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Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le mercredi 20 avril 2016 - Vol. 44 N° 56

Ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion


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Table des matières

Remarques préliminaires

Mme Kathleen Weil

M. Maka Kotto

Mme Nathalie Roy

Discussion générale

Document déposé

Document déposé

Document déposé

Adoption des crédits

Documents déposés

Autres intervenants

M. Marc Picard, président

Mme Marie Montpetit 

M. Marc H. Plante

Mme Véronyque Tremblay

M. Michel Matte 

*          M. Robert Baril, ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion

*          M. Jacques Leroux, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Quinze heures cinq minutes)

Le Président (M. Picard) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de procéder à l'étude des crédits budgétaires du portefeuille Immigration, Diversité et Inclusion pour l'exercice financier 2016‑2017.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger) est remplacée par Mme Montpetit (Crémazie); Mme Vallières (Richmond) est remplacée par M. St-Denis (Argenteuil); Mme Lavallée (Repentigny) est remplacée par Mme Roy (Montarville). Merci.

Remarques préliminaires

Le Président (M. Picard) : Nous allons débuter par les remarques préliminaires puis nous allons procéder à une discussion d'ordre général par blocs d'environ 20 minutes, incluant les questions et les réponses. La mise aux voix des crédits sera effectuée à la fin du temps qui est alloué à l'étude de ce programme.

Puisque nous avons débuté nos travaux à 15 h 5 et qu'une période de trois heures doit être consacrée à l'étude de ces crédits cet après-midi, y a-t-il consentement pour poursuivre nos travaux au-delà de l'heure prévue, soit jusqu'à 18 h 5? Merci. Nous terminerons à 18 h 5.

Nous allons débuter avec les remarques préliminaires de Mme la ministre. Vous disposez de 17 minutes.

Mme Kathleen Weil

Mme Weil : Oui. Merci, M. le Président. Alors, je salue mes collègues députés du parti ministériel ainsi que mon collègue de l'opposition officielle, le député de Bourget, et ma collègue du deuxième groupe d'opposition, la députée de Montarville. C'est avec plaisir que je m'adresse à vous aujourd'hui pour vous présenter les crédits budgétaires alloués au ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion. Permettez-moi tout d'abord de vous présenter les personnes qui m'accompagnent : à ma gauche, M. Robert Baril, sous-ministre au MIDI, accompagné de la magnifique équipe du ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, ainsi que ma directrice de cabinet, à ma droite, Mme Marie-Hélène Paradis, et plusieurs personnes de mon cabinet.

Mesdames et messieurs, l'année 2016‑2017 sera marquée par la transformation profonde de l'action du Québec en matière d'immigration, de participation et d'inclusion. Cette réforme majeure du système d'immigration s'appuie sur deux piliers : la Politique québécoise en matière d'immigration, de participation et d'inclusion Ensemble, nous sommes le Québec et sa stratégie d'action pour 2016‑2021 que j'ai dévoilée le 7 mars dernier, ainsi que la nouvelle Loi sur l'immigration du Québec, qui, elle, a été adoptée par l'Assemblée nationale le 6 avril.

Les investissements prévus au budget du Québec 2016‑2017 présentés le 17 mars dernier par le ministre des Finances permettront au ministère de réaliser les actions afin que nous puissions mieux sélectionner, mieux intégrer et mieux vivre ensemble. Les crédits votés, qui incluent notamment le budget de dépenses et le budget d'investissement, s'élèvent à 299,7 millions de dollars pour le MIDI en 2016‑2017, une hausse de 6,5 millions ou 2,2 % par rapport à 2015‑2016. Au total, le budget de dépenses 2016‑2017 du ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, en incluant la provision, est établi à 291,9 millions, en hausse nette de 8 millions par rapport à 2015‑2016. Cette augmentation représente une hausse de 2,8 % de notre budget. Le budget de dépenses 2016‑2017 inclut les montants pour réaliser des mesures concrètes de la stratégie d'action, de la politique et celles du plan d'action gouvernemental 2015‑2018 La radicalisation au Québec : agir, prévenir, détecter et vivre ensemble. Un montant de 4 millions a aussi été alloué au MIDI dans le but de renforcer les efforts de francisation auprès des nouveaux arrivants en 2016‑2017.

La diversité et l'immigration sont des richesses incontournables de la société québécoise. C'est en accueillant ensemble des talents de partout que le Québec grandit et construit son avenir. Nos besoins sont grands, et notre système d'immigration doit être capable de répondre rapidement aux impératifs de notre développement.

• (15 h 10) •

Pour l'exercice 2016‑2017, le budget de dépenses de base en immigration est de 4,7 millions, un montant comparable à celui de 2015‑2016, qui était de 4,8 millions. À ce budget de base en immigration, le ministère prévoit ajouter un financement supplémentaire de 47,7 millions provenant des crédits au net et découlant des revenus de tarification; les crédits au net du ministère étaient de 44,9 millions en 2015‑2016. L'ensemble du budget de dépenses en immigration atteindra donc environ 52,4 millions en 2016‑2017, comparé à 49,7 millions en 2015‑2016. Le budget de dépenses en immigration permettra notamment la mise en oeuvre d'une nouvelle stratégie de prospection et d'attraction visant les travailleurs et travailleuses qualifiés, la mise en oeuvre d'un système d'immigration basé sur la déclaration d'intérêt, la transformation des programmes d'immigration destinés aux gens d'affaires, l'adoption de la prochaine planification pluriannuelle de l'immigration.

Une des plus importantes actions que nous avons menées en 2015 en matière d'immigration est sans contredit l'accueil des personnes réfugiées syriennes. Nous avons été le premier gouvernement au Canada à décider d'augmenter nos cibles pour permettre l'admission de 7 300 personnes réfugiées d'origine syrienne en 2015‑2016. Nous avons déjà atteint 73 % de l'objectif. Au 30 mars 2016, le Québec a accueilli 5 332 personnes, dont 4 445 parrainées et 887 prises en charge par l'État. Le ministère a été un acteur de premier plan dans l'opération d'accueil qui s'est déroulée en collaboration avec le gouvernement fédéral entre décembre 2015 et février 2016.

À titre de ministre de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, je suis très fière de l'accueil réservé aux personnes réfugiées syriennes et des témoignages chaleureux et inclusifs qui se sont fait entendre dans toutes les villes d'accueil au Québec. Le Québec accueille et intègre des personnes réfugiées depuis des décennies, nous avons une longue tradition d'immigration humanitaire. Nous poursuivrons dans cette voie au cours de 2016 afin de tenir notre engagement envers les personnes réfugiées d'origine syrienne et d'autres origines. Malgré les difficultés que les personnes réfugiées ont dû affronter avant d'arriver au Québec, ces personnes trouvent la force de rebâtir leur vie et de contribuer à la prospérité et au développement de notre société.

L'attraction d'immigrantes et d'immigrants qualifiés se déroule dans un contexte hautement concurrentiel sur la scène internationale. En 2016, nous allons mettre en oeuvre une nouvelle stratégie de prospection et d'attraction visant les travailleuses et les travailleurs qualifiés. Nous allons affiner nos connaissances et axer davantage nos actions sur les profils professionnels pour rejoindre ceux qui répondent le mieux aux besoins du Québec. Nous le ferons en assurant une présence sur le terrain, en développant des partenariats locaux et en recourant davantage aux technologies de l'information et des communications.

L'adoption de la nouvelle Loi sur l'immigration au Québec accorde au ministère les pouvoirs de mettre en place le système d'immigration moderne et performant proposé dans la politique québécoise Ensemble, nous sommes le Québec et sa stratégie d'action. Reposant sur la déclaration d'intérêt, ce nouveau système nous offre la possibilité de sélectionner en temps réel et en continu les personnes dont le profil est recherché et de les faire venir au Québec plus rapidement. Grâce à une collaboration avec le ministère du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale, ce système sera enrichi par des portraits régionalisés sur les besoins du marché du travail. Le principe du premier arrivé, premier servi sera révolu. Nous comptons mettre en place ce nouveau système à partir de l'année 2017.

L'immigration temporaire est en croissance au Québec comme ailleurs dans le monde. Les travailleuses et travailleurs temporaires spécialisés et les étudiantes et étudiants étrangers sont des candidats de choix pour le Québec. C'est pour eux que nous avons mis en place le Programme de l'expérience québécoise en 2010. Depuis six ans, nous avons émis près de 29 000 certificats de sélection du Québec dans le cadre de ce programme.

La nouvelle loi réitère notre engagement à faciliter l'obtention d'un statut permanent aux travailleurs temporaires et étudiants étrangers. Lors du budget du Québec, le 17 mars dernier, le gouvernement a annoncé le financement d'un projet pilote par Montréal International visant à favoriser davantage la rétention des étudiantes et étudiants étrangers. Pour la réalisation de cette initiative, des crédits additionnels seront octroyés au MIDI : 700 000 $ en 2016‑2017, 500 000 $ en 2017‑2018 et 400 000 $ en 2018‑2019.

Cherchant à optimiser l'apport de l'immigration à la prospérité du Québec, nous porterons une attention particulière à l'attraction et à la sélection d'entrepreneurs talentueux et innovants. Le ministère finalisera, au cours de 2016, la mise en oeuvre de son nouveau Programme des immigrants entrepreneurs. Ce programme est en voie d'être réformé en collaboration avec le ministère de l'Économie, de la Science et de l'Innovation. Par ailleurs, les entrepreneurs issus de l'immigration et des minorités ethnoculturelles pourront aussi bénéficier des services du programme EntrePrism de HEC Montréal, qui a obtenu un soutien gouvernemental de 400 000 $ sur deux ans. Au Québec, plusieurs personnes immigrantes ont réussi leur intégration et ont contribué au développement de leur ville et de leur région en mettant à profit les compétences entrepreneuriales acquises dans leur pays d'origine.

Au cours des prochains mois, nous tiendrons un nouvel exercice de planification pluriannuelle de l'immigration. Nous avions reporté cette planification afin que ces orientations puissent prendre assise sur la nouvelle Loi sur l'immigration au Québec et la nouvelle politique Ensemble, nous sommes le Québec. Les orientations proposées seront soumises à une consultation publique afin de déterminer les caractéristiques, la composition et le nombre de personnes immigrantes que le Québec souhaite accueillir dans les années à venir.

Les mesures prévues dans la stratégie d'action Ensemble, nous sommes le Québec permettront au Québec de se démarquer sur la scène internationale par la qualité, l'accessibilité et la simplification des services offerts aux personnes aspirant s'établir au Québec. En 2016‑2017, le budget de dépenses consacré aux activités de francisation, d'intégration, de diversité et d'inclusion est de 109,6 millions, comparativement à 100,1 millions en 2015‑2016. Ces sommes supplémentaires seront utilisées pour mettre en oeuvre des services adaptés aux différents profils des personnes immigrantes, déployer une campagne de promotion des cours de français et répondre à la demande, enrichir l'offre de francisation à visée professionnelle, favoriser la reconnaissance des compétences acquises à l'étranger, sensibiliser l'ensemble de la population québécoise au caractère pluriel de la société et à l'apport de la diversité à la prospérité du Québec, poursuivre le soutien à l'accueil et à l'intégration des réfugiés syriens et autres réfugiés.

Le Québec offre aux personnes immigrantes une gamme de services axés sur la pleine participation à la société québécoise. Les personnes immigrantes sont encouragées à entreprendre ces démarches depuis l'étranger grâce aux technologies de l'information. Des actions seront mises en oeuvre pour réunir les conditions propices à ce que les collectivités soient encore plus accueillantes et inclusives envers les personnes immigrantes et les minorités ethnoculturelles.

L'immigration participe au maintien de la vitalité de la langue commune, et à cet effet le MIDI offre des services de francisation très variés aux personnes immigrantes qui ont besoin d'améliorer leurs compétences en français. L'apprentissage en milieu de travail fait partie des services en francisation de mon ministère. Ces cours permettent de joindre les travailleurs immigrants en emploi qui ne peuvent s'inscrire aux cours réguliers.

La stratégie d'action de la politique québécoise propose d'ajouter une nouvelle formule alliant classes de français et marché du travail. Les personnes immigrantes pourront améliorer leur connaissance du français spécialisé à un domaine professionnel et valider les compétences acquises en milieu de travail. Divers autres moyens sont prévus dans la stratégie pour renforcer le rôle du français comme langue d'intégration et de cohésion sociale.

L'immigration est un atout essentiel pour la croissance, pour notre avenir et pour la prospérité du Québec. Nous devons redoubler d'efforts pour que les personnes immigrantes puissent plus facilement s'intégrer en français au marché du travail et participer à la vie collective.

Malgré les efforts investis jusqu'à présent, force est de constater que des difficultés se dressent encore à l'embauche des personnes immigrantes, surtout celles d'arrivée récente. Les difficultés liées à la reconnaissance des compétences sont parmi les plus évoquées. Cette situation a des conséquences considérables sur les personnes immigrantes mais aussi sur l'économie québécoise. Le Comité interministériel sur la reconnaissance des compétences des personnes immigrantes formées à l'étranger a identifié une série de mesures à effet rapide visant à accélérer cette reconnaissance; le comité devrait déposer son rapport final avec recommandations dans les prochains mois. Le comité interministériel a contribué à élaborer la stratégie d'action Ensemble, nous sommes le Québec, qui propose notamment de soutenir les personnes immigrantes formées à l'étranger et les employeurs, entre autres, par la mise à jour de l'information en ligne, l'exploitation des réseaux sociaux et la concertation des partenaires en matière de reconnaissance des compétences, délivrer simultanément l'évaluation comparative des études effectuées hors du Québec et le certificat de sélection du Québec aux immigrants travailleurs qualifiés et d'encourager le partage des pratiques exemplaires en matière de reconnaissance des compétences ainsi que la mise en commun de ressources.

• (15 h 20) •

La pleine participation des personnes immigrantes et des minorités ethnoculturelles et le vivre-ensemble sont au coeur de la révision de notre action en matière d'immigration, de participation et d'inclusion. La nouvelle politique et sa stratégie d'action sont un appel à tous les acteurs de la société à se mobiliser pour que les Québécois de toutes origines puissent contribuer à la hauteur de leur potentiel à la prospérité du Québec et à la vitalité du français et de renforcer le sentiment d'appartenance de toutes et de tous à la société québécoise.

Au début de son mandat, le premier ministre avait déclaré : «Le défi de ce siècle sera de conjuguer [une] identité forte avec une diversité non seulement croissante, mais nécessaire. Une identité québécoise distincte, forte [et] partagée par tous les Québécois[...], de toutes régions et de toutes origines. Voilà notre projet et voilà notre avenir.» Fin de la citation. Plusieurs mesures de la stratégie visent à relever ce défi. Le vivre-ensemble est aussi un des axes du plan d'action gouvernemental 2015-2018 La radicalisation au Québec : agir, prévenir, détecter et vivre ensemble, coordonné par le MIDI. En 2015, 4 millions de dollars avaient été octroyés pour la réalisation de ce plan de trois ans. Parmi les 59 mesures et moyens d'action proposés, 16 ont déjà été réalisés et 33 sont en cours de réalisation. De nombreuses mesures sur le vivre-ensemble sont aussi prévues dans la stratégie Ensemble, nous sommes le Québec. Je pense notamment au partenariat avec les municipalités et les acteurs locaux visant à poursuivre l'édification de collectivités encore plus accueillantes et inclusives.

L'ouverture du milieu économique à la diversité est essentielle au développement du Québec. Non seulement elle renforce le sentiment d'appartenance des personnes issues de l'immigration et des minorités ethnoculturelles, mais l'ouverture du milieu économique à la diversité est bénéfique pour les entreprises elles-mêmes.

La révision en profondeur de l'action du Québec en matière d'immigration, de participation et d'inclusion vise à rallier la population autour d'une vision pluraliste du vivre-ensemble bien ancrée dans les valeurs démocratiques partagées, notamment celle de l'égalité, qui se trouve au coeur du vivre-ensemble. Viser l'égalité réelle, voilà un objectif ambitieux qui nous interpelle toutes et tous, acteurs économiques, partenaires, ministères, organismes et élus. La politique et sa stratégie d'action Ensemble, nous sommes le Québec expriment notre conviction que l'immigration et la diversité contribuent à la prospérité du Québec et de ses régions, à un vivre-ensemble harmonieux, à la pérennité et à la vitalité du français et au rayonnement international du Québec. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Picard) : Merci, Mme la ministre. J'invite maintenant le porte-parole de l'opposition officielle à faire ses remarques préliminaires pour un maximum de 10 minutes.

M. Maka Kotto

M. Kotto : Merci, M. le Président. Mes hommages, M. le Président. Je veux saluer également la ministre de l'Immigration ainsi que l'ensemble de nos fonctionnaires qui l'accompagnent ici cet après-midi. Je salue également nos collègues du parti ministériel ici présents ainsi que ma collègue de Montarville, la personne qui l'assiste également cet après-midi ainsi que celle qui m'assiste également.

La perspective de l'exercice qui nous pose ici cet après-midi, M. le Président, est l'occasion de revenir sur des enjeux fondamentaux relatifs à l'immigration et de les aborder par le prisme du budget et des crédits, évidemment, qui ont été récemment déposés, le 9 mars dernier.

Le premier ministre a indiqué que le Québec n'a d'autre choix que d'augmenter à 60 000 le nombre annuel d'immigrants qu'il accueille, soit 10 000 de plus qu'à l'heure actuelle. Cette déclaration faisait suite au dépôt de la nouvelle politique québécoise en matière d'immigration, de participation et d'inclusion, laquelle stipulait qu'en relevant à 60 000 le nombre d'immigrants reçus, et je cite, «le Québec éviterait un recul de sa population en âge de travailler en dessous de son niveau de 2011». Fin de la citation. Or, si le seuil actuel de 50 000 immigrants est maintenu, je recite le document, «la taille de la population en âge de travailler connaîtrait un recul marqué entre 2016 et 2031, entraînant [ainsi] une rareté de main-d'oeuvre, particulièrement dans [certains] secteurs d'activité [en région]». Fin de la citation.

M. le Président, si j'évoque ceci, c'est pour éclairer davantage les concitoyennes et concitoyens qui nous écoutent dans le cadre de cet exercice afin qu'ils suivent un peu les liens que nous allons faire entre ces crédits et les ambitions du gouvernement, avérées ou non. Une consultation, comme vous le savez, devrait avoir lieu au cours de l'automne 2016 afin d'établir la planification pluriannuelle de l'immigration. Les dernières consultations publiques, je le rappelle, entourant cette planification, aussi appelée les seuils, au Québec, date de 2011 et couvre la période 2011‑2015, et à l'automne dernier la ministre a décidé de prolonger d'un an la planification pluriannuelle afin d'adopter la nouvelle loi sur l'immigration et de déposer sa nouvelle politique. La ministre de l'Immigration a également déposé en novembre dernier le projet de loi n° 77, qui a été adopté sur division, Loi sur l'immigration au Québec, loi qui datait, je le rappelle, de 1968. Lors des consultations en commission parlementaire, plusieurs ont soulevé des inquiétudes quant à la francisation des immigrants. Ça, c'est l'un des enjeux fondamentaux.

Maintenant, toujours dans la perspective d'éclairer des personnes qui nous écoutent, je vais donner quelques chiffres. Environ 50 000 immigrants entrent au Québec chaque année en provenance de 185 pays différents, comparativement à une moyenne de 30 000 au tournant des années 2000 et de 23 000 en 1980. 86 % d'entre eux s'établissent dans la région de Montréal et 43 % de ceux-ci ne maîtrisent pas la langue française. Le taux de chômage des nouveaux arrivants au Québec oscille entre 18 % et 22 %, comparativement à un taux de chômage global de 7,5 %. 26 % de ces nouveaux arrivants ne parlant que le français sont au chômage, contre 16 % de ceux qui ne parlent que l'anglais, toujours dans la grande région de Montréal. Le chômage des immigrants récents est de 27 % à Montréal contre 14 % à Toronto. 42 % des nouvelles demandes à l'aide sociale proviennent des immigrants, et les immigrants comptent pour 24,7 % des prestataires à l'aide sociale.

Sur la décision du premier ministre, plusieurs lui ont reproché d'avoir annoncé son intention avant même d'avoir tenu des consultations sur les seuils prévus l'automne prochain. La hausse des seuils fait craindre de voir le français fragilisé par l'arrivée d'un nombre très important de nouveaux arrivants, considérant les moyens financiers notamment mis à disposition, d'où l'importance pour nous de concentrer nos énergies pour une bonne intégration, une meilleure intégration des immigrants au marché du travail avant d'envisager en accueillir plus. La majorité, comme je le disais, des immigrants s'installent à Montréal, alors que les besoins ou pénuries de main-d'oeuvre sont ressentis sur l'ensemble du territoire québécois. Donc, le défi est de trouver, pour nous, et depuis toujours, l'équilibre entre la protection de la langue française et les besoins du marché du travail.

Et je veux rappeler, M. le Président, qu'il y a actuellement moins d'argent pour la francisation des immigrants en entreprise. En effet, une mesure du dernier budget... de l'avant-dernier budget libéral fait passer le seuil d'assujettissement à la loi du 1 % de 1 million à 2 millions. Par cette mesure, 50 % des entreprises assujetties au fonds de formation de la main-d'oeuvre se retrouvent exemptées, soit 8 000 PME. Cela représente un manque à gagner de 12 millions de dollars, dont une baisse de 8 millions à 4 millions pour la francisation en entreprise. C'est pour cette raison que le fonds a manqué d'argent pour continuer la francisation en entreprise, comme ce fut le cas pour Peerless, vous vous en souvenez.

Des chercheurs, notamment Marois et Dubreuil, nous disent que l'impact de l'immigration sur la moyenne d'âge québécoise demeure marginal, que le meilleur moyen pour rajeunir le Québec reste la hausse de la natalité. Or, des mesures internes ou des énoncés politiques, en termes de politique nataliste, font présentement défaut. Les chercheurs Boudarbat et Grenier recommandent quant à eux de maintenir les niveaux d'admission actuels, soit autour de 50 000 immigrants permanents par année. L'effet de l'immigration pour résoudre les problèmes de vieillissement de la population et de pénurie de main-d'oeuvre est limité, selon eux.

Et, selon le chercheur Michel Pagé, dans un contexte économique difficile, l'immigration à des niveaux trop élevés a des effets négatifs sur les finances publiques et, d'une façon générale, sur l'économie. Selon lui, il n'y a pas lieu d'augmenter le niveau d'immigration sur le seul motif d'une pénurie générale de main-d'oeuvre hypothétique.

Je voudrais rappeler, M. le Président, qu'en novembre 2013 le gouvernement du Parti québécois avait abaissé les seuils. Il était alors indispensable de réduire légèrement les niveaux d'immigration et de hausser les budgets — je dis bien de hausser les budgets — consacrés à l'intégration et la francisation, l'objectif ayant toujours été de mieux intégrer, d'accompagner pour une intégration réussie des nouveaux arrivants. Diane De Courcy avait haussé de 13,5 millions de dollars le financement consacré à la francisation. Elle avait fait passer le niveau de connaissance du français dans la grille de sélection de six à sept, six à sept, intermédiaire, avancé. Alors, c'est, en gros, ce que je dirais pour mettre la table en prévision des échanges que nous allons avoir incessamment, sous peu. Merci, M. le Président.

• (15 h 30) •

Le Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Je cède maintenant la parole à la porte-parole du deuxième groupe d'opposition, Mme la députée de Montarville, pour une période maximale de sept minutes.

Mme Nathalie Roy

Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, avant de débuter nos travaux, j'aimerais d'abord saluer Mme la ministre, la remercier d'avance pour sa collaboration, sa transparence durant les travaux que nous allons amorcer. J'aimerais également saluer toute son équipe qui l'accompagne, son équipe ministérielle, les collègues du gouvernement, les fonctionnaires qui sont présents ainsi que le député de l'opposition officielle et également la personne qui l'accompagne, et la personne qui m'accompagne, également, naturellement, tous les gens présents dans la salle et, s'il y a des gens qui nous écoutent à la télévision, bien, ce sera tant mieux, je les salue.

Bon, alors, on est ici pour effectuer une tâche centrale à notre responsabilité parlementaire, on appelle ça l'étude des crédits budgétaires. Qu'est-ce que c'est? C'est la grande question. Alors, c'est un exercice démocratique qui est essentiel et auquel doit se livrer le gouvernement en toute transparence pour que tous les Québécois puissent savoir où va leur argent. Mais c'est aussi, M. le Président, un processus nécessaire de reddition de comptes qui vise à s'assurer que la gestion des programmes du ministère de l'Immigration, des programmes essentiels au développement socioéconomique des nouveaux arrivants, se fasse de façon responsable, et ce, dans l'intérêt public.

Alors, cela étant dit, M. le Président, notre temps de parole est limité, j'aimerais pouvoir reporter les minutes qu'il me reste pour poser plus de questions.

Discussion générale

Le Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée de Montarville. Je suis prêt maintenant à reconnaître M. le député de Bourget pour le premier bloc d'échange. Allez-y.

M. Kotto : Merci, M. le Président. Alors, je reviens, comme promis, sur les seuils. En juin 2015, le premier ministre actuel mentionnait qu'il fallait augmenter les seuils d'immigration. En mars 2016, le premier ministre actuel croyait qu'il faut l'augmenter à 60 000. Dans son bilan du deux ans de son gouvernement, il a dit, et je cite : «"Il faut y répondre de façon correcte." Le Québec a besoin d'augmenter sa population active...»

Lorsque questionné dernièrement sur ses intentions d'augmenter les seuils d'immigration à 60 000 par année, il a, dans un premier temps, taxé l'opposition d'intolérance, en l'occurrence la deuxième opposition. Ensuite, via la voix de la ministre de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, il a sous-entendu que les oppositions et les journalistes avaient probablement rêvé et qu'ils avaient inventé de toutes pièces le fait que le premier ministre ait exprimé le désir d'augmenter les seuils à 60 000. La ministre de l'Immigration nous a même mis au défi de trouver à quel endroit il aurait dit cela. Ce n'est pas compliqué, M. le Président, on retrouve ces informations dans la politique publiée par son gouvernement, dans la nouvelle politique d'immigration Ensemble, nous sommes le Québec. Et voici ce que le gouvernement affirme, je cite : «Selon les perspectives démographiques, à partir d'un niveau de 60 000 personnes immigrantes admises annuellement, le Québec éviterait un recul de sa population en âge de travailler en dessous de son niveau de 2011 et cette population augmenterait à nouveau et de manière plus marquée à long terme.» Fin de la citation. Je vous le dis, c'est à la page 6 de son document de politique déposé récemment. Alors, pourtant, la ministre de l'Immigration a dit qu'il n'y aurait pas d'augmentation, qu'il y aurait une période de transition — ça, c'était lors de l'avant-dernière période de questions dans laquelle nous avons eu un échange, évidemment — qu'il y aurait une période de transition.

Alors, je souhaiterais savoir ce que veut dire ce chiffre de 60 000 dans la nouvelle politique. On a eu la coutume d'avoir des échanges courtois en commission parlementaire. Est-ce qu'elle peut nous confirmer ici qu'il n'y aura pas de hausse? Et aussi, par le même biais, est-ce qu'elle voudrait nous déposer le graphique 2.8 dont il est question dans sa politique? Ce sont des données qui résultent des simulations produites par l'Institut de la statistique du Québec pour le compte du ministère de l'Immigration et sont illustrées dans le graphique 2.8 du recueil de statistiques de la Politique québécoise en matière d'immigration, de participation et d'inclusion. Cet élément, nous n'avons pas pu le trouver en ligne, donc je pense que, comme on y fait référence dans le document, la ministre doit l'avoir en sa possession. Est-ce qu'elle voudrait le déposer? Et je m'arrêterai là pour l'instant. Je voudrais savoir si elle confirme qu'il n'y aura pas de hausse et aussi si elle aurait l'amabilité de nous déposer ce document en référence au graphique 2.8.

Le Président (M. Picard) : Merci. Mme la ministre.

• (15 h 40) •

Mme Weil : Merci, M. le Président. J'ai demandé qu'on vérifie sur l'Internet parce qu'on me dit qu'on peut le trouver, mais, oui, j'ai le document, je peux le déposer. Mais on va juste voir si on est capables d'y avoir accès, c'est peut-être juste un problème technique. Alors, voici, M. le Président, donc on dépose le graphique.

Je voulais juste dire... Parce que, dans cette étude de l'ISQ — je ne me rappelle pas précisément, là, peut-être qu'un des fonctionnaires pourra me rappeler — je sais qu'on n'avait pas cette donnée-là particulière lorsqu'on a fait la consultation en 2011, mais je me rappelle que l'ISQ avait évoqué des enjeux démographiques à l'époque. Donc, ça fait longtemps que l'ISQ nous en parle, qu'il en parle avec le gouvernement, cette question de personnes en âge de travailler en décroissance. Tout le monde le sait.

Là, nous, on l'a mis, évidemment, dans le document parce que c'est un enjeu. Quand on fait la planification, c'est des enjeux qu'on regarde, ça fait partie du portrait global dans lequel le ministère de l'Immigration travaille dans sa planification pour essayer de voir quels sont les enjeux, quels sont les enjeux économiques, démographiques, des enjeux emploi, intégration, etc., quel est le monde dans lequel nous, on gravite pour bien organiser, si vous voulez, la sélection, la mission et nos programmes d'intégration. Donc, c'était fait dans cette optique-là, sans... honnêtement, à l'époque, quand moi, je l'ai... c'est le ministère qui avait cette information, il n'y avait pas d'arrière-pensée, c'est tout simplement une donnée de l'ISQ. Puis c'est normal d'être transparent. On a mis beaucoup d'information, d'ailleurs, dans ce document de consultation.

Pour la suite des choses, pour moi, évidemment, et pour nous, le gouvernement, on vient de déclencher une réforme très profonde, hein, qui va nous permettre de sélectionner des gens qui pourront intégrer le marché du travail beaucoup plus rapidement mais qui va aussi nous permettre de travailler avec les acteurs régionaux pour que les gens, au lieu de passer par Montréal, aillent en région, qu'on puisse définir, mieux définir les besoins des régions pour amener les gens directement en région. Et vous avez suivi, les collègues en face de moi, la consultation en 2015, ensuite en 2016, le projet de loi, on a fait tout ce travail ensemble, et vous avez vu l'adhésion à certains éléments piliers de cette transformation. Mais vous comprenez bien que ce n'est pas des transformations qu'on pourra amener rapidement. Bien, on peut les amener rapidement, mais pour l'année prochaine.

Alors, je ne veux pas revenir sur qui a dit quoi et quand, mais c'est sûr qu'il y avait une... moi, dans les commentaires que j'avais, il y avait cette impression qu'on avait décidé pour 2017, mais c'est important que nous, on fasse, au ministère de l'Immigration, un travail très sérieux et qui n'est pas encore complété, c'est cette planification sur plusieurs années, et qu'on puisse donner... et vraiment c'est moi qui a... comment dire, pour moi, c'est très important qu'on puisse me dire exactement quand est-ce que certaines de ces réformes pourront donner les résultats escomptés. Alors, on ne peut pas le faire du jour au lendemain, certainement pas pour janvier 2017.

Alors, c'est ça, dans toute grande réforme de la sorte — et vous savez que l'immigration, c'est quand même un dossier complexe — il y a des facteurs externes qui ont une influence sur la question de gens qui vont venir, de la mobilité des gens et les choix qu'ils font pour venir ici ou ailleurs. Il y a le contexte d'un système dual, si vous voulez, fédéral-provincial, qui a un impact aussi, donc, et finalement il y a notre propre marché du travail, notre propre réalité qui est extrêmement importante, d'où l'importance de la consultation.

Alors, ce que je peux vous dire, c'est qu'on fera cet exercice. Vous allez avoir l'information ce printemps. Donc, on va lancer, si vous voulez, les orientations du gouvernement sur quelques années avec des cibles, des cibles qui vont tenir compte de plusieurs facteurs; oui, des facteurs démographiques, des facteurs des besoins du marché du travail, mais aussi des facteurs d'intégration au marché du travail pour nous assurer qu'en temps réel on puisse continuer à sélectionner des gens qui sont très scolarisés, qui parlent français et qui ont vraiment une contribution à faire, à donner à la société québécoise.

C'est des gens, vous savez — j'aime le dire, M. le Président, parce qu'il y a beaucoup d'études qui attestent de ça — qui sont, de par nature — et je regarde le député en face moi, qui a vécu cette expérience — courageux. Ils ont quitté leurs pays pour se faire une nouvelle vie ailleurs. Donc, ça prend beaucoup de courage pour, comment dire, entamer une aventure de la sorte, et c'est important de valoriser puis de comprendre. Aussi, ils sont très scolarisés. Alors, on choisit des personnes qui ont toutes les compétences pour intégrer le marché du travail, mais il y a un laps de temps qui est trop long, hein? De zéro-cinq ans, le taux de chômage est plus élevé. On le voit avec le temps, les personnes intègrent le marché du travail sur une période de 10 ans. Et évidemment, au-delà de 10 ans, ils s'intègrent très bien, mais c'est trop long. Alors, c'est pour ça, cette réforme. On veut qu'ils intègrent rapidement.

Donc, la planification tiendra compte, et je tiens à le souligner pour mon collègue et mes collègues en face... oui, les volumes, mais aussi la composition est aussi très importante, la composition dans le sens de quel est le profil de travailleurs qu'on recherche pour combler les besoins qui sont partout au Québec. On ne parle pas assez de ça. Mais vous avez suivi la réforme, et il s'agira, lorsque la consultation va débuter, de mettre l'accent aussi sur est-ce que la composition reflète bien ce qu'on souhaite comme société québécoise au plan des travailleurs qualifiés, puis que nous, on puisse le justifier en pourcentages. La connaissance de la langue aussi est toujours un enjeu important lors de la consultation.

Document déposé

Le Président (M. Picard) : Merci, Mme la ministre. Je confirme le dépôt du graphique 2.8 qui traite de la population en âge de travailler, 20-64 ans, et projetée selon les différents groupes d'immigration. M. le député de Bourget, c'est à vous.

M. Kotto : Merci, M. le Président. Donc, si j'entends bien la ministre, sa parole est celle qui prévaut au niveau du gouvernement relativement à cette volonté exprimée par le premier ministre à l'effet d'augmenter les seuils de 20 %. Et ça, à sa décharge, elle l'a toujours dit même en commission parlementaire, qu'elle attendrait l'exercice parlementaire en commission bientôt, probablement cet automne, un exercice portant sur les seuils, justement, entendre les personnes, les associations, les organismes, les experts et autres avant de prendre une position là-dessus.

Ce qui est inquiétant, c'est que son patron, le premier ministre, affirme depuis... et j'ai des articles de journaux ici qui nous ramènent jusqu'en 2015, l'été 2015, affirme, affiche son intention de hausser les seuils. Et il a exprimé cette volonté sans même attendre que cette commission siège. C'est ça qui inquiète.

Donc, c'est la raison pour laquelle je posais la question à ma collègue ministre, bien estimée collègue, la dernière fois que nous avons eu un échange, ici, en Chambre, à savoir qui disait vrai. Est-ce que c'est la ministre ou le premier ministre? Mais j'ai constaté que, depuis que la ministre a remis les pendules à l'heure relativement au paradigme qu'il convient de suivre avant de s'afficher publiquement en ces matières, le premier ministre ne s'est pas beaucoup exprimé. Donc, je prends sa parole comme une indication formelle. Devrais-je?

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : Écoutez, je dois le dire parce que le premier ministre n'est pas ici, mais le premier ministre est sûr que la préoccupation qui est exprimée dans le document par rapport au défi démographique du Québec, c'est une réalité. Le premier ministre le sent, il le sent partout, comme moi aussi, hein, honnêtement, comme ministre de l'Immigration. Certainement, on le sent beaucoup dans certains territoires que ça frappe. Je tiens à le souligner, le premier ministre l'a répété en Chambre ici, qu'il y a un processus démocratique et que nous allons soumettre des orientations. Alors, le premier ministre l'a dit. Le premier ministre et moi, on est sur la même page dans ce sens-là. Que le premier ministre évoque l'enjeu démographique, c'est tout à fait sa responsabilité de le faire, mais je pense que le gouvernement, on peut le dire, tout le monde est sur la même page. Il s'agira de proposer des orientations à la population et d'en débattre dans le cadre d'une vaste consultation publique. Et d'ailleurs on l'a même inscrit dans la loi, que ce seraient des consultations générales. C'est inscrit dans la loi, c'était une pratique. Donc, ça vient renforcer cette notion bien importante d'un exercice démocratique.

Le Président (M. Picard) : M. le député de Bourget.

