Par Frédéric Lemieux
Un portrait du Québec et du Canada
Le Canada compte désormais dix provinces avec l’entrée de Terre-Neuve dans la Confédération, le 31 mars 1949. Joseph Roberts Smallwood, homme politique de Terre-Neuve – une colonie sous la tutelle de la Grande-Bretagne –, prendra d’ailleurs plaisir à se qualifier lui-même comme le dernier Père vivant de la Confédération. La population terre-neuvienne avait voté en faveur de la Confédération, à 52,3 %, après un deuxième référendum.
Au Québec, en 1949, la compagnie Iron Ore se lance dans l’exploitation du minerai de fer de la Côte-Nord et construit un chemin de 900 km entre Sept-Îles et Schefferville. Des milliers d’ouvriers vont travailler à ce chantier. Le gouvernement se félicite de ces progrès qui ouvrent la frontière du « Nouveau-Québec ».
À Québec, l’Université Laval, qui s’apprête à célébrer son centenaire en 1952, planifie son futur déménagement du Vieux-Québec vers ce nouveau campus moderne qui sera construit sur un terrain boisé appartenant au Séminaire, à Sainte-Foy.
À propos des universités et de leur financement, le gouvernement surveille d’un œil critique la création, le 8 avril 1949, d’une commission royale d’enquête du gouvernement fédéral portant sur l’avancement des lettres, des arts et des sciences au Canada (commission Massey). La culture étant un domaine exclusivement de compétence provinciale, Québec y voit une nouvelle offensive de centralisation d’Ottawa.
Sur la scène culturelle, Gabrielle Roy publie son deuxième roman, La petite poule d’eau. On découvre aussi une jeune écrivaine de Sainte-Catherine-de-Fossambault (Portneuf); en 1950, Anne Hébert publie Le torent, un recueil de nouvelles et de récits qui lance sa carrière. Au cinéma, Jean-Yves Bigras produit Les Lumières de ma ville et Paul Gury signe la réalisation de Séraphin, la suite du célèbre film Un homme et son péché.
Un fait divers qui marquera les annales et les imaginations est l’écrasement d’un DC-3 de la Canadian Pacific Airlines, à Sault-au-Cochon dans Charlevoix, qui fait 23 victimes, le 9 septembre 1949. Albert Guay, avec l’aide de complices, avait mis une bombe à bord pour se débarrasser de son épouse. Le procès qui s’ensuivra sera retentissant et inspirera à Roger Lemelin la trame de son roman Le crime d’Ovide Plouffe.
Le contexte politique québécois
L’Union nationale est au faîte de sa puissance depuis les élections de juillet 1948. On sait qu’avec 51 % des voix exprimées, le parti de Maurice Duplessis a remporté la victoire dans 82 des 92 comtés de la province. Cette force politique encourage le premier ministre à appuyer les conservateurs de George Drew aux élections fédérales du 27 juin 1949. Malgré cet appui, les libéraux fédéraux de Louis Saint-Laurent sont élus avec une forte majorité au Québec, ne laissant seulement que deux députés conservateurs surnager dans cette mer libérale.
Le règlement de la grève de l’amiante de 1949 est encore tout frais dans la mémoire des Québécois au moment de l’ouverture de la session provinciale. Les grévistes sont retournés au travail après plusieurs mois de violence déclenchée au départ par le projet de code du travail de l’Union nationale. En décembre, l’arbitrage vient conclure ce pénible épisode de l’histoire des relations de travail au Québec. Avec Duplessis comme conciliateur et la médiation de l’archevêque de Québec, Mgr Maurice Roy, tout se règle entre les dirigeants des compagnies et les principaux chefs syndicaux peu avant le jour de l’An 1950. L’intervention de l’épiscopat dans ce conflit de travail a laissé des traces. Et l’on verra durant la session que le gouvernement Duplessis a l’intention de montrer qui dirige au Québec dans les relations de travail.
Pour l’ouverture de l’Année sainte, décrétée par le pape Pie XII, les ministres Albiny Paquette et Antonio Barrette sont reçus par le pape au Vatican durant la période des fêtes. Leur présence coïncide avec celle de plusieurs évêques québécois venus informer la hiérarchie des dissensions au sein de l’épiscopat causées par Mgr Joseph Charbonneau, archevêque de Montréal. Les mauvaises relations de ce dernier avec ses pairs sur la question scolaire et l’administration déficiente de son diocèse, pour n’en citer que quelques-unes, seraient parmi les raisons qui encouragent Rome à démettre Charbonneau de ses fonctions. Le principal intéressé en reçoit la nouvelle en janvier 1950. Son départ précipité fait sensation dans l’opinion publique. L’appui de l’archevêque aux grévistes d’Asbestos laisse croire à plusieurs que c’est Duplessis qui obtint son renvoi. Dès le mois de mars, Mgr Paul-Émile Léger est nommé archevêque de Montréal et est sacré à Rome le 26 avril.
