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(Quinze heures six minutes)
M. LAVOIE (président): Qu'on ouvre les portes. A l'ordre,
messieurs!
Affaires courantes. Présentation de pétitions. Lecture et
réception de pétitions. Présentation de rapports de
comités élus.
Commission permanente des Finances
M. HOUDE (Limoilou): M. le Président, la commission permanente
des Finances a l'honneur de soumettre à votre honorable Chambre son
deuxième rapport.
Votre commission a décidé de rapporter avec une
modification le bill suivant: bill 57, Loi modifiant la charte de la Caisse de
dépôt et placement du Québec.
Et, sans modification, le bill suivant: bill 58, Loi modifiant la loi
concernant l'établissement par Sidbec d'un complexe sidérurgique
intégré.
M. LE PRESIDENT: Ce rapport sera-t-il approuvé?
Approuvé.
Commission des bills privés et publics
M. BLANK: M. le Président, la commission des bills privés
et des bills publics a l'honneur de soumettre à votre honorable Chambre
son huitième rapport.
Votre commission a décidé de rapporter avec des
amendements les bills suivants: bill 181, bill 186 et bill 244.
M. LE PRESIDENT: Ce rapport sera-t-il approuvé?
M. PAUL: Approuvé. M. LAURIN: Approuvé.
M. LE PRESIDENT: Approuvé. Présentation de motions non
annoncées.
Commission des Affaires sociales
M. LEVESQUE: M. le Président, qu'il me soit permis de faire
motion pour que la commission permanente suivante soit instituée et
ajoutée à la liste des commissions permanentes de
l'Assemblée nationale: 29e) commission des Affaires sociales; que
messieurs Bois, Boivin, Bossé, Castonguay, Cloutier (Montmagny),
Fortier, Goldbloom, Harvey (Jonquière), Laurin, Quenneville et
Théberge forment ladite commission; que le quorum en soit fixé
à six et que M. Fortier en soit le président. Cette commission
remplacera la commission de la Santé et la commission de la Famille et
du Bien-Etre social, après la proclamation de la Loi du ministère
des Affaires sociales.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. PAUL: Je voudrais signaler au leader du gouvernement et à
vous-même, M. le Président, des modifications qui devront
s'imposer pour référence au texte du procès-verbal
numéro 1, du mardi 9 juin, considérant que nous y voyons la liste
des différentes commissions et que l'on y retrouve justement ces
deux-là qui deviennent fusionnées par suite de l'adoption de la
Loi des Affaires sociales. Là où cela devient nécessaire,
il y aurait peut-être lieu de faire les corrections qui s'imposent.
M. LEVESQUE: D'autant plus que, M. le Président, malgré la
justesse des remarques du leader parlementaire de l'Opposition officielle, la
session achève et que c'est sessionnel. Dès le début de la
prochaine session, nous devrons reconstituer toutes les commissions.
M. LE PRESIDENT:
Présentation de bills privés. Présentation de bills
publics.
M. LEVESQUE: C.
Projet de loi no 64 Première lecture
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires culturelles propose
la première lecture de la Loi modifiant la loi de l'admission à
l'étude de professions et d'autres dispositions législatives.
L'honorable ministre des Affaires culturelles.
M. CLOUTIER (Ahuntsic): M. le Président, en vertu de ce projet,
il ne sera plus nécessaire d'être citoyen canadien pour exercer
certaines professions. Il suffira aux candidats de s'engager à demander
cette citoyenneté dans les délais légaux minimums et de
posséder une connaissance d'usage du français.
L'article 1 change le titre de la Loi de l'admission à
l'étude de professions, qui devient la Loi de l'admission à
l'étude et à l'exercice de professions.
L'article 2 ajoute à cette loi un article 4 prévoyant
qu'une corporation mentionnée à l'annexe ne pourra refuser
d'admettre un candidat simplement pour le motif qu'il n'est pas citoyen
canadien, s'il a été légalement admis au Canada pour y
demeurer en permanence, s'il s'engage à demander la citoyenneté
canadienne dans les délais légaux minimums, s'il est
domicilié au Québec et s'il possède une connaissance
d'usage de la langue française.
Par ailleurs, le gouvernement pourra rendre cet article applicable
à d'autres corporations en
adoptant un arrêté en conseil qui doit être
publié dans la Gazette officielle du Québec, au moins trente
jours avant son adoption.
Quant au nouvel article 5 ajouté par l'article 2 du projet, il
permet à une corporation à laquelle la loi s'appliquera de
suspendre toute personne qui ne demandera pas la citoyenneté canadienne
à l'expiration des délais légaux minimums.
Les articles 3 et 6 du projet apportent des modifications de concordance
à la Loi médicale. L'article 7 apporte des modifications de
concordance à la Loi de pharmacie. Il permet en outre au conseil du
Collège des pharmaciens de reconnaître l'équivalence des
études suivies par un candidat à l'admission, de même que
l'équivalence du stage qu'il a effectué et des examens qu'il a
subis. Les articles 8 et 9 apportent des modifications de concordance à
la Loi des optométristes et des opticiens et à la Loi des
opticiens d'ordonnance.
L'article 10 permet au bureau des gouverneurs du Collège des
médecins vétérinaires de reconnaître
l'équivalence d'un diplôme d'un candidat à l'exercice de la
médecine vétérinaire et l'article 11 apporte une
modification de concordance à la Loi des médecins
vétérinaires.
Les articles 12 et 13 apportent des modifications de concordance
à la Loi des agronomes. L'article 14 fait de même pour la Loi des
architectes. Les articles 15 à 17 pour la Loi des ingénieurs.
L'article 18 pour la Loi des ingénieurs forestiers. L'article 19 pour la
Loi des chimistes professionnels et l'article 20 pour la Loi des comptables
agréés. L'article 21 protège les droits acquis des
personnes qui ont déjà été admises par une
corporation au moment où l'article 4 de la Loi de l'admission à
l'étude et à l'exercice de professions devient applicable
à la corporation.
Je vous remercie, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT : Première lecture de ce bill. First
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture à une prochaine
séance.
Déclarations ministérielles.
L'honorable ministre des Affaires municipales.
Nouvelle industrie en Gaspésie
UNE VOIX: Encore!
M. TESSIER: M. le Président...
M. CARDINAL: Qui vous a mal cité?
M. TESSIER: Attendez. M. le Président, dans le cadre de
l'opération déblocage du plan d'aménagement de l'Est du
Québec, il me fait plaisir d'annoncer à cette Chambre la
création d'une nouvelle industrie dans la Gaspésie, plus
précisément dans le comté de Gaspé-Nord. Il s'agit
d'un projet qui était en suspens depuis plusieurs mois. En ayant
été saisi il y a moins d'une semaine, je suis entré
immédiatement en contact avec le ministre fédéral de
l'Expansion économique régionale l'honorable Jean Marchand. Il me
fait plaisir de dire que M. Marchand ayant considéré très
favorablement l'établissement de cette nouvelle industrie la
construction de l'usine pourra débuter d'ici un mois à
Grande-Vallée...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!
M. TESSIER: ... dans le comté de Gaspé-Nord.
M. DEMERS: C'est dans la Gaspésie, ça?
M. TESSIER: L'investissement sera de près de $1 million et
procurera des emplois permanents dont 30 à l'usine et au moins une
centaine en forêt, pour un total de 130 emplois.
La compagnie qui construira cette usine, d'ici un mois, est la compagnie
James Richard-son Company Limited.
UNE VOIX: C'est un beau nom français.
M. CHARRON: Ça, ça en donne des emplois!
M. PAUL: Une usine de quoi?
M. TESSIER: J'ai parlé de 100 employés en forêt,
alors je pense qu'il est facile d'en conclure qu'il s'agit d'une industrie
forestière de transformation du bois.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre!
L'honorable député de Lévis.
M. ROY (Lévis): M. le Président, je suis très
heureux des déclarations du ministre des Affaires municipales. Etant
intéressé à l'industrie...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): II faudrait attendre la version
définitive, M. le Président.
M. ROY (Lévis): La semaine dernière si ma
mémoire est fidèle le ministre du Travail annonçait
une industrie nouvelle du côté de Montréal et, aujourd'hui,
le ministre des Affaires municipales nous annonce une industrie du
côté du Bas du-Fleuve. Etant député du centre et
n'ayant pas l'avantage d'avoir un ministre dans cette région, je me
demande si un des ministres, un de ces jours, pourra nous annoncer une
industrie dans le centre, c'est-à-dire
dans les environs de la ville de Lévis ou de Québec.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LACROIX: On a sauvé votre chantier.
M. LE PRESIDENT: Le député de Lévis a-t-il fini ses
commentaires? Il s'agirait d'en faire uniquement sur la déclaration
ministérielle.
M. ROY (Lévis): Je voulais simplement féliciter le
gouvernement et lui demander de continuer dans la bonne voie. Avec ces
déclarations, on pourra toujours au moins compenser, par ces nouveaux
emplois, les mises à pied qu'on a subies en ce moment.
M. CHARRON: II est payé pour cela.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, au nom de l'Opposition
officielle, je me réjouis de la déclaration du ministre des
Affaires municipales, sous toute réserve, naturellement, que le texte
qu'il nous a communiqué soit définitif. Je l'inviterais à
faire de la prospection forestière dans la région du Saguenay-Lac
Saint-Jean, afin de nous doter d'industries qui pourraient occuper plus de 130
personnes pendant quelques mois.
M. LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve.
M. BURNS: M. le Président, avant de faire des commentaires
définitifs, nous attendrons la version officielle, la bobine autrement
dit.
M. LACROIX: Vous allez attendre que M. Lévesque fasse ses
commentaires?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! UNE VOIX: Ah, il se réveille! UNE
VOIX: On s'ennuyait
M. LE PRESIDENT: Dépôts de documents. Questions des
députés.
L'honorable chef de l'Opposition.
Questions et réponses
Protestation des journalistes de Rimouski
M. BERTRAND: Le ministre des Affaires municipales a-t-il pris
connaissance du vote de blâme enregistré à son endroit par
le club de presse de Rimouski, dans lequel on l'accuse d'avoir indûment
contesté le travail et le sens de l'éthique professionnelle d'un
journaliste du quotidien le Soleil, M. Robert Lévesque?
M. TESSIER: En effet, M. le Président, j'en ai pris
connaissance.
M. BERTRAND: A-t-il des commentaires à faire? Est-ce que le
ministre a des commentaires?
M. TESSIER: Je n'ai aucun commentaire à faire.
M.BERTRAND: Est-ce qu'on doit tenir pour acquis que le vote de
blâme est bien fondé?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. TESSIER: C'est une question d'appréciation.
M. BERTRAND: Ah, il ne nie pas!
M. LE PRESIDENT: Le député de Rouyn-Noranda.
Personnel au Bien-Etre social
M. SAMSON: M. le Président, j'aurais aimé poser une
question au ministre des Affaires sociales ou à son adjoint
parlementaire, mais en leur absence...
M. LEVESQUE : Le ministre est retenu dans la capitale
fédérale.
M. SAMSON: ... j'adresserai ma question à l'honorable premier
ministre. C'est une question concernant le manque de personnel évident
dans les différents bureaux de bien-être social de la province qui
sont à ce moment-ci débordés de travail. J'aimerais, avec
votre permission, apporter un exemple concret d'une plainte qui, entre
plusieurs, m'est parvenue aujourd'hui même.
Il s'agit, dans la région de Rouyn-Noranda, encore, d'une famille
de seize enfants à qui le gaz a été coupé
aujourd'hui; il n'y a donc plus de chauffage à la maison ceci
pour expliquer ma question le bureau de bien-être social ne peut
s'en occuper avant le 17 janvier 1971. Donc, le chef de police de Rouyn a
dû aujourd'hui piger à même la caisse de Noël des
policiers pour venir en aide à cette famille, ce qui fait dire au chef
de police qu'il devient en quelque sorte un deuxième bureau de
bien-être.
Est-ce que le premier ministre pourrait nous rassurer à l'effet
qu'il y aurait des possibilités, dans un avenir très
rapproché, d'augmenter le personnel des bureaux de bien-être
social pour venir en aide à ces gens?
M. BOURASSA: Oui, il y a certainement des possibilités
très rapprochées. J'en ai discuté, il y a quelques jours
à peine, avec le ministre des Affaires sociales.
Nous voulons augmenter le personnel pour répondre à ces
cas-là. Nous sommes absolument conscients de la situation qui existe
actuellement au Québec et dont le chef du Ralliement créditiste
vient de donner un exemple très convaincant. Je demanderais au ministre
d'Etat et député de Hull, responsable du Conseil de la
Trésorerie, de donner des détails supplémentaires sur les
efforts que fait le gouvernement pour répondre à la question
soulevée par le député.
M. PARENT: M. le Président, devant la situation
créée à la suite du bill 26, le Conseil de la
trésorerie a dû prendre des mesures assez radicales pour
prévoir justement les cas qui se sont présentés dans les
différents bureaux de la Famille et du Bien-Etre social pour le paiement
de l'assistance sociale. Nous avons autorisé le ministère de la
Famille et du Bien-Etre social à retenir, avant même la tenue de
concours par la Fonction publique, tous les employés qui pouvaient
réussir un examen verbal de façon à combler par le moyen
d'emplois occasionnels, les postes vacants dans chacun des bureaux
régionaux et locaux du ministère de la Famille et du Bien-Etre
social.
Ceci s'est présenté dans cinq bureaux de la province
où nous avions de la difficulté pour le recrutement du personnel.
Nous avons adopté cette formule justement pour pallier les
problèmes qui se présentaient dans ces bureaux. Alors, s'il y a
des cas particuliers, je n'ai pas objection à les prendre en
considération et à faire le nécessaire pour que
l'engagement de ce personnel se fasse dans le plus bref délai
possible.
M. SAMSON: Question supplémentaire, M. le Président. J'ai
bien compris que le ministre avait autorisé des mesures, en quelque
sorte d'urgence, pour combler les postes vacants dans les différents
bureaux. Est-ce que ces mesures pourraient aller aussi loin que prendre en
considération les endroits où on a besoin d'un surplus de
personnel?
M. PARENT: Oui. Le nombre des effectifs qui a été
autorisé est plus élevé que le montant prévu
normalement. Or, la mobilité du personnel peut exister entre les
bureaux; il n'y a aucune difficulté de ce
côté-là.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Maisonneuve
Loi des mesures de guerre
M. BURNS: M. le Président, à la suite d'une motion que
j'avais inscrite au feuilleton, le ministre de la Justice a
déposé deux directives du directeur général de la
Sûreté du Québec concernant la détention de
personnes arrêtées en vertu de la Loi des mesures de guerre.
Cependant, la motion que j'avais déposée allait beaucoup plus
loin. En particulier, elle demandait le dépôt de directives
relativement à l'utilisation des pouvoirs d'arrestation et de
perquisition, d'identification et d'interrogatoires des personnes
arrêtées et la libération de ces personnes.
Est-ce que je dois conclure, du dépôt de documents fait par
le ministre, que, sur ces trois points, il n'y a pas eu de directive du
ministère ou des officiers supérieurs de la
Sûreté?
M. CHOQUETTE: Non, vous n'êtes pas obligé de conclure
ça, mais il peut y avoir eu des directives verbales sans qu'il y ait eu
de directives écrites. Toutefois, je vais vérifier pour voir si
on n'aurait pas omis de déposer certaines directives écrites
mentionnées dans la question du député.
M. BURNS: Question supplémentaire, M. le Président. Le
ministre de la Justice peut-il nous dire en vertu de quelles lois ont
été prises les photographies et les empreintes digitales de
toutes les personnes arrêtées, tel qu'il le mentionnait dans une
de ses réponses?
M. CHOQUETTE: Je ne le sais pas.
M. LAURIN: Question supplémentaire, M. le Président,
toujours au ministre de la Justice. Ma question porte sur les perquisitions
effectuées en vertu de la Loi des mesures de guerre. Je suis
obligé d'expliquer brièvement ma question. Dans une
réponse antérieure à une question que nous avions inscrite
au feuilleton, le ministre de la Justice a indiqué qu'il y avait eu,
jusqu'au 24 novembre, 3068 perquisitions dont 49 seulement avaient mené
à des mises en accusation. Parmi les objets saisis, le ministre a
mentionné plusieurs armes, 46 dactylos, deux enregistreuses, une machine
à adresser, deux machines à polycopier. Le ministre mentionnait
également dans sa réponse: "De plus, une certaine quantité
de films, de diapositives et de caméras ont été saisis,
ainsi qu'une abondante documentation se rapportant au mouvement FLQ ou à
d'autres mouvements connexes." Le ministre ne mentionne aucun autre objet. Or,
j'aimerais, M. le Président, vous donner la liste des objets saisis chez
un citoyen bien connu du Québec: une machine à polycopier
Ronéo...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!
M. LAURIN: ...cinq mille feuilles de papier...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! Je pense bien que le
député de Bourget a bien énoncé tous les faits
utiles pour rendre sa
question très intelligible. Je lui demanderais de poser sa
question.
M. LAURIN: Je voulais simplement mentionner, M. le Président,
que, chez ce citoyen, on avait pris un tas de choses qui nous semblaient avoir
assez peu de rapport avec le motif de la perquisition. Je voulais ajouter, en
terminant, qu'en dépit de demandes répétées la
Sûreté du Québec...
M. LEVESQUE: M. le Président, un rappel au règlement.
M. LAURIN: ...a refusé, jusqu'à maintenant, de remettre
ces objets.
M. LEVESQUE: M. le Président, un rappel au règlement.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LAURIN: J'arrive à ma question.
M. LEVESQUE: Non, non, non!
M. CADIEUX: II y a deux rappels au règlement.
M. CHARRON: L'honorable ministre du Travail.
M. CADIEUX: Toi, le petit, là...
M. LE PRESIDENT: L'honorable leader parlementaire.
M. LEVESQUE: M. le Président... M. CADIEUX: Mon petit marxiste
là, sors. M. CHARRON: Le ministre du Travail. M. CADIEUX: Toi, je ne te
piquerai pas... M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. CADIEUX: ...avec des aiguilles. Tu vas voir comment je vais te
piquer, toi.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! M. CHARRON: Le grand, assieds-toi. M.
LEVESQUE: Le député de Bourget... M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LEVESQUE: ...est bien conscient que le règlement ne lui permet
pas une intervention comme celle qu'il vient de faire. Qu'il soit ou non
satisfait des réponses fournies, il n'a pas le droit, à ce
moment-ci, de s'en plaindre.
S'il veut le faire, il y aura peut-être d'autres façons ou
d'autres occasions. Nous sommes maintenant à la période des
questions et je crois que le député de Bourget doit se conformer
au règlement.
M. LAURIN: Je vais me contenter de me poser ma question: Le ministre de
la Justice pourrait-il nous dire si, quand des citoyens, après plusieurs
tentatives infructueuses, ne se sont pas vus remettre les objets qui ont fait
l'objet de la perquisition, le ministre de la Justice peut faire quelque chose
pour que cesse une situation qui peut facilement paraître
intolérable?
M. CHOQUETTE: M. le Président, en réponse à cette
question, certainement que le ministre de la Justice peut faire quelque chose,
mais est-il opportun de faire quelque chose dans le cas particulier
soulevé par le député de Bourget? Cela reste à
voir.
Maintenant, est-ce que le député me permettrait de donner
une réponse au moins aussi longue que sa question...?
M. LAURIN: Je n'ai pas eu le temps de la poser!
M. CHOQUETTE: Je lui dirai ceci: Dans ce cas particulier, j'ignore tout
des faits soulevés par le député. D'ailleurs, c'est un cas
particulier. S'il m'avait manifesté qu'il avait des revendications
à faire valoir au sujet de cette saisie ou de cette perquisition en
particulier, j'aurais pu prendre des mesures. Mais faire perdre le temps de la
Chambre avec des cas particuliers comme ceux-là, M. le Président,
cela ne me paraît pas très parlementaire.
M. LAURIN: Je l'ai donné comme exemple, M. le ministre. J'ai dit
qu'il y avait plusieurs exemples de ce genre.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable député de
Chicoutimi.
L'assurance-automobile
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'ai une question
à l'intention du premier ministre, question qui ne sera pas litigieuse.
Est-ce que le premier ministre, ayant pris connaissance du rapport du bureau
des assurances du Canada qui indique que, l'an passé, le taux
d'assurance avait augmenté de 11.8 p. c. l'assurance-automobile,
j'entends et qu'il doit augmenter cette année, semble-t-il, de 12
p. c, est-ce que le gouvernement du Québec a l'intention de
préparer un projet de loi en vue de la création d'une
régie de l'assurance-automobile, telle que le demandent un grand nombre
de consommateurs?
M. BOURASSA: Je dois dire, M. le Président, qu'aujourd'hui le
député de Chicoutimi pose une question tout à fait
pertinente.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pardon, M. le Président, comme de
coutume. Seulement le premier ministre l'a comprise aujourd'hui!
M. BOURASSA: Je dois affirmer que les hausses successives et
substantielles en assurance-automobile préoccupent sérieusement
le gouvernement. Il est clair que si ces hausses ne sont pas justifiées,
le gouvernement ne peut pas rester passif devant une telle situation. Il reste
pour lui à déterminer le moyen d'action le plus approprié.
Mais avec l'usage quasi général de l'automobile par l'ensemble
des citoyens du Québec, le gouvernement devra assumer ses
responsabilités s'il y a des abus.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je remercie le premier ministre, M. le
Président.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bagot.
Opération mise à jour
M. CARDINAL: M. le Président, ma question se serait
adressée au ministre de l'Education qui a probablement d'excellentes
raisons de ne pas être à l'Assemblée nationale. Je
l'adresse donc au premier ministre qui pourra...
M. LEVESQUE: Le ministre de l'Education sera probablement ici dans
quelques minutes, si le député veut attendre.
M. CARDINAL: Est-ce que la période des questions sera
terminée, à ce moment-là?
M. LEVESQUE: Nous pouvons attendre vers la fin.
M. CADIEUX: On a posé plusieurs questions à l'ancien
ministre de l'Education et il n'était jamais en Chambre!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!
M. LEVESQUE: II est retenu présentement à une
réunion très importante.
M. CARDINAL: Est-ce que la présidence me permettrait, moyennant
la promesse d'honneur du leader parlementaire, de poser ma question, même
si le ministre arrive deux minutes après la fin de la période des
questions?
DES VOIX: Demain, demain!
M. LEVESQUE: Je n'ai pas d'objection, si mes collègues n'en ont
pas, d'attendre à la fin de la période des questions. On ira voir
à ce moment-là.
M. CARDINAL: Auriez-vous objection à ce que je pose la question,
M. le Président, et qu'on en prenne avis, tout simplement? C'est encore
plus simple.
Cela permettrait au ministre de se renseigner auprès de ses hauts
fonctionnaires. Pour poser la question, M. le Président, selon les
règlements, je donnerai quelques très brefs faits. Sous
l'ancienne administration, le ministère de l'Education avait
lancé l'"Opération mise à jour", devant la situation
financière difficile de nombreuses commissions scolaires. Et, à
ce moment-là, ceux qui forment présentement le gouvernement
avaient d'ailleurs posé plusieurs questions.
Ma question est donc, précisément, la suivante: Alors que
le ministre de l'Education a promis $50 millions aux commissions scolaires,
alors que plusieurs commissions scolaires sont dans une situation difficile
présentement, est-ce que l'"Opération mise à jour",
premièrement, est poursuivie? Deuxièmement, est-ce qu'elle se
terminera bientôt? Et, troisièmement, quels fruits
portera-t-elle?
M. LEVESQUE: Merci.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Mégantic.
Route 49
M. DUMONT: M. le Président, ma question s'adresse au ministre de
la Voirie. Considérant que la route 49 de Thetford à
Plessisville, appelée la route de la mort, a causé onze accidents
mortels, est-ce que des projets urgents pour atténuer le chômage
et rendre moins dangereuse cette route sont mis de l'avant par son
ministère?
M. PINARD: M. le Président, nous étudions ce
problème très attentivement et nous espérons pouvoir
réaliser le souhait du député de Mégantic, à
très brève échéance.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bellechasse.
Livre blanc de M. Benson
M. LOUBIER: M. le Président, ma question s'adresse au premier
ministre. Est-ce que le premier ministre souscrit à la
déclaration faite par son ministre des Finances, laquelle
déclaration a été reproduite dans le quotidien Le Soleil
de lundi, à l'effet que le livre blanc de M. Benson n'avait pas tenue
compte des droits et des intérêts du Québec?
M. BOURASSA: Le ministre des Finances a repris dans des mots
forcément un peu différents ce que j'avais dit à la
Chambre, la semaine dernière.
M. LOUBIER: Le premier ministre souscrit à cette
déclaration?
M. BOURASSA: Je viens de répondre à la question.
M. LOUBIER: D'accord.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Abitibi-Ouest.
Chemin Villebois Baie-James
M. AUDET: M. le Président, ma question s'adresse au ministre de
la Voirie. J'ai déjà posé une question au ministre de la
Voirie, au sujet de l'entretien, cet hiver, du chemin de
pénétration de Villebois Baie-James. Le ministre m'a
répondu qu'il me donnerait une réponse sous peu. Je lui
demanderais à nouveau si l'étude qu'il nous disait être en
cours a été définie. Si non, je demanderais s'il serait
possible de hâter cette étude, parce que chez nous,
déjà, c'est l'hiver.
M. PINARD: Je prends avis de la question et, dès que le rapport
m'aura été soumis, je ferai part des recommandations au
député.
M. AUDET: Une question supplémentaire. Pourrions-nous
espérer, pour très bientôt, la décision du ministre?
Ceci serait un moyen presque unique de faire ressentir la relance
économique du gouvernement en Abitibi-Ouest.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.
M. LESSARD: M. le Président, j'attends le ministre de
l'Education.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Jacques.
Rapport Davey
M. CHARRON: M. le Président, ma question s'adresse au premier
ministre et concerne le rapport sénatorial Davey, qui a
été remis, hier. Parmi les recommandations du comité, il y
en a quelques-unes, par exemple création d'un conseil national de la
presse, octrois de bourses aux journalistes, etc., qui sont des
matières, sinon exclusivement, du moins en grande partie de juridiction
provinciale. Ma question est donc la suivante. Est-ce que le gouvernement
entend prendre des mesures immédiates pour occuper activement ce domaine
qui est le nôtre, avant que le fédéral ne s'en empare
complètement?
M. BOURASSA: Malheureusement, je n'ai pas eu le rapport complet. J'ai
pris connaissance des recommandations.
Un conseil de presse a été proposé avant-hier par
M. Gilles Gariépy, président de la Fédération des
journalistes, et M. Bureau. Je pense que ce conseil de presse est
différent de celui dont parle le député de
Saint-Jacques.
M. CHARRON: Celui dont parle la commission Davey.
M. BOURASSA: Mais le député pourrait-il préciser la
composition ou les modalités du conseil de presse dont parle la
commission Davey?
M. CHARRON: M. le Président, je n'ai pas à faire
l'information du premier ministre. S'il n'a pas le temps...
M. BOURASSA: Le député lance-t-il des termes en l'air sans
savoir ce dont il parle?
M. CHARRON: Ce que je vous ai demandé c'est simplement si vous
suiviez l'activité qui se passe à Ottawa...
M. BOURASSA: Le député pose des questions et il n'a
même pas lu le rapport.
M. CHARRON: ... c'est tout ce que je vous ai demandé. Et je vous
ai demandé si vous aviez l'intention de réagir devant ça.
Un domaine qui devrait être réservé à la juridiction
provinciale...
M. BOURASSA: M. le Président,...
M. CHARRON: Agissez plutôt que de parler.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BOURASSA: M. le Président, j'ai posé une question au
député. Je me suis rendu compte qu'il ne savait pas ce dont il
parlait. Cela ne vaut pas la peine de lui répondre.
M. CHARRON: Je vais vous en poser, une question.
Question additionnelle, M. le Président.
Commission sur la liberté de la presse
M. CHARRON: Je reviendrai avec ma question quand le premier ministre
saura ce dont je veux parler. Une question qui relève du premier
ministre. La commission parlementaire sur la liberté de la presse
doit-elle siéger bientôt, sera-t-elle formée avant la fin
de la session, afin de pouvoir siéger en janvier?
M. BOURASSA: J'ai répondu...
M. CHARRON: Cela vous concerne, vous êtes censé être
informé de cela.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BOURASSA: Du calme. Il est excité aujourd'hui!
M. CHARRON: Cela vous énerve, cela vous excite.
M. BOURASSA: J'ai dit, la semaine dernière,...
M. CHARRON: Le ministre du Travail, s'il vous plaît.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!
M. CHARRON: M. le Président, voulez-vous rappeler à
l'ordre le ministre du Travail, s'il vous plaft?
M. CADIEUX: Va te piquer en dehors de la Chambre...
M. CHARRON: Le centrale de Beauharnois.
M. CADIEUX: ... à Cuba. Tu aurais dû être sur
l'avion.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
UNE VOIX: Nous comprenons pourquoi il n'est pas ministre.
M. CHARRON : Si vous aviez été sur l'avion, je l'aurais
détourné.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. CADIEUX: ... à Cuba... la détourner.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable premier ministre.
M. CHARRON : II est en train de sauver le premier ministre.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. CHARRON: II ne répondra pas encore.
M. LACROIX: II est donc fin!
M. BOURASSA: ... s'il était possible, avant la fin de cette
session. Nous avons siégé ce matin à la commission des
Richesses naturelles, pour entendre les représentants de Sidbec et de la
Caisse de dépôt. Hier, nous avons siégé à
deux commissions: les Richesses naturelles, sur la question de la baie James,
et les Institutions financières, au sujet de la protection du
consommateur. Je veux réunir, la semaine prochaine, la commission
parlementaire en ce qui a trait à la réforme électorale.
Si nous pouvons trouver, la semaine prochaine, peut-être le 23 ou le 24
décembre, si le député n'a pas d'objection...
M. CHARRON: Si vous aviez commencé la session à temps,
nous aurions eu le temps de le faire.
M. BOURASSA: ... sur la liberté de la presse, nous le ferons.
Rencontre avec le personnel de Radio-Mutuelle
M. LAURIN: Question additionnelle, M. le Président. Une autre
question en ce qui concerne les problèmes de la presse, qui s'adresse
cette fois au ministre des communications. Je voudrais lui demander si les
informations que j'ai reçues de la permanence du parti sont exactes
à l'effet qu'avec M. Marc Lalonde, conseiller de M. Trudeau, il aurait
rencontré les patrons et les journalistes de Radio-Mutuelle, vendredi,
à Montréal.
M. L'ALLIER: L'information est inexacte. Je n'ai pas rencontré
les patrons et les journalistes de Radio-Mutuelle à Montréal.
Radio-Mutuelle avait organisé, pour son service d'information, des
journées d'étude, et j'ai été invité
à ces journées d'étude uniquement comme citoyen, pour
rencontrer ces gens-là et discuter avec eux de questions qui nous ont
été posées uniquement par ces...
Cela ne s'est pas déroulé à Montréal,
ça s'est déroulé à l'hôtel Chanteclerc,
à Sainte-Adèle.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Maskinongé.
Déblocage de l'ODEQ
M. PAUL: M. le Président, ... vous savez que je suis
réfractaire à toute activité bouillante. Je voudrais poser
à l'honorable ministre des Affaires municipales une question pour
l'information des honorables députés et pour la population de la
région de la Gaspésie. Le ministre peut-il nous dire si l'annonce
qu'il nous a faite aujourd'hui est en relation avec la déclaration qu'il
faisait en Chambre, le 24 novembre, au sujet du déblocage de l'ODEQ?
M. TESSIER: C'est en plus de ce que j'avais annoncé à
cette occasion.
M. PAUL: M. le Président, le ministre pourrait-il nous dire si,
depuis le 4 décembre environ, il y a 750 emplois nouveaux qui ont
été créés dans la région du Bas
Saint-Laurent et la Gaspésie, tel qu'il nous l'annonçait mardi le
24 novembre 1970, dans un texte qui ne peut pas être
réfuté?
M. TESSIER: Je ne peux pas, M. le Président, préciser le
nombre exact.
C'est plusieurs centaines d'emplois nouveaux qui ont été
créés, et les gens sont au travail depuis quelques semaines.
M. PAUL: Par la même occasion, le ministre avait dit que cela
cesserait si la neige commençait à tomber. Y a-t-il beaucoup de
neige en Gaspésie actuellement?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. TESSIER: Non, aucun emploi n'a encore cessé.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable député de
Portneuf.
Offensive contre la pègre
M. DROLET: M. le Président, ma question s'adresse à
l'honorable ministre de la Justice. Maintenant que M. Cross est
libéré et qu'on a commencé à retirer les forces
policières et l'armée, le ministre de la Justice peut-il dire
à cette Chambre s'il prépare ou s'il a l'intention de
préparer contre la pègre une offensive globale semblable à
celle qu'il a lancée contre le FLQ surtout à la suite de la
déclaration du juge Wagner, futur candidat à la chefferie, qui a
déclaré que la pègre était le véritable
gouvernement parallèle?
UNE VOIX: Quelle chefferie?
M. CHOQUETTE: M. le Président, je n'ai pas attendu la
déclaration de l'honorable juge Wagner pour déclencher une
offensive générale contre la pègre. Aussitôt que le
premier ministre m'eut confié les responsabilités de ministre de
la Justice, j'ai pris des actions énergiques que j'ai déjà
relatées en cette Chambre à plusieurs occasions. Il me semble
inutile de revenir sur des sujets qui ont été discutés
à la suite de questions, entre autres, posées par le
député de Maisonneuve et par d'autres députés du
Ralliement créditiste.
Pour autant que je suis concerné, l'action contre la pègre
va continuer à tous les niveaux et, on peut en être assuré,
dans tous les milieux. Si nous avons été obligés de porter
une attention particulière au phénomène du terrorisme,
ceci n'a été que temporaire et imposé par les
circonstances. Le député peut être assuré que notre
réponse à la pègre est un non catégorique à
tous les niveaux du crime.
M. PAUL: M. le Président, une question de privilège.
L'honorable ministre de la Justice nous a annoncé que dès sa
prestation de serment il avait déclenché une opération
contre la pègre.
M. BERTRAND: II a continué le travail.
M. PAUL: Je dis que le ministre de la Justice n'a fait que continuer
l'oeuvre de tous ses prédécesseurs.
DES VOIX: Oh! Oh!
M. PAUL: Vous n'avez pas besoin de vous lever, M. le Président,
c'est vrai et la population se rappelle que quand nous étions au
pouvoir, ce n'était pas des déclenchements de
mécanismes...
M. LEVESQUE: M. le Président...
M. PAUL: ...mais des résultats que l'on obtenait contre la
pègre.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BERTRAND: Moins de paroles, plus d'actes.
M. LE PRESIDENT: Je comprends que l'intervention du député
de Maskinongé est terminée.
M. PAUL: Oui, oui.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Maurice.
M. BURNS: J'avais une question additionnelle avant l'intervention du
député.
M. DEMERS: M. le Président...
M. BURNS: Est-ce que je peux poser ma question additionnelle, M. le
Président?
M. LE PRESIDENT: Une question supplémentaire?
M. BURNS: Une question supplémentaire ou additionnelle.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela fait plus sérieux.
UNE VOIX: C'est plus français.
Déclaration du juge Wagner
M. BURNS: M. le Président, je me réfère à la
déclaration du juge Wagner. Le ministre de la Justice a-t-il l'intention
de communiquer avec le juge Wagner pour lui faire des reproches car il s'agit
d'un juge qui, à mon avis, fait de façon anormale, des
déclarations d'ordre politique, se servant de son siège, du haut
du banc, pour les faire?
M. LEGER: II va dégringoler.
M. CHOQUETTE: Le ministre de la Justice est toujours délicat dans
ses interventions auprès de la magistrature et il apprécierait
que les magistrats soient également délicats dans leurs
incursions politiques.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Maurice.
Syndicalisme agricole
M. DEMERS: M. le Président, ma question s'adresserait au ministre
de l'Agriculture, mais en son absence je la pose au premier ministre.
Pourrions-nous savoir, à la suite des visites très assidues que
nous recevons présentement des membres de l'UCC, si c'est l'intention du
gouvernement de présenter dès cette session la loi instaurant le
syndicalisme agricole dans la province de Québec?
M. BOURASSA: M. le Président, le leader parlementaire a
répondu à cette question au début de la semaine.
M. DEMERS: Est-ce qu'on pourrait me répondre encore?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BOURASSA: Pourquoi faire perdre le temps de la Chambre?
M. LE PRESIDENT: Cette question a déjà été
posée et on y a répondu, à ma connaissance, à
quelques reprises.
M. DEMERS: On n'y a jamais répondu clairement à aucune
reprise.
M. LE PRESIDENT: De toute façon, le règlement...
M. DEMERS: C'est ce que je voudrais savoir.
M. LEVESQUE: Qu'on relise le texte du journal des Débats.
M. LE PRESIDENT: ...dit qu'on doit accepter une réponse
même non satisfaisante. L'honorable député de
Témiscouata.
M. SIMARD (Témiscouata): M. le Président, ma question
s'adresse au ministre responsable de l'ODEQ. J'ai été bien
emballé tout à l'heure d'apprendre qu'une nouvelle industrie
s'implantait en Gaspésie.
Je me pose quelques petites questions. Par exemple, j'aimerais demander
au ministre si c'est la même firme Richardson qui exploite
déjà une usine de bois de sciage en Gaspésie. Si oui,
combien de personnes cette firme a-t-elle à son emploi?
M. TESSIER: Si c'est la même firme qui? Je n'ai pas compris.
M. SIMARD (Témiscouata): Qui exploite déjà une
usine de bois de sciage en Gaspésie.
M. TESSIER: Oui, à Cap-Chat.
M. SIMARD (Témiscouata): Combien d'employés a-t-elle
à son service?
M. TESSIER: Je n'en ai aucune idée.
M. SIMARD (Témiscouata): Est-ce qu'il s'agit d'une
deuxième usine ou d'une reconstruction plus moderne de cette usine?
M. TESSIER: II s'agit d'une nouvelle usine. Il n'y a rien qui existe
actuellement à Grande-Vallée. Il s'agit d'exploiter des
concessions forestières qui ne le sont pas actuellement. Il n'y a aucune
usine de transformation à Grande-Vallée. Il s'agit, par
conséquent, de quelque chose de tout à fait nouveau.
M. SIMARD (Témiscouata): Est-ce que la première usine, qui
fonctionne à l'heure actuelle, va fermer ses portes?
M. TESSIER: Vous voulez dire l'usine de Cap-Chat? Je ne le sais pas.
M. SIMARD (Témiscouata): Oui.
M. BERTRAND: II bouche un trou, dans ce bout-là.
M. SIMARD (Témiscouata): C'est certainement important de le
savoir. On nous annonce un projet nouveau. Est-ce qu'il s'agit d'une fermeture
pour une réouverture? C'est ça qu'on voudrait savoir.
M. TESSIER: Non, non il n'est pas question de fermeture. Je ne suis pas
au courant du fonctionnement actuel...
M. SIMARD (Témiscouata): On ferme d'un bord, puis on ouvre de
l'autre.
M. TESSIER: ... de l'usine de Cap-Chat. UNE VOIX: Un autre ballon.
M. TESSIER: Je peux m'informer, si vous le voulez...
M. SIMARD (Témiscouata): C'était trop beau pour être
vrai.
M. TESSIER: ... et vous répondre, mais, actuellement, il s'agit
d'un projet nouveau.
M. SIMARD (Témiscouata): Une question
supplémentaire sur le même sujet. Est-ce que cette usine
remplacerait l'usine Couturier à Marsoui qui vient de disparaître
à la suite d'un incendie?
M. DEMERS: II ne le sait pas encore. M. TESSIER: Si elle remplacerait
quoi?
M. SIMARD (Témiscouata): Si cette usine remplacera
éventuellement l'usine qui vient de disparaître à
Marsoui?
Il ne sait rien.
M. BERTRAND: C'est dans l'ODEQ. United Aircraft
M. LEGER: M. le Président, ma question s'adresse au ministre de
l'Industrie et du Commerce, concernant la United Aircraft. Il pourra la prendre
comme préavis et me répondre plus tard. On sait que la compagnie
United Aircraft avait signé une entente avec le gouvernement
québécois, le 9 novembre remarquons bien la date et
avait reçu une subvention de $5 millions de la part des contribuables
québécois et que cette compagnie est présentement en
négociation avec ses employés pour le renouvellement de la
convention collective.
Ma question est la suivante: Le ministre est-il au courant des quatre
renseignements suivants et qu'entend-il faire par la suite?
Premièrement, que le 25 novembre, après le don de la subvention,
la compagnie a annoncé au syndicat une nouvelle réduction de
personnel d'environ 10 p. c, c'est-à-dire 150 mises à pied, en
plus de 400 employés qui ont déjà été
rétrogradés ou mis à pied. Deuxièmement, que la
compagnie refuse d'inclure dans la convention une clause reconnaissant le
français comme langue de travail.
M. LEVESQUE: M. le Président, j'invoque le règlement.
M. LEGER: Est-ce qu'il y a un point de règlement?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LEVESQUE: M. le Président, le règlement ne permet pas,
encore une fois, ce genre de question. Si on s'en rapporte au titre 12 des
questions et réponses, c'est justement un énoncé de faits.
On donne des renseignements; on n'en demande pas. On est en train de faire un
discours. Le but de la période des questions les collègues
le reconnaissent c'est de permettre aux membres de la Chambre de poser
des questions aux ministres et au gouvernement. Depuis le commencement de cette
prétendue question, on est en train de faire un discours et de donner
des renseignements qui sont contrôlés plus ou moins, on ne le sait
pas. Si on a des questions à poser, qu'on les pose donc.
Présentement, c'est le gouvernement qui est interrogé; ce
n'est pas la compagnie United Aircraft, ce ne sont pas les unions
ouvrières, ce ne sont pas les syndicats. On pose des questions aux
ministres. On veut savoir ce que le ministre de l'Industrie et du Commerce a
fait ou devrait faire dans telle situation. Qu'on pose la question qui est de
la responsabilité du ministre.
M. LEGER: M. le Président, ma question est claire et simple. Le
gouvernement a donné $5 millions à une compagnie.
M. CADIEUX: Ce n'est pas une question, ça.
M. LEGER: Je lui demande s'il était au courant et s'il entend
agir. A la suite de ce don, puisque la compagnie ne veut pas reconnaître
le français comme langue de travail...
M. LEVESQUE: M. le Président.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! Ce n'est pas sous forme d'une
question; c'est un énoncé de faits. Qu'on pose une question,
qu'on demande au ministre si la langue de travail sera le français. Le
ministre vous dira oui ou non.
M. LEGER: M. le Président, est-ce que le ministre a l'intention
de retirer ces $5 millions à la suite des décisions prises par la
compagnie, qui sont contraires aux intérêts du Québec?
M. LEVESQUE: Très bien. Voilà le genre de question qui
peut être posée. Alors, voici la réponse...
M. LEGER: J'attends la réponse.
M. LEVESQUE: La réponse va venir bien naturellement. Si la
compagnie ne remplit pas les conditions posées par le ministère,
la subvention devra être remboursée. De toute façon, pas un
sou de cette subvention n'a encore été versé.
M. LEGER: Merci.
M. LE PRESIDENT: Je vais permettre trois dernières questions. Le
député de Montmagny, le député de Sainte- Marie et
le député de Beauharnois.
M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, je voulais poser des
questions au premier ministre sur la commission de la liberté de la
presse et le rapport qui a été déposé, hier, au
fédéral. Le député de Saint-Jacques a posé
ses questions, mais, si le premier ministre a quelque chose de plus
précis à nous dire que tout à
l'heure, je serais prêt à lui reposer la question, quant
à la date possible à laquelle la commission pourrait
siéger afin de prendre en considération deux problèmes au
moins; le problème dont nous avons parlé en Chambre
antérieurement, durant le débat sur les événements
du mois d'octobre, et aussi les implications du rapport qui a été
déposé hier, les implications importantes du point de vue du
Québec. Je voudrais demander au premier ministre, si la commission ne
peut pas siéger d'ici la fin de la présente session, si durant
l'intersession, en janvier ou février, il ne sera pas possible de
convoquer cette commission, de la remettre sur pied, afin que nous puissions
discuter de ces problèmes d'extrême importance.
M. BOURASSA: J'en prends note. J'ai dit que, si nous pouvions
siéger d'ici le début de la période des Fêtes, nous
le ferions. Je prends note de la suggestion du député, qui semble
approuvée par le leader parlementaire de l'Opposition officielle.
M. PAUL: J'ai approuvé la demande qu'il vous a faite pour que
ça bouge.
M. BOURASSA: Pardon? M. PAUL: Pour que vous bougiez. M. BERTRAND: Pour
que ça bouge. M. PAUL: Que ça bouge.
M. BOURASSA: Si nous ne pouvons pas réunir la commission pour des
raisons qui sont compréhensibles à tous les députés
sérieux, si nous ne pouvons pas réunir la commission...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela exclut tous les vôtres.
M. BOURASSA: ... d'ici le début de la période des
Fêtes, nous le ferons certainement entre les deux sessions, comme vient
de le suggérer, d'une façon très appropriée et
courtoise, le député de Montmagny.
UNE VOIX: Très bien.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Sainte-Marie.
Médicaments aux assistés sociaux
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, étant
donné l'absence du ministre des Affaires sociales, ma question s'adresse
au premier ministre. Est-ce que le premier ministre pourrait préciser
s'il y a eu des directives données aux hôpitaux, en ce qui
concerne la distribution de médicaments aux assistés sociaux?
Est-ce que les hôpitaux ont reçu des directives?
M. BOURASSA: Depuis quelques jours? Est-ce que le député
se réfère à des directives qui auraient
été...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Oui.
M. BOURASSA: Depuis l'annonce de l'assis-tance-médicaments?
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Actuellement, il semblerait qu'il
règne une grande confusion à ce propos dans les hôpitaux.
Est-ce qu'on a prévu un régime provisoire en attendant la
modification de l'assurance-maladie, en ce qui concerne la distribution de
médicaments aux assistés sociaux? Si vous voulez prendre avis de
la question.
