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Version finale

29e législature, 2e session
(23 février 1971 au 24 décembre 1971)

Le vendredi 10 décembre 1971 - Vol. 11 N° 104

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

(Dix heures trente-huit minutes)

M. LAVOIE (président): Qu'on ouvre les portes. A l'ordre, messieurs!

Affaires courantes. Présentation de pétitions. Lecture et réception de pétitions. Présentation de rapports de commissions élues.

Commission des Affaires municipales

M. PEARSON: M. le Président, au nom du député de Taillon, la commission des Affaires municipales a l'honneur de soumettre à votre honorable Chambre son premier rapport. Votre commission s'est réunie pour étudier le projet de loi no 84, Loi constituant la Commission de transport de la rive sud de Montréal, les 19 août et 7 décembre 1971. Dix organismes ou personnes ont présenté leurs observations ou recommandations sur le projet. Le tout humblement soumis.

M. LE PRESIDENT: Lu et reçu.

M. LEVESQUE: Y aurait-il objection à lui faire franchir l'étape du comité plénier et de la troisième lecture?

M. PAUL: A ce projet de loi? M. LEVESQUE: Oui.

M. PAUL: Ah! M. le Président, c'est effrayant comme mon honorable ami fait des invitations pressantes ce matin! Il pourrait peut-être réserver son invitation jusqu'au début de la semaine prochaine pour nous permettre de regarder et d'étudier les délibérations et les représentations qui ont été faites en commission.

M. LEVESQUE: Je n'ai aucune hésitation à me rendre au désir légitime du député de Maskinongé.

M. LE PRESIDENT: Présentation de motions non annoncées.

Commission spéciale sur les professions

M. LEVESQUE: M. le Président, afin de respecter l'économie des règles de pratique adoptées le vendredi 19 novembre 1971, tout en permettant aux divers représentants des organismes, corps professionnels ou à tout autre intéressé par le projet de loi no 250 et par les projets de loi qui lui sont connexes, qu'il me soit permis de faire motion pour que, dans le cas spécifique de la commission parlementaire spéciale sur les professions, le délai de 30 jours, mentionné à l'article 2 des règles de pratique adoptées le 19 novembre, ne commence à courir que lors de la parution de l'avis, dans la Gazette officielle, du dépôt du dernier desdits projets de loi.

M. PAUL: M. le Président, en principe, c'est une excellente motion, mais, en pratique, ça peut se concrétiser comment? Le gouvernement a-t-il l'intention d'appeler tous les projets de loi qui figurent au feuilleton?

M. LEVESQUE: M. le Président, j'ai eu la précaution de m'assurer que le dernier des projets de loi serait déposé avant Noël.

M. PAUL: C'est prudent; pas avant la prorogation, avant Noël.

M. LEVESQUE: On m'a fourni cette assurance.

M. LATULIPPE: Nous sommes favorables à cette motion.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?

M. LEVESQUE: Je choisis mes mots. M. LAURIN: Avec plaisir. M. LE PRESIDENT: Adopté.

Présentation de bills privés. Présentation de bills publics.

M. LEVESQUE: Article i).

Projet de loi no 281 Première lecture

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose la première lecture du projet de loi intitulé Loi constituant le service de police de la Communauté urbaine de Montréal et modifiant de nouveau la loi de la Communauté urbaine de Montréal.

M. CHOQUETTE: M. le Président, ce projet a pour principal objet de constituer le corps de police de la Communauté urbaine de Montréal. Ce corps de police est formé d'un directeur, des policiers des municipalités membres de la communauté le 31 décembre 1971, des fonctionnaires affectés le 31 décembre 1971 au service des corps policiers des municipalités de la Communauté urbaine de Montréal et des policiers et fonctionnaires qu'engagera par la suite le Conseil de sécurité de la communauté urbaine.

Les articles 1 à 18 apportent des modifications à la Loi de la Communauté urbaine de Montréal. Ces articles prévoient que le conseil de sécurité qui existe déjà sera désormais constitué de six membres dont trois seront nommés par le conseil de la communauté,

parmi ses membres ou les membres du comité exécutif, et trois par le gouvernement. Au moins une des personnes à être désignées par le conseil devra être choisie parmi les représentants des municipalités autres que la ville de Montréal. Le président sera choisi parmi les six membres et sera désigné par le gouvernement. Le mandat du président est de cinq ans. Celui des autres membres est de trois ans. Les membres du conseil de sécurité qui sont membres du conseil de la communauté et du comité exécutif continuent leur mandat au conseil de sécurité, même s'ils cessent de faire partie du conseil de la communauté ou du comité exécutif.

Le conseil de sécurité désigne lui-même son secrétaire. Il a son propre budget qu'il soumet au conseil de la communauté pour faire partie intégrante du budget du conseil.

Une fois en vigueur, le budget du conseil de sécurité est exclusivement sous l'administration de ce dernier. Le conseil de sécurité a pour principales fonctions de voir au maintien de la paix, de l'ordre et de la sécurité publics dans le territoire de la communauté, d'y prévenir les crimes et les infractions, d'en rechercher les auteurs et de les traduire devant les tribunaux, de recommander au ministre de la Justice la nomination du directeur du service de police, de pourvoir le service de police des effectifs, des immeubles et de l'équipement requis, de négocier et de soumettre au conseil de la communauté les conventions de travail et les plans de retraite, de régime de rentes ou de fonds de pension des membres du service et de soumettre au ministre des rapports sur toutes les situations pouvant perturber l'ordre public ainsi que la situation de la criminalité.

Il doit aussi, sur demande du comité exécutif, du conseil ou des municipalités, fournir des rapports sur son administration. Avant de recommander la nomination d'un directeur de police, le conseil de sécurité doit obtenir, au préalable, l'avis du conseil de la communauté. Le directeur du service de police est ensuite désigné par le gouvernement.

Les articles 19 à 58 traitent l'intégration des divers corps de police des municipalités de la Communauté urbaine de Montréal au service de police de la communauté et comportent des dispositions pour la mise en vigueur de l'intégration.

Le projet prévoit que le nouveau conseil de sécurité devra être constitué dans les dix jours de l'entrée en vigueur de la loi et que le président sera choisi dans la semaine suivante. Jusqu'au moment où le nouveau conseil de sécurité entrera en vigueur, l'actuel conseil de sécurité continuera d'exister. Le premier directeur du service de police de la Communauté urbaine de Montréal sera désigné par le gouvernement et il entrera en fonction à la date que fixera le gouvernement. Tous les policiers qui, le 31 décembre 1971, sont membres d'un corps de police d'une municipalité de la communauté, de même que les fonctionnaires de ces municipalités qui, à la même date, sont rattachés à un service de police sont transférés à la communauté urbaine à compter du 1er janvier 1972 suivant les étapes et les modalités prévues au projet.

Aucun de ces policiers ou fonctionnaires ne devra être mis à pied ou ne devra subir de réduction de traitement par suite de ce transfert. La personne qui serait mise à pied ou dont le traitement serait réduit par suite de ce transfert pourrait en appeler, d'abord, au conseil de sécurité et ensuite à la Commission de police.

Le projet prévoit que le directeur du service de police de la communauté devra, en priorité, établir un plan d'intégration au service de police de la communauté urbaine des ressources humaines et physiques des divers corps de police des municipalités de la communauté.

Ce plan d'intégration sera soumis à l'approbation du conseil de sécurité, qui le transmettra au conseil de la communauté et en donnera avis aux municipalités. Dans les quinze jours suivants, une municipalité ou une association représentant les policiers ou les fonctionnaires affectés pourra en appeler à la Commission de police.

En prévoyant l'intégration des ressources physiques, le plan pourra disposer du transfert à la communauté des immeubles appartenant aux municipalités et affectés par celles-ci principalement à leur corps de police. Au cas de mésentente, les municipalités pourront en appeler à la Commission municipale.

Le projet prévoit que le plan d'intégration sera mis en application sous la surveillance de la Commission de police, qui pourra entendre les représentations des municipalités et qui verra à ce que chaque municipalité reçoive une protection efficace.

Jusqu'à ce que le plan d'intégration soit mis en application, les policiers autres que ceux de la ville de Montréal et les fonctionnaires des corps de police demeureront en poste dans la municipalité qui les employait le 31 décembre 1971, à moins que la municipalité ne consente au contraire. Si un tel employé veut être assigné ailleurs et que la municipalité s'y oppose, il y aura appel à la Commission de police.

Le projet prévoit que la Communauté urbaine de Montréal est substituée à chacune des municipalités qui sont parties à des conventions de travail avec des policiers transférés à la communauté. Avant le 1er février 1972, le conseil de sécurité devra donner avis à la Fraternité des policiers de Montréal Incaux fins de négocier une nouvelle convention de travail pour les policiers.

Entre-temps, la Commission de police procédera à l'évaluation du personnel policier, ainsi qu'à la normalisation des grades et des fonctions des membres des corps de police des municipalités, suivant un ordre qu'elle déterminera elle-même. La commission avisera chaque

intéressé des conclusions auxquelles elle en est venue. Elle entendra, en révision, les personnes qui pourront se sentir lésées et elle décidera par la suite.

Lorsque la commission aura terminé son travail d'évaluation et de normalisation, les membres des divers corps de police seront intégrés à l'unité de négociation pour laquelle est accréditée la Fraternité des policiers de Montréal Inc.

Leurs conditions de travail seront rétroactivement celles qui auront été fixées d'après la convention qui aura été arrêtée entre la communauté et la fraternité.

Entre-temps les traitements et conditions de travail des policiers des municipalités autres que la ville de Montréal seront ceux qui sont applicables le 10 décembre. L'association qui représentait les policiers avant leur intégration à l'unité de négociation pour laquelle la Fraternité des policiers de Montréal Inc. est accréditée sera dissoute et les droits et les obligations de cette association seront assumés par la fraternité.

En ce qui concerne les fonctionnaires qui le 31 décembre 1971 sont affectés aux divers corps de police des municipalités, le ministre du Travail présentera le plus tôt possible après le 1er janvier 1972 une requête au tribunal du travail de façon que soit déterminées par le tribunal l'unité de négociation de ces fonctionnaires de même que l'association ayant droit à l'accréditation.

Le tribunal décidera d'abord, après avoir entendu les intéressés de l'unité de négociation et ensuite après avoir reçu les diverses demandes d'accréditation, quelle association aura droit à l'accréditation. Les conditions de travail de ces fonctionnaires, telles qu'elles sont le 10 décembre 1971, continueront de s'appliquer jusqu'à la conclusion d'une nouvelle convention collective avec la communauté.

Le conseil de sécurité doit entreprendre sans délai les démarches en vue d'unifier les régimes de retraite des policiers et des fonctionnaires qui seront régis sur ce point par les régimes en vigueur, tant qu'une entente ne sera pas intervenue avec la communauté. Toutefois, les policiers de la ville de Montréal continueront entre-temps de contribuer à la caisse de l'association de bienfaisance et de retraite de la police de Montréal.

Les fonctionnaires engagés par le conseil de sécurité et ceux qui n'ont pas déjà une caisse de retraite seront régis par la caisse de retraite de la communauté urbaine.

Le projet prévoit que jusqu'à ce que le conseil de sécurité les avise du contraire, les municipalités devront continuer de payer leurs policiers et leurs fonctionnaires et fournir à leur corps de police les équipements, locaux et accessoires requis pour l'exercice des fonctions policières. La communauté remboursera ces dépenses et, s'il y a mésentente, la Commission municipale décidera.

Le projet prévoit aussi que le conseil de sécurité devra préparer et soumettre à l'adoption du conseil de la communauté un règlement uniformisant les divers règlements des municipalités relatifs aux matières qui sont de la compétence du conseil de sécurité. Ce règlement devra être approuvé par le gouvernement.

Pour l'année 1972, le conseil de sécurité n'aura pas à adopter de budget. Il administrera les sommes que devra mettre à sa disposition la communauté et qui ne devront pas être inférieures au total des dépenses de police dans toutes les municipalités de la communauté en 1971. Les ajustements requis seront effectués lors de l'exercice financier de 1974. Le conseil de sécurité pourra, pour l'exercice de 1972, adopter un budget supplémentaire et effectuer des virements de fonds dans son budget. Merci, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?

Adopté.

Deuxième lecture, à la prochaine séance ou à une séance subséquente.

M. LEVESQUE: Article j).

Projet de loi no 285 Première lecture

M. LE PRESIDENT: Le ministre de la Justice propose la première lecture du projet de loi intitulé Loi modifiant la loi de police.

M. CHOQUETTE: M. le Président, ce projet de loi comporte les notes explicatives suivantes. L'article 1 porte de cinq à neuf le nombre des membres de la Commission de police du Québec et prévoit que les autres membres seront nommés pour un mandat n'excédant pas dix ans.

L'Article 2 permet à la commission de faire des règlements pour déterminer les qualifications requises pour exercer une fonction ou obtenir un grade dans un corps de police municipal, pour déterminer les fonctions et les grades d'un corps de police municipal, eu égard aux effectifs du corps, pour établir une échelle indicative des traitements susceptibles d'être versés aux cadres supérieurs d'un corps de police municipal et pour pourvoir à la remise des décorations et citations aux personnes ayant contribué de façon éminente à la protection publique.

L'article 3 est de concordance. L'article 4 permet au gouvernement de demander à la Commission de police de faire enquête sur les activités d'une organisation ou d'un réseau, si le gouvernement a des raisons de croire que, dans la lutte contre la criminalité, il est d'intérêt public qu'une telle enquête soit tenue.

L'article 5 prévoit que le directeur ou chef d'un corps de police municipal, quelles que

soient les modalités de son engagement, ne peut être destitué ou subir une diminution de traitement sans qu'il puisse faire appel à la Commission de police de la décision du conseil municipal le destituant ou diminuant son traitement.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce bill. First reading of this bill.

M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente.

M. LEVESQUE: Article 1).

Projet de loi no 282 Première lecture

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose la première lecture de la Loi prolongeant et modifiant la loi pour favoriser la conciliation entre locataires et propriétaires.

M. CHOQUETTE: M. le Président, l'article 1 de ce projet a pour but de prolonger d'un an l'application de la Loi pour favoriser la conciliation entre locataires et propriétaires. Les articles 2 à 7 décrètent la prolongation des baux qui, autrement, se termineraient le 30 avril prochain ou entre cette date et le 30 avril 1973, s'il n'y a pas de demande spéciale de prolongation de bail ou avis donné par écrit par une partie ou l'autre de l'intention de ne pas prolonger le bail. L'article 8 donne effet au projet de loi depuis le 1er décembre 1971.

M. PAUL: M. le Président, est-ce que je pourrais poser une question au ministre de la Justice? Est-ce qu'il a l'intention de déférer ce projet de loi-là, avant la deuxième lecture, à la commission de la Justice?

M. CHOQUETTE: Le dernier projet de loi? M. PAUL: Oui.

M. CHOQUETTE: Non, je ne le pense pas. Le député de Maskinongé comprend facilement pourquoi.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce bill. First reading of this bill.

M. PAUL: Les trois étapes, quant à nous. M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture, mê- me séance? Prochaine séance ou séance subséquente.

M. LEVESQUE: Article e).

Projet de loi no 258 Première lecture

M. LE PRESIDENT: L'honorable Solliciteur général propose la première lecture de la Loi des agronomes. Cette motion est-elle adoptée?

Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce bill. First reading of this bill.

Projet de loi no 65

M. LEVESQUE: M. le Président, le projet de loi no 65 a été étudié en commission parlementaire. Avant de le soumettre à l'étape de la deuxième lecture, je fais motion pour que la réimpression de ce bill soit maintenant déposée. Cette réimpression a eu lieu à cause des modifications qui se sont imposées à la suite des représentations diverses qui ont été faites en commission parlementaire.

M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture?

M. LEVESQUE: Non, M. le Président, c'est simplement une motion pour que nous puissions déposer le projet de loi et que, la première lecture étant adoptée, tout soit prêt pour la deuxième lecture mais avec le projet de loi réimprimé.

M. PAUL: Ne serait-il pas plus simple, M. le Président, pour éviter cette ambiguïté, de passer un ordre de révocation de première lecture et de procéder comme si...

M. LEVESQUE: Nous pouvons aussi le faire, je n'ai aucune objection.

M. PAUL: C'est parce que c'est peut-être moins difficile en cas de référence.

M. LEVESQUE: Nous pouvons demander la révocation de la première lecture et passer immédiatement en première lecture sur le texte modifié.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?

M. PAUL: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Adopté.

L'honorable ministre des Affaires sociales propose la première lecture du projet de loi no 65 réimprimé.

Cette motion est-elle adoptée?

M. PAUL: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Adopté. Deuxième lecture...

M. LEVESQUE: Prochaine séance. M. PAUL: Un instant.

M. CLOUTIER (Montmagny): Pourrais-je demander au ministre si, dans cette nouvelle version du projet de loi, il y a des différences fondamentales entre les indications qu'il nous a données à la commission parlementaire à la dernière séance ou si c'est dans la ligne de pensée qu'il nous a donnée?

M. CASTONGUAY: M. le Président, c'est dans la ligne des indications que j'ai données à la dernière séance. Je ne vais pas lire les notes explicatives ni tenter de les résumer, étant donné que je l'ai fait à cette séance et qu'il y en a sept pages.

Je voudrais, par contre, avec votre permission, vous indiquer que nous avons fait un effort pour faciliter le travail des députés. Nous avons en annexe une table de concordance donnant le numéro de l'article du projet original et le numéro de l'article du projet réimprimé. De même, à la suite de chacun des articles du projet de loi, nous avons le numéro de l'article du projet original, c'est-à-dire que lorsque c'est un article que nous retrouvons présentement dans la Loi des hôpitaux, c'est indiqué avec le numéro et lorsque c'est un article nouveau, c'est indiqué par la lettre N. Cela devrait faciliter considérablement la lecture de ce projet de loi.

Enfin, dans les notes explicatives, nous n'exposons pas uniquement le nouveau projet de loi, mais nous avons fait aussi un résumé des changements par rapport au projet original.

Je crois que tout a été mis en oeuvre pour en faciliter la lecture, l'étude et aussi faire le pont par rapport au projet original.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

M. LE SECRETAIRE-ADJOINT: Première lecture de ce bill. First reading of this bill.

M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente.

M. LEVESQUE: M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi des agronomes, qui vient de subir l'étape de la première lecture, soit déféré à la commission parlementaire étudiant les professions.

M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

Déclarations ministérielles Dépôt de documents Questions des députés.

Questions et réponses

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.

Chantiers de la baie James

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je désirerais poser une question au ministre des Richesses naturelles. Le ministre des Richesses naturelles pourrait-il, sinon ce matin, du moins dans les jours qui viendront, nous faire une déclaration sur les méthodes d'embauche sur les chantiers de la Baie James?

Deuxièmement, est-ce qu'il pourrait faire un rapport sur le cas du renvoi du chef du personnel, M. André Benoît, et sur les agissements de M. Gilles Buteau dans cette affaire? Enfin, est-ce que le ministre des Richesses naturelles pourrait s'enquérir afin de savoir s'il est exact que, dans le cas de l'embauche des personnes qui devront travailler aux chantiers du projet de la baie James, on passe par les centres de main-d'oeuvre du Canada et du Québec, et est-ce que le ministre peut confirmer ou nier qu'à l'heure actuelle on fait appel aux anciens candidats libéraux dans les divers comtés ou aux députés pour engager le personnel requis pour ces chantiers?

M. MASSE (Arthabaska): M. le Président, c'est un fait qui est relaté dans le journal ce matin, et qui est nouveau pour moi. Disons que, pour le rapport concernant les questions du député de Chicoutimi, je prendrai des renseignements auprès de l'Hydro-Québec et donnerai une réponse au cours de la semaine prochaine.

En ce qui concerne l'embauchage sur les chantiers de la baie James, effectivement, il se fait par les centres de main-d'oeuvre du Québec.

Pour les deux ou trois questions auxquelles je ne peux répondre ce matin, je me renseignerai auprès de l'Hydro-Québec.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Question additionnelle, M. le Président. Est-ce que le ministre a affirmé que, dans le cas de l'embauchage du personnel, on passe par les centres de main-d'oeuvre du Canada et du Québec? Est-ce que le ministre pourrait pousser plus à fond son enquête afin de voir si, par exemple — je vais lui donner un cas précis qui recouvre quand même la réalité générale — dans le cas de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, — je demande au ministre d'être bien attentif, parce qu'il aura à répondre — dans le cas précis de Chicoutimi, on a bien requis les services des employés des centres de main-d'oeuvre du Canada et du Québec pour embaucher des gens qui doivent travailler aux chantiers de la baie James?

M. SAMSON: Question supplémentaire, M. le Président. Est-ce que le ministre accepterait de convoquer la commission parlementaire des Richesses naturelles afin de nous permettre de questionner les responsables de ce projet et de poser certaines questions à savoir quelles sont les méthodes d'embauche et quelles raisons justifient ces sociétés de faire appel à des entrepreneurs de l'Ontario ainsi qu'à des compagnies d'aviation de l'Ontario?

M. MASSE (Arthabaska): M. le Président, je pense que le premier ministre a répondu à cette question de la convocation de la commission parlementaire, il y a deux jours.

M. SAMSON: M. le Président, si le premier ministre a répondu à cette question et si ce n'est pas votre intention de convoquer la commission parlementaire, est-ce qu'au moins le ministre accepterait de faire enquête et nous faire rapport sur ces questions?

M. MASSE (Arthabaska): Le premier ministre a fait part que c'était son intention de convoquer la commission parlementaire après les Fêtes.

M. PAUL: Question additionnelle.

M. SAMSON: Question supplémentaire, M. le Président. Etant donné la situation, est-ce que le ministre accepterait de rapprocher la convocation de cette commission parlementaire? Quand on voit, au grand jour, des choses comme celles que nous voyons ce matin et ce que nous avons mentionné la semaine dernière et ce que je vous rajoute ce matin, je pense que cela justifie que vous convoquiez cette commission immédiatement.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Maskinongé.

M. PAUL: M. le Président, question additionnelle, toujours en rapport avec la baie James. Est-ce que l'honorable ministre des Richesses naturelles pourrait nous dire lorsqu'il donnera réponse aux questions qui lui ont été posées par le député de Chicoutimi, qui a procédé à l'appel d'offres au sujet du chemin de Matagami vers la baie James et qui a entraîné l'octroi d'un contrat à la compagnie Kiewit? Est-ce que l'appel d'offres avait été placé par l'Hydro-Québec ou par la Corporation de la baie James?

M. MASSE (Arthabaska): Il me fera plaisir de répondre.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Question supplémentaire, M. le Président. Est-ce que, étant donné que ce contrat a été accordé à la compagnie Kiewit à cause d'une erreur technique, le ministre ou le gouvernement a l'inten- tion d'annuler ce contrat et de faire un nouvel appel d'offres?

M. MASSE (Arthabaska): M. le Président, encore une fois, le premier ministre a répondu à cette question.

M. LAURIN: Question supplémentaire, M. le Président. Etant donné qu'on se réfère à la convocation de la commission parlementaire, est-ce que le leader parlementaire peut nous assurer que cette séance de la commission sera convoquée durant l'intersession?

M. LEVESQUE: Je crois que le premier ministre a mentionné son désir qu'il en soit ainsi.

M. LAURIN: Pardon?

M. LEVESQUE: Si je me rappelle bien les paroles du premier ministre, il faudrait que je revoie le journal des Débats, je crois qu'il a laissé entendre qu'il en serait ainsi.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.