M. Kotto : Merci, M. le Président. Je voudrais amener nos collègues à la page 125 du cahier explicatif des crédits. À la page 125, à la question relative au nombre d'entrevues de sélection pour l'émission de certificats de... enfin, de CCQ, dans la catégorie économique, réalisées pour les années civiques 2014 et 2015, nous avions demandé une ventilation par pays, par programme d'immigration ainsi que le nombre de sélections sur dossier pour l'émission d'un certificat de sélection du Québec. Et, chose remarquable, il y a comme une tendance, M. le Président. Ça, c'est une observation générale, les approches par entrevue ont baissé drastiquement versus les approches par dossier. On remarquera que, pour le total des travailleurs qualifiés, l'émission de CSQ s'est faite via des entrevues à hauteur de 3 479 et, sur dossier, à 13 473. Et à titre comparatif, les entrevues en 2012 étaient de 12 365 versus les approches dossier, à 6 083; en 2013, à 7 638 versus les dossiers à 5 266; et en 2014, les CSQ validés sur entrevue à 4 002 versus sur dossier à 7 033. Pourquoi cet écart? Pourquoi cette variation? Est-ce un problème de ressources humaines ou un changement technique quelconque? Pourquoi cette variation drastique?

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : Oui, si je comprends bien : Pourquoi la baisse du nombre d'entrevues, c'est bien la question?

• (15 h 50) •

M. Kotto : Exact. Et surtout l'augmentation de l'approche dossier.

Mme Weil : On en avait discuté aux crédits l'année dernière. D'ailleurs, l'intention, c'est de ne plus avoir d'entrevue — alors, on avait beaucoup discuté de ça l'année dernière — parce que les systèmes modernes d'immigration ne font plus d'entrevue. Donc, ça va dans la bonne direction. La raison pour laquelle il y a encore des entrevues, c'est des entrevues de contrôle de qualité, mais aussi parce qu'il reste quelques dossiers, mais de moins en moins, de gens qui n'ont pas pu, c'est ce qu'on m'explique, faire le test de français. Donc, l'entrevue est pour vraiment valider le niveau de connaissance de la langue.

Et vous pouvez vous imaginer, avec le nouveau système de déclaration d'intérêt, ça devient encore plus évident que la sélection se fait par le profil de la personne et qu'on sélectionne dépendant du besoin puis l'arrimage qu'on en fait avec le marché du travail.

Donc, je vérifie une chose, mais, si je comprends bien, au fédéral, c'est peut-être des contrôles de qualité. Je ne sais pas s'ils font même des entrevues. C'est fini?

Une voix : ...

Mme Weil : Moins de 5 %. Donc, l'objectif de tous les systèmes d'immigration modernes, c'est de ne pas faire d'entrevue. La raison fondamentale, c'était que c'était très aléatoire, hein, et ce n'était pas uniforme. Alors, l'impression d'une personne peut être très différente de l'impression d'une autre personne par rapport à la personne devant elle. Et c'est un exercice beaucoup plus objectif, évidemment, si on va tout simplement sur les critères identifiés dans la grille de sélection.

Le Président (M. Picard) : M. le député de Bourget, il vous reste deux minutes.

M. Kotto : Deux minutes. M. le Président, oui, juste pour aller sur une ligne, celle de l'Asie. Le nombre d'entrevues est de 160 et le nombre de traitements d'approche sur dossier est de 2 193 en 2015, comparativement à 233 en 2014 et 92 en 2013. Il y a un nombre exorbitant de validations qui suggère une explication. Est-ce que c'est une approche... Parce que, quand on compare avec l'Afrique du Nord, par exemple, on voit qu'il y a une baisse drastique dans la validation des dossiers venant d'Afrique, et du Nord précisément, mais une augmentation drastique vers l'Asie. Est-ce que c'est un changement, disons, informel d'intérêt de bassin d'immigration?

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre, en 45 secondes.

Mme Weil : Donc, oui, premièrement, donc, si vous regardez en bas, total travailleurs qualifiés, on a fait beaucoup plus de dossiers, hein, quasiment le double. Donc, il y a eu beaucoup plus de dossiers à traiter, ça, c'est la première partie de la réponse, en 2015 qu'en 2014, donc un volume plus important. Maintenant, on me dit, puis on verra s'il faut plus de détails dans les explications, qu'il y avait énormément d'inventaires de dossiers de l'Asie, et c'est vraiment des dossiers de travailleurs qualifiés. Est-ce que, donc, c'est vraiment l'explication?

Une voix : ...

Mme Weil : C'est un nombre important dans l'inventaire de dossiers de l'Asie. D'ailleurs, en 2015, la Chine est le deuxième bassin d'immigration en 2015. C'est des données qui viennent de sortir, en fait.

Le Président (M. Picard) : Merci, Mme la ministre. Maintenant, du côté de la partie gouvernementale, Mme la députée de Crémazie.

Mme Montpetit : Je vous remercie, M. le Président. Peut-être que la ministre souhaite compléter sur notre temps?

Le Président (M. Picard) : Est-ce que vous aviez un complément? Non, ça va? Mme la députée.

Mme Montpetit : Parfait. Je vous remercie. Alors, bien, je veux en profiter pour saluer la ministre et toute son équipe, le député de Bourget, de l'opposition officielle, la députée de Montarville, de la deuxième opposition. C'est un plaisir de prendre la parole dans ces crédits qui sont fort importants. Puis, comme députée de Montréal, évidemment, la question de l'immigration revêt une importance particulière.

Et d'entrée de jeu le sujet que je souhaiterais aborder, la ministre l'a abordé dans ses notes préliminaires, dans son préambule, la question des réfugiés syriens. Avec la crise humanitaire qu'il y a eu en Syrie, le gouvernement du Canada avait pris, à l'automne dernier, l'engagement d'accueillir 25 000 réfugiés syriens. 10 000 réfugiés, majoritairement parrainés, étaient prévus au 31 décembre 2015 et 15 000 autres jusqu'à la fin février 2016. Et le Québec a fait sa part face à cette crise humanitaire, et je vais me permettre de revenir... Bon, c'est ça, le 7 septembre 2015, la ministre de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, accompagnée de sa collègue la ministre des Relations internationales et de la Francophonie, dévoilait les mesures que le Québec mettait en place en vue d'accueillir un plus grand nombre de personnes réfugiées. Afin de soutenir les organismes de coopération internationale québécois qui oeuvrent sur le terrain... Et je me permets de citer ça parce qu'une forte proportion, pour ne pas dire la majorité, des réfugiés syriens qui ont été accueillis à Montréal l'ont été dans Ahuntsic et Saint-Laurent, qui sont des quartiers tout juste à côté de ma circonscription, et de nombreux organismes communautaires de ma circonscription, donc, ont été appelés à se mobiliser pour permettre l'accueil de ces réfugiés.

Et donc suite à l'annonce de la ministre en septembre dernier, de nombreuses mesures ont été mises en place pour répondre à la demande, pour permettre l'intégration des réfugiés, pour permettre de façon optimale leur accueil, et là j'en cite quelques-unes, là, c'est ça : le ministère, donc, de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion avait organisé des séances d'information à l'intention des organismes et des personnes qui souhaitaient parrainer des réfugiés syriens; un comité ministériel regroupant tous les ministères impliqués a été créé aussi afin d'organiser l'arrivée massive et l'accueil des réfugiés syriens; plusieurs ministères ont délégué des fonctionnaires pour oeuvrer au centre de bienvenue qui a été mis sur pied par le gouvernement fédéral afin de faciliter l'accueil des familles réfugiées. Et donc, à cet effet, je suis extrêmement fière, là, de comment ça s'est passé, dans le fond, au niveau de l'implication du gouvernement du Québec.

Et, quand je disais que le Québec a fait sa part dans cette crise humanitaire, je pense qu'il est bon de le rappeler, la ministre le soulignait d'entrée de jeu, mais ce sont donc 5 332 réfugiés, dont 4 445 réfugiés parrainés, qui ont eu leur destination au Québec, et au total ce sont 7 300 réfugiés syriens qui seront accueillis au Québec. Et, à cet effet-là, même le premier ministre a pris un engagement personnel de parrainer lui-même une famille, là, pour qu'elle s'installe dans sa région. Et, bon, je le cite, là, il disait à l'époque : «Mon épouse Suzanne et moi [avons] décidé de faire partie d'un groupe de parrainage. J'ai déjà contacté des personnes, des gens de grand coeur, qui ont décidé de poser ce geste-là avec nous. Je tiens à ce que la famille vienne s'établir dans la région et dans le nord du Lac-Saint-Jean spécifiquement.» Donc, c'est aussi pour souligner que, jusqu'au premier ministre, l'implication des Québécois a été forte, et l'accueil, et l'installation des réfugiés ne s'est pas faite non plus seulement à Montréal, mais s'est bien faite dans tout le Québec.

Et, à l'initiative, bon, que je viens de souligner du premier ministre, il y a eu des centaines et des centaines d'initiatives de solidarité et de générosité qui ont été mises de l'avant suite à l'annonce de la ministre. Je pense qu'on voyait passer ça sur les réseaux sociaux quotidiennement à l'époque : des dons de vêtements chauds parce que les réfugiés arrivaient au mois de décembre, en pleine tempête de neige, du mobilier, des biens de première nécessité, jusqu'à des oursons pour les enfants. C'est vraiment le Québec dans toute sa beauté, là. On sait qu'on est un peuple extrêmement généreux, les Québécois sont très accueillants, puis cet épisode-là nous l'a très, très, très bien démontré par la grande mobilisation des Québécois, qui, vraiment le coeur sur la main, se sont dit : Bon, bien, si ça m'arrivait à moi demain matin, j'aimerais qu'on ait ce geste de solidarité, et ça a été un mouvement très, très, très impressionnant qui fait extrêmement chaud au coeur.

Je relisais certains articles de journaux qui avaient été publiés à l'époque, puis je me permettrais d'en lire un petit extrait qui avait été publié dans Le Soleil au mois de décembre l'année dernière et qui va comme suit, là : «En fuyant la guerre qui fait rage dans leur Syrie d'origine, jamais Nabi Sabeh [et] Jeanet Jiji et leurs enfants ne s'étaient imaginé être accueillis avec tant d'amour dans leur pays d'adoption. Quelques jours après son arrivée, la première famille de réfugiés syriens à s'établir à Québec est renversée par le chaleureux accueil.

• (16 heures) •

«[...]la petite famille rayonnait au moment [où elle racontait] leurs premiers jours dans la ville de Québec. Au-delà de la neige, qui fait le bonheur des enfants, c'est la simplicité de leur intégration qui renverse Nabi et sa femme[...]. "C'est inimaginable pour moi qu'à notre arrivée, le 29 décembre au soir, des gens que nous ne connaissions même pas avaient fait le voyage à Montréal pour nous accueillir et nous ramener à Québec à travers la tempête. Ici, un appartement où on ne [manquait] absolument de rien nous attendait"...» Et c'est un extrait parmi tant d'autres de très, très, très belles histoires de gens qui ont été accueillis soit par leur famille ou soit effectivement par des étrangers qui souhaitaient contribuer à cette crise. Et je suis extrêmement fière, moi, que, comme société, on arrive à retourner une situation qui est aussi horrible, que les gens fuyaient, à une situation positive d'accueil, de générosité, de sécurité et de liberté.

Et les médias, encore ce matin dans Le Devoir, tous les jours encore, témoignent de très, très, très belles histoires d'intégration de ces nouveaux Québécois, notamment d'enfants qui, dès le lendemain de leur arrivée ou presque, dans les jours qui suivaient, intégraient des classes d'accueil et qui, quelques mois seulement après leur arrivée — donc on est à trois mois de leur arrivée aujourd'hui — parlent déjà le français, se sont fait des amis, se sont intégrés dans les différents quartiers où ils habitent.

Et c'est très enthousiasmant de voir comment, comme société, on est capables d'accueillir des gens qui fuient une situation horrible, mais de voir aussi comment notre gouvernement, comment le ministère de l'Immigration a réussi à mettre en place un encadrement, dans le fond, qui a permis d'accueillir, donc, des milliers de personnes de façon relativement optimale, que ce soient des biens de première nécessité jusqu'à l'école, jusqu'aux appartements. Donc, je pense qu'on peut être très fiers du ministère.

Puis j'en profiterais pour laisser la ministre nous en parler davantage, sur ce qui a été fait, mais sur ce qui s'en vient aussi également au niveau des réfugiés qu'il reste encore à accueillir.

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : Merci, M. le Président. Je remercie beaucoup ma collègue la députée de Crémazie. Je pense qu'on a tous été très émus par ce grand dossier, qui est l'accueil des réfugiés syriens, évidemment surtout la période du mois de décembre et janvier, avec l'arrivée d'un nombre important de réfugiés qui sont venus s'installer ici, au Canada, mais au Québec aussi. Alors, je suis très fière de parler de ce dossier puis je pense que c'est une fierté que je partage — et j'espère que je partage, mais je crois bien pouvoir le dire — avec tous les Québécois. Je pense qu'on a démontré non seulement notre savoir-faire... Parce que, quand on pense à l'opération d'accueil au centre de bienvenue et comment tous les ministères ont travaillé ensemble, le ministère de la Santé, le ministère de l'Immigration, le ministère de la Sécurité publique et j'en passe, avec le gouvernement fédéral, et comment cette collaboration, dans une atmosphère fébrile d'émotions à l'accueil...

Moi, je me rappelle de cette soirée, la première soirée. On attendait le premier avion qui allait atterrir. Il y avait beaucoup de ministres qui étaient là, mais il y avait la Croix-Rouge qui était là, tous les ministères qui étaient là, prêts à les accueillir. Et, à partir de ce jour-là... je ne me rappelle plus de la date exacte, c'est au mois de décembre, quelques semaines avant Noël, le 11, 12 décembre, et ensuite l'opération qui a continué pendant le mois de décembre, et ensuite en janvier jusqu'à fin février jusqu'à ce que le gouvernement atteigne son objectif... En date d'aujourd'hui, on me dit qu'on est rendus à 5 408. Il faut savoir que c'est un objectif de 7 300 qu'on s'est donné sur deux ans, 2015 et 2016.

Je tiens aussi à souligner mes souvenirs extraordinaires de travail, de collaboration avec le député qui était à l'époque ministre de la Sécurité publique, qui est maintenant ministre délégué aux Finances, le député de Châteauguay. On a eu beaucoup, beaucoup de plaisir à travailler ensemble dans ce dossier. On avait fait une visite, même, à Ottawa pour rencontrer le ministre de la Sécurité publique et le ministre de l'Immigration. Cette mission-là, c'était pour valider, vérifier les mesures de sécurité et de santé qui seraient et qui allaient être entreprises par le gouvernement fédéral. Évidemment, ils nous ont rassurés. Si on se rappelle bien, à cette époque — c'était, je pense bien, fin octobre, début novembre — on voulait s'assurer que toutes les vérifications de sécurité se feraient non sur sol québécois, évidemment, mais à l'extérieur de nos frontières. Et, pour le Canada, évidemment, c'était important que les vérifications se fassent outremer aussi.

Alors, à partir du moment, donc, qu'on l'a annoncé — nous, c'était au mois de septembre, c'était la fin de semaine de la fête du Travail — on a annoncé notre volonté d'accueillir le triple du nombre de réfugiés syriens en l'espace de... donc pour 2015 et 2016. Et on a tout de suite mis notre gouvernement en action pour mobiliser surtout notre ministère, à ce moment-là. On se rappelle qu'il y avait des élections, à ce moment-là, donc le gouvernement fédéral actuel n'était pas encore en poste, mais on a quand même, nous, travaillé, au ministère de l'Immigration. On a rencontré les groupes qui voulaient faire du parrainage, on a encouragé, on a informé, on a bien indiqué... Et c'est vraiment... Je félicite mon ministère pour tout le travail qu'ils ont fait. Ils ont été extraordinaires, je tiens à le dire ici publiquement.

Parce que, vous savez, on ne voit pas nécessairement, hein, tous ceux qui travaillent derrière, mais certains m'ont dit que ça a été peut-être l'expérience de leur vie, de leur carrière professionnelle, surtout ceux qui sont en immigration humanitaire, on peut imaginer. De sentir que toutes les actions qu'eux pouvaient entreprendre allaient changer le destin d'une personne, d'une famille, d'une communauté, c'est très émouvant. Et je pense que tous les Québécois, on a senti cette fierté qu'on faisait quelque chose — on ne pourra pas sauver, évidemment, tout le monde, mais... — que, oui, le Québec faisait sa part et qu'on allait mettre l'énergie, la détermination, comme je le dis, notre savoir-faire.

Moi, j'ai eu l'occasion de témoigner de ce savoir-faire lorsqu'il s'agissait des suites du tremblement de terre en 2010 en Haïti. Aussi, ça a été un choc, hein, un choc épouvantable pour tous les Québécois à cause de cette relation d'amitié qu'on a avec Haïti. Mais j'ai pu témoigner. On nous a invités, comme ministres députés, si on voulait aller voir les opérations à l'aéroport. À l'époque, c'était l'aéroport Trudeau, ce n'était pas le centre de bienvenue. Et on a pu voir comment on est organisés, au gouvernement du Québec, quand il y a des situations, des crises de ce genre et qu'on se met en branle et on se met en action. Moi, ça m'a rendue, honnêtement, très fière de pouvoir le témoigner. Alors là, dans ce dossier-là, pour nous, dans un premier temps, évidemment, c'était l'accueil, hein, de vraiment nous assurer que, dans les premières heures, on leur donnait assez d'information pour les orienter.

Il faut savoir que ces personnes-là, les réfugiés syriens, ne parlent ni français ni anglais. Ils ont certaines notions d'anglais, et certains qui sont passés par Beyrouth, par le Liban... Ça, ça m'a intéressée, parce qu'ils disaient, bon, qu'ils ne pouvaient pas parler français, mais là j'ai écouté une phrase ou deux qu'ils pouvaient dire avec un accent français et j'ai dit : Mais où est-ce que vous avez appris votre français? Bien, j'ai passé quatre ans au Liban. Ça n'a pas été des années faciles, mais, comme vous le savez, le Liban a été un des pays qui a reçu, évidemment, comme la Turquie, comme la Jordanie, beaucoup des ces réfugiés qui ont quitté de peine et de misère dans des conditions extrêmement dangereuses et qui se sont retrouvés dans ces pays. Et ces pays ont joué un rôle important. D'ailleurs le haut-commissaire des Nations unies tient à le souligner, quand le représentant fait des discours publics, parce que souvent on oublie.

On est fiers de ce que nous, on fait, l'accueil de ces réfugiés venant de partout et de la Syrie. Mais ces pays limitrophes, eux, évidemment, c'est des milliers de personnes, hein, qui sont chez eux. Donc, ils doivent s'assurer d'une certaine sécurité, de fournir du logement le mieux qu'ils peuvent. Mais on sait que les conditions ne sont pas faciles parce que là les gens peuvent nous en parler.

Je vais vous expliquer un peu, donc, ce qu'on a fait, mais je voudrais souligner aussi le rôle des médias dans ce dossier. Il n'y a pas un jour, hein, qu'on n'a pas vu... Évidemment, moi, dans la revue médiatique que je reçois au ministère de l'Immigration, il y a beaucoup d'articles, encore tous les jours, de toutes les régions. Et d'ailleurs on avait fait un inventaire, mais ça, c'était déjà il y a une époque, là, hein? En date du 9 février, nous, il y avait 51 articles imprimés, 23 des reportages à la télévision, 24 radios, mais ça continue. Je ne sais pas si vous avez suivi la série de Lisa-Marie Gervais, D'Alep à Rosemont. C'est l'histoire de la famille Darwish. Ils ne sont pas encore arrivés. Je pense que tout le monde est curieux pour voir... D'ailleurs j'avais même posé une question, si on pouvait savoir quand ils vont arriver en sécurité. Je vous invite à lire cette série. L'article quatre de quatre était dans Le Devoir ce matin. Mais c'est intéressant parce que l'article explique comment un groupe de parrainage s'est organisé, les responsabilités qu'ils ont prises à leur charge pour s'occuper pendant un an, fournir tous les besoins, fournir toutes les nécessités de la vie à cette famille, les hauts et les bas, les émotions de cette expérience.

Donc, il y a deux façons, évidemment, deux façons d'accueillir et d'intégrer ces personnes : il y a le programme de parrainage privé et il y a les prises en charge par l'État. Donc, la majorité, c'est des gens qui sont parrainés par des familles avec l'aide d'organismes des églises de parrainage. Et, je vous dirais, la plupart d'entre eux vont se retrouver à Montréal, à Laval et à Sherbrooke parce que c'est là qu'on trouve les communautés syriennes les plus importantes.

Et le Canada... ou le Québec, si on veut, représente le nombre de réfugiés parrainés privés... De façon privée, la moitié des parrainages sont issus du Québec. La raison est fort simple : on a la plus importante communauté syrienne au Canada, mais suivie de très près par Toronto, par l'Ontario et Toronto. Et on voit que c'est le Québec et l'Ontario, je pense, qui représentent la moitié des réfugiés syriens, globalement, pour tout le Canada.

Mais c'est une voie qui est intéressante, les prises en charge par l'État. Je l'expliquerai... Il me reste combien de minutes?

• (16 h 10) •

Le Président (M. Picard) : Deux minutes.

Mme Weil : Deux minutes. Donc, les prises en charge par l'État, eux, c'est des gens qui vont aller dans les 13 villes, les 13 villes qui sont nos villes partenaires. Mais c'est parce qu'il y a un organisme communautaire, dans cette ville, désigné, qui a l'expérience, les compétences, l'expertise pour s'occuper de l'accueil et l'intégration de ces personnes réfugiées. Donc, on s'assure de la francisation, on s'assure que les enfants sont inscrits à l'école. Et, avant même d'amener la famille dans ces régions, on demande — par exemple, nous, on a une famille de six, une famille syrienne avec six personnes, quatre enfants : Est-ce qu'il y a une disponibilité de logement pour une famille de six? Et la ville nous dira : Non, non, on n'a pas tout de suite, ou oui. Et généralement c'est oui, et donc il n'y a pas de délai d'attente.

Donc, nous, au Québec, on n'a pas vécu ce que d'autres villes comme Vancouver, Toronto et Ottawa ont vécu, c'est-à-dire, à un moment donné, ils ont dit, à Ottawa : Arrêtez, s'il vous plaît, parce qu'on n'a pas assez de logements pour ces grandes familles. Parce que, c'est vrai, dans le cas des prises en charge par l'État, ça a tendance à être des familles plus importantes.

Mais, pour les parrainés, donc, on s'assure évidemment d'accès aux cours de francisation. Et c'est les parrains qui s'occupent de l'inscription à l'école. Mais, jusqu'à date, les commissions scolaires à Montréal, à Laval, Sherbrooke nous ont dit qu'il n'y a pas de problème pour l'instant, tout va bien, les enfants sont bien intégrés dans leurs classes.

Et une statistique intéressante. C'est entre un quart... ou presque un tiers des réfugiés syriens, c'est des enfants. C'est une donnée importante parce que ça représente notre avenir. C'est des enfants qui apprennent la langue très rapidement. Là aussi, si vous regardez les reportages, il y a eu beaucoup de reportages sur la francisation. Et finalement la rapidité avec laquelle ces enfants apprennent la langue, c'est encourageant, parce que c'est ça aussi, l'histoire de l'immigration au Québec. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre, je cède maintenant la parole à Mme la députée de Montarville pour une période de 19 minutes.

Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, Mme la ministre commence à me connaître. Elle sait que j'ai des sujets qui me tiennent particulièrement à coeur : les cours de français, la francisation obligatoire pour, naturellement, les immigrants qui ne le comprennent pas et l'apprentissage de nos valeurs communes, nos valeurs démocratiques à tous, comme vous aimez si bien le dire, Mme la ministre.

Alors, ma première question va porter sur ce cours qui existe, qui n'est pas une lubie, qui s'appelle Objectif intégration. Ce cours est offert. Alors, ce cours Objectif intégration prévoit deux modules de trois heures chacun sur les valeurs, la culture et l'histoire québécoises. Tout ça pour un total de six heures de cours. On s'entend, ce n'est pas beaucoup, six heures. Malgré qu'elle soit beaucoup trop sommaire pour réellement initier les nouveaux arrivants à nos valeurs communes et que nous estimons qu'elle devrait être révisée, cette formation, elle est importante. Pour nous, c'est important que les immigrants comprennent et apprennent ce que sont nos valeurs, notre culture et notre histoire. C'est ce qui fait notre société.

Or, il y a de moins en moins de personnes qui s'inscrivent à ce cours — qui est non obligatoire, faut-il bien le mentionner — et ce, année après année. Alors là, on a des chiffres pour illustrer dans quelle mesure il y a de moins en moins de monde qui y participe. En 2012, 10 696 immigrants seulement y avaient participé. Et là ce nombre — ça, c'est en 2012 — continue à diminuer d'année en année : 10 350 personnes y étaient inscrites en 2013 et l'ont suivi — mais ce qu'il faut savoir, c'est que 80 % des immigrants n'y ont pas participé en 2013; en 2014, 8 946 personnes y étaient inscrites et ont suivi ce cours, mais 82,2 % des immigrants n'y ont pas participé; et, en 2015, les derniers chiffres, 7 987 personnes y étaient inscrites et ont suivi le cours, et là c'est 83,7 % des immigrants qui n'y ont pas participé. De plus, il faut dire que la ministre a réduit de 25 % le nombre de séances offertes le 1er juillet dernier — c'est en 2015 — et la raison donnée : trop faible taux de participation.

Alors, comment la ministre peut-elle justifier cette décision et que fait-elle pour favoriser la participation à cette formation qui est essentielle? Nous croyons que c'est une formation essentielle, alors que faire pour stimuler la participation? C'est ma première question que je soumets à la ministre.

Le Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Mme la ministre.

Mme Weil : Oui. Alors, il y a une explication, mais j'attends les chiffres. C'est le Programme d'expérience québécoise qui est en augmentation parce qu'on fait beaucoup la promotion de ce programme. Donc, c'est les étudiants étrangers qui sont ici depuis déjà plusieurs années et les travailleurs temporaires qui sont ici déjà depuis... certains, quatre ans, quand ils avaient le permis de quatre ans. Donc, c'est des gens qui veulent immigrer parce qu'ils connaissent le Québec, ils aiment le Québec, ils parlent français, ils connaissent nos valeurs. Il y a aussi de plus en plus de Français aussi, donc... ou d'autres pays qui connaissent bien le Québec et connaissent les valeurs.

Mais on me dit que c'est vraiment le programme. Donc, si je donne les chiffres : Programme de l'expérience québécoise, donc en 2012, presque 4 000; donc en 2015, 7 751; 2014, 6 817. Donc, il y a de plus en plus... Et on va voir, avec nos intentions dans la réforme... Et là aussi il y a un consensus important, c'est qu'il y ait de plus en plus de personnes qui passent du temporaire au permanent pour toutes ces raisons. C'est des gens qui sont intégrés, qui connaissent le Québec, qui sont à l'aise au Québec, qui se sentent chez eux au Québec.

Alors, on n'est pas la seule société qui vise ces personnes-là. Je pense que tout le monde découvre que l'intégration se fait bien; ils sont déjà intégrés avec leur diplôme, surtout des étudiants. On demande souvent l'expérience québécoise; là ils ont un diplôme québécois et, 12 jours après... pas 12 jours, 20 jours après qu'ils aient reçu leur diplôme, ils font une demande de certificat de sélection du Québec. C'est très rapide. Alors, c'est l'explication qu'on me donne.

Par ailleurs, oui, je concours sur l'objectif global. La question m'a été posée : Est-ce que je crois que c'est important notamment de participer à ce cours? Moi, j'ai participé à ce cours et j'ai trouvé le cours vraiment intéressant. Il y avait une mixité de gens qui venaient de différents pays. Et je me rappelle, je pense que je l'ai raconté quand on était sur le projet de loi n° 77, je pense que c'est dans ce contexte-là, et on est arrivés sur la question des valeurs québécoises, l'égalité hommes-femmes notamment. Et c'était vraiment intéressant de voir l'échange. Mais une chose que j'ai saisie, c'est qu'eux ont saisi... Et d'ailleurs ils avaient lu ce document-là, Affirmer les valeurs communes de la société québécoise, où on parle beaucoup de l'égalité entre les hommes et les femmes. Ils l'avaient lu et ils avaient parlé de la charte des droits et libertés puis à quel point c'était important de respecter le droit des femmes. Ça, c'est les femmes qui l'ont dit. Mais c'était... comment dire, l'atmosphère était très détendue quand ils avaient ces échanges.

Mais je pense que c'est important. C'est important d'en faire la promotion, comme on va faire la promotion de la langue française et des cours de francisation. Mais je dirais que la tendance s'en va beaucoup plus vers une intégration rapide parce que les gens sont déjà ici.

Je ne sais pas s'il y a d'autres éléments de réponse... Je vérifie s'il y a d'autres éléments de réponse...

Le Président (M. Picard) : Mme la députée de Montarville.

• (16 h 20) •

Mme Roy (Montarville) : Oui. Merci pour la réponse. Je vais poursuivre dans la même veine. Donc, une réduction de 25 % du nombre de séances pour ce cours.

Selon les réponses que vous nous avez fournies par écrit dans le livre des crédits, donc le coût de ce cours-là est passé de 947 316 $ en 2014 à 636 287 $ en 2015. Donc, on réduit le nombre de cours, on réduit les coûts. Autrement dit, on a coupé dans l'apprentissage des valeurs communes et dans l'accompagnement à l'intégration et on a économisé 311 000 $. C'est 33 %. Donc, ma question est : Où est allé ce 311 000 $?

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : Oui. Un moment s'il vous plaît.

(Consultation)

Mme Weil : Ah! l'argent a été transféré aux organismes qui donnent des services personnalisés, on peut dire, aux immigrants, aux nouveaux arrivants, donc tous les organismes qui sont nos partenaires qui s'occupent de l'accueil et l'intégration des immigrants.

Le Président (M. Picard) : Mme la députée de Montarville.

Mme Roy (Montarville) : Merci. Autre question. Seuil d'admission. Mon collègue de Bourget en a amplement parlé.

J'aimerais vous soumettre, bien respectueusement, qu'en 2008, dans une entrevue qui a été publiée dans La Presse et également en 2013 dans un documentaire sur l'immigration, il y a votre collègue le ministre Carlos Leitão qui, lui-même immigrant, estimait que l'intégration est difficile au Québec, et que l'augmentation du volume d'immigrants ne règlera pas la pénurie de main-d'oeuvre, et que la formation doit être privilégiée. C'étaient ses paroles à l'époque. Dans le documentaire, on l'entendait dire : «On s'est créé cette panacée qui va régler tous nos problèmes, avec l'idée d'augmenter l'immigration. Je ne crois pas que ce soit le cas. On se trompe royalement.»

Alors, c'est un clin d'oeil que je vous fais. Force est de constater que Mme la ministre et le premier ministre écoutent de plus en plus, là, ces ministres de l'Économie, de l'Éducation et des Finances qui ralentissent leurs ardeurs à cet égard. Alors, je suis heureuse de constater le changement de position de la ministre et de son gouvernement au sujet des seuils d'immigration, car il faut respecter, M. le Président, notre capacité d'accueil et corriger les difficultés d'intégration actuelles. Et on a vu, lors de l'étude du projet de loi n° 77, que plusieurs intervenants sont venus nous parler de ces difficultés d'intégration. Et il faut régler ces problèmes-là avant de penser à accueillir davantage de gens, ne serait-ce que par respect pour eux. Ce sont eux, les premiers qu'il faut bien intégrer et réussir.

Alors, avant d'accueillir 20 % de plus d'immigrants, les 10 000 de plus qu'avait évoqués le premier ministre, la ministre ne croit-elle pas que nous devrions essayer de retenir ceux que nous accueillons déjà? Et je vais vous embarquer là-dessus, sur des chiffres qui montrent justement une difficulté de rétention. Les statistiques du ministère nous démontrent que des 484 807 immigrants admis au Québec entre 2004 et 2013, 24,5 %, soit 118 792 personnes, avaient quitté le Québec en 2014 pour retourner ou dans leur pays d'origine, ou pour s'installer ailleurs au Canada

 Alors, quelles mesures concrètes la ministre va-t-elle mettre de l'avant pour améliorer la rétention des nouveaux arrivants? Je vous répète qu'entre 2004 et 2013, c'est 25 % des immigrants que nous avons perdus. Alors, que va faire Mme la ministre? Et que prévoyez-vous pour améliorer la rétention? Parce que, dans le projet de loi n° 77 que nous avons étudié, je ne trouve rien pour améliorer le français puis améliorer la rétention. Et les reconnaissances des compétences, puis tout ça, j'y viendrai tout à l'heure. Alors, que voulez-vous faire?

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : Globalement, je vous dirais : Toute la réforme s'adresse à cette question-là. Toute la réforme. Donc, mieux sélectionner, mieux intégrer, mieux vivre ensemble, hein, c'est les trois grands objectifs de la politique d'immigration, de participation et d'inclusion. Évidemment, une des pièces maîtresses, c'est la loi n° 77, qui va nous permettre, avec ce nouveau système, de faire un arrimage plus direct entre le candidat à l'immigration et les besoins du marché du travail, avec des portraits régionalisés. Et, comme je l'ai dit dans le cadre du projet de loi n° 77, l'idée, c'est de mettre nos acteurs régionaux, les chambres de commerce, les élus, les entreprises, en amont avec nous des projets pilotes qu'on veut faire avec les acteurs régionaux. Quelles idées, pensent-ils, vont fonctionner? Quels projets innovateurs pourraient les aider à retenir des immigrants? Parce qu'il y a la rétention en région et il y a la rétention au Québec. C'est deux choses qui se ressemblent dans un sens.

C'est sûr que la mobilité... On le voit un peu partout au Canada, les gens qui vont d'une province à l'autre lorsque le marché de l'emploi est plus fort dans une province. Mais les gens qui quittent parce qu'ils ne trouvent pas l'emploi, les gens qui quittent qui parlent français et ils ne trouvent pas d'emploi, qui sont qualifiés, scolarisés, qu'on a sélectionnés, ça, ça fait mal, hein, que ces gens quittent, nous quittent parce qu'ils n'ont pas trouvé leur place ici, au Québec.

Donc, justement, quand on parle de planification, c'est ça, ces enjeux-là qu'il va être important de regarder dans la planification pluriannuelle, le temps que ça va prendre pour ces réformes de porter fruit, pour qu'on ait cette intégration rapide pour répondre, justement, aux besoins du marché du travail. Il y a le programme des travailleurs temporaires aussi.

Mais, au-delà d'une bonne sélection — et là je sens que les acteurs régionaux embarquent avec nous — on a un programme qui s'appelle Mobilisation-diversité. C'est un programme où on finance les milieux, si on veut, les milieux de vie, là, on pourrait appeler ça les milieux de vie. C'est les villes, les régions, les MRC qui souhaitent... elles ont besoin d'immigration, mais elles savent très bien que la rétention est un enjeu. Souvent, les gens vont s'installer en région, mais s'ils peuvent peut-être avoir un emploi qui n'est pas à la hauteur de leurs compétences, ou peut-être qu'ils ne se sentent pas si bien là... Les acteurs régionaux m'en ont parlé, ils savent qu'ils doivent travailler aussi l'accueil, mais l'intégration, ce qu'on appelle très généralement le vivre-ensemble.

Donc, on a un budget qui est attaché à cette stratégie d'action, qui est sur cinq ans, 42,5 millions. Donc, une partie de ces stratégies d'action, c'est cette partie-là, c'est le vivre-ensemble. Et ça, ça touche directement la rétention. Il n'y aurait pas meilleure façon... Et, honnêtement, on a regardé les meilleures pratiques un peu partout dans le monde, je vous dirais que le Québec est très précurseur avec cette politique. Nous, on n'a pas trouvé des stratégies semblables avec aussi... Si on regarde la stratégie de reconnaissance des compétences et des acquis, qui, malgré beaucoup, beaucoup de progrès ces dernières années... il reste encore des difficultés à ce chapitre-là. Alors, vous vous imaginez quelqu'un qui est très formé, un ingénieur, par exemple, qui n'est pas reconnu ici, mais qu'il apprend qu'il peut être reconnu ailleurs, la personne va partir.

Au-delà de ça, puis j'aurai peut-être des chiffres qu'on va me donner, précis, il y a toujours des gens qui vont partir pour toutes sortes de raisons. Il y a le regroupement familial là-dedans, il y a les réfugiés. On ne peut pas savoir les projets de vie de tout le monde. C'est comme les gens qui quittent l'Ontario pour venir ici. Des Québécois qui quittent pour aller à Toronto, j'en connais beaucoup aussi. C'est des opportunités qui se présentent dans d'autres provinces, ils ont la mobilité. Mais votre question est très pertinente, et c'est pour ça, cette réforme. C'est vraiment s'adresser à ces questions-là pour une bonne intégration.

Le Président (M. Picard) : Mme la députée de Montarville.

Mme Roy (Montarville) : Alors, poursuivons sur cette rétention. Vous nous dites que c'est la loi no 77, puisqu'elle a été adoptée dernièrement, qui va régler la problématique de la rétention. Actuellement, on perd le quart des immigrants qui sont arrivés ici entre 2004 et 2013. Alors, ma question est très simple : Est-ce que vous avez une cible de rétention?

