Journal des débats de la Commission des relations avec les citoyens
Version préliminaire
42e législature, 1re session
(début : 27 novembre 2018)
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Le
mercredi 18 septembre 2019
-
Vol. 45 N° 35
Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 18, Loi modifiant le Code civil, le Code de procédure civile, la Loi sur le curateur public et diverses dispositions en matière de protection des personnes
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11 h 30 (version non révisée)
(Onze heures trente-huit minutes)
La Présidente (Mme Chassé) :
Je constate le quorum, et je déclare la séance de la Commission des relations
avec les citoyens ouverte.
Je vous souhaite la bienvenue, et je vous
demande à tous de fermer la sonnerie de vos appareils électroniques ou le mode
de vibration, ou encore la porte, ici.
La commission est réunie afin de
poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le
projet de loi n° 18, Loi modifiant le Code civil, le Code de procédure
civile, la Loi sur le curateur public et diverses dispositions en matière de
protection des personnes.
Mme la Secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
La Secrétaire
: Oui,
Mme la Présidente. M. Lévesque (Chauveau) est remplacé par Mme Picard
(Soulanges); M. Skeete (Sainte-Rose) par Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac); Mme Robitaille (Bourassa-Sauvé) par Mme Weil
(Notre-Dame-de-Grâce); Mme Dorion (Taschereau) par Mme Labrie
(Sherbrooke).
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci, Mme la Présidente. Ce matin, nous entendrons les groupes suivants :
l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du
Québec, puis L'Appui pour les proches aidants d'aînés. Comme la séance a
commencé à 11 h 38, c'est ça, hein?
La Secrétaire
: Oui.
La Présidente (Mme Chassé) :
Est-ce qu'il y a consentement pour poursuivre nos travaux au-delà de l'heure
prévue?
Une voix
: ...
La Présidente (Mme Chassé) :
Il n'y a pas de consentement, ça prend l'unanimité. Donc, deux façons :
soit qu'on répartit les coupes des enveloppes de temps à travers chacun des
partis. Est-ce qu'il y a consentement à ce que l'on coupe de façon
proportionnelle dans chacun des... dans chacunes des enveloppes de temps?
M. LeBel : Tant qu'il en
reste.
La Présidente (Mme Chassé) :
Tant qu'il en reste. Le 10 minutes qui est imparti aux présentateurs est
conservé, et le reste... mais je suis certaine qu'il va en rester. Alors, il y
a consentement?
Une voix
: ...
La Présidente (Mme Chassé) :
Très bien. Excellent.
Je souhaite donc la bienvenue aux
représentants de l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux
et familiaux du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes, tel
que je viens de vous le mentionner. Et, à une minute de la fin, je vais vous
faire un signe de la main ou un signe vocal pour vous inviter à conclure.
Débutez en vous présentant, puis commencez tout de suite votre exposé. Allez-y.
• (11 h 40) •
Mme Ouimette (Guylaine) : Mme
la Présidente, je suis Guylaine Ouimette, présidente de l'Ordre des...
La Présidente (Mme Chassé) :
... thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec. Je vous rappelle que vous
disposez de 10 minutes, tel que je viens de vous mentionner, et, à une minute
de la fin, je vais vous faire un signe de la main ou un signe vocal pour vous
inviter à conclure. Débutez en vous présentant puis commencez tout de suite
votre exposé. Allez-y.
Mme Ouimette (Guylaine) : Mme
la Présidente, je suis Guylaine Ouimette, présidente de l'Ordre des
travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec. Je
suis accompagnée de M. Alain Hébert, travailleur social, chargé d'affaires
professionnelles à l'ordre.
Mme la Présidente, M. le ministre délégué,
distingués membres de la commission, au nom de l'Ordre des travailleurs sociaux
et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec, je vous remercie de nous
permettre d'exercer notre participation citoyenne en commentant le projet de
loi n° 18.
Dans le respect de sa mission de
protection du public, notre ordre soutient l'exercice et encadre...
professionnel ses quelque 14 000 membres. L'ordre juge impératif de
participer à la réflexion sociétale entourant ce projet de loi, et je remercie
le curateur de nous avoir associés à sa consultation en reconnaissance de notre
expertise.
Mme la Présidente, permettez-moi de vous
présenter brièvement notre profession inspirante. Nous croyons en la capacité
humaine d'évoluer et de se développer. Nous adhérons aux principes de respect
de la dignité, de l'autonomie et de l'autodétermination de la personne. Nous
reconnaissons à tout individu en danger le droit de recevoir assistance selon
ses besoins. Nous sommes, et avec fierté, d'ardents défenseurs des droits et
des principes de justice sociale.
Nous intervenons auprès des personnes qui
comptent souvent parmi les plus vulnérables de notre société. Nous visons à
rétablir leur fonctionnement social, à améliorer leurs conditions de vie et
leur mieux-être, à favoriser leur intégration et leur participation citoyenne.
Les travailleurs sociaux jouent un rôle de
premier plan dans le contexte des mesures de protection des personnes inaptes
depuis le tournant des années 1990. D'ailleurs, en 2009, le législateur nous a
attribué la réserve exclusive de l'activité qui consiste à, et je cite,
«procéder à l'évaluation psychosociale d'une personne dans le contexte des
régimes de protection du majeur ou du mandat donné en prévision de l'inaptitude
du mandant».
J'insiste sur le fait que l'évaluation
psychosociale constitue un geste professionnel de première importance. Nous
portons un regard global sur la situation de la personne, sa réalité, ses
besoins et ses aspirations. Nous statuons sur la mesure de protection la plus
appropriée et nous déterminons si la personne a besoin d'être représentée dans
l'exercice de ses droits civils. Également, nous évaluons et recommandons la ou
les personnes les plus habilitées à jouer ce rôle.
L'évaluation est une activité complexe et
sensible puisque le travailleur social est souvent placé au coeur de situations
conflictuelles où plusieurs intérêts divergents s'affrontent. Nous privilégions
la mesure de protection la moins contraignante pour la sauvegarde optimale des
droits... de l'exercice des droits et des volontés de la personne.
Le projet de loi n° 18
s'inscrit parfaitement dans l'esprit de la conduite professionnelle attendue
des travailleurs sociaux. Mme la Présidente, ce projet de loi représente un pas
de plus vers le respect de la préservation de l'exercice des droits civils. Il
vise une plus grande sensibilité sociale, je vous dirais, à l'égard des
préférences, des volontés et de la participation de la personne. Ce projet de
loi tend à préserver un équilibre entre les principes d'autodétermination et de
protection pour les personnes en situation de vulnérabilité.
Nous vous soumettons 17 recommandations
qui visent à ajouter des balises pour mieux réussir l'actualisation de la
nouvelle loi, protéger le public et éviter toute forme de maltraitance. Aujourd'hui,
nous avons choisi de mettre l'emphase sur certaines recommandations qui
favorisent l'exercice optimal des droits des personnes tout au long du parcours
de leur vie.
D'abord, l'ordre salue la volonté inscrite
au projet de loi, qui prévoit que la tutelle sera modulée par le tribunal en
fonction, notamment, des facultés de la personne. La notion de faculté est très
importante et mérite d'être définie pour éviter toute méprise par une
interprétation restrictive au sens biologique du terme.
Pour sa part, le travailleur social, par
son évaluation multidimensionnelle, tient plutôt compte des capabilités de la
personne, c'est-à-dire qu'il estime les ressources propres à la personne, donc
ses attributs personnels, combinées à celles disponibles dans son environnement
dans le but premier de maintenir au maximum l'exercice de ses droits...
Mme Ouimette (Guylaine) :
...tient plutôt compte des capabilités de la personne, c'est-à-dire qu'il
estime les ressources propres à la personne, donc ses attributs personnels,
combinées à celles disponibles dans son environnement dans le but premier de
maintenir au maximum l'exercice de ses droits. Nous recommandons donc l'ajout
d'une brève définition de la notion de faculté dans le sens même de capabilité.
Cette précision, nous croyons, sera gagnante pour tous et garante du respect de
l'esprit de la loi.
La mesure de représentation temporaire est
une nouveauté. Elle vise à répondre aux besoins d'une personne qui est devenue
inapte à la suite d'une évaluation médicale. Il s'agit d'une mesure pour un
seul acte par une personne désignée dans un temps spécifique. Ceci est un gain,
mais comporte des risques. Ainsi, l'ordre est en désaccord avec le fait que
cette mesure soit conclue uniquement sur évaluation médicale. Nous recommandons
fortement un amendement afin d'exiger une évaluation psychosociale de pair avec
l'évaluation médicale pour la mesure de représentation temporaire. Notre souci
comporte deux dimensions : premièrement, valider si la personne désignée
est en mesure d'exercer les droits qui lui sont confiés; deuxièmement, si cette
mesure ne répond pas, une tutelle pourrait s'avérer nécessaire. Par ailleurs,
les travailleurs sociaux déplorent également qu'aucun encadrement ne soit
systématiquement prévu pour le mandataire, alors qu'il se voit confier
notamment la pleine administration des biens d'une personne inapte.
Le projet de loi propose l'instauration de
l'inventaire obligatoire des biens et la reddition de comptes, sauf sur
renonciation expresse du mandant. Nous saluons ces deux dispositions, qui
exigent du représentant qu'il agisse avec transparence afin d'éviter tout
préjudice et d'assurer la protection du patrimoine. Cela va dans le sens
vraiment des efforts sociétaux contre la maltraitance financière et matérielle.
Enfin, la mesure de l'assistant majeur est
un aspect novateur du projet. Elle suppose que la personne comprend la décision
qu'elle prend et en quoi consiste la mesure. Dans un souci de vigilance et de
bienveillance, le curateur doit s'en assurer, et en cas de doute il importe de
prévoir une trajectoire afin que la personne en situation de vulnérabilité
obtienne la bonne mesure.
Mme la Présidente, l'ordre appuie le
projet de loi n° 18, et nous souhaitons que nos 17
recommandations trouvent un accueil favorable de la part des parlementaires et
du législateur. Chaque jour, les travailleurs sociaux sont sollicités afin
d'évaluer des personnes en besoin de protection. Vous conviendrez avec nous de
l'absolue nécessité que les Québécois aient accès à leurs services dans le
réseau public. Également, nous invitons l'État à être sensible aux besoins de
soutien des acteurs sociaux afin qu'ils bénéficient des ressources requises
pour contribuer à l'actualisation de cette future loi.
En terminant, le succès de cette nouvelle
pièce législative reposera en bonne partie sur l'engagement, la rigueur et la
contribution unique de nos membres en collaboration avec les médecins, les
notaires, les avocats et les autres professionnels. Je vous assure que, de
concert avec le curateur et son équipe, les travailleurs sociaux seront à la
hauteur du défi que ce virage pose pour la protection des personnes, et ce défi
est notre engagement. Pour votre réflexion et en terminant, sans être une
recommandation de l'ordre, je me permets de vous suggérer que la future
désignation du curateur devienne «le Tuteur public». Merci.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la période d'échange
avec les membres de la commission. M. le ministre, la parole est à vous. Le
temps qui est imparti au gouvernement, au parti formant le gouvernement est de
14 min 30 s. Allez-y.
• (11 h 50) •
M. Lacombe : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Merci. Merci à vous pour la présentation, merci pour votre
présence, merci pour votre mémoire, qu'on a évidemment lu avec beaucoup
d'attention. D'entrée de jeu, je suis heureux d'entendre que vous êtes en
faveur du projet de loi, je le suis même avec vous. Je pense que c'est un bel
outil... ce serait un bel outil... tout ce qui se trouve là-dedans serait un
bel outil, peut-être, pour améliorer l'autonomie des personnes, préserver leurs
droits le plus longtemps possible. J'ai quelques questions quand même, parce
qu'évidemment le but de votre présence, c'est qu'on puisse améliorer... prendre
vos commentaires et éventuellement améliorer le projet de loi.
À la page 10 de votre mémoire, donc, vous
parlez... vous indiquez que le curateur...
M. Lacombe : ...améliorer
l'autonomie des personnes, préserver leurs droits le plus longtemps possible.
J'ai quelques questions quand même, parce
qu'évidemment le but de votre présence, c'est qu'on puisse améliorer, prendre
vos commentaires et éventuellement améliorer le projet de loi. À la
page 10 de votre mémoire, donc, vous parlez... Vous indiquez que le
curateur devra offrir un soutien aux tuteurs pour les aider. La question que
j'ai pour vous, le curateur joue déjà un rôle de soutien ou du moins un rôle
dans cette sphère-là. En quoi les fonctions actuelles du curateur ou la
situation actuelle ne répond pas aux besoins selon vous?
Mme Ouimette (Guylaine) :
En fait, on dit offrir un soutien adapté. C'est parce qu'on va vers un projet
de loi qui a des mesures, en fait, que la population vont comme découvrir et
peut-être ne pas nécessairement comprendre. C'est un enjeu qu'on a soulevé
d'ailleurs déjà auprès du curateur pour dire que tout l'aspect pédagogique qui
va suivre suite à l'application de cette loi-là nécessitera définitivement su
soutien. Oui, on sait qu'il va y avoir des gens qui répondent aux appels
téléphoniques, mais ce qu'on veut dire, ça prend vraiment une grande... On
parle de soutien. Ça peut être des documents, des dépliants, ça peut être de
l'information grand public, ça peut être des capsules vidéo et ça peut être,
dans certaines situations, vraiment un soutien téléphonique pour bien faire
comprendre le rôle soit de l'assistant au majeur ou de la personne qui est porteur
d'une tutelle modulée. Parce que parfois les gens ne vont pas nécessairement
comprendre. Parce que, là, on s'en va vers vraiment le respect des droits de la
personne dans ses capacités, des aptitudes personnelles, jusqu'au maximum de ce
qu'elle peut utiliser. Donc, ça crée une ouverture de... On sort du
paternalisme, on soutient la personne dans l'exercice maximal de ses droits.
Donc, nous, c'est de s'assurer qu'il n'y
aura pas oubli, hein, de mettre ce qu'il faut en termes de ressources pour
répondre aux questions du grand public. Souvent ça va être peut-être des
aidants naturels qui vont répondre, qui vont jouer ce rôle-là. Ça va être des
personnes qui ne vont peut-être pas nécessairement toujours comprendre bien les
balises. C'est à cet égard-là que nous avons fait cette recommandation.
M. Lacombe : Est-ce que
le fait que, dans la loi, on introduirait dans la mission du curateur, qui va
changer de nom, dans cette mission-là, on introduit aussi un devoir
d'information. Parce que c'est important ce que vous dites. Effectivement, il y
aura tout un changement. Et au-delà du soutien, là, technique qu'on doit
offrir, par exemple aux tuteurs ou aux assistants, il y a toute cette notion
d'information dans le changement que vous évoquez. Cette notion-là qu'on
ajoute, de devoir d'information, est-ce que ça répond à votre préoccupation, à
cette préoccupation-là?
Mme Ouimette (Guylaine) :
En fait, je ne suis pas juriste, mais c'est... Évidemment, si c'est inscrit
dans un projet de loi que le futur tuteur ou curateur public ait cette
responsabilité-là, je crois que ça viendrait appuyer notre demande. À moins que
mon confrère puisse en ajouter, des éléments.
M. Hébert (Alain) : Bien,
écoutez, on part avec l'idée, pour nous, que le Curateur public est déjà dans
cette voie-là, fait déjà le travail. En fait, ce qu'on soulève, c'est qu'on
prend très au sérieux les changements d'attitude, de compétence que les tuteurs
auront à développer pour tenir compte, comme on dit dans le projet de loi, des
volontés et préférences de la personne et pour la faire participer dans la
mesure de ses possibilités à la prise de décision. C'est un changement qui peut
sembler, comme ça, quand on le lit, peut-être un petit peu banal. Et il est
vrai que, déjà, les tuteurs et qu'au plan social, on est dans cette
mouvance-là, mais en l'inscrivant nommément dans le projet de loi, nous, on
pense qu'il y aura quand même un changement de culture sociale à y avoir, et
même... Ça fait que c'est dans ce sens-là qu'on parle d'un soutien adapté en
fonction de cette nouvelle réalité. C'est ce qu'on veut dire.
Est-ce que, dans la mission, le terme «information»
suffit? Bien, il faut voir peut-être comment on le comprend, là, du côté du
législateur dans le sens où, déjà, le Curateur public donne de l'information,
mais déjà, on le sait, nous, il donne du soutien. Alors, est-ce que l'information,
c'est la même chose que le soutien et l'accompagnement qui est déjà dans la
mouvance des actions du curateur? Faudrait voir, là. On va laisser à d'autres peut-être,
le soin de juger de ça. Est-ce que le terme «information», de votre point de
vue, englobe tout ça? C'est à voir. Tu sais, il peut avoir une gradation, là, information,
soutien, accompagnement. Et on sait que c'est déjà dans les pratiques quand
même du curateur de viser le soutien et l'accompagnement. Alors, est-ce qu'il
faudrait l'inscrire dans la mission? Là, c'est une... Nous, on ne s'est pas
prononcé là-dessus dans notre mémoire.
M. Lacombe : Vous avez
raison que c'est déjà dans son rôle. Je pense que ça fait partie implicitement
du rôle que le curateur joue. Et nécessairement, dans le... avec le projet de
loi qu'on propose, ça sera aussi au coeur, l'accompagnement. Mais je vous
rassure, là, pour l'information, ce qu'on propose, c'est vraiment d'ajouter que
le curateur informe les personnes chargées de la représentation de majeurs
inaptes, les tuteurs aux mineurs, les assistants aux majeurs afin qu'ils
remplissent leurs charges conformément à leurs obligations, qui informe...
M. Lacombe : ...ce sera aussi
au coeur, l'accompagnement. Mais je vous rassure, là, pour l'information, ce
qu'on propose, c'est vraiment d'ajouter que «le curateur informe les personnes
chargées de la représentation de majeur inapte, les tuteurs au mineur, les
assistants au majeur, afin qu'ils remplissent leurs charges conformément à
leurs obligations, qu'il informe la population des enjeux que soulève la
protection des personnes inaptes et des moyens nécessaires pour l'assurer». Donc,
je présume, je ne veux pas vous mettre des mots dans la bouche, mais que ça
répond probablement à ce questionnement que vous aviez.
M. Hébert (Alain) : Ça va dans
le sens de notre recommandation.
M. Lacombe : Super. Deuxième
question pour vous, et c'était dans la page 12 de votre mémoire, au sujet de
l'évaluation psychosociale, c'est la recommandation no°5 que vous formulez.
Vous l'avez dit tantôt, vous exprimez un désaccord qui est assez marqué avec la
mesure qui prévoit qu'il y a seulement dépôt d'une évaluation médicale qui est
nécessaire pour demander la représentation temporaire du majeur. Il faut dire
que l'évaluation médicale qui est nécessaire pour la demande de représentation
temporaire, ce n'est pas la même, hein, on le sait, ce n'est pas la même que
pour l'ouverture d'une tutelle ou pour l'homologation d'un mandat de
protection. Et mon questionnement, c'est que, par exemple, dans le cas où on se
trouve devant un notaire, il y a déjà cette situation-là qui se pose,
c'est-à-dire qu'il n'y a pas d'évaluation psychosociale qui est nécessaire pour
l'homologation. Si le notaire a un doute, il peut demander une évaluation
médicale. On se rend chez le médecin, on doit revenir avec un billet.
Et pour terminer le préambule de ma
question, vous soulignez vous-même que c'est parfois difficile d'avoir accès
aux services pour avoir une évaluation psychosociale. Est-ce que vous ne pensez
pas que de l'exiger, dans le cas de la représentation temporaire, ça pourrait
rendre ça plus compliqué et faire en sorte que le citoyen ne se prévale pas de
cette mesure-là, quand, dans les faits, on veut simplifier la vie des citoyens
qui ont besoin de cette représentation-là de façon très temporaire?
Mme Ouimette (Guylaine) :
D'accord. Je vais demander à mon collègue, M. Hébert, de bien positionner cette
recommandation avec la paire de lunettes que nous, les travailleurs sociaux,
nous avons, en termes de protection de public, et éviter de la maltraitance
possible.
M. Hébert (Alain) : Bien,
voici, peut-être, d'entrée de jeu, on trouve important de vous souligner qu'ici
n'est pas mis en cause le bien-fondé de l'évaluation médicale, peut-être juste
important quand même de le clarifier de façon explicite. C'est qu'en fait on
estime que l'acte pour lequel la représentation temporaire pourrait être en
vigueur pourrait donner lieu, par exemple, s'il s'agit de la vente d'un actif
important, à des besoins possibles de représentation plus permanents, par
exemple, au niveau de la gestion, dans l'exemple que je vous donne. Or, au
niveau de l'évaluation psychosociale, ce qu'on vous mentionnait tantôt, c'est
qu'on a développé, au fil des années, une complémentarité avec l'évaluation
médicale, avec les médecins, et, de notre côté, en termes d'évaluation
psychosociale, on a l'objectif d'apprécier le représentant légal, d'en faire
une recommandation pour qu'il puisse bien jouer son rôle. Et on porte un regard
global sur la personne, qui pourrait faire en sorte qu'on s'assure que le
besoin temporaire anticipé n'est vraiment que temporaire, que... le besoin de
représentation. C'est dans ce sens-là qu'on voit une plus-value pour la
personne qu'il y ait une évaluation psychosociale qui soit faire. Maintenant,
est-ce que... parce ce qu'on fait la distinction entre cette évaluation
psychosociale... entre l'évaluation médicale et le rapport d'évaluation
médicale produit aux fins d'ouverture d'une tutelle, par exemple, ou
d'homologation de mandat, est-ce qu'il ne pourrait pas y avoir un pendant au
niveau de l'évaluation psychosociale? Et nous, dans les limites de notre
mandat, comme ordre, on est tout à fait disposés à voir qu'il puisse y avoir,
et on le souligne dans notre mémoire, peut-être, pour clarifier, un modèle de
rapport adapté et un processus d'évaluation un peu plus succinct qui part avec
le contexte de la demande qui est une demande pour la représentation
temporaire. Quitte, au besoin, si le travailleur social, dans son évaluation,
voyait que cette évaluation plus succincte... on trouve des éléments, des
données qui font en sorte qu'on devrait s'intéresser plus largement à la
situation, quitte, là, à ce moment-là, à la faire. Mais pour un certain nombre
de situations, il est possible qu'une évaluation plus sommaire pourrait être
acceptable. Et dans ce sens-là, nous, comme ordre, ça nous ferait plaisir de
travailler à cette situation-là, pour accommoder aussi en termes de besoins.
• (12 heures) •
Mme Ouimette (Guylaine) : Je
complémenterais en disant que, pour rassurer les parlementaires et vous, M. le
ministre, c'est que c'est évident qu'on ne veut pas ajouter plus d'étapes pour
permettre aux gens d'avoir accès à cette mesure-là, qui est quand même assez
légère dans le temps, temporaire. Notre point de vue, c'est de dire : On
est prêts à travailler avec le curateur pour arriver avec un type d'évaluation
qui est beaucoup plus simplifié, mais juste pour s'assurer que la personne qui
va représenter, qui va exercer les droits de cette personne-là, juste dans une
mesure temporaire...
12 h (version non révisée)
Mme Ouimette (Guylaine) :
...dans le temps, temporaire. Notre point de vue, c'est de dire : On est
prêts à travailler avec le curateur pour arriver avec un type d'évaluation qui
est beaucoup plus simplifié, mais juste pour s'assurer que la personne qui va représenter...
qui va exercer les droits de cette personne-là, juste dans une mesure
temporaire, là, puis temporaire, des fois, bon, est-ce que le médecin peut
dire : C'est que trois mois, c'est que pour cette action-là?, des fois, ça
peut être plus long, qu'on ait fait le tour de la question pour dire :
Effectivement, cette personne-là est en mesure de jouer ce rôle-là dans le
contexte. Donc, on est ouverts vraiment... on ne parle pas d'une évaluation
psychosociale comme l'activité réservée, quand c'est le temps d'ouvrir une
tutelle modulée ou homologuer un mandat, là, on est ailleurs.
M. Lacombe : D'accord, merci
pour la précision. Je vais laisser le temps restant à ma collègue députée de
Lotbinière-Frontenac.
La Présidente (Mme Chassé) :
Excellent. Donc, j'invite la députée de Lotbinière-Frontenac à prendre la
parole. Bienvenue avec nous.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Merci. Bonjour.
La Présidente (Mme Chassé) :
Il reste trois minutes.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Merci. Pouvez-vous informer la commission des
impacts socioaffectifs vécus par les personnes vivant sous le régime de
tutelle? Et comment la réforme proposée par le projet de loi pourrait aider à
minimiser ces impacts-là?
Mme Ouimette (Guylaine) : Je
m'excuse, je vous ai mal entendue, il y avait du bruit.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Je répète. Pouvez-vous informer la commission
des impacts socioaffectifs vécus par les personnes vivant sous le régime de
tutelle? Et comment la réforme proposée par le projet de loi pourrait aider à
minimiser ces impacts?
Mme Ouimette (Guylaine) : Je
vais commencer. En fait, l'esprit de cette loi-là vise à ce qu'on change notre
regard paternaliste sur la limitation de l'exercice des droits d'une personne.
C'est comme si, dans la chaise, la personne qui va avoir le devoir de
représenter, elle devra permettre à cette personne-là d'exercer ses droits de
prendre la parole avec ce qu'elle a comme attitude ainsi qu'avec les ressources
qu'elle a autour d'elle. Donc, pour nous, ça va permettre — comme je
disais tantôt, c'est un changement de cap, là — d'une certaine façon,
d'aller encore plus loin, de dire : Ce qui est primaire, c'est la parole
de la personne dans les capacités qu'elle a et dans ses limites mais aussi avec
toutes ses ressources. Donc, on croit que, pour la personne qui est
représentée, le projet de loi va permettre qu'elle soit encore plus dans
l'exercice de ses droits civils. C'est la perception qu'on en a. Les gens vont
être obligés...
La Présidente (Mme Chassé) :
Il vous reste encore une... au-dessus d'une minute.
Mme Ouimette (Guylaine) : Dans
le fond, je pourrais ajouter que les gens qui vont représenter la personne, peu
importe la mesure, premièrement, la tutelle modulée, les gens, maintenant, vont
avoir des obligations d'inscrire, de faire un rapport, de faire une reddition
de comptes, mais, quand on parle de l'assistant au majeur, c'est intéressant,
parce que c'est comme... on part de ce que la personne est et où elle est
rendue puis on lui permet d'exercer parole et faire ses choix jusqu'au bout de
sa limite. Donc, c'est ça, l'esprit de ce projet de loi là. Et c'est pour ça
que les recommandations... les 17 recommandations qu'on fait, c'est vraiment
dans le sens que cet esprit-là qui est derrière ce projet de loi là soit
actualisé dans son sens même.
