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(Quinze heures sept minutes)
M. LAVOIE (président): Qu'on ouvre les portes. A l'ordre,
messieurs!
Affaires courantes. Présentation de pétitions. Lecture et
réception de pétitions. Présentation de rapports de
comités élus. Présentation de motions non
annoncées. Présentation de bills privés.
Présentation de bills publics.
Amendement à la Constitution
M. Robert Bourassa
M. BOURASSA: M. le Président, avec le consentement de la Chambre
et afin que les députés puissent prendre connaissance du nouveau
projet de loi et le voter à cette session-ci, sujet à discussion
peut-être avec les membres de l'Opposition, je voudrais que nous
adoptions aujourd'hui en première lecture le projet de loi concernant
les districts électoraux. Il a pour objet d'abroger l'article 80 de
l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, et ce en vertu des pouvoirs
constitutionnels du Québec d'amender sa constitution interne à
l'exception des pouvoirs du lieutenant-gouverneur.
Les citoyens et les groupes représentatifs pourront alors faire
devant l'Assemblée nationale toutes les représentations qu'ils
jugeront utiles afin de modifier dans un sens ou dans l'autre la
délimitation de leur comté ou bien d'en maintenir les limites
actuelles. On pourra ainsi faire valoir tous les arguments pertinents, tels que
le caractère rural du comté, sa composition ethnique, son
éloignement, et ce à partir de normes générales que
la commission de l'Assemblée nationale, c'est-à-dire les
députés, établira au cours des prochaines séances
de cette commission.
Il s'agit de la première étape du processus de
réforme de la carte électorale dont j'ai maintes fois
parlé depuis le 29 avril dernier. Je rappelle que ce travail de
réforme touchera à la carte électorale, au mode de scrutin
et à la Loi électorale elle-même.
Une fois ce projet de loi adopté, nous serons dès le mois
de janvier à même de travailler avec efficacité et
célérité au niveau de la commission de l'Assemblée
nationale afin d'opérer certe réforme électorale.
En quelques mots, M. le Président, ce projet de loi, en
abolissant l'article 80, a pour but d'enlever une des principales pierres
d'achoppement à toute réforme électorale. Je propose, avec
le consentement unanime de la Chambre, la première lecture de ce
bill.
M. Jean-Jacques Bertrand
M. BERTRAND: M. le Président, le premier ministre est en retard.
Louis-Philippe Lacroix, le député des Iles-de-la- Madeleine, a
renseigné le public hier alors que les députés de la
Chambre apprennent aujourd'hui de la bouche du chef du gouvernement qu'une loi
est déposée. J'avais l'intention de le faire comme il est de mon
devoir, de soulever une question de privilège; je le fais à ce
moment-ci, M. le Président, et je vous en ai informé. C'est la
première occasion, à tout événement, qu'un
député de la Chambre annonce la présentation d'un projet
de loi. Je pense que ce n'est certainement pas là respecter les
députés de cette Chambre. Ce n'est pas la première fois
que le gouvernement se rend responsable d'actes semblables.
Au moins, aujourd'hui, le premier ministre a essayé de couvrir
cela en déposant immédiatement le projet de loi. J'espère
que les députés ministériels ne répéteront
pas le geste posé par leur collègue, le député des
Iles-de-la-Madeleine. Il pouvait être mal pris au colloque avec les
étudiants. Il a essayé de s'en tirer. Mais ce n'est pas de cette
manière qu'on respecte tous les députés. C'était le
premier commentaire.
Deuxièmement, M. le Président, je suis surpris que cela
arrive peu de temps après que le premier ministre nous eut dit que la
commission de l'Assemblée nationale se réunirait cette semaine
pour examiner ce problème. Un de mes collègues, qui est membre de
la commission et qui est le porte-parole de l'Opposition à cette
commission, avait compris, lors de la dernière séance,
qu'à la séance subséquente, c'est-à-dire à
celle qui doit se tenir jeudi, tout le problème des comtés
protégés serait examiné.
Le gouvernement veut procéder de façon législative.
La seule suggestion que je peux faire à ce moment-ci, c'est que, sous
réserve de tous nos droits et de toutes nos objections, même si
nous acceptons le dépôt de la loi en première lecture, au
moins, cette loi soit référée à la commission de
l'Assemblée nationale qui doit siéger jeudi. C'est elle qui verra
quelle décision prendre quant à la présentation du projet
de loi et à son étude à cette session-ci ou qui la
reportera, si on a besoin de renseignements additionnels, à la session
du mois de février. Cela n'empêcherait pas, entre-temps, la
commission de l'Assemblée nationale de siéger d'abord jeudi et,
par la suite, avant la reprise des travaux parlementaires, en
février.
M. BOURASSA: Si vous me le permettez, le projet de loi a pour but de
placer sur un pied d'égalité tous les comtés du
Québec, étant donné qu'il fait disparaître les
comtés protégés. Je n'ai pas d'objection à ce qu'on
discute jeudi matin, à la commission parlementaire de l'Assemblée
nationale, si on doit procéder immédiatement à l'adoption
de la loi ou si on doit suivre la suggestion du chef de l'Opposition.
Personnellement, nous croyons qu'il serait préférable
d'éliminer cette pierre d'achoppement et d'adopter le projet de loi
d'ici à la fin de cette session. Cependant, si le chef de
l'Opposition,
comme cela lui arrive quelquefois, apporte des arguments convaincants
pour en remettre l'étude à la prochaine session, nous pourrons
prendre cette décision à la réunion de jeudi matin, si les
autres partis sont d'accord. Mais, nous avons pensé qu'il était
temps d'agir et qu'il fallait cesser de parler.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! Ecoutez, si j'ai
accordé le droit de parole au chef de l'Opposition officielle, c'est que
j'ai présumé du consentement unanime de la Chambre, sur la
question de privilège. C'était la seule soupape qui me
permettait, dans le règlement, de lui accorder le droit de parole,
à ce moment-ci des travaux. Sans permettre de débat ni accorder
la parole à qui que ce soit, à moins que ce soit avec le
consentement unanime de la Chambre, tout ce que je peux demander, c'est s'il y
a consentement unanime à ce qu'on procède à la
première lecture du projet de loi.
J'ai accordé le droit de parole au chef de l'Opposition, je le
répète, sur la question de privilège. Même sur la
question de première lecture, il n'y a pas de débat.
M.BOURASSA: M. le Président, est-ce qu'on pourrait entendre
l'avis des autres chefs de partis?
M. LE PRESIDENT: Est-ce que la Chambre consent à ce qu'un
représentant de chacun des partis fasse un commentaire? C'est tout ce
que je peux vous demander.
M. BERTRAND: Oui, cela devrait être permis.
M. LEVESQUE: Oui, d'accord. M. BERTRAND: Oui, d'accord.
M. LAVOIE (Wolfe): Une question de privilège...
UNE VOIX: Un quatrième chef de parti.
M. LAVOIE (Wolfe): II n'est pas question de chef de parti.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!
M. LAVOIE (Wolfe): A la suite des déclarations du premier
ministre, je trouve indigne la façon dont il nous présente cette
loi en première lecture.
M. HARDY: A l'ordre, M. le Président!
M. LAVOIE (Wolfe): Premièrement, il nous avait dit, il y a
quelque temps, qu'on se réunirait au sujet des comtés
protégés, et je n'aime pas cette façon de
procéder.
M. HARDY: M. le Président, à l'ordre!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! Je crois que cette question de
privilège a déjà été soulevée une
fois.
M. LAVOIE (Wolfe): Au nom de mes collègues et au nom des
électeurs de mon comté, je m'élève contre cela.
M. LE PRESIDENT: Bon, d'accord, c'est fait.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je pose à mon tour une question de
privilège. M. le Président, je tiens à faire observer,
dans l'intérêt de tous les députés de la Chambre,
que la démarche que pose aujourd'hui le premier ministre est à
l'encontre des décisions que nous avions prises à la commission
parlementaire; c'est une violation flagrante des droits des parlementaires qui
ont siégé à cette commission et qui devaient, jeudi,
s'occuper particulièrement de cette question des comtés dits
protégés.
Il s'agit, de la part du gouvernement, d'un acte qui est une
façon de nous forcer la main et d'utiliser sa majorité
parlementaire pour nous empêcher d'étudier les questions que nous
devions étudier.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! UNE VOIX: Des droits
féodaux.
M. BOURASSA: Est-ce que je peux rétablir les faits, quand
même? On soulève des questions de procédure, de
modalités; j'ai dit que je n'avais pas objection à ce qu'on
discute de la chose, jeudi matin, mais est-ce qu'on va s'enferrer dans la
procédure indéfiniment, alors que tout le monde réclame
une réforme électorale?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je pose encore une fois la question de
privilège, M. le Président. Le premier ministre vient de nous
donner une explication qui n'est absolument pas conforme aux décisions
qui avaient été prises à la commission parlementaire.
M. BOURASSA: Ecoutez...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): D'accord, vous pouvez discuter du
problème, mais il devance, il préjuge de l'opinion des
parlementaires et il nous met en face d'un fait accompli, ce qui est un acte
d'autoritarisme et de dictature. Je retire le mot dictature.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Ecoutez! Je crois que le
député de Chicoutimi pourrait refuser, cet après-midi, son
consentement, et nous ne procéderions pas à la première
lecture. Il a tout à fait le droit de le faire.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je refuse, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Mégantic.
M. DUMONT: Merci, M. le Président. Dans le courant du mois
d'août, lors d'une réunion des représentants des 108
députés, à ce moment-là, de l'Assemblée
nationale, il avait été convenu qu'il y aurait d'abord une
consultation de tous les représentants des comtés
protégés. On a même, par la suite, présenté
une motion selon laquelle, justement les 17 représentants des
comtés protégés viendraient à cette commission
parlementaire exprimer leur point de vue. Et on a dit qu'en partant de ces
explications, un projet de loi serait probablement présenté.
Encore une fois, pour montrer notre bonne volonté, nous permettrons
d'étudier ce projet de loi jeudi prochain, mais nous tenons compte du
fait qu'actuellement l'Opposition abuse certainement de ses droits.
M. LEVESQUE: Très bien.
M. DUMONT: ... le gouvernement!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LAURIN : M. le Président, je suis heureux que le premier
ministre ait manifesté le désir d'entendre les réactions
des chefs d'opposition. Je suis aussi heureux que lui de lui donner ma
réaction car, comme il le sait, c'est un sujet qui nous tient
énormément à coeur. Tout en m'associant aux remarques du
chef de l'Opposition officielle quant à la façon dont cette
nouvelle a été annoncée dans les journaux, je ne peux
quand même m'empêcher de manifester la satisfaction immense et
profonde que provoque en nous la nouvelle que vient de nous annoncer le premier
ministre.
Nous sommes très heureux que cet accouchement, après huit
mois et demi,...
M. BOURASSA: Sept mois, M. le Président. Je pense que le
député de Bourget sait compter davantage que l'ancien
député de Laurier.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LAURIN: Selon les canons de la médecine, l'enfant est viable,
et j'en suis extrêmement heureux, d'autant plus que nous avions
présenté un modèle de projet de loi assez semblable. Nous
sommes très heureux que le projet de loi dont on vient de faire la
première lecture corresponde, dans ses traits généraux,
à celui que nous avions présenté à la
commission.
Pour notre part, nous espérons que ce projet de loi soit
adopté le plus tôt possible afin que nous puissions
procéder aux autres réformes qui doivent suivre celle-là,
en particulier celle qui concerne le découpage de la carte
électorale et la réforme du mode de scrutin et toutes les autres
réformes qui doivent s'ensuivre. Donc, nous sommes très heureux
de féliciter le premier ministre et la deputation
ministérielle.
UNE VOIX: Très bien.
M. LE PRESIDENT: Y a-t-il consentement unanime pour que nous
procédions immédiatement à la première lecture?
M. PAUL: M. le Président, ce projet-là aurait pu
être présenté depuis le 29 avril. Il n'y a pas de
péril en la demeure, que cela attende jusqu'à demain.
M. SAINT-PIERRE: ... le 29 avril.
M. PAUL: Si le ministre de l'Education a quelque chose à dire,
qu'il se lève.
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, je voulais signaler que le
projet de loi aurait pu être déposé avant et que les
réformes auraient pu être entreprises avant le 29 avril.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. PAUL: M. le Président, je dis que nous assistons à une
parodie de notre système parlementaire. Quand une commission a
reçu un mandat de la Chambre, on laisse la commission terminer son
travail, et c'est cela que nous voulons signaler à la population
à l'effet qu'il n'y a pas de logique dans les mesures que nous
présente le gouvernement dans sa législation.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LEVESQUE: C'est simplement pour faciliter le travail de la
commission, comme l'a dit le premier ministre, voyons donc!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LACROIX: M. le Président, sur une question de
privilège, je pense que la discussion actuelle tourne autour d'une
réponse que j'ai donnée hier à un étudiant.
M. PAUL: Non, non, c'est fini, cela.
M. LACROIX: Je n'ai pas entendu la radio ce matin et je n'ai pas lu les
journaux non plus, mais je voudrais rétablir les faits. Hier, un
étudiant m'a posé une question à savoir si j'étais
d'accord avec la question de la représentation alors que 24 p. c. de la
population avaient sept députés. Je lui ai dit: Nous avons
déjà eu 51 p. c. , nous avons eu 8 députés et nous
n'avons pas braillé.
Le gars m'a parlé de l'article 81, parce qu'il
avait été bien "briefé" par le Parti
québécois, et je lui ai dit: Je m'excuse, c'est l'article 80.
Dans l'article 80, il y a 17 comtés protégés et il n'y a
pas possibilité de changer l'article 80...
M. LAURIN: M. le Président, question de privilège.
M. LACROIX: ... à moins d'avoir la majorité des
députés qui représentent ces circonscriptions. Il y a des
députés libéraux qui sont d'accord, il y en a qui le sont
moins; il y a des députés de l'Union Nationale qui sont d'accord,
il y en a qui le sont moins; il y a des députés du Ralliement
créditiste qui sont d'accord, il y en a qui le sont moins, mais je crois
sincèrement qu'à l'heure actuelle la majorité des
députés sont d'accord...
UNE VOIX: A l'ordre!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LACROIX: ... pour que l'on change l'article 80, et c'est exactement
ce que j'ai dit.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LACROIX: Je n'ai pas présumé de l'activité du
gouvernement.
M. CHARRON: Un point d'ordre, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: C'est sur une question de règlement.
M. CHARRON: Je pense...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. CHARRON: ... que ce n'est pas le contenu d'une question de
privilège...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. CHARRON: ... c'est un discours qu'est à faire le
député des Iles-de-la-Madeleine.
M. LACROIX: Cela fait assez longtemps que l'on se fait engueuler par des
gars qui se font lessiver le cerveau par des individus comme vous.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je crois que le député des
Iles-de-la-Madeleine avait été mentionné dans
l'exposé ou la question de privilège de l'honorable chef de
l'Opposition et il était tout à fait en droit de rétablir
les faits. Il a peut-être dépassé... comme il y en a
plusieurs qui le font dans cette Chambre. De toute façon, est-ce que le
député de Bourget.
M. LAURIN: Vous comprendrez, M. le Président, je retire ma
question de privilège.
M. LE PRESIDENT: D'accord. M. LEVESQUE: Article C
Projet de loi no 61 Première lecture
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires municipales propose
la première lecture du projet de loi modifiant la Loi de la
Communauté urbaine de Québec, l'honorable ministre des Affaires
municipales.
M. TESSIER: M. le Président, ce projet de loi comporte trois
dispositions principales. La première précise que les membres du
conseil de la ville de Québec qui sont membres du comité
exécutif de la communauté sont aussi membres du conseil de la
communauté, mais n'ont pas de droit d'y voter, sauf le maire ou celui
qui le remplace. La deuxième disposition prévoit que la Loi du
Bureau d'assainissement des eaux du Québec métropolitain cessera
de s'appliquer le 1er janvier 1972, ou à toute autre date
antérieure fixée par le gouvernement, à la demande de la
communauté au lieu du 1er janvier 1971, comme le prévoit
présentement la charte de la communauté.
Enfin, la troisième disposition permet à la
Communauté urbaine de Québec de succéder au comité
intermunicipal qui avait été formé par un certain nombre
de municipalités lorsqu'elle succédera au comité
intermunicipal la communauté assumera les droits et obligations de ce
comité.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce bill. First
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture à la prochaine
séance.
M. LEVESQUE: E.
Projet de loi no 66 Première lecture
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires municipales propose
la première lecture du projet de loi concernant la charte de la ville de
Percé.
M. TESSIER: M. le Président, ce projet de loi comprend sept
dispositions dont la première a pour objet de constituer à
compter du 1er janvier 1971, sous le nom de Percé, une nouvelle ville
qui englobera cinq municipalités, soit Barachois, Bridgeville,
Cap-d'Espoir, Saint-Pierre-de-la-Malbaie et Percé. La ville de
Percé
sera régie par la Loi des cités et villes et la
première élection générale y sera tenue le premier
dimanche de novembre 1971.
Jusqu'à cette date, elle sera administrée par un conseil
de cinq membres, soit un représentant pour chacune des
municipalités. Le maire de la nouvelle ville sera désigné
par les conseillers parmi eux au cours d'une assemblée qui doit avoir
lieu au plus tard le 8 janvier 1971.
En somme, ce sont les mêmes dispositions que le bill 60, qui
crée la ville de Sainte-Scholas-tique. Un administrateur
désigné par le gouvernement exercera à l'égard de
la ville certains pouvoirs prévus à la loi et remplira d'autres
tâches que pourra lui confier le ministre des Affaires municipales. Le
ministre des Affaires municipales devra présenter un plan indiquant les
affectations du sol dans le territoire de la ville. Ce plan sera
déposé au bureau de la ville où tout
intéressé pourra en prendre connaissance à compter du 31
décembre 1971.
Dans les deux années suivantes, la ville devra adopter et faire
approuver par le ministre un plan directeur. Dès l'entrée en
vigueur de la loi, la ville devra adopter et faire approuver par le ministre
des Affaires municipales des règlements concernant le zonage, la
construction et la création d'une commission d'urbanisme. Toute
construction sera interdite dans la ville jusqu'à ce que le ministre des
Affaires municipales ait approuvé les règlements de la ville
concernant le zonage, la construction et la création d'une commission
d'urbanisme. L'administrateur pourra toutefois permettre qu'on déroge au
gel de la construction.
Le projet prévoit enfin que les actes posés par les
corporations municipales ou scolaires dont le territoire a été
affecté par l'expropriation faite en vertu de la Loi concernant le parc
Forillon et ses environs, ne seront pas annulés pour défaut de
qualité des administrateurs de ces corporations.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce bill. First
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture à la prochaine
séance.
M. LEVESQUE: Article d).
Projet de loi no 67 Première lecture
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires municipales propose
la première lecture d'un projet de loi concernant la charte de la ville
de Gaspé.
M. TESSIER: M. le Président, je ne veux pas me
répéter, les dispositions de ce projet de loi sont sensiblement
les mêmes que celles s'appli-quant à la ville de Percé,
sauf, bien entendu, qu'il y a lieu de regrouper dans la seule ville de
Gaspé douze municipalités, soit les suivantes:
Baie-de-Gaspé-Sud, Grande-Grève, Haldimand,
L'Anse-aux-Griffons, Rivière-au-Renard, Saint-Alban-du-Cap-des-Rosiers,
Sainte-Majori-que, York, Saint-Maurice, ainsi que les cantons de
Baie-de-Gaspé-Nord et de Douglas et la ville de Gaspé.
La seule différence qu'il y a avec le projet de loi constituant
en corporation la nouvelle ville de Percé, c'est que, dans le cas du
présent projet de loi, jusqu'à la date des élections, le
1er novembre 1971, elle sera administrée par un conseil de quinze
membres, soit un représentant pour chacune des municipalités,
à l'exception de la ville de Gaspé, de la municipalité de
la paroisse de Saint-Maurice et de la municipalité de
Rivière-au-Renard qui, elles, auront deux représentants au
conseil municipal. La raison de cela, c'est que les cinq municipalités
qui sont regroupées pour former la ville de Percé, ont
sensiblement la même population, tandis que, dans le cas du projet de loi
concernant Gaspé, il y a trois municipalités dont la population
est assez supérieure à celle des autres municipalités.
C'est pourquoi nous mettons deux représentants au lieu d'un au
conseil.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce bill. First
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance.
M. LEVESQUE: Article F).
Projet de loi no 68 Première lecture
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Gatineau, ministre
d'Etat, propose la première lecture du projet de loi modifiant la Loi
sur les relations du travail dans l'industrie de la construction.
M. FOURNIER: M. le Président, ce projet de loi comprend quatre
articles particuliers.
L'article 1 permet, par règlement, d'étendre l'application
de la loi, en explicitant le mot "construction" et en remplaçant la
définition du mot "salarié permanent d'entretien".
L'article 2 soustrait de l'application de la loi certains travaux, en
particulier ceux exécutés par les municipalités, les
entreprises minières.
les entreprises forestières, l'Hydro-Québec. Il
prévoit, en plus, la nomination d'un commissaire chargé de
régler les différends d'interprétation des
règlements et de l'article 2 de la loi. Le commissaire pourra, en plus,
consulter un comité de huit personnes nommées à cette fin
par le ministre.
L'article 3 abroge deux articles ayant trait à une
négociation particulière pour les chantiers comportant une
dépense de plus de $25 millions.
L'article 4 confie à la Commission du salaire minimum, pour au
plus six mois, l'application du décret qui sera adopté en vertu
du bill 38, sanctionné le 8 août 1970.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce bill. First
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance.
M. PAUL: M. le Président, au sujet de la deuxième lecture
de ce projet de loi, je voudrais, dès maintenant, signaler la
réserve qui, éventuellement, pourra s'imposer quant à
toute motion susceptible d'être présentée à
l'occasion de l'appel de deuxième lecture de ce projet de loi.
M. LEVESQUE: Ai-je compris que le leader parlementaire de l'Opposition
officielle s'objecterait à la première lecture comme dans le cas
de...
M. PAUL: M. le Président, j'ai employé deux termes:
"éventuel" et "deuxième lecture".
M. LEVESQUE: Pour bien comprendre la signification, est-ce que c'est
dans le même sens que le refus accordé au bill 65 ou est-ce qu'il
y a une nuance?
M. BERTRAND: Non, non!
M. PAUL: Celui-là, M. le Président, il est
présenté dans la parfaite légalité.
M. LE PRESIDENT: Celui-ci.
M. BOURASSA: Celui-ci ou celui-là?
M. PAUL: Celui-ci. Pas le vôtre. Le vôtre, nous n'en parlons
pas!
M. BOURASSA: Celui-là, vous ne voulez pas l'adopter en
première lecture?
M. LE PRESIDENT: Déclarations ministérielles.
L'honorable ministre de la Santé.
Foyers pour personnes âgées
M. CASTONGUAY: M. le Président, à la suite de la
tragédie du 2 décembre 1969 à Notre-Dame-du-Lac, dans le
comté de Témiscouata, où une quarantaine de personnes ont
perdu la vie dans l'incendie du foyer pour personnes âgées, le
Repos du vieillard, le ministre de la Santé, de la Famille et du
Bien-Etre social d'alors a créé une mission d'inspection
composée de représentants des ministères de la
Santé, de la Famille et du Bien-Etre social, ainsi que du
ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Cette mission avait
été chargée de vérifier et de déterminer
l'état de sécurité dans un certain nombre
d'établissements privés de santé et de bien-être
répartis sur le territoire.
De fait, la mission a visité 565 établissements, dont 165
de santé et 400 foyers d'hébergement pour personnes
âgées. Il existe au Québec environ 1,300
établissements de santé et de bien-être, tant publics que
privés.
Le travail de vérification a porté sur les aspects
suivant: le nombre de lits, la catégorie d'occupants, le personnel, la
surveillance de nuit, la sécurité physique, la protection contre
l'incendie, l'éclairage d'urgence et les systèmes d'alarme. Les
données compilées par la mission révèlent que la
situation dans les établissements visités est, de façon
générale, inadéquate. Si plusieurs de ces
établissements sont assez bien pourvus en ce qui a trait aux
systèmes de chauffage et d'électricité, de
sérieuses déficiences ont été remarquées
dans plusieurs domaines particuliers. Ainsi, la mission signale que les
systèmes de protection contre l'incendie et les moyens
d'évacuation sont inadéquats. La plupart de ces
établissements ne possèdent pas de plans d'évacuation en
cas d'incendie et ne font aucun exercice de prévention, ajoute le
rapport.
Par ailleurs, la plupart d'entre eux ne sont pas à
l'épreuve du feu, sont en partie ou totalement dépourvus d'une
surveillance adéquate de nuit ou encore manquent de personnel. La
mission a également noté que les objectifs de
sécurité sont bien différents dans ces
établissements que dans les édifices publics, même si ces
deux catégories d'établissements sont soumis aux normes de
sécurité du ministère du Travail et de la
Main-d'Oeuvre.
Le rapport fait aussi état du chevauchement des règlements
municipaux et gouvernementaux, ainsi que de leur contradiction en
matière de sécurité.
Je voudrais signaler également, M. le Président, que je
vais déposer, à la fin de cette déclaration, deux copies
de la deuxième et dernière partie du rapport de la mission
Gen-dron, soit celle contenant les constatations et les recommandations. Quant
à la première partie du rapport, qui en est de statistiques
uniquement, je crois qu'il n'est pas d'intérêt
public d'en révéler la teneur, étant donné
qu'elle pourrait soulever, dans certains cas, des inquiétudes.
Ces constatations sont suivies de nombreuses recommandations dont la
principale préconise que la loi établisse clairement que nul ne
peut tenir un établissement du genre sans un permis formel du
ministre.
La mission propose, de plus, que la loi permette au ministre de fermer
tout établissement opérant sous le couvert d'un permis
d'hôtellerie, sous peine de sanctions appropriées, de façon
à mettre fin aux établissements d'hébergement clandestins.
Le rapport recommande aussi la création d'un service permanent de
sécurité, et l'expansion de l'enquête sur l'état de
sécurité à tous les établissements de santé
et de bien-être du Québec.
On préconise la préparation d'une réglementation
spéciale et sévère devant comporter, notamment, des normes
de sécurité uniformes dans tout le Québec; une
priorité sur tout règlement municipal; une nouvelle
classification des établissements et des personnes qui y vivent, et
cela, en fonction des mesures sécuritaires à adopter; une
attention spéciale à l'évacuation, plans
d'évacuation, exercices d'évacuation; à la surveillance de
nuit; à la qualité et à la quantité du personnel;
au système de prévention des incendies et l'éclairage
d'urgence; à l'aspect physique des établissements.
La mission d'inspection propose également que le service de
sécurité soit composé d'un personnel suffisant, dont les
qualités seraient suffisantes pour la préparation et la mise en
application de la réglementation suggérée.
En tenant compte de ces constatations et recommandations, le
gouvernement présentera au début de 1971, ou au cours de la
prochaine session, une législation générale sur les
établissements de santé et de bien-être, et cette
législation est déjà en préparation au
ministère.
Parmi les principaux objectifs de cette législation, le
gouvernement rendra beaucoup plus sévères les conditions
d'émission des permis d'opération et les modalités de la
surveillance de ces établissements. En attendant cette
législation, une meilleure coordination entre les ministères du
Travail et de la Main-d'Oeuvre, de la Famille et du Bien-Etre social sera de
rigueur afin que les inspections de ces établissements soient les plus
efficaces possibles et que les foyers clandestins ne puissent voir le jour. Des
entretiens ont déjà eu lieu entre les autorités des deux
ministères à ce sujet.
Par ailleurs, la création d'une direction générale
unique, quant aux normes de soins, d'approbation de permis pour ces
établissements, a été prévue à
l'intérieur des structures du ministère des Affaires
sociales.
Avant de terminer, M. le Président, je voudrais lancer un appel
à la population qui, à mon avis, doit également assumer
ses responsabilités à l'égard des personnes
hébergées dans ces établissements. J'invite, de
façon toute spéciale, les familles, dont certains membres sont
dans ces établissements, à les visiter
régulièrement et à faire les représentations
nécessaires auprès des dirigeants de ces établissements et
aux autorités du ministère, quand cela s'impose. Quelque
perfectionnés que soient les normes et les mécanismes de
surveillance, ils ne remplaceront jamais l'effet bénéfique du
contrôle direct de la population dont je viens de parler.
Je voudrais également préciser qu'il n'est pas possible
d'apporter une solution à tout ce problème en l'espace de
quelques semaines, ou même quelques mois, en raison de sa
complexité et en raison du très grand nombre
d'établissements concernés.
Je dépose deux exemplaires du rapport; j'ai ici un exemplaire de
la deuxième tranche du rapport, et j'ai également un exemplaire
pour chacun des chefs des partis d'Opposition.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Montmagny.
M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, je ne voudrais faire
qu'un bref commentaire, évidemment, réservant pour une autre
occasion, après que j'aurai pris connaissance du document que nous remet
le ministre à l'instant, des commentaires plus substantiels. Je voudrais
mentionner ici.
Evidemment, on se souvient de cette tragédie qui, il y a un an,
avait sensibilisé la population, avait ému au plus haut point
toute la population du Québec et avait fait l'objet de plusieurs
interventions en cette Chambre et de plusieurs précisions quant aux
questions qui nous avaient été posées. Nous avions mis sur
pied cette commission d'enquête qui groupait trois ministères.
J'ai cru comprendre, d'après l'énoncé du ministre il y a
un instant et d'après les recommandations qui ont été
faites, qu'il s'agit là d'un travail substantiel. Je voudrais, M. le
Président, attirer l'attention de cette Chambre sur une affirmation, sur
une déclaration que j'avais faite à ce moment-là. J'avais
demandé la collaboration de tous les membres de cette Chambre, de tous
les députés, à l'appui d'une politique de mise en place de
ressources pour les personnes âgées parce qu'il y avait
véritablement deux urgences. D'abord, il s'agissait de mettre en place
des ressources dans des endroits où il n'y en avait pas et,
deuxièmement, de pourvoir la province de ressources de substitution
là où la sécurité des personnes
hébergées était en danger.
Je maintiens encore ces affirmations, M. le Président, et je
demande au ministre des Affaires sociales et au gouvernement de revoir cette
question de l'implantation des ressources même si les coûts ont
augmenté d'une façon importante ces dernières
années, pour toutes sortes de raisons. Je crois qu'il y aurait lieu pour
le ministre des Affaires sociales et le gouverne-
ment, à la lumière de ce rapport qui probablement
proposera des ressources de substitution, et de ce côté-là,
il y a urgence...
Je voudrais que le gouvernement, avec l'appui des députés
de cette Chambre et de la population en général... parce que
ça exige de la part de la population un effort financier, une
participation non seulement du point de vue des souscriptions, mais du point de
vue des budgets.
La semaine dernière, le ministre des Affaires municipales nous a
présenté un projet de loi modifiant la Loi de l'habitation
familiale où il a été question du projet
d'hébergement des personnes âgées.
Evidemment, le ministre des Affaires sociales a été retenu
à Ottawa par la conférence des ministres de la Santé. Il
n'a pu, à l'occasion de l'étude de cette loi, nous faire
l'exposé qu'il nous avait annoncé il y a quelques jours en cette
Chambre.
Je regrette que le ministre n'ait pu participer à ce
débat. Nous aurions pu échanger des idées sur ce programme
important de mise en place des ressources, mais à une autre occasion,
peut-être d'ici la fin de cette session ou au début de l'autre
session, il faudre revoir et c'est très important ce
programme d'implantation des ressources pour les personnes âgées.
Je ne voudrais pas, M. le Président, à ce moment-ci,
empiéter sur la période des questions mais tout à l'heure
je reviendrai pour demander des précisions au ministre sur un article
qui a paru dans le journal Le Soleil d'aujourd'hui disant que la province
s'expose à perdre une somme de $4 millions si les constructions qui
étaient en cours ou qui étaient à la veille de
démarrer ne sont pas reprises et continuées. Je demanderai
tantôt au ministre, à la période des questions, de
répondre précisément à ce point particulier du
programme de mise en place des ressources.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Sauveur.
M. BOIS: M. le Président, nous apprécions qu'un tel
rapport ait été soumis. J'espère qu'à la
lumière des chiffres que nous donne l'honorable ministre des Affaires
sociales, ce rapport couvre non seulement les maisons d'hébergement des
personnes âgées mais aussi les maisons de toutes
catégories. Je crois bien qu'il y a souvent lieu dans ce domaine
d'apporter des améliorations aux maisons d'hébergement qui
existent à l'heure actuelle sans avoir à grever le budget de la
province de Québec de millions de dollars pour faire des constructions
neuves. Je crois bien que l'honorable ministre et son personnel
étudieront cette situation à la lumière des conditions qui
prévalent dans la plupart des institutions existantes.
Dans l'ensemble, nous sommes heureux de constater que ce rapport a
été fourni et que ceci permettra au ministre des Affaires
sociales d'améliorer les conditions générales de la
population lorsqu'il y a lieu de le faire et cela à un coût
général moindre pour la population. Merci, M. le
Président.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.
M. LAURIN: M. le Président, la lecture du rapport de la mission
Gendron est susceptible de provoquer énormément
d'inquiétudes au sein de la population. Pour ma part, je ne savais pas
que la situation était à ce point grave. Ceci nous montre qu'un
vigoureux coup de barre doit être donné dans les délais les
plus brefs. Je suis heureux que le ministre de la Santé, avec son sens
habituel des responsabilités, nous ait énuméré
toute une série de réformes qui doivent être prises
immédiatement.
Je souhaite qu'elles soient prises le plus rapidement possible, mais je
me demande, étant donné la gravité de la situation et le
nombre d'établissements où nous avons observé de graves
défauts, s'il n'est pas temps de penser aux formules d'assistance pour
les personnes âgées. Peut-être est-il temps de se demander
si le système, auquel on a pensé il y a une quinzaine ou une
vingtaine d'années, est le plus apte à répondre aux
besoins de ce secteur de la population.
Je voyais, aujourd'hui dans les journaux, que le ministre des Affaires
sociales a commencé à élaborer, à haute voix, les
éléments d'une nouvelle politique. Dans le projet de
législation, dont il nous a parlé tout à l'heure, j'ai vu
qu'il avait plutôt tenté de régler, d'apporter des
palliatifs aux problèmes actuels. J'aimerais savoir, s'il le veut bien,
s'il a pensé également à une formulation nouvelle des
méthodes d'assistance à ce secteur de la population.
M. LE PRESIDENT: Y a-t-il permission de la Chambre?
UNE VOIX: Oui.
M. CASTONGUAY: Je voudrais tout simplement faire un très bref
commentaire. Demain ou après-demain, n'ayant pu justement participer aux
débats sur la loi présentée par le ministre des Affaires
municipales, la Loi modifiant la Loi de l'habitation familiale, c'est mon
intention de faire une déclaration destinée à faire le
point sur les mesures plus concrètes que nous prenons et que nous
entendons prendre relativement aux foyers pour personnes âgées et
d'autres ressources à ce stade-ci.
M. LE PRESIDENT: Y a-t-il d'autres déclarations
ministérielles? Dépôt de documents.
Rapport du ministère du Travail
M. FOURNIER: M. le Président, au nom du ministre du Travail et de
la Main-d'Oeuvre, j'ai l'honneur de vous soumettre le rapport annuel du
ministère. Je voudrais signaler à la Chambre que le document est
signé par Pierre Laporte et qu'il s'agit probablement du dernier
document officiel portant la signature de notre regretté
collègue.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Education.
Rapport de la Commission consultative de
l'enseignement privé
M. SAINT-PIERRE: Suivant l'article 8, de la Loi de l'enseignement
privé, il me fait plaisir de déposer aujourd'hui le premier
rapport annuel de la Commission consultative de l'enseignement privé
pour la période allant du 25 mars 1969 au 30 septembre 1970.
Ce rapport résume les activités de la commission depuis sa
formation, le 12 mars 1969, et fournit une liste complète des demandes
recommandations et décisions qui ont été prises dans tous
les cas touchant, soit la reconnaissance d'intérêt public,
où le gouvernement donne une subvention à 80 p. c. du coût
moyen dans le secteur public, soit des demandes de reconnaissance pour fins de
subventions, où la part gouvernementale est de 60 p. c. ou soit encore
simplement l'émission d'un permis d'enseignement où il n'y a
aucune contribution financière du gouvernement.
On retrouve, dans ce rapport, la méthodologie suivie par le
comité, les critères d'évaluation, l'analyse de certains
problèmes particuliers, dont la détermination du coût moyen
dans le secteur public, les frais maximums alloués, les cautionnements
requis, l'enseignement professionnel intensif et le cas des étudiants
étrangers. En déposant ce rapport, je signale que la commission a
reçu plus de 794 demandes et qu'après étude elle a
recommandé 278 cas pour des reconnaissances d'intérêt
public, 90 cas pour des reconnaissances pour fins de subventions, 286 permis
d'enseignement et 85 refus; 68 cas sont encore en suspens.
Les décisions du ministre de l'Education, qui n'est pas tenu de
suivre à la lettre les recommandations de cette commission consultative,
ont été essentiellement dans la ligne des recommandations, sauf
qu'en général il y a eu 10 cas de recommandations
d'intérêt public où le ministre n'a pas
accédé aux recommandations de la commission.
Je tiens, en terminant, à signaler que sur les 1.8 million
d'étudiants qui fréquentent les écoles du Québec,
on en retrouve 47,310 qui fréquentent les institutions d'enseignement
privé.
M. PAUL: M. le Président, je crois que nous venons d'assister
à un précédent dangereux. S'il faut que chaque ministre
nous donne un résumé du document qu'il dépose, nous allons
commencer nos travaux quotidiens à une heure assez avancée. Je
crois que la déclaration que vient de faire le ministre de l'Education
était pour le moins inutile.
M. LE PRESIDENT: Moi, j'ai cru comprendre qu'il s'agissait d'une
déclaration ministérielle.
M. PAUL: Non, non, d'un dépôt de documents.
M. LE PRESIDENT: Je crois qu'à ce moment les
députés pourraient interrompre le ministre dès le
début et qu'il ne pourrait procéder qu'avec le consentement
unanime de la Chambre.
M. PAUL: M. le Président, vous remarquerez que nous sommes
très polis.
M. LE PRESIDENT: Questions des députés.
Questions et réponses
Budget supplémentaire
M. BERTRAND: M. le Président, j'avais demandé au premier
ministre la semaine dernière s'il y aurait un budget
supplémentaire. Il m'a alors dit qu'il y en aurait peut-être un,
mais plutôt en février. Est-ce qu'il a changé
d'idée?
M. BOURASSA: II y aura un budget supplémentaire.
M. BERTRAND: Quand?
M. BOURASSA: Demain ou après-demain. Demain.
M. BERTRAND: Un gros montant?
M. BOURASSA: Un million cent quarante-trois mille.
M. BERTRAND: Cela, c'est le premier budget supplémentaire. Le
deuxième viendra pour $100 millions en février?
M. BOURASSA: Est-ce que le chef de l'Opposition a des relations directes
avec le ministère des Finances? Où prend-il le chiffre de $100
millions?
M. BERTRAND: Non, non, vous avez assez d'un jeune dictateur
là!
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.
Assurance-chômage
M. SAMSON: M. le Président, j'aimerais poser une question
à l'honorable premier ministre. Comme le premier ministre en est
sûrement au courant, dans l'entreprise privée, on oblige les
employés à payer et les employeurs à percevoir des
employés des contributions d'assurance-chômage. Or, il se trouve
que dans le domaine des employés saisonniers du gouvernement 12,000
personnes ne paient actuellement pas d'assurance-chômage et ne sont donc
pas susceptibles de retirer actuellement des prestations.
Est-ce qu'on pourrait savoir si le gouvernement a l'intention de faire
des arrangements spéciaux qui permettraient à tous ces gens de
retirer de l'assurance-chômage durant l'hiver qui s'en vient?
M. BOURASSA: Je prends avis de la question. Je pense que je pourrai
répondre demain au chef du Ralliement créditiste. C'est une
question qui a des implications avec le ministère des Affaires sociales
et avec le ministère du Travail.
M. LE PRESIDENT: Le député de Bourget.
Caisse d'aide à la santé
M. LAURIN: Ma demande s'adresse au ministre des Affaires sociales. Dans
les réponses qu'il me donnait vendredi aux questions que je lui posais
et que j'ai relues avec une extrême attention, le ministre des Affaires
sociales a mentionné que le gouvernement avait modifié l'attitude
prise par l'ancien gouvernement sur deux points très importants,
c'est-à-dire la répartition de la caisse d'aide à la
santé exclusivement en fonction de la population de chaque province, ce
qui était la politique antérieure, et, deuxièmement,
l'octroi direct par le gouvernement fédéral de subventions
à des institutions québécoises sur un fonds de $2.5
millions qui restait.
Est-ce que le ministre pourrait nous expliquer les raisons qui à
ses yeux ont pu justifier une attitude qui, du moins à première
vue, semble être un recul par rapport à l'attitude de l'ancien
gouvernement?
M. CASTONGUAY: M. le Président, je n'ai pas relu le journal des
Débats, mais je ne crois pas avoir dit que nous avions modifié
une attitude qui modifiait celle qu'avait prise l'ancien gouvernement?
En ce qui a trait à la caisse d'aide à la santé,
une première décision avait été prise d'attribuer
$325 millions de cette caisse, et sur les $175 millions qui restaient, il n'y
avait jamais eu d'entente définitive de conclue. Le gouvernement
fédéral aurait pu, en vertu de la loi, les distribuer, comme la
loi le dit, pour des projets d'aide d'importance nationale. Or, à la
suite des discussions des dernières années, des discussions des
derniers mois, il a convenu de le distribuer sur une base per capita.
Je ne sais pas si sur ce point, le gouvernement précédent
avait une attitutde différente relativement à ces $175 millions.
Peut-être, Je ne le sais pas. Je n'ai pas voulu, en tout cas, laisser
entendre dans mes commentaires qu'il y avait différence ou accord sur ce
point avec le gouvernement précédent.
Subventions spéciales
M. CASTONGUAY: En ce qui a trait à l'autre question, les
subventions spéciales, encore sur ce point je ne sais pas si le
gouvernement précédent avait pris une position sur ce programme.
Tout ce que j'ai voulu faire, c'est donner la position que nous avions prise
à l'effet que ces subventions ne pouvaient, à notre sens,
être distribuées sans qu'il y ait consultation préalable
avec les provinces concernées.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Montmagny.
M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, si j'ai bien compris,
on me demande de donner des précisions sur les positions
antérieures. Il est exact, comme l'a dit le ministre il y a un instant,
qu'une somme de $325 millions était distribuée sur une base per
capita. Quant au résidu, il n'y avait pas eu d'entente de prise, mais un
certain montant du solde devait être distribué en deux parties.
Une partie était en discussion, cela n'a jamais été
réglé, mais notre attitude était que la répartition
devait se faire également sur une base per capita pour une partie
importante de ce montant. Je ne me souviens pas exactement quelles
étaient les proportions. Le solde devait être distribué
pour des projets d'intérêt national. L'attitude du Québec
avait été ferme à chacune des conférences
fédérales-provinciales; toute la différence entre $500
millions et $325 millions ne devait pas être distribuée sur une
base d'intérêt national, parce que le Québec se serait vu
privé de certaines sommes qui lui revenaient de droit à
même la caisse de la santé. C'était la position du
Québec.
Quant aux subventions à l'hygiène, évidemment, nous
nous étions aussi opposés à ce que le
fédéral donne des sommes directement, dans ce secteur
particulier, à des organismes privés ou semi-privés ou
publics sans que le Québec n'ait d'abord donné son accord. A une
conférence des ministres de la Santé des provinces, à
Halifax, en particulier, alors qu'il y avait un observateur du
fédéral le docteur Armstrong, si je me souviens bien
les provinces, suivant en cela l'initiative du Québec, avaient
exprimé le désir que ces subventions ne soient données
qu'après que les provinces, et en particulier le Québec,
aient eu accès aux dossiers et aient donné leur accord, de
façon que ça ne vienne pas en conflit avec la politique
générale du Québec dans ces matières.
M. LE PRESIDENT: II n'y a pas de question.
L'honorable député de Lotbinière.
Syndicalisme agricole
M. BELAND: M. le Président, une question au ministre de
l'Agriculture et de la Colonisation. A la suite de plusieurs rencontres avec
l'UCC et les différents députés des régions rurales
principalement, nous aimerions savoir si le ministre a l'intention de
déposer le projet de loi sur le syndicalisme agricole avant la fin de la
présente session, tel qu'il l'avait promis il y a trois semaines.
M. LEVESQUE: Cette question a déjà fait l'objet d'une
réponse, plus d'une fois durant la session. J'ai eu moi-même
l'occasion de répondre à cette question en disant que je ne
croyais pas que, d'ici la fin de la session, nous puissions étudier ce
projet de loi, ni même qu'il soit déposé. C'est ce que
j'avais répondu dans le temps.