Alors que la conférence fédérale-provinciale de 1946 portait sur la taxation et les champs de compétence, le sommet de janvier 1950 est voué exclusivement à l’étude de la Constitution. Louis Saint-Laurent veut s’entendre avec les provinces pour définir un mode d’amendement, pierre d’achoppement traditionnelle des négociations. Tenue le 10 janvier, cette conférence repousse à la mi-février le début de la session parlementaire de Québec. La délégation menée par Duplessis demande la disparition du droit de désaveu et l’abrogation des amendements fédéraux de 1949. Les provinces, et surtout le Québec, craignent toutes que la formule d’amendement voulue par Ottawa ne devienne une menace à l’autonomie provinciale. Incapables d’obtenir de garanties, elles restent sur leurs positions. Duplessis et Saint-Laurent échangeront par la suite plusieurs lettres sur la question dans le cadre de cette importante ronde constitutionnelle, dont le prochain arrêt aura lieu à Québec à l’automne 1950.
Aussi, Duplessis conteste devant la Cour suprême le droit du gouvernement fédéral de créer une régie des loyers (janvier 1950). Il s’empressera, par la suite, de légiférer dans ce domaine en 1951.
Montréal vit de nombreux problèmes de moralité et de croissance dus à l’essor économique d’après-guerre. Le maire de Montréal, Camillien Houde, fait appel au gouvernement pour trouver une solution aux problèmes de transport grandissants occasionnés par le développement fulgurant des banlieues.
Sur le plan social, le crime organisé, la corruption et la prostitution règnent en maîtres. Fin 1949, une campagne contre l’immoralité s’organise sous l’impulsion de personnalités montréalaises dont Le Devoir se fait le porte-voix. Le fer de lance de ce mouvement est sans contredit Pacifique Plante, ex-assistant directeur de la police municipale, qui dénonce, par une série d’articles dans Le Devoir, la tolérance des forces de l’ordre et de l’administration municipale envers les activités de la pègre. Sa croisade est appuyée notamment par Pierre Desmarais, président du Conseil exécutif de la Ville, qui rejoint le clergé, les comités de moralité publique et autres associations comme les ligues du Sacré-Cœur et le Comité d’action catholique.
En mars 1950, cette mouvance obtient des tribunaux la tenue d’une enquête sur l’administration de la police montréalaise avec Plante et Jean Drapeau comme avocats de la poursuite. Ce sera le début de l’enquête menée par le juge François Caron qui, jusqu’en 1953, fera grand bruit et lancera véritablement la carrière politique de Drapeau.
En Chambre, l’opposition est en pleine reconstruction après la cuisante défaite de 1948. Le seul député indépendant élu, René Chaloult, quitte pour l’Europe peu après le début de la session pour récupérer d’un accident de la circulation. George Marler remplace Adélard Godbout et agit à titre de chef intérimaire de l’opposition jusqu’à ce qu’un nouveau chef soit élu lors de la convention prévue pour le 19 mai suivant.
Le discours du trône
En l’absence du lieutenant-gouverneur Eugène Fiset, retenu chez lui par la maladie, c’est le juge en chef Antonin Galipeault – ancien Orateur de l’Assemblée législative – qui prononce le discours du trône.
Les proposeur et secondeur de l’adresse en réponse au discours du trône sont Gérard Thibeault, député de Montréal-Mercier, et Warwick Fox, député de Brome. Hormis les deux chefs, plusieurs députés prononcent de grands discours. Du côté de l’opposition, signalons René Chaloult, Lionel Ross et Dave Rochon. Ce dernier dénonce avec force la nonchalance de la police montréalaise dans la répression du crime. Chez les ministériels, les honorables Antoine Rivard et Onésime Gagnon se signalent respectivement par leurs discours sur la francisation du nom de Spencer Wood en Bois-de-Coulonge et lors de l’adoption du fleurdelisé. Les honorables Omer Côté, Paul Sauvé, Antonio Talbot et Antonio Barrette témoignent, quant à eux, avec éloquence des progrès de la province dans leur sphère ministérielle respective.
La lutte contre l’immoralité et la censure
L’étude des crédits du procureur général (et premier ministre) est l’occasion pour l’opposition de dénoncer la situation qui prévaut à Montréal : preneurs de paris illégaux, débits de boissons clandestins, maisons closes. Le premier ministre se défend en laissant à l’administration municipale l’entière liberté en cette matière. En même temps, Duplessis fait preuve de réalisme à l’égard de la nature humaine : pour lui, il est illusoire de penser la contrôler. Il avertit également que l’opposition, par ses dénonciations, risque de nuire à la réputation de Montréal à l’étranger.