Opinion de Mgr Grégoire

M. SAMSON: M. le Président, j'aurais aimé poser une question au ministre de l'Education. En son absence, je crois que le leader du gouvernement pourrait peut-être me donner une réponse. A la suite du nouvel avis de Mgr Grégoire publié aujourd'hui concernant les amendements au bill 28, est-ce que le ministre peut nous dire si c'est l'intention du gouvernement de prendre connaissance de cet avis et de nous fournir d'autres amendements au bill 28 avant la tenue de la séance de la commission de lundi?

M. LEVESQUE: Je prends avis de la question et j'en ferai part au ministre de l'Education.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.

Autoroute Est-Ouest

M. LAURIN: M. le Président, le 25 novembre, je posais, au ministre de la Voirie, une question à savoir s'il avait l'intention de tenir compte de la recommandation de la Commission d'audiences populaires d'ordonner l'arrêt immédiat et définitif des travaux de l'autoroute, ainsi qu'une autre question sur le relogement des familles dont les maisons avaient été démolies. Je lui ai laissé deux semaines pour donner une réponse à la question qu'il avait prise en avis. Et, comme soeur Anne, je ne vois rien venir. Alors, je repose, à nouveau, la question au ministre espérant que cette fois, il aura les

renseignements qu'il a pu accumuler au cours des deux dernières semaines.

M. PINARD: Très bien. Nous nous sommes mis en contact avec ceux qui ont formé ce que vous appelez la Commission d'audiences populaires pour avoir toutes les autres informations pertinentes parce que le seul document que j'ai reçu personnellement, c'est le rapport Joubert. Dans la lettre de présentation du rapport adressée au ministre, il était bien dit que, dans les jours qui suivraient, on me ferait parvenir les documents en annexe pour que je puisse prendre vraiment toute la mesure du problème soulevé par cette Commission d'audiences populaires, document que je n'ai pas reçu.

Nous nous sommes mis en contact avec les membres de cette commission et nous attendons encore les documents. En attendant, j'ai fait préparer un rapport de synthèse des recommandations formulées par la Commission d'audiences populaires.

Mais je ne voudrais pas préjuger de la décision qui sera prise. Je ne voudrais pas non plus préjuger du contenu des autres documents qui ne nous sont pas encore parvenus. C'est pourquoi j'attends.

Il y en avait qui semblaient être bien pressés à l'époque, mais qui paraissent l'être beaucoup moins maintenant. Il semblerait qu'il ne sont pas capables de faire passer leurs recommandations à travers d'autres instances.

M. LAURIN: La deuxième question que je posais au ministre avait trait aux familles qui avaient été délogées en raison de la démolition de leurs maisons. Le ministre a-t-il fait enquête au sujet de ces familles qui ne seraient pas encore relogées ou qui n'auraient pas encore reçu une compensation financière pour les logements qu'elles ont dû abandonner ou pour leur relogement? L'enquête est-elle en cours? Le ministre peut-il nous donner les résultats de cette enquête?

M. PINARD: L'enquête est en cours, M. le Président, et ce n'est pas à l'instigation des membres du Parti québécois. Le ministère de la Voirie a fait son travail, comme à l'accoutumée.

M. LAURIN: M. le Président, je n'ai pas demandé un commentaire. J'ai simplement demandé une réponse à mes questions...

M. PINARD: Oui, oui! Très bien.

M. LAURIN: ... que je pose en toute candeur et simplicité.

M. PINARD: M. le Président, il faudrait régler les choses comme elles doivent être réglées. S'il est permis au député de faire des affirmations en posant des questions il est certainement permis au ministre de faire des affirmations en répondant à ces questions.

UNE VOIX: Un débat ! Un débat !

M. PINARD: Nous avons un service d'expropriation qui fonctionne, au ministère de la Voirie. Nous avons autant de conscience sociale que n'importe quel autre député de cette Chambre, spécialement les députés du Parti québécois. Nous n'avons pas l'intention de mettre qui que ce soit dehors sans compensation adéquate et sans avoir pris la peine d'essayer de les reloger de façon décente, peut-être mieux qu'ils ne l'étaient auparavant.

UNE VOIX: Une autre bonne main!

M. PINARD: Nous avons constitué une banque de 1,300 logements. A ce jour, malgré les prétentions contraires faites par les représentants du Parti Québécois et les membres de la Commission d'audiences populaires...

M. LAURIN: On ne prête qu'aux riches, M. le Président.

M. PINARD: ... il y a eu une demande de relogement faite par les personnes censément déplacées. C'est l'épouse d'un journaliste du journal Québec-Presse, Mme Michel Roy, qui s'est dite très heureuse d'avoir pu...

M. LAURIN: Michel Roy écrit au Devoir, M. le Président.

M. PINARD: ... avoir le loisir d'obtenir un logement de cette banque de logements. Elle nous a écrit une note de félicitations à ce sujet.

M. LAURIN: Une question additionnelle, M. le Président. Le ministre n'a pas répondu à ma question. Il a simplement fait un discours. Je lui ai demandé combien, sur les mille familles dont les logements ont été démolis, ont été relogées, combien de ces familles n'ont pas eu de compensation financière et quels sont les résultats précis de l'enquête qu'il a menée?

M. PINARD: Si nous pouvions obtenir les documents en annexe qui devaient être envoyés au ministre, cela nous permettrait de faire une enquête beaucoup plus complète et de répondre de façon plus adéquate au député. Je viens de le dire, j'attends ces documents.

Par contre, cela pourrait être long, M. le Président, d'avoir à lire tous les documents que j'ai en ma possession dans ce dossier. Ils pourraient répondre point par point à toutes les interrogations du Parti québécois sur ce fameux sujet du relogement des familles délogées par la construction de l'autoroute Est-Ouest, à Montréal. Je pense qu'il y aura d'autres occasions de le faire...

M. LAURIN: Lors du budget supplémentaire.

M. PINARD: ... soit lors de la discussion des crédits budgétaires ou à l'occasion d'un débat spécial que je suis prêt à engager avec n'importe qui sur cette fameuse autoroute Est-Ouest, à Montréal.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Lévis.

Traverse de Lévis

M. ROY (Lévis): M. le Président, ma question s'adresse à l'honorable ministre des Transports. Je pense bien qu'il ne doit pas penser que je vais lui demander pourquoi les bateaux ne traversaient pas ce matin. C'est parce qu'il y avait de la brume.

On avait déclaré antérieurement que les bateaux passeurs devaient desservir les automobilistes le 15 décembre. On a déclaré hier, je crois, qu'on ne pourrait pas donner ces services aux automobilistes avant le 1er janvier.

Est-ce qu'il y a eu des réparations urgentes à faire ou si on n'avait pas prévu qu'il faudrait autant de temps avant que les travaux soient terminés et que l'on donne le service? Vous savez que nous avons beaucoup de demandes dans la région, parce que ça rend service à plusieurs personnes qui ont de la difficulté. C'est pour ça que je voudrais que la population soit éclairée à ce sujet.

M. PINARD: Je pense que le député de Lévis sait qu'il y a des problèmes techniques à régler. La mise au point des bateaux eux-mêmes par la construction d'une deuxième passerelle va permettre précisément l'embarquement des véhicules automobiles ou des camions. Cela tarde un peu parce qu'il y a des problèmes d'ajustement. C'est la véritable raison qui m'a été donnée et qui explique pourquoi il y a un retard dans la politique d'embarquement de ces véhicules.

M. ROY (Lévis): Question supplémentaire. Est-ce que l'honorable ministre peut assurer la population qu'au moins au 1er janvier elle pourra se servir de ces traversiers?

M. PINARD: Dans le domaine de la technique, il est bien difficile pour un ministre de pouvoir donner des assurances. Des ingénieurs sont responsables de la préparation des plans et devis. Il y a aussi des constructeurs et des ouvriers qui ont à mettre en exécution ces plans et devis. Je leur laisse cette responsabilité.

Ce que je puis affirmer, c'est que tout le monde travaille très fort à la mise au point des bateaux, de façon à donner un meilleur service possible à la population de Québec et de Lévis. En attendant, pourrais-je les inviter à prendre le point Pierre-Laporte, s'ils veulent venir à Québec?

M. ROY (Lévis): Question supplémentaire. Est-ce que le ministre est toujours dans les bonnes dispositions de laisser la gratuité aux passagers de Québec à Lévis ou de Lévis à Québec?

M. PINARD: Le député peut certainement conseiller à sa population d'en profiter pendant que c'est encore gratuit.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.

Instabilité des sols au Québec

M. LESSARD: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Richesses naturelles. A la suite du cataclysme de Saint-Jean-Vianney, le ministre pourrait-il nous dire s'il est exact que des études systématiques ont été entreprises sur l'instabilité des sols au Québec?

M. MASSE (Arthabaska): Des glissements, comme vous le savez, se sont produits ailleurs que dans la région de Saint-Jean-Vianney, à différents endroits dans la province. Chacun des cas qui semblaient représenter le plus de danger a été examiné dès le moment que nous l'avons connu et des travaux rémédiateurs ou des déplacements ont été prévus.

En ce qui concerne une étude systématique de l'ensemble du territoire du Québec, le peu d'effectifs que nous avons au ministère, malgré l'engagement de deux ou trois autres spécialistes en la question, de fait, le manque de spécialistes de ce genre de phénomène dans la province même, nous a amenés, à reporter à plus tard le début de cette étude systématique.

M. LESSARD: Question supplémentaire. A la suite de ces études partielles, est-ce que le ministre pourrait nous dire si des travaux de consolidation des sols ont été entrepris au niveau du Québec?

Deuxièmement, est-ce qu'il pourrait nous dire si, en collaboration avec le ministre des Affaires municipales, il a l'intention de soumettre une loi à la Chambre régissant le développement domiciliaire dans ces régions-là?

M. MASSE (Arthabaska): Effectivement, une des principales causes de ces catastrophes, c'est que, la plupart du temps, les résidences sont construires dans des endroits exposés à ce genre de glissements. Par exemple, certaines municipalités n'ont pas empêché la construction de certaines résidences dans des zones d'inondation.

Nous avons l'intention d'inclure dans une loi du ministère des Affaires municipales un règlement de zonage qui permettra d'éviter à l'avenir des constructions dans des endroits dangereux.

Le ministère, sur toute demande de municipalité pour études de sol, répond favorablement, positivement.

M. LE PRESIDENT: Le chef de l'Opposition officielle.

Syndicalisme agricole

M. LOUBIER: Ma question s'adresse au ministre de l'Agriculture. Est-il vrai que le bill 64 sur le syndicalisme agricole ne serait pas présenté à la présente session, qu'il serait reporté à beaucoup plus tard et que le ministre aurait déclaré lui-même qu'il n'était pas question que ce projet de loi soit adopté au cours de la présente session?

M. LEVESQUE: M. le Président, j'ai répondu à cette question hier, et j'ai affirmé que le projet de loi devait être ramené devant le comité de législation, afin que ce comité puisse étudier les amendements proposés par le ministre, et qu'ensuite ce soit présenté au conseil des ministres. Cependant, j'ai lu dans un entrefilet de journal ce matin, que cela voulait dire plusieurs semaines. Je crois que la question du chef de l'Opposition est inspirée par la fin de cet article; si elle l'est, je rappellerai au journaliste que ça ne prend pas quelques semaines pour cette procédure. Cela se peut, mais pas dans ce cas-ci; il s'agit simplement de faire approuver les amendements par le comité de législation. Il est probable que ces amendements puissent être présentés au conseil des ministres, dès la prochaine réunion, mercredi prochain.

M. LOUBIER: M. le Président, une question additionnelle; est-ce que le leader parlementaire, étant donné qu'il s'est substitué avec succès au ministre de l'Agriculture dans sa réponse, pourrait nous dire si ce projet de loi reviendra en Chambre et qu'il sera adopté au cours de la présente session?

M. LEVESQUE: Je dirai que je ne me suis pas substitué au ministre de l'Agriculture, qui peut fort bien répondre comme d'habitude, avec compétence et brio. La seule chose, c'est que la question avait déjà été posée hier, j'y avais répondu et c'est pourquoi je me suis levé.

Pour répondre de nouveau à cette question additionnelle, c'est que j'ai bon espoir, dans ce cas-là comme dans les autres projets importants que nous avons au feuilleton, de pouvoir en disposer avant la prorogation. Je ne sais pas comment progresseront nos travaux — je ne suis pas un prophète — mais j'espère bien avoir la collaboration de tous les partis de l'Opposition, afin de disposer des travaux que nous avons devant nous et qui sont inscrits au feuilleton.

M. LOUBIER: Si je pouvais exprimer un voeu au leader parlementaire, c'est que nous ne sommes pas limités dans le temps et nous sommes prêts à siéger tant et aussi longtemps qu'il sera nécessaire pour que ce bill éminemment important et attendu soit présenté en cette Chambre au cours de la présente session.

M. LEVESQUE: C'est ce qui a expliqué, d'ailleurs, la motion que le gouvernement a proposée hier, d'allonger les heures de séance.

M. LE PRESIDENT: Le député de Beauce.

Commission des comptes publics

M. ROY (Beauce): M. le Président, ma question s'adresse au leader du gouvernement. Etant donné qu'il est normal dans toute entreprise sérieuse de rencontrer les comptables et les vérificateurs de temps à autre, est-ce que le leader du gouvernement a pris en considération l'excellente suggestion qu'on lui a faite la semaine dernière, c'est-à-dire prendre les dispositions pour convoquer la commission des comptes publics après les Fêtes?

M. LEVESQUE: Il y a des gens, M. le Président, qui posent continuellement les mêmes questions et ils peuvent s'attendre à avoir les mêmes réponses.

M. ROY (Beauce): M. le Président, une question additionnelle. Dois-je considérer la réponse du ministre comme un refus définitif, ou si le gouvernement a l'intention de procéder? Je me réfère à la page 4 de nos procès-verbaux, au sujet de la commission no 24, commission des comptes publics. Il y est dit ceci: Et que chacune de ces commissions soit autorisée à délibérer et à s'enquérir de toutes les affaires et de toutes les matières que la Chambre lui aura renvoyées ou qui soient de sa compétence, à faire de temps à autre des rapports exprimant ses observations et ses vues sur ces affaires et ces matières et à envoyer chercher les personnes, les pièces et les dossiers dont elle aura besoin. La motion a été adoptée.

M. le Président, nous voulons savoir si le gouvernement accepte de convoquer la commission parlementaire des comptes publics ou s'il refuse.

M. LEVESQUE: M. le Président, le député devrait, maintenant qu'il siège ici depuis quelque temps, avoir suffisamment d'expérience pour savoir que, même s'il y a 26 ou 27 commissions permanentes qui ont eu ce mandat, ça ne veut pas dire que les 26 ou 27 commissions seront convoquées au cours de la session. Il s'agit simplement que, s'il y a un besoin qui se manifeste, cette commission permanente puisse être convoquée. Nous attendons toujours l'occasion de le faire.

Le député a maintes occasions de provoquer la convocation d'une telle commission, mais pas avec le genre de questions qu'il nous sert d'habitude.

M. SAMSON: Supplémentaire, M. le Président. Est-ce que le leader parlementaire du gouvernement a des raisons spéciales pour refuser de convoquer cette commission? Même s'il nous demande quelles sont nos raisons pour demander cette convocation, le leader sait fort bien que c'est en questionnant les responsables que nous découvrirons quelles sont les véritables raisons.

On ne peut pas connaître ce qui se passe si on ne nous donne pas la possibilité de questionner les responsables.

M. LEVESQUE: Il ne faudrait pas non plus qu'on laisse croire ou qu'on laisse entendre à la population que les députés ne sont pas informés. S'ils ne le sont pas, c'est leur faute. Il y a une publication des comptes publics chaque année où les dépenses du gouvernement sont inscrites. De plus, depuis quelque temps nous avons maintenant la commission des engagements financiers où, avant même que ce soit inscrit dans les comptes publics on peut connaître chaque mois les engagements du gouvernement.

Les députés sont réunis et convoqués chaque mois pour étudier les engagements financiers du gouvernement. Troisièmement, il y a la commission des subsides où chacun des ministères et des ministres titulaires de ces ministères sont convoqués, questionnés et contre-interrogés pendant des heures, des jours et des semaines sur l'administration du ministère. S'il y a quelque chose de précis que l'on veut reprocher à l'administration actuelle, qu'on porte les accusations visière levée et nous saurons répondre. S'il y a lieu de convoquer la commission à ce moment-là, parce que cela ne paraît pas suffisamment clair, nous n'avons rien à cacher, nous administrons en pleine lumière, nous le ferons avec plaisir.

M. SAMSON: Question additionnelle, M. le Président. Est-ce que le leader considère quand même qu'il y a une différence entre connaître les engagements et connaître le détail des dépenses qui ont été faites par le gouvernement, à qui cela a été payé, de quelle façon on a procédé? C'est pour cela qu'on demande la convocation de cette commission. Si le gouvernement refuse, on sait pourquoi il refuse.

M. LEVESQUE: Prenez les comptes publics de la dernière année; vous verrez là toutes les dépenses avec les noms des gens à qui cela a été payé, et posez des questions.

M. SAMSON: Convoquez-là, la commission.

M. LEVESQUE: Posez des questions sur l'administration du gouvernement précédent.

M. SAMSON: Convoquez-la, la commission.

M. LEVESQUE: Posez des questions sur l'administration du gouvernement actuel mais posez des questions intelligentes.

M. SAMSON: Convoquez-la, la commission.

M. ROY (Beauce): M. le Président, nous avons des questions inscrites au feuilleton depuis le mois de février et nous n'avons pas encore les réponses. Nous avons des questions à poser, et j'estime que l'endroit pour les poser c'est à la commission des comptes publics.

M. LEVESQUE: J'invoque la question de privilège, M. le Président. Qu'on dise le nombre de questions qui ont été posées et auxquelles on a répondu au lieu de dire qu'il en reste qui n'ont pas reçu de réponse. Dans toutes les administrations et sous tous les gouvernements il y a eu de ces questions restées sans réponse, simplement parce que ce genre de questions demande un temps infini pour préparer les réponses; non pas parce qu'il y a quelque chose à cacher.

Prenons les questions posées et regardons-les, ces questions-là. Prenons le temps de les regarder. Que le député soit honnête au lieu de porter des accusations comme celle-là. Lorsqu'on pose des questions où l'on demande une infinité de détails qui demandent de rassembler des renseignements de tous les organismes du gouvernement, de tous les ministères du gouvernement qu'on prenne le temps d'attendre. Chaque fois, les instructions sont données à tous les ministères et organismes de fournir les renseignements et les réponses au bureau du leader du gouvernement. Chaque fois que ces réponses sont apportées, elles sont immédiatement transmises à la connaissance de la Chambre.

M. SAMSON: Est-ce que le leader se réfère au genre de questions qu'on a posées, à un moment donné, concernant les limousines et lorsqu'il a dit qu'il ne pouvait pas donner de réponse parce qu'il ne les avait pas encore toutes trouvées?

M. LEVESQUE: M. le Président, si on veut revenir à cette question, nous pourrons donner tous les renseignements dont le député a besoin. Nous avons mentionné à ce moment-là qu'il y avait des renseignements qui manquaient; non pas parce que nous voulions cacher quoi que ce soit, mais nous avons eu la franchise de dire qu'à un moment donné, il y avait un véhicule qui était enregistré à tel nom, pour tel ministère et dont, dans le transfert, on avait perdu la trace. Cela peut arriver. Dès que nous avons les renseignements, nous les fournissons. Ce n'est pas toujours facile d'avoir tous les renseignements, mais dès que ces renseignements parviennent à mon bureau, ils sont transmis à la Chambre.

M. LOUBIER: M. le Président, dans le même ordre de questions qu'a posées le député de Rouyn-Noranda, je pourrais peut-être demander pourquoi le député de Rouyn-Noranda a exigé que ses tapis soient changés à son bureau?

Ce n'était pas assez luxueux pour le député de Rouyn-Noranda.

M. SAMSON: M. le Président, je pose la question de privilège.

M. HARVEY (Chauveau): Je fais appel au règlement, M. le Président.

M. SAMSON: Lorsque le gouvernement change...

UNE VOIX: La question de privilège avant.

M. LE PRESIDENT: Je crois que la question de privilège a priorité sur le règlement.

M. SAMSON: Sûrement. Avant de m'accuser, le député de Bellechasse devrait se rappeler qu'il est de tradition, dans les bureaux du premier ministre, quand on change de gouvernement, non seulement de changer les tapis, mais de changer même les portes.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! J'ai accordé au député de Rouyn-Noranda la permission d'invoquer son privilège du fait qu'on avait mentionné certaines choses qui se seraient passées à son bureau, mais il faudrait que cela se limite à cette question de privilège sans soulever le débat.

M. SAMSON: Merci, M. le Président.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'invoque le règlement.

M. SAMSON: Dans mon bureau, comme dans tous les bureaux du troisième étage, on a changé les tapis parce que, lorsque nous sommes arrivés, c'était trop sale.

M. BACON: C'est faux. DES VOIX: C'est faux! M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LOUBIER: M. le Président, je répète que c'est le député de Rouyn-Noranda qui ne trouvait pas ses tapis assez luxueux et qu'il a exigé qu'on mette...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LOUBIER: ... d'autre tapis pour monsieur.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'invoque le règlement, M. le Président.

M. SAMSON: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: Question de règlement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est tout simplement pour vous faire observer que la question du chef d'Unité-Québec avait pour but de souligner un fait, c'est que le député de Rouyn-Noranda soigne plus ses pieds que sa tête.

M. SAMSON: M. le Président, puisque l'honorable député de Bellechasse est revenu à la charge...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

M. SAMSON: ... je lui dirai que ceux qui occupaient les locaux avant moi étaient des membres de son parti. Je répète que les planchers étaient trop sales.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

M. LAVOIE (Wolfe): M. le Président, c'était mon bureau avant, et j'avais des tapis...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Nous allons... A l'ordre messieurs!

Maintenant que tous les tapis sont nettoyés, Affaires du jour.

A l'ordre!

M. LEVESQUE: M. le Président, article 6.

Projet de loi no 276

Deuxième lecture

M. LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition officielle.

M. Gabriel Loubier

M. LOUBIER: M. le Président, j'ai écouté hier avec beaucoup d'intérêt le ministre des Affaires municipales faire, comme il se devait, l'apologie du projet de loi no 276 intitulé Loi favorisant le regroupement des municipalités.

Je sais que cette loi s'inspire du désir manifeste du gouvernement d'essayer d'apporter tous les avantages de l'efficacité administrative à des agglomérations qui sont contiguës et qui pourraient, par la centralisation des services, bénéficier d'avantages supérieurs, tant au plan du bien-être social, au sens orthodoxe du mot qu'à celui de la confection d'un plan directeur et d'urbanisme qui répondrait davantage aux besoins socio-économiques de cette agglomération ou de cette unité de regroupement.

Je pense que ce projet de loi qui, dans l'ensemble, s'inspire du désir manifeste, comme je le disais, du gouvernement de fixer des unités de regroupement, n'atteint pas les objectifs visés par le gouvernement et, surtout, ne répond pas au désir exprimé par les municipalités rurales.

Je comprends fort bien que le bill 276, dans son ensemble, veut surtout atteindre les municipalités urbaines. Il est évident que son application devient relativement facile à cause, évidemment, du territoire limité sur lequel se trouvent des agglomérations assez importantes de sorte que, sur le plan social, c'est assez homogène. En ce qui concerne la mentalité de ces gens-là, dans le milieu urbain, il y a, je

pense, une homogénéité qui permet un rapprochement très facile. Il n'y a pas, à proprement parler, ni sur le plan psychologique, ni sur le plan économique, des conflits d'intérêts.

