(Dix heures sept minutes)
Le Président (M. Lessard) : Donc, à
l'ordre, s'il vous plaît!
Une voix : ...
Le Président (M. Lessard) : Ah! O.K.
Il faut que j'attende l'image, hein?
Une voix : ...
Le Président (M. Lessard) : On s'est
fait signe. Parfait. Merci. Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! Donc, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la
Commission des transports et de l'environnement ouverte. Je demande à
toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de
leurs téléphones cellulaires.
Le mandat de
la commission est de procéder à des consultations particulières et de tenir des
auditions publiques à l'égard du
projet de loi n° 37, Loi interdisant certaines activités destinées à
rechercher ou à exploiter du gaz naturel dans le schiste.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Marcotte (Portneuf) sera
remplacé par M. Martel (Nicolet-Bécancour).
Le
Président (M. Lessard) : Merci. Alors donc, à l'ordre du jour
aujourd'hui, nous entendrons les personnes suivantes, les groupes suivants, donc l'Alliance… Après les remarques
préliminaires, il y aura donc l'Alliance des villes des Grands Lacs et du Saint-Laurent, l'Association
québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique. Donc, ça va durer pour l'avant-midi. Et, comme nous avons
commencé un petit peu en retard, je demanderais déjà, tout de suite, le consentement pour perdurer au-delà de
11 h 45, tel que… pour lequel nous avons été convoqués. Alors, y
a-t-il consentement pour aller au-delà de l'heure? Merci.
En après-midi, nous allons recevoir, donc, la
MRC de Nicolet-Yamaska, l'Association des consommateurs industriels de gaz, l'Association pétrolière et gazière du Québec, le
Centre québécois du droit de l'environnement et, en soirée, la Fédération des chambres de commerce du
Québec, Collectif Moratoire, Alternatives, Vigilance et Intervention et,
finalement, le Conseil patronal de l'environnement du Québec.
Remarques préliminaires
Alors, nous
débuterons sans plus tarder avec les remarques préliminaires. M. le ministre,
vous disposez donc de six minutes pour vos remarques d'ouverture.
M. Yves-François
Blanchet
M.
Blanchet : Merci
beaucoup, M. le Président. Chers collègues, messieurs, écoutez, c'est une
circonstance heureuse, je pense, qui fait
qu'on est tous ici ce matin parce que nous transportons un débat qui aura été
important, intense, très animé chez
les Québécois au cours des dernières années, nous le transportons dans un lieu
qui prête à ce que cette discussion-là
se fasse entre des citoyens, des groupes représentant des citoyens, des
organisations et les parlementaires, et je pense que c'est tout à fait
souhaitable pour d'assez nombreuses raisons.
Permettez-moi d'abord, au bénéfice des gens qui
pourraient prendre connaissance… ou être à l'écoute de nos échanges, de rappeler très brièvement le contexte.
Un premier BAPE avait établi que l'État ne disposait pas d'informations scientifiques suffisantes pour prendre une
décision éclairée dans le dossier du gaz de schiste de la vallée du Saint-Laurent,
qui était déjà, avouons-le, passablement
enflammé. Le BAPE a donc demandé à être alimenté en données scientifiques,
ce qui a donné lieu à la création d'un
comité allant piloter une évaluation environnementale stratégique, laquelle
évaluation environnementale
stratégique a été maintenue par nous parce qu'on pense que l'exercice était
important. Mais, plutôt que de nous
restreindre au dépôt de recommandations par le comité de l'évaluation
environnementale stratégique, nous avons fait le choix de reconfier, comme c'était le voeu initial, au Bureau
d'audiences publiques sur l'environnement l'étude des données qui auront
été cumulées par l'EES.
• (10 h 10) •
Nous en
sommes là, le mandat vient d'être confié au BAPE. Le BAPE va commencer ses
travaux le 31 mars. Et, en parallèle
de ça, par souci de cohérence, le gouvernement a décidé d'établir un moratoire
sur les activités d'exploration et
d'exploitation de gaz de schiste dans les basses-terres du Saint-Laurent,
essentiellement sur le shale dit d'Utica. C'est là où nous en sommes aujourd'hui. Nos discussions,
normalement, vont porter de façon rigoureuse — qui pourrait être jugée étroite — sur
le moratoire. Dans les faits, bien sûr, on s'attend un peu à ce que ça déborde,
et je vous dirai que cette, peut-être, saine
contamination de l'ensemble d'autres débats dans celui-ci peut faire l'objet de
nos discussions si c'est fait de façon raisonnable.
La seule
chose que je nous demande à tous, compte tenu de la façon dont ça s'est fait
initialement dans la vallée du Saint-Laurent,
compte tenu de certains enjeux d'actualité dont les médias font état avec des
colonnes de chiffres de plusieurs
couleurs, compte tenu de l'enjeu d'Anticosti, qui est apparu dans l'actualité
récemment, et compte tenu de la façon
dont le débat s'est fait sur le principe de ce projet de loi... Il y a un
potentiel que ce soit très animé et effervescent, il y a potentiel de
débordement. Je nous invite à aborder tous les sujets qu'on voudra aborder en
donnant, bien sûr, la priorité à celui pour
lequel nous sommes ici. Je nous invite à les aborder, mais à les aborder
toujours en nous référant à la connaissance,
à la science, à la volonté d'alimenter une réflexion publique avec, peut-être,
un peu moins de rhétorique, un peu
plus de faits, un peu plus de rationalité. Parce que, même si je comprends
parfaitement bien — et j'en
suis, et j'en fais partie — que des gens aient pu réagir de façon très
intense au débat initial, maintenant, quand le moment viendra de le trancher, il faudra qu'on soit le plus rationnel
possible dans le meilleur intérêt de la population du Québec. Alors, je nous
souhaite de fructueux échanges. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Lessard) : Merci, M. le ministre. Donc, je vais donc
céder la parole au porte-parole officiel de l'opposition, et député de Laurier-Dorion, et porte-parole en matière
de développement durable et de l'environnement. Vous disposez d'un délai
maximal de six minutes.
M. Gerry Sklavounos
M.
Sklavounos :
Merci, M. le Président. Je vous salue ainsi que la secrétaire de la commission.
M. le ministre, mes salutations à
vous, à toute votre équipe qui vous accompagne, les collègues ministériels, les
collègues de l'opposition officielle
et les gens... évidemment, en remerciant rapidement aussi les gens qui sont
devant nous en ce moment et qui seront devant nous plus tard aujourd'hui
et pour le reste de cette semaine.
Nous sommes
ici, évidemment, dans des auditions publiques pour le projet de loi n° 37,
qui est la Loi interdisant certaines
activités destinées à rechercher ou à exploiter du gaz naturel dans le schiste.
Ce qu'il faut rappeler rapidement, c'est
que ce projet de loi a été déposé au mois de mai 2013. Deux jours plus tard,
l'opposition officielle, nous avons dressé notre liste de groupes que nous voulions entendre dans cette
commission-là. Du moment qu'on a dressé notre liste et soumis au gouvernement, on n'a pas entendu parler de ce
projet de loi durant une période de six mois. Ce projet de loi est réapparu
sur le radar six mois plus tard, et le
gouvernement, le leader du gouvernement — je me souviens de cet échange qu'il y a eu
en Chambre — a demandé aux oppositions d'adopter le
principe sans que le gouvernement ne s'engage à avoir des consultations.
Alors, juste
pour reprendre rapidement ce que le ministre a dit au niveau de la conjoncture,
je ne me souviens pas de quels termes
il a utilisés, si nous sommes ici aujourd'hui pour ces consultations, c'est
parce que l'opposition a exigé des
consultations, c'est parce qu'à quelques reprises l'opposition a même ajourné
le débat qui visait à prendre un vote pour
adopter le principe sans que le gouvernement ne s'engage à faire des
consultations. Et vous allez vous souvenir, tous les gens autour de la table vont se souvenir que même le député de
Mercier, le député de Québec solidaire, le député de Mercier, s'était abstenu de voter avec le
gouvernement à ce moment-là, appuyant l'opposition, qui exigeait des
consultations de ces groupes-là. Et
je me souviens de l'incident, qui a été, si vous voulez, un petit peu bizarre,
surréel, où le député de Mercier se
faisait accuser d'être pour l'exploitation et l'exploration des gaz de schiste
parce qu'il avait exigé, lui aussi, avec
les autres oppositions, qu'on ait des consultations. Et donc nous sommes très
heureux que vous êtes devant nous, et
nous sommes très heureux que nous allons donner l'occasion à d'autres groupes
de se prononcer, et c'est dû à cette bataille-là, qui a été menée par
l'opposition, de faire les choses dans un ordre qui est correct.
Je dois vous
dire qu'évidemment, si quelqu'un écoutait les nouvelles jeudi soir, on se
demandait ce qui allait se passer ici
aujourd'hui parce qu'en écoutant les nouvelles jeudi soir je pense, tout le
Québec, les gens partout, les observateurs se sont dit : On est devant une drôle de contradiction, si vous
voulez, où on a un feu vert pour le pétrole de schiste, alors qu'on a un feu rouge pour le gaz de schiste. Les
gens ont des questions, et, évidemment, ce sont des questions légitimes.
Est-ce que la priorité, c'est l'environnement ici? C'est quoi, la priorité?
Parce que
vous vous souvenez que, lorsque ce projet de loi a été déposé, on a regardé
rapidement, il y avait des trous, il était, si vous voulez, à géographie
variable. Ça ne couvrait pas la Gaspésie, ça ne couvrait pas l'Anticosti, et il y avait d'autres éléments qui étaient aussi
fatigants, dont l'élément qui parle de l'annulation ou la suspension des permis
sans indemnité, indemnisation, ce qui est
quand même bizarre, hein? En Russie, sous Vladimir Poutine, ça ne serait pas
nécessairement bizarre, dans un régime
totalitaire, d'annuler un permis et ne pas compenser. Mais, dans notre
tradition à nous, en Amérique du
Nord, en Europe, en général, lorsqu'on est pour annuler un permis et lorsqu'on
n'est pas pour respecter une décision
prise par le gouvernement précédent, il faut quand même qu'on envisage à
quelque part la possibilité d'un
dédommagement, là, parce qu'il y a des investissements là-dedans. Et ça envoie
un message très, très néfaste. Imaginez, ça envoie les messages du genre nationalisation, et saisies, et d'autres
choses qui se sont passées dans d'autres juridictions qui ne sont pas
notre juridiction à nous.
Il y a aussi
la question de l'étude environnementale stratégique, que nous avons eue hier, à
5 h 40… 17 h 40, après les heures de bureau, qui a été déposée avec un communiqué du ministre.
C'est bizarre aussi, il faudrait noter qu'initialement, lorsque l'ancien ministre de l'Environnement,
député de Mont-Royal, avait demandé cette étude environnementale stratégique,
il avait précisé qu'il voulait regarder et
le pétrole de schiste et le gaz de schiste. Mais, en faisant comme une espèce
de rappel à ce comité le 14 février
2013, le ministre actuel a précisé qu'il voulait absolument laisser de côté le
pétrole de schiste. Il fallait,
premièrement, ne pas avoir de recommandations et, deuxièmement, il ne fallait
pas parler de pétrole de schiste. Alors, on avait déjà dit qu'on n'allait pas parler de pétrole
de schiste, on avait laissé le territoire d'Anticosti exclu du projet de
loi, il y a des questions.
Et nous
l'avons reçu à la dernière minute hier, alors qu'on sait que le rapport est
daté de janvier 2014. On a des questions
pour le ministre. J'aimerais que le ministre profite de sa prochaine
intervention pour nous dire depuis quand qu'il l'a et pourquoi ça n'a pas été divulgué un peu plus tôt. Si on est
pour faire des consultations, il faut les faire avec tous les renseignements.
Vous savez, au niveau du la transparence, il y a
des questions qui ont surgi, que ça soit au niveau de la rivière Chaudière, les BPC de Reliance, le rapport
Alberta-Québec. Et je vous mentionne également que nous attendons aussi le plan d'action de ce gouvernement en matière de
gaz à effet de serre, qui jouent là-dedans, et que nous n'avons pas vu encore. Alors, il y a plein de questions, et je
suis sûr que certaines de ces pistes-là seront des pistes prises par les
groupes qui parleront devant nous.
Alors, avec grand enthousiasme et plaisir que j'attends des échanges très
fructueux. Merci, M. le Président.
• (10 h 20) •
Le
Président (M. Lessard) : Alors, merci beaucoup. Le temps alloué, donc,
pour les remarques préliminaires étant
terminé, nous allons procéder maintenant à l'audition. Je veux rappeler les
règles concernant l'audition. Donc, le groupe
devant nous et tous les groupes qui se présenteront auront 10 minutes pour leur
présentation. Les échanges avec les
groupes parlementaires seront de 35 minutes, soit 16 minutes pour le
gouvernement, 15 min 22 s pour l'opposition officielle et 3 min 48 s
pour le deuxième groupe d'opposition.
Auditions
Alors, sans plus tarder, nous allons donc
débuter les auditions avec Alliance des villes des Grands Lacs et du Saint-Laurent. Donc, je vous souhaite la
bienvenue. Je vous inviterais à vous présenter et à nous faire votre exposé.
Alors donc, si vous voulez vous
présenter pour les enregistrements officiels, et puis on va procéder par la
suite aux échanges. Alors, la parole est à vous. Merci.
Alliance des villes des
Grands Lacs
et du Saint-Laurent
M. Masson
(Robert) : Merci, M. le
Président. M. le ministre, Mmes et MM. les parlementaires, j'aimerais, dans
un premier temps, remercier la commission pour l'invitation transmise à
l'Alliance des villes des Grands Lacs et du Saint-Laurent ainsi que pour
l'occasion qui nous est offerte de présenter sa position sur le projet de loi à
l'étude.
Je me
présente, Robert Masson. Je suis le directeur des affaires gouvernementales et
des communications. Et je suis accompagné ce matin par mon collègue, M.
Philippe Chenard, gestionnaire de programme et des politiques.
Avant de
commencer nos remarques à proprement parler, j'aimerais, tout simplement,
porter à votre attention, et ce, sans surprise, je pense, que tant notre
mémoire que nos commentaires ont été préparés avant le dépôt de l'étude
environnementale stratégique et ne porteront que sur le projet de loi
n° 37, le projet de loi qui est à l'étude, mais que, malgré cela, plusieurs des commentaires que nous
ferons et puis plusieurs principes que nous soulèverons demeurent d'actualité.
Alors,
l'alliance est une coalition binationale de plus de 110 villes, cités et autres
organismes municipaux représentant
plus de 17 millions de citoyens. L'alliance travaille activement auprès
des gouvernements fédéraux, d'États, provinciaux,
tribaux et des Premières Nations, et autres organismes d'intérêts, pour
favoriser la protection, la restauration et la promotion des Grands Lacs et du fleuve Saint-Laurent. En date
d'aujourd'hui, l'alliance compte au Québec 22 municipalités membres représentant plus de 3 millions de
citoyens qui vivent à proximité des rives du Saint-Laurent.
En raison des
impacts potentiels tant sur la santé et la sécurité des citoyens que sur les
ressources en eau, l'alliance est,
depuis 2010, impliquée dans la question des gaz de schiste. Ces dernières
années, l'alliance a, en effet, déposé des mémoires lors de deux processus de consultation, soit au Québec, lors
des audiences du BAPE en 2010, et au Department of Environmental Conservation de l'État de New York en 2012. La
prochaine phrase qui suit résume en quelques mots la position de l'alliance, et puis, vous verrez,
elle demeure d'actualité, qu'on se situe en aval ou en amont du dépôt de
l'étude environnementale stratégique. Alors,
en résumé, l'alliance appelle à la gestion prudente, efficace et responsable
de l'industrie du gaz de schiste pour
protéger l'intégrité de l'environnement naturel, le bien-être des citoyens
ainsi que le rôle et les pouvoirs des municipalités.
Bien que les
activités liées au gaz de schiste aient connu une hausse importante ces
dernières années dans plusieurs régions
des Grands Lacs et du Saint-Laurent favorisant des investissements, la création
d'emplois et des revenus additionnels en
redevances et impôts, des incertitudes persistent. L'exploration, l'extraction
et le traitement des gaz de schiste poseraient, en effet, des risques environnementaux pour l'eau, l'air et le sol, sans
oublier les impacts possibles sur les municipalités, tant sur leurs
responsabilités à titre de premiers répondants que sur le plan financier.
L'alliance se
soucie particulièrement des impacts liés aux niveaux d'eaux et à leur qualité,
de la divulgation des additifs
employés et des émissions des gaz à effet de serre. De plus, tel qu'indiqué
dans une résolution adoptée par ses membres en juin 2012 lors de son
assemblée annuelle, l'alliance demande une transparence accrue et une meilleure
communication entre les gouvernements, les
sociétés d'exploitation et les citoyens dans toutes les phases du processus
de développement.
En février
2011, suite au dépôt du rapport du BAPE sur le développement durable de
l'industrie des gaz de schiste, l'alliance
s'est déclarée satisfaite que ses recommandations fussent très proches de ses
propres propositions. La réalisation d'une
étude scientifique indépendante et rigoureuse ainsi qu'une meilleure prise en
compte des enjeux environnementaux, sociaux
et économiques étaient au coeur de nos préoccupations. Également, en accord
avec les commentaires de l'alliance, l'approche proposée par le BAPE privilégiait
l'acquisition de connaissances nécessaires à une prise de décision éclairée.
Cela se traduit par une participation accrue
des communautés locales, selon le respect des autorités et des citoyens, dans
le processus décisionnel lors de tout nouveau développement gazier.
Avec
votre permission, M. le Président, je céderai maintenant la parole à mon
collègue, M. Chenard, qui présentera les principaux motifs de la prise
de position de l'alliance sur le projet de loi à l'étude ainsi que nos
recommandations.
Le Président (M.
Lessard) : Alors, M. Chenard, la parole est à vous.
M. Chenard (Philippe) : Merci. Merci, M. le Président. Donc, en ce qui a trait au projet de loi
présentement à l'étude, la position
de l'Alliance des villes des Grands Lacs et du Saint-Laurent repose
principalement sur les éléments suivants, à savoir :
Les
incertitudes persistantes en ce qui a trait aux risques environnementaux liés à
l'eau, à l'air et au sol dans le contexte de l'exploration, de
l'exploitation et du traitement des gaz de schiste;
Les
études toujours en cours au sujet de l'impact environnemental, social et
économique des activités d'exploration, d'extraction et de traitement des gaz de schiste, notamment celles du
Comité de l'évaluation environnementale stratégique en cours au
Québec — du
moins, jusqu'à hier soir — du
Department of Health de l'État de New York sur les effets potentiels sur la
sécurité publique et de l'Environmental Protection Agency ou U.S. EPA sur les
ressources en eau;
Le devoir et les
obligations des municipalités de protéger la santé, la sécurité et le bien-être
de leurs citoyens, particulièrement en fournissant une eau potable saine;
Le
potentiel d'impacts financiers sur les municipalités, advenant une fuite, une
explosion ou tout autre incident significatif
lié avec l'exploitation, l'exploration, l'extraction et le traitement des gaz
de schiste, ainsi que l'assurance d'un niveau de préparation adéquat et
d'équipement adapté et disponible pour les premiers répondants;
Les préoccupations
récurrentes en ce qui a trait aux impacts des liquides de fracturation
hydraulique sur les aquifères, à l'apport
des gaz de schiste sur les émissions de gaz à effet de serre et à l'utilisation
de composés chimiques non dévoilés dans de nombreuses juridictions;
Et, finalement, les
incertitudes quant à la capacité des usines de traitement municipales à traiter
efficacement et en toute sécurité les eaux usées découlant du processus de
fracturation.
Pour
ces raisons, l'alliance accorde son appui à l'esprit et aux objectifs du p.l.
n° 37 tel que présentement formulé. En suspendant l'exploration, l'exploitation et le traitement des gaz de
schiste durant une période prolongée, nous estimons, en effet, que le moratoire permettra à la fois une
progression du niveau de connaissance scientifique ainsi que la mise en place, par une collaboration entre gouvernements,
municipalités, industrie et autres acteurs pertinents, de normes
réglementaires, de garanties
financières et de processus d'intervention nécessaires pour assurer la sécurité
des citoyens dans l'éventualité d'une exploitation.
Bien qu'elle approuve l'adoption du p.l.
n° 37, l'alliance soumet respectueusement à la commission trois recommandations visant à renforcer son
application, favoriser la transition vers le prochain régime d'exploitation
des hydrocarbures et à mieux desservir, selon nous, ses objectifs.
Recommandation
n° 1. Le p.l. n° 37 bénéficierait, selon nous, d'une application plus
large. Le texte actuel ne désigne, en
effet, que le gaz de schiste, alors que le procédé par fragmentation
hydraulique est aussi utilisé pour l'extraction du pétrole. Nous suggérons donc d'inclure dans le
p.l. n° 37 l'ensemble des procédés d'extraction par fragmentation
hydraulique.
Recommandation
n° 2. Le territoire couvert par le p.l. n° 37 vise essentiellement la
vallée du Saint-Laurent. Nous recommandons à
la commission que son application, autant pour des motifs de simplicité que
d'équité, comprenne l'ensemble du
territoire québécois, ce qui inclurait d'autres régions présentement omises
comme la Gaspésie ou l'île d'Anticosti. Dans le cas de l'île d'Anticosti, force est d'admettre que cette
recommandation sera difficilement applicable, du moins pour les activités d'exploration, suite à la
récente annonce de partenariat annoncée la semaine dernière par le gouvernement
québécois.
Je
me permets un petit aparté ici pour dire que, lorsqu'on parle des régions
omises, l'accent est particulièrement fait
sur les zones habitables. Nous avons eu, entre autres, des commentaires du
maire actuel de Gaspé, qui reprenait — M. Côté — aussi la position de son prédécesseur, M.
Roussy, comme quoi en Gaspésie il y avait 85 % du territoire qui n'était pas occupé ou habité, donc
qui ne posait, évidemment, pas les mêmes obligations en termes de gestion
de risques que les territoires habités.
Le
Président (M. Lessard) : M. Chenard, je vous avise qu'il vous reste
une minute pour votre présentation. Ça pourrait donner le ton.
M. Chenard (Philippe) : Oui, j'ai presque fini, M. le Président. Recommandation n° 3.
L'application du p.l. n° 37 prendra
fin avec l'adoption d'une nouvelle loi sur les hydrocarbures ou à l'expiration
du délai prescrit de cinq ans. Dans le but
de permettre à la fois l'acquisition d'un niveau de connaissance adéquat, la
mise en place de mesures et de normes assurant
la sécurité tant des citoyens que des ressources naturelles, et notamment
celles en eau, nous recommandons que le p.l. n° 37 soit appliqué
minimalement pour une période de cinq ans.
En
plus de ces recommandations, nous jugeons important de réitérer auprès de la
commission plusieurs éléments additionnels,
bien qu'ils dépassent le cadre du projet de loi présentement à l'étude. Ces
éléments pourraient être considérés lors
de l'adoption d'une nouvelle loi sur les hydrocarbures afin d'assurer une
gestion intégrée, efficace et responsable de l'industrie des gaz de schiste. L'alliance souhaite la plus grande
cohérence possible entre toute nouvelle loi concernant les activités
d'exploration, d'extraction et de traitement…
• (10 h 30) •
Le
Président (M. Lessard) : Je dois vous aviser que votre temps,
maintenant, est dépassé. Mais on va procéder aux échanges, donc vous aurez peut-être l'occasion de refaire votre
point de vue là-dessus. Alors donc, je tiens à rappeler… Mais je vais essayer de le faire en vous avisant
qu'il reste une minute pour, parfois, être capable de vous donner le temps
et ne pas vous couper à la dernière seconde.
Avant de passer, donc, la parole au groupe formant le gouvernement, donc,
je tiens à rappeler les règles. Le groupe
parlementaire, donc, formant le gouvernement aura 16 minutes, 15 min — par la suite — 12 s
pour le premier groupe d'opposition, et le deuxième groupe d'opposition aura 3
min 48 s.
Alors, M. le
ministre, vous disposez maintenant de 16 minutes pour, donc, faire votre
présentation ou questionner, donc, nos invités. La parole est à vous.
M.
Blanchet : Merci,
M. le Président. Écoutez, d'abord merci beaucoup. Je vais me permettre, si vous
me le permettez, mais je vais prendre le
moins de temps possible de… Je n'ai pas le choix, là, il y a des éléments
d'informaiton qui n'en sont pas qui
ont été transmis. C'est à peu près ce que je voulais éviter. Il n'a jamais été
dit — et
j'aimerais voir les extraits de
quelque galée que ce soit — que le gouvernement ne voulait pas d'audiences sur le projet de
loi n° 37. Ça n'a jamais été dit
nulle part, c'est d'une inexactitude complète. Mais, puisqu'il fallait trouver
quelque chose pour s'accrocher, c'est
ce qui a été inventé. Alors, s'il existe une citation de qui que ce soit du
gouvernement qui dit : Nous ne voulons pas rencontrer les citoyens
sur le projet de loi n° 37, qu'on nous la sorte.
En revanche,
il y a quand même 41 organisations sur la liste de 70 et plus... de 70
organisations qui a été déposée par l'opposition officielle qui ne sont
pas venues en commission parlementaire, qui ne l'ont pas jugé nécessaire.
Petit élément de fait aussi, les permis sont
suspendus pendant le moratoire, ils ne sont pas annulés.
Enfin, je
pense qu'on devrait totalement s'abstenir d'utiliser des mots comme «totalitaire»
dans une démocratie, au Québec,
d'autant plus que ma compréhension est que le geste du gouvernement du Québec,
en imposant ce moratoire, qui, pour
l'instant, est à l'étude avec l'appui de toute l'Assemblée nationale, est
justement, enfin, d'avoir été à l'écoute de ce qu'était la volonté des
gens de la vallée du Saint-Laurent.
Information
technique, là, le rapport qui a été déposé, qui a été rendu public hier l'est à
l'initiative du Comité sur l'évaluation
environnementale stratégique. Je vous dirai toutefois qu'il aurait pu l'être
deux jours plus tôt. Mais, compte tenu
du contexte, essentiellement, de l'annonce d'Anticosti, qui aurait — comment dire? — fait passer sous le radar, ce qui n'est absolument pas ce que je voulais, je
pense que c'est une bonne nouvelle que ce soit public et c'est une bonne
nouvelle que le mandat aille au BAPE… on s'est parlé puis on a dit : On va
faire ça lundi. Et voici tout le complot incroyable
qu'il y a autour de ce moment. Notre activité devrait porter sur le moratoire,
et non pas sur le fond. Donc, le moment du dépôt n'est pas un enjeu.
Maintenant,
je comprends de votre mémoire et de votre présentation que vous êtes d'accord
avec l'esprit général de la loi
n° 37, mais que vous l'auriez voulue même un peu plus sévère, un peu plus
restrictive. Je veux m'assurer d'une chose. Le processus que nous avons
mis en place, qui est dans la foulée du premier BAPE, qui disait : Peut-on
avoir davantage d'information?, donc qui est
de compléter l'évaluation environnementale stratégique, mais de retransmettre
au BAPE pour que ce soit le BAPE, qui, après
des consultations publiques et parce que c'est sa manière de travailler…
lui reviendrait avec des recommandations au
gouvernement du Québec, avec, en parallèle, un moratoire, une suspension, donc, de toutes les activités… Cette démarche-là
comme telle vous apparaît convenable? Peut-être une question… Allez-y.
M. Chenard
(Philippe) : Merci. Merci, M. le
ministre. Non, tout à fait. L'alliance et ses membres, on est… Comme mentionné dans notre mémoire, nous sommes tout à
fait d'accord avec autant le texte que l'esprit. Les recommandations qu'on fournit, en fait, ça ne vise qu'à renforcer
l'application du p.l. n° 37. Mais, pour ce qui est du principe d'un
moratoire, ça, nous sommes entièrement pour.
M.
Blanchet :
Un point sur lequel on n'est pas exactement à la même place, mais je suis très
ouvert et très curieux… Vous savez,
comme je le disais en d'autres circonstances, le Québec, c'est trois fois grand
comme la France. La réalité géographique,
économique, démographique, géologique et, je dirais, dans ces dossiers-ci,
historique même des enjeux, qui
seraient ceux des différentes régions du Québec, sont très différents les uns
des autres… Dans ce cas-ci, nous avons
accès maintenant à un ensemble de données scientifiques, nous sommes documentés
pour aller de l'avant avec un BAPE de
façon articulée, BAPE qui avait lui-même dit, dans un premier temps :
Écoutez, on ne peut pas vous faire de recommandations, on n'a pas de
données scientifiques pour le faire. Dans ce cas-ci, ça marche.
Et vous
soulevez le cas d'Anticosti, où on n'a pas de données scientifiques à l'heure
où on se parle. Le gouvernement dit :
Nous allons chercher les données scientifiques et les confier au BAPE si jamais
il a raison de le faire, c'est-à-dire s'il
y a un potentiel d'exploitation commerciale. Est-ce qu'il n'est pas normal
qu'on reproduise, mais avec un encadrement plus serré, parce qu'on en fait partie, le même principe de cueillette
de données préalable au BAPE à Anticosti que ce que vous saluez qu'on a
fait, pour l'avoir fait, dans la vallée du Saint-Laurent?
M. Chenard
(Philippe) : Je crois que, pour
le cas de l'île d'Anticosti, que ce qui est intéressant, c'est qu'il s'agit
peut-être d'un territoire peut-être plus
approprié pour ce type d'exercice là. Si je reviens à l'exemple de la ville de
Gaspé, où il y a — bon, ce n'est pas du gaz de schiste, c'est
du pétrole de schiste — un projet de puits qui est dans le territoire municipal et près de zones habitées, là c'est
certain que l'opposition serait plus grande. Mais, dans le cas d'une zone sur
un territoire non organisé ou un territoire
qui n'a pas du tout une présence de citoyens, là, je crois que, dans ce cas-ci,
oui, ça serait plus acceptable.
C'est tout
simplement d'avoir un cadre — puis ça, pour nous, c'est très
important — qui
permette aux municipalités de pouvoir
faire face aux types de demandes ou aux types de projets que certaines
compagnies pourraient faire. On l'a vu en 2010. Si
j'avais été l'industrie des gaz de schiste, j'aurais peut-être agi avec moins
de précipitation. Puis je pense que c'est
cette précipitation qui a, finalement, heurté beaucoup leurs propres
initiatives et leurs propres projets. Donc, autrement dit, je crois que les préoccupations principales
de nos membres — puis,
là-dessus, on fait juste écho à qu'est-ce que d'autres associations font
comme l'UMQ ou la FQM — c'est
que les municipalités aient, tout de même, leur mot à dire puis puissent contrôler du moins les activités, que ce
soient des activités d'exploitation ou, à prime abord, d'exploration dans
leur territoire, dans les zones habitées ou près de leurs ressources en eau.
Pour
ce qui est de l'île d'Anticosti, bon, les chevreuils n'ont pas le droit de
vote, l'impact est sans doute moins grand,
du moins pour les municipalités. Il y a peut-être une latitude qui est beaucoup
plus grande que s'il s'agissait, là, d'un
territoire municipal. Ça fait que, dans ce cas-ci, je crois qu'il y a… ça peut
tout à fait se défendre puis se justifier.
Le
Président (M. Lessard) : M. le ministre, je vais vous laisser la
parole, mais je vois que vos collègues de Mirabel et de Repentigny m'ont
signifié qu'ils voulaient poser des questions.
M.
Blanchet :
Par la suite.
Le
Président (M. Lessard) : Par la suite, parfait. Je vais vous laisser
juste organiser votre temps. Alors, M. le ministre.
M.
Blanchet :
Rapidement. Est-ce que je comprends que, si nous déployons des mesures de
collaboration étroite avec la municipalité
de Port-Menier, bien sûr, mais qui est environ 1 % du territoire de l'île
d'Anticosti, là, en termes de
territoire occupé, et, par exemple, Gaspé — mais ça, c'est déjà pratiquement quotidien,
là, la collaboration ou la relation est
très, très étroite — on est
en mesure d'avoir un déploiement responsable et sécuritaire de ce qui vous
semble nécessaire?
M. Masson (Robert) : Je pense qu'une démarche comme celle que vous mentionnez rencontre les
principes que l'alliance défend, à
savoir que la gestion doit être prudente, la collaboration des municipalités
doit être acquise, et puis l'acquisition
de données scientifiques est également importante. Donc, tout ça, ça dresse un
petit peu, là, la toile de fond de
notre position, puis je pense qu'une démarche comme celle que vous venez de
mentionner rencontrerait ces critères-là.
M.
Blanchet : Dernière question, très rapidement. J'aimerais
que vous nous disiez... L'alliance représente des villes à l'extérieur du Québec. Donc, j'imagine
qu'il y a l'Ontario et il peut y avoir des villes américaines dans cette
alliance. Vous êtes au courant,
évidemment, de l'entente Québec-Californie en termes de gestion des gaz à effet
de serre, le marché du carbone, et
que, par le principe de compensation, un territoire donné peut réduire ses
émissions de gaz à effet de serre de façon significative par le principe
de compensation autant que par une réduction réelle.
Est-ce
qu'en vertu de ça on peut considérer que, si — si, parce que la démonstration est à
faire — il y a
un enjeu d'émission de gaz à effet de
serre dans l'exploitation et l'exploration par le biais de fracturation, que
cet enjeu-là — puis je
ne parle pas tellement de la vallée du Saint-Laurent que d'autres
secteurs — serait
couvert et que les objectifs de réduction du Québec seraient quand même
atteints par le principe de compensation en vertu du marché du carbone?
M. Chenard (Philippe) : C'est certain que, sur ce point précis, là, il
faudrait refaire une consultation avec nos membres, mais, pour ce qui
est du principe, comme vous le dites, de compensation, ça n'empêche pas les
émissions d'arriver, mais, au moins, ça
permettrait à la province, là, d'améliorer son bilan là-dessus. Donc, pour
nous, à prime abord, ça serait une piste intéressante.
M.
Blanchet :
Merci.
Le
Président (M. Lessard) : Parfait. Je reconnais donc la députée de
Mirabel et vice-présidente de la commission.
Mme
Beaudoin : Merci, M. le Président. À mon tour, j'aimerais
saluer le nouveau président de cette commission, le féliciter pour sa nomination. M. le ministre, les collègues de
l'Assemblée nationale. Messieurs, d'abord, merci pour la présentation de votre mémoire. Si je comprends
bien, d'après votre mémoire et d'après vos réponses à M. le ministre, un
moratoire permettrait bien de calmer les esprits, là, selon vous. Est-ce que
c'est exact?
• (10 h 40) •
M. Chenard (Philippe) : Pour nous, en fait, je vous dirais, ce n'est pas
tant de calmer les esprits. On a vu en 2010 que ça s'était échauffé, tout de même, il faut le reconnaître. Comme mon
collègue l'a mentionné, en fait, à l'alliance, on a, par nature et pour tous les dossiers, une approche
très pragmatique, mais avec un principe de précaution qui soit le plus élevé possible. Donc, si le moratoire permet
d'avoir la meilleure acquisition des connaissances possible... Là, c'est sûr
que l'EES vient de publier ses
recommandations hier, mais, si le moratoire permet d'avancer la connaissance
et, surtout, la mise en place de
mesures de protection, de garantie financière puis de collaboration avec les
citoyens puis les municipalités, eh bien, pour nous, ça ne peut être que
positif.
Mme
Beaudoin :
Ma question principale, là, concerne l'une de vos recommandations. À la
page 8 de votre mémoire — et je le cite — cette recommandation-là, vous dites :
«L'alliance demande finalement la création d'un fonds de redressement et d'indemnisation pour les
municipalités, financé par des droits versés par l'industrie des gaz de
schiste, au cas où surviendraient des
impacts négatifs dans leur territoire suite à des activités d'exploration,
d'extraction ou de traitement.» J'aimerais avoir plus de détails sur ce
que vous demandez. Est-ce que vous avez des montants qui ont été fixés pour
cette demande-là?
M. Chenard (Philippe) : Je vous dirais, à prime abord, non, pour la
simple raison qu'il fallait d'abord connaître l'étendue de l'activité. Ça, ça demeurait une grande inconnue autant en
2010 que maintenant. Juste pour bien comprendre le mécanisme, c'est qu'autant pour le dossier des pipelines que pour le
dossier des gaz de schiste ou de l'industrie maritime l'alliance a toujours préconisé une couverture à
deux niveaux — bien
sûr, une couverture d'assurance — qui soit adéquate. Et ça, on en avait même parlé lors d'autres
présentations à partir de 2010, même avant l'incident malheureux, là, ou même
tragique de Lac-Mégantic, donc, d'avoir une couverture d'assurance qui soit
suffisante.
Mais
aussi, étant donné les délais qui sont souvent encourus pour le traitement des
demandes aux compagnies d'assurance,
on trouverait que ça soit important qu'il y ait des fonds de couverture sur le
modèle de qu'est-ce qui existe ailleurs — je pense, entre autres, à la
Colombie-Britannique ou dans certains États américains — qu'il y ait des fonds de couverture qui soient capables de répondre
rapidement aux besoins des municipalités. Et ça, là-dessus, il y a un modèle
qui existe actuellement dans le domaine
maritime au Canada, où il y a un fonds de prévoyance pour les cas de
déversement maritime qui pourrait servir
de modèle. Par contre, pour ce qui est de l'étendue, ça, je vous avoue qu'on
n'est pas rendus à ce niveau de
détail là. Puis il faut comprendre aussi que les compagnies de gaz de schiste
sont souvent des compagnies… À part
peut-être Junex et Talisman, ce sont souvent des compagnies qui sont dans leur
lancement. Donc, les modalités financières, nous ne sommes pas rendus là
encore.
Le
Président (M. Lessard) : Pour les fins des échanges, le député de
Repentigny m'avait demandé le droit de parole. Ça fait qu'on serait
peut-être rendus là, étant... Il reste environ trois minutes.
M.
McKay :
Trois minutes?
Le Président (M.
Lessard) : Oui.
M.
McKay : Oui. Bien, merci, M. le Président. Alors, je vais
saluer, moi aussi, M. Masson, M. Chenard et saluer notre
nouveau président de la commission, vous souhaiter la bienvenue.
En
ce qui concerne la question de l'eau, vous savez sûrement qu'en 2009 l'Assemblée
nationale a adopté une loi qu'on
appelle de façon plus courte, là… je ne vous donnerai pas tout son nom, mais
qu'on appelle la loi sur l'eau, donc, qui réaffirmait le caractère
collectif… et on reconnaît un principe fort important. Je pense que l'opposition
officielle aurait avantage à relire ce
projet de loi là... bien, cette loi-là, qui a force de loi maintenant, parce
qu'on y reconnaît un principe qui est
une grande avancée dans le domaine du droit environnemental, c'est-à-dire le
principe de l'État comme gardien des intérêts collectifs de la nation
dans ses ressources en eau, puisque l'eau est un bien collectif. Et, dans ce cadre-là, on reconnaît — et c'est une loi qui avait été adoptée sous
le précédent gouvernement — justement à l'État le droit
de cesser des prélèvements en eau s'il y a un danger ou une menace pour la
qualité de l'eau, et ceci, sans indemnité de la part de l'État. Donc, c'est un principe qui est de base. Et on
pourrait le résumer ainsi, c'est que ça n'existe pas, un droit acquis à
polluer au Québec.
Alors,
par rapport à ça… Et il ne restera pas grand temps pour répondre à la question,
mais moi, j'aimerais ça, éventuellement,
si vous pouviez élaborer sur, justement, comment est-ce qu'on peut... Parce que
vous dites : Il faudra que, pendant
ce moratoire-là, qu'on prévoie des mesures pour l'après-moratoire, et comment
est-ce qu'on peut concilier les besoins
en eau de l'industrie des gaz de schiste, puis les critères environnementaux,
puis les sociaux… de la population et des municipalités qui les
représentent?
M. Chenard
(Philippe) : Bien, très rapidement... Je ne sais pas combien de temps dont
je dispose.
Le Président (M.
Lessard) : Il vous reste une minute…
M. Chenard
(Philippe) : Une minute?
Le Président (M.
Lessard) : Un peu plus.
M. Chenard (Philippe) : Bon, je crois que la clé de cette question-là… C'est certain qu'à un
niveau macro, bon, il va avoir une
loi qui, éventuellement, va être appliquée, mais je crois qu'une des réponses
importantes à cette question-là, c'est
d'avoir vraiment une possibilité, pour les collectivités locales, les
municipalités, d'avoir un dialogue avec l'industrie et le gouvernement pour savoir de façon précise,
pour une MRC, pour une municipalité donnée, de quelle façon l'industrie va se déployer. Parce que, comme vous l'avez
mentionné lors de la commission, la géographie du Québec est très différente.
Je crois qu'il faut que, dans les
mécanismes, dans la façon que ça va se faire… il faut que l'industrie puisse
dialoguer avec les intervenants, les citoyens des municipalités pour
dire : Bien, voici la façon que nous allons procéder, et qu'il y ait
vraiment une compréhension puis un dialogue pour que l'extraction ou la prise
de ressources en eau se fasse de façon adéquate
et responsable, pas que l'industrie arrive et, de façon unilatérale, sollicite
un tributaire ou une rivière, et que, s'il
y avait, par exemple, un épisode de sécheresse important, qu'il pourrait y
avoir des problèmes d'approvisionnement. Ça fait que je pense qu'une des
clés, des réponses, c'est vraiment le dialogue au niveau local.
Le Président (M.
Lessard) : Quatre secondes. Je pense que le temps est expiré. Alors
donc, le temps réservé pour la partie
gouvernementale est expiré. Nous allons donc passer, pour une période de
15 min 12 s, au groupe formant la première opposition. Donc, le député de Laurier-Dorion et
porte-parole officiel en matière de développement durable et de
l'environnement, la parole est à vous.
M.
Sklavounos : Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de
souhaiter la bienvenue à M. Masson, M. Chenard. Merci de votre présentation, votre présence ici aujourd'hui. Je ne veux
pas m'éterniser sur la question des consultations, là, avec mon collègue
parce qu'on est plutôt ici pour vous entendre. Évidemment, je ne sais pas si
vous allez vous souvenir de la période de
marchandage qu'il y a eu, où le gouvernement nous disait que, si on n'adoptait
pas le principe, on n'était pas capable de nous assurer des consultations. Alors,
bien que le gouvernement n'a jamais dit qu'il ne voulait pas de consultations, on a marchandé les
consultations pour une adoption du principe du projet de loi. C'est dans les
galées, c'est partout, on pourrait
faire la vérification, et le ministre pourrait revenir par la suite. On a les
déclarations du leader du gouvernement là-dessus.
Je vous
rappelle rapidement que la position de notre formation politique a toujours été
claire. En tout temps, les libéraux
ont toujours dit que le développement du gaz de schiste allait se faire
correctement, ou pas du tout. On a toujours été clairs là-dessus, et la position du parti était d'attendre la fin de
l'évaluation stratégique environnementale, qui allait nous éclairer, qui allait pouvoir stimuler le
débat, nous éclairer sur la faisabilité des activités d'exploration,
d'exploitation au Québec. Seulement à
l'aboutissement de ce processus, une fois qu'on avait ces données-là, qu'on a
eu le temps de les regarder, de les
évaluer, de les analyser, seulement à la fin de ce processus, si nous avions la
certitude que les activités d'exploration
et d'exploitation pouvaient se réaliser selon les meilleurs principes de
développement durable — évidemment, les 16
principes, de concert avec l'accord de la population parce que c'est très
important, et vous l'avez mentionné en quelque
part, mais je vais revenir, ce que vous avez dit concernant les chevreuils, M.
Chenard — nous
allions déterminer seulement à ce
moment-là si c'était envisageable d'aller de l'avant. Ça prenait, évidemment,
l'acceptabilité sociale et le reste.
Aucun permis d'exploitation n'allait être autorisé tant et aussi longtemps
qu'une loi aussi pour encadrer ce secteur n'allait pas être adoptée. Alors, c'était notre position. On n'était pas
des gens qui avons dit : Écoutez, on ne va pas attendre, on va aller… Ça ressemble bien plus à ce qu'on
voit, si vous voulez, aujourd'hui à Anticosti, où on se dit qu'on va aller
au niveau de l'exploration et que le BAPE va se faire par la suite, sachant
pertinemment, évidemment…
Et vous mentionnez, en quelque sorte, dans votre
mémoire que le procédé est le même, quand on parle de fracturation, là, que ce soit pétrole de schiste ou gaz de schiste,
c'est le même procédé. Dans un cas, on s'inspire — et comme
je l'ai dit tout à l'heure — de la Russie, on suspend des permis sans
indemnisation. Et, bien qu'il n'y a pas de droit de polluer, lorsque le gouvernement lui-même a, avec une couleur
de droit, émis un permis sur la base de ce qui était connu à ce moment-là, il y a, je crois, une
injustice flagrante de révoquer ce permis sans une indemnisation si l'état des
connaissances a évolué. Ce n'est pas une
question de... le droit de polluer, c'est que le gouvernement lui-même avait
émis ce permis-là, et c'est le même
gouvernement qui suspend ce permis-là. C'est le gouvernement, dans le fond, qui
change de position suite à
l'évolution des connaissances, et ça, ce n'est pas la faute de l'entreprise
comme ce n'est pas la faute du
gouvernement. Mais dire qu'on va révoquer ou suspendre — «suspendre», c'est le bon mot du
ministre — sans
aucune indemnisation, ça rappelle pas mal ce qui se passe dans d'autres
régimes.
Mais, dans
l'autre cas, d'Anticosti, on s'inspire plutôt des États-Unis, et non pas de la
Russie. On s'inspire plutôt du «drill,
baby, drill», où on va directement sans passer par le BAPE, puis on se
dit : On va faire le BAPE par la suite. Mais ce qu'il faut clairement comprendre — et vous le mentionnez dans votre
mémoire — c'est
qu'au niveau de l'exploration comme
telle il y a le procédé de fracturation hydraulique. Alors, vous, quand vous
parlez d'étendre, en quelque sorte, vous auriez… vous trouvez, en quelque sorte, contradictoire, si je vous
comprends bien, d'avoir le pétrole de schiste pas encadré de cette façon-là et le gaz de schiste encadré de
cette façon-là. Est-ce que je comprends bien, un petit peu, ce que vous
dites dans le mémoire, M. Chenard?
• (10 h 50) •
M. Chenard
(Philippe) : Pour être bien
franc, M. le député, il faut comprendre que le mémoire a été rédigé avant
l'annonce. Donc, on n'avait pas eu la
prescience de savoir qu'il allait y avoir de la collaboration entre le
gouvernement québécois et la
compagnie, dont j'ai oublié le nom… ou les compagnies parce qu'il y en a plus
qu'une qui sont impliquées.