La Présidente (Mme Chassé) :
Bon, et voilà. Alors, merci, Mme la députée de Lotbinière-Frontenac. Je cède
maintenant la parole à la députée de Westmount—Saint-Louis. Le bloc qui vous
est imparti est de 9 min 30 s... 9 min 40 s,
pardon.
Mme Maccarone : 40, 10
secondes de plus.
La Présidente (Mme Chassé) :
Yes!
Mme Maccarone : Merci, Mme la
Présidente. Merci beaucoup pour votre présentation. Désolée d'avoir manqué le
début, mais j'ai lu avec grand intérêt votre mémoire.
La première question, pour moi, ça a rapport
avec la recommandation n° 7, par rapport à la
procuration générale et que vous proposez de permettre des pouvoirs relevant de
la simple administration des biens. Si je joue l'avocat du diable, on a entendu
des groupes qui représentent les proches aidants, et si, mettons, moi-même,
j'étais proche aidante, pourquoi que je ne voudrais pas aller pour quelque
chose qui est peut-être plus facile? Est-ce que la procuration est peut-être
plus facile? Et sinon — procuration générale, excusez-moi, n'est pas
plus facile — pourquoi je veux mettre des balises à l'intérieur de
ceci? Parce qu'on veut vraiment faciliter puis aider ces gens-là aussi, on ne
veut pas ramener une lourdeur. Alors, comment que le projet de loi peut nous
aider à déterminer ou de décortiquer mieux?
Mme Ouimette (Guylaine) :
...vais demander à mon expert de vous répondre à ce sujet-là.
M. Hébert (Alain) : Bien,
cette recommandation sur la procuration, vous voyez qu'au début c'est explorer
la possibilité et la pertinence. Alors, on est vraiment dans... Dans le fond,
ce qu'on veut faire avec cette recommandation-là, c'est soulever des enjeux par
rapport, par exemple, au recours à la mesure de l'assistant au majeur.
C'est-à-dire que la mesure de l'assistant au majeur, et avec raison, est encadrée
par un certain nombre de mesures d'encadrement. Et évidemment, quand on a le
choix entre deux mesures, comme...
M. Hébert (Alain) : ...avec
cette recommandation-là, c'est soulever des enjeux par rapport, par exemple, au
recours à la mesure de l'assistant au majeur, c'est-à-dire que la mesure de
l'assistant au majeur, et avec raison, est encadrée par un certain nombre de
mesures d'encadrement. Et évidemment, quand on a le choix entre deux mesures,
comme vous dites, on pourrait trouver très contraignante l'idée par rapport à
la procuration, la mesure d'assistant au majeur. Alors, nous, on le voyait
possiblement comme un obstacle, c'est-à-dire que cette mesure-là présente moins
d'attraits, et que, si on veut l'actualiser, l'assistant au majeur, qu'il y
aurait peut-être à regarder qu'on ait aussi une forme d'encadrement au niveau
de la procuration.
Là, ce que, nous, il est proposé ici,
c'est la pertinence pour les pouvoirs relevant de la simple administration dans
le sens où notre angle, nous, ce qu'on observe, comme travailleurs sociaux,
dans certaines situations, évidemment, pas toutes, on ne veut pas faire de
généralisation, mais dans certaines situations, on se retrouve dans des zones
grises, où, il nous semble que la procuration peut donner lieu à des risques
d'abus. Et dans cette perspective-là, on souhaite qu'il y ait une réflexion
sociale plus large, on n'est pas les spécialistes de la procuration, mais on
soulève, on soulève la question pour cette raison-là, mais l'idée n'est pas de
limiter, on comprend, les choix des citoyens.
Mme Maccarone : Je ne suis pas
experte non plus, alors je suis contente d'avoir votre réflexion, je pense que ça
va nous aider quand on va aller article par article. Pour la recommandation n° 9, vous proposez d'ajouter un pouvoir réglementaire
permettant de déterminer le fond du contenu de la reddition de comptes du
mandataire. Pouvez-vous nous donner un exemple de qu'est-ce que ça peut avoir
l'air?
Mme Ouimette (Guylaine) : Oui,
Alain, tu peux répondre.
M. Hébert (Alain) : Bien, en
fait, c'est que, d'entrée de jeu, ce qu'on observe, comme Mme la présidente le
disait, Mme Ouimette, tantôt, c'est qu'actuellement il n'y a pas d'encadrement
au niveau du mandat de protection et les deux mesures qui sont soulevées par le
projet de loi, qui sont identifiées dans le projet de loi, on est en accord
avec elles. Ça fait plusieurs années, dans le fond, que, nous, on déplore qu'il
n'y a pas d'encadrement au niveau de mandat de protection. Maintenant, la
mesure de reddition de comptes, ce qu'on dit, puis on finit en disant, c'est ce
que nous proposons, c'est que, si on souhaitait avoir des balises pour dire en
quoi elle pourrait consister, sans que ce soit nécessairement trop
contraignant, ça pourrait agir comme guide pour voir à quoi pourrait ressembler
la reddition de comptes, autant pour la personne que pour les biens. Et on
pense que ça pourrait être une bonne idée de le faire, c'est dans ce sens-là
qu'on soumet la recommandation.
Mme Maccarone : Pas nécessairement
dans la législation, mais comme un document accompagnateur, avec toutes les
autres informations qui seront fournies par le tuteur public, si c'est ça qui
devient le nom potentiel.
Mme Ouimette (Guylaine) : En
fait... et aussi c'est vraiment parce qu'on sait que c'est un grand changement
une fois que cette loi-là va arriver. Puis on sait qu'il y a des tuteurs, des représentants
légaux de toutes sortes de niveaux de compréhension, et on se dit qu'on est
vraiment d'accord avec ces deux mesures-là. C'est parfait. Mais, s'il y a comme
des qualifications, des attendus, ça va être facile pour tout le monde, pour ce
qui est des suivis mêmes faits par le curateur, ça va être encore plus simple.
Alors, pour moi, c'est comme de faire la
boucle et de permettre à la population d'agir, mais avec un cadre qui est quand
même plus simple avec des lignes assez claires et rendre ça le plus simple
possible pour que ce soit réalisable.
Mme Maccarone : Par rapport à
votre recommandation n° 1, excusez-moi, je pense que
c'est la formation obligatoire, alors la recommandation n° 11.
J'aimerais vous entendre un peu par rapport aux critères de cette formation
obligatoire, ça a l'air de quoi, on attend après quoi à l'intérieur de ceci.
Mme Ouimette (Guylaine) : Je
vais demander à Alain de vous répondre à cet égard-là, par rapport à la
formation des attentes.
M. Hébert (Alain) : Oui, je ne
suis pas certain d'avoir bien saisi votre question. Je ne suis pas certain
d'avoir bien saisi la question de Mme la députée.
La Présidente (Mme Chassé) :
Pourriez-vous répéter?
Mme Maccarone : Oui, je vais
répéter, c'est par rapport à la recommandation n° 11,
vous faites une recommandation pour avoir la formation obligatoire en matière
d'évaluation psychosociale, ça a l'air de quoi, cette formation obligatoire,
si, mettons, on écrivait un autre document accompagnateur. Ça a l'air de quoi
exactement, on s'entend, pour...
• (12 h 10) •
M. Hébert (Alain) : Oui. Mais
les éléments fondamentaux de cette formation-là, ce serait les nouveautés au
plan juridique du cadre légal qui encadre l'exercice de l'activité. Ce serait
aussi des ajustements faits sur comment produire le rapport d'évaluation
psychosociale, d'abord, comment la réaliser au plan clinique et ensuite comment
la produire. Parce que là, c'est sûr qu'on aura, nous, comme travailleurs
sociaux, dans le cadre de notre évaluation, à formuler des recommandations à
l'intention du tribunal pour la modulation de la tutelle. On aura à documenter
quelles sont les facultés de la personne qui... pour permettre au tribunal de
déterminer quel type de modulation de tutelle on aura.
Dans ce sens-là, ça va dans l'esprit quand
même, je vous dirais, de la philosophie des travailleurs sociaux depuis
plusieurs années, mais il y a quand même un aspect nouveau qu'on devra
documenter, et on souhaite que les travailleurs sociaux qui continuent... qui
vont continuer à exercer cette activité-là, soient bien au fait de bien réaliser
une opinion professionnelle et des recommandations, notamment sur cet
aspect-là...
M. Hébert (Alain) : ...sens-là,
ça va dans l'esprit quand même de la philosophie des travailleurs sociaux
depuis plusieurs années, mais il y a quand même un aspect nouveau qu'on devra
documenter et on souhaite que les travailleurs sociaux qui continuent, qui vont
continuer à exercer cette activité-là, soient bien au fait de bien réaliser une
opinion professionnelle et des recommandations notamment sur cet aspect-là. Ça
fait que dans ce sens-là, on estime que ça justifie cette formation
obligatoire.
Nouveauté du cadre légal, certaines
dispositions par rapport à l'évaluation psychosociale, il y a d'autres éléments
dans l'évaluation psychosociale par rapport à l'appréciation du représentant...
du futur représentant légal potentiellement qui vont être aussi à modifier, parce
qu'on ajoute, puis nous on prend ça très au sérieux, là, l'idée qu'on va... le
représentant va devoir tenir compte des volontés et préférences de la personne,
dans la mesure du possible, la faire participer aux décisions.
On le disait tantôt, ça suppose que nous,
comme travailleurs sociaux, travailleuses sociales, on apprécie cette ouverture
du futur représentant, cette capacité du futur représentant légal à jouer le
rôle dans l'esprit du projet de loi. Donc ça va changer quand même jusqu'à un
certain point l'évaluation. Ça fait que c'est peut-être les éléments qui je
vous dirais, là, spontanément.
Mme Ouimette (Guylaine) : Un
petit ajout tout simple. C'est qu'il existe déjà une formation pour les
travailleurs sociaux qui font l'activité exclusive réservée. Là, ce qu'on
souhaite, c'est, étant donné le grand changement que ce projet de loi là
apporte dans certaines façons de faire, on veut rendre obligatoire la formation
pour assurer au public que le travailleur social qui la fait sera qualifié,
aura les nouvelles connaissances nécessaires pour le faire.
M. Hébert (Alain) : Dans sa
forme actuelle, la formation, là, puis c'est un format de trois jours avec une
journée dispensée par un juriste ou une juriste et deux jours par un
travailleur social ou une travailleuse sociale.
Mme Maccarone : Complètement
en accord avec vous, je présume aussi ça va prendre une réflexion au niveau
universitaire aussi pour la formation des travailleurs sociaux avec peut-être
juste une petite note à prendre. S'il reste du temps, Mme la Présidente,
j'aimerais...
La Présidente (Mme Chassé) :
Il vous reste 1 min 30 s, la députée de Notre-Dame-de-Grâce désire prendre la
parole.
Mme Weil
: D'accord,
alors merci. Bienvenue, Mme Ouimette, M. Hébert. Vous êtes vraiment
au coeur de l'action, donc je vais aller un peu sur le lexique. «Tuteur
public», c'est votre recommandation pour le titre, on a eu quelques différentes
recommandations, inquiétudes par rapport à une personne vulnérable qu'on vient
stigmatiser ces personnes. Moi, dans mes recherches, c'est... «Tuteur public»,
c'est cohérent avec le langage qu'on entend un peu partout dans toutes les
provinces, dans tous les sites qui sont en français, puis il y en a quand même
beaucoup dans diverses provinces. Juste expliquer... parce que c'est important,
les mots, le titre est très important. Ça signale quelque chose, un message,
une orientation. Peut-être... avec le temps que j'ai, expliquez votre choix.
Mme Ouimette (Guylaine) : On
est partis de l'idée que depuis 1945 existe le titre de Curateur public. On va
faire face à un projet de loi qui va amener des changements importants. C'est
toute la référence au public, à cette institution-là qu'on trouve très
importante. Et d'aller avec un titre comme celui qui est proposé, on craint un
peu que la population se perde. En partant... et désormais, parce qu'évidemment
pour le Curateur, il n'y a plus de curatelle. Ce sont des tutelles modulées et
autres mesures, alors vraiment on n'en fait pas une recommandation, ce matin,
on fait un peu une improvisation, mais il reste que... Parce que quand on a
finalisé notre mémoire, on n'avait pas encore finalisé notre réflexion, mais en
disant tuteur public, là, ça dit ce qu'il fait. Ça dit qui il est.
La Présidente (Mme Chassé) :
En terminant.
Mme Ouimette (Guylaine) : Et
ça fait quand même référence `une grande institution depuis plusieurs années.
La Présidente (Mme Chassé) :
C'est très bien, je vous remercie. Je cède maintenant la parole au député de
Rimouski pour un bloc d'échanges de 2 min 25s.
M. LeBel : Merci, vous êtes
trop généreuse. Très rapidement, moi, je suis porte-parole du dossier des
aînés, c'est un dossier qui m'interpelle beaucoup. L'an passé ou il y a deux
ans, j'ai participé au projet de loi contre la maltraitance des aînés. Mais
c'est une situation qui se perdure, là, avec le vieillissement de la
population. Je suis dans une région, moi, où il y a une personne sur deux...
sur quatre qui a 65 ans et plus. Il y a des... La protection des aînés, ça
m'intéresse beaucoup.
À la recommandation 12, vous dîtes
«prévoir une solution législative à la controverse actuelle — je vais
aller voir dans le mémoire, vous dîtes — l'obligation de devoir
recourir à l'autorisation du tribunal comme on l'exige en matière de
consentement aux soins peut s'avérer inutilement lourd, voire préjudiciable
dans certaines situations».
J'ai des petites inquiétudes par rapport à
des aînés qui ne pourraient pas se défendre ou qui pourraient être...
J'aimerais ça avoir un peu vos commentaires là-dessus.
Mme Ouimette (Guylaine) : Sur
l'enjeu que nous soulevons par rapport au consentement aux soins?
M. LeBel : Oui.
Mme Ouimette (Guylaine) : Ça
va prendre trois heures, mais je vais tenter de... je vais passer la parole à
mon collègue Alain pour répondre le plus succinctement possible, parce que cet
enjeu-là, cette controverse-là, existe depuis très longtemps. On savait
quand... dans le cadre du projet de loi, ça serait difficile de le régler. Puis
on dit sous réserve, c'est de prévoir, de discuter vraiment pour arriver à ce
que le consentement soit bien compris. Parce que le consentement aux soins,
comme il est actuellement, peut être compris par les acteurs présents et futurs
comme un consentement aux soins global. On va chez le médecin, on signe un
formulaire, faîtes ce que vous voulez...
Mme Ouimette (Guylaine) :
...sous réserve, c'est de prévoir, de discuter vraiment pour arriver à ce que
le consentement soit bien compris. Parce que le consentement aux soins, comme
il est actuellement, peut être compris par les acteurs présents et futurs comme
un consentement aux soins global. On va chez le médecin, on signe un
formulaire, faites ce que vous voulez. Quand, nous, on parle de consentement
déontologique, qui est produit par un travailleur social, face à une personne,
c'est d'aller jusqu'au bout pour lui faire comprendre, de façon la plus claire,
ce à quoi elle consent. Donc, c'est une dimension que je vous dirais plutôt
sociale, de bien comprendre, de prendre le temps avec la personne pour aller
chercher son consentement. Et là on rentre dans les enjeux de respecter
qu'est-ce qu'elle a comme résiduel en termes d'exercices, d'aptitudes personnelles
qui lui restent et de pouvoir consentir à ce qui se passe avec elle. Je ne sais
pas si tu voulais ajouter quelque chose, Alain, parce que...
La Présidente (Mme Chassé) :
...
Mme Ouimette (Guylaine) : 30
secondes, c'est...
La Présidente (Mme Chassé) :
En 10 secondes.
M. Hébert (Alain) : En
10 secondes. Bien, en fait, c'est qu'on soulève la difficulté que posent
différentes interprétations sur l'étendue du consentement requis pour procéder
à l'évaluation, et c'est dans ce sens-là qu'on souhaite une solution législative
qui serait aidante pour tous les acteurs d'établissement.
La Présidente (Mme Chassé) :
Excellent.
M. LeBel : Merci.
La Présidente (Mme Chassé) :
Je vous remercie pour votre contribution aux travaux de la commission. Je
suspends les travaux quelques instants — et on va essayer d'être
diligent dans le transfert — afin de permettre au prochain groupe de
prendre place. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 12 h 16)
(Reprise à 12 h 19)
La Présidente (Mme Chassé) :
On se retrouve, et je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de L'Appui
pour les proches aidants. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour votre exposé. À une minute de la fin, je vais vous faire un signe de la
main ou un signe vocal pour vous inviter à conclure, puis, par la suite, nous
procéderons à une période d'échange avec les membres de la commission.
Commencez par vous présenter puis ensuite sautez tout de suite sur votre
exposé. Bienvenue.
Mme Dumas
(Magalie) : Merci. Donc, merci de nous accueillir. Je suis
Magalie Dumas, je suis directrice générale adjointe à L'Appui national pour les
proches aidants d'aînés, donc la société de gestion.
Mme Laliberté (Emmanuelle) :
Moi, je suis Emmanuelle Laliberté, directrice générale de L'Appui
Capitale-Nationale. Donc, comme on est dans la région, c'est moi qui suis là
pour représenter les 17 régions avec ma collègue.
• (12 h 20) •
Mme Dumas
(Magalie) :M. le ministre, Mme la
Présidente, Mmes et MM. les députés, membres de la Commission des relations
avec les citoyens, merci de nous recevoir aujourd'hui.
L'Appui pour les proches aidants d'aînés
salue le dépôt de ce projet de loi qui valorise l'autonomie, les droits, les
volontés et les préférences des personnes assistées. De plus, nous saluons de
façon encore plus soutenue l'objectif de simplification des mesures
actuellement en place. Comme organisation accompagnant les personnes proches
aidantes dans leurs trajectoires de soutien, nous pouvons témoigner de leur
désarroi face aux mesures existantes. Leur simplification et leur modulation
apporteront certainement un...
Mme Dumas (Magalie) :
...les droits, les volontés et les préférences des personnes assistées. De
plus, nous saluons de façon encore plus soutenue l'objectif de simplification
des mesures actuellement en place. Comme organisation accompagnant les
personnes proches aidantes dans leurs trajectoires de soutien, nous pouvons
témoigner de leur désarroi face aux mesures existantes. Leur simplification et
leur modulation apporteront certainement un allègement de leur rôle et leur...
et une reconnaissance de leurs savoirs expérientiels. Telle était la citation
de notre organisation dans un document du Curateur public annexé au communiqué
de presse du ministre de la Famille, M. Mathieu Lacombe, pour souligner le
dépôt du projet de loi n° 18, le 10 avril dernier. Selon nous,
cependant, pour arriver à de tels effets positifs, il y aura d'une part des
dispositions à préciser, et, d'autre part, un plan de transition rigoureux à
orchestrer.
Plus que juridique, l'esprit dans lequel
nous sommes ici devant vous est empreint d'une perspective sociale et de
gestion du changement. Notre opinion toute relative est celle de témoins et
d'acteurs privilégiés auprès de nos personnes aidantes d'aînées québécoises. Il
est important de préciser que, compte tenu de notre mission, qui n'en est pas
une de défense des droits, l'Appui n'adopte pas, dans ce processus des
consultations, une posture de revendication, mais plutôt une posture
partenariale. Par ailleurs, compte tenu de notre mission actuelle, qui pourrait
être amenée à se modifier dans les prochaines années pour élargir les
clientèles de personnes proches aidantes visées par notre action, l'Appui prend
parole, dans ce mémoire et dans cette présentation, au regard de la situation
des personnes proches aidantes d'aînés exclusivement. Nous vous prions donc de
ne pas extrapoler le contenu de ce mémoire et de nos présentations à toutes les
clientèles de personnes aidantes et à toutes les personnes pouvant se retrouver
en situation de vulnérabilité et qui sont visées pas les dispositions du projet
de loi n° 18.
Est largement considérée comme signe d'une
société en santé celle qui vise à accroître le pouvoir d'agir de ces citoyennes
et citoyens. Malgré leurs maladies, handicaps, limitations, difficultés, que
tous puissent jouir d'un exercice de leurs droits adapté à leurs réalités et
aptitudes. Par ailleurs, il est tout aussi largement considéré comme signe
d'une société en santé celle qui vise à protéger ses membres en situation de
vulnérabilité. À la jonction de ces deux considérants se trouve une fine ligne,
un équilibre que tout législateur chercherait à atteindre. Il voudrait, pour ce
faire, bien mesure les impacts législatifs, légaux financiers, économiques,
transitifs et sociaux engendrés par cette recherche d'équilibre entre son rôle
de protection des individus et de préservation des droits civils, tout en ne
perdant pas de vue les considérants de la santé des personnes et des
institutions. C'est dans cette situation que se trouve aujourd'hui l'État
québécois, et nous saluons le courage nécessaire à une telle entreprise.
Conséquemment, la mission de l'Appui, c'est du point de vue des considérations
sociales et transitives que nous commentons le projet de loi n° 18, et ce
au regard, comme je vous le disais précédemment, d'une clientèle bien précise,
celle des personnes proche aidantes de personnes aînées et de l'environnement
qui est le nôtre, donc celui d'une organisation présente à la fois
nationalement et régionalement.
Depuis quelques décennies, l'État québécois
a mis moult efforts politiques et mesures législatives en place afin de contrer
la maltraitance envers les personnes aînées, de favoriser leur maintien à
domicile et de soutenir leurs personnes aidantes. À coup de gains âprement
atteints, l'équilibre et la cohérence de ses actions tendent à se stabiliser et
à se pérenniser depuis quelques années.
Derrière nos personnes aînées en situation
de vulnérabilité se cachent des centaines de milliers de personnes proches
aidantes sans qui nombre de personnes aînées ne pourraient s'accomplir dans
leur quotidien. Il apparaît donc primordial qu'un changement de paradigme si
important à l'égard du dispositif de protection des personnes prenne en compte
la perspective particulière des personnes proches aidantes d'aînés et des aînés
en situation de vulnérabilité eux-mêmes comme sous-population appréciable au
Québec. La structure démographique québécoise telle qu'on la connaît, le taux
de prévalence des troubles neurocognitifs et l'espérance de vie des personnes
dressent devant nous de lourdes perspectives quant à l'équilibre et à
l'étanchéité de notre tissu social.
Tel que présenté à l'heure actuelle, le
projet de loi n° 18 ne semble pas suffisamment prendre en considération de
ces faits. Il est convenu qu'une approche clientéliste n'est certainement pas
le souhait du Curateur public, mais il est difficile d'imaginer que des
changements aussi fondamentaux au dispositif de protection des personnes
puissent se réaliser sans égard particulier aux personnes aînées en situation
de déficit cognitif ou de maladie dégénérative et leur entourage. Plus tard, au
moment de répondre à vos questions, on pourra vous parler précisément de nos
préoccupations, de nos questionnements.
Mme Laliberté (Emmanuelle) :
Comme c'est toujours le cas, l'adoption d'une nouvelle loi ou l'adoption d'une
modification substantielle à une loi déjà en vigueur est la fin importante d'un
rigoureux processus législatif, mais aussi le début d'un chantier déterminant
de mise en application, de communication et d'opération destiné à en assurer le
déploiement. Il nous faudra toute une collectivité pour réussir la transition
de la modification du dispositif de protection des personnes. L'Appui pour les
proches aidants d'aînés souhaite continuer à contribuer de manière active à la
poursuite des activités de consultation du Curateur public et à porter auprès
de lui conseils et avis quant au contenu du projet de loi n° 18. D'autre
part, l'appui assure l'État québécois, le Curateur public et les personnes proches
aidantes d'aînées de toute sa volonté de contribuer à la stratégie de mise en
application et de communication nécessaire auprès des instances qui seront
concernées par ces changements, et il y en aura beaucoup.
Nous aurons pris la peine, en annexe de
notre mémoire, de manière plus soutenue que ce type d'exercice suppose, de
dresser au lecteur un portrait du pouvoir d'agir de l'Appui. Évidemment, ceci
permettra au lecteur de mieux comprendre qui nous sommes, mais surtout comment
on pourra mesurer notre...
Mme Laliberté (Emmanuelle) :
...auprès des instances qui seront concernées par ces changements, et il y en
aura beaucoup. Nous aurons pris la peine, en annexe de notre mémoire, de
manière plus soutenue que ce type d'exercice suppose, de dresser au lecteur un
portrait du pouvoir d'agir de L'Appui. Évidemment, ceci permettra au lecteur de
mieux comprendre qui nous sommes, mais surtout, comment on pourra mesurer notre
accès privilégié à des réseaux diversifiés qui seront tous concernés par la modification
du dispositif de protection des personnes.
Nos réseaux communicationnels, notre engagement
au transfert des connaissances et notre travail constant visant à vulgariser et
rendre disponible l'information pertinente pour les personnes proches aidantes
d'aînés de partout au Québec sauront assurément trouver leur place dans la
stratégie de transition et de communication du Curateur public. Non seulement
rejoignons-nous de manière privilégiée des personnes aidantes, nous avons un
accès particulier auprès des organisations communautaires et associatives qui
leur offrent des services, que ce soit par des initiatives communicationnelles,
informationnelles ou formatives auprès des intervenants et professionnels qui
accompagnent et soutiennent les personnes prochaines aidantes d'aînés, nous
nous engagerons à être là aux moments opportuns et importants.
Plus tard, nous pourrons répondre à vos
questions concernant nos principales préoccupations et nos constats favorables
eu égard au grand chantier de transition qui sera nécessaire.
Bien qu'il reste des zones d'ombre à
éclaircir, des notions à approfondir, des réalités différenciées à accorder et
des politiques à rendre congruentes, L'Appui pour les proches aidants d'aînés
est favorable à l'adoption du projet de loi n° 18. Nous avons confiance
que les multiples avis transmis dans les exercices de consultation sauront
apporter les ajustements nécessaires au projet de loi.
Mais comme l'adage nous dit que le diable
se cache souvent dans les détails, l'organisation demeure à la disposition du
Curateur public et du législateur pour s'assurer de l'adéquation entre la
modification du dispositif de protection des personnes et les réalités des
personnes proches aidantes d'aînés.
En terminant, nous souhaitons remercier
évidemment le Curateur public et la Commission des relations avec les citoyens
d'avoir donné une voix aux préoccupations d'un réseau de soutien au service des
personnes proches aidantes d'aînés. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci pour votre exposé. On va débuter la période d'échange avec le parti
formant le gouvernement. M. le ministre, je vous cède maintenant la parole.
M. Lacombe : Merci beaucoup.
Merci, Mme Dumas, merci, Mme Laliberté de vous être déplacée ce matin. Je
comprends que ça demande beaucoup de travail. À chaque fois qu'on dépose un
projet de loi, ça vous demande beaucoup de travail, parce qu'évidemment vous
voulez que ça réponde très précisément aux besoins que vous avez. Je sais que
vous avez travaillé fort.
