Débats de l'Assemblée législative (débats reconstitués)
Version finale
15e législature, 3e session
(10 janvier 1922 au 21 mars 1922)
Le vendredi 17 mars 1922
Ces débats, reconstitués principalement à partir des comptes rendus des médias de l’époque, ne constituent pas un journal officiel des débats de l’Assemblée législative.
Présidence de l'honorable J.-N. Francoeur
La séance est ouverte à 11 heures.
M. l'Orateur: À l'ordre, Messieurs! Que les portes soient ouvertes!
Dépôt de documents:
Rapport du bibliothécaire
M. l'Orateur dépose sur le bureau de la Chambre le document suivant: Rapport du bibliothécaire de la Législature de Québec, janvier 1921 à décembre 1921. (Document de la session no 25)
Représentation à l'Assemblée législative
L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose, selon l'ordre du jour, que le bill 202 amendant la loi concernant la représentation à l'Assemblée législative soit maintenant lu une deuxième fois.
Adopté. Le bill est renvoyé au comité général.
L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose que la Chambre se forme immédiatement en ledit comité.
Adopté. Le comité étudie le bill et en fait rapport sans amendement.
L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.
Adopté.
Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.
Messages du Conseil législatif:
M. l'Orateur informe la Chambre que le greffier du Conseil législatif a apporté le message suivant, lequel est lu ainsi qu'il suit:
Le Conseil législatif informe l'Assemblée législative qu'il ne concourt pas dans l'amendement de l'Assemblée législative à ses amendements au bill 101 ayant pour objet de venir en aide à la dénomination congrégationaliste ci-devant connue sous le nom de Membres des sociétés congrégationelles et concernant la tenue de leurs registres de l'état civil et simplifiant la procédure, parce qu'il n'est pas conséquent et ne découle pas de ses amendements.
Membres des sociétés congrégationnelles
M. Smart (Westmount) propose, appuyé par le représentant de Montréal-Saint-Georges (M. Gault), qu'un message soit envoyé au Conseil législatif informant les honorables conseillers que l'Assemblée législative retire ses amendements aux amendements du Conseil législatif au bill 101 ayant pour objet de venir en aide à la dénomination congrégationaliste ci-devant connue sous le nom de Membres des sociétés congrégationnelles et concernant la tenue de leurs registres de l'état civil et simplifiant la procédure, et accepte les amendements faits par le Conseil législatif audit bill.
Adopté. Le bill est retourné au Conseil législatif.
Les organisations ouvrières
Conformément à l'ordre du jour, la Chambre reprend le débat, ajourné le 16 mars, sur l'amendement proposé le jeudi 16 mars courant sur la motion suivante:
"Qu'il soit résolu que, de l'avis ce cette Chambre, la question de savoir s'il est opportun d'adopter une législation forçant toutes les organisations ouvrières à se constituer en corporation, et mettant plus strictement en vigueur les lois contre les grévistes qui ont recours à la violence, devrait être prise immédiatement en considération."
Et l'amendement proposé se lit comme suit:
Que tous les mots après "que" soient remplacés par les suivants:
"cette Chambre reconnaissant que les ouvriers canadiens sont un des éléments les meilleurs de notre population, invite les organisations ouvrières de cette province à se donner une constitution essentiellement canadienne et à continuer à coopérer dans l'ordre et le respect des lois, au développement industriel de la province."
M. Sauvé (Deux-Montagnes): La question est non seulement sérieuse, mais brûlante, et elle requiert la plus grande réflexion. C'est un sujet chargé d'électricité et le moindre choc peut causer l'alarme et une crise. Il importe d'éviter soigneusement de ne point provoquer les armées de classes à se mesurer du regard et encore moins à en venir aux mains. La question est de savoir si pour le moment il n'est pas plus opportun de chercher à obtenir les améliorations désirées par un prudent travail d'éducation que par une législation qui peut paraître arbitraire et vexatoire. L'honorable premier ministre a fait sur les organisations ouvrières des déclarations sensationnelles qui ont provoqué des sympathies, des protestations également, sur le débat qui se continue aujourd'hui.
La résolution de l'honorable député de Westmount (M. Smart) est la conséquence des déclarations de l'honorable premier ministre au sujet de la grève des typographes1 internationaux. Et logiquement, ceux qui ont applaudi le premier ministre devraient appuyer la motion, et les reproches des députés de Maisonneuve (M. Laurendeau) et de Sainte-Marie (M. Gauthier) devraient être adressés avant tout au premier ministre. Ces déclarations, en temps normal et dans un Parlement autre que celui-ci, eussent provoqué une crise politique, car elles attaquaient non seulement une armée d'ouvriers, mais aussi directement un membre du Parlement et les représentants de la classe ouvrière qui siègent sur les bancs ministériels. Cependant, il est évident que la discipline du parti est très forte, même parmi ceux qui proclament si bruyamment leur indépendance. On a réussi à bâillonner les protestataires.
C'est avec beaucoup d'intérêt que j'ai suivi ce débat. J'ai été un peu surpris, hier, de l'attitude de mon honorable ami le député de Dorion (M. Lacombe), ministre sans portefeuille. Le député de Dorion a fait l'éloge des unions internationales, tout en reconnaissant qu'il y a là comme ailleurs, des "exagérés", et a désapprouvé le député de Rouville (M. Robert) qui a été très violent contre les internationales. Mais finalement, il se déclara en faveur de l'amendement du député de Rouville. Par cette dernière déclaration, le député de Dorion veut-il dire qu'il était prêt à se retirer des unions internationales?
L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): Non.
M. Sauvé (Deux-Montagnes): Je vois que l'honorable ministre du Travail (M. Galipeault) fait signe que non.
L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): L'honorable député de Dorion (M. Lacombe) n'est pas ici et je crois qu'il n'a jamais dit qu'il abandonnerait les unions internationales. Les absents n'ont pas toujours tort.
M. Sauvé (Deux-Montagnes): Je maintiens ce que j'ai dit. L'honorable député de Rimouski (M. Tessier) dénonce lui aussi les internationales qui devraient disparaître et lui, le vieux rouge, lui dont le parti prêchait autrefois l'annexion aux États-Unis avec Mercier, disait, hier: Ces internationales sont un danger, c'est un commencement d'annexion...
M. Tessier (Rimouski): C'est ce que j'ai dit. Je le pense et je le dirai encore. C'est mon opinion.
M. Sauvé (Deux-Montagnes): L'honorable député de Saint-Louis (M. Bercovitch), un avocat éminent, prétend que la Législature n'a pas le droit d'agir comme l'a prétendu l'autre jour le premier ministre qui a provoqué la motion du député de Westmount (M. Smart). On prétend que, dans cette province plus qu'ailleurs, l'ordre règne et que sa population, si elle souffre du malaise de la crise, ne trouble point la paix. Or, si l'ordre règne ici au point de servir de modèle, pourquoi risquer de le troubler par des lois vexatoires, par des déclarations ou des résolutions provocantes et par des mesures ou amendements inutiles, qui sont plutôt présentés pour éviter ou pour amoindrir la gravité d'un faux pas.
Je suis content que mon honorable ami de Westmount (M. Smart) ait été, dans son attitude, plus respectueux des ouvriers des unions internationales que ne l'a été l'autre jour le premier ministre. L'honorable député de Westmount n'est pas contre les ouvriers qui font partie des unions internationales, mais à la suite des déclarations de l'honorable premier ministre sur la grève des typographes, il veut que des paroles nous passions à l'étude et, si possible, ensuite aux actes. Il veut que le gouvernement et la Chambre prennent des moyens pour savoir s'il y a possibilité pour nous d'adopter une législation qui garantisse suffisamment la protection des ouvriers sur la réglementation des salaires, sans l'appui des ouvriers des États-Unis. Il faudrait savoir si, dans cette législation, les ouvriers trouveraient autant d'avantages que dans leur affiliation aux ouvriers des États-Unis.
C'est au point de vue de l'ordre une grande chose à considérer, mais il ne faudrait point oublier de considérer aussi les intérêts bien entendus des ouvriers devant les prétentions des patrons trop ambitieux. Nous avons déjà eu des unions purement nationales, séparées des unions internationales, mais elles n'ont pas réussi. Nous avons maintenant des unions ouvrières catholiques, dont la direction morale est assurément une garantie d'ordre de premier ordre, mais elles ont leurs difficultés, leurs ennuis. Leur but est louable, leur esprit religieux est une sécurité. Gardons-nous de les déprécier. Elles ont fait du bien et leur but était magnifique.
Une législation ouvrière qui fermerait les portes aux intérêts internationaux réunirait-elle pour être plus forts les unions nationales catholiques et les unions nationales neutres? Ce que l'ami du peuple et de la justice doit vouloir, c'est d'empêcher l'abus de l'ambition, de l'égoïsme, des préjugés ou de la haine, c'est une direction à forte base de christianisme. Si la presse et les hommes publics renseignaient mieux le peuple, ils éviteraient bien des désordres et il y aurait beaucoup moins de désordres.
La justice et la vérité triompheraient toujours. Les intérêts politiques, ou plutôt de parti, font fausser les situations et soulever des préjugés. C'est de là que partent les germes de fomentation, le venin des préjugés, les étincelles des passions populaires. On connaît le passé. On sait comment l'ouvrier fut soulevé contre les autres classes, contre les riches, et l'on sait qu'ensuite ils furent victimes de ceux qui les avaient évangélisés, puis entrainés dans leurs rangs. Les ouvriers, dégoûtés, songent plus que jamais à se protéger contre les organisations formidables qui se dressent tous les jours pour s'en servir.
J'avouerai que j'ai toujours eu pour l'ouvrier une sincère sympathie et je ne craindrai pas d'avouer que j'ai déjà été président de l'union des journalistes affiliés à l'Union typographe internationale, il y a de cela bientôt 20 ans. J'ai pour l'ouvrier une sympathie réelle, parce que moi-même j'ai souffert des peines de l'ouvrier, et j'ai dû bien des jours réfléchir sur les conditions pénibles qui étaient faites aux ouvriers. J'ai constaté alors que les ouvriers avaient réellement des griefs. Je suis en faveur d'une classification, car les travailleurs n'ont pas tous la même compétence et, si je suis pour les ouvriers, je n'en reconnais pas moins que les employeurs et les patrons ont des droits.
Les organisations ouvrières ont été fondées pour protéger les ouvriers et pour réprimer les abus de certains patrons, pour établir un juste équilibre de justice entre l'employeur et l'employé. "L'ouvrier, dit Raoul Jay, a non seulement le droit de vivre, mais aussi de mener une vie humaine". Il n'y a pas de sots métiers et il y a des ouvrages qui requièrent non seulement un travail manuel, mais surtout de l'intelligence, de la science. C'est pourquoi la question ouvrière est très difficile à traiter pour qui veut rendre justice au patron et à l'ouvrier. Outre des compétences, il y a aussi la rigueur du travail qui requiert une grande force physique constamment exploitée à l'année.
Prenons les ouvriers qui travaillent dans les scieries, dans les fonderies, dans les imprimeries. Ils sont des victimes d'une atmosphère mortelle. C'est pourquoi il est excessivement important de songer à ces considérations quand nous sommes appelés à nous prononcer sur une législation concernant les salaires. Je crois qu'il importe avant tout de considérer la classification non seulement des métiers, mais aussi des compétences dans les métiers. C'est le manque de classification véritable qui, je crois, affecte le plus le patron, obligé ou exposé qu'il est souvent à employer certains ouvriers qui, par leur inexpérience, leur inhabilité, leur lenteur, ou autres défauts, leur font subir des pertes considérables. Car pour défendre les intérêts des ouvriers, je ne suis pas de ceux qui méprisent les droits de l'employeur.
Le patron, suivant la définition de Gabriel Hanotaux2, est un organisateur du travail, c'est un homme qui a le sens de mobiliser les idées, les choses et les hommes de façon à faire naître, par leur groupement et leur collaboration, un profit pour lui et pour les autres. Le patron est plus encore, c'est un audacieux. Il a une telle confiance en son jugement, son activité et son savoir-faire qu'il joue sa fortune, son honneur et sa vie sur cette carte; ce qui le caractérise, c'est qu'il accepte le risque.
Le risque du capital est l'âme du progrès, de ce progrès créateur de villes et de paroisses qui font la fortune d'un pays. Sans cela, point de population. Or, si l'État doit agir de façon à ce que le capitaliste n'empiète point sur les droits de l'ouvrier, il fera en sorte aussi que le capital ne soit sans cesse ballotté et exposé à la ruine par des troubles ouvriers. C'est pour cela qu'on a reconnu au législateur le droit d'intervenir toutes les fois que les initiatives privées se montrent impuissantes à protéger les droits des individus ou des familles, inaptes à sauvegarder efficacement les intérêts généraux et permanents de la société. L'honorable premier ministre a lancé le cri d'alarme contre les unions internationales et il a protesté contre cette organisation, dont le siège est à Indianapolis, qui vient régenter ici les patrons et ouvriers, susciter des grèves et causer des troubles ruineux.
C'est une campagne d'éducation, et non une législation, qui devrait amener les ouvriers canadiens à faire partie d'unions canadiennes. Il (M. Sauvé) est disposé à renvoyer à six mois ou plus la motion du député de Westmount (M. Smart) et l'amendement du député de Rouville (M. Robert).
L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): Quand même la motion de l'honorable député de Westmount (M. Smart) n'aurait eu que le seul résultat de soulever ce débat, l'auteur devrait être félicité d'avoir pris cette attitude énergique. Le moins que l'on puisse dire du député de Westmount, c'est qu'il a montré du courage en présentant sa motion. En cela, il n'a pas imité son leader, l'honorable chef de l'opposition.
La motion du député de Westmount est d'actualité et elle a été rendue encore plus intéressante par la motion du député de Rouville qui recevra l'approbation de tous les Canadiens dignes de ce nom. Selon moi, cette motion du député de Rouville a, pour ainsi dire, corrigé celle du député de Westmount en ce qu'elle avait de trop radical à l'égard de tous nos ouvriers.
Ici, dans notre province, les travailleurs ont les sympathies de toute la population et cette sympathie, elle a été amplifiée pourrait-on dire par tout ce que le gouvernement a fait pour les ouvriers. Nos ouvriers sont des choyés et, on nous le dit, nous sommes des privilégiés au point de vue de la question ouvrière.
Il (M. Galipeault) l'a constaté à la Conférence du travail à Genève. Ces derniers, dit-il, ne peuvent se plaindre de la législation qui a été proposée par le gouvernement et que, tous les ans, il amende suivant les besoins des ouvriers et les conditions nouvelles du travail. Il n'y a peut-être pas 20 % de la législation québécoise qui ne tende pas à améliorer les relations entre le capital et le travail.
Je ne veux pas élargir le cadre du débat qui, selon moi, a peut-être pris un peu trop d'ampleur, mais je me demande s'il est opportun d'obliger les unions à s'incorporer. Le but du député de Westmount est d'indiquer un mal, et un remède à ce mal est de faire de nos unions des associations canadiennes. Quel est le patriote qui ne souhaite pas la réalisation d'un tel but3? Il ne croit pas cependant que ce que suggère le député de Westmount apporte le remède au mal qu'il a signalé.
Tôt ou tard, dit-il, il faudra que les ouvriers canadiens comprennent qu'ils doivent faire partie seulement des unions canadiennes et s'occuper de leurs propres intérêts. Le chef de l'opposition croit que les ouvriers ne seront peut-être pas assez protégés s'ils rompent avec l'Internationale et, cependant, il est obligé d'admettre lui-même que les unions catholiques prennent rapidement tous les jours de l'ampleur et de la force. La situation est modifiée pour les Canadiens.
Autrefois, on disait par le passé que les ouvriers canadiens n'étaient pas suffisamment nombreux pour le faire, et les ouvriers devaient compter sur leurs camarades des autres pays pour obtenir quelque chose. Mais aujourd'hui, notre population a augmenté et le pays est de plus en plus fort. Ces unions sont maintenant assez fortes pour protéger les ouvriers. Ils peuvent se passer de l'aide extérieure. Dans la province de Québec, les unions internationales ont plus de 100,000 membres et les unions nationales et catholiques ont aussi beaucoup de membres.
Ne serait-il pas possible que ces deux organisations se rassemblent en une seule et, avec la sympathie d'un large public derrière elles, soient assez fortes sans direction américaine? Ce n'était pas présentement une question de législation contre les unions internationales, mais une question d'éducation. Quelques jours auparavant, il (M. Galipeault) a interrogé un dirigeant syndical qui lui a dit que les ouvriers canadiens aimeraient avoir des syndicats purement canadiens, mais qu'ils ne voulaient pas de changement trop radical.