Le gouvernement combat cependant avec vigueur la prolifération des publications obscènes. Une loi est adoptée pour donner au Bureau de censure du cinéma l’autorité de saisir et d’imposer des amendes aux « fripouilles » qui « cachent des saletés sous des piles de journaux », comme le dit le premier ministre. Il faut en effet protéger la morale publique et l’âme de la jeunesse de ce « poison ». (7 mars 1950)
Dans un autre registre, la loi sur l’instauration d’une loterie vise à accroître les revenus que le gouvernement veut consacrer à l’hygiène publique et à l’instruction publique. Bien que le Code criminel interdise ce type de loterie (une compétence fédérale), Duplessis demande expressément à Ottawa de faire une exception. Les détracteurs de la mesure répondent que partout dans le monde, les profits générés par des loteries ont été négligeables en plus de causer des problèmes sociaux.
La lutte contre les avancées du communisme n’est pas en reste. La loi sur l’ordre public empêche toute tentative d’affiliation syndicale des pompiers et des policiers à des « unions » interprovinciales ou internationales. Déjà, Duplessis voit d’un mauvais œil l’appartenance de ces corps professionnels à une fédération provinciale dirigée par Guy-Merrill Desaulniers, l’ancien chef de la Co-operative Commonwealth Federation (CCF) au Québec. Pour le gouvernement, la sécurité et l’intérêt financier des citoyens du Québec doivent être protégés contre toute menace de grève décidée par un syndicat étranger déconnecté du bien-être local.
Ces arguments ne sont pas nouveaux. En février 1922, les travaux du Parlement avaient été dérangés par une grève des typographes affiliés à l’Union internationale des typographes. Louis-Alexandre Taschereau avait alors dénoncé leur obéissance à un ordre de grève décidé aux États-Unis et prôné en faveur d’une affiliation des ouvriers à un syndicat catholique local.
Les relations ouvrières
La grève de l’amiante de 1949 a provoqué au sein de l’Église une nouvelle réflexion sur les relations de travail, la justice sociale et le droit syndical. L’implication dans cette affaire de l’archevêque de Montréal, Mgr Charbonneau, a ramené au cœur de l’actualité les principes de la doctrine sociale de l’Église et l’importance pour les autorités cléricales de savoir les rappeler à temps et à contretemps.
Le 20 mars 1950, l’Assemblée des évêques publie une lettre ouverte sur la question ouvrière, lettre qui crée un malaise du côté du gouvernement québécois. Duplessis charge Antonio Barrette, ministre du Travail, de répondre en Chambre à la lettre épiscopale. Ce dernier déclare : « La justice sociale existe chez nous. C’est ici qu’il y a des leçons à prendre. Que l’on ne vienne pas nous en donner! » Pour donner du poids à sa réponse, le gouvernement fait sténographier et publier intégralement sous forme de brochure le discours du ministre.
L’agriculture
La Chambre vote des augmentations de budget pour le crédit agricole, l’Office de l’électrification rurale et le Service d’aide à l’habitation familiale. Dans ce dernier cas, la hausse est due au succès des coopératives d’habitation qui, partout dans la province, construisent des maisons pour tenter d’endiguer la crise du logement et aider les familles à se loger à un prix raisonnable.
Dans le domaine de la colonisation, malgré les difficultés de recruter des candidats pour les nouveaux centres, le gouvernement institue l’Ordre du mérite du défricheur. Cette distinction offerte aux pionniers des régions dites neuves veut souligner des efforts qui, trop souvent, ne peuvent être reconnus par l’Ordre du mérite agricole, fondé par Honoré Mercier en 1889 et réservé aux agriculteurs bien établis.
L’Ordre du mérite du défricheur reprend donc la même formule que sa contrepartie agricole pour honorer ses lauréats : concours et visite de juges, catégorisation des décorations, banquet tenu à Québec en compagnie du premier ministre et de tout le gratin colonisateur (prêtres, sous-ministres, sociétés de colonisation). Tout cela cherche à susciter chez les colons « une légitime fierté de leurs succès ».
La protection de la jeunesse
Sur le plan social, la loi instituant les cours de bien-être social aborde la délinquance juvénile sous un nouvel angle. Désormais, les jeunes délinquants seront jugés par un tribunal soucieux de dissiper les connotations négatives et le caractère pénal des anciennes cours. Deux autres lois créent les « écoles de protection », en remplacement des « écoles de réforme » et des « écoles d’industrie », de façon à protéger les enfants des « dangers moraux ou physiques » les menaçant dans leur famille ou dans d’autres circonstances spéciales. L’enseignement dispensé dans ces établissements cherche à inculquer aux enfants de saines valeurs et le sens des responsabilités, plutôt que de les enfermer dans une atmosphère punitive.
Une autre loi est votée pour créer des institutions pour les détenus souffrant d’aliénation mentale. Le gouvernement sépare ces cas spéciaux des détenus ordinaires en tenant compte des avancées récentes de la médecine qui considère désormais les troubles mentaux comme une maladie.
