Débats de l'Assemblée législative (débats reconstitués)
Version finale
13e législature, 4e session
(11 janvier 1916 au 16 mars 1916)
Le jeudi 9 mars 1916
Ces débats, reconstitués principalement à partir des comptes rendus des médias de l’époque, ne constituent pas un journal officiel des débats de l’Assemblée législative.
Présidence de l'honorable C. F. Delâge
La séance est ouverte à 11 heures.
M. l'Orateur: À l'ordre, Messieurs! Que les portes soient ouvertes!
Subsides
L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose que la Chambre se forme de nouveau en comité des subsides.
Adopté.
En comité:
L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose qu'un crédit n'excédant pas trente-cinq mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour le bureau d'hygiène de la province de Québec, articles 3867-3982, S. R. Q., 1909, pour l'exercice finissant le 30 juin 1917.
M. Cousineau (Jacques-Cartier): Le bureau d'hygiène de la province ne travaille pas toujours dans l'intérêt de la santé publique. Il est arrivé que les médecins hygiénistes qui le composent se sont laissés influencer par certaines corporations et ont considéré plus particulièrement le côté politique de certaines questions, laissant au deuxième plan le côté sanitaire.
Il croit que certains docteurs sont trop responsables pour se laisser influencer par les municipalités. Il demande que le bureau d'hygiène cesse de faire affaire avec certaines corporations.
L'honorable M. Gouin (Portneuf) dit qu'il est bien de son avis que le bureau d'hygiène doit s'occuper avant tout des intérêts de l'hygiène et qu'il a raison de croire que c'est ça qu'il a toujours fait.
Le gouvernement n'a pas encore reçu de plaintes touchant l'administration du bureau d'hygiène. Les médecins qui le composent sont très dévoués et s'occupent de leur affaire.
M. Gadoury (Berthier) parle de la mortalité infantile et des moyens de l'enrayer. Il compare les statistiques à celles des autres pays.
Il prouve par des statistiques que la mortalité dans la province de Québec est trop grande. Il attribue cet état de choses non pas à la déchéance de notre race, mais à la mauvaise hygiène de nos écoles et à la mauvaise hygiène en général. Il ajoute que l'inspection sanitaire des écoles est insuffisante. De plus, l'inspection du lait n'est pas bien faite, les écoles publiques sont encombrées et mal aérées, etc. Le gouvernement devrait donner plus d'aide au bureau d'hygiène.
Il parle de la nécessité de prendre toutes les mesures possibles pour enrayer le progrès des maladies contagieuses.
M. Grégoire (Frontenac): L'hygiène est une question primordiale et qui doit avoir un rôle, et un rôle marqué, dans notre vie. Pour quiconque a confiance dans notre nation, elle est une question vitale. Il faut vivre d'abord. La supériorité du Canadien, c'est sa santé et sa vitalité. Il est donc de la première importance que le gouvernement donne son appui à l'institution qui a charge de l'hygiène publique.
M. Desaulniers (Chambly): On constate que, depuis six ou sept ans, le bureau d'hygiène de la province, grâce à l'aide que lui a donnée le gouvernement, a fait des progrès énormes dont toute la province a profité. La subvention qui lui était accordée fut augmentée il y a cinq ans et elle est maintenant raisonnable. Il n'y a pas lieu de dire que les médecins se sont plutôt occupés du côté politique de la question.
Il y a des cas où l'on voit clairement que c'est la santé publique qui préoccupait le bureau d'hygiène. Dans aucun cas il n'est arrivé que les médecins se soient laissés influencer. Il faut cependant avouer que le nombre des médecins n'est pas suffisant. Le gouvernement ne peut trouver des médecins qui consentent à passer l'examen exigé par la loi. Plusieurs, cependant, ont l'intention de passer ces examens et, aussitôt qu'ils seront en état de faire partie du bureau, il n'y a pas de doute que le gouvernement les acceptera.
La résolution est adoptée.
L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose: Qu'un crédit n'excédant pas deux cent cinquante mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour l'amélioration des chemins ruraux, pour l'exercice finissant le 30 juin 1917.
M. Sauvé (Deux-Montagnes) pose au ministre de la Voirie (l'honorable M. Tessier) plusieurs questions concernant les subventions soit aux chemins de pierre, soit aux chemins de terre. Il veut savoir la destination de l'allocation de $121,000 pour améliorations et en quoi consistent ces améliorations. Le député de Deux-Montagnes fait une charge contre les inspecteurs du gouvernement chargés d'inspecter les améliorations aux chemins ruraux. Il demande quelle est la compétence de ces officiers qui, dit-il, dans certains cas, comme à Saint-Benoît des Deux-Montagnes, par exemple, ont accepté des travaux mal faits, tandis qu'ils en rejetaient d'autres excellents.
L'honorable M. Tessier (Trois-Rivières): Ce sont des officiers de première classe.
M. Sauvé (Deux-Montagnes): Comme le ministre?
L'honorable M. Tessier (Trois-Rivières): Meilleurs, mais la perfection n'est pas de ce monde, et le meilleur service que le député des Deux-Montagnes (M. Sauvé) puisse nous rendre, c'est, quand il constatera des bourdes semblables, de nous les signaler pour que nous y apportions remède.
Relativement à la question du gravelage, il déclare qu'il a toujours conseillé de faire du gravelage au lieu de macadamisage.
M. Sauvé (Deux-Montagnes): Qui s'occupera de l'entretien de routes comme la route Lévis-Jackman et d'autres routes provinciales?
L'honorable M. Tessier (Trois-Rivières): dit que le sujet est encore à l'étude, mais qu'il croit que ce sera le gouvernement. Il s'agit, depuis quelque temps déjà, d'un problème entre les municipalités et le gouvernement. Les municipalités prétendent que le gouvernement devrait s'occuper de ces routes.
Il ajoute que le gouvernement se chargerait de l'entretien de la route Lévis-Jackman.
L'étude de la résolution est suspendue.
Résolutions à rapporter:
Le comité fait rapport qu'il a adopté une résolution et demande la permission de siéger de nouveau. Ladite résolution est lue deux fois et adoptée.
La Chambre, en conformité de l'ordre, procède à la prise en considération ultérieure de deux résolutions rapportées le 8 mars courant du comité des subsides et dont l'adoption avait alors été remise:
1. Qu'un crédit n'excédant pas vingt-sept mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour encourager l'industrie laitière en général, pour l'exercice finissant le 30 juin 1917.
2. Qu'un crédit n'excédant pas cinq mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour encouragement à la culture des arbres fruitiers (horticulture), pour l'exercice finissant le 30 juin 1917.
Les résolutions sont adoptées.
La Chambre, en conformité de l'ordre, procède à la prise en considération ultérieure d'une résolution rapportée le 8 mars courant du comité des subsides et dont l'adoption avait alors été remise: Qu'un crédit n'excédant pas vingt-sept mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour le Journal d'agriculture, pour l'exercice finissant le 30 juin 1917.
L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose que ladite résolution soit maintenant adoptée.
M. Bérubé (Témiscouata) propose en amendement, appuyé par le représentant de Lévis (M. Bernier), que tous les mots après "que", dans la motion principale, soient retranchés et remplacés par les suivants: Que la résolution relative au Journal d'agriculture, pour un montant de $27,000, soit amendée en réduisant $10,000 sur ce montant, et que ledit montant de $27,000 soit en conséquence remplacé dans la résolution par celui de $17,000, vu que, suivant les offres qui lui ont été faites publiquement par une compagnie d'imprimerie solvable, le gouvernement est à même de faire imprimer le Journal d'agriculture pour $10,000 de moins que le prix actuellement payé.
L'honorable M. Taschereau (Montmorency) demande le rejet de la motion comme étant hors d'ordre parce qu'elle contient des faits non établis que la Chambre ne peut pas accepter comme vrais.
L'honorable M. Gouin (Portneuf) demande à M. l'Orateur de remettre sa décision à cet après-midi.
M. l'Orateur réserve sa décision.
L'honorable M. Gouin (Portneuf) propose, appuyé par le représentant de Drummond (l'honorable M. Allard), que le débat soit ajourné.
Cette dernière proposition est adoptée. Le débat est ajourné.
Dépôt de documents:
Municipalités et ministère de la Voirie
L'honorable M. Décarie (Maisonneuve) dépose sur le bureau de la Chambre les réponses à un ordre de la Chambre, en date du 19 janvier 1916, pour la production de copie de toute correspondance entre le secrétaire ou l'un des membres du conseil de la municipalité de Sainte-Hedwidge et le ministère de la Voirie, depuis l'année 1914 jusqu'à ce jour. (Document de la session no 95)
Copie de toute correspondance entre le secrétaire ou l'un des membres du conseil de la municipalité de Saint-Anselme et le ministère de la Voirie, depuis 1914 jusqu'à ce jour. (Document de la session no 96)
Copie de toute correspondance entre le secrétaire ou l'un des membres du conseil de la municipalité de Saint-Méthode et le ministère de la Voirie, depuis l'année 1914 jusqu'à ce jour. (Document de la session no 97)
Copie de toute correspondance entre le secrétaire ou l'un des membres du conseil de la municipalité de Saint-Henri-de-Taillon et le ministère de la Voirie, depuis 1914 jusqu'à ce jour. (Document de la session no 98)
La séance est levée à 1 heure.
