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(Deux heures et demie de l'après-midi)
M. HYDE (président): Qu'on ouvre les portes. Let the doors be
opened.
A l'ordre, messieurs. Affaires courantes.
Présentation de pétitions. Lecture et réception de
pétitions. Présentation de rapports de comités
élus.
M. GABIAS: M. le Président, avant que le président du
Comité des privilèges et élections dépose le
rapport, me serait-il permis de lui demander si les chèques de Samson
& Marchand à M. Croisetlère ont été
reçus, si le billet de M. Lavergne a été reçu et si
l'original de la lettre de M. Casabon a été trouvé?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre messieurs. Je crois que ce sont des questions
qui devraient être posées en discutant du rapport après que
le rapport sera produit devant la Chambre. Il n'y a rien devant la Chambre pour
le moment.
M. BEAUPRE: Le Comité permanent des privilèges et
élections a l'honneur de soumettre à votre honorable Chambre son
deuxième et dernier rapport. Votre Comité a décidé
de présenter à cette Chambre son rapport adopté à
l'unanimité qui se lit comme suit: « Le Comité des
Privilèges et Elections avait à étudier une accusation
portée en Chambre le 30 juin 1964 par le député de
Trois-Rivières contre le Procureur général de la province,
M. René Hamel, député de Saint-Maurice suivant les
dispositions de l'article 196 du règlement.
Cette accusation se lit comme suit: « Je soussigné, Yves
Gabias, député du comté de Trois-Rivières, à
l'Assemblée législative du Québec, désire accuser
le député du comté de Saint-Maurice, d'un acte qui le rend
indigne de siéger en cette Chambre. « Le député de
Saint-Maurice, au cours du mois de Juillet ou d'août 1960, alors qu'il
avait été déclaré élu député
de ce comté, a reçu la somme de $1,500, soit quinze (15) billets
de $100 de monsieur Amédée Bellemare, âgé de 45 ans,
contracteur demeurant à Shawinigan-Est, dans la province de
Québec. « En considération de cette somme de $1,500, le
député de Saint-Maurice a donné, ou fait donner, un
contrat de $4,200 audit Amédée Bellemare, contrat intervenu le 8
août 1960, entre Amédée Bellemare et Patrick Bellemare
d'une part, et Samson & Marchand Inc., d'autre part, par lequel contrat
signé à Ste-Flore, comté de Saint-Maurice, ledit
Amédée Bellemare fournis- sait le gravier, le chargement, le
concassage pour le gravier de grosseur de 1 pouce moyennant le prix de $0.50 la
tonne pesée. Pour le gravier de 3 pouces le prix de $0.43 la tonne,
pesage compris. « Il s'agissait d'un contrat octroyé par le
ministère de la Voirie provinciale pour travaux sur le Boulevard
St-Onge. « Ladite somme de $1,500 a été remise par
Amédée Bellemare au député de Saint-Maurice dans
son bureau, au ministère du Travail, vers les trois heures de
l'après-midi. Après que la somme de $1,500 eût
été remise au député de Saint-Maurice, ce dernier a
immédiatement introduit les 15 billets de $100 dans la poche droite de
son veston (coat) et a dit à M. Amédée Bellemare: «
Je te remercie, tu es bien smatte » « Je prends la
responsabilité de la présente accusation et donne
immédiatement avis à cette Chambre que je lui proposerai de
procéder à une enquête pour constater si l'accusation est
fondée le tout conformément au règlement annoté de
l'Assemblée Législative. « Conformément au mandat
qui lui avait été confié, le Comité des
privilèges et élections a tenu plusieurs séances et
entendu un grand nombre de témoins afin de vérifier le
bien-fondé de l'accusation dont le député de
Trois-Rivières avait, conformément au règlement de
l'Assemblée législative, assumé l'entière
responsabilité. « Le témoin principal, essentiel, fut sans
contredit Amédée Bellemare, lequel a répété
son accusation contre l'honorable René Hamel, déclarant devant le
Comité, tout comme il l'avait fait lors de l'interrogatoire du 12 juin
1962 en Cour de Faillites, et comme il l'avait affirmé dans sa
déclaration assermentée du 25 octobre 1962, qu'il était
seul à seul, quand il aurait remis l'argent à M. Hamel. «
Deux critères fondamentaux de la crédibilité du
témoin Amédée Bellemare doivent être utilisés
dans l'analyse des témoignages rendus devant le Comité: 1- La
provenance de l'argent qu'Amédée Bellemare aurait remis au
ministre Hamel; 2- L'obtention par Amédée Bellemare, en retour,
d'un ou plusieurs contrats. « Sur la provenance de l'argent, la preuve au
dossier démontre que le témoignage d'Amédée
Bellemare ne peut être accepté. Il suffit en effet d'opposer le
témoignage du gérant de banque, M. Emile Morin, et celui de son
assistant, M. Gosselin à celui de Bellemare pour en avoir la certitude.
Bellemare a juré catégoriquement qu'il a reçu $1,500 de la
Banque canadienne nationale, Sème rue à Shawinigan, après
avoir dé-
claré au gérant de ladite banque, M. Emile Morin, que
c'était pour remettre au député Hamel. Bellemare a
juré de plus que ledit gérant Emile Morin lui a alors remis 15
billets de $100.
Or, les dossiers de la Banque canadienne nationale, succursale de la
5ème Rue à Shawinigan, contredisent formellement ce
témoignage. Le gérant de banque, M. Morin, est des plus
précis. Les retraits effectués du compte des frères
Bellemare du 1er juin au 30 août 1960, démontrent à
l'évidence, qu'aucun montant de $1,500 n'a été remis
à M. Amédée Bellemare. De plus, le registre des
prêts établit qu'Amédée Bellemare n'a pas
emprunté la somme de $1,500 pendant cette période. Enfin, le
gérant, M. Morin, nie formellement avoir remis 15 billets de $100
à Amédée Bellemare au cours des mois de juillet et
août 1960, tout comme il nie que ledit Bellemare lui ait
déclaré qu'il devait verser un tel montant à M.
René Hamel pour obtenir le contrat du Boulevard St-Onge. « A ces
témoignages, il faut ajouter la déclaration assermentée de
M. W. Edmond Casabon, oncle d'Amédée Bellemare. Le Comité
a été impressionné par la franchise de ce témoin,
lequel a déclaré textuellement ce qui suit (exhibit C-36):
« J'ai demandé à l'honorable René Hamel si
c'était possible de favoriser Amédée Bellemare pour du
gravier. Il m'a répondu: « Jamais je le recommanderai, je vais
plutôt le maudire en prison. » « J'ai demandé
pourquoi? Il m'a dit: « Il est venu pour m'offrir de l'argent, ça
marche pas comme ça. » « Interrogé sur ce qu'il avait
fait à la suite de son entrevue avec l'honorable Hamel, M. Casabon a
répondu: « J'ai rencontré Amédée Bellemare,
je lui ai dit: « T'as offert de l'argent au ministre? » « Il
a dit « Oui, ç'a pas marché. »
Je lui ai dit: « Si tu m'avais pas eu tu serais peut-être en
prison aujourd'hui. » « Plus loin, interrogé sur la
réponse de son neveu, M. Casabon déclare, sous serment, ce qui
suit: « Il m'a dit: « J'ai pas peur, on était seuls tous les
deux, mon serment vaut le sien. » « Le deuxième
critère permettant d'établir la crédibilité du
témoin Amédée Bellemare, c'est l'obtention par lui et son
frère d'un ou plusieurs contrats. Or, tous les témoins qui ont eu
ou auraient pu avoir quelque connaissance des faits mentionnés dans
l'accusation ont déclaré, sans hésitation aucune, que ni
M. René Hamel, ni son secrétaire exécutif, ni personne en
son nom n'est intervenu pour demander ou suggérer de donner ou d'enlever
aux frères Bellemare le sous-contrat de fourniture du concassé
pour les travaux du Boulevard St-Onge. MM. Marchand et Samson, entrepreneurs,
ainsi que MM. Larose et Favreau, du ministère de la Voirie, ont
été particulièrement catégoriques. La preuve
établit, par ailleurs, que les frères Bellemare n'ont obtenu
aucun contrat du ministère de la Voirie après le 22 juin 1960.
Ils ont tout au plus fourni le concassé pour les travaux du Boulevard
St-Onge, ce qui, d'après l'établissement de prix du
ministère de la Voirie, leur était destiné dès juin
1959. D'autres commandes, plutôt minimes, pour l'achat de gravier ont pu
être exécutées après le 22 juin 1960. Elles avaient
été accordées avant cette date. La preuve démontre,
en résumé, et cela sans contradiction aucune, que Bellemare n'a
obtenu aucun contrat du gouvernement par l'influence du député de
Saint-Maurice. « Selon son propre témoignage, le
député de Trois-Rivières a pris à son compte
l'accusation d'Amédée Bellemare, sans en vérifier la
véracité. Il aurait pu faire, avant de poser un geste d'une
gravité aussi exceptionnelle, ce qu'un confrère, Me Pierre
Trudel, a fait à sa demande après le 30 juin 1964, savoir;
vérifier auprès du gérant de banque la provenance des
$1,500. Il aurait pu également vérifier auprès de Samson
& Marchand Inc. les conditions du contrat intervenu le 8 août 1960
entre cette société et les frères Bellemare. «
Acceptant volontairement de témoigner, l'honorable René Hamel a
déclaré: « Maintenant, je veux, sous tous les serments que
j'ai prêtés, déclarer que jamais, ni avant
l'exécution de son contrat, ni pendant l'exécution du contrat, ni
après l'exécution du contrat, Amédée Bellemare ne
m'a remis, ni $l,500, ni quelque montant que ce soit ». « En
conséquence, le Comité en vient à la conclusion suivante:
la preuve révèle que l'accusation portée par le
député de Trois-Rivières contre le député de
St-Maurice n'est pas fondée.
Comité des privilèges et élections ».
Messieurs, je dépose en même temps tous les documents, tous
les procès-verbaux des assemblées de même que tous les
exhibits qui ont été produits lors de l'enquête.
M. GABIAS: M. le Président...
M. LESAGE: M. le Président, je propose l'adoption du rapport par
la Chambre.
M. GABIAS: M. le Président, préalablement,...
M. LESAGE: Il n'y a pas de préalablement.
M. GABIAS: ... en vertu de Particle458 des règlements qui se lit
comme suit: « Les recommandations d'un comité spécial de
même que les résolutions ou écrits qu'un comité
spécial présente avec son rapport peuvent être
agréés, rejetés ou agréés avec des
amendements ».
Je vous réfère également à la note No 3
concernant l'article 458; « Quand un rapport ne contient pas de
résolution ou de recommandation, il ne peut être proposé de
l'adopter. Si on désire le discuter, on propose qu'il soit pris en
considération à une date ultérieure. Lors de sa prise en
considération, on peut proposer toute motion qui se rattache au sujet
qui fait l'objet de ce rapport. »
Alors, je soumets, M. le Président, que la proposition faite par
l'honorable premier ministre ne s'applique pas dans ce cas parce que le rapport
ne contient aucune résolution et aucune recommandation.
Deuxièmement, c'est un droit qui est accordé à tout
député de demander, après que le rapport est
déposé, qu'il soit pris en considération à une date
ultérieure.
Je vous demande, M. le Président, je fais la motion suivante, que
le rapport soit étudié vendredi de cette semaine, le 31 juillet
1964.
M. LAPORTE: M. le Président, en vertu justement de l'article 458
que le député de Trois-Rivières vient d'invoquer, je
soumets que, premièrement, sa motion est irrecevable parce qu'il est
clair que le rapport qui nous est soumis par le Comité des
privilèges et élections contient une recommandation, savoir: que
l'accusation qui a été portée...
M. JOHNSON: Non.
M. LAPORTE: ... contre le député n'estpas
fondée.
M. JOHNSON: M. le Président, j'invoque le règlement.
M. LAPORTE: Bien, je pourrais terminer mon point de vue?
M. JOHNSON: J'invoque le règlement. La motion en discussion
actuellement n'est pas la motion du député des
Trois-Rivières, c'est la motion du premier ministre qui demande
l'adoption du rapport.
M. LESAGE: C'est ça!
M. LAPORTE: Alors, M. le Président, en vertu de 458, le rapport
qui contient quelques résolutions ou recommandations peut être
adopté ou rejeté en tout ou en partie. C'est ce que la Chambre
doit faire actuellement. Et, deuxièmement, les rapports de tout
comité spécial ne peuvent être discutés que sur une
motion préalablement annoncée. Alors, la motion du
député de Trois-Rivières est certainement irrecevable
parce qu'elle n'a pas été annoncée et, du propre aveu du
chef de l'Opposition, ce qu'il y a actuellement devant la Chambre, c'est la
motion du premier ministre à l'effet que le rapport qui vient
d'être lu soit reçu par cette Chambre.Alor s, je propose que nous
passions à cet item, que la motion du premier ministre soit prise en
considération.
M. LESAGE: M. le Président, j'amende ma motion et je demande que
le rapport soit reçu par la Chambre.
M. JOHNSON: Bon, à cette occasion-là.
M. GABIAS: Sur ce point, M. le Président, je demanderais, tel que
le règlement le permet et, je crois que, non seulement je crois, mais je
suis certain qu'on ne peut donner un avis préalable ou donner un avis
annonçant notre motion avant aujourd'hui, puisque le rapport
n'était pas dans cette Chambre. Et comment pouvons-nous annoncer une
motion avant que le rapport soit déposé? A ce moment-là,
cet avis-là serait déclaré irrecevable parce que
prématuré et que la Chambre ne pourrait pas se rendre à
notre demande. D'ailleurs, à plusieurs reprises, vous avez
décidé dans ce sens lorsqu'il s'agissait du Comité des
comptes publics et vous avez décidé également dans ce sens
lorsqu'il s'agissait de rapports concernant le bill 54, à la
présente session.
Alors, je fais la motion, je donne avis, suivant la troisième
note contenue à la page 139 du règlement annoté de
l'Assemblée Législative, c'est sur demande, et uniquement par une
demande, que nous pouvons demander que l'étude du rapport soit
reportée à une date ultérieure.
Alors, je demande à cette Chambre que, en amendement à la
motion du premier ministre le sous-amendement suivant, l'amendement suivant:
que le rapport soit étudié vendredi.
M. LESAGE: Vote, M. le Président. M. LE PRESIDENT: A
l'ordre...
M. JOHNSON: M. le Président vous allez nous laisser parler.
M. LE PRESIDENT: Sur la motion, l'amendement proposé par
la...
M. JOHNSON: Vous allez nous laisser parler sur la motion du
député des Trois-Rivières.
M. LE PRESIDENT: Sur la motion d'amendement proposé.
M. JOHNSON: Il est clair, M. le Président, en vertu de l'article
457 que je cite, que je citerai tantôt, que nous n'avons pas le droit de
discuter du rapport, si ce n'est sur une motion préalablement
annoncée. L'article 457 se lit comma suit: « Les rapports de tout
comité spécial ne peuvent être discutés que sur une
motion préalablement annoncée. » Et l'on sait
déjà, je pense que c'est admis par tout le monde, que cette
règle contenue à l'article 457 du règlement s'applique
également aux procédés des comités permanents de la
Chambre et, évidemment, au Comité des privilèges et
élections dont il est question.
Donc, on ne peut discuter de ce rapport que sur une motion
préalablement annoncée. Il faut, pour en discuter, qu'un
député donne un avis au feuilleton...
M. LESAGE: Non.
M. JOHNSON: ... qui paraîtra normalement demain...
M. LESAGE: Non.
M. JOHNSON: ... et, deuxièmement, que sa motion revienne
vendredi.
M. LESAGE: Non.
M. JOHNSON: Si la Chambre veut donner son consentement unanime, la
motion pourrait être, pourrait venir demain et même aujourd'hui, et
même aujourd'hui! avec le consentement unanime...
M. LESAGE: Non.
M. JOHNSON: ... de la Chambre. Il n'y a rien qui nous empêche
d'accorder ce consentement unanime mais, suivant le règlement, il
faudrait déposer l'avis qui paraîtra demain au feuilleton...
M. LESAGE: Non.
M. JOHNSON: ... et qui prendra sa place après-demain vendredi, le
31 juillet 1964. Est-ce que l'on va discuter, M. le Président, le droit
à aucun membre de cette Chambre de discuter du rapport d'un
comité élu où d'un comité per- manent? Il n'y a
personne dans cette Chambre, encore moins le premier ministre, j'ai lieu de le
présumer, qui voudrait refuser ce droit élémentaire,
à quelque député que ce soit, de discuter du contenu d'un
rapport de comité, comité permanent ou comité
spécial.
Quelle qu'ait été l'attitude du député
vis-à-vis ce rapport, quel qu'ait été son vote, je
soutiens qu'il est de l'essence même des droits et des privilèges
d'un député de cette Chambre de discuter d'un rapport. Or, le
règlement est clair, il n'y a qu'une manière de le faire: c'est
sur une motion préalablement annoncée. Et pour permettre au
député de faire une motion préalablement annoncée,
il faut, M. le Président, naturellement convenir que la Chambre a le
droit de remettre à des jours subséquents à une date
ultérieure, l'étude dudit rapport. C'est tellement le cas, M. le
Président, qu'à la note 3 qu'a citée le
député tantôt, de l'article 458, on peut lire ceci: «
Quand un rapport ne contient pas de résolution et de recommendation
» (ce qui est le cas du présent rapport, je le fais remarquer ),
« il ne peut être proposé de l'adopter. » Donc la
motion du premier ministre tantôt n'était pas conforme au
règlement.
La note continue: « Si on désire le discuter, on propose
qu'il soit pris en considération à une date ultérieure.
» (C'est ce que le député de Trois-Rivières vient de
faire.) « Lors de la prise en considération » (
évidemment dudit rapport) « on peut proposer toute motion qui se
rattache au sujet qui fait l'objet du rapport. » Et comme autorité
au soutien de cette note M. le Président, on cite B-555, BE-No 67, C-No
1958.
On sait, en référant à la table des
abréviations, que B. désigne « Bourinot's Parliamentary
Procedure, 3rd Edition, 1903: » Be., «Beauchesne's Parliamentary
Rules and Forms, House of Commons of Canada, 2nd Edition, 1927, » et que
C, ça réfère à « Law and Practice of
Legislative Assemblies, par Cushing, 9th Edition, 1874. »
Je soumets donc, M. le Président, que cette Chambre devrait
remettre, selon que le demande la motion du député de
Trois-Rivières, l'étude du rapport à vendredi le 31
juillet afin qu'il soit permis au député de
Trois-Rivières, s'il le jugeait à propos, ou à n'importe
quel député de cette Chambre, de donner un avis préalable
d'une motion, condition essentielle pour qu'on discute du rapport.
M. LESAGE: M. le Président, le chef de l'Opposition a dit tout
à l'heure que la Chambre pouvait donner son consentement unanime
à ce que le rapport soit étudié dès maintenant.
Je demande à la Chambre, aux députés de la Chambre,
de donner ce consentement unanime à ce qu'il soit étudié
aujourd'hui.
M. GABIAS: D'ailleurs, c'était mon intention de revenir
avec...
M. LESAGE: Bon, bien alors! M. GABIAS: D'accord.
M. LESAGE: Hier, après tout, M. le Président, si on me
permet, juste un instant, je suis absolument... Tous les députés,
presque tous les députés, qu'ils soient membres du Comité
ou non-membres du Comité, ont assisté aux témoignages, aux
délibérations. Il y avait plus de députés, je
pense, au Comité qu'on en voit en Chambre. Tout le monde est au courant.
Tout le monde était d'accord pour qu'on vide cette question le plus
rapidement possible. Le rapport a été voté unanimement par
tous les membres du Comité présents hier, il en manquait un. Il
me semble que la Chambre devrait donner son consentement unanime à ce
que le rapport soit discuté et étudié maintenant.
M. LE PRESIDENT: Alors c'est adopté? Je comprends que le rapport
est reçu et que la Chambre consente à ce que l'on discute le
rapport immédiatement.
M. GABIAS: Très bien.
M. JOHNSON: M. le Président, quant à moi, je suis
très heureux d'accorder mon consentement, maintenant que le premier
ministre a changé d'avis sur les règlements, tant mieux!
M. LESAGE: Je n'ai pas changé d'avis.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'on pourrait discuter du rapport? Est-ce que
le député de Trois-Rivières voudrait parler sur le
rapport?
M. GABIAS: Oui, M. le Président. Avant d'argumenter sur le
rapport,...
M. LE PRESIDENT: Je crois que je devrais peut-être faire la mise
au point avant de commencer et rappeler à tous les députés
qu'on est en Chambre et que les règles ordinaires en Chambre devraient
s'appliquer. Maintenant, on n'est pas en comité. Cela veut dire qu'un
député, quand il prend la parole, peut parler une fois sur la
discussion et il ne peut pas reprendre la parole comme si on était en
Comité plénier.
M. GABIAS: Je vous remercie, M. le Président. Je tenterai
d'être le plus bref possible, mais, au préable, je demanderais
à l'ex-président du Comité des privilèges et
élections...
M. LESAGE: Pourquoi ex-président?
M. GABIAS: Non, de fait, il n'est pas dissous; il va être dissous
à la prorogation des Chambres. Parfait! Est-ce que le président
du Comité des privilèges et élections a reçu des
documents de Samson & Marchand, soit des chèques, concernant l'achat
de gravier chez un monsieur Normand Croisetière?
Deuxièmement a-t-il reçu le billet qui était en
possession de M. Lavergne et que nous retrouvons dans un acte
hypothécaire intervenu entre M. Amédée Bellemare et M.
Lavergne, et troisièmement, s'il a en sa possession l'original d'une
lettre en date du mois de septembre 1960 écrite à l'honorable
Hamel par M. Casabon.
M. BEAUPRE: M. le Président,...
M. GABIAS: Evidemment, M. le Président, je ne perds pas mon droit
de parole j'espère?
M. CADIEUX: Oh oui.
UNE VOIX: C'est là-dessus.
M. LE PRESIDENT: Je crois que le député de
Trois-Rivières devrait continuer s'il a d'autres représentations
à faire...
M. GABIAS: Vous voyez, M. le Président, comme il faut être
prudent dans cette Chambre.
M. CADIEUX: C'est sûr qu'il faut être prudent.
M. GABIAS: Il faut être prudent.
M. le Président, le rapport qui vient d'être soumis
à la Chambre, par le président du Comité des
privilèges et élections, à la page 5, dit ce qui suit:
« Selon son propre témoignage, le député de
Trois-Rivières a pris à son compte l'accusation
d'Amédée Bellemare sans en vérifier la
véracité. Il aurait pu faire, avant de poser un geste d'une
gravité aussi exceptionnelle, ce qu'un confrère, Me Trudel a fait
à sa demande après le 30 juin 1964, savoir: vérifier
auprès du gérant de banque la provenance des $1,500. Il aurait pu
également vérifier auprès de Samson & Marchand Inc.,
les conditions du contrat intervenu le 8 août 1960, entre cette
société et les frères Bellemare. »
Je tiens à dire à cette Chambre, M. le Président,
et je réfère les membres de cette Chambre à l'accusation
que je portais le 30 juin, et chacun des mots qui apparaît dans cette
accusation a été puisé dans, soit l'affidavit ou la
déclaration assermentée donnée par M. Amédée
Bellemare le 12 juin 1960, à l'occasion d'un interrogatoire devant la
Cour de Faillites, au palais de justice de Trois-Rivières, ou soit dans
la déclaration assermentée de M. Amédée Bellemare
devant Me Chartier, le 25 octobre 1962, dans les circonstances que le
comité a connues.
Partant de ce fait, M. le Président, partant du fait que chacun
des mots de l'accusation que j'ai portée contre le député
de St-Maurice était puisé dans un affidavit du 12 juin 1962 ou
dans celui du 25 octobre 1962, je dis, M. le Président, que je n'avais
pas à vérifier du tout la véracité de ces
déclarations.
La même accusation contient également le mot à mot
d'un contrat intervenu le 8 août 1960 entre Samson & Marchand Inc.,
et Amédée Bellemare et Patrick Bellemare. Ce contrat a
été produit comme exhibit C-1 devant le Comité des
privilèges et élections.
Etant donné que chacun des mots contenus dans la
déclaration du 30 juin 1964 provient, soit comme je l'ai dit
tantôt de l'affidavit du 12 juin 1960, soit de l'affidavit du 25 octobre
1962, 12 juin 1962 et 25 octobre 1962, ou qu'il s'agisse d'un contrat reconnu
comme authentique et déposé comme C-1, ou de mots puisés
dans le règlement annoté de l'Assemblée
Législative, je dis, M. le Président, que je n'avais pas du tout
à vérifier la véracité du contenu de
l'accusation.
Il est reconnu à travers toute cette province que le mode de
témoigner devant quelque Cour que ce soit, que le mode de
témoigner devant quelque comité que ce soit, c'est à la
suite de l'assermentation d'un témoin. Qu'une personne témoigne
devant la Cour supérieure, qu'elle témoigne devant la Cour de
magistrat, qu'elle témoigne devant une Cour criminelle, Session de la
paix, qu'elle témoigne devant la Cour municipale, qu'elle
témoigne devant la Cour des commissaires ou qu'elle témoigne
devant un comité de cette Chambre, c'est à la suite d'une
assermentation que cette personne peut témoigner.
Et s'il fallait que nos cours de justice ou que les comités de la
Chambre soient obligés de vérifier, de faire enquête sur
chacune des déclarations faites devant la Cour, je dis, M. le
Président, qu'il n'y aurait jamais moyen d'administrer la justice dans
cette province.
On me reproche de ne pas avoir accepté des déclarations
assermentées ou plutôt d'avoir accepté des
déclarations assermentées, M. le Président. C'est le mode
usuel lorsque l'on veut être certain qu'une déclaration d'une
personne, qu'elle soit faite devant une Cour de justice ou en dehors d'une Cour
de justice, le mode usuel, coutumier et accepté partout, c'est la
déclaration sous serment. Et dès qu'on est en possession d'une
déclaration assermentée, on n'a plus à vérifier la
véracité des déclarations contenues dans cet affidavit,
sauf si on veut l'attaquer. Et je ne sache pas que aucun des deux, aucune des
deux déclarations assermentées que j'ai déposées
devant le Comité des privilèges et élections et sur
lesquelles je me suis basé pour porter mon accusation, je ne sache pas
que l'une ou l'autre de ces déclarations assermentées ait
été attaquée et ait été rejetée,
annulée.
M. LAPALME: Est-ce que le député de Trois-Rivières
me permettrait de lui poser une question?
M. GABIAS: Du moment que je ne perds pas mon droit de parole, M. le
Président.
M. LAPALME: Non. Je voudrais faire remarquer tout d'abord une chose
qu'il sait, c'est que je n'étais pas membre du Comité des
Privilèges et Elections et que je n'ai assisté qu'à deux
parties de séance. Or, l'une des séances au moment où j'ai
assisté se déroulait hier alors que le Comité
rédigeait le paragraphe dans lequel on dit que le député
de Trois-Rivières, je résume, n'a pas vérifié les
faits ou la véracité des témoignages. Et au moment
où je me trouvais au Comité, ce paragraphe a été
adopté par tous les membres du Comité, y compris le
député de Trois-Rivières. Or, comme aujourd'hui il dit
qu'il n'était pas obligé de procéder de la façon
qu'on indique, il y a quelque chose que je ne comprends plus. Je voudrais
savoir quelle est la position exacte du député de
Trois-Rivières dans un cas comme celui-ci?
M. GABIAS: La position du député de Trois-Rivières
est bien claire. Hier après-midi devant le Comité, je me suis
levé et j'ai dit: « Je n'ai pas vérifié le contenu
des affidavits. » Mais j'ai référé le Comité
lorsqu'on était à étudier ce rapport en disant: «
J'ai consulté l'interrogatoire sous serment de M. Amédée
Bellemare et qui est produit comme C-5 », j'ai ajouté: «
j'ai également consulté la déclaration produite comme C-6
», une déclaration assermentée de M. Bellemare en date du
25 octobre 1962. Si ça n'apparaît pas dans le rapport, M. le
Président, je l'ai soulevé.
Et ma position est bien simple. J'avais fait une déclaration,
hier, devant le Comité, avant même que le président lise
une ligne, ou un mot de son projet de rapport, et j'ai admis qu'à la
suite des faux témoignages qui ont été rendus devant le
Comité des privilèges et des élections...
M. LESAGE: M. le Président, objection. Il n'est pas prouvé
que des faux témoignages aient été rendus devant le
Comité des privilèges et élections.
M. GABIAS: M. le Président, je lis la déclaration qui a
été déposée comme exhibit C-47 hier
après-midi devant le Comité des privilèges et des
élections et pas une personne, pas un membre de ce Comité n'a
objecté à la production de cette déclaration. « Le
30 juin 1964, j'accusais le député de St-Maurice de s'être
rendu coupable d'un acte qui le rendait indigne de siéger dans la
Chambre. Le Comité des privilèges et élections fut
convoqué, l'enquête est maintenant close. Après avoir
entendu et lu les témoignages, je n'hésite pas à
déclarer que des témoins ont rendu de faux témoignages. De
plus, des documents originaux n'ont pas été
déposés. Dans de telles circonstances, il est de mon devoir de
déclarer que l'accusation portée contre le député
de St-Maurice n'est pas prouvée. »
C'est la déclaration que j'ai faite avant même
l'étude du projet du rapport, et il est clair que lorsqu'il s'est agi,
et je l'ai déclaré au Comité, d'adopter le rapport, pourvu
qu'il apparaisse dans ce rapport que la preuve ne révélait pas
que l'accusation était fondée, j'étais satisfait, M. le
Président, et telle est la conclusion de ce rapport qui vient
d'être déposé. « En conséquence, le
Comité en vient à la conclusion suivante: la preuve
révèle que l'accusation portée par le député
de Trois-Rivières contre le député de St-Maurice n'est pas
fondée. »
Je suis satisfait, M. le Président, pourvu que l'on
réfère à la preuve qui a été faite devant le
Comité, mais c'est précisément cette preuve-là,
dans laquelle il y a de faux témoignages, et dans laquelle il y a des
documents originaux qui n'ont pas été produits. C'est pourquoi je
suis en droit de discuter ce que contient ce rapport en ce qui concerne mon
attitude, en ce qui concerne ce que j'ai, moi-même, déclaré
être une preuve parfaite le 30 juin 1960.
M. LAPORTE: Le député de Trois-Rivières parle
toujours sur le point d'ordre soulevé par le premier ministre?
M. GABIAS: Non.
M. LAPORTE: Parce que s'il est question des faux témoignages moi
je voudrais»..
M. GABIAS: Je pense que j'ai répondu, M. le
Président...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs. Si je comprends bien, le
député de Trois-Rivières exprime ses opinions
personnelles.
M. GABIAS: C'est ça. C'est pour ça que je crois que je
suis justifié de faire part à cette Chambre, parce que c'est
cette Chambre qui va décider de l'acceptation de ce rapport, c'est cette
Chambre qui va décider si on doitl'amen-der, c'est cette Chambre qui va
décider si l'on doit le rejeter. Et suivant qu'une décision doit
être rendue par cette Chambre, je dis que j'ai le droit d'expliquer le
rapport qui vous est soumis, et j'ai le droit également de discuter de
la phraséologie contenue dans ce rapport. Et ce rapport...
M. LE PRESIDENT: Je ne voudrais pas interrompre le député
de Trois-Rivières. Je voudrais être bien certain où on en
est rendu à ce stade. J'avais compris que le rapport a été
lu, qu'il a été reçu par la Chambre, et là on
discute du rapport. On pourrait proposer, d'après la note, on pourrait
peut-être proposer des motions, mais moi je considère que le
consentement unanime du rapport a été lu, et reçu par la
Chambre.
M. GABIAS: M. le Président, il est dit dans ce rapport que j'ai
pris à mon compte une accusation sans en vérifier la
véracité. J'ai le droit d'indiquer à cette Chambre
où j'ai puisé les éléments qui ont constitué
mon accusation ou l'acte d'accusation que j'ai portée contre le
député de St-Maurice.
Il s'agissait donc de deux déclarations assermentées qui
n'ont pas été contestées, qui n'ont pas été
déclarées nulles, et il s'agissait également d'un contrat
intervenu entre deux parties, contrat authentique qui a été
adopté et accepté et reconnu par le Comité des
privilèges et élections.
Est-ce que j'avais lieu, M. le Président... M'aurait-il fallu
attaquer les déclarations assermentées? M'aurait-il fallu mettre
en doute la véracité de la déclaration assermentée
de M. Amédée Bellemare dans son dossier de faillite? M'aurait-il
fallu attaquer la déclaration assermentée d'Amédée
Bellemare, le 25 octobre 1962, en présence de personnes honnêtes
et que je connaissais et qui ont témoigné davant le
Comité? Est-ce que je devais mettre en doute ces déclarations
assermentées?
Mais il y a plus, et c'est la base de tout notre système
judiciaire! Déclarations assermentées écrites ou verbales,
et ce sont ces témoignages que l'on prend pour rendre une
décision. J'étais justifié de croire ces
déclarations assermentées.
M. LACROIX: Est-ce que le député de Trois-Rivières
me permettrait une question, une petite question? Si le député de
Trois-Rivières a cru la déclaration assermentée de M.
Amédée Bellemare, pourquoi n'a-t-il pas tenu compte de la
déclaration solennelle de l'honorable René Hamel qui était
aussi bien que celle de M. Bellemare?
M. GABIAS: M. le Président, j'en viens à cette partie et,
ne craignez pas, nous allons regarder tous les éléments que
j'avais entre les mains.
Je dis que je n'avais pas à faire moi-même la contestation
de ces deux affidavits, je n'avais pas à les attaquer devant les cours
de justice. Mais il y a une personne, par exemple, qui, elle, avait
intérêt à attaquer la déclaration assermentée
d'Amédée Bellemare du 12 juin 1960, et c'est le
député de St-Maurice qui avait cet intérêt. Et le
député de St-Maurice ne l'a pas fait. Je comprends qu'il ne
connaissait pas l'existence de l'assermentation du 25 octobre 1962, mais il
connaissait l'existence de la déclaration d'Amédée
Bellemare devant la Loi de Faillites. Et le député de St-Maurice
n'a pas attaqué cette déclaration assermentée.
M. le Président, qu'est-ce qu'a fait, ensuite, le
député de Trois-Rivières, étant en possession de
ces deux documents assermentés, ou plutôt du premier; celui du 12
juin 1960? Le député de Trois-Rivières ne s'est pas
caché et, devant une grande foule, il a répété
l'accusation assermentée d'Amédée Bellemare, le 14 octobre
1962, au manège militaire deTrois-Rivières. Et à ce moment
il a dit au ministre, M. Hamel: « Si la déclaration
d'Amédée Bellemare est fausse, dites-le-nous, mais poursuivez
Amédée Bellemare ! ».
Et si ce que je dis n'est pas vrai, M. le Président, je disais au
ministre: « Poursuivez-moi devant les cours de justice ».
L'honorable Hamel n'a pas poursuivi Amédée Bellemare et il
ne m'a pas poursuivi. J'étais donc encore justifié de croire le
contenu de cette déclaration assermentée du 12 juin 1960.
M. le Président, qu'a fait le député de St-Maurice?
Il a répondu par la voix des journaux, dans les journaux du temps (du 24
octobre 1962) et il a remis cette déclaration à tous les
journaux: « C'est devant M. Louis-Philippe Pigeon que l'honorable
René Hamel a signé son démenti catégorique
après avoir pris connaissance dans « L'Action » (il s'agit
du journal « L'Action catholique ») et dans d'autres journaux des
paroles de M. Gabias et il déclare, entre autres, premièrement:
« Je n'ai jamais, ni directement, ni indirectement, ni personnellement,
ni par intermédiaire, exigé, sollicité, demandé,
accepté ou reçu d'Amédée Bellemare ou de qui que ce
soit un montant quelconque dans le but de recommander l'obtention d'un contrat,
d'une position, d'une licence, d'un privilège ou d'une faveur quelconque
du gouvernement ou de toute autre personne ». « D'après les
renseignements que me transmet le ministère de la Voirie,
Amédée Bellemare n'a pas eu, en 1960, de contrats de ce
ministère pour travaux sur le Boulevard St-Onge. Le dernier contrat
important accordé par le ministère de la Voirie à
Amédée Bellemare l'était pour un montant de $6,452.36 ou
$6,452.26 et remonte au 20 mai 1960, c'est-à-dire en pleine campagne
électorale, 32 jours avant les élections de 1960 et 46 jours
avant mon assermen-tation dans le Cabinet Lesage. « Quatrièmement,
si je n'ai pas, avant ce jour, nié la déclaration qu'aurait faite
Amédée Bellemare dans sa déposition de failli, c'est que,
n'ayant ni Guépé ou ni Gestapo comme dans l'Allemagne d'Hitler,
je n'en ai pas été informé. « Cinquièmement,
la déclaration de cet individu, telle qu'elle apparaît dans
« L'Action » (toujours « L'Action catholique ») est
fausse et mensongère et donne la mesure du mépris que
mérite son auteur. « Je fais la présente
déclaration, la croyant consciencieusement vraie et sachant qu'elle a la
même force et le même effet que si elle était faite sous
serment, en vertu de la Loi sur la preuve du Canada. « René Hamel,
ministre du Travail ».
M. le Président, je réfère cette Chambre au Code
criminel, à la Loi de la preuve, que j'ai consulté dans le temps,
chapitre 307, l'article 13 ou plutôt le chapitre intitulé: «
Serment et affirmation ». Article 15: « Si une personne tenue ou
désireuse de faire un affidavit ou une déposition dans une
procédure ou en une circonstance dans laquelle, ou au aujet d'une
affaire à propos de laquelle un serment est exigé ou permis, soit
en entrant en fonction soit autrement, refuse ou s'il lui répugne, pour
des motifs de scrupules de conscience, d'être assermentée, la Cour
ou le juge ou autre fonctionnaire, ou autre personne autorisée à
recevoir des affidavits où des dépositions permet à cette
personne, au lieu d'être assermentée, de faire une affirmation
solennelle dans les termes qui suivent savoir;
« Je (a) (b) affirme solennellement etc. laquelle affirmation
solennelle a la même valeur et le même effet que si cette personne
avait prêté serment suivant la formule ordinaire. Tout
témoin, deuxième paragraphe, tout témoin
dont le témoignage est admis ou qui fait une affirmation sous
l'autorité du présent article ou de l'article 14 est passible de
mise en accusation et de punition pour parjure à tous égards,
comme s'il avait été assermenté. » Or, M. le
Président, après avoir bien lu cet article 15, après avoir
pris connaissance de la formule qui doit nécessairement être
utilisée si l'on veut que la déclaration faite en vertu de la
« Loi de la preuve » soit acceptable, il faut nécessairement
prendre les mêmes mots, exactement les mêmes mots que ceux
prévus par la « Loi de la preuve ». Or, dans la
déclaration de l'honorable Hamel du 24 octobre 1962, les mots
obligatoires pour que ce soit une assermentation en vertu de la « Loi de
la preuve » n'ont pas été utilisés.
M. le Président, de plus, la déclaration du 25 octobre
1962 de l'honorable Hamel n'a pas été reçue par un
fonctionnaire, une personne autorisée à recevoir des affidavits
ou des dépositions. A supposer M. le Président, que M. Pigeon
soit commissaire de la Cour supérieure à supposer que Me Pigeon
ait été autorisé à recevoir une telle formule
d'assermentation, il n'y a rien dans la déclaration de M. Hamel qui
l'indique. Celle du 24 octobre 1962, il n'y a rien non plus M. le
Président, à l'effet que sa déclaration a
été véritablement assermentée.
J'étais donc en présence de deux déclarations
assermentées et d'une déclaration ordinaire. Cela c'était
au mois d'octobre 1962. C'est à la suite de cette déclaration non
assermentée et ne tombant pas sous le coup de la Loi de la preuve du
Canada que j'ai obtenu la deuxième déclaration assermentée
d'Amédée Bellemare. Il apparaît clairement, dans la
déclaration du député de St-Maurice, qu'il a eu
connaissance de la déclaration assermentée d'Amédée
Bellemare devant la Cour de faillite, il y réfère. En aucun
moment il a attaqué cette assermentation ou cet affidavit. Et le temps a
passé et aucune procédure n'a été intentée
ni contre les déclarations assermentées ni contre
Amédée Bellemare que ce soit de la part du député
de St-Maurice ou que ce soit quelqu'un intéressé dans la
faillite, dans laquelle il a fait sa première déclaration.
Personne n'a attaqué cette déclaration. Ni les
créanciers, ni ceux qui étaient intéressés dans le
dossier de la faillite, ni le député de St-Maurice. Et on ne
répond pas à cette déclaration assermentée par une
déclaration assermentée. J'étais donc justifié M.
le Président, de di- re que j'avais une preuve parfaite quand j'ai
déposé l'accusation le 30 juin 1964, mais j'ai pris d'autres
facteurs.
J'ai pris le facteur que l'honorable Hamel n'a pas poursuivi
lui-même, alors que lorsque le député de
Vaudreuil-Soulanges a été accusé d'avoir reçu un
pot-de-vin, il a immédiatement attaqué...
M. PINARD: A l'ordre.
M. LE PRESIDENT: Je crois que le député de
Trois-Rivières pourrait discuter de l'affaire qui est devant la Chambre,
sans être obligé d'y introduire d'autres matières.
M. GABIAS: Je me contenterai de souligner que de ses collègues,
qui avaient été accusés, ont immédiatement
poursuivi les accusateurs. Je n'ai qu'à vous référer au
« Devoir » du 12 novembre 1962...
M. PINARD: A l'ordre, même objection.
M. GABIAS: Non, non, je donne seulement la date, M. le Président,
seulement la date, je ne lirai rien du document. Dans « Le Devoir »
du 12 novembre 1962, le député de Chambly a pris action, je dis a
pris action.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre messieurs, ça n'a rien à faire,
et le député n'a pas le droit de citer ce document.
M. GABIAS: Je ne le cite pas M. le Président, je donne ma
référence. Je vous dis que je ne citerai rien de ces documents,
« la date, et qui s'y réfère, » un point c'est
tout.
M. LE PRESIDENT: Il y a un rapport devant la Chambre, et le
député pourrait discuter et pourrait même proposer des
motions concernant le rapport qui a déjà été
reçu par la Chambre, mais il n'a pas le droit de sortir de cette
affaire, et de faire entraîner d'autre chose dans le débat.
M. GABIAS: Je savais évidemment, M. le Président, que le
député de St-Maurice était avocat, et nous devons en tenir
compte, tout comme on en tient compte dans le cas de mon accusation. Le
député de St-Maurice avait une longue expérience du droit,
il connaissait ses droits, il connaissait les moyens qu'il pouvait employer
pour mettre Amédée Bellemare à la raison, si sa
déclaration assermentée était fausse. A ce
moment-là, le député de St-Maurice était ministre
des Affaires municipales
11 était également ministre du Travail, il n'a rien fait
contre Amédée Bellemare.
Un peu plus tard, il est devenu procureur-général, et
comme procureur-général, il lui appartient, et c'est une
obligation que la loi lui fait, de faire en sorte que tout crime soit
recherché, soit poursuivi, et soit jugé, et soit puni. Il n'a
encore rien fait contre la déclaration assermentée connue de lui
d'Amédée Bellemare. M. le Président, non seulement le
député de St-Maurice n'a rien fait contre la déclaration
assermentée, mais il n'a également rien fait contre le crime
qu'est celui de donner de l'argent à un fonctionnaire de la
province.
Il n'a également rien fait contre celui qui offre de l'argent, et
dont le crime est punissable par deux ans d'emprisonnement. Tout citoyen doit
connaître la loi, mais dans le cas du député de St-Maurice,
nous sommes certains qu'il la connaissait, puisqu'il a même dit à
l'oncle d'Amédée Bellemare, que si ce n'était pas de lui
M. Casabon, « il maudirait Bellemare en prison », et rien n'a
été fait M. le Président.
On veut, M. le Président, me tenir compte que je n'ai pas
vérifié la véracité de mes sources d'informations,
je n'avais même pas le droit, M. le Président, de ne pas croire ce
que contenaient les déclarations assermentées
d'Amédée Bellemare. Et aucune Cour de justice avait le droit
d'ignorer la véracité de ces affirmations, de ces affidavits ou
affirmations sur les Saints Evangiles aussi longtemps que ces documents
n'étaient pas déclarés faux.
On veut me tenir compte que je n'ai pas fait enquête, je n'avais
pas, M. le Président, à vérifier aucune information
contenue dans les déclarations assermentées. Je n'avais pas non
plus, dans l'évaluation de la preuve, à tenir compte de la
déclaration de l'honorable Hamel, parce que sa déclaration
n'avait pas de valeur même en vertu de la « Loi de la preuve du
Canada, chapitre 307. »
On me fait grief, en ces termes; « Il aurait pu faire avant de
poser un geste d'une gravité aussi exceptionnelle, ce qu'un
confrère, Me Pierre Trudel, a fait à sa demande après le
30 juin 1964, savoir; vérifier auprès du gérant de banque,
de la provenance des $1,500. »
Comme il est facile de faire un reproche au député de
Trois-Rivières, de ne pas avoir vérifié cette information,
comme c'est facile, une fois qu'un fait est connu de reprocher à une
personne de ne pas avoir vérifié, mais qu'on m'indique donc, M.
le Président, à quel endroit, dans les déclarations
assermentées, et dans la déclaration de M. le
député de St-Maurice, que l'argent du $1,500 provenait de la
Banque Canadienne Nationale de Shawinigan. A quel endroit pouvais-je savoir que
M. Bellemare avait emprunté ou reçu l'argent de la Banque
canadienne nationale.
L'accusation était non pas qu'il s'était procuré
l'argent à un endroit, mais qu'il avait donné $1,500 à
l'honorable Hamel. Il y avait tout lieu de le croire, puisqu'à ce
moment-là il n'est pas failli lorsqu'il les donne, cela se passe en
1960. Je savais qu'il s'agissait d'un entrepreneur et nous savons
qu'habituellement, jusqu'à nouvel ordre, jusqu'au moment de la faillite,
un entrepreneur a de l'argent, nous n'avons qu'à nous reporter aux
faillites, M. le Président, c'est de commune renommée, vous voyez
des faillis qui ont $150,000, $200,000 de dettes, c'est donc qu'ils disposent
d'argent, et s'ils n'avaient pas eu d'argent, ils n'auraient pas
été capables de faire de faillite, M. le Président. C'est
parce que les contracteurs ont de l'argent qu'un moment donné ils font
faillite, parce que c'est pas leur argent à eux autres, mais au moment
ou ils opèrent ils en ont de l'argent, et j'étais justifié
de croire que Bellemare avait de l'argent, je n'avais pas à me demander
où il s'était procuré cet argent, d'ailleurs, rien, je le
répète, rien dans les déclarations assermentées
indiquait la provenance de l'argent. Comme les membres du Comité, je
l'ai appris lors du témoignage d'Amédée Bellemare.
On me fait reproche de ne pas avoir vérifié, à
supposer, M. le Président, que j'ai eu tort de ne pas faire les
démarches pour connaître la provenance de l'argent et que j'aurais
dû le savoir, nous n'avons qu'à nous reporter au témoignage
de M. Morin, gérant de la Banque Canadienne Nationale, pour savoir que
je n'aurais pas été capable d'avoir l'information, puisqu'il
déclare sous serment qu'il ne peut pas communiquer d'informations
à qui que ce soit.
M. le Président, on me fait également un troisième
reproche, de ne pas avoir vérifié auprès de Samson &
Marchand Inc., les conditions du contrat intervenu le 8 août 1960 entre
cette société et les frères Bellemare. Le contrat est
clair, il parle par lui-même, toutes les conditions du contrat sont
reproduites dans mon accusation du 30 juin 1964. Est-ce que ce n'était
pas de l'élémentaire prudence que de s'en tenir à la
déclaration assermentée d'Amédée Bellemare, et
à l'original du contrat intervenu entre Samson & Marchand, et les
frères Bellemare? Qu'avais-je à consulter Samson & Marchand?