Les ressources naturelles
Le gouvernement donne la permission à l’Aluminum Company of Canada de développer une autre portion de la rivière Péribonka. Depuis décembre 1949, des représentants de la compagnie demandent au premier ministre le droit de produire de l’énergie supplémentaire pour leur usine d’Arvida. Le projet initial prévoyait la construction d’un barrage sur la Péribonka à condition de pouvoir détourner la rivière Bersimis. Mais les gens de la Côte-Nord, Mgr Napoléon-Alexandre Labrie en tête, s’opposent à cette possibilité. Après des pourparlers, Duplessis accorde à l’Aluminum Company le droit de harnacher la Péribonka sans toucher à la Bersimis, qui demeure réservée uniquement au développement de la Côte-Nord.
Les régions minières du Nord-Ouest du Québec demandent elles aussi davantage d’électricité pour se développer. Le gouvernement autorise la construction d’un nouveau barrage sur le Rapide 1 et le cède à l’Hydro-Québec à des conditions jugées avantageuses. À cette centrale s’ajoute la cession des installations hydroélectriques du rapide Cadillac et du réservoir Dozois, appartenant aussi au gouvernement. Pour Duplessis, ces mesures vont assurer le développement de la région. Pour l’opposition, cette vente n’est qu’une excuse pour aider le trésorier provincial, on le verra plus loin, à boucler son exercice financier grâce aux 19 millions de dollars que rapporte cet échange d’actifs gouvernementaux.
Le règlement de la question de la seigneurie de Mingan fait disparaître les derniers vestiges de la tenure seigneuriale des terres au Québec. Acheté en octobre 1949 par le gouvernement, ce territoire couvre 240 km de longueur sur 10 km de profondeur entre Sept-Îles et Havre-Saint-Pierre. On souhaite donner des titres clairs à ses habitants et permettre l’exploitation d’un territoire forestier de 32 000 km carrés enclavé à l’intérieur des terres. Lors de l’examen de ce dossier, le chef de l’opposition déplore l’absence de pièces justificatives prouvant que l’on a évalué correctement le prix d’achat de la seigneurie.
La voirie et le pont Duplessis
Le boulevard Talbot reliant Québec à Chicoutimi via le parc des Laurentides est pratiquement terminé à l’hiver 1950. Le ministre Antonio Talbot, dont la route porte le nom, explique en détail les imposants défis techniques que représente la construction d’une artère importante dans une région isolée à la topographie accidentée. Commencée pendant la guerre et ouverte à la circulation en 1949, elle permet l’accès au Saguenay-Lac-Saint-Jean en seulement deux heures. Les légumes frais et les journaux de Québec peuvent y être livrés le jour même, ce que ne permettait pas l’ancienne route.
Un incident important survient, à la fin février, lorsque se fissure une arche du pont Duplessis, à Trois-Rivières. Ce pont qui enjambe la rivière Saint-Maurice, inauguré le 6 juin 1948 par le premier ministre, était, selon lui, « solide comme l’Union nationale ». L’opposition cherche évidemment à provoquer le premier ministre. Celui-ci déclare que les dommages sont mineurs et que les frais seront assumés par Dufresne Construction et Dominion Bridge. Les libéraux tentent aussi d’insinuer que les entrepreneurs – Dufresne Construction étant une compagnie recevant beaucoup de contrats du gouvernement – ont mal fait leur travail, mais ils ne réussissent pas à mettre le premier ministre dans l’embarras1.
L’éducation
Deux lois importantes sont votées dans le domaine de l’enseignement supérieur. Un bill remanie la charte de l’Université de Montréal et la dote d’un conseil de 12 gouverneurs dont la nomination est réservée conjointement à l’autorité ecclésiastique et au gouvernement, qui exerce ainsi une certaine influence dans l’administration de l’Université. À la même époque, l’Université Laval caresse le projet d’établir une grande cité universitaire à Sainte-Foy. Pour empêcher les propriétaires des terrains convoités d’exiger des prix exorbitants, le gouvernement donne à l’administration de l’Université un pouvoir d’expropriation, qui doit être utilisé de façon dissuasive envers les spéculateurs.
Le caractère unique de la Belle province
Le gouvernement francise le nom de « Spencer Wood », résidence du lieutenant-gouverneur, en « Bois-de-Coulonge », en l’honneur de Louis d’Ailleboust de Coulonge, troisième gouverneur de la Nouvelle-France2 (bill 6). Après avoir été dévoilé le 21 janvier 1948, le drapeau fleurdelisé devient officiel grâce à une loi adoptée à l’unanimité par la Chambre (bill 7).
La ville de Montréal
Le bill de Montréal est un sujet d’une grande importance tout au long de la session. Les débats tournent autour de la question de la municipalisation des tramways et le procès du mode d’administration imposé en 1941 par le gouvernement Godbout. On tente de trouver un arrangement, à tel point que le bill original doit être réimprimé tellement il subit de modifications.
