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(Quinze heures neuf minutes)
M. LAVOIE (président): Qu'on ouvre les portes. A l'ordre,
messieurs!
Affaires courantes. Présentation de pétitions. Lecture et
réception de pétitions. Présentation de rapports de
comités élus. Présentation de motions non
annoncées. Présentation de bills privés.
Présentation de bills publics.
M. LEVESQUE: A.
Projet de loi no 53 Première lecture
M. LE PRESIDENT: L'honorable premier ministre propose la première
lecture d'un projet de loi accordant une pension à la veuve de M. Pierre
Laporte.
M. BOURASSA: Ce projet de loi accorde à Mme Laporte, à
compter du décès de son mari, une pension égale à
la moitié du montant des indemnités qu'il recevait comme
député et ministre, mais sans tenir compte des allocations qui
lui étaient versées. Il prévoit que le quart de cette
pension sera versé à chacun de ses deux enfants au cas de
décès de leur mère avant qu'ils aient atteint l'âge
de 18 ans ou de 21 ans, s'ils sont aux études.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce bill. First
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture à la prochaine
séance.
Déclarations ministérielles. Dépôts de
documents.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: M. le Président, qu'il me soit permis de
déposer une copie de l'entente fédérale-provinciale
intervenue entre le gouvernement du Québec et celui du Canada
relativement aux prêts aux personnes déjà engagées
dans l'exploitation de la pêche commerciale dans des eaux
prohibées.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Agriculture.
M. TOUPIN: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le
rapport sur la fabrication et la vente du cidre au Québec, connu sous le
nom de rapport Thinel. Une copie sera distribuée au cours de
l'après-midi.
M. LE PRESIDENT: Questions des députés. L'honorable
député de Nicolet.
Questions et réponses
Ecole de médecine
vétérinaire
M. VINCENT: M. le Président, j'aurais une question à poser
au ministre de l'Agriculture et de la Colonisation, suite à une
réponse écrite donnée par le ministre de l'Education,
mercredi dernier. Je cite seulement une partie de la réponse
écrite du ministre de l'Education. Cela paraît aux
procès-verbaux du mercredi 2 décembre 1970: "A cause du contexte
d'austérité et de la possibilité d'utiliser les ressources
physiques de l'institut Voisine en parlant de l'Ecole de médecine
vétérinaire le ministre de l'Education dit: "L'Institut
technique d'agronomie".
Ma question au ministre de l'Agriculture est la suivante; Est-ce qu'on a
changé le nom de l'Institut de technologie agricole de Saint-Hyacinthe
récemment? Si oui, est-ce le nouveau nom donné à
l'institut?
M. TOUPIN: Non, M. le Président. Le nom de l'institut n'a pas
été changé. Il est demeuré ce qu'il
était.
M. VINCENT: Une question supplémentaire au ministre de
l'Education. Est-ce que c'est seulement par erreur qu'on a baptisé cette
nouvelle bâtisse à Saint-Hyacinthe: Institut technique
d'agronomie? Il faudrait quand même...
M. SAINT-PIERRE: Le ministre de l'Education fait amende honorable, M. le
Président. Il s'agissait sûrement d'une erreur. Le nom n'a pas
changé.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauce.
Conférence des ministres des Finances
M. ROY (Beauce): M. le Président, nous remarquons cet
après-midi le retour du ministre des Finances de la conférence
fédérale-provinciale des ministres des Finances. Est-ce qu'on
pourrait demander au ministre s'il aurait quelque chose à dire en vue
d'informer les membres de cette Chambre sur certaines décisions qui
auraient pu être prises, sur certains sujets de discussion qu'il aurait
abordés dans l'intérêt du Québec au cours de cette
conférence?
M. GARNEAU: M. le Président, la réunion des ministres des
Finances tenue les lundi et mardi derniers était une réunion de
travail, comme les ministres des Finances ont l'habitude d'en tenir à
tous les trois ou quatre mois.
Ce que je puis dire comme résumé de la
conférence, c'est qu'il s'est manifesté de la part de
l'ensemble des ministres des dix provinces un consensus à l'effet que la
reprise économique devrait se manifester au Canada, d'une façon
certaine et positive, à partir du début du premier trimestre.
Chacune des provinces a fait connaître les programmes qu'elle avait mis
de l'avant pour assurer cette relance. Evidemment, du côté
fédéral, le budget de M. Benson était tout récent.
Il n'y avait donc rien de spécial de ce côté. Pour
résumer, disons que cette réunion de travail a abordé
également d'autres points comme le livre blanc sur la fiscalité
et qu'elle a fourni également l'occasion au ministre, M. Munro, de
donner quelques explications sur le livre blanc sur la sécurité
du revenu.
M. ROY (Beauce): M. le Président, j'aurais une question
supplémentaire. Comme il semble que l'assiette fiscale du gouvernement
fédéral soit nettement insuffisante pour subvenir aux besoins du
fédéral et des provinces, est-ce que l'on pourrait demander au
ministre des Finances s'il a été question également,
à l'occasion de cette conférence, d'utiliser la Banque du Canada
comme le gouvernement fédéral l'a fait au cours de la
dernière émission de $550 millions, à savoir que la Banque
du Canada en a acheté 50 p. c? Je voudrais savoir ceci: Est-ce que le
gouvernement du Québec, le ministre des Finances du gouvernement du
Québec a fait des représentations auprès du gouvernement
fédéral pour que cette possibilité puisse être
offerte aux provinces, et plus particulièrement à la province de
Québec?
M. GARNEAU: Ma réponse est non, M. le Président, mais je
pourrais peut-être souligner au député de Beauce que le
gouvernement central vient tout juste d'annoncer une formule de prêts aux
provinces dont le Québec bénéficiera largement.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Une question supplémentaire, M. le
Président.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Sainte-Marie.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Une question supplémentaire au
ministre des Finances. Pourquoi le Québec n'a-t-il pas, comme il en a
généralement l'habitude, publié de mémoire à
la conférence des ministres des Finances? L'Ontario l'a fait. Je
m'explique mal pourquoi le Québec ne l'a pas fait.
M. GARNEAU: M. le Président, il s'agissait d'une réunion
de travail. Le mémoire que l'Ontario a présenté concernait
le livre blanc sur la fiscalité. Le Québec avait fait
connaître son point de vue en déposant un mémoire à
ce sujet à la conférence de Winnipeg.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Montmagny sur une
question supplémentaire.
M. CLOUTIER (Montmagny): Une question supplémentaire, M. le
Président, sur les travaux de la conférence des ministres des
Finances. Je la poserai au premier ministre. Le premier ministre, selon le
rapport que lui a certainement fait son ministre des Finances, est-il toujours
d'avis que le livre blanc sur la sécurité sociale est un point de
départ aux négociations ou s'il lui apparaît,
d'après les déclarations qui ont été faites
à la conférence et les échanges, que les
négociations marqueront difficilement du progrès, et si on
s'oriente vers des difficultés particulières quant au
rapatriement de la sécurité sociale?
M. BOURASSA: La position du gouvernement n'a pas changé. Je l'ai
exprimée la semaine dernière. Le ministre des Finances l'a
exprimée à la conférence, à Ottawa. Nous examinons
cette formule. Nous considérons que c'est un point de départ de
négociations. Nous voyons quels avantages cela peut comporter pour le
Québec, quels avantages sur le plan financier, par exemple, peut
comporter pour le Québec le fait que ce soient les catégories
situées entre $10,000 et $20,000 qui défraient la principale
partie du coût des allocations familiales, quelle est leur proportion au
Québec, en Ontario, en Colombie-Britannique. Ce sont ces
différentes implications financières, implications
constitutionnelles, sociales que nous examinons. C'est pourquoi la position du
Québec est la même, c'est-à-dire que c'est un point de
départ de négociations et nous défendrons la meilleure
position possible.
M. CLOUTIER (Montmagny): Une question supplémentaire, M. le
Président. Disons que ce sont des réponses aux questions de
principe, mais comme mécanisme pratique, qu'est-il résulté
de l'échange des ministres des Finances, et particulièrement du
ministre de la Santé, M. Munro, avec le ministre des Finances du
Québec? Est-ce qu'on s'est entendu sur un mécanisme particulier
et pratique de négociation à propos du livre blanc de la
sécurité sociale?
M. BOURASSA: M. Castonguay est présentement à Ottawa pour
trois jours à une conférence fédérale-provinciale
des ministres de la Santé. Je suggérerais à l'ancien
ministre de la Santé de reposer sa question à son retour,
vendredi.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Jacques sur
une question supplémentaire.
M. CHARRON: M. le Président, le ministre des Finances pourrait-il
nous dire s'il est vrai que le ministre Benson a écarté de
façon définitive la possibilité de transformer en sub-
vention, le prêt de $68 millions qui a été
annoncé?
M. GARNEAU: Non, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget, sur une
question supplémentaire.
M. LAURIN: J'aurais une autre question à poser au ministre des
Finances. Est-ce qu'on a abordé la question du transfert partiel ou
total de certains champs d'imposition du gouvernement fédéral au
Québec? Le premier ministre a dit, déjà, que
c'était une question vitale pour le Québec. Deuxième
question: Est-ce que vous avez fait connaître au gouvernement d'Ottawa le
point de vue du Québec sur l'exemption de l'impôt de base? Le
premier ministre nous avait dit qu'un groupe de travail ferait rapport, avant
la fin de l'été, à ce sujet.
Il y a deux sujets: transfert total ou partiel de champs d'imposition
et, deuxièmement, le problème de l'exemption de l'impôt de
base.
M. GARNEAU: Quant à la première question, je
répondrai au député de Bourget que ce n'était pas
à l'ordre du jour de nos réunions de travail. Dans le
deuxième cas, je voudrais essayer de mieux saisir la question. Vous
parlez de transformer les exemptions par des crédits d'impôts.
Est-ce votre question?
M. LAURIN: Oui. Le premier ministre avait promis la constitution d'un
groupe de travail sur le problème de l'exemption de l'impôt de
base. Je voulais savoir si vous aviez soulevé le problème et si
le groupe de travail avait été constitué.
M. GARNEAU: La question n'a pas été abordée comme
telle à la conférence, puisque nous avions fait connaître
notre point de vue à Winnipeg. Ce qui nous a encouragé, c'est que
le gouvernement de l'Ontario a présenté, dans le mémoire
qu'il a déposé, une formule qui s'apparente de très
près aux propositions de la commission Bélanger et à ce
que le premier ministre, qui était ministre des Finances à
l'époque, avait proposé à Winnipeg. D'un autre
côté, évidemment, les études se poursuivent.
M. LAURIN : Et votre groupe de travail?
M. BOURASSA: Le ministre vient de répondre. Je suppose que le
député de Bourget réfère aux crédits
d'impôts plutôt qu'aux exemptions.
M. LAURIN: Oui, bien sûr, mais vous aviez...
M. BOURASSA: S'il était plus précis dans ses questions,
nous pourrions être plus précis dans nos réponses.
M. LAURIN: Je voulais simplement savoir si vous aviez constitué
le groupe de travail, comme vous aviez promis de le faire.
M. BOURASSA: Oui. M. Marcel Bélanger, conseiller fiscal du
gouvernement, comme des anciens gouvernements, étudie la façon
d'appliquer cette nouvelle formule que nous avions proposée à la
commission Bélanger, indépendamment de ce que le
fédéral va décider.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Gouin.
Marché des valeurs
M. JORON: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des
Finances. Avec votre permission, pour mieux formuler ma question, je voudrais
rappeler quelques faits très brièvement. Le ministre est
sûrement convaincu de l'importance du pouvoir d'emprunt d'un Etat pour le
développement de son économie. Il est essentiel que le
Québec, s'il veut développer son économie, ait
accès au marché à long terme. Si vous me le permettez, M.
le Président, traditionnellement, on avait assisté à un
partage des champs d'emprunt entre le fédéral et le provincial;
le fédéral se réservant le marché à court
terme et le Québec, plus particulièrement, le marché
à long terme. Depuis le dernier budget Benson, il semble qu'il y ait
renversement de la situation.
Le fédéral emprunterait lui-même à long terme
pour prêter ensuite, à long terme également, aux provinces.
C'est le cas du fonds de $150 millions. Ma question est la suivante: Le
ministre a-t-il protesté ou entend-il le faire contre le fait que le
gouvernement fédéral semble vouloir s'engager sur le
marché des emprunts à long terme, limitant ainsi l'accès
du Québec à ce marché, et orienter largement le
développement du Québec par des prêts conditionnels?
M. GARNEAU: M. le Président, j'avais soulevé ce
problème lors de ma rencontre avec M. Benson, il y a une semaine, et
j'en ai discuté de nouveau avec lui au cours des deux derniers jours. Je
peux assurer le député de Gouin que le Québec n'a pas du
tout à s'inquiéter sur ce plan en ce qui concerne notre
possibilité d'emprunts à long terme sur les marchés.
M. JORON: Une question supplémentaire, si vous le permettez, M.
le Président. Je veux bien ne pas m'inquiéter, mais je vous ai
demandé si vous aviez protesté, si vous aviez l'intention de le
faire ou si vous aviez l'intention de négocier à ce sujet.
M. GARNEAU: Je ne vois pas, M. le Président, pourquoi il faut
absolument protester. S'il
y a entente, je ne vois pas pourquoi il faudrait discuter longuement et
faire des batailles inutiles. Nous croyons qu'il est beaucoup plus facile de
discuter calmement et lorsqu'il y a entente de ne pas faire inutilement des
déclarations fracassantes.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.
Projets annoncés
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, ma question s'adresse
au premier ministre. Compte tenu des déclarations que nous avons
entendues ce matin de la part des représentants de l'Hydro-Québec
qui nous ont indiqué que le projet de la baie James ne pourrait pas se
réaliser avant 1973 ni celui de Shawinigan avant 1978 et étant
donné l'inexistence du projet de la Péribonka, le premier
ministre pourrait-il nous dire de quelle façon il entend resouffler les
ballons qu'avaient lancés ses ministres en parlant de la création
de nouveaux emplois car le truchement de la Commission hydro-électrique
du Québec?
M. BOURASSA: M. le Président, je m'étonne de la question
du député. Il était pourtant présent ce matin. Il
était présent quand les réponses ont été
données par l'Hydro-Québec qu'étant donné les
problèmes considérables de pollution avec les centrales
thermiques, qu'étant donné le coût très
élevé de l'énergie nucléaire, plus ou moins
inévitablement on devrait considérer l'aménagement des
forces hydrauliques pour produire de l'énergie électrique au
Québec. Alors, que lui faut-il de plus? Est-il malheureux des
réponses qui ont été données et qui confirment ce
qu'avait dit le gouvernement depuis plusieurs mois?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Question additionnelle, M. le
Président. Le premier ministre admet-il que le ministre de l'Education,
en annonçant le projet de la baie James, a commis une erreur, que le
député du Lac Saint-Jean, en annonçant le projet de la
Péribonka, a dit une chose inexacte?