Mais là où je suis beaucoup plus prudent et beaucoup plus réticent à accepter le projet de loi tel que présenté par le ministre, c'est surtout dans les milieux ruraux. Le ministre, dans les notes explicatives, nous dit fort bien quel est son but: "Ce projet autorise le ministre des Affaires municipales à établir des unités de regroupement pouvant comprendre des municipalités tant urbaines que rurales". Je pense que je peux déduire facilement que le ministre lui-même décidera quelles seront les unités de regroupement, désignera ces unités de regroupement qui ne sont pas encore désignées, comme il le disait hier, et qui devraient, selon ses dires, faire l'objet d'études. En définitive, c'est toujours le ministre qui aura la discrétion d'établir ces unités de regroupement en milieu rural.

J'ai infiniment de réticence à accepter le projet de loi tel que présenté. Je répète que, s'il s'agissait tout simplement de fixer des unités de regroupement dans les municipalités urbaines, à cause des facteurs que j'ai cités tout à l'heure, le projet de loi serait acceptable d'emblée, souhaitable et bienvenu. Mais, en milieu rural, ce projet de loi aura une application extrêmement difficile. En second lieu, je pense que, dans nos municipalités rurales, nous ne désirons pas, en partie, l'imposition par le ministre du choix de ces unités de regroupement, d'autant plus qu'à la fin du projet de loi on remarque fort bien l'intention du gouvernement, parce qu'on mentionne que ce projet remplace la Loi de la fusion volontaire des municipalités.

Je pense qu'on constate que le gouvernement se démasque et que le projet de loi no 276 fait abstraction justement du volontariat ou du désir exprimé par les municipalités rurales de s'unir. Le bill 276 vient, à toutes fins pratiques et littéralement, matraquer les municipalités rurales et donner complète discrétion au ministre de fixer lui-même ces unités de regroupement. Même s'il y a une coloration de participation démocratique de la population qui pourra s'exprimer, en définitive, on se rend compte que le projet de loi permet au ministre d'exercer sa discrétion.

Or, je pense que ce projet, tel que soumis actuellement, ne peut pas répondre aux besoins et surtout aux désirs des municipalités rurales. Le ministre voudrait, par le bill 276, comme il le mentionnait hier, surtout atteindre les municipalités urbaines. C'est un voeu qu'il exprime, et je crois qu'il est sincère.

D'autre part, la loi, telle qu'elle est conçue et rédigée actuellement peut très bien et très directement, d'une façon assez impérative, imposer à nos municipalités rurales ce regroupement, suivant les unités de regroupement fixées par le ministre. Oh! le ministre voudra camoufler l'odieux de cette imposition en disant que des études socio-économiques se feront, que ces études permettront d'arriver à une équité assez grande pour permettre à ces municipalités rurales de s'épanouir et de connaître un plus grand bien-être par ce regroupement. Mais, en fait, peu importent les études, il appartiendra toujours au ministre — c'est là que le danger se trouve — de fixer ces unités de regroupement sans tenir compte, en milieu rural parfois, des distances qui séparent deux municipalités, sans tenir compte des mentalités différentes qui peuvent se retrouver dans deux municipalités rurales à quatre ou cinq milles de distahce, sans tenir compte également de la situation économique de chacune de ces deux municipalités. Il peut s'avérer, fort bien que, dans une municipalité donnée, il y ait une industrie florissante qui fasse vivre très bien toute la population et qu'à quelques milles de distance il y ait une municipalité qui soit, économiquement, moins florissante, qui soit moins favorisée. Là, on essaiera de marier le feu et l'eau.

Je pense, M. le Président, que ce projet de loi, dans son économie, contient de bonnes intentions, que, dans les objectifs, le gouvernement veut tout simplement assurer plus d'efficacité sur le plan administratif et arriver à une qualité améliorée des services. Mais je répète que la réticence qui me vient à l'esprit, c'est que le ministre, à ce moment-là, rejoint les municipalités rurales, fait disparaître, à toutes fins pratiques, le volontariat qui avait été déjà inscrit dans la Loi de la fusion volontaire des municipalités et, véritablement, indique dans quel esprit il a l'intention de procéder, c'est-à-dire de façon que les municipalités rurales se voient mariées de force. Je sais qu'il y aura des mariages de raison qui, à certains endroits, pourront s'avérer fructueux. Mais je pense que le ministre devrait obéir aux suggestions ou aux amendements que nous proposerons plus tard parce que, s'il n'y a pas d'amendements d'acceptés pour donner plus de liberté aux municipalités rurales, je serai obligé, pour ma part, de me prononcer contre ce projet de loi justement à cause du fait que le ministre le présente dans l'intention de regrouper des municipalités rurales sans tenir compte des réalités socio-économiques. Il imposerait, de son propre cru, à des municipalités un mariage qui ne servirait pas les intérêts de ces gens-là.

M. TESSIER: Est-ce que le chef de l'Opposition officielle pourrait préciser — sans donner le texte de l'amendement proposé parce qu'évidemment ce n'est pas le temps de le faire - ce à quoi il veut en venir? Quelle serait, en somme, l'idée de l'amendement qu'il désirerait proposer?

M. LOUBIER: Je pense que les amendements viennent, M. le Président, en comité plénier, lorsque...

M. TESSIER: D'accord, mais au moins donner des explications.

M. LOUBIER: ...nous étudions les articles un par un. Si le ministre souhaite que je soumette ces amendements illico, sur-le-champ, est-ce qu'il pourrait prendre l'engagement que lui-même et ses collègues soumettront, à l'avenir, les amendements avant que nous n'étudIlons les projets de loi article par article?

M. TESSIER: Non, M. le Président, je n'ai pas demandé...

M. LOUBIER: Mais pour ne pas jouer à la cachette avec le ministre, je lui dirai tout simplement...

M. TESSIER: Je n'insiste pas.

M. LOUBIER: ...que ce que j'aimerais c'est qu'il y ait certaines précautions concernant sa discrétion très large pour les municipalités rurales.

Je voudrais que le ministre ne puisse pas, même à la suite d'études, décider de fixer et d'établir lui-même les unités de regroupement, qu'il y ait un mécanisme en place qui fasse que les municipalités rurales ne soient pas littéralement forcées par le ministre à se regrouper, s'il n'y a pas compatibilité de caractère entre les municipalités. Je le dis au sens très large. Si à ce moment-là, les deux municipalités concernées, à cause de distances ou à cause d'autres facteurs socio-économiques, n'ont pas intérêt à s'unir, je ne voudrais pas que le ministre puisse, dans son texte de loi, les obliger à le faire contre leur volonté et, par voie d'extension, contre leurs intérêts.

Je pense bien que ce sont plutôt des thèmes d'amendements que nous voulons proposer au ministre. Je voudrais que, si possible, il y ait un réaménagement, dans cette loi, permettant beaucoup plus de liberté à ces municipalités rurales et diminuant le pouvoir d'imposition du ministre des Affaires municipales.

M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de Lafontaine.

M. Marcel Léger

M. LEGER: M. le Président, on nous présente ce matin le bill 276 qui permettrait le regroupement des municipalités.

M. le Président, le livre blanc s'en allait vers une réforme globale des municipalités et le projet qui nous arrive ce matin accouche d'une souris alors qu'on pensait avoir une réforme gigantesque à travers le Québec.

Qu'on le veuille ou non, à travers le Québec, aujourd'hui, on s'en va vers des regroupements de quelque ministère que ce soit, de quelque responsabilité administrative que ce soit. On s'en va vers des regroupements. Je pense, M. le Président, que le bill qui nous est présenté ce matin, comme je le disais pour un autre bill hier, est bon en soi mais nous n'avons aucune espérance que ce bill sera efficace et qu'il atteindra les buts pour lesquels il est présenté.

En effet, M. le Président, dans le bill qui nous est présenté, tout parle de la création d'unités de regroupement, comme point de départ, A la minute où le ministre a fait le découpage de ces unités de regroupement, il en découle deux possibilités: d'une part, qu'il y ait une requête conjointe venant des municipalités ou des citoyens et, d'autre part, que le ministre, s'il n'y a pas de requête conjointe, peut demander — toute la nuance est là — des études obligatoires. Il peut le faire. Il ne doit pas nécessairement le faire mais il peut le faire.

Si on part d'une requête conjointe, on arrive à deux autres possibilités: soit que cette requête demande la fusion, sans obstacle. A ce moment-là, le ministre peut déclarer une fusion. Il se peut que cette requête conjointe amène des objections, des obstacles. Alors on peut déclarer une enquête publique. Tout tourne autour de cette enquête publique.

La conséquence de cette enquête publique amène soit une nécessité de fusion — encore là, le ministre est le seul qui décide de cette fusion — ou, s'il y a des oppositions, cela peut amener un référendum. A la suite du référendum, il peut arriver que la population soit pour et qu'on fasse la fusion. Il se peut que la population soit contre et on est encore au statu quo.

Si nous reprenons l'autre possibilité du début, à savoir qu'il n'y a pas eu de requête conjointe, le ministre peut — toute la mesure est là — peut seulement et non pas doit, demander des études obligatoires. La conclusion de ces études ne peut qu'amener à une enquête publique. On retombe dans le même labyrinthe.

Il y a aussi le cas des municipalités qui ne sont pas à l'intérieur des unités de regroupement.

Pour les municipalités qui sont hors de l'unité, cela demande absolument une requête conjointe et, là on arrive soit à une solution d'étude obligatoire, d'enquête publique ou de fusion.

En aucun endroit, on ne voit le désir profond, nécessaire, de l'administration ou du gouvernement municipal de voir à décréter une fusion basée sur une politique bien planifiée qui aurait trouvé que la solution finale, c'est le regroupement et qu'il faut le faire. On peut consulter la population sur les modalités, mais on doit nécessairement arriver à cette décision.

Tout le système du Québec s'en va vers le regroupement et on est en train encore d'attendre la bonne volonté des gens en place, et non pas nécessairement des citoyens, pour qu'ils décident de se faire hara-kiri en acceptant une fusion volontaire. La seule amélioration que je vois dans ce bill 276, c'est peut-être une incitation financière.

Ce sont des demi-mesures quand même, et je pense que le gouvernement ne veut pas de

véritable réforme, parce qu'il craint de déplacer des gens en place. Pourquoi ne pas imiter, dans le bill 276, ce qui a été fait dans le bill 27, alors qu'on a réellement, après étude, déterminé qu'il fallait regrouper? On a adopté une loi en conséquence, en consultant les gens, mais, par la suite, on a agi.

Les unités de regroupement supposent des consultations auprès des intéressés. Nous trouvons que c'est une bonne initiative du gouvernement, mais, en recourant encore au volontariat, en n'obligeant pas le ministère à aller au bout de sa réforme, nous allons réaliser, dans cinq ans, que nous avons perdu du temps dans un regroupement qui est absolument essentiel à travers toutes les administrations du Québec.

Le ministre voudra peut-être sortir la carte sentimentale de la démocratie. S'il y a un parti qui est démocratique dans ses idées, c'est bien le nôtre, et le fait qu'on demande que le ministère prenne ses responsabilités en imposant un plan de regroupement basé sur l'efficacité, avec la participation des citoyens, c'est la meilleure forme de démocratie possible. Mais ce n'est pas protéger la démocratie de vouloir protéger des gens élus en place, parce que c'est eux dont on a peur quand on parle de créer un regroupement volontaire.

Il ne faut pas mélanger la démocratie, qui touche le citoyen qui a le droit d'être bien administré, et les personnes en place qui veulent garder des postes comme maires ou conseillers. Je pense que la réelle démocratie, c'est de fixer les cadres d'une bonne administration municipale ou gouvernementale où la démocratie va réellement fonctionner. Il y a toute une nuance entre obliger des municipalités à se fusionner pour le plus grand bien des citoyens qui y vivent — c'est de la démocratie et vouloir que des gens élus en place se laissent berner par l'esprit de clocher, par des intentions peut-être partisanes, locales qui empêcheraient le développement et l'évolution du Québec dans un regroupement de l'administration de toutes les municipalités du Québec.

La démocratie va fonctionner pour autant que, premièrement, le ministère ait une planification d'ensemble, qu'il ait consulté la population et, après ça, qu'il agisse, mais qu'il n'attende pas que les élus, qui ont des fiefs à protéger, décident que c'est bon pour leurs concitoyens, cette administration regroupée.

Je pense qu'il faut non seulement établir un plan de regroupement volontaire, mais, après consultation, y aller carrément et penser que la démocratie, c'est la participation du citoyen et non pas simplement la participation des gens qui ont des postes élus d'administrateurs.

C'est un palier de gouvernement qu'il faut repenser. On doit aller, tôt ou tard, vers des regroupements de gouvernements régionaux pour une meilleure efficacité administrative dans le domaine des municipalités.

Laisser tout à l'initiative locale, c'est voué à l'échec. Ceci prouve bien qu'il n'y a pas de plan général d'ensemble d'aménagement municipal au ministère des Affaires municipales.

M. le Président, la planification a des droits. Elle est disparue depuis un an et demi au ministère des Affaires municipales, depuis, premièrement, qu'on a fait disparaître la Direction générale de la planification et, deuxièmement, qu'on a vu le pourcentage infime, dans le budget des Affaires municipales, consacré à la recherche.

C'est là qu'on voit la cause première de ce manque de planification, d'idées à longue échéance, d'idées à horizon lointain qui permettraient de réaliser une administration efficace dans la province de Québec. M. le Président, il n'y a rien de nouveau dans ce bill, sauf le fait qu'il y aura des unités de regroupement. Mais ce qui me surprend, c'est que ces unités de regroupement devront être faites, après que la loi aura été adoptée.

Je pense qu'il aurait été très important, si le ministère des Affaires municipales avait été préparé, avait réellement planifié son affaire, de nous présenter des cas d'unité de regroupement, comme on l'a fait pour le livre blanc quand on nous a présenté les secteurs d'aménagement municipaux. Nous aurions pu voir les conséquences de ces regroupements et en discuter à l'occasion du projet de loi, alors que le ministre, au contraire, veut mettre le cheval derrière la charrue et dit: Adoptons le projet de loi et après on verra à faire les unités de regroupement.

Je pense que c'est une fausse conception et qu'il aurait fallu qu'on nous présente ces unités de regroupement en même temps que le projet de loi, pour que nous puissions en étudier les implications. M. le Président, ceci prouve quand même qu'il n'y a pas de plan de regroupement précis de préparé. C'est laissé à l'aveuglette. Comme le projet de loi est simplement incitateur, on laisse donc à l'initiative le fait de se regrouper alors que si on veut une saine administration il faut planifier, étudier, consulter et, après que c'est fait, administrer et réaliser. C'est la seule façon d'atteindre le but d'une saine administration au plan des municipalités du Québec.

M. le Président, j'aurai des amendements à présenter lors du comité plénier parce que je pense qu'il est essentiel qu'on ne laisse pas le regroupement municipal dépendre uniquement d'un simple désir du ministère. Actuellement, comme je le disais tantôt, on part d'une unité de regroupement et on a deux options: soit qu'il y ait une requête conjointe venant des municipalités ou des citoyens, soit que le ministre puisse déclarer des études obligatoires.

Mais tout le problème est dans le mot "peut." Je pense qu'on pourrait améliorer sensiblement le projet de loi si on mettait dans la loi que le ministre "doit" déclarer des études obligatoires à la suite de la présentation des unités de regroupement. Et si on mettait une date limite de temps pendant lequel le ministre

devrait faire faire des études obligatoires aux frais des municipalités, celles-ci seraient peut-être plus enclines à vouloir étudier sincèrement ce regroupement de leur milieu pour des meilleurs services à un meilleur coût, parce qu'elles sauraient que bientôt, dans tant de temps, précis, dans six mois, il y aura nécessairement des études obligatoires décrétées par le ministre. Non pas des études que le ministre pourrait, mais que le ministre devrait faire faire.

A ce moment-là, on inciterait les municipalités à l'intérieur des unités de regroupement à commencer immédiatement à penser à se regrouper, à faire des sondages sérieux, et non pas dire: Bien, le ministre ne le fera probablement pas, on ne touche pas à ça, on ne veut pas se regrouper parce qu'on a chacun notre petit fief et on veut rester comme ça.

Comme on veut empêcher l'esprit de clocher de prédominer mais qu'on veut une administration saine de toute la province, je pense que si le ministre devait, dans un délai déterminé après la présentation des unités de regroupement, exiger des études obligatoires pour certaines municipalités dans les unités de regroupement, ce serait une amélioration pour inciter les municipalités à penser immédiatement à ce regroupement.

M. le Président, je pense que c'est une solution nécessaire et que le ministre devrait la considérer sérieusement.

Nous sommes d'accord sur le principe du bill, mais comme je le disais l'autre jour, on a une série de petits bills qui se présentent au petit bonheur mais qui n'ont aucune ressemblance avec une politique soit d'urbanisme, soit d'aménagement du territoire des municipalités soit d'habitation. Tant que nous n'aurons pas cela, nous ne saurons jamais si les projets de loi vont vers le bien-être de l'ensemble des Québécois. Nous ne pouvons que déplorer le fait qu'il n'y a pas de politique générale des municipalités au Québec.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Lévis.

M. J.-Aurélien Roy

M. ROY (Lévis): M. le Président, personne ne peut me blâmer dans cette Chambre d'abuser de mon droit de parole. Devant un bill aussi important et puisque je suis concerné dans mon comté et dans les comtés environnants, je crois qu'il est normal que nous fassions valoir nous aussi, de ce côté-ci de cette Chambre, nos remarques sur le bill 276.

J'ai compris que l'honorable ministre avait eu de mauvaises expériences avec les communautés urbaines. J'ai eu l'occasion de siéger avec le ministre à des commissions. Je lui avais dit moi-même, lors d'autres rencontres, d'être très prudent en ce qui concerne les communautés urbaines et les regroupements des municipalités. Le ministre a fait des études et je crois que le ministre a abandonné son projet pour nous en présenter un autre qui essaie de regrouper les municipalités.

Je suis parfaitement d'accord avec l'honorable député de Bellechasse, pour une fois, et cela me fait plaisir, lorsqu'il a parlé tout à l'heure des municipalités rurales. Il y a plusieurs choses que nous devons éviter. Vous savez que la province de Québec a été — je ne veux pas faire d'historique — agrandie par des municipalités qui se sont séparées, qui ont laissé les municipalités urbaines pour aller se fonder un petit patelin dans une paroisse ou dans un comté.

On aura beau dire que ces gens-là ont l'esprit de clocher, on ne peut pas tellement les blâmer. Il ne faut pas penser non plus, parce que nous avons été élus par la population pour les représenter en cette Chambre, qu'il n'y a que nous qui pouvons dire la vérité et prendre les bonnes décisions, sans les consulter. Je ne suis pas du tout d'accord avec mon collègue qui vient de parler et qui voudrait que le gouvernement aille encore plus vite, que le gouvernement leur donne un certain temps et après, qu'il applique la loi. Je pense bien que ce ne serait pas tellement démocratique et que nous ne serions pas tellement bien vus de la population.

Nous avons des administrateurs dans les conseils municipaux, des gens qui sont élus par le peuple, qui s'élisent un maire, qui n'ont peut-être pas l'instruction et les manières d'agir des députés de cette Chambre, mais il faut penser que ces gens-là sont des administrateurs et qu'ils ont à coeur le développement de leur paroisse. Je pense que ce serait aller un peu trop vite que d'aller imposer une loi par un bill les forçant à se regrouper.

Je pense qu'il y a beaucoup de choses à faire, et j'espère que le ministre en tiendra compte. On parle du regroupement des municipalités mais on a oublié, depuis quelques années, de regrouper d'abord leurs services. Nous avons chez nous des municipalités qui ont chacune leurs petits services. Nous avons d'autres municipalités qui, il n'y a pas longtemps, se sont approprié des services qu'elles auraient pu avoir chez la municipalité voisine. Je ne veux pas blâmer les gouvernements précédents ou le gouvernement actuel, ce sont des choses qui sont arrivées.

Nous parlons de communications, nous parlons de systèmes d'eau et d'égout. Vous savez que dans nos municipalités urbaines nous parlons d'épuration et qu'il n'y a pas eu encore de réalisations après des études approfondies qui ont coûté des milliers de dollars à nos villes.

Nous avons le service de la police, nous avons tous les services, surtout dans nos municipalités urbaines, mais ils devraient être repensés. Quand nous pourrons démontrer à la population, principalement à la population urbaine, qu'il y a avantage économiquement à se regrouper, point ne sera besoin de voter une loi

pour les y forcer. Même si on dit qu'on a un esprit de clocher dans les campagnes, ces gens sont encore assez intelligents pour savoir ce qui est avantageux pour eux et ce qui est désavantageux.

Je pense que si nous pouvions, une fois pour toutes, démontrer à la population les avantages qu'il y a à se fusionner, le ministre n'aurait pas de problème. Ce qui fait peur à notre population, c'est que d'autres villes ont eu de mauvaises expériences en se fusionnant; les taxes ont presque doublé.

Certes, on ne peut pas dire que nous allons vivre comme aux temps anciens; il faut nous habituer à payer des taxes, d'accord, mais on peut s'y habituer quand on a les moyens de les payer. Si nous demandons aux cultivateurs de nos municipalités de doubler les taxes, je crois que nous aurons de la difficulté à avoir l'unanimité pour fusionner ces municipalités.

J'entends quelqu'un de l'autre côté qui semble vouloir avoir la parole. J'espère qu'il pourra faire son discours tout à l'heure.

Je ne voudrais pas dramatiser mais je représente plusieurs municipalités urbaines et aussi plusieurs municipalités rurales. Le ministre nous a fait part hier qu'il avait déjà rencontré au moins 400 municipalités sur 1585 et que ces gens semblaient unanimes pour étudier au moins le regroupement. Je suis d'accord et le ministre me connaît assez pour savoir que je ne ferai pas campagne contre le regroupement. Le ministère devrait immédiatement prendre les mesures nécessaires afin de rassurer la population, qui craint les fusions à cause de la piastre, même si on y voit des avantages au point de vue des services.

Mes collègues vont peut-être penser que je vais me mettre à parler de prêts sans intérêts de la Banque du Canada; non, ce n'est pas mon domaine, je vais laisser ça au ministre des Finances.

Il y a une autre chose à laquelle il faudrait bien faire attention avant de prendre des décisions. Dans les municipalités rurales, il n'y a pas tellement de problèmes parce qu'il n'y a pas tellement de locataires. Loin de vouloir enlever le droit de vote aux locataires mais, quand il est question de 50 p.c. de la population qui pourraient amener une décision favorable plutôt que d'empêcher l'avancement, il faut prendre garde parce que c'est le propriétaire qui est le gros contribuable dans les municipalités urbaines. Probablement me dira-t-on que le propriétaire, s'il a une augmentation de taxes, l'inclura dans le coût du loyer; il peut quelquefois le faire mais quelquefois les propriétés sont régies par le contrôle des prix. Si des dépenses extraordinaires étaient faites, ces gens-là, même si on a adopté, cette semaine, une loi pour leur donner l'avantage de rénover leurs constructions, seraient aux prises avec les logements qu'ils ne peuvent louer à des prix suffisants pour défrayer le coût d'entretien de la bâtisse parce qu'ils sont encore sous le contrôle de la Régie des loyers.

C'est à peu près tout ce que j'ai à dire. Je sais que le ministre, tel que je le connais, avec l'expérience qu'il a vécue avec les communautés urbaines dont la création s'est faite à la vapeur, prendra toutes les précautions nécessaires avant de mettre en application ce bill, parce que, comme le disait le député de Bellechasse tout à l'heure, le ministre a pleine autorité pour décider ce qu'il voudra, si à un certain moment il y a des choses qui ne fonctionnent pas.