M. BOURASSA: Oui, je prends avis de la question. Le ministre est
à Ottawa pour la conférence fédérale-provinciale,
il va être de retour mardi.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Ce n'est pas une colle que je vous pose, je
voudrais avoir des informations précises.
M. BOURASSA: Ah non! le député de Sainte-Marie ne pose pas
ce genre de question.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Merci. DES VOIX: Le ministre du Travail. M.
LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. CADIEUX: Le député de Saint-Jacques, ses jours sont
comptés, il ne sera jamais ministre ni adjoint...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. CADIEUX: ... alors, il peut laisser les questions aux autres.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Question. M. CHARRON: ... mes intentions.
Réduction des prix
M.. CADIEUX: Ma question s'adresse au ministre de la Justice et il ne
s'agit pas des présumés bandits qui sont enfermés. Il
s'agit de centaines de personnes qui sont intéressées à un
problème crucial et urgent. Des vendeurs font remarquer au gouvernement
qu'il y a une guerre terrible, actuellement, dans le domaine de l'alimentation
et plus spécialement dans le domaine de la vente des pains. Des pains
sont vendus, présentement, dans des épiceries à neuf cents
et les vendeurs sur la route doivent les vendre vingt-cinq cents. Plusieurs
détaillants en alimentation ont décidé de se servir de ce
produit...
DES VOIX: Question.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. CADIEUX: ... pour attirer le client dans leur épicerie. La
question que je pose au ministre de la Justice...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président...
M. CADIEUX: ... est celle-ci: Est-ce que le ministre de la Justice
entend intervenir auprès du ministre fédéral de la Justice
concernant l'article 33a) de la loi fédérale contre les pratiques
restrictives qui déclare coupable toute personne qui vend son produit
à un prix exagérément bas dans le but de diminuer la
concurrence...
DES VOIX: Question.
M. CADIEUX: ... d'éliminer un compétiteur ou d'aboutir
à un pareil effet?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est plutôt "toasté",
ça!
M. CADIEUX: Le député de Chicoutimi ne comprend jamais
rien. Il n'a pas compris ma question. Ma question a été
posée...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est une question "toastée", M. le
Président.
M. CADIEUX: ... au ministre de la Justice qui, lui, a compris.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): II est dans le pétrin.
M. BERTRAND: Je pense que le ministre n'a pas compris, lui non plus!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! messieurs! je pense bien que, depuis
au-delà d'une demi-heure, tout le monde a pu poser ses questions plus ou
moins facilement. Il s'agit de la dernière question. Est-ce que l'on
pourrait...
M. BERTRAND: ... vous bâillonnez tout le monde, par exemple.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BOURASSA: L'Opposition bâillonne le gouvernement!
M. LE PRESIDENT: Ecoutez, lorsqu'il y a des énoncés de
faits, vous pouvez comprendre que le président va les permettre moins,
lorsque cela soulève des débats. Mais je ne voyais pas dans
l'énoncé du député de Beauharnois que cela pouvait
soulever beaucoup de débats si le pain se vend $0.09 ou $0.25.
Je demanderais au député de Beauharnois de terminer sa
question.
M. CADIEUX: Ma question, je la repose. Est-ce que le ministre de la
Justice veut intervenir auprès du ministre fédéral de la
Justice concernant l'article 33 de la loi fédérale sur les "loss
leaders"?
M. CHOQUETTE: M. le Président, je remercie l'honorable
député de Beauharnois de m'avoir fait parvenir une volumineuse
documentation au sujet de ce problème d'un grand intérêt.
Je puis assurer l'honorable député que je vais intervenir
auprès de la Commission fédérale sur les pratiques
restrictives du commerce afin de savoir si elle a procédé
à une enquête sur la question qu'il a soulevée et quelles
mesures elle va adopter.
Je puis également l'assurer que je vais faire examiner par les
légistes de mon ministère, l'aspect juridique, à savoir
s'il y a contravention du code criminel et s'il est de notre compétence
d'agir. S'il y a lieu, nous prendrons les actions nécessaires. Je puis
assurer le député que s'il ressort de ces interventions qu'il
s'agit d'un domaine réservé exclusivement au gouvernement
fédéral, je ferai les interventions requises auprès du
ministre fédéral de la Justice.
M. LE PRESIDENT: Affaires du jour.
M. LESSARD: M. le Président, est-ce qu'on peut espérer que
nous aurons demain plus de ministres pour répondre à nos
questions?
M. LEVESQUE: Je crois que chaque fois qu'un ministre a été
interrogé et qu'il n'était pas à sa place, j'ai pris la
peine de me lever et d'indiquer les raisons très sérieuses qui
l'avaient retenu à l'extérieur.
UNE VOIX: Vous faites votre possible, en masse!
M. LESSARD: Le ministre du Revenu?
M. LEVESQUE: M. le Président, vous me permettrez de
déposer une réponse complémentaire à celle qui
apparaît à la page 247 des procès-verbaux du 2
décembre 1970 à une question posée par M. Burns; c'est une
réponse complémentaire de M. Choquette.
M. le Président, je crois que nous pourrons avoir une sanction
vers la fin de l'après-midi, et ceci pour une raison bien simple; c'est
que, lors
de l'étude d'un des projets de loi présentés par le
ministre des Affaires municipales, on a mentionné qu'il y avait des
conseils municipaux qui étaient inquiets et qui continuent d'être
inquiets.
UNE VOIX: Ils ont raison d'être inquiets du ministre.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est une version définitive, sa loi,
elle a été bien citée?
M. BERTRAND: Est-ce qu'elle a été revue et
revisée?
M. LEVESQUE: Revue, revisée et adoptée même en
troisième lecture par l'Assemblée nationale.
M. BERTRAND: Oui, oui, mais...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que le gouverneur est toujours en
fonction, M. le Président?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! M. LEVESQUE: Pardon?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que le lieutenant-gouverneur est
toujours en fonction? J'attends ma nomination!
M. LEVESQUE: Je continue de...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le premier ministre me l'a promise, M. le
Président.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LEVESQUE: Nous continuons de noter l'intérêt soutenu et
constant du député de Chicoutimi !
M. LESSARD: Est-ce que le député des Iles-de-la-Madeleine
aura le poste de lieutenant-gouverneur?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! A l'ordre!
M. LEVESQUE: M. le Président,... M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LESSARD: Est-ce que le député des Iles-de-la-Madeleine
va être nommé lieutenant-gouverneur?
M. LEVESQUE: ... Article 5.
M. BURNS: M. le Président, avant les affaires du jour, est-ce que
je peux demander, à ce stade-ci, quel est l'ordre des travaux qui est
prévu pour aujourd'hui et demain? Je comprends que les bills du ministre
de la Justice doivent être étudiés cet
après-midi.
M. LEVESQUE: Les quatre projets de loi au nom du ministre de la Justice
seront suivis du projet de loi du ministre de l'Agriculture. Voilà, du
moins, les prévisions jusqu'à présent.
M. BURNS: Une dernière question à ce sujet-là, M.
le Président. Est-ce l'intention du leader de nous faire siéger
samedi, comme une certaine motion l'y autorise?
M. BOURASSA: Cela dépend de ce que l'Opposition va faire.
M.BERTRAND: Nous n'aimons pas cela! Vous allez siéger
jusqu'à demain soir et samedi.
M. PAUL: C'est malhabile!
M. BERTRAND: C'est très malhabile!
M. LEVESQUE: Autrement dit, nous pourrons nous consulter à la fin
de la journée, aujourd'hui, avant l'ajournement. Et selon le
progrès réalisé, comme le disait justement le premier
ministre, il y a un instant, nous pourrons alors convenir d'ajourner à
telle heure plutôt qu'à telle autre, à tel jour
plutôt qu'à tel autre.
M. BOURASSA: S'il y a une collaboration positive...
M. BERTRAND: Cela, c'est encore de trop! UNE VOIX: Il s'enfonce, M. le
Président!
M. PAUL: M. le Président, pourrais-je demander à
l'honorable leader du gouvernement s'il ne pourrait pas, dans ses temps libres,
renseigner quelque peu le premier ministre sur la façon de se conduire
en Chambre quant au travaux, et ainsi de suite, dans un but de collaboration?
Je voudrais suggérer au leader d'appeler le rapport qui nous a
été fait cet après-midi, concernant les projets 57 et 58,
ce qui pourrait faciliter, j'en suis sûr, l'adoption en troisième
lecture et, peut-être, la sanction ce soir.
Voilà de la collaboration effective.
M. BOURASSA: Merci.
M. LEVESQUE: En effet, voilà une marque de collaboration.
D'autant plus que je ne manquerai pas de rappeler au premier ministre que c'est
aujourd'hui jeudi, qui semble être un jour de prédilection pour le
député de Maskinongé.
M. PAUL: C'est cela. Oui. Je viens de Trois-
Rivières. Autrefois c'était le mercredi mais un peu plus
loin c'est le jeudi!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela tombe le vendredi.
M. LEVESQUE: M. le Président, pour faire suite à la
suggestion positive du député de Maskinongé, je vais
proposer de franchir l'étape du comité plénier et celle de
la troisième lecture des deux projets de loi 57 et 58.
M. BERTRAND: II y a eu des amendements à un projet de loi,
n'est-ce pas?
M. LEVESQUE: Un amendement pour le projet de loi 57.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que les résolutions du comité sont
agréées?
M. BERTRAND: Adopté. M. PAUL: Adopté. Le comité
plénier a siégé. M. LE PRESIDENT: Troisième
lecture. M. PAUL: C'est cela.
Troisième lecture des projets de lois no 57 et
no 58
M. LE PRESIDENT: Troisième lecture des deux projets de loi,
adoptée?
M. LAURIN: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Les projets de loi 57 et 58 adoptés.
M. BOURASSA: Cela bouge, cela bouge! M. PAUL: Pas vous autres, nous
autres! M. LEVESQUE Article 5.
Projet de loi no 46 Deuxième lecture
M. LE PRESIDENT: Article 5. L'honorable ministre de la Justice propose
la deuxième lecture du projet de loi numéro 46, Loi prolongeant
et modifiant la Loi pour favoriser la conciliation entre locataires et
propriétaires.
L'honorable ministre de la Justice.
M. Jérôme Choquette
M. CHOQUETTE: M. le Président, cette loi a pour but de prolonger,
pour une période additionnelle d'une année, c'est-à-dire
jusqu'au 30 avril 1972, la Loi pour favoriser la conciliation entre locataires
et propriétaires. Elle a également pour but d'arrêter, ou
de fixer les municipalités dans lesquelles la Loi pour favoriser la
conciliation entre locataires et propriétaires s'applique à la
suite de demandes de la part des conseils municipaux
intéressés.
M. le Président, je ne pense pas que j'aie besoin de faire un
long exposé du principe de cette loi, ou de donner des explications
considérables à son sujet, puisqu'il s'agit d'une loi qui revient
encore cette année comme elle est revenue dans le passé de
façon à réaliser les objectifs que je viens de mentionner
précédemment, c'est-à-dire de continuer l'existence de la
Loi pour favoriser la conciliation entre locataires et propriétaires
pour la période additionnelle d'une année ainsi que pour
déterminer la liste des municipalités dans lesquelles le
régime est applicable.
Je ferai simplement quelques observations sur le travail
réalisé...
M. LEVESQUE: M. le Président, j'attendais que mon collègue
finisse sa phrase.
Pourrais-je avoir le consentement de la Chambre et je m'excuse
auprès de mon collègue et de mes collègues de la Chambre,
parce que vu qu'il y a sanction et que nous avons ces trois projets de loi de
ce matin qui ont été adoptés, à la commission des
bills privés pour demander au secrétaire de faire les
inscriptions, de franchir l'étape du comité plénier et de
la troisième lecture et ainsi, pouvoir faire sanctionner ces trois
projets de loi en même temps.
M. BURNS: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté.
M. CHOQUETTE: M. le Président, je disais donc que, sans
m'étendre inutilement, je crois qu'il y aurait lieu pour moi, quand
même, de faire part à la Chambre de l'étendue du travail
accompli par la Commission des loyers, dans la période récente.
Ainsi, du 1er janvier au 1er novembre de cette année, la commission
a-t-elle entendu 10,000 différends entre locataires et
propriétaires. On m'informe également qu'environ 200,000
informations ont été données par la commission à
des propriétaires ou à des locataires, sur des situations qui les
intéressaient, dans le cours normal des occupations de la
commission.
Finalement, on a pu renseigner, à la commission, 10,000 personnes
qui s'enquéraient de leurs droits respectifs, en vertu de cette loi.
Actuellement, il existe encore, et cela m'apparaît tout à fait
évident, il existe, dis-je, une nécessité, pour une telle
commission, de continuer son existence et de pouvoir trancher les
différends entre les locataires et les propriétaires, avec la
plus grande équité, car il serait au moins audacieux d'affirmer
que la crise du logement, qui avait été à l'origine de la
Loi de la
conciliation entre locataires et propriétaires, soit une question
réglée.
Evidemment, ce sont aux autorités locales à demander
d'être assujetties à la loi existante. C'est-à-dire qu'il
appartient à chaque conseil municipal de déterminer les
conditions qui existent dans la localité concernée, et à
la suite d'un examen de la situation, de demander au lieutenant-gouverneur en
conseil d'être assujetti à la loi en question. De telle sorte que
c'est une mesure qui nous est demandée par les conseils municipaux de
chaque municipalité.
Alors, M. le Président, sans autre préambule, je
présente une motion à l'effet que ce projet de loi soit
adopté en deuxième lecture.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Maskinongé.
M. Rémi Paul
M. PAUL: M. le Président, nous venons d'assister à la
présentation rituelle et je dirai quasi sacramentelle du principe d'une
loi qui est devenue permanemment annuelle. Depuis 1950, 1951, celle loi
s'impose, afin de corriger certaines situations qui, dans les milieux,
pourraient devenir des situations vraiment intolérables et même
créer des problèmes injustes à l'endroit des
défavorisés, des économiquement faibles.
Nous ne pouvons pas être contre le principe de cette loi;
cependant, j'ai été déçu. J'ai été
déçu, non pas de la teneur du discours du ministre responsable de
la Régie des loyers, mais des brèves remarques qu'il nous a
adressées, parce que j'aurais cru, M. le Président, que le
ministre de la Justice aurait saisi cette occasion pour nous annoncer une loi
concordant avec une motion dont il fut, un jour, l'auteur, soit en avril 1969,
motion aux fins d'étudier le problème des locataires dans la
ville d'Outremont et la région de Montréal.
C'était une motion tellement urgente qu'elle a été
consacrée comme étant la motion Choquette. Le gouvernement a
alors accepté les propos que tenait à l'époque le
député d'Outremont qui, à moins que je ne m'abuse, est le
même aujourd'hui.
M. BERTRAND: II y a plusieurs personnes en lui.
M. PAUL: Je crois que l'occasion aurait été toute choisie
pour que le ministre nous informe qu'il avait l'intention de créer un
comité spécial sur la question du logement et de la construction
domiciliaire non seulement dans la région de Montréal, mais dans
toute la province. Nous aurions eu ainsi une continuité de pensée
entre l'Opposition et le pouvoir. Je n'en fais pas un reproche au ministre; je
suis sûr que c'est probablement le fardeau des nombreuses
responsabilités qui le force à reporter jusqu'à la
prochaine session cette for- mation du comité spécial dont il
nous a entretenus avec intérêt et émotion et que nous
avions discutée avec enthousiasme parce que nous y voyions à
l'époque des arguments au soutien de la formation de ce comité.
Je vous prie de croire, M. le Président, que les arguments
soulevés à l'époque par le député
d'Outremont étaient tellement valables et sérieux que si nous
avions gardé le pouvoir cette commission serait déjà en
action depuis bientôt quelques mois.
Cette législation, qu'on nous demande aujourd'hui de renouveler
parce qu'elle arrivera à terme au mois de mars 1971, est
nécessaire parce que nous n'avons qu'à nous référer
à la liste... Je ne voudrais pas qu'il soit dit que j'ai l'intention de
discuter article par article mais je voudrais simplement signaler le nombre de
municipalités qui se prévalent aujourd'hui des dispositions de
cette loi concernant la conciliation entre locataires et propriétaires.
Le tout résulte d'une excellente législation qui a
été présentée par l'ancien gouvernement, soit le
bill 12. Sans vouloir jeter de blâme sur qui que ce soit; sans vouloir
non plus nous attribuer des mérites trop généreux, je
dirai qu'à l'époque, nous avons présenté une
législation qui a permis aux conseils municipaux de prendre leurs
responsabilités. Si nous avons toute cette liste de municipalités
qui aujourd'hui se prévalent des avantages de la conciliation entre
locataires et propriétaires, c'est parce qu'elles ont
bénéficié du mécanisme du bill 12 qui
prévoit qu'une municipalité doit, avant le 1er novembre de chaque
année, informer la Commission des loyers de son intention de se
prévaloir du mécanisme d'application de la loi.
Quelques-uns iront jusqu'à prétendre... Ce point, je n'y
toucherai pas trop parce que l'honorable député de Maisonneuve
soulèvera peut-être cette question qui, je le sais, a
déjà été débattue à la CSN.
S'il y a un problème particulier dans la ville de
Montréal, je crois qu'il appartient aux autorités municipales de
se prévaloir du mécanisme du bill 12 et qu'il y aura
peut-être lieu d'étendre ou de prolonger les périodes
prescrites par les dispositions de cette loi.
Je comprends parfaitement la situation dans laquelle se trouve
placé le ministre responsable de l'application de cette loi. Veuillez
croire, M. le Président, que le ministre recevra notre appui dans
l'application de cette loi, sachant qu'il saura garder les fonctionnaires
expérimentés et compétents qui oeuvrent, pour certains
d'entre eux, depuis 1941.
A cette époque, cette disposition de la loi relevait de la
compétence du gouvernement fédéral, puisque c'était
durant la guerre. Ce n'est qu'en 1951 que le provincial est intervenu dans ce
domaine, par suite du retrait des autorités fédérales.
Qu'il me soit permis de rendre un hommage bien mérité à
tous ceux qui, à la régie et à la commission, font un
travail de
dévouement, de renseignement et d'efficacité
administrative qui les honore.
Entre autres, je crois que la cheville ouvrière du bon
fonctionnement de toute cette opération est M. Gaston Massie. Il a
acquis une expérience dans l'application fédérale de la
loi et il est resté en poste malgré tous les remue-ménage
et toutes les tempêtes que peuvent apporter les changements de
gouvernement.
Les statistiques que nous a données le ministre de la Justice,
responsable de l'application de cette loi, nous prouvent la
nécessité de maintenir tout le personnel et le mécanisme
de fonctionnement afin d'éviter certains chaos économiques dans
les paroisses où il y a des crises de logement ou des situations
particulières qui forcent les conseils municipaux à intervenir
avec des législations particulières qui diffèrent d'un
endroit à l'autre, et ce, en vertu de la latitude que leur donne le bill
12.
C'est une législation excellente qui s'impose; elle est
nécessaire. Au lieu de voir le gouvernement aux prises avec
l'application d'une loi de portée générale, alors que les
conditions économiques peuvent être différentes d'un
endroit à l'autre, ce sont les municipalités qui ont le
mécanisme opérationnel voulu pour corriger les situations, mais
toujours, cependant, sous l'administration et sous la gouverne de la commission
et de la Régie des loyers, sous l'oeil vigilant du ministre responsable,
le ministre de la Justice.
M. le Président, c'est avec empressement que nous appuierons ce
projet de loi en deuxième lecture.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Mégantic.
M. Bernard Dumont
M. DUMONT: Merci, M. le Président. Nous avons devant nous ce
projet de loi no 46, Loi prolongeant et modifiant la loi pour favoriser la
conciliation entre locataires et propriétaires. Ce que nous avons
à dire de ce projet de loi, c'est que ni des louanges, ni des
protestations vigoureuses ne nous ont été faites, même si
l'Union Nationale, dans le temps, avait continué, selon les paroles du
député de Maskinongé, à administrer cette loi,
amendée aujourd'hui par le ministre actuel. Souvent, quand on parle en
bien ou en mal d'un projet de loi, c'est tout simplement parce qu'on a à
s'en plaindre ou qu'on voudrait le voir améliorer.
Comme nous n'avons pas eu tellement de plaintes, je me contenterai de
poser quelques questions au ministre de la Justice. Entre autres, il nous a
fait mention de 10,000 différends tout à l'heure. Ma
curiosité a été piquée et j'aimerais savoir combien
il y a de questions financières qui ont été
discutées entre propriétaires et locataires, lorsque ces derniers
trouvaient le prix trop élevé. Dans les 10,000 cas, combien
peut-il y en avoir eu pour cela?
L'autre question est la suivante: Dernièrement, j'ai reçu
à mon bureau du comté des appels à l'effet qu'un certain
avocat, du palais de justice de la ville de Thetford Mines, donnait, dans le
passé, des renseignements. Apparemment du moins, c'est la version
qu'on m'a donnée; je n'ai pas vérifié et je pose la
question au ministre cet avocat ne serait pas désigné pour
continuer à donner des renseignements concernant les
propriétaires et locataires. Je ne sais pas si c'est une nouvelle
politique ou une information qui a été transmise à cet
avocat ou si ce dernier ne trouvait pas cela assez rémunérateur
de continuer d'informer la population.
Je pose la question, car ce sont à peu près les seuls
griefs que j'ai reçus de ma circonscription ou d'ailleurs dans la
province.
Tous ensemble, nous aussi, parce qu'il ne semble être ni mauvais,
ni tellement digne de louange, il ne semble pas faire de mal à personne,
nous serons en faveur de ce bill.
M. Robert Burns
M. BURNS: M. le Président, nous aussi nous sommes, bien
sûr, d'accord avec le principe de ce bill, comme nous l'avons
été pour la loi de la protection du consommateur, puisqu'il
s'agit, à toutes fins pratiques, d'un projet de loi protégeant
une catégorie de consommateurs, c'est-à-dire les locataires. Du
moins, c'est comme ça que nous aimerions envisager cette loi.
Malgré tout l'enthousiasme que nous apportons à l'appui du
principe de ce bill, nous le trouvons, évidemment, un peu restrictif et
nous pensons qu'il ne va peut-être pas assez loin à certains
égards. C'est brièvement, sur ces divers aspects, que j'aimerais
faire des remarques relativement au projet de loi no 46.
J'espère que, suite aux reproches que le député de
Maskinongé faisait à l'égard du député
d'Outremont, on ne me fera pas les mêmes reproches lorsque le groupe dont
je fais partie sera au pouvoir; dans ce temps-là, je tenterai de les
mettre en vigueur, si on me le permet.
M. BERTRAND : Dans combien d'années ça?
M. BURNS: Bientôt. Très bientôt. De toute
façon, voici la première critique que j'aurais à faire
valoir contre cette loi, le député de Maskinongé ayant
abordé le sujet. Il s'agit d'une loi dont les dispositions provenaient
du fédéral, avant 1951, et qui ont été prises en
charge, à bon droit puisque c'est sa juridiction, par le gouvernement
provincial, en 1951, qui, depuis, d'année en année a
renouvelé la loi. Nous nous demandons véritablement s'il ne
s'agirait pas, après 19 ans, de nous poser la question suivante:
Pourquoi ne rendrions-nous pas ce texte législatif permanent au lieu
de,
continuellement, de façon rituelle, revenir tous les ans devant
l'Assemblée nationale pour prolonger à nouveau les dispositions
de ce bill?
Selon nous, cela aurait un avantage et c'est évidemment celui de
la politique à long terme. Vous avez actuellement une commission des
administrateurs, des fonctionnaires qui sont dans le cadre d'une loi qui existe
d'année en année, qui est sujette à être
éteinte d'année en année. Selon nous, ça
favoriserait une politique à long terme de la commission des loyers, de
rendre ou de donner à cette loi le caractère permanent dont elle
a besoin.
De deux choses l'une; ou bien, c'est une véritable farce de
revenir constamment devant l'Assemblée nationale, alors que tout le
monde se dit que ce sera prolongé, ou bien ce n'est pas une farce et,
à ce moment-là, des politiques à long terme peuvent
difficilement être envisagées dans le domaine de l'habitation.
C'est la première critique que j'ai à faire valoir
à l'encontre de la loi. Nous aimerions, plutôt que de voir une loi
prolongée d'année en année pour des fins que nous
approuvons, évidemment, voir cette loi avoir un caractère de
permanence.
Le deuxième point que j'aimerais soulever concerne la
juridiction. L'article 33a) M. le Président, je ne veux pas entrer
dans le détail, mais je le mentionne, il s'agit quand même d'un
point assez important dans la loi l'article 33a) réserve aux
municipalités qui y sont désignées ainsi qu'à
celles qui en font la demande la juridiction de cette loi. Nous nous demandons,
encore une fois, pourquoi le gouvernement provincial, par l'entremise de
l'Assemblée nationale, ne prend pas l'initiative d'étendre cette
loi à toutes les municipalités. Si on s'arrête au concept
de la municipalité, qui en soi est une créature de
l'Assemblée nationale, il est concevable que ce soit plutôt le
rôle du gouvernement provincial de décider de la juridiction.
A partir du moment où on a accepté qu'il est important de
protéger cette catégorie de consommateurs qui s'appellent les
locataires, je me demande pourquoi on n'étend pas la juridiction de
cette loi à toutes les municipalités plutôt que de laisser
aux municipalités elles-mêmes le choix de décider si
ça s'appliquera ou non.
Par analogie, je me demande ce que le ministre de la Justice aurait dit
si nous étions arrivés avec un amendement, par exemple, sur la
loi de la protection du consommateur et si nous avions dit: La loi de la
protection du consommateur ne s'appliquera que dans les municipalités
où les conseils municipaux le décident. Il y a un
parallèle évident à faire. Et pas plus que nous n'aurions
été d'accord avec cette formule relativement à la
protection du consommateur, nous ne pouvons être d'accord avec une
juridiction qui est décidée par des corps qui sont des
créatures de la Législature provinciale.
Il y a un autre problème qui est évident dès qu'on
s'arrête à y penser, lorsque ce sont les municipalités qui
décident. Je n'ai pas besoin de discuter longtemps sur le fait que plus
le pouvoir est local, plus il est sujet à des pressions
d'intérêt, plus le conseil municipal va être sujet à
écouter les pressions venant principalement, et très souvent
principalement, des propriétaires qui, dans encore beaucoup de
municipalités, sont ceux qui détiennent le pouvoir. C'est une
question de fait, malheureusement, qui relève de l'histoire, mais qui
est là quand même.
Sur ce point, nous considérons donc que l'Assemblée
nationale devrait prendre sa responsabilité et, évidemment, si on
croit que ce bill doit être prolongé, doit exister en vue de la
protection, encore une fois, de ce type de consommateurs qui s'appellent les
locataires, il devrait être étendu à toutes les
municipalités de la province.
Un autre point nous préoccupe, M. le Président, c'est
celui relatif au fait qu'il est d'abord évident que nous devons
reconnaître que les coûts des loyers doivent de se tenir au pair et
augmenter selon le coût de la vie. Je pense que quelqu'un qui arriverait
à dire que les loyers doivent être absolument bloqués,
gelés, sans égard à la progression de l'indice du
coût de la vie, serait peu réaliste.
Pour cette raison, nous nous demandons s'il n'y aurait pas lieu de
réexaminer toute la technique de l'augmentation du loyer. Le ministre
nous a cité tantôt des chiffres qui sont quand même
très intéressants et qu'il est bon d'examiner en regard de ce que
j'ai l'intention de suggérer. S'il y a eu 10,000 différends et
200,000 informations, il est assez difficile de voir dans les 200,000
informations la proportion de ce qui aurait pu être d'éventuels
différends qui ont été bloqués à cause d'une
information ou pas.
Il reste quand même qu'on s'aperçoit qu'il pourrait y avoir
diminution du côté administratif de la commission, si la
commission, toujours vue dans une optique de permanence de cette loi et dans
une optique de juridiction complète sur le plan du territoire de la
province, pouvait avoir la juridiction comme d'autres régies
l'ont d'ailleurs, en matière d'électricité par exemple, en
matière de gaz d'édic-ter des augmentations automatiques
pour le territoire au complet.
On peut envisager que cette commission pourrait entendre les parties
intéressées, les mouvements, les groupes de pression, etc., qui
feraient valoir le pour et le contre d'une augmentation automatique lorsque
nécessitée par l'augmentation du coût de la vie. Partant de
là, on pourrait envisager que le nombre de plaintes, le nombre de
différends serait énormément diminué. On se
retrouverait probablement avec beaucoup moins de plaintes, étant
donné que le problème aurait déjà été
discuté globalement.
Au lieu de voir les administrateurs de la Commission des loyers
obligés de se pencher individuellement sur des cas qui ne sont
normalement que des cas qui arrivent à cause de l'augmentation de
l'indice du coût de la vie, cela nous permettrait d'envisager que si un
propriétaire réclame j'aurai, en comité
plé-nier, un amendement à proposer en ce sens une
augmentation de loyer supérieure à ce coût
déjà décidé par la commission avec les experts, les
techniques, les statistiques et les informations utiles à ces fins,
qu'il s'adresse lui-même à la régie. On reviendrait, dans
cette optique, à ce qui est normal dans les relations de plaideur, au
sens large du mot, c'est-à-dire que celui qui, habituellement, veut
quelque chose est celui qui s'adresse au tribunal pour l'obtenir.
Il serait donc possible de considérer que ce soit le
propriétaire qui s'adresse à la Commission des loyers.
Enfin, dans les cas de contestation., nous croyons que ce bill devrait
comporter une disposition qui permette au locataire, lorsque ce dernier
n'obtient pas gain de cause, c'est-à-dire lorsque le loyer est
augmenté à un montant supérieur à ce qu'il croit
acceptable, donc justifiant le différend, au départ même
dans l'éventualité où l'administrateur donne raison au
propriétaire sur l'augmentation, de mettre fin à son bail
en donnant avis au cours du mois.
Voici pourquoi nous pensons que cette disposition est justifiée.
Il est normal de penser qu'un locataire qui se présente devant un
administrateur de la Commission des loyers en contestant une augmentation de
loyer ne le fait pas simplement par caprice. Il peut se présenter des
cas de caprice mais j'imagine que la majorité des gens qui prennent la
peine de s'adresser à cet organisme le font parce qu'ils sentent, de
deux choses l'une: ou bien ils sont incapables de payer le loyer tel que
suggéré par l'augmentation, ou bien le lieu loué ne vaut
pas, à leurs yeux, le montant du loyer proposé par le
propriétaire. Dans l'un ou l'autre cas, il ne serait que juste que si
l'administrateur donne raison au propriétaire qui veut faire cette
augmentation ... Pardon?
M. CHOQUETTE: Ça ne sera pas comme aller aux courses.
M. BURNS: Ce ne sera pas comme aller aux courses, M. le
Président. Ce sera comme dans toute contestation judiciaire où
une partie a toujours une décision à prendre. Un locataire
conteste une décision d'un propriétaire. Le locataire se trouve
"encarcané" dans un bail, parce que, la plupart du temps, le bail est
prolongé et, selon ma petite expérience dans ce domaine, dans la
grande majorité des cas, la décision arrive après la
reconduction du nouveau bail. Voilà un locataire qui est pris, pour une
année, dans une situation telle que si on lui avait dit d'avance qu'il
était pris dans ce système, il n'aurait peut-être pas
accepté. De là l'importance, selon nous, de cette faculté
que le locataire devrait avoir en cas d'augmentation,
décrétée par l'administrateur, de mettre fin au bail
après un avis raisonnable, un avis d'un mois que nous
suggérerons, éventuellement.
Enfin, et c'est mon dernier point, M. le Président, tout ce
problème tourne autour d'un document qui s'appelle le bail. Nous ne
comprenons véritablement pas pourquoi cette loi ne comporte pas,
à la suite de suggestions de nombreuses organisations, de bail type, de
modèle de bail. Encore une fois, je fais l'analogie avec la loi du
consommateur. Il n'y a pas de contrat type dans la loi du consommateur, tel que
proposé par le gouvernement. Mais il y a tellement de précisions
concernant les clauses à trouver dans les contrats relatifs à
cette loi que, à toutes fins pratiques, nous avons devant nous, ou nous
devrons peut-être rédiger un contrat type.
Pourquoi alors, dans le cas de ce consommateur très important
qu'est le locataire et soit dit en passant, à Montréal, on
nous dit que 80 p. c. des gens sont des locataires; cela commence à
être important pourquoi n'aurions-nous pas de baux types dans la
loi?
Je ne cite que deux organismes qui ont fait des représentations
à cet égard, dont l'un qui s'appelle "Le comité sur
l'habitation et la rénovation urbaine de la région
métropolitaine de Montréal", a remis un mémoire
très documenté au gouvernement précédent, en date
du 26 novembre 1969. Vous avez eu, également, les divers organismes
syndicaux, dont le Conseil central de Montréal des syndicats nationaux,
qui se préoccupent beaucoup de la situation du locataire.
Le bail, en soi, est un contrat bilatéral ou, pour faire plaisir
à mon collègue de Maskinongé, un contrat synallagmatique,
c'est-à-dire où deux parties doivent donner leur adhésion
à un contrat après l'avoir discuté. Ce bail qui, à
l'origine, devrait être bilatéral, on se rend compte qu'en
pratique c'est un contrat d'adhésion, c'est-à-dire que le
propriétaire, selon des baux qu'il achète à tant de
dollars le cent, dans des entreprises qui se spécialisent dans ce genre
de travail, soumet son bail au locataire, et c'est purement et simplement un
contrat d'adhésion, c'est-à-dire que le locataire n'a
pratiquement pas la faculté de discuter d'autre chose que du loyer et
non des clauses qui s'y trouvent. Le locataire se trouve automatiquement, s'il
veut louer ce genre de logement, obligé de signer le bail.
Selon nous, une façon d'éviter ce contournement du contrat
bilatéral en le faisant progresser vers le contrat d'adhésion, ce
serait d'inclure le contrat, le bail type dans la loi. Je pourrais citer une
série de conditions qui sont,
justement, imposées au locataire dans ces baux
préparés à l'avance, imprimés par milliers et
où personne n'a vraiment quelque chose à dire sur le
problème du nombre d'enfants, le problème des animaux dans la
maison, le problème de la sous-location, etc, qu'on impose au locataire
sans qu'il ait quoi que ce soit à dire. Il n'a, à toutes fins
pratiques, qu'une seule chose à dire: Je n'adhère pas. Donc, je
ne loue pas. Dans ces circonstances, on trahit le véritable sens du bail
et, comme je le disais tantôt, d'un contrat bilatéral, on fait un
contrat d'adhésion où la bilatéralité est
très peu présente.
Ce sont les quelques remarques, M. le Président, que j'avais
à faire. Nous en aurons d'autres devant le comité plénier.
Qu'il soit quand même retenu que nous sommes, de façon
évidemment enthousiaste, en faveur du principe de ce bill, tellement
enthousiaste que nous trouvons qu'il ne va pas assez loin. J'espère
qu'éventuellement quand nous proposerons nos amendements dans ce sens,
le gouvernement saura en tenir compte. Merci, M. le Président.
M. LE PRESIDENT (Brown): Y a-t-il d'autres répliques?
Le ministre de la Justice.
M. CHOQUETTE: M. le Président, je voudrais évidemment
féliciter le député de Maskinongé de la
mémoire qu'il a des motions que j'avais présentées en
Chambre lorsque j'étais dans l'Opposition.
M. BERTRAND: Une meilleure mémoire que vous!
M. CHOQUETTE: Pardon?
M. PAUL: Est-ce que l'honorable ministre me permet, dans le but de lui
rappeler ses bons coups à l'Assemblée, que c'est au journal des
Débats de 1969, page 179.
M. BERTRAND: C'est devenu un document historique.
M. CHOQUETTE: Mais, M. le Président, ce que le
député de Maskinongé n'a pas dit, c'est que la commission
qui avait été formée pouvait siéger, si je me
rappelle bien, d'après la décision de la Chambre, entre les
sessions, et qu'en somme, cette commission n'est pas
décédée, n'est pas morte, parce que la commission avait
été instituée pour les questions qui relèvent du
logement et de l'habitation en général.
Elle a entendu un certain nombre d'organismes et de personnes. Elle a
reçu des mémoires et sur ces entrefaites est survenu
l'ajournement qui a précédé la dernière
élection, celle du 29 avril dernier. Par la suite, évidemment,
nos préoccupations ont été concentrées sur d'autres
sujets qui étaient peut-être plus critiques que cette
commission.
Mais je puis assurer l'honorable député de
Maskinongé que l'intérêt de l'ancien et actuel
député d'Outremont, comme celui du ministre de la Justice n'a pas
diminué quant à ces questions et que je lui donnerai probablement
le plaisir, en temps et lieu, au début ou au cours de la prochaine
session, de réunir de nouveau cette commission de façon qu'elle
puisse continuer le travail qu'elle avait entrepris sur mon insistance quand
j'étais député dans l'Opposition. Evidemment, tout le
monde se rend compte que, dans la province de Québec, il y a un
problème économique, un problème social, un
problème familial, un problème individuel au niveau du logement
et de l'habitation.
Je ne vais pas parler longuement de cette question parce qu'il y a d'une
part des économistes, en particulier des amis de nos collègues du
Parti québécois, qui ont déjà insisté sur
cet aspect. Au point de vue social on sait, par exemple, que dans la ville de
Montréal au moins 70 p. c. de la population est locataire, tandis que
dans la ville de Toronto les proportions sont exactement inverses, avec les
conséquences que ceci entrafne sur le plan de l'aisance et du confort
des personnes et également, je pense, sur le plan de la
société pour autant qu'on puisse l'examiner sous le rapport de la
stabilité parce que, à mon sens, une honnête aisance de
propriétaire ne peut en somme que favoriser la stabilité sociale.
A ce point de vue là, il nous faut reconnaître je pense
qu'on le reconnaîtra d'emblée que la situation qui
prévaut dans la ville de Toronto a des avantages sur celle qui
prévaut à Montréal.
Que dire également de la situation familiale, puisque tout le
monde sait qu'en bonne partie la prolongation de cette loi vise à
protéger justement les familles nombreuses, les familles où il y
a beaucoup d'enfants et qui ont de la difficulté, dans l'état
actuel de la construction, à trouver des logements suffisamment vastes,
suivant les moyens financiers du chef de la famille. Par conséquent, il
devient nécessaire de trouver ce mécanisme régulateur qui
fait que l'impact de l'augmentation des loyers n'est pas tellement percutant
sur le chef de famille lorsqu'il habite un logement vétuste et que son
propriétaire, évidemment, cherche à l'augmenter pour faire
face à des coûts sans doute croissants, mais qui peuvent
constituer un obstacle presque insurmontable pour celui qui est locataire et
chef d'une famille nombreuse.
Par conséquent, l'intérêt que je porte à la
question est toujours aussi immédiat qu'il l'était à
l'époque, mais je pense qu'aujourd'hui tout le monde se rend compte que
nous n'avons pas fait les études voulues, que nous n'avons pas la
documentation nécessaire, que le sujet n'a pas été
approfondi d'une façon suffisamment adéquate pour nous permettre
d'arriver, comme le disait tout à l'heure le député de
Maisonneuve, avec une loi permanente dans ce domaine. Mais je peux l'assurer
que le président de la Commis-
sion des loyers, le juge Lionel Ross, a été chargé
de préparer une refonte de la loi qui sera prolongée par ce bill
que nous adopterons dans quelques minutes, refonte qui serait faite dans
l'optique d'une loi qui serait permanente et qui viendrait au secours des
locataires dans les diverses localités du Québec.
Quant à savoir si cette mesure devrait s'étendre à
toutes les municipalités, quelles que soient les conditions qui peuvent
prévaloir dans chaque localité ou dans chaque
municipalité, il s'agit encore là d'une question que l'on peut se
poser.
Je comprends parfaitement le député de Maisonneuve de se
la poser, mais je ne pense pas qu'actuellement, avec les données que
nous possédons, nous sommes en mesure de trancher la question d'une
façon définitive et de dire qu'il faudrait établir une loi
qui s'étendrait à tout le Québec.
M. BURNS: Puis-je poser une question au ministre?
M. CHOQUETTE: Sans doute.
M. BURNS: Quelles seraient, selon lui, ces données que nous
n'avons pas et qui seraient nécessaires pour prendre une décision
sur cette juridiction totale dans le Québec?
M. CHOQUETTE: Cette loi cherche à régler la crise du
logement, tant au point de vue du nombre que du coût des logements, dans
les diverses régions ou municipalités du Québec.
Je considère donc qu'avant de l'étendre à tout le
territoire du Québec il faudrait savoir si l'état de crise existe
d'une façon suffisamment généralisé pour que nous
devions abandonner le système en vertu duquel la décision finale
repose sur les autorités locales. Le principe de ce projet de loi, c'est
que c'est l'autorité locale qui, constatant un besoin, demande au
lieutenant-gouverneur en conseil l'application de cette loi.
J'ajouterai, en réponse à l'intervention du
député de Maisonneuve, que les amendements qui furent
apportés, je crois, à l'automne 1969, permettant aux locataires
de voter aux élections municipales et de se faire élire dans les
conseils municipaux, soit comme conseillers ou comme maires, donnent aux
locataires une influence beaucoup plus considérable sur la politique des
conseils municipaux que celle qui existait avant.
Par conséquent, il serait erroné, à l'heure
actuelle, de dire que l'influence des propriétaires a plus de poids que
celle des locataires. Au total, je considère que nous avons fait le
nécessaire, pour le moment. Mais, je serais le dernier à dire
qu'il s'agit d'une question réglée et qu'il faudra toujours
conserver cette loi dans son état de "permanence annuelle", comme le
disait tout à l'heure le député de
Maskinongé. C'est donc que je me rends compte de la force des
arguments qui ont été soulevés de l'autre
côté de la Chambre. Je ne pense pas qu'à l'heure actuelle
nous soyons en mesure de prendre une décision éclairée.
C'est la raison pour laquelle, aussitôt que possible, nous pourrons,
à cette commission dont j'ai été à l'origine,
examiner le problème de la permanence d'une loi s'appliquant aux
différends entre locataires et propriétaires. Je pense que nous
serons en mesure de prendre une décision finale dans ce
domaine-là avant que l'année prochaine, à pareille date,
je sois obligé de revenir avec ce projet ou avec un projet
identique.
Maintenant, l'honorable député de Mégantic m'a
posé des questions. Il m'a demandé quelle était, je pense,
la nature des litiges qui avaient été tranchés par la
Commission ou par la Régie des loyers. Je ne suis pas en état de
lui donner une réponse précise, parce qu'on sait que la
Commission des loyers peut trancher des litiges de différentes
catégories. Mais, je lui dirai que, sans aucun doute, les 10,000 litiges
portaient principalement sur la valeur du loyer. En somme, il s'agissait
d'ajuster les réclamations du propriétaire aux moyens du
locataire.
Quant au conseiller juridique dont il déplore la disparition du
palais de justice de Thet-ford-Mines, je peux l'assurer que je vais examiner la
situation et que nous saurons y remédier.
L'honorable député de Maisonneuve a également
soulevé la question d'un bail type. Actuellement, je suis en mesure de
lui dire que la Commission de révision du code civil a justement
étudié et fait un rapport sur le chapitre qui traite des
relations entre locateurs et locataires.
Mais il m'a semblé que le temps n'était pas
approprié, parce que les suggestions qui nous ont été
faites n'étaient pas encore suffisamment au point pour que nous soyons
en mesure d'apporter à la Chambre un projet dont nous pourrions
être parfaitement satisfaits comme gouvernement.
Il est incontestable que, dans le contexte actuel, comme partout dans le
monde, la situation des locataires mérite notre préoccupation.
Elle le mérite. Même une province comme l'Ontario s'est
penchée sur le problème puisqu'on a institué une
commission, la commission McRuer, qui a produit un rapport établissant
quelles devaient être les règles de droit qui s'appliquent, en
1970 ou dans la période contemporaine, entre locataires et
propriétaires. Tout le monde se rend compte que la base du droit, entre
locataires et propriétaires, est extrêmement ancienne; elle date
peut-être du XVlle et du XVllle siècle; il y a peut-être un
certain nombre de droits qui ont été consacrés, par les
locataires à l'endroit des propriétaires, au cours des
siècles. Ces droits devraient être corrigés de
façon que la législation soit absolument contemporaine
dans ce domaine-là.
Le gouvernement se préoccupe donc de cette question. Nous ne
pensions pas, avec toutes les crises que nous avons traversées
récemment, que nous étions prêts à apporter une
législation définitive tant sur le plan de la conciliation entre
locataires et propriétaires que sur le chapitre du code civil qui traite
des relations entre les propriétaires et les locataires. Là
encore, il pourra s'agir d'une question que nous pourrions examiner à
cette commission de l'habitation et du logement de façon qu'au cours de
l'année prochaine nous puissions apporter une législation
véritablement au point. Ce sont les seules observations que j'avais
à faire sur ce sujet, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Cette motion de deuxième lecture sera-t-elle
adoptée? Adopté.
LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose que je
quitte maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en comité
plénier. Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
Comité plénier
M. BLANK: (Président du comité plénier): Article
1.
M. PAUL: M. le Président, c'est avec intérêt que
nous avons écouté le ministre de la Justice. Il me permettra
cependant de différer peut-être un peu d'opinion avec lui au sujet
de cette commission qu'il aurait l'intention de faire revivre. Lors de la
motion qu'il avait présentée en avril 1969, envisageant
l'étude de toute la situation des locataires dans le Québec,
l'honorable ministre avait proposé la formation d'une commission
spéciale. S'il s'en souvient, c'était une commission
spéciale. A la suite de discussions de bon aloi que nous avions eues
avec le leader de l'Opposition de l'époque, M. Pierre Laporte, et
l'honorable ministre, nous avions convenu de référer tout ce
problème à la commission des Affaires municipales...
M. CHOQUETTE: C'est exact.
M. PAUL: Parce que la commission des Affaires municipales est
l'organisme tout choisi, en vertu de nos règlements sessionnels, pour
entendre la Société d'habitation du Québec sur toutes les
implications de la question du logement dans le Québec. A ce
moment-là c'est là que je me permets de différer
quelque peu d'opinion avec l'honorable ministre cette commission avait
reçu un ordre de la Chambre d'étudier un point, un domaine ou une
question particulière.