Est-ce qu'il admet que le représentant de l'Hydro-Québec a
déclaré ce matin qu'il n'était pas question
d'aménagement hydro-électrique dans la région de
Péribonka? Ce qui prouve, de toute évidence, que ce qu'avaient
déclaré le premier ministre et ses ministres, et ce que vient
encore de déclarer le premier ministre, ce ne sont que des mots pour
donner le change à la population...
UNE VOIX: Règlement!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... qui attend toujours les 100,000 nouveaux
emplois.
M. LEVESQUE: Règlement!
M. BOURASSA: M. le Président, le ministre de l'Education parlait
non pas du projet lui-même mais d'une hypothèse de financement
à même les caisses populaires.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre de l'Education, si le premier
ministre me le permet, avait dit...
M. BOURASSA: Règlement!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... qu'incessamment on mettrait en
chantier...
DES VOIX: Règlement!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... le projet de la baie James.
M. BOURASSA: Le ministre de l'Education...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Or, on nous a dit ce matin qu'il n'en
était pas question...
M. LEVESQUE: Règlement, M. le Président!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... avant 1973 ou même 1975.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BOURASSA: M. le Président, il n'y a rien de nouveau
là-dedans. On a toujours dit, et plusieurs fois, que nous attendions, ce
n'est pas nouveau, en 1971, un rapport de rentabilité. Nous avons eu, ce
matin, des éclaircissements additionnels qui, à mon sens, ont
démontré que, pour faire face au déficit de
puissance...
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Ont démontré que vous aviez
lancé trois ballons et que ces ballons...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! DES VOIX: Règlement!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... et que ces ballons ont été
crevés. C'est cela.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je ne peux pas permettre cet échange,
vous le comprenez. Les questions ont été posées et le
premier ministre a le droit de répondre...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est parce que le ballon me revient, je le
lui retourne et je le dégonfle.
M. BOURASSA: M. le Président...
M. PINARD : Vous jouez tout seul avec votre ballon.
M. BOURASSA: Je comprends que c'est difficile, pour le
député de Chicoutimi, de s'y comprendre dans quelques
chiffres.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je pose la question de
privilège. Je connais très bien les problèmes de
l'Hydro-Québec, ayant été mêlé à
l'administration du gouvernement. Je tiens à préciser ceci: ce
matin, les questions qu'a posées le premier ministre ont
démontré, de façon péremptoire, qu'il ne savait
rien de la question de l'Hydro-Québec, pas plus que son ministre des
Richesses naturelles.
M. BOURASSA: M. le Président, c'est une question d'opinion.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela a été un constat
d'ignorance et d'incompétence.
M. BOURASSA: Ah! M. le Président, si le député de
Chicoutimi veut parler d'ignorance et d'incompétence, il est bien
placé pour en parler, avec ce qu'il a fait comme ministre.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Certainement, parce que j'ai constaté
la vôtre.
M. BOURASSA: II y a une question, posée par le
député de Saguenay, qui a révélé le
déficit considérable de puissance de l'Hydro-Québec.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): D'accord.
M. BOURASSA: Bon, alors ce déficit de puissance, il faut y faire
face. On a démontré que l'énergie nucléaire, du
moins jusqu'en 1980, n'était pas la façon, que les certrales
thermiques je suis obligé de me répéter, M. le
Président n'étaient pas non plus la façon
préférable, étant donné les coûts
d'établissement qui augmentaient de façon continuelle et les
frais d'exploitation très élevés. Il restait donc le
développement du pouvoir électrique du Québec.
Cela veut dire que la baie James j'étais absent dans le cas
de la région du Lac-Saint-Jean fait partie des
possibilités au Québec de faire face à ce déficit
de puissance.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pas au Lac-Saint-Jean.
M. BOURASSA: Le député de Chicoutimi a-t-il des
alternatives pour faire face au déficit de puissance par rapport
à la question électrique?
Est-ce qu'il peut en souligner? Est-ce qu'il en a proposé?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'ai une question
à poser au premier ministre. D'abord, je dois lui faire observer qu'on
ne dit pas des alternatives, parce que ça devient une progression
géométrique; on dit une alternative. Le premier ministre me pose
la question: Est-ce qu'il y a des alternatives? Est-ce que le premier ministre
est prêt à envisager, avec l'Hydro-Québec, la
possibilité de l'aménagement de la Péribonka afin d'aider
les chômeurs de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean? Il sait
où c'est. Nous avons eu des...
M. DEMERS: Saint-Maurice.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...réponses négatives. Projet de
la baie James, projet du Haut Saint-Maurice, projet de la Péribonka:
c'est toujours non, non et non, contrairement aux affirmations des
députés..,
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...du ministre de l'Education, du
député du Lac-Saint-Jean.
M. BOURASSA: C'est faux! M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BOURASSA: M. le Président, ce sont des ballons, le
député ment effrontément à la Chambre. Les
réponses ont été données ce matin.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'invoque le règlement, M. le
Président. Que le premier ministre relise les débats de la
commission parlementaire et il se rendra compte que les réponses qu'a
données M. Giroux, ce matin, sont conformes à ce que je viens de
dire, et je demande, M. le Président...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je vais permettre...
M. TREMBLAY (Chicoutimi):... je vous demande de prier le premier
ministre de retirer ses paroles...
M. LE PRESIDENT: Est-ce que vous avez une question?
M. TREMBLAY (Chicoutimi);... quand il a dit que je mentais à la
Chambre.
M. LE PRESIDENT: Vous avez le droit de poser la question de
privilège et de rétablir les faits.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je l'ai posée. Alors, M. le
Président, je pose la question de privilège et je vous prie de
prier, de supplier le premier ministre de retirer ses paroles.
M. BOURASSA: M. le Président, est-ce que le règlement
m'oblige à retirer mes paroles? Je veux respecter le règlement.
D'accord, je retire mes paroles, mais le fait demeure.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Très bien.
M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Sauveur.
L'honorable ministre de l'Education sur une question de
privilège.
M. BOIS: M. le Président, ma question s'adresse à
l'honorable...
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, sur une question de
privilège, je pense que le député de Chicoutimi erre dans
le mauvais chemin. Je lui demanderais de rétracter ses paroles. A aucun
moment ai-je déclaré, devant cette réunion des
étudiants, que le gouvernement songeait à implanter le projet de
la baie James. J'ai discuté avec les étudiants de la
possibilité d'un exemple que pourra fournir une coopérative de
production, et j'ai esquissé des possibilités, mais à
aucun moment ai-je mentionné moi-même le projet de la Baie James
et je mentionnais un projet d'aménagement de chutes
hydro-électriques. Je n'ai jamais déclaré cela. L'article
qui a paru dans la Presse était le fruit de l'imagination du politicien.
Le député de Chicoutimi m'impute une nouvelle que j'aurais
répandue, que lui-même sait pertinemment que je n'ai pas
demandée, et je lui demanderais de retirer ses paroles en ce qui
concerne cette déclaration que j'aurais faite.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je crois que le ministre de l'Education
était tout à fait en droit de poser cette question de
privilège. Il a rétabli les faits et on doit accepter sa
déclaration, sans débat.
L'honorable député du Lac-Saint-Jean.
M. PILOTE: Une question de privilège, M. le Président. Je
voudrais rappeler au député de Chicoutimi que je n'ai jamais fait
de déclaration concernant les projets de barrages sur la
Péri-bonka. Cela a été annoncé par le maire de
Notre-Dame-du-Rosaire, et on m'a impliqué là-dedans.
Or, personnellement, je n'ai jamais fait de déclaration aux
journalistes dans ce sens-là.
DES VOIX: Ah!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Le député du Lac-Saint-Jean a
rétabli les faits et on doit prendre sa parole.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'invoque le
règlement.
UNE VOIX: Quel article du règlement?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je pose, à mon tour, la question de
privilège. J'ai pris la parole du député du
Lac-Saint-Jean. Il reste qu'un rapport de presse indique que le
député du Lac-Saint-Jean a fait une telle déclaration.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je prends donc sa parole. Il faut en
conclure...
DES VOIX: A l'ordre!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... encore une fois, qu'un
député a été mal cité...
DES VOIX: A l'ordre!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... et que les journalistes sont encore dans
l'erreur.
M. LE PRESIDENT: Je rappelle à l'ordre le député de
Chicoutimi.
M. AUDET: Question supplémentaire, M. le Président.
Exploitation forestière à la baie
James
M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Abitibi-Ouest.
M. AUDET: Vu qu'il a été déterminé que
l'étude de l'Hydro ne sera terminée que dans deux ou trois ans,
est-ce qu'on pourrait demander au gouvernement s'il a l'intention de faire de
l'exploitation forestière plus tôt?
M. BOURASSA: L'an dernier, lorsque j'avais abordé le sujet alors
que l'Union Nationale était au pouvoir, on avait dit qu'il fallait, pour
faire face au déficit de puissance, avoir la possibilité
d'obtenir cette électricité en 1982. Comme cela prenait une
dizaine d'années pour la construction et pour compléter le
projet, il fallait se décider, au plus tard, en 1971, de manière
à commencer le projet en 1972 ou, au plus tard, en 1973. Ce qui a
été dit ce matin confirmait exactement ce que M. Giroux et M.
Dozois nous ont dit l'an dernier.
Alors, quelle est la question du député?
M. AUDET: Ma question est la suivante: Vu que l'Hydro ne sera
prête qu'en 1973 ou en
1974, est-ce que vous prévoyez exploiter ces forêts avant
1972 ou 1973? Les épinettes.
M. BOURASSA: Si c'est rentable.
M. PAUL: Question supplémentaire, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Maskinongé.
M. PAUL: Sur le même sujet, est-ce que j'aurais le
privilège de poser une question à l'honorable ministre des
Richesses naturelles? Je voudrais qu'il nous fasse rapport sur le comité
chargé d'étudier l'investissement de certaines sommes à la
baie James, sujet dont il nous a laborieusement entretenu à l'occasion
de l'étude des crédits de son ministère.
M. MASSE (Arthabaska): M. le Président, quand le
député mentionne que je l'ai laborieusement entretenu sur les
études de la baie James, je dois dire qu'à ce moment-là je
n 'avais rien dit.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): On le savait. On voulait en avoir la
preuve.
M. MASSE (Arthabaska): A ce moment-là, le comité avait
tenu une première rencontre. Depuis, le comité a tenu six ou sept
rencontres avec les représentants des ministères qui le
composent.
Ce matin, on a mentionné que les études effectuées
par l'Hydro-Québec ne lui permettront probablement pas de prendre une
décision avant l'été ou l'automne 1971. Le comité
interministériel de la baie James effectue actuellement certains travaux
pour tenter, en supposant que le projet de l'Hydro-Québec se
réalise, de coordonner l'action des différents
ministères.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Sauveur.
Fermeture de bureaux de main-d'oeuvre
M. BOIS: M. le Président, ma question s'adresse à
l'honorable ministre du Travail. En son absence, je l'adresserai donc à
l'honorable premier ministre. Est-ce que l'on pourrait informer cette Chambre
si c'est dû au fait d'une économie ou encore parce qu'il n'y a
plus d'emplois de disponibles qu'on entend fermer les deux bureaux de la
main-d'oeuvre dont un est situé à Saint-Raymond, comté de
Portneuf, et l'autre à Limoilou, Québec?
M. FOURNIER: Pour le ministre du Travail, je prends avis de la question.
Il répondra en temps opportun.
M. BOIS: Merci.
Cadillac Moly Mines
M. FOURNIER: En même temps, j'ai des informations à fournir
à la Chambre relativement à Cadillac Moly Mines, au sujet d'une
question posée par l'honorable député de Bourget. Le
comité de reclassement ou de recyclage a trouvé des emplois dans
133 des 183 cas, de sorte qu'il reste 50 cas d'employés à
régler. Relativement aux infractions à la Loi de la formation et
de la classification de la main-d'oeuvre, des plaintes ont été
portées par le ministère à la suite de démarches de
la Commission des accidents du Travail.
Relativement aux réclamations, une réclamation a
été faite pour une somme de $34,958 en congés dus aux
employés.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Lafontaine.
Satellite Memini
M. LEGER: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des
Communications. On sait qu'il doit rencontrer, ce soir, le ministre Kierans, du
fédéral. Peut-il nous dire à la suite de quel rapport ou
de quelle étude le gouvernement du Québec a décidé
de diminuer sa participation au projet du satellite Memini?
M. L'ALLIER: M. le Président, d'abord je ne dois pas rencontrer
M. Kierans ce soir, c'est demain matin. Et je voudrais entendre la question de
nouveau pour la deuxième partie.
M. LEGER: A la suite de quel rapport ou de quelle étude le
gouvernement du Québec a-t-il décidé de diminuer sa
participation au premier satellite Memini avec la France?
M. BOURASSA: Où est-ce que le député a pris son
information?
M. LEGER: Cela a été écrit dans tous les journaux
la semaine dernière.
UNE VOIX: Certainement pas en Chambre. M. BOURASSA: Cela a
été démenti.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.
M. LEGER: Question supplémentaire, M. le Président. Est-ce
que le ministre des Communications...
M. BOURASSA: La nouvelle a été démentie, le
lendemain.
Satellite Symphonie
M. LEGER: Question supplémentaire, M. le Président. Est-ce
que le ministre peut nous dire
si le Québec a toujours l'intention de construire les
équipements terrestres nécessaires pour pouvoir utiliser le
satellite franco-allemand Symphonie?
M. L'ALLIER: M. le Président, c'est une question qui est assez
compliquée. D'abord, il faudrait savoir quels sont les
équipements terrestres nécessaires pour utiliser un satellite. La
question du satellite a été évoquée lors de la
dernière commission permanente de coopération
franco-québécoise. Le ministère des Communications et le
gouvernement feront connaf-tre, en temps utile, quel est le détail de
leur politique globale en matière de communication et
d'équipements de communication.
M. CARDINAL: Question supplémentaire, M. le Président. Je
regrette. Un dossier était déjà constitué depuis
1967 sur le satellite Symphonie et sur son déplacement dans l'espace.
Les études avaient été faites dès ce
moment-là pour les installations terrestres. Est-ce que le ministre est
au courant que déjà, à ce moment-là, des
études avaient été faites et qu'elles se sont poursuivies
jusqu'en janvier 1969, date à laquelle il y a eu un dernier rapport de
produit au gouvernement du temps?
M. L'ALLIER: M. le Président, cette question n'est pas urgente.
Je vais quand même y répondre. Je suis parfaitement au courant de
l'existence du dossier sur les satellites. Je l'ai d'ailleurs dans mon bureau.
C'est un dossier qui représente plusieurs milliers de pages.