Deuxième séance du 9 mars 1916
Présidence de l'honorable C. F. Delâge
La séance est ouverte à 3 heures.
M. l'Orateur: À l'ordre, messieurs! Que les portes soient ouvertes!
Votes concernant les règlements de prohibition
M. Robert (Rouville) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme de nouveau en comité général pour étudier le bill 179 modifiant la loi de tempérance de Québec relativement au mode de votation sur les règlements de prohibition.
Adopté.
En comité:
Les articles 1 à 3 sont adoptés.
M. Tellier (Joliette) propose en amendement que l'on ajoute l'article suivant:
"4. La présente loi entrera en vigueur le vingtième jour après sa sanction."
Cela a pour but de permettre aux employés de corporations municipales de se familiariser avec ses dispositions et d'être ainsi capables de régler les litiges.
Adopté.
Le comité, ayant étudié le bill, fait rapport qu'il l'a adopté avec certains amendements. Les amendements sont lus deux fois et adoptés.
M. Robert (Rouville) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.
Adopté.
Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.
Subsides
L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme de nouveau en comité des subsides.
Adopté.
Suspension des travaux
Messages du lieutenant-gouverneur:
L'huissier à la verge noire se présentant à la porte avec un message de Son Honneur le lieutenant-gouverneur, M. l'Orateur reprend le fauteuil.
L'huissier à la verge noire communique à la Chambre un message de Son Honneur le lieutenant-gouverneur requérant la présence des membres de la Chambre dans la salle du Conseil législatif.
En conséquence, M. l'Orateur et les députés se rendent à la salle du Conseil législatif où Son Honneur veut bien, au nom de Sa Majesté, donner la sanction royale aux bills suivants:
-bill 2 refondant les dispositions des articles 47 et 53 et modifiant l'article 1202b du Code de procédure civile;
-bill 3 modifiant le Code civil concernant la jouissance des droits civils;
-bill 5 modifiant les articles 1426 et 1427 du Code de procédure civile relativement aux successions vacantes;
-bill 9 amendant la loi des mines de Québec;
-bill 10 ratifiant certains contrats passés par le gouvernement de la province avec Sa Grandeur Mgr Gustave Blanche, vicaire apostolique du golfe Saint-Laurent; l'hospice Saint-Joseph de la délivrance, de Lévis; l'asile du Bon-Pasteur, de Québec; les missionnaires de la Compagnie de Marie; et les dames religieuses de Notre-Dame de Charité du Bon-Pasteur, de Montréal, respectivement concernant l'entretien de certains enfants dans une école de réforme ou une école d'industrie, selon le cas;
-bill 11 légalisant certaines entrées au volume 2 de l'index aux immeubles de la ville de Joliette, en usage depuis le 15 juin 1900, dans le bureau de la division d'enregistrement de Joliette;
-bill 12 relatif à l'authentification de certains registres et livres d'enregistrement dans le district de Terrebonne;
-bill 15 amendant la loi 5 George V, chapitre 12, relative aux compagnies de chemins à barrières de péage;
-bill 16 modifiant l'article 892 du Code de procédure civile;
-bill 20 amendant la loi 3 George V, chapitre 38, relativement à la protection de certaines municipalités contre les incendies;
-bill 21 modifiant les statuts refondus, 1909, et refondant les dispositions relatives à la création, par certaines municipalités, d'un fonds d'indemnité destiné aux propriétaires ou possesseurs qui ont souffert des dommages causés à leurs moutons;
-bill 25 relatif à certaines questions soumises à la Cour du banc du roi, juridiction d'appel, par le lieutenant-gouverneur en conseil;
-bill 27 modifiant la loi 2 George V, chapitre 5, concernant des subventions à certaines compagnies de chemins de fer;
-bill 28 amendant la loi imposant des taxes sur les transferts d'actions, de bons, d'obligations ou d'actions-obligations;
-bill 29 amendant les statuts refondus, 1909, concernant les véhicules-moteurs;
-bill 51 autorisant le Barreau de la province de Québec à admettre Louis-René Gagné au nombre de ses membres et à lui octroyer son diplôme d'avocat;
-bill 55 amendant la charte de la Société des artisans canadiens-français;
-bill 56 amendant la charte de la ville de Montréal-Ouest;
-bill 57 amendant la charte de la ville de Laval-des-Rapides;
-bill 60 annexant la municipalité scolaire de Saint-Édouard à celle de la Commission des écoles catholiques de Montréal;
-bill 61 autorisant le Barreau de la province de Québec à permettre à Joseph-Philéas-Philippe Caumartin de pratiquer le droit;
-bill 70 amendant la loi 60 Victoria, chapitre 72, concernant la paroisse de Saint-Michel-Archange;
-bill 75 constituant en corporation la ville de Québec-Ouest;
-bill 76 autorisant le Barreau de la province de Québec à admettre Benjamin Shulman au nombre de ses membres, après qu'il aura passé l'examen d'admission à la pratique et l'examen d'admission à l'étude du droit;
-bill 78 concernant le bureau des commissaires d'écoles protestants de la cité de Montréal;
- bill 81 concernant la Commission des écoles catholiques de Montréal;
-bill 85 concernant la construction des soubassements d'église, sacristie et presbytère de la paroisse de Saint-Jean-Baptiste de la Salle;
-bill 90 amendant la charte de la cité de Montréal;
-bill 92 annexant la municipalité scolaire du village de Villeray à celle des écoles catholiques de Montréal;
-bill 98 autorisant le collège des chirurgiens dentistes de la province de Québec à admettre Joseph Labrèque au nombre de ses membres;
-bill 106 amendant la charte de la corporation de la cité des Trois-Rivières;
-bill 108 constituant en ville la paroisse de la Pointe-aux-Trembles, sous le nom de "Laval de Montréal";
-bill 119 concernant les curé et marguilliers de l'oeuvre et fabrique de la paroisse de Saint-Pierre-aux-Liens;
-bill 129 amendant la charte de la ville de Beaconsfield;
-bill 131 amendant la charte de la cité de Westmount;
-bill 132 annexant la municipalité scolaire du village de la Côte-de-la-Visitation de Montréal à celle des écoles catholiques de Montréal;
-bill 152 changeant le chef-lieu du comté de Pontiac et l'établissant dans le village de Campbell's Bay;
-bill 156 constituant en corporation la ville de Trois-Pistoles;
-bill 159 autorisant le collège des chirurgiens dentistes de la province de Québec à admettre Albert Lavigne au nombre de ses membres;
-bill 162 autorisant la construction d'une église, d'une sacristie, d'un presbytère et ses dépendances en la paroisse de Sainte-Marie-de-Monnoir;
-bill 167 amendant la loi 5 George V, chapitre 134, concernant la construction des église, sacristie et presbytère de la paroisse Saint-Pierre-Claver;
-bill 170 modifiant le Code du notariat;
-bill 171 amendant la loi de l'instruction publique relativement au serment d'office que doivent prêter les commissaires et les syndics d'écoles.
Reprise de la séance
Subsides
Au retour de M. l'Orateur et des députés, M. l'Orateur quitte le fauteuil et le comité des subsides reprend ses délibérations.
L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose de nouveau qu'un crédit n'excédant pas deux cent cinquante mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour l'amélioration des chemins ruraux, pour l'exercice finissant le 30 juin 1917.
L'honorable M. Tessier (Trois-Rivières) dit que le gouvernement possède 57 outillages qu'il loue aux municipalités moyennant une somme mensuelle de $100. Quand une municipalité veut améliorer ses chemins ou ses routes, elle passe d'abord un règlement à cet effet dans lequel elle mentionne quels chemins ou routes elle se propose d'améliorer. Ce règlement est adressé au département de la Voirie qui envoie ses ingénieurs chargés de faire les plans et devis et d'établir le coût approximatif des travaux. Il déclare que, dans les municipalités où le gravois est à proximité, son ministère recommande de faire du gravelage.
M. Sauvé (Deux-Montagnes) dit que l'explication du ministre n'est pas exacte et il cite le cas de la municipalité de Saint-Hermas, dans le comté de Deux-Montagnes, qui possède une montagne d'excellent gravois. Il y a deux ans, on avait gravelé la route Lalande et, en 1914, on l'a macadamisée malgré que cette route fût excellente, meilleure que bien des chemins macadamisés. Le macadam de cette route en 1914 a coûté très cher parce que l'on a eu beaucoup de peine à défaire le gravelage.
Il s'informe ensuite d'un certain M. Bergeron qui aurait conduit les travaux de voirie à Saint-Hermas.
L'honorable M. Tessier (Trois-Rivières) dit qu'il ne connaît pas ce monsieur et admet ensuite qu'il est employé comme rouleur. Ce M. Bergeron n'a pas été envoyé par le département de la Voirie à Saint-Hermas.
M. Sauvé (Deux-Montagnes) soutient que la position de M. Bergeron, à Saint-Hermas, était occupée, en 1914, par un M. Cyr et par un M. Gagnon, deux jeunes gens compétents. On a augmenté le salaire de Bergeron et diminué les salaires des ouvriers de la localité. Il demande si des plaintes avaient été portées contre M. Cyr ou M. Gagnon.