Mme Weil : Mais, bon an, mal an,depuis que moi, je connais bien le dossier d'immigration, c'est à peu près 80 % de rétention depuis des années. Donc, j'imagine... Et, même quand le chômage est plus bas, le chômage est plus élevé. Mais on ne s'est jamais vraiment, comment dire, attardés à la question de rétention au-delà de Montréal, à l'extérieur de Montréal. Et là pour la première fois on va s'attarder à ça.

Je ne sais pas si on a des cibles au ministère de l'Immigration pour le taux de rétention. On voudrait l'améliorer... La rétention, pour ceux qui parlent français seulement, la rétention est — puis ça, c'est des données qui peuvent être intéressantes — 86,1 %. Donc, la rétention va être plus élevée chez les gens qui parlent français et qui...

Une voix : ...

Mme Weil : Oui. Donc, nous, évidemment, une des stratégies, justement, c'est de sélectionner des gens, des travailleurs qualifiés qui parlent français — donc là, on le voit, le taux de rétention est plus élevé; et ensuite qui connaissent le français, c'est élevé aussi; français, anglais, évidemment ils ont le choix de vivre ailleurs, c'est 74,3 %, le taux de rétention; anglais seulement, alors là ça pourrait être le regroupement familial, c'est des gens qui quittent parce qu'ils trouvent ça plus difficile, des investisseurs.

Donc, la langue, hein? Je pense que l'enjeu, c'est la langue, c'est la connaissance de la langue. Et c'est pour ça qu'on investit 4 millions pour faire la promotion des cours de francisation pour que tout le monde puisse participer.

Cible, ça peut être plus élevé, mais je ne veux pas répondre pour le ministère pour l'instant. Pour l'instant, il n'y a pas nécessairement de cible précise, mais c'est certainement de ne pas aller en deçà de 80 %. Parce que moi, j'ai toujours connu le chiffre de 80 %. Si on va en baisse de ça, bon, ça va moins bien. Il faudrait être au-dessus du 80 %.

• (16 h 30) •

Mme Roy (Montarville) : J'ai une question ici qui me tient à coeur. On a fouillé avec une demande d'accès à l'information. En vertu d'ententes administratives, le ministère de l'Immigration verse des sommes au ministère de la Santé, au ministère de l'Éducation et au ministère du Travail pour leur collaboration, naturellement, dans la prestation de services dédiés à l'intégration et la francisation des nouveaux arrivants. Selon une demande d'accès à l'information qu'on a faite, on apprend qu'en 2014 il y a 2 144 900 $ des 12,2 millions qui sont versés au ministère de la Santé par le MIDI qui ont été versés au CSSS de la Montagne, CIUSSS, le CIUSSS du Centre-Ouest de Montréal pour financer — et c'est là que je suis très surprise — leur budget de fonctionnement. Alors, j'aimerais avoir des précisions là-dessus, Mme la ministre. Comment peut-on justifier que des sommes que vous versez à ce CSSS servent à boucler — celle-là, je ne la comprends pas — le budget de fonctionnement du CSSS de la Montagne.

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : J'ai tout de suite... quand vous m'avez parlé du CIUSSS, et j'avais la bonne réponse, c'est les demandeurs d'asile. Parce que c'est le CIUSSS qui s'occupe de ce dossier-là, et ils ont été très sollicités lorsque le gouvernement fédéral — vous, vous parlez de quelle année, là, 2014 — qui avait coupé le programme de santé intérimaire... Vous vous rappelez de ce programme de santé? Et là le gouvernement Trudeau vient de le rétablir. Donc, tous les coûts de santé, c'est le Québec, en 2012, qui a décidé de prendre à sa charge tous ces coûts pour ces réfugiés. Ce CIUSSS, c'est le CIUSSS... avant ça, on appelait ça le centre la Montagne, c'est vraiment le centre d'expertise pour les réfugiés et les demandeurs d'asile. C'est ce qu'on m'explique, c'est ce qui explique l'argent.

Mme Roy (Montarville) : ...court, mais j'y reviendrai peut-être. Mais il y a des précisions à apporter, parce qu'on a demandé, justement, des chiffres avec l'accès à l'information. Pour les réfugiés, ce sont un peu plus de 5 millions qui sont pour les réfugiés. Mais il y a un 2 millions qui s'en va au budget de fonctionnement uniquement, et c'est là que ça me pose problème.

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre, en 20 secondes.

Mme Weil : Oui, on pourra vous revenir après, là, pour être vraiment précis, mais on me dit que c'est le budget de gestion du PRAIDA pour les demandeurs d'asile. Mais on pourra vous revenir avec des chiffres plus précis.

Le Président (M. Picard) : Nous retournons du côté du gouvernement, M. le député de Maskinongé.

Mme Weil : ...est-ce que c'était une demande d'accès à l'information au ministère de la Santé?

(Consultation)

Mme Roy (Montarville) : La réponse, c'est oui, tu me dis? Oui.

Mme Weil : Mais je vois le lien parce que j'étais dans ce dossier-là en 2012. D'ailleurs, c'était le ministre de la Santé à l'époque et moi-même qui avions demandé au gouvernement fédéral de rétablir le programme. C'était Jason Kenney qui était ministre de l'Immigration, et finalement ils ont refusé. Alors, le gouvernement du Québec a été le premier gouvernement du Canada à décider que nous, on allait le prendre en charge, parce que c'était vraiment très désolant de voir ce qui arrivait à ces réfugiés, ces demandeurs d'asile qui avaient des problèmes de santé importants, des enfants qui étaient privés de médicaments et de traitements, des fois dans des situations d'urgence. Donc, on l'a pris en charge, le gouvernement du Québec. Et ce centre-là a été le centre d'expertise qui s'est occupé des demandeurs d'asile. Je vois le rapport, mais on verra si on est capables de donner une suite, c'est un autre ministère.

Le Président (M. Picard) : Merci. M. le député de Maskinongé.

M. Plante : Merci beaucoup, M. le Président. Vous connaissez ma grande générosité, il me fait plaisir de partager mon temps afin que la ministre puisse répondre à ma collègue la députée de Montarville. J'aimerais la saluer d'ailleurs ainsi que le député de Bourget, mes collègues du gouvernement, donc, la députée de Chauveau, la députée de Crémazie, le député de Portneuf et sans oublier Mme la ministre non plus.

Alors, M. le Président, vous savez, tantôt, la ministre, dans sa présentation et en répondant aux questions de ma collègue de Montarville, a effleuré le sujet, qui est un sujet primordial et qui touche, et qui va changer le visage de l'immigration, je crois, au Québec, pour les prochaines années, parce qu'on sait qu'en vertu de l'Accord Canada-Québec le Québec est responsable de la sélection de son immigration, notamment économique, de l'accueil, de l'intégration socioéconomique et linguistique des personnes immigrantes sur son territoire. Mais on sait aussi que le gouvernement s'est donné comme objectif d'augmenter l'adéquation entre le profil des candidats à l'immigration sélectionnés et les besoins du marché du travail au Québec. On sait, M. le Président, que parfois, dans nos régions, il y a de nombreux emplois à pourvoir, et on n'a pas la main-d'oeuvre disponible pour pouvoir pourvoir ces emplois-là. Et on sait, dans les processus d'immigration, le meilleur moyen d'intégrer le plus rapidement possible les personnes, c'est de les intégrer à l'emploi. Donc, d'une autre part aussi, il faut répondre aux besoins de main-d'oeuvre ressentis dans nos régions et dans les industries, ce qui leur permet de se développer et tout ça.

La planification pluriannuelle, M. le Président, du ministère, qui a été réalisée en 2011, donne un objectif que 50 % des requérants principaux sélectionnés dans la catégorie des travailleurs qualifiés ait un domaine de formation en lien avec nos besoins du marché du travail ici, au Québec, M. le Président. De plus, le ministère de l'Immigration et la ministre se sont engagés, dans le cadre de la réforme du plan d'action du gouvernement du Québec en matière d'immigration, de participer, et d'inclure, et favoriser l'adéquation optimale entre les profils des candidats qu'on sélectionne, mais aussi au niveau des besoins évolutifs du marché du travail, et ce, M. le Président, dans toutes nos régions au Québec.

Comme vous le savez, et la ministre en a fait allusion un peu tantôt, l'enjeu soulevé est un enjeu d'intégration socioprofessionnelle, et ce qui est important, M. le Président, que rapidement, les personnes immigrantes, qu'on maximise leur contribution au développement socioéconomique de notre société québécoise. Donc, on se rappelle que, le 8 mars dernier, la ministre a rendu publique la nouvelle politique québécoise en matière d'immigration, de diversité et d'inclusion, intitulée Ensemble, nous sommes le Québec. Cette stratégie qui a été lancée est accompagnée d'une enveloppe budgétaire de 42,5 millions de dollars sur cinq ans, ce qui est une somme considérable. Vous savez, de plus, en avril 2016, nous avons adopté le projet de loi n° 77.

Moi, M. le Président, j'aimerais aujourd'hui que la ministre puisse nous faire part, qu'elle nous entretienne du nouveau processus et du nouveau système de sélection qui joindra en même temps adéquation besoins de main-d'oeuvre et immigration dans nos régions au Québec. Donc, M. le Président, si la ministre peut nous clarifier ce point.

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

• (16 h 40) •

Mme Weil : Merci, M. le Président. Donc, je pense que c'est important de rappeler le contexte de cette réforme, parce que l'immigration évidemment est affectée par toutes sortes de conditions qu'on vit ici, au Québec, mais aussi par des mouvements qu'on voit à l'international. Premièrement, et c'est noté par tous, tous les experts, c'est que le Québec est confronté à une situation démographique marquée par le déclin de sa population en âge de travailler, les 25-64 ans. Le départ à la retraite des baby-boomers crée une rareté quant à la main-d'oeuvre disponible, et les projections d'Emploi-Québec nous indiquent que, d'ici 2020‑2022, près de 1,4 million d'emplois seront à pourvoir, dont 18 % par l'immigration. Ce n'est pas 100 %, c'est 18 %. C'est quand même un chiffre important, il faut le noter. Donc, l'immigration va contribuer à combler ces postes qui sont rendus disponibles à cause du départ à la retraite de baby-boomers.

Alors, les sociétés industrialisées, évidemment, il y en a de nombreuses, doivent relever exactement les mêmes défis que nous. Et donc on est tous, toutes en compétition pour attirer les talents stratégiques pour combler justement les besoins de croissance de nos entreprises ou les besoins tout court de nos entreprises. Donc, ça crée un évidemment de compétitivité. Nous, on le voit. Sans dire qu'on est en compétition avec le Canada, mais on regarde quand même le système canadien pour voir son efficacité, puis on regarde les meilleures pratiques, on regarde d'autres sociétés. Évidemment, il y a les États-Unis, hein, les États-Unis qui attirent des gens, vous le savez, des gens qui ont le choix d'aller à Silicon Valley, ou ils peuvent aller à New York, ou Boston, ou Toronto, mais on veut qu'ils viennent ici. Donc, il faut avoir des mesures pour les attirer, réduire les délais, nous assurer qu'on a un système d'immigration qui est fluide, rapide, efficace et tout ça parce que les gens qui bougent, qu'on appelle ces talents stratégiques, ils ont quand même le choix, hein, le choix de sociétés dans lesquelles ils veulent s'établir. Donc, c'est ça, le contexte de compétitivité, et le Québec évolue dans une économie mondialisée où les gens sont de plus en plus, donc, mobiles, et où les pays d'immigration se disputent les meilleurs talents.

Alors, comme d'autres systèmes, on avait remarqué que notre système était trop lent. L'arrivée des personnes, juste le traitement des dossiers pouvait prendre d'un an à quatre ans, et il faut rajouter à ça le processus de résidence permanente, qui fait en sorte que les gens arrivent tardivement, si on veut, par rapport aux besoins du marché du travail, et le marché du travail qui a eu le temps de bien changer entre-temps.

On avait aussi remarqué, dans notre système, que nos universités... évidemment, un grand, grand nombre d'étudiants étrangers qui se retrouvent dans nos universités, eh bien, très peu d'entre eux qui restaient ici mais auraient pu rester ici, parce qu'ils ne connaissaient pas notre programme d'expérience québécoise. Donc, on s'est rendu compte qu'il fallait mettre les bouchées doubles pour nous assurer de garder ces étudiants étrangers ici avec nous. Aussi, je dirais la même chose pour les travailleurs temporaires. On avait remarqué que d'autres sociétés avaient réussi à encourager les travailleurs temporaires qui souhaitaient rester dans leur pays à faire, donc, une demande de résidence permanente, et nous aussi, on souhaiterait que ces travailleurs temporaires restent ici. Donc, ça, c'est le contexte dans lequel on vit.

Mais je rajouterais à ça, évidemment, les problèmes persistants de barrière. Et on l'a remarqué, Le Devoir a écrit un article récemment là-dessus, sur les gens qui parlent français mais qui ne trouvent pas un emploi. Et c'est un phénomène qu'on connaît et c'est pour ça qu'on a créé différents programmes et c'est pour ça qu'on a cette politique, pour s'adresser à cette question, soutenir, aider, faire en sorte que les entreprises s'ouvrent à cette diversité, mais aider les personnes qui cherchent un emploi. Ça passe aussi par la reconnaissance des compétences, dans un premier temps, et la reconnaissance aussi des acquis lorsqu'on parle de professionnels ou de métiers réglementés. Mais, pour tous les autres, c'est à peu près 80 %, je crois, ou 75 %, c'est tout simplement les diplômes et expériences de travail que l'employeur ne reconnaît pas. Donc, la politique fait en sorte, et la loi aussi, de nous attarder pour qu'il y ait un arrimage plus direct entre ces personnes qui sont scolarisées, expérimentées, qualifiées, et qui parlent français, et qui souhaitent bâtir leur vie ici. Il faut éliminer ces barrières.

Donc, cette politique et cette réforme visent justement à travailler en amont, en amont même avant que la personne arrive, évidemment, dans la sélection, mais aussi pour la préparation de cette personne, pour son trajet migratoire. Donc, toute l'information... Ce n'est pas demain qu'on invente ça, le ministère est quand même... travaille sur, comment dire, ces stratégies depuis quelques années. Il y a un programme qui s'appelle le SIEL, justement, service en ligne, pour permettre à la personne de choisir, même, de lui présenter ses options en termes de ville ou village ou de région où la personne voudrait s'installer, de connaître aussi notre marché de l'emploi. Donc, la personne peut se brancher, si on veut, avec Emploi-Québec et tout.

Mais on se rend compte qu'il faut un accompagnement encore plus serré. Donc, cette nouvelle façon de sélectionner, ce qu'on appelle le système de déclaration d'intérêt, va faire en sorte que les gens déposent leur profil, ensuite on invite ceux qui ont un profil intéressant à déposer leur candidature. Tous, à l'entrée, devront déposer leur profil, en fait, dans le guichet emploi d'Emploi-Québec, qui permettrait aux employeurs, les employeurs qui auraient accès à ce guichet aussi, d'Emploi-Québec, pour déterminer si la personne évidemment a le profil, et nous aussi, avec nos profils régionalisés qui nous permettraient de voir si la personne a le profil pour intégrer le marché du travail rapidement.

Donc, le projet de loi n° 77, vous le connaissez bien, il y a plusieurs mesures, une nouvelle façon de faire la prospection et la promotion. Donc, on va être beaucoup plus ciblés dans nos façons d'attirer les talents chez nous. On pourra mettre sur pied aussi des projets pilotes pour tester des nouvelles idées, faire des innovations en matière d'immigration temporaire et permanente, avec un maximum de 400 personnes pour les projets d'immigration temporaire et 500 personnes pour les projets d'immigration permanente.

Moi, je crois, et c'est ce qu'on a entendu en commission parlementaire, que les acteurs régionaux sont très intéressés. Le travail qu'il nous reste à faire, évidemment... bien, tout le travail qu'on a à faire pour bien préparer ces projets pilotes, c'est la consultation, hein, c'est la consultation avec les acteurs régionaux pour connaître un peu leurs besoins, de faire en sorte que ça ne devienne pas un système parallèle d'immigration. Je tiens à le dire parce que je pense que des gens pourraient imaginer que c'est... on pourrait faire entrer 400 ici, 500 là, et 400 ici, 500 là; non, l'idée, c'est quel serait un besoin important dans une localité, dans une région, et comment peut-on mieux travailler pour amener les gens dont cette région a besoin. Parce que la chambre de commerce, les employeurs, les élus disent : Non, il faut vraiment — les députés — qu'on travaille ensemble pour amener les gens ici parce qu'on a un besoin criant dans ce domaine-là.

Donc, avec le ministère de l'Immigration, avec ces acteurs, la Commission des partenaires du marché du travail aussi, c'est de concevoir ces projets pilotes pour tester des idées. Et, si le projet pilote nous fait la démonstration qu'on aurait besoin de changer nos façons de faire, eh bien, on aurait donc un «road map» pour déterminer... l'expression en français, «road map», il y a une meilleure expression, un «road map», carte routière, en tout cas, pour déterminer, bon, comment peut-on répondre plus rapidement aux besoins des régions.

Évidemment, il y avait aussi... il me reste sept minutes, il y avait aussi... je l'ai dit, mais c'est le transfert de l'immigration temporaire ou permanente, le nombre d'étudiants étrangers qui sont chez nous et des travailleurs temporaires, de faire en sorte que, rapidement, ils puissent faire une transition à l'immigration permanente. Mais, comme je l'ai dit tantôt à la deuxième opposition, c'est aussi extrêmement important de travailler l'autre gros morceau, l'autre grande pièce maîtresse; c'est le vivre-ensemble, c'est l'inclusion et la participation. Il faut travailler avec les employeurs par des programmes...

À Montréal, on a un programme avec la chambre de commerce de Montréal, qui s'appelle Interconnexion. C'est un programme de réseautage... mais un taux de succès vraiment important, je pense, c'est à peu près 75 % de placement suite à des rencontres entre les entreprises et ces candidats qui sont des gens jeunes, formés, ils parlent français, crème de la crème, mais ils n'ont juste pas de réseau ici. Ce n'est pas comme nos enfants ou les enfants de nos amis, qui ont quand même des réseaux. Le nombre de fois que moi, personnellement, j'ai des amis de mes enfants... Tu connais-tu quelqu'un dans ce domaine-là? Pourrais-tu regarder mon C.V.? Qu'est-ce que tu pourrais me recommander? Puis on les aide, hein? On aide nos jeunes à s'orienter. Ces gens-là arrivent... beaucoup de ces jeunes-là, les jeunes universitaires, ils sont dans nos universités, mais ils n'ont pas de réseau, les universités les aident. Il y a des programmes de start-ups. Il y a tout le mouvement des start-ups justement, qui est un réseau extraordinaire, parce que là on les accompagne, mais, pour le reste, ils n'ont pas vraiment ce réseautage.

Alors, c'est des programmes comme ça. Le programme PRIIME... Combien de minutes?

Une voix : Cinq minutes.

• (16 h 50) •

Mme Weil : Le programme PRIIME, qui est un programme d'intégration en emploi, c'est un programme extraordinaire qui donne des résultats de 86 % de rétention. C'est un programme qui est géré par Emploi-Québec, mais financé par le Programme immigrants entrepreneurs. Et puis-je dire avec fierté qu'on est les seuls... Maintenant, le programme immigrants investisseurs n'existe pas au Canada actuellement, mais, lorsqu'il existait, on était vraiment la seule province à avoir utilisé l'argent du programme pour non seulement l'intégration des immigrants et des personnes qui sont sous-représentées, notamment les minorités visibles, sur le marché du travail, mais aussi pour le développement économique du Québec. Alors, c'est des argents qui vont financer très directement, par l'entremise d'Investissement Québec, le développement des entreprises dans les régions.

Alors, ces programmes-là, les programmes de mentorat, nous, dans la politique, on identifie ces mesures-là, mais on est très ouverts — parce qu'il y a un budget qui est attaché à ça, 42,5 millions — à regarder d'autres initiatives innovatrices qui vont donner des résultats. Il y a beaucoup de jeunes qui ont beaucoup d'idées. Il y a des réseaux de jeunes professionnels actuellement qui sont partout en région et qui souhaitent vivement attirer des gens dans les régions, mais les jeunes... Place à la relève, il y a Place aux jeunes aussi, l'organisme Place aux jeunes, il y en a d'autres qui le font. Je sais que Beauce embauche... C'est un organisme que je connais parce qu'on a travaillé avec eux pour amener des soudeurs et d'autres personnes qui sont requis, des expertises qui sont requises dans la région de Beauce, mais il y a d'autres régions qui ont ces genres de pénuries très aiguës et ponctuelles dans les régions. Bien, c'est de voir comment activer les acteurs de ces régions, et nous, on est là pour les appuyer avec Emploi-Québec toujours, évidemment. Dans une intégration d'emploi, il faut savoir que c'est beaucoup Emploi-Québec. Nous, c'est comment mobiliser tous ces acteurs, mais on travaille vraiment main dans la main avec Emploi-Québec pour réussir cette intégration.

Donc, il faut voir cette réforme très globalement. J'en suis fière parce qu'il y a beaucoup de mesures là-dedans, il y a beaucoup de ministères qui travaillent, presque tous les ministères qui sont des partenaires avec nous dans ce... et nous, on pilote évidemment tout ça, mais avec les connaissances, le savoir-faire, l'expérience des autres ministères qui vont travailler avec nous.

La francisation, c'est aussi un pilier de tout ça. Ça semble évident, mais il faut le dire et le répéter. Si on n'a pas les compétences linguistiques, évidemment, ça va être difficile d'intégrer, et ça va être difficile pour la personne d'être motivée si elle n'atteint pas le niveau de compétence professionnelle parce que ses capacités linguistiques sont limitées. C'est une question tellement fondamentale, je suis extrêmement sensible à cette question parce que mon propre parcours personnel, le parcours de ma famille, le parcours de beaucoup de gens que je connais, de gens qui sont venus d'ailleurs et qui maîtrisent la langue parce qu'ils ont fait leurs études en français, parce qu'ils ont travaillé en français, parce que, bon, ils sont très à l'aise évidemment dans deux ou trois langues... C'est ce qu'on voit beaucoup à Montréal, c'est la ville où le plus de gens parlent trois langues en Amérique du Nord. C'est intéressant, hein? Mais le français, c'est la survie, hein, je... C'est sûr qu'on peut vivre bien sans le parler parfaitement, mais, je vous dirais, d'un point de vue professionnel, c'est décourageant pour certaines personnes s'ils ne sont pas capables de travailler au niveau de leur scolarité. Donc, ce que je remarque, c'est qu'ils veulent apprendre la langue rapidement et ils veulent être très compétents dans la langue rapidement. Donc, nous, on veut être là pour les épauler.

Donc, il faut voir cette pièce-là. Ça a toujours été important, l'immigration, mais on vient rajouter des sommes et des actions pour aller encore plus loin sur cette question.

Le Président (M. Picard) : Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole à M. le député de Bourget.

M. Kotto : Merci, M. le Président. Alors, je veux revenir à la page 125 du cahier explicatif des crédits, dans les questions particulières de l'opposition, à la question 5 au sujet du nombre d'entrevues de sélection dans le but d'émettre le CSQ.

Je constate, M. le Président, que, pour le total, dans la catégorie des travailleurs qualifiés, le nombre de dossiers acceptés à l'entrevue a chuté de 523, tandis que le nombre de travailleurs qualifiés acceptés sur dossier est passé de 7 033 à 13 473 en un an. C'est une augmentation de 52 %. La ministre a expliqué cette situation en évoquant un changement de paradigme afin de se mettre à la page avec les autres pays d'accueil. Je traduis sa réaction. Elle confirme, par ce biais, qu'il y a une baisse de l'approche entrevue. Aussi peut-elle nous éclairer sous un autre angle qui serait de savoir, si on n'a aucune forme de vérification secondaire en la matière par un professionnel, comment peut-on assurer l'intégrité même du processus de la sélection sur dossier?

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : Oui. Dans un premier temps, il y a un processus de révision. Toute personne peut demander une révision. Donc, ça, c'est primordial comme mesure de contrôle, si vous voulez, et d'équité.

En entrevue, on fait aussi la vérification d'authentification de documents. Donc, il se pourrait... Là, je vais voir s'il y a des réponses précises. Donc, il y a ça, donc, des refus qui pourraient être basés sur la qualité ou l'authenticité du document. Il y aurait peut-être des refus sur la langue, possiblement, que la personne n'avait pas les connaissances appropriées au niveau assez élevé sur la langue.

Donc, il y a plusieurs facteurs, mais... il y a plusieurs facteurs.

(Consultation)

Mme Weil : Ce qu'on me dit, c'est qu'une des raisons pour lesquelles le taux est plus élevé, c'est qu'a priori c'est des dossiers possiblement problématiques. L'acceptation sur dossier, c'est généralement des dossiers complets, des dossiers avec le test de français, tout va bien dans le dossier. Quand c'est plus problématique, on fait l'entrevue, pour toutes sortes de raisons. Donc, les chances qu'il y ait un taux de refus plus élevé, ça s'explique parce qu'à l'origine c'était un dossier problématique. Maintenant, il y a plusieurs facteurs de rejet, notamment l'authentification des documents, mais je pense que la réponse simple par rapport à l'équité, c'est le processus de révision.

Le Président (M. Picard) : M. le député de Bourget.

M. Kotto : Oui, M. le Président. Est-ce que la ministre est ouverte à l'idée de... pas aujourd'hui, là, mais de nous faire connaître les détails du processus d'analyse ou de validation, plutôt, sur dossier? C'est une information qui nous paraît essentielle. Et je lui demanderais, relativement à l'expertise concernant l'évaluation de la valeur et de l'authenticité des documents au dossier : Est-ce que le ministère a en son sein actuellement, comment dire, une ressource humaine formée à cet effet-là?

Mme Weil : Il y a un guide, on me dit, un guide...

Une voix : ...

Mme Weil : Il y a une équipe dédiée à l'authentification des documents, notamment. Juste d'entrée de jeu, j'aimerais dire que c'est le Vérificateur général, d'ailleurs... Le fait de procéder comme on procède, c'est suite à une recommandation du Vérificateur général, qui disait que ça prenait des processus objectifs sans partialité, tout à fait impartiaux, donc, d'où cette façon de faire la sélection. Mais, par ailleurs, oui, le ministère, on a toutes ces informations, hein?

Une voix : ...

Mme Weil : On pourrait fournir l'information sans problème. Il y a un guide, justement, un guide de procédure, des équipes spécialisées par rapport à chaque étape, bon, sur la langue, le test, les documents, etc. Donc, sous quelle forme on pourrait transmettre cette information? On me dit que vous êtes libre de venir voir et de rencontrer le ministère aussi, si ça vous intéresse, pour poser ces questions.

M. Kotto : Bien.

Le Président (M. Picard) : Allez-y, M. le député.

• (17 heures) •

M. Kotto : Merci, M. le Président. Je reviens sur les chiffres en particulier et je parlais précédemment d'une impression de changement de bassin d'intérêts avec les dossiers acceptés... pardon, oui, les dossiers acceptés en entrevue versus les sélections sur dossier. J'évoquais les changements notables du côté de l'Asie, où on est passé, 2012, à 201 dossiers en entrevue, 92 en 2013, 223 en 2014 et 2 193 l'année dernière. À moins que l'on me donne une information contradictoire, a priori, ce n'est pas un bassin francotrope ou francophone. Est-ce qu'il n'y a pas lieu de penser, dans la mesure où mon impression se confirme, qu'il y a là un défi supplémentaire à la francisation?

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : Et ça, je rentrerai dans les détails, mais la Chine notamment a toujours été, au Québec et au Canada, dans les premiers, hein, bassins, depuis de nombreuses années. Je vais demander à quelqu'un de me sortir les dernières années. En 2015, c'est le deuxième pays d'origine pour l'immigration, la France est le premier en 2015. Les autres années, soit première, il y a eu une année où la Chine était en première position, je pense, c'est en 2012. On va le sortir.

Donc, il faut savoir que... Et on n'est pas la seule société qui reçoit beaucoup de gens et de dossiers de la Chine. Le Canada, je pense, la Chine est le premier, c'est vrai un peu... Donc, il y a un volume important.

M. Kotto : M. le Président, je voulais juste préciser une chose.

Le Président (M. Picard) : Allez-y.

M. Kotto : Ma question est posée sous l'angle, sous le prisme de la maîtrise de la langue, parce que... Voilà, c'est ça.

Mme Weil : Là, ça, c'est des traitements en 2015, oui. Alors, ce qu'on me dit, c'est le niveau 7 qui serait appliqué, oui, et c'est certainement le résultat de toutes ces ententes qu'on a signées avec des alliances françaises en Asie. Le chiffre, c'est à peu près... écoutez, c'est au moins, dans trois grandes villes, sept ou huit, maintenant, ententes avec des alliances françaises. Ils sont déterminés à venir ici. Ils savent que c'est le français qui est la langue de travail, la langue commune, ils s'inscrivent dans les alliances françaises. Alors, c'est ça, le résultat, parce que vraiment ce n'est pas même admission ici, hein, c'est vraiment la sélection.

Et il y avait un inventaire, ce qu'on me dit aussi, c'est important de le dire, un inventaire important, et le ministère a voulu traiter cet inventaire important qui... un inventaire de l'Asie. Je pense qu'on n'est pas les seuls à vivre cette expérience, il y a d'autres pays d'immigration qui le vivent aussi.

Le Président (M. Picard) : M. le député.

M. Kotto : M. le Président, on se rappelle que l'année dernière le MIDI a coupé 9 millions en francisation et intégration, et, lors du dépôt de son dernier budget, le gouvernement libéral n'a pas réinvesti ce qu'il avait coupé l'année dernière en immigration. Pour 2015‑2016, il a coupé 6,6 millions, c'était moins 2,2 millions de budget global, et il réinvestit le même montant pour 2016‑2017, donc seulement 2 %. Il a par ailleurs coupé en francisation, 4,7 millions en francisation en 2015‑2016.

Au moment où le premier ministre jongle, disons-le ainsi, avec l'idée d'accueillir 10 000 immigrants de plus par année, les sommes investies ne sont pas significatives, et le gouvernement n'envoie pas un message cohérent, du moins c'est notre perception. Je veux rappeler que 2013‑2014, quand le Parti québécois a occupé le pouvoir pendant 18 mois, les crédits pour l'intégration et la francisation étaient de 112,3 millions, et ils sont passés, en 2014‑2015, au moment où le Parti libéral a été aux commandes, a pris les commandes, il est passé donc de 112,3 à 109 millions; en 2015‑2016, à 100 millions; en 2016‑2017, à 109 millions. Alors, si on prend 2016‑2017, comparativement à 2013‑2014, il y a une différence. Il y avait 112, et là on est à 109. Ça, on peut le voir à la page 136 dans les crédits des ministères et organismes.

Alors, les sommes pour l'intégration et la francisation, pour 2016‑2017, ont augmenté de seulement 4 millions en deux ans. C'est bien peu lorsqu'on pense que l'année passée c'est 5 millions qui ont été coupés pour ces mesures sur le terrain. Cela veut dire que des organismes ont dû couper dans les services, ils ont dû mettre à pied des employés, et par conséquent on aboutit à une perte d'expertise.

Les budgets octroyés aux organismes communautaires membres de la table de concertation sont en baisse, 12,5 millions pour 2014‑2015 et environ 11,9 pour 2015‑2016, si on exclut les budgets pour les réfugiés parrainés par l'État. Le réinvestissement n'est pas significatif, et déjà les organismes en ressentent les effets sur le terrain. Bien que les consultations sur les seuils prévues par la loi ne soient pas encore tenues, le dépôt du budget 2016‑2017 qui nous occupe et les crédits l'accompagnant, bien évidemment, démontrent qu'aucune ressource supplémentaire en francisation des immigrants ne sera disponible au cours de la prochaine année.

Quand la ministre dit qu'elle a augmenté le budget de son ministère, est-ce qu'elle confirme qu'elle a plutôt remis les sommes qui avaient été coupées, les sommes qui avaient été soustraites? C'est une question. Alors que le gouvernement souhaite... jongle, plutôt, avec l'idée d'accueillir 10 000 immigrants de plus, comment explique-t-elle le si peu d'argent investi en ce sens?

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

• (17 h 10) •

Mme Weil : Oui. J'aimerais corriger quelque chose : il n'y a pas eu de mise à pied du tout dans nos organismes et il y a augmentation des budgets. Donc, tous les services directs à notre clientèle, les nouveaux arrivants, les budgets ont été augmentés. Donc, 2015‑2016, c'était 20 129 000 $. Là, c'est 21 929 100 $, donc une augmentation de 2 millions. C'est important de le dire parce que, justement, quand on pense à l'accueil des réfugiés syriens, la francisation, évidemment, on a toujours répondu à la demande, et ça a toujours été notre politique de répondre à la demande.

Par ailleurs, moi, j'aimerais dire que l'ajout de 4 millions juste en francisation, ça nous amène à un sommet historique, historique en francisation, je pense qu'il faut le célébrer. En tout cas, moi, je le célèbre, comme ministre de l'Immigration qui a le souci de la francisation, je suis tellement contente d'avoir ce 4 millions. J'en ai parlé avec mon ministère. Évidemment, l'objectif, c'est d'offrir des cours adaptés aux différents besoins de notre clientèle.

Et donc, comme vous le savez, c'est la francisation du ministère de l'Immigration, là, le 70 millions. Il y a aussi la francisation qui est offerte par le ministère de l'Éducation et le ministère de l'Emploi.

Et, sachant aussi qu'on a stabilisé le volume d'immigration à 50 000... Moi, j'ai les chiffres des dernières années en francisation. Est-ce que vous l'avez? Donc, 2016‑2017, c'est 70 124 060 $; en 2015‑2016, 64 708 000 $; en 2014‑2015, 66 876 000 $; l'année précédente, 2013‑2014, 68 076 000 $; 2012‑2013, 67 604 000 $; 2011‑2012, 67, donc... 65; les années avant, 62, 56, 51, 45, 43, donc, 58 et 66. Donc, c'est vraiment un sommet.

Alors, c'est important de le dire, parce qu'on stabilisé à 50 000, donc... Et c'est vraiment mon ministère, hein, c'est les experts en francisation. Lorsque je leur ai dit, bon, avec ce 4 millions, je voulais bien confirmer qu'on serait capables de faire tout ce qu'on souhaite faire, nos objectifs, qui est de promouvoir... Et on sait très bien que, si on fait une promotion vigoureuse de la francisation, il y aura des répercussions, parce qu'on pourra pénétrer peut-être des groupes de personnes qu'on n'a pas pu rejoindre auparavant. C'est aussi d'avoir beaucoup de diversité dans l'offre de francisation.

Je vais vous donner... je vais trouver la fiche sur la francisation... En tout cas. Maintenant, toute réduction, c'est des réductions plutôt au niveau administratif. Donc, sur la francisation...

(Consultation)

Mme Weil : Dans la stratégie d'action... Je vais sortir la stratégie d'action.

Le Président (M. Picard) : Je vais céder la parole à M. le député pour le moment, là.

M. Kotto : O.K. Parce que je vais passer à une autre question, mais on pourra revenir là-dessus.

Le Président (M. Picard) : ...deux minutes.

M. Kotto : Deux minutes, M. le Président. Je vais à l'orientation 3, à la page 122, les plans annuels de gestion des dépenses. Orientation 3 — je pense que la ministre a cette orientation à l'esprit — valoriser la diversité ethnoculturelle pour un Québec inclusif. Un budget de, enfin, 2 millions est consacré aux activités en lien avec cette orientation, qui rejoint l'ensemble de la population québécoise sur le caractère pluriel de la société et à l'apport de la prospérité du Québec. Bref, on peut dire que la ministre a un projet derrière ce 2 millions, mais quel est-il précisément, ce projet? En quoi consiste-t-il? Est-ce qu'on peut avoir une explication détaillée de ce dans quoi ce 2 millions va, disons, s'exprimer?

Le Président (M. Picard) : En 35 secondes, Mme la ministre.

Mme Weil : En cinq secondes?

Une voix : 35 secondes.

Mme Weil : 35 secondes. Écoutez, j'ai une fiche, on pourra y revenir après, là, dans les...

Le Président (M. Picard) : ...un bloc de la partie gouvernementale dans 20 secondes, donc on pourrait...

Mme Weil : C'est ça, on pourra y revenir, oui, sur la francisation.

Le Président (M. Picard) : Donc, nous allons du côté de la partie gouvernementale. Mme la députée de Chauveau.

Mme Tremblay : Oui, bonjour. Bonjour, tout le monde, Mme la ministre, l'équipe du ministère; également du côté de l'opposition, mes collègues. Bonjour, tout le monde.

J'aimerais poursuivre sur la situation du français chez nos immigrants, immigrantes. Juste vous raconter, lundi j'ai reçu de la belle visite à mon bureau de comté. J'ai un monsieur qui avait pris rendez-vous, il s'appelle Paulin Rusasa, c'est un réfugié originaire du Rwanda. Et, dans ses démarches d'intégration, on lui avait dit : Ce serait bien que vous alliez rencontrer votre députée, alors il avait pris rendez-vous pour me rencontrer. Il est fraîchement arrivé au Québec, il est arrivé en novembre dernier. Et il était tout content de me rencontrer et de me dire... et il s'exprimait dans un français impeccable pour me dire à quel point le Québec était chaleureux, à quel point il avait été bien accueilli, à quel point il était heureux d'être ici, à quel point tous les organismes lui étaient venus en aide pour qu'il s'implique dans la communauté, pour lui trouver un logement, pour lui trouver des meubles, pour également l'aider à se déplacer avec le transport en commun, lui fournir une carte, également, puis l'amener vers des activités qui ont lieu dans mon beau comté, le comté de Chauveau.