On vient d'en terminer la collation je ne sais pas si c'est le
mot exact et c'est à partir de ces dossiers
précisément, mais dans une optique globale de communication, que
nous l'étudions.
M. CARDINAL: Une question supplémentaire, M. le Président.
Est-ce que le ministre veut nous dire, comme le premier ministre nous l'a
déjà mentionné, qu'il est rendu à la page sept du
rapport qui en a environ mille? On pourra chaque semaine lui demander à
quelle page il est rendu.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.
M. SAMSON: M. le Président, c'est une question
supplémentaire à la suite de la réponse qui nous a
été apportée tantôt par l'honorable
député qui représente le ministre du Travail. Concernant
la Cadillac Moly Mines, on nous fait rapport dans votre réponse
qu'environ 133 personnes ont déjà retrouvé des emplois
grâce à votre ministère.
M. FOURNIER: Merci.
M. SAMSON: Avant de dire merci, attendez que je finisse la question.
Vous ne me direz peut-être pas merci tantôt.
Ce qui se produit, c'est que je me rappelle que l'été
dernier, on nous a fait rapport l'été dernier après
la fermeture de la mine qu'une centaine de personnes avaient
déjà été recyclées. La question est la
suivante, M. le Président: Ces 133 personnes ont-elles retrouvé
de l'emploi dans la région du Nord-Ouest québécois ou si
elles ont dû se rendre au Nouveau-Brunswick, par exemple, comme je sais
pertinemment que cela leur a été offert par les fonctionnaires du
ministère? Si tel est le cas, si elles ont dû sortir de la
région, est-ce qu'il y aura des indemnités de compensation de
prévues pour ces gens?
Je précise pourquoi la question m'apparaît importante.
C'est que plusieurs de ces mineurs possèdent déjà des
foyers dans cette région immédiate et s'ils doivent aller
à l'extérieur, évidemment, cela pose un problème.
Qu'a prévu le ministère pour cela? Voulez-vous prendre avis de la
question pour demain ou...?
M. FOURNIER: M. le Président, il s'agit nécessairement de
personnes qui sont engagées dans une mine. Si les mines sont
fermées dans ce coin, il faut nécessairement que les gens aillent
travailler ailleurs s'il s'agit de personnes qualifiées dans ce
domaine.
Le député a-t-il des cas particuliers sur lesquels il veut
des renseignements? Les renseignements que je puis lui fournir aujourd'hui sont
à l'effet que sur les 183 personnes, le comité de recyclage a
fait du bon travail en retrouvant de l'emploi pour 133 d'entre elles,
peut-être sur les lieux ou peut-être dans d'autres endroits, qu'il
reste encore 50 cas à régler et que le comité continue son
travail de façon à éviter des difficultés aux
familles concernées.
M. SAMSON: Une question supplémentaire, M. le Président,
puisque le député semble dans de bonnes dispositions. Plusieurs
plaintes nous parviennent de ces employés à l'effet que des
sommes leur sont encore dues par la mine même qui, en l'occurrence, a
été liquidée par une compagnie qui s'appele Guaranty
Trust. Cette compagnie, apparemment, trame la patte. Elle ne voudrait pas payer
présentement. Est-ce que le ministère prévoit pouvoir
venir en aide à ces employés afin que ce qui leur est dû
leur soit payé?
M. FOURNIER: Relativement aux sommes dues, il restait apparemment,
suivant le syndicat, une somme d'environ $61,000. Sur cette somme, $34,958 sont
le sujet d'une réclamation. Il s'agit de congés dus en vertu de
l'ordonnance numéro 3. Quant au reste, l'on étudie
présentement la réclamation au montant de $27,000. Relativement
au syndic ou aux administrateurs et à la façon dont ils
administrent les choses, je n'ai aucun renseignement aujourd'hui.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il s'agit d'une question
supplémentaire? La période des questions est
épuisée. Cela ira à demain.
Affaires du jour.
Un instant, s'il vous plaît. L'honorable ministre des Affaires
municipales m'a donné préavis d'une question de
privilège.
M. BERTRAND: Encore! DES VOIX: Encore mal interprété. M.
CHARRON: Encore mal cité.
Question de privilège Article du Soleil
M. TESSIER: M. le Président, je désire soulever une
question de privilège au sujet d'un article paru dans le journal Le
Soleil d'aujourd'hui, et mettant en cause le premier ministre et
moi-même.
M. BERTRAND: Ah! vous changez d'évê-que!
M. TESSIER: Sous le titre "Bourassa dément son ministre des
Affaires municipales".
M. BERTRAND: Très très bien. M. DEMERS: Bourassa se
réveille.
M. BOURASSA: Si vous aviez eu des ministres comme ça, vous seriez
encore au pouvoir.
M. DEMERS: Ou bien on l'aurait perdu sans s'en apercevoir.
M. TESSIER: ... on dit:"Tessier avait sous les yeux un texte
écrit, le 30 novembre ". L'article dit, entre autres:"C'est ce que
démontrent les propos tenus par le premier ministre Bourassa, hier,
à l'Assemblée nationale, à la suite de discussions entre
M. Tessier et M. Jean-Noël Tremblay, député de Chicoutimi.
Le leader parlementaire de l'Union Nationale, Me Rémi Paul, avait
demandé à M. Maurice Tessier une copie de son discours pour
consultation. Le ministre avait alors répondu qu'il avait parlé
sans texte à cette occasion et qu'il ne pouvait donc déposer son
discours pour renseigner les députés".
M. BERTRAND: C'est ça.
M. TESSIER: "M. Jean-Noël Tremblay lui a demandé le
même service hier. C'est alors que le premier ministre, Robert Bourassa,
s'est levé et a déclaré qu'il pourrait envoyer une copie
de ce texte au député de Chicoutimi. M. Bourassa montrait alors,
dans ses mains, une copie de ce fameux texte".
M. TREMBLAY (Chicoutimi): On ne l'a pas vu. On ne l'a pas eu.
M. TESSIER: Or, voici quels sont les faits. Il faut, tout de même,
que mes collègues de cette Chambre soient bien renseignés, qu'ils
ne soient pas laissés avec de fausses impressions.
M. BERTRAND: Franchement, on y renonce.
M. TESSIER: II ne faudrait pas, non plus, que, dans tout cela, je passe
pour un menteur.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est déjà acquis.
M. TESSIER: Alors, voici exactement les faits. Je déclare, comme
j'ai eu l'occasion de le faire il y a quelques jours en cette Chambre, que,
lors de la conférence en question, le lundi 30 novembre, je n'avais
aucun texte lorsque j'ai prononcé cette causerie.
UNE VOIX: Par coeur.
M. TESSIER: Voilà l'explication.
M. CROISETIERE: C'était du par coeur.
M. TESSIER: Toutefois, il y avait au moins trois enregistreuses dans la
salle où j'ai prononcé ma causerie. De plus, le poste CJBR de
Rimouski...
M. PAUL: Pas d'annonce...
M. TESSIER: ... a enregistré la conférence au complet et
l'a radiodiffusée, le lendemain soir, durant une heure.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ils n'avaient rien d'autre à
diffuser.
M. DEMERS: Est-ce que les enfants ont bien dormi dans la
région?
M. TESSIER: C'est signe, tout de même, que ma causerie, je crois,
avait un certain intérêt pour la population du territoire.
J'ajouterai, évidemment, que cette radiodiffusion pendant une heure n'a
pas coûté un sou. Cela a été fait par le poste.
DES VOIX: Ah! Ah!
M. DEMERS: A la radio, c'est meilleur qu'à la
télévision. On ne vous voit pas.
M. TESSIER : Ce qui est arrivé, c'est que l'enregistrement de ma
conférence a été tran crit sur papier, le lendemain ou le
surlendemai;
M. TREMBLAY (Chicoutimi): La transcri] tion était mauvaise.
M. TESSIER: C'est ce texte qu'avait en main le premier ministre, hier ou
avant hier, lorsqu'il a fait cette déclaration et qu'il a offert au
député de Chicoutimi de lui remettre le texte. C'est la
transcription de l'enregistrement de la causerie que j'ai prononcée sans
texte, le lundi 30 novembre 1970.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je pose la question de
privilège.
M. LE PRESIDENT: Exposez votre question de privilège.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): On m'a promis un texte, mais le premier
ministre ne l'a pas encore déposé; j'aimerais avoir la bobine
dont a parlé le député de Rimouski, afin de faire la
collation des textes et voir si le ministre a été bien
radiodiffusé.
M. TESSIER: M. le Président, je ne l'ai pas, il faudrait que le
député de Chicoutimi prenne les moyens de se la procurer
lui-même. Quant à moi, je n 'ai aucune objection.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Très bien. M. LE PRESIDENT: A
l'ordre.
M. DEMERS: C'est au musée de Rimouski, dans les documents
historiques.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je vais mettre ça dans ma section
"Humour".
Vacance du siège de Chambly
M. LE PRESIDENT: J'ai l'honneur d'informer la Chambre que j'ai
reçu la notification suivante: "Québec, le 9 décembre
1970.
M. Jean-Noël Lavoie, Président de l'Assemblée
nationale du Québec, Hôtel du Gouvernement, Québec. "M. le
Président, Nous soussignés, Guy Leduc, membre de
l'Assemblée nationale du Québec pour le district de Taillon, et
Marcel Ostiguy, membre de l'Assemblée nationale du Québec pour le
district de Rouville, vous notifions officiellement par les présentes
que le siège du député du district électoral de
Chambly à l'Assemblée nationale du Québec est devenu
vacant par suite du décès de l'honorable Pierre Laporte. "Le
présent avis vous est adressé conformément à
l'article 39 du chapitre 6 des Statuts refondus, 1964. Nous vous prions de bien
vouloir agir en conséquence.
Signé: Guy Leduc, Marcel Ostiguy."
J'ai aussi l'honneur d'informer la Chambre qu'aujourd'hui même
j'ai adressé au président général des
élections un mandat lui enjoignant d'émettre un nouveau bref
portant convocation du collège électoral de Chambly pour
l'élection d'un député en remplacement de l'honorable
Pierre Laporte, décédé.
M. PAUL: M. le Président, nous vous remercions de l'excellente
nouvelle que vous venez de nous communiquer. Ce qui nous frappe le plus dans
cette nouvelle M. le président, c'est l'intérêt
qu'apportent les députés à faire bouger le gouvernement,
qui aurait dû vous donner bien avant aujourd'hui l'avis que vous venez de
nous communiquer.
Questions inscrites au feuilleton
M. LE PRESIDENT: Affaires du jour.
M. LEVESQUE: M. le Président, en réponse à
certaines questions.
Article numéro 6, question de M. Drolet, réponse de M.
L'Allier.
M. L'ALLIER: Lu et répondu.
M. LEVESQUE: Article numéro 8, question de M. Béland,
réponse de M. Drummond.
M. DRUMMOND: Lu et répondu.
M. LEVESQUE : Arrivant aux bills et ordres inscrits au nom du
gouvernement, j'ai l'intention d'appeler l'article 26, mais avant de ce faire
on me permettra d'essayer de diminuer le volume du feuilleton, en appelant les
articles 39 et 40.
Article 39, ordre de la Chambre, à la suite d'une motion de M.
Burns. Réponse de M. Choquette.
M. CHOQUETTE: Documents déposés.
M. LEVESQUE: Article 40, ordre de la Chambre, à la suite d'une
motion de M. Burns. Réponse de M. Choquette. Article 48, ordre de la
Chambre, à la suite d'une motion de M. Vincent. Réponse de M.
Toupin.
M. TOUPIN: Documents déposés. M. LEVESQUE: Article 26.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Finances propose...
Rapport du ministre de la Justice sur la
libération de M. James Cross
M. BOURASSA: M. le Président, je crois que le ministre de la
Justice avait dit, hier, qu'il répondrait aux questions des
députés, avec le consentement unanime de la Chambre.
M. BURNS: On espérait, en tout cas, que cela se fasse.
M. BOURASSA: Avec le consentement unanime, si on pouvait permettre au
ministre...
M. LE PRESIDENT: On peut revenir aux déclarations
ministérielles.
M. BOURASSA: Je crois que oui, si la Chambre n'a pas d'objection.
M. LE PRESIDENT: Y a-t-il consentement unanime?
UNE VOIX: Unanime.
M. BOURASSA: Le ministre de la Justice, dans quelques minutes, va
relater les faits, mais il ne répétera pas ce qui est
déjà connu. La Chambre admettra qu'il ne peut pas
répéter tout ce qui a été dit depuis trois jours.
Il sera disponible pour répondre aux questions de la Chambre.
M. Jérôme Choquette
M. CHOQUETTE: M. le Président, j'ai fort peu de choses originales
à dire à la Chambre. Les faits sont connus en grande partie et je
ne voudrais pas, en somme, faire une déclaration qui serait fastidieuse
pour les honorables députés. Les faits n'offrent pas de
complications particulières. Il est difficile pour moi de
départager ce qui a déjà été dit et ce qui
est connu du public sur les événements qui ont eu lieu le 2 et le
3 décembre des faits qui pourraient présenter un
intérêt par leur nouveauté. Il va de soi que ma
déclaration n'offrira pas un caractère particulièrement
original.
Donc, si on me permet de faire ce bref exposé des circonstances
qui ont entouré la libération de M. Cross, je dirai qu'environ
dix jours avant le mercredi 2 décembre les corps policiers, la
Sûreté du Québec, la police de Montréal et la
Gendarmerie royale, agissant conjointement, avaient noté des
activités inusitées à la maison portant l'adresse 10945
rue des Récollets à Montréal-Nord. Des observations ont
été faites au cours de ces dix jours pour déterminer qui
étaient les occupants de cette maison et pour savoir surtout si M. Cross
y était détenu.
Le mercredi 2 décembre, à un moment donné, on a
effectué l'arrestation d'un M. Jacques Cossette-Trudel et de son
épouse que l'on avait suivis à partir de l'adresse que je viens
de mentionner. Après interrogatoire de ces personnes, il devint
évident que M. Cross était bien détenu à cet
endroit. Dans la nuit du mercredi 2 décembre au jeudi 3 décembre,
on coupa le courant électrique de l'immeuble, de façon à
indiquer aux occupants que quelque chose d'inusité se produisait aux
alentours et, en somme, qu'ils étaient cernés. Cette
stratégie avait été établie préalablement
par des discussions au niveau des corps policiers, ainsi qu'avec moi-même
et d'autres personnes. Il s'agissait de procéder à la
libération de M. Cross sans mettre sa vie en danger.
Par conséquent, la stratégie qui avait été
arrêtée consistait à cerner l'endroit, à indiquer la
présence des policiers aux ravisseurs et à les mettre dans une
situation où ils devraient négocier avec nous, suivant les
conditions que j'avais déjà exposées en date du 10
octobre. Le stratégie réussit et les ravisseurs, se voyant
entourés de la sorte, émirent un message qu'ils laissèrent
tomber d'une fenêtre.