L'honorable M. Tessier (Trois-Rivières): Aucune plainte n'a été portée, à ma connaissance, contre ces messieurs.
M. Sauvé (Deux-Montagnes): Pourquoi ne pas les avoir gardés?
L'honorable M. Tessier (Trois-Rivières) dit que M. Bergeron était, en 1915, l'employé de la municipalité de Saint-Hermas et non de son département et il n'a jamais demandé au conseil de Saint-Hermas d'employer M. Bergeron.
M. Cousineau (Jacques-Cartier) soulève la question de la retraite de l'ingénieur Evans, du département de la Voirie. Au commencement des opérations de la voirie, le département s'était adressé à Washington pour avoir les services d'un ingénieur compétent. On avait recommandé M. Evans.
Il s'informe des raisons de son départ du département. Il dit qu'il a été informé que M. Evans était parti parce qu'il ne s'accordait pas du tout avec les principaux officiers du département au sujet des travaux à faire.
L'honorable M. Tessier (Trois-Rivières): M. Evans était un bon ingénieur et l'on s'est bien accordé avec lui.
L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine) affirme que M. Evans était un homme incontrôlable, qu'il n'a jamais écouté les avis de ses supérieurs, qu'il s'absentait sans raison et que l'on était des 15 jours sans savoir où il se trouvait. Il avait des relations qui étaient mal vues de ses chefs avec certains entrepreneurs. Je l'ai plusieurs fois averti à ce sujet quand je m'occupais encore de la voirie.
M. Cousineau (Jacques-Cartier) note la contradiction entre les deux ministres. Si c'était un homme de cette nature, pourquoi lui avoir donné, avant de partir, une indemnité de $1,000?
L'honorable M. Tessier (Trois-Rivières): Nous avons cru qu'il était de notre devoir de lui donner trois mois de salaire. Ce n'était pas un mauvais employé, et on craignait qu'à cause de ses conditions d'engagement il pût réclamer toute l'année.
M. Cousineau (Jacques-Cartier) affirme de nouveau qu'Evans est parti de lui-même parce que l'on ne voulait pas suivre ses avis. N'est-il pas vrai qu'il est parti parce qu'il ne voulait pas, comme ingénieur en chef, approuver les plans du gouvernement?
L'honorable M. Tessier (Trois-Rivières): Il est parti parce qu'on pouvait le remplacer par un Canadien et qu'on n'avait plus besoin de lui. Il n'était pas ingénieur en chef, d'ailleurs, mais sous M. Herary. Il dit qu'il est parti parce qu'on lui a fait voir que l'on pouvait se passer de lui et qu'il y avait au département assez de bons employés canadiens-français pour se passer de ce monsieur.
M. Sauvé (Deux-Montagnes): M. Evans était favorable au bitume au lieu du macadam à l'eau dans certaines routes, et voilà pourquoi on ne s'accordait pas avec lui.
M. Cousineau (Jacques-Cartier): C'est évident que les deux ministres ne s'entendent pas: l'un prétend que M. Evans était un mauvais employé, l'autre dit qu'il est parti parce qu'on n'avait plus besoin de lui, mais qu'il n'a jamais donné lieu de se plaindre de sa conduite.
L'honorable M. Tessier (Trois-Rivières): On n'avait pas à se plaindre de M. Evans et il n'est pas parti mécontent.
L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine): Mon Dieu... il se peut que M. Evans se soit amendé depuis que j'ai quitté le département.
M. Labissonnière (Champlain) s'informe de la façon dont sont distribués les octrois aux municipalités et comment les municipalités s'y prennent quand elles veulent emprunter pour macadamiser. Il s'informe également quel est actuellement le montant des réclamations contre les municipalités relativement aux intérêts sur les emprunts contractés en vertu de la loi des chemins.
L'honorable M. Tessier (Trois-Rivières): L'année dernière, ce montant était de $630,000 et il n'est plus, cette année, que de $355,405.29.
M. Labissonnière (Champlain) demande quand seront terminés les travaux de revêtement de la route Montréal-Québec à travers le comté de Champlain.
L'honorable M. Tessier (Trois-Rivières) dit qu'ils seront terminés l'année prochaine. Il promet qu'il verra au parachèvement de ces travaux.
La résolution est adoptée.
Résolutions à rapporter:
Le comité fait rapport qu'il a adopté une résolution et demande la permission de siéger de nouveau. Ladite résolution est lue deux fois.
Messages du Conseil législatif:
M. l'Orateur informe la Chambre que le greffier du Conseil législatif a apporté les messages suivants:
Le Conseil législatif informe l'Assemblée législative qu'il a voté les bills suivants sans amendement:
-bill 29 amendant les statuts refondus, 1909, concernant les véhicules-moteurs;
-bill 60 annexant la municipalité scolaire de Saint-Édouard à celle de la Commission des écoles catholiques de Montréal;
-bill 61 autorisant le Barreau de la province de Québec à permettre à Joseph-Philéas-Philippe Caumartin de pratiquer le droit;
-bill 76 autorisant le Barreau de la province de Québec à admettre Benjamin Shulman au nombre de ses membres, après qu'il aura passé l'examen d'admission à la pratique et l'examen d'admission à l'étude du droit;
-bill 81 concernant la Commission des écoles catholiques de Montréal;
-bill 92 annexant la municipalité scolaire du village de Villeray à celle des écoles catholiques de Montréal;
-bill 132 annexant la municipalité scolaire du village de la Côte-de-la-Visitation de Montréal à celle des écoles catholiques de Montréal.
Le Conseil législatif informe l'Assemblée législative qu'il a voté les bills suivants avec certains amendements qu'il l'a prie d'agréer:
-bill 84 amendant la charte de la ville de Lévis;
-bill 89 concernant la Compagnie Bélair limitée;
-bill 87 concernant la Compagnie Lecavalier & Riel limitée;
-bill 80 amendant la charte de The Shamrock Amateur Athletic Association.
Charte de Lévis
La Chambre procède à la prise en considération des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 84 amendant la charte de la ville de Lévis. Les amendements sont lus une première et une seconde fois.
Compagnie Bélair limitée
La Chambre procède à la prise en considération des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 89 concernant la Compagnie Bélair limitée. Les amendements sont lus une première et une seconde fois.
Compagnie Lecavalier & Riel limitée
La Chambre procède à la prise en considération des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 87 concernant la Compagnie Lecavalier & Riel limitée. Les amendements sont lus une première et une seconde fois.
The Shamrock Amateur Athletic Association
La Chambre procède à la prise en considération des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 80 amendant la charte de The Shamrock Amateur Athletic Association. Les amendements sont lus une première et une seconde fois.
Demande de documents:
Loi des bons chemins
M. Cousineau (Jacques-Cartier) propose, appuyé par le représentant de Joliette (M. Tellier), qu'il soit déposé sur le bureau de cette Chambre un état récapitulatif concernant la loi des bons chemins, 1912, faisant suite au no 43 produit à la dernière session, depuis le 3 février 1915 au 15 février 1916.
Adopté.
Dépôt de documents:
Loi des bons chemins
L'honorable M. Décarie (Maisonneuve) dépose sur le bureau de la Chambre la réponse à un ordre de la Chambre, en date de ce jour, pour la production d'un état récapitulatif concernant la loi des bons chemins, 1912, faisant suite au no 43 produit à la dernière session, depuis le 3 février 1915 au 15 février 1916. (Document de la session no 99)
Subsides
L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme de nouveau en comité des subsides.
M. Sylvestre (Montcalm) propose en amendement, appuyé par le représentant de Lévis (M. Bernier), que tous les mots après "que", dans la motion, soient retranchés et remplacés par les suivants:
Attendu que le gouvernement fait imprimer le Journal d'agriculture par la Compagnie de publication du Canada limitée, au coût de $27,000 par année, frais de port compris (Comptes publics 1914-1915, page 398);
Attendu que le contrat entre le gouvernement et ladite compagnie est un contrat annuel qui expire le 31 décembre, chaque année;
Attendu que, dès le mois de septembre dernier (1915), le gouvernement a reçu publiquement et à plusieurs reprises, de la part d'une compagnie d'imprimerie solvable, l'offre d'imprimer le Journal d'agriculture à $10,000 meilleur marché que le prix actuel;
Attendu que le gouvernement a négligé de profiter de cette offre, qu'il a laissé l'ancien contrat se renouveler par tacite reconduction le 31 décembre 1915, et qu'il continue à payer à la Compagnie de publication du Canada limitée l'ancien prix de $27,000, quand il pourrait obtenir le même service pour $10,000 de moins, c'est-à-dire $17,000 au lieu de $27,000 par année;
Cette Chambre regrette que le gouvernement, par incurie, négligence ou favoritisme, fasse ainsi perdre à la province une somme de $10,000 par année qu'il pourrait employer fort avantageusement à aider la classe agricole dans cette province, et elle invite le gouvernement à faire mieux à l'avenir.
M. l'Orateur déclare la motion hors d'ordre.
Des voix de l'opposition font appel de cette décision.