Et il est arrivé ici avec ses quatre enfants, son épouse également. Lui parle très bien français, ce n'était pas le cas de ses enfants. Mais rapidement ses enfants se sont retrouvés intégrés à l'école dans les classes de francisation, donc, que ce soit... tout dépendant de l'âge des enfants, là, un au primaire, deux au secondaire et un autre au cégep, et il a dit que ça se déroulait très bien, et que ses enfants étaient contents d'apprendre le français, et que ça se passait très bien. Alors, il n'avait que des commentaires positifs à formuler, même avec ses voisins, tout ça, il recevait un bel accueil, ça se déroulait bien, il était heureux, et il était heureux de m'en faire part également, de nous dire à quel point il était bien intégré.

Alors, ce que j'ai constaté également en l'écoutant parler puis en voyant à quel point ses enfants, sa conjointe aimaient parler français, souhaitaient apprendre également la langue... Parce qu'il sait à quel point c'est important, étant donné que tout l'entourage, bien, baigne dans le français, donc les gens parlent la langue française. Et on n'a pas eu besoin de le forcer, on n'a pas eu besoin de l'obliger à suivre un cours en français lorsqu'il est arrivé, on n'a pas eu besoin de faire ça non plus avec ses enfants parce que l'intérêt était là, ils savaient qu'ils s'en venaient ici. Donc, pour eux, ce serait inutile de faire comme ce que propose la CAQ et de dire : Maintenant, on vous oblige à apprendre le français. Pour eux, ce serait leur occasionner un stress indu, parce qu'ils sont contents, ils veulent l'apprendre de toute façon. On n'a pas besoin de les forcer, ils sont prêts à le faire à leur rythme, à leur rythme où ils peuvent apprendre sans avoir cette menace qui leur pend au-dessus de la tête en disant : Bien, si on échoue le test, on va être obligés de s'en retourner chez nous. Est-ce que c'est ça qui risquerait d'arriver? Alors, eux apprécient de pouvoir apprendre la langue française librement et sans que ce soit imposé.

Et là-dessus j'aimerais d'ailleurs qu'on parle de l'importance accordée, au cours des dernières années, à la connaissance du français lors de la sélection, qui a fait bondir d'ailleurs la proportion des personnes qui déclarent connaître le français à l'admission. Alors, Mme la ministre, ce que j'aimerais savoir, c'est quelle a été l'évolution, d'abord, des immigrants qui parlent déjà le français quand ils arrivent et la rapidité également à laquelle ils l'apprennent, également, cette langue, donc peut-être l'évolution au cours des 20 dernières années. Mais je sais qu'il y a de plus en plus d'immigrants qui parlent français et qui souhaitent l'apprendre rapidement.

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : Écoutez, tantôt, je voulais vous parler de la stratégie d'action cible en matière de francisation. Donc, c'est important de le dire, parce qu'on veut aller encore plus loin. En effet, sur 20 ans, on a doublé le nombre de personnes qui parlent français. Et aussi c'est 94,6 % des requérants principaux maintenant qui parlent français, en 2015. On avait un autre chiffre qu'on donnait il y a quelques jours, quelques semaines, qui était aux alentours de 90 %, mais on vient d'avoir les données de 2015, c'est 94,6 % qui parlent déjà français parmi les requérants principaux. Ça veut dire... C'est vraiment l'application de la combinaison du test standardisé de français aussi, le niveau 7, qui est un niveau avancé. Et, en 20 ans, donc, le nombre de personnes qui connaissent le français au moment de l'admission est passé de 36,8 %, en 1995‑1999, à 61,3 % en 2010‑2014.

Mais, pour aller plus loin... Je pense que c'est important. J'ai parlé du 4 millions qu'on investit pour faire la promotion du français et offrir des services variés. Votre expérience, Mme la députée, justement... M. le Président, excusez-moi, je m'adresse à vous, mais, l'expérience de la députée, je l'entends souvent et je pense qu'on est tous un peu, comment dire, impressionnés, émerveillés, encouragés, il y a toutes sortes de sentiments qu'on ressent lorsqu'on rencontre des gens qui font des efforts pour apprendre la langue et on se rend compte qu'ils parlent déjà la langue. D'ailleurs, la députée a mis une magnifique capsule sur sa page Facebook suite à la rencontre avec un réfugié, un réfugié qui venait de...

Une voix : Du Rwanda.

• (17 h 20) •

Mme Weil : ...du Rwanda, imaginez, et donc qui parlait français puis qui a raconté son expérience à la députée, et elle a été très touchée par cette expérience. Et je pense que c'est important de partager, justement, ces expériences et parce que ce que les gens nous disent sur le terrain, et je suis contente de savoir qu'ils le disent à leurs députés, les cours de francisation ont été là, que les services du ministère de l'Immigration étaient là pour eux, étaient disponibles, il n'y a pas eu de délai, les enfants, évidemment, qui ont appris la langue française à l'école.

Mais, pour aller plus loin, ce qu'on veut faire, donc, c'est offrir une personnalisation des services de francisation afin de mieux répondre aux besoins différenciés des personnes immigrantes, offrir le service d'intégration en ligne et la francisation en ligne aux personnes résidentes temporaires afin de faciliter le passage du statut temporaire vers le permanent. Ce programme-là était toujours... seulement disponible pour les personnes qui avaient déjà leur résidence permanente, mais là on va ouvrir ce service aux gens... Et je vous invite à le promouvoir dans vos propres comtés et régions. Si vous rencontrez des gens qui viennent vous voir, qui ont un statut temporaire, dites-leur que dorénavant ils pourront avoir accès aux services de francisation en ligne, alors ça leur permet... C'est un excellent programme aussi. Il y a plus que juste la langue, c'est pour ça que ça s'appelle francisation... C'est aussi sur l'histoire, les valeurs, la société québécoise, la culture et tout.

On va assurer la promotion des services gouvernementaux de francisation et renforcer le statut du français comme langue de l'État et langue publique commune. On va adapter les tests de compétences langagières destinés à la sélection des personnes immigrantes aux repères socioculturels du Québec et, à l'échelle québécoise, les niveaux de compétence en français des personnes immigrantes adultes afin que les travailleuses et travailleurs temporaires ainsi que les étudiantes et étudiants étrangers candidates et candidats à l'immigration permanente puissent faire reconnaître leurs compétences en français acquises au Québec. On va promouvoir le recours aux services de francisation et d'intégration depuis l'étranger afin d'inciter les personnes à entamer leurs parcours d'intégration avant leur arrivée au Québec.

On va concevoir et mettre en place, de concert avec des partenaires économiques, des formules alliant francisation et expérience en emploi. En effet, il y a de plus en plus de gens qui intègrent le marché du travail plus rapidement, donc on peut remarquer une certaine baisse dans le cours à temps plein. C'est une bonne nouvelle, c'est des gens qui ont trouvé un emploi. Généralement, on veut s'assurer que c'est, en fait, ça. Et, si c'est ça, c'est d'aller voir s'ils ont besoin d'un cours de francisation, donc ça, c'est en collaboration avec les entreprises et les employeurs, qui nous diront : Oui, en effet, la personne bénéficierait, et moi, je bénéficierais, comme employeur, de voir que cette personne puisse acquérir des compétences langagières. Donc, ce programme-là ou cette initiative-là est très intéressant.

Et de plus en plus c'est la tendance, que les gens intègrent plus rapidement le marché du travail. C'est ce qu'on souhaite. Évidemment, dans le nouveau système aussi, c'est ce qu'on souhaite, c'est de permettre que cette formule puisse répondre aux différents besoins. On va répondre aux besoins différenciés d'un plus grand nombre de personnes immigrantes en matière de connaissance du français selon les exigences spécifiques du domaine d'emploi visé et de l'employeur en diversifiant notamment les services de francisation à visée professionnelle offerts à l'étranger et au Québec, en classe et en milieu de travail.

Juste pour rappeler un peu les faits, donc, c'est depuis décembre 2011 que les candidats à l'immigration ont l'obligation de produire un résultat de test standardisé de français pour se voir attribuer des points relatifs à la connaissance du français dans la grille de sélection. En 2013, le niveau de français requis a été rehaussé à intermédiaire avancé, le même niveau qu'exige le gouvernement fédéral.

Outre la mesure du niveau de connaissance du français des candidats à l'immigration par des tests standardisés, plus d'ententes du ministère de l'Immigration avec des alliances françaises dans une trentaine de pays permettent aux candidats de suivre des cours de français qui intègrent des aspects de la langue et la culture québécoise avant leur arrivée au Québec. Le ministère met aussi à leur disposition des cours de français en ligne et une banque d'exercices de français en ligne.

Je veux savoir combien de temps il me reste, parce que j'ai une information intéressante.

Une voix : Neuf minutes.

Mme Weil : Neuf? Juste la dernière... Moi, j'étais ministre de l'Immigration, 2010 à 2012, et, je vous rappelle, il y avait trois ententes avec des alliances françaises en Chine, hein, trois ententes, et là, regardez, on a 12 ententes avec la Chine : Beijing, Canton, Chengdu, Chongqing, Dalian, Hangzhou, Nanjing, Shandong, Shanghai, Tianjin, Wuhan et Xi'an. C'est impressionnant, vous avez fait un bon travail en mon absence. Non, c'est vraiment extraordinaire parce que ça montre... c'est une formule excellente parce que c'est des gens qui cherchent à connaître, à apprendre le français parce qu'ils ont déjà un projet de venir au Québec et ils savent que la langue d'usage, la langue commune, la langue de travail, c'est le français.

Donc, je donne cet exemple-là parce que c'est quand même intéressant de voir qu'en Chine il y a cet engouement. D'ailleurs, il y a eu quelques articles de journaux, il y a quelques années, sur l'engouement pour les cours de français en Chine, et ça, c'est la preuve que c'est vraiment une réalité.

Nous offrons des cours en classe et en ligne dès l'étranger et au Québec, à temps complet et à temps partiel, et même en milieu de travail, nos cours sont adaptés aux besoins des nouveaux arrivants. Et, tel qu'énoncé dans la politique gouvernementale en matière d'immigration, de participation et d'inclusion Ensemble, nous sommes le Québec qui a été dévoilée hier, notre gouvernement a l'intention de faire une promotion vigoureuse de notre offre de francisation.

Donc, pour ce qui est du 4 millions qu'on va investir en 2016‑2017, c'est notamment pour les actions suivantes, donc : une augmentation de la prestation des services de francisation, la promotion de l'accès à l'offre de services gouvernementale en francisation et l'inscription aux cours de français, la promotion de la francisation auprès des personnes immigrantes, des entreprises ainsi que des régions, la mise en valeur des services de francisation sur le site Internet du ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion.

Donc, il y a deux volets. Il y a le volet promotion avec un budget de 75 000 $, donc une campagne de promotion sera élaborée et diffusée dans certains médias ciblés afin de mieux faire connaître l'offre de services en francisation auprès de certaines clientèles qui sont traditionnellement moins enclines à s'inscrire aux différentes et variées formations offertes, et cet argent-là va couvrir l'information sur le site Internet du MIDI concernant les services de francisation afin de permettre une plus grande mise en valeur des services de francisation.

Ensuite, pour le volet prestation de services, c'est un budget de 3,25 millions. Donc, la campagne de promotion va favoriser l'inscription d'un plus grand nombre de nouveaux arrivants aux différentes formules de formation offertes : temps complet, temps partiel, en entreprise, spécialisée, à partir de l'étranger, en ligne. Afin de permettre de répondre à la demande accrue pour ces services de francisation, le MIDI consacrera donc ces budgets supplémentaires de la façon suivante, donc : 75 000 $ pour la rémunération des heures de formation additionnelles par les professeurs, 1 250 000 $ pour permettre de conclure des ententes avec les partenaires du MIDI — c'est les cégeps, les universités, les organismes, les commissions scolaires — afin de permettre la diffusion de ces formations, 1 250 000 $ supplémentaires sont prévus en allocations de participation, lié essentiellement à l'augmentation de la clientèle pour les sessions de formation de 2016 à 2017.

Le Président (M. Picard) : Mme la députée de Chauveau.

Mme Tremblay : ...dans les crédits, on parlait de 4 millions supplémentaires, donc, pour un total de 70 millions. Si j'ai bien compris, lorsque vous avez parlé des budgets des dernières années, c'est bel et bien un record cette année.

• (17 h 30) •

Mme Weil : C'est un record historique, c'est pour ça qu'on tient à le souligner. Je pense que c'est très rassurant et ça va nous permettre d'innover, ça va nous permettre de tester des idées.

Je pense que, dans les chiffres qu'on peut voir parfois... C'est sûr que nous, pour l'immigration sélectionnée, tout le monde comprend que c'est des travailleurs qualifiés qu'on sélectionne, donc on a une capacité de nous assurer que la personne parle français parce qu'ils doivent passer un test et il y a un niveau de français qui est exigé. On sait par ailleurs que ce travailleur ou cette travailleuse qualifiée est accompagné d'un conjoint et conjointe. Le conjoint, conjointe peut-être parle français ou peut-être ne le parle pas, peut-être cette personne... Donc, c'est de cibler cette personne pour que cette personne puisse aussi s'inscrire dans ces cours.

Pour ce qui est des enfants, on ne s'inquiète pas, ils vont être... s'inscrire à l'école en français. Donc, pour les enfants, ça a toujours fait partie de ce portrait global des personnes qui sont sélectionnées.

Les réfugiés, je pense que les gens ont été beaucoup sensibilisés, ces derniers mois, que les réfugiés vont automatiquement en francisation. Ils sont vraiment pris en charge par l'État. Même s'ils sont parrainés, on s'assure qu'ils ont cette information rapidement. Et je vous dirais que c'est une volonté partagée, notre volonté et leur volonté, d'apprendre la langue rapidement. D'ailleurs, pour les réfugiés syriens notamment, on s'est assurés qu'il n'y avait pas de délai d'attente pour s'inscrire aux cours de francisation. Moi, ce que j'ai compris, c'est que, dans d'autres provinces... c'est ce que j'ai entendu dans une conférence fédérale-provinciale des ministres de l'Immigration, que, dans les autres grandes villes, il y avait des délais d'attente pour les cours de langue, mais pas au Québec. On s'est assurés qu'il n'y en avait pas. Et là on va vraiment s'assurer que la formule soit plus flexible même dans certaines régions. C'est tout ça qu'on va regarder. On a entendu beaucoup de choses en commission parlementaire sur le projet de loi n° 77, les organismes qui... experts en francisation nous ont parlé de certaines idées innovatrices qui pourraient fonctionner pour s'adapter.

Mais là, je pense, où les gens souhaiteraient qu'on puisse faire une percée, c'est le regroupement familial. Le regroupement familial, au fil des années... plus l'immigration est francophone dans la sélection, c'est sûr qu'on le voit au fil des années, le regroupement familial reflète la sélection des années passées. Donc, le regroupement familial, maintenant, au Québec, il est plus francophone qu'il était avant, et, de plus en plus, on voit que la langue parlée à la maison, c'est... on voit qu'il y a une augmentation de personnes qui parlent la langue française. C'est vraiment l'effet de tous ces facteurs.

Mais, quoi qu'il en soit, il y a encore des personnes qui ne sont pas en francisation, donc on souhaiterait les rejoindre, parce que ça leur permet de sentir comme... C'est des cours qui sont intéressants pour ces personnes qui veulent... Moi, j'ai beaucoup d'amis qui... bien, j'ai plusieurs amis qui donnent des cours de francisation, et ils m'en parlent souvent, de l'atmosphère dans ces cours de francisation. C'est une occasion de se lier d'amitié avec d'autres personnes, c'est l'occasion de rencontrer des gens qui viennent d'autres pays aussi, donc de sortir peut-être de son propre milieu et d'établir des contacts. Ça leur donne confiance aussi. Ce n'est pas tout le monde qui peut avoir confiance, les premières années d'installation, les premiers mois d'installation, les premières années d'installation au Québec. Ça peut être, comment dire... les gens parfois peuvent sentir un peu d'inquiétude par rapport à la participation puis un peu de gêne.

Et ces cours, d'après ce que je comprends et ce qu'on me dit, ça permet aux gens d'être à l'aise avec la diversité qui existe ici, mais aussi avec les profs qui sont là pour les enseigner, les aider, mais aussi pour aider les parents, pour aider les enfants qui sont en scolarisation. Les parents veulent aussi pouvoir aider leurs enfants. Donc, on veut pénétrer plus cette catégorie d'immigration qu'est le regroupement familial. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Picard) : Merci, Mme la ministre. Je cède la parole à Mme la députée de Montarville pour une période de 19 minutes.

Mme Roy (Montarville) : Merci, M. le Président. Écoutez, j'aimerais d'entrée de jeu corriger la députée de Chauveau, qui nous a tenu des propos inexacts, peut-être sans le savoir, là.

Elle nous a parlé d'un de ses concitoyens immigrants dont les enfants ne parlaient pas français, et qui l'ont appris à l'école, et elle nous a dit bien candidement qu'ils n'étaient pas obligés de l'apprendre. Alors, je regrette, M. le Président, mais là vous faisiez fausse route, Mme la députée, parce qu'il faut dire aux gens qui nous écoutent que, grâce à la loi 101, les enfants doivent aller à l'école en français. Donc, c'est obligatoire, les cours de français à l'école pour les enfants de ces immigrants.

Donc, ce que j'ai aimé du discours de la députée de Chauveau, c'est qu'elle nous dit : Ça a réussi, les enfants ont appris le français, parlent bien le français. Oui, M. le Président, ça réussit, ce sont des cours de français obligatoires pour les jeunes qui nous arrivent, et nous, ce que nous disons, nous poussons la réflexion un peu plus loin, nous disons : Si ça fonctionne, les cours de français obligatoires pour les enfants, pourquoi n'en serait pas t-il autant pour les parents? Alors, rendons les cours de français obligatoires pour les parents qui ne parlent pas français également, et ça va fonctionner tout aussi bien. Ça fonctionne pour les enfants, nous croyons que ça pourrait fonctionner également pour les parents. Parce qu'il faut la protéger, cette langue française, et il y a un déclin de la langue française, surtout à Montréal — on pourra en parler plus tard, tout à l'heure — et je pense, et nous pensons, notre formation politique, que nous devons faire en sorte que les cours de langue française deviennent obligatoires pour les immigrants qui ne le comprennent pas, ne comprennent pas le français, ne le parlent pas, ne l'écrivent pas suffisamment bien.

Et c'est important, c'est une question de respect pour eux, pour qu'ils puissent s'intégrer, puisque la ministre nous répète souvent que la langue, c'est la clé de l'intégration, la langue française, et je suis tout à fait d'accord avec elle, mais, comme le processus de rendre les cours de français obligatoires chez les enfants fonctionne, il est là, grâce à la loi 101, ce processus de francisation obligatoire, faisons la même chose avec les parents, appuyons la même logique. Je suis convaincue, M. le Président, que nous allons arriver à de beaux succès, à une meilleure intégration. Alors, c'était mon petit aparté. Mais nous persistons à croire que ces cours doivent être également obligatoires pour les parents.

Cela dit, j'aimerais poser des questions autres... d'autres sujets qui nous préoccupent, la formation professionnelle, la reconnaissance des acquis, j'aimerais vous parler premièrement du programme Accès aux ordres professionnels. En 2016, le budget du programme Accès aux ordres professionnels va augmenter de 1 050 000 $. Il va passer de 800 000 $ à 1 850 000 $. Alors, ma question à la ministre : À quoi vont servir ces nouvelles sommes? Ce nouveau million va servir à quoi?

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : Oui. Je vais commencer par la réponse puis ensuite je vais consulter, parce que... pour être plus spécifique. Il y a le programme qu'on a, qui est Accès aux ordres... Voulez-vous sortir la fiche, l'Accès aux ordres professionnels?

Une voix : ...

Mme Weil : C'est des programmes pour mieux reconnaître, par exemple, qui aident les ordres professionnels à mieux reconnaître les compétences. Il y a aussi l'information, l'accompagnement. Ça, c'est des programmes qu'on a déjà. Le rajout, c'est la stratégie d'action. Donc, je vais attendre qu'on me sorte...

Une voix : ...

Mme Weil : Voilà. Donc, la stratégie d'action. Donc, vous demandez... la question, c'est : Qu'est-ce qu'on va faire avec ces investissements additionnels? Donc : «Veiller à la mise en ligne de l'information, à l'exploitation des réseaux sociaux et à la concertation des partenaires en matière de reconnaissance des compétences pour bien soutenir les personnes immigrantes formées à l'étranger et les employeurs.» Donc, ça, c'est 650 000 $. Ensuite : «Poursuivre le renforcement des approches en reconnaissance des compétences qu'adoptent les ordres professionnels et autres organismes de réglementation au moyen de référentiels de compétences et par la formation d'appoint prescrite.» Ça, c'est 250 000 $. Et «encourager le partage des pratiques exemplaires en matière de reconnaissance des compétences et favoriser la mise en commun de ressources», 150 000 $.

Ça, c'était votre question. Je ne sais pas si vous voulez savoir comment on dépense l'argent actuel ou si vous avez la réponse à cette question.

Le Président (M. Picard) : Mme la députée.

Mme Roy (Montarville) : J'ai plusieurs questions qui touchent justement la reconnaissance des compétences, puisque vous en parlez dans ces nouveaux budgets. Donc, vous nous avez dit... vous avez ventilé à quoi vont servir ces nouvelles sommes, là, ce 1 850 000 $. J'aimerais ici faire un petit aparté puisque j'avais pris la note.

Parlant de reconnaissance des compétences, vous vous en souvenez sûrement, Mme la ministre, durant l'étude du projet de loi n° 77, avant que le projet de loi ne devienne loi, on avait parlé, entre autres, du cas, et c'était dans l'actualité, de ces médecins syriens, des médecins spécialistes, francophones par surcroît, qui n'arrivent pas à travailler dans leur domaine alors que nous manquons cruellement de médecins. Vous aviez été très interpellée, d'ailleurs, par le reportage de Radio-Canada qui avait été fait à cet égard, puis j'avais questionné : Est-ce qu'on fait quelque chose? Il faut les aider. Les gens qui ont vu le reportage, je suis convaincue, et ceux qui nous écoutent vont dire : C'était aberrant de voir qu'on ne reconnaissait pas les compétences. Et vous nous aviez dit que vous étiez sur le dossier avec votre collègue. Alors, ça fait déjà quelques... un mois, peut-être, un mois ou deux. Où en sommes-nous pour ces gens et que fait le gouvernement pour qu'on accélère ou qu'on puisse reconnaître leurs compétences?

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : Oui. Je ne veux pas répondre pour le ministre de la Santé et la ministre de l'Éducation, mais je sais qu'ils travaillent ensemble actuellement ce dossier-là. Il y a eu des progrès, mais là ce qu'on a vu dans le reportage, c'était par rapport aux stages, hein, que ces personnes avaient toute la formation reconnue, ils avaient même fait leur formation ici, au Québec. Et ensuite il y avait le programme de stages, je crois bien, qui était l'obstacle. Donc, il y a eu un suivi par le ministre de la Santé, mais il y a... Bon, pour les médecins étrangers, j'ai une fiche ici, là, que je vais vous lire, puis on verra si ça répond à vos questions, donc :

«Le ministère travaille étroitement avec ses partenaires, notamment le ministère de la Santé et des Services sociaux et le ministère de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, pour trouver des solutions aux difficultés auxquelles sont confrontés les médecins formés à l'étranger qui souhaitent exercer au Québec et pour s'assurer que le processus de reconnaissance de leurs compétences soit équitable, transparent et efficace. Même s'il reste encore des obstacles à lever, des progrès ont été accomplis au cours des dernières années.»

• (17 h 40) •

Je pourrais vous les lire, hein? Il y a quand même des progrès qui ont été amenés ces dernières années. Je ne sais pas si vous voulez que je vous en parle, mais je comprends votre question, c'est : À partir du moment où on a tous vu que ces personnes-là ont même eu leur formation toute reconnue ici, au Québec... Mais là il y avait ce problème d'être admis pour un stage, si je me souviens bien du reportage. Et apparemment — et je vais faire attention parce que c'est des informations que je n'ai pas eues de mon ministère, mais que j'ai eues d'un expert qui m'a expliqué ça — c'est la compréhension de comment on choisit un stage. Si la personne fait l'erreur de juste donner deux choix, et qu'il n'y a pas de stage dans ces villes-là ou ces régions-là, c'est un refus, puis le Collège des médecins ne revient pas là-dessus. Donc, il faut accompagner... Le ministre de la Santé et la ministre de l'Éducation supérieure travaillent ce dossier-là justement pour mieux accompagner.

Et ce n'est pas juste les immigrants qui ont ce problème-là, il y a des Québécois aussi qui ont exactement les mêmes problèmes, où des gens, des Québécois qui ont fait leur formation ailleurs reviennent ici. Donc, pour les médecins, il y a un gros travail qui va se faire, il y a un gros travail qui a été fait, mais c'est très technique. Pour l'instant, je n'ai pas toutes les réponses, mais je peux vous dire qu'ils sont vraiment là-dessus pour mieux accompagner.

Nous, en tant que ministre de l'Immigration... le ministère de l'Immigration, c'est d'accompagner la personne. C'est sûr qu'il y a des gens qui sont déjà ici, et tous ceux qui sont ici au moins depuis 0-5 ans, on s'y attarde avec le ministère de la Justice, qui est là-dedans, le ministère de l'Éducation, le ministère de la Santé, le ministère du Travail... Il y a plusieurs ministères qui sont là-dedans. Il y a ce grand comité interministériel qui a fait des recommandations. Ces recommandations d'ailleurs vont être dévoilées bientôt, au courant des prochaines semaines, sur... ça a été un travail qui a été piloté par la députée de Jeanne-Mance—Viger. Donc, ça, ça va être les premières mesures, mais, ensuite, c'est un plan de match tel que décrit dans la stratégie d'action pour les prochaines années. Parce que, nous, au ministère de l'Immigration, d'entrée de jeu, comme d'autres systèmes, c'est de faire en sorte que la personne sait exactement à quoi s'attendre, et qu'elle ait exactement la carte routière qu'elle devra suivre avant d'arriver, donc un contact direct avec l'ordre professionnel, une évaluation de son diplôme, de ses compétences, de ses acquis, de son expérience.

Là où ça devient compliqué pour tout le monde, et il y a un chiffre, une donnée, je pense, qui est importante, les ordres professionnels et les métiers réglementés, ça représente peut-être 15 % à 20 % de nos travailleurs qualifiés. Tout le reste, le 80 %, 75 %, c'est d'autres personnes qui ne font pas partie ou ne visent pas un ordre réglementé ni un métier réglementé. C'est tout simplement, tout simplement leurs diplômes et leur expérience de travail qui n'est pas reconnue, où l'employeur n'est pas capable de reconnaître... Vous vous rappelez l'étude de la Commission des droits de la personne, je ne veux pas faire une association directe, là, mais cette méconnaissance, mieux vaut s'appeler Bélanger que Traoré. Donc, dans cette étude, il y avait plusieurs théories ou propositions qui étaient mises de l'avant sur l'obstacle, mais la reconnaissance de son expérience de travail, c'est un obstacle. Donc, comment ouvrir et aider les entreprises à reconnaître justement ces compétences? C'est ça, l'accompagnement qu'on doit fournir aux entreprises.

Le Président (M. Picard) : Mme la députée.

Mme Roy (Montarville) : Merci. Merci, M. le Président. Cependant, si je reviens à notre couple de médecins spécialistes syriens, et je comprends que, là, il y a des gens des cabinets d'autres ministères qui sont sur le dossier, j'aurais aimé qu'on nous dise si c'est une question de semaines ou de mois avant que ça se règle. On va attendre les autres ministères.

Cela dit, vous parlez justement de ce comité interministériel sur la reconnaissance des compétences des personnes immigrantes qui a été piloté par la députée de Jeanne-Mance—Viger. Ce comité doit rendre un rapport final en juin 2016 avec des mesures concrètes pour faciliter la reconnaissance des acquis. C'est ce qu'on apprend dans les crédits. Là, on nous parle de juin 2016. C'est une bonne chose, là, parce que, ça, je pense qu'il y a bien des gens au Québec qui ont hâte que les compétences acquises à l'étranger soient reconnues.

Maintenant, quelle va être la suite de ce rapport? Est-ce que vous préconisez un projet de loi et est-ce que vous avez un échéancier? Est-ce que vous vous engagez à mettre un échéancier sur la table devant nous pour...

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : Oui, M. le Président. C'est une volonté qui a été exprimée par le premier ministre en 2014, lors du discours inaugural, l'importance d'aller plus loin dans ce dossier-là. Donc, si la première étape, c'était le travail de ce comité, maintenant, c'est tous les ministères qui touchent à ce dossier-là qui doivent travailler ensemble pour trouver les solutions. Je ne peux pas vous dire quelles seront les solutions, mais, pour nous, l'objectif, c'est que la personne ait une reconnaissance presque totale avant même d'être admise. Donc, qu'on ait fait tout le travail pour que la personne... Parce que la personne a deux choix. On lui dit : Voici, la reconnaissance de votre diplôme, vos compétences, etc. S'il manque une formation d'appoint, qu'on puisse lui dire : Voici la formation d'appoint dont vous avez besoin et ensuite les stages que vous pourriez avoir. Donc, ça, c'est en le mettant directement en contact avec des ordres professionnels.

Ce que je sais, c'est qu'il y a certains ordres professionnels qui ont fait beaucoup, beaucoup de progrès ces dernières années, c'est les ingénieurs, les pharmaciens... Je ne sais pas s'il y a d'autres ordres professionnels qu'on peut me donner, mais on les a aidés par, justement, le programme qu'on a mis sur place il y a plusieurs années, qui leur a permis d'aller plus loin pour la reconnaissance.

Lorsque la personne arrive, comment dire, à un mur, parce qu'il n'aura pas sa reconnaissance, cette personne n'aura pas sa reconnaissance, c'est d'offrir, comment dire, un parcours transversal. Et ça, ça se fait très bien. Il y a des gens qui disent : Non, ça va, j'ai fait mon deuil, je comprends que je ne pourrai pas pratiquer comme médecin. Mais il faudrait lui offrir... et on avait un projet pilote, et c'est notre intention, d'aller plus loin, pour offrir, donc, par exemple, gestion en santé. Et on a fait un projet pilote qui a donné des bons résultats, où certains médecins, parce que ça faisait longtemps qu'ils étaient ici ou pour toutes sortes de raisons, ils n'avaient pas pu avoir... ne voulait pas refaire sa formation ici, et son diplôme n'était pas reconnu, de son pays, donc c'est des... Mais les stratégies, je ne peux pas vous les dire tout de suite, mais, oui, il faut aller plus loin, absolument, il faut aller plus loin. Et, justement, pour ceux qui sont déjà ici, les 0-5 ans, mais pour les professionnels ou les métiers qui viendront, à l'avenir, il faut leur donner un parcours précis.

Mais je tiens à dire qu'il y aura une grande rencontre à l'échelle du Canada parce que le problème, les problèmes qu'on vit, les autres provinces les vivent aussi. Alors, l'idée, c'est de partager nos meilleures pratiques pour mieux réussir cette mobilité.

Le Président (M. Picard) : Mme la députée Montarville.

Mme Roy (Montarville) : Merci. Alors, j'ai hâte de voir quel projet de loi sera sur la table, quelles seront les lois qui seront modifiées, si ce sont les lois professionnelles, et quel sera l'échéancier.

Autre question, le plan contre le racisme, il y avait... Le plan d'action 2008‑2013, intitulé La diversité : une valeur ajoutée, constitue une réponse aux consultations qui ont été menées à l'automne 2006 en vue d'élaborer une politique de lutte contre le racisme et la discrimination. Ce plan d'action, il comportait 21 mesures allant de la sensibilisation à des mesures visant à assurer le maintien, l'accès et la progression en emploi.

Alors, selon le bilan 2013‑2014 du plan d'action 2008‑2013, la nouvelle politique québécoise d'immigration, de participation et d'inclusion, la nouvelle 2016‑2021, pour laquelle les consultations ont été tenues en janvier 2015 et qui a finalement été publiée le 7 mars dernier, donc, ce plan d'action devait permettre de mettre à jour les orientations du Québec en matière de lutte au racisme. Or, cette nouvelle politique ne fait rien de tel, cette politique ne reprend ou ne bonifie pas les 21 mesures du fameux plan 2008‑2013. Donc, en conséquence, à l'heure où on se parle, le Québec ne dispose d'aucun plan stratégique doté de mesures concrètes pour lutter contre le racisme.

On parle d'immigration, de racisme... Alors, qu'a à répondre la ministre aujourd'hui à cet effet, et allez-vous présenter un vrai plan d'action contre le racisme?

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

• (17 h 50) •

Mme Weil : Donc, il y a des mesures dans la stratégie d'action...

(Consultation)

Mme Weil : C'est le 2.2 de la stratégie d'action. Donc, l'objectif 2.2 : «Viser l'égalité réelle en associant et concertant les acteurs économiques, les partenaires [et les] milieux de vie ainsi que les ministères et organismes.»

Donc, c'est par la participation, l'inclusion, lutter contre la discrimination, l'exclusion... Toute la section. Donc, c'est comment on mobilise tous les acteurs, les milieux de travail, les milieux de vie, les municipalités, etc., pour lutter. Donc, j'essaie de... Les programmes d'accès à l'égalité...

(Consultation)

Mme Weil : Oui. Alors, si on regarde la mesure 2.2.2, c'est le C :

«Outiller les municipalités dans la mise en place d'initiatives qui visent à assurer un vivre-ensemble harmonieux et à créer des milieux de vie inclusifs exempts de toute manifestation de discrimination et de racisme.»

Tout le document, là, de vivre-ensemble est imprégné de cette lutte à la discrimination, l'exclusion, le racisme sous toutes ses formes, exclusion sous toutes ses formes. Ensuite, on a aussi la mesure E. Donc, c'est 2.2.2 E :

«Favoriser la mise en place d'initiatives conjointes entre le gouvernement et les fondations philanthropiques qui s'intéressent au rapprochement interculturel, à l'éducation aux droits et libertés de la personne et à la lutte contre la discrimination et le racisme.»

Il y a aussi beaucoup de mesures... non, bien, il y a aussi des mesures dans le plan contre la radicalisation menant à la violence, toute la section concernant en particulier le ministère de l'Immigration, c'est l'inclusion, c'est le vivre-ensemble, mais c'est l'éducation aux droits, sensibiliser le milieu scolaire à toutes les notions de racisme.

Le Président (M. Picard) : Mme la députée de Montarville, 20 secondes.

Mme Roy (Montarville) : Quelques secondes. Tout simplement, ce que je comprends, c'est qu'il y avait 21 mesures dans le plan d'action 2008‑2013 pour contrer le racisme, et là on se ramasse avec quatre points actuellement. Mais je vais revenir tout à l'heure au plan d'action relativement à la radicalisation. Alors, je sais qu'il me reste quelques secondes à peine, je vais les garder pour le volet ultérieur.

Le Président (M. Picard) : Merci.

Mme Roy (Montarville) : Merci à vous, Mme la ministre.

Le Président (M. Picard) : Merci. Je cède maintenant la parole à M. le député de Portneuf pour les 13 prochaines minutes.

M. Matte : Merci, M. le Président. Je voudrais également saluer mes collègues de l'opposition ainsi que mes collègues du gouvernement et naturellement Mme la ministre ainsi que l'équipe et les membres qui vous accompagnent.

Vous le savez que, dans un contexte de changements démographiques que le Québec s'apprête à vivre, l'immigration a un rôle important à jouer, ne serait-ce que pour enrichir notre société, mais aussi améliorer la performance du marché de notre main-d'oeuvre.

Le faible taux de natalité ainsi que... d'ici les 10 prochaines années, environ 1 million de Québécois et de Québécoises prendront leur retraite. D'où l'alternative que nous avons, c'est de se tourner vers l'immigration, et c'est très important. Mais nous savons aussi que le Québec n'est pas le seul à recourir à l'immigration, d'où l'importance de pouvoir avoir des mesures d'attraction et d'attirer les immigrants.

Vous nous avez mentionné à quelques reprises, Mme la ministre, que le budget a été majoré dernièrement, et vous avez aussi mentionné quelles étaient vos intentions par rapport à la majoration du budget. Je me permets aussi de dire que le mois de mars 2016 sera vraiment un mois de mars important pour vous, compte tenu de la présentation du budget, compte tenu de la présentation de votre politique. Alors donc, c'est un mois qui sera vraiment important dans les annales du MIDI.