Il (M. Galipeault) croit qu'à côté des avantages qu'offrirait l'incorporation des unions ouvrières, il y aura toujours les difficultés qui existent actuellement concernant l'ingérence étrangère. Une des leçons de la guerre, dit-il, a été de nous apprendre que l'union de nos ouvriers avec ceux des autres pays pouvait constituer un danger contre le salut de notre nation. En ces temps de crise, si les relations économiques deviennent tendues entre le Canada et les États-Unis, que feront les ouvriers canadiens?
La situation des ouvriers canadiens serait dangereuse et cette situation peut mettre le pays en péril. Il faut penser non seulement au temps de paix, mais au temps de guerre. L'argent est aux États-Unis et, s'il ne parvenait pas ici, il n'y aurait pas de grève. Les unions canadiennes affiliées aux États-Unis ne sont canadiennes qu'en temps de paix, quand vient la grève, qui est la guerre du travail, ils dépendent exclusivement des États-Unis.
Aux États-Unis, certaines unions se sont incorporées, mais l'autorité qui leur avait accordé cette incorporation l'a retirée dans la suite, devant les abus qui se sont commis. Nous avons heureusement dans notre province des unions nationales dont les membres sont aussi heureux que ceux des unions internationales.
L'une des grandes objections qu'on apporte à la sécession des ouvriers canadiens des unions internationales est que nos ouvriers perdraient les bénéfices pécuniaires résultant de leur affiliation à l'internationale. Un chef ouvrier international me demandait ce que l'on donnerait aux ouvriers en échange de ce qu'on leur ôterait, en fait de pension, s'ils changeaient d'union.
Cet inconvénient pourrait être facilement surmonté. On lui (M. Galipeault) a dit que la somme capitale pour dédommager les ouvriers rompant avec l'Internationale serait de $100,000, mais il croit ce chiffre trop modeste. Mais quand bien même il nous en coûterait un million, dit-il, cela n'est rien pour assurer la paix sociale et leur conserver les privilèges qu'ils ont acquis dans ces unions étrangères. Ce serait encore de l'argent bien placé, afin de se débarrasser des unions étrangères.
M. l'Orateur, j'ai toujours admiré la classe ouvrière, je l'ai représentée au conseil de ville et je lui dois ma modeste carrière. Mais j'avoue que j'ai moins d'admiration pour les chefs ouvriers internationaux qui sont responsables de la crise des chemins de fer en raison du système d'échelle de salaire, un exemple d'ingérence étrangère d'inspiration américaine qui a été adopté automatiquement dans ce pays et qui a plongé nos chemins de fer dans les déficits, et qui n'aurait jamais dû être adopté en cette province.
Les employés de chemins de fer au Canada ont les mêmes salaires que ceux des États-Unis, alors que les conditions ne sont pas les mêmes, surtout durant la saison d'hiver. Cependant, les compagnies de chemins de fer ont été obligées d'accepter les conditions des États-Unis. Il en résulta que, quand on demanda une réduction des frais de transport, il fut impossible de l'obtenir. Les salaires sont trop élevés: jusqu'à tout récemment, les conducteurs et les ingénieurs gagnaient de meilleurs salaires que les juges de la Cour supérieure.
Il pense que $500 par mois, c'est trop élevé pour un ingénieur. Il en résulte des injustices criantes envers les bons ouvriers, dit-il, au bénéfice des mauvais ouvriers. Un ouvrier me disait que si nos chemins de fer avaient appartenu à des unions véritablement canadiennes, ils n'auraient pas demandé de salaires aussi élevés.
Je suis surpris et peiné, M. l'Orateur, que le député de Saint-Louis (M. Bercovitch) ait désapprouvé les unions nationales et les ait comparées à la "One Big Union4" et à la grève de Winnipeg pour montrer à quoi pourrait conduire la rupture avec les unions américaines. Il ne pouvait tomber plus mal. Dieu merci, nos ouvriers ne sont pas comme ces ouvriers révolutionnaires. Le député de Montréal-Saint-Louis devrait savoir que, dans ce mouvement de l'Ouest, les ouvriers vraiment canadiens sont très peu nombreux.
Ce sont des hommes venus au pays, il y a deux ou trois ans, et qui retourneront dans leur pays après avoir fait de l'argent, qui ont préconisé ce mouvement et ont causé les émeutes de Winnipeg. Rien ne ressemble moins à l'agglomération des ouvriers de l'Ouest frais débarqués au Canada que nos ouvriers de la province de Québec, qui sont ici pour y rester, qui ont été précédés ici par de nombreuses générations, qui élèvent leurs enfants dans un pays où se trouvent tout ce qu'ils aiment et tout ce qu'ils vénèrent. C'est en développant ce sentiment national partout que ces ouvriers se trouveront les plus forts.
Le député de Saint-Louis (M. Bercovitch) ne semble pas avoir confiance dans les unions canadiennes. Sa déclaration m'a surpris, parce que j'avais en effet jusqu'ici considéré le député comme un excellent Canadien, mais celui-ci s'est évidemment plus souvenu, dans son discours d'hier, qu'il a été, comme il l'a dit lui-même, pendant de longues années, l'avocat de l'Internationale, que de sa qualité plus récente de législateur. Il a dit quelque chose qui ressemblait à une menace, si on attaquait les internationaux. Mais il n'est pas question de molester les ouvriers internationaux. Il n'y a pas de menace. Il n'y a pas d'union, si forte et si nombreuse soit-elle, qui puisse tenir contre la volonté du peuple. Ce n'est pas une direction étrangère qui va conduire le peuple du Canada et de cette province.
Depuis quelques années, nous n'avons pas fait machine en arrière. La guerre s'est faite en disant qu'il s'agissait du triomphe de la démocratie. De là, les nations alliées ont créé à la suite de la guerre une Conférence internationale du travail à Genève, à côté de la Ligue des nations. Mais les États-Unis n'en font pas partie. Le résultat de cette création, c'est qu'on a donné aux agitateurs et aux meneurs une occasion de se rencontrer et de tramer ensemble, on leur a fourni un lieu de rencontre. Ils ont vu se réaliser une partie de leur rêve et le jour n'est pas loin où ils viendront à songer à l'établissement d'une union universelle.
J'ai assisté au Congrès de Genève et j'ai constaté ce que sont ces conférences internationales. À mon point de vue, je crois que c'est une utopie que de vouloir régler dans le monde les conflits ouvriers par un tribunal international. Les situations, les moeurs, les habitudes, les coutumes, les conditions et les traditions de chaque pays ne permettent pas la réalisation de ce rêve. Peut-on comparer Québec à la Bulgarie, au Siam, aux Indes ou à la Lituanie? Les conditions des pays représentés à la Conférence internationale du travail sont tout à fait différentes. Je me suis demandé ce que le Canada pouvait bien faire dans cette galère alors même que les États-Unis, avec qui nous avons nos relations économiques les plus directes, ne font pas partie de cette organisation. Ils annulent d'un geste toute action qui pourrait être prise là-bas. Il (M. Galipeault) cite comme exemple la cédule McAdoo5, cause de nos maux.
D'ailleurs, le Congrès de Genève n'a pas été un grand succès. C'est le rêve de quelques ouvriers qui s'imaginent dans un bureau à diriger les ouvriers du monde. Une législation internationale est impossible. On discute là des questions qui sont parfois absolument étrangères à plusieurs pays. On y a voté la journée de huit heures à Washington par exemple, et on a déclaré que celle de 10 était impraticable. Et on a découvert que cette question est de juridiction provinciale et non fédérale, ce qui rend la situation encore plus compliquée au Canada.
Mais l'an dernier, à Genève, on a admis la faillite de cette loi. Les pays qui l'ont appliquée n'en sont pas satisfaits et, en France, on abandonne ce système. Lors de la Conférence de Genève, on a parlé des travailleurs agricoles et du droit qu'ils peuvent avoir de se former en association. On a parlé du repos hebdomadaire. Mais les délégués ont été fort surpris d'apprendre que, dans notre province, ces deux questions étaient réglées depuis longtemps. Nous avons l'observance du dimanche et nos cultivateurs ont le droit de former des associations.
Il (M. Galipeault) déclare avoir prouvé à la dernière conférence que la province de Québec possède une législation ouvrière inégalée. Et si la situation sociale est excellente dans le Québec, dit-il, cela tient, à part de la législation ouvrière, au fait que nos ouvriers sont nationaux, c'est-à-dire qu'ils sont ici pour y rester. Nos travailleurs ont un excellent esprit grâce à leur attachement au sol, à leur désir de rester ici et à leur qualité de propriétaires dans un bon nombre de cas, mais il leur arrive d'être mal conduits.
Pour dire toute ma pensée, je crois que, dans cette conférence, les représentants des pays européens, qui sont en petit nombre mais qui ont toute l'influence, travaillent de manière à ce que les autres pays fassent leur jeu. Nous sommes là pour payer les pots cassés. Ce serait une grave erreur que d'instituer un tel comité.
Il est vrai que l'Internationale dispose de fonds considérables, et cela n'a rien d'étonnant puisqu'il (M. Galipeault) a relevé dans les journaux que les ouvriers canadiens leur donnent 10 % de leurs salaires au bureau central américain. Présentement, au Canada les ouvriers sont pour la plupart en chômage, dit-il, et ce n'est que récemment que les chômeurs de Montréal ont demandé au gouvernement de donner un million par mois pour du secours. Comment se fait-il que les grosses unions internationales, avec leurs fonds considérables, n'ont rien donné à leurs malheureux confrères chômeurs?
Cette union, dont on vante tant la richesse, ne sait pas mieux les protéger et ne donne pas d'allocation et de pain à ses membres qui manquent de travail. Elle leur aide en temps de grève, dit-il, mais en temps de chômage forcé, elle ne fait rien pour eux. Il craint que la protection accordée par l'Internationale soit plus imaginaire que réelle en période d'épreuves. Les chefs de l'Internationale semblent davantage préoccupés d'avoir de gros salaires que d'obtenir du travail pour le plus grand nombre d'ouvriers possible. Il a pourtant dû faire cette constatation. Il croit déraisonnable de prolonger la crise du chômage pour maintenir des salaires résultant d'une situation transitoire. Dans les temps normaux, dit-il, les salaires doivent retourner au niveau normal.
Les ouvriers sentent bien aussi la fausseté de cette situation et leurs représentants, qui les défendaient ici en même temps qu'ils louent l'Internationale, affirment qu'ils sont membres d'organisations canadiennes. J'entrevois le jour où les ouvriers eux-mêmes, sentant leur situation un peu fausse vis-à-vis leur pays et leur province, verront par eux-mêmes les avantages d'une union purement canadienne, sans violence, sans heurts ni frictions, les ouvriers canadiens se libéreront eux-mêmes de la domination étrangère et formeront des unions purement canadiennes.
(Applaudissements)
M. Vautrin (Montréal-Saint-Jacques) félicite le ministre du Travail (M. Galipeault), et dit qu'il s'oppose à l'amendement du député de Rouville (M. Robert); il croit que la Chambre ne devrait pas adopter un tel amendement, afin d'éviter les discordes. Si l'amendement du député de Rouville (M. Robert) est adopté, les membres des unions internationales se sentiront attaqués. Il croit que la Chambre est contre la motion du député de Westmount (M. Smart) dont il blâme le ton. Le fait de voter l'amendement du député de Rouville enverrait le message aux membres des unions internationales que la Législature souhaite les voir disparaître...
L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Pourquoi6?
M. Vautrin (Montréal-Saint-Jacques): L'Internationale a rendu, au début, des services signalés aux ouvriers canadiens. Ils sont venus dans la province, ont organisé les ouvriers et ceux-ci ont pu bénéficier de meilleurs salaires et de meilleures conditions, et ils ne sont plus considérés comme des machines. Maintenant les unions nationales se sont jointes au mouvement et il est tout simplement naturel qu'il y ait un désir de les voir croître. L'amendement proposé par le député de Rouville (M. Robert) est arrivé à l'improviste.
Il devrait être analysé par tous ceux que le domaine de la main-d'oeuvre intéresse et pourrait mettre les ouvriers sous une mauvaise impression et leur faire croire à un vote de censure. S'il était adopté, il créerait une tempête dont les effets se feraient sentir pendant une longue période. Il (M. Vautrin) se déclare donc contre cet amendement7, tout en souhaitant que les unions nationales et internationales catholiques ou autres s'entendent pour s'unir et collaborer au lieu de se combattre. Pour éviter que l'opinion de la Législature soit mal comprise, dit-il, je propose en sous-amendement que cette Chambre passe à l'ordre du jour no 4.
L'honorable M. Taschereau (Montmorency) se lève.
M. Sauvé (Deux-Montagnes) soulève un point d'ordre disant qu'aucun député ne pouvait parler sur une pareille proposition qui devait être soumise au vote immédiatement.
M. l'Orateur: L'article 189 des règlements de la Chambre dit qu'une telle motion discontinue toute discussion sur un débat.
Des ministres citent des règlements de la Chambre et commencent une discussion avec l'Orateur.
L'honorable M. Taschereau (Montmorency) dit qu'une telle motion mettait fin à tout débat en cours, il est vrai, mais aux débats concernant les motions précédentes, il ajoute qu'il avait le droit de parler sur la motion du député de Saint-Jacques (M. Vautrin). Il (M. Taschereau) maintient que la motion du député de Saint-Jacques ne met pas un terme au débat, qu'elle est nouvelle et qu'on peut la débattre en tant que telle.
M. l'Orateur lit l'article 189:
"Quand elle est proposée incidemment, la motion de passer aux ordres du jour, à l'ordre du jour suivant ou à un ordre du jour déterminé ne peut être faite que par un député qui a le droit de prendre la parole sur la question en débat ou l'affaire en cours.
"1. On ne peut interrompre un discours pour proposer de passer aux ordres du jour ou à quelque ordre du jour. Cf. Art. 246.
"2. Celui qui a déjà pris la parole sur la question en cours ne peut proposer de passer aux ordres du jour ou à quelque ordre du jour.
"Elle interrompt tout débat en cours et, si elle est adoptée, elle écarte toutes les questions, tant principales que secondaires ou incidentes, dont la Chambre est alors saisie. B., p. 447; C., no 1377; Redl., II, p. 226; C. Man., nos 143, 148; Bl. Man., p 145; Robert, nos 13, 61 (a).
"1. Une motion écartée peut être présentée de nouveau. Art. 154.
"2. Un ordre du jour écarté peut être rétabli au feuilleton. Art. 210.
"3. Quand, à une heure déterminée, la chambre passe à une affaire pour se conformer à un ordre spécial, l'affaire qui était en cours est interrompue, et non pas écartée. Mell, no 174.
"Si elle est rejetée, elle ne peut être renouvelée tant que la chambre est saisie de la même affaire. Robert, no 61 (a)."
Il (M. l'Orateur) déclare que, si on veut poursuivre le débat, la Chambre doit rejeter la motion du député de Saint-Jacques (M. Vautrin) parce que l'amendement Robert supprime la première motion Smart.
L'honorable M. Taschereau (Montmorency) prétend toujours que ce n'est pas une décision correcte et continue de citer les règlements.
(Il s'ensuit un brouhaha assez sensible dans toute la Chambre, pendant que les officiers recourent aux volumes de procédure.)
Des députés: Pour!
Des députés: Contre!
M. l'Orateur maintient sa décision et décrète qu'elle devait prendre fin et que le premier ministre n'avait pas le droit de parler sur cette motion.
M. Sauvé (Deux-Montagnes): Vous acceptez sûrement la décision de l'Orateur?
M. Smart (Westmount) veut savoir si, en tant qu'auteur de la motion, on l'empêcherait de mettre fin au débat.
M. l'Orateur lui dit qu'il pourrait parler si la motion du député de Montréal-Saint-Jacques était battue. Il appelle le vote.
Et la motion "que la Chambre passe maintenant à l'ordre du jour no 4", étant mise aux voix, la Chambre se divise et, sur la demande qui en est faite, les noms sont enregistrés ainsi qu'il suit:
Pour: MM. Bédard, Bercovitch, Bouthilier, Cannon, Dufresne, Gauthier, Lacombe, Laferté, Lapierre, Laurendeau, Mercier (Trois-Rivières), Ouellet (Dorchester), Poulin, Reed, Renaud, Richard, Sauvé, Vautrin, 18.