Les conditions existaient dans le contrat, et j'avais le contrat en ma
possession, et j'avais également les déclarations
d'Amédée Bellemare, déclarations assermentées.
Ce sont les trois reproches que le rapport me fait. Je dis que ces
reproches peuvent être
faits au député de Trois-Rivières après la
tenue de l'enquête, mais on ne peut pas reprocher au député
de Trois-Rivières d'avoir négligé quoi que ce soit avant
de porter l'accusation que j'ai faite le 30 juin 1964. Si on est obligé
de mettre de côté la base de nos cours de justice, si on est
obligé de s'interroger sur les déclarations assermentées,
il n'y a plus de preuve possible dans cette province.
M. le Président, quand j'ai porté l'accusation contre le
député de Saint-Maurice, le 30 juin 1964, à la page 4236
du « Journal des débats ), je n'ai fait aucun commentaire, je n'ai
fait que lire l'acte d'accusation. Lorsque la motion de l'honorable premier
ministre a été étudiée, discutée, à
la page 4505 du « Journal des débats », plutôt
ça c'est l'honorable ministre des Ressources naturelles...
M. LESAGE: 4507, au bas de la page.
M. GABIAS: ... 4508, j'ai déclaré ceci: « M. le
Président, j'ai été sobre dans mes paroles, je vais
continuer à l'être. J'aurais aimé que le ministre des
Richesses naturelles ne termine pas son allocution de la façon dont il
l'a fait. S'il avait lu en entier l'article 196 avec beaucoup d'attention, il
aurait pu se rendre facilement compte que je ne pouvais pas procéder
autrement que de la façon dont je l'ai fait. » Et je terminais
cette intervention à la page 4508, en parlant de l'accusation; «
Si je l'avais placée dans l'orbite des partis politiques, si je n'avais
pas eu confiance au serment d'office prêté par les
députés, chacun d'eux dans cette Chambre, sachant fort bien que
toute question qui est litigieuse, et qui entraîne un vote, a toujours
été décidée à l'avantage du parti
majoritaire, je n'aurais pas fait cela, M. le Président. Mais c'est
parce que je sais que chacun des députés en cette Chambre a
prêté un serment, et que lorsqu'ils auront à décider
du rapport de l'enquête, ils devront se souvenir du serment qu'ils ont
prêté, que j'ai fait entièrement confiance à
l'Assemblée législative. »
J'ai été le premier à déclarer que
l'enquête tenue par le Comité des privilèges et
élections démontrait que l'accusation n'était pas
prouvée.
J'ai tenu compte de mon serment d'office et je n'ai pas chicané
le rapport qu'on vous a soumis aujourd'hui du moment que ce rapport contenait
que la preuve révèle que l'accusation portée par le
député de Trois-Rivières contre le député de
St-Maurice n'est pas fondée. Les reproches que l'on fait au
député de Trois-Rivières dans ce rapport, on peut les lui
faire après l'enquête, mais on ne peut pas lui faire un seul
reproche pour ce qui s'est passé avant l'accusa- tion. C'est tout ce que
j'ai à dire à cette Chambre.
M. LESAGE: M. le Président, le rapport du Comité des
privilèges et des élections, avec l'assentiment unanime de la
Chambre, a été reçu, il est sur la table. Tous les
députés en ont une copie. Le rapport se termine par ces mots:
« En conséquence, le Comité en vient à la conclusion
suivante: la preuve révèle que l'accusation portée par le
député de Trois-Rivières contre le député de
St-Maurice n'est pas fondée. »
J'ai, M. le Président, un très pénible devoir
à remplir. Je voudrais d'abord citer les articles du règlement
qui s'appliquent.
L'article 196 se lit comme suit:« Quand un député
désire accuser un de ses collègues de quelque acte rendant
celui-ci indigne de siéger dans la Chambre, il doit d'abord lire, de son
siège, une déclaration où l'accusation est
énoncée en termes directs, explicites, modérés, et
où il prend la responsabilité de l'accusation portée, puis
donner immédiatement avis qu'il proposera à la Chambre de
procéder à une enquête pour constater si l'accusation est
fondée ».
La Chambre, en vertu de ses pouvoirs, a délégué au
Comité des privilèges et des élections la charge
d'enquêter sur l'accusation portée. Le rapport du Comité
des privilèges et des élections a été reçu
avec le consentement unanime de la Chambre cet après-midi.
Je continue la lecture de 196, 2. « La déclaration est
insérée et l'avis est consigné au journal, à moins
que la Chambre n'en ordonne autrement sur une motion non annoncée.
« 3. Il appartient à la Chambre, et non à l'Orateur, de
décider si la déclaration est suffisante pour justifier une
enquête. » (Cela a été fait). « 4. Lorsque la
motion demandant de procéder à l'enquête est mise en
délibération, le député incriminé peut,
avant de se retirer, s'expliquer ou lire une déclaration. » (Cela
a été fait.) « Celle-ci est insérée au
journal. » (Cela a été fait.) « 5. Si le
député qui a porté l'accusation ne prouve pas qu'elle est
fondée, il devient coupable d'une violation de privilège.
»
L'article 194 se lit comme suit: « Tout député ou
toute autre personne qui se rendent coupables d'une violation de
privilège encourent les peines mentionnées aux articles 76 et 77.
»
L'article 76 se lit comme suit: « 1. Si un député
est rappelé nominativement à l'ordre, la parole lui est par
là même interdite pour le reste de la séance. » (Ce
n'est pas ce qui nous concerne.) « 2. La Chambre peut en outre, si une
motion
à cet effet est immédiatement présentée,
ordonner à l'Orateur d'admonester ou de réprimander ce
député, ou bien prononcer contre celui-ci la censure avec ou sans
exclusion temporaire. »
La note 8, sous l'article 193, dit: « La Chambre ne peut exclure
un député que pour un temps défini. »
M. le Président, quelle a été l'accusation, je m'en
tiens aux procès-verbaux, portée officiellement le 30 juin,
répétée le 8 juillet évidemment, par le
député de Trois-Rivières? « M. Gabias propose que
cette Chambre est d'avis de procéder à une enquête pour
constater si l'accusation portée contre le député du
comté de St-Maurice est fondée, accusation à l'effet que
le député du comté de St-Maurice s'est rendu indigne de
siéger à l'Assemblée législative en donnant ou
faisant donner un contrat d'une valeur de $4,200 à Amédée
Bellemare, entrepreneur, en considération d'une somme de $1,500 qu'il a
empochée. »
Alors, M. Hamel a fait la déclaration que l'on sait. Il a
nié. Et j'ai proposé que la motion en discussion soit
amendée pour que la motion se réfère directement à
l'accusation portée le 30 juin. Et, en sous-amendement, le chef de
l'Opposition a tenu à ce que l'accusation portée le 30 juin fasse
partie de la motion textuellement. C'est la page 727 des procès-verbaux.
« M. Johnson propose, secondé par M. Elle, que la motion
d'amendement soit sous-amendée en changeant le point final (de mon
amendement évidemment) par une virgule et en y ajoutant les mots
suivants: « et qui se lit comme suit: « Je soussigné, Yves
Gabias, député du comté de Trois-Rivières à
l'Assemblée législative de Québec, désire accuser
le député du comté de St-Maurice d'un acte qui le rend
indigne de siéger en cette Chambre. « Le député de
St-Maurice, au cours du mois de juillet ou d'août 1960, alors qu'il avait
été déclaré élu député de ce
comté, a reçu la somme de $1,500, soit quinze billets de $100 de
M. Amédée Bellemare, âgé de 45 ans, con-tracteur
demeurant à Shawinigan, dans la province de Québec. « En
considération de cette somme de $l,500, le député de
St-Maurice a donné ou fait donner un contrat de $4,200 audit
Amédée Bellemare, contrat intervenu le 8 août 1960, entre
Amédée Bellemare et Samson & Marchand Inc., d'autre part,
pour lequel contrat signé à Ste-Flore, comté de
St-Maurice, ledit Amédée Bellemare fournissant le gravier, le
chargement, le concassage pour le gravier de grosseur de 1" moyennant le prix
de 50 cents la tonne posée (on sait maintenant que ça voulait
dire « pesée ») pour le gravier de 3e, le prix de 43 cents
la tonne, posage compris (et l'on sait que cela veut dire « pesage
»). « Il s'agissait d'un contrat octroyé par le
ministère de la Voirie provinciale pour travaux sur le Boulevard
St-Onge. « Ladite somme de $1,500 a été remise par
Amédée Bellemare au député de St-Maurice, dans son
bureau, au ministère du Travail, vers les trois heures de
l'après-midi. Après que la somme de $1,500 eut été
remise au député de St-Maurice, ce dernier a immédiatement
introduit les quinze billets de $100 dans la poche droite de son veston (coat)
et a dit à M. Amédée Bellemare: « Je te remercie, tu
es bien « smart ». « Je prends la responsabilité de la
présente accusation et donne immédiatement avis à cette
Chambre que je lui proposerai de procéder à une enquête
pour constater si l'accusation est fondée. »
La motion a été adoptée. L'amendement, le
sous-amendement, la motion telle qu'amendée et sous-amendée a
été adoptée. Puis j'ai proposé que le cas soit
référé, pour étude et enquête, au
Comité des privilèges et élections dont nous venons de
recevoir officiellement le rapport.
Au cours du débat sur la motion du député de
Trois-Rivières sur l'amendement que j'ai proposé, et sur le
sous-amendement proposé par le chef de l'Opposition, il y a eu diverses
interventions. Puis-je référer à la page 4505 du «
Journal des débats », et rappeler les paroles de mon
collègue, le ministre des Richesses naturelles? « M. le
Président, sur la motion, très brièvement, car c'est une
chose qui refuse aussi bien le style fleuri que le style partisan, c'est
peut-être la chose la plus grave, et une des plus graves en tout cas,
dans le parlement, que j'aie vue, depuis les quatres brèves
années que je vis ici. (C'est parce que j'ai souligné, et puis
j'ai mal souligné). « En toute logique et en toute
intégrité, c'est une chose qui peut être mortelle, (je
répète, c'est une chose qui peut être mortelle) pour un des
deux hommes qui y sont impliqués, parce qu'au fond, on pourrait dire
même, pour la vie ou pour la mort, dans un sens, elle va tordre la
réputation de l'un des deux hommes publics qui sont avec nous, ici, pas
un, mais deux. Un des deux. Pas seulement celui qui est accusé, mais
ça implique également celui qui est l'accusateur. L'un ou
l'autre, normalement, va payer terriblement cher la fin de cette histoire, dans
un des deux ou trois domaines qui nous sont les plus chers, celui de la
réputation, et comme il s'agit d'un homme public, bien, c'est payer
terriblement cher ».
A la page 4507 du même fascicule, je cite, au bas de la page,
deuxième colonne à droite, M. Gabias, le dernier paragraphe.
« Il est clair (C'est M. Gabias qui parle) que je suis conscient de la
responsabilité que je porte. Je suis conscient que la Chambre, à
la demande de quelques députés, pourra après
l'enquête, m'enlever mes privilèges de député. Mais,
je peuxassurer cette Chambre que si je n'avais pas une preuve que je crois
parfaite, (C'est un avocat et un ancien juge qui parle) je n'aurais pas pris
sur moi de salir, ou de ternir la réputation d'aucun collègue de
cette Chambre ».
M. le Président, l'accusation portée par le
député de Trois-Rivières, si elle avait été
prouvée, faisait perdre à tout jamais la réputation du
procureur-général. On s'attaquait à l'homme qui est
chargé de l'administration de la justice dans la province. Il
était disqualifié, il n'avait plus le droit de se
représenter, il perdait tous ses droits à la pension, il
était suspendu probablement à vie par le Barreau et il
était dans le chemin, avec sa famille. Et le député de
Trois-Rivières a dit qu'il savait la responsabilité et les
conséquences de son acte.
Quels ont été, dans le cas de violation de
privilèges, ou encore de conduite, mauvaise conduite en vertu de 76 et
77, les précédents en cette Chambre? Avant de se faire,
cependant, je voudrais purement et simplement rappeler aux
députés que l'article 114 du Code criminel dit ceci:
Est coupable d'un acte criminel et passible d'un emprisonnement de 14
ans, quiconque, n'étant pas témoin dans une procédure
judiciaire, mais ayant la permission, l'autorisation ou l'obligation,
d'après la loi, de faire une énonciation par affidavit, par
déclaration solennelle, ou oralement sous serment, fait dans une telle
énonciation, devant une personne autorisée par la loi à
permettre que cette énonciation soit faite par lui, devant elle, (c'est
le cas M. Pigeon) une assertion qu'il sait fausse sur une question de faits,
d'opinion, de croyance, ou de connaissance. La punition en vertu du Code
criminel est la même pour celui...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre. M. GABIAS: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: Est-ce que c'est un point d'ordre?
M. GABIAS: Oui. Je crois que le premier ministre réfère,
avec beaucoup de déférence, il réfère à
l'article 114, mais la déclaration à laquelle je
référais de l'honorable Hamel, a été faite en vertu
de la Loi de la preuve.
M. LESAGE: M. le Président, peu importe en vertu de quelle loi la
déclaration a été faite, c'est que la déclaration
soit faite sous serment, ou solennellement, comme l'a été faite
celle de M. Hamel...
M. GABIAS: Non.
M. LESAGE: ... s'il ment, il est coupable, il est punissable de la
même façon que s'il avait menti sous serment, s'il ment dans une
déclaration solennelle. Et la raison, je puis le dire maintenant, pour
laquelle ç'a été une déclaration solennelle, c'est
parce que M. Pigeon lui je sais, je connais ses opinions croit,
étant donné les dispositions de l'article 114, que l'on doit
suivre les prescriptions qui nous sont données par le clergé,
à l'effet qu'autant que possible, il ne faut pas abuser du serment. Et
la déclaration solennelle pouvait entraîner les mêmes
punitions que la déclaration sous serment. Et, évidemment, c'est
un ministre qui était en cause, et dans l'évaluation du
témoignage assermenté, dans la comparaison entre le
témoignage assermenté d'Amédée Bellemare et la
déclaration solennelle de l'honorable René Hamel, à ce
moment-là ministre du Travail dans le gouvernement, le
député de Trois-Rivières devait tenir compte de l'article
114 du Code criminel qu'il connaissait certainement.
Mais quels sont les précédents? Puis-je vous
référer, M. le Président, à un incident qui est
bien connu, procès-verbaux de l'Assemblée législative de
la province de Québec, numéro 30, mercredi 13 février
1957, alors que le député de Richmond, qui est encore
député de Richmond, a été puni dans les conditions
suivantes: Le rapport du président du comité à l'Orateur
était le suivant: « Au cours du débat en Comité
plénier sur l'article 3 du bill numéro 58, l'honorable
député de Richmond s'est engagé dans une critique
générale de la loi, et dans des invectives contre la loi. Parlant
sur le point d'ordre, le député de Richmond a prétendu
qu'il avait le droit de démontrer que cette loi constitue une
législation dangereuse et mauvaise, pire que la loi « Dillon
». J'ai décidé, c'est le président du
comité qui siège qui parle, qui fait rapport à l'Orateur,
j'ai décidé qu'à ce stade de la procédure,
le député ne pouvait, comme il l'a prétendu, critiquer le
principe de la loi; de plus, me basant sur une interprétation
autorisée du paragraphe 10 de l'article 285, j'ai demandé au
député de Richmond de retirer les paroles qui constituent une
invective contre la loi, savoir: législation pire que la loi «
Dillon ». Le député de Richmond malgré ma demande a
refusé de retirer ses paroles, dont rapport.
Sur réception de ce rapport, M. l'Orateur demande au
député de Richmond s'il persiste à ne pas vouloir retirer
les paroles qu'il a prononcées en comité. Comme le
député de Richmond continue à demander qu'on lui cite
l'article en vertu duquel il a été condamné à
retirer ses paroles, sans déclarer qu'il consent à les retirer,
M. l'Orateur le rappelle nominativement à l'ordre.
L'honorable M. Duplessis propose que la Chambre censure le
député de Richmond, le suspende pour une période de trente
jours, et que, vu qu'il a déjà été suspendu dans le
cours de la présente session, pour une période de huit jours, son
indemnité lui soit retirée. Mais ça, ç'a
été changé par la suite au sujet de
l'indemnité).
Alors, pour une bagatelle, trente jours d'expulsion. En
Angleterre...
M. BELLEMARE: C'était la troisième fois dans la même
année.
M. LESAGE: Oui, deux fois. En Angleterre, en 1947 ( je vous donne un
bref résumé des décisions de la Chambre qu'a en main le
ministre des Affaires municipales), la Chambre des Communes, en Grande-Bretagne
en 1947 sur le cas suivant; En 1947, un nommé Garry Halligan,
député de Graves' Sand, journaliste de profession (c'est un
journaliste de profession) a rédigé, moyennant
rémunération, un article publié dans le « World's
Press News » qui fut jugé un affront à la Chambre par ses
imputations injustes d'insobriété dans l'enceinte à
l'égard d'autres députés. Après une enquête
devant le comité des privilèges, on le déclara coupable,
non seulement de cette accusation, mais aussi d'avoir fait de fausses
déclarations au comité et d'avoir accepté de l'argent pour
trahir des secrets (évidemment, c'était au sujet de la
sobriété des gens, comme vous savez). Là-dessus, le
président du conseil, qui n'était pas M. Attlee, je ne sais pas
au juste qui c'était...
M. DOZOIS: Est-ce qu'il était député?
M. LESAGE: Il était député, mais il était
journaliste, et il avait été payé pour un article qu'il
avait écrit. Là-dessus, le président du conseil, qui
n'était pas M. Attlee, je ne sais pas qui il était...
M. LAPORTE: C'était M. Morrisson.
M. LESAGE: C'était M. Morrisson qui agissait comme leader de la
Chambre. Il proposa comme sanction une suspension ou une exclu- sion, comme
vous voudrez, de six mois, mais la Chambre vota l'expulsion définitive.
Les règlements en Angleterre permettent à la Chambre d'exclure un
député et de lui enlever son titre de député et de
déclarer son siège vacant. Ici, nous n'avons pas le droit. C'est
l'article 76, paragraphe 2, tel que précisé par la note 8, sous
193.
M. le Président, je considère franchement (j'aimerais
mieux ne pas le dire, mais c'est mon devoir de le dire, c'est extrêmement
pénible pour moi!) que le député de Trois-Rivières
n'a pas pris la moindre précaution, la plus élémentaire,
pour s'assurer de la véracité de son accusation. Il ne faut pas
que des choses comme celle-là se répètent en cette
Chambre. Je considère, M. le Président, et vous comprendrez
combien je suis ému d'être obligé de faire ce travail que
je déteste, de proposer la motion suivante, appuyé par le
ministre de l'Education, que le député de Trois-Rivières
soit déclaré coupable de violation de privilèges pour
avoir porté contre le député de St-Maurice une accusation
de corruption qu'il n'a pas prouvée et dont la fausseté a
été démontrée et reconnue; que, vu la
gravité de cet outrage, le député de Trois-Rivières
soit exclu pour une période de trois ans.
M. JOHNSON: M. le Président, nous avons devant nous une motion
qui constitue, évidemment, un précédent, du moins pour les
dernières 71 années. Il n'y a personne dans cette Chambre qui n'a
jamais eu connaissance d'une motion semblable et il est peut-être vrai de
dire que personne de cette Chambre n'avait même l'âge de raison
lorsque pareille motion, une motion comparable, a été
présentée à l'Assemblé législative de la
province de Québec.
La motion que nous avons devant nous contient deux parties: la
première, que le député de Trois-Rivières soit
déclaré coupable d'une violation de privilège pour avoir
porté contre le député de St-Maurice une accusation de
corruption qu'il n'a pas prouvée, et dont la fausseté a
été démontrée et reconnue.
M. le Président, la deuxième, partie de la motion se lit
comme suit; que, vu la gravité de cet outrage, le député
des Trois-Rivières soit exclu pour une période de trois ans.
Avec votre permission, M. le Président, et contenant à
l'intérieur des limites raisonnables, je l'espère, les
émotions qui en ce moment-ci m'étreignent, vous me permettrez de
faire des considérations qui toutes, concluent ou conclueront à
démontrer et avec succès, je l'espère que la sentence que
voudrait faire prononcer le premier ministre par cette motion, en est une
qui est injuste et antidémocratique.
La motion est injuste. D'abord, je ne récapitulerai pas les
faits. Ils sont connus. Je ne rappellerai pas toutes les procédures.
Nous les avons vécues et elles ont été décrites par
le premier ministre, et je ne répéterai pas les arguments que cet
après-midi le député de Trois-Rivières
lui-même, utilisant un droit que lui accorde le règlement, a
élaborés dans cette Chambre, avec franchise et
sincérité. Cependant, vous me permettrez de compléter, les
faits, les citations brossés ou expliqués par le premier
ministre. Il est vrai que le député de Trois-Rivières a
porté une accusation très grave et je dirai tout de suite qu'il
est vrai, c'est automatique en vertu de la règle contenue à
l'article 196, il est vrai qu'il s'est rendu coupable d'une violation de
privilège.
L'article 196 est clair, il a la même force d'automatisme que
certaines provisions de la loi des véhicules moteurs. Quand un homme, un
conducteur de véhicule est pris à voyager à 80 milles
à l'heure dans une zone de 30 milles à l'heure, quels que soient
les motifs qui l'aient incité à cette imprudence, à cette
vitesse exagérée, il est coupable quand même d'avoir
enfreint la loi. Or, malgré, évidemment, cette comparaison
peut-être un peu triviale, il semble que l'article 196 est aussi brutal,
puisque le paragraphe 5, dit textuellement ceci: « Si le
député qui a porté l'accusation ne prouve pas qu'elle est
fondée, il devient coupable d'une violation de privilège
».
Nous n'avons donc pas à déclarer coupable le
député de Trois-Rivières. C'est la règle 196 du
règlement de l'Assemblée législative qui le
décrète coupable, sans que nous ayons à voter pour ou
contre telle proposition. Evidemment, on peut constater qu'il est coupable de
violation de privilège, mais nous n'avons pas, je vous le soumets
respectueusement, mais fermement, à déclarer que le
député des Trois-Rivières est coupable d'une violation de
privilège.
Donc, le député de Trois-Rivières est coupable
d'une violation de privilège de cette Chambre et j'essayerai
tantôt de cerner le privilège à l'encontre duquel il a
commis une violation. Il est coupable d'une violation de privilège
pourquoi? Parce qu'il n'a pas réussi à prouver une accusation
qu'il avait portée. Il n'a pas réussi à la prouver. Tous
les membres du Comité l'admettent. Lui-même, le
député de Trois-Rivières, l'a admis. Est-il
nécessaire de vous rappeler que nous aurions pu devant le Comité,
utilisant les droits qui nous sont accordés par le règlement
proposer un autre projet de rapport? Est-il nécessaire de vous dire que
nous aurions pu jouer à la politique devant le Comité? Que nous
aurions pu, oubliant le devoir que nous avions à ce moment-là ou
faisant semblant de l'observer, et les exemples ne manquent pas à ma
mémoire, est-ce que nous n'aurions pas pu à ce moment-là
faire de l'obstruction, créer un écran de fumée,
intervenir d'une façon violente, faire de l'obstruction, toutes
méthodes qui ont déjà été employées,
et aucun parti n'a le monopole de ces méthodes, toutes
méthodes qui ont déjà été employées
devant les comités et dans cette Chambre?
Non! Tous les députés de l'Union nationale, membres du
Comité des privilèges et élections, tous les
députés de la gauche y inclus le député de
Trois-Rivières, ont reconnu unanimement que la preuve de l'accusation
n'avait pas été faite. Nous savions à ce moment-là
qu'en vertu de la règle que j'ai citée le député de
Trois-Rivières devenait automatiquement coupable d'une violation de
privilège. Il le savait lui aussi. Et malgré ça nous avons
voté pour le projet de rapport avec quelques amendements consentis
unanimement ou quasi unanimement le projet de rapport préparé par
le président du Comité, député de
Québec-Est, membre du parti au pouvoir...
M. LESAGE: De Québec-Centre.
M. JOHNSON: ... de Québec-Centre, je m'excuse. Je ne sais pas si
je vais m'excuser envers le député de Québec-Est ou envers
les électeurs de Québec-Est ou de Québec-Centre. Je
m'excuse pour le moment envers le député de
Québec-Centre.
M. le Président, unaniment nous avons voté, pourquoi?
Parce que fidèle à ce que nous avions dit dans cette Chambre, et
j'avais conscience à ce moment-là de parler au nom de tous mes
collègues, le député des Trois-Rivières, usant de
ses droits, de ses privilèges et prenant ses responsabilités,
devait faire la preuve devant le Comité, de façon à
satisfaire le Comité. Nous avons voté unanimement parce que nous
avons reconnu qu'il ne devait pas en matière de réputation d'un
député de cette Chambre, qu'on ne devait pas dans le domaine de
l'utilisation des privilèges des députés de cette Chambre,
faire de la politique. Nous avons considéré qu'il était de
notre devoir, et le député des Trois-Rivières l'a compris
puisqu'il a voté comme nous, de rendre hommage à la
vérité en autant que nos faibles moyens humains nous permettent
de la capter.
Or, dans mon opinion et j'ai lieu de le croire dans l'opinion de tous
mes collègues, il n'y avait pas l'ombre d'un doute que le
député de Trois-Rivières n'avait pas fait la preuve contre
le député de Saint-Maurice.
M. le Président, J'avertis tout de suite le gouvernement,
cependant, de ne pas s'imaginer qu'il s'agit, ni directement ni indirectement,
d'un certificat officiel de vertu pour qui que ce soit, témoin
accusé ou accusateur et tout ce qu'on voudra.
Mais il s'agit d'un certificat de vertu officiel et rien de plus, mais
rien de moins.
M. LESAGE: Non, non. M. le Président, je voudrais rappeler au
chef de l'Opposition que je me suis engagé, hier, à
référer tout le dossier au ministère du Procureur
général, ce que je ferai lorsque nous aurons disposé de la
présente motion.
M. JOHNSON: Et j'avertis tout de suite le premier ministre qu'à
ce moment-là je proposerai que le dossier demeure sous la garde de
l'Assemblée législative...
M. LESAGE: Oui, oui.
M. JOHNSON: ... mais qu'une copie soit transférée,...
M. LESAGE: Très bien.
M. JOHNSON: ... soit expédiée au ministère du
procureur général et qu'on n'ouvre...
M. LESAGE: Et je serai d'accord.
M. JOHNSON: ... qu'on ne donne prise à aucun soupçon ou
à aucune difficulté à l'avenir.
M. LESAGE: Je serai parfaitement d'accord.
M. JOHNSON: M. le Président, il ne s'agit donc pas d'un
certificat officiel de vertu pour qui que ce soit, mais uniquement un
certificat de vertu officiel. La preuve, telle que nous avions à
l'apprécier, hier après-midi, et je le répète, je
n'avais pas l'ombre d'un doute, n'avait pas établi la culpabilité
du procureur général. Mais, hier après-midi, nous avons
fait seulement un deuxième rapport, qui n'est pas nécessairement
un rapport final.
M. le Président, hier après-midi nous en étions
à ce stade où nous n'avions pas encore obtenu certains documents
que le principal intéressé, le député de
Trois-Rivières, et plusieurs collègues, dont celui qui vous
parle, considéraient comme des documents essentiels ou tout au moins
nécessaires pour clarifier la preuve.
Il s'agissait, qu'il me suffise de vous le rappeler, de l'original d'une
lettre datée de septembre 1960, adressée à l'honorable
René Hamel pour un M. Casabon. Il s'agissait, deuxièmement, d'un
billet provisoire entre M. Amédée Belle mare et M. Emery
Lavergne, dont il est fait mention dans un acte notarié du notaire
Desaulniers et, troisièmement, de deux chèques de Samson &
Marchand à l'ordre de M. Normand Croisetière, propriétaire
d'un banc de gravier dans le comté de St-Maurice.
A ce moment-là, hier, nous n'avions pas encore ces documents.
Aujourd'hui, le député, président du Comité des
privilèges et des élections, a dit qu'il ne les avait pas encore
reçus ou, du moins, j'ai tout lieu de croire que c'est ce qu'il dirait,
s'il ne l'a pas dit pendant mon absence.
Donc, le député de Trois-Rivières était
coupable et s'est reconnu coupable de violation de privilège. Le premier
ministre a argumenté tantôt en utilisant les textes du
député de Trois-Rivières. D'abord l'accusation
elle-même. Admis: c'est une accusation grave. Deuxièmement, les
propos du député de Trois-Rivières qui, tous, tendent
à démontrer qu'il se rendait parfaitement compte de la
gravité des actes qu'il posait et des conséquences que ces actes
pouvaient avoir. Et, troisièmement, le premier ministre a cité
avec solennité les propos très sérieux du
député de Montréal-Laurier dans cette Chambre, propos
qu'il a cités, propos que nous avions tous entendus, et que le premier
ministre a l'air, évidemment, d'épouser.
Je ne reviendrai pas sur chacun des propos du député de
St-Maurice, je le répète. Ils sont consignés dans les
procès-verbaux. Le député de Trois-Rivières a fait
une intervention dans cette Chambre le 8 juillet et le député de
Trois-Rivières a eu l'occasion, cet après-midi, de prendre la
parole.
Quant aux propos du député de St-Maurice, il semble que le
premier ministre aurait dû les citer. Le député de
St-Maurice, et je réfère au procès-verbal No 103 pour le
mercredi 8 juillet, à la page 726.
Le député de St-Maurice, avant que cette Chambre ne
décide de référer toute l'affaire au Comité des
privilèges et élections, a fait une déclaration qui est la
répétition d'une déclaration qu'il avait faite
spontanément le 30 juin 1964, alors que, pour la première fois,
la Chambre a entendu le député de Trois-Rivières lire
l'accusation.
Or, que dit le député de St-Maurice? « M. Hamel
(St-Maurice) fait la déclaration suivante: je cite le
procès-verbal, page 726 « M. le Président, je
comprends qu'on va procéder en vertu de l'article 196. J'ai
déjà déclaré publiquement, à la
télévision et sur les
tréteaux, qu'Amédée Bellemare était un
failli, un parjure et que c'était absolument faux. Je n'ai aucune
espèce d'inquiétude et je suis content, M. le Président,
qu'on lave cette affaire. » On me permettra de répéter les
paroles du député de St-Maurice: « ... et je suis content,
M. le Président, qu'on lave cette affaire-là. Je déclare
que jamais, à aucun moment, ni directement ni indirectement,
Amédée Bellemare n'a donné au député de
St-Maurice quoi que ce soit. Je dois dire qu'il l'a offert. »
M. LESAGE: « Quoi que ce soit. »
M. JOHNSON: M. le Président, à ce moment-là, il
était toujours question de $1,500: $1,500 dans la déclaration
assermentée devant la Cour de Faillites par Amédée
Bellemare, 12 juin 1962; $1,500, affidavit qu'on ne connaissait pas dans le
temps mais qui est venu à la connaissance du Comité dès
l'une des premières auditions des déclarations du 25 septembre
par M. Bellemare. Déclaration par le député de
Trois-Rivières pendant la campagne électorale, soit le 14
octobre. Déclaration du ministre procureur général, le 24
octobre, parue dans les journaux du 24 octobre 1962. Accusation par le
député de Trois-Rivières en Chambre le 30 juin. Et,
toujours, il est question de $1,500 que le ministre aurait empochés. Et
la déclaration du ministre dit: « Je dois dire qu'il (en parlant
d'Amédée Bellemare) l'a offert. » « L'a offert.
»
A ce moment-là, ayant à décider comme
député de cette Chambre, exactement comme tous mes autres
collègues, si, oui ou non, la déclaration était suffisante
pour justifier une enquête, nous avions devant nous la déclaration
du député de Trois-Rivières, oui! mais également la
déclaration du député de St-Maurice, procureur
général. Et je vous rappelle que l'article 196, paragraphe 3, dit
qu'il appartient à la Chambre, et non à l'Orateur, de
décider si la déclaration est suffisante pour justifier une
enquête.
A ce moment-là, comme plusieurs autres, j'en suis certain,
moi, j'ai compris que le procureur général admettait qu'il
avait reçu l'offre d'Amédée Bellemare de $1,500. C'est ce
que j'ai compris. C'est ce que d'autres collègues ont compris. Et nous
en avons conclu, à ce moment-là, avec raison, et le
député de Trois-Rivières évidemment participe
à ce même contexte, nous avons conclu, à ce
moment-là qu'il y avait une déclaration ou des
déclarations suffisantes pour justifier une enquête. Dans
l'opinion publique, il en était ainsi.
Or, M. le Président, la Chambre, qui s'est prononcée
à l'unanimité en faveur de la tenue de l'enquête, je vous
le soumets respectueuse- ment, avait le droit de s'enquérir, avant de
référer l'affaire au Comité des privilèges et
élections, si la déclaration était suffisante. Et je
déclare ici que « prima facie », à sa face
même, à cause des documents que j'ai cités, à cause
surtout de la déclaration du député de St-Maurice, nous
avions raison de juger qu'il y avait lieu de faire une enquête. Et le
député de Trois-Rivières, je le soumets respectueusement
mais fermement, avait, lui aussi, une raison additionnelle à ce
moment-là de croire que son accusation avait un certain fondement
sérieux.
Deux affidavits assermentés. Deux affidavits sérieusement
assermentés. Le député de Trois-Rivières, on
l'admet, a fait enquête sur les méthodes d'assermentation et une
admission d'une offre d'argent par le même Amédée Bellemare
au même procureur général. A ce moment-là, et je
vous demande, M. le Président, de vous en rappeler, je demande à
mes collègues des deux côtés de la Chambre de s'en
rappeler, à ce moment-là, on ne peut pas dire, on ne peut, par
aucun raisonnement en arriver à dire que M. Gabias était de
mauvaise foi ou était imprudent. S'il avait été imprudent,
ce que je n'admets pas, s'il avait été imprudent jusqu'à
ce moment-là, je soutiens que l'admission du député de
St-Maurice, dans une forme qu'on veut aujourd'hui, expliquer en torturant la
grammaire et la syntaxe était une raison suffisante pour justifier la
bonne foi de n'importe quelle accusation.
Il ne faut pas l'oublier qu'il ne s'agit pas d'une matière qui
était cachée. Je voudrais, évidemment, épargner le
plus de temps possible à la Chambre en ne répétant pas
textuellement tous les propos, mais je voudrais les résumer
substantiellement, ou substantivement pour être plus exact.
Le député de Trois-Rivières a pris cette accusation
dans un dossier de la Cour, dossier dans lequel il n'avait aucune part ni comme
intéressé, ni comme créancier, ni comme procureur de l'une
ou l'autre des parties, pas même procureur d'aucun des créanciers
dans la faillite. Il s'agit d'une déclaration assermentée qui n'a
pas été sollicitée par le député de
Trois-Rivières. Le député de Trois-Rivières,
à l'ouverture de la campagne, utilisant ce document, a pris sur lui de
rendre à la connaissance du grand public un document qui de sa nature
est public. Il a répété, comme il arrive souvent dans les
campagnes électorales, une accusation.
Est-il nécessaire de rappeler aux membres de cette Chambre que ce
n'était pas la première fois qu'on entendait une accusation. J'en
ai entendu des accusations. J'en ai entendu de la bouche de mes adversaires.
J'en ai portées, mais
jamais sur la réputation d'aucun. J'en ai portées de
très dures sur les idées politiques de plusieurs de mes
adversaires et s'il y en a un qui s'en souvient c'est certainement le ministre
des Affaires culturelles qui se souvient des campagnes de 1952 et de 1956. Je
ne viens pas dire que je n'ai pas fait des campagnes électorales qui
étaient dures. J'en ai subi des difficiles, des accablantes. Mais, je
n'ai jamais porté d'accusation de ce genre. Le député de
Trois-Rivières en a portées mais en se basant sur un
témoignage assermenté non sollicité par lui. Il y a
déjà là, un élément de sérieux. On
peut discuter de l'à-propos d'utiliser de telles accusations en campagne
électorale, mais l'on doit admettre qu'au moins lui, le
député de Trois-Rivières, les portait en se basant sur un
document assermenté qu'il n'avait pas sollicité.
Et quand je songe à certaines accusations quand je songe à
certaines accusations portées dans cette Chambre par les membres de
l'Opposition alors que nous siégions de l'autre côté. Quand
je songe à certaines accusations portées en dehors de la Chambre
par nos adversaires politiques, particulièrement par celui qui a
été victime de l'accusation, le député de
St-Maurice.
Je dis que le député de Trois-Rivières a
été plus prudent et moins injuste que ne l'ont été
certains des collègues dans cette Chambre et particulièrement le
député de St-Maurice, qui ne se gênait pas pour nous
accuser en bloc, et si on voulait avoir des preuves, j'en ai. Je les fournirai
avec plaisir. Des accusations où nous passions tous pour des gens
croches, où nous passions tous pour des concussionnaires. Des
accusations où il nous englobaient non pas un à un mais
globalement, tous les députés, sans faire d'exception pour qui
que ce soit, ni pour celui qui parle, ni pour le député de
Missisquoi, ni pour le député de Champlain, ni pour aucun d'entre
nous. Comparons cette méthode et l'autre celle d'un député
qui se base sur un affidavit et qui se lève en Chambre ensuite pour
être logique, la répète face à face pour donner
comme le dit le député de St-Maurice, lui-même procureur
général, la chance à un député de cette
Chambre de laver sa réputation.
J'aurais été heureux que certaines accusations qu'on a
portées contre nous, qu'on a fait porter contre moi par certains
collègues qui sont ici dans cette Chambre, qui n'étaient pas
collègues à ce moment-là, et je réfère au
député de Chambly pour qu'il n'y ait pas de doute, ministre des
Affaires municipales, j'aurais été heureux que ce soit face
à face qu'on vienne dire ce qu'on a écrit dans le journal... sous
sa signature; « scandale et tripotage de $20,000,000; six ministres dont
le député de Bagot, M. le Président...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. JOHNSON: ... Je compare les méthodes M. le Président,
je compare la logique et le courage de certains collègues avec celui du
député de Trois-Rivières. Le député de
Trois-Rivières a donc porté une accusation en dehors de la
Chambre. Il l'a répétée en Chambre et à ce
moment-là. J'ai dit que ça demandait du courage et je crois
l'avoir démontré.
Il est donc coupable automatiquement, il le reconnaît
lui-même et nous le reconnaissons d'avoir violé les
privilèges d'un député, soit le député de
St-Maurice. Quel est le privilège que le député de
Trois-Rivières a violé? Disons que nous allons le cerner à
ceci. Tout député dans cette Chambre a droit qu'on ne porte pas
contre lui des accusations qui sont de nature à ternir sa
réputation à mettre en danger sa sécurité où
à mettre en danger la sécurité de la Chambre. On choisira
M. le Président les termes que l'on voudra, il n'y a pas de
discussion.
Il est évident et je prends la responsabilité de mes
paroles, il est évident qu'un député dans cette Chambre,
Dieu sait si la politique est assez ingrate sans ça, a le droit au moins
qu'on ne porte pas d'accusations à la légère contre lui.
Et c'est l'un des privilèges qui remonte à l'origine même
des institutions parlementaires britanniques. Il n'y a donc pas de discussion
sur le point. C'est un privilège extrêmement précieux,
auquel nous avons raison de tenir. Et je l'ai dit dans mon intervention du 8
juillet, j'espère que ce précédent qui actuellement se
prépare dans cette Chambre au parlement de Québec servira
à rendre plus sérieux, les gens qui veulent porter des
accusations et ça ne s'applique pas seulement aux gens de la
Chambre.
M. le Président, ce privilège nous y tenons vous y tenez
et il faut, si nous voulons sauvegarder nos institutions démocratiques,
il faut que nous y tenions tous. Ce privilège n'a pas toujours
été respecté. Ce privilège dont l'une des
conséquences c'est notre droit d'entendre une accusation face à
face, selon les modalités prévues dans le règlement, n'a
pas été observé, il a été violé par
le gouvernement que j'ai devant moi, il a été violé d'une
façon constante, méthodique lorsque le gouvernement qui est
devant moi, ayant de soi-disant reproches envers ma conduite et celle de
certains autres députés et ministres du temps n'a choisi de ne
pas suivre le règlement, mais de s'abrier au moyen de millions d'argent
des contribuables...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre...
M. JOHNSON: ... derrière des commissions d'enquêtes.
M. LE PRESIDENT; A l'ordre. Je demande évidemment comme
actuellement nous ne sommes pas à étudier un projet de loi, mais
plutôt entendre en quelque sorte des plaidoiries sur un jugement qui sera
rendu par la Chambre, je me demandais depuis quelques minutes quel est le but
recherché par le chef de l'Opposition. J'ai compris dès le
début que la prémisse de la motion était admise, il y
avait eu violation de privilège et j'ai l'impression que le
député voudrait parler de la sentence ou du moins de la
proposition faite à la motion à savoir combien de temps devrait
durer la suspension. Je ne crois pas si vous me permettez de finir, je ne crois
pas que ce soit l'occasion d'ouvrir un débat sur d'autres sujets
d'autres personnes, ou d'autres époques puisqu'à date sur la
motion j'ai compris qu'on s'en était tenu à ce qui était
actuellement devant la Chambre, le résultat du rapport du Comité
qui est reçu et je demanderais au chef de l'Opposition de s'efforcer de
rester dans le sujet de la prémisse qu'il a admise et qu'il argumente
sur les conclusions.
M. JOHNSON: M. le Président, je n'insiste pas, sauf que vous
comprendrez que j'argumente sur la deuxième partie de la motion qui se
lit comme suit: « ... que, vu la gravité de cet outrage, le
député de Trois-Rivières soit exclu pour une
période de trois ans ».
J'essaie d'analyser quelle est la gravité de l'outrage. Et avant
d'en arriver à la gravité de l'outrage, M. le Président,
il faut bien que je sache quel est le privilège ou que j'essaie de
cerner quel est le privilège qui a été violé ou qui
n'a pas été respecté par le député de
Trois-Rivières.
Je disais donc qu'on a raison,qu'on a raison d'invoquer ces articles,
qu'on a raison de vouloir maintenir ces privilèges tels qu'ils ont
été consacrés dans ce volume qui répète et
qui comprend évidemment la formulation de privilèges, formulation
qui remonte aux débuts, aux origines du système parlementaire. Je
dis que c'est certainement grave. Mais, dans l'appréciation de la
gravité de l'outrage qu'aurait fait le député de
Trois-Rivières, il faut s'en reporter, entre autres normes, au contexte
et le contexte, j'étais en train de l'expliquer, est celui-ci:le
député de Trois-Rivières est membre de cette Chambre
depuis 1960; il a entendu des accusations et il a été
témoin, témoin évidemment peiné, comme bien
d'autres, de la violation systématique des privilèges de cette
Chambre, quand on procède autrement que par les méthodes
prévues dans le présent règlement.
Ceci étant dit, M. le Président, je considère que
cette suspension que l'on propose pour une période de trois ans est
injuste, souverainement injuste. Le premier ministre a argumenté
tantôt en disant: « Je vous réfère aux paroles du
député de Montréal-Laurier », et le premier ministre
les citait comme si c'était de la jurisprudence ou de la doctrine.
M. LESAGE: Non.
M. JOHNSON: ... C'est une opinion que je partage, qu'il ne faut pas
traiter à la légère de telles choses, mais il ne faut pas,
non plus, ériger en principe des opinions de qui que ce soit. Il ne faut
pas ériger en principe des opinions de gens qui ont peut-être
moins d'expérience que plusieurs autres membres dans cette Chambre sur
le contexte dans lequel certains actes sont posés et certaines paroles
sont prononcées.
Le contexte, le premier ministre y a touché en parlant du
député de Richmond. Il a cité les procès-verbaux
où il est démontré que, le 13 février 1957, le
député de Richmond avait été expulsé de la
Chambre pour une période de trente jours.
Le premier ministre aurait pu, pour nous permettre d'interpréter
exactement la portée de cette sentence imposée par la Chambre,
rappeler que, le 31 janvier 1957, soit treize jours auparavant, le même
député avait déjà été expulsé
pour une période de huit jours.
On se rappellera les circonstances. Qu'on prenne les journaux de
l'Assemblée législative de 1956-1957, page 328, rapport du
président du comité: « Au cours du débat sur la
résolution numéro 2 relative au bill 40, « Loi concernant
l'assistance aux mères nécessiteuses et la Commission des
allocations sociales de Québec », le député de
Richmond, d'un ton courroucé, a déclaré: « Ceux qui
ont été élus sur de fausses représentations, ce
sont ceux qui ont soûlé la province. »
M. le Président, est-il nécessaire de vous dire que ce
n'était pas des compliments à faire à des
députés au pouvoir que de dire qu'ils avaient été
élus parce qu'ils avaient soûlé la province. C'était
une de ces accusations générales qui s'appliquaient à tout
le monde.
M. LESAGE: Ce n'est pas là-dessus que le rapport a
été fait.
M. JOHNSON: Je parle de l'expulsion qui avait
précédé celle du 13 janvier, soit celle du 31 janvier. Il
faut rappeler aussi que le député de Richmond, en deux autres
occasions, à un
mois d'intervalle, avait été expulsé de cette
Chambre, une fois pour des remarques désagréables envers
l'orateur: il avait été expulsé pour 24 heures,...
M. LAFRANCE: Vous seriez tous expulsés, s'il fallait appliquer la
même justice envers tout le monde!
M. JOHNSON: ... et une autre fois, M. le Président, le 25
février, pour d'autres propos anti-parlementaires, dont je n'ai pas ici
de détails. C'est dans le procès-verbal qu'on le trouvera
plutôt que dans les journaux.
M. le Président, il s'agissait donc d'un député qui
était expulsé pour la quatrième fois.
Il s'agissait d'un récidiviste, il s'agissait d'un
récidiviste.
M. LESAGE: Est-ce que là on pourrait qualifier le mot «
récidiviste »?
M. JOHNSON: M. le Président, il avait récidivé, il
était revenu à la charge, il l'avait fait volontairement, il
avait eu, avant son expulsion,...
M. LESAGE: M. le Président...
M. JOHNSON: ... ah, mais voici, on a allégué un
précédent, M. le Président! Je le connais! Je l'ai
vécu et je vais l'expliquer!
M. LESAGE: M. le Président, lorsque j'ai invoqué le
précédent, j'ai purement et simplement lu les
procès-verbaux officiels de la Chambre.
M. JOHNSON: M. le Président, le premier ministre a invoqué
les précédents que j'ai vécus, dont j'ai été
témoin.
M. LAFRANCE: Eh! l'acteur!
M. JOHNSON: C'était des insultes, de propos
délibéré,...
M. LESAGE: M. le Président...
M. JOHNSON: ... écrites la plupart du temps...
M. LESAGE: Objection.
M. JOHNSON: ... d'avance, répétées, non
retirées.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. JOHNSON: ... malgré les objurgations de l'Orateur.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LESAGE: J'invoque le règlement, M. le Président. Est-ce
que le chef de l'Opposition peut, à ce moment-ci, faire des commentaires
et donner son jugement personnel sur des décisions antérieures de
la Chambre, alors qu'il y a des documents officiels qui peuvent être
cités?
M. JOHNSON: M. le Président, vous n'allez certainement pas juger
qu'on n'a pas le droit d'examiner un précédent que l'on
connaît mieux que le livre ne le connaît, et certainement mieux que
ne le connall le premier ministre. C'est lui qui a invoqué un
précédent, M. le Président.
M. LESAGE: Oui, M. le Président, je l'ai invoqué en me
servant des procès-verbaux.