Quand la dernière mouture est enfin votée par la Chambre, le Conseil législatif, dont 17 des 25 membres sont d’allégeance libérale, refuse un amendement qui aurait permis aux Montréalais de se prononcer par référendum sur le système d’administration de la ville. Les ministériels protestent, mais finissent par accepter ce camouflet parce que la session achève et qu’ils ne veulent pas « tuer » le bill en entier. Le premier ministre va condamner avec vigueur ce geste « antidémocratique et autocratique » d’une Chambre « non élue ». La faible opposition libérale, solidaire du geste des conseillers libéraux, remporte en quelque sorte une victoire morale sur le gouvernement.
Les finances de la province
Au cours du discours sur le budget, Onésime Gagnon révèle que les revenus de la province atteignent 207 millions de dollars, avec un surplus au compte ordinaire de 31 millions de dollars et un excédent global de 7,6 millions de dollars. La dette de la province se chiffre à 280 millions de dollars, soit la plus faible par tête d’habitant au Canada. Ainsi, Québec peut acquitter en priorité ses dépenses ordinaires ou ses paiements de dépenses imputables au capital.
Marler répond que le gouvernement doit son excédent à la seule vente de la centrale du Témiscamingue à Hydro-Québec pour 19 millions de dollars. Comme cette centrale appartenait déjà à la province tout comme l’Hydro, dit le chef de l’opposition, sans cette transaction le budget devrait être déficitaire.
Le travail de l’opposition
Avec si peu de députés, le travail de l’opposition n’est pas aisé. Impossible d’empêcher longtemps le gouvernement de faire adopter ses projets. Dans ce contexte, le travail du chef de l’opposition George Marler est colossal, allégé seulement par le premier ministre qui, bon prince, accepte de lui donner à l’avance les textes des projets de loi importants de la session avant leur étude en Chambre. Ses principaux lieutenants sont Arthur Dupré, député de Verchères, et Lionel Ross, député de Verdun, mais ils sont inexpérimentés.
Au dernier jour de la session, le premier ministre couvre Marler de compliments pour son travail en Chambre : « Je n’ai aucune hésitation à dire que parmi tous ceux que l’on mentionne pour le poste, dit Duplessis, il n’y en a sûrement pas de supérieurs au chef de l’opposition actuel3. » Ces compliments, souligne le Star, sont à double tranchant. Ils laissent entendre que le premier ministre préfère affronter Marler à tout autre candidat à la chefferie du Parti libéral4.
Les bons mots de la session
Malgré la faiblesse de l’opposition, les débats ne sont pas dénués d’humour, de traits d’esprit et de répliques bien senties.
Marler félicite avec humour le ministre des Travaux publics, Roméo Lorrain, qui, quelques mois auparavant, « a franchi le pont du mariage, construit sans soumission ». Marler enchaîne en parlant du mariage récent d’un autre ministre, Antonio Talbot, qu’il croyait pourtant marié à la route de Chibougamau, qu’il a tant vantée et défendue dans le passé. Avec ces défections, le « triumvirat des célibataires » de l’Union nationale montre des signes de faiblesse. En effet, seul s’entête le premier ministre, lui qui, « dans son isolement célibataire, semble être irréductible5 ». (21 février 1950)
La poigne de fer de Duplessis sur son parti est bien connue. Il est de tous les débats et ses adversaires ne manquent pas de narguer les ministres indolents face à leur chef.
Lorsque le député indépendant René Chaloult réclame avec insistance une résidence officielle pour le premier ministre, il estime que les ministres, pour une fois, feraient bien « de siéger hors la connaissance du premier ministre et de régler ce problème. Ils écriraient d’ailleurs une nouvelle page d’histoire en prenant une décision sans consulter le premier ministre6 ».
Dans le même ordre d’idées, Marler laisse trois de ses députés aller à Joliette à la fin mars demander à Lapalme de déposer sa candidature en vue de la course à la chefferie du 19 mai. Lorsque le premier ministre taquine ceux qui, selon lui, sont allés à Joliette offrir la direction du parti de façon « déloyale » à un autre que Marler, celui-ci répond qu’il existe chez les libéraux « une liberté qu’on ne trouve pas chez les ministériels7 ».
La reconstruction du Parti libéral décimé aux élections de 1948 est une cible privilégiée pour Duplessis qui n’hésite pas à traiter l’opposition de « minorité pitoyable8 ». Il leur suggère d’ailleurs de placer les intérêts de la province au centre de la convention du 19 mai s’ils veulent sortir leur parti « des catacombes où il se trouve9 ».