Ceci étant
dit, c'est certain qu'on n'est pas là, ici, pour juger ce projet-là en tant que
tel. Nos commentaires portent spécifiquement
sur p.l. n° 37. Mais c'est certain que, s'il doit y avoir une activité,
comme M. le ministre l'a mentionné, qu'on
souhaite et on espère que ce soit dans le meilleur encadrement et l'application
des normes environnementales les plus élevées possible. Et on espère que
les résultats de ces explorations-là sauront servir à faire avancer, tel qu'on
l'a mentionné aussi, là, la connaissance
scientifique et qu'ensuite les municipalités et tous les autres acteurs
bénéficient de cette avancée de
connaissance là. Mais, dans le principe, oui, si on prend le cas d'autres
municipalités, que ce soit pour du gaz ou du pétrole de schiste, surtout
dans les zones habitables, on souhaiterait que le moratoire soit élargi.
M.
Sklavounos :
Alors, votre recommandation n° 1, dans un sens, c'est ça : «Le texte
actuel ne désigne que le gaz de
schiste alors que le procédé par fragmentation hydraulique est aussi utilisé
pour l'extraction du pétrole — vous le dites assez clairement. Nous
suggérons donc d'inclure dans le projet de loi n° 37 l'ensemble des
procédés d'extraction par fragmentation hydraulique.»
Vous
mentionnez aussi ailleurs dans votre mémoire la question des produits
chimiques, les composés chimiques qui
sont non dévoilés, etc., et qui rentrent dans la fracturation hydraulique.
C'est exactement la même chose au niveau du pétrole, c'est pas mal le
même procédé.
M. Chenard
(Philippe) : En principe, oui. Je
n'ai pas la prétention… je ne suis pas un expert technique, ni un
géologue, ni un ingénieur, mais, pour ce qui est de notre compréhension, oui,
il y a des produits chimiques qui sont utilisés
dans tous les procédés de fracturation. Et, ceci dit, nous sommes conscients
aussi qu'il y a une question de droits, des droits de propriété sur le cocktail ou le mélange. Mais, un petit
peu comme... faire un parallèle avec la situation pour le chemin de fer, où il
y a des principes de non-divulgation qui doivent être signés par les
municipalités dans le processus où les compagnies de chemin de fer informent les
municipalités pas de la composition, mais du contenu de leur transport ferroviaire, bien, ce serait un peu l'adoption
d'un même principe où il y aurait cette information-là qui serait, au moins,
divulguée aux premiers répondants puis aux
autorités compétentes, que ce soit au niveau provincial ou fédéral. Donc, on
trouve que ce serait, au moins, un minimum, là, pour les compagnies impliquées.
M.
Sklavounos :
Et je vous dirais que, même dans certaines juridictions et même ici, aux
dernières nouvelles, il y a des
représentants de l'industrie qui seraient d'accord pour que ces composés
chimiques soient divulgués, là. Dans d'autres
juridictions, c'est le cas. Et même ici, aux dernières nouvelles, il me
semble — et on va
avoir l'occasion de les entendre — qu'une divulgation volontaire, de la
transparence peut juste être bénéfique, là, pour les citoyens et pour le
public en général.
Une autre
question. Vous parlez à la page 5, au bas de la page… vous mentionnez que
l'esprit et les objectifs du projet
de loi n° 37, tels que présentement formulés, vous les appuyez. Et je vous
dirais que, d'une certaine façon, nous aussi,
on s'était dits d'accord, le temps de laisser progresser la science. Vous avez
mentionné que… Évidemment, l'étude environnementale
stratégique est tombée à 17 h 48, hier soir. Avez-vous eu l'occasion
de la regarder ou de l'analyser avec… Évidemment, vous êtes les
représentants d'un plus large groupe. Évidemment, vous avez aussi des gens qui
ont les connaissances dont vous avez mentionné tout à l'heure ne pas posséder
ces connaissances-là. Avez-vous eu le temps, l'occasion
de pouvoir, je ne sais pas, faire un appel conférence téléphonique, quelque
chose pour essayer de... Je sais que le mémoire comme tel était déjà écrit, je comprends, mais, au niveau de
l'analyse, est-ce que vous avez eu l'occasion ou ça a été impossible, vu le peu de délai entre la
divulgation de l'étude environnementale stratégique et votre présence ici
aujourd'hui?
M. Chenard
(Philippe) : Je vous dirai, M. le
député, que c'est un exercice que l'on va certainement faire dans le futur rapproché. Et ça, là-dessus, oui, et,
comme pour tous les autres dossiers où il y a une dimension scientifique ou de
connaissances techniques plus fines, habituellement, à l'alliance, on diffuse
l'information auprès de nos membres et, ensuite,
on a des suivis. Étant donné que, dans les municipalités, il y a cette
connaissance technique qui est présente, bien, on compte, bien sûr, sur l'apport de nos membres là-dessus. Donc, c'est
un exercice que nous allons certainement faire.
M.
Sklavounos :
Une autre question. Je vous dirais, on comprend tous, il y a une partie, là, de
l'étude environnementale stratégique qui était claire, là, même si on a
lu juste le résumé. Évidemment, il y a une certaine conjoncture économique qui fait en sorte qu'en ce moment le marché, la
rentabilité... on ne peut pas être sûr que c'est le bon moment, là, au niveau d'avoir, comme disent les Anglais, «a bang
for our buck», ce n'est peut-être pas le bon moment en ce moment. On n'est pas si pressé, je pense
qu'il n'y a personne qui est pressé. On a dit vouloir progresser la science,
nos collègues d'en face veulent un
moratoire. Est-ce que vous, dans l'éventualité où vous auriez l'occasion de
prendre connaissance de l'étude
environnementale stratégique, pouvoir consulter vos membres, vos experts... ne
serait-il pas intéressant de pouvoir revenir devant nous à un moment
donné et vous prononcer après avoir eu le temps d'analyser cette étude
environnementale stratégique, consulter vos experts, vos membres? Est-ce que
c'est quelque chose qui pourrait être envisageable pour vous de pouvoir revenir
devant cette commission?
M. Masson
(Robert) : Certainement,
quand on aura eu la chance de se pencher sur ce rapport-là, quand on aura
pu en avoir discuté avec nos membres. C'est
certain qu'il y a beaucoup de choses... Nous pensons qu'il y a beaucoup de
choses dans cette étude-là, qui va répondre à beaucoup de questions qu'on avait
soulevées.
Quant à
l'opportunité économique de procéder, bien, nous, ce qui nous intéresse
davantage de par les membres qu'on
représente, c'est de, premièrement, aller chercher l'information scientifique,
s'assurer que le développement se fasse de façon harmonieuse le plus possible, que les villes et municipalités
puissent avoir leur mot à dire. Mais on comprend qu'ultimement c'est le marché qui va décider de l'exploitation, une fois
qu'on aura pu répondre à toutes les questions qui étaient en amont du
processus.
M.
Sklavounos : Alors, sachant pertinemment qu'en ce moment il
n'y a pas d'exploitation, il n'y a pas d'exploration, de facto, il y a
un mémoire... un moratoire — j'ai-tu
dit mémoire? — …
Une voix : Oui.
M.
Sklavounos :
…oui, moratoire, vous, vous ne serez pas en désaccord qu'on puisse reporter ou
mettre la pédale douce, attendre,
faire ce débat, avoir l'analyse de l'étude environnementale stratégique? De
toute façon, un, la conjoncture n'est
pas rentable. Ça, bon, on va tous être d'accord ici, je pense qu'on ne peut pas
contester ces données-là. Deuxièmement, dans les faits, il n'y a rien qui se passe en ce moment, là, il y a… Et,
troisièmement, le débat serait probablement beaucoup plus éclairé. On pourrait revenir un petit peu
plus tard ou faire une deuxième version d'une consultation, procéder rapidement
pour essayer de passer un moratoire, alors
que, premièrement, on exclut des territoires, deuxièmement, l'état de la
science n'était pas tout à fait clair
au moment que... Il y aura peut-être d'autres groupes qui auront l'occasion de
se prononcer un petit peu plus tard
dans la semaine, ils auront eu un petit peu plus de temps, mais, je vous
dirais, ça laisse très, très peu de temps, là.
Et, évidemment, vous savez qu'après cette
semaine on tombe en congé... pas en congé, mais en travaux de circonscription, mais il y a un congé parlementaire,
dans le sens qu'il n'y a pas de travaux ici. Et par la suite, évidemment,
il y a des rumeurs, il y a des rumeurs
électorales qui circulent, de plus en plus pressantes. Ça fait que, pour vous,
il ne s'agit pas d'aller plus vite
que nécessaire ici. On est probablement... Vous êtes d'accord avec nous qu'on
peut tous bénéficier de prendre notre temps, étudier l'étude environnementale stratégique,
consulter et revenir pour discuter à tête reposée, sans avoir aucune
échéance en tête, de cette question-là qui est très importante au niveau de la
population.
• (11 heures) •
M. Chenard (Philippe) : Mais c'est certain qu'en gros, si nous avions l'invitation de la part
de la commission ou d'autres
instances, que ce soit le prochain BAPE, bien, c'est certain que nous serions
tout à fait disposés, là, à poursuivre la réflexion collective.
M.
Sklavounos : Et d'avoir cette invitation avant qu'on puisse
légiférer, là, avant qu'on puisse passer ou essayer de passer un projet
de loi, ça serait juste normal, la consultation avant.
Alors, j'ai une
dernière question pour vous. Et je ne sais pas combien de temps qu'il reste, M.
le Président.
Le Président (M.
Lessard) : Il vous reste 1 min 12 s.
M.
Sklavounos : Oui, 1 min 12 s. Juste
rapidement, lorsque vous parlez du fait que, malgré le moratoire, on… Vous estimiez qu'on pourrait progresser au niveau
de la connaissance scientifique, pouvez-vous me dire de quoi vous parliez exactement? Est-ce que c'était l'étude
environnementale stratégique? Comment envisagez-vous approfondir les
connaissances s'il y a un moratoire, puis il n'y a pas de procédés
scientifiques qui peuvent être testés sur le territoire?
M. Chenard (Philippe) : Oui. Bien, en fait, il y a deux choses. Il y a
d'abord la poursuite des activités d'exploration comme… Elles vont se dérouler à l'île d'Anticosti. Donc, ça, c'est
peut-être davantage une approche empirique. Mais, en dehors de l'EES, il y a des études très
importantes dans un contexte nord-américain. Comme on l'a mentionné, il y a une
étude en cours de l'État de New York qui
devait être annoncée l'an dernier, mais qui se poursuit encore et qui est une
étude très… qui focalise beaucoup sur
les questions de santé publique. Il y a la U.S. CPA qui fait une étude
très importante sur les impacts sur
les ressources en eau. Ça aussi, c'est une étude, un peu comme l'EES, qui a
pris plus de temps que prévu. C'est
une étude très importante que fait cette administration-là présentement et dont
les résultats sont très attendus. Donc, c'est certain qu'il y a un contexte… On voit, en gros, qu'à l'échelle
nord-américaine que tous les exercices d'évaluation ont tendance à
prendre plus de temps que prévu. Et, comme il y en a certaines qui arrivent à…
Le
Président (M. Lessard) : Excusez, je vais devoir vous interrompre,
malheureusement, étant donné que le délai imparti pour le premier groupe d'opposition est expiré. Nous allons
passer, donc, au critique d'opposition officielle du deuxième groupe d'opposition, qui est critique,
donc, en matière d'environnement, développement durable, faune et parcs.
La parole est à vous pour 3 min 48 s.
M.
Martel : Merci, M. le Président. Puis je tiens à vous
féliciter pour votre nomination et saluer tous mes collègues de
l'Assemblée nationale pour cette commission.
En
premier, dans mon ancienne vie, j'étais directeur général de la MRC de
Nicolet-Yamaska, puis, vraiment, où est-ce
que le territoire est situé, c'est vraiment une zone importante de potentiel de
gaz de schiste. Puis, quand ça nous est arrivé, les premiers tests, pour voir le potentiel de tout ça, une des
frustrations qu'on avait au niveau de la MRC, c'était avoir de la
compétence, de la connaissance pour alimenter les maires par rapport à tout ce
phénomène-là. Moi, je me demandais, dans
votre organisation, c'est de quel genre de compétences vous bénéficiez pour
vous alimenter, pour vous… qu'est-ce qu'il y a comme compétences au sein
de votre organisation à ce niveau-là.
M. Chenard (Philippe) : Si vous parlez de l'équipe, nous sommes une
équipe très réduite, nous sommes six personnes réparties dans quatre villes. Donc, c'est certain
que nous, notre compétence et notre expertise, pour des sujets très techniques
comme celui-ci, on ne l'a pas nécessairement
à l'interne. Mais, par contre, on sait où aller la trouver. Et, dans ce
domaine, qui touche plus la
pétrochimie ou les questions énergétiques, nous avons quand même plusieurs
municipalités qui sont actives ou qui
ont une certaine connaissance approfondie du domaine. Donc, c'est certain que
nous, pour se faire une tête, comme
on dit en bon québécois, on doit… et, par nature, c'est quelque chose qu'on
fait régulièrement, on va consulter nos municipalités membres et celles
qui ont une connaissance, évidemment, là, du sujet. Donc, on doit se référer à
la connaissance scientifique, mais, bien sûr, à la connaissance de nos membres.
M.
Martel : Mais c'est exactement dans cette veine-là. Moi, je
connais bien les municipalités — là, je ne parle pas de l'Ontario ou… mais les municipalités au
Québec — puis,
sincèrement, on n'avait pas cette expertise-là. Là, je parle de voilà trois,
quatre, cinq ans. Est-ce que les municipalités se sont donné des nouvelles
ressources dans ce domaine-là ou c'est
des études privées qui ont été faites? Mais j'essaie de bien comprendre d'où
vient votre «know-how», là, dans ce domaine-là.
M. Chenard (Philippe) : Je dois vous avouer qu'en 2010 c'étaient plus des
principes de précaution, c'était plus, je
vous dirais, de l'intuitif que du scientifique. Parce que, bien sûr, c'était un
nouveau domaine pour tout le monde. C'était un nouveau domaine pas juste
au Québec, mais à l'échelle nord-américaine. C'est certain que, quand on a fait
nos représentations pour le dossier
d'Enbridge, là, par contre, on avait une meilleure connaissance. Mais je vous
avoue que c'est sur un mode de «work
in progress», si vous me permettez l'expression. La connaissance scientifique
avance, elle avance dans les
municipalités, mais c'est certain que nous, à l'alliance, on a un sujet à
traiter, et c'est un sujet parmi d'autres. On a, par contre, des ressources dans les municipalités qui focalisent,
qui travaillent là-dessus de façon plus intensive. Donc, on doit se
reposer là-dessus.
M.
Martel : Mais vous comprenez pourquoi je vous amène là, je
n'essaie pas de vous tendre un piège, mais l'expertise,
elle est difficile, dans le domaine municipal, à trouver. Puis, moi, c'est ça
que je trouvais intéressant, d'attendre les conclusions du comité d'étude stratégique pour qu'on se fasse
vraiment une tête par rapport à ça, puis je suis un peu surpris que vous arriviez avec des recommandations
qui vont au-delà du p.l. n° 37 avant de prendre connaissance de façon
plus approfondie des orientations.
Le Président (M.
Lessard) : C'est ce qui va terminer, malheureusement, nos audiences
pour l'Alliance des villes des Grands Lacs et du Saint-Laurent.
Alors, on remercie,
donc, les représentants de l'organisation, et nous allons suspendre quelques instants
pour permettre à l'autre groupe de s'installer.
(Suspension de la séance à
11 h 6)
(Reprise à 11 h 8)
Le
Président (M. Lessard) : Donc, nous reprenons nos travaux. Nous
accueillons donc l'Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique. Alors, bienvenue. Si vous
voulez vous nommer pour les fins d'enregistrement de nos auditions.
Association québécoise de lutte contre la
pollution atmosphérique (AQLPA)
M. Bélisle (André) : Bonjour, M. le Président. Bonjour, les membres de la commission. Je
m'appelle André Bélisle. Je suis
président de l'AQLPA, Association québécoise de lutte contre la pollution
atmosphérique, organisme qui existe au Québec depuis maintenant 32 ans
et celui qui a sonné le réveil sur le dossier des gaz de schiste au Québec
aussi.
Mme Legendre (Sophie-Anne) : Bonjour. Mon nom est Sophie-Anne Legendre. Je
travaille avec l'Association québécoise
de lutte contre la pollution atmosphérique à titre d'analyste et de conseillère
aux communications. Je travaille avec
l'AQLPA depuis 2009, donc j'étais là à l'époque de la première demande de
moratoire complet sur les gaz de schiste au Québec.
Le
Président (M. Lessard) : Alors, merci beaucoup. Vous disposez
maintenant d'une période de 10 minutes pour votre présentation. Et, vers la fin, vers neuf minutes et quelques, je
vais vous indiquer si vous voulez, donc, terminer votre présentation
pour qu'on puisse passer aux échanges par la suite. D'accord? La parole est à
vous.
• (11 h 10) •
M. Bélisle (André) : Merci, M. le Président. Alors, tout d'abord, j'aimerais indiquer qu'il
y a deux documents. Il y a le mémoire
qu'on vous dépose sur le projet de loi et il y a aussi les commentaires,
questions et recommandations sur le
plan de réalisation de l'étude environnementale stratégique qui a été
finalement déposé hier. Mais, nous, c'était un document qu'on a quand même déposé le 15 janvier 2011, et il y a des
rappels importants là-dedans, là, qui devraient nous être utiles pour
nous orienter.
Alors,
tout d'abord, bien, merci à la commission de nous recevoir. C'est un plaisir
d'être avec vous et c'est aussi un devoir important de se poser les
bonnes questions face à un dossier aussi déterminant au niveau environnemental.
D'abord,
un mot sur le contexte dans lequel nous faisons, ce matin, notre présentation,
au lendemain d'une annonce très
importante concernant la fracturation à venir sur l'île d'Anticosti et à la
veille très probable du déclenchement des élections au Québec. Et en plus — et ça nous a joué un petit tour hier — bien, on a appris que M. le ministre
annonçait qu'il y avait un BAPE qu'on
voulait vous demander. Alors, merci, M. le ministre. Et, bien, il y a aussi
l'étude environnementale stratégique qui a été annoncée, sur laquelle on
a pas mal de commentaires.
Bon,
bien, au sujet des élections, on invite tous les parlementaires à reprendre cet
exercice et à le conclure à la lumière
de la volonté clairement exprimée par la majorité de la population. Et je
souligne, pour ceux qui s'en rappellent, qu'on a fait ça, il n'y a pas tellement longtemps, dans le dossier des
poursuites abusives. Il y a eu une élection qui a fait que la commission qui avait commencé n'a pas pu
faire son travail, mais elle a été reprise dès que le gouvernement est revenu
en place, et on a conclu, et ça a donné la
loi n° 9, que vous connaissez et pour laquelle on a travaillé très fort à
l'AQLPA.
Un
mot aussi sur la teneur du mémoire que nous vous présentons ce matin. Le
présent mémoire se veut succinct. Son
but n'est pas une mise à jour de l'avancement des connaissances en matière
d'impacts environnementaux et sanitaires de l'industrie du gaz de schiste et de la fracturation en général, mais
bien un commentaire sur le projet de loi n° 37. Le présent mémoire
ne reflète donc pas l'ampleur des réflexions des travaux de recherche effectués
par les équipes de l'AQLPA et de Stratégies
énergétiques au fil des années. Comme je le disais tantôt, vous savez, c'est
nous qui avons sonné le réveil
là-dessus. Mais, quand on regarde l'annonce de l'EES, bien, finalement, les
études à la base de l'annonce du rapport synthèse de l'EES confirment ce que l'AQLPA disait depuis le début en
termes de pollution atmosphérique, à savoir les émissions de gaz à effet de serre qui augmenteraient de façon très
importante et aussi les différents types de pollution liés à l'exploration et à l'exploitation de ce gaz-là.
Alors, là-dessus, bien, je cède la parole à ma collègue Sophie-Anne, qui a un
message éditorial aussi à livrer.
Mme
Legendre (Sophie-Anne) :
Bien, d'abord, merci de nous recevoir aujourd'hui. C'est une consultation qui est très importante pour l'avenir du Québec et,
émotivement un peu, je dirais aussi, pour l'avenir du monde, qu'on peut être des leaders dans bien des choses, notamment
en matière de protection de la santé des populations et de l'environnement.
Donc, après
ces remerciements d'usage, je vais vous lire le préambule, que vous avez
également dans le mémoire qu'on vous
présente aujourd'hui. J'aimerais que, tout au long des consultations qui ont lieu
présentement, vous gardiez ce message en tête.
Qui peut
sérieusement penser qu'injecter des tonnes de produits chimiques dans les sols
soit une bonne idée? Rien ne justifie
cet empoisonnement du monde. Rien. Soyons bien clairs là-dessus. Oui, nous pourrions
débattre longtemps, tenter de
documenter les impacts ou orienter le débat sur des aspects techniques comme
les distances séparatrices adéquates, l'épaisseur
du ciment ou l'intensité carbonique des gaz et pétrole de schiste. Mais, au
fond, peu importe, l'essentiel tient en
peu de mots : Injecter des tonnes de produits toxiques dans les sols
mélangés à de l'eau douce est une aberration totale et complète.
La Loi sur le
développement durable, adoptée au Québec en 2006, stipule que «le développement
durable s'appuie sur une vision à
long terme qui prend en compte le caractère indissociable des dimensions
environnementale, sociale et économique des activités de développement».
Parmi les principes soutenant cette loi, notons santé et qualité de vie, équité
et solidarité sociales, protection de l'environnement, prévention, précaution
et préservation de la biodiversité. Dans le
cadre de l'industrie du gaz de schiste, de la fracturation hydraulique, nous
jugeons que la santé et la qualité de vie des citoyens sont menacées et
que les principes de prévention, de précaution et de protection de
l'environnement, de préservation de la biodiversité et d'équité
intergénérationnelle sont ignorés.
Donc, pour
faire suite à ce préambule, on articule notre mémoire très simplement autour de
quatre recommandations qui parlent
exclusivement du projet de loi n° 37. La première de ces quatre
recommandations va comme suit : Le projet de loi n° 37 devrait établir un moratoire à
l'ensemble du territoire québécois, et non pas seulement à une série de
municipalités densément peuplées.
M. Bélisle
(André) : La deuxième
recommandation dit que le projet de loi n° 37 devrait s'appliquer à la
fracturation sans distinction au fait que celle-ci soit destinée à
l'exploration ou l'exploitation du gaz ou du pétrole de schiste.
Mme
Legendre (Sophie-Anne) : En
troisième position, donc, de nos recommandations, un préambule devrait
être ajouté au projet de loi n° 37 afin de décrire le contexte et les
objectifs visés afin d'éviter des contestations auprès d'instances commerciales
internationales telles que l'ALENA.
M. Bélisle
(André) : La quatrième
recommandation se lit comme suit : Les obstacles législatifs actuels
doivent être levés afin de favoriser
la production, la distribution et l'utilisation du biogaz, biométhane pour le
développement adéquat d'une filière de gaz naturel de source
renouvelable.
Et
en conclusion, si vous me permettez, l'AQLPA et Stratégies énergétiques
remercient chaleureusement les membres de la
Commission des transports et de l'environnement de leur accueil et invitent
respectueusement cette commission à
accepter les présentes recommandations et propositions d'amendement au projet
de loi n° 37, en espérant humblement que leur présent mémoire
contribuera à mettre en place au Québec des mesures législatives cohérentes relatives au pétrole et au gaz de schiste au
Québec et, parallèlement, à lever les obstacles législatifs actuels à l'essor
du biogaz, biométhane, du gaz naturel
pour véhicules et au développement des mesures d'efficacité énergétique, le
tout dans l'intérêt des citoyens et des générations futures. Merci.
Le Président (M. Lessard) : Alors,
merci beaucoup. Donc, votre condensé est même rentré à l'intérieur du 10 minutes, ce qui est un fait assez rare ici.
Donc, c'est bon. Alors donc, la parole est maintenant au gouvernement. Donc,
vous avez une période de 16 minutes. M. le ministre, la parole est à vous.
M.
Blanchet :
Messieurs dames, un plaisir comme toujours. Vous savez, il y a des organisations
et des gens qui sont reconnus et
salués pour le franc-parler et la clarté de la façon dont ils s'expriment. Moi,
je salue ça parce qu'ultimement, même
si, sur les moyens, compte tenu de chaises différentes qu'on peut occuper, sur
les moyens, on peut avoir des différends,
sur les objectifs, vous pouvez être assurés qu'on a les mêmes. Et là, après ça,
il y a des moyens de l'articuler, et
c'est ce qui fait débat selon qu'on est, évidemment, dans un gouvernement ou
dans une organisation de sensibilisation.
Je veux
préciser quelques éléments par rapport à ce qui a été dit avant. D'abord, les
intrants sont connus, même que l'évaluation environnementale stratégique
et la synthèse en font état. Il reste des variables par rapport au ratio à l'intérieur de ça, mais les intrants comme tels
sont connus. Et, lorsqu'un certificat d'autorisation est émis, le cas échéant,
le détail du cocktail, si vous me passez l'expression, doit, effectivement,
être soumis.
Un autre
élément — je veux
juste mettre ça clair — nos audiences portent sur le projet de loi n° 37, sur le
moratoire. Il y a, effectivement, des
documents puis une synthèse qui ont été déposés par le Comité sur l'évaluation
environnementale stratégique hier.
Moi, je suis très ouvert à ce qu'on aborde autre chose que le strict moratoire,
mais je ne suis pas ouvert à ce qu'on
reproche au gouvernement de ne pas avoir déposé des documents sur autre chose
que ce sur quoi on se parle aujourd'hui à l'avance. C'est comme
incohérent, là, tu sais. Tant mieux que ce soit disponible, tant mieux si les
gens peuvent y référer, et la plupart ont
l'articulation nécessaire pour le faire. Moi, je ne me serais pas permis,
d'ailleurs, de mettre en doute la
compétence de gens qui viennent s'asseoir ici. Il y a des citoyens qui
pourraient avoir un niveau de compétence
limité parce que ce n'est pas leur métier ou des organisations qui ont
dit : On va parler juste du moratoire, puis pas du reste à ce
stade-ci. Moi, je ne le leur reprocherai pas. Et enfin tout le monde pourra
venir développer leur opinion
lors des audiences du BAPE, lequel BAPE n'existait pas dans les plans du
précédent gouvernement et a bel et bien été confirmé dans nos intentions
et dans l'action, puisque le mandat est maintenant donné.
Cela dit, je
veux juste préciser une chose, si l'enjeu… Parce que vous dites deux
choses : On veut que ça s'étende à
l'ensemble du territoire et on veut que ça s'étende au pétrole. L'enjeu du
pétrole, dans la vallée du Saint-Laurent, ne se posait simplement pas. Dans les basses-terres du Saint-Laurent, dans le
schiste de l'Utica, selon les données scientifiques dont nous disposons, à part une trouvaille, il y a
environ un siècle, qui s'est avérée absolument non pertinente, il n'y a pas
de pétrole dans la vallée du Saint-Laurent. Donc, c'est la raison.
L'autre
raison, je l'ai expliquée — et je vous inviterais à vous exprimer là-dessus — c'est que nous considérons que les différents secteurs géographiques du
Québec qui pourraient contenir des hydrocarbures sont tellement différents
les uns des autres que la même règle
pourrait s'appliquer, mais ça serait du mur-à-mur. Mais ça ne serait pas la
meilleure façon de servir les
intérêts des Québécois, quelles que soient les décisions futures du Québec. Je
pourrais être opposé à toute exploration
et dire que c'est quatre territoires différents pareil, vous comprenez. C'est
la réalité géographique, économique, géologique, démographique,
historique de ces secteurs-là, et traitée différemment par choix.
Là où je veux
vous entendre — et c'est
un peu une question que j'ai posée au groupe avant vous — dans le cas du gaz de schiste — parce que vous voulez étendre, puis vous faites référence à
Anticosti — on a
obtenu une information scientifique
étoffée, 73 études, on les remet au BAPE, le BAPE formule les recommandations,
tel que c'est la façon de faire, tel
que vous l'avez vous-mêmes souhaité dans le cas du gaz de schiste. Nous voulons
procéder ainsi sur un autre territoire,
aller chercher l'information avant de la soumettre à un BAPE pour ne pas avoir
de nouveau un BAPE qui dit : Écoutez,
on veut bien, mais on n'a pas de données scientifiques sur lesquelles
travailler. C'est un peu le piège qu'on veut éviter, un BAPE inutile, on veut qu'un BAPE soit alimenté et documenté.
Est-ce que ça ne vous apparaît pas une approche cohérente, quel que soit
le territoire visé?
• (11 h 20) •
M. Bélisle
(André) : Il y a plusieurs
questions dans votre question, M. le ministre. Bon, d'abord, pour nous, c'est
la fracturation hydraulique, là, qui est le
dénominateur commun, et il faut que ce soit vraiment étudié et encadré. Et,
pour nous, c'est plus simple si on
commence par le coeur du problème, qui est la fracturation hydraulique, et
qu'on fasse les réflexions autour de ça. Maintenant, qu'on le fasse pour
le pétrole et le gaz, oui, il y aura des variantes, et elles vont prendre toutes sortes de formes, que ce soient des
variantes territoriales, des variantes opérationnelles, mais il faut encadrer
ça de façon très prudence avant de permettre l'avancement ou le développement
de quelque façon que ce soit.
Maintenant, pourquoi un moratoire sur l'ensemble
du territoire? Bien, c'est que, par exemple, si je regardais juste la région où je demeure, à un moment donné
La Nouvelle-Beauce n'était pas incluse, elle l'a été un peu plus tard. Par contre, on s'est rendu compte que,
possiblement, peut-être, dans l'autre secteur de la Beauce, il y en aurait. Et
après on a appris, bien, peut-être
qu'au Lac-Saint-Jean il y en a aurait, peut-être qu'ailleurs il y en aurait
aussi. Alors, on s'est dit :
Façon cohérente de procéder, on couvre l'ensemble du territoire, on fait la
réflexion nécessaire et, ensuite, on décide qu'est-ce qu'on fait.
Même chose
pour le pétrole, le pétrole, on parle : Il n'y en pas peut-être pas
beaucoup, il y en a peut-être beaucoup à Anticosti, mais on sait que, par exemple, en Gaspésie, bien, il y a des
projets en cours depuis longtemps avec Pétrolia. Alors, dans ce contexte-là, on se dit : Encore, peut-être qu'on
découvrira quelque à un moment donné qu'il y en avait. Et, si on procède avec, comme je le disais,
prudence, bien, qu'on encadre la fracturation hydraulique pour l'ensemble du
territoire, pétrole et gaz avant, et ensuite on décide.
Le Président (M. Lessard) : M. le
ministre.
M.
Blanchet :
O.K. Le principe, la volonté d'encadrement de l'activité de fracturation, je
vous suis tout à fait là-dessus.
Peut-être que, sur les moyens, on ne choisit pas les mêmes. Je ne suis pas
convaincu, toutefois, que… Le moratoire n'est pas un outil
d'encadrement, il est un outil d'empêchement. Notre volonté est d'empêcher dans
la vallée du Saint-Laurent jusqu'à ce que l'Assemblée nationale ait disposé de
l'enjeu ou période maximale de cinq ans… On n'attache
pas l'avenir au-delà d'une certaine légitimité. Il y a d'autres endroits où on
veut qu'il y ait exploration, acquisition de connaissances auxquelles un territoire total de 0,43 kilomètre carré
va être affecté, par lequel ça va être touché — donc, c'est extrêmement restreint — avec, comme encadrement, une présence, je dirais
même une omniprésence, comme je l'ai
dit, avec le ministère de l'Environnement dans les bottes du promoteur auquel
on est associé. Donc, il y a comme… Ne
voyez-vous pas là un niveau de
sécurité dans l'encadrement? Ce demi-kilomètre carré sur un territoire de
8 000 kilomètres carrés avec
directement les inspecteurs du ministère de l'Environnement sur place avec
l'entreprise, est-ce qu'il n'y a pas là un niveau de sécurité
intéressant?
M. Bélisle
(André) : Bien, on voit que
le gouvernement a quand même fait une réflexion dans le sens de mettre,
si on veut, plus de prudence dans ce
développement-là. Mais, par contre, pour nous, on pense qu'on doit être encore
plus prudent, dans le sens qu'il faut
vraiment s'entendre sur la fracturation hydraulique. Je vous donne l'exemple
quand on a parlé pour la première
fois des gaz de schiste et que j'ai soulevé la question à votre prédécesseure
qui était Mme Beauchamp, et que j'ai
posé la question : Qu'est-ce qu'on connaît sur le gaz de schiste pour
avoir émis 585 permis? Et Mme Beauchamp a été d'une franchise vraiment… avec son cabinet, d'une franchise très
directe pour dire : Bien, André, on ne connaît pas ça. Bien là, on a un problème, on a émis 585 permis,
et il y a déjà des forages de faits. Et là, bien, avec son successeur, on a
pu — et nous, on le savait — démontrer que, sur ces 31 forages qui ont
été faits, il y en avait 19 qui avaient des problèmes, qui fuyaient. Alors, nous, c'est ça qu'on veut
éviter. On veut éviter qu'on fasse des démarches et qu'on se retrouve ensuite
avec un problème qu'on aurait pu éviter si
on avait eu un contrôle et qu'on avait réfléchi de façon plus, je dirais,
poussée avant.
Et
ensuite, M. le ministre, je pense que ça ne vous surprendra pas, pour nous, on
est opposés à ce virage-là tant et aussi
longtemps qu'on n'aura pas vraiment un plan d'action de lutte aux changements
climatiques ou aux gaz à effet de serre
et aussi qu'on nous démontre un plan qui va rejoindre les engagements du gouvernement,
à savoir qu'on va réduire notre consommation de pétrole de 30 %. Bien, ça,
pour nous, il faut que ça passe avant, il faut qu'on ait ça sur la table
pour dire, bien, on s'en va dans quelle
direction. Sinon, bien là on a pris des engagements et, en parallèle, on s'en
va dans le sens contraire. On a de la
misère. Bien, peut-être que je n'ai peut-être pas la souplesse mentale qu'il
faut, là, mais, moi, bon, l'idée, c'est de savoir où est-ce qu'on s'en
va.
Le
Président (M. Lessard) : Alors, M. le ministre, après ça, j'aurai donc
le député de Bonaventure, qui a demandé la prise la parole aussi. Ça
fait que si vous voulez poursuivre…
M.
Blanchet : Oui, je
veux juste poser une petite dernière.
M. Bélisle (André) : Complément de
réponse peut-être?
Mme
Legendre (Sophie-Anne) : …en
complément de réponse, je pense qu'il y a quelque chose de très dangereux
à morceler le territoire comme ça. On parle
de moins de 0,5 kilomètre qui serait affecté au sol, mais… Ça dépasse, là,
moins de 0,5 kilomètre qui serait affecté au
sol. Ce qui nous inquiète en premier lieu, c'est les émissions atmosphériques,
c'est les choix énergétiques qu'on fait,
c'est la contamination des nappes phréatiques, des sources d'eau potable des
citoyens et c'est l'industrialisation
de secteurs qui n'ont peut-être pas besoin d'être industrialisés pour le bien
du plus grand nombre. Je crois que
c'est un danger, dans la façon dont on aborde le débat présentement, de
morceler, de parler d'acceptabilité sociale.
Oui, c'est important, mais, au-delà de l'acceptabilité sociale de proximité, il
faudrait qu'on soit capable de réfléchir aussi en termes d'acceptabilité
sociale morale.
Le
Président (M. Lessard) : Donc, peut-être qu'on va céder la parole, M.
le ministre, à notre collègue de Bonaventure, qui a demandé la parole.
M.
Blanchet : …un
petit point là-dessus.
M. Roy : Bien, allez-y, M. le
ministre.
M.
Blanchet :
…je comprends l'objectif. Encore une fois, on est plus dans l'échéance que dans
le fait. Je vous rappelle le système
de plafonnement et échanges, qui est majeur en termes de réduction de gaz à
effet de serre, la politique d'électrification
des transports, dans laquelle on investit d'emblée quatre puis cinq fois déjà
ce qui a été annoncé pour l'exploration
pétrolière à Anticosti, le premier pacte qui a été complété, le deuxième pacte
qui est en branle, le programme de biométhanisation, qui produit, effectivement,
des biogaz, tel que vous le soulevez. Donc, vous voyez, il y a des gestes
extrêmement concrets et des investissements
infiniment plus importants qui sont faits dans le développement des énergies
alternatives par rapport à l'énergie
conventionnelle, je veux juste qu'on le reconnaisse. Mais, sur ce, je vais bien
laisser la parole à mon collègue de Bonaventure.
Le
Président (M. Lessard) : Parfait, M. le ministre. Donc, il reste
environ six minutes, donc, pour nos échanges. M. le député de Bonaventure.
M. Roy :
Merci, M. le Président. Salutations à tous mes collègues. Bonjour. On a
beaucoup parlé de la Gaspésie, hein?
Je suis député de la circonscription de Bonaventure, donc on est très
interpellés par tout ce qui se passe au niveau du pétrole, de l'eau,
etc.
Moi,
j'aimerais vous poser une question très simple : Comment évaluez-vous le
fait qu'il n'y aura pas d'autres forages
à Gaspé, entre autres, tant et aussi longtemps que l'étude hydrogéologique ne
sera pas déposée? Est-ce que vous considérez que ce genre d'étude a sa
place et est pertinente au niveau scientifique?
M. Bélisle
(André) : Oui, tout à fait.
C'est quelque chose qu'il faut faire. Par contre, il y a aussi des menaces,
si on veut, il faut… Bon. Et là je ne suis
pas… Je n'ai pas préparé une présentation par rapport à la Gaspésie, mais on
sait bien que, présentement, il y a
un débat pour la protection des sources d'eau potable. Et, pour nous, bien, ça,
c'est l'enjeu principal. On ne peut
pas prendre le risque avec l'eau des gens. Et, une fois qu'on a contaminé un
puits, c'est fait. Alors, pour nous,
encore là, c'est la prudence qui doit nous guider. Les études hydrogéologiques
sont importantes, mais il faut aussi
arrêter l'ensemble de la machine pour dire comment on procède et est-ce qu'on
le fait dans l'intérêt et avec l'appui des
gens. Parce que, si on permet des choses que les gens ne veulent pas, ah! bien
là, on a peut-être un problème aussi qu'on est en train de créer au
niveau sociologique, en plus des problèmes environnementaux.
M. Roy :
Mais vous reconnaissez qu'une étude hydrogéologique qui est faite à partir des
critères de scientificité les plus rigoureux peut quand même rassurer
une certaine partie de la population?
Mme Legendre (Sophie-Anne) : Bien, on peut le reconnaître, oui, mais on peut
aussi le remettre en contexte. C'est
une précaution élémentaire, c'est la base d'aller vérifier et de faire une
étude hydrogéologique. On parle beaucoup de données disponibles, de données scientifiques.
Il faut aussi, encore une fois, prendre du recul et se dire de quelle échelle
de temps est-ce qu'on dispose. Les profits à
court terme qu'on peut imaginer, c'est une chose. On peut calculer l'impact
de l'industrie du gaz de schiste et de la
fracturation hydraulique en général sur une échelle de temps relativement
restreinte. Je suis plus vieille que
l'industrie schisteuse dans le schiste et dans le pétrole, on n'a pas le recul
nécessaire pour voir dans 20 ans, dans 30 ans, dans 50 ans. Ce qu'on
peut voir présentement comme contamination des sols et de l'eau, c'est peut-être simplement un aperçu. On sait notamment
qu'aux États-Unis il y a des problèmes graves de radioactivité des déchets de forage. La demi-vie des produits
radioactifs, là, qui sont trouvés dans les eaux et dans les déchets de forage,
c'est de 600 ans. On ne dispose pas du temps
nécessaire pour avoir une vraie image. Et, encore une fois, au-delà de la
volonté d'obtenir des hydrocarbures fossiles, il faut se poser la
question : Dans l'ensemble, pourquoi? À l'avantage de qui veut-on
faire ça?
M. Roy :
Merci.
Le
Président (M. Lessard) : C'est encore à vous. Donc, est-ce que… Oui,
le député de Repentigny a demandé la parole. Il vous reste deux minutes.
• (11 h 30) •
M.
McKay : Deux minutes. Bien, moi, je pense, je vais surtout
en profiter, justement, pour féliciter l'AQLPA d'avoir, effectivement, levé le drapeau concernant les gaz de schiste.
Je me souviens très bien du moment que vous avez évoqué avec Line Beauchamp, qui était ministre à l'époque, et j'avais
été… En tout cas, j'ai été fortement impressionné cette journée-là par le fait qu'effectivement des
centaines de permis avaient été émis, et la ministre de l'Environnement
admettait candidement qu'elle ne disposait pas des connaissances requises.
Alors, effectivement, vous avez sonné la sonnette
d'alarme, et, par la suite, on a vu une mobilisation citoyenne assez
extraordinaire dans la vallée du Saint-Laurent, et donc c'est,
effectivement, le territoire qui fait l'objet du présent projet de loi.
Rapidement,
je veux juste souligner le fait qu'à votre point 1.4, dans votre mémoire, vous
parlez de l'importance de protéger la
loi n° 37 contre les attaques devant les instances commerciales
internationales. Alors, on n'aura peut-être pas le temps d'en parler beaucoup, mais peut-être que les autres membres
de la commission pourront revenir là-dessus. Mais soyez assurés qu'on va
y porter une attention particulière.
Le Président (M.
Lessard) : Oui.
M. Bélisle (André) : M. le Président, il y avait aussi le point que… Mais là, avec l'annonce
de M. le ministre pour le BAPE, bien,
ça a changé un peu le contexte. Mais, nous, une autre chose qui nous
inquiétait, c'est que le quasi-moratoire dont on parle vient à échéance le 13 juin prochain. Alors là, il ne faut
pas que, le 14 juin, tout d'un coup, on revoie, là, le raz-de-marée
d'industries qui se lancent un peu partout parce qu'il n'y a plus d'arrêt…
Le
Président (M. Lessard) : …imparti est terminé. Donc, on doit passer,
donc, au groupe formant l'opposition officielle. Donc, la parole sera
donc au porte-parole de l'opposition officielle pour une période de 15 min
12 s.
M.
Sklavounos : Merci, M. le Président. Alors, bonjour, M.
Bélisle, Mme Legendre. Merci d'être là. Merci pour votre travail, vos
observations.
L'étude
environnementale stratégique est tombée hier soir. Il y a un communiqué de
presse émis à 17 h 48. J'attendais…
Parce que j'étais devant mon écran et je rafraîchissais tout le temps pour
savoir. Parce que j'étais convaincu qu'on
allait sortir ça juste avant, on ne pouvait pas le sortir après. Mais j'avoue
que c'était quand même dernière minute.
J'imagine que vous
avez, comme les autres… Les autres intervenants juste avant vous sont venus
nous dire candidement : Le mémoire a
été écrit avant, on n'a pas vraiment eu le temps de le lire. Même si on avait
eu le temps de lire des bouts, on n'a
pas eu le temps de consulter. C'est très difficile, ce qu'on demande, parce
que, là, il faut aller aux experts, etc.
À la fin du grand document — parce qu'il y en a un petit puis un plus
grand, là, un qui est plus résumé puis l'autre est plus grand — il y a des annexes et il y a des lettres à l'intérieur, des
lettres des ministres. Et il y a une lettre datée du 25 avril 2012, elle est signée par Pierre Arcand.
Et le paragraphe du milieu, je vais vous lire ce qui est noté : «Les
annonces récentes de certaines
entreprises d'exploration pétrolière, comme Pétrolia et Corridor Ressources,
concernant le développement du potentiel
pétrolier en Gaspésie et à l'île d'Anticosti soulèvent de vives inquiétudes
dans les communautés d'accueil et
dans la population en général. » Ça, c'est Pierre Arcand, c'est un libéral, là,
tu sais, juste… «Je souhaite m'assurer que cet enjeu soit abordé dans le
cadre de l'évaluation environnementale stratégique, puisque votre mandat
stipule que le comité "...pourra aussi
traiter — et ça,
c'est une autre... entre guillemets, là — de toute autre question pertinente relative
à l'exploration et à l'exploitation des
ressources pétrolières et gazières, de même que [...] leurs
répercussions".» Ça, c'est une lettre de Pierre Arcand, libéral,
25 avril 2012.
Il
y a une autre…
Le
Président (M. Lessard) : Oui? Question de…
M.
McKay : Oui.
Le
Président (M. Lessard) : Il y a une question qui est soulevée, si vous
voulez...
M.
McKay : Vous savez bien qu'on ne peut pas nommer les
membres...
Le Président (M. Lessard) : Oui,
effectivement. Donc, j'avais laissé passer une première fois, mais je pense
qu'on doit suivre le règlement, qui est : On interpelle, donc, un député
par son comté. Merci. Alors, poursuivons.
M.
Sklavounos :
Effectivement, je devrais mieux savoir. Le député de Mont-Royal, qui avait, à
ce moment-là, à titre de ministre, envoyé cette lettre. Il y en a une
autre le 14 février, et c'est le ministre actuel qui la signe, celle-là. Avant-dernier paragraphe, avant le «veuillez
recevoir, M. le Président, mes salutations distinguées», une autre citation :
«Il m'apparaît de plus important dans le
contexte actuel des choix du gouvernement de vous spécifier que la filière
pétrole n'est donc pas visée par l'EES en cours.» Signé : le
ministre actuel.
Pourquoi
je vous mets devant ces deux lettres-là? Parce qu'à quelque part on peut se
parler, on se pose des questions, on veut
tous se proclamer des disciples de la science et dire : On va laisser
procéder la science, on va faire ce qu'on
peut faire avec la science. Quand qu'on ne le sait pas, on ne fera pas… Quand
qu'on sait, on va avancer, puis on va avancer
aussi doucement que la science nous dit que c'est possible de le faire sans
empoisonner le monde, sans empoisonner l'eau, etc.
Il me semble, là,
que, malgré le fait qu'on l'a reçue à la dernière minute, si on avait laissé
aller l'étude environnementale stratégique
comme elle avait été stipulée dans cette lettre-là du député de Mont-Royal, qui
était alors ministre, on aurait
aujourd'hui certaines réponses qui auraient pu servir à se positionner dans un
autre dossier qui est, pour le moins,
un petit peu... qui a l'air un petit peu contradictoire. M. Bélisle, vous
nous avez parlé, possiblement, de manquer la souplesse, là, nécessaire pour voir la cohérence là-dedans, dans le
morcellement, ce sont d'autres termes qui ont été utilisés, et, je dois
vous dire, j'ai trouvé ce matin que cette manchette était absolument injuste,
Pascal...