M. JOHNSON: Est-ce que je suis obligé, M. le Président, de
me limiter aux procès-verbaux quand je sais dans quel contexte et
c'est là l'argument que je voudrais faire comprendre aux
collègues de cette Chambre, le contexte, est-ce qu'on va me
demander d'ignorer le contexte qui explique un précédent au sujet
duquel, M. le Président, je puis avoir une opinion à part
ça? Même récidiviste: 30 jours! C'était une
très grave, probablement trop grave punition à ce
moment-là. Le précédent que le premier ministre
allègue, si on le connaît, il faut évidemment, et nous
avons certainement le droit d'en soupeser la valeur, et le premier ministre l'a
laissé entendre, ça a peut-être échappé
à quelques membres de cette Chambre, mais la Chambre était alors
revenue sur sa décision...
M. LESAGE: Pour ne pas lui enlever...
M. JOHNSON: ... et a donné au député de Richmond
son indemnité.
M. LESAGE: Oui. M. le Président, sur...
M. JOHNSON: En somme il a eu des vacances payées!
M. LESAGE: Oui, sur cet incident, si j'ai bien compris, les
témoins m'ont dit qu'on se demandait s'il avait droit ou s'il n'avait
pas droit à son indemnité. Aujourd'hui, la loi de la
Législature dit...
M. JOHNSON: Quelles pages des procès-verbaux?
M. LESAGE; ... que le députe qui ne siège pas...
M. JOHNSON: A quelles pages des procès-verbaux que cela
paraît-il?
M. LESAGE: Je ne sais pas. « On » m'a dit...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs. Est-ce que je pourrais demander
aux députés qui voudraient prendre la parole sur la motion
d'essayer de se limiter et de donner peut-être des opinions à la
Chambre concernant des questions de privilège, sur l'affaire
précise que discute présentement le chef de l'Opposition. Je n'ai
pas voulu l'interrompre, mais je crois qu'il pourrait peut-être discuter
de ce précédent sans donner quelque chose qui va obliger le
ministre concerné, le député de Richmond, de se lever pour
défendre ses actions d'il y a quatre ou cinq années. Et je crois
qu'il est de mon devoir de demander à tous les députés qui
voudraient parler sur la motion qui est devant la Chambre, qui concerne une
violation des privilèges de la Chambre, c'est quelque chose, je crois,
qui est beaucoup plus important qu'un simple manquement au règlement en
général de la Chambre.
Alors si, je fais ça comme suggestion, je crois que c'est mon
devoir, je ne voudrais pas certainement entrer dans la discussion, mais je
crois que c'est là-dessus que la Chambre voudrait être
éclairée.
M. JOHNSON: M. le Président, vous avez droit à votre
opinion, mais ce n'est pas à vous de juger...
M. LE PRESIDENT: Non.
M. JOHNSON: ... de la valeur relative des précédents,
c'est à la Chambre. Je regrette vous n'aurez pas de jugement à
rendre, c'est la Chambre.
M. le Président, je tacherai quand même d'éviter de
tenir des propos qui pourraient soulever des débats qui ne sont pas
« ad rem ».
Donc le député de Trois-Rivières a porté son
accusation en Chambre. Il n'a pas réussi à la prouver. C'est une
accusation qu'il avait déjà portée à
l'extérieur, qu'il a eu le courage d'apporter ici, face à face,
dans un geste qui a contenté le ministre, procureur
général qui l'a déclaré, comme vous le savez
à la page 726 des procès-verbaux.
Est-elle grave cette violation? En soi, oui.
Dans son contexte, non. Puisqu'on parle de revaloriser la fonction
publique, je trouve qu'on devrait tenir compte dans l'appréciation de la
gravité, du fait que le député de Trois-Rivières ne
joue pas double jeu, ne parle pas d'une façon à
l'extérieur, en campagne électorale, et d'une autre en Chambre.
Je voudrais qu'on tienne compte également que le député de
Saint-Maurice ne semble pas avoir, je dis bien, ne semble pas avoir pris aucun
des moyens à sa disposition pour faire taire un homme qui violait,
clairement les privilèges du député de Saint-Maurice.
Il y a à l'article 197, une procédure prévue pour
un député qui désire se plaindre d'une violation de
privilège commise par une personne qui n'est pas député.
Mais, à aucun moment le député de Saint-Maurice n'a
semblé disposé à utiliser ce moyen alors qu'il savait, de
son propre aveu, que ledit Amédée Bellemare colportait de telles
choses et alors que lui-même, procureur général, avait dit
à certains de ses amis qui ont témoigné devant nous:
« S'il continue je le ferai maudire en prison. » Le
député de Saint-Maurice n'a pas décidé, lui,
d'utiliser un autre moyen qui a été utilisé par le
député de Vaudreuil-Soulanges et par le député de
Chambly, de prendre une action devant la Cour supérieure contre ceux qui
colportaient des choses que ces députés considèrent comme
fausses. Le député de Saint-Maurice n'a utilisé aucun des
moyens traditionnels, aucun des moyens prévus par le règlement et
le député de Trois-Rivières lui, a suivi le
règlement et je demande qu'on en tienne compte.
Je crois sincèrement que la politique dans la province de
Québec prendra de la stature si tous les membres de cette Chambre
veulent se résoudre à utiliser le règlement plutôt
que ces accusations en dehors de la Chambre ou ces accusations vagues à
l'intérieur de la Chambre.
Dans tout le reste du Canada, et ça, ça me fait de la
peine, on considère Québec comme une province où les
moeurs politiques sont dépravées, non pas parce qu'elles sont
effectivement ou réellement moins bonnes, mais parce que nous, nous en
parlons constamment au lieu d'utiliser le règlement et de porter des
accusations face à face. Il faut mettre fin à cette tradition
dans la province de Québec. Il faut mettre fin à ce masochisme
politique qui consiste, pour nous particulièrement de langue
française, à nous déprécier aux yeux de tout le
Canada et de tout l'univers. Il faut y mettre fin et une
des manières d'y mettre fin, c'est que nous prenions tous la
résolution de faire
comme le député de Trois-Rivières, quand on a des
accusations à porter, les porter face à lace.
Maintenant, le député de Trois-Rivières n'a pas
réussi. L'Opposition, et j'ai hâte de voir le jour
où les libéraux nous imiteront, a voté avec les
libéraux pour établir bien clairement que nous ne
considérons pas prouvée l'accusation contre le
député de Saint-Maurice. « Je suis certain qu'il a
dû, hier, être heureux, et que son épouse et que ses enfants
ont dû être heureux de voir qu'il y avait des hommes politiques,
dans cette Chambre, qui pouvaient mettre de côté l'esprit de
politique, et observer la justice envers un collègue, en votant
unanimement pour le projet de rapport du député de
Québec-Centre. J'aurais été, à sa place,
très heureux de constater que les députés du parti adverse
sont capables de ce sens de la justice, et sont capables malgré certains
inconvénients politiques que cela peut représenter, de mettre fin
à certaines règles que je considère dictatoriales dans
notre système politique. Mais seulement, le lendemain matin, quand c'est
au tour du gouvernement de prendre l'initiative, qu'est-ce que nous voyons? une
motion qui a une saveur de vengeance, une motion concluant à l'exclusion
pour une période de trois ans. Je l'ai dit, je considère cette
période de trois ans injuste, et je la considère...
M. LESAGE: M. le Président, je dois objecter, pour relever une
inexactitude du chef de l'Opposition. Il a dit « Le gouvernement a
décidé... » je dois dire que j'ai pris la
responsabilité de la motion, et que j'ai dit que c'était un
pénible devoir.
M. JOHNSON: M. le Président, c'est un secret de polichinelle, que
le caucus en a décidé. Les libéraux, en ont
discuté, dis-je. Nous avons tout lieu de croire que le Cabinet des
ministres en a discuté. 11 est vrai que le député de
St-Maurice aurait été dans le chemin,
déprécié lui et sa famille; mais, comme on me le
suggère avec raison, si l'accusation avait été
prouvée, il aurait subit les conséquences de ses actes, il aurait
subit une peine extrêmement dure, extrêmement sévère,
je l'admets, mais il ne l'aurait subie que si on avait réellement
prouvé qu'il avait pris de l'argent. Il y en a d'autres qui subissent
des peines extrêmement graves, aussi graves, sinon plus, que celle
qu'aurait subie le député de St-Maurice, si on avaitprouvé
l'accusation, et ces gens-là n'ont pas pris d'argent. Aucune preuve n'a
été faite qu'ils avaient pris de l'argent, Même, admission
qu'on n'en a pas pris. Même, admission que ç'a n'a rien
coûté de plus à la province, et pourtant ils sont sous le
coup...
M. LESAGE: M. le Président, ils sont devant les tribunaux.
M. JOHNSON: ... de peines semblables; et je sais qu'on me demandera de
ne pas en parler parce que la cause est « sub judice », mais je
demande au premier ministre de dire à son ministre de l'Agriculture,
quand il va dans Dorchester et à Alma, de ne pas y faire allusion.
M. LOUBIER: C'est ça.
M. JOHNSON: J'aime bien les règles du jeu, j'aime bien que les
règles du jeu soient celles des « gentlemen », mais je
voudrais que les deux équipes jouent le jeu, par exemple, et suivent le
même règlement.
Elle est injuste, et elle est antidémocratique cette suspension
que l'on recherche pour une période de trois ans. Le
député de Trois-Rivières a été élu en
1960, il fut d'ailleurs le seul nouveau député dans
l'équipe de l'Union nationale, et dans des conditions qui
n'étaient pas faciles, puisqu'il y avait même un candidat Union
nationale indépendant. En 1960 il fut la seule addition à
l'équipe.
Il a accompli un énorme travail dans cette Chambre. Il a
été, je crois que c'est de mon devoir de le dire à tous
ses collègues, il a été l'un des députés les
plus travailleurs, les plus méthodiques. On pourra discuter de ses
méthodes, son ton de voix, chacun a ses défauts
mais il reste que c'est l'un des députés les plus
appliqués, c'est l'un des députés qui s'occupe le plus de
son comté, c'est l'un des députés les plus ponctuels
à la Chambre, c'est l'un des députés, qui à mon
sens, représentent véritablement ce groupe d'hommes qu'on devrait
avoir, en ce qui concerne la représentation de leur comté.
Il a été réélu en 1962 après avoir
porté publiquement, à l'assemblée d'ouverture, qu'on se le
rappelle, de sa campagne électorale, le 14 octobre, l'accusation qui,
évidemment, est la base de tout ce problème.
Ses électeurs avaient raison de s'attendre à ce que le
député de Trois-Rivières, après avoir porté
une accusation en dehors de la Chambre, la porte en Chambre. Il n'a pas
réussi. Il prétend qu'il manque des documents. Il prétend
que cette Chambre devrait attendre d'avoir tous les documents, ceux notamment
que j'ai mentionnés tantôt. Et moi je vous dis que les
électeurs de Trois-Rivières subissent une violation de leur droit
élémentaire si cette Chambre suspend le
député de Trois-Rivières pour trois ans. On n'a pas
le droit de punir l'électorat de Trois-Rivières pour trois ans en
le privant d'un représentant au parlement. On n'a pas le droit de
priver, je le répète, les électeurs rouges, Union
nationale ou d'autres nuances du comité de Trois-Rivières d'un
représentant, d'un député dans cette Chambre.
C'est antidémocratique à sa face même. Et je fais
appel à des députés de cette Chambre libéraux,
mettant à l'épreuve leur sens de la démocratie et leur
sincérité quand ils en parlent, leur demandant de ne pas
considérer cette motion comme une motion qui engage la vie du
gouvernement. M. le Président, il me semble que connaissant certains des
collègues qui siègentà votre droite, connaissant la vie
professionnelle de certains d'entre eux, connaissant leur charmante famille,
connaissant la manière dont ils ont été
élevés, il me semble qu'ils seraient tellement plus heureux si la
sentence n'était pas démesurément sévère
etaussiantidémocratique qu'une suspension de trois ans.
Et je demande au premier ministre de revenir sur sa décision. Je
demande au premier ministre de revenir sur sa décision et de
déclarer au moins que le vote n'est pas un vote de partisans, que le
vote est libre. Autrement, avec raison, dans la province, dans le pays et dans
toute l'Amérique sinon ailleurs, on dira que le parti libéral
s'est vengé d'un député qui a accusé un membre du
parti libéral, alors que ce député de l'Opposition n'a pas
réussi, et on tirera les conclusions que s'il avait été au
pouvoir il aurait peut-être réussi lui aussi.
M. LAPORTE: M. le Président, deux choses essentiellement à
retenir de l'exposé que vient de faire le chef de l'Opposition, la
motion qui est actuellement en discussion devant cette Chambre serait
antidémocratique et injuste. C'est là l'essentiel de son
argumentation.
Voyons d'abord si cette motion, si ce que nous faisons actuellement est
antidémocratique. Si nous repassons toute la procédure depuis le
début, il est facile de constater qu'à chacune des étapes,
cette Chambre a scrupuleusement respecté les prescriptions du
règlement qui gouverne nos délibérations.
Comme le veut le règlement, le député du
comté de Trois-Rivières a donné son avis. Il l'a fait le
30 juin. Conformément au règlement de l'Assemblée
législative, le 8 juillet, une motion a été votée
unanimement par cette Chambre, référant le problème au
Comité des privilèges et élections. Conformément au
règlement de cette Chambre, le Comité des privilèges et
élections a siégé pendant de nombreuses heu- res, trente
au total, pour entendre tous les témoins que l'une et l'autre partie ont
voulu interroger.
Procédé antidémocratique, je voudrais bien
souligner devant cette Chambre que le rapport préparé par le
président du Comité, le député de
Québec-Centre, a été adopté à
l'unanimité par le Comité des privilèges et
élections. Je me demande alors ce qu'il y a d'antidémocratique si
nous nous en reportons tout simplement à l'article qui a
été invoqué par le député de
Trois-Rivières pour porter son accusation, à l'article qu'on a
utilisé pour référer l'étude et l'enquête au
Comité des privilèges et élections (l'article 196) qui
déclare de façon absolument catégorique que, si le
député qui a porté l'accusation ne prouve pas qu'elle est
fondée, il devient coupable d'une violation de privilèges.
Il est donc évident que, jusqu'ici, dans tout ce qui s'est
passé, il n'y a absolument rien d'antidémocratique, si peu
antidémocratique que le Comité des privilèges et
élections a réussi à faire l'unanimité autour de
son rapport.
M. JOHNSON: M. le Président, je ne veux pas être malcommode
por le député, mais il est trop intelligent pour argumenter comme
il vient de le faire.
M. LAPORTE: Pourquoi?
M. JOHNSON: Je n'ai pas dit que d'apporter une motion c'était
antidémocratique, j'ai dit que de priver l'électorat de
Trois-Rivières d'un représentant dans cette Chambre pendant trois
ans, c'était antidémocratique. C'est tout ce que j'ai dit...
M. LAPORTE: M. le Président, le chef de l'Opposition a
commencé son discours à peu près dans les termes suivants:
« Cette motion est antidémocratique et injuste. »
M. JOHNSON: Bien oui! Dans ce sens-là, évidemment!
M. LAPORTE; Et, plus loin, dans son argumentation, il a expliqué
que c'était antidémocratique de priver le comté de
Trois-Rivières de la présence de son député. Nous
allons y venir.
Est-ce que la Chambre, comme telle, a le droit de suspendre ou
d'expulser un député? Si la Chambre n'a pas ce droit, nous
faisons quelque chose d'antidémocratique. Mais, si nous nous reportons
à l'article 76 qui a été cité tout à l'heure
par le chef du gouvernement, nous constatons à la note, au bas de
l'article 76, la note 2; « On ne saurait contester à un corps
législa-
tif le pouvoir de suspendre ou expulser un de ses membres pour une
raison jugée suffisante. »Et, deuxièmement, on va plus
loin, on explique que ce pouvoir est absolument essentiel pour assurer la
dignité et l'unité du corps législatif dans lequel nous
siégeons.
Si nous nous référons à quelques auteurs, à
Cushing, par exemple, dans « Law and Practice of Legislative Assemblies
», nous trouverons (je traduis à mesure que je parle), que le
pouvoir d'expulser un membre fait naturellement et nécessairement partie
de l'ensemble des pouvoirs qui est dévolu à un corps
législatif parce que, sans la présence ou l'existence de ce
pouvoir, le Parlement ne pourrait exister de façon honorable ou remplir
l'objet pour lequel il a été créé. »
Précisément, l'auteur que je cite se réfère
à l'objection que vient de soulever le chef de l'Opposition à
l'effet qu'il serait antidémocratique de priver les électeurs de
Trois-Rivières du député qu'ils ont élu en
1962.
On ajoute, d'abord, qu'un pouvoir analogue à celui d'expulser un
député, c'est celui dele suspendre de l'exercice de son mandat
pour une période plus ou moins longue, sentence, dit-on, qui est d'un
caractère plus doux que l'expulsion. Mais l'on dit que, pendant la
durée de la suspension. « The electors are deprived of the
services of their representative without power to supply place but the rights
of the electors are no more infringed by this proceeding than by an exercise of
the power to imprison. » Ce qui revient à dire que les
électeurs d'un comté n'ont pas plus de droits que celui qu'ils
ont élu pour les représenter ou que les droits des
électeurs d'un comté ne peuvent venir en contradiction avec les
pouvoirs de la Chambre. Car quelle serait l'autorité de la Chambre de
suspendre un de ses membres s'il lui était interdit, à cette
Chambre de priver les électeurs de son représentant? Et, quelle
différence y a-t-il en principe entre suspendre le député
de Richmond pour trente jours ou suspendre le député de
Trois-Rivières pour trois ans?
C'est exactement le même principe, sauf que la période de
suspension est plus ou moins longue; que, dans le cas de trente jours, les
électeurs sont privés de représentant pour trente jours et
que, dans l'autre cas, c'est pour trois ans.
Mais je dis que si nous acceptions le raisonnement du chef de
l'Opposition, raisonnement qui est contredit par Cashing, c'est la
négation même du droit qu'a cette Chambre de suspendre un
député.
M. le Président, je peux également citer une autre
autorité, celle de May, qui est un des auteurs le plus cités dans
cette Chambre, qui dit, dans son édition de 1906 que « comme toute
cour de justice, l'Assemblée législative a un droit fondamental
de se constituer en tribunal lorsqu'il y a lieu d'appliquer à ses
membres les prescriptions du règlement qui la gouverne ». Et l'on
dit que toute matière relevant du règlement peut et doit
être étudiée et jugée par le Parlement
lui-même, et c'est un des cas où l'on dit que cette Chambre a une
autorité absolument exclusive d'une autre Chambre qui, elle-même,
pourrait utiliser les mêmes pouvoirs pour faire respecter ces
règlements.
Nous n'avons absolument rien fait, nous n'avons ou cette Chambre ne fait
actuellement rien d'antidémocratique, elle est justement en train, dans
une journée qui est absolument désagréable pour tout le
monde, de remplir sa fonction judiciaire telle que décrite par May dans
son commentaire sur le rôle d'un parlement.
Est-ce que la motion que nous étudions actuellement est injuste?
M. le Président, je pense que nous allons tous admettre que l'accusation
qui avait été portée contre le député de
St-Maurice était infiniment grave. Le chef du gouvernement a fait
allusion aux conséquences qu'aurait pu avoir cette accusation si, par
malheur, le procureur général n'avait pas réussi à
recueillir les éléments de preuve nécessaires pour la
repousser, ou, c'est à bon droit que le premier ministre me le signale,
s'il était seulement resté un doute sur le non-fondement total de
cette accusation.
Le chef de l'Opposition tout à l'heure parlait de la
réputation de cette assemblée dans le reste du pays et ça
me permet d'ajouter que, non seulement la réputation du
député de St-Maurice a été affectée par
l'accusation qui a été portée (je n'ai pas dit par le
jugement qui a été rendu), par l'accusation qui a
été portée.
M. JOHNSON: Bien non, le jugement a réglé ça.
M. LAPORTE: M. le Président, je pense que j'ai laissé
argumenter le chef de l'Opposition sans l'interrompre une seule fois. Il sait
que je ne recule pas devant une assemblée comme celle-là, s'il
veut me contredire, mais ce n'est pas la façon de discuter. Je pense que
c'est assez difficile ce que j'ai à faire, que je tâche de m'en
tenir strictement au règlement, que je tâche de m'en tenir aux
faits, je lui demanderais, s'il vous plaît, de ne pas interrompre.
M. le Président, je dis que non seulement l'accusation pouvait
porter atteinte à la réputation du procureur
général, mais que, par ri-
cochet, c'est toute cette assemblée dont le privilège
collectif était menacé, c'est toute la Législature. Et
c'est beaucoup plus grave que des accusations pendant les campagnes
électorales auxquelles s'est référé le chef de
l'Opposition. C'est vrai que c'est extrêmement désagréable.
Mais, il l'a dit lui-même, des accusations portées en bloc:
« Tout un parti serait malhonnête, tout un parti serait ceci.
» Allons-nous croire, un seul instant, que la population d'une
façon générale accorde à ces accusations de
campagne électorale, à ces accusations portées contre tout
le monde en même temps, la même importance qu'une accusation bien
circonstanciée, portée solennellement par un
député, sous sa responsabilité, avec des
précisions: $1,500, 15 billets de $100, dans sa poche, droite ou
gauche?
Je dis que l'accusation portée par le député de
Trois-Rivières contre le député de St-Mau-rice est
infiniment plus grave que ces accusations en bloc, qui peuvent être
portées parfois, et que je serais probablement de ceux qui
souhaiteraient, comme le chef de l'Opposition, que le parlementarisme
s'élève à des hauteurs nouvelles. Il faut espérer
que les événements d'aujourd'hui nous aident à atteindre
cet objectif que nous déclarons tous vouloir rechercher. M. le
Président, le député de Trois-Rivières n'a pas mis
son siège en jeu.
M. BELLEMARE: D'ailleurs, le règlement le dit que ça ne
compte pas.
M. LAPORTE: Merci. Précisément;, M. le Président,
le règlement de cette Chambre dit qu'il n'est plus nécessaire,
lorsqu'on veut porter une telle accusation, de mettre son siège en jeu.
Je ne sais pas quelles ont été les raisons qui ont amené
le changement dans ce règlement, mais je veux simplement le citer pour
dire que pendant de nombreuses années, on a considéré cet
acte suffisamment grave, pour que l'accusateur se mette sur le même pied
que l'accusé, qu'il s'expose à perdre son siège. Pourquoi
l'a-t-on modifié? Je ne le sais pas personnellement.
M. BELLEMARE: C'est la note en bas qui le dit.
M. LAPORTE: C'est la note en bas de la page.
M. BELLEMARE: Ce n'est pas le règlement qui dit ça.
M. LAPORTE: 196, note 1, oui 196. M. le Président, il n'est plus
d'usage que le député qui porte l'accusation mette son
siège en jeu. Je voudrais bien souligner que le rapport du Comité
des privilèges et élections a été adopté de
la façon suivante: il a été lu, de la première
ligne à la dernière, d'abord, et ensuite, comme le veut le
règlement, nous l'avons adopté, paragraphe par paragraphe. Le
député de Trois-Rivières, après avoir soumis
quelques amendements mineurs, qui ont été acceptés, a
voté pour tous les paragraphes du rapport que nous avons devant nous, et
il a voté ensuite en faveur de l'adoption du rapport. M. le
Président, ce rapport contient la phrase suivante, qui aujourd'hui est
sanctionnée par le vote du député de
Trois-Rivières, selon son propre témoignage: «Le
député de Trois-Rivières a pris à son compte
l'accusation d'Amédée Bellemare, sans en vérifier la
véracité, il aurait pu faire, avant de poser un geste d'une
gravité aussi exceptionnelle, ce qu'un confrère Me Pierre Trudel,
a fait à sa demande après le 30 juin 1964, à savoir,
vérifier auprès du gérant de banque la provenance des
$l,500, il aurait pu également vérifier auprès de Samson
& Marchand Inc. les conditions.
M. JOHNSON: Le ministre a bien dit: « Il aurait pu », pas
« ... aurait dû ».
M. LAPORTE: Excusez-moi, si j'ai dit p-u. M. JOHNSON: C'est bien.
M. LAPORTE: « Il aurait pu également vérifier
auprès de Samson & Marchand les conditions du contrat intervenu le 8
août 1960 entre cette société et les frères
Bellemare ». Or, le député de Trois-Rivières a
voté, M. le Président, pour ce paragraphe. Il a voté pour
le rapport et l'on vient nous dire aujourd'hui qu'une des choses dont la
Chambre doit tenir compte, c'est que le député de
Trois-Rivières n'a fait preuve d'aucune imprudence. « Il n'a pas
été imprudent », dit le chef de l'Opposition, mais quand
est-ce alors, M. le Président, qu'un député dans cette
Chambre, portant une accusation, pourra être imprudent?
M. JOHNSON: Quand il écrira des articles comme les vôtres
dans « Le Devoir ».
M. LAPORTE: M. le Président, les hors-d'oeuvre du chef de
l'Opposition, encore une fois, il a parlé tantôt de courage,
d'articles, tout ça, ça ça pourra revenir, mais ce n'est
pas le cas aujourd'hui, il n'est pas question de ça. Il est question
d'un problème extrêmement sérieux, et encore une fois si le
chef de l'Opposition veut qu'on continue à l'étudier aussi
se-
rieusement qu'il l'a prétendu, qu'il garde donc le silence, M. le
Président.
M. JOHNSON: C'est difficile d'entendre ça de votre bouche.
M. LAPORTE: Oh! c'est difficile à entendre, je le sais, mais ce
n'est pas plus facile d'entendre le chef de l'Opposition, M. le
Président, et je me suis tu, parce que je trouve que c'est une
journée où l'on doit, autant que possible, étudier dans le
calme. M. le Président, le député de Trois-Rivières
qu'on dit ne pas avoir été imprudent, a reconnu qu'il s'est
basé uniquement sur un ou des témoignages sous serment d'un seul
des témoins: Amédée Bellemare. C'est sur cela, M. le
Président, qu'il a prétendu qu'il avait une preuve parfaite. Il
n'a pas vérifié auprès du gérant de banque, il ne
s'est pas enquis auprès de Samson & Marchand pour connaître au
moins les éléments essentiels de sa cause. M. le
Président, on a parlé de courage, dans le cas du
député de Trois-Rivières, je pense qu'on serait plus
fondé à parler de témérité, parce que la
té mérité c'est essentiellement du courage qui est mis au
service d'une cause qui n'est pas fondée.
M. le Président, ce n'est pas tout. Est-ce que le
député de Trois-Rivières, devant l'écroulement de
sa preuve, aussitôt que le gérant de banque a eu
témoigné, M. le Président, il était clair, à
ce moment-là, mais est-ce que le député de
Trois-Rivières s'est excusé publiquement auprès des
membres de cette Chambre, est-ce qu'il s'est excusé publiquement
auprès du député de.St-Maurice, nullement, M. le
Président, jusqu'à la fin, c'est peut-être partie de ce
courage auquel s'est référé le chef de l'Opposition,
jusqu'à la fin, il n'a pas dit un seul mot d'excuse. Je me permets de me
référer à cette cause, dont a parlé ce matin le
premier ministre et à la fin de laquelle, le député est
expulsé de la Chambre, son siège a été...
M. LESAGE: Expulsé du Parlement.
M. LAPORTE: ... expulsé du Parlement, l'élection dans son
comté et ce député a dit les choses suivantes: « I
want to express my deep regret for having returned the offending and offensive
article. And to apologize humbly and sincerely for writing in such a way as to
be an affront to the House. I wrote the article, but I do assure the House that
it never entered my mind when I wrote the article that I was committing a
breach of privilege ».
Nous sommes en présence d'un député, M. le
Président, qui mettons toute la bonne foi que l'on veut, dans cette
cause, nous sommes en présence d'un député au Parlement
Anglais, en 1947, qui constate qu'il a violé les privilèges de la
Chambre et qui s'excuse, qui s'excuse de la façon la plus formelle, de
la façon la plus solennelle et qui pourtant, alors qu'on propose une
suspension de six mois, la Chambre modifie la motion et l'expulse.
M. le Président, personne ne s'est excusé, dans le cas
actuel, on a parlé de précédent M. le Président, on
peut peut-être en citer un autre, pour montrer combien pour des choses
infiniment moins graves, on a eu recours à la suspension contre un
député de cette Chambre, le 15 février 1957, le
député de Hull, qui était un nouveau député,
s'est fait expulser pour huit jours, de l'Assemblée législative
parce qu'il avait refusé de retirer la phrase suivante; Que le premier
ministre, là je cite les mots du député, avait une
façon de faire du chantage.
Sur le point d'ordre soulevé par le premier ministre, j'ai
expliqué à l'honorable député que ce genre de
langage est clairement antiparlementaire et on l'a expulsé pour huit
jours, M. le Président, voilà...
M. BELLEMARE: Le député a déclaré à
ce moment-là qu'il ne retirait pas ses paroles.
DES VOIX: Voyons.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.
M. LAPORTE: En tout cas, vous pouvez être certain, M. le
Président, que je verse au dossier toute l'affaire, sur le point d'ordre
soulevé par le premier ministre, j'ai expliqué à
l'honorable député que ce genre de langage est clairement
antiparlementaire et je lui ai demandé de retirer ses paroles.
L'honorable député a déclaré d'un ton très
ferme qu'il ne retirait pas ses paroles, j'ai alors de nouveau demandé
au député de Hull de retirer ses paroles qui ne pouvaient
être tolérées dans cette Chambre. Le député
de Hull refuse une deuxième fois de retirer ses paroles dont rapport.
Sur réception de ce rapport, M. l'Orateur donne lecture de l'article 75
du règlement et déclare qu'avant de prendre position, il veut
savoir si le député de Hull consent à retirer ses paroles.
Le député ayant déclaré qu'il ne retirerait pas les
paroles qu'il avait prononcées en comité, M. l'Orateur le
rappelle nominativement à l'ordre, l'honorable monsieur Duplessis
propose que suivant les dispositions de l'article 76 du règlement, le
député de Hull soit censuré par la Chambre et suspendu
pour une période de huit jours.
M. BELLEMARE: C'est la même chose que le premier ministre m'a
faite à moi.
M. LAPORTE: M. le Président,
M. BELLEMARE: Il ne s'est jamais excusé...
M. LAPORTE: Quand on dit, M. le Président, que la sentence que
nous proposons aujourd'hui est injuste, je dis qu'il était absolument
impossible, les humains, de trouver une commune mesure entre ce qui serait
arrivé au procureur général si, et là je n'accuse
pas le député de Trois-Rivières du tout, je voudrais que
la Chambre sache clairement, mais si le « frame up » avait
été, et encore une fois je veux bien dire à cette Chambre
qu'il n'entre pas du tout dans mon esprit que le député de
Trois-Rivières ait pu de près ou de loin, mais si l'affaire
Bellemare avait été mieux organisée, ça aurait
continué à être faux, M. le Président.
Mais les conséquences pour le procureur général
auraient pu être absolument tragiques. C'est pour ça que je dis
qu'il est impossible pour des humains de trouver une commune mesure entre ce
qui aurait pu arriver au procureur général et la punition que
cette Chambre discute actuellement au sujet du député de
Trois-Rivières.
Nous ne devons pas, pour aucune considération, nous laisser
guider par des motifs de vengeance et j'espère que c'est là le
sentiment de chacun des députés de cette Chambre. Mais nous avons
quand même le devoir strict, peu agréable, absolument
pénible, mais nous avons le devoir strict de nous rendre jusqu'à
la limite de la justice.
C'est vrai ce qu'a dit le chef de l'Opposition. Nous avons
discuté entre nous de la période de suspension que le premier
ministre allait recommander dans sa motion. Mais je voudrais vous dire, M. le
Président, combien nous y avons pensé, combien nous avons
scruté, chacun d'entre nous, les conséquences de l'acte que nous
allions poser. Pendant combien de minutes nous avons hésité! Je
pourrais vous rapporter le cas d'un collègue qui me disait: « Ce
matin je me suis réveillé à cinq heures parce que j'avais
ce problème-là dans la tête. » Et l'on va nous dire,
M. le Président, que nous agissons par esprit de vengeance? Je voudrais
dire que, moi pour un, les aures collègues, les membres de cette
Chambre, nous avons foncièrement l'impression que nous voulons
simplement faire justice et qu'il nous apparaît à nous qu'une
suspension de trois ans est justifiée.
M. le Président, j'ai terminé l'exposé que je
voulais faire. Il était entendu entre nous que, vu les circonstances,
nous n'applaudirions pas les orateurs qui se lèveraient et je remercie
les députés de cette Chambre qui ont respecté cette
consigne avant et après le discours que j'ai prononcé.
M. BERTRAND (Missisquoi): M. le Président, je voudrais que mes
propos soient marqués au coin de la plus grande compréhension
humaine, de l'amour, il ne faut pas craindre de le dire, puisqu'on veut
s'éloigner de la haine, de l'esprit de vengance de part et d'autre; au
coin également de la vérité et, je ne crains pas
également de l'affirmer, de la miséricorde, qui est cette vertu
qui consiste à pardonner ce que normalement et raisonnablement l'on
aurait le droit de punir.
Il y a des occasions dans la vie publique où, comme homme
politique, se taire, garder le silence n'est pas recommandable, ne doit pas
être fait et celle-ci en est une, même si, comme tous les
collègues qui ont exprimé leur opinion, je réalise en mon
âme et conscience la responsabilité qui est la mienne en
même temps que le rôle excessivement ingrat que l'on doit jouer,
tous et chacun, en exposant notre point de vue le plus calmement possible,
n'ayant en vue que la recherche du droit, de la justice et de la
vérité, marquée au coin des sentiments que je viens
d'exprimer.
Je voudrais d'abord, dès le début, répondre au
député de Chambly. Le chef de l'Opposition n'a pas dit que les
actes parlementaires que nous avions posés par, par exemple
l'accusation, le comité, l'enquête, le dépôt du
rapport, tout cela, le chef de l'Opposition n'a jamais voulu dire que tout cela
était antidémocratique. Au contraire I Je suis heureux
d'affirmer, à la fin de toutes ces séances que nous avons eues au
Comité des privilèges et élections, que le Parlement de la
province de Québec a donné, par son comité, par les actes
que nous avons posés, actes de tous les députés, l'exemple
d'une démocratie active et d'une démocratie qui sait jouer son
rôle.
Lorsque le chef de l'Opposition déclare au député
de Chambly qui l'a relevé comme à tous les autres
députés que ce qui, dans la motion qui nous est
présentée et j'y reviendrai M. le Président, ce sont tout
simplement des préliminaires, ce qu'il y a d'antidémocratique,
c'est la peine disciplinaire qui est imposée, que le Parlement ait le
pouvoir, M. le Président, je ne le nierai pas, il est inscrit au livre
des règlements: « L'exclusion temporaire », je ne le nie pas
mais il y a ce qui s'appelle en certains cas l'abus d'un pouvoir, il y a
également ce qui s'appelle l'abus d'un droit. J'arrête là
mes considérations et je dis que la peine qui est imposée, je
reviendrai sur la motion que l'on
propose à la Chambre, que cette peine est abusive d'un pouvoir et
abusive d'un droit. J'y reviendrai tantôt.
Deuxièmement, le chef de l'Opposition a dit que c'était
injuste et je m'en tiens justement à cette partie des propos du chef de
l'Opposition qui concernent la motion, que vu la gravité de cet outrage
le député de Trois-Rivières soit exclu pour une
période de trois ans. Je n'ai pas besoin de dire ou d'établir ce
qui est antidémocratique, priver les électeurs du comté de
Trois-Rivières d'un représentant à la Chambre, tout cela
je n'ai pas besoin d'y revenir, elle est injuste, elle est excessive, elle est
démesurée, M. le Président.
Dans ces circonstances, personnellement, pourquoi ne pas dire tout haut
ce que j'ai pensé tout bas, ce que j'ai même dit à
certaines personnes, pouquoi s'en cacher? Nos propos à certains moment
peuvent être connus, je n'ai jamais eu de craintes de dire tout haut ce
que j'avais pu dire tout bas à quelqu'un. La procédure qui existe
nous impose à l'article 76, après un cas de violation de
privilège, la censure avec ou sans exclusion temporaire, vous donner mon
opinion, il y a également l'admonestation, la réprimande du
député mais il y a également la censure, la censure comme
telle.
L'admonestation, la réprimande ça peut être fait
pour des manquements, disons, légers, la censure comme telle, elle est
plus grave parce que l'admonestation et la réprimande elle est faite par
le président seulement tandis qu'un vote de censure de la Chambre ou de
blâme est un vote de la Chambre. Or, M. le Président, il est
clair, je ne saurais nier l'évidence des documents, des actes qui ont
été posés, il y a un rapport qui a été
présenté par le président du Comité des
privilèges et des élections, ce rapport conclut que la preuve de
l'accusation n'a pas été établie, n'a pas
été fondée, que l'accusation n'est pas fondée et
l'article 196, le paragraphe 5 de l'article 196 déclare formellement que
si l'accusation n'est pas fondée, cela constitue une violation de
privilège.
Seuls les membres qui étaient en bas au Comité ont
été appelés à décider de cela, seuls les
membres. Le rapport est devant la Chambre, que l'on dise à ce
moment-là: une réprimande par le président de la Chambre
que ce n'est pas suffisant, peut-être; que l'on dise: une admonestation
par le président de la Chambre proposée par, disons, le premier
ministre comme leader de la Chambre, que ce n'est pas suffisant; nous demandons
maintenant à la Chambre d'antériner le rapport qui a
été présenté par le président et de censurer
M. Untel.
Je regrette, mais les règlements de la
Chambre ne semblent pas le permettre parce qu'on parle d'une motion de
censure à laquelle on y greffe: avec ou sans exclusion temporaire.
Il est clair que, du consentement unanime de la Chambre, on pourrait le
faire, mais il ne semble pas qu'on pourrait l'obtenir. Dans les circonstances,
M. le Président, je suis obligé de prendre la motion telle
qu'elle est. Mais je tenais à faire ces restrictions.
Or, la motion que nous avons devant nous, et le chef de l'Opposition l'a
noté, elle parle de la culpabilité relativement à une
violation de privilèges. C'est vrai. Pour avoir porté contre le
député de St-Maurice une accusation de corruption qu'il n'a pas
prouvée, c'est vrai, et dont la fausseté a été
démontrée et reconnue, arrêtons là! L'accusation n'a
pas été prouvée. C'est le rapport qui a été
présenté par le président de la Chambre. N'allons pas
au-delà du rapport.
J'ai suffisamment d'expérience, M. le Président, devant
les tribunaux, et dans les propos que je tiens, qu'on ne les prenne pas comme
une allusion au député de St-Maurice, au contraire! mais il y a
eu des témoignages qui ont été prononcés devant ce
Comité qui ne portent pas sur les faits essentiels de l'accusation, j'en
conviens. Mais il y a eu des témoignages qui mériteront
d'être analysés. Et c'est tellement vrai. C'est au Comité
que nous avons fait mention d'envoyer certains témoignages au
ministère du procureur général, nous avons ajouté:
« Il y en aura peut-être d'autres. » Et le premier ministre a
dit: « Je ferai moi-même la motion. » Cela a
été répété tantôt.
Donc la première partie de la motion, je ne crains pas de le
déclarer, il est clair que le député de
Trois-Rivières, et d'ailleurs, il l'a admis, s'est rendu coupable d'une
violation de privilèges mais qu'à ce moment-là, en
principe, il peut être l'objet de réprimande, d'admonestation et
de censure. Là où je suis incapable de suivre le premier
ministre, c'est lorsqu'il déclare que « vu la gravité de
cet outrage, le député de Trois-Rivières soit exclu pour
une période de trois ans ».
D'abord, quand on parle d'exclusion temporaire dans le règlement,
on n'a qu'à lire le dictionnaire, si on veut comprendre le sens des
mots, indépendamment des précédents qui ont pu exister
ailleurs. Parce que l'on sait qu'en Angleterre, je pense, on parle d'exclusion
permanente; ici, on parle d'exclusion temporaire. Or, l'exclusion temporaire
est une exclusion momentanée, de courte durée. La durée
d'une Législature suivant la loi est de cinq ans. Nous avons
déjà deux ans, deux années sont terminées des cinq
années de cette Législature et on dit: « Expulsé
pour trois ans ».
Donc, M. le Président, cela équivaut, à compter du
moment présent, suivant la loi, à une exclusion permanente, donc
contraire au règlement de la Chambre qui dit: « une exclusion
temporaire ». On me dira... aux regards, j'ai vu qu'il pouvait y avoir
une apparence d'objection. Je dis que la durée d'un parlement est de
cinq ans. Alors qu'en ce moment, nous sommes en 1964, par le signe de
tête du ministre des Richesses naturelles, la durée normale de ce
parlement serait jusqu'en 1967 et que l'exclusion de trois ans qu'on impose
à l'heure actuelle au député du comté de
Trois-Rivières équivaut, en fait, à une exclusion
permanente et contraire, je le répète, à l'article 76 qui
dit « avec ou sans exclusion temporaire ».
M. RENE LEVESQUE: Est-ce que le député de Missisquoi me
permettrait une question? Est-ce qu'il veut dire qu'il emploie le mot «
permanent », (pour être sûr que je le comprends), dans le
sens de la vie d'un parlement qui, évidemment...?
M. BERTRAND (Missisquoi): C'est ça. C'est dans ce sens-là.
Je parle de la durée d'une Législature qui, suivant la
Constitution, est de cinq ans.
Donc, M. le Président, la peine que l'on inflige est excessive.
Elle est déraisonnable. Elle est antidémocratique. Elle est
injuste. Oh, sans doute, viendra-t-on me dire,... Il y a eu ailleurs des cas
semblables. Je n'ai pas l'intention de faire appel à aucun des
précédents. Je siège en cette Chambre par la
volonté populaire, comme député dans l'Opposition.
Je suis dans un parti politique, et au sein de ce parti je pense avoir
démontré à plusieurs reprises que si j'étais
prêt à respecter une certaine discipline, je n'étais pas
prêt à suivre aveuglément. Je pense l'avoir
démontré. Si on a besoin d'actes, le chef de l'Opposition
lui-même l'a dit tantôt. Je suis entré au Comité lors
de la première séance dégagé d'esprit de parti. Le
député des Trois-Rivières avait porté son
accusation comme député du comté de Trois-Rivières.
J'y suis entré comme député du comté de Missisquoi,
dans l'Opposition, et c'est ainsi, que j'ai l'intention de continuer.
J'ai, au Comité, pris certaines attitudes démontrant qu'il
n'y a pas eu de partisanerie. Des votes ont été pris. A ce
moment-là, avec mon expérience, comme député et
comme avocat, à l'examen de l'ensemble de la preuve que j'avais entendue
jusqu'à ce moment, à deux reprises, je n'ai pas craint, d'aucune
façon, sans changer ma manière de penser et ma manière de
voir, d'appuyer, à ce moment-là, le gou- vernement. Je
n'étais pas là comme partisan, parce que j'ai voulu prendre pour
acquit que nous étions là tout simplement comme
députés, siégeant dans un Comité, et je pense
qu'à plusieurs reprises, dans d'autres comités, nous avons fait
la preuve de ce que je viens d'avancer.
Donc, nous y sommes allés. Nous avons jugé, nous avons
posé des actes. Aujourd'hui, je le déclare, le chef de
l'Opposition l'a déclaré lui aussi, qu'il y a eu violation de
privilèges, et blâmes à l'endroit de celui qui s'en est
rendu coupable. Admis. Mais, de là à appuyer une motion comme
celle qui est présentée par le premier ministre, je dis non. On
parle de la gravité de l'offense. Je n'ai pas l'intention de revenir sur
les propos qui ont été échangés.
On a dit tantôt, je pense que c'est le premier ministre qui en a
parlé, que M. Hamel risquait sa réputation, sa famille, ses
biens, tout cela. Disons d'abord, immédiatement, que le
député de St-Maurice, je l'ai vu à l'oeuvre, en Chambre.
Personnellement, je ne lui en ai jamais voulu à cause de cela. Il a
bataillé. On peut juger de ses actes comme avec tous les
collègues dans la Chambre, j'ai de l'estime pour lui. Quand il a
été accusé, en mon âme et conscience, comme tous les
députés je disais: « Si l'accusation n'est pas
prouvée, tant mieux pour lui. »
Jamais je n'ai souhaité à qui que ce soit, j'en suis
absolument incapable, souhaiter du mal, par esprit de vengeance, même par
calculs.
Parfois, on peut considérer que c'est un défaut.
Personnellement, j'aime mieux être comme ça.
Donc, M. le Président, l'offense. Il est clair que si
l'accusation eut été fondée, ou si la preuve avait
révélé que l'accusation était fondée,
j'aurais été le premier à pleurer dans mon âme pour
lui, mais elle aurait été fondée. Or, qu'est-ce qui
se produit lorsque nous analysons les éléments, sans vouloir
prêter de motifs à qui que ce soit, sans sonder ou tenter de
sonder les reins et les coeurs. Je m'avoue absolument impuissant dans ce
domaine. Sonder les reins et les coeurs. Analyser les motifs qui peuvent
pousser quelqu'un à agir. Je vous avoue que je recule devant cette
tâehe. Je recule devant l'impossibilité de l'établir. Mais,
il y a des faits.
Le député de St-Maurice, lui-même, a dit: « Je
suis heureux qu'on lave cette affaire. » Il avait raison. Elle est
lavée, suivant la preuve qui a été faite, et le
député de St-Maurice, alors que si le contraire s'était
produit, aurait été reconnu indigne de siéger, et il est
digne de siéger en cette Chambre, à la suite de l'accusation non
fondée.
C'est l'utilisation d'un droit par le député de
Trois-Rivières qui a permis de laver cette affaire-là. Ce droit
qu'il a utilisé, l'a-t-il utilisé avec toutes les
précautions? M. le Président, c'est matière d'opinion!
Puisque je concours à reconnaître qu'il y a eu un blâme,
qu'il doit y avoir un blâme, j'admets donc que toutes les
précautions, et d'ailleurs il le reconnaît lui-même dans la
déclaration relativement à la véracité de certains
témoignages; donc l'accusation portée, non prouvée, la
réputation, l'honneur et la dignité du député de
St-Maurice sont saufs. Si, au cours de l'étude de cette affaire qui
était devant nous, l'affaire du Boulevard St-Onge pouvait paraître
ébranler, aux yeux de certains qui sont le jouet et la proie des
mouvements populaires, des secousses et des rumeurs, aujourd'hui, sa
réputation relativement à cette affaire est intacte.
C'est lui qui avait dit qu'il était heureux de laver cette
affaire et il avait raison. Il avait d'ailleurs déjà
étudié la possibilité de le faire. Si j'examine, M. le
Président, le témoignage du député de St-Maurice
(R/296 - page 1; déposition du 27 juillet 1964 vers cinq heures vingt de
l'après-midi), le député de St-Maurice déclare
ceci, en réponse à une question où il continue
l'explication de la déclaration faite par le député de
Trois-Rivières à l'occasion de l'ouverture de sa campagne
électorale à Trois-Rivières, il dit et je cite: « On
peut me demander pourquoi je ne l'ai pas poursuivi (en parlant
d'Amédée Bellemare). Avant de prendre une cause contre un
citoyen, quel qu'il soit, et même si, à première vue, il
peut paraître être méprisable, je prends les
précautions élémentaires. Dans le cas de parjure, il
fallait une corroboration. L'article 115 du Code criminel est formel. Je
n'avais à ce moment-là aucun fait. Je ne savais pas d'aucune
espèce de façon quelconque comment Amédée Bellemare
prétendait avoir agi dans cette affaire-là. Et je me suis dit!
(c'est toujours le procureur général, l'honorable René
Hamel, député du comté de St-Maurice qui parle) et Je me
suis dit; je ne suis pas capable d'aller devant la cour à ce
moment-là avec une cause de parjure parce qu'il m'aurait manqué
des éléments pour corroborer mon témoignage. » M. le
Président, c'est la fin de la citation.