J'aimerais connaître, Mme la ministre, compte tenu du temps qui nous reste, qui est peu de temps... J'aurais une question à deux volets. Une première, c'est que, dans le budget, on indique qu'avec la majoration on va pouvoir toucher la régionalisation des immigrants. J'aimerais savoir si vous pouvez nous dire ça comprend quoi, la régionalisation, et en quoi la majoration du budget va vous permettre, là, d'offrir des services supplémentaires. Quelles sont vos intentions par rapport à la majoration du budget?

Je sais bien que les investissements prévus au budget confirment la volonté du gouvernement du Québec de faire l'attraction, la rétention et les développements du talent en priorité, mais j'aimerais ça si on peut l'assortir, là, d'exemples concrets afin que les auditeurs qui nous écoutent puissent être en mesure de visualiser les actions concrètes.

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : Oui. Alors, je remercie mon collègue pour la question. Oui. Pour commencer avec les investissements prévus dans le budget, là, puis le budget prévoit des crédits supplémentaires de 18,4 millions de dollars visant à favoriser l'intégration rapide des personnes immigrantes au marché du travail et dans la société québécoise... Donc, ça, c'est vraiment pour tout le Québec, incluant les régions qui ont fortement besoin de main-d'oeuvre, évidemment formation de Québécois, comme le premier ministre le dit souvent, des Québécois qui sont dans nos cégeps, dans nos écoles, pour qu'ils aient une formation arrimée aux besoins du marché du travail, mais aussi ceux qui sont des immigrants, nouveaux arrivants qui sont venus, mais qui n'ont pas trouvé un emploi pour les amener sur le marché du travail. Donc, 10,4 millions — et ça, c'est chez notre collègue le ministre du Travail, et de l'Emploi, et de la Solidarité sociale — pour «favoriser la participation [des personnes immigrantes] au programme Objectif emploi».

Il y a un 2 millions pour «favoriser le développement des compétences des jeunes par les entreprises d'insertion», qui couvrent aussi les jeunes immigrants. Ça aussi, évidemment, c'est chez notre collègue le ministre du Travail et de l'Emploi; un 2 millions pour «favoriser la rétention des étudiants étrangers» et l'entrepreneuriat immigrant, un 4 millions «pour encourager — j'en ai déjà parlé — l'apprentissage du français chez les nouveaux arrivants». Et aussi, il y a des crédits alloués au ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion pour l'année 2016‑2017, qui totalisent un montant de 299,7 millions, donc une augmentation de 6,5 millions par rapport aux crédits de 2015‑2016.

Pour ce qui est des régions, je vous dirais d'entrée de jeu, dans les minutes qu'il me reste... Il reste combien de minutes?

Le Président (M. Picard) : Huit minutes.

Mme Weil : Huit minutes. C'est oui, des mesures du budget, mais, aussi, c'est dans la vision de la réforme. On avait parlé de ça lors de la consultation pour le projet de loi n° 67. On a tendance à parler de la régionalisation de l'immigration comme, bon, des gens qui passeraient par Montréal, puis on veut les encourager à aller en région. Mais déjà, depuis plusieurs années, le ministère de l'Immigration a fait des efforts, développé des stratégies pour présenter les régions, si vous voulez, aux immigrants avant qu'ils arrivent, pour qu'ils puissent avoir le choix puis connaître d'autres régions, entamer des démarches vis-à-vis les acteurs de cette région pour trouver leur place.

D'ailleurs, on avait même une vidéo de quelqu'un qui avait choisi... je pense que c'était une région tout près de Rimouski... c'était Rivière-du-Loup, en fait. Oui, j'avais vu ça dans une capsule vidéo, parce que le ministère a des capsules vidéo. Et la personne a expliqué comment elle avait découvert une... c'était la région, donc, Rivière-du-Loup, et qu'elle trouvait ça... que ça ressemblait plus à... elle était Française, je crois bien, ça représentait plus la région d'où elle venait, puis elle se sentirait plus à l'aise.

Mais là on veut aller plus loin. On veut faire en sorte que, lors de la sélection, on fasse un arrimage direct entre le profil de cette personne et les besoins des différentes régions. Et on présente la région à la personne, on dit : Il y a un emploi qui vous attend dans cette région. Faire en sorte que les entreprises aussi... Les détails de tout ça, on les connaîtra lorsque tout ce programme sera développé, comment la sélection va se faire, très techniquement, là. Mais, pour faire ce lien, donc, entre l'entreprise ou la région qui a besoin de cette personne...

Mais, pour bien réussir le tout, l'immigration en région, là, c'est-à-dire la sélection, que la personne arrive dans cette région, soit bien accueillie, que les services soient en place et la rétention, ça prend le concours de beaucoup de gens et beaucoup d'organismes... Pas nécessairement... Il y a des gens qui s'installent bien, et c'est correct, mais, si on veut que ce soit un projet, vraiment un projet de développement pour une région, ça va prendre une mobilisation de tous les acteurs.

Et on souhaite mettre les acteurs régionaux... Ce que je dis souvent, c'est : Plus en amont du processus de sélection. Qu'est-ce que ça veut dire? C'est, lorsqu'on détermine les besoins des régions, les régions et le ministère de l'Immigration travaillent ensemble pour dire : O.K., on comprend vos besoins et donc, dans la sélection, on sera sensibles à ça, puis qu'on puisse présenter les régions à ces candidats.

Aussi, il y aura une banque. Ce sera le guichet emplois, qui est géré par Emploi-Québec, qui va être accessible et où les gens devront déposer, d'ailleurs, leur candidature. Et là c'est de voir comment les entreprises pourront avoir accès aussi à cette banque d'emplois.

• (18 heures) •

Il y a aussi les projets pilotes, dont j'ai parlé un peu. C'est comment bâtir des projets pilotes avec les acteurs régionaux qui ont des idées sur le type de travailleurs dont ils ont besoin, leur volonté d'accueillir des immigrants. On l'a vu, bien que ce n'est pas les travailleurs qualifiés, mais je fais des parallèles avec l'accueil des réfugiés syriens... on a vu s'exprimer, partout au Québec, des villes qui ont dit : Nous aussi, on veut jouer un rôle, on veut accueillir...

C'est sûr que c'est un dossier humanitaire, et les gens ont voulu contribuer à ce grand défi humanitaire, mais aussi il y avait cette notion d'une famille qui va venir s'installer ici, les enfants vont aller à l'école ici, donc ça vient appuyer, soutenir les institutions publiques qu'on a chez nous. Il y a peut-être certains qui iront au cégep éventuellement, il y a des parents qui vont chercher un emploi. Donc, que ça soit des réfugiés, que ça soit des travailleurs qualifiés, je pense que les villes et les régions voient ça plus globalement. Mais, pour ce qui est de la sélection, oui, en effet, c'est de les amener...

Donc, ces projets pilotes, ça sera en collaboration avec le ministère de l'Immigration et des acteurs des différentes régions, analyser leurs besoins... qui va permettre, donc, de produire ou de bâtir un projet pour cette région, éventuellement en faire un programme d'immigration permanente. Ça pourrait être des travailleurs qualifiés, temporaires ou permanents.

Finalement, il y a aussi, dans les cégeps qui sont dans les différentes régions, dans nos universités dans les différentes régions, des étudiants étrangers qui sont là et de faire en sorte de mobiliser... Là, on a une entente avec Montréal International, parce que Montréal, évidemment, c'est la deuxième plus grande ville universitaire en Amérique du Nord; donc, beaucoup, beaucoup d'étudiants étrangers qui sont là. Et on sait qu'on pourrait faire beaucoup mieux : doubler, tripler le nombre d'étudiants étrangers à court terme, là, qui décideraient de rester au Québec. Mais ça, c'est pour les régions. Il faut le voir aussi avec l'optique de la région qui souhaiterait justement jouer un rôle.

D'ailleurs, pour l'instant, on a Montréal International. On va travailler avec Montréal International pour la région de Montréal, mais il y aura d'autres partenaires pour d'autres régions. Mais, au-delà de ces partenariats-là, les acteurs régionaux peuvent jouer un rôle aussi dans ce dossier, et on va regarder ça ensemble, avec le ministère, pour voir comment tout ça va être bâti. Personnellement, comme ministre de l'Immigration, j'ai visité... et on m'a organisé des visites avec des étudiants étrangers. Et c'est sûr que ce n'est pas... Ça, ce n'est pas un programme, c'est parce que je souhaitais le faire, et l'université m'avait invitée; je l'ai fait à l'UQAM, je l'ai fait à McGill.

Donc, c'est intéressant de voir l'intérêt de ces étudiants. Et c'est bien qu'ils le sachent dès la première année, et c'est notre intention que les étudiants le sachent, même peut-être avant qu'ils arrivent; c'est possible, on va regarder tout ça. Mais, là aussi, que les régions, surtout s'il y a un cégep tout près... On le voit, dans certaines villes où il y a un cégep ou une université, que les acteurs fassent, par exemple, des stages pour les étudiants étrangers, des emplois d'été, pour qu'ils aient une expérience de travail. Alors, on va travailler tout ce dossier-là pour venir renforcer, si on veut, ce que j'appelle l'immigration en région. Je trouve l'expression un peu plus dynamique que la régionalisation de l'immigration.

Le Président (M. Picard) : Merci. Il vous reste une minute, M. le député.

M. Matte : Bien — il me reste une minute — je voulais tout simplement dire que la présentation de votre politique le 7 mars, c'était reçu dans nos régions, c'était vraiment énergisant. Et, lors de ma deuxième intervention, là, après souper, je vais vous parler d'un projet en région, là. Et je pense qu'on parle souvent de Montréal et de Québec, mais il ne faut pas oublier que le Québec a des régions aussi, et cette politique-là fait appel aux régions, et j'ai hâte de vous soumettre mon projet, là, de région.

Mme Weil : ...

M. Matte : Je vous souhaite un bon appétit, c'était vraiment comme apéritif.

Mme Weil : Merci.

Le Président (M. Picard) : Merci. Compte tenu de l'heure, la commission suspend ses travaux jusqu'à 19 h 30, où elle poursuivra son mandat. La salle va être sécurisée, donc vous pouvez laisser vos choses ici. Bon appétit à tous.

(Suspension de la séance à 18 h 5)

(Reprise à 19 h 33)

Le Président (M. Picard) : Nous allons reprendre nos travaux.

Je vous rappelle que la commission est réunie afin de poursuivre l'étude des crédits budgétaires du portefeuille Immigration, Diversité et Inclusion pour l'exercice financier 2016‑2017.

Puisque nous avons débuté nos travaux à 19 h 32 et qu'une période de trois heures doit être consacrée à l'étude des crédits ce soir, y a-t-il consentement pour poursuivre nos travaux au-delà de l'heure prévue, soit 22 h 32? Consentement?

Des voix : ...

Le Président (M. Picard) : Consentement. Avant de poursuivre nos travaux, je vous informe du temps approximatif qu'il reste à chaque groupe parlementaire pour l'étude de ces crédits : la partie gouvernementale, 1 h 27 min; l'opposition officielle, 58 minutes; le deuxième groupe d'opposition, 32 minutes.

Lors de la suspension de nos travaux cet après-midi, M. le député de Portneuf avait la parole. Je vous invite donc à poursuivre votre intervention, M. le député de Portneuf...

M. Matte : Ça va être Marie.

Le Président (M. Picard) : ...qui cède son droit de parole à Mme la députée de Crémazie. Allez-y.

Mme Montpetit : Merci, M. le Président. Merci. En fait, pour reprendre ce nouveau bloc de cette soirée, j'aimerais aborder un sujet un peu différent et je souhaiterais que la ministre puisse nous parler, entre autres, de sa politique, en quoi elle comporte, dans le fond, des mesures qui vont nous permettre de lutter contre la discrimination envers les personnes immigrantes et les personnes qui sont issues des communautés culturelles — je pense qu'il y a différentes mesures qui ont été mises en place — les orientations également qui vont être mises de l'avant, et si elle pouvait, dans le fond, nous en dire davantage sur comment cette mission-là va prendre une place au sein de son ministère et les différentes mesures, dans le fond, qui vont être mises de l'avant.

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : Oui. Alors, je remercie la députée de Crémazie pour cette question. C'est une question bien importante.

Dans le budget, d'ailleurs, le budget de dépenses 2016‑2017, il y a un 2 millions additionnel qui est consacré à valoriser la diversité ethnoculturelle pour un Québec inclusif. Donc, c'est pour consacrer aux activités en lien avec cette orientation qui vise à sensibiliser l'ensemble de la population québécoise au caractère pluriel de la société et à l'apport de la diversité, et à la prospérité du Québec, et notamment de lutter contre le racisme et la discrimination. Ça, c'est des argents neufs. On parlait tantôt du plan d'action La diversité : une valeur ajoutée, c'était autofinancé. Donc, ça, c'est des argents neufs pour supporter des projets, des projets qui vont venir des différents milieux pour sensibiliser les gens à la diversité et lutter contre la discrimination.

Mais je vais aller plus précisément, parce que le ministère a regardé précisément toutes les mesures qui sont dans la stratégie d'action, avec des argents attachés à chacune de ces mesures. Donc, la politique reconnaît l'enjeu de la discrimination et du racisme — c'est pages 14, 36 et 37 de la stratégie d'action — comme un obstacle important à la reconnaissance et à la valorisation de la diversité ethnoculturelle. La discrimination et le racisme sont aussi des obstacles à l'édification de collectivités plus accueillantes et inclusives. Ainsi, le rôle de la formation sur les droits et libertés, de la sensibilisation aux conséquences des préjugés, mais aussi l'implication des acteurs économiques et des milieux de vie sont mis de l'avant.

Dans la stratégie, la discrimination et le racisme sont nommément pris en compte dans les objectifs 2.1 et 2.2. 2.1, c'est «consolider [des] liens de confiance et de solidarité entre les personnes de toutes origines». Ça, c'est dans la politique. Et 2.2, c'est «viser l'égalité réelle en associant et concertant les acteurs économiques et partenaires des milieux de vie ainsi que les ministères et organismes», donc plusieurs mesures qui sont dans ces sections.

Donc, notons par exemple les mesures structurantes suivantes : la sensibilisation sur les valeurs démocratiques et sur la lutte contre les préjugés, la discrimination et le racisme ainsi que la diffusion d'information en la matière, 2.1.1 B, pour laquelle un budget de 500 000 $ est prévu en 2016‑2017; ensuite, l'information et l'accompagnement des personnes victimes de discrimination et de racisme, 2.1.2 B; l'outillage des municipalités, 2.2.2 C, 1,2 million de dollars; la mise en place d'initiatives avec les fondations philanthropiques, 2.1.2 E. Alors, la politique et la stratégie engagent et mobilisent l'ensemble des acteurs dans un projet visant à faire du Québec une société encore plus inclusive et égalitaire. Pour y parvenir, la lutte contre les préjugés, la discrimination et le racisme est indispensable, et nos actions de sensibilisation et de formation y contribueront. L'engagement des acteurs économiques dans la mise en place de pratiques inclusives en emploi inclut la lutte contre la discrimination et le racisme.

Par ailleurs — et ça, c'est vraiment important, je tiens à le souligner — la stratégie d'action Ensemble, nous sommes le Québec se distingue du plan d'action La diversité : une valeur ajoutée en ce qu'elle contient des indicateurs de performance bien circonscrits qui permettront avec transparence de rendre compte des progrès accomplis et de rectifier le tir au besoin pour concrétiser notre vision. Ce n'est pas le nombre de mesures ou moyens d'action qui compte, mais plutôt leur caractère structurant et innovant et un engagement ferme pour atteindre les résultats attendus de la part, certes, du gouvernement, mais aussi des employeurs, des acteurs municipaux et de l'ensemble de la société.

De nombreuses mesures de La diversité : une valeur ajoutée visaient à favoriser l'intégration des personnes immigrantes et la pleine participation des personnes de minorités ethnoculturelles. Ce sont des objectifs qui demeurent dans la politique et la stratégie, mais inscrits dans une approche globale et cohérente en matière d'immigration, de participation et d'inclusion.

Le Président (M. Picard) : Merci, Mme la ministre. Alors, Mme la députée de Crémazie?

Mme Montpetit : Je vous remercie, M. le Président. Combien nous reste-t-il de temps?

Le Président (M. Picard) : Deux minutes.

Mme Montpetit : Est-ce qu'il est possible de le reporter sur le prochain bloc?

Le Président (M. Picard) : Oui, il n'y a pas de problème.

Mme Montpetit : Je vous remercie.

Le Président (M. Picard) : Je cède maintenant la parole à M. le député de Bourget.

• (19 h 40) •

M. Kotto : Merci, M. le Président. Je veux revenir à l'orientation 3 du cahier de crédits, dont je parlais juste avant que mon temps ne s'épuise. Dans l'orientation 3 — je reprends ce que je disais — il est écrit :

«Valoriser la diversité ethnoculturelle pour un Québec inclusif.

«Un budget de 2 millions de dollars est consacré aux activités en lien avec cette orientation, qui [correspond à] l'ensemble de la population québécoise au caractère pluriel de la société et à l'apport de la prospérité du Québec.»

Il y a une action envisagée : «La mise en oeuvre d'une stratégie de communication incluant une campagne publicitaire [afin] de sensibiliser l'ensemble de la population québécoise au caractère pluriel de la société et [...] à la prospérité du Québec.»

Je voulais savoir si la ministre pouvait nous donner une idée plus précise de la finalité de l'usage de ce 2 millions et sur quoi précisément il va s'articuler, quel genre d'activités. Il n'y a pas de précision, de détail là-dessus. Est-ce que c'est un montant d'argent qui est attribué de façon abstraite, ou il repose sur un plan d'affaires bien précis, une stratégie bien précise?

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : Excusez-moi, M. le Président, pour clarifier. Est-ce que c'est concernant le 2 millions généralement ou la stratégie de communication?

M. Kotto : Non, le 2 millions.

Mme Weil : Le 2 millions?

M. Kotto : Oui, oui. C'est spécifique...

Mme Weil : Oui. La mise en oeuvre, vous voulez dire, comment... Parce qu'on est... moi, personnellement, le ministère, on n'est pas encore rendus à l'étape de mise en oeuvre, mais je vais valider...

(Consultation)

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : Oui. Alors, il y a la campagne. Évidemment, moi, je n'ai pas encore eu de briefing sur la campagne, la stratégie de communication encore. Donc, il y aura des appels d'offres. L'idée, c'est comme on voit dans d'autres sociétés, c'est des campagnes publicitaires qui vont évoquer des sentiments. Donc, je ne sais pas encore ce que ça va donner, mais il y a des appels d'offres. Mais, pour ce qui est du reste, ça va être des appels de projets. L'idée, c'est vraiment de susciter l'engagement des différentes collectivités, des organismes qui vont proposer des projets — parce que ce n'est pas dans le cadre de nos programmes, essentiellement, c'est des nouveaux projets — pour la durée de cette stratégie d'action, et sur des thèmes. Plus détaillé que ça... Moi, je n'ai pas encore un plan de match détaillé, mais l'idée, c'est de mobiliser tous les différents acteurs de la société civile.

Le Président (M. Picard) : M. le député de Bourget.

M. Kotto : O.K. Je vois que le projet en lui-même n'est pas encore défini dans toutes ses déclinaisons, mais je vois où la ministre s'inscrit là-dedans. Cependant, quand on définit 2 millions, on se base sur quoi spécifiquement, alors que l'ensemble du projet dans ses déclinaisons n'est pas encore lui-même défini? Comment est-ce que le calcul de 2 millions atterrit ici?

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : Vous avez le document, la stratégie d'action. On le voit très bien, la manière que c'est décliné. Mais, surtout, on voit aussi qui est responsable du projet et la collaboration avec d'autres ministères et organismes. Donc, les chiffres ont été estimés, basés sur l'évaluation des différents partenaires, les différents ministères qui sont... Ça a été fait conjointement. Donc, si on va sur un exemple... Des fois, il y a la Commission des droits de la personne, hein? Par exemple, la Commission des droits de la personne, si je regarde 2.1.2 A... Mais informer, par exemple. Ça, c'est 2.1.2 B :

«Informer et accompagner les personnes des minorités ethnoculturelles victimes de discrimination et de racisme pour qu'elles aient une compréhension juste de leurs droits et qu'elles puissent les exercer en utilisant les recours mis à leur disposition, notamment en appuyant les organismes oeuvrant auprès des minorités ethnoculturelles dans la diffusion de l'information et la mise en place de mécanismes d'accompagnement.»

Ça, c'est avec la Commission des droits de la personne. Ça, je me souviens bien de ça parce que la Commission des droits de la personne nous a dit qu'il y a beaucoup de gens qui ne veulent pas se plaindre. Ils ont une crainte. Il faut les informer, il faut avoir des organismes aussi qui agissent comme des... comment dire, des liens avec ces personnes pour qu'ils sachent qu'ils peuvent s'adresser à la Commission des droits de la personne, ils peuvent faire valoir leurs droits. Donc, il y a un montant qui est associé à cette mesure-là... Peut-être pas encore précisément...

Une voix : ...

Mme Weil : O.K. C'est autofinancé, donc, autofinancé par la Commission des droits de la personne et le ministère dans ce cas-là.

Il y en a un autre, donc les... comment dire... «Renforcer l'éducation aux droits et libertés ainsi que la formation interculturelle afin d'assurer un plus grand respect des valeurs démocratiques et l'adaptation des institutions...»

Et là il y a trois différents objectifs ou actions, il y a : l'élaboration d'un «programme de formation [spécifique] destiné [aux hauts dirigeants] et aux gestionnaires des ministères et organismes publics»; deux, «développant des programmes de formation et des outils favorisant l'apprentissage et l'exercice des droits et libertés pour les employeurs du privé et de la fonction publique, les organismes communautaires qui interviennent auprès des personnes immigrantes et l'ensemble de la population».

«Informer et accompagner les personnes des minorités ethnoculturelles victimes de discrimination et de racisme pour qu'elles aient une compréhension juste de leurs droits et qu'elles puissent les exercer en utilisant les recours mis à leur disposition», là, il y a un montant de 50 000 $ qui y est associé.

Donc, c'est quand même assez spécifique, c'est l'étape de la mise en oeuvre. On a bien identifié les enjeux, bien identifié les actions à prendre, bien identifié les partenaires. Et là l'étape où moi, en tout cas, je n'ai pas encore eu de briefing, c'est la mise en oeuvre. On va le faire très bientôt. C'est ça.

Le Président (M. Picard) : M. le député.

M. Kotto : La question est en lien avec la budgétisation de potentiels projets, mais la ministre nous fait comprendre que, disons, la démarche est en développement. Mais ma question, elle n'est pas... comment dire, abstraite, parce qu'on définit un 2 millions. Si d'aventure la campagne exige plus d'argent, qu'est-ce qui va se passer? Ou, si d'aventure on en utilise moins, c'est-à-dire, si on va dans l'autre sens, que va-t-il se passer? Et l'idée est de savoir si, dès le départ, on s'est dit : Bon, on donne une enveloppe de 2 millions sur une telle campagne contre la discrimination, contre le racisme, ça vaut 2 millions. On a là, de ma perspective des choses, une lecture intuitive de ce que ça va coûter, mais on ne s'est pas basé sur des modèles de projets budgétés pour définir ce montant. C'est ça, le sens de ma question.

Mme Weil : Parce que je sais qu'il y a des experts ici, au ministère, qui ont travaillé ça justement et qui ont connu d'autres campagnes, qui ont travaillé d'autres campagnes, qui savent comment estimer les sommes dépendant de la nature... C'est surtout les experts en communication. Alors, moi, je ne suis pas une experte en communication. Je sais ce que j'aime avoir, je sais ce qui me touche, je sais lorsque je ressens des émotions, mais je ne sais pas la production derrière ça et comment on estime les coûts. Moi, je proposerais qu'on demande à quelqu'un qui a vraiment l'expertise chez nous, peut-être, de répondre à cette question, comment on évalue. Donc, notre sous-ministre se prêterait à l'exercice.

Le Président (M. Picard) : Est-ce qu'il y a consentement pour permettre au sous-ministre de répondre à la question? Consentement. Vous êtes habitué, donc, vous vous présentez avec votre titre et vous pourrez continuer.

• (19 h 50) •

M. Baril (Robert) : Alors, bonjour, Robert Baril, sous-ministre au ministère de l'Immigration, Diversité et Inclusion.

En fait, dans les exercices de préparation budgétaire comme ceux-là, on utilise les paramètres de comparables. Par exemple, dans le cas de campagnes de sensibilisation, on va se baser sur des campagnes qui ont été réalisées, soit par d'autres ministères... On travaille avec le ministère du Conseil exécutif, le Secrétariat à la communication gouvernementale et le CSPQ, qui ont des agences déjà préautorisées avec lesquelles on peut travailler. Donc, c'est comme ça qu'on arrive à faire des estimations de budget.

Les budgets doivent être préautorisés par le Conseil exécutif, donc le Secrétariat à la communication gouvernementale. Mais on utilise globalement, donc, des paramètres à partir des comparables de programmes ou de campagnes semblables qui ont été réalisées.

M. Kotto : Est-ce que, par le passé, quels que soient les gouvernements, il y a eu de telles démarches de sensibilisation pour lutter contre la discrimination ou le racisme dans l'histoire du Québec?

M. Baril (Robert) : Je ne m'en souviens pas précisément. Je sais qu'il y a eu une campagne de sensibilisation à l'immigration, L'immigration s'écrit avec un i, là. Je ne sais pas si vous vous rappelez de cette campagne publicitaire là. C'est, à ma connaissance, la dernière campagne à ce sujet-là. Puis ça date quand même d'un certain nombre d'années. Oui. Puis avant, il y a eu une campagne qui s'appelait Toutes nos origines enrichissent le Québec. Mais ça date quand même d'un bon nombre d'années, là.

Le Président (M. Picard) : M. le député.

M. Kotto : Et là allons sur la finalité. Qu'est-ce qu'on cherche à atteindre? Qu'est-ce qu'on cherche à changer dans la société québécoise en se basant sur cette campagne-là? C'est quoi, la finalité?

Mme Weil : Je pense que...

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : Oui. La finalité, c'est beaucoup de faire la promotion de ce qu'on appelle le vivre-ensemble par une... Les campagnes sociétales de ce genre, évidemment, c'est d'aller chercher beaucoup le coeur, hein, des gens et une compréhension. Puis c'est souvent par les images, par une histoire qui nous est racontée en une minute.

Moi, j'en ai vu d'autres. J'en ai vu en Angleterre, j'en ai vu aux États-Unis contre le racisme. Mais ce qui est toujours frappant dans ces campagnes, c'est qu'évidemment avec l'expertise des gens en communication, en l'espace de très peu de temps, une minute, on a tout de suite compris l'enjeu et on a été ému par ce qu'on a vu. Donc, essentiellement, c'est, oui, la...

Bien, d'une part, bon, les résultats attendus, ça, c'est vraiment techniquement :

«L'accroissement de la reconnaissance du caractère pluriel de la société québécoise et de l'apport de la diversité;

«La connaissance de l'interculturalisme par l'ensemble de la population;

«L'augmentation [...] — ah non, ça, c'est plus généralement;

«L'accroissement de la reconnaissance des conséquences des préjugés, de la discrimination et du racisme.»

Parce qu'il y a deux façons... Puis, c'est ça, je ne sais pas encore les choix qu'on fera, hein? Parce qu'il y a deux façons d'y aller. Je ne sais pas si vous avez vu la campagne récente en France. Oui, vous l'avez vue? Où ils se bagarrent, là, dans un escalier puis bon... Et c'est le racisme. Hein, vous avez vu ça? Puis c'est frappant, c'est choquant. Ça nous affecte quand on regarde la campagne aussi de lutte contre les agressions sexuelles du gouvernement du Québec ces dernières années. C'est plus pour... comment dire, c'est plus négatif, ça nous fait peur. On sent une tristesse quand on voit ça. Il y a ces émotions-là.

J'ai vu d'autres campagnes qui vont sur le très positif de la diversité. Une magnifique campagne en Grande-Bretagne. Je pense que c'est dans le métro. C'est des images. On voit que c'est des personnes issues de la diversité. Peut-être c'est soit des minorités visibles ou autres, mais on voit par les visages. Et on voit un pompier avec un peu les joues noires. On voit qu'il sort de la fumée puis d'un incendie, puis qu'il vient d'ailleurs. C'est une personne racisée. Et il dit, bon : J'ai sauvé une famille avec deux enfants aujourd'hui. Ensuite, on voit une infirmière qui dit ce qu'elle a fait. Donc, elle a sauvé les vies des enfants. Et c'est quatre images comme ça. Et c'est des gens qui ont des fonctions dans la société, mais qui contribuent comme tout le monde à des tâches et des missions importantes dans la société.

Nous, on n'a pas encore pris de décision là-dessus. On n'est pas encore rendus là. L'idée, c'est justement d'aller chercher l'adhésion des gens, soit comme c'est dit ici, qu'ils reconnaissent l'impact négatif du racisme ou aussi qu'ils puissent apprécier ce que la diversité apporte à une société.

Le Président (M. Picard) : M. le député.

M. Kotto : Oui, M. le Président. Je vois l'idée. Elle est louable. Mais avec un tel budget, permettez-moi de douter de l'efficacité d'une... Parce que le montant nous permet de nous déployer sur du court terme. Mais les racines de la discrimination et du racisme, quand elles s'inscrivent dans une société, quelles que soient les poches, les milieux, sont tellement profondes qu'elles prennent beaucoup plus de moyens que ceux-ci pour changer au terme d'une génération. Je prends tout ce que véhicule l'imagerie populaire à travers la télévision, le cinéma et autres, des modèles de représentation qui, quand ils ne sont pas totalement absents, sont parfois biaisés, caricaturaux et ne véhiculent pas nécessairement un portrait vers lequel spontanément l'ensemble de la société pourrait s'identifier, parce que c'est un modèle positif. Les modèles sont absents.

J'entends bien la démarche, mais... Autre question. Est-ce que cette approche, cette démarche, va se poursuivre dans les exercices budgétaires subséquents?

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : Alors, oui, j'ai deux éléments de réponse. Alors, c'est une campagne sur cinq ans avec montants récurrents. Donc, ça, je pense que ça s'adresse... Mais c'est une mesure parmi d'autres mesures, parce que le député, évidemment, de l'opposition, le député de Bourget a tout à fait raison, ça prend une panoplie de mesures, un coffre d'outils bien garni. C'est pour ça qu'on a toutes ces mesures, de diffuser de l'information, mais aussi éducation de droits... Dans les écoles, il y a beaucoup de mesures qui touchent le ministère de l'Éducation. Déjà, il y a des organismes qui font l'éducation aux droits, et c'est très efficace, il y a des camps d'été, il y a un organisme qui s'appelle Équi-tasse. Vous connaissez peut-être l'organisme Équi-tasse, qui fait justement ce genre de travail.

Et, en parlant avec Équi-tasse, ils disent que vraiment l'impact est très fort. Parce que, quand on atteint les jeunes, ils le comprennent plus facilement. Bien, facilement... c'est instinctif, presque, pour eux, parce qu'ils sont jeunes et ils sont avec d'autres jeunes, et surtout dans certaines... bien, à Montréal, très, très diversifié, Équi-tasse travaille beaucoup dans la région de Montréal. Et c'est un programme financé par le MIDI, mais qui passe par l'entente qu'on a avec la ville de Montréal. Donc, ils sont aussi dans les camps d'été. Ça, c'est juste un exemple.

Donc, il y a une série de mesures dans la politique qui fait en sorte qu'on touche à beaucoup de milieux, les municipalités aussi. En effet, le problème du racisme... ce n'est pas simplement par une campagne qu'on pourrait éradiquer le racisme et la discrimination.

La représentativité aussi... Au gouvernement, dans le secteur public, dans nos institutions, dans les médias, on en avait beaucoup parlé lors de la consultation en 2015. Là, c'est évidemment la ville de Montréal qui...

M. Kotto : ...juste suggérer à la ministre de réfléchir également sur l'obstacle qu'incarne l'approche du multiculturalisme. Au Québec, on l'a combattue, tous gouvernements confondus, depuis Robert Bourassa jusqu'à récemment, parce que c'est une approche qui nous amène à vivre en silos, silos exsangues de passerelle et de pont au sein de la diversité même et entre la diversité et la société d'accueil. Donc, c'est un obstacle qu'il faudra considérer dans l'approche, parce que c'est une avenue qui génère beaucoup de préjugés, les uns par rapport aux autres. Pourquoi? Parce qu'on ne se connaît pas, on ne se fréquente pas. Et, croyez-moi, on l'a vu en Angleterre, on l'a vu en Allemagne, on l'a vu un peu partout, en Australie.

Le Président (M. Picard) : Merci. Merci, M. le député...

M. Kotto : C'est un enjeu important.

Le Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Maintenant, pour la partie gouvernementale, M. le député de Portneuf.

Des voix : ...

Le Président (M. Picard) : Mme la députée de Chauveau? O.K.

• (20 heures) •

Mme Tremblay : O.K. Alors, on va parler de la reconnaissance des acquis, parce que les personnes immigrantes formées à l'étranger doivent surmonter plusieurs obstacles lorsqu'elles essaient d'intégrer le marché du travail. Et, bon, il y en a certains dont la profession est régie par un ordre professionnel, et ces gens-là se butent à des difficultés au moment de faire reconnaître leurs diplômes, les nouveaux arrivants qui envisagent d'exercer un métier réglementé doivent faire reconnaître leurs compétences, et il y en a d'autres qui se heurtent au manque de reconnaissance de leur expérience de travail parce que celle-ci a été acquise ailleurs qu'au Québec et au Canada.

C'est une situation qui cause de la frustration, bien sûr, chez les nouveaux arrivants, mais c'est le Québec qui subit le plus grand préjudice, parce que le Québec se prive des talents et d'expertises qui peuvent contribuer à combler les besoins pressants de main-d'oeuvre et au développement de nos entreprises. Et, pour réussir une intégration qu'on dirait pleine, réussie, bien c'est nécessaire que les diplômes, les qualifications, les expériences qui sont acquises à l'étranger soient reconnus par des organismes de réglementation et les employeurs.

Il y a beaucoup de progrès qui ont été accomplis depuis 10 ans, mais il en reste quand même beaucoup à faire. Ce que j'aimerais savoir, Mme la ministre, c'est que vous nous parliez, dans le fond, des progrès qui ont été faits et ce qu'il reste à accomplir.

Le Président (M. Picard) : Merci. Mme la ministre.

Mme Weil : Oui. Alors, je remercie la députée de Chauveau. On en avait parlé un petit peu avant, mais évidemment je n'ai pas pu expliquer toute la genèse de ce dossier puis les progrès réalisés. Alors, ça me fait plaisir d'évoquer les progrès qui ont été réalisés mais aussi le chemin qu'il nous reste à parcourir pour vraiment avoir, comment dire... faire en sorte que toutes ces personnes tellement talentueuses puissent bien intégrer, travailler dans la profession dans laquelle elles sont destinées.

Alors, nous avons réalisé beaucoup de progrès, ces dernières années, nous avons mis en oeuvre une grande partie des recommandations qui ont été faites par l'équipe des parlementaires, le Groupe de travail sur l'accès aux professions et métiers réglementés, en 2009. Et moi, je dois vous dire que je suis fière d'avoir été la ministre de la Justice qui a amené cette loi, c'est la Loi instituant le poste de Commissaire aux plaintes concernant les mécanismes de reconnaissance des compétences professionnelles. C'était en 2009, cette loi a été adoptée. Je vous dirais que ça a été ma première initiation, ce dossier très, très complexe, et c'est là que j'ai appris... C'est que, souvent, le problème, c'est la formation et les stages. Souvent, on est capables de reconnaître, mais, quand arrive le temps de trouver la formation d'appoint, soit que les universités ne sont pas capables de le fournir parce qu'il n'y a pas assez de volume d'étudiants ou, les stages, comme on l'a vu tout récemment dans les reportages, certaines professions ont de la misère à les offrir. Alors, cette loi, qui s'inscrit au chapitre des mesures pour contrer les effets du déclin démographique, permet l'accélération des mécanismes de reconnaissance des compétences professionnelles. Le rôle du commissaire est d'observer globalement le fonctionnement des mécanismes de reconnaissance des compétences professionnelles. Il observe aussi l'accès aux formations et aux stages exigés par les ordres pour la reconnaissance des compétences. Il joue un rôle de surveillance spécialisé en travaillant surtout sur la problématique de l'accès des personnes immigrantes aux professions régies par un ordre professionnel. Le commissaire reçoit et examine les plaintes contre un ordre professionnel concernant la reconnaissance des compétences professionnelles, puis il transmet à cet ordre les recommandations qu'il juge utiles.