Je sais que vous êtes favorables, donc, au
projet de loi. On est ici pour évidemment le bonifier s'il y a lieu. Justement,
je vous amène à la page quatre de votre mémoire. Vous parlez de... dans la
section où vous parlez de l'assistant aux majeurs, vous parlez de décalage.
Vous dites que, selon vous, il y a un décalage, et là, je vais vous citer, là,
qu'il y a «un décalage [qui] semble se créer entre [les principes] "Destinée
à toutes les personnes qui, en raison d'une difficulté, souhaitent être
accompagnées pour prendre certaines décisions " et — l'autre
côté — "Aucun pouvoir décisionnel pour l'assistant"». Donc,
selon vous, il y a comme une zone... est-ce que je dirais d'ombre ou de
possible?
Mme Dumas
(Magalie) : D'ombre, de lumière, toutes ces choses étant possibles.
M. Lacombe : Est-ce que vous
pouvez nous en parler davantage? Qu'est-ce que... est-ce que vous avez des
craintes? Si oui, quelles sont ces craintes-là?
Mme Dumas
(Magalie) : En fait, bien, tout ça sera dans les efforts de
communication, de formation, puis de vulgarisation de la loi. Là, à l'heure
actuelle, c'est sûr que les outils ne sont pas à ce point développés pour
permettre d'expliquer l'ensemble de ce changement-là.
Mais, à la lecture préliminaire, puis pour
avoir testé ça avec quelques proches aidants, cette lecture-là, la vision,
d'un, sur la ligne de l'accompagnement... Qu'est-ce qu'un début, une fin
d'accompagnement? Qu'est-ce qu'accompagner quelqu'un, mais de ne pas prendre de
décision? Parce que ça demeure d'être accompagné dans une décision.
Il y a quand même une zone ici où, si
c'est une mesure non judiciarisée, qu'on espère rendre très accessible... puis
on l'a dit dans les constats favorables, on pense que dans plusieurs cas où la
personne est encore apte, mais a des difficultés, ça va vraiment permettre à
nombre de proches aidants de pouvoir agir là où ils ont plein de difficultés de
nature administrative quand il n'y a pas de procuration, quand il n'y a pas
d'autre chose pour la personne.
Mais cette zone-là où il y a un équilibre
dans une dyade, où on a une personne aînée avec son proche aidant... puis il y
a plein de zones, puis je... on n'a malheureusement pas pu assister à tout
l'exposé de nos amis de l'Ordre des travailleurs sociaux, mais assurément, je
suis convaincue qu'ils ont probablement des préoccupations aussi à ce
niveau-là, sur s'assurer que tous comprennent bien.
Puis je pense que l'assistant une fois
nommé, on devra vraiment prendre le temps avec lui, pour ne pas que ça crée
plus de dommages et de conflits familiaux à l'interne... Donc, de vraiment,
vraiment définir la zone de l'assistant nous apparaît d'une primauté absolue,
là.
• (12 h 30) •
M. Lacombe : Si je vous dis...
Je comprends mieux votre crainte ou votre questionnement. Si je vous... si je
réponds à ça que, bien, d'une part, le curateur ou le nouveau nom qu'on va lui
donner, rencontre, hein, l'assistant pour lui expliquer son...
12 h 30 (version non révisée)
M. Lacombe : ...si je vous
dis... Je comprends, je comprends mieux votre crainte ou votre questionnement.
Si je vous... Si je réponds à ça que, bien, d'une part, le curateur, ou le
nouveau nom qu'on va lui donner, rencontre, hein, l'assistant pour lui
expliquer son rôle et, d'autre part, que, de façon plus théorique, mais quand
même, on intègre aussi dans la loi, dans la mission du curateur le fait qu'il
doit... qu'il a un devoir d'informer et de faire en sorte que les gens qui vont
agir à ce titre-là aient tous les outils pour le faire puis qu'ils connaissent
bien leur rôle, est-ce que ça, ça vous rassure?
Mme Dumas
(Magalie) : Tout à fait. Et je pousserais ça plus loin. C'est-à-dire,
oui, effectivement, dans l'exercice, au moment où on a l'assistant et l'assisté
puis l'assistant, au moment... Mais aussi, puis souvent, bien, on... C'est
comme les proches aidants puis les aînés qui se retrouvent chez le médecin,
hein? La moitié des questions qu'ils voulaient poser, ils se les posent dans
l'auto en retournant, ou ils ont été stressés, ou... C'est bien énervant de se
trouver dans ces institutions-là.
Donc, non seulement, oui, il y a un rôle
du curateur, d'information et d'assistance, mais il y aura aussi à ce que ce
soit très, très bien compris... bon, les travailleurs sociaux, mais au-delà de
ça, dans les organismes communautaires, dans tous les gens qui interviennent
dans la vie des dyades de proches et de leurs personnes, que ce soit tout aussi
bien compris. Parce que souvent, c'est ce qui arrive dans une zone de
transition, où tout le monde n'a pas les mêmes informations au même moment.
Donc, oui, bien informer l'assistant, mais s'assurer que le réseau autour aussi
soit très bien informé.
M. Lacombe : Donc, si j'ajoute
peut-être un autre élément de réflexion, si je vous disais que toutes les
questions que les gens se posent en revenant dans la voiture, ils pourraient
téléphoner, disons, à une ligne qu'on pourrait mettre sur pied, surtout dans la
transition? On parle d'une transition qui pourrait durer plusieurs mois, là.
Mais, si on vous dit qu'il pourrait y avoir une ligne comme ça pour les
questions de voitures, est-ce que ça, ça vous rassurerait encore plus?
Mme Dumas (Magalie) :
Un accueil favorable, effectivement.
M. Lacombe : Accueil
favorable, d'accord.
Je vous amène maintenant à la page 5 de
votre mémoire. Vous indiquez à cet endroit-là que le régime de tutelle modulée,
dans un contexte de maladie dégénérative ou de troubles neurocognitifs, n'est
pas suffisamment considéré dans le texte du projet de loi. Et vous dites que ce
manque de considération là, le fait que ce ne soit pas assez évoqué, ça
pourrait alourdir la tâche des tuteurs puis des familles, potentiellement,
peut-être aussi désengager les gens qui auraient eu un intérêt de s'occuper
d'un proche, d'une personne aînée. Qu'est-ce qui vous amène à tirer cette
conclusion-là?
Mme Dumas
(Magalie) : Bien, la lourdeur, déjà, actuelle de tous ces
impacts-là. On a un service Info-aidant, donc, l'année dernière, presque
20 000 interventions auprès de proches aidants d'aînés au Québec. Donc, on
a une antenne très, très, très collée, donc, sur les besoins du milieu. Et
après les questions sur les services et le répit, le deuxième sujet en
importance, au service Info-aidant, ce sont les questions de nature légale,
fiscale et financière. Donc, c'est les proches aidants et les familles, ne
serait-ce qu'ouvrir un régime de protection, là. Puis d'être dans les démarches
d'évaluation psychosociale, médicale, les temps d'attente qui sont déjà
présents actuellement, c'est beaucoup, et ça fragilise énormément, et ça crée
des zones de conflit dans les familles très souvent, malheureusement.
Donc, de retourner... Bon, si on installe
une tutelle modulée... Je vais essayer de faire un exemple le plus concret
possible. Donc, avec une personne... donc, une conjointe et son conjoint qui a
la maladie d'Alzheimer. Pas de mandat de protection. On se retrouve donc sur un
régime de tutelle. Et, bien, par la nature même d'une maladie dégénérative ou
un trouble neurocognitif, on ne peut pas prévoir, cinq ans en avant de nous, ce
qui va arriver, quels seront les droits civils qui pourront être maintenus.
Donc, ça implique systématiquement de la revue très rapide et à une fréquence
qui va finir par, finalement, épuiser des familles et renoncer à la volonté de
maintien à domicile. Donc, c'est...
Puis, d'un autre côté, notre État
québécois travaille fort à soutenir les proches aidants, à accueillir et à
donner des facilitateurs pour qu'ils puissent vivre à domicile. Mais, si on
vient déséquilibrer ce fragile équilibre là, en plus des coûts financiers,
nous... je vais être... Encore une fois, très, très concrètement, à
Info-aidant, quand on a un proche aidant d'aîné qui est en attente des
évaluations pour ouvrir un régime de protection et qu'on est rendus à 13 mois
d'attente, si... Faites ça fois quatre sur une trajectoire de deux, trois,
quatre, cinq ans, 10 ans, plus les coûts que ça engendre. Il y a des gens qui
ont dit : C'est tellement rendu problématique d'avoir les évaluations
avant d'ouvrir le régime que les gens se tournent au privé, là. Puis ce n'est
pas toutes les familles qui ont les moyens et les accès à ces réseaux-là. Donc,
on est très préoccupés par ce bout-là pour ne pas finalement déséquilibrer ce
qu'on essaie de faire comme société ici au Québec.
M. Lacombe : Je comprends. On
a pris des notes. Et puis peut-être, dernière question... peut-être, en fait,
une proposition. J'aimerais peut-être avoir une proposition de votre part...
Mme Dumas (Magalie) :
...à ces réseaux-là. Donc, on est très préoccupés par ce bout-là pour ne pas finalement
déséquilibrer ce qu'on essaie de faire comme société ici, au Québec.
M. Lacombe : Je comprends. On
a pris des notes. Et puis peut-être dernière question... peut-être, en fait,
une proposition. J'aimerais peut-être avoir une proposition de votre part.
Vous écrivez... c'est à la page 4. C'est-u
à la page 4? Oui, à la page 4 de votre mémoire. Vous écrivez que ce serait
souhaitable, selon vous, d'arrimer et de préciser la... disons, la zone
d'action des assistants dans le contexte du plan d'action contre la
maltraitance puis de la loi pour lutter contre la maltraitance envers les aînés
et toute autre personne en situation de vulnérabilité. Qu'est-ce que vous
proposez?
Mme Dumas
(Magalie) : En fait, je n'ai pas avec moi le détail de cette
loi-là, mais elle prévoit déjà des mesures, des zones d'action... de faire la
différence entre la maltraitance, de... Bien, tu sais, il y a une entente
sociojudiciaire en cours.
Puis c'est ça qu'on disait, à un moment
donné, dans la mesure d'assistance, pour nous, ce serait vraiment très
pertinent, puis c'est à degré variable, puis elle est à déploiement encore
variable, l'entente sociojudiciaire, mais le curateur n'est pas forcément de
toutes les ententes sociojudiciaires.
Et, exemple, pour vraiment s'arrimer avec
ça, c'est que, comme c'est une mesure non judiciarisée, bien, si le curateur, quand
il a des préoccupations ou des soupçons importants, s'il peut être... s'il peut
lui aussi faire partie de l'entente sociojudiciaire et aller travailler avec
les policiers, les travailleurs sociaux, avoir de l'accès, pour nous... C'est
déjà prévu. C'est là. Pourquoi refaire? C'est là qu'on dit : Il y a un
arrimage qui nous apparaît nécessaire entre — celui-là en était un
exemple, là — entre la loi puis la politique.
M. Lacombe : Et, si je vous
dis qu'on fait déjà partie de cette entente-là, est-ce que ça répond de facto à
cette préoccupation?
Mme Dumas
(Magalie) : Bien, corrigez-moi si je me trompe, j'ai peut-être
commis une erreur, parce que j'ai vu, entre autres, des ententes
sociojudiciaires où le curateur n'était pas tout le temps là. C'est pour ça
qu'on dit : Qu'il soit vraiment là dans tous les déploiements des ententes
sociojudiciaires. C'est peut-être juste là, mais je le sais qu'il est présent
dans certaines...
M. Lacombe : D'accord. Bien,
on comprend l'essence de votre proposition. Merci beaucoup. Puis je vais... Mme
la Présidente, je n'ai plus de question, mais je vais laisser peut-être ma
collègue députée de Les Plaines...
La Présidente (Mme Chassé) :
Oui. Je cède la parole à la députée de Les Plaines. Allez-y.
Mme Lecours (Les Plaines) :
Merci, M. le ministre. Merci beaucoup, Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Chassé) :
4 min 30 s.
Mme Lecours (Les Plaines) :
4 min 30 s. Bonjour, mesdames. D'entrée de jeu, je vais vous
dire que je... votre organisme est très important. Vous êtes déployés à travers
le Québec, et, dans ma circonscription, on réfère souvent des cas à votre
organisme.
Écoutez, j'avais beaucoup de questions
auxquelles vous avez répondu, mais, une... un petit peu pointue comme... Étant
donné que votre clientèle, si je peux m'exprimer ainsi, là, je ne suis pas une
clientèle, mais les gens que vous appuyez, on va dire ça comme ça, c'est à un
bout du spectre, et le projet de loi couvre quand même assez large, j'aimerais
vous entendre sur l'obligation des mandataires de tenir un registre et de faire
des redditions de comptes de façon permanente, de façon périodique également.
Mme Dumas
(Magalie) : Bien, dans notre mémoire, on le mentionne, en fait,
pour nous, c'est...
Une voix
: ...à quelle
page?
Mme Dumas
(Magalie) : À la page 6, chère collègue, de notre mémoire.
Donc, on a des constats essentiellement très, très favorables pour les ajouts
au mandat, donc le mandat de protection bonifié, puis je vais prendre la peine
de le dire en trois secondes : «L'obligation du mandataire de faire un
inventaire des biens de la personne inapte dans les 60 jours suivant
l'homologation corrige une lacune actuelle importante, la bonification semble
mieux structurer aussi les attentes et les obligations qui peuvent être
légitimement attendues de la part du mandataire et du mandant — puis,
tu sais, bon, c'était quand même une procédure écrite et entérinée par le
tribunal, mais des fois il y avait quand même encore des petites zones d'ombre,
mais on sent que la bonification vient clarifier ça — et que
l'obligation de reddition de comptes qui pourrait être demandée est, pour nous,
une mesure de protection supplémentaire tant pour le mandant que le
mandataire.»
Souvent, en conseil de famille après, on
se retrouve, on est le mandataire de notre personne aînée, puis il y avait des
questions même sur... O.K. Elle est où, cet argent-là? Qu'as-tu fait de ce
bien-là? Et, comme il n'y avait pas d'inventaire à la base, bien, il y a
certains proches aidants qui se retrouvaient d'être dans le siège de l'accusé.
Là, de savoir que ça va être mis par écrit, que ça va faire partie du mandat de
protection, pour nous, protège absolument et le mandataire et le mandant. Donc,
on entrevoit ça vraiment d'un bon oeil.
Et, dans la préoccupation qu'on a dans
notre mémoire à ce sujet-là, compte tenu de nos préoccupations, eu égard à la
quérulence des révisions pour le mandat de tutelle dans des cas de maladie
cognitive ou dégénérative, bien, travaillons très fort à ce que les familles
travaillent très fort à s'équiper puis à faire des mandats de protection au bon
moment pour justement éviter la tutelle.
• (12 h 40) •
À Info-aidant, entre autres, on fait
beaucoup d'éducation aux gens. Puis, tu sais, corrigez-moi si je me trompe,
mais, tu sais, les directives médicales anticipées, on est encore à moins de
1 % de la population qui les a remplies. Donc, les mesures de protection
sont mal connues, puis ce qui fait qu'on se précipite dans des situations très
déplorables.
Donc, aimerait ça... Oui, il va y avoir un
effort de communication à expliquer les régimes de tutelle, mais prenons aussi
un bon temps pour mieux préparer les gens finalement pour éviter les recours à
la tutelle justement...
Mme Dumas (Magalie) :
...donc les mesures de protection sont mal connues, puis... ce qui fait qu'on
se précipite dans des situations très déplorables. Donc, on aimerait ça... Oui,
il va y avoir un effort de communication à expliquer les régimes de tutelle,
mais prenons aussi un bon temps pour mieux préparer les gens, finalement, pour
éviter les recours à la tutelle, justement.
Mme Lecours (Les Plaines) : Et
de façon peut-être un petit peu plus générale, est-ce qu'il y aurait des ajouts
au projet de loi qui répondraient encore plus à votre partie de clientèle plus
spécifique?
Mme Dumas
(Magalie) : On l'a nommé dans le régime de tutelle modulée, on
sait que ça existe, entre autres, en santé mentale, mais peut-être la création
d'un tribunal administratif ou de quelconque organe qui permettrait un accès
plus rapide en cas de réévaluation. Parce que, comme je vous dis, à l'heure
actuelle, ouvrir un régime de protection, tout dépendant d'où on est au Québec,
c'est de semaines à plusieurs mois, voire dépassé des années. On essaie de...
on se met dans la peau des proches aidants qui accompagnent quelqu'un qui a une
perte d'acquis substantielle qui fait que le tuteur ou le proche aidant ne peut
plus... En fait, l'aidé a encore des responsabilités qu'il ne peut plus
assumer, et dans ce contexte-là, si au moins il y avait un endroit où
rapidement on peut sonner l'alarme, et pas retourner sur une liste d'attente
pour être réévalué, nous apparaît être vraiment quelque chose de primordial à
penser, et à installer, et à faire. Si on avait une recommandation à faire, ce
serait probablement celle-là.
Mme Lecours (Les Plaines) :
O.K.
Mme Laliberté (Emmanuelle) :
Pour les personnes atteintes, dans le fond, de maladie cognitive,
neurodégénérative.
Mme Lecours (Les Plaines) :
Dégénérative. Parce qu'entre le moment de faire la demande puis... il y a déjà
une...
Mme Dumas
(Magalie) : Le lendemain de la décision du tribunal, on
pourrait se retrouver dans une tout autre situation.
Mme Laliberté (Emmanuelle) :
Ça change vraiment rapidement, là, l'évolution de la maladie, il y a toutes
sortes de choses qui peuvent amener des changements, puis on ne peut pas
attendre aussi longtemps que ce qui est prévu, actuellement.
La Présidente (Mme Chassé) :
Ça conclut.
Mme Dumas
(Magalie) : Et des changements dans la situation de santé de
l'aidé, mais des changements dans la situation de l'aidant aussi.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci. C'est très bien. Je vous remercie. Je cède maintenant la parole à la
députée de Westmount—Saint-Louis pour un bloc de 9 min 40 s.
Mme Maccarone : Tellement beaucoup
de questions, puis pas assez de temps. Premièrement, merci beaucoup pour
l'infographie, j'adore, ça donne vraiment un portrait clair puis vraiment ça
m'aide beaucoup à mieux comprendre. Ça fait que merci pour ça, c'était hyper
clair, votre mémoire.
Première question pour moi, parce que, là,
on parle du plan d'action, etc., puis comment qu'on va l'arrimer avec le projet
de loi. On sait que, souvent, la maltraitance des aînés est faite par leurs
membres de la famille. Comment voyez-vous... Qu'est-ce qu'on peut faire pour
protéger ces personnes en situation de vulnérabilité et aussi éviter un
embarras pour eux, peut-être, à l'intérieur de qu'est-ce qu'on est en train de
faire?
Mme Laliberté (Emmanuelle) :
Hum, c'est une bonne question.
Mme Dumas
(Magalie) : C'est une excellente question. En fait, bon, la...
Bien, premièrement, je vais commencer par dire : Oui, effectivement, la maltraitance,
souvent, est opérée par quelqu'un qui est près de nous, pas seulement un membre
de la famille, mais quelqu'un qui est près de nous. Mais j'ai aussi envie de
vous dire qu'en ce moment au Québec il y a des chercheurs qui s'intéressent au
contraire, c'est-à-dire la maltraitance à l'égard des proches aidants de la
part de leurs aidés. Nous, à Info-aidant, on reçoit beaucoup d'appels de proches
aidants qui voudraient prendre du répit, qui voudraient avoir accès aux
services, et c'est l'aidé qui refuse. On a... Ces dynamiques-là sont excessivement
complexes. Donc, on ne peut pas juste parler de la maltraitance comme l'aidant
qui... sur l'aidé, vraiment pas, et souvent ça crée du déséquilibre dans la
famille, où le proche aidant a vraiment besoin de services, et c'est le
contraire qui se produit.
Donc, c'est des questions excessivement
pointues, c'est pour ça que je pense que j'ai pris un délai de réponse, parce
que ça mériterait un mémoire, en soi, cette question-là, ce n'est pas évident à
trancher. Mais assurément il faut trouver quand même le moyen d'avoir une préoccupation,
puis c'est ça qu'on vous mentionne, par ailleurs, dans le mémoire. On trouve
que vous vous retrouvez dans une position où trouver la juste balance, hein...
voyons, la balance de la justice, qu'elle soit vraiment comme ça à l'égard du proche
aidant puis de l'aidé.
Puis j'ai entendu, tantôt, vaguement, je
pense, nos collègues de l'ordre des travailleurs sociaux parler aussi qu'il
faudrait qu'ils rajoutent l'appréciation aussi du tuteur ou de la personne
responsable. C'est... On ne l'a pas mentionné dans notre mémoire, mais... en se
disant que probablement ils le feraient, et ils l'ont fait. C'est un
incontournable aussi. Il va falloir vraiment évaluer les deux personnes. Puis
dans un contexte aîné, c'est souvent le conjoint ou la conjointe qui se
retrouve à être le tuteur ou le représentant légal. Donc, on parle d'une
dynamique de couple qui s'est établie sur 50 ans, sur 30 ans, sur 40 ans, on
n'arrive pas là... Déjà, absorber la maladie, là, surtout dans le contexte des
aînés puis des maladies neurocognitives, c'est déjà quelque chose, donc il faut
vraiment s'assurer de trouver, entre le rôle de protection, hein, puis on pose
plusieurs questions dans ce... entre le rôle de protection puis évidemment la
préservation des droits civils, mais de trouver un juste équilibre pour ne pas
justement ajouter plus de déséquilibre aux familles qui sont déjà sur une corde
raide, là.
Mme Maccarone : Ça m'amène sur
mes questions, mais les questions de consentement. Avez-vous quelque chose...
Mme Dumas
(Magalie) : ...puis évidemment la préservation des droits
civils, mais de trouver un juste équilibre pour ne pas justement ajouter plus
de déséquilibres aux familles, qui sont déjà sur une corde raide, là.
Mme Maccarone : Ça
m'amène... sur mes questions... mais les questions de consentement. Avez-vous quelque
chose à nous emmener là-dessus pour nous aider dans cette réflexion-là? Parce
que, c'est sûr, c'est un enjeu directement affecté dans qu'est-ce qu'on est en
train de parler.
Mme Dumas
(Magalie) : On n'a pas abordé ni le consentement aux soins dans
notre réflexion... puis j'entendais aussi la procuration générale qui nous questionne
aussi. On a... On s'est vraiment concentrés sur les aspects... pas que ceux-là
ne le sont pas, là, mais de... vraiment, dans le projet de loi, on... Il y a
une réflexion à poursuivre là-dessus, on s'engage à la faire à l'intérieur des
instances de consultation du Curateur public. Mais c'est sûr qu'il y a toute
une réforme à opérer.
Puis on se pose quand même la question
entre la procuration générale — je vais plus aller sur la procuration
générale — puis le rôle... la nouvelle mesure d'assistance, puis je
l'ai entendu tantôt, donc je ne répéterai pas le même propos, mais on a sensiblement
les mêmes préoccupations par rapport à ça. Puis la procuration générale, bien,
des fois, elle permet d'aller plus... tu sais, elle permet d'aller plus loin.
On peut signer pour quelqu'un, on peut prendre place pour lui. Et là on pense
que, bon, bien, dans certains cas, toujours avec la perspective d'éviter des
situations de maltraitance, il y a assurément des choses à venir préciser ici
pour vraiment s'assurer finalement que la mesure d'assistance soit plus
utilisée pour ne justement pas utiliser la procuration générale dans le cas où
quelqu'un est capable de signer pour lui. Parce que souvent elle est utilisée
rapidement, puis on enlève des droits civils pour rien. Donc, trouver ici un
équilibre encore.
Mme Maccarone : O.K. Pour
ne pas répéter les questions, déjà, que mes collègues ont posées, vous avez
souligné une préoccupation que... quand on parle de la personne responsable du
respect des décisions au tribunal, un... quelqu'un qui peut-être n'habite pas
avec la personne à leur charge ou qui n'habitent même pas peut-être dans la
même ville, vous dites qu'on devrait considérer de déléguer un certain nombre
de responsabilités particulières à un tiers. Vous proposez beaucoup de
questions, suffisamment de ressources pour l'accompagnement, exercice de leurs
droits, puis je sais qu'on a touché un peu là-dessus, mais que proposez-vous à
nous, à cette commission, pour régler cette problématique, la préoccupation?
Mme Dumas
(Magalie) : Assurément, d'avoir cette préoccupation-là,
c'est-à-dire d'éviter la lourdeur, hein? Je pense que vous comprendrez que
c'est l'esprit du propos, c'est déjà une tâche lourde, d'éviter la lourdeur.
Mais, à l'heure actuelle, puis ce n'est pas un jugement, c'est un constat,
hein, il y a des familles qui vont nourrir leurs personnes chères en CHSLD pour
s'assurer qu'elles ne sont pas en dénutrition. Ils dont déjà beaucoup,
beaucoup, beaucoup de travail pour venir suppléer au réseau de la santé et des
services sociaux. Si, en plus, on leur dit : O.K., là, en plus, votre aidé
est accompagné, mais il va falloir que vous soyez là très, très, très présent
dans le jugement du tribunal pour qu'il lui permette d'accomplir tel droit
civil...
Une voix
: Ça fait
peur.
Mme Dumas
(Magalie) : Ça fait peur. Ça fait peur. Les charges sont déjà
importantes en soins mêmes à la personne, donc si on vient encore ajouter des
impacts administratifs, légaux, fiscaux, financiers à tout ça, est-ce qu'on va
avoir moins de gens qui vont venir s'occuper de nos personnes? Puis ça, c'est
pour la partie publique.
Et, pour la partie privée, bien, on
assiste quand même dans le réseau des résidences à une facturation à la carte
assez impressionnante dans certains cas. Donc, allons-nous ravoir une belle
facturation, un nouveau... une belle proposition de facturation pour
accompagner un aidé à aller voter? On se pose la question.
Mme Maccarone : Wow! Je
n'avais même pas pensé à ça. Je trouvais que c'était vraiment une bonne idée
quand vous avez proposé que... «Il n'y aurait pas un dispositif à envisager,
comme par exemple, la constitution du tribunal administratif qui pourrait
permettre un accès rapide et sans frais à cette clientèle pour que les
modulations de tutelle seront à prévoir à une cadence potentielle accélérée?»
C'est une idée excellente. Est-ce
qu'actuellement nous avons assez de ressources pour répondre à ce besoin-là?