Le ministre de l’Agriculture Laurent Barré compte à son actif plusieurs répliques qui amusent beaucoup la Chambre. Lors d’un débat sur l’aviculture, il déclare que son département fait tout pour encourager la consommation des produits locaux de la ferme, tout comme lui d’ailleurs : « J’ai fait un contrat pour manger 125 douzaines d’œufs par année. Je ne peux aller plus loin que ça10. » Et pour cause! Un rapide calcul démontre que cela équivaut à manger 1 500 œufs par an, soit une moyenne de 4,1 par jour... Un régime à aussi forte teneur en cholestérol ne semble pas avoir hypothéqué la santé du ministre. Ancien cultivateur déjà sexagénaire en 1950, Barré ne s’éteindra qu’en 1964, à 78 ans bien sonnés.
La campagne d’immoralité à Montréal est l’occasion de savoureux débats en Chambre. Sont notamment pointés du doigt les endroits louches tels les « bookies », lieux de paris et de jeux de hasard illégaux – les bingos par exemple –, et les « barbotes », ces débits de boissons clandestins. Le premier ministre juge que la Ville est la seule responsable de l’ordre sur son territoire. Cela ne l’empêche pas de donner son opinion sur la question dans un discours haut en couleur. Dans ces lieux où règne le vice, dit-il, on rencontre des individus louches, tels les « pimps », qui auront toujours « recours au crime, au meurtre, au hold-up pour vivre ». Et lutter contre le crime est difficile à Montréal, port cosmopolite et ville de passage, qui attire beaucoup de gens, « et pas toujours pour faire des pèlerinages à l’oratoire Saint-Joseph11 ». Duplessis ajoute que la situation est bien pire à New York, par exemple : « Savez-vous qu’il y a là des clubs de fifis pour les hommes et pour les femmes? Ils sont tolérés. Il n’y a pas de cela à Montréal12. » Heureusement, les politiciens ont su évoluer depuis l’époque de Duplessis! De toute façon, conclut le premier ministre, la nature humaine étant ainsi faite, « qu’on ne perde pas son temps à essayer d’établir la perfection sur Terre. Elle est venue sur la Terre il y a 2 000 ans et nous ne l’avons jamais revue depuis13 ».
Toujours dans le domaine de la moralité, le gouvernement adopte une loi contre les publications obscènes, pour « protéger la moralité publique ». Le premier ministre vise tous ceux qui vendent des revues avec des images et propos « immoraux ». Ces revues sont un « poison qui peut tuer l’âme ». « On arrête les marchands de poison, dit-il, et existe-t-il un poison plus dangereux que celui de l’esprit?14 ».
Du côté de l’opposition libérale, le député de Verdun, Lionel Ross, met beaucoup de feu dans ses attaques contre le gouvernement. Duplessis ne s’en montre pas impressionné et lui répond qu’il est « totalement à côté de la track ». Et Ross de répliquer fièrement : « Chaque fois que l’Union nationale attentera à la liberté et à la dignité humaine, je protesterai15. »
À un autre moment, Ross dénonce avec véhémence l’oppression du gouvernement Duplessis en concluant solennellement : « L’heure de la délivrance sonnera bientôt. » Le ministre Omer Côté saisit la balle au bond et déclare aussitôt que, parlant de délivrance, « tout le monde a compris » que Ross faisait allusion à son propre discours16.
Dans la chaleur des débats oratoires, certains inventent des formules imagées qui, lorsqu’on s’y attarde, s’avèrent douteuses. Duplessis affirme un jour que la Providence a si richement pourvu la province de grands talents qu’elle occupe une situation plutôt particulière en Amérique : celle d’une « oasis au milieu d’une mer immense17 ».
Pendant la discussion d’une loi, Marler vante la contribution des deux grands partis politiques à la construction de l’Université de Montréal. Duplessis répond avec esprit que si « le chef de l’opposition est satisfait de ce que son parti a fait pour l’université, nous aussi. Il est toujours agréable de comparer les petites choses aux grandes18 ».
La création du poste de solliciteur général suscite les reproches de Marler qui estime que ce terme n’est pas français. Le premier ministre, qui veut affirmer le caractère français de la province, devrait trouver un mot « plus conforme au génie de la langue française »19. Malgré le fait que le gouvernement balaie du revers de la main ces objections, le souci de la langue française dont fait preuve cet anglophone parfaitement bilingue est digne de mention.
La question des salaires des fonctionnaires revient plusieurs fois sur le parquet de la Chambre. Nombreux et mal payés, les employés du « service civil » sont défendus par le libéral Arthur Dupré, député de Verchères, qui ne manque pas de réclamer pour eux des augmentations de salaire. Si cette question provoque plusieurs traits d’humour, elle nous permet également d’avoir une idée de la précarité de la profession à l’époque.