Le message, qui était dans un tuyau, indiquait leur disposition
à négocier.
Le gouvernement avait antérieurement retenu les services de Me
Robert Demers, pour agir en son nom auprès de ce groupe, de cette
cellule. Me Robert Demers qui était alors à Ottawa fut
rappelé immédiatement et se mit en communication avec le
procureur qui avait été désigné par les membres de
la cellule du FLQ comme celui qui pouvait les représenter à
l'occasion de cette négociation qu'ils étaient prêts
à aborder.
Par conséquent, dans la matinée du jeudi, 3
décembre, Me Demers et Me Bernard Mergler se rencontrèrent, et
après des discussions, qui eurent lieu au quartier général
de la section antiterroriste, c'est-à-dire du groupe et de cette
formation tripartite de policiers, ils en arrivèrent à certaines
conditions qui étaient conformes à notre position. Ils se
dirigèrent alors vers Montréal-Nord, à l'adresse que j'ai
mentionnée précédemment: 10,945 des Récollets, et
là, Me Mergler, qui agissait en somme comme mandataire pour la cellule,
pénétra dans la maison et eut des pourparlers avec les
occupants.
Et c'est à ce moment que ceux-ci acquiescèrent à
des termes en vertu desquels ils quitteraient le Québec et le Canada
pour Cuba. Alors, ils montèrent dans une automobile Chrysler 1962, qui
était dans un garage attenant à cette maison et qui était
enregistrée au nom d'un nommé Pierre Séguin. Les occupants
de la voiture en question étaient Pierre Séguin, Marc Carbonneau,
Jacques Lanctôt, ainsi que Me Mergler et M. Cross, qui était assis
entre deux des ravisseurs sur la banquette arrière. Ils se
dirigèrent ainsi vers Terre des Hommes qui avait été
déclarée territoire cubain pour les fins de la négociation
possible et prévue antérieurement.
Et c'est à ce moment que l'on amena, au cours de
l'après-midi du 3 décembre, les autres personnes qui faisaient
partie du groupe de la cellule ou parents des personnes qui avaient
été englobées dans la négociation et qui devaient
quitter le Canada pour Cuba. Il s'agissait, en l'occurence,
précisément de Jacques Cossette-Trudel et de son épouse,
née Louise Lanctôt, (celle-ci est la soeur de Jacques
Lanctôt) également de madame Jacques Lanctôt et de leur
enfant de dix-huit mois qui furent amenés à Terre des
Hommes, au pavillon du Canada qui était devenu pavillon de Cuba à
ce moment.
Par conséquent, vers 6h45, après identification des
personnes, l'échange prévu eut lieu, et les ravisseurs, au nombre
de sept, furent mis dans une automobile et amenés auprès d'un
hélicoptère qui les transporta à l'aéroport de
Dorval où les attendait un avion des forces armées du Canada qui
les conduisit à Cuba. M. Cross, suivant la négociation, devait
rester entre les mains des autorités cubaines jusqu'à ce que
l'avion des forces armées se dépose à l'aéroport de
la Havane, ce qui fut fait. Aussitôt après qu'un avis fut
donné à cet effet, M. Cross fut transporté à
l'hôpital Jewish General de Montréal pour vérifier son
état de santé. Ce sont les faits.
Quant à Pierre Séguin, certaines personnes ont fait
état qu'il pouvait s'agir d'un nommé Pierre Charest, un
personnage connu dans le mouvement terroriste dont il a été
question à diverses occasions, en particulier à l'occasion d'un
film tourné sur l'entraînement de terroristes en Jordanie. Or,
après véfirication auprès des forces policières, on
m'informe que Pierre Séguin dont il s'agit n'est pas Pierre Charest. Les
photographies de Pierre Charest que nous avons en notre possession n'indiquent
pas qu'il s'agirait de la personne qui a quitté le Québec pour
Cuba. Quant à Pierre Séguin, s'agit-il de sa véritable
identité, ou d'une autre?
La question demeure toujours posée, car le dénommé
Pierre Séguin n'avait aucun antécédent terroriste avant
ses activités dans la cellule Libération.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Maskinongé.
M. PAUL: M. le Président, nous remercions le ministre de la
Justice, qui n'a fait que confirmer certains renseignements qui nous avaient
déjà été communiqués par l'honorable premier
ministre, le jour même ou M. Cross était heureusement
libéré. Je n'ai pas l'intention de commenter le récit des
faits que vient de nous exposer le ministre de la Justice, mais je me rendrais
facilement à l'invitation faite par l'honorable premier ministre,
lorsqu'il nous a dit que le ministre de la Justice pourrait répondre
à des questions relatives au récit des faits qu'il pourrait nous
faire. Je comprends que le ministre ne pourra peut-être pas être en
mesure de répondre dès aujourd'hui à cinq questions que
j'aurais l'intention de lui poser.
La première qui n'est pas...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je crois que nous nous aventurons dans un
certain domaine ; Est-ce qu'une autre demi-heure s'applique, en l'occurrence,
ou si tous les députés pourraient poser...
M. BERTRAND: Non, je pense que vider ça ne serait sûrement
pas...
M. LE PRESIDENT: Ne croyez-vous pas que ce serait
préférable d'attendre à demain, à la période
des questions?
M. BERTRAND: Ce serait mieux de faire ça tout de suite.
M. PAUL: De toute façon, ce n'est pas très long.
M. LE PRESIDENT: Bien, s'il y a consentement.
M. PAUL: C'est le premier ministre qui nous a invités. Alors, je
vais retirer les questions...
M. LE PRESIDENT: Je n'ai pas d'objection, personnellement. Mais, je
crois que vous me comprenez. Il peut facilement y avoir des questions
pendant...
M. PAUL: Alors, je vais changer la forme de mes questions.
M. LE PRESIDENT: Non, moi, je n'ai pas d'objection, s'il y a
consentement unanime. Est-ce que vous voulez qu'on vide la question?
M. BERTRAND: Avez-vous des objections?
M. LE PRESIDENT: Voulez-vous attendre la période de questions de
demain?
M. BOURASSA: Disons que, de notre côté, nous n'avons pas
d'objection à ce que les questions soient posées
immédiatement. Mais, si le député de Maisonneuve et le
député de Maskinongé veulent attendre à demain,
c'est...
M. BURNS: M. le Président, nous avions compris, hier, par
l'annonce que le premier ministre avait faite de cette déclaration du
ministre de la Justice, que ça pourrait être suivi de quelques
brèves questions. En ce qui me concerne, après le
député de Maskinongé, si tout le monde est d'accord, j'en
aurai quelques-unes, une ou deux au maximum. Il ne s'agit pas de retenir la
Chambre tout l'après-midi sur ça.
M. LEVESQUE: Peut-être, par prudence, pourrions-nous
déterminer une période de temps, disons dix minutes,
d'accord?
M. PAUL: M. le Président, je remercie...
M. LEVESQUE: M. le Président, j'aimerais que ce soit bien entendu
dans ce cas-là.
M. LE PRESIDENT: J'attends des instructions de la Chambre.
M. LEVESQUE: Je propose une période de dix minutes.
M. BOURASSA: Dix à quinze minutes.
M. LEVESQUE: On voit la générosité naturelle du
premier ministre. D'un autre côté, connaissant nos adversaires et
amis, j'aimerais bien qu'on précise, M. le Président.
M. PAUL: Je vous promets et je promets à la Chambre, M. le
Président, que ce ne sont pas des questions de nature à soulever
de débat; elles sont d'une objectivité qui s'impose dans les
circonstances.
Je crois que le ministre de la Justice notera avec intérêt
cette question qui est toujours restée sans réponse, à
savoir pourquoi, dans les journaux du mercredi 15 octobre 1970, on n'a pas
autorisé la publication de la photographie de Rose plutôt que
d'attendre au lundi pour cette publication. On sait fort bien que la police a
suivi Rose jusqu'au mercredi soir, alors qu'on a perdu ses traces. Deux jours
avant le décès de Pierre Laporte, je me demande comme beaucoup de
gens...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je n'ai eu d'instruction ni bien
précise ni claire de la Chambre. Est-ce que je dois le permettre?
J'attends vos instructions...
M. BERTRAND: Ce n'est pas à lui à vous en donner, M. le
Président. Il n'appartient pas au leader de la Chambre de vous donner
des instructions.
M. LE PRESIDENT: J'ai demandé des instructions à la
Chambre.
M. BERTRAND: A la Chambre?
M. LE PRESIDENT: A la Chambre. Ecoutez, loin de moi l'idée de
demander à...
M. LEVESQUE: Le chef de l'Opposition est traumatisé.
M. PAUL: Ah! non, non!
M. BERTRAND: C'est vous qui l'êtes dans votre rôle de
préfet...
M. LE PRESIDENT: Je pense bien que je n'ai même pas fait de
lapsus. C'est de la Chambre que j'attends des instructions et je veux que ce
soit bien clair. J'ai compris tout à l'heure que je pouvais permettre
des questions sur les événements qui se sont produits les 2 et 3
décembre. Mais est-ce que je dois permettre d'autres questions qui se
réfèrent à l'enlèvement de notre collègue,
M. Laporte?
M. CHOQUETTE: M. le Président, je n'ai aucune objection à
répondre aux questions des députés et je ne vois pas
pourquoi on fait état de toutes sortes de questions. Je suis
parfaitement disposé à répondre à la question du
député de Maskinongé immédiatement.
M. LE PRESIDENT: Oui, mais êtes-vous prêt à aller
jusqu'à cinq ou six heures avec les questions? Est-ce qu'il est de mon
devoir de prévoir ce qui peut se produire dans 20 minutes ou dans une
demi-heure?
M. DUMONT: M. le Président, si nous prenons en
considération la demande du leader parlementaire du gouvernement, nous
serons en mesure de constater que le député de Maskinongé
va prendre, à lui seul, le quart d'heure. On pourrait peut-être
déterminer dix minutes au moins par parti, ce qui donne encore trente
minutes pour vider la question.
M. BOURASSA: Commencez.
M. BERTRAND: C'est la journée des députés.
M. LEVESQUE: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: Encore là, je ne saurai plus... Cela va
très bien au début. Mais d'après mon expérience, il
pourrait arriver que dans 20 minutes nous ne sachions plus où nous
allons. Je crains...
M. LEVESQUE: ... je crois que le premier ministre, tout à
l'heure, a fait une suggestion très généreuse lorsqu'il a
pris les dix minutes que j'avais suggérées puis les a
portées à quinze minutes. Je pense que l'on pourrait donner cinq
minutes à chacun des partis quitte, demain, à la période
des questions, à revenir à la charge.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que vous êtes d'accord? Consentement
unanime à cinq minutes?
M. CHOQUETTE: Il me semble qu'on devrait vider la question, enfin,
raisonnablement.
M. BERTRAND: M. le Président, si vous preniez jusqu'à
quatre heures et demie et donniez tant de minutes à chacun des partis...
C'est le jour des députés.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que la Chambre est unanime pour que ce soit
jusqu'à quatre heures trente?
M. CHOQUETTE: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: Est-ce que la Chambre est unanime pour que je permette
une nouvelle série de questions, une nouvelle période de
questions sur ce sujet jusqu'à quatre heures trente?
M. LEVESQUE: D'accord.
M. LE PRESIDENT: Bon, je demande justement des instructions
précises.
M. PAUL: Ma deuxième question, M. le Président, concerne
le dénommé Pierre Seguin. Nous avons écouté les
observations faites à ce sujet par le ministre de la Justice. Sans doute
qu'il pourra nous informer des moyens actuellement pris par la
Sûreté du Québec pour tâcher de connaître la
véritable identité de ce dénommé Pierre
Séguin au cas où cet individu aurait un prête-nom.
Ma troisième question est celle que j'adresse par ricochet
à l'honorable premier ministre aux fins de connaître la
possibilité pour le gouvernement de demander le retrait de
l'armée du territoire du Québec.
Ma quatrième question: Est-ce que M. Maurice Saint-Pierre demeure
encore le coordonna-teur de toutes les forces policières du
Québec, parce qu'il me semble qu'en vertu de la loi,
l'arrêté en conseil renouvelé ou
répété doit parvenir à échéance
aujourd'hui ou demain?
Ma cinquième et dernière question: Est-ce que le ministre
de la Justice pourrait nous dire combien il y aurait de détenus dans les
prisons qui auraient été arrêtés en vertu de la Loi
des mesures de guerre et contre qui on n'aurait pas jusqu'ici porté
d'accusation? Je comprends que quelques questions ne peuvent recevoir de
réponse cet après-midi. J'en ai aucun doute que le ministre
pourra en prendre avis pour y répondre à sa convenance.
M. CHOQUETTE: M. le Président, je suis prêt à
répondre aux questions que le député de Maskinongé
m'a posées personnellement. Quant à celle qui intéresse le
premier ministre, il répondra après moi.
Pour ce qui est de la décision de ne pas publier la photographie
de Paul Rose dans la semaine qui a précédé la mort de
notre collègue, Paul Rose avait été suivi dans la rue et,
comme le disait tout à l'heure le député de
Maskinongé, à un moment donné il est entré dans une
maison et plus tard, le lendemain matin, quelqu'un a quitté cette maison
en automobile.
Des efforts ont été faits pour suivre Paul Rose mais la
police en a perdu la trace.
Donc, la décision de ne pas publier sa photographie a
été prise pour ne pas, justement, mettre la vie de notre
collègue en péril. On a pensé qu'en indiquant qu'il
était clairement identifié comme un des ravisseurs de notre
collègue, au lieu d'avoir l'avantage de nous permettre de retrouver M.
Laporte sain et sauf, ceci pouvait, au contraire, être une incitation au
meurtre pour les personnes qui le détenaient, à ce
moment-là. D'autant plus que Paul Rose n'avait pas été vu,
en somme, à l'endroit où se trouvait M. Laporte, mais avait
été suivi dans la rue et qu'on connaissait sa relation avec la
cellule Chénier simplement par les empreintes digitales qui avaient
été trouvées sur certains communiqués
émanant de cette cellule. C'est donc par prudence que la photographie de
Rose n'a pas été publiée. On a considéré que
cela pourrait comporter plus de désavantages que d'avantages pour ce qui
était de retrouver notre collègue sain et sauf.
Quant à Pierre Seguin et à son identification, je peux
assurer l'honorable député de Maskinongé que les corps
policiers intéressés, actuellement, cherchent à identifier
cette personne par tous les moyens possibles et imaginables. Comme je l'ai dit
tout à l'heure, il n'est pas du tout certain que Pierre Seguin soit le
véritable nom de la personne qui a quitté le Québec pour
Cuba. Mais, en temps et lieux, lorsque des recherches suffisantes auront
été faites, je serai en mesure d'éclairer la Chambre sur
cet aspect.