Je ne veux pas lui enlever son autorité. Je comprends qu'on a un ministre qui a une grande expérience des municipalités puisqu'il a été longtemps maire d'une ville assez considérable, ce dont je le félicite. J'y vais assez souvent et Rimouski est une très belle ville.

Pour une fois que je vante votre ministre, laissez-moi tranquille.

M. VEILLEUX: Continuez! Pour une fois que vous tenez des propos sensés, continuez.

M. ROY (Lévis): M. le Président, je veux bien qu'on soit à notre aise. Je ne louange pas le ministre parce que j'ai une faveur à lui demander. C'est faux! Je dis ce qu'il en est. Quand le ministre est à côté de la "track" — il me connaît, il est venu dans mon comté et nous avons eu l'occasion de nous rencontrer — et qu'il répète l'annonce des mêmes subventions trop souvent, quand il le dit au moins quatre ou cinq fois, je lui rappelle qu'il le dit trop souvent. Le principal, c'est quand il donne. Je comprends que le ministre va prendre ses responsabilités avant d'accepter ce bill. Je crois que, s'il n'y a pas des amendements considérables, nous serons obligés de voter contre le bill en deuxième lecture. Merci M. le Président.

M. VEILLEUX: C'est un bon bill et il est contre.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.

M. Lucien Lessard

M. LESSARD: M. le Président, vous me permettrez de dire quelques mots sur ce projet de loi. Cela fait tellement longtemps qu'on entend parler de réforme municipale qu'on espère, à chaque session, avoir quelque chose de sérieux. On nous présente encore un projet de loi qui ne mène, à mon sens, à rien.

La réforme municipale, je pense que personne n'y croit plus. Chaque fois qu'on a essayé de faire quelque chose, sous les pressions de certaines personnes, comme on le disait tout à l'heure, qui ont des fiefs à l'intérieur des localités, les différents ministres ont toujours reculé. C'est tellement vrai qu'on est rendu, dans nos municipalités, à dire: Ah! les lois qu'on va nous présenter, on ne s'en occupe plus. De toute façon, on sait que le ministre va reculer. On sait que cela ne mènera absolument

à rien. On s'est essayé avec le principe des fusions volontaires. Pourquoi on faisait cela? C'est parce qu'il me semble qu'au niveau du ministère des Affaires municipales, on a pris conscience que le système, tel qu'il existe actuellement, ne peut pas fonctionner, que 1,500 municipalités au Québec, cela ne peut pas fonctionner. Donc, un principe a dû être établi, je pense, à la suite d'études techniques au niveau du ministère des Affaires municipales, qu'il faut absolument, pour une saine administration, regrouper différentes municipalités.

Ce principe est bon ou non. Que le ministre nous le dise. On sait que le principe, actuellement, est passablement discuté. Mais si le ministre nous propose un projet de loi de fusion, c'est parce que ce principe doit être valable.

Ce principe-là doit être bon pour essayer de regrouper différentes municipalités, pour essayer, exactement comme on l'a fait, par exemple, dans le bill 27, de faire en sorte que ces municipalités regroupées puissent regrouper leurs services, puissent se donner aussi des personnes compétentes pour les administrer, puissent arrêter de créer des doubles services un peu partout, comme on le voit dans notre région où on ne sait même pas où est la limite entre Sault-au-Mouton et Saint-Paul-du-Nord. C'est une chose qui est absolument inacceptable.

M. TESSIER: Est-ce que le député de Saguenay me permettrait une question?

M. LESSARD: Oui, M. le Président, certainement.

M. TESSIER: J'aimerais savoir du député de Saguenay s'il est favorable à la fusion des villes de Baie-Comeau et de Hauterive.

M. LESSARD: J'y reviendrai, M. le Président, et, à partir de cet exemple-là...

DES VOIX: Ah!

M. LESSARD: ... je vous expliquerai pourquoi le projet de loi ne fonctionnera jamais. C'est surtout sur cela que je vais fonder mes critiques. Je me demande si le ministre ne s'amuse pas, tout simplement, à nous présenter des projets de loi que nous nous amusons à discuter et qui ne mèneront absolument à rien. Nous sommes ici pour faire quelque chose de sérieux, non pas pour nous amuser...

M. VEILLEUX: Alors, assoyez-vous.

M. LESSARD: ... sur des projets de loi qui ne mènent à rien, exactement comme cela a été le cas pour le projet de loi des fusions volontaires. C'est aussi volontaire que ce l'était avant, excepté qu'on met un peu plus d'incitation. Si le ministre y croit à la réforme municipale, qu'il soit sérieux, qu'il nous présente quelque chose qui est applicable, qu'il nous présente quelque chose qui va amener les municipalités à se fusionner. La démocratie, ce n'est pas l'anarchie, contrairement à ce qu'on pense. On vient d'obliger, par le projet de loi no 277, je pense, les municipalités non organisées à se regrouper à l'intérieur d'un secteur.

M. TESSIER: Non!

M. LESSARD: Oui, M. le Président, c'est quand même une certaine forme d'obligation.

M. TESSIER: C'est faux!

M. LESSARD: Bien, le ministre ne comprend plus ses projets de loi.

M. TESSIER: C'est faux! Il n'y a aucune obligation dans le projet de loi no 277.

M. LESSARD: Il reste que vous allez nommer un administrateur qui va être responsable d'un certain nombre de municipalités non organisées actuellement et, je pense bien qu'elles seront obligées de s'intégrer ou bien votre projet de loi est un autre projet de loi qui ne mène à rien. Alors, que le ministre soit sérieux !

On vient de nous soumettre un projet de loi ou l'on crée des cadres de fonctionnement pour des municipalités non organisées. Je disais que la démocratie, ce n'est pas l'anarchie. La démocratie, ce n'est pas laisser à chacun le soin de faire ce qu'il veut. La démocratie, ce n'est pas dire à chacune des 1,500 municipalités du Québec: Vous pouvez vous fusionner; vous pouvez ne pas vous fusionner; vous avez la possibilité de le faire et on va tenter de vous aider.

Je pense que la démocratie à ce niveau-là, c'est former un cadre de réforme municipale, avec consultation de la population. Après cela, par exemple, cela devra fonctionner à l'intérieur de ce cadre général. C'est cela, de la démocratie. Ce n'est pas laisser à chacun le soin de faire ce qu'il veut. Je pense qu'on en a soupé de la réforme municipale.

Cela fait passablement de temps que nous en entendons parler, et cela ne mène absolument à rien. Cela fait des années que j'entends parler de la réforme municipale, et chez nous, ce sont encore les mêmes petites municipalités, l'une à côté de l'autre. Il n'y en a pas une, actuellement, qui ait cherché à se fusionner.

Les gens ne s'inquiètent plus, M. le Président, des projets de loi qui sont soumis par le ministre. Les gens ne s'inquiètent plus du tout. Ce n'est plus sérieux, cette affaire-là. Le ministre en parle. Il se fait démolir, à la télévision, sur la réforme municipale mais après cela, il retournera au gouvernement et les administrateurs municipaux se disent: Nous allons continuer à faire notre petite affaire, seuls, nous continuerons à nous administrer, nous conti-

nuerons à créer nos services, nous continuerons à conserver nos fiefs tels que nous les avons encore. Cela ne mènera à rien.

Ce qui est dramatique, M. le Président, c'est que les gens ne croient plus à ce gouvernement. On en est rendu à faire des lois qui ne s'appliquent jamais, à faire des lois...

M. VEILLEUX: On verra cela aux prochaines élections.

M. LESSARD: ...simplement parce qu'on a déclaré qu'on était favorable à la fusion des municipalités. Donc, on va faire une loi pour permettre cette fusion. Mais en fin de compte, M. le Président, si on est d'accord avec ce principe, il faut créer, à un moment donné, des moyens de faire cette réforme.

Je pense qu'encore là le ministre commence par la fin dans sa réforme municipale. Si au moins il avait commencé un peu comme cela s'est fait pour le bill 27. Lorsqu'on a discuté du projet de loi no 27, on s'est aperçu que les commissions scolaires multiples, telles qu'on les avait là, cela ne pouvait plus fonctionner. On a décidé enfin de faire quelque chose. Qu'a-t-on fait? On a déterminé des unités de regroupement. On a commencé par les déterminer. Non pas par établir le principe et dire que le ministre peut déterminer des unités de regroupement. Non, M. le Président. On a déterminé des unités de regroupement.

Après cela, la population a été consultée. Ces unités de regroupement ont été placées en annexe au projet de loi. Lorsque la commission de l'Education a siégé, les populations concernées ont pu venir présenter des mémoires pour dire ce qui ne fonctionnait pas dans ces unités de regroupement ou ce qui pouvait fonctionner. Cela, M. le Président, c'est de la démocratie.

Nous votons encore, M. le Président, un chèque en blanc. Je n'ai pas peur de le signer parce que je sais qu'il ne l'encaissera jamais. Cela ne donnera absolument rien encore. Mais il reste que c'est pratiquement un chèque en blanc, c'est-à-dire que le ministre dit: On peut créer des unités de regroupement mais il n'y a absolument rien, à la fin du projet de loi, qui nous dit quelles seront ces unités de regroupement. Y a-t-il eu des études, au ministère des Affaires municipales, par exemple, disant qu'au Québec, ce n'est pas 1,500 municipalités qu'il nous faudrait avoir mais 300, 400 ou 150, mais à partir d'une étude géographique, d'une étude technique. Y a-t-il des études qui ont été faites au ministère des Affaires municipales? Cela a dû être fait. Nous ne nous en allons probablement pas vers une fusion des municipalités sans savoir exactement pourquoi nous faisons cela.

Il est certain, à mon sens, si c'est de la saine administration, qu'il doit y avoir des études au ministère des Affaires municipales qui, à un moment donné, nous diront au moins que, normalement, étant donné le territoire, étant donné la distance entre les municipalités, étant donné le nombre de municipalités concernées dans différentes régions, de 1,500 municipalités — actuellement, c'est à peu près ce nombre; je ne sais pas si c'est exact — on devrait aller vers tant de municipalités dans une période X.

Si ces études existent, le ministre aurait pu dans son projet de loi, à partir de ces études, nous soumettre dès ce matin les unités de regroupement qu'il proposerait et faire siéger la commission des Affaires municipales, entendre les populations concernées et ensuite déterminer des cadres de fusion.

Je ne pense pas, pour ma part, que ce projet de loi puisse s'appliquer à partir de l'expérience que j'ai chez moi. Tout à l'heure, le ministre me demandait: Est-ce que le député est d'accord avec la fusion de Baie Comeau-Hauterive? C'est justement à partir de cette question que les unités de regroupement dont je parle deviennent absolument nécessaires.

Il y a eu deux études techniques en ce qui concerne Baie-Comeau-Hauterive, deux études extrêmement importantes. Or, il semble qu'à partir de ces études la fusion de la ville de

Baie-Comeau et de la ville de Hauterive s'impo- serait. Il est certain qu'il y a des désavantages pour l'une des villes de faire cette fusion.

Si cette fusion doit se faire, il faut que le ministre prévoie au moins de pouvoir donner des compensations à ces populations. Parce que si on laisse strictement à ces municipalités le soin de se fusionner par elles-mêmes, il est certain qu'il y aura toujours une ou deux municipalités désavantagées.

Si le gouvernement pense qu'une meilleure répartition des municipalités entraînerait comme conséquence une meilleure administration, donc aussi, comme conséquence économique, de l'argent économisé pour la province, cela veut dire que le ministre devrait prévoir des compensations pour les villes qui subiraient des conséquences néfastes du fait du regroupement. En principe, pour ma part — et là je réponds à la question du ministre — je suis complètement pour la fusion des villes de Baie-Comeau et de Hauterive.

On est continuellement pris, actuellement dans notre région, avec ce fameux problème-là d'avoir deux villes très importantes, avec des services complètement parallèles, distancées dans cinq à six milles.

Malheureusement on n'a pas consulté la population au sujet de la fusion des villes de Baie-Comeau-Hauterive. A la suite des études , techniques qu'on a faites, la population n'a pas i du tout été consultée. A partir des deux études qui ont été faites, il y a un maire de la région qui a dit: Non! on ne fusionnera pas les deux villes. Une enquête a été faite à ce sujet, mais, lorsqu'on va consulter la population et qu'on lui demande si elle est d'accord en principe avec la fusion des deux villes, elle est d'accord. Or, parce que les administrateurs ont décidé qu'eux ne seraient pas d'accord, on ne consulte pas la population. Maintenant, on laisse simplement

cette affaire-là dans le silence; on n'en parle plus, on laisse faire.

Alors, est-ce que le projet de loi va améliorer les choses? Pas du tout; ça ne réglera absolument rien, sinon peut-être quelques incitations qu'on donne dans le projet de loi. C'est la seule chose qui est différente du projet de loi qui existait auparavant. C'est toujours du volontariat. C'est toujours de l'administration sur une petite échelle, à la petite semaine. Il n'y a aucun plan-cadre. Quand "mon" livre blanc du ministre est sorti, on croyait au moins que cela allait mener à quelque chose.

Il y a des fonctionnaires qui ont travaillé probablement des mois et des mois à ce livre-là, puis, là, on le met de côté, comme de nombreuses études techniques faites dans les différents ministères. On a un gouvernement de gens studieux. Ils étudient, mais ils ne réalisent jamais rien, cependant. On fait des belle études techniques, puis ça donne quoi? Un avortement, comme le projet de loi que nous avons actuellement devant nous.

Pendant ce temps-là, on a des fonctionnaires qui se morfondent à essayer de planifier. M. le Président, on est tanné de ça.

M. le Président, on est "tanné" de cela. On en a assez d'étudier des projets de loi qui ne mènent à rien. Si le ministre voulait être sérieux, il devrait tout simplement retirer ce projet-là. Je ne ferai pas de motion mais il devrait tout simplement le retirer car ça ne vaut rien. Il devrait nous soumettre un projet de loi qui aurait du bon sens et qui s'inscrirait non pas dans une réformette mais dans une véritable réforme municipale, une réforme planifiée, une réforme à l'intérieur de laquelle on aurait déterminé les unités de regroupement, une réforme au sujet de laquelle la population aurait été consultée, en ce qui concerne ces unités de regroupement.

Après cela, après la consultation qui aurait été faite, qu'on prévoie des moyens incitateurs et autres pour que cela se fasse; qu'on arrête d'en parler, et qu'on se décide. Qu'on arrête de fatiguer la population en lui disant: Cela s'en vient, la réforme municipale; le regroupement s'en vient. Après cela, on s'aperçoit que les projets de loi soumis ne nous mènent à rien.

Je conclus sur cela. Je demande au ministre, à partir de ce qu'on a dans le projet de loi... C'est tellement compliqué, cette patente-là; on sait que pas une municipalité va se rendre au dernier stade nécessaire du regroupement. Que le ministre retire donc un projet de loi aussi futile, aussi inefficace. Qu'il le retire donc. S'il veut faire quelque chose, s'il veut faire de la réforme — s'il ne veut pas en faire, qu'il le garde, son projet de loi — qu'il nous soumette quelque chose de sérieux et on se penchera dessus pour l'étudier sérieusement.

Là, cela ne vaut même pas la peine et on s'amuse à discuter de projets de loi qui m'appa-raissent, pour ma part, insignifiants.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Maurice,...

M. DEMERS: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: ... qui, probablement, demandera la suspension du débat.

M. DEMERS: ... c'est une excellente suggestion. Je demande la suspension du débat.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que la motion de suspension du débat du député de Saint-Maurice est adoptée?

Adopté.

Je déclare la séance suspendue jusqu'à deux heures.

(Suspension de la séance à 12 h 31)

Reprise de la séance à 13 h 59

M. HARDY (président): A l'ordre, messieurs!

Le député de Saint-Maurice.

M. Philippe Demers

M. DEMERS: M. le -Président, j'aurai une grande consolation en me levant, c'est que moins il y a de monde, plus on applaudit.

J'aurais aimé que le ministre eût le temps de réintégrer son siège, mais de toute façon, pour le cas, probablement, qu'il fera de mes propos, je peux parler en son absence.

M. SIMARD (Témiscouata): Il brille par son absence.

M. VEILLEUX: On lui fera le message.

M. DEMERS: Au mois d'avril 1965, plus précisément le 8 avril, le lieutenant-gouverneur sanctionnait le bill de la fusion volontaire des municipalités. Aux statuts refondus de nos lois, nous pouvons relever que c'était le chapitre 56. Aujourd'hui, le gouvernement nous propose de remplacer la loi 56, Loi de la fusion volontaire des municipalités, par une nouvelle loi, la loi 276, qui s'intitulera Loi favorisant le regroupement des municipalités.

A l'époque, ç'avait été un fiasco. Le temps a prouvé que ce qu'on avait mis en oeuvre à ce moment-là ne valait pas la peine de l'être, à tel point qu'aujourd'hui les gens de la même formation politique qui ont mis sur pied cette loi viennent de nous proposer de l'enlever et de la remplacer par une pas meilleure, peut-être une pire. On peut dire que la montagne se met en mouvement et qu'elle accouche d'une souris.

Nous attendions une superloi, à la suite des tournées faites par le ministre en province, de ses grandes déclarations qui se contredisaient quelquefois, vous me permettrez de le dire, M. le Président — il ne pensait pas que nous avions le téléphone dans nos régions, il ne pensait pas que ça arriverait jusque chez nous — nous en étions venus à la conclusion que nous aurions une superloi, une énorme loi, une grosse loi, quelque chose qui se tiendrait, qui aurait de la consistance, quelque chose de solide, de fort, de bon, qui régenterait toute l'administration municipale et qui serait une pierre de posée dans le jardin de nos objectivités.

Contrairement à tout cela, c'est une loi à laquelle je me demande si nous pouvons même donner le nom de loi.

C'est une pitié, une grande pitié. C'est une codification de petites réformettes qui n'aboutissent à rien. Le ministre avait dit et il l'a répété, il n'y a pas si longtemps, que l'époque des communautés urbaines était révolue, qu'il les ferait disparaître, qu'il fallait remplacer cela, même si le premier ministre a dit qu'il les maintiendrait. Cela n'avait pas donné satisfaction. Et il vous remplace cela par le projet de loi no 276 qu'il intitule Loi favorisant le regroupement des municipalités.

Cela peut peut-être en favoriser mais cela n'en groupera pas une. Il faudrait voir ce que ce projet de loi a dans le ventre. Ventre creux, il n'y a rien. Nous aurions voulu — et les opinants qui m'ont précédé au cours de la matinée ont préconisé la même chose — qu'après une étude sérieuse du milieu urbain, du milieu rural, par des gens sérieux, qu'on en vienne à un consensus. Il y a, nous disait le ministre, 1,500 municipalités. En combien de municipalités voudrait-il les regrouper? Combien voudrait-il en faire disparaître? A quel endroit voudrait-il en faire disparaître? Qu'est-ce qu'il veut regrouper? Je comprends que ce seraient probablement des municipalités. Est-ce qu'il a étudié ou fait étudier la démographie? Qui compose ces municipalités? Est-ce qu'on peut décemment unir tout le monde sans savoir quelle sorte de monde nous allons unir? Unir des régions, des groupes de municipalités sans savoir si elles peuvent se marier ou non.

Nous aurions voulu que dans son ministère, on en arrive — il me semble que cela ne doit pas être sorcier — à prendre la carte de la province de Québec, avec les municipalités, les corporations, etc., et à grouper cela, à diviser cela et à dire: Le ministère vous présente aujourd'hui, MM. de l'Assemblée nationale, un organigramme, quelque chose de structuré, de fini et il vous propose d'accepter ou de refuser ce projet. Et s'il avait été sérieux, bien fait, bien structuré, bien fini, et de bon sens, nous l'aurions accepté avec facilité, sans discussion. On s'attendait à une grosse loi. Petite loi.

Là, nous avons eu comme document de travail le rapport Lacasse-Poisson. C'est seulement pour une région de la province et c'est pour installer un service communautaire de transport en commun par autobus. Nous avons des données précises. La commission a étudié sérieusement comment cela devrait être régenté, la capitalisation et plusieurs autres détails, nous avons tout cela dans le rapport Lacasse. Nous savons même comment va coûter un billet d'autobus. Là, pour fusionner, pour ramasser un groupe de municipalités urbaines ou rurales, pas une feuille de papier, rien. Faites-nous confiance! Il y a quelques années, en 1965, on a fait confiance au gouvernement du temps. On avait accepté de voter la Loi des fusions volontaires. Qu'est-ce que cela a donné? Aujourd'hui, on l'abroge. Cela n'a rien donné. Peut-être par incitation, le ministre pourra-t-il grouper. Vous voyez venir cela, M. le Président, lorsque le maire d'une municipalité, qui est un ami du régime politique — actuellement, c'est le gouvernement libéral, mais il y aura d'autres gouvernements — vient à Québec pour rencontrer le ministre: Ne nous fais pas ça. On ne veut pas embarquer dans le bateau. N'incite pas. N'incite pas assez. N'incite pas fort. Il ne se fera rien. Nous n'avons rien devant nous. Il n'y a rien de précis, il n'y a rien de clair.

Même si nous sommes pour le principe d'un

regroupement municipal, urbain, rural, j'admets comme vous, M. le Président et comme tout le monde, qu'il y a des municipalités à trois milles de distance où il y a deux services d'incendie. Les camions à incendie sont dans le garage pendant 20 ans. Quand il faut les changer, ils ont parcouru à peu près 200 milles. Ils ne sont jamais allés au feu. On ferait mieux de n'avoir qu'un camion à incendie. Mais il irait au feu tous les jours. Cela ne veut pas dire de mettre le feu mais il aurait un territoire plus grand à couvrir. C'est comme cela dans une foule de municipalités. J'admets cela. Mais la façon qu'on nous donne pour faire cela, pour rapetisser cela et concentrer cela, cela ne vaut pas le six. Excusez les expressions, c'est de la foutaise, c'est de la bouillie pour les chats. On veut nous faire passer une loi. Nous sommes pour le principe de la fusion mais il n'y a rien dans la loi. C'est creux. J'allais dire: C'est à l'image de... Non, ce n'est pas cela, M. le Président. Ce n'est pas grand. Il n'y a rien dedans.

Le député de Saguenay, en matinée, a exposé cela et, écoutez — je ne couche pas avec eux tous les soirs, je vous avertis — j'ai trouvé que son affaire était marquée au coin du bon sens. Ils en veulent du regroupement mais nous voulons regrouper quelque chose qui va regrouper.

Comme c'est là, on va en parler, on va sanctionner une autre loi, on va s'en aller chez nous et on va dire: Cela va se regrouper: $15 par tête pour le regroupement et ceux qui vont s'embrayer avant telle année auront $15 payés dans cinq ans. Ce sont des bonnes mesures pour essayer de regrouper les gens, mais on ne sait pas — par exemple, prenez la région de la Mauricie — quelles municipalités seront ensemble? Qu'est-ce qu'on fera dans la Mauricie? Qu'est-ce qu'on fera dans la région du député de Montmagny, dans le Bas-du-Fleuve? Quelles municipalités vivront ensemble en communauté? On ne le sait pas. On va inciter.

M. VEILLEUX: Commencez par voter le principe et, après ça, on va le faire.

M. DEMERS: C'est ça. Commencez par nous donner l'outil, puis on ne fera rien avec. Attendez !

M. VEILLEUX: Un instant!

M. DEMERS: On va commencer par regarder ce qu'il y a dans le projet de loi avant de voter. Comme vous ne l'avez pas regardé, vous ne pouvez pas le savoir. Regardez dans la loi et si, après les études que vous avez faites, vous, qui êtes professeur, vous en venez à la conclusion qu'il y a quelque chose là-dedans, vous en ferez la démonstration tantôt et on vous écoutera.