Quand le ministre dit que la commission n'est pas morte, je soumets
respectueusement que je ne puis partager son point de vue en vertu des
dispositions de l'article 10 de notre règlement qui dit: "Lorsqu'une
session est prorogée, tous les ordres qui n'ont pas été
adoptés sont rescindés, donc reviennent caducs." Je crois que,
pour éviter toute ambiguïté ou toute discussion possible, il
y aurait lieu, durant la prochaine session, de donner un nouveau mandat bien
déterminé à la commission des Affaires municipales visant
à aérer tout ce problème des relations entre locataires et
propriétaires.
On pourrait juger de l'opportunité ou de la
nécessité de présenter une loi-cadre susceptible de
corriger toutes les situations auxquelles le locataire et quelquefois
également le propriétaire doivent faire face.
Si, comme le disait le député de Maisonneuve, c'est une
loi pour protéger le locataire, c'est un mécanisme
opérationnel qui protège également le propriétaire
qui se voit imposer de nouvelles taxes. La commission possède des
barèmes d'ajustement et de vérification de loyer qui tendent
à établir un certain équilibre entre les droits et les
obligations du propriétaire et du locataire.
Nous avons noté avec plaisir les remarques du ministre de la
Justice. Il n'y a aucun doute qu'après consultation avec le leader
parlementaire cette commission des Affaires municipales sera appelée
à siéger dès le début de la prochaine session pour
que nous puissions envisager l'opportunité d'adopter une
législation corrigeant la situation que décrivaient tout à
l'heure et le ministre et le député de Maisonneuve.
M. CHOQUETTE: Est-ce que je pourrais seulement faire une brève
réponse au député de Maskinongé et lui dire que,
sur le plan juridique, je m'incline devant son interprétation qui me
parait tout à fait justifiée? Il a rafraîchi un peu ma
mémoire quant au mandat qui avait été confié
à la commission des Affaires municipales. Le député a tout
à fait raison; c'était la commission des Affaires municipales. La
commission des Affaires municipales, qui est une commission permanente, pourra
reprendre les travaux de l'ancienne commission là où elle les
avait laissés et continuer le travail.
M. BURNS: M. le Président, avant d'étudier le projet
article par article, j'aimerais dire que j'ai été bien
intéressé personnellement par les chiffres que le ministre nous a
cités tantôt, soit les 10,000 différends et les 200,000
informations qui ont été demandées, si je comprends bien
au cours de l'année dernière.
M. CHOQUETTE: Cette année.
M. BURNS: Apparemment, cette Commission des loyers n'émet pas de
rapport annuel, tel que le font diverses autres commissions. Est-ce l'intention
du ministre de voir à ce qu'un rapport formel soit déposé,
afin qu'au moins les membres de l'Assemblée nationale puissent se tenir
au courant des activités de cette commission, activités,
évidemment, que je loue avec le député de
Maskinongé? Il serait bon, je pense, que nous ayons les détails
des différents travaux. Le travail obscur qui est fait à la
Commission des loyers pourra peut-être être amélioré
et encouragé de l'extérieur, quand il sera connu
véritablement en détail. On pourrait connaître aussi les
lacunes de cette commission qui fait peut-être face à des
problèmes administratifs ou autres.
C'est une suggestion que je fais au ministre. J'espère qu'il nous
sera donné, dans un avenir prochain, d'avoir un rapport annuel de cette
commission, comme beaucoup d'autres commissions gouvernementales le font.
M. CHOQUETTE: Je note avec intérêt la suggestion du
député. J'en ferai part au président de la régie et
je verrai dans quelles conditions il serait possible de produire un rapport au
nom de la commission.
M. LE PRESIDENT (Blank): Article 1 adopté?
M. BURNS: Article 1, M. le Président, je ne
répéterai pas les remarques que j'ai faites tantôt en
deuxième lecture concernant la permanence de la loi. Je me demande
simplement si les collègues accepteraient de suspendre l'étude de
l'article 1, parce que j'aurais des amendements à proposer à
l'article 2. Même si nous sommes en faveur de la permanence de la loi,
s'il arrivait que ce comité plénier se prononce en faveur de
certaines améliorations, même pour une courte période,
évidemment, ça pourrait changer notre attitude à
l'égard de l'article 1. Alors, je demanderais, si on n'a pas
d'objection, qu'on suspende l'étude de l'article 1 et qu'on passe
à l'article 2.
M. LEVESQUE: Suspendons. Mais je trouve que le député est
présomptueux.
M. BURNS: J'ai le droit d'être présomptueux.
M. CHOQUETTE: M. le Président, avant d'aborder l'étude de
l'article 2...
M. LEVESQUE: Confiant.
M. BERTRAND: Vous feriez peut-être mieux de ne pas parler de votre
force et de l'utiliser quand le temps viendra.
M. BURNS: C'est un aveu ça, cependant.
M. BERTRAND: Vous êtes mieux de ne pas parler de votre force
numérique.
M. LEVESQUE: Je ne parlais ni de la qualité ni de la
quantité, je parlais simplement d'un état de fait.
M. BERTRAND: Non, non, mais...
M. LAURIN: Comment le leader parlementaire peut-il préjuger de la
mauvaise qualité de notre amendement qui serait telle qu'il le
déclarerait inacceptable?
M. LEVESQUE: Pour répondre à ça, je dirais que j'ai
accepté de bonne grâce que l'on suspende l'article 1, que l'on
passe, mais, évidemment, on peut bien sourire.
M. LE PRESIDENT (Blank): Article 2.
M. CHOQUETTE: Avant d'en aborder l'étude, j'aurais un amendement
à soumettre.
M. LAURIN: Je ne sais pas si c'est un meilleur.
M. BURNS: Est-il meilleur parce qu'il vient de l'autre
côté?
M. PAUL: M. le Président, je me demande si le ministre a
oublié une ville dans son amendement. Il semblerait, d'après les
informations que j'ai, qu'une ville s'est prévalue des clauses et
dispositions de l'article 12, la ville de Waterloo.
M. BERTRAND: Waterloo, dans le comté de Shefford.
M. PAUL: Elle aurait, avant le 1er novembre, manifesté le
désir de se prévaloir des dispositions et des avantages de cette
loi. Peut-être, que nous pourrions adopter cet article et, connaissant la
vigilance du conseiller juridique du gouvernement, nous pourrions apporter la
correction et ajouter le nom de cette ville, si ça s'impose.
M. CHOQUETTE: Très bien.
M. PAUL: C'est parce que j'ai reçu de la correspondance à
cet effet. De mon côté, je pourrais peut-être l'envoyer
chercher.
M. CHOQUETTE: Très bien. M. Normand téléphone au
juge Deraspe pour savoir si la ville s'est conformée aux exigences et si
son nom doit se trouver dans la liste.
M. PAUL: Très bien.
M. BURNS: M. le Président, à l'article 2, j'ai
mentionné plutôt que nous aimerions voir la juridiction de cette
loi s'étendre à toutes les
municipalités. Nous soumettrions l'amendement suivant, en
remplaçant l'article 35, tel qu'il apparaît dans le bill, par les
mots suivants: "Nonobstant les articles 32, 33a) et 35a), la présente
loi s'applique, à compter du 1er janvier 1971, à toute maison
dès que celle-ci a été occupée comme lieu
d'habitation depuis au moins douze mois".
Si on me permet d'expliquer un peu brièvement cet amendement que
je propose d'ailleurs, je pense que je ne prenne personne par surprise,
je l'ai annoncé tantôt en deuxième lecture nous
soumettons un délai de mise en application au 1er janvier 1971 à
cette juridiction étendue à toute la province, pour des raisons
bien évidentes, c'est-à-dire pour ne prendre personne par
surprise au cas où cet amendement serait adopté. On me dit que je
suis présomptueux, j'ai l'impression que déjà la
décision du gouvernement de battre cet amendement est prise. Nous
verrons bien s'il va l'étudier sérieusement ou pas.
En second lieu, je voudrais relever ce que le ministre de la Justice
mentionnait tantôt, lorsqu'il a dit qu'il est erroné de penser que
le locataire est sous-représenté dans certaines
municipalités. Je pense que ça va être difficile pour
quelqu'un de nier ça, il y a certaines municipalités où le
locataire est minoritaire en soi. Et je pense, sauf erreur, à la ville
de Hauterive.
Je peux peut-être faire erreur dans le cas de la ville de
Hauterive, mais je sais qu'il y a un certain nombre de municipalités
où véritablement le locataire, même s'il a le droit de
voter depuis les récents amendements, est minoritaire. Cela pourrait
être facilement le propriétaire ou les propriétaires qui
décident, à toutes fins pratiques, de l'application ou de
l'absence d'application, de l'absence de juridiction de la loi. C'est pour
cette raison que nous croyons quand même, malgré tous les
arguments que le ministre de la Justice nous a donnés à l'effet
que certains projets sont à l'étude et que toutes les
données ne sont pas actuellement entre nos mains, que cette loi,
puisqu'elle vient à l'étude devant l'Assemblée nationale,
doit être bonifiée autant que possible. Ce n'est pas, selon nous,
une raison suffisante de dire que tout ce problème est à
l'étude. II l'est depuis 1951, soit dit en passant et de
dire aussi que c'est un problème qui mérite préoccupation.
Il ne faudrait pas qu'on règle un problème aussi important que
celui des relations entre locataires et propriétaires par des simples
énoncés de bonnes intentions, que j'endosse, remarquez. Je suis
bien d'accord pour que l'on revise totalement cette situation. Nous
espérons pouvoir, sur certains points très précis,
améliorer cette loi, même s'il était décidé
de la garder en vigueur seulement pour un certain temps jusqu'à une
refonte totale.
C'est pour cette raison que nous proposons cet amendement à
l'article 2.
M. CHOQUETTE: M. le Président, je ne vais pas
répéter ce que j'ai dit tout à l'heure dans mon
intervention en réponse à l'intervention de l'honorable
député. Je comprends que sa suggestion part d'un bon
naturel...
M. BURNS: Elles partent toutes de là.
M. CHOQUETTE: Oui, mais enfin celle-là en particulier. Je
comprends qu'il peut y avoir des arguments qui militent dans le sens de la
solution qu'il préconise et je tiens à lui dire que je ne les
rejette pas. Mais je ne suis pas convaincu que dans l'état actuel de nos
connaissances dans ce domaine, nous ferions nécessairement un pas en
avant avec l'amendement qu'il suggère.
Dans ces conditions, je ne peux pas l'accepter, mais je peux lui dire
que, quant à l'ensemble de la situation et en particulier quant à
l'amendement qu'il suggère, nous aurons l'occasion d'étudier sa
suggestion à fond, au cours de l'année prochaine, je pense, avant
de présenter un autre projet de loi annuel, comme je le lui ai
répondu tout à l'heure. Il ne faut pas oublier que si, dans
certaines régions, dans certaines municipalités, il n'y a aucun
problème sur le plan de la Régie des loyers, aucun
problème entre propriétaires et locataires, l'on peut se demander
si en étendant la loi à l'ensemble du territoire du Québec
nous ferions un pas administrativement justifiable et même justifiable
sur le plan des administrés. Je pose la question sans y répondre.
A mon sens, il demeure qu'il y a un gros point d'interrogation relativement
à l'amendement qu'il suggère. Pour cette raison, je crois que
pour cette année nous pouvons nous dispenser de l'amendement
suggéré. Mais comme je le dis, il sera considéré au
cours de l'année qui vient.
M. BURNS: M. le Président, j'aurais une seule question à
poser au ministre sur ce point. Quand il dit qu'il n'est pas certain
qu'administrativement parlant ce soit acceptable ou désirable, est-ce
que je dois comprendre que du côté administratif, la Commission
des loyers ne serait pas prête à faire face à ce genre
d'extension de la juridiction à tout le territoire? Est-ce que c'est ce
que je dois comprendre?
M. CHOQUETTE: II va de soi que cela pose des problèmes, et non
seulement sur le plan de l'extension des services de la Régie des
loyers. C'est sûrement là un des problèmes, mais ce n'est
pas celui que j'avais à l'idée au moment où je
m'exprimais. Je me demandais simplement s'il était opportun, sur le plan
de la bonne administration et des résultats que nous devons donner tant
aux locataires qu'aux propriétaires, d'étendre une administration
à
certaines municipalités où il n'y a pas de problème
réel à régler, si ceci était sage.
Je ne voudrais pas prendre cette décision avant que nous ayons
entendu les membres de la Commission des loyers, que nous ayons examiné
les conditions qui peuvent exister un peu partout dans le Québec avant
d'arriver à une solution définitive sur ce sujet. Il ne s'agit
pas, à mon sens, d'une décision que l'on puisse prendre à
la légère. On risquerait alors de faire encourir au gouvernement
des coûts administratifs additionnels, sans être assuré que
cela rendra véritablement service, parce que l'administration de cet
organisme et de la commission a coûté, au cours de l'année
dernière, près de $1 million. Dans l'état actuel des
choses, c'est le coût que cela représente pour le Québec.
Est-ce qu'il serait opportun de le faire? Je n'en suis pas satisfait à
l'heure actuelle. C'est la raison pour laquelle je ne peux pas accepter
l'amendement de l'honorable député.
M. PAUL: M. le Président, nous devons féliciter le
député de Maisonneuve pour la compassion et le bon esprit qui
l'animent. Je crois toutefois que le député de Maisonneuve a
été mal conseillé dans la rédaction de son article
35 tel qu'il nous le soumet, parce que, de la façon qu'il est
présenté, nous ne pourrions pas, avec cet amendement, mettre de
côté certaines dispositions des chapitres 79 et 80 des statuts de
1967, 17, Elizabeth II.
Je crois, M. le Président, que le député de
Maisonneuve est animé d'un bon esprit, mais, d'un autre
côté, voyez-vous la surprise générale, s'il fallait
que, dans dix jours ou quinze jours, tous les loyers soient gelés
à travers le Québec?
M. BURNS: Si on lit bien mon amendement, il ne devrait entrer en vigueur
que le 1er janvier 1971.
M. PAUL: C'est cela, 1971. Nous n'en sommes pas loin.
M. BURNS: Nous n'en sommes pas loin, mais...
M. PAUL: II reste à peu près quinze jours. M. le
Président, il faut saisir, dans l'intention du député de
Maisonneuve, qui se fait sans doute le porte-parole de tous ses
collègues et de nos collègues de l'Assemblée nationale, il
faut voir, dis-je, le but visé et le mécanisme
d'opération.
Le but visé est de tâcher de corriger certaines
inquiétudes, certaines situations qui existent dans le Québec et
spécialement dans les petits centres. Je dis, M. le Président,
que le pouvoir a déjà été donné aux
municipalités de corriger ces situations. D'un autre côté,
il nous appartient de légiférer pour le bien commun dans tout le
Québec. Il ne faut pas oublier, à cette période-ci, les
dispositions plus que généreuses du ministre de la Justice. Si
l'équipe actuelle était marquée d'une
libéralité aussi progressive et aussi socialiste, dans le bon
sens du mot, je crois, M. le Président, que nos débats seraient
parfois raccourcis.
C'est là, M. le Président, que le député
d'Outremont, qui est le ministre responsable de cette loi, et le
député de Maisonneuve et toute son équipe se
réunissent au sommet quant à la nécessité d'adopter
une législation. Le député de Maisonneuve voudrait y aller
par un amendement, le ministre de la Justice dit: II nous faut faire revivre
une commission pour aller de l'avant dans une législation, pour
éviter non pas ce pèlerinage, mais cette présentation
annuelle d'une loi qui doit être étudiée tous les ans par
l'Assemblée.
Je dis, M. le Président, que même si l'animus du
député est excellent, je crois que nous devons, dans les
circonstances, tenir compte des remarques qui nous ont été faites
par le ministre de la Justice, et surtout à cause du texte de
l'amendement qui n'atteindrait pas son but, même s'il était
adopté, les répercussions dans nos statuts seraient telles que
nous ouvririons un nid de procès. Et même si mon collègue
est un brillant juriste, je suis sûr qu'il se reprocherait lui-même
d'être responsable de certaines difficultés encore plus graves que
celles que connaissent aujourd'hui les locataires et les locateurs dans le
Québec.
Dans les circonstances, nous devons appuyer le ministre de la Justice
tout en retenant le bien-fondé de la suggestion du député
de Maisonneuve.
M. CHOQUETTE: Pourrai-je ajouter simplement une observation, M. le
Président? C'est que l'amendement suggéré par le
député n'aurait pas d'effet immédiat. Il n'a effet que
dans un an d'ici.
Or, il va de soi que, l'année prochaine, nous serions
obligés de revenir avec une autre loi. Par conséquent... Ah, le
1er janvier 1971...
M. BURNS: C'est bientôt, ça.
M. LE PRESIDENT (Blank): L'amendement est rejeté sur division.
L'article 2 est adopté sur division.
M. BURNS: Sur division.
M. SEGUIN: Si M. le Président veut me regarder, on va lui faire
face. Je brise un silence de six ou sept mois, silence volontaire et non pas
imposé, mais j'entends, depuis tout à l'heure, des argumentations
au sujet de cette question de la possibilité d'en étendre la
juridiction, tel qu'indiqué dans le bill 46, à toute la
province.
Je parle, non pas en deuxième lecture mais
surtout sur l'article 2, où il s'agit de la nomenclature, et en
réponse à l'amendement suggéré par le
député de Maisonneuve, où son amendement aurait pour effet
d'étendre ce contrôle de la province sur les loyers.
Je voudrais faire une observation immédiate, et mon observation
sera probablement plus brutale que ne l'a été la réponse
du ministre de la Justice, ou encore du député de
Maskinongé, en reconnaissant les bonnes intentions du
député de Maisonneuve. Mais je vais dire tout simplement que je
m'oppose totalement à ce que ce contrôle soit imposé
au-delà des villes déjà mentionnées, et je voudrais
demander que le gouvernement, dans les mois à venir, puisse trouver les
moyens pour diminuer le contôle qui existe déjà dans les
municipalités concernées. Il s'agit ici, dans notre
société d'entreprise libre, d'une question d'offre et de demande.
Je comprends que, durant une certaine période, à cause du manque
de logements, il a pu y avoir des abus de la part de certains
propriétaires qui louaient leur propriété à des
locataires ou à des citoyens.
La loi proposée, qui est déjà devant nous, et
à laquelle on propose une extension aujourd'hui, avait justement pour
intention et pour but d'empêcher les abus dans certaines
municipalités, et surtout dans des secteurs industrialisés et
dans des secteurs où il y avait une population plus dense et où
la demande était plus considérable que l'offre. Il y avait une
pénurie de logements, il y avait une diminution dans la construction et
on a dû imposer une réglementation pour protéger le
locataire, afin de fournir à chaque citoyen et à sa famille la
protection voulue au point de vue de l'habitation. Je pense que cette
époque est révolue et qu'on devra rétablir un ordre
d'offre et de demande, une offre d'entreprise libre, au lieu de donner au
gouvernement encore plus de contrôle dans le domaine de l'habitation. Je
pense qu'ici, il faut prendre en considération le problème tel
qu'il est, dans une situation, dans une population, dans une
société dans laquelle nous habitons, et non point essayer de
transmettre des doctrines, que ce soit le socialisme ou autre chose, à
l'intérieur de ce problème de l'habitation.
Je pense que nous avons les outils, si nous voulons nous mettre à
l'oeuvre, pour fournir à chacun une habitation propre, salubre. Mais je
ne vois pas qu'étendre, à la grandeur de la province, un
contrôle sur les loyers vaille quoi que ce soit, si ce n'est implanter le
service du gouvernement ou la juridiction gouvernementale à toute la
province dans un domaine où, en réalité, nous n'avons pas
juridiction. Nous ne devrions pas avoir juridiction, si ce n'est que pour
s'assurer que chacun puisse y habiter confortablement à
l'intérieur de notre patrimoine provincial.
Tout à l'heure, lorsque nous aurons voté l'amendement,
j'aurai des suggestions à faire au sujet de certains noms qui ne
reflètent pas exactement les circonstances. Ce sont des changements ou
des propositions d'ordre mineur. On a eu, de la part du député de
Maskinongé et de la part du député d'Outremont, le
ministre de la Justice, et du député de Maisonneuve, des
suggestions à l'égard de la possibilité, une autre
année, d'étendre la portée de cette loi. On a parlé
de bail type, tout à l'heure. Que fait-on de l'offre? Que fait-on des
services?
Que fait-on de l'utilisation? Que fait-on de la demande? Que fait-on de
l'évaluation? Que fait-on du risque du propriétaire? Que fait-on
de toutes ces choses-là? C'est très bien de faire de grands
énoncés et de dire: Nous allons contrôler tous les loyers,
nous aurons un bail type et ce sera la même chose pour tout le monde.
Cela me répugne et je n'accepte pas du tout que nous puissions nous
diriger vers une réglementation de ce genre. Je m'opposerai
formellement, je n'accepterai pas. Il s'agit plutôt, pour le
gouvernement, de réduire la liste des différentes
municipalités concernées et de voir à ce qu'à
l'intérieur de ces municipalités on ait des habitations salubres
et en quantité, en nombre et en valeur pour la demande de la population
et non pas vouloir imposer des contrôles gouvernementaux dans toutes les
paroisses, dans tous les villages qui existent dans la province. C'est un
non-sens et c'est nous charger d'une responsabilité que nous ne devons
pas assumer, puisqu'il y a trop d'autres choses qu'il faut faire pour
améliorer le sort du citoyen du Québec.
Mon commentaire, en réalité, n'était que pour faire
opposition, tant bien que mal, à cette suggestion qu'on a faite et qui
semblait recevoir un certain appui, intentionnel ou autre.
Je dis franchement et sincèrement que, lorsque cette proposition
viendra, je m'y opposerai formellement pour une société
libre.
M. LE PRESIDENT (Blank): L'honorable député de
Bourget.
M. LAURIN: M. le Président, ce n'est pas la première fois
que nous observons qu'il y a deux écoles de pensée dans le parti
ministériel. Je commence même à me demander
sérieusement si nous n'assisterons pas bientôt à une
scission de ce parti, avec une aile droite et une aile gauche.
M. MARCHAND: C'est déjà fait dans le Parti
québécois.
M. BACON: Nous pensons, nous, au moins.
M. LAURIN: De toute façon, entre les deux écoles de
pensée...
M. SEGUIN: Je ne voudrais pas qu'on puisse accorder des intentions
à mes paroles.
M. MARCHAND: Dans le Parti québécois, il y a les radicaux,
les socialistes, les maoïstes et il y a toute la suite des litanies au
complet.
M. SEGUIN: M. le Président, je me donne le même droit
d'exprimer mes pensées que le député qui vient de me
prêter des intentions. Je me donne ce même privilège et ce
même droit en cette Chambre. Si je ne l'ai pas fait jusqu'à
maintenant, c'était intentionnel parce qu'un nouveau gouvernement en
place doit avoir le temps de prendre position.
Ce n'est pas à moi, comme député, comme
représentant, de vouloir imposer une charge supplémentaire
à ce gouvernement, mais il faut donner le temps aux ministres des
différents ministères d'aménager et d'apporter les
législations qui représenteront mon parti.
Alors, qu'on ne me prête pas d'intentions, ni quant à une
question de scission ou autre chose. Je suis de mon parti et je serai de mon
parti. J'appuie ce que mon parti apporte aujourd'hui comme législation
et je m'oppose non pas au bill du gouvernement, mais à l'amendement
apporté et suggéré par l'Opposition.
M. LAURIN: Mes remarques portaient simplement sur le fait que le
député...
M. MARCHAND: Les insinuations du député de Bourget sont sa
force.
M. LAURIN: ... de je ne sais plus quel comté disait que la loi
actuelle donnait déjà trop de pouvoirs à la Commission des
loyers et suggérait au gouvernement de restreindre la portée des
pouvoirs accordés à la Commission des loyers.
Je n'ai pu m'empêcher de tirer la conclusion que j'ai
tirée. De toute façon, je voulais simplement dire que les
opinions exprimées tout à l'heure par le ministre de la Justice
sur les perspectives envisagées par le député de
Maisonneuve me plaisaient beaucoup plus que celles exprimées par le
député de Robert-Baldwin. Je voudrais simplement dire que notre
amendement venait d'un principe très simple; c'est qu'étant
donné l'accord de principe apporté par les quatre partis qui se
sont exprimés aujourd'hui, à cette perspective d'une plus grande
libéralisation dans ce domaine et, deuxièmement, étant
donné que chaque année nous sommes obligés d'ajouter les
noms d'autres municipalités assujetties à la Commission des
loyers, il nous semblait préférable d'envisager ce
problème dans une autre perspective, c'est-à-dire une loi
générale qui couvrirait toutes les municipalités, loi
à laquelle nous pourrions apporter ensuite des exceptions dans les cas
où les embarras ou les difficultés administratives
s'avéreraient trop grandes. Il me semble que c'est beaucoup plus
conforme au droit français et à la logique d'apporter une loi
positive à laquelle on peut présenter des cas d'exception
plutôt que faire des lois où on ajoute sans cesse des
municipalités les unes après les autres.
M. LE PRESIDENT (Blank): Article 2, adopté sans amendement.
M. BURNS: Sur division. M. LE PRESIDENT (Blank): Article 1.
M. SEGUIN: Lorsque nous aurons disposé du projet d'amendement,
j'aurais une suggestion à faire au gouvernement au sujet de la
nomenclature de certaines villes. Ainsi, par exemple, à l'article 35, la
ville de Beaconsfield devrait être City of Beaconsfield en anglais, et
non pas Town of Beaconsfield. D'après les chartes de ces
municipalités, on donne le titre français "ville de" et la
traduction anglaise est "city";
Pour le compte de Pierrefonds, au bas de la page, à cinq lignes
du bas de la page, ce serait City of Pierrefonds, pour la version anglaise et
dans le cas de Pointe-Claire, ce serait City of Pointe-Claire, ville de
Pointe-Claire en français.
M. CHOQUETTE: Nous acceptons l'amendement du député.
M. BURNS: M. le Président, faudrait-il que je fasse proposer mes
amendements par ce député pour qu'ils aient des chances de passer
à l'avenir?
M. MARCHAND: C'est parce qu'il propose des amendements intelligents.
M. LE PRESIDENT: Article 1, adopté.
M. PAUL: Le ministre peut-il nous dire pourquoi cette nouvelle
disposition dans la loi?
M. CHOQUETTE: Quelle nouvelle disposition?
M. PAUL: L'amendement à l'article 9. "Les articles 1 à 8
entrent en vigueur à compter du 1er décembre 1970".
M. CHOQUETTE: Parce que le projet de loi arrive au moment où nous
avons dépassé de neuf jours la date du 1er décembre. Les
municipalités doivent faire connaître leur intention, d'être
soumises à la Commission des loyers, avant le 1er décembre. C'est
la raison...
M. PAUL: Très bien
M. CHOQUETTE: ...pour laquelle il nous faut introduire l'amendement que
les honorables députés ont sur une feuille unique que je leur ai
présentée.
M. le Président, vous avez sans doute noté qu'il y a un
amendement à l'article no 9.
M. LE PRESIDENT (Blank): Oui. Article 1? Adopté sur division.
Article 3, adopté. Article 4, adopté. Article 5, adopté.
Article 6, adopté.
Article 7, adopté. Article 8, adopté. Article 9. "Les
articles 1 à 8 entrent en vigueur à compter du 1er
décembre 1970" est l'amendement à l'article 9. Adopté.
Article 10, adopté.
M. BURNS: Oui. M. le Président, en vertu de l'article 564 du
règlement, il semble que, si on a de nouveaux articles à
proposer, c'est après l'adoption des articles imprimés, ce qui
vient d'être fait. J'aurais un autre amendement à proposer. Je
suis prêt à le proposer tout en étant présomptueux.
Ajouter, après l'article 1, l'acticle l-a)."Ladite loi est
amendée en remplaçant les articles 18 à 22 par les
suivants." Soit dit en passant, je mentionne que l'article 18, dans la loi, est
abrogé et c'est pour cela qu'on lui donne le numéro 18."Sur
réserve des articles 19, 20, 20a), 21 et 22, tout bail de maison, qui
arrive à expiration, est reconduit pour une période d'une
année ou pour la même durée si celle-ci était de
moins d'un an. "19) Tout locataire qui désire éviter la
reconduction d'un bail doit donner au propriétaire un avis à cet
effet, par poste recommandée, au moins 90 jours avant l'expiration du
bail; le locataire peut également donner cet avis au moins 60 jours
avant l'expiration du bail pourvu que cet avis soit accompagné d'un
paiement égal à un mois de loyer ou au moins 30 jours avant
l'expiration du bail, pourvu que cet avis soit accompagné d'un paiement
égal à deux mois de loyer. "20) Tout locateur qui désire
qu'un bail soit reconduit à de nouvelles conditions doit donner, au
locataire, un avis à cet effet par poste recommandée au moins 90
jours avant son expiration. Le locataire, qui a reçu un semblable avis,
peut éviter la reconduction du bail en signifiant au locateur un avis
à cet effet par poste recommandée au moins 60 jours avant
l'expiration du bail. "20a) Si, 60 jours avant l'expiration du bail, les
nouvelles conditions, dont avis a été donné
conformément à l'article 20, n'ont pas été
acceptées et si le locataire n'a pas signifié son intention de
mettre fin au bail, le locataire peut demander à l'administrateur local
d'en déterminer l'application au bail à être reconduit.
Cette demande doit être accompagnée d'une copie de l'avis qui a
été donné au locataire. Après avoir reçu
cette demande et si possible avant l'expiration du bail, l'administrateur doit
convoquer les parties pour audition et leur communiquer sa décision sur
la demande. "21) L'appel de la décision de l'administrateur en suspend
les effets sur le bail reconduit. Toutefois, la décision de la
commission sur cet appel fixe les conditions du bail à partir de la
reconduction si elle est rendue postérieurement à celle-ci,
à moins qu'elle ne dispose d'un autre temps où elle prendra
effet. "22) Lorsque l'adjudication définitive prévoit une
augmentation de loyer supérieure à celle permise par les
règlements adoptés en vertu de l'article 22a), tout locataire
peut mettre fin au bail en donnant au locateur un avis par poste
recommandée dans le mois qui suit. Le bail se termine alors à la
fin du mois suivant celui où l'adjudication a eu lieu. "22a) La
commission peut, chaque fois qu'elle le juge à propos, prescrire par
règlement les augmentations de loyer qui sont permises dans une
municipalité ou un territoire donné ou dans l'ensemble du
Québec. Un tel règlement entre en vigueur après
approbation du lieutenant-gouverneur en conseil et publication dans la Gazette
officielle de Québec. "Lorsqu'un tel règlement est entré
en vigueur, une augmentation de loyer inférieure à l'augmentation
permise et s'appliquant à compter de la reconduction d'un bail n'est pas
considérée, aux fins de l'article 20, comme une modification des
conditions de ce bail. "Avis de cette augmentation doit, cependant, être
donné au locataire par poste recommandée au moins 90 jours avant
l'expiration du bail. Le locataire peut alors, par un avis signifié au
locateur par poste recommandée au moins 60 jours avant l'expiration du
bail, empêcher sa reconduction".
M. le Président, on me permettra très brièvement
d'expliquer la nature de l'ensemble de ces nouveaux articles que nous
proposons. Tout d'abord, aux articles 18 et 19, nous proposons une formule qui
donnerait une plus grande flexibilité quant à la
possibilité du locataire de ne pas reconduire le bail à de
nouvelles conditions, lorsqu'un avis lui est donné. Il aurait cette
possibilité, dans des délais plus courts, allant jusqu'à
30 jours avant l'expiration du bail, pour autant qu'il paie une certaine
indemnité, chose qui, d'ailleurs est déjà acceptée
par une certaine jurisprudence devant les tribunaux en droit commun, en dehors
du cadre de la Loi favorisant la conciliation entre locataires et
propriétaires.
Nous soumettons également, ce que j'avais mentionné
tantôt, le fait, à 22a), que la Commission des loyers,
elle-même puisse décréter des augmentations que j'appelais
tantôt automatiques et qu'à l'intérieur de ces
augmentations-là il ne puisse pas y avoir de possibilités de
plaintes de la part du locataire. Par contre, si le propriétaire
demandait une augmentation supérieure à celle prescrite par la
régie, il lui reviendrait de s'adresser à la régie pour
demander que ces changements lui soient appliqués.
Enfin, nous mentionnons, à l'article 22, l'amendement que j'avais
annoncé tantôt à l'effet que, si l'adjudication
définitive dans les cas de contestation accorde au propriétaire
un droit à un loyer supérieur à celui qui existait, il y
ait une possibilité de mettre fin au bail de la part du locateur, en
donnant un avis d'un mois. Je n'ai pas à expliciter davantage ces
points-là. Je suis encore présomptueux en présentant cet
amendement, mais nous considérons qu'il serait absolument essentiel que
ces dispositions appa-
raissent dans un bill qui prétend favoriser la conciliation entre
locataires et propriétaires.
M. CHOQUETTE: M. le Président, je ne blâmerai pas le
député d'être présomptueux et même audacieux
dans les amendements qu'il veut soumettre à ce projet de loi, en
particulier, ou à d'autres projets de loi. C'est parfaitement son droit
de soumettre les amendements qu'il juge opportuns, mais je considère que
les amendements soumis par le député ne sont pas tout à
fait réalistes ou encore ne me persuadent pas, de prime abord, qu'ils
méritent d'être accueillis par le gouvernement.
D'abord, le député veut instaurer un système de
réglementation générale en vertu duquel la Commission des
loyers pourrait décréter, dans une localité donnée,
une augmentation générale de xp.c. suivant l'augmentation des
coûts d'entretien d'édifices.
L'honorable député sait comme moi que les édifices
sont très variables au point de vue de leur vie. Je veux dire que la
dépréciation qui affecte les édifices varie suivant
ceux-ci. Si un édifice est très ancien, la
dépréciation l'affecte beaucoup moins qu'un édifice
nouveau. Par conséquent, je vois de prime abord quelque
inconvénient à ce que la régie se prononce par un
règlement d'ordre général sur un accroissement de
l'ensemble des loyers dans une municipalité. L'honorable
député devrait noter que ceci peut être au détriment
des locataires qu'il cherche justement à protéger parce que, dans
certains cas, un locataire pourrait se voir imposer arbitrairement une
augmentation de loyer par une décision de portée
générale alors que le cas particulier n'a pas été
analysé à son mérite.
Par conséquent, même si on pouvait trouver une
justification en théorie économique globale à la
suggestion de l'honorable député, je pense que, dans la
réalité des choses, ceci pourrait créer des injustices
à l'égard de locataires et surtout les plus démunis, ceux
qui ont des familles nombreuses et qui ne peuvent absorber des augmentations de
loyer que très légères et très espacées,
comme on en a l'expérience à la Régie des loyers. C'est
ça en effet, la situation qui se produit, puisque, dans les plus vieux
édifices habités par des locataires, les régisseurs ou les
commissaires de la régie tentent en somme d'alléger le fardeau
économique de cette partie de notre population qui a de la
difficulté à joindre les deux bouts.
Par conséquent, je ne saurais être favorable à
l'amendement proposé, mais j'invite le député à
venir le suggérer en temps et lieu à la commission des Affaires
municipales de façon qu'il soit étudié avec les
régisseurs. Si on lui trouve certains avantages, peut-être
pourra-t-on le raffiner et peut-être pourra-t-il faire partie de la loi
sous une autre forme, quand nous l'adopterons l'année prochaine.
L'honorable député, dans ses amendements ceux qu'il
nous annonçait entre autres dans son intervention en deuxième
lecture a suggéré un droit pour un locataire qui ne serait
pas satisfait du jugement rendu à son égard de se désister
de ce jugement et de quitter les lieux, laissant le propriétaire
bredouille avec son logement.
Je ne pense pas que nous puissions accueillir cette suggestion,
premièrement, parce qu'elle ne me paraît pas correspondre à
la réalité, à un problème réel, à un
problème concret, à un problème vécu. Je pense que
la plupart des augmentations accordées par la Commission des loyers sont
en général assez légères qu'elles ne constituent
pas un obstacle à ce que locataire continue d'occuper encore une autre
année et même souvent neuf ou dix autres mois les lieux qu'il
occupe.
D'autant plus que c'est lui qui a imposé au propriétaire
le fardeau ou l'obligation d'aller à la Commission des loyers, qui a
tranché la question et qui a rendu un jugement dont il peut ne pas
être satisfait souvent, comme on ne l'est pas de tous les jugements qui
sont rendus à notre égard. Mais, à ce moment-là, il
a engagé le propriétaire, c'est-à-dire un tiers, dans un
processus judiciaire contre la volonté du propriétaire. Or,
l'honorable député de Maisonneuve voudrait donner à ce
locataire le droit additionnel de se désister du jugement dont il ne
serait pas satisfait.
Je ne pense pas, avec l'esprit juridique que je reconnais au
député de Maisonneuve, qu'il accepte, après avoir
analysé la situation à son mérite, que l'on puisse ainsi
affecter les droits d'un tiers et, une fois que l'on a affecté ses
droits, parce que on n'est pas soi-même satisfait de la décision
rendue, qu'on puisse de nouveau réaffecter les droits du même
tiers que l'on a amené devant le tribunal.
Je ne pense donc pas que la suggestion soit réaliste et je ne
pense pas qu'elle soit conforme au droit.
M. PAUL: M. le Président, vous ne sauriez croire avec quel
déchirement je me lève.
D'un côté, vous avez des amendements qui sont
proposés par le député de Maisonneuve qui se penche, avec
un souci admirable, sur le sort d'un certain nombre de locataires. D'un autre
côté, j'ai suivi l'argumentation du ministre de la Justice et je
m'en voudrais de ne pas commenter très brièvement, d'une
façon bien objective, cet amendement. Je n'insisterai pas, M. le
Président, sur la recevabilité de l'amendement parce que ce
serait faire référence à certains débats qui eurent
lieu un jeudi... Ce serait une question sérieuse de recevabilité,
mais je passe là-dessus. On en a eu un amendement tout à l'heure.
On en a disposé. On ne peut pas faire indirectement ce qu'on a
tenté de faire directement. Ce n'est pas ça qui est le point.
Je dis que l'amendement proposé par l'honorable
député de Maisonneuve est dangereux
parce que son application aurait pour effet d'exposer un grand nombre de
locataires à avoir une augmentation de loyer de leurs
propriétaires. Il y a un point que je ne puis comprendre quand je lis
les articles 21, 22 et 22a). Dans l'article 21, tel qu'il est proposé,
on reconnaît encore le fonctionnement actuel de la régie, de
l'administrateur à la commission. On dit que certains règlements
peuvent être adoptés par la commission pour un territoire
donné. Il va de soi, M. le Président, que la régie et la
commission, la commission agissant comme tribunal d'appel ou de surveillance
des décisions des régisseurs, seront nécessairement
liées par les règlements qu'éventuellement ceux-ci
pourraient adopter.
Quelle est l'application pratique de l'article 22a) lorsqu'on dit: "La
commission peut, à chaque fois qu'elle le juge à propos,
prescrire par règlements les augmentations de loyer qui sont permises
dans une municipalité ou un territoire donné dans l'ensemble du
Québec. Un tel règlement entrera en vigueur après
approbation du lieutenant-gouverneur en conseil et publication dans la Gazette
officielle du Québec." Là, c'est le principe ou l'autorité
qu'on donne, le devoir qu'on impose à la Commission des loyers de
concert avec la régie d'édicter des règlements applicables
dans un territoire donné ou une région donnée.
Mais voici qu'à l'article 22 on émet un nouveau principe.
On permettrait à la régie d'accorder à la
régie, aux régisseurs et à la commission des
augmentations supérieures aux propres règlements que la
régie aurait adoptés. "Lorsque l'adjudication définitive
prévoit une augmentation de loyer supérieure à celle
permise par les règlements adoptés en vertu de 22a)." Au point de
vue pratique, jamais cela va se présenter parce que MM. les
régisseurs, MM. les commissaires n'iront jamais accorder ultra petita,
c'est-à-dire plus que le règlement qu'ils ont eux-mêmes
rédigé et imposé, l'accorde soit à un locataire ou
à un locateur.
Je dis donc, M. le Président, que nous tombons dans une
économie qui viendrait chambarder tout le code civil. D'autant plus que
l'amendement proposé par l'honorable député de Maisonneuve
se rapporte aux dispositions de l'article 1608 du code civil; la tacite
reconduction. Qu'adviendra-t-il de l'article 1609 qui traite du défaut
de congé? On n'en parle pas. Qu'est-ce qu'on ferait des articles
si ma mémoire est bonne 1641 ou 1642 du code civil pour ce qui
est du terme d'un bail? Bail ne veut pas nécessairement dire
écrit.
M. le Président, tout ce problème...
M. BURNS: L'article 1668.
M. PAUL: L'article 1668? Peut-être. M. le Président, tout
ce problème soulevé par le député de Maisonneuve
est à l'étude à l'Office de révision du code civil.
Tout à l'heure, dans sa réplique de deuxième lecture, le
ministre a référé au rapport de la commission McRuer en
Ontario. Dans ce rapport, M. le Président, on fait mention de la
création possible de tribunaux de loyers, comme cela existe en France.
Dans l'analyse de toute cette situation juridique entre locataires et
propriétaires, on se pose, entre autres, cette question que j'ai
déjà soulevée de la constitutionnalité d'un
tribunal nouveau qui pourrait être créé en vertu des
dispositions de l'article 96 de l'Acte de l'Amérique du Nord
britannique.
Le député de Maisonneuve nous propose une
législation qui, dans ses principes, serait acceptable, mais non pas
dans la formulation qui nous est présentée aujourd'hui. D'abord
l'adoption de cet amendement aurait pour effet de modifier les dispositions du
code civil traitant des relations entre locataires et propriétaires,
c'est-à-dire tout le chapitre du bail et de la location. En second lieu
le ministre pourra certainement confirmer ces remarques tout ce
chapitre de notre code concernant la location et, par voie de
conséquence, le bail régissant les locataires et les
propriétaires est actuellement à l'étude par les membres
de l'Office de révision du code civil.
Je dis donc, M. le Président, qu'en droit nous ne pourrions pas
adopter cet amendement. Ce serait pour le moins immoral au point de vue
légal. Ce serait placer dans une boîte à surprise des
amendements qui devraient faire l'objet d'une législation bien
spécifique de la part du gouvernement visant à amender les
dispositions du code civil.
Je comprends que l'application de la Loi de la Régie des loyers
déroge aux principes généraux qui régissent les
relations normales entre locataires et propriétaires. Alors, je dis, M.
le Président, que nous ne pouvons pas accepter ces amendements qui
créeraient certaines complications ou dangers à l'endroit des
locataires qui, actuellement, ne sont pas frappés par les dispositions
de la loi qui régit les relations entre locataires et
propriétaires. Ces mêmes locataires deviendraient, de ce coup,
exposés à voir la Commission des loyers réglementer sur un
territoire donné.
Ils seraient exposés à des hausses de loyer anormales et,
dans certains cas, oppressives. Pour toutes ces raisons, M. le
Président, mon tiraillement, mon déchirement finit par me faire
décliner mon appui à l'endroit de la motion d'amendement du
député de Maisonneuve. J'appuie les remarques visant à
rejeter cet amendement et je vote avec le ministre de la Justice, sur ce
point-là.
M. BOURASSA: Collaboration positive.
M. PAUL: M. le Président, ça allait bien. Je remarque que
le premier ministre arrive. De grâce, M. le Président, ne vous en
occupez pas.
Nous allons continuer à travailler en hommes sérieux et
nous allons certainement progresser dans nos travaux.
M. LE PRESIDENT (Blank): L'honorable député de
Maisonneuve.
M. BURNS: M. le Président, moi, je suis content que le premier
ministre soit arrivé, parce que j'ai l'impression que son ministre de la
Justice ne comprend pas le sens de nos amendements. Peut-être que le
premier ministre va l'aider à comprendre.
M. MARCHAND: Le premier ministre sait qu'il a un bon ministre de la
Justice.
M. CHOQUETTE: Lâchez-le.
M. BURNS: Le ministre de la Justice nous dit que cela pourrait, à
la rigueur, nuire aux locataires. Quand il nous dit que cette augmentation
générale, et soit dit en passant, ce n'est pas uniquement pour
une municipalité, on dit: Pour une municipalité, un territoire ou
pour l'ensemble du Québec. C'est justement pour ça que le premier
ministre va peut-être comprendre, c'est un problème
économique.
On a dit tantôt que ce serait irréaliste de notre part de
nous imaginer que les loyers peuvent être gelés
complètement, qu'il y a un des éléments de l'indice du
coût de la vie qui varie et c'est le coût du logement. C'est sous
cet aspect que nous voyons la Commission des loyers se prononcer.
Pourquoi permettrions-nous, à ce moment-là, aux
propriétaires, en sus de cette augmentation, de s'adresser à la
commission pour obtenir une augmentation additionnelle? C'est que l'autre
serait, évidemment, au minimum applicable par un commun
dénominateur au plus bas possible.
Et si, justement, les cas spéciaux que le ministre de la Justice
soulevait tantôt se présentent, ce seront justement ces cas qui
justifieraient des augmentations. Le député de Maskinongé,
quand il nous réfère au code civil...
M. CHOQUETTE: M. le Président, les amendements proposés
par mon savant ami, le député de Maisonneuve, entraînent
une dépense d'argent; il n'a pas le droit de les proposer.
M. BURNS: Quelle dépense d'argent cela entrafnerait-il?
M. CHOQUETTE: C'est sûr, vous préconisez la
généralisation d'un système différent. Cela va de
soi qu'il y a une dépense d'argent.
M. BURNS: Pas du tout, M. le Président. Pas du tout. Cette
commission existe déjà. On a le droit de lui donner certaines
autres fonctions, qui sont les mêmes, à toutes fins pratiques, qui
sont plus élargies.