Quant à la troisième question posée par l'honorable
député de Maskinongé, je pense pouvoir lui
répondre, quitte à faire une correction demain, qu'il ne reste
plus aucun détenu dans les prisons qui n'ait pas été
accusé formellement devant les tribunaux. Je vais vérifier et,
s'il y a une correction à faire à ma réponse, je le ferai
demain matin.
M. PAUL: M. le Président, avec votre permission, je voudrais
rappeler une question. Je comprends que l'honorable premier ministre doit
répondre à une question. Est-ce que M. Saint-Pierre est encore
coordonnateur des forces de l'armée au Québec?
M. CHOQUETTE: C'est une décision qui sera prise, je pense, ce
soir, à la séance du conseil des ministres. Je ne pense pas qu'il
soit dans l'ordre, pour moi, d'annoncer d'avance la décision.
M. PAUL: C'est pour savoir si...
M. BOURASSA: Demain, je pourrai répondre.
M. PAUL: ... l'arrêté ministériel est
périmé.
M. BOURASSA: Je pourrai répondre au député de
Maskinongé demain. C'est une décision, comme vient de le dire le
ministre de la Justice, que nous devons prendre ce soir et qui est en relation
avec la question du retrait graduel de l'armée.
Les informations que nous avons, c'est que le gouvernement du
Québec doit demeurer vigilant et ne doit certainement pas
considérer la question comme réglée parce que nous avons
pu libérer M. Cross et que ses ravisseurs sont à Cuba. Donc, la
question n'est pas réglée. Il faut rester absolument vigilant.
C'est pourquoi nous avons opté pour un retrait graduel de
l'armée. A la suite de discussions avec les forces
policières,
nous déterminerons le rythme de ce retrait. Demain, je pourrai
dire à l'ancien ministre de la Justice ce qui arrive de la position de
M. Saint-Pierre comme coordonnateur de toutes les forces au Québec.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Rouyn-Noranda.
M. SAMSON: M. le Président, si on s'en souvient bien, le ministre
de la Justice a laissé entendre, par certaines déclarations, que
les personnes autorisées à quitter le pays et ayant des
sauf-conduits pour Cuba ne devaient être reliées d'aucune
façon à l'affaire Laporte.Nous aimerions savoir jusqu'à
quel point on peut nous assurer que tel a bien été le cas et que
les personnes qui sont parties pour Cuba n'ont rien eu à voir avec
l'affaire Laporte. Si on peut nous assurer de cette chose, cela nous
amène à nous poser une autre question: Comment peut-on être
certain que ces personnes n'ont pas été reliées à
l'affaire Laporte si on n'est pas Certain de l'identité de l'une des
personnes qui ont quitté le Canada pour Cuba, en l'occurrence Pierre
Séguin?
M. CHOQUETTE: Ecoutez, je ne peux pas jurer avec une certitude absolue
qu'aucune des personnes qui ont quitté le Québec pour Cuba n'est
reliée à l'enlèvement et au meurtre de notre
collègue.
Mais, je peux dire à l'honorable député que les
probabilités sont qu'aucune des personnes qui ont quitté le
Québec n'a été directement impliquée dans le
kidnapping et le meurtre de M. Laporte.
Il s'agit de toute évidence, chez les sept personnes que nous
avons autorisées à quitter le territoire, de personnes qui
étaient membres de cette cellule Libération, cellule qui
était tout à fait distincte de la cellule Chénier. Toutes
les indications des faits sont, à l'heure actuelle, que la cellule
Chénier a agi d'elle-même, de son propre pouvoir, une fois que la
cellule Libération eut procédé à
l'enlèvement de M. Cross. Par conséquent, il n'y avait pas de
relation immédiate entre les deux groupes en question. Les indications
sont également que Pierre Séguin, que le député de
Rouyn-Noranda a mentionné, était une des personnes de la cellule
Libération qui s'était limitée à une action
terroriste, exclusivement à l'occasion de l'enlèvement de M.
Cross.
M. SAMSON: Une question supplémentaire, M. le Président.
Est-ce que le ministre peut nous assurer que, dès qu'il y aura
possibilité de déterminer l'identité exacte de la personne
mentionnée, c'est-à-dire Pierre Séguin, la Chambre pourra
être mise au courant? J'aimerais poser une autre question au ministre.
Est-ce qu'il y eut, dans le cours des négociations, des montants
d'argent de versés, soit par le Québec, soit par le Canada, soit
par d'autres pays, aux ravisseurs ou à d'autres personnes proches des
ravisseurs?
M. CHOQUETTE : A ma connaissance, nul montant d'argent n'a
été versé par aucun gouvernement, que ce soit le
gouvernement du Québec, le gouvernement du Canada ou le gouvernement de
la Grande-Bretagne ou quel-qu'autre gouvernement, aux ravisseurs qui ont
quitté le pays pour Cuba.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Maisonneuve.
M. BURNS: M. le Président, moi aussi, je tiens à remercier
le ministre pour son rapport. Concernant d'abord le dénommé
Pierre Séguin, je partage les craintes soulevées par le
député de Rouyn-Noranda, à l'effet que cette personne, si
on ne la connait pas, pourrait peut-être être reliée
à l'autre événement malheureux concernant Pierre Laporte.
Cependant, je me demande une chose: Est-ce que des photos ont été
prises de cette personne, Pierre Séguin? Si oui, est-ce qu'on a
l'intention de les publier, de les rendre publiques? Deuxièmement,
est-ce que, lors de la discussion avec les ravisseurs, il a été
question d'autres choses que des modalités du sauf-conduit? Y a-t-il eu
un interrogatoire, si on peut dire, relativement aux faits qui ont pu
éclairer la police? Evidemment, je ne demanderai pas au ministre de nous
dévoiler l'essence de cet interrogatoire, s'il y en a eu un., mais
simplement s'il y en a eu un. Le ministre mentionnait tantôt que, dans la
nuit du 2 au 3 décembre, l'électricité avait
été coupée pour montrer à ces personnes-là
que quelque chose d'anormal se passait. Est-ce qu'à ce moment-là
la police savait que M. Cross était ià l'intérieur? Si
oui, quel poids a-t-on accordé au fait que le FLQ, du moins cette
cellule, avait annoncé dans les communiqués antérieurs
que, si elle se sentait cerné, la vie de M. Cross était en
danger? J'imagine qu'il y a eu une décision difficile à prendre
et, heureusement, cela n'a pas causé la mort de M. Cross.
Finalement, c'est une question que je raccroche à une des
questions du député de Maskinongé, le fameux rapport
définitif concernant les personnes incarcérées, que le
ministre nous promet depuis le 20 novembre, relativement à la
possibilité d'accorder des cautionnements à ces gens, est-ce que
le ministre l'a enfin?
M. CHOQUETTE : Je vais répondre aux questions de l'honorable
député de Maisonneuve. Tout d'abord, je pense lui dire qu'aucune
photographie n'a été prise de Pierre Séguin.
Ceci reste à vérifier, mais je pense qu'il peut être
assuré, du moins pour le moment, qu'il nous a été
impossible de prendre des photographies officiellement de lui alors qu'il a
été amené à Terre des Hommes. Il ne faut pas
oublier qu'à ce moment-là les autorités et les
ravisseurs agissaient en vertu d'une entente négociée par leurs
représentants le matin même et qu'on ne pouvait pas faire un
travail policier normal dans ces conditions-là. Ceci aurait pu
constituer une violation de notre parole, et je pense que nous étions
astreints aux obligations que nous avions assumées tant en vertu des
déclarations que j'avais faites antérieurement que des
engagements qui avaient été pris par notre représentant,
Me Robert Demers.
Par conséquent, aussitôt que, le matin du 3
décembre, il y eut entente entre les parties dûment
représentées, je pense que, sur notre honneur, nous étions
liés à la façon de procéder que nous avions
acceptée, et il ne s'agissait pas, à Terre des Hommes ou à
un aéroport quelconque, de commencer à faire des
vérifications d'identité des sept personnes qui nous quittaient
pour Cuba. Je dis ceci pour expliquer dans quelles conditions s'est fait
l'échange entre les personnes.
C'est donc la même explication que je puis donner à
l'honorable député quant à la possibilité
d'interroger ces gens sur les faits ayant entouré l'enlèvement de
M. Cross et sa détention. Je pense qu'on aurait pu, peut-être
à juste titre, nous reprocher toute tentative d'interroger ces gens que
nous étions prêts à mettre à bord d'un avion pour
quitter ce pays, et il n'y a pas eu d'interrogatoire formel de ces personnes.
Je ne sais même pas s'il y a eu des échanges de paroles sur ce qui
s'est passé. Je ne le pense pas. Je crois avoir répondu à
l'honorable député à ce point de vue là.
L'honorable député m'a demandé si nous avions
considéré le danger que pouvait constituer l'action de cerner la
maison où se trouvaient les ravisseurs et M. Cross. Il est
évident qu'il y avait toujours un certain danger, mais encore fallait-il
qu'à un moment donné les policiers exercent une certaine
manoeuvre, une certaine stratégie pour amener les ravisseurs à
négocier.
Nous avons considéré que faire savoir aux ravisseurs
qu'ils étaient entourés, sans exercer une action policière
brusque par une tentative de s'emparer de la maison les armes à la main,
constituait une pression suffisante sur eux pour les amener à la
négociation. Le fait est que notre stratégie a réussi.
Maintenant, si les ravisseurs avaient refusé toute
négociation, se voyant cernés de cette façon-là,
nous aurions peut-être été placés devant une
alternative, à savoir: aurions-nous procédé à un
état de siège pendant une période indéfinie de la
maison, ou aurions-nous tenté une action policière brusque et
subite de façon à les prendre par surprise, malgré que la
surprise n'y aurait plus été à ce moment-là?
De toute façon, ces questions-là ne se posent pas
réellement parce que notre stratégie a réussi et qu'elle a
apporté les résultats désirés.
M. BERTRAND: Si le ministre le permet, sur le même
problème. La stratégie a été arrêtée
après qu'on eut détenu Jacques Cosette-Trudel et sa femme.
M. CHOQUETTE: Non. La stratégie avait déjà
été établie bien longtemps avant que les
événements se passent. J'en avais même parlé avec le
ministre des Affaires extérieures, M. Sharp, et nous avions convenu que
si l'action policière nous amenait à l'endroit où
était détenu M. Cross il fallait procéder avec la plus
grande circonspection possible pour lui sauver la vie. A la suite de cet
échange de vues entre les deux gouvernements, j'en avais fait part au
directeur de la Sûreté, M. Maurice Saint-Pierre, qui,
lui-même, en avait discuté avec les autres chefs
intéressés, et eux-mêmes avaient agréé
à cette stratégie. Lorsqu'ils ont vraiment vérifié
la présence de M. Cross, ils ont pu procéder ainsi que nous
l'avions prévu.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Mégantic.
M. DUMONT: Merci, M. le Président. Au plus fort de la crise, le
ministre avait déclaré que les ressources humaines ne
permettaient pas de continuer la lutte contre la pègre en même
temps que la recherche des ravisseurs dans l'affaire Cross.
Dans le communiqué qu'il vient de nous donner, il n'a fait aucune
allusion à une possibilité, maintenant que l'affaire semble se
régler, d'entreprendre la lutte contre la pègre.
M. LE PRESIDENT (Hardy): A l'ordre! M. DUMONT: Est-ce qu'il a
l'intention...
M. LE PRESIDENT (Hardy): A l'ordre! Cette question n'est pas dans
l'ordre. La Chambre a donné son consentement unanime à l'effet de
poser des questions sur la déclaration du ministre. L'honorable
député de Saint-Jacques.
M. DUMONT: Avec tout le respect que je vous dois, M. le
Président, c'est une question...
M. LE PRESIDENT (Hardy): A l'ordre! Ma décision est rendue.
L'honorable député de Saint-Jacques.
M. DUMONT: ...qui se relie à l'affaire Cross.
M. LE PRESIDENT (Hardy): J'ai rendu ma décision et je demande
à l'honorable député de Mégantic de reprendre son
siège.
L'honorable député de Saint-Jacques.
M. DUMONT: Le ministre est prêt à répondre.
M. CHARRON: M. le Président, je réfère à la
question que le député de Rouyn-Noranda a posée tout
à l'heure. Je ne sais pas s'il voulait toucher le domaine dont je veux
parler actuellement. Au tout début de son exposé, le ministre de
la Justice nous a dit que, quelque dix jours avant les événements
des 2 et 3 décembre, on surveillait la maison d'une façon
intensive. Ma question est la suivante : Est-ce une information précise
d'un citoyen québécois, par exemple, qui aurait amené la
police à surveiller le 10945 des Récollets? Si tel est le cas,
est-ce que la bourse de $150,000 annoncée partout, y compris sur les
murs de cette auguste maison il y a Marc Carbonneau, parmi les quatre
fugitifs recherchés sera touchée, en partie, par celui qui
aurait informé la police quant au 10945 des Récollets?
M. CHOQUETTE: Tout d'abord, je dois dire que je ne
révélerai jamais dans quelles conditions la police a
été amenée aux abords de cette maison, au 10945 des
Récollets. Cela va de soi que je ne dirai jamais si un montant
quelconque a été ou sera versé à qui que ce
soit.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Maisonneuve.
M. BURNS: M. le Président, une dernière question. En
passant, je rappelle au ministre qu'il y a une question à laquelle il
n'a pas répondu tantôt, concernant le rapport définitif
qu'il attendait de ses procureurs de la couronne. Je le lui rappelle, tout
simplement.
Dernière question: Serait-il possible à cette Chambre de
savoir qui a défrayé le coût du voyage
Montréal-La-Havane? Est-ce le gouvernement fédéral ou le
gouvernement provincial qui, éventuellement, sera appelé à
le payer?
M. CHOQUETTE: On serait peut-être mieux de ne pas soulever la
question; comme cela, on ne recevra pas de compte.
M. BURNS: La réponse à l'autre question, M. le
Président.
M. CHARRON: L'autre question.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'autre question.
M. CHOQUETTE: Oui, M. le Président, j'ai eu les rapports des
procureurs que j'ai retenus sur chacune des causes en question. Il s'agit de
rapports verbaux qui doivent être suivis de rapports écrits. Le
sous-ministre adjoint aux affaires criminelles s'est même rendu à
Montréal, hier, pour examiner chacun des dossiers des personnes mises en
accusation. On sait qu'en vertu de la nouvelle loi il incombe au procureur
général de déposer au dossier un document à l'effet
qu'il s'oppose à l'octroi d'un cautionnement lorsqu'il le juge à
propos.