Le Président (M.
Lessard) : ...s'il vous plaît, sans...
M.
Sklavounos : Ah! je n'ai pas le droit de faire ça. Le député
de Matane-Matapédia fait volte-face… Parce qu'elle disait qu'un député… alors que ce n'est pas juste
un député, là, c'est une question de toute une formation politique, tout un
gouvernement, en quelque sorte. On est les
libéraux, là, je... On a toujours dit… Et je vous regarde, je vous dis ça bien
franchement : On est les libéraux. On a
dit qu'on allait faire les choses… Le BAPE nous a dit : Écoutez, on va
aller chercher d'autres
connaissances. On a mandaté l'étude environnementale stratégique, mais,
lorsqu'on a mandaté l'étude environnementale stratégique, on avait la fracturation couverte, M. Bélisle, des
deux bords, pétrole, gaz. C'est dans la lettre, là, je vous l'ai lue, là. Et, lorsque le PQ a pris le pouvoir, là, on a
exclu le pétrole. Là, aujourd'hui, on se retrouve devant des choses qui sont un
petit peu contradictoires, puis il manque possiblement la science pour pouvoir
nous aider à faire ce débat qui fait rage actuellement. J'aimerais vous
entendre là-dessus, M. Bélisle.
M. Bélisle (André) : Bien, écoutez, je pense que ça va être... Bien, il y avait bien des
choses dans ce que vous avez dit, je
pense que ça va être relativement court. Nous, ce qu'on demande, c'est qu'il y
ait un encadrement autour de l'ensemble
de la fracturation hydraulique, pétrole et gaz. Et on sait que, sur l'île d'Anticosti,
il y a déjà eu de la fracturation et il
y a des problèmes, le puits Chaloupe, par exemple, qui fuit. Alors, ça, c'est
là où on dit : Avant de permettre la fracturation, il faut
définir comment ça marche, il faut l'encadrer de façon très, très prudente. Et,
comme ce sont les mêmes procédés pour le gaz et le pétrole, bien, on pense
qu'on a avantage à le faire immédiatement au départ, et, ensuite, on verra
comment on fait.
Maintenant,
je vais aussi vous dire, nous... J'ai peut-être les traits tirés ce matin, là,
puis notre avocat aussi, parce qu'on s'est tapé une analyse assez rapide du
rapport synthèse et des 60 quelques études qui nous mettent en garde
contre la fracturation hydraulique
parce qu'il y a beaucoup de problèmes qu'on n'a pas encore bien identifiés et
pour lesquels on n'a pas le contrôle.
Alors, raison de plus d'avoir un encadrement global, fracturation hydraulique
au complet, pétrole et gaz.
Le Président (M.
Lessard) : M. le député, oui.
M.
Sklavounos :
Merci, M. le Président. M. Bélisle, est-ce que vous êtes rassuré, là, du
fait qu'à l'intérieur de l'étude
environnementale stratégique on parle du contexte économique et qu'on semble
dire assez clairement qu'au niveau de la rentabilité de faire
l'exploration ou l'exploitation, là, on risque de manquer, là — pour
même ceux qui veulent aller plus vite ou qui veulent avancer — on
risque de manquer d'arguments économiques?
Les
arguments financiers et économiques sont généralement ceux qui semblent
influencer le plus les investisseurs et
ceux qui seraient tentés par l'aventure, à moins qu'on serait dans un autre cas
où le gouvernement subventionnerait le risque,
là, et prendrait une police contre le risque, là, en le mettant sur le dos des
contribuables. Mais est-ce que ça vous rassure
un petit peu de voir que ce n'est simplement pas rentable en ce moment de
procéder avec le gaz de schiste? Le gaz.
• (11 h 40) •
Mme Legendre (Sophie-Anne) : Bien, «rassurer», c'est un mot un peu fort.
C'est-à-dire que c'est sans surprise, notamment
à cause des cours actuels. On sait que ce n'est pas rentable présentement à
cause de tout ce que ça implique, mais
c'est une portion de l'argument seulement qui joue en la faveur de ceux qui
prônent la prudence et la précaution. Donc,
oui, bien sûr, on peut être ravis de cette analyse-là qui dit : Ce n'est
pas rentable. L'expérience des États-Unis nous le montre aussi, là, c'est une bulle qui, à certains endroits, commence
à montrer des signes de défaillance, mais je ne pense pas que c'est… en tout cas, pour moi ni pour
l'AQLPA... Ce qui nous intéresse le plus, ce n'est pas tant la rentabilité de
cette entreprise-là que les impacts à court,
moyen et long terme. C'est ce qu'on a beaucoup de difficultés à calculer, les
impacts à long et à très long terme. Ce
n'est pas seulement pour nous qu'on doit considérer les impacts, c'est pour nos
enfants et leurs petits-enfants, et il faut absolument garder ça en tête.
M. Bélisle (André) : Et peut-être, si
vous me permettez...
Le Président (M.
Lessard) : M. Bélisle.
M. Bélisle
(André) : ...un complément de
réponse, il faut faire bien attention parce que, là, il y a des signaux qui
démontrent que le prix du gaz a tendance à
vouloir remonter aux États-Unis. Eh bien, là, le Québec a investi — et ça a commencé sous le gouvernement libéral, et heureusement ça a été
poursuivi sous le gouvernement du Parti québécois — on a
investi des montants très importants dans la biométhanisation. Bien, ce qu'on
veut, dans le gaz de schiste comme dans le gaz naturel, c'est le méthane. Bien, le biométhane, c'est un gaz
naturel 100 % renouvelable qui permet de réduire les gaz à effet de serre et qui a la même valeur.
Alors, ça, pour nous, là, ce qui est important, c'est que le Québec renoue avec
ses vraies origines. Au Québec, là, on aime
les énergies vertes, renouvelables et sans impact ou de moindre impact sur
l'environnement. Bien, c'est ça qu'il faut développer.
Le Président (M. Lessard) : M. le
porte-parole.
M.
Sklavounos :
Juste clarifier, la position du PLQ a toujours été en faveur du moratoire de
facto, si vous voulez. La seule chose
qu'on a refusé de dire, c'est un moratoire qui ne pourrait jamais bouger, qui
ne pourrait jamais changer et évoluer
avec la science. Alors, le moratoire de facto était en place en attendant la
science. La question que je vous pose, c'est
que — et il
faut que ce soit clarifié — dans le cas du BAPE, on parle du BAPE, là, sur Anticosti, là,
mais, à part d'un BAPE après
l'exploration, est-ce que c'est assez clair dans votre esprit, là,
qu'évidemment l'exploration au niveau d'Anticosti inclut de la
fracturation hydraulique? Donc, il y aura de la fracturation hydraulique à
Anticosti avant le BAPE, alors qu'ici on
parle de faire un BAPE. Je veux dire, c'est toute une contradiction, quand
même. Moi, quand on parle de
cohérence, là, ce n'est pas une question de la position, là, pour le
développement de nos ressources ou non, là, je parle d'essayer de comprendre la boîte à surprise, là, parce qu'on
avoue... vous le dites, ça prend beaucoup de flexibilité pour voir la
cohérence là-dedans. Au niveau du BAPE, là, Anticosti, qu'est-ce que vous avez
à dire là-dessus?
Mme
Legendre (Sophie-Anne) : Bien, il
ne faut pas de faire de procès d'intention. Moi, vraiment, mon idée ici, ce
n'est pas de faire de procès d'intention, mais je suis d'accord avec vous que,
s'il y a de l'exploration, il y a des dangers. Et puis de tenir le BAPE après avoir fracturé, c'est une idée qui tient
drôlement la route. Donc, bien sûr, c'est pourquoi on fait la recommandation suivante, que le
moratoire s'applique également à la fracturation pour le pétrole de schiste,
sur les phases d'exploration et d'exploitation. Donc, en ce sens, oui, il y a
une grosse lacune à Anticosti.
M.
Sklavounos :
Est-ce que vous auriez aimé voir l'étude environnementale stratégique porter
sur la question du pétrole de schiste également? Parce que vous, vous
avez mentionné, M. Bélisle, que nous attendons encore le plan d'action du gouvernement au niveau des gaz à effet
de serre, là. Si je comprends bien, là, des deux procédés, là, pétrole
et gaz, là, il me semble que le pétrole
contribuerait plus au niveau des gaz à effet de serre. Je ne le sais pas, je
veux votre analyse là-dedans parce
qu'on semble aller vite sur le pétrole, on semble mettre les freins sur le gaz.
Quelqu'un a dit que les chevreuils
n'ont pas le droit de vote à Anticosti. Je ne sais pas, c'est une expression
que je ne vais pas reprendre, là, mais, au niveau des gaz à effet de
serre, là, votre analyse, là, malgré le fait qu'on n'a pas de plan d'action…
M. Bélisle
(André) : Bien, écoutez, là, il
faut se projeter dans le temps et dans quelque chose que nous, on ne veut pas voir, mais admettons qu'on décidait
qu'Anticosti devienne comme le Dakota. Bien, le Dakota, c'est un État que,
si vous étiez avec moi assis sur la lune,
bien, vous n'auriez pas vu. Et aujourd'hui, si on va s'asseoir sur la lune, le
Dakota est illuminé avec les dizaines
de milliers de torchères qui brûlent jour et nuit du gaz et qui polluent de
façon très importante. Alors, est-ce
que c'est ça qu'on veut voir à Anticosti? Certainement pas dans le cas de
l'AQLPA. Et les conséquences de ça,
bien, c'est clair que c'est en termes de gaz à effet de serre, mais c'est aussi
tous les gaz qui polluent l'air, qui sont à l'origine des pluies acides, de toutes les problématiques
atmosphériques. Alors, bien, c'est ça qu'on veut éviter. Et, pour nous,
c'est pour ça qu'on dit : On devrait, de façon très prudente, aborder
cette question-là, s'assurer qu'on a des plans.
Et là je reprends les paroles de M. le ministre,
bien, tant mieux, là, on voit que le gouvernement a donné des orientations pour
un plan d'action, mais il faut que ça soit très clair, qu'on ait un plan
d'action défini et qu'on puisse vraiment le
suivre. Parce que ça, ça a été le problème, hein? Nous, on a demandé, à un
moment donné, une évaluation du plan
d'action sur les changements climatiques parce qu'on en entendait parler, et
même on nous disait que Kyoto, c'était beau,
que tout était réglé. Bien, ce n'était pas le cas, hein, le Vérificateur
général a donné raison à l'AQLPA, il n'y avait rien de fait. Bien, on
veut éviter ça.
Le Président (M. Lessard) : Il vous
reste donc peut-être une minute. Oui, on a le député de Mégantic.
M.
Bolduc
(Mégantic) : Merci, M. le Président. Une question
rapidement. Le ministre nous a mentionné tout à l'heure qu'on parlait de 0,43 kilomètre carré sur 8 000 kilomètres
carrés, mais que les employés du gouvernement seraient là, impliqués comme promoteurs. Est-ce que le fait
que le gouvernement soit promoteur, qu'il soit impliqué puis qu'il soit
juge et partie en même temps… est-ce que ça vous rassure, ça?
M. Bélisle
(André) : Bien, oui, d'une
manière parce qu'avant ça on a vu l'invasion, que je qualifierais d'invasion
barbare, des entreprises, qui ont décidé de
faire n'importe quoi, n'importe comment, n'importe où. Et là, bien, avec le
gouvernement, il y aura probablement une
petite gêne. Mais la cohérence, là, nous oblige à encadrer d'abord et à
procéder ensuite.
M.
Bolduc
(Mégantic) :
Encadrer d'abord, procéder ensuite. Est-ce qu'il me reste du temps, M. le
Président?
Le Président (M.
Lessard) : Oui. Il reste… Bon, c'est moins d'une minute.
M.
Bolduc
(Mégantic) : Est-ce que vous êtes d'accord
avec le fait qu'on veut prioriser le développement du pétrole dans un contexte où le gaz naturel est 30 %
moins polluant que le gaz naturel ou... qui provient de la biométhanisation?
Puis vous nous avez parlé un petit peu de ce contexte-là, pouvez-vous élaborer
là-dessus?
M. Bélisle (André) : Bien, écoutez, pour nous, le gaz qu'on peut produire à partir de la
matière organique, qui est le
biométhane, c'est la voie à emprunter. On l'a dit dès le début du dossier des
gaz de schiste, et maintenant même Gaz Métro le reconnaît.
Le
Président (M. Lessard) : Malheureusement, je vais devoir vous couper
là-dessus, j'ai le mauvais rôle. Donc, on
va passer maintenant au deuxième groupe de l'opposition. Donc, je cède donc la
parole au député de Nicolet-Bécancour pour 3 min 48 s.
M.
Martel : Merci, M. le Président. Bonjour à vous deux. Moi,
j'aimerais ça avoir, très franchement, votre position par rapport à une expérience pilote. Nous, on
s'est positionnés favorables à ça. Pour en avoir discuté avec le ministre, il
avait l'air à être favorable aussi, le Parti
libéral. L'industrie était d'accord à faire, pendant le moratoire, des
expériences pilotes dans des endroits
sécurisés où il y a un potentiel, quand même. On ne peut pas aller faire des
expériences pilotes où est-ce qu'il
n'y a pas de gaz de schiste. Moi, très franchement, j'aimerais ça, connaître
votre position par rapport à une expérience pilote.
M. Bélisle (André) : Bien, si vous me permettez, M. le Président, il y a une réponse
peut-être bien simple à ça, puis elle
vient de l'industrie elle-même, c'est M. Binnion qui disait : On n'a même
pas besoin de faire d'expériences, il y a tellement de puits qui ont été forés partout aux États-Unis et dans
l'Ouest canadien qu'on sait comment ça marche. O.K.? Bon, bien, maintenant, on doit encadrer parce
qu'on a vu partout... Et ça, on nous présente toujours l'aspect, bon, il y
a de l'argent qui se fait, mais on
parle très peu des problèmes environnementaux qui ont été causés. Eh bien,
l'idée d'apprendre ou d'acquérir des
connaissances, si c'est mal encadré, va donner les mêmes résultats qu'on a vus
ailleurs. Alors, pour nous… Et là je
reprends le… de M. Binnion, là, qui nous disait qu'au fond on a les
connaissances, ce qu'il faut, c'est… Bien là, ce n'est pas M. Binnion. Lui, il disait qu'ils avaient les connaissances,
l'industrie. Mais, nous, ce qu'on dit, c'est l'encadrement, là, qui va
faire foi de tout là-dedans, là.
Mais, bon, en même
temps, comme je disais tantôt, pour nous, à l'AQLPA, on est contre la
production de pétrole et de gaz si ça nous
amène à ne pas respecter nos engagements de réduction de gaz à effet de serre
par rapport au réchauffement
planétaire. Mais il y a aussi les autres gaz qui causent d'autres problèmes
comme les pluies acides, dont on parle peu, mais qui sont en train de
revenir nous hanter.
M.
Bolduc
(Mégantic) : Je ne suis pas sûr si j'ai bien
compris votre réponse. Je vais vous donner la parole, mais est-ce que
vous êtes d'accord ou pas d'accord à ce qu'il y ait une expérience pilote?
Mme Legendre
(Sophie-Anne) : Pas d'accord. Avec plus de 45 000 puits aux
États-Unis, je pense qu'il y a suffisamment de puits pour aller faire des
études. Ceci dit, j'aimerais attirer votre attention sur le fait que, si on
veut faire des études exploratoires, ce
serait comment régler les problèmes de fuite, qu'on devrait s'attarder à
régler. Ça, ce serait une bonne étude
à faire. Sur les 31 puits forés au Québec, 19 puits fuyaient aux dernières nouvelles.
Il faudrait aller vérifier à la
source est-ce que ces puits-là fuient encore. Je crois que, s'il y a une
expertise d'avenir à développer, de leader, ça va être d'être capable de vraiment colmater les fuites qui vont
continuer de se produire aux alentours des puits pour les années à venir si on en croit l'expérience
précédente. Donc, il n'y a rien qui justifie l'exploration présentement,
puisque la littérature et l'expérience étrangères sont bien assez
développées pour qu'on puisse se faire une tête.
Et
je reviendrais aux questions précédentes. Je reviens là-dessus, le pétrole de
schiste versus le gaz de schiste. On
parle de fracturation hydraulique, et c'est de ça dont on devrait parler, pas
de ce qu'on va tirer, parce qu'on va tirer du gaz, du pétrole, de la houille, plein d'autres produits qui vont sortir
de ces trous-là qu'on creuse. Donc, on devrait parler de fracturation,
hydraulique et autre, même, parce qu'on s'aperçoit…
• (11 h 50) •
Le Président (M.
Lessard) : Il vous reste à peu près 30 secondes.
M.
Martel : Oui, c'est ça, c'est parce que, là, ça
m'intéressait, vous répondez à la question de mon collègue, mais vous ne trouvez pas ça curieux que le ministre
impose un moratoire par rapport à l'exploration des gaz de schiste dans les
basses-plaines du Saint-Laurent, mais pas au
niveau d'Anticosti... qu'il impose... pas un moratoire, qu'il demande au BAPE,
je veux dire?
Mme Legendre (Sophie-Anne) : Bien, comme je vous disais, je préfère ne pas
faire de procès d'intention, mais je vous
dirais simplement que le titre de notre mémoire en dit long, c'est Le projet
de loi n° 37 : en augmenter la portée pour plus de
cohérence.
Le Président (M.
Lessard) : ...le temps est donc passé. Donc, je vais donc…
La commission
suspend donc ses travaux jusqu'après les affaires courantes. Alors, merci de
votre présentation, puis on…
(Suspension de la séance à 11 h 51)
(Reprise à 15 h 45)
Le
Président (M. Lessard) : Alors, merci, donc. À l'ordre, donc, s'il
vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des transports et de l'environnement
ouverte. Je demande aussi à toutes les personnes dans la salle de bien
vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
Je vous
rappelle que la commission est réunie afin de poursuivre les auditions
publiques dans le cadre des consultations
particulières sur le projet de loi n° 37, Loi interdisant certaines
activités destinées à rechercher ou à exploiter du gaz naturel dans le
schiste.
Alors, je
tiens à rappeler au groupe qui va se présenter et pour tous les membres de la
commission, donc pour nos invités d'aujourd'hui, dont on va demander par
la suite de se nommer, mais... donc, les échanges, c'est 10 minutes de présentation. Après ça, il y a 35 minutes
d'échange : 16 minutes est donné au gouvernement,
15 min 12 s à l'opposition officielle et 3 min 48 s
à la deuxième opposition.
Alors donc,
on s'est entendus, je pense, de consentement, de terminer à 18 heures. Et
là on est en train de recalculer quels
seront les temps de parole attribués à chacun et on va s'ajuster sur le nombre
de personnes à être présentées. Alors donc,
on va débuter sans plus tarder à la MRC de Nicolet-Yamaska, qui vient nous
visiter cet après-midi. Si vous voulez vous
présenter pour les fins d'enregistrement de nos audiences. Par la suite, on
pourra distribuer, donc, le temps de parole, après votre présentation de
10 minutes. Bonjour.
Municipalité régionale
de comté de
Nicolet-Yamaska (MRC de Nicolet-Yamaska)
M.
Drouin (Alain) : Merci, M. le
Président. Merci, M. Lessard, de nous accueillir à cette commission
parlementaire. Vous me permettez
de... Mon nom, c'est Alain Drouin. Je suis maire de la ville de Nicolet, préfet
de la MRC Nicolet-Yamaska. Je suis
accompagné du directeur général de la MRC Nicolet-Yamaska, M. Jean-François
Albert. Vous me permettez de saluer
le ministre de l'Environnement, M. Blanchet. Vous me permettez aussi de saluer
M. Martel, qui n'était pas loin tantôt. Il s'est effacé, il va revenir,
j'imagine. Alors, mon député, il faudrait l'identifier comme ça.
Alors,
normalement, on devait vous donner un petit peu de temps. On ne sera pas très
longs dans notre présentation. Le portrait, peut-être qu'on pourra
préciser, là, qui on est. La MRC de Nicolet-Yamaska est un organisme dont le mandat principal est de voir à l'aménagement du
territoire, comme toutes les MRC du Québec. La MRC se caractérise par un milieu rural à 98 % de son territoire. Et
98 %, donc, de son territoire est situé dans une zone agricole, et chose
que nous ignorions précédemment, le sous-sol de la MRC est notamment
composé de schiste.
La MRC compte
sur son territoire 16 municipalités et une communauté autochtone. Elle s'étend
sur une vaste plaine bordée par le
fleuve Saint-Laurent et est découpée par les rivières Saint-François, Nicolet
et Bécancour. L'UNESCO a reconnu la
réserve de la biosphère du lac Saint-Pierre, qui représente une portion
significative de son territoire. Il s'agit donc d'un territoire à vocation agricole avec un fort potentiel
récréatif en bordure du fleuve Saint-Laurent, et dont le chef-lieu est
la ville de Nicolet.
Le contexte de la MRC de Nicolet-Yamaska versus
le gaz de schiste. Dès que la MRC a été mise au courant d'activités de forage sur son territoire, elle s'est intéressée à la
question du gaz de schiste. C'était en avril 2009. Aujourd'hui, donc a posteriori, je pense qu'on peut dire que la
MRC aura été un leader dans son milieu et même, à une plus grande échelle,
concernant le débat qu'a connu le Québec au sujet du gaz de schiste dans les
dernières années. C'est depuis ce moment
un sujet d'intérêt pour la MRC, qui suit de près tout développement dans ce
dossier, et notre présence ici n'est pas
étrangère à notre intérêt toujours vivant de participer à cette grande
réflexion sur l'avenir de la filière gazière au Québec.
On comprendra
que, dans le débat sur le gaz de schiste puis sur le développement de
l'industrie pétrolière ou des hydrocarbures,
les municipalités, les MRC ont été et seront encore les premières interpellées,
les premières institutions, en tout
cas celles qu'on décrit toujours comme étant les plus proches des citoyens,
vont être encore... ça sera encore ça dans l'avenir. Et, lorsqu'il sera
question de développement de l'industrie gazière ou pétrolière, eh bien c'est
sûr que ça va atterrir dans nos cours. Et,
si on se fie à l'expérience passée dans nos cours, c'est atterri avec assez
d'agressivité puis de façon assez
violente. On a vécu de façon assez particulière le développement, là, de la
filière du gaz de schiste, de façon encore
un petit peu plus pointue. Alors, on souhaite que, dans les décisions qui
seront prises dans le développement de l'industrie,
bien, qu'on tienne en compte qu'il y a des gens sur le territoire qui vivent ça
de proche puis qui ne sont pas menacés, mais qui sont interpellés, et de
façon agressive.
• (15 h 50) •
Trois puits
d'exploration ont, à ce jour, été forés sur le territoire de la MRC. Mis à part
les craintes soulevées par la
population, nous n'avons pas été témoins de problèmes particuliers vécus par
les citoyens du territoire, là, durant la période de test ni depuis ce jour. On n'a pas vécu de problèmes. En ce
qui concerne les craintes manifestées par la population, nous avons reçu une forte délégation citoyenne lors d'un
conseil des maires, et le conseil des maires a maintenu sa position, qui était à l'époque — je vais la résumer, là — la suivante. Donc, dans le contexte
actuel — puis je
pense que c'est
encore vrai — n'ayant
pas en main toutes les informations pertinentes pour prendre une décision
éclairée, le conseil des maires est
contre la poursuite des activités de forage. Cette position sera révisée à la
lumière du rapport du comité
responsable de l'étude environnementale stratégique qui vient juste d'être
publiée. C'est un engagement que nous avons pris comme conseil des
maires devant la population de la MRC Nicolet-Yamaska.
En 2009, nous avons formé un comité ad hoc avec
cinq autres municipalités régionales de comté, et on s'était donné comme mandat d'approfondir nos connaissances
sur la question de l'exploitation, là, afin de protéger efficacement les intérêts de nos populations respectives. Nos
objectifs, notre compétence et notre prise de parole se sont faits au nom
des citoyens, jamais de façon scientifique.
On n'avait pas les connaissances, nous, on était là pour représenter la
population, défendre ce qu'on croyait
les intérêts de la population. Donc, ce comité ad hoc, on l'a formé en
souhaitant, justement, pouvoir
regrouper nos forces avec cinq territoires de MRC et on a laissé tomber... Bon,
on se rappellera qu'il y a eu la création
du comité de liaison, qui a un petit peu adouci les affaires dans cette
époque-là, et on s'est rendu compte aussi que, finalement, ça nous prendrait de l'argent pour avoir les
compétences pour développer, justement, les connaissances sur l'exploitation des gaz de schiste, et on a dû
abandonner pour ces deux raisons-là : le manque de soutien financier et le
manque de ressources, et la création du comité de liaison.
La MRC, par
contre, a pris position à plusieurs reprises dans le dossier, et notamment par
l'intermédiaire d'un mémoire qui a
été déposé ici dans le cadre d'une consultation précédente, justement, là,
relativement à la Loi sur les mines, le
projet de loi n° 79. Et nous pensons que notre position est toujours
pertinente, mais elle sera particulièrement utile lorsque viendra le
temps d'influencer la rédaction de la future loi sur les hydrocarbures.
La position
de la MRC versus le projet de loi n° 37 de façon particulière. Alors, la
MRC se réjouit du moratoire prévu au
projet de loi, malgré que la MRC a toujours évité de faire la promotion d'un
moratoire. On s'en réjouit, même si on n'en a jamais fait la promotion.
Pour nous, le plus important, c'est surtout que les études environnementales stratégiques concernant le gaz de schiste
permettent à l'État et à l'ensemble de la population de faire les bons choix.
Le moratoire ne doit pas être une
rupture dans le processus. C'est une étape, tout simplement, qui devra mener à
une position gouvernementale claire,
définitive, qu'elle soit favorable ou non au développement de la filière. Donc,
le moratoire, c'est une étape dans le processus.
Nous avions
fait écho, dans notre mémoire déposé dans le contexte de la révision de la Loi
sur les mines, que nous estimions
être très mal préparés à la venue de l'industrie gazière. Il faut que cette
période de moratoire permette précisément de nous donner des moyens raisonnables et efficaces pour bien encadrer
l'industrie si la population du Québec, à la lecture des résultats des études en cours, compte,
effectivement, développer ce potentiel. Donc, c'est une période de transition,
la période de moratoire.
Il y a eu des changements intéressants dans la
Loi sur les mines que nous recommandions, là, tels que la possibilité pour le monde municipal de fixer
certaines limites au développement de l'industrie à l'égard des autres usages
du territoire. Cela laisse espérer dans le
futur une meilleure prise en compte des intérêts locaux dans la réalisation des
projets d'exploitation des ressources naturelles. Je redis, la proximité du
monde municipal dans ces dossiers-là et la proximité
de l'exploitation aussi, hein, qui devra… De par sa nature même, l'exploitation
gazière devra se faire de façon intensive,
donc avec de nombreux puits. Ça ne pourra pas se faire n'importe comment, là,
c'est dans la nature même de l'industrie, on croit, là... Alors, ça va
venir perturber pas mal le territoire et l'habitat. Alors, il faudra s'assurer
que la population accepte.
Pour
l'instant, vous aurez donc compris que la MRC n'est ni pour ni contre le
développement du gaz de schiste. Nous avons pris l'engagement devant la
population de prendre une position quand nous aurons pris connaissance des conclusions de l'étude environnementale
stratégique qui est sortie hier. Encore une fois, là, l'imposition d'un
moratoire nous apparaît donc
raisonnable dans le contexte actuel, mais à la seule condition qu'il faudra
statuer une fois pour toutes au sujet de la pertinence ou non de
développer cette filière en sol québécois.
Le Président (M. Lessard) : …d'une
minute, M. le préfet.
M. Drouin
(Alain) : Merci. Il ne saurait
s'agir d'un moyen final. Il s'agit d'un moyen transitoire, et le délai de
cinq ans inscrit à la loi apparaît plus que
suffisant pour permettre à l'État de tracer une voie claire pour le
développement du gaz de schiste. À ce
sujet, vous pouvez compter sur la MRC Nicolet-Yamaska pour continuer de
contribuer au débat et à la
réflexion. Évidemment, on ne sera pas là comme des experts, on va continuer d'y
être à titre de représentants de la population. Nous espérons donc être
entendus lorsque viendra le temps d'étudier la future loi sur les
hydrocarbures. Merci de votre attention. On pourra répondre à vos questions.
Le
Président (M. Lessard) : Merci beaucoup, M. le préfet. Je pense que
vous avez bien fait étalage des expériences que vous avez vécues chez
vous, donc.
Juste avant
de passer la parole au gouvernement, donc, suite à une entente intervenue entre
les partis de terminer à 18 heures, le
temps de parole sera réparti comme suit. Donc, pour les groupes, le 10 minutes
va rester pour la présentation, et,
donc, il restera 23 minutes, donc, pour l'ensemble des partis à se
partager : 10 minutes au gouvernement, neuf minutes à l'opposition
officielle, et le 3 min 48 s qui est préservé, là, pour la deuxième opposition.
Alors, M. le ministre, sans plus tarder, je vous
laisse la parole.
M.
Blanchet : J'aime
toujours ça, faire sourire mon collègue de Nicolet-Bécancour.
Écoutez,
bien, d'abord, bien le bonjour, M. le maire, M. le directeur. Évidemment, on ne
fera pas comme si on ne se connaît
pas. C'est toujours un plaisir de vous voir et c'est... Je dirais que votre
présence et ce que vous venez de nous dire a quelque chose d'emblématique, et je vous
explique pourquoi. D'abord, Nicolet-Yamaska, on est dedans, là, on est dans la zone dans laquelle... tout près. Parce que
l'intensité de l'inquiétude, ça se situe un peu plus Bécancour que Nicolet.
Mais grandes inquiétudes, si on déborde un peu
vers Drummond, on arrive Saint-Bonaventure. Donc là, on est dans le
très, très emblématique, vous êtes dedans.
Or, ce que
vous dites aujourd'hui… Vous n'amalgamez pas ce débat avec d'autres, vous ne
dites pas : On tranche sur le
fond. Vous ne dites pas : On présume de ce que doit être la fin des
discussions. Vous ne dites pas : On sait ce que la science va dire avant que la science le dise. Vous
dites : Écoutez, on ne le sait pas trop. Puis même vous faites état d'un
historique où ça a brassé un peu d'un côté,
un peu de l'autre, et vous dites : Dans ce contexte, le gouvernement
choisit le bon outil en imposant un
moratoire. Alors, moi, je trouve ça particulièrement intéressant non pas par
récupération, mais parce que c'est ce
qu'on voulait. Fondamentalement, c'est ce qu'on voulait. Au-delà du débat de
fond qui va se faire, au-delà des analyses qui sont rendues publiques,
au-delà des consultations qui vont avoir lieu avec le BAPE, il était essentiel qu'effectivement on se donne cet outil de recul,
que d'autres voudront peut-être un peu démoniser, mais son intention n'a
jamais été dans cet esprit-là.
Quelques
questions qui vont nous éclairer parce que vous êtes plus proches des citoyens
qui le vivent qu'à peu près n'importe
qui parmi ceux qui vont venir ici, sauf peut-être d'autres MRC. Si ça avait été
fait autrement — parce
qu'on a tous décrit un peu la façon
cavalière dont ça s'est passé au début — si ça avait été fait autrement, si ça avait
été fait selon ce qu'on pourrait
considérer aujourd'hui comme les règles de l'art, si les approches auprès des
citoyens avaient été nuancées, si ça
avait été : Écoutez, c'est un processus scientifique, exploratoire au
début, et non pas comme… — ça nous a été écrit de
même, je ne sais pas si ça s'est passé de même — et non pas : J'ai le droit, j'y vais…
Vous savez, il y a eu… les citoyens ont
été très heurtés. Est-ce qu'on aurait un débat différent aujourd'hui si les
citoyens n'avaient pas eu ce sentiment d'être accessoires sur leurs
propres terres?
M. Drouin (Alain) : Les politiciens, en
général, à des situations hypothétiques, ils voient des questions hypothétiques et ne répondent pas, mais je vais
répondre parce que… Puis je vais répondre oui à votre question. Si ça avait été différent, le résultat… Si ça avait été présenté
différemment, le résultat aurait été différent, je suis convaincu. Il aurait été quoi, le résultat? Je ne le sais pas
parce que le différent, c'est tout ce qui n'a pas été fait. Puis tout ce qui
n'a pas été fait, bien, il y a des
affaires qui ont été mal faites, puis il y a des affaires qui ont peut-être été
bien faites. Donc, la réponse, c'est
sûr que c'est oui s'il y avait eu une différence, M. Blanchet. Mais je ne peux
pas aller plus loin que ça.
Il y a des choses qu'on aurait dû faire différemment,
puis particulièrement dans l'approche, particulièrement dans, je dirais, l'image qu'on laissait paraître des impacts de
l'exploitation gazière, hein? On laissait peut-être paraître qu'il n'y en avait pas, d'impacts
environnementaux, finalement, que ce n'était pas grave, qu'on s'inquiétait pour
rien. Alors, ça a juste fait en sorte que la population s'est inquiétée
encore plus, et ça a fait en sorte que la population s'est manifestée encore
plus, et s'est manifestée encore plus chez nous, dans nos cours.
• (16 heures) •
Le Président (M. Lessard) : M. le
ministre.
M.
Blanchet :
Oui. Est-ce que le moratoire... On sait qu'il a été beaucoup demandé, mais,
votre sentiment, est-ce que le moratoire va donner aux citoyens de la
MRC de Nicolet-Yamaska le sentiment de sécurité auquel ils aspirent?
M. Drouin
(Alain) : Pour le temps du
moratoire, assurément. Nous les premiers, comme élus, on s'est engagés
devant la population de la MRC de Nicolet-Yamaska à regarder les résultats du
moratoire, à regarder les résultats de l'évaluation
environnementale stratégique, on s'est engagés devant la population pour
continuer à défendre ces intérêts-là. Et
on vous dit aujourd'hui qu'on va le regarder et qu'on va vouloir être présents
lorsque la prochaine loi sur les hydrocarbures sera présentée. On va
vouloir être ici pour dire les préoccupations du monde municipal là-dedans.
Alors, durant le moratoire, M. le ministre,
oui, la population va... on pense, là, que ça va tempérer les inquiétudes.
Quant aux résultats, on n'en présumera pas plus maintenant qu'on en
présumait il y a 10 minutes, là.
Le Président (M. Lessard) : M. le
ministre.
M.
Blanchet :
Bien, les enjeux du débat, c'est la présence de populations et d'activité
économique, essentiellement l'agriculture,
qui soulèvent beaucoup d'inquiétudes. Vous faites état de trois puits par
fracturation, et ça n'a pas fait débat, ça n'a pas été problématique. Ma
question est la suivante...
M. Drouin (Alain) : ...ça n'a pas fait
débat...
M.
Blanchet : Ça n'a
pas fait problème, techniquement.
M. Drouin (Alain) : Il n'y a pas eu de
problèmes environnementaux connus, là, qui...
M.
Blanchet :
O.K. Si — et
j'imagine que vous avez eu des discussions avec des gens de l'industrie — la région était allée vers une
exploitation de la ressource, on n'aurait pas parlé de trois puits, on aurait
parlé — et
vous le savez probablement mieux que moi — d'un nombre beaucoup plus
significatif de puits sur le territoire. Est-ce que votre compréhension est que les citoyens auraient
considéré compatibles l'activité économique agricole et l'activité économique
gazière sur un même territoire?
M.
Drouin (Alain) : À ma
compréhension, non. À ma compréhension, là, non. Ça n'aurait pas été
compatible. À ma compréhension, non.
M.
Blanchet :
Nous avons revu le processus qui était en place parce que l'évaluation
environnementale stratégique était
déjà en place, mais avait un mandat de recommandation. Nous avons retiré le
mandat de recommandation pour le confier de nouveau au BAPE parce que le
BAPE ne fait pas que des recommandations, il fait aussi des consultations publiques. J'aimerais avoir votre commentaire, mon
opinion est à l'effet que… Si nous n'avions que pris la science, les recommandations et la mise en oeuvre — quel que soit le résultat, mais imaginons
une mise en oeuvre moins défavorable — est-ce que les citoyens auraient été satisfaits de ne pas être de nouveau
consultés, de ne pas avoir de nouveau l'occasion d'exprimer leurs
inquiétudes, leurs appréhensions ou leurs questions?
M. Drouin
(Alain) : Moi, je pense que les
citoyens vont toujours souhaiter être consultés. Les citoyens sont toujours
concernés par l'exploitation des ressources sur leur territoire. Alors, ils
vont toujours souhaiter être consultés parce qu'encore
une fois c'est dans leur cour que ça se passe. Et, quand on parle
d'exploitation minière, ou gazière, ou pétrolière, ça se passe dans leur cour, puis parce que ça se
passe chez eux... Bien, si ça se passait chez moi, je voudrais être consulté
puis j'imagine que, si ça se passait dans
votre cour, ça serait pareil, on souhaite... Oui, les citoyens vont souhaiter
être consultés et sont concernés par
l'exploitation des ressources naturelles. Particulièrement du gaz, mais de
l'ensemble du dossier des mines et pétrole, des hydrocarbures, ils sont
concernés par ça.
M.
Blanchet :
Moi, ma circonscription est tout près de votre secteur, que je connais très
bien. Et, d'ailleurs, c'est un
secteur qui, en termes environnementaux, est emblématique aussi. C'est riverain
du lac Saint-Pierre, réserve mondiale de
l'UNESCO. C'est un endroit qui, effectivement, a une valeur environnementale extraordinaire,
et vous avez quand même eu des
débats. Il n'y a pas eu un braquage immédiat, il y a eu des discussions. La MRC
a débattu, les maires ont débattu de
l'enjeu. Si je comprends bien — vous commenterez — à travers les débats que vous avez eus, vous
en êtes arrivés à la conclusion que,
puisqu'il n'y avait pas de consensus, le plus sage était que tout le monde
s'abstienne jusqu'à ce qu'une loi dispose de l'enjeu.
M. Drouin (Alain) : Cette conclusion-là,
on y est arrivés, mais ce n'est pas exclusivement lié au consensus scientifique
ou au consensus social. Cette conclusion-là, qu'il fallait attendre, c'était,
effectivement, en fonction des connaissances,
qu'on croit encore imparfaites, des expériences, qu'on croit encore
imparfaites. Elles le seront toujours, là,
mais il y a de la place pour bonifier ces connaissances-là, pour bonifier nos
expériences, pour bonifier nos méthodes de travail. On peut encore dire aujourd'hui au nom de la population,
hein, que, compte tenu des compétences, justement, l'exploitation, ce
n'est pas encore le moment, alors… Puis c'est encore vrai.
Le Président (M. Lessard) : M.
Albert.
M. Albert
(Jean-François) : Oui. Un
autre commentaire aussi à ce sujet-là. Même, je pense que c'est assez évident,
là, même si le gouvernement décide d'aller
de l'avant dans cette filière gazière là, même si les études sont plutôt
rassurantes, puis, bon, que le
contexte semble être bon pour développer ça, il est évident qu'il va avoir un
braquage d'une certaine partie de la population sur le développement de
la filière. Ça va demeurer un enjeu au niveau citoyen. Moi, je suis persuadé que, même avec le meilleur cadre, il
risque d'y avoir des citoyens mécontents qui viennent, par exemple, à la
MRC Nicolet-Yamaska, là.
Le Président (M. Lessard) : ...je
m'excuse de vous interrompre, mais ça termine la partie pour laquelle le gouvernement pose des questions. On va aller du
côté de l'opposition officielle maintenant. Vous avez donc neuf minutes
pour vous adresser, donc, à nos invités.
M.
Sklavounos :
Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de souhaiter la bienvenue à M.
Drouin, le préfet de Nicolet-Yamaska,
et M. Albert également. Je vais vous lire une citation qui a été d'une
déclaration faite par la ministre des
Ressources naturelles. Parce que j'ai entendu attentivement votre présentation,
M. Drouin, à l'effet que, pour vous, ce
qui est important, c'est de pouvoir
prendre une décision qui est éclairée, avoir l'information, et que vous, vous
ne sentiez pas… sans les moyens de pouvoir prendre une décision et recommander
quelque chose au public, là, il y avait trop d'interrogations, là.
Vous savez que l'étude environnementale
stratégique est sortie hier soir, 17 h 48, la veille du début de nos consultations. Je veux savoir, d'abord, si vous
avez eu l'occasion, premièrement, de la consulter et d'échanger, de consulter
vos experts et de faire le tour un petit
peu. Et j'avoue qu'en posant la question je sais que… Il y en a qui nous ont
dit qu'ils paraissaient un petit peu
cernés aujourd'hui parce qu'ils avaient passé une nuit blanche en essayant de
décortiquer le tout. Est-ce que,
vous, c'est votre cas? Est-ce que vous avez eu l'occasion, avant de venir ici
aujourd'hui et, en quelque sorte, faire
votre présentation… avez-vous eu l'occasion, vraiment, de regarder en
profondeur ce qui a apparu sur le site Internet, là, hier, à 6 heures,
le soir?
M. Drouin
(Alain) : Non, on n'a pas
consulté. On en a discuté, là. Personnellement, je ne l'ai pas consulté du tout.
M. Albert en a vaguement pris connaissance, là, des conclusions...
M. Albert (Jean-François) : Un
certain nombre…
M. Drouin (Alain) : Un certain nombre, mais on comprend que, je veux
dire, c'est un sommaire. Puis il y a 278 pages, je pense, alors… Mais on
n'a pas regardé ça de façon pointue.
• (16 h 10) •
M.
Sklavounos :
Ce n'est pas une question piège, là. En posant la question, je soupçonnais
quand même la réponse un petit peu, M.
Drouin. Vous savez, par le passé… Et nous aussi, on a été pris par surprise un
petit peu avec ce qu'on a entendu
dans les nouvelles jeudi parce que vous savez, vous n'êtes pas sans savoir, je
pense, que tout le Québec est au
courant qu'on... en utilisant un procédé similaire, la fracturation hydraulique,
on a une annonce pour Anticosti. Et, en quelque sorte, c'est le même procédé où on dit : On va explorer
d'abord et faire un BAPE après, alors que l'exploration elle-même
comporte la fracturation.
Ici,
on parle plutôt d'arrêter tout. Ou c'est déjà arrêté de facto, veux veux pas.
Il y avait par le passé une déclaration de la ministre des Ressources naturelles où elle avait déclaré, et je
cite : «Je ne vois pas le jour où des technologies permettront une exploitation sécuritaire.» Et ceci, elle le disait
en parlant des gaz de schiste. Je comprends que, vous, votre position est plutôt, au lieu de présumer qu'il n'y en aura
jamais, une façon technologique sécuritaire et appropriée pour traiter,
pour forer, vous préférez dire : Je veux pouvoir m'appuyer sur la science,
je veux pouvoir avoir cette information.
Alors,
la question que je vous pose, là, j'imagine, en quittant ou à un moment donné
dans le proche avenir, vous allez
consulter et essayer de prendre position en vertu de ce qui est dans l'étude environnementale
stratégique, qui est une synthèse de
plusieurs rapports. Sentez-vous à l'aise. À part le fait de dire :
Écoutez, en ce moment, économiquement, ce n'est pas rentable, le gaz, tout le monde semble d'accord là-dessus pour
le moment, et le fait qu'il y a un moratoire de facto, veux veux pas, il n'y a personne qui est en train de forer pour
du gaz,-est-ce que vous ne préférez pas, à un moment donné — et le BAPE, c'est quelque chose qui va
arriver plus tard — pouvoir
venir et vous positionner sur la question du moratoire, ayant eu le temps préalablement de pouvoir analyser,
étudier l'étude environnementale stratégique afin de pouvoir vous
positionner, sachant que, de facto, ce moratoire existe?
Le Président (M.
Lessard) : M. le préfet.
M. Drouin
(Alain) : Bien, d'abord, je vais parler de mes yeux pochés, c'est
naturel.
Des voix :
Ha, ha, ha!
M. Drouin
(Alain) : Je vais me coucher tard, je vais me coucher de bonne heure,
ils sont toujours pochés.
Le Président (M.
Lessard) : …
M. Drouin (Alain) : Merci, M. le ministre... M. Lessard. M. le ministre... Écoutez, la
réponse à la question, nous, d'abord,
on ne décidera pas, hein, de l'avenir de l'industrie gazière puis de
l'industrie pétrolière sur le territoire québécois. Puis l'exploitation,
si ça venait en exploitation, on ne décidera pas ça.
Encore une fois, on
est une petite municipalité régionale de comté, on n'a pas d'experts, on n'en
aura jamais à notre emploi. On se fie à
l'État, on se fie comme on s'y est fié jusqu'à aujourd'hui, comme on s'y est
fié dans le passé, à l'État. Ça a
d'ailleurs… On s'y est fié, là, à cette méthode, cette façon de faire. On ne
s'est jamais, encore une fois, prétendu des experts. On s'est dit, encore une fois, qu'on défendait à une
certaine époque… Donc, c'est encore ça, c'est la démocratie dans le système lui-même. C'est-à-dire que
l'institution, non seulement l'Assemblée nationale, mais les moyens dont elle
s'est donné, le Bureau d'audiences
publiques, l'évaluation environnementale stratégique, c'est… on a dit : On
se fie à ça, puis ce qu'on défend… En
fait, ce n'est pas les individus, c'était l'institution qu'on défendait en
disant : Laissons l'institution, justement, faire son travail. On
évaluera après le résultat, mais pas avant. Et c'est encore vrai.
M.
Sklavounos :
Sachant qu'en utilisant le même procédé, qui est la fracturation hydraulique,
pour faire de l'exploration à Anticosti… Et
vous comprenez que le BAPE à Anticosti dont on parle… Parce qu'on parle de BAPE
ici, on parle de BAPE là. Ici, on
parle de BAPE alors que tout est arrêté. Là, on parle d'un BAPE après qu'il y
aura eu des forages puis de la
fracturation hydraulique au stade de l'exploration. Alors, on le place à des
endroits différents, le BAPE, selon que ce soit du pétrole ou du gaz.
Ceci
étant dit, on comprend tous… Et c'est souvent le cas qu'on trouve les deux
ensemble, et, en forant pour du pétrole,
on risque de frapper du gaz avant de toucher à du pétrole, il y a… Je poserai
la question à d'autres plus tard, mais ma
question pour vous : Est-ce que vous trouvez qu'on devance un petit peu la
question en voulant imposer le moratoire avant de pouvoir regarder les
études? Ça, c'est la première.