M. l'Orateur accepte de mettre la proposition devant la Chambre.
Et la motion d'amendement étant soumise à la Chambre, celle-ci se divise et, sur la demande qui en est faite, les noms sont enregistrés ainsi qu'il suit1:
Pour: MM. Bernier, Bérubé, Campbell, Cousineau, D'Auteuil, Gadoury, Gault, Labissonnière, Morin, Sauvé, Slater, Sylvestre, Tansey, Tellier, 14.
Contre: MM. Allard, Bissonnet, Bugeaud, Bullock, Cannon, Caron (Îles-de-la-Madeleine), Caron (Matane), Décarie, Delisle, Demers, Finnie, Fortier, Francoeur, Galipeault, Gendron, Godbout, Gosselin, Gouin, Grégoire, Langlois, Lemieux, Létourneau (Montréal-Hochelaga), Létourneau (Québec-Est), Lévesque, Mercier, Mitchell, Ouellette, Phaneuf, Philps, Pilon, Reed, Robert (Rouville), Robillard, Scott, Séguin, Stein, Tanguay, Taschereau, Tessier (Trois-Rivières), Therrien, Trahan, Turcot, Vilas, 43.
La motion d'amendement est ainsi rejetée.
Et la motion principale étant soumise à la Chambre, celle-ci l'adopte.
En comité:
L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose de nouveau qu'un crédit n'excédant pas deux cent cinquante mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour l'amélioration des chemins ruraux, pour l'exercice finissant le 30 juin 1917.
M. Cousineau (Jacques-Cartier) s'informe de la retraite de M. Castonguay, ancien inspecteur des travaux de colonisation, et il demande les raisons de sa retraite. Comme dans le cas de M. Evans, le chef de l'opposition a été informé que l'ancien employé civil ne s'accordait pas avec les autres officiers du département au sujet de certains travaux à faire et à faire faire.
L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay): M. Castonguay s'est retiré de lui-même parce qu'il se disait vieux, fatigué de travailler et malade. Il veut se consacrer exclusivement à l'École d'arpentage dont il est le directeur.
M. Lavergne (Montmagny) préconise de nouveau une réforme qu'il a suggérée bien des fois. C'est que, dans les routes le long desquelles se trouvent des limites à bois, les porteurs des limites de ces forêts soient forcés de payer, comme les autres, des parts de routes, afin que ces routes qui leur appartiennent autant qu'aux colons ne soient pas seulement entretenues par les municipalités.
M. Bérubé (Témiscouata) se plaint que son comté ne reçoit pas les allocations qu'il recevait autrefois au point de vue des travaux de colonisation. Il craint que, dans la distribution de ces octrois de la colonisation, on ne fasse du favoritisme. Il y a quelques années, le comté recevait jusqu'à $20,000; aujourd'hui, il reçoit à peine quelque $6,000.
L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay) affirme que les comtés représentés par les conservateurs reçoivent autant que les autres. Il dit que, si Témiscouata reçoit moins aujourd'hui et qu'il a reçu beaucoup autrefois, c'est que le département doit tourner ses yeux ailleurs où l'on en a besoin.
M. Morin (L'Islet) attire l'attention du ministre sur une route du comté de L'Islet, la route Saint-Adalbert qui n'est pas encore terminée au grand ennui des colons qu'elle dessert. Cette route, dit-il, traverse un pays magnifique, des paroisses qui ont un beau site, et où la terre est excellente. Seulement nous n'avons là qu'un seul bout de route et, tant que le département n'aura pas terminé cette route complètement, l'argent qu'on y mettra sera en pure perte.
L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay) promet de voir à cela.
M. Lavergne (Montmagny) reproche au gouvernement de dépenser dans des paroisses où il ne se fait pas le moins du monde de colonisation de l'argent spécialement affecté à la colonisation, et cela, au détriment des paroisses qui en ont excessivement besoin. Le député de Montmagny reproche aussi au gouvernement sa politique d'aller camper des colons à 200 et 300 milles de Québec, dans l'Abitibi, par exemple, tandis qu'il y a encore tant d'endroits près de nous où l'on pourrait les loger.
Ce n'est pas avec $1,400, dit-il, que l'on fera grand-chose dans une région où il n'y a même pas de routes. Il parle du système qui régit actuellement le colon et le marchand de bois.
L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay) promet de donner son attention aux besoins des électeurs de Montmagny.
Le comité fait rapport qu'il n'a pas terminé l'examen de la résolution et il demande la permission de siéger de nouveau.
Demande de documents:
Noms et adresses des instituteurs et institutrices
M. Sauvé (Deux-Montagnes) propose, appuyé par le représentant de Pontiac (M. Campbell), qu'il soit déposé sur le bureau de cette Chambre un état indiquant quels sont les noms et adresses des instituteurs et institutrices de la province de Québec.
Adopté.
Commission scolaire de Maisonneuve
M. Desaulniers (Chambly) propose, appuyé par le représentant de Sherbrooke (M. Therrien), que, le bill 93 conférant certains pouvoirs à la commission scolaire de Maisonneuve ayant pour objet de favoriser la diffusion de l'instruction publique ayant été retiré, les droits ordinaires que les promoteurs de ce bill ont payés leur soient remboursés, moins les frais d'impression et de traduction.
Adopté.
The Shawinigan Water & Power Company
M. Cannon (Dorchester) propose, appuyé par le représentant de Maskinongé (M. Tourville), que les droits ordinaires payés pour le bill 99 amendant la charte de The Shawinigan Water & Power Company soient remis, moins les frais de traduction et d'impression, ce bill ayant été retiré.
Adopté.
Charte de Montréal-Nord
M. Lévesque (Laval) propose, appuyé par le représentant de Saint-Hyacinthe (M. Bouchard), que les droits ordinaires payés pour le bill 118 concernant la ville de Montréal-Nord soient remis, moins les frais de traduction et d'impression, vu que ce bill a été retiré.
Adopté.
Commission des parcs de Montréal-Nord
M. Lévesque (Laval) propose, appuyé par le représentant de Saint-Hyacinthe (M. Bouchard), que les droits ordinaires payés par le bill 116 constituant en corporation la Commission des parcs de Montréal-Nord soient remis, moins les frais de traduction et d'impression, vu que ce bill a été retiré.
Adopté.
Charte de Saint-Michel
M. Lévesque (Laval) propose, appuyé par le représentant de Saint-Hyacinthe (M. Bouchard), que les droits ordinaires payés pour le bill 88 amendant la charte de la ville Saint-Michel soient remis, moins les frais de traduction et d'impression, vu que ce bill a été retiré.
Adopté.
La séance est levée à 6 heures.
Troisième séance du 9 mars 1916
Présidence de l'honorable C. F. Delâge
La séance est ouverte à 8 h 15.
M. l'Orateur: À l'ordre, messieurs! Que les portes soient ouvertes!
Questions et réponses:
Pont Delisle, Rivière-à-Pierre
M. Bernier (Lévis): 1.Quel a été le montant de l'octroi payé par le gouvernement pour la reconstruction du pont Delisle et à la demande de qui cet octroi a-t-il été accordé?
2. Le gouvernement sait-il que ce pont Delisle n'a pas été reconstruit conformément à la loi et qu'il ne mesure que 12 pieds de largeur entre les garde-fous?
3. Avant de payer l'octroi promis, le gouvernement s'est-il assuré que la reconstruction du pont en question avait été faite conformément à la loi?
L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay): 1. $400 ont été octroyés, à la demande du conseil municipal de Rivière-à-Pierre.
2 et 3. Le pont a été reconstruit ou réparé en utilisant les vieilles culées.
Cimetière de l'est de Montréal
M. Lévesque (Laval) propose la seconde lecture des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 141 constituant en corporation le cimetière de l'est de Montréal. Les amendements sont lus une deuxième fois sur division et sont adoptés sur division. Le bill est retourné au Conseil législatif.
Charte de Verdun
La Chambre procède à la prise en considération des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 111 amendant la charte de la cité de Verdun. Les amendements sont lus une deuxième fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.
Compagnie Lecavalier & Riel limitée
La Chambre procède à la prise en considération des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 87 concernant la Compagnie Lecavalier & Riel limitée. Les amendements sont adoptés et le bill est retourné au Conseil législatif.
Compagnie Bélair limitée
La Chambre procède à la prise en considération des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 89 concernant la Compagnie Bélair limitée. Les amendements sont adoptés et le bill est retourné au Conseil législatif.
Ville du Sault-au-Récollet
La Chambre procède à la prise en considération des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 115 concernant la ville du Sault-au-Récollet. Les amendements sont lus une deuxième fois et adoptés. Le bill est retourné au Conseil législatif.
The Shamrock Amateur Athletic Association
La Chambre procède à la prise en considération des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 80 amendant la charte de The Shamrock Amateur Athletic Association. Les amendements sont adoptés et le bill est retourné au Conseil législatif.
Subsides
L'ordre du jour appelle la reprise du débat sur l'amendement du député de Témiscouata (M. Bérubé) fait, le jeudi 9 mars courant, à la motion pour adoption de la résolution suivante: Qu'un crédit n'excédant pas vingt-sept mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour le Journal d'agriculture, pour l'exercice finissant le 30 juin 1917.