Dans beaucoup de causes, j'ai déposé ou fait
déposer, aujourd'hui même, des oppositions à l'octroi de
cautionnement. A l'égard de certaines personnes, je n'ai pas
déposé d'objection à ce qu'elles demandent un
cautionnement suivant la voie ordinaire devant les tribunaux.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, deux brèves
questions au ministre de la Justice. Le ministre de la Justice je ne lui
demande pas de me répondre aujourd'hui, parce que c'est assez complexe
a-t-il pris connaissance de la déclaration du président de
la Fraternité des policiers de Montréal-Nord, lequel fait une
critique assez sévère sur ce qui s'est passé au moment
où l'on a cerné la maison où se trouvait M. Cross?
D'autre part, ma seconde question est la suivante: On a parlé,
tout à l'heure, de l'identité de ce dénommé Pierre
Séguin. Le ministre nous a dit qu'on n'en avait pas de photo officielle.
Le ministre pourrait-il faire enquête afin de savoir si la photo que l'on
publie aujourd'hui, par exemple, dans Montréal-Matin est connue et si
elle correspond à des indications que possède déjà
la police?
M. CHOQUETTE: Je n'ai pas pris connaissance de la déclaration
dont le député fait état, mais je vais en prendre
connaissance, ainsi que de la photo.
M. LE PRESIDENT (Hardy): L'honorable député de
Bellechasse.
M. LOUBIER: M. le Président, j'ai entendu, tout à l'heure,
le ministre de la Justice nous dire, à la suite d'une question d'un
député de notre droite, qu'il ne dévoilerait jamais
l'identité de la personne qui aurait pu recevoir un montant
d'argent.
Je comprends les raisons qui incitent le ministre à une
affirmation aussi globale et aussi définitive, mais je pense qu'il est
d'intérêt public que l'on sache si un montant a été
versé, sans pour autant dévoiler l'identité de la personne
qui l'aurait reçu.
M. CHOQUETTE: Non, il n'est pas d'intérêt public que l'on
sache si un montant a été déboursé ou n'a pas
été déboursé. C'est justement ce qui n'est pas
d'intérêt public, parce qu'il ne faut pas oublier que cette
stratégie pourra être utilisée ultérieurement, dans
d'autres circonstances. Par conséquent, il ne sert à rien de
faire la preuve qu'elle réussit ou qu'elle ne réussit pas. Je
considère donc qu'il n'est pas d'intérêt public de
révéler si un montant a été versé ou non,
pas plus qu'il n'est d'intérêt public de révéler
l'identité de la personne à qui un montant pourrait avoir
été versé, si un montant a été
versé.
M. LE PRESIDENT: Affaires du jour. M. LEVESQUE: Article 26.
Projet de loi no 58 Deuxième lecture
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Finances propose la
deuxième lecture du projet de loi no 58, Loi modifiant la loi concernant
l'établissement par Sidbec d'un complexe sidérurgique
intégré. L'honorable ministre des Finances.
M. Raymond Garneau
M. GARNEAU: M. le Président, l'honorable lieutenant-gouverneur de
la province a pris connaissance de ce bill et il en recommande l'étude
à la Chambre.
M. BERTRAND: Nous pourrons aller en comité.
M. GARNEAU: J'aimerais faire un exposé... M. le Président,
le projet de loi dont nous entreprenons l'étude en deuxième
lecture est important non pas en raison du nombre ou de la complexité
des articles qu'il contient, mais bien plutôt en raison de sa
signification sur le plan économique québécois. Il faut
remonter à plusieurs années en arrière pour trouver
l'origine de ce que je pourrais appeler ce vieux rêve
québécois de posséder une sidérurgie
intégrée.
Sans vouloir faire l'historique ou décrire le cheminement complet
de ce projet, je pense que je peux dire sans me tromper qu'il est le
résultat des efforts de bien des hommes politiques qui ont formé
le gouvernement et qui siègent encore des deux côtés de
cette Chambre.
M. LOUBIER: M. le Président, avec votre permission, est-ce que je
pourrais demander au ministre des Finances de parler d'une façon
intelligible; il est impossible de le comprendre. Le comprendre, cela peut
aller, mais il est impossible de l'entendre.
M. GARNEAU: Je vais essayer de parler plus près du micro, M. le
Président.
Je venais donc de souligner que ce projet était le
résultat des efforts de bien des hommes politiques qui ont formé
les gouvernements émanant des deux partis qui se sont
succédé à la tête du Québec au cours des dix
dernières années.
Le projet de loi no 58 vise essentiellement à permettre au
gouvernement de fournir à Sidbec les capitaux dont cette compagnie a
besoin pour réaliser les investissements nécessaires à la
mise sur pied d'une véritable sidérurgie intégrée.
En 1968, le gouvernement qui nous a précédés avait,
à la suite d'une législation, permis à Sidbec
d'acquérir le contrôle des actions de la compagnie Dosco. Au
moment de la prise de possession par Sidbec de la compagnie Dosco, cette
dernière contrôlait un marché de produits finis d'environ
450,000 tonnes et alimentait des laminoirs avec de l'acier en billettes et en
lingots donc de l'acier primaire en provenance de son usine de
Montréal et pour une très grande partie avec de l'acier primaire
qui provenait de la Compagnie Sydney Steel Corporation en Nouvelle-Ecosse.
Théoriquement, Sysco, Sydney Steel Corporation, était en
mesure de faire une contribution d'acier primaire suffisante pour pourvoir aux
besoins de Dosco pendant quelques années. Cependant, il s'est
avéré, avec l'expérience des 24 derniers mois, que tel n'a
pas été le cas. D'une part, Sysco n'a jamais pu remplir ses
engagements envers Dosco et, d'autre part, le prix que Dosco a dû payer
et doit encore payer à Sysco pour de l'acier primaire est
considérablement supérieur à celui qui était
prévu, soit de 10 p. c. environ pour l'année 1970. Cet
état de choses a forcé Dosco à aller sur les
marchés internationaux pour acheter, à des prix souvent
très élevés, l'acier primaire dont cette compagnie avait
besoin pour satisfaire à la production de ses produits finis,
c'est-à-dire répondre à la demande de sa
clientèle.
Cette dépendance des marchés extérieurs pour son
approvisionnement en acier primaire et le prix élevé qu'il lui a
fallu payer pour acheter cet acier, soit tout près de $6,500,000 de plus
pour l'anné 1970, sont parmi les principales raisons qui incitent le
conseil d'administration de Sidbec et le gouvernement à investir
massivement afin de fournir à Sidbec et à Dosco
l'équipement qui leur est nécessaire pour fabriquer leur propre
acier primaire.
Des investissements de cette nature auront pour résultat
immédiat de rendre Sidbec et Dosco indépendants au point de vue
de l'approvisionnement en matière première et aussi de diminuer
sensiblement le coût d'achat de l'acier primaire.
Les projets d'investissement sont de l'ordre de $127 millions et se
répartissent en deux tranches. La première, la plus importante,
$76 millions, doit servir à l'installation d'équipement propre
à fabriquer l'acier primaire. La deuxième tranche, soit $51
millions des investissements prévus, servira surtout à
revaloriser certains équipements en place afin d'en accroître
l'efficacité et d'assurer une production conforme au désir de la
clientèle de Sidbec.
Quand on parle d'aciéries intégrées, cela
signifiera, lorsque les investissements auront été
réalisés, que Sidbec contrôlera toutes les
opérations de production à partir d'un minerai brut ou
concentré jusqu'à un produit fini, prêt à mettre sur
le marché. Le minerai à l'état brut doit franchir trois
étapes avant d'être disponible pour alimenter les usines de
fabrication de produits finis ou semi-finis.
A l'exception de l'extraction, la première de ces étapes
consiste dans la concentration du minerai pour fabriquer ce qu'on appelle
des
boulettes d'oxide de fer dont la teneur en fer varie de 65 p. c.
à 70 p. c. La deuxième étape, c'est l'usine de
métallisation qui utilise les boulettes ou le concentré de 56 p.
c. à 70 p. c. en fer pour transformer ce minerai réduit en un
minerai qui a une teneur en fer de 95 p. c. et que l'on appelle du fer
métallisé ou du fer éponge. La troisième
étape a pour but de transformer le fer éponge ou le fer
métallisé en billettes ou lingots, lesquels alimenteront les
usines qui produisent des "rods, and bars", des profilés et qui
alimentent également les autres usines de Dosco, en particulier celles
de la ville d'Eymard qui produisent différents produits finis.
Le programme d'investissements, comme je viens de le mentionner, est de
l'ordre de $76 millions en ce qui regarde la fabrication de l'acier. Il se
divise en trois parties distinctes. D'abord, la construction d'une
aciérie électrique à Contrecoeur. L'aciérie que
Sidbec a l'intention d'installer à Contrecoeur aura, au départ,
une capacité de 500,000 à 600,000 tonnes et utilisera la
coulée continue pour faire des billettes de trois à sept pouces.
Cette aciérie sera une des plus modernes, sinon la plus moderne au
monde, et son alimentation consistera en ferraille, d'une part, et en fer
métallisé ou fer éponge, d'autre part.
Dosco possède à son usine de Montréal deux
fournaises électriques avec coulée continue qui, bien que
modestes en volume, n'en sont pas moins des plus efficaces aux dire de tous les
experts consultés à ce sujet. Cette aciérie permet
actuellement de former un personnel compétent qui sera disponible pour
travailler aux fournaises électriques qui seront construites à
Contrecoeur. Ce qui veut dire qu'il n'y aura pas de problème technique
ou de problème de personnel à la suite de la construction de
cette usine.
La deuxième étape consiste en l'usine de
métallisation. Bien qu'aucune entente ne soit intervenue jusqu'à
maintenant avec des détenteurs de procédés de
préréduction, je suis en mesure de vous dire que, d'ici quelques
semaines, peut-être même quelques jours, ce sera chose faite. En ce
moment, les autorités de Sidbec étudient les derniers rapports
techniques concernant deux procédés éprouvés et
elles feront un choix définitif d'ici peu. On retiendra le
procédé dont la mise de fonds et le coût d'exploitation
sont les moins élevés pour un produit qui correspond aux
exigences techniques de Sidbec.
Pour faire ce choix, Sidbec compte sur l'appui de spécialistes
reconnus mondialement et aussi sur les détenteurs du
procédé qui se rendront responsables de la construction et de la
mise en exploitation de cette usine de métallisation. Cette usine sera
alimentée par un concentré de fer dont la teneur devra varier
entre 65 p. c. et 70 p. c.
La troisième partie de cette première tranche
d'investissements concerne les sources de minerai et de concentré de
fer.
Sidbec est en train d'examiner, depuis déjà plusieurs
mois, toutes les possibilités qui sont disponibles pour la fourniture
d'un concentré de fer. Plusieurs options sont possibles, soit
l'exploitation d'une mine, l'achat d'un superconcentré venant des
compagnies installées au Québec, l'achat de boulettes d'oxyde de
fer, etc.
La solution à ce problème teindra compte des contraintes
économiques, de la qualité du produit et de la
disponibilité, à plus ou moins long terme, de minerais dont les
caractéristiques sont compatibles avec l'exploitation d'une usine de
métallisation. Sidbec sera en mesure de prendre une décision
finale à ce sujet avant la fin du mois de mars 1971.
Lorsque les trois étapes sommairement exposées ci-haut
seront réalisées, Sidbec sera devenue une sidérurgie
complètement intégrée. Les trois étapes en question
créeront approximativement 1,000 nouveaux emplois dont la plus grande
partie sera employée aux installations de Contrecoeur. Ces trois
étapes sont indispensables à franchir, si l'on veut faire de
Sidbec-Dosco une entreprise viable et rentable.
La réalisation d'un tel projet, soit celui d'une
sidérurgie intégrée, nécessitait d'abord une
analyse sérieuse de l'ensemble du dossier Sidbec-Dosco. Cette
étude, menée par le conseil d'administration de Sidbec, nous
porte à conclure que le Québec se doit de franchir ce pas
additionnel et dégager les capitaux nécessaires pour doter son
économie d'une véritable sidérurgie
intégrée. Si tout se passe tel que prévu et prenant en
considération les plus et les moins qui peuvent se produire d'ici 1974,
Sidbec prévoit qu'elle aura, en 1974, un "cash-flow" d'environ $20
millions à $25 millions, des profits de l'ordre de $15 millions et des
ventes d'environ $150 millions par année.
Des investissements totaux prévus de $127 millions seront
financés de la façon suivante: d'abord, $30 millions qui seront
prêtés par la Caisse de dépôt et placement;
deuxièmement, $36 millions versés au capital-actions de la
compagnie par le gouvernement; et, finalement, les $27 millions constituant le
reste à verser à Sidbec par le gouvernement en vertu de la loi
sanctionnée le 5 juillet 1968.
Il restera, en tout et partout, une somme d'environ $34 millions pour
compléter l'investissement total et Sidbec prévoit en financer
une partie à même ses profits. Le reste proviendra d'une
émission d'obligations sur le marché privé, à moins
que d'autres sources de financement soient disponibles. Ici, je me
réfère particulièrement aux amendements qui ont
été apportés à la loi de la détermination
des zones désignées, qui permettraient maintenant aux
ministère du Développement économique régio-
nal d'aider Sidbec dans les investissements qu'elle fera aussitôt
que cette législation aura été adoptée.
Quant au montant le plus important pour le résidu des $51
millions qu'il reste pour combler la partie totale du montant de $127 millions,
j'ai indiqué qu'il y en avait $76 millions, pour ce qui est de la
sidérurgie intégrée, et $51 millions, pour
l'amélioration des équipements. La majeure partie de ces $51
millions comprend une somme de $10 millions qui s'appliquera aux laminoirs
à tôle de Contrecoeur. Le travail à faire sur ces laminoirs
est déjà amorcé. On prévoit que les
résultats seront positifs dès la fin de 1971. Il est
évident que, si Dosco peut fabriquer une tôle qui peut se comparer
en qualité et en prix à celle de ses concurrents, l'effet
d'entraînement économique pour le Québec sera très
bénéfique. De plus, cette situation permettra à Dosco
d'augmenter sa part du marché québécois, laquelle est
très faible actuellement et pour cause. En fait, il s'agit d'une
tôle dont la qualité n'est pas parfaite. Une des raisons pour
lesquelles Sidbec désire effectuer ces investissements, c'est pour
améliorer la qualité de cette tôle afin de pouvoir
avantager sa situation sur le marché.
Il est peut-être bon de mentionner que les équipements
achetés ou à être achetés par Sidbec-Dosco, selon le
programme d'investissements, le sont de fournisseurs dont le contenu de
fabrication québécois est le plus élevé, pourvu,
évidemment, que la qualité soit acceptable par Sidbec et que les
prix soient raisonnables. Jusqu'à présent, la compagnie Sidbec
nous a informés qu'elle a eu une très bonne collaboration de la
part des manufacturiers québécois. De plus, il serait
peut-être bon de mentionner que la mise en chantier prévue
à Contrecoeur entraînera l'embauche, lorsque le tout sera en plein
essor, d'environ 500 à 600 personnes, ce qui devrait se produire
normalement vers les mois de juin, juillet, août et septembre 1971.