Et
la deuxième : Est-ce que c'est de nature à vous rassurer, à rassurer les
citoyens, alors que le gouvernement va de
l'avant avec le pétrole de schiste en nous disant qu'on est capable de le
surveiller, on va avoir nos experts là, on va pouvoir faire ça
correctement? Est-ce que ça vous rassure à quelque part, puisqu'on utilise le
même procédé?
M. Drouin (Alain) : Nous, sur la fracturation, là, à l'île d'Anticosti, on ne s'est pas
arrêté. Honnêtement, on ne s'est pas
arrêté, comme MRC, sur la fracturation pour aller extraire les hydrocarbures,
le pétrole de schiste qui y est enfermé. On comprend, puis je comprends bien le sens de votre question, c'est la
même méthode d'extraction, mais on ne s'est pas attardé sur ce qui va se passer là-bas. On comprend que l'île
d'Anticosti… Je crois qu'il y a 187 habitants, quelque chose comme ça, ce
n'est pas…
Une voix : …
M.
Drouin (Alain) : Pardon, 188? Ce
n'est pas moins important parce qu'il y a 188, ou 189, ou 200 000 personnes, il y a 100… Il y a des individus qui vivent
là-bas. Mais il y a peut-être moyen de moyenner, là, en faisant des fracturations
à certains endroits où ce n'est pas habité, j'imagine. L'exploitation, on sait,
là, du gaz de schiste, c'est de ça dont…
Le
Président (M. Lessard) : Malheureusement, je dois vous interrompre, M.
le préfet, étant donné qu'on est rendu maintenant au temps accordé,
donc, au deuxième groupe d'opposition, et critique de l'opposition officielle,
donc, en matière de développement durable, et député de Nicolet-Bécancour.
Donc, à vous la parole pour 3 min 48 s.
M.
Martel :
Merci, M. le Président. Bienvenue, M. Drouin, Jean-François. Je dois vous dire,
cet après-midi, que je suis vraiment
fier de vous autres. Je ne dis pas ça d'un ton paternaliste, là, je suis fier
d'avoir été associé… Puis je trouve que
vous nous avez fait un beau témoignage de ce qui s'est vécu au niveau de la
MRC. Puis moi, je rajouterais… Puis c'est
peut-être gênant pour vous autres de dire ça, mais les citoyens de
Nicolet-Yamaska ont été chanceux de compter sur un préfet aussi sage que vous, des maires complètement objectifs et
ouverts sur cette question-là. Et, Jean-François, une belle expertise qui tu as amenée avec les
moyens du bord, mais la curiosité... On a toujours pu être bien informés par rapport à ce dossier-là, puis je trouve que vous
seriez en mesure, les maires de la MRC de Nicolet-Yamaska, à donner une
leçon aux parlementaires.
Moi, je peux témoigner que cette question-là du
gaz de schiste, au sein de la MRC, elle s'est traitée en faisant totalement abstraction de la politique. Il y a des
maires qui ont une tendance plus péquiste, il y a des maires qui ont une
tendance plus libérale. J'espère qu'il y a
des maires avec une tendance caquiste aussi, mais je pense sincèrement… je
pense que vous avez fait abstraction
de ça, et c'est ce qui a fait qu'on a pu avoir des discussions franches et
ouvertes. C'est de valeur, je n'aurai
peut-être même pas le temps de poser des questions, mais je pense que
l'attitude que les maires ont eue là-dedans…
même s'il y a eu de l'opposition, l'objectif recherché, c'était vraiment la
vérité. Ce n'était pas l'opportunisme politique,
c'était vraiment... il y avait une curiosité et un désir de bien servir les
citoyens de Nicolet-Yamaska. Moi, je vous dis bravo, je profite de ma
tribune pour vous féliciter de cette attitude-là.
Peut-être que
je vous donnerais juste l'opportunité de vous exprimer. Parce que, tantôt, mon
collègue, il vous parlait de
l'expertise au niveau de la MRC, on n'a pas les moyens dans les MRC de se payer
ça, c'est vraiment des choses qu'on rajoute,
et, en même temps, on est responsables de l'aménagement. Les gouvernements
demandent beaucoup aux MRC. J'aimerais ça, vous laisser peut-être
l'opportunité de faire les réclamations nécessaires.
Le Président (M. Lessard) : Alors,
M. le préfet, vous avez presque une minute.
M. Drouin
(Alain) : Bien, je pourrais
joindre ma voix, bien sûr, à la voix des élus locaux, de l'ensemble des élus
locaux du territoire québécois puis de de l'ensemble, j'imagine, des préfets de
MRC pour dire : Bien oui, il y a des responsabilités
qui sont cédées aux municipalités, il y a des responsabilités qui sont cédées
aux MRC, puis parfois ça se fait par
la bande. On comprend que les interventions ou les coupures budgétaires dans le
réseau de la santé, les coupures budgétaires
dans le réseau scolaire, les coupures budgétaires un peu partout dans les
réseaux, dans les services publics, eh
bien ça se répercute, qu'on le veuille ou qu'on ne le veuille pas, sur les
municipalités. Ceux qui sont passés par le rôle d'élu municipal parmi
vous…
Le
Président (M. Lessard) : Ça met fin, malheureusement, à nos échanges
aujourd'hui. Alors, on veut remercier, donc, les représentants de la MRC
de Nicolet-Yamaska.
Nous allons suspendre quelques minutes pour que
le prochain groupe puisse s'approcher. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 20)
(Reprise à 16 h 22)
Le
Président (M. Lessard) : …nous allons maintenant entendre
l'Association des consommateurs industriels de gaz. Je ne voulais pas couper le plaisir de personne, mais, comme on
s'est donné un cadre temporel à respecter, alors donc bienvenue à cette commission, et veuillez aussi décliner votre
identité pour les fins d'enregistrement de nos travaux.
Association des
consommateurs
industriels de gaz (ACIG)
Mme
Gervais (Lucie) : Bonjour.
Mon nom est Lucie Gervais. Je suis consultante principale pour l'Association
des consommateurs industriels de gaz.
Mme Rahbar (Shahrzad) : Moi, je suis
Shahrzad Rahbar, la présidente de l'association.
Le
Président (M. Lessard) : ...alors, vous avez donc 10 minutes pour
faire une présentation. Je vois que vous avez un soutien, donc, audiovisuel actuellement. Alors, on vous laisse
aller, vous avez 10 minutes pour la présentation.
Mme Rahbar (Shahrzad) : Mme Gervais.
Mme
Gervais (Lucie) : Alors,
bonjour, M. le Président et les membres du comité. Naturellement, nous sommes
bien heureux d'être ici et de pouvoir contribuer à votre consultation.
L'objectif de l'association, de notre présentation aujourd'hui est de vous sensibiliser au lien qui est très, très intime
et très important entre, pour les industriels, d'avoir un approvisionnement gazier qui est fiable et à prix
compétitif et l'impact que ça a ou le lien que ça a avec le développement
économique durable au Québec et pour les régions également.
Alors, je
vais vous parler rapidement de l'ACIG, de l'association, pour que vous ayez une
bonne idée qui nous représentons.
Alors, les membres, globalement, de l'association, il y a 22 membres, dont neuf
qui sont présents au Québec. Ces
membres sont partout en région. Ils représentent 20 000 emplois directs au
Québec et ils représentent autant, donc 20 000 emplois indirects au Québec. Ils ont des liens d'affaires
avec 9 000 fournisseurs. Ils injectent plus de 7,5 milliards, donc tout près de 8 milliards de dollars
annuellement dans l'économie du Québec. Et leur consommation seulement au
Québec représente environ 25 % de la
consommation totale du Québec au niveau du gaz naturel. À l'échelle mondiale,
les 22 membres de l'association qui… les 22
membres totaux consomment l'équivalent de la moitié de la consommation de gaz
naturel au Québec et ils représentent, à eux
seuls, à travers le monde, sur la planète, près de trois quarts de million
d'emplois.
Les
industriels sont engagés à protéger l'environnement. Ils sont de fiers
partenaires au développement durable. Certains
de ces industriels… en fait, tous ces industriels qui sont les membres de
l'ACIG, de l'association, ont une politique environnementale. Plusieurs d'entre eux utilisent des matières
résiduelles. Certains d'entre eux sont partenaires de chaires de recherche en efficacité énergétique. Au moins trois
d'entre eux que j'ai pu décompter, finalement, qui ont reçu des prix Énergia de l'Association québécoise pour la
maîtrise de l'énergie et les prix Innovation de l'ADRIQ, qui est l'Association de la recherche industrielle du
Québec. Alors, chacun, c'est sûr, que ce soit pour des motifs d'économie
d'énergie, de coûts, naturellement,
également pour une sensibilité environnementale… chacun fait sa part, et c'est
une question à laquelle les industriels sont très conscients et très
concernés.
La consommation
d'énergie au Québec... On a vu dans les documents qui ont été présentés lors de
la consultation sur les enjeux
énergétiques, l'électricité comptait pour 40 % de la consommation
énergétique au Québec, le gaz naturel, 13 %.
Les industriels, leur consommation, dans leur secteur, on parle de 49 %
d'électricité, mais on parle de près de 20 % pour le gaz naturel. Donc, la part du gaz naturel,
elle est plus forte du niveau industriel qu'elle l'est sur l'ensemble des
Québécois, de la consommation. Et, pour les industriels,
c'est presque 20 %. C'est très important comme valeur parce que les coûts sont importants et les coûts se
dirigent, vont en grande partie… tiennent une grande place dans le coût de
production de l'industrie. Alors, les coûts
de production sont directement liés avec les coûts de l'énergie et la
disponibilité, et c'est pour ça que
c'est essentiel d'avoir un accès fiable et un accès à prix compétitif d'un
approvisionnement en gaz naturel.
Dans le document de consultation qui a servi à
l'élaboration de la politique énergétique, qu'on n'a pas vue encore, mais qui est probablement en train d'être
élaborée, il y avait deux des six ou sept objectifs qui étaient visés qui,
particulièrement, nous interpellaient, le
premier étant d'explorer et exploiter de façon responsable les réserves
d'hydrocarbures sur le territoire et
valoriser cette ressource afin d'enrichir les Québécois. Alors, il n'y a
personne qui est contre la vertu, et
ça va de soi que, pour nous, c'est important. Si l'approvisionnement est plus
près, on aimerait croire que les coûts vont être moins élevés également
parce qu'ils seront à proximité. Alors, pour nous, si le Québec pouvait
développer des ressources d'hydrocarbures tout comme le Québec a su développer
les ressources hydrauliques dans le passé, on est convaincus que ça devrait aider à l'apport économique parce que ça va
rendre les coûts de production moindres et ça pourrait inciter de nouveaux investissements, finalement,
au Québec. Également, ce qui est important pour nous, c'est d'assurer — ce qui était un objectif aussi — à
long terme la sécurité et la diversité des approvisionnements énergétiques du
Québec.
Le gaz
naturel est une énergie qui est essentielle au développement économique parce
qu'elle est essentielle à certaines
industries. Ce ne sont pas toutes les industries qui utilisent de
l'électricité, et, pour certaines industries, il est essentiel d'avoir du gaz naturel. L'électricité ne
pourrait pas répondre à la transformation, finalement, ou à la production
comme telle, ne donnant pas suffisamment
d'énergie ou de chaleur, finalement. Alors, le gaz naturel est essentiel pour
les industries qui sont implantées au
Québec, et il est important que le gouvernement reconnaisse cet apport-là et le
rôle que ça joue dans l'économie, et également le gouvernement devrait
en faciliter l'accès. Il en va de la viabilité des entreprises d'accéder à
cette énergie à des bons prix.
L'exploitation
du gaz de schiste au Québec, l'association des consommateurs de gaz naturel,
vous comprendrez qu'on ne se prononce
pas sur le gaz de schiste ou pour ou contre. Ce que l'on dit, c'est : Les
industries au Québec ont besoin de
gaz naturel. Alors, peu importe d'où il provient, le besoin est pour le gaz
naturel. Maintenant, ce qui est important, je le répète, parce que c'est
très important pour nous, c'est qu'il soit fiable et qu'il soit à prix
compétitif.
• (16 h 30) •
Présentement,
l'industrie du gaz naturel ou le monde du gaz naturel vit de grandes
transformations où l'approvisionnement,
qui venait auparavant de l'Ouest, de l'Alberta, finalement, tant avec les
exploitations de gaz de schiste et
de… aux États-Unis, au sud de l'Ontario, cela correspond, finalement, à une
nouvelle source d'approvisionnement pour
les industriels au Québec qui est plus près que l'Ouest et qui offre une option
ou une alternative, finalement. Mais c'est
sûr que, si on est assis sur des ressources et qu'on pouvait les exploiter,
encore faut-il s'assurer de bien les exploiter et de bien établir les règles, finalement. Mais ça pourrait représenter
un avantage économique tant pour le Québec que pour les industries qui font partie… Le Québec, on croit qu'il doit
développer son savoir-faire et prendre le temps de bien faire les
choses.
Le projet de loi n° 37, visant... finalement,
de ce que je comprends, ça officialise un moratoire qui est, entre guillemets, de facto. On est un petit peu... Ce
n'est pas qu'on est contre le projet de loi ou pour le projet de loi, je crois
qu'on n'a pas à... on ne peut pas
vraiment... on n'arrive pas à se prononcer. Ce que l'on croit, l'association,
ça nous semble aller... je dirais, à
être prématuré, je le dirais comme ça, dans le sens qu'on attend toujours la
politique énergétique. Et, pour nous,
dans l'ordre des choses, on s'attendrait à ce que la politique énergétique
soit, premièrement, émise et approuvée, ce qui donnerait la direction à prendre. Parce que
les objectifs sont de développer les hydrocarbures au Québec, c'est un des objectifs que j'ai mentionnés tout à l'heure.
Alors, le fait que l'on arrête présentement... De toute façon, il n'y a pas
d'activité qui se fait, alors, pour nous, le
moratoire, on croyait qu'il était vraiment en place. Alors, de voir le projet
de loi tel que prononcé, pour nous,
on croit que c'est tout simplement prématuré, qu'il y aurait plus lieu de
focusser vraiment, de porter son
attention sur le développement de la politique énergétique pour qu'on connaisse
les règles de façon très claire, finalement,
pour qu'on sache c'est quoi, le carré de sable dans lequel on va jouer, et
quelles sont les règles qui vont être en place. Et, pour nous, tant que
la politique n'est pas confirmée...
Le Président (M.
Lessard) : Malheureusement, ça va terminer le temps alloué, là...
Mme Gervais
(Lucie) : Ça termine également...
Le Président (M.
Lessard) : …pour la présentation, mais on aura l'occasion de faire des
échanges.
Mme Gervais
(Lucie) : On a terminé, alors je vous remercie.
Le
Président (M. Lessard) : Merci pour le travail bien documenté. Alors
donc, je rappelle les règles : 10 minutes au gouvernement, neuf minutes à l'opposition officielle et 3 min 48 s à
la deuxième opposition. Alors, la parole est au ministre, donc, du
Développement durable.
M.
Blanchet : Mesdames, bonjour. Écoutez, votre présentation
est très, très intéressante parce que vous abordez la question sous un angle qui a été sinon peu
abordé, au moins peu médiatisé. Ça n'a pas assez fait partie du débat qu'il y a
des consommateurs à grande échelle. Et on
comprend, d'ailleurs, que l'essentiel du gaz naturel au Québec, pour une très,
très, très grande partie, est, effectivement, dans le secteur industriel.
J'ai
plusieurs types de questions. Je ne réussirai pas à toutes les rentrer dans le
10 minutes, je vais essayer d'y aller au
plus coupant. Vous dites que le moratoire retarde le développement d'une
filière. Or, est-ce que la demande sur le marché québécois, au prix
qu'est le gaz américain, justifie le développement de la filière? Et, sinon,
qu'est-ce que ça retarde?
Mme Gervais
(Lucie) : Je ne crois pas avoir dit que le moratoire retardait le
développement de la filière.
M.
Blanchet :
On l'a lu dans le mémoire.
Mme Gervais (Lucie) : En fait, ce que l'on dit est qu'il est prématuré. Tant qu'on n'a pas
encore développé les politiques et
qu'on n'a pas pris connaissance de la politique énergétique, pour nous, le
moratoire nous apparaissait comme on
voulait tout arrêter, alors qu'il y aurait probablement lieu de développer
notre expertise, nos connaissances par des recherches. Les gens de la MRC de Nicolet ont parlé avant nous et
faisaient référence, justement, tant qu'on n'a pas vu les rapports, qu'on fasse les... Ma compréhension de…
Ce que j'ai entendu, finalement, de leur commentaire à l'effet que le moratoire, présentement, on ne voit pas ce qu'il
vient arrêter, puisque le reste est déjà arrêté, c'était le moratoire de facto
auquel j'ai fait référence un petit peu tout
à l'heure. Et de vouloir mettre l'emphase sur ce moratoire maintenant ou sur le
projet de loi, on croyait que ça venait tout
simplement... J'essaie de ne pas dire «à l'encontre» parce que je ne suis pas
certaine, même si je... Peut-être que le mot
est bon, mais peut-être qu'il est fort, un peu. Alors, j'essaie d'adoucir cette
expression-là, mais d'être un petit
peu dans une direction opposée ou ne pas aller dans le même sens que les
objectifs qu'on lit dans la politique.
Essentiellement,
si on lit une politique... Parce qu'on ne l'a pas lue, parce qu'elle n'est pas
sortie. Alors, ce n'est pas un
reproche, là, c'est plus une constatation. Lorsqu'on lira la politique
énergétique et on dira : Voici, c'est vers ça qu'on veut aller, je crois que tout le reste va
découler de ça. C'est plus la position ou la conception. C'est une fois qu'on a
une politique, on sait que, voici, c'est la direction qu'on va prendre. À ce
moment-là, le reste des outils, le moratoire, et le reste, et tout autre décret
qui pourrait arriver ou loi devraient découler de la vision globale qui sera
énoncée par la politique. La
difficulté, si je peux l'exprimer ainsi, c'est qu'en allant avec un moratoire
maintenant ou avec le projet de loi c'est
comme si on arrêtait certaines étapes bien encadrées, et, ensuite, on va
arriver avec une politique énergétique, mais on aura déjà décidé des choses auparavant. C'était juste dans l'ordre
des choses, qui nous apparaissait un peu ambigu.
M.
Blanchet :
J'ai l'impression contraire. Puisque vous souhaitez que la politique
énergétique précède les décisions relatives
à l'exploitation ou non d'une filière, le moratoire n'est pas un obstacle,
puisque vous souhaitez que nous attendions la politique énergétique
avant d'aller de l'avant. Autrement dit, c'est comme si, pour deux raisons différentes, on arrivait à une même conclusion, on
souhaite attendre parce qu'on n'a pas la politique énergétique et on souhaite attendre de notre côté parce qu'il y a un
ensemble d'enjeux qui ne sont pas réglés. Mais le moratoire n'est pas un
obstacle au développement de la politique
énergétique, il est même, à la limite, favorable à cette attente et à cette
période de réflexion pendant laquelle le gouvernement développe,
justement, sa politique énergétique.
Mme Gervais (Lucie) : Je ne suis pas en désaccord avec vous, et ce n'est pas une question de
débattre comme tel. Ce que je vois, c'est que, lorsqu'on aura la
politique, on saura que c'est la direction vers laquelle on veut prendre. Présentement, l'annonce qu'il y a eu la semaine
dernière pour le développement du pétrole de schiste à Anticosti, pour moi, je le lis comme étant en lien avec la
politique énergétique ou, du moins, qui est à venir, dont on a vu les objectifs
énoncés lors de la consultation à l'automne dernier ou au courant de l'été.
Et, je vais vous dire très
candidement, le moratoire, qu'il soit ou non enforcé, finalement, par le projet
de loi... Moi, j'étais convaincue
qu'il y en avait un, moratoire, jusqu'à ce que je fasse ma recherche. Alors,
pour moi, le moratoire… Et ce n'est
pas contre le moratoire que j'en ai, et ce n'est pas une question qu'on a
quelque chose contre. Ce qu'on dit, c'est :
On se questionnait sur la nécessité d'avoir ce projet de loi là qui venait
donner, je dirais, des dents peut-être à quelque chose qui n'est pas utile parce que, de toute façon, il n'y a rien qui
se passe tant qu'on ne saura pas vers quoi on va ou tant et aussi
longtemps… Si on prend pour acquis que le moratoire est déjà en place, c'est
comme si on vient… Vous connaissez l'expression
d'avoir la ceinture et les bretelles et d'en rajouter. Alors, on se demande,
tout simplement, est-ce que c'est pertinent de l'avoir.
M.
Blanchet : C'est tout l'exercice de dérive auquel un certain
nombre de personnes nous ont conviés. Ce n'est pas parce que quelque chose ne se fait pas que c'est interdit. Ce n'est
pas parce que je roule à 100 que je n'ai pas le droit de rouler à 120. Peut-être que je m'abstiens de
rouler. C'est peut-être pour d'autres raisons qu'il n'y a pas de développement.
Je suis convaincu que l'absence de
développement n'est pas due au fait que les promoteurs diraient : Ça ne
nous intéresse pas. Il y a d'autres
raisons pour lesquelles il n'y a pas de développement. Le moratoire de facto
que vous décrivez n'est pas du tout
un moratoire parce que ce n'est pas une interdiction. Un moratoire, c'est un
empêchement, c'est une interdiction. Ce
n'est donc pas parce que ça ne se fait pas que c'est l'objet d'une
interdiction, ça ne se fait pas pour d'autres raisons. Parmi les autres
raisons possibles, est-ce qu'on peut considérer les facteurs économiques?
Vous
parliez d'un prix compétitif pour le gaz. Et ça, je le comprends parfaitement
bien, vous avez besoin d'un approvisionnement stable, de qualité, à prix
compétitif. Est-ce qu'on peut considérer qu'un des facteurs pour lesquels il n'y a pas plus de pression récemment sur les
projets de gaz de schiste dans la vallée du Saint-Laurent, c'est qu'au niveau
économique ces projets-là ne seraient pas
concurrentiels par rapport à la production extrêmement abondante qui est en
train de faire des États-Unis le premier producteur d'hydrocarbures au monde?
• (16 h 40) •
Mme Gervais (Lucie) : M. le ministre, vous comprendrez que l'association des consommateurs
n'est pas l'association des producteurs. Ça va de soi que tout ce qui
est… Et je vous le concède, je ne vais pas discuter de tout ce qui
est des coûts de production et d'aller chercher le gaz de schiste, et tout,
parce que ce n'est pas nous qui le produisons, ce n'est pas les… Nous, on représente les consommateurs. Le message qu'on
veut vous transmettre, c'est que les consommateurs
ont un besoin au niveau de l'économie, au niveau de la santé de leur
entreprise, d'avoir un accès fiable et
de connaître les règles du jeu clairement. Alors, pour nous, ce qui importe,
c'est que le Québec ait accès à un approvisionnement gazier fiable.
Présentement, il ne vient pas du sous-sol québécois, et c'est correct.
Et
ce qu'on veut vous dire, c'est qu'il ne faut pas aller à la course, de
dire : Il faut absolument qu'on ait quelque chose demain matin. Comme je vous dis, ce n'est pas de retarder indûment
non plus. Le message qu'on veut vous transmettre,
c'est que les industries, parce que ça les touche profondément et directement
dans leur santé économique ou leur santé d'industriels… Ce qui est
important pour nous, pour les membres de l'ACIG, pour les industriels au Québec, c'est de faire, je dirais, une
transformation lorsqu'il y en aura une et la faire parfaitement, du bon coup.
Donc, si ça prend deux ans, trois
ans, si ça prend le temps qu'il faut… Et je ne veux pas attacher de temps, ça
peut être… mais il faut s'assurer que, lorsqu'on le fera, on le fera
correctement du premier coup et de prendre le temps de le faire.
Pour
l'instant, on a accès à d'autres approvisionnements, mais est-ce que cet
approvisionnement-là sera toujours… Il
faut s'assurer qu'on a une vision à long terme. Est-ce que cet
approvisionnement-là sera toujours disponible pour les industriels du Québec? Et est-ce qu'il sera
toujours disponible à prix compétitif? Alors, il n'y a pas le feu, comme on
dit, mais, en même temps, on veut
s'assurer que, lorsque vous ferez quelque chose, ce sera fait correctement du
premier coup.
M.
Blanchet : L'approvisionnement extérieur a des chances de
demeurer assez crucial, même si je comprends très, très bien les
préoccupations de l'industrie, et vous les exprimez très bien.
J'aurais
une dernière question pour vous. Est-ce qu'il y a un effort de fait parmi vos
membres pour aller vers le biogaz,
dont le Québec fait des efforts considérables pour en développer, faire en
sorte… Parce que c'est, évidemment, beaucoup plus environnemental, et
est-ce qu'il y a des efforts qui se font pour s'affranchir des hydrocarbures?
Parce que, quels que soient les débats qu'on
a au Québec présentement, sur un horizon de quelques dizaines d'années il
faudra s'affranchir éventuellement
des hydrocarbures pour des raisons environnementales assurément et,
éventuellement, pour des raisons
économiques. Donc, est-ce que vos membres font des efforts vers le biogaz et
vers l'affranchissement de ce type de carburant en général?
Mme Gervais
(Lucie) : Le biogaz, les efforts, naturellement, ça dépend là où il
sera. L'industrie…
Le
Président (M. Lessard) : Je pense, ça va terminer nos échanges
concernant la question du ministre. Avant de passer, donc, au groupe de l'opposition officielle, donc, je sais que
le ministre essayait de faire un point sur l'interdiction, à savoir ce n'est parce que personne ne te le
demande pas qu'il n'y a pas d'interdiction. Donc, la loi vient préciser que le
ministère aura la capacité d'interdire.
Alors, quiconque demanderait un permis, la loi interdirait de l'émettre, alors
que la loi, actuellement, l'autorise.
Alors donc, on va
passer, donc, du côté de l'opposition officielle pour neuf minutes.
M.
Sklavounos : Merci, M. le Président. Alors, merci, Mme
Fortin, Mme Rahbar, et bienvenue. Merci pour vos observations.
D'abord, je
vous comprends bien lorsque vous dites que, lorsqu'on n'a pas de politique
énergétique, c'est très difficile de
comprendre la logique lorsqu'on semble procéder morceau par morceau. Et, si
vous voulez, depuis jeudi, un petit peu en contradiction, là… Et, comme vous
l'avez dit, au niveau de la politique énergétique, il y en a d'autres qui
sont venus nous parler plus... des groupes
de nature environnementale sont venus nous parler plus du plan d'action au
niveau des gaz à effet de serre, nous dire
également que c'est très difficile de comprendre ce qu'on fait, là, lorsqu'on
n'a pas un plan d'action, là, parce qu'évidemment il y a une différence
entre les émissions des gaz pour la production et l'utilisation du gaz naturel
et pour le pétrole. Malgré le fait qu'on les trouve souvent ensemble, la
plupart du temps ensemble, là, il y a des impacts et une empreinte différente,
là, lors de l'utilisation.
Et
je comprends ce que vous craignez, je comprends ce que vous craignez lorsque
vous dites : Il y a un moratoire de facto. Parce que oui, le
gouvernement précédent s'était engagé à ne pas autoriser — malgré
le fait que ce n'est pas interdit — des forages de ce type-là tant et aussi
longtemps qu'on n'avait pas la science pour nous appuyer. Mais, lorsque vous, vous entendez comme d'autres les
déclarations de la ministre des Ressources naturelles, qui dit : On ne
pourra jamais, techniquement, faire
ça, là je comprends que vous êtes inquiètes. Parce que, là, vous dites :
Écoutez, là, là, ce moratoire-là, là,
c'est un moratoire comme final, là. Ce n'est pas un moratoire temporaire, c'est
un moratoire comme final qui va piper les dés, si vous voulez, qui va
faire en sorte qu'on ne pourra pas, au niveau scientifique, même aller voir…
Vous
parlez d'un projet pilote à la page 9 de votre mémoire, vous parlez de... Il
est prématuré parce que ça ne permet
même pas au gouvernement de mettre en place un projet pilote qui pourrait nous
donner des réponses, pourrait nous
permettre de développer nos connaissances et notre expertise. Et il me semble
qu'en lisant… il me semble que je vois toute la logique et les
explications données par le gouvernement pour procéder à Anticosti, hein? On va
être là, on va procéder, on va prendre des
connaissances, on va savoir ce qui se passe. On ne peut pas se fermer les yeux,
il faut savoir ce qu'il y a là. On va
prendre une décision, on va parfaire les connaissances. Alors, je vous
comprends, vous ne comprenez plus
rien. Comme nous, on a de la misère à comprendre aussi. On parle des deux côtés
de la bouche, si vous voulez, et je
vous comprends. Et ce que vous reprochez, c'est le fait de mettre un frein à la
possibilité d'aller faire l'acquisition des connaissances pour voir si
c'est faisable ou non. Est-ce que je vous comprends bien? Est-ce que j'ai bien
compris ce bout-là de votre mémoire?
Mme Gervais (Lucie) : Oui, effectivement — j'attendais le micro — effectivement, cette portion-là... En fait,
ce qui est important pour les industriels,
c'est d'être capables de prévoir. Les industriels doivent investir d'énormes...
des millions et des millions dans
leurs usines pour rester à l'avant-garde, rester compétitifs, développer. Et
ces investissements-là, ça ne se fait
pas en trois mois et demi, ça ne se fait pas en six mois, ça se planifie sur
des années. Alors, de toujours connaître où est l'Étoile du Nord, là, et
de savoir vers où on va aller, c'est un outil pour les industriels également.
Ce
qui est important, c'est de savoir est-ce qu'on va vers l'avant. Qu'on y aille
dans six mois, dans un an, dans cinq ans, là n'est pas la question. La
savoir, c'est est-ce qu'on va investir, comme industriels, à rajeunir et à
réétablir, finalement, ou rendre meilleures
nos usines, finalement, pour demeurer compétitifs en sachant qu'à long terme on
pourra peut-être en bénéficier encore
plus? Ça va de soi que, le moment où le gouvernement va investir et exploiter
ses richesses dans son sous-sol — peu importe l'énergie qu'il va y trouver,
finalement, ça demeure sa ressource — à ce moment-là ce sera un avantage pour les industriels de venir
s'établir au Québec et d'investir à long terme au Québec. Ça demeure la
ligne, finalement, qu'on tient... le message qu'on tient à vous passer.
Le Président (M.
Lessard) : M. le député.
M.
Sklavounos : Et je ne sais pas si vous avez suivi lorsqu'on
regardait la question du renversement du flux de la pipeline d'Enbridge, et lorsqu'il y a...
Évidemment, sur cette question-là, on parlait de la stabilité dans
l'approvisionnement pour pouvoir
assurer non seulement des emplois, faire du développement, mais aussi pour
attirer de l'investissement. Il me semble qu'on entendait des arguments
qui étaient différents, à ce moment-là, du gouvernement.
Il
faut aussi se dire — et je
vais en ajouter un petit peu parce que je ne sais pas si les députés
ministériels n'ont pas eu l'occasion
de le mentionner — il me
semble que les cimenteries sont aussi un des grands consommateurs de gaz
naturel. Je ne sais pas si vous pourriez le
confirmer, mais il me semble que les cimenteries sont une des grandes, de
grandes consommatrices de gaz naturel, et ça m'étonne que les membres du
parti ministériel ne l'ont pas soulevé.
Mais,
vous, lorsque vous nous parlez d'un projet pilote qui permettra de développer
ces connaissances, qu'est-ce que vous
avez en tête? Comment qu'on l'encadrerait? Et, selon vous, ce moratoire-là, de
votre compréhension — et ça semble être notre compréhension aussi — va mettre, effectivement, fin à tout type de
projet pilote qui pourrait nous aider à parfaire nos connaissances.
Est-ce que c'est ce que vous comprenez également?
Mme Gervais
(Lucie) : Vous me donnez une seconde?
Le
Président (M. Lessard) : Oui. Donc, une petite consultation. Si Mme
Rahbar veut s'exprimer, vous avez toute l'occasion de le faire...
Mme Rahbar
(Shahrzad) : Je vous remercie.
Le Président (M.
Lessard) : ...dans la langue de votre choix.
Mme Rahbar (Shahrzad) : Merci. Si vous me permettez, je vais parler anglais parce que je ne
veux pas maltraiter la langue merveilleuse de Molière plus que j'ai fait
déjà, si vous me permettez.
• (16 h 50) •
Le Président (M. Lessard) : Allez-y.
Mme Rahbar (Shahrzad) : So the reason we are supporting pilots
is in our own industries… I'll use an example, pulp and paper. 20 years ago, we had no renewables
in there. Today, most of our plants in Québec are running on 75 % own fuel. We believe, with
connecting the dots, our education system, the expertise that we have, and the
human capital that we have, and the
scientific knowledge, over time we are hopeful... As we have seen, in our own
industries, we are not experts, as my
colleague said, in the production of natural gas, but we do certainly have
belief that, when you put the science, and
the people, and the resources together, human beings are resilient and will
find solutions. We are confident that it would be possible in due course to find ways that resources can be
developed in an environmentally responsible manner that will keep the beautiful environment for our
children and grandchildren. Do we know all? Do we have all the answers today? No. Will we never have them? I think the
answer to that is no as well. How do we learn? The way of human beings normally learn. We try, we move a bit, we… When
two steps back, we eventually progress. We are just saying: Don't shut
the door on progress because our sector could really take advantage of having
those resources. That's…
Le Président (M.
Lessard) : 45 secondes.
M.
Sklavounos : I don't have much time. I just wanted to say
that I thought your French was impeccable. I think it
is better than mine, so… from what I heard, so…
Juste rapidement, aussi n'y a-t-il pas une
certaine logique de dire que, si on pourrait faire ça de manière prudente,
on pourrait garder des milliards de dollars au Québec au lieu de les envoyer à
l'extérieur du Québec? C'était un des arguments
qu'on avait pour Enbridge qu'on utilisait des deux bords, là, les ministériels
aussi, n'est-il pas logique de vouloir garder cet argent ici, au Québec?
Mme
Gervais (Lucie) : C'est ce
qu'on souhaite. Essentiellement, un approvisionnement le plus près possible,
à proximité, coûte moins cher. Il est donc
plus intéressant pour les investisseurs ou les industriels, et ça génère des emplois,
ça génère des revenus et ça remet l'argent dans...
Le
Président (M. Lessard) : Ceci, malheureusement, met fin, donc, à nos
échanges. Alors donc, je vais remercier les représentants de
l'association des consommateurs industriels du Québec.
Je vais donc
suspendre quelques instants pour que le prochain groupe puisse prendre la place
en vous remerciant. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 52)
(Reprise à 16 h 55)
Le
Président (M. Lessard) : Alors, merci beaucoup. Donc, on donne la chance
à l'Association pétrolière et gazière du
Québec de prendre place afin qu'on puisse reprendre le cours de nos travaux,
là, concernant les audiences concernant le projet de loi n° 37.
Alors, si notre représentant peut prendre place
pour qu'on puisse débuter. Alors donc, je vais laisser, donc, la chance à nos représentants de se nommer pour les
fins d'enregistrement, donc, de nos travaux. Alors, la parole est à vous.
Alors, je comprends que vous… M. le
président est venu m'informer que la présentation a 10 minutes, il va
s'exprimer en français et, s'il y a
le consentement, donc il pourrait peut-être dépasser de quelques secondes.
Alors, je ne sais pas si, M. le
ministre… On verra, donc, à l'usage de vos 10 minutes. On vous demande de faire
10 minutes, mais, si ça dépasse, on
verra si vos derniers messages peuvent être entendus, donc, avant de passer à
la période de questions. Donc, allez-y, la parole est à vous.
Association pétrolière
et gazière
du Québec (APGQ)
M. Binnion
(Michael) : Merci. Et bonjour, M.
le Président et le monde de la commission. Je suis Michael Binnion, le
président de l'Association pétrolière et gazière du Québec et aussi le
président de Questerre Energy, une entreprise majoritairement
norvégienne. Je vous présente Marie-Chantal Domingue, notre coordonnatrice des
communications et, aujourd'hui, le traducteur officiel pour moi.
C'est un honneur d'être parmi vous pour exprimer
la vision de l'APGQ sur comment on peut, tous ensemble, créer une nouvelle industrie florissante au Québec. Ma compagnie a foré
son premier puits au Québec en 1989. Plusieurs générations d'experts prétendaient que le Québec n'avait pas de pétrole
ni de gaz sur ses terres. Ça a été une immense fierté pour moi et
plusieurs membres de l'association lorsqu'on a trouvé la présence de ressources
en hydrocarbures.
Pour
expliquer ce qui se passe avec notre industrie, je vais vous raconter une
petite histoire. Un homme conduit sa
voiture dans une route de campagne. Il aperçoit au loin un poulet qui court
dans le chemin. L'homme roule à 50
kilomètres-heures et il voit la poule courir plus vite. Il accélère à 70 et
puis à 100, et il ne peut pas rattraper le poulet. Le poulet se dirige vers une ferme, l'homme le
suit et aperçoit le fermier. Il lui dit : Vous allez probablement croire
que je suis fou, mais j'ai suivi un
poulet jusqu'ici. Il courait sur la route, et je roulais à 100
kilomètres-heure, et je n'étais pas capable
de le rattraper. Le fermier répond : Oui, je sais, il a trois pattes.
Trois pattes… Comment ça, trois pattes? Le fermier dit : Je l'ai créé de cette façon. Quand
notre enfant est arrivé, on voulait que les trois membres de notre famille
aient chacun une
cuisse pour le repas. J'ai donc créé des poulets à trois pattes pour avoir le
poulet parfait pour un souper parfait pour les trois membres de ma famille. L'homme intrigué demande au
fermier : Qu'est-ce que ça goûte? Le fermier répond : Je ne
sais pas, je ne suis pas capable de les attraper.
Comme le
fermier, l'industrie a découvert le projet parfait à l'endroit parfait. Un
projet aussi à trois pattes qui peut
aider l'économie, aider les communautés locales et, en même temps, aider à
améliorer l'environnement. Un projet qui
peut être bénéfique pour ces trois piliers de notre société. Ce n'est pas…
Mais, comme le fermier, on n'est pas capables de l'attraper. Plus on voulait aller rapidement de l'avant, plus la
population soupçonnait qu'on cachait quelque chose. On est des spécialistes de l'exploration et on n'a
pas vu au-delà de notre rêve de trouver des hydrocarbures au Québec. On était concentrés sur nos défis techniques et on
n'a pas vu la réalité. La réalité : une découverte est le début, pas la
fin de notre aventure. C'est la production, c'est la raison de vivre de
notre industrie.
La population de Québec avait le droit de savoir
comment nos projets seraient produits ainsi que les coûts et bénéfices. Même un poulet à trois pattes doit être
nourri et déplumé avant d'être mangé. Même les meilleurs projets ont des coûts et des impacts. Je ne suis pas ici au
nom de l'industrie pour demander une levée du moratoire demain. On est d'accord que l'industrie, le gouvernement et la
population ne sont pas prêts pour la production. On n'a plus l'approche
de Nike : Just do it. Mais on
espère, avec l'immense potentiel de notre projet, que la population va voir que
«just stop it» n'est pas non plus la bonne approche.
• (17 heures) •
Je suis ici
pour dire qu'on veut établir une relation constructive et respectueuse avec
tous les intervenants de ce débat. C'est
possible, depuis hier, de consulter le rapport de l'évaluation environnementale
stratégique, basé sur plus de 70
études toutes faites au Québec par des Québécois. Maintenant, ça serait le
temps de discuter du rapport et la possibilité de créer une nouvelle
industrie au Québec, une industrie de production.
Au lieu de ça,
on est ici aujourd'hui pour discuter d'une nouvelle loi pour un deuxième
moratoire. Il y a certainement des
aspects positifs à cette loi. Par exemple, cette nouvelle loi est seulement
pour les basses-terres, le seul endroit
où l'industrie a trouvé une découverte majeure. Donc, ça va éliminer
complètement le moratoire dans plusieurs régions, les régions à explorer. C'est reconnu que le développement
local pourrait être positif et c'est possible d'exploiter ces ressources en toute sécurité en utilisant les
meilleures techniques modernes d'extraction. Le gouvernement a même
investi l'argent des Québécois. On salue et on appuie ces actions qui
supportent le projet de loi.
Cependant,
permettre seulement l'exploration, c'est remettre un statu quo de 50 ans.
Aujourd'hui, en 2014, on croit que ce
n'est plus le temps de revenir en arrière sur un débat qu'on a déjà eu il y a
trois ans. Ce débat a été réglé, et le présent
moratoire en est le résultat. Le vrai débat au Québec, c'est si et comment les
découvertes des hydrocarbures vont être
produites. Notre association supporte le processus du BAPE pour répondre aux
questions sur le si et le comment. On n'a pas l'intention de demander la
permission d'aller de l'avant avec la production avant que ce processus soit
complété. Cependant, on doit s'opposer au
présent projet de loi tel qu'il est présenté. Un, il est discriminatoire. Deux,
il n'est supporté par aucune preuve
scientifique. Trois, il est inutilement punitif. Quatre, il envoie un message
négatif aux investisseurs. Cinq, il n'encourage pas une consultation
constructive.
Vous pouvez
trouver dans la présentation la liste de 10 étapes nécessaires pour créer
l'industrie des hydrocarbures :
1° comprendre les bénéfices des hydrocarbures;
2° développer une expertise;
3° définir les règles du jeu;
4° attirer les investisseurs;
5° faire une découverte;
6° étudier les impacts locaux;
7° exploiter la découverte;
8° utiliser les revenus pour la société;
9° attirer davantage d'investisseurs;
10° en profiter pour faire une autre découverte
et répéter les étapes 5° à 10° plusieurs fois.
Malheureusement,
on est dans une boucle qui répète continuellement les étapes 1° à 5°. Ce projet
de loi, tel qu'il est présenté, nous
renvoie à l'étape 1° pour une seconde fois, et cela, pour la même découverte.
Ce n'est pas un bon message à envoyer.
On demande au gouvernement du Québec de
considérer les recommandations suivantes :
1° la loi
doit avoir comme objectif de créer et supporter un dialogue constructif sur la
possibilité d'une nouvelle industrie de production;
2° jusqu'à la
fin d'un BAPE, considérer une simple extension du moratoire existant et la
permission, dans le cadre de la loi
actuelle, de mettre en oeuvre un projet de démonstration pour permettre
l'exploration, par exemple, à l'île d'Anticosti ou simplement la
création d'un moratoire sur la délivrance des loyers de production;
3° préciser
que les obligations des sociétés sont suspendues pour une durée égale à la
suspension de leurs droits pour s'assurer que la loi n'est pas
discriminatoire et punitive pour ceux qui ont investi de bonne foi dans ces
projets.
Coopérer avec
les processus du BAPE, encourager les projets de démonstration pour aider le…
de l'acceptabilité sociale.
Pendant 400
ans, l'histoire du Canada s'est construite d'est en ouest. Cadillac, Franchère,
et le Père Lacombe, et les coureurs des bois sont les premiers à avoir
apporté l'expertise et du financement à partir de l'est du pays pour le développement de l'Ouest canadien. Cette histoire
est l'héritage qui appartient aux Québécois. Le pétrole et le gaz naturel
de schiste sont aussi un héritage qui
appartient aux Québécois. Aujourd'hui, les pionniers de pétrole et gaz de
l'Ouest veulent redonner au Québec. Avec les Québécois, ils veulent
développer cette ressource...
Le Président (M. Lessard) :
…de vous interrompre. Toutefois, c'est le temps qui est alloué. On va vous
demander de passer vos messages du
reste de votre présentation à travers, peut-être, les deux périodes de
questions, alors, étant donné que votre temps pour le 10 minutes est
alloué. Alors donc, malheureusement, donc, je vous invite à passer vos autres messages du reste de votre texte à travers les
questions que chacun pourra vous présenter. Ça va? Je suis obligé de passer,
malheureusement, au ministre pour sa présentation, à moins qu'il vous...
M. Binnion
(Michael) : Vous avez coupé à… monsieur.
M.
Blanchet :
M. le Président, je suis déçu que vous soyez malheureux de me passer la parole.
Le
Président (M. Lessard) : Alors, je vais passer la parole au ministre
parce qu'on a une période de questions de
prévue. Alors, à moins qu'il vous autoriserait, mais c'est à la discrétion du
ministre. Normalement, on est rendus aux échanges.
M.
Blanchet : On aura l'occasion de... Je suis certain que vous
allez avoir le talent nécessaire de reprendre au bond tout ce que je vous enverrai comme questions pour passer les
messages qui sont les vôtres, et ça me va très bien.
D'abord,
bonjour, madame, monsieur. On s'est vus récemment. Donc, on donne suite dans un
contexte différent à une conversation
qu'on avait eue récemment à mon bureau. Écoutez, je veux revenir sur un point
précis. Les grandes lignes, on peut
en discuter. L'orientation générale de l'association, elle est relativement
connue. Je veux revenir sur la notion de
projet pilote. Je veux connaître le but d'un projet pilote parce qu'il y a deux
buts possibles à un projet pilote. Parce qu'un projet pilote,
fondamentalement, c'est de l'exploration. S'il s'agit d'obtenir des
connaissances générales sur le procédé, les
risques, les effets, c'est, effectivement, déjà passablement documenté. Comme
l'évaluation environnementale stratégique qui l'établit assez
clairement, il y a beaucoup de documentation sur les procédés et ce qui entoure
les procédés. Si c'est pour ça, donc je
m'explique mal la nécessité d'un projet pilote. Si c'est pour savoir ce qu'il y
a à un endroit précis, mais là, à ce
moment-là, un projet pilote n'est pas le bon outil parce que vous ne voudrez
pas savoir ce qu'il y a à un endroit
précis, mais bien sur un territoire plus vaste. Qui n'est probablement pas
l'ensemble du «shale» d'Utica, mais sur un territoire plus vaste.
Donc,
est-ce que le but de ce projet pilote est de déterminer le potentiel d'un
endroit précis ou de tester un procédé?
M. Binnion (Michael) : Alors, pour moi, les projets de démonstration ont trois buts : un,
pour démontrer aux gens du
gouvernement les processus pour la production… La production est un processus
beaucoup plus large que les processus de
l'exploration comme on a une plateforme avec huit puits, pas une plateforme
avec un puits, avec les usines pour le processus
pour le gaz, pour les pipelines et les autres choses comme ça. Et le premier
but, c'est de démontrer ça au gouvernement, mais aussi de démontrer ça
aux communautés et, trois, pour l'industrie. Maintenant, on veut établir la
rentabilité de notre projet, et c'est possible, avec un projet pilote, de
savoir la rentabilité de notre projet.
M.