M. VEILLEUX: Je vais parler après vous. M. DEMERS: Vous nous donnez un marteau pour casser des roches, mais le marteau est en verre, puis le gars qui est sur le manche ne "swing" pas fort.

M. VEILLEUX: Pour enfoncer un clou, ça prend un marteau. Donnez-nous le marteau, puis on va l'enfoncer.

M. DEMERS: M. le Président, dans les clous, c'est le spécialiste. Les clous à finir n'avaient pas de tête, dans mon temps.

Je termine. Je n'ai pas été méchant; qu'on me laisse donc exposer mon affaire! Cela vous fait plaisir? Raisonnez ça un peu en battant des mains. Cessez de frapper sur les pupitres et regardez ce qu'il y a dans les lois, puis trouvez quelque chose là-dedans, si vous en êtes capables. Je vous défie de le faire. Incitation ! Si on demande telle ou telle chose, s'il y a cinquante si, s'il y a ceci, s'il y a cela, mais il n'y aura jamais ceci et il n'y aura jamais cela. Voyons donc, il faut être plus vieux que ça !

M. HARVEY (Chauveau): Faites confiance au ministre.

M. DEMERS: On sait comment ça se fait de l'incitation. Nous sommes passés dans le domaine municipal. J'ai été maire, modestement, moi, pas aussi fort que lui. Je ne l'ai été que pendant six ans. Je n'ai pas démissionné pour être nommé ministre. Ils m'ont "sacré" dehors, parce qu'ils ne voulaient plus de moi. J'ai connu des problèmes municipaux, j'ai participé à la création d'une ville, bâti une municipalité où il n'y avait aucun service. On nous a laissé bâtir parallèlement, dans le temps, à côté de Shawini-gan qui était la ville riche, la chambre à coucher, nous autres. Cela a coûté une fortune. S'il y avait eu une loi qui, au lieu d'inciter, aurait dit: Vous allez tout mettre ça dans le même panier. Les gens travaillaient en ville, puis ils venaient coucher à Shawinigan-Sud. C'était illogique. Aujourd'hui que la ville est bâtie, Shawinigan voudrait reprendre Shawinigan-Sud. Shawinigan-Sud dit: Maintenant qu'on est bâti, que le diable vous emporte! C'est le mot.

Et c'est comme ça. Et le ministre avec ses incitations, ça va inciter comme ça, ça va faire des affaires à hue et à dia, un attelage de chiens esquimaux, il y en a un qui veut s'en aller à une place et l'autre qui veut s'en aller à l'autre, ils ne s'en vont nulle part.

C'est ça le bill 276. Et le ministre sortira les arguments qu'il voudra, il n'a pas de critères pour établir ces fusions, il n'en a pas du tout. Il s'en va dans le champ et il court, il se dépêche, il ne sait pas où il va, nous les avons connus ceux-là, ça ne mène nulle part.

Il n'a aucun critère. On regroupera, au point de vue géographique, on ne sait pas quoi. On regroupera des individus, on ne sait pas qui. S'ils ne veulent pas, il n'y en aura pas.

Il faut être plus sérieux que ça. S'il prenait le temps de retirer sa loi et, pendant les vacances

de Noël, de s'asseoir sur une chaise de bois franc et de regarder ce qu'il y a dedans, il viendrait à la conclusion qu'il n'y a rien. Il dirait: Tout le monde est pour le regroupement, nous allons prendre deux ou trois semaines de plus et nous allons préparer un tableau de nos objectifs.

C'est comme ça. Dans l'Evangile c'est dit — je ne lis pas ça tous les soirs, je ne suis pas du Ralliement créditiste —: "Il n'y a personne qui voulant bâtir, ne s'asseoit et regarde s'il y aura des matériaux pour finir".

Je demande au ministre de s'asseoir tranquillement. Il est dans une rage de passer des lois, depuis quelques jours. Cela fait un mois et demi que nous sommes ici, nous n'avons pas touché à ses lois. Nous allons parfois en première lecture et ça dépose. Mais là ça achève, nous nous en allons au congé de Noël. Dans deux semaines nous allons être partis. On reviendra après Noël avec une loi, avec des objectifs précis d'un ministre qui sait où il va, ce qu'il veut faire, qui ne s'attend pas d'être nommé juge. Ce n'est pas pareil quand on s'attend d'être nommé juge, on passe des petites lois et on s'en va.

Mais là nous, nous allons être pris ensuite, nous l'aurons comme juge et plus comme ministre. C'est important et je demande sérieusement au ministre de réfléchir. Je comprends qu'avec la force du rouleau compresseur avec les lumières qui l'entourent et cet appui qu'il a en quantité, le ministre va pouvoir nous la faire adopter, sa loi, même si nous sommes contre et nous nous battons jour et nuit contre. La participation de vous autres, les "backbenchers" comme nous autres, les simples députés, des gars qui ne font que ça être députés, qui ne sont pas ministres, nous allons voter, nous allons parler de ça et nous allons avoir une loi de rien.

C'est en ce sens que je voulais intervenir et j'ose espérer que mes propos, s'ils n'ont pas ébranlé le ministre, auront pu au moins le faire réfléchir. Je tente ma chance. Merci, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Jean.

M. Jacques Veilleux

M. VEILLEUX: M. le Président, je tiens d'abord à féliciter le ministre de nous présenter ce projet de loi qui favorise le regroupement des municipalités.

Ici, je ne serai pas long, parce que je n'ai pas, d'abord, une grande région, je n'ai pas de municipalités aussi nombreuses que le représentant de Saint-Maurice. Cependant, dans ma région il y a quand même des problèmes qui surgissent à certains moments.

Je demanderais notamment, au député de Saint-Maurice de réfléchir et d'analyser le premier paragraphe des notes explicatives de ce projet de loi, qui répondra justement, s'il le lit bien, s'il essaie de le comprendre, à toutes les interrogations qu'il s'est posées tout à l'heure.

D'abord, établir des unités de regroupement. Je crois qu'il est essentiel que le ministre des Affaires municipales ait ce pouvoir afin, justement, de pallier des problèmes qui peuvent surgir dans des régions, problèmes surgissant, comme le disait le député de Saguenay ce matin, parce qu'il y a des gens qui à un certain moment ont de petits fiefs, qui refusent de se fusionner ou même de fusionner des services avec une municipalité très importante près de la municipalité de village.

Dans ma région, M. le Président, vous avez Saint-Jean qui a une population de 35,000 hommes et, tout à côté, vous avez certaines petites municipalités, notamment la municipalité de Saint-Blaise. Saint-Blaise n'a jamais voulu, pour une raison ou pour une autre, fusionner son service d'incendie avec la ville de Saint-Jean, avec le résultat que trois ou quatre petites municipalités plus éloignées de Saint-Jean que Saint-Blaise ont décidé de fusionner leur service d'incendie. Il y a quinze jours, un incendie se déclare aux limites de la paroisse de Saint-Blaise, tout près de Saint-Jean. On appelle le service d'incendie le plus près de ce lieu où la maison prenait feu, Saint-Jean répond à l'appel, mais Saint-Jean ne peut éteindre le feu pour la simple raison que la municipalité de Saint-Biaise, voulant conserver un certain fief comme le disait la député de Saguenay, avait décidé de fusionner son service avec une municipalité éloignée de cinq à six milles, avec le résultat que, lorsque le camion à incendie de ladite municipalité est arrivé sur les lieux il ne restait que le solage à éteindre.

Je pense qu'il est temps qu'on donne le pouvoir au ministre des Affaires municipales d'établir une cohérence dans les unités de regroupement pour empêcher justement que des cas comme celui que je viens de vous mentionner se reproduisent, non seulement dans le comté de Saint-Jean mais aussi dans d'autres régions du Québec.

Jusqu'ici, lorsque des municipalités voulaient se fusionner, il fallait absolument que toutes les municipalités susceptibles de se fusionner acceptent la fusion. Le projet de loi donne ici une incitation très forte en ce sens que cela ne prendra que la moitié des municipalités à l'intérieur de l'unité de regroupement pour fusionner si possible toute cette unité. Si, par exemple, Saint-Jean ou Saint-Luc décidaient de se fusionner et que ces deux municipalités étaient comprises dans une unité de regroupement incluant Saint-Blaise, celle-ci serait obligée de se fusionner avec Saint-Jean et Saint-Luc, et à Saint-Blaise, on aurait pu éteindre un incendie et on aurait empêché un "payeur de taxes", comme dit le député de Rouyn-Noranda, de subir une perte de $30,000 à $35,000.

Uniquement pour ces raisons, il est suffisant de voter pour le principe de cette loi qui favorise le regroupement municipal. Je suggère

tout simplement au député de Saint-Maurice, qui qualifiait tout à l'heure cette loi de réformette, de petite loi, etc., qu'après avoir voté le principe du regroupement il propose au ministre des amendements susceptibles de faire que la réformette, comme il dit, devienne une véritable réforme.

D'ici là, il n'y a aucun membre de cette auguste Assemblée...

M. PAUL: Il est mort, Auguste, cela fait longtemps.

M. VEILLEUX: ... qui puisse s'empêcher de voter en faveur du principe de cette loi, loi qui favorise le regroupement des municipalités. Merci.

M. LE PRESIDENT (Carpentier): L'honorable député de Beauce.

M. Fabien Roy

M. ROY (Beauce): M. le Président, au risque de décevoir l'honorable député de Saint-Jean qui vient de prendre la parole, je crois bien qu'il y aura des membres en cette Chambre qui voteront contre le projet de loi du regroupement des municipalités.

Le bill 276, intitulé Loi favorisant le regroupement des municipalités, nous porte à nous interroger sérieusement sur les véritables intentions du gouvernement; nous porte à nous interroger sérieusement sur ce que le gouvernement a l'intention de proposer aux municipalités qui vont se regrouper, à savoir s'il y aura autre chose que de petites incitations pour le regroupement et ce que fera le gouvernement aussitôt que le regroupement sera accompli.

Nous aurions été en droit de nous attendre à avoir un projet de loi favorisant le développement des municipalités du Québec, mais au lieu d'avoir un projet de loi favorisant le développement des municipalités du Québec, nous avons un projet de loi favorisant le regroupement des municipalités. Et les regrouper pourquoi et en fonction de quoi? Nous savons que le problème no 1 des municipalités du Québec, à l'heure actuelle, est un problème fiscal, avoir des capitaux pour pouvoir donner les services que l'on doit donner à la population qui les réclame.

Au lieu de trouver des moyens pour mettre à la disposition des municipalités du Québec plus de capitaux, le gouvernement cherche par des moyens subtils à récupérer et à mettre plus de monde dans l'assiette fiscale pour tâcher d'organiser des diversions et de plus grosses chicanes.

Nous le savons, le gouvernement le sait, l'ancien gouvernement le sait encore, le problème, c'est que l'assiette fiscale des disponibilités financières qui sont à la dispositions des municipalités du Québec est trop petite. Le gouvernement le sait mais il ne fait rien. Et dans sa loi de regroupement des municipalités du Québec, il passe encore à côté du problème.

On veut regrouper les municipalités du Québec parce que l'on dit qu'il y a trop de municipalités au Québec. Nous savons qu'il n'y a pas tellement longtemps, pas plus d'une dizaine d'années, quinze ou vingt ans, il y avait plusieurs municipalités au Québec qui se subdivisaient mais on ne s'est pas interrogé sur la raison pour laquelle tant de municipalités cherchaient à se subdiviser plutôt qu'à se regrouper.

On n'a pas cherché à trouver les causes de ces subdivisions, il n'en est aucunement fait mention dans le projet de loi, ni dans le livre blanc que nous a présenté le ministre, ni dans aucun rapport.

Si les municipalités du Québec ont cherché à se subdiviser, il y a eu certainement des raisons, des causes qui ont motivé cet état de fait.

Lorsqu'on prend le temps de visiter les gens dans nos comtés, de faire le tour de nos comtés, de rencontrer les maires de nos petites municipalités et de discuter avec eux de leurs problèmes, on se rend compte que la subdivision municipale est justement arrivée pour trois facteurs bien précis. Premièrement, pour des raisons économiques; on a trouvé plus économique de subdiviser les municipalités pour se donner les services dont on avait besoin sans avoir à recourir à de grosses formules et augmenter les discussions et faire en sorte que les centres de décisions deviennent de moins en moins capables de prendre les décisions qui s'imposaient.

Les gens se sont regroupés en petites municipalités pour se donner les services dont ils avaient besoin et au meilleur coût possible.

Une deuxième raison qui a fait que les municipalités se sont subdivisées a été une raison d'efficacité. C'était plus facile d'organiser les travaux municipaux qui s'imposaient, et qui étaient réclamés par la population de toute urgence, tant dans de petites que dans de grosses municipalités. Le problème était circonscrit, et c'étaient les gens en place qui avaient justement le pouvoir de décision, parce que le pouvoir de décision était très près de la population.

Une troisième raison pour laquelle les municipalités ont cherché à se subdiviser au Québec, dans nos territoires a été une raison budgétaire. Comme le budget était trop petit, il y avait le problème de la répartition du budget dans le territoire, il y avait des problèmes dans les villages, il y avait des problèmes du côté des rangs. Par exemple, lorsqu'on parle des municipalités exclusivement rurales, du fait qu'elles n'avaient pas suffisamment d'argent pour donner tous les services, il y a toujours eu un risque de conflit entre les besoins des municipalités de villages et les besoins des municipalités de campagne parce que, justement, les deux avaient des problèmes, avaient des travaux à faire, mais les disponibilités financières, les disponibilités fiscales ne leur permettaient pas de faire les deux. Les gens ont subdivisé leur municipalité pour ces raisons.

Par son projet de loi sur le regroupement

municipal, est-ce que le gouvernement offre réellement des services plus avantageux aux municipalités qui se retrouveront regroupées? D'abord, est-ce que ce sera plus économique? Le gouvernement ne nous en a pas fait la preuve. Il y aurait passablement de discussions sur ce point. Deuxièmement, est-ce que ce sera plus efficace? C'est un point sur lequel on peut se demander...

M. VEILLEUX: Oui!

M. ROY (Beauce): Le député de Saint-Jean a fait son discours, et j'ai été assez poli pour ne pas l'interrompre. Alors, je vous demanderais, M. le Président, de le rappeler à l'ordre même s'il est près de la console des techniciens.

M. VEILLEUX: Question de règlement. Le député de Beauce...

M. ROY (Beauce): Ce n'est pas une question de règlement. Je l'ai demandée et c'est moi qui ai la parole. J'ai demandé au président de bien vouloir faire asseoir le député de Saint-Jean...

M. VEILLEUX: Question dérèglement...

M. ROY (Beauce): On l'a laissé faire son discours tout à l'heure sans l'interrompre.

M. LE PRESIDENT: Quel article?

M. VEILLEUX: M. le Président, je réponds aux interrogations du député de Beauce.

M. ROY (Beauce): M. le Président, je n'ai jamais vu de rappels au règlement aussi insignifiants depuis que je siège en cette Chambre. Quand on n'a rien à dire, ce sont à peu près des choses comme celles-là que l'on dit pour interrompre les autres dans leurs interventions.

Je disais donc qu'on peut se poser trois questions sur le regroupement des municipalités. Est-ce que ce sera plus économique? Est-ce que ce sera plus efficace? Est-ce que les problèmes de disponibilités budgétaires vont être résolus, sinon en tout, au moins en partie? Le gouvernement ne nous l'a pas dit. Le gouvernement n'a rien laissé entendre, parce qu'il ne nous a pas annoncé en même temps une politique financière qu'il entendait adopter pour permettre des services aux municipalités de façon qu'elles puissent se financer à meilleur marché qu'à l'heure actuelle et que ce soit plus facile pour elles d'aller sur le marché des capitaux lorsqu'il est nécessaire de faire des emprunts.

M. le Président, je pense que regroupées ou pas — non pas que nous nous opposions à ce que certaines municipalités regroupent certains services, comme le disait le député de Saint-Jean tout à l'heure, nous ne pouvons nous opposer à ça — il appartient aux gens dans les municipalités de décider ce qui est bon et avantageux pour eux.

Je ne crois pas que le gouvernement soit capable à l'heure actuelle, de décider aux lieu et place des gens qui font partie des différentes municipalités du Québec. On parle d'établir des unités de regroupement? Si on se réfère au document que le gouvernement a mis à notre disposition, qui accompagnait le livre blanc, on a vu, dans tous les comtés du Québec une carte de distribution des municipalités. Si le gouvernement se base encore sur les mêmes critères pour établir les unités de regroupement, bien, je me demande sérieusement si ceux qui ont préparé ces plans connaissent réellement la province de Québec et s'ils l'ont vue ailleurs que sur une carte routière. Je ne veux pas parler pour les autres comtés mais en ce qui a trait au comté de Beauce, c'est tout simplement ridicule de voir la façon dont le gouvernement a établi ces unités de regroupement.

M. le Président, on veut imposer cela à la population par des moyens artificiels, sous prétexte qu'à un moment donné cela a favorisé les regroupements volontaires, en organisant une politique de subvention appropriée, en organisant une politique d'incitation pour obliger les grosses municipalités à trouver les moyens nécessaires pour tâcher de convaincre les petites municipalités qui les entourent d'embarquer dans le giron du regroupement afin de pouvoir bénéficier de certaines subventions pour accomplir les travaux urgents. Je pense qu'on passe encore à côté du problème. On manque de réalisme. Nous sommes en train de nous demander, réellement, si le gouvernement, à l'heure actuelle, dans sa planification, n'est pas formé, comme le dit le député des Iles-de-la-Madeleine, de pelleteurs de nuages.

Nous avons référé également au congrès annuel de l'Union des municipalités du Québec, qui a donné lieu à un large échange de vues entre les maires et de nombreuses personnalités invitées, dont plusieurs ministres. Les problèmes fiscaux ont, bien sûr, largement été débattus puisque les municipalités ont le rôle ingrat de percevoir des taxes. Elles ont droit aux pouvoirs et responsabilités correspondants. Dans cette optique, l'intervention de M. Marc Perron, gérant de la ville de Laval, a semblé cerner d'assez près les problèmes des municipalités, comme on peut s'en rendre compte par l'intervention qu'il a faite et par certains passages des allocutions qui ont été prononcées.

Or, la situation financière de la grande majorité des municipalités québécoises est précaire. Cela, nous le savons. Selon un sondage récent, on discerne trois principaux problèmes administratifs qui, par ordre d'importance, sont les suivants: des moyens financiers limités, comme nous venons de le dire; l'absence d'une méthode de gestion moderne et l'absence de planification. On semble vouloir accuser nos municipalités de ne pas avoir recours à des méthodes modernes de gestion. On pourrait peut-être se demander ce qu'elles ont à gérer et à administrer.

On parle aussi d'une absence de planification. Qu'est-ce que cela donne de faire de la planification au niveau municipal à l'heure actuelle, alors qu'on n'est pas capable d'avoir les capitaux nécessaires pour établir des réseaux d'égout et d'aqueduc, pour faire des travaux de voirie, des travaux de rue, des trottoirs et pour les autres services de la municipalité?

On veut les regrouper, mais pourquoi? Dans mon comté, à l'heure actuelle, il y a des municipalités qui, depuis dix ans, réclament et font des voyages auprès du gouvernement pour avoir des services du ministère des Affaires municipales, pour être capables d'exécuter les travaux qui sont urgents et que la population réclame. On est encore au stade des voyages auprès du gouvernement qui répond qu'il n'a pas de budget. Regrouper les municipalités du Québec pour faire quoi? C'est la question qu'on peut se poser.

D'autre part, l'insistance des représentants municipaux au cours de cette conférence à demander de façon de plus en plus pressante une réforme de la fiscalité — on l'a demandé — et le retrait de la concurrence scolaire dans le domaine des impôts fonciers qui est en quelque sorte un problème financier.

Si nous consultons les statistiques officielles depuis 15 ou 20 ans, force nous est de constater que les charges financières des municipalités se font de plus en plus lourdes. Il est vrai que les dépenses ne cessent de croître, car alors qu'elles atteignaient à peine $200 millions en 1955, elles ont quadruplé depuis. La dette municipale, d'autre part, qui, à la même époque, se situait aux environs de $530 millions a quintuplé durant la même période pour atteindre aujourd'hui $2,500 millions.

M. TESSIER: M. le Président, je soulève un point d'ordre.

On est à parler de fiscalité municipale. C'est très intéressant d'entendre le député de Beauce. C'est évident que c'est un problème primordial pour les municipalités, mais il faut tout de même faire la distinction entre fiscalité municipale et le regroupement des municipalités. Or, je soumets qu'on doit s'en tenir à la loi présente, qui favorise le regroupement des municipalités et non pas la fiscalité municipale.

M. LE PRESIDENT: J'ai été jusqu'à maintenant très large en acceptant les remarques du député de Beauce, mais je voudrais également lui rappeler qu'il doit s'en tenir au principe du bill 276. Je compte sur la collaboration de tous et de chacun afin qu'on s'en tienne précisément au bill en discussion. Sans ça, nous allons nous lancer dans des discussions qui peuvent amener n'importe quel objet ou débat adjacent. Je compte, encore une fois, sur la collaboration généreuse de tous les députés et les invite à s'en tenir précisément à la discussion du bill que nous étudions présentement soit le bill 276, Loi favorisant le regroupement des municipalités.

J'invite les députés à cette collaboration.

M. ROY (Beauce): Merci, M. le Président. Dans l'étude du projet de loi no 276, j'ai fait référence à la fiscalité parce qu'à l'heure actuelle on ne peut pas ne pas parler de fiscalité lorsqu'on parle de regroupement des municipalités, puisqu'on veut justement faire du regroupement municipal pour permettre aux municipalités de jouer leur rôle. Si on refuse de parler de fiscalité, on passe à côté du problème. Or, c'est justement là qu'on voit les intentions du gouvernement, qui sont encore de passer à côté du problème fondamental des municipalités du Québec et que le gouvernement veut reporter le problème dans des chicanes, dans des débats de structures au lieu de s'attaquer au problème de fond, au problème fondamental.

Or, par voie de référence — et le règlement nous le permet — nous pouvons faire un parallèle à ce moment-ci pour démontrer au gouvernement que la loi favorisant le regroupement des municipalités devrait être plus complète et aurait dû contenir un aspect du problème pour permettre de régler le problème fiscal que les municipalités doivent envisager.

C'était le sens de mon intervention.

Loin de moi l'intention de m'écarter du sujet et d'aborder un sujet qui n'avait aucun rapport avec le présent projet de loi. Je disais donc que le véritable problème fondamental — je sais que ça fait mal au ministre, au gouvernement — c'est un problème fiscal, le problème financier. Et si le gouvernement continue à vouloir refuser de ne pas l'aborder, nous allons constater, dans deux, trois, quatre ou cinq ans qu'il n'y a absolument rien de réglé au Québec, qu'on a fait énormément de débats au niveau des structures municipales, mais que nos municipalités ont continué de s'embourber, que les problèmes sont restés là, qu'il n'y a à peu près absolument rien de réglé. C'était pourquoi je voulais intervenir en parlant un peu du problème fiscal.

Vous me permettrez de faire un parallèle — puisqu'on veut parler de regroupement et qu'on ne semble pas tellement intéressé de parler du problème fiscal, le seul moyen qui pourrait régler la question — entre ce qui s'est fait en France au niveau du regroupement — et citer quelques statistiques — et ce que le gouvernement a l'intention de faire au Québec.