En 2010, l'Office des professions, en concertation avec le ministère de l'Éducation supérieure et de la Recherche scientifique — c'était le nom à l'époque — a mis en place le pôle de coordination pour l'accès à la formation prescrite par les ordres professionnels ainsi qu'aux stages. Le MIDI a agi sur plusieurs fronts pour améliorer la qualité de l'information transmise aux candidats. Le site Internet a été amélioré par du référencement vers le site Emploi-Québec, la sélection des candidates et candidats tient compte des difficultés liées à l'accès aux professions et métiers réglementés, les déclarations des candidates et candidats quant aux professions et métiers réglementés ont été bonifiées, et le message véhiculé lors des séances de promotion a gagné en réalisme. Le MIDI réfère les personnes immigrantes vers l'organisme de réglementation compétent pour qu'elles s'informent des exigences liées à l'exercice de leur profession. Aujourd'hui, de nombreux ordres professionnels ont conçu des outils d'information de qualité et consacrent une section de leurs sites Internet aux candidates et candidats formés hors du Québec.

Le ministère a mis sur pied le programme Accès aux ordres professionnels. Le programme peut financer divers projets visant des processus d'évaluation et de reconnaissance des compétences des personnes immigrantes formées à l'étranger. Les promoteurs de ces projets sont principalement des ordres professionnels. De plus, grâce à la participation financière du MIDI, de nombreux outils de reconnaissance des acquis et des compétences ont été élaborés pour près de 20 professions, de même que des outils d'autoévaluation ou d'autoappréciation par plusieurs ordres professionnels. Des programmes de formations d'appoint pour certaines professions régies par des ordres professionnels ont été développés, par exemple celles pour les infirmières, infirmiers, les ingénieurs ou les pharmaciens. Certains cours à distance, en ligne ou en réseau portant notamment sur la législation et les conditions d'exercice au Québec en lien avec des professions régies par des ordres professionnels ont aussi été élaborés.

D'autres avancées significatives sont survenues à l'égard des professions régies par des ordres professionnels, soit l'introduction de nouveaux types de permis — restrictifs, temporaires, spéciaux et sur permis — l'adoption de règlements en matière de reconnaissance des acquis, la création du poste de commissaire dont j'ai parlé et l'adoption de principes en matière de reconnaissance d'une équivalence de diplôme et de formation acquis hors du Québec. Le ministère de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche ainsi que le ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion ont fourni du financement pour la formation d'appoint requise à la suite d'une prescription d'un ordre professionnel.

Le gouvernement a conclu deux ententes en matière de mobilité professionnelle avec la France, l'Entente entre le Québec et la France en matière de reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles, signée en 2008, qui détermine une procédure commune de reconnaissance des qualifications professionnelles visant à faciliter et à accélérer l'obtention d'une aptitude légale d'exercer une profession, un métier ou une fonction réglementée sur l'un et l'autre territoire, sous la responsabilité du ministère des Relations internationales et de la Francophonie... D'ailleurs, je vous dirais que cette entente de mobilité est vraiment un modèle. Et on a vu un reportage tout récemment sur quelques problématiques, mais généralement c'est une entente qui donne des résultats vraiment très intéressants, beaucoup de professionnels qui ont pu, en vertu de... C'est tout simplement une entente de mobilité. Ce n'est pas une entente qui vise nécessairement l'immigration, mais ça peut mener à l'immigration si la personne qui vient travailler ici, de la France... ou, inversement, un professionnel québécois va en France et puis tombe en amour avec la France et avec quelqu'un là-bas, comme la personne qui vient ici, comme ça se fait souvent, et donc la personne décide de rester, bien, toute la reconnaissance de ses qualifications professionnelles, évidemment, tout ça est automatique en vertu de cette entente. Depuis la signature de cette entente, une centaine d'autorités compétentes ont appliqué cette procédure, permettant à 81 professions, métiers et fonctions réglementés au Québec d'être couverts par ce qu'on appelle des ARM, des arrangements de reconnaissance mutuelle.

La seconde, l'Entente entre le gouvernement du Québec et le gouvernement de la République française relative à la mobilité professionnelle et à l'intégration des migrants, signée en 2010, vise notamment à promouvoir la mobilité professionnelle, les emplois et les stages ouverts aux ressortissants des deux pays, à faciliter les formalités administratives et à permettre l'accès aux dispositifs d'accueil et d'intégration des deux côtés de l'Atlantique. En effet, c'était le bout qui manquait dans la première entente, c'était d'avoir accès à des emplois et des stages, donc il a fallu cette deuxième entente pour, finalement, ce morceau-là, si on veut, de cet arrangement qui est très stratégique et nécessaire, essentiel.

• (20 h 10) •

Pour favoriser l'acquisition d'un vocabulaire technique lié à la profession, le MIDI offre des cours de français spécialisés dans le domaine de la santé et des soins infirmiers, du génie et des sciences appliquées ainsi que dans le domaine de l'administration, du droit et des affaires. On a élargi les critères d'admissibilité du Programme d'aide à l'intégration des immigrants et des minorités visibles en emploi, le programme PRIIME, dont je vous parlais plus tôt, qui vise à favoriser l'acquisition d'une première expérience de travail au Québec dans son domaine, que celui-ci soit réglementé ou non. On a aussi créé le projet d'intégration en emploi de personnes formées à l'étranger référées par un ordre professionnel, qui s'appelle IPOP, qui propose notamment une subvention salariale, qui a été créé pour les professions régies par un ordre professionnel. Pour être éligibles, les personnes doivent déjà être titulaires d'une autorisation légale d'exercer.

Lors de l'exercice financier 2006‑2007, le gouvernement du Québec a rendu permanent un crédit d'impôt remboursable accordé aux sociétés du secteur privé qui offrent des stages en milieu de travail. Ce crédit a été bonifié pour les stages offerts aux personnes immigrantes.

Le Fonds d'appui à la mobilité de la main-d'oeuvre, le FAMMO, administré par l'Office des professions du Québec, permet aussi de soutenir des projets en matière de reconnaissance des qualifications professionnelles des ordres professionnels et des organismes régissant l'accès aux métiers réglementés de la construction et hors construction.

Le ministère de l'Éducation finance les formations d'appoint en formation professionnelle et technique. Ces formations permettent aux personnes formées à l'étranger de suivre des cours d'appoint afin de remplir les conditions imposées par un ordre.

Pour sa part, le programme de soutien à l'intégration des personnes immigrantes du ministère de l'Éducation consiste en une aide financière aux universités afin qu'elles puissent offrir un programme de formation d'appoint. Le Programme de prêts et bourses et le Programme de prêts pour les études à temps partiel du ministère de l'Éducation permettent d'apporter un soutien financier aux personnes immigrantes admissibles qui doivent compléter une formation d'appoint ou une formation scolaire prescrite à la carte par un ordre professionnel en vue d'obtenir leurs permis d'exercice.

Dans toutes les régions du Québec, les commissions scolaires sont en mesure, par l'entremise des Services d'accueil, de référence, de conseil et d'accompagnement... ça s'appelle le SARCA, je ne sais pas si vous avez déjà entendu parler, mais on me dit que ça fonctionne très bien, c'est un service qui est très, très utile, qui joue un rôle fondamental, donc... ou des centres de formation professionnelle, d'assurer l'accessibilité aux services de la reconnaissance des acquis et des compétences, de fournir les informations requises et d'effectuer les références vers le service le plus approprié. Donc, ça, on le trouve dans toutes les régions. Elles jouent un rôle vraiment important, ces commissions scolaires, là, par le service d'accueil et de référence.

Lors du développement du plan économique du Québec, le 26 mars 2015, le gouvernement a annoncé des investissements de 42,5 millions sur cinq ans pour renforcer la contribution de l'immigration au marché du travail, dont 2,8 millions les trois premières années pour favoriser justement la reconnaissance des compétences des personnes immigrantes. Donc, on est en plein là-dedans. On a fait la première étape, les résultats seront dévoilés sous peu, et là on entame la deuxième étape de ce gros chantier de travail.

Il s'agit d'un bref résumé de nos avancées en matière de reconnaissance des diplômes et des compétences. Beaucoup d'efforts ont été consentis, et des progrès ont été constatés. Cependant, évidemment, force est de constater qu'il nous reste encore beaucoup à faire. Nous ne pouvons plus laisser celles et ceux que nous avons sélectionnés pour leurs compétences et leur formation sans travail alors que nos entreprises et notre économie ont besoin d'eux, ces difficultés de reconnaissance ont des impacts importants pour notre société. Donc, nous miserons sur l'information aux candidats à l'immigration, le réseautage, le partage des bonnes pratiques et l'émission d'une évaluation comparative des études au même moment que la délivrance du certificat de sélection du Québec. Nous allons oeuvrer auprès des candidats à l'immigration qui exercent une profession ou un métier réglementé mais aussi auprès des employeurs qui ont de la difficulté à reconnaître les diplômes et l'expérience de travail acquise à l'étranger. Ce que nous voulons, c'est d'offrir un parcours clair dès l'étranger aux personnes immigrantes afin d'accélérer leurs démarches.

Je réitère ici, là, donc, il y a les trois cas types, hein? Il y a la personne qui se destine à un ordre professionnel ou à un métier réglementé, et tout le reste, qui est entre 65 % et 80 %, c'est tout simplement l'employeur qui ne peut pas reconnaître... Je ne sais pas si vous avez déjà été dans cette situation. Moi, dans une autre vie, quand je regardais les C.V., c'est vrai, quelqu'un qui a fait son diplôme à l'Université de Barcelone, par exemple, je me rappelle très bien, j'avais le C.V. devant moi, je me disais : C'est très difficile à savoir, bon, l'expérience de travail que la personne avait, et on a besoin d'appui, on a besoin que quelqu'un puisse nous dire : Bien, ça, ce serait exactement comme un diplôme à une de nos universités. Mais apparemment même entre nos universités ce n'est pas si facile de se reconnaître entre les unes et les autres.

Donc, nous travaillons donc avec l'ensemble des acteurs pour mettre fin à ce que j'appellerais vraiment un gaspillage de talents. Et, au-delà du gaspillage de talents, il y a aussi le, comment dire... on l'a vu dans les reportages à la télévision justement ces dernières semaines, en parlant de ces médecins de la Syrie, mais on voit la détresse. On voit la détresse, le découragement, les personnes se résignent. Mais on le voit aussi chez les enfants. Moi, j'ai parlé souvent à la deuxième génération, qui ont témoigné dans des grands événements sur l'immigration, etc. Il y a eu un grand événement ici, à Québec, justement, c'étaient toutes les commissions scolaires qui ont participé, il y avait à peu près 800 enfants qui étaient à cet événement extraordinaire, et l'idée, c'était... Il y avait des étudiants, des jeunes qui étaient là et qui ont témoigné de leur parcours, et des fois c'étaient des parcours très émouvants, j'étais là avec quelques autres députés, puis le maire Labeaume était là aussi, très émouvant, et certains qui avaient vécu certains traumatismes, il y avait des réfugiés. Mais il y avait aussi une jeune fille, elle avait peut-être 14 ans, et elle, sa grande tristesse, c'est d'avoir vu ses parents, donc, un ingénieur et l'autre comptable... ou en tout cas, c'étaient vraiment des professions... Pour une raison quelconque, ils n'ont jamais pu pratiquer dans leur domaine. Et j'ai vu de mes propres yeux, par son témoignage, l'impact que ça a eu sur elle. Elle ne comprenait pas pourquoi ses parents, tellement scolarisés, tellement intelligents, formés...

Donc, je pense que nous tous, comme élus, ici, on a tous cette volonté de s'attaquer à ce problème, de trouver les solutions. Alors, c'est bien de voir les progrès, je pense qu'il faut le souligner, qu'il y a eu des progrès, beaucoup de travail qui a été fait, et on est fiers du travail qu'on a fait, mais je pense qu'il n'y a personne ici, à l'Assemblée nationale, qui veut arrêter là.

C'est tellement complexe. Et on sait qu'on n'est pas... J'ai eu l'occasion, parce que le ministère a commandé des études, justement, pour comparer les différents systèmes de reconnaissance dans d'autres sociétés, d'autres pays, et on voit qu'il n'y a personne qui a la formule magique. Parce que, derrière tout ça, il y a toujours, pour les ordres professionnels, la question de protection du public, on prend ça bien au sérieux, évidemment, mais, à part ça, c'est juste la difficulté de reconnaître, donc, les expériences et les formations des personnes ailleurs.

Donc, je pense que plus il y a de mobilité, plus les gens vont bouger, plus les sociétés sont vieillissantes... On sent la pression, maintenant, on sent la pression sur tout le monde. Les sociétés comme la nôtre, on n'a plus le choix. Au-delà de la détresse que tout ça, ça cause et de ce gaspillage de talents, on n'a plus le choix, il faut absolument qu'on bouge plus vite, rapidement, tout le monde ensemble, pour mieux réussir, évidemment, cette reconnaissance pour que ces gens-là puissent travailler dans leur domaine d'expertise.

Donc, il y a un comité interministériel qui a été créé, qui va continuer son travail, qui a été piloté, d'ailleurs, présidé par la députée, je l'ai mentionné tantôt, la députée de Jeanne-Mance—Viger, qui sera avec nous lorsqu'on va annoncer la première étape, si on veut, les résultats de la première étape des travaux de ce comité, avant d'entamer la deuxième étape. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Picard) : ...secondes.

Mme Tremblay : Pardon?

Le Président (M. Picard) : 30 secondes.

Mme Tremblay : 30 secondes? Bien, est-ce que c'est possible de le reprendre plus tard?

Le Président (M. Picard) : Oui, mais un jour il va falloir les faire, parce qu'on reporte depuis...

Mme Tremblay : On les accumulera tout à l'heure, le prochain bloc.

Le Président (M. Picard) : C'est beau. Mme la députée de Montarville.

• (20 h 20) •

Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, comme je l'avais annoncé avant l'heure du souper, j'aimerais parler maintenant du plan de radicalisation. Sur les 59 mesures et moyens que compte ce plan d'action gouvernemental 2015‑2018 qui s'intitule La radicalisation au Québec : agir, prévenir, détecter et vivre ensemble, il y a donc 16 mesures sur 59 qui ont été réalisées, 33 mesures sur 59 qui sont en cours de réalisation et 10 mesures sur 59 qui, elles, sont à venir. Je sais qu'il y a plusieurs ministères qui sont impliqués dans ce vaste plan, une dizaine, si mon compte est bon, mais c'est votre ministère qui chapeaute tout ce vaste plan, La radicalisation au Québec : agir, prévenir, détecter et vivre ensemble.

Donc, nous parlions de mesures. Sur 59, 16 ont été réalisées. Quelles sont ces mesures? Et quels sont leurs résultats? On va parler de celles qui sont réalisées, ensuite on parlera de celles qui sont en cours, et ensuite on parlera des 10 qui sont à venir. Alors, ma question : 16 des 59 mesures ont été réalisées. Quelles sont-elles? Et quels ont été les résultats?

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : Oui. Un moment, s'il vous plaît.

(Consultation)

Mme Weil : Donc, les mesures réalisées, donc, 1.11 — je vais commencer... je vais aller dans l'ordre, il y en a beaucoup quand même — alors «poursuivre la contribution de la Sûreté du Québec au modèle intégré des enquêtes en sécurité nationale de la Gendarmerie royale du Canada avec le Service de police de la ville de Montréal et ses autres partenaires», donc là le responsable, c'est le MSP, et c'est en collaboration avec la SQ. Et état de la réalisation, étapes à venir, participation à l'équipe intégrée de la sécurité nationale, ça, c'est en continu, hein, il n'y a pas d'échéancier, évidemment, on comprend.

«1.15. Considérer le volet "actes terroristes et extrémistes" dans le module de soutien aux victimes d'actes criminels de la Sûreté du Québec», encore là, c'est MSP et SQ. Développement d'un partenariat avec les centres d'aide aux victimes d'actes criminels, c'est en continu.

«1.16. Poursuivre le programme[, ça s'appelle] CBRNE — chimique, bactériologique, radioactif, nucléaire, explosif — notamment au regard de la formation des agentes et des agents désignés pour répondre en cas d'attentat terroriste», MSP, SQ. Donc, l'état de réalisation, c'est formation de base en continu, formation intermédiaire en continu, participation à des colloques, des séminaires et des conférences en continu.

Tout ça, ça va être MSP. Évidemment, les mesures, je pense qu'on l'a déjà dit en Chambre en réponse à des questions, mais, les mesures qu'on met dans le plan d'action, vous comprendrez que c'est des mesures que le MSP peut mettre de l'avant, mais il y a d'autres mesures, réactions qu'ils prennent qui sont... évidemment, pour des raisons évidentes de sécurité, qui ne sont pas discutées publiquement.

«2.2. Établir un partenariat avec le Centre de prévention de la radicalisation menant à la violence de la ville de Montréal afin d'étendre l'initiative à l'échelle nationale, notamment au moyen de satellites virtuels», ça, c'est MSP et le ministère de la Santé et des Services sociaux. Alors, il y a eu signature d'une convention de subvention entre le MSP, la ville de Montréal et le centre de prévention. Et développement du partenariat et mise à profit du réseau de la santé et des services sociaux, là aussi, évidemment, c'est en continu.

«2.2.1. Rendre disponible une ligne téléphonique unique et sans frais sur l'ensemble du territoire québécois soutenue par des [personnes] multidisciplinaires», MSP, le centre de prévention, en collaboration avec la ville de Montréal et MSSS, donc, il y a eu la mise en service de la ligne téléphonique sans frais sur l'ensemble du territoire québécois. Ça, c'était en juin 2015. Évidemment, c'est en continu.

«2.9. Mettre en place un comité composé d'intervenantes et d'intervenants des milieux policier et académique afin de partager des pratiques exemplaires de formation en matière de lutte contre la radicalisation», MSP et École nationale de police du Québec. Mise en place d'un comité de partage des pratiques exemplaires de formation en matière de lutte contre la radicalisation, ça, c'est à partir du mois d'août 2015. Inventaire des pratiques exemplaires de formation en matière de lutte contre la radicalisation, ça, c'était en octobre 2015.

«2.10. Ajouter un volet de sensibilisation sur la radicalisation dans les programmes d'intervention des corps policiers dans les établissements scolaires et avec les municipalités», MSP, SQ. Donc là, l'état de réalisation et étapes à venir : un, sensibilisation des premières répondantes et des premiers répondants au phénomène de la radicalisation et de l'extrémisme violent, avril 2015; élaboration d'un contenu pédagogique sous forme de quatre blocs d'information sur l'extrémisme violent, avril 2015; élaboration de deux capsules vidéo avec matériel pédagogique produit dans le but d'optimiser la rétention d'information, août, octobre 2015; et, quatre, déploiement d'activités de sensibilisation auprès des policières et policiers intervenant en milieu scolaire.

«2.11. Implanter un volet spécifique de relations avec les minorités ethnoculturelles et un guide de pratiques exemplaires dans une révision du modèle de police communautaire», MSP, SQ. Alors, un, élaboration d'une présentation des services de police communautaire à l'intention des personnes immigrantes nouvellement arrivées ainsi que d'outils visant à accroître la connaissance des policières et policiers désignés à l'égard de la diversité ethnoculturelle, ça, c'était en novembre 2015; deux, élaboration à l'intention des policières et policiers désignés des outils visant à accroître leurs connaissances sur les communautés ciblées, novembre 2015; trois, formation des policières et policiers désignés; quatre, tenue de séances d'information à l'intention des personnes immigrantes nouvellement arrivées, ça, c'est en continu; participation à des activités socioculturelles avec des minorités ethnoculturelles et établissement de liens étroits avec des personnes d'influence au sein de ces minorités, en continu. Donc, ici, il y en a deux... Dans la formation des policières et policiers désignés, on dit : À venir à la suite de la refonte des districts en cours. C'est un détail, là, mais...

«2.14. Rendre disponibles aux policières et aux policiers des activités de formation et de sensibilisation à la sécurité nationale en matière de lutte contre la radicalisation», MSP et l'École nationale de police du Québec. Enrichissement de certains cours et programmes de perfectionnement professionnel de l'école nationale avec des activités de formation en matière de lutte contre la radicalisation : en continu. Mise en disponibilité de nouvelles activités de formation dans l'offre de cours de perfectionnement professionnel de l'École nationale de police à la suite de l'inventaire des pratiques exemplaires, ça aussi, c'est en continu.

«2.15. Maintenir des spécialistes experts ainsi que des formatrices et des formateurs internes sur l'extrémisme violent et la haine à la Sûreté du Québec», MSP, SQ. Ici, c'est échanges internationaux de pratiques exemplaires, en continu, et développement de l'expertise en matière de crimes haineux et d'extrémisme violent, ça aussi, c'est en continu.

«2.17. Poursuivre la formation des coordonnateurs d'information en menace terroriste dont l'objectif est de fournir des connaissances en matière de terrorisme et sur les signes probables de radicalisation à l'extrémisme violent, notamment auprès des intervenantes et des intervenants de première ligne», MSP, SQ. Organisation de sessions de formation sur le terrorisme et la radicalisation à l'extrémisme violent à l'intention des intervenantes et intervenants de première ligne en sécurité publique deux fois par année, et ça aussi, c'est en continu.

Le Président (M. Picard) : Oui, Mme la députée.

Mme Roy (Montarville) : Merci. Mme la ministre, ce que je comprends... Ma première question, c'était justement les mesures qui ont été réalisées. J'ai pris des notes et je comprends que les mesures qui ont été réalisées dans ce plan, c'est vraiment des mesures qui touchent le monde policier, la Sûreté du Québec...

Mme Weil : ...les autres vont venir, là. Ça, c'est SQ, dans un premier temps. Ensuite, on va arriver à d'autres ministères, là, il y a des mesures en cours, oui, Justice, MSSS, Éducation...

Mme Roy (Montarville) : Alors, j'aimerais aller à ma troisième question, comme le temps qui m'est alloué est assez court. Sur ces 59 mesures, il y en a 10 qui sont à venir, donc sur lesquelles on n'a pas travaillé encore. Quelles sont-elles?

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

• (20 h 30) •

Mme Weil : Oui, mesures à venir. Donc, pour le MSP : «Effectuer des recherches et partager les pratiques exemplaires de formation du Québec et hors du Québec dans le domaine de la sécurité publique relativement à la problématique de la radicalisation.» C'est un inventaire canadien des pratiques exemplaires en matière de lutte contre la radicalisation. Il y a d'autres éléments, là, mais ils veulent élaborer un guide sur les pratiques exemplaires. Donc, ça, c'est MSP.

Ensuite, le MSSS, et le MSSS a d'autres mesures qui sont déjà en cours, mais, pour ce qui reste à venir : «Structurer et rendre accessible aux familles de l'information sur les signes de radicalisation et les ressources disponibles.» Et ça va être fait avec le CIUSSS du Centre-Ouest-de-l'Île-de-Montréal, qui a une expertise en la matière. Donc, on comprend, c'est l'information pour les familles qui sont aux prises avec ce problème.

Ensuite, ça, c'est une mesure de MSP et du MIDI dans ce cas-là, collaboration avec nous : «Mettre en ligne dans les sites Internet du ministère de la Sécurité publique et du ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion une section portant sur le phénomène de la radicalisation.» Donc, il s'agira d'élaboration d'un contenu en lien avec les enjeux liés à la radicalisation. Donc, la date, ici... est-ce que c'est toujours avril 2016? Oui, avril 2016. Donc, c'est bientôt, oui, c'est là, là. Et mise en ligne des nouvelles sections en mai 2016.

Ensuite, une autre mesure MSP : «Promouvoir, auprès des corps de police du Québec disposant d'un site Internet, l'insertion d'un lien menant à la section du site Internet du ministère de la Sécurité publique portant sur la radicalisation.» Donc, il s'agit de l'envoi d'une lettre aux directrices et directeurs des corps policiers pour inciter ceux disposant d'un site Internet à ajouter un lien vers celui du MSP. Et ça, c'est en mai 2016 que ça va se réaliser.

Un autre du MSP et l'École nationale de police : «Intégrer des activités obligatoires de formation et de sensibilisation à la sécurité nationale au programme de formation des aspirantes policières et des aspirants policiers.» Il s'agit de l'enrichissement du Programme de formation initiale en patrouille-gendarmerie de l'École nationale de police, de nouvelles activités de formation en matière de lutte contre la radicalisation. Et l'objectif, l'échéancier, c'est septembre 2016.

«2.16. Réaliser un portrait de l'évolution des phénomènes de la radicalisation et de l'extrémisme violent pour bien en saisir les implications en matière de sécurité publique.» Donc c'est MSP. Réaliser un portrait des phénomènes de la radicalisation et de l'extrémisme violent à l'intention des autorités du MSP, automne 2016. «Mettre sur pied une équipe intégrée pour assurer une vigie sur les médias sociaux.» C'est MSP, SQ, discussions en cours.

«3.4. Participer au programme de "Signalement d'incidents suspects" de la Gendarmerie royale du Canada.» C'est MSP, SQ. Donc, récupération des signalements d'incidents suspects au Québec et des analyses produites par l'équipe des infrastructures essentielles nationales de la GRC. Ça, c'est 2016‑2017. Établissement d'une structure de gouvernance dans le cadre du programme de signalement d'incidents suspects, mars 2018. Et ça, c'est les mesures à venir.

Le Président (M. Picard) : Mme la députée de Montarville.

Mme Roy (Montarville) : Merci, Mme la ministre. Dans le plan de radicalisation qui a été publié en juin, ce fameux plan dont on parle, le MAMOT est responsable, pour sa part, de la mise en oeuvre des actions 4.4 et 4.7 du plan, en collaboration avec d'autres ministères, afin de — et là je vous cite 4.4 — «déployer une stratégie de sensibilisation favorisant la cohésion sociale, l'inclusion et le mieux-vivre ensemble et luttant contre les préjugés». Et 4.7 : «Outiller les municipalités dans la mise en place d'initiatives qui visent à assurer un vivre-ensemble harmonieux et à créer des milieux de vie inclusifs.»

Le ministère nous indique que des actions du plan ont été réalisées. Vous en avez nommé quelques-unes tout à l'heure, plusieurs, là, les 16 qui ont été réalisées. Cependant, la réponse qu'on nous a fournie, au ministère des Affaires municipales, à une demande d'accès à l'information que nous avons faite, c'est que non seulement le ministère ne détient aucun document sur la mise en oeuvre du plan — là, je vous parle du MAMOT — mais il précise que les mesures 4.4 et les mesures 4.7 relèvent de la responsabilité du ministère de l'Immigration et que le MAMOT n'a pas été sollicité par le MIDI à ce sujet en date du 7 mars 2016. Là, je citais ce que le MAMOT nous a dit.

Autrement dit, neuf mois après la publication de ce plan de juin 2015, le MAMOT n'avait toujours pas été sollicité, et rien n'avait avancé pour la lutte à la radicalisation sur le plan municipal. Vous avez parlé tout à l'heure de la ligne... Ça, c'est à Montréal, plus précisément, mais, à l'égard des points 4.4 et 4.7, on nous répond que le MAMOT n'a pas été sollicité par le MIDI à ce sujet en date du 7 mars dernier. Donc, c'était : «Déployer une stratégie de sensibilisation favorisant la cohésion sociale, l'inclusion, le mieux-vivre ensemble et luttant contre les préjugés» et «outiller les municipalités dans la mise en place d'initiatives qui visent à assurer un vivre-ensemble harmonieux et à créer des milieux de vie inclusifs». Donc, pourquoi?

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : Bon, pour le 4.4, c'est le MIDI qui est responsable. Donc, il ne s'est pas passé... Là, il faudrait que je parle avec la personne qui est responsable du dossier. Donc, pour le 4.4, le MIDI est responsable, mais il n'y a pas eu de contact encore... Le 4.4, il y a un comité interministériel. Beaucoup de ministères sont là, le MAMOT est là, mais le MIDI est responsable de cette mesure. Donc... Ah! donc, pour le 4.7, ils ont convenu avec le MAMOT que, bien que les deux ministères sont coresponsables, c'est le MIDI qui allait prendre l'initiative, essentiellement. Je ne sais pas si ça explique les réponses qu'ils ont eues, qu'ils n'étaient pas au courant. Je pense que ce serait peut-être... M. le Président?

Le Président (M. Picard) : Oui?

Mme Weil : Si le fonctionnaire, Jacques Leroux, pourrait répondre plus directement, plus...

Mme Roy (Montarville) : Bien, je vais juste... gens qui nous écoutent, relire le 4.7, qui spécifie... Parce qu'il y a un changement, si je comprends, il y a un changement de garde, là. Parce que le point 4.7 spécifiait, dans le plan publié en juin dernier, là : «Outiller les municipalités dans la mise en place d'initiatives qui visent à assurer un vivre-ensemble harmonieux et à créer des milieux de vie inclusifs.» Et le MAMOT nous dit qu'il n'a pas été sollicité à cet égard-là. Alors, j'aimerais qu'on m'explique juste ce qui s'est passé.

Le Président (M. Picard) : Est-ce qu'il y a consentement pour que monsieur puisse répondre? Oui? Ça va. Veuillez vous présenter avec votre titre et répondre.

M. Leroux (Jacques) : D'accord. Alors, Jacques Leroux, sous-ministre adjoint à la participation et à l'inclusion au MIDI.

Au tout début de l'élaboration du plan sur la radicalisation, on a convenu avec le MAMOT que cette mesure-là serait... malgré qu'on soit coresponsables, le MIDI et le MAMOT, on a convenu avec le MAMOT que le MIDI allait assumer les travaux, qui sont essentiellement une bonification d'une trousse d'aide à la gestion de la diversité dans les municipalités, dans laquelle on va ajouter la sensibilisation à la radicalisation. Mais c'est vrai que le MAMOT n'a pas été sollicité pour mener les travaux parce qu'au tout début il a été convenu, là, que le MIDI assumerait cette responsabilité-là.

Le Président (M. Picard) : Je dois maintenant céder la parole à la partie gouvernementale. M. le député de Portneuf.

• (20 h 40) •

M. Matte : Merci, M. le Président. Alors, je voudrais vous entretenir, Mme la ministre, et vous interpeler sur la rétention des étudiants étrangers. Vous savez que Québec et Montréal constituent des grands centres pour les étudiants, là, immigrants. Mais il ne faut pas oublier aussi que les cégeps et les universités en région ont... souvent, les groupes sont complétés par des étudiants immigrants. Je pense que le réseau d'universités et de cégeps est vraiment bien organisé, et ça fonctionne bien.

J'ai été surpris de constater, dans un rapport que j'ai lu, qu'il y a plus de 30 000 étudiants immigrants qui sont au Québec, et dont le 1/5 sont au niveau de la maîtrise et le quart au niveau du doctorat, et qu'à la suite de ça le tiers des étudiants immigrants demeurent au Québec, demeurent, restent au Québec. Sauf que, Mme la ministre, on oublie souvent de parler de la formation professionnelle. Et ça nous touche personnellement.

Dans Portneuf actuellement on est en train de s'organiser. Il y a un groupe pour présenter un projet de formation professionnelle. Vous le savez, on n'a pas de cégep puis on n'a pas d'université dans nos petits milieux, dans nos régions. Par contre, il se donne souvent de la formation professionnelle, que ce soit en soudure, montage, que ce soit en mécanique automobile ou en comptabilité. Et ce que je trouve intéressant dans la formation professionnelle, supposons que c'est un cours de deux ans, bien, l'étudiant ou l'étudiante a la possibilité d'avoir un deux ans, c'est-à-dire deux ans de travail, l'équivalent de la durée de formation. Et ça, c'est intéressant parce que c'est déjà une façon de pouvoir s'intégrer dans un milieu, de pouvoir prendre goût, de pouvoir s'adapter, et c'est facile. Alors, je trouve qu'on parle beaucoup des cégeps, des universités, mais il faudrait regarder la formation professionnelle.

J'aimerais aussi toucher à comment qu'on fait, à ce moment-là, pour faire en sorte que nos étudiants puissent demeurer. Et donc vous avez parlé, dans vos remarques préliminaires, une possibilité que vous interpeliez les milieux de pouvoir se prendre en charge, de pouvoir vous présenter un projet. C'est ce qu'on va faire, nous autres, je vous le dis : On va vous présenter un projet. Mais j'aimerais savoir de votre part qu'est-ce que vous avez mis de l'avant pour faire en sorte de retenir, de faire de la rétention des étudiants. On parle souvent, là, du P-E-Q, là, le PEQ, là. J'aimerais ça que vous puissiez nous en parler.

Le Président (M. Picard) : Merci. Mme la ministre.

Mme Weil : Merci à mon collègue le député de Portneuf. D'ailleurs, j'ai eu l'occasion de visiter le comté du député avec... il y avait un autre projet, si je me souviens bien, qui était vraiment intéressant, c'était l'attraction des personnes d'une certaine région de la France, hein, des gens qui avaient donc choisi de vivre dans le comté du député mais qui avaient des liens dans une certaine région de la France. Je ne me rappelle plus c'était quoi, la région. Et il y a des gens qui venaient et qui choisissaient justement la région de Portneuf, ce comté-là, à cause, si je me souviens bien, qu'ils se sentaient chez eux, comme en France, la géographie un peu similaire et tout. Alors, je trouve ça intéressant que cette question vient... et peut-être possiblement, éventuellement, un projet... Vous parliez d'étudiants avec une formation professionnelle, mais qu'on puisse trouver des stages pour leur permettre d'avoir une expérience de travail puis éventuellement entamer un processus d'immigration.

Donc, oui, pour revenir sur cette question bien importante de la mobilité des étudiants étrangers, on parlait... Je vais parler de cette course aux talents, et je pense que les universités... On le sait, souvent, quand on parle avec les gens, les gestionnaires des universités, à quel point c'est devenu vraiment une course pour les étudiants étrangers. Toutes les universités au Canada sont en compétition les unes avec les autres. Et ne parlons pas même de la compétition avec les universités aux États-Unis qui sont elles aussi en course. Donc, on est là-dedans aussi au Québec.

Évidemment, on souhaite attirer des étudiants d'un peu partout, évidemment surtout ceux qui parlent français dans les universités francophones. Mais il y a des gens qui, a priori, n'ont peut-être pas toutes les compétences, mais, à la fin de leur parcours universitaire, maîtrisent très bien la langue. J'ai des jeunes qui arrivent à 18 ans puis, en l'espace de quelques années, ils sont capables de maîtriser la langue, j'en ai rencontré. D'ailleurs, j'en rencontre beaucoup ici, dans la région de Québec.

Je vous raconte parce que, comme ministre de l'Immigration, souvent, les gens, soit ils me reconnaissent... ils vont toujours me poser des questions, souvent les étudiants, puis ils vont m'expliquer qu'ils ont un certain problème ou ils veulent un certain conseil. Donc, je les réfère toujours à quelqu'un chez nous, au ministère de l'Immigration, pour les aider. C'est soit des ingénieurs ou c'est des gens qui ont fait une formation dans leur pays, mais ils sont jeunes quand même. Souvent c'est des ingénieurs, mais ils refont quelques années ici pour avoir leur diplôme de génie ici, du Québec. Et ils travaillent dans des restaurants, des boutiques, n'importe où. C'est des gens qui, donc, à l'origine, n'avaient pas, peut-être, pensé à l'immigration, mais rapidement ils connaissent le programme PEQ et ils m'en parlent ou ils savent qu'ils peuvent immigrer.

Alors, évidemment, je vous raconte ça comme ça, parce que moi, j'habite dans un quartier à Montréal très près des quatre universités, l'UQAM, McGill, Concordia, l'Université de Montréal pas si loin, et tout le centre-ville de Montréal, ce n'est que des étudiants. Au mois de septembre, on les voit venir, pour ceux qui connaissent Montréal, les semaines d'initiation à leur université et tout. Donc, à Montréal, évidemment, la deuxième ville universitaire en Amérique du Nord.

Alors, je vais vous donner peut-être quelques chiffres. Donc, CIRANO nous disait, selon une étude en 2011, qu'«en effet, dans le monde, la mobilité étudiante est un phénomène en croissance». Ce phénomène, évidemment, est toujours d'actualité aujourd'hui, et différentes études publiées démontrent les impacts positifs des étudiants étrangers dans l'économie des pays développés ainsi que la lutte acharnée de ces pays pour attirer ces étudiants. Le Québec attire des jeunes talents. Nos universités, nos collèges offrent aux jeunes du monde entier une formation de qualité, un environnement enviable en termes de richesse culturelle, de diversité, d'innovation, de performance.

Nos universités jouissent d'une reconnaissance internationale. Montréal est la deuxième ville étudiante en importance en Amérique du Nord. Les immigrants temporaires de la catégorie des étudiants étrangers au Québec en 2013 se chiffrent à 13 396, ce qui est supérieur aux entrées observées à chacune des cinq années précédentes. En effet, le nombre d'étudiants étrangers entrés au Québec a augmenté de façon soutenue depuis 2008. Pour la période 2008‑2012, les entrées moyennes d'étudiants étrangers se chiffrent à 14 563. Je pense qu'on a des chiffres plus récents. Je ne sais pas si le MIDI a des chiffres plus récents du nombre d'étudiants étrangers qui sont ici. J'y reviendrais quand on va me trouver des chiffres plus récents.

L'effectif, au 1er décembre 2013, des étudiants étrangers au Québec s'élève à 41 838 personnes. Cet effectif est supérieur à ceux notés au cours des cinq années antérieures. L'effectif, au 1er décembre de chacune de ces années, est en hausse constante depuis 2008. Pour la période 2008-2012, l'effectif moyen des étudiants étrangers se chiffre à 32 476.