M. DUMONT: M. le Président, sur une question de privilège.
Il y a eu, en fin de semaine, des rencontres très importantes de tous
les partis politiques avec consultation des membres de l'UCC et autres et
chaque membre de l'UCC s'inquiète à savoir...
M. LEVESQUE: M. le Président, je dois m'opposer à ce genre
d'intervention...
M. DUMONT: Question de privilège, M. le Président.
M. LEVESQUE: ... car la question a reçu une réponse. C'est
une façon indirecte d'essayer de faire ce qu'on ne peut pas faire
directement.
M. LE PRESIDENT: J'ai écouté attentivement le
député de Mégantic, mais je n'ai encore rien vu, dans son
intervention, qui pouvait lui permettre de soulever une question de
privilège.
M. DUMONT: J'essayais d'expliquer, M. le Président, qu'en
présence de faits nouveaux la question était plus
d'actualité que jamais. Nous exigeons une réponse du
ministre.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bellechasse.
Déclaration de M. Lacroix
M. LOUBIER: M. le Président, est-ce que le premier ministre
partage l'opinion ou le juge- ment émis par le député des
Iles-de-la-Madeleine dont le Soleil, en page 6, rapporte les propos. Le titre
est le suivant: "II y a aussi des ratés parmi les députés
et les ministres". Or, je me demande sérieusement si le premier
ministre...
UNE VOIX: Nommez-les.
M. LOUBIER: ... a l'intention de laisser un député
perpétuer des accusations, perpétuer des jugements qui sont le
fruit de je ne sais quel sentiment...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LACROIX: C'est l'ancien gouvernement, M. le Président.
M. LOUBIER: Je m'aperçois que le député des
Iles-de-la-Madeleine vient en premier lieu et qu'il s'est reconnu parmi ces
députés-là. Mais, sérieusement, je demande au
premier ministre s'il a l'intention...
UNE VOIX: De les nommer.
M. LOUBIER: ...de laisser un député perpétuer de
telles idées un peu partout et les répandre dans le
Québec.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BOURASSA: M. le Président, le député de
Bellechasse sait fort bien ce qu'a voulu dire le député des
Iles-de-la-Madeleine.
M. GAGNON: C'est pour cela qu'il se lève.
M. BOURASSA: C'est normal...
M. GAGNON : II veut des explications.
M. BOURASSA: ...que, dans toutes les professions, dans tous les
métiers, il y en ait d'excellents et aussi des moins bons! C'est tout ce
que le député des Iles-de-la-Madeleine...
M. LOUBIER: Alors, est-ce que le premier ministre se satisfait
même si c'est cruel si je prends ses propos d'avoir des
ratés dans son cabinet?
M. LACROIX: Ce n'est pas pire que l'ancien cabinet dont vous faisiez
partie.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! L'honorable député
de Chicoutimi.
Humaniser le mode de perception
M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'ai une question
à poser au premier ministre. Le ministre du Revenu a annoncé, en
fin de semaine dernière, que le gouvernement a l'intention d'humaniser
le mode de perception
des taxes et des impôts. Alors, le premier ministre pourrait-il
nous faire connaître, dès maintenant, les normes et les
critères nouveaux qui rendront moins douloureuse la sortie de l'argent
des goussets des contribuables?
M. BOURASSA: M. le Président, je pense que le
député de Chicoutimi aura l'occasion de poser toutes les
questions lorsque les crédits de l'excellent ministre du Revenu, qui
vient de la même région que le député de Chicoutimi,
seront discutés à l'Assemblée nationale. Cela ne me
paraît pas une question absolument urgente, comme telle. Le principe est
admis: il faut humaniser la perception de l'impôt. Je pense qu'il n'est
pas nécessaire que je donne tous les détails aujourd'hui.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, question
additionnelle, Le premier ministre m'a répondu. Je prends sa
réponse. Il reste que la déclaration à laquelle je faisais
allusion est récente et qu'elle était l'annonce d'une politique
gouvernementale. Alors, je voudrais savoir si le premier ministre a l'intention
de déposer un projet de loi qui rende très douce, très
bénigne, très gentille l'extorsion des fonds des
contribuables.
M. BOURASSA: M. le Président, je ne sais pas si le
député tient à une réponse ou s'il pose des
questions, comme ça, pour essayer de mettre en relief certains
problèmes. Le fait d'humaniser la perception des impôts comme les
procédures administratives dans le cas des affaires sociales, c'est une
politique générale du gouvernement. Nous donnerons tous les
détails. S'il le faut, nous pourrons apporter des amendements
législatifs pour appliquer cette politique.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que cela veut dire une diminution des
taxes et des impôts?
M. PINARD: A l'ordre!
M. BOURASSA: Bien, la question pourrait s'adresser au ministre des
Finances.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce une diminution de taxes ou
d'impôts ou bien...
M. BOURASSA: M. le Président...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... une façon
détournée...
M. PINARD: A l'ordre!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...d'en prendre davantage, sans que les gens
s'en rendent compte?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
L'honorable député de Lafontaine.
M. BOURASSA: Ce que je puis dire au député de Chicoutimi,
c'est que les réductions de taxes, c'est moi qui vais les annoncer; les
hausses de taxes, c'est le ministre des Finances qui va les annoncer.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je voulais savoir ça!
M. HARVEY (Jonquière): M. le Président...
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre du Revenu.
M. HARVEY (Jonquière): ...est-ce que vous me permettriez de
suggérer à mon collègue, le député de
Chicoutimi, de prendre connaissance de mon texte qu'il recevra dans quelques
jours? Il verra qu'il y a des fois où, lorsqu'on est juste, on peut le
faire de façon humaine.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Lafontaine
Discussions du ministre des Communications
M. LEGER: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des
Communications. Etant donné qu'il n'a pas jugé bon de nous faire
rapport de ses discussions avec le ministre Kierans d'Ottawa, vendredi dernier,
est-ce que le ministre pourrait me dire, premièrement, si le
gouvernement fédéral a décidé d'accorder à
l'Hydro-Québec un permis pour son réseau de micro-ondes du
Haut-Saint-Maurice et deuxièmement, s'il a accepté de
reconnaître l'autorité du Québec sur la
télévision par câble?
M. L'ALLIER: M. le Président, en réponse à cette
question, d'abord, en ce qui a trait à l'Hydro-Québec, nous avons
discuté avec M. Kierans des critères employés par le
ministère fédéral des Communications pour le licenciement
de nouveaux réseaux. Vous n'ignorez pas que le gouvernement
fédéral a légèrement modifié ses
critères de licenciement de réseaux depuis 1969. Nous avons
discuté de ces critères.
J'ai rencontré M. Kierans avec le ministre des Richesses
naturelles. La rencontre, pour ce qui a trait de l'Hydro-QuébeG, doit se
poursuivre au cours des prochaines semaines afin que nous puissions en arriver
à une entente quant au développement harmonieux du réseau
de l'Hydro-Québec, sans que ce soit contradictoire avec la
réglementation fédérale quant à l'attribution des
ondes.
Pour ce qui est de la télévision par câble, cette
question n'est pas de la juridiction du ministre Kierans, qui est ministre des
Communications, mais relève davantage du ministère des
Transports.
M. LEGER: Une question supplémentaire. M. le Président. Le
ministre pourrait-il nous dire si le gouvernement fédéral a
modifié son attitude concernant l'émission d'un permis de
radiodiffusion à Radio-Québec?
M. L'ALLIER: Cette question n'a pas été abordée
lors de nos rencontres.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Abitibi-Ouest.
Infirmiers dans les foyers
d'hébergement
M. AUDET: Ma question s'adresse au ministre de la Santé. M. le
ministre de la Santé, votre ministère a-t-il prévu, dans
son programme de révision générale des foyers
d'hébergement, de doter ces établissements de services
infirmiers, comme certains de ces foyers en possèdent dans la province?
Ceci permettrait à ces foyers d'accepter les personnes
âgées, même si elles ne sont pas en parfaite
santé.
M. CASTONGUAY: M. le Président, je ne sais pas si c'est une
question tellement urgente, encore là. De toute façon, au cours
de la déclaration que je ferai, j'essayerai d'englober ces divers
points.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Maskinongé.
Restructuration scolaire
M. PAUL: M. le Président, nous continuons de recevoir certains
mémoires de la part d'organismes intéressés dans la
restructuration scolaire dans l'île de Montréal. Par
conséquent, je me permets de poser une question à l'honorable
ministre de l'Education aux fins de lui demander s'il sera en mesure de nous
faire une déclaration ministérielle sur ce point avant la fin de
la présente session.
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, j'ai déjà fait
une déclaration au début de la session touchant tout le
problème de la restructuration sur l'île de Montréal.
J'avais dit, à cette époque, que nous avions consulté tous
les organismes qui n'avaient pas eu le temps de présenter un
mémoire devant la commission parlementaire, l'an dernier, leur demandant
de nous faire parvenir leur mémoire.
Plusieurs de ces organismes l'ont fait. Leurs mémoires ont
été dûment enregistrés à la commission par
les secrétaires et les fonctionnaires. Nous avons fait l'analyse de
l'ensemble de ces mémoires et il semble qu'aucune suggestion, aucun
propos, aucune conception nouvelle ne soit apparue dans ces nouveaux
mémoires de groupes souvent, peut-être, en général,
plus secondaires que ceux qui avaient eu l'occasion de présenter un
mémoire à la commission parlementaire. Nous avons refait, par la
suite, l'analyse de l'ensemble des recommandations. Il ne me semble pas
opportun et désirable, avant de présenter une loi de convoquer la
commission parlementaire.
M. CHARRON: Une question supplémentaire, M. le Président,
au ministre de l'Education. Est-ce que la politique ou la décision que
vient d'annoncer le ministre veut dire que lorsque le gouvernement
déposera son propre projet de loi sur la restructuration scolaire, il
n'y aura plus possibilité pour les différents organismes de se
faire ententre et de reprendre à nouveau les souhaits de modification
qu'ils auront exprimés lors de l'ancien projet de loi?
M. BOURASSA: Pendant quatre ans.
M. CHARRON: Cela ne me surprendrait pas de vous, pendant quatre ans, par
exemple, mais de la part des organismes...
M. BOURASSA: Si vous posez la question...
M. CHARRON: Les organismes sont nettement plus pressés que le
gouvernement dans cette matière, je vous le signalerai.
M. BOURASSA: Nous avons démontré le contraire
aujourd'hui.
Jeux du Québec
M. LOUBIER: M. le Président, ma question s'adresse au ministre de
l'Education. Le ministre de l'Education pourrait-il nous dire quelles sont les
raisons qui ont motivé sa décision de désigner
Rivière-du-Loup comme étant l'endroit où se
dérouleraient les jeux du Québec, de préférence
à d'autres villes qui en avaient fait la demande?
M. SAINT-PIERRE: Comme je l'ai mentionné, lors de la
conférence de presse, il ne s'agit pas d'une décision du ministre
de l'Education. Nous avions constitué un jury qui se composait
essentiellement de tous les membres de la Corporation des jeux du
Québec, plus quatre fonctionnaires représentant les
ministères les plus concernés par les jeux. La décision
transmise par le ministre de l'Education était la décision du
jury qui, pendant toute une journée, avait revu les candidatures des
quatre villes qui avaient fait valoir, pour les jeux du Québec comme
pour d'autres jeux olympiques ou d'autres jeux sportifs, les avantages, les
mérites, les points pertinents à leur candidature.
Alors en désignant Rivière-du-Loup, je n'ai fait que
transmettre la décision du jury. Comme je l'ai indiqué à
cette occasion, dans un esprit olympique international, il ne m'apparaît
pas opportun de divulguer quelles sont les raisons pour lesquelles une ville a
été choisie plutôt
qu'une autre. C'est simplement l'étude des dossiers par le jury,
par des personnes que je considère à la fois compétentes
et dégagées de toute influence indue qui ont recommandé,
tenant compte de l'ensemble de la situation au Québec, que pour 1971,
Rivière-du-Loup soit désignée la ville qui doit
présenter les Jeux du Québec.
M. LOUBIER: Une question supplémentaire. Est-ce que l'honorable
ministre ne pourrait pas au moins nous dire si c'est l'élément ou
le facteur du meilleur équipement ou du meilleur endroit
stratégique qui a prévalu ou donner l'idée maîtresse
qui a présidé à cette décision qui a
été ratifiée par le ministre?
M. SAINT-PIERRE: Comme je l'ai mentionné, je pense que, dans
l'esprit olympique, c'est la même chose qui a eu lieu sur le plan
international. Ce n'est pas la coutume de dévoiler les raisons
profondes, mais c'est évident que c'est une étude, une analyse
objective de l'ensemble des facteurs qui peuvent assurer le succès des
jeux de 1971.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Témiscouata.
Projets de foyers pour personnes
âgées
M. SIMARD (Témiscouata): M. le Président, ma question
s'adresse au ministre de la Famille et du Bien-Etre social. Le ministre de la
Famille a évoqué, il y a quelques instants...
M. BOURASSA: Le ministre des Affaires sociales...
M. SIMARD (Témiscouata): ... le ministre des Affaires sociales,
si vous voulez, a évoqué, il y a quelques instants, la
disparition du foyer Notre-Dame-du-Lac. Est-ce que le ministre aurait
l'intention de réviser la décision prise par son ministère
de biffer des projets en priorité dans la province et le projet de
Notre-Dame-du-Lac? Je crois que ce serait une manière toute
spéciale de marquer l'anniversaire d'un des pires désastres que
le Québec ait connus. Deuxièmement, pourrait-il démentir
en même temps l'article paru dans les journaux d'aujourd'hui, à
l'effet que le Québec perdrait au- delà de $4 millions pour la
construction de foyers? Cela aiderait certainement le premier ministre à
remplir l'engagement de ses 100,000 nouveaux emplois, du moins durant le temps
de la construction de ce foyer.
M. CASTONGUAY: II est évident que c'est facile de faire appel
à la sympathie à la suite de l'incendie de l'an dernier, mais je
ne crois pas que les décisions de construction d'hôpitaux et de
foyers doivent être prises à partir de sentiments de ce
genre-là. En ce qui a trait au foyer de Notre-Dame-du-Lac, je serai
disposé à répondre à d'autres questions sur ce cas
particulier ou sur d'autres, soit à la suite de la déclaration
que je vais faire sur le sujet pour annoncer la politique que nous entendons
suivre. En ce qui a trait aux $4 millions auxquels fait allusion le
député de Témiscouata, suite à un article
mentionné dans le Soleil d'aujourd'hui, j'aurai également
quelques mots à dire sur cette nouvelle qui est non fondée.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Berthier.
Traverse de Sorel
M. GAUTHIER: M. le Président, ma question s'adresse au ministre
des Transports. La Chambre de commerce régionale de Lanaudière
m'informe, par un télégramme, sous la signature de son
secrétaire, M. Gilles Loyer, que la Compagnie de la Traverse du
Saint-Laurent, qui opère des traversiers entre l'île Saint-Ignace
et Sorel, discontinuerait son service de nuit, à partir de dix heures ce
soir. L'honorable ministre est-il au courant de cette situation et qu'entend-il
faire pour remédier à cette situation? D'autant plus qu'on
m'informe que des actes de violence seraient à craindre si rien n'est
fait.
M. TREMBLAY (Bourassa): M. le Président, j'aimerais bien
répondre à la question de l'honorable député de
Berthier. Mais j'arrive, je ne suis que depuis quelques minutes au
Québec. Je suis descendu de l'avion...
M. BERTRAND: Oh, oui. Il est allé en Angleterre.
M. TREMBLAY (Bourassa): Je ne suis pas très au courant des
derniers événements. Je peux vous dire que, la semaine
dernière, nous avons tout fait, mon sous-ministre, mon ministère
et moi, pour que le traversier de Sorel...
M. PAUL: Vous n'y étiez pas.
M. TREMBLAY (Bourassa): ... à Berthier ait les mêmes
privilèges que ceux de Lévis et de Québec.
M. GAUTHIER: Une question additionnelle. Cela veut dire qu'à
toutes fins utiles, d'ici ce soir, il n'y a rien à espérer.
M. TREMBLAY (Bourassa): Je ne peux pas vous répondre
immédiatement. Peut-être que je pourrai vous répondre dans
une heure.
UNE VOIX: II va demander à son sous-ministre.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de Beauce.
Projets municipaux contre le chômage
M. ROY (Beauce): M. le Président, j'aurais une question à
poser à l'honorable premier ministre. Pour être en mesure de
répondre adéquatement aux nombreuses demandes d'information que
nous avons de nos différentes municipalités rurales, est-ce que
le premier ministre pourrait nous dire si la partie qui doit être
attribuée au Québec des $150 millions du budget Benson pourrait
être prêtée pour des projets municipaux plutôt que
pour des projets provinciaux, de façon à trouver un moyen pour
résoudre le problème du chômage qui sévit dans nos
petites municipalités?
M. BOURASSA: II y a plusieurs façons de combattre le
chômage, grâce à l'action des ministères du
gouvernement du Québec ou des municipalités. Je pense qu'il
conviendrait davantage que la question du député soit inscrite au
feuilleton. Je ne sais pas exactement ce qu'il veut savoir au juste.
M. ROY (Beauce): Ce que je veux savoir au juste, M. le Président,
c'est si les quelque $44 millions qui doivent être attribués au
Québec, sous forme de prêt du gouvernement fédéral,
seraient mis à la disposition des différentes
municipalités du Québec pour des projets municipaux.
M. BOURASSA: Ce n'est pas un montant de $44 millions. Il y a de $160
millions à $170 millions, plus les subventions aux régions
désignées qui peuvent atteindre environ $100 millions. Le
député réfère-t-il aux prêts de la
Société centrale d'hypothèques? Réfère-t-il
au fonds d'aide conjoncturelle? Réfère-t-il aux projets des
différents ministères? Ne pourrait-il pas être un peu plus
précis dans sa question? Je pourrais être plus précis dans
mes réponses.
M. ROY (Beauce): Je m'excuse, M. le premier ministre, je vais essayer
d'être plus précis. Les différentes municipalités du
Québec ont divers travaux municipaux à faire, autres que ceux que
vous venez de mentionner. Il s'agit de travaux publics que font les
municipalités pour l'amélioration de rues ou de ponts, de
différents travaux, quoi. Je veux savoir si le gouvernement a
l'intention d'élaborer prochainement une politique afin de mettre des
fonds à la disposition des municipalités qui auraient des travaux
municipaux à faire.
M. BOURASSA: Tout ce que je puis dire à la suite de cette
nouvelle question qui n'est guère plus précise que les
précédentes, c'est que le gouvernement fera tout ce qu'il peut
pour combattre le chômage.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Sainte-Marie.
M. ROY (Beauce): M. le Président, nous allons être assez
embarrassés pour répondre aux différents maires qui nous
posent cette question.
M. LE PRESIDENT; (Hardy): A l'ordre! S'agit-il d'une question
supplémentaire?
M. ROY (Beauce): On pourrait peut-être nous le dire de
façon définitive, M. le Président. Ce serait une question
supplémentaire.
M. LE PRESIDENT (Hardy): A l'ordre! L'honorable premier ministre a
répondu à la question.
L'honorable député de Sainte-Marie.
Médicaments aux assistés sociaux
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, ma question
s'adresse au ministre des Affaires sociales. Vendredi dernier, le ministre nous
a dit qu'il avait demandé à certains hôpitaux de continuer
à distribuer des médicaments aux assistés sociaux. Le
ministre pourrait-il nous dire le nom de ces hôpitaux et s'il y en a qui
sont situés en dehors de Montréal?
M. CASTONGUAY: Je prends avis de la question et je vais obtenir le
renseignement, M. le Président.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Saguenay.
L'avenir du traversier Manic
M. LESSARD: M. le Président, ma question s'adresse au ministre
des Transports. Actuellement, des discussions se poursuivent entre le
gouvernement fédéral et le gouvernement provincial concernant le
Manic qui faisait autrefois le service entre Pointe-au-Père et
Forestville. Pourrions-nous savoir où en sont actuellement ces
discussions et si une décision a été prise sur l'avenir du
Manic?
M. TREMBLAY (Bourassa): M. le Président, aucune décision
n'a été prise. Nous sommes actuellement à étudier
ce cas. Je ferai tout mon possible pour ne pas étudier durant quatre
ans, comme d'autres l'ont fait. Je demanderais toutefois au
député de Saguenay d'attendre encore deux semaines et je lui
donnerai une réponse.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Saint-Maurice.
Communauté urbaine de Hull
M. DEMERS: Ma question s'adresse à l'honorable premier
ministre.
En fin de semaine, je prenais connaissance,
ainsi qu'une foule de collègues, d'un certain article de journal
qui est réputé sérieux à l'effet qu'il y aurait
quelque chose de pas trop catholique dans la région de Hull au sujet
d'une certaine communauté urbaine. Le premier ministre a-t-il fait
enquête à ce sujet et, s'il prétend que les renseignements
rapportés par le journal sont fondés, quelle sera la position du
gouvernement dans ce cas?
M. BOURASSA: Je n'ai pas lu l'article du journal. A quel journal
réfère le député?
M. DEMERS: Pourtant, hier, à Radio-Mutuel, vous disiez que vous
aviez lu cet article.
M. BOURASSA: Je n'ai pas lu l'article.
M. DEMERS: Ou que vous iriez en prendre connaissance.
M. BOURASSA: Cela est absolument faux, M. le Président.
M. DEMERS: Je prends votre parole, M. le premier ministre.
M. BOURASSA: J'ai dit hier, à la radio, que j'avais entendu
parler du problème du transport.
M. DEMERS: Pour votre information, c'est Québec-Presse; je vous
l'enverrai.
M. BOURASSA: Le député doit prendre ma parole. Je n'ai pas
lu l'article auquel réfère le député.
M. DEMERS: Pour l'information du premier ministre, c'est
Québec-Presse; je vous l'enverrai par livraison spéciale.
UNE VOIX: Ce n'est pas un journal sérieux.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Montcalm.
Déclaration de M. Jean Marchand
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, j'espère que le
premier ministre a lu le Soleil du lundi 14 décembre. Ce journal nous
rapportait que M. Marchand, le ministre fédéral de l'Expansion
économique régionale, lors d'une déclaration dans la
région de Montréal, promettait, pour d'ici 1973, 100,000
emplois.
M. le Président, est-ce que ce sont là 100,000 emplois de
plus que les 100,000 nouveaux emplois du premier ministre du Québec?
Est-ce que ce sont là 100,000 nouveaux emplois pour remplacer les
100,000 nouveaux emplois du premier ministre du Québec? Si tel est le
cas, ce dernier acceptera-t-il d'être remplacé à son poste
par M. Marchand?
M. BOURASSA: M. le Président, même si la question est
posée d'une façon plus ou moins sérieuse, je pense qu'on
peut signaler ici que c'est peut-être l'occasion...
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, contre les dires du premier
ministre, je sais que le premier ministre a lancé des ballons concernant
les 100,000 nouveaux emplois.
M. LE PRESIDENT (Hardy): A l'ordre! DES VOIX: Règlement!
Règlement!
M. MASSE (Montcalm): De là à croire que ceux qui en
parlent ne sont pas sérieux...
M. LE PRESIDENT (Hardy): Je rappelle le député de Montcalm
à l'ordre.
M. MASSE (Montcalm): ... le premier ministre n'en a pas le droit. Ne
pourrions-nous pas nous asseoir tous les deux, le président est debout?
Merci, M. le Président.
M. LACROIX: Petit politicologue. M. BOURASSA: M. le Président...
M. LACROIX: Petit politicologue.
M. BOURASSA: ... je pense que c'est l'occasion, à la suite de la
question du député de Montcalm, de signaler les efforts
considérables que fait M. Jean Marchand pour relancer l'économie
du Québec. Il a signalé, à cette occasion-là, que
les projets qu'il dépose à la Chambre des communes devraient
créer 75,000 à 100,000 nouveaux emplois d'ici 1973. Je pense que
c'est une mesure, au niveau fédéral, qui va compléter tout
le travail fait au niveau provincial, de même que le travail fait par le
capital privé. Les trois piliers de la croissance économique au
Québec sont: le gouvernement du Québec, l'action
fédéral et le capital privé. Cela devrait permettre de
combattre le chômage d'une façon efficace.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, une question
supplémentaire. Le premier ministre tient-il dans sa comptabilité
à lui les 100,000 nouveaux emplois créés par l'honorable
Jean Marchand, ou si c'est deux comptabilités distinctes, ce qui ferait
200,000 nouveaux emplois? C'est la réponse à cette
question-là que nous voulons savoir.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Lévis.
M. ROY (Lévis): M. le Président, pour redevenir
sérieux, ma question s'adresse à l'honorable ministre de la
Santé.
M. MARCHAND: Dire qu'il voudrait être chef de l'Union
nationale!
Nouveaux hôpitaux sur la rive sud
M. ROY (Lévis): L'honorable ministre entend-il prendre les
mesures nécessaires et nous dire si, dans son programme, du
côté de la rive sud, il projette de faire construire un nouvel ou
des nouveaux hôpitaux, ou agrandir celui qui existe en ce moment, afin
qu'au moins les malades qui sont malades d'une façon urgente...
il y a des malades qui le sont moins que d'autres au moins, quand il
s'agit d'urgences, que ces malades puissent être hospitalisés dans
nos hôpitaux de la rive sud sans attendre deux ou trois jours avant de
pouvoir être traités et rester dans une salle d'urgence?
M. CASTONGUAY: M. le Président, c'est la première fois que
l'on m'indique, d'une façon particulière, qu'il y a un
problème au sujet des adminissions d'urgence dans la région de
Lévis. J'ai reçu les membres de la corporation de
l'Hôtel-Dieu de Lévis, qui m'ont parlé du problème
des malades chroniques, mais c'est la première fois que l'on me signale
la difficulté d'hospitaliser les cas d'urgence. Je prends avis de la
question et je vais l'examiner.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Je dois rappeler aux honorables
députés que la période réservée aux
questions des députés est maintenant terminée.
Industries Valcartier
M. LEVESQUE: Avec le consentement de la Chambre, j'aimerais
répondre à une question qui avait été
considérée comme avis. Le député de Portneuf
m'avait demandé de lui faire connaître l'attitude que le
gouvernement entendait prendre au sujet des mises à pied faites par les
Industries Valcartier et de l'incertitude entourant les activités de La
Belle Couture Inc. de Saint-Ubald.
En premier lieu, la situation aux Industries Valcartier. Cette
entreprise était auparavant la propriété de Canadian
Arsenal; elle existe depuis 85 ans et a déjà embauché
jusqu'à 5,000 personnes au plus fort de la production de guerre, il y a
25 ou 30 ans. La Société générale de financement et
le colonel Georges Couture en ont fait l'acquisition en décembre 1966.
Le nombre d'employés était alors de 400. Il s'est accru car il
s'établissait à 1,400 à la mi-novembre de cette
année.
Ces augmentations considérables étaient dues à
l'obtention de contrats qui n'avaient cependant aucun caractère de
permanence. La récente mise à pied de quelque 450 personnes est
la conséquence directe d'une réduction de commandes. Cette
situation a été portée à l'attention du
gouvernement, il y a quelques mois. Dès le mois d'août, nos
experts ont constaté que la diversité insuffisante de la
production de cette entreprise l'exposait à des contrecoups
sérieux. Un comité a été formé pour
s'occuper du reclassement de la main-d'oeuvre et de la recherche
d'activités nouvelles qui pourraient être entreprises.
Ce comité est composé de représentants du
ministère fédéral de l'Immigration et de la Main-d'Oeuvre,
du ministère québécois du Travail et de la Main-d'Oeuvre,
de l'entreprise elle-même et du syndicat. Le comité recevra, au
surplus, l'aide technique de notre ministère, celui de l'Industrie et du
Commerce.
Une entente de travail doit être conclue dans les prochains jours,
selon les conditions de la loi concernant la formation et la qualification
professionnelle de la main-d'oeuvre. J'ai eu l'occasion, d'ailleurs, de
rencontrer personnellement M. Couture et il m'a laissé entendre qu'il
entretenait des espoirs de pouvoir reprendre une partie de ses employés,
dès que les circonstances le permettraient, évidemment.
Quant à LaBelle Couture Inc., cette entreprise, qui avait
dû fermer ses portes en juin dernier, a depuis repris ses
activités sous une nouvelle direction. Elle occupe de 15 à 30
couturières, suivant les contrats qu'elle obtient. Avec l'aide des
spécialistes du ministère de l'Industrie et du Commerce, la
productivité a été améliorée au point que
l'entreprise peut accepter certains contrats qu'elle ne pouvait entreprendre
précédemment.
Il lui reste, toutefois, à s'adapter en prévision des
nouvelles conditions qui résulteront de la disparition des zones de
salaire dans le secteur de la robe, applicables en mai 1971.
Je profite de l'occasion pour m'adresser au député de
Lafontaine, au sujet du paiement de la subvention de la United Aircraft; un
quart de cette subvention a été payé. Le chèque a
été pris avant même que je donne la réponse au
député, les fonctionnaires l'ayant remis à l'avocat qui
était venu le chercher.
Je voulais faire cette mise au point. En même temps, mes
fonctionnaires m'ont dit avoir inspecté les lieux et avoir fait des
suggestions. Evidemment, il n'y a pas de conditions au sujet du français
comme langue de travail; ça n'était pas dans les conditions ni
dans l'arrêté en conseil de 1969. Mais, en passant, on a
profité de l'occasion pour souligner à la compagnie qu'il y avait
des affiches qui étaient unilingues. Immédiatement, on nous a
fait parvenir les nouveaux plans pour des affiches bilingues à
l'intérieur de l'usine.
En plus, on faisait des annonces dans les journaux anglophones pour
demander des ingénieurs et des diplômés; ces annonces
paraîtront cette semaine, me dit-on, dans les journaux francophones pour
demander des diplômés, des ingénieurs francophones.
M. LEGER: Est-ce que je peux poser une question au ministre, s'il vous
plaît?
M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Lafontaine.
Langue de travail
M. LEGER: Je remercie le ministre de la franchise de ses
réponses. Je dois seulement ajouter la question suivante, celle que je
n'avais pas terminée la semaine dernière. Etant donné que
le gouvernement avait adopté une politique incitatrice pour faire du
français la langue de travail, est-ce que ça n'aurait pas
été une bonne occasion, à l'occasion de la subvention, de
le demander dans vos conditions?
M. LEVESQUE: Nous avons procédé par arrêté en
conseil, je ne sais plus le numéro par coeur, mais celui qui a trait
à l'assistance aux industries de pointe.
M. LEVER: 3792.
M. LEVESQUE: Par contre, nous avons suivi cette politique du
gouvernement de convaincre les industries d'employer le français comme
langue de travail. Des faits concrets commencent à se manifester. Je
tiens à féliciter les officiers de mon ministère, qui ont
donné suite à la politique du gouvernement, en cette
matière.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de Gouin, une question
supplémentaire.
M, JORON: Une question supplémentaire, M. le Président,
adressée au ministre de l'Industrie et du Commerce, qui dans sa
réponse fournissait...
M. LEVESQUE: Je m'excuse auprès du député; en
répondant au député de Portneuf, je répondais
également à la question du député de Gouin, ou je
pensais, du moins, y répondre.
Industries Valcartier
M. JORON: Je voulais vous remercier et demander quelques
précisions. Ma question, la semaine dernière, portait plus
précisément sur les Industries Valcartier. Vous avez
apporté quelques précisions quant à l'historique de cette
entreprise. Mais je demandais, la semaine dernière, étant
donné le type de production de cette industrie ce sont des
armements dont la destination principale était le Vietnam, il y avait
des incidences qu'on peut qualifier ou de politiques ou de morales si le
gouvernement avait une attitude à faire valoir auprès des
dirigeants de cette entreprise.
M. LEVESQUE: Je n'ai pas la réponse ici dans les notes que j'ai
préparées, mais je puis dire qu'en discutant avec le colonel
Couture, la réponse que j'ai reçue, c'est que les munitions en
question n'étaient pas vendues aux Etats-Unis, mais étaient
toutes vendues au gouvernement fédéral et que la partie des
activités de Valcartier consacrée à la fabrication des
munitions, n'était qu'une fraction des activités de l'usine.
Visite de M. John White
M. HARVEY (Jonquière): M. le Président, je voudrais
simplement souligner à mes collègues de cette Chambre la
présence d'un visiteur de marque, soit mon homologue ontarien, M. John
White.
M. White, ministre du Revenu de l'Ontario, a dirigé une
délégation ontarienne pour une conférence de deux jours,
ici à Québec. Les entretiens ont porté sur l'application
des lois fiscales au Québec et en Ontario. Je voudrais dire combien, au
nom du ministère du Revenu et du gouvernement du Québec, nous
apprécions la très grande collaboration du gouvernement ontarien
dans l'application de nos lois fiscales.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Maskinongé.
M. PAUL: M. le Président, je voudrais poser une question au
leader du gouvernement, conformément aux dispositions de l'article
114.
M. FOURNIER: Est-ce que je pourrais répondre à deux
questions? Je comprends que c'est une motion que l'honorable
député de Maskinongé a l'intention de faire.
M. PAUL: Ah! Je n'ai pas de motion.
M. FOURNIER: Est-ce que je peux répondre à deux
questions?
M. PAUL: Je les réserve, ce n'est pas pour aujourd'hui.
Fermeture de centres de main-d'oeuvre
M. FOURNIER: L'honorable député de Saint-Sauveur
s'informait, mercredi dernier, de la fermeture de deux centres de
main-d'oeuvre: celui de Saint-Raymond, dans le comté de Portneuf, et
celui de Limoilou, à Québec. Je dois dire, en réponse
à cette question, que le ministère du Travail et de la
Main-d'Oeuvre a fait une étude du fonctionnement et de l'implantation
des différents centres de main-d'oeuvre de la province. Il a
constaté que, pour fins d'efficacité, il devait fermer certains
centres où il n'existait pas de personnel suffisant. En
particulier,lorsqu'il y a seulement deux ou trois employés, ces
gens-là ne font que remplir des formules de demandes d'emploi et ils
n'ont pas le temps d'aller chercher chez l'employeur des emplois
disponibles.
La déclaration du ministère, au sujet de l'enquête
qui se tient, dit ceci: "La réduction du nombre de centres de
main-d'oeuvre n'implique pas une réduction des activités. Nous
croyons, au contraire, qu'il est beaucoup plus avantageux d'établir des
centres de main-d'oeuvre bien dirigés et organisés desquels se
fera un rayonnement vers les localités qui ne sont pas dotées
d'un tel centre". Quant à la fermeture des centres de Limoilou et de
Saint-Raymond de Portneuf, vous noterez que l'agglomération de
Québec restera particulièrement bien desservie puisqu'elle
conservera trois centres, dont celui de Québec-centre, situé
boulevard Charest, qui bénéficie d'une excellente localisation et
qui a déjà prouvé son efficacité.
Dans toute cette question, il s'agit d'avoir des centres qui peuvent
rendre service aux travailleurs au lieu de centres qui ne font que recevoir des
demandes d'emploi. Toute la politique du ministère est centrée
sur l'efficacité en vue de trouver des emplois et non pas simplement de
recevoir des formules de demande.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de Portneuf
relativement à la réponse de l'honorable ministre.
M. DROLET: M. le Président, je m'étonne d'entendre cette
déclaration de la fermeture du centre...
M. LE PRESIDENT (Hardy): A l'ordre! Il faudrait que l'honorable
député de Portneuf formule sa question, au lieu de faire des
commentaires.
M. DROLET: M. le Président, on est rendu qu'on ferme des centres
de main-d'oeuvre et nous n'avons pas le droit de faire des commentaires.
M. LE PRESIDENT (Hardy): A l'ordre! Nous sommes à la
période des questions.
M. DROLET: On va applaudir devant des incompétences
semblables.
M. LE PRESIDENT (Hardy): A l'ordre! Est-ce que vous avez une question
à poser?
M. DROLET: Je voulais commenter la fermeture du centre de
Saint-Raymond.
M. LE PRESIDENT (Hardy): II n'y a pas de commentaire à faire,
à ce stade-ci. L'honorable député de Saguenay.
M. LESSARD: M. le Président, je pense que le règlement
nous permet, quand même, d'exposer des faits.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Nous sommes ici à la période des
questions.
M. LESSARD: Oui, mais, M. le Président, il existe un
règlement qui dit...
M. LE PRESIDENT (Hardy): A l'ordre! Si l'honorable député
de Saguenay a une question à poser, je lui permettrai de la poser mais
non pas de faire un commentaire à ce stade-ci.
M. LESSARD: Je ne fais pas de commentaire, M. le Président.
M. DROLET: II a une question à poser.
UNE VOIX: L'Union Nationale les ouvre, puis les libéraux les
ferment.
M. LESSARD: II est dit, dans le règlement, qu'on peut exposer des
faits.
De toute façon, concernant la déclaration du
député relativement à la fermeture des centres de
main-d'oeuvre parce qu'ils manquent de personnel, je voudrais demander au
représentant du ministre du Travail s'il a l'intention de
procéder à l'engagement de personnel en ce qui concerne le centre
de main-d'oeuvre de Baie-Comeau, qui manque actuellement de personnel et
où un directeur n'est même pas encore nommé? Est-ce que
l'on peut s'attendre que ce centre de main-d'oeuvre va être fermé
par manque de personnel?
M. FOURNIER: M. le Président, je crois que la réponse est
complète. Dans les endroits où le centre est réllement un
centre, dans les localités qui nécessitent un centre de
main-d'oeuvre, il y en aura un qui sera bien organisé et qui servira les
besoins de la population. Dans les endroits où il y a une
multiplicité de centres qui ne servent pas les besoins de la population,
ceux-là disparaîtront peut-être.
M. VINCENT: M. le Président, question supplémentaire.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Nicolet.
M. VINCENT: Suivant la réponse donnée par le
député de Gatineau et ministre d'Etat concernant le centre de
main-d'oeuvre de Saint-Raymond-de-Portneuf et l'autre endroit, combien de
centres de main-d'oeuvre seront fermés éventuellement dans la
province de Québec avec ces nouveaux critères que vient de donner
le ministre?
M. FOURNIER: M. le Président, l'enquête sur le
fonctionnement et l'implantation des centres est encore en cours. Il est trop
tôt pour dire combien seront fermés.
M. DROLET: M. le Président...
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de Portneuf,
sur une question.
M. DROLET: ... sur une question, M. le Président, je vais me
conformer aux règlements, le ministre d'Etat au Travail a dit qu'il
manquait de personnel au bureau de Saint-Raymond; n'y aurait-il pas
possibilité de prendre la liste des 1,500 personnes qui attendent et
d'engager du personnel?
Formation professionnelle
M. FOURNIER: M. le Président, une autre question posée la
semaine dernière par l'honorable député de Saint- Maurice
demandait ce que le ministère du Travail fait relativement au recyclage.
Je dois faire la déclaration suivante qui me vient du ministère
du Travail: Parmi les conclusions auxquelles ont permis de conduire les
différentes études sur le chômage du Québec, on peut
notamment citer l'inadaptation de nombreux travailleurs aux exigences actuelles
de la profession. Pour remédier à cette situation, le
ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre a décidé de
consacrer au perfectionnement des travailleurs la totalité de ses
efforts dans le domaine de la formation professionnelle. A l'heure actuelle,
2,924 personnes suivent des cours de recyclage à temps plein dans les
commissions de formation professionnelle. Pour le premier trimestre de 1971, de
janvier à mars, on prévoit que 4,136 personnes suivront de tels
cours. De plus, le ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre a
augmenté sa contribution au projet de formation en industrie. On peut,
par ailleurs, souligner que les efforts du ministère du Travail et de la
Main-d'Oeuvre et du ministère de l'Education du Québec sont
coordonnés en pareille matière puisque les institutions de
formation du réseau scolaire accordent actuellement la priorité
au recyclage en formation professionnelle.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Maskinongé.
Travail de la Chambre
M. PAUL: M. le Président, je voudrais poser à l'honorable
leader parlementaire une question au sujet des travaux de la Chambre, tel que
le permet l'article 114 de notre règlement. Aujourd'hui, nous avons eu
la surprise d'une nouvelle législation, qui est l'initiative de
l'honorable premier ministre. Pour orienter notre travail d'ici la fin de la
session et probablement avec la fin de la présente semaine, le leader du
gouvernement voudrait-il nous dire s'il y a encore des projets de loi qui
doivent être présentés pour adoption par la Chambre ou s'il
y aura des projets de loi qui seront déposés et qui deviendraient
des documents de travail en attendant l'ouverture de la prochaine session?
Nous voudrions, si possible, être fixés dès
aujourd'hui sur le programme définitif que nous devrons adopter avant la
prorogation de la Chambre.
M. LEVESQUE: M. le Président, pour autant que je le sache et
à moins d'imprévus, la législation que nous avons devant
les yeux au feuilleton est celle que le gouvernement a l'intention de
présenter au cours de la présente session. Il y aurait deux
autres projets de loi, premièrement celui relatif aux
médicaments...
M. PAUL: Documents sessionnels.
M. LEVESQUE: ... et celui qui concerne les petites créances. Ces
deux projets de loi seraient normalement déposés pour
étude entre les deux sessions, c'est-à-dire entre la fin de la
présente session et le commencement de la prochaine.
Quant aux autres lois, je n'en connais pas à l'heure actuelle et
je m'imagine bien que nous avons devant nous le menu complet.
M. PAUL: II y aura le projet de loi relatif et nécessaire
après l'étude des crédits du budget
supplémentairere dont nous a parlé le premier ministre.
M. LEVESQUE: Oui. Le budget supplémentaire devrait être
distribué dès demain. Nous devions le distribuer aujourd'hui.
L'impression était terminée, mais il s'y est glissé des
erreurs. Il faut donc la reprendre. Ce sera peut-être fini cet
après-midi, ce soir ou demain matin. Mais cela ne change pas le chiffre
donné par le premier ministre tout à l'heure, qui est de
$1,143,000 incluant le million des contributions au régime de
l'assurance-maladie du Québec par le gouvernement en sa qualité
d'employeur.
M.PAUL: II ne faudrait pas oublier, non plus, le message de son
excellence, préalable et nécessaire à la
présentation de ce projet de loi.
M. LEVESQUE: Le message est prêt et signé de sa main.
M. PAUL: Ah bon! Très bien.
M. DUMONT: Je voudrais tout simplement demander au leader parlementaire,
M. le Président, s'il n'y aurait pas un projet de loi surprise pour la
reconnaissance professionnelle des cultivateurs.
M. SAMSON: Cela concerne les travaux de la Chambre. Nous aimerions bien
le savoir.
M. LEVESQUE: Pardon?
M. SAMSON: Cela concerne les travaux de la Chambre.
M. LEVESQUE: Disons que j'ai déjà répondu à
cette question. C'est la deuxième fois que je le dis aujourd'hui.
Dois-je le dire une troisième fois? Cependant, si de nouveaux faits
surgissent, je suis sûr que le ministre de l'Agri-
culture se fera un plaisir d'en aviser ses collègues.
M. SAMSON: Actuellement, si nous comprenons bien, cela n'est pas
prévu. Il n'y en aura pas.
M. LEVESQUE: Ce n'est pas prévu par le leader du
gouvernement.
M. SAMSON: Nous venons d'avoir la réponse que nous attendions
depuis longtemps.
M. LEVESQUE: II n'est pas prévu qu'il en soit
présenté un. Il ne faudrait pas déformer mes paroles. Je
l'ai dit, je le répète: II n'est pas prévu qu'un tel
projet de loi soit déposé avant la fin de la présente
session.
M. SAMSON: C'est tout ce que nous voulons savoir.
M. LEVESQUE: Article 5.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable ministre des Finances propose la
deuxième lecture du projet de loi numéro 55.
Projet de loi no 55
Deuxième lecture
M. Raymond Garneau
M. GARNEAU: M. le Président, l'honorable lieutenant-gouverneur de
la province a pris connaissance de ce bill et il en recommande l'étude
à la Chambre.
Un des traits marquants de l'évolution de la
société québécoise durant la dernière
décennie a été l'intensification constante de
l'intervention de l'Etat dans la vie de la collectivité. Le gouvernement
québécois, à l'instar des autres gouvernements
occidentaux, a vigoureusement élargi le champ de ses activités et
a assumé une multitude de responsabilités nouvelles dans tous les
secteurs vitaux du développement économique, de la promotion
sociale et de l'épanouissement culturel de notre communauté.
Autrefois considéré comme étant simplement responsable du
maintien de l'ordre public, l'Etat est désormais perçu comme
l'artisan premier du progrès et du développement de notre
société.