En France, sur 38,000 municipalités ou communes, on compte 35,000 municipalités rurales, groupant 17 millions d'habitants, soit une moyenne de 500 personnes par commune. Effectivement, 3,500 municipalités françaises comptent actuellement moins de 100 contribuables.

Le Québec, au contraire, compte plus de 1,635 municipalités dont plus de 1,100 affichent une population inférieure à 1,500 habitants. C'est dire que 70 p.c. du nombre total des municipalités québécoises représentent à peine 18 p.c. de la population du Québec. C'est dire de plus qu'en France 95 p.c. du nombre

total des municipalités représente à peine 30 p.c. de la population.

Depuis 1884, la France recherche une solution miracle au regroupement municipal. Nous comprenons que le gouvernement actuel — comme l'ancien gouvernement — cherche aussi une solution miracle. En 1963, se basant sur une législation suédoise rendant obligatoire la suppression de toutes les municipalités de moins de 4,000 habitants, un projet du ministère de l'Intérieur — l'équivalent de notre ministère des Affaires municipales — avait prévu la disparition de 3,500 centres de moins de 100 habitants ainsi que de très nombreuses communes de moins de 200 personnes.

Ce projet — remarquez bien, M. le ministre — souleva de violentes protestations et le gouvernement dut l'abandonner. La coercition devait alors faire place à la persuasion: subventions accordées en priorité aux municipalités regroupées — c'est drôle comme ça se ressemble — et majoration substantielle de ces subventions

La formule principale de regroupement en France consiste, bien entendu, en une fusion volontaire. Malgré les subventions et les autres incitations à se fusionner, seulement 197 communes sur plus de 35,000 ont disparu entre 1962 et 1966. La fusion volontaire n'est donc pas plus populaire en France qu'au Québec.

Mais il y a tout de même une autre forme de regroupement qui a tenté de s'effectuer et qui s'est avérée beaucoup plus populaire chez la majorité des petites municipalités. Elle consiste en une ordonnance qui prévoit la création de syndicats de communes. En France, le syndicat de communes peut être à vocation unique ou à vocation multiple, selon les besoins de la communauté. Il existe actuellement 6,500 syndicats de communes en France.

Le syndicat de communes, qui ressemble étrangement à la nouvelle formule proposée par le ministre sous le nom de communauté municipale, peut exercer des pouvoirs différents d'un endroit à l'autre selon les besoins. Cette dimension géographique peut changer selon le désir des municipalités membres. Ce n'est tout de même pas ça qu'on nous propose. Le syndicat de communes — et c'est là que c'est intéressant, M. le Président — est financé entièrement par le gouvernement central et n'a pas le droit de recourir à la taxe locale.

Si le ministre des Affaires municipales, le gouvernement, en nous proposant une loi en vue de favoriser le regroupement des municipalités, nous disait à l'avance: les municipalités vont se regrouper au niveau de tel service, vous aurez telles subventions statutaires, pour tel et tel service, dans tel et tel domaine, et selon des critères de besoins pour que les municipalités en connaissent les avantages réels, là on pourrait dire qu'il y amélioration, que le projet de loi favorisant le regroupement des municipalités va certainement apporter des solutions aux nombreux problèmes qui se posent, et là on pourrait dire, M. le Président, que nous faisons un pas en avant. Mais, M. le Président, le député de Saint-Maurice l'a dit tout à l'heure, qu'est-ce qu'il y a dans le projet de loi? Où est-ce que le gouvernement se dirige avec ce projet de loi?

Un regroupement municipal ici, un petit regroupement municipal à 200 milles plus loin, un regroupement municipal 100 milles au nord, un autre regroupement municipal à 75 milles au sud, puis on va se réveiller avec quoi?

M. GARNEAU: Toutes les municipalités vont être regroupées.

M. ROY (Beauce): On va se réveiller, parce que le gouvernement n'a aucune politique précise dans ce domaine, puis le gouvernement n'est pas capable d'avoir de politique précise dans ce domaine, parce que le gouvernement n'a pas de capitaux pour lui permettre de s'engager, pour quelques années, au moins et dire aux municipalités: Si vous voulez regrouper certains services, vous allez bénéficier de telles choses, de tels services, vous allez avoir tels avantages.

Mais, M. le Président, cherchons les avantages dans le bill 276 qui favorise le regroupement des municipalités du Québec. On n'en trouve à peu près aucun, sauf du petit bonbon. Cela me fait penser un peu à du bonbon qu'on servirait à des gens qui meurent de faim. Alors ça peut soulager durant dix minutes, quinze minutes, une demi heure pour permettre de retarder un problème, de le reporter à plus tard.

Alors, M. le Président, nos municipalités ont énormément de problèmes, comme nous l'avons dit tout à l'heure. Avec le regroupement des municipalités, s'il y avait lieu de croire que le gouvernement va mettre plus de capitaux à leur disposition pour leur permettre de construire des usines d'épuration, de façon à pouvoir lutter efficacement contre la pollution, on pourrait dire qu'il y a certainement des avantages à voter pour un tel projet de loi, mais il n'y a rien dans le projet de loi. Lorsque les municipalités font des demandes pour la construction d'égout et d'aqueduc ou autres, pour les besoins municipaux, on parle de regrouper des services, mais quels services veut-on regrouper? Et ces services une fois regroupés, est-ce qu'on va être capable de les donner à la population? C'est la question qu'on peut se poser. Le gouvernement n'a pas de réponse de ce côté-là. On ne semble pas bien intéressé à ce que l'on discute de la question fiscale.

Il y a aussi un autre point sur lequel je veux attirer l'attention du gouvernement, c'est que le gouvernement du Québec, à l'heure actuelle, blâme le gouvernement central de trop centraliser, d'éloigner les centres de décision, et le gouvernement veut justement, par le regroupement municipal, faire de la centralisation. On fait exactement le contraire au niveau des municipalités que ce que le même gouvernement réclame au niveau du gouvernement fédéral et on veut éloigner les centres de décision de

la population et tout ça au nom de la démocratie, au nom de la démocratisation, comme on se plaît à le dire.

M. le Président, il est évident que'ce projet de loi ne nous conduit nulle part, ce projet de loi ne fait que reporter le problème. Ce projet de loi ne faut qu'augmenter la discussion et la division. Ce projet de loi ne réglera absolument rien et nous allons nous retrouver dans trois ans, dans quatre ans, cinq ans, avec des problèmes encore plus aigus, avec encore plus de problèmes et il n'y aura absolument rien de réglé au Québec.

Si le gouvernement se veut un gouvernement efficace, un gouvernement dynamique, un gouvernement compétent, comme il se plaît à le dire lui-même, je pense qu'il n'aurait pas d'autre chose à faire que de reprendre son projet de loi no 276, d'élaborer une véritable politique favorisant le développement des municipalités du Québec, de véritables politiques favorisant le développement des services municipaux au Québec. Et je pense qu'à ce moment-là ce projet de loi pourra trouver l'unanimité des membres de la Chambre.

On pourrait alors faire plaisir à l'honorable député de Saint-Jean.

Etant donné l'absence de toutes ces choses, nous n'avons pas d'autre choix que de voter contre ce projet de loi.

M. VEILLEUX: Le député de Beauce a pensé à moi.

M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de Chicoutimi.

M. Jean-Noël Tremblay

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le projet de loi qui nous est présenté à l'heure actuelle veut être un geste qui indique la volonté du gouvernement de procéder à une planification de l'administration à tous les paliers sur l'ensemble du territoire du Québec. L'objectif de ce projet de loi est certainement louable en soi, mais on peut se poser la question suivante: Est-ce que le gouvernement procède, à l'heure actuelle, dans un ordre logique ou s'il ne met pas plutôt la charrue devant les boeufs?

Le projet de loi no 276 s'intitule Loi favorisant le regroupement des municipalités. L'intention est donc formellement marquée, et je ne crois pas que nous puissions avoir d'objection à une telle volonté du gouvernement. Il s'agit, au fait, d'établir un ensemble de structures, de créer, par la suite, des mécanismes qui s'intégreront dans le cadre de ces structures, afin de coordonner l'activité des diverses municipalités que l'on veut regrouper à des fins d'amélioration, d'accroissement des services, de création de services là où lesdits services n'existent pas.

Le projet de loi vise aussi — ce n'y est peut-être pas explicitement déclaré — à établir une planification dans l'ordre du financement des municipalités. Il reste cependant que, tel que libellé, le projet de loi ne nous fournit pas les renseignements que nous serions en droit d'exiger du ministre pour comprendre exactement la portée du projet de loi, les intentions du ministre et les étapes des politiques qu'il entend mettre de l'avant dans l'organisation municipale du Québec. On parle, dans les notes explicatives du projet de loi, de regroupement par unité. On dit ceci: Ce projet autorise le ministre des Affaires municipales à établir des unités de regroupement pouvant comprendre les municipalités tant urbaines que rurales. A la demande de la moitié des conseils municipaux des municipalités de l'unité, représentant 50 p.c. de la population globale de l'unité, le gouvernement pourra approuver la fusion des municipalités de l'unité.

Or, je crois que c'est dans ce paragraphe des notes explicatives qu'est posé le vrai problème. Qu'est-ce que seront exactement ces unités? A quoi correspondront-elles? Je présume que le ministre a déjà à l'esprit un organigramme, qu'il a déjà dans ses dossiers, une carte, qu'il a déjà défini les frontières de ce qu'il appelle, dans les notes explicatives du projet de loi, les unités de regroupement. Ces unités ne peuvent exister qu'à partir du moment où existent, entre les diverses composantes, des affinités économiques, des affinités sociales, des affinités qui tiennent aux besoins de ces diverses unités, de ces diverses constituantes et qui les forcent à former ce que les notes explicatives du projet de loi décrivent comme étant des unités de regroupement.

Mais pourquoi le ministre, en nous présentant ce texte de loi, ne nous a-t-il pas fourni les documents qui nous permettraient de voir comment ces unités peuvent être déterminées, comment les frontières de ces unités peuvent être établies pour que le regroupement dont il parle devienne une chose naturelle, une chose qui corresponde vraiment à des exigences locales déterminées et apparaissant à l'évidence dans les milieux qui formeront les unités de regroupement dont parle le projet de loi?

M. le Président, on a dit tout à l'heure — celui qui vous a précédé au fauteuil a alors interrompu le député de Beauce — qu'il n'était pas question ici de discuter de la fiscalité municipale. Je suis d'accord, et je ne veux pas engager le débat sur ce terrain, mais il reste que le regroupement des municipalités va nécessairement entraîner un réaménagement de la fiscalité municipale.

On s'en occupe à l'heure actuelle, on y travaille. Etant donné l'aspect primordial de la fiscalité municipale au regard de la loi que nous étudions actuellement, je me demande pourquoi le ministre n'a pas attendu que nous ayons entre les mains ce rapport sur la fiscalité municipale afin de voir comment exactement les structures qu'il nous propose, qu'il entend créer par son projet de loi entraîneront des

dépenses et comment elles modifieront les mécanismes de la fiscalité municipale. Pourquoi le ministre ne nous a-t-il pas présenté, d'abord, ce rapport afin que nous puissions tout de suite découvrir que ce qu'il propose va fonctionner normalement parce que cela répondra à des besoins que déjà le rapport sur la fiscalité municipale aura établis?

Il y a quelques mois déjà, j'avais interrogé le ministre des Affaires municipales — c'était précisément le 12 août 1971, alors que nous étudIlons le livre blanc sur la réforme des structures municipales — sur le rôle que seraient appelés à jouer les conseils de comté.

Il y a quelques semaines, à l'occasion d'une séance de la commission parlementaire des Affaires municipales, qui étudiait le projet de loi 48, j'ai rappelé au ministre la déclaration qu'il avait faite où il indiquait l'intention éventuelle du gouvernement de donner plus de pouvoirs aux conseils de comté. Cela m'avait amené à lui demander: Est-ce qu'en même temps vous allez leur donner également plus de moyens financiers? Le ministre m'avait répondu, à ce moment-là, soit le 12 août 1971 — cela se retrouve à la page B/3548 du rapport de la commission parlementaire —: "Nous ne pouvons pas vous donner de renseignements avant que d'avoir reçu ce rapport sur la fiscalité municipale."

Au moment où je lui rappelais cette déclaration, il y a quelques semaines, en commission parlementaire, le ministre m'a dit: Je n'ai jamais dit cela. Je serais extrêmement heureux que le député de Chicoutimi me donne la preuve que j'ai bien fait telle déclaration.

Je prierais le ministre de s'en rapporter à la page B/3548 du rapport de la commission qui a étudié le livre blanc sur la réforme des structures municipales, le 12 août 1971, où le ministre me disait ceci: "M. Tessier: Il n'y a pas de contradiction entre les pouvoirs qui sont requis par les conseils de comté et ceux qui peuvent être incorporés dans le projet de loi-cadre des communautés municipales. Il s'agit maintenant, en face de ces recommandations et suggestions, de les étudier en profondeur, d'en discuter avec l'Union des conseils de comté pour voir s'il n'y aurait pas lieu d'apporter certains amendements à la Loi des conseils de comté pour étendre les pouvoirs des conseils de comté."

Ce qui m'avait incité, je le répète, à lui demander s'il accorderait en même temps des pouvoirs additionnels dans le domaine financier aux conseils de comté et le ministre m'avait répondu — je le reprends encore une fois — que le rapport sur la fiscalité municipale permettrait au gouvernement d'annoncer si oui ou non lesdits conseils de comté obtiendraient des pouvoirs financiers accrus.

Si je fais cette précision, c'est que le ministre avait jeté les hauts cris et qu'il avait déclaré que ce que j'avançais alors à la séance de la commission des Affaires municipales n'était pas exact, qu'il n'avait pas fait telle déclaration. Je fais donc la mise au point afin que le ministre se souvienne de ce qu'il avait dit. Si j'insiste là-dessus, c'est que dans le projet de loi qu'il nous propose, il n'est pas question des conseils de comté. Or, le ministre ayant déclaré que les conseils de comté auront très probablement des pouvoirs accrus, il est important de savoir quels sont les moyens financiers qu'il mettra à la disposition des municipalités et à la disposition des conseils de comté. A moins que le ministre n'ait décidé d'abolir les conseils de comté, ce qui serait évidemment un recul très net sur ce qu'il a déclaré, affirmé à l'Union des conseils de comtés. Ce qui serait, en somme, une dénégation des propos qu'il a tenus en les assurant que non seulement ils ne seraient pas abolis mais qu'ils auraient des pouvoirs additionnels.

Il y a aussi un autre problème qui m'inquiète et qui m'a incité à prendre la parole cet après-midi. Est-ce que le ministre a examiné de façon très nette, de façon très précise, très minutieuse le découpage éventuel de la carte du Québec aux fins d'établir ce qu'il appelle les unités de regroupement? Il y a évidemment dans toutes les régions du Québec des pôles naturels d'attractions. Il est bien clair que, dans une région comme la mienne, des villes comme Chicoutimi, Jonquière, Arvida, Kénogami, les villes de Chicoutimi-Nord, Bagotville, Port-Alfred, Grande-Baie constituent des unités naturelles de regroupement. Mais il reste qu'il y a, gravitant autour de ces pôles normaux d'attraction, un ensemble de petites municipalités qui en sont fort éloignées. Qu'on songe simplement à la distance qu'il y a entre l'Anse Saint-Jean et cette agglomération qu'on appelle communément, chez nous, la Baie. Prenons, par exemple, le comté de Roberval. Il y a des pôles d'attraction: Dolbeau, Mistassini, Normandin, Saint-Félicien, Roberval...

M. HARVEY (Jonquière): Il ne faut pas comparer cela au Saguenay.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le député de Jonquière dit qu'on ne peut pas comparer cela au Saguenay. Il aura l'occasion de le dire, d'en parler et de donner son point de vue. Je serai heureux de l'entendre là-dessus, parce qu'il est intéressé comme moi...

M. HARVEY (Jonquière): Est-ce que le député de Chicoutimi me permettrait une question?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, je veux bien.

M. HARVEY (Jonquière): Est-ce que, dans les explications que le député de Chicoutimi donne à cette Chambre, explications qui sont vraiment nécessaires, il tente de faire un parallèle d'unités possibles de regroupement entre les petites municipalités qu'il y a près de la

conurbation du haut Saguenay en comparant cette unité naturelle de regroupement avec une province, au point de vue territorial, qu'il est le comté de Roberval?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Justement, c'est là le problème.

M. HARVEY (Jonquière): Je vous écoute.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Comme le ministre ne nous en a pas parlé, j'ai parlé tout à l'heure du découpage de la carte. J'ai parlé de la nécessité de définir, par le moyen de la présentation d'une carte qui aurait dû être jointe à ce projet de loi, le territoire afin qu'on sache exactement où se trouvent les unités de regroupement. Dans le cas de ce qu'on appelle chez nous le haut Saguenay, le problème ne se pose pas de la même façon.

Mais le député de Jonquière a raison de dire que le comté de Roberval, c'est un peu comme une sorte de province, c'est un peu comme le comté de Saguenay, c'est un peu comme le comté de Duplessis. Or, le ministre ne nous fournit pas d'indication en ce qui concerne des régions comme celle de Roberval. Prenez les pôles d'attraction que j'énumérais tout à l'heure: Dolbeau, Mistassini, Roberval, Saint-Félicien; cependant, il y a toutes les municipalités situées autour du lac Saint-Jean mais qui se trouvent dans les terres à des distances assez considérables, quelquefois 20 milles, quelquefois 25 milles. Qu'on prenne, par exemple, les villages qui gravitent autour de ce village qui s'appelle Chambord et qui est à 13 milles de Roberval. Vous avez la ville de Roberval, vous avez Chambord. Vous avez Sainte-Hedwidge, qui est à 7 milles. Cela, c'est un peu plus facile. Vous avez, d'autre part, Saint-Prime; cela peut aller du côté de Saint-Félicien, d'accord. Vous avez Pointe-Bleue, il y a une partie qui est la réserve de Pointe-Bleue mais il y a une partie qui est Roberval paroisse. Vous avez ensuite les villages de Saint-François, le lac Bouchette. Le lac Bouchette est à 18 milles de Chambord et Chambord est déjà à 13 milles de Roberval. Vous avez ensuite Saint-François-de-Sales et Saint-André. Simplement ce petit point-là est suffisamment important, en ce qui nous concerne, nous qui connaissons la région, pour demander au ministre de nous dire comment il va, géographiquement, déterminer les unités de regroupement et permettre aux municipalités, à tous les citoyens intéressés et à ceux qui sont responsables des municipalités, c'est-à-dire les maires et les conseillers municipaux, d'accepter d'emblée le projet de loi que propose le ministre.

Je comprends, en cela je vais faire la part des choses, que ce projet de loi va déranger des habitudes, va contrarier, si vous voulez, un certain chauvinisme, un certain esprit de clocher. Cela, je ne veux pas en tenir compte. Si on parle de planification à l'échelle du Québec, je suis d'accord qu'une loi soit présentée même si elle vient contrarier certaines habitudes et si elle vient choquer certain esprit de clocher. Mais il reste qu'une planification comme celle-là doit être conçue de façon à répondre à des besoins, de façon à donner des services mais à les donner dans un cadre qui soit naturel, qui soit normal et qui n'entraîne pas de dépenses extraordinaires.

M. le Président, quand le ministre nous disait, tout à l'heure — il avait raison — que le projet de loi ne porte pas sur la fiscalité municipale, il devrait quand même admettre, en même temps, que ce regroupement va exiger un examen très approfondi de tout le problème de la fiscalité municipale. L'objectif qu'il veut atteindre d'un regroupement volontaire, d'un regroupement par unités de municipalité de ville ou de municipalité rurale ne sera accepté que dans la mesure où les responsables des municipalités, soit les municipalités de ville ou les municipalités de campagne, seront capables de voir qu'il est possible d'obtenir plus de services à un coût moindre ou d'obtenir des services qui vont coûter très cher et qu'ils accepteront d'organiser ou de laisser organiser, à condition que le ministre déclare tout de suite, ou tout au moins dans les plus brefs délais, quelle est l'intention du gouvernement en ce qui concerne les barèmes qui serviront à établir les subventions dont auront fatalement besoin ces municipalités qui seront regroupées à des fins de services.

Je ne suis pas, personnellement, un expert en droit municipal. Je ne suis pas un expert en questions municipales. Mais je vis quand même dans un territoire où il y a multiplicité d'entités municipales. Les groupes municipaux viennent me voir régulièrement, me posent les problèmes. J'en signalais un encore au ministre au cours du débat avant le déjeuner. Je lui signalais le cas de la paroisse de Chicoutimi, par exemple, qui a un problème de service d'eau et d'aqueduc.

C'est un problème qui pourra se régler, et je sais que le ministre va le régler à la satisfaction des citoyens, selon d'ailleurs une promesse qu'a faite le député de Jonquière à ce sujet.

M. HARVEY (Jonquière): M. le Président, j'invoque mon privilège de député. Le député de Jonquière n'a jamais fait de promesse aux dirigeants de la paroisse de Chicoutimi, si ce n'est celle d'être toujours disponible pour tous citoyens afin de renvendiquer ce qui leur revient de droit de la part de chacun des ministères de l'administration provinciale.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

Exerçant toujours une absolue objectivité quel que soit le côté de la Chambre en présence, je suis dans l'obligation de dire à l'honorable ministre du Revenu, député de Jonquière, que ce n'est pas une question de privilège qu'il soulève. Il veut rétablir les faits, ce qu'il aura droit de faire en vertu du règlement lorsque l'honorable député de Chicoutimi aura terminé son intervention.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, M. le Président, je ne veux pas insister sur cette promesse solennelle ou secrète qu'a faite le député de Jonquière — les représentants de la paroisse de Chicoutimi me l'ont confirmé encore ce matin — à cette municipalité et je n'insisterai pas non plus sur le fait qu'on les aurait menacés d'être pénalisés s'ils ne signaient pas une requête pour que l'édifice administratif régional soit construit à Jonquière. Enfin, le député de Jonquière pourra s'expliquer là-dessus, comme vous l'avez dit. Alors, je reviens à ceci, en disant que les municipalités, à des fins de services, pour de meilleurs services, pour la création de services qu'elles n'ont pas, accepteront de se regrouper à la condition que le ministre leur dise de quelle façon elles vont pouvoir le faire financièrement. Pour cela, il faut que le ministre nous dise quels seront les barèmes qui serviront à déterminer les subventions à des fins de regroupement pour les services, etc.

La loi, telle qu'elle est présentée — et je ne veux pas insister davantage — me parait, dans son principe, valable. Mais, parce qu'elle prend le problème par la fin et parce que le ministre ne nous a pas fourni des renseignements qui nous permettraient de comprendre l'ensemble de la structure et la façon dont cette structure va s'intégrer dans le cadre d'une planification municipale, en raison de toutes ces absences, nous nous posons la question, savoir si c'est une loi valable. Si on ne procède pas encore une fois dans ce domaine, comme en bien d'autres, à la pièce, si on ne fait pas de la législation à la petite semaine en créant des structures sans nous dire ce qu'il y aura dedans et sans nous dire comment ces structures vont s'intégrer à d'autres structures et s'articuler à un mécanisme général qui doit être celui de la planification du Québec.

Ainsi donc, j'attendrai la réplique du ministre. Je lui demande de nous fournir des renseignements sur le découpage de la carte, sur les critères qui vont servir à établir les unités de regroupement, sur les critères qui vont servir aussi à financer ces regroupements de municipalités. J'attends ces renseignements du ministre avant de dire que je lui donne mon appui plein et entier, avant de lui dire que je vais accepter même le principe du projet de loi qui — je l'ai dit tout à l'heure — est bon in se, mais une chose peut être bonne in se, mais devenir mauvaise à partir du moment où on la met en application dans un cadre déterminé. Parce qu'il faut ici distinguer entre l'aspect essentiel et l'aspect opérationel.