Contre: MM. Ashby, Bergevin, Bugeaud, Bullock, Caron (Îles-de-la-Madeleine), Daniel, David, Desaulniers, Dufour (Charlevoix-Saguenay), Fortier, Galipeault, Gault, Godbout, Grégoire, Lemay, Lemieux (Gaspé), Lemieux (Wolfe), McDonald, Mercier fils (Châteauguay), Miles, Monet, Moreau, Morin, Nicol, Oliver, Ouellette (Yamaska), Paquet (Montmagny), Péloquin, Perrault, Ricard, Robert, Saurette, Savoie, Smart, Taschereau, Tessier, Thériault, Tourville, 38.
Cette motion est rejetée.
En conséquence, la Chambre reprend le débat sur l'amendement qui a été proposé le jeudi 16 mars courant, sur la motion suivante:
"Qu'il soit résolu que, de l'avis de cette Chambre, la question de savoir s'il est opportun d'adopter une législation forçant toutes les organisations ouvrières à se constituer en corporation, et mettant plus strictement en vigueur des lois contre les grévistes qui ont recours à la violence, devrait être prise immédiatement en considération."
Et l'amendement se lit comme suit:
Que tous les mots après "que" soient remplacés par les suivants:
"cette Chambre reconnaissant que les ouvriers canadiens sont un des éléments les meilleurs de notre population, invite les organisations ouvrières de cette province à se donner une constitution essentiellement canadienne et à continuer à coopérer dans l'ordre et le respect des lois, au développement industriel de la province."
M. Smart (Westmount) met fin à la discussion en faisant remarquer que, puisque les irritants ont disparu, il peut conclure. Il critique les remarques des députés de Maisonneuve (M. Laurendeau) et Montréal-Saint-Louis (M. Bercovitch) au sujet de la One Big Union. Cette dernière, dit-il, est apparentée aux Travailleurs indépendants du monde qui oeuvrent aux États-Unis, et les unions internationales n'ont aucun désir de les supprimer.
Aux États-Unis, ce sont les Travailleurs indépendants du monde que les hommes de l'Internationale ont cité comme une sorte de spectre affreux de ce qui pourrait nous arriver, si on n'accédait pas à leurs propres exigences. La One Big Union n'est pas une organisation ouvrière, mais un mouvement révolutionnaire, et on a bien fait de tuer ce mouvement à sa naissance dans le pays. Il (M. Smart) est plutôt fatigué de voir qu'on brandit ce spectre. Quant aux dires du député de Saint-Louis (Bercovitch), dit-il, à savoir qu'on ne pouvait pas citer un seul cas où les unionistes s'étaient montrés insoumis à la loi commune, les journaux sont remplis de cas d'insoumissions.
La critique du député de Sainte-Marie (M. Gauthier) comme quoi la motion arrive très tard dans la session est prononcée de mauvaise grâce de la part du représentant de l'I.T.U au Québec, l'homme en partie responsable de la grève qui a paralysé la Chambre...
M. Gauthier (Montréal-Sainte-Marie): Je vous demande pardon. Je n'ai pas provoqué la grève. Je n'en suis pas responsable.
M. Smart (Westmount): Alors, très bien, j'accepte cette déclaration. C'est Indianapolis, justement ce à quoi je voulais en venir. Cela signifie que la responsabilité en incombe à l'Internationale, sur qui nous voulons faire porter le blâme. Le député de Saint-louis (M. Bercovitch) parle de l'autonomie des unions locales, mais il semble que leur autonomie réside seulement dans les accessoires. Personne ne met en doute que les ouvriers ont des droits, mais ce à quoi il (M. Smart) s'oppose, c'est d'être commandé par les unions internationales. Ils n'ont pas besoin des conseils ou des avis des Américains, parce que tout le système social et politique canadien est de beaucoup supérieur à celui des États-Unis.
Les unions ouvrières ont retardé le pays pendant la guerre, insistant pour obtenir des salaires exorbitants, pendant que leurs compatriotes combattaient dans les tranchées pour $1.10 par jour. On ne pardonnera jamais aux unions ouvrières la façon infecte dont ils ont traité les hommes qui revenaient de la guerre en ne leur permettant pas de travailler à leurs côtés, parce qu'ils n'étaient pas syndiqués.
La séance est levée à 1 heure.
Deuxième séance du 17 mars 1922
Présidence de l'honorable J.-N. Francoeur
La séance est ouverte à 3 heures.
M. l'Orateur: À l'ordre, Messieurs! Que les portes soient ouvertes!
Droits sur les successions
L'honorable M. Nicol (Richmond) demande la permission de présenter le bill 209 amendant la loi relative aux droits sur les successions.
Accordé. Le bill est lu une première fois.
Nomination des juges des sessions et des magistrats de police
L'honorable M. Taschereau (Montmorency) demande la permission de présenter le bill 210 amendant les statuts refondus, 1909, relativement à la nomination des juges des sessions et des magistrats de police.
Accordé. Le bill est lu une première fois.
Questions et réponses:
Octroi de terres publiques
M. Sauvé (Deux-Montagnes): 1. Le ministre des terres et forêts a-t-il, conformément à l'article 1553b inséré dans les statuts refondus, 1909, accordé des terres publiques à des personnes ou compagnies dont les terres détenues par lettres patentes ou par licences de coupe de bois, ont été inondées par les barrages faits par la couronne pour l'emmagasinement des eaux de rivières?
2. Dans l'affirmative, quels sont les noms et résidences de ces personnes ou compagnies et combien d'acres et dans quelle partie de la province?
L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay): 1. Oui.
2. a. Northern Colonisation Railway - Montreal 96,000 acres dans les cantons projetés de Deziel, Lindsay et Magnan, comté de Champlain.
b. Laurentide Company, Ltd - Grand'Mère, 27,160 acres dans les cantons projetés de Landry, David et Leau (Champlain et Maskinongé)
c. Brown Corporation - Québec, 6,765 acres dans le canton projeté de Dubois-Lac-Saint-Jean.
d. Brown Corporation - Québec, 20,250 acres dans le haut du Saint-Maurice.
Droits sur les successions
L'honorable M. Nicol (Richmond) propose, appuyé par le représentant de Montréal-Laurier (l'honorable M. Lacombe), qu'à la prochaine séance, la Chambre se forme en comité plénier pour prendre en considération un projet de résolution relative au bill 209 amendant la loi relative aux droits sur les successions.
Adopté.
Les organisations ouvrières
Conformément à l'ordre du jour, la Chambre reprend le débat, ajourné ce matin 17 mars, sur l'amendement proposé le jeudi 16 mars courant, sur la motion suivante:
"Qu'il soit résolu que, de l'avis de cette Chambre, la question de savoir s'il est opportun d'adopter une législation forçant toutes les organisations ouvrières à se constituer en corporation, et mettant plus strictement en vigueur les lois contre les grévistes qui ont recours à la violence, devrait être prise immédiatement en considération."
Et l'amendement se lit comme suit:
Que tous les mots après "que" soient remplacés par les suivants:
"cette Chambre reconnaissant que les ouvriers canadiens sont un des éléments les meilleurs de notre population, invite les organisations ouvrières de cette province à se donner une constitution essentiellement canadienne et à continuer à coopérer, dans l'ordre et le respect des lois, au développement industriel de la province."
M. Smart (Westmount) maintient que les unions de commerce parlent beaucoup de liberté, mais, une fois qu'ils ont pris le contrôle sur leurs hommes, ils leur enlèvent leur liberté individuelle. Le débat a été d'intérêt public, dit-il, et a révélé l'humeur de la population de la province, qu'elle ne veut pas que les unions de commerce aillent trop loin et qu'un accord équitable est requis. Il fait certaines remarques au sujet de la situation de la Russie, où les agitateurs ont causé des troubles si sérieux. Il ne désire pas insister sur sa motion et accepte l'amendement proposé par le député de Rouville (M. Robert), croyant qu'il va assez loin pour le moment et espérant que c'est le premier pas vers de meilleures conditions entre les employeurs et les employés.
L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Vous me permettrez d'ajouter quelques mots à ce qui a été dit sur la question ouvrière. Je reconnais à l'ouvrier le droit de se grouper en unions et celui de la grève, pourvu que leurs associations soient canadiennes et qu'ils décident eux-mêmes les grèves. Il y a eu des différends entre ouvriers nationaux et patrons à Québec, et ces différends ont pu être réglés de façon satisfaisante pour toutes les parties, sans que l'on ait eu besoin d'avoir recours à des étrangers.
Si je ne me trompe, l'origine de tout ce long débat, c'est le trouble que nous a causé, il y a quelque temps, la grève des typographes qui a retardé les travaux de la session pour environ deux semaines et dont la Législature se ressent encore. À cette occasion, j'ai fait des déclarations en présence des députés qu'il n'est pas nécessaire de répéter. Et de ces déclarations qui n'ont pas eu l'heur de satisfaire certaines personnes, je n'ai rien aujourd'hui à retrancher et je serais prêt à les répéter.
(Applaudissements)
Hier, le député de Saint-Louis (M. Bercovitch), qui est un excellent avocat, a plaidé éloquemment la cause des unions internationales. J'ai rarement eu plus d'admiration pour son talent et chaque fois que j'aurai des mauvaises causes, je m'adresserai à lui; mais il nous a dit hier que les unions internationales se conduisaient par elles-mêmes. Sur ce point, et sur ce point-là seul, je diffère d'opinion avec lui. Les Internationaux sont-ils bien leurs maîtres? Ne reçoivent-elles pas des ordres d'étrangers? Est-il bien vrai qu'elles sont indépendantes de Chicago, de New York, d'Indianapolis, de Buffalo ou d'autres villes américaines? Certains incidents de la grève des typographes cependant permettent de douter fortement que les ouvriers enrôlés dans l'Internationale jouissent ici d'une parfaite autonomie.
Quand la grève des typographes s'est déclarée, j'ai téléphoné8 à M. Moore9 du Congrès canadien du commerce. Il m'a dit qu'il ne savait rien de cette grève. J'ai télégraphié à Gustave Francq10 qui m'a dit la même chose et que c'était les Internationaux qui étaient les maîtres de leur propre destinée. Ce qui est le plus curieux, c'est qu'un homme d'Indianapolis que je ne connais pas et avec qui je n'ai pas communiqué m'a envoyé un télégramme. Le télégramme était signé d'un M. McPharland11, l'un des grands maîtres de l'Internationale, dans lequel il disait qu'il regrettait que le retrait des membres de l'I.T.U. ait embarrassé la Législature.
Mais il ajoutait "nous devons affirmer que le salaire offert par les employeurs est insuffisant dans les circonstances actuelles." Quelle affaire ce monsieur d'Indianapolis a-t-il de venir protester contre une échelle de salaires d'ouvriers de Québec? On ne pouvait constater plus clairement que les ordres aux typographes de cette province venaient directement d'Indianapolis. Il est tout à fait extraordinaire de voir un monsieur des États-Unis venir nous dire: "Nous nous objectons aux salaires payés par les patrons de Québec aux typographes."
Personne n'a d'objection à ce que les ouvriers s'entendent entre eux, mais ce à quoi nous nous objectons, et je suis certain que tous les gens sensés de cette province sont d'accord avec moi, c'est ce que M. McPharland vienne nous dire: "je m'objecte à l'échelle de salaires que vous avez à Québec". Lors des troubles ouvriers, j'ai parlé aux chefs de Québec et nous nous entendions, mais il est venu un autre citoyen des États-Unis, un M. McLaughlin d'Indianapolis, pour discuter avec moi la grève des typographes de l'Internationale et poser ses conditions et dire ce qu'il accepte. Je lui ai fait répondre que je n'avais carrément pas d'affaire à lui.
(Applaudissements)
J'ai dit aussi que je crois avec toute la population que nos ouvriers canadiens sont capables de régler leurs propres affaires et doivent être maîtres de leurs destinées sans l'influence des Américains. Ils savent mieux ce qui leur convient que des étrangers.
(Applaudissements)
Je me demande quel est le député de cette Chambre et quel est le Canadien de cette province qui peut se prononcer contre l'amendement du député de Rouville, qui ne demande pas autre chose aux ouvriers que leurs associations soient aussi canadiennes que possible. Qui peut s'objecter à cela? Nous ne demandons pas aux ouvriers de rompre avec les unions internationales s'ils ne le veulent pas. Nous ne leur demandons pas de renoncer à la pension de vieillesse, aux prestations en cas de décès ou de maladie qu'ils peuvent obtenir et pour lesquels ils ont payé pendant de nombreuses années. Nous leur demandons d'être Canadiens, et je pense que ce sentiment patriotique devrait suffire. Qu'on aille demander aux ouvriers des États-Unis s'ils préfèrent que leurs unions soient américaines par-dessus tout et l'on verra quelle sera leur réponse. Si nous voulions dicter des lois à nos voisins nous serions vite rappelés à nos affaires. Sur ce point, nous voulons la réciprocité.
(Applaudissements)
J'ai appris des choses intéressantes au cours de cette grève des typographes. J'ai étudié un peu la question des grèves et, d'un point de vue canadien, les difficultés ne reposent pas seulement sur les salaires, mais aussi sur les heures. Les typos insistaient surtout sur la demande de la semaine de 44 heures; sur les autres points, ils étaient prêts à discuter, mais ils étaient intransigeants sur la question des 44 heures. D'où venait l'idée du règne de 44 heures, réclamé par les ouvriers? D'Indianapolis à n'en pas douter. On nous dit que les travailleurs canadiens sont indépendants. Or, c'est d'Indianapolis que l'on a proclamé la semaine de 44 heures, lors d'un récent congrès de l'Union.
Le congrès de l'I.T.U. a adopté une résolution que tous les membres sont tenus moralement d'adopter et a mis en vigueur la semaine de 44 heures à partir du 1er mai 1921. Si nos ouvriers sont indépendants, pourquoi obéissent-ils aux courants d'idées parties des États-Unis? Je ne discute pas ce principe de la semaine de 44 heures. Peut-être que c'est correct et peut-être que ce ne l'est pas. Ce règne de 44 heures peut convenir à nos voisins, mais sa raison d'être en Canada est fort discutable. Si je suis capable de comprendre quelque chose, les ouvriers des unions internationales sont moralement tenus de se conformer aux ordres qui viennent de là-bas. Résultat: on établit ici un régime qui est bon pour les États-Unis, mais qui l'est plus ou moins pour Québec.
Il a reçu, dit-il, une lettre d'un dirigeant des chemins de fer du Québec12 datée du 24 février qui le félicite hautement de son attitude lors de la grève des typographes. Cette lettre dit en partie: "Laissez-moi vous dire à quel point j'admire votre courage et votre bon jugement, au sujet de la grève des typographes. Les points les plus fondamentaux que vous avez soulevés m'ont interpellé." À mon avis, ce qui touche les Canadiens de nos jours, c'est que toute notre vie industrielle soit dirigée de Cleveland, d'Indianapolis, de toute autre ville des États-Unis ou du Canada. Et, la même lettre le souligne en disant que la question est de savoir si l'industrie canadienne doit être contrôlée à partir de villes américaines ou à partir du Canada. Ce dirigeant ajoute également: "Je crois que le Canada vous doit une belle gratitude pour avoir affronté publiquement cet état de choses." La grande question qui est en jeu est ce problème même de se débarrasser du patron étranger.
Nous n'avons aucune objection à ce que nos travailleurs se regroupent en unions. Au contraire, c'est leur droit et leur devoir. Qu'on fasse partie de l'Internationale tant qu'on voudra, que les ouvriers se protègent quand ils pensent que c'est nécessaire, mais ce que nous voulons, et je le répète, ce que le bon sens de la province veut, c'est qu'ils soient maîtres d'eux-mêmes et qu'ils décident eux-mêmes de ce qui est convenable pour le Canada et nos propres provinces, et qu'ils n'acceptent pas la direction d'étrangers, surtout quand les conditions qui prévalent ailleurs sont différentes des nôtres.
Voulez-vous un exemple de ce que peut faire chez nous la dictature américaine? Aux États-Unis, la population est plus nombreuse, par rapport à la grandeur du territoire. La situation dans notre province est différente, et l'Abitibi en fournit un bon exemple. Dans l'Abitibi que nous cherchons à coloniser le plus activement possible, les colons ont coupé des millions de cordes de bois de pulpe traînant le long des voies ferrées. Le gouvernement a fait tous ses efforts pour aider les colons à expédier le bois; Ottawa offre de payer ¼ du transport. Mais les colons répondent que le coût du transport vers les grands centres est plus élevé que la valeur du bois lui-même, à cause de l'échelle McAdoo.