Blanchet : Mais je veux être sûr de bien comprendre. Vous
voulez tester davantage un procédé ou les versions d'un procédé que de
déterminer le potentiel d'un lieu précis, déterminer ou faire... cet exemple du
procédé autant à l'attention du gouvernement
que de l'industrie, que des communautés. C'est bien ça? C'est un objectif de
démonstration d'un processus, et non pas un objectif d'établissement du
potentiel.
• (17 h 10) •
Mme Domingue (Marie-Chantal) : Si je peux me prononcer, effectivement c'est
plus... pas de nécessairement trouver
un potentiel. Présentement, il y a une découverte qui a été faite. La
découverte, nous, on doit aller de l'avant pour savoir exactement c'est quoi, cette découverte-là, puisqu'il y a
plusieurs étapes, là, en ce qui concerne une découverte. You can talk about the different…
M.
Binnion (Michael) : …resources?
Mme
Domingue (Marie-Chantal) : Yes.
M. Binnion (Michael) : Oui. Il y a peut-être six types de ressources. Il y a des ressources
découvertes, qui est seulement le pétrole à gaz… qu'un crochet a trouvé
à la surface. C'est clair, il y a une ressource là, c'est la ressource
découverte. La prochaine étape, c'est la «resource contingent». C'est la
ressource qu'on a trouvée à la basse-terre maintenant.
C'est prouvé, aux basses-terres, que c'est possible d'extracter la ressource
avec la technologie aujourd'hui. C'est
une grande étape, et on a dépensé probablement plus de 200 millions de
dollars pour prouver cette étape. Après ça, c'est la réserve «probable». Les réserves «possible, probable, proven».
Et la dernière étape, c'est la réserve «producing», pour la production de réserves. Il y a beaucoup
d'étapes. Aujourd'hui, au Québec, la ressource est la ressource découverte.
C'est clair que la ressource est là, mais ce
n'est pas clair qu'on peut extracter la ressource avec la technologie
aujourd'hui, sauf pour une
découverte, Haldimand, en Gaspésie, et une autre, d'Utica, aux basses-terres.
Et, un projet pilote, on peut avancer notre projet entre la «resource
contingent» et la réserve «possible, probable, proven».
M.
Blanchet : Donc, ce que vous appelez projet pilote, c'est de
l'exploration dans le but de prouver la réserve.
M. Binnion
(Michael) : Prouver, oui. C'est
parce que la définition pour réserve, c'est la ressource qu'on peut démontrer, pour un ingénieur indépendant, que
c'est possible de produire la ressource dans une façon rentable. Et on doit
démontrer ça à un
ingénieur pour le marché, pour les banques, pour les investisseurs, pour avoir
l'argent pour produire la ressource pour les réserves.
M.
Blanchet : Je vous amène complètement ailleurs. Ça ne s'est
pas bien passé au début de l'exercice. On nous conte des histoires
désolantes d'entreprises qui auraient été cavalières avec des résidents, des
citoyens. Vous n'avez peut-être pas la même
perspective là-dessus, puis je comprendrais très, très bien ça, mais quelle est
votre explication à cette réaction
forte de la population contre ce projet-là? Nous, entre nous, on se donne des
explications, mais, de votre point de vue, pourquoi est-ce que ça a
dérapé comme ça?
M. Binnion
(Michael) : En 2009, en 2010 dans l'histoire de notre dossier?
Des
voix : …
M. Binnion (Michael) : O.K. Pour moi, en 2010, on a beaucoup de choses au Québec. Il y a deux
enquêtes pour le gouvernement, mais
aussi c'est très important, le déversement de BP, Macondo, le déversement de BP
au golfe du Mexique. Le déversement
au golfe a créé les nouvelles par tout le monde que l'industrie du pétrole et
gaz ont des risques. C'est sur la
télé 24 sur 24. Et aussi, en même temps, il y a le film Gasland avec les
feux dans les robinets, et c'est une image qui était très mauvaise pour notre industrie, l'idée que l'industrie a créé
le feu dans les robinets. Aujourd'hui, aux États-Unis, c'est clair,
toutes les études ont prouvé que le feu dans les robinets, c'est à cause du gaz
naturel, comme l'étude pour l'évaluation
environnementale stratégique qui a prouvé, au Québec, il y a beaucoup de gaz
naturel dans la nappe phréatique au
Québec, aux basses-terres. Mais l'image était très mauvaise pour nous. L'image
des déversements est très mauvaise pour nous, et les inquiétudes pour le
gouvernement... C'est une coïncidence, mais ce n'était pas bon pour nous aussi.
Le
Président (M. Lessard) : Parfait. On a le député de Repentigny, qui
veut le faire. On a moins de 30 secondes... 30 secondes.
M.
McKay : Bien, enfin, je veux peut-être en profiter pour vous
féliciter pour les efforts et les progrès que vous faites en français parce que, depuis quelques
années, on voit que vous avez travaillé fort de ce côté-là. Alors,
félicitations.
Peut-être
qu'un peu plus tard vous aurez l'occasion de nous rappeler un peu votre
histoire, là, disons, autour des coureurs
des bois et... parce que moi, je vous dis, je trouve un peu cette
comparaison-là un peu paternaliste, de dire qu'au début de la colonie...
Le
Président (M. Lessard) : ...tout le temps qu'on avait du côté
gouvernemental. Excusez-moi de vous interrompre, mais ça fait partie des
règles du temps alloué.
M.
McKay : Alors, sûrement que le député de Laurier-Dorion va
aimer ça parce que c'est toute l'histoire de votre Canada qui est en
cause.
Le
Président (M. Lessard) : Oui. Alors, si vous voulez, pour respecter le
temps qui nous est accordé, donc, on va passer du côté de l'opposition officielle pour une période de neuf
minutes, et c'est le député de Mégantic, donc, qui va adresser les
questions à nos invités.
M.
Bolduc
(Mégantic) : Merci, M. le Président. J'aime
beaucoup entendre ce que vous nous dites, mais vous passez à travers des éléments très techniques pour
faire le développement de votre industrie. En premier lieu, je voudrais comprendre de votre part… Est-ce que vous
préconisez, par exemple, que le moratoire nous amène à une loi des hydrocarbures qui permettrait de définir les
règles du jeu pour votre industrie? Comment vous voyez l'évolution… À partir
d'aujourd'hui, là, comment vous voyez l'évolution de ce qu'on devrait mettre en
place pour que l'industrie puisse éventuellement,
de façon sécuritaire, en collaboration avec le milieu, la population, se
développer d'une façon rentable, économique et équitable pour l'ensemble
de la société?
M. Binnion
(Michael) : Oui, mais on n'est pas contre une pause, on n'est pas contre le
moratoire, le présent moratoire, on est
contre la loi n° 37 pour le plan technique. Un moratoire de cinq ans,
c'est un mauvais message pour les marchés
internationaux. La loi n'est pas claire si notre obligation est suspendue pour
une durée égale de notre droit. Pour nous, la loi est... On peut
accepter un moratoire pour la durée du BAPE, par exemple, on n'est pas contre.
Le Président (M.
Lessard) : M. le député de Mégantic.
M.
Bolduc
(Mégantic) : Oui. Vous n'êtes pas contre. Ce
que vous êtes en train de nous dire, c'est que le temps qu'on fasse des études, l'étude environnementale
stratégique, l'étude du BAPE… puis qu'après on continue à faire du développement technologique pour essayer de
définir les meilleures méthodes d'opération, les meilleures technologies
utilisables dans un environnement sécuritaire et acceptable pour la population.
M. Binnion
(Michael) : Oui.
M.
Bolduc
(Mégantic) : Parce que vous semblez avoir
relié le fait qu'au début, quand il y a eu des études d'exploration de
faites au Québec, c'est qu'on s'est soucié de la technologie et on n'a pas pris
le soin d'informer la population. Vous avez mentionné ça au début de votre
présentation.
M. Binnion
(Michael) : Comme j'ai dit,
jamais je n'ai pensé que la découverte n'était pas la fin... le bout de la
ligne. J'ai foré mon premier puits quand
j'avais 30 ans. Regardez-moi, monsieur, je n'ai pas 30 ans aujourd'hui. Pour
nous, la découverte était le bout de
la ligne, mais aujourd'hui je comprends bien, on comprend bien que la
découverte est le début, et pas la
fin de notre aventure au Québec. Oui, on a fait une erreur, c'est clair, c'est
clair pour nous, et aujourd'hui on veut travailler avec le BAPE, avec le
gouvernement, avec les communautés, avec la population, et on est patients.
• (17 h 20) •
M.
Bolduc
(Mégantic) : Donc, vous ne voyez pas d'objection à passer à
travers ces étapes-là. Ce que vous nous dites aujourd'hui, là, c'est : Donnez-nous la chance de vous le
démontrer. On va travailler avec tout le monde de façon harmonieuse, de
façon à produire dans un environnement sécuritaire. Je comprends bien? Ça va
comme ça?
Maintenant,
vous avez parlé de démontrer, via des projets pilotes… de démontrer les étapes
du processus. Est-ce que,
l'extraction du pétrole ou du gaz naturel dans la vallée du Saint-Laurent, pour
vous, parce qu'il y a une population relativement
dense, parce qu'il y a beaucoup d'agriculture, parce qu'il y a beaucoup de
conditions spécifiques, vous devez démontrer
avec des outils de façon spécifique comment on va le faire ici, au Québec, en
opposition au Wyoming, ou au Dakota
du Nord, ou ailleurs? Est-ce que c'est ça que vous essayez de nous expliquer
avec le projet pilote, de comment on va bien le faire ici,
spécifiquement au Québec?
M. Binnion
(Michael) : Oui. On pense que
c'est possible de démontrer, avec un projet de démonstration à la vallée
du Saint-Laurent, aux basses-terres, que
notre industrie est «low impact» dans les quartiers des fermes. On a deux
tournées des agriculteurs pour les
Québécois, de visiter les fermes en Alberta, et toujours les fermiers du Québec
étaient presque choqués parce que
c'est presque impossible de voir les puits, de voir les impacts sur les terres,
sur les quartiers des fermes. Actuellement,
vraiment, c'est plus facile de voir les impacts dans les quartiers de nature
que dans les quartiers des fermes.
M.
Bolduc
(Mégantic) : O.K. Donc, ce que vous nous dites, c'est que
l'impact dans l'agriculture, par exemple, est tellement faible que c'est presque difficile, dans certains cas, de
l'observer. O.K.? Donc, est-ce que vous préconisez qu'ici on va devoir s'ajuster à l'environnement
parce que le climat, parce que le fleuve Saint-Laurent, parce qu'il y a toutes
sortes d'autres conditions et le... entre
autres, les communautés veulent comprendre et vous devez les rassurer? Comment
vous comptez le faire, ça? En faisant le
projet pilote, vous savez, la relation entre la population et l'élaboration du
projet, est-ce que vous avez un plan
qui va vous permettre de rassurer la population, une fois que nous, on
s'entend, là, à comprendre comment vous allez le faire?
M. Binnion (Michael) : On est pour un
projet de démonstration, absolument. C'est très facile de voyager à l'Ouest canadien ou aux États-Unis et de voir les
projets de production. Mais «seeing is believing», et, si on a un projet de
démonstration au Québec, c'est très facile pour les Québécois de voir ce projet
au Québec, et ça ne va pas être nécessaire de voyager à l'Ouest canadien
de le voir.
M.
Bolduc
(Mégantic) : Donc, vous voulez vous servir de ce projet-là
pour rassurer les Québécois et leur permettre une visibilité en même temps que vous faites l'évolution technologique
jusqu'à la réserve qui peut être extraite, vous apprenez en même temps et vous échangez avec la population
locale la compétence technologique et la sécurité de ces projets-là.
M. Binnion (Michael) : C'est exact.
M.
Bolduc
(Mégantic) :
C'est ça que vous nous décrivez?
M. Binnion (Michael) : Oui, exact.
M.
Bolduc
(Mégantic) :
O.K. Combien de temps vous croyez que ça peut prendre, ça?
M.
Binnion (Michael) : Un projet de
démonstration, probablement on doit planifier pendant un an et, probablement,
on doit prendre un autre an pour faire le projet de production. Pour nous,
c'est possible de faire ça complètement en coopération avec les processus du
BAPE.
M.
Bolduc
(Mégantic) : Complètement en... O.K. En deux ans. Une fois
que le BAPE est approuvé, vous nous dites
qu'en deux ans vous êtes capables de faire le développement et l'éducation et
informer la population sur un projet spécifique.
M. Binnion (Michael) : Oui. Mais c'est un
«educated guess», oui.
M.
Bolduc
(Mégantic) :
Merci beaucoup.
M. Binnion (Michael) : Merci, monsieur.
Le
Président (M. Lessard) : Merci beaucoup. Donc, on va passer au
deuxième groupe… groupe de deuxième opposition,
donc le député de Nicolet-Bécancour, qui est porte-parole officiel. Alors, vous
avez 3 min 48 s pour adresser la parole, donc, à…
M.
Martel :
Merci, M. le Président. Bonjour à vous deux. Premièrement, un peu comme mon
collègue, M. Binnion, je veux vous
féliciter pour l'amélioration de votre français. Je vous ai vu ça fait
peut-être trois ans, puis ce n'était pas cette qualité-là. Je veux aussi souligner votre ténacité. S'il y a des gens
qui doutent que vous doutez du potentiel québécois, je pense que vous avez confondu tous les
sceptiques par rapport à ça. Puis, en même temps, vous avez eu quand même
une bonne nouvelle avant les fêtes, je
pense. Vous avez un ancien collaborateur, André Boisclair, qui est maintenant
rendu un collaborateur du ministre de
l'Environnement. Donc, c'est possible que vous ayez une oreille un peu plus
attentive au niveau du cabinet.
Un des griefs
qu'on a beaucoup par rapport au… une des craintes qu'on a par rapport à
l'exploitation, c'est qu'on se
dit : Au Québec, c'est dans des zones habitées. Par exemple, le long du
Saint-Laurent, il y a des municipalités, c'est habité pratiquement partout, puis ça fait peur, quand même, aux
citoyens. En Amérique du Nord, là, est-ce qu'il y a des endroits qui sont comparables où il y a quand même
beaucoup d'exploitation dans des zones rurales, là, habitées comme on
connaît au Québec?
M. Binnion (Michael) : Le corridor entre
Calgary et Edmonton est très similaire du corridor entre Québec et Montréal, beaucoup similaire. Le quartier des
fermes, la terre est très plate et très… Juste un exemple, dans le… seulement
le Red Deer County, il y a plus de puits en Red Deer County que pour
probablement tout le Québec.
M.
Martel : Est-ce que
c'est du gaz de schiste? Puis est-ce que c'est par fracturation aussi, là?
M. Binnion
(Michael) : Il y a un projet de
pétrole de schiste dans la banlieue de Calgary maintenant avec les puits
horizontaux, avec la fracturation «multistages», fracturation... J'ai un projet
à Vulcan, Alberta, et on a fait un puits horizontal
avec les fracturations multiples. Et aussi Questerre a un projet en
Saskatchewan, près des petites villes et dans le quartier des fermes, avec les puits horizontaux. Et il y a beaucoup,
beaucoup, beaucoup d'exemples dans le quartier des fermes dans l'Ouest
canadien.
M.
Martel :
Juste une petite dernière. C'est quoi, le niveau d'acceptabilité sociale dans
les endroits que vous nous parlez?
Est-ce que vous vivez les mêmes craintes qu'au Québec ou c'est une industrie
qui procède avec l'accord de la population?
M. Binnion (Michael) : Pour les fermiers,
on doit forer un puits, on doit fracturer le puits. Probablement, ça fait un ou deux mois pour ça, et il y a des petits
désagréments pour ça, le bruit, etc., et les camions, etc. Mais, après ça,
20 ou 30 ans de tranquillité et 20 ou 30 ans
de chèques. Et les fermiers, normalement, pour nous, probablement plus de 90…
Le Président (M. Lessard) : Ça va
terminer nos échanges, M. Binnion.
M. Binnion (Michael) : …qui aiment les
chèques comme ça.
Le
Président (M. Lessard) : Ça va terminer nos échanges, M. Binnion.
Merci beaucoup, donc, à votre présentation. Merci de vos échanges.
On va
suspendre quelques minutes et inviter, donc, le prochain groupe à prendre
place, qui est le Centre québécois du droit de l'environnement.
(Suspension de la séance à 17 h 29)
(Reprise à 17 h 30)
Le Président (M. Lessard) : Alors,
nous reprenons nos travaux. Donc, on accueille aujourd'hui le Centre québécois du droit de l'environnement. Alors,
messieurs, si vous voulez vous présenter pour les fins d'enregistrement
de nos travaux. Et bienvenue.
Centre québécois du
droit de l'environnement (CQDE)
M. Baril
(Jean) : Oui, merci. Bonsoir.
Merci de nous accueillir. Mon nom est Jean Baril. Je suis avocat, docteur
en droit. Je suis accompagné par mon
collègue Hugo Tremblay, qui est, lui aussi, avocat et docteur en droit. À des
fins de transparence, je dois aussi
vous aviser que nous avons été, tous les deux, associés à la Chaire de
recherche du Canada en droit de
l'environnement pour réaliser les recherches et la rédaction de trois études
juridiques pour le compte du comité responsable de l'évaluation
environnementale stratégique.
Nous sommes
aussi administrateurs bénévoles du Centre québécois du droit de
l'environnement, un organisme que certains d'entre vous connaissent, qui
existe depuis près de 25 ans, sans but lucratif et toujours sans financement public. Le CQDE considère
que le projet de loi n° 37 est prématuré et inopportun, puisqu'il fait fi
du processus d'évaluation environnementale stratégique en cours,
autorise les travaux de recherche à l'aide de sondages stratigraphiques sans définir en quoi consiste cette notion, risque
d'affaiblir les mécanismes d'autorisation environnementale existants par ses
ambiguïtés et reproduit une limite
territoriale et géologique peu conforme avec les impératifs de protection
environnementale de l'ensemble du territoire québécois.
Pour ces raisons,
le CQDE demande le retrait de ce projet de loi jusqu'à la conclusion du
processus d'évaluation environnementale
stratégique par le dépôt du rapport du BAPE à cet effet. Subsidiairement, si
les parlementaires décident d'aller
de l'avant malgré tout, nous proposons certaines modifications visant à
bonifier et renforcer la portée du moratoire recherché.
Vous le
savez, une évaluation environnementale stratégique sur les gaz de schiste a été
amorcée en 2011 dont le rapport
synthèse, rendu public hier, fera l'objet d'une consultation publique par le
BAPE à partir du 31 mars prochain. Le
CQDE constate que le projet de loi précède donc l'achèvement du processus
d'évaluation environnementale stratégique sur les gaz de schiste. Cette façon
de faire ne respecte pas les meilleures pratiques en cette matière ni les
principes d'accès à l'information et de participation du public à la
prise de décision reconnus, entre autres, par la Loi sur le développement
durable.
Le CQDE
rappelle que le comité responsable de l'EES a élaboré des propositions
d'encadrement législatif pour l'industrie
du gaz de schiste sur la base de cinq scénarios qui illustrent sur un horizon
de 25 ans l'ensemble des niveaux de développement plausibles de cette
industrie. Ces scénarios vont de l'interdiction complète et permanente jusqu'au
développement extensif et rapide de
l'industrie et ont été utilisés par le Comité de l'EES pour mener l'ensemble de
ses analyses et rédiger son
rapport — vous
pouvez trouver dans le rapport de l'EES, d'ailleurs, les cinq scénarios
mentionnés — alors
que, de son côté, le projet de loi propose
un moratoire qui serait effectif pour une période maximale de cinq ans ou
jusqu'à l'entrée en vigueur d'une loi
sur les hydrocarbures, loi qui a été annoncée par deux ministres différents
pour la présente session. Le
gouvernement semble donc décider tant de l'opportunité et de la durée du
moratoire que des règles devant éventuellement encadrer l'industrie sans
attendre la consultation publique sur les différents scénarios développés dans
l'EES, dont celui d'un moratoire de 25 ans, ni le rapport du BAPE qui suivra
les consultations de la population.
Le projet de loi entend aussi imposer un
moratoire. Cependant, il permet à l'industrie de poursuivre certaines activités, dont les sondages stratigraphiques.
Aucune définition n'accompagne cette notion nouvelle ni aucune justification
quant à la nécessité ou l'utilité de
permettre de tels travaux malgré le moratoire annoncé, le tout sans attendre
les résultats de l'EES et les travaux du BAPE quant à l'opportunité de
permettre de tels travaux.
Par ailleurs,
les opérations visées par le terme «sondage stratigraphique» sont, tout
simplement, des opérations de forage
à des fins de recherche des hydrocarbures. D'ailleurs, les rapports
d'inspection du MRN à l'égard d'opérations visées par le terme «sondage stratigraphique» démontrent que ces
opérations sont des travaux de forage, le tout tel qu'il appert du document formant l'annexe II de notre
mémoire, où vous voyez des photos des rapports d'inspection, et c'est
des forages faits par des foreuses, des équipes de foreurs, etc.
La
description du projet type d'un puits gazier fournie par le CIRAIG dans le
cadre toujours de l'EES ne contient aucune
trace de «sondage stratigraphique». Le rapport synthèse, publié hier, de près
de 300 pages, ne mentionne qu'à un endroit
cette notion, et là c'est lorsqu'il cite le projet de règlement sur le
prélèvement des eaux et de leur protection. Ce terme ne semble utilisé, donc, que par le ministère, puisque la
nomenclature utilisée par l'industrie ne réfère pas à des activités de sondage stratigraphique.
L'impossibilité pratique de distinguer les opérations visées par ce terme,
«sondage stratigraphique», des travaux de forage à des fins de recherche
transparaît aussi du texte même du projet de loi.
La version
anglaise de l'article 1 indique que les termes «sondage stratigraphique» se
traduisent par «stratigraphic drilling».
Or, «drilling» se traduit en français par le mot «forage», tel que repris d'ailleurs
à l'article 1 du projet de loi. Le concept
de sondage stratigraphique n'est pas non plus utilisé dans la Loi sur les mines
et ses règlements afférents. Les activités
visées par ces termes sont clairement des travaux assujettis à l'octroi d'un permis
de forage émis par le ministère des Ressources naturelles conformément à
l'article 160 de la Loi sur les mines, qui est le seul permis en vertu de la
Loi sur les mines qui permet d'aller
faire des travaux dans le sous-sol québécois. Le CQDE constate donc que
l'utilisation du terme «sondage stratigraphique» ne décrit pas
adéquatement les opérations de forage visées par ce terme et que la rédaction actuelle du projet de loi ne peut que générer des
incertitudes et des incohérences quant à l'application des mécanismes
d'encadrement et de surveillance de la Loi sur les mines.
Par ailleurs,
depuis un décret publié sous l'ancien gouvernement le 10 juin 2011 — et je cite — «les travaux de forage autorisés en vertu de la Loi sur les mines
destinés à rechercher ou à exploiter du pétrole ou du gaz naturel dans le
shale, communément appelé schiste, et
toute opération de fracturation destinée à rechercher ou exploiter du pétrole
ou du gaz naturel sont assujettis à
l'obligation préalable de demander et obtenir du MDDEFP un certificat
d'autorisation délivré en vertu de l'article 22 de la Loi sur la qualité
de l'environnement».
Au même moment, le Règlement relafif à
l'application de la LQE avait été modifié afin d'introduire dans la procédure d'émission du certificat d'autorisation
des obligations particulières en termes d'information et de consultation
du public et des municipalités. Le même
jour, est entré en vigueur le Règlement sur la transmission de renseignements
liés à l'exécution de certains
travaux de forage et de fracturation de puits gaziers ou pétroliers, qui impose
des obligations de transmettre des
renseignements au ministre, à tous les titulaires de certificats d'autorisation
portant sur ces travaux. Le CQDE
constate que le droit environnemental actuellement en vigueur regroupe les
essais d'injectivité et les opérations de fracturation sous les termes
«toute opération de fracturation destinée à rechercher ou à exploiter du
pétrole ou du gaz naturel». Effectivement,
l'essai d'injectivité, mentionné dans le projet de loi, et l'opération de
fracturation consistent tous deux en l'injection de liquide pressurisé
dans des formations géologiques en relation avec la fracturation.
Le CQDE
signale que le texte de l'article 1 du projet de loi ignore cet état de fait et
semble distinguer une opération de
fracturation d'un essai d'injectivité, ainsi qu'un sondage stratigraphique d'un
forage. En introduisant ces distinctions, c'est l'ensemble des mécanismes de surveillance,
d'autorisation préalable, d'acquisition de connaissances, d'information et de consultation du public mis en place en juin
2011 qui pourraient être écartés lors de l'exécution des travaux de sondage
stratigraphique ou de tests d'injectivité,
ce qui constitue, selon nous, un net recul sur la situation actuelle. Par
ailleurs, le rapport synthèse de
l'EES, rendu public hier, ne fait… on ne retrouve aucune mention d'essai
d'injectivité dans un rapport de près de 300 pages.
Finalement, le projet
de loi interdit les forages, les essais d'injectivité et les opérations de
fracturation, mais seulement dans le
schiste. Pourtant, les impacts de ces travaux sur l'air, l'eau et le sol, tels
que définis dans la LQE, sont les
mêmes, quelles que soient les formations géologiques visées dans le sous-sol
québécois. Du point de vue environnemental, cette limite arbitraire ne fait pas vraiment de sens et rend plus
difficile la mise en oeuvre des divers mécanismes prévus dans la législation environnementale. Pour le
CQDE, il apparaît peu approprié que ce type d'ouvrages et de techniques pouvant avoir de forts impacts environnementaux
puissent être autorisés partout ailleurs que sur le territoire des municipalités
indiquées à l'annexe 1 et pour explorer toute autre formation géologique que le
schiste.
En
conclusion, face à l'ensemble de ces constats, le CQDE recommande de retirer
l'actuel projet de loi n° 37 et d'attendre
l'achèvement du processus d'EES en cours, dont la consultation du public à cet
effet par le BAPE et la production de
son rapport, afin de pouvoir ensuite présenter à l'Assemblée nationale un cadre
législatif reflétant les diverses consultations publiques menées ces dernières années. L'acceptabilité sociale des
décisions prises serait, selon nous, alors renforcée.
Le
Président (M. Lessard) : Merci. Donc, vous avez terminé. Il vous
restait encore une belle minute. Alors donc, on va essayer de la faire profiter aussi au débat. On va aller du côté
gouvernemental, le député de Repentigny, donc, qui va adresser les questions. Ah! vous… D'accord, il y a
un changement à l'horaire, la députée de Mirabel, donc, qui va prendre
la parole au préalable. La parole est à vous.
• (17 h 40) •
Mme
Beaudoin : Merci, M. le Président. Me Baril, Me Tremblay,
merci pour la présentation de votre mémoire. Étant avocate moi-même, je
trouve que vous vous démarquez, puisque vous apportez quand même un volet
juridique important. J'aimerais ça que vous
puissiez élaborer sur ce que vous dites, là, concernant la Loi sur la qualité
de l'environnement. À la page 19 de
votre mémoire, vous dites : «En outre, les concepts de "sondage
stratigraphique" et de "test
d'injectivité" ne sont pas utilisés dans la Loi sur la qualité de
l'environnement et sa réglementation actuelle et leur introduction dans le projet de loi pourrait
entraîner des difficultés d'application et nuire à l'information et à la
participation du public.» Pour les
fins d'enregistrement, ce serait important d'expliquer, pour les gens qui nous
écoutent, de quoi vous parlez exactement, là.
M. Baril (Jean) : Bon, vous savez — c'est ce qu'on indique dans le mémoire — en 2011, suite à la controverse des
gaz de schiste, le gouvernement de l'époque avait été obligé de réagir parce
qu'une des plaintes des citoyens, des municipalités,
c'est qu'ils n'étaient pas informés du début des travaux. Il y avait des maires
qui disaient : Bien, ça ne se peut
pas, il y a des tours de forage qui s'érigent dans notre municipalité, puis on
n'a jamais été même informés de cette chose-là.
Au niveau environnemental, les citoyens étaient aussi choqués de s'apercevoir
qu'à l'époque tous travaux de forage,
incluant la fracturation hydraulique, ne nécessitaient aucune autorisation
environnementale de la part du ministère de l'Environnement malgré l'ampleur connue, reconnue ailleurs de ce type
de travaux là. Sans dire que c'est la fin du monde, là, mais c'est quand
même des travaux qui ont un certain impact sur l'environnement, l'EES le
démontre bien.
Donc,
il y a eu des avancées marquantes parce que c'est le seul certificat
d'autorisation, celui qui est émis pour les forages, la fracturation, où les citoyens peuvent s'attendre d'être
consultés, d'être informés, et même leur municipalité. Ça ne se fait pas pour les autres types de
certificats d'autorisation. Les renseignements… le règlement sur la transmission
de renseignements, c'était à des fins
d'acquisition de connaissances aussi. Le gouvernement de l'époque avait
dit : S'il y a des forages, s'il
y a des travaux, que ça demande un certificat d'autorisation, il va y avoir un
certain nombre d'informations sur les
produits utilisés, les méthodes, les techniques, etc., qui vont être
obligatoirement données au ministre. Ça s'applique aux forages et aux
fracturations.
Notre crainte, parce qu'étant avocat… Les mots,
vous savez comment c'est important. Et, moi, ce qui m'a amené en droit — une vocation tardive — c'est en 1999, justement un projet de
construction d'une centrale hydroélectrique sur la rivière Batiscan où le ministère de
l'Environnement avait donné une autorisation sur la base que ce n'était pas un
réservoir de plus de
50 000 mètres carrés qui était créé, mais une aire de retenue d'eau.
Ça ne changeait pas beaucoup de choses pour
la faune, la flore, les citoyens que ça soit une aire de retenue d'eau, mais le
certificat avait été déployé sans passer par les audiences publiques du BAPE. Ça s'est ramassé devant la Cour
d'appel, justement avec le ministre Bégin, qui nous avait appuyés, et
c'est comme ça que ça s'est réglé.
Les
mots ont un sens. Et ce qui nous inquiète, c'est que les mots qui sont introduits
sans définition dans le projet de
loi, «sondage stratigraphique», «essai d'injectivité», qu'on ne retrouve pas
nulle part ailleurs, ouvrent la porte à des travaux qui ne vont pas
permettre l'information, la consultation, la transmission de renseignements.
Donc, tous les mécanismes qui ont été mis en
place graduellement avec la controverse des gaz de schiste qui n'ont toujours
pas été mis en oeuvre parce qu'il n'y
a pas eu aucune demande de certificat d'autorisation risqueraient d'être
écartés. Donc, c'est pour ça qu'on
dit que l'introduction de ces notions nouvelles là qui n'ont pas été discutées
par l'EES, qui ne se ramassent pas dans le rapport, qui n'apparaissent pas dans le rapport type... Le CIRAIG, là,
qui est quand même quelque chose de reconnu, qui a dressé un portrait de c'est quoi, un puits type,
là, de l'accès, là, routier jusqu'à la fermeture, nulle part n'a mentionné ce
type d'activité là. Donc, pourquoi — la question — risquer
d'introduire ces nouvelles notions là et de nuire aux rares avancées que les
questions des gaz de schiste ont pu permettre au niveau légal au Québec ces
dernières années?
Mme
Beaudoin : Merci.
Le
Président (M. Lessard) : …nos échanges, et je crois que votre… Vous
pouvez compléter l'information…
M.
Tremblay (Hugo) :
Oui. Mme la députée de Mirabel, si vous me permettez, en fait... En fait, oui,
je continuerais ce que mon collègue disait. En fait, je voulais
simplement, au niveau purement technique, là, vous parler des règles d'interprétation des lois, en fait. La façon dont
est rédigé l'article 1 du projet de loi fait en sorte que, par exemple, les
essais d'injectivité, qui sont
essentiellement des opérations de fracturation mais à très faible volume,
semblent être exclus, si on veut, du vocable plus général d'opérations
de fracturation. En fait, selon les règles d'interprétation des lois normales, lorsqu'un juge lirait cet article-là, il se
demanderait pourquoi les essais d'injectivité ne sont pas inclus dans le sous-paragraphe 2°, qui traite de façon plus
générale des opérations de fracturation. Et c'est un petit peu la même chose,
le même problème avec la question des sondages stratigraphiques.
Et la raison
pour laquelle ça peut causer un problème, que ces énumérations-là font en sorte
de distinguer les essais d'injectivité
et les sondages stratigraphiques des termes, des vocables plus généraux que
sont les forages et les opérations de
fracturation. C'est parce qu'en fait, comme le disait mon collègue, ces
concepts très spécifiques qui sont apparus tout à coup avec le projet de
loi ne se retrouvent pas dans l'article 2, paragraphe 6°, du règlement
d'application de la LQE.
Le
Président (M. Lessard) : Alors, si vous voulez poursuivre. Je ne sais
pas si vous voulez toujours partager le temps. Là, on va aller à notre
collègue, maintenant, de Repentigny pour le côté gouvernemental, toujours.
M.
McKay :
Merci. Alors, bonjour à vous deux. Bien, en fait, moi, j'ai quelques
informations qui nous viennent du
ministère des Ressources naturelles et... En tout cas, je vous remercie pour
votre intervention aujourd'hui parce que, dans le fond, jusqu'à maintenant je pense que vous êtes le premier
intervenant qui nous permet de rentrer vraiment dans le libellé du projet de loi et qui... Vos
interventions vont nous être très utiles au moment de l'étude article par
article parce que ce que le MRN, le
ministère des Ressources naturelles, considère comme un sondage stratigraphique,
ce sont des sondages réalisés avec
des petites foreuses au diamant qui font des trous de l'ordre de quatre pouces
de diamètre, dont le but est de récupérer des échantillons de roc.
Et il
semblerait qu'il y ait des milliers de tels sondages qui sont réalisés chaque
année au Québec, et, en effet, ces sondages-là ne sont pas assujettis à
l'article 22. Donc, on n'exige pas de certificat d'autorisation, et le
ministère des Ressources naturelles non plus n'exige pas de permis. Et la
raison pour laquelle on n'en exige pas, c'est que l'impact environnemental est considéré négligeable. En
fait, on libère, on me dit, quelques centaines de kilos de roche dans quelques
centaines de litres d'eau. Il n'y a pas...
peu d'additifs de forage, et, lorsqu'il y en a, ils sont supposés… ils sont
reconnus étant «eco-friendly», en
anglais, Donc, je ne sais pas si on peut traduire par «écogentil». Et on me dit
que, dans le cas de l'exploration de pétrole et gaz, ils sont tout de
suite cimentés à la fin du forage, donc...
Par contre,
ce que je retiens, c'est qu'en effet ça voudrait dire que, dans le cadre du
territoire assujetti au moratoire, l'industrie
pourrait quand même aller réaliser des forages, mais, comme je vous dis, ce
sont des forages qui sont réputés ne
pas avoir d'impact au niveau de l'environnement. Par contre, il y aurait
potentiellement le problème que vous soulignez, c'est-à-dire que les citoyens et citoyennes concernés, disons,
n'auraient pas à être avisés parce que le ministère lui-même ne serait toujours pas avisé, alors
qu'actuellement, comme on ne fait pas la distinction, il y a un certificat
d'autorisation qui doit être demandé
dans tous les cas. Alors, je pense que ça va être une matière à réflexion pour
le ministre puis les membres de la commission.
Mais, en ce
qui concerne votre proposition de base, qui était de surseoir à ce projet de
loi, en fait le projet de loi, c'est
un... C'est justement, le moratoire, son but… Et vous avez peut-être consulté
le projet de loi que j'avais déposé lorsque j'étais porte-parole de l'opposition officielle, c'était tout à fait le
même esprit, c'est-à-dire dans l'attente... on considère qu'on n'a pas actuellement l'encadrement
législatif et réglementaire adéquat pour encadrer l'industrie des gaz de
schiste. Dans l'intervalle qu'on se
donne, tout ça, donc, qu'il y ait le BAPE, l'EES et éventuellement une loi qui
viendra concerner directement les
hydrocarbures, pendant toute cette période-là, on s'assure que les permis de
recherche de gaz de schiste soient...
Le permis n'est pas arrêté, l'exercice du droit est suspendu pendant cette
période-là. Et je pense que, dans notre esprit, ça ne préjuge en rien du fait d'un scénario d'un moratoire, par
exemple, de 25 ans à la fin du processus. Donc, on s'assure, tout simplement, pendant cette
période-là d'un maximum de cinq ans, pendant que tout ce travail-là se fait...
Le Président (M. Lessard) :
Malheureusement, c'est tout le temps qu'on avait, là, pour... On va essayer de continuer les échanges en, peut-être, raccourcissant
les questions si on veut avoir des réponses. Alors, on va aller du côté
de l'opposition officielle, le député de Laurier-Dorion, porte-parole officiel,
qui va s'adresser à nos invités.
• (17 h 50) •
• (17 h 50) •
M.
Sklavounos : Merci,
M. le Président. Alors, Me Baril, Me Tremblay, merci beaucoup de votre
présence. J'avoue que, si quelqu'un qui
n'est pas formé en droit a essayé de suivre votre présentation… Je suis
d'accord avec ma collègue que c'est
plutôt compliqué pour le commun des mortels. Je suis avocat également. Juste
résumer rapidement, là, je vais
essayer de le faire, de… Je ne veux pas utiliser le terme «for dummies», là,
mais on va essayer de rendre ça plus simple.
Les essais d'injectivité, c'est de la fracturation. Puis les sondages
stratigraphiques, c'est des forages, dans le fond. Ça fait qu'en employant des termes différents pour
dire la même chose on crée de la confusion. Puis, au niveau des principes
d'interprétation de droit, là, on n'utilise
pas des termes spécifiques, à moins que notre but, c'était de vouloir faire ou
dire quelque chose de différent que
le terme plus général, là. Juste pour les gens qui nous écoutent, je pense, on
va laisser ça là.
On vous
comprend, puis, honnêtement, je trouve ça très utile et j'ai l'impression que,
dans la vitesse à laquelle nous
travaillons ici, on a tendance… Mais là le fait que nous sommes des avocats, de
bord et d'autre il y en a, on a tendance à passer par-dessus ces
affaires-là. Alors, je dois vous dire à quel point votre présentation et votre
contribution sont bienvenues
et utiles, et je vous remercie de votre présence et de… Ça, vous vous consacrez
à ça, vous êtes des bénévoles si j'ai
bien compris. Vous n'avez pas d'argent public, vous êtes ici de votre propre
chef, en train de nous dire que ceux qui
ont fait ça, ils ont écrit un petit peu trop rapidement, puis les avocats qui
siègent ici, qui représentent des gens ont aussi manqué ça. Ça va aller sous notre radar. Moi, pour ça, je vous remercie,
puis je pense que c'est tout en votre honneur de pouvoir jouer ce
rôle-là.
Au
niveau de votre… Un autre commentaire que vous avez fait… Parce que ça, c'est
le premier, mais le deuxième, c'est
qu'on semble… on a inversé l'ordre logique des choses. D'abord — et je l'ai dit à d'autres groupes
aussi — on a eu
l'étude environnementale stratégique ou la
synthèse de ces 70 quelques… 73 études hier, à 17 h 48, tardivement,
d'après nous. Je sais que, dans le
rapport — vous
l'avez vu comme moi — on
mentionnait... il n'était pas daté, là, mais on mentionnait janvier
2014. Il y avait eu quelques explications du ministre, je comprends. Peu
importe, peu importe, le problème, c'est que
la plupart des gens qui sont venus devant nous aujourd'hui ont avoué
candidement ne pas avoir eu le temps
de le lire puis, dans plusieurs cas, d'avoir lu en diagonale, dans certains cas
de ne pas avoir pu consulter des experts. Certains ont avoué qu'ils n'avaient pas d'experts, là, mais qu'ils
n'avaient pas eu l'occasion de se faire une tête là-dessus.
Évidemment,
on parle de verser ce travail-là dans un BAPE. Évidemment, l'étude
environnementale stratégique émane
aussi d'un BAPE qui a demandé, a suggéré qu'on approfondit nos connaissances
sur le sujet. On veut ramener ça au
BAPE, mais, en même temps, il y a ce projet de loi qui est là, où on veut
procéder le plus rapidement possible pour une raison qui n'est pas tout à fait claire. Et, si j'ai bien compris,
vous nous dites : Écoutez, il faut laisser le temps, et pour l'étude environnementale stratégique de se faire
analyser, pour le BAPE, entendre les opinions, entendre les expertises, et seulement à ce moment-là on pourra procéder. Et
vous êtes… Dans l'état actuel des choses, il y a une espèce de moratoire
de facto qui fait en sorte que, combiné à
d'autres éléments qui sont économiques, qui ne sont pas… bien, il y a un
moratoire de facto en place. Nous
pouvons prendre le temps de faire ça correctement, en toute connaissance de
cause, avec tous les éléments, avoir
le temps de bien les analyser avant de se prononcer sur un moratoire qui
s'entête avant tout… un moratoire de
type final, surtout si on le conjugue à des déclarations faites par la ministre
des Ressources naturelles, qui semble nous dire : Peu importe ce
que la science va dire, moi, je ne crois pas qu'on va trouver une façon de
faire ça, qui sont des commentaires du genre
à inquiéter les gens qui privilégient la science et qui veulent laisser
l'occasion à la science… Est-ce que j'ai bien compris ou si j'ai mal
compris? S'il vous plaît, corrigez-moi ou précisez. Merci.
M. Baril
(Jean) : Nous, ce qu'on demande, c'est de respecter l'institution
nouvelle au Québec qui est une évaluation
environnementale stratégique, d'aller jusqu'au bout. Et je dois dire qu'en mars
dernier, quand on a vu le dépôt de ce
projet de loi là, on était un peu déçus parce qu'on était en plein dans la
rédaction de différents textes à la demande du Comité d'évaluation environnementale stratégique, entre autres sur un
moratoire de 25 ans, et là on déposait quelque chose qui semblait dire : Bien, de toute façon, nous, notre projet,
c'est maximum jusqu'à temps qu'on dépose une loi sur les hydrocarbures ou un maximum de cinq ans — c'est un petit peu embêtant — ce qui est très différent du projet de
moratoire qui avait été déposé
antérieurement par… M. le député en a parlé tantôt, qui était au moment où il
n'y avait pas nécessairement d'évaluation
environnementale stratégique, au tout début. Là, on est en plein dans un
processus qui a été pas facile, qui est un gain de la population du Québec, là,
d'obtenir un BAPE, d'obtenir une évaluation environnementale stratégique.
Ça ne s'est pas fait tout seul, ça allait à
l'encontre de plusieurs puissants du Québec. Et moi, je suis très content de
voir que le Québec a arraché ça, mais il faut le respecter jusqu'au
bout.
Et,
effectivement, il y a un moratoire de facto. Le ministre Arcand, au moment de
déclencher l'EES, avait dit : Si
le comité responsable de l'EES nécessite d'autoriser les forages, on le fera à
des fins d'acquisition scientifique. Dès le départ, le Comité de l'EES a dit : Non, ce n'est pas nécessaire, on
n'en aura pas besoin. Pour toutes sortes de raisons, mais aussi l'obligation qu'il y aurait maintenant, si
quelqu'un voulait faire un forage, d'aller demander un certificat
d'autorisation au ministère, ce qui
demande un certain temps, d'aller consulter la population et les municipalités,
dans l'état actuel des choses, sans qu'on ait pris connaissance des
études scientifiques qui viennent d'être rendues publiques, je ne suis pas convaincu — et, d'ailleurs, M. Binnion l'a dit
tantôt — que ça
va se faire. Donc, il n'y a pas d'urgence sociale, il n'y a pas
d'urgence environnementale, puis il n'y a pas d'urgence économique à présenter
ça.
Moi,
en droit, on a tout le temps appris qu'un projet de loi doit avoir une utilité
sociale, une finalité sociale, on la cherche.
Et ce qui nous inquiète, c'est justement l'introduction d'un nouveau concept
qui, à notre avis, risque de faire reculer les gains environnementaux à
titre d'information et de consultation qui sont là depuis juin 2011.
M.
Sklavounos : Alors, si je peux résumer une partie de ce que
vous dites, vous, vous avez été impliqué dans un processus qui a été mis en place pour acquérir des connaissances,
pour pouvoir partager ces connaissances, pouvoir permettre une analyse
d'où était l'état de la science sur l'affaire, et, en quelques sorte, vous vous
sentez un petit peu court-circuité par le
fait qu'il y a ce projet de loi qui vient imposer un moratoire. Le ministre, à
d'autres intervenants, il a… Bien, il a fait une tentative d'expliquer
qu'en ce moment il n'y a pas de moratoire. On a une autre dame qui est venue représenter les consommateurs de gaz, qui nous a
dit : Bien, s'il n'y en a pas un là, je ne sais pas, là, j'étais sous
l'impression, tellement qu'il n'y a
rien qui se passe… j'étais sous l'impression qu'il y en avait un. Vous venez de
clarifier… Je vous dis ce qu'elle a
dit sur le terrain, mais vous venez de dire assez clairement que le ministre,
député de Mont-Royal, qui était l'ancien
ministre, avait clarifié la situation. Puis, au niveau des gens qui ont été
impliqués dans l'EES, ils ont clarifié la situation encore plus pour
dire que, de facto, il n'y a rien qui va se passer avant qu'on puisse atteindre
ce niveau de connaissance, avoir les
résultats et les faire correctement. Alors, vous... et vous nous dites que vous
ne comprenez pas aujourd'hui pourquoi
on veut aller de l'avant à ce niveau-là, et je vous comprends parce que je ne
comprends pas non plus.
Au
niveau Anticosti, au niveau de l'annonce de jeudi, je sais que vous avez émis
un communiqué de presse, qui est
juste ici. Vous avez, dans le titre, dénoncé l'incohérence des choses.
Pourriez-vous, s'il vous plaît, des deux approches… Parce que, dans une
approche, on semble dire : On va être là… Combien de temps qu'il me reste,
M. le Président?
Le Président (M.
Lessard) : C'est 15 secondes.
M.
Sklavounos : Je
vais vous laisser commenter rapidement.
M. Baril
(Jean) : Incohérence, parce
que nous, on n'est pas ni pour ni contre. C'est nouveau. Si on décide qu'une
opération de fracturation porte des dangers
suffisants pour l'interdire ou pour demander des autorisations avec des mécanismes
d'information et de consultation…
Le
Président (M. Lessard) : Malheureusement, c'est tout le temps qu'on
avait. Donc, alors, on vous remercie de votre présentation, vous avez
jeté un éclairage important.
Alors donc, la commission suspend ses travaux
jusqu'à ce soir, 19 h 30. Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 59)
(Reprise à 19 h 36)
Le Président (M. Lessard) : Alors,
merci. Donc, je déclare la séance de la Commission des transports et de l'environnement ouverte. Je demande à toutes les
personnes de la salle de bien vouloir éteindre leur sonnerie de téléphones
cellulaires.