L'extension quantitative et qualitative rapide des fonctions de l'Etat
ainsi que la croissance correspondante des activités gouvernementales se
vérifient par des faits concrets. Les dépenses nettes de la
province, qui étaient d'environ $745 millions pour l'année
financière 60/61, atteindront environ $3,700,000,000 pour l'année
financière 70/71. Alors que les dépenses publiques du
gouvernement du Québec constituaient 7.5 p. c. du produit national brut
en 1960, elles en constituaient presque 16.3 p. c. en 1969-1970. De 1960
à 1970, les dépenses nettes du gouvernement du Québec per
capita sont passées de $160 à $620. Durant cette même
période, le nombre des personnes employées dans la fonction
publique a presque doublé pour s'élever maintenant à
environ 50,000 sans compter les employés de l'Hydro. Le gouvernement
paie indirectement, en outre, près de 225,000 personnes employées
dans le monde de l'éducation, de la santé et des services
sociaux. De sorte que l'Etat emploie actuellement environ 13 p. c. de la main-
d'oeuvre du Québec et que la part des salaires du secteur public se
situe aux environs de la moitié du budget de la province.
Ces chiffres ne tiennent pas compte des données relatives
à l'assurance-maladie, que le présent gouvernement vient de
mettre en vigueur, non plus que de l'extension probable des services sociaux
qui résultera de la mise en application du projet de loi no 26.
Ces quelques chiffres illustrent plus éloquemment que toute
tirade l'extension des rôles du gouvernement québécois et
la place prépondérante qu'il occupe au sein de notre
société. La question, qui surgit immédiatement à
l'esprit, est la suivante: comment l'administration publique, comme institution
ou réseau d'institution, s'est-elle adaptée à ces
changements? Peut-on dire que l'administration publique a évolué
pour s'accorder aux mutations rapides et répétées qui
caractérisent l'évolution de notre société et du
rôle de l'Etat, autrement dit, l'évolution sociale rapide et les
mutations profondes des activités du gouvernement se sont-elles
traduites par des changements appropriés dans l'administration publique?
Répond-elle efficacement, d'une part, dans son organisation, et d'autre
part, dans sa gestion, aux besoins de la société tels que les a
traduits le Parlement, et aux aspirations du public, telles que les
perçoit l'Etat?
Si nous posons ces questions à celui que doit servir
l'administration, c'est-à-dire au citoyen et je suis tenté
de dire à son mandataire, le député nous pouvons
affirmer, sans risque de nous tromper, qu'elles recevront des réponses
négatives. Si nous nous appuyons sur les commentaires émis ici et
là dans la population, l'administration est loin de répondre aux
attentes du citoyen. Le citoyen considère l'administration comme une
immense machine, un être anonyme, insensible, froid et distant, dont la
difficulté à comprendre les problèmes concrets n'a
d'égal que la lenteur à les résoudre. Je pense que cette
conception de l'administration, par le citoyen, se réflète dans
l'idée qu'il se fait des fonctionnaires. Pour lui, les fonctionnaires
sont, ou bien des technocrates inaccessibles et indépendants,
élaborant des programmes et projets dispendieux et cadrant mal avec la
réalité, ou bien les fonctionnaires, pour certains citoyens, sont
des ronds de cuir improductifs.
Si nous examinons objectivement le fonc-
tionnement et le rendement de l'administration publique, force nous est
d'admettre que la perception du citoyen constitue, en grande partie, une
appréciation qui retrouve ses échos dans la situation
réelle. Au cours des dernières années, les nouvelles
tâches endossées par le gouvernement ont conduit, bien sûr,
à une expansion accélérée de l'appareil
administratif. Des changements sont survenus aux structures
ministérielles et l'on a créé beaucoup d'organismes
extraministériels, dont les rôles et les régimes
administratifs sont extrêmement variés.
Or, ces changements ont généralement été
effectués de façon empirique, pour répondre à des
besoins immédiats et urgents, et sans idée directrice tout
à fait définie. De plus, malgré l'accroissement
phénoménal des ressources que nous avons à administrer,
nous avons continué d'appliquer les mêmes styles de gestion qui
prévalaient à l'époque où le meilleur gouvernement,
disait-on, est celui qui gouverne le moins. Par exemple, posant en
équation organismes de contrôle puissants et efficacité
administrative, nous avons multiplié les services centraux pour
contrôler, avant le fait, tous les gestes occasionnés par les
activités de gestion , privant, de ce fait, les administrateurs des
ministères de la capacité de décider et de
l'opportunité d'exercer leurs responsabilités.
Nous avons ainsi provoqué la congestion à la tête de
l'administration et, bien souvent, la paralysie aux extrémités.
Il s'en est suivi un ralentissement des opérations et bien souvent un
gaspillage d'énergie dont le citoyen supporte le prix.
Il est donc urgent de réaménager les structures de
l'appareil administratif gouvernemental et d'instaurer un style de gestion qui
nous permette d'obtenir un rendement maximum de l'utilisation de nos ressources
financières, humaines et matérielles, tout en s'assurant que les
services rendus à la population sont bien ceux que la loi dit qu'elle
doit recevoir. Cette préoccupation de moderniser l'administration
publique pour l'adapter aux besoins nouveaux n'est pas inédite et
exclusive au gouvernement du Québec, comme en témoignent les
nombreuses études sur ce sujet effectuées dans d'autres pays.
Ainsi, le président Roosevelt, au cours de son second mandat
à la tête de son pays, recevait d'un comité des suggestions
pour améliorer les structures et la gestion de l'administration
américaine. Une dizaine d'années plus tard, on formait aux
Etats-Unis une autre commission, dirigée par l'ancien président,
Herbert Hoover, pour étudier et recommander des améliorations
à l'administration publique américaine. En Angleterre, nous
pouvons mentionner le Bladden Report sur le contrôle des dépenses
publiques, en 1961, et le Fulton Report sur le service civil, en 1968. En
France, nous pouvons aussi noter l'existence du Comité central
d'enquêtes sur le coût et le rendement des services publics,
crée en 1946, et plus récemment la création de la Mission
permanente de la réforme administrative, instituée en 1963 et qui
a fait de nombreuses études. Au Canada, l'étude la plus
importante est évidemment celle de la Commission Glassco, dont le
rapport a été publié au cours des années 1962-1963.
Il y a aussi le rapport Johnson sur l'organisation du gouvernement de la
Saskatchewan, publié en 1965, et cette année le gouvernement de
l'Ontario a mis sur pied un comité dont le mandat est d'entreprendre une
analyse générale de l'administration gouvernementale et de faire
des suggestions de réforme. Ici, au Québec, le gouvernement
précédent confiait à la firme Price, Waterhouse, dont M.
Richard Mineau était le directeur de projets, la responsabilité
d'entreprendre une étude générale des structures et du
mode de fonctionnement de l'appareil administratif du gouvernement, dans le but
de recommander à leur égard les changements estimés les
plus propres à en accroître l'efficacité et à
favoriser la réalisation d'économies.
Le gouvernement actuel a mis l'accent sur la nécessité de
la réforme administrative, au cours de la dernière campagne
électorale, et il est fermement décidé à donner le
coup de barre qui s'impose afin de remettre à flot la barque
administrative et de restaurer la confiance des citoyens envers
l'administration publique. Anatole France écrivait, vers 1900: "La
république gouverne mal, mais je lui pardonne car elle gouverne peu".
Or, aujourd'hui, on n'a plus le droit de tenir de tels raisonnements, dû
au fait que les responsabilités qui incombent à l'Etat sont sans
cesse croissantes.
Nous ne pouvons, évidemment, réaliser une réforme
complète de l'administration, du jour au lendemain. La fusion du
ministère de la Santé avec celui de la Famille et du Bien-Etre
social a constitué un premier pas. Aujourd'hui, avec le projet de loi
sur l'administration financière, nous touchons un des points
névralgiques du fonctionnement de l'Etat. La gestion des ressources
financières a des implications dans tous les domaines. C'est par la
répartition de ses ressources que le gouvernement traduit ses
politiques, façonne en partie le devenir culturel de la
société et accentue son développement économique.
La disponibilité de ces mêmes ressources est un des
éléments importants dont tient compte le gouvernement dans
l'établissement de ses priorités. C'est en rapport avec leur
utilisation que l'on juge de l'efficience de l'administration et de la
rentabilité de son action. Le présent projet de loi constitue une
autre étape dans la réalisation d'une réforme
administrative globale qui réaménage la structure
hiérarchique de l'administration à partir de concepts modernes de
gestion.
Il est de l'essence même de notre système politique que
ceux qui bénéficient de la confiance de cette Chambre et qui
constituent le gouvernement prennent véritablement en main
les rênes du pouvoir. En d'autres mots, il faut que le
gouvernement gouverne, c'est-à-dire que la détermination des
objectifs du gouvernement et la définition des programmes qu'il veut
mettre en oeuvre pour les réaliser soient ses décisions et non
celles des technocrates.
Dans notre système politique, le pouvoir exécutif
appartient aux ministres agissant collectivement. Le gouvernement, en somme,
c'est le conseil des ministres. Chaque ministre détient sa propre
autorité administrative, mais le Pouvoir est détenu et
exercé collectivement et les grandes décisions politiques
émanent du groupe et non de l'individu. Bien plus, chaque ministre est
responsable de la direction des affaires qui lui sont confiées ainsi que
des actes de ses fonctionnaires, mais cette responsabilité est
partagée par ses collègues devant cette Chambre.
Il incombe donc au conseil des ministres de diriger et de
contrôler l'administration, de sorte que l'activité
gouvernementale reflète fidèlement l'idéologie, la
pensée et les intentions du gouvernement. La réalisation de cet
objectif n'implique pas que l'organe exécutif doive chercher à
contrôler toutes et chacune des activités de l'administration.
Si un tel mode d'exercice du rôle directeur du pouvoir
exécutif était concevable à l'époque où la
dimension de l'appareil administratif gouvernemental correspondait, en somme,
à celle d'une administration locale, il est totalement inapplicable
à une époque où l'intensité, la portée et la
diversité des activités de l'administration obligent les
gouvernements à prendre des décisions graves et à
résoudre des problèmes d'une extrême conséquence. De
nos jours, pour pouvoir exercer un leadership véritable, le cabinet doit
être capable de discerner les questions fondamentales et d'y consacrer le
gros de ses efforts et de ses énergies. Il doit être en mesure: 1)
de définir les orientations majeures des activités de
l'administration; 2)de prendre les décisions importantes et, 3)
d'exercer une surveillance générale sur le sens et sur
l'efficacité de l'action administrative.
Cela doit être vécu dans tous les secteurs:
développement économique, mesures socioculturelles, services
sociaux, etc.
Ainsi, par exemple, en matière de politique administrative,
c'est-à-dire en matière d'organisation et de gestion de
l'administration publique, le conseil des ministres doit s'occuper des
questions majeures qui touchent l'ensemble de l'appareil gouvernemental. Au
niveau de l'organisation de l'administration publique, il appartient donc,
à mon sens, au conseil des ministres de se prononcer sur la
création, l'abolition ou la fusion de ministères ou d'organismes
extraministériels, de partager leur rôle et de délimiter
leurs responsabilités. C'est également au conseil des ministres
de décider de la régionalisation de l'administration ou de la
réorganisation du secteur décentralisé de notre
régime administra- tif, c'est-à-dire des collectivités
municipales et scolaires.
Sur le plan de la gestion financière, on peut donner, comme
exemple de décisions importantes relevant du conseil des ministres, la
détermination du niveau des dépenses publiques, l'allocation des
ressources financières entre les différentes sphères de
l'activité gouvernementale, la détermination des montants que le
gouvernement doit emprunter au cours de l'année et l'augmentation ou la
réduction de taxes.
En matière de gestion de personnel, on peut mentionner, comme
décision importante, la nomination ou la révocation des
sous-ministres et des autres fonctionnaires de rang équivalent dans les
commissions, régies ou offices.
En ce qui concerne la gestion de l'équipement ou des ressources
matérielles, les questions qui doivent faire l'objet de l'attention du
conseil des ministres portent, par exemple, sur la construction des grandes
voies de communication, sur des projets majeurs d'immobilisation, sur les
lignes directrices de la politique d'achat, y compris la procédure
d'adjudication des contrats.
Pour que le conseil des ministres puisse assumer pleinement les
responsabilités que nous venons de mentionner, il est nécessaire
que les ministres consacrent, collectivement, une proportion importante de leur
temps et de leur attention à la détermination des objectifs
gouvernementaux, à l'établissement de priorités et
à la direction de la mise en oeuvre de programmes destinés
à les atteindre.
Or, tous ceux qui ont exercé la fonction de ministre savent que
le fardeau individuel de travail des ministres est excessivement lourd. Le
ministre est député et représente des électeurs
avec qui il doit demeurer en contact non seulement dans le but de se faire
réélire, mais aussi dans le but de connaître leurs
problèmes et leurs besoins. Pour le député, le contact
avec ses électeurs est la seule façon de constater de visu si les
besoins et les aspirations de la population sont ceux que l'administration a
identifiés et si les remèdes proposés collent bien
à la réalité.
En tant que législateur, le ministre doit être actif en
Chambre et participer aux travaux de nombreuses commissions parlementaires. En
outre, sa fonction, comme chef d'un ministère, devient de plus en plus
complexe et accaparante. Le ministre doit également recevoir
continuellement les représentations de personnes et de groupes que
touche l'activité gouvernementale dont il est responsable. Si l'on
ajoute à cela le fait que les ministres sont appelés à se
déplacer fréquemment à travers le Québec, on peut,
sans fausse modestie, affirmer que le ministre qui désire s'acquitter de
ses reponsabilités est loin d'être inactif.
Pour que les ministres, en tant que membres du cabinet, consacrent une
bonne partie de leur temps aux questions importantes c'est là
une
nécessité aussi impérieuse que les autres que je
viens d'énumérer il est d'abord nécessaire qu'ils
se dégagent des actes administratifs routiniers et qu'ils
délèguent certains de leurs pouvoirs actuels.
Autrement dit, le cabinet lui-même ne doit pas s'empêtrer
dans un amas de problèmes de seconde importance qui viennent encombrer
l'ordre du jour du conseil et qui font perdre un temps précieux.
J'ajoute en ce sens qu'il serait opportun d'examiner les pouvoirs qui sont
actuellement attribués dans nos lois au lieutenant-gouverneur en conseil
et aux ministres individuellement afin d'en opérer un nouveau partage
plus en accord avec les situations administratives de notre époque.
Enfin, nous devons admettre qu'il est illusoire de penser que le conseil
des ministres puisse examiner de façon approfondie toutes les questions.
D'ailleurs, il ne serait peut-être pas pratique qu'il en soit ainsi,
puisqu'il est souvent plus facile à un comité restreint
d'analyser tous les détails d'une question. Je pense qu'il faut, au
niveau du conseil exécutif, comme d'ailleurs dans l'administration
publique ou privée, en arriver à la spécialisation des
tâches en répartis-sant le travail entre divers comités
constitués selon les différents secteurs de l'activité
gouvernementale. Le cabinet pourrait alors siéger moins souvent, moins
longtemps, et ce serait pour prendre des décisions sur des questions qui
auraient fait l'objet d'études, d'analyses et de rapports par des
comités spécialisés formés de ses membres.
Pour que le cabinet puisse remplir adéquatement son rôle
véritable, il n'est pas suffisant que les ministres, en tant que membres
du cabinet, consacrent la majeure partie de leur temps à l'examen des
questions d'importance. Il faut aussi que les dossiers soient complets. Les
problèmes sont de plus en plus complexes et les décisions
à prendre ont des implications politiques, sociales, économiques
ou financières très considérables. Pour ne donner qu'un
exemple parmi plusieurs, prenons la décision du gouvernement de porter
de sept ans à six la durée du cours élémentaire, et
de quatre ans à cinq ans la durée du cours secondaire. Non
seulement affectait-elle des milliers d'étudiants; elle impliquait aussi
des dépenses additionnelles de plusieurs millions de dollars, notamment
au chapitre de la rémunération des maîtres, puisque le
rapport maître-élèves est de 1 à 27 à
l'élémentaire et de 1 à 17 au secondaire. Il est donc
essentiel que le système de gestion procure au ministre toute
l'information nécessaire pour qu'il puisse étudier une question
et prendre une décision en en connaissant de façon la plus exacte
possible toutes les conséquences.
Les structures et les modes de fonctionnement de l'appareil
administratif du gouvernement doivent permettre au conseil des ministres de
décider des grandes orientations de l'activité gouvernementale.
Ils doivent également viser à permettre aux administrateurs des
ministères et organismes d'administrer réellement,
c'est-à-dire de prendre les décisions sur les questions qui les
concernent.
L'établissement d'un système rigide de contrôles
centraux avant le fait, contrôles a priori, procède sûrement
d'une intention louable. Je pense ici tout aussi bien aux contrôles
centraux relatifs à la gestion budgétaire qu'à ceux de la
gestion de personnel, tout comme à ceux de la gestion de
l'équipement et de l'approvisionnement. Cependant, un tel système
ralentit fatalement le processus de prise de décisions et retarde leur
application en plus de créer des frustrations innombrables chez les
administrateurs des ministères, de leur enlever une bonne partie de leur
esprit d'initiative et de les inciter à la médiocrité
professionnelle, puisqu'il déplace le centre de responsabilités.
Un contrôle a priori de gestes administratifs finit par ne plus
être du contrôle, mais bien plutôt de la centralisation
d'exécution par d'autres que les gestionnaires supposément
responsables.
Cette situation doit donc être modifiée. Les
ministères et organismes doivent se voir confier des tâches
administratives plus importantes et des pouvoirs accrus. Il faut que chaque
gestionnaire devienne responsable de l'exécution d'activités
gouvernementales bien définies, et qu'il soit en outre investi de
l'autorité requise pour s'acquitter complètement de ses
responsabilités, afin de passer aussi rapidement que possible de la
décision à l'action. Ceci n'implique pas la disparition de tout
contrôle, mais suppose plutôt une philosophie différente de
contrôle axée sur la surveillance de l'exécution
plutôt que sur la restriction de la liberté d'action.
Si nous voulons que l'extension de l'autorité administrative des
ministères et organismes s'effectue tout en assurant l'unité et
la cohésion de l'administration publique, tout en augmentant son
efficacité, cette extension des responsabilités ne peut venir que
de l'établissement de normes et règles de gestion applicables
à tous et qui devront être scrupuleusement respectées.
Si chacun était libre d'agir à sa guise, ce serait le
règne de l'arbitraire pour les citoyens comme pour les fonctionnaires,
et l'administration publique sombrerait dans le désordre et le chaos le
plus concret. On n'administrerait plus; on exécuterait cas par cas. Plus
il y a d'unités administratives et plus elles ont de pouvoirs, plus il
est nécessaire pour une saine administration publique d'élaborer
des règles de gestion uniformes et de voir à leur
application.
Qui doit être chargé d'édicter ces règles et
de surveiller leur application? A mon avis ce ne peut être là la
responsabilité d'un seul ministre. En effet, ce qui caractérise
la politique administrative, c'est qu'elle trouve son application dans tous les
ministères et que chaque ministre, comme administreur-chef dans son
ministère, doit l'accepter et voir à son application. Comme les
ministres sont égaux, on voit mal que cette
politique soit l'oeuvre et la responsabilité d'un seul ministre,
car à ce moment il se trouverait à fixer seul des règles
de gestion, donc des règles de conduite à ses collègues.
C'est pourquoi deux solutions apparaissent possibles. Ou bien c'est tout le
cabinet qui en est responsable ou bien, dans une perspective de
spécialisation et de délégation, c'est un comité du
conseil des ministres. Si nous voulons respecter le principe selon lequel le
cabinet doit concentrer son attention sur les questions majeures et
essentielles et si nous sommes conscients de la nécessité
d'étager les pouvoirs de décision de façon que le temps de
chacun soit sauvé pour travailler sur des matières qui lui sont
propres, nous sommes amenés à conclure que la politique
administrative est une matière qui doit relever d'un comité du
conseil des ministres. C'est d'ailleurs ce que suggère la commission
Glassco et, après elle, M. Mineau dans l'étude qu'il a faite. Or,
c'est exactement ce que nous faisons dans le projet de loi de l'administration
financière en créant le Conseil du trésor. Le conseil sera
un comité du cabinet spécialisé en matière de
politiques administratives qui sera chargé de réglementer sur le
plan administratif l'utilisation faite des ressources de l'Etat, de surveiller
la mise en application de cette réglementation et aussi d'assurer la
bonne coordination des fonctions des services administratifs. Nous maintenons
donc l'idée que la gestion administrative, tout comme
l'éducation, est de matière de politique publique et que c'est
à des ministres qu'il appartient, sous l'autorité du Parlement,
d'en fixer le sens et de voir à sa mise en oeuvre.
Le projet de loi no 55, qui doit remplacer la Loi du ministère
des Finances et la Loi de la vérification des comptes, propose un
réaménagement profond des rôles et des fonctions en
matière de gestion financière. Il constitue la première
d'une série de réformes dont les unes sont rattachées au
style de gestion et dont les autres sont d'ordre réglementaire ou
d'ordre purement opérationnel. Mentionnons par exemple l'implantation du
budget-programme que nous espérons pouvoir mettre en place pour
l'anné 1972-1973. Ce processus de budgétisation, en obligeant le
gouvernement et chacun des ministères à définir clairement
leurs objectifs et à bien analyser les implications financières
des programmes mis en oeuvre pour les réaliser, favorisera la
planification des activités du gouvernement et une allocation plus
rationnelle de ses ressources financières.
Ce processus de budgétisation donnera également au
gouvernement la possibilité d'évaluer systématiquement
l'efficacité de ses programmes, c'est-à-dire de voir s'ils sont
exécutés au meilleur coût possible et de voir
également s'ils réalisent bien les objectifs pour lesquels ils
ont été conçus.
Un autre projet en cours est celui de la mécanisation des
opérations budgétaires et comptables. Ce système permettra
d'abord de fournir aux gouvernants les informations dont ils ont besoin pour
prendre des décisions en connaissant bien les implications
financières. Il contribuera également à augmenter
l'efficacité des opérations de contrôle budgétaire.
L'enregistrement rapide et la mise à jour régulière des
engagements de dépenses permettront aux organismes centraux de suivre
presque quotidiennement l'évolution de la dépense et sa
conformité au budget. L'instauration d'un tel système facilitera
donc l'exercice par les gestionnaires des ministères de leurs
responsabilités administratives.
Je désire également mentionner qu'en ce qui concerne le
reste de l'appareil administratif, c'est-à-dire les 105 organismes
statutaires autres que les ministères, le gouvernement vise à
régulariser au plus vite leur relation avec la Législature, le
gouvernement, les ministres et les fonctionnaires des divers
ministères.
La réforme administrative que nous voulons placer sous le signe
de l'efficacité et de la responsabilité ne saurait être
réalisée d'une façon satisfaisante si les relations entre
ces organismes extraministériels, la Législature et le
gouvernement ne sont pas régis par des règles de jeu suffisamment
précises qui fixent clairement à chacun ses
responsabilités dans la mise en oeuvre des volontés de l'Etat
exprimées démocratiquement.
Certains organismes ont des revenus, d'autres n'en ont pas. Certains
organismes ont comme but de procéder à des adjudications mais
sans qu'il existe des critères précis sur lesquels ils peuvent
appuyer leurs décisions. D'autres organismes ont des rôles
uniquement consultatifs. D'autres, enfin, exercent des activités
à caractère industriel ou commercial. Il est évident que
le degré de prévision des mandats de chacun varie, que leur marge
de manoeuvre ne doit pas nécessairement être la même, que
les règles de conduite auxquelles ils doivent s'astreindre peuvent
varier, et que le gouvernement, au plan de leur orientation et de leur
financement ainsi que le Parlement au plan du contrôle, sont
intéressés à des degrés différents. Chacun
aussi constate que l'on vit actuellement dans un certain état de
paradoxe constant. D'une part, on crée des organismes en dehors des
ministères, et d'autre part, on les soumet, dans certains cas, au
même contrôle de leurs décisions que les ministères
eux-mêmes. Il y a quelque chose d'un peu faux à créer des
corporations pour gérer, présumément avec une certaine
latitude, des opérations et, en même temps, à soumettre
toutes leurs décisions à un contrôle préalable
externe.
Il est donc urgent de standardiser le régime administratif de
tous ces organismes. L'an dernier, le député de Montcalm, devant
la Commission permanente de la présidence du conseil, disait qu'il
serait intéressant d'élaborer une loi de l'administration
financière comportant des critères quant à la
détermination du
degré d'automonie ou de contrôle administratif qui doit
être laissé aux divers types d'organismes, soit en matière
de gestion financière ou budgétaire, soit en matière de
gestion de personnel. Cela aurait été mieux s'il était
passé immédiatement à l'action. J'ai déjà
constitué, M. le Président, à la suite d'une
décision prise par le conseil des ministres, un comité de travail
chargé d'examiner systématiquement les lois organiques existantes
et les règlements, afin de pouvoir suggérer une sorte de code des
régimes administratifs. Aussitôt que cette étude sera
terminée, nous compléterons le présent projet de loi de
l'administration financière par des dispositions classifiant les
organismes et définissant, pour chaque classe, les matières sur
lesquelles les décisions de leur conseil d'administration sont finales
et leur appartiennent en propre, ainsi que les matières sur lesquelles
ces décisions doivent être le propre d'autres
autorités.
Ces différentes mesures constituent un complément au
projet de loi numéro 55 qui opère des changements surtout au
niveau des structures administratives mais aussi au. plan du style de gestion
financière selon les principes de base de la réforme
administrative que nous avons précédemment
énoncée.
L'objet principal de ce projet de loi est en effet de proposer une
nouvelle répartition des attributions et tâches entre le Conseil
du trésor, le ministère des Finances, le contrôleur des
finances, le vérificateur général et les différents
ministères et organismes.
Je vais essayer d'expliquer sommairement les rôles que devront
jouer chacun de ces organismes et les principes que nous mettons de l'avant
dans le projet que nous soumettons à l'attention de cette Chambre.
L'actuelle loi du ministère des Finances prévoit
l'existence d'un conseil de la trésorerie chargé d'exercer les
fonctions de comité du conseil exécutif en ce qui concerne les
finances, les revenus et les dépenses du gouvernement ainsi que la
retraite des fonctionnaires et employés du gouvernement. La loi
n'accorde cependant aucun pouvoir de décision à ce conseil. Dans
une perspective de spécialisation des tâches et de saine
répartition des pouvoirs de décision, nous suggérons de
modifier la situation actuelle. Nous proposons que le Conseil de la
trésorerie, sous le nouveau vocable de Conseil du trésor,
n'agisse plus seulement à titre de comité du conseil des
ministres, mais exerce, de son propre chef, la plupart des pouvoirs qu'il
possède actuellement en plus de pouvoirs nouveaux que lui confère
le projet de loi.
Vous remarquerez que ces pouvoirs ne sont pas limités au secteur
de la gestion financière mais touchent les autres secteurs de la
politique administrative. En matière de gestion financière, le
Conseil du trésor deviendra l'organisme central de budgétisation
et de contrôle budgé- taire. Il sera chargé d'analyser les
implications financières des plans et programmes des ministères
et organismes du gouvernement, de préparer, chaque année, les
prévisions budgétaires et de contrôler l'exécution
des dépenses et engagements financiers autorisés par la
Législature.
Présentement, les prévisions budgétaires sont
préparées sous l'autorité d'un sous-ministre adjoint des
Finances, alors que le contrôle budgétaire s'effectue sous
l'autorité du contrôleur de la Trésorerie, qui, tout en
relevant administrativement du sous-ministre des Finances, relève
fonctionnellement du Conseil de la trésorerie. Cette dualité
d'autorité crée des duplications inutiles, de la confusion et
provoque des retards dans la mise en oeuvre des programmes
approuvés.
Nous estimons donc important de confier à un organisme unique,
soit le Conseil du trésor, à la fois la préparation des
prévisions budgétaires qu'il soumet au conseil des ministres et
le contrôle d'opportunité des dépenses, une fois que les
crédits ont été votés. Le Conseil du trésor
pourra également adopter des règlements déterminant les
méthodes que les ministères et autres organismes doivent employer
dans la perception et dans l'administration des deniers publics, ainsi que la
manière dont ils doivent tenir les comptes. En outre, il aura le pouvoir
d'adopter des règlements relatifs aux comptes, honoraires ou frais de
fourniture ou d'utilisation d'installations, ainsi qu'aux conditions des
locations, des baux et des aliénations de biens publics.
Dans le secteur de la gestion du personnel, nous prévoyons que le
Conseil du trésor exerce-re les pouvoirs du lieutenant-gouverneur en
conseil en tout ce qui concerne l'approbation des plans d'organisation des
ministères et organismes du gouvernement, les effectifs requis pour leur
gestion ainsi que les conditions de travail de leur personnel. En outre, nous
proposons d'accorder au Conseil du trésor les pouvoirs qui sont
actuellement conférés au lieutenant-gouverneur en conseil en
vertu de la Loi du ministère de la Fonction publique et de la Loi de la
Fonction publique, du régime de retraite des fonctionnaires et du
régime de retraite des enseignants, sauf les pouvoirs relatifs à
la nomination, à la révocation, ainsi qu'à la retraite des
sous-ministres ou autres fonctionnaires de rang équivalent.
De prime abord, certains auraient peut-être la tentation de
prétendre que nous faisons ainsi disparaître la raison
d'être du ministère de la Fonction publique. Or, rien ne saurait
être plus contraire à la réalité, car nous ne
modifions aucunement les fonctions de ce ministère. Il sera
appelé à jouer vis-à-vis du Conseil du trésor le
même rôle qu'il était appelé à jouer
auprès du conseil des ministres.
Il va sans dire que, pour bien s'acquitter de ces vastes
responsabilités, le Conseil du trésor devra avoir à son
service un secrétariat bien
organisé et composé d'un personnel compétent. Le
titulaire du poste de secrétaire du Conseil du trésor devra
être un fonctionnaire de haut calibre, possédant une
expérience éprouvée en administration publique. Il devra
être assisté de personnes qui commanderont, par leur
compétence et leurs aptitudes, le respect des fonctionnaires avec qui
elles devront transiger dans les autres ministères.
Nous avons d'ailleurs l'intention de procéder
régulièrement à des échanges entre les
ministères et les organismes centraux de façon à
diversifier l'expérience des analystes et des autres cadres.
Dans le domaine particulier de la gestion financière, les
objectifs que devra viser à atteindre le secrétariat du conseil
seront : a) De permettre au gouvernement de prendre des décisions en
connaissant le plus exactement possible toutes les implications
financières; b) De permettre au gouvernement de contrôler
l'utilisation des ressources financières affectées à
l'exécution de ces décisions; c) De permettre au gouvernement
d'évaluer, de façon systématique et continue, la
rentabilité des programmes en cours.
Pour réaliser ces objectifs, le secrétariat du conseil
devra, entre autres activités, analyser en profondeur les implications
financières des nouveaux programmes; vérifier le degré
d'efficacité avec lequel ils sont exécutés; faire des
analyses des coûts-bénéfices des programmes existants,
c'est-à-dire comparer les coûts de chaque programme avec les
bénéfices économiques et sociaux qui en découlent;
enfin, suggérer des règles précises sur l'engagement des
dépenses votées par la Légisalture et voir à leur
application.
Il est essentiel de bien comprendre que le Conseil du trésor doit
être un organisme de direction centrale et non un organe exerçant
un contrôle négatif. Il devra s'employer à fournir aux
ministères et aux autres organismes gouvernementaux les principes de
gestion qui sont en mesure d'assurer l'efficacité maximale de
l'administration publique, ainsi que d'en surveiller l'application. Le Conseil
du trésor devra donc déléguer le plus possible aux
gestionnaires des ministères et autres organismes, tout en prescrivant
les modes d'exercice de cette délégation et en l'assortissant de
sanctions appropriées.
Même si le projet de loi vise à attribuer un vaste champ de
responsabilité au Conseil du trésor, il serait tout à fait
faux de prétendre qu'il crée un second cabinet ou un cabinet
parallèle. Afin de préserver l'autorité suprême du
conseil des ministres, le projet de loi prévoit que le
lieutenant-gouverneur en conseil peut toujours, par règlement, limiter
les pouvoirs qui sont conférés par la loi au Conseil du
trésor, dans la mesure qu'il indique, ou assortir les pouvoirs des
conditions qu'il détermine.
Le nouveau rôle que nous désirons attribuer au Conseil du
trésor suppose une redéfinition des responsabilités du
ministère des Finances. En effet, la tâche de préparer les
prévisions budgétaires et de contrôler subséquemment
l'opportunité des dépenses sera transférée de
l'autorité du ministère des Finances à celle du Conseil du
trésor.
Dans les fonctions que le projet de loi à l'étude attribue
au ministre des Finances, la plus importante me semble être celle
d'effectuer des recherches et de conseiller le gouvernement en matière
de politique économique, fiscale et budgétaire. Le
ministère des Finances devrait devenir, dans le domaine de la politique
économique et fiscale, le conseiller expert du gouvernement, comme l'est
le ministère de la Fonction publique, en matière de gestion du
personnel. Le ministère des Finances devrait être capable de
développer cette nouvelle dimension qui est le propre des
ministères des Finances bien organisés dans d'autres
gouvernements. L'analyse économique ainsi que l'appréciation et
le prévision de la conjoncture économique, voilà des
tâches, il me semble, dont ne peut se désintéresser un
véritable ministère des Finances. De plus, l'examen approfondi et
constant de toute notre structure fiscale, y compris la fiscalité
municipale et scolaire, est une activité qui devrait faire la
préoccupation constante d'un véritable ministère des
Finances. Il m'apparaît également important que le
ministère des Finances s'intéresse à d'autres secteurs,
comme la politique douanière et la politique monétaire, afin
d'être en mesure d'en analyser l'impact sur l'économie du
Québec et de formuler des recommandations aux autorités
fédérales.
Une autre responsabilité du Ministère des Finances sera,
comme c'est le cas présentement, la gestion de l'encaisse et de la dette
publique. Les emprunts publics constituent aujourd'hui une partie importante du
financement des activités gouvernementales. D'ailleurs, je pense que le
ministère des Finances ne peut plus limiter son action au financement du
gouvernement même, il faut songer à ce que le ministère des
Finances coordonne le financement des organismes du secteur parapublic.
Enfin, le ministre des Finances sera responsable de la
préparation des comptes publics et de leur présentation à
l'Assemblée nationale.
Le projet de loi suggère aussi de modifier les fonctions de
l'actuel contrôleur de la Trésorerie. Le poste de contrôleur
de la Trésorerie a été créé en 1961. Les
fonctions présentement exercées par le contrôleur sont de
tenir un registre des engagements imputables sur chaque crédit et
d'approuver, au terme de l'arrêté en conseil 1556 de 1965, les
dépenses à encourir inférieures à $25,000.
Donc, le contrôleur de la Trésorerie est comptable d'une
part, des engagements et, d'autre part, approuve le bien-fondé des
propositions d'engagements de moins de $25,000. Il y
avait là une confusion qui pouvait conduire à des
situations malsaines et jugées comme telles par la commission
Glassco.
Désormais, le pouvoir d'autoriser des dépenses et de juger
de leur opportunité appartiendra aux divers ministères et
organismes, sauf dans les cas où le gouvernement se le réservera
ou l'attribuera au Conseil du trésor. Le contrôleur de la
Trésorerie qui portera, dorénavant, le titre de contrôleur
des finances deviendra le comptable en chef du gouvernement. D'abord, il devra
certifier, comme le fait présentement le contrôleur de la
Trésorerie, des disponibilités de crédit. Il sera ensuite
chargé de faire la vérification avant paiement,
c'est-à-dire d'examiner la régularité et la
légalité des dépenses avant d'en autoriser le paiement. Il
deviendra, en quelque sorte, le gardien de la régularité du
processus de contrôle budgétaire. En plus, le contrôleur des
finances tiendra la comptabilité du gouvernement, selon les
régies édictées par le Conseil du trésor.
On pourrait croire que le contrôleur sera coincé, lorsqu'il
refusera une demande de paiement signée par les autorités d'un
ministère. D'abord, il faut dire qu'il ne pourra refuser en se fondant
sur des critères autres que ceux de la régularité ou de la
légalité de la demande. Par conséquent, il n'y aura plus
de débat sur la sagesse de la demande. Le contrôleur des finances
n'aura plus à autoriser le bien-fondé d'une demande de
crédit. Et puis, s'il y a hésitation, il pourra
référer le tout au Conseil du trésor qui en
décidera.
Il va sans dire également que nous misons ici sur une certaine
discipline administrative de la part des autorités des ministères
et aussi sur le fait que le conseil va exercer dès le départ son
pouvoir réglementaire de façon à édicter les normes
et règles auxquelles devront s'astreindre les ministères.
D'autres dispositions de la loi concernent l'Auditeur de la province,
dont nous suggérons de changer le nom pour celui de Vérificateur
général. Présentement, en vertu de la Loi du
ministère des Finances et de la Loi de la vérification des
comptes, l'Auditeur remplit deux rôles. Tout d'abord, il doit, pour le
compte de l'organe exécutif, tenir les comptes, faire la
vérification avant paiement, autoriser le paiement et contresigner les
chèques émis par le gouvernement. En outre, il doit, pour le
compte de l'Assemblée nationale, tel que le stipule l'article 23 de la
Loi de la vérification des comptes, effectuer une vérification
après paiement.
A mon avis, cela crée une situation tout à fait absurde.
On demande en somme à l'Auditeur de vérifier après
paiement ce qu'il a vérifié lui-même avant paiement. On lui
demande, en d'autres mots, de se vérifier et de se critiquer. Nous
croyons que le vérificateur ne peut demeurer le serviteur à la
fois de l'organe exécutif et de l'organe législatif.
Pour valoriser son rôle et lui donner le détachement voulu
pour qu'il puisse, dans son rapport annuel à la Chambre, s'exprimer
librement, nous suggérons de le relever de cette double
allégeance en transférant ses responsabilités en
matière de vérification avant paiement et de paiement au
contrôleur des finances pour lui confier uniquement la tâche de
vérification après paiement, comme le fait le vérificateur
professionnel pour les actionnaires de toute entreprise.
Nous voulons donc faire du vérificateur général un
véritable fonctionnaire de la Législature, de l'Assemblée
nationale, chargé de faire la vérification finale des
transactions financières qui ont été faites et d'en faire
rapport à cette Chambre. Le projet de loi prévoit que, dans son
rapport annuel, le vérificateur général devra indiquer si
les comptes ont été tenus de manière convenable, si les
dépenses ont été faites de façon légale et
régulière et si les règles de procédure
appliquées sont suffisantes pour assurer une saine gestion des deniers
publics. Le vérificateur général pourra ainsi contribuer
au perfectionnement des normes administratives qui permettront une meilleure
utilisation des ressources financières.
Le gouvernement est conscient qu'en suggérant de modifier le
rôle du vérificateur général dans le sens
indiqué, il prend certains risques. Un intérêt mesquin
aurait dicté au gouvernement de laisser subsister la situation actuelle,
mais le gouvernement est vraiment convaincu de la nécessité
d'avoir une administration publique la plus efficace et la plus intègre
possible et est prêt à prendre tous les moyens nécessaires
pour y arriver, même si ces moyens peuvent parfois se
révéler douloureux.
Un autre effet important du projet de loi est d'accroître la
capacité de décision et, par voie de conséquence, de
favoriser la capacité de gestion des divers ministères et
organismes du gouvernement. Ainsi, comme nous l'avons mentionné
précédemment, le pouvoir d'autoriser des dépenses et de
juger de leur bien-fondé appartiendra désormais aux
ministères ou organismes, sauf dans les cas où le
lieutenant-gouverneur en conseil jugera bon de se le réserver ou de
l'attribuer au Conseil du trésor. L'étendue de ce pouvoir pourra
varier selon certains critères, comme par exemple la nature de la
dépense, le montant en jeu, l'importance du budget de l'organisme qui
fait les transactions ainsi que la performance administrative passée des
gestionnaires de cet organisme.
Une des caractéristiques du système actuel est la
multitude d'autorisations requises pour engager la moindre dépense. Ce
système a pour conséquence néfaste de miner le sens des
responsabilités des gestionnaires. Ces derniers, en effet, sont de moins
en moins enclins à étudier à fond tous les aspects d'une
décision, étant assurés que ces décisions seront
soumises à de nouveaux examens et à des approbations multiples
à divers niveaux plus élevés.
Il incombera au Conseil du trésor de décen-
traliser les pouvoirs de décision en matière d'engagement
de dépenses tout en prescrivant par des règles et directives
précises les modalités d'exercice de ces pouvoirs.
Le fait pour les fonctionnaires de prendre eux-mêmes les
décisions permettra de passer directement de la décision à
l'action et tout le processus d'exécution des activités
gouvernementales sera grandement accéléré.
Vous pouvez constater que le projet de loi ne va pas aussi loin que la
loi fédérale, qui attribue au ministère même toutes
les responsabilités en matière de certification, de
disponibilité de crédits et de vérification avant
paiement; et ce depuis le 1er avril 1969.
Mais, il faut dire que les ministères du gouvernement
fédéral exerçaient depuis longtemps les
responsabilités que nous suggérons d'attribuer aux nôtres
dans le présent projet de loi. Nous avons donc cru qu'il était
préférable de procéder par étapes.
Voilà les principales innovations du projet de loi dont nous
proposons l'adoption à l'Assemblée nationale. Ce projet contient
d'autres dispositions nouvelles sur des points particuliers dont nous pourrons
discuter la teneur au stade de l'étude en comité. Je ne
prétends pas que le présent projet de loi soit exempt de toute
imperfection ; le gouvernement est prêt à accepter les suggestions
valables qui pourront être faites par les membres de l'Assemblée
nationale lors de l'étude en comité.
D'ailleurs, j'ai mentionné précédemment que le
projet serait complété aussitôt que possible par
l'adjonction de nouvelles dispositions concernant la classification de
différents organismes statutaires extraministériels et la
normalisation de leur régime administratif. Nous croyons que ce projet
de loi constitue un geste important en vue de doter le gouvernement
québécois d'une administration plus moderne, plus efficace,
capable de s'adapter aux mutations rapides de notre société,
consciente du coût de ses opérations et préoccupée
par la nécessité de fournir aux citoyens des services de
qualité supérieure.
Nous contribuerons ainsi à accroître la confiance des
citoyens envers l'Etat. Cette confiance, à mon sens, est un
élément essentiel de l'existence d'une véritable
démocratie. J'ai donc l'honneur, M. le Président, de proposer
l'adoption en deuxième lecture du projet de loi no 55.
M. Marcel Masse
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, le gouvernement soumet un
projet de loi par lequel il veut apporter des transformations importantes dans
l'organisation et l'administration de plusieurs organismes au sein de l'Etat.
Même si, à première vue, ces transformations peuvent ne pas
avoir tout l'impact que l'on aurait pu souhaiter, il demeure que certaines
recommandations auront des conséquences considérables sur la
gestion des affaires de l'Etat.
Ainsi, à l'article 2, on accorde au ministre des Finances la
fonction d'effectuer des recherches et de conseiller le gouvernement en
matière de politique économique, fiscale et budgétaire.
Pour mesurer les conséquences d'une telle législation il est bon,
dans une première étape, d'étudier, puisqu'il en est
question dans le projet de loi, ce qu'est la politique économique, la
politique fiscale et la politique budgétaire.
Le terme politique économique pris dans son sens large peut
signifier l'action gouvernementale dans la sphère économique,
c'est-à-dire l'intervention plus ou moins délibérée
du gouvernement dans la production, la distribution et la consommation des
biens.
La politique économique peut dépendre de la politique
générale d'un gouvernement en même temps que l'influencer.
En conséquence, la politique économique peut avoir une
portée encore plus vaste que la politique fiscale et elle peut
comprendre tout programme qui reflète des objectifs économiques
ou est influencé par eux. De plus en plus, toutefois, la politique
économique est appelée à se confondre, au moins sous
certains de ses aspects, avec la politique fiscale étant donné
que les éléments de celle-ci: taxation, dépenses
gouvernementales et administration de la dette publique occupent une place de
plus en plus grande dans la poursuite de la stabilité
économique.
Bref, il est difficile de concevoir et de poursuivre une politique
économique véritable et réaliste si les dirigeants des
organismes concernés n'ont pas une connaissance approfondie du jeu des
forces économiques. La politique économique occupe une place de
plus en plus importante dans la société contemporaine en raison
de la croissance rapide de la richesse, des possibilités accrues d'en
faire l'acquisition et des efforts des gouvernements pour en contrôler la
distribution.
Le but ultime de la politique économique est le même depuis
des décades: prévenir la rareté des biens et rechercher
l'abondance. Chaque Etat doit avoir une politique économique
adaptée aux diverses circonstances. De plus, chaque forme
d'activité économique agriculture, commerce, industrie et
autres peut devenir objet de contrôle gouvernemental. Si chacune
de ces politiques n'est pas parfaitement intégrée dans une
politique globale, les résultats peuvent être désastreux
pour le gouvernement et la société. Il est donc extrêmement
important que les actions directes entreprises par le gouvernement, entre
autres les dépenses publiques, soient intimement reliées avec
certaines autres actions, plus indirectes celles-là, comme la
taxation.