Les compagnies de chemins de fer ont refusé de transporter le bois, parce que les seuls frais de transport s'élevaient à une somme dépassant la valeur du bois à transporter et ne pouvaient être réduits. Les compagnies expliquaient ce haut coût de transport par les salaires monstres qu'elles étaient obligées de payer à leurs conducteurs, ingénieurs et autres employés de chemins de fer, en vertu de l'échelle fixée par le commissaire McAdoo.
Le développement sera interrompu dans cette partie de la province. Seulement l'été dernier, un conducteur de l'Intercoloniale m'a dit qu'il gagnerait entre $3,500 et $4,000 dans l'année pour avoir conduit son train. "Je ne veux pas cela", ajoutait-il, "mais puisqu'on me l'offre, je le prends". Il serait fou de ne pas prendre l'argent.
Aussi longtemps que nous aurons ce régime édicté par les États-Unis où les conditions sont différentes des nôtres, le développement de notre pays sera entièrement paralysé et nos chemins de fer qui appartiennent aux Américains auront, comme l'an dernier, des centaines de millions de déficits. La cédule McAdoo, qui peut convenir aux États-Unis, est pour le Canada, pays jeune, peu peuplé, une cause de ruine. Notre jeune pays ne saurait endurer plus longtemps ces conditions, si nous nous laissons mener par les États-Unis.
En proposant son amendement, le député de Rouville (M. Robert) n'a fait qu'un appel au bon coeur, à l'intelligence et au patriotisme des ouvriers qu'ils soient membres des unions internationales ou de toute autre union. Tout ce que nous leur demandons, c'est d'étudier les constitutions et d'être avant tout Canadiens. Je ne vois pas qu'il y ait un seul député dans cette Chambre qui puisse refuser de voter en faveur de l'amendement.
(Applaudissements)
M. Gauthier (Montréal-Sainte-Marie) tient à donner quelques explications sur la grève des typographes de Québec.
M. Smart (Westmount) élève une objection en disant que le député a déjà parlé une fois sur la motion.
M. l'Orateur: Le député de Montréal-Sainte-Marie (M. Gauthier) a parlé sur la motion Smart avant l'amendement Robert, et il peut par conséquent parler sur l'amendement.
M. Gauthier (Montréal-Sainte-Marie): On a prétendu, et personne ne l'a fait pendant le débat, que des ordres étaient venus d'Indianapolis pour que les typographes de Québec entrent en grève. C'est faux. Ce sont les typographes de Québec qui ont déclaré eux-mêmes la grève, sans intervention d'Indianapolis, par un vote de 53 à 1513. Ils étaient entièrement libres de leurs actes. S'ils n'avaient pas été aux trois quarts en majorité, il n'y aurait pas eu de grève. Quant à M. McLaughlin, il est venu ici à la demande des patrons eux-mêmes qui voulaient que le représentant américain de l'I.T.U. vienne à Québec pour négocier avec eux.
En ma qualité de député et en ma qualité d'international, je suis venu moi-même à Québec pour régler la grève. Si, au lieu d'inviter cet officier, on m'avait laissé tenter, dès le début de la grève, les efforts qui ont contribué ensuite au règlement, une entente aurait été conclue bien plus tôt entre les intéressés. J'ai fait bien des démarches pour régler cette grève qui aurait pu être réglée bien vite, si les patrons avaient voulu, mais ils ont longtemps refusé de me recevoir. Les typographes ont soumis une proposition qui aurait réglé la grève si les hommes l'acceptaient.
Et les hommes étaient d'accord et les employeurs ont alors changé d'idée. S'ils avaient respecté leurs engagements, la grève eût pu se régler immédiatement. Mais les patrons ont manqué à leur parole en changeant leurs conditions de travail qu'ils avaient acceptées. L'Internationale n'est pas entièrement responsable de la situation difficile qui a existé alors. Toute question a deux côtés, et il n'est pas juste de ne blâmer que les internationales. Les ouvriers commencent à se ressentir de l'opprobre de l'ingérence des Américains dans leurs affaires.
Je voudrais maintenant faire une correction. L'honorable ministre du Travail (M. Galipeault) a dit que nos ouvriers payaient 10 % de leur salaire aux États-Unis. Cela est vrai pour certaines organisations, mais pas pour toutes. Je ne vois pas que l'on puisse vouloir tant de mal aux unions internationales. Pourquoi faire un si grand reproche aux ouvriers d'appartenir à l'Union internationale, quand on sait que celle-ci existe et recrute ses membres dans la province de Québec depuis 5514 ans, tandis que les unions nationales ne sont formées que depuis trois, quatre ou cinq ans? Comment peut-on reprocher à nos ouvriers d'entrer dans l'Internationale?
En ce qui concerne les commentaires du député de Rouville (M. Robert) sur les troubles qui ont eu lieu à Marieville15, il peut y avoir dans les rangs de l'Internationale, qui compte des millions de membres, un certain nombre de têtes brûlées et des gens ayant des idées plus avancées que d'autres, mais cela arrive dans toutes les classes de la société et tous les corps publics, même ceux qui sont composés des personnes les plus instruites. Le ministre des Travaux publics et des ouvriers (l'honorable M. Galipeault) dit que la province de Québec a les meilleures lois ouvrières, mais si le Québec a des bonnes lois ouvrières, ce sont les ouvriers de l'Internationale qui sont venus année après année les revendiquer. Lui-même, en tant qu'ouvrier, se présente à chaque année depuis dix ans, et il admet que les délégués ouvriers ont toujours été bien reçus.
On ne peut faire de reproches aux ouvriers de s'être inféodés à l'Internationale, quand il n'existait pas d'autres unions. Les ouvriers ne demandent pas mieux que d'appartenir à des unions canadiennes, pourvu qu'elles puissent leur offrir les mêmes avantages. L'Union pourvoit au bien-être de ses membres. Dans tous les cas, c'est grâce à l'Internationale que maintenant, de Vancouver à Halifax, il n'y a pas un typographe qui soit sans travail et qui gagne moins que $22 par semaine. Pas un typographe ne vit aujourd'hui dans la mendicité comme la chose arrivait dans le passé.
Je suis contre l'amendement du député de Rouville (M. Robert), parce que je crois qu'il condamne les unions internationales; c'est un reproche aux Canadiens qui sont membres des unions internationales. Ces unions internationales existent dans la province depuis longtemps, tandis que les unions nationales ne sont apparues que depuis trois ou quatre ans. Il y a 300,000 membres des unions internationales au Canada et, si les unions canadiennes offraient les mêmes avantages que l'Internationale, les Canadiens seraient heureux d'adhérer à une organisation canadienne.
M. l'Orateur: Adopté?
Des voix: Oui!
Des voix: Non!
M. Bercovitch (Montréal-Saint-Louis) demande le vote.
(Personne ne se lève pour demander le vote)
M. l'Orateur: Adopté?
M. Laurendeau (Maisonneuve), M. Sauvé (Deux-Montagnes), M. Gauthier (Montréal-Sainte-Marie), se lèvent avec M. Bercovitch (Montréal-Saint-Louis) pour demander le vote16.
M. l'Orateur: Adopté?
M. Thériault (L'Islet) se lève à son tour, ce qui donne les cinq voix nécessaires pour appeler un vote.
Et l'amendement étant mis aux voix, la Chambre se divise et, sur la demande qui en est faite, les noms sont enregistrés ainsi qu'il suit:
Pour: MM. Bordeleau, Caron (Îles-de-la-Madeleine) David, Dufresne, Fortier, Galipeault, Gault, Godbout, Lacombe, Laferté, Leclerc, Lemay, Lemieux, (Gaspé), Mercier (Trois-Rivières), Miles, Monet, Moreau, Morin, Nicol, Oliver, Ouellet (Dorchester), Ouellette, (Yamaska), Paquet (Montmagny), Péloquin, Perrault, Poulin, Ricard, Roy, Sauvé17, Savoie, Smart, Taschereau, Tessier, Vautrin, 34.
Contre: MM. Bercovitch, Gauthier, Laurendeau, Thériault, 4.
L'amendement est ainsi adopté.
Et la motion principale ainsi amendée étant mise aux voix, la Chambre l'adopte.
Représentation proportionnelle
M. Sauvé (Deux-Montagnes) propose, appuyé par le représentant de Montréal-Saint-Georges (M. Gault):
Qu'attendu que le système électoral en vogue dans cette province est sérieusement critiqué parce que l'on prétend qu'il ne traduit pas fidèlement et dans une proportion exacte, au sein de l'Assemblée législative, les courants d'opinion publique qui trouvent leur expression dans les suffrages du corps électoral;
Qu'il importe d'étudier si un système de représentation proportionnelle pratique ne s'impose pas comme mesure de justice et d'ordre public;
Qu'un comité spécial de cette Chambre soit créé avec mission de faire enquête sur les différents systèmes de représentation proportionnelle adoptés ou proposés ailleurs, tendant à perfectionner les méthodes électorales en vogue en cette province; et que le comité ait le pouvoir de se réunir durant la vacance parlementaire pour entendre des personnes compétentes sur la question, et fasse rapport à la prochaine session de ce Parlement.
Mes remarques à l'appui de ma résolution seront assez brèves, car, je n'ai point l'intention d'examiner en détail devant cette Chambre le système de représentation proportionnelle, ou plutôt devrais-je dire les différents systèmes de représentation proportionnelle, puisque, a-t-on dit, il y avait 200 systèmes de représentation, mais admettons avec un modéré que les plus importants sont au nombre de dix environ. Cet examen est très difficile, et déterminer quel mode de représentation proportionnelle conviendrait le mieux à nos conditions économiques, à notre position géographique, exige un travail de longue haleine, éclairé par des compétences qui ont fait de la question des études spéciales.
Dans tous les parlements, des commissions comme celle que je propose ont été formées pour les mêmes fins. Au Parlement impérial, en 1910, une Commission royale a fait un rapport complet, sous la présidence de M. Richard Cavendish. Cette Commission était composée, avec le président, de MM. Lochee18, E. S. Montagu19, C. P. Ilbert, Chs. Eliot, W. P. Reeves20 et John W. Hills. La Commission se prononce contre la représentation proportionnelle comme système impraticable, parce que trop compliquée. M. Lochee fut dissident et je donnerais plus loin ses principales raisons.
À la session de 1909, le regretté M. Monk21, dont la mémoire est si respectée, faisait aussi une motion demandant l'institution d'une commission pour l'étude du système, mais je crois que la Commission avec son rapport fut comme soeur Anne, on ne l'a jamais vu venir22. Notre système actuel est le système majoritaire uninominal. C'est-à-dire que c'est le groupe le plus nombreux de chaque comté ou collège électoral qui obtient un représentant au Parlement.
S'il y a plus de deux partis en présence dans le comté ou circonscription, il arrive assez souvent que le député est l'élu de la minorité. Il arrive aussi qu'un parti puisse être victorieux dans tous les comtés d'une province et que, cependant, ses adversaires comptent presque la moitié de l'électorat.
On a même vu dans ce pays qu'un parti est porté au pouvoir par une grande majorité des comtés, bien que la majorité des électeurs du pays ait voté contre ce parti, et que de cette façon, un gouvernement peut conduire suivant la volonté d'un groupe de députés, mais non pas la majorité des électeurs du pays.
Des chiffres et des exemples ont souvent été donnés à l'appui de ce fait indiscutable. Ce qui fait que, souvent, des gouvernements ont tort de dire que leur majorité parlementaire représente le sentiment du peuple. On prétend que ce système est injuste, car le gouvernement ainsi élu ne représente pas l'exercice du gouvernement par la majorité de la nation, mais par la majorité d'un groupe, et que des milliers et des milliers de citoyens qui payent des impôts et qui ont aussi des droits devant le pays ne sont point représentés dans l'administration des affaires publiques. Il est indiscutable que le meilleur mode d'élection est bien celui qui assurerait dans l'administration de notre province la représentation des sentiments de la nation, en proportion de leur valeur.
L'État moderne est construit par la souveraineté du peuple, mais non d'un groupe. C'est la majorité qui gouverne, actuellement, mais cette majorité ne représente très souvent que le sentiment de la minorité des citoyens du pays. Si l'on tient compte des organisations électorales, des journaux stipendiés, des abus de pouvoir pour escamoter des mandats pour voler des élections, si l'on tient compte de la liberté aujourd'hui de dissoudre les Chambres quand cela fait l'affaire des gouvernements, de prolonger ou d'abréger les Parlements, est-ce que l'on peut prétendre en réalité que, par le système actuel, nous avons des gouvernements par le peuple? Je ne le crois pas. Nos institutions parlementaires ont perdu beaucoup de leur prestige de leur autorité, à cause des moeurs politiques qui découragent les meilleurs éléments de la population.
La démocratie est devenue une fatalité par l'exploitation du démagogue, et un vain mot par l'oppression des gouvernements qui trouvent leur force dans l'organisation électorale favorisée par notre système de représentation. La Législature a adopté le "one man one vote" sous prétexte que les citoyens doivent être égaux aux urnes électorales, que l'opinion du faible est aussi respectable que celle du puissant. Cependant, que fait-on de l'opinion de la minorité dans cette province? N'est-elle pas la victime, non seulement de nos moeurs politiques, mais aussi de notre système d'élections?
En 1890, un bon vieux libéral, ardent s'il en fut, Ulric Barthe23, alors rédacteur de L'Électeur, parlant de notre mode de représentation, le dénonça comme injuste, premièrement parce qu'il ne donne pas une représentation fidèle de l'électorat; deuxièmement parce qu'il défranchise une notable portion, quelquefois plus de la moitié de l'électorat. M. le juge J.-B. Archambault a fait des différents systèmes de scrutin une étude approfondie. Ce compatriote, distingué plus encore par ses talents que par la position qu'il occupe, disait, parlant de notre système électoral: "Cette forme de scrutin nous est venue de l'Angleterre. Elle a été accueillie sans discussion, du consentement universel, avec d'autant plus de facilité que le pays d'où elle était importée avait conservé et conserve la réputation d'être la terre classique de la liberté politique. Or, cette forme de scrutin ne nous donne qu'un simulacre de gouvernement démocratique."
Sir Richard Cartwright24 disait au sénat canadien: "Notre système de représentation est radicalement mauvais; supposons qu'un parti représente 100,000 électeurs et qu'un autre en représente 90,000. Il est parfaitement juste, disait-il, que 100,000 électeurs envoient 100 députés et que l'autre parti 90, mais il n'est pas équitable que ceux qui disposent de 100,000 voix envoient 150 représentants et que ceux qui disposent de 90,000 n'en puissent élire que 40."
M. Lochee, membre de la Commission impériale, disait dans un rapport de minorité:
"Under our present system a minority of electors may seat a majority of legislators. A small majority may elect a large majority. Considerable sections of the electorale may have no representation on at all. It is impossible to say that such a system has a fully representative character, or to deny that the transferable vote would remove or greatly modify its defects25."
Le comité avait cependant recommandé avec M. Lochee le vote alternatif et l'abolition des circonscriptions à double mandat. Gladstone26, bien auparavant, s'était aussi prononcé contre la réforme électorale en faveur de notre système plus simple de majoritaire uninominal.
On dit que le grand remède à cette injustice est la représentation proportionnelle. J'avouerai que je ne connais ni ne comprends assez ce mode pour être aujourd'hui juge compétent. C'est un mode très compliqué, et c'est pour cela que les hommes politiques les plus éminents depuis cinquante ans, plus d'un quart de siècle, ont craint de l'adopter. M. A. Surveyer a fait de ce système une étude qui a été publiée dans la Revue Trimestrielle.
Je crois que je ne puis faire mieux qu'en citant un extrait de cet article de revue où il explique le fonctionnement de la représentation. Voici: "L'application du système de la représentation proportionnelle exige la création de circonscriptions électorales élisant plus d'un député, préférablement au moins 5, encore mieux 7 ou 9. Son fonctionnement comporte deux problèmes: 1. La détermination du nombre de sièges à attribuer à chaque parti; 2. Le choix par chaque parti, des candidats qui doivent le représenter en Chambre. La représentation proportionnelle, c'est, en somme, l'application de la règle de trois.