Je vous
rappelle que la commission est réunie, donc, afin de poursuivre les auditions
publiques dans le cadre de la consultation
particulière sur le projet de loi n° 37, Loi interdisant certaines
activités destinées à rechercher ou à exploiter du gaz naturel dans le
schiste.
Alors donc,
nous allons donc voir trois groupes ce soir. Nous sommes convoqués pour nos
travaux jusqu'à 21 h 45 et,
pour ce faire, nous devrons, un petit peu, partager le temps. Les présentations
seront toujours de 10 minutes, donc, pour votre présentation officielle,
et nous allons répartir le temps plutôt : 14 minutes pour le groupe
gouvernemental, donc 13 minutes pour
l'opposition officielle et 3 min 30 s, là, pour le deuxième groupe
d'opposition. Comme ça, on sera capables de finir nos travaux selon
l'heure respective.
Alors donc, si vous voulez, s'il vous plaît, on
reçoit maintenant la Fédération des chambres de commerce du Québec. Si vous voulez décliner, donc, votre
identité pour les fins d'enregistrement de nos travaux, faire votre
présentation de 10 minutes, puis,
après ça, on ouvrira sur les questions de chacun des groupes d'opposition et du
gouvernement. Merci.
Fédération des chambres de
commerce
du Québec (FCCQ)
M. Simard
(François-William) : Donc,
bonsoir, tout le monde. Mon nom est François-William Simard. Je suis
directeur à Stratégie et affaires économiques à la Fédération des chambres de
commerce du Québec.
M. Lemieux
(Dany) : Dany Lemieux. Je suis consultant en énergie et en
environnement auprès de la fédération.
Le Président (M. Lessard) : Bonsoir.
Donc, la parole est à vous pour une présentation de 10 minutes.
M. Simard
(François-William) : Merci,
M. le Président. M. le ministre, Mmes, MM. les parlementaires, merci de nous permettre d'être présents ce soir. C'est
un dossier qui est extrêmement important pour nous. On a été très présents
dans les débats qui ont précédé… en fait,
qui ont marqué les dernières années sur la filière du gaz de schiste, et on est
très heureux d'être présents ce soir.
Donc, Dany, comme il le mentionnait, c'est notre expert en environnement et en
énergie. Donc, si jamais il y a des
questions qui sont très poussées, très techniques, c'est certain que je vais me
tourner vers Dany.
Rapidement,
vous présenter la Fédération des chambres de commerce. On représente environ
150 chambres de commerce au Québec. On
représente 1 200 membres qui sont directement membres chez nous, donc des
membres corporatifs. On a
également... par le biais de notre réseau, on représente 60 000
entreprises et 150 000 gens d'affaires. Donc, simplement pour vous présenter la fédération, on a également 17
comités sectoriels à la fédération, dont un comité Énergie qui se penche spécifiquement sur les
questions, évidemment, qui sont liées aux hydrocarbures, dont les gaz de
schiste. Donc, on a travaillé très fort ce dossier-là pour vous
présenter la position ce soir.
M. le Président, comme vous le savez peut-être,
la fédération a été très active dans le dossier des ressources naturelles au cours des dernières années, que ce
soit en matière de forêts, de mines ou d'énergie. Nous voyons l'exploitation
de nos ressources naturelles comme un
immense potentiel de développement économique et d'enrichissement de tous les
Québécois. C'est pourquoi nous n'avons pas
hésité à prendre la parole pour défendre une exploitation responsable des gaz
de schiste dès que cette nouvelle industrie
a fait son apparition au Québec, il y a quelques années, et vous comprendrez
que depuis nous n'avons pas changé d'idée.
Au contraire, nous sommes plus convaincus que jamais. Pourquoi? Parce que,
depuis les premiers balbutiements de ce
dossier au Québec, les exemples de pays ayant exploité le gaz de schiste tout
en respectant l'environnement se sont
multipliés et les études démontrant les bénéfices économiques et
environnementaux de cette industrie n'ont pas manqué non plus. Je
reviendrai à ces éléments dans quelques instants.
Comme je le
disais, nous avons toujours appuyé le développement de cette industrie. Nous
insistions principalement sur quatre
éléments : que le gouvernement du Québec rende disponible une analyse
coût-avantage et de retombées économiques; que, pour les aspects
environnementaux, nous considérions l'apport de cette industrie dans sa
globalité plutôt que de se limiter à
son extraction; que le gouvernement du Québec détermine, avec les municipalités
et les MRC, des moyens et des outils
en matière d'aménagement durable du territoire en utilisant ceux qui existent
déjà dans d'autres cadres tels que l'éolien; que le gouvernement du
Québec fasse preuve de prudence dans sa présentation de l'instance municipale comme pôle de gouvernance. La gestion
des ressources naturelles est une responsabilité provinciale, et elle
doit le demeurer. Voilà pour la position que nous défendons depuis le début.
• (19 h 40) •
M. le Président, si nous sommes présents en
commission parlementaire ce soir, c'est pour recommander au gouvernement de ne pas aller de l'avant avec le
projet de loi n° 37. Oui, il y a une blessure collective sur les gaz de
schiste, entre autres en raison de la
façon dont le dossier a été géré au départ. Personne ne va remettre en cause
cela ce soir. Mais ce n'est pas à
coups de moratoires sur le développement de cette industrie que nous allons
gérer et guérir cette blessure. Entre
démarrer sur les chapeaux de roue et ne rien faire du tout, il y a sans doute
quelque chose qu'on peut faire. J'y reviendrai dans quelques minutes lorsque nous vous présenterons les recommandations
que nous formulons ce soir. Parce qu'avant de vous présenter ces recommandations il nous apparaît essentiel
d'examiner ce qui s'est fait ailleurs dans le monde dans l'industrie des gaz de schiste et comment cela a
affecté positivement la situation économique et énergétique de ces endroits.
D'abord,
en Colombie-Britannique, une province reconnue pour être l'une des plus vertes
au Canada, les investissements de
l'industrie du gaz naturel ont presque quadruplé entre 2000 et 2010, augmentant
de 1,8 milliard à 7,1 milliards de dollars. Dans cette province, le secteur du gaz naturel est
devenu l'un des piliers de l'économie, l'un des plus gros employeurs et
il représente la source de revenus la plus importante provenant des ressources
naturelles. Selon la première ministre britanno-colombienne
Christy Clark, l'industrie des gaz de schiste pourrait créer jusqu'à
100 000 emplois, et les redevances contribueront à diminuer, voire éliminer la dette de la province. C'est
ce que la fédération appelle être «open for business».
Autre
exemple, aux États-Unis, la production de gaz de schiste représentait plus de
27 % de tout le gaz naturel produit
en 2010, proportion qui devrait passer à 43 % en 2015. Selon une étude
réalisée par l'IHS Global Insight, les emplois liés à cette industrie étaient de plus de 600 000, et sa
contribution au PIB, de près de 77 milliards en 2010. Au cours des 25 prochaines années, les municipalités, les États
et le gouvernement fédéral devraient toucher plus de 933 milliards de
dollars en impôts fonciers, taxes et recettes fiscales de toutes sortes. C'est
gigantesque.
Finalement,
autre impact plus que significatif, alors que les multinationales
manufacturières américaines avaient transféré
des capacités de production à l'étranger depuis quelques décennies, elles les
rapatrient désormais en force à cause du
faible coût de l'énergie, de la sécurité et de la grande disponibilité
d'approvisionnement du gaz naturel. Nous ne pouvons avoir un exemple de
retombées économiques plus concret que celui-là.
M. le
Président, si la Colombie-Britannique et les États-Unis, pour ne citer que
ceux-là, se sont enrichis grâce au gaz
de schiste, qu'ils ont amélioré leur situation énergétique et qu'ils l'ont fait
tout en assurant une protection de l'environnement, pourquoi n'en
serions-nous pas capables ici?
Parmi les
recommandations que nous... Je vais laisser la parole, en fait, à Dany avant.
Je suis parti un petit peu vite sur mon discours, je vais laisser la
parole à Dany.
Le Président (M. Lessard) : Il vous
reste quatre minutes.
M. Lemieux
(Dany) : Merci. Donc, on va
faire un bref rappel, là, des principales étapes qu'il y a eu au Québec
depuis quelques années. Depuis le mois d'août 2010, le gouvernement a multiplié
les interventions visant à encadrer et
évaluer l'impact du développement de l'industrie des gaz de schiste au Québec,
et ça, ça a eu comme conséquence de faire
un quasi-moratoire, en fait, sur le développement de la filière. Donc, août
2010, Québec fait appel au BAPE; mars 2011, rapport du BAPE avec comme principale recommandation d'avoir une étude
environnementale stratégique où l'exploration est permise, mais la fracturation hydraulique interdite, sauf pour faire
des expériences scientifiques, et ça, c'est très important. Toujours en mars 2011, l'industrie accepte les
recommandations du BAPE. Toujours en mars 2011, la ministre Normandeau annonce que toutes les opérations de fracturation
seront dorénavant assujetties à l'étude environnementale stratégique et que les travaux de fracturation ne seront
autorisés que pour les besoins de développement de connaissances scientifiques.
Encore une fois, c'est important. 26 mai
2011, début du mandat du comité environnemental stratégique. 6 février 2013, le
ministre annonce qu'il va confier au BAPE la
réalisation de la consultation élargie. Et, 15 mai dernier, le projet de loi
n° 37 est déposé.
Aujourd'hui,
près de quatre ans plus tard, outre le comité environnemental stratégique, rien
n'a été fait au Québec : pas de
projets de démonstration, pas de connaissances scientifiques terrain, donc pas
de nouvelles connaissances pour les employés
du ministère du Développement durable, Environnement et Parcs et du MRN pour
parfaire leurs connaissances le jour
où on en aura vraiment besoin. On n'a toujours pas de chiffres de retombées
économiques émanant du gouvernement et on n'a toujours pas d'étude
avantage-coût complète.
L'impact sur
les entreprises entre le mois d'août 2010 et la fin mai 2011 — donc, ça, c'est les dates entre lesquelles
le gouvernement a respectivement fait appel
au BAPE et au comité environnemental stratégique — Questerre Energy a perdu 65 % de
sa valeur boursière, Junex, 52 %, Gastem, 38 %. Donc, ça, c'est des
impacts réels. Est-ce qu'un autre moratoire
de cinq ans va envoyer un message positif aux investisseurs, que le Québec «is
open for business», comme disait la
première ministre? Donc, la fédération tient à rappeler que, dans le concept de
développement durable, l'acceptabilité sociale, l'environnement et
l'économie doivent être considérés sur le même pied.
En termes de
retombées économiques, on a été très surpris de voir à quel point l'étude du
ministère du Développement durable,
Environnement, Faune et Parcs était frileuse et refusait de chiffrer les
retombées économiques de l'industrie,
donc a refusé de mettre un chiffre. Comment est-ce qu'on peut soupeser les
avantages économiques par rapport aux inconvénients environnementaux et sociaux si
on refuse de mettre un chiffre sur la partie avantages? Donc, il faut se
doter d'une étude coût-avantage complète.
Donc, présentement,
on trouve que c'est hâtif d'imposer un moratoire maximal de cinq ans, puisque
le gouvernement n'a pas toutes les
données en main pour prendre une décision éclairée et de soupeser adéquatement
les avantages économiques par rapport aux inconvénients sociaux et
environnementaux.
M. Simard
(François-William) : Oui.
Bien, rapidement, parce qu'il nous reste, quoi, environ une minute, parmi
les recommandations que nous formulons
aujourd'hui, outre celle de ne pas aller de l'avant avec le projet de loi n° 37,
nous recommandons de permettre la réalisation de quelques projets de
démonstration. En plus de pouvoir confirmer s'il
y a un réel potentiel d'exploitation, cela permettrait au gouvernement de
développer sa propre expertise sur les gaz de schiste, ce qui serait très utile si jamais l'industrie devait, un jour,
prendre son envol au Québec. Rappelons que c'était d'ailleurs l'une des principales recommandations
du rapport du BAPE du 8 mars 2011, alors qu'il était suggéré que l'étude
environnementale stratégique se fasse en parallèle avec l'exploration gazière.
Le
Président (M. Lessard) : Alors, ça termine donc le temps alloué, là,
pour la présentation. On pourra vous faire élaborer votre point de vue à travers les différentes questions. Donc,
il y a 14 minutes maintenant qui sont attribuées au gouvernement.
Je donne la parole maintenant au ministre pour ses questions.
M.
Blanchet : Bien le
bonjour, messieurs. Fort intéressante présentation, qui a la vertu
d'avoir — comment
dire? — un niveau de représentativité et
d'articulation souhaitable dans un débat comme celui que nous voulons avoir.
Maintenant, il y a des endroits où le débat
va se déployer complètement et des endroits où c'est plus restreint comme sujet.
Comme j'ai dit, moi, je n'ai pas de problème
à ce qu'on déborde de la simple notion de moratoire, là, ça me va. Ça me va
bien, on peut le faire, à la condition, bien
sûr, qu'on ne fasse pas le raccourci intellectuel de nous reprocher le moment
de dépôt de documents qui n'ont rien
à voir avec ce pourquoi on est là aujourd'hui. Mais, les raccourcis, il y a des
spécialistes là-dedans.
Une question
pour vous, qui est brève et technique. Quand vous dites : Le gouvernement
ne fournit pas des chiffres, une
étude, vous parlez d'une étude du gouvernement, je veux être sûr de ce dont
vous parlez. Est-ce l'étude préalable au premier BAPE ou est-ce l'étude
qui est dans le rapport de l'évaluation environnementale stratégique?
M. Lemieux
(Dany) : En fait, dans le
cadre de l'étude environnementale stratégique, il y a un mandat qui a été
donné à la Direction des analyses
économiques de votre ministère de regarder les études de retombées économiques
qui ont été faites, notamment par le
secteur privé, et d'arriver avec un chiffre pour qu'on ait un chiffre à mettre
sur les avantages liés au
développement de la filière, et la conclusion de cette étude-là, c'est que…
Bien, on ne comprend pas trop s'ils ne veulent
pas ou ils ne sont pas capables de le faire, mais il n'y a pas de chiffre. Et
ça, c'est sur le site Internet, là, je l'ai ici, et donc le ministère
refuse de mettre un chiffre sur les retombées économiques de la filière.
M.
Blanchet : Là, vous
dites : Ne veulent pas, sont incapables ou refusent.
M. Lemieux (Dany) : On ne le sait
pas.
M.
Blanchet :
Donc, vous excluez l'hypothèse que leur conclusion soit celle qui est dans
l'étude. Vous assumez que ce qu'eux autres ont écrit dans l'étude, ils
l'ont écrit pour ne pas dire ce qu'ils pensaient pour vrai?
M. Lemieux
(Dany) : Bien, en fait,
c'est qu'on ne le sait pas. C'est un peu bizarre qu'on demande de fournir un
chiffre et qu'ils ne fournissent pas de chiffre en disant : Bien, écoutez,
il y a eu toutes sortes d'études...
M.
Blanchet :
Est-il possible que l'état des connaissances ne permette pas d'établir un
chiffre aussi clair que ce que vous auriez souhaité d'avoir?
M. Lemieux (Dany) : Bien, dans le
rapport que vous avez rendu public hier soir, le comité en tant que tel...
M.
Blanchet : Que le
comité a rendu public.
M. Lemieux
(Dany) : Oui, que le comité
a rendu public, pardon. En fait, il relate trois études qui ont été faites
par le secteur privé, et eux discutent des
hypothèses qui sont derrière. Et, bon, eux-mêmes ne concluent pas, mais il y
avait un autre exercice qui avait été
demandé à votre Direction des affaires économiques, et eux non plus n'ont pas
conclu. Et donc, nous, la question
qu'on se pose, si on veut soupeser les avantages par rapport aux inconvénients
et que le gouvernement... Puis là nous, on ne le sait pas, est-ce que
c'est parce qu'ils ne sont pas capables? Est-ce que...
Puis ça, une
des choses qu'on vous recommande depuis fort longtemps, à la fédération, c'est
de créer un bureau d'analyse
économique qui serait indépendant, qui serait complémentaire au BAPE. Parce
qu'on comprend que le BAPE, ça fait partie de sa mission du
développement durable, mais ce n'est pas au coeur de sa mission. D'ailleurs, il
y a, quoi, trois économistes sur
50 employés au BAPE, et nous, ça fait longtemps qu'on demande au
gouvernement de créer un bureau des
analyses économiques. Puis ça ne serait pas juste pour les gaz de schiste, tout
projet économique majeur pourrait faire l'objet d'études indépendantes, et donc ça viendrait complémenter,
apporter des chiffres neutres. Parce que, souvent, les opposants disent que les
chiffres des industriels ne valent rien, c'est des chiffres gonflés, ce n'est
pas bon. Donc, un bureau des analyses
économiques ferait en sorte de dépolitiser la partie avantages, la partie économique
qu'on voit dans les dépôts de
projets. Ça, ça fait des années qu'on le recommande au gouvernement, et on
pense que ça pourrait être une bonne solution, et on arriverait à un
chiffre.
• (19 h 50) •
M.
Blanchet :
Je reviens à votre propos, je ne suis pas sûr qu'on arriverait à un chiffre
parce que ce que j'entends de ce que
vous me dites, c'est : Il y a trois études qui ont été faites par le
privé, et le ministère n'a pas endossé la conclusion d'aucune de ces
trois études-là, donc il n'a pas voulu ou il n'a pas été capable de tirer une
conclusion.
Vous savez,
aucune agence ou aucun ministère du gouvernement ne sous-traite nécessairement
les études. On peut faire des revues de littérature et on peut arriver à
la conclusion que, justement, ce n'est pas concluant. Mais toutes les opinions
sont valables. Je doute fort, par contre, que les gens du ministère soient
portés par une mauvaise volonté ou incapables. J'ai tendance à les croire très
capables et de beaucoup de bonne volonté.
Un autre ordre d'idées. Au fil de votre
implication dans ce dossier-là — parce que c'est le coeur de l'enjeu à quelque part — au fil de votre implication, je présume que
vous êtes allés dans la région qui est concernée, vous êtes allés dans les basses-terres du Saint-Laurent, vous êtes
allés dans la région de Bécancour, dans la région de Nicolet. Vous avez dû
rencontrer des gens, vous avez dû vous
mettre à la recherche de l'explication pour laquelle les citoyens n'endossaient
pas le projet ou, même, manifestaient
une grande colère à l'endroit du projet. Quelle lecture faites-vous de vos
contacts directs avec les citoyens de la région, de leur refus de ce
projet-là?
M. Simard
(François-William) : Bien,
je vais me permettre de répondre, et, ensuite de ça, je vais laisser la parole
à Dany pour qu'il puisse compléter. Dans les
éléments qu'on a constatés au départ, avec la façon dont le projet a été lancé,
c'est certainement le manque d'accompagnement de la part du gouvernement. Ça
fait partie de nos recommandations aujourd'hui
que le gouvernement, lorsqu'il y a des projets de cette ampleur-là… Parce que
oui, ça peut être intimidant pour les
citoyens puis ça peut… c'est tout à fait légitime. La réaction que certains
citoyens ont eue est tout à fait légitime, ça peut être intimidant. On voit une nouvelle industrie qui est
débarquée, on entend toutes sortes de choses à gauche et à droite, et
les craintes peuvent être légitimes.
Maintenant,
est-ce qu'entre ce qu'on entend et la réalité, c'est exactement la même chose?
Parfois, il y a des choses qui sont
dites qui ne sont pas tout à fait exactes. Donc, c'est le rôle du gouvernement
d'apporter des informations qui vont être
neutres, qui vont être objectives. Et je fais, malheureusement, le
constat — et on
l'a fait à la fédération — qu'à l'époque le dossier
a été laissé entre les mains de l'industrie, et c'est probablement là la chose,
la première chose à corriger si jamais on
va de l'avant avec une exploration des gaz de schiste éventuellement, il faut
que le gouvernement soit présent dans tout le processus. Je ne sais pas
si tu veux conclure.
M.
Blanchet :
Juste là-dessus, ça vous permettra de compléter parce que… Écoutez, c'est
semi-historique, au moins pour la
journée, si je comprends bien, la Fédération des chambres de commerce dit que
les cafouillages du départ ne sont
pas dus au comportement de l'industrie, mais bien parce que le gouvernement,
qui, d'habitude, est trop interventionniste, dans ce cas-ci, aurait dû se porter à l'avant et dire aux
entreprises : Nous allons y aller avec vous pour être sûrs que ça se
passe bien. De telle sorte que, ne l'ayant pas fait, l'industrie peut
dire : Ah non! Nous, nous n'y sommes pour rien, le gouvernement ne nous a
pas accompagnés, donc ça a pu heurter des citoyens.
M. Simard
(François-William) : Vous
n'entendrez jamais la fédération dire : L'industrie devrait fonctionner
toute seule, peu importe l'industrie qu'on parle. On oublie les gaz de schiste,
là, vous ne nous entendrez jamais dire qu'une
industrie devrait fonctionner toute seule, être laissée comme un électron
libre, sans aucune règle. Les industries doivent être encadrées, et le rôle du gouvernement, c'est de le faire.
C'est d'être également présent quand il y a des nouveaux projets qui arrivent. C'est également le rôle du gouvernement
d'être présent. Donc, on n'est pas en porte-à-faux du tout avec ce qu'on
a dit par le passé.
M. Lemieux
(Dany) : Peut-être juste un
dernier point pour compléter. La certitude réglementaire est primordiale
pour une entreprise, spécialement pour les
entreprises qui ne sont pas issues du Québec, donc qui ne savent pas comment
ça fonctionne ici et qui ne connaissent pas
comment les gens peuvent réagir à certains types de projets de développement.
Donc, le fait
de dire à une entreprise : Bien, écoutez, comme ça, au Québec, dorénavant
on aimerait qu'il y ait des consultations
au préalable et qu'il y en ait x, consultations au préalable, ensuite sachez
qu'il y a des certificats d'autorisation, sachez qu'il y a un BAPE, sachez que… Bien, présentement, les
entreprises sont laissées un peu dans une espèce de flou, et nous, tout ce qu'on demande, c'est d'avoir une
certitude réglementaire et d'avoir une espèce d'encadrement pour que les
entreprises sachent comment que ça peut se
passer, quelles devraient être les étapes pour pas s'assurer d'une
acceptabilité sociale, mais, à tout le moins, favoriser l'acceptabilité
sociale et...
M.
Blanchet : Je vous
dirais que c'est exactement ce qu'on est en train de faire. Le premier BAPE
dit : Nous n'avons pas les informations
nécessaires. Les études se font par l'évaluation environnementale stratégique.
C'est retourné au BAPE. Pour éviter de la confusion sur le terrain, il y
a un moratoire qui est implanté, qui sera levé au moment où l'Assemblée nationale, dont vous dites vous-mêmes
qu'elle doit encadrer l'activité, aura disposé de l'enjeu du gaz de schiste.
On donne cette prévisibilité.
Puis je
comprends parfaitement bien que c'est un facteur crucial pour une entreprise
que d'avoir de la prévisibilité dans
les conditions. Ça s'est passé d'une façon qui n'a pas été adéquate, il y a un
recul à prendre, il y a un mécanisme à mettre en place pour aller chercher et la
prévisibilité, et la clarté, et, potentiellement — peut-être que non aussi — l'acceptabilité sociale, mais au moins de façon structurée. Donc,
je pense que c'est ce qu'on fait, c'est ce qu'on propose. Peut-être d'une
manière que vous auriez faite différemment, c'est ce qu'on propose.
Et je vous donne
tout de suite l'autre question parce que, d'habitude, il ne reste pas grand
temps, puis je veux avoir le temps de
vous la poser. Vous avez… — et je l'ai noté quand vous le disiez, donc mes mots peuvent ne pas
être exactement comme les
vôtres — vous mettez
en garde le gouvernement contre son approche de transmettre une forme
d'instance de gouvernance aux
municipalités dans les dossiers de gaz de schiste. Ah! bien là, nous,
évidemment, on est plus dans un esprit
de valoriser le rôle des institutions municipales dans beaucoup de dossiers,
dont ces dossiers-là, dont les dossiers miniers, et là vous dites : Attention! On vous met en garde. Avant
de transmettre une forme d'autorité ou une forme de gouvernance aux
municipalités dans ces dossiers-là, on met en garde le gouvernement contre ça.
Moi, je veux bien comprendre, puis je suis certain que les municipalités
voudraient bien comprendre.
M. Simard (François-William) : Je
vais répondre à la première question, qui est celle sur la démarche du gouvernement. Le problème qu'on y voit avec le
moratoire actuel, on l'a vu dans les dernières années, si on se fie… en fait, si le passé, il est garant de l'avenir, on a
un petit peu peur que ça prenne quatre et cinq ans avant qu'effectivement
on ait un cadre qui permette l'exploration
et l'exploitation. Nous, ce qu'on vous dit aujourd'hui, pourquoi qu'on ne
définirait pas des projets de
démonstration qui permettraient de dire : On fait de l'exploration à
quelques projets? On n'est pas en train de dire : Mettons 50, mettons 100
projets de démonstration ou des projets pilotes, peu importe comment qu'on les
appelle… On n'est pas en train de
dire : Mettons-en une centaine en marche. On est en train de dire :
Faisons-en quelques-uns, ça va nous
permettre de développer une expertise, de voir exactement comment ça se fait.
Et aussi ça va nous permettre non pas
probablement, mais certainement de rassurer la population que ça peut se faire
de façon sécuritaire parce qu'ailleurs ça se fait de façon sécuritaire.
Donc, plutôt
que de ne rien faire, nous, ce qu'on vous dit aujourd'hui... On n'est pas en
train de vous dire : Démarrez sur
les chapeaux de roue, comme je disais tout à l'heure. On est en train de
dire : Est-ce qu'on peut y aller progressivement? Ça va permettre,
un, de développer l'expertise et de rassurer les gens également. Sur les
municipalités…
M. Lemieux
(Dany) : Au niveau des
instances municipales, si vous prenez dans le cadre des éoliennes, le MRN
a développé un guide d'implantation des
éoliennes pour aider les municipalités à faire leur schéma d'aménagement. Donc,
le gouvernement a proposé un outil aux
municipalités pour les aider à encadrer le développement de cette industrie-là.
Donc, dans le contexte actuel, avec les
pouvoirs qui existent, qui sont dévolus au gouvernement provincial et aux municipalités, on a trouvé un moyen d'établir un
cadre pour que les municipalités aient un rôle via le schéma d'aménagement
du territoire. Et moi, je n'ai pas entendu
personne hurler, au niveau des éoliennes, que le gouvernement ou les
municipalités avaient trop ou pas
assez de pouvoirs parce qu'on l'a fait de façon concertée, et ça a été un très
bel exemple de réussite de gouvernance conjointe,
municipalités-gouvernement, sans pour autant que le gouvernement du Québec
délaisse son pouvoir au niveau de la gestion des ressources naturelles.
M.
Blanchet :
Vous me rassurez et vous rassurez sûrement d'autre monde parce que j'avais
vraiment entendu un doute.
L'encadrement, les outils de travail qu'on peut donner aux municipalités, je
pense qu'effectivement il y a mieux à faire dans beaucoup de dossiers.
Je l'ai dans les milieux humides, je l'ai dans un ensemble de dossiers aussi.
Une dernière
chose. Vous avez parlé de projets, bon, projets pilotes, démonstrations. Vous
savez, moi, ce que j'ai compris
après-midi, si un projet pilote sert à démontrer une technologie, puis ce n'est
pas ce dont il s'agit, bien là c'est un
projet pilote. S'il sert à démontrer qu'il y a, effectivement, une ressource
dans le sous-sol, c'est de l'exploration. Si je comprends bien, si l'exploration est là pour montrer que ça peut être
rentable, c'est simplement de l'exploitation à petite échelle, on n'est pas dans l'exploration.
L'exploration, c'est qu'est-ce qu'il y a — c'est une démarche à laquelle nous-mêmes
on réfléchit — qu'est-ce qu'il y a là, comment on le
détermine, on fixe le potentiel. Si c'est ça qu'on veut faire, qu'on dise que c'est ça qu'on veut faire
clairement : On veut établir le potentiel, prouver la réserve. On pourra
refuser de le faire, les gens
pourraient le refuser, mais ça aura la vertu d'être clair et de ne pas être un
peu camouflé derrière un projet pilote qui…
Comme le disait M. Binnion lui-même, là, on pourrait creuser 40 000
puits en Amérique, on n'en apprendrait pas davantage sur la technologie
que ce qu'on sait maintenant.
• (20 heures) •
M. Lemieux
(Dany) : Bien, en fait, le
problème — puis
j'en ai fait référence tantôt dans mon allocution — c'est que le BAPE, déjà, en mars 2011, disait qu'on devrait faire des projets
de démonstration pour acquérir des connaissances scientifiques. Et, nous, ce qu'on dit, c'est que ça a été une occasion
perdue, on a perdu trois ans, au moins trois ans, parce qu'il ne s'est rien fait. Et, durant ces trois
années-là, les Québécois auraient pu, avec un encadrement gouvernemental,
les employés du MRN, les employés du MDDEFP
qui auraient encadré tout ça, qui se seraient assurés que tout est fait
selon les meilleures pratiques…
Le Président (M. Lessard) : ...nos
travaux du côté de l'aile gouvernementale. On va poursuivre du côté de
l'opposition officielle, et le député de Viau, donc, qui va prendre la parole
et s'adresser à vous pour 13 minutes.
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Bonsoir, messieurs. En résumé, la
grande question, c'est les inquiétudes. Ce que vous appeliez tout à l'heure la blessure collective, il faut
tenter… Pour aller de l'avant dans ce secteur-là, il faut réconcilier un gouffre assez majeur qui s'est
créé. Puis ce n'est pas de revenir sur les raisons, puis comment, mais, à la
fin de la journée, les citoyennes et
les citoyens n'ont pas de confiance dans ce secteur industriel là. Et
conséquemment, si on veut aller de l'avant, puis on regarde, puis on vous entend qu'il y a
des possibilités, au niveau du développement économique, très
importantes…
On a parlé du
passé, mais, moi, ce que j'aimerais vous entendre davantage, c'est comment
faire pour réconcilier à l'avenir ces
populations-là qui sont, et avec raison, très hésitantes et même réfractaires à
ce développement-là et faire en sorte
qu'il y ait une acceptabilité sociale. C'est quoi, là, qu'il faut faire à
partir de maintenant? Là, vous avez parlé brièvement, là, de l'idée, bon, de l'intervention gouvernementale, de
l'accompagnement gouvernemental, mais j'aimerais que vous alliez plus loin que ça, et qu'est-ce que la Fédération des
chambres de commerce… Parce que, j'imagine, il y a des chambres de commerce qui sont dans la région,
dans les diverses régions visées par le projet de loi, donc qu'est-ce que,
je veux dire, le secteur privé, le secteur
économique en général peut faire pour, justement, aider à faire avancer ce
dossier-là de façon positive?
Puis aussi
j'aimerais ça, en même temps, en termes de sous-question, couvrir aussi les
meilleures pratiques. Vous avez parlé
de la Colombie-Britannique, j'aimerais en entendre plus à propos de ça et
d'autres cas de meilleures pratiques qui ont permis d'aller de l'avant.
Le Président (M. Lessard) : M.
Simard.
M. Simard
(François-William) : Oui. Je vais
répondre pour la première partie de la question et je vais laisser M. Lemieux poursuivre. Dans les façons, nous
pensons de pouvoir... Pouvoir réparer en tant que tel ou guérir cette blessure,
comme on l'a mentionné tout à l'heure, c'est
d'y aller de façon intelligente, progressive et de ne pas nier, justement, les
craintes que les gens ont. Puis ça, je pense que c'est, entre autres, le rôle
de l'industrie, c'est, entre autres, le rôle des entreprises, et je pense qu'elles sont prêtes à le faire. Il n'y a
aucune entreprise qui va vous dire aujourd'hui… des entreprises qui sont impliquées dans le gaz de schiste qui
vont vous dire qu'elles répéteraient exactement qu'est-ce qui s'est passé
il y a quelques années. Je pense qu'on a des leçons à tirer.
J'ai parlé
tout à l'heure du gouvernement. Je maintiens, effectivement, que le
gouvernement doit être présent. Non pas
pour prendre par la main les entreprises, mais pour les accompagner parce que,
naturellement, les citoyens ont confiance en leur gouvernement davantage
qu'ils ont confiance en les promoteurs.
L'autre chose que j'ai mentionnée tout à
l'heure, les projets de démonstration, c'est justement là pour ça. Pourquoi
qu'on propose ça? Pourquoi qu'on pense que c'est probablement une des façons
d'y parvenir? C'est qu'on arrive avec
quelques projets qui vont se dérouler correctement parce qu'on aura mis un
cadre rigoureux en place pour pouvoir
procéder à ces projets pilotes là et on aura démontré que ça peut se faire de
façon sécuritaire. Je pense qu'on est à l'étape où est-ce que les gens ont besoin d'avoir des démonstrations
tangibles que les gaz de schiste, ça ne signifie pas nécessairement, comme plusieurs le prétendent,
chaos environnemental ou tout autre. C'est ça que les gens ont besoin
actuellement pour être rassurés, certainement.
M.
Lemieux (Dany) : Pour
l'avenir, en fait, une des choses que la fédération propose, c'est de préparer
dès maintenant le cadre réglementaire
et... Parce que je vous annonce tout de suite que le prix du gaz va monter un
jour. Ce n'est pas une surprise, là,
il va monter un jour. On a le phénomène de la réindustrialisation aux
États-Unis. La demande est très forte en
Europe et en Asie présentement. Il y a des projets de ports méthaniers pour
exporter du gaz naturel liquéfié vers ces marchés-là. Donc, ça va faire en sorte que, si on sort du gaz du
continent, du Nord-Est américain, ça va faire plus une parité au niveau des prix, donc on peut s'attendre, à
moyen, long terme, à ce que les prix remontent. Et, à ce moment-là, il faudrait
qu'on soit prêts si jamais ça devient
rentable. Et là, à ce moment-là, l'argument de dire que, parce que le prix est
faible, bien, ça ne donne rien de le faire... Bien, il se passe quoi si,
le mois prochain, il y a un renversement complet?
Je vous
rappellerai qu'il n'y a pas longtemps, là, en 2005, le prix du gaz naturel
était beaucoup plus élevé qu'il était,
là, à l'heure actuelle, jusqu'à temps que les gaz de schiste rentrent dans la
production américaine de façon massive. Et, il n'y a pas si longtemps que ça, on voulait importer du gaz naturel
parce que le prix du gaz naturel était trop élevé en Amérique du Nord. On voulait faire des ports
méthaniers pour en importer. On parle de 2005, là, il n'y a pas 100 ans, donc
il y a à peine huit ans, et là on est à une situation inverse. Donc, la
situation peut changer très rapidement au niveau des prix. Comment qu'on peut se préparer? Comment qu'on peut préparer
l'avenir? C'est en fournissant un cadre réglementaire clair, efficace, et là les entreprises… Si les règles,
elles peuvent être aussi sévères que le gouvernement pourrait souhaiter qu'elles le soient, ces
règles-là, bien là les entreprises prendront une décision d'affaires : On
y va ou on n'y va pas. Mais, en ayant
un cadre réglementaire, les entreprises auront une certitude réglementaire, et
sauront à quoi s'attendre, et prendront leurs décisions économiques en
toute connaissance de cause.
En
Colombie-Britannique... ou je peux vous donner l'exemple de l'Alberta. En
Alberta, il y a des bureaux de projets uniques.
Donc, le promoteur cogne à une porte, et c'est le gouvernement, qui a des gens
de chaque ministère et organisme qui
travaillent à ce bureau unique là, qui fait en sorte que tous les acteurs
gouvernementaux travaillent de concert, et ça, ça aide beaucoup. C'est d'ailleurs une des recommandations
que la fédération avait faites au gouvernement il y a quelques années.
Aux
États-Unis, l'Environmental Protection Agency, présentement, mène une série
d'études depuis 2011 pour, justement,
en arriver avec les meilleures pratiques pour encadrer cette industrie-là. Il y
a même des groupes environnementaux qui n'avaient pas confiance à ces études-là qui sont en train de faire leurs
propres études aux États-Unis. Et, d'ailleurs, il y en a une qui est sortie récemment et, à leur grande
surprise, il y avait beaucoup moins de fuites de méthane qu'anticipé. Donc,
on peut tout préparer ça déjà. On peut déjà préparer l'avenir, il faut juste le
faire. On attend la nouvelle loi sur les hydrocarbures depuis longtemps et on
pense que ce serait un très bon pas pour, justement, préparer demain.
M. Heurtel : Au niveau du temps,
s'il vous plaît, M. le Président.
Le Président (M.
Lessard) : Il vous reste encore sept minutes.
M. Heurtel :
Merci.
Le Président (M.
Lessard) : Six minutes, en fait.
M. Heurtel :
Merci. Plus particulièrement, est-ce que ce serait possible d'élaborer
davantage sur le cas de la Colombie-Britannique?
Ça m'intéresse particulièrement, ça. Est-ce que, par exemple, ce que vous avez
au niveau de la Colombie-Britannique…
est-ce qu'on parle de même type de territoire? Est-ce qu'on parle de même genre
de population? Est-ce que ces
impacts-là... est-ce qu'il y a vraiment une corrélation à faire entre les
régions visées par le projet de loi et ce que vous avez constaté en
Colombie-Britannique, par exemple?
M. Lemieux (Dany) : Bien, en Colombie-Britannique, le bassin qui est le plus en
développement à l'heure actuelle est
un peu plus au nord, donc un peu moins densément peuplé, mais il y a quand même
une population qui est autour, là. Donc, on n'est pas dans un champ, au
milieu de nulle part.
Une voix :
...
M. Lemieux (Dany) : Non, non. Donc, il n'y a pas de... En fait, chaque province gère ça à
sa façon, établit ses propres règles.
En Colombie-Britannique, ça s'est fait de façon graduelle dans le temps parce
que les découvertes… donc, la
découverte de potentiel se fait de façon graduelle également. Donc, ici, au
Québec, on ne connaît même pas le potentiel encore. Donc, il n'y a pas de... François-William, tantôt, faisait
référence à partir sur les chapeaux de roue. Ça ne peut pas être le cas au Québec, on ne connaît même pas le
potentiel. Puis ça, c'est une des choses qu'on demandait au gouvernement,
de mettre en place des projets de
démonstration et, éventuellement, qu'on soit capable d'établir si on a un
potentiel ou non.
M.
Heurtel : Par rapport au marché, parce que c'est une... Ce qui
ressort, les premières conclusions qui ressortent de l'évaluation environnementale stratégique,
c'est justement qu'il n'y a pas de marché pour le gaz. Puis vous parliez tout à
l'heure du fait qu'éventuellement il y en
aurait, mais est-ce que vous avez constaté que, malgré le prix de marché
faible, il y aurait quand même un
potentiel de développement assez rapide? Est-ce que l'industrie est prête à y
aller maintenant de façon importante ou est-ce qu'on parle de quelque
chose qui peut se faire sur cinq, 10, 20, 25 ans?
• (20 h 10) •
M. Lemieux (Dany) : Tout est une question de rentabilité. Vous avez entendu des grands
industriels qui sont sur la Côte-Nord
qui sont fortement intéressés par la substitution énergétique au gaz naturel,
compte tenu du prix du gaz à l'heure
actuelle. Présentement, le réseau de distribution ne se rend pas jusque-là.
Quand on dit qu'il n'y a pas de marché, on importe 2 milliards de mètres cubes par année, ce n'est quand
même pas rien, ce qui est… 100 % de notre gaz est importé.
L'autre
point, comme je disais tantôt, la réindustrialisation dans le Nord-Est, dans le
Midwest américain, est très rapide,
donc ça pourrait avoir un impact plus tôt que plus tard sur le prix, en fait.
Le prix du marché du gaz naturel en Europe est très élevé présentement.
En Asie, ça monte sans cesse. Donc, c'est des marchés potentiels.
M. Heurtel :
Donc, c'est un enjeu d'indépendance énergétique pour le Québec, selon vous?
M. Lemieux (Dany) : Bien, 2 milliards de mètres cubes d'achat par année, ce n'est pas
rien, comme je vous dis, là. Il y a
une question de sécurité énergétique, il y a une question de… C'est un marché
continental, hein, le gaz naturel. Et, si on l'exporte sous forme liquéfiée, ça devient un marché international.
Donc, des marchés, il y en a. C'est une question de prix.
M.
Heurtel : L'autre point, vous avez parlé des conséquences au niveau du
«open for business». Ce que j'aimerais comprendre,
c'est… Bon, vous en avez parlé directement, mais est-ce qu'il y a des
conséquences, des dommages collatéraux aussi
qui se font? Est-ce que vous constatez que le fait qu'on ferme cette porte-là
de façon définitive pendant une très longue période de temps crée des
dommages, là, vraiment au-delà de l'industrie gazière directement?
M. Simard
(François-William) : Je peux peut-être me risquer à une réponse.
Malheureusement, je ne vous donnerai pas une
réponse qui est très, très précise, mais c'est certain que, quand on envoie des
signaux… Parce qu'il faut se
rappeler… Puis, par rapport à ce que Dany disait il y a quelques instants, la
question de la rentabilité, ce n'est peut-être pas… peut-être que, quand on prend une photo aujourd'hui, ce n'est
peut-être pas aussi rentable qu'on le voudrait, mais il faut comprendre que cette photo-là est appelée à
évoluer. Et, quand on dit : Bien, peut-être que ça va devenir rentable
dans trois, dans quatre ans, dans
cinq ans, prenons des hypothèses, peu importe, bien, il ne suffit pas de peser
sur un piton pour dire : Bien,
parfait, l'exploitation, l'exploration peut commencer. Ça prend des années de
préparation, mais ça prend aussi une capacité à aller lever des
capitaux, c'est aussi ça.
Puis,
quand vous parlez de dommages qui peuvent être faits, justement, bien, c'est
certain que, si on poursuit dans la
voie du moratoire, qui est celle qui est privilégiée actuellement, et si on
retarde encore de plusieurs années notre ouverture à développer cette industrie-là, bien, c'est
certain que ça a un impact sur notre capacité à lever du financement, entre
autres, comme on en a eu dans les
dernières années, certaines difficultés à lever du financement au niveau
minier, avec les conséquences qu'on
connaît aujourd'hui, parce qu'entre autres il y avait une certaine hésitation
au niveau gouvernemental. Puis je ne pointe
aucun gouvernement particulier, mais il y avait une hésitation au niveau
gouvernemental, et ça a eu un impact sur la capacité à lever du
financement parce que, d'abord et avant tout, pour les entreprises, c'est ça,
le nerf de la guerre.
M.
Heurtel : Ça va. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Lessard) : D'accord. Donc, on va passer au porte-parole
du deuxième groupe d'opposition et député de Nicolet-Bécancour. La
parole est à vous pour 3 min 30 s.
M.
Martel : Merci, M. le Président. Bonsoir à vous deux.
Premièrement, permettez-moi de souligner votre courage d'énoncer des choses… pas dénoncer, mais d'énoncer
des choses très sensibles. Puis je vous dirais même que moi, j'habite Nicolet-Bécancour, on est un territoire visé, et,
dans la grande tourmente, même la Chambre de commerce Coeur-du-Québec avait pris position. Je pense que c'est important
qu'on ait les deux côtés de la médaille puis je souligne votre courage par
rapport à ça.
Moi,
je pense que l'idée du moratoire, c'est quand même une bonne idée parce que, je
vais vous dire, premièrement, le
contexte financier n'est pas nécessairement une nuisance par rapport à la
situation actuelle, mais je vous dirais surtout qu'au niveau de l'acceptabilité sociale on a vraiment quelque chose de
difficile. Puis, pour avoir été aux premières loges, je vous dirais qu'à la fois l'ancien gouvernement,
dans sa stratégie de développer cette filière-là, a été très maladroit, et les
compagnies aussi ont été très maladroites en
venant sur nos territoires. Donc, je pense que c'est important. Nous, on pense
que ça serait important qu'on ait un puits
pendant le moratoire en exploration pour améliorer notre connaissance
scientifique, comme vous avez
mentionné, autant les différents ministères, mais aussi que la population
apprivoise un peu ce secteur-là.
Ce
que je veux vous dire, par rapport aux coûts-bénéfices, ce que vous dites, moi,
je pense qu'effectivement c'est une
donnée qui est manquante. Vous faites bien de mettre de la pression par rapport
à ça parce que — vous
avez très bien compris — quand le gouvernement a parlé d'Anticosti,
avec quoi on est d'accord, immédiatement il a vanté les vertus économiques de ce potentiel-là. Il a fait la même
affaire avec les cimenteries, il a fait la même affaire avec le développement
éolien. Donc, je pense que... puis j'aimerais ça avoir votre idée, pendant le
moratoire, pendant qu'on améliore nos connaissances,
ce serait peut-être bon de développer tout l'aspect économique, là, des coûts
et bénéfices. Je ne sais pas ce que vous en pensez.
M. Lemieux (Dany) : Oui. En fait, la firme qui a fait l'analyse coût-avantage, très
clairement, dans son rapport, il y a
une section sur les limites méthodologiques, et là elle cite très clairement
qu'il lui manquait un paquet de données pour faire son étude. Donc, elle a dû faire beaucoup d'hypothèses qui rendent
l'étude, l'analyse coût-avantage très imprécise. Et le fait de faire des projets de démonstration, on aurait des données
réelles, et donc on ne serait plus dans les hypothèses imprécises, mais
on serait avec des données réelles. Donc, l'analyse coût-avantage qui
découlerait des projets de démonstration, on
aurait des données beaucoup plus solides à ce moment-là, et, oui, c'est quelque
chose que je pense qui serait très souhaitable, là, pour la suite des
choses.
Et,
l'entreprise, je ne la blâme pas, elle a fait ce qu'elle pouvait avec les
chiffres qu'elle avait en main. Elle disait : Bien, écoutez, on était supposés avoir accès à
tels chiffres, tels chiffres, vous regardez le rapport, et on n'a pas eu accès.
Donc, on a été obligés de faire des
hypothèses, et c'est ça que ça donne. Donc, moi, je ne la blâme pas du tout,
l'entreprise, elle a fait ce qu'elle
pouvait avec ce qu'elle avait sous la main, mais je pense qu'avec des projets
de démonstration on aurait des chiffres réels et…
Le Président (M.
Lessard) : Malheureusement, je dois vous interrompre, là, pour dire
que ça termine la présentation des audiences
publiques. On veut remercier les représentants de la Fédération des chambres de
commerce du Québec de votre présentation et la contribution à cette
commission.
Je
vais donc suspendre quelques instants pour inviter le prochain groupe, là, à se
joindre à la table pour les travaux.