M. l'Orateur: La motion du député de Témiscouata est irrégulière pour au moins deux raisons: 1. parce que, contrairement aux dispositions de l'article 160 du règlement, elle ne propose pas de modifier la motion qui était en délibération; 2. parce qu'on ne peut plus proposer d'amender une résolution lorsque la Chambre est saisie d'une motion à l'effet d'agréer cette résolution. (Cf. May, p. 627: Règlement annoté de l'Assemblée législative de Québec, note 1 sous l'article 316)
M. Bérubé (Témiscouata) en appelle de la décision de M. l'Orateur2.
Et appel de la décision de l'Orateur étant fait à la Chambre, celle-ci se divise et, sur la demande qui en est faite, les noms sont enregistrés ainsi qu'il suit:
Pour: MM. Bouchard, Bugeaud, Bullock, Cannon, Caron (Îles-de-la-Madeleine), Caron (Matane), Décarie, Finnie, Fortier, Francoeur, Galipeault, Godbout, Gosselin, Gouin, Grégoire, Langlois, Lavergne, Létourneau (Montréal-Hochelaga), Lévesque, Mercier, Mitchell, Péloquin, Phaneuf, Philps, Pilon, Reed, Robert (Rouville), Séguin, Taschereau, Tessier (Rimouski), Tessier (Trois-Rivières), Turcot, 32.
Contre: MM. Bernier, Bérubé, Campbell, Cousineau, D'Auteuil, Gadoury, Gault, Labissonnière, Morin, Sauvé, Slater, Sylvestre, Tansey, Tellier, 14.
En conséquence, la décision de M. l'Orateur est maintenue.
Et la motion principale étant soumise à la Chambre, celle-ci se divise et, sur la demande qui en est faite, les noms sont enregistrés ainsi qu'il suit:
Pour: MM. Allard, Bouchard, Bugeaud, Bullock, Cannon, Caron (Îles-de-la-Madeleine), Caron (Matane), Décarie, Finnie, Fortier, Francoeur, Galipeault, Godbout, Gosselin, Gouin, Grégoire, Langlois, Létourneau (Montréal-Hochelaga), Létourneau (Québec-Est), Lévesque, Mercier, Mitchell, Péloquin, Phaneuf, Philps, Pilon, Reed, Robert (Rouville), Séguin, Taschereau, Tessier (Rimouski), Tessier (Trois-Rivières), Trahan, Turcot, 34.
Contre: MM. Bernier, Bérubé, Campbell, Cousineau, D'Auteuil, Gadoury, Gault, Labissonnière, Morin, Sauvé, Slater, Sylvestre, Tansey, Tellier, 14.
La motion est ainsi adoptée.
En conséquence, la résolution est adoptée.
La Chambre, en conformité de l'ordre, procède à la prise en considération ultérieure d'une résolution rapportée le 9 courant, laquelle se lit comme suit: Qu'un crédit n'excédant pas deux cent cinquante mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour l'amélioration des chemins ruraux, pour l'exercice finissant le 30 juin 1917.
La résolution est adoptée.
Loi des licences
L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme en comité général pour prendre en considération un projet de résolution concernant le bill 38 amendant la loi des licences de Québec relativement aux licences de certains brasseurs, distillateurs ou magasins de liqueurs en gros.
Adopté. Il informe alors la Chambre que Son Honneur le lieutenant-gouverneur a autorisé à soumettre ledit projet de résolution et qu'il en recommande la prise en considération.
En comité:
L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose que, quand un porteur de licence de magasin de liqueurs de gros ne pourra renouveler sa licence, dans une année de licence, à raison de la mise en vigueur d'un règlement de prohibition, il lui soit permis de disposer, dans les six mois qui suivront la mise en vigueur du règlement de prohibition, des liqueurs enivrantes qui seront encore en sa possession, en les retournant aux maisons de commerce qui les lui auront fournies ou en les vendant à des personnes munies de licences pour la vente des liqueurs enivrantes, pourvu que ladite vente se fasse dans un territoire non régi par un règlement de prohibition; et que, pour les fins de la présente résolution, une licence pour la vente en gros des liqueurs enivrantes dans les cités et villes soit accordée simplement et sans autre formalité, sur paiement au percepteur du revenu qu'il appartiendra de la moitié des droits et honoraires requis par l'article 988 des statuts refondus, 1909.
Adopté.
Résolutions à rapporter:
Le comité fait rapport qu'il a adopté une résolution, laquelle est lue deux fois et adoptée par la Chambre.
L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose, selon l'ordre du jour, que le bill 38 amendant la loi des licences de Québec relativement aux licences de certains brasseurs, distillateurs ou magasins de liqueurs en gros soit maintenant lu une deuxième fois.
Adopté. Le bill est renvoyé au comité général.
L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose que la Chambre se forme immédiatement en ledit comité.
Adopté. Le comité étudie le bill et en fait rapport sans amendement.
L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.
Adopté.
Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.
Charte de Québec
La Chambre procède à la prise en considération des amendements que le Conseil législatif a apportés au bill 97 amendant la loi constituant en corporation la cité de Québec. Les amendements sont lus une deuxième fois.
La motion "Que lesdits amendements soient maintenant adoptés" est proposée à la Chambre.
M. Létourneau (Québec-Est) propose, appuyé par le représentant de Lotbinière (M. Francoeur), qu'un message soit envoyé au Conseil législatif, informant les honorables conseillers que cette Chambre n'accepte pas l'amendement 1 que le Conseil législatif a apporté au bill 97 amendant la loi constituant en corporation la cité de Québec parce qu'il n'est pas à propos d'accorder à la cité de Québec des pouvoirs plus étendus que ceux qui lui ont été accordés par cette Chambre, et que cette Chambre accepte les autres amendements du Conseil législatif.
L'amendement du Conseil législatif hausse la taxe sur les billets de théatre et autres lieux d'amusement de un à deux cents.
Adopté. Il est ordonné que le greffier porte ledit message au Conseil législatif.
Subsides
L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose que la Chambre se forme de nouveau en comité des subsides.
M. Bernier (Lévis) demande à ce sujet des explications plus satisfaisantes que celles qu'on a données la veille. L'honorable député de Montmorency (l'honorable M. Taschereau), dit-il, a prétendu que le contrat signé par la Saint-Maurice Construction Co. était plus favorable que les conditions offertes par l'entrepreneur Gosselin. Mais en quoi, demande le député de Lévis. Pour répondre à cela, il suffit de se demander combien la province aurait été appelée à payer sur chacune de ces soumissions.
Que les débentures soient à 10 ans ou qu'elles soient à 30 ans, dès qu'elles seront achetées sur la base de 4½ % au pair, le gouvernement paiera exactement le même montant pour leur rachat. Par conséquent, la différence de $80,000 entre le prix des deux soumissions constitue une perte sèche pour la province.
On a dit qu'il pouvait y avoir arrêt dans la construction ou bien qu'il y aurait impossibilité de construire et qu'alors, si l'on déposait immédiatement des débentures au montant de $1,500,000, il y aurait une perte sèche pour la province. Mais cela serait vrai pour les deux soumissions si telle occurrence se produisait.
1. Dans la soumission de M. Gosselin, le produit de la vente déposé à la Banque Nationale reste au crédit de la province, et ce produit est reconnu comme celui d'une vente à excellentes conditions par la Commission. Si, au cours des travaux, ceux-ci sont rendus impossibles par un accident de force majeure, il n'y aura de perdu pour la province que la partie de l'argent payé à M. Gosselin. La balance du produit des débentures retournera et sera remise par la Banque Nationale au gouvernement.
2. Dans la soumission de la Saint-Maurice Construction Co., si l'on paie celle-ci en débentures sur chaque estimé mensuel, les débentures payées à la Saint-Maurice Construction Co. seront seules perdues; la balance qui sera entre les mains du gouvernement et non livrée ne sera pas dépensée, voilà tout.
Dans le premier cas, la balance du produit de la vente des débentures (dans le cas de M. Gosselin) servira aux fins publiques de la province.
Mais, en réalité, cette contingence d'impossibilité de construire peut-elle arriver? Non. Pouvait-on douter de la compétence, de la capacité et de l'habileté de M. Gosselin?
Le rapport de la Commission, en date du 14 juillet 1915, dit ceci: "Que la soumission dudit Joseph Gosselin, au jugement de la Commission, est la plus basse et la plus avantageuse dans l'intérêt public, et que ce soumissionnaire a toute l'expérience, l'habileté et les ressources nécessaires pour bien exécuter les travaux. De plus, il offre de payer le pair pour les débentures de la province de Québec à 4½ %".
Ce témoignage, ou plutôt cette constatation de la capacité de M. Gosselin était le résultat de l'enquête que la Commission devait faire sur la compétence de M. Gosselin, en vertu de la loi 3 George V.
Que le ministre des Terres et Forêts puisse avoir une autre opinion, libre à lui, mais de quel droit viendrait-il substituer sa manière de voir à celle de la Commission? Celle-ci est en meilleure position que le ministre pour connaître la valeur intrinsèque des soumissionnaires, car c'est son devoir de faire enquête sur ce sujet.