"On commence d'abord par faire la somme de tous les votes, qui s'appelle la masse électorale; cette somme divisée par le nombre de députés à élire, donne le quotient électoral. Ce chiffre s'appelle aussi plus correctement l'unité de représentation.
"C'est en divisant la somme des votes obtenus par chaque parti, par ce quotient électoral, qu'on déterminera les sièges gagnés, d'emblée, par les différents partis. Si après avoir fait le calcul pour tous les partis, il reste encore quelques sièges non distribués, on les attribuera aux partis ayant le plus grand reste."
Il (M. Sauvé) cite des chiffres pour établir que la députation sortant des urnes électorales aux dernières élections du 6 décembre 1921 ne donne justice, à aucun parti; ne donne pas plus justice à M. King27, à M. Crerar28 ou à M. Meighen29 et encore moins au peuple du Canada. M. King n'a pas justice dans l'Ouest où il compte de nombreux partisans et n'a qu'un seul député. De même, les conservateurs pour Québec et les provinces maritimes. Dans notre province, les 234,500 électeurs qui ont voté contre les candidats de M. King, de M. Gouin ou de M. Lapointe auraient avec la représentation proportionnelle 15 à 18 députés aux Communes, tandis qu'avec le système actuel, il n'y en a pas un seul.
Ainsi en Nouvelle-Écosse, les libéraux ont eu 53 % des voix et élu 16 députés sur 16, tandis que les électeurs conservateurs, progressistes et dissidents, avec 47 % des voix, n'ont pas un seul député pour les représenter à Ottawa.
Au Manitoba, les progressistes ont reçu moins de la moitié des voix, mais ils ont élu 12 députés sur 15 et, dans l'Alberta, où 60 % des électeurs ont voté pour leurs candidats, ils en ont élu 11 sur 12.
Dans l'ensemble du pays les libéraux ont présentement 117 députés, les progressistes 66, les conservateurs 50, et les ouvriers, 2. Avec ce système de représentation proportionnelle, les libéraux en auraient 98, les conservateurs 73, les progressistes 58 et les ouvriers 5 ou 6.
Pour notre province, prenons le pire résultat que l'on puisse obtenir, dû à des circonstances spéciales, nées de causes étrangères aux mérites des deux partis en lutte et d'une précipitation inexcusable et oppressive. Je veux parler de l'élection provinciale de 1919.
Voyons les statistiques publiées dans le rapport sur la 15ème élection générale. 131,08430 bulletins ont été déposés dans les urnes. Les candidats du gouvernement ont obtenu 90,651 votes et les oppositionnistes 38,98531, soit plus d'un tiers.
Je crois que les honorables amis de la droite sont assez impartiaux pour admettre que nous ne devons pas conclure que dans les comtés où il y a eu acclamation, le sentiment était unanime en faveur du gouvernement.
Deux oppositionnistes ont été acclamés dans des comtés populeux. Dans les autres comtés les acclamations sont dues, pour la plupart du moins, à une situation particulière concernant l'organisation électorale, et non le sentiment et l'opinion de l'électeur sur l'administration de la province. Or, je crois qu'il est juste de placer dans les comtés où il y eut acclamation le 1/3 des électeurs dans la colonne des oppositionnistes.
Je crois que ma base est correcte. Or, en considérant le nombre de votes inscrits ou le nombre d'électeurs inscrits sur la liste, les oppositionnistes devraient avoir ici 28 ou 29 représentants.
Je ne parle pas ainsi pour exprimer une plainte personnelle, écho de l'ambition des hommes, car on verra avant longtemps que le travail que j'accomplis ici n'a pas été inspiré et nourri par cette ambition, mais bien dans le seul but de faire mon devoir envers mes concitoyens et ma province, envers ce bon peuple que j'aime plus que jamais, parce que je sais combien il est trompé, combien il est victime des exploiteurs.
Cette réforme préoccupe tous les pays. Certaines provinces du Canada l'ont adoptée à l'essai pour des villes. L'honorable M. King, l'honorable M. Crerar et l'honorable M. Meighen se sont déjà prononcés en faveur.
Aux États-Unis, des politiciens sérieux se prononcent en faveur de la représentation proportionnelle qui a empêché, dit-on, la scission entre les Flandres et la Wallonie.
La représentation proportionnelle est pratiquée en Belgique, en Serbie, en Suisse, en Tasmanie, en Suède et au Danemark. La France a adopté une proportionnelle mitigée et le Parlement italien s'est il y a quelques années déclaré en faveur de ce système.
En Afrique Sud, la représentation proportionnelle fut recommandée. En France, l'abbé Lemire32 fut d'abord partisan de la réforme, mais pas longtemps. Paul Deschanel33, Jules Roche34, Delahaye35, Benoist, Henri Clément, Jos. Dorrays, etc., etc., se prononcent pour la réforme.
Deschanel s'écriait un jour: "En France plus qu'ailleurs, peut-être, il faut toujours avoir confiance dans l'avenir! Seulement, pour que ce sentiment ne soit pas un leurre, il faudra que l'expression des volontés et des sentiments intimes du pays cesse elle-même d'en être un."
"Il faut que la représentation proportionnelle soit adoptée et que le résultat d'un scrutin législatif ne soit pas simplement la tyrannie d'une moitié de France exercée sur l'autre."
J'ai écrit jadis: "Notre régime électoral est un scandale; c'est l'arbitraire et l'injustice mêmes". Je n'ai pas à changer un mot à ce jugement. Là est, en effet, à mon sens pour notre politique intérieure, la question capitale."
Nous devons au peuple, disait Jacques Pion lors du débat à Paris sur la représentation proportionnelle, d'abord des scrutins de clarté, ensuite des scrutins de justice. Il y a dans la justice une grande vertu d'apaisement. Quand les partis savent qu'on ne leur a causé aucun dommage, qu'on leur a fait tout leur droit, qu'ils auront sur les affaires publiques une influence parfaitement adéquate à leurs forces, les vainqueurs ont moins le désir d'abuser de la victoire et les vaincus se résignent plus aisément à leur défaite.
Comme ils savent qu'ils n'ont pas été écrasés par la brutalité du nombre, qu'ils n'ont pas été dépouillés par des artifices électoraux, leurs colères se calment, les résolutions extrêmes les tentent moins.
La certitude de ne pas se perdre en efforts inutiles arrache les indifférents à leur torpeur... Maintenant qu'ils sont certains d'avoir la part d'influence qui leur est due, ils rentrent dans la lice et redeviennent les citoyens qu'ils n'auraient jamais dû cesser d'être.
N'est-ce pas, messieurs, un monde de votation souhaitable, celui qui éveille dans les esprits la foi de la justice, la notion des devoirs civiques qui, mettant sous les yeux de tous l'image fidèle du pays, apprend aux vainqueurs qu'ils ne sont pas les maîtres pouvant tout oser, et aux vaincus qu'ils ne sont pas des victimes condamnées à tout souffrir.
Oh! Que ces sentiments exprimés par une langue d'or sont donc beaux! Est-il un patriote, est-il un Canadien français, imbu de justice, aimant réellement sa province, son vrai patrimoine national, voulant le bien de la société, la justice pour tous, qui puisse, en réalité, préférer à ces sentiments de noblesse, d'honnêteté, de vertu, la cupidité, le mensonge, le parjure, la fraude, les fausses professions de foi, les hypocrites déclarations de patriotisme?
Non, non la vie est trop courte pour entrer dans cette comédie humaine et l'honnête homme a bien d'autres choses à penser. J'ai établi que notre système ne rendait pas justice aux citoyens, à la majorité ou à la minorité du peuple. N'est-ce pas assez pour justifier la commission d'étude que je propose? J'ai cité des opinions importantes préconisant la représentation proportionnelle.
Ne valent-elles pas la peine d'être sérieusement considérées. Je viens de citer des paroles de Plon et de Deschanel: N'invitent-elles pas les hommes de coeur et de justice à vouloir trouver la réforme salutaire que nous devons chercher devant les vices qui nous désagrègent? Nos institutions parlementaires atrophient les bons éléments de la nation ou favorisent la cupidité?
Je me rends compte des difficultés d'un mode de représentation proportionnelle chez nous, à cause de l'étendue territoriale de notre province et de la vaste dissémination de sa population. Chez nous, la population n'est point dense comme en Belgique. C'est pourquoi, M. l'Orateur, je comprends qu'avant de nous prononcer en faveur de tel mode de représentation, il convient de soumettre la question à une commission d'étude et d'en attendre le rapport pour bien considérer quel mode pourrait le mieux s'adapter au pays et à notre province.
L'honorable M. David (Terrebonne): L'an dernier, un système de représentation proportionnelle a été proposé pour la cité de Montréal dans la cédule A du bill de charte alternative préparée par la Commission nommée spécialement à cet effet. La Législature a alors soumis cette question à la population de Montréal qui s'y est déclarée hostile par une immense majorité, de même que le comité des bills privés de l'Assemblée législative. Toutes les explications les plus claires avaient pourtant été données au préalable sur ce sujet.
S'il fallait former un comité chargé de faire enquête sur les divers systèmes de représentation proportionnelle, il serait bien à craindre que l'on pût trouver dans la Chambre, sans faire injure à qui que ce soit, un nombre suffisant de députés ayant les connaissances nécessaires pour traiter convenablement cette question, qui est excessivement compliquée et qui connussent seulement 10 des quelques centaines de systèmes qui existent sur la représentation proportionnelle. Au reste, ce système ne semble d'ailleurs pas très populaire dans notre province. Il est vrai qu'il fonctionne bien en Belgique, mais il y a seulement deux nations dans ce pays, et aussi, cela est dû au fait que l'on a le vote obligatoire dans ce pays.
À ce propos, l'on peut se demander si la population de notre province est prête à accepter le vote obligatoire, qui est un élément essentiel de ce système. Ce système, au reste, ne serait pas très pratique dans notre province, étant donné le grand nombre de minorités que nous avons et qui toutes, sans doute, réclameraient une représentation à la Chambre. Il (M. David) cite une autorité qu'avait citée le chef de l'opposition, M. Surveyer, disant "que les apôtres de la représentation proportionnelle parlent quand ils sont dans l'opposition".
Cependant, la question mérite d'être étudiée, mais privément pour le moment. Il est certain que le gouvernement y apportera toute l'attention possible. Il serait inopportun de la faire étudier maintenant par un comité spécial, avant qu'il y ait une campagne d'éducation sur la matière. Le chef de l'opposition ferait bien de continuer à instruire la population à ce sujet et il sera peut-être temps l'an prochain de former un comité dans le but d'étudier l'opportunité d'accepter ce système.
Et, la motion étant mise aux voix, la Chambre la rejette.
Liste des jurés de Montréal
L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose, selon l'ordre du jour, que le bill 206 concernant la préparation et le renouvellement de la liste des jurés pour les districts de Montréal et de Québec soit maintenant lu une deuxième fois.
Adopté. Le bill est renvoyé au comité général.
L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose que la Chambre se forme immédiatement en ledit comité.
Adopté.
Le comité, ayant étudié le bill, fait rapport qu'il l'a adopté avec certains amendements. Les amendements sont lus deux fois et adoptés.
L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.
Adopté.
Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.
Taxes sur les corporations
L'honorable M. Nicol (Richmond) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme en comité général pour prendre en considération un projet de résolutions relatives au bill 205 amendant les statuts refondus, 1909, concernant les taxes sur les corporations, compagnies, personnes, raisons sociales et associations.
Adopté.
Il informe alors la Chambre qu'il est autorisé par Son Honneur le lieutenant-gouverneur à soumettre ledit projet de résolutions et que Son Honneur en recommande la prise en considération.
En comité:
L'honorable M. Nicol (Richmond) propose: 1. Que la taxe additionnelle de trente piastres pour chaque place d'affaires dans les cités de Montréal et de Québec, et de quinze piastres pour chaque place d'affaires dans toute autre municipalité, imposée par le paragraphe b de la division I de l'article 1347 des statuts refondus, 1909, sur les compagnies constituées en corporation, soit réduite de moitié si le montant du capital versé est moindre que vingt-cinq mille piastres.
Adopté.
2. Que les taxes imposées sur les compagnies de chemins de fer, dans les cas prévus par le paragraphe c de la division I de l'article 1347 des statuts refondus, 1909, soient aussi exigibles des compagnies de navigation dans les mêmes circonstances.
Adopté.
3. Que le lieutenant-gouverneur en conseil pourra accorder, pour un temps déterminé ou non, telle réduction de taxes qu'il croira juste, à une compagnie constituée en corporation et visée par la division I de l'article 1347 des statuts refondus, 1909, et
I. Ayant son bureau-chef en dehors de la province et faisant affaires dans la province, ou
II. Ayant son bureau-chef dans la province et ayant en dehors de la province la majeure partie, en valeur, de son actif corporel, ou
III. Ayant son bureau-chef dans la province mais n'y faisant aucune autre affaire que détenir les actions, débentures et autres garanties d'autres compagnies constituées en corporation ayant leur bureau-chef dans la province et y faisant affaires.
Adopté.
4. Que le lieutenant-gouverneur en conseil pourra accorder, pour un temps déterminé ou non, telle réduction de taxes qu'il croira juste, à une compagnie de navigation visée par la division V de l'article 1347 des statuts refondus, 1909, et
I. Ayant son bureau-chef en dehors de la province et étant propriétaire ou utilisant des vaisseaux servant entre des ports dans la province et des ports en dehors, ou faisant seulement escale à un port dans cette province, ou
II. Ayant son bureau-chef dans la province et étant propriétaire ou utilisant des vaisseaux servant seulement entre des ports en dehors, ou entre des ports dans cette province et des ports en dehors, ou faisant seulement escale à un ou plusieurs ports dans cette province.
Adopté.
5. Que les taxes imposées en vertu des dispositions de la section dix-huitième du chapitre cinquième du titre quatrième des statuts refondus, 1909, exigibles le premier juillet de chaque année, porteront intérêt, au taux légal, à compter de la date de leur exigibilité.
Adopté.
6. Qu'au cas où une corporation ou une compagnie sujette à la taxe, suivant les dispositions de l'article 1353 des statuts refondus 1909, serait mise en liquidation ou ferait l'abandon de sa charte, conformément à la loi, elle aura droit de recouvrer une partie proportionnelle du montant des taxes qu'elle aura payées pour l'année durant laquelle son actif a été définitivement réalisé par le liquidateur, ou durant laquelle elle a fait l'abandon de sa charte.
Adopté.
Résolutions à rapporter:
Un comité fait rapport qu'il a adopté plusieurs résolutions, lesquelles sont lues deux fois et adoptées par la Chambre.
Il est ordonné que lesdites résolutions soient renvoyées au comité plénier chargé d'étudier le bill 205 amendant les statuts refondus, 1909, concernant les taxes sur les corporations, compagnies, personnes, raisons sociales et associations.
L'honorable M. Nicol (Richmond) propose, selon l'ordre du jour, que le bill 205 amendant les statuts refondus, 1909, concernant les taxes sur les corporations, compagnies, personnes, raisons sociales et associations, soit maintenant lu une deuxième fois.
Adopté. Le bill est renvoyé au comité général.
L'honorable M. Nicol (Richmond) propose que la Chambre se forme immédiatement en ledit comité.
Adopté. Le comité étudie le bill et en fait rapport sans amendement.
L'honorable M. Nicol (Richmond) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.
Adopté.
Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.
Subsides
L'honorable M. Nicol (Richmond) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme de nouveau en comité des subsides.
Adopté.
En comité:
L'honorable M. Nicol (Richmond) propose: 1. Qu'un crédit n'excédant pas trente mille trois cent quatre-vingt-dix piastres et soixante-neuf centins soit ouvert à Sa Majesté pour les frais d'administration (dette publique) pour l'exercice finissant le 30 juin 1923.
Adopté.
2. Qu'un crédit n'excédant pas mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour le traitement de l'Orateur du Conseil législatif, pour l'exercice finissant le 30 juin 1923.
Adopté.
3. Qu'un crédit n'excédant pas vingt et un mille quatre cent cinquante piastres soit ouvert à Sa Majesté pour traitements, dépenses continentes, etc., (Conseil législatif), pour l'exercice finissant le 30 juin 1923.
Adopté.
4. Qu'un crédit n'excédant pas cent quatre mille cinq cent soixante-quinze piastres soit ouvert à Sa Majesté pour traitements, dépenses contingentes, etc., (Assemblée législative), pour l'exercice finissant le 30 juin 1923.