(Suspension de la séance à
20 h 17)
(Reprise à 20 h 19)
Le
Président (M. Lessard) : Alors, nous reprenons nos travaux, donc, pour
l'audience sur le projet de loi n° 37. Nous recevons ce soir le Collectif Moratoire, Alternatives, Vigilance et
Intervention. Alors, si vous voulez décliner votre identité pour les fins de l'enregistrement de nos
débats, et vous aurez une période de 10 minutes pour faire votre présentation.
Par la suite, chacun des groupes va pouvoir
vous questionner pour une période de temps. Alors, si vous voulez faire la
présentation… et qui vous accompagne, M. Fortier. Merci.
Collectif Moratoire,
Alternatives, Vigilance
et Intervention (CMAVI)
M. Fortier (Serge)
: D'accord. Merci beaucoup, M. le Président. Mmes, MM. les députés, mon nom
est Serge Fortier. Je suis porte-parole du CMAVI, le Collectif Moratoire, Alternatives,
Intervention et… — mon
Dieu, Seigneur! — Vigilance, bon, oui. Je suis accompagné de
M. Pierre Bluteau ici, coordonnateur du volet Gaz de schiste de l'organisme, Mme Mylène Bolduc, qui est
responsable des communications, et de Mme Lise Perreault, qui est membre
du conseil d'administration.
• (20 h 20) •
Le CMAVI,
entre autres, a été formé… c'est une organisation citoyenne qui a été mise sur
pied à l'automne 2013, donc c'est
tout récent. Nous voulons, premièrement, vous remercier de nous donner la
chance de venir expliquer les raisons de notre appui au projet de loi n° 37
interdisant certaines activités destinées à rechercher ou à exploiter du gaz
naturel dans le schiste. Alors, le
CMAVI poursuit deux objectifs principaux. Premièrement, la mise en place d'un
moratoire sur l'exploitation et
l'exploration du gaz de schiste dans la vallée du Saint-Laurent et d'un BAPE
générique sur le sujet et, à moyen
terme, l'abandon total de l'idée même d'exploiter cette forme d'énergie fossile
dans les basses-terres du Saint-Laurent. Comme second objectif de notre collectif, c'est de faire la promotion
des énergies renouvelables comme alternative durable au gaz de schiste.
Il
y a maintenant près de quatre ans que les citoyens sont mobilisés contre la
venue de cette industrie lourde des hydrocarbures
non conventionnels dans la vallée du Saint-Laurent. Cette industrie s'est
installée sournoisement sur nos terres,
sans aucune consultation de la population et de ses élus municipaux et avec la
complicité du gouvernement en place à ce
moment. Comme citoyens, nous ne connaissions rien du dossier à l'époque mais
avions constaté également l'ignorance de notre gouvernement sur les
enjeux majeurs dans ce dossier. Nous, citoyens, avons fait nos classes depuis.
Loin
de nous enfermer dans une opposition aveugle, nous avons décortiqué un grand
nombre d'études scientifiques et les
avons vulgarisées au profit de nos citoyens et de nos élus. Nous sommes allés
en mission d'observation à trois reprises en Pennsylvanie afin de rencontrer des citoyens aux prises avec des
problèmes suscités par l'exploration et l'exploitation à grande échelle de l'industrie du gaz de schiste.
Nous y avons aussi rencontré un grand nombre de scientifiques des plus
grandes universités américaines qui nous ont dressé un portrait sombre de cette
industrie basé sur l'état actuel des connaissances
et sur les perspectives d'avenir pour une population sacrifiée sur l'autel de
l'indépendance énergétique. Plusieurs
de ces spécialistes connaissant la situation au Québec nous ont exhortés à ne
pas céder à la tentation, comme société, de faire ce virage vers la
production du gaz de schiste.
Alors,
le mouvement citoyen d'opposition au gaz de schiste dans la vallée du
Saint-Laurent ne peut être catalogué comme
un mouvement «pas dans ma cour» selon une étude réalisée par l'Université du
Québec à Rimouski dans le cadre de
l'évaluation environnementale stratégique. La non-acceptabilité sociale de
l'implantation d'une telle industrie dans la vallée du Saint-Laurent correspond plutôt à une conscience de ce que
devrait être le développement durable de notre territoire.
Dans
notre mémoire écrit déposé à la commission parlementaire et que vous avez lu
attentivement, sans aucun doute, nous
reprenons les principales préoccupations qui nous habitent en ce qui concerne
le développement d'une industrie du gaz de schiste dans la vallée du
Saint-Laurent. En voici un bref résumé.
Le
moins que l'on puisse dire est que la technologie utilisée pour extraire le gaz
de schiste n'est pas au point et comporte
un grand nombre d'éléments susceptibles de causer de gros problèmes
environnementaux à court, moyen et long terme. Depuis les trois
dernières années, certains représentants du gouvernement, surtout de 2009 à
2012, et les représentants des compagnies
ont constamment évité ou dissimulé des éléments pourtant essentiels à un
jugement éclairé sur l'ensemble des enjeux du développement de cette filière
énergétique pour le Québec. Ils ont répété à plusieurs reprises que les dangers étaient plus que minimes, voire
même inexistants. Devant l'organisation et la grogne citoyenne, ils ont modifié leur langage en insistant sur le fait que
tout développement comporte des risques. Par la suite, ils ont reconnu, mais seulement du bout des lèvres, certaines
erreurs reliées à la technologie de fracturation et de réparation des puits en
difficulté, et ce, après plusieurs
constatations et démonstrations concrètes sur les terrains où avaient été forés
les puits des compagnies gazières.
Lors
des audiences du BAPE sur le gaz de schiste, nous avons appris, après une série
d'inspections des 31 puits de gaz de
schiste effectuées par le ministère de l'Environnement, que 19 de ceux-ci
présentaient une fuite plus ou moins importante
de méthane, 11 de ces puits étaient problématiques selon le ministère. Les deux
puits de Talisman et Leclercville ont
dû être l'objet de travaux pour colmater des fuites en 2011 et 2012. Dans un
cas, cette fuite se trouvait à un kilomètre de la surface et résultait
du forage dans une faille naturelle selon le géologue de Talisman.
Vous
savez que la zone où se retrouve le gaz de schiste se situe dans la vallée du
Saint-Laurent. L'industrie gazière y a acquis
des droits d'exploration sur l'ensemble du territoire. C'est là où vit la majorité
de la population du Québec. Les basses-terres du Saint-Laurent sont
l'endroit où se concentrent les terres agricoles les plus productives. Ce
serait un détournement de vocation peu
avantageux pour la souveraineté alimentaire du Québec si nous devrions en faire
une zone industrielle. Lors d'une
mission d'observation en Pennsylvanie avec des agriculteurs, ceux-ci en sont
venus à la conclusion que
l'agriculture et l'exploitation du gaz de schiste étaient incompatibles. La
souveraineté énergétique ne peut se faire sur le dos de la souveraineté alimentaire. Il y a des alternatives
énergétiques, mais il n'y a pas d'autre façon de produire notre nourriture que sur les terres agricoles de la
vallée du Saint-Laurent qui sont convoitées par les gazières. N'oubliez pas que
seulement 2 % du territoire québécois
est cultivable et que déjà près de 4 000 hectares disparaissent à chaque
année pour l'industrie ou pour le développement.
L'autre
danger qui menace l'agriculture et la survie même des humains est le risque
d'une pollution irréversible des
nappes phréatiques et des puits d'eau de surface sur le territoire convoité par
l'industrie gazière. Alors, pour forer chaque puits, les compagnies vont utiliser au moins de 20 à 26 millions de
litres d'eau. À cette eau, les compagnies ajouteront une concentration de 1 % du fluide composé de
160 à 200 produits chimiques sur une possibilité de près de 750 produits
chimiques selon un rapport de la Chambre des
représentants aux États-Unis. On sait maintenant que plus de 50 % de ce
mélange d'eau et de produits chimiques
restera dans la terre et pourrait migrer au fil des années vers les nappes
phréatiques et les puits d'eau de surface par les failles naturelles
existantes.
Dans
un rapport déposé par la Santé publique du Québec au comité de l'étude
environnementale stratégique, les chercheurs
concluent que — et je
cite — «les
possibilités de contamination des eaux souterraines sont réelles». En se basant
sur 18 nouveaux documents, ce même rapport
de la Santé publique précise que des mesures effectuées depuis trois ans près
des sites d'exploitation gazière — et je cite — «permettent de prévoir des augmentations
locales des concentrations de certains polluants de l'air».
Or, très peu
d'études ont été produites pour évaluer les risques pour la santé humaine de
ces polluants émis par l'industrie
gazière, et, pour documenter les risques de façon cohérente, il importerait de
tenir compte des effets à plus long terme de l'émission de gaz à effet de serre.
Certains diront que le Québec doit exploiter ses richesses gazières afin que
les revenus tirés de celles-ci
puissent soulager le fardeau de l'État et qu'un grand nombre d'emplois seront
créés par cette exploitation. De
nombreuses études scientifiques tendent maintenant à démontrer le contraire. La
plus récente déposée au Comité de
l'évaluation environnementale stratégique sur le gaz de schiste en décembre
dernier est signée par la firme Genivar, le Groupe AGECO et M. Jean-Thomas Bernard. Elle s'intitule Analyse des
avantages et des coûts de la pertinence socioéconomique de l'exploitation du gaz de schiste au Québec. Nous vous encourageons à lire cette analyse, que
vous retrouverez sur le site de l'EES. Les conclusions sont sans
équivoque.
En
voici des extraits : «Du point de vue de l'industrie, les données
utilisées pour les coûts d'exploitation, ainsi que celles sur les prix du gaz prévus dans les prochaines années
laissent présager que l'exploitation du gaz de schiste est non rentable au niveau privé selon les différents
scénarios de développement analysés.[...]il semble très peu probable que les
prix du gaz augmentent dans un horizon de 20 à 30 ans.»
«En
regard des paramètres retenus dans le scénario de référence, qui prend en
compte les prix projetés par l'EIA, la
valeur sociale nette de l'exploitation des gaz de schiste au Québec serait
négative, soit de l'ordre de moins 397 millions de dollars pour le scénario 3 — de l'étude — et de moins 3,3 milliards de dollars
pour le scénario 5. [...]En regard de ces considérations, il est clair que la conjoncture actuelle et prévisible
concernant le prix du gaz naturel constitue une contrainte importante au
potentiel de rentabilité de l'exploitation des gaz de schiste au Québec.»
Alors, que dire de plus?
Le Président (M.
Lessard) : M. Fortier, il va vous rester une minute.
M. Fortier (Serge)
: Une minute?
Le Président (M.
Lessard) : Bien oui.
M. Fortier (Serge) : O.K. C'est beau. Les Québécois et Québécoises ne veulent pas que
l'industrie du gaz de schiste
s'installe dans la vallée du Saint-Laurent. Tous les sondages d'opinion menés
depuis 2010 le confirment. En ce qui
concerne le moratoire comme tel, un sondage Léger de la fin de 2012 nous
apprend que 63 % de la population québécoise
appuie l'adoption du moratoire, tous partis politiques confondus. Plus de
80 % des électeurs du Parti québécois et de Québec solidaire y sont favorables, ainsi que 44 % des électeurs
libéraux et 60 % des électeurs de la Coalition avenir Québec. Le consensus québécois est là. Ce même
sondage nous apprend que seulement 17 % de la population québécoise
voit l'exploitation du gaz de schiste d'un
bon oeil. Alors, les Québécois et Québécoises ne veulent pas que l'industrie du
gaz de schiste s'installe dans les basses-terres du Saint-Laurent.
Alors,
nous, ce qu'on demande, c'est quatre choses : de voter à l'unanimité pour
l'adoption du projet de loi n° 37 afin
qu'il devienne une loi officielle à l'Assemblée nationale du Québec;
deuxièmement, d'appuyer l'instauration d'un BAPE générique avec le
mandat de réaliser des études indépendantes et scientifiques sur les gaz de
schiste…
Le
Président (M. Lessard) : M. Fortier, malheureusement, je devrai vous
couper, mais vous essaierez de repasser le message en faisant des
périodes de…
M. Fortier (Serge)
: Je faufilerai ça lors des questions.
Le Président (M.
Lessard) : Alors donc, la parole est au ministre. Donc, vous avez 14
minutes pour le faire.
M.
Blanchet : Je comprends que vous n'ayez pas pu tout mettre,
vous aviez énormément d'information. Prenez un peu d'eau et faites-nous
état des points 3 et 4. Puis, après ça, j'aurai des questions pour vous.
M. Fortier (Serge)
: Pardon?
M.
Blanchet :
Vous devez être essoufflé. Mais c'est la fougue que nous vous connaissons.
M. Fortier (Serge)
: J'ai mal entendu, là.
Le
Président (M. Lessard) : C'est parce que vous avez… au lieu de faire
la synthèse, vous avez accéléré, mais vous avez manqué de temps. Alors,
le ministre vous offre l'occasion…
M.
Blanchet :
Prenez le temps de finir les points 3 et 4...
M. Fortier
(Serge) : J'avais peur de parler trop vite et de ne pas me faire
comprendre comme il faut…
• (20 h 30) •
Le Président (M.
Lessard) : Oui. Le ministre vous donne l'occasion de finir vos points
en attendant..
M. Fortier (Serge)
: Ah oui?
Le Président (M.
Lessard) : Oui, oui.
M. Fortier (Serge) : Ah! O.K. D'accord. Merci beaucoup, M. le
ministre. J'avais mal compris. Alors, point 3. O.K. Donc, moratoire, BAPE générique pour étudier la question. Troisième
point, favoriser l'organisation d'un débat de société aussi accessible à
tous les citoyens et citoyennes de différentes régions du Québec concernant les
futurs choix énergétiques pour le Québec de
l'avenir. Et, quatrièmement, d'adhérer au principe élémentaire que tous les
projets reliés aux énergies fossiles
fassent l'objet d'une évaluation des impacts environnementaux ainsi que de
l'évaluation de la pertinence de
développer chaque type d'énergie. C'est l'application du principe de précaution
et celui de la protection du bien
commun que les citoyens et citoyennes ont toujours revendiquée légitimement et
pacifiquement. Alors, je fais grâce des deux derniers paragraphes, mais
nos quatre demandes sont là.
Le Président (M.
Lessard) : Merci, M. Fortier. M. le ministre, donc, pour ouvrir la
discussion.
M.
Blanchet : Bon, bien, d'abord, de nouveau bonsoir. J'ai déjà
eu l'occasion de vous rencontrer, et c'est toujours un plaisir. Écoutez, je vois vos constats, je vois
vos recommandations. Personne ne sera surpris que j'aie une proximité considérable par rapport à ce que vous énoncez.
Alors, je ferai l'exercice de me mettre plutôt dans la peau, un peu, de l'avocat du diable. En disant d'emblée que vous
voulez que ce soit non à long terme, que vous voulez que l'aboutissement
de la démarche, c'est qu'il n'y en ait pas,
d'exploitation de gaz de schiste dans la vallée du Saint-Laurent, est-ce que
vous ne restreignez pas votre propre analyse et votre propre objectivité
dans la présentation de vos arguments?
M. Fortier (Serge) : Moi, je vous dirais que non parce que c'est une étape. Imposer un
moratoire, c'est pour nous donner le
temps de faire la preuve que le gaz de schiste ne sera pas et ne deviendra
jamais une alternative ou une solution énergétique
à long terme pour un vrai développement durable au Québec. Nous, on est
beaucoup plus convaincus qu'on devrait
mettre l'énergie sur développer au plus vite les énergies alternatives parce qu'on
va être obligés, on va être forcés d'arriver
là d'une manière ou d'une autre. On ne peut pas se le cacher, les énergies
fossiles, elles ne sont pas durables, elles
polluent de plus en plus notre air, notre eau. Ça devient de plus en plus
difficile à aller les chercher, c'est de moins en moins rentable. Alors, nous, pour nous, à long terme ce n'est pas une
solution. Tout ce que ça fait, c'est que, si on se lance dans une exploitation de gaz de schiste au
Québec, ça ne fait que retarder la mise en place des énergies renouvelables
parce qu'on maintient la population, on
maintient notre style de vie dans une consommation d'énergies fossiles. Nous,
c'est notre point de vue. Alors, au plus
vite, c'est vers les énergies renouvelables. Mettons nos énergies — l'argent qu'on a, les contribuables — qui commencent à être plus grosses, là, vers
la solution d'avenir, soyons innovateurs. Ce qu'on veut, c'est qu'on
soit innovateurs au Québec, qu'on ne soit pas des traîneux ou des suiveux parce
que d'autres le font.
M.
Blanchet : O.K. Dans cette période de transition vers des
énergies renouvelables, il y aura quand même des besoins énergétiques qui vont rester tributaires d'énergies fossiles, je
pense qu'on ne peut pas se le cacher. Dites-moi, votre approche, le fondement de votre action, est-ce que ça s'appuie
davantage sur un argumentaire général, à la limite, je dirais, idéologique, ou est-ce que c'est issu
des intérêts immédiats du quotidien, des inconvénients subis par des citoyens
au jour le jour dans la région? Parce que
c'est deux approches différentes. La position générale et idéologique peut être
tenue par un groupe environnemental qui est
basé à Rimouski, même si c'est situé dans la vallée du Saint-Laurent, là,
dans les basses-terres. Donc, est-ce que c'est
plus ça ou est-ce que c'est vraiment un mouvement citoyen de gens qui l'ont
subi puis qui disent : Nous autres, c'est moins philosophique, c'est très
concret, chez nous ça ne passe pas?
Le
Président (M. Lessard) : Je pense que vous voulez, M. Bluteau… M.
Bluteau, vous voulez peut-être répondre à...
M. Bluteau (Pierre) : Merci. Donc, à vrai dire, c'est les deux, hein? Parce que, écoutez, ça
fait quatre ans maintenant qu'on
s'occupe de ce dossier-là parce qu'on l'a vécu. Comme chez moi, dans un rayon
de huit kilomètres autour de chez moi,
j'ai six puits de gaz de schiste. J'en ai quatre là-dessus qui sont fracturés.
C'est sûr que, pour moi, c'est une préoccupation
personnelle, ça va de soi. Mais, par contre, au fil des années, depuis quatre
ans maintenant, on a étoffé, comme on
a dit dans le document tout à l'heure, on a étoffé notre argumentaire aussi, on
est allés chercher, justement, la science. Et, à chaque fois que la
science s'est prononcée sur le dossier, autant dans le premier BAPE que dans
l'étude environnementale stratégique, que
dans l'étude de l'Institut national de santé publique, à chaque fois ça nous a
donné raison, ça a toujours accrédité
la thèse qui disait que c'est dangereux, on joue les apprentis sorciers en
allant dans ce domaine-là.
Puis
on sait très bien… O.K. Pour le pétrole, il n'y a pas peut-être pas
actuellement d'alternative intéressante au niveau alternatives renouvelables, mais, au niveau du gaz, il y a des
alternatives. Le biogaz par exemple, des choses qui ne sont pas vraiment exploitées au Québec. On va en
Allemagne, il y a des projets extraordinaires là-dessus. On s'en vient, au
Québec, là-dedans, mais ce n'est pas
vraiment exploité. Donc, il y aurait vraiment une technologie à développer qui
serait beaucoup plus rentable puis
beaucoup plus propre aussi, beaucoup plus rentable pour les Québécois d'y aller
dans ce sens-là, à mon avis.
M.
Blanchet : C'est intéressant, mais, strictement à titre de
point d'information, je vous dirais que, si toutes les municipalités qui sont admissibles au programme de
biométhanisation mettaient des projets en place, on serait autour de 1 % de la consommation de gaz du Québec.
Alors, la seule façon pour que, toutes proportions gardées, l'Allemagne ait un
plus gros ratio, il faudrait qu'ils
produisent plus de déchets. Or, toutes proportions gardées, les Québécois sont
les plus gros producteurs de déchets au monde. Donc, je pense qu'il est
très environnemental d'aller vers le biogaz, mais qu'il faut reconnaître la
limite que ça présente et que les usages de proximité sont peut-être, à terme,
plus porteurs.
Vous avez parlé d'incompatibilité entre
l'agriculture et l'industrie gazière. Au-delà du côté engagé et militant du propos, j'aimerais que vous développiez, mais
sur le concret, là, qu'est-ce que... où est-ce que ça accroche, où est-ce
que ça accroche, l'un
et l'autre, où est-ce que ça ne marche pas, où est-ce qu'on dit : Écoutez,
tu ne peux pas mettre ça à la même place, ces deux affaires-là, ça ne
marche pas.
Le Président (M.
Lessard) : M. Fortier.
M. Fortier (Serge) : Bon, oui. Écoutez, il y a beaucoup de points qui accrochent, entre
autres la valeur des terres agricoles.
Ça, c'est un point majeur. On a vu, là où il y a des puits de gaz de schiste
actuellement au Québec, une dévaluation des propriétés. Donc, en partant, déjà ce n'est pas trop avantageux pour
les agriculteurs ou pour même les citoyens qui demeurent près des puits. Ça, c'est déjà une chose très importante sur
le plan économique qu'on ne tient pas compte, hein? Il ne faut pas regarder rien que les profits qu'on
fait, mais il faut regarder tous les impacts que ça crée aussi. Alors, ça, c'en
est une.
Au
niveau agricole, aussi il y a la grande crainte, et qui est très fondée, d'une
pollution des nappes phréatiques qui
ferait que ça... regarde, ça compromettrait carrément l'agriculture. Je ne sais
pas si vous savez les besoins en eau des animaux, combien ça a besoin de boire, les animaux, tout faire le lavage
des appareils pour le lait, etc. L'eau est primordiale en agriculture. Et, s'il fallait qu'une nappe
phréatique soit contaminée, vous venez de scraper cette économie-là, là. Et
est-ce qu'on a la preuve que ça ne scrapera
pas cette économie-là? Est-ce qu'on a la preuve que l'eau ne sera pas contaminée?
On n'a pas de preuve pour l'instant. Alors,
c'est pour ça que nous, on demande… On prend une pause puis on finit les
études comme il faut pour avoir l'heure
juste là-dessus à tous les niveaux. Je pense que c'est juste une question de
sagesse. Ce n'est pas une question de philosophie ou bien donc
d'idéologie, c'est une question de sagesse.
On
est conscients, même nous qui sommes engagés, on est conscients qu'on a encore
besoin de gaz, que ce n'est pas demain
matin qu'on va se priver de ça. Mais c'est quand qu'on va ralentir, par
exemple, ça, c'est ça qui nous inquiète. Parce que, si on continue à produire, comment voulez-vous ralentir quand
on en a plein... Tu sais, je veux dire, on ne sera pas portés à
ralentir. Et puis, vous savez, je me dis, peut-être finir là-dessus...
Le Président (M.
Lessard) : Vous nous demandez donc de prendre notre gaz égal, c'est
ça, là.
M. Fortier (Serge) : Bien, il faut... Toute chose... Dans tout projet, il faut... Sur le
plan environnemental, la première des
choses, il faut commencer par penser à réduire notre consommation. C'est ça,
c'est ça qui est primordial. Tu ne peux pas passer à côté de ça, c'est
de un.
Mais,
vous savez... Regardez, je vais vous donner un exemple. Est-ce qu'il y en a qui
mangent des bananes icitte? On en
consomme, des bananes, mais est-ce que, parce qu'on consomme des bananes, on va
aller en produire, des bananes au
Québec? On se rend compte que, si on regarde les avantages et les
inconvénients, on est encore aussi bien de les importer, mais on continue à en manger pareil. Alors, est-ce
qu'on ne peut pas faire la même chose avec le gaz en attendant de passer
à d'autres choses? Vous voyez, c'est ça
aussi, là, qu'il faut regarder. On n'est pas obligés de devenir une province
productrice parce qu'on en consomme.
On peut très bien accepter pour l'instant de continuer à l'acheter, même si ça
coûte plus cher. Tant mieux si ça
coûte plus cher, on passera plus vite aux énergies alternatives. Ça nous
donnera la chance, justement, de faire un transfert. Et je vous jure que
les...
Le Président (M.
Lessard) : J'ai le député de Bonaventure qui veut vous poser une
question.
M. Fortier (Serge)
: ...études prouvent que les énergies alternatives sont beaucoup plus
rentables que...
Le
Président (M. Lessard) : M. Fortier, je ne veux pas vous couper,
mais le député de Bonaventure a levé la main, il aimerait ça, vous poser une question concernant le sujet. On va
laisser les bananes puis les... On va revenir peut-être sur le sujet
de... M. le député de Bonaventure, je vous laisse la parole, là.
Une voix :
…
Le Président (M.
Lessard) : Parfait.
M. Roy :
Écoutez, vous nous avez dit tout à l'heure que, bon, l'exploitation des gaz de
schiste, ce n'était pas rentable. O.K.? C'est ce que j'ai entendu.
M. Fortier (Serge)
: Selon des études qui sortent de l'EES, alors ce n'est pas nous qui...
M. Roy :
Donc, pourquoi certains groupes ne veulent pas de moratoire dans ce cas-là?
M. Fortier (Serge)
: Pardon?
M. Roy :
Pourquoi certains groupes ne veulent pas de moratoire?
Une voix :
Comme les chambres de commerce.
M. Roy :
Comme les gens qui ont un intérêt particulier à faire...
M. Fortier (Serge) : Qui ont passé
auparavant, oui.
M. Roy :
C'est quoi, votre interprétation de ce phénomène-là?
• (20 h 40) •
M. Bluteau
(Pierre) : D'ailleurs, dans
l'analyse de l'EES, la même étude de monsieur... Ceux qui l'ont faite, là,
M. Bernard, et tout ça, concluent, d'ailleurs, que les compagnies
pourraient très bien, même si ce n'est pas rentable, pourraient très bien y aller quand même, effectivement. C'est-à-dire
s'il n'y avait pas de moratoire, là, et si on décidait d'ouvrir la porte
aux compagnies actuellement, aujourd'hui même, là, les compagnies iraient quand
même.
Aux
États-Unis, le prix du gaz n'est pas plus élevé qu'ici, hein, et actuellement,
en Pennsylvanie, il se fait autant de
forage qu'il s'en faisait il y a cinq ans. Et pourquoi? Parce que les puits de
gaz de schiste s'épuisent rapidement. En l'espace d'une année, un puits va perdre 40 % de sa capacité de
production. Donc, qu'est-ce qu'il faut qu'ils fassent pour maintenir le même niveau de production? Bien, il
faut qu'ils en fassent un autre, puis un autre, puis un autre. Actuellement,
en Pennsylvanie, là, j'ai sorti ça ce matin
dans le journal, il y a 6 261 puits dans l'État de Pennsylvanie, il y en a
4 312 qui ont été faits depuis
deux ans seulement. Et, là-dessus, il y en a 2 879 qui ne sont même pas en
opération parce qu'il manque de
pipelines, il manque de gazoducs actuellement, il faut qu'ils fassent des
gazoducs pour relier ces puits-là. Parce que c'est un autre problème. Quand on parlait tantôt de l'agriculture, ce
n'est pas rien que la petite partie que le puits prend sur une terre agricole, tout ça doit être relié par un
gazoduc aussi, hein? Donc, ça vient enlever… ça vient empiéter là aussi
sur les terres agricoles. Puis on n'en a pas à perdre, comme on dit. C'est
2 %, les terres agricoles, là.
Donc, pour
répondre à votre question, je suis persuadé, moi, que, si on ouvrait la vanne
demain matin, les compagnies s'en
viendraient. Entre autres chez moi, dans mon coin, dans Fortierville, c'est
dans le comté de M. le député ici, la
compagnie Talisman a un permis pour fracturer. Ça a été émis en 2010. Donc, ils
pourraient très bien dire demain matin :
Regarde, O.K., nous autres, on veut aller fracturer notre puits à Fortierville,
on a le droit de le faire. Donc, ça nous prend un moratoire pour, au
moins, suspendre ces travaux-là.
Le
Président (M. Lessard) : D'autres questions? Peut-être, oui, de
Mirabel. La collègue de Mirabel qui a une question.
Mme
Beaudoin :
Merci, M. le Président. Merci pour la présentation de votre mémoire. Vous étiez
présents tantôt et vous avez écouté
les commentaires et le mémoire de la Fédération des chambres de commerce du
Québec. Et on a fait une analyse de
ce qui se passait dans d'autres pays, puis ça s'intitule Les gaz de schiste
ailleurs au Canada et dans le monde. Puis on parle de la Colombie-Britannique, de l'Alberta, des États-Unis,
et il semblerait qu'ils arrivent à la conclusion que, finalement, c'est positif parce qu'on prône la
protection de l'environnement puis qu'il n'y a pas de problèmes ailleurs.
Est-ce que vous avez des commentaires à faire sur ces propos?
M. Fortier (Serge) : Très facile à
dire, mais sur quoi se sont-ils basés? Je n'ai pas vu aucune étude, ceux qui parlaient, au niveau de l'environnement, que tout
était correct. C'est juste des mots à travers le texte qu'ils lisaient tantôt,
les gens. Alors, nous, on est allés sur le terrain, on a constaté qu'est-ce qui
se passait. On a osé y aller. Vous savez, quelqu'un posait la question,
d'ailleurs, si les gens qui étaient là nous avaient rencontrés, les citoyens,
pour savoir pourquoi que nous autres, on
s'oppose à ça, c'est quoi, la raison de la non-acceptabilité sociale. Il y a
une raison en arrière de ça, ce n'est
pas juste parce qu'on ne veut pas que ça soit dans notre cour ou qu'on a peur.
Ce n'est pas ça, c'est vraiment basé
sur des faits, soit des choses qui sont prouvées ou des choses qui sont
inconnues, qui demandent, à ce moment-là, le principe de précaution tout
à fait naturel. C'est là-dessus qu'on se base.
Alors, vous
savez, les… Comment dire, donc? C'est facile de lancer des chiffres ou bien
donc d'affirmer des choses, mais
nous, on ne voulait pas fonctionner comme ça. C'est pour ça que notre mouvement
a tenu puis que nos arguments sont
valables, parce qu'on est allés chercher les preuves. Ça a l'air qu'il y en a,
des victimes, en Pennsylvanie? On va aller les voir, ces victimes-là. Puis, quand tu vois quelqu'un, entre autres, qui
n'a plus d'eau potable puis que, pour prendre sa douche, il est obligé, quand il fait moins 20 C
dehors, d'ouvrir la fenêtre, faire marcher son ventilateur puis fermer la porte
pour faire sortir le méthane, qui
risque de faire exploser sa salle de bains, je vais te dire que ce n'est pas
trop intéressant. Ça, on l'a vécu, c'est des gens comme vous puis moi
qui vivent ça, là.
Mais est-ce qu'on en entend parler dans les
médias, ça? Est-ce que les compagnies parlent de ça, de ces conséquences-là, de ces… Non. Et ça, c'est
important que vous le sachiez, et puis, actuellement, on s'est rendu compte
qu'on est à peu près les seuls, les
citoyens, bénévolement, à avoir exploré ces facettes-là, qui sont réelles, qui
existent, là. O.K.? Alors, quand on
me parle de chiffres ou quoi que ce soit, moi, je suis sur mes gardes parce qu'il
y a d'autre chose à considérer qui est hyper important…
Le
Président (M. Lessard) : C'est terminé, M. Fortier. Excusez de vous
couper la parole, mais le temps… Puis on verra sur le temps du
gouvernement…
Mme Bolduc (Mylène) : ...
Le Président
(M. Lessard) : Malheureusement, on est obligés de passer au bloc de
l'opposition officielle, qui va vous questionner pendant 13 minutes là-dessus.
Vous pourrez faire valoir votre point, Mme Bolduc, si l'occasion est donnée.
Je pense que le critique de l'opposition
officielle permettra certainement que vous puissiez vous prononcer là-dessus.
Alors…
M.
Sklavounos :
Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de souhaiter la bienvenue à M.
Fortier, Mme Perreault, M. Bluteau et
Mme Bolduc. Merci de votre présence. Et c'est sûr et certain que c'est
important, votre présence et votre manifestation ici aujourd'hui.
Évidemment,
l'étude environnementale stratégique ou la synthèse des différentes études qui
ont été faites est sortie hier, à
17 h 48. J'imagine que vous avez pris un petit peu de temps hier pour
la regarder. Évidemment, il y en a certains qui ont passé du temps là-dessus, il y en a certains qui n'ont pas dormi
pour pouvoir bien étudier la question et pouvoir venir prêts
aujourd'hui. Il y a d'autres qui sont venus devant nous, qui ont avoué qu'ils
n'avaient pas eu le temps de vraiment faire une analyse exhaustive, etc.
Vous, votre
point de vue sur ce qui est dans l'étude environnementale stratégique... Il y
avait un point qui ressortait, mais
qui... on aurait pu se mettre d'accord avant de l'avoir vu, au niveau de la
rentabilité actuelle, là, et, évidemment, il y en a d'autres qui sont venus nous dire :
Écoutez, faites attention, ça peut fluctuer, ça peut changer, et on est
d'accord là-dessus également.
Au niveau de
ce qui était la technologie, la technique, etc., il me semble qu'il y en a qui
attendaient à ce que ça soit beaucoup
plus catastrophique que ce qu'on a vu, là, à l'intérieur de l'étude
environnementale stratégique. Vous, votre point de vue de ce qui était là-dedans, au niveau de la technologie, la
fracturation comme telle et la technologie, quel est votre point de vue après avoir pris le temps... Je
sais que vous l'avez regardée, ça a été mentionné. Comment vous réagissez
à cette étude environnementale stratégique, à ces études qui ont été faites au
niveau technique, là?
Le Président (M. Lessard) : M.
Fortier.
M. Fortier
(Serge) : O.K. Tu vas y aller
après? O.K. Entre autres, ici, j'ai justement… C'est l'évaluation environnementale stratégique, dans le rapport,
pour ceux qui ne l'auraient pas lu jusque-là, là, Risques technologiques.
Ça, c'est l'étude qui dit ça :
«L'examen des rapports d'accident d'autres États montre que des accidents
graves se produisent périodiquement
avec des conséquences importantes.» Ça, ça fait partie du rapport, entre
autres. Il y en a, des accidents. Puis, de toute façon, si on se reporte
concrètement à notre cas à nous, là, vous savez, un projet pilote, il y en a eu
un. Il y en a 31 puits sur notre territoire
qui ont été forés, plusieurs ont été fracturés, et on a vécu toutes sortes
d'affaires là-dessus. Vous savez
qu'il y a deux puits problématiques, on a parlé de celui de Leclercville
tantôt. Qu'est-ce qui va arriver là-dessus? Qu'on se penche donc sur ce puits-là. La Présentation, là, des fuites de
méthane à 45 mètres du tuyau de forage, merde, ça sort d'où, ça?
Qu'est-ce qui se passe en dessous de ça? Est-ce qu'on s'est penché sur cette
étude-là?
Le
Président (M. Lessard) : Vous êtes un homme coloré. On va essayer de
garder des mots qui passent ici, à l'Assemblée, comme il y a du monde
qui nous écoute.
M. Fortier (Serge) : Ah! excusez-moi,
c'est vrai. D'accord.
Le Président (M. Lessard) : Vous
êtes capable…
M. Fortier (Serge) : C'est ça. Ça, c'est
important de...
Le
Président (M. Lessard) : …vous êtes capable d'utilisation
d'expressions colorées, mais qui passent mieux à l'Assemblée.
M. Fortier (Serge) : Ah! vous savez, des
fois j'en ai d'autres. Celui-là n'était pas terrible.
Mme Bolduc (Mylène) : Est-ce que je peux…
M. Fortier (Serge) : Oui, vas-y.
Le Président (M. Lessard) : Mme
Bolduc.
Mme Bolduc
(Mylène) : C'est sûr qu'au niveau
de nos appréhensions… c'est sûr que l'EES vient dans le même sens que nos inquiétudes. Puis, si je peux me
permettre d'introduire ce que je voulais dire tout à l'heure dans cette
réponse-là, ce qu'on a vu aux
États-Unis, c'est que le fardeau de la preuve repose toujours sur l'épaule des
citoyens. Donc, de voir, pour vous,
vraiment un cas de cause de contamination, lorsque c'est le citoyen qui doit se
battre contre des mégagrosses entreprises
jusque, à la rigueur, des lobbyings, pour eux c'est très difficile. Pour nous,
ici, même au Québec, d'avoir une analyse
d'eau, c'est difficile pour un citoyen qui habite à côté du puits. Donc, quand
on a lu les grandes lignes… J'avoue que
je n'ai pas lu tout, tout, tout en profondeur le 273 pages, mais ça nous
réconforte dans nos appréhensions pour les risques de la qualité de l'eau,
la qualité de l'air.
On a vu des
producteurs agricoles bios, là-bas, qui ont perdu leur accréditation parce
qu'il y a des produits chimiques qui
se retrouvent dans le lait. Donc, le fardeau de la preuve est où? Il est encore
sur les épaules d'un citoyen. Et ça devrait être l'inverse, et on souhaite que le moratoire, peut-être, ça pourrait
faire pencher les choses, qu'on souhaiterait que le fardeau de la preuve
ne soit pas sur nos épaules.
Le Président (M. Lessard) : …donc,
le critique de l'opposition officielle.
M.
Sklavounos : Il y a des intervenants qui ont suggéré devant
nous qu'on venait de recevoir l'étude environnementale stratégique, et il fallait prendre le temps
d'analyser — évidemment,
le gouvernement, le ministre l'a déjà envoyée au BAPE, comme il s'était engagé
de le faire — et que,
dans les faits, il y a un moratoire de facto sur le territoire du Québec, et
qu'on devrait probablement... ou on
devrait laisser la porte ouverte à faire ce débat-là, attendre le BAPE et, par
la suite, nous prononcer sur un moratoire complet comme tel. Entre
autres, le Centre québécois du droit de l'environnement, les représentants, Me
Baril et Me Tremblay, sont venus nous dire ça.
Est-ce
que, d'après vous, le moratoire de facto ne fait pas l'affaire? Il me semble
que, lorsque je vous entends, je vous
entends, d'un côté, dire : Écoutez, on va attendre, on veut voir la
science, on veut être convaincus, et je comprends. Mais, d'un autre côté, j'ai entendu M. Fortier qui
semblait nous dire, un petit peu sur les mêmes lignes que la ministre des Ressources naturelles : Écoutez, on ne
veut jamais aller là-dedans. On veut s'acheter du temps jusqu'à temps qu'on
démontre qu'on ne devrait jamais aller là-dedans.
Alors,
ma question pour vous : Est-ce qu'on va trop vite en faisant le moratoire
tout de suite? Est-ce qu'on devrait laisser le temps de l'étude
environnementale stratégique, faire ce débat au BAPE et, par la suite, revenir
sur cette question-là, laisser le temps aux gens de prendre connaissance et de
prendre position là-dessus, au lieu d'aller sur le moratoire tout de suite, qui semble pour vous, en tout cas… Des fois,
oui, des fois, non, mais ça semble être un moratoire final, final qu'on
veut.
• (20 h 50) •
Le
Président (M. Lessard) : Je vois la main de Mme Perreault. Donc, Mme
Perreault, si vous voulez vous exprimer là-dessus.
Mme Perreault (Lise) : Déjà, l'EES, dans la liste de ses constats
auxquels ils en sont venus, disent que, sur le plan de l'environnement, on appréhende plusieurs impacts
environnementaux, dont, au premier chef, la contamination de l'eau et des sols, un bilan négatif de GES ainsi
que les fuites de gaz liées à l'utilisation de la technique de fracturation.
Moi, je ne vois pas en quoi attendre
changerait quelque chose à ça. Si l'eau se pollue, si l'eau est contaminée, si
l'air continue de l'être, si on
produit encore plus de GES, je ne vois pas pourquoi on attendrait. Parce que ça
ne changera rien, la pollution demeure,
la contamination existe, c'est nos terres agricoles, c'est... Je trouve qu'on
est en train de se piéger en tant que société en développant ça. Je
pense qu'on aura toujours… Moi, j'aimerais qu'on…
Le
Président (M. Lessard) : M. Fortier, oui? Excusez, c'est parce que M.
Fortier semblait vouloir complémentaire… Si on veut faire des échanges
plus nombreux…
Mme Perreault
(Lise) : Oui, c'est bon.
Le Président (M.
Lessard) : M. Fortier, vous pouvez compléter.
M. Fortier (Serge)
: O.K. Bien, juste rapidement, c'est… Je m'excuse.
Mme Perreault
(Lise) : Oui, oui, c'est beau.
M. Fortier (Serge) : Bien, juste rapidement, là, pour répondre à votre question, vous
dites : Est-ce qu'on est trop vite?
Écoutez, on n'est pas trop vite, on est quatre ans en retard. C'est au début du
projet que ça aurait dû se faire, tout ça
O.K.? Là, ça fait quatre ans qu'on perd, carrément, quatre ans qu'on perd au
Québec à garder l'industrie dans l'insécurité, à ne pas savoir sur quel bord qu'ils vont se brancher. Bien là, au
moins, s'il y a un moratoire, l'industrie va dire : Écoute, ça ne donne rien de tirailler, là, on va passer à
d'autre chose en attendant que les études se finissent. Mettons donc ça clair.
Puis le moratoire, pour nous, c'est ça que ça va faire, ça va mettre ça clair,
c'est…
Le Président (M.
Lessard) : Alors donc… Oui, monsieur…
M.
Sklavounos : Merci. On a entend plus tôt le ministre
commenter un petit peu l'EES, et il a dit lui-même, en quelque sorte,
que… Je n'ai pas la citation exacte, là. On pourrait l'avoir, mais ça ressemble
un petit peu…
Une voix :
Les faits scientifiques ne sont pas aussi inquiétants.
M.
Sklavounos :
Oui, les faits scientifiques ne sont pas aussi inquiétants que ce qu'on aurait
pu — je
lis «croire» — croire. Il y a des éléments là-dedans,
évidemment, qui demandent plus d'attention. Et, évidemment, le ministre,
je pense — et c'est pour cette raison-là qu'il veut
l'envoyer au BAPE — s'il
pensait qu'il y avait quelque chose là-dedans qui signalait la fin de la question parce que c'était absolument
concluant, j'ai l'impression que ça serait illogique de continuer le
processus juste parce qu'il s'était engagé à envoyer quelque chose au BAPE.
Mais
ma question pour vous… On a entendu plus tôt le préfet de la MRC
Nicolet-Yamaska, il est venu témoigner devant
nous. J'imagine que vous l'avez rencontré à un moment donné. M. Drouin nous a
dit que lui, il n'était pas pour, il
n'était pas contre. Il semblait dire que ce qu'il voulait, c'est pouvoir
renseigner ses citoyens. Parce qu'il dit aujourd'hui : Les citoyens... On s'est dit, nous, comme MRC, là,
qu'on n'avait pas les moyens d'informer les citoyens correctement. Alors, il ne voulait pas se prononcer contre,
contre, contre, il s'est dit : On veut se renseigner. Et il nous a aussi
expliqué que c'est en plein coeur de son affaire, là, ce dont on parle
ici, aujourd'hui.
Comment
vous réagissez à ça? Est-ce que vous avez rencontré M. Drouin? Est-ce que lui
aussi, il représente une partie de la
société ou une partie des citoyens, peut-être, qui veulent aussi se renseigner
avant de fermer la porte à triple tour sur cette question-là, alors que,
dans les faits, en ce moment, il n'y a pas d'exploration ni d'exploitation?
Le Président (M.
Lessard) : Je pense qu'on a M. Bluteau qui vient de Fortierville, donc
il fait partie...
M. Bluteau (Pierre) : Non, de
Leclercville, monsieur...
Le Président (M. Lessard) : De
Leclercville? D'accord.
M. Bluteau (Pierre) : Je suis un de vos
électeurs.
Le
Président (M. Lessard) : D'accord, oui. Bonjour. Ça doit être là que
je vous avais vu. Je ne sais pas, je cherche depuis tantôt. Alors donc,
si vous permettez, peut-être, de répondre.
M. Bluteau
(Pierre) : Oui, je vais répondre
au député. C'est que toute l'information est là. Écoutez, ça fait maintenant
quatre ans, là, qu'il y a eu un BAPE qui s'est prononcé là-dessus. On est allés
au BAPE, évidemment, nous-mêmes. Il y
a l'EES ensuite qui a publié 73 études hier, à 17 h 48, comme vous
dites, là, et je pense que tout est là actuellement,
là, il s'agit rien que... Mais, comme députés, comme représentants du
peuple — c'est
vous autres, les représentants du
peuple — à un
moment donné, il faudra aussi que vous preniez une décision. C'est-à-dire le
peuple demande... le peuple de la
vallée du Saint-Laurent et le peuple du Québec dit : Non, on n'en veut
pas, de cette filière-là, on veut aller ailleurs. On trouve qu'avec toute l'information qu'on a,
l'information scientifique qui est sortie depuis quatre ans, on a l'impression
que... Les citoyens disent ça, là : On
ne veut pas aller là-dedans. Donc, il me semble, comme députés, vous devriez
avoir le devoir de respecter la volonté populaire aussi, il me semble.
M.
Sklavounos : J'ai
une dernière question pour vous. Il reste...
Le Président (M. Lessard) : Deux
minutes.
M.
Sklavounos :
Deux minutes, oui. Je vous entends bien, et on vous comprend, et, évidemment,
on n'est pas étrangers à ce qui s'est
passé et comment les citoyens ont réagi. Et je pense que même les représentants
de l'industrie, à quelque part, sont
venus nous dire : Écoutez, on a peut-être mal commencé cette affaire-là.
Ils se remettent en question, là. On
l'a entendu, ils sont venus le dire candidement qu'on aurait pu informer mieux,
on aurait pu commencer différemment. Mais
vous, votre position est tranchée, je vous comprends, c'est clair. Je me
demande, jeudi passé, là, lorsque vous avez entendu l'annonce du gouvernement, et le ministre de l'Environnement
était à côté de la première ministre puis applaudissait alors qu'on annonçait la fracturation hydraulique
à des fins d'exploration sur l'île d'Anticosti, est-ce que vous vous êtes
sentis trahis par ce gouvernement?
M. Bluteau
(Pierre) : Est-ce qu'on peut
marcher avec un dossier à la fois? Nous, notre dossier, c'est le gaz de schiste dans la vallée du Saint-Laurent, et,
là-dessus, on pense qu'il faut avoir un moratoire, puis on pense qu'il faut
arrêter éventuellement cette hypothèque-là sur la vie des citoyens.
La question
du pétrole, c'est autre chose. On ne parle pas du pétrole ici. Le projet de loi
qu'on a à étudier, le projet de loi n° 37, c'est sur le moratoire,
gaz de schiste, vallée du Saint-Laurent, tenons-nous-en à ça.
M.