Puis, je pense aussi, pour les régions aussi, c'est une question que je demande
régulièrement parce qu'on n'est pas tous dans les milieux urbains. Alors,
qu'est-ce que vous proposez qu'on peut faire pour bonifier ceci puis pour le
mettre en vigueur?
• (12 h 50) •
Mme Dumas
(Magalie) : En fait, le tribunal administratif, on le voit
très, très bien sous l'égide du curateur. On ne pense pas à une structure
différente. Puis le curateur a un bureau partout au Québec, hein? Bon, des
fois, hein, bon, ils sont à Gaspé, il peut être à 200 kilomètres pareil,
mais quand même. Puis, à la limite, je vous dis ça puis probablement aussi que
l'avènement des technologies nous amènera probablement un jour à être capables
de faire un certain nombre de ce type d'audition là à distance. Et ce serait
d'ailleurs une très, très bonne idée, en passant.
Donc, on ne voit pas de création
supplémentaire, on voit juste une facilité vraiment dans les antennes du
curateur qui sont déjà partout au Québec et donc très près du milieu
décisionnel régional à ce sujet-là. Donc, à partir de maintenant, est-ce qu'on
a les ressources et les capacités? Moi, je pense qu'on doit les donner au
curateur, de pouvoir faire ça dans chacun de ses bureaux régionaux pour
vraiment, vraiment, vraiment venir enlever de la pression et donner de l'accès
rapide, pour pas... puis... Parce que de l'accès non rapide, éventuellement,
peut conduire aussi...
Mme Dumas (Magalie) :
...à ce sujet-là. Donc, à partir de maintenant, est-ce qu'on a les ressources
et les capacités? Moi, je pense qu'on doit aller donner au curateur de pouvoir
faire ça dans chacun de ses bureaux régionaux pour vraiment, vraiment, vraiment
venir enlever de la pression et donner de l'accès rapide pour ne pas...
Parce que de l'accès non rapide, éventuellement,
peut conduire aussi à des situations de maltraitance. Si on commence à être au
bout du rouleau, l'épuisement, la fatigue, l'ajout, puis déjà composer avec de
l'errance la nuit, par exemple, comme proche aidant, quand on a été debout
toute la nuit pour veiller, il faut donc... il faut vraiment prévoir un accès
facilité à la clientèle, vraiment, mais dans les antennes déjà en place.
Mme Maccarone : Avez-vous déjà
été confrontés avec des difficultés pour les communautés minoritaires, que ça
soit linguistiques ou autochtones qui ont un besoin, mais qu'on n'est pas
capables de les combler parce qu'il y a un manque de ressources?
La Présidente (Mme Chassé) :
En une quarantaine de secondes.
Mme Dumas
(Magalie) : On ne constate pas, nous, en tout cas, à
Info-aidant, qui est notre principale antenne, là, directe, on ne constate pas
de différenciation quant à ces facteurs-là. C'est le même accès. Bon, c'est sûr
que, parfois, les niveaux de littéracie, si on est un anglophone dans une
région plus francophone, bon... Mais c'est vrai là et c'est vrai à l'épicerie,
là. Ce n'est pas différent. Donc... Mais rien de particulier par rapport à
cette clientèle-là.
Mme Maccarone : C'est une
bonne nouvelle. Merci. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci à vous. Je cède maintenant la parole au député de Rimouski.
M. LeBel : Merci, Mme la
Présidente. Moi, c'est à votre page 3, le dernier paragraphe, ça m'a... En
partant, vous... Il dit : «Tel que présenté à l'heure actuelle, le projet
de loi ne semble pas suffisamment prendre en considération le fait du
vieillissement de la population.» Vous dites : On ne peut pas... Ça ne
peut pas se réaliser sans égard particulier aux personnes aînées en situation
de déficit cognitif. Moi, je vous dis, c'est vrai qu'on a... Il faut s'ouvrir
les yeux, là. Il nous arrive... À chaque année, le vieillissement de la
population nous interpelle, puis ça tombe beaucoup sur le dos des proches
aidants, je le vois dans ma région. Il faut absolument qu'on prenne conscience
de ça. Puis on ne peut pas y aller par silo.
Est-ce que vous pensez qu'au Québec on ne
serait pas dus à un protecteur des aînés?
Mme Dumas
(Magalie) : Vaste question, intéressante. Pourquoi pas?
Pourquoi pas? Notre structure démographique est telle que, pour les 20
prochaines années... Peut-être que ce ne serait plus... ce ne serait peut-être la
saveur à la mode dans 60 ans, là, quand on aura passé une grande partie de
notre pyramide démographique, mais, à l'heure actuelle, ce serait effectivement
une idée intéressante.
M. LeBel : J'en profite parce
que je n'ai pas beaucoup de temps, Mme la Présidente, j'aimerais ça, déposer...
parce qu'il y a des réflexions qui se font partout. Mais, dans ma région, avec
les gens de chez nous, on a proposé une réflexion sur le comment on peut bien
vieillir dans nos communautés, vieillir dans la dignité. Et on organise un
colloque bientôt. Je vous dépose le programme du colloque qui est organisé, ça
pourrait donner des idées aux autres. C'est fait en collaboration avec tout le
monde. Parce que je continue à dire qu'il faut se donner une vision par rapport
aux aînés; ça va nous rattraper. On a parlé aujourd'hui de listes d'attente en
CHSLD, on ne parle pas encore des ressources intermédiaires qui ont aussi des
listes d'attente, des aînés qui n'ont pas d'argent, qui vivent... Il y a des
villages chez nous, les aînés sont à 94 %, ils reçoivent des revenus
suppléments garantis, ça fait qu'ils ne peuvent pas avoir des logements
adéquats. Et il faut les protéger et il faut travailler avec eux autres. Merci pour
ce que vous faites.
La Présidente (Mme Chassé) :
Excellent. Je confirme qu'on a reçu votre document, M. le député de Rimouski,
et qu'il va être disponible sur notre site.
Alors, je vous remercie pour votre
contribution aux travaux.
La commission suspend ses travaux jusqu'à
15 heures. Bon lunch.
(Suspension de la séance à 12 h 54)
15 h (version non révisée)
(Reprise à 15 h 3)
La Présidente (Mme Chassé) :
Bon après-midi, tout le monde. La Commission des relations avec les citoyens
reprend ses travaux et je demande à toutes les personnes de la salle de bien
vouloir éteindre la sonnerie ou la fonction de vibration de son appareil. La commission
est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions
publiques sur le projet de loi n° 18, la Loi modifiant le Code civil, le
Code de procédure civile, la Loi sur le curateur public et diverses
dispositions en matière de protection des personnes. Et cet après-midi, nous
entendrons les organismes suivants : La Confédération des organismes de personnes
handicapées du Québec, le Protecteur du citoyen et Me Dominique Goubau,
professeur en droit à l'Université Laval.
Je souhaite tout d'abord la bienvenue à la
Confédération des organismes de personnes handicapées du Québec. Vous avez
10 minutes pour votre exposé. À une minute de la fin, je vais vous faire
un signe de la main ou un signe vocal pour vous inviter à conclure. Je vous
invite à tout d'abord vous présenter, puis à tout de suite débuter votre
exposé. Bienvenue.
Mme Vézina (Véronique) :
Merci, Mme la Présidente. Merci aux membres de la commission. Mon nom est
Véronique Vézina, je suis présidente honorifique de la COPHAN. J'ai, à mes
côtés, à ma droite, M. Olivier Collomb d'Eyrames, qui est du Regroupement
des organismes de personnes handicapées de la région 03, qui est un membre
de la COPHAN, et à ma gauche, Mme Louise Bourgeois, qui est présidente de
la Fédération des mouvements Personne d'abord du Québec, qui est aussi un
membre de la COPHAN.
Peut-être une petite minute pour vous
présenter la COPHAN. La COPHAN est un organisme de défense de droits des
personnes qui ont des limitations fonctionnelles et de leurs familles, on
couvre l'ensemble des limitations, que ce soient les limitations motrices,
visuelles, auditives, intellectuelles, trouble du spectre de l'autisme,
troubles de santé mentale, trouble du langage et les troubles cognitifs. On
regroupe actuellement près de 45 organisations à travers le Québec, ce
sont des organisations soit provinciales ou régionales.
La COPHAN fonctionne par le... a le mandat
de faire du pour et par. Aujourd'hui, je tiens à souligner qu'on fait beaucoup
plus de pour que de par...
Mme Vézina (Véronique) :
...organisations à travers le Québec, ce sont des organisations soit
provinciales ou régionales.
La COPHAN fonctionne par le... a le mandat
de faire du pour et par. Aujourd'hui, je tiens à souligner qu'on fait beaucoup
plus de pour que de par, et on est ici pour porter la voix de ceux qui sont
derrière nous et qui, considérant que plusieurs d'entre eux sont sous curatelle
ou tutelle, n'ont pas le droit à l'image et à la parole. Et je tiens à le
souligner car nous ne sommes que des porte-voix et non pas des porte-parole.
La COPHAN accueille favorablement les
principes du projet de loi n° 18. Après lecture de la
situation issue des individus et de leurs familles, il est en effet grand temps
de réformer en profondeur le système des régimes de protection. Cependant, à
travers les informations de nos membres, nous constatons que l'effet réel du projet
de loi est trop faible. Ayons pris connaissance de plusieurs mémoires, nous
constatons ne pas être les seuls à partager cette lecture. Nos membres vous
rappellent que l'autodétermination des personnes ayant des limitations fonctionnelles
va beaucoup plus loin que ce qui est mis de l'avant par le personnel des
différents réseaux de la direction, jusqu'aux intervenants terrain.
L'autodétermination d'un individu, comme celle d'un peuple, c'est avoir la
capacité de choisir, incluant le droit à l'erreur. Il s'agit de notre ligne
directrice dans le présent mémoire afin d'améliorer véritablement les droits
des personnes que nous représentons. À la lecture du projet de loi, il pourrait
potentiellement avoir un gain de droit pour les personnes. Cependant, plusieurs
points nous apparaissent limiter les effets du projet de loi.
Le premier point : les ressources
humaines techniques et financières. Le changement de mentalité dans l'ouverture
et la gestion de la tutelle ne peut pas être simplement décrété. C'est un
processus long, complexe et surtout hasardeux. Nous nous questionnons sur le
fait que, depuis 1990, la tutelle modulée était déjà possible sur une base
volontaire. Pourtant elle n'a été que la solution dans 225 cas. Nous doutons
que l'obligation fasse naître la vocation. Tous les réseaux impliqués dans la
mise en oeuvre de la loi à venir ont des contraintes évidentes de ressources.
Même en leur prêtant les meilleures intentions du monde, les différentes organisations
impliquées vont faire en fonction de leurs ressources actuellement déficientes.
Nous avons une perception que nous allons aller vers une définition a minima du
processus de modulation. Cela sera tout simplement des tutelles modulées,
numérotées de un à cinq.
Nous recommandons donc que la Commission
des relations avec les citoyens s'assure notamment dans l'étude des crédits que
les ressources nécessaires aux différentes organisations citées plus haut
soient affectées en accord avec l'esprit du législateur.
Nous recommandons également que le projet
de loi prévoie la mise en place d'une modulation personnalisée à chacun et non
une modulation individualisée avec un jugement identique par catégories de
tutelles modulées.
Également, depuis trop longtemps la COPHAN
et ses membres suivent différentes initiatives censées améliorer les droits
effectifs des personnes et de leurs familles. Ainsi, nous demandons à ce qu'une
recherche de 10 ans soit faite, débutant avant la mise en oeuvre de la loi
et suivant les changements au fil des années. Un rapport d'étape après cinq ans
permettrait d'alimenter un comité responsable d'étudier les effets de la loi et
ses éventuelles révisions. Nous demandons également que le projet de loi prévoie
une évaluation indépendante de la mise en oeuvre et des résultats de la loi sur
la base du rapport préliminaire de la recherche. Pour soutenir ce monitorage de
la loi, nous demandons qu'un comité consultatif soit formé avec, entre autres,
des experts de vécu, après consultations entre autres de la COPHAN. Ce comité
aurait notamment deux mandats : la préparation et la révision de la loi
ainsi qu'une analyse dénominalisée des plaintes et des commentaires reçus au
Curateur public.
• (15 h 10) •
Nous suggérons aussi à la commission
d'agir immédiatement pour les personnes vivant en RI-RTF ou en RAC. Ces
personnes sont extrêmement surveillées sur ce qu'elles peuvent ou non faire
chez elles, dans leur domicile. Par exemple, si une personne veut recevoir son
conjoint ou sa conjointe, si elle veut inviter une personne à dîner, aucune
raison ne pousse le gestionnaire de la ressource à accepter. Le fait d'octroyer
de nouveaux droits aux personnes ne dictera pas ce changement de mentalité. Le
projet de loi ne s'attaque pas à ce problème et la présente commission doit
interpeler les autorités en charge des lieux d'hébergement.
Nous demandons en conséquence à la
présente...
Mme Vézina (Véronique) :
...de la ressource à accepter. Le fait d'octroyer de nouveaux droits aux
personnes ne dictera pas ce changement de mentalités. Le projet de loi ne
s'attaque pas à ce problème et la présente Commission doit interpeler les
autorités en charge des lieux d'hébergement. Nous demandons en conséquence à la
présente commission d'interpeler le ministère de la Santé et des Services
sociaux et son réseau pour qu'ils prennent leurs responsabilités concernant les
hébergements en RI, RTF et RAC afin que les personnes soient maîtres chez elles
et aient véritablement accès à leurs droits.
Concernant la mesure d'assistance, nous
comprenons que cette pratique se fait déjà et que le projet de loi veut
encadrer cette pratique. Nous avons du mal à concevoir ce que ce nouveau modèle
va proposer d'effectif. Nous nous questionnons en fait sur l'intérêt des
personnes à s'inscrire à cette mesure d'assistance. Dans les faits, s'inscrire
à la mesure d'assistance, faire une demi-journée de formation, rédiger un rapport
une fois par année devient plus lourd que de simplement continuer d'assister sa
grand-mère de façon ponctuelle. Nous recommandons donc que la Commission des
relations avec les citoyens prenne les moyens en se servant des mécanismes
d'imputabilité, que ce soit l'audit d'imputabilité ou le mandat d'initiative,
pour documenter les besoins d'accompagnement et que la mise en oeuvre de ces
moyens inclue l'audition des groupes représentant les individus et leurs
familles.
Pour les personnes sous tutelle modulée,
la mesure d'assistance doit exister. Comme indiqué, le réseau de la santé n'aura
pas les ressources. Le personnel du Curateur public a une expertise très
pointue en gestion de patrimoine, notamment en acquisition et vente de biens,
qui doit être mise à contribution. De plus, une partie des personnes concernées
sont isolées, voire désaffiliées. Et il est crucial que l'expertise cumulée par
le personnel du Curateur public soit mise à contribution dans l'exercice de
leurs droits. Nous recommandons donc que le projet de loi permette au Curateur
public de mettre en place un réseau d'assistants rémunérés pour aider les
personnes sous tutelle modulée et leurs proches qui en font la demande. En
effet, si la personne sous tutelle ne développe pas d'elle-même les aptitudes
pour gérer son nouveau droit, le Curateur public n'aura d'autre choix que de
lui retirer. À titre d'exemple, une personne qui assume le droit de gestion de
finance et qui oublie de payer son loyer, car elle ne sait pas faire un chèque,
risque de se voir retirer son droit. Le projet de loi doit prévoir un mécanisme
pour que le service de soutien des services sociaux soit là, et pas dans six
mois. Il doit être là maintenant.
Ainsi, il faut aussi prendre en
considération que les personnes sous régime de protection ont droit à l'erreur,
comme tout un chacun. Il faut toutefois faire la part des choses entre le droit
à l'erreur et protéger les personnes sous tutelle. La personne a droit à
l'erreur, toutefois, lorsque cette erreur est répétée dans le temps, il faut
s'en apercevoir et corriger la situation. La Commission des droits de la
personne et des droits de la jeunesse qui a le mandat d'exercer
l'article 48 de la Charte des droits et libertés de la personne doit être
impliquée dans le projet de loi. La COPHAN est...
La Présidente (Mme Chassé) :
Il vous reste moins d'une minute.
Mme Vézina (Véronique) :
La COPHAN est surprise que cette entité ne soit pas associée au projet de loi.
Nous recommandons donc que le projet de loi prévoie une disposition pour que le
réseau de la Santé et des Services sociaux assume la période de transition
lorsque la personne sous régime de protection assume de nouveau certains
droits. Je vais laisser ma collègue, Mme Bourgeois, terminer avec quelques
exemples.
La Présidente (Mme Chassé) :
En 30 secondes. 30 secondes.
Mme Bourgeois (Louise) :
Bonjour.
La Présidente (Mme Chassé) :
Bonjour.
Mme Bourgeois (Louise) :
Au sujet de... les mots... Oui. Au sujet des mots, le vocabulaire et les
changements de pensée, nous ne voulons plus entendre le mot «inapte» et
«vulnérable». Nous ne voulons que des mots qui respectent l'esprit de la loi,
qui respectent la personne. Au sujet de «le droit à l'erreur»...
La Présidente (Mme Chassé) :
Ça conclut votre exposé. Je suis désolée.
Mme Vézina (Véronique) :
Est-ce qu'on pourrait avoir un petit deux minutes en accompagnement en fonction
de nos limitations?
La Présidente (Mme Chassé) :
M. le ministre, est-ce que vous accordez deux de vos minutes pour... Comme vous
le désirez. Vous êtes... Vous avez la pleine liberté.
M. Lacombe : Oui. Oui,
oui. Allez-y.
La Présidente (Mme Chassé) :
Oui. Le ministre vous accorde deux minutes supplémentaires.
Une voix
: ...la
conclusion, s'il vous plaît.
Mme Vézina (Véronique) : La
conclusion.
Mme Bourgeois (Louise) :
Ah! la conclusion. Je passe à la conclusion.
La Présidente (Mme Chassé) :
Excellent.
Mme Bourgeois (Louise) :
Au sujet. Conclusion, message général. Ça fait plus de 10 ans qu'on
attendait ce projet de loi. À chaque fois qu'il y avait un changement de gouvernement,
le projet de loi restait sur glace, et à chaque fois. Maintenant, c'est là que
ça se passe. On a déjà trop attendu, mais il faire que ça se passe tout croche.
Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Chassé) :
Bien, merci à vous. Très bien. Je vous remercie pour votre exposé. Et nous
allons débuter la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous. Il
vous reste 15 minutes...
Mme Bourgeois (Louise) : ... On
a déjà trop attendu. Mais il ne faut pas que ça se passe tout croche.
Mme Vézina (Véronique) : Merci
beaucoup.
La Présidente (Mme Chassé) :
Bien, merci à vous. Très bien. Je vous remercie pour votre exposé, et nous
allons débuter la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous. Il
vous reste 15 minutes.
M. Lacombe : Merci beaucoup, Mme
la Présidente. Merci à vous de vous être déplacés en aussi grand nombre. Ça
fait plaisir à voir, vous prenez ça à coeur. Merci pour votre engagement.
D'abord, je dois vous dire honnêtement, je
suis un peu surpris, parce qu'effectivement, vous venez de le dire en
conclusion, et je vous avais entendus le dire : À la COPHAN, nous
attendons un tel projet de loi depuis plus de 10 ans. Par contre, je vous
écoute, vous n'avez pas l'air satisfaits, vous avez l'air d'avoir plusieurs
revendications. Vous sous-entendez que... ou enfin, vous mettez de l'avant que
ce qu'on propose n'est pas adapté. Et je vous avoue aussi que j'aurais aimé
peut-être pouvoir vous poser des questions plus précises, mais je vais vraiment
me baser sur ce que vous venez de me dire, parce que là vous comprenez qu'on a
reçu votre mémoire il y a moins d'une heure, donc on... J'aurais aimé pouvoir
le lire avant, puis pour qu'on puisse échanger sur le mémoire, mais on pourra
le lire après, c'est correct. Donc, je vais vraiment me baser sur ce que vous
venez de dire.
Donc, effectivement, je suis un peu
surpris. Pouvez-vous m'expliquer qu'est-ce qui a changé entre le moment où on a
déposé le projet de loi... — et vous avez été consultés, je pense
qu'il y a eu des discussions et tout ça — entre ce moment-là, où vous
étiez heureux, et aujourd'hui, où vous semblez avoir, disons, beaucoup de
points de divergence?
Mme Bourgeois (Louise) : Je
vais expliquer. C'est parce que dans l'ancien... dans le
passé — comment je pourrais dire ça? — dans le passé, on
parlait beaucoup du projet de loi, puis là on voulait que le projet de loi soit
adopté et accepté. Mais, à chaque fois, on rentrait dans un mur. Il y avait un
changement de gouvernement. Là, c'était à recommencer encore, le projet de loi
était mis sur la glace. Mais, maintenant, là, on a eu un changement de
gouvernement cette année. On s'est pris dès le début, c'est là que ça se
passait, puis on en est fiers.
Puis je peux vous donner des exemples
qu'on a le droit à l'erreur, je peux vous donner des exemples aussi. Il faut
que les mots soient simples, que le projet de loi ne soit pas expliqué dans les
mots à 100 piastres, que ce soit expliqué dans les mots simples pour des
personnes... la population au complet. Comme je prends, exemple, Suzie, qui a
80 ans, une personne âgée puis qu'elle ne comprend pas qu'est-ce qu'ils disent
dans la loi, puis, s'ils interprètent des mots de politicien, ça peut être dur.
Comme Mario... Suzie, qui a une énorme... une déficience visuelle. Il faudrait
qu'il y en ait version braille aussi pour les personnes non voyantes.
M. Lacombe : Je comprends.
Mais, en fait, peut-être...
Mme Bourgeois (Louise) : J'en
ai un troisième exemple qui est pertinent : Mario, un malentendant qui est
sourd, il faudrait qu'il y ait un interprète pour lui expliquer la loi.
Mme Vézina (Véronique) :
Peut-être pour compléter...
M. Lacombe : Mais... Bien, je
voudrais peut-être juste poser une question. Je comprends ces exemples-là, et
vous avez raison, je pense qu'on doit faire des efforts pour que les projets de
loi et les lois soient accessibles. En même temps, on a aussi un devoir après
de communication, hein, et je pense que le meilleur outil pour vendre les
nouvelles mesures, ce ne sera pas le projet de loi, parce que c'est lourd et ce
n'est pas toujours compréhensible pour le commun des mortels, parce que c'est
du langage souvent juridique, hein, mais je pense qu'on a un devoir de diffuser
l'information, de faire connaître aux gens leurs droits. D'ailleurs, dans le
projet de loi, si vous le voyez, on intègre la mission du curateur. Notamment,
on ajoute le fait que le curateur a un devoir d'information. Donc, peut-être
que, ça, ça peut répondre à votre questionnement.
Mais la question précise que je me pose,
parce que je me la pose sincèrement : Qu'est-ce qui a changé dans votre
état d'esprit entre le moment où on a présenté le projet de loi et aujourd'hui?
Vous étiez heureux. Là, aujourd'hui, je vous sens davantage, je veux dire,
prudents, pour ne pas dire déçus de ce qu'on présente dans le projet.
• (15 h 20) •
Mme Vézina (Véronique) : Je
vous dirais que ce qui a changé... On est toujours heureux que le projet de loi
soit déposé, mais on est inquiets sur sa mise en oeuvre. On trouve qu'il manque
énormément de balises et de mesures pour soutenir la personne pour transiter
vers une nouvelle façon de faire, et les ressources qui vont être utilisées
pour soutenir ces personnes-là ne sont actuellement... Puis ça va être
principalement les ressources du réseau de la santé...
Mme Vézina (Véronique) : ...de
balises et de mesures pour soutenir la personne pour transiter vers une
nouvelle façon de faire. Et quand... Et les ressources qui vont être utilisées
pour soutenir ces personnes-là ne sont actuellement... puis ça va être principalement
les ressources du réseau de la santé... ne sont actuellement pas disponibles.
Quand je dis «pas disponibles», je pense, c'est un contexte qui est connu dans plusieurs
secteurs, il y a un manque de main-d'oeuvre partout, et il y en a un criant
dans le réseau de la santé, et actuellement il y a des listes d'attente importantes.
Le réseau de la santé n'a pas les ressources pour absorber le soutien qu'ils
vont devoir donner aux personnes qui vont aller vers différents types de
tutelles, en fonction de la modulation qu'il va y avoir. Ils n'auront pas le
soutien, par exemple, pour faire des apprentissages qui vont leur permettre
d'obtenir des droits. Ils n'auront pas le soutien nécessaire s'ils veulent
avoir, par exemple, de l'information : est-ce que je devrais faire l'achat
de tel équipement ou me procurer tel service, ou aller vers telle ressource? La
disponibilité n'est pas là, et c'est ça qui nous inquiète. Ce n'est pas le projet
de loi, je pense qu'on est content d'aller vers où on va. Mais on est inquiet
de la disponibilité du soutien que les personnes vont avoir pour pouvoir
regagner des droits. Parce que nous, notre objectif, c'est que les gens aient
plus de droits, mais, pour avoir plus de droits, elles ont aussi besoin à plus
de services.
M. Collomb d'Eyrames (Olivier) :
Si je peux me permettre, en complément, il nous semble avoir compris, dans les
derniers temps, que le réseau de la justice aussi a des légers problèmes de
ressources. Puis ce qu'on constate, on ne veut pas comparer ça à la
désinstitutionnalisation parce que c'est beaucoup mieux préparé, mais c'est
que, là, le projet de loi, il s'adresse à une entité, en principalement le Curateur
public, qui ne peut pas couvrir toute une société. Le projet de loi qui couvre tout
le monde, je ne sais pas ce... même, si ça peut seulement exister. Mais c'est
de se dire d'attirer l'attention de la commission, parce qu'il y a même des recommandations
qui concernent la commission, qui ne concernent même pas le projet de loi, mais
sur le fait qu'il faut vraiment le monitorer. Puis je pense que le Curateur, certainement,
a dû vous faire part de comment ça c'était passé ailleurs. Ailleurs, les
réformes des systèmes de protection, ça a eu parfois... en tout cas, je pense, notamment
en France, ça a été très ma géré.
Là, on voit qu'il y a des modifications importantes
qui ont été apportées face aux philosophies des projets de loi précédents. On
sent moins la volonté d'aller vers des trucs de curatelle privée, des choses comme
ça. Mais ce qu'on se dit, on voit un réseau de la santé qui coupe des services,
qui n'arrive pas à respecter ce qui est son coeur de métier, et à qui on vient
rajouter ça. C'est ça qui nous préoccupe, et on sait que le projet de loi, il y
a des aspects qu'il ne couvrira pas.