Adopté.
5. Qu'un crédit n'excédant pas quatre-vingt-dix mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour impression et reliure pour les deux Chambres de la Législature, S. R. Q., 1909, article 164, pour l'exercice finissant le 30 juin 1923.
Adopté.
6. Qu'un crédit n'excédant pas quatre mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour achat de livres (Bibliothèque de la Législature), pour l'exercice finissant le 30 juin 1923.
Adopté.
7. Qu'un crédit n'excédant pas seize mille sept cents piastres soit ouvert à Sa Majesté pour traitements, dépenses contingentes, etc., (Bibliothèque de la Législature), pour l'exercice finissant le 30 juin 1923.
Adopté.
8. Qu'un crédit n'excédant pas quatre cent cinquante piastres soit ouvert à Sa Majesté pour dépenses contingentes des élections pour l'exercice finissant le 30 juin 1923.
Adopté.
9. Qu'un crédit n'excédant pas neuf cent cinquante piastres soit ouvert à Sa Majesté pour le greffier de la couronne en chancellerie, et un commis, traitement, pour l'exercice finissant le 30 juin 1923.
Adopté.
10. Qu'un crédit n'excédant pas seize mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour impression, reliure et distribution des statuts, pour l'exercice finissant le 30 juin 1923.
Adopté.
11. Qu'un crédit n'excédant pas dix-huit mille cent cinquante piastres soit ouvert à Sa Majesté pour traitements (gouvernement civil), pour l'exercice finissant le 30 juin 1923.
Adopté.
12. Qu'un crédit n'excédant pas cent soixante-dix mille neuf cents piastres soit ouvert à Sa Majesté pour dépenses contingentes (gouvernement civil), pour l'exercice finissant le 30 juin 1923.
Adopté.
13. Qu'un crédit n'excédant pas huit cent cinquante mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour l'administration de la justice, pour l'exercice finissant le 30 juin 1923.
Adopté.
14. Qu'un crédit n'excédant pas neuf mille neuf cent trente-huit piastres et soixante-quinze centins soit ouvert à Sa Majesté pour les juges de la Cour des sessions de la paix, Québec et Montréal, comme juges et commissaires des licences; magistrats de police, Montréal, et constables et huissiers audienciers à Québec et à Montréal, pour l'exercice finissant le 30 juin 1923.
Adopté.
15. Qu'un crédit n'excédant pas vingt mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour l'inspection des bureaux publics, pour l'exercice finissant le 30 juin 1923.
Adopté.
16. Qu'un crédit n'excédant pas vingt-sept mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour le Journal d'agriculture, pour l'exercice finissant le 30 juin 1923.
M. Sauvé (Deux-Montagnes) s'élève contre le revenu des annonces dans le Journal d'agriculture. Il prétend qu'il est plus élevé de deux cents quelques piastres que la Cie de publication du Canada fît du Journal d'agriculture.
L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine) s'engage à remettre lundi au chef de l'opposition tous les documents relatifs à la publication du Journal d'agriculture.
La résolution est adoptée.
L'honorable M. Nicol (Richmond) propose: 17. Qu'un crédit n'excédant pas quinze mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour l'aviculture, pour l'exercice finissant le 30 juin 1923.
Adopté.
Résolutions à rapporter:
Le comité fait rapport qu'il a adopté plusieurs résolutions et demande la permission de siéger de nouveau.
Messages du Conseil législatif:
M. l'Orateur informe la Chambre que le greffier du Conseil législatif a apporté les deux messages suivants, lesquels sont lus ainsi qu'il suit:
Le Conseil législatif informe l'Assemblée législative qu'il a voté, sans amendement, les bills suivants:
- bill 115 étendant les pouvoirs de l'Église du Messie;
- bill 146 amendant le Code de procédure civile relativement aux ventes par le shérif;
- bill 147 amendant l'article 16 du Code municipal relativement à la coupe du bois;
- bill 156 amendant les statuts refondus, 1909, relativement à l'annexion de territoires faisant partie d'une cité ou d'une ville à une autre corporation;
- bill 197 relatif à certaines acquisitions et aliénations d'immeubles par les corporations et les gens de mainmorte;
- bill 201 concernant l'agrandissement du palais de justice du district de Québec.
Le Conseil législatif informe l'Assemblée législative qu'il a voté, avec certains amendements qu'il la prie d'agréer, les bills suivants:
- bill 82 concernant la succession de feu Joseph-Aimé Massue;
- bill 87 constituant en corporation la municipalité de la paroisse de Saint-Pierre d'Estcourt, dans le comté de Témiscouata;
- bill 94 constituant en corporation la ville de Mont-Joli;
- bill 105 constituant en corporation la municipalité de la paroisse de Saint-Joachim, dans le comté de l'Assomption;
- bill 148 détachant certains lots du comté de Terrebonne et les annexant à la paroisse de Saint-Joachim, dans le comté de l'Assomption, pour les fins électorales, judiciaires, municipales et d'enregistrement;
- bill 149 détachant certains lots du comté de Kamouraska et les annexant à la paroisse de Saint-Pierre d'Estcourt, dans le comté de Témiscouata, pour les fins électorales, judiciaires, municipales et d'enregistrement;
- bill 162 amendant les articles 80 et 259 du Code municipal.
Succession J.-A. Massue
La Chambre prend en considération les amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 82 concernant la succession de feu Joseph-Aimé Massue.
Les amendements sont lus deux fois et adoptés. Le bill est retourné au comité législatif.
Charte de la municipalité de la paroisse de Saint-Pierre d'Estcourt
La Chambre prend en considération les amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 87 constituant en corporation la municipalité de la paroisse de Saint-Pierre d'Estcourt, dans le comté de Témiscouata.
Les amendements sont lus deux fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.
Charte de la municipalité de la paroisse de Saint-Joachim
La Chambre prend en considération les amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 105 constituant en corporation la municipalité de la paroisse de Saint-Joachim, dans le comté de l'Assomption.
Les amendements sont lus deux fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.
Lots du comté de Terrebonne
La Chambre prend en considération les amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 148 détachant certains lots du comté de Terrebonne et les annexant à la paroisse de Saint-Joachim, dans le comté de l'Assomption, pour les fins électorales, judiciaires, municipales et d'enregistrement.
Les amendements sont lus deux fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.
Lots du comté de Kamouraska
La Chambre prend en considération les amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 149 détachant certains lots du comté de Kamouraska et les annexant à la paroisse de Saint-Pierre d'Estcourt, dans le comté de Témiscouata, pour les fins électorales judiciaires, municipales et d'enregistrement. Les amendements, sont lus deux fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.
Code municipal
La Chambre prend en considération les amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 162 amendant les articles 80 et 259 du Code municipal. Les amendements sont lus deux fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.
Charte de Mont-Joli
La Chambre prend en considération les amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 94 constituant en corporation la ville de Mont-Joli. Les amendements sont lus une première fois.
Fête des Irlandais
L'honorable M. Taschereau (Montmorency) demande au chef de l'opposition de joindre sa voix à la sienne pour saluer leurs concitoyens Irlandais à l'occasion de leur fête nationale. L'année dernière, dit-il, a été une année mémorable dans l'histoire de l'Irlande. Après des années de lutte, l'Irlande a enfin conquis une certaine liberté. Il n'y a pas d'endroit au Canada peut-être que dans la province de Québec où l'on ait plus applaudi chaleureusement au geste impérial accordant l'autonomie à l'Irlande.
Nous leur souhaitons tout le succès et le bonheur possibles sous le nouveau régime. Les fils de l'Irlande au Canada sont parmi les meilleurs citoyens de notre pays, et ils vivent en paix et en harmonie avec leurs concitoyens canadiens. Il demande au chef de l'opposition d'appuyer sa motion afin de montrer aux concitoyens irlandais que la province de Québec est unanime dans son hommage à l'Irlande.
(Applaudissements de la Chambre)
M. Sauvé (Deux-Montagnes) se lève.
(Applaudissements de la Chambre)
C'est un plaisir pour moi que de me joindre au premier ministre et de saluer nos concitoyens de la verte Erin qui célèbrent aujourd'hui leur fête nationale et de leur souhaiter bonheur et prospérité. Puissent-ils toujours trouver à nos côtés le support et la sympathie que nous avons accordés aux fils de l'Irlande, pendant plus d'un siècle sous le drapeau britannique. Durant des siècles, déchirée par des divisions internes, l'Irlande a chèrement gagné sa liberté.
L'Ulster contre le reste de l'Irlande, ou vice versa, voilà ce qui, par le passé, fut la principale barrière à cette autonomie si fièrement réclamée par les disciples du grand O'Connell. L'Irlande a connu également en son sein d'autres scissions importantes. Espérons que ces incidents qui paralysent la solution au problème irlandais disparaîtront le plus tôt possible afin que triomphent justice et liberté.
(Applaudissements de la Chambre)
M. Grégoire (Frontenac) parle en faveur de la cause irlandaise et fait référence à une nouvelle aube de prospérité pour l'Irlande, ce qui, espère-t-il, arrivera bientôt.
Ajournement
L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose, appuyé par le représentant des Îles-de-la-Madeleine (l'honorable M. Caron), que lorsque cette Chambre s'ajournera, à la présente séance, elle soit ajournée à huit heures et demie, ce soir.
Adopté.
La séance est levée.
Troisième séance du 17 mars 1922
Présidence de l'honorable J.-N. Francoeur
La séance est ouverte à 8 h 3036.
M. l'Orateur: À l'ordre, Messieurs! Que les portes soient ouvertes!
Travaux de la chambre
M. Sauvé (Deux-Montagnes) se plaint qu'il est bien difficile de discuter des questions importantes devant une Chambre si disposée à finir la session, même bien avant la prorogation. Il regrette que les crédits pour l'administration de la justice, comme les grosses mesures, viennent à la dernière heure.
L'honorable M. Taschereau (Montmorency) dit qu'il veut bien pour sa part donner tous les renseignements au chef de l'opposition. Le chef de l'opposition fait un travail de géant durant la session, dit-il, et il a rendu des services réels à sa province et à son administration.
Charte de la Commission métropolitaine de l'Île de Montréal
M. Monet (Napierville)37 propose, appuyé par le représentant de Montréal-Hochelaga (M. Bédard), que toutes les dispositions du règlement qui ont trait à l'avis, à la présentation et à l'examen des pétitions introductives des bills privés ainsi qu'à l'examen préliminaire, à la présentation et à l'examen en comité des bills privés soient suspendues et qu'il soit en conséquence permis de présenter un bill apportant des modifications additionnelles à la charte de la commission métropolitaine de l'Île de Montréal.
Adopté.
M. Monet (Napierville) demande la permission de présenter le bill 143 apportant des modifications additionnelles à la charte de la commission métropolitaine de l'Île de Montréal.
Accordé. Le bill est lu une première fois.
Journal des débats
M. Sauvé (Montmorency) propose, appuyé par le représentant de Montréal-Saint-Georges (M. Gault): Qu'attendu qu'il est d'une grande importance que le public soit renseigné avec exactitude sur les actes des députés, sur les débats de l'Assemblée législative, sur la législation et sur l'administration publique: Attendu qu'il est important de conserver des comptes-rendus officiels des séances et des débats de l'Assemblée législative, ainsi que cela se faisait avant 1892; cette Chambre invite le gouvernement à rétablir ces débats et à procurer aux journaux représentés, aux sessions de la Législature, les moyens d'assurer au public des comptes-rendus fidèles des séances et des débats de l'Assemblée législative, de manière à ce que la députation, le public, et les propriétaires de journaux soient traités avec la plus grande justice possible.
Il (M. Sauvé) croit absolument nécessaire la publication du Hansard. Il invite le gouvernement à consacrer chaque année une somme d'environ $10,000 pour défrayer les frais occasionnés par cette publication. Il fait l'éloge des courriéristes parlementaires et il dit que ces derniers doivent journellement (sic) accomplir une tâche très ardue. Il invite le gouvernement à reprendre la publication du Hansard et à nommer pour la prochaine session deux reporters officiels dont les fonctions seront de coopérer avec les courriéristes parlementaires pour la préparation des comptes-rendus des séances de la Législature publiés dans nos principaux quotidiens.
Il est d'une grande importance que le public soit renseigné d'une façon impartiale sur les actes des députés et sur les débats de l'Assemblée législative, et cela, de manière à ce que la députation, le public et les propriétaires de journaux soient traités avec la plus grande justice possible. Pour arriver à ce résultat, il faut rétablir le Hansard et aider ainsi aux rapports des journaux. Cela coûterait relativement peu cher.
L'honorable M. Perrault (Arthabaska): L'honorable chef de l'opposition voudrait que les débats de la Législature soient publiés. Le gouvernement a déjà publié un Hansard qui a été abandonné en 189138 quand l'allocation annuelle fut retenue par mesure d'économie. Ce journal des débats n'était pas publié par le gouvernement, mais c'était une entreprise privée dirigée par M. Desjardins39 et qui était subventionnée par le gouvernement, jusqu'à l'avènement de Boucherville au pouvoir. Après la suppression de ce journal, il y a eu un comité formé pour s'enquérir de la possibilité de ressusciter la publication, mais il n'y a jamais eu de rapport de ce comité. Plus tard, il y a eu d'autres vaines tentatives de résurrection de ce Hansard. Est-il bien nécessaire que les débats de la Chambre soient publiés officiellement?
Aucune province n'a trouvé que cela était nécessaire, puisque aucune province ne possède de ces publications. Le public a le droit d'être bien renseigné et, comme question de fait, il l'est puisque tous les grands journaux de la province sont représentés à la Législature et que ces journaux publient sur chaque débat, en Chambre ou en comité, des comptes-rendus très longs, complets et aussi impartiaux que possible.
Dans tous les comptes-rendus que les courriéristes parlementaires ont publiés depuis le début de la présente session, ils ont fait preuve d'une exactitude et d'une franchise qui est tout à leur éloge. Il n'y a pas eu de Hansard depuis 30 ans et le public ne pourrait être mieux renseigné qu'il ne l'est présentement, et nous devons reconnaître que nos courriéristes parlementaires accordent justice à qui de droit et s'acquittent de leurs importantes fonctions avec justice et jugement.
Au reste, qui lirait ce Hansard? Qui lit celui de la Chambre des communes? Sûrement pas le public, peut-être même pas la plupart des députés. Le public qui suit les débats de la Chambre des communes est renseigné comme celui qui suit les débats de la Législature, c'est-à-dire par les journaux. De plus, toutes les grandes bibliothèques bien montées possèdent des filières de tous les journaux, et le public peut toujours facilement se renseigner sur les comptes-rendus antérieurs. Il nous semble que cela est suffisant et qu'il n'est pas opportun de reprendre une telle entreprise et d'entraîner la province dans la dépense de la publication d'un Hansard qui coûterait très cher.
Tant que durera l'état de choses actuel, la publication d'un journal officiel n'est pas nécessaire ni d'intérêt public, puisqu'elle entraînerait de nouvelles et inutiles dépenses. Comment se fait-il aussi que, depuis la Confédération, la province de Québec n'ait pas trouvé l'occasion de fonder cette publication? Le gouvernement ne doit pas faire une telle dépense que les autres provinces ne font pas, mais que seul le gouvernement fédéral juge à propos de faire.
M. Sauvé (Deux-Montagnes): Le ministre a la réputation d'être sérieux, mais il n'a pas été à la hauteur de sa réputation dans ce débat40. Il a badiné au lieu de traiter la question à fond. Quelques journaux font de leur mieux pour servir le public en parlant des deux côtés d'un sujet, mais la nécessité d'un journal officiel s'impose, et le ministre en sait bien la raison.
Cette nécessité résulte surtout du fait que la presse du gouvernement, la presse stipendiée, trompe le peuple, fausse les actes, les paroles et les gestes des législateurs, trouve que tous les ministres sont des paragons de vertu et des génies, que tout ce qui est ministériel est bon et que cette presse déforme tout ce que fait l'opposition, ne se contente même pas de faire le silence sur ses actes, mais encore l'injurie quotidiennement. Le public commence à s'en rendre compte et le jour est proche où l'on verra un changement dans le sens de la vérité.