Les étudiants internationaux contribuent à l'ouverture sur le monde des institutions scolaires et, une fois établis de façon permanente au Québec, ils contribuent à l'ouverture sur le monde de nos entreprises. Ils permettent de développer des réseaux d'affaires avec leur pays d'origine et participent à l'enrichissement culturel de la société. On constate par ailleurs que l'intégration au marché du travail pour les étudiants étrangers est largement facilitée du fait que ceux-ci n'ont pas à affronter les procédures pour la reconnaissance de leurs diplômes; qu'ils dominent déjà le français, langue de travail au Québec; qu'ils ont déjà développé un réseau social; et qu'ils connaissent très bien les codes culturels de la société d'accueil. Ces candidats de choix pour le Québec occupent rapidement des postes clés dans les entreprises, symbole d'une intégration socioprofessionnelle exemplaire, grâce à leur première expérience acquise au Québec sous un statut temporaire.

Le Programme d'expérience québécoise, le député de Portneuf a évoqué ce programme, qu'on appelle le PEQ, donc, c'est... Je raconte ma petite histoire. Quand j'ai commencé comme ministre de l'Immigration, en 2010, j'avais fait un événement avec la communauté maghrébine, et il y a plusieurs personnes qui m'ont dit : Mais, Mme la ministre, on ne comprend pas. Je suis arrivé ici, on me demande toujours mon expérience québécoise. Et je n'avais pas été sensibilisée, dans ma vie antérieure, à ce phénomène. Qu'est-ce que c'était, cette expérience québécoise qu'on demandait? Et c'est par la suite que j'ai appris, bon, c'est : Est-ce que vous avez un diplôme ou une expérience de travail ici, au Québec? Et c'est la même réalité dans les autres pays. Au Canada, c'était l'expérience canadienne de travail ou un diplôme. Donc, quelques pays ont créé un programme semblable : le programme d'expérience canadienne, le programme d'expérience australienne, j'imagine, néo-zélandais, bon. Alors, pour nous, donc, l'idée, c'est de mettre ces personnes-là sur une voie rapide vers l'immigration permanente.

• (20 h 50) •

Donc, c'est la rétention des étudiants étrangers qui est une priorité du gouvernement depuis plusieurs années. C'est en 2010 qu'on a créé ce programme. Donc, on est dans notre sixième année, un programme qui fonctionne très bien. Et, pour faciliter cette rétention, notre gouvernement a mis en oeuvre, donc, le Programme de l'expérience québécoise le 14 février 2010. Ce programme d'immigration permet de favoriser la rétention et d'accélérer la sélection d'étudiants étrangers diplômés du Québec et de travailleurs temporaires spécialisés en emploi au Québec, soit une clientèle de choix pour le Québec. En fait, le Programme de l'expérience québécoise est un programme accéléré de sélection des travailleurs qualifiés qui permet d'obtenir un CSQ, un certificat de sélection du Québec, en vue de la résidence permanente. Je ne sais pas si on a trouvé des chiffres... Donc, quelques chiffres ici. Donc, on dit que Montréal est la deuxième ville universitaire en Amérique du Nord, et le Québec accueille 42 000 — c'est ça, le chiffre que je cherchais, 42 000 — étudiants étrangers chaque année. Quand même... Et donc il y a une étude récente de Montréal International qui révèle qu'un étudiant étranger sur deux a exprimé le souhait de rester au Québec après ses études, alors qu'à présent seulement 20 % des étudiants étrangers admissibles présenteraient une demande de certificat de sélection du Québec dans le programme.    Donc, on peut voir qu'on pourrait faire beaucoup, beaucoup mieux. On fait quand même déjà... le programme connaît une croissance, je pense que c'est de 30 % par année, mais on pourrait faire beaucoup mieux. Un sur deux.

Nous, on avait fait un sondage très, très simple. Ce n'était pas nécessairement très scientifique, mais je me rappelle de ça, on avait trouvé un tiers qui pourrait peut-être être intéressé à l'immigration permanente. Alors là, on va avoir une entente, on va signer une entente avec Montréal International et on va signer des ententes avec d'autres organismes pour le reste du Québec, d'autres régions du Québec afin de vraiment attirer, faire connaître le programme et accompagner les étudiants étrangers qui seraient intéressés à rester ici pour qu'on puisse doubler, au moins, tripler. On va se donner des cibles très précises, mais on ne les a pas encore, mais des cibles, des objectifs ambitieux, mais réalistes, avec l'accompagnement d'organismes comme Montréal International.

Évidemment, je pense que plus on peut faire connaître ce programme... Je pense que les députés aussi, dans leur comté, quand vous rencontrez des étudiants qui viennent vous voir parce qu'ils peuvent avoir des problèmes quelconques... Vous avez tous des gens qui viennent dans vos bureaux avec des... Nous, on sait, parce que le cabinet les reçoit, puis ensuite on les transmet, puis, des fois, vous allez directement au ministère de l'Immigration. Mais souvent il y a des étudiants aussi qui peuvent avoir des questions. Et parfois c'est des problématiques qu'ils ont avec le gouvernement fédéral, mais ils ne savent pas, pour eux, l'immigration... Bon. Ils viennent nous voir, et ensuite, nous, on fait le lien. Mais, en même temps, si vous pouvez faire la promotion de ce programme, ce serait très bien, et ce serait très bien pour toutes les régions où il y a des universités, des cégeps, un peu partout, de les encourager à rester.

Je sais qu'il y a... Ils ne le font plus, mais le London School of Economics, il y a quelques années, là, plusieurs années, apparemment, c'était la... j'ai rencontré quelqu'un qui est allé là, sa première session, au London School of Economics, à l'époque, lorsque la Grande-Bretagne sollicitait vraiment activement des étudiants étrangers pour rester, ils avaient eu une présentation sur ce programme. On pourrait imaginer quelque chose du genre où on pourrait — et on verra avec Montréal International — leur faire connaître ce programme. Et, ensuite, l'idée, c'est de leur donner accès au cours de francisation, pour ceux qui ne sont pas dans des universités francophones ou qui souhaiteraient le prendre. Parce que, je le dis souvent, c'est plus qu'un cours de langue, c'est aussi un cours sur les valeurs, sur la culture, sur l'histoire du Québec. Les gens trouvent le cours très intéressant, les aspects de la langue aussi qui sont différents.

Donc, le potentiel de croissance évidemment est très important. Donc, le projet en partenariat avec Montréal International, c'est 1,6 million. Mais, comme je l'ai dit, il y aura d'autres ententes avec d'autres partenaires pour promouvoir le programme dans toutes les régions, là, où il y a des universités. Donc, ce programme, en cinq ans, ce sont presque 11 600 nouveaux concitoyens qui contribuent, avec leurs connaissances et leur expérience, à l'essor économique du Québec.

Donc, juste quelques chiffres. Depuis la mise en oeuvre du programme en février 2010 et jusqu'au 31 décembre 2015, le nombre total de CSQ émis est de 28 724, dont 11 594 émis à des étudiants internationaux. Donc, c'est des étudiants étrangers et des travailleurs temporaires aussi. Donc, c'est quand même vraiment très intéressant. Et, si on est capables de doubler ce chiffre, tant mieux pour nous. On le voit aussi, quand on voit des fluctuations dans nos cours de francisation ou dans nos cours Objectif emploi, ce contingent, si vous voulez, plus les proportions seront en hausse, plus on va avoir des gens qui n'auront pas nécessairement besoin de ce genre d'accompagnement, donc qui nous permet de rester compétitifs.

De plus en plus de gens se déplacent pour explorer de nouveaux horizons, et c'est de notre devoir de faire du Québec une terre d'accueil qui rayonne à l'international face à une forte tendance à la mondialisation. Lorsque, l'année dernière, j'ai eu le plaisir de célébrer le cinquième anniversaire de création du Programme de l'expérience québécoise en remettant le certificat de sélection en main propre à deux étudiants internationaux — d'ailleurs j'ai les photos ici — ceux-ci m'ont fait savoir combien ils ont apprécié de vivre et d'étudier dans un pays si riche en culture, si riche de sa diversité. Ils m'ont parlé de leur détermination à s'établir de façon définitive au Québec et comment le Programme de l'expérience québécoise avait facilité leur démarche. C'était vraiment intéressant, parce que dans les deux cas... je pense qu'il y avait HEC et l'autre qui était un ingénieur... Est-ce que c'est possible? L'autre était ingénieur, je crois, de Polytechnique, et il y en avait un qui était tombé en amour, hein?

Une voix : Oui.

Mme Weil : C'est bon. C'est ça. Je blague souvent, mais c'est incroyable, le nombre de personnes... Alors, c'est quand même intéressant, ils rencontrent quelqu'un... C'est arrivé à mon père. Moi, je ne serais pas ici si ça n'avait pas été des étudiants étrangers qui tombent en amour. Alors, il est venu faire sa médecine à Montréal, il est venu des États-Unis et donc il a rencontré ma mère, tombé en amour, ils ont eu sept enfants, et voilà. Et là je suis ici pour en témoigner. Non, mais je vous le dis. C'est drôle, parce que je pose des questions... je blague souvent avec des étudiants, mais le nombre de fois qu'ils me disent : Bien, justement, Mme la ministre, je suis tombé en amour et c'est pour ça que je vais rester. Puis, bon, ils sont ensemble.

L'autre chose qu'ils nous ont dite... Celui-là, il avait fait le tour un peu des régions du Québec et il trouvait le Québec tellement beau. Je ne sais pas si les gens se souviennent de ça. Il trouvait qu'il y avait beaucoup à découvrir chez nous. Et l'autre, ce qu'il nous avait dit, c'était comme une boîte de crayons de couleur quand il est venu ici. Ce qui l'avait beaucoup frappé, c'était Montréal, c'était la diversité. Puis c'était un Français, puis il trouvait ça vraiment enrichissant, et il trouvait aussi... Évidemment, les gens font beaucoup de commentaires sur l'ouverture, hein, de la société québécoise, comment les gens sont, puis tout de suite ils se sentent à l'aise chez nous. Alors, quand ils sont jeunes, évidemment, je pense qu'encore plus... parce qu'il y a une connexion immédiate qui se fait avec les jeunes.

Donc, on me dit que le temps est écoulé?

Le Président (M. Picard) : Il vous reste 15 secondes.

Mme Weil : J'ai un autre exemple, elle me met un petit sourire, c'est mon attachée de presse, mon attachée de presse qui est arrivée juste il y a quelques années, pas si longtemps.

Une voix : ...

Mme Weil : Ah? O.K., quelques années.

Une voix : ...

Mme Weil : Oui, mais c'est ça, et je n'ose pas lui demander s'il est tombé en amour avec le Québec ou... Mais, en tout cas, donc, il y a beaucoup de gens autour de nous, en effet, qui sont venus d'ailleurs et qui intègrent rapidement la société québécoise, soit en politique ou ailleurs.

Donc, oui, en effet, c'est un programme extraordinaire, et on va miser beaucoup sur ce programme pour sélectionner des... ils sont de la catégorie des travailleurs qualifiés.

Le Président (M. Picard) : Merci. Donc, nous avons soustrait du temps sur le dernier bloc. M. le député de Bourget.

• (21 heures) •

M. Kotto : Merci, M. le Président. Je veux revenir sur la francisation et les chiffres. Dans son budget 2015‑2016, la ministre avait coupé... en fait, la ministre... le budget de la ministre avait été coupé de 4,7 millions en intégration et francisation. La ministre a beau dire qu'elle ajoute 9 millions cette année à cette mesure, il faut néanmoins, M. le Président, qu'elle prenne en considération qu'il y a eu une coupe de près de 5 millions l'an passé.

Maintenant, la loi du 1 %, au sujet de la Commission des partenaires du marché du travail et la hausse de l'assujettissement des entreprises à la loi du 1 %, un des problèmes importants est une mesure du budget 2015‑2016 qui a fait passer le seuil d'assujettissement à la loi 101 du 1 %... pardon, à la loi du 1 % — je suis obnubilé par la loi 101 — à la loi du 1 % de 1 million de dollars à 2 millions de dollars. Par cette mesure, 50 % des entreprises assujetties au fonds de formation de la main-d'oeuvre se retrouvent exemptées, soit 8 000 PME. Cela représente un manque à gagner de 12 millions de dollars, dont une baisse de 8 millions de dollars à 4 millions de dollars pour la francisation en entreprise. C'est pour cette raison que le fonds a manqué d'argent pour continuer la francisation en entreprise, comme dans le cas de Peerless, je le disais au début de nos travaux, et qu'il y aura probablement d'autres cas semblables.

En haussant le seuil d'assujettissement des entreprises à la loi 101... à la loi 101, la fatigue me gagne... à la loi du 1 %, dis-je, le gouvernement a privé le fonds de développement de la main-d'oeuvre de 12 millions de dollars selon le budget 2015‑2016. Et ce fonds est censé financer la formation, comme vous le savez, M. le Président, en emploi, dont la francisation dans le milieu de travail. Le budget pour la francisation est passé de 8 millions à 4 millions, selon Florent Francoeur, président de la CPMT —l'abréviation de la Commission des partenaires du marché du travail... l'acronyme, dirais-je — puisque tous les programmes de la CPMT ont été coupés de moitié.

Ah! le gouvernement s'est engagé à compenser la perte de revenus de 12 millions de dollars au fonds. Par contre, ces nouveaux crédits budgétaires sont réservés pour des bourses et pour l'adéquation formation-emploi, qui n'ont aucun lien avec la francisation. Alors, que va faire la ministre pour compenser cette perte en francisation dans le milieu du travail? Première question.

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : M. le Président, si vous permettez, j'aimerais quand même revenir sur cette question de compression. Pour nous, on a une croissance pour des dépenses pour des services, c'est ça qui est important. Les réductions... il y a compression dans le BIQ, hein, les bureaux d'immigration au Québec; c'est vraiment administratif. Dans les services centraux, c'est la rationalisation, c'est l'efficience, l'efficacité; donc, c'est l'optimisation des ressources. Je pense que le député a parlé de 5 millions, mais on ne sait pas où...

M. Kotto : Presque 5 millions; c'est 4,7.

Mme Weil : Mais ce chiffre-là, nous, on a un 3 millions, mais on ne voit pas le 5 millions. Donc, honnêtement, c'est pour ça que moi, je suis très, très contente de ce budget, c'est parce que c'est de l'argent neuf pour des services.

Quant aux compressions, c'est vraiment des compressions qui se sont faites sans douleur parce qu'il n'y a pas eu de coupure de services. C'était dans les services centraux puis les bureaux d'immigration du Québec. Donc, il n'y a pas eu de problème à ce niveau-là et on a plus d'argent pour nos services et aussi des nouveaux argents pour la participation, l'inclusion, avec le budget que nous accorde la stratégie d'action.

(Consultation)

Mme Weil : Bien, je ne sais pas, les facteurs de croissance, mais peut-être que le député voudrait que je réponde à l'autre question avant puis on pourra parler des facteurs... de la question plus argent après.

Et c'est vraiment au ministère du Travail. Moi, je n'ai pas d'information... c'est à eux de répondre à cette question. Mais nous, de toute façon, on va offrir des cours de français en milieu de travail et on va travailler avec le ministère de l'Emploi pour améliorer la référence des entreprises aux services de francisation.

Mais, vous vous rappellerez — je vous parle, M. le Président, je pense que vous étiez là même lors de la consultation, et j'attire l'attention du député de Bourget — on avait posé cette question, d'ailleurs, à la Commission des partenaires du marché du travail, et on avait posé la question aux syndicats, d'ailleurs, parce qu'ils sont tous des partenaires autour de cette table, et on leur a posé la question, parce que c'est eux qui prennent la décision, c'est le conseil d'administration et les syndicats. On leur a dit : Bon, est-ce que c'est important, pour vous, la langue? Et ils ont dit oui. Alors, je ne sais pas, je pense qu'il faut leur poser la question à eux; le ministère du Travail et de l'Emploi doit avoir, peut-être, un point de vue là-dessus. Je le sais que la Commission des partenaires du marché du travail est indépendante, mais, pour ma part et pour notre part ici, au ministère, évidemment, les cours de français en milieu de travail, c'est important. Donc, on va travailler avec le ministère de l'Emploi pour améliorer la référence des entreprises aux services de francisation.

Le Président (M. Picard) : M. le député.

M. Kotto : M. le Président, comme dit la ministre, si c'est leur problème, pourquoi c'est le ministère qui a envoyé ses professeurs pour, disons, colmater la brèche chez Peerless, par exemple?

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

(Consultation)

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : Je vous dirais que, dans ce cas-là, honnêtement, on connaît la clientèle qui est là. Moi, je suis sensible à... on est tous sensibles à ça ici, au ministère, c'est une clientèle qui est vulnérable — c'est des femmes immigrantes qui sont souvent là — vulnérable dans le sens que ne pas pouvoir parler français ou... Je le mettrais de façon plus positive, c'est que, pour ces femmes-là, l'importance de la langue, c'est à souligner parce que, souvent, c'est leur façon de pouvoir communiquer et participer et travailler, etc. Donc, on n'a pas trop posé de questions, on voulait tout simplement que le service soit en continu. Et donc j'avais demandé au ministère de voir si on pouvait faire quelque chose. On savait, de toute façon, qu'on avait la stratégie d'action avec des sommes qui seraient dans la stratégie d'action. On savait qu'on voulait faire la promotion de nos services de francisation, on savait que les formules... on voulait déjà... c'était déjà indiqué, dans notre politique, de diversifier l'offre de francisation, notamment en alliant formation linguistique et travail. Donc, on s'est dit : On va agir rapidement pour remplir un peu le trou, si vous voulez, et faire en sorte que ces femmes puissent continuer leur francisation.

Le Président (M. Picard) : M. le député.

M. Kotto : M. le Président, la francisation en entreprise exige une expertise que probablement l'on a perdue avec le manque de ressources financières avérées chez Peerless. Est-ce que les enseignants que le ministère a envoyés, disons, en renfort, avaient cette expertise spécifique? Parce qu'il y a différents profils, il y a différents secteurs et l'approche absolue de l'enseignant qui débarque pour dispenser son cours n'est pas ce qui convient nécessairement. Il y a une expertise bien précise. Est-ce que, disons, la ressource que le ministère a envoyée en renfort, après que l'affaire eût éclaté dans les médias, avait cette expertise?

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : Oui, en effet, ça fait depuis 15, 20 ans qu'on a cette expertise. Donc, on a toujours donné des cours en entreprise aux personnes immigrantes, et c'est vraiment... Quand on dit : Nous répondons à la demande, c'est vraiment ça. Le MIDI répond toujours à la demande, donc les professeurs du MIDI sont formés et ont l'expertise spécifique pour donner des cours en entreprise.

• (21 h 10) •

Le Président (M. Picard) : M. le député.

M. Kotto : M. le Président, lors des crédits de formation professionnelle, mon collègue de Saint-Jean — c'était dans une autre commission — a porté à mon attention une réduction budgétaire d'environ 15 millions de dollars à l'allocation pour l'accueil et la francisation. En 2014‑2015, le montant accordé était de 52 055 000 $ et, en 2015‑2016, ce montant était de 37,8 millions de dollars.

Alors, je voudrais déposer le document pour que les collègues puissent constater par eux-mêmes — avec, bien sûr, l'assentiment de la commission...

Le Président (M. Picard) : O.K.

M. Kotto : ...pour qu'ils l'aient — il y a trois copies. Donc, le ministre de l'Éducation n'a pas été capable d'expliquer ces chiffres, et je me demande si la ministre peut nous dire, elle, si elle voit comme moi qu'il y a eu une coupure de 15 millions de dollars à cette mesure. Alors qu'elle a transféré le même montant que l'année précédente en éducation, la question qui se pose est à l'effet de savoir si le ministre de l'Éducation a pu décider d'utiliser ces sommes ailleurs qu'en francisation. Est-ce que la ministre a le pouvoir ou est-ce qu'elle ne devrait pas s'assurer que les sommes qu'elle transfère servent à l'intégration et à la francisation des immigrants? Donc, je ne sais pas si...

Document déposé

Le Président (M. Picard) : Je confirme le dépôt du document à la commission. Donc, Mme la ministre.

Mme Weil : Il y a toujours, annuellement, un exercice de reddition de comptes, parce que nous, on fait une reddition de comptes au gouvernement fédéral. Donc, on devrait recevoir ça... ce n'est pas prochainement, là, mais la reddition de comptes, c'est?

(Consultation)

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : À la fin de l'année scolaire. À la fin de l'année scolaire, on aura la reddition de comptes.

M. Kotto : Juste, dans la mesure du possible, serait-ce réaliste de penser qu'on pourrait l'avoir, en commission, comme dépôt?

Mme Weil : Oui.

M. Kotto : Oui?

Mme Weil : Oui. À chaque année, en fait.

M. Kotto : O.K. Merci. Alors, je...

Mme Weil : Un instant, M. le député.

M. Kotto : Oui?

Le Président (M. Picard) : ...bien comprendre : vous vous engagez à transmettre le document à la commission?

Mme Weil : Oui.

Le Président (M. Picard) : O.K. Merci.

M. Kotto : Merci, M. le Président. Dans la nouvelle politique qu'a déposée la ministre le 7 mars dernier, on peut lire le passage suivant : «Le contexte actuel de prestation des services gouvernementaux est en transformation afin de pouvoir offrir aux personnes la possibilité d'agir avec autonomie.» C'est à la page 27 de la politique.

Alors, je me rappelle que, l'an dernier, la ministre avait signifié vouloir laisser plus d'autonomie aux immigrants dans leurs démarches, développer plus de services en ligne. Je comprends, M. le Président, que c'est important que les gens soient autonomes. Mais, avant d'en arriver là, je crois que les gens, notamment quand ils débarquent, quand ils sont nouvellement, disons, inscrits dans leur nouveau pays, ils ont besoin d'accompagnement. L'autonomie ne doit pas rimer avec le laisser à soi-même, l'abandon à soi-même.

Je veux rappeler, ici, un commentaire d'un participant à notre commission lors des consultations sur la politique, justement, et qui disait, je le cite : «Sur ce volet-là, je voudrais ajouter un autre élément qui est très important pour nous sur la question de l'immigration, c'est que nous savons très bien que notre besoin économique sur l'immigration est indiscutable. Il n'y a aucun économiste aujourd'hui... et on sait très bien que toutes les chambres de commerce, tous les hommes d'affaires demandent l'augmentation. D'un autre côté, la population, d'une façon tout à fait légitime, a des inquiétudes sur nos valeurs communes, sur le statut francophone du Québec. Et je pense qu'aujourd'hui la classe politique est appelée [à] mettre [de] côté tous les débats idéologiques et de trouver des solutions qui sont concrètes de façon à garantir notre productivité économique, notre capacité aussi à développer [une] économie, et la main-d'oeuvre qui vient de l'étranger est très importante, mais, en même temps, trouver des solutions qui sont concrètes sur l'intégration à travers des programmes de jumelage, à travers des programmes qui vont permettre à ces personnes, à travers l'emploi, de vouloir devenir Québécois à part entière.» Fin de la citation.

M. le Président, dans la dernière année, le MIDI a fermé tous ses bureaux régionaux. Il a fermé les CRE, les CLD. Les bureaux régionaux étaient bien souvent la porte d'entrée des immigrants en région. Par les CRE et les CLD transitaient des fonds, des fonds permettant d'investir dans des projets et dans des organismes qui sont sur le terrain et qui aident les immigrants, les nouveaux arrivants à s'intégrer.

On apprenait que les organismes qui travaillent pour l'intégration des immigrants ont reçu récemment comme directive qu'il fallait qu'ils priorisent des clientèles à l'aide sociale et à l'assurance-emploi. Il y a une lettre à cet effet qui, ma foi... je pense que je l'ai laissée dans mon bureau, mais c'est une lettre que la table de concertation... c'est ça, c'est la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes... a adressé au ministre Blais, quelques passages pour illustrer le cri de coeur.

«Lors de la dernière rencontre du Forum, nous avons appris que suite à une décision du national, nos ententes de services seraient assujetties à des cibles AFDR et PAE à compter de juillet 2016.

«Nous ne comprenons pas cette décision car contrairement à celle prise pour l'année en cours, elle ne tient plus compte des réalités vécues par les nouveaux arrivants, des situations particulières dont ils sont porteurs et des besoins spécifiques en employabilité que cela engendre.»

Je pourrai déposer la lettre, M. le Président, au terme de mon intervention.

«En résumé, nous estimons que par cette orientation qui va avoir des impacts majeurs sur les nouveaux arrivants comme sur les interventions que font nos membres auprès d'eux, le Gouvernement du Québec, à travers son ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale, se désengage fortement de l'intégration professionnelle des nouveaux arrivants.»

Alors, cette interrogation sur l'autonomie des immigrants, j'espère que la ministre va la prendre en considération et adapter son approche et, probablement même, se pencher sur cette lettre que je dépose, M. le Président, à son intention.

Mme Weil : Pour clarifier.

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre, il reste 30 secondes.

Mme Weil : Oui. Alors, nos directions... Combien de temps?

Le Président (M. Picard) : 20 secondes.

Mme Weil : 20 secondes. Nos directions régionales n'offraient aucun service direct depuis plusieurs années. Les services sont vraiment en immigration, c'est les organismes communautaires qui sont nos partenaires. On avait transféré tout ça en 2012, je crois bien, aux organismes directement, et c'est eux qui font le lien avec les nouveaux arrivants. Que ce soient des organismes en francisation, que ce soient des organismes d'accueil, d'intégration, c'est vraiment les organismes qui prennent ça en charge. C'est nos partenaires de premier plan dans toutes les régions du Québec. Mais je tiens compte... je vais regarder ça, cette lettre, pour nous assurer que les gens ne tombent pas entre deux chaises.

• (21 h 20) •

Le Président (M. Picard) : Merci, Mme la ministre.

Document déposé

Alors, je confirme le dépôt de la lettre adressée au ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, lettre transmise par la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes, en date du 6 avril 2016.

Et je cède maintenant la parole à la partie gouvernementale, à M. le député de Maskinongé.

M. Plante : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, écoutez, on a parlé tantôt... on a effleuré le sujet, on a parlé de la nouvelle politique en matière d'immigration et de participation à l'inclusion, Ensemble, nous sommes le Québec, car, vous savez, M. le Président, depuis 1990, le Québec s'appuie sur l'énoncé en matière d'immigration et d'intégration, Au Québec pour bâtir ensemble, pour fonder son action, qui a été dévoilé par le gouvernement de Robert Bourassa.

Bien que plusieurs constats et orientations de l'époque demeurent toujours pertinents, certains phénomènes ont grandement évolué. En dépit des progrès significatifs qui ont été réalisés, certaines difficultés sont encore observées des phénomènes qui ont émergé. Soulignons notamment le nouvel environnement international, de plus en plus compétitif, pour attirer des talents stratégiques, en raison, M. le Président, du déclin de la population en âge de travailler dans de nombreux pays. Comme on sait, il n'y a pas que le Québec qui fait face à cette problématique.

De plus, le besoin d'une meilleure adéquation entre le système d'immigration et les besoins évolutifs du Québec pour accroître la contribution des personnes immigrantes dans le développement économique non seulement dans les centres urbains, mais aussi dans toutes les régions du Québec, M. le Président... De plus, la persistance d'entraves à la capacité d'action des personnes immigrantes et des minorités ethnoculturelles qui compromettent la prospérité de la société québécoise, le bouleversement, par les technologies de l'information, des façons de s'informer et de concevoir les services publics, et la nécessité de tirer le meilleur parti possible de la prestation électronique de services pour simplifier, faciliter et accélérer les démarches, depuis l'étranger, des personnes, en misant sur leur capacité d'action... Finalement, M. le Président, diversification accrue du mouvement migratoire qui suscite des inquiétudes, chez une partie de la population, au sujet des différences ethnoculturelles...

M. le Président, vous savez, Mme la ministre nous a parlé, tantôt, de la nouvelle politique, nous a parlé des nouvelles orientations du gouvernement afin de favoriser non seulement une attraction de personnes en lien avec les besoins du marché du travail, mais aussi d'aller chercher les talents, les compétences et les personnes de tous les pays et de toutes les origines différentes.

M. le Président, j'aimerais que la ministre nous entretienne sur la révision du plan d'action du Québec en matière d'immigration et de participation et d'inclusion. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Picard) : Merci. Mme la ministre.

Mme Weil : Bien, peut-être vous parler un peu de, oui, la genèse. Donc, ça faisait 25 ans qu'on n'avait pas revu la politique. On était tous ensemble quand on a consulté. Il y a eu plusieurs étapes de consultation et je pense que ça nous a permis de valider nos orientations. Donc, j'ai fait référence à ces différents facteurs : un environnement plus compétitif; le besoin d'une meilleure adéquation entre le système d'immigration, les besoins évolutifs du Québec; la persistance d'entraves; le bouleversement, par les technologies de l'information, des façons de s'informer, de concevoir les services publics, et de tirer le meilleur parti possible de la prestation électronique de services pour simplifier... diversification accrue du mouvement migratoire, qui suscite des inquiétudes, chez une partie de la population, au sujet de différences ethnoculturelles.

Donc, l'idée, c'était de travailler... et la proposition qu'on a mise de l'avant, c'était : Comment fait-on pour continuer à faire en sorte que l'immigration continue à... on puisse continuer à développer le Québec, grâce, en partie, à l'immigration? Faire en sorte aussi que l'immigration puisse continuer à contribuer à la pérennité du fait français.

Mais il y avait aussi une autre dimension, on n'a pas eu l'occasion d'en parler...

(Consultation)

Mme Weil : Bon, c'est le modèle de vivre-ensemble du Québec, un modèle qu'on appelle l'interculturalisme, qu'on connaît; l'interculturalisme, qui est notre modèle de vivre ensemble et qui a été affirmé, à plusieurs reprises, comme notre modèle d'intégration, mais qui n'a pas, jusqu'à date, eu de formulation formelle. On en a beaucoup discuté, aussi, lors de la consultation. Donc, l'interculturalisme québécois, qui tient compte...

Et d'ailleurs le député de Bourget l'a évoqué, je pense que c'était sa question il y a quelques heures peut-être de ça, le modèle multiculturalisme et le modèle interculturalisme. Évidemment, l'interculturalisme québécois tient compte du caractère pluriel et dynamique de l'identité québécoise, de la langue française comme langue d'intégration et de cohésion sociale, d'une vision de l'intégration basée sur l'engagement réciproque et le partage des valeurs démocratiques, de l'importance des rapprochements et des contacts, et de l'engagement partagé entre les personnes immigrantes et la société québécoise pour assurer une intégration réussie.

Alors, plusieurs intervenants sont venus, en commission parlementaire, pour dire qu'il y avait lieu de bien concevoir ce modèle d'interculturalisme. Et, dans la stratégie d'action, d'ailleurs, il y a une action qui touche... Oui. Alors, c'est 2.1.1. C'est d'«affirmer l'interculturalisme québécois pour rallier la population autour d'une vision pluraliste du vivre-ensemble, notamment en : publiant un texte de référence sur l'interculturalisme afin de clarifier la vision pluraliste qui favorise la cohésion sociale et la pleine participation». Donc, ça, c'est dans la stratégie d'action.

La raison pour laquelle je le souligne, c'est que, dans toute la construction de la politique, avec l'élément central, oui, d'une sélection de personnes qui vont être mieux arrimées lors de la sélection, arrimées au marché du travail et tout ce que cela implique, c'est-à-dire la connaissance du français, d'avoir des portraits régionalisés, et tout, mais il y a aussi tout le deuxième enjeu, c'est ce qu'on appelle globalement le vivre-ensemble, et le vivre-ensemble, le modèle, notre modèle de vivre-ensemble, c'est ce qu'on appelle l'interculturalisme québécois.

C'est un modèle que d'autres pays prônent, comme en Europe, mais je suis sûre que chaque société qui adopte ce modèle a peut-être sa propre façon de l'exprimer, propre façon de le vivre. Évidemment, ici, au Québec, ce modèle est beaucoup articulé autour d'une langue commune qu'on appelle souvent le ciment qui nous unit, mais le modèle d'interculturalisme nous appelle aussi à un dialogue constant, une compréhension des uns et des autres, une adhésion... évidemment, une vision commune de la société québécoise et une obligation de rejeter, si on veut, toute forme d'exclusion et, comme on en parlait tantôt, de discrimination, de racisme, aussi.

Donc, l'interculturalisme québécois tient compte du caractère pluriel et dynamique de l'identité québécoise, de la langue française comme langue d'intégration et de cohésion sociale, d'une vision de l'intégration basée sur l'engagement réciproque et le partage des valeurs démocratiques, de l'importance des rapprochements et des contacts, et de l'engagement partagé entre les personnes immigrantes et la société québécoise pour assurer une intégration réussie. Lors de la consultation publique, donc, on nous avait invités justement à engager ce débat pour qu'on puisse aller encore plus loin pour promouvoir ce vivre-ensemble.

• (21 h 30) •

Donc, au Québec, à l'instar d'autres sociétés, la réalité migratoire des dernières années a donné lieu à l'expression d'inquiétudes culturelles, sociales, économiques, politiques et sécuritaires, auxquelles s'ajoutent, au Québec, des inquiétudes linguistiques liées au statut minoritaire de la francophonie au Québec et en Amérique du Nord. Plusieurs études et sondages récents ont illustré que les liens de solidarité et de confiance entre les Québécoises et Québécois de toutes origines pouvaient être fragilisés si on ne portait pas attention à ces éléments. Des recherches montrent également un déficit de participation des personnes des minorités ethnoculturelles, qu'elles soient immigrantes ou nées au Québec, tant dans le domaine économique que dans les domaines politique, communautaire, social et culturel.

Les obstacles à la participation des personnes des minorités ethnoculturelles et les inégalités qui en découlent ne sont pas apparus à la suite des débats publics. Il est néanmoins possible de penser que la fragilisation des liens de confiance et de solidarité peuvent se répercuter sur la qualité de l'intégration et de l'inclusion, notamment en raison de perceptions négatives face à l'immigration, et la diversité, et de certaines inquiétudes quant à la vigueur des balises québécoises du vivre-ensemble. Affirmer le choix de l'interculturalisme québécois en permettrait de démontrer la volonté du gouvernement à poser un geste pour affirmer, donc, notre modèle, rappeler notre cadre civique commun, valoriser la diversité de la population québécoise et renforcer le respect des valeurs démocratiques.

Le premier ministre avait parlé de la diversité comme le défi du siècle, de conjuguer l'identité québécoise avec une diversité croissante, une identité québécoise distincte, forte, partagée par les Québécoises et Québécois de toutes régions et de toutes origines. Mais je rajouterais à ce débat sur le modèle d'intégration que les sociétés qui s'affichent ouvertes à la diversité, toutes sortes de diversités, la diversité ethnoculturelle, mais d'autres formes de diversité aussi, des sociétés qui se démontrent comme des sociétés inclusives, évidemment, c'est des sociétés qui sont les plus attrayantes pour ces jeunes talents qui cherchent les meilleures sociétés où vivre et s'installer.

Donc, cet aspect de la politique, il n'est pas théorique, il n'est pas philosophique, il est très concret, et j'essaie de le rendre très concret, parce que parfois, quand on parle de modèle de multiculturalisme ou d'interculturalisme, ça peut être parfois un peu aride pour que les gens comprennent de quoi est-ce qu'on parle vraiment. Moi, je l'exprime beaucoup en termes de, oui, ces rapports qu'on devrait avoir les uns avec les autres, mais aussi, c'est un élément, toujours, je reviens à ça, cet élément qui fait qu'on puisse attirer les gens, les retenir chez nous. Le Québec est souvent reconnu d'ailleurs comme une société très attirante, de par sa façon... On le voit pendant la semaine des relations interculturelles, toutes sortes d'événements que les gens organisent partout, partout, sur le territoire québécois. C'est des fêtes, c'est des événements de dialogue, ça touche les écoles, les organismes communautaires et tout, et c'est une semaine où on a la possibilité de célébrer qui nous sommes, notre ouverture à l'autre, notre souhait de mener le dialogue.

Maintenant, on n'est pas une société parfaite, on le sait. Il n'y a pas une société qui est parfaite, mais on peut se comparer à d'autres et se féliciter. Je reviens encore à cette magnifique expérience, qui est l'accueil des réfugiés syriens. On a vu comment les milieux se sont mobilisés pour bien accueillir ces réfugiés syriens, parce que l'enjeu nous convoquait justement à s'activer, puis tous les reportages que j'ai vus, c'est des personnes qui ne se connaissaient pas nécessairement qui ont formé des groupes pour parrainer, organiser des groupes de parrainage. On a vu ça partout au Canada d'ailleurs, mais au Québec aussi. Nous, on l'a vu beaucoup au ministère de l'Immigration.