En conclusion, le gouvernement, en présentant le projet de loi
numéro 58, est conscient qu'il demande aux représentants du
peuple d'engager collectivement la socitété
québécoise dans un développement de grande envergure. Nous
croyons fermement que cette décision est à l'avantage des
Québécois, qui, par l'entremise de leurs représentants,
posent un geste de confiance dans l'avenir économique de notre
collectivité.
C'est pourquoi, M. le Président, j'ai l'honneur de proposer
l'adoption, en deuxième lecture, du projet de loi numéro 58.
M. LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition.
M. Jean-Jacques Bertrand
M. BERTRAND: M. le Président, quelques mots seulement. La
réponse de l'Opposition officielle au projet de loi du gouvernement
concernant Sidbec est exactement la même que celle que nous avons
apportée à M. Gignac en 1968 et d'ailleurs il en a fait
part aux membres du Parlement au cours des séances de la
régie gouvernementale qui se sont tenues les 28 mai , 5, 7 et 12 juin
1968 et dont vous trouvez le compte rendu au journal des Débats de
l'année 1968.
La réponse, donc, est la même que celle qui avait
été apportée par le premier ministre d'alors, mon
collègue Daniel Johnson, à la question qui lui avait
été posée par M. Gignac. Cette question avait
été posée par M. Gignac, à M. Johnson au cours de
l'année 1967, alors que M. Johnson avait autorisé d'autres
travaux de recherche permettant à Sidbec de présenter un projet
au gouvernement. La question était donc la suivante: "Seriez-vous
prêts à investir une somme de $60 millions, en cinq versements
annuels, pour doter le Québec d'une sidérurgie
intégrée, soit en achetant Dosco comme première phase,
soit en installant un laminoir, quitte à compléter plus tard et
d'en arriver enfin à une usine de fabrication d'acier primaire?"
La réponse, à ce moment-là, a été:
"Oui", De notre part et, je n'ai aucun doute, de la part de tous ceux qui
représentent l'Opposition, elle sera également aujourd'hui:
"Oui". Nous avons permis l'établissement de Sidbec à Contrecoeur.
Nous voulons permettre son développement... A Contrecoeur. Dans ce
temps-là, on a fait beaucoup de jeux de mots.
M. GARNEAU: Avec beaucoup d'enthousiasme.
M. BERTRAND: Ah cela, c'était le problème de votre ancien
gouvernement. A Bécan-cour, ce n'était pas notre problème.
Si vous voulez réveiller des morts, Bécancour, c'était une
promesse de votre ancien premier ministre, Jean Lesage. Ne réveillez pas
de débats!
M. GARNEAU: C'est parce que le chef de l'Opposition dit que le
gouvernement d'alors l'avait fait "à contrecoeur". Je pensais qu'il
l'avait fait avec enthousiasme.
M. BERTRAND: Avec?
M. GARNEAU: Avec enthousiasme.
M. BERTRAND: Nous? Avec grand enthousiasme. Je pense que M. Gignac, par
les propos qu'il a tenus lors des séances de la commission des
régies gouvernementales, a démontré clairement l'appui
qu'il avait reçu du gouvernement précédent, et
également l'appui que je lui ai accordé quand j'étais
premier ministre. C'est pourquoi aujourd'hui...
M. LEVESQUE: Le chef de l'Opposition me permettrait-il une
question...
M. BERTRAND: Oui.
M. LEVESQUE: ... seulement pour être sûr que j'ai bien
compris?
Le premier ministre, avant 1966, avait parlé de Bécancour
comme site pour l'installation d'une sidérurgie.
M. BERTRAND: L'ancien député de Louis-Hébert.
M. LEVESQUE: N'est-il pas vrai que celui qui lui a
succédé, à la veille des élections de 1966, a
répété la même chose à l'intention des gens
de Bécancour?
M. BERTRAND: Non seulement cela, mais nous ne sommes pas pour
reprendre tout ce débat...
M. LEVESQUE: C'est simplement pour compléter le dossier.
M. BERTRAND: Ce n'est pas nous qui avions fait acheter tous les
terrains!
M. LOUBIER: C'est cela.
M. VINCENT: Qui n'étaient pas payés, d'ailleurs !
M. BERTRAND: Ce n'est pas nous qui avions fait luire aux yeux des gens
de la Mauricie, et en particulier du centre du Québec, qu'une
sidérurgie serait établie à Bécancour. J'ai ici des
notes qui pourraient confondre le ministre de l'Industrie et du Commerce, mais
pour ne pas prolonger ce débat, j'arrête. Je réponds au
principe de la loi: Oui, comme nous l'avons fait en 1968.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauce.
M. Fabien Roy
M. ROY (Beauce): Le gouvernement nous a remis un projet de loi
intitulé bill 58, Loi modifiant la loi concernant l'établissement
par Sidbec d'un complexe sidérurgique intégré. Sur le
principe de la loi, M. le Président, il me fait plaisir de dire au nom
de notre groupe que nous sommes entièrement d'accord avec le projet
Sidbec et que nous avons hâte de voir au Québec une industrie
sidérurgique entièrement intégrée.
M. le Président, ce projet de loi a pour but deux choses. D'une
part, permettre l'achat de 3,600,000 actions à $10 à même
le budget des taxes et des impôts du gouvernement de la province et
d'investir $36 millions dans Sidbec. D'autre part, le projet de loi autorise le
gouvernement à garantir jusqu'à concurrence de $30 millions tout
prêt que la Caisse de dépôt et de placement du Québec
peut consentir à Sidbec.
En ce qui a trait à l'investissement de $36 millions à
même le budget des taxes et des impôts, je me permets de souligner
en passant qu'on est en train de taxer les individus pour faire de
l'investissement alors qu'on emprunte à long terme pour administrer les
dépenses courantes du gouvernement. C'est la logique du système
qui marche à l'envers et que nous ne sommes pas gênés de
dénoncer à chaque fois que l'occasion se présente.
J'ai déjà déclaré, au cours de la session de
l'été dernier, que le gouvernement nous remettait très peu
de documents, très peu d'informations à l'occasion de la
présentation de ses projets de loi. C'est encore la même chose qui
se présente aujourd'hui. On nous demande d'autoriser $66 millions et on
nous remet entre les mains un petit document de quelque quarante lignes. Il
faudrait, évidemment, être des experts, être capables de
lire l'avenir pour être en mesure de deviner quelle sera la nature de
l'investissement, quelle est la situation dans laquelle Sidbec se trouve
présentement. On ne nous a présenté aucun prospectus. Le
ministre vient de nous faire une longue déclaration pour nous expliquer
les buts et certaines dates d'échéance en ce qui a trait au
calendrier des investissements, mais encore là, nous n'avons aucun
document entre les mains.
J'ai fait des recherches, ici au Parlement, après que le
gouvernement eut déposé son projet de loi, pour retracer quelque
chose qui pourrait nous donner des informations en ce qui a trait à
Sidbec. A part ce qui a paru dans le journal des Débats de
l'Assemblée nationale et le rapport des états financiers au 31
mars 1969, qu'on nous a remis au cours de l'été, nous n'avons
rien eu.
Je vais revenir là-dessus à l'occasion et j'en profite
pour demander au gouvernement, lorsqu'il présente des projets de loi de
cette envergure d'avoir au moins le courage de nous informer, de nous donner la
documentation dont nous pouvons avoir besoin afin d'être capables de
porter un jugement adéquat, de nous faire une opinion exacte et aussi
d'être en mesure de faire les recommandations qui s'imposent, ou encore
nos observations.
Je me réfère ici au message que le président de
Sidbec faisait dans son rapport à l'effet qu'il avait connu en 1969 une
année relativement bonne. En effet, un revirement favorable de $10
millions s'est produit à la Dosco, qui est passée d'un
déficit d'exploitation de près de $9 millions au 31
décembre 1968 à un profit de près de $1 million au 31
décembre 1969.
Depuis cette date, qu'est-ce qui se passe à Sidbec? De quelle
façon les opérations se déroulent-elles? Est-ce que Sidbec
est en train de connaître une année exceptionnelle? Est-ce que
Sidbec est en train de connaître une année moyenne? Ou est-ce que
Sidbec est en train de connaître une année plus difficile,
à cause des restrictions économiques, des restrictions
budgétaires qu'il y a un peu partout parce que le
gouvernement a dû lui-même restreindre ses achats? Ce sont
toutes des choses que nous ignorons, et il nous faut consulter la boule de
cristal pour le savoir.
M. Gignac avait dit dans son exposé: Si nous avions pu nous
procurer tout l'acier primaire et j'estime que c'est un des buts du
réinvestissement massif qu'on veut faire dans Sidbec lingots et
billettes requis pour nos besoins de 1969, nos ventes auraient
été d'environ $8 millions plus élevées. Cependant,
nous prévoyons que les années 1970 et 1971, et c'est M. Gignac
qui le dit, seront particulièrement difficiles pour Sidbec et sa filiale
à cause de leur forte dépendance des marchés
extérieurs pour leur approvisionnement en acier primaire.
Il continue en disant: "En effet, les marchés d'acier primaire,
aussi bien au niveau national que mondial, sont très difficiles
d'accès. Nous sommes forcés, depuis quelques mois, pour
satisfaire à la demande croissante de nos clients, d'acheter ces aciers
à des prix extrêmement élevés, ce qui aura pour
effet d'entraîner chez Dosco et Sidbec des pertes d'exploitation, en 1970
et 1971." Quelle sera la nature de ces pertes? Nous l'ignorons. Le gouvernement
ne nous a fourni aucune indication en ce sens.
Alors, M. Gignac continue: "C'est là une des raisons principales
qui ont amené notre conseil d'administration à
accélérer la mise en oeuvre d'un programme d'investissement
d'environ $125 millions, dont 90 p. c. seront dépensés au cours
des trois prochaines années."
Loin de moi l'intention de mettre en doute la compétence des
administrateurs de Sidbec à l'heure actuelle. Ce n'est pas du tout sur
ce point, car j'estime que Sidbec a été très bien
administrée, si on en juge par le rapport qui nous a été
remis. Mais ce n'est pas une raison pour le gouvernement de ne pas nous donner
les informations et les chiffres dont nous aurions besoin. Il y a tout de
même un fait également qui aurait été
intéressant, je pense, pour les membres de cette Chambre, à
l'occasion d'une séance de la commission, c'est de pouvoir poser
certaines questions.
On sait que l'actif de Sidbec, l'année dernière,
était de $171 millions, et que, cette année, c'est-à-dire
le 31 décembre 1969, l'actif était réduit d'un montant de
$30 millions, soit à $141,837,000. Ce sont toutes ces choses qui font
qu'il est difficile pour nous justement parce que nous sommes
appelés à voter un montant d'argent aussi important de
comprendre et de faire les recommandations qui devraient s'imposer dans ce
cas-là.
Nous sommes d'accord avec le principe de la loi, même si nous ne
sommes pas d'accord avec la façon dont le gouvernement a
présenté son projet de loi. Mais nous demandons au gouvernement
de profiter de l'occasion qui lui est offerte pour qu'à l'avenir,
lorsqu'il y aura des projets de loi de cette importance, il puisse informer
comme nous avons le droit de l'être.
Je pense que nous allons profiter de l'occa- sion qui nous sera
également offerte, au cours de l'étude en comité, pour
poser toutes les questions que nous jugerons utiles.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Gouin.
M. Guy Joron
M. JORON: M. le Président, quelques remarques assez
brèves, je ne veux pas retenir cette Chambre trop longtemps parce que
personnellement, je suis pressé de voter des projets de loi semblables,
et je ne peux que souhaiter qu'ils seront plus nombreux à l'avenir.
Quelques brefs commentaires cependant. Le ministre des Finances faisait
un rappel historique, tout à l'heure, au début de son
exposé. J'aimerais aussi rappeler des propos d'un ministre des Richesses
naturelles, qui paraissaient dans le Soleil, parlant de l'établissement
d'un complexe sidérurgique. On pouvait lire: "Le seul moteur qui peut
donner cet élan, c'est l'Etat." On lisait plus loin: "L'Etat doit sortir
de cette espèce de rôle colonial qu'il joue dans notre province.
L'aciérie rejoint exactement les ressources que nous avons ici au
Québec. Il faut donc la développer, à condition qu'un seul
élément suffisamment fort soit au point de départ, en
l'occurrence, l'Etat."
II s'agit, bien entendu, du Soeil du 22 janvier 1962, donc d'un ancien
ministre des Ressources naturelles. Je veux souligner que si, aujourd'hui, nous
assistons à la conclusion d'efforts qui ont pris presque une dizaine
d'années à se réaliser, s'il y aura enfin, et très
bientôt maintenant, une aciérie intégrée au
Québec, c'est uniquement parce que l'Etat a décidé
d'assumer son rôle de faire une intervention directe dans
l'économie.
Je pense que si l'Etat n'avait pas pris cette responsabilité au
cours des dernières années, nous serions encore aujourd'hui
à attendre que d'autres installent une aciérie au Québec,
et peut-être que cette attente durerait 20, 25 ou 30 ans, qui sait.
Nous avons effectivement attendu assez longtemps bien des choses au
Québec, nous avons surtout attendu que les autres développent
notre propre pays. Cette attitude d'attendre et de laisser la
responsabilité du développement à d'autres nous a
donné une structure économique qui, aujourd'hui,
évidemment, est à bien des égards, boiteuse et
déficitaire, a laissé des trous assez considérables dans
la société, produit un taux de chômage inacceptable, un
déséquilibre dans le développement régional, ainsi
de suite.
Il est donc clair que ces trous qui existent dans notre économie
ne seront jamais bouchés par les autres. On ne remédiera jamais
à ces maux si on n'accepte pas d'en porter la responsabilité,
c'est-à-dire de les régler soi-même. C'est dans ce sens que
nous parlons de l'intervention de l'Etat et de son rôle dans
l'économie.
De toute manière, ce sont les Québécois qui
en financent l'essentiel, que le développement se fasse par
l'Etat lui-même ou par des entrepreneurs privés, locaux ou
étrangers. Il faut comprendre que les entreprises se financent à
même des crédits bancaires, à même des emprunts sur
nos marchés locaux, à même des profits retenus,
c'est-à-dire, en quelque sorte, à même un pourcentage du
dollar des consommateurs locaux. De toute manière, ce sont les
Québécois qui financent la majeure partie des entreprises. Je
comprends que, dans certains cas une certaine compétence technologique
n'existe pas, il faut faire appel, sous forme de "partnership" ou d'autres
façon, à l'entreprise étrangère. Mais, dans la
mesure où nous pouvons le faire nous-mêmes, nous souhaitons, nous
du Parti québécois, que l'Etat assume lui-même ce
rôle.