Sklavounos : Vous
n'avez pas d'opinion sur Anticosti du tout?
M. Bluteau
(Pierre) : Je peux avoir une
opinion, mais c'est mon opinion personnelle, que je pourrais émettre,
mais ce n'est pas l'opinion du groupe.
M.
Sklavounos :
O.K. Mais y a-t-il quelqu'un qui veut s'aventurer des quatre personnes qui sont
devant nous...
M. Bluteau (Pierre) : À titre personnel?
M.
Sklavounos :
...sachant que, la plupart du temps, en creusant pour du pétrole, on trouve du
gaz avant?
M. Bluteau
(Pierre) : Pas dans la vallée du
Saint-Laurent. Dans la vallée du Saint-Laurent, il n'y a pas vraiment de
pétrole qui serait rentable ici, là.
Le Président (M. Lessard) : La
question, je pense, était plus...
M.
Sklavounos : Il
reste un petit peu de temps?
Le Président (M. Lessard) : Oui.
Alors donc, il reste 30 secondes, quand même.
M.
Sklavounos : Alors,
juste sur Anticosti...
M. Fortier
(Serge) : Écoutez, le volet
alternative qu'on développe, qu'on veut développer, qu'on veut faire la promotion, quand on amène une alternative, c'est
pour remplacer quelque chose, d'accord? Alors, nous, on considère que, si on veut développer
autre chose, bien, il ne faudrait peut-être pas encourager les développements
pétroliers ou devenir une province pétrolière parce que...
Le
Président (M. Lessard) : M. Fortier, malheureusement, je devrai vous
couper pour le temps qui est alloué à l'opposition officielle. On va
passer au deuxième groupe de l'opposition. Donc, le porte-parole et député de
Nicolet-Bécancour, donc, va s'adresser à vous pour 3 min 30 s.
M.
Martel : Merci, M. le Président. Bonsoir à vous quatre. Tout
à l'heure, on a reçu les gens de la Fédération des chambres de commerce, puis j'ai salué leur courage
d'avoir pris position dans ce débat-là, puis je salue le même courage de votre part, sincèrement. Je pense que c'est
important qu'on entende des personnes qui sont pour, des personnes qui sont
contre, puis c'est un peu la job des élus de
soupeser tout ça puis d'essayer de prendre les meilleures décisions. Puis, cet
après-midi, on avait les représentants de la
MRC Nicolet-Yamaska, auxquels j'étais associé à l'époque, puis c'est toujours
dans cette optique-là qu'on a essayé de
prendre des décisions, c'est vraiment mettre les allégeances politiques de côté
et de trouver les meilleures façons possible.
Moi,
je voudrais faire du pouce un petit peu sur la question... Le ministre vous a
posé une bonne question tantôt, et je
voudrais faire un petit peu de pouce là-dessus parce que je suis resté un peu
sur mon appétit. Moi, je regarde, là, vos quatre recommandations, puis, sincèrement, je suis assez d'accord avec
ça. La seule chose qui accroche, c'est quand je vous entends dire qu'on n'en veut pas jamais, tu sais. Ou à un moment
donné vous parliez de 50 ans ou je ne sais pas trop. Ça fait que je me dis : Comment qu'on peut
faire un exercice constructif en partant avec des conclusions? J'aurais
d'autres choses à dire, mais, juste par rapport à ça, si vous voulez
rajouter, là...
M. Fortier (Serge) : Bien, dans nos quatre points qu'on a demandés, on ne parle pas d'un
abandon complet et définitif de
toutes les énergies d'hydrocarbures, à ce que je sache. Les quatre points,
c'était : moratoire, instauration d'un BAPE, consultation citoyenne ou sociale, là, un débat social sur la
question, et puis envisager aussi de voir la pertinence de développer une telle énergie face à d'autres
énergies alternatives, et finalement, quatrièmement, bien, c'est ça, c'est
de passer le plus vite possible au niveau des énergies alternatives. Donc…
M.
Martel : C'est parce que vous dites : Ça, ça va
démontrer clairement que ce n'est pas nécessaire. Autrement dit, si on arrivait à d'autres conclusions, vous
seriez forcément — moi,
c'est de même que je le comprends — contre ces conclusions-là. Parce que le gaz naturel, veux veux pas, on en a besoin.
Vous savez, à Bécancour, il va y avoir une usine d'urée que le ministre est venu annoncer avec beaucoup de fierté.
Fondamentalement, essentiellement, la matière première de l'urée, ça va être le gaz naturel. Ça fait
qu'on s'entend-u pour dire qu'on ne peut pas se priver de ça demain matin, là?
Mme Perreault
(Lise) : Pardon, moi, je...
Le
Président (M. Lessard) : Oui. Alors donc, on va y aller avec Mme
Perreault, oui. Plusieurs ont levé la main, mais on va lui donner le
droit de parole.
• (21 heures) •
Mme Perreault (Lise) : Dans un article ici qui s'intitule Bond de
5 % des GES en deux ans : «À ce rythme, la hausse de
température de la terre risque de dépasser le seuil critique des 2 Celcius.»
Bon, ça, c'était dans Le Devoir du 31 mai 2011. Ici, on dit : «Selon le chef économiste de l'AIE,
deux raisons principales expliquent l'échec de la communauté internationale à réduire ses
émissions de GES. D'abord, dit-il, "les grandes nations émettrices
n'envisagent pas sérieusement de réduire leurs émissions. Et, deuxièmement, la révolution des gaz de schiste
menace la viabilité des projets d'énergies vertes partout sur la
planète".»
Le
Président (M. Lessard) : …c'est tout le temps qui nous a été consacré.
Excusez de vous couper comme ça, mais je suis l'arbitre du temps ici. Alors, ça va terminer, donc, la
présentation que CMAVI a pu faire ici, donc, dans une… assez enthousiaste.
On
vous remercie et on va donc suspendre quelques minutes pour donner la chance à
un autre groupe de prendre la place. Merci.
(Suspension de la séance à
21 h 1)
(Reprise à 21 h 4)
Le Président (M. Lessard) : Alors donc, nous reprenons nos travaux
concernant, donc, le projet de loi n° 37. Alors donc, nous recevons
maintenant le Conseil patronal de l'environnement du Québec. Alors donc,
bienvenue. Vous aurez donc une
période de 10 minutes, donc, pour faire votre présentation, et si vous voulez
décliner votre identité pour les fins de l'enregistrement. Par la suite, donc, deux blocs seront offerts à vous…
trois blocs, en fait : 14 minutes pour le gouvernement, 13 minutes pour l'opposition officielle et
3 min 30 s pour le deuxième groupe d'opposition. Alors, nous vous
écoutons.
Conseil patronal de l'environnement
du Québec (CPEQ)
Mme Lauzon
(Hélène) : Bonjour, M. le
Président, M. le ministre, madame… oui, Mme et MM. les parlementaires. Donc, merci de nous permettre de commenter le
projet de loi n° 37. Je suis Hélène Lauzon, la présidente du Conseil
patronal de
l'environnement du Québec, et je suis accompagnée ce soir du Pr Pierre-Olivier
Pineau, qui est professeur à l'École des
hautes études commerciales à Montréal, mais également titulaire de la Chaire de
gestion du secteur de l'énergie des HEC. Je l'ai dit comme il faut,
hein?
Donc, le
Conseil patronal de l'environnement du Québec, c'est l'organisation qui
représente le secteur d'affaires du
Québec pour toutes les questions relatives à l'environnement et au
développement durable. Nous générons avec nos membres 280 000
emplois et nous affichons des revenus de l'ordre de 45 milliards de
dollars.
Avant de vous
transmettre les commentaires plus précisément sur le mémoire, j'aurais à vous
dire que nous avons pris, bien sûr,
connaissance de l'annonce qui a été rendue publique hier par le ministre, le
rapport du Comité d'évaluation environnementale stratégique, et
également l'annonce que le BAPE allait tenir une audience publique. Bien sûr,
nous sommes satisfaits que ce rapport ait
été rendu public, mais nous déplorons qu'il ait été rendu public la veille des
débuts de la commission aujourd'hui
parce que nous aurions souhaité bénéficier d'un délai plus long pour en prendre
connaissance, pour ajuster notre mémoire. Parce que vous avez sûrement
constaté, puisque nous avons transmis notre mémoire hier après-midi, vous avez sûrement constaté que notre
mémoire est déphasé par rapport à la réalité, puisque nous n'avions pas, à ce moment-là encore, entre nos mains le
rapport du comité. Alors, une telle commission sert à obtenir des avis, sert à
obtenir un éclairage pour élaborer des
politiques publiques. Donc, idéalement, c'est toujours préférable si on peut
avoir les documents plus longtemps d'avance.
Cela dit, je
suis prête à vous formuler nos commentaires qui portent, d'une part, sur les
effets négatifs du projet de loi, qui
vise à décréter un moratoire et, d'autre part, qui, pour nous, manque un
élément essentiel… c'est-à-dire que c'est
un projet qui manque deux éléments essentiels aussi. Donc, si je commence sur
les effets négatifs, ils portent, d'après nous, sur l'effet d'insécurité juridique que ça crée pour les
entreprises, la crainte pour les investisseurs potentiels et le préjudice que certaines entreprises peuvent
encourir, et je vais vous donner des exemples que l'on retrouve dans le projet
de loi qui permettent de conclure à ces effets négatifs.
Le premier,
vous savez qu'en vertu du projet de loi le moratoire, qui, bien sûr, interdit
l'exploration et l'exploitation des
gaz de schiste, s'appliquera sur le territoire de 52 municipalités et MRC. Par
contre, c'est ce qu'on déplore, le gouvernement aura un pouvoir discrétionnaire de déterminer éventuellement l'étendue
de ce moratoire en l'élargissant à d'autres territoires contigus. Nous, nous croyons que les permis qui
ont été délivrés aux entreprises sont valides. Et imaginez-vous, placez-vous
dans la position d'une entreprise dont les
permis visent un territoire qui est contigu à l'une des 52 municipalités qui
sont visées par le projet de loi.
Alors, ce titulaire de permis, en ce moment, ne sait pas si son permis est
valide. Il sait qu'il est possible
que le gouvernement décide sur une base purement discrétionnaire que son
territoire sera visé. Alors, nous le déplorons et nous le dénonçons.
Un autre
exemple des effets négatifs, c'est l'effet rétroactif du moratoire. Ce qu'on a
constaté, c'est qu'en vertu des
articles 2, 3 une entreprise qui possède des autorisations en vertu de la Loi
sur la qualité de l'environnement verra ses autorisations suspendues pendant toute la durée du moratoire,
c'est-à-dire pendant cinq ans. Et une entreprise qui possède aussi un permis de forage en vertu de la Loi sur
les mines verra aussi son permis suspendu pendant cinq ans. Ça a un effet
rétroactif, un moratoire, de cette façon. Je
vais vous donner l'exemple concret pour que ça puisse avoir une résonance
pour M. et Mme Tout-le-monde, ce serait la
même chose que... Le rêve de plusieurs individus dans une vie, c'est de se
procurer une terre ou un terrain puis de se
faire construire une maison. Alors, ce serait, par exemple, si on prend le
scénario, un individu qui s'achète
son terrain, qui obtient tous les permis pour construire la maison, qui retient
les services d'un architecte pour
élaborer les plans, qui retient la main-d'oeuvre nécessaire, qui achète les
matériaux, puis, à la toute dernière minute,
on lui dit : Bien, finalement, vous ne pourrez pas construire votre
maison. Alors, transposé dans le monde des entreprises, c'est un exemple comme celui-là. Et pourtant, lorsqu'on a
fait nos demandes de permis, nous respections les conditions. Ça crée de l'insécurité juridique,
puisque ce qui se dit dans le monde en ce moment, les entreprises, c'est :
Au Québec, on ne sait pas si nos permis
seront bons longtemps, on ne sait pas si on ne pourrait pas se voir suspendre
nos permis, et, bien sûr, ça décourage les investissements.
Le dernier exemple des effets juridiques…
c'est-à-dire des effets négatifs du projet de loi, porte sur l'absence d'indemnité. Il y a une disposition dans le projet
de loi qui vient dire que l'État ne versera aucune indemnité, par exemple,
si une entreprise subit un préjudice. Je vais prendre une petite gorgée d'eau. Alors,
ce que ça peut faire, c'est que l'entreprise…
Et là, en ce moment, ce sont les permis de forage puis les autorisations
délivrées en vertu de la Loi sur la qualité
de l'environnement qui sont suspendus, mais vous devez savoir qu'une entreprise
qui oeuvre dans le domaine des gaz de schiste possède également un
permis d'exploration.
• (21 h 10) •
Le permis
d'exploration, lui, en vertu du projet de loi, n'est pas suspendu. Par contre,
les obligations qui y sont assorties,
c'est-à-dire l'obligation de faire des travaux de recherche puis l'obligation
de verser une rente annuelle, continuent de s'appliquer. Et pourtant il n'y a aucune indemnité, et le permis de
recherche sous-tend l'obligation de faire des forages. Alors, d'un côté, on interdit de faire des forages
en vertu du projet de loi, mais, en vertu de la Loi sur les mines, nos
titulaires de permis sont obligés de
faire de la recherche et obligés de faire du forage. Donc, il y a quelque chose
d'antinomique, et voilà encore un exemple de préjudice potentiel. Alors,
ce sont les effets négatifs que je voulais soulever.
Maintenant,
je vous disais aussi qu'il manquait deux éléments importants dans le projet de
loi. Premier élément, un inventaire
qui devrait être réalisé sur l'ensemble du territoire pour connaître notre
ressource. Et le deuxième élément, c'est
la possibilité de faire un projet de démonstration. Le rapport qui a été publié
hier en fin de journée indique que le climat
économique n'est pas favorable à l'exploration et l'exploitation des gaz de
schiste en raison du fait que le prix du gaz naturel est bas, mais qu'un jour, si le prix montait, ça pourrait
devenir favorable sur le plan économique. Ce qui arrive, c'est que nous
croyons que, pendant cette période, c'est justement l'occasion d'aller de
l'avant et d'essayer de parfaire nos connaissances
pour essayer de répondre aux préoccupations des citoyens qui se posent des
questions par rapport aux risques que comportent la fracturation ou encore les
émissions fugitives. Alors, dans ce contexte, nous croyons qu'un projet de
démonstration serait tout à fait bienvenu,
et le comité lui-même le suggère dans son rapport. Voilà, c'est ce que nous
avions à formuler comme commentaires, M. le Président.
Le
Président (M. Lessard) : Alors, merci beaucoup. Donc, on va ouvrir nos
échanges immédiatement, donc, sur M.
le ministre, qui va donc s'entretenir avec vous pendant 14 minutes. Par la
suite, 13 minutes, l'opposition officielle, et 3 min 30 s
pour le deuxième groupe. M. le ministre.
M.
Blanchet :
Permettez-moi de prendre une minute encore une fois. Je comprends que la
politique est souvent affaire de
rhétorique puis de répétition de choses qui pourraient ne pas s'avérer tout à
fait exactes. Bien sûr, passeront à l'histoire le 17 h 48, qui
pourrait être 17 h 47 ou 17 h 49. Le fun, sympathique, pas
très grave.
Par
contre, très grave de faire le lien entre le document d'hier et ce qu'on fait
ici aujourd'hui. Et je suis convaincu, je suis convaincu, compte tenu de
la grande estime que j'ai pour vous, que vous savez très bien que ce qu'on fait
ici aujourd'hui n'a aucun rapport avec le
rapport de l'évaluation environnementale stratégique déposé hier et qu'il est
donc inadéquat de dire que ça a été
déposé trop tard, puisqu'on devait venir là-dessus aujourd'hui. Ça aurait pu
être déposé dans trois semaines, il y
a trois semaines, le Comité de l'évaluation environnementale stratégique
déposait son rapport. Il n'y a pas de
lien, puisqu'on parle ici d'un projet de loi sur le moratoire, et non pas sur
le fond de l'enjeu. Alors, je l'ai dit — je présume que je le redirai encore — parce que je présume que mon estimé collègue
de Laurier-Dorion va répéter la même
affaire encore à de nombreuses reprises, mais ce ne sera peut-être pas tous les
gens qui viennent ici qui reprendront cet argument.
Cela
dit, on parle de quelques décennies… — et là, quelques décennies, quand on dit 30
ans, je pense qu'on est bien, bien
optimiste, là — on parle
de plusieurs décennies avant qu'on puisse opérer une transition réussie vers
l'essentiel de notre consommation
d'énergie qui viendrait d'énergies renouvelables, de sources renouvelables.
Dans l'intervalle…
Une voix :
...
M.
Blanchet :
...peut-être jamais, là, mais moi, je ne rirai pas pendant vos interventions.
Mais les gens…
Le Président (M.
Lessard) : M. le ministre, adressez-vous à moi s'il y a lieu, mais on
ne va pas favoriser les interpellations entre les personnes.
M.
Blanchet :
Les gens, il y en a qui parlent de 30 ans. Moi, je n'y crois pas. Avant que
l'essentiel de notre consommation d'énergie
soit de sources renouvelables, il va falloir des décennies. Ma question est
fort simple : Est-ce qu'on est capable, compte tenu de l'enjeu d'acceptabilité
sociale du gaz de schiste dans la vallée du Saint-Laurent, de traverser cette
période de transition sans avoir recours à cette ressource?
Le
Président (M. Lessard) : Donc, la parole est à vous. Je ne sais pas si
vous voulez vous exprimer, Mme Lauzon ou M. Pineau, là, qui est
titulaire d'une chaire de recherche.
M. Pineau (Pierre-Olivier) : Bien, quand vous faites référence à nos besoins,
c'est mal défini si c'est les besoins du
Québec, où, en fait, presque la majorité des ressources énergétiques au Québec
sont déjà de sources renouvelables, ou
si vous faites référence à l'humanité. Je pense que le Québec est dans une
situation très différente. Et le gouvernement du Parti québécois veut
réduire, d'ici 2025, de 30 % notre consommation de pétrole. Donc, si on
réduit de 30 % notre consommation de pétrole et qu'on est déjà à 50 %
d'énergie renouvelable, et qu'on amène, même si c'est des petites quantités, du biométhane sur le marché, on va
arriver bien plus vite vers une société où on a des parts d'énergie
renouvelable qui sont bien plus grandes que ce qu'on a aujourd'hui.
Mais
je suis d'accord avec vous, ceci dit, sur le fait que nous avons besoin, dans
la transition, d'énergie fossile et
qu'il y a un avantage à la produire en sol québécois, et que, donc, c'est
important, et c'est à ce titre-là que je suis venu soutenir le mémoire du CPEQ, que c'est important
d'acquérir le maximum d'information sur… d'expertise québécoise sur la fracturation et sur les émissions fugitives
qui ont lieu lorsqu'on exploite des pétroles et des gaz non conventionnels.
Et donc c'est dans ce moratoire qui pourra
avoir lieu que ça nous restreindrait dans l'acquisition d'information, et donc
je souscris complètement à l'idée
que, pour acquérir de l'information, justement pour assurer la transition
énergétique dont vous parlez en
maximisant les éventuelles retombées économiques québécoises, qu'il faut être
ambitieux, aller très vite vers des
énergies vertes en réduisant notre consommation, en augmentant la part des
énergies renouvelables, mais en ne disant
pas non à une exploitation responsable, si c'est possible de le faire,
d'énergies fossiles, même de type non conventionnel, en sol québécois.
Donc, je pense avoir répondu...
Le Président (M.
Lessard) : M. le ministre, je pense…
M. Pineau
(Pierre-Olivier) : …à la question, M. le Président.
Le Président (M.
Lessard) : …des échanges.
M.
Blanchet :
…ma question parce qu'à l'heure actuelle il y a à peu près 14 milliards
par année d'importation de pétrole.
Même si on réduisait ça de 30 %, il en reste à peu près 9 milliards.
Ça reste encore un volume phénoménal de pétrole, beaucoup trop. Donc, effectivement,
l'alternative locale, mais j'ai précisé spécifiquement l'enjeu de la vallée
du Saint-Laurent. Pourquoi? Parce qu'il y a
un enjeu d'acceptabilité sociale de résidents, et donc, dans cette mesure-là,
je dis… Et je parle strictement d'indépendance énergétique pour le Québec, puis
j'avoue qu'aujourd'hui je n'ai pas la perspective
humanité. Donc, je dis juste : Est-ce qu'on est capables mathématiquement
de traverser cette transition, dont on
pourrait beaucoup débattre de comment de temps elle va durer, là, parce qu'il y
a quelques milliers de véhicules électriques sur les routes du Québec à l'heure où on se parle… est-ce qu'on est
capables de traverser cette transition sans recourir spécifiquement à
cette source d'hydrocarbures là?
Mme Lauzon
(Hélène) : Oui. C'est possible.
Ce que je vous dirais, M. le ministre, c'est : À partir du moment où il y aura toujours… Il y aura toujours un enjeu
d'acceptabilité sociale pour les combustibles fossiles, vous le voyez dans le dossier d'Anticosti. Est-ce que ça veut
dire qu'à chaque fois où on aura un enjeu d'acceptabilité sociale on devra
avoir un moratoire? Moi, je me pose cette question-là. Mais, pour répondre à
votre question : Oui, c'est possible.
M.
Blanchet : Je vous
dirais sur cet aspect-là précis que la démarche qu'on fait sur Anticosti est
exactement celle qu'on fait dans la vallée
du Saint-Laurent. Pourquoi? On dit : Allons chercher de l'information, de
la connaissance, soumettons-la au
BAPE. Mais, à Anticosti, on va faire partie de l'exercice de cueillette
d'information qui va aussi être soumise au BAPE. Donc, on a une démarche
qui procède de la même logique.
Vous parliez
de connaissance de ce que… de ce dont recèle le sous-sol, que c'était essentiel
de faire l'inventaire de ce dont nous
disposons. Donc, le projet de démonstration, qui revient dans un certain nombre
de présentations, me laisse un peu
perplexe parce que… Puis je citais tout à l'heure M. Bélisle, qui dit :
Même si on creusait 40 000 autres puits en Amérique, on n'en
saurait pas plus sur l'aspect technique de la chose. La raison du forage, c'est
identifier le potentiel d'exploitation
commerciale de ce qu'il y a en dessous. Quand on se le dit franchement, c'est
clair. Pour moi, donc, ce projet de
démonstration, je dis : C'est de l'exploitation à petite échelle, ce n'est
pas autre chose. C'est : On va faire en petit ce qu'on ne réussit pas à faire en grand. Je ne
m'explique pas la pertinence de cet exercice de créer un exemple ou de faire un
projet de démonstration qui ne démontre rien, qui n'est pas déjà pratiqué à
coups de dizaines de milliers de puits en Amérique du Nord déjà.
Le Président (M. Lessard) : Pr
Pineau ou Mme la présidente?
• (21 h 20) •
M. Pineau
(Pierre-Olivier) : Mais alors, à
Anticosti, on va faire de l'exploration, justement, pour acquérir plus de
données. Je pense que les compagnies
gazières voudraient acquérir plus de données dans les basses-terres du
Saint-Laurent pour, justement, tirer
le même type de conclusions que ce que Ressources Québec va tirer dans deux
ans. Je crois que, d'un niveau
d'expertise gouvernementale, là où, au Québec, je pense que nous devons viser
d'avoir une réglementation exemplaire et d'être des leaders, c'est au
niveau des émissions fugitives parce que les conclusions de l'évaluation
environnementale stratégique ont vraiment souligné le fait que, selon le
pourcentage d'émissions fugitives qui sont associées à l'exploitation de gaz de
schiste... Mais c'est la même chose pour le pétrole de schiste, il y a des
émissions fugitives. Lorsqu'on fore pour ce
type d'hydrocarbures, il y a du méthane qui fuit, et on a peu de capacité à
bien savoir quelle est la quantité
qui fuit. Et c'est essentiel, pour que l'État québécois puisse suivre et
surveiller quel est le niveau d'émissions, qu'il y ait une expertise de
mesure, d'encadrement, de réglementation pour que les entreprises sachent exactement à quoi s'attendre, et à quoi elles vont
faire face, et le nombre de droits d'émission qu'elles devront aller acheter
sur le marché du carbone pour compenser ces émissions qu'elles vont avoir là.
Et c'est dans
cette mesure-là où il faut bien comprendre l'industrie, bien comprendre le type
de forage, le type de produits qu'on
a. Parce qu'on dit que ce n'est que du gaz naturel ou que du pétrole. Dans la
réalité, c'est mélangé, il y a des
gaz de pétrole liquéfiés qui vont sortir. C'est ce qui fait que le gaz de
schiste, aux États-Unis, est rentable, c'est qu'il y a plus que du gaz de schiste qui sort de là, il y a
du propane, il y a du butane, il y a de l'éthane, qui sont des produits à
valeur ajoutée. Et il y en aurait
peut-être une certaine proportion qui pourrait rendre le forage dans les
basses-terres du Saint-Laurent rentable si on avait un peu plus de
propane et de butane que de gaz que ce qu'on attend aujourd'hui. Donc, dans
cette exploration-là, il y a encore des
données à aller chercher, des validations, il faut l'encadrer. Et, comme le
disait Mme Lauzon, c'est pour être prêts, lorsqu'on va avoir, dans deux
ans, trois ans, cinq ans ou dans 10 ans, des prix du gaz naturel qui remontent, eh bien, que l'État québécois soit prêt
à bien encadrer. Et le prix du gaz naturel peut fluctuer très rapidement.
On l'a vu en janvier dernier, il a dépassé
le 5 $ le million de BTU, alors que plusieurs prédisaient qu'il
resterait à 2 $, 3 $ pendant des décennies. Il se peut que le prix du
gaz naturel remonte relativement rapidement et que, dans trois, quatre ans,
on se trouve à 5 $, 6 $, 7 $,
et le seuil de rentabilité, d'après les rapports de l'EES, c'est environ
6 $,7 $ le million de BTU pour le gaz naturel de schiste au Québec. Alors, 6 $, 7 $,
c'est ce qu'on avait en 2007-2008, ça pourrait arriver dans quatre, cinq
ans.
Le
Président (M. Lessard) : Je pense qu'il y a un complément
d'information que la présidente veut donner, mais, M. le ministre, il vous reste quatre minutes.
Donc, un petit complément d'information si on veut avoir deux échanges.
Je pense que le député de Repentigny aussi…
Mme Lauzon
(Hélène) : Oui. C'était pour
répondre au ministre. Lorsque vous dites : Mais finalement c'est une
exploitation à petite échelle, vous avez
raison, un projet pilote, c'est toujours une exploitation à petite échelle,
mais ce serait sur un petit terrain, petites dimensions, dans une
approche de gestion de risques, comme le comité d'évaluation stratégique le dit
aussi, mais, oui, dans un contexte d'exploitation, mais pour évaluer le risque
aussi.
M.
Blanchet : Écoutez, c'est assez précisément ce qu'on va
faire à Anticosti, ce qui amène à notre comparaison. D'abord, trois choses. Au niveau économique,
effectivement, on constate que les gens qui font des pronostics, les uns et
les autres, ça varie énormément, là, je suis
totalement d'accord avec vous, dans un premier temps. Sur les fuites, sur les
émanations fugitives, j'ai moi-même,
aujourd'hui… j'ai dit : Sortez-moi de meilleures données, on doit avoir une
meilleure compréhension de cet
enjeu-là. Mais, encore là, d'une étude à l'autre, on va de là à là. Le débat
est ouvert entre une fraction de 1 % et 7 % d'émanations
fugitives, c'est un énorme écart.
Par contre,
sur la comparaison avec Anticosti — j'ai eu l'occasion de le faire souvent, et
ça aussi, je le ferai encore souvent — il y a des différences géologiques,
géographiques. Il y a des différences dans la nature de ce qu'il y a dans
le sol. Il y a des différences démographiques évidentes. Il y a des différences
économiques évidentes entre la vallée du Saint-Laurent
et l'île d'Anticosti. Sur une base purement scientifique, on ne va pas tenir
compte des résidents en surface puis
de l'industrie agricole si on ne s'intéresse qu'aux hydrocarbures. Mais, comme
gouvernement, on n'a pas le droit de ne pas tenir compte du fait qu'il y
a dans la vallée du Saint-Laurent des gens qui vivent en surface, qui
pratiquent l'agriculture et qui pourraient
dire : Nous ne voulons pas ça chez nous. Et là on n'est plus ni dans
l'économie ni dans la science, on est dans la volonté populaire, c'est
très légitime.
À l'île
d'Anticosti, il y a environ 250 habitants qui n'occupent pas 1 % du
territoire de l'île d'Anticosti. On ne fera
pas de trous dans la cour arrière de personne en allant avec un processus qui
sera de l'exploitation à petite échelle dans la mesure où on veut aller voir qu'est-ce qu'il y a là puis si ça
sort. Donc, la comparaison entre les deux, on la fait. Mais, si on la
fait sur une base rhétorique, tu fais attention, la réponse est très, très
claire. Si on la fait sur une base scientifique,
du contenu, des mécanismes, des technologies, là je suis tout à fait d'accord.
Je veux laisser du temps à mon collègue. Donc, moi, je m'arrête là.
Le
Président (M. Lessard) : Alors donc, le député de Repentigny aura une
des questions parce qu'il reste moins… 1 min 30 s
environ.
M.
McKay : Bien, je vais essayer d'y aller rapidement. Il y a
eu huit forages, huit avec de la stimulation hydraulique, de la fracturation. Il y en a quatre là-dessus qui
fuient. Alors, vous ne les avez pas déjà, vos exemples d'émissions fugitives?
Pourquoi ça prendrait un puits de plus pour démontrer que les puits de gaz de
schiste fuient?
M. Pineau (Pierre-Olivier) : Bien, c'est
justement, ce serait de... c'est des exemples de mauvaises pratiques. L'industrie a, en Amérique du Nord, un historique
qui est loin d'être parfait sur l'exploitation de pétrole et de gaz non conventionnels. L'Agence internationale de
l'énergie, dans une de ses recommandations, recommande, justement, qu'il
faut être extrêmement rigoureux si on veut pouvoir en faire de manière
responsable.
Maintenant,
dire qu'à cause d'un mauvais conducteur on interdit à tout le monde de
conduire, c'est un problème. Même s'il y a beaucoup de mauvais
conducteurs, est-ce qu'il faut interdire à tout le monde ou il faut éduquer et
bien réglementer? Je pense que nous, on prend l'approche... et je prends
l'approche de dire : Il vaut mieux réglementer, encadrer et, surtout, bâtir une expertise. Et des règlements clairs
parce que, comme l'industrie n'avait pas de règlements clairs, elle ne
savait pas vraiment à quoi s'en tenir.
Une voix : Merci.
Le Président (M. Lessard) : Alors,
il reste à peu près 20 secondes.
M.
McKay : O.K. L'article 31.86
de la loi sur l'eau fait en sorte que le ministre peut arrêter un prélèvement
d'eau s'il juge que l'environnement
est menacé. Alors, vous dites, vous, que le projet de loi n° 37 va créer
de l'insécurité juridique. Est-ce que vous remettez en cause...
Le
Président (M. Lessard) : C'est tout le temps... Je vais arrêter le
député de Repentigny dans son élan, mais, malheureusement...
M.
McKay : ...la
protection de l'eau qu'il y a dans la loi sur l'eau?
Le
Président (M. Lessard) : ...le temps imparti est terminé. Donc, vous
aurez peut-être l'occasion de répondre du côté de l'opposition
officielle, qui a 13 minutes. C'est le député de Viau qui va donc
s'adresser à vous.
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Me Lauzon, Pr Pineau,
bonsoir. La présentation est très intéressante, puis, lors des échanges, on a appris énormément. La
question reste depuis le début, là, de la journée, quand on a des groupes
citoyens qui viennent nous voir, on ne peut
pas nier le fait qu'il y a une inquiétude fondamentale, là, qui est là, qui est
présente, puis on peut faire des démonstrations très éloquentes comme la vôtre,
il demeure qu'il faut répondre à cette inquiétude-là.
Alors, de
votre côté, qu'est-ce que vous proposez, qu'est-ce que vous mettez de l'avant?
Pas pour... Puis, encore une fois, le
procès du passé, il a été fait à maintes et maintes reprises, on sait les
erreurs qui ont été commises, même ceux qui les ont commises les reconnaissent. Moi, ce que je voudrais
approfondir, c'est voir qu'est-ce que vous mettez de l'avant, qu'est-ce que le CPEQ, vos membres,
particulièrement, là, les gros joueurs industriels québécois mettent de l'avant
pour tenter de rapiécer ce lien de confiance là qui a été brisé.
Mme Lauzon (Hélène) : Bien, je vous remercie. Ce qu'on a fait, tout de
suite après le dossier en question, lorsque le tout a dérapé, si on peut dire, ce qu'on a fait, c'est qu'on a senti
le besoin d'élaborer un guide de bonnes pratiques afin de favoriser l'acceptabilité sociale des projets.
Donc, c'est un guide qui va loin, qui incite nos membres à adopter de bonnes
pratiques, donc à consulter en amont, à
remettre en question, à plusieurs étapes dans le processus de consultation, le
projet lorsqu'il y a un
mécontentement. Nous avons élaboré ce guide avec l'ensemble de nos parties
prenantes de façon à bonifier le
guide. Donc, c'est une façon pour nous de réagir à cet enjeu qui comporte...
qu'ont les citoyens de... leurs craintes, leurs préoccupations,
d'essayer de voir quelle serait l'acceptabilité sociale.
Et
l'une des choses que l'on met de l'avant, c'est de vouloir travailler avec le
gouvernement éventuellement sur une
proposition de qu'est-ce que l'acceptabilité sociale. Mais je dirais plus que
ça : À quel moment on atteint l'acceptabilité sociale? Et c'est l'enjeu en ce moment. Alors,
c'est sûr que ce dossier-là nous préoccupe, mais beaucoup d'autres dossiers,
puisqu'il semble que l'acceptabilité sociale devienne le prétexte pour... Et je
ne suis pas à remettre en question les préoccupations
des citoyens, qui sont très légitimes. Mais ce que je constate, par contre,
c'est que l'acceptabilité sociale est le prétexte pour freiner le
développement aussi. Parce que nous préconisons un développement durable, donc
un développement qui respecte des conditions de base, alors c'est ce qu'on a
préconisé auprès de nos membres.
M.
Heurtel : Est-ce que vous comprenez qu'on part de très loin? Si vous
prenez le groupe qui vous a précédés, la proposition est presque de dire
que ça ne sera jamais acceptable ou, en tout cas, pas loin. Ça va prendre
beaucoup, beaucoup de temps. Alors, si on
part de si loin que ça, je comprends qu'il y a un guide, mais, au-delà de ça,
vous pensez faire quoi exactement,
plus précisément? Parce que le guide, je comprends, mais rejoindre ces gens-là
ou tenter un dialogue... Je sais bien
qu'on ne peut pas aller chercher 100 % de consensus dans quelque question
que ce soit, mais qu'est-ce qu'on peut faire pour, justement, aller
chercher ce degré-là, là, dont vous parlez?
• (21 h 30) •
Mme Lauzon (Hélène) : Donc, je vais juste… Avant de vous céder la parole, M. Pineau, ce
que je dirais à ça, c'est
d'essayer... C'est certain qu'il y a toujours des gens qui vont être contre
l'exploitation des gaz de schiste, qui sont contre les combustibles, de toute façon. Alors, la seule chose que l'on
peut faire, parce qu'auprès de ces gens-là on ne pourra jamais réussir à les rassurer non plus, ils sont contre de façon
déterminée et, je pense, perpétuelle… Mais ce qu'on peut faire, c'est, avec le projet de
démonstration, essayer de répondre à leurs préoccupations et démontrer qu'il
n'y a aucun risque ou les risques
sont contrôlés. Donc, c'est de faire de l'information beaucoup et de la
transmission de connaissances. Et je vous céderais la parole, M. Pineau.
M. Pineau (Pierre-Olivier) : Mais je pense que ces derniers points sont les
points sur lesquels je voulais insister. Je pense que les citoyens, à juste titre, n'ayant pas d'information,
n'ayant pas de réglementation gouvernementale en ce qui concerne l'eau, le traitement de l'eau, les
émissions fugitives, un ensemble de préoccupations environnementales réelles,
n'ayant pas cette information et se sentant
seuls, ils se sont sentis démunis. Et, si, par contre, l'information leur est
donnée et qu'il y a une crédibilité
dans l'expertise du gouvernement à gérer ces situations pour ne pas que le
citoyen se sente seul face à des
grandes entreprises, mais se sente, premièrement, en contact avec les
entreprises par une meilleure approche de
relation et aussi protégé et encadré par un gouvernement, c'est-à-dire que le
gouvernement encadre les relations, je pense
qu'il y aurait moyen de rétablir le lien de confiance qui est nécessaire. Et
c'est ce qui se passe dans beaucoup de juridictions
en Amérique du Nord. Par exemple, sur les produits chimiques qui sont mis dans
les liquides de fracturation, eh
bien, on a de plus en plus de divulgation obligatoire de ces produits-là, qui
ne sont pas forcément des produits chimiques toxiques, qui sont différents produits qui sont mis. Et donc, s'il y a
une divulgation, s'il y a une transparence sur la manière dont ils sont
traités par la suite, eh bien, il va y avoir une plus grande acceptabilité de
ces pratiques-là.
M.
Heurtel : Sur la question des meilleures pratiques, justement, est-ce
que vous pouvez aller plus loin au niveau d'exemples concrets des juridictions? Parce que, bon, dans les
présentations, notamment la Fédération des chambres de commerce, on
parlait de la Colombie-Britannique. Est-ce que vous avez, justement, des
exemples qui s'apparentent, justement, au
genre de territoire puis à la densité de population, là, qu'on a ici, là, qui
est visée par le projet de loi? Est-ce que
vous avez des exemples des meilleures pratiques, là, qu'on pourrait regarder,
là, davantage pour s'inspirer, là, de ce que vous dites?
M. Pineau
(Pierre-Olivier) : Je crois qu'il n'y a pas un endroit en Amérique du Nord
où on peut établir des meilleures pratiques encore aujourd'hui parce que c'est
une industrie à la fois naissante, mais extrêmement atomisée. Donc, on a un ensemble de compagnies, dans
certains cas des petites compagnies, qui, elles-mêmes, bâtissent leur expertise
un peu sur chaque projet. Donc, on fait face
à un défi, et c'est d'autant plus important pour le Québec, pour l'État
québécois de se bâtir une expertise,
une capacité à comprendre les enjeux pour pouvoir encadrer l'industrie de
manière responsable et rendre son
activité légitime auprès de la population si, évidemment, on conclut qu'il y a
lieu d'aller de l'avant avec de tels
projets. Mais on ne dispose pas encore d'assez d'information et d'assez de
capacité de réglementation pour vraiment encadrer l'industrie et
s'assurer que les fuites fugitives sont contrôlées, que l'eau est bien gérée et
que l'ensemble des préoccupations légitimes des citoyens est traité de manière
adéquate.
M. Heurtel :
Pardon, M. le Président. Le temps, s'il vous plaît.
Le Président (M.
Lessard) : Il vous reste sept minutes, oui.
M.
Heurtel : Merci. Maintenant, au niveau du processus, là, qu'on vit,
là, je comprends qu'on a commencé par un BAPE, après ça on est passé à
une étude environnementale stratégique, qui, par une coïncidence fascinante, a été
divulguée hier soir, à 17 h 48, c'est ça, et donc…
Une voix : …
M.
Heurtel : Oui, vous pourriez
certainement les donner. Et donc, là, maintenant, ce qu'on comprend, c'est
qu'on va retourner avec un autre
BAPE. J'aimerais ça vous entendre sur ce genre de mécanique là et comment vous
voyez ça, et les conséquences d'agir de la sorte, là, parce que ça va
créer des précédents, sans doute.
Mme Lauzon
(Hélène) : Oui. C'est-à-dire que,
là, ça va me permettre aussi de répondre à votre préoccupation, M. le ministre, quand vous avez dit : Je ne
peux pas croire que vous pensez qu'il y a un lien entre les travaux du comité
puis la commission d'aujourd'hui. Ce n'était
pas pour dire qu'il y avait un lien direct, mais il y a un lien quand même
indirect, en ce sens qu'il y a des
recommandations qu'on vous a formulées que, si on avait pris connaissance du
rapport avant, peut-être que les
recommandations auraient été encore plus précises. C'est en ce sens-là que,
pour moi, il y a un lien.
Mais, pour
répondre à votre question, Me Heurtel, ce que je vous dirais, c'est : Il y
a, effectivement, eu une audience publique tenue par le BAPE au départ.
Le BAPE en était venu à la conclusion qu'il ne disposait pas suffisamment de connaissances, et, pour cette raison, le gouvernement
avait confié un mandat au Comité d'évaluation environnementale
stratégique.
Pour nous, il est un peu précipité… Et loin de
moi l'idée de dire que le BAPE ne devrait pas faire son travail, puisque c'est une institution qu'on admire et qui
est citée partout dans le monde, on a la chance d'avoir cette institution-là.
Mais c'est peut-être un peu précipité,
puisque le comité lui-même a conclu à des recommandations, et pourquoi ne pas
prendre le temps d'analyser ces
recommandations avant de retourner devant le BAPE, qui, peut-être, ne pourra
pas arriver à d'autres conclusions
que celles du Comité d'évaluation environnementale stratégique? Alors, c'est
peut-être un peu précipité.
M.
Heurtel : C'est parce que j'aimerais ça, entendre le Pr Pineau au
niveau économique, la dimension économique, dont vous avez parlé ce
soir. Est-ce que le BAPE est équipé pour en tenir compte?
M. Pineau
(Pierre-Olivier) : Je ne crois
pas que le BAPE apportera un nouvel éclairage par rapport à ce qui est déjà
inclus dans les rapports, enfin les études
de l'EES. Donc je crois qu'à ce stade-ci le BAPE est… et je m'en excuse, là,
mais un peu inutile dans … parce que l'état
de connaissances n'a pas évolué par rapport à ce qu'on a. Alors, on va
consulter des gens qui vont revenir
avec des mémoires qui ont déjà été écrits dans d'autres circonstances et qui
vont être resoumis à la discussion. Alors, personnellement, je ne vois
pas la valeur ajoutée de cet exercice-là dans l'immédiat.
M. Heurtel : O.K.
Le Président
(M. Lessard) : Ça va. Donc, on va continuer de faire nos échanges, là,
jusqu'à la fin correctement. Alors, il reste trois…
M. Heurtel : Moi, ça va aller. Ça va
aller, M. le Président.
M.
Lessard :
…trois minutes. Ça va aller pour ça? Parfait. On va donc passer aux critiques
de la deuxième opposition. Vous avez trois minutes, alors.
M.
Martel : Merci, M. le Président. Bonsoir à vous deux. Moi,
j'aimerais ça… Je ne sais pas si vous avez l'expertise pour répondre correctement. Moi, dans mon esprit,
le moratoire, c'était adéquat, mais je souhaitais vraiment qu'il y ait un
puits, un projet pilote d'un puits où, un peu comme le ministre veut faire à
Anticosti, on mettrait les Ressources naturelles, l'Environnement, l'entreprise
privée. Le ministre, il dit : On va la faire, cette expertise-là, au
niveau d'Anticosti, donc ce n'est pas nécessaire qu'on fasse ça dans les
endroits où est-ce qu'il y a le gaz de schiste.
Est-ce que
vous pensez que ce qui va sortir d'Anticosti peut être pertinent pour
approfondir notre connaissance dans les gaz de schiste dans les
basses-terres du Saint-Laurent?
M. Pineau
(Pierre-Olivier) : Je pense que
oui, ça va être pertinent, évidemment, si on prend le temps, quand on va
aller à Anticosti, d'avoir véritablement non
seulement les équipes techniques des compagnies qui sont impliquées, mais
une équipe d'experts, de scientifiques qui vont étudier ce qui se passe et
regarder comment ça se passe. Il faut que le gouvernement
crée un comité de suivi des travaux d'exploration. Si jamais on n'a que les
équipes des compagnies qui vont
forer, qui n'ont pas le mandat, elles, d'acquérir de l'information à plus long
terme, bien on n'aura pas cette… alors on
a un risque, en fait, parce que je n'ai pas entendu le gouvernement là-dessus,
sur quel genre d'encadrement pour acquérir l'expertise est-ce qu'on va
avoir. Donc, oui, il y a une possibilité.
Je pense que
le ministre fait aussi une distinction, il dit : Ça serait intéressant de
faire la même chose qu'on fait à Anticosti
dans les basses-terres du Saint-Laurent, mais le contexte social est différent.
Moi, je crois que ce serait envisageable de voir s'il n'y a pas une
municipalité dans les basses-terres du Saint-Laurent qui serait prête à
accepter un projet de démonstration,
justement, pour faire la preuve d'un côté ou de l'autre. Exactement comme l'a
dit le groupe qui nous a précédés,
ils sont ouverts, eux, à ce qu'il y ait plus de données scientifiques. En fait,
ils sont convaincus que ces données scientifiques vont leur donner raison. Mais alors
mettons-nous d'accord avec eux et dire : Allons chercher ces données
scientifiques bien encadrées, et non pas de
manière anarchique, comme ça s'est fait un petit peu trop, malheureusement,
de 2006 à 2010. Donc, encadrons cette exploration dans un projet de
démonstration bien encadré.
Le Président (M. Lessard): Une minute.
M.
Martel :
Une minute? Très général, là. Je vous ai entendu, professeur, par rapport à
Anticosti, les retombées économiques.
Pouvez-vous faire un parallèle avec le potentiel de gaz de schiste dans les
basses-terres du Saint-Laurent? C'est trop vague, hein?
M. Pineau
(Pierre-Olivier) : C'est très
difficile parce qu'on ne connaît pas exactement encore la ressource en place de manière exacte, on ne connaît pas encore
quels sont les taux de récupération. Mais une autre grosse incertitude,
c'est le prix du gaz naturel. Si le prix du
gaz naturel est de 2 $ le millier de BTU ou de 7 $ le millier de BTU,
et on se rend compte qu'il y a une
différence énorme… Très difficile à dire, donc il y a un risque. Mais une chose
est certaine, c'est que cette ressource-là… le prix du gaz naturel est
destiné à augmenter dans les années à venir, donc la pression des compagnies va
redevenir plus forte d'ici deux, trois, quatre, cinq, 10 ans.
M.
Martel : Merci
beaucoup. Merci beaucoup.
Le
Président (M. Lessard) : Alors, merci beaucoup aux représentants,
donc, du Conseil patronal en environnement.
Donc, la
commission, ayant épuisé l'ordre du jour, ajourne ses travaux au mercredi 19
février, 15 heures, où elle poursuivra ce mandat. Merci. Ça termine
notre soirée.
(Fin de la séance à 21 h 40)