La politique économique c'est, pour l'Etat, à la fois la
définition de ce qu'il considère être l'optimum
économique de la nation et la mise en oeuvre des moyens
nécessaires pour y parvenir.
Par ailleurs, les formes de la politique économique varient avec
les situations auxquelles elle
a à faire face. Si l'on s'intéresse aux structures
existantes de l'économie, soit pour les protéger, soit pour les
modifier, l'on agira surtout par la voie légale et réglementaire.
Si l'on s'efforce de lutter contre des déséquilibres
conjoncturels, entre l'offre et la demande, l'action fiscale budgétaire
et monétaire et la coordination des activités des
différents groupes économiques permettront de triompher de
situations de crise contre lesquelles tous les efforts conjugués des
entreprises concernées resteraient impuissants.
Si l'on recherche l'expansion des productions, l'on définira les
objectifs à atteindre et l'on mettra en oeuvre des
procédés de planification. Faut-il alors se surprendre que la
politique économique de l'Etat coincide assez directement avec les
pouvoirs dont il dispose? Ainsi, dans une économie libérale
où les pouvoirs d'intervention de l'Etat sont fort restreints, la
politique économique ne pourra produire des effets aussi positifs que
lorsqu'il s'agit d'une économie où l'Etat peut exercer un certain
dirigisme.
Aujourd'hui, tous le reconnaissent sans hésiter, la situation a
évolué dans les démocraties libérales, et les
gouvernements s'octroient ou se font octroyer des responsabilités qui
accroissent considérablement leur pouvoir d'intervention dans
l'économie. L'Etat devient le plus important régulateur de
l'économie. Donc, par sa politique économique, non seulement il
organise ou réorganise des structures, mais il les corrige. L'action
motrice et correctrice de la politique économique peut se
révéler un facteur de paix, de progrès et de
compréhension.
Comme on le comprend rapidement, la politique économique est
étroitement reliée à la politique fiscale qui se rapporte
aux divers facteurs relatifs à la taxation et à l'impôt,
c'est-à-dire à leur structure, leur objet et leur
répartition.
La politique fiscale d'un Etat revêt une importance capitale. La
création assez récente de commissions royales ou de
comités d'étude sur le sujet par les gouvernements de l'Ontario,
du Québec, du Nouveau-Brunswick, du Manitoba, de la Saskatchewan et de
la Nouvelle-Ecosse en est une preuve suffisante. Sans élaborer
longuement sur la fiscalité et les problèmes qui s'y rattachent,
qu'il suffise de mentionner que les principaux critères qui permettent
de l'apprécier peuvent se résumer au rendement, à la
justice et à l'incidence économique.
Des liens directs existent entre politique fiscale, politique
économique et politique budgétaire. La fiscalité contribue
activement à la politique économique. Le budget est directement
influencé par la taxation. Est-il besoin de rappeler que tous les
impacts, quels qu'ils soient, exercent une influence sur l'activité
économique? Ils affectent souvent la répartition des ressources
et parfois même celle des revenus. La politique fiscale peut signifier en
définitive les efforts du gouvernement pour stabiliser ou stimuler
l'activité économique par les moyens de la taxation, des
dépenses gouvernementales et de l'administration de la dette
publique.
La politique fiscale doit avant tout permettre à l'Etat et aux
collectivités publiques de réunir des ressources suffisantes.
Elle doit être réaliste, s'adapter à la matière
imposable, c'est-à-dire finalement au degré de
développement économique du pays, à la répartition
des revenus entre les groupes et les individus.
La politique budgétaire joue également un rôle
important dans l'administration d'un Etat. Le budget, établissant le
niveau des revenus et des dépenses pour une période future,
devient de plus en plus un outil d'une politique fiscale et, de ce fait, peut
constituer un instrument important pour influencer la vie économique
d'un Etat.
Toutefois, la politique budgétaire n'a pas toujours exercé
une aussi grande influence que la politique fiscale étant donné
qu'elle ne contient pas nécessairement la politique du gouvernement
à propos de l'administration de la dette publique. Toutefois, il est
clair que la politique budgétaire a des liens étroits avec
certaines décisions de politique fiscale. Si le budget est conçu
pour apporter une contribution maximale à la politique fiscale, les
procédés budgétaires seront assez souples pour que les
revenus et les dépenses de l'Etat s'adaptent aux besoins de
l'économie. La politique budgétaire est un compromis entre deux
forces: la tendance à dépenser et les besoins
d'économiser.
D'autre part, des besoins de plus en plus aigus se font sentir chez les
citoyens pour des services accrus ou de nouveaux services. Faut-il être
surpris en conséquence, qu'à chaque année les budgets
atteignent de nouveaux sommets? La rareté des ressources oblige
invariablement l'Etat à réduire le rythme d'accroissement de ses
dépenses parce qu'une augmentation de ces dernières conduit
presque inévitablement à une augmentation des impôts et
aussi à une incidence directe sur la politique fiscale.
Il faut donc établir des priorités. Ne pouvant satisfaire
tous les besoins, il faut faire un choix. Une saine politique budgétaire
est celle qui met en relief les grandes missions de l'Etat et les meilleurs
moyens d'y répondre. Il faut ici signaler l'apport considérable
du budget-programme de plus en plus nécessaire au Québec. En
mettant en relief les grandes missions de l'Etat, le budget-programme permet de
dépasser le cloisonnement des structures administratives et de mieux
définir les priorités dans les objectifs comme dans les moyens.
Cette méthode valorise le rôle du gestionnaire et lui donne de
meilleurs outils pour prendre des décisions.
Ces brèves considérations sur la politique
économique, fiscale et budgétaire nous indiquent les liens
qu'elles ont entre elles. Rappelons, pour clore cette démonstration, une
des constatations du rapport de la commission royale d'enquête sur la
fiscalité. En plus de
s'appuyer sur certains principes fondamentaux tels que le rendement,
l'équité et l'incidence économique, la politique fiscale
d'un Etat doit tenir compte du contexte économicosocial auquel elle
s'applique.
Si, d'une part, les revenus de l'Etat fluctuent selon l'activité
économique, celle-ci, d'autre part, est influencée par la
fiscalité. Ainsi, une situation économique déprimée
a des effets non seulement sur le niveau des revenus publics, mais aussi sur
l'élaboration de la politique gouvernementale. Alors qu'autrefois la
neutralité budgétaire était une donnée fondamentale
de la philosophie économique, il est aujourd'hui reconnu que le budget
constitue un instrument efficace susceptible d'influer sur l'activité
économique.
Le projet de loi sur l'administration financière met en relief
les relations existant entre les questions économiques, fiscales et
budgétaires. Cependant, ce qui peut se produire à la suite de
l'adoption de ce projet de loi, c'est la multiplication des organismes qui s'en
occupent. Le ministère des Finances aura des pouvoirs accrus et se verra
octroyer des responsabilités dans ces matières, cependant que les
responsabilités conférées par la loi à l'Office de
planification du Québec l'amènent directement à
étudier ces mêmes problèmes. L'article 2 de la loi portant
sur la création de l'Office de planification dit ceci: "L'Office a pour
fonction et pouvoirs: a) De préparer pour le compte du gouvernement des
plans, programmes et projets de développement économique et
social et d'aménagement du territoire en vue de la meilleure utilisation
des ressources économiques et humaines et en tenant compte des
particularités des régions du Québec; b) D'obtenir des
ministres et organismes du gouvernement les renseignements disponibles
concernant leur politique, leurs programmes, leurs objets et leur
réalisation ainsi que toute autre donnée statistique ou
renseignement qu'il juge nécessaire ou utile à la poursuite de
ses fins; c) D'exécuter ou de faire exécuter pour les fins
prévues aux paragraphes a) et b) des recherches, études,
enquêtes et inventaires."
Il y a donc possibilité de double emploi entre ces deux
organismes. De plus d'autres ministères ou organismes de l'Etat ont
également des pouvoirs conférés par la loi leur permettant
d'intervenir eux aussi dans ces divers secteurs.
En vue d'éviter les heurts entre les différentes instances
gouvernementales, en vue d'empêcher les divers organismes de prendre des
orientations distinctes, nous croyons qu'il y aurait lieu de créer un
ministère de l'Economie, responsable non seulement d'effectuer des
recherches et de conseiller le gouvernement, comme le propose l'actuel projet
de loi, mais d'appliquer la politique économique décidée
par le gouvernement.
Une meilleure coordination des politiques et une plus grande
rationalité administrative s'imposent. Or, elles ne peuvent être
atteintes que par une centralisation des décisions dans un seul
ministère où chacun travaillerait en liaison avec ses
collègues dans une perspective identique, sous la direction du
responsable politique. Cette philosophie qui a présidé à
l'avènement du ministère des Affaires sociales aurait dû
trouver une application complémentaire dans les matières d'ordre
économique. On ne comprend pas pourquoi, malgré les promesses
électorales répétées, il n'en a point
été ainsi. Il est permis de penser qu'on est prêt, du
côté ministériel, à sacrifier l'efficacité
tant prônée à l'individualisme et au besoin de prestige de
quelques-uns des membres du gouvernement.
Ce projet de loi soulève d'autres problèmes dont celui de
la croissance du rôle de l'Etat. Un des phénomènes les plus
importants des dernières décades est la croissance très
rapide du rôle de l'Etat. Il fut un temps où l'Etat, loin de
prendre des initiatives qui auraient pu diriger ou, tout au moins, orienter le
développement de la communauté, limitait ses interventions au
strict minimum. C'était l'époque du laisser-faire. Aujourd'hui,
la situation a changé et les responsabilités de l'Etat ont
sensiblement évolué. Il suffit de consulter, ne serait-ce qu'un
moment, la législation de la dernière décade pour
réaliser à quel point l'activité de l'Etat s'est
élargie et diversifiée.
L'immense système administratif de l'Etat est devenu un moyen de
satisfaire les besoins du public et un instrument de puissance pour ceux qui en
disposent. La santé d'un Etat se reconnaît, entre autres, par son
aptitude à adapter ses politiques aux besoins de la population et
à organiser ses structures de manière à assurer
l'application de ses politiques avec le maximum de rendement et le minimum de
coût. Si le pouvoir de l'Etat n'est pas efficace, en vain pourrons-nous
espérer en accroître les bons effets. "L'Etat, ajoute en
spécialiste de la science politique, a cessé d'être
simplement la puissance protectrice d'un certain type d'organisation
économique. Son intervention régulatrice s'est étendue
à tous les domaines. Le budget, la fiscalité cessent d'être
neutres et sont désormais conçus et utilisés comme des
moyens de transfert et de répartition du revenu national en vue d'un
meilleur emploi des ressources et des hommes. La politique économique
est devenue une fonction reconnue et éminente de l'Etat; au
libéralisme a succédé un dirigisme plus ou moins
accentué selon les pays".
Dans le même sens, la commission royale d'enquête sur la
fiscalité ajoutait: "Les transformations qui sont intervenues dans la
structure économique des sociétés depuis quelques
décennies ont engendré des problèmes
socio-économi-
ques que l'Etat seul est en mesure de résoudre dans la plupart
des cas. L'un de ces importants changements fut le passage d'une
économie principalement axée sur l'agriculture à une
économie caractérisée par la grande industrie. Les
services publics requis dans une société fortement
industrialisée et urbanisée n'ont pas de commune mesure avec ceux
qui étaient exigés d'une société dont
l'activité économique se limitait à l'exploitation
agricole et à la petite entreprise de type artisanal.
Il s'ensuit qu'un nombre croissant de besoins humains tels que
l'éducation, la sécurité sociale et la santé,
autrefois à la charge des familles, ne peuvent plus être
satisfaits entièrement que par la collectivité. C'est ainsi que
l'Etat fut amené à prendre une place de plus en plus importante
dans l'organisation sociale et économique et ce en réponse aux
aspirations et aux exigences de la population."
Faut-il alors se surprendre que le budget des dépenses du
gouvernement du Québec, qui était d'environ $170 millions en
1945, soit passé à $598 millions en 1960, et que, pour cette
année, il soit de l'ordre de $4 milliards? Certes, cette croissance
rapide de l'Etat a suscité des critiques de ceux qui s'y opposaient par
principe ou par intérêt, ou qui avaient noté les
échecs et les imperfections qui ont pu se produire. Néanmoins,
ils ont dû accepter la réalité et y voir une tendance
irréversible.
Cette évolution et cette croissance du rôle de l'Etat se
sont effectuées au bénéfice du pouvoir exécutif.
L'expansion des tâches de l'exécutif faisait dire à Jean
Meynaud: "Ce phénomène se relie sans doute à l'extension
généralisée des compétences de l'Etat. A beaucoup
d'égards, tous les organes gouvernementaux ont été
affectés dans le sens d'un accroissement plus large de leurs
tâches, mais il ne semble pas que la répartition ait
été égale. On soutient régulièrement que les
assemblées parlementaires se sont mal adaptées aux
responsabilités nouvelles assumées par le gouvernement au 20e
siècle et que la branche exécutive en a recueilli la plus large
part."
L'extension de la mission de l'Etat a introduit un
déséquilibre entre les différents secteurs du
système gouvernemental. Ce mouvement est particulièrement
marqué dans l'ordre économique. Dès qu'entrent en jeu,
dans ce domaine, des techniques de planification et des mesures de rendement,
ces activités incombent trop facilement à l'exécutif. Pour
sa part, souvent, le Parlement ne possède pas les moyens suffisants pour
décider adéquatement des priorités de l'Etat.
L'exécutif a un rôle éminemment important à jouer au
moment de lancer les opérations. Il a un rôle moteur. Comme
exemple, soulignons qu'une partie des affaires publiques se résout par
l'arbitrage entre des intérêts rivaux ou des prétentions
opposées. Or, de plus en plus, l'exécutif est appelé
à trancher les conflits. Si les parties ne peuvent arriver à une
entente, l'exécutif sera fréquemment appelé à
intervenir.
Un exemple encore plus significatif concerne la répartition et la
location des ressources entre diverses activités. On remarque en effet
une réduction de l'initiative des députés dans la
discussion et le vote des crédits budgétaires. Le nombre
considérable de données que requiert la discussion des budgets et
le caractère souvent très technique des projets font que le
député peut difficilement participer. L'organe exécutif
est trop souvent seul à déterminer ce qu'est
l'intérêt général.
Un autre facteur qui contribue à la croissance de
l'exécutif est la rapidité avec laquelle doivent être
effectués de nombreux choix. Ce phénomène le conduit
souvent à prendre des options qui, en temps normal, seraient de la
compétence du Parlement mais qui deviennent sa responsabilité en
raison des urgences.
En un mot, "les raisons de ce phénomène sont multiples:
accroissement de la masse de travail qui s'établit à un niveau
sans rapport avec le temps dont disposent les parlementaires;
technicité, complexité des questions traitées qui
apparaissent difficiles à dominer sans connaissances
spécialisées; lourdeur des procédures législatives
traditionnelles, etc. On peut ajouter à cela que la méthode de la
discussion publique, difficilement concevable pour certaines décisions,
complique très sérieusement de multiples questions". (Jean
Meynaud)
Lors de sa 46e conférence, l'Union interparlementaire a
discuté ce problème et a "recommandé que, dans le cadre
des divers systèmes politiques et constitutionnels, de sérieux
efforts soient entrepris en vue de consacrer la suprématie du Parlement,
qui à cette fin, doit être l'expression authentique de la
volonté populaire".
L'organe exécutif joue également un rôle
déterminant dans l'élaboration et la proposition des projets de
loi soumis au Parlement. En raison de la complexité des problèmes
auxquels doit faire face le gouvernement, la législation doit être
suffisamment large pour s'adapter aux diverses situations de temps et de
milieu. De là, un nombre grandissant de projets de lois-cadres (et ce
projet no 55 en est un exemple) forcément générales et qui
confèrent au lieutenant-gouverneur en conseil le pouvoir de
réglementer sur les modes que doit prendre sa politique et ses
actions.
Nous sommes en présence d'une forme de législation
déléguée qui accorde à l'exécutif une
discrétion considérable. Trop souvent le Parlement est-il dans
l'obligation de donner au gouvernement un chèque en blanc sur des
questions pouvant avoir des effets déterminants sur l'administration et
la société. Il arrive souvent même que le gouvernement a
l'autorité suffisante pour instituer les moyens de contrôle de sa
propre action.
Certes, au sens constitutionnel du mot, on ne peut strictement parler de
fonctions législatives de l'administration, étant donné
que la constitution accorde exclusivement aux législa-
teurs le pouvoir de faire des lois. Néanmoins, dans les faits, il
s'agit d'un pouvoir qui peut donner les résultats d'une
législation. Et comme l'indique un spécialiste canadien en droit
administratif, nous n'avons aucun scrupule à penser que ceux qui
exercent l'activité réglementaire constituent un pouvoir
réel. Nous ne sommes tout simplement pas loin de croire qu'ils en ont
un, tant en raison de la part croissante qu'ils prennent dans la
définition de l'ordre juridique que par l'autonomie dont ils jouissent
dans l'élaboration de cette partie de l'ordre juridique qui leur est
confié.
Il nous apparaît, en effet, d'une part, que ce pouvoir est le
principal bénéficiaire de la demande accrue d'interventions
étatiques que formule la population, alors que le Parlement,
déjà surchargé, tend à détourner toute
demande d'intervention législative vers ce pouvoir réglementaire.
Le Parlement est donc, en pratique, dessaisi de quelques-unes de ses
principales fonctions qu'on lui attribuait jusqu'à tout
récemment.
La croissance du rôle de l'Etat a surtout profité au
pouvoir exécutif qui s'est considérablement affermi alors que,
parallèlement, la possibilité de législation
déléguée entraînait pour le gouvernement une
immunité de contrôle. L'évolution de ces deux facteurs
jouait dans le même sens pour provoquer un déclin du rôle du
Parlement dans le fonctionnement de notre démocratie.
Afin de remédier à de pareils maux, il y a lieu
d'envisager des mécanismes qui, sans être trop lourds, peuvent
contribuer à revaloriser le rôle qui nous revient en tant que
représentants de la population.
La solution à ce problème se trouve, à mon avis,
dans la création d'une commission parlementaire d'approbation des
règlements. Une telle commission, formée de représentants
de l'Assemblée nationale, aurait comme responsabilité
d'étudier, de discuter et d'adopter les règlements issus des
loi-cadres. Les membres du Parlement ne se contenteraient plus ainsi de fixer
les limites de l'action gouvernementale, mais ils auraient l'occasion de la
contrôler davantage, ce qui contribuerait à redonner au Parlement
une place prépondérante au sein de nos institutions.
M. le Président, je demande la suspension du débat.
M. LEVESQUE: Jusqu'à huit heures quinze.
M. LE PRESIDENT: La Chambre suspend ses travaux jusqu'à huit
heures quinze.
Reprise de la séance à 20 h 16
M. LAVOIE (président): A l'ordre, messieurs!
L'honorable député de Montcalm.
M. MASSE (Montcalm): Ce projet de loi nous inspire également
d'autres remarques. L'article 22 stipule que "le Conseil du trésor
exerce les pouvoirs du lieutenant-gouverneur en conseil en tout ce qui concerne
l'approbation des plans d'organisation des ministères et organismes du
gouvernement, les effectifs requis pour la gestion de ces ministères et
organismes, les conditions de travail de leur personnel ainsi que
l'élaboration et l'application de la politique administrative
générale suivie dans la fonction publique".
Or, la Loi du ministère de la Fonction publique, chapitre 14 des
Statuts de 1969, à l'article 2-d), confie au ministre des
responsabilités parallèles: "Faire des recommandations au
gouvernement sur la réorganisation des structures et des fonctions des
ministères et organismes qui en dépendent et préparer
à cette fin des plans d'organisation portant notamment sur les effectifs
requis pour la gestion du gouvernement et de ses ministères et
organismes, ainsi que sur la répartition et l'utilisation de ces
effectifs".
Certes, le ministre de la Fonction publique continuera à
conseiller non plus le gouvernement, mais dorénavant le Conseil du
trésor, puisque l'article 22 du présent projet de loi
spécifie que les pouvoirs du lieutenant-gouverneur en conseil, en ces
matières, seront dorénavant exercés par le Conseil du
trésor.
Par contre, pour bien s'acquitter de sa responsabilité, le
Conseil du trésor devra étudier les projets qui lui seront soumis
pour approbation et devra, pour bien s'acquitter de cette tâche,
s'adjoindre, dans ces domaines, des spécialistes. Cela viendra,
évidemment, par le biais des pouvoirs accessoires qui sont toujours
implicitement conférés avec les responsabilités. Ces
spécialistes en matière de fonction publique seront
forcément appelés à faire des recherches pour le compte du
Conseil du trésor. Au nom de l'économie du temps et de
l'efficacité, ils étudieront même les projets du
ministère de la Fonction publique au cours de leur élaboration.
Il y a un danger évident d'en arriver à un parallélisme de
la recherche qui peut signifier rapidement l'érosion des pouvoirs du
ministère de la Fonction publique.
Le ministère de la Fonction publique sera probablement ainsi
amené à plus d'exécution de programmes sans en avoir
l'orientation. Pourtant, les raisons de la création du ministère
étaient claires. "Nous avons voulu, par cette loi, donner au ministre ce
pouvoir d'orientation et lui accorder les facilités de normaliser, de
coordonner et de surveiller l'exécution et l'administration des
politiques ainsi définies". Un
des motifs de la création du ministère de la Fonction
publique n'était-il pas de confier, à un même responsable,
l'ensemble de la politique de gestion du personnel?
Il y a plus. Dans le deuxième paragraphe de l'article 22, il est
stipulé que "le Conseil du trésor exerce aussi les pouvoirs qui
sont conférés au lieutenant-gouverneur en conseil en vertu de la
Loi du ministère de la Fonction publique. Or, cette loi donnait au
gouvernement des pouvoirs considérables.
Le paragraphe g) de l'article 2 du chapitre 14 des Statuts 1969 se lit
comme suit: "Le ministre doit s'acquitter des autres devoirs que lui assigne le
lieutenant-gouverneur en conseil." En outre, qui peut soutenir que le Conseil
du trésor ne s'accordera pas une responsabilité dans le domaine
de la négociation des conventions collectives secteur public et
parapublic à la place du ministère de la Fonction
publique?
Les responsabilités que le Conseil du trésor demande en
matière de conditions de travail ainsi qu'en matière
d'élaboration et d'application de la politique administrative
générale peuvent facilement y conduire. On s'interroge encore
à savoir au nom de quelle efficacité le gouvernement actuel
propose une législation qui aura comme résultat de confier
à deux de ces organismes des responsabilités similaires.
Le projet de loi de l'administration financière, aux articles 24
et 26, prévoit que le lieutenant-gouverneur en conseil,
c'est-à-dire le gouvernement en fait, déterminera par
règlement ce que seront les pouvoirs du Conseil du trésor. Il
s'agit donc d'une loi-cadre qui sera ultérieurement
précisée par des règlements. On demande donc aux
parlementaires de voter une loi dont ils ne connaissent pas encore
l'application exacte. Encore une fois, nous disons qu'il y aurait lieu de
prévoir des mécanismes préféra-blement
à une commission parlementaire par lesquels l'Assemblée
nationale pourrait participer à l'élaboration ou du moins
à la discussion et à l'approbation des règlements de cette
loi organique, étant donné son importance et sa
répercussion sur la structure de l'Etat.
La section a) de ce projet de loi, intitulée "Vérification
des comptes, " prévoit dans sa première partie les
responsabilités du vérificateur général. Celui-ci
vérifira la régularité des dépenses après
paiement seulement. Cela lui permettra une plus grande latitude quant à
ses appréciations sur l'administration. Cette mesure est heureuse; il
n'aura plus à se critiquer lui-même.
Toutefois, pareille latitude peut facilement être réduite.
En effet, il ne semble pas que le vérificateur général
bénéficiera de tous les pouvoirs pour poser des exigences quant
à la manière de présenter les documents qu'il doit
consulter et critiquer. Le Conseil du trésor aura des pouvoirs bien
définis sur ce point. Je cite l'article 23: "Le Conseil détermine
la forme et la teneur des documents au moyen desquels ces données
doivent lui être transmises et l'époque à laquelle elles
doivent lui être communiquées".
Les pouvoirs du vérificateur général seront moins
précis. Au mieux, je cite l'article 75: "Le vérificateur
général a droit de prendre communication des dossiers, documents
et registres concernant les comptes de chaque ministère ainsi que de
chaque organisme dont il est, en vertu de la loi, chargé de
vérifier les comptes."
Le projet de loi C-190 concernant l'Auditeur général du
Canada, et déposé en première lecture aux Communes,
accordait à l'Auditeur général "le droit d'exiger et de
recevoir, des membres de la Fonction publique du Canada, les renseignements,
rapports et explications qu'il juge nécessaires au bon exercice de ses
fonctions", article 10.
Or, dans le projet de loi 55 déposé à
l'Assemblée nationale, ces mêmes pouvoirs sont accordés non
pas au vérificateur général, mais au contrôleur des
finances par l'article 14 et l'article 45 est également important sur ce
point. On sait à quel point la façon de tenir la
comptabilité ou de présenter les informations peut cacher
certains problèmes administratifs.
Par ailleurs, l'article 81 stipule que "le vérificateur
général doit faire enquête et rapport chaque fois que le
lieutenant-gouverneur en conseil ou le Conseil du trésor lui en fait la
demande sur toute matière qui est de la compétence du
vérificateur général". Qu'arrive-t-il si le
vérificateur général croit qu'il y a lieu de faire
enquête sur une matière qui est de sa compétence mais que
ni le lieutenant-gouverneur en conseil, ni le Conseil du trésor ne lui
en font la demande?
Selon le projet de loi 55, tel que déposé en
première lecture, le pouvoir d'autoriser des dépenses et de juger
de leur bien-fondé appartiendra aux ministères. L'article 57, "le
pouvoir d'autoriser les dépenses et de juger de leur bien-fondé
appartiendra désormais aux divers ministères, sauf dans les cas
où le gouvernement se le réservera ou l'attribuera au Conseil du
trésor." C'est ce que nous indiquent les notes explicatives et la
rédaction de l'article 57.
Le ministre des Finances devra indiquer aux membres de cette Chambre les
pouvoirs exacts dévolus aux ministères et les modalités
que devra prendre cette gestion financière décentralisée.
Par contre, le contrôleur des finances tel que spécifié
à la section II, article 13, doit tenir la comptabilité du
gouvernement, enregistrer les engagements financiers et voir à ce qu'ils
ne dépassent pas les crédits autorisés par le
Parlement.
Que se passe-t-il, s'il réalise que les dépenses vont
à un rythme trop rapide et que l'on s'oriente vers un budget
supplémentaire?
L'idée de confier aux ministères la responsabilité
d'autoriser les dépenses semble s'inscrire dans une politique de
revalorisation du rôle du gestionnaire. L'insistance, depuis quelques
an-
nées, sur le bien-fondé des budgets-programmes nous
amenait à confier au gestionnaire l'outil de réalisation de son
programme. Dorénavant, il sera mieux équipé pour atteindre
ses objectifs.
La commission Glassco avait signalé les dangers d'une trop grande
centralisation aux mains du Conseil du trésor: "Ministères et
organismes, placés sous sa direction, constatent que, du point de vue de
l'utilisation d'une ressource essentielle leur personnel ils sont
soumis à une réglementation, voire à une contrainte
exercée par un service dont l'optique et les critères n'ont
parfois rien de commun avec leurs besoins réels. Même le Conseil
du trésor, chez qui les ministères devraient chercher les grands
principes de direction et une certaine coordination de l'ensemble, leur semble
non pas un élément de direction centrale, mais plutôt un
organe exerçant un contrôle tout à fait négatif ".
Vous trouverez cela dans le rapport de la Commission royale d'enquête sur
l'organisation du gouvernement, tome I, pages 268 et 269.
Pareille situation peut se présenter au Québec. Si aucune
mesure préventive n'est prise, les ministères
bénéficient d'une autorité considérable quant
à la gestion financière, mais ils doivent quand même faire
approuver, d'une certaine façon, leurs programmes d'activités au
moment de la préparation des crédits budgétaires.
L'article 23 de la loi précise que "le Conseil du trésor
est chargé de soumettre au conseil exécutif, chaque année,
un projet de prévisions budgétaires. A ces fins, il analyse les
implications financières des plans et programmes des ministères
et organismes du gouvernement et recueille auprès d'eux les
données requises pour la préparation de ces
prévisions."
Il est possible que le personnel du Conseil du trésor soit
tellement préoccupé par les coûts qu'il sacrifie certaines
des missions essentielles de l'Etat. Il est donc dangereux que certains
programmes d'activités essentielles soient sacrifiés.
Les pouvoirs considérables du Conseil du trésor et du
contrôleur des finances semblent indiquer une montée du pouvoir
exécutif sans contre partie équivalente du législatif. De
la même façon, le projet de loi du gouvernement du Canada, qui
tend à restreindre certains des pouvoirs de l'Auditeur, en est un
signe.
Aux Etats-Unis, un phénomène à peu près
semblable se produit. En 1921, fut institué le Bureau du budget, avec la
mission d'assister le président pour la planification et la coordination
des dépenses, des programmes et des revenus du gouvernement des
Etats-Unis.
Le bureau du budget est devenu le principal outil du président
pour la planification et la direction des opérations du gouvernement
dans son entier, au point de devenir l'organe par excellence de l'organisation
administrative. Ses responsabilités et sa structure en
témoignent.
Ainsi, l'appelle-t-on maintenant le Bureau du budget et de la gestion.
Cet organisme a contribué largement à accroître
l'autorité du chef de l'exécutif.
Au Québec, afin d'éviter un accroissement
démesuré de l'exécutif par rapport au législatif,
il y a lieu d'exploiter au maximum l'idée d'une commission ou d'un
comité parlementaire qui permettrait aux membres de l'Assemblée
nationale de contribuer activement à la gestion des affaires publiques.
Cela est d'autant plus opportun qu'avec les nombreuses lois-cadres les
occasions de réglementer les actes de l'exécutif et du
gouvernement sont tellement plus fréquentes et lourdes d'implication.
Ces lois-cadres, qui souvent doivent être générales par la
force des choses, accordent néanmoins au pouvoir exécutif une
marge de manoeuvre dont le contrôle peut facilement échapper aux
parlementaires.
Les commissaires de la commission Glassco ont pu dire: "L'enquête
révèle de façon de plus en plus nette que les pressions
nées de l'évolution de la fonction publique ont non seulement
créé le besoin d'un concept nouveau pour l'administration, mais
elles imposent une trop lourde charge aux organes établis par lesquels
le public exerce son contrôle sur l'activité administrative."
La croissance des pouvoirs de l'exécutif, outre les dangers
déjà mentionnés et qui concernent le parlementarisme
lui-même, risque de conduire à la prolifération des
organismes, ce qui signifie quasi nécessairement parallélisme et
dédoublement dans les activités.
Depuis quelques années, au Québec, le rôle de plus
en plus grand joué par l'Etat a conduit le Parlement à adopter
diverses lois organiques créant ministères, régies,
offices et autres organismes.
Face à cette prolifération, il y a lieu d'envisager, pour
arriver à mettre de l'ordre dans les structures étatiques, la
création d'une commission d'étude. Celle-ci, après avoir
pris connaissance de l'ensemble des organismes de l'Etat, de leurs
responsabilités et de leur efficacité, ferait des recommandations
au Parlement quant à la façon de réaliser, au
Québec, une structure administrative répondant
adéquatement aux besoins de la société. Cette commission
pourrait nous instruire sur les différentes institutions dont dispose
l'Etat pour l'élaboration et l'exécution de ses politiques, sur
leur véritable nature, leurs possibilités, leurs fonctions
propres.
Cette commission pourrait enfin répondre à la question,
jusqu'ici restée sans réponse, à savoir si la lenteur
administrative est inhérente à l'Etat lui-même, ou si elle
ne dépend pas plutôt du manque de coordination entre ces
organismes, qui fait que les efforts de l'un sont souvent immédiatement
annulés par l'autre.
Ce projet de loi qui peut sembler, à certains, aride, complexe,
devrait permettre aux parle-
mentaires une discussion de fond, quant à la division des
pouvoirs entre l'exécutif et le législatif, la
responsabilité des ministères d'exécution face aux
ministères centraux.
M. le Président, c'est dans cette optique que nous avons voulu
intervenir dans ce débat.
M. Fabien Roy
M. ROY (Beauce): M. le Président, quelques très
brèves remarquer sur le projet de loi qui nous a été
présenté et sur lequel nous devrons nous prononcer, le projet de
loi no 55, Loi de l'administration financière, lequel comprend 106
articles concernant les différents modes et les différentes
innovations, concernant les responsabilités attribuées aux
différentes personnes responsables de l'administration financière
de notre province.
M. le Président, on y propose certes des améliorations,
mais certains articles sont plus que discutables. Nous profiterons de
l'étude en comité pour poser des questions et obtenir les
réponses dont nous avons besoin pour être en mesure de prendre la
position que nous devrons prendre.
Ce projet de loi indique que le Conseil de la trésorerie
deviendra le Conseil du trésor et n'agira pas seulement à titre
du comité du conseil des ministres. On change le nom du Conseil de la
trésorerie pour le Conseil du trésor. On change le nom du
contrôleur des finances pour celui de contrôleur de la
trésorerie et l'Auditeur deviendra le vérificateur
général.
Je pense que ce projet de loi n'est pas un projet de loi de
réformes financières et je pense que ce n'est pas le but du
gouvernement. C'est un projet de loi qui concerne surtout la procédure
administrative plutôt que de proposer de véritables
réformes financières, de véritables réformes
économiques. Qu'on calcule le budget de différentes
façons, il restera toujours que ce sera le même budget et que nous
connaîtrons les mêmes problèmes économiques, les
mêmes problèmes sociaux et que la province devra continuer
à administrer également avec des déficits, des dettes,
pour connaître les mêmes résultats à la fin de
l'année.
J'écoutais tout à l'heure le ministre des Finances qui
nous a parlé de réformes.
Il a fait référence à un ancien président
des Etats-Unis, le président Roosevelt, sous différents rapports;
mais, je pense que nous devons dire que le président Roosevelt a fait
plus que des réformes administratives ou de procédure, il a fait
des réformes économiques et des réformes
financières.
M. le Président, je pense qu'il est bon de le souligner; alors,
nous voulons tout de même appuyer toutes les mesures qui permettront au
gouvernement d'éviter la lourdeur administrative de laquelle tout le
monde se plaint, et nous osons espérer que ces réformes auront
juste- ment pour effet de rendre plus efficace et plus rapide l'administration
de notre province.
Cependant, nous regrettons que le gouvernement n'ait pas profité
de ce projet de loi pour faire de véritables réformes
financières, comme je le disais tout à l'heure.
Pour terminer, je demande au gouvernement de convoquer à la
commission parlementaire l'Auditeur général actuel de la province
afin que nous puissions obtenir de lui toutes les informations
nécessaires.
M. LE PRESIDENT (Blank): Le député de Gouin.
M. Guy Joron
M. JORON: M. le Président, j'ai également quelques
brèves remarques à faire. D'abord, je voudrais dire que nous nous
réjouissons globalement de l'esprit qui anime ce projet de loi, dans la
mesure où nous pouvons le considérer comme une rationalisation ou
une modernisation qui permettra d'accélérer le processus de
l'administration du gouvernement.
Nous sommes heureux de voter de tels projets de loi; nous ne pouvons que
souhaiter qu'ils soient plus nombreux et nous serions disposés à
en voter davantage, à un rythme toujours plus
accéléré. Nous nous en réjouissons pour une raison
particulière: Dans la mesure où ce projet de loi permettra au
conseil des ministres, en les dégageant de certaines
responsabilités, de brasser un peu moins de chiffres et un peu plus
d'idées. De cette façon, nous pensons qu'il y aura une
revalorisation possible du rôle plus purement politique qui doit
être celui, non seulement de tous les parlementaires, mais très
certainement du conseil des ministres, et qui dans le passé, a eu
tendance à être, trop souvent, simplement l'image d'un conseil
d'administration de quelques grosses corporations et qui passait, une partie de
son temps dans des questions d'ordre purement administratif.
Mais, d'autre part, je pense qu'il ne faudrait pas prendre la loi pour
ce qu'elle n'est pas. C'est avant tout une mesure d'ordre administratif.
Encore, ne précise-t-elle pas certains points qui auraient dû,
à notre avis, être précisés?
Par exemple, les règlements qui donneront l'étoffe
à cette loi-cadre restent inconnus. La Chambre est appelée
à se prononcer sur une loi-cadre qui, bien sûr, indique une
façon de procéder, mais sans savoir exactement où cela
pourra nous conduire, ne connaissant pas les balises, les critères,
enfin, les règlements qui donneront l'étoffe à cette loi.
C'est pourquoi, pour que la Chambre se prononce, pour que les
députés puissent se prononcer et exercer effectivement un certain
contrôle, il aurait fallu, je pense, retenir et il le faudra dans
l'avenir la suggestion du député de Montcalm, à
savoir étudier la possibilité d'une commission des
règlements.
Enfin, je terminerai là-dessus, puisque nous aurons quelques
amendements à apporter en comité, principalement au sujet du
rôle du vérificateur général, nous souhaitons qu'il
soit rattaché plus étroitement à l'Assemblée
nationale, plutôt que directement au conseil des ministres. Nous aurons
quelques amendements à apporter en ce sens pour faire que non seulement
sa destitution, mais que sa nomination également relève de
l'Assemblée nationale et peut-être par le vote des deux tiers,
comme on l'a fait dans le cas de l'ombudsman.
M. le Président, je termine mes remarques là-dessus. Lors
de l'étude en comité, nous en discuterons davantage en
suggérant des amendements. Je vous remercie.
M. LE PRESIDENT (Blank): L'honorable député des
Trois-Rivières.
M. Guy Bacon
M. BACON: M. le Président, lors du premier contact d'un
député avec l'appareil gouvernemental, il est facile de constater
jusqu'à quel point la lourdeur est bien installée à tous
les paliers. Même si on nourrit toujours l'espoir de voir s'opérer
des changements en profondeur, les expériences passées nous
portent à croire qu'il est à peu près impossible de
raffiner cette machine administrative.
On parle souvent de l'administrateur, du contrôleur, et il arrive
très rarement qu'on en définisse le rôle. Il est
accepté que la fonction de l'administrateur commence au moment où
la tâche à accomplir est tellement vaste qu'il lui faut appeler
à l'aide et avoir un adjoint à qui il délègue une
partie du travail à exécuter. Voilà ce qu'il convient
d'appeler une règle élémentaire. A l'intérieur de
cette délégation de pouvoirs, la chose la plus importante est
d'atteindre les objectifs fixés et d'obtenir les meilleurs
résultats. Nous établissons ces quelques règles pour bien
démontrer qu'elles peuvent s'appliquer, dans une certaine limite, dans
l'administration gouvernementale. C'est ce que nous tenterons de faire d'une
façon un peu plus élaborée.
Nous convenons que, même si nous avons cru que le gouvernement
devrait s'administrer comme une entreprise, nous devons admettre avoir quelque
peu perdu nos illusions. Il y a eu, au cours des dernières
années, un accroissement considérable du montant total du budget
provincial.
Comme cela a été mentionné, de $750 millions qu'il
était en 60/61, nous nous retrouvons, en 70/71, avec un montant de
près de $4 milliards. Alors qu'en 1960 la province avait un personnel de
22,000 employés, en 1970, on retrouve une cinquantaine de mille
personnes à l'emploi de l'Etat provincial.
Malgré l'expansion de l'appareil administratif, on a craint
d'appliquer un certain degré de décentralisation en
matière de contrôle des dépenses propres aux
ministères. Nous sommes souvent tentés de proposer des mesures
dont l'efficacité est éprouvée dans l'entreprise
privée. Toutefois, il faut finalement se rendre à
l'évidence; des différences incontestables distinguent
l'administration publique du monde des affaires et influent profondément
sur leurs structures administratives. Le but primordial de toute entreprise est
d'assurer d'abord la continuation de sa propre existence. Il faut tenir compte
de la situation d'une firme dans un domaine donné, de la concurrence, du
contrôle des coûts et de la mise en marché.
L'administration publique, elle, n'est menacée que lorsque la
guerre met en péril l'existence même d'un pays. Les forces qui
animent un gouvernement et qui président à son destin sont donc
politiques. De ce fait, on ne saurait établir de comparaisons valables
entre la fonction du chef politique et celle du directeur d'entreprise, ni
entre le rôle du cabinet et celui du conseil d'administration. On ne
trouve dans le secteur privé aucun processus comparable à celui
qui détermine les objectifs d'un gouvernement, aucun exemple des
rapports compliqués et nuancés qui s'établissent entre un
ministre et ses fonctionnaires permanents.
On ne trouvera pas plus, dans le monde des affaires, des formules
magiques qui permettront de résoudre d'emblée tous les
problèmes administratifs de l'Etat. Tel que le ministre, d'ailleurs, en
a fait mention dans son exposé, même s'il n'est pas parfait, le
projet de loi qui nous est présenté permettra beaucoup plus
facilement la coordination des activités financières et pourra
arriver probablement à faire jouer le rôle qu'à l'Etat
provincial il doit réellement jouer chez nous.
Merci.
M. LE PRESIDENT (Blank): Avant que le ministre des Finances exerce son
droit de réplique, est-ce qu'il y a d'autres orateurs?
M. BERTRAND: Non.
M. LE PRESIDENT (Blank): Le ministre des Finances.
M. Raymond Garneau
M. GARNEAU: M. le Président, je voudrais remercier, d'abord, les
députés qui ont participé au débat et qui l'ont
fait sur un ton sérieux. Je me réfère
particulièrement au député de Montcalm qui a livré,
je pense, un document très intéressant sur certains aspects
philosophiques, mais qui a placé le débat à un niveau
assez élevé. Je pense que c'est à l'avantage de tous.
Parmi les points qu'a soulevés le député de
Montcalm, il y en a un qui concerne la multiplication des organismes qui
s'occupent de politique économique, fiscale et budgétaire.
Le député de Montcalm a particulièrement
souligné le rôle qu'est appelé à jouer, par la loi,
l'Office de planification et de développement du Québec en ce qui
regarde la préparation de programmes, pour me référer
à son texte, il a mentionné, à l'article 2, les trois
sous-articles donnant les pouvoirs de l'OPDQ.
Je pense qu'il ne faut pas confondre planification et expertise, du
côté de l'analyse de la politique économique, fiscale et
budgétaire. Le fait que le ministère des Finances devienne, si on
peut dire, le conseiller du gouvernement dans le domaine et l'analyse de la
conjoncture économique, des implications de la fiscalité et des
dépenses publiques sur l'économie du Québec, ça
n'implique pas nécessairement que l'Office de planification et de
développement du Québec n'aura pas un rôle à jouer
au niveau gouvernemental.
Personnellement, je considère que le rôle qui est
confié, par la loi, à l'Office de planification et de
développement du Québec est très difficile d'application
dans un régime parlementaire comme le nôtre, parce que l'office
peut faire et suggérer des programmes, mais il demeure certain que les
ministères sont les maîtres d'oeuvre. C'est pourquoi je pense
qu'il y aurait peut-être plus d'efficacité je pense tout
haut en réplique au député de Montcalm dans le
rôle que pourrait jouer l'office si on séparait le
développement, la mise en chantier, la coordination des programmes dont
les ministères demeurent les maîtres d'oeuvre et, d'autre part,
les études en ce qui regarde la préparation de programmes
d'ensemble, en somme ce qui regarde la planification.
Et, dans ce sens, le deuxième rôle de l'Office de
planification et de développement du Québec pourrait s'exercer,
soit comme comité d'experts auprès du conseil des ministres, qui
est appelé en quelque sorte à se prononcer sur les
priorités gouvernementales, ou encore auprès d'un comité
du conseil des ministres qui serait chargé plus particulièrement
d'étudier les priorités du gouvernement.
Le député de Montcalm a également parlé des
pouvoirs de réglementation. Sur certains points, je pense que nous
pouvons être d'accord avec lui; il serait peut-être
approprié que le Parlement se prononce sur une loi qui pourrait
déterminer dans quelles conditions les règlements ou la
législation que le député de Montcalm a appelée
"déléguée" pourraient être étudiés par
une commission de l'Assemblée nationale.
D'ailleurs, la Chambre des communes vient de présenter un projet
de loi à cet effet, pour donner des pouvoirs de surveillance des
règlements à une commission. Je pense que cette suggestion
mériterait certainement d'être retenue. Pour ma part, je serais
disposé à l'analyser très attentivement.
En ce qui regarde les pouvoirs du vérificateur
général, nous n'avons pas l'intention, et ce n'est certainement
pas là l'idée que nous recherchions, de museler le
vérificateur général. Dans certains articles du projet de
loi que nous analyserons tout à l'heure, il est dit que, partout dans
nos lois où c'est indiqué "Auditeur de la province," ce sera
changé pour "vérificateur général". Et
déjà, à l'article 14 du chapitre 11 des Statuts refondus
de 1969, il y a de confiés à l'Auditeur de la province les
pouvoirs d'enquêteur. C'est donc dire que, sur ce plan, il ne serait
peut-être pas nécessaire d'apporter les amendements que
suggérait le député de Montcalm.