Puis, dans ce qu'on vous dit, comme dit
notre présidente, c'est important, bravo! Maintenant, c'est qu'est-ce qu'il y a
derrière? Puis on sait que le pouvoir de l'Assemblée nationale, il y a un
moment, c'est le pouvoir exécutif qui va s'occuper de ça. Puis on voit plusieurs
organisations, puis ce qu'on a tendance à constater, puis ce n'est pas juste, je
pense, pour les personnes qui ont des limitations, quand on change quelque
chose, chacune des organisations concernées essaie de le moins possible changer
ses pratiques quand elles n'ont pas les ressources pour le faire. Et donc,
nous, ça, c'est une de nos préoccupations, c'est comment faire pour que les
ressources soient là, pour que les gens les aient au bon moment dans un
contexte où... Puis je pense que vous avez des gens aussi qui travaillent en
services sociaux... bien, vous le voyez, c'est comment on va faire pour dire à
des gens qui n'y arrivent pas, en plus, s'il y a ça dans ta charge de cas à
travers le reste?
M. Lacombe : Là, vous parlez
de ressources, vous parlez du réseau de la santé. Pouvez-vous préciser, en lien
avec le projet de loi?
Mme Vézina (Véronique) :
Bien, en lien avec le projet de loi, c'est que les gens vont avoir des
apprentissages à faire, mais on va avoir aussi beaucoup de questionnements.
Puis ce n'est pas toujours les proches, il y a beaucoup de gens qui sont
isolés. Il y en a qui sont même désaffiliés du réseau, que, déjà, ils ne sont
pas dans le réseau. Les gens n'arriveront... les professionnels qui sont de la
réseau... dans le réseau de la santé n'arriveront pas à prendre cette charge de
travail là, supplémentaire, pour supporter les personnes qu'on vient de sortir
d'un régime, mais qu'on transfère dans un autre réseau qui va devoir leur
donner des services pour venir palier. Puis tant mieux si on les transfère de
réseau, mais est-ce que les ressources vont être là pour leur donner le
service? Puis il faut savoir que les principales personnes concernées sont des
personnes qui ont une déficience intellectuelle, un trouble du spectre de
l'autisme et une déficience... ou des déficiences cognitives.
M. Lacombe : Mais, je...
Mme Vézina (Véronique) :
Et... J'aimerais terminer mon idée. C'est ces personnes-là qui vont être les
principales concernées, et, actuellement, l'offre de service à ces personnes-là
est en train de se modifier. On travaille maintenant par épisodes de services,
donc plusieurs personnes se retrouvent sans intervenants dans le réseau de la
santé, donc sans personnes sur qui pouvoir s'appuyer.
M. Lacombe : Je vais... Ce que
je vous dirais, c'est que je comprends vos critiques envers le réseau de la
santé. Je comprends, en fait, que vos critiques s'adressent au réseau de la
santé. Sauf que je dirais aussi que ce n'est pas l'objet du projet de loi. Ce
n'est pas du tout...
Mme Vézina (Véronique) :
...sans personne sur qui pouvoir s'appuyer.
M. Lacombe : Je vais... Ce que
je vous dirais, c'est que je comprends vos critiques envers le réseau de la
santé. Je comprends, en fait, que vos critiques s'adressent au réseau de la
santé, sauf que je dirais aussi que ce n'est pas l'objet du projet de loi... ce
n'est pas du tout l'objet du projet de loi, parce que — puis c'est
pour ça que je voulais peut-être corriger la perception — on ne parle
pas d'envoyer des gens... de changer gens de réseau, tout ça est toujours sous
l'égide du curateur, qui va changer de nom. Donc, on ne parle pas de désinstitutionnalisation
comme ce à quoi on faisait référence, c'est-à-dire qu'on n'envoie pas les gens
dans le réseau de la santé. C'est pour ça que je me posais la question quand
vous faites référence au manque de ressources en santé pour prendre en charge
ces gens-là.
Ces gens-là vont continuer d'être épaulés
par le curateur, donc on parle de mesure, la mesure d'assistance, qui fait en
sorte que, pour permettre à des gens de conserver des droits le plus longtemps
possible, on leur permette, sans avoir recours aux tribunaux, d'avoir accès à
une personne qui va pouvoir leur offrir un conseil, va pouvoir les accompagner,
va pouvoir téléphoner dans les ministères, par exemple, les organismes à son
nom pour être capable de prendre de l'information, appuyée par le curateur, qui
va être là, qui va avoir un devoir d'informer les gens de leurs obligations,
des outils qui sont disponibles, de leur donner de l'information. Donc, on ne
les envoie pas dans le réseau de la santé. Donc, je me demande si on a une interprétation
différence.
Mme Vézina (Véronique) : On
n'a pas une interprétation... je ne dis pas qu'on les transfère du curateur au réseau
de la santé, mais le réflexe des gens, ça va être de s'adresser au réseau de la
santé pour obtenir un service, parce qu'ils n'auront plus... la perception des
gens, là, c'est qu'ils n'auront plus d'agents, à la curatelle... je vais dis
ça, peu importe le nom que ça portera par la suite, n'auront plus d'agents à
qui se référer. Déjà, c'est difficile d'avoir accès à ces personnes-là et là,
en ayant une mesure d'assistance, à qui ils vont se référer? Ça va être beaucoup
plus simple pour eux d'aller dans le réseau de la santé.
Puis on ne dit pas que le projet de loi
doit adresser des recommandations ou s'attacher avec le réseau de la santé, ce
qu'on dit, c'est qu'on doit s'assurer que le réseau de la santé aura les
ressources pour absorber les changements à la curatelle, mais aussi pour
permettre aux gens de faire de... nous, ce qu'on veut, c'est que les gens aient
plus de droits. Mais pour avoir plus de droits, les gens vont avoir des
apprentissages à faire, et si le réseau n'a pas la capacité de leur donner la possibilité
de faire des apprentissages là, ils n'auront pas plus de droits.
M. Lacombe : Je pense qu'on
gagnerait peut-être à changer davantage le fond du projet de loi sur la façon
dont il va être mis en oeuvre, parce que, je vous avoue, je suis très surpris,
et pas agréablement surpris, là. Moi, je pensais que ça répondait à ce que vous
cherchiez, et je le dis honnêtement, parce que je suis persuadé que ça répond à
ce que vous énoncez comme préoccupation en ce moment. Je pense qu'on a peut-être
un travail d'explication à faire parce que, vraiment, je ne vois pas ça de la
même façon que vous. C'est-à-dire il y a toujours des gens, là, au curateur,
les gens qui sont sous curatelle, par exemple, ou sous tutelle aujourd'hui, vous
dites : Bien là, maintenant ils devront se tourner vers des gens du réseau
de la santé ou, en tout cas, ce sera leur réflexe.
Les gens qui ont toujours besoin d'une
tutelle, là, avec le nouveau projet de loi, ils vont continuer d'avoir leurs
ressources. Les gens qui voudraient eux-mêmes ne pas être sous tutelle, mais plutôt
avoir recours à la mesure d'assistance, bien là, d'abord, ce serait leur choix,
parce que peut-être que, pour eux, c'est la meilleure solution, ils peuvent
conserver le maximum de droits, puis ils sont capables de les exercer. Bien, à
ce moment-là, ce sera leur choix, ils vont être très bien informés du support
qu'on leur donne ici sans être obligés d'aller chercher ça dans le réseau de la
santé. Donc, je pense que c'est là qu'on ne s'entend peut-être pas ou qu'on ne
comprend pas la même chose.
Mme Vézina (Véronique) : Je
pense qu'on comprend bien les mêmes intentions. Nous, ce qui nous inquiète,
c'est l'application, puis je vais vous donner un exemple de ce qui nous
inquiète : si on donne à la personne le droit... on redonne à la personne
le droit, par exemple, de gérer ses finances elle-même, mais qu'il n'y a jamais
personne qui lui a montré à faire un chèque, à aller au guichet automatique, à
simplement aller sur Internet faire un virement ou une transaction quelconque,
ça, là, la personne, ce n'est pas qu'elle n'est pas capable de gérer ses
finances, c'est qu'elle n'a pas fait les apprentissages pour y arriver. Ça fait
que si on veut lui redonner le droit à gérer ses finances, il faut d'abord lui
donner des services pour qu'elle ait les capacités de le faire.
La Présidente (Mme Chassé) :
Il vous reste moins d'une minute au bloc d'échange, M. le ministre.
M. Lacombe : Merci, Mme la
Présidente. Dans le cas d'une tutelle... je comprends qu'il y a un
accompagnement, là, qui est offert — vous êtes d'accord avec moi? — dans
le cas d'une curatelle, en ce moment, d'une tutelle, il y a cet
accompagnement-là.
• (15 h 30) •
Mme Vézina (Véronique) : Oui.
Oui.
M. Lacombe : Si la personne, du
jour au lendemain, pour x, y raisons — il y en a mille et une — sort
du régime de protection de la tutelle pour aller vers une mesure d'assistance,
la personne qui va pouvoir l'aider dans son cheminement...
15 h 30 (version non révisée)
M. Lacombe : ...en ce moment
d'une tutelle, il y a cet accompagnement-là. Si la personne du jour au
lendemain pour X, Y raison, il y en a 1001, sort du régime de protection, de la
tutelle, pour aller vers une mesure d'assistance, la personne qui va pouvoir
l'aider dans son cheminement, parce qu'elle reprend le contrôle de ses
finances, bien ça va être l'assistant. Puis ça, c'est explicite, là, en faisant
tout ce processus-là, ça va lui être expliqué, la personne va choisir un
assistant, il va y avoir une entrevue...
La Présidente (Mme Chassé) :
En terminant M. le ministre.
M. Lacombe : ...et tout ça va
se faire, donc c'est l'assistant qui va les aider.
La Présidente (Mme Chassé) :
C'est... ça conclut le bloc d'échanges avec le parti formant le gouvernement.
Je cède maintenant la parole à la déjà de Westmount—Saint-Louis pour son bloc
d'échanges avec les intervenants. Allez-y.
Mme Maccarone : Merci, Mme la
Présidente. Merci pour votre présence ici en si grand nombre. Ça va du bien
d'avoir du monde ici à notre Assemblée nationale.
Question pour vous, puis là j'ai fait une
lecture rapide, mais je vous ai entendu par rapport à votre présentation, vous
avez dit que la Commission des droits de la personne et les droits de la
jeunesse qui a le mandat d'exercer l'article 48 de la Charte des droits et
libertés de la personne doit être impliquée dans le projet de loi. Quel rôle
aimeriez-vous qu'elle occupe à l'intérieur de ce projet de loi?
M. Collomb d'Eyrames (Olivier) :
Oui, ça. Il y a quelques années, la Commission des droits de la personne avait
mis sur pied une escouade avec différentes compétences pour protéger les aînés
en vertu de l'article 48 de l'exploitation. Et en ouvrant des nouveaux
droits, on augmente les risques d'exploitation. C'est comme ça. Si la personne
peut gérer 0 $... en tout cas, on peut abuser d'elle, mais pas là-dessus.
Et donc là, nous, on se posait la
question... c'est, comme l'article 48 de la Charte protège les personnes
qui ont des limitations, enfin, personnes handicapées au sens de la Charte,
bien on s'est dit : Mais ça va être quoi leur lien avec ces nouvelles
ouvertures de droits? Parce que nous, ce qui nous préoccupe, ce n'est pas... Je
comprends le ministre, mais je pense qu'il n'y a personne qui est contre le
fait qu'on donne des nouveaux possibles, mais si on ne donne pas les
ressources, bien en fait, les possibles ne seront juste pas mis en oeuvre.
Et là on se posait la question, encore une
fois, et je comprends M. le ministre, mais nous, on n'est pas juristes, et
surtout pas à ce niveau-là, c'est qu'on se posait la question : Est-ce que
le projet de loi, il interpelle le rôle de la commission. Est-ce qu'eux aussi,
ça va leur donner ce que la Commission des droits de la personne, voilà encore
une organisation qui se déclare sous contrainte de ressources depuis de
nombreuses années, qui certainement fait très bien son travail. Mais un an pour
avoir une instruction pour des discriminations des fois qui sont, somme toute
genre : on m'a refusé un taxi, j'ai un chien-guide, ça prend des délais
qui sont quand même assez élevés, d'aller en médiation et tout ça. De se dire
encore une fois, ils sont interpellés. Il y a un effet d'aubaine, ça s'appelle,
hein, quand on... de ces personnes qui vont recouvrir des droits et de se dire,
mais est-ce qu'il devrait être interpellé... Comme je vous dis, on n'a pas
votre expertise, on ne sait pas si votre commission a le pouvoir de se pencher
là-dessus, mais de se dire, puis la commission a certainement un avis sur le
présent projet de loi, mais nous, c'est ça, ce qui nous questionnait,
c'était : Est-ce qu'en donnant ces nouveaux droits, il y a ce besoin d'une
protection plus élevée par le biais de la commission? Est-ce que la commission
a un rôle?
Donc, nous, c'est ça qu'on soulève dans
notre mémoire et d'ailleurs, je pense, de mémoire, il n'y a pas de
recommandation spécifique à cet effet, mais c'est qu'en le lisant, bien, il y a
des gens qui se sont déclarés surpris en disant : bien, la protection
contre l'exploitation, la maltraitance, là, d'habitude c'est eux, donc là on se
le demandait, on s'est posé cette question.
Mme Maccarone : Mais c'est
bien que vous souleviez ce point-ci. Vous êtes ici pour nous aider dans notre
réflexion, alors merci. C'est sûr notre Curateur public est avec nous
aujourd'hui alors je sais qu'il en prend note de vos propos. Vous avez
mentionné : Qu'est-ce qu'on peut faire pour changer la mentalité? Parce qu'on
comprend qu'il y a quand même une vulnérabilité à l'intérieur de tout ça, parce
qu'il y a des jugements.
J'aimerais vous entendre parler un peu sur
le consentement. Parce que, moi, dans le fond si je peux résumer un peu
qu'est-ce que vous avez partagé avec nous à cette commission aujourd'hui, c'est
qu'il y a des jugements, il y a des gens qui peuvent être aptes à faire des
choses, mais il y a un jugement envers ces personnes-là qui ne sont pas
capables, mais elles ont le droit au consentement.
Ça peut avoir l'air de quoi à l'intérieur
de notre projet de loi si on faisait peut-être une définition, une description
de comment que ça peut évoluer puis comment qu'on peut vraiment aider les gens
à l'intérieur de qu'est-ce qu'on veut faire, une évolution pour aider le public
dans ce projet de loi?
Mme Bourgeois (Louise) : Moi,
je dirais que leur donner... de leur donner leur droit de se marier puis le
droit de voter, parce qu'une personne qui est sur la curatelle, leurs droits
sont enlevés. Ils n'ont même pas le droit de faire un appel, ils n'ont pas le
droit... Les personnes qui vivent en ressources intermédiaires, ils n'ont pas
le droit de recevoir un ami de coeur, donc il faut que ça change. Il faut
qu'ils regagnent tous ces droits-là. Pour nous, c'est très important.
M. Collomb d'Eyrames (Olivier) :
...peut-être pour compléter, et encore une...
Mme Bourgeois (Louise) : ...les
personnes qui vivent en ressource intermédiaire, et n'ont pas le droit de
recevoir un ami de coeur. Donc, il faut que ça change, il faut qu'ils aient...
il faut qu'ils regagnent tous ces droits-là. Pour nous, c'est très important.
M. Collomb d'Eyrames (Olivier) :
Peut-être pour compléter, c'est... Et encore une fois, vous avez vos
expériences et nous, on a les nôtres. On aimerait éviter qu'on aille vers une
individualisation. Parce qu'individualiser... une lettre individualisée, en
fait, c'est qu'il y a votre nom dessus, puis c'est la même pour tout le monde.
Ça, c'est bien ce qu'on appelle une lettre individualisée. Une lettre
personnalisée, bien, on connaît mon âge, qu'est-ce que j'ai déjà acheté, bon,
c'est ça. Mais nous, notre souci, c'est que l'approche reste personnalisée.
Puis on ne décrète pas un changement de
mentalité. Puis ce n'est pas... Je veux dire, nous, quand on a posé la question
effectivement il y a eu des très beaux échanges avec le personnel du curateur.
Ça aurait dû commencer il y a 10 ans, mais on apprécie le nombre de rencontres
qu'on a eues en quelques semaines. Mais c'est ça, on nous dit, depuis 1990, on
peut faire des tutelles modulées sur une base volontaire. On pose la
question : Il y en a eu combien? J'aurais... Ça fait 29 ans qu'on peut le
faire, que les acteurs, les individus, tout le monde peut le faire. Sur une
base volontaire, on nous dit : 225 en 30 ans. Sur le volume total des gens
qui ont été concernés, nous ça nous interroge.
Si je vous permets volontairement de
cesser un comportement qui brime les droits des autres, et que vous continuez,
bien ça veut peut-être dire qu'en fait, cette situation-là, pour toutes sortes
de raisons, des jugements de valeur, des fois des contraintes de ressources...
On l'a entendu aussi, les proches... toutes les démarches juridiques de
modulation de tutelle, quand c'était sur une base volontaire, on peut
comprendre que des proches, qui en ont déjà pas mal au-dessus de la tête, se
soient contentés de choses beaucoup plus rigides. Mais ça, je veux dire, si en
30 ans, tu l'as fait 225 fois sur des dizaines de milliers de cas, ça veut
peut-être dire que le jour où je t'impose, tu vas y aller, mais pas... pas
gaiement. Donc, pour nous... c'est pour ça qu'on veut insister sur le côté
personnalisé. Et on sait que ça va être compliqué à gérer, on sait qu'il n'y a
personne qui veut des jugements de six pages d'attendus et de 18 pages de ce
qu'il faut faire dans le détail. Ça ne sera pas gérable. Mais on veut vraiment
rester dans cette philosophie. C'est d'essayer de la personnaliser. Maintenant,
comment faire, dans la loi, pour dire qu'il faut que les gens respectent... ça,
c'est compliqué, je...
Mme Maccarone : En effet. Mais
comment? Comment le faire? Parce qu'on a déjà entendu autres groupes nous dire
qu'ils ne veulent pas qu'on en rajoute, de la lourdeur administrative pour,
dans le fond... dans le fond, il faut enlever cette lourdeur-là pour aider les
proches aidants à aider les personnes à leur charge. Alors, ma crainte, c'est
que... comment on peut le faire sans rajouter une lourdeur administrative, non
seulement pour les proches aidants puis les tuteurs, mais aussi pour le
Curateur public, qui veut vraiment bien gérer toutes les personnes, pour qui il
est responsable, mais d'une façon où il n'y aura pas une liste d'attente parce
que... puis il y aura un accès assez rapide?
Parce que je vous ai clairement entendus,
il faut rajouter des ressources, je pense que c'est clair, puis je pense que
tout le monde est en accord avec ceci, avec ce changement, puis il y aura une
gestion de changement. Ça aussi, je vous entends là-dessus, une gestion de
changement qui peut être à 18 mois, 24 mois peut-être, avec... Il y a
déjà l'engagement du gouvernement et du curateur pour donner de l'information,
faire de la formation, s'assurer que toutes les informations sont adaptées pour
la population qui va subir ce changement-là, mais comment faire vraiment,
personnaliser? Est-ce que c'est parce qu'on... pensez-vous qu'on devrait
proposer un autre intervenant à l'intérieur du processus? Est-ce qu'il y a un
autre rôle qu'on devrait penser à créer? Est-ce qu'il y a un autre niveau de
gouvernement à interpeller dans le processus? Est-ce que c'est le droit de la
personne qui peut nous aider dans ceci?
M. Collomb d'Eyrames (Olivier) :
Je pense, la seule réponse claire que vous avez, dans notre mémoire, à ce
sujet-là, c'est qu'en fait on n'en sait peut-être pas grand-chose et que c'est
pour ça qu'on vous propose un projet de recherche qui commence avant la
l'entrée en vigueur du projet de loi, un côté longitudinal, qu'on suive les
personnes dans cette évolution et qu'on la... peut-être on la révise. En tout
cas, pour nous, c'est comme un changement de mentalité important qu'on propose
là. Mais moi, je me rappelle, il y a quelques années — peut-être mon
accent me trahit encore, je ne suis pas né ici — où j'entendais des
gens qui parlaient du moment où les femmes ont eu le droit de commencer à
signer des papiers sans qu'il y ait un homme à côté, puis d'entendre des gens
qui disaient : Mais tu as encore des notaires, au milieu des
années 70, qui questionnaient le fait que la femme, elle vienne toute
seule, et là on parle de gens formés, on parle de gens qui sont dans un certain
milieu, soit les années 70, les notaires... bon, voilà.
• (15 h 40) •
Donc... et ça a pris des années et je
pense... il me semble entendre parfois encore... qu'il y a encore des enjeux
sur l'égalité hommes-femmes, comme la Loi sur l'équité. Je suis arrivé en 2004,
on en parlait encore. Donc, je me dis, c'est ça. Nous, on en est venus à la
conclusion...
M. Collomb d'Eyrames (Olivier) :
...on parle de gens qui sont dans un certain milieu, dans les années 70, les
notaires. Bon. Voilà donc. Et ça a pris des années, et je pense... il me semble
entendre parfois encore qu'il y a encore des enjeux sur l'égalité
hommes-femmes, comme la Loi sur l'équité, je suis arrivé en 2004, on en parlait
encore. Donc, je me dis, c'est ça, nous, on en est venu à la conclusion... et
pour éviter ces problèmes de perception que le ministre souligne, on parle bien
d'un projet de recherche où on suit, où on regarde, où on «monitore». J'ai vu
un très beau... un extrait de projet de recherche en France, où ils ont vu à
quel point il y avait eu du très bon, et des gens qui s'étaient tout simplement
débrouillés pour faire comme avant, mais en changeant les mots, et on se dit...
La Présidente (Mme Chassé) :
Il vous reste moins d'une minute.
M. Collomb d'Eyrames (Olivier) :
...avec un vaste projet de recherche ambitieux, on en a déjà parlé au Curateur
public qui semble ouvert, M. Marsolais, bien là, on se donne une chance. Je
pense qu'il faut arrêter de vouloir essayer d'être parfait tout le temps, en
partant. Et, quand on en a parlé entre nous, c'est ce qu'on s'est dit : Le
droit à l'erreur, il est pour vous aussi.
Mme Maccarone : Si vous me
permettez, parce qu'il nous reste peut-être 30 secondes, vous avez fait plusieurs
recommandations, est-ce que vous pouvez identifier votre top trois? Parce qu'il
y en a deux pages, et je vous félicite là-dedans, c'est parfait, mais, si
mettons, il faut cibler, c'est lesquels les plus importants.
La Présidente (Mme Chassé) :
En 15 secondes.
Mme Vézina (Véronique) : Je
vais en citer deux : la personnalisation et l'ajout de ressources pour
s'assurer que les personnes sont soutenues, et qu'on leur permette d'acquérir
des droits, mais d'acquérir la possibilité de faire des apprentissages pour avoir
des droits.
Mme Maccarone : Merci.
La Présidente (Mme Chassé) : Merci
beaucoup pour votre contribution aux travaux de la commission. Je vais
suspendre momentanément les travaux pour permettre au prochain groupe de
prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 15 h 42)
(Reprise à 15 h 45)
La Présidente (Mme Chassé) :
Et je souhaite... À l'ordre, s'il vous plaît! Je souhaite maintenant la
bienvenue aux représentants du Protecteur du citoyen. Vous savez que vous
disposez de 10 minutes, et que par la suite nous procéderons à une période
d'échange, et qu'à une minute de la fin je vais vous faire un signe pour vous
inviter à conclure. Débutez, tout d'abord, en vous présentant, puis poursuivez
avec votre exposé. Allez-y.
Mme Rinfret (Marie) :
Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci à vous.
Mme Rinfret (Marie) :
Marie Rinfret, Protectrice du citoyen. Mme la Présidente, M. le ministre de la
Famille, Mmes, MM. membres de la commission, je vous présente les personnes qui
m'accompagnent. À ma droite... bien, je ne sais pas pourquoi je dis à ma droite
parce qu'il y a juste un homme, Claude Dussault, qui est vice-protecteur,
Services aux citoyens et aux usagers, et Mme Ariane Massicotte, qui est
coordonnatrice aux enquêtes en administration publique.
D'abord, je remercie la Commission des
relations avec les citoyens d'avoir invité le Protecteur du citoyen à
participer aux consultations sur le projet de loi n° 18. Le respect des
personnes et de leurs droits ainsi que la prévention des préjudices sont au
cœur de la mission du Protecteur du citoyen. Son rôle en matière de prévention
s'exerce notamment par l'analyse de situations qui pourraient engendrer des
préjudices pour des citoyens et des citoyennes ou qui sont de nature
systémique. En vertu des pouvoirs qui nous sont conférés, nous pouvons proposer
des modifications aux lois, aux règlements, directives et politiques
administratives afin de les améliorer dans l'intérêt des personnes concernées.
C'est dans cette perspective que nous sommes devant nous aujourd'hui.
D'entrée de jeu, le Protecteur du citoyen
considère que le projet de loi n° 18 marque une avancée pour la protection
des personnes en situation de vulnérabilité, et ce, dans le respect de leur
autonomie. De plus, il s'inscrit dans les tendances internationales qui visent
les mêmes buts et auxquels nous adhérons. Je suis toutefois d'avis que des
précisions sont nécessaires pour que la réforme atteigne son objectif.
Soulignons d'abord que le projet de loi
prévoit dorénavant une seule mesure de représentation pour les personnes
inaptes, soit la tutelle. Le tribunal en déterminera les modalités à partir
d'évaluations médicales et psychosociales, et en fonction de l'avis du majeur,
dans la mesure du possible. C'est un progrès. C'est un progrès puisque le
tribunal adaptera mieux les conditions de la tutelle à la situation du majeur
inapte. La reconnaissance de l'autonomie des personnes exige qu'on ne les
empêche pas d'exercer elles-mêmes les droits qu'elles sont en mesure d'exercer.
C'est ainsi que l'accent est désormais mis sur l'évaluation du besoin de représentation.
Cela m'amène à recommander que les
critères à prendre en compte pour évaluer le besoin de représentation pour
l'exercice des droits civils soient davantage précisés afin de fournir des
références communes à tous les professionnels, de même qu'au tribunal, et ce,
compte tenu des conséquences déterminantes sur les personnes visées. Parmi ces
facteurs, ni exhaustifs ni limitatifs, à prendre en compte, on peut penser au
degré et à la durée prévisible de l'inaptitude du majeur, à la nature et à la valeur
de son patrimoine, à savoir s'il est isolé ou bien entouré ou encore si un
mandataire désigné par lui assure déjà une représentation adéquate ou non.
La réévaluation médicale et psychosociale
de la personne sous tutelle ne se fera plus selon des délais uniformes mais
fixés au cas par cas par le tribunal selon l'évolution de la condition de la
personne, et ce, sans excéder cinq ans. J'insiste qu'il faudra voir à respecter
rigoureusement les délais impartis. En effet, des plaintes que nous recevons font
état de nombreux retards dans ce processus de réévaluation.