M. LE PRESIDENT (Blank): Le ministre a raison, parce que, si on demande
à la Régie des loyers de faire des enquêtes pour savoir si
on a besoin d'une augmentation ou non, c'est dépenser de l'argent. Le
député de l'Opposition n'a pas le droit de faire des suggestions
d'amendements qui entraîneraient des dépenses additionnelles.
M. BURNS: M. le Président, loin de moi de vouloir contester votre
décision mais je pense qu'elle n'est pas tout à fait rendue.
C'est pour ça que je voudrais argumenter sur ce point. J'espère
qu'on ne...
M. CHOQUETTE: Vous êtes sur le point de continuer votre...
M. LEVESQUE La décision est rendue, si j'ai bien compris...
M. BURNS: Elle est rendue. Est-ce qu'elle est rendue?
M. LEVESQUE: ... et c'est une motion...
M.BERTRAND: C'est tout simplement pour indiquer qu'il rendrait cette
décision.
M. LEVESQUE: Ah bon, très bien, si c'est l'interprétation
qu'on lui donne!
M. BLANK: Si on me le demande, je rendrai cette décision.
M. BURNS: De toute façon, si j'ai bien compris l'intervention du
ministre de la Justice sur le règlement, c'était surtout pour me
faire signe que nous approchons de six heures et qu'il fallait que je sois
très bref. C'est du moins ce que j'ai cru comprendre.
Je veux tout simplement faire cette dernière remarque en regard
de ce que disait le député de Maskinongé quand il nous dit
que c'est exorbitant du code civil, ce que l'on propose là. Mais, c'est
bien évident que c'est exorbitant. Toute cette loi est exorbitante du
code civil, elle est contraire à l'une des règles de base qui est
la liberté de contracter sans aucune difficulté
extérieure. C'en sont des lois qui vont à l'encontre du code
civil, qui vont par-dessus le code civil. Ce n'est pas ma prétention que
les amendements que nous faisons là sont dans le cadre du code civil,
ils sont contraires à cette idée suivant laquelle deux personnes
ont le droit de faire les contrats qu'elles veulent entre elles.
Là-dessus, nous ne changeons rien, il n'y a rien de nouveau.
M. LE PRESIDENT (Blank): L'amendement est rejeté.
M. BURNS: Rejeté sur division.
M. CHOQUETTE: Est-ce adopté?
M. BURNS: M. le Président, je m'excuse, j'en ai un dernier. Il
sera plus bref celui-là. Il est bien meilleur, sauf que j'ai
l'impression qu'on se force pour ne pas les comprendre pour pouvoir les battre,
ce serait trop compliqué de changer le système.
M. CHOQUETTE: Je n'ai pas tellement compris.
M. BURNS: M. le Président, je propose un article 2a) qui se
lirait comme suit: "Ladite loi est amendée en ajoutant, après
l'article 38, les articles suivants: "39) Tout bail de maison fait après
le 1er avril 1971 doit être consigné dans un écrit conforme
à l'annexe de la présente loi soit dit en passant si
jamais l'amendement était adopté, je serais prêt à
déposer une annexe à cette loi-là toutefois, les
parties pourront modifier ou remplacer les clauses, qui seront laissées
à leur option, en les biffant de telle manière qu'elles restent
lisibles, et en ajoutant des clauses nouvelles faisant une
référence explicite aux numéros des clauses qu'elles
remplacent ou modifient. "Les parties peuvent également ajouter au bail
des clauses qui ne sont pas contraires aux clauses obligatoires, car toute
stipulation d'un bail de maison, oral ou écrit, conclu après le
1er avril 1971 qui déroge aux conditions obligatoires de l'écrit
mentionné à l'article 39, est nulle et sans effet. Ces conditions
obligatoires sont présumées faire partie de tout bail conclu
après cette date."
Encore une fois c'est l'énoncé du bail type qui
respecterait, selon nous, davantage l'idée du contrat bilatéral
que doit être un bail.
M. CHOQUETTE: M. le Président, ma réponse au
député sera brève. Comme je l'ai déjà dit en
réponse à son intervention en deuxième lecture, je pense
qu'il y a sûrement du mérite à étudier la question
du bail type, mais je ne pense pas qu'il s'agisse ici de la loi
appropriée pour présenter cet amendement. Il ne faut oublier que
la loi que je présente en Chambre aujourd'hui ne vise que ces loyers qui
sont réglementés par la Loi de la Régie des loyers, tandis
que le chapitre entier du code civil qui traite des relations entre
propriétaires et locataires a une application générale,
que le bail soit soumis à la Commission des loyers ou non.
Par conséquent, l'amendement proposé par le
député n'a pas vraiment sa place dans cette loi, mais je l'invite
à le soumettre, ou au moins à soumettre l'idée qui y
préside, à notre commission qui siégera au cours de
l'année prochaine sur toute cette situation.
M. PAUL: M. le Président, je crois que, pour une fois, le
député de Maisonneuve a touché la corde sensible, à
mon humble point de vue, du juridisme pratique. Je crois que cet amendement
devrait recevoir une considération sérieuse.
Je regrette, M. le Président, mais aujourd'hui le ministre est
dans un esprit de juridisme extraordinaire. Dans les circonstances, je crois
qu'à cause de l'exception générale de la loi du code civil
qui est cette application de la conciliation entre locataires et locateurs,
nous ne pouvons malheureusement appuyer l'amendement proposé par
l'honorable député de Maisonneuve. Je n'ai aucun doute cependant
que le leader parlementaire du Parti québécois se fera un
impérieux devoir de déléguer le député de
Maisonneuve à la commission municipale chargée d'étudier
les relations entre locataires et locateurs. Il nous apportera des suggestions
susceptibles de nous aider à légiférer dans le meilleur
intérêt de cette classe de la société que l'on
appelle les locataires et par voie de conséquence également des
suggestions concernant cette relation synallagmatique qui existe avec les
locateurs.
M. LE PRESIDENT (Blank): Cet amendement est rejeté.
M. BURNS: Adopté sur division.
M. LE PRESIDENT (Blank): M. le Président, j'ai l'honneur de faire
rapport que le comité a adopté le projet de loi 46 avec des
amendements et demande la permission de siéger de nouveau.
M. LE PRESIDENT (Vézina): Alors ces amendements seront-ils lus et
agréés?
M. BERTRAND: Pour vous, oui.
M. LE PRESIDENT (Vézina): Troisième lecture?
M. PAUL: Adopté, M. le Président. Article 64; je ne peux
pas me lever, vous êtes debout.
M. LE PRESIDENT (Vézina): C'est pour cela que je reste debout.
Troisième lecture.
M. PAUL: Non, objection. Vous pouvez vous asseoir.
M. LE PRESIDENT (Vézina): Je peux m'as-seoir?
M. PAUL: M. le Président, je suis soucieux du règlement et
l'article 64 m'empêchait de me lever pendant que vous étiez
debout. J'ai une suggestion à faire au leader du gouvernement: c'est de
retarder, peut-être, la troisième lecture de ce projet de loi
jusqu'à demain pour permettre certaines vérifications au sujet de
la ville de Waterloo, dont j'ai soulevé cet
après-midi le problème. L'honorable député
de Shefford, c'est sa ville, corrobore l'information que j'ai eue. Alors
peut-être que cette vérification administrative, qui pourra se
faire demain matin, ne causera aucun préjudice à l'adoption en
troisième lecture de ce projet de loi demain.
M. LEVESQUE: Le ministre de la Justice me fait signe qu'il est
entièrement d'accord.
M.PAUL: Très bien.
M. LEVESQUE: Nous pourrions suspendre nos travaux jusqu'à ce soir
à huit heures et quart.
M. BERTRAND: Huit heures et quart.
M. LE PRESIDENT (Vézina): La Chambre suspend ses travaux
jusqu'à vingt heures et quinze minutes.
Reprise de la séance à 20 h 19
M. LAVOIE (président): A l'ordre, messieurs!
M. LEVESQUE: Article 6.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose la
deuxième lecture du projet de loi no 47, Loi modifiant la Loi de
police.
Projet de loi no 47
Deuxième lecture
M. Jérôme Choquette
M. CHOQUETTE: M. le Président, je ne ferai pas d'intervention sur
le bill proprement dit, parce que je crois que les articles qui se trouvent au
projet sont suffisamment explicites et ne requièrent pas d'exposé
très élaboré de ma part. Cependant, je dois
immédiatement annoncer aux membres de cette Chambre que j'aurai des
amendements additionnels à apporter en comité et dont le sens
sera, premièrement, de permettre à la Commission de police
d'arrêter ou de fixer le niveau de scolarité et les cours de
formation policière qui seront exigés dorénavant des chefs
de police municipaux.
En second lieu, les amendements que j'apporterai auront pour but de
revaloriser et indexer la pension aux veuves et aux enfants de membres de la
Sûreté du Québec morts en fonction depuis quelques
années. On sait que le coût de la vie a augmenté, la
pension leur est payée en vertu du salaire qu'ils gagnaient
antérieurement à leur mort et, dans certains cas, ceci nous
ramène à 1961, 1962, 1963. Par conséquent, il s'agit pour
nous, en toute justice, de rétablir le niveau de la pension due à
ces veuves et à des enfants pour être plus conforme aux conditions
économiques actuelles.
En troisième lieu, M. le Président, d'arrêter que
les pensions dues aux enfants et aux veuves des policiers municipaux qui sont
décédés en fonction seront ajustées selon les
barèmes arrêtés pour la Sûreté du
Québec. C'est-à-dire que nous allons créer
l'égalité entre les policiers municipaux et ceux de la
Sûreté du Québec, sur le plan des pensions qui peuvent
être dues.
Et finalement, parmi les amendements que j'introduirai tout à
l'heure lors de notre étude de ce projet en comité, j'apporterai
un amendement à la Loi de police en vertu duquel les chefs de police ne
pourront être destitués par simple résolution des conseils
municipaux, mais la résolution des conseils municipaux sera sujette
à une condition suspensive, c'est-à-dire qu'elle n'entrera en
vigueur qu'une fois la résolution entérinée,
approuvée par la Commission de police, à moins,
évidemment, qu'il n'y ait acquiescement de la part de
l'intéressé.
Maintenant, M. le Président, je suggère que nous allions
immédiatement en comité plénier. Je voudrais, avant de
terminer cet exposé introductif en deuxième lecture, annoncer
à la Chambre que la Commission de police a adopté ou adoptera
incessamment un règlement en vertu duquel, dorénavant, tout
policier municipal du Québec, à quelque police municipale qu'il
appartienne, sera tenu d'avoir suivi le cours de quatre mois prescrit à
l'Institut de police du Québec ou à l'Ecole de police de la ville
de Montréal.
Je pense que je n'ai pas besoin d'insister beaucoup sur les avantages de
cette mesure dans les conditions où nous sommes à l'heure
actuelle. Il s'agit, en somme, de revaloriser nos corps de police municipaux,
d'assurer que nos policiers municipaux aient une formation adéquate au
départ. Et ceux qui connaissent l'Institut de police de Nicolet ainsi
que l'Ecole de police de la ville de Montréal savent jusqu'à quel
point ces écoles de police peuvent donner, en un court espace de temps,
une formation extrêmement précieuse, extrêmement avantageuse
pour le public, extrêmement complète sur le plan du travail
policier qui nous assure que, dans le Québec, dans un avenir
rapproché, nous aurons des forces de police municipale tout à
fait à la hauteur de la situation. Ce qui n'implique, évidemment,
aucune critique à l'égard de nos forces actuelles. On le
comprendra. Mais d'un autre côté, je pense que tout le monde
comprend aujourd'hui la nécessité que le policier, aujourd'hui,
soit non seulement un excellent policier, soit non seulement énergique
dans l'exécution de ses fonctions, mais ait cette discipline et cette
formation qui en fassent un citoyen qui ait le respect de ses concitoyens
auprès desquels il représente, après tout, l'ordre.
Et, M. le Président,...
M. PAUL: Le lieutenant-gouverneur...
M. CHOQUETTE: ... le savant secrétaire adjoint m'indique qu'avant
de m'asseoir...
M. BERTRAND: Ne l'oubliez pas.
M. CHOQUETTE: ... je devrais lire la formule traditionnelle à
l'effet que l'honorable lieutenant-gouverneur, dans sa sagesse, a pris
connaissance de ce bill et qu'il en recommande l'étude à la
Chambre.
M. Rémi Paul
M. PAUL: Je suis content de voir, M. le Président, qu'on ajoute
trois mots à l'expression habituelle. Dans sa sagesse, Son Excellence le
lieutenant-gouverneur approuve la présentation de ce projet de loi.
Vous comprendrez, M. le Président, que je ne peux pas laisser
passer cette occasion sans tout d'abord rappeler, à vous, non, M. le
Président, mais à certains collègues qui siègent
ici en cette Chambre que la Commission de police a été le
résultat d'un travail acharné, d'études poussées,
de dialogues continus entre les intéressés et celui-là
qui, en 1967, occupait les fonctions de ministre de la Justice, l'honorable
chef de l'Opposition.
Cette loi répondait à l'époque je dis
à l'époque à un besoin. Je crois que les
amendements subséquents que nous avons apportés au bill 14
c'était le numéro du bill original prouvent de toute
évidence l'efficacité et le travail vraiment admirable de
construction, de collaboration, d'édification d'un corps de police. Et
quand je parle d'un corps de police, M. le Président, je parle du genre.
Pour ce qui est de l'espèce, il se compose des membres de la
Sûreté provinciale et des différents corps de police
municipaux.
Je dis, M. le Président, que cette Commission de police a
immédiatement joué son rôle. Par la création de cet
organisme, nous avons créé comme un phare d'orientation pour les
conseils municipaux, infailliblement aux prises avec certains problèmes
administratifs qui résultaient d'un mode de recrutement un peu fait au
hasard et sans normes de compétence, de scolarité et de
préparation, comme la Commission de police le fait aujourd'hui par la
voie du ministre actuel de la Justice.
Le travail de cette commission a été vraiment admirable et
je suis sûr que tous ont lu avec beaucoup d'intérêt ce
rapport de la Commission de police, concernant les activités pour
l'année 1969, surtout quand on voit que, dans le cours de l'année
1969, la Commission de police était composée de trois
commissaires. J'ajouterai que par le bill 21 nous avons apporté un
amendement pour pouvoir, là comme ailleurs, avoir des commissaires ad
hoc.
L'honorable juge Gosselin, MM. Courteman-che, Tobin et Saint-Georges ont
été les pionniers dans la réglementation d'abord, pour
certaines règles au sein de la Sûreté du Québec et
ils ont été aux prises avec une foule de demandes venant de
différentes municipalités à travers tout le Québec.
Et devant ce travail accumulé, devant les besoins qui devenaient de plus
en plus pressants, la commission a été obligée d'engager,
ou de confier du travail d'enquête à des enquêteurs à
la pige. Dans certains cas, on a procédé à une
préenquête, pour justifier l'audition d'une enquête
publique.
La Commission de police, en 1966, a procédé à six
grandes enquêtes. Je n'ai sûrement pas à
énumérer ici les municipalités, ou les corps de police qui
ont été touchés par ces enquêtes. Mais au point de
vue pratique, 18 enquêtes ont été présentées
à la Commission de police, par différents conseils municipaux,
non pas toujours dans le but de pénaliser les corps de police
municipaux, mais dans le but de créer, ou de
mettre sur pied, un corps de police mieux préparé, des
méthodes de travail qui correspondent le plus et le mieux aux moyens que
nous devons prendre aujourd'hui pour combattre les activités des
criminels, et même, dans certains cas, de la pègre, dans des
territoires donnés.
La Commission de police a été saisie, dans le chapitre 22
des lois de 1969, d'un travail d'arbitre. Ce qui autrefois relevait du code du
travail en a été soustrait pour être confié à
la Commission de police qui, aujourd'hui, est le seul organisme en mesure de
juger du bien-fondé des plaintes que portent devant elle des policiers
municipaux qui se croient victimes de certaines injustices.
Ces plaintes, qui autrefois relevaient de la Commission municipale dans
l'appréciation de la preuve, sont aujourd'hui
référées à la Commission de police pour
enquête et pour l'imposition, en certaines circonstances, je ne dirai pas
de sentences, mais de recommandations de la part des conseils municipaux. Dans
certains cas, ces derniers sont obligés de remercier de leurs services
certains membres du corps de police jugés indésirables, le tout
résultant souvent d'un manque de préparation efficace et
nécessaire au policier aujourd'hui pour jouer son véritable
rôle dans la vie quotidienne, pour la protection du peuple
québécois.
Il faut avoir vécu certaines journées
désagréables, dont je n'ai pas l'intention de rappeler le
souvenir, pour comprendre combien notre société est fragile et
combien elle deviendrait anarchique si, du jour au lendemain, nous perdions
cette protection essentielle qui assure notre propre sécurité et
la garde de nos biens.
Le travail accompli par la Commission de police a été
vraiment remarquable. Je félicite le ministre d'avoir
écouté, comme nous l'avions fait dans le passé, les
recommandations de l'honorable juge Gosselin, président de la Commission
de police.
Ces recommandations qu'il nous est donné aujourd'hui
d'étudier ou d'inclure dans un texte de loi avaient été
portées à la connaissance de celui qui vous parle à la
suite de rapports détaillés et d'une étude exhaustive de
toute la situation qui existe au sein de la Commission de police en regard du
travail gigantesque qu'elle doit accomplir.
C'est tellement vrai et je serais fort heureux d'apprendre que la
situation est changée qu'il y a tellement de travail à
accomplir à la Commission de police qu'on est rendu à un point
où l'on doit retarder des enquêtes demandées depuis plus de
dix-huit mois et près de vingt-quatre mois.
Je crois que les amendements que nous propose ce projet de loi
permettront, d'une façon plus expéditive, de répondre aux
besoins des municipalités. Je tiens à faire part de toute notre
appréciation quant aux normes que l'on exigera à l'avenir et
qu'imposera la Commission de police. Nous allons lui donner le pouvoir de
réglementer, d'édicter des conditions d'admission. Un minimum de
qualifications deviendra requis pour qu'un individu, dans l'un ou l'autre de
nos corps de police, soit provincial ou municipal, puisse faire
carrière.
C'est ainsi que nous pourrons, devant cette société qui
évolue, obtenir une collaboration plus étroite et une
coopération "coopération" n'est pas suffisant
essentielle parmi tous les corps de police. Ayant reçu la même
formation, ils comprendront mieux les problèmes et ils seront en mesure
de travailler à la solution des difficultés qui se
présentent pour le maintien de l'ordre et de la paix dans la
société.
Cette réglementation, à l'endroit des cadets de nos corps
de police, à l'endroit des cadets de la Sûreté du
Québec, s'imposait. Je crois qu'il faut rendre, ce soir, un hommage bien
mérité à ces travailleurs acharnés qui ont
accepté le mandat qu'on leur avait confié dans le but de
répondre à un besoin et à une législation
qu'avaient demandée les différentes municipalités de la
province. Je sais qu'il existe certaines difficultés au niveau
financier. Aujourd'hui, la Commission de police exige, à bon droit, que
les cours dispensés à leurs futurs policiers à l'Institut
de police de Nicolet, les municipalités doivent en partager le
coût.
Je sais, M. le Président, que nous avons examiné ce
problème. Je suis convaincu que le ministre s'est penché
également sur cette situation qui a sûrement été
portée à sa connaissance. Afin que les municipalités
puissent, si on leur impose l'obligation de faire suivre des cours, soit
à l'institut de Nicolet ou à l'école de Montréal,
à leurs futurs policiers, il va de soi, M. le Président, que le
ministère de la Justice devrait trouver une formule pour alléger,
en quelque sorte, le budget des municipalités, afin qu'il n'y ait pas de
charges trop onéreuses à l'endroit des contribuables.
Je sais que le ministre n'a pas eu le temps de le faire depuis son
entrée en fonction, mais je me demande s'il n'y aurait pas avantage
à tenir occasionnellement des rencontres avec les différents
chefs de police des principales villes de la province. Personnellement, j'ai
vécu cette expérience, et c'est là que nous pouvons saisir
les véritables besoins de nos chefs de police, qui, à ce
moment-là, se font les porte-parole des corps policiers municipaux. Et
par la présence des officiers de la Commission de police, je crois que
ces derniers sont orientés, sont en mesure de préparer des
règlements et de suggérer des méthodes administratives et
de travail qui ne soient que dans le meilleur intérêt de toutes
les populations des municipalités concernées.
Si on envisage certaines expériences pilotes qui sont
actuellement vécues au sein de la Sûreté du Québec,
je n'ai aucun doute que, de plus en plus, ces rencontres devront être
continuées et deviendront nécessaires pour tâcher qu'il n'y
ait qu'un esprit au sein de tous nos corps de police municipaux.
C'est avec plaisir, M. le Président, que nous apprenons
également l'amélioration du sort des veuves et des enfants des
policiers morts en service. C'est une autre amélioration. C'était
une lacune qui existait dans la loi, mais nous l'avons constatée au fur
et à mesure que des cas d'espèce nous ont été
signalés. Je crois que ces amendements qui nous sont
présentés ce soir s'imposaient, et c'est avec plaisir que nous
appuierons cette loi qui répond à un besoin qui était
fortement désiré par les membres de la Commission de police.
Je suis sûr que vous me permettrez, M. le Président, non
pas de m'éloigner du sujet, mais de rattacher à ce sujet
l'Institut de police de Nicolet. Je me rappelle qu'à l'occasion de
l'étude des crédits du ministère de la Justice, le
ministre était aux prises avec un cas de conscience, soit celui
d'améliorer, de réparer et d'investir davantage dans l'Institut
de police de Nicolet.
Je ne sais pas quel a été le résultat de ces
consultations que le ministre a certainement eues avec les chefs de service du
ministère et avec ses sous-ministres. Mais je serais fort surpris que le
ministre, de concert avec le ministre des Travaux publics, n'ait pas
arrêté la décision d'aller de l'avant afin
d'améliorer cet institut de police pour que l'on puisse offrir un peu de
confort, et je dirais même dans certains cas de la
sécurité, à ces élèves qui
fréquentent l'institution. Je souhaite une politique progressive de la
part du ministre de la Justice et je formule le voeu que les locaux actuels de
l'Institut de police de Nicolet soient améliorés.
C'est donc avec beaucoup de plaisir que nous appuierons le principe de
cette loi. Nous serons prêts à collaborer avec le gouvernement
dans l'espoir de rendre cette loi encore meilleure si possible. Ce seront
nécessairement les policiers eux-mêmes qui, en premier lieu, en
retireront bénéfices et avantages. D'un autre côté,
ce sera la population qui, avec orgueil et raison, se réjouira d'avoir
un corps de police bien préparé pour accomplir le travail que les
officiers municipaux, ou les officiers de la Sûreté du
Québec voudront bien lui confier, et ce pour que notre corps de police
puisse se comparer avec avantage à ceux de toute autre province du
Canada.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Mégantic.
M. Bernard Dumont
M. DUMONT: Merci, M. le Président. Nous avons ce soir à
étudier ce bill 47, Loi modifiant la Loi de police. Dans les
premières notes explicatives, nous pouvons lire textuellement: "Les
articles 1 à 4, 7, 12 et 14 du projet de loi modifie la Loi de police
afin de prévoir explicitement la possibilité pour les corps de
police municipaux d'avoir des cadets et leur accordent un statut analogue aux
cadets de la Sûreté du Québec."
J'ai écouté tout à l'heure le ministre de la
Justice vanter les possibilités d'avoir de tels cadets, surtout dans la
région de Montréal. Je le félicite de penser toujours
à cette grande ville, cette grande métropole du Canada qui, par
sa population, mérite une attention spéciale.
Le député de Maskinongé, lui, a parlé de
Nicolet. Je n'ai aucune objection à ce qu'on continue à vanter
les mérites des gens bien préparés. On espère que
ces cadets seront préparés à être demain des gens
d'ordre, mais qu'ils seront surtout des éducateurs qui verront à
faire respecter les lois et non pas seulement à percevoir des amendes.
Je voudrais aussi attirer l'attention du ministre sur le fait qu'il y a
Québec, Lévis, Chandler, Rimouski. Il y en a peut-être un
dans Bonaventure. En tout cas, dans le comté de Mégantic, il y a,
à Thetford Mines, un très beau palais de justice où l'on
pourrait très bien préparer les cadets à effectuer un
service d'ordre qui deviendrait parfait. Il faudrait qu'on permette à
ces jeunes de tous les coins de la province, d'étudier dans des
écoles de formation comme telles.
A Thetford Mines, comme dans bien d'autres endroits de la province de
Québec, maintenant que les manèges militaires sont fermés,
nous pourrions avoir des cadets qui, venant des quatre coins de la province,
formeraient, sans aucun doute nous espérons qu'ils ne seront pas
seulement préparés à Montréal un corps
policier ou un service d'ordre qui deviendrait parfait. Donc, nous acceptons et
nous préconisons cette façon de procéder de la part du
gouvernement, conscients que le ministre de la Justice a voulu donner un bon
coup de pouce au premier ministre pour créer ses 100,000 emplois! Bien
préparés, ces cadets auront un emploi rémunérateur.
Comme je le disais tout à l'heure, nous espérons qu'ils seront
préparés dans le but de prévenir notre population des lois
qui existent et qu'ils seront des éducateurs plutôt que des
percepteurs d'amendes.
Enfin, nous devons, je crois, applaudir à cette pensée.
C'est une expérience à vivre dans la province de Québec.
Souhaitons que nous aurons avec ça une préparation
nécessaire afin que, dans les périodes de crise comme celle que
nous venons de traverser, nous ne soyons pas toujours obligés d'appeler
l'armée. On l'a fait parce qu'il y avait épuisement humain
à cause des circonstances difficiles que nous avons traversées.
Désormais, nous aurons un nombre assez imposant de personnes au service
d'ordre de la province de Québec pour répondre à nos
besoins.
Il y a peut-être une explication que je demanderais au ministre de
la Justice. D'ailleurs, lors de l'application de cette loi, nous nous
réserverons le droit de critiquer si par hasard il y avait dans
ça une intrusion de la part de la Commission de police. J'ai
toujours
respecté, moi, et je sais que le ministre aussi respecte
très bien les municipalités, le maire et les conseillers. Alors,
j'ai bien remarqué dans ces déclarations qu'il faudra toujours,
lors de la destitution, par exemple, de leurs fonctions d'officiers de police
et autres, comme le ministre l'a expliqué tout à l'heure, que le
tout soit entériné par la Commission de police. J'ai l'habitude
de faire confiance et je sais que le ministre fait confiance aussi au maire et
aux échevins qui, la plupart du temps, sont des juges très
impartiaux pour maintenir dans ses fonctions un chef de police ou un officier
de police qui remplit bien son rôle.
Alors je me pose une question, au sujet de l'article 11, à savoir
s'il n'y aura pas, à un moment donné, un divorce d'idées
entre un conseil municipal et une commission de police qui aura tendance
à devenir un petit peu trop autoritaire. Enfin, ce n'est qu'une simple
remarque. C'est surtout dans le but d'en faire une critique constructive que je
fais une allusion à cet article 11.
Dans ce secteur-ci de la Chambre, nous serons en faveur de cette loi.
Nous sommes en faveur du principe de la loi. Nous écouterons tous les
arguments qui seront apportés et nous tenterons, par des critiques
constructives qui existeront en cette Chambre, d'améliorer ce projet de
loi qui permettra, dans la province de Québec, d'avoir réellement
un corps policier québécois.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.
M. Camille Laurin
M. LAURIN: M. le Président, il est quelques aspects de ce projet
de loi qui ont particulièrement retenu notre attention. Le premier
concerne précisément la formation de ces
étudiants-policiers que l'on nomme cadets.
La formation de nos policiers constitue, en effet, un problème
extrêmement important. Au cours de la crise que nous venons de
connaître, c'est le ministre de la Justice lui-même qui nous
rappelait, avec quelques autres membres de l'équipe
ministérielle, ainsi que le député de Maskinongé
tout à l'heure, à quel point notre démocratie est fragile
et justement, par voie de conséquence, à quel point le rôle
du policier est appelé à prendre de l'importance dans notre
société.
Plus le rôle du policier est appelé à prendre de
l'importance, plus nous devons accorder une extrême attention aux
programmes d'étude, aux modes de formation auxquels nous devons penser
pour lui. A ce titre, je crois que l'occasion est peut-être opportune de
souligner à quel point le rôle du policier exige une formation de
plus en plus poussée, de plus en plus complète. Incidemment,
j'aimerais bien, à ce sujet je sais que l'occasion n'est pas
propice à l'heure actuelle pouvoir examiner le programme
d'étude des policiers afin que nous puissions l'analyser d'un peu plus
près. J'espère que cette occasion nous sera donnée lorsque
la commission de la Justice se réunira.
Mais de toute façon, nous pouvons rappeler certains des grands
principes qui doivent inspirer la formation de nos
élèves-policiers. Je ne voudrais en signaler que quelques-uns ce
soir. Ce premier principe, particulièrement, est le respect de la vie,
de la dignité humaine afin que l'on ne voie jamais, dans notre pays,
certaines pratiques qui, parfois, ont terni la réputation de certains
autres corps policiers dans d'autres pays, c'est-à-dire ces
brutalités ou ces sévices qui, au fond, ne sont pas
ordonnés aux fins que poursuit la justice et qui souvent, constituent un
déni des droits fondamentaux de la personne humaine.
De la même façon, je crois que, comme deuxième
principe, on pourrait dire que la formation des policiers devrait s'inspirer
des découvertes de la psychologie moderne afin que le policier puisse,
dans son action, mener non seulement le rôle qui est le sien, de
protéger la société mais aussi d'aider l'individu dans le
cours de son travail à réorienter ses activités dans un
sens différent, quitte à ce que plus tard, cette action soit
poursuivie par les cours de justice.
De même, je crois qu'un troisième principe pourrait
être le suivant: c'est que l'on enseigne d'une façon très
exacte au cadet policier la conception exacte de son rôle qui est celui
d'apporter des faits à l'administration de la justice, qu'il s'agisse de
procureurs de la couronne, d'avocats de la défense ou de juges, qui leur
permettent d'établir la culpabilité ou la non-culpabilité
de l'accusé. Il faudrait éviter encore une fois ce qu'on a vu
dans certains autres pays et qui peut peut-être exister parfois dans le
nôtre: des policiers ou des représentants de la justice prendre
à ce point fait et cause pour la cause qui a amené l'arrestation
que nous constatons là encore, un véritable déni de
justice.
Je pense que la conception de ce rôle est extrêmement
importante et que si chacun de nos policiers, comme chacun de ceux qui
administrent la justice dans ce pays, conçoit son rôle comme celui
d'un protecteur de la société et non pas de quelqu'un qui ne veut
pas perdre sa "cause" par suite de la façon faussée dont il
conçoit son rôle, la justice sera très, très bien
servie.
Un autre aspect du projet de loi a retenu notre attention. C'est la
formation d'un autre corps, un service de renseignements et de statistiques. Ce
rôle était jusqu'ici tenu par la Commission de police. Je suis
d'accord avec le ministre de la Justice que le développement structural
de notre société rend nécessaire...
M. CARON: M. le Président...
M. LAURIN: ... et même indispensable la formation de cette
nouvelle...
M. CARON: ... une question de privilège, s'il vous plaît.
Afin que l'honorable député de Saguenay cesse d'intervenir
à propos de tout et de rien, pourriez-vous lui demander de se
réveiller et d'écouter attentivement les intéressants
discours des membres de cette Chambre?
M. LESSARD: M. le Président, j'ai d'ailleurs mon microphone ici
et je suis à l'écoute du député de Bourget, comme
j'ai écouté tout à l'heure le député de
Maskinongé ainsi que le député de Mégantic. S'il
vous plaît, les "backbenchers", réveillez-vous d'abord avant de
demander aux autres de se réveiller.
UNE VOIX: Debout!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. DEMERS: Ce n'est pas la faute du député, s'il
dort...
M. LAURIN: Donc, M. le Président, ce rôle était tenu
jusqu'ici par la Commission de police. Quant à moi, j'étais
rassuré du fait que c'était la Commission de police qui avait
pour mission de contrôler ces opérations d'intelligence, de
renseignements. On sait à quel point ces opérations de police
peuvent être délicates. Lorsqu'il s'agit d'enquêter dans la
vie privée de certains individus, même parfois sur des
matières qui touchent aux moeurs, sur des activités qui, sans
être illégales, peuvent parfois mettre un individu, si elles
étaient révélées, dans une fâcheuse
situation, on conçoit le pouvoir que cette faculté accorde aux
corps de police ou aux individus qui les contrôlent.
Pour ma part, j'étais satisfait de voir que la Commission de
police, étant donné surtout sa composition, donnait
là-dessus des garanties absolument parfaites de la bonne utilisation de
ces renseignements.
Lorsque nous voyons que ces pouvoirs sont transférés
uniquement à un corps de police, je suis quand même obligé
de rappeler l'exemple de certaines polices dans le passé, dans d'autres
pays; je me rappelle, par exemple, les volumes que j'ai lus sur la police
secrète de Russie, d'Allemagne et même de France dans le temps de
Fouché. Je me rappelle les abus auxquels a pu donner lieu cette
capacité de connaissance de dossiers individuels, à certaines
occasions. Il y a toujours danger que ces renseignements puissent être
utilisés pour des fins autres que celles que poursuit la police,
c'est-à-dire pour des fins politiques ou pour d'autres fins plus ou
moins avouables.
Je n'ai pas d'amendement à suggérer au ministre de la
Justice, mais je voudrais simplement soumettre ce problème à son
attention pour qu'il songe aux dangers possibles que cela pourrait constituer
et qu'il puisse penser à un moyen, peut-être lorsqu'il nous
donnera la réplique ou en comité plénier, qui garantirait
d'une façon absolue que tous les renseignements nécessaires et
indispensables qui peuvent être recueillis par cette section de la police
puissent ne pas servir à d'autres fins que la protection et le bon ordre
de la société.
En ce qui concerne les pensions, je me réjouis, avec le
député de Maskinongé, qu'on pense à en
élever le montant et surtout qu'on pense à l'accorder aux
conditions actuelles de la vie. Mais, j'irais peut-être même plus
loin. Nous savons à quel point le métier de policier devient de
plus en plus dangereux, à quel point des accidents peuvent survenir dans
la poursuite des activités d'un policier, que ce soit dans le cours
normal de la lutte contre la pègre ou dans la lutte contre les
organisations terroristes, comme nous l'avons vu récemment.
Peut-être y aurait-il moyen de pousser un peu plus loin la protection
à accorder aux policiers, peut-être y aurait-il moyen de penser
à l'indemnisation des policiers victimes de leur devoir et aussi des
familles dont ces policiers seraient responsables.
Je crois que c'est là un principe absolument valable, absolument
humain qui correspond aux dangers de plus en plus grands que courent nos
policiers et qui pourrait non seulement rassurer leur famille, mais leur donner
une plus grande motivation dans l'exercice de leurs fonctions.
C'est un autre principe que je soumets à l'intention du ministre
de la Justice, espérant qu'à cette occasion ou plus tard il lui
sera permis d'y donner suite.
En ce qui concerne l'amendement qui nous est suggéré, au
point de vue des suspensions de chefs de police, je crois que je suis
absolument d'accord, puisque la nomination d'un chef de police prendra de plus
en plus d'importance dans les années qui viennent et qu'il faut
être bien sûr qu'aucun arbitraire ne soit exercé, soit dans
le sens positif, soit dans le sens négatif, en ce qui concerne la
nomination ou la suspension de personnages aussi importants.
C'est donc la raison pour laquelle, M. le Président, il nous fait
plaisir de souscrire, avec enthousiasme, au principe de ce projet de loi.
M. DUMONT: M. le Président, le député de Bourget me
permettrait-il, à la suite de l'exposé qu'il a fait, de lui poser
une question?
Il a fait allusion au système d'ordre qui existe en Russie. Le
député de Bourget pourrait-il nous donner des détails sur
le corps policier qui expédie les prisonniers en Sibérie?
M. LAURIN: Je préfère ne pas répondre à
cette question.
UNE VOIX: Cela pourrait être intéressant. M. CHOQUETTE: M.
le Président...
M. VINCENT: M. le Président, avant que le ministre puisse exercer
son droit de réplique, peut-être pourrait-il ce soir
puisqu'il a mentionné tout à l'heure, ainsi que le
député de Maskinongé, l'Institut de police situé
à Nicolet, et puisque, à l'occasion de l'étude du budget
du ministère de la Justice, le ministre avait émis quelques
doutes en ce qui concerne l'emplacement de l'institut à la suite
de ses deux visites à Nicolet, à la suite également des
rencontres qu'il a eues avec des officiers supérieurs, nous donner un
aperçu de sa politique en ce qui concerne l'Institut de Nicolet?
Il y a même certaines rumeurs qui circulent selon lesquelles le
ministre tendrait la main pour donner des montants d'argent assez importants.
Ceci, je crois, entre très bien dans le cadre du principe du projet de
loi. Si nous voulons former de très bons cadets, dans un corps de police
provincial, ils peuvent venir chercher à Nicolet la meilleure formation
dans ce très bel institut.
M. FORTIER: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Gaspé-Sud.
M. Guy Fortier
M. FORTIER: ... je désire féliciter le ministre de la
Justice d'avoir présenté ce projet de loi parce qu'il
m'intéresse de façon particulière. Comme nous avons,
à Percé, un palais de justice et que nous avons eu des
difficultés avec des jeunes, je crois qu'avoir un corps de cadets
à Percé pourrait régler un problème qui s'est
présenté dans le passé et qui se présentera
peut-être dans l'avenir.
Je suis heureux de voir ce projet de loi car je crois que cela pourrait
peut-être régler le problème de Percé ou encore
d'autres villes ou villages qui reçoivent des jeunes durant
l'été et qui ont des problèmes avec ces jeunes. Je crois
que le meilleur moyen de régler le problème des jeunes, c'est
avec des jeunes. Je crois que les jeunes s'entendraient très bien avec
ceux qui seraient initiés. Ils connaîtraient les modalités
d'application de la loi de police et pourraient devenir des cadets de police.
Je me rappelle toujours, une fois à Gaspé, avoir vu des jeunes,
des cadets de l'armée et de la marine qui m'ont donné
l'impression que ce sont eux qui vont, dans l'avenir, aider la province.
Ce sont nos jeunes qui dirigeront ceux qui auront des problèmes;
ils devront, par exemple, prendre part à l'exécution de ce qui
regarde l'avenir de la province de Québec. Il faut se rappeler, M. le
Président et je crois que tous vont dire comme moi
qu'avant de diriger, il faut apprendre à écouter. L'école
de cadets de la police offre une excellente formation. Cela permet aux jeunes
de s'initier à cette profession, parce que, maintenant, être
policier est une profession. Vous allez donner de l'emploi et, en plus, vous
permettrez ainsi à des jeunes de Gaspé de discuter avec des
jeunes qui viendront visiter la Gaspésie.
Je vous félicite de cette loi et je crois qu'elle donnera
d'excellents résultats.
M. PAUL: L'honorable député me permettrait-il une
question?
M. FORTIER: Oui.
M. PAUL: L'honorable député ne conviendrait-il pas que la
formation d'un corps de cadets à Gaspé, à la charge
exclusive de la ville de Gaspé, pourrait être onéreuse?
D'un autre côté, s'il y avait, par exemple, un organisme comme une
communauté urbaine, couvrant tout ce territoire-là, ne serait-ce
pas l'organisme tout désigné pour implanter, sustenter ou
soutenir l'établissement d'un corps de cadets non pas exclusivement pour
la ville de Gaspé je sais que vous avez un brillant maire
mais pour tout le territoire de la Gaspésie?
M. FORTIER: M. le Président, je dois dire au député
de Maskinongé que sa question m'intéresse. Nous aurons
prochainement une loi qui va faire de Gaspé et de Percé une
communauté urbaine. Je ne vous apprends rien, tout le monde le sait et
cela va aider à avoir un corps de cadets pour Percé et aussi pour
Gaspé.
M. PAUL: Voici.
M. LE PRESIDENT: Le député de Robert-Baldwin.
M. Arthur Séguin
M. SEGUIN: M. le Président, je m'en voudrais si, à
l'occasion de ce bill, je ne faisais pas certains commentaires, je pense, bien
à propos. Tout d'abord il s'agirait de déclarer, puisque tous les
membres de cette Chambre semblent être en faveur du bill, que, moi aussi,
je voudrais féliciter le gouvernement de l'idée d'apporter ces
changements à la Commission de police, changements qui permettront
d'augmenter le nombre de commissaires, d'abord, puisque je pense que
déjà avec trois membres ils n'ont pas tous les avantages voulus
pour diriger cette fonction policière à travers la province.
Deuxièmement, l'aspect nouveau de permettre aux corps policiers des
différentes municipalités d'organiser des corps de cadets qui
pourront, à l'occasion, être utiles dans leur municipalité
sur plusieurs fronts et en plusieurs rapports.
J'écoutais avec beaucoup d'intérêt les commentaires
énoncés ce soir par différents orateurs de la Chambre. On
semble prêter aux policiers un rôle non seulement primordial et
principal de ce rôle de détection et d'investigation quand on sait
qu'exception faite de Mont-
réal, de Québec, de Trois-Rivières et de,
peut-être, une ou deux autres villes, la responsabilité du
policier se résume probablement à 10 p. c. ou à 15 p. c.
de son temps passé aux investigations et à la détection du
crime.
C'est là que je vois, M. le Président, qu'on est enclin
plutôt à se pencher du côté de ce problème de
détection, de prévention, ou d'investigation et qu'on oublie le
rôle très important du policier dans les municipalités.
C'est un rôle tout à fait d'ordre personnel, d'ordre social,
d'ordre humain et j'en parle avec connaissance de cause, ayant
été responsable, comme administrateur local, d'un corps de
policiers assez considérable si on parle de 70, 80 ou 100 personnes,
dans un corps, pour une ville assez imposante. Et je sais que, dans la
province, il y a d'autres municipalités dans cette même situation
où les policiers sont appelés non seulement à pourvoir
à la détection et à la surveillance du bien d'autrui, mais
aussi ces gens sont des ambassadeurs de l'administration, en
réalité. Ce sont des gens qui se prêtent quotidiennement,
constamment à l'assistance du public, que ce soit pour la maladie, que
ce soit pour l'hospitalisation, ou encore pour des problèmes tout
à fait journaliers comme des pannes d'automobiles, etc.
Il s'agit aussi pour ces policiers de faire la surveillance de
domiciles, de maisons dont les propriétaires sont partis en vacances. Il
s'agit d'appeler les quartiers généraux de la police pour
demander cette assistance. Dans la plupart de nos municipalités,
exception faite de la métropole, ou des grandes villes, il s'agit pour
ces policiers d'être constamment alertés et employés
à l'organisation de toutes sortes d'oeuvres. C'est la police municipale,
dans la province, qui est à la base de la représentation de
l'individu. Qu'on ne l'oublie pas! On semble toujours mettre cette
partie-là à l'écart, en arrière et on pense
à la pègre, on pense au crime, on pense à tous ces
problèmes extravagants, mais on oublie le rôle principal du
protecteur civil qu'est le policier dans 1,500 ou 1,600 municipalités de
la province.
Il y a cet avantage, en pouvant créer ses corps de cadets, non
seulement de prendre des jeunes qui sont intéressés à la
chose, de les instruire sur ce côté humain, loin du crime, loin de
la pègre, mais qu'on puisse les instruire, les éduquer et les
élever avec l'idée d'un service public, de la participation au
civisme.
C'est ce qui semble manquer. On est prêt à organiser des
groupements politiques, des mouvements de protestation, on est prêt
à structurer toutes sortes de jeunes pour protester, pour s'opposer,
mais jamais rien de positif ne se fait; c'est un négativisme auquel on
est devenu tellement habitué qu'on n'y fait plus attention.
Je voudrais que cette Commission de police puisse, au cours des
prochaines années, avoir des pouvoirs plus étendus que ceux que
le bill lui donne. Qu'on puisse lui permettre d'entrer dans les
municipalités et d'aider à l'organisation de ces corps de cadets,
de ces groupements de jeunes, afin de renverser la roue ou de la faire tourner
en sens inverse.
On en est à la protestation; il me semble qu'il faudrait
peut-être revenir à la participation et c'est par l'entremise de
ces jeunes, corps de cadets de l'armée, corps de cadets de l'aviation,
corps de cadets de police, qu'on y parviendra. En plus de ça
peut-être que j'abuse, M. le Président, je pourrais être
hors d'ordre il faudrait même que le ministère de
l'Education poursuive dans nos écoles les mêmes ambitions pour
essayer d'éduquer les jeunes sur cette nécessité de vivre
ensemble. En plus du crime, de la pègre, de la détection et de
l'investigation dont on parle toujours au sujet de nos policiers, il faudrait
aussi reconnaître leur rôle principal, en réalité,
dans les petites municipalités. Et ce rôle principal, c'est
d'être constamment au service du public.
Je pense que c'est là l'influence que ces corps de cadets
pourraient avoir, qu'ils soient subventionnés ou non, qu'ils aient des
uniformes ou non, peu importe. Qu'ils aient un local pour qu'ils puissent
entendre parler les gens bien renseignés de la municipalité, que
ce soient le maire ou les conseillers, les présidents de groupes locaux,
des corps intermédiaires, la police elle-même, pour qu'on les
instruise et les amène à comprendre d'une façon positive
cette participation au civisme.
C'est ça qu'il faudrait, c'est de cette façon qu'il faut
utiliser ces jeunes. C'est pour cela qu'il me fait grand plaisir, non seulement
de féliciter le gouvernement, mais de lui souhaiter bonne chance et
surtout d'exprimer, en ce qui concerne les municipalités de ma
région, notre intérêt et notre désir de participer
pleinement à ce qu'on veut accomplir ici.
J'éviterai de faire les éloges de la commission, puisque
déjà le député de Maskinongé est allé
bien au-delà de ce que j'aurais pu faire moi-même, surtout
après une période d'essai d'une année ou d'une
année et demie depuis qu'elle est en devoir. Mais, je sais que
déjà il y a grand avantage d'avoir cette centrale qui pourra
contrôler la police municipale.