En d'autres termes, ajoute-t-il, voici l'histoire en trois mots: On demande des soumissions payables en argent: neuf soumissions arrivent à la Commission; quand ces soumissions sont ouvertes, on offre non plus de l'argent, mais des débentures, et ces débentures sont à 30 ans; on décide de donner l'entreprise au plus bas soumissionnaire, qui est M. Gosselin, et l'on insère dans le contrat devant être passé avec lui l'offre de débentures à 10 ans. M. Gosselin refuse et, le même jour, on donne l'entreprise à la Saint-Maurice Construction Co. avec des débentures à 30 ans.
Il existe dans notre province, continue-t-il, un état de choses assez étranger. Y a-t-il une limite qu'un ministre ne doit pas dépasser dans l'octroi des contrats sans soumission? Je ne sais pas. Il devrait y en avoir une. Généralement, et cela est arrivé par exemple pour l'ameublement de la Bibliothèque de la législature et pour des achats de charbon en rapport avec la construction de la route Lévis-Jackman, on ne demande pas de soumissions. À la vérité, j'aime autant cela que de demander des soumissions et d'accorder ensuite les contrats non pas aux plus bas soumissionnaires, mais à des favoris politiques. Il n'est pas permis à un gouvernement, quoi qu'il en soit, de changer les termes d'une soumission.
Il propose, appuyé par le représentant de Témiscouata (M. Bérubé), que tous les mots après "que", dans la motion en discussion, soient remplacés par les suivants:
Attendu qu'en vertu des pouvoirs qui lui ont été conférés par le statut 3 George V, chapitre 6, la Commission du régime des eaux courantes de Québec a demandé des soumissions pour l'éclusage de la rivière Saint-Maurice;
Attendu que, par la section 6 de ce statut, il est édicté que "la Commission adjugera l'entreprise des travaux autorisés par la présente loi par voie de soumissions et de contrat, après annonce publique et avis que les plans et devis sont déposés pour examen au bureau de la Commission; que l'adjudication de l'entreprise est constatée par un contrat qui doit être donné à l'entrepreneur qui produit la plus basse soumission et qui, en même temps, au jugement de la Commission, a assez d'expérience, d'habilité et de ressources pour bien exécuter les travaux; un contrat ne peut toutefois être conclu par la Commission qu'avec l'approbation du lieutenant-gouverneur en conseil";
Attendu que, par la section 10 dudit acte, il est dit que pour assurer la construction des travaux indiqués, le trésorier de la province est autorisé à contracter des emprunts n'excédant pas un million cinq cent mille piastres, au moyen d'obligations ou de rentes inscrites émises pour un terme n'excédant pas 50 ans;
Attendu que ce statut a été modifié par le statut 5 George V, chapitre 3, qui, pour les raisons mentionnées dans le préambule de ce dernier acte, édicte que l'emprunt de ladite somme de $1,500,000 se fera par des débentures ou obligations n'excédant pas 10 ans;
Attendu que, parmi les neuf soumissions qui ont été faites pour ces travaux, celle de Joseph Gosselin, entrepreneur de Lévis, a été trouvée la plus basse par la Commission du régime des eaux courantes, et qu'en même temps ladite Commission a reconnu que ledit Joseph Gosselin possédait toutes les garanties d'expérience, d'habilité et de ressources pour bien exécuter lesdits travaux;
Attendu que, par son rapport officiel à l'honorable ministre des Terres et Forêts, en date du 14 juillet 1915, conformément à la section 6 de la loi 3 George V, chapitre 6, la Commission a adjugé lesdits travaux audit Joseph Gosselin;
Attendu que, par sa résolution adoptée en sa séance régulière, ledit 14 juillet 1915, il fut résolu que le président de la Commission des eaux courantes de Québec et son secrétaire fussent autorisés à signer le contrat à être passé entre M. Joseph Gosselin susdit et ladite Commission, pour la construction d'une écluse sur la rivière Saint-Maurice;
Attendu que la soumission de M. Joseph Gosselin était pour un prix de $1,345,960;
Attendu que, nonobstant les faits ci-dessus, le contrat susdit a été accordé, le 16 juillet 1915, à la compagnie connue sous le nom de Saint-Maurice Construction Co., au prix de $1,425,000, savoir à un soumissionnaire dont le prix était près de $80,000 plus élevé que le prix de la soumission de Joseph Gosselin;
Attendu que, dans son contrat avec la Saint-Maurice Construction Co., ladite Commission a, par la clause 36 du contrat, convenu de payer soit en argent, soit au moyen de débentures de la province émises pour un terme de 30 années, contrairement à la loi 5 George V, chapitre 6;
Attendu que, si la soumission de Joseph Gosselin avait été acceptée, non seulement on aurait épargné une perte de $80,000 à la province, mais celle-ci aurait retiré de la Banque Nationale de Québec, dépositaire en fidéicommis, du produit de la vente de $1,500,000 de ces débentures, un intérêt de 4½ % sur toutes balances non payées à l'entrepreneur durant tout le cours de la construction desdits travaux;
Cette Chambre blâme le gouvernement pour n'avoir pas agi dans les meilleurs intérêts de la province, dans l'octroi du contrat pour l'éclusage de la rivière Saint-Maurice, d'avoir fait perdre à la province des sommes considérables.
L'honorable M. Allard (Drummond) répète son argumentation de la veille sur certains points.
M. Bérubé (Témiscouata) dit qu'avant même que la soumission ait été rejetée par le gouvernement MM. le député de Lotbinière (M. Francoeur), Vien et Thériault, des libéraux bien connus, avaient prononcé leur jugement dans cette soumission et l'avaient approuvée. Par aucun raisonnement, continue-t-il, on ne peut établir que la province n'a pas perdu $80,000 en refusant le contrat au plus bas soumissionnaire, M. Gosselin. On fait toutes sortes d'arguties au sujet de la valeur des débentures. Il aurait été bien plus simple de payer M. Gosselin en argent et d'économiser $80,000 à la province.
L'honorable M. Mitchell (Richmond) dit que le statut autorisant l'exécution du contrat décrète que celui-ci doit être adjugé au plus bas soumissionnaire. Je ne crains pas d'affirmer, ajoute-t-il, que le gouvernement a suivi en cela la loi à la lettre. Le gouvernement aurait pu faire un emprunt d'un million et demi et payer comptant, mais il en a jugé autrement. Sans tenir compte que M. Gosselin était un libéral, que son avocat, M. Vien, un bon libéral aussi, était l'associé d'un député ami du gouvernement, le député de Lotbinière (M. Francoeur).
Le gouvernement a considéré avant tout l'intérêt de la province et a adjugé le contrat à la Saint-Maurice Construction Co. parce qu'elle était le plus bas soumissionnaire en raison des conditions dans lesquelles elle acceptait de faire l'entreprise. Il déclare qu'il ne sait même pas quelles sont les opinions politiques des directeurs de la Saint-Maurice Construction Co. Il considère que l'opposition a tort de vouloir faire du capital politique avec cette question.
Il considère que, malgré la déclaration du député de Lotbinière (M. Francoeur) à l'effet qu'il est membre du cabinet d'avocats chargé de négocier les affaires de M. Gosselin, c'est son partenaire qui a négocié cette soumission en particulier, et cela devrait être reconnu de bonne foi par l'opposition, qui semble très empressée d'en retirer du capital politique.
Il fait observer que la loi n'oblige pas le gouvernement à payer comptant. Nous avons dit à M. Gosselin, quand nous avons considéré sa soumission, que nous ne le paierions pas en argent, mais avec des débentures. Il n'y a rien de mal à cela; ce sont des choses qui se passent tous les jours dans les affaires. M. Gosselin consentit à accepter les débentures à 10 ans, tandis que la Saint-Maurice acceptait celles de 30 ans.
Le 23 juin dernier, M. Gosselin se déclarait prêt à accepter les débentures à 10 ans et on préparait le contrat d'après les conditions mentionnées dans sa lettre. Au moment de signer le contrat, M. Gosselin déclara qu'il voulait être payé d'avance.
Voilà la raison pour laquelle M. Gosselin n'a pas été l'heureux soumissionnaire. S'il avait accepté d'être payé comme on le fait généralement dans ces entreprises, et la Saint-Maurice a accepté de l'être, il aurait eu le contrat ce jour-là même. Le 15 juillet, M. Gosselin déclara, dans une lettre, qu'il n'acceptait pas la proposition parce qu'on ne voulait pas le payer d'avance. Il lit alors la lettre de M. Gosselin à cet effet.
Lorsqu'on a su que M. Gosselin n'acceptait pas le contrat après qu'il eût appris que nous ne payerions pas d'avance, la Commission des eaux courantes s'est alors tournée vers le soumissionnaire suivant et lui a demandé s'il accepterait le contrat. Ils l'ont accepté tel que rédigé, à l'exception d'une modification au nom de la compagnie, en haut du contrat, et ils ont accepté des débentures de 30 ans au lieu de 10 ans.
Je pense que le gouvernement était parfaitement justifiable d'accorder le contrat à la Saint-Maurice. Je ne crois pas qu'un homme d'affaires dans cette province nous aurait conseillé d'augmenter la dette d'un million et demi pour une entreprise dont l'exécution n'était pas assurée. La proposition de M. Gosselin étant acceptée, l'argent eût été déposé à la banque et, si pour une raison quelconque les travaux avaient été suspendus ou arrêtés définitivement, il aurait fallu continuer à payer l'intérêt et le capital eût été immobilisé. La dette de la province se serait trouvée augmentée d'autant et en pure perte.