Un des aspects que le député de Montcalm a soulevés
a retenu mon attention d'une façon particulière, et je pense
qu'il a parfaitement raison. J'ai demandé aux conseillers juridiques de
préparer un amendement en conséquence, un amendement que nous
pourrons soumettre lors de l'étude en comité; c'est au dernier
alinéa de l'article 22. Ce n'était pas du tout notre intention de
confier au Conseil du trésor la possibilité de remplacer le
lieutenant-gouverneur en conseil dans les pouvoirs ou les devoirs qu'il peut
confier au ministre de la Fonction publique et aux membres de la Commission de
la fonction publique. C'est pourquoi nous croyions que l'article tel que
rédigé était suffisamment étanche, mais, à
la suggestion du député de Montcalm, nous l'avons regardé
une deuxième fois. Pour éviter toute confusion, nous
suggérerons en comité un amendement à ce dernier
paragraphe de l'article 22.
Pour ce qui est des autres points soulevés par le
député de Montcalm, il y a la possibilité d'un
dédoublement de travail entre le Conseil du trésor et l'expertise
du ministère de la Fonction publique, en ce qui regarde l'analyse des
effectifs, l'approbation des organigrammes des ministères.
Je pense que ce n'est pas du tout l'intention que nous avions en
rédigeant ce projet de loi. D'ailleurs, déjà, au niveau du
Conseil de la trésorerie, nous avons déféré en
quelque sorte les fonctionnaires qui agissaient, jusqu'à un certain
point, pour faire l'analyse des effectifs au ministère de la Fonction
publique et c'est le ministère de la Fonction publique qui fait
actuellement, pour le compte du comité du budget, l'analyse des
effectifs, qui va les recommander au Conseil du trésor et
également suggérer les modes d'organigrammes qui seront
utilisés.
Ce qui m'a surpris le plus, je pense, dans les remarques du
député de Montcalm, c'est le fait qu'il souligne dans son texte
"qu'il est possible que le Conseil du trésor soit tellement
préoccupé par les coûts qu'il sacrifie certaines des
missions essentielles de l'Etat". Il ajoute: "Il est donc dangereux que
certains programmes d'activités essentielles soient sacrifiés."
Je pense que peu importe, M. le Président, les structures qui vont
être utilisées pour analyser les programmes gouvernementaux. Que
ce soit le conseil des
ministres, le Conseil de la trésorerie ou un comité de
fonctionnaires, il est évident qu'aucun gouvernement n'oserait prendre
de décision sur un programme nouveau sans en connaître les
implications financières; autrement, évidemment, ce serait le
chaos sur le plan de l'administration des deniers publics. Je pense que pour
que le gouvernement puisse prendre véritablement ses
responsabilités, il faut qu'il connaisse toutes les conséquences
des nouveaux programmes et particulièrement, d'une façon
spéciale peut-être, les coûts financiers. Sans cela, comment
voulez-vous pouvoir administrer efficacement la chose publique?
Le dernier point que je voudrais souligner, c'est sa suggestion de la
création d'une commission d'étude. Je pense qu'il y a eu en
Amérique du Nord plusieurs commissions d'étude. Les rapports ont
été publiés. Il est peut-être temps de songer un peu
plus à implanter plusieurs des recommandations ou des suggestions qui
ont été formulées au niveau d'autres Parlements. C'est la
raison pour laquelle le conseil des ministres a même décidé
de mettre un terme à l'étude faite par M. Mineau pour implanter
ses suggestions quitte à reprendre les études lorsque ses
recommandations auront été appliquées.
Je remercie également le député de Beauce de ses
remarques qui ont été relativement brèves. J'imagine qu'il
réserve d'autres commentaires pour l'analyse en comité
plénier.
Je pense que je dois souligner une partie de l'intervention de M. Joron
qui situe bien l'esprit dans lequel le projet de loi a été
présenté. Il s'agit véritablement de dégager le
conseil des ministres de contingences purement administratives pour lui
permettre de consacrer plus de temps à l'étude des questions
importantes, à l'orientation de l'action gouvernementale. C'est
réellement le but que nous visions en présentant ce projet de
loi.
M. LE PRESIDENT (Blank): La motion de deuxième lecture du bill 55
sera-t-elle adoptée?
M. BERTRAND: Sur division.
M. LE PRESIDENT (Blank): Adopté sur division.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT (Blank): Le ministre des Finances propose que je quitte
maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en comité
plénier pour étudier le bill 55.
Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
Comité plénier
M. LEDUC (président du comité plénier): A
l'ordre!
M. PAUL: C'est notre président préféré.
M. LE PRESIDENT (Leduc): Messieurs, c'est mardi! Bill 55, Loi de
l'administration financière, article 1.
M. GARNEAU: Je vais prendre un instant pour présenter deux des
fonctionnaires qui assisteront à l'étude article par article: Me
Yvon Marcoux, qui est conseiller juridique et M. Goyette, qui est sous-ministre
adjoint au ministère des Finances. M. Cazavan est retenu à New
York pour la discussion d'un emprunt.
M. PAUL: Cela améliore le ministère.
M. LE PRESIDENT (Leduc): Article 1 adopté?
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, sur l'article 1...
UNE VOIX: Cela va être long, n'est-ce pas?
M. MASSE (Montcalm): Ecoutez, si vous voulez absolument limiter le droit
de parole des parlementaires, dites-le tout de suite et nous le saurons.
M. LEVESQUE: Le sens de l'humour du député de Montcalm
n'est pas encore...
M. LE PRESIDENT (Leduc): Messieurs, à l'ordre s'il vous
plaît!
M. BERTRAND: Pourquoi abuser du président?
M. LE PRESIDENT (Leduc): Le député de Montcalm a la
parole.
M. MASSE (Montcalm): On n'est même pas debout et ils commencent
tout de suite à crier au meurtre, parce qu'on leur pose des questions!
La population vous en posera beaucoup plus dans quatre ans, vous verrez! Vous
aurez beaucoup de difficulté à leur répondre !
M. GARNEAU: Vous connaissez cela!
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, je pense que c'est à
l'article 1 que nous pourrions poser cette question. Le ministre actuel des
Finances a préconisé à quelques reprises la
création d'un ministère de l'Economie qui grouperait l'ensemble
des organismes responsables de l'élaboration et de l'exécution
d'une politique économique au Québec. Peut-il sans que ce
soit dans le libellé du projet de loi nous expliquer pourquoi le
gouvernement a accepté de créer un ministère des Affaires
sociales groupant l'ensemble des organismes de sécurité sociale
et n'a pas cru bon, dans un domaine où lui-même avait
préconisé un minis-
tère de l'Economie, de nous soumettre un projet de loi dans le
même sens que le projet de loi du député de
Louis-Hébert?
M. GARNEAU: M. le Président, je ne sais pas à quel endroit
le député de Montcalm a trouvé ces remarques que j'aurais
faites concernant le ministère de l'Economie. Une chose est certaine
je ne veux pas entreprendre de débat sur le moment où
j'aurais dit une telle chose c'est que, même si on devait
créer un ministère de l'Economie, je ne vois pas comment on
pourrait l'intégrer au ministère des Finances comme tel. Je pense
que le ministère des Finances a un rôle bien particulier à
jouer qui doit certainement être séparé du rôle d'un
ministère de l'Economie qui, même s'il était
créé, pourrait regrouper, j'imagine le
député de Montcalm pourrait peut-être élaborer un
peu plus sur ce qu'il soulignait dans son texte les ministères de
l'Industrie et du Commerce, des Terres et Forêts, de l'Agriculture et des
Richesses naturelles. J'imagine que ce seraient les ministères qui
pourraient être regroupés dans un ministère de l'Economie,
étant donné que le ministère de l'Equipement regroupera
les ministères des Travaux publics et de la Voirie. Même si ce
ministère devait être créé, éventuellement
je ne me prononce pas sur le fond de la question je soumets
respectueusement que le ministère des Finances ne devrait pas être
regroupé avec ce ministère de l'Economie, mais être un
ministère séparé ayant une responsabilité bien
particulière à jouer au niveau de l'administration
gouvernementale.
M. LE PRESIDENT (Leduc): Article 1 adopté.
Article 2?
M. MASSE (Montcalm): L'article 2, M. le Président, concerne les
pouvoirs du ministre. Le ministre a pour fonctions de définir la
politique et de conseiller le gouvernement en matière de politique
économique, fiscale et budgétaire. Il est évident que la
première responsabilité d'un ministère de l'Economie est,
entre autres choses, de recommander au gouvernement des politiques en ces
matières et d'être l'instrument d'exécution et
d'application de ces politiques.
Deuxièmement, M. le Président, le ministre en
réponse à la deuxième lecture de ce projet de loi nous a
parlé de l'Office de planification du Québec, en insistant sur le
fait qu'il n'y avait pas nécessairement de parallélisme ou de
contradiction entre les deux organismes.
Il est évident que l'Office de planification du Québec
existe pour définir des objectifs à long terme dans le domaine
économique, le domaine de l'aménagement du territoire et d'autres
domaines connexes. Le ministre ne croit-il pas que ce serait un rôle
intéressant à faire jouer à l'office que de lui demander
de soumettre au gouvernement et au Parlement des orientations, de la
documentation, des études concernant ces politiques à long
terme?
Lorsque le député de Jean-Talon nous a dit, tout à
l'heure, que l'Office de planification était mal équipé
pour des objectifs à court terme, je crois qu'il avait en partie raison,
parce que ce n'est pas sa responsabilité première.
Lorsqu'il a dit que nous étions mal équipés pour
discuter des politiques économiques de l'Office de planification, ou
d'organismes de même genre, il a raison. Est-ce que ce ne serait pas une
bonne façon de permettre aux députés d'être bien
équipés en matière d'orientation économique, en
matière de politique à long terme, que de permettre au
Québec ce qui existe dans beaucoup de pays où le commissariat du
plan ou l'office de planification enfin tous les gouvernements ont un
secteur de ce genre recommandent au Parlement des plans en
matière d'équipement, en matière d'investissements, en
matière de développement économique, fiscal et
budgétaire, faisant discuter par le Parlement ces grandes orientations
de l'Office de planification au fond du plan de l'orientation que
le gouvernement veut donner en ces matières? Ce qui permettrait au
Parlement de se prononcer sur les orientations économiques que le
gouvernement doit appliquer. Ce qui, d'autre part, informerait et
éclairerait les membres de cette Chambre sur les difficultés qu'a
le gouvernement à atteindre, en certains domaines, des politiques
économiques et leur permettrait d'être bien informés
également des besoins, dans l'ensemble des secteurs, concernant la
planification.
M. GARNEAU: M. le Président, je n'ai pas mentionné tout
à l'heure que nous étions mal équipés. J'ai
indiqué que le rôle de l'Office de planification était
ambigu dans le contexte de notre système de gouvernement à
responsabilité ministérielle. C'est ce que j'ai indiqué.
J'ai fait ressortir également dans ma réplique la
différence que je concevais entre le rôle que pourrait jouer
l'Office de planification dans la préparation de plans à court,
à moyen et à long termes et le rôle d'expertise que peut
jouer un ministère, comme conseiller, en ce qui regarde la politique
économique, fiscale et budgétaire. Je pense que c'est là
le rôle essentiel d'un ministère des Finances bien
organisé, que de pouvoir agir comme conseiller du gouvernement en ces
matières et non pas nécessairement de proposer des programmes
d'action précis, comme pourrait le faire l'Office de planification s'il
pouvait jouer son rôle d'une façon complète. Je pense que
le député de Montcalm a ajouté dans ses remarques des
propos que je n'ai pas tenus tout à l'heure.
M. BERTRAND: M. le Président, je voudrais profiter de l'occasion
pour féliciter mon collègue, le député de Montcalm,
de l'excellent travail qu'il a présenté. Il avait
parfaitement
raison d'indiquer au ministre qu'on ne fait qu'ajouter à un
ministère des pouvoirs qui appartiennent déjà à
d'autres. Il y a, par exemple, le ministère des Richesses naturelles qui
est chargé de certaines fonctions planificatrices. Il y a autour du
gouvernement un autre organisme, l'Hydro-Québec, qui doit s'occuper
à court et à long termes, des besoins énergétiques.
Il y a le ministre qui est responsable de l'ODEQ. Il y a le ministère de
l'Industrie et du Commerce qui s'occupe de recherche en matière de
politique économique et qui doit conseiller le gouvernement. Il y a le
ministère de l'Agriculture et de la Colonisation, dans le domaine de
l'économie agricole. Que fait-on avec ces nouveaux pouvoirs que l'on
accorde au ministre des Finances après avoir créé un
Office du plan et du développement qui, à l'époque, avait
été à plusieurs reprises réclamé par
l'Opposition libérale comme devant être le véritable
organisme de planification économique? Et bien entendu, on lui a
greffé l'aspect développement. Que fait-on? Nous avions
pensé qu'à ce moment-ci le gouvernement aurait groupé,
coordonné les pouvoirs et leur exercice qui sont
distribués dans tous les ministères du gouvernement et qu'au lieu
d'ajouter un pouvoir additionnel au ministre des Finances en essayant de lui
faire jouer ce rôle de coordination, lui qui n'a pas tous les outils pour
le jouer, on aurait créé plutôt un ministère des
Affaires économiques.
M. le Président, on ne fait donc, au lieu de coordonner,
qu'ajouter à un ministère qui est déjà passablement
chargé, qui doit s'occuper de toute la politique fiscale et
budgétaire du gouvernement, et Dieu sait si, lorsqu'on a eu
l'expérience du gouvernement, on sait comment simplement établir
les bases d'une politique fiscale, et deuxièmement, on sait que le
budget requiert le temps d'un ministre.
Et à ce moment-ci, sans doute que le premier ministre, voulant
faire plaisir à son jeune ministre qui lui a demandé des pouvoirs
supplémentaires, a mis en tutelle les autres ministères à
vocation économique, en particulier le ministère de l'Industrie
et du Commerce, le ministère des Richesses naturelles et les autres
ministères.
M. le Président, je crois que, dans ce domaine, on ne trouvera
qu'un coordinateur de plus. Mais, le mécanisme de coordination qui
aurait dû être établi dans un nouveau ministère,
celui des affaires économiques, on ne le retrouve pas. Au contraire,
nous verrons en veilleuse l'Office de planification et de développement.
Et si je me base sur certaines attitudes d'un autre ministre même
celui qui est responsable de l'ODEQ le ministre des Affaires
municipales, je me demande si, lui aussi, n'est pas en train de mettre en
veilleuse l'Office de planification et de développement, après
avoir demandé la disparition du CRD dans le Bas-du-fleuve.
C'est pourquoi, tout à l'heure, lorsqu'on a voté, nous
avons dit de ce côté que c'était sur division. Nous ne
pouvons pas approuver un projet de loi qui accorde à un ministre, qui a
déjà une tâche assez abondante, des pouvoirs qui ne sont
pas de nature à mettre de l'ordre, entre autres, en vue
d'élaborer une politique économique qui puisse
bénéficier à la population du Québec.
M. GARNEAU: M. le Président, je pense que le chef de l'Opposition
saisit mal la distinction que l'on fait entre "effectuer des recherches et
conseiller le gouvernement en matière de politique économique,
fiscale et budgétaire" et la responsabilité qui peut tout de
même demeurer à l'Office de planification et du
développement, ou le rôle que peut jouer ou que doit jouer le
ministère de l'Industrie et du Commerce comme conseiller du gouvernement
dans les matières de politique de développement industriel ou
commercial.
La même chose en ce qui regarde les politiques concernant les
richesses naturelles. Mais il y a une distinction entre l'analyse d'une
politique, une pensée au niveau de la politique économique et
l'application concrète au niveau des divers ministères...
M. BERTRAND: M. le Président, ce n'est pas pour interrompre le
ministre, je lui pose une question. Si le ministre de l'Industrie et du
Commerce, d'une part, est un des conseillers du gouvernement, est-ce
qu'à ce moment il n'a pas tous les instruments, ou certains instruments,
qui lui permettent d'effectuer des recherches en vue d'élaborer une
politique économique pour le gouvernement?
M. GARNEAU: M. le Président...
M. BERTRAND: Alors, on ne fait qu'ajouter à un pouvoir qui existe
déjà dans un des ministères, on ne fait qu'accorder ce
pouvoir à un autre ministre qui, lui aussi, sera chargé de faire
des recherches pour conseiller le gouvernement. Nous en avons trop de cela. Il
aurait fallu centraliser cela dans un ministère donné.
M. GARNEAU: M. le Président, si le chef de l'Opposition avait
attendu quelques secondes, je pense que cela aurait pu lui éviter une
partie de son intervention, parce que j'allais justement lui dire que, lorsque
nous avons inclus cet article dans le projet de loi, il y avait eu,
antérieurement, une consultation avec le ministère de l'Industrie
et du Commerce. Et une partie des analyses conjoncturelles qui sont faites au
ministère de l'Industrie et du Commerce seront faites maintenant, et une
partie du personnel sera transférée au ministère des
Finances, ce qui nous permettra, lorsque nous participerons à des
conférences fédérale-provinciales, d'avoir les analyses,
les experts qui pourront conseiller le gouvernement en matière de
politique économique, fiscale et budgétaire.
Je pense qu'il n'y a absolument pas dédoublement ni confusion
entre le rôle que sera appelé à jouer le ministère
des Finances et celui que jouent présentement le ministère de
l'Agriculture en ce qui regarde l'économie agricole, le ministère
des Richesses naturelles, en ce qui regarde le développement minier, le
développement de l'ensemble des ressources naturelles, et le
ministère des Terres et Forêts, en ce qui regarde l'exploitation
forestière.
Je pense qu'il n'y a aucune confusion. Autrement, à suivre
l'exposé ou la pensée du chef de l'Opposition, il faudrait,
à toutes fins utiles, éliminer la moitié des
ministères et tout centraliser. Je pense qu'il faut nettement faire une
distinction entre une analyse de la situation, de la conjoncture
économique et l'application de mesures concrètes pour y faire
face dans chacun des domaines spécialisés qui tombent sous la
responsabilité des ministères.
Je voudrais ajouter un autre point. Le chef de l'Opposition a
mentionné le fait que le ministère des Finances avait
déjà beaucoup de responsabilité, que c'était lui
ajouter un pouvoir supplémentaire. Je dois souligner au chef de
l'Opposition qu'à l'avenir, si le projet de loi est accepté tel
qu'il est proposé, les prévisions, les estimations de
dépenses des ministères ne tomberont plus sous la
responsabilité du ministre des Finances, mais tomberont sous la
responsabilité du Conseil du trésor, c'est-à-dire un
comité de ministres.
M.BERTRAND: Oui, mais c'est bonnet blanc, blanc bonnet.
M. GARNEAU: II n'est pas indiqué que le ministre des
Finances...
M. BERTRAND: Tout cela relève assez directement du ministre des
Finances. On s'aperçoit qu'il va y avoir deux hommes importants dans le
gouvernement: le premier ministre et le ministre des Finances. Le ministre des
Finances va diriger le Conseil du trésor et c'est le Conseil du
trésor qui s'empare, en fait, de la majeure partie des pouvoirs
exercés par le conseil des ministres.
Ce sera non seulement un superministère, cela deviendra un petit
tsar de l'administration du Québec.
M. GARNEAU: M. le Président, le chef de l'Opposition doit savoir
que le Conseil du trésor est formé de ministres, qui sont
désignés par le lieutenant-gouverneur en conseil. Je ne sais pas
comment cela fonctionnait du temps où nos prédécesseurs
étaient au pouvoir, mais tous les ministres, depuis que je
préside le Conseil du trésor, sont toujours invités
à nos séances et peuvent participer à nos discussions.
M. BERTRAND: Le Conseil du trésor était ni plus ni moins
une commission du conseil des ministres, tandis qu'à l'heure actuelle,
il va exercer des pouvoirs quasi absolus. L'homme qui le préside n'est
pas le premier ministre, c'est le ministre des Finances.
M. GARNEAU: Pas nécessairement.
M. BERTRAND: C'est le ministre des Finances.
M. GARNEAU: Pas nécessairement.
M. BERTRAND: On sait bien que le ministre des Finances actuel
n'abandonnera pas sa présidence, surtout avec tous les pouvoirs que la
loi lui accorde.
M. GARNEAU: Cela dépendra de la décision du
lieutenant-gouverneur en conseil.
M. RUSSELL: M. le Président, le ministre pourrait-il informer le
comité davantage. Il est naturellement clair, par la loi, que c'est la
mise en tutelle, avant l'audition des comptes par l'Auditeur de la province. La
protection qu'avait jusqu'à présent l'Assemblée
législative il n'en sera plus maintenant question. Il faudra se fier
simplement au contrôleur du Trésor et, en somme, à son
responsable, le ministre des Finances.
M. GARNEAU: J'ai mal saisi, vous dites que...
M. RUSSELL: On sait que le ministre des Finances, actuellement, par la
loi, met en tutelle l'Auditeur de la province en ce qui concerne la
vérification des comptes avant paiement. Cela est clair dans la loi.
M. GARNEAU: Le vérificateur général n'aura plus
à vérifier avant paiement, il vérifiera uniquement
après paiement.
M. RUSSELL: Après paiement.
M. GARNEAU: Ce sera le contrôleur...
M. RUSSELL: On s'en débarrasse. Cela donne un contrôle
absolu au ministre des Finances ou au contrôleur des finances. Avant
paiement, l'Auditeur n'a plus à s'occuper de ces comptes-là.
C'est la protection qu'avait l'Assemblée législative auparavant.
Elle ne l'aura plus, c'est fini.
M. GARNEAU: II n'y a pas de changement du côté...
M. RUSSELL: Bien oui, il y a des changements certains.
M. GARNEAU: La vérification aura lieu quand même.
M. RUSSELL: Aujourd'hui même, avant paiement, l'Auditeur a le
droit de regard sur les comptes.
M. GARNEAU: Maintenant, ce sera le contrôleur des finances, il a
des pouvoirs statutaires.
M. RUSSELL: Après l'adoption de la loi, ce sera le
contrôleur des finances.
M. GARNEAU: Qui a également des pouvoirs statutaires.
M. RUSSELL: L'Auditeur était l'engagé de
l'Assemblée législative.
M. GARNEAU: Oui.
M. RUSSELL: L'Assemblée législative n'a plus maintenant
cette protection.
M. GARNEAU: C'est-à-dire qu'elle l'aura d'une façon plus
grande par après, parce qu'elle aura la liberté complète
de critiquer toute l'administration financière du gouvernement.
M. RUSSELL: Critiquer après. M. GARNEAU: C'est
évident.
M. BERTRAND: II ne pourra pas empêcher le paiement avant.
M. RUSSELL: Mais pas surveiller avant.
M. GARNEAU: II y a la commission des engagements financiers qui
surveille régulièrement.
M. RUSSELL: La commission des engagements financiers surveille
après, aussi. On surveille après que le paiement est fait. On
sait par la loi que c'est après.
M. GARNEAU: C'est-à-dire après que le crédit a
été engagé.
M. RUSSELL: Est-ce que le ministre peut nous certifier qu'il va abolir
l'Office de planification? Cela va s'en aller, c'est fini, ça? Cet
après-midi, dans son exposé, il était inquiet même
du personnel; il disait qu'il devait voir à se trouver du personnel
très compétent. C'est évident, parce que c'est la mise en
tutelle, par cette loi, de toute la planification de chacun des
ministères, sans exception. Ce qui m'intéresse, c'est que le
ministre nous expose le pourquoi de ces pouvoirs; pourquoi a-t-il besoin de
tous ces pouvoirs? D'abord, on met l'Auditeur de côté. On veut un
pouvoir absolu sur la planification de tous les ministères.
Est-ce que c'est lui qui veut dicter exactement à chacun des
ministères la planification qu'ils vont faire? La Voirie va pouvoir
faire les routes que le ministre des Finances va décider. L'Agriculture
va pouvoir se développer au fur et à mesure, suivant la
volonté, la planification du ministre des Finances. Le ministre des
Richesses naturelles va être obligé de se soumettre à la
décision du ministre des Finances. La Loi est claire.
M. GARNEAU: Je pense que le député n'a pas lu le projet de
loi.
M. RUSSELL: J'aimerais que le ministre des Finances explique le pourquoi
de ces pouvoirs.
M. GARNEAU: Si le député de Shefford a lu le projet de loi
comme il faut, il va se rendre compte que justement, afin d'en arriver à
une meilleure répartition des pouvoirs, un meilleur étagement des
pouvoirs, ça n'appartiendra plus à un seul ministre d'accepter
les prévisions de dépenses des ministères; cela
appartiendra à un comité de ministres qui fera rapport au conseil
des ministres.
Avant, c'était le ministre des Finances qui avait cette
responsabilité et maintenant ça va être le Conseil du
trésor, donc un comité du Conseil des ministres, qui va faire les
analyses premières des demandes des ministères, qui va faire
rapport au conseil des ministres qui, lui, va se prononcer sur l'allocation
définitive des ressources financières entre les différents
ministères. Ce que le Conseil du trésor va faire et c'est
indiqué dans le projet de loi, c'est l'analyse, la
vérification, avec les experts des différents ministères,
du coût financier des programmes proposés. Une fois que l'ensemble
des analyses des coûts auront été faites et que les
demandes de tous les ministères auront été reçues,
un rapport sera fait par un comité de ministres et non plus par un seul
ministre. Comme le disait le député de Shefford, cela pouvait se
faire avant; le ministre des Finances aurait pu dire non beaucoup plus
facilement qu'il pourra le faire maintenant, parce que, dans les nouvelles
dispositions législatives, ça sera un comité de ministres.
C'est beaucoup plus sage que ce soit fait ainsi, parce que le gouvernement
comme tel, en tant que Conseil exécutif, par un comité qui va
faire l'analyse des coûts, va pouvoir réellement gouverner et
prendre les décisions majeures en ce qui regarde l'allocation des
dépenses.
M. RUSSELL: M. le Président, si je comprends bien la loi, c'est
le ministre des Finances qui va s'occuper de la vérification et non pas
le Trésor.
M. GARNEAU: M. le Président, il y a une différence...
M. RUSSELL: Le Trésor va s'occuper; comme actuellement, de la
surveillance et du
paiement des comptes. Mais, par cette loi, c'est le ministre des
Finances qui a la responsabilité de surveiller la planification, et
tout, et c'est lui qui est le grand patron. C'est vers lui qu'il va falloir que
chacun des ministres se tourne pour lui demander de lui accorder de bonne
grâce telle et telle planification; chacun devra se soumettre à
son comité de planification de grands experts dont il a parlé cet
après-midi et qu'il doit trouver. Il ne doit pas les posséder
encore, parce qu'il était inquiet, cet après-midi. Dans son
exposé, il a dit qu'il faudrait trouver les experts, des hommes
compétents, des connaissances pour assurer une planification...
M. GARNEAU: Le député de Shefford devrait se
référer au journal des Débats; il verrait qu'à ce
moment-là je parlais des employés du Conseil du trésor et
non des employés du ministère des Finances. Ce qu'il
soulève, ce sont des arguments contre le fait que le ministère
des Finances serait chargé d'effectuer des recherches et conseiller le
gouvernement en matière de politique économique, fiscale et
budgétaire, alors que, cet après-midi dans mon exposé, je
parlais des employés du secrétariat du Conseil du trésor,
ce qui est fort différent.
M. RUSSELL: M. le Président, le ministre des Finances a fait
référence, tout à l'heure, au tranfert possible ou quasi
certain d'une partie du comité de planification du ministère de
l'Industrie et du Commerce, si j'ai bien compris...
M. GARNEAU: Ce n'est pas un comité de planification, c'est une
partie du service d'analyse conjoncturelle.
M. RUSSELL: Est-ce que ça sera la mise en tutelle de tous les
autres comités de planification qui existent dans les autres
ministères?
M. GARNEAU: M. le Président, un service d'analyse conjoncturelle
n'est pas un comité de planification. Ce sont des éléments
qui servent à préparer une planification globale. Ce que j'ai
voulu souligner, tout à l'heure, au chef de l'Opposition, ce que je
redis au député de Shefford, c'est qu'il y a une distinction
entre une analyse de la conjoncture économique et la préparation
d'un programme précis de développement et de planification
à court, moyen et long termes, ce que le ministère des Finances
aura comme pouvoir.
D'ailleurs, comme la plupart des ministères des Finances dans les
autres provinces, dans les autres pays ont, c'est la responsabilité de
conseiller le gouvernement en matière de politique économique.
Encore là, je veux insister davantage parce qu'il ne semble pas que ce
soit compris, il y a une distinction entre une analyse de la conjoncture et la
détermination de programmes à court, à moyen et à
long termes.
Alors le ministère des Finances du Québec, comme la
plupart des ministères des Finances des autres provinces du Canada et
des autres pays, aura la responsabilité d'agir comme conseiller du
gouvernement en ces matières.
Je voudrais ajouter un autre mot, et peut-être ainsi devancer
certaines questions, c'est qu'il y a également une distinction que nous
faisons entre la politique budgétaire et la préparation des
estimations de dépenses. La politique budgétaire, c'est de
conseiller, par exemple, le gouvernement en ce qui regarde le niveau des
dépenses publiques alors que les estimations de dépenses qui sont
préparées par le Conseil du trésor, ce sera l'allocation
à l'intérieur de la politique budgétaire qui aura
été établie par le conseil des ministres... Mais faire
l'allocation des ressources compte tenu de cette politique de dépenses
publiques qui aura été établie par le conseil des
ministres suivant les conseils ou les expertises...
M. BERTRAND: Le ministre devrait admettre avec moi que la distinction
est joliment mince entre établir la politique budgétaire et la
répartition des budgets. Il ne faut pas jouer sur les mots.
L'expérience que nous avons, c'est que le ministre des Finances alloue
telle somme. En résumé, la politique budgétaire, c'est
qu'après avoir analysé les revenus possibles, le ministre des
Finances dise: Nous pouvons dépenser tel montant. Et la
répartition budgétaire se fait, c'est entendu, lors de
l'étude de chacun des ministères.
Le ministre, à l'heure actuelle, doit vivre cette
expérience parce qu'il est en train...
M. GARNEAU: C'est justement. Ce qui me surprend c'est d'entendre le chef
de l'Opposition...
M. BERTRAND: ... d'élaborer les budgets...
M. GARNEAU: ... expliquer que c'est aussi facile... Le chef de
l'Opposition semble oublier rapidement, parce qu'il me semble que ce n'est pas
aussi facile de faire cette allocation.
M. BERTRAND: Non. Mais je veux dire qu'entre établir... Cela
paraît bien, vous savez, le ministre des Finances sera chargé
d'établir les principes de la politique budgétaire.
M. GARNEAU: Conseiller le gouvernement.
M. BERTRAND: Et conseiller le gouvernement.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela, c'est encore mieux.
M.BERTRAND: Et quand le ministre des Finances fait rapport au conseil
des ministres, il dit: Nous avons tant de millions de dollars; si
vous nous en demandez davantage, indépendamment de la politique
budgétaire que j'ai voulu établir, ou appliquer, vous avez tant.
C'est ça que le ministre de ce temps-ci est en train de faire. Il
répète ça tous les jours, à tous ses
collègues: Ne m'en demandez pas plus, il n'y en a pas plus.
Je le fais rire parce qu'il le sait.
M. GARNEAU: Je m'aperçois que le chef de l'Opposition
connaît ça.
M. BERTRAND: II ne faut pas jouer sur les mots. Si le ministre avait
été franc et direct, il aurait d'abord changé le nom, il
aurait dit: C'est le ministère des Finances et des Affaires
économique. Alors, on pourrait dire: II veut centraliser à son
ministère le service des recherches en matière économique
qui est à l'heure actuelle au ministère de l'Industrie et du
Commerce, le service des recherches qui existe également au
ministère des Richesses naturelles et dans les autres ministères,
il veut coordonner leur action en s'arrogeant des pouvoirs que la loi lui
accorde, en se donnant les pouvoirs qu'il demande par la loi.
Tandis que, ici, nous allons avoir ces centres de recherche
économique dans tous les ministères, il n'y aura aucune
coordination. C'est tellement vrai qu'il peut arriver que, dans un même
domaine, le ministère de l'Industrie et du Commerce fasse des recherches
et il y aura dédoublement parce qu'au ministère des Finances on
fait les mêmes recherches. Alors là, au moins, on aurait la
garantie que des recherches se feront à une seule place et qu'il y aura
quelqu'un qui réponde devant la Chambre de la politique
économique du gouvernement. Tandis qu'avec ça on ne fait que
multiplier, je le répète, les agents, mais il n'y a pas de
coordination.
M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, je voudrais que le
ministre des Finances se rende bien compte de l'importance du débat qui
se déroule actuellement au sujet de cet article et le paragraphe a).
Il y est mentionné que "le ministre a pour fonctions d'effectuer
des recherches et de conseiller le gouvernement en matière de politique
économique, fiscale et budgétaire." Si on se réfère
aux autres sous-paragraphes, on constate que ce sont toutes des fonctions au
point de vue fiscal et budgétaire. Cet article est le seul endroit
où l'on accorde au ministre des Finances des responsabilités au
point de vue économique. Ce qui me surprend, c'est qu'il y a dans cette
Chambre, actuellement, plusieurs ministres qui sont touchés directement
par les implications de ce sous-paragraphe.
Je ne crois pas que le ministre des Affaires sociales, pour sa part,
aurait accepté que l'on inclue dans cet article que le ministre des
Finances aura pour fonctions d'effectuer des recherches et de conseiller le
gouvernement en matière sociale. Le ministre des Institutions
financières, le ministre de l'Industrie et du Commerce, le ministre du
Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, le ministre des Richesses
naturelles et aussi le ministre de l'Agriculture, qui ont tous, dans leurs
responsabilités, à voir à la planification, à
discuter des questions économiques et à participer à
l'élaboration de programmes économiques, n'ont pas eu
connaissance des implications précises de cet article.
Pour ma part, je préférerais je crois que ce serait
une amélioration du projet de loi qu'on y apporte l'amendement
suivant: Que le ministre ait pour fonctions d'effectuer des recherches et de
conseiller le gouvernement en matière fiscale et budgétaire,
tenant compte des implications économiques. Je crois qu'à ce
moment-là on éviterait justement les dangers qui ont
été soulignés tantôt par le chef de l'Opposition et
par les autres membres de notre groupe, qui ont mentionné au ministre
qu'il pouvait y avoir du dédoublement.
Disons que ce ne serait pas le seul endroit au gouvernement où
cela se produit. Ce qui est plus grave, c'est cette affirmation qu'a faite le
ministre tantôt, en disant qu'il transférerait, du
ministère de l'Industrie et du Commerce à son ministère,
des effectifs qui seraient chargés de faire des analyses dans le domaine
de la conjoncture. On sait, M. le Président, que le ministère de
l'Industrie et du Commerce doit être, et c'est normal, dans tout
l'appareil gouvernemental, en collaboration avec l'Office de
développement et de planification, le point central et le point de
ralliement des préoccupations économiques. Par cette disposition
du projet de loi, on est en train d'enlever des moyens d'action et de
coordination au ministère de l'Industrie et du Commerce qui est
peut-être le ministère qui doit chapeauter tout l'appareil
gouvernemental dans le secteur économique. Je crois que les fonctions et
les responsabilités qui sont confiées au ministre des Finances
par ce sous-article ne devraient pas être incluses dans ce projet de
loi.
Je reprends la suggestion que j'ai faite tantôt en disant que le
ministre devrait avoir pour fonctions d'effectuer des recherches en
matière fiscale et budgétaire, mais en tenant compte des
implications économiques.
M. GARNEAU: M. le Président, le projet de loi à
l'étude je pense que le député de Montmagny
acceptera ma parole non seulement a été accepté par
l'ensemble du conseil des ministres mais, avant, il avait fait l'objet d'une
analyse détaillée, article par article, par un comité
spécial du conseil afin de bien en mesurer la portée. Je
comprends mal son intervention en ce qui regarde la politique
économique, comme, d'ailleurs, je ne saisis par vers quoi les remarques
de l'Opposition se dirigent.
Comment voulez-vous faire de la politique fiscale, de la politique
budgétaire? Comment conseiller le gouvernement sur les dépenses
publiques, compte tenu de la situation économique, si nous n'avons pas
également des experts en analyse conjoncturelle?
Quand on parle de dédoublement, à quel endroit pourrait-on
souligner ce dédoublement puisqu'il a été convenu avec le
ministère de l'Industrie et du Commerce que le service d'analyse
conjoncturelle serait transféré du ministère de
l'Industrie et du Commerce à celui des Finances? Il n'y aura donc pas de
dédoublement puisqu'il n'y aura qu'un seul service d'analyse
conjoncturelle quand même.
Alors le travail de l'Office de planification et de développement
qui, actuellement, utilise les expertises des analystes conjoncturels du
ministère de l'Industrie et du Commerce feront leur travail de la
même façon en utilisant les services de l'analyse conjoncturelle
du ministère des Finances, de telle sorte que les gens qui sont
responsables de coordonner l'expertise de la situation économique, de la
situation fiscale et de la politique budgétaire pourront,
évidemment, voir les trois aspects du tableau et être de meilleurs
conseillers pour l'ensemble du gouvernement.
Je ne vois pas du tout ce que changeraient les suggestions que voulait
apporter le député de Montmagny.
M. CLOUTIER (Montmagny): Le ministre pourrait-il expliciter davantage ce
qu'il vient de dire? Quels seraient les inconvénients ou quels seraient
les empêchements à ce qu'il puisse assumer entièrement ses
fonctions, du point de vue fiscal et budgétaire? Si le ministère
de l'Industrie et du Commerce a besoin, lui aussi, des effectifs d'analyse
conjoncturelle, quel serait l'inconvénient majeur à ce que ce
service continue de fonctionner sous l'autorité du ministre de
l'Industrie et du Commerce et qu'il puisse utiliser, à
l'intérieur du ministère de l'Industrie et du Commerce, les
services de tout cet appareil?
M. GARNEAU: M. le Président, je pourrais retourner la question au
député de Montmagny et lui dire: Qu'est-ce que cela changera?
Mais il y a une autre raison, je pense, beaucoup plus logique, beaucoup plus
importante que je me dois de soulever. Je pense bien que s'il y avait, en cette
Chambre, d'autres personnes qui ont exercé les responsabilités,
à un certain moment, de ministre des Finances, on se rend compte,
lorsque les discussions se font entre les différents paliers de notre
gouvernement, au Canada, sur ces questions, que ces discussions se font au
niveau des ministères des Finances.
Par exemple, à la dernière conférence des ministres
des Finances, on a passé une partie de la première journée
de la conférence à étudier l'ensemble de la situation
économique au Cana- da, c'étaient les ministres des Finances qui
étaient réunis, et les documents de travail devaient
évidemment être des documents préparés par chacun
des gouvernements. Mais la discussion qui se fait entre les différents
paliers de gouvernement à ce sujet se fait entre les ministères
des Finances. Je pense que ce sera beaucoup plus logique que ce soit ainsi.
Dans ce sens, je retourne la question du député de Montmagny en
disant: Les documents qui seront disponibles et qui seront
préparés au niveau des analyses conjoncturelles effectuées
par le ministère des Finances serviront non seulement au
ministère de l'Industrie et du Commerce mais également au
ministère des Institutions financières, au ministère de
l'Agriculture, au ministère des Terres et Forêts, au
ministère des Richesses naturelles et à l'Office de planification
et de développement. Il n'y aura absolument pas de
dédoublement.
M. LOUBIER: M. le Président, ce que je comprends difficilement,
c'est qu'au même moment où le ministre des Finances avec ses
fonctionnaires traceront un programme d'action sur le plan économique,
ou encore essaieront de trouver quelles sont les priorités
d'aménagement ou d'investissement, au même moment, dans tous les
ministères du gouvernement, que ce soient des ministères à
coloration sociale ou économique, comme le ministère des Terres
et Forêts, comme le ministère des Richesses naturelles, comme le
ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, etc., au
même moment, dis-je, il y aura une armée de recherchistes,
d'économistes, de sociologues qui travailleront à établir,
à l'intérieur de chaque ministère, les priorités du
ministère. A ce moment-là je dis qu'ils travailleront dans le
vide, M. le Président, absolument dans le vide parce qu'à un
autre niveau, à côté, et c'est plafonné, à ce
moment-là, en catimini, le ministre des Finances, avec ses conseillers,
établira un plan d'ensemble pour tous les ministères et, au
même moment où le ministre des Finances établira ces
priorités pour tout le tableau des activités gouvernementales,
tous les ministères auront des centaines d'économistes, de
sociologues, de recherchistes qui feront le même travail. A ce
moment-là, ils se ramasseront devant le ministre des Finances lorsqu'il
distribuera la masse budgétaire pour chacun des ministères et on
dira: Voici, vous n'avez pas plus que tant, parce que nous, nous avons
établi que les priorités économiques devraient se situer,
par exemple, au ministère des Richesses naturelles, cette
année.
Je veux tout simplement attirer l'attention du ministre s'il
n'est pas habitué aux affaires, s'il n'a pas l'expérience des
affaires, au moins c'est simple à comprendre sur le fait que s'il
y a 250 ou 300 économistes qui travaillent dans différents
ministères à établir des priorités ou une
planification à moyen terme et à long
terme qui ne sera jamais appliquée parce que le ministre des
Finances et ses conseillers ont décidé que cela n'entrait pas
dans l'ordre des priorités qu'il avait fixées, lui, il y a des
centaines de personnes à $12,000, $15,000 et $20,000 par année
qui vont faire quoi en fin de compte? Je trouve donc que le ministre des
Finances, en vertu de ce bill 55 et surtout du paragraphe 2, sous-paragraphe 1,
prend une hégémonie sur le plan économique qui met en
tutelle tous les autres ministères.
Deuxièmement, je trouve absolument déplorable que le
ministre des Finances à peu près seul possédera tous les
éléments de planification et, dans sa poche arrière,
l'argent pour payer. Je trouve qu'il se substitue également au conseil
des ministres. Et on sait comment fonctionne un conseil des ministres.
Périodiquement, des experts viennent renseigner le conseil des
ministres. En période de préparation des budgets, on utilise les
experts du gouvernement pour décrire la situation, pour dire quelles
sont les dépenses absolument incompressibles, quels seront
approximativement les revenus durant l'année. Et c'est le ministre des
Finances qui pourra disposer de la masse budgétaire selon son propre
plan, sans tenir compte, des priorités qui ont été
établies dans chacun des ministères. Encore là, c'est se
foutre du conseil des ministres qui doit avoir, à mon sens,
l'autorité suprême. Il l'aura, si vous voulez, en surface, mais de
facto, à cause des renseignements, à cause de l'influence et
à cause du rôle que jouera le ministre des Finances, le conseil
des ministres devra se soumettre, puisqu'il accorde aujourd'hui toute sa
confiance au ministre des Finances pour définir les priorités et
en même temps enlever au ministère de l'Industrie et du Commerce,
par exemple, un instrument qui était essentiel.
Pour ma part, je n'ai pas d'objection à ce que le ministre des
Finances puisse, à un moment donné, avoir un droit de regard et
même de conseil sur la planification économique du gouvernement.
Mais là, ce n'est plus un droit de regard, ce n'est plus un droit de
surveillance, ce n'est plus un droit de contrôle. C'est un droit de
décision, c'est un droit d'orientation, On vient encore une fois de
mettre une autre roue à cette machine, à ce mastodonte de
l'administration publique qui ne bouge pas et, dès que l'on retrouve une
petite roue quelque part qui fonctionne mal, tout est paralysé pour des
semaines et des mois.
On va pouvoir encore trouver des prétextes pour retarder la mise
en chantier de projets, la mise en application de grandes politiques. On
trouvera une foule de raisons administratives: ce qui a existé hier, ce
qui a existé avant-hier, en 1950, 1960, 1965 et en 1970. On va toujours
essayer de trouver des poux, de se renvoyer la balle pour bloquer des projets.
On vient, je pense, de trouver la baguette par excellence pour faire en sorte
qu'on assiste au miracle de la paralysie à tous les niveaux du
gouvernement et l'on confie au ministre des Finances le soin de décider,
d'orienter sur le plan économique et de tracer ses propres
priorités, selon ses vues à lui et selon la masse
budgétaire dont il peut disposer et qu'il peut consacrer à qui il
voudra.
M. GARNEAU: M. le Président, réellement, je ne comprends
pas l'intervention du député de Bellechasse puisque, tout
à l'heure, le chef de l'Opposition blâmait justement le
gouvernement de proposer un tel article en disant que cela allait amener un
dédoublement, une fois de plus, des fonctions de recherche.
Voici que le député de Bellechasse voudrait que cela soit
décentralisé dans chacun des ministères.