Ce que le ministre nous propose dans son projet de loi, c'est l'essence d'un regroupement municipal, mais il ne nous a pas présenté les éléments qui nous permettraient de voir comment se fera l'opération. A l'aspect opérationnel, le ministre n'a pas touché, il ne nous a pas fourni suffisamment d'indications pour que nous puissions, en toute objectivité, accepter un projet de loi aussi incomplet que celui qu'il voudrait nous voir adopter cet après-midi.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre du Revenu.

M. Gérald Harvey

M. HARVEY (Jonquière): M. le Président, j'ai entendu avec beaucoup d'intérêt les arguments et les explications que donnait, sur la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, le député de Chicoutimi, il y a quelques instants.

Moi, je me réjouis aujourd'hui du fait que, par le bill 276, on cesse de jouer, dans le domaine du développement municipal et, surtout du regroupement municipal, le jeu d'hypocrisie des mariages de raison ou des mariages d'amour. Ce bill permet au ministre des Affaires municipales de faire le regroupement dans des secteurs où c'est absolument nécessaire pour faire face à de grands problèmes, comme celui du développement industriel ou du développement tout court du territoire au point de vue de l'urbanisme.

Aucune des villes, si elle est seule, ne peut développer son territoire actuellement. Il y a — ça se voit à l'oeil dans le Québec — des agglomérations comme Trois-Rivières-Cap-de-la-Madeleine, Rouyn-Noranda et la conurbation, du Haut Saguenay: Jonquière-Kénogami-Arvida, Chicoutimi, Rivière-du-Moulin, Chicoutimi (paroisse). Depuis dix ans, tout le monde crie et chante qu'il est pour le regroupement. Lorsque des municipalités individuellement tentent de regrouper un service à un meilleur coût pour les contribuables, on voit, pour des raisons qui diffèrent les unes des autres, certaines municipalités qui refusent d'emboîter le pas au niveau des services.

Par ce pouvoir que possède maintenant, dans le projet de loi, le ministre des Affaires municipales, s'il y va de l'intérêt public, de décréter certaines études de territoires, nous aurons, au moins par cette étude conjointe des municipalités concernées dans l'unité de regroupement, un rapport bien fait, réétudié par la Commission municipale. Le problème deviendra l'affaire des citoyens et non d'un conseil municipal en particulier qui, avec raison et selon son mandat, a présentement des intérêts particuliers de survivance à sauvegarder.

Les obligations nouvelles qu'ont maintenant les municipalités nécessiteront des mises de fonds. Nous voyons, encore là, dans le projet de loi, une politique beaucoup plus intelligente qui va faire en sorte qu'une ville qui fait un regroupement normal, mais dont la situation financière est excellente, va bénéficier de subventions de l'Etat d'une façon moins accélérée qu'une autre qui est dans une situation financière difficile.

Nous retrouvons également, dans ce projet de loi, une disposition qui permet, dès que les études préalables des procédures de regroupe-

ment ou de fusion commencent, une surveillance par la Commission municipale des opérations ou des gestes posés par les conseils respectifs des municipalités comprises dans l'unité de regroupement.

On connaît les deux regroupements massifs qu'il y a eu dans le Québec. Il y en a eu un, il y a quelques années, dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Ce regroupement a permis de faire une nouvelle ville qu'on appelle la ville d'Alma. Tous se réjouissent, depuis plusieurs années, de voir que ce regroupement a eu lieu. Nous en avions parlé pendant quinze ans et nous n'avons pas attendu un bill comme celui-là pour faire le regroupement. Pourquoi? Parce que les unités à regrouper étaient très petites et que très peu de citoyens pouvaient contester. Cela s'est avéré un succès.

Ville de Laval, dans le Québec. Si ce droit de surveillance avait existé, Laval, qui est un succès aujourd'hui aurait été un triple succès quand on revoit à fond le dossier des opérations et des décisions qui ont été prises à partir du moment où on a commencé à parler de faire ville de Laval jusqu'au moment où le bill, en définitive l'a créé.

Partant de l'expérience vécue dans le regroupement municipal depuis plusieurs années, le ministre des Affaires municipales, entouré de conseillers judicieux, nous présente une loi qui pourrait, comme le dit le député de Chicoutimi, comprendre une carte. Mais quelle carte? Une carte qui porterait à confusion. Les endroits où l'intérêt public commande le regroupement seront déterminés par le ministre, qui permettra, dans ces secteurs, une étude objective conjointe avec les municipalités comprises dans l'unité de regroupement. Par la suite, la Commission municipale, à qui, pour une fois, on fait jouer un rôle vraiment important vis-à-vis des citoyens concernés, les contribuables, verra elle à tenir sur place des audiences publiques qui permettront de connaître les avantages et les désavantages d'un tel regroupement.

Et, si nécessaire, la commission recommandera au ministre des Affaires municipales, pour y aller d'une façon démocratique, permettra même le référendum à l'intérieur de cette unité de regroupement. Je pense, M. le Président, qu'encore là, dans ce domaine du regroupement municipal ou de politiques de développement municipal au Québec, nous avons, avec le bill 276, un bill qui nous permet d'atteindre nos objectifs de regroupement intelligent du territoire et de l'infrastructure municipale dans une période beaucoup plus courte que celle qui était prévue dans les anciennes lois.

Je pense que le ministre des Affaires municipales mérite nos félicitations. Et je désire vivement que, dans notre région surtout, les villes comprises dans la conurbation du Haut-Saguenay transmettent, dans les plus brefs délais, une demande pour faire étudier à fond cette question, pour voir s'il y a moyen, dans une étape préalable à l'établissement d'une magnifique ville, procéder à un regroupement naturel, avec les bénéfices que comportent les charges additionnelles du regroupement.

On dira, M. le Président, que regrouper va coûter des millions. Mais si on retourne dans le passé, chez nous, dans le territoire de la ville d'Alma, ç'a coûté, pour le regroupement, $210,000, mais il faut bien se comprendre, c'est parce qu'on a bâti un système d'informatique et de comptabilité unifiée, système qui, à lui seul, a coûté près de $150,000 aux fins de créer cette magnifique ville où il y a de l'harmonie et où les contribuables, au lieu de se chicaner pour leur petit clocher, parlent depuis quelques années des points cardinaux, laissant le sud, le nord, l'ouest. Au lieu, comme autrefois, d'entendre parler de la chapelle de l'île Maligne, du paradis terrestre de Riverbend, on entend parler du grand Alma, et cette ville est en train de prouver aux gens du Saguenay-Lac-Saint-Jean qu'elle est une des villes les plus prospères de notre territoire parce qu'on a su, en temps opportun, regrouper les énergies. De cimetière d'énergies qu'Aima était autrefois, elle est devenue un catalyseur d'énergies dans le Lac-Saint-Jean et fait l'admiration des autres pôles d'attraction comme Chicoutimi, Jonquière et la Baie des Ha! Ha!

M. le Président...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, est-ce que le ministre me permettrait une question?

M. HARVEY (Jonquière): Certainement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que le ministre voudrait dire à la Chambre que l'une des premières personnes responsables du regroupement merveilleux de la ville d'Alma, avant qu'il y eût une loi de fusion des municipalités, c'est l'ancien député, notre collègue, M. Léonce Desmeules?

M. HARVEY (Jonquière): Pour rafraîchir la mémoire...

M. PILOTE: Sur une question de privilège, pour répondre à la question du député de Chicoutimi...

M. HARVEY (Jonquière): J'ai dit: une des premières personnes.

M. PILOTE: ... Ce n'est pas l'ancien député M. Léonce Desmeules qui est responsable de la fusion, c'était bien M. Paul-Emile Harvey, maire d'Alma dans le temps.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Avec M. Léonce Desmeules.

M. HARVEY (Jonquière): M. le Président, on va raccourcir l'histoire, il est bien vrai...

M. LE PRESIDENT: Les mérites de tous les gens de la région du Lac-Saint-Jean étant connus, je demanderais au ministre du Revenu de continuer.

M. HARVEY (Jonquière): C'est bien vrai, M. le Président...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le président, M. Harvey, était aussi un homme de l'Union Nationale.

M. HARVEY (Jonquière): Il est bien vrai, M. le Président, que bien des gens, dans le secteur d'Alma, durant une période de dix ans, ont préconisé ce regroupement.

Et celui qu'a nommé le député de Chicoutimi, M. Léonce Desmeules qui a oeuvré, pendant des années et des années, dans le Parti libéral avant d'être, ici en cette Chambre, élu sous l'étiquette de l'Union Nationale après avoir voté, pour la première fois de sa vie, pour ce parti et pour lui-même. C'est vrai qu'il était parmi ceux qui appuyaient M. Collard, le député qui avait eu le courage de présenter à ce moment-là un bill privé regroupant la ville d'Alma.

Il reste un fait: le regroupement a permis à ce secteur de se développer avec harmonie et intelligence de sorte qu'aujourd'hui la ville d'Alma, pour un investisseur, est devenue un territoire où il y a un rôle d'évaluation, où il y a un centre de décision et où les problèmes locaux, au lieu de se régler en catimini, au lieu de se régler par du "lobbying" auprès de gouvernements supérieurs, se règlent au niveau du seul et unique conseil municipal. Les investisseurs aiment avoir un dialogue avec une personne et non être assujettis à toutes sortes d'ententes en dessous de la table, situation qu'élimine effectivement le bill 48, que nous discuterons la semaine prochaine.

Bien sûr, dans le territoire du haut Saguenay il y aura ce problème des petites municipalités qui nous rapproche du comté de Charlevoix. Je pense, tout comme ceux qui veulent le développement et le regroupement municipal, qu'il y a lieu, le plus rapidement possible, sans bouder le progrès, de demander au ministre des Affaires municipales — qu'on soit maire de la ville de Chicoutimi, de Chicoutimi-Nord, de Jonquière, d'Arvida, de Kénogami ou de la Baie-des-Ha! Ha! — une étude pour permettre de bien voir comment on peut, d'une façon rationnelle, faire ce regroupement indispensable afin de donner au pôle de croissance naturelle du haut Saguenay cette force dont il a besoin pour son développement industriel, cette force dont il a besoin pour un rôle d'évaluation unifié, un développement intelligent au niveau de l'urbanisme pour le plus grand bien des citoyens du Saguenay.

Je voterai donc, avec plaisir, en faveur du bill 276 de mon collègue.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Maskinongé.

M. Rémi Paul

M. PAUL: M. le Président, c'est la première fois que je vois un ministre blâmer d'une façon aussi astucieuse, par le biais, la présentation d'un projet de loi. J'ai écouté avec intérêt le ministre du Revenu, qui nous a parlé avec emphase des avantages de la fusion de la ville d'Alma. Il nous a cité le cas de Laval et d'une autre municipalité dont le nom m'échappe.

Je suis sûr que, par modestie, il n'a pas osé parler de la fusion de Saint-Hubert, de Jacques-Cartier, de Lachine, de Lemoyne et de combien d'autres au Québec. Du même coup, l'honorable ministre du Revenu a vanté les avantages du chapitre 56, Loi de la fusion volontaire des municipalités. Durant son discours, il nous a parlé des avantages des fusions, des pôles économiques que ces fusions créent, du dynamisme que l'on rencontre chez ces gens qui, enfin, communient au même désir de progrès et de développement économico-social. Dans les circonstances, si la fusion est tellement avantageuse, pourquoi, à l'aide du bill 276, rayer de nos statuts le chapitre 56, Loi de la fusion volontaire des municipalités?

Je suis sûr que le ministre n'y a pas pensé. Le ministre a oublié qu'il y avait des moyens mis à la disposition des municipalités actuellement pour répondre à tous ces objectifs et atteindre les résultats dont il nous a fait part. Le ministre, parrain de cette loi, mérite beaucoup de sympathie. Tous se rappellent quel avait été le renversement de la population, l'émoi qu'avait créé, dans la population, la production de "mon" livre blanc.

A l'époque, c'était l'euphorie chez les administrateurs municipaux. Enfin, la planche de salut leur était apportée par un ministre supposément dynamique, clairvoyant et efficace.

Il voulait à tout prix que les municipalités, les directeurs, les officiers de nos municipalités, les secrétaires trésoriers, les maires, les conseillers se réunissent pour étudier les problèmes municipaux au Québec.

Fin d'avril, grande conférence municipale. Déception du même coup parce que les municipalités se sont arrêtées aux implications fiscales, aux problèmes économiques, aux difficultés de financement qu'elles connaissaient dans l'administration.

Première retraite stratégique du ministre. Il repart à la conquête du territoire du Québec, rencontres par-dessus rencontres. Il nous disait, hier, qu'il avait rencontré 400 conseils municipaux, cela c'est de la démocratie et je félicite le ministre pour l'intérêt avec lequel il s'est penché sur les problèmes des municipalités.

Le ministre a rencontré les directeurs, les officiers, les conseils exécutifs des communautés urbaines. Il a rencontré l'exécutif de la

Communauté urbaine de Montréal, de celle de Québec et de celle de l'Outaouais. Premier résultat, première conclusion, la communauté municipale n'est pas le meilleur moyen pour créer un esprit communautaire.

Voilà une déclaration sensationnelle de la part du ministre.

Alors, il s'agissait donc d'instaurer une nouvelle politique. La politique de fusion, selon ce qu'il nous a dit hier soir dans son discours de deuxième lecture, n'avait pas apporté les résultats espérés. D'ailleurs, tout cela a été confirmé cet après-midi par le brillant discours du ministre du Revenu. Il n'a parlé que des avantages des fusions qui se sont produites par le mécanisme de la loi existante du chapitre 56 de la Loi des fusions volontaires des municipalités.

M. HARVEY (Jonquière): M. le Président, le député de Maskinongé me permettrait-il de faire une petite nuance? Des villes ont été regroupées en vertu de la Loi des fusions volontaires, c'est le cas de Saint-Hubert. Et c'est tellement récent, puisque j'agissais alors comme ministre par intérim des Affaires municipales, que nous ne pouvons même pas encore palper les résultats. Mais lorsque j'ai cité la ville d'Alma, ce regroupement n'a pas eu lieu en vertu de la loi du regroupement volontaire mais bien par un bill privé, après dix ans de tractations et d'espérance des citoyens d'avoir enfin une unité municipale cohérente. Je voudrais qu'il fasse la différence entre le cas de Saint-Hubert qu'il a mentionné, dont on ne peut pas palper les résultats et le regroupement d'Alma, par voie de bill privé, ce qui est complètement différent du chapitre 56.

M. PAUL: M. le Président, comme le ministre s'est prévalu des dispositions de l'article 257, il me permettra sans doute de continuer mon discours.

M. HARVEY (Jonquière): Je n'ai plus le droit de parole. Je veux être sûr que le député a bien compris mes remarques.

M. PAUL: Alors je vous répondrai, non pas par la bouche de mon canon, mais je vous répondrai: Laval. C'est ça la Loi actuelle des fusions volontaires, nous en avons apprécié les résultats et l'efficacité. Mais le ministre, hier soir, devant le résultat quelque peu décevant des communautés urbaines, devant la déception qu'apporte l'application de la Loi des fusions volontaires, nous a dit? Je me crois donc justifié de présenter une nouvelle loi, le projet de loi 276, Loi favorisant le regroupement des municipalités.

On trouve dans cette loi des mesures incita-trices et, hélas! des mesures coercitives. Où la loi trouve-t-elle son application au départ? C'est beau, dans la loi, de parler d'unités de regroupement. Combien y en aura-t-il? Quelle a été l'analyse qui a été faite de tout ce problème de regroupement d'unités municipales? Le ministre nous a dit que l'inventaire n'avait pas encore été fait. On nous demande d'adopter un projet de loi sans connaître comment, par la suite, on pourra appliquer ce projet de loi. Cependant, il y aura des pouvoirs extrêmement dangereux dans la loi, où on lit que le ministre peut modifier les limites des unités de regroupement et peut les fusionner les unes avec les autres si elles sont contiguës.

Le ministre des Affaires municipales, au soutien de son argumentation de deuxième lecture du projet de loi, nous dit que l'Union des municipalités approuve ce projet de loi. D'ailleurs, il a cité au texte les deux lignes suivantes du mémoire annuel présenté à l'honorable Maurice Tessier par l'Union des conseils de comté en décembre 1970. Il est dit: "La politique que nous favorisons en vue d'établir des secteurs municipaux viables est celle des regroupements." Mais le ministre est tellement pressé qu'il n'a pas lu tout le paragraphe. Je ne lui en fais pas de reproche, mais je vois, au fur et à mesure que le débat se déroule, la tragédie sur les figures des députés des comtés ruraux qui se demandent comment il se fait qu'ils n'ont pas été informés de ce projet de loi. Une fois de plus, on les invite à faire confiance à un ministre. Ils réalisent aujourd'hui tous les dangers que va présenter ce projet de loi dans son application.

Je sais que beaucoup de députés s'interrogent aux fins de savoir si le ministre des Affaires municipales a cité tout le texte de l'Union des conseils de comté. Je continue: "Le gouvernement du Québec devrait donc les favoriser en prenant bien soin qu'ils se fassent en tenant compte de tous les éléments susceptibles de mettre sur pied un système efficace et humain. "b) Ces regroupements pourraient se faire en donnant aux municipalités de paroisse et de village un délai de deux ans pour procéder. Sinon, on s'adresse à Sa Seigneurie, le ministre des Affaires municipales". Et on continue. "Votre gouvernement pourrait le faire automatiquement." Le ministre a trouvé cela tellement bon l'autorité qu'on voulait lui confier, qu'il vous met les deux ans de côté; il les sape à la base. Nous retrouvons le texte que je vous ai lu tout à l'heure. "Il s'agit évidemment pour nous de prévoir des mesures incitatrices afin d'amener paroisses et village à se regrouper." Paroisses au pluriel et village au singulier. Voilà l'attitude de l'Union des conseils de comtés. L'Union des conseils de comtés est pour le regroupement, mais à une condition. Dans un délai de deux ans et, après, le ministre pourrait agir. Ce n'est pas tout à fait ce que le ministre nous a dit hier soir. Le ministre nous a dit que l'Union des conseils de comté et l'Union des municipalités approuvaient le projet mais avec certaines modalités. Car, dans la mise en marche du mécanisme de regroupement, il faut tenir plus particulièrement compte des faits suivants: 1) la représentation de nos milieux ruraux.

"Nous ne croyons pas qu'il serait souhaitable — écoutez bien cela, mes chers collègues qui représentez des collèges électoraux à caractère rural ou à prédominance rurale — de viser à créer deux blocs ruraux et urbains qui s'opposeraient à coeur d'année. Ce serait créer un terrain de bataille continuelle. Nous croyons préférable de bien analyser le problème en cause et d'amener les urbains et les ruraux à faire les concessions nécessaires pour qu'ils puissent travailler ensemble à créer et à faire fonctionner les nouveaux organismes. "Chacun des regroupements devra, de plus, être étudié sérieusement." Chacun des regroupements, c'est bien dit. "C'est donc dire que chaque regroupement présentera des aspects différents au point de vue économique, au point de vue de régionalisation ou de "communisation" de services afin qu'ils ne constituent pas un simple transfert du fardeau fiscal de certaines personnes à d'autres." C'est pourquoi mon collègue, le député de Chicoutimi, a insisté, avec raison, sur cet aspect de la fiscalité municipale consécutif au regroupement que voudrait nous faire adopter le ministre par son projet de loi no 276. "En somme, il s'agit de voir la réalité en face et non pas de cacher aux contribuables les taxes qu'ils pourraient assumer dans un tel organisme. Une étude devrait être faite dans chacun des cas afin de savoir quels sont les actifs des municipalités en présence et comment sera établi le fardeau fiscal lors de la création de la nouvelle municipalité."

C'est grandement différent, M. le Président, de ce que nous disait, hier soir, le ministre. Je ne lui en fais pas un reproche. Il n'a pas eu le temps de consulter ou de lire tout le texte du mémoire que lui avait présenté l'Union des conseils de comté ou il est resté traumatisé par les premières phrases.

M. PARENT: Les conclusions?

M.PAUL: Pardon?

M. PARENT: Les conclusions?

M. PAUL: J'y arrive. Voici, M. le Président, que mon bon ami, le ministre d'Etat et député de Hull, est frappé par les conclusions qui sont les suivantes: "Une telle politique de regroupement exige, évidemment, une modification en profondeur de la législation." C'est cela le changement en profondeur dont on parle dans les conclusions? On nous offre un squelette de loi, un principe qui, en soi, est excellent, mais dont l'application va différer suivant que les corporations municipales concernées seront de caractère urbain ou de caractère rural. Je crois que le ministre a raison lorsqu'il parle de faire des regroupements urbains à l'intérieur des communautés urbaines. Je crois que le ministre a raison sous cet aspect, mais je me demande si le ministre n'aurait pas dû envisager... Je comprends qu'il est à mentalité urbaine. Il était maire de Rimouski; il n'a pas eu l'avantage de se familiariser avec les problèmes municipaux. Pour ma part, j'ai été conseiller juridique de quatorze municipalités avant d'entrer en politique. J'ai connu, un peu, les problèmes municipaux. Je n'ai pas eu l'avantage d'être professeur et de me lever pour faire de grandes déclarations de principe et dire au ministre: Je vous félicite, M. le ministre. Non, il s'agit de connaître les besoins municipaux.

Nous reprochons donc au ministre de ne pas prévoir de mécanismes différents pour un regroupement urbain et un regroupement municipal. C'est extrêmement dangereux. Je vais vous donner deux exemples qui vont vous frapper. Je ne serais pas surpris que vous ayez été victime, vous aussi, de cette centralisation administrative que prêche et que veut appliquer le gouvernement.

Lorsqu'il s'est agi de faire la distribution des subventions du Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux sports, on a été fort surpris d'apprendre que, là où on avait "communisé" les services des loisirs, les municipalités ont perdu leur subvention, lorsque la population de ces deux municipalités a dépassé 8,000 habitants.

Et je vais vous donner l'exemple de Louise-ville et Louiseville paroisse. L'ensemble de ces deux municipalités était de neuf mille et quelque cents dollars, neuf mille et quelques cents de population, excusez-moi si j'ai pour un moment pensé en créditiste. Je dis donc que le service des loisirs du Louiseville métropolitain a perdu toute subvention.

Qu'est-ce à dire de l'application de la politique du ministre de la Voirie dans les subventions pour l'entretien des chemins d'hiver? Autre pénalité à l'endroit des villes. Est-ce que l'on a pris le soin d'informer les municipalités des dangers d'un tel regroupement? Voilà deux points sur lesquels je voulais attirer l'attention des députés humbles, silencieux, cependant intelligents, du moins la très grande majorité de ceux qui siègent sur les banquettes du côté ministériel.

Vous allez, M. le Président, vous réveiller, pas vous parce que je sais que vous êtes toujours vigilant, mais il y a des députés qui vont se trouver "enfargés", gênés. Ils auront contribué à pénaliser leurs commettants sous prétexte qu'il fallait évoluer vers une centralisation administrative sous le couvert de l'efficacité ou de la bonne administration et des avantages que peut apporter le regroupement municipal.