• (15 h 50) •
Le projet de loi introduit le concept de
représentation temporaire du majeur inapte. Sans être une tutelle, la formule
vise à répondre à un besoin temporaire de représentation d'une personne
déclarée inapte par un médecin, et ce, pour la réalisation d'un acte déterminé.
Or, aucune mesure de surveillance n'est prévue pour s'assurer que l'acte posé
par le représentant temporaire respecte le cadre de son mandat. Les actes visés
par une telle représentation peuvent parfois être...
Mme Rinfret (Marie) : ...par
un médecin, et ce, pour la réalisation d'un acte déterminé. Or, aucune mesure
de surveillance n'est prévue pour s'assurer que l'acte posé par le représentant
temporaire respecte le cadre de son mandat. Les actes visés par une telle
représentation peuvent parfois être complexes et lourds de conséquences.
Ainsi, je suis d'avis que des mesures de
surveillance devraient être instaurées pour que le représentant temporaire,
tout comme le tuteur, soumette une reddition de comptes lorsque la
représentation prend fin. J'en fais une recommandation.
Le projet de loi prévoit une nouvelle
mesure d'assistance au majeur apte ou inapte. Cette mesure, qui n'en est pas
une de représentation, pourrait concerner toute personne majeure qui, en raison
d'une difficulté, voudrait être assistée pour prendre soin d'elle-même,
administrer son patrimoine ou exercer ses droits civils tout en conservant sa
pleine capacité.
Par cette formule administrative, ce
serait donc le directeur de la protection des personnes vulnérables qui serait
responsable de la reconnaissance de l'assistant au majeur choisi par la
personne elle-même. J'estime que cela devrait répondre aux besoins d'un certain
nombre de personnes et de leurs proches aidants, tout en leur évitant des
démarches judiciaires.
Afin de remplir son rôle auprès de la
personne qu'il assiste, il importe toutefois que l'assistant au majeur puisse
accéder facilement à l'information requise, y compris à de l'information
confidentielle. Des plaintes traitées par le Protecteur du citoyen nous ont
permis de constater les difficultés qu'éprouvent les proches aidants pour
obtenir des renseignements auprès de certains ministères et organismes parce
qu'ils n'ont pas de statut reconnu par un régime de protection ou un mandat
homologué. Par exemple, nous avons reçu une plainte d'une dame qui n'avait pas
de procuration ou de mandat homologué pour prendre soin de sa mère atteinte de
la maladie d'Alzheimer. Elle souhaitait obtenir des renseignements sur une
réclamation de Revenu Québec d'environ 800 $ qu'avait reçu sa mère.
Jusqu'alors, elle n'avait pas réussi à obtenir l'information qui lui était
nécessaire. Elle avait même échoué à négocier une entente de paiement.
La mesure d'assistance devrait
permettre au proche désigné par la personne souhaitant être assistée d'obtenir
l'information nécessaire pour l'aider.
Je recommande donc que le projet
de loi soit modifié afin de préciser que nul ne puisse refuser à cet assistant
au majeur, avec le consentement de la personne assistée, la communication d'un
renseignement ou l'accès à toute information requise dans le cadre de cette
assistance.
Le projet de loi prévoit par
ailleurs que l'assistant ne puisse agir lorsqu'il se trouve dans une situation
de conflit entre son intérêt personnel et celui du majeur assisté. Je
recommande que le projet de loi oblige l'assistant à dénoncer à la personne qu'il
assiste et au directeur de la protection des personnes vulnérables toute
situation où il peut se trouver en conflits d'intérêts réels ou potentiels.
Enfin, le Protecteur du citoyen est
préoccupé eu égard aux délais requis pour compléter les étapes de la
reconnaissance d'un assistant au majeur. Les ressources nécessaires devront
être mises en place au directeur de la protection des personnes vulnérables
pour permettre la reconnaissance des assistants dans des délais raisonnables.
Par ailleurs, considérant la
nouveauté et l'ampleur des modifications proposées par le projet de loi, je
recommande que le directeur de la protection des personnes vulnérables ait un
rôle d'accompagnement et d'information pour les personnes qui le requiert dans
le cadre de leurs démarches pour initier l'ouverture d'une tutelle ou une
demande de représentation temporaire.
En conclusion, le Protecteur du citoyen
estime que le projet de loi n° 18 constitue un pas
dans la bonne direction vers l'atteinte de l'équilibre délicat entre la
protection des personnes et le respect de leur autonomie. La mise en place de
la réforme proposée nécessitera une grande vigilance pour assurer une juste
réponse aux personnes, dont la situation, loin d'être nécessairement binaire,
apte ou inapte, peut se situer quelque part entre ces deux pôles. Autant dire
que répondre aux besoins de chacun et de chacune, à l'intérieur des balises
légales, requiert à la fois souplesse et rigueur. Le défi est de taille, de
plus en plus d'actualité dans une société qui prend de l'âge et profondément
humain. Je vous remercie de votre attention.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci à vous pour votre exposé. Nous allons débuter ensemble la période
d'échange avec les membres de la commission, en commençant avec M. le ministre
pour le bloc d'échange du parti formant le gouvernement, avec vous.
M. Lacombe : Merci, Mme la
Présidente. Merci à vous tous d'être ici aujourd'hui. Évidemment, on a écouté
avec beaucoup d'attention vos commentaires, vos recommandations, et là j'ai
plein de questions. Donc, je vais essayer de faire ça vite pour qu'on puisse
couvrir le plus de terrain possible.
D'abord...
M. Lacombe : ...merci, Mme la
Présidente. Merci à vous tous d'être ici aujourd'hui. Évidemment, on a écouté
avec beaucoup d'attention vos commentaires, vos recommandations, et là j'ai
plein de questions. Donc, je vais essayer de faire ça vite pour qu'on puisse
couvrir le plus de terrain possible.
D'abord, vous en avez parlé, c'est à la
page 5 de votre mémoire, parlons de surveillance, des mesures de surveillance
du représentant temporaire. Vous recommandez, donc, vous venez de le
mentionner, que les règles relatives aux mesures de surveillance de la tutelle
s'appliquent au représentant temporaire avec peut-être des adaptations en
fonction de l'acte visé. Pourquoi vous croyez qu'il devrait y avoir cette
mesure de surveillance, alors que, d'une certaine façon... cette mesure de reddition
de comptes, parce que, d'une certaine façon, le juge, lorsqu'il a un doute ou
lorsqu'il y a une attention ou une information qui est portée à son attention,
peut décider par lui-même de dire : Bien, à la suite de la transaction,
par exemple, à la suite de la vente de la maison pour laquelle vous allez être
représenté temporairement, bien, je veux avoir une reddition de comptes, je
veux voir tel ou tel document? D'autant plus que le curateur lui-même, par
exemple, serait notifié, lorsqu'il y aurait une telle demande, il pourrait
lui-même aller faire des représentations. Et là je parlais comme si c'était
déjà adopté, mais évidemment, c'est hypothétique. Donc, il y aurait déjà cette
possibilité pour le juge de demander une reddition de comptes, et le curateur
aurait lui-même la possibilité de faire une revendication. Donc, pourquoi faire
cette recommandation-là?
Mme Rinfret (Marie) :
Écoutez, et à cet égard-là, on considère, d'abord, un, éviter de judiciariser
les dossiers et de responsabiliser le représentant temporaire à devoir rendre
compte, faire une reddition de comptes, tant à la personne qu'il représente à
l'égard de l'acte qui avait été déterminé par le tribunal et également au
directeur de la protection des personnes vulnérables. Ça nous apparaît
essentiel, d'autant plus que l'article 297.7 du projet de loi... bien, en fait,
ce n'est pas... vous me comprenez, là, l'article 297 qu'on introduit par le
projet de loi, réfère aux règles relatives à la charge tutélaire et au
remplacement d'un tuteur au mineur. On importe ces règles-là à la
représentation temporaire du majeur inapte.
Alors, nous, on se dit : Ce serait
essentiel que le représentant temporaire doive également être assujetti aux
règles sur la surveillance, qui sont prévues également au Code civil. Et,
conséquemment, ça permettrait, sans avoir à judiciariser, sans avoir à
retourner auprès d'un juge pour déposer une reddition de comptes, de le faire
administrativement et d'avoir cette responsabilité-là inhérente en vertu de la
loi.
M. Lacombe : On en prend bonne
note.
Mme Rinfret (Marie) : Merci.
M. Lacombe : Page 4 de votre
mémoire, vous recommandez que le projet de loi précise les principaux critères,
vous l'avez aussi mentionné, que le tribunal devra prendre en compte dans
l'évaluation des besoins de représentation au moment d'établir les mesures.
Selon l'article 270 du Code civil, le besoin de représentation, et c'est toute
la notion du rapport psychosocial... Donc, par exemple, dans le rapport
psychosocial, on pourrait retrouver la durée, justement, le... bien :
isolement du majeur, la durée prévisible de son inaptitude, la nature ou l'état
de ses affaires, ce que vous... essentiellement, de mémoire, ce que vous avez
mentionné tantôt. Donc, puisque ce sera déjà inclus... ce serait déjà inclus
dans le rapport psychosocial, ce que je comprends, c'est que, pour vous, ce
n'est pas suffisant, ça devrait être écrit tel quel.
• (16 heures) •
Mme Rinfret (Marie) : En
fait, ce qu'on souhaite, c'est qu'il y ait des repères communs pour l'ensemble
des intervenants qui devront... parce que chacun intervient à un moment x de
l'évaluation de la personne, et ce serait également essentiel, selon nous, que
le tribunal tienne compte de ces facteurs au moment où il doit déterminer sur
mesure dans quelles circonstances la personne pourra exercer ses droits civils
ou dans quelles circonstances elle devra être représentée par son tuteur. Et, à
ce titre-là, ça nous importe que l'ensemble des intervenants, donc pas juste
lors de l'évaluation psychosociale, pas juste, également, lorsque c'est le
directeur général d'un établissement qui fait un signalement, qui doit, lui,
s'en tenir à ces critères-là, donc que ce...
16 h (version non révisée)
Mme Rinfret (Marie) : ...Et, à
ce titre-là, ça nous importe que l'ensemble des intervenants, donc pas juste
lors de l'évaluation psychosociale, pas juste, également, lorsque c'est le
directeur général d'un établissement qui fait un signalement, qui doit, lui,
s'en tenir à ces critères-là, donc que ce soit une trame commune. Puis... Bon,
quand on vous énumérait les facteurs qu'on propose, bien, ma foi, il faut également
que ces facteurs-là collent à la réalité des personnes visées par la demande de
tutelle. Donc, ils ne doivent ni être limitatifs ni être exhaustifs, mais ce
doit, selon nous, être des éléments communs que l'ensemble des intervenants au
dossier doivent prendre en compte.
M. Lacombe : Pas seulement le
travailleur social, donc, dans l'établissement de son rapport?
Mme Rinfret (Marie) : Exactement.
Et ça, ça devrait être vrai, selon nous, tant pour l'ouverture de la tutelle
que pour des modifications par la suite. On le sait, hein, avec les
dispositions qui sont prévues par le projet de loi, la personne qui a été
déclarée inapte, qui a besoin de représentation dans l'exercice de ses droits
civils peut, elle aussi, demander que les conditions soient assouplies ou
changées, modifiées. Et, à ce titre-là, de pouvoir s'asseoir également sur des
critères uniformes communs. Je n'aime pas le mot «uniforme» parce qu'on n'est
pas dans l'uniformité ici. C'est vraiment une appréciation commune, qui, selon
nous, doit être faite et partagée par l'ensemble des intervenants dans un
dossier.
M. Lacombe : D'accord. Et puis
dernière question pour moi, je vais laisser la place à un collègue après, c'est
à la page 6 de votre mémoire, donc, au sujet des renseignements, la communication
des renseignements confidentiels. Donc, vous venez de le dire, là, vous
aimeriez qu'on ajoute dans le texte que nul ne pourrait refuser la transmission
des renseignements à la personne qui est désignée comme étant l'assistant dans
le cadre de son assistance. Je veux juste préciser avec vous, à 297.1, on dit
déjà que l'assistant agit comme intermédiaire entre le majeur assisté et tout
tiers, et que le tiers ne peut refuser que l'assistant agisse à ce titre. Donc,
je comprends, encore une fois, que c'est peut-être... ça répond partiellement à
ce que vous voulez. Vous voulez qu'on aille plus loin?
Mme Rinfret (Marie) : Oui.
Bien simplement, le fait qu'un tiers ne puisse refuser que l'assistant agisse à
titre d'assistant, ça n'empêche pas un organisme public, par exemple, de dire à
cette personne-là : Bien, en vertu de la loi, par ailleurs, je ne peux pas
te donner tel document. Ce qui fait que, bien, ça n'aide pas l'assistant ni
l'assisté dans des circonstances comme celle-là.
M. Lacombe : Et on se
demandait, est-ce qu'il y a une notion de professionnel là-dedans ou vous ne
touchez pas à ça?
Mme Rinfret (Marie) :
Écoutez, on n'en était pas là. Ce qu'on... vraiment, l'exemple qu'on a, chez
nous, et les demandes, les plaintes que nous recevons, c'est souvent lié à des
documents détenus par les organismes publics qui... bien, qui, en vertu des
lois actuelles, hein, c'est... sont tenus de refuser l'accès à ces
documents-là. Donc, je me dis, si, vraiment, on veut aider l'assistant au majeur
à administrer ses biens, bien, c'est de boucler la boucle et de lui permettre
d'avoir accès aux documents dont il a besoin pour soutenir, pour assister le
majeur.
M. Lacombe : On a pris note de
ça aussi.
Mme Rinfret (Marie) : Merci.
M. Lacombe : C'est tout pour
moi, Mme la Présidente. Je sais que la députée de Bellechasse...
La Présidente (Mme Chassé) :
Je cède la parole à la députée de Bellechasse. C'est très bien, merci, M. le
ministre. Mme la députée, vous avez 7 min 30 s.
Mme Lachance : Merci, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Chassé) :
Allez-y.
Mme Lachance : Merci, Mme
Rinfret, merci à vos acolytes. Merci d'être là. J'ai trois petites questions
quand même assez brèves. La première, c'est que j'aimerais savoir, dans les
mandats de protection, suite à l'homologation, l'inventaire obligatoire et la
reddition de comptes, quelle est votre opinion?
Mme Rinfret (Marie) :
Écoutez, en ce qui nous concerne, et vous le savez, mon mandat se situe à
l'égard des organismes publics. Donc, quand on entre dans la sphère privée,
malheureusement, je n'ai pas compétence. Donc, je réserverai des opinions qui
pourraient vous être faites par les personnes les mieux placées pour les faire.
Mme Lachance : D'accord. Dans
la suite, et dans le même ordre d'idée, pensez-vous que les propositions
d'abandon du régime de curatelle auront un impact sur votre travail en tant que
Protecteur du citoyen?
Mme Rinfret (Marie) :
Écoutez, et là, vous me permettez de souligner à...
Mme Rinfret (Marie) :
...pourraient vous être faites par les personnes les mieux placées pour les
faire.
Mme Lachance : Alors, dans la
suite et dans le même ordre d'idées, pensez-vous que les propositions d'abandon
du régime de curatelle auront un impact sur votre travail en tant que
Protecteur du citoyen?
Mme Rinfret (Marie) :
Écoutez... Et là vous me permettez de souligner à nouveau que, pour nous, de
simplifier la curatelle, la tutelle, la représentation temporaire aux majeurs
inaptes, donc de regrouper la curatelle et la tutelle au sein d'une forme de
représentation, c'est une avancée. Toutefois, et je le disais d'entrée de
jeu — on le dit dans notre mémoire, je le disais dans mon allocution
tout à l'heure — il y a là un défi de taille, il y a là un grand défi
de communication, un défi d'accompagnement, de guider les personnes qui, à un
moment de leur vie, demandent à ce qu'il y ait une personne pour les assister
alors qu'elles sont encore aptes, et qu'ensuite, bon, leur état, pour une
raison ou pour une autre, se dégrade, bien, il faudra que le directeur de la
protection des personnes vulnérables agisse avec beaucoup de vigilance pour
être capable d'accompagner les personnes qui auraient été désignées comme
assistants aux majeurs pour, là, venir dire : Bien là, votre personne ne
peut plus uniquement être assistée, elle a besoin d'être représentée, et, bien,
ça pourrait être par le moyen de la représentation temporaire, ou encore :
Son état s'est tellement dégradé que ça devrait être la tutelle. Et pour ça, il
devra y avoir des outils, il devra y avoir des guides, il devra y avoir de
l'accompagnement pour les personnes, les proches aidants, notamment, les
personnes donc qui sont désignées comme assistants aux majeurs et les personnes
également visées par les mesures.
Mme Lachance : Donc, si j'ai
bien compris, vous nous dites qu'il y a un très grand enjeu de communication...
Mme Rinfret (Marie) : Oui,
d'accessibilité.
Mme Lachance :
...d'accompagnement et puis d'outils disponibles pour accompagner les gens.
Mais, dans votre expérience, avec le type de plaintes que vous recevez habituellement,
est-ce que vous pensez que ça va augmenter ou diminuer, à la lumière de...
Mme Rinfret (Marie) : Votre
question est excellente. Un constat qu'on fait généralement, c'est que,
lorsqu'il y a un grand changement — et appelons-le comme
ça — une réforme, la gestion de la transition est aussi importante
que l'adoption du projet de loi comme tel, ce qui fait qu'au moment où le
projet de loi sera adopté, dans l'hypothèse où il l'est, bien sûr, il faudra
déjà avoir prévu tous les éléments de transition pour bien soutenir les
personnes qui auront besoin de ces outils pour assister les personnes qui en
auront besoin, et ici, on parle souvent des personnes qui sont les plus
vulnérables de notre société, de sorte qu'il faut être proactifs par rapport à
eux si on veut vraiment que, par exemple, l'assistance aux majeurs atteigne son
objectif d'aller chercher le plus possible les gens qui actuellement, parce
qu'ils n'ont pas les sous, parce que de s'adresser aux tribunaux, ça devient
quelque chose qui s'ajoute au fait d'accompagner leurs parents... Donc, il y a
là, quand on parle de défi de taille... Et c'est vrai dans n'importe quelle
réforme, je vous dirais, là, mais ici, il faut bien être conscient qu'on parle
d'une réforme qui va toucher les personnes les plus vulnérables de notre
société. Donc, on doit vraiment mettre en place tout ce qu'il faut pour assurer
la transition et bien, bien, bien accompagner les personnes dans ça.
Mme Lachance : Donc, je
comprends l'importance et je tiens à vous rassurer, à cet effet-là, entre
l'adoption, c'est le lieu et la mise en application, on prévoit un temps de 18
à 24 mois pour préparer tout ça... Merci.
La Présidente (Mme Chassé) : O.K.
C'est parfait. C'est très bien. 2 min 30 s.
Mme Lachance : Si vous
permettez, Mme la Présidente, j'aurais terminé.
La Présidente (Mme Chassé) :
Bon. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le ministre, vous désirez
reprendre la parole? Absolument. Allez-y. C'est votre prérogative.
M. Lacombe : J'ai senti un peu
d'inquiétude.
La Présidente (Mme Chassé) : Absolument
aucune inquiétude, vraiment, pas de stress du tout.
M. Lacombe : Bien, j'avais une
autre question parce qu'évidemment on veut bien faire les choses. Vous dites
que vous êtes préoccupés, c'est à la page 6 de votre mémoire, vous dites qu'au
point 21 : «Le Protecteur du citoyen est préoccupé eu égard aux délais
requis pour compléter les étapes de la reconnaissance d'un assistant au majeur.
Les ressources nécessaires devront être mises en place au directeur de la
protection des personnes vulnérables pour permettre la reconnaissance des
assistants dans des délais raisonnables.»
Et là je comprends qu'on peut interpréter
ça de plein de façons, mais disons qu'on veut éviter de se retrouver dans votre
rapport. Qu'est-ce que vous voulez dire?
• (16 h 10) •
Des voix
: Ha, ha, ha!
Mme Rinfret (Marie) : C'est
un excellent réflexe...
M. Lacombe : ...majeur, les ressources
nécessaires devront être mises en place au directeur de la protection des
personnes vulnérables pour permettre la reconnaissance des assistants dans des
délais raisonnables.» Et là je comprends qu'on peut interpréter ça de plein de
façons, mais disons qu'on veut éviter de se retrouver dans votre rapport...
Des voix
: Ha, ha, ha!
M. Lacombe : Qu'est-ce que
vous voulez dire?
Mme Rinfret (Marie) : C'est
un excellent réflexe.
Des voix
: Ha, ha, ha!
M. Lacombe : Je pense que
c'est bien de savoir qu'est-ce que vous entendez par «délais raisonnables».
J'imagine que ça dépend de beaucoup de choses.
Mme Rinfret (Marie) : Vous
avez raison, et c'est d'ailleurs pour ça qu'on a inscrit «délais raisonnables»,
parce que, déjà, dans la loi, il y a des délais qui sont prévus, hein, des avis
de 30 jours, il y en a deux, me semble-t-il. Déjà là, on est dans une
perspective de plus de deux mois avant de déposer une demande et de se voir
reconnu comme assistant au majeur. De sorte qu'il faudra vraiment agir avec beaucoup
de célérité, du côté du directeur de la protection des personnes vulnérables,
pour permettre aux gens qui demandent d'être assistés de recevoir une réponse rapidement,
pour s'assurer qu'effectivement, là, leur demande est acceptée et que
l'assistant, lui, au majeur, obtienne l'information, obtienne la formation.
Parce que ça aussi, ça va devoir faire partie de l'accompagnement quand on
parle d'accompagner les personnes qui transigent autour...
La Présidente (Mme Chassé) :
En moins de 30 secondes.
Mme Rinfret (Marie) :
Excusez-moi.
La Présidente (Mme Chassé) :
Allez-y.
Mme Rinfret (Marie) : Donc,
c'est tout ça.
La Présidente (Mme Chassé) :
Bon. Vous aviez 30 secondes. Je vous remercie. Je cède maintenant la
parole à la députée de Westmount—Saint-Louis pour son bloc d'échange. Allez-y.
Mme Maccarone : Merci, Mme la
Présidente. Juste pour faire un peu de pouce sur votre paragraphe 13°, faire le
lien avec qu'est-ce que le ministre vient de dire, on parle des suivis
rigoureux, puis il y a des délais. Savez-vous s'il y a des actions qui sont
mises en place pour adresser cette problématique-là? Et sinon, est-ce qu'on
devrait être conscients de ceci dans l'adoption de ce projet de loi?
Mme Rinfret (Marie) : Écoutez,
c'est une chose qu'on porte à l'attention... à votre attention, Mmes, MM. les parlementaires,
parce qu'actuellement on reçoit des plaintes, au Protecteur du citoyen, qui
concernent le non-respect des délais de réévaluation des dossiers. Bon. Actuellement,
il y a un délai de trois ans et un délai de cinq ans, selon qu'on est en
tutelle ou en curatelle. Là, ce qu'on prévoit, c'est que le délai puisse varier
selon la personne visée par la tutelle, avec un maximum de cinq ans. Et à ce
titre-là, ce qu'on dit, c'est qu'il faut mettre en place, au directeur de la
protection des personnes vulnérables, les outils de suivi pour s'assurer qu'il
n'y a pas de dossier qui glisse entre les craques, comme on dit au Québec, et
qui se retrouve sans évaluation, sans réévaluation.
Et ce que je dois dire, cependant, pour
répondre complètement à votre question, c'est qu'à ce titre-là on a une
excellente collaboration du côté du Curateur public, actuellement, qui, de
fait, est tout à fait conscient de ces enjeux-là... et mettent en place les
processus pour s'assurer de respecter le délai de réévaluation des dossiers.
Mme Maccarone : Excellent.
Vous parlez beaucoup de la responsabilité du tuteur, la personne qui va faire
la représentation temporaire, mais je n'ai pas senti qu'on parle beaucoup des
proches aidants, ou la personne qui va être responsable là-dedans. Est-ce que
ça, c'est quelque chose qui devrait faire partie aussi de notre réflexion?
Parce qu'on sait qu'eux aussi, ils ont besoin des mesures de protection, on a
bien entendu la cause puis la demande. Alors, qu'est-ce qu'on peut faire pour
bonifier qu'est-ce que vous avez présenté aujourd'hui pour amener des mesures
de protection envers cette population?
Mme Rinfret (Marie) : Écoutez,
les... quand on parle... pour nous, quand on réfère au proche aidant,
l'ensemble du projet de loi n° 18, les nouvelles
mesures qui sont proposées, devraient faire écho aux besoins qu'on entend de
leur part. C'est certain, selon nous, que la mesure d'assistance au majeur
devrait faciliter les choses, d'où l'importance de faire connaître. Et ça
aussi, c'est une recommandation que l'on fait, de faire la promotion de cette
nouvelle mesure pour permettre justement que ce soit les proches aidants, mais
aussi les personnes qui ont besoin d'aide... de faire cette demande-là, que ce
soit traité rapidement. Dans le fond, les mots-clés, dans ça, c'est la
souplesse...
Mme Rinfret (Marie) :
...mesure, pour permettre justement, que ce soit les proches aidants, mais
aussi les personnes qui ont besoin d'aide, de faire cette demande-là, que ce
soit traité rapidement. Dans le fond, les mots-clés dans ça, c'est la
souplesse, l'efficacité, l'accessibilité Et en ce sens-là, je pense... en tout
cas, on le pense sincèrement. Ça devrait répondre à un besoin qu'on entend. Le
besoin qu'on entend aussi souvent, et c'est pour ça qu'on en fait une recommandation,
c'est le fait que les personnes qui... les proches aidants, les personnes qui
soutiennent celles qui ont besoin d'aide se butent au refus d'organismes
publics de leur donner les outils dont ils ont besoin pour aider la personne
qui a besoin d'aide.
Et là, je réfère uniquement... je vais
vous donner seulement un exemple, puis je pense que vous allez tout le monde
comprendre. La déclaration de revenus qui doit être faite, l'ensemble des
documents qu'on a besoin pour demander une rente d'invalidité. Ce sont des
formalités qui devraient demeurer des formalités simples, accessibles et qui
actuellement peuvent s'avérer être une montagne pour les proches aidants, alors
qu'on devrait leur faciliter les choses. C'est pour ça qu'on vous demande
d'ajouter au projet de loi un article qui va leur permettre d'obtenir tous les
documents nécessaires avec le consentement de l'assisté, bien sûr, mais tous
les documents nécessaires qui vont leur permettre justement, à titre
d'assistant, de bien conseiller la personne assistée afin que les décisions
puissent être prises correctement.