Si le gouvernement l'avait fait, l'opposition aurait été la première à l'en blâmer. Si l'on m'avait alors demandé de payer en argent, je n'aurais pas osé consentir à cause des obligations très lourdes qui nous auraient été ainsi imposées en ces moments de guerre. Mais le député de Drummond (l'honorable M. Allard) m'a convaincu que l'entreprise était avantageuse, qu'on en retirerait un revenu de $130,000 au moins, et possiblement $160,000 annuellement.
On développera des forces hydrauliques considérables en créant le plus grand réservoir du genre dans tout l'Empire. J'ai réalisé quelle valeur auront avant longtemps les pouvoirs d'eau en notre province. Je sais que les Américains ont l'oeil sur le pouvoir hydraulique bon marché que nous avons dans ce pays et, après avoir constaté ces avantages, j'ai pensé qu'il était temps de nous demander sérieusement si nous devions aller de l'avant ou non avec ce contrat.
J'ai considéré sérieusement l'opportunité de favoriser l'entreprise. L'honorable ministre des Terres a prouvé à la Chambre, hier soir, que l'entreprise rapportera des bénéfices considérables à la province. Il ajoute que des financiers éminents ont déclaré au gouvernement que la proposition acceptée par la Saint-Maurice Construction était la plus avantageuse si on acceptait les débentures de la province à 30 ans, à 90 et payant 4½ %. Il cite la lettre du président de la Banque de Montréal, Sir Vincent Meredith, qui recommande cette proposition comme la plus avantageuse. Il démontre que les débentures à 30 ans du contrat de la Saint-Maurice négociées sur le marché de New York à 90, donnant un escompte de 10%, rapportent immédiatement à la province la somme de $142,500, puisque le montant du contrat est de $1,425,000. Au lieu de perdre $80,000 comme le disent les gauchistes, le gouvernement réalise donc par la transaction $142,500 dès le début.
Il dit qu'en réduisant des $142,000 le montant de $80,000 que l'opposition prétend être perdu pour la province parce que la soumission de M. Gosselin était inférieure de cette somme à celle de la Saint-Maurice, on obtient encore un bénéfice net pour la province d'au moins $62,500.
Quant à ce qui concerne la province, le prix demandé pour la réalisation en cours des travaux par la St. Maurice Construction Company est de $1,282,500.
M. Cousineau (Jacques-Cartier) dit que, le 16 juin dernier, quand le trésorier de la province a fait, à Boston, son emprunt de six millions déclarant que c'était là tout l'argent dont la province avait besoin, les soumissions pour le barrage du Saint-Maurice étaient demandées depuis le 14 avril. Conséquemment, le trésorier, il était tout naturel, devait prévoir qu'il lui fallait de l'argent pour ces travaux.
D'un autre côté, continue-t-il, quand M. Gosselin a fait sa soumission, il était dans son droit de croire que le gouvernement pouvait payer en argent, suivant les termes que comportait sa soumission. Alors, du moment que l'on voulait payer par des bons de 10 ans ou de 30 ans, c'était le gouvernement qui changeait les conditions et il était alors de son devoir de demander de nouvelles soumissions.
D'un autre côté, avant d'accepter la soumission Gosselin, la Commission des eaux courantes a obtenu un rapport de Sharp Miles & Co., déclarant que la soumission Gosselin était la plus avantageuse.
Il déclare que c'est une bien mauvaise politique que de payer des entreprises considérables comme celle-là avec des débentures, ou plutôt avec des billets promissoires. C'est une politique de gens aux abois.
Le chef de l'opposition parle de l'honorable S.-N. Parent qu'il dit un homme néfaste pour la province. Son nom, dit-il, est intimement lié à l'entreprise du pont de Québec qui s'est terminée par la chute de ce pont dans le fleuve. La compagnie, à la tête de laquelle il était, s'est fait rembourser les quelque $100,000 qu'elle avait mis dans l'entreprise et si, aujourd'hui, le pont se reconstruit, c'est grâce au gouvernement qui l'a pris entièrement à sa charge. Le nom de M. Parent est aussi intimement lié à la construction du Transcontinental où il a été établi qu'après enquête fédérale il s'était gaspillé au-delà de 45 millions.
Au reste, cet homme a reçu déjà le certificat que je lui décerne, dit-il, du premier ministre lui-même, dans une lettre datée du 3 février 1905 et dans laquelle le premier ministre disait de M. Parent qu'il ne s'occupait pas de sauvegarder l'honneur de la province et le sien; le futur premier ministre expliquait pourquoi il démissionnait du cabinet Parent.
Enfin, les entreprises de barrage organisées par M. Parent semblent être une suite naturelle des entreprises auxquelles il a toujours été mêlé et dont on connaît les résultats, que ce soit le barrage du Saint-Maurice ou de la rivière Saint-François.
Nous voulons une enquête sur cette affaire, poursuit-il. Il serait normal que nous en ayons une, mais je suis certain que nous n'en aurons pas.
L'honorable M. Gouin (Portneuf): Le chef de l'opposition est sorti absolument de la question principale pour faire des personnalités. Il dit que la cause de l'opposition est bien mauvaise, puisque le chef recourt à de tels moyens d'attaque pour dire des injures à tout le monde à peu près.
Il a dit particulièrement des injures au président de la Commission des eaux courantes et il est remonté pour chercher de quoi baver jusqu'à l'ancien pont de Québec. Il a qualifié M. Parent d'homme néfaste pour la province de Québec. Je n'ai pas à faire l'éloge de l'honorable S.-N. Parent, mais je veux dire un mot du pont de Québec.
Le chef de l'opposition pensera ce qu'il voudra de cette entreprise, il n'en restera pas moins vrai que, quand l'histoire s'écrira, quand la population de la province de Québec et du Canada passera sur le pont de Québec, il apparaîtra que l'homme qui, par son énergie et son sens des affaires, réussit à parfaire cette gigantesque entreprise, ce fut l'honorable S.-N. Parent. C'est l'oeuvre la plus considérable du genre dans l'univers.
Je me rappelle un temps où les conservateurs étaient tout puissants dans cette province et dans le pays. On parlait alors d'un pont qui relierait les deux rives du fleuve.
À chaque élection, les conservateurs mettaient en tête de leur programme la construction du pont de Québec.
À un banquet devenu célèbre à cause du ton des discours qui y furent prononcés, l'honorable T.-C. Casgrain déclara après le président, M. Châteauvert, que, si le gouvernement conservateur ne donnait pas le pont, il n'aurait pas de votes. En effet, en 1896, comme il n'y avait pas encore de pont, il n'y eut pas de votes pour ces messieurs.
En 1896, le Parti libéral vint au pouvoir et celui qui consacra la plus grande partie de son temps et de ses efforts à l'accomplissement des promesses faites par le Parti conservateur fut M. Parent. Il déploya toute son énergie et fit preuve du plus grand dévouement; il réussit à convaincre le gouvernement fédéral de la nécessité de cette construction et ce dernier vota les fonds nécessaires. Ce n'est pas l'honorable M. Parent qui a fait les plans du pont. Les oeuvres de M. Parent vivront.
M. Sauvé (Deux-Montagnes): Et la lettre aussi3!
L'honorable M. Gouin (Portneuf): Elle vivra plus longtemps, je le crains, que le député des Deux-Montagnes (M. Sauvé).
C'est à des ingénieurs réputés que cette lourde tâche est confiée. Que ce soit dû à un accident, que ce soit à cause d'un mauvais calcul scientifique, le pont est tombé. On se souvient que, le soir même de cette catastrophe, un conservateur qui occupe aujourd'hui un poste très élevé voyait dans ce malheur le doigt de Dieu.
Le chef de l'opposition répète ici ce soir la même chose. Il souhaite que Québec et tous les grands centres aient encore de ces hommes de volonté, de talent et d'esprit de travail du calibre de l'honorable M. Parent. Parlant du Transcontinental, il rappelle que l'on n'a pas pu prouver qu'un seul sou de cette grande entreprise ait été dépensé inutilement. Il défie l'opposition de prouver que $500 furent dépensés inutilement dans cette seconde entreprise.
C'est là encore une oeuvre nationale dont la réalisation revient en partie au crédit de l'honorable M. Parent et à laquelle l'histoire attachera avec raison son nom. Mais nous sommes loin de la question que nous avons en ce moment à étudier. Le chef de l'opposition nous a fait passer par le pont de Québec et parcourir toute la voie du Transcontinental.
Il s'agit de savoir si, en juillet dernier, nous avons fait un bon marché en accordant le contrat du barrage du Saint-Maurice à la Compagnie Saint-Maurice Construction. Nous avons été autorisés à construire ce barrage par la loi 3 George V et, à cette fin, la Chambre a autorisé aussi le gouvernement à emprunter la somme de $1,500,000. Nous avons envoyé des ingénieurs sur les lieux, des hommes très compétents chargés de nous faire rapport.