Je vois mal auquel des députés attacher le plus
d'importance, mais il y a certainement une contradiction entre ce qu'a dit le
chef de l'Opposition, tout à l'heure, et ce que soutient le
député de Bellechasse.
Je voudrais soulever un autre point que le député de
Bellechasse...
M. LOUBIER: Quelle contradiction y a-t-il?
M. GARNEAU: Le député de Bellechasse dit que, si on
centralise au ministère des Finances, cela enlèvera
l'autorité dans les ministères. Et tout à l'heure, le chef
de l'Opposition mentionnait qu'il fallait assurer une centralisation du
côté de la recherche. Alors, il y a certainement...
M. LOUBIER: M. le Président, je m'excuse, je ne sais pas si le
ministre n'a pas voulu comprendre, ou si le qualificatif peu agréable
que le député des Iles-de-la-Madeleine a utilisé pour
certains ministres peut s'appliquer à lui, et qu'il se trouvait dans le
cabinet des ratés! Mais le ministre ne veut pas comprendre, j'ai dit
tout simplement qu'au même moment où lui utilise des douzaines
d'économistes, de sociologues, de planificateurs, de recherchistes pour
établir des priorités au chapitre de l'économie, dans tous
les ministères et, tout dernièrement des ministres
ont déclaré qu'ils devaient renforcer l'équipe de
recherche dans chacun des ministères.
Là, c'est une belle contradiction. Au même moment,
où, lui, est en train de vouloir centraliser au chapitre de la
recherche, etc. pour donner les orientations sur le plan économique, il
y en a des centaines, dans les autres ministères, qui font
précisément ce travail. Or, si le ministre veut en faire un
superministère, un super-superministère, qu'on abolisse tous les
centres...
M. BERTRAND: C'est ce que je lui ai dit.
M. LOUBIER: ... tous les services de recherche. Et c'est ce qu'a dit le
chef de l'Opposition.
M. BERTRAND: C'est cela.
M. LOUBIER: Qu'on enlève les sercices de recherche dans tous les
autres ministères, qu'on centralise au ministère des Finances,
qu'on ramène l'Office de planification au ministère des Finances,
qu'on ramène également tous les aspects de recherches
industrielles du ministère de l'industrie et du Commerce, et tous ces
secteurs au ministère des Finances, et à ce moment, que les
autres ministres fassent ce que l'on appelle de "l'entertaining", se
promènent dans la province et ailleurs, avec leur petite valise et leurs
beaux sourires, parce qu'ils n'auront plus rien à faire, aucune
responsabilité à prendre, et surtout, ils ne pourront prendre le
rythme d'action qu'ils veulent avoir dans leur ministère. A mon sens, ce
sera dépersonnaliser chacun des ministères dans l'action qu'il
devra entreprendre sur le plan économique.
C'est ce que le chef de l'Opposition a dit et c'est ce que j'ai repris
en d'autres termes.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, le projet de loi que
nous étudions actuellement est très intéressant, mais
à cet article que nous sommes à étudier, j'aimerais faire
quelques observations. Il est bien évident que le projet de loi vise
à faire du ministre des Finances une sorte de tsar du gouvernement
puisqu'à toutes fins utiles c'est le ministre des Finances qui
décidera de tout, en tout et partout.
M. BOURASSA: II est capable.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Or, il me paraît...
M. BOURASSA: II est capable de remplir...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Peu importe!
M. BERTRAND: Ah! oui, il a toutes les prédispositions.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Quelle que soit la capacité du ministre
des Finances qui est là actuellement ou de ceux qui viendront
après lui, l'administration du gouvernement n'est pas un encan. Le
ministre comprendra ce que je veux dire. Mais il me paraît que, dans la
préparation de ce projet de loi, le ministre a accordé une
très grande importance à l'aspect économique. Cela, je ne
le lui reprocherai pas.
M. BOURASSA: II a été élu là-dessus.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Et je crois que cette préoccupation
économique a à ce point obnubilé son esprit qu'il a
oublié les ministères qui n'ont pas spécifiquement une
vocation...
M. MARCHAND: ... à la chefferie.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ainsi donc, lorsque le ministre des Finances
sera nanti des pouvoirs qu'il réclame en vertu de cette loi, il aura la
responsabilité...
M. MARCHAND: N'importe qui peut y aller.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... une planification générale,
dont l'objectif final sera d'abord et avant tout un objectif économique.
Par conséquent, lorsqu'il s'agira de procéder à
l'allocation des ressources, le ministre peut-il nous dire quelle sera
l'importance qui sera accordée aux ministères qui n'ont pas
spécifiquement une vocation économique?
On peut classer dans ces ministères-là un ministère
comme celui de l'Education, par exemple, même si, à long terme, le
ministère de l'Education a une vocation économique, en raison des
gens qu'il prépare à exercer des métiers qui, eux,
deviennent des facteurs économiques. Prenons par exemple, un
ministère que j'ai administré pendant quatre ans, le
ministère des Affaires culturelles. Lorsque les planificateurs qui
entoureront le ministre des Finances auront établi un budget, lorsqu'ils
auront pensé une politique budgétaire, fiscale, comment le
ministre des Affaires culturelles pourra-t-il plaider une cause qui est
extrêmement difficile, celle de la diffusion de la culture, par
exemple?
On se rend compte, à l'heure actuelle, de la
désintégration qui se produit dans un ministère comme
celui des Affaires culturelles, précisément parce que le ministre
des Finances et les gens qui l'entourent...
DES VOIX: Deux.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je suis toujours à l'article 2. ...
sont obnubilés par cette idée de l'économique qui est fort
importante. Le ministre de la Santé, l'autre jour, lors du débat
d'urgence, parlait de l'importance de l'économique, mais il a su,
cependant, apporter l'importante réserve de dire que l'économique
n'était pas tout.
M. BOURASSA: On est d'accord.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Or, il m'ap-paraît que ce qui a
présidé à l'élaboration de ce projet de loi, c'est
une intention, d'abord, économique. Le ministre des Finances se
bâtit un empire et se réserve, en faisant litière des
droits du conseil des ministres et de chacun des ministres, le droit de
distribuer ensuite à la graine l'argent dont ont besoin des
ministères à vocation socio-culturelle, auxquels, jusqu'à
présent, on n'a pas pu donner les budgets dont ils avaient besoin et qui
seront réduits, à partir du moment où l'on appliquera
cette planification
qui est dans l'esprit du nouveau ministre des Finances à la
portion congrue. Lorsqu'ils présenteront leur demande de crédits,
on leur dira: Voici, le ministre des Finances et ses planificateurs ont
établi des lignes de démarcation et conçu une politique
économique globale, une politique fiscale globale.
A partir du moment où il s'agira de procéder à
l'allocation des ressources, de parler strictement de budget et de
définir les lignes d'une politique budgétaire, on dira: Les
priorités sont déjà établies et nous les avons
conçues en fonction de l'économique uniquement. Qu'adviendra-t-il
de ces ministères? Cela vient déjà et on le sent
particulièrement au ministère des Affaires culturelles et au
ministère du Tourisme. Ces ministères deviendront simplement des
directions générales d'un superministère. C'est le
ministre des Finances qui aura droit de regard sur tout et qui aura vous
me permettrez, M. le Président, de faire cette observation; je crois
qu'elle est importante et je veux mettre le ministre des Finances en garde
en main des atouts qui deviendront uniquement des atouts politiques,
puisqu'il pourra, puisant à même le trésor, établir
des priorités, mais ne mettre en relief que celles qui auront une
rentablité électorale.
C'est la raison pour laquelle je m'inquiète, avec mes
collègues, de l'attitude du ministre des Finances. Surtout, je
m'interroge sur les raisons qui motivent son silence ou ses réticences
à nous dire exactement pourquoi il a conçu cette idée d'un
superministre, d'un superministère, en somme, d'un tsar qui va
définir les politiques et qui, après cela, réduisant tout
le monde à la portion congrue, ne mettra en évidence quand
on connaît le ministre, Dieu sait que cela a de l'importance que
les projets qui auront une rentabilité électorale.
M. GARNEAU: M. le Président, la seule réplique que je veux
faire au député de Chicoutimi, c'est que, s'il avait lu le projet
de loi, il saurait que l'allocation des ressources pour chacun des
ministères n'est pas de la responsabilité du ministre des
Finances, mais du Conseil du trésor, qui est un comité du conseil
des ministres.
M. LE PRESIDENT (Leduc): Le député de Beauce.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre n'a même pas lu son propre
projet de loi.
M. GARNEAU: Citez-moi l'article, monsieur.
M. LE PRESIDENT (Leduc): A l'ordre, messieurs!
Messieurs, à l'ordre, s'il vous plaît! Le
député de Beauce.
M. ROY (Beauce): Depuis un bon bout de temps, j'écoute avec toute
l'attention possible et je constate qu'on parle beaucoup de planification et de
coordination. Je pense qu'on en a parlé également beaucoup depuis
ces dix dernières années. On a tellement parlé de
planification et de coordination qu'on en est rendu à se demander s'il y
a un manque de coordination dans la planification ou s'il y a un manque de
planification dans la coordination. Si on regarde réellement le budget
de la province au cours des dix dernières années, c'est assez
révélateur.
On parle de reprise de l'économie, de relance de
l'économie et, depuis dix ans, nous avons eu quatre gouvernements qui
nous ont administrés successivement. Si on regarde, par exemple, le
côté économique, c'est là qu'on peut constater le
déséquilibre budgétaire que nous avons connu. Les
ministères à vocation économique, dans les années
1959-1960, prenaient environ 15 p. c. du budget et, en 1970 ou 1971, les
ministères à vocation économique en sont rendus à 5
p. c. J'aurais une question à poser au nouveau ministre des Finances.
Quant aux nouveaux pouvoirs qu'il demande, il s'agirait d'abord de
définir si ce sont des pouvoirs de décision ou un rôle de
conseiller. Si je prends correctement connaissance de la loi, j'ai l'impression
que le ministre a pour fonction paragraphe a) d'effectuer des
recherches et de conseiller le gouvernement. Or, je ne vois pas là qu'il
ait tellement un pouvoir de décision. J'aimerais tout de même
qu'il nous précise davantage s'il a un pouvoir de décision ou un
rôle de conseiller dans ce domaine-là. Le fait d'avoir ce pouvoir
pourrait-il assurer aux membres de cette Chambre et à la population du
Québec que ce nouveau projet de loi et ces nouveaux pouvoirs pourraient
nous permettre d'espérer avoir un meilleur équilibre
budgétaire dans l'avenir?
M. GARNEAU: M. le Président, je pense que le député
de Beauce a compris parfaitement l'esprit dans lequel l'article a
été écrit et je l'en remercie.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): A condition d'avoir compris.
M. GARNEAU: En relisant l'article, il a bien défini ce qu'il veut
dire, c'est-à-dire que le ministre des Finances aura pour fonction
d'effectuer des recherches et de conseiller le gouvernement. Les
décisions seront prises par le gouvernement, les priorités seront
établies par le gouvernement. L'allocation des ressources, lorsque les
priorités auront été établies, se fera comme suit:
Si le gouvernement décide que les priorités concernent le
ministère des Affaires culturelles, le Conseil du trésor, qui
d'après l'article 23 sera chargé de faire la distribution des
ressources du budget par ministère, donnera au ministère des
Affaires culturelles $100 millions, par exemple.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, justement c'est
là qu'est la pierre d'achoppement et ce que le ministre ne veut pas
comprendre.
M. GARNEAU: Avez-vous lu l'article 23?
M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, on dit "d'effectuer des
recherches et de conseiller le gouvernement". Vous avez là une
équipe de planificateurs, de recherchistes, appelez-les comme vous
voudrez. Ils vont préparer tout un plan, tout un programme, ils vont
arriver avec un menu cuit d'avance devant le conseil des ministres. Chacun des
ministres n'ayant pas pris connaissance de chacun des documents de ces fameuses
recherches que l'on va effectuer, dans quelle mesure, dans quelle situation se
trouvera-t-il? Dans quelle mesure pourra-t-il se prononcer sur ce qu'on va lui
proposer, non pas sous forme de suggestion, mais, à toutes fins utiles,
de façon impérative?
C'est pour ça que je m'en prends à cet article. J'estime
que les fonctions qui seront dévolues, par cet article, au ministre des
Finances paralysent virtuellement à l'avance l'action des
ministères, puisqu'on sait très bien que les comités de
planification finissent toujours par se substituer à ceux qui doivent
effectivement prendre les décisions. Il faut tenir compte de l'ampleur
de la machine gouvernementale, des tâches qui sont dévolues
à chacun des ministres, de toute la routine administrative. Comment les
ministres trouveront-ils le temps d'étudier les documents des
planificateurs et de se prononcer sur les conseils que voudra bien leur
prodiguer le nouveau tsar, ministre des Finances?
Cela va être impossible, parce qu'ils vont être
noyés, encore une fois, sous des montagnes de documents. Ils n'auront
pas le fil conducteur, tandis que, quand les recherches se poursuivent à
l'intérieur d'un ministère, et je pense en particulier aux
ministères à vocation socioculturelle les problèmes
sont extrêmement différents de ceux qui peuvent se poser, par
exemple, dans un ministère comme celui de l'Agriculture et de la
Colonisation.
Il faut, à ce moment-là, être en mesure de
comprendre exactement quelles sont les priorités à
l'intérieur d'un ministère qui, déjà, recèle
des mystères pour la majorité des membres de cette Chambre. Et je
le sais d'expérience.
M. BOURASSA: M. le Président, si l'ancien ministre...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je vais vous donner un exemple que vous pouvez
apprécier.
M. BERTRAND: Oui, oui, écoutez.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je vais vous donner un exemple.
M. BERTRAND: On vous donne des exemple, on les a vécus.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Supposons que le ministre des Finances,
après avoir fait ses analyses et tout cela, présente ses
suggestions et que, par ailleurs, au ministère des Affaires culturelles,
comme c'est arrivé l'an passé, on présente un programme de
diffusion du français. Nous l'avons fait il y a un an et demi. Nous
avons préparé un programme avec les spécialistes du
ministère, qui ne sont pas des planificateurs, mais des linguistes, des
lexicologues, etc, avec tous les gens de la discipline de la langue. Nous avons
ensuite établi les lignes budgétaires de ce programme. Nous avons
ensuite soumis ce programme au conseil des ministres qui l'a accepté,
mais qui ne l'a accepté qu'à partir du moment où les
spécialistes, ayant comparu devant nous, ont expliqué, à
la suite du ministre qui défendait le projet, quels étaient les
tenants et aboutissants de cette politique que nous allions mettre de
l'avant.
Or, M. le Président, si la politique est conçue
globalement par le ministre des Finances, comment, pour des problèmes
aussi spécifiques que ceux-là et qui mettent en cause des
principes, des valeurs qui ne s'apprécient pas mathématiquement.
Comment, dis-je le ministre des Finances pourra-t-il faire retrouver à
chacun des ministre le fil conducteur qui permettra à ce ministre de
défendre un projet spécifique? J'aurais des dizaines d'exemples
concernant les affaires culturelles, par exemple. On nous dit: Oui, le ministre
ne prendra pas de décisions, il va conseiller le gouvernement. Mais je
vous répète et l'expérience est là pour le
prouver que les planificateurs, qui sont au départ des
auxiliaires, finissent toujours par se substituer à ceux qu'ils ont
fonction d'aider, parce que les tâches administratives sont tellement
importantes et chaque ministre le sait et le premier ministre le sait
qu'on n'a pas le temps à ce moment-là d'examiner les
tonnes de documents qui nous sont présentés et que l'on s'en
tient aux recommandations générales. Et c'est le ministre qui va
les faire à ce moment-là, c'est le tsar des finances qui va les
faire à ce moment-là, et tout le monde va boire ça comme
du petit lait, va manger ça comme du bon pain. Ils vont dire: Le tsar
des finances pense comme ça, donc, on pense comme ça. Et il
arrivera ce qui est en train de se produire aux Affaires culturelles, une
désintégration du ministère, puisque permettez-moi
l'expression, M. le Président le ministre des Affaires
culturelles sait qu'on est en train de lui bouffer son ministère.
Comment se fait-il, par exemple, et je vous donne encore un
exemple précis de cette planification si la planification du
ministre des Finances telle qu'il la conçoit est bien faite, est faite
telle qu'il la pense? Il arrive, il a conçu
son projet je pense par exemple aux loisirs et aux sports
et il suggère à ses collègues de confier la
responsabilité des loisirs et des sports au ministère de
l'Education. Tout le monde accepte ça, sans égard au fait qu'il y
a une très grande partie de l'activité dite de loisirs qui est
une activité socio-culturelle et qui devrait relever de la
compétence du ministre des Affaires culturelles. Celui-ci s'en trouve
actuellement privé puisque c'est le ministre de l'Education qui agit
dans un domaine qui, en grande partie, n'est pas de son ressort, puisque ces
problèmes sont administratifs, d'ordre pédagogique.
Ils ont évidemment une résonance culturelle, mais à
longue portée, comme un résultat. Ce serait normalement le
ministre des Affaires culturelles qui devrait avoir la responsabilité de
tout cet aspect des loisirs socio-éducatifs et culturels. Or, c'est
actuellement le ministre de l'Education qui l'a. Je vous donne cet exemple, M.
le Président, simplement pour essayer de faire apercevoir au ministre
des Finances que cette planification qu'il conçoit, cette grande
politique qu'il va élaborer en matière économique, fiscale
et budgétaire avec ses planificateurs peut fort bien venir en
contradiction avec celle qui est élaborée par les
spécialistes du métier dans chacun des ministères et
particulièrement dans les ministères qui n'ont pas une vocation
immédiatement ou spécifiquement économique. C'est pour
cela que je dis au ministre des Finances qu'une fois qu'il aura servi les
grands ministères il réduira tous les autres ministères,
particulièrement ceux que j'évoquais tout à l'heure,
à la portion congrue.
M. BERTRAND: C'est ça.
M. BOURASSA: M. le Président, tout simplement...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je suis sûr que le ministre des Affaires
culturelles est de mon avis. C'est vrai?
M. BOURASSA: Le ministre des Finances a répondu...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Excusez-moi, M. le premier ministre.
M. BOURASSA: ...à l'avance à cette tempête dans un
verre d'eau que veut créer l'ancien ministre des Affaires culturelles.
C'est clair que c'est le gouvernement qui va établir les
priorités. D'ailleurs, c'est arrivé au gouvernement, à
quelques reprises, de siéger uniquement en fonction de
l'établissement des priorités. Si on regarde ce qui se fait dans
d'autres pays, comme la France, l'Angleterre, partout, c'est normal que le
ministère des Finances ait des conseillers et des planificateurs pour
aviser le gouvernement ainsi que le ministre. Comme nous avons signalé
je l'ai fait encore hier à une émission de radio
l'importance, pour nous, de la priorité culturelle dans le contexte
actuel du Québec, je ne vois pas pourquoi l'ancien ministre craint que,
parce que le ministre des Finances aura d'excellents conseillers et
planificateurs, un ministère comme celui qu'il a présidé
n'aura pas les fonds nécessaires pour accomplir une fonction qui nous
paraît nécessaire. Pourquoi s'en faire inutilement comme
ça? Pourquoi ne pas procéder rapidement à l'adoption d'un
projet de loi qui vise à l'efficacité administrative pour
laquelle nous avons été élus?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je pense que le
premier ministre, parlant très calmement c'est son habitude parce qu'il
n'a pas assez de caractère pour se fâcher essaie, encore
une fois, de faire de l'esquive. Il nous dit: Ecoutez, faites donc confiance au
ministre...
M. BERTRAND: Mon jeune ministre.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...mon jeune ministre, mon ministre favori!
Adoptez son projet de loi. S'il vous plaît, aidez-moi à le
consacrer tsar des Finances! Le premier ministre nous demande ça. Mais,
il y a une observation, M. le Président: Si le projet de loi est
très important, s'il vise à l'efficacité administrative,
pourquoi ne nous a-t-il pas été présenté plus
tôt? Nous n'aurions, peut-être, pas eu à tenir, ce soir, les
propos que nous tenons, parce que le projet nous arrive comme ça. C'est
un projet quand même très important. On a déposé le
texte depuis un certain temps, d'accord. Il reste que les implications de ce
projet de loi sont telles que nous n'avons pas du tout l'idée je
regrette de refuser la supplication du premier ministre de l'adopter
à la vapeur. Il est lourd de conséquences, ce projet de loi.
Répondant directement à l'observation qu'a faite le premier
ministre au sujet des Affaires culturelles, je dis qu'il aura, d'ici quelques
jours, à répondre de la véracité de ce qu'il a
avancé, non pas que je veuille dire qu'il nous a trompés.
Puisqu'il nous dit sa préoccupation pour les choses culturelles et qu'il
prend la peine de prendre les ondes pour nous parler de la culture et de
l'importance qu'il y attache, il aura à nous dire, d'ici quelques jours,
combien d'argent il a consenti à donner à son collègue des
Affaires culturelles.
M. BERTRAND: Oui! M. PAUL: Oui!
M. BERTRAND: Nous allons avoir un allié là-bas!
M. LE PRESIDENT (Leduc): L'honorable député
d'Abitibi-Ouest.
M. AUDET: M. le Président, cette nouvelle loi tend beaucoup
à vouloir faire des changements de juridiction entre les divers
responsables et administrateurs pour essayer de contrôler les revenus et
les dépenses du gouvernement pour ce qu'il consacre aux études
à savoir si notre système financier lui-même n'est pas
victime d'un malaise fondamental qui serait la plus grande fourberie de tous
les temps.
Maintenant, je m'accorde beaucoup avec l'opposition d'à
côté. Le Conseil de la trésorerie qui deviendrait le
Conseil du trésor ne change pas grand-chose quant à sa nouvelle
appellation. Je crois qu'il faudrait s'attarder plus longuement sur la
juridiction qu'on semble vouloir lui léguer. Le gouvernement n'est-il
pas en train d'ajouter dans ses structures une autre forme de superpouvoir
à un organisme gouvernemental qui, comme une multitude de commissions de
toutes sortes, est formé de personnes qui n'ont reçu aucun mandat
du peuple? Nous savons que le ministre, chargé comme il le sera, devra
laisser du travail à des gens bien en place qui, en plus de n'avoir
jamais été élus, ne perdent non plus jamais leurs
élections. Il arrive que ce ne seront plus les élus du peuple qui
feront les lois, mais plutôt une foule de bureaucrates et de technocrates
qui, nantis de tous les pouvoirs, feront le beau temps et le mauvais temps.
M. DUMONT: M. le Président, pour continuer dans le sens de ce que
le préopinant vient de dire, nous voyons bien, à l'article 2 a):
"Le ministre a pour fonctions d'effectuer des recherches et de conseiller le
gouvernement..." Si c'était pour conseiller le gouvernement pour
éteindre la dette publique, nous n'aurions pas d'objection. Mais quand
c'est pour consolider le revenu dans le but d'imposer des dettes nouvelles
à tout citoyen, nous voyons certains gestes qui deviennent des gestes
d'un certain tsar qui devient trop opérant.
Pour nous prévenir de cela, le ministre a même
déclaré: "Afin de préserver l'autorité
suprême du conseil des ministres, le projet de loi prévoit que le
lieutenant-gouverneur en conseil peut toujours, par règlement, limiter
les pouvoirs qui sont conférés par la loi au Conseil du
trésor." Si le ministre a peur qu'on lui donne trop de pouvoirs, s'il
craint qu'on soit obligé de lui en enlever, c'est qu'il craint qu'on lui
en donne trop dans le moment. Pourquoi nous demander des pouvoirs que demain on
devra lui enlever?
D a même ajouté: "II serait tout à fait faux de
prétendre qu'il crée un second cabinet ou un cabinet
parallèle." Alors voilà, tout est dit.
M. MASSE (Montcalm): C'est déjà un gouvernement
parallèle.
M. DUMONT: Un autre premier ministre à côté du
premier ministre. Je dirais, plus, M. le Président. C'est que le
ministre, à l'heure actuelle, parce qu'il veut mettre en tutelle tous
les autres ministères, prend trop en exemple je cite ici ses
déclarations le gouvernement fédéral.
M. MASSE (Montcalm): C'est la voix de son maître.
M. DUMONT: II dit: "II faut dire que les ministères du
gouvernement fédéral exercent depuis longtemps ces
responsabilités que nous suggérons d'attribuer aux nôtres
dans le présent projet de loi."
Or, M. le Président, quand le ministre des Finances ira
négocier une question de finances, à Ottawa, et qu'il ne
reviendra pas avec les $255 millions, il se retournera avec les autres
ministères et dira: Nous n'avons pas d'argent. Nous n'avons pas d'argent
pour administrer.
C'est cette mise en tutelle que nous ne voulons pas. Il faudrait que les
ministres responsables devant le peuple puissent aider le ministre des Finances
à négocier car souvent les gens de là-bas disent qu'il
passe inaperçu. Nous ne voulons pas que cela arrive. Ils iront tous
ensemble pour qu'ils ne passent pas inaperçus.
C'est la raison pour laquelle s'il veut mettre en tutelle, à
l'heure actuelle, différents autres ministères, nous lui
disons...
M. GARNEAU: C'est seulement...
M. DUMONT: ... qu'il ne prenne pas en exemple le gouvernement d'Ottawa
qui veut mettre en tutelle le gouvernement de la province de Québec.
M. RUSSELL: L'article ne dit pas cela, mais c'est en fait ce qui
arrive.
M. LE PRESIDENT (Leduc): Adopté?
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, le député de
Mégantic a parfaitement raison de se questionner concernant ce projet de
loi par rapport aux projets similaires que nous voyons à Ottawa. Nous
savons fort bien que le gouvernement du Québec, intendant de la gestion
des choses du Québec au nom de son maître d'Ottawa, a certainement
demandé à M. Lalonde de siéger au comité où
ce projet de loi a été rédigé.
M. BOURASSA: M. le Président, peut-on discuter
sérieusement?
M. MASSE (Montcalm): M. le Président...
M. BOURASSA: Le député de Montcalm était plus
sérieux cet après-midi.
M. MASSE (Montcalm): ... le premier ministre, tout à l'heure, est
intervenu...
M. BERTRAND: M. le Président...
M. LE PRESIDENT (Leduc): A l'ordre! Le député de
Montcalm.
M. BERTRAND: Pour vous montrer un exemple: C-190: Loi concernant
l'Auditeur général du Canada.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, le premier ministre est
tellement habitué à copier ce qui se fait à Ottawa qu'il
ne s'en aperçoit même plus.
M. BERTRAND: II a été retiré.
M. MASSE (Montcalm): D'ailleurs, il copie mal, on y reviendra tout
à l'heure, concernant le vérificateur des comptes.
M. BOURASSA: J'invoque le règlement, l'article 271...
M. MASSE (Montcalm): Quant à copier, copiez comme il faut, au
moins.
M. BOURASSA: L'article 271...
M. MASSE (Montcalm): Qu'est-ce qu'il dit, l'article 271?
M. BERTRAND: Pourriez-vous nous le citer?
M. MASSE (Montcalm): Comment le premier ministre peut-il invoquer un
article quand il ne connaît même pas le contenu?
M. BOURASSA: M. le Président, l'article 271...
M. PAUL: M. le Président, pour prouver au premier ministre qu'il
ne connaît pas son règlement, il ferait mieux d'invoquer l'article
200.
M. BOURASSA: Article 200?
M. PAUL: Oui.
M. BOURASSA: Ah! Je n'ai pas d'objection, M. le Président.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Article 201.
M. BOURASSA: Le 18 juin, lors du discours sur le budget...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, non, M. le Président. Il faut
savoir en vertu de quel article il invoque le règlement. Article 201 ou
202?
M. BOURASSA: L'un ou l'autre. De ce côté-ci, on dit
l'article 271, de l'autre l'article 200. De toute façon j'ai droit de
parole, M. le Président, pour rétablir les faits.
M. MASSE (Montcalm): Non, non, sur le rappel au règlement du
premier ministre, je ne vois pas, en vertu de l'article 200, pour quelle raison
il vient s'immiscer dans le débat avec le discours sur le budget.
M. BOURASSA: II parle du projet de loi...
M. MASSE (Montcalm): En quoi l'article 200...
M. BOURASSA: C'est parce que, dans le discours sur le budget...
M. LE PRESIDENT (Leduc): A l'ordre! A l'ordre!
M. BOURASSA: Au cours du discours sur le budget, M. le Président,
j'ai mentionné, dans l'une des réformes, qu'il fallait apporter
des changements au rôle du vérificateur général.
D'ailleurs, le projet de loi reprend certaines des dispositions que j'avais
annoncées, comme ministre des Finances, le soir du 18 juin, soit que
l'auditeur général ne devrait pas, à la fois, autoriser
des dépenses qu'il lui faut critiquer par la suite.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, ce n'est pas de cela qu'on
discute pour l'instant.
M. BOURASSA: Alors, c'est une réforme que j'avais annoncée
quand j'étais critique financier, l'année dernière, en
réplique à M. Dozois...
M. MASSE (Montcalm): Article 2, M. le Président...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Article 2, M. le Président.
M. BOURASSA: ... que j'ai également annoncée, comme chef
de gouvernement et ministre des Finances, le 18 juin, et qu'on met en pratique
dès aujourd'hui. C'est ça un gouvernement qui agit au lieu de
"placoter".
M. PAUL: M. le Président, si le parlementarisme est
véritablement bien compris du premier ministre, premièrement, il
va rester en Chambre. Deuxièmement, M. le Président, il a
invoqué un article du règlement pour enlever la parole au
député de Montcalm. Si le premier ministre est trop pressé
pour participer d'une façon continue et logique au débat, qu'il
ne vienne pas ici pour démontrer qu'il connaît ça et qu'il
s'intéresse au projet de loi.
Quand le premier ministre va invoquer les
règlements, à l'avenir, il a besoin d'être
ferré. Il a besoin d'être ferré. C'est indécent, M.
le Président, de se lever, comme il l'a fait, pour enlever la parole
à un opinant qui présente une argumentation logique, bien
structurée, efficace et qui démontre que le ministre actuel des
Finances a tout simplement, comme arrière-pensée, de vouloir
encore mieux contrôler, pour exercer son patronage aussi pernicieux,
qu'il le fait depuis qu'il est arrivé au pouvoir.
M. VEILLEUX: Est-ce que le député de Maskinongé
fera le forgeron?
M. MASSE (Montcalm): Je trouve surprenant que le premier ministre soit
venu ici...
M. LEVESQUE: M. le Président, je ne sais pas si j'ai mal entendu
ou mal compris...
M. MASSE (Montcalm): Réveillez-vous!
M. LEVESQUE: Voyons!
M. MASSE (Montcalm): Allez-y!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous avez mal entendu.
M. LEVESQUE: Je crois bien que le député de
Maskinongé avait d'abord commencé à porter certains
jugements qu'il lui appartient de porter, s'il le juge à propos,
c'est à nous et à la population de juger de l'objectivité
de ses remarques je crois avoir entendu la dernière partie de son
intervention. Je n'ai pas donné la parole au député de
Maskinongé, et je me demande s'il n'y aurait pas lieu qu'il nuance un
peu son vocabulaire.
M. PAUL: M. le Président, comme le leader parlementaire n'a rien
compris, il a peut-être entendu mais il n'a rien compris
c'est peut-être le mot pernicieux qui l'a chatouillé. Je vais
changer cela par astucieux.
M. LEVESQUE: Bien, cela dépend avec quel substantif c'est
associé. J'ai entendu, je n'ai probablement pas compris, comme dit le
député de Maskinongé, mais j'ai entendu: Un patronage
pernicieux...
M. PAUL: Mais j'ai changé...
M. LEVESQUE: Mais qu'il soit astucieux ou pernicieux, je ne crois pas
qu'il puisse être associé à l'un ou l'autre des membres de
cette Chambre.
M. PAUL: C'est parce que le leader parlementaire vit loin de la
région de la Mauricie, car le ministre de l'Agriculture a dit que le
patronage, en soi, c'était une bonne chose.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Le leader n'est pas allé au mont
Sainte-Anne, récemment.
M. LE PRESIDENT (Leduc): A l'ordre, s'il vous plaît !
M. TREMBLAY (Chicoutimi): II n'est pas allé au mont
Sainte-Anne...
M. LE PRESIDENT (Leduc): Le député de Montcalm a la
parole.
M. MASSE (Montcalm): J'ai été surpris, d'une part,
d'entrendre les paroles du premier ministre tout à l'heure, vantant son
projet de loi par l'efficacité administrative qu'il prône, et,
d'autre part, de le voir disparaître aussi rapidement, au moment
où on donne la réplique concernant ses avancés.
Si le premier ministre avait consulté le chapitre 64, la Loi du
ministère des Finances, dans la section I, de la loi actuelle, par
rapport au projet de loi qui est mis de l'avant par le nouveau tsar de la
finance, il constaterait le pourquoi du débat de ce soir. Il se rendrait
compte par exemple, qu'à l'article 3 de la loi actuellement en vigueur,
il est donné des fonctions, des devoirs et des pouvoirs au ministre des
Finances qui sont les suivants: "Surveillance, contrôle et gestion de
tout ce qui se rattache aux affaires financières, aux revenus et
dépenses et aux comptes publics de la province et qui n'est pas, ou
autant qu'il n'est pas, par la loi ou par arrêté du
lieutenant-gouverneur en conseil, assigné à un autre
ministère du gouvernement".
M. RUSSELL: C'est cela.
M. MASSE (Montcalm): Si le premier ministre d'une part, avait lu les
projets de loi que son gouvernement propose, s'il avait bien voulu condescendre
à assister au débat de ce soir plutôt que d'intervenir
à la sauvette, il réaliserait également qu'à
l'article 5 de la loi actuelle, il est dit ceci: "II a, de plus, le
ministre des Finances, actuellement les autres fonctions, devoirs et
pouvoirs qui ne sont pas incompatibles avec quelque loi de la province et qui
peuvent de temps à autre lui être assignés par le
lieutenant-gouverneur en conseil".
Or, que présente-t-on maintenant comme projet de loi? On
présente un projet de loi qui donne comme fonction au ministre des
Finances, une fonction générale qui dit: "Effectuer des
recherches et conseiller le gouvernement en matière de politique
économique, fiscale et budgétaire".
Le premier ministre ne semble pas constater, lorsqu'il parle
d'efficacité administrative, que, si d'une part, il dépose un
projet de loi le projet de loi 55 il ne crée pas
l'efficacité administrative. Au contraire, il embrouille
l'administration actuelle par rapport au projet de loi du chapitre
64, Loi des ministères des Finances, actuellement en vigueur. Et
pourquoi? Le leader parlementaire le sait fort bien. Parce qu'actuellement, les
lois des arrêtés en conseil du gouvernement ont distribué
des pouvoirs en matière économique, fiscale et
budgétaire.
Il pouvait être possible de centraliser la quasi-totalité
de ces pouvoirs entre les mains d'un ministère de l'Economie et c'est
cela que nous avons préconisé en deuxième lecture. Ce
n'est pas l'option du gouvernement. Au contraire, l'option du gouvernement
tente, sans changer quoi que ce soit dans les lois actuelles, sans changer quoi
que ce soit dans les arrêtés en conseil actuels, de donner un
surplus de pouvoirs au ministre des Finances en lui disant, en plus de tout le
monde, que des responsabilités en matière budgétaire,
fiscale et économique, il y aura, en plus de tout cela, un autre
ministre qui, lui, aura un pouvoir général pour à peu
près n'importe quoi, qui touche les questions économique, fiscale
et budgétaire.
Ce sont les points de vue qui ont été soulevés par
l'Opposition. Et si le premier ministre avait assisté au débat en
Chambre, ou du moins s'il avait compris les points de vue qui ont
été avancés par l'Opposition, il n'aurait pas pu plaider
l'efficacité administrative avec son projet de loi no 55. Encore une
fois, il parlait à côté de la question.
Pourquoi le projet de loi 55 crée-t-il de la confusion
plutôt que l'efficacité? Parce qu'il est évident que le
ministre des Finances, puisqu'il aura comme responsabilité de conseiller
le gouvernement, se trouvera des conseillers en matière
économique, fiscale, budgétaire, cherchera et trouvera des
planificateurs, des fonctionnaires responsables dans ce domaine pour lui
permettre de conseiller le gouvernement.
Or, avons-nous, premièrement, suffisamment de compétences
dans ces domaines pour être capable de les égrener entre les
divers ministères, entre les diverses régies et, en plus, au
ministère des Finances? Deuxièmement, est-il possible, sans
organismes de coordination, que l'ensemble de ces gens travaillent aux
mêmes projets au point de vue économique, budgétaire et
fiscale? Troisièmement, est-il possible avec un projet de loi semblable
qui ne donne aucun pouvoir cette fois-ci au ministre des Finances, d'appliquer
et d'exécuter la politique économique, fiscale et
budgétaire définie par le gouvernement? Est-ce cela
l'efficacité prônée par le premier ministre? Est-ce cela la
rentabilité de l'administration québécoise? Est-ce de
cette façon qu'il sera possible d'avoir une politique économique
fiscale et budgétaire au Québec? Est-ce de cette façon
qu'il sera possible d'appliquer cette politique définie par le
gouvernement?
M. VEILLEUX: Oui.
M. MASSE (Montcalm): Et qu'en sera-t-il de l'Office de
planification?
En termes ronflants, pendant des années, à l'époque
où il était de l'Opposition, alors qu'il avait le temps de
s'occuper de ses discours plutôt que de dire n'importe quoi,
régulièrement, de son siège le député de
Mercier revenait à la charge pour demander au gouvernement où en
était rendu l'Office de planification, où en est rendue la
nomination des membres du conseil de planification. Il est premier ministre
depuis des mois et il n'en a pas nommé un, encore. C'est cela,
l'efficacité du premier ministre?
C'est, encore une fois, un ballon qui a été lancé
par une équipe dynamique dans un seul domaine: la publicité et la
propagande. Au contraire de cela, on nous apporte des projets de loi qui vont
à l'encontre de l'efficacité administrative.
Autre question: Est-ce que ce sera désormais la
responsabilité du ministre des Finances de régler le
problème de la promesse du premier ministre des 100,000 nouveaux
emplois? Est-ce le ministre des Finances qui aura la responsabilité de
chercher tous les moyens et de conseiller le gouvernement dans ce secteur de la
politique économique? Si c'est là l'idée du premier
ministre ce sera de sa part, encore une fois, une façon de se trouver un
autre responsable pour venir nous dire plus tard: Si je n'ai pas trouvé
les 100,000 emplois, cela dépend quelque fois de Marchand et d'autres
fois de mon tsar, Garneau.
C'est cela, l'efficacité administrative prônée par
le premier ministre? Si telle est l'efficacité administrative, c'est une
farce monumentale. C'est un ballon de propagande comme les autres ballons:
Brinks, Lafferty, Harwood et les autres choses semblables. Où en est
l'efficacité administrative dans ce domaine?
M. VEILLEUX: Le prochain chef péquiste!
M. MASSE (Montcalm): Qui aura la responsabilité? C'est cela que
l'on doit poser comme question au ministre des Finances.
M. GARNEAU: Le député de Montcalm devrait garder le ton
serein qu'il avait cet après-midi.
M. MASSE (Montcalm): C'est à cela qu'il n'est pas capable de nous
répondre. Or, il voudrait ainsi que les députés qui
l'assistent dans cette Chambre qu'aveuglément, au cri de
"adopté", tels des soldats du Parti libéral muets et bouches
cousues, nous répondions par un signe de tête affirmatif. M. le
Président, je ne crois pas que ce soit là notre
responsabilité. Certes, il est normal pour les banquettes d'en avant
d'être silencieuses quand les ordres leur sont donnés. Je ne crois
pas que ce soit la responsabilité de l'Opposition de répondre oui
à chaque fois que l'on crie "adopté". Que le ministre des
Finances...
M. LACROIX: Comme vous êtes éloquent depuis que vous
êtes dans l'Opposition!
M. MASSE (Montcalm): Je ne pense pas que Fido ait affaire dans ce
débat.
M. LACROIX: M. le Président, le député de Montcalm
est un triste individu qui n'a jamais ouvert le bec quand il était
ministre responsable et qui essaie aujourd'hui d'imputer tous les
péchés d'Israël à une administration qui est
là depuis six mois.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): A l'ordre!
M. LACROIX: Si le député de Montcalm veut que je lui donne
des noms de petits chiens, je suis capable de lui en donner.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): A l'ordre! Article 2.
M. LACROIX: Je vais apprendre au député de Montcalm
à respecter ses collègues. S'il ne le fait pas, je vais lui
montrer ce qu'est l'étiquette d'un professeur, qu'il n'a jamais eue; il
n'est même pas digne d'avoir été autrefois professeur
lorsqu'il se comporte en Chambre comme il le fait depuis qu'il est dans
l'Opposition.
Pour le futur chef de l'Union Nationale, j'espère qu'il sera
choisi...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): A l'ordre!
M. LACROIX: ... parce qu'autrement, nous les laverons. Il n'en restera
pas dix-sept, il n'en restera même pas un.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): A l'ordre!
M. MASSE (Montclam): M. le Président, premièrement, je
suis surpris de voir que le député des Iles-de-la-Madeleine s'est
levé, tel un ressort, de son siège au cri de Fido. Je ne vois pas
pourquoi il s'est senti visé à ce point.
M. LACROIX: C'est parce que je trouve imbécile un homme qui se
pense intelligent d'essayer d'insulter ses collègues qui ont
été au moins...
M.TREMBLAY (Chicoutimi): J'invoque le règlement!
M. LACROIX: Le député des Iles-de-la-Madeleine a
été élu par la majorité absolue de ses concitoyens.
En n'importe quel temps, je suis prêt à faire face au chien du
comté de Montcalm.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'invoque le
règlement! Nous venons d'entendre, de la part du député
des Iles-de-la-Madeleine, je pense, des expressions qui ne sont pas dignes de
cette qualité de parlementarisme que nous essayons d'instaurer dans
cette Chambre.
M. LACROIX: Le député de Chicoutimi me permettrait-il une
question?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'ai la parole, M. le Président. Oui,
allez!
M. LACROIX: Acceptez-vous les propos du député de
Montcalm? Je connais le député de Chicoutimi même si
je n'accepte pas toutes ses attitudes comme étant un gentilhomme.
Accepte-t-il que dans cette Chambre le député de Montcalm, qui
est un de ses collègues comme professeur, ait à l'endroit de ses
collègues, des propos comme ceux qu'il a prononcés? Si le
député de Chicoutimi me dit qu'il accepte cela, j'aurai un autre
jugement à porter sur lui.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, on m'a posé une
question et je vais y répondre. Je poursuivrai ensuite mon rappel au
règlement. J'ai entendu le mot "Fido" et comme je connais le latin
c'est un mot latin je ne sais pas ce que cela veut dire. M. le
Président, tout simplement, ce que je voulais...
M. LACROIX: Un autre mot qui est latin aussi, c'est "fifi" ou d'autres
choses comme cela.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je voulais vous faire
observer que le député des Iles-de-la-Madeleine ne vient pas de
nous donner un exemple de cette qualité de parlementarisme que nous
revendiquons et que nous voulons instaurer ici.
Il a employé des termes de diverses natures, que je n'ai pas
besoin de relever; d'ailleurs, je sais qu'il regrette déjà de les
avoir prononcés. Mais, je crois, M. le Président, que vous
devriez intervenir, afin de demander au député des
Iles-de-la-Madeleine, comme d'ailleurs le premier ministre le lui a
demandé lui-même, ses collègues le lui demandent tous les
jours, de retenir ses sentiments et de ne pas s'emporter à un point tel
qu'il déshonore la Chambre par des expressions qui, non seulement ne
sont pas parlementaires, mais ne trouvent pas place dans le vocabulaire d'un
homme civilisé.
M. LEVESQUE: M. le Président, je dois intervenir très
brièvement; je crois que le tout a été provoqué par
le député de Montcalm, qui doit en assumer toute la
responsabilité.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, je n'ai jamais visé
le député des Iles-de-la-Madeleine, je ne comprends pas
pourquoi...
M. LACROIX: Je n'ai jamais visé le député de
Chicoutimi, non plus.
M. MASSE (Montcalm): Si personne ne se vise, pourquoi tout le monde se
sent-il attaqué?
M. LE PRESIDENT (Blank): Retournons à l'article no 2.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, j'aimerais quand
même, en réponse à l'intervention saugrenue et "au discours
du trône" du député des Iles-de-la-Madeleine,...
M. LEVESQUE: M. le Président, c'est justement ce que nous avons
voulu éviter. Nous avons passé, je crois, une heure et demie sur
l'article 2 a) ou 2 b)...
M. BERTRAND: Article 2 a).
M. LEVESQUE: Dans les circonstances, nous devrions continuer sur
l'article 2 a) plutôt que de nous arrêter à des
considérations d'ordre personnel.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, pas avant d'avoir
répondu à la remarque qu'a soulevée le
député des Iles-de-la-Madeleine lorsqu'il a dit qu'il n'avait pas
souvent entendu le député de Montcalm s'ouvrir le bec à
l'époque où il était au gouvernement.