Mme Maccarone : Vous
identifiez dans votre recommandation 1 les principaux critères, alors je
réfère à votre paragraphe 9 au vous disez les facteurs qui devraient
guider l'analyse des professionnels de la santé, ultimement celles du tribunaux
ne soient pas davantage précisées au projet de loi. Comme quoi?
Mme Rinfret (Marie) :
Écoutez, on réfère et ce sont les exemples que l'on donne. Est-ce que... puis
ça, c'est un exemple, là, bien sûr. Est-ce que la personne est isolée ou elle
est bien entourée? Et quand on réfère au fait d'être bien entourée, ce n'est
pas juste d'être entourée, c'est d'avoir des personnes compétentes pour
administrer leurs biens. Parce que dans les plaintes que nous recevons, il y en
a plusieurs qui réfèrent à la gestion du patrimoine des personnes.
Donc, on identifie des gens qui devraient
nous aider et qui malheureusement soit se retrouvent en conflit d'intérêts ou
encore ne savant pas trop par où passer, de sorte que ce ne sont pas les bonnes
personnes pour nous soutenir. Ce qui fait que dans les exemples qu'on donne,
qui, encore une fois je le répète, ne sont pas des critères qui doivent être
limitatifs ou exhaustifs. Je pense que le principal, ça devrait toujours être dans
l'intérêt du majeur inapte, hein, de s'assurer que toutes les décisions qui
sont prises, les facteurs qui sont considérés le soient à terme en fonction de
la personne qui a besoin de représentation.
Parce qu'ici, avec la réforme, on sort de
l'appréciation binaire d'une personne apte ou inapte. On pousse... on met
l'accent sur est-ce qu'une personne inapte a besoin de représentation dans
l'exercice de ses droits civils? Et si oui, pour l'exercice de quels droits
civils? Et conséquemment, que la personne qui soit désignée comme tuteur agisse
dans cette continuité-là, donc permette au majeur inapte d'exercer ses droits
civils par ailleurs pour lesquels il a été... il est toujours compétent pour le
faire.
Donc, vraiment c'est... Le choix des
personnes en fonction des critères qui doivent être pris en compte, pas
uniquement — je le rappelle — par... dans le cadre de
l'évaluation psychosociale, mais également par l'évaluation médicale et aussi,
et j'ai presque envie de dire surtout, par le tribunal qui, lui, a comme
responsabilité de déterminer la tutelle sur mesure pour la personne qu'il a
devant lui. Bien, qu'il a devant lui ou qu'il a, tu sais, dont il est chargé
d'évaluer le besoin de représentation.
• (16 h 20) •
Mme Maccarone : Merci, Mme la
Présidente, je pense que...
La Présidente (Mme Chassé) :
Est-ce que la députée de Notre-Dame-de-Grâce désire prendre la parole? Vous
avez deux minutes. Allez-y.
Mme Weil
: Cette
question...
Mme Rinfret (Marie) : ...la
tutelle sur mesure pour la personne qu'il a devant lui... bien, qu'il a devant
lui ou qu'il a, tu sais, dont il est chargé d'évaluer le besoin de représentation.
Mme Maccarone : Merci, Mme la
Présidente. Je passe...
La Présidente (Mme Chassé) : Est-ce
que la députée de Notre-Dame-de-Grâce désire prendre la parole?
Mme Weil
: Oui.
La Présidente (Mme Chassé) :
Vous avez deux minutes. Allez-y.
Mme Weil
: ...cette question.
D'abord, j'aimerais vraiment vous remercier pour votre mémoire. Avec votre
expérience, avec votre vision de l'intérieur, des plaintes que vous recevez, on
voit que la tâche est énorme. Et, dans ce que vous dites, il y a des échos de
ce que d'autres ont dit, et je suis contente d'entendre qu'il y a une bonne collaboration
avec le Curateur public parce qu'il y a beaucoup de travail à faire. Et on
comprend que le gouvernement va se donner le temps de s'assurer que les choses
seront mises en place. Moi, je n'avais pas saisi que ce serait comme jusqu'à
peut-être 24 mois.
Donc, j'irais sur peut-être votre point
13. Vous, vous recevez beaucoup de plaintes par rapport aux délais concernant
la réévaluation du régime de protection, déjà, donc, un drapeau rouge, alors
que, maintenant, ça va se faire cas par cas. Est-ce que vous... Donc jusqu'à un
maximum de cinq ans. Est-ce que vous avez une recommandation? Parce que c'est
bien de dire qu'ils devront être vigilants par rapport à ça, mais dans un
système aussi complexe, si on n'a pas, comment dire, un déclencheur qui fait en
sorte que, woup! là c'est trop tard... Est-ce que, de votre expérience, vous
êtes capables de peut-être y réfléchir, si vous n'avez pas aujourd'hui une
solution à ça? Si vous n'avez pas de recommandation, c'est que vous n'aviez pas
nécessairement une recommandation précise, mais...
La Présidente (Mme Chassé) :
Il reste une minute...
Mme Rinfret (Marie) : Écoutez,
votre question est excellente. On s'est posé la question. Le système comme le
propose la réforme, il est très bien. Je vous dirais, pour nous, la limite
maximale de cinq ans se doit d'être une limite maximale parce que c'est quelque
chose de priver une personne de l'exercice de ses droits civils.
Donc, est-ce que le délai de cinq
devrait... maximal de cinq ans devrait être une limite maximale de trois ans? À
cet égard-là, on se fie sur la discrétion du tribunal qui aura, avec
l'éclairage de l'évaluation médicale et psychosociale, à déterminer une limite
pour la réévaluation. Ce qui fait que, là, on arrive vraiment dans l'ordre
administratif...
La Présidente (Mme Chassé) :
En terminant.
Mme Rinfret (Marie) : ...et,
à cet égard-là, ce qu'on demande, c'est d'être extrêmement vigilant et de
mettre en place des outils du côté du directeur de la protection des personnes
vulnérables pour...
La Présidente (Mme Chassé) :
Ça conclut.
Mme Rinfret (Marie) :
...assurer le suivi... Excusez. Donc, assurer le suivi.
La Présidente (Mme Chassé) :
Ça va. Je vous remercie pour votre contribution aux travaux de la commission.
Je suspends momentanément les travaux afin
de permettre à la prochaine personne de prendre place.
(Suspension de la séance à 16 h 23)
(Reprise à 16 h 25)
La Présidente (Mme Chassé) :
Je souhaite maintenant la bienvenue à Me Dominique Goubau. Je vous rappelle que
vous disposez de 10 minutes pour faire votre exposé, et, à une minute de la
fin, je vais vous faire un signe de la main ou un signe vocal pour vous inviter
à conclure. Débutez, tout d'abord, en vous présentant de nouveau puis commencez
votre exposé.
M. Goubau (Dominique) : Merci.
Mme la Présidente, M. le ministre...
La Présidente (Mme Chassé) :
...je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour faire votre exposé,
et, à une minute de la fin, je vais vous faire un signe de la main ou un signe
vocal pour vous inviter à conclure. Débutez, tout d'abord, en vous présentant
de nouveau puis commencez votre exposé.
M. Goubau (Dominique) :
Merci, Mme la Présidente, M. le ministre, distingués membres de la commission,
M. le Curateur public. C'est un honneur pour moi d'être ici, c'est un
privilège, et je vous remercie de me l'avoir accordé.
Je vais prendre juste quelques secondes
pour me présenter, pour dire qui je suis, comment ça se fait que je viens vous
voir pour parler et participer à vos travaux sur le projet de loi n° 18. J'enseigne le droit des personnes depuis plus de 30
ans, depuis 33 ans exactement, à l'Université Laval. J'ai publié beaucoup dans
ce domaine. J'ai notamment écrit un traité sur la question, qui est réédité
depuis 25 ans maintenant et qui sert d'ouvrage de référence pour les tribunaux
et les avocats dans la province de Québec.
Donc, j'ai un intérêt personnel,
professionnel pour la matière et je vais vous dire en deux mots la raison aussi
pour laquelle j'ai demandé à... enfin, j'ai déposé un mémoire et... que j'ai
rédigé cet été, et que j'ai demandé à pouvoir vous rencontrer. Je vous remercie
d'avoir accepté ma demande.
La première raison, et je ne sais pas si
ça a déjà été soulevé depuis vos travaux d'hier, mais, depuis quelques années
maintenant au Québec, on entend des juristes bien avisés qui soulignent, depuis
quelques années, depuis l'entrée en vigueur... enfin, depuis d'adoption par le
Canada de la convention internationale sur la protection des droits des
personnes handicapées, le fait que le droit du Québec serait en porte-à-faux
par rapport aux normes internationales. Je ne partage pas du tout cet avis et
je pense que cela ne constitue... ce soi-disant porte-à-faux ne devrait pas
être le fondement d'une réforme du droit québécois actuel, et je m'en
expliquerai dans quelques instants.
J'entends également l'argument
suivant : Ça fait 30 ans qu'on a fait la réforme — j'y étais, de
la réforme, en 1989, j'enseignais déjà cette matière-là, et ça fait 30
ans — le système québécois était à l'avant-garde, il ne l'est plus,
la société a changé, il faut donc changer le système. Là encore, je ne suis pas
d'accord. Je pense que le droit québécois est encore à l'avant-garde, je m'en
expliquerai.
On parle aussi difficultés sur le terrain.
Je pense que, depuis hier, vous entendez parler des difficultés sur le terrain
lorsqu'il s'agit des régimes de protection au Québec. Par exemple, on entend
souvent dire qu'en matière de consentement aux soins médicaux il arrive
souvent — et, selon certains témoins, très souvent — que,
par le simple fait qu'une personne est sous régime de protection, que ce soit
la tutelle et certainement la curatelle, on ne s'intéresse même pas de savoir
si elle est apte à consentir ou non à des soins médicaux ou les refuser.
Et c'est un vrai problème, mais ce n'est
pas un problème de norme, c'est un problème de pratique sur le terrain. La loi
est très, très claire. Même s'il y a un régime de protection de tutelle ou de
curatelle, il faut vérifier au cas par cas l'aptitude ou l'inaptitude de la
personne et si, même si elle est sous curatelle, elle est apte à consentir ou à
refuser les soins, et il faut respecter cette décision, comme si elle était
apte et qu'elle n'était pas sous régime.
Alors, si cette règle n'est pas respectée,
c'est un vrai problème. Les médecins qui ne respectent pas cette règle-là
commettent une faute civile, pour ne pas dire plus, et seraient susceptibles
d'être poursuivis en responsabilité civile. Il s'agit d'une atteinte à
l'intégrité physique. La Cour d'appel et la Cour suprême sont très claires sur
le fait que, lorsqu'il y a un régime de protection, cela ne constitue jamais
une présomption d'inaptitude.
Donc, ce n'est pas la norme qui est la
fautive ici. La norme est bonne. Elle prévoit que la... qu'il n'y a pas de
présomption d'inaptitude, mais elle est mal appliquée. Elle n'est pas respectée
dans la pratique. Il ne faut pas changer la norme, il ne faut pas changer
l'article 15 du Code civil du Québec, il faut modifier les mentalités.
Y a-t-il encore des relents de
paternalisme médical? Sans doute. En tout cas, certains juges le soulignaient
encore. Y a-t-il une certaine paresse professionnelle à se contenter du régime
de protection et à ne plus vérifier l'aptitude ou l'inaptitude de la personne?
Sans doute. Ce n'est pas un problème de norme, c'est un problème de pratique.
Un autre exemple, et je pense que vous...
on vient de l'entendre tout à l'heure. J'étais dans la salle et j'ai entendu
les deux précédents intervenants. On sait que la tutelle est donc un régime
adaptable, mais on sait aussi, on l'a entendu des précédents témoins, que
souvent ça ne se fait pas, et on prend, au fond, le régime par défaut plutôt
que d'y aller dans le détail. Bien, là encore, ce n'est pas un problème des
normes. Les normes prévoient dans la loi que c'est un système adaptable.
• (16 h 30) •
Et je vais plus loin que certains témoins
ici. Le juge n'a pas l'option de déterminer le champ de capacité des personnes
dans le cadre de la tutelle, il a l'obligation. Il ne peut prononcer un régime
de protection et décrire les pouvoirs de la personne que dans la mesure où le
besoin existe, dans la mesure de l'inaptitude de la personne.
Donc, ces règles existent déjà, mais il y
a clairement un problème d'application des normes actuelles. Mon propos est le
suivant...
16 h 30 (version non révisée)
M. Goubau (Dominique) :
...l'obligation. Il ne peut prononcer un régime de protection et décrire les
pouvoirs de la personne que dans la mesure où le besoin existe, dans la mesure
de l'inaptitude de la personne. Donc, ces règles existent déjà. Et... Mais il y
a clairement un problème d'application des normes actuelles.
Mon propos est le suivant, s'il fallait le
résumer. Les objectifs du projet de loi n° 18, qui sont les mêmes que ceux
de la convention, sont des objectifs louables, mais je pense que les mesures
qui sont proposées sont beaucoup trop radicales, qu'il n'est pas nécessaire de
bouleverser des régimes de protection. Il suffit, à mon avis, de modifier
quelques dispositions d'un code pour satisfaire à l'essentiel des objectifs de
la loi.
Je... évidemment, dans mon exposé, de même
que dans mon mémoire, je ne m'arrête qu'à ce qui me paraît problématique. Il y
a bien des points dans la loi qui sont bien et que j'applaudis, j'en ai cité
quelques-uns. Mais sur le fond même, celui de l'abolition des régimes, d'où
vient cette idée? La convention internationale sur la protection des personnes
handicapées prévoit que les objectifs de la convention, c'est de prévenir les
abus, de ne pas discriminer, de respecter les droits des personnes, surtout, de
respecter la volonté et les préférences à chaque fois que c'est possible et de
protéger des personnes de façon proportionnée. Ce sont les objectifs du projet
de loi. Ce que je viens vous dire ici, c'est que ce sont les fondements
éthiques de la loi actuelle. Ce sont exactement les mêmes.
Donc, sur le plan des objectifs, le projet
de loi fondamentalement ne change rien. Ces objectifs existent déjà. Ce sont
déjà les valeurs fondamentales du système actuel. Or, selon certains, notamment
des hauts fonctionnaires à l'ONU, les systèmes de représentation, comme notre
curatelle ou notre tutelle sont... ou de décisions substituées, comme on les
appelle, sont fondées sur l'idée que la protection des personnes, dans un cadre
de représentation, tutelle, curatelle, implique nécessairement la privation des
droits de participation. Or, cela ne s'applique pas au Québec.
Depuis 1989, nous avons déjà ces principes
dans notre loi. Nous sommes précurseurs, nous avions déjà dans notre système
ces principes avant même la convention. Je peux vous dire aussi qu'il y a
plusieurs pays qui à l'époque ont regardé avec beaucoup d'intérêt notre système
et qui encore aujourd'hui imitent notre système. La Belgique, en 2013, a
modifié ses régimes pour les rendre conformes à la convention internationale
et, ce faisant, elle a appliqué des principes que nous avons dans notre
loi : mandat de protection, un régime de tutelle à la carte, etc., qui
sont les principes que nous avons déjà.
Alors, depuis 1989, et je pense que ça n'a
pas changé, le Québec est à l'avant-garde dans l'organisation de ses régimes de
protection. Il... et je pense qu'il est conforme. Le mandat de protection, nous
étions précurseurs là-dedans. Bien sûr, il y a certains points qui peuvent être
améliorés.
Mais la tutelle... alors c'est le premier
grand point ici, la tutelle devrait être abolie, la curatelle devrait être
abolie, le conseiller judiciaire devrait être aboli, au profit d'une tutelle
unique, parce qu'on ne doit pas seulement prévoir la représentation, il faut
aussi insister sur le terme d'assistance des... et la possibilité d'assistance.
Mais on oublie souvent que c'est déjà le cas aujourd'hui.
Si vous regardez l'article qui est...
l'article 288 du Code civil actuel, cette disposition du code prévoit
expressément que le tribunal qui ouvre un régime de tutelle doit déterminer
dans son jugement, selon le niveau d'inaptitude de la personne, les actes pour
lesquels elle doit être représentée ou les actes pour lesquels elle doit être
assistée. Par conséquent, la tutelle n'est pas qu'un régime de représentation,
c'est aussi un régime d'assistance. On a tendance à l'oublier, même les juges
semblent l'oublier. Il y a là certainement un effort d'information à faire au
sein de la magistrature et au sein du Barreau.
Le deuxième point, celui... je pense qu'il
est central dans votre projet de loi, c'est celui de la prise en considération
de la volonté et des désirs de la personne. Et ça, je pense que c'est le point
le plus important de la réforme et je pense qu'il mérite d'être souligné.
Il...L'idée est la suivante...
La Présidente (Mme Chassé) :
Il vous reste une minute à votre exposé.
M. Goubau (Dominique) :
Pardon?
La Présidente (Mme Chassé) :
Une minute.
M. Goubau (Dominique) : Une
minute.
La Présidente (Mme Chassé) :
Il vous reste une minute à votre exposé.
M. Goubau (Dominique) :
D'accord. Alors, il y a, dans le Code civil, l'article 257 et l'article 260 qui
prévoient qu'il faut informer la personne des décisions que l'on prend. La Cour
d'appel, unanime, nous rappelle à tous les deux mois que cela signifie non
seulement qu'il faut informer, mais qu'il faut faire participer la personne,
dans le respect de son autonomie résiduelle.
Donc, ce principe, il est déjà dans notre
système juridique. Je crois que c'est une bonne idée de l'inscrire, comme le
projet de loi le fait, et je propose qu'on aille plus loin et qu'on prévoie, à
l'article 257, et surtout l'article 260, qui est un petit peu les obligations
du représentant, de déterminer plus dans le détail quelles sont les obligations
du représentant ou de l'assistant lorsqu'il s'agit de faire participer la
personne à des décisions, et certainement lorsqu'il s'agit de décisions qui
touchent aux droits fondamentaux de la personne.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci...
M. Goubau (Dominique) :
...un petit peu les obligations du représentant de déterminer plus dans le
détail quelles sont les obligations du représentant ou de l'assistant lorsqu'il
s'agit de faire participer la personne à des décisions, et certainement lorsqu'il
s'agit de décisions qui touchent aux droits fondamentaux de la personne.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci. Très aimable. Merci pour votre exposé. Je cède maintenant la parole au ministre
pour son bloc d'échange.
M. Lacombe : Merci, Mme
la Présidente. Merci d'être ici aujourd'hui. Alors, on voit que vous avez beaucoup
d'expérience. Je comprends que lorsque vous avez commencé à enseigner, je
n'étais pas né ou j'avais 1 an, là. Donc, j'ai beaucoup de respect pour
votre feuille de route. Blague à part, il y a beaucoup de choses dans ce que
vous nous amenez, surtout beaucoup de points sur lesquels vous n'êtes pas d'accord
avec ce qu'on propose. Donc, si vous permettez, je vais me concentrer peut-être
sur un ou deux points sur lesquels j'aimerais davantage échanger avec vous,
notamment sur l'assistant au majeur, parce que c'est une petite révolution.
Certains diront que ce serait une grande révolution d'avoir, et je comprends
que ce n'est pas votre avis, mais plusieurs personnes nous ont dit que, pour
eux, ça ferait toute la différence. Vous questionnez l'utilité réelle, parce
que vous dites que le majeur peut déjà avoir accès, par exemple, à une
procuration. En même temps, on comprend que la procuration, ça permet de donner
à une autre personne le pouvoir d'exercer notre droit. Quand on parle de
l'assistant, ce n'est pas du tout la même chose. Pouvez-vous peut-être nous
clarifier ou nous donner plus de détails sur votre position là-dessus.
M. Goubau (Dominique) :
Certainement. Je trouve que cette idée de l'assistance est très intéressante
et... Mais je doute qu'elle soit appliquée. D'abord la procuration, c'est une
chose, mais il n'y a pas que la procuration. Le droit commun... Si la personne
est apte, et on prend pour acquis qu'elle est apte, mais qu'elle désire une
certaine assistance, rien n'empêche selon le droit commun d'engager une
personne et dire : Tu vas m'aider. Tu vas m'assister. Moi, si j'achète une
maison, je ne connais rien dans l'immobilier, je peux demander à quelqu'un non
pas de me représenter, je ne veux pas lui donner une procuration, mais je peux
très bien en droit lui confier cette entreprise, si vous voulez, qui est de me
conseiller et de m'aider. C'est tout à fait possible. Pourquoi est-ce que
j'irais m'enregistrer dans un registre pour cela? Pourquoi est-ce que je me
soumettrais à des formalités alors que le droit commun permet de le faire de
façon très, très simple dans une entente, même pas une entente écrite.
Mais si par contre il s'agit d'une
personne qui est vulnérable, non pas au point d'être inapte au sens qu'elle
doit être représentée, mais suffisamment vulnérable pour que son entourage
trouve qu'elle devrait être assistée, on a déjà le conseiller judiciaire dans
le code. C'est vrai que c'est peu appliqué, mais ce principe existe déjà.
Alors, c'est sûr que c'est intéressant, mais est-ce que c'est... est-ce que ça
va être appliqué dans les faits? D'abord, je pense que la plupart des gens qui
veulent vraiment être assistés alors qu'ils sont aptes d'exprimer leurs
volontés, ils ne passeront pas par le système prévu par la loi. Mais ça s'est
déjà vu ailleurs.
En Saskatchewan, ils ont cela. Ils ont la
«codecision making», l'assistance. J'ai un de mes collègues à l'Université de
Saskatchewan qui a fait une étude intéressante en 2012 et qui a démontré qu'il
n'y a à peu près aucun... aucune demande d'assistance. Et je l'ai appelé, parce
que son étude date de 2012. Je l'ai appelé pour savoir si son étude était
actualisée. Il m'a dit : «Your timing is perfect», parce qu'il vient de
terminer l'actualisation. Il m'a envoyé un petit mémo parce qu'il n'a pas eu le
temps de publier ses résultats. Il m'a envoyé un mémo récemment et il
m'autorise à le déposer aujourd'hui et à vous le communiquer, dans lequel il
confirme que son étude de 2012 a été actualisée à 2018‑2019. Et il constate la
même chose. Juste pour vous donner une idée, selon son étude à lui, si on prend
les assistances, cela représente, sur une période 10 ans, à peu près huit
dossiers par année. Et si vous me permettez, sur la représentation temporaire,
où ça existe, ça existe également en Saskatchewan, deux cas par année pour la
Saskatchewan. Donc, je pense que c'est une... Ça vaut la peine, c'est peut-être
une suggestion que je pourrais faire, de regarder plus en détail ce qui s'est
fait ailleurs.
M. Lacombe : On l'a fait.
M. Goubau (Dominique) :
C'est ça.
• (16 h 40) •
M. Lacombe : On l'a fait.
Et là-dessus, peut-être qu'on ne sera pas d'accord, mais en fait on ne parle
pas du tout de la même chose. On ne parle pas du tout de la même chose parce que,
dans le cas de la Saskatchewan, le système de codécision, ce qu'il permet de
faire, c'est... Ou, en fait, la différence entre ce qu'on propose et le système
de codécision, c'est qu'en Saskatchewan, avec ce système-là, vous ne gardez pas
totalement le contrôle de vos droits. C'est-à-dire que la décision, l'autre
personne a un droit de veto. Donc, ce n'est pas exactement la même chose. Et
évidemment on a communiqué avec... Bon, là, le nom m'échappe, là, mais avec le
Public Guardian and Trustee of Saskatchewan. Et lui-même nous confirme que ce
n'est pas du tout la même chose et salue, ou en tout cas, nous dit que c'est
une excellente nouvelle parce qu'ici au Québec c'est différent et que c'est
intéressant. Donc, on ne parle pas de la...
M. Lacombe : ...mais avec le
Public Guardian and Trustee of Saskatchewan» et lui-même nous confirme que ce
n'est pas du tout la même chose et salue, ou, en tout cas, nous dit que c'est
une excellente nouvelle, parce qu'ici, au Québec, c'est différent et que c'est intéressant.
Donc, on ne parle pas de la même chose dans ce cas-là.
M. Goubau (Dominique) : Évidemment,
je ne veux pas argumenter, mais je pense que comme vous dites très bien, s'il
s'agit d'une personne qui veut garder l'entier contrôle et qui est inapte totalement,
cette personne a les outils actuellement dans le droit commun pour faire les
choses de façon beaucoup plus simple que ce que propose le projet de loi.
M. Lacombe : ...inapte,
disons. Je pense qu'on peut tasser, peut-être, l'exemple de la Saskatchewan, parce
qu'on ne parle pas du tout de la même chose, mais si on revient à l'assistant,
on parle de quelqu'un, par exemple... Je peux vous donner l'exemple de mon
père, qui, par exemple, pourrait vouloir garder toutes ses capacités, pouvoir
prendre ses décisions par lui-même, mais peut-être avoir besoin de mon aide
pour téléphoner chez Revenu Québec; peut-être avoir besoin de mon aide pour
téléphoner chez Vidéotron, quand il y a un problème de facture; pour téléphoner
à la banque, parce que parfois, c'est compliqué et les gens ressentent ce
besoin-là.
D'ailleurs, on a toute une liste, là, de
gens qui... de groupes qui sont venus nous dire que ça ferait toute une
différence et la différence, avec ce que vous mettez de l'avant, en
disant : Bien, les gens peuvent le faire de toute façon, c'est qu'il y a
une légitimité qui est donnée à l'assistant, qui peut aller recueillir ces
informations-là, au nom de la personne qu'il assiste. La situation
actuellement, c'est qu'on se bute... les gens qui veulent assister un proche,
bien se butent, par exemple, dans les organismes publics, à la loi qui
dit : Bien, on ne peut pas vous partager ces renseignements-là.
M. Goubau (Dominique) : Non,
je comprends très bien et je... Je vous ai dit au départ, c'est intéressant. Je
doute de la praticabilité et j'ai entendu tout à l'heure un des intervenants,
qui disait : Ça serait peut-être intéressant de faire des tests et
vérifier si ces mécanismes peuvent fonctionner. Il faudrait peut-être les observer.
Personnellement, j'ai des doutes que ça fonctionnera. Je pense que le droit
commun répond amplement à cela et qu'on n'a pas besoin d'un autre élément de
complexité dans la loi.
M. Lacombe : Et l'autre
particularité, c'est que ce n'est pas judiciarisé.
M. Goubau (Dominique) : Oui.
M. Lacombe : Donc, vous n'avez
pas besoin d'avoir recours aux tribunaux. Par exemple, que si vous voulez...
M. Goubau (Dominique) : C'est
administratif.
M. Lacombe : Exactement, c'est
administratif. Donc, il y a aussi une différence avec ce qui existe
actuellement. Vous parliez du conseiller au majeur, qui existe actuellement,
qui n'est pas comparable en ce sens-là.