Pendant que j'y suis, il faudrait peut-être que cette Commission
de police fasse en sorte d'enlever au niveau municipal le contrôle de la
police locale, la soustraire du joug du maire et des conseils de ces
municipalités, pour que ces corps policiers deviennent apolitiques dans
la force du mot. Qu'il y ait un minimum de contrôle et du nombre et des
individus et de leurs qualifications et de ce qu'ils font, de la part du
conseil, qui est élu d'une façon politique et qui a des tendances
et des désirs politiques. Il faudrait, il me semble, que cette
commission puisse graduellement voir à cette surveillance tout à
fait nécessaire à nos corps de police municipaux pour faire
disparaître toute interférence, toute ingérence et pour
qu'ils
soient complètement libres d'être utilisés pour les
raisons pour lesquelles ils ont été constitués,
c'est-à-dire voir à l'application des lois, voir à
l'assistance de la population et, enfin, détecter les crimes, s'il en
existe dans le milieu où ils sont.
Je pense que le gros problème qui existe présentement,
c'est que, très souvent, il y a de la part des autorités
municipales de l'ingérence. C'est pour ça aussi qu'il faudrait,
à l'avenir, que cette commission puisse avoir plus à dire sur
l'action de la police dans nos municipalités. La municipalité
doit nécessairement payer. D'un autre côté, je pense qu'il
faut préserver ces gens, pour qu'ils puissent accomplir leur devoir
librement, jusqu'à un certain degré, de la politique locale qui
se vit et se répète tous les quatre ans, lorsqu'il y a des
élections.
M. Jérôme Choquette
M. CHOQUETTE: M. le Président, je ferai simplement une
brève réplique qui ne constituera pas une réponse à
tout ce que nous avons entendu de la part des honorables préopinants.
Une réflexion qui me venait à l'esprit en entendant le
député de Robert-Baldwin, c'est que son point de vue était
diamétralement opposé à celui du député de
Mégantic. D'une part, le député de Robert-Baldwin
réclamait l'autonomie absolue des corps policiers par rapport aux
conseils municipaux, tandis que le député de Mégantic,
lui, faisait l'apologie des conseils municipaux, de leur sens civique dans la
direction des affaires policières et de leur
désintéressement par rapport à l'action des corps
municipaux de police.
M. le Président, je n'abonderai ni dans le sens de l'honorable
député de Robert-Baldwin ni dans celui du député de
Mégantic. La vérité est probablement entre les deux. D'une
part, il faut que la police ait une certaine indépendance
vis-à-vis du pouvoir politique mais, d'un autre côté, on ne
conçoit pas bien qu'un corps de police travaille dans l'absolu, sans
aucun contrôle des élus du peuple. Par conséquent, ce qu'il
faut rechercher, je crois, lorsqu'on est dans ce domaine, c'est la formule qui
assure un équilibre entre les deux pouvoirs, un respect
réciproque, une action concertée, afin d'éviter des
collisions et d'assurer, en somme, que la justice s'accomplisse dans les
meilleurs conditions possible.
C'est la raison pour laquelle, tout à l'heure, je proposerai un
amendement que les honorables députés n'ont pas encore sous les
yeux et qui, à mon sens, diminuera les pouvoirs des conseils municipaux
sur les directeurs ou les chefs de police. Les conseils municipaux pourront,
évidemment, adopter une résolution relevant un directeur de sa
fonction, mais cette résolution n'entrera en vigueur que lorsqu'elle
aura été entérinée et approuvée après
enquête par la Commission de police. Je pense que, dans ces
conditions-là, nous aurons réalisé l'unanimité
entre le député de Robert-Baldwin et le député de
Mégantic.
M. le Président, simplement quelques observations. L'honorable
député de Nicolet m'a tendu la perche pour que je lui
réponde de l'avenir de l'Institut de police de Nicolet. Il est vrai que,
lors de l'étude du budget du ministère de la Justice, j'avais
manifesté quelques doutes sur l'avenir de cet institut dans les locaux
qu'il occupe actuellement. Ceci n'impliquait, de ma part, aucune critique
à l'égard de la formation, du programme d'entraînement, de
la direction ou du personnel de l'institut. Ce sont simplement des questions
qui nous venaient à l'esprit, étant donné l'investissement
considérable requis par cet institut.
Mais, je dois rassurer le député de Nicolet, ce soir.
L'Institut de police demeurera à Nicolet. Il peut dormir sur ses deux
oreilles. Il pourra retourner à ses commettants à Nicolet et,
dans cette ville au passé clérical, je dirais, presque
centenaire, il pourra dire que le clergé a été
remplacé par la police!
M. VINCENT: Je vais me faire aider par le vice-président de
l'Assemblée nationale!
M. BERTRAND: II y a même un policier qui est devenu diacre!
M. CHOQUETTE: J'ai vu que dans la ville de Nicolet on réussissait
à concilier les qualités des deux. Je suis content que le chef de
l'Opposition... Enfin, même un père de huit enfants...
M. PAUL: C'est cela. Locus regit actus.
M. CHOQUETTE: Je puis dire au député de Nicolet que
l'institut restera à Nicolet et que sans lui promettre des
investissements considérables nous travaillons sur la base d'un
programme bien organisé de façon à équiper
l'institut dans son ensemble de tous les services requis pour en faire une
école de plus en plus avancée, un campus policier,
véritablement, qui assurera à nos jeunes policiers la meilleure
formation possible.
L'honorable député de Bourget a également
posé quelques questions intéressantes, à mon sens. Il
s'est interrogé sur le rôle de ce centre de renseignement et de
dépistage du crime. Je peux l'assurer que je partage tout à fait
ses préoccupations. A mon sens, un centre de renseignements et de
documentation sur le crime ne doit jamais servir contre les personnes en
l'absence d'une action véritablement policière qui a pour but de
faire triompher la justice et non pas d'exercer une vengeance quelconque
à l'égard de qui que ce soit pour quelque motif personnel que ce
soit. Il peut, je pense, dans ces conditions, être assuré que les
contrôles appropriés seront exercés de façon qu'on
n'utilise pas des renseignements qui sont nécessaires dans
l'action policière d'aujourd'hui à des fins autres que
celles qui sont strictement ordonnées vers le triomphe de la justice.
l'honorable député s'est également interrogé sur la
formation qui était donnée à l'Institut de police. Je
voudrais, M. le Président, à titre de colonel honoraire de
l'Institut de police l'inviter à la prochaine collation des
diplômes des policiers, ainsi que tous les autres députés,
pour voir jusqu'à quel point en quatre mois on réussit à
prendre des jeunes gens souvent indisciplinés, sans aucune tenue, sans
aucune formation, souvent je ne dirais pas délabrés, le
mot serait trop fort, mais négligés, le mot, je pense, serait
exact et à en faire des personnalités tout à fait
dignes de représenter leur ville et même la province auprès
du peuple.
M. LAURIN: Le ministre pourrait-il me permettre une question? Si
vraiment ils sont dans cet état à leur arrivée, j'ai
l'impression qu'ils sont mal choisis.
M. CHOQUETTE: Non. J'ai dit négligés. J'ai dit
négligés parce que l'honorable député sait qu'il y
a beaucoup de laisser-aller de nos jours.
M. LE PRESIDENT: Cette motion de deuxième lecture sera-t-elle
adoptée?
UNE VOIX: Adopté.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose que je
quitte maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en comité
plénier.
Cette motion sera-t-elle adoptée?
UNE VOIX: Adopté.
Comité plénier
M. HARDY (président du comité plénier): Article
1?
M. PAUL: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté. Article 2?
M. PAUL: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté. Article 3?
M. PAUL: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté. Article 4.
M. PAUL: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté. Article 5? Adopté.
Article 6? Adopté. Article 7.
M. CHOQUETTE: L'article 7, c'est dans les nouveaux amendements.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable ministre de la Justice propose un
amendement à l'article 7.
Adopté.
Article 8? Adopté?
M. PAUL: Un instant, s'il vous plaît. Adopté, M. le
Président.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté. Article 9?
M. PAUL: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté. Article 10? Adopté?
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté?
M. PAUL: M. le Président, à l'article 30, cet amendement
s'impose justement à cause de cette nouvelle politique, mise sur pied au
sein de la Sûreté du Québec, qui tendrait à faire
disparaître les deux régions est et ouest du Québec, ou la
région de Québec et la région de Montréal, pour
établir certains bureaux de districts.
M. CHOQUETTE: Conformément à la division administrative
qui a été acceptée pour l'ensemble des activités
gouvernementales.
M. PAUL: Oui, très bien.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 10, adopté. Article 11?
M. CHOQUETTE: L'article 11, c'est dans les nouveaux amendements, M. le
Président.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 11, adopté avec amendement.
M. VINCENT: M. le Président, à l'article 11, est-ce que le
ministre serait en mesure de nous dire... Je n'ai pas eu le temps de lire
l'article, je viens tout juste de l'avoir. Je vais citer un exemple: supposons
un policier de la Sûreté du Québec qui serait
décédé en 1961 et dont la veuve recevrait
présentement une pension d'environ $150 par mois. En vertu de l'article
11 ou de l'amendement que le ministre apporte aujourd'hui, quel serait
l'ajustement de cette pension? Est-ce qu'on agirait de la même
façon qu'on a agi avec les fonctionnaires provinciaux,
soit en donnant un effet rétroactif qui datait de 1962, je crois,
ou si cela entre en vigueur seulement à compter du 1er janvier 1970? Je
l'avoue, je n'ai pas eu le temps de lire l'article. Il vient tout juste de
m'être remis.
M. CHOQUETTE: La revalorisation de la pension est faite à compter
du 1er janvier 1970, mais elle est faite en fonction du salaire gagné
par le défunt, à la date du 1er janvier 1970, si le défunt
avait été vivant à cette date.
M. VINCENT: D'accord. Parfait.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 11, adopté tel
qu'amendé.
M. LAURIN : M. le Président, est-ce que le ministre aurait un
commentaire à faire sur la suggestion que je faisais en ce qui concerne
l'indemnisation des policiers morts en service?
M. CHOQUETTE: L'indemnisation...
M. LAURIN: Les familles des policiers morts en service?
M. CHOQUETTE: Mais c'est justement l'objet de tous les amendements qui
suivent et que le député a devant lui. Le premier article est
l'article 49 a) qui vise les veuves et les enfants des officiers de la
Sûreté, mais vous avez par la suite des amendements qui visent les
officiers et les agents des municipalités.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 11, adopté tel qu'amendé.
Article 12? Adopté.
M. SEGUIN: A l'article 11 du règlement, il s'agit, malgré
que la discussion n'ait pas porté directement sur ce que je peux lire
à l'article 11, 53 a), il s'agit d'un code de discipline. Est-ce que la
Commission de police ferait parvenir...
M. CHOQUETTE: L'honorable député, je pense, est un peu en
avance...
M. SEGUIN: Bien, je parle de l'article 11.
M. CHOQUETTE : Dans les amendements qui viennent d'être
ajoutés et qui sont assez longs, il s'agit de pension, et après
cela, l'article 11 dont il parle devient l'article 12 dans le nouveau
projet.
M. SEGUIN: Très bien. Alors je reviendrai à l'article
12.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 12, adopté?
DES VOIX: Adopté.
M. SEGUIN: Puisque je n'ai pas les amendements, c'est assez difficile de
suivre, M. le Président.
M. BERTRAND: Nous allons vous les passer.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'Opposition est mieux traitée que le
parti ministériel.
M. PAUL: C'est parce qu'on fait une part plus constructive.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Ceci démontre l'impartialité du
président.
M. PAUL: C'est ça.
M. SEGUIN: J'ai une question assez simple à poser au ministre de
la Justice. On fait cette suggestion que les différents responsables des
corps policiers devront faire parvenir à la commission, dans les 60
jours, un exemplaire de leur code disciplinaire. Cela prête à
toute une série de codes variés. Est-ce que la commission ne
pourrait pas, pour avantager et aider, faire parvenir aux municipalités
concernées, c'est-à-dire les municipalités qui ont des
corps de police, un prototype, un exemple ou un modèle de code, sur
lequel les municipalités moins bien pourvues au point de vue de
l'assistance, au point de vue du personnel de bureau, par exemple, en
l'amendant ou en le changeant?
On aurait au moins un règlement de base sur lequel la plupart des
municipalités pourraient se baser.
Je me demande si, puisqu'il en est question ici dans 60 jours, il ne
serait pas assez difficile, dans certains cas et pour certaines
municipalités, de rédiger ce code, qui pourrait aller
complètement à côté de ce qu'on voudrait avoir en
réalité.
Je soumets humblement que peut-être la commission ou le
ministère pourrait faire parvenir aux municipalités de la
province, par l'entremise du ministère des Affaires municipales, un
exemple d'un code type, permettant ensuite aux municipalités de le
modifier, de l'amender ou de le changer, mais toujours en gardant les grandes
lignes de cette suggestion ou de cette proposition.
Je pense qu'il y aurait une assistance et une contribution
réelles afin de s'assurer que, dans le plus bref délai possible,
on pourrait obtenir à la commission un rapport de chacune des
municipalités. De plus, il y aurait déjà un certain ordre
d'établi puisqu'il y aurait un document de base sur lequel elles
pourraient se guider.
M. CHOQUETTE: Je note la suggestion de l'honorable député.
Elle me paraît avoir beaucoup de valeur et j'en ferai part au
président de la Commission de police. Peut-être pourrait-on
prévoir un certain code type suivant l'importan-
ce des municipalités, quitte à permettre à des
municipalités, dans des cas particuliers, de déroger au code pour
d'excellentes raisons. Je note la suggestion du député et si nous
pouvons y donner suite, nous le ferons.
M. SEGUIN: II y aurait en plus, M. le Président, pour
l'information du ministre, à prêter ou donner considération
au fait que, dans beaucoup de nos villes d'importance moyenne, il y a des
forces combinées de police et de pompiers. Je pense que le code de
discipline devrait être rédigé de façon que, dans
certains cas où les corps sont séparés, on ait un code
disciplinaire distinct pour le corps de police. Dans les autres corps où
il s'agit d'une combinaison des deux, il y aurait aussi un code qui s'applique
aux deux fonctions puisqu'en l'occurrence, à certains moments, le
policier devient pompier ou le pompier devient policier.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 13, adopté?
M. DUMONT: M. le Président, j'ai quelque réticence
à accepter cet article 13 en ce sens que, pour moi, le maire d'une
municipalité, c'est un peu comme l'homme à la chaise, le
"Chairman", le président, l'homme très juste qui prend toujours
de très bonnes décisions, et on semble vouloir donner à la
Commission de police ces droits de décider. Je ne sais pas, nous avons
entendu tout à l'heure des commentaires en cette Chambre,
peut-être y a-t-il des maires qui, par excès de zèle, ont
abusé de leurs responsabilités. S'ils s'en accusent publiquement,
nous prenons leur parole et probablement parce que le ministre de la Justice se
sent le Salomon québécois, a-t-il voulu en même temps
servir une bonne leçon de choses à certains maires qui sont
allés un peu loin!
Mais les maires que je connais personnellement ont toujours
été des arbitres qui prennent des décisions très
justes et ce, avec les conseillers qui les entourent. Je pense qu'à ce
moment-là, ils sont mieux en mesure de juger qu'une commission
municipale. Par exemple ça dépend où les membres
siégeront si on essaie de légiférer à
Montréal pour une erreur qui pourrait être commise dans le
comté de Mégantic, s'il y avait des erreurs, on ne
connaî-tra peut-être pas tous les problèmes à ce
moment-là et il pourrait en résulter des abus.
Je ne m'opposerai sans doute pas à l'article, mais nous allons
suivre de très près l'application de cet article dans le projet
de loi.
M. SEGUIN: M. le Président, répondant aux commentaires
qu'on vient de faire, puisque je suis maire, en plus d'être
député, je dois dire que le maire et le conseiller, dans leur
municipalité, sont reconnus et doivent y agir comme législateurs
et non pas comme exécuteurs ou comme des gens qui voient
nécessairement, immédiatement et directement à
l'application de leur législation. Cela, c'est laissé.
UNE VOIX: A titre d'arbitres.
M. SEGUIN: Non même pas arbitres. Une fois que la
législation est votée par le conseil municipal, de par le fait
même, le geste du législateur étant posé, le
policier, le directeur de police ou le chef de police assume la
responsabilité de l'application de la loi adoptée par le
législateur qui est le membre du conseil.
Je voudrais, une fois que la législation sera faite, que le
policier ou le directeur de police soit dégagé d'une
responsabilité. Nécessairement, il est responsable devant le
conseil de ville; cela, je le comprends. Au point de vue de la direction et au
point de vue de l'application de ses directives, il doit en assumer la
responsabilité vis-à-vis d'une commission de police
régissant toute la province et non pas vis-à-vis d'un conseil
local ou municipal.
M. CHOQUETTE: Je voudrais seulement dire, en réponse aux deux
honorables préopinants, que nous n'avons que de bons rapports sur les
maires du comté de Robert-Baldwin et du comté de
Mégantic.
M. SEGUIN: Je l'espère.
M. DUMONT: Nous pouvons vous signaler, M. le Président, comme il
a été demandé, tout à l'heure, d'être au
juste milieu, que nous avons nous aussi adopté un slogan, qui est "ordre
nouveau" et qui permettra le juste milieu.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 13, adopté. Article 14?
Adopté tel qu'amendé?
M. BERTRAND: Oui.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté. Article 15? Adopté.
Article 16?
M. BERTRAND: Adopté;
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté. Article 17?
M. BERTRAND: Adopté.
M. HARDY (Président du comité plénier): M. le
Président, j'ai l'honneur de vous faire rapport que le comité a
étudié le projet de loi no 47 et l'a adopté avec des
amendements.
M. LAVOIE (Président): Est-ce que ces résolutions sont
agréées? Agréé.
M. PAUL: Oui, M. le Président, agréé.
Troisième lecture
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose la
troisième lecture du projet de loi no 47, Loi modifiant la Loi de
police. Cette motion sera-t-elle adoptée? Adopté de consentement
unanime.
M. LEVESQUE: Article onze.
Projet de loi no 56 Deuxième lecture
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose la
deuxième lecture du projet de loi no 56, Loi modifiant de nouveau la Loi
des tribunaux judiciaires.
L'honorable ministre de la Justice.
M. Jérôme Choquette
M. CHOQUETTE: M. le Président, l'honorable lieutenant-gouverneur
de la province a pris connaissance de ce bill et il en recommande
l'étude à la Chambre. Il s'agit d'un certain nombre d'amendements
à la Loi des tribunaux judiciaires, qui ne requièrent pas de
présentation. Par conséquent, M. le Président, je propose
que nous allions en comité immédiatement.
M. LE PRESIDENT: Cette motion de deuxième lecture est-elle
adoptée?
M. BERTRAND: Adopté. Nous allons en comité.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose que je
quitte maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en comité
plénier. Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
Comité plénier
M. HARDY (Président du comité plénier): Article
1.
M. PAUL: M. le Président, je ne voudrais pas entrer dans les
secrets du ministre, mais sans doute a-t-il consulté les
autorités du gouvernement central pour que cet amendement à la
loi devienne actualisé dans un avenir rapproché,
c'est-à-dire après son adoption. Je présume que le
mécanisme de consultation habituel a été appliqué
dans les circonstances.
M. CHOQUETTE: Oui. l'honorable député comprendra que j'ai
été en communication avec le ministre de la Justice et que j'ai
promis de lui donner les justifications statistiques nécessaires
à l'accroissement du nombre de juges. Il faut noter qu'actuellement le
nombre de juges est de 12 et que ce chiffre n'a pas varié depuis 1921,
à la cour d'Appel. Alors, je pense que je pourrai satisfaire facilement
les autorités fédérales.
M. BERTRAND: Est-ce que la demande a été formulée
par le juge en chef?
M. CHOQUETTE: Le juge en chef de la cour d'Appel.
M. BERTRAND: II vous a demandé d'augmenter le nombre.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1, adopté? Adopté.
Article 2?
M. LEVESQUE: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté. Article 3?
M. BERTRAND: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté. Article 4? Adopté.
M. CHOQUETTE: L'article 4 vise à corriger des erreurs commises
lors de la préparation d'une loi précédente et ne change
absolument rien à la question du régime des pensions.
M. DUMONT: Quel est le montant des pensions que les juges
reçoivent actuellement?
M. CHOQUETTE: Cela dépend des conditions dans lesquelles ils
prennent leur pension.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 4 adopté. Article 5,
adopté. Article 6?
M. FOURNIER: J'aurais certaines remarques à faire. Je dois
mentionner la situation particulière de la cour Provinciale dans le
district judiciaire de Hull. A cet effet, j'aimerais renseigner la Chambre sur
les activités de cette cour qui nécessiteront la nomination d'un
quatrième juge. Il y a présentement trois juges de la cour
Provinciale: les honorables juges Arthur Labbé, Avila Labelle et Orvile
Frenette.
Les statistiques judiciaires pour le district indiquent qu'il y a eu une
augmentation sensible des causes civiles depuis que des modifications ont
été apportées à la juridiction de la cour
Provinciale. L'augmentation s'est fait sentir lorsque la juridiction a
été augmentée à $1,000 et elle se fait sentir
davantage depuis qu'elle est passée à $3,000. Les causes civiles
ont augmenté. A la fin de 1962, il en restait dix. A la fin de 1968, il
y avait 180 causes civiles en suspens. En 1969, il y en avait 260 et,
présentement, il y a 386 causes civiles qui sont sur le rôle et
qui attendent des juges.
Parmi ces causes, il y en a 108 dont le litige s'établit
au-dessus de $1,000, de sorte que la
situation est assez difficile. Le nombre des poursuites pénales
et statutaires dans Hull a augmenté. En 1965, le total se chiffrait par
3,114 poursuites pénales et statutaires. Il est passé, en 1968,
à 4,108. En 1969, il était de 4,467 poursuites pénales et
statutaires et, cette année jusqu'à maintenant, il y a eu 1,261
causes en vertu du code criminel et 2,493 causes statutaires, de sorte que le
total, pour cette année, à ce jour, est de 3,754.
Je dois dire que cette situation est causée par le district que
nous occupons qui est situé près de la région ontarienne.
Je ne dis pas que tous ceux qui commettent des offenses nous viennent de la
province voisine. Cependant, ils participent grandement, à cause de la
quantité de la population, aux activités des tribunaux, de sorte
que, cette année, jusqu'ici, nos juges ont eu à entendre 3,754
causes criminelles. Les trois juges qui siègent dans le district de Hull
sont appelés à siéger aussi dans le district de Pontiac.
Ici, on me donne, pour l'année 1969, 773 poursuites pénales et
statutaires.
Je dois dire à l'avantage des honorables juges qui siègent
à Hull qu'ils ont accompli un travail très considérable.
J'ai devant moi le nombre des jours de séance qu'ils ont tenues dans le
district. Il y a eu 412 jours de séance cette année, de sorte que
chacun des juges a siégé au maximum. Le travail prend du retard
quand même à cause de l'augmentation de juridiction. Il est donc
important et opportun, vu cette augmentation de juridiction, que le
gouvernement voie à la nomination d'un quatrième juge de la cour
Provinciale relativement aux affaires civiles et criminelles, de façon
à empêcher la multiplicité des retards dans
l'administration de la justice.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Le député de
Maskinongé.
M. PAUL: M. le Président, j'ai écouté avec beaucoup
d'intérêt les arguments soulevés par le
député de Gatineau. Disons que la situation qui vient de nous
être signalée n'est pas exclusive à son district
judiciaire. Quand on envisage, M. le Président, les modifications qui
ont été apportées à la juridiction de la cour
Provinciale, soit l'article 34 du code de procédure civile, on voit
qu'il y a eu déplacement massif de la cour Supérieure à la
cour Provinciale dans tous les districts judiciaires.
Et je crois que le district actuellement qui mérite le plus
d'attention de la part des autorités du ministère de la Justice,
c'est votre district, M. le Président, où il existe une
accumulation de causes, tant au niveau de la cour Supérieure, de la cour
Provinciale et de la cour des Sessions de la paix, qui, en certaines
circonstances pourraient appeler certains commentaires
désagréables jusqu'à même employer l'expression
"déni de justice", non pas parce que les officiers ne travaillent pas,
non pas parce que les juges ne travaillent pas, mais cette situation, fort
intéressante, qui vient de nous être décrite par
l'honorable ministre d'Etat, se retrouve à tous les niveaux de tous les
districts judiciaires parce qu'il y a, en raisonnement simpliste, trois fois
plus de causes à la cour Provinciale qu'il n'y en avait autrefois,
c'est-à-dire depuis le mois de juillet 1970, en 1969 c'était
$1,000, en 1970 c'est devenu $3,000 et certaines modifications apportées
à cette session-ci donnent aujourd'hui nécessairement une
accumulation de causes au niveau de la cour Provinciale.
Pour ce qui est de la situation dans le district judiciaire de
l'honorable député, je crois que le développement
fantastique qui se produit à Lucerne, à Gatineau, et à la
ville de Deschênes amène là une population qui a quasiment
doublé de densité depuis peut-être une dizaine
d'années. Je ne dirai pas que c'est la rançon du progrès,
mais dans ce district judiciaire, il y a des besoins, je l'admets. Mais ce
soir, je crois que nous devons nous pencher sur une situation toute
particulière qui existe dans deux districts judiciaires
spécialement, ceux de Terrebonne et de Joliette.
Je crois que vous avez là les deux districts judiciaires
où il y a suffisamment de juges, mais peut-être un manque d'espace
pour corriger une situation pour que nos tribunaux puissent siéger
davantage. Et je ne suis pas personnellement frappé quand l'honorable
ministre nous parle de 412 jours de session à trois juges par
année, ce qui fait une moyenne d'à peu près 104 jours
chacun. Alors ce n'est pas un argument très fort, mais l'honorable
ministre a eu raison de faire ces commentaires pour satisfaire sans doute
à des demandes qui lui ont été faites par des membres de
son barreau. Je suis sûr que le ministre de la Justice, avec le
discernement et l'expérience de ses fonctionnaires, verra à
répartir ces nouveaux juges dans les districts où le besoin est
le plus pressant.
M. BERTRAND: Très bien.
M. FOURNIER: Seulement un mot à ajouter. Sur ce nombre de jours,
il faut penser nécessairement aux délibérés que les
juges ont à faire.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 5, adopté. Article 6.
M. PAUL: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté. Article 7.
M. PAUL: Adopté.
M. BERTRAND: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté. Article 8.
M. BERTRAND: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté.
M. le Président, j'ai l'honneur de vous faire rapport que le
comité a étudié le projet de loi no 56 et l'a
adopté sans amendement.
Troisième lecture
M. LAVOIE (président): L'honorable ministre de la Justice propose
la troisième lecture du projet de loi no 56, Loi modifiant de nouveau la
Loi des tribunaux judiciaires.
Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. LEVESQUE: Article 12.
Projet de loi no 62 Deuxième lecture
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose la
deuxième lecture du projet de loi no 62, Loi modifiant la Loi des
poursuites sommaires.
UNE VOIX: Adopté.
M. CHOQUETTE: Comité.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose que je
quitte maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en comité
plénier.
Cette motion sera-t-elle adoptée?
DES VOIX: Adopté.
Comité plénier
M. HARDY (président du comité plénier): A
l'ordre!
M. CHOQUETTE: M. le Président,... M. LE PRESIDENT (Hardy):
Article 1?
M. CHOQUETTE: ... à l'occasion de l'article 1...
M. LE PRESIDENT (Hardy): Excusez.
M. CHOQUETTE: ... je voudrais quand même remercier le juge Potvin
ainsi que ses collègues de la cour des Sessions de la paix qui ont fait
un travail d'étude et de mise au point de notre Loi des poursuites
sommaires. Ils ont présenté un rapport, et de ce rapport nous
avons tiré un certain nombre d'amendements qui sont contenus dans la loi
que j'ai l'honneur de présenter ce soir, de façon à
moderniser notre Loi des poursuites sommaires.
Alors, je pense, M. le Président, qu'il s'imposait que je leur
exprime, publiquement, nos remerciements pour le travail qu'ils ont
accom-pli.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 1, adopté?
M. PAUL: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 2? Adopté?
M. PAUL: M. le Président, à l'article 2, je me demande
quelle est la justification de cette définition qu'on y trouve,
spécialement à l'avant-dernière ligne et à la
dernière ligne: "... soit dans toute circonscription que
l'aéronef a survolée au cours de cette envolée." Pourquoi
ne dit-on pas tout simplement: Entre le point de départ et le point
d'arrivée, ou le point de départ et le point de destination? A ce
moment-là, on englobe tout le champ visé par l'amendement qu'on
veut apporter à cet article-là. Soit dans la circonscription
où l'envolée a commencé, soit dans les lieux où
elle...
M. CHOQUETTE: Est-ce que l'honorable député...
M. PAUL: ... a pris fin.
M. CHOQUETTE: ... accepterait de suspendre l'étude de cet
article?
M. PAUL: Je suis sûr, M. le Président, que le ministre
verra que cela devient un peu confus quant à la lecture de cette
dernière partie...
M. CHOQUETTE: C'est qu'en...
M. PAUL: ... de la phrase ou de l'amendement qui devient, à mon
humble point de vue, de la redondance inutile.
M. CHOQUETTE: En somme, l'aéronef est censé avoir
traversé tous les districts judiciaires à partir du point de
départ jusqu'au point d'arrivée. Par conséquent, on
laisse...
M. BERTRAND: Alors, il survole, au départ, le district
d'où il part, il survole, à l'arrivée, le district
où il atterrit. Alors, il a vu déjà ces deux
districts-là...
M. PAUL: Et les districts qu'il a traversés.
M. BERTRAND: "... soit dans toute circonscription que l'aéronef a
survolée au cours de cette envolée." Il a survolé au point
de départ et il a survolé au point d'arrivée et il a
survolé pendant. Alors, il y a...
M. CHOQUETTE: Oui, mais le survol impli-
que qu'il n'y a pas eu de départ ni d'arrivée. Le
survol...
M. PAUL: Bien...
M. CHOQUETTE: Cela me rappelle...
M. BERTRAND: II ne faut pas être plus catholique que le pape.
M. PAUL: Ou bien, entre le point de départ et le point
d'arrivée.
M. CHOQUETTE: Dans tout district judiciaire, entre le point de
départ...
M. BERTRAND: En plus, si cela s'est produit à bord d'un
aéronef, il y a un point de départ et un point d'arrivée.
Pourquoi les districts...
M. CHOQUETTE: C'est que cela peut même représenter un
avantage pour celui qui...
M. BERTRAND: Voici. Cette rédaction-là doit venir à
la suite d'un cas qui s'est présenté, et peut-être que le
ministre de la Justice a des informations qui permettraient d'appuyer cet
article.
M. CHOQUETTE: M. le Président, je n'ai pas de cas précis.
Il s'agit, en somme, d'arrêter la compétence des tribunaux au
point de vue des infractions qui peuvent être commises à bord d'un
aéronef.
Evidemment, on peut être assez restrictif et limiter cela au
district d'où l'avion a décollé et au district où
il a terminé sa course. Par ailleurs, il y a les districts qui ont
été traversés par l'aéronef. Cela nous donne un peu
plus de latitude. Je serais bien prêt à accepter une suggestion
disant: "Dans toute circonscription territoriale où l'envolée a
commencé et s'est poursuivie jusqu'à sont point
d'arrivée."
M. BERTRAND: A ce moment-là, vous choisirez n'importe quel
district.
M. CHOQUETTE: Exactement.
M. BERTRAND: Si vous survolez le district de Rimouski, vous pourrez
déposer la plainte dans le district de Rimouski. Si vous arrivez dans le
district de Gaspé, vous déposerez la plainte à
Gaspé ou à Percé.
M. CHOQUETTE: Le texte de l'article 2 est ainsi fait. C'est que le situs
de la commission de l'infraction est dans l'un ou l'autre de ces districts
judiciaires. C'est pour donner compétence au tribunal, purement et
simplement.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 2 adopté.
Article 3?
UNE VOIX: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté. Article 4?
UNE VOIX: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté. Article 5?
M. BERTRAND: Pas trop vite, M. le Président.
M. PAUL: Une demi-minute, M. le Président.
M. LE PRESIDENT (Hardy): On arrête à l'article 5?
M. PAUL: Non, non.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 5?
M. BOURASSA: Adopté.
M. PAUL: C'est jeudi, M. le Président.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 5 adopté.
Article 6?
UNE VOIX: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté. Article 7?
M. BOURASSA: Adopté.
M. PAUL: M. le Président, le premier ministre pourrait-il nous
dire ce que dit l'article 7?
M. BERTRAND: Le premier ministre vient en Chambre, habituellement...
M. BOURASSA: M. le Président, je puis dire exactement ce que
c'est.
M. BERTRAND : Oui mais le premier ministre me permettrait
certainement...
M. BOURASSA: "L'article 16 de ladite loi est remplacé par les
suivants...
M. PAUL: Mais qu'est-ce que cela veut dire?
M. BOURASSA: "La signification à une corporation se fait soit
à son siège social, soit à son bureau...
M. BERTRAND: C'est cela.
M. BOURASSA: "... d'affaires dans la province, soit au bureau de son
agent dans la circonscription territoriale où la contravention a
été commise, en s'adressant à l'un de ses
officiers ou à une personne ayant la garde du bureau. "Une
corporation comparaît par avocat ou par l'un de ses officiers
généralement ou spécialement autorisé." C'est
clair.
M. BERTRAND: C'est cela. La lecture est excellente. Je constate, M. le
Président, que, lorsque le premier ministre vient en Chambre, c'est un
peu comme une détente.
M. PAUL: C'est cela.
M. BERTRAND: A l'occasion, il vient ici pour se détendre.
M.BOURASSA: Avec le chef de l'Opposition, je pense que c'est normal.
M. BERTRAND: Je ne le blâme pas de se trouver cette
détente, mais c'est ce qu'il fait.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Revenons à l'article 7 pour l'adopter.
Adopté. Article 8?
M. PAUL: Oui, oui, d'accord. Parce que vous le demandez, M. le
Président.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté.
Article 9?
Adopté.
M. PAUL: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Adopté. Article 10? Adopté.
Article 11? Adopté. Article 12? Adopté. Article 13?
Adopté.
M. VEILLEUX: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 14? Adopté.
DES VOIX: Adopté.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 15? Adopté. Article 16?
Adopté. Article 17?
M. PAUL: M. le Président, au deuxième paragraphe de
l'article 17, amendant l'article 44, dois-je comprendre que le ministre a
l'intention de changer les formules de rapport qui sont en usage au
ministère depuis de nombreuses années?
M. CHOQUETTE: Pardon? J'étais distrait. Je n'écoutais pas
le député de Maskinongé.
M. PAUL: A l'article 17, deuxième paragraphe de l'article 44. "Le
procès-verbal est dressé suivant un modèle approuvé
par le lieutenant-gouverneur en conseil et est contresigné par un juge
de paix". Pour fins de statistiques en vue de l'établissement de
l'électronique au ministère de la Justice, est-ce l'intention du
ministre d'adopter une nouvelle formule de compilation de rapports? Est-ce pour
ça qu'on amende l'article 44?
M. CHOQUETTE: J'attire l'attention de l'honorable député
sur la portée exacte de l'article 17 qui ne vise que le jugement rendu
par le juge.
M. PAUL: Oui.
M. CHOQUETTE: Alors, en somme, le jugement pourrait être...
M. PAUL: Au procès-verbal.
M. CHOQUETTE: ... écrit au procès-verbal par le greffier,
mais à la condition qu'il soit contresigné par le juge de paix.
Maintenant, quant à savoir comment nous allons recueillir les
statistiques sur les jugements rendus, eh bien, je pense qu'on devra s'en
rapporter aux chiffres qui nous seront donnés par les greffiers au sujet
des condamnations et des amendes accordées.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 17, adopté. Article 18?
Adopté. Article 19?
M. PAUL: M. le Président, à l'article 19, est-ce que les
nouveaux tarifs sont prêts?
M. CHOQUETTE: Non, mais on peut tenir pour acquis qu'ils seront
similaires à ceux du code de la route.
M. PAUL: Ah! très bien.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 19? Adopté. Article 20?
Adopté. Article 21? Adopté.
M. BERTRAND: Quand il y a un mandat de saisie.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 22? Adopté. Article 23?
Adopté. Article 24? Adopté. Article 25? Adopté.
M. PAUL: Articles 24, 25, 26, 27.
M. LE PRESIDENT (Hardy): Article 26?
Adopté. Article 27? Adopté. Article 28?
Adopté. Article 29? Adopté. Article 30? Adopté.
M. BERTRAND: En avez-vous d'autres? M. PAUL: Amenez-en.
M. HARDY (Président du comité plénier): M. le
Président, j'ai l'honneur de faire rapport
que le comité a procédé à l'étude du
projet de loi numéro 62 et l'a adopté sans amendement.
M. LE PRESIDENT: La troisième lecture. L'honorable...
M. DUMONT: M. le Président, je voulais faire remarquer que nous
avons justement au cours de la semaine avant l'adoption en
troisième lecture demandé qu'on porte une attention
spéciale quand il y a des projets de loi de l'importance de celui qui
vient de nous être présenté 30 articles par exemple
afin que nous ayons de la part du gouvernement une préparation
avec la loi actuelle, la loi que l'on propose et les notes explicatives
à côté.
Alors, au lieu d'adopter les lois à la vapeur comme nous le
faisons, nous serions peut-être...
M. BOURASSA: Ce sont des articles de concordance.
M. DUMONT: ...en mesure de mieux juger de l'importance de la loi.
Mais puisque le ministre de la Justice, tout à l'heure, semblait
se poser la question et je me la pose, à l'article 2, "Soit dans toute
circonscription que l'aéronef a survolée au cours de cette
envolée", pourquoi ce terme est-il ajouté? Le ministre peut-il
maintenant nous fournir des détails?
M. CHOQUETTE: C'est parce que, lorsqu'une infraction est commise dans un
avion, nous ne savons pas dans quel district l'infraction a été
commise. Prenons un avion qui part de Baie-Comeau et qui s'en irait à
Ottawa. L'infraction commise à bord d'un aéronef peut être
commise dans le district de Baie-Comeau, dans le district de Québec,
dans le district de Saint-Hyacinthe, dans le district de Montréal, dans
le district de Hull, dans le district de Pontiac, peut-être. C'est pour
donner le choix au plaignant de porter sa plainte dans le district.
M. BERTRAND: II peut atterrir en cours de route. Il sera
arrêté à Trois-Rivières.
M. CHOQUETTE: L'honorable député peut tenir pour acquis
que ça ne se produira pas souvent.
M. VEILLEUX: A Saint-Jean.
M. BOURASSA: II convient que la Chambre ait une détente,
d'après les remarques que je viens d'entendre.
Troisième lecture
M. LE PRESIDENT: Cette motion de troisième lecture est-elle
adoptée?
M. PAUL: Oui, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Adopté.
M. LEVESQUE: M. le Président, je propose l'ajournement...
M. PAUL: Un instant, M. le Président. Je ne peux pas concevoir
que nous allons terminer la journée à dix heures cinq.
M. BERTRAND: Nous sommes prêts à continuer.
M. PAUL: Tout à l'heure, il y a une phrase que le
président des comités a échappée.
M. LE PRESIDENT: Est-ce sur la motion d'ajournement?
M. PAUL: Oui. C'est sur cela.
M. LEVESQUE: M. le Président, je n'ai pas encore formulé
la motion.
M. PAUL: Mais je veux faire une suggestion au leader. Le
président des comités a échappé tout à
l'heure une phrase que je voudrais appuyer positivement, en suggérant au
leader du gouvernement d'appeler, même si c'est en appendice au
feuilleton, la motion qui est inscrite au nom de l'honorable
député de Terrebonne. Je crois que la discussion ne sera pas trop
longue et nous pourrions libérer d'autant notre feuilleton du jour.
M. LEVESQUE : Je trouve la suggestion excellente. Je crois même
qu'il y a là une mesure d'économie parce que...
M. PAUL: C'est ça.
M. LEVESQUE ... demain le feuilleton n'aura pas à porter
l'inscription mentionnée par le député de
Maskinongé.
Chaque fois que de tels cas se présenteront, je serai très
heureux de manifester ma collaboration et le même esprit qui a
animé nos amis d'en face au cours de cette journée qui nous a
permis d'adopter ces quatre projets de loi.
M. BOURASSA: Merci, merci.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Terrebonne.
M. HARDY: M. le Président
M. HARDY: M. le Président, mes explications sont très
brèves. En vertu de la coutume, je demande tout simplement que la
fabrique de Sainte-Adèle soit remboursée des sommes qu'elle a
dû déposer ici pour un projet de loi qui est devenu caduc et qui a
été remplacé par un autre projet de loi.
Je pourrais évidemment faire une grande
thèse sur les difficultés financières, que
traversent présentement les fabriques, mais je sais que mes
collègues comprendront et accepteront à l'unanimité cette
motion.
M. PAUL: Pourrais-je demander à l'honorable député
quand aura lieu le "party"?
M. HARDY: Le?
M. BERTRAND: Le "party".
M. PAUL: Le "party".
M. BERTRAND: A Sainte-Adèle-en-Haut.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. PAUL: Adopté.
M. LACROIX: II y a un baril de vin de messe qui s'en vient.
M. LEVESQUE: M. le Président, je propose l'ajournement de la
Chambre à demain matin, vendredi, à dix heures trente.
M. BERTRAND: Nous étions prêts à continuer
jusqu'à onze heures.
M. LEVESQUE: Je connais votre...
M. BERTRAND: Non, non. Nous savons que votre ministre de l'Agriculture
n'est pas prêt, ce soir.
M. LEVESQUE: Vous allez voir, demain matin à dix heures
trente...
M. BERTRAND: ... pour discuter de la loi sur le cidre.
M. VINCENT: Le député de Rouville n'était pas
là.
M. BERTRAND: Nous allons excuser le député de Champlain et
ministre de l'Agriculture même si nous étions prêts à
continuer jusqu'à onze heures.
M. LEVESQUE: Je ne voudrais pas être injuste ainsi envers le
ministre de l'Agriculture. Je crois que s'il y a une responsabilité
à assumer, je dois l'assumer entièrement car j'avais prévu
que les travaux dureraient un peu plus longtemps. J'étais un peu dans
l'esprit du député de Mégantic, probablement, lorsque j'ai
fait le calcul du temps que cela prendrait pour les quatre projets de loi
présentés par le ministre de la Justice. C'est pourquoi j'ai dit
au ministre de l'Agriculture, qui était évidemment retenu par
beaucoup d'autres travaux il n'y a pas seulement ce projet de loi qui
l'occupe qu'il pouvait continuer son travail ce soir et que nous
l'attendions ici demain matin.
S'il y a quelqu'un de responsable, j'assume toute la
responsabilité.
M. PAUL: L'honorable député me permettrait-il une
question?
M. LACROIX: Avec le consentement du whip.
M. PAUL: M. le Président...
M. BERTRAND: On ne l'a pas vu depuis quelques jours.
M. PAUL: Dans la projection du temps qu'a pu faire le leader, est-ce que
par hasard il avait présumé que le premier ministre serait plus
longtemps en Chambre aujourd'hui?
M. BOURASSA: II n'avait peut-être pas présumé la
collaboration positive et l'opposition constructive de l'Opposition
officielle.
M. DUMONT: M. le Président, les jeudis passent mais ne se
ressemblent pas.
M. BERTRAND: C'est votre meilleure depuis un bon moment!
M. LE PRESIDENT: La Chambre ajourne ses travaux à demain matin,
dix heures trente.
(Fin de la séance 22 h 9)
ANNEXE Commission permanente des Finances
Projet de loi no 58
Loi modifiant la loi concernant l'établissement
par Sidbec d'un complexe sidérurgique intégré
Séance du mercredi 9 décembre 1970
TABLE DES MATIERES
Nombre d'actions.................................... 2167
Rentabilité ........................................ 2168
Prévisions......................................... 2169
Gisements......................................... 2170
Ferraille.......................................... 2170
Exploitation minière.................................. 2171
Exportation ....................................... 2172
Ventes........................................... 2176
Déficit........................................... 2179
Ajournement....................................... 2180 Séance
du jeudi 10 décembre 1970
Etobicoke......................................... 2180
Approvisionnement de métal ............................ 2180
Aciers spéciaux ..................................... 2181
Concurrence ....................................... 2181
Parcs d'automobiles .................................. 2182
Marchés.......................................... 2183
Développement industriel .............................. 2184
Recherche......................................... 2185
Autres compagnies................................... 2185
Projet de loi no 57
Loi modifiant la charte de la
Caisse de dépôt et placement du
Québec
Séance du jeudi 10 décembre 1970
Aliénation d'immeubles................................ 2187
Placements immobiliers................................ 2188
Politique de la caisse.................................. 2189
Placements........................................ 2190
Fonds de développement industriel ........................
2194
Ajournement....................................... 2196
Annexe
Commission permanente des Finances
Projet de loi no 58 Loi modifiant la loi
concernant
l'établissement par Sidbec d'un complexe
sidérurgique intégré
Séance du mercredi 9 décembre 1970 (Dix-sept heures
vingt-quatre minutes)
M. HOUDE (Limoilou): (président de la commission permanente des
Finances): A l'ordre, messieurs!
M. BERTRAND: Si le président veut ouvrir la séance. M.
Roy, entre autres, a des questions à poser à M. Gignac.
M. LE PRESIDENT: J'inviterais le ministre des Finances, s'il vous
plaît.
M. GARNEAU: A l'article 1. M. LE PRESIDENT: Article 1, bill 58.
Nombre d'actions
M. GARNEAU: II s'agit de porter de 6 millions à 9 millions 600
mille le nombre d'actions et dividendes différés. Ce qui devrait
dire que, d'après la charte, il resterait 400 mille actions à
dividendes différés qui seraient non émises.
M. PAUL: Le nombre d'actions, M. le Président, est de 10
millions?
M. GIGNAC: 20 millions.
M. GARNEAU: 10 millions d'actions ordinaires et 10 millions d'actions
à dividendes différés.
M. GIGNAC: Le gouvernement a seulement acheté, d'ailleurs de son
propre accord, les actions à dividendes différés.