Après avoir reçu un rapport favorable des experts qui avaient été envoyés, le gouvernement se demanda, en second lieu, s'il était dans l'intérêt de la province d'entreprendre ces travaux. Quand il fut reconnu que la province gagnerait à la construction de ce barrage, la Commission des eaux courantes demanda des soumissions. Après avoir étudié très sérieusement les propositions des neuf soumissionnaires qui avaient répondu à la demande, la Commission conclut que les deux propositions les plus sérieuses étaient celle de M. Jos. Gosselin, de Lévis, et celle de la Saint-Maurice Construction Co. M. Gosselin demandait $1,345,000, la Saint-Maurice, $1,425,000.
L'honorable S.-N. Parent s'assura des contrats des différentes compagnies qui exploitaient les pouvoirs d'eau et il assura au gouvernement un revenu annuel de $130,000, ce qui est plus que suffisant pour garantir le fonds d'amortissement d'une somme de $1,500,000 et l'intérêt qu'elle comporte. Ce montant de $130,000 augmentera à $160,000 dans 5 ans probablement.
Le gouvernement venait d'emprunter $6,000,000 sur le marché américain et avait déclaré à ses prêteurs qu'il en avait assez pour rencontrer toutes ses obligations jusqu'en janvier 1918. Nous n'avons pas encore payé un sou à la Saint-Maurice et nous n'avions rien à lui payer jusqu'au printemps, probablement, de sorte que le trésorier avait raison de faire la déclaration ci-haut à nos prêteurs. Les soumissions ne mentionnaient pas le mode de paiement.
L'argument du chef de l'opposition accusant le trésorier de la province d'avoir blagué les banquiers américains ne vaut donc rien.
La Commission avait donc deux soumissions devant elle. Quand elle les avait demandées, elle ne s'était pas engagée à payer en argent ou en obligations.
Quand ces deux soumissions furent devant la Commission, celle-ci ne songea qu'à une chose: travailler dans le meilleur intérêt de la province; faire faire les travaux pour le prix le plus bas. C'est alors qu'elle proposa de payer en obligations de la province.
En hommes d'affaires sérieux, le gouvernement a accepté la soumission qui était la plus avantageuse pour la province. Nous n'avons pas considéré que M. Gosselin était libéral, que M. Vien était libéral, deux bons amis du gouvernement.
M. Joseph Gosselin déclara qu'il était prêt à accepter les obligations au pair à 10 ans pourvu que le gouvernement, avant que les travaux soient commencés, déposât pour $1,500,000 d'obligations à la Banque Nationale. Celle-ci vous paiera, dit-il, et il n'y aura aucun danger.
La Commission déclara qu'elle acceptait l'offre de l'entrepreneur de Lévis, mais qu'elle ne voulait pas engager le crédit de la province pour une telle somme avant même que les travaux fussent commencés. Elle donnait pour raison que la Chambre et le peuple tout entier censureraient sa conduite. Le seul contrat que la Commission des eaux courantes a recommandé au gouvernement dans le cas de M. Gosselin comportait que ce dernier acceptait les débentures de la province à 4½ % au pair, payables à mesure que les travaux avançaient.
M. Gosselin a refusé ces conditions. Il avait peut-être raison, mais le gouvernement en a jugé autrement dans l'intérêt de la province. Nous voulons payer à mesure que les travaux sont exécutés. Il me semble que nous avons pris toutes les précautions nécessaires pour assurer le succès de l'entreprise et les membres de la gauche ne devraient pas insister dans leurs critiques.
Restait l'autre soumissionnaire, la St. Maurice Construction Co. Le gouvernement lui demanda si elle accepterait des débentures à 30 ans. La réponse fut affirmative. La compagnie n'exigeait pas que le gouvernement émette immédiatement le montant total des obligations. Les obligations de la province de Québec sur le marché sont cotées à 90%, ce qui comporte un escompte de 10%. Si le gouvernement avait accepté la proposition Gosselin, il aurait vendu ses obligations et il n'aurait certainement pas en plus que 90%. La St. Maurice Construction Co. accepte des obligations à 30 ans.
Sur une somme de $1,425,000, 10% d'escompte pendant 30 ans représente $142,000. Cette dernière somme que le gouvernement va retirer de la vente de ses obligations dépasse de beaucoup le $80,000 que l'opposition considère comme perdu pour la province. Le gouvernement a donc fait une bonne affaire en accordant le contrat à la St. Maurice Construction Co. Voilà ce que la province a gagné. C'est là une transaction qui a été approuvée par le président de la Banque de Montréal et par plusieurs autres financiers.
Je souhaite, dit-il, que les administrations qui nous suivront ne fassent jamais d'autres transactions que celle-là. Elles y trouveront plus de profit qu'à jeter la boue et l'injure à la face de leurs adversaires.
Répondant au chef de l'opposition qui avait dit que le premier ministre s'était sauvé pour ne pas prendre part à l'octroi de ce contrat, il déclare qu'il prend toute la responsabilité de cette transaction et qu'il félicite ses collègues de l'avoir faite, dans l'intérêt de la province. Loin d'avoir préparé pour nos enfants un fardeau qui leur sera lourd comme le prétend le chef de l'opposition, dit-il, nous leur léguerons un héritage des plus avantageux. En outre des $130,000 puis des $160,000 que nous retirerons des trois compagnies mentionnées par le député de Drummond (l'honorable M. Allard), quels avantages n'aurons-nous pas dans 20 ans des ressources développées par la réalisation de cette entreprise! Elles rapporteront alors un quart de million par année.
Les travaux de développement de la Saint-Maurice stimuleront le développement d'autres parties de la province. Combien d'industries pourront grandir grâce à ces ressources qui leur seront ainsi offertes! Quand on a fait des opérations aussi heureuses, quand on a réalisé des transactions aussi belles, on peut marcher le front haut. On ne craint pas le verdict de l'histoire. On n'a pas honte de marcher le front haut devant la génération vivante et on ne craint pas le verdict de ses enfants et de ses petits-enfants.
M. Bernier (Lévis): Il reste deux faits qu'on ne peut contredire et que je suis prêt à établir devant le comité des comptes publics, en mettant mon siège en jeu s'il le faut. D'abord, quand on a offert le contrat à M. Gosselin, on ne lui a pas fait mention de la clause des débentures à 30 ans, mais à 10 ans seulement. Deuxièmement, M. Parent, président de la Commission des eaux courantes, a déclaré devant ses collègues que, s'il était soumissionnaire, jamais il n'accorderait la clause du paiement mensuel à mesure que les travaux avanceraient. M. Parent a prononcé ces paroles en sortant du bureau du procureur général. Il fait observer qu'on a lésé dans cette transaction un particulier et que personne, pas même un gouvernement si puissant soit-il, n'a le droit de faire cela.
Il ne nie pas que le gouvernement ait fait un bon marché, mais c'est sur le dos et aux dépens d'un honnête citoyen. Il demande qu'on lui cite un cas où l'on a payé des estimés avec des billets promissoires; c'est l'indice d'une boutique qui s'en va à la ruine. Quand on n'est pas capable de payer avec de l'argent les travaux que l'on veut faire, on s'abstient d'en faire.
Et la motion d'amendement étant soumise à la Chambre, celle-ci se divise et, sur la demande qui en est faite, les noms sont enregistrés ainsi qu'il suit:
Pour: MM. Bernier, Bérubé, Campbell, Cousineau, D'Auteuil, Gadoury, Gault, Labissonnière, Morin, Sauvé, Slater, Sylvestre, Tansey, Tellier, 14.
Contre: MM. Allard, Bouchard, Bugeaud, Bullock, Cannon, Caron (Îles-de-la-Madeleine), Caron (Matane), Décarie, Delisle, Demers, Finnie, Fortier, Francoeur, Galipeault, Godbout, Gosselin, Gouin, Grégoire, Langlois, Lemieux, Létourneau (Montréal-Hochelaga), Létourneau (Québec-Est), Lévesque, Mercier, Mitchell, Ouellette, Péloquin, Phaneuf, Philps, Pilon, Reed, Robert (Rouville), Robillard, Scott, Séguin, Stein, Taschereau, Tessier (Rimouski), Tessier (Trois-Rivières), Therrien, Tourville, Trahan, Turcot, Vilas, 44.
La motion d'amendement est ainsi rejetée.
Et la motion principale étant soumise à la Chambre, celle-ci l'adopte.
En comité:
L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose qu'un crédit n'excédant pas cinq cents piastres soit ouvert à Sa Majesté pour la Société nationale d'immigration des femmes, Montréal, pour l'exercice finissant le 30 juin 1917.
Adopté.
Résolutions à rapporter:
Le comité fait rapport qu'il a adopté une résolution et demande la permission de siéger de nouveau. Ladite résolution est lue deux fois et adoptée.
La séance est levée.
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NOTES
1. Selon Le Canada, Armand Lavergne quitte son siège au moment où la cloche appelle les députés pour voter et il revient aussitôt que le vote est fini.
2. Selon La Presse, c'est plutôt le député de L'Islet, Joseph-Octave Morin, qui en appelle à la Chambre de la décision de l'Orateur.
3. Selon Le Devoir, Arthur Sauvé fait ici allusion à la lettre que M. Gouin écrivait lors de sa séparation d'avec M. Parent, en 1905.