Le gouvernement n'a pas d'argent, lorsque vient le temps de donner la vérité à la population et il ne pourrait dépenser $5,000 à cet effet, peu importe ce qu'on dépense ailleurs. Il ne demande aucune faveur, mais la justice pour les deux côtés de la Chambre et pour la population qui doit être en mesure de juger à partir de rapports officiels du mérite de ses élus. En cette Chambre, le gouvernement ne cesse de se vanter d'avoir des surplus et de vanter sa législation modèle, et le fait qu'il constitue ici un exemple pour les autres provinces, mais lorsqu'on lui demande une modeste somme dans l'intérêt du public et de la justice, sa seule réponse c'est que cela ne se fait pas ailleurs.
L'honorable M. Taschereau (Montmorency) soulève un point d'ordre et demande au chef de l'opposition de parler sur sa motion Le chef de l'opposition, dit-il, retombe dans son vieux péché qui consiste à présenter une motion, nous lui répondons, et après notre réponse, quand nous ne pouvons plus revenir sur la question, il se livre à d'autres charges et d'autres accusations. Il (M. Taschereau) proteste avec énergie contre cette méthode de garder d'autres faits nouveaux dans sa réplique, alors que le gouvernement ne peut plus lui répondre.
M. Sauvé (Deux-Montagnes) explique qu'il fait bien, qu'il prouve la fausseté de ce qui a été dit par le ministre de la Colonisation (l'honorable M. Perrault)41. Il ajoute que, dans l'après-midi, il aurait pu rappeler à l'ordre le premier ministre, lorsqu'il a parlé après le député de Westmount (M. Smart) sur le débat concernant les ouvriers.
L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Il faut se conformer aux règles de la Chambre. Le public n'attachera sans doute pas grande importance à ce que dit le chef de l'opposition, mais il n'en reste pas moins vrai qu'après celui-ci, personne ne pourra parler et que le gouvernement devra rester sous le coup de ses accusations.
M. l'Orateur: Le chef de l'opposition s'est écarté de la question en apportant des faits nouveaux dans sa réplique.
M. Sauvé (Deux-Montagnes): Je ne poursuivrai pas le débat. Je ne suis pas autorisé à répondre. De l'autre côté, ils transgressent continuellement les règlements de la Chambre. C'est la domination de la majorité aussi servile qu'énorme. On veut m'enchaîner. Que l'on finisse alors la session!
M. l'Orateur: À l'ordre!
M. Sauvé (Deux-Montagnes): Oui, à l'ordre!
Et la motion étant mise aux voix, la Chambre la rejette.
La motion est rejetée.
Dr L.-E.-A. Parrot et J.-Frs Pouliot
M. Sauvé (Deux-Montagnes) propose: Que, le 26 mai 1921, M. Jean-François Pouliot, avocat de Rivière-du-Loup, écrivit au premier ministre de la province de Québec une lettre par laquelle il accusait le Dr L.-E.-A. Parrot, alors député de Témiscouata à la Législature de Québec, d'avoir fait le commerce des lots de colonisation au détriment de la province, mais à son bénéfice personnel, et d'avoir obtenu des lots au moyen de représentations frauduleuses;
Que ledit Jean-François Pouliot a, dans la même lettre, demandé au premier ministre d'instituer une "enquête complète sur les concessions dans le comté de Témiscouata";
Que le premier ministre, dans une lettre du 31 mai 1921, adressée au susdit J.-François Pouliot, déclarait que les accusations de ce dernier étaient graves;
Que le Dr Parrot a démissionné comme député du comté de Témiscouata le 22 juin 1921, à la demande du premier ministre qui lui aurait conseillé de se présenter de nouveau devant ses électeurs, pour leur expliquer son cas et se faire juger;
Que ledit Dr Parrot n'a pas été choisi et n'a pas été candidat à l'élection partielle qui eut lieu dans le comté de Témiscouata, le 22 décembre 1921;
Que la partie de la poursuite criminelle intentée contre M. Jean-François Pouliot par le Dr L.-E.-A. Parrot concernant les lots mentionnés dans la lettre dudit Pouliot au premier ministre de la province, le 26 mai 1921, a été abandonnée, à la demande des procureurs, en l'automne de 1921;
Qu'il appert par le document 55, produit devant cette Chambre le 7 mars 1922, que le 6 juin 1921, William Morin, rentier, de la paroisse de Saint-Hubert, comté de Témiscouata, déclare sous serment qu'il a entendu le Dr Parrot, alors député, faire des déclarations de nature à convaincre que la spéculation sur la cancellation ou pour l'obtention de lots se pratique sur une grande échelle;
Que, le 29 mai 1921, de nombreux électeurs réunis à Saint-Antonin ont adopté une résolution demandant au premier ministre l'enquête demandée par le susdit M. Pouliot, dans l'intérêt des colons et des cultivateurs, et que des citoyens de Saint-Hubert et de Saint-Honoré, de Témiscouata, ont adopté des résolutions faisant la même demande d'enquête;
Que, dans un jugement rendu en 1921 et rapporté dans les rapports de la Cour suprême du Canada, Vol. 62, No 2, dans la cause de Daniel Bernier, défendeur appelant, et Alfred Paradis, plaignant, la Cour suprême, à l'unanimité, déclare frauduleuses l'obtention et l'exploitation de certains lots de colonisation situés dans le rang B du Canton Bourdages, et que l'un des juges a été jusqu'à dire que la vente dans ce cas avait été faite sous des "circonstances qui paraissent étranges", que ledit juge a dénoncé la fraude dans la combinaison, dans la transaction, et signalé l'intervention de personnages pour faciliter la transaction, et qu'il a déclaré que le gouvernement, malheureusement, paraissait avoir facilité la fraude contre la loi en adoptant l'arrêté en conseil du 2 juillet 1918;
Que de semblables spéculations frauduleuses ont été faites aussi sur d'autres lots par des politiciens, candidats du gouvernement, pour des fins de caisse électorale et autres, dans le comté de Montmagny;
Que les échanges de lots par le gouvernement, en vertu de l'article 1553a, ont été faits en certains cas au détriment de la province, mais au bénéfice de politiciens dont les uns, alors députés et conseiller législatif, se servaient de leur influence politique pour faire cette spéculation, faisant perdre à la province une grande somme d'argent, et ce, contrairement à l'esprit dudit article 1553a de la loi des terres et forêts;
Que l'article 584 des statuts refondus, 1909, dit:
"Chaque fois que le lieutenant-gouverneur en conseil juge à propos de faire faire une enquête sur quelque objet qui a trait au bon gouvernement de la province, sur la gestion de quelque partie des affaires publiques, sur l'administration de la justice, sur quelque matière importante se rattachant à la santé publique ou sur une matière se rapportant au bon gouvernement de quelque municipalité de la province, il peut, par une commission émise à cette fin, nommer un ou plusieurs commissaires pour conduire cette enquête."
Qu'il soit en conséquence résolu qu'une enquête s'impose, pour le bon gouvernement de cette province, sur la gestion des affaires publiques, concernant les terres et forêts et les lots de colonisation depuis 1912, et que le lieutenant-gouverneur en conseil soit prié d'instituer immédiatement une commission suivant ledit article 584 et les dispositions du chapitre quatrième du titre III des statuts refondus, 1909.
M. Sauvé (Deux-Montagnes): Soulevez un point d'ordre, M. le Premier Ministre?
M. l'Orateur: Cette motion est hors d'ordre.
M. Sauvé (Deux-Montagnes) réclame des explications.
M. l'Orateur déclare la motion irrégulière parce que l'un de ses paragraphes tend à mettre indirectement en question la conduite de députés et conseillers législatifs, en citant certains propos tenus par des étrangers à cette Chambre. L'article 156 du règlement est formel: on ne peut mettre en question la conduite d'un député ou d'un conseiller que par une motion à cet effet qui soit directe comme de fond.
M. Sauvé (Deux-Montagnes) demande quelle partie de la motion est hors d'ordre.
M. l'Orateur lit le paragraphe de la motion qui est en flagrant délit avec cette règle de la Chambre.
Que, dans un jugement rendu en 1921 et rapporté dans les rapports de la Cour suprême du Canada, Vol. 2, No 2, dans la cause de Daniel Bernier, défendeur appelant, et Alfred Paradis, plaignant, la Cour suprême, à l'unanimité, déclare frauduleuses l'obtention et l'exploitation de certains lots de colonisation situés dans le rang B du Canton Bourdages, et que l'un des juges a été jusqu'à dire que la vente dans ce cas avait été faite sous des "circonstances qui paraissent étranges", que ledit juge a dénoncé la fraude dans la combinaison, dans la transaction, et signalé l'intervention de personnages pour faciliter la transaction, et qu'il a déclaré que le gouvernement, malheureusement, paraissait avoir facilité la fraude contre la loi en adoptant l'arrêté en conseil du 2 juillet 1918.
M. Sauvé (Deux-Montagnes): Il fallait bien que je fasse l'exposé de mes motifs. La motion est sur le feuilleton depuis plusieurs jours. Mais on attend à la dernière heure pour soulever ce point d'ordre. Je laisse la Chambre juge de cet acte. Je crois que le point d'ordre n'est pas fondé et que la raison n'est pas suffisante pour mettre ma motion de côté. On n'a pas bien pris le point d'ordre.
M. l'Orateur: Si le paragraphe en question commençant par les mots "Que, dans un jugement" n'était pas dans la motion, elle serait régulière.
L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Je ferai remarquer au chef de l'opposition que la motion est sur le feuilleton depuis le 13 mars seulement. Cet après-midi, nous nous sommes entendus pour qu'elle vienne devant la Chambre ce soir.
M. Sauvé (Deux-Montagnes): Le premier ministre n'a pas dit qu'elle était hors d'ordre à ce moment-là.
L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Ce n'est pas ma décision, mais celle de l'Orateur. Et l'Orateur n'a fait que son devoir qui est d'appliquer les règlements.
M. Sauvé (Deux-Montagnes): C'est très bien, je suis prêt à retrancher ce paragraphe. Est-ce que cela rendra la motion régulière?
M. l'Orateur: Les règlements de la Chambre disent que, lorsqu'une partie d'une motion est irrégulière, toute la motion est irrégulière. L'honorable chef de l'opposition peut faire une autre motion.
M. Sauvé (Deux-Montagnes): C'est bien, il y en aura une autre, lundi.
Subsides
L'honorable M. Nicol (Richmond) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme de nouveau, en comité des subsides.
Adopté.
En comité42:
L'honorable M. Nicol (Richmond) propose: 1. Qu'un crédit n'excédant pas un million cinq cent mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour amélioration et entretien des chemins, pour l'exercice finissant le 30 juin 1923.
M. Sauvé (Deux-Montagnes) se plaint de ce que, dans la discussion du budget, il n'obtient pas souvent les renseignements qu'il demande. Il rappelle que, du temps que les libéraux étaient dans l'opposition, ils exigeaient des renseignements que le gouvernement conservateur d'alors leur donnait toujours. Il prétend qu'il n'en est plus ainsi depuis, dit-il, qu'un gouvernement autocrate a derrière lui une majorité servile.
Il prétend que certains ingénieurs de la Voirie sont insuffisamment payés, si l'on compare leur salaire à ceux payés à leurs ingénieurs par les compagnies ou les grandes villes43. Pendant que certains gagnent $12,000 par année, il y en a qui reçoivent de $1,200 à $3,000 et ont une formation technique avancée. Il mentionne tout particulièrement M. Gabriel Henry, ingénieur en chef, qui ne reçoit que $3,100.
Un homme de la valeur de M. Henry devrait être mieux payé, dit-il, alors que des ingénieurs de sa capacité recevaient des salaires de $7,000 et même plus pour des compagnies. Le gouvernement se comporte comme les patrons du temps où il n'y avait pas d'unions, opprimant ses employés parce qu'ils sont permanents. Ceci donne comme résultat que les ingénieurs ne demeurent pas longtemps au département de la Voirie.
Par contre, on emploie à des salaires minimes d'autres ingénieurs incompétents. Ces derniers sont la cause et la raison pour laquelle il y a tant de mauvaises routes et un problème d'entretien qui inquiète beaucoup le premier ministre et qui grève davantage les municipalités.
Le gouvernement est lent à rembourser les municipalités pour l'argent qu'elles ont investi sur les chemins, de sorte qu'elles se trouvent obligées à emprunter, pour pouvoir survivre, à des taux élevés.
Il (M. Sauvé) parle des organes du gouvernement, du Soleil et du Canada.
L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Que le chef de l'opposition lise donc sa Minerve; il verra dans ce journal qu'il est un grand homme pendant que nous ne valons rien. Il est un peu froissé parce que sa motion a été rappelée à l'ordre...
M. Sauvé (Deux-Montagnes): Pardon, M. le Président. Pardon, je soulève un point d'ordre, car le premier ministre n'a pas le droit de me prêter des sentiments que je n'ai pas.
L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Je n'ai pas prêté de mauvaise...
M. Sauvé (Deux-Montagnes): M. le Président, j'espère que vous aurez assez de courage pour me rendre justice; je comprends que vous êtes un peu gêné, mais si le premier ministre veut oublier sa position, j'ai droit de le rappeler à l'ordre.
M. le président: Adopté?
M. Sauvé (Deux-Montagnes): Non. Le ministre de la Colonisation (l'honorable M. Perrault) m'a promis d'attendre à lundi pour voter ce crédit et nous allons attendre à lundi.
L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Non. Nous ne sommes pas pour ajourner. Vous aurez la troisième lecture.
M. Sauvé (Deux-Montagnes): N'y a-t-il pas autre chose à faire? Le premier ministre n'est pas juste pour le chef de l'opposition. Cet après-midi, il a déclaré que j'avais fait un travail de géant et que l'opposition rendait de grands services au gouvernement par ses observations. Je ne crois pas avoir mérité, ce soir, d'être traité de cette façon, et le premier ministre a tort de me traiter de cette manière, en m'injuriant et en m'insultant.
M. le président: Adopté?
M. Sauvé (Deux-Montagnes): Non. On ne vote pas ainsi $1,500,000. Il (M. Sauvé) fait un long discours et pose de nombreuses questions au ministre de la Colonisation (l'honorable M. Perrault).
L'honorable M. Perrault (Arthabaska): Depuis dix ans, le département de la Voirie a amélioré considérablement notre voirie: nous avons aujourd'hui les plus belles routes du dominion. Dans la confection de ces routes, assurément il a pu se commettre quelques erreurs; le contraire eût été surprenant. Il y a des erreurs dans toutes les constructions, parce que même les ingénieurs peuvent commettre des erreurs. Est-ce à dire que l'on doive crier à l'incompétence? Deux grandes causes ont contribué à détériorer nos chemins: les conditions climatiques dans lesquelles nous vivons et l'augmentation du trafic par automobiles. Il y a 12 ans44, il y avait peu d'automobiles.
Quand nous avons construit les routes, il n'y avait seulement que 2,000 automobiles dans la province et aucun camion. Nous ne nous attendions pas à cela quand nous avons construit nos chemins. Si nos chemins se sont détruits, ce n'est donc pas à cause de l'incompétence de nos employés. Quant à ces employés, nous les payons bien, comme nous payons tous nos employés. Il peut arriver que quelques-uns nous quittent. C'est encore une chose qui arrive dans toutes les administrations. Du reste, les employés de la voirie sont satisfaits de leur sort. Cependant, le gouvernement est prêt à faire face à toutes les urgences et, avec l'aide de la Chambre, dépensera les sommes d'argent nécessaires.
M. Sauvé (Deux-Montagnes) indique que le talent n'est pas apprécié. Sous prétexte qu'un individu est un employé permanent, cela ne justifie pas de le payer un salaire moindre.
Le gouvernement reçoit trois ou quatre millions de la vente de liqueurs, mais il n'a rien pour ses employés parce que ceux-ci sont permanents, et le gouvernement est indifférent au fait qu'ils soient ou non capables de nourrir et éduquer adéquatement leurs enfants.
Il s'informe du futur surintendant du service de l'amélioration et de l'entretien des chemins.
L'honorable M. Perrault (Arthabaska): Il n'est pas encore nommé.
M. Sauvé (Deux-Montagnes): Sera-t-il compétent?
L'honorable M. Perrault (Arthabaska): Assurément, il sera compétent.
M. Sauvé (Deux-Montagnes) parle de l'incompétence du futur surintendant de l'amélioration et de l'entretien des chemins et discute en détail de l'ensemble du réseau routier.
M. Grégoire (Frontenac) reproche au chef de l'opposition de parler trop longtemps45. Il (M. Grégoire) ne peut pas concevoir que l'on puisse faire de la législation avec des vétilles comme celles auxquelles s'attache le chef de l'opposition. Il nous faudrait un fameux Hansard, dit-il, pour reproduire tout ça!