M. LEVESQUE: M. le Président, il s'agit de quelque chose qui n'a
aucune relation avec le projet de loi.
M. MASSE (Montcalm): Je tiens à dire, M. le Président,
qu'il avait parfaitement raison.
M. LE PRESIDENT (Blank): Je pense qu'on a vidé la question
zoologique et on doit retourner à l'article 2 a).
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, le député
porte des accusations, pose des questions; je ne vois pas en vertu de quel
article de notre règlement je ne pourrais lui répondre.
M. LE PRESIDENT (Blank): II n'y a aucun article qui dit qu'un
député peut poser une question à un autre
député. C'est fini.
M. LACROIX: Je demanderais au fossoyeur de l'Union Nationale de se
reporter au projet de loi.
M. LE PRESIDENT (Blank): A l'ordre! A l'ordre!
On retourne à l'article 2 a), s'il vous plaît.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, vous entendez cet homme
vous invectiver et nous ne pouvons répondre. Je trouve ça anor-
mal. Que nous ayons à porter notre croix, passe encore, mais de
là à ne pas répondre, c'est une autre chose. Je ne vois
pas pourquoi, M. le Président. Il a posé la question. Il s'est
demandé pourquoi, pendant plusieurs années, je n'ai pas ouvert le
bec dans cette Chambre. La raison est bien simple, j'ai ouvert la bouche
à plusieurs reprises, mais je ne suis pas une poule pour ouvrir le
bec.
M. LEVESQUE: Le député de Montcalm ne peut pas accepter de
ne pas continuer dans cette veine. S'il continue dans ce sens, alors qu'une
décision du président a été rendue, je crois qu'il
ne se rend pas digne de la fonction qu'il occupe en cette Chambre.
M. MASSE (Montcalm): Le leader pourrait se retourner en arrière,
quand il parle.
M. PAUL: M. le Président, je sais que le rôle du leader
parlementaire est de voir à ce que les travaux sessionnels
progressent...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Protéger ses arrières.
M.PAUL: ... rapidement, intelligemment, avec efficacité. Son
rôle est d'être le véritable gardien du respect des lois. Je
me demande comment il se fait qu'il n'intervient pas plus souvent pour rappeler
à l'ordre le député des Iles-de-la-Madeleine.
M. LACROIX: Pourquoi n'avez-vous rappelé à l'ordre le
député de Montcalm?
M. PAUL: M. le Président, je sais que le député de
Montcalm ne fera plus aucune allusion aux déclarations du
député des Iles-de-la-Madeleine, mais il va maintenant
s'interroger lui-même en empruntant des expressions qui ont
déjà peut-être été utilisées dans
cette Chambre.
M. LEVESQUE: M. le Président, à l'invitation du leader
parlementaire de l'Opposition officielle, les conseils qu'il me donne, je lui
retourne avec politesse, et même avec espoir...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je les lui retourne.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, avec la permission du
député des Iles-de-la-Madeleine, son entendement et son courage,
je vais continuer. Le ministre des Finances nous propose, dans cet article 2
a), au grand soulagement du ministre de l'Industrie et du Commerce, d'effectuer
des recherches et de conseiller le gouvernement en matière de politique
économique, fiscale et budgétaire.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): II le soulage de son ministère
aussi.
M. LE PRESIDENT (Blank): A l'ordre!
M. MASSE (Montcalm): Or, dans ce secteur, il y a une question
fondamentale qui se pose et à laquelle n'a pas répondu encore le
ministre des Finances. Qui doit conseiller le gouvernement parmi les
différentes instances qui ont ces responsabilités actuellement
dans l'ensemble de la structure de l'Etat? Quel partage de pouvoirs envisage le
ministre des Finances entre l'Office de planification, qui a comme
responsabilité de conseiller le gouvernement en matière
économique, le ministère des Finances qui, désormais, se
donne cette responsabilité et les autres ministères qui ont cette
responsabilité? Où sera le partage? Est-ce que le ministre
envisage que ce partage se fasse sur les politiques à long terme par
rapport aux politiques à court terme?
Certes, cela peut être une distinction entre les deux
responsabilités, mais nous aimerions bien voir dans la loi quelque chose
qui spécifie ces responsabilités entre l'Office de planification
et le ministère des Finances. Si tel était le cas, comment le
ministre des Finances définit-il les responsabilités à
long terme et les responsabilités à court terme en matière
économique? Est-ce qu'il a des définitions sérieuses ou
si, au contraire, il va nous arriver avec une "réponset-te", à la
manière du député de Mercier concernant, par exemple, les
nouveaux emplois? Nous aimerions mieux avoir une définition
sérieuse que des exemples de badinage. Cela est fondamental.
Au nom de la même efficacité que prône le premier
ministre, si nous sommes face à deux instruments qui ont comme
responsabilité de conseiller le gouvernement en matière
économique, il faut abolir un des deux instruments. Si, au contraire,
les deux ont leur rôle à jouer, il faut spécifier quelque
part, soit dans la Loi de l'Office de planification, soit dans la Loi du
ministère des Finances, la différence qu'il y a entre les deux
organismes et les deux responsabilités. Autrement, nous serions en face
de dédoublement, nous serions en face d'un ensemble de fonctionnaires
qui font le même travail.
Egalement, on sait qu'il existe un ministère du Revenu et le
ministre, à l'arrière de la salle, prête une oreille
attentive, j'en suis certain. Or, le ministre des Finances se donne comme
responsabilité de conseiller le gouvernement en matière de
politique fiscale. On sait qu'une des parties de la politique fiscale, c'est la
taxation. Il est évident que le ministère du Revenu existe pour
deux fins, soit pour percevoir la taxation, mais, également, pour
conseiller le gouvernement en matière de taxation et de politique
fiscale.
M. HARVEY (Jonquière): Le député de Montcalm me
permettrait-il une question?
M. MASSE (Montcalm): Certainement.
M. HARVEY (Jonquière): Sait-il, le député de
Montcalm, que le ministère du Revenu a toujours, depuis sa
création, servi de conseiller au ministère des Finances qui est
responsable entièrement de la politique fiscale du gouvernement? Est-ce
que le député de Montcalm sait ça?
M. MASSE (Montcalm): Justement, M. le Président...
M. HARVEY (Jonquière): Cela n'a pas changé, même si
c'est le député de Jonquière qui est titulaire du
ministère du Revenu. Si le député de Montcalm
répond qu'il sait cela, il devrait retirer les paroles qu'il a
prononcées alors qu'il savait que le ministre du Revenu était en
train de griller une cigarette à l'arrière.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, je remercie le
témoignage à la barre des accusés du ministre du Revenu.
En effet, c'est justement ça, le problème. Je connaissais le
dossier et c'est pour cela que j'en ai parlé. Voilà que le
ministre lui-même, sous l'oeil vengeur du ministre des Finances, vient
témoigner à la barre...
M. BERTRAND: C'est ça.
M. MASSE (Montcalm): ...que la responsabilité de son
ministère, c'est de conseiller le gouvernement en matière
fiscale.
M. HARVEY (Jonquière): Le ministre des Finances.
M. MASSE (Montcalm): Sommes-nous en face d'un gouvernement divisé
contre lui-même? Le ministre du Revenu, actuellement devant nous, est-il
seul à avoir conscience de l'importance de ce projet de loi? Les autres
sont tous disparus des banquettes. Ils se font dépouiller de leurs
responsabilités et, nus, sortent de cette salle sans même gronder.
C'est incroyable, M. le Président.
Je pense que voilà un deuxième exemple. En matière
de politique fiscale, qui aura la responsabilité, désormais, de
conseiller le gouvernement? Est-ce que ce sera, comme jusqu'à
maintenant, le ministre du Revenu qui semble, lui au moins, vouloir conserver
sa responsabilité...
M. HARVEY (Jonquière): Pardon...
M. MASSE (Montcalm): ... sachant fort bien...
M. HARVEY (Jonquière): ... je rétablis les faits. Le
ministre des Finances a toujours été celui qui conseille le
gouvernement, le cabinet, sur les politiques fiscales. Le ministre du Revenu,
dont le rôle principal est de percevoir les revenus, continuera...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Humanitairement.
M. HARVEY (Jonquière): ... d'agir comme conseiller auprès
du ministre des Finances qui, lui...
M. BERTRAND: Non, non, non.
M. HARVEY (Jonquière): ... aura toujours le rôle...
M. BERTRAND: Avez-vous lu la nouvelle loi?
M. HARVEY (Jonquière): ... de conseiller le gouvernement dans les
politiques fiscales.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Avez-vous lu la loi?
M. HARVEY (Jonquière): Je l'ai lue, la loi, aussi bien que
l'ancien ministre des Affaires culturelles.
M. BERTRAND: Lisez la loi.
UNE VOIX: Qu'est-ce qu'elle dit?
M. LE PRESIDENT (Leduc): Article 1 a).
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, ce témoignage
ignorant...
M. HARVEY (Jonquière): M. le Président, mais il a le
droit... Voyons donc! Le député de Montcalm prend la mouche pour
rien. On sait fort bien que le ministre des Finances va avoir également
d'excellents conseillers autour de lui pour mieux le renseigner, pour
améliorer davantage la politique fiscale du gouvernement qui veut, pour
les années à venir, avoir une politique fiscale à
point...
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Humanitaire.
M. HARVEY (Jonquière): ... et humanitaire, comme vient de le dire
le député de Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous allez faire cela sous...
M. HARVEY (Jonquière): Oui.
M. MASSE (Montcalm): Je crois que le deuxième témoignage
du ministre est moins valable que le premier. Premièrement, il nous a
dit, dans son intervention je ne sais pas s'il a témoigné
à la demande du ministre des Finances, le tsar lui a fait signe
il nous a dit, le ministre du Revenu, qu'actuellement la loi donnait au
ministre des Finances la responsabilité de conseiller le gouvernement en
matière fiscale. Est-ce que c'est ça? Ai-je bien compris? Or,
vérifions le chapitre 64. Retournons au texte. La loi actuellement en
vigueur, Loi du ministère des Finances, section I, article 3: Quelles
sont les fonctions, devoirs et pouvoirs du ministre actuel? Lisons-les
ensemble. Je vais faire la lecture. C'est certainement la première fois
que le ministre va entendre les pouvoirs actuels du ministre des Finances.
M. HARVEY (Jonquière): Je vous en dispense.
M. MASSE (Montcalm): Je lis: 1) Le ministre des Finances
actuellement a la surveillance, le contrôle et la gestion de tout
ce qui se rattache aux affaires financières, aux revenus et
dépenses et aux comptes publics de la province, et qui n'est pas ou pour
autant qu'il n'est pas, par la loi ou par arrêté du
lieutenant-gouverneur en conseil, assigné à un autre
ministère du gouvernement." Il n'a donc pas là de pouvoirs de
conseiller en matière fiscale. "2) II a les fonctions, devoirs et
pouvoirs qui, au temps de l'Union, étaient respectivement imposés
ou accordés par la loi au ministre des Finances et au receveur
général de l'ancienne province du Canada, en tant qu'ils sont
compatibles avec la division des pouvoirs établis par l'Acte de
l'Amérique du Nord britannique, 1867, entre le gouvernement du Canada et
celui de la province, et qui n'ont pas été modifiés ou
affectés depuis; "3) II a le contrôle et la direction du bureau
général de dépôts de la province;
M. HARVEY (Jonquière): Posez-la vous-même.
M. MASSE (Montcalm): 4) II est chargé de surveiller
l'exécution des lois...
M. HARVEY (Jonquière): Posez-la vous-même.
M. MASSE (Montcalm): "5) II a, de plus, les autres fonctions, devoirs et
pouvoirs qui ne sont pas incompatibles avec quelque loi de la province et qui
peuvent, de temps à autre, lui être assignés par le
lieutenant-gouverneur en conseil."
Voilà les responsabilités actuelles du ministre des
Finances.
M. HARVEY (Jonquière): Posez-la vous-même. Le
député de Maskinongé, posez-la vous-même.
M. MASSE (Montcalm): Or, M. le Président, il est donc faux...
M. HARVEY (Jonquière): Posez-la vous-même.
M. MASSE (Montcalm): ... de prétendre qu'actuellement c'est le
ministre des Finances qui a la responsabilité de conseiller en
matière de taxation le gouvernement. Je trouve surprenant que le
ministre du Revenu se laisse dépouiller de son organe comme ça,
sans pour autant, même se surprendre à crier. Il est
évident que, puisqu'il est ministre du Revenu, il a la
responsabilité de recueillir les impôts, mais il a aussi la
responsabilité d'orienter la politique fiscale. Je pense que...
M. HARVEY (Jonquière): Pardon. Nous avons la
responsabilité de bien déterminer à notre collègue,
le ministre des Finances, quels seront les rendements des lois fiscales ou des
amendements que le cabinet ou le gouvernement...
UNE VOIX: Les conseillers.
M. HARVEY (Jonquière): ... se propose d'apporter aux lois
fiscales. La différence, M. le Président, qu'il y a entre le
ministre du Revenu actuel et l'ancien ministre de l'ancien gouvernement, le
député de Montcalm,...
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, je pense que vous allez
être obligé de le rappeler à l'ordre.
M. HARVEY (Jonquière): ... c'est que le ministre du Revenu actuel
ne se prend pas pour un autre. Il sait qu'il n'est que ministre du Revenu et il
sait qu'il ne sera jamais le deuxième premier ministre de la province de
Québec avec une boîte à lunch! Quand on se prend pour un
autre, M. le Président, cela ne dure pas longtemps. Le règne du
député de Montcalm a duré le temps que durent les
roses.
On s'aperçoit que cela fait mal parce que, ce soir, il joue
à l'expert en économique. On s'aperçoit qu'il n'est pas
fort.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, j'invoque le
règlement.
M. HARVEY (Jonquière): Quant à moi, M. le
Président, cela va clore le débat. Je répète encore
une fois que les responsabilités qu'a bien voulu me confier le premier
ministre de la province de Québec, j'en suis conscient. Je connais la
loi de mon ministère, comme je connais la loi du ministère des
Finances. Je suis conscient des amendements que le gouvernement propose
actuellement aux membres de cette Chambre pour améliorer
l'efficacité administrative dans la province de Québec...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Montrez-nous comment cela les améliore?
Comment ces amendements améliorent-ils l'efficacité
administrative?
M. HARVEY (Jonquière): Vous, je ne vous montre rien. C'est trop
dangereux.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je voudrais bien
savoir du député de Jonquière de quelle façon cela
améliore l'efficacité administrative. Lui, c'est le percepteur
des taxes et des impôts. Même s'il veut le faire humanitairement,
il se laisse quand même déposséder de ses pouvoirs par le
ministre des Finances.
M. HARVEY (Jonquière): M. le Président...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Peut-il nous expliquer comment le projet de
loi qui est présenté améliore l'efficacité
administrative?
M. LEVESQUE: Si le député de Chicoutimi attend qu'on
procède à l'étude de la loi, article par article, nous
aurons certainement l'occasion de lui faire la preuve...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je n'ai pas à
entendre les observations du leader de la Chambre.
M. LEVESQUE: Non?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le député s'est levé. Il
a fait une observation. Il est intervenu dans le débat en sa
qualité de ministre du Revenu. J'ai le droit de lui poser des questions!
Puisqu'il a partie liée avec le ministre des Finances, j'ai le droit de
lui demander, à lui qui invoque l'efficacité administrative, de
démontrer comment la loi augmente cette efficacité
administrative, à l'article 2.
M. LEVESQUE: Je sais que le député...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le leader de la Chambre se lève pour
rien! Qu'il protège plutôt ses arrières!
M. LEVESQUE: Le député de Chicoutimi a les mêmes
droits que celui qui prend la parole à ce moment-ci. Je crois que j'ai
le droit d'intervenir au moment que je juge opportun. Comme vous le savez, je
dois...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pas d'intervenir quand je suis en train de
parler.
M. LEVESQUE: Non, non.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'étais en train de parler. Je faisais
une intervention.
M. LEVESQUE: J'ai attendu que le député de Chicoutimi ait
repris son siège...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, je n'étais pas encore assis.
M. LEVESQUE: ... contrairement à ce qu'il fait
présentement...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je ne m'étais pas encore assis.
M. LEVESQUE: J'ai attendu, contrairement à ce que fait le
député de Chicoutimi présentement, qu'il reprenne son
siège. A ce moment-là, j'ai dit que si on procédait
à l'étude de la loi, article par article, on aurait l'occasion de
voir comment le projet de loi que nous avons devant nous aidera à
améliorer l'efficacité administrative du gouvernement.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je suis tout à
fait d'accord avec le leader de la Chambre.
M. LEVESQUE: Bon!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mais pourquoi intervient-il? Nous sommes
précisément à discuter de cette question et des
interruptions sont venues du ministre du Revenu, du député de
Jonquière...
M. HARVEY (Jonquière): Absolument pas!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... à l'adresse de mon collègue
le député de Montcalm.
M. HARVEY (Jonquière): M. le Président, c'est faux!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): II a répondu...
M. HARVEY (Jonquière): Les interventions...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): A l'ordre, M. le Président!
M. HARVEY (Jonquière): ... ne sont pas venues du ministre du
Revenu. Elles sont venues à la suite d'une affirmation du
député de Montcalm.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): D'accord, d'accord!
M. HARVEY (Jonquière): Je vais répondre au
député de Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, non. Un instant, un instant: J'ai
d'autres questions à poser.
M. HARVEY (Jonquière): Je vais vous envoyer porter les statuts,
dont le chapitre 66 dit, à l'article l,que le ministre du Revenu...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'invoque le
règlement.
M. HARVEY (Jonquière): ... désigné dans la
présente loi a la direction et l'administration du ministère du
Revenu. Je sais ce que cela veut dire. Il n'est pas ministre des Finances.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M le Président, je ne vois pas du tout
ce que vient faire la lecture laborieuse que le député de
Jonquière...
M. HARVEY (Jonquière): C'est le chapitre 66, pas le chapitre
69.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je demandais simplement ceci au ministre du
Revenu, qui est intervenu de façon inopportune dans le discours de mon
collègue: Comment la loi du nouveau tsar des Finances
améliore-t-elle l'efficacité administrative?
Je lui demande de me faire une démonstration par A plus B, s'il
en est capable. Il nous a dit qu'il n'était pas un expert, on le savait.
Alors, c'est confirmé. Je lui demande tout simplement de nous dire cela.
Avec plusieurs de mes collègues, j'ai essayé de démontrer
comment le ministre est en train d'alourdir la machine administrative du
gouvernement. Le député de Jonquière s'amène
à la barre, comme l'a dit mon collègue. Il commence à
donner un jugement qui aide la cause du procureur du ministère public et
il devient tout à coup témoin hostile. C'est pour ça que
je suis intervenu pour lui poser une petite question, comme en demande un
témoin qui est gêné: Comment la loi présentée
par le nouveau tsar des Finances pourra-t-elle améliorer
l'efficacité administrative, alors que nous avons
démontré, il me semble, de façon péremptoire, que
cela alourdit le mécanisme? C'est ce qu'est en train de démontrer
mon collègue, le député de Montcalm.
M. HARVEY (Jonquière): On verra dans six mois et le
député de Chicoutimi sera un des témoins. Il sera à
la barre cette fois-là.
M. LE PRESIDENT (Blank): Le député de
Lotbinière.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, certes, dans la Loi du
ministère des Finances, l'article 2 concernant les attributions du
ministre des Finances octroie des pouvoirs sur les recettes et dépenses
du gouvernement. Donc, par extension, si je peux dire, le ministre des Finances
a déjà certains pouvoirs en ces matières. De là
à prétendre que le ministère n'en a aucun, il y a
très loin. De toute façon, nous aurons l'occasion de revenir sur
cette question.
M. ROY (Beauce): M. le Président, j'avais posé une
question, tout à l'heure, au ministre des Finances, après avoir
expliqué un peu le tableau et démontré le
déséquilibre qu'il peut y avoir dans le budget que les
gouvernements ont présenté. Le ministre des Finances pourrait-il
nous dire si, par ses nouvelles fonctions ou par les nouveaux pouvoirs qu'il
demande à la Chambre, il pourrait justement faire le nécessaire
en vue d'assurer une meilleure répartition des budgets entre les
différents ministères?
M. GARNEAU: M. le Président, il y a eu tellement de choses de
dites depuis la dernière fois que je me suis levé que je ne sais
pas exactement par où commencer.
M. PAUL: Est-ce que je pourrais inviter l'honorable ministre à
s'approcher un peu? On aime ça l'entendre et le comprendre surtout.
UNE VOIX: Ils vieillissent, ils sont sourds.
M. GARNEAU: Je dirai au député de Beauce que l'une des
raisons...
M. PAUL: M. le Président, peut-être que vous pourriez
demander aux enfants de l'arriè-re-ban de s'en aller, parce qu'il est
tard. Il est 10 h 50.
M. LAFRANCE: II y en a plusieurs de sortis.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ils ont le droit. D'ailleurs, c'est toujours
le vide, de votre côté, le creux.
M. PAUL: Cela intervient.
M. GARNEAU: Les seuls bruits que j'entends ne viennent pas de ce
côté, à ce moment-ci.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Faites un encan, vendez-nous votre loi.
M. GARNEAU : Est-ce que le député veut se mettre aux
enchères?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pardon?
M. GARNEAU: Est-ce que le député aimerait que nous le
placions aux enchères?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, je ne miserais pas sur vous. Je vous
suggérais simplement de miser sur certains établissements du mont
Sainte-Anne.
M. MASSE (Montcalm): II est sourd d'une oreille, le ministre.
M. GARNEAU: Bien, je peux prendre les deux et essayer de comprendre ce
que babille le député de Chicoutimi.
De toute façon, M. le Président, pour répondre
à la question...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est la question des $25,000.
M. GARNEAU: ... très pertinente du député de
Beauce, c'est justement une des raisons pour lesquelles le ministère des
Finances, à mon sens cela a été la décision
du gouvernement en présentant ce projet de loi doit pouvoir
effectuer des études sur le plan de la conjoncture économique.
Quand le député de Beauce parle de l'équilibre
budgétaire ou de l'utilisation du budget comme instrument
économique, j'imagine qu'il réfère à la
possibilité d'utiliser le budget pour relancer l'activité
économique lorsque nous sommes en période de chômage.
A ce moment, le fait qu'on accepte le déficit au compte
budgétaire, ou encore, lorsque nous sommes en période de
surchauffe, que le gouvernement s'impose une certaine discipline du
côté de sa politique budgétaire pour indiquer, dominer des
surplus, par exemple, ou encore diminuer le volume de ses emprunts, c'est
justement pour atteindre cet objectif, pour que le ministère des
Finances et c'est là le désir du gouvernement
puisse effectuer des recherches et conseiller le gouvernement en matière
de politique économique, fiscale et budgétaire.
Tout à l'heure, nous avons eu plusieurs discussions en ce qui
concerne le fait que le ministère des Finances puisse être
appelé à conseiller le gouvernement en matière de
fiscalité. Est-ce que c'est le ministre du Revenu, est-ce que c'est un
autre ministre? Je pense et à ma connaissance, et on me corrigera
si je me trompe que le chapitre 66 des Statuts refondus, qui est la loi
organique du ministère du Revenu, ne donne pas au ministre du Revenu la
responsabilité de conseiller le gouvernement en matière fiscale.
A ma connaissance, il n'existe actuellement pas dans les lois organiques un
ministre qui soit particulièrement responsable de conseiller le
gouvernement en matière fiscale.
Par exemple, du côté économique, l'Office de
planification et de publicité est appelé, comme l'a dit le
député de Montcalm, dans son...
M. MASSE (Montcalm): Vous me permettrez, M. le Président...
M. GARNEAU: L'Office de planification et de développement est
appelé à édicter...
M. MASSE (Montcalm): L'Office de planification et de
développement et non pas planification et publicité. Je sais bien
que vous avez hâte de vendre les choses, mais tout de même pas
à ce point.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est un lapsus qui est significatif. Le
psychiatre devra nous expliquer le sens de cela.
M. BERTRAND: C'est une idée fixe du gouvernement.
M. GARNEAU: L'Office de planification, comme l'a dit le
député de Montcalm, dans son exposé de cet
après-midi, a un rôle à jouer auprès du gouvernement
en vue de préparer, pour le compte du gouvernement, des plans,
programmes et projets. Mais quelle est la contradiction dans l'article 2 a) de
la loi proposée avec l'Office de planification et de
développement, lorsque cet Office de planification et de
développement pourra utiliser comme expertise les avis qui seront
fournis par les experts du ministère des Finances en matière
d'analyse économique, d'analyse de la conjoncture économique? Il
n'y a pas de dédoublement là-dedans, c'est tout simplement une
saine répartition des responsabilités, c'est un rôle que
tout ministère des Finances bien organisé doit être
appelé à jouer en vue de donner suite aux objectifs qu'avaient en
tête le député de Beauce en posant sa question.
M. ROY (Beauce): M. le Président, je voudrais dire
également que le ministre des Finances aurait certainement plus de
pouvoirs pour indiquer, par exemple, que les ministères à
vocation économique pourraient avoir une plus grande part du budget par
rapport à d'autres catégories de ministères. Est-ce que
j'ai bien compris?
M. GARNEAU: M. le Président, justement, si dans l'analyse de la
conjoncture économique, les conclusions sont à l'effet qu'il faut
assurer une relance de l'économie, il est évident que le
gouvernement, s'il est conséquent avec ce qu'il accepte comme situation
de l'économie québécoise ou de l'économie
nord-américaine, devra agir en conséquence au niveau de la
préparation de ses budgets. C'est ce que nous avons fait cette
année, lorsque, avant de demander aux ministères de
préparer les estimations de dépenses pour l'année qui
vient, nous avons, au niveau de séances du conseil des ministres,
établi les priorités; à partir de ces priorités,
nous avons transmis à chaque ministère une enveloppe à
l'intérieur de laquelle il pourra choisir les priorités qu'il
veut. C'est ce que nous avons fait.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président...
M. ROY (Beauce): M. le Président, je m'excuse, j'aurais
simplement une question complémentaire, si vous voulez. Si j'en juge par
les déclarations que le ministre vient de faire, à ce moment, je
me pose réellement un point d'interrogation. Je pense que je partagerai
un peu les craintes de l'Opposition officielle, parce que, justement, pour que
cette coordination se fasse, il faut que le gouvernement fasse des incitations
en vue d'assurer un meilleur équilibre budgétaire.
Je pense que tout le monde sera d'accord là-dessus. Mais,
pourquoi le ministre des Finances plutôt qu'un autre ministère? La
loi dit ceci, dans le paragraphe a): Le ministre conseille des politiques
économiques, fiscales et budgétaires. Dans le paragraphe b) on
dit: II présente les prévisions budgétaires; donc il
prépare les budgets. Dans l'article c) on dit: II gère le fonds
consolidé. Et dans l'article e): II surveille et contrôle tout ce
qui se rattache aux affaires financières.
M. le Président, si j'en juge par cette consolidation de
pouvoirs, je partage les craintes de l'Opposition officielle.
M. GARNEAU: Le député de Beauce pourrait jeter un coup
d'oeil sur l'article 23 du projet de loi, où il est indiqué
clairement que ce n'est pas le ministre des Finances qui a la
responsabilité de préparer les estimations des dépenses
des ministères, mais bien plutôt le Conseil du trésor, qui
est un comité de ministres. Mais, en Chambre, c'est le ministre des
Finances qui a la responsabilité de présenter le discours du
budget. C'est le ministre des Finances qui sera l'interprète du
gouvernement puisque les estimations des dépenses de l'ensemble des
ministères deviennent une décision gouvernementale. Ce sera le
ministre des Finances qui sera chargé de présenter ces
estimations des dépenses à l'Assemblée nationale. Il y a
une distinction entre le fait que le ministre des Finances ait la
responsabilité de présenter les estimations des dépenses
en Chambre et la responsabilité d'accepter ou de proposer au
gouvernement la répartition de l'ensemble du budget global entre les
différents ministères.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je voudrais poser une
question au ministre des Finances, au sujet de ce paragraphe a): effectuer des
recherches et de conseiller le gouvernement. Pour faire des recherches, il va
falloir des recherchistes. Est-ce que le ministre a une idée du nombre
de personnes dont il devra requérir les services pour effectuer ces
recherches? Ou est-ce qu'il a actuellement en main, soit au ministère
des Finances ou dans divers ministères, l'équipe
déjà prête à assumer cette responsabilité de
recherche? Ou le ministre devra-t-il faire un inventaire des ressources
disponibles dans ce domaine de la recherche afin de constituer l'équipe
qui sera habilitée à le conseiller à constituer cette
sorte de machine extrêmement lourde? Est-ce que le ministre pourra nous
donner une idée du nombre de personnes qu'il sera nécessaire
d'avoir? Quelles seront les qualités de ces personnes? De quel type de
spécialistes aura-t-il besoin?
Cela nous indiquerait peut-être dans quel
sens s'infléchit sa pensée et si elle va bien dans cette
direction d'une plus grande efficacité administrative. Le
député de Jonquière, le ministre du Revenu, nous a dit
qu'il le saurait, lui, dans six mois. Nous, nous voulons le savoir tout de
suite. Est-ce que le ministre pourrait nous donner un ordre de grandeur du
nombre de personnes dont il se propose de requérir les services?
M. GARNEAU: Est-ce que le député a terminé?
D'abord, je voudrais peut-être commenter le fait que le projet de loi,
tel qu'il est prévu dans le dernier article, entrera en vigueur le 1er
avril 1971. Il y avait deux raisons fondamentales: la première,
c'était que le 1er avril est le début d'une nouvelle année
financière, ce qui permettait une transition plus facile entre le
rôle de l'Auditeur de la province, tel qu'on l'appelle
présentement, et celui du vérificateur général des
comptes, car la vérification se fait à la fin d'une
année.
Deuxièmement, ça donnait le temps de mettre sur pied des
équipes en mesure d'assumer pleinement les responsabilités
nouvelles qui seront confiées, soit au ministère des Finances,
soit au Conseil de la trésorerie, au vérificateur
général ou au contrôleur des Finances.
Le nombre de personnes que ça prend? Il faut distinguer, d'abord,
les conseillers en politique fiscale. Il était de coutume, même
si, dans les projets de loi, ce n'était pas clairement indiqué,
que le ministre des Finances conseille le gouvernement en matière de
politique fiscale. Il y a actuellement au ministère des Finances un
service de recherche fiscale.
Du côté de la recherche économique, il y a une
équipe actuellement au ministère de l'Industrie et du Commerce
qui, je crois, est sous la direction de M. Vézina. C'est un excellent
économiste qui pourrait assumer la direction ou jouer un rôle
important si le ministère de l'Industrie et du Commerce était
prêt à le muter. C'est un excellent analyste de la conjoncture
économique.
Est-ce que je dois répondre au député de Chicoutimi
que cela en prendra deux, trois, quatre ou cinq? J'aime mieux retenir mon
jugement pour être en mesure d'établir un organigramme
précis. Evidemment, je ne voudrais pas présumer des
décisions de la Chambre. Il y aura des consultations avec le
sous-ministre des Finances, le directeur du personnel et le ministère de
la Fonction publique en ce qui regarde l'approbation de l'organigramme. Par la
suite, nous pourrons établir le nombre précis de personnes dont
nous aurons besoin pour agir comme conseillers en matière de politique
économique.
M. BERTRAND: M. le Président, il est onze heures.
M. LEVESQUE: Je le sais.
M. BERTRAND: Moi aussi.
M. ROY (Beauce): Est-ce qu'on continue le débat?
UNE VOIX: Certainement.
M. ROY (Beauce): Alors, M. le Président, lors de la discussion en
deuxième lecture tout à l'heure, j'avais demandé, à
la fin de mon exposé, que nous puissions entendre l'Auditeur
général de la province. Est-ce qu'on pourrait demander au
gouvernement de faire venir à la commission parlementaire l'Auditeur
général de la province pour que nous puissions l'interroger
à ce sujet-là?
M. LE PRESIDENT (Blank): Est-ce qu'on aura à voter?
M. RUSSELL: Non, monsieur.
M. LE PRESIDENT (Blank): Parce qu'il en reste encore un peu à
faire.
M. MASSE (Montcalm): Le ministre des Finances, tout à
l'heure...
M. ROY (Beauce): M. le Président, j'ai posé une question
au gouvernement et je n'ai pas eu de réponse.
M. MASSE (Montcalm): C'est ça qu'ils font avec nos questions, ils
n'y répondent jamais.
M. GARNEAU: J'aurais aimé pouvoir y répondre, mais le
député de Montcalm s'est levé et j'ai cru que le
président lui avait donné la parole. Si le député
de Beauce suggère qu'il y ait une rencontre avec l'Auditeur, il
faudrait, je pense, convoquer le comité des comptes publics où il
pourrait comparaître. Avant de prendre une telle décision,
j'aimerais pouvoir consulter mes collègues.
M. PAUL: Un point d'ordre. Le ministre nous demande de convoquer un
comité qui n'existe pas. Il nous demande de convoquer le comité
des fonds publics et ça n'existe pas.
M. SAMSON: M. le Président, est-ce que nous devons comprendre que
le ministre refuse de faire comparaître l'Auditeur général
ou si nous devons comprendre que nous devons lui fournir la possibilité
de le faire comparaître?
Nous sommes en comité plénier maintenant, mais je pense
que, sur d'autres sujets, nous avons eu des commissions qui nous ont permis de
faire entendre les témoins, pourquoi pas l'Auditeur de la province? On
pose des questions au ministre sur ce bill de 106 articles, je pense qu'il y en
a assez pour justifier de faire comparaftre l'Auditeur de la province.
Sûrement que tous les membres de l'Opposition ont
des questions à lui poser. Pourquoi, monsieur le
Président, pourquoi, monsieur le ministre, n'acquiescez-vous pas
à notre demande?
M. GARNEAU: M. le Président, le député de
Rouyn-Noranda se réfère-t-il à des questions concernant
l'administration financière, les comptes publics actuels, ou s'il se
réfère au contenu du projet de loi lorsqu'il désire
consulter l'Auditeur?
M. SAMSON: M. le Président, dans tout ce contenu, nous aurions
sûrement des questions à poser et qui pourraient être
intéressantes pour tout le monde. On pourrait, en commission
parlementaire, poser des questions à l'Auditeur. Je pense que ça
s'est déjà fait dans d'autres domaines, ça se fait dans
tous les domaines, et on a, à certains moments, convoqué des
personnes pour beaucoup moins que ça, alors pourquoi ne le ferait-on pas
dans ce cas-là? Cela nous permettrait peut-être de faire toute la
lumière là-dessus et à ce moment-là, on pourrait,
l'opposition créditiste sinon les autres, se faire une meilleure
idée de ce qu'ils ont derrière la tête, et, on pourrait
vous donner notre opinion qui serait sûrement beaucoup plus
formée.
M. GARNEAU: M. le Président, si le député de
Rouyn-Noranda veut poser des questions à l'Auditeur de la province sur
les comptes publics, sur l'administration financière, je veux bien
consulter mes collègues du conseil des ministres et répondre oui
ou non au député de Rouyn-Noranda s'il convenait que nous le
fassions.
Maintenant, en ce qui regarde le projet de loi, je comprends et cela me
surprend énormément que ce soit le chef du Ralliement
créditiste qui pose cette question parce que c'est le gouvernement qui a
à prendre la décision en ce qui regarde les projets de loi qu'il
propose à l'Assemblée nationale, ce ne sont pas
nécessairement les fonctionnaires. Et je veux bien que le
député de Rouyn-Noranda demande au gouvernement ou à la
Chambre de faire siéger une commission où il pourrait interroger
l'Auditeur sur l'administration financière, sur son rapport contenu dans
les derniers comptes publics, mais je ne vois pas pourquoi l'Auditeur viendrait
imposer ou dicter ou commenter une décision de politique
gouvernementale. Cela le placerait dans une situation extrêmement
délicate, et je serais surpris qu'il accepte de faire de telles
déclarations.
M. ROY (Beauce): M. le Président, la semaine dernière,
nous avons discuté deux projets de loi: l'un qui a permis à
Sidbec d'avoir des crédits additionnels, et l'autre qui a permis
d'amender la Loi de la Caisse de dépôt et placement du
Québec. A ce moment-là, le gouvernement a accepté de faire
venir à la commission parlementaire M. Jean-Paul Gignac, directeur
général de Sidbec, et M. Claude Prieur de la Caisse de
dépôt et placement, et nous avons pu leur poser différentes
questions sur tout ce qui avait trait aux projets de loi qui nous
étaient présentés.
Alors comme ce projet de loi concerne surtout la procédure
administrative, j'estime que c'est extrêmement important. Je pense que le
gouvernement devrait accepter notre demande et qu'il devrait justement
convoquer la commission parlementaire des Finances et faire comparaître
l'Auditeur de la province pour que nous puissions justement poser des questions
concernant la procédure, concernant le projet de loi.
M. GARNEAU: M. le Président, je redis ce que j'ai souligné
tout à l'heure: le projet de loi est une décision du
gouvernement, ce n'est pas une décision de fonctionnaires. Alors,
l'Auditeur serait placé dans une situation intenable où il
devrait commenter, en quelque sorte, le bien-fondé d'une loi
présentée par le gouvernement.
Je pense que ce serait intenable et cela ne se compare pas, à mon
humble avis, aux dépositions qui ont été faites par les
présidents des deux régies, Sidbec et la Caisse de
dépôt, puisque ce sont là des régies qui ont un
large degré d'autonomie et qu'il convenait, je pense, que la Chambre
puissse leur poser des questions sur l'administration à l'occasion d'un
amendement au projet de loi. Mais, par exemple, le président de Sidbec
ou le président de la Caisse de dépôt auraient
été dans une situation certainement difficile si on leur avait
demandé: Etes-vous d'accord avec le deuxième alinéa de
l'article 24? Ils auraient été dans une situation impossible. Ils
ont répondu au geste administratif mais pas à l'action
législative.
M. SAMSON: M. le Président, je pense que le ministre vient de
nous dire que, si nous pouvions convoquer l'Auditeur général de
la province, cela pourrait le mettre dans une position intenable. Ecoutez, nous
nous posons la question. Est-ce que ce n'est pas plutôt le gouvernement
qui serait dans une position intenable si nous posions des questions à
l'Auditeur général? Nous ne le saurons réellement pas tant
que nous ne pourrons pas être à même de poser certaines
questions.
Nous réitérons notre demande. Si le gouvernement est
sincère lorsqu'il nous dit que ce projet de loi a pour but
d'améliorer l'administration, nous serons peut-être à
même de poser des questions à l'Auditeur général,
à savoir, de quelle façon il travaillait dans le temps, et
qu'est-ce que cela pourrait améliorer? Nous savons que ce ne sont pas
les fonctionnaires qui soumettent le projet de loi. Nous savons que c'est le
gouvernement qui en est le responsable. Nous savons tout ça. Mais ce que
nous ne
savons pas c'est probablement ce que l'Auditeur général de
la province aurait à nous dire et nous tenons à ce que le
ministre donne une réponse favorable à notre demande afin qu'il
permette à tous les membres de l'Opposition de poser les questions qui
s'imposent. Ce projet, même s'il a 106 articles, j'ai bien l'impression
que personne d'entre nous n'a l'intention de le voter à la vapeur, de le
voter trop rapidement, parce qu'il est grave de conséquences. Si ce
projet de loi apporte réellement une nette amélioration dans
l'administration, nous serons d'accord. Mais qu'on nous le prouve d'abord! On
ne nous l'a pas encore prouvé, ce soir, et si on ne nous permet pas de
poser les questions qui s'imposent à l'Auditeur général,
probablement qu'on ne réussira pas à nous le prouver.
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, le député de
Rouyn-Noranda a parfaitement raison et nous aurons certainement l'occasion,
lorsqu'arriveront les articles concernant le vérificateur des comptes,
de demander des comptes au gouvernement. Qu'est-ce que cache le gouvernement en
voulant tenter d'empêcher le vérificateur de venir nous expliquer
les pouvoirs dont il a besoin pour être réellement efficace comme
employé de l'Assemblée nationale, puisqu'il relève de
l'Assemblée nationale dans ce projet de loi? C'est elle qui le
spécifie. Je pense que le ministre des Finances, tout à l'heure,
en réponse à certaines questions concernant l'Office de
planification et de développement a eu des blancs de mémoire, ou
des oublis. Il ne remémore pas, entre autres, l'article 2 de la loi
créant l'Office de planification et de développement ou
l'Office de planification et de publicité, comme il le dit
lui-même qui est de préparer, pour le compte du
gouvernement, des plans, des programmes et des projets de développement
économique. Or, où est la différence entre cette
responsabilité que le Parlement a donnée à l'Office de
planification, de préparer , pour le compte du gouvernement si je
suis bien au courant, c'est le même gouvernement des programmes de
développement économique et, par contre, la responsabilité
qu'on nous demande ici d'effectuer des recherches et de conseiller le
gouvernement en matière de politique économique?
Ce sont manifestement les mêmes responsabilités que le
gouvernement, qui prône une efficacité de ballon électoral,
veut confier à deux organismes distincts. Le résultat sera que
les deux organismes engageront des fonctionnaires, ce qui multipliera les
dépenses publiques. Ils puiseront à même les ressources au
niveau de l'université en matière de planification. Nous aurons
deux ministres qui auront dans leur tête deux orientations
différentes au point de vue du développement économique.
Les deux organismes se contrediront. Les deux organismes soumettront des
projets au gouvernement pour des politiques contradictoires. Où
est-elle, l'efficacité que le gouvernement prône? Où en
sommes-nous avec ces promesses et ces ballons que le gouvernement, le Parti
libéral, nous envoyait dans toute la province? Où est-elle, cette
efficacité? C'est cela que le ministre ne peut pas comprendre où
c'est à cela qu'il ne peut pas répondre depuis le début de
la veillée.
M. PAUL: II devrait y répondre.
M. MASSE (Montcalm): II ne daigne répondre ou il ignore comment
répondre, je ne sais, mais je crois que nous avons apporté
suffisamment d'exemples, depuis le début de cette discussion, pour que
le ministre profite de sa nuit pour réfléchir. Il doit
réfléchir à la portée de cet article, compte tenu
de l'ensemble du reste de l'administration. Pour sa suggestion, pour lui
permettre de bien dormir, je vais lui proposer un amendement qui va
certainement lui permettre de revenir d'une part à l'efficacité
qui est prônée par son maître, le député de
Mercier, et, d'autre part, lui permettre de se reposer pleinement, puisqu'il
aura trouvé là la clé de l'efficacité qu'il
cherche, pas la clé de l'électricité, mais la clé
de l'efficacité.
M. VEILLEUX: Vous étiez là, vous autres.
M. PAUL: Les enfants ne sont pas admis à parler après onze
heures.
M. MASSE (Montcalm): Est-ce que je peux attirer votre attention sur le
fait que certains députés du côté ministériel
hurlent, crient, jacassent?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ils jacassent, piaillent,
"chiâlent."
M. BERTRAND: C'est un veilleux.
M. VEILLEUX: Je porte mon nom à part cela.
M. MASSE (Montcalm): Je crois, M. le Président, qu'il serait
possible de lire l'article de cette façon. Le ministre a pour fonctions:
a) d'effectuer des recherches et de conseiller le gouvernement en
matière de politique économique, fiscale et budgétaire
pour autant qu'il n'est pas, par la loi, ou par arrêté du
lieutenant-gouverneur en conseil, assigné à un autre
ministère du gouvernement.
M. PAUL: Cela règle la question.
M. MASSE (Montcalm): Cela existe déjà dans la loi du
ministère des Finances, chapitre 64. Dans les fonctions qui en ont
été données et qui sont encore celles du ministre des
Finances, il est dit que le ministre des Finances a la surveillance et le
contrôle de la gestion de tout
ce qui se rattache aux affaires financières, aux revenus et
dépenses et aux comptes publics de la province, et qui n'est pas ou pour
autant qu'il n'est pas, etc. Voilà une loi qui donnait au ministre des
Finances des responsabilités dans le domaine des affaires
financières, des revenus et des dépenses et des comptes publics,
mais qui, par contre, évitait le dédoublement en
spécifiant dans le même paragraphe, que pour autant que ces
responsabilités n'existent pas déjà dans d'autres
ministères. Selon la réponse du ministre des Finances, nous
verrons quelle est sa véritable intention.
Est-ce qu'il préconise le projet de loi 55 au nom de
l'efficacité ou s'il le préconise au nom d'une main-mise totale
sur les autres organismes, régies du gouvernement, en matière de
développement ou de politique économique, fiscale ou
budgétaire?
S'il accepte l'amendement proposé, il aura l'efficacité
qu'il cherche, sans pour autant dépouiller ses collègues de leurs
responsabilités en matière économique, fiscale et
budgétaire.