Je pense que ce projet de loi sur Sidbec nous donne l'occasion
d'encourager le gouvernement non pas à souhaiter que d'autres viennent
développer le Québec et créer des emplois ici, mais
à les créer directement lui-même à l'avenir. Il faut
que l'Etat devienne entrepreneur dans la mesure où c'est possible. Ce
n'est pas possible dans tous les secteurs, bien entendu, on le
réalise.
Finalement, puisque Sidbec est une compagnie de la couronne, je voudrais
simplement signaler au ministre des Finances qu'il serait peut-être
opportun que le gouvernement communique à Sidbec sa philosophie sociale
quant au fonctionnement interne de cette entreprise-là, si le
gouvernement, bien entendu, s'est penché sur le problème. Je fais
écho aux propos qu'a tenus, il y a quelques semaines, le ministre de la
Santé en cette Chambre quant au désir de valeurs nouvelles dans
notre société qui se veut de plus en plus axée sur la
participation.
Il ne faudrait pas que les entreprises d'Etat fonctionnent selon les
même critères rigides que respectaient les entreprises
capitalistes dans le passé. Il est possible que l'Etat devienne,
à travers des entreprises comme Sidbec, un exemple pour les autres
entreprises. Exemple de participation, d'intégration des travailleurs et
peut-être même des consommateurs. C'est peut-être difficile
à concevoir dans le cas d'une aciérie, mais il faudrait
intégrer ceux qui travaillent à l'entreprise à la prise de
décision.
On pourrait voir là le début d'une politique sociale
nouvelle et d'un renouveau de nos valeurs culturelles au Québec. Un
dernier point, avant de terminer. Je m'aperçois que tous les partis
politiques en cette Chambre applaudissent cette intervention directe de l'Etat
et la création de cette entreprise. A d'autres occasions, certains
partis politiques représentés dans cette Chambre se montrent
souvent réticents quand on parle de l'intervention de l'Etat ou du
rôle direct de l'Etat dans l'économie. Je m'aperçois
aujourd'hui que tout le monde applaudit. J'espère que l'exemple heureux
de Sidbec saura inciter tous les membres de cette Chambre à encourager
la multiplication de projets semblables. Je vous remercie.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bellechasse.
M. Gabriel Loubier
M. LOUBIER: M. le Président, je fais simplement quelques
remarques à la suite de ceux qui m'ont précédé. Je
voudrais enchaîner sur les derniers propos du député qui
m'a précédé. Il a parlé de l'intervention heureuse
de l'Etat. Je me demande jusqu'où on peut être bien motivé
de se réjouir de ce bill qui nous est présenté.
Nous sommes tous d'accord sur le principe; depuis des années,
nous avons souhaité l'avènement d'une sidérurgie
intégrée, au Québec. Mais le bill, tel qu'il nous a
été soumis par le ministre des Finances et surtout avec le peu
d'explications qu'il nous a données, m'apparaît un peu comme une
invitation à lui donner un chèque en blanc. Il aurait
été préférable et très rationnel, comme l'a
mentionné le député de Beauce au début de ses
remarques, de nous donner l'état de la situation de Sidbec et de Dosco
et nous décrire ni plus ni moins quel était le marché de
l'offre et de la demande.
Deuxièmement, nous dire quel était l'horizon plein
d'espoir de Dosco, sur le marché. Or, le ministre des Finances a
été très silencieux ou très vague. Il nous a
invités à voter ce bill, d'une façon qui laissait croire
qu'il fallait s'en remettre complètement à un état
d'espoir, d'euphorie, si vous me permettez l'expression, pour croire que ce
serait miraculeux de voter ces quelques $100 millions pour pourvoir en
équipement une nouvelle fonderie. Il nous a donné très peu
de détails sur la possibilité de ce complexe
intégré de recourir par exemple, d'une façon directe,
à une exploitation rationnelle et efficace de mines. Il nous a
donné d'une façon très vague, encore là,
l'idée que l'alimentation de l'acier primaire pourrait être la
cause première d'un coût de revient trop fort et qui
empêcherait Sidbec et Dosco de devenir concurrentiel. Mais d'aucune
façon, à moins que je ne m'abuse, M. le Président, il ne
nous a tracé le tableau des possibilités de Sidbec et de Dosco
sur le plan de l'offre et de la demande.
Il serait essentiel, avant de voter une loi qui implique tout de
même au-delà de $125 millions ou $130 millions, de connaître
les possibilités de ce marché de l'offre et de la demande et de
savoir quel sera le rendement de la fonderie que Sidbec et Dosco veulent
établir à Contrecoeur. On nous dit qu'elle produira environ
500,000 tonnes, mais, encore là, ce sont des détails globaux qui
ne nous permettent pas, à mon sens en tout cas, de juger d'une
façon lucide du mérite du projet de loi qui nous est
présenté et surtout de l'invitation pressante d'accepter que ce
montant soit donné à Dosco et Sidbec.
M. le Président, en terminant, est-il possible au ministre des
Finances de nous donner, comme je le demandais au tout début, non pas
des généralités, mais des précisions? Quelles
sont les possibilités du marché pour Sidbec et Dosco et
quelles sont les chances de rentabilité à la suite de cet
investissement, en chiffres assez précis ou du moins avec des
projections rationnelles? Ce serait à l'avantage de tous les membres de
cette Chambre et le public pourrait avoir une meilleure connaissance des
désirs et des actions du gouvernement dans ce domaine.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que le ministre des Finances désire
exercer son droit de réplique avant de passer au comité?
M. Raymond Garneau
M. GARNEAU: M. le Président, j'ai peu de remarques à
ajouter. Sur le plan technique, vous comprendrez facilement que c'est un
domaine assez spécialisé. J'ai demandé à M. Gignac
d'être présent cet après-midi, il a été
retardé à cause de l'avion, mais on vient de m'informer qu'il
arrive justement. Alors, sur le plan technique, je pense qu'il pourra me
fournir les explications qui pourraient satisfaire les
députés.
Pour ce qui est des perspectives de Sidbec, évidemment, c'est une
question qui nous a intéressés au premier chef, lorsque la
demande nous est parvenue à l'effet que le gouvernement investisse $36
autres millions dans le capital-actions différé de Sidbec et
garantisse $30 millions auprès de la Caisse de dépôt et
placement. Les perspectives du côté du marché sont
excellentes. D'ailleurs, si ce n'était de cette assurance d'un
marché qui est déjà, comme je l'ai mentionné tout
à l'heure...
M. BERTRAND : Je ne veux pas interrompre le ministre, mais me permet-il
cette question? M. Gignac est-il arrivé?
M. GARNEAU: Oui, il est arrivé.
M. BERTRAND: Je me demande si nous ne trouverions pas tous profit
à entendre M. Gignac au comité, plutôt que d'être en
Chambre ici. Nous posons nos questions au ministre et le ministre se tourne
vers M. Gignac. On sait avec quelle facilité M. Gignac peut
répondre. On a déjà eu des séances de la
Régie des affaires gouvernementales. Il est clair et précis.
Alors, je suggérerais qu'on entende M. Gignac d'ici à six
heures.
M. LEVESQUE: C'est une excellente suggestion. Après consultation
avec le ministre des Finances, je suis prêt à faire cette
proposition. Cependant, est-ce qu'on croit que les cinquante minutes qui nous
restent nous permettraient de revenir et d'adopter la loi?
M. BERTRAND: On pourrait prendre les lois de la Justice.
En deuxième lecture, c'est adopté.
M. PAUL: La deuxième lecture est adoptée.
M. BERTRAND: Adopté. Référé au comité
en bas où l'on entendra M. Gignac.
M. LEVESQUE: Et on pourrait continuer en Chambre. C'est ça, la
proposition?
M. PAUL: Les lois de la Justice.
M. LEVESQUE: Si on veut me donner quelques instants pour vérifier
si le ministre de la Justice est disposible; autrement, on ajournera la
Chambre.
M. BERTRAND: Cela ne dérange pas tellement, parce que tous ceux
qui sont ici vont venir en bas.
M. LEVESQUE: C'est ça.
M. BERTRAND: Ceux qui n'y sont pas ne reviendront pas.
M. LEVESQUE: Dans ce cas-là, puisqu'il faut être pratique,
je compte bien que le reste de l'après-midi sera suffisant pour le
comité.
M. BERTRAND: Je le pense.
M. LEVESQUE: Cela voudrait dire que ça reporterait simplement
à demain après-midi l'adoption pro forma de la troisième
lecture et celle de l'autre bill qui est de concordance, celui de la Caisse de
dépôt et placement. Demain, à partir de trois heures, nous
pourrions procéder à l'étude des articles qui apparaissent
au feuilleton d'aujourd'hui; 22, 23, peut-être 30 et 31, si le ministre
de la Justice est prêt avec ses deux autres projets de loi, tout en
terminant, comme on l'a dit, les rapports au comité et les
troisièmes lectures, plus l'autre projet de loi qui est de
concordance.
M. PAUL: Et si nous avions terminé, M. le Président, ces
quatre projets de loi?
M. LEVESQUE: Voilà une bonne question.
M. BERTRAND: S'il n'y en a plus, on pourra ajourner.
M. LEVESQUE: J'essaie de faire plaisir à tout le monde. Il y a
des gens des deux côtés de la Chambre qui préfèrent
avoir tel projet de loi à telle date, mais nous tâcherons de nous
entendre demain, si nous finissons trop tôt.
M. PAUL: Très bien.
M. LEVESQUE: Alors, M. le Président, je rappelle simplement
à ceux qui sont ici que nous avons une réunion de la commission
des bills privés et des bills publics demain, à dix heures,
à la salle 81-A. Nous espérons, à ce moment-là,
terminer le travail de la commission des bills publics et privés pour la
présente
session. Je crois que le ministre des Finances aurait un mot à
dire.
M. GARNEAU: En fait, je me demande si je ne devrais pas attendre en
comité. Certains points avaient été soulevés par le
député de Beauce à l'effet que nous n'avions pas
donné beaucoup de documentation. Evidemment, il est impossible pour
nous...
M. BERTRAND : Ce serait mieux en comité.
M. GARNEAU: Je pense que je pourrais compléter en comité.
Il y avait aussi quelques aspects de la participation de l'Etat au
développement d'entreprises que je pourrais reprendre à ce
moment-là. Cela avait été soulevé par le
député de Gouin.
M. BERTRAND: Très bien.
M. DUMONT: M. le Président, la simple remarque du
député de Beauce était qu'hier nous avons
étudié la charte de la ville de Québec, par exemple, et
l'ancienne loi, la nouvelle loi et les commentaires à côté
pour 60 articles, cela s'est passé en deux heures. Son point de vue,
c'est ça. Avec la présentation d'un bill, est-ce qu'on ne
pourrait pas avoir de la part du gouvernement même là on se
permettra de le critiquer une explication de la loi telle qu'elle
existe, la nouvelle loi, les amendements, les commentaires à
côté. A ce moment, vous sauvez même du temps. C'est
l'efficacité du Parlement qui le demande.
M. GARNEAU: Je pense, M. le Président, que c'est la raison pour
laquelle cette Assemblée nationale a accepté de fournir aux
Oppositions des services de recherche.
M. BERTRAND: C'est lui qui peut nous donner les renseignements.
M. GARNEAU: C'est pour ça que vous avez des employés
à votre service. On a même...
M. DUMONT: ... il faut les reconnaître à la Fonction
publique. Ils ne sont pas encore acceptés.
M. LEVESQUE: M. le Président, je propose l'ajournement de la
Chambre à demain après-midi...
M. LE PRESIDENT: Un instant. M. LEVESQUE: Excusez-moi.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que cette motion de deuxième lecture
c'est assez important ...
M. BERTRAND: Adopté.
M. LE PRESIDENT: C'était officieusement; maintenant c'est
officiellement.
M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second
reading of this bill.
M. LEVESQUE: M. le Président, est-ce qu'on me permet une
suggestion avant d'adopter la deuxième lecture? Est-ce qu'on ne pourrait
pas c'est une suggestion que me fait le ministre des Finances
accepter la deuxième lecture de l'autre projet de loi et faire en
comité l'examen des deux projets de loi?
M. BERTRAND: La Caisse de dépôt?
M. LEVESQUE: Oui, qui est une concordance tout simplement.
M. BERTRAND: Moi, je n'ai aucune objection à accepter le
principe, quitte à faire l'étude en comité.
M. LEVESQUE: C'est ça.
M. BERTRAND: A ce moment, on a plus de renseignements. M. Gignac va tout
nous donner ça. Demain, M. Prieur pourra faire la même chose.
M. GARNEAU: M. le Président, justement, M. Prieur est ici
présentement. Il est arrivé parce que je ne savais pas quand nous
finirions. Si on siégeait peut-être un peu plus longtemps
après six heures et si on était capable de vider les deux bills
cet après-midi, moi je n'aurais pas d'objection.
M. BERTRAND: On n'aura pas le temps de vider les deux aujourd'hui.
M. GARNEAU: Même en dépassant six heures?
M. LEVESQUE: Pour le comité. M. GARNEAU: Pour le
comité.
M. BERTRAND: J'en doute parce que sur le projet de Sidbec, le Ralliement
créditiste et le Parti québécois auront des questions.
M. GARNEAU: Je vais demander à M. Prieur de rester jusqu'à
demain.
M. LEVESQUE: Un instant. Peut-être pourrions-nous, encore de
consentement, si ce n'est pas terminé, décider que certains
membres pourront continuer demain matin...
M. BERTRAND: Cela, c'est parfait.
M. LEVESQUE: ... dans la Chambre 91-A...
M. PAUL: D'accord.
M. LEVESQUE: ... en même temps que siégera la commission
des bills privés et publics.
M. BERTRAND: Aucune objection.
M. LEVESQUE: Au moment de l'ajournement en bas, vous pourriez vous
entendre.
M. BERTRAND: D'accord.
Projet de loi no 57 Deuxième lecture
M. LE PRESIDENT: Si je comprends bien, la motion de deuxième
lecture du bill 57 est également adoptée.
M. BERTRAND: Oui, la Loi modifiant la charte de la Caisse de
dépôt et placement du Québec.
M. LE SECRETAIRERE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: Maintenant, ces deux projets de loi sont
déférés à la commission des Finances.
M. BERTRAND: La commission des Finances. Après deuxième
lecture.
M. LEVESQUE: Tous ceux qui sont ici peuvent participer aux travaux de la
commission. Disons que c'est la commission des Finances.
M. LE PRESIDENT: La commission des Finances.
M. GARNEAU: Les députés qui sont membres de la commission
des Finances ne sont pas avisés.
M. BERTRAND: Ceux qui n'y sont pas seront avisés demain.
M. LE PRESIDENT: Maintenant, la Chambre ajourne ses travaux...
M. LEVESQUE: A demain après-midi, trois heures.
M. LE PRESIDENT: ... à demain après-midi, trois
heures.
(Fin de la séance 17 h 19)