Le député de St-Maurice avait raison de dire que, dans une
cause de parjure, il faut de la corroboration. On n'a qu'à vous
référer à l'article 115 du Code criminel où il est
dit; « Nul ne doit être déclaré coupable d'une
infraction visée par 113 ou 114 sur la déposition d'un seul
témoin à moins que cette déposition ne soit
corroborée sous quelque rapport essentiel par une preuve qui implique
l'accusé. »
Le député de St-Maurice avait raison. Mais ce que le
député de St-Maurice n'a pas pu faire, et ici je ne puis
m'empêcher de reprendre ce vieux dicton populaire, qu'on a si souventes
fois entendu, « A quelque chose malheur est bon. » Il y a toujours
dans toutes les situations les plus dangereuses, les plus délicates, de
tous les problèmes les plus épineux, des épreuves les plus
lourdes ( et je sais combien l'épreuve a pu être lourde, pour lui,
pour les membres de sa famille, comme elle est lourde pour tous ceux là
qui portent le fardeau de luttes politiques acrimonieuses et accablantes). Je
n'ai pas besoin, M. le Président, de faire de longs discours
là-dessus. Tous les députés peuvent s'examiner, examiner
leurs problèmes et ils réaliseront la vérité des
propos que je tiens.
Donc, le député de St-Maurice a cette chose qui peut
s'appeler un acte posé par un député de la Chambre
conformément aux règlements.
Sans avoir peut-être vérifié tout, j'appellerai, les
accessoires directs de l'accusation qui était portée, tout cela,
qui permet au député de St-Maurice de dire: « L'affaire
tant qu'a moi, elle est lavée, et le but que je pouvais poursuivre,
lorsque dans mon témoignage, je dis, je n'ai pas poursuivi à
cause des éléments essentiels qu'il faut prouver dans un cas de
parjure, »
Aujourd'hui, ce dossier sera examiné par le département du
procureur-général et l'affaire sera, je l'espère,
réglée.
Voilà au moins un domaine où les rumeurs malicieuses, le
venin des propos que l'on entend trop souvent dans la bouche de ces
colporteurs, organisateurs, partisans aveugles, qui passent obnubilés,
aveuglés par l'esprit de parti, qui ne s'arrêtent jamais à
penser à la réputation que les hommes publics veulent conserver,
que les hommes publics ont le droit de préserver et ont le droit de
défendre. M. le Président, les combats politiques qui nous
mettent en face les uns des autres doivent être autant que possible et
ça devient un lieu commun que de demander que l'on respecte certaines
règles élémentaires.
Quand on est chez-soi à causer avec les membres de sa famille, et
que l'on parle de problèmes, mais pourquoi ne pas utiliser les
mêmes propos et le même langage et les mêmes attitudes
lorsque l'on est sur un « haust-ing » public? C'est à nous
qu'il appartient de valoriser la fonction de député, et c'est
pourquoi j'essaie autant que possible, de me dégager, même si
à certains moments il faille faire sauter la discipline des partis,
j'essaie de m'en dégager, afin d'envisager les problèmes de la
manière la plus objective possible et c'est ainsi que chacun de soi
répondra de ses actes
non pas devant ses électeurs, mais devant sa conscience.
Nous voulons être et essayer d'être des hommes libres, mais
des hommes responsables. M. le Président, je pense que je n'ai pas
besoin de reprendre les propos qui ont pu être avancés par le chef
de l'Opposition, je pense que nous avons démontré que nous
voulions que justice et lumière soient faites. Justice et lumière
ont été faites suivant que le déclare le rapport du
président que la preuve ne démontrait pas que l'accusation contre
le député de St-Maurice était fondée.
Le premier ministre, comme c'est son devoir, comme leader de la Chambre,
qu'il en ait parlé et que les députés ministériels
aientparlé de la gravité d'abord de l'offense et aient
suggéré des sentences, c'est leur droit, ce n'estpas moi qui les
en blâmerai. C'était leur droit, mais qu'on nous laisse
apprécier, c'est également notre droit, que la peine
disciplinaire que l'on veut imposer est excessive, injuste,
déraisonnable, antidémocratique, qu'on nous laisse ce même
droit. Et c'est là, M. le Président, ce jeu dans une
démocratie d'un gouvernement et d'une opposition où chacun
à sa place a rempli le rôle véritable, l'un de proposer,
l'autre de surveiller, l'autre de critiquer, où je n'attaque pas les
hommes, j'ai dit tantôt que les motifs, sonder les reins et les coeurs,
mais c'est impossible. Chacun prend ses responsabilités.
Le premier ministre cet après-midi a posé un acte qui
personnellement m'a fait plaisir lorsqu'il a consenti de proposer à la
Chambre que du consentement unanime nous permettions au député de
Trois-Rivières de faire entendre sa voix. Je ne crains pas de le dire et
le député de Trois-Rivières a fait entendre sa voix. Il a
droit à son opinion, je la respecte comme je respecte les opinions de
tous et chacun des collègues en cette Chambre.
M. le Président, le jeu des partis, dans notre démocratie,
c'est notre devoir, c'est notre devoir de faire valoir notre point de vue.
Motion de censure, oui, motion de blâme, de réprimande,
d'admonestation, oui, mais avec la peine qui est imposée, non. Pour les
raisons, M. le Président, que j'ai brièvement exposées,
que j'ai sommairement développées devant cette Chambre, qui
pourraient faire l'objet d'un discours beaucoup plus long mais qui ne
mèneraient à rien, puisque je n'aurais qu'à
développer des points que j'ai énoncés mais qui, enfin de
compte, conclueraient à ce que je viens de dire, que je suis incapable,
comme député libre, et responsable, en cette Chambre, d'approuver
la motion dans son entier, telle qu'elle a été soumise par le
leader de la droite, par le premier ministre de la province de
Québec.
M. le Président, il ne faudrait pas que par des sentences
excessives et déraisonnables, indirectement, je le dis, accessoirement,
l'on invite à ne pas agir que si jamais ça se produit, encore,
parce que M. le Président, il peut arriver qu'une cause soit bien
préparée, il peut arriver qu'une cause soit bien
étayée, il peut arriver qu'une personne ait tenté de
rechercher, de faire enquête, et de relever tous les
éléments de preuve qui peuvent appuyer une accusation, mais qu'on
défaille en Cour, qu'on perde. Il ne faut pas avoir plaidé
longtemps, et je m'adresse aux avocats qui ont eu suffisamment
d'expérience devant les tribunaux, ils me comprennent, combien de fois,
même après avoir interrogé les témoins, et j'ai
à la pensée, des causes où j'avais interrogé
personnellement des gens, des témoins, causes d'accidents d'autos, ou
causes criminelles, j'ai plaidé dans les deux matières, devant
les deux Cours, interrogé minutieusement, non pas en vue de les
tricoter, non pas en vue de les préparer, non pas en vue de les «
framer » au contraire, en vue de donner à ma cause des fondations
solides, en autant que raisonnablement possibles, et, on arrive devant le
tribunal, à ce moment-là un témoin qui nous a dit telle
chose, qui nous a tenu tel propos, il arrive qu'il dise le contraire de ce
qu'il nous a dit à notre bureau. Les avocats qui ont eu de la pratique
s'en rappellent. Les avocats qui ont exercé devant les tribunaux et
c'est depuis 23 ans que je pratique, malgré la vie politique intense,
à l'exception de l'époque où j'ai été
ministre, vous me retrouverez à mon cabinet d'avocat lundi matin.
Alors, M. le Président, il ne faudrait pas que par des peines
excessives, ça équivaille à empêcher, à
provoquer une crainte, peut-être légitime, « que si tu
portes une accusation contre le député de tel comté,
qu'elle n'est pas prouvée, tu n'as pas de chance, à ce
moment-là. Tu seras suspendu pour trois ans. Il y aura un
précédent dans les procès-verbaux de la Chambre, et
quelqu'un se lèvera un bon après-midi comme celui-ci et dira: en
telle année, il y a eu un précédent ici, et le
précédent ça été: « exclusion
temporaire de trois ans ». Prenons garde, M. le Président, prenons
garde, en allant trop loin, l'on empêche peut-être, je l'ai dit,
indirectement, on me dira, oui, mais, et je tiens à le noter, dans le
cas du député de Trois-Rivières, il n'a pas
vérifié certains faits, le député de
Trois-Rivières, il l'a dit, l'a répété, le
député de Trois-Rivières est peut-être trop imbu,
mais ça on ne se change pas, on est fait, on est tel qu'on est,
je sais que dans mon cas, je ne peux pas me changer pas plus que le
député de Vaudreuil-
Soulanges, qui me regarde le sourire aux lèvres, on ne peut se
changer, le député de Trois-Rivières est imbu de
juridisme, il croit en la valeur du serment, qui va le blâmer?
Je ne le blâme pas. Par contre, mon expérience à moi
me dit que, même si je crois à la valeur du serment, je n'oserai
pas dire que c'est quotidien devant les tribunaux où le serment est
bafoué, où le serment est violé, où le serment est
écrasé, où le serment ne vaut rien. Mais peut-on
blâmer quelqu'un de croire au serment? Pourquoi en faire plus reproche
à notre collègue, le député du comté de
Trois-Rivières, pourquoi?
A ce moment-là, je vois que, peut-être, certains se diront:
« Il avait des motifs, il était animé par des motifs.
» Je vous l'ai dit; qui peut se lever en cette Chambre, d'un
côté comme de l'autre, et étiqueter à l'endroit de
l'un ou l'autre des membres de cette Chambre, d'un côté comme de
l'autre: motif de vengeance, d'avoir sondé les reins et les coeurs?
Personne je pense.
M. le Président, je tiens à le déclarer, je ne veux
pas par le plaidoyer que j'ai fait donner l'impression que c'est par faiblesse
devant des actes importants que nous avons à poser que je prends
l'attitude que j'ai déclarée, que j'ai
énoncée» Ce n'est pas par faiblesse! Mes seize ans de vie
politique active, combattive à certains moments, pas toujours, j'en
conviens, combattive quand je crois qu'elle doit l'être, m'enseignent,
m'ont appris à exercer dans tous mes actes une grande
compréhension ou, du moins, si je ne l'atteins pas, à rechercher
à comprendre les hommes. Et j'aime mieux commettre une erreur par
excès de miséricorde, par excès de compréhension
humaine, j'aime mieux commettre cet excès, tomber dans cet extrême
que de me retrouver dans l'autre. J'aime mieux pécher, si c'est
possible, mais c'est possible qu'il y ait des extrémistes partout. Les
propos d'un récent candidat à la présidence des Etats-Unis
nous l'enseignent. Il a dit qu'il pouvait qu'il pouvait y avoir
l'extrémisme dans la vertu, l'extrémisme... Je ne connais pas
tous ses propos, mais on sait quel sens il a voulu donner.
Exerçons nos droits, oui! Lorsque nous les exerçons et que
nous faillons, acceptons des sanctions, acceptons le blâme. Le
député de Trois-Rivières l'a accepté. Aller plus
loin, M. le Président...
M. GERIN-LAJOIE: Plus loin que quoi?
M. BERTRAND (Missisquoi): ... avec la peine disciplinaire que l'on
impose, avec trois ans, je dis que c'est un abus de pouvoir, c'est un abus de
droit. Je ne conteste pas, et j'y reviens, que c'est dans l'exercice d'un
droit, que c'est dans l'exercice d'un pouvoir. Mais le gouvernement ou ceux qui
siègent à la droite, et qui ont déjà appuyé
de leurs propos et de leur vote au moment où nous exercions un droit de
l'autre côté et qu'ils appelaient, eux, un abus de droit et un
abus de pouvoir, ont voulu appuyer leur collègue, pas comme
députés d'un tel parti, et je le déclare, mais comme
députés de nos comtés respectifs, membres de
l'Opposition.
Donc, M. le Président, la motion telle que
présentée, je devrai voter contre à cause des raisons que
j'ai formulées relativement à la partie de la motion où il
est question de la peine disciplinaire que je trouve, et je le
répète, antidémocratique, excessive, injuste et
déraisonnable.
M. le Président, on a déclaré: « Mais
pourquoi n'a-t-il pas fait amende honorable, présenté des excuses
publiques ? ». Tout cela, c'est une question de tempérament. Il y
a eu rapport que le député de Trois-Rivières a
signé. On ne demandait pas, dans le rapport, qu'il fasse des excuses. On
a parlé du député de St-Maurice; si l'accusation avait
été prouvée, qu'est-ce qui serait survenu de lui? C'est
épouvantable, et c'est vrai.
Mais, à l'heure actuelle, devant l'opinion publique, dans la
province de Québec, il y a un député qui, à la
suite de l'accusation, est digne de siéger. Il y en a un autre qui,
à cause de tous les propos que l'on tient par devoir, je n'ai pas
recherché à les prononcer, mais on doit expliquer ses votes,
est blâmé par l'ensemble des collègues de cette
Chambre, blâme auquel il a souscrit, jusqu'à un certain point,
à cause de la preuve inssuffisante qui a été faite.
On lui demanderait des excuses publiques? Est-ce que c'est l'attitude
qu'il a prise au Comité, en bas, même cet après-midi, en
expliquant comment il avait envisagé le problème? Mais qu'est-ce
qu'on veut de lui? Nous sommes des adultes! Nous ne sommes pas des enfants! Et
chacun répond de ses actes et c'est par des actes qu'il a
démontré que, suivant la preuve qui a été faite, et
que lui le député de Trois-Rivières, ayant pris
l'accusation à son compte, a échoué dans
l'établissement de l'accusation qu'il avait portée.
M. le Président, le député de Trois-Rivières
est dans la vie publique. Autant la réputation du député
de St-Maurice aurait fait l'objet de commentaires s'il avait été
condamné, autant aujourd'hui les commentaires pourront lui être
favorables, je le lui souhaite! Et du côté du député
de Trois-Rivières, il aura à porter le far-
deau devant l'opinion publique, c'est clair, d'une accusation qui n'a
pas été prouvée.
M. le Président, il y aurait beaucoup d'autres points à
discuter, mais je ne veux pas abuser de votre bonne attention. Je voteraï
contre la motion pour les raisons que je viens d'énoncer sans
apprêts.
M. KIERANS: Mr. Speaker, I am just going to speak very briefly on this,
because, like all of my colleagues in this House, I find it distressing and
very sad. L'accusation portée par le député de
Trois-Rivières contre le député de St-Maurice n'est pas
fondée. It would be wonderful if we could say: the accusation did not,
in fact, exist anymore. But it was made, it was proved false, but it will
carry, for a long time to come, a measure of confusion and doubt that will
hurt, even the now innocent Attorney General, the deputy for St-Maurice.
When an accusation is made by someone in strange circumstances like that
originally made by Mr. Bellemare, the accusation in a bankruptcy Court, one
must take account of the atmosphere and the tension under which such statement
were made. All of you, lawyers, here in this House, know much more about the
bankruptcy Court proceedings than I do myself, although I have attended some of
them, and there the debtor is in a very harassed, ambiguous and doubtful
position. He would probably never be under greater stress and strain at any
time in his life than he is at that moment when creditors, inspectors and
lawyers are asking him what happened? where did this money go? why did you
fail? What happened to this contract? And in this most human of all cases he
fights back, blaming generally everyone but his own lack of ability.
It will be either the bankers or it will be a Government contract that
did not arrive or it will be a creditor that did not have patience, and in this
case, as Mr. Bellemare himself said, after long prolonged nagging and
negotiating and questionning, he finally blurted out that the cost of
Government contracts came too high and when he was asked to be more precise,
and badgered into being more precise, out came the statement that he had in
fact given $1,500 to a member of the Government.
Now, the point that I want to make here is that when you take a
statement made under such conditions and when you take it and bring it into
yourself and you bring it to a Chamber such as this, then you accept all the
implications in that statement, then you accept even the motives of that man,
and you are bound to accept them because you admit that you have checked
nothing yourself, that you relied entirely on his bond, his word. Therefore,
you accept everything that man has said because you have nothing else to add to
it; when you do all of this you are constrained also to accept his motives and
he admitted to the Prime Minister that he did act hastily and in vengeance.
I am in favour of the sentence because, as a matter of fact, I was of
those who would have argued for more; I believe that the responsibility here
should be judged by the stature and the prestige of the man who made the
accusation, the Deputy for Trois-Rivières.
If a professor in a university accused another professor of stealing the
results of research, someone has got to go. Both men put their positions, their
appointements in jeopardy. When a director of a corporation or a bank accuses
another director of fraud or corruption, the very nature and stature of the man
and of the complaint make it evident that the penalty must be the
equivalent.
Not very many years ago, the Chancellor of the Exchequer, in England,
made, within a few minutes of revealing his budget, an aside to a reporter on
his way into the House of Parliament. It was injudicious but it was not costly,
and it was not of the nature of the remark that anyone could have profited by
it. But such are the high standards of integrity, of responsibility rather,
because it was not a question of integrity here, of responsibility that after
this single error, the man did not wait for his colleagures to ask for his
resignation from the Cabinet, he gave it.
This has been, as a collegue has said, a mortal cause. The damage will
exist long after the Committee's nappy report yeasterday. It damages the
members of the Opposition Party because it tends to create a revival of
previous views that there are some of us who are not so concerned with the
development of the problem, of the province, as with pursuing personal
causes.
The days of petty patronage are long over in this province. But this
case has served to revive it. It does a great deal of damage to the political
life of this province, because at a time when the Government, the Liberal Party
and the Union Nationale, is attempting to attract people of the highest
standards and integrity to their banners obviously people in this province are
now going to pause and say: « What are these risks that we are running ?
»
I do not agree with the Deputy from Missis-quoi that this penalty is
excessive.
If there had been one ounce of good will and generosity before that
accusation was made it would have led the deputy for Trois-Rivières
to check. One ounce of good will and generosity, a simple visit to a
bank manager who destroyed the whole case in a few minutes with his own
testimony but even more with the records of his bank. One minute of generosity,
one ounce of generosity and good will and this would never have happened. The
deterioration in public confidence is going to effect both the members of the
Opposition and the government on this side. How can we talk of prudence, of
judgment, of integrity and responsibility, how can we talk, of these things
with words that will mean something and which will reach the hearts of our
people, if we are not ourselves examples, abiding examples of those very
qualities.
The actions of the deputy for Trois-Rivières has compromised the
honour and integrity of each and every one of us, in this House. And, I am
going along solidly with the recommandation made by the Prime Minister this
afternoon,
DES VOIX: Here! here!
M. DOZOIS: M. le Président, après les propos tenus par mes
collègues, le chef de l'Opposition et le député de
Missisquoi, je n'avais pas l'intention d'ajouter grand chose à ce qu'ils
ont dit étant donné que je partage entièrement les paroles
qu'ils ont énoncées.
Je voudrais, cependant, ajouter, à ces propos quelques
expériences personnelles ou quelques opinions personnelles de
façon à ce que la Chambre puisse considérer tous les
facteurs possibles avant de prendre une décision aussi grave que celle
que l'on veut nous faire prendre.
Le ministre du Revenu vient de nous dire, et j'ai retenu, en particulier
une phrase de son discours, entre autres, que le procureur
général a passé par une très grande tension. Je
pense que je peux traduire son terme « The greatest stress » la
plus grande tension...
UNE VOIX: C'est vrai!
M. DOZOIS: ... au cours des dernières semaines. Je ne crois pas,
M. le Président, que le ministre du Revenu a voulu dire que cette
tension du procureur général serait diminuée en sachant
que le député de Trois-Rivières est prive de ses droits de
députés pendant trois ans.
Je crois plutôt que la tension véritable, et je n'en doute
pas un instant, qu'a eu à subir le député de St-Maurice,
s'est terminée fort heureusement par la fin de l'enquête.
Je ne crois pas que le député de St-Maurice se
réjouirait de savoir que certains témoins seraient
enfermés en prison même s'ils le mé- ritent. Je pense que
personne ne peut se réjouir d'un tel sort à un être humain.
Mais, je crois que peut-être le grand responsable de toute cette histoire
est peut-être celui, qui le premier a dit, sous serment, que le
député de St-Maurice avait accompli un tel acte.
Je crois que la lumière doit être faite dans ce secteur et
que si cette personne mérite une punition, on doit lui imposer, non pas
pour punir un individu, non pas pour punir un être humain, mais pour
protéger la société contre d'autres citoyens qui seraient
tentés de tenir des propos semblables.
Au cours de toute cette enquête, je n'ai pu faire autrement que de
faire un rapprochement avec une expérience que j'aie vécue alors
que je militais, dans la vie publique, dans une autre juridiction. J'ai connu
un homme politique qui pendant des années avait subi les attaques
d'adversaires politiques, des attaques de journaux, des attaques qui se
répétaient de jour en jour et j'ai vécu aux
côtés de cette personne, de par mes fonctions, et à tous
les jours j'ai pu me rendre compte, personnellement de la tension, de la grande
tension que cette homme avait vécue comme, probablement, le
député de St-Maurice en a vécue, ces semaines
dernières. Et pour cette personne, cela a duré des années,
des années.
Il m'a souvent confié qu'il examinait, avec l'aide d'avocats
brillants, lapossibilité depren-dre des procédures. Mais, comme
le député de St-Maurice, il y voyait des difficultés qui
ne lui auraient pas permis d'atteindre le but qu'il voulait atteindre. Mais ses
adversaires ont réussi à obtenir une enquête sur l'objet
des accusations dont cette personne était victime. Cette enquête a
duré des mois de temps. Je ne veux pas nommer de noms, je crois que tous
ceux qui m'entendent vont replacer cet épisode de la vie de
Montréal. Cette enquête a duré des mois de temps et cette
personne a été finalement exonérée par le juge qui
avait présidé l'enquête. Cette personne a été
satisfaite et elle était contente, elle s'est réjouie du
dénouement de cette enquête malgré que, pendant toute cette
période qui avait duré des années, pas des mois, mais des
années, et qui avait affecté sa santé au point de la
rendre inactive pendant un an, cette personne s'est réjouie et je sais
personnellement (et je me plais à lui rendre hommage, cette personne est
décédée, nous n'étions pas du même parti
politique) qu'elle s'est rejouie, elle n'a jamais voulu exercer de vengeance
contre ceux qui l'avaient, pendant des années, je dirais
vilipendée et persécutée.
M. le Président, je pense que, dans la vie publique, l'on doit
considérer une foule de fac-
teurs. On a fait un reproche au député de
Trois-Rivières d'avoir porté cette accusation sans s'être
assuré à l'avance qu'il pourrait la soutenir devant le
Comité des privilèges et élections.
J'ai vécu personnellement une autre aventure et j'ai
été fort surpris, à l'occasion d'un débat en cette
Chambre, que le premier ministre ait avoué, lui grand avocat, c'est lui
qui nous l'a dit, ancien procureur de la Couronne, après avoir
consulté des avocats éminents, des procureurs de la Couronne, ait
porté des accusations ou ait autorisé à porter des
accusations, le soir du 2 novembre 1962, pour créer ce que l'on a
appelé « l'affaire des faux certificats ».
M. le Président, voici des gens qui sont dans la vie publique,
nous sommes en période électorale, on leur soumet des faits qui
n'étaient pas concluants, qui étaient tout à fait
superficiels et l'on donne ordre d'arrêter des gens, et en posant ce
geste pendant la campagne électorale, on atteignait non seulement ceux
qu'on arrêtait mais tous ceux qui étaient concernés ou qui
pouvaient être concernés par cette histoire.
Je l'ai vécue moi aussi, je l'ai subie cette tension, je l'ai
subie cette tension, et je comprends le député de St-Maurice, car
le soir, en arrivant à la maison, quand j'ai constaté que mes
enfants avaient pris connaissance de cet en-tête sur le journal «
La Presse », alors que mon nom était en grosses lettres,
ç'a été des moments difficiles. Et tout cela a
été créé, et tout ce qui s'en est suivi, par le
geste d'un homme d'expérience, un homme qui déclare qu'il a de
l'expérience et qui avait tout ce qu'il fallait pour juger l'acte qu'il
posait.
M. GERIN-LAJOIE: M. le Président, là, sur un point
d'ordre. Le député de St-Jacques me permettra. Sur un point
d'ordre, M. le Président, je me dois de dire à ce moment-ci que
le député de St-Jacques fait un rapprochement qui est tout
à fait injuste, qui n'a aucune relation avec la question qui est
actuellement devant la Chambre. Le premier ministre agissait à ce
moment-là...
M. GOSSELIN: Non, non.
M. GERIN-LAJOIE: ... en sa qualité de premier ministre pour
autoriser les officiers réguliers de la Couronne de procéder,
selon l'avis qu'ils avaient fourni au premier ministre. Je soumets, M. le
Président, que ce rapprochement est tout à fait hors d'ordre et
injuste.
M. GOSSELIN: Non, non, non, dans ce temps-là, c'était nous
autres qui étions victimes comme question de fait.
M. DOZOIS: M. le Président, je voulais juste faire une allusion
que, si l'on a posé des gestes qui ont amené une affaire qui
avait autant de conséquences, on a posé ce geste qui reposait sur
des éléments de preuve très faibles et je voulais tout
simplement faire une analogie avec l'accusation portée par le
député de Trois-Rivières, lorsqu'il apporte une accusation
contre le député de St-Maurice, et qu'on l'accuse de ne pas avoir
pris suffisamment de précaution pour ne pas faire de tort à la
réputation d'un collègue.
M. GERIN-LAJOIE: Mon point d'ordre, c'est qu'il n'y a aucune analogie,
aucun rapprochement possible, le premier ministre n'a jamais accusé
personnellement.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.
M. JOHNSON: Est-ce qu'on peut parler sur le point d'ordre, M. le
Président?
M. LE PRESIDENT: Je comprends le point d'ordre soulevé par le
ministre de l'Education je devais moi-même suggérer au
député de St-Jacques d'éviter de discuter du
problème en discussion parce que cela a déjà fait le sujet
des décisions de cette session, que c'est une affaire qui ne devrait pas
être discutée en Chambre parce que c'est toujours « sub
judice » , mais j'avais laissé continuer le député
de St-Jacques, je comprends qu'il voudrait faire des comparaisons, ça
c'est une question d'opinion personnelle. Si on peut comparer cet
incident-là avec l'affaire qui est devant la Chambre actuellement, mais
en même temps, je crois que je devrais demander encore une fois au
député de St-Jacques d'essayer de faire ses comparaisons mais
sans entrer dans aucun détail de l'affaire.
M. DOZOIS: M. le Président, je vous remercie. Je n'ai aucunement
l'intention de discuter de cette affaire que j'ai mentionnée tout
à l'heure. Je voulais simplement faire une analogie entre la tension
qu'a dû subir le député de St-Maurice et celle que deux
députés de cette Chambre ont dû subir ainsi que d'autres
personnages qui ne sont pas membres de cette Chambre, et l'analogie
également entre les preuves que l'on possédait dans les deux cas
pour initier une action judiciaire ou du moins une action d'enquête dans
les deux cas.
M. le Président, je voudrais relever une affirmation autant du
premier ministre que du député de Chambly relativement à
la comparaison qu'ils ont faite avec le sort qui a été
réservé à ce membre du parlement anglais qui lui
avait été expulsé d'une façon permanente. Je dois
faire remarquer, M. le Président, que son cas était totalement
différent. Voici un député qui a été
jugé par ses pairs, et qui a été trouvé coupable
d'avoir commis un acte dérogatoire aux règlements de la Chambre
des Communes.
On a dit, je ne connais pas le cas, mais après avoir
écouté tant l'exposé du premier ministre que celui du
ministre des Affaires municipales, on a dit que cette personne avait
accepté de l'argent pour écrire des articles dans lesquels il
décriait ses collègues de la Chambre des Communes, et il a
été déclaré coupable d'un acte qu'il avait
posé, c'est complètement différent à mon avis, M.
le Président, et l'on peut difficilement faire une comparaison avec le
geste posé par le député de Trois-Rivières. Le
député de Trois-Rivières a exercé un droit qui est
consigné ici dans le livre des règlements, et je suis
parfaitement de l'avis du député de Missisquoi, M. le
Président, au point que si cette sentence est votée, j'estime
qu'il serait préférable d'amender l'article 196 du
règlement et qu'on l'amende pour dire que quand un député
prouvera qu'un autre de ses collègues s'est rendu coupable, il sera
passible de telle chose.
Mais quand l'article 196 dit: « Qu'un député qui
porte une accusation qu'il doit y avoir enquête », c'est
évidemment parce que la Chambre n'est pas en mesure ou n'a pas à
ce moment-là tous les éléments pour porter un jugement
puisque l'on établit qu'il y a tout un procédé, un
processus d'enquête à suivre, et je suis de l'avis du
député de Missisquoi que si l'on impose une sentence aussi
sévère, que ça peut décourager à tout jamais
un député qui pourrait avoir une bonne cause, des
éléments de preuve raisonnables à apporter contre la
culpabilité d'un de ses collègues et je pense que c'est essentiel
pour la bonne marche d'un parlement que quand un député a une
connaissance personnelle de faits qui peuvent rendre indigne un
député de siéger en cette Chambre, j'estime que c'est son
devoir de les apporter.
Mais si l'on vote la motion qui est devant nous, je ne connais pas un
député, et je n'imagine pas un député dans l'avenir
qui prendra le risque d'apporter une accusation et cet article deviendra
complètement inutile parce qu'il n'y en aura plus jamais dans cette
Chambre, ni dans aucun parlement. On a dit également, M. le
Président, que le règlement autrefois, la personne ou le
député qui faisait une telle accusation était
obligé de mettre son siège enjeu.
Je me demande si on ne devrait pas établir, car au moins on ne
privera pas et on ne punira pas les électeurs d'un comté, si la
personne met son siège en jeu et ne prouve pas l'accusation. Il
démissionne et les électeurs le rééliront ou s'en
choisiront un autre, mais ils pourront être représentés
dans le Parlement. Il prendra le risque de se faire battre aux élections
mais au moins on ne punira pas les électeurs de ne pas être
représentés dans un Parlement pendant les 3/5 de la durée
d'un Parlement, pour les mêmes raisons que ceux qui m'ont
précédé de ce côté-ci de la Chambre, M. le
Président, je trouve que c'est une sentence injuste, hors de proportion
et je voterai contre.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: M. le Président, il prévaut en
certains milieux cette opinion malheureuse et nuisible à nos
institutions parlementaires que nos politiciens sont tous semblables et qu'ils
ne semblent prendre plaisir qu'à s'injurier mutuellement.
Ceci vient du fait qu'une longue tradition que je dois malheureusement
appeler québécoise, a voulu qu'au cours de campagnes
électorales, certains politiciens ne trouvent pas mieux que d'attaquer
la réputation et la famille de leur adversaire pour tenter, M. le
Président, de discréditer l'individu plutôt que les
idées qu'il met de l'avant.
M. JOHNSON: Le député devrait cesser de se
décrire.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Mais nous avons...
M. JOHNSON: Le député devrait cesser de se
décrire.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: ... mais nous avons heureusement, je crois,
dépassé l'époque où le meilleur politicien
était celui qui pouvait crier le plus fort sur le parvis de
l'église du village ou ailleurs pendant les assemblées
contradictoires des campagnes électorales.
Depuis 1960, peut-être même depuis ce fameux «
désormais » de l'ancien député de Deux-Montagnes, en
1959, mais surtout depuis 1960, on est en droit de croire que la politique au
Québec est vraiment en passe de devenir ce qu'elle devrait être:
un moyen pour le peuple de développer et de contrôler son
économie et ses institutions pour devenir le maître de sa
destinée.
Il y a eu, dans cette Chambre, je dois l'admettre, même depuis
l'époque dont je parlais tout à l'heure, des spectacles qui sont
loin d'édifier le spectateur non rompu à la technique
parlementaire.
Il y a peut-être eu, de la part des députés non
expérimentés ou de membres de cette Chambre au caractère
plus vif, des mots d'échangés mais aussitôt repris et
oubliés.
Il existe, ou tout au moins il devrait exister au sein de toute la
députation, une sorte de camaraderie, parce que nous sommes tous
mandatés de la même façon par le peuple,
c'est-à-dire pour surveiller l'intérêt supérieur de
la province.
Aussi conscients que nous devons l'être de notre devoir d'inspirer
au peuple de la confiance dans ses institutions, conscients comme nous devons
l'être que nous ne sommes pas ici pour faire assaut de
personnalité et gagner des victoires personnelles mais bien pour
étudier d'abord le fonctionnement de la chose publique, il ne faudrait
pas oublier, M. le Président, l'intérêt du peuple dans
cette Chambre, et il ne faudrait pas permettre que l'on puisse porter une
accusation personnelle et criminelle contre un des membres de cette Chambre
sans l'obligation par l'accusateur de prendre une extrême
précaution avant de ne le faire.
Encore une fois, nous ne sommes pas convoqués ici par le pouvoir
Souverain, et mandatés par le peuple pour faire le procès
personnel les uns des autres. 11 est élémentaire pour un avocat
et même, je dirais, pour un étudiant en droit et, comme question
de fait, pour toute personne qui attache de l'importance à la
réputation d'autrui, qu'avant d'attaquer quelqu'un publiquement d'une
accusation aussi grave et aussi infamante que de la fraude et corruption, il
faille contrôler les dires et les documents qui pourraient justifier une
pareille accusation.
Bellemare s'est parjuré dès le début de son propre
témoignage; son gérant de banque a démontré en deux
mots la fausseté de l'accusation.
Pour un ancien juge, M. le Président, pour un avocat de
l'expérience du député de Trois-Rivières, c'eut
été l'enfance de l'art que de se rendre compte du mal
fondé des accusations avant de venir en cette Chambre tenter de souiller
la réputation d'un député qui fait honneur à toute
la députation, depuis les nombreuses années où il se
dévoue à la chose publique.
J'ai assisté à l'enquête devant le Comité et
je ne trouve pas de mots pour qualifier l'acharnement de celui qui voyait sa
présumée victime lui échapper et la voyait sortir grandie
d'un procès au cours duquel l'accusateur devenait en quelque sorte
l'accusê.
Malgré tout, je crois important de souligner qu'il ne s'agit pas
aujourd'hui de...
M. JOHNSON: M. le Président, je ne veux pas être
désagréable envers la seule femme dans cette Chambre, mais cette
dame doit être soumise au règlement comme tous les autres
députés. M. le Président, il y a un rapport devant nous,
rapport auquel a concouru le député de Trois-Rivières et
je trouve qu'on défait exactement les principes et qu'on manque aux
principes qu'on tente de prêcher quand on parle comme le
député vient de parler de l'attitude du député de
Trois-Rivières et c'est une tactique de salissage indigne...
M. PINARD: A l'ordre.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs. Je ne crois pas que le chef de
l'Opposition pourrait aider en employant des termes comme ceux qu'il vient
d'employer.
M. JOHNSON: Il faut tout de même trouver des mots...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre messieurs. Je réponds à
l'objection de la même manière que j'ai fait il y a quelques
instants pour le député de St-Jacques. Ce sont des opinions qu'on
exprime et ce n'est pas le devoir de l'Orateur d'intervenir pour empêcher
les députés d'exprimer des opinions quand il le fait dans des
termes qui sont admis devant la Chambre. Mais quand on commence à
employer des termes comme le chef de l'Opposition vient justement d'employer
lui-même, c'est là que. je suis obligé d'intervenir.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: M. le Président, malgré tout, je
crois important de souligner qu'il ne s'agit pas aujourd'hui de passer à
la vengeance mais plutôt étant, tous que nous sommes,
appelés aux plus hautes fonctions dans la province, que nous imposions
une punition exemplaire à celui qui a, sans excuse et sans justification
valable, agi en sorte de salir la réputation d'autrui.
La sanction proposée par le premier ministre contre le
député de Trois-Rivières pour son comportement est loin
d'être exagérée. Je me demande même si elle est
suffisante.
M. JOHNSON: Est-ce qu'il y a un amendement pour...
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Vous me permettrez d'en douter, M. le
Président.
M. JOHNSON: Ce n'est pas étonnant.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Non pas que je veuille m'opposer à la
clémence du premier ministre et je dis bien clémence quand on
réalise les circonstances dans lesquelles cette motion a
été apportée à la suite ou après avoir
constaté l'acharnement de l'accusateur, après avoir
constaté le défaut de l'accusateur de s'excuser, de faire la
moindre excuse.
Cependant, je le répète, il ne s'agit pas aujourd'hui de
passer à la vengeance, mais plutôt à une punition
exemplaire envers celui qui, sans excuse et sans justification valable, a agi
en sorte pour tenter de salir la réputation d'au-trui, la
réputation de celui-là même qui est présentement
bâtonnier du district de Trois-Rivières, procureur
général, chargé de l'administration de la justice dans la
province de Québec et qui mérite quand même une
considération analogue à celle du simple citoyen
c'est-à-dire tout ce que ce dernier, le simple citoyen, aurait le droit
d'exiger dans un cas semblable dans un pays démocratique.
C'est pour cette raison, M. le Président, que j'appuie la motion
du premier ministre.
M. BELLEMARE: M. le Président...
M. HANLEY: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, àl'ordre.
UNE VOIX: Qui est le premier?
M. JOHNSON: C'est à l'orateur de décider.
M. LE PRESIDENT: Tout ce que j'ai indiqué ç'a
été que j'avais remarqué premièrement le
député de Ste-Anne et j'étais pour faire remarquer au
député de Champlain que le député de Ste-Anne
était debout. Alors, personnellement, ça ne fait rien, si les
députés voudraient se décider.
M. HANLEY: Mr. Speaker, I am not going to repeat, I hope, a single word
that we have listened to this afternoon, this is the toughest vote that I have
ever been called upon to exercise since I have been elected to Public
Office.
I do not know how I am going to muster enough courage to vote for this
motion but as a member of Parliament I feel that I am duty bound to act as a
juror and leave my sentiments to one side and exercise my decision according to
the testimony, the spirit of the motion and my conscience. This would be the
first time, I repeat, that I would go along with a sanction against, not only a
colleague but an individual, in 24 years of city and 16 years of provincial
politics and I would like to bring this to the attention of this Parliament
that on one other occasion when this parliament wanted to discuss a family
problem and the Quebec government and I refer to the honourable member of that
time of Gaspé South, the honourable Mr. Pouliot whom, in my thought, was
a gentleman I assume his family were equally as good as he was.
Therefore, for this particular discussion it took a unanimous vote of
the Parliament I was the only member to object and it was not discussed,
therefore I want to revive some of my principles to this Parliament, I do not
like to investigate members of this Parliament. I feel that if the honourable
member of Trois-Rivières would have listened to reason when he presented
his motion; I made every attempt indirectly to have him withdraw the motion. If
he had had presented a motion to this Parliament to investigate
Amédée Bellemare, he would be the biggest man in this Parliament
tonight, but he was carried away with over confidence. From the expression of
the member when he presented the motion, he had everything within his hands to
destroy the honourable Attorney General, the member for St-Maurice.
Mr. President, I have cautioned many other people in public life
concerning over-confidence. They refused to listen and where did they land when
they were so over-confident and they wanted to destroy? They landed in the
disaster area. Mr. President, the honourable member for Trois-Rivières,
I like him, socially I like him, I thought he was a fine member, I cannot
understand his attitude to destroy and I am fully convinced that he was an
ignorant, innocent victim of a conspiracy to destroy the Attorney General, the
liberal government and to destroy the members of the Opposition. This is my
firm conviction.
Mr. President, my family and my mother who is 75 years of age have been
through all the agony that the families of the honourable member of St-Maurice
and the family of Emile Morin, the bank manager who was accused of loaning
money from the bank for an attempted bribe.
Mr. President, I had planned to plead with this Parliament to exercise
some clemency after we received the report of the Committee.
And I cannot understand after the honourable member of
Trois-Rivières admitted that the honourable member of St-Maurice should
be exonerated and the honourable member of Trois-Rivières admitted that
he presented a motion without consulting the leader of the Opposition. This
confirms the rumors that have been circulating through the undergrounds
attempted
conspiracy. This is a question of experience when you do not consult
your leader, before you present such a serious motion. And thus I am obliged to
form an opinion and exercise my vote. What were the arguments of the honourable
Member of Trois-Rivières, today, to me, they were disappointing,
disgusting. He was violent. I had hoped today, after the evidence, that he
would publicly, before this Parliament, apologize to the honourable Member of
St-Maurice, and his family for the heartaches and the damages that he has
caused the family, since the presentation of his petition. I had hoped that he
would have apologized to the Bank manager whose family was suffering after the
newspaper reports about his mix-up concerning the attempted bribe. I was
disappointed and I was disgusted and I want to bring this to the attention of
this Parliament once more. People who read this local daily on Tuesday the
21st, claim Hamel took so and so.
People who read this: « Histoire d'un pot-de-vin :
Amédée Bellemare ». People who are on their vacation and
will not read the true side of the story may be still under the impression that
the member was corrupted. This is a damage that is not easy to wipe out.
I was prepared to plead for clemency from this Parliament on behalf of
the Member of Trois-Rivières. To my surprise, the strongest argument
that the Honourable Member of Trois-Rivières brought up today was to the
effect that the Honourable Member of St-Maurice did not prosecute and put an
ignorant truck driver in jail for two years, Amédée Bellemare.
This was his biggest plea today that Bellemare should have been jailed.
How are we, and how am I going to continue to plead for clemency as I
felt before the recommendation and motion of the Prime Minister of this
Province? An ignorant truck driver mixed up in politics, now a taxi driver, Mr.
Gabias pleading that he should be jailed and now the members of the Opposition
are pleading that the man who criticized the Attorney General for not
prosecuting Amédée Bellemare should be free. I am disappointed. I
am disappointed for this reason: I am disappointed with the Leader of the
Opposition, I am disappointed with some members of the Opposition because, I am
very much in favour of a two party system of Government, whether it be
provincial or federal and I am disappointed again, I repeat, with the Leader of
the Opposition for his defence on behalf of the member, in my opinion, from the
underground current of rumors that he is wrong in defending a member who was
trying to destroy him in his riding. This I cannot understand. This I am
disappointed because,
Mr. President, I have the greatest respect for the Opposition.
M. JOHNSON: This is democracy!
M. HANLEY: I have the greatest respect for many members of the
Opposition. They are very honest, sincere, qualified and competent members of
thisParliament and I hope that the people of this province will always vote for
the principle of a strong Opposition as well as a good Government. And I was
rather disappointed in his attempt to persuade this Parliament to be
lenient.
Mr. President, I must exercise my vote. I must decide if the petition
was presented in a spirit of clarifying the situation in the Province or in a
spirit of destruction...
I am convinced it was presented in a spirit of destruction of an honest,
honourable minister of this Government. I am more convinced because if you read
from 2:50 P.M., this afternoon to 3:40, all of the remarks of the honourable
Member were to destroy and to emprison. Therefore, Mr. President, I would be
lacking in my duties if and it is against my grain, it is against my grain if I
did not go along with I haven't got it. Now, young man, if you've been here as
long as I've been here and if you were here to listen to, by...
M. ALLARD: By the time you have been here you've never been here,
M. HANLEY: Mr. President, if the honourable member of the Opposition
Gabias was here long enough to know what has taken place within this Parliament
for 16 years, he will know that the honourable member of St-Anne was always
very human and defended one of his own Members from Gaspé South
convicted on the block.
M. LOUBIER: Because you were a clown.
M. HANLEY: Pardon? Would you repeat, I do not hear.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. HANLEY: Would, Mr. President, would the honourable Member repeat that
remark?
M. LOUBIER: Because you were a clown in your county.
M. HANLEY: Pardon?
M. LOUBIER: Well, I do not repeat. M. HANLEY: I couldn't hear...
M. LE PRESIDENT: We ask the Member for St-Anne we are not in Committee
if the Member for St. Anne wishes to make his speech.
M. HANLEY: Mr. President, there is another indication that the Member of
St. Anne is paying a tribute to the Opposition for their qualities, their
competence and their sincerity. And the ignorance of one Member is challenging
the reputation of the Member of St. Anne. Common sense isn't it? A young man
that has short pants on and I hope he is in public life for forty-two years as
a Member of St. Anne without one sore against his reputation, but many many
attempts against him and his family and his aged mother by politicians such as
he is associated with today in his party. I hope the honourable Member is old
enough to whether destroy .
M. LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. JOHNSON: To raise a point of order, I will not challenge the mass
statement made by the honourable Member for St. Anne but I would like him to
remember that Mr. Gabias is still a Member in this House even though due to the
standing orders he must stay out of the House while the motion is being
debated. Therefore the honourable Member should have towards his fellow Member
for Trois-Rivières the same consideraition and the same line or the same
quality of speech as he would have in his presence and I am referring
especially to his remark about the ignorance of the Member of
Trois-Rivières.
M. HANLEY: Mr. President, if the honourable Member of
Trois-Rivières is still a Member of the House why is he not in his
seat?
M. LE PRESIDENTS If the Member for St. Anne will read article 76, of the
rules he will see exactly why the Member for Trois-Rivières is not in
his place, but in any event I must ask the Member for St. Anne and I do not
think it was only with reference to the Member for Trois-Rivières that
he was directing his remark I would ask him to try to avoid using expressions
such as ignorance of this or that Member or for that matter I think he could
express himself regarding any Member of the public without having to use
expressions such as that.
M. HANLEY: Mr. Speaker may I repeat, the honourable Member of St. Anne
presented a conjunction of an ignorant innocent Member from
Trois-Rivières. Ignorant, innocent so why does the Honourable Leader of
the Opposition mix my words and only say ignorant when I said ignorant,
innocent Member of I believe a prime conspiracy to destroy that makes the
difference, Mr. Speaker, that doesnt mean that I am insulting the honourable
Member of Trois-Rivières by saying ignorant I am paying him a tribute
when I way he was innocent. Innocent is a bigger word than ignorant I do not
think I should be reproached
In conclusion Mr. President, I hope, I hope that this Parliament will
never be faced with another motion such as we are called upon to vote, during
this session, if I ever hear any insults attacks, charges by an individual
against the Member regardless of what party I attack the person who is accusing
and not the person that they hear they either see or they accuse, I think that
is the spirit in public life where all Members of all Governments should have
more, not only respect, more consideration for their fellow members.
It is a terrible thing it must be a terrible feeling Mr. President when
you feel that you have all the machinery all the affidavits all the documents
and all the witnesses to destroy and you find that you wind up behind The Eight
Ball and you have nothing, nothing but grief. Therefore in conclusion Mr.
President, I have no alternative it hurts my heart to punish I have no
alternative because of the demonstration this afternoon, I judged when the
corruptor when the attempted corruptor that came out in the report, was on the
stand, cross examined by the Prime Minister, in less than ten or fifteen
minutes when he was on the stand I knew he was a liar and he was a padded
witness. I expressed my opinion during the recess, but he was on the stand
before the bank manager was questlonned, to some members of the Press that he
was a liar and his stories were false they were not consistent and I am sorry
for the Member who depended upon the affidavits that he signed concerning this
charge. Once again Mr. President I cannot do anything else but go along with
the motion. I must stand by my duty here as a Member I promised not repeat
previous statements but I must repeat again I must put my sentiments to one
side. My mind was open until today but it is certainly not open now. I must go
along with the motion of the Prime minister.
M. JOHNSON: That is clear.
M. BELLEMARE: M. le Président, vous
comprendrez aujourd'hui, toute l'émotion que je ressens à
adresser devant cette Chambre les quelques remarques qui seront très
brèves, surtout étant un des doyens. Je n'ai pas besoin de vous
dire que ce sont mes deux voisins qui sont en cause. Etant député
de Champlain depuis 1944, j'ai vu évoluer dans le climat politique ces
deux hommes. Et, c'est avec une certaine émotion, aujourd'hui, M. le
Président, que je me lève pour dire à cette Chambre pour
dire combien il y a des situations politiques difficiles pour un homme qui a
une conscience et qui veut réellement exercer tous ses droits dans cette
Chambre.
Je voudrais d'abord, sincèrement, féliciter le
gouvernement d'avoir bien voulu se rendre à la motion du
député de Trois-Rivières, le 8 juillet en accordant la
motion qu'il a présentée pour demander que le Comité des
privilèges et élections soit appelé à
siéger. Cette motion qui a été sous-amendée par le
premier ministre, sous-amendée par le chef de l'Opposition, a
été votée à l'unanimité quant aux
sous-amendements, mais elle a été votée avec un «
contre » quand il s'est agi de faire siéger le Comité sur
la motion principale et c'est justement le député qui m'a
précédé qui a voté contre, contre la tenue d'une
enquête présidée par un député de cette
Chambre et par les membres, députés élus, nommés
sur le Comité des privilèges et élections.