Si, par contre, il rejette l'amendement, nous verrons bien ce que le
ministre cherche dans sa proposition comme ça, petite proposition, petit
pouvoir, 2 a): Effectuer des recherches. On verra ce qu'il cherche dans ses
recherches, c'est-à-dire contrôler l'ensemble des politiques
économiques, fiscales et budgétaires, sans se donner pour autant
le véritable instrument d'exécution et d'application de cette
politique que serait un ministère des Affaires économiques.
C'est là que l'on réalisera réellement de quel bord
penche le ministre. Du bord du tsarisme ou de celui de l'efficacité.
C'est là que l'on verra exactement comment le gouvernement entend
répondre à l'efficacité qu'il a prônée.
Je pense, M. le Président, que le ministre serait sage de dormir
sur la proposition qui lui est faite et de bien réfléchir, de
bien consulter ses collègues. Certes, il peut répondre tout de
suite: J'ignore l'amendement. Il serait peut-être mieux de consulter ses
collègues, même de les informer sur la portée de ce projet
de loi, parce que celui-ci n'a certainement pas été vu au
préalable par le ministre de l'Education, par le ministre du Revenu, par
le ministre des Affaires sociales et autres ministres qui se donnent des
responsabilités dans ces matières.
Je pense qu'il ferait mieux de consulter ses collègues pour voir
quelle sorte de pouvoir il doit se donner.
DES VOIX: Vote! Vote!
M. GARNEAU: M. le Président, en réplique à la
proposition d'amendement du député de Montcalm, je dirai tout
simplement que, si j'acceptais ou si je suggérais, à ce
côté-ci de la Chambre, d'accepter cet amendement, cela irait
à l'encontre de ce que disait le chef de l'Opposition tout à
l'heure; il avait peur qu'il y ait une répartition, une dispersion de
l'ensemble des activités...
UNE VOIX: A l'ordre!
M. BERTRAND: Ce n'est pas cela du tout.
UNE VOIX: Les propos du chef de l'Opposition disent que cet amendement
ne devrait pas être accepté.
M. BERTRAND: M. le Président, au contraire. Ce n'est pas cela du
tout que j'ai dit. J'ai dit qu'on multipliait...
M. GARNEAU: ... qu'on garde la multiplication.
M. BERTRAND: ... pas qu'on garde la multiplication, mais qu'on ait un
véritable agent de coordination. Mais, ce n'est pas ce qu'on fait avec
cela. On ne fait qu'ajouter un autre agent, dans le domaine de la recherche en
matière économique.
M. GARNEAU: Le député...
M. BERTRAND: Qu'on me laisser parler!
M. GARNEAU: ... me permet-il une question?
M. BERTRAND: Qu'on me laisse parler! Il prétend qu'il y a
contradiction...
M. GARNEAU: Est-ce que vous me permettez une question?
M. BERTRAND: Oui, allez-y!
M. GARNEAU: Est-ce que le chef de l'Opposition pourrait me citer
et j'aimerais avoir ceci comme information additionnelle s'il en existe
un, dans une loi actuelle, un article semblable à l'article 2 a),
où on demanderait à un organisme ou à un ministère
et surtout à un ministère, parce que ce sont les
ministères, par la voix de leur ministre, qui conseillent le
gouvernement d'effectuer des recherches et de conseiller le gouvernement
en matière de politique économique? Non pas de préparer
des plans, comme dit l'Office de planification...
M. BERTRAND: Mon collègue vient de les donner. J'étais
allé chercher les deux volumes, tantôt.
M. GARNEAU: C'est la même chose.
M. BERTRAND: Les Statuts de 1969, chapitre 16, loi qui a amendé
l'Office de planification, et les articles 67 et 68, chapitre 14 je
pense Loi créant l'Office de planification du Québec, loi
sanctionnée le 5 juillet 1968. Ne jouons pas sur les mots.
M. GARNEAU: Que le chef de l'Opposition nous lise les articles!
M. BERTRAND: Ne jouons pas sur les mots. M. GARNEAU: Qu'il nous lise les
articles!
M. BERTRAND: Relisez quelle a été l'intention du
législateur et l'intention de ceux qui ont participé aux
débats de l'Opposition sur le rôle de l'Office de planification.
Mais pourquoi a-ton voulu greffer à l'Office de planification cette
commission interministérielle sinon pour servir de véritable
coordination?
On est rendu à multiplier dans les gouvernements les bureaux de
recherche; on en est rendu dans tous les domaines à mettre en pratique
ces mots du fabuliste: "S'agit-il de délibérer? La cour en
conseillers foisonne. S'agit-il d'exécuter? On ne trouve plus personne."
C'est cela le manquement des gouvernements à l'heure actuelle.
Si l'on veut véritablement coordonner je l'ai dit tout
à l'heure et aucun de mes collègues ne s'y opposera que
l'on centralise tout le domaine de la recherche. Je ne sais pas ce que l'on
fait avec cela. On multiplie, on ajoute un nouvel agent de recherche dans le
domaine de la politique économique.
Et le député de Jonquière a dit tout à
l'heure en matière de politique fiscale: C'est le ministère du
Revenu qui a toujours été le conseiller du gouvernement.
M. GARNEAU: C'est le ministre des Finances qu'il a dit tout à
l'heure?
M. BERTRAND: Ah, oui! Ne jouons donc pas sur les mots, encore. Nous
aurons des conseillers au ministère du Revenu en matière de
politique fiscale et nous aurons également des conseillers au
ministère des Finances. Ce n'est pas tout de mettre cela dans des textes
de loi. Cessons donc de jouer avec des mots politiques. Parce qu'on met dans
une loi les mots "politique économique", on s'imagine qu'on a
réglé tous les problèmes. Mon collègue le dit avec
raison. J'ai déjà eu l'occasion de le dire. Ce n'est qu'une
question de mots. Le gouvernement actuel,son efficacité administrative?
Publicité! Cela paraîtra bien demain dans un discours: "politique
économique". M. le Président, comme jadis!
Quelques semaines après la prise du pouvoir en 1960,
rappelez-vous les titres de journaux: "Planification, planification
économique, planification démocratique". On a tellement
abusé de ces mots que le peuple n'y croit plus. Ce que la population
demande, c'est qu'à l'aide de tout ce que l'on possède comme
recherches dans tous les ministères et Dieu sait s'il y en a, au
ministre de l'Industrie et du Commerce, en particulier, au ministère des
Richesses naturel- les on cesse de chercher, qu'on prenne l'objet ou le
résultat des recherches qui ont été faites jusqu'à
présent et qu'on agisse, mais qu'on cesse de se payer de mots comme ceux
que l'on met dans le texte de la Loi de l'administration financière.
M. PAUL: M. le Président, le ministre des Finances pourrait-il
nous dire quelles objections pratiques il aurait à accepter l'amendement
proposé par l'honorable député de Montcalm aux fins
d'ajouter après le mot "budgétaire", le texte que l'on retrouve
dans les fonctions actuelles du ministre des Finances: "En autant qu'il n'est
pas, pour la loi ou par arrêté du lieutenant-gouverneur au
conseil, assigné à un autre ministère du
gouvernement."
M. RUSSELL: C'est clair.
M. PAUL: Est-ce parce que le ministre veut tout centraliser? Le ministre
aurait-il peur que d'autres de ses collègues du cabinet
établissent des politiques économiques? Quelle est la
justification du refus à cette proposition d'amendement?
Le député de Montcalm n'avait pas fini de lire
l'amendement que le ministre a dit: Non. Il ne s'est pas arrêté un
seul instant et nous sommes inquiets. Nous sommes réellement inquiets de
cette multiplication que l'on veut encore créer dans ce texte actuel
tel qu'il nous est présenté d'autres organismes
préposés à la recherche. Si le ministre prétend que
cela ne change rien à sa planification à lui, pourquoi
n'accepte-t-il pas cet amendement? En même temps, cela va protéger
ses collègues de l'exécutif et on n'entaillera pas la
responsabilité du ministre du Commerce et de l'Industrie.
M. MASSE (Montcalm): Ils sont drôlement silencieux, à part
cela.
M. PAUL: Ce que je ne comprends pas des membres de l'Exécutif
c'est qu'on se laisse manger la laine sur le dos comme cela.
M. MASSE (Montcalm): Ils sont bouche bée. Ils l'ignorent.
M. PAUL: Est-ce parce qu'on n'a pas analysé le projet de loi ou
parce que l'on craint de protester? La rédaction actuelle de cet article
2, tel que proposé par le ministre des Finances, n'est pas acceptable.
Nous, conscients du rôle que nous devons jouer dans l'Opposition, celui
de la vigilance, nous invitons le ministre des Finances à insérer
dans cet article 2 une partie du texte de loi que l'on retrouve à
l'article 2 de la loi du ministère actuel des Finances.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je suis heureux de
l'amendement qu'a proposé mon collègue de Montcalm.
L'attitude
que prendra le ministre à l'endroit de cette proposition va nous
indiquer dans quelle mesure il entend réaliser son objectif
d'efficacité administrative. Il va nous indiquer aussi quelle est
l'importance qu'il accorde à ses collègues et quelle est la
mesure d'autonomie qu'il entend garder aux divers ministres qui assument la
responsabilité de ministères à vocation
économique.
Tel que l'article que nous sommes à étudier se
présente, il apparaît très clairement que le ministre des
Finances cherche, par le truchement de ce petit paragraphe qui a l'air
insignifiant, à se constituer un empire qui lui permettra d'être
l'arbitre, d'être l'instance finale du gouvernement, d'être,
à toutes fins utiles, l'empereur devant lequel devra aller se prosterner
chacun des ministres qui aura besoin d'un budget.
Il veut devenir, M. le Président, le juge de toutes les
politiques que ses collègues pourront lui présenter.
Nous avons ici, devant nous, le ministre des Affaires sociales, nous
avons le ministre de l'Industrie et du Commerce. Il y a le ministre de
l'Education, il y avait tout à l'heure le ministre des Affaires
culturelles, j'en ai parlé parce que c'est très important. Nous
avons eu une brève apparition du ministre du Revenu aussi. Tous ces gens
sont intéressés, chacun à des responsabilités
spécifiques, chacun assume une fonction qui exige qu'il établisse
des priorités et que ces priorités soient établies
à l'intérieur du cadre du ministère, par les
spécialistes de la question et non pas simplement par des planificateurs
qui, quelque compétents qu'ils soient, ne seront quand même pas
capables de prendre la dimension de tous les problèmes qui se poseront
aux divers paliers de l'administration, dans les divers secteurs de
l'administration et dans chacun de ces ministères qui répondent
tous à des besoins spécifiques de la société dans
laquelle nous vivons.
Or, par ce petit paragraphe, insignifiant en apparence, le ministre
retire à ses collègues la liberté qui leur est
dévolue par la loi qui régit chacun de leurs ministères et
par la Loi de l'exécutif, le ministre leur retire cette
possibilité, cette habilité à penser eux-mêmes les
politiques du ministère, à en établir les
priorités, parce que, et j'y reviens, c'est très important, le
ministre nous a dit: Nous allons simplement faire de la recherche afin de
conseiller le conseil des ministres. Mais je vous l'ai dit tout à
l'heure, M. le Président, et je veux bien que le ministre l'entende
encore une fois, afin qu'il considère l'amendement qu'apporte mon
collègue, à partir du moment où il va mettre en branle,
où il va mettre en action sa machine de planification, son équipe
de recherchistes, cette équipe de fonctionnaires qui vont se superposer
aux autres et se substituer aux autres, à partir du moment où
cette machine va commencer à fonctionner, cela va devenir un rouleau
com- presseur et il ne sera plus possible aux autres ministères de se
faire entendre parce qu'on aura déjà tranché la question,
à partir des suggestions qui seront faites au ministre des Finances, par
son équipe de planificateurs.
Je lui ai posé tout à l'heure la question de savoir de
combien de personnes il allait devoir requérir les services. Il n'a pas
été capable de donner un ordre de grandeur, mais
immédiatement il m'a indiqué, par exemple et j'ai vu tout
de suite la faille, qu'il se proposait de demander au ministère
de l'Industrie et du Commerce une mutation de fonctionnaire, d'un fonctionnaire
très important à la recherche, au ministère de l'Industrie
et du Commerce.
Alors, est-ce que le ministre va procéder comme ça, va
commencer par aller vider tous les ministères des personnes qui sont
là et qui font de la recherche afin de définir les politiques du
gouvernement et d'établir les priorités?
Et ensuite, une fois qu'il aura fait cette razzia, comment
reconstituera-t-on, dans chacun des ministères, les équipes de
recherche nécessaires à la définition des politiques et
à l'établissement des diverses priorités?
M. le Président, je crois que l'amendement que propose le
député de Montcalm répond précisément
à l'objectif du ministre qui a présenté et qui parraine ce
projet de loi, l'efficacité administrative. Et s'il acceptait cet
amendement, il atteindrait son objectif et, en même temps, il garderait
sauve l'autonomie des ministres, ses collègues, dont il va devenir, si
on accepte ça comme ça, l'empereur tout-puissant, le seigneur
Nikolai Garnovitch devant lequel tout le monde va aller se prosterner pour
demander un virement, pour demander une subvention, pour demander des
allocations de ressources qui sont chaque année définies.
Le ministre va me dire: Ah! écoutez, vous n'avez pas lu la loi,
référez-vous à l'article no x, no y, etc. Non. Le ministre
ne pourra pas s'en tirer comme ça, tant et aussi longtemps qu'il n'aura
pas démontré ce qu'il nous a proposé cet
après-midi: Que du fait de l'adoption de ce projet de loi, tel qu'il
nous le propose, il améliore l'efficacité administrative au lieu
de l'alourdir. Tel que le projet de loi est présenté à
l'heure actuelle, il nous apparaît clairement qu'en superposant les
structures qu'il nous propose de créer à celles qui existent
déjà, non seulement on alourdit la machine, mais on risque de
l'écraser. Et, dans cet écrasement, on retrouvera en-dessous les
ministres qui auront perdu toute responsabilité, toute autonomie, qui
seront privés de leurs droits. J'en ai donné des exemples tout
à l'heure, et ç'a fait réfléchir le premier
ministre.
Le premier ministre n'est pas intervenu souvent dans le débat, il
n'intervient pas souvent. Il arrive assez souvent ceci, il survient, il lance
quelques cailloux comme un gamin, puis il se sauve. Là, il est devant
moi, je lui demande, à lui, je le demande au ministre des Finances,
dans l'optique de la pensée qui inspire l'amendement
proposé par mon collègue de Montcalm, comment le projet de loi,
précisément l'article que nous étudions actuellement,
garantit l'efficacité administrative. Est-ce qu'au contraire ça
ne risque pas d'alourdir la machine? Comment sera sauvegardée
l'autonomie de chacun des ministres? Comment ceux-ci pourront-ils maintenir
leur autorité au sein d'un ministère, travaillant avec des
fonctionnaires spécialisés, quand les décisions et les
suggestions de ces fonctionnaires seront contredites par les planificateurs au
service du ministre des Finances?
Je sais, pour ma part, M. le Président, qu'assumant la
responsabilité d'un ministère, comme celui de l'Education par
exemple le ministre de l'Education est là devant moi je
refuserais catégoriquement à mon collègue des Finances de
se donner un instrument de domination aussi puissant que celui qu'il veut se
donner.
Les ministres ne se rendent pas compte...
M. MASSE (Montcalm): Ils ne le réalisent pas.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...de ceci qu'ils vont devenir les petits
instruments, les petites marionnettes d'un super ministre, d'un tsar dont ils
auront par ailleurs à répondre des erreurs politiques sur le plan
électoral. C'est ça l'intention du ministre, c'est de se donner
tous les moyens de faire de la politique, de l'électo-ralisme et de ne
mettre l'accent que sur ce qui est politiquement rentable. C'est ça
l'attitude du ministre. Le ministre de l'Education peut se lever...
M. SAINT-PIERRE: Vous ne les effrayez pas, vous les faites rire.
UNE VOIX: A l'ordre!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): On va l'entendre tout à l'heure, le
ministre des Finances.
UNE VOIX: ...qu'il enseigne le désordre.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre de l'Education a des
responsabilités. Il a des responsabilités d'ordre administratif,
mais il n'a pas que ça. Il a des responsabilités d'ordre
pédagogique et il y a une relation étroite entre les moyens
financiers dont il dispose et la philosophie pédagogique qu'il peut
concevoir. Mais à partir du moment où il aura abdiqué ses
droits, vendu ses droits au tsar des Finances, il ne sera plus capable
d'établir entre ses politiques pédagogiques, sa philosophie
pédagogique et les moyens financiers que voudra bien lui attribuer le
tsar des Finances. C'est là tout le problème...
M. BOURASSA: Ce n'est pas du tout la même chose.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...M. le Président. La Chambre fatigue
le premier ministre, je le sais.
M. MASSE (Montcalm): Cela l'énerve.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je sais qu'après 5 heures du soir, il
est fatigué...
M. MASSE (Montcalm): C'est ça.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...et qu'il a hâte de rentrer pour
retrouver le confort de son foyer, prendre son appareil
téléphonique, appeler sa femme, ses enfants, etc. Moi, je suis
célibataire, je n'ai pas ces problèmes. M. le Président,
le premier ministre, cela le fatigue. Il dit: "Ce sont des
répétitions". La répétition, c'est la mère
de la science. Le premier ministre, sachant fort peu de l'administration, a
tout intérêt à écouter des gens qui le savent. Je
lui donne tout simplement cette petite leçon amicale, cordiale...
UNE VOIX: Entre nous.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...d'écouter des gens sérieux
qui ont de l'expérience et qui le mettent en garde contre
quelqu'un...
M. MASSE (Montcalm): Les instruments de trahison de son ministre.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...qui se voit déjà revêtu
du manteau du premier ministre. On va créer d'abord un pope et
après ça on aura le tsar qui succédera à l'autre.
C'est ce qui se prépare à l'heure actuelle, M. le
Président. Le ministre des Finances devrait considérer
l'amendement du député de Montcalm. J'irais plus loin que
ça, M. le Président. Je pense que si le ministre des Finances
était vraiment convaincu de son affaire, il retirerait ce projet de loi.
Il le retirerait.
M. GARNEAU: Vous avez dit tout à l'heure qu'il arrivait trop
tard.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): D'accord. J'ai dit tout à l'heure que
vous l'aviez présenté un peu trop tard, votre projet de
loi...
UNE VOIX: A cette session-ci.
M. LACROIX: C'est l'histoire du chat botté.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): II le retirerait, on le réexaminerait
et il consulterait un expert: le ministre des Affaires sociales.
Celui-là, c'est un expert! En chiffres, mais pas en tout. C'est un homme
très spécialisé, c'est un homme de chiffres. Lui, il
aurait fait un bon ministre des Finances.
Enfin, ce n'est pas mon problème. C'est la responsabilité
du premier ministre qui avait à choisir une équipe et qui l'a
choisie.
M. PAUL: II est pas mal seul.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): II en a laissé cinquante de
côté pour prendre dans nos rangs un nouveau membre, etc. Pour
faire une histoire brève, M. le Président, je suis sûr que
le ministre de la Santé serait capable, reconsidérant le projet
de loi à la lumière de ce que nous avons dit ce soir, de dire
à son petit collègue qui a moins d'expérience que lui
plus dans le patronage, mais moins dans l'administration . Je pense
que nous sommes sur un terrain glissant.
M. PAUL: C'est cela.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Au lieu d'atteindre cet objectif
d'efficacité administrative, au contraire, nous créons un
mécanisme qui broiera les autres, qui les écrasera et qui
empêchera tous les ministres qui ne sont pas présents ce soir
d'assumer pleinement leurs responsabilités, à partir du ministre
de l'Education.
Le ministre de l'Education a hâte de se lever. J'ai hâte de
l'entendre aussi. Je sais très bien, cependant, que, déjà,
dans la préparation de son budget, il a des difficultés à
concilier les propositions et les suggestions qui lui sont faites par ses
fonctionnaires, particulièrement par le premier de ses sous-ministres,
avec les impératifs budgétaires qui lui sont imposés par
celui qui déjà se sent devenir le tsar du gouvernement.
M. le Président, la proposition du député de
Montcalm me paraît vraiment sensée. Elle s'articule très
bien au discours qu'il a prononcé cet après-midi dans lequel il a
vraiment une réforme de l'administration et non pas une
"réformet-te"...
M. LACROIX: Allez-vous l'appuyer à la chefferie?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...comme l'est le projet de loi.
M. le Président, le député des Iles-de-la-Madeleine
est revenu.
M. SAINT-PIERRE: C'est un meilleur souvenir.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Qu'il soit gentil...
M. LACROIX: C'est parce que vous allez là, tous les deux!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je sais que le député des
Iles-de-la-Madeleine aime l'éloquence. Nous allons continuer. M. le
Président, je trouve que...
M. LACROIX: Je trouve ridicule de vous entendre pérorer pour
rien!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non. Le député des
Iles-de-la-Madeleine admire la langue française. Cela lui sert de
leçon à un double titre : cela lui sert de leçon de
français et cela lui sert en même temps de leçon
d'administration. Alors, j'atteins un double but.
M. BERTRAND: Et latine parfois!
M.TREMBLAY (Chicoutimi): A part cela, un peu de latin de temps en temps,
tout en blaguant, M. le Président.
M. LACROIX: Si les professeurs sont comme vous deux, ce n'est pas
riche.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président je disais donc, avant
que je ne fusse interrompu les imparfaits du subjonctif, c'est pour le
premier ministre avant qu'on ne m'interrompit...
M. LACROIX: Dans votre cas, vous feriez mieux de dire: Avant qu'on ne
m"'interrompis-se"!
M. PAUL: M. le Président, est-ce que le mot "interrompisse" est
parlementaire?
M. LACROIX: On sait qu'il ne rapportera pas grand-chose!
M. LE PRESIDENT (Leduc): A l'ordre, s'il vous plaît!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je disait donc, avant
que ne se fissent entendre tous ces bruits, que la proposition du ministre ou
plutôt du député de Montcalm enfin, remarquez que
c'est une habitude qui reviendra vite avec la réalité
devrait être reconsidérée attentivement par le ministre des
Finances. La nuit porte conseil.
Je pense qu'une petite conversation de cinq ou dix minutes avec son
collègue des Affaires sociales lui permettrait de réexaminer
l'article qu'il nous propose d'adopter et d'examiner l'amendement de mon
collègue de Montcalm, parce que nous lui avons démontré
à l'envie, ce soir, qu'il s'est engagé sur une fausse route, sur
une voie sans issue et que son objectif d'efficacité, non seulement il
ne peut pas l'atteindre, mais qu'au contraire, il va rendre encore plus lourde,
plus difficile à manoeuvrer la machine administrative qui,
déjà, écrase le premier ministre.
M. LEVESQUE: M. le Président, je profite de l'occasion de prendre
la parole, alors que le député de Chicoutimi vient de s'asseoir.
Je ne l'ai pas interrompu, je n'ai pas plus interrompu le chef de l'Opposition,
ni les autres opinants, y
compris le député de Montcalm. Maintenant que cette
tempête semble s'apaiser pour quelques instants, vous me permettrez, M.
le Président, bien modestement, de donner mon opinion. Je suis
extrêmement surpris ou je devrais l'être, je suis extrêmement
étonné de voir jusqu'à quel point on peut dramatiser une
situation, jusqu'à quel point on peut aller dans la longueur des
discours pour s'opposer simplement à un mot, apparemment, dans tout
cela. Le ministre des Finances aura pour fonction d'effectuer des recherches et
de conseiller le gouvernement en matière de politique économique,
fiscale et budgétaire. Il semble que ce soit là le noeud de la
question pour l'Opposition officielle. C'est cette phrase qui a soulevé
toute cette tempête qui est évidemment une tempête dans un
verre d'eau.
M. le Président, que l'on proteste ou que l'on ne proteste pas,
il n'en reste pas moins vrai que c'est là-dessus qu'on s'est
chicané...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... que nous avons découvert...
M. LEVESQUE: ... toute la soirée. On ne voudrait pas que le
ministre des Finances conseille le gouvernement, effectue des recherches. M. le
Président, je suis très heureux de ce que plus de ministres
pourront effectuer des recherches, de ce que plus de ministres pourront
conseiller le gouvernement. C'est une excellente chose, en matière
économique en particulier. Ah, c'est le chef de l'Opposition qui a
manifesté sa crainte vis-à-vis des pouvoirs de l'Office de
planification et de développement du Québec...
M. BERTRAND: C'est un exemple...
M. LEVESQUE: Un exemple. Prenons l'exemple qui a fait qu'il s'est
emporté lorsqu'il a pensé qu'on mettait en danger les pouvoirs de
l'Office de planification et de développement du Québec. M. le
Président, je suis un témoin particulièrement
scandalisé de voir que c'est le chef de l'Opposition qui avait justement
entre les mains cet Office de planification et de développement du
Québec, qui avait comme responsabilité de voir à
l'application, par exemple, du plan de développement de l'Est du
Québec. Tous les pouvoirs étaient entre les mains de l'office, au
point de vue de la planification et du développement, tout cela
relié au développement de l'Est du Québec. Qu'est-ce qu'on
a fait de 1966, à partir de la signature de l'entente, jusqu'en 1970?
Qu'est-ce que l'office de planification a fait alors qu'on avait tous les
pouvoirs.
On a refusé d'agir. Le gouvernement actuel veut agir. C'est
là qu'est la différence; et la preuve, c'est que depuis que le
gouvernement actuel est au pouvoir, nous nous sommes servis des pouvoirs qui
étaient à la disposition du gouvernement, les pouvoirs
budgétaires en particulier, pour que ces plans deviennent
réalité.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ce n'est pas ce que le ministre...
M. LEVESQUE: M. le Président, la population du
Québec...
M. MASSE (Montcalm): Est-ce que le ministre me permettra une
question?
M. LEVESQUE: M. le Président...
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, est-ce que le ministre me
permettra une question?
DES VOIX: A l'ordre!
M. MASSE (Montcalm): Me permettriez-vous une question?
M. LEVESQUE: On posera les questions à la suite...
M. MASSE (Montcalm): D'accord.
M. LEVESQUE: ... de mon intervention que je veux brève, concise,
précise et à point.
M. le Président, ce que le gouvernement actuel veut, c'est de
procéder à l'action. Quant à être conseillé,
qu'il le soit par le ministre des finances, en plus du ministre de l'Industrie
et du Commerce, en plus du ministre des Richesses naturelles, en plus de tous
les ministres qui ont, par exemple, des ministères à vocation
économique, tant mieux!
Qu'il y ait au sein du ministère de l'industrie et du Commerce
une section qui s'appelle de recherches, ou d'études en matière
de conjoncture économique, que cela passe au ministère des
Finances, mais qu'est-ce que cela peut changer dans l'action gouvernementale?
Que le ministre des Finances soit mieux éclairé,
éclairé de plus près, particulièrement en vue des
discussions d'ordre constitutionnel, d'ordre fiscal, dans les relations entre
le gouvernement central et le gouvernement du Québec, est-ce qu'on a
à redire à cela? Qu'est-ce qu'on a à redire à
cela?
Il n'y a dans cette loi, qu'une expression de la volonté du
gouvernement du Québec...
M. MASSE (Montcalm): Le poisson vient de mordre.
M. LEVESQUE: ... d'être le plus logique possible, le plus efficace
possible et de mettre à la disposition du gouvernement le plus
d'instruments possibles pour permettre une action, la plus immédiate
possible, la plus logique, la plus coordonnée possible.
M. le Président, toute cette tempête, à
laquelle nous avons assisté ce soir, autour de quoi, encore une
fois? Autour du pouvoir du ministre de surveiller, contrôler et
gérer tout ce qui se rattache aux affaires financières du
gouvernement et qui n'est pas assigné...
M. PAUL: ... M. le Président...
M. LEVESQUE: On a parlé... et c'est celui qui est debout qui en a
parlé.
M. MASSE (Montcalm): L'article 2...
M. LEVESQUE: Qu'on retourne...
M. MASSE (Montcalm): ... l'article 2-a)...
M. LEVESQUE: Qu'on retourne au journal des Débats et on verra que
c'est celui qui vient de se lever...
M. MASSE (Montcalm): On est en discussion à l'article 2-a)...
M. LEVESQUE: M. le Président, est-ce que le député
peut se lever et dire qu'il ne s'est pas référé à
cet article?
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, le ministre vient de nous
dire que ladite "tempête" je la place entre guillements a
été soulevée par un article, et ce n'est pas cet article
qui est dans la loi.
M. LEVESQUE: M. le Président... M. MASSE (Montcalm):
Remarquez...
M. LEVESQUE: ... je demande au député de Montcalm...
M. MASSE (Montcalm): ... que l'article qu'il cite...
M. LEVESQUE: Je ne pose qu'une question.
M. MASSE (Montcalm): ... a été apporté en exemple,
peut-être; mais ce n'est pas cet article qui a soulevé la
discussion.
M. LEVESQUE: Est-ce que le député de Montcalm
prétend qu'il n'a pas cité cet article et qu'il n'a pas
référé à cet article?
M. MASSE (Montcalm): Cité, oui, mais soulevé la
discussion, non!
DES VOIX: A l'ordre!
M. LEVESQUE: C'est justement parce que le député de
Montcalm...
M. MASSE (Montcalm): Retournons à ce que vous venez de
dire...
M. LEVESQUE: ... s'est référé à cet article,
que je profite de l'occasion...
M. MASSE (Montcalm): Ah, bon! Cela se replace.
M. LEVESQUE: ... pour demander ce qui faisait que le
député de Montcalm s'opposait à cette fonction
particulière du ministre des Finances de surveiller, contrôler et
gérer tout ce qui se rattache aux affaires financières du
gouvernement et qui n'est pas assigné par la loi ou par
arrêté du lieutenant-gouverneur en conseil...
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, on ne s'est jamais
opposé à cela.
M. LEVESQUE: ... au Conseil du trésor, à un autre
ministère ou au vérificateur général.
M. MASSE (Montcalm): C'est dans l'article de la loi actuelle. C'est
l'article de la loi actuelle, on ne s'est pas opposé à cela. On
s'oppose aux articles du projet de loi que l'on nous présente, on ne
s'oppose pas au chapitre 64 de la Loi du ministère des Finances qui a
été votée il y a déjà plusieurs
années.
DES VOIX: A l'ordre!
M. LEVESQUE: M. le Président, j'ai écouté avec
beaucoup de patience...
M. MASSE (Montcalm): Parlez de choses...
M. LEVESQUE: ... les efforts de rhétorique du
député de Montcalm. Je l'ai écouté avec patience
et, à certains moments, cela prenait beaucoup de patience. Je dirai
simplement sur cette objection-là que, pour respecter...
M. MASSE (Montcalm): Ce n'est pas sur cet article-là.
M. LEVESQUE: ... l'ordre des travaux de la Chambre, j'attendrai que
l'article 2e) soit appelé pour donner mes impressions sur ce paragraphe,
toujours dans le respect des règlements. Je crois pourtant avoir le
droit, à ce moment-ci, de référer à cet article
parce que des opinants antérieurs l'ont fait, tout
particulièrement le député de Montcalm. Tout de
même, je suis très soucieux du respect des règlements et je
m'en tiendrai à l'article 2a).
Pour résumer ma pensée, je crois que ce paragraphe ne
consiste qu'à permettre au ministre d'effectuer des recherches et de
conseiller le gouvernement en matières économique, fiscale et
budgétaire, et qu'il n'aurait jamais dû provoquer une telle
indignation ou prétendue indignation de nos honorables amis d'en face.
Il n'y avait rien là, en effet, pour fouetter un chat, sauf de permettre
au ministre des Finances de
remplir plus efficacement et plus entièrement les fonctions qui
lui sont confiées, le rôle qu'il doit jouer au sein de
l'administration gouvernementale.
Le ministre des Finances a des responsabilités
particulières. On sait jusqu'à quel point ces
responsabilités sont importantes, parce qu'elles sont évidemment
reliées à tous les budgets de tous les ministères du
gouvernement. On sait fort bien que, dans le passé, c'était le
ministre des Finances qui avait à accepter ou à refuser tel ou
tel budget, sans oublier que l'enveloppe globale de tous les budgets des
ministères était encore la responsabilité du ministre des
Finances. On verra que, dans la loi présente, c'est au Conseil de la
trésorerie un conseil des ministres qu'est confiée
cette responsabilité. On peut s'attendre que le ministre des finances
sera encore là. Or, on voudrait lui refuser d'être le mieux
renseigné possible afin de renseigner le gouvernement et de le
conseiller en matière économique.
On ne peut pas dissocier l'économique, le budgétaire et le
fiscal. Comment le faire pour atteindre réellement les buts qui sont les
nôtres, c'est-à-dire une administration efficace?
Est-ce qu'on voudrait tellement compartimenter l'administration
gouvernementale que le ministre des Finances ne pourrait pas conseiller en
matière économique, alors qu'il a des responsabilités
aussi lourdes au point de vue fiscal et budgétaire?
M. le Président, c'est l'ABC d'une administration et de la
gestion gouvernementale. Le ministre des Finances est celui vers lequel on se
tourne pour savoir exactement quelle est la situation, pour prendre le pouls de
la situation économique de la province. Lorsque l'on veut, par exemple,
savoir si on peut se permettre d'aller un peu plus loin, soit dans le domaine
économique, soit dans le domaine social, soit dans le domaine culturel,
on se tourne vers le ministre des Finances. Eh bien, lui doit être
conscient et le premier renseigné sur la situation économique. Il
doit avoir le pouls de l'économie du Québec, et c'est justement
dans cette perspective, dans ce contexte, que le ministre des Finances apporte
cette loi.
C'est pourquoi ses collègues sont tellement heureux de...
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Cela va être un petit peu sorcier.
M. LEVESQUE: ... voir que d'autres instruments seront mis à sa
disposition et que nous lui accordons par cette loi des pouvoirs qui le
rendront encore plus efficace et qui lui permettront de conseiller davantage et
encore mieux le gouvernement, qui se veut, lui, le plus efficace possible.
M. PAUL: M. le Président, nous avons écouté avec
beaucoup d'intérêt le ministre de l'Industrie et du Commerce,
leader du gouvernement. Ses remarques étaient très
intéressantes. Vous trouvez ça curieux? M. le Président,
il y en a qui trouvent curieux qu'à un moment donné il faut que
nous soyons assez honnêtes pour dire ce que nous pensons.
Il y en a qui n'ont pas le courage de dire ce qu'ils pensent, mais, nous
nous sommes assez honnêtes pour dire ce que nous pensons. On a
écouté le ministre, ça me fait penser à un avocat
qui défendrait un prévenu devant la cour, parce qu'il aurait
été accusé de tentative de vol. Et, dans la
défense, son procureur passerait son temps à dire que
c'était un bon garçon.
M. BERTRAND: Une preuve de caractère.
M. PAUL: Oui, ce serait un gros argument. Ce que le ministre nous a dit
était intéressant, mais il n'a pas plaidé la cause, parce
que la cause qu'il aurait dû plaider, c'est justement celle que lui a
proposée le député de Montcalm. Le ministre a
oublié de discuter de l'amendement et, à ce moment-là,
s'est référé à l'article e). Il n'a pas commis un
gros péché, et, dans les circonstances, on va utiliser le
même petit péché qu'il a commis pour lui suggérer de
prendre les mots qui figurent au paragraphe e) et qui se lisent ainsi, à
partir de la 3e ligne." Et qui n'est pas assigné par la loi ou par
arrêté du lieutenant-gouverneur en conseil au Conseil du
trésor à un autre ministère. Point.
On demande de prendre ce texte-là et de l'ajouter à
l'article 2 a), après les mots "et budgétaire". C'est tout ce
qu'on demande et on nous reproche de faire une tempête dans un verre
d'eau.
Si le gouvernement n'a rien à cacher et s'il ne veut pas
établir un empire au sein de l'Exécutif, qu'il accepte notre
suggestion. Nous allons être encore plus précis, M. le
Président. Nous irions jusqu'à suggérer au gouvernement de
faire disparaître le mot "économique" à la troisième
ligne de l'article 2 a). Pourquoi? Parce que nous avons d'autres organismes
gouvernementaux qui ont cette tâche: l'Office de planification, entre
autres.
Que le ministre des Finances oriente le gouvernement dans une politique
économique, nous n'y voyons pas d'objection, mais que le ministre des
Finances, pour faire ses recommandations, se serve de l'expérience
acquise et des recherches menées par des organismes spécialement
constitués à cette fin. C'est pourquoi nous donnons une
alternative au gouvernement. Je crois que le leader du gouvernement, lui qui
comprend quelque chose, saisirait facilement toute la nécessité
de notre amendement s'il consentait à inscrire à l'article 2 a)
ce qu'on retrouve à l'article 2 e). A ce moment-là, je crois que
le ministre des Finances sera protégé, que ça n'affectera
en rien la politique économique du gouvernement et que nous
éviterons la création d'un empire au sein de
l'Exécutif.
Dès neuf heures ce soir, si on avait pris le temps
d'écouter les amendements qui ont été
suggérés, cet article-là et combien d'autres auraient
été adoptés. Peut-être, serions-nous rendus à
l'article 50. Mais non, un entêtement inexplicable. Si cette
phraséologie est excellente à l'article 2 e), pourquoi ne pas
l'accepter à l'article 2 a)?
En acceptant cet amendement, je crois que le gouvernement n'innovera
pas; au contraire, il va respecter les organismes qui ont été
créés et qui agissent actuellement dans le domaine de
l'économie. Le ministre des Finances "qui trop embrasse mal
étreint" ne sera pas exposé à entrer en conflit
avec d'autres ministères à caractère économique.
Cette planification effective qu'appelle le premier ministre sera
réellement ou possiblement vécue d'une façon beaucoup plus
facile parce que plus rationnelle. Elle répondra à un besoin,
nous en convenons, mais non pas au détriment de certains
ministères déjà constitués.
M. GARNEAU: M. le Président, quoique je demeure convaincu qu'il
n'y a pas, dans d'autres lois organiques créant des
ministères...
M. PAUL: N'en créez pas s'il n'y en a pas.
M. GARNEAU: Laissez-moi donc terminer. ... il n'y a pas d'autre loi
organique qui donne à un ministre cette fonction. Je suis quand
même disposé à faire la suggestion suivante: si les trois
partis d'Opposition sont d'accord, on pourrait suspendre l'étude de
l'article 2. Je vais revoir les conseillers juridiques. Je vais en
consulter...
M. PAUL: Enfin!
M. MASSE (Montcalm): C'était donc simple!
M. GARNEAU: M. le Président, je ne voudrais pas que l'Opposition
crie trop rapidement victoire. Je pense que nous avons suffisamment d'articles
à étudier pour que nous...
M. PAUL: Ne regardez pas l'horloge.
M. GARNEAU: ... ne puissions pas étudier les 106 ce soir.
M. MASSE (Montcalm): Ce n'est pas l'horloge qu'on regarde, c'est le
texte de loi.
M. PAUL: Mais l'horloge...
M. MASSE (Montcalm): Qu'importe, c'est le texte de loi. L'horloge, c'est
secondaire.
M. BOURASSA: Ah! le député de Montcalm fait son petit
démagogue tout le temps.
M. MASSE (Montcalm): Non, non! M. le Président, pour quelle
raison...
M. LE PRESIDENT (Leduc): A l'ordre! L'honorable ministre des
Finances.
M. GARNEAU: Si on devait approuver tous les articles ce soir, il
faudrait quand même revenir un autre jour afin de me laisser quelques
heures pour consulter. C'est pourquoi je suggère, si cela convenait
à l'Opposition, que nous passions aux autres articles, et nous pourrions
revenir là-dessus un autre jour lorsque nous reprendrons l'étude
en comité plénier du projet de loi numéro 55.
M. PAUL: M. le Président, c'est tellement intéressant de
la part du ministre. Nous ne désespérons pas qu'il rencontre son
chemin de Damas et que la lumière se fasse. Nous serions prêts
à nous rendre à la suggestion du ministre, et du même coup,
dans un geste de collaboration exceptionnel, nous serions prêts à
adopter les articles 3, 4 et 5 en autant que nos amis...
M. BOURASSA: Pas plus que ça?
M. PAUL: ... du Ralliement créditiste et du Parti
québécois acceptent.
M. LEVESQUE: II n'y a pas d'objection, même aux articles 6, 7, 8,
9 et 10.
M. PAUL: L'article 6, ah! non. C'est du droit...
M. MASSE (Montcalm): A l'article 6, nous avons plusieurs questions ou
propositions à faire. Quant à nous, nous sommes d'accord pour
adopter les articles 3, 4 et 5. Je profite du fait que je suis debout pour
remercier le ministre d'avoir enfin compris qu'il y avait des dangers, et
d'accepter d'étudier de nouveau son projet de loi pour voir s'il peut
être amélioré afin d'assurer l'efficacité
prônée par le gouvernement.
M. LE PRESIDENT (Leduc): Messieurs, si je comprends bien, l'article 2,
en totalité, est suspendu. Les articles 3, 4 et 5 sont
adoptés.
M. PAUL: Vous avez bien compris.
M. BERTRAND: Vous pourrez faire rapport de l'état de la
question.
M. LEVESQUE: M. le Président, je suggère qu'on fasse
rapport de l'état de la question.
M. LEDUC (président du comité plénier): M. le
Président, j'ai l'honneur de faire rapport que votre comité n'a
pas fini de siéger et demande la permission de siéger à
nouveau.
M. LAVOIE (président): Quand siégera-t-il? A une prochaine
séance.
M. LEVESQUE: M. le Président, j'aimerais appeler l'article 6.
Projet de loi no 59 Deuxième lecture
M. BERTRAND: Est-ce la Loi sur les mines? Je n'ai pas d'objection, au
contraire, mais le chef du Ralliement créditiste m'a dit qu'un de ses
députés voudrait faire un discours en deuxième
lecture.
M. LEVESQUE: Le ministre également. Je m'excuse auprès du
chef du Ralliement créditiste, j'avais parlé, justement, au
ministre des Richesses naturelles et il avait, lui aussi, un discours de
prêt. Il a accepté de le faire en commission avant de commencer.
Si le député décidait de faire la même chose, cela
nous permettrait d'adopter la deuxième lecture et nous permettrait
ensuite, comme au ministre, d'intervenir à la commission.
M. SAMSON: M. le Président, évidemment, nous sommes
toujours prêts à collaborer. Je pense que nous pourrions faire la
même chose. Le député qui a une intervention de
préparée pourrait la faire à l'article 1. Peut-être
pourrions-nous aussi, étant donné qu'il passe minuit, changer les
calendriers? Nous sommes rendus au 16 décembre.
M. BERTRAND: Oui.
M. MASSE (Montcalm): Ce serait de l'efficacité.
M. SAMSON: Ce serait vraiment de l'efficacité administrative.
M. PAUL: C'est une planification logique.
M. SAMSON: M. le Président, nous sommes d'accord.
M. LEVESQUE: Alors, la deuxième lecture.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.
M. LAURIN: Nous acceptons également de faire notre intervention
en commission.
M. LEVESQUE: Merci.
M. LE PRESIDENT: Cette motin de deuxième lecture est-elle
adoptée?
M. PAUL: Adopté, M. le Président. M. LE PRESIDENT:
Adopté.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill Second
reading of this bill.
M. LEVESQUE: M. le Président, je suggérerais que ce projet
de loi soit déféré à la commission parlementaire
des Richesses naturelles...
M. BERTRAND: A quelle heure?
M. LEVESQUE: ...qui pourrait siéger demain après l'ordre
du jour, vers 11 heures 15 ou 11 heures 30 à la salle 81-A si elle est
libre. Si elle ne l'était pas, à la salle 91-A.
M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
M. PAUL: M. le Président, nous acceptons. Nous en donnons
même plus que ce que le leader parlementaire veut avoir. Nous serions
même prêts à accepter le texte de l'article 404 pour que la
commission puisse siéger pendant que la Chambre est en
séance.
M. LEVESQUE: D'accord. M. le Président, je propose l'ajournement
de la Chambre à demain...
M. BERTRAND: A ce matin.
M. LEVESQUE: A ce matin, 10 heures 30.
M. LAURIN: Est-ce qu'on pourrait savoir quels projets de loi seront
présentés ce matin?
M. LEVESQUE: Nous pourrons procéder ce matin à
l'étude des projets de loi qui sont inscrits au nom du ministre de la
Santé, peut-être précédés par les projets de
loi au nom du ministre des Affaires municipales.
M. BERTRAND: Gaspé, Percé.
M. LEVESQUE: D'abord l'aéroport international.
M. PAUL: La Communauté urbaine de Québec.
M. LEVESQUE: Pardon?
M. PAUL: La Communauté urbaine de Québec.
M. LEVESQUE: La Communauté urbaine de Québec,
Percé, Gaspé. Ces bills-là.
M. BERTRAND: D'accord.
M. LEVESQUE: Par la suite, si le ministre de la Santé est revenu
et s'il est libre, on pourra procéder à l'étude des
projets de loi inscrits au nom du ministre de la Santé.
M. LE PRESIDENT: La Chambre ajourne ses travaux à 10 h 30, ce
matin.
(Fin de la séance: 0 h 7)