M. Goubau (Dominique) : Je ne
veux pas polémiquer. Je n'ai pas dit que c'était identique, j'ai dit qu'il y a
une idée d'assistance à une personne qui est apte dans la prise de décision. On
voit le succès très, très mitigé, pour dire à peu près nul, en Saskatchewan.
Je ne peux que vous redire que le droit
commun permet déjà de répondre à cela, mais je crois, et je le souligne dans
mon mémoire, la question de la représentation temporaire va probablement
souffrir du même défaut.
M. Lacombe : Qu'est-ce que
vous voulez dire?
M. Goubau (Dominique) : Je
veux dire par là que les exigences qui sont mises en place sont des exigences
telles qu'il est difficile d'imaginer des personnes qui vont faire les
démarches pour le constat d'inaptitude, la démarche judiciaire, tout cela pour
obtenir l'autorisation d'un seul acte. Dans ces genres de situations là, il
s'agira d'un cas où, de toute évidence, on se dirige vers un cas d'inaptitude
plus important. Or, les cas où on peut demander l'autorisation d'un acte
particulier, c'est déjà prévu dans la loi, vous pouvez aller voir un juge aujourd'hui
et dire : Il y a un acte pour lequel on demande une autorisation
particulière et c'est déjà dans la loi, c'est possible.
M. Lacombe : Je n'ai pas envie
de m'obstiner avec vous sur le détail juridique, parce que je sens que je vais
perdre.
M. Goubau (Dominique) : Non,
non, non. On n'est pas là pour gagner ou pour perdre.
M. Lacombe : Parce que vous
êtes juriste et je ne le suis pas, mais moi, j'ai envie de vous parler des gens
aussi. On a tous une liste de gens : la mesure d'assistance, le Réseau
FADOQ, le Barreau du Québec, l'Office des personnes handicapées, Réseau Avant
de craquer; l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et
familiaux du Québec. Seulement pour la mesure d'assistance, par exemple, qui
sont venus nous dire que ça les aiderait.
Je vais vous poser une question. Je
comprends que vous présumez que ça ne sera pas utilisé. Vous présumez que ce ne
sera pas populaire. Mais si tout le monde demain matin applaudissait et
utilisait cette mesure-là tel qu'on la présente, telle qu'on la propose aujourd'hui,
est-ce que ce serait une bonne nouvelle?
M. Goubau (Dominique) : Vous
n'êtes peut-être pas juriste, mais vous êtes un très bon avocat. Et l'argument
du nombre, c'est sûr. Moi, tout ce que je vous dis, c'est les outils existent déjà.
Maintenant, si un nombre important d'intervenants dans la société vous
disent : C'est un outil qui, pour nous, serait très utile, j'imagine que
c'est votre responsabilité de les écouter.
M. Lacombe : Donc, on a un
terrain d'entente, là. Je comprends ce que vous voulez dire. Vous dites : Actuellement,
peut-être que légalement, à gauche et à droite, en théorie, je vais dire, on a
les outils pour arriver aux mêmes fins. Là, je comprends qu'il y a d'autres
juristes qui pourraient peut-être, là, ne pas être d'accord, mais ce que vous
dites, je résume en disant : Legalement, on aurait peut-être les leviers,
là, pour le faire, mais ce n'est pas populaire. Nous, ce qu'on dit,
c'est : On veut que les gens aient recours, on veut faciliter la vie des
gens, on veut leur simplifier la vie. Donc, en ce sens-là, si la mesure, elle
est utilisée, et c'est le son de cloche qu'on a, on a l'impression que les gens
vont l'utiliser. Il y a des gens qui nous disent qu'ils attendent ça...
M. Lacombe : ...on aurait peut-être
les leviers, là, pour le faire, mais ce n'est pas populaire. Nous, ce qu'on
dit, c'est... on veut que les gens aient recours, on veut faciliter la vie des
gens, on veut leur simplifier la vie. Donc, en ce sens-là, si la mesure, elle
est utilisée... Et c'est le son de cloche qu'on a. On a l'impression que les
gens vont l'utiliser. Il y a des gens qui nous disent qu'ils attendent ça
depuis 10 ans, par exemple. Donc, si elle est populaire, j'imagine que la façon
dont on la présente, ce sera une bonne nouvelle.
M. Goubau (Dominique) : On
avait présenté également le conseiller au majeur comme une formule
intermédiaire très, très utile et pratique, et finalement, on voit bien qu'elle
n'est jamais appliquée, mais... parce qu'il s'agit de personnes qui sont aptes.
M. Lacombe : Mais il y a un
coût associé à ça.
M. Goubau (Dominique) : Il y
a un coût parce que c'est judiciarisé.
M. Lacombe : C'est ça,
exactement. Et là ce ne le serait pas. Mais je comprends, je comprends mieux
votre point de vue. Donc, je comprends que, si vous aviez la certitude que ce
serait utilisé et populaire, je comprends que vous seriez probablement d'accord
avec la mesure?
M. Goubau (Dominique) : Bien
sûr. Bien sûr, oui.
M. Lacombe : D'accord. Moi, je
suis encouragé... je suis peut-être optimiste, mais je suis encouragé quand je
vois toute la liste des gens qui sont venus nous dire qu'ils aimeraient
utiliser cette mesure-là. Mais je suis content d'avoir pu échanger avec vous,
c'est instructif.
Maintenant, moi, je céderais la parole à
une collègue, un collègue?
La Présidente (Mme Chassé) : À
un collègue ou à une collègue, puis peut-être que vous allez la reprendre
après.
M. Lacombe : La députée de
Soulanges.
La Présidente (Mme Chassé) :
C'est la députée de Soulanges qui prend la parole. Allez-y.
Mme Picard : Oui, merci.
Bonjour... pour votre présence aujourd'hui. J'aimerais attirer votre attention
sur une partie de votre mémoire où vous parlez de l'utilisation du terme
«vulnérable». Vous dites que c'est... qu'on aurait proposé un autre nom, au
lieu du terme «vulnérable». J'aimerais avoir vos propositions, si vous en avez,
ou... élaborer sur le sujet.
M. Goubau (Dominique) : J'ai
écrit dans le mémoire que j'aimais assez bien l'idée de Curateur public,
d'abord parce que les gens connaissent le Curateur public et que, dans les
milieux d'intervention, tout le monde sait qui est le Curateur public. Donc, le
mot, il est acculturé, il est connu. Et qu'on a déjà un défi important, auprès
de nombreuses clientèles, à faire comprendre les choses. Voilà déjà un acquis,
il est connu. Tout le monde sait qui est le Curateur public.
Mais j'ai une objection... enfin, une
proposition ou, plutôt, un élément à apporter. C'est que le Curateur public,
bien sûr, il s'occupe des régimes de protection des majeurs, il s'occupe aussi
des mineurs, des petits enfants, mais il s'occupe aussi des adolescents, qui
ont 16 ans, qui ont 17 ans et qui, parce qu'ils ont des actifs de plus de
25 000 $, eh bien, se voient soumis, en tout cas, leur tuteur, à une
série de contrôles, et c'est normal, dont le Curateur public est le chien de
garde. C'est normal. Mais les jeunes de 16, 17 ans ne sont pas des personnes
vulnérables au sens où on l'entend. Et j'ai écrit, j'ai dit dans mon mémoire
qu'il y a même quelque chose de problématique là, puisque le Québec adhère à la
convention internationale sur les droits de l'enfant, dont un des principes
fondamentaux est la reconnaissance de l'autonomie des mineurs, particulièrement
des adolescents.
Et donc dire, du même souffle : Nous
adhérons à la convention internationale sur les droits de l'enfant et nous
reconnaissons l'importance de l'autonomie du mineur... et le Québec est en
avance sur ces questions-là ... et dire en 2019 ou 2020 : Par
ailleurs, nous considérons que tous les mineurs, parce qu'ils ont des intérêts
pour lesquels ils sont représentés et pour lesquels il y a des contrôles, qui
sont nécessaires et normaux, eh bien, on va les faire contrôler par une
personne qui est responsable ou le protecteur des personnes qui sont en état de
vulnérabilité au Québec, je pense que ce n'est pas un bon signal à envoyer aux
étudiants de secondaire V et aux étudiants de cégep, qui, au contraire, sont
des personnes qui sont dans la voie de l'autonomie, bien plus que de la
vulnérabilité.
Mme Picard : Donc, vous
proposez de garder le terme de curateur...
M. Goubau (Dominique) :
Personnellement, je le garderais, oui, je l'aime bien.
Mme Picard : D'accord. J'ai
combien de temps encore, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Chassé) :
Il vous reste encore 2 min 45 s.
Mme Picard : Deux minutes?
Effectivement, je peux faire une autre question, ça va? Parfait. Vous avez
mentionné d'entrée de jeu qu'il y a des aspects du projet de loi qui, selon
vous, ont le plus grand potentiel d'améliorer la vie des individus concernés.
Vous avez dit qu'il y a certains éléments qui sont bons. J'aimerais que vous
élaboriez un petit peu sur les points positifs.
M. Goubau (Dominique) : J'en
ai signalé plusieurs, que j'applaudis. D'ailleurs, il y en a plusieurs que
j'avais moi-même... que j'ai déjà moi-même proposés il y a longtemps. Mais il y
a des simplifications dans les procédures de convocation du conseil de tutelle,
des simplifications dans l'organisation de l'assemblée des parents et des
simplifications au niveau du mandat aussi, du mandat de protection. Peut-être,
ce sont des choses qui paraissent plus des détails, mais qui ont leur
importance dans le quotidien, et qui sont des irritants, qui ont déjà été
parfois soulignées par les tribunaux aussi, et qui vont être améliorées par ce
projet de loi. Donc, ça, je pense que c'est une très bonne idée.
Mme Picard : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Chassé) :
1 min 45 s au bloc.
Mme Picard : Je pourrais en
prendre d'autres, si vous voulez, mais libre à toi. En avais-tu une dernière?
M. Lacombe : Tu n'as pas
d'autre question?
Mme Picard : Bien, oui, je
pourrais en avoir une autre, oui.
La Présidente (Mme Chassé) :
Oui, elle dit qu'elle en a une autre.
M. Lacombe : O.K. Oui, oui,
vas-y, vas-y.
• (16 h 50) •
Mme Picard : L'article 257 et
260, vous les avez mentionnés tantôt. J'aimerais ça que vous élaborez un petit
peu sur votre commentaire que vous avez dit, d'entrée de jeu, dans votre...
M. Goubau (Dominique) : Ma
position est la suivante. C'est...
Mme Picard : ...en avais-tu une
dernière?
M. Lacombe : Tu n'as pas
d'autres questions?
Mme Picard : Bien oui, je
pourrais en avoir une autre.
La Présidente (Mme Chassé) :
Oui, elle dit qu'elle en a une autre.
M. Lacombe : Oui, vas-y,
vas-y.
Mme Picard : L'article 257 et
260, vous les avez mentionnés tantôt, j'aimerais ça que vous élaborez un petit
peu sur votre commentaire que vous avez dit, d'entrée de jeu, avant votre...
M. Goubau (Dominique) : Ma
position est la suivante, c'est que je pense que le point central du projet de
loi et qui devrait être le souci de tout le monde, c'est de s'assurer que, dans
notre société, les personnes qui sont sous une mesure de protection, quelle
qu'elle soit, puissent être entendues dans la mesure où elles sont capables de
s'exprimer, un, et deux... donc exprimer leur volonté, et deux, si elles ne
sont plus capables de le faire, que le représentant ou que l'assistant ait l'obligation
de tenir compte d'une expression de volonté antérieure ou probable de cette
personne-là. Ces choses-là ont été soulignées et sont soulignées très régulièrement
par les tribunaux. La Cour d'appel, comme je vous ai dit en introduction, a
dit : Il ne suffit pas d'informer, il faut que la personne puisse
participer à la décision. J'ai mis, dans mon mémoire, plusieurs extraits...
La Présidente (Mme Chassé) :
Il vous reste 45 secondes pour répondre, Me Goubau. 45 secondes.
M. Goubau (Dominique) :
Alors, j'ai mis, dans mon mémoire, plusieurs extraits de décision des tribunaux
dans lesquels les tribunaux de Québec insistent sur l'importance du respect de
la liberté et de l'autonomie, particulièrement lorsqu'il s'agit des droits fondamentaux
des personnes sous régime de protection. C'est l'État actuel du droit de
l'inscrire mieux dans la loi, c'est une excellente idée.
Mme Picard : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Chassé) : Très
bien. Ça termine le bloc avec le parti formant le gouvernement. Maintenant,
nous passons au bloc... au parti formant l'opposition officielle. La députée de
Westmount—Saint-Louis désire prendre la parole. Allez-y.
Mme Maccarone : Merci, Mme la
Présidente. Merci beaucoup pour votre mémoire puis votre présentation. Je vous
ai entendu, quand vous avez débuté votre présentation, vous avez parlé, je vous
cite, peut-être pas exactement, mais : «On a le problème de pratique sur
le terrain à identifier si la personne est apte, puis il faut modifier les
modalités.» Alors, comment on peut faire appliquer la loi et quelles modalités
devrons-nous changer pour faire appliquer la loi?
M. Goubau (Dominique) : Dans
ma pratique d'avocat ou de professeur, je suis très souvent confronté à des
médecins, compte tenu de la matière que j'enseigne et dans laquelle je fais de
la recherche, et je constate effectivement qu'il y a un manque d'information.
Et pourtant, pourtant, les médecins ont un ordre professionnel qui les informe
beaucoup. Mon épouse est médecin, et je dis ce qu'elle reçoit et je vais
dire... et je trouve qu'ils sont très bien outillés pour informer leurs
membres. Et curieusement on entend des gens, comme des gens qui sont venus
hier, je pense, ici, devant la commission vous dire que, dès lors qu'il y a un
régime de protection, on ne cherche pas à obtenir le consentement ou à savoir
s'il y a un refus, ce qui est tout à fait contraire aux règles. Et donc il y a
là un déficit d'information, enfin, j'espère que ce n'est que ça, et, très
certainement, une action à mener là-dessus.
Mais puisque vous me tendez la perche sur
cette question-là, une des propositions que je fais dans mon mémoire, et je
pense que... enfin, je pense qu'elle est intéressante, c'est que la règle que
nous avons, en matière de consentement aux soins, c'est-à-dire de vérifier au
cas par cas si la personne, même sous régime de protection, a l'aptitude ou non
de participer à la décision médicale, je pense qu'on devrait avoir la même
règle pour ce qui est de la résidence de la personne. Il y a des pays où ça
existe, en France, ça existe, en Belgique, ça existe. Il y a des pays qui
prévoient, comme en matière de soins médicaux, que même si la personne est sous
régime de protection, parce qu'il s'agit de la résidence de son lieu
d'habitation, alors il faut présumer que la personne est apte ou, en tout cas,
il faut vérifier à chaque cas par cas, comme en matière de soins, si la
personne est inapte de prendre une décision concernant son lieu de résidence.
Je pense que ça, ce serait une amélioration intéressante pour le projet de loi.
Mme Maccarone : Merci. Merci.
C'est sûr, on comprend, comme le ministre a cité, beaucoup de gens sont
contents avec la proposition d'avoir un rôle d'assistant au majeur temporaire
tel que proposé dans le projet de loi. Si, mettons, on va vers l'argent puis le
projet de loi est adopté, mais avant que ce soit adopté, que devrions-nous
faire pour bonifier le rôle de cette personne-là?
M. Goubau (Dominique) : Le
rôle de l'assistant?
Mme Maccarone : Oui.
M. Goubau (Dominique) : Je
pense qu'il faudrait bonifier les dispositions 257, 260, y inclure l'assistant.
Et, au lieu de simplement dire, comme le fait le projet de loi, mais c'est une
énorme avancée, «le représentant ou l'assistant doit tenir compte des volontés,
des désirs exprimés», ce que la Cour d'appel a dit noir sur blanc, donc c'est
déjà la règle, mais elle n'est pas dans le code, de la mettre dans le code, c'est
une bonne idée. J'y ajouterais des choses plus précises : Qu'est-ce que ça
veut dire tenir compte, comment tenir compte? Tenir compte du milieu de la
personne, de son histoire. Il y a des précédents, il y a des législations en
dehors du Québec, où on prévoit ce genre de code d'éthique, si vous voulez, du
bon représentant ou du bon assistant.
Et donc je pense que l'article 260
pourrait être bonifié pour mieux expliciter ce que ça veut dire concrètement,
pour un assistant ou pour un représentant, de tenir compte des volontés et
tenir compte des désirs de ces personnes. Évidemment, le grand défi,
c'est : Comment établir l'aptitude ou l'inaptitude de la personne? Mais
ça, ce n'est pas un législateur qui va faire ça, et tous les intervenants sont
d'accord pour dire que...
M. Goubau (Dominique) : ...ce
que ça veut dire concrètement, pour un assistant ou pour un représentant, de
tenir compte des volontés et tenir compte des désirs de ces personnes.
Maintenant, évidemment, le grand défi,
c'est : Comment établir l'aptitude ou l'inaptitude de la personne? Mais
ça, ce n'est pas le législateur qui va faire ça. Et tous les intervenants sont d'accord
pour dire... que ce soient les médecins, les travailleurs sociaux, pour dire
que c'est probablement la chose la plus délicate à faire. Lorsque le juge devra
déterminer, dans une tutelle, que tel acte est permis tout seul, tel acte non,
tel acte oui, ça va être extrêmement compliqué. C'est déjà très compliqué de
dire qu'une personne est totalement inapte ou qu'elle est apte. Les psychiatres
s'entendent pour dire que c'est un exercice parfois impossible à faire. Alors,
quand il s'agit d'aller déterminer par le menu détail que l'aptitude est
suffisante pour tel acte, mais qu'elle est insuffisante pour tel acte, c'est sûr
qu'on va avoir des problèmes d'application concrète de dispositions comme
celles-ça. Donc, moi, je pense que ça va être là, le grand défi. Ce n'est pas
un défi de loi, c'est un défi dans la pratique encore une fois.
Mme Maccarone : Je céderais la
parole à ma collègue, elle a une question directement reliée à ceci.
La Présidente (Mme Chassé) : Absolument.
La députée de Notre-Dame-de-Grâce, allez-y. Vous avez
6 min 20 s, profitez-en.
Mme Weil
: Merci. Merci
beaucoup. Justement, donc vous avez dit : Le problème n'est pas dans le
Code civil en soi que le Québec est précurseur, mais c'est dans la pratique,
surtout je pense que... j'imagine, dans le réseau de la santé et des services
sociaux, etc., toutes ces institutions qui ont le mandat de protéger ces
personnes en situation de vulnérabilité. Qu'en est-il des tribunaux et de leur
compréhension, surtout parce que c'est quand même... ces modifications du Code
civil, ça date, cette réforme, 1989, vous avez dit? Donc, il y a certainement
des changements dans la compréhension aussi peut-être des juges.
Et là on vient d'avoir des
recommandations. Je pense, c'est le Protecteur du citoyen qui nous a fait des
recommandations d'être très, très précis, je pense que vous vous référez à ça
par rapport aux conditions de vulnérabilité, etc., puis quand est-ce que... je
ne sais pas si vous avez entendu donc... et invite le ministre à aller de façon
assez pointue. Qu'en dites-vous par rapport aux tribunaux et l'application de
ce que vous voyez, dans votre pratique, de la loi et des modifications et du
Code civil tel que c'était conçu à l'origine, la réforme?
M. Goubau (Dominique) :
L'analyse des 30 dernières années des décisions des tribunaux,
particulièrement de la Cour d'appel, démontre que la Cour d'appel a très bien
mis la lumière sur l'interprétation juste de la réforme de 1989. C'est la Cour
d'appel qui a rappelé que le principe le plus important, dans notre régime
actuel, c'est le respect de l'autonomie résiduelle et qu'on ne peut imaginer
une mesure de protection que lorsqu'il y a un besoin à rencontrer, c'est
exactement ce qu'on dit dans le projet de loi. La Cour d'appel a constamment
rappelé ça. Quand elle dit : Il ne suffit pas d'informer une personne, encore
faut-il l'écouter et, quand c'est possible, la faire participer. Ce sont les
tribunaux qui ont mis ce principe de l'avant et je pense que c'est un excellent
principe, raison pour laquelle j'applaudis le projet de loi lorsqu'il ajoute,
dans cette disposition du code, qu'effectivement il faut écouter la personne et
qu'il faut tenir compte de ses volontés.
Maintenant, la détermination de l'aptitude
ou de l'inaptitude est un exercice tellement difficile et je ne pense pas que
les tribunaux même soient très efficaces là-dedans. Dans les années 90, la
Cour d'appel du Québec a proposé un test en cinq questions, s'inspirant d'un
document de psychiatres de la Nouvelle-Écosse. Il a dit : Voici... pour
déterminer l'aptitude sur le plan médical, voici les questions qu'il faut se
poser. Et le médecin ou n'importe qui, travailleur social, doit se poser ces
cinq questions. C'est bien, mais c'est très théorique, ça n'a pas réglé les
problèmes en termes de difficultés d'établir l'aptitude ou l'inaptitude d'une
personne. Mais... Voilà.
Mme Weil
: Est-ce qu'il
y a un risque, si le législateur va trop loin, à énumérer, bon, des éléments ou
pensez-vous que ce serait éclairant pour le tribunal d'être assez précis pour
regarder des conditions de vulnérabilité, etc., qui mériteraient...
M. Goubau (Dominique) : Et
donc les conditions d'inaptitude.
Mme Weil
: C'est ça.
M. Goubau (Dominique) : Je
pense qu'aujourd'hui les tribunaux sont tous d'accord pour dire que ce test en
cinq questions s'applique. Donc, à la limite, on pourrait même l'inscrire dans
la loi. Mais si vous parlez à un psychiatre, il va vous dire : Oui, c'est
très bien, mais c'est purement théorique, ça reste un exercice extrêmement
délicat et compliqué.
• (17 heures) •
Mme Weil
: Dans votre
pratique, je ne sais pas s'il y a d'autres éléments que vous voudrez... parce
que c'est une occasion unique, pour nous, de vous entendre, vous avez une
expertise extraordinaire. Le Barreau est venu avec son point de vue, donc,
évidemment, on regarder ça, toutes ces recommandations.
Est-ce qu'il y a d'autres éléments, dans ce que
vous avez peut-être pu entendre?
C'est sûr qu'on nous, il y a une grande
préoccupation par rapport au système, où on a parlé de la gestion du
changement. Mais c'est drôle parce que, d'après ce que vous dites, le droit va
bien, c'est la pratique qui est problématique. Donc, quoi qu'il en soit, dans
la pratique, c'est une occasion peut-être pour le gouvernement... on a parlé de
formation et d'information...
17 h (version non révisée)
Mme Weil
: ...au système.
On a parlé de la gestion du changement. Mais c'est drôle, parce que, d'après ce
que vous dites, le droit va bien, c'est la pratique qui est problématique. Donc,
quoi qu'il en soit, dans la pratique, c'est une occasion, peut-être, pour le gouvernement....
On a beaucoup parlé de formation et d'information. Donc, alors qu'on amène des
changements dans le sens que vous dites et dans le sens de ces conventions internationales,
alors que le Québec est peut-être déjà là, mais... peut-être pas en pratique,
mais en théorie, est-ce que votre pratique vous dit, en effet, les genres de
problèmes qui ont été soulevés, problèmes de vieillissement de la population, lourdeur,
problème de ressources humaines, problème de coordination entre les professionnels
qui sont tous autour de cette même personne? Est-ce que vous constatez ça dans
votre pratique?
M. Goubau (Dominique) : Oui.
Enfin, ma pratique est une pratique de chercheur et d'enseignant, mais je vous
dirais, pour répondre, ou peut-être répondre par le biais, que ma pratique
m'enseigne, si vous voulez, que la chose la plus importante, et on la retrouve
dans le projet de loi, c'est la consécration dans la loi du principe reconnu en
jurisprudence de la prise en considération des volontés de la personne. Il faut
que ce soit inscrit dans la loi. Je pense qu'il faut encore aller plus loin et
mieux l'expliquer, et peut-être même prévoir une règle selon laquelle, lorsqu'il
s'agit de droits fondamentaux comme la résidence d'une personne, le lieu de
vie, alors il faut une présomption dans la loi que cette personne est apte à
prendre cette décision, à moins qu'on en fasse la démonstration contraire. Et
je pense que s'il y avait ne fut-ce que cette partie de la réforme là, ce
serait déjà un pas énorme dans la prise en considération des droits
fondamentaux des personnes protégées.
La Présidente (Mme Chassé) :
Il reste 30 secondes.
Mme Weil
: Dans les systèmes
que vous avez observés, analysés, vous avez beaucoup cité la Belgique, la
France ou l'Europe. Est-ce que c'est là les meilleurs modèles que vous avez
vus?
M. Goubau (Dominique) : Non, certainement
pas. Je pense, honnêtement, quand je fais des exposés...
Mme Weil
: C'est le
Québec? C'est le Québec?
M. Goubau (Dominique) : Quand
je fais des exposés sur notre modèle, le Québec est cité en exemple. Et donc je
pense qu'il faut... Et c'est pour ça que j'ai... une des raisons pour
lesquelles j'ai fait ce mémoire, c'est que je ne suis pas d'accord avec ceux
qui viennent dire qu'on a un mauvais système et qu'il viole le droit
international. C'est faux. Et quand on connaît le système, on ne peut que
conclure que c'est un bon système, mais qui peut être... on peut le parfaire.
Et je pense que c'est une bonne occasion de le faire.
Ceci dit, tout cet exercice me rappelle
une fois de plus à quel point la loi, elle n'est pas toujours efficace. Je veux
dire, je tombe de ma chaise quand j'entends quelqu'un venir vous dire, pas plus
tard qu'hier ou ce matin, je ne sais plus, que c'est la norme que lorsque dans
les milieux médicaux une personne est sous régime de protection, qu'on ne
cherche même pas à savoir si elle refuse ou si elle accepte ça. Je tombe de ma
chaise. C'est contraire à toutes les règles. C'est même contraire à toute l'information
médicale...
La Présidente (Mme Chassé) :
Ça conclut.
M. Goubau (Dominique) : ...qui
est proférée par l'ordre des médecins. Donc, la loi a beau dire le principe, on
a un problème d'application. C'est un peu frustrant, cet exercice nous mène
face à la limite de la loi.
La Présidente (Mme Chassé) : Ça
conclut votre... l'échange avec le... Oui. Il manque un petit bout à mon
aide-mémoire, mais je vais y aller justement avec ma mémoire. Ça conclut nos discussions
pour aujourd'hui, et j'ajourne les travaux jusqu'à demain, jeudi 19 septembre — merci
de me rappeler la date — qu'est-ce qui est écrit? 12 h 15.
Bonne soirée, tout le monde.
(Fin de la séance à 17 h 4)