Ainsi, Dupré apprend du ministre Barré que plusieurs employés à faible salaire travaillent au département de l’Agriculture « un peu pour des considérations charitables ». Le ministre cite le cas d’un brave curé qui, un jour, se présenta à son bureau et lui dit « qu’il a un beau-frère infirme, qui n’est pas capable de donner le rendement d’un employé ordinaire ». Se disant avoir un grand cœur, Barré accepta de donner à cet homme un emploi à un salaire moindre, car « son infirmité ne l’empêchait pas d’être père d’une grosse famille20 ».
Voyant que ses requêtes salariales sont mal reçues par les ministres, Dupré demande alors : « Les fonctionnaires doivent-ils prouver qu’ils sont de bons membres de l’Union nationale? » « Ça ne nuit pas! », répond en souriant le premier ministre21. Celui-ci demande alors si Dupré savait que l’Union nationale avait fait augmenter de 650 millions de dollars « les salaires des ouvriers dans la province ». Dupré lui répond que si tel est le cas, « cela prouve qu’ils ne travaillent pas pour le gouvernement22 ».
La voirie et les ponts sont un autre sujet infini de discussions et de bons mots. L’incident du pont Duplessis provoque les quolibets de l’opposition libérale à l’endroit de cette œuvre supposément « magnifique », au dire de l’Union nationale. Duplessis riposte en rappelant la chute du pont de Québec en… 1907. Cette catastrophe de l’époque du libéral Wilfrid Laurier avait causé des dizaines de morts. Le raisonnement du premier ministre est le suivant : il est clair que l’opposition, en dénonçant une simple fissure dans le pont Duplessis, salit la mémoire de Laurier, lui dont le pont est tombé en 1907. Si Laurier revenait, « il aimerait mieux se rappeler l’hécatombe du pont de Québec que les débris de son parti. Pour notre part, nous construisons des ponts qui demeurent et non des ponts qui s’écroulent pendant la construction23 ».
Le premier ministre déborde de confiance et ne sait pas encore que cette fissure est un signe avant-coureur d’une tragédie plus grave. Tôt le matin du 31 janvier 1951, une partie de ce même pont, inauguré le 6 juin 1948, va s’écrouler et causer la mort de huit personnes.
Critique des sources
Par Frédéric Lemieux
Nous pouvons séparer en quatre catégories les journaux qui couvrent la session parlementaire de 1950 : un groupe favorable au gouvernement, un autre plutôt neutre, un qui s’oppose et, en dernier lieu, les journaux anglophones qui sont généralement favorables à l’Union nationale.
Le premier groupe est formé du Montréal-Matin, organe de l’Union nationale à Montréal, de La Presse et de L’Action catholique. Tous trois publient les mêmes comptes rendus favorables au gouvernement. Le second groupe est formé du Soleil, de L’Événement et de La Patrie. Leurs articles sont plutôt neutres et leurs éditorialistes ne sont ni trop sévères ou trop élogieux envers le gouvernement. Il arrive que L’Action catholique et les journaux du deuxième groupe se partagent exactement la même version des débats le temps d’une ou deux séances.
De leur côté, Le Devoir et Le Canada sont des cas spéciaux. Malgré sa férocité envers le gouvernement durant la grève d’Asbestos, Le Devoir n’est pas aussi acharné contre Duplessis qu’il le sera plus tard dans la décennie. Pierre Laporte loue à quelques occasions certaines lois du gouvernement. Agacé par sa puissance, il n’hésite cependant pas à écrire que « l’Union nationale aurait besoin d’une bonne cure d’humilité. On se fatigue à la fin de la voir poser chaque jour des gestes sauveurs ». Le meilleur exemple est celui de la loi ouvrant la seigneurie de Mingan au peuplement et à l’exploitation forestière, une loi somme toute mineure, mais qui, selon le gouvernement, devient « une victoire sur la dictature économique ». Laporte écrira alors avec ironie : « Rien que ça!24 »
Le Devoir se concentre surtout sur la lutte pour la moralité à Montréal. Les propos des députés à ce sujet y sont rapportés plus fidèlement que dans les autres journaux. Le 24 février 1950, il est le seul journal à reproduire l’intervention de Dave Rochon, député de Montréal-Saint-Louis, qui accuse Duplessis de fermer les yeux sur les clubs et les débits de boissons qui violent la loi et qui seraient protégés moyennant contribution à la caisse électorale de l’Union nationale. Les autres journaux résument très brièvement les paroles de Rochon. Seul L’Événement de Québec emboîte le pas au Devoir à cette occasion.
Quant au Canada, il publie des comptes rendus très différents des autres journaux. Remplis de détails et d’anecdotes, ses articles sont des plus utiles pour notre travail de reconstitution. Son journaliste parsème les discours de petites observations montrant sa faveur envers l’opposition, sans cependant être trop piquant pour le gouvernement. À plusieurs reprises, il complimente le parti ministériel et ses députés tout en ne ménageant pas non plus ses éloges envers les membres de l’opposition25.