Il ne conçoit pas que l'on tienne responsable un gouvernement de quelques détails infimes dans une administration comme celle du ministère de la Voirie. Qu'est-ce que cela fait à la province, dit-il, de faire voir la différence entre les ergots des Plymouth Rock et de Rock Island46?
M. Sauvé (Deux-Montagnes) remercie de façon élaborée le député de Frontenac (M. Grégoire) de lui avoir permis de se reposer. Il (M. Sauvé) prend quelques rapports annuels et pose question après question sur toutes sortes de détails47.
Il rappelle que dans les travaux de Voirie, le gouvernement a employé de la dynamite achetée du député de Matane (M. Dufour) et souligne le prix élevé payé pour cette dynamite.
La résolution est adoptée48.
Résolutions à rapporter:
Le comité fait rapport qu'il a adopté une résolution et demande la permission de siéger de nouveau. Ladite résolution est lue deux fois et adoptée.
Ajournement
L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose l'ajournement à lundi après-midi.
La séance est levée vers 1 heure du matin.
__________
NOTES
1. La grève des typographes de l'Union Typographique a débuté le 15 février dernier. Les employés réclamaient un meilleur salaire et la réduction des heures de la semaine de travail. Le travail parlementaire a souffert de ce conflit pendant plus d'une semaine, car le gouvernement avait confié l'impression des bills destinés à la Chambre à ces imprimeurs. Le 21 février, le député de Montréal-Sainte-Marie (M. Gauthier) et Médéric Martin, le maire de Montréal, ont négocié un règlement partiel du conflit et les typographes ont recommencé à alimenter le travail de l'Assemblée. À ce sujet, voir la séance du 15 février.
2. Gabriel Hanotaux (1853-1944), homme politique, historien et diplomate français. Député à partir de 1886 et ministre des Affaires étrangères en 1894 et en 1896-1898 dans les cabinets de Dupuy, Ribot et Méline. Élu à l'Académie française en 1897.
3. La Presse du 18 mars 1922, à la page 23, est en contradiction avec toutes nos autres sources sur ce point: M. Galipeault "ne croit pas que tout patriote doit souhaiter prochain le jour où nos ouvriers, d'eux-mêmes et sans heurts, réclameront et obtiendront l'autonomie complète de nos unions canadiennes."
4. La "One Big Union", mouvement syndical de l'Ouest canadien fondé en 1918-1919, visant le renforcement de la lutte pour la syndicalisation des non-syndiqués, pour le syndicalisme d'entreprise et pour le rapatriement de l'action syndicale. L'O.B.U. n'existe que sur papier, lors du déclenchement de la grève de Winnipeg en juin 1919. La confusion vient du fait que certains dirigeants de l'O.B.U ont pris part à cette grève, mais en leur qualité de représentants d'autres syndicats existants comme les unions internationales. L'O.B.U. est le fruit de la lutte pour l'organisation d'un syndicalisme d'entreprise authentiquement canadien. Pour plus de détails, voir Charles Lipton Histoire du syndicalisme au Canada et au Québec, 1827-1959, Ottawa, Parti pris, Coll. "Aspects; 32", 1976, p. 333-338.
5. De William Gibbs McAdoo (1863-1941), homme politique américain. secrétaire du Trésor sous la présidence de Woodrow Wilson, sénateur démocrate de 1932 à 1938. En décembre 1917, le président Woodrow Wilson place les chemins de fer américains sous contrôle fédéral, pour faire face à l'effort de guerre. Dans la foulée de cette décision, l'échelle McAdoo est une mesure imposée pour augmenter la capacité du transport par chemin de fer, la qualité des voies ferrées et le nombre de trains pour répondre à la fois aux besoins accrus de la guerre ainsi que pour favoriser le train dans sa concurrence avec les moyens de transport commerciaux concurrents (pipeline, routes, avions) se développant de plus en plus. Les coûts de transport des marchandises ont été augmentés par McAdoo, et ces hausses donnèrent notamment des salaires élevés aux employés des chemins de fer américains. Les employés de chemins de fer canadiens, affiliés aux mêmes syndicats que les employés américains, profitaient des mêmes conditions salariales. Or, au Canada, pays beaucoup moins peuplé et au niveau de transport ferroviaire moins important qu'aux États-Unis, ces règlements provoquent l'augmentation exagérée des coûts de transport.
6. The Gazette du 18 mars 1922, à la page 13, mentionne qu'au même moment, "l'honorable M. Galipeault secoue vivement la tête."
7. Le Canada du 18 mars 1922, à la page 1, est seul à contredire les autres sources en disant que M. Vautrin appuie l'amendement du député de Rouville (M. Robert). Le reste de l'intervention de M. Vautrin démontre cependant le contraire, lui qui, de plus, vote contre l'amendement un peu plus loin.
8. Selon The Gazette et Le Soleil du 18 mars 1922, à leur page 1 respective, M. Taschereau a "télégraphié" à M. Moore, alors que L'Événement du 18 mars 1922, à la page 1, écrit plutôt que le premier ministre a "téléphoné".
9. Tom Moore (1879-1946), syndicaliste canadien. Né en Angleterre, il s'installe au Canada en 1909. Président du Congrès des métiers et du travail du Canada de 1918 à 1935 et président de la Commission de l'assurance-chômage de 1935 à 1942. Durant sa carrière, il représente à de nombreuses reprises le Canada aux conférences ouvrières internationales de Londres, Genève, Washington, Amsterdam et Kyoto.
10. Gustave Francq (1871-1952), militant et chef syndical. Sur Francq, voir Éric Leroux, Gustave Francq. Figure marquante du syndicalisme et précurseur de la FTQ, Montréal, VLB Éditeur, 2001, 371 p.
11. Toutes nos sources écrivent "MacPharland". Seul L'Événement du 18 mars 1922, à la page 1, change l'orthographe pour "McFarlane". Selon l'article de L'Événement du 21 février, page 3, intitulé "Québec perd des travaux par la grève", les journalistes de L'Événement, ont obtenu une déclaration de M. Taschereau, le 20 février, à sa sortie d'une réunion du cabinet tenue dans les premiers jours de la grève des typos concernant M. MacPharland: "Il paraît de plus en plus évident que les typographes de Québec ne demandent qu'à travailler et s'entendre avec leurs patrons qui sont prêts à leur accorder une augmentation de salaire. S'ils avaient été laissés à eux-mêmes, ils n'auraient jamais déclaré la grève à un moment où cette grève met obstacle aux travaux de la Législature et crée de graves embarras dans l'administration de la province. Mais l'ordre leur est venu d'Indianapolis de se mettre immédiatement en grève pour exiger la semaine de 44 heures. Et alors qu'il en est un grand nombre parmi eux qui cherchent plutôt à travailler 60 heures, ils sont obligés de se plier à ce mot d'ordre, non seulement à leur détriment personnel et au détriment de leur famille, mais au préjudice de leur province. C'est contre cette ingérence indue, qui ne tient nul compte des intérêts primordiaux du pays et de la province, que je ne cesserai de protester de toutes mes forces. Je considère qu'il n'a jamais été lancé de plus grave défi au gouvernement provincial que le télégramme que m'a adressé ce M. John MacPharland d'Indianapolis m'informant que, même en face des obstacles que la grève mettait à nos travaux parlementaires, il lui fallait maintenir cette grève. Pour ma part, je persiste à croire que nos braves typos ne souffriront pas longtemps qu'un étranger vienne ainsi faire la loi à leur parlement. Nous multiplions les efforts pour n'avoir pas à ajourner les Chambres, mais nous ne sommes pas sûrs d'y réussir. Et je ne saurais dire assez combien je regrette d'avoir à enlever aux typographes de Québec un travail sur lequel nous les avions habitués à compter."
12. La Patrie du 18 mars 1922, à la page 4, présume qu'il s'agit d'une lettre de M. Beatty, président du Canadien Pacifique.
13. Donnée du Nouvelliste, de L'Événement et de L'Action catholique dans leur édition du 18 mars 1922, respectivement aux pages 1, 3 et 9. Le Montreal Star du même jour, à la page 4, mentionne plutôt un vote de "53 à 25".
14. Chiffre de La Patrie du 18 mars 1922, à la page 4. L'Événement du même jour, à la page 3, mentionne plutôt "53 ans".
15. À ce sujet, voir l'intervention de M. Robert, lors de la séance du 16 février.
16. Selon les règlements de la Chambre, il faut cinq députés pour obtenir l'enregistrement d'un vote officiel et, dans le cas présent, les députés hésitent à appuyer la demande de vote de M. Bercovitch et ainsi provoquer une adoption sur division - le contraire du souhait tout juste exprimé par le premier ministre.
17. The Gazette du 18 mars 1922, à la page 13, rapporte que "M. Sauvé vote pour la motion telle qu'amendée, s'étant levé seulement pour que le nombre exigé de cinq personnes permette d'appeler le vote."
18. Orthographe de La Presse du 18 mars 1922, à la page 17. Certains journaux mentionnent "Lachoe", mais La Presse elle-même utilise les deux graphies, probablement par erreur.
19. Edwin Samuel Montagu (1879-1924), homme politique anglais qui a été sous-secrétaire d'État pour l'Inde (1910-1914), chancellier du Lancaster (1915), ministre des Munitions (1916), et secretaire d'État pour l'Inde (1917-1922).
20. William Pember Reeves (1857-1932), journaliste, politicien et économiste néo-zélandais. Député du Parlement de Nouvelle-Zélande de 1887 à 1896, ministre de l'Éducation, du Travail et de la Justice de 1891 à 1896. Il démissionne et devient Agent général de la colonie de 1896 à 1905, Haut commissaire de Nouvelle-Zélande de 1905 à 1908, puis directeur de la London School of Economics de 1908 à 1919.
21. Frédéric Debartzch Monk (1856-1914), avocat, professeur et homme politique, élu député conservateur de Jacques-Cartier à la Chambre des communes de 1896 à 1914, il est ministre des Travaux publics en 1911-1912.
22. M. Sauvé fait allusion à un personnage du conte de Charles Perrault intitulé "Barbe-Bleue".
23. Ulric Barthe (1853-1921), journaliste et auteur, il fonde le quotidien L'Électeur en 1880 avec Ernest Pacaud, journal qui deviendra Le Soleil en 1903.
24. Sir Richard John Cartwright (1835-1912), homme politique ontarien. Député conservateur de 1863 à 1867, élu en 1867 à la Chambre des communes. Il rejoint les libéraux et devient ministre des Finances (1873-1878) dans le cabinet Mackenzie. Ministre du Commerce et des Finances (1896-1911) dans le cabinet Laurier, il entre au sénat en 1904.
25. Traduction: "Selon notre système actuel, une minorité d'électeurs peut faire siéger une majorité de législateurs. Une faible majorité peut élire une forte majorité. De grandes parties de l'électorat peuvent ne pas avoir de représentation du tout. Il est impossible de dire qu'un tel système possède un caractère complètement représentatif ou de nier que le vote transférable enlèverait ou modifierait de manière notable ses imperfections."
26. William Ewart Gladstone (1809-1898), premier ministre britannique de 1868 à 1874 et de 1880 à 1885.
27. William Lyon Mackenzie King (1874-1950), premier ministre du Canada de 1921 à 1926, 1926 à 1930 et de 1935 à 1948.
28. Thomas Alexander Crerar (1876-1975), homme politique manitobain élu député de Marquette de 1917 à 1925. Il est ministre de l'Agriculture de 1917 à 1919. Il est réélu en 1929 pour être aussitôt nommé ministre des Chemins de fers, poste qu'il occupe jusqu'en 1930. Battu aux élections générales de 1930, il est réélu dans Churchill en 1935 et est ministre des Mines, de l'Immigration et de la Colonisation (1935-1936), puis ministre des Mines et Ressources (1936-1945). Nommé sénateur en 1945, il occupera ce poste jusqu'à sa démission en 1966.
29. Arthur Meighen (1874-1960), avocat et homme politique ontarien. Député de 1908 à 1921, de 1922 à 1926. Solliciteur général de 1913 à 1917 dans le cabinet Borden, il est secrétaire d'État en 1917 et ministre de l'Intérieur de 1917 à 1920. Défait en 1921, il devient premier ministre du Canada en 1926, il siège au sénat de 1932 à 1941. De 1932 à 1935, il est ministre sans portefeuille dans le cabinet Bennett.
30. Chiffre de La Presse du 18 mars 1922, à la page 5. La Patrie du même jour, à la page 24, mentionne plutôt 131,064 bulletins.
31. Chiffre de La Presse du 18 mars 1922, à la page 5. La Patrie du même jour, à la page 24, mentionne plutôt 38,955 votes pour les oppositionnistes.
32. Jules Auguste Lemire (1853-1928). Ordonné prêtre en 1878, il s'intéresse aux questions sociales. Élu député (1893) puis maire (1914) d'Hazebrouck.
33. Paul Deschanel (1855-1922), homme politique français élu à la Chambre des députés en 1885 qu'il présida de 1898 à 1902 et de 1912 à 1920.
34. Jules Antoine Roche (1841-1923), homme politique français. Député du Var (1881-1885), de la Savoie (1885-1898) et de l'Ardèche (1898-1919). Ministre du Commerce, de l'Industrie et des Colonies de 1890-1892 et ministre du Commerce et de l'Industrie en 1892.
35. Jules-Auguste Delahaye (1851-1925), homme politique français et député de l'Indre-et-Loire (1889-1893), du Maine-et-Loire (1907-1919) et sénateur du Maine-et-Loire (1920-1925). M. Sauvé semble toutefois être dans l'erreur car, en 1912, Delahaye combat le scrutin de liste avec la représentation proportionnelle.
36. Le Canada du 18 mars 1922, à la page 7, rapporte que, malgré le fait que la Chambre siège un vendredi soir, le premier ministre "constata la présence d'un grand nombre de députés qui, sans doute, désirent rester à leur poste jusqu'à la fin de la session." Sur l'heure de la reprise, le Journal de l'Assemblée législative nous indique 8 h 30, et Le Canada toujours à la page 7 écrit plutôt 8 heures.
37. Les Journaux de l'Assemblée indiquent que M. Monet, appuyé par M. Bédard, présente le projet de loi 143, bien que les copies officielles portent bien le nom de M. Bédard comme parrain de ce dernier.
38. Date de La Patrie du 18 mars 1922, à la page 5. Le Canada du même jour, à la page 5, mentionne plutôt 1892.
39. Alphonse Desjardins, journaliste, attaché parlementaire et fondateur de la Caisse populaire (1854-1920). Il est l'auteur des Débats de l'Assemblée législative couvrant les années 1878 à 1889. Narcisse Malenfant couvre ensuite l'année 1890, et la Chambre ne siège pas en 1891. Le frère d'Alphonse Desjardins, Louis-Georges, est l'auteur des années 1892-1893 des débats de la Chambre. Mais M. Perrault fait probablement allusion à Alphonse Desjardins, puisque le gouvernement de Boucherville arrive au pouvoir en 1891.
40. Le Devoir du 18 mars 1922, à la page 3, mentionne que M. Sauvé "se fâche en réplique" à M. Perrault.
41. La Tribune du 18 mars 1922, à la page 5, un journal partisan, mentionne qu'à ce moment, le chef de l'opposition "se fâche tout rouge".
42. M. Lemieux (Gaspé) préside le comité.
43. L'Action catholique du 18 mars 1922, à la page 16, rapporte qu'il est 10 h 30 lorsque M. Sauvé commence à poser des questions au sujet du département de la Voirie.
44. Chiffre du Montreal Daily Star du 18 mars 1922, à la page 4. The Gazette du même jour, à la page 6, mentionne plutôt deux ans.
45. Le Soleil du 18 mars 1922, à la page 1, précise que c'est vers minuit que M. Grégoire intervient.
46. The Gazette du 18 mars 1922, à la page 6, mentionne que M. Grégoire a parlé durant 15 minutes.
47. The Gazette du 18 mars 1922, à la page 6, mentionne qu'à minuit trente, M. Sauvé est l'unique membre de l'opposition encore en Chambre, et que "M. Perrault garde son calme et M. Sauvé a l'air plutôt en forme... Il n'y a que quelques députés en Chambre et ils paraissent se divertir de cette obstruction".
48. L'Action catholique, 18 mars 1922, page 15, rapporte que "le crédit demandé fut voté par les quelques membres qui assistaient à la séance et maintenaient le quorum."