M. JORON: Si vous le permettez, dans quel but avait-on payé ces
deux classes de capital?
M. GIGNAC: Je pense qu'elle existaient déjà dans Sidbec,
au moment de la formation de Sidbec pour quelles raisons ont-elles,
à ce moment-là...
M. GARNEAU: Elles existaient dans la charte de Sidbec et il avait
été convenu qu'il faudrait qu'il y ait au moins une moyenne de $1
de profit par action avant de pouvoir les transférer en actions
ordinaires et recevoir des dividendes. Mais la raison pour laquelle...
M. ROY (Beauce): Pardon? Je n'ai pas très bien compris. Combien
de profit par action?
M. GIGNAC: C'est $1, de mémoire.
M. ROY (Beauce): C'est $1 minimum. C'est dans la charte, ça?
M. GIGNAC: Dans la charte, oui. M. GARNEAU: Cela remonte...
M. ROY (Beauce): C'est parce que, si on se réfère à
la loi, il y a 15 millions d'actions d'autorisées.
M. GIGNAC: II y a 20 millions.
M. ROY (Beauce): Cela a été changé il y a quelque
temps. Mais dans l'ancienne loi...
M. GIGNAC: Est-ce que vous avez le bill 66?
M. ROY (Beauce): C'est le chapitre 77.
UNE VOIX: Cela a été changé par la suite,
ça?
M. GIGNAC: En 1968.
M. ROY (Beauce): C'est la loi sanctionnée le 5 juillet 1968.
M. GIGNAC: II est censé y avoir, si je me souviens bien 10
millions d'actions à dividendes différés et 10 millions
d'actions ordinaires.
M. ROY (Beauce): A l'article en bas, oui.
M. GARNEAU: Vous avez ça dans la loi... Les détenteurs de
ces actions, des actions à dividendes différés, n'auront
droit à cette conversion en dividendes ordinaires que lorsque la
compagnie aura d'après ses états financiers approuvés par
ses administrateurs, réalisé au cours de deux exercices
financiers consécutifs de 12 mois...
M. TETREAULT: M. le Président, on ne comprend rien!
M. GARNEAU: Y a-t-il quelque chose qui ne fonctionne pas?
M. TETREAULT: Ce n'est pas assez fort. On ne comprend absolument
rien.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que vous pourriez faire un peu moins de
bruit?
M. GARNEAU: Je mentionnais que les actions...
UNE VOIX: Ah, ah!
M. GARNEAU: Je pense que le micro ne fonctionnait pas. Je mentionnais
donc que les actions à dividendes différés pouvaient
être converties en actions ordinaires. Les détenteurs de ces
actions, à dividendes différés, n'auront droit à la
conversion en actions ordinaires que lorsque la compagnie aura, d'après
ses états financiers approuvés par ses administrateurs,
réalisé, au cours de deux exercices financiers consécutifs
de 12 mois chacun, un bénéfice net, déductions faites de
toutes taxes parce qu 'à ce moment-là c'était une
charte privée dont la somme globale, pour les deux exercices,
divisée par deux, sera égale à au moins un dollar par
action en cours à la fin du premier de ces deux exercices.
M. ROY (Beauce): C'est un dollar net, cela? M GARNEAU: Oui.
M. ROY (Beauce): C'est un dollar net, les impôts payés.
Maintenant là, je ne suis pas au courant est-ce que
Sidbec, par exemple, serait tenue de faire ses rapports d'impôt comme
d'autres sociétés, ou si Sidbec en est exemptée?
M. GIGNAC: Elle les fait.'
M. ROY (Beauce): Elle les fait?
M. GIGNAC: On les a déposés d'ailleurs en 1969. On a
déposé des états financiers je ne sais pas si vous
les avez eus, en tout cas, j'en ai envoyé...
M. ROY (Beauce): Je les ai eus. D'ailleurs, j'y ai fait certaines
références tout à l'heure, en Chambre, et je veux vous
féliciter de votre rapport. Je l'ai lu avec beaucoup d'attention.
D'ailleurs, il y avait beaucoup d'indications là-dedans qui nous ont
fourni la lumière nécessaire pour nous prononcer sur le projet de
loi.
Alors, ce sera un dollar l'action une fois les impôts
payés. C'est un dollar net ou un dollar avant impôt?
M. GIGNAC: Après toutes déductions.
M. ROY (Beauce): Après toutes déductions
d'impôt.
M. GIGNAC: Amortissements, impôts...
M. ROY (Beauce): Pour deux années de suite?
M. GIGNAC: Oui.
M. ROY (Beauce): Au sujet de la répartition des actions, je pense
que la totalité des actions est détenue par le gouvernement.
C'est cela?
M. GIGNAC: II y a à peu près 50 actions qui sont
détenues par les administrateurs actuels, des actions de qualification,
et qui, de toute façon, sont endossées par les détenteurs,
qui sont remises au Trésor.
M. ROY (Beauce): C'est la deuxième question que je voulais vous
poser. D'ailleurs, cela répond à la question parce que j'ai
remarqué qu'il y avait un certain nombre d'actions qui étaient
calculées séparément ici.
M. TETREAULT: Sur les actions que le gouvernement achète, on
remarque que ce sont toujours des actions différées. Est-ce que
le gouvernement, quand il fait un investissement, est obligé d'acheter
strictement des actions différées?
Rentabilité
M. GIGNAC: Je pense que c'est une question de choix ou de goût. Le
gouvernement aurait peut-être pu acheter des actions ordinaires, mais on
n'aurait tout simplement pas payé de dividendes. Peut-être que M.
Prieur pourrait confirmer cette affirmation. Je pense que, normalement, quand
quelqu'un détient des actions ordinaires, il semble normal que le plus
rapidement on paie des dividendes, le mieux c'est. Je pense que le gouvernement
a voulu indiquer, en achetant des actions à dividendes
différés, qu'il était évident que cela prendrait
quelques années avant que la compagnie puisse faire des profits.
M. ROY (Beauce): Cela peut prendre combien d'années,
d'après vous...
M. GIGNAC: Pour faire des profits, à Sidbec?
M. ROY (Beauce): Oui.
M. GIGNAC: Disons que je pense que l'année 1973 sera le point
tournant.
Ce sera un gros point tournant en fait, parce que tout converge vers
l'année 1972, pour, d'une part, avoir tous nos équipements de
fabrication d'acier en marche, rodés, avec la main-d'oeuvre
entraînée et, d'autre part, pour mettre sous contrôle
certains équipements qui ne l'étaient pas lorsque nous avons pris
la charge de Dosco.
Au milieu de 1972, on prévoit qu'on se retrouvera avec une
compagnie rentable et qui devrait à partir de ce moment, l'être
toujours, à moins qu'il y ait des choses imprévisibles qui se
produisent et qui nous empêchent de faire des profits. Actuellement
je ne sais pas jusqu'à quel point on vous a donné des
informations mais nous sommes extrêmement dépendants des
marchés extérieurs pour nous procurer, disons, de l'acier
primaire, des billettes et
lingots, et nous sommes obligés de payer des prix exorbitants. Si
nous ne payons pas ces prix, nous perdrons les marchés que nous avons.
Construire un marché dans le domaine de l'acier, cela coûte
énormément cher, et je pense qu'il est important que nous
gardions nos clients.
C'est pour cela que cette année, en 1970, de même qu'en
1971, d'une façon consciente, sachant que les prix seraient exorbitants,
nous avons décidé d'acheter l'acier où que ce soit
je ne dirais pas à des prix de fou, mais c'est presque cela, dans le
fond au prix du marché, qui est un prix très
élevé, surtout aux Etats-Unis. Nous devons acheter cet acier pour
être capables de pourvoir à la demande de nos clients.
M. PAUL: Excusez-moi, est-ce que je pourrais vous poser une question?
Est-ce que c'est dans les projets de Sidbec de fabriquer de l'acier à
partir du minerai transformé par toutes les opérations d'une
sidérurgie?
M. GIGNAC: Oui.
Prévisions
M. PAUL: Est-ce que vos prévisions, votre projection vous
permettraient de risquer sans imprudence une année comme étant
susceptible d'être atteinte pour la production, à partir du
minerai de base de l'acier, pour consommation commerciale?
M. GIGNAC: Voici quelles sont nos prévisions. Dans les projets
que nous avons soumis, les prévisions que nous avons faites, comportent
trois étapes très distinctes l'une de l'autre.
La première étape, la plus immédiate, celle qui
nous aidera à éliminer le paiement de ces sommes exorbitantes que
l'on paie pour l'acier primaire, c'est l'installation de fours
électriques à Contrecoeur et à l'usine de Montréal,
parce qu'il y a aussi là une installation de fours électriques
qui est en voie de se faire ou qui a commencé. Ces fours vont être
alimentés au départ par de la ferraille. Evidemment, cela va
demander un apport de ferraille assez considérable, de l'ordre de
700,000 tonnes en 1972. Cela veut dire que le marché
québécois ne peut fournir la ferraille en question. Il faut
l'importer. Cela va nous coûter je ne dirais pas nécessairement
plus cher, parce que dans le moment, assez curieusement, la ferraille de
Détroit coûte moins cher que celle de Québec. Je ne sais
pas pourquoi, mais passons.
M. PAUL: Quand vous parlez de ferraille, vous ne parlez pas du
minerai.
M. GIGNAC: Non, je parle de la "scrap". M. PAUL: La "scrap" de
métal.
M. GIGNAC : Oui. Cela va nous permettre de faire fonctionner nos fours
électriques et d'entraîner notre main-d'oeuvre, bien que, dans le
moment, nous ayons déjà deux fours électriques et que nous
soyons très bien placés pour entraîner cette main-d'oeuvre.
Cela va quand même nous permettre de nous dégager de l'emprise
sous laquelle nous sommes présentement quant à la fourniture
d'acier primaire. La deuxième étape est ce que j'appelle...
M. JORON: Si vous me le permettez, la première va durer combien
de temps environ?
M. GIGNAC: Je prévois qu'à peu près à ce
temps-ci, l'an prochain, la première fournaise va entrer en fonction. La
deuxième devrait être installée et prête vers le mois
de février 1972.
M. JORON : Je veux dire la période pendant laquelle vous vous
alimentez en ferraille avant d'en arriver au minerai va durer combien de
temps?
M. GIGNAC: J'arrive à ce point-là. Disons qu'en mars 1972
tout ce que l'on avait prévu pour fondre des boulettes
métallisées ou de la "scrap", de la ferraille, va être
installé et va fonctionner, excepté qu'au début cela va
fonctionner seulement avec de la ferraille. La deuxième étape,
qui va se faire en même temps ou, du moins, qui va démarrer assez
rapidement, va être l'installation d'une usine pour faire ce que l'on
appelle du fer éponge ou du fer métallisé.
Qu'est-ce que le fer métallisé? Je pense que vous
êtes tous ici assez au courant de ce qui se fait à Pointe-Noire
avec des boulettes d'oxyde de fer.
C'est une opération qui consiste à faire passer la teneur
en fer de 66 p. c. à 94 p. c. ou 95 p. c. de ces boulettes ou d'un
concentré de fer. C'est une concentration, mais bien spéciale,
faite à l'aide de catalyse, etc. C'est un procédé qui est
très compliqué.
Cette usine de métallisation peut être alimentée de
deux façons, soit par des boulettes des "pellets" vous connaissez
ça ou par un minerai. L'usine de métallisation, si le tout
se déroule selon le scénario qu'on a prévu, devrait
être en marche vers les mois de mars ou d'avril 1973. A ce
moment-là, ça nous dégage d'une autre emprise qui est
celle du marché de la ferraille. Cela nous permet ça nous
met peut-être sous une autre emprise, mais une emprise qui est beaucoup
plus contrôlable d'acheter des boulettes d'oxyde de fer et de les
transformer en fer métallisé dans l'usine de métallisation
qui serait à Contrecoeur.
La troisième étape, c'est l'exploitation d'une mine, soit
seuls ou avec d'autres. Je dois vous dire qu'on a plusieurs options en
tête, plusieurs voies à suivre, de ce côté-là,
qui nous permettraient de trouver un concentré qui répondrait
à
nos exigences techniques et qui pourrait être utilisé
directement dans l'usine de métallisation. Cette troisième
étape, au mieux, je la vois à la fin de 1973 je dis au
mieux et, au pire, vers 1975. C'est difficile à dire, cela
dépend beaucoup de la voie dans laquelle nous allons nous engager.
Si nous y allons seuls, c'est différent. Si nous y allons avec
d'autres, évidemment il faut faire un peu de compromis. Si nous sommes
pressés d'avoir du minerai, cela ne veut pas dire que d'autres le sont.
Vous savez très bien vous pouvez lire les journaux mieux que moi
que les investissements dans une mine de fer sont extrêmement
considérables, normalement. Le choix, pour nous, est soit d'y aller avec
des partenaires dans un nouveau gisement ou un gisement actuel nous
étudions toutes les possibilités soit d'avoir notre propre
mine, qui, nécessairement, devra être une petite mine que nous
exploiterions nous-mêmes.
M. JORON: Est-ce que, pour les fournisseurs actuels de minerai, la
production est vendue d'avance en circuit fermé? Vous ne pouvez pas vous
alimenter...
M. GIGNAC: Je vais juste vous faire une remarque technique; le minerai
que nous requérons pour alimenter notre usine de fer, on appelle
ça un concentré.
M. JORON: D'accord.
M. GIGNAC: Ce n'est pas nécessairement le minerai qui sort de
terre et qui est expédié aux hauts fourneaux. C'est un
concentré de ce minerai et la concentration doit se faire sur place. En
d'autres mots, ça prend des équipements additionnels sur place
pour faire le concentré. C'est le concentré qui va être
expédié à Contrecoeur et qui va être utilisé
dans l'usine de métallisation.
Gisements
M. TETREAULT: Dans les recherches pour les dépôts de fer,
est-ce que vous pensez, vu que la sidérurgie' du Québec se
développe à ce rythme, que ça peut faciliter les
investissements dans les mines où existent actuellement certains
gisements? Je parle du Nord-Ouest québécois aux environs de
Cadillac?
M. GIGNAC: Ecoutez, les investissements dans une mine sont normalement
des investissements très considérables. On parle du mont Wright,
enfin tout monde est au courant, l'affaire de la Québec Cartier Mining.
Elle veut dépenser quoi? Quelque $300 millions. Dès qu'on
s'attaque à des mines de cette dimension, ce sont de gros gâteaux.
Il faut avoir les reins assez solides. On n'est sûrement pas prêt
pour cela. Moi, je ne demanderais jamais au gouver- nement d'entreprendre une
chose semblable, pour plusieurs raisons. D'abord, je pense que
évidemment je ne voudrais pas donner d'opinion politique, c'est
une opinion personnelle c'est beaucoup plus rentable, pour la
création d'emplois, de mettre l'argent dans une usine de
métallisation, des fours électriques ou des instruments de
production et ou finition que de le mettre dans une mine de fer. Vous pouvez
prendre comme exemple Québec Cartier Mining ou même Iron Ore
Company of Canada. A Schefferville, ils ont investi peut-être $1 milliard
pour créer quoi? A peu près 1,000 emplois.
M. PAUL: Vous n'excluez pas la minéralisation, l'extraction du
minerai...
M. GIGNAC: Non, je ne l'exclus pas. Ce qu'on essaie de trouver, c'est
une façon de faire qui serait appropriée à nos moyens
financiers.
UNE VOIX: On n'a pas parlé de Natashquan.
M. GIGNAC: On a fait beaucoup d'études sur les sables de
Natashquan et on a fait des études de concentrés de Québec
Cartier Mining, etc. Il y a même la possibilité d'autres
gisements; il y en a qui sont assez bien connus, il y en a d'autres qui le sont
moins.
On a reçu parlant de l'abitibi des
représentations. Il y a des gisements de fer un peu partout, mais
évidemment, à moins que le gouvernement nous dise que nous sommes
une société de charité, je suis obligé de m'occuper
de la rentabilité de cette entreprise. Je prends donc le minerai qui est
le plus approprié pour mon usine, et justement celui qui me coûte
le moins cher.
Je pense qu'il est important que notre société, je parle
de Sidbec, de façon générale, devienne une entreprise
rentable.
Ferraille
M. RUSSELL: Dans la troisième étape, vous parlez
d'utiliser d'autres concentrés, mais vous conservez toujours la
possibilité d'utiliser la "scrap" comme on dit communément.
M. GIGNAC: Nous serons toujours un gros acheteur de ferraille ou de
"scrap".
M. RUSSELL: Plutôt que d'expédier la "scrap" au Japon, on
pourra toujours l'utiliser.
M. GIGNAC: Un des gros avantage d'utiliser le fer
métallisé, c'est que cela nous permet d'acheter de la ferraille
de très basse qualité, qu'il est difficile d'écouler pour
tous les fournisseurs de ferraille.
Evidemment, en achetant une ferraille de deuxième ou
troisième qualité, on abaisse le
coût de notre matière première aux fours
électriques.
M. LE PRESIDENT: Le député de Mégantic, s'il vous
plaît.
M. DUMONT: M. Gignac, vous incluez les vieilles carcasses d'automobiles
dans cette ferraille?
M. GIGNAC: Actuellement, pous vous dire la vérité, nous en
achetons. Il y a une usine à Montréal qui a installé une
déchiqueteuse et qui peut-être dans le moment déchiquette
des automobiles au rythme de 30,000 ou 40,000 tonnes par année. Le
problème, c'est le coût de la voiture rendue à l'usine
où elle doit être déchiquetée. C'est une
installation qui est assez dispendieuse, qui demande beaucoup d'entretien et
qui, évidemment, donne un assez bon produit. Mais à un moment
donné, dans un marché où le prix de la ferraille est
à la baisse, cela peut devenir du jour au lendemain une entreprise peu
rentable.
M. DUMONT: Vous avez dit qu'il serait nécessaire, probablement,
d'acheter à l'extérieur, alors on pense aux Etats-Unis, et
à ce moment-ci on voit que les navires et les chemins de fer
transportent en grande quantité ces vieilles carcasses d'automobiles
pressées. Si on les vend aux Etats-Unis dans le moment et
qu'après vous êtes obligés de les y racheter, est-ce que ce
n'est pas un peu invraisemblable?
M. GIGNAC: Vous ne pouvez pas déchiqueter les carcasses
d'automobiles si elles sont pressées. C'est là qu'est le
problème.
M. DUMONT: Ah! bon.
M. GIGNAC: C'est cela le problème. S'il n'y avait pas ce
problème-là, ce serait facile. Pour vous donner une idée,
je pense, si je me souviens bien, que le prix qu'un opérateur doit
payer, comme celui de Montréal, pour une carcasse d'automobile rendue
à l'usine, se situe entre $10 et $15. Ensuite, on la dépouille de
ses pneus, on enlève le chrome, on enlève ceci et cela, et ce qui
reste représente un peu moins qu'une tonne d'acier. Alors, cela veut
dire que la matière première, au départ, sans même
lui toucher ou à peu près pas, coûte $15 la tonne. Il faut
qu'il la manufacture, qu'il la mette en petites pièces. Alors, c'est une
entreprise marginale, et moi, je ne crois pas enfin c'est une opinion
bien personnelle qu'on puisse se départir de nos parcs de
vieilles voitures, dont tout le monde souhaiterait la disparition, sans que le
ou les gouvernements donnent des subsides. Cela me semble difficile, du moins
dans le moment, avec les équipements qui existent
présentement.
M. LE PRESIDENT: Le député de l'Assomption, vous avez une
question?
M. PERREAULT: Etant donné que vous êtes à court de
ferraille que vous avez payée cher, est-ce que le gouvernement ne
devrait pas donner un subside pour se débarrasser de ces
parcs-là? Nous en avons partout dans la province, dans la région
de Montréal surtout.
UNE VOIX: Quel est votre but?
M. GIGNAC: Je n'ai pas d'objection.
M. PERREAULT: Les municipalités sont prises avec cela.
M. GIGNAC: II y a deux choses. Allez chercher avec un camion vous
savez ce que coûte un camion aujourd'hui avec les chauffeurs qui sont
payés $2.50 à $3 l'heure dix carcasses d'automobiles et
apportez-les à l'usine, ils vont faire le déchiquetage de la
ferraille. A moins que les parcs en question soient très près de
l'usine, ce n'est pas rentable.
S'il y a un subside, c'est évident que cela peut parer un peu
à la non-rentabilité, mais il faut quand même penser aussi
aux quantités. On a fait une étude, justement sur le sujet, et on
calcule, dans le moment, que si on utilisait ce que j'appelle l'inventaire des
parcs de vieilles voitures qui existent dans la province de Québec, on
pourrait sans problème supposons qu'on pourrait les avoir
à bon prix déchiqueter à peu près 120,000
tonnes d'acier par année, pendant cinq ans. Après cela, on
reviendrait au rythme de la production normale annuelle qui se situe aux
environs de 50,000, 60,000, 65,000, 70,000 tonnes. Evidemment, au point de vue
de la pollution, c'est réellement un élément de pollution,
j'en conviens. On peut vider ces parcs-là, mais cela ne peut pas se
faire sans que le gouvernement n'intervienne.
M. LE PRESIDENT: M. le député d'Olier. Exploitation
minière
M. PICARD: M. Gignac, vous avez dit, tantôt au sujet de
l'utilisation d'un concentré par l'usine, qu'il y avait deux
possibilités. D'abord, que vous pouviez l'obtenir d'une compagnie qui
exploitait déjà une mine. Puis, que c'était possible
d'exploiter eux-mêmes une mine. Mais que cette deuxième
possibilité était très dispendieuse. On nous laisse
entendre qu'il existe de nombreux gisements au Québec. Avez-vous
étudié la possibilité, par exemple, que si une compagnie
voulait exploiter ces gisements, qu'il y aurait peut-être
possibilité d'en venir à une entente? Qu'un pourcentage du
minerai extrait et concentré pourrait être vendu à la
compagnie Sidbec de la même façon que l'Hydro-Québec
exploite Churchill Falls, où on obtient la presque
totalité de la production de Churchill Falls. Il y aurait une entente.
Vous n'auriez pas à faire les frais de l'investissement mais on
donnerait à cette compagnie, à capital prévu, le
privilège d'exploiter le gisement à la condition, par exemple,
que vous donniez la préférence à Sidbec d'acheter 50 p. c.
non pas du minerai mais du concentré.
M. GIGNAC: Ce n'est pas une impossibilité. C'est strictement une
question de prix. Une des raisons pour lesquelles, je pense, des compagnies se
sont groupées et ont formé des sociétés comme Iron
Ore Company et Wabush, c'est parce qu'elles ont réalisé
rapidement, après plusieurs expériences, qu'à quelques
exceptions près ce n'était pas tellement rentable d'exploiter des
mines à faible volume. Il peut y avoir des exceptions mais c'est rare.
C'est pour cela que les compagnies Wabush, dans laquelle il y a Steelco,
Dopasco, Algoma et je ne sais combien d'autres ont fait un "pool", ont mis de
l'argent et ont dit: On dépense $300 millions et on ouvre une mine.
M. PICARD: Est-ce qu'il n'est pas vrai aussi que la raison principale
pour laquelle ces compagnies risquent quelque $300 millions est tout simplement
parce qu'elles sont capables de récupérer leur capitalisation
dans un très court délai? Autrement, elles ne risqueraient pas.
C'est une question de récupérer leur capitalisation. En 50 ans,
elles ne le feront pas.
M. GIGNAC: C'est bien évident que non. Je pense que c'est dix
ans.
M. PICARD: C'est cela que je dis. C'est un court délai...
M. GIGNAC: C'est une façon de le dire. C'est peut-être plus
compliqué que cela.
Malheureusement, je ne suis pas dans les secrets de Wabush et de l'Iron
Ore Company of Canada, mais il est évident que ces gens ne sont pas
là juste pour le plaisir d'être là. Seulement, c'est une
chose prouvée que d'exploiter une mine à 10 millions de tonnes
par année ça coûte moins cher que d'en exploiter une
à 2 millions. Cela, c'est sûr et certain.
Maintenant, il peut arriver, et il peut y avoir certaines exceptions
à cela, mais elles sont très rares. Je pense que SIDBEC, et je
parle strictement au point de vue de la rentabilité, ne peut pas se
permettre de payer son minerai ou son concentré $2 ou $3 ou $4 ou $5 de
plus la tonne qu'elle pourrait l'avoir d'un autre, si on peut l'avoir, surtout
ici au Québec.
Il y a aussi la possibilité d'obtenir une équité
dans les grosses compagnies, d'entrer dans le club des exploitations
minières; mais ce sont des investissements qui sont aussi assez lourds,
même si notre part serait assez minime au départ.
Il y a des règles de jeu qui sont établies. Je pense que
ces compagnies avec lesquelles nous sommes en excellentes relations, avec
lesquelles on discute c'est une question de fait, nous discuterons cette
semaine avec une de celles-là sont assez souples et sont
parfaitement conscientes des aspects politiques et économiques du
problème. Seulement, elles font affaires à l'échelle
mondiale. Non seulement elles font affaires à l'échelle mondiale,
mais elles ont aussi dans d'autres pays, souvent, des exploitations de minerai
de fer. Si, dans un pays, elles faussent les règles du jeu, pour autant
qu'elles sont concernées du moins, si elles vont trop loin dans
ce jeu-là à ce moment, cela peut leur retomber sur le bout
du nez ailleurs. Je ne veux pas me faire l'interprète de l'Iron Ore et
de toutes ces compagnies.
M. PICARD (Leduc): Mais, si on regarde l'expérience...
M. GIGNAC: Pour nous, bien que la mine soit une chose qui
deviendra importante je suis obligé de vous dire qu'à ce
moment, c'est ce qu'il y a de moins important dans mon programme, ce n'est pas
ma première priorité. Ma première priorité, c'est
d'installer des fours électriques et ma deuxième, c'est d'avoir
une usine de métallisation. A ce moment-là, je peux me permettre
bien des choses. Parce qu'à ce moment, je peux rendre ma compagnie
rentable. Lorsqu'on est rentable, c'est plus facile de converser ou de discuter
avec des partenaires éventuels, prendre des équités dans
d'autres compagnies, etc. C'est un sujet délicat, j'en conviens;
surtout, lorsqu'on sait très bien qu'au Québec nous avons un tas
de mines ou de gisements miniers.
A partir du moment où nous avons eu un gisement minier, cela ne
veut pas dire nécessairement que c'est un gisement rentable. Je pense
qu'on ferait face à ce moment-là à la concurrence
mondiale. On ne peut pas se permettre cela, à moins de vouloir demeurer
ce que j'appelle une sidérurgie locale. Si on veut sortir du
Québec et on est sorti du Québec au point de vue de la
vente je pense qu'il faut élargir nos horizons pour demeurer
rentable. Il faut être non seulement rentable, mais aussi donner à
nos clients la qualité et la quantité qu'ils veulent avoir quand
ils veulent les avoir. H faut leur donner le service. Ils n'achètent pas
pour nos beaux yeux. Ils achètent parce qu'ils ont besoin de quelque
chose.
Exportation
M. LOUBIER: Vous disiez que le seul pouvoir de rentabilité sur le
marché non seulement local mais international était
l'installation de fourneaux électriques, à Contrecoeur, je
présume. Tout cela présuppose, par exemple, une alimentation sur
le plan de la ferraille, comme vous le signaliez tout à l'heure. Est-ce
qu'à ce
moment-là, vous avez considéré la concurrence
exercée par le marché européen?
M. GIGNAC: Pour le marché de la ferraille?
M. LOUBIER: Oui.
M. GIGNAC: ...C'est le marché japonais.
M. LOUBIER: Pas seulement japonais. Vous avez en Espagne et en
Angleterre des marchés qui sont très bons.
M. GIGNAC: Je n'ai peut-être pas compris. Parliez-vous de
l'exportation du Canada vers l'Europe ou le contraire?
M. LOUBIER: Le contraire n'existe pas. Au Québec, 80 p. c. de la
production de ferraille actuellement au Québec et pratiquement en
Ontario, dans un pourcentage inférieur à cela, va à
l'exportation à cause des prix beaucoup plus élevés que
ceux offerts ici dans le Québec et même au Canada actuellement.
Vous avez, par exemple, cette année...
M. GIGNAC: Nous n'avons pas les mêmes chiffres.
M. LOUBIER: Nous n'avons pas les mêmes chiffres, mais je suis dans
le commerce. Cette année, entre autres, vous aviez des prix offerts ici
pour l'acier numéro 1, ce que l'on appelle "low-fire steel" autour de
$40, $42 la tonne.
UNE VOIX: Vous pouvez aller jusqu'à $45.
M. LOUBIER: Or, pour fins d'exportation, vous pouviez avoir un prix se
situant aux environs de $48 à $50 au quai de chargement. Partant de
là, tous ceux qui sont dans le commerce ne sont pas du tout
intéressés que ce soit des "brokers" ou des
commerçants à vendre leur ferraille pour la production
québécoise ou la production canadienne. Or, il appert, selon les
projections des experts en la matière, que pendant les cinq ans à
venir, le même phénomène persistera.
Même si la demande du Japon a diminué, on la retrouve
à un plus haut degré en Espagne, en Angleterre et même en
France, où l'on a fait des tentatives. Pour vous, l'alimentation en
ferraille de ces fourneaux électriques devient-elle un
élément essentiel ou si vous pouvez y suppléer d'autres
façons?
M. GIGNAC: Au départ, c'est un élément
essentiel.
M. LOUBIER: Au départ, c'est un élément
essentiel.
M. GIGNAC: Je ne prévois pas que Sidbec soit capable de
s'alimenter au Québec à cause du volume très important de
ferraille dont nous allons avoir besoin, qui va se situer aux alentours de
600,000 ou 650,000 tonnes, dès 1972. Disons que, dans le moment, nous
achetons au Québec; nous contrôlons le marché de la
ferraille au Québec. Je m'excuse, mais nous achetons 250,000 tonnes de
ferraille au Québec, dans le moment.
M. ROY (Beauce): Cela représente quel pourcentage de vos
achats?
M. GIGNAC: Jusqu'ici, cela représentait tout ce dont nous avions
besoin, mais, à partir de maintenant, cela ne sera plus suffisant.
M. LOUBIER: Je m'excuse, avant d'aller plus loin. Vous prétendez
qu'actuellement vous avez une alimentation et un contrôle de 250,000
tonnes...
M. GIGNAC: Disons 200,000 tonnes.
M. LOUBIER: ... de ferraille qui proviennent du Québec.
M. GIGNAC: C'est ça.
M. LOUBIER: Est-ce que vous avez une projection de ce qui est
exporté à l'extérieur?
M. GIGNAC: II doit s'exporter environ 100,000 à 150,000
tonnes.
M. LOUBIER: Par tous les "brokers" de Toronto ou de New York.
M. GIGNAC: Si vous connaissez le marché, les bateaux qui passent
par la Voie maritime chargent tout d'abord en Ontario, passent le canal et
comme ils disent "topent" à Montréal. Les
mouvements que nous avons observés j'ai peut-être de
mauvais renseignements, en tout cas ont surtout été des
mouvements vers le Japon, du moins cette année. Il y a aussi des
Européens, mais disons que les Japonais ont entrepris, depuis deux ans,
toute la côte est nord-américaine, à partir de la Floride
jusqu'au Québec. Je dois vous dire cependant que, depuis à peu
près un mois, peut-être un mois et demi, le prix de la ferraille a
baissé d'à peu près $15 la tonne. Je ne vous dis pas que
cela ne remontera pas au printemps.
Qu'est-ce qui se passe exactement? Il y a eu la grève de la
General Motors qui a dû être un élément d'influence
dans ça, parce que les aciéries ont été
obligées de diminuer leur production. On n'a pas encore analysé
quels sont les éléments qui ont fait que le prix de la ferraille
avait baissé d'une façon aussi draconienne, surtout aux
Etats-Unis. Au Québec, le prix a fléchi mais beaucoup moins
qu'aux Etats-Unis, jusqu'à maintenant du moins. Mais de toute
façon, quoi qu'il arrive, on sait fort
bien qu'en 1972 on ne pourra pas s'alimenter en ferraille au
Québec, pour nos besoins. Il va falloir aller à
l'extérieur et l'extérieur, ce sont les Etats-Unis.
M. LOUBIER: Quels sont les "brokers" actuellement, des courtiers de
Sidbec ou de Dosco?
M. GIGNAC: Je ne sais pas si je peux les nommer.
M. LOUBIER : Je pense. Ce sont des intérêts publics.
M. GIGNAC: Actuellement, nous avons un courtier principal qui s'appelle
Saint Lawrence Metal qui nous fournit à peu près 75 p. c.
à 80 p. c. de nos besoins.
M. LOUBIER: Oui.
M. GIGNAC: Nous avons un contrat avec ce courtier et nous avons des
ententes spéciales avec certains fournisseurs...
M. LOUBIER: Du Québec?
M. GIGNAC: Du Québec. Le CPR, par exemple et le CNR; alors que
c'est là une ferraille de très haute qualité et d'autres
entreprises du genre.
M. LOUBIER: Saint Lawrence Metal, vous prétendez que c'est un
"broker"?
M. OSTIGUY: Cette ferraille, M. Gignac, est-ce une ferraille
d'automobile?
M. LOUBIER: Je m'excuse, M. le Président. J'aimerais, si c'est
possible, qu'on réponde à ma question.
M. GIGNAC: Qu'est-ce que vous voulez dire, si je prétends que
c'est un "broker"? Je prétends qu'il nous vend de la ferraille.
M. LOUBIER: Non, est-ce que c'est un "broker" dans le sens qu'on
l'entend dans le monde des affaires, c'est-à-dire une tierce partie qui
fait le lien entre les commerçants, ou les négociants et le
consommateur?
M. GIGNAC: Je pense que oui. C'est un "broker" au même sens que
Luria Brothers est un "broker" je ne sais pas où, je pense que
c'est à New York, ou à Détroit, ou à Chicago...
M. LOUBIER : A travers le monde.
M. GIGNAC: ... et que d'autres, Internatio- nal Iron, etc. Je pense que,
au même titre que ces gens-là, si c'est le mot "broker"...
M. LOUBIER: Et combien fournit-on de ferraille pour cette année,
par exemple, pour 1969?
M. GIGNAC: De tonnes? En 1969, on a dû nous fournir, attendez une
minute, je dirais à peu près 130,000, ou 135,000 tonnes.
M. LOUBIER: A peu près 130,000 ou 135,000 tonnes. Il y a une
exportation de 125,000 à 130,000 tonnes qui se fait actuellement.
M. GIGNAC: A part cela, on en achète nous-mêmes.
M. LOUBIER: Ce que je veux dire, je ne veux pas vous embêter, ou
vous emmerder, comme dirait Voltaire, mais je ne peux pas concilier les
chiffres que vous donnez surtout sur ce plan-là, si vous me dites que la
ferraille est absolument essentielle, pour les fourneaux électriques qui
vont être aménagés à Contrecoeur, quand on a la
projection que d'ici un an et demi, ou deux ans ce sera 650,000 tonnes. A ce
moment-là, vous entrez directement dans le marché de la
compétition internationale de la ferraille.
M. GIGNAC: Non, écoutez, ce n'est pas difficile à
expliquer...
M. LOUBIER: Non, voici, je m'excuse... M. GIGNAC: Je comprends...
M. LOUBIER: Vous allez arriver avec des coûts de revient qui vont
sensiblement augmenter. Alors, si on prend les données du début,
du moins ce que j'en ai su, c'était actuellement déficitaire et
on prévoyait, avec les chiffres que l'on possède aujourd'hui, que
cela deviendrait rentable avec l'établissement de ces fourneaux. Mais
que l'élément essentiel se retrouvait dans l'alimentation de la
ferraille. Alors, ceci nous invite à considérer l'aspect suivant:
c'est que vous allez vous retrouver dans le marché de la
compétion internationale pour l'aspect essentiel de vos fourneaux
électriques de Contrecoeur. Est-ce que vous avez tenu compte du
coût de revient qui va être énormément
augmenté dans vos projections?
M. GIGNAC: J'ai dit: Au départ. Ce sont deux mots bien
importants. J'ai dit: Au départ, la ferraille est un
élément essentiel. On ne peut pas mettre du minerai dans une
fournaise électrique, donc il faut mettre de la ferraille.
M. LOUBIER: D'accord.
M. GIGNAC: Et immédiatement, ou en même temps, on met en
marche l'usine de métallisation qui, elle, va réduire grandement
notre demande en ferraille.
M. LOUBIER: Oui.
M. GIGNAC: Et qui, en fait...
M. LOUBIER: Progressivement.
M. GIGNAC: D'un coup sec, dès que cela va marcher. Je veux dire,
mettez six mois, huit mois, neuf mois. Cela prend trois mois pour mettre une
usine de métallisation en marche. Alors, cela veut dire qu'après
trois mois, théoriquement, on devrait atteindre une capacité
d'à peu près 450,000 tonnes de production de boulettes
métallisées. Alors, à ce moment-là, c'est
évident qu'on réduit nos achats de ferraille
considérablement. Et cela nous permet, en même temps, comme je le
disais tout à l'heure, d'acheter une ferraille de qualité
beaucoup inférieure à celle qu'on achète
présentement, mais on veut demeurer dans le marché de la
ferraille, parce que ce sera toujours un élément
intéressant pour nous à utiliser. On peut faire des inventaires
de ferraille à des prix qui peuvent être attrayants et s'en Servir
au fur et à mesure de l'exploitation de nos usines.
M. LOUBIER: II y a un an, il y a une compagnie française, ou il y
a un consortium d'hommes d'affaires français qui se sont
présentés ici, au Québec, avec des offres assez
alléchantes à ce qu'on m'a dit pour vider tous les
parcs ou les cimetières d'automobiles.
M. GIGNAC: Je les ai rencontrés. La Compagnie française
des ferrailles.
M. LOUBIER: En partant de là, est-ce qu'ils ont trouvé
qu'il n'y avait aucune rentabilité à cause des distances, des
facilités portuaires, d'une foule de facteurs?
M. GIGNAC: La Compagnie française des ferrailles voulait se
spécialiser dans le déchi-quetage des automobiles.
M. LOUBIER: D'accord! Vous l'avez dit avec beaucoup d'à-propos
tout à l'heure, le simple coût du transport des carcasses
d'automobiles est prohibitif, à mon sens. Il est inutile et illusoire de
penser qu'on pourrait rendre ce marché alléchant pour les
commerçants éventuels, c'est absolument impossible. Vous avez
parlé de subsides, tout à l'heure. Ce sont des subsides qui
seraient absolument impensables en chiffres pour le gouvernement. Si l'on peut,
dans un camion de cinq tonnes, mettre quatre, cinq ou six carcasses et s'il
peut transporter deux, trois, même trois tonnes et demie de tôle de
carcasses d'automobiles sur une distance supérieure à 50, 75 ou
100 milles, cela ne serait pas rentable. Si l'on prend le coût
d'exploitation d'un camion, qui est évalué d'une façon
assez rentable à $0.45 ou $0.50 le mille, cela voudrait dire qu'il
faudrait donner en subsides $35 ou $40 pour trois tonnes pour avoir une
matière absolument secondaire en qualité et même en
possibilité de production.
M. GIGNAC: Ce n'est pas une matière secondaire en qualité,
c'est une bonne qualité. Je ne voudrais pas entrer dans les
détails ni, enfin, être celui...
M. LOUBIER: Je m'excuse.
M. GIGNAC: Le besoin crée l'organe. Il y a quelqu'un qui a
déjà dit ça.
M. BERTRAND: Lui, y connaît ça.
M. LOUBIER: On peut dire que c'est vrai dans tous les domaines.
M. GIGNAC: Quelque soit le besoin ou l'organe. Ce qui est à
l'étude présentement et non pas seulement par la Compagnie
française des ferrailles, je peux vous le dire, par bien d'autres aussi
est la possibilité d'aller dans des parcs de cadavres, dans les
cimetières d'autos, et faire le dépouillement sur place.
M. LOUBIER: Oui, d'accord!
M. GIGNAC: Oui, il y a des choses qu'on peut conserver. Je ne connais
pas les détails. En tout cas, faire le dépouillement qui,
normalement, se fait à l'usine et avoir une machine qui serait, une
machine portative, où on prendrait la carcasse et on l'aplatirait comme
une feuille de papier.
M. LOUBIER: Ce qui n'est absolument pas rentable. Cela a
été expérimenté.
M. GIGNAC: Ce que je veux vous dire, c'est qu'à ce
moment-là, le subside du gouvernement serait moindre que de prendre les
carcasses d'autos telles qu'elles sont présentement, et de mettre cela
dans un camion et transporter cela à l'usine. Cela coûterait
cher.
M. RUSSELL: Mais si vous pensez à vous démunir de vos
cimetières d'automobiles, dans la province de Québec ou ailleurs,
sans subsides, "forget about it", c'est infaisable.
M. LOUBIER: II y a déjà une loi qui prévoit qu'en
1972, ils seront obligés de les transporter à 500 pieds de toute
voie carossable avec une clôture...
M. GIGNAC: Oui, mais cela a changé...
M. GARNEAU: Les voitures restent là.
M. LOUBIER: Sur le plan de l'esthétique, cela règle le
problème.
UNE VOIX: Dans le cas de Montréal... M. BERTRAND: Le
péché est toujours là. UNE VOIX: Dans Bellechasse, c'est
réglé.
M. LOUBIER: Ils seront obligés de les enlever quand
même.
M. PERREAULT: Pas dans la région de Montréal.
M. LOUBIER: Voici, si vous permettez, monsieur, je vais vous poser une
question directe. Je sais que vous ne pourrez peut-être pas
répondre parce qu'il y a tellement d'éléments
technologiques et de commerces internationaux, tout ce que vous voudrez, qui
entrent en ligne de compte. Est-ce que vous prévoyez qu'avec ces
fourneaux avec une alimentation optimiste et optimale sur le plan ferraille,
que d'ici deux ans, cette sidérurgie deviendra rentable? Je vous place
dans les circonstances les plus favorables sur tous les plans: au plan de
l'alimentation, au plan de la mise en marché, au plan de
l'écoulement, au plan de la production, etc.
UNE VOIX: Salaire.
M. RUSSELL: II n'oublie rien.
M. GIGNAC: Je prétends que, d'une façon non optimiste mais
d'une façon réaliste, me plaçant entre l'optimiste et le
pessimiste...
M. LOUBIER: Entre les deux extrêmes.
M. GIGNAC: ...les deux pieds bien à terre, compte tenu de
catastrophes évidemment des catastrophes qui peuvent arriver, on
ne peut pas les prévoir.
M. LOUBIER: Je vous place dans des circonstances...
M. GIGNAC: Je ne veux pas être dans un climat idéal, je
n'ai jamais vécu cela.
M. RUSSELL: Cela, c'est la première condition pour avoir ce
climat idéal.
M. LOUBIER: Je ne vous aurais même pas posé cette question
si j'avais su que cela aurait été le même gouvernement qui
aurait été là et qui nous l'aurait donné.
M. GIGNAC: Ce que je veux vous dire, c'est que, dans une perspective
réaliste, avec des prix de ferraille tels qu'on les connaît
aujourd'hui, le plus tard ou l'année la plus éloignée
où j'entrevois faire des profits, c'est en 1973. Je parle des profits
que nous verrons.
M. RUSSELL: Pour l'année 1973 ou à partir de 1973?
M. GIGNAC: C'est-à-dire que nous pouvons peut-être faire
des profits en 1972, mais ce sera peut-être dilué par des pertes
que nous aurons faites dans les trois, quatre ou cinq mois
précédents.
M. LOUBIER: Pour les trois prochaines années, vous
prévoyez encore des déficits?
M. GIGNAC: C'est-à-dire qu'en 1971 je prévois une
année déficitaire. C'est 1971, l'an prochain? C'est cela. En
1972, en étant un peu optimiste, je prévois une année
profitable. Evidemment, là, tout est enregistré et écrit.
J'aimerais beaucoup que ce soit 1972 plutôt que 1973, mais, disons que
sûrement, en 1973, pour autant que je suis concerné, la
sidérurgie, telle que nous la connaîtrons à ce moment, sera
rentable et fera des profits.
M. LOUBIER: Malgré les importations de fer laminé, etc.,
que font actuellement les provinces, vous prévoyez que cela ira
très bien.
M. GIGNAC: Oh! oui, absolument.
M. LOUBIER: Et malgré même la possibilité
d'augmentation de ces importations, parce qu'il n'y a aucune
barrière.
M. GIGNAC: Malgré tout cela.
M. LOUBIER: Malgré tout cela. Eh bien, je vous félicite au
moins d'une chose, c'est de votre optimisme.
M. LE PRESIDENT: Le député de Gouin.
M. JORON: M. le Président, le député de Bellechasse
comprendra que je ne veux pas lui manquer de respect en abandonnant la
ferraille...
M. LOUBIER: Ce n'est peut-être pas distingué, mais c'est
payant.
M. BERTRAND : Pourquoi cela ne serait-il pas distingué?- Lorsque
c'est de la bonne ferraille.
Ventes
M. JORON : Vous vous souvenez que ce n'était pas non plus une des
priorités de Sidbec. Une priorité qui est constante, je pense,
qui sous-tend la rentabilité de l'entreprise à tout
moment, c'est évidemment votre marché et vos clients.
Est-ce qu'il vous est possible de nous dire, premièrement, quel
est le pourcentage de ventes destinées à des clients au
Québec? Le pourcentage du chiffre d'affaires de Sidbec-Dosco
réalisé au Québec? Deuxièmement, y a-t-il des
clients dont l'importance est telle que la perte d'un client comme
celui-là pourrait entraîner des conséquences graves pour
Sidbec? Par exemple, est-ce qu'il y a des clients qui achètent
jusqu'à 10 p. c. et plus de la production de Sidbec?
L'autre question s'adresserait plutôt au ministre des Finances ou
au premier ministre: Y a-t-il une coordination qui se fait entre le
gouvernement, Sidbec et d'autres agences du gouvernement je pense
à 1'Hydro, à la SGF, à Sidbec, à SOMA, etc.
quant à leur approvisionnement d'acier?