Les journaux anglophones ne couvrent pas tous les sujets abordés en Chambre. Leurs comptes rendus sont généralement plus courts. Ils apportent cependant beaucoup plus d’éclairage que les journaux francophones sur les interventions de certains députés anglophones. À deux reprises, nous avons pu trouver des interventions substantielles du député indépendant de Montréal-Sainte-Anne, Frank Hanley, qui n’étaient résumées ailleurs qu’en quelques lignes. Il en est de même d’un discours du libéral de Montréal-Notre-Dame-de-Grâce, et unilingue anglophone, Paul Earl. Par ailleurs, nous n’avons pas trouvé d’indices significatifs démontrant que les correspondants des différents journaux anglophones reproduisent la même version d’un compte rendu durant la session.
Le discours d’Antonio Barrette sur les relations du travail est sténographié in extenso et publié dans une brochure intitulée La politique ouvrière et sociale de l’Union nationale. Quelques passages sont rapportés différemment par les journalistes, ce qui prouve que la teneur de leurs comptes rendus est soumise à l’espace disponible dans leur journal.
Il arrive aussi que les journalistes saisissent mal ce que disent les députés. Par exemple, dans leur compte rendu de la séance du 18 mars, ils écrivent « rivière du Manoir » au lieu de « rivière Manouane », et réservoir « Pilraque » pour « Pibrac ». Ces exemples démontrent toutes les difficultés des journalistes, éloignés des orateurs et gênés par le chahut qui peut régner dans la Chambre.
Certains correspondants déplorent également le peu d’action qui règne en Chambre. Laporte, du Devoir, écrit : « On est évidemment loin des luttes passionnantes de la session préélectorale de 1948, mais la monotonie fait momentanément place à l’intérêt26. »
En février 1950, la Tribune de la presse a pour président William Stewart, de La Presse canadienne. Le vice-président est Arthur-W. Langlois, de La Presse, et Henri Dutil, du Soleil, en est le secrétaire. Les autres membres sont : Guy Beaudry (Montreal Daily Star), Maurice Bernier (Montréal-Matin), Paul Bouchard (La Nation), Edmond Chassé et Marcel Inkel (L’Événement-Journal), Calixte Dumas (L’Action catholique), Jacques Verreault (L’Action catholique), Jack Dunn (The Quebec Chronicle-Telegraph), Amédée Gaudreault (La Tribune), Pierre Laporte et Marcel Thivierge (Le Devoir), Dostaler O’Leary (La Patrie), Charles-Eugène Pelletier (L’Action catholique et Le Droit) et Abel Vineberg (The Gazette).
Notes de l’introduction historique et de la critique des sources
1. Le 31 janvier 1951, une section du pont Duplessis va s’effondrer causant la mort de huit personnes. À ce sujet, voir : Conrad Black, Duplessis. Le pouvoir, tome 2, Montréal, Éditions de l’Homme, 1977, p. 159-163, et l’introduction historique de la session de 1951.
2. Voir : Frédéric Lemieux, Christian Blais et Pierre Hamelin, L’histoire du Québec à travers ses lieutenants-gouverneurs, Québec, Publications du Québec, 2005, p. 353-356.
3. Le Montréal-Matin, 6 avril 1950, p. 1.
4. The Montreal Daily Star, 6 avril 1950, p. 5.
5. Duplessis reste célibataire toute sa vie.
6. Le Devoir, 22 février 1950, p. 1.
7. La Patrie, 30 mars 1950, p. 9.
8. Le Devoir, 5 avril 1950, p. 3.
9. La Patrie, 6 avril 1950, p. 6.
10. Le Canada, 18 mars 1950, p. 3.
11. Le Devoir, 16 mars 1950, p. 2.
12. Le Canada, 16 mars 1950, p. 2; Le Devoir, 16 mars 1950, p. 2.
13. Le Soleil, 16 mars 1950, p. 10; Le Devoir, 16 mars 1950, p. 2.
14. Du 8 mars 1950, voir : La Patrie, p. 17; L’Action catholique, p. 19; Le Montréal-Matin, p. 5.
15. La Patrie, 23 mars 1950, p. 7.
16. Le Canada, 23 février 1950, p. 2; Le Montréal-Matin, 23 février 1950, p. 5.
17. Le Montréal-Matin, 25 mars 1950, p. 5.
18. Le Canada, 28 mars 1950, p. 14.
19. Le Devoir, 18 mars 1950, p. 1.
20. L’Action catholique, 5 avril 1950, p. 3; L’Événement, 5 avril 1950, p. 19.
21. Le Devoir, 31 mars 1950, p. 2.
22. Le Soleil, 31 mars 1950, p. 12.
23. Le Soleil, 1er avril 1950, p. 6.
24. Le Devoir, 15 mars 1950, p. 4.
25. Le Canada, 23 mars 1950, p. 3.
26. Le Devoir, 1er mars 1950, p. 2.