Je suis heureux, M. le Président, que le gouvernement se soit
rendu à cette requête. Requête qui avait été,
si on la situe véritablement dans son contexte, inspirée par le
député de Trois-Rivières et je le connais depuis de longue
date pour son courage, pour sa ténacité et surtout pour sa
logique.
Le député de Trois-Rivières, tout le monde sait
qu'il lui a fallu beaucoup de courage jusqu'à aujourd'hui, pour
être devenu ce qu'il est. Après les terribles épreuves
qu'il a eu à subir, je ne plaide pas sympathie, je plaide bon sens, et
je voudrais simplement dire à cette Chambre que toute sa
carrière, toute sa vie a été une vie d'honnête
homme, a été une vie courageuse, a été une vie
d'exemples à ses neuf enfants. Pendant des années, cet
homme-là a surmonté une épreuve physique extraordinaire,
mais il a démontré à la face de tous, de tous ceux qui
l'ont connu, combien il était courageux, combien il était tenace
et combien il était logique. Mais, sa caractéristique, au
député de Trois-Rivières, cela a toujours
été sa bonne foi.
Et je suis sûr, M. le Président, que lorsqu'il est venu
devant cette Chambre et qu'il a demandé par cette motion qu'il a faite
le 8 juillet 1964, que le député de Trois-Rivières
était de bonne foi, le connaissant comme je le connais pour l'avoir vu
à l'oeuvre et surtout pour l'avoir vu militer pendant des années
dans tous les mouvements sociaux, économiques, industriels et autres,
même au sein de son association le Barreau, il a donné à
tous l'exemple d'un homme dont la vie était intègre, dont la
réputation n'a jamais fait de doute et dont l'intégrité
professionnelle peut en toute circonstance se situer au diapason de
l'honnêteté et du courage. Le député de
Trois-Rivières a fait preuve d'un acte de courage mais d'un acte de
bonne foi et c'est justement, c'était son droit en vertu du
règlement, en vertu de la procédure de l'Assemblée
législative de procéder comme il l'a fait, s'inspirant, M. le
Président, des dossiers qu'il possédait et s'appuyant surtout sur
la validité du serment sur lequel il a fait cet après-midi une
preuve irréfutable, il avait le droit et c'était essentiellement
son droit de faire sa preuve. M. le Président, je voudrais citer ici
à la Chambre simplement un paragraphe d'une loi 8, 9 Elizabeth II,
statuts du Canada 1960 dans laquelle, M. le Président, le Parlement du
Canada proclame que: « La nation canadienne repose sur des principes qui
reconnaissent la suprématie de Dieu, la dignité et la valeur de
la personne humaine ainsi que le rôle de la famille dans une
société d'hommes libres et d'institutions libres, » et
c'est ça le paragraphe que je voudrais citer à la Chambre.
« Le Parlement du Canada proclame en outre que les hommes et les
institutions ne demeureront libres que dans la mesure où la
liberté s'inspire du respect de la valeur morale et spirituelle et du
règne du droit ». Cette déclaration, M. le
Président, des droits de l'homme prouve que c'est librement mais en
exerçant un droit pour protéger justement ces institutions libres
que le député de Trois-Rivières, courageusement, face
à face, n'ayant crainte d'aucune autre chose que sa conscience qui le
dictait à ce moment-là, M. le Président, a soumis à
la Chambre une motion qu'a agréée le gouvernement et cette
Chambre de faire siéger le Comité des privilèges et des
élections pour entendre cette cause. M. le Président,
j'appartiens à une association qui s'appelle le C.P.R., je suis membre
depuis de très nombreuses années de cette compagnie. Chez-nous
comme ailleurs, il peut se faire des erreurs, il peut se commettre des dommages
graves quant aux propriétés, quant aux personnes et quant
à la vie des humains, mais il y a au sein de notre organisation; un
bureau qui entend les plaintes et qui juge du mérite et des
démérites de l'action qui a entraîné l'accident, la
perte matérielle ou le décès, la mort
accidentelle de certaines personnes, et à ce moment-là, M.
le Président, notre bureau selon la gravité de l'offense, donne
des « demerit marks » à l'employé qui est
accusé, et c'est dans des circonstances extrêmement graves,
extrêmement graves que la compagnie du CPR, par son bureau d'audition
donne des sentences d'un an ou de deux ans de suspension. M. le
Président, aujourd'hui nous sommes en face d'une cause qui a
été plaidée, qui a été entendue, vous avez
reçu de la part du Comité des privilèges et des
élections un rapport, vous avez entendu plusieurs personnes qui, cet
après-midi se sont fait entendre, et toutes ont trouvé
disproportionnée la sanction imposée au député de
Trois-Rivières. Est-ce que, M. le Président, on peut accuser le
député de Trois-Rivières de mauvaise foi? Je dis non.
Est-ce qu'on peut dire que le député de Trois-Rivières
s'est servi de ce moyen pour salir la réputation du député
de St-Maurice? Je dis non. Est-ce que le député de
Trois-Rivières qui est père de famille de neuf enfants aurait
pris le risque de la sanction qu'on lui impose aujourd'hui s'il n'avait pas
été foncièrement sûr des preuves qu'il
détenait à ce moment-là? Non, M. le Président, je
dis et je répète que cette sanction va trop loin.
Non, M. le Président, je dis et je répète, M. le
Président, que cette sanction va trop loin, surtout M. le
Président, quant à moi personnellement, et j'en suis
renversé, devant l'attitude du premier ministre qui se sert pour
argumenter cette peine de trois ans, du dossier du député de
Richmond, qui dit; « pour le député de Richmond, pour une
bagatelle dit-il, parce qu'il avait dit, il s'était engagé dans
une critique générale de la loi et des invectives contre la loi,
parlant sur un point d'ordre, il a prétendu qu'il avait le droit de
démontrer que cette loi constitue une législation dangereuse et
mauvaise, pire que le bill « Dillon ».
Le premier ministre dit: vous avez vu, messieurs, on a imposé
à ce député en Chambre une sanction de 30 jours. M. le
Président, je voudrais vous rappeler que l'offense a été
commise le 13 février 1957, et que la session s'est terminée le
21 février 1957, donc il n'y a eu seulement que 8 jours de sanction, et
il y a eu M. le Président, comme l'ont dit les autres orateurs et comme
l'a dit le premier ministre, il y a eu une rectification quant à son
salaire. Mais, M. le Président, la sanction n'a duré que 8 jours,
du 13 février 1957 au 21 février 1957.
M. le Président, si on va voir dans les journaux de
l'Assemblée législative, on trouvera qu'il y a eu un
député et c'était de mon temps ça, un
député, M. Fernand Choquette, qui a prononcé après
une première offense le 21 mars 1947, il avait été, M. le
Président, suspendu, expulsé pour la durée de la
séance, mais tout de suite après, le jeudi 8 mai 1947, M.
Choquette continuait en Chambre, et je me souviens des détails, à
poursuivre le gouvernement et de l'accuser, jusqu'à aller dire, cette
phrase qu'il n'a pas voulu retirer.
M. le député de Montmagny s'adressant aux membres du
gouvernement, déclare que: « C'est un gouvernement de malfaiteurs,
qui spéculent sur la vente des permis de liqueur. » Ça
c'était une accusation grave, M. le Président, une accusation
où tous les membres du gouvernement indépendamment, des
individus, tous sur le même pied, étaient déclarés
des malfaiteurs qui spéculaient sur la vente des permis des liqueurs, et
M. le Président, le premier ministre soulève un point d'ordre et
demande à ce que le député retire ses paroles comme non
parlementaires. Parlant sur le point d'ordre, le député
déclare qu'il ne retirera jamais ses paroles, les répète
de nouveau et invite le président à faire rapport et
déclare qu'il consent lui-même à être nommé,
c'était de l'outrecuidance, en Chambre, je lui demande alors de retirer
ses paroles comme non parlementaires, mais il déclare qu'il refuse de
les retirer.
A la suite du rapport, l'Orateur demande au député de
Montmagny de retirer les paroles qu'il a prononcées en comité et
sur le refus du député de les retirer, l'Orateur rappelle
nominativement à l'ordre Fernand Choquette, l'honorable Duplessis
propose alors que la Chambre censure M. Choquette et l'exclut de la salle des
délibérations de l'Assemblée législative pour une
période de 8 jours, de 8 jours, M. le Président, après une
première condamnation par la Chambre, le 21 mars 1947, une
deuxième le 8 mai 1947, le député Choquette dit: je ne les
retirerai jamais. La Chambre, se prononce pour une sanction de 8 jours.
Aujourd'hui, M. le Président, le premier ministre qui s'est servi de ces
détails, la Chambre est sûrement intéressée à
ce que l'on donne aussi d'autres renseignements de d'autres peines
disciplinaires qui se sont produites dans cette Chambre.
Pour un seul mot, M. le Président, j'ai été
expulsé pour 8 jours, 8 jours en dehors de la Chambre, dans un moment
où c'était très important d'y être parce que j'avais
fait une étude spéciale sur un problème qui venait devant
la Chambre, sur un budget qui était soumis. On m'a expulsé pour 8
jours, c'était une peine disciplinaire, M. le Président, trop
onéreuse je n'ai pas à la critiquer mais je constate les faits.
Aujourd'hui encore, on arrive avec une peine qui est absolument
disproportionnée, j'ai entendu tout à l'heure quelqu'un dire que
c'était
une sentence de débarras. M. le Président, c'est mauvais,
et le gouvernement qui prononcera, qui portera demain toute la
responsabilité de cette sanction, qui est démesurée, se
fera dire par des éditoriaux demain, se fera dire par des gens qui ont
de la logique et du bon sens, que ce n'est pas raisonnable, après qu'un
homme a agi de bonne foi après que sa réputation est intacte,
après qu'il a dans la vie publique mené une conduite
irréprochable, ce n'est pas juste, M. le Président, d'imposer
à un député qui se servant de son droit, de bonne foi,
comme dit, si nous voulons conserver des institutions libres et des hommes
libres, il faut que nous conservions les droits qui nous appartiennent, au
moins de faire valoir en certaines circonstances nos arguments, et M. le
Président, quand on a entendu le premier ministre dire, bien avant la
condamnation qu'il veut faire imposer à ce député, «
je m'en vais le brider ce député ». Cela laisse à
l'opinion publique une certaine idée de vengeance, et quand on voit que
le premier ministre répète, même en Chambre: « Je
m'en vais te le brider ».
Eh bien, et qu'on voit aujourd'hui la motion qui est devant nous, on est
porté à faire des relations entre ce qui a été dit,
et ce qui est posé comme geste.
Trois ans, c'est antidémocratique. Lui, le député
de Trois-Rivières qui s'est fait élire par les pauvres, par les
humbles, par les ouvriers de Trois-Rivières, lui qui a milité
dans tous les mouvements sociaux de charité publique, lui qui a chez
nous une réputation inattaquable, et demain matin, M. le
Président, vous pensez que les gens de Trois-Rivières, de son
comté, ne seront pas furieux.
UNE VOIX: Ils vont pleurer.
M. BELLEMARE: Non, ils ne pleureront pas, mais ils sauront à qui
rendre justice quand la justice viendra. Et je dis, moi, qui a
été accusé par le député de St-Maurice
pendant des années, moi qui a subi les invectives du
député de St-Maurice pendant des années, à la
télévision, dans mon comté, passant six, sept fois dans
mon comté, à chaque élection pour m'invectiver, et je ne
répèterai pas ici en Chambre ce qu'il est venu prononcer dans mon
comté. Je l'ai déjà mis au défi, ici, en Chambre de
me prouver une seule de ses accusations, et il ne les a jamais
répétées. Mais moi qui ait eu à subir ça,
aujourd'hui je dis que le député de St-Maurice est
peut-être heureux de la sentence, du jugement qui a été
rendu, mais qu'il est injuste, complètement injuste pour le
député de Trois-Rivières qui a fait son devoir, qui s'est
conduit comme un parlementaire, qui a été courageux, même
devant la preuve qui a été faite en bas. Et face à face,
il en a prononcé une accusation.
M. le Président, hier après-midi, avant la
rédaction du mémoire du Comité, il a
présenté sa version, il l'a déposée courageusement.
Est-ce qu'il y en a un seul qui s'est levé à ce moment-là
pour dire que ce n'était pas vrai? Que les accusations qu'il portait
dans sa déclaration n'étaient pas vraies? Non, pas un. Je dis,
connaissant le député de Trois-Rivières, sachant avec quel
courage, à l'année longue il porte son fardeau, connaissant toute
l'énergie qu'il met pour survivre, et surtout constatant avec quelle
intégrité toute sa vie a été faite, et surtout la
réputation qu'a ce député, qu'a cet avocat dans le
barreau, je dis qu'aujourd'hui le premier ministre ne devrait pas proposer
à la Chambre une motion aussi forte.
M. le Président, on a entendu durant des campagnes
électorales, des termes extrêmement déplacés, des
accusations extrêmement malheureuses. Le député de
Jacques-Cartier disait de mon chef que c'était une « ratatouille
», à Chambly le 12 novembre 1962. C'était le
député de Jacques-Cartier qui disait ça, que mon chef
était une « ratatouille »...
M. JOHNSON: C'est distingué ça.
M. BELLEMARE: Est-ce que ça ressemble à ce qu'elle a dit
cet après-midi en Chambre? Est-ce que c'est ça la
démocratie? Est-ce que c'est ça qu'elle a prêché cet
après-midi? Elle aujourd'hui, qui applique les sanctions, et qui veut
voter cette sanction.
M. JOHNSON: Qui trouve qu'elle n'est pas assez sévère.
M. BELLEMARE: M. le Président, je dis que, dans le feu de la
discussion, il peut peut-être nous échapper certaines expressions
malheureuses, mais que jamais le député de Trois-Rivières,
que je connais, qui a mené des campagnes politiques pendant de
nombreuses années, n'a jamais eu, à l'endroit de son adversaire,
jamais, des termes aussi vulgaires qu'a employés le député
de Jacques-Cartier à l'endroit de mon chef, le député de
Bagot.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. BELLEMARE: M. le Président...
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Question de privilège, M. le
Président.
M. JOHNSON: Non.
M. BELLEMARE: M. le Président...
DES VOIX: A l'ordre.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Si le député de Champlain ne
connaît pas la définition de la « ratatouille », je
pense qu'il devrait l'apprendre, parce que c'est un terme de personne, de
cuisinier.
M. JOHNSON: C'est ça.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Et je pense qu'il devrait regarder la
définition dans le dictionnaire.
M. BELLEMARE: Entre le sens que veut lui donner le député,
et le sens dans lequel l'a employé, elle, pendant les élections,
c'est bien différent. Quand elle l'a employé elle, pour dire au
gens de Granby, le chef de l'Union nationale est une « ratatouille
», ça c'était différent.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre messieurs. M. BELLEMARE: M. le
Président... M. JOHNSON: Ce n'est plus le même sens. M. BELLEMARE:
... je reviens à la motion.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs. Jusqu'à maintenant, je
crois...
M. BELLEMARE: Je m'en vais vous en donner un autre moi...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre messieurs...
M. BELLEMARE: ... le ministre de la Voirie, vous allez voir ça,
vous n'aimerez pas ça.
M. LE PRESIDENT: ... je rappelle le député de Champlain
à l'ordre.
M. BELLEMARE: On va vous parler de votre maison.
M. LE PRESIDENT: Pour la deuxième fois, je rappelle le
député de Champlain à l'ordre, deuxième fois. Je
considère que, jusqu'à maintenant, vu la gravité...
Je considère que jusqu'à maintenant, vu la gravité
de la motion qui est devant la Chambre, et toute la question qui est devant la
Chambre, et à décider, je considère qu'on a
été capable des deux côtés de la Chambre en
général, de discuter de l'affaire, de la motion, d'une
manière sérieuse, en discutant des faits qui sont devant la
Chambre, de la motion qui est devant la Chambre, et je crois que c'est de mon
devoir d'attirer l'attention du député de Champlain sur le fait
qu'il avait bien commencé son exposé, mais au moment où je
me sentais obligé de me lever, il était en train de commencer
à faire le procès de plusieurs autres députés en
Chambre et je lui demande de revenir à discuter de la motion qui est
devant la Chambre.
M. BELLEMARE: M. le Président, c'est assez rare que vous me
faites des compliments, j e suis heureux de prendre vos instructions, et de
revenir à cette motion actuellement en discussion. Je dis, M. le
Président, que demain, les éditoriaux, les journaux ne
partageront pas toujours l'opinion du premier ministre, et que plusieurs
trouveront que cette sanction, même si elle doit être exemplaire,
est démesurée.
Vous verrez des journaux honnêtes, des gens qui sont dans la vie
publique, qui ont accompagné les hommes publics depuis de nombreuses
années, dire qu'il aurait pu y avoir une sanction, mais qu'on n'avait
pas le droit de défranchiser un député pour trois
années. Il y a des gens sérieux qui vont l'écrire demain,
et ça ne seront pas ni des gens de l'Union nationale, ni peut-être
des gens du parti libéral, mais des gens qui diront que la sanction,
il aurait pu y avoir une sanction, mais jamais une sanction de
trois ans pour défranchiser un député siégeant en
cette Chambre, l'empêchant de représenter ses
électeurs.
M. le Président, je termine en rendant un hommage bien
particulier à ce député courageux, à ce
député intègre, à ce député dont la
bonne foi est manifeste, et en demandant au gouvernement de ne pas laisser
percer dans l'opinion publique que ça pourrait être une punition
de vengeance, une punition de débarras, ou une punition qui serait
antidémocratique.
M. RENE LEVESQUE: M. le Président, pour mon humble part j'ai
été cité à quelques reprises, des paroles que
j'avais prononcées il y a quelque temps ont été
citées. Je vous demande d'abord de croire que ça ne m'a pas
flatté du tout, que ça m'a plutôt fait peur, parce que
ça me condamnait, jusqu'à un certain point, à dire
quelques mots pendant ce débat-ci. Cela me faisait déjà
peur d'ailleurs ces paroles-là quand je les ai prononcées il y a
quelques semaines, parce que je n'ai pas du tout, on sait que je n'ai pas
l'entrafnement, et je ne me sens pas du tout la vocation d'un juge, et
pourtant
c'était à un tribunal très exactement que
l'accusation du député de Trois-Rivières nous
forçait d'appartenir, ceux qui étaient membres du Comité,
en tout cas, et maintenant la Chambre ici. C'est un tribunal qui est
appelé à juger, et je répète ce que j'ai dit il y a
quelques semaines là-dessus, je n'ai rien à retirer, qui est
appelé à juger dans une affaire qui ne pouvait pas être
autrement, dans le sens politique, qu'une affaire de vie ou de mort. La vie ou
la mort politique d'un des deux hommes qui étaient impliqués
directement: l'accusé et l'accusateur. Et à partir du moment
où les dés étaient jetés par le
député de Trois-Rivières comme il l'a fait, et il s'en est
dit parfaitement conscient.
On ne pouvait pas, à mon humble avis, refuser que cela doive
coûter très, très cher à l'un des deux hommes. Pour
ce qui est de l'accusé, le député de St-Maurice, le
premier ministre l'a dit en détail. Le procureur général
aurait été dans la rue, si l'accusation avait été
prouvée, cela aurait été sa déchéance
politique, il aurait perdu sa pension, il aurait perdu sa réputation, et
ça se serait prolongé au moins chez ses enfants et puis
probablement chez ses petits-enfants aussi. On a vu des choses comme ça
dans la province, et on en voit dans tous les pays.
Bien sûr, si ça avait été prouvé, le
chef de l'Opposition l'a dit, le député de St-Maurice l'aurait
mérité, dans le sens de la justice humaine, ça on est
d'accord, mais il est non moins sûr qu'il est défendu de jouer
avec de telles atteintes à la réputation des hommes. Cela c'est
dans toutes les lois, je crois, des sociétés civilisées et
nous nous devons ici, avec nos lois particulières qui sont celles d'un
parlement, il me semble, de réfléter aussi, à ce point de
vue-là, la sévérité de ces lois, à moins
qu'on ait perdu toute notion de la gravité des choses, et qu'on en soit
venu à croire que cette enceinte-ci est un club privilégié
où l'on peut se permettre, comme un passe-temps, ce qui est une chose
tragique pour les autres hommes, il n'est pas possible de sous-estimer l'action
qu'a posée le député de Trois-Rivières, d'autant
plus qu'il est un avocat, avec de longues années d'expérience, et
qu'il a été juge sur un tribunal; parce que la
personnalité de l'accusateur doit avoir il me semble, un poids
évident dans la balance de la justice que nous essayons,
péniblement, en amateur, de tenir ici.
Il lui incombait, à lui, le député de
Trois-Rivières, il me semble, moi, plus qu'à bien d'autres,
d'être prudent, et d'être responsable. Pour moi, en tout cas, il
est évident qu'il ne l'a pas été. J'ai vécu pendant
pas mal de journées, ce qui s'est fait au Comité dont je faisais
partie, le Comité des privilèges et élections.
Tout, absolument tout, pour moi, en tout cas, reposait sur un seul
individu, M. Bellemare. On a pu, tous, et celui qui vous parle comme les
autres, se faire une opinion de ce personnage. Il s'est, à toutes fins
utiles, dépeint devant nous, pendant les deux présences physiques
qu'il a eues devant le Comité. A moins d'être aveuglé, le
député de Trois-Rivières aurait pu, lui aussi, avant et
mieux que n'importe qui d'entre nous, se faire une opinion de M. Bellemare.
Après tout, il est de la même région. Il est évident
qu'il ne l'a pas fait, ou qu'il ne l'a pas voulu, ce n'est pas à moi de
juger. Des éléments précis et convaincants de preuves, il
me semble en tout cas, devaient, encore une fois à moins d'être un
homme aveuglé, s'ajouter au serment de cet individu, évidemment
très particulier. Son seul serment était déjà une
fragilité effroyable pour poser une accusation pareille. Et quand on
essaie de me convaincre qu'une déclaration assermentée, par
n'importe quel individu: « est-ce quelque chose de suffisant? Il me
semble qu'on doit dire en toute justice que le serment n'est malheureusement
pas une chose qui est aussi respectée que ça et que tout homme de
loi d'expérience doit le savoir. C'est malheureux. C'est une chose
terriblement déplorable mais c'est vrai, et on en a eu des exemples,
nous-mêmes.
Ces éléments de preuve nécessaires additionnels,
ils étaient, je crois, facilement vérifiables avant. Le
Comité, il me semble, pour moi en tout cas, l'a prouvé, et le
député de Trois-Rivières lui-même l'a prouvé
en faisant faire des vérifications après avoir lancé son
accusation.
Rien ne sert de parler de quelques documents qui ne changent rien au
fond de l'affaire. Pour moi en tout cas, en conscience ça ne change
rien. L'essentiel demeure que la preuve de l'accusation n'existe pas. Donc,
cette accusation est apparue gratuite. Lancée à la
légère par un homme professionnellement entraîné,
pourtant, à savoir la terrible gravité d'un geste pareil. Une
telle irresponsabilité est proprement inconcevable à moins de
motifs sur lesquels je n'ai pas le droit, et encore moins le désir de me
poser des questions. Mais j'espère que la cruauté féroce
dont une telle irresponsabilité a fait sentir les effets pendant des
semaines au député de St-Maurice, qui n'était pas
obligé d'endurer ça, était une cruauté
inconsciente. J'espère aussi que la dégradation du Parlement
qu'implique, dans l'esprit des citoyens, un tel abus criant des
privilèges d'un représentant du peuple, et, pour sa part, cette
dégradation, une chose réparable, et surtout on doit tous
espérer que ce soit la dernière
du genre à laquelle nous soylons forcés d'assister.
Maintenant, en ce qui concerne l'évaluation de la sanction
elle-même, tout le monde admettra que ce n'est pas facile. Il n'y a pas
de précédent valable en réalité. Il y a à
peine des points de repaire qu'on peut trouver tant bien que mal parce que
chaque cas du genre, par définition, doit être un cas « sine
generix », c'est un cas qu'il faut juger en lui-même. Je ne vois
pas comment on peut faire autrement.
Le député de Trois-Rivières lui-même, je
crois que je vais être obligé de l'ajouter, a rendu plus
malaisé et plus pénible notre tâche par son intervention
d'aujourd'hui, de cet après-midi. Non seulement on n'a pas senti, en
tout cas moi je n'ai pas senti à aucun point de son discours, aucun
regret, mais il y a eu des phrases que moi j'ai trouvées des phrases
effroyables. Par exemple, j'en ai noté une seulement et puis ensuite
j'ai vu que le ton se maintenait, « Une personne disait le
député de Trois-Rivières, aujourd'hui, le lendemain du
rapport du Comité auquel on a tous assisté une seule
personne avait intérêt le mot était souligné
dans le ton de la voix à démentir Amédée
Bellemare. » Je vous passe la suite de cette phrase-là; elle est
facile à retrouver dans le « Journal des Débats ». En
l'écoutant, moi j'ai eu l'Impression que c'était un effort pour
laisser encore planer un doute en dépit d'une preuve qui avait
été démantibulée, s'arranger pour qui en reste
quelque chose. Moi, j'ai trouvé ça effroyable. J'ai pensé
qu'on avait devant nous un homme qui était ou bien incurablement
aveuglé par la haine partisane, ou bien totalement irresponsable parce
que c'était aujourd'hui ça, ce n'était pas hier.
Nulle part dans son discours, mol j'ai senti en tout cas pour ma part
qu'il se souvenait de l'écoulement total de la mise en pièces de
sa propre accusation à laquelle il venait lui-même d'assister au
Comité ces jours derniers. Et plus encore après son discours, en
notre âme et conscience, chacun pour soi, pour ma part j'ai cru que la
sanction devait être exemplaire, non pas pour décerner un
certificat de vertu à qui que ce soi. C'est une précaution
inutile que cette phrase que j'ai entendu prononcer par le chef de
l'Opposition. Chacun ici sait, ou doit savoir qu'il est sous l'oeil de la
justice la plus impitoyable qui est celle de citoyens de plus en plus exigeants
et de plus en plus sévères. Et par chaque geste, par dessus le
marché, que nous posons dans le genre de celui qui est indiqué
dans la motion que nous discutons, par chaque geste de ce genre-là nous
devons sa- voir que nous nous condamnons nous-mêmes à faire
attention, à nous surveiller, et c'est terriblement grave ça,
mais en même temps je crois que c'est bon.
Evidemment le plus simple, le plus facile ça serait pour nous
tous de suivre le conseil qui nous a été donné, je crois,
dans une autre phrase du chef de l'Opposition quand il a dit: « On serait
plus heureux si la sanction était moins grave. » C'est bien
sûr ça. Le bonheur est simple dans ce cas-là. On serait
encore plus heureux d'une façon simple et facile s'il n'y avait pas de
sanction du tout, et si on pouvait passer l'éponge. Mais je crois que
c'est un mauvais conseil. Parce que l'opinion dans le Québec, dans trop
de milieux en tout cas, est déjà assez portée à
considérer le Parlement comme un cercle d'initiés qui ont des
« gentlemen's agreements » confortables, même sur les choses
les plus graves, et qui, au fond, s'arrangent toujours entre eux pour que
ça s'arrange. Mais qu'est-ce que c'est qu'une sanction suffisamment
exemplaire qui ne soit ni antidémocratique ni injuste?
Antidémocratique, pour mon humble part, moi ça ne me frappe pas
comme adjectif. Est-ce que un mois c'est démocratique dans une expulsion
et trois ans antidémocratique?
La démocratie, je ne crois pas que ça se mesure à
la journée. Même l'argument du député de Missisquoi
qui nous disait que trois ans cela équivalait à une expulsion
permanente dans le sens de la vie du Parlement présent. Il ne me
convainc pas à la réflexion. Il a peut-être la valeur d'une
interprétation juridique habile mais je ne me sens ni le goût ni
l'aptitude de faire du travail d'interprétation. Je retiens simplement
qu'une assemblée élue a le droit de se faire des
règlements y compris les règlements pour la malheureuse
éventualité de la suspension ou de l'expulsion d'un de ses
membres. Ce droit là est l'essence même de la démocratie.
Il est vieux comme les institutions démocratiques elles-mêmes. Et
ce droit, est aussi conforme au bon sens. Maintenant, est-ce que la sanction
que nous discutons dans la motion est un abus de ce droit. Autrement dit, c'est
une question de justice. Cela, il me semble que ça doit nous
préoccuper. Est-ce que c'est juste ou est-ce que c'est injuste? Ici,
c'est la conscience seule qui peut s'exprimer, puis elle a de la misère
parce que la conscience a des balances dans un cas comme celui-ci qui sont
saprement dures à ajuster. Il faut éviter que ce ce soit de la
vengeance partisane, c'est entendu. Il faut éviter aussi qu'une sanction
soit une caricature de ce qu'elle devrait être. Finalement, notre seul
juge dans cette matière ne peut être que le peuple même du
Québec, en
commençant, et ça je crois que c'est essentiellement
démocratique dès qu'ils en auront l'occasion par les propres
électeurs du député de Trois-Rivières. C'est le
peuple seul qui peut décider, en dernière instance, de la justice
ou de l'injustice de ce que nous faisons. Nous, nous ne pouvons pas faire autre
chose sans précédents valables, que d'écouter notre
conscience puis de peser de notre mieux ce qui est arrivé, pour notre
part ici, vu ce qu'a fait le député de Trois-Rivières, vu
ce qu'a constaté le Comité, par la suite, vu, pour mon humble
part, en tout cas, ce que le député de Trois-Rivières a
dit et n'a pas dit, aujourd'hui.
Nous croyons, à regret, que la sanction prévue dans la
motion est indiquée et juste. Et quant aux sentiments personnels sur
lesquels évidemment, chacun ne peut parler que pour soi, je voudrais
bien qu'on croit, que pour mon humble part, en tout cas, je ne me sens pas le
goût d'aucune vengeance partisane ou politique.
M. LAPALME: M. le Président, évidemment, ce n'est pas le
hasard qui fait que je prends la parole immédiatement après le
ministre des Richesses naturelles, parce que, depuis deux ou trois jours, nous
en avons beaucoup parlé de cette affaire.
Mais,jepréférerais que le premier ministre n'aille pas trop loin
parce que je voudrais le mentionner.
M. LESAGE: Non, non.
(A ce moment, M. Lesage allait quitter la Chambre pour répondre
à un appel fait à son bureau de la Législature.)
M. LAPALME: Mes premiers mots sont pour dire ceci, c'est que le premier
ministre annoncera tout à l'heure la liberté totale du vote. Ceci
ne doit pas être fait suivant les lignes de parti. C'est la raison pour
laquelle j'aurais deux ou trois mots à dire qui pourraient indiquer, si
cet avertissement n'avait pas été donné, qu'il n'y a pas
solidarité ministérielle. Il n'y a pas solidarité
ministérielle dans le cas présent, je le répète,
sur la liberté du vote. C'est la raison pour laquelle je veux dire ceci
à la Chambre: c'est que quand j'ai vu la motion, j'ai dit au premier
ministre que je trouvais la sentence, si je puis ainsi m'exprimer par
déformation professionnelle, je lui ai dit que je trouvais la sentence
trop sévère. Nous avons d'ailleurs, le ministre des Richesses
naturelles et quelques-uns d'entre nous, tourné assez longtemps autour
de ce chiffre.
Cet après-midi, (et là je rejoins le ministre des
Richesses naturelles,) cet après-midi, je dois dire que j'ai
été complètement désarçonné. On me
permettra, M. l'Orateur, de passer tous les discours qui ont été
faits de part et d'autre et dont chacun contenait une grande part de
vérité, même dans les moments où
l'élément purement passionnel intervenait. Je n'ai pas
l'intention de refaire le procès, au point de vue juridique, de celui
qui, à l'heure actuelle, fait l'objet de nos discussions»
J'ai dit que cet après-midi, j'ai été
complètement désarçonné par la déclaration
du député de Trois-Rivières qui a demandé que l'on
discute le rapport qui venait d'être reçu par la Chambre. Il est
vrai qu'hier, pendant les quelques instants où je suis allé au
Comité, je disais qu'hier, je trouvais assez surprenant de voir que le
député de Trois-Rivières, alors que les paragraphes
défilaient devant lui et qu'ils contenaient déjà, en
quelque sorte, sa condamnation ou enfin une réprobation, il est vrai
qu'hier, j'étais déjà assez surpris de voir comment il les
adoptait les uns après les autres. Mais enfin, il était dans le
rôle qui dépasse celui du rôle d'avocat. Il était
dans le rôle d'un accusateur qui devait, à mon point de vue,
constater que sa cause tombait en lambeaux, sans compter qu'il savait quelles
seraient, dans son cas, les conséquences possibles, je ne dis pas
probables, mais possibles. Et lorsque tout fut voté, lorsqu'il fut
déclaré qu'il n'avait pas présenté la preuve
requise, que son accusation était sans fondement, je me demandais ce
qu'il viendrait dire en Chambre, cet après-midi. Et il était bon,
(et le premier ministre l'a compris, qui immédiatement a
accédé à sa requête), il était bon qu'il y
ait une discussion en ce moment où le rapport unanime du Comité
nous parvenait, et en ce moment-ci, moi qui ne faisais pas partie du
Comité, il me plaît souverainement de féliciter tous ceux
qui en faisaient partie pour la largeur de vue avec laquelle ils ont
regardé les choses sans trop se préoccuper de l'homme ou des
hommes qui étaient l'objet ou le sujet de cette sorte de
procès.
Mais cet après-midi (et qu'on relise demain dans les
débats ou après-demain, lorsque les débats seront
publiés, la déclaration du député de
Trois-Rivières), j'avais réellement l'impression qu'il
récidivait, à tel point M. le Président, ( je crois que
vous étiez exactement où vous êtes), à tel point
qu'à un moment donné, relisant comme il venait de le faire, le
paragraphe dans lequel il était dit qu'il n'avait pas pris les
précautions ou les mesures nécessaires, relisant ce texte je l'ai
interrompu, (je lui ai demandé s'il me permettait de lui poser une
question) à tel point que je me demandais et que je lui ai
demandé s'il rejetait enfin ce paragraphe qu'il avait lui-même
accepté la veille. J'ai eu l'impression bien nette qu'il
récidivait, et c'est d'ailleurs ce qui ressort de l'impression que vient
de nous transmettre le ministre des Richesses naturelles. Que sera ce texte une
fois mis par écrit? est-ce qu'il y aura moyen de gloser ou d'ergoter
autour? je ne le sais pas. Mais dans le moment ie demeureavec cette impression,
et j'ai l'impression aussi que demain, alors que l'on rapportera ces
débats, que l'on mettra en gros titres la motion qu'a
présentée le premier ministre et également en gros titres,
probablement, les protestations qu'ont faites en particulier le chef de
l'Opposition et le député de Missisquoi, demain, il y aura
très probablement dans les journaux suffisamment de phrases
prononcées ici par le député de Trois-Rivières pour
indiquer, puisqu'on a parlé de l'opinion publique, au public,
qu'à la dernière minute, après avoir été
désavoué en Comité par tous les membres de son parti, il
est revenu dire en Chambre que si les gens ne s'étaient pas
parjurés il aurait, (ce ne sont pas ses mots mais c'est l'idée)
gagné sa cause contre le procureur général. Ceci change en
tant que je suis concerné mon optique considérablement.
Ma première réaction,... quand même après
toutes ces années passées ici, vous savez, on a beau se dire
blindé il vient des moments où on constate qu'il y a des endroits
de la cuirasse qui ne sont pas protégés. Tout de même, il
vous prend l'envie, M. le Président, de vous en aller d'ici et de n'y
être pas quand le vote deviendra une chose inévitable; c'est ma
première réaction à moi.
Le député de Champlain tout à l'heure a dit quelque
chose au sujet de cette vie difficile qu'a été celle du
député de Trois-Rivières à une époque dont
je connais tous les détails. Bien oui, et c'est encore une chose autour
de laquelle nous avons tourné en pensant au sort que la Chambre pourrait
lui réserver. Je n'ai pas besoin d'aller plus loin. On a donc
discuté du plan juridique. J'ai dit tout à l'heure qu'il y avait
eu un fort élément passionnel qui est intervenu dans tout ceci;
nous vivons en vase clos ici et à certains moments, nous mesurons assez
mal la distance qui sépare, dans un cas comme celui-ci, le juridique du
passionnel. Je voudrais essayer de m'en dégager tout envoyant
très bien le danger qu'il y a pour moi à m'en tenir sur le plan
purement humain et ce plus purement humain, auquel je viens de faire allusion
à la suite de l'allusion faite par le député de Champlain,
est celui-ci, je disais tout à l'heure que je trouvais la sentence
infiniment sévère. Je disais également tout à
l'heure qu'après avoir entendu le député de
Trois-Rivières, j'étais assez bouleversé de voir
jusqu'à quel point il semblait ne pas comprendre la chose.
Eh bien, si le député de Trois-Rivières avait
réellement été conscient de ce qui venait de lui survenir,
il lui aurait été tellement facile, au lieu de faire le discours
qu'il a fait, où il tentait de refaire le procès, il lui aurait
été tellement facile de venir très humblement
déclarer qu'il s'était trompé, qu'il s'excusait et
là, je puis assurer la Chambre que le procureur général
serait venu à son pupitre demander lui-même au premier ministre de
réduire la clause d'exclusion qui apparaît aujourd'hui dans la
motion. Mais maintenant M. le Président, je n'ai pas le coeur de
demander au procureur général de venir marcher sur son coeur
quand au moment même où nous décidons du sort du
député de Trois-Rivières au moment même où
nous décidons de son sort il y a déjà des imprimés
qui se font dans la province qui vont répéter en plus où
moins grand, où en plus ou moins petit les accusations indirectes contre
celui qui vient d'être, dois-je employer ce mot? qui vient d'être
acquitté. Il n'y a pas une heure encore, malgré qu'il n'en eut
pas tellement le désir, il n'y a pas une heure encore le procureur
général avec qui j'avais une conversation était prêt
à venir ici, je n'irai plus le lui demander. Nous avons
été quelques-uns à tenter en cette Chambre, nous avons
été quelques-uns silencieusement à tenter d'établir
une sorte de notion commune de la justice dans un cas comme celui-ci.
Il n'y a maintenant plus rien à faire. Les flots
d'éloquence se sont déversés de part et d'autre, on a
à peu près tout dit. On a parlé des conséquences
sur la vie de celui qui est déjà censuré, comme on a
parlé des conséquences qui auraient pu survenir si celui qui est
aujourd'hui censuré avait été le vainqueur dans une joute
qui est devenue à un moment donné, une véritable joute
à deux hommes. On a tout dit des conséquences d'ordre juridique.
Là-dessus j'ouvre une incidence tout simplement pour dire que l'un des
arguments qui peut peut-être frapper à première vue me
semble à moi très fragile, c'est celui qui consiste à dire
que nous allons léser la population d'un comté pendant une
période de trois ans. On a pas tous la même notion des choses.
Dans un cas comme celui-ci, il me semble que j'aurais donné ma
démission dès aujourd'hui. Le député de
Trois-Rivières a préféré attendre la
décision de la Chambre. Si la population de Trois-Rivières est
lésée pendant trois ans, cela ne dépendra que de lui. Cela
ne sera pas à cause d'un acte posé par la popula-
tion, mais à cause d'un acte posé par le
député de Trois-Rivières lui-même et s'il ne veut
pas, je n'ai pas de conseil à lui donner, s'il ne veut pas que la
population de Trois-Rivières soit lésée, il sait ce qu'il
a à faire. Il n'y aurait même pas eu besoin de cette longue
discussion s'il avait posé ce geste, et cette discussion aurait
été considérablement écourtée s'il
s'était conduit d'une façon contraire à celle que nous
avons connue aujourd'hui.
M. le Président, je disais tout à l'heure que ma
première réaction ce serait de ne pas voter, ça n'est pas
réjouissant. Comme le disait tout à l'heure le ministre des
Richesses naturelles, il ne s'agit pas de sauver un système dont nous
faisons partie, auquel nous sommes intégrés, système que
dénonça autrefois André Tardieu quand il
dénonçait le parlement français, ni un régime, il
ne s'agit pas de défendre ça. Quand on a fait un peu de droit
criminel dans sa vie, il nous vient souvent des souvenirs livresques dans une
cause criminelle. L'un des plus grands juristes en droit pénal, Lachaud,
s'adressant au jury un jour, après avoir terminé son plaidoyer
disait au jury: « J'ai fait mon devoir, le vôtre commence, pensez-y
bien ». C'est à peu près ce que le Comité est venu
nous dire. Le Comité est venu nous dire: « Nous, nous avons fait
notre devoir, nous avons dit que l'accusation n'était pas fondée,
le vôtre maintenant commence, c'est le devoir de la Chambre ».
Est-ce que les uns et les autres ne regretteront le vote que nous donnerons?
Nous ne pouvons pas prévoir l'avenir, on a parlé de l'opinion
publique, on a mentionné les journaux, on a mentionné ce qui se
dirait. Te dois dire que dans ce domaine-là, celui qui parle ou d'autres
n'ont pas été capable de s'empêcher à certains
moments de penser en termes de parti politique.
Qu'est-ce que vous voulez, on est pris là-dedans. On n'a pas
été capable non plus de s'empêcher de penser en termes
d'opinion publique. On ne doit pas penser en termes de parti, on ne doit pas
penser en termes d'opinion publique. Peu m'importe ce que l'opinion publique
pensera du vote que j'ai à donner parce qu'autrement il faudrait
qu'à chaque fois que j'ai à voter, je m'en aille consulter
l'opinion publique. C'est une bien triste affaire que celle-là. Le vote
que je vais donner pour ma part, M. le Président, je ne le donnerai pas
avec la joie que nous pouvons éprouver à certains moments quand
nous faisons passer des mesures auxquelles nous tenons. Personne tient à
voter dans cette histoire. Malheureusement, à cette heure-ci maintenant,
les dés sont jetés avec tout ce qui s'est dit, il ne peut plus
être question que de s'en aller vers ce vote qui, je le
répète, sera suivant la déclaration du premier ministre,
un vote libre. La loi est dure, dit-on, mais c'est la loi. Dans le moment ce
qui est plus dur, c'est que c'est nous qui allons la faire.
M. LESAGE: M. le Président, je n'ai pas le droit de
réplique, mais étant donné que le chef de l'Opposition au
cours de son discours cet après-midi m'a demandé de laisser les
députés libres de voter comme ils l'entendaient, je
répète qu'il ne s'agit pas d'une motion du gouvernement, mais
d'une motion que j'ai personnellement présentée sous ma
responsabilité croyant que c'était mon devoir de conscience de le
faire et quant aux députés libéraux, ils sont libres de
voter comme ils l'entendront»
M. JOHNSON: Je voudrais ajouter, M. le Président, en toute
logique, quant aux députés de l'Union nationale, ils sont
certainement libres de voter comme ils l'entendront.
M. LESAGE: Le vote.
M. LE PRESIDENT: La Chambre est-elle prête à se prononcer
sur la motion? Qu'on appelle les députés.
M. LE PRESIDENT: Puisque la motion n'est pas imprimée au
feuilleton, je crois que je devrais la lire: « Proposé par le
premier ministre, appuyé par le ministre de l'Education, que le
député des Trois-Rivières soit déclaré
coupable de violation de privilèges pour avoir porté contre le
député de St-Maurice une accusation de corruption qu'il n'a pas
prouvée et dont la fausseté a été
démontrée et reconnue. Que, vu la gravité de cet outrage,
le député de Trois-Rivières soit exclu pour une
période de trois ans. »
Je demande que tous ceux qui sont en faveur de l'adoption de la motion
veuillent bien se lever.
M. LE GREFFIER ADJOINT: MM. Lesage, Lapalme, Bédard, Lalonde,
Gérin-Lajoie, Lévesque (Montréal-Laurier), Bertrand
(Terrebonne), Arsenault, St-Pierre, Cliche, Dionne, Brown, Kierans, Lafrance,
Pinard, Couturier, Levesque (Bonaventure), Laporte, Fortin, Mme
Kirkland-Casgrain, MM. Parent, Binette, O'Reilly, Turpin, Lechasseur, Roy,
Lavoie (Laval), Meunier, Harvey, Morissette, Maheux, Collard, Vaillancourt,
Boulais, Coiteux (L'Assomption), Ouimet, Crépeau, Fournier,
Théberge, Fortier, Dallaire, Lacroix, Kennedy, Brisson Hébert,
Mailloux, McGuire, Cadieux, Beaupré, Godbout, Duprê, Martin,
Hanley.
M. LE PRESIDENT; Que ceux qui sont contre veuillent bien se lever.
M. LE GREFFIER ADJOINT: MM. Johnson, Elie, Dozois, Bertrand
(Missisquoi), Bellemare, Ducharme, Johnston, Boudreau, Lafontaine, Bernatchez,
Guillemette, Russell, Somerville, Gosselin, Lizotte, Raymond, Charbonneau,
Gervais, Allard, Loubier, Majeau, Gagnon, Gauthier.
M. LE GREFFIER: Pour; 53. Yeas: 53. Contre; 23. Nays: 23.
M. LE PRESIDENT; La motion est adoptée.
M. LESAGE: M. le Président, je propose que tout le dossier
déposé cet après-midi pour le président du
Comité des privilèges et élections soit remis, sous forme
de copie, faite sous la surveillance du greffier de la Chambre, au
ministère du procureur général pour étude aux fins
de savoir s'il y a lieu d'intenter des poursuites judiciaires.
M. JOHNSON: M. le Président, cette motion tel que convenu, vient
pour faire suite à une entente qui a été faite hier au
Comité lors de l'étude, paragraphe par paragraphe, du projet de
rapport du président. Cette entente est survenue à la suite d'une
correction dans le projet de rapport au paragraphe où on demandait aux
membres du Comité de déclarer parjure M. Amédée
Bellemare. A ce moment-là j'ai rappelé au président du
Comité qu'une demande avait été faite d'étudier
d'autres témoignages pour savoir s'il y avait lieu, oui ou non, de
porter certaines accusations, demande qui avait été
formulée par le député de Trois-Rivières, et qui
concernait les témoignages de messieurs Marchand & Samson. J'ai
ajouté, pour ma part, une demande d'étudier de bien près
le témoignage d'un M. St-Louis. M. le Président, nous sommes en
faveur de la motion telle que présentée puisqu'il s'agit d'une
copie de ces documents qui iront chez le procureur général.
M. LE PRESIDENT: La motion sera-t-elle adoptée?
M. LESAGE: Adoptée.
M. LE PRESIDENT; Adoptée.
M. JOHNSON: M. le Président, j'aurais une motion à faire
à cette Chambre, avec l'espoir, évidemment, qu'elle sera
agréée. Sans l'accompagner de commentaires, je me contente de la
lire, secondé par le député de Yamaska. « Que le
président du Comité des privilèges et élections, le
député de Québec-Centre, poursuive ses démarches
pour obtenir les documents nécessaires en vue de compléter le
dossier, soit; a) l'original d'une lettre datée de septembre 1960 et
adressée à l'honorable René Hamel par M. Edmond Casabon;
b) un billet promlssoire entre M. Amédée Bellemare et Emery
Lavergne, dont il est fait mention dans un acte notarié passé
devant le notaire Desaulnlers; c) deux chèques de Samson & Marchand
Inc. à l'ordre de M. Normand Croisetière.
M. LESAGE: Je n'ai aucune objection, M. le Président, d'autant
plus que c'est « immatériel », cela est
indifférent.
M. LE PRESIDENT: La motion sera-t-elle adoptée? Adoptée.
Est-ce qu'il y a d'autres députés qui voudraient parler sur le
rapport du Comité des privilèges et élections?
M. LESAGE: Je crois que le président du Comité des
privilèges et élections m'a fait part qu'il avait l'intention de
présenter une motion.