Je dis que le regroupement municipal est excellent. J'écoutais mon bon ami, le député de Lafontaine, qui a parlé lui aussi avec une mentalité urbaine. Je ne le lui reproche pas, mais les problèmes sont très différents. Je sais que mon honorable ami, le député de Trois-Rivières, a lui aussi une mentalité urbaine. Il a Trois-Rivières, Trois-Rivières-Ouest et la ville du Cap-de-la-Madeleine. Il n'y aurait pas d'inconvénient à cet endroit que l'on fasse un regroupement urbain. Il y aurait même avantage, mais

comment concevoir — et chacun peut se lever et citer son comté en exemple — qu'à Saint-Guillaume, comté de Yamaska, nous allons fusionner cette municipalité avec le village de Yamaska? C'est impensable. La distance est trop grande. Les services ne pourront jamais être adéquats et dispensés à travers tout le territoire.

Le ministre aurait dû prévoir dans sa loi un mécanisme de regroupement différent lorsqu'il s'agit de regrouper des villes et lorsqu'il s'agit de regrouper des municipalités rurales. Nous aurions aimé avoir une carte — le député de Chicoutimi l'a signalé — comme le ministre de l'Education a fait lorsqu'il nous présenta le bill 27, la Loi du regroupement scolaire. Le ministre aurait pu nous donner un instrument de travail, d'information auprès de nos municipalités, convoquer des séances régionales d'information. Il est impossible de demander à l'honorable ministre de parcourir la province et d'aller dans chaque région, mais je suis sûr que d'excellents fonctionnaires de son ministère auraient pu tenir des séances d'information publiques et analyser sur place les avantages, la nécessité, l'opportunité d'un regroupement municipal.

Nous aurions aimé connaître du ministre quels seront les critères de base, les exigences du ministère, de la Commission municipale pour qu'une unité municipale soit créée. Non, c'est le silence complet. Nous aurions aimé avoir l'inventaire des municipalités. On aurait pu nous donner un avant-projet de la loi, convoquer la commission parlementaire.

Pourtant, le ministre aurait dû se rappeler l'exemple que nous lui donnons avec le projet de loi no 48, non pas que je veuille en parler, mais le ministre a réalisé qu'il fallait finalement référer ce projet de loi à la commission parlementaire des Affaires municipales. Or, de ces discussions, la lumière a jailli, puisque nous étudierons la semaine prochaine in camera des amendements au nombre d'au-delà de 100 pour améliorer le projet de loi no 48.

Si le ministre a retraité — ce n'est pas un reproche que je lui fais — à la suite de la présentation de son livre blanc, s'il a retraité au sujet du projet de loi no 48, alors que nous avions 35 articles de ce projet d'étudiés en comité plénier, c'est que le ministre, dans un esprit démocratique pour lequel nous devons le féliciter, a tout simplement reconnu le bien-fondé des représentations que lui avait faites l'Opposition.

Nous disons que ce projet de loi, qui devait être une réforme en profondeur, ne présente malheureusement que le caractère d'une loi rédigée à la hâte comme pour satisfaire une déclaration de principe faite par le ministre au cours de ses nombreuses allocutions. Je dis donc que ce projet de loi, à toutes fins utiles, présente des avantages pour les territoires urbains et des inconvénients dans les centres ruraux.

C'est pourquoi je dis que le ministre aurait dû agir avec beaucoup plus de prudence. Il aurait dû nous déclarer : Voilà un instrument de travail; durant l'intersession, nous convoquerons la commission parlementaire des Affaires municipales, nous entendrons les corps intéressés, nous envisagerons l'établissement ou la création d'unités municipales des terres de regroupement, un nombre déterminé, fixe, et par la suite nous présenterons un projet de loi.

C'est une loi qui pêche beaucoup plus par les désavantages qu'on y trouve que par les avantages qui visait le ministre. Et, je le répète, le principe de cette loi serait excellent, s'il était soutenu de modalités, de textes, de moyens efficaces pour rencontrer le principe visé par le projet de loi.

Quant à moi, je crains d'être dans l'obligation de voter contre ce projet de loi. Je me demande si, même, il ne devrait pas faire une étude complète de tous les arguments qui lui ont été soumis depuis le matin et qu'un peu plus tard, à une autre séance, il se lève et dise: J'ai à coeur le mieux-être, l'avantage, le progrès des municipalités, je veux à tout prix que les contribuables québécois soient entièrement satisfaits de mon administration, de mon passage — qui est très éphémère — à la tête du ministère des Affaires municipales. J'ai l'impression que lui aussi va être muté à quelque part dans le remaniement ministériel. Je sais qu'il y en a qui pourraient le remplacer avantageusement, comme lui pourrait dans un autre ministère remplacer d'autres ministres avantageusement.

Je sais que le ministre prendra en considération toutes les bonnes suggestions que nous lui avons faites, pour sa propre sécurité. Nous attendrons sa réplique pour prendre définitivement position quant à l'acceptation ou au refus, quant à nous, du principe de la loi que l'on retrouve dans le projet de loi no 276.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de L'Assomption.

M. Jean Perreault

M. PERREAULT: M. le Président, la très grande majorité des dirigeants de la société québécoise sont maintenant convaincus d'une nécessité de la réforme municipale en raison des très nombreux problèmes complexes qui se posent dans les municipalités d'aujourd'hui.

En effet, parmi ces problèmes auxquels les municipalités ont à faire face aujourd'hui, mentionnons un taux inégal de croissance économique se traduisant par le chômage, les problèmes d'habitation et de rénovation urbaines, la congestion de la circulation, la pollution de l'air et des eaux, le transport en commun, la disparition d'excellentes terres agricoles, la spéculation foncière, qui étouffe souvent le développement des municipalités, la destruction des unités de voisinage par l'établissement de bidonvilles, le manque de ressources financières pour

réaliser des programmes d'aménagement et d'équipement.

Pour résoudre ces problèmes, il nous faut une réforme des structures municipales. Deux notions bien distinctes ont été mises de l'avant pour opérer cette réforme. La première notion établit d'abord une régionalisation de certains pouvoirs municipaux résultant par la suite dans un programme de fusion de municipalités à l'intérieur de cette entité régionale. C'est la notion des experts et des technocrates. Pour eux, procéder par étapes, c'est retarder indéfiniment une décision qui est pressante. Ils se disent que les fusions seront longues à s'opérer si on en laisse le choix aux municipalités; qu'au contraire, elles viendront beaucoup plus vite et beaucoup plus rapidement, si on commence à mettre en place un gouvernement régional.

La deuxième notion s'établit d'abord sur le regroupement municipal et ne propose la régionalisation qu'une fois qu'on aura diminué considérablement le nombre de municipalités. Les tenants de cette option, un grand nombre d'administrateurs municipaux, soutiennent que, quoi qu'il y ait urgence de régionalisation, la communauté régionale ne doit pas être établie du jour au lendemain, mais résulter d'une collaboration graduelle entre municipalités.

Quant à moi, me basant sur l'expérience acquise dans le domaine municipal et le domaine de la promotion industrielle, à titre de vice-président de l'Union des municipalités pendant quelques années, je préconise une action parallèle sur les deux plans de la réforme municipale. Un regroupement de municipalités procédant de la loi de regroupement municipal, mais aussi une action de régionalisation procédant d'une refonte de la structure et des pouvoirs des conseils de comtés municipaux existants.

Je demande au ministre de procéder à une expérience pilote de régionalisation, dans la banlieue est de Montréal, soit dans le comté municipal de l'Assomption. Peu importe l'option choisie, dans cette réforme municipale, le problème fondamental qui se pose à nous est l'établissement de municipalités viables, dynamiques et financièrement stables. Le nouveau projet de loi qui remplace la Loi des fusions volontaires est supérieur à cette loi en ce sens qu'il y imprime un dynamisme, il la bonifie et consacre une initiative du ministère des Affaires municipales. La loi précédente ne facilitait pas cette initiative du ministre des Affaires municipales. Permettez-moi de citer ce paragraphe du discours du ministre: Si le ministre des Affaires municipales estime que l'intérêt public le justifie, il peut ordonner à toutes les municipalités comprises dans une unité de regroupement établie en consultation avec les autorités municipales concernées de procéder ou de faire procéder, dans un délai qu'il fixe, à une étude conjointe sur l'opportunité pour les municipalités de se fusionner.

En un tel cas, le rapport de l'étude devra être transmis au ministre et aux municipalités.

Une fois en possession du rapport, si ce dernier conclut qu'une fusion serait souhaitable, le ministre pourra demander à la Commission municipale de tenir une enquête publique au cours de laquelle les propriétaires et les locataires pourront faire connaître leur opinion. Il pourra, sur la recommandation de la commission, ordonner la tenue, dans toutes les municipalités intéressées ou dans certaines d'entre elles, d'une consultation des propriétaires et des locataires.

J'aimerais, cependant, que le ministre des Affaires municipales fasse sienne la recommandation de l'Union des conseils de comtés et qu'il accorde une priorité au regroupement des municipalités de village ou de paroisse, surtout dans les régions économiques de Montréal. Si, dans certaines régions à tendance conservatrice, on n'en veut pas, qu'on pense à la région de Montréal qui connaît ces problèmes et qui en a un urgent besoin. Quand on verra la réussite de ces municipalités, on en demandera l'application dans ces autres régions.

En terminant, je désirerais que le ministre des Affaires municipales rappelle aux technocrates de son ministère qu'il en est de la conduite des municipalités comme celle des individus. Elles ont leur vanité, leurs préjugés et leurs ignorances. Je souhaite que les technocrates établissent des unités de regroupement qui tiendront compte des voeux de la population des régions concernées, au contraire de ce qui était proposé dans les communautés municipales. Merci.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Dorchester

M. Florian Guay

M. GUAY: M. le Président, quelques brèves remarques sur ce projet de loi no 276, étant donné que d'autres membres du groupement politique que je représente ont fait connaître notre point de vue.

Ce projet de loi no 276, qui remplace la Loi de la fusion volontaire, est passablement discuté, peut-être même beaucoup plus que le ministre ne l'aurait désiré. Sur ce branle-bas de fusions ou de regroupements municipaux, on a dit beaucoup de choses. N'ayant que très peu d'expérience dans le domaine des affaires municipales et dans l'intention de me forger une idée assez juste des choses, j'ai dû faire appel, d'abord, aux gens responsables, depuis parfois de nombreuses années, de certaines municipalités, donc, aux maires responsables de l'administration municipale avec, bien sûr, les conseillers, pour prendre conscience de ce que peut être une fusion volontaire imposée ou autre.

Je leur ai donc adressé une lettre en mars 1971. J'aimerais lire un paragraphe de cette lettre pour prouver avec quelle honnêteté et avec quelle objectivité on discute chez nous de fusion ou de regroupement municipal. A la suite du dépôt du livre blanc par le ministre des

Affaires municipales concernant le regroupement municipal, je disais ceci à chacun des maires des municipalités du comté de Dorchester: "Il était dans mon intention de vous envoyer une copie du livre blanc déposé par le ministre, dès sa déposition. Cependant, le ministre a annoncé lui-même, en même temps, qu'il en ferait parvenir immédiatement une copie à toutes les municipalités du Québec. J'ose donc espérer que vous l'avez déjà en main ou que vous l'aurez très bientôt. Sinon, avisez-moi et je me ferai un plaisir de vous l'expédier afin que les conseils municipaux puissent en étudier le contenu et les implications".

Je leur avais demandé de me faire parvenir leurs commentaires à la suite de cette étude, étant donné que j'ai, quand même, très peu d'expérience dans le domaine. J'ai été énormément surpris par le grand nombre de responsables municipaux qui m'ont fait parvenir leurs commentaires.

En plus de plusieurs municipalités qui m'ont fait parvenir des résolutions contenant les raisons pour lesquelles elles s'opposaient ou é-taient favorables au regroupement municipal, cette documentation a été couronnée par une résolution du conseil de comté. Alors, la position que je prends ici, M. le Président, sera bien claire, et ce n'est pas moi qui l'ai prise à tout hasard, mais sous la directive écrite noir sur blanc de tous les conseils municipaux du comté, c'est-à-dire du conseil de comté.

M. le Président, dans cette résolution, il est fortement question que, même les conseils municipaux du comté, ne sont pas opposés au principe d'un certain regroupement. Cependant, ils se prononcent catégoriquement contre certains autres aspects. C'est une résolution du conseil de comté de Dorchester adressée à l'Union des conseils de comté de la province de Québec en rapport avec le livre blanc relatif à tout regroupement municipal. Je lis le document: "Considérant que, pour se préparer à un congrès, y participer et y donner convenablement suite nous avons étudié les documents soumis individuellement ou en comité; "Considérant que plus précisément nous, membres du conseil du comté de Dorchester, nous avons étudié en comité, au cours du congrès susmentionné, sous la direction de l'animateur, M. Léo Laplante, maire d'Estcourt, Témiscouata, et que nous avons alors pratiquement accepté le principe d'un certain regroupement en vue de rester en communication avec le ministère des Affaires municipales et éviter ainsi le pire qui eût été le regroupement forcé sans que nous ayons grand-chose à dire une fois le dialogue rompu; "Considérant que, par la suite, nous avons adopté une résolution dont copie a été adressée à l'union des conseils de comté et au ministre dans laquelle nous recommandons à l'unanimité de favoriser le regroupement de certains services pour en augmenter l'efficacité, mais nous prononçant du même coup contre les fusions ou l'établissement de communautés municipales de grande envergure sans avantage apparent, d'après nous, dans ce document, nous demandions à l'Union des conseils de comté de garder l'oeil ouvert, ce qui nous paraît avoir été fait puisque le 23 avril elle suggérait une assemblée spéciale du conseil de comté aux fins de faire le point avant la conférence provinciale municipale; "Considérant que cette assemblée spéciale a été tenue ce jour, le 7 mai 1971, que la situation a été réétudiée avec les documents déjà en main en plus du livre blanc maintenant publié, considérant qu'un grand nombre de personnes, certains corps intermédiaires, conseils municipaux et leaders de tous genres ont été consultés; "Il est proposé par M. Raymond Deblois, maire de Sainte-Marguerite, et résolu à l'unanimité: "1- Que nous continuions de nous opposer fermement aux regroupements obligatoires dans de vastes structures où chacun perdrait son identité et le contact avec les citoyens; "2- Nous croyons toujours valable la forme actuelle de municipalités où il est toujours possible de trouver des administrateurs généreux, compétents et dévoués pour prendre soin d'une multitude de petits problèmes de nos gens, et ceci quasi bénévolement; "3- Nous croyons que des moyens et des pouvoirs accrus permettraient à ces derniers de se faire mieux valoir: meilleure redistribution de la taxe provinciale, élimination de la taxe scolaire, libérant d'autant le champ de la taxation, amendement à la Loi électorale et aux conditions des référendums; "4- Que nous croyons que des correctifs peuvent être apportés aux structures actuelles pour en arriver, sans tout bouleverser, à une structure intermunicipale valable dans le sens de certaines recommandations du livre blanc lui-même, page 12, troisième paragraphe; "5- Que cette structure intermunicipale pourrait être les conseils de comté actuels mis au point avec des pouvoirs demandés tant de fois, atteignant ainsi les buts poursuivis par les meilleurs éléments de la population et du gouvernement. Evaluation pondérée et uniformisée, aménagement, promotion économique, fonds industriels, contrôle de l'environnement, etc. "6- Et là je pense bien qu'arrive la difficulté d'application d'une loi même favorisant le regroupement des municipalités, le découpage de la carte. On dit comme sixième considération que les découpages de la carte leur paraît pour le moins farfelus. Je donne un exemple qui existe dans mon comté. La paroisse Sainte-Hénédine de Dorchester regroupée avec Saint-Séverin de Beauce, chose qui est complètement illogique, qui n'a aucun sens. Ces découpages faits dans le sens des longitudes au lieu des latitudes auraient mieux respecté lesnormes

actuelles, en ce qui nous concerne; le découpage projeté est à cheval sur plusieurs zones scolaires, judiciaires ou autres. "7- Que le regroupement peut avantager les grosses municipalités et désavantager les plus petites, ce qui serait contraire à certains buts mêmes du livre blanc."

Pour toutes ces considérations, ils insistent pour que ce regroupement, s'il doit se faire, se fasse volontairement et non pas contre le gré de la population au sein de laquelle il existe déjà trop de sujets de mécontentement et de contestation.

Il est extrêmement facile pour moi de prendre position dans le présent projet de loi no 276. D'autres responsables municipaux ont signifié que ceux qui désiraient à tout prix un regroupement municipal, appartenaient surtout à des municipalités qui s'étaient dangereusement endettées dans le passé. J'ai reçu une requête également d'une municipalité de mon comté disant qu'elle se prononçait contre le regroupement des municipalités. On me demande même de plaider sa cause à l'Assemblée nationale. On me remercie d'avance. Elle est sûre que je prendrai d'abord la part de la population, la part des citoyens.

Une autre corporation municipale me faisait part également de sa peur de voir regrouper des municipalités pour les raisons suivantes: On dit ici: Ne croyez-vous pas qu'il y a présentement assez de mal dans la société sans prendre les moyens pour que ça aille encore plus mal? Pourquoi vouloir regrouper des municipalités dont la mentalité est différente, les problèmes sont différents? Pourquoi tout étatiser? Nous ne voyons rien de justifiable à cela.

M. le Président, je suis très heureux aujourd'hui d'avoir la chance de citer des paroles des responsables municipaux qui s'opposent fortement, catégoriquement à tout regroupement. On ajoute, dans certaines documentations que j'ai en main, qu'on n'est pas contre un certain principe qui veut le regroupement de certains services.

Mais quand on regarde un projet de loi comme celui que nous discutons actuellement, le projet de loi no 276, nous connaissons trop peu de choses pour donner un consentement sans savoir pourquoi. Bien sûr, ce projet de loi remplace la Loi des fusions volontaires. Mais quand on parle d'unités de regroupement, on regroupera qui avec qui, M. le Président? C'est là la peur des corporations municipales. C'est même la peur des populations. On m'a même dit, dans une résolution qui m'a été envoyée, que ce qui avait été proposé comme regroupement municipal avait été fait par des amateurs qui ne connaissaient absolument rien à certaines régions de la province de Québec. Je me rappelle certaines paroles du ministre des Affaires municipales qui disait : Faisons confiance aux administrateurs municipaux. Je suis absolument d'accord qu'on leur fasse confiance. C'est pour cette raison-là que nous allons devoir nous opposer à ce projet de loi.

Les administrateurs municipaux sont quand même des gens du milieu, des gens qui ont administré des municipalités pendant plusieurs années et qui continuent de le faire de façon admirable et même presque bénévolement. Nous connaissons très peu de choses en ce qui concerne les modalités, les critères de base dont le ministre se servira pour établir ces unités de regroupement. Bien sûr, on dit également dans le projet de loi, du moins dans les notes explicatives: "50 p.c. des conseils municipaux représentant 50 p.c. de la population globale". Chez nous, par exemple — je peux donner un exemple au ministre — il se pourrait que, dans un cas, peut-être spécifique d'accord, mais qui se présentera probablement quand même, cinq ou six conseils municipaux se prononceront contre un regroupement alors qu'un conseil municipal représentera 50 p.c. de la population de l'unité. Je vois donc bien mal l'application de ce projet de loi.

M. le Président, je pense que le ministre est tout de même conscient que ce n'est pas facile de regrouper des municipalités. C'est peut-être pour cette raison-là qu'il y est allé peut-être beaucoup plus fort qu'autrefois dans d'autres projets de loi sur l'incitation.

M. HARVEY (Jonquière): Est-ce que le député me permettrait une réflexion? Si l'exemple qu'il vient de donner se produit, il n'y aura pas de regroupement parce que ça prend 50 p.c. des municipalités représentant 50 p.c. de la population. S'il y en a un pour et six contre, dans les municipalités, même si la municipalité représente plus que 50 p.c. de la population, c'est seulement si l'intérêt public permet au ministre de décréter une unité où il y aura étude qu'elle aura lieu.

M. GUAY: Mais quels critères déterminent que ce sera d'intérêt public? C'est laissé à la discrétion du ministre. Si le ministre juge...

M. HARVEY (Jonquière): Il a un excellent jugement.

M. GUAY: Je ne dis pas...

M. SAMSON: Ne charriez pas trop.

M. GUAY: ... que le ministre actuel des Affaires municipales...

M. HARVEY (Jonquière): Je le connais mieux que vous.

M. GUAY: ... n'est pas un homme compétent, un homme intelligent. Nous le reconnaissons. Mais il n'y a rien qui dit que ce sera toujours lui qui va être là. Un gouvernement, cela se change, cela s'est déjà changé. Il n'y a rien qui prouve...

M. PAUL: En janvier.

M. GUAY: ... que cela ne changera pas encore dans l'avenir.

M. PAUL: En janvier. Il s'en va aux Transports.

M. GUAY: M. le Président, nous avons beau faire confiance au ministre, je suis prêt à donner au ministre quelques pouvoirs, certaines responsabilités, mais de là à établir lui-même et seulement lui qu'il y a intérêt public, à ce moment-là, pour imposer une fusion par ce qu'on appelle la Loi favorisant le regroupement des municipalités, il y a loin. On dit que c'est de l'incitation, ce ne sera plus de l'incitation, ce sera de la dictature.

C'est de cela que nos responsables municipaux ont peur. Ils ont peut de tout cela. Ils nous disent: Si le ministre est bien clair, si le ministre nous explique toutes les modalités, si on est au courant de tout avant, il y a quand même des chances qu'on soit plus souple. Mais tant que toutes les modalités ne seront pas connues et que le ministre ira aussi fort du côté de l'incitation, si le ministre fait une distribution de prix...

M. HARVEY (Chauveau): M. le Président, question de règlement. Le député utisile son droit de parole depuis combien de temps? Est-ce qu'il a parlé durant trente minutes, d'après vous? De toute façon, ça nous a paru une heure.

DES VOIX: C'est fort.

M. GUAY: M. le Président, j'ai quand même l'impression que, lorsque les maires des municipalités du comté de Dorchester liront le journal des Débats, ils ne penseront pas que j'ai parlé trop longtemps. Du moins, ils l'ont signifié par lettres.

Etant dans mon comté presque à toutes les fins de semaine, je dois dire que les autorités des municipalités qui forment mon comté ont une grande peur du regroupement municipal pour certaines raisons que j'ai données. A moins, comme le disait si bien l'honorable député de Lévis, mon collègue, ce matin, que le ministre ne change énormément de choses dans son projet de loi, nous serons malheureusement dans l'obligation de nous prononcer contre.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires municipales.

M. TESSIER: M. le Président, si mes collègues n'ont pas autre chose à dire en deuxième lecture, je désire exercer mon droit de réplique. Je voudrais, dans ce droit de réplique, éclaircir davantage certaines questions qui ont été soulevées par les trois partis d'Opposition et je crois que j'en aurai pour un bon moment. Comme nous sommes au vendredi après-midi et que plusieurs m'ont laissé entendre qu'ils avaient pris des engagements dans leurs comtés respectifs, en conséquence je demande l'ajournement de la Chambre à mardi, quinze heures.

M. LE PRESIDENT: Alors, si j'ai bien compris, l'honorable ministre propose l'ajournement du débat. La motion d'ajournement est adoptée?

M. PAUL: C'est ça.

M. BIENVENUE: Lundi, quinze heures, M. le Président. Je rappelle aux membres de cette Chambre que nous reprendrons après les affaires courantes, le débat de deuxième lecture du bill 276, avec la réplique du ministre des Affaires municipales.

Nous procédrons ensuite à l'étude de la motion d'amendement au bill 90. Toutes choses étant normales, et le temps le permettant, peut-être, à nouveau, tenterons-nous de nous pencher sur le budget supplémentaire.

M. LE PRESIDENT (Hardy): La Chambre ajourne ses travaux à lundi, quinze heures.

(Fin de la séance à 16 h 19)

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