M. GIGNAC: Pour répondre à la première partie de
votre question, environ 55 p. c. de nos ventes se font au Québec.
Il y en a 35 p. c. qui se font en Ontario et le reste se fait dans les
Maritimes ou dans l'Ouest du pays et à l'exportation. Pour ce qui est de
la deuxième partie de votre question, notre plus gros client
actuellement est l'Hydro-Québec. C'est facile à expliquer.
M. LOUBIER: Des ventes en famille.
M. GIGNAC: Je ne sais pas si ce sont des ventes en famille, mais nous
avons de ce côté un excellent produit, nous avons un bon
équipement et nous pouvons lui donner ce qu'elle veut à un prix
qui est très convenable.
M. JORON : Je voudrais vous demander quel pourcentage du chiffre
d'affaires est impliqué.
M. GIGNAC: Le pourcentage du chifrre d'affaires représente
à peu près 8 p. c, cette année.
M. RUSSELL: M. Gignac, êtes-vous en mesure...
M. GIGNAC: L'an dernier, c'était plus que cela.
M. RUSSELL: ... de nous informer si les clients, les fournisseurs du
matériel de l'HydroQuébec achètent vos produits?
M. GIGNAC: Oui.
M. LOUBIER: Les entrepreneurs, les sous-entrepreneurs.
M. RUSSELL: C'est-à-dire que les fabricants, il y a des chances
qu'ils utilisent l'acier...
M. GIGNAC: Je prends un produit quelcon- que. Disons que les gens qui
font une route pour l'Hydro-Québec je suis un peu au courant
parce que c'est moi qui l'ai établi, c'est-à-dire que j'y ai
contribué sont obligés, ou du moins cela est
spécifié dans leur contrat, de mentionner le contenu
québécois et de leur produit.
M. LOUBIER: M. Gignac, si vous me le permettez, avez-vous fait un tour
d'horizon, une analyse des importations provenant, par exemple je prends
juste un pays de France, en tonnage de tout ce qui entre au
Québec actuellement?
M. GIGNAC: C'est à peu près 15,000 à 20,000
tonnes.
M. LOUBIER: C'est le chiffre que j'avais avancé à
quelqu'un tout à l'heure. Selon les renseignements que j'ai recueillis,
soit par des personnes ou par des lectures que j'ai faites, d'ici trois ans la
France, entre autres, se promet de doubler ses exportations qui deviennent des
importations pour nous. Avez-vous analysé tout ce mouvement?
M. GIGNAC: Oui.
M. LOUBIER: Je m'excuse. Avez-vous analysé ce mouvement et
avez-vous tenu compte de cette possibilité dans vos chiffres, dans vos
projections, dans vos perspectives?
M, GIGNAC: Oui. Ecoutez, nous avons tenu compte de tout cela, de
l'importation. Et avec tout le respect que je dois à la
mère-patrie, ce n'est pas la France qui nous effraie le plus...
M. LOUBIER: Oui.
M. GIGNAC: ... au point de vue des importations. Prenez le cas de
l'Angleterre, à cause du tarif réduit de douanes qu'elle a.
M. LOUBIER: D'accord.
M. GIGNAC: Et si jamais les Japonais décident de venir exporter
par exemple des fers-angles, cela pourrait sûrement nous faire mal. Mais,
à ce moment-là et c'est un peu d'ailleurs le
phénomène qui se produit aux Etats-Unis où les
aciéries commencent à se plaindre de façon assez forte
auprès du gouvernement elles vont faire comme ils ont
déjà fait dans d'autres domaines: sans mettre d'embargo, elles
vont tout simplement établir des quotas et ils vont dire: Cette
année, vous pouvez exporter tant.
M. LOUBIER: Cela vient justement à la prochaine question que je
voulais vous poser: Est-ce que vous ne croyez pas et je parle là
à l'homme d'affaires, au spécialiste, je ne parle
pas à un politicien que la seule planche de salut de
l'entreprise dont il est question soit que le gouvernement
fédéral impose des restrictions quant à l'invasion du
marché québécois et canadien par les produits venant de
France, d'Angleterre et éventuellement surtout je le crains
d'Espagne?
M. GIGNAC: II y a bien des façons de voir le problème; on
peut le voir d'une façon immédiate ou d'une façon à
long terme. Si on le voit d'une façon immédiate, il peut y avoir
des dangers. Evidemment, si la France, l'Angleterre et le Japon se mettent
à exporter d'une façon massive au Canada, ils peuvent mettre
si le gouvernement ne s'en occupe pas toutes les aciéries
en faillite...
M. LOUBIER: D'accord.
M. GIGNAC: ... mais je pense, pour ma part, que ce n'est pas le Canada
qui intéresse ces pays-là, c'est bien plus les Etats-Unis. Le
marché américain est beaucoup plus attrayant que le marché
canadien et, sans que cela paraisse trop, je pense quand même que le
marché canadien est un marché difficile à
conquérir, pour des exportateurs ou des importateurs, suivant le cas.
Cependant, si le pire se produisait ou qu'on voyait à long terme se
dessiner ce que vous dites là l'envahissement, si vous voulez
le choix qu'on devrait faire serait de devenir verticalement
intégré. En d'autres mots, il faudrait se créer des
marchés captifs, aller jusqu'à la construction de maisons, de
bâtiments. D'ailleurs, une des sidérurgies les plus rentables que
je connaisse est située à Tampa, Floride, et elle s'appelle
Florida Steel. On y fait à peu près $75 millions à $80
millions d'affaires par année et c'est complètement
intégré. On achète de la ferraille à $55
pour votre information la tonne, pour faire concurrence aux Japonais, on
la fond dans des fours électriques; on y a des coulées continues
et on y fait des fers marchands.
Cette sidérurgie ne vend pas une tonne d'acier. Tout cet acier
est utilisé dans des bâtiments ou des choses qui feront des
produits finis.
M. LOUBIER: Oui.
M. GIGNAC: A ce moment-là c'est difficile pour un exportateur de
concurrencer cela, avec notre système.
M. LOUBIER: Je me suis laissé dire que les compagnies
américaines vous avez raison d'affirmer que le marché le
plus fascinant et le plus rentable pour les pays européens ou pour le
Japon, c'est les Etats-Unis, c'est clair se servaient d'industries
canadiennes, contrôlées par des capitaux américains, comme
porte d'entrée des cargaisons ou des volumes assez considérables,
et qu'à ce moment-là on faisait jouer le jeu de la régie
interne et de la loi qui veut qu'une compagnie-mère peut s'alimenter
avec les produits d'une filiale où qu'elle se trouve, et qu'à ce
moment-là il y a une entente internationale selon laquelle on ne peut
taxer ou "douaner" ces produits-là ou cette alimentation-là. L'un
des subterfuges utilisés par les exportateurs européens ou
japonais était justement de se servir de cette porte d'entrée
comme on le fait pour plusieurs produits, mais entre autres pour
ceux-là du Canada et, d'une façon très subtile et
très discrète, de faire pénétrer tous ces
tonnages-là aux Etats-Unis, sous prétexte que la
compagnie-mère est aux Etats-Unis, qu'elle manque de matériel ou
qu'elle manque de produit et qu'on va lui en transporter. Cela devient,
à ce moment-là, seulement un jeu de livres ou seulement un jeu de
comptabilité et de transfert.
M. GIGNAC: Ecoutez, tout peut se faire par des subterfuges,
j'imagine.
M. LOUBIER: Qui sont très légaux.
M. GIGNAC: C'est assez curieux, mais une compagnie japonaise est
entrée en contact directement avec nous pour faire expédier de
l'acier aux Etats-Unis. Je n'ai pas besoin de vous dire que la réponse
négative est venue vite de notre part. Mais, le gouvernement canadien
du moins à ma connaissance est extrêmement conscient
de ce problème-là. Ce qui peut se passer dans les hautes
sphères des gouvernements canadien et américain, je ne le sais
pas. Je pense bien que c'est un jeu dont on ne peut pas abuser sans risquer de
se faire taper sur les doigts un jour ou l'autre. Je pense que les Japonais
sont assez intelligents pour ne pas en abuser. Ils l'ont fait et ils le font
peut-être encore.
Quant aux Européens, je ne pense pas qu'ils soient
implantés, en tout cas à mon avis, assez solidement ici au Canada
pour jouer ce jeu-là. Mais, les Japonais sont implantés.
M. LOUBIER: Mais, ce qui me fait peur dans les propos que vous tenez,
qui sont absolument raisonnés et bien logiques, c'est ceci: Le
gouvernement canadien aurait-il intérêt, pour une usine ou pour
une entreprise bien particulière, à imposer un embargo ou des
restrictions aux exportations des autres pays, tenant compte des discussions
qui sont très larges sur le plan horizontal sur d'autres modes, d'autres
articles de négociation ou de commerce entre ces pays-là? A ce
moment-là, cela voudrait dire, à moins que le gouvernement du
Québec n'insiste d'une façon très particulière et
très convaincante, qu'il s'agit de sauver et de rendre rentable Dosco et
Sidbec et que le gouvernement fédéral pourrait trouver la
façon de convaincre ces pays-là pour un objet particulier qui
s'appelle
Sidbec et Dosco. Moi, je trouve qu'on tombe dans le monde des
spéculations. J'aimerais avoir plus d'assurance sur l'attitude ce
n'est pas à vous de répondre, à ce moment-là
du gouvernement fédéral à la suite des
représentations que pourrait faire le Québec pour éviter
justement que cette entreprise ne devienne déficitaire ad vitam
aeternam.
M. GARNEAU: Dans la question des négociations de tarifs
douaniers, je crois bien que le député de Bellechasse est au
courant...
M. LOUBIER: Comme député de l'Opposition, je ne suis au
courant de rien.
M. GARNEAU: ... je ne vous demande pas de le confirmer, mais que, dans
chacun des accords, surtout à l'intérieur du CATT, il y a la
clause de la nation la plus favorisée, dans ce sens-là, à
l'exception des produits agricoles, si le Canada donne un avantage particulier
sur un article qui fait partie des négociations, il est obligé de
le donner à d'autres en vertu de cette clause de la nation la plus
favorisée. Evidemment, il y a toujours la possibilité de faire
sortir de l'accord général sur le tarif des transports un article
qui pourrait être l'acier, comme on a fait sortir les produits
agricoles.
M. LOUBIER: Oui, mais, à ce moment-là, si on parle des
produits agricoles...
M. PICARD: Est-ce que le ministre pourrait parler un peu plus fort?
M. GARNEAU: C'est parce que les produits agricoles, on n'a jamais...
M. BERTRAND: M. Gignac, si tout ce que vous avez dit tantôt et ce
que mon collègue de Bellechasse a dit au sujet des importations et des
exportations se produisait au Canada, cela ne serait plus seulement le
problème de Sidbec, mais cela deviendrait le problème de toutes
les aciéries canadiennes.
Je pense qu'il est important de noter que ce ne serait pas alors
seulement votre problème. Si c'était seulement votre
problème, si vous étiez dans une position de faiblesse telle,
étant seul, il est sûr que votre rentabilité future serait
joliment précaire.
M. GIGNAC: J'irais même jusqu'à dire, M. Bertrand, que nous
serions le plus petit des problèmes.
M. BERTRAND: Le plus petit! Et vous auriez des alliés
puissants...
M. GARNEAU: Pour faire le...
M. BERTRAND: ... pour inviter le gouvernement canadien à modifier
sa politique.
M. LE PRESIDENT: Le député de Beauce.
Déficit
M. ROY (Beauce): En parlant de rentabilité, M. Gignac,
l'année dernière Sidbec a fait un déficit de $1 million.
Cette année, combien prévoyez-vous? Je ne voudrais pas vous faire
dévoiler quelque chose qui est confidentiel, mais étant
donné que l'année est presque terminée...
M. GIGNAC: Vous parlez de Sidbec consolidée?
M. ROY (Beauce): Sidbec consolidée. C'est-à-dire que je
parle de ce qui était inclus dans votre bilan de l'année
dernière.
M. GIGNAC: II y a deux profits, il y a deux pertes d'exploitation. Si on
parle de pertes d'exploitation, l'ordre de grandeur du déficit de cette
année serait de l'ordre d'à peu près $8 millions et demi
à $9 millions.
M. ROY (Beauce): De $8 millions et demi à $9 millions
comparativement à $1 million l'année dernière.
M. GIGNAC: Oui.
M. ROY (Beauce): Est-ce qu'il y a des raisons particulières
à cela?
M. GIGNAC: Oui, il y en a.
M. ROY (Beauce): II y en a plusieurs?
M. GIGNAC: Non. Il y en a deux particulières. D'abord, le prix
cela n'était pas prévu à ce point excessif
qu'il a fallu payer pour se procurer de l'acier primaire. Nous appelons cela le
coût de l'excédent qu'il faut payer pour se procurer de l'acier
primaire, coût qui excède ce que Sidbec peut se procurer dans le
moment de la Sydney Steel Corporation de la Nouvelle-Ecosse. Ce coût
s'élève cette année à tout près de $7
millions. C'est pour cela que lorsqu'on parle de "scrap" à $55, on
regagne vite son argent.
Deuxièmement, il y a eu une grève, comme vous le savez
sans aucun doute, qui n'a pas été tellement longue, durant en
tout et pour tout trois semaines ou un mois, mais qui nous a coûté
assez cher. Je ne parle pas des augmentations de salaires, je parle du
coût du fait d'être arrêté, etc.
Ce sont les deux principaux éléments qui ont concouru au
déficit.
Maintenant, je dois dire que nous avions prévu pour Sidbec
consolidée, si ma mémoire est bonne, dans nos prévisions
faites en 1968, un déficit de $6 millions pour 1969.
Et nous avons prévu pour 1970 un déficit moindre que $8
millions. Mais ce qu'on prévoit en fait, des prévisions,
cela demeure toujours des prévisions c'est que, dans l'ensemble
des études que nous avons faites, si on parle de déficit sur une
période de trois ans, nous aurons un déficit à peu
près égal à celui que nous avions prévu. Si nous
pouvions réussir cela, je pense que ce ne serait déjà pas
mal.
Evidemment, tant qu'on achètera de l'acier au prix qu'on doit le
payer, surtout sur le marché américain, on aura des
déficits d'exploitation de cet ordre. Maintenant, il y a une chose qui
s'est produite quand on parle de prévisions, c'est curieux de
voir celle-là en 66/67, je crois, quand on a commencé
à discuter de la possibilité d'acheter les entreprises de Dosco
et que Dosco, à ce moment-là, si vous vous en souvenez bien, a
vendu au gouvernement de la Nouvelle-Ecosse ses équipements de
production d'acier à Sydney, le marché de l'acier était
complètement à plat. Il y avait, prétendait-on, un surplus
mondial de 75 millions de tonnes d'acier qui est disparu en l'espace d'un an.
Il n'y a personne, expert ou non, qui avait prévu cela. La raison qui,
apparemment, a amené cette disparition de surplus de capacité,
c'est que la Russie est devenue importatrice plutôt qu'exportatrice, dans
un très court laps de temps. Cela a complètement changé la
situation européenne. Cela a été la principale raison, en
somme, de la rareté et de la hausse du coût de l'acier
primaire.
Le contraire peut se produire, c'est difficile à dire. Même
en 1968 Dosco, dans des conditions difficiles ce n'est pas nous qui
étions là, à ce moment, même si nous avons le bilan
ici a réussi à augmenter la vente de ses produits finis,
alors que le marché d'exportation, en 67/68, vers le Canada et
particulièrement la province de Québec était très,
très fort.
M. ROY (Beauce): Maintenant...
M. GIGNAC: C'est assez intéressant de le noter.
M. GARNEAU: M. le Président, il est six heures et demie et nous
avions convenu de prolonger un peu après six heures. J'en ai
causé avec le chef de l'Opposition, il serait d'accord. Si les autres
membres de la commission étaient d'accord, nous pourrions ajourner
à dix heures et demie demain, à la salle 91, celle qui est au
bout, la salle du comité de l'ancien Conseil législatif, et nous
pourrions terminer le bill de SIDBEC et entreprendre en commission le projet de
loi de la Caisse de dépôt et placement.
M. BERTRAND: Parfait.
M. LE PRESIDENT: La séance est ajournée à demain
matin, à dix heures trente, à la salle 91.
Séance du jeudi 10 décembre 1970 (Dix heures)
M. HOUDE (Limoilou) (président de la commission permanente des
Finances): A l'ordre, messieurs! L'honorable député de
Beauce.
Etobicoke
M. ROY (Beauce): M. Gignac, quand la séance s'est terminée
hier, nous parlions, je crois, du bilan consolidé. J'aurais une question
à vous poser. Lorsque vous parlez de bilan consolidé, est-ce que
cela comprend une filiale de Sidbec, située à Toronto Etobicoke.
Est-ce compris dans le bilan consolidé de Sidbec?
M. GIGNAC: Oui.
M. ROY (Beauce): Quel pourcentage de l'actif Etobicoke
représente-il?
M. GIGNAC: Vous voulez dire en argent? M. ROY (Beauce): En argent,
oui.
M. GIGNAC: Les actifs d'immobilisation fixes de Etobicoke sont de
l'ordre d'environ $5 millions.
M. ROY (Beauce): Cela veut dire $5 millions sur le montant total de $103
millions?
M. GIGNAC: Vous parlez de l'actif total. Je ne pourrais pas vous donner
le chiffre exact. Quand nous avons pris le contrôle de Dosco à la
fin de 1968, la valeur aux livres des actifs fixes
dépréciés était de $72 millions, si ma
mémoire est fidèle. Dans ce montant, Etobicoke pouvait
représenter à ce moment-là à peu près $5 ou
$6 millions. C'est un ordre de grandeur. Evidemment, nous n'avons pas, comme
vous le savez, payé la valeur aux livres pour ces équipements.
Nous avons eu un escompte assez appréciable lors des
négociations.
Approvisionnement de métal
M.ROY(Beauce): Je vous remercie. Voici ma deuxième question.
Hier, il y a une partie de cette question qui a été posée.
A propos du pourcentage d'approvisionnement sur le marché du
Québec votre approvisionnement, par exemple, de métal de
rebus et autre sorte de métal dont vous avez besoin pour votre usine
pourriez-vous nous indiquer quel est le pourcentage d'approvisionnement
à l'intérieur du Québec?
M. GIGNAC: Jusqu'à maintenant, il a été de 100 p.
c. à l'intérieur du Québec. Quand nous passerons à
des quantités plus élevées, il faudra aller à
l'extérieur du Québec, ceci à partir de 1971.
M. ROY (Beauce): Je vous remercie.
M. LE PRESIDENT: D'autres questions? Alors, article 1, adopté?
Article 2?
M. BERTRAND: Tous.
M. LE PRESIDENT: Article 3, adopté? Article 4, adopté?
Aciers spéciaux
M. LAURIN: M. le Président, avant de terminer, j'avais une
question que j'ai oublié de poser. On a beaucoup parlé de
l'alimentation, dans ce qui précède, de métal de rebut et
tout ça. Est-ce que Sidbec a éventuellement des projets
également pour les aciers de qualité?
M. GIGNAC: Les aciers spéciaux? M. LAURIN: Oui.
M. GIGNAC: Disons que c'est une chose que nous n'avons jamais mise en
évidence, mais le fait d'utiliser des fours électriques
plutôt que des hauts fourneaux pour faire de l'acier donne une
très grande flexibilité dans le domaine des aciers
spéciaux, des aciers alliés, si vous voulez. Il me semble donc
naturel qu'éventuellement, Sidbec devienne très
intéressée aux aciers spéciaux, pour lesquels il y a un
marché domestique assez considérable, ainsi qu'un marché
d'exportation intéressant.
M. LAURIN: Mais vous n'avez pas encore pensé à des projets
spéciaux, même dans une prospective?
M. GIGNAC: Non, nous pensons actuellement à l'accouchement, nous
pensons à mettre le bébé au monde.
M. LAURIN: Mais, de toute façon, dans ce que vous allez faire, il
y a une possibilité.
M. GIGNAC: C'est une possibilité réelle et qui pourrait
devenir très intéressante.
M. JORON: M. le Président, si vous le permettez, sur le
même sujet, vous disiez hier que 55 p. c. des expéditions
étaient destinées au Québec et que le reste était
exporté vers les autres provinces ou... Je me demandais si Sidbec-Dosco
a une vocation de haute spécialisation dans le contexte d'un très
grand marché. Je ne sais pas quelles sont exactement les
barrières tarifaires à l'heure actuelle sur les produits de
l'acier entre les Etats-Unis et le Canada, mais, dans la mesure où,
d'ici un certain nombre d'années, nous pourrions peut-être les
voir s'abaisser.
M. GIGNAC: Avec le Kennedy Round, les tarifs douaniers baissent
graduellement...
M. JORON : Ils sont rendus à quoi à peu près, en
gros?
M. GIGNAC: Actuellement, nous importons des Etats-Unis surtout des
billettes ce sont des pièces d'acier d'une dimension variant de 3
pouces par 3 pouces par 40 pieds de longueur jusqu'à 5 pouces par 5
pouces par 30 ou 40 pieds de longueur ainsi que des lingots. Sur cet acier
importé, nous devrions normalement payer un tarif douanier qui
s'élève, je crois, à 2 p. c. ou 3 p. c. Le gouvernement
fédéral, l'an dernier, nous a cependant exemptés de ce
tarif douanier, étant donné que personne, sur le marché
canadien, ne pouvait nous fournir cet acier. Cette année, il a consenti,
pour un certain nombre de mois en tout cas, à nous exempter de nouveau
de ce tarif.
Sur l'acier fini, les barres, les fers marchands, la tôle, etc. le
tarif est plus élevé, je crois qu'il est situé autour de 6
ou 7 p. c. Si nous avions à un moment donné, un marché
commun avec les Etats-Unis, il n'y aurait pas de 6 p. c. ni pour eux ni pour
nous et je ne sais pas ce qui arriverait.
M. JORON: Seriez-vous des concurrents pensez-vous?
M. GIGNAC: Oui.
M. JORON: Le coût de production...
M. GIGNAC: L'acier canadien est à meilleur marché que
l'acier américain dans le moment.
Concurrence
M. JORON: Dans ce contexte que l'on peut prévoir,
peut-être, éventuellement, la vocation de Sidbec serait-elle
hautement spécialisée ou bien si vous entrez en concurrence
directement avec U.S. Steel et toute sa gamme de produits?
M. GIGNAC: Tout le monde est concurrent avec U.S. Steel parce que cette
aciérie fabrique tous les produits. Normalement, nos clients et les
clients de nos concurrents s'alimentent de plusieurs aciéries et de
plusieurs sidérurgies. C'est une pratique normale et tout le monde le
comprend. Enfin, on ne veut pas mettre tous ses oeufs dans le même
panier. A partir de ce moment-là que ce soit Sidbec, Steelco, Algoma,
Dofasco ou U.S. Steel, etc., on peut espérer avoir une certaine part
d'un certain marché, ou une certaine part du marché d'un certain
client. Je pense bien qu'on ne peut pas espérer avoir 100 p. c. de la
demande d'acier d'un client. A ce moment-là, ça devient une
question de mise en marché, de contacts personnels au niveau des
vendeurs, etc., qui doivent convaincre le client que l'acier qu'on leur
vend est de bonne qualité, est à un prix acceptable et qu'on peut
leur donner un service métallurgique convenable, qu'on s'occupe d'eux,
etc. Dans le fond, à ce moment-là, on joue les règles du
jeu, on observe les règles du jeu. Si on ne les observe pas, on perd nos
clients. C'est le jeu de l'offre et de la demande. Il arrive aussi que, pour
des raisons économiques souvent difficilement contrôlables, c'est
un "seller's market". A ce moment-là, il y a une rareté d'acier
et on se trouve de nouveaux clients. En fait, il y a beaucoup
d'éléments qui jouent dans l'élaboration du marché.
C'est sûr qu'on essaie d'exploiter ça à fond et on essaie
de remonter ses ventes dans des occasions comme celles-là. Prenez, comme
exemple, la grève de la Steelco, il n'y a personne qui aime avoir des
grèves. Quand Steelco était...
Quand Steelco était en grève et que nous, nous ne
l'étions pas, j'aime autant vous dire que la demande était
à la hausse. En fait, on ne pouvait suffire à la demande. Cela a
joué contre nous cette année, c'est nous qui avons eu une
grève.
Ce sont des éléments qui, à un moment donné,
dans le temps, jouent et font qu'on obtient des marchés, qu'on a de
nouveaux clients, etc. Il y a aussi des points spéciaux, comme dans le
fil-machine, qui est un produit relativement spécial. Il n'y a pas
tellement de gens qui font du fil-machine. Souvent, en vendant du fil-machine,
cela nous permet de vendre d'autres produits, une espèce de
"package deal" à un client donné.
Tous ces éléments jouent et je suis très confiant,
surtout au Québec, que nous allons augmenter notre part du
marché. On vend, je l'ai dit, 50 p. c. ou 55 p. c. de nos produits au
Québec. En ce qui concerne des aciers comme l'acier d'armature ou des
fers-angles, il n'y a pas de problèmes. Quand on touche à la
tôle, c'est différent, on a un pourcentage infime du
marché. La raison est très simple, je l'ai dit plusieurs fois,
c'est qu'on a eu des problèmes techniques avec nos engins, nos
équipements. Dès que ces problèmes techniques auront
été réglés ou surmontés, je pense que nous
allons très rapidement prendre notre juste part du marché
québécois dans le domaine des tôles fines. Je vous donne un
exemple entre autres.
M. LAURIN: M. Gignac, hier vous aviez l'air bien confiant, pour ne pas
dire assuré, que, Sidbec dès 1973, non seulement serait rentable
mais ferait des profits intéressants. Est-ce que vous pourriez nous
résumer des raisons sur lesquelles s'appuie votre confiance ou votre
certitude?
M. GIGNAC: C'est relativement facile. Actuellement, nous sommes
obligés de nous approvisionner pour une quantité d'environ
350,000 tonnes d'acier primaire de Sydney Steel Corporation, de U.S. Steel, de
Republic Steel, enfin de plusieurs aciéries. Cet acier-là nous
coûte les yeux de la tête et nous avons fait nos projections, nos
prévisions en nous basant sur les prix cela, c'est en 1969
que nous payions à Sisco.
Même si, depuis ce temps-là Sisco a haussé ses prix,
en nous basant sur ces prix-là, qui forcément sont plus
élevés que nous coûterait l'acier si nous le fabriquions
nous-mêmes, nous prévoyons un profit. Alors, je me dis: Nous ne
sommes pas plus imbéciles que Sisco. En outre, pour nous appuyer, nous
avons quand même deux petites fournaises électriques à
Montréal et nous connaissons très bien le prix d'une billette.
Nous savons ce qu'une billette nous coûte, nous savons le prix que nous
la payons. Alors faire la différence entre les deux n'est pas difficile
et multiplier non plus. Je peux vous assurer qu'en 1973, à moins qu'il
arrive des catastrophes que je ne prévois pas, nous allons faire un
profit et un bon profit.
M. LE PRESIDENT: Le député de l'Assomption.
Parcs d'automobiles
M. PERREAULT: M. Gignac, vous avez parlé hier de la
possibilité d'avoir une déchi-queteuse mobile qui irait dans les
parcs d'autos. Cette déchiqueteuse mobile existe-t-elle sur le
marché?
M. GIGNAC: Ce n'est pas cela que j'ai dit. Je m'excuse M. le
député. J'ai dit qu'on pourrait avoir des aplatissoirs, un
appareil qui aplatirait sur place les carcasses d'automobiles pour en faire
comme une espèce de feuille afin qu'elle ne prenne pas de place dans le
camion. Au lieu de mettre 7, 8 ou 10 voitures dans un camion, il serait
possible d'en mettre 50 ou 100. Ce serait encore dispendieux, mais j'ai dit
que, même à cela, il faudrait quand même un subside du
gouvernement pour rendre cette chose-là rentable.
Il y a beaucoup de gens qui ont pensé aux déchiqueteuses
mobiles. Ce sont de très gros engins et je serais
énormément surpris si on pouvait utiliser une
déchiqueteuse mobile qui pourrait être rentable.
UNE VOIX : Est-ce que ça existe présentement?
M. GIGNAC: Non. A ma connaissance ça n'existe pas.
M. BRASSARD: Je pense bien que des essais ont été faits
sur des presses.
M. GIGNAC: Ça fonctionne. Je pensais qu'on parlait de
déchiqueter le métal.
M. BRASSARD: Je parle de presser le métal sur place après
avoir brûlé les bourrures, l'intérieur de l'automobile.
Encore là c'est extrêmement dispendieux, ça coûte
trop cher et les gens disent que ce n'est pas rentable, donc ils ne s'en
occupent pas.
M. GIGNAC: C'est un problème.
M. LEVESQUE : Est-ce que vous avez déjà songé
à mettre en parallèle vos besoins et ceux de la province dans un
programme d'embellissement?
M. GIGNAC: Pour autant que la province contribue, je n'ai pas
d'objection. Je peux vous assurer d'une chose, c'est un problème qui va
s'accentuer, il ne diminuera pas. Plus ça va, plus le nombre de voitures
est élevé. Je pense, qu'on le veuille ou non, qu'il va
sûrement falloir que le ou les gouvernements interviennent, d'une
façon ou d'une autre, pour faire disparaître ou, du moins, pour
amoindrir ces fameux parcs de cadavres qui existent dans le moment.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauce.
M. GIGNAC: Mais ce n'est pas le mandat de Sidbec d'embellir la province.
Notre mandat à nous est de faire de l'acier.
M. BERTRAND: Ce n'est pas une compagnie d'embellissement.
M. GIGNAC: Non.
M. ROY (Beauce): Vous avez mentionné tout à l'heure que
Sidbec devait acheter de l'acier d'autres compagnies pour pouvoir satisfaire
à la demande de ses clients. Est-ce qu'il arrive parfois que Sidbec soit
obligée d'acheter de l'acier à un prix déterminé et
que Sidbec soit obligée de le vendre à un prix inférieur?
Est-ce que cela arrive assez souvent?
M. GIGNAC: Cela arrive...
M. ROY (Beauce): Je ne dis pas à un prix inférieur au prix
de production ou au prix que cela pourrait vous coûter pour le
produire...
M. GIGNAC: Ah! bon.
M. ROY (Beauce): ... mais au prix où vous l'avez payé.
M. GIGNAC: II y a une partie des fonds je pense que cela vous a
été expliqué par M. le ministre Garneau il y a $76
millions, si je me souviens bien, qui sont affectés à
l'installation d'équipement pour faire de l'acier. Cet acier-là
va nous coûter pas mal moins cher que le prix qu'on paie actuellement
pour alimenter nos laminoirs. C'est là que se trouve le gros profit.
M. ROY (Beauce): Ma question est la suivante: Est-ce que cela vous
arrive actuellement d'acheter de l'acier préparé et de le
revendre pour satisfaire le besoin de vos clients, mais de le revendre à
un prix inférieur à celui que vous avez payé?
M. GIGNAC: Vous voulez dire le revendre tel quel?
M. ROY (Beauce): Tel quel, oui. M. GIGNAC: Non.
M. ROY (Beauce): Vous n'avez jamais à subir de perte?
M. GIGNAC: Non. La perte qu'on subit survient quand on achète de
l'acier primaire en billettes et en lingots, qu'on le transforme et qu'on le
revend en produit fini. Evidemment, quand le prix de départ est de $50,
$30, ou $40 la tonne de plus cher que cela nous coûterait si on le
faisait, c'est là qu'on perd de l'argent.
M. ROY (Beauce): J'aurais maintenant une question indiscrète
à vous poser.
M. GIGNAC: Allez-y.
Marchés
M. ROY (Beauce): Est-ce que le gouvernement du Québec est un bon
client pour Sidbec?
M. GIGNAC: Le gouvernement du Québec est de plus en plus
conscient que Sidbec existe.
M. ROY (Beauce): Est-ce qu'on peut vous poser la même question
relativement à l'Hydro-Québec?
M. GIGNAC: Oui, l'Hydro-Québec... j'y ai d'ailleurs vu avant de
la quitter.
M. BERTRAND: Quelqu'un faisait hier la remarque que c'était
peut-être en famille. J'ai aimé l'explication, la réponse
de M. Gignac à ce sujet-là, parce qu'il ne faudrait pas que cela
devienne une entreprise d'entraide qui ne serait pas basée sur des
critères meilleurs que celui de bonnes relations avec un groupe.
Vous avez ajouté, qu'au point de vue du produit, vous
étiez en état de donner à l'Hydro-Québec un produit
de première qualité.
M. GIGNAC: Exactement.
M. BERTRAND : Quant à moi, comme dé-
puté, nous avons eu l'occasion de vous entendre pendant trois ou
quatre jours, devant la commission lorsque nous avons lancé Sidbec.
M. GIGNAC: Oui.
M. BERTRAND: Vous aviez répondu à la satisfaction de tous
les membres de la commission d'une manière complète. Vous aviez
apporté des arguments pour faire valoir que l'achat de Dosco
était une première étape sinon il y aurait deux
sidérurgies au Québec, cela pourrait être dangereux. Et
vous aviez dit que, par la disparition d'un concurrent, cela assurait davantage
le succès de Sidbec. Nous vous avons fait confiance quant
à moi et je pense que mes collègues sont prêts
également à vous faire confiance à ce sujet. Je comprends
que toutes les décisions qui sont prises vous avez un conseil
d'administration qui vous appuie sont des décisions unanimes.
M. GIGNAC: Oui, absolument.
M. LE PRESIDENT: Le député de Gouin.
M. JORON: M. Gignac, je m'excuse, il n'y a peut-être pas de suite
logique dans nos questions...
M. GIGNAC: Cela n'a pas d'importance.
M. JORON: ... mais je profite de votre présence pour les poser
toutes. J'ai une question, peut-être un peu délicate. Cela m'a
toujours intrigué de savoir si, au moment où Dosco était
devenue propriété de l'Etat québécois, il y avait
eu un chambardement dans votre clientèle. En d'autres mots, est-ce que
vous avez pu voir si certains marchés, si certains clients vous
devenaient inaccessibles du fait que Sidbec était devenue
propriété de l'Etat? Avez-vous été en mesure de
voir peut-être une certaine forme de nationalisme économique chez
certains clients anglophones, par exemple?
M. GIGNAC: Sur le marché du Québec, non. Il n'y a aucune
réaction, ni pour ni contre...
M. JORON; II n'y a pas eu de gros chambardements chez vos clients...
M. GIGNAC: Non.
M. JORON: ... comme la perte de clients spectaculaires...
M. GIGNAC: Sur le marché de l'Ontario, il y a eu ce que
j'appellerais quelques hésitations. A ce moment, dès le
début de 1969, je suis allé avec mon vice-président de
mise en marché, rencontrer personnellement deux de nos principaux
clients qui, au fond, se demandaient ce que nous faisions dans cette
galère. Je leur ai expliqué d'une façon très
franche très honnête, quels étaient nos objectifs. Cela les
a satisfaits. Depuis ce temps, je dois dire qu'en fait nos ventes ont
augmenté en Ontario. Alors, il n'y a pas eu de réactions.
Si vous me parlez des événements récents, c'est la
même chose; nous n'avons vu aucune réaction. De toute
façon, je me suis informé cette fois-là, à la suite
des événements que nous connaissons, pour savoir les
réactions sur le marché, mais il n'y en a pas eu.
M. LE PRESIDENT: Le député de Bourget
désirerait...
M. GIGNAC: C'est assez curieux, mais ce que le client désire,
c'est un produit de qualité à un prix concurrentiel. Il se fout
comme de l'an quarante de la provenance du produit. En tout cas, c'est
l'expérience que j'en ai.
M. LE PRESIDENT: Le député de Bourget.
Développement industriel
M. LAURIN: M. Gignac, lorsque l'on parlait de l'établissement
d'un projet Sidbec, une des raisons principales que l'on faisait valoir
était qu'une aciérie et surtout une sidérurgie
intégrée constituaient une sorte d'incitation extraordinaire au
développement industriel, c'est-à-dire que l'effet
d'entraînement prévu de Sidbec pour le développement
industriel serait très marqué. Cette projection
bénéfique entrevue commence-t-elle à se
matérialiser?
M. GIGNAC: Je peux vous dire une chose. Les effets
bénéfiques dont vous parlez ne sont peut-être pas
arrivés. La façon positive de répondre à votre
question serait la suivante: Cela a empêché des usines qui
utilisent des produits d'acier de fermer leurs portes et d'utiliser leurs
usines situées en Ontario. Disons que les tôles fines, qui sont un
produit que nous fabriquons et avec lequel nous perdons de l'argent dans le
moment parce que nous avons des difficultés techniques, comme je l'ai
mentionné tout à l'heure, sont probablement le produit qui
engendre le plus d'industries secondaires. Dès que nous pourrons
établir vis-à-vis des clients actuels et futurs notre
crédibilité au point de vue de la qualité, de la
livraison, du service, etc., je pense et je suis absolument convaincu, à
la suite des contacts que j'ai eus, que cela va avoir un effet
bénéfique au point de vue du développement industriel au
Québec.
M. LAURIN: Y a-t-il d'autres domaines où vous entrevoyez des
développements de ce genre-là?
M. GIGNAC: D'autres domaines?
M. LAURIN: D'autres secteurs, d'autres industries secondaires?
M. GIGNAC: Parlons-nous encore des produits de l'acier?
M. LAURIN: Oui.
M. GIGNAC: II n'y a presque pas de limite à ce qui peut se faire.
On peut parler de maisons préfabriquées. On peut parler de
panneaux préfabriqués pour la construction de maisons ou la
construction d'édifices publics. On peut parler de
lessiveuses-sécheuses. Je vais vous donner un exemple que tout le monde
connaît, je pense. Prenons la Fonderie l'Islet, qui est située
dans le bas du fleuve, à l'Islet. C'est un problème que je
connais assez bien parce qu'à ce moment-là j'étais
à l'Hydro-Québec et d'ailleurs, M. Perreault, qui est ici, peut
confirmer cela. Elle s'est mis en tête un jour de faire des chauffe-eau
électriques. L'Hydro-Québec l'a réellement
encouragée. On lui a fait une concurrence épouvantable et elle a
été obligé à un certain moment de cesser ses
affaires. Je vois maintenant qu'elle semble vouloir recommencer à
produire. Une des raisons qui faisait que ses produits n'étaient pas
compétitifs ou concurrentiels était qu'elle payait tout
simplement la tôle utilisée pour mettre autour du chauffe-eau $12
de plus que tous ses concurrents. Je vous donne un autre exemple concret.
Prenez les motos-neige, c'est une industrie que nous ne fournissons pas
à plein dans le moment justement à cause des problèmes
dont je vous ai parlé. C'est une industrie qui va devenir, pour nous,
éventuellement, un client extrêmement intéressant. Nous
allons contribuer... Comme question de fait, par notre seule présence
actuellement, même si nous avons un produit qui est de qualité
douteuse, nous avons fait descendre le prix de l'acier de $10 à $12 la
tonne. Si nous n'étions pas là, le prix remonterait de $12. Le
seul fait d'être là fait baisser le prix de $12 la tonne et je dis
$12 parce que c'est le transport dans le fond entre Hamilton et Montréal
ou le marché du Québec.
Recherche
M. LAURIN: Est-ce que vous avez un département de recherche
à Sidbec qui s'occupe de ces problèmes de prospective, de mise en
marché éventuelle, de développement de nouveaux produits,
d'ouverture de nouveaux marchés?
M. GIGNAC: Je suis justement en train d'en former un. Hier, vous m'avez
dérangé en ce sens que l'Assemblée nationale a
exigé ma présence. J'étais en train de discuter exactement
du problème que vous soulevez. Au moins, nous voulons former une
équipe qui va travailler dans la recherche de nouveaux produits ou de
nouvelles façons de faire le produit. Je vais vous dire qu'une partie de
cette recherche-là va se faire cela peut peut-être
intéresser de concert avec l'Institut de recherche de
l'Hydro-Québec, dans leur département de métallurgie. On a
d'ailleurs déjà commencé. C'est une chose qui est inscrite
dans notre programme de développement, mais nous ne pouvons
réellement escamoter la fondation. Il faut partir d'une bonne base, ce
qui n'est pas facile. D'ici deux ou trois ans, nous allons avoir tout ce qu'il
faut pour faire le développement ou la recherche, pour être disons
à l'avant-garde.
Je peux vous dire que l'usine de métallisation, que nous avons
l'intention d'installer à Contrecoeur, est une première au
Canada. Nous allons probablement être en 1972 ou 1973, la
quatrième ou la cinquième usine au monde à faire des
boulettes métallisées. De ce côté-là, nous
sommes réllement à l'avant-garde. Nous avons pris au
départ un risque calculé, mais cela en valait la peine, parce
qu'en faisant du fer métallisé dans une usine, les
investissements de capital pour faire de l'acier sont coupés de
moitié. Cela vaut la peine de prendre le risque et je pense que, de ce
côté-là, nous avons sûrement été
d'avant-garde.
M. LE PRESIDENT: Une deuxième question.
Autres compagnies
M. LAURIN: Pensez-vous qu'avez le développement de Sidbec vous
pouvez chasser du marché québécois certaines autres
compagnies qui y sont ou les absorber éventuellement? Ou même
faire des "holdings conglomérats"...?
M. GIGNAC: Quand on fait des profits et qu'on a un bon "cash-flow", on
peut se permettre bien des choses. Ce n'est pas notre intention de chasser qui
que ce soit du Québec. Cependant, nous avons l'intention de bien nous
implanter au Québec de la même façon que Steelco ou Dofasco
sont bien implantées en Ontario. J'en nomme deux, mais je pourrais
nommer Algoma mais ce n'est pas tout à fait le même genre de
produit. Ce sont plutôt Steelco et Dofasco qui sont nos plus grands
concurrents. Cependant, nous allons leur faire concurrence sur leur
marché pour les tenir honnêtes, pour employer une expression
commune. Eux viennent faire d'ailleurs la même chose ici.
Maintenant, qu'on rationalise j'appelerais plutôt ça
de la rationalisation ou même qu'on fasse des entreprises
communautaires avec des concurrents, cela n'est pas impossible. Parce qu'il y a
des marchés je ne vais vous en nommer qu'un le
marché du tuyau qui est un marché limité, qui a une
croissance très lente.
La capacité de fabrication est à peu près 50 p. c.
ou 75 p. c. plus élevée que le marché. C'est une
entreprise marginale. Tout ce que ça fait, ça dépense
l'acier qui est produit à l'aciérie.
Ce n'est pas impossible, qu'un de ces jours on se mette ensemble avec
Steelco et qu'on fasse seulement une compagnie qui va faire un produit et qui
va desservir un marché. Disons qu'à ce moment-là cela ne
sera plus une entreprise marginale. Cela sera une entreprise profitable.
Qu'est-ce qui peut se produire dans le futur? Je ne le sais pas. Mais on
a bien l'intention de s'implanter solidement au Québec.
M. LAURIN: Dans ce domaine-là, est-ce qu'il y a, comme en
agriculture, des signes de protectionnisme provincial qui commencent à
se manifester?
M. GIGNAC: II y a des signes que l'on voit et il y a des signes qu'on ne
voit pas. Je n'aime pas beaucoup revenir sur le passé mais quand
j'étais à l'Hydro et qu'on a commencé à parler de
tarifs préférentiels, tout le monde a jeté les hauts cris
pour s'apercevoir, six mois ou un an après, que toutes les provinces
faisaient la même chose. Disons que le problème s'est
réglé à ce moment-là.
M. BERTRAND: II faudrait se le dire.
M. GIGNAC: Cela a été notre malheur ou notre bonheur, je
ne le sais pas. D'ailleurs, je dois dire, je ne sais pas si vous êtes au
courant, qu'on a été critiqué à ce moment-là
c'était en 1963 ou 1964, si je me souviens bien par toutes
sortes d'organismes y compris le Financial Post, le président de ceci et
le président de cela. Il y a un an les entreprises du Canada, et
évidemment les entreprises ontariennes, étaient à ce
moment-là extrêmement lésés par des importations. Je
connais au moins deux présidents, en particulier le président de
la General Electric qui a dit que la seule politique d'achat intelligente au
pays je m'excuse de vous dire ça c'est
l'Hydro-Québec qui l'a établie. Quant au président de la
CEMA, je ne me souviens plus du nom, la Canadian Electrical Manufacturing
Association, il a confirmé la même chose. Je pense que, lorsque
l'on parle de protectionnisme, cela me semble normal qu'une province s'occupe
de ses affaires. Quand on retombe dans l'industrie privée, disons que
c'est normal que la concurrence joue avec moins de protectionnisme. Mais que le
gouvernement ou que l'Hydro-Ontario ou des entreprises du gouvernement, d'une
façon quasiment consciente, aillent donner leurs commandes aux Japonais
ou aux Allemands, je trouverais ça un peu ridicule, si on veut
réellement se bâtir une économie.
M. LE PRESIDENT: Le député de Shefford.
M. RUSSELL: Certaines de nos compagnies manquent de vigilance.
M. GIGNAC: Cela se fait. Cela se fait sûrement.
M. PILOTE: M. Gignac, vous avez dit tantôt que le marché de
plaques d'acier pour la fabrication de motos-neige était très
intéressant, ou semblait intéressant. Avez-vous pensé
à la concurrence des plaques d'aluminium ou de fibre de verre avec
lesquelles certaines motos-neige sont fabriquées?
M. GIGNAC: Cela fait partie du développement. S'il fallait que,
du jour au lendemain, on arrête les substituts, dans dix ans d'ici, on
serait à court d'acier. Cela serait impossible de fournir
là-dedans.
En un mot, quand on dit que le marché de l'acier augmente de 2
1/2 p. c, 3 p. c. ou 4 p. c. par année, cela tient compte du fait qu'il
y a un tas de substituts qui vont remplacer l'acier dans les motos-neige ou
dans ce que vous voudrez. S'il n'y avait pas ces substituts la même
chose d'ailleurs s'applique pour le bois les forêts seraient
vidées dans l'espace de dix ans. C'est ma façon de voir les
choses. Il y aura toujours des substituts ou d'autres produits pour faire
concurrence à l'acier ou au bois et même au plastique ou à
la fibre de verre, etc.