M. BEAUPRE: C'est la motion suivante: Je voudrais être
autorisé à prendre possession de certains documents
déposés, certains originaux parce que promesse avait
été faite à ceux qui les ont déposés qu'ils
seraient remis lorsque la Chambre en aurait pris connaissance. A ce
moment-là, je crois qu'un officier pourrait certifier que la copie est
conforme à l'original et nous rendrions ces documents à ceux qui
nous les ont gracieusement fournis.
M. JOHNSON: M. le Président, il me fait plaisir...
M. LESAGE: La Chambre ne voit pas d'objection à ce que les
originaux soient retournés, à condition que le dossier contienne
des copies conformes ou certifiées par le greffier de l'Assemblée
législative.
M. JOHNSON: Très bien.
M. LE PRESIDENT: Cette motion est adoptée? Adoptée.
Présentation de motions non annoncées. Présentation
de bills privés. Présentation de bills publics.
M. LESAGE: « A ».
M. LE PRESIDENT: M. Laporte propose la première lecture d'une Loi
concernant la cité de Québec. Cette motion sera-t-elle
adoptée?
M. LAPORTE: M. le Président, il s'agit tout simplement
d'autoriser la ville de Québec à émettre un permis de
construction pour que le Consulat français, qui est établi avenue
des Braves, puisse construire en arrière de la résidence un
immeuble pour la chancellerie.
M. LE PRESIDENT: La motion en première lecture sera-t-elle
adoptée?
M. JOHNSON: Adoptée.
M. LE PRESIDENT: Adoptée.
M. LE GREFFIER ADJOINT: Première lecture de ce bill. First
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture à la prochaine
séance.
M. LESAGE: M. le Président, avant l'appel des affaires du jour,
je voudrais demander, si je puis l'obtenir, le consentement unanime de la
Chambre à ce que nous considérions ce qui est apparu en appendice
aujourd'hui, un avis au nom du ministre des Affaires municipales, concernant
les municipalités de l'île Jésus et la ville des îles
Laval.
M. JOHNSON: M. le Président...
UNE VOIX: Ce n'est pas en appendice.
M. LESAGE: Non, ce n'est pas en appendice, je demande le consentement
unanime de la Chambre, comme je l'ai fait l'autre jour dans un autre cas,
à ce que la Chambre considère qu'un tel avis apparaisse à
l'appendice.
M. JOHNSON: M. le Président, quant à moi je suis
prêt à recommander que le consentement soit accordé,
consentement qui consiste à dire que l'avis, c'est-à-dire que le
bill qui viendra demain à l'agenda comme en première lecture, a
été dûment précédé de l'avis qui
aurait dû paraître aujourd'hui. C'est-à-dire qu'on exempte,
en d'autres termes,...
M. LESAGE: M. le Président, je n'ai absolument rien
demandé de plus.
M. JOHNSON: M. le Président, je comprends que le premier ministre
ne demande que ça. Il est arrivé très souvent, sur les
dernières journées de la session, que nous procédions de
cette façon, et même au cours de la session quand il y avait une
question urgente. Là, on comprendra que l'Opposition, à ce
moment-ci, n'a pas une connaissance officielle du contenu du projet de loi et
c'est tout simplement un avis qu'il y aura un projet de loi au nom du ministre
des Affaires municipales concernant les municipalités de l'île
Jésus et la municipalité des îles Laval. Evidemment, il
faut qu'il soit clairement établi que notre consentement ne comporte
aucune acceptation, ni du principe, ni des détails, toutes des choses
dont nous pourrons discuter en temps et lieu.
M. LESAGE: M. le Président, je n'ai rien demandé de plus.
Et j'ai ici ce que je crois être une copie dactylographiée du bill
qui sera imprimé pour demain et que je suis prêt à remettre
au chef de l'Opposition.
M. JOHNSON: Cela nous permettra, M. le Président, de
l'étudier et d'être prêt à le prendre en
deuxième lecture en temps et lieu.
M. LE PRESIDENT; Alors, si je comprends bien c'est le consentement
unanime pour que ce bill-là puisse apparaître demain...
M. JOHNSON: C'est ça.
M. LE PRESIDENT: ...pour première lecture et que l'avis en a
été donné.
M. JOHNSON: C'est ça.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Affaires du jour.
M. JOHNSON: M. le Président, avant l'appel des affaires du
jour...
M. LESAGE: Je crois que le ministre de la Santé a une
déclaration à faire.
M. COUTURIER: M. le Président, il y avait un bill No 62: «
Loi modifiant la Loi des hôpitaux ». A la suite, des
représentations qui ont été faites au ministère de
la Santé; de plus le sous-ministre adjoint de la Santé, le
docteur Lizotte, accompagné des docteurs Georges Lachaîne, premier
vice-président du Collège des médecins; le docteur
Hervé Gagnon, deuxième vice-président du Collège
des médecins et du docteur Jacques Dinel, gouverneur du Collège
des médecins sont venus à mon bureau pour demander
également que l'étude du bill ci-dessus mentionné soit
retardée à la 'prochaine
session afin de permettre aux autorités du ministère de la
Santé de discuter davantage du projet avec les autorités du
Collège des médecins et aussi avec les autorités des
associations d'hôpitaux de la province, le docteur Jean-Baptiste Jobin,
président du Collège des médecins, a appelé un
appel téléphonique de Matane où il se trouvait pour me
parler, mais lorsque j'ai placé moi-même un appel pour le
rejoindre, il avait quitté la ville.
Donc, M. le Président, ce bill qui devait être
présenté, je demande à la Chambre la permission de le
retirer afin de permettre au Collège des médecins, à
l'Association des hôpitaux d'étudier la question davantage et,
après quelque temps, s'il n'y a pas d'entente entre les associations
d'hôpitaux et le Bureau provincial de médecine, nous verrons
à représenter ce bill à la session prochaine.
M. JOHNSON: M. le Président, j'ai eu moi aussi, des
représentations et, quant à moi, je n'ai pas d'objection à
donner mon consentement à ce que le bill soit retiré. Il semble
que c'est lorsque le gouvernement retire quelque chose qu'il fait moins de
dommage et qu'il fait ses meilleurs coups et vous comprendrez que je sois
prêt à donner mon consentement.
M. LE PRESIDENT: Alors la motion sera-t-elle adoptée pour retirer
le bill? Adoptée. Affaires du jour.
M. BELLEMARE: Non, M. le Président.
M. JOHNSON: Non, j'avais, M. le Président, une question à
poser. Est-ce que le premier ministre est au courant de démarches qui
seraient faites, dans les coulisses, par les ministres fédéraux
pour amener la province de Québec et Brinco ou une filiale, une
subsidiaire, à s'entendre quant au développement des ressources
hydrauliques des chutes Hamilton? C'est M. Smallwood, comme on le sait, qui a
fait allusion à de telles rumeurs.
M. LESAGE: J'ai causé au téléphone avec mon
collègue fédéral du ministère des Finances. Nous en
avons dit qelques mots et il n'y a pas eu de suite depuis.
M. JOHNSON: Est-ce que je dois comprendre qu'il se fait des
négociations, que les négociations sont reprises?
M. LESAGE: M. le Président, s'il y avait eu des
négociations, je l'aurais dit.
M. JOHNSON: D'accord.
M. LESAGE: J'ai dit que le ministre des Finances du Canada m'en a dit
quelques mots au téléphone. Je ne suis pas libre de
dévoiler cette conversation. Il ne s'agissait pas de négociations
ni de pressions. Cela a duré, je ne voudrais pas me tromper comme
certains témoins! mais ça n'a pas duré deux minutes, ou
deux minutes et demie, trois minutes, je suppose.
M. JOHNSON: Des fois, c'est important ce qui se dit en deux minutes.
M. LESAGE: Oui! Mais je ne suis pas libre de le dévoiler.
M. LE PRESIDENT: Affaires du jour.
M. BELLEMARE: M. le Président, à l'honorable ministre de
L'Education: est-ce qu'il entend prendre des mesures les plus immédiates
possibles pour remédier à un état de fait que lui reproche
un commissaire nouvellement élu de la cité de
Trois-Rivières, M. Lessard, à savoir que les employés
manqueraient d'égards à l'endroit des commissaires
d'école? Ils font des attentes de plusieurs heures et ils ont
l'impression d'aller quémander une position. C'est un nouvel élu.
Je pense que le ministre pourrait peut-être faire enquête.
M. GERIN-LAJOIE: M. le Président, le député de
Champlain a attiré mon attention, il y a un instant, sur un article paru
dans le journal « Le Nouvelliste » sous le titre: « Les
commissaires ne sont pas reçus comme ils le devraient », mais je
lis, en dernier paragraphe, que le docteur Guy Boisclair a dit, par contre, que
le voyage avait été intéressant: « Cela a
peut-être été un peu long, d'ajouter le docteur
Boisclair mais il faut donner au nouveau ministère de l'Education
la chance de s'organiser. Il a été appuyé sur ce point par
le président de la commission scolaire, M. Roland Leroux, qui faisait
également partie de la délégation, accompagné des
ingénieurs architectes et autres intéressés ».
M. BELLEMARE: Si j'ai passé mon journal au ministre, ce n'est pas
pour lire la dernière partie!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs. Affaires du jour.
M. BELLEMARE: Que le ministre prenne le
premier paragraphe du nouvel élu, M. Lessard et lise...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs. Affaires du jour.
M. BELLEMARE: Je ne lui en donnerai plus, de « papiers
».
M. LESAGE: No 9. Il s'agit d'une question de M. Majeau. La
réponse est assez volumineuse. Je fais la suggestion habituelle que la
question soit transformée en motion pour production de documents et,
pour M. Courcy, je dépose le document en double j'espère!
oui, j'en ai une copie pour le député de Joliette.
M. LE PRESIDENT: La motion estadoptée? Adoptée.
M. LESAGE: No 25.
M. LE PRESIDENT: M. Cliche propose la troisième lecture du bill
No 58. Loi modifiant la Loi des terres et forêts. Cette motion
sera-t-elle adoptée?
M. JOHNSON: Sur division.
M. LE PRESIDENT: Sur division.
M. LE GREFFIER ADJOINT: Troisième lecture de ce bill. Third
reading of this bill.
M. LESAGE: No 26. J'ai fait prendre connaissance hier au chef de
l'Opposition de la lettre que j'avais reçue de garde Tassé.
M. JOHNSON: Oui. Je voudrais, M. le Président, rétablir
les faits, ou plutôt détruire peut-être un mauvais effet que
les questions ont pu causer hier, mauvais effet qui est dû aussi au
manque de réponses, à l'omission du ministre de répondre.
Je questionnais le ministre d'une façon assez agressive après
quelques minutes, parsemant mes questions évidemment ou appuyant mes
questions de commentaires, au sujet des négociations avec garde
Tassé quant à ses droits acquis. Comme je n'avais pas de
réponse, je concluais que garde Tassé n'était
peut-être pas satisfaite de l'arrangement que le ministre proposait. Or
le premier ministre est intervenu. Il a fait mention dans cette Chambre qu'il
avait une lettre. Lettre qu'il m'a montrée et lettre dans laquelle il
est clair que garde Tassé est satisfaite de l'arrangement proposé
dans la présente loi, relativement à ses droits à
elle.
M. LE PRESIDENT: La motion de troisième lecture est
adoptée? Adoptée.
M. LE GREFFIER ADJOINT: Troisième lecture de ce bill. Third
reading of this bill.
M. JOHNSON: Sur division. M. LESAGE: No 27.
M. RENE LEVESQUE: Voulez-vous envoyer un communiqué à la
galerie de la presse?
M. LE PRESIDENT: M. Lévesque (Montréal-Laurier) propose la
troisième lecture du bill No 66: Loi concernant l'Hydro-Québec.
Cette motion sera-t-elle adoptée? Adoptée.
M. LE GREFFIER ADJOINT: Troisième lecture de ce bill. Third
reading of this bill.
M. JOHNSON: Un instant. Est-ce que c'est organisé ça?
M. RENE LEVESQUE: Pardon?
M. JOHNSON: On avait convenu hier qu'il serait préférable
d'avoir, en annexe à la loi, et le texte du règlement de l'Hydro,
et le texte de l'arrêté ministériel. On se souvient qu'il
s'agit de valider ces deux documents, ou à tout événement,
de valider, oui, parce qu'on aurait eu des doutes sur les pouvoirs de l'Hydro
de passer tel règlement, et sur le pouvoir du Conseil des ministres
d'adopter tel arrêté ministériel. Et un
député de cette Chambre, je crois que c'est le
député de Champlain, avait fait remarquer que plusieurs
détenteurs des obligations dont on veut garantir le paiement seraient
intéressés à pouvoir consulter facilement ces
documents.
J'admets que n'importe qui peut obtenir une copie d'arrêté
ministériel, et une copie des règlements de l'Hydro, mais
ça devient compliqué pour des gens ordinaires, ça devient
compliqué pour des exécuteurs testamentaires, et c'est tellement
plus facile quand on incorpore le tout dans la loi, ou en annexe à la
loi, et il était entendu que le ministre des Richesses naturelles en
causerait avec le leader du gouvernement au conseil, ainsi que le leader de
l'Opposition, afin quo nous ne retardions pas les procédures en
Chambre.
M. RENE LEVESQUE: C'est exactement... Enfin le chef de l'Opposition me
rassure parce que je croyais en toute bonne foi avoir bien compris ce qu'il
vient de dire en terminant,
c'est-à-dire que je devais, et c'était l'accord auquel on
semblait en être arrivé, que je devais souligner ce que vient de
dire le chef de l'Opposition, et ce sur quoi on s'était entendu hier
soir, au leader du gouvernement au Conseil législatif et laisser au
Conseil le soin de décider si ça leur paraissait
nécessaire de mettre ça en annexe.
M. JOHNSON: Cela a été fait?
M. RENE LEVESQUE: J'avoue humblement que ça n'a pas encore
été fait, mais que ça va être fait.
M. JOHNSON: Très bien.
M. LE PRESIDENT: La motion de troisième lecture sera-t-elle
adoptée? Adoptée.
M. LE GREFFIER ADJOINT: Troisième lecture de ce bill. Third
reading of this bill.
M. LESAGE: No 30.
M. LE PRESIDENT: M. Hamel (St-Maurice) propose la deuxième
lecture du bill No 64: « Loi modifiant la Loi des tribunaux judiciaires
». Cette motion sera-t-elle adoptée?
M. LESAGE: Il y a tellement de choses, M. le Président, diverses,
n'est-ce pas, dans ce projet de loi, que je me demande s'il y a lieu de
discuter tous les principes dans le bill. Est-ce qu'il ne vaut pas mieux aller
en comité immédiatement...
M. BERTRAND (Missisquoi): En comité immédiatement.
M. LESAGE: ... et avoir une discussion absolument libre en
comité.
M. LE PRESIDENT: La motion de deuxième lecture est-elle
adoptée? M. Hamel propose que je quitte maintenant le fauteuil pour que
la Chambre se forme en Comité plénier pour étudier le bill
C4. Cette motion sera-t-elle adoptée? Adoptée.
M. HAMEL (St-Maurice): M. le Président, je voudrais remettre au
chef de l'Opposition quelques... Ce sont des amendements que je voudrais
proposer en comité.
M. HAMEL (St-Maurice): Alors, l'article 1 prévoit une
augmentation de cinq au nombre des juges de la Cour supérieure. Au lieu
de 67 comme actuellement, ce sera porté à 72.
M. MAJEAU: Est-ce que le ministre pourrait me dire si c'est à la
suite de certaines recommandations que le nombre de juges a été
augmenté?
M. HAMEL (St-Maurice): Oui. Les deux juges en chef. Lors de la
première discussion que j'ai eue avec les deux juges en chef, ils nous
demandaient trois juges additionnels. Alors, à ce moment-là, j'ai
communiqué avec le ministre de la Justice qui a dit: « Nous
n'avons pas d'objection. »
Plus tard, il est arrivé certains événements
où le juge en chef de Québec m'en a demandé un additionnel
pour Québec et le juge en chef de Montréal, un additionnel pour
Montréal; c'est pour cela que nous l'avons porté à cinq.
Seulement au moment où nous avons porté le nombre à cinq,
ils avaient déjà amené à Ottawa une
résolution pour l'augmenter de trois. Alors, j'ai communiqué avec
le ministre de la Justice fédéral et le ministre de la Justice
dit qu'il n'y a aucune objection à ce que nous indiquions cinq, quitte
à eux à modifier leur loi au cours de la présente session
ou de la prochaine session.
Alors, c'est cinq additionnels que nous établissons dans la loi,
sous réserve, évidemment de la modification par le gouvernement
fédéral.
M. BERTRAND (Missisquoi): Je vois qu'il y aura des districts, dans
l'article 2, il y aura des nouveaux districts de créés.
M. HAMEL (St-Maurice): Oui.
M. BERTRAND (Missisquoi): Est-ce que le ministre pourrait nous dire,
à peu près, où iront ces juges-là, dans quel
district, de Montréal et de Québec?
M. HAMEL (St-Maurice): Les trois juges prévus...
M. BERTRAND (Missisquoi): Oui.
M. HAMEL (St-Maurice): ... c'est deux pour Montréal, et un pour
la région de l'Abitibi.
M. BEDARD (président du Comité plénier): Article 1
adopté? Adopté. Article 2.
M. HAMEL (St-Maurice): L'article 2 apour objet d'ajouter deux ou trois
districts judiciaires, c'est-à-dire deux, en fait, parce que Hauterive
est déjà établi, mais il n'apparaissait pas dans la
modification. Alors, Drummond, St-Maurice et Hauterive.
M. LE PRESIDENT: Article 2.
M. BERTRAND (Missisquoi): Je pense bien que le procureur
général doit être heureux de la création de son
district judiciaire dans St-Maurice.
M. HAMEL (St-Maurice): Surtout les justiciables!
M. BERTRAND (Missisquoi): Les justiciables! Mais je pense bien que le
procureur général lui-même va se dire, enfin, un peu comme
chez nous, quand les gens de Granby ont obtenu que la Cour supérieure
puisse siéger à Granby. Ils ont été grandement
heureux et je pense qu'il est excellent, comme mesure, de décentraliser
autant que possible la justice en créant de nouveaux districts
judiciaires. Je note, par exemple, que l'on crée le nouveau district de
Drummond. Ce sont des régions qui se développent et il est bon
que les justiciables de ces régions soient plus rapprochés de
ceux-là qui sont appelés à rendre justice. Pas besoin de
dire que, dans ce domaine de la décentralisation judiciaire, tant de la
Cour supérieure que de la Cour de magistrat, le procureur
général trouvera toujours de ce côté-ci, un
appui.
M. HAMEL (St-Maurice): Nous croyons que la décentralisation
judiciaire peut contribuer à accélérer les
procédures. C'est la raison.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article3.
M. BERTRAND (Missisquoi): Non, c'est une résolution.
M. LE PRESIDENT: Excusez-moi. Article 4. M. HAMEL: Article 4...
M. MAJEAU: Dans l'article 3, M. le Président...
M. LE PRESIDENT: Non, 3, c'est une résolution. On y reviendra.
Article 4.
M. HAMEL (St-Maurice): L'article 4 est quelque chose de nouveau et de
très important. Nous ajoutons ceci: « Le juge en chef ou le juge
en chef adjoint peut ordonner qu'un litige en délibéré
depuis plus de six mois soit remis au rôle pour être terminé
par un autre juge. » En fait, ce qui nous avait été
demandé par les commissaires, c'était de modifier le Code de
procédure civile. Mais comme nous ne voulons pas modifier le Code de
procédure civile, et comme les deux juges en chef considèrent
qu'une disposition semblable est extrêmement urgente, nous avons
décidé de l'inclure dans la Loi des tribunaux judiciaires et
c'est pour ça qu'elle se trouve ici. Probablement que lorsque le Code de
procédure civile viendra pour étude, il y aura une disposition
à peu près semblable dans le Code de procédure civile
même.
M. MAJEAU: Est-ce que vous avez reçu des résolutions du
Barreau de la province et du Barreau rural en rapport avec l'amendement?
M. HAMEL (St-Maurice): Je ne peux pas dire, de mémoire, si nous
avons reçu des résolutions. Mais je crois, j'ai l'impression
qu'on m'a fait des représentations, peut-être verbales, à
ce sujet-là, parce qu'il y a des délibérés,
à un moment donné, ça dure un an, deux ans, trois ans.
Alors, c'est pour éviter ça. Dans le Code de procédure
civile, nous prévoyons une disposition un peu différente. Dans le
Code de procédure civile, nous prévoyons que le protonotaire sera
obligé de faire rapport au juge en chef du district de Québec ou
de Montréal de toutes les causes qui sont en
délibéré depuis plus de six mois.
M. LE PRESIDENT: Article 4 adopté. Article 5?
M. HAMEL (St-Maurice): L'article 5. Dans l'article 5, nous faisons
disparaître une disposition qui prévoyait la concurrence sur
certains districts, particulièrement pour le district de
Trois-Rivières.
M. MAJEAU: Quels avantages particuliers voyez-vous à
l'amendement, monsieur le ministre?
M. HAMEL (St-Maurice): Bien, l'avantage particulier, nous essayons et,
au cours de ces modifications, nous avons essayé de limiter, le plus
possible, la juridiction concurrente parce que, chaque fois qu'il y a une
juridiction concurrente, en fait on se trouve à donner au demandeur une
préférence parce que c'est lui qui choisit l'endroit. Alors,
ç'a été utile et ç'a peut-être
été nécessaire à certains moments mais quand
ça ne s'avère pas absolument nécessaire, nous en gardons
des juridictions concurrentes, mais nous essayons d'en faire disparaître
le plus possible quand ce n'est pas de nature à porter préjudice
aux contribuables. Maintenant, il y a toujours une disposition qui dit que les
causes pendantes actuellement dans ces districts-là peuvent, ou bien, de
consentement,
être transportées à un autre district, ou bien, sur
requête, avec la permission du juge.
M. MAJEAU: Je reviens à un articleprécé-dent:
qu'est-ce qui arrive dans les causes pendantes devant les tribunaux à la
suite de la création des trois nouveaux districts judiciaires?
M. HAMEL (St-Maurice): Il y a une disposition que nous allons voir, un
instant, là,...
M. LE PRESIDENT: Article 15.
M. HAMEL (St-Maurice): Je réfère à l'article 15,
là: « Les causes pendantes lors de l'entrée en vigueur de
l'article 5, 6 ou 7 de la présente loi sont entendues et jugées
comme si elle n'avait pas été adoptée et les jugements
rendus dans ces causes ou avant cette entrée en vigueur sont
exécutés de la même manière. » Maintenant dans
la loi de la division territoriale, où nous créons des districts
judiciaires, là, nous donnons la possibilité de
transférer... Prenons un exemple: supposons que deux parties de
Sept-Iles ont pris une action à Rimouski, elles avaient le droit de le
faire. Alors, là on dit: actuellement le dossier est à Rimouski,
mais les gens pourront, s'ils le veulent, si les parties s'entendent pour le
transporter à Baie-Comeau, elles l'apporteront à Baie-Comeau.
M. MAJEAU: De consentement.
M. HAMEL (St-Maurice): S'il n'y a pas de consentement, alors l'une des
parties pourra faire une requête au juge en expliquant, par exemple, que
tous les témoins sont dans la région de Sept-Iles ou de Baie
Comeau et que ce serait dans l'intérêt de la justice de
transporter le dossier. Alors, pour la période d'ajustement, nous
donnons cette possibilité-là.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 6?
M. HAMEL (St-Maurice): Article 6. Alors 135 à 141, ce sont
précisément certaines juridictions concurrentes qui sont abolies.
Dans le district, par exemple, de Hauterive, il y avait juridiction
concurrente, je crois, avec la Malbaie, avec Rimouski, avec
Rivière-du-Loup, avec Kamouraska, ils pouvaient aller quasiment
n'importe où. Alors ce sont ces juridictions-là concurrentes qui
sont abolies.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 7? M. HAMEL (St-Maurice):
L'article 7. Alors, c'est encore la disparition, cela, d'une juridiction
concurrente en ce qui concerne le district d'Abitibi.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 8?
M. HAMEL (St-Maurice): Oh, un instant M. le Président. A
l'article 3 on apassé...On n'est pas venu à l'article 3.
M. LE PRESIDENT: Non, c'est une résolution.
M. HAMEL (St-Maurice): Ah bon, très bien! M. LE PRESIDENT:
Article 8.
M. HAMEL (St-Maurice): Article 8. Il y avait actuellement, là,
juridiction concurrente pour le district de Hauterive avec Saguenay
jusqu'à Forestville. Seulement, le district est séparé par
la rivière Saguenay et puis nous ne croyons pas que ce soit
justifié de maintenir encore une juridiction concurrente, surtout que
c'est plus facile d'aller à Baie-Comeau.
M. LOUBIER: Et dans toutes ces disparitions de juridiction concurrente,
la même option peut toujours s'exercer dans tous les cas.
M. HAMEL (St-Maurice): La même option est toujours faite.
M. LOUBIER: Mais tout à l'heure quand on pouvait,... dans la
juridiction concurrente pour six ou sept districts judiciaires. Dans tous les
cas l'option existe.
M. HAMEL (St-Maurice) C'est ça, du consentement des parties ou
avec l'autorisation d'une requête ou annotée.
M. LE PRESIDENT: Article 9, 10, 11, 12, alors l'article 13, un nouvel
article. Article 13?
M. HAMEL (St-Maurice): L'article 13, c'est l'amendement ça.
M. LE PRESIDENT: Un nouvel article.
M. HAMEL (St-Maurice): Voici, c'est que nous prévoyons dans
l'article 3, que nous divisions le district de Trois-Rivières. Je dois
dire d'abord que le district de Trois-Rivières est le troisième
district judiciaire de la province au point de vue nombre, et avec la division
du district judiciaire de Trois-Rivières, nous aurons deux districts
judiciaires qui se-
ront encore les troisième ou quatrième districts, en
importance, à l'exception de Québec et Montréal. Il y aura
seulement, je pense, le district de St-Jérôme, peut-être de
Chicoutimi, Hull et peut-être, c'est dans l'équivalent à
peu près du district de la Beauce qui est un gros district judiciaire.
Alors, actuellement la loi prévoit qu'à Trois-Rivières il
y a trois juges résidents, étant donné que nous divisons
le district, nous disons, au lieu d'avoir trois juges résidents à
Trois-Rivières, nous en aurons deux seulement, mais ça ne prendra
effet que lorsqu'une vacance se produira chez les juges actuels, pour ne pas
briser, si vous voulez, les droits acquis ou ne pas...
M. LOUBIER: Et le troisième juge résident sera à
Shawinigan?
M. HAMEL (St-Maurice): A Shawinigan ou dans les environs.
M. LE PRESIDENT: Alors article 13 adopté. L'article 13, tel
qu'imprimé, qui devient 14.
M. HAMEL (St-Maurice): Alors, c'est une chose de concordance
ça.
M. LE PRESIDENT: Adopté. «
M. MAILLOUX: M. le Président, c'est possible évidemment
que ça ne se rapporte pas à cet article-là, mais ce que je
voudrais savoir, vu mon absence pour le souper on prétend
évidemment fusionner une partie du district judiciaire de Saguenay,
à Haute-Rive. J'ai eu des représentations qui m'ont
été faites de nouveau cet après-midi de la part des
avocats du Barreau de la Malbaie, à l'effet qu'ils avaient eu des
pétitions de signées de toutes les paroisses de la côte,
soit de Sept-Iles à Tadoussac, demandant à rester
rattachés au district judiciaire dont le siège est à La
Malbaie, et je vois malheureusement que ces paroisses-là, malgré
le désir de la population, semblent être attachées au
district que vous créez là-bas. Est-ce que je pourrais avoir des
renseignements du procureur général sur ce
changement-là?
M. HAMEL (St-Maurice): Je prends note et le député de
Charlevoix m'a déjà parlé. Nous avons
réexaminé tout ce problème-là, et nous en avons
discuté avec des officiers et avec des personnes qui sont
intéressées, et après avoir examiné tout le
problème, nous n'ignorons pas qu'à certains moments, nous
blessons des intérêts particuliers, nous n'ignorons pas ça.
Sei- lement, après avoir examiné tout le problème, nous en
sommes venus à la conclusion que l'administration de la justice serait
mieux servie en procédant de cette façon-là, mais nous
avons examiné, et je dois admettre, que le député de
Charlevoix m'a déjà parlé, et j'ai rencontré les
avocats de La Malbaie, j'ai rencontré les avocats de Baie-Comeau. Nous
les avons tous rencontrés, leur point de vue était
différent évidemment, et nous avons essayé de trouver
cette formule qui nous semble dans l'intérêt de l'administration
de la justice.
M. LE PRESIDENT: Alors, nous étions à l'article 14 qui
devient 15, adopté. Et 15 qui devient 16, on en a discuté tout
à l'heure, adopté. Article 16 qui devient 17.
M. MAJEAU: Correct.
M. LE PRESIDENT: Adopté, et 17 qui devient 18.
M. MAJEAU: Correct.
M. LE PRESIDENT: Adopté.
M. HAMEL (St-Maurice): Alors, on comprendra que les dates
d'entrée en vigueur, c'est pour entrer en vigueur seulement quand les
différents services seront organisés.
M. MAJEAU: C'est ça.
M. BEDARD (président du Comité plénier): M. le
Président, j'ai l'honneur de faire rapport que le comité n'a pas
fini de délibérer et qu'il demande la permission de siéger
à nouveau.
M. HYDE (président): Quand siégera-t-il? A la même
séance. Même séance.
M. HAMEL (St-Maurice): Son Excellence le lieutenant-gouverneur mis au
courant de la résolution concernant le Bill 64, en recommande la prise
en considération par la Chambre.
M. LE PRESIDENT: M. Hamel propose que je quitte maintenant le fauteuil
et que la Chambre se forme en Comité plénier pour étudier
la résolution relative au Bill No 64. Cette motion sera-t-elle
adoptée? Adoptée.
M. HAMEL (St-Maurice): Dans l'article 3, c'est là où nous
avons un amendement, en remplaçant dans la troisième ligne, du
paragraphe 4, le mot trois par le mot deux, alors c'est le district de
Trois-Rivières qui a actuellement
trois juges résidents et après la division, nous croyons
que deux juges résidents ce sera satisfaisant, à cause de la
création du district judiciaire de St-Maurice.
Mais nous avons une provision, comme je l'ai dit tantôt, de
façon à ce que les juges actuellement en fonction ne soient pas
affectés par cette disposition-là.
M. LE PRESIDENT: Résolution No 1 adoptée,
résolution No 2?
M. HAMEL (St-Maurice): Alors, la résolution No 2, un instant,
alors j'ai ici l'amendement. Le paragraphe c) devient le paragraphe d) à
cause de l'ajouté précédent?
M. LE PRESIDENT: Non, ça c'est la résolution No 1.
M. HAMEL (St-Maurice): C'est la résolution No 1?
M. LE PRESIDENT: Oui. L'article 3, résolution No 1.
M. HAMEL (St-Maurice): Alors c'est ici, sur la résolution No 1,
là, l'article 3 est modifié en remplaçant la
troisième ligne du paragraphe 4, le mot trois par le mot deux, c'est ce
qui explique pour Trois-Rivières et ensuite le paragraphe c) actuel
devient le paragraphe d) et on ajoute le paragraphe e) qui dit:
Dixièmement: pour le district de St-Maurice, avec résidence
à Shawinigan ou dans le voisinage immédiat, un juge. Alors
ça veut dire ça Shawinigan, Grand-Mère, Shawinigan-Sud,
St-Boniface, Ste-Flore, tout le district, les choses contiguës.
La résolution No 2: vingt par le mot trente, ça ça
concerne une augmentation des juges du Bien-Etre social.
M. BERTRAND (Missisquoi): L'augmentation est de dix si je comprends
bien.
M. HAMEL (St-Maurice): L'augmentation est de dix.
UNE VOIX: Dans quel district?
M. HAMEL (St-Maurice): Voici, nous avons je dois dire, et
honnêtement, nous avons des demandes dans presque tous les districts
judiciaires. Le juge en chef de Montréal nous en demande cinq pour le
district de Montréal. Nous examinons la possibilité d'en nommer
un dans le district de Valleyfield, je dis que nous examinons la
possibilité, je ne peux pas dire que c'est définitivement
décidé ça, parce qu'on nous en demande dans le Bas du
fleuve, il n'y en a pas un seul dans le Bas du fleuve, on nous en demande un
additionnel pour Québec. On nous en demande un additionnel pour
Chicoutimi, on en demande un pour dans le Lac St-Jean.
M. MAJEAU: Est-ce qu'on en demande un pour Joliette?
M. HAMEL (St-Maurice): Pour Joliette, ce n'est pas à ma
souvenance.
M. MAJEAU: Je fais la demande, M. le Président.
M. HAMEL (St-Maurice): Alors, nous allons la prendre en sérieuse
considération.
M. LESAGE; Vous n'avez pas d'intérêt personnel, je suis
sûr.
M. BERTRAND (Missisquoi): Je ne rappellerai pas au procureur
général la demande...
M. HAMEL (St-Maurice): Granby nous en a demandé,
c'est-à-dire le district de Bedford.
M. BERTRAND (Missisquoi): Que je suis donc content qu'il y pense.
M. HAMEL (St-Maurice): Oh oui.
M. BERTRAND (Missisquoi): Je ne voudrais pas porter atteinte aux droits
de Granby d'en demander, j'appuie sur le district de Bedford.
M. HAMEL (St-Maurice): Je comprends. M. BERTRAND (Missisquoi): De ce
district.
M. LOUBIER: Mais est-ce que le procureur général va au
moins en distribuer dans tous les coins de la province, il parlait tout
à l'heure par exemple de la Gaspésie, le Lac St-Jean, aux
extrêmes...
M. LESAGE: Il y en a cinq pour Montréal, puis un pour
Québec, c'est essentiel.
M. LOUBIER: Et par après la distribution va se faire, pour
accommoder les régions les plus lointaines, je présume du
moins.
UNE VOIX: Une copie additionnelle?
M. LESAGE: Une pour vous, M. le Président.
UNE VOIX: Le président doit l'avoir.
M. LE PRESIDENT: Alors, la résolution No 3.
M. HAMEL (St-Maurice): La résolution No 3. C'est pour
établir à la Cour du Bien-Etre social, la Cour du Bien-Etre
social prend de plus en plus d'importance et de plus en plus d'extension, alors
nous établissons pour la Cour du Bien-Etre social le même
système que nous avons pour la Cour de Magistrat ou la Cour des Sessions
de la Paix, un juge en chef à Québec ou à Montréal
et un juge en chef-adjoint à Québec ou à
Montréal.
M. LE PRESIDENT: Résolution No 3 adoptée?
Résolution No 4.
M. HAMEL (St-Maurice): Cela, c'est je crois le problème de la
pension, un instant là, l'article 266. (Voulez-vous demander M.
Lapointe).
UNE VOIX: M. Lapointe?
M. LESAGE: Oui, M. Jacques Lapointe.
M. HAMEL (St-Maurice): Il y a une difficulté qui se pose quant
à la pension des juges. Les juges en chef actuellement, d'après
la loi telle qu'elle a été passée, voient leur pension
basée sur leur salaire de juge, et non sur leur salaire de juge en chef,
or, nous voulons corriger la situation en établissant que ce sera sur le
salaire de juge en chef et non pas sur le salaire de juge.
M. LE PRESIDENT: Adoptée? Résolution No 5.
M. HAMEL (St-Maurice): La résolution numéro 5 c'est pour
augmenter de six le nombre des juges de district.
UNE VOIX: Dans quels districts?
M. HAMEL (St-Maurice): Evidemment, on m'en a demandé dix, mais
nous avons pensé que, pour le moment, c'était suffisant. Il en
faut deux additionnels à la Commission des relations ouvrières.
Il en faut un à la Régie des transports. Ce qui fait trois. Le
juge en chef de Montréal nous en demandait quatre ou cinq, je pense. Et
il en restera trois pour le district judiciaire de Montréal.
M. BERTRAND (Missisquoi): Je ne veux pas discuter de tout le
problème. Est-ce que c'est bon cette coutume qui s'établit de
plus en plus de dire: « On nomme un tel juge de district, et il s'en va
dans une commission gouvernementale. » Je parle en principe, là.
On le nomme juge de district et, à ce moment-là, on lui dit:
« Vous allez occuper un poste dans une commission. » Je sais que
c'est établi depuis assez longtemps, mais je me pose la question; si on
nomme quelqu'un juge de district, il y a dans notre loi des districts
d'établis dans la province de Québec où les juges doivent
exercer leur autorité. Or, dans les cas présents, le procureur
général, comme ça s'est dé jàfait avant lui,
dit: « Nous allons nommer un tel juge de district, et il s'en ira
siéger à la Commission des relations ouvrières.
»
M. LESAGE: Bien, c'est parce que ces commissions: la Régie des
transports, la Régie de l'électricité, la Commission des
relations ouvrières, remplissent des fonctions quasi-judiciaires.
M. BERTRAND (Missisquoi): Admis.
M. LESAGE: Y a-t-il une solution qui serait meilleure,
peut-être?
M. BELLEMARE: Les tribunaux du travail?
M. LESAGE: Bien oui, mais je ne peux pas tout faire à la fois, et
le procureur général non plus.
M. HAMEL (St-Maurice): Les tribunaux du travail, moi, je me souviens
que, l'an dernier, le Conseil supérieur du travail nous avait
demandé de ne pas étudier le problème des tribunaux du
travail à ce moment-là.
M. LESAGE: Oui.
M. HAMEL (St-Maurice): Alors c'est pour ça qu'en attendant...
Evidemment, si, à un moment donné, le ministère du Travail
décide de créer les tribunaux du travail, il y aura
peut-être lieu à ce moment-là d'examiner la situation de
tous ces juges que nous avons dans les...
M. BERTRAND (Missisquoi): Non, mais je pose la question, je soumets le
problème. Le problème n'est pas nouveau, il existe depuis
longtemps. Mais, je demande au procureur général et au premier
ministre d'examiner s'il n'y aurait pas moyen de trouver une solution.
M. LESAGE: J'en suis à l'étudier.
M. MAJEAU: M. le Président, puisqu'on parle de la Cour de
magistrat, est-ce que le premier ministre pourrait nous dire ce qu'il arrive de
l'augmentation de la juridiction à $500? Est-ce que le jugement est
rendu?
M. LESAGE: Nous attendons le jugement de la Cour d'appel.
M. MAJEAU: Est-ce qu'il y a longtemps que la cause a été
soumise?
M. HAMEL (St-Maurice): Je crois que c'est au mois de février que
la cause a été plaidée en appel, je crois que c'est au
mois de février.
M. LESAGE: J'en ai parlé à l'administrateur de la province
lors de la dernière sanction de bills et il m'a dit qu'il avait, pour sa
part, 17 délibérés à étudier durant
l'été, dont celui-là.
M. LE PRESIDENT: Adoptée? Adoptée.
M. BEDARD (président du comité plénier): M. le
Président, j'ai l'honneur de faire rapport que le comité a
adopté des résolutions relatives au bill numéro 64 ainsi
que le bill numéro 64, avec des amendements.
M. HYDE (président): M. Hamel propose que les résolutions
soient maintenant lues et agréées Cette motion sera-t-elle
adoptée?
M. JOHNSON: Adoptée.
M. LE PRESIDENT: Adoptée. La Chambre se forme de nouveau en
comité plénier.
M. LESAGE: Non, non, il a été adopté.
M. HAMEL (St-Maurice): Il y a eu des amendements.
M. LE PRESIDENT: M. Hamel propose que les amendements soient maintenant
lus et agrées: Cette motion sera-t-elle adoptée? Adoptée.
Troisième lecture?
M. JOHNSON: Non, voici...
M. LESAGE: Bon, ça n'a pas d'importance parce que l'on peut
attendre à demain matin.
M. JOHNSON: Voici, on peut peut-être régler ça tout
de suite. En troisième lecture, M. le Président, c'est parce que
je n'y étais pas au moment de l'étude article par article, je
voudrais critiquer certaines dispositions du bill ou au moins obtenir certains
renseignements, parce que j'ai promis...
M. LESAGE: Alors, demain matin...
M. JOHNSON: A moins de régler le problème tout de
suite.
M. LESAGE: Oui.
M. JOHNSON: Quant à moi, je suis prêt.
M. LESAGE: Bon, allez-y!
M. JOHNSON: Parce que j'ai promis à des gens de la
Côte-Nord de faire ces représentations. Vous connaissez la notion
du rôle de l'Opposition, c'est d'être la voix de ceux qui ne
peuvent pas parler en Chambre, de ceux qui n'ont pas l'occasion de se faire
entendre en Chambre.
Le ministre a reçu une délégation de maires et
d'avocats relativement à certaines dispositions de ce bill. Je suis
informé que les maires de Tadoussac jusqu'à Forestville ont
signé, tous signé, une requête pour que soit maintenue la
juridiction concurrente du district de Saguenay, avec palais de justice
à la Malbaie, et du district de Hauterive, avec palais de justice
à Baie-Comeau, sur ce territoire qui s'étend de l'embouchure de
la rivière Saguenay à Tadoussac jusqu'à Forestville
inclusivement.
Ce territoire comprend, comme on le sait, les municipalités de
Tadoussac, Sacré-Coeur, les Bergeronnes, les Escoumins, Sault-au-Mouton,
St-Paul du Nord, Portneuf et Forestville, groupant une population de 7,000 ou
8,000 âmes, je donne des chiffres approximatifs.
Or, cette population, par la voix des maires de leur municipalité
respective a demandé que ce service soit maintenu. On comprend le
problème. A Baie-Comeau, quand un accident survient, un accident
d'automobile, par exemple, survient dans Tadoussac, Sacré-Coeur ou l'une
de ces municipalités, le demandeur a le droit de prendre action soit
à Baie-Comeau soit à la Malbaie.
Je pense que le procureur général devrait se placer dans
l'optique suivante: il faut rendre service aux justiciables, il faut que la
justice soit à la portée du justiciable. Evidemment, je vois ici
le député de Charlevoix qui pourra certainement, lui, me corriger
si je fais des erreurs en géographie, et qui peut-être jugera
à propos d'appuyer cette requête que j'ai promis de transmettre au
procureur général en Chambre.
Il faut donc songer au meilleur moyen de
rendre la justice post-abordable et facile aux justiciables. Or, on sait
que de Baie-Comeau à Tadoussac, il y a 200 milles, alors que de
Tadoussac à la Malbaie il n'y a que 45 milles. Donc un
justiciable...
M. HAMEL (St-Maurice): Il y a un obstacle: la rivière
Saguenay.
M. JOHNSON: Oui, oui, il y a le traversier, ... donc un justiciable de
Tadoussac, à l'heure où je vous parle, peut choisir soit
Baie-Comeau, soit la Malbaie comme endroit d'inscription de son action. De
Forestville à Baie-Comeau il y a 75 milles, alors que de Forestville
à la Malbaie il y a 105 milles. Je comprends que pour les gens de
Forestville, Baie-Comeau c'est plus près que la Malbaie, mais quand il y
a juridiction concurrente, c'est le justiciable, c'est le citoyen qui veut se
prévaloir des tribunaux qui décidera s'il aime mieux aller
à Baie-Comeau qu'à la Malbaie ou vice versa, et on comprendra que
pour les points intermédiaires les distances doivent être
ajustées en conséquence.
Donc, on met fin à un privilège des justiciables
résidant dans le territoire qui s'étend de Tadoussac à
Forestville inclusivement, on leur enlève, dis-je, un privilège
qu'ils avaient, qu'ils ont à l'heure où je vous parle. Pourquoi
insister pour que tous les justiciables soient obligés de se rendre
à Baie-Comeau? Pourquoi ne pas leur laisser cette option? M. le
Président, qu'une cause soit jugée à Baie-Comeau ou
à la Malbaie, quelle différence cela peut-il nous faire à
nous? Cela peut faire une grande différence cependant pour le
justiciable, et ça peut faire une grande différence pour les
avocats. Mettons en partant que les avocats de la Malbaie qui plaident pour
garder la juridiction concurrente ont exactement les mêmes
intérêts que les avocats de Haute-Rive et de Baie-Comeau et des
alentours, qui ont fait pression pour que le territoire comprenne
nécessairement et en exclusivité cette partie de la
Côte-Nord, soit de Tadoussac à Forestville inclusivement. Mais
nous ne devons pas nous inquiéter d'abord du sort des avocats qui sont
là. Nous devons nous inquiéter du bien-être des
contribuables, et je soutiens que le procureur général aurait
dû se rendre aux représentations de cette délégation
qui l'a rencontré, qui lui a remis une requête dûment
signée par les autorités de chacune des municipalités de
tout le territoire. Je comprends aussi que le secrétaire du conseil de
comté aurait envoyé une lettre au nom du conseil de comté
à M. le Procureur général.
Le procureur général aurait répondu: « Eh
bien! vous avez la rivière Saguenay qui est un obstacle naturel, qui est
une borne normale ». Je comprends ça. Mais il y a un bon
système de traversiers et, encore une fois, je le répète,
la situation actuelle permet au justiciable de Tadoussac, de
Sacré-Coeur, des Bergeronnes, les Escoumins, Sault-au-Mouton,
St-Paul-du-Nord, Portneuf, et Forestville de choisir l'un ou l'autre des
endroits , c'est son affaire.
Alors pourquoi lui enlever ce privilège? Pourquoi tenir
nécessairement à ce que toutes les causes de ce territoire
aillent exclusivement à Hauterive? Encore une fois, le procureur
général prête flanc à des critiques très
graves. Il prête flanc aux critiques suivantes: d'avoir
cédé aux pressions des avocats libéraux de Baie-Comeau. Et
c'est mauvais. Aux avocats libéraux, secondés par les avocats qui
ne sont pas libéraux et qui pratiquent à Baie-Comeau.
M. le Président, moi j'ai des amis aux deux endroits: des
libéraux et des gens de l'Union nationale et je leur ai dit: « Je
ne me placerai pas au point de vue des intérêts de qui que ce
soit. » Dans le Barreau, moi je me place au point de vue de
l'intérêt bien compris des justiciables et c'est le seul point de
vue valable que nous devons envisager.
A l'appui de leurs critiques, ces gens-là me disent, et le
procureur général pourra le nier, qu'à l'ouverture
du palais de justice à Baie-Comeau, alors que les invitations
étaient la responsabilité du procureur général pour
cette manifestation qui intéresse tout le Barreau, on a
évidemment invité tous les avocats du district de Hauterive, mais
on a invité seulement les avocats libéraux de Rimouski, seulement
les avocats libéraux de la Malbaie. Il n'y a pas un avocat Union
nationale de La Malbaie, ni de Rimouski qui a reçu l'invitation. Il y a
des avocats libéraux qui n'ont pas aimé ça.
Je ne sais pas qui est responsable d'une telle situation, mais ça
donne une mauvaise teinte à toute l'affaire. Cela place le procureur
général dans l'optique de la « partisanerie. » Et le
procureur général, on sait ce que j'en pense de cette fonction,
devrait être un homme au-dessus de la politique, à tel point que
j'ai prôné dans cette Chambre qu'il devrait être un homme
qui n'est pas soumis à l'élection, mais nommé en
permanence.
Le procureur général me corrigera si mes renseignements ne
sont pas exacts quant à cette invitation, mais je doute fort qu'il
puisse me donner une raison valable pour priver les justiciables de Tadoussac
et des autres endroits à l'est, jusqu'à Forestville
inclusivement, d'un privilège, d'une facilité que leur accorde la
loi actuelle.
M. HAMEL (St-Maurice): M. le Président, j'ai examiné
très sérieusement le point souligné par le chef de
l'Opposition. J'ai reçu des délégations et de La Malbaie
et de Baie-Comeau. J'ai eu une hésitation sérieuse. Ce qui m'a
fait décider, il y a deux raisons. La première raison, c'est que
tout le monde semble d'accord pour que le bureau d'enregistrement du
comté de Saguenay soit transporté à Baie-Comeau. Le
régistrateur actuel, je pense, est prêt à aller à
Baie-Comeau, et le bureau d'enregistrement doit être
transféré à Baie-Comeau.
M. JOHNSON: Où est-il actuellement?
M. HAMEL (St-Maurice): Il est à Tadoussac, je pense. Maintenant,
la deuxième raison est celle-ci. Comme j'ai eu l'occasion de le dire
tantôt, nous essayons, dans la mesure du possible, d'éliminer les
juridictions concurrentes, parce que nous considérons qu'elles
constituent une situation priviligiée pour le demandeur. Il y a une
situation privilégiée pour le demandeur dans la juridiction
concurrente.
M. JOHNSON: Oui, mais est-ce que ce n'est pas l'optique dans laquelle on
doit se placer? C'est celui qui recherche justice contre un autre qui doit
avoir la préférence si, toutefois, on doit en donner une.
M. HAMEL (St-Maurice): Bien voici, M. le Président, moi, je me
souviens parfaitement de la théorie de l'ancien juge Marchand, le juge
Aimé Marchand, de la Cour d'appel, qui disait que celui qui poursuit
doit faire sa preuve et le doute doit aller au défendeur quand la
preuve... Alors pourquoi est-ce qu'on imposerait au défendeur une
situation inférieure dans les procédures?
Evidemment, c'est une question que l'onpeut discuter longuement.
Après avoir tout pesé et l'une des raisons, je le
répète, qui m'a fait décider, ç'a été
le transfert du bureau d'enregistrement de Tadoussac à Baie-Comeau qui
me semble être admis par tout le monde dans ce secteur-là. Alors,
si le bureau d'enregistrement est à Baie-Comeau, nous avons pensé
qu'il était raisonnable de mettre la juridiction à Baie-Comeau
pour cette partie du territoire.
M. LE PRESIDENT: La motion de troisième lecture sera-t-elle
adoptée?
M. MAILLOUX: M. le Président, je voudrais qu'il me soit possible
d'ajouter quelques mots aux observations que j'ai faites tantôt en
Chambre, avant les observations du chef de l'Opposition. Malheureusement, je
devrai enregistrer ma dissidence sur ce bill pour les raisons suivantes.
Dans le comté de Charlevoix, évidemment, le district
judiciaire de la Malbaie, on a mentionné tantôt que les paroisses
qui sont de Tadoussac à Forestville, inclusivement, avaient signé
une pétition unanime demandant de rester rattachées à
cette division judiciaire. Et, je pense que même quand on fait
l'observation que malgré le handicap de la rivière Saguenay, ceci
ne peut être mis en cause, parce que tous les gens qui ont à se
produire à une Cour de justice doivent évidemment encourir des
frais assez onéreux de déplacement, et les gens de cette partie
du comté de Saguenay font normalement leurs affaires vers la
région de Malbaie et de Québec, et c'est pour cette raison
précise qu'ils préféreraient rester rattachés,
évidemment à notre division judiciaire, plutôt qu'à
celle de Hauterive.
Mais, je ne connais pas évidemment, les problèmes de
juridiction et les problèmes qui entrent en ligne de compte dans
l'administration de la justice. Malheureusement, comme la pétition
signée par ces gens a été unanime à vouloir rester
rattachés à la Malbaie et comme évidemment je suis
mandataire de Charlevoix, je me porte dissident, évidemment, de cette
mesure pour les raisons que j'ai énoncées tantôt,
précédemment, et celles que je viens de dire.
M. HAMEL (St-Maurice): Je comprends parfaitement l'attitude du
député de Charlevoix.
M. LE PRESIDENT: La motion de troisième lecture sera-t-elle
adoptée?
M. JOHNSON: Sur division.
M. LE PRESIDENT: Adoptée. Sur division. Deuxième lecture,
Bill 65.
M. HAMEL (St-Maurice): Deuxième lecture.
M. LE PRESIDENT: M. Hamel propose la deuxième lecture du bill
numéro 65: « Loi modifiant la Loi de la division territoriale.
» La motion sera-t-elle adoptée?
M. JOHNSON: Est-ce qu'on pourrait, sur division, aller en
Comité?
M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture, sur division?
M. JOHNSON: Très bien.
M. LE PRESIDENT: Adoptée, sur division. M. Hamel propose que je
quitte maintenant le fauteuil pour que la Chambre se forme en comité
plénier pour étudier le bill 65. Cette motion sera-t-elle
adoptée? Adoptée.
M. HAMEL (St-Maurice): Le bill 65.
M. BEDARD (président du comité plénier): Bill 65,
article 1.
M. BELLEMARE: M. le Président, je n'ai pas besoin de vous dire
que dès le commencement de cette étude, je voudrais bien faire
valoir au ministre les arguments les plus tenaces, ceux que me dictent, ceux du
bon sens et de la logique, concernant le comté de Champlain, le district
électoral de Champlain, qu'on veut rattacher au district Judiciaire de
Shawinigan. A l'article 5,...
M. HAMEL (St-Maurice): Si on commençait par l'article 1, M. le
Président?
M. LE PRESIDENT: Alors, on en discutera à l'article 5.
M. BELLEMARE: Mais est-ce que là, on ne touche pas, par ces
amendements là, le chapitre 8 Georges VI, j'ai cherché Champlain
là, et j'ai trouvé Chambly...
M. HAMEL (St-Maurice): Quand nous arriverons à la description du
district de Trois-Rivières, le député de Champlain verra
que le comté de Champlain reste entièrement...
M. BELLEMARE: Non!
M. HAMEL (St-Maurice): ... dans le district judiciaire de
Trois-Rivières. Il y a deux choses là-dedans. La division
territoriale regarde les districts judiciaires et les bureaux d'enregistrement.
Alors là, l'article...
M. BELLEMARE: Mais on va se rendre à 5 et puis là...
M. HAMEL (St-Maurice): Mais, commençons par 1.
M. LE PRESIDENT: Article 1.
M. HAMEL (St-Maurice): L'article 1 a pour but de déterminer qu'au
lieu de 29 districts judiciaires, il y en aura 31. Et le deuxième
paragraphe 4, il y aura 82 divisions d'enregistrement au lieu de 81, tel
qu'actuellement.
M. LE PRESIDENT: Article 1, adopté.
M. BELLEMARE: Dans les nouveaux districts judiciaires il y a
Drummondville...
M. JOHNSON: Non deux... j'aurais d'abord à demander au ministre
s'il est exact qu'on a oublié 3, 4, Elizabeth II, comme
références...
M. HAMEL (St-Maurice: 3-4 Elizabeth n, c'est ici ça...
M. JOHNSON: Qui suivraient... chapitre 25... non je le vois ici, 3-4
Elisabeth II. Je demande pardon au ministre. C'est une erreur de ma part.
Alors, on veut quoi? Installer deux nouveaux districts judiciaires?
M. HAMEL (St-Maurice): Deux nouveaux districts judiciaires, un pour
Drummond, et un pour St-Maurice.
M. JOHNSON: Et, en vertu de quelle planification là, en est on
arrivé à la conclusion qu'il en fallait un dans Drummond, qui se
trouve dans le comté d'un ministre...
M. HAMEL (St-Maurice): Bien.
M. JOHNSON: ... et qu'il en fallait un à Shawinigan qui se trouve
dans le comté du procureur général. Cela n'aurait pas pu
s'adonner que ce soit dans d'autres comtés ou d'autres endroits?
Pourquoi c'est plus pressé là qu'ailleurs. Je suis certain que le
gouvernement, qui fait évidemment toutes ses révérences
à la planification, a dû étudier sérieusement tout
le problème. Et cela arrive juste, là, ça tombe dans
Drummond et dans Shawinigan.
M. HAMEL (St-Maurice): Alors M. le Président je dois dire d'abord
en ce qui concerne le district judiciaire de St-Maurice, que nous
détachons du district judiciaire de Trois-Rivières il arrive
ceci; actuellement le district judiciaire de Trois-Rivières est le plus
gros district judiciaire de la province après Montréal et
Québec. J'ai ici dans mon dossier la population des différents
districts judiciaires de la province. Nous avons par exemple l'Abitibi 103,000
de population, Arthabaska 102,000 Beauce 128,000 je donne les chiffres ronds,
Beauharnois, 96,000 Thetford 98,000 Bonaventure 42,000 Chicoutimi 90,000
Gaspé 71,000 Hull
161,000 St-François, Joliette 101,000 Kamouraska 90,000 Labelle
30,000 Montmagny Montréal 1,000,000 évidemment
au-delà...
M. JOHNSON: Un million de quoi?
M. HAMEL (St-Maurice): De population. Montréal, 1,657,000...
M. JOHNSON: Et Trois-Rivières combien?
M. HAMEL (St-Maurice): Trois-Rivières, bien je voulais donner les
autres avant...
M. JOHNSON: Saguenay?
M. HAMEL (St-Maurice): Saguenay, un instant. Saguenay 31,000.
St-François 202,000 Trois-Rivières 243,700 alors en divisant,
ça divise à peu près en deux il reste encore dans chacun
des districts judiciaires...
M. BELLEMARE: Est-ce que le ministre peut nous dire à peu
près où là? Non?
M. HAMEL (St-Maurice): Eh bien, ça comprend, le comté de
St-Maurice et le comté de Laviolette...
M. BELLEMARE: Bon.
M. HAMEL (St-Maurice): ... vont faire partie du district judiciaire de
St-Maurice...
M. BELLEMARE: Bon.
M. HAMEL (St-Maurice): ... à l'exception de St-Michel-des-Forges
qui est dans la ville de Trois-Rivières.
M. BELLEMARE: Bon.
M. HAMEL (St-Maurice): ... à l'exception de Pointe-du-Lac et de
Yamachiche que nous laissons dans Trois-Rivières, parce que c'est leur
connection normale avec Trois-Rivières.
M. BELLEMARE: Vous ne touchez pas au district électoral de
Champlain?
M. HAMEL (St-Maurice): Ah non. M. BELLEMARE: Pas du tout. M. HAMEL
(St-Maurice): Ah non.
M. BELLEMARE: Ce n'est pas la question qu'il n'en veut pas c'est que, si
on veut, on ne veut pas non plus.
M. HAMEL (St-Maurice): Nous prenons aussi une partie du comté de
Maskinongé.
M. BELLEMARE: Ah là...
M. HAMEL (St-Maurice): Le nord du comté de Maskinongé
où c'est beaucoup plus près de venir à Shawinigan
qu'ailleurs.
M. BELLEMARE: Que le canton Doberson? M. HAMEL (St-Maurice):
Doberson.
M. BELLEMARE: Doberson. Mais, ah quand on arrivera à l'article 5,
je ne retrouve pas ça moi.
M. HAMEL (St-Maurice): Quant à Drummond, bien évidemment,
Drummondville devient de plus en plus important et avec l'évolution
là, il arrive que nos palais de justice à certains moments se
trouvent mal placés, je ne veux pas inquiéter le
député de Missisquoi inutilement, mais il arrive à
certains moments qu'au point de vue de population, la population s'est
déplacée de façon considérable, alors c'est la
raison pourquoi nous faisons un district judiciaire à Drummondville.
M. LE PRESIDENT: 1 adopté. Article 2.
M. BELLEMARE: C'est la description du district électoral de
Shawinigan.
M. HAMEL (St-Maurice): Alors, nous décrivons là, ça
c'est le district judiciaire. Alors, c'est la description du district
électoral de St-Maurice à la page l'article 78 des tribunaux
judiciaires. En fait, il y a quatre où cinq pages là de
descriptions. C'est comme je l'ai dit tantôt Trois-Rivières, le
comté de Trois-Rivières, le comté de Champlain reste dans
Trois-Rivières, plus Pointe-du-Lac, Yamachiche restent dans
Trois-Rivières, plus la partie du comté de St-Maurice qui est
incluse dans les limites de la cité de Trois-Rivières
c'est-à-dire les Forges, paroisse des Forges.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 3.
M. HAMEL (St-Maurice): L'article 3 c'est pour indiquer qu'il y a deux
districts judiciaires de plus.
M. LE PRESIDENT; Article 4.
M. HAMEL (St-Maurice): L'article 4 indique le district d'Arthabaska avec
le district de
Drummond et Nicolet, ça modifie un peu les
délimitations.
M. LE PRESIDENT: 4 adopté. Article 5, paragraphe...
M. BELLEMARE; Là, c'est l'article 5?
M. LE PRESIDENT: Article 5, paragraphe 1 (b).
M. BELLEMARE: M. le Président là, le ministre va
m'expliquer ça, parce que...
M. LE PRESIDENT: Excusez-moi, est-ce 5 (a) que vous voulez?
M. BELLEMARE: (b).
M. LE PRESIDENT: Alors 5 (a) on va en discuter sur la
résolution.
M. BELLEMARE: Sur la résolution. C'est 5 (b) et (c) là,
parce que en remplaçant les sous-paragraphes 2 et 3 du paragraphe 26 par
les suivants, la partie du district électoral Maskinongé au sud
du canton Doberson ça c'est correct, sauf les territoires de la paroisse
de St-Didace, laquelle appartient au district judiciaire de Joliette. Bon, 3,
la partie du district électoral de St-Maurice comprise dans la
cité de Trois-Rivières, les municipalités de Yamachi-che,
correct. Pointe-du-Lac, la Visitation et Pointe-du-Lac, la paroisse Ste-Anne de
Yamachiche 4, le district électoral de Champlain.
M. LE PRESIDENT: 5 (c).
M. BELLEMARE: 5 (c) 4 en bas là.
M. LE PRESIDENT: 5 c).
M. BELLEMARE: Le district électoral de Champlain.
M. HAMEL (St-Maurice): Alors Trois-Rivières. Voici, c'est que si
on prend là, 26, Trois-Rivières, chef-lieu; Trois-Rivières
comprend si vous voulez, avant la loi, le district électoral de
Trois-Rivières, le district électoral de St-Maurice, le district
électoral de Maskinongé, le district électoral de
Champlain, moins la partie comprise dans le district judiciaire de
Québec bornée au nord-est par les comtés des districts
électoraux de Roberval et du comté de Québec. Alors, en
vertu de la loi actuelle, on enlève 2, 3, et 4 et on établit le
district de Trois-Rivières au paragraphe 5 c).
M. BELLEMARE: 5 c) c'est ça.
M. HAMEL (St-Maurice): Alors la partie du district électoral de
Maskinongé au sud du canton...
M. BELLEMARE: Doberson.
M. HAMEL (St-Maurice): Cela est la description du district de
Trois-Rivières.
M. BELLEMARE: Alors, ça c'est la description du district de
Trois-Rivières?
M. HAMEL (St-Maurice): C'est ça.
M. BELLEMARE: Qui était dans le 4 c).
M. HAMEL (St-Maurice): On l'enlève l'autre, on la remplace par
celle-là.
M. BELLEMARE: Alors le ministre me dit que le 4, là, le district
électoral de Champlain, reste ou demeure dans le district judiciaire de
Trois-Rivières?
M. HAMEL (St-Maurice): Si le député de Champlain veut
aller à la page 2, l'article 5 c): « Le district de
Trois-Rivières va comprendre ceci: la partie du district
électoral de Maskinongé au sud du canton de Hunterstown, sauf la
paroisse de St-Didace qui appartient déjà au district de
Joliette; la partie du district électoral de St-Maurice comprise dans
les cités de Trois-Rivières (ça c'est Les Forges) plus les
municipalités du village de Yamachiche, Pointe-du-Lac, La Visitation de
Pointe-du-Lac et de la paroisse de Ste-Anne de Yamachiche.
M. BELLEMARE: Correct.
M. HAMEL (St-Maurice): « Plus le district électoral de
Champlain qui reste dans Trois-Rivières. »
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 6 a), b) et c).
M. HAMEL (St-Maurice): Alors l'article 6 indique qu'il y aura 82
divisions d'enregistrement au lieu de 81 et le paragraphe 13 est modifié
parce que « Champlain, bureau à Ste-Geneviève-de-Batiscan.
Le district électoral de Champlain, » Cela, c'est la correction de
la description, à cause de la création du nouveau district
d'enregistrement de Shawinigan.
M. BELLEMARE: Toute la partie de Laviolette...?
M. HAMEL (St-Maurice): Laviolette s'en vient à Shawinigan.
M. BELLEMARE: S'en va à Shawinigan, toute la partie
électorale?
M. HAMEL (St-Maurice): Voici, c'est que le comté électoral
de St-Maurice, le comté électoral de Laviolette, à
l'exception de ce qui fait déjà partie du bureau d'enregistrement
de La Tuque.
M. BELLEMARE: Le ministre peut m'ex-pliquer ça: est-ce que
St-Tite, par exemple, St-Timothée?
M. HAMEL (St-Maurice): Bien La Tuque, je ne sais pas exactement ce que
La Tuque, ça comprend. Un instant là.
M. BELLEMARE: St-Tite, Ste-Thècle, St-Timothée?
M. HAMEL (St-Maurice): Si actuellement, c'est un bureau d'enregistrement
de la Tuque, ça reste à La Tuque.
M. BELLEMARE: Je le pense.
M. HAMEL (St-Maurice): Si c'est à Ste-Geneviève, ça
s'en vient à Shawinigan.
M. BELLEMARE: Est-ce que le ministre peut me le dire, là?
M. HAMEL (St-Maurice): Oui. La Tuque, voici la description: cette partie
du district électoral de Laviolette renfermée dans les limites
suivantes savoir au sud-est: le district électoral de Portneuf; au
nord-est: le district électoral du comté de Québec dans le
district électoral de Roberval; au sud-ouest: le district
électoral de St-Maurice, les cantons projetés de Mékinac,
de Boucher, de Paulette, de Baril, de Goeffrion, de Bisaillon, de Laporte, de
Frémont, de Châteauvert, et en leur faisant suite, au sud: les
cantons projetés de Châteauvert, Amyot, Lortie, Drouin; à
l'ouest: les cantons projetés de Landry, de René-Bazin, de
Tassé, de Huguenet, de Chapman, de Marmette, de Mc-Sweeney, de Mathieu,
et le prolongement de la limite est de ce dernier jusqu'au district
électoral de Roberval. La Tuque: la partie du canton projetée de
Dandurand, comprise dans le district électoral de St-Maurice.
M. BELLEMARE: Alors, les autres, les villes de St-Tite,
Ste-Thècle, St-Timothée et Rou- ville, ça ça fait
partie du bureau d'enregistrement de Champlain?
M. HAMEL (St-Maurice): Je le crois.
M. BELLEMARE: Cela n'est pas changé, il y a juste de
changé tout ce qui fait partie actuellement du bureau d'enregistrement
de La Tuque qui va à Shawinigan.
M. HAMEL (St-Maurice): Non, non, non, ce qui fait partie du bureau
d'enregistrement de La Tuque reste à La Tuque, tel qu'il est.
M. BELLEMARE: Ah! bon.
M. HAMEL (St-Maurice): Le comté de Laviolette.
M. BELLEMARE: Tout ce qui n'est pas cité là pour La Tuque
et qui est dans le comté de Laviolette, ça s'en vient à
Shawinigan?
M. HAMEL: Cela s'en vient à Shawinigan.
M. BELLEMARE: D'accord.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 7?
M. HAMEL: L'article 7, oui c'est là où on change le bureau
d'enregistrement de Tadoussac, il est transporté à
Baie-Comeau.
M. LE PRESIDENT: 7 adopté. Article 8?
M. HAMEL (St-Maurice): L'article 8, ça c'est une modification
pour les fins municipales. Dans le district électoral de
Matapédia, cette partie du canton de Matane, qui est située au
sud-ouest.
Alors on met dans le district de Matapédia une partie qui est
actuellement dans le district de Matane, mais c'est une demande du ministre des
Affaires municipales, il ne peut pas établir de municipalité
à moins que tout le territoire soit dans les limites d'un comté
municipal, alors c'est pour ça que le changement vient.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 9.
M. BELLEMARE: Pourquoi sauf la partie du canton de Matane, la partie du
comté de Matane?
M. HAMEL (St-Maurice): Bien, parce que ce qui est déjà
dans Matane, dans...
M. BELLEMARE: Dans le chose municipal...
M. HAMEL (St-Maurice): Cela, c'est pour les territoires non
organisés d'après ce qu'on m'a rapporté au
ministère des Affaires municipales, le territoire non organisé
qui fait partie du comté de Matane, reste dans Matane.
M. LE PRESIDENT: Article 9.
M. HAMEL (St-Maurice): L'article 9, eh bien c'est l'explication
là des causes pendantes pour les districts judiciaires.
M. BELLEMARE: Le ministre fait encore une loi rétroactive?
Non?
M. LE PRESIDENT: Adopté?
M. HAMEL (St-Maurice): Je comprends pas.
M. BELLEMARE: Une loi rétroactive non?
M. HAMEL (St-Maurice): Non, parce que il y a des causes pendantes
actuelles qui...
M. BELLEMARE: Il y a des jugements rendus.
M. HAMEL (St-Maurice): ... pourront être entendues.
M. LE PRESIDENT: Adopté? Adopté.
M. HAMEL (St-Maurice): Alors, quant au numéro 10, il entre en
vigueur suivant...
M. BEDARD (président du comité plénier): M. le
Président, j'ai l'honneur de faire rapport que le comité n'a pas
fini de délibérer et qu'il demande la permission de siéger
de nouveau.
M. HYDE (Président): Quand siégera-t-il? A la même
séance? A la même séance. La résolution.
M. HAMEL (St-Maurice): Son Excellence le lieutenant-gouverneur, ayant
été informé de la présente résolution en
recommande la prise en considération par la Chambre.
M. LE PRESIDENT: M. Hamel propose que je quitte maintenant le fauteuil
pour que la Chambre se forme en comité plénier pour
étudier les résolutions relatives au bill 65. Cette motion
sera-t-elle adoptée? Adoptée.
M. BEDARD (président du comité plénier): Bill 65.
Résolution No 1.
M. HAMEL (St-Maurice): Alors c'est la création du district
judiciaire de Drummondville.
M. LE PRESIDENT: No 1 adopté. Numéro 2.
M. HAMEL (St-Maurice): St-Maurice. M. LE PRESIDENT: No 2
adopté.
M. HAMEL (St-Maurice): No 3, c'est le bureau d'enregistrement.
M. LE PRESIDENT: No 3 adopté.
M. BELLEMARE: Je ne sais pas ce que va dire M. Lafontaine, le bureau
d'enregistrement de Ste-Geneviève.
M. HAMEL (St-Maurice): Mais, il y a un bureau d'enregistrement à
La Tuque, il y a un bureau d'enregistrement dans le comté de Champlain,
il y a un bureau d'enregistrement dans le comté de
Maskinongé...
M. BELLEMARE: Trois-Rivières.
M. HAMEL (St-Maurice): ... il y a un bureau d'enregistrement dans le
comté de Trois-Rivières, il n'y avait pas de bureau
d'enregistrement dans le comté de St-Maurice, là il va y avoir
non seulement un bureau d'enregistrement, mais un palais de justice et un
district judiciaire.
M. BELLEMARE: Je n'ai pas d'objection, je n'ai pas aucune objection, M.
le Président, seulement, c'est lorsque M. Lafontaine, notre
régistrateur va lire ça, j'ai hâte de lui voir...
M. HAMEL (St-Maurice): Le député de Champlain est mieux de
ne pas discuter trop de ça parce que Ste-Geneviève a
été en danger à un moment donné.
M. BELLEMARE: Ah, ah. M. LE PRESIDENT: Adopté.
M. BELLEMARE: Faut que ça vienne au Cap.
M. BEDARD (président du comité plénier): M. le
Président, j'ai l'honneur de faire rapport que le comité a
adopté des résolutions relatives au bill No 65.
M. HYDE (président): M. Hamel propose que les résolutions
soient maintenant lues et agréées, cette motion sera-t-elle
adoptée? Adoptée. Troisième lecture.
M. DOZOIS: Adopté.
UNE VOIX: De nouveau en comité plénier.
UNE VOIX: Ah oui.
M. BEDARD (président du comité plénier): Article
10, adopté? Adoptée.
M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport à la
Chambre que le comité a adopté le bill No 65.
M. HYDE (président): Troisième lecture? M. DOZOIS:
Adopté.
M. LE PRESIDENT: Bill 67. Deuxième lecture.
M. HAMEL (St-Maurice): Le bill canadien des droits de l'homme.
M. LE PRESIDENT: M. Fortin propose la deuxième lecture du bill No
67, « loi sur la discrimination dans l'emploi. »
M. FORTIN: Est-ce que tout le monde est d'accord pour le principe du
bill?
M. BELLEMARE: Deuxième lecture, on va aller en comité, je
me réserve des critiques à faire dans différents
articles.
M. LE PRESIDENT: La motion de deuxième lecture est
adoptée? Adoptée.
M. Fortin propose que je quitte maintenant le fauteuil et que la Chambre
se forme en comité plénier pour étudier le bill 67. Cette
motion sera-t-elle adoptée? Adoptée.
M. BELLEMARE: On est en faveur duprin-cipe.
M. BEDARD (président du comité plénier): Bill No
67, article 1.
M. BELLEMARE: M. le Président, dans l'article 1, la portée
du bill qui est devant nous, a une portée restreinte, extrêmement
restreinte. La publicité qui a été faite alentour de cette
loi, M. le Président, nous laissait entendre que c'était une
nouvelle législation pour éliminer toute discrimination possible,
raciale, races différentes, de sexes, et on nous présente un bill
qui s'applique seulement qu'aux salariés, qui couvrent seulement le
domaine du travail.
Et M. le Président, on donne au mot discrimination une
définition tellement vague, une définition tellement complexe,
tellement embrouillée, que la loi va être difficile d'application.
Tellement, M. le Président, que dans cet article 1, on dit de
discrimination: « toute distinction, exclusion ou
préférence fondée sur la race, la couleur, le sexe, la
religion, l'ascendance nationale, ou l'origine sociale qui a pour effet de
détruire ou d'altérer l'égalité des chances de
traitement en matière d'emploi et de profession ».
Premièrement, M. le Président, dans ce volume, qui est le
compte rendu des travaux de la Conférence internationale du travail,
dans la définition de discrimination, on dit: Toute distinction,
exclusion ou préférence fondée sur la race, la couleur, le
sexe, la religion, l'ascendance nationale et origine sociale. Et, dans la
quatrième session de la Conférence internationale du travail,
à la page 769...
M. FORTIN: Quelle convention? M. BELLEMARE: Pardon?
M. FORTIN : Quelle convention lisez-vous?
M. BELLEMARE: Convention internationale du travail.
M. FORTIN: Non, mais quelle convention lisez-vous? Quelle numéro
de la convention, en dedans, à l'Intérieur?
M. BELLEMARE: 1957.
M. FORTIN: Non, mais à l'intérieur?
M. BELLEMARE: En dedans?
M. FORTIN: Oui.
M. BELLEMARE: L'annexe 10.
M. FORTIN: Est-ce que vous avez la convention de 19...
M. BELLEMARE: Septième question à l'ordre du jour: la
discrimination en matière d'emploi et de profession.
M. FORTIN: Il faut que vous lisiez la convention numéro 111 de
1958, c'est sur ça qu'est basée notre loi.
M. BELLEMARE: Oui, mais dans ce temps-là en 1957, à ce
moment-là à Genève on avait voulu nettement que toute
exclusion, que toute distinction ne soit pas absolument claire et nette. Et
c'est justement pourquoi aujourd'hui on arrive quand on dit en particulier:
« cependant les distinctions, les exclusions ou préférences
fondées sur les qualifications exigées pour un emploi
déterminé, ne sont pas considérées comme des
discriminations. Et c'est justement ce que cela veut dire. A-t-on un sujet
aussi nébuleux que celui-là? On va, par cette loi, justement
concrétiser que les petits emplois, que les porteurs d'eau et les
scieurs de bois, il ne peut y avoir de discrimination. Mais, lorsqu'il va
s'agir de qualifications pour une personne qui voudra occuper des postes
supérieurs, comme celui de gérant, comme celui de chef
d'entreprise, on dira, comme contremaître, comme surintendant, comme
officier de relations extérieures, on dira qu'une distinction
fondée sur les qualifications spéciales, tel que le veut la loi,
amène qu'il n'y ait pas de discrimination. Et la loi n'aura jamais
été aussi nébuleuse.
Je voudrais que le ministre me comprenne bien. Ce n'est pas pour le
chicaner, c'est pour lui faire comprendre qu'entre les deux...
M. FORTIN: C'est le mot à mot de la convention.
M. BELLEMARE: ... on met, entre les deux, une cloison étanche,
pas de discrimination quand il s'agit, défendu quand il s'agit des
petits emplois, c'est dit dans la loi. L'égalité des chances de
traitement en matière d'emplois et de professions. Cependant les
distinctions, les exclusions ou préférences fondées sur
les qualifications exigées pour un emploi déterminé comme
« d'un contremaître, d'un surintendant, d'un officier des relations
extérieures, d'un administrateur ou d'un officier de corporation,
» eux autres, ne sont pas considérés comme de la
discrimination à cause des qualifications exigées.
Je dis que là on fait une cloison étanche, et on rend la
loi extrêmement difficile d'application. Et vous voyez par là que
la loi va s'appliquer seulement qu'aux salariés, et aux employeurs,
seulement avec leur emploi. Et deuxièmement, elle ne s'applique pas
à l'employeur qui a moins de cinq employés. Le ministre sait
ça. Et plus que ça, elle ne s'appliquera pas aux hôpitaux,
elle ne s'appliquera pas aux collèges, elle ne s'appliquera pas aux
congrégations, aux corporations scolaires, municipales, religieuses et
autres. Et le ministre dit que c'est une loi qui va apporter extrêmement
de bienfait pour empêcher la discrimination. Il y a la discrimination
raciale, mais il y a aussi la discrimination de la religion, il y a la
discrimination de l'ascendance nationale, de l'origine sociale, il y a
même plus que ça, il y a l'ascendance politique qui peut en
certaines circonstances amener la discrimination et je dis le sexe aussi, le
sexe. Pardon?
M. LAPALME: Il faut faire une différence tout de même.
M. BELLEMARE: Avec quoi? Le beau, et puis le laid.
M. LAPALME: Avec l'autre. M. LAPORTE: Avec l'autre.
M. BELLEMARE: C'est Sacha Guitry qui disait un jour; « Il y en a
qui sont tellement laids qu'à sourire ils deviennent beaux ».
Alors, M. le Président, je dis au ministre, sans le chicaner, que sa loi
n'est pas celle que tout le monde attendait.
M. LAPALME: Sans se chicaner. Sans discrimination.
M. BELLEMARE: Sans discrimination aucune. Je dis, M. le
Président, qu'elle n'atteint pas le but visé et quand on regarde
dans les droits de l'homme, cette définition importante passée
par le gouvernement du Canada en 1960, VIII, IX Elisabeth II, volume 1,
chapitre 44 il est dit dans la déclaration des droits de l'homme ceci:
« Il est, par les présentes, reconnu et déclaré que
les droits de l'homme et les libertés fondamentales ci-après
énoncés ont existes et continueront d'exister pour tout individu
».
M. le Président, ils ne disent pas seulement pour les petits
salariés, ils ne disent pas seulement pour une partie mentionnée
dans une loi, ils disent; « toutes les libertés fondamentales
ci-après énoncées ont existé et continueront
à exister pour tout individu au Canada quel que soit et là
ils donnent sa race, son origine nationale, sa couleur, sa religion et
son sexe » et un peu plus loin, dans la déclaration des droits de
l'homme, il est dit: « et s'appliquer de manière à ne pas
supprimer ni restreindre, ni enfreindre l'un quelconque des droits des
libertés reconnues, et déclarés aux présentes, ni
en autoriser la suppression, la diminution ou la transgression et en
particulier nulle loi du Canada ne doit s'appliquer comme; A) autorisant, se
prononçant sur quelles sont les différentes sections où il
y a des remarques
particulières quant à l'emprisonnement, quant aux peines
ou les traitements cruels inusités, privant une personne
arrêtée, détenue et le reste ».
Mais, M. le Président, toujours dans la Conférence
internationale du travail dans le compte rendu des travaux de 1957 et dans les
droits de l'homme, il est toujours question de ne pas faire de
différence, de ne pas faire d'exclusion, et il est question d'appliquer
la loi pour tout le monde. Là le ministre fait ça en deux castes:
la caste des petits salaires, de ceux qui, selon la religion, la race, le sexe
et le reste, l'origine nationale, ceux-là, pas d'objection, mais quand
il s'agit d'obtenir une qualification spéciale exigée, par
exemple, pour un contremaître, pour un surintendant, pour un officier de
relations extérieures ou pour un administrateur, un officier de
corporation on dit: « Vous autres, non monsieur il n'y a pas de
discrimination pour vous autres ». Cela donnera peut-être une
chance à ceux qui, dans la province, sont portés à trouver
des raisons pour encourager le mouvement des séparatistes qui disent
que, dans certains endroits, nos amis les anglais ne sont pas toujours
empressés pour donner des postes de faveur, des positions
particulières, excepté « grande qualification et puis
grande compétence ». Alors, c'est mon objection à
l'article, à la discrimination, je trouve que le terme est mal
défini, contre les droits de l'homme, contre la Conférence
internationale du travail parce que, justement, on fait des exclusions et des
préférences.
M. FORTIN: M. le Président, le texte de loi que nous proposons
est basé textuellement sur la convention 111 du Bureau international de
Genève adoptée en 1958. Si les députés veulent
suivre la définition de « discrimination », je vais lire ce
qu'il y a dans la convention internationale de Genève, et on verra qu'il
n'y a qu'un mot qui a été enlevé dans le premier
paragraphe; « C'est l'opinion publique ».
M. JOHNSON: Une opinion politique.
M. FORTIN: « Une opinion politique «excusez-moi.
M. JOHNSON: C'est un lapsus trop commode.
M. FORTIN: « Toute distinction, exclusion ou
préférence fondée sur la race, la couleur, le sexe, la
religion, l'opinion politique, l'ascendance nationale ou l'origine sociale qui
a pour effet de détruire ou d'altérer l'égalité de
chances ou de traitement en matière d'emploi ou de profession
».
Paragraphe deuxième. « Les distinctions, exclusion ou
préférence, fondées sur les qualifications exigées
pour un emploi déterminé, ne sont pas considérées
comme des discriminations ». C'est la convention internationale de
Genève, et il ne faut pas l'interpréter comme le fait le
député de Champlain. Ceci ne veut pas dire que pour les gens qui
ont des qualifications spéciales il est permis de faire de la
discrimination en raison de leur race ou de leur couleur etc. Ceci veut dire
que lorsqu'un employeur, en face de deux ou trois employés de
différentes religions, de différentes races, décidra
d'engager un individu parce qu'il a un certificat de compétence pour un
métier en particulier, le fait pour cet employeur d'engager cet individu
à cause de sa compétence, parce que le métier qui s'offre
exige une telle compétence, n'est pas considéré comme
étant de la discrimination.
C'est simplement un proviso dans la loi pour éviter des
discussions inutiles au point de vue légal. Et c'est mot à mot la
Convention internationale de Genève.
Maintenant le député a empiété un peu en
parlant des exceptions au sujet des associations, corporations religieuses. Eh
bien, j'attire son attention sur l'article 2 de la Convention internationale de
Genève qui dit:« Tout membre ceci veut dire tout pays
membre qui signe la convention pour lequel la présente convention
est en vigueur s'engage à formuler et à appliquer une politique
nationale visant à promouvoir par des méthodes adaptées
aux circonstances et aux usages nationaux, l'égalité de chance
etc. »
Or il faut tenir compte dans l'adoption de cette loi des circonstances
particulières à notre province, comme on l'a fait d'ailleurs dans
les autres provinces. Nous n'avons qu'à consulter les lois des autres
provinces, spécialement de l'Ontario, du Manitoba, de la Saskatchewan,
je les ai toutes. Eh bien il y a des exceptions telles que nous mentionnons ici
au paragraphe B-l et 2, pour celui qui emploie moins de cinq salariés,
pour les associations, corporations philantropiques et religieuses et pour les
salariés et les domestiques de maison. Nous avons ça dans toutes
les autres lois des autres provinces.
M. BELLEMARE: Pas en Alberta.
M. FORTIN: Je ne repasserai pas toutes les lois mais...
M. BELLEMARE: Non.
M. FORTIN: ... la majorité des provinces ont cette
distinction.
On comprend facilement, M. le Président, que si par exemple dans
une comission scolaire protestante il y a un professeur d'une autre religion
qui se présente pour enseigner une des religions d'une profession
religieuse quelconque, il est normal que cette commission scolaire dise;
« Bien monsieur, à cause de votre religion, on ne peut pas,
à cause de la foi religieuse que vous professez, vous engager comme
professeur. » C'est la même chose pour les autres institutions
charitables etc. Et je crois que ces exceptions sont fort
justifiées.
Les domestiques de maison, ça va de soi. Je crois bien que dans
les maisons privées, dans un foyer catholique ou dans un foyer
protestant ou juif, je crois bien que par exemple, les maîtres de la
maison sont intéressés d'avoir des domestiques qui ne
professeront pas une religion ou n'auront pas d'opinions qui seraient
contraires à celles de la famille.
M. BELLEMARE: Cela aurait été utile, il y a quelques
années, à Maillardville, en Colombie-Britannique.
M. FORTIN: Oui.
M. BELLEMARE: Mais, M. le Président, ce qui me choque le
plus...
M. FORTIN: Choquez-vous pas!
M. BELLEMARE: ... qui m'exaspère le plus...
M. LAPALME: Il est dix heures et demi, choquez-vous pas.
M. BELLEMARE: Non, mais il m'en reste encore. ... c'est que quand je
vois le beau sexe, la discrimination...
M. LAPALME: Qu'est-ce que vous faites quand vous le voyez?
M. BELLEMARE: J'ai plus de misère avec ma vertu qu'avec ma
santé!
M. le Président, quand je vois la discrimination qu'on va faire
au beau sexe. Dans cet article-là on porte un dur coup aux filles d'Eve
parce qu'on va les laisser... en déclarant qu'on peut cependant les
éloigner des hautes positions...
M. LAPALME: Le député fait de la pornographie.
M. LE PRESIDENT; A l'ordre messieurs.
M. JOHNSON: « Ad modum recipientis recipitur »!
M. BELLEMARE: C'est-à-dire qu'on va pouvoir les éliminer
ces filles d'Eve...
M. LAPALME: Non.
M. BELLEMARE: ... qu'on va pouvoir les empêcher..!
M. LAPALME: Non, non.
M. BELLEMARE: ... on va pouvoir les restreindre..!
M. LAPALME: Non, que le député recommence sa phrase. Je
n'en suis plus.
M. BELLEMARE: M. le Président, je dis que le sexe faible, les
filles d'Eve vont se trouver par le fait même en discrimination, parce
qu'on va les empêcher d'accéder vers les emplois
supérieurs. Ah oui, certainement, on le dit. Dites-le d'abord.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre messieurs.
M. JOHNSON: M. le Président, nous sommes bien d'accord pour ne
pas faire traîner la session mais il est quand même des choses que
l'Opposition doit dire quand il s'agit d'un bill d'une certaine importance. La
discrimination en soi, tout le monde veut l'éliminer. Et je fais
grâce ce soir à la Chambre des attitudes publiques, formelles que
le parti de l'Union nationale a prises relativement à ce
problème. Je me permettrai peut-être en troisième lecture
demain d'apporter quelques précisions. J'ai examiné ce bill dans
le peu de temps qui m'a été accordé dans les circonstances
que vous connaissez comme moi. J'ai cueilli des opinions et j'en viens à
la conclusion que l'intention du gouvernement était peut-être
bonne mais que le bill serait à refaire et voici pourquoi.
Il y a tellement d'exceptions dans ce bill que la note explicative
devrait se lire; « Ce projet a pour but de permettre la discrimination
dans l'emploi...
M. LAPORTE: On parle sur le bill en général, je
présume?
M. JOHNSON: Oui, oui. C'est pour donner une chance au ministre de me
répondre. Plutôt que d'en parler en troisième lecture
demain et de
n'aboutir peut-être, à rien. C'est d'autant plus
fâcheux, à mon point de vue, qu'une loi de cette nature qui est
toujours extrêmement difficile d'application, tout le monde l'admet.
Sa valeur vient surtout, à mon sens, de son poids moral beaucoup
plus que de son poids juridique. C'est l'Etat du Québec, en somme, qui
met son autorité morale dans la balance pour faire pencher contre la
discrimination, qui est déjà une chose mauvaise en soi. Or, avec
le texte actuel, c'est l'Etat du Québec qui prend sur lui de calmer les
scrupules des employeurs en disant qu'il est permis, même si c'est
immoral en soi, de faire de la discrimination, si on a moins de cinq
employés, s'il s'agit d'un poste de gérant, contremaître et
le reste. Je réfère les députés à la loi
elle-même. De plus, le bill prend sur lui de suggérer, à
tous ceux qui n'ont pas une très haute idée de la
compétence des nôtres, de se retrancher derrière cet
argument, ou plutôt le préjugé de l'impréparation
des Canadiens français due à leur mauvais système
d'éducation. Bien sûr que cette deuxième partie du
paragraphe...
M. LAPALME: Est-ce que... Je ne comprends pas. Est-ce que le chef de
l'Opposition voudrait répéter la dernière phrase?
M. JOHNSON: Ce bill prend sur lui de suggérer à tous ces
gens qui entretiennent des préjugés envers notre manque de
préparation, notre soi-disant manque de préparation et de
compétence, il permet, en somme, de suggérer à ces
gens-là qu'ils peuvent se retrancher encore derrière cet
argument, que je n'admets pas, que notre manque de compétence, qui
serait dû à un système d'éducation déficient,
ou qui était déficient. Je ne mets pas de nom, mais on a lu ces
phrases. Elles ont été prononcées par des
présidents de grandes corporations, même en public, dans des
endroits, dans des tribunes très huppées. On a dit que des
Canadiens français n'étaient pas préparés à
accéder à certaines fonctions.
Or, nous, députés de cette Chambre, nous disons: «
Ce n'est pas de la discrimination de mettre de côté certains
employés quand il s'agit d'un poste de contremaître ou d'un poste
plus élevé. » Cela, à mon sens, c'est une mauvaise
attitude, mauvaise présentation du problè- me, je le
répète: le gouvernement était de bonne foi, sans doute,
mais le bill est mal fait, est mal présenté.
Bien sûr que cette deuxième partie du paragraphe A de
l'article 1 disant que: « les distinctions, exclusions ou
préférences fondées sur des qualifications exigées
pour un emploi déterminé ne sont pas considérées
comme des discriminations et copiées sur des législations en
vigueur au Canada anglais ». Mais, justement, cette législation du
Canada anglais est un modèle d'hypocrisie que nous ne devrions pas
imiter dans Québec. La première partie du même paragraphe
dit expressément quelles sont 1er distinctions qui constituent la
discrimination. C'est évident que les distinctions fondées sur la
compétence ne sont pas de la. discrimination. Mais pourquoi le dire?
Pourquoi proposer cet alibi à ceux qui se cherchent des raisons? On leur
fournit tout de suite l'alibi, là. Vous n'aurez à marquer sur
votre formule que la phrase suivante: « Incompétence, manque de
préparation » et là, cela ne constituera pas de la
discrimination au sens de la présente loi.
Et puisque le mot « employeur » comprend Sa Majesté,
comme on aime à le dire de l'autre côté, pourquoi ne pas
condamner la forme de discrimination qui se pratique le plus dans le
régime actuel, soit la distinction, exclusion ou
préférence fondée sur des opinions politiques.
Est-ce que le gouvernement actuel a des objections à s'interdire
toute discrimination fondée sur des motifs de « partisanerie
» politique? La Convention internationale de 1958, le ministre
l'admet...
M. LAPORTE: Bien, c'était marqué.
M. JOHNSON:... comprend, comme élément de discrimination,
les opinions politiques. Or, en voici un domaine où il s'en fait et,
pour n'être pas obligé de tout prouver et risquer des sanctions,
disons que voici un domaine où, dans l'opinion publique, on a
l'impression qu'il s'en fait. Allez n'importe où dans nos comtés,
vous allez cueillir des témoignages tant que vous pourrez et tant que
vous en voudrez à l'effet qu'il se fait de la discrimination
basée sur l'opinion politique, discrimination faite par le gouvernement
actuel comme par le gouvernement passé, les gouvernements du
passé.
M. LAFRANCE: De moins en moins!
M. BELLEMARE: C'est parce que vous ne les voyez pas.
M. JOHNSON: Pourquoi, M. le Président, ne pas inscrire, ne pas
interdire cette forme de discrimination qui est la plus répandue la plus
répandue certainement. Est-ce qu'on fait de la discrimination dans
Québec contre les Noirs?
M. LAPALME: Oui. UNE VOIX: Où?
M. JOHNSON: M. le Président, y en a-t-il tellement de Noirs?
M. LAPALME: Non, mais il s'en fait.
M. JOHNSON: Bon. Il y a moins de Noirs que de gens de l'Union nationale,
M. le Président...
M. LAPALME: Un peu moins.
UNE VOIX: C'est tout prouvé ça.
M. JOHNSON: Il y a beaucoup moins de Noirs.
UNE VOIX: Il n'y a pas beaucoup ni des uns ni des autres.
M. JOHNSON: ... contre qui on fait de la discrimination qu'il y a de
gens de l'Union nationale contre qui on fait de la discrimination. Il y a
beaucoup moins de victimes chez les Noirs de la discrimination à cause
de leur couleur qu'il n'y en a à cause de leurs opinions politiques. M.
le Président, le député de Beauharnois n'a jamais
recommandé un bleu de sa vie, je vous le jure. Jamais!
M. CADIEUX: Je n'en ai pas de recommandables. M. le
Président.
M. JOHNSON: M. le Président, voyez! C'est ça, la
mentalité qu'il faut tuer. Un député libéral qui se
lève en Chambre...
M. BELLEMARE: C'est ça, la discrimination.
M. JOHNSON: ... et qui dit: « Il n'y a pas un gars de l'Union
nationale qui est recommandable. » Je connais des députés
libéraux qui en ont recommandé, des gens connus de l'Union
nationale, mais il y a d'autres députés libéraux, c'est de
valeur que ça tombe sur des jeunes, des nouveaux...
M. LAPALME: Cela dépend du comté, pas du
député. Je ne sais pas ce qui se passe.
M. JOHNSON: M. le Président, dans Outremont, le ministre est
mieux de ne pas essayer de savoir ce qui se passe, puis d'essayer de faire le
dossier de ses électeurs. Lui, il aurait du trouble.
M. LAPALME: C'est ça. J'ai de mes collègues qui me
demandent s'il se passe quelque chose dans Outremont!
M. JOHNSON: M. le Président, le député
d'Outremont...
M. BELLEMARE: Il est comme les sénateurs!
M. JOHNSON: ... est celui de tous les députés de cette
Chambre qui est éluparun vote automatique. C'est une machine
électronique qui l'élit, c'est une vraie machine I.B.M.
M. LAPALME: L'automatisation! M.JOHNSON: Non.
M. LAPALME: Mais la machine I.B.M., je voudrais faire remarquer au chef
de l'Opposition qu'elle ne fonctionne qu'en faveur du ministère de
l'Education.
M. JOHNSON: M. le Président, elle est bien
généreuse pour certains boursiers qui ne sont pas
qualifiés. Mais dans le comté d'Outremont, quand est
arrivée la première élection du député
actuel, j'étais...
M. FORTIN: C'est une dégression? Est-ce qu'on pourrait en revenir
à la discrimination?
M. JOHNSON: ... oui, je vais justement donner un exemple de
discrimination.
M. LAPALME: Convention de jeunesse dans Outremont.
M. JOHNSON: J'organisais, M. le Président, en 1953, une partie,
un secteur du comté d'Outremont, Incidemment, le député
d'Outremont eut 10 de majorité dans mon secteur sur 10,000
électeurs. Cela lui en aurait fait 400 dans tout le comté si tout
le monde avait tenu son coup! Et il arrive un bon citoyen de religion
judaïque, assez visiblement de... visiblement de la race juive, et qui
demande à l'officier rapporteur: « Quel est le candidat de Laurier
dans le comté? c'est pour lui que je veux voter » M. le
Président...