M. LE PRESIDENT: Je remercie M. Gignac d'avoir répondu aux
questions de la commission et je remercie également les membres de la
commission.
M. LEVESQUE: M. le Président, au nom du gouvernement, je veux
également remercier M. Gignac. Si nous l'avons dérangé
dans un domaine particulier, de la recherche, je suis convaincu qu'il aimerait
se faire déranger comme ça...
M. GIGNAC: Souvent.
M. BERTRAND: II est certainement heureux que M. Gignac soit venu. Quelle
que soit la compétence d'un ministre quel qu'il soit, il ne peut jamais
répondre à nos questions comme peut le faire, dans le cas, le
président de la compagnie Sidbec. Je le remercie personnellement au nom
de mes collègues.
M. ROY (Beauce): A titre de membre de la commission il me fait plaisir
également de remercier sincèrement M. Gignac d'avoir bien voulu
répondre à toutes nos questions.
Etant donné que nous sommes des nouveaux en Chambre, il est
évident qu'il a contribué énormément à nous
informer. Nous sommes beaucoup plus au courant maintenant des projets de Sidbec
dans la province de Québec. Par la manière dont il a
répondu aux questions que nous lui avons posées, M. Gignac nous a
prouvé
qu'il était un homme d'une grande compétence et d'une
grande valeur. Il me fait plaisir de le remercier.
M. BERTRAND: C'est votre cadeau de Noël!
M. JORON: Je voudrais également remercier M. Gignac. Sans
répéter ce que je disais en Chambre, hier, nous sommes
très sensibles à l'exemple que représente Sidbec, une
intervention positive de l'Etat dans la création d'entreprises nouvelles
et d'un élargissement de notre structure économique. Nous
souhaitons que l'exemple soit multiplié. On ne sait pas si on pourra
trouver partout des administrateurs aussi compétents que M. Gignac pour
piloter tous ces exemples futurs que l'on souhaite. Vous me permettrez de vous
remercier et de vous féliciter pour le rôle que vous jouez dans le
redressement de l'économie québécoise.
M. GIGNAC: Cela me remonte le moral. M. BERTRAND: Ne comptez pas vos
visites.
M. LE PRESIDENT (Houde) (Limoilou): Merci bien, M. Gignac.
M. GIGNAC: Cela me remonte le moral. Cela m'appesantit aussi. Merci
beaucoup. Au revoir.
Projet de loi no 57
M. LE PRESIDENT (Houde) (Limoilou): Bill 57 - Loi modifiant la charte de
la Caisse de dépôt et placement du Québec.
Article 1.
M. LEVESQUE (Bonaventure): A l'article 1, il y aurait un amendement que
nous voudrions suggérer et qui sera distribué à l'instant
même.
Aliénation d'immeubles
M. BERTRAND: A l'heure actuelle, la loi permettait quand même
à la Caisse de dépôt d'aliéner les immeubles, mais,
dorénavant, la caisse ne pourra le faire qu'après une
autorisation générale, ou spéciale du
lieutenant-gouverneur en conseil. Ce pouvoir a été
demandé, bien entendu, par le lieutenant-gouverneur en conseil.
M. Prieur, j'ai noté à la page 26 de votre rapport annuel
de gestion pour l'année 1969, la liste de tous les immeubles qui ont
été acquis par la Caisse de dépôt et placement.
M. LEVESQUE (Bonaventure): Si vous me permettez, M. le Président,
d'enchaîner avec ce que vient de dire le chef de l'Opposition, simplement
pour clarifier un peu la nécessité d'amener, ou
l'opportunité d'amener cet amendement à l'article 4 de la charte
de la caisse, c'est qu'à l'occasion de certaines transactions, des
conseillers juridiques avaient émis des doutes quant à la
capacité de la caisse de passer certains actes, tels que vendre,
hypothéquer, nantir et louer les biens immobiliers dont la caisse a la
possession.
D'autre part, le conseil d'administration de la caisse avait reçu
une opinion juridique du ministère de la Justice du Québec
à l'effet que la caisse avait probablement la capacité de passer
des actes de propriété. Toutefois, l'opinion juridique transmise
stipulait que la charte de la caisse devrait être modifiée pour
enlever tout doute qui pourrait subsister à ce sujet. Si on se reporte,
par exemple, aux dispositions retrouvées dans la Loi des autoroutes
1964, Statuts revisés de Québec, chapitre 134, article 10, on
voit que les deux premiers alinéas sont sensiblement les mêmes que
l'on retrouve dans l'article 4 de la charte de la Caisse de dépôt
et de placement, mais on y avait, alors, ajouté un troisième
paragraphe qui disait: "Toute acquisition ou aliénation de biens
immeubles par l'office doit être préalablement autorisée
généralement ou spécialement par le lieutenant-gouverneur
en conseil."C'est cette disposition que nous croyons bon d'amener pour enlever
tout doute dans l'interprétation des pouvoirs de la caisse.
M. BERTRAND: II y aurait eu moyen d'enlever tout doute, si doute il y
avait. Je n'ai
personnellement pas d'objection à ce que l'aliénation
d'immeubles soit autorisée par le lieutenant-gouverneur en conseil. Je
pense que c'est une protection également pour la Caisse de
dépôt. A ce moment-là, il ne pourra pas y avoir un jour des
conflits comme on en a eus au sujet de certaines transactions
immobilières qui ont été faites par une régie, dont
je n'ai pas besoin de donner le nom, étant donné que le
problème a été devant l'opinion publique. Je pense que
c'est également une protection pour les membres de la Caisse de
dépôt.
M. LEVESQUE: A ce moment-ci, on pourrait peut-être parler de
l'amendement, parce que ça enchaîne encore sur ce que vient de
dire le chef de l'opposition. Nous voudrions ajouter un alinéa qui se
lirait comme suit: "Toute autorisation visée à l'alinéa
précédent n'a effet qu'à compter de la date de sa
publication dans la Gazette officielle du Québec." Ceci est pour
éviter ce qui arrivait lors des transactions, alors que les notaires et
les avocats se posaient continuellement la question à savoir si un
arrêté en conseil prévoyant l'autorisation pouvait avoir
été modifié subséquemment. Donc, pour enlever
encore...
M. BERTRAND: Ça va donner un avis au public, à l'opinion
publique en général. Est-ce qu'il y a eu beaucoup de ventes
d'immeubles?
M. PRIEUR: Non, à ma connaissance, il n'y a eu aucune vente
d'immeuble, mais il y a eu certaines aliénations comme, par exemple,
lorsque nous avons loué des immeubles. Dans le cas de transactions de
conventions d'achats à retours locatifs ce que l'on appelle en
anglais les "sell and lease back", nous achetons une
propriété et nous la louons pour une période de, disons,
vingt ans à une société. Louer une
propriété, ce n'est pas la vendre, mais ça y ressemble un
peu.
M. BERTRAND: Un bail au-delà de neuf ans équivaut presque
à une aliénation au sens du code civil.
M. PRIEUR : II y a aussi la question à savoir lorsque nous devons
reprendre une propriété qui jouit de la garantie de la Centrale
d'hypothèques, c'est-à-dire qui jouit de l'assurance de la
Centrale d'hypothèques fédérale, nous savons que la
Centrale d'hypothèques n'acceptera pas la validité du titre
signé simplement par nous sans une intervention du lieutenant-gouverneur
en conseil. Ceci prévoit donc ce qui nous arrivera peut-être un
jour.
M. ROY (Beauce): En ce qui a trait aux immeubles, est-ce que la Caisse
de dépôt achète des immeubles pour les revendre, si elle
achète des immeubles commerciaux pour les louer à d'autres
personnes ou si elle est exclusivement réservée aux immeubles
devant servir aux différents services gouvernementaux?
M. PRIEUR: La caisse a le droit de faire toutes les opérations de
ce genre, mais généralement, à ce jour et à
l'avenir, tel que je peux le prévoir, la caisse n'est pas au
marché pour acheter des immeubles et les revendre pour faire un profit.
Lorsque nous achetons des immeubles, c'est pour des raisons de placements et
c'est essentiellement pour les relouer pour gagner un revenu pendant un certain
nombre d'années.
M. ROY (Beauce): Est-ce que c'est surtout pour acheter des immeubles
devant servir au gouvernement?
M. PRIEUR: Non. Ce sont des immeubles pour fins commerciales.
M. ROY (Beauce): Pour fins commerciales.
M. LE PRESIDENT (Houde) (Limoilou): Le député de
Gouin.
Placements immobiliers
M. JORON: M. Prieur, j'ai vu que la caisse avait fait différents
placements immobiliers; on voit souvent des constructions où la caisse
de dépôt participe au financement de la réalisation de tels
projets, etc. Est-ce qu'avant cette loi, de tels placements devaient être
autorisés par le lieutenant-gouverneur en conseil?
M. PRIEUR : Non, II y avait une différence d'opinion, seulement
au moment d'une vente c'est-à-dire que, la Caisse de dépôt
étant une corporation au sens du code civil, certaines personnes
croyaient que nous avions le droit de le vendre. Par contre, vu qu'il existe
déjà une tradition, des lois je ne suis pas avocat, je
m'excuse ...
M. JORON : II ne faut pas vous en excuser surtout !
M. PRIEUR: ... dans ces explications, j'ai toujours peur de me servir
d'expressions qui pourraient choquer les avocats la question est la
suivante: à notre avis, nous avions le droit de vendre, mais le
problème avait été soulevé par certains avocats,
à l'effet que nous n'avions pas le droit de vendre. Le ministère
de la Justice avait émis une opinion laquelle, pour un organisme comme
le nôtre, a force de loi, à savoir que nous avions le droit de
vendre. En même temps, il a été suggéré que,
pour enlever tout doute, on adopte une loi dans ce sens. Ceci va toutefois
exiger un arrêté en conseil du lieutenant-gouverneur qui nous
permettra généralement de faire la sorte de transactions que nous
faisons, arrêté en conseil qui, selon la loi, devra être
publié dans la Gazette officielle.
M. JORON: Dans le passé, les placements immobiliers qu'a fait la
Caisse de dépôt, ont-ils été faits après
consultation avec le conseil des ministres?
M. PRIEUR: Non.
M. JORON : Ma question s'adresse aussi en même temps au ministre
de l'Industrie et du Commerce je ne sais pas, en fait, de qui
relève... c'est le cabinet...
M. PRIEUR : Du ministère des Finances.
M. LEVESQUE: Du ministre des Finances. Je suis ici justement, à
titre de représentant.
M. JORON : Sans mettre en question la qualité des placements que
la caisse a effectués à date, je me suis posé une
question, à propos de ces fonds publics perçus de tous les
Québécois. Uniquement à titre d'exemple, ne mettant pas en
cause le mérite du placement, je vois que la Caisse participe au
financement de l'hôtel... sur la rue Sherbrooke... le Holiday Inn, je ne
sais trop.
M. PRIEUR: Oui, mais cette propriété n'a rien à
faire avec Holiday Inn.
M. JORON: Pardon, cela je l'ignorais. Je me demande la question
s'adresse davantage au gouvernement s'il y a des priorités
dictées par des réalités sociales, par exemple de mettre
l'accent sur la construction immobilière des logements à loyers
modiques. On en parle beaucoup de ce temps-ci. Est-ce qu'il est souhaitable que
la Caisse de dépôt emploie ses fonds à financer des
constructions d'ordre un peu plus somptuaire: des hôtels de luxe ou des
maisons appartements de luxe, des immeubles à bureaux, ainsi de suite? A
quel moment intervient le rôle du cabinet pour dicter une politique qui
tiendrait compte de ces préoccupations sociales?
M. LEVESQUE: Je n'ai pas d'objection à tenter de répondre
à la question posée. Je m'objecterais, en principe, à ce
que la commission parlementaire s'éloigne de l'objet de la
présente loi. Je voudrais qu'on se comprenne parce qu'autrement, on
pourrait, à ce moment-là, utiliser le travail en commission
parlementaire, exigé par la présente loi, pour faire un tour
complet d'horizon dans le domaine de la Caisse de dépôt. Ce n'est
pas ce pourquoi la Caisse de dépôt a demandé ce projet de
loi, présentement.
Ceci étant dit, je ne crois pas que ce soit le
lieutenant-gouverneur en conseil qui doive prendre l'initiative des placements
dans ce cas-ci parce qu'il y a une grande part d'autonomie dans la Caisse de
dépôt. C'est à la Caisse de dépôt qu'il
revient de juger des situations et, suivant la loi, de faire les placements
qu'elle juge à propos de faire.
M. JORON: Je comprends très bien, M. le ministre, aussi je ne
veux pas élargir indûment le débat, mais puisque...
M. LEVESQUE: D'ailleurs, M. Prieur pourrait peut-être ajouter
quelque chose pour répondre à cette question.
M. JORON : Je vous en prie.
Politique de la Caisse
M. PRIEUR : II me fait plaisir de vous donner, d'une façon
très brève, les politiques que nous poursuivons et qui
répondrons peut-être à la question que vous m'avez
posée.
La Caisse de dépôt est consciente de ses
responsabilités sociales. Par contre, la Caisse de dépôt
est aussi consciente du fait que les fonds, qu'elle doit gérer, sont les
fonds non pas de toute la population mais d'une certaine partie de la
population est que ces fonds servent à protéger le Régime
de rentes du Québec. Nous sommes dans une position où nous
devons, à la fois, rencontrer deux critères qui, dans la
majorité des cas, ne sont pas en conflit mais, quelquefois, peuvent le
devenir. Pour répondre à votre question spécifiquement,
nous avons essayé de faire certains placements dans le domaine du
domicile à prix modique, mais par contre, nous ne pouvons pas demeurer
simplement dans ce domaine parce qu'il s'agit aussi d'obtenir des revenus et de
faire des profits aussi pour protéger le Régime de rentes et les
autres organismes qui déposent à la caisse.
Nous avons essayé de faire un peu de tout. Mais il y a une autre
chose, c'est que la caisse n'est pas un entrepreneur, et ce n'est pas du
domaine de la caisse à elle seule de lancer des projets. Nous
représentons la finance et la finance n'est qu'une seule des choses
essentielles dans le développement économique. H faut un
entrepreneur avec une idée pour lancer un projet, avec des fonds assez
substantiels pour le protéger et pour permettre des prêts qui
pourraient s'y rattacher.
Notre présence même dans le marché répond
donc à tout le problème d'aider au développement
économique de la province. Nous chargeons habituellement le prix du
marché; il y a toujours l'offre et la demande, il y a toujours un
écart entre le meilleur prix et le prix le plus dispendieux, et parce
que nous sommes au Québec, parce que nous sommes une institution
québécoise, nous avons tendance à offrir peut-être
des meilleurs taux et conditions qu'on pourrait en obtenir d'une
société qui ne se reconnaît pas de responsabilités
politiques. Je ne sais pas si cela répond à votre question.
M. JORON: Je comprends très bien; je comprends que le rôle
de la caisse n'est pas d'être entrepreneur, elle est fournisseuse de
capitaux, si vous voulez. Mais, à ce moment, la partie s'adresse
peut-être plus au gouvernement, dans la mesure où le gouvernement
doit dicter peut-être des critères, enfin, établir des
normes à la caisse. A qui doit-elle...
M. LEVESQUE: D'ailleurs, nous avons des institutions, vous l'admettrez
volontiers, comme la Société d'habitation du Québec, par
exemple, qui s'occupe plus particulièrement d'un domaine social.
M. JORON: D'accord, la question que je posais, M. le ministre, à
ce moment, est justement de savoir s'il serait souhaitable que la caisse
prête à des entrepreneurs privés dans le domaine immobilier
ou prête davantage à l'Etat pour augmenter son pouvoir
d'investissement, à savoir si elle pourrait prêter à la
Société d'habitation du Québec. A un moment donné,
il y aura...
M. LEVESQUE: D'ailleurs, je sais que chaque fois qu'il y a un emprunt de
la province, la première question qui est posée en Chambre:
Est-ce que la Caisse de dépôt, en particulier?
M. JORON: Le pourcentage que...
M. BERTRAND: Vous avez à la page 23 du rapport annuel la
ventilation du portefeuille de la Caisse de dépôt et vous notez
que le gouvernement du Québec a des garanties dans ce portefeuille il en
a pour 55,1 p. c. ; hypothèques et immeubles: 3,1 p. c. . Ce sont des
placements très limités pour le moment. Vous avez
également les actions: 16 p. c. ; obligations d'entreprises: 4,7 p. c. ;
gouvernement du Canada: 4,8 p. c. ; émissions garanties par subventions
provinciales: 2,2 p. c. ; municipalités et commissions scolaires: 8 1/2
p. c. .
M. LEVESQUE: On admettra que la part du gouvernement, qui est de 55,1 p.
c. doit servir à plusieurs fins que vous défendez.
M. JORON: J'en conviens. Les 3 p. c. en immeubles, c'est qu'il faut
concevoir aussi que les initiatives de la caisse sont relativement nouvelles
dans ce domaine.
M. PRIEUR: C'est exact, dans le domaine des immeubles et
hypothèques, il y a aussi le fait qu'il y a un délai
considérable entre le moment de l'engagement et le moment où la
transaction se termine. Dans les cas de maisons d'appartements, cela peut aller
jusqu'à un an, un an et demi; tout dépend de la dimension de
l'édifice.
Je pourrais peut-être vous donner un chiffre que je citais
publiquement récemment; lorsque tous les engagements présents de
la caisse seront complétés, dans le domaine des valeurs
immobilières, y compris cette partie qui est réellement du
domaine immobilier mais qui se fait par choix par le véhicule
d'obligations hypothécaires, nous aurons, si nous arrêtions de
prendre des engagements ou d'accepter des engagements, $110 millions dans le
domaine des valeurs immobilières.
M. JORON: Soit environ près de 10 p. c. du...
M. PRIEUR: Sur un actif qui, en ce moment, excède un peu
$1,300,000,000.
M. LE PRESIDENT (Houde) (Limoilou): Le député de
Beauce.
M. ROY (Beauce): Est-ce qu'on me permettrait de poser quelques questions
concernant le bilan? A la page 18, il est mentionné: Actions
privilégiées: $6 millions; actions ordinaires: $150 millions.
Les actions achetées, qu'elles soient privilégiées
ou ordinaires, sont-elles des actions dans des sociétés
canadiennes, dans des sociétés québécoises? Y
a-t-il des capitaux qui peuvent être investis ailleurs que dans la
province de Québec?
M. LEVESQUE Je n'ai pas d'objection à ce que M. Prieur
réponde, mais j'aurais objection à ce qu'on poursuive trop
longtemps ce genre de questions et qu'on s'éloigne du projet de loi.
Placements
M. ROY (Beauce): On a permis quand même à un autre
député d'obtenir des réponses à ses questions.
J'aimerais bien en obtenir également parce que c'est la première
occasion que nous avons de rencontrer M. Prieur et de discuter avec lui.
M. LEVESQUE: Si on le fait d'une façon brève, je n'ai pas
d'objection.
M. ROY (Beauce): Comme il s'agit justement de changer un peu la
politique de placement de la Caisse de dépôt, j'aimerais, pour
m'éclairer et pour éclairer les autres également, avoir
quelques réponses à ce sujet.
M. PRIEUR: Je peux répondre à cette question en vous
faisant peut-être un exposé de la politique de la caisse
vis-à-vis des différentes sortes de placements. Dans le cas de
titres de créance où il s'agit d'obligations
hypothécaires, de debentures, de billets, ou quoi que ce soit, les
transactions de la caisse représentent alors un apport direct de capital
dans les sociétés. Dans ce cas-là, nous nous sommes
généralement maintenus à l'intérieur de la province
de Qué-
bec. Il y a eu quelques exceptions et ces exceptions sont d'habitude
temporaires, pour des fins bien précises, celles de faire de l'argent,
de faire un profit. Nous avons, par exemple, acquis une partie d'une
émission en Ontario qui apparaissait attrayante au marché. On
croyait qu'il y a un petit profit à faire à un moment où
nous avions des fonds disponibles. Nous allons peut-être passer un mois,
deux mois dans de telles obligations, puis les revendre et faire un profit, ce
qui nous donne plus d'argent pour retourner dans les affaires
québécoises, éventuellement.
Le cas des actions est complètement différent. Le domaine
des actions représente à près de 100 p. c. un
marché secondaire. Lorsque nous achetons des actions, ce n'est pas un
apport de capital à la compagnie. C'est un transfert d'actionnaires;
nous remettons l'argent à un autre actionnaire qui peut faire ce qu'il
veut avec cet argent. Vu que cela ne représente pas un apport direct et
immédiat de fonds à une société, nous nous sommes
maintenus dans le marché canadien. Par exemple, si la caisse voulait
participer au pétrole, pour avoir un portefeuille le moindrement
équilibré. Or, nous pouvons difficilement le faire dans la
province de Québec, car le pétrole se trouve surtout dans
l'Ouest, nous avons donc acheté des actions de sociétés de
pétrole dans l'Ouest. Ceci toujours dans le but de faire un profit,
toujours pour protéger les participants au régime des rentes et
les autres déposants à la caisse. Remarquez qu'il y a là
une différence fondamentale qui existe entre le portefeuille d'actions
et le portefeuille de créances. Le portefeuille d'actions est
essentiellement pour faire de l'argent. Je n'ose pas dire trop fort que c'est
pour se protéger contre l'inflation parce que le marché des
actions n'a pas été propice à la protection contre
l'inflation cette dernière année.
M. ROY (Beauce): Cela peut vous protéger contre l'inflation et
aussi vous protéger contre l'impôt, mais comme vous êtes
dans une institution gouvernementale, c'est différent. Si je comprends
bien, d'après les actions ordinaires que détiendrait la Caisse de
dépôt, ce serait un genre de portefeuille qui pourrait se comparer
aux portefeuilles des compagnies de fonds mutuels, en somme, tant de placements
dans telle catégorie.
M. PRIEUR: Oui, sauf que la Caisse de dépôt, étant
un organisme nettement québécois, nous avons essayé de
nous identifier comme actionnaires de sociétés
québécoises et nous retrouvons peut-être à la Caisse
de dépôt une ampleur plus grande que celle que nous pourrions
trouver dans un portefeuille privé de titres, d'actions de
sociétés québécoises car, naturellement, nous les
connaissons mieux. Alors que, par exemple, nous détenons des actions de
presque toutes les banques canadien- nes, en pourcentage de chaque banque, les
plus élevés sont les deux banques québécoises
francophones.
M. ROY (Beauce): Concernant la rentabilité de ces actions, je
comprends que la politique du gouvernement puisse entrer en ligne de compte,
mais si on regarde uniquement la rentabilité dans un portefeuille
d'actions, il est évident que nous n'en sortirons jamais. Si nous
voulons mettre l'accent, par exemple, sur les entreprises
québécoises, pour leur permettre de se développer, il est
évident qu'il y aura peut-être des sacrifices à faire au
début.
Comme la Caisse de dépôt se trouve alimentée par des
fonds qui proviennent des petits épargnants, du peuple du Québec,
ne pensez-vous pas qu'il y aurait lieu d'orienter la politique de placement
vis-à-vis les entreprises québécoises, même s'il y a
des sacrifices à faire au tout début? En somme, ce sont des
capitaux québécois.
M. JORON: Si le député me le permet, je voudrais amplifier
sa question. Je suis très content de voir la distinction que vous avez
faite entre la nature différente des deux sortes de placements, le
premier étant un investissement, un achat d'action n'étant qu'un
transfert de capital. J'avais eu passablement de misère à faire
comprendre ça, moi-même, à mon adversaire libéral
pendant la campagne électorale. Il est vrai que cela a été
une source de profit supplémentaire pour la Caisse de dépôt
dans le passé. La section des actions de la Caisse de dépôt
est pilotée par un de mes amis personnels et qui a eu passablement de
succès dans ses opérations boursières depuis quelques
années. La question que je voulais vous poser, et qui se rattache
à celle du député de Beauce, c'est dans le total des
actions c'est 16 p. c. environ le portefeuille de la caisse quel
a été le pourcentage des émissions nouvelles d'actions et
qui auraient constitué un apport de capital, à ce
moment-là, des entreprises nouvelles?
Est-ce aussi la politique de la caisse, à l'avenir, de se
concentrer davantage à l'achat d'actions au moment d'émissions
premières que d'opérations en bourse?
M. PRIEUR: Naturellement nous sommes toujours liés à ce
qu'on peut acheter au marché, à ce qui nous est offert.
M. JORON: Oui.
M. PRIEUR: Je n'ai pas fait faire le chiffre pour l'an dernier.
L'année précédente, j'avais demandé qu'on me
prépare une liste pour répondre exactement à cette
question. Cette année-là, l'année 1968, 92 p. c. de nos
opérations étaient en bourse, au marché secondaire, et 8
p. c. de nos acquisitions représentaient des apports directs de
financement, c'est-à-dire une
émission primaire d'actions. Je dois dire que nous essayons
toujours de faire cette sorte d'opération, mais nous ne pouvons faire
que ce que le marché nous permet de faire. Ce n'est pas tous les jours
qu'on nous offre ces choses-là.
M. JORON: Vous faites des placements privés et directs aussi?
M. PRIEUR: Oui.
M. JORON: Est-ce que vous avez l'intention d'amplifier cette
activité de la caisse?
M. PRIEUR: Oui, exactement.
M. ROY (Beauce): Moi, M. Prieur, j'avais posé une question tout
à l'heure, à savoir si vous croyez que la Caisse de
dépôt devrait si vous êtes d'accord mettre
l'accent à l'avenir sur le placement d'actions de compagnies
québécoises plutôt que de l'étendre sur des
compagnies canadiennes, même si ça suppose certains sacrifices, de
perte d'intérêt.
M. PRIEUR: C'est une question à laquelle je dois répondre
avec énormément de discrétion, parce que je ne peux pas
parler pour le conseil d'administration de la caisse. Je peux essayer de me
faire son interprète. Nous avons toujours été prêts,
à la caisse, de faire certaines concessions au marché pour aider
le Québec. Il y a une limite où on ne peut pas aller plus loin.
Cette limite-là, plus souvent qu'autrement, est simplement dans une
opération que nous ne croyons pas rentable. Si la situation est
rentable, nous pouvons toujours trouver des conditions auxquelles nous pouvons
faire un placement. C'est plutôt rare que, à partir de
discussions, on ne puisse pas en arriver à une solution quelconque. Si
nous n'avons pas fait plus, c'est que le marché ne nous l'a pas
permis.
M. ROY (Beauce): En parlant d'entreprises rentables, il est
évident que, si on se réfère aux banques qui font
différents prêts, ils exigent trois bilans, les trois derniers
bilans. Est-ce que c'est un peu la même chose en ce qui regarde la Caisse
de dépôt quand elle fait un placement dans une entreprise?
Voici où je veux en venir. C'est parce qu'on demande certaines
modifications et il est évident qu'il va falloir songer, au
Québec, à financer des entreprises qui devront débuter. Et
une entreprise qui débute, qui doit commencer, ne peut pas publier trois
bilans. Alors, elle publie nécessairement une espèce de
prospectus de départ avec certaines normes de rentabilité qui
peuvent être analysées. Est-ce la politique de la Caisse de
dépôt de prévoir la possibilité de faire des
placements dans une entreprise nouvelle au Québec plutôt que dans
des entreprises déjà existantes et qui sont hors de notre
contrôle, parce qu'en somme la caisse de dépôt est toujours
minoritaire?
M. JORON: Dans quelle mesure est-elle en concurrence avec la SGF,
lorsqu'elle fait ça?
M. PRIEUR: S'ils existent, nous demandons cinq bilans, pas trois.
M. ROY (Beauce): Cinq bilans.
M. PRIEUR : La loi précise en effet que l'entreprise a dû
gagner 4 p. c. pendant cinq ans sur le compte des actionnaires. Maintenant, en
ce qui a trait aux entreprises nouvelles, la loi nous permet aussi, par la
clause omnibus, de faire des placements qui ne rencontrent pas les autres
exigences. Il n'y a aucun empêchement pour la caisse à faire des
placements dans les nouvelles industries. Nous en avons fait. A certains
moments nous avons même fait des placements dans les entreprises qui
n'étaient pas nouvelles, mais en regard de croissance de l'entreprise,
au moment où le financement se faisait, il fallait envisager la
situation non pas par en arrière mais par en avant, pour l'avenir.
M. ROY (Beauce): Est-ce qu'il y aurait possibilité de faire
chaque année, une partie du portefeuille, même si cela pouvait
comporter certains risques pour permettre la création d'entreprises
nouvelles? Je ne veux pas citer de cas, mais je pense que vous avez en
mémoire un cas que vous avez eu. A titre de député de
Beauce, je vous rappelle que vous avez eu l'occasion d'avoir des rencontres au
sujet de l'établissement à Saint-Georges d'une entreprise
à laquelle la population avait accepté de souscrire un
demi-million de dollars, c'est-à-dire $500,000. Mais il n'a pas
été possible d'avoir de nos institutions
québécoises le montant d'argent susceptible de permettre
l'établissement de cette industrie au Québec. Elle a dû
aller s'établir au Manitoba après un effort d'un demi-million de
la part de la population. A ce moment-là, je m'étais
réservé des questions, quand l'occasion se présenterait de
vous rencontrer, pour vous demander s'il n'y aurait pas possibilité que
la Caisse de dépôt songe à ce problème. Nous avons
des entreprises à bâtir au Québec. Le problème en
est un de capitaux.
M. PRIEUR : Nous sommes conscients du problème à la
caisse. Je pourrais dire, comme je l'ai dit dans le rapport annuel, l'an
dernier, qu'au commencement de l'année, le conseil d'administration
dresse un programme d'investissements pour l'année en cours et que nous
devrons, au cours de l'année, modifier lorsque nécessaire.
Chaque année, nous avons toujours prévu des placements
dans des sociétés pour un montant plus fort que celui que nous
avons pu trouver au marché. Il n'y a pas d'année qu'on n'a pas
terminée, avec un certain montant d'argent dont on ne s'était pas
servi parce que l'on n'avait pas trouvé les choses que l'on
croyait rentables. Il faut toujours se servir de critères d'une
rentabilité quelconque. On peut se tromper à certains moments.
Peut-être les gens de la caisse peuvent-ils commettre des erreurs comme
tout le monde, quand ils jugent de la rentabilité d'un projet. Mais on
ne peut pas dire qu'on n'a pas essayé.
M. ROY (Beauce): On dit toujours qu'une institution prêteuse qui
ne perd jamais d'argent en prêtant ne prête pas assez! C'est un
dicton qui est assez populaire.
M. PRIEUR: On en a déjà perdu un peu, peut-être que
l'on entre dans la catégorie que vous mentionnez.
M. ROY (Beauce): J'aurais une dernière question à poser
là-dessus. Je voudrais terminer en ce qui me concerne. Je remarque que
vous avez ici, dans l'état des revenus et des dépenses, au poste
du surplus, une somme de $52,876,000, et qu'au passif on ne voit aucun poste au
bilan qui indique des surplus accumulés. Est-ce que ceci voudrait dire
que le revenu net est partagé entre les déposants et
crédité au compte des déposants?
M. PRIEUR: Pourriez-vous répéter les chiffres au
bilan?
M. ROY (Beauce): Je m'excuse. Au bilan, page 20, on indique à
l'état des revenus et dépenses, $52 millions de revenu net. Si on
revient à la page 19, je ne vois pas de poste au bilan, au passif, qui
indique un surplus ou un surplus accumulé. Est-ce que ceci voudrait dire
que le surplus du revenu net est crédité directement au compte
des déposants, partagé entre les déposants et
crédité directement à leur compte?
Dans tout bilan d'entreprise, on voit toujours un article, à la
fin du passif, qui indique les surplus accumulés.
M. PRIEUR: La comptabilité de la caisse est un peu
différente de celle d'un organisme purement commercial. Ceci se situe au
niveau de la capitalisation. Dans notre cas, ce n'est pas une capitalisation,
c'est un résumé des dépôts à demande et des
dépôts à préavis. Ces chiffres représentent,
en réalité, les dépôts historiques de la caisse de
dépôt. Les revenus qui sont là, sont traduits purement et
simplement dans l'actif de la caisse qui est automatiquement
augmenté.
M. ROY (Beauce): Oui, un instant.
M. PRIEUR: Ils servent à augmenter le compte du déposant.
C'est-à-dire que, si vous regardez le compte des déposants
à préavis qui est $924 millions, ils n'avaient pas
déposé exactement $924 millions, ils avaient déposé
un montant moindre que ceci par les surplus accumulés de chaque
année.
M. ROY (Beauce): Bon.
M. PRIEUR: Cela revient automatiquement dans le compte du
déposant.
M. ROY (Beauce): Cela revient directement dans le compte du
déposant?
M. PRIEUR : Oui. Vous allez voir à la page 21 c'est
là que la comptabilité se fait dans la répartition
du revenu net d'opération, où les $52 millions apparafssent sous
le montant à préavis, $52,876,000. Actuellement, le revenu total
était de $54 millions et on avait déduit de cela les montants
payés en intérêt sur les dépôts à
demande. Le revenu net qui était de $54,977,000, a été
réparti parmi les déposants. C'est pour cela que, lorsqu'on
regarde le bilan, le montant de $52 millions ou de $54 millions
n'apparaît pas au bilan parce qu'il est déjà au compte des
déposants.
M. ROY (Beauce): Autrement dit, la caisse de dépôt ne garde
pas un compte du surplus, elle le crédite directement au compte de
déposant.
J'avais dit que c'était ma dernière question mais je
m'excuse. Il arrive que la caisse de dépôt achète les
obligations du gouvernement provincial, comme cela s'est produit lors de la
dernière émission d'obligations de $60 millions du gouvernement.
La caisse de dépôt a alors acheté directement du syndicat
financier au lieu d'acheter directement du gouvernement. Est-ce que c'est
là une politique établie à la caisse de
dépôt?
M. LEVESQUE : On a déjà répondu à cette
question précissant qu'il s'agissait d'une émission publique. Je
crois que cette question doit être posée au gouvernement.
M. ROY (Beauce): Au gouvernement?
M. RUSSELL: Répondu par le gouvernement?
M. LEVESQUE: C'est cela.
M. ROY (Beauce): Disons que la décision ne relève pas de
la caisse de dépôt, la décision relève du
gouvernement?
M. PRIEUR: C'est cela.
M. ROY (Beauce): Si le gouvernement répète la même
chose, on posera d'autres questions?
M. LEVESQUE: C'est cela. Nous continuerons en Chambre.
M. LE PRESIDENT (Houde) (Limoilou): Le député de
Gouin.
Fonds de développement industriel
M. JORON: M. le Président, je voudrais revenir brièvement
à cette partie des activités de la caisse de dépôt,
dont on parlait tout à l'heure, et dont le rôle est d'assurer le
financement privé direct de petites entreprises qui ont de la
difficulté à se financer. Si cette forme d'activité devait
prendre une ampleur considérable, est-ce qu'elle dépasse,
d'après vous, le rôle premier qu'on avait prévu à la
caisse? Est-ce qu'on ne s'en va pas vers une espèce de fonds de
développement industriel, en quelque sorte qui, à un certain
moment donné, pourrait se détacher de la caisse pour venir
remplir le rôle historique que la SGF n'a jamais joué et qu'on
avait pensé qu'elle jouerait au début?
M. PRIEUR: Je n'ai pas répondu complètement à votre
question la dernière fois. Vous aviez deux ou trois questions au
même moment. Vous avez parlé des relations qui existent entre la
Caisse de dépôt et la SGF et j'ajouterais aussi l'Office du
crédit industriel. Je siège à l'Office du crédit
industriel et les trois organismes ne sont pas dans le même domaine de la
finance. La Société générale de financement est une
société qui, d'après ce que l'on voit, s'oriente vers le
contrôle de sociétés. La Caisse de dépôt est
un organisme financier qui s'occupe de placements de portefeuilles surtout
rentables. On fait peut-être un peu plus que cela, mais il faut toujours
garder l'aspect de rentabilité à la Caisse de dépôt.
L'Office du crédit industriel commence où nous laissons dans la
petite entreprise c'est-à-dire que, lorsque la petite entreprise est un
peu petite pour nous, que la rentabilité lorsqu'il s'agit de
manufactures, d'entreprises manufacturières laisse un peu
à désirer c'est peut-être du nouveau c'est
à l'Office du crédit industriel que cette société
s'adresse.
Je croirais, pour répondre à votre question c'est
peut-être une question politique mais il me semble que ce que vous
demandez existe déjà à l'Office du crédit
industriel. Il serait peut-être plus facile de considérer cet
organisme, pour faire ce dont vous parlez, plutôt qu'à la Caisse
de dépôt.
M. JORON : Le rôle de la caisse serait peut-être, à
ce moment-là, de prêter des fonds à d'autres organismes ou
de faire une délimitation...
M. PRIEUR: C'est possible. Avec ces organismes qui sont des organismes
gouvernementaux, la caisse est toujours prête à considérer
des prêts.
M. LE PRESIDENT (Houde) (Limoilou): Article 1, adopté?
Adopté. Article 2?
M. LEVESQUE Pour bien saisir la marche de cette législation, je
pense qu'il faut regarder un instant l'article 5 et on reviendra sur les
articles 2, 3 et 4.
C'est qu'actuellement la caisse ne peut détenir plus de 30 p. c.
des actions ordinaires d'une même compagnie. Présentement, nous
parlons d'aliénation d'immeubles dans l'article 1. A certains moments,
dans les transactions immobilières, il serait avantageux d'acheter des
actions de compagnies qui ne font que de l'immeuble; elles ne sont que
propriétaires. Je vais vous dire ce à quoi on veut en venir:
c'est que la Caisse ne peut détenir plus de 30 p. c. des actions
ordinaires d'une même compagnie. Elle peut, cependant, acquérir et
détenir des immeubles sans restriction pourvu que son investissement
total en hypothèques et en immeubles ne dépasse pas 10 p. c. de
son actif total.
La caisse est fréquemment appelée à acquérir
des immeubles en co-propriétés avec d'autres institutions
financières et la meilleure formule à utiliser pour ce genre
d'opérations, est celle de la compagnie. Cette formule présente
l'avantage de limiter la responsabilité de la caisse et sa mise de
fonds, lui donne des prérogatives identiques à celles dont
jouissent ses compétiteurs et permet à la caisse de varier sa
participation en fonction des circonstances dans le capital-actions des
compagnies concernées.
L'article 5 a donc pour effet de modifier la charte de la caisse de
façon à ce qu'elle ait le pouvoir de détenir plus de 30 p.
c. des actions ordinaires d'une même compagnie, n'existant qu'aux fins de
détenir ou d'administrer les immeubles. Une compagnie autrement dit qui
n'a...
M. BROSSARD: ... qui est propriétaire d'immeubles.
M. LEVESQUE: Oui directement. C'est cela. A ce moment-là les 30
p. c. peuvent devenir 100 p. c.
M. LAURIN: Comment expliquez-vous, M. le Président, 1 p. c. pour
une seule compagnie et 10 p. c. pour l'ensemble...
M. LEVESQUE: C'est pour cela qu'il y a eu les deux articles
précédents. On verra quand on va faire la concordance, on va y
revenir.
M. LAURIN: C'est toujours dans un but de diversification qui est
destiné à assurer la protection de ceux qui contribuent a la
Caisse de rentes?
M. LEVESQUE: C'est surtout pour permettre à la caisse de faire ce
qu'elle fait dans l'acquisition des immeubles, etc., mais de procéder
via des actions de compagnies plutôt que directement...
M. RUSSELL: D'être la seule actionnaire d'un immeuble, d'aider
à des compagnies qui font de l'immeuble et de donner une meilleure
garantie, en somme, de sortir d'un domaine auquel elle n'appartenait pas.
M. PRIEUR: Nous sommes, par exemple, dans une transaction; nous
étions dans cette transaction à moins de 30 p. c, et il y avait
trois actionnaires. C'était une compagnie qui détenait des
immeubles. A un certain moment, un des actionnaires a dû se retirer et
cela nous a laissés dans une drôle de situation parce que nous
étions obligés d'acquérir sa participation et cela nous
aurait fait dépasser les 30 p. c. Nous ne pouvions pas faire
indirectement ce que la loi nous permettait de faire directement. C'est pour
cela qu'on a demandé... D'ailleurs, les sociétés
d'assurance fédérales ont eu le même problème avant
64/65 et, à ce moment-là, elles ont demandé la même
chose que nous demandons aujourd'hui.
M. RUSSELL: Je suis opposé à ce que la caisse devienne
propriétaire d'immeubles. Je ne serais pas contre le fait que la caisse
fasse partie d'une compagnie ou détienne partie d'une compagnie qui fait
exactement ce commerce-là, mais qu'elle exige de cette compagnie les
mêmes garanties que d'autres avant de prêter à une compagnie
valable. C'est exactement ce qu'on fait en vertu de la loi.
M. PRIEUR: C'est cela. En revenant à l'article 2, on
s'aperçoit que le but de cet article est de soumettre les sommes
placées dans des actions de compagnies détenant ou administrant
des immeubles aux mêmes restrictions qui existent déjà.
Dans l'article original, on ne parlait évidemment pas des actions. Or,
on introduit dans les paragraphes a) et b) la possibilité d'inclure les
actions de chaque compagnie ayant uniquement pour objet d'acquérir, de
détenir, de louer ou d'administrer des immeubles, avec les mêmes
restrictions, soit 1 p. c. et 10 p. c.
M. LAURIN: Et ces restrictions sont le garde-fou qui protège
l'admission, l'objectif premier de l'enquête.
M. LEVESQUE: La caisse a autant de protection. La seule chose, cela nous
donne un peu plus de flexibilité.
L'article 3 je mentionnais tout à l'heure l'article 5
"donnant à la compagnie le pouvoir d'acquérir sans
restriction des actions d'une compagnie ayant uniquement pour objet
d'acquérir, détenir, louer ou administrer des immeubles. Il est
nécessaire de lui accorder le pouvoir d'acquérir de telles
actions même si les exigences passibles pour l'achat d'actions dans
d'autres compagnies, quant au rendement", tel qu'il est prévu au
paragraphe b).
C'est pour les actions privilégiées; alors, la caisse peut
acquérir et détenir des actions privilégiées
entièrement acquittées, d'une compagnie qui a uniquement pour
objet d'acquérir, détenir, louer ou administrer des
immeubles.
M. LAURIN: Les 4 p. c. seront éventuellement changés parce
que cela vous oblige à des placements de pères de famille.
M. PRIEUR : Pas nécessairement. Pour le grand portefeuille de la
caisse, je crois que 4 p. c. est un chiffre prudent. Il est moins prudent qu'il
l'était, parce qu'originalement, dans toutes les lois telles que
celle-ci, c'était: "ayant payé un dividende de 4 p. c";
éventuellement, cela a changé, c'est: "ayant gagné 4 p. c.
sur ces actions durant les cinq années précédentes", et
cela ne représente réellement pas un critère très
difficile à satisfaire.
Lorsqu'une compagnie ne satisfait pas à ce critère, elle
tombe sous la clause omnibus, et alors nous pouvons détenir
jusqu'à 7 p. c. de notre actif total dans de telles
sociétés.
M. LEVESQUE: L'article 4, c'est la même chose, excepté pour
les actions ordinaires. Nous arrivons à l'article 5 dont nous avons
discuté tout à l'heure. Quant à l'article 6, on ajoute un
alinéa à l'article 31. C'est-à-dire qu'on ajoute l'article
31 a) qui se lit comme suit: "La Caisse peut recevoir et détenir en
nantissement tout titre en garantie de l'exécution d'une obligation
contractuelle autre que le remboursement d'un prêt ou en garantie
additionnelle du remboursement d'un prêt qu'elle consent, etc."
Cet article a pour but de permettre à la caisse de recevoir, non
pas à titre de placement, mais en nantissement, à titre de
garantie additionnelle tout genre de titres ou valeurs même si ceux-ci ne
sont pas admissibles aux fins de placements. Cette modification a pour objet de
permettre à la caisse d'améliorer les garanties
d'exécution de certains contrats auxquels elle peut être partie
dans le cours normal de ses opérations ou de parfaire la
sécurité de certains placements qu'elle est autorisée
à faire en vertu de sa charte. Alors, c'est une garantie
additionnelle.
M. LAURIN : Est-ce que la garantie peut devenir un corset à un
moment donné?
M. LEVESQUE: Si on me le permet ici, on donne un exemple: dans un cas la
caisse a considéré l'acquisition des debentures d'une
société qui avait gagné un revenu de 4 p. c. sur ses
actions ordinaires depuis au moins cinq ans.
L'article 24 le permet. Alors que la caisse avait le droit
d'acquérir ces debentures, elle se voyait obligée de refuser
à cause de l'état financier général de cette
société.
Par contre, cette société détenait la
totalité des actions d'une de ses filiales, dont la valeur était
jugée suffisante pour garantir le remboursement de la débenture.
La caisse ne pouvait pas accepter que ces actions soient nanties en sa faveur,
car sa charte lui défend de détenir plus de 30 p. c. des actions
ordinaires d'une même compagnie et elle n'aurait pu demander la
réalisation de cette garantie additionnelle.
M. LAURIN: A mesure que la Caisse de dépôt progresse au
point de vue d'accumulation de ses fonds, de l'expérience de ses
administrateurs, de la connaissance de tout le marché, il me semble
qu'on pourrait peut-être lui donner plus de flexibilité, plus de
marge de manoeuvre.
M. LEVESQUE: Nous allons noter cette remarque pour la prochaine visite
de M. Prieur.
M. RUSSELL: Peut-être au début...
M. LE PRESIDENT (Houde) (Limoilou): Alors, article 2, adopté,
article 3, adopté, article 4, adopté, 5, adopté, 6,
adopté et 7 adopté. Merci bien, M. Prieur, de vous être
prêté si gentiment à répondre à nos
questions.
M. LEVESQUE: Au nom du groupe ministériel, nous allons suivre
l'exemple du président en vous remerciant et en vous souhaitant plein
succès dans votre travail.
M. BERTRAND: J'amende les propos en disant au nom de l'Opposition.
M. TETREAULT: Pareillement.
(Fin de la séance: 12 h 26)