M. LAPALME: Ah oui, je le connais, celui-là.
M. JOHNSON: ... c'est automatique, c'est automatique dans ce
comté-là: c'est le candidat de Laurier qui est élu et que
le député d'Outremont ne l'oubliez pas.
M. FORTIN: Il n'avait pas lu les journaux.
M. JOHNSON: M. le Président, la discrimination politique, c'est
celle dont tout le monde a connaissance. Discrimination contre les Noirs,
discrimination contre les Chinois, y en a-t-il tellement? Discrimination quant
au sexe? M. le Président, je laisse à notre expert le
député de Champlain...
M. BELLEMARE: Merci, pour l'expert.
M. JOHNSON: M. le Président, « ad modum recipientis
recipitur »!
M. BELLEMARE: Ah, écoute là, je ne comprends rien dans
ça.
M. JOHNSON: Cela ça veut dire qu'on interprète des paroles
selon sa manière de concevoir les choses. Moi je n'ai pensé
à rien de pornographique.
M. BELLEMARE: C'est le ministre des Affaires culturelles.
M. JOHNSON: C'est ceux qui rient, M. le Président, qui pensent
à de pareilles choses. Mais notre expert, le député de
Champlain, quand il s'agit d'emploi et non pas de sexe, le député
de Champlain le sait, les femmes ne sont pas traitées sur le même
pied, sur un pied d'égalité, ni au point de vue salaire, ni au
point de vue de promotion.
Est-il nécessaire d'apporter des preuves? Chacun de nous sait
bien qu'il subsiste encore dans la province un préjugé, une
mentalité qui est bien caractérisée par une phrase
anglaise « This is still a men's world », c'est encore le monde des
hommes, non pas employé comme terme générique mais dans
l'acception...
M. LAPALME: Exemple: l'Assemblée législative.
M. JOHNSON: M. le Président, je me demande si les femmes tiennent
tellement à venir à l'Assemblée législative,
à part ça. Ce n'est pas moi qui va les blâmer, un jour
comme aujourd'hui: j'aimerais mieux faire de la « ratatouil- le »
dans la cuisine que de la faire en politique.
M. le Président la discrimination au point de vue couleur, race,
sexe, mais pas dans les deux premiers cas est bien défendue dans la
province à cause de certains facteurs connus, mais elle existe au point
de vue opinions politiques.
Le public ne comprendra pas pourquoi des gens qui ont fait profession de
vouloir abolir le patronage, de vouloir valoriser la fonction publique, ne
profitent pas d'un bill semblable pour enfin poser un geste qui serait à
la gloire du gouvernement actuel, qui serait en somme une attestation de sa
sincérité, de la sincérité de ses propos. Le
député de Champlain aura l'occasion de discuter, comme d'autres
collègues, des clauses une par une. Est-ce que je pourrais en terminant
ces brèves remarques, vous répéter que le bill, à
mon sens, est mal « foutu », si je puis employer un terme pareil en
Chambre. Il est à l'opposé de ce besoin de logique et de
clarté qui devrait caractériser à tout instant l'esprit
français que tout le monde aimerait avoir à un degré
intense. Ce n'est pas de la discrimination pour un curé d'engager de
préférence un bedeau de sa propre religion, ou pour « le
bien-être polonais » de se donner une secrétaire polonaise.
Au lieu de dire que ce n'est pas de la discrimination, le bill
énumère toute une série d'exceptions donnant à
croire que la discrimination sera permise dans certains cas. Je ne sais pas si
je me fais assez clair...
M. PINARD: Oui, oui.
M. JOHNSON: ... pour des gens qui ont siégé depuis ce
matin, qui sont à l'ouvrage depuis très tôt ce matin, la
plupart d'entre nous, je ne sais pas si je m'exprime assez clairement, mais on
dit: « C'est mauvais la discrimination, mais vous pouvez en faire et ce
ne sera pas illégal, dans tel, ou tel, ou tel, ou tel cas », et
c'est ça qui est mauvais. Est-ce qu'on n'aurait pas pu rédiger
autrement la loi? Est-ce qu'on n'aurait pas dû commencer par
caractériser certains actes discriminatoires? Est-ce qu'on n'aurait pas
dû édicter certaines provisions qui constituent, qui
définissent, quand il y a infraction.
Au contraire, on pose un principe général, qui est bon en
soi, et ensuite on a l'air d'être tolérant envers des hommes qui
n'engageraient pas, envers des gens qui sont énumérés dans
les articles d'exception. Est-ce que le ministre ne devrait pas remettre
à plus tard l'étude de ce bill? Le fouiller davantage, essayer de
le rédiger de façon à ce que l'on apporte une
réel-
le contribution dans ce domaine. Quant à moi, Je le
répète, je suis fermement opposé à toute
discrimination, c'est l'un des sentiments les plus profonds chez-moi, pour
diverses raisons, au point de vue intellectuel, pour des raisons spirituelles,
dans l'optique de mes concepts chrétiens de la société, et
évidemment, pour des raisons évidentes, des raisons de
consonnance de nom, qui dans certaines occasions ont pu créer des
problèmes à certaines personnes. Il est facile d'être
contre la discrimination quand on a quelquefois l'impression qu'on en est la
victime, mais je vous le dis, ce n'est là qu'une des raisons
accessoires, mais la raison fondamentale, c'est j'aime à le croire, M.
le Président, ma conviction de l'égalité des hommes, et de
l'égalité d'oportunité que nous devons fournir à
tous les humains.
Encore une fois, puisqu'on veut apporter une contribution, une
contribution importante à la lutte contre la discrimination, qu'on le
fasse donc de la bonne manière, qu'on remette donc le bill pour nous le
présenter sous une forme plus acceptable, à une autre
session.
M. FORTIN: M. le Président, si j'ai bien compris le premier
argument du chef de l'Opposition, il semble prétendre que si nous avons
mis les mots: «... cependant, les distinctions, exclusion,
préférences fondées sur les qualifications exigées
pour un emploi déterminé ne sont pas considérés
comme des discriminations, » que ces mots dis-je, sont une espèce
d'aveu de complexe d'infériorité des Canadiens-Français
dans la province de Québec. Eh bien, je ne sais pas s'il était en
Chambre.
M. JOHNSON: Non.
M. FORTIN: ... lorsque j'ai cité la convention 111, j'ai dit et
je le répète.
M. JOHNSON: Ce n'est pas ce que j'ai dit, je ne répéterai
pas, ça pourrait fournir un prétexte à certaines
personnes.
M. FORTIN: Bien oui, ça pourrait fournir un prétexte, mais
c'est mot à mot la convention de Genève, la convention 111, alors
que cette convention a été rédigée par des
représentants des associations d'employeurs, des associations
d'employés et des représentants des pays qui font partie du
Bureau international du Congrès international du travail.
Encore une fois, cette phrase n'a pas pour but de dire: vous pouvez
faire de la discrimination pour des emplois supérieurs, au contraire
elle a pour but d'empêcher des poursuites inutiles. Ainsi, un employeur a
besoin d'un traducteur, évidemment, s'il veut employer un traducteur qui
traduit de l'espagnol au français, il va être obligé de
prendre quelqu'un qui connaît l'espagnol et le français, et s'il y
a un allemand ou une autre personne d'une autre langue quelconque, qui ne sait
pas ces deux langues-là, eh bien il va dire: évidemment mon cher
monsieur, je ne suis pas pour vous employer, et alors on ne pourra pas
l'accuser d'avoir fait de la discrimination à cause de la race ou de la
langue. C'est parce qu'il fallait une qualification spéciale.
Maintenant, il n'y a pas que le contremaîtres. Il y a dans les
métiers de la construction à l'heure actuelle, tous les apprentis
de première, deuxième, troisième et quatrième
année, des compagnons dans tous les métiers. Or, si dans un
chantier de construction, on a besoin d'un compagnon charpentier-menuisier ou
d'un machiniste, avec carte de compétence, ou d'un individu qui a sa
carte de chauffeur de bouilloires, eh bien, le fait qu'il soit Polonais ou
Anglais, ou Canadien-français, eh bien, si on lui dit: « Monsieur,
vous n'avez pas votre carte de compétence », on ne pourra pas
accuser l'employeur d'avoir fait de la discrimination, pour cette
raison-là. C'est simplement une mesure, si je peux dire, de protection
qui a été mise dans la convention internationale, et que nous
reproduisons dans le texte de loi.
Maintenant, le chef de l'Opposition a parlé de l'opinion
politique. Eh bien, je dois dire que d'après les rapports que nous avons
du Congrès international, c'est que les mots « opinion politique
» ont été ajoutés pour satisfaire les demandes des
pays communistes, et spécialement des pays où le communisme est
reconnu comme un parti politique, et c'était simplement pour rendre,
pour se rendre aux récriminations...
M. BELLEMARE: En 1957, la motion a été battue justement
par eux autres.
M. FORTIN: Alors.
M. BELLEMARE: En 1957.
M. FORTIN: Maintenant, dans la province de Québec, nous enlevons
ces mots à cause de l'article 60 de la Loi du Service Civil qui dit
qu'il est défendu à un fonctionnaire de faire de la politique.
Or, c'est pour être conforme à la Loi du Service Civil que nous
avons 6té...
M. JOHNSON: Voyons donc.
M. FORTIN: ... les mots « opinion politique ».
M. JOHNSON: Vous ne voudriez pas qu'on croit ça?
M. FORTIN: Certainement que c'est pour ça, c'est au point de
vue...
M. BELLEMARE: Ce sont les communistes qui ne veulent pas ça.
UNE VOIX: Voyons donc!
M. FORTIN: Et maintenant, on pourrait également nous dire que
nous voulons empêcher certaines Unions ouvrières qui voudraient
peut-être faire de la politique, alors, si par exemple, une Union
ouvrière décide d'être quoi? Faire de la politique pour le,
je ne nommerai pas de parti quelconque, eh bien, on dirait à un ouvrier:
« Monsieur, s'il y a un syndicat fermé, un atelier fermé
dans une usine. Notre syndicat a décidé de se lancer activement
dans la politique fédérale ou provinciale or, il y a un syndicat
fermé dans cette boutique, si vous voulez rentrer dans le syndicat, vous
allez être obligé d'adhérer au parti politique. »
Alors, c'est pour ça que nous l'avons enlevé, pur laisser la
liberté aux Unions ouvrières, et d'ailleurs l'opinion politique ,
ç'a été enlevée dans les autres provinces.
Quant aux femmes, eh bien, nous répétons encore une fois,
la convention de Genève, et je dois dire qu'il existe une situation de
fait dans la province de Québec. Dans aucune des ordonnances de la Loi
du salaire minimum, vous verrez un seul article qui fait de la discrimination
au point de vue de salaire, et au point de vue de travail pour les femmes.
Quant au reste, dans les autres conventions collectives, eh bien, nous avons un
régime spécial dans laprovince de Québec, nous avons notre
loi de la convention collective, et il convient aux parties, aux employeurs et
aux employés de déterminer les tâches, et de
déterminer les salaires pour les femmes, et je crois qu'à l'heure
actuelle dans les Unions ouvrières, les femmes sont dans les syndicats,
elles ont des représentants sur les bureaux de direction des syndicats,
et je rappelle seulement, par exemple le syndicat des employés de la
robe à Montréal, où c'est une union de femmes. Elles sont
fortement représentées dans les centrales syndicales, et elles
sont en mesure de protéger leurs droits. Je ne vois pas qu'il y ait
nécessité dans ce texte de loi de passer une mesure comme le
suggère le chef de l'Opposition et en même temps, le mot sexe dans
cette loi, nous voulons simplement dire ceci, c'est qu'on ne peut pas, à
un travail égal, refuser à une femme du travail à cause de
son sexe.
Et quant aux exceptions, eh bien, c'était la façon au
point de vue de technique législative la plus simple de dire dans la
définition du mot « employeur », au sens de la
présente loi, celui qui emploie moins de cinq salariés, et
deuxièmement les associations ou corporations sans but lucratif ne sont
pas censées être des employeurs au sens de la présente
loi.
M. RUSSELL: M. le Président, est-ce que je pourrais poser une
question au ministre. Simplement pour donner un exemple, savoir si
réellement je comprends bien son explication. Il a utilisé
tantôt le mot un homme qualifié pour chauffer une bouilloire,
chauffeur de bouilloire, qui a son certificat. Voici un cas où il y aura
l'employeur qui ne parle pas l'anglais et la personne qui se présentera
avec un certificat de chauffeur, ne parlera pas le français. S'il ne
peut l'employer, est-ce que ce sera de la discrimination suivant la loi?
M. FORTIN: Eh bien, évidemment, si l'employeur puis
l'employé ne sont pas capables de se comprendre, il va peut-être
manquer un peu de qualification de ce côté-là. Maintenant
strictement parlant, il pourra peut-être dire: « Monsieur, vous me
faites de la discrimination à cause de ma race.
M. RUSSELL; Bien, voici, M. le Président, j'aimerais que ce soit
clair. Suivant la loi, c'est de la discrimination. Il faudrait être
très clair, si on veut prévenir ces cas-là, il faudrait
les inclure dans la loi afin d'être certain qu'il n'y aura pas de ces cas
qui sont compliqués, le ministre le sait. Et je connais des cas, je
pourrais vous en citer, ça pourrait être vice-versa, où le
contremaître ne parle pas un mot d'anglais, comment va-t-il employer un
anglais?. Et à ce moment-là l'employé qui se sentira
lésé pourra-t-il faire une plainte au ministre puis justifier sa
plainte; « j'ai ma carte et on m'a fait de la discrimination, on ne m'a
pas donné l'emploi. »
M. FORTIN: Le texte de loi ne parle pas de la langue.
M. RUSSELL: Pardon?
M. FORTIN: Le texte de loi ne parle pas de discrimination à cause
de la langue. Si à un moment donné, un Polonais qui est au pays
depuis une semaine arrive sur un chantier puis il ne
sait parler ni le français ni l'anglais, que le
contremaître n'est pas capable de lui donner des ordres, et on lui dit;
« monsieur on ne peut pas vous employer à cause de ça
»; je ne vois pas que ce soit une question de discrimination.
M. LOUBIER: Mais, M. le ministre, si vous me permettez. Dans le cas de
l'exemple donné par le député de Shefford, j'ai bel et
bien l'impression que l'employé qui va s'engager pour chauffer la
bouilloire, le contremaître n'a pas à comprendre l'employé,
le contremaître devrait plutôt lui demander s'il comprend la
bouilloire. A ce moment-là, le cas va être réglé,
ils n'ont pas besoin de discuter ensemble, pourvu qu'il comprenne labouilloire,
même s'il ne comprend pas l'employeur...
M. FORTIN: A la condition que la bouilloire puisse parler anglais.
M. LE PRESIDENT: Alors l'article 1... M. BELLEMARE: Seulement A. M. LE
PRESIDENT: Article 1-A.
M. BELLEMARE: Article 1-B, employeur. Celui qui emploie, c'est là
que sont les restrictions. La Croix-Rouge, ça fait partie des
associations philantropiques?
M. FORTIN: C'est une question de fait qui sera appréciée
par la Commission, s'il y avait une cause à ce sujet-là. Je ne
suis pas en mesure d'étiqueter chacune des corporations. Si c'est une
association...
M. BELLEMARE: Philantropique.
M. FORTIN: ... sans but lucratif, exclusivement à des fins
religieuses...
M. BELLEMARE: Philantropique.
M. FORTIN: ... philantropique. Probablement qu'avec la conception que
nous avons de la Croix-Rouge, ce que nous connaissons de ses activités
probablement qu'elle serait incluse dans cette définition.
M. LE PRESIDENT: Article 1-B. Article 1-C.
M. BELLEMARE: C'est là que vient, M. le Président, dans
salariés, tout le noeud de la question que le chef de l'Opposition a
brillamment exposé, et qu'il dit là que les distinctions qui sont
faites, les exclusions qui sont données, les préférences,
sont en faveur des hauts postes dans l'administration. Les gérants, les
surintendants, les contremaîtres, les représentants de l'employeur
dans ses relations avec les salariés, ne comprennent pas les
salariés, et on verra à l'article 2 tout à l'heure
pourquoi. A la suite de ça, un administrateur, un officier de
corporation et on dit plus que ça, le mot « salarié »
ne comprend pas un domestique de maison.
M. FORTIN: Oui, je l'ai... M. BELLEMARE: Bien!
M. FORTIN: M. le Président, il est bien concevable que par
exemple une compagnie qui décide d'avoir un administrateur ou un
gérant et qu'elle met une annonce sur le journal et qu'elle dit; nous
avons besoin d'un gérant. Il est bien normal que cette compagnie par
exemple va prendre comme gérant une personne qui sera familière
avec cette compagnie-là.
M. BELLEMARE: Ce n'est pas nécessaire de mettre une annonce sur
les journaux, il y a un gérant qui vient de mourir, puis il y a deux
hommes qui sont là, dans l'usine, prêts à prendre la
position, il y en a un qui est Canadien anglais et l'autre est Canadien
français et il y en a un, parce qu'il est Canadien anglais, il est
placé. Le Canadien français lui il ne peut pas avoir de
promotion. Qu'est-ce que fait la discrimination? Il ne peut pas en avoir, il ne
peut pas plaider discrimination parce que la loi lui dira: vous ne tombez pas-
sous le coup de la loi.
M. FORTIN: Mais M. le Président...
M. BELLEMARE: C'est là qu'est toute l'importance du bill.
M. FORTIN: ... il faut comprendre que les administrateurs, non seulement
accomplissent un travail simplement matériel, mais ils ont à
administrer toute la compagnie, comprendre l'esprit de la compagnie, voir
à faire bénéficier la compagnie.
M. BELLEMARE: C'est ça, porteurs d'eau, scieurs de bois, pas de
possibilité d'avenir. Admis, le ministre l'a dit.
M. FORTIN: Cela s'applique...
M. BELLEMARE: C'est ça, il va falloir qu'il comprenne mieux les
Anglais que nous autres.
M. FORTIN: M. le Président...
M. BELLEMARE: C'est ça le ministre l'a admis.
M. FORTIN: ... le député de Champlain a l'air à
penser qu'il y a seulement les Anglais qui ont des compagnies, puis qui ont des
commerces prospères dans la province de Québec. Il y a des
Canadiens français également qui ont des commerces
prospères et qui seraient bien intéressés d'avoir comme
officiers de leur compagnie des gens de leur race, qui comprennent leur
mentalité.
M. BELLEMARE: Ah, le ministre...
M. FORTIN: ... c'est un des côtés ça aussi.
M. BELLEMARE: ... admet qu'il y a dans ce paragraphe-là, la
définition du salarié, il y a justement ce qui se pratique
actuellement depuis des années, la discrimination à l'endroit de
notre race. C'est là qu'elle est. Tous ceux qui sont appelés
à être gérant, surintendant, contremaître,
représentant des employeurs auprès des salariés, pas de
possibilité de promotion, absolument pas. Et vous autres, il n'y aura
pas de discrimination pour vous autres. On n'aura pas le droit de faire
uneplainte écrite au ministre, pas au ministre, à la
commission.
M. LE PRESIDENT: Adopté.
M. BELLEMARE: C'est absurde.
M. LE PRESIDENT: Article 1-D, adopté?
M. BELLEMARE: Article 1-D, pas d'objection. Article 1-E non plus.
Article 1-F là.
M. LE PRESIDENT: Article 1-F. Article 2.
M. BELLEMARE: L'article 2, M. le Président: « Aucun
employeur ni aucune personne... », c'est là qu'on arrive justement
avec la plainte que je porte contre la loi: « pour un employeur ou une
association d'employeurs n'exercera une discrimination dans l'embauchage, la
promotion, la mise à pied, le renvoi ou les conditions de travail
» pour tous ceux des petits salariés. Et puis quand ça
arrivera aux surintendants, aux gérants, aux contremaîtres, aux
administrateurs, aux officiers de compagnies, pour ceux-là, il n'y a pas
de question de discrimination: on peut en faire, on est couvert par la loi. On
aura simplement à dire: « Il faut des qualifications », et
là tout sera couvert, il ne pourra pas y avoir de poursuites faites
contre ces gens-là et on continuera à être des porteurs
d'eau et des scieurs de bois.
M. FORTIN: M. le Président, dans les autres provinces,...
M. BELLEMARE: Une loi libérale.
M. FORTIN: ... il n'y a pas la question raciale que le
député de Champlain vient de souligner et on trouve la même
disposition.
M. BELLEMARE: Pas la même mentalité, non plus. Pas la
même mentalité. Il y a, dans les autres provinces, une seule race
qui prime et vous le savez.
M. FORTIN: Bien oui, et ils ont cette disposition.
M. BELLEMARE: Pas bon!
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 3.
M. BELLEMARE: Encore la même chose ça, c'est toujours les
salariés.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 4.
M. BELLEMARE: Ici l'article 5, j'y vols une objection. « La
Commission doit vérifier toute plainte par écrit et dûment
signée. »Cela devrait être dans la loi au moins, pour ne pas
arriver demain matin que la Commission fasse une enquête et puis sur une
plainte qui est portée par n'importe qui, qui n'est pas signée.
Bien, mais c'est sûr, par écrit, M. le Président, mais
« dûment signée ». Elle peut être par
écrit et puis elle peut ne pas être signée.
M. FORTIN: Bien oui, mais évidemment, si elle n'est pas
signée, comment identifier qui a payé la plainte?
M. LESAGE: Quand vous recevez des lettres anonymes, vous mettez
ça au panier.
M. BELLEMARE: Oui mais, M. le Président, je dis, par exemple: Je,
Maurice Bellemare, déclare que j'ai subi de la discrimination par mon
employeur. Je ne signe pas.
M. LESAGE: Bien oui, mais votre nom y est.
M. BELLEMARE: Oui mais pourquoi pas dûment signée, une
plainte dûment signée?
M. LESAGE: Cela ne veut rien dire.
M. BELLEMARE: Ah! oui, ah! oui, parce qu'il y en a qui peuvent souvent,
pour faire de la discrimination, écrire des lettres au nom des autres.
Quand on vérifiera la lettre, si elle est réellement
signée, on dira: « Bien, c'est toi qui l'as signée, la
lettre », sûrement.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article...
M. BELLEMARE: La Commission doit vérifier toute plainte
écrite dûment signée. Qu'est-ce que ça change? Cela
change énormément pour la personne qui va la porter, la plainte.
Mais qu'est-ce que ça change pour le gouvernement dans la loi: une
lettre dûment signée?
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 6.
M. LESAGE: Non, non, un instant. Je n'ai pas d'objection.
M. BELLEMARE: Merci, M. le premier ministre. « Dûment
signée... »
M. LESAGE: « La Commission doit vérifier toute plainte par
écrit, dûment signée,...
M. BELLEMARE: «... par une personne... » M. LESAGE: ... par
une personne... »
M. BELLEMARE: C'est ça. Et à la fin, M. le
Président, pourquoi donner au ministre tant d'ouvrage? Pauvre ministre,
on ne finit plus de lui donner des responsabilités!
M. LESAGE: Bien oui, mais...
M. BELLEMARE: C'est effrayant, M. le Président, on vient de lui
donner un Code du travail qui est chargé, on vient de lui donner de
l'ouvrage épouvantable, là on dit: il n'y a pas une plainte qui
ne sera pas, après enquête, soumise au ministre. Cela n'a pas de
bon sens! La commission qui est là, la Commission des relations,
d'ailleurs c'est un juge qui est président de la Commission des salaires
minimums, c'est un homme compétent? Pourquoi ne pas laisser à la
Commission le soin de décider? Il faut ramener ça au ministre!
« La Commission fait rapport au ministre. » Imaginez-vous, ce
pauvre ministre, s'il se met à y avoir des requêtes écrites
par centaines. C'est trop d'ouvrage pour le ministre, il le sait.
M. FORTIN: M. le Président, le ministre ne s'est pas encore
plaint. Voici. Si on regarde bien le processus: la Commission, pour commencer,
lorsqu'elle reçoit une plainte...
M. BELLEMARE: Doit vérifier... M. FORTIN: ... elle
vérifie;... M. BELLEMARE: ... les plaintes.
M. FORTIN: ... elle va s'efforcer par conciliation de tâcher
d'entendre les parties.
M. BELLEMARE: Par téléphone.
M. FORTIN: Si elle ne réussit pas, elle fait une enquête
et, encore là, àlasulte de cette enquête, elle va essayer
de régler le problème et, enfin, si, à la suite
d'enquêtes, elle ne réussit pas encore une fois, là elle
fait rapport au ministre...
M. BELLEMARE: Non, non, non.
M. FORTIN: ... oui la Commission fait rapport au ministre du Travail de
chaque enquête...
M. BELLEMARE: Non, non: « La Commission fait rapport au ministre
de chaque enquête», ça veut dire de chaque décision
qui sera prise.
M. LESAGE: Bien oui, vous savez bien que ça va s'adresser au
sous-ministre et puis à l'assistant sous-ministre.
M. BELLEMARE: C'est trop d'ouvrage pour un ministre, c'est effrayant,
vous allez le faire mourir.
M. FORTIN: Maintenant, simplement un mot au député de
Champlain: en Ontario, ça fait à peu près dix ans ou
quinze ans que la loi existe; il y a eu en tout et partout dans ce nombre
d'années 175 cas et puis il y a eu, je pense, trois plaintes qui ont
été devant la Cour. Alors ce n'est pas si extraordinaire que
ça.
M. BELLEMARE: J'ai justement préparé ma question pour
l'année prochaine, pour la poser au feuilleton. Combien de cas soumis au
ministre?
M. FORTIN: Laissez-moi une chance de travailler!
M. LE PRESIDENT: Adopté.
M. BELLEMARE: C'est trop! M. LE PRESIDENT: Article 6.
M. BELLEMARE: Les amendes de $25 à $100. S'il s'agit d'une
association d'employeurs ou de salariés, d'une amende de $100 à
$1,000. Je trouve que la différence est trop minime de $25 à $100
quand il s'agit d'une association d'employeurs ou salariés, d'une amende
de $25 à $100... quand il s'agit d'une amende d'une association
d'employeurs ou salariés d'une amende de $100 à $1,000. Pour un
particulier c'est $25 à $100?
M. LESAGE: Oui.
M. BELLEMARE: Et puis pour une association, c'est de $100 à
$1,000.
M. LESAGE: Bien oui, et puis?
M. BELLEMARE: C'est la même discrimination, en somme?
M. LESAGE: C'est le juge qui va...
M. BELLEMARE: C'est la même discrimination, que ce soit fait par
un individu ou une association d'employeurs?
M. LESAGE: C'est le régime de toutes nos lois, ça.
M. BELLEMARE: Il n'y a pas tant de différence que ça, je
pense.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 7. Adopté.
M. BELLEMARE: Encore le pauvre ministre! Il faut une permission
écrite du ministre du Travail pour poursuivre. Quand on dit, monsieur,
que dans le bill de l'Hydro-Québec, on vient de dire que toute
pétition de droit, il faut ôter ça de nos lois. Et
là, M. le Président, une nouvelle...
M. LESAGE: Bien oui.
M. BELLEMARE: ... dans la discrimination, une pétition de droit,
une permission du ministre! Le ministre des Ressources naturelles a dit hier:
« Je suis donc heureux d'être le premier à enlever
ça, ces pétitions de droit-là dans nos lois ». Lui,
le lendemain soir, il arrive avec une pétition: Il faut une
pétition au ministre! C'est vrai, ça...
M. LESAGE: Bien non.
M. BELLEMARE: ... une poursuite pénale pour infraction n'est
intentée qu'avec l'autorisation écrite du ministre. Cela
équivaut à une pétition de droit, certainement.
M. LESAGE: M. le Président, je regrette. Mais, si le
député de Champlain veut reprendre sa bonne humeur
là...
M. BELLEMARE: Moi, j e ne suis pas choqué du tout! Ah! non.
M. LESAGE: La loi du dimanche, c'est la même chose.
M. JOHNSON: Ah! C'est différent ça. C'est une loi
fédérale, aucune poursuite ne peut être prise, à
moins...
M. LESAGE: ... d'autorisation par le procureur
général.
M. JOHNSON: ... d'autorisation par le procureur général.
Mais le député de Champlain a raison. C'est l'argument juridique
auquel aucun avocat n'avait pensé. Hier on a abolit la pétition
de droit, et aujourd'hui on la rétablit sous une forme
mitigée.
M. LESAGE: M. le Président, le chef de l'Opposition est en train
de s'amuser.
M. JOHNSON: Non.
M. BELLEMARE: Non, non. C'est le ministre des Richesses naturelles qui a
dit que c'était une bonne chose qu'elle disparaisse de nos lois. Il a
dit ça hier soir. Il a dit: « Je suis donc heureux que ça
disparaisse.»
M. LESAGE: La pétition de droit. Bien sûr.
M. BELLEMARE: Bien oui mais on...
M. LESAGE: Je l'avais dit bien avant lui.
M. BELLEMARE: Ah oui, mais là le ministre arrive ce soir avec un
article spécifique où il dit: « Bien ça prend une
autorisation de moi, si vous voulez poursuivre.»
M. LESAGE: Bien oui, autrement il peut y avoir des abus.
M. LE PRESIDENT: Adopté.
M. LESAGE: En tout cas vous le verrez.
M. BELLEMARE: Deux poids, deux mesures. Deux soirs, deux
veillées.
M. JOHNSON: On change de principe tous les soirs.
M. BELLEMARE: Ce n'est pas de ma faute ça. J'essaie de lui en
ôter et puis il ne veut pas. Je ne voudrais pas qu'il en ait trop. Il y
en a " trop d'ouvrage.
M. BEDARD (président du comité plénier): M. le
Président, j'ai l'honneur de faire rapport que le comité n'a pas
fini de délibérer et demande la permission de siéger de
nouveau.
M. HYDE (président): Quand siégera-t-il? A la même
séance? A la même séance. La résolution.
M. FORTIN: Il n'y a pas de résolution. Je pense que c'est une
erreur.
M. JOHNSON: Ah bon! M. FORTIN: Sa Majesté?
M. BELLEMARE: Non, il n'y a pas de résolution.
M. LESAGE: C'est un comité plénier. M. JOHNSON: Oui, il y
a une résolution.
M. LE PRESIDENT: D'après le feuilleton il y a une
résolution.
M. JOHNSON: Oui, oui.
M. LESAGE: Oui, entre parenthèses (Y compris Sa
Majesté).
M. BELLEMARE: Ah bon! Ah oui!
M. LE PRESIDENT: Son Excellence...
M. FORTIN: Son Excellence le lieutenant-gouverneur informé de la
résolution nous prie d'en prendre considération.
M. BELLEMARE: Et remercie ses loyaux et parfaits sujets.
M. LE PRESIDENT: M. Fortin propose que je quitte maintenant le fauteuil
pour que la Chambre se forme en comité pour étudier la
réso- lution relative au bill 67. Cette motion sera-t-elle
adoptée? Adoptée.
M. BEDARD (président du comité plénier): La
résolution, on en avait discuté évidemment sur le
bill.
M. JOHNSON: Cela va.
M. BEDARD (président du comité plénier):
Adoptée. M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que le
comité a adopté la résolution relative au bill No 67.
M. HYDE (président): M. Fortin propose que la résolution
soit maintenant lue et agréée. Cette motion sera-t-elle
adoptée? Adoptée. La Chambre de nouveau en comité
plénier sur le bill.
M. BEDARD (président du comité plénier): Article
8?
M. BELLEMARE: Adopté. M. LE PRESIDENT: Adopté.
M. LESAGE: Vous venez de faire votre B.A. de la journée.
M. BEDARD (président du comité plénier): M. le
Président, j'ai l'honneur de faire rapport que le comité a
adopté le bill No 67 avec un amendement,
M. HYDE (président): M. Fortinpropose que l'amendement soit
maintenant lu et agrée. Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adoptée. Troisième lecture?
M. JOHNSON: Demain.
M. LE PRESIDENT: A la prochaine séance? A la prochaine
séance.
M. LESAGE: Alors bill 68.
M. LE PRESIDENT: M. Laporte propose la deuxième lecture du bill
68: Loi concernant la ville de Montréal.
M. LAPORTE: Pas de discours, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: La motion de deuxième lecture sera-t-elle
adoptée?
M. BELLEMARE: Oui.
M. LE PRESIDENT: Adoptée.
M. LE GREFFIER ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: M. Laporte propose que je quitte maintenant le fauteuil
pour que la Chambre se forme en comité plénier pour
étudier le bill 68. Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adoptée.
M. BEDARD (président du comité plénier): Bill 68,
article 1.
M. LAPORTE: M. le Président, l'article 1 a tout simplement pour
but de prolonger de 30 à 180 jours le délai fixé dans la
charte de Montréal pour la nomination du remplaçant du directeur
des services. Il y a un chapitre dans la charte de Montréal qui traite
du directeur des services. Le premier article dit: « La ville doit nommer
un directeur des services.» Et un peu plus loin à l'article 146,
on dit que si le poste devient vacant, on doit le nommer dans les trente
jours.
Les autorités de Montréal, après nous avoir appris
la démission du titulaire actuel, nous ont dit qu'elles songeaient, les
autorités, à réorganiser la fonction de directeur des
services, et qu'elles préféreraient avant de nommer un titulaire
définitif, et qu'actuellement ce serait seulement quelqu'un qui serait
sur une base temporaire.
M. DOZOIS: M. le Président, je crois qu'avec l'amendement elles
vont pouvoir nommer un directeur intérimaire.
M. LAPORTE: Oui. M. DOZOIS: En plus? M. LAPORTE: Oui.
M. DOZOIS: ... et elles auront six mois pour nommer leur directeur
permanent. Je n'ai pas d'objection.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 2.
M. LAPORTE: Deuxième article, M. le Président, c'est pour
simplifier la procédure d'expropriation ou d'achat de gré
à gré de certains immeubles qui pourraient être
utilisés à la fois par la cité ou par la ville de
Montréal et par le gouvernement de la province de Québec: la
ville de Montréal pour la construction du métro, la ville de
Montréal pour la construction d'un tronçon de la route
transcanadienne ou, dans d'autres secteurs, pour la construction de la voie de
service par la ville de Montréal et pour la route transcanadienne par le
gouvernement de la province de Québec. On sait que, lorsqu'il s'agit
d'une expropriation par la province, c'est le Code de procédure civile
et, lorsqu'il s'agit d'expropriation par la ville, c'est la Charte de
Montréal. Alors, pour simplifier, c'est la ville qui va exproprier et la
province remboursera aux autorités de Montréal les sommes qui
représenteront la mise de fonds de la province.
M. DOZOIS: M. le Président, j'avais averti le ministre des
Affaires municipales que je lui poserais une question au sujet de cet
amendement et je l'avais averti, hier, de façon à ce qu'il puisse
se procurer le renseignement.
Ma question était celle-ci; est-ce que le ministre peut nous dire
quelle sera le montant impliqué dans cette autorisation donnée
à la ville de Montréal? Est-ce qu'il a une idée...
M. LAPORTE: Oui.
M. DOZOIS: ... du montant des expropriations que demandera le ministre
de la Voirie?
M. DOZOIS: Pour des raisons que toute cette Chambre va comprendre, je
n'ai pas eu le temps, depuis hier, de me procurer en détail, ou d'une
façon très précise, le montant, je pourrai le donner au
moment de la troisième lecture si on ne la passe pas ce soir. Mais il
s'agit, en gros, d'un montant pour la province de $35,000,000,
d'expropriations.
M. DOZOIS: Peut-être moins.
M. LESAGE: C'est $35,000,000, moins...
M. DOZOIS: Peut-être moins que $35,000,000...
M. LAPORTE: Alors, je m'excuse, je corrige, $35,000,000 moins la part de
la cité de Montréal, de la ville de Montréal.
M. DOZOIS: Moins la part de la cité?
M. LESAGE: Oui, oui.
M. LAPORTE: De la ville de Montréal.
M. DOZOIS: Moins la part de la ville, oui. C'est quand même un
montant appréciable.
M. LESAGE: Evidemment,...
M. LAPORTE: C'est quand même quoi? M. DOZOIS: Un montant
appréciable.
M. LESAGE: M. le Président, je parle de mémoire.
D'après les discussions au Conseil des ministres et des renseignements
que j'ai obtenus du ministre de la Voirie, c'est $35,000,000 moins la part de
la cité de Montréal.
M. DOZOIS: Maintenant, M. le Président, avant...
M. LESAGE: C'est-à-dire le coût total $35,000,000.
M. DOZOIS: Très bien. Est-ce qu'il y a une entente quelconque qui
est intervenue, pas sur papier, mais verbalement, au moins, entre le
ministère de la Voirie et la Cité de Montréal? Est-ce que
la province s'est engagée à rembourser la municipalité de
Montréal, la ville de Montréal, dès qu'elle aura fait des
déboursés quant à ses expropriations?
M. LAPORTE: J'ai rencontré, hier, l'expropriateur en chef de la
province qui m'a dit que les autorités de la province et celles de la
ville de Montréal se sont entendues sur la procédure sur les
montants qui seraient versés au fur et à mesure des
expropriations parce que la ville, étant obligée de
déposer, en vertu de la Loi, deux fois la valeur municipale ou autre
chose, mais il y a eu entente... Une fois?... Il y a eu entente quant à
la procédure au moment où les sommes d'argent seront
versées par la province de Québec. L'information est d'hier.
M. DOZOIS: Je veux que ce soit bien entendu parce que, en vertu de la
Charte, de Montréal, et dans ces cas je suis convaincu que
Montréal prendra possession préalable en vertu de la Charte, la
ville de Montréal est obligée, dans les 30 jours, de
déposer l'équivalent de la valeur municipale.
M. LESAGE: C'est ça!
M. DOZOIS: Et le montant est versé à l'exproprié
comme acompte, si l'on veut, sur le montant de l'indemnité qui sera
fixé plus tard. Maintenant, il ne faudrait pas obliger la cité de
Montréal à financer les expropriations pour le compte de la
province et que Montréal ait à supporter, même si
c'était pendant quelques mois seulement, des déboursés de
l'ordre de plusieurs millions. On me dira que la Cité est
autorisée, ou la ville est autorisée à acquérir et
que, si la province ne veut pas s'engager à rembourser, la ville n'a
qu'à ne pas procéder. Mais, étant donné qu'il y a
des projets conjoints, ou des projets qui se chevauchent, comme c'est le cas de
la rue Vitré où il y aura sous la terre le métro et au
niveau ou dans les airs, si l'on veut, la route Trans-Canada, la ville de
Montréal sera peut-être obligée de procéder quand
même à ces expropriations. Il ne faudrait pas placer la ville dans
la situation où elle financera, même si c'est pendant quelques
mois, les expropriations de la province.
Maintenant, j'imagine que laprovince se rend compte que Montréal,
procédant en vertu de sa Charte, les sentences sont sujettes à
appel jusqu'à la Cour suprême depuis deux ans, tandis que pour la
province, je pense que... Est-ce qu'elle peut en appeler également, des
sentences, pour les expropriations de la province?
M. LESAGE: Oui.
M. DOZOIS: Et cela, jusqu'à la Cour suprême?
M. LESAGE: Oui.
M. DOZOIS: Oui. Pas de différence?
M. LESAGE: M. le Président, en réponse
générale aux doutes du député de St-Jacques,
j'attire son attention sur le premier budget supplémentaire: Route
transcanadienne; somme: $10,501,000; contribution du gouvernement du Canada,
$10,500,000.
C'est exactement pour ça, ç'a été
expliqué dans le temps, et je dois dire que les disponibilités de
caisse du gouvernement provincial, à l'heure actuelle, et pour les mois
à venir, sont excellentes, et pour les mois à venir les
prévisions sont excellentes.
M. DOZOIS: Le ministre du Revenu remplit bien son rôle.
M. LESAGE: Oui le ministre du Revenu fait un excellent travail.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 3 adopté?
M. JOHNSON: Non, non, j'ai une question à poser au ministre. 956
est présenté sous une rédaction que je trouve un peu
illogique. On dit que « la ville est autorisée à
acquérir de gré à gré où par expropriation
tous immeubles, partie d'immeubles ou servitudes qu'elle juge
appropriés, c'est-à-dire la ville, pour les cé-
der au ministre de la Voirie en vue de la construction d'un secteur de
la route transcanadienne ». Où est-ce qu'est l'autorité de
planification à ce moment-là? La ville elle décidera que
telle et telle servitude, tel immeuble, où telle partie d'immeuble, il
est approprié, il est tout à fait approprié de
l'exproprier pour le céder au ministre. C'est une question de
rédaction, je comprends qu'en somme on va s'entendre, mais on laisse
à la ville, là, toute liberté d'exproprier tout ce qu'elle
juge approprié d'exproprier pour le céder au ministre de la
Voirie.
M. LAPORTE: Dans le secteur de la route transcanadienne.
M. JOHNSON: Oui, oui.
M. LAPORTE: Ce n'est pas très important.
M. JOHNSON: Mais pourquoi la ville déciderait qu'elle doit
exproprier telle partie? Y a-t-il une raison à ça? Pourquoi ce
n'est pas la province qui dit à la ville: « C'est ça qu'on
veut, procédez par expropriation, et on vous remboursera. »
M. LAPORTE; Au fait, c'est ça qui va arriver.
M. JOHNSON: Pourquoi le rédiger d'abord de façon à
donner l'impression que c'est la ville qui décide ce qu'elle va
exproprier, puis ensuite elle se tourne au ministère de la Voirie, puis
elle dit: « Prenez la. »
M. LAPORTE: Bien oui, il y a deux choses dans ça, il y a une
décision, il y a une décision illégale d'exproprier, c'est
la ville qui décide d'exproprier après entente avec la province
de Québec.
M. LESAGE: C'est la province qui paye.
M. LAPORTE: ... La décision dont il est question ici c'est une
décision d'ordre légal.
M. JOHNSON: Très bien.
M. LESAGE: C'est la province qui paye.
M. JOHNSON: Mais la détermination des immeubles des parties
d'immeubles ou des servitudes qu'il faut exproprier, on laisse ça
à la ville.
M. LAPORTE: Mais, si la ville décide d'exproprier des choses dont
la province n'a pas besoin, ils vont courir après le paiement. Si elle
n'en a pas besoin.
M. LESAGE: C'est évident.
M. LAPORTE: C'est pour ça qu'il faut nécessairement qu'il
y ait entente, parce que si la ville exproprie des choses dont la province ne
veut pas, elle ne sera pas payée. La ville de Montréal ne sera
pas payée.
M. JOHNSON: Qu'elle juge appropriée à la demande du
ministre de la Voirie.
M. LESAGE: Bien oui.
M. JOHNSON: Si on mettait quelque part un qualificatif là que
c'est fait à la demande du ministre de la Voirie pour éviter
à un moment donné une situation qui...
M. LESAGE: Bien oui, il n'y a pas de difficultés,
M. JOHNSON: ... les administrations changent, les directeurs
changent...
M. LESAGE: Bien oui, il y a une entente parfaite à l'heure
actuelle sur le tracé de la route Trans-Canada du nord au sud entre la
ville de Montréal, le ministère de la Voirie et les
autorités fédérales. Pourquoi chercher comme disent les
anglais « the nigger in a wood pile ».
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 3. M. JOHNSON: Mauvaise
rédaction. M. LE PRESIDENT: Adopté.
UNE VOIX: Faire la discrimination « the nigger in a wood pile
».
M. BEDARD (président du comité plénier): M. le
Président le comité a adopté le bill numéro 68.
M. HYDE (président): Troisième lecture. Troisième
lecture adoptée?
M. LESAGE: Adoptée.
M. LE GREFFIER ADJOINT: Troisième lecture de ce bill. Third
reading of this bill.
M. LESAGE: M. le Président, il est onze
heures et vingt, nous avons fait une grosse journée.
M. GAGNON: On veut finir.
M. LESAGE: Moi aussi je veux, je vous le garantis, et je pense qu'on va
finir plus rapidement si on se couche plus de bonne heure...
M. GAGNON: Possible.
M. LESAGE: ... et demain j'aurai une motion non annoncée à
présenter pour le paiement des indemnités parlementaires.
M. GOSSELIN: Une augmentation?
M. GAGNON: Pas une soustraction non plus?
M. LESAGE: Non, c'est le contraire. C'est que notre loi n'est pas
complète.
M. GAGNON: Il y a longtemps qu'on le constate.
M. LESAGE: Il faudra qu'elle soit amendée l'an prochain dans le
même sens que la loi fédérale a été
amendée en 1963, et je citerai l'amendement demain, en présentant
ma motion pour que tous ceux qui ont été malades, prenez par
exemple, comme M. Lorrain, M. Caron et d'autres, reçoivent leur
indemnité.
M. BERTRAND (Missisquoi): M. Binet.
M. LESAGE: J'ai été député à Ottawa
pendant treize ans et à toutes les fins de session, il y avait toujours
la même motion, mais en 1963, on a décidé d'amender la loi
fédérale pour prévoir que, dans les cas de maladie, et
dans les cas d'absence par devoir, il n'y avait pas d'amende à payer.
C'est l'intention déterminée du gouvernement d'apporter le
même amendement à la loi de la législature l'an prochain.
Et pour cette année, étant donné que notre loi est
incomplète, qu'elle crée des injustices, je présenterai la
motion en question dont j'ai d'ailleurs montré le texte au
député de St-Jacques. Ensuite, nous prendrons la troisième
lecture de la Loi sur la discrimination dans l'emploi, la deuxième
lecture du Bill concernant la cité de Québec, pas
compliqué, si les députés le veulent, après
l'examen qu'ils auront faite de la première lecture du bill concernant
l'Ile Jésus, le discuter en deuxième lecture demain, s'il y a
consentement unanime. Je n'insiste pas, mais s'il y a consentement unanime,
nous serons prêts. Et quant aux crédits qui restent, il reste ceux
du secrétariat de la province qui viendront d'abord, et ensuite,
à cause de certains arrangements, de certains députés qui
sont spécialement intéressés au ministère des
Finances, les crédits du ministère des Finances, contrairement
à ce que j'avais annoncé seront présentés avant
ceux du Conseil exécutif.
M. LESAGE: ... seront présentés avant ceux du Conseil
exécutif.
M. JOHNSON: Alors, la poire pour la soif, là, c'est le Conseil
exécutif?
M. LESAGE: Bien, c'était le ministère des Finances, mais
on est...
M. JOHNSON: Cela me va...
M. LESAGE: Le chef de l'Opposition, enfin, j'ai eu des conversations
avec de ses collègues qui ont pris des dispositions pour leurs vacances,
et qui préfèrent étudier le ministère...
M. JOHNSON: Cela me va.
M. LESAGE: ... des Finances avant le Conseil exécutif.
M. BELLEMARE: On va tout finir ensemble.
M. LESAGE: Oui, je l'espère bien, moi, j'ai l'impression, M. le
Président, que nous pourrons avoir la prorogation vers la fin de
l'après-midi vendredi.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que ce sera pour demain, à dix
heures?
M. LESAGE: Dix heures demain matin.
M. LE PRESIDENT: Moi, franchement, parlant sur la motion d'ajournement,
je pense à nos employés à la transcription des
débats, et s'il m'était permis de faire une suggestion, si on
prévoit la possibilité d'avoir le temps, même si on
était pour commencer vers midi ou midi et demi, ça donnerait une
chance aux jeunes filles qui travaillent en bas, pendant de longues heures,
pour prendre leur « lunch » avant de commencer les travaux...
M. LESAGE: M. le Président, quant à cela je serais bien
prêt à m'engager d'avance à ce que, demain, il y ait
ajournement de midi et demi à deux heures.
M. JOHNSON: C'est ça.
M. BERTRAND (Missisquoi): C'est raisonnable.
M. JOHNSON: Oui, ça va.
M. LE SAGE: Parce que nous avons fait assez de progrès maintenant
pour nous per- mettre de ...
M. BERTRAND (Missisquoi): Oui. Alors, à dix heures demain
matin?
M. LESAGE: Là, on verra pour demain soir.
M. LE PRESIDENT: Alors la Chambre est ajournée à dix
heures, demain matin.