Ça, c'est un exemple. C'est un exemple de ce modèle très concret de qu'est-ce que ça veut dire, l'interculturalisme. Comme je le dis, c'est très difficile pour les gens de comprendre nécessairement c'est quoi la différence entre notre modèle et le modèle canadien. Essentiellement, on l'explique beaucoup par la langue, cette nécessité de travailler très fort justement parce que c'est la seule société francophone en Amérique du Nord. C'est peut-être de ça, de ces origines-là que le modèle s'est développé, mais, par la suite, c'est devenu vraiment... oui, on va tous vivre cette diversité croissante qui va évoluer avec le temps, mais on invite la personne à venir partager l'expérience québécoise, et nous, les Québécois, on s'ouvre aussi à bien comprendre les origines de cette personne, son désir de participer. On va lui donner les outils pour que cette personne puisse bien s'intégrer, mais on veut partager... on parle de valeurs communes, de valeurs démocratiques communes, on peut l'exprimer comme on veut, mais on souhaite maintenir, si on veut, protéger, promouvoir ces valeurs qui sont importantes pour nous, qui comprennent l'égalité entre les hommes et les femmes, notamment des valeurs démocratiques, d'égalité tout court, ces valeurs qui sont précieuses, des valeurs de famille, de vouloir aussi dynamiser nos régions, ne pas abandonner nos régions. Tout ça fait partie de cette politique.

D'ailleurs, on l'exprime très différemment dans cette politique. La place des régions, dans cette politique, elle est très importante. Je reviens là-dessus parce que, quand on parle d'interculturalisme, ça se pratique, si on veut, ça se vit partout sur le territoire. Ce n'est pas juste dans un milieu comme Montréal, qui est une ville de diversité, ou à Laval, ou Gatineau, Sherbrooke, Québec, qui connaît une diversité croissante, c'est comment toutes les régions puissent participer justement à ce grand projet collectif, parce que notre avenir passe par là. Moi, je le sens, c'est comme un cri du coeur dans certaines régions qui voient leur population diminuer. Il y a une crainte, je le sens beaucoup, une inquiétude. Ils veulent retenir leurs jeunes, dans un premier temps, c'est sûr. Ils veulent renforcer leurs institutions, que ce soient des cégeps ou des universités, dans certains cas, leur hôpital, tout ce qui fait vivre... leur palais de justice. Je l'ai découverte quand j'étais ministre de la Justice, l'importance des palais de justice. Mais, pour ça, ça prend de l'activité humaine, et qui dit activité humaine dit évidemment rétention de nos jeunes, mais aussi l'attraction de nouvelles personnes qui vont venir s'installer dans leur région. Il y a beaucoup de mobilité entre les régions, il y a certaines régions qui attirent et d'autres régions qui sont en train de perdre la population, mais l'immigration peut aussi répondre à ces besoins-là.

Alors, pour revenir sur cette question d'interculturalisme... Il me reste trois minutes. Je pense que...

Une voix : Deux.

Mme Weil : Deux minutes. Donc, le souhait, c'est de préparer, comme on le dit dans la stratégie d'action... c'est un texte de référence, évidemment, pour clarifier cette vision pluraliste, mais je pense que, de façon plus importante, c'est comment toutes ces actions vont se concrétiser sur le terrain et comment... et je pense que c'est important que tout le monde qui nous écoute regarde bien ce plan et cette stratégie d'action pour voir comment ils peuvent s'inscrire. Je pense beaucoup aux organismes communautaires et toutes les autres personnes qui sont intéressées par cette question-là. Ça peut être les institutions aussi qui souhaitent être parties prenantes de notre avenir, qui va se bâtir, comme notre passé, par l'immigration.

C'est sûr qu'on dit : Ce n'est pas 100 % des emplois qui seront comblés par l'immigration. C'est 18 %, donc c'est à peu près... c'est un volume important, mais tout à fait gérable pour nous et tout à fait gérable dans le sens qu'on est capables d'aller chercher des gens qui... Bon an, mal an, vous le voyez, il y a beaucoup, beaucoup d'intérêt, beaucoup d'intérêt parmi beaucoup de pays. Moi, je le vois parce que, sur les réseaux sociaux, souvent, je suis interpelée personnellement. Évidemment, je ne réponds pas aux courriels ou aux tweets que je peux recevoir, qui viennent d'un peu partout, mais on le voit sur les réseaux sociaux. Les gens, ils connaissent bien le Canada, mais, s'ils sont francophones, ils connaissent le Québec.

Ça fait partie d'un tout, alors, pour être attrayant, évidemment, et retenir ces talents qu'on va chercher, le modèle de l'interculturalisme, évidemment, comme notre modèle de vivre-ensemble, mais aussi par les stratégies d'action qu'on va mettre en branle pour réussir cette immigration et cette intégration.

• (21 h 40) •

Le Président (M. Picard) : Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Montarville pour votre dernier bloc, 13 minutes.

Mme Roy (Montarville) : Merci, M. le Président. J'aimerais revenir sur un dossier dont on a parlé durant l'étude du p.l. n° 77, les fameuses écoles de pilotage.

Pour les gens qui nous écoutent, le 11 novembre 2015, j'avais interpelé la ministre, en lui fixant un ultimatum très, très poli, là, très respectueux, par la voie d'une lettre que je lui ai envoyée afin qu'elle mette fin à l'incertitude qu'elle et son collègue le ministre de l'Éducation laissent planer concernant le statut des écoles de pilotage et les conditions selon lesquelles elles pourront désormais recevoir des étudiants étrangers.

Alors, le climat d'incertitude dans lequel le gouvernement maintient les écoles de pilotage du Québec depuis plus d'un an maintenant est déplorable. Le manque de collaboration entre le MIDI et le ministère de l'Éducation, de même que l'incapacité du gouvernement à élaborer une solution conjointe permettant de reconnaître ses écoles à titre d'établissements désignés, comme l'ont fait les gouvernements des autres provinces, eh bien, ce manque d'efficacité et ce manque de collaboration est, pour nous, injustifiable. On en avait parlé en commission. Ces écoles attirent pourtant, vous le savez, un bon nombre d'étudiants étrangers, et constituent vraiment un moteur économique pour les régions où elles se trouvent, et elles génèrent d'importantes retombées au Québec.

Donc, l'inaction du gouvernement dans ce dossier compromet l'activité des écoles de pilotage et risque de mettre leur existence en péril. Vous vous souvenez sûrement, Mme la ministre, nous avons déposé un amendement au p.l. n° 77 justement pour légiférer sur le statut de ces écoles. Vous avez refusé notre amendement malgré l'appui que nous avions de toute l'industrie. Il y a l'Association québécoise du transport aérien, l'AQTA, qui a adopté des résolutions lors de son congrès annuel à la mi-mars pour appuyer notre amendement. D'ailleurs, ces documents et des lettres ont été déposés ici même, M. le Président, à cette commission, mais, jusqu'à présent, on n'a rien de concret sur la table, le dossier n'est toujours pas réglé.

Vous m'aviez dit avoir été très sensible et sensibilisée à la problématique, Mme la ministre. Alors, les écoles de pilotage du Québec attendent après vous pour harmoniser leur statut avec ce qui se fait dans le reste du Canada. Donc, j'ai une question bien simple : Quand obtiendront-elles ce fameux statut d'établissement désigné? Elles en ont besoin, elles attendent après vous et le ministre de l'Éducation.

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : Écoutez, j'attends peut-être la fiche... il y a une fiche qui a été préparée par le ministère, mais on est très, très proches, hein?

Donc, essentiellement, ce qu'on a eu du... Vous savez que c'est un règlement fédéral, hein? Donc, c'est un règlement fédéral, et quand moi, je suis arrivée en poste, je suis arrivée en avril 2014, j'ai été sensibilisée à cette question, la rencontre avait déjà eu lieu avant que j'arrive entre les deux ministères et les ministères de l'Éducation, parce que ça a été décidé que c'était les ministères de l'Éducation de toutes les provinces qui allaient gérer ce dossier-là pour la reconnaissance.

Et, un peu comme vous, le téléphone a commencé à sonner, le cabinet a commencé à recevoir des appels, j'ai découvert ces écoles de pilotage et les problèmes qu'elles allaient vivre, et ça voulait dire des emplois et l'économie des régions. Il y a aussi les écoles de langue, aussi, donc qui ont... dans une situation particulière. Donc, on me dit qu'on est très, très proches. Je suis contente que le ministère de l'Immigration du Canada, ils attendent qu'on finisse le processus, qui est bientôt fini, parce qu'il faut qu'on agence notre réglementation avec la leur, et vous savez que c'était... Vous connaissez un peu l'origine de cette problématique, l'abus de ce programme des étudiants étrangers pour ceux qui venaient pour des formations de plus de six mois.

Donc, pour les écoles de pilotage, état de situation, de 2011 à 2015, le ministère a délivré en moyenne 2 090 CAQ, certificat d'acceptation du Québec, pour études par année à des étudiants étrangers admis dans une école de pilotage, pour un total 1 453 CAQ pour études.

Plus de 85 % de ces CAQ pour études, soit 1 239 CAQ pour études, ont été délivrés à des étudiants étrangers admis dans une école reconnue, ou qui le sera à compter du 1er juillet 2016, ou affiliée à un établissement d'enseignement reconnu. Cette proportion atteint 95 % si l'on ajoute le nombre de CAQ pour études délivrés pour le compte des écoles dont la demande est présentement en cours d'examen par le ministère de l'Éducation et 98 % si l'on ajoute le nombre de CAQ pour études délivrés pour le compte des écoles examinant les possibilités d'affiliation ou en discussions avec le ministère de l'Éducation. Certaines de ces écoles de pilotage sont, en fait, des entreprises de transport de marchandises ou de passagers où on n'observe qu'une faible fréquentation d'étudiants étrangers.

L'Association québécoise du transport aérien, l'AQTA, a mené des représentations auprès du ministère de l'Immigration, du ministère de l'Emploi, du ministère des Transports du Québec, pour que le projet de règlement prévoie la reconnaissance des écoles de pilotage sur la base de la certification de Transports Canada. L'automne dernier, après maintes analyses, il a été jugé plus approprié de maintenir les critères prévus par le ministère de l'Emploi...

Une voix : De l'Éducation.

Mme Weil : ...de l'Éducation pour l'adhésion des écoles de pilotage. Bon, là, donc, j'ai la liste. Je ne sais pas si ça vous intéresse de savoir où ils en sont rendus. Toute la liste, dont Cargair, comme ça, là, spécifiquement comme ça?

Une voix : ...

Mme Weil : Oui. Donc, ils ont reçu 644 étudiants, ça, c'est une école reconnue à partir du 1er juillet 2016; Air Richelieu inc., 306, une école reconnue depuis 2014; École de pilotage Saint-Hubert, 198, école affiliée avec le cégep Beauce-Appalaches; École de pilotage Saint-Hubert, 110 étudiants, demande de permis en cours d'examen au ministère de l'Éducation; ensuite, Passeport Hélico, 53 étudiants; Hélicraft inc., 51 étudiants, école reconnue à partir du 1er juillet 2016; Exact Air, 43 étudiants, école en discussion avec le ministère de l'Éducation; Lachute Aviation, 40 étudiants, école reconnue depuis 2015; Aviation Phoenix, 29, école ayant présenté une demande de permis incomplète au ministère de l'Éducation; Orizon Aviation Québec, 13 étudiants reçus, demande de permis en cours d'examen au ministère de l'Éducation; Dorval Aviation inc., 12 étudiants; Hélicoptères canadiens limitée, 11 étudiants, école examinant les possibilités d'affiliation actuellement; Capitale hélicoptère inc., six étudiants admis, demande de permis en cours d'examen au ministère de l'Éducation; ensuite, Laurentide Aviation, six étudiants; centre de formation Aéro quelque chose, cinq étudiants; Select aviation, quatre étudiants, école examinant les possibilités d'aviation... d'affiliation — je suis fatiguée un peu, là; Hélipsair inc., quatre étudiants; Nadeau air service, deux étudiants; Devenir Pilote inc., deux étudiants; Aéro Loisirs inc., un étudiant; et Aérotaxi, école de pilotage, un étudiant, donc pour un total de 1 546 étudiants.

Donc, il y en a quelques-uns qui sont en discussions avec le ministère, et c'est en marche. Les écoles non reconnues... oui, ceux qui sont non reconnus actuellement ont très, très, très peu d'étudiants. Donc, ce n'est pas un enjeu, étudiants étrangers. Tout ça, c'étaient des étudiants étrangers.

Le Président (M. Picard) : Mme la députée de Montarville.

Mme Roy (Montarville) : Si je comprends bien, Mme la ministre — merci pour les précisions — vous me corrigerez si je me trompe, c'est qu'on maintient, pour les écoles que vous m'avez nommées, l'obligation d'affiliation à un cégep reconnu. Ça, ça entraîne des coûts d'à peu près 100 000 $ par école, là, alors qu'ailleurs dans le pays... je comprends qu'on veut faire une harmonisation, mais, ailleurs dans le pays, ils n'ont pas besoin d'avoir cette affiliation avec un cégep ou une école collégiale. Donc, vous allez dans cette direction-là. C'est ce que je comprends, là, c'est que cette affiliation-là sera obligatoire, là.

• (21 h 50) •

Mme Weil : C'est le ministère de l'Éducation, suite à une entente avec le ministère de l'Immigration du Canada. L'importance, pour le ministère de l'Immigration du Canada, c'était de s'assurer que c'étaient des écoles, comment dire... une légitimité, parce qu'il y avait eu quelques cas... C'était beaucoup ça, hein, des problèmes de qualité... en tout cas, de qualité, on dira ça, de qualité d'enseignement.

Donc, il y a eu une rencontre... et ça, c'est vraiment avant que j'arrive, là, j'ai appris tout ça par la suite, mais ça ne concernait pas le MIDI directement... les ministères d'Éducation de partout au pays, qui avaient leurs propres façons de valider la reconnaissance, donc, une reconnaissance des écoles et de leurs formations. Donc, la responsabilité devait, comment dire, incomber à un organisme en particulier. Et donc chez nous, au Québec, c'était par la reconnaissance parce qu'on a déjà un système de reconnaissance. Donc, il avait été décidé, à ce moment-là, que ce serait le ministère de l'Éducation qui donnerait le tampon, si on veut, de compétence, parce que...

Alors, quand ces écoles-là... Comment le faire? Il fallait que l'école s'associe, donc, à des universités ou des cégeps qui sont reconnus, et, comme ça, ils pourraient bénéficier de cette reconnaissance.

Une voix : Sauf si elle se fait reconnaître elle-même.

Mme Roy (Montarville) : Oui, je vois où vous voulez en venir. Je vous remercie beaucoup. Il me reste à peine quelques minutes. Brièvement, je vais vous poser une petite question rapide sur des sommes qui auraient été versées, des sommes du MIDI, au fonds consolidé. Selon une étude de l'Institut de recherche en économie contemporaine, le fameux IREC, intitulée, cette étude, En matière de francisation et d'intégration des immigrantsLe Québec rate sa cible — l'étude a été publiée en janvier dernier — on peut y lire, et je cite : «...sur la période de 2010 à nos jours — donc 2016 — le ministère de l'Immigration a retourné plus de 70 millions au fonds consolidé alors même que le nombre d'immigrants ne connaissant pas le français est en augmentation et que le financement des services de francisation dans les trois ministères concernés est en baisse depuis 2011.»

Alors, la ministre peut-elle réfuter cette affirmation par des chiffres, un tableau, et nous dire si, oui ou non, de l'argent a été retourné au fonds consolidé?

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : En quelle année?

Mme Roy (Montarville) : 2010 à aujourd'hui.

Une voix : ...

Mme Weil : Oui, c'est ça. Alors, le MIDI devra examiner... Il dit : Ce n'est certainement pas 70 millions, certainement pas. Mais ça va leur prendre du temps pour... je ne pense pas que... pour examiner ça. C'est sérieux comme affirmation.

Le Président (M. Picard) : Mme la députée, 30 secondes.

Mme Roy (Montarville) : Parfait.

Mme Weil : Parce que... Bien, juste dire... à préciser, c'est important. Tout l'argent... Vous parlez de l'accord Canada-Québec, c'est bien ça?

Mme Roy (Montarville) : Je parle des transferts fédéraux qui sont donnés au ministère.

Mme Weil : C'est ça. C'est vraiment toujours le cas chaque année que plus d'argent est dépensé par le gouvernement, les quatre ministères, que ce qui est transféré au gouvernement du Québec, là. C'est toujours plus d'argent qu'on dépense. À chaque année, ça a toujours été plus. Donc, cet écart de 70 millions, j'aurais de la difficulté...

Le Président (M. Picard) : ...Mme la ministre. Je cède maintenant la parole à M. le député de Bourget pour la dernière période, 17 min 30 s.

M. Kotto : Merci, M. le Président. En 2013, les immigrants admis au Québec depuis cinq ans ou moins avaient enregistré une forte baisse du taux de chômage, passant de 20,8 % en 2012 à 14,2 % en 2013. Et c'était la première fois depuis 2006 que le taux de chômage de ce groupe était inférieur à celui de l'Ontario, qui était de 14,8 % en 2013. Mais, en 2014, on est passés de 14,2 % de chômeurs chez ce groupe à 17,2 % et, en 2015, on a grimpé... on est passés, pardon, de 17,2 % à 18 %.

Je vous ramène au document Renseignements particuliers, question 51. Alors, j'aimerais savoir, de la part de la ministre, ce qui s'est passé depuis que nous avons laissé le gouvernement, parce que nous avons affiché un bon tableau. Les efforts déployés, notamment par, bon, ma collègue de Taschereau, à l'époque ministre du Travail, ont eu un impact positif chez ce groupe où on a remarqué un recul notable du chômage. Et qu'est-ce qui s'est passé depuis ce temps-là? Quels sont les facteurs qui expliquent ce changement? C'est ma première question à la ministre.

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : Bien, j'attends les réponses du ministère, mais je... On remonte à 2006. C'est toujours un peu en dents de scie, hein? 2006, pour les cinq ans ou moins, 19,3 %; 2007, 14,7 %, très semblable aux chiffres de 2013. Ensuite, 2008, ça montait à 17,6 %; 2009, ça montait à 22,7 %; 2010, 18,2 %; 2011, 19,5 %; 2012, 20,2 %, ensuite 14,2 %, 17,2 %. Donc, il y a des variations depuis toujours. Et ensuite on voit, de cinq à 10 ans, là, ça va mieux pour les immigrants. Donc, ces dernières années, en 2013, c'était 11,3 %; en 2014, c'est 10,1 %; ça a baissé un tout petit peu. Ensuite, immigrants de longue date, plus de 10 ans, en 2013, c'était 10,3 % et, en 2014, 9,6 %. En 2012, c'était 8,2 %.

Je pense que l'important... Je vais voir les raisons. Ça peut être toutes sortes de raisons. C'est des gens qui cherchent un emploi. L'important, c'est de travailler l'intégration. L'important, pour nous, au ministère de l'Immigration, c'est la sélection. Évidemment, mon rôle, comme ministre de l'Immigration, c'est de travailler une sélection qui puisse s'arrimer plus directement. C'est la réforme. En fait, c'est la réforme qu'on mène, où les gens n'attendent pas d'intégrer le marché du travail, parce qu'on peut dire : Bon, tant mieux, ils intègrent après cinq ans, ça va mieux, l'intégration, mais on ne peut plus se permettre, comme société, comme système d'immigration, d'avoir cet écart. Bien, c'est-à-dire qu'on comprend qu'il y aura toujours un écart, mais pas un écart de cette grandeur. Et donc c'est pour ça que je mène et qu'on mène toute cette réforme pour avoir un arrimage plus direct.

Par rapport aux facteurs, d'autres éléments...

Une voix : ...

Mme Weil : Bon, cette performance sur le plan de l'emploi se reflète sur le taux de chômage qui affiche une hausse, dans le cas des immigrants les plus récents, plus 0,8 point de pourcentage par rapport à 2014. Le taux de chômage de 18 % en 2015 reste cependant inférieur à ceux enregistrés pour ce groupe entre 2006 et 2012, année pour laquelle il avait atteint 20,2 %. Donc, une hausse est aussi notée dans le taux de chômage des immigrants admis depuis cinq à 10 ans.

Plusieurs facteurs... On n'a pas les facteurs, nous, mais, pour nous et pour moi, comme ministre de l'Immigration, c'est pour ça, la réforme. C'est pour ça qu'il est important d'avoir des stratégies non seulement en amont pour que la sélection se fasse d'une façon beaucoup plus pointue, beaucoup plus rapide, qui répond précisément aux besoins du marché du travail, mais aussi qu'on travaille l'inclusion. Donc, tout ce qu'on a mentionné, les programmes de réseautage, de mentorat, les programmes de subvention salariale, on l'a vu dans le cas des réfugiés syriens lorsqu'on a lancé l'appel aux entreprises, quelque 200 entreprises ont répondu présent, et on a utilisé justement le programme PRIIME.

Donc, c'est des stratégies de ce genre qu'il va falloir promouvoir. Et c'est ce qu'on dit justement dans la politique, dans la stratégie d'action, qu'on veut promouvoir ces types de stratégie pour faire en sorte que les gens puissent intégrer rapidement le marché du travail. Et les programmes fonctionnent bien. Le taux de rétention est aux alentours de 87 % une fois qu'ils reçoivent cette subvention salariale.

Le Président (M. Picard) : M. le député.

• (22 heures) •

M. Kotto : M. le Président, est-ce que la ministre envisage l'exercice qui consisterait justement à essayer d'identifier les facteurs qui touchent ce groupe de nos concitoyennes et concitoyens nouvellement arrivés? Parce que ça peut, disons, aboutir à des pistes d'éclairage qui pourraient amener à corriger la situation. Un des facteurs que la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse avait mesuré était celui de la discrimination à l'embauche. Il y avait un avis, il y avait tout un travail qui avait été fait là-dessus, mais... Cinq années, c'est beaucoup, hein, même une année, quand on se retrouve dans la galère, ce n'est pas simple pour la famille, quand on en a une, pour les enfants, pour sa conjointe ou son conjoint. Parfois, ça aboutit à des ruptures, à des dislocations familiales, et ce n'est pas joyeux. Quand on le vit ou quand on est témoin de ça, ce n'est pas joyeux.

Donc, je pense qu'il serait pertinent de tabler sur une analyse des facteurs qui pourraient, disons, rendre la vie difficile à ces nouveaux arrivants. Maintenant, j'ai une seconde question en lien avec la première, c'est de savoir si la ministre a une information spécifique sur les groupes les plus touchés par le chômage dans le cas de ceux qui sont là depuis cinq ans et moins.

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : La question... Je ne sais pas... Les coupes?

M. Kotto : Non, non, c'est les deux groupes qui sont...

Mme Weil : Groupes qui ont été plus affectés par le chômage? Il faudrait voir l'équipe des études de recherche.

Une voix : ...

Mme Weil : Oui, évidemment, dans les récentes données?

Une voix : ...

Mme Weil : Ah oui! Les Maghrébins, justement, et... Est-ce qu'il y a d'autres groupes identifiés?

Une voix : ...

Mme Weil : L'Afrique subsaharienne aussi. Donc, vous voyez, quand on... Là, toute la pertinence de cette politique avec des mesures qui mettent l'accent, justement, sur la valorisation de la... et de contrer la discrimination, etc., on en parlait tantôt, plus tôt, ce soir ou cet après-midi, mais aussi des mesures comme PRIIME, qui identifient les personnes issues des minorités visibles et des programmes qui fonctionnent bien.

Alors, on va poursuivre avec ces genres de programmes et on a des recherches, en effet, au ministère de l'Immigration, qui nous permettent d'identifier ceux qui sont sous-représentés, ceux qui souffrent d'exclusion. Et c'est des gens qui parlent français. Il y a eu un article dans Le Devoir, il y a quelques semaines, qui l'a bien identifié. On connaît le problème, et c'est désolant... plus que désolant, le député de Bourget a souligné le désarroi que ça peut causer à un couple, aux parents, aux familles.

Donc, oui, le ministère du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale et le MIDI étudient actuellement les trajectoires des personnes immigrantes vers l'emploi pour ajuster leurs services. En effet, c'est vrai, il y a ce programme ou ce projet de travailler ensemble une stratégie... c'est dans la stratégie d'action, justement, pour être capable de bien identifier les problématiques. Donc, au-delà d'un programme comme PRIIME, bien comprendre qu'est-ce qui se passe et comment bien les accompagner.

D'ailleurs, dans le budget pour le ministère de l'Emploi, il y a aussi Objectif emploi pour les accompagner à l'emploi, il y a des stratégies que le ministère de l'Emploi vise aussi. Et on va travailler ensemble, les deux ministères, avec de nouvelles stratégies pour mieux réussir cette intégration de ces personnes très scolarisées, très compétentes, parfaitement... bon, ils parlent deux langues, leur deuxième langue, c'est le français, mais on croirait que c'est leur première langue.

Le Président (M. Picard) : M. le député.

M. Kotto : Combien de temps me reste-t-il, M. le Président?

Le Président (M. Picard) : Six minutes. Six.

M. Kotto : Six minutes. Depuis quelques années, quatre organismes très impliqués dans la communauté des affaires, à savoir le Réseau des entrepreneurs et professionnels africains, le REPAF, le Chantier d'Afrique du Canada, CHAFRIC, l'Association de la communauté noire de Côte-des-Neiges et la Jeune Chambre de commerce haïtienne bénéficiaient du programme Soutien aux clientèles particulières du ministère de l'Économie. Je sais que la ministre n'en a pas la charge, mais c'est néanmoins des groupes qui devraient logiquement la préoccuper quant à l'essor qui devrait être le leur dans la sphère d'activité dans laquelle ils exercent.

Alors, ces organismes, au total, recevaient 120 000 $ pour l'embauche de ressources ayant pour objectif d'accompagner les entrepreneurs dans leurs démarches et dans leur développement. Alors, comme me disait M. Messie, qui est le président du conseil d'administration du REPAF, donc le Réseau des entrepreneurs et professionnels africains : Cette ressource, disait-il, nous permettait d'ouvrir des portes, d'avoir accès aux programmes, aux autres programmes, de nous orienter et, bien souvent, d'éviter des erreurs. C'était un programme très apprécié, voire essentiel pour nous tous.

Or, l'an dernier, M. le Président, ils n'ont rien reçu de ce programme et ils sont toujours dans l'attente pour la présente année. En fait, depuis 2010, la subvention qui leur était octroyée a toujours été à la baisse. Le programme serait en révision, dit-on, mais, au même moment, le MIDI annonce, en référence au communiqué du 24 mars de cette année, un soutien de 400 000 $ sur deux ans au programme EntrePrism de HEC Montréal. Donc, ça a suscité une grande déception de savoir que l'expertise de ces groupes des milieux d'affaires de concitoyens d'origine africaine que leur expertise soit en quelque sorte mise de côté au détriment... au bénéfice de HEC. Je ne sais pas si la ministre est au fait de cet enjeu, parce qu'apparemment ils ont fait des représentations, frappé à plusieurs portes, mais sans entendre quelque écho positif que ce soit.

Le Président (M. Picard) : Merci. Mme la ministre.

Mme Weil : Vous vous rappelez, lors de la consultation sur 77, il y a quelques groupes qui sont venus. Je pense que c'était vers la fin de la consultation. Je n'ai pas le nom des organismes qui sont venus...

M. Kotto : C'était la Table ronde du Mois de l'histoire des Noirs.

Mme Weil : La table ronde. Et on est allés les rencontrer. Moi, je peux juste vous dire... Là, on n'a pas encore développé toute la mise en oeuvre, mais, oui, je suis très sensible. Je connaissais le Fonds afro-entrepreneurs, je pense que c'était le nom, à l'époque. Et je sais qu'il y a de la déception, mais ce que j'ai dit à mon ministère, et je l'ai même évoqué lorsqu'on a rencontré ces groupes : Il faut absolument qu'on développe une stratégie pour cette communauté, absolument. Alors, on a de l'argent dans la stratégie d'action.

On a vu, il y a eu des reportages tout récemment, je ne sais pas si vous l'avez vu, des gens très scolarisés qui venaient... je ne me rappelle plus de quel pays d'Afrique. Ils parlaient un français impeccable, très formés. Et c'était à Radio-Canada, encore une fois, à Radio-Canada. Ils ont fait le reportage. C'était juste après notre consultation. Je pense qu'ils ont été inspirés par le témoignage qu'ils ont entendu de ces personnes, un chimiste d'ailleurs... Bien, ça, c'était le reportage, c'était un chimiste. Bien, en tout cas, ces personnes qui n'ont jamais pu trouver un emploi à leur hauteur de leurs compétences, et elles avaient envoyé leur C.V. partout.

En tout cas, tout ça pour dire que je peux bien dire : Je suis déterminée, je suis déterminée. Il y a de l'argent qui est dans notre stratégie d'action, le ministère est très sensible à cette question aussi. Je vous dirais que les Maghrébins, mais aussi la communauté africaine, toutes les différentes communautés africaines... pas toutes, il y en a qui intègrent rapidement, mais il faut les accompagner. Il va falloir qu'on fasse quelque chose de plus soutenu avec le ministère de l'Emploi, mais aussi avec les entreprises. Il faut concevoir un projet.

Donc, dans ce cas-là, leur expertise... Et moi, j'ai dit aux deux messieurs qui sont venus nous voir... Moi, je trouvais qu'ils avaient beaucoup d'expertise et je pense qu'il faut qu'on se fie puis qu'on fasse une alliance avec ces personnes-là, un partenariat, parce qu'ils sont très sensibles à tous les différents types de problématique. Donc, c'est la volonté que j'exprime, et ce n'est pas juste des paroles. Moi, je le vois depuis quelques années, comme ministre de l'Immigration, là, de 2010 et 2012 et encore 2014 à maintenant, qu'il y a des problématiques spécifiques. Ce n'est pas par rapport à la communauté, c'est peut-être plus la société d'accueil. Et, comme les Maghrébins, donc, il y a un programme PRIIME, mais il faut aller plus loin que ça.

• (22 h 10) •

Le Président (M. Picard) : Merci. Il reste 10 secondes.

M. Kotto : 10 secondes. Bien, pour vous remercier, M. le Président.

Le Président (M. Picard) : C'est bon.

M. Kotto : Puis, en attendant le vote des crédits tout à l'heure, remercier la ministre et tous les collègues ici présents.

Le Président (M. Picard) : Merci. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Crémazie pour une période de 20 minutes.

Mme Montpetit : Merci, M. le Président. Je vais en prendre moins que ça, il se fait tard. Ce sera le dernier bloc de 20 minutes, on va se partager le dernier bloc avec ma collègue de Charlevoix.

Je m'en voudrais de ne pas avoir abordé, avant la fin de ces crédits, une des très belles réalisations du ministère de l'Immigration, en fait, un des cas qui a pris beaucoup de place dans la dernière année, le cas de M. Raif Badawi. Son cas n'a plus vraiment besoin d'être présenté, je pense qu'on en a entendu beaucoup parler. Mais je tiens quand même à rappeler, s'il y a encore des gens qui sont avec nous, à l'écoute, à l'heure qu'il est, que M. Badawi publiait des textes critiquant la Commission de la promotion de la vertu et de la prévention du vice ainsi que les fatwas qui étaient émises par certaines figures religieuses du Royaume d'Arabie Saoudite, donc remettait en question certains aspects de la religion. Et un certain nombre de ces figures religieuses ont donc décidé de le poursuivre pour insulte à l'islam et désobéissance à l'autorité. Il a été emprisonné en juin 2012, condamné à 10 ans de prison, à 1 000 coups de fouet, à payer une amende avoisinant les 300 000 $.

L'épouse de... Mme Badawi, Mme Ensaf Haidar, et leurs trois jeunes enfants ont obtenu le droit d'asile politique au Canada. Ils se sont établis à Sherbrooke en décembre 2013. On a eu l'occasion d'ailleurs de la recevoir à l'Assemblée nationale, le premier ministre du Québec l'a rencontrée, elle a eu l'occasion de rencontrer plusieurs autres élus également. Et, alors que la sentence de M. Badawi était confirmée par la Cour suprême d'Arabie Saoudite en juin 2015, l'Assemblée a adopté à l'unanimité une motion qui condamnait cette décision. Et, en conférence de presse, le 12 juin 2015, la ministre de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion annonçait l'émission d'un certificat de sélection du Québec pour M. Raif Badawi. Et donc le 18 juin, lors d'une cérémonie spéciale au bureau de la ministre, le certificat a été remis à Mme Haidar, donc à sa femme, pour... Donc, le certificat de sélection du Québec a été remis à sa femme.

Et l'émission de ce certificat envoie un signal très clair aussi au niveau de la solidarité et de l'appui du Québec à M. Badawi et à sa famille. Et je voulais donner l'occasion à la ministre de nous en parler, parce que c'est un geste d'une grande solidarité, mais c'est un geste qui est aussi clairement exceptionnel pour une situation exceptionnelle, et je voulais lui donner l'opportunité de nous en parler quelques minutes.

Le Président (M. Picard) : Mme la ministre.

Mme Weil : Oui. Alors, je remercie ma collègue de cette question. Alors, on a commencé l'étude des crédits avec les réfugiés syriens, donc un dossier humanitaire, et là on finit avec un dossier humanitaire qui concerne évidemment une personne.

Dans un cas, évidemment, les réfugiés syriens, c'est un dossier, oui, d'une tristesse horrible, infinie parce qu'on pense à des gens qui quittent leur pays, qui ont vécu des traumatismes, mais qui sont tellement heureux de rebâtir leur vie ici avec nous. Et, dans le cas de Raif Badawi, évidemment, la tristesse... et notre désir de le voir venir ici rejoindre sa famille, ses trois enfants, mais de voir qu'on n'a pas réussi encore à faire changer la décision du gouvernement de l'Arabie Saoudite... Et donc on sait qu'il vit dans la souffrance. On sait que Ensaf Haidar aussi, elle vit dans la souffrance. Et tous les jeudis soirs, elle nous le dit, tous les jeudis soirs... C'était un jeudi soir lorsque je l'avais appelée pour lui dire qu'on allait lui accorder un certificat de sélection du Québec, et je me souviendrai toujours de cet appel. On avait trouvé quelqu'un au ministère d'ailleurs qui a agi comme interprète, hein? Parce qu'il y a des gens qui parlent... combien de langues au ministère?

Une voix : ...

Mme Weil : Beaucoup de langues au ministère de l'Immigration. On fera le décompte un jour. Et donc c'est quelqu'un qui a agi comme interprète qui a appelé Ensaf. Et donc elle était très, très émue au téléphone. Mais ce que j'ai appris, par la suite... bien, c'est d'ailleurs là qu'elle me l'a dit, c'est que tous les jeudis soirs elle vivait une anxiété invivable : c'est de penser que peut-être le lendemain son mari Raif allait recevoir les coups de fouet et que peut-être il ne survivrait pas. Parce que, bon, il y a eu une séance... Elle ne peut jamais savoir. Et elle dit que c'est tous les jeudis soirs qu'elle a beaucoup de difficultés à vivre, on peut imaginer. Alors là, tout de suite, on est dans sa vie et dans ce qu'elle vit. Mais, en même temps, très, très émue par le geste.

Alors, je vais peut-être faire, avec le temps qu'il nous reste, un peu l'historique de ce dossier bien important. Donc, Raif Badawi, le fondateur de Liberal Saudi Network, dont les activités étaient généralement concentrées sur les réseaux électroniques, sur le forum du réseau en question, M. Badawi publiait des textes critiquant la Commission de la promotion de la vertu et la prévention du vice, qui est en fait une police religieuse, et les fatwas, avis juridiques non contraignants émis par certaines figures religieuses du Royaume d'Arabie Saoudite. Un certain nombre d'entre elles ont décidé de le poursuivre pour insulte à l'islam et désobéissance à l'autorité.

Alors, il a été emprisonné en juin 2012. Il a été condamné à 10 ans de prison, 1 000 coups de fouet administrés par tranches de 50, tous les vendredis pendant 20 semaines, et à payer une amende avoisinant les 300 000 $ CAN. Une fois la peine purgée, il lui sera interdit de voyager pendant 10 ans. Son avocat a aussi été appréhendé. Donc, il a reçu ses premiers coups, 50 premiers coups de fouet le 9 janvier 2015, mais le reste de la sentence a été suspendue le 16 janvier 2015.

Alors, l'épouse de M. Badawi, Mme Ensaf Haidar, et leurs trois jeunes enfants ont obtenu le droit d'asile politique au Canada et se sont établis à Sherbrooke en décembre 2013. Alors que la sentence, on se souvient bien, de M. Badawi a été confirmée par la Cour suprême de l'Arabie Saoudite le 7 juin 2015, l'Assemblée nationale adoptait à l'unanimité une motion condamnant cette décision.

Alors, pour nos actions, on était tous ensemble, les députés, moi, donc, on... bon, le ministère, on a émis un certificat de sélection du Québec pour motif humanitaire à M. Raif Badawi, et je pense que ça a été un moment très émouvant de l'année dernière. Et je souhaiterais tout d'abord souligner la belle unanimité qui a régné à l'Assemblée nationale. On se souvient, on était ensemble, le député de l'opposition officielle, tous les partis étaient représentés, on était tous ensemble. Et donc on a été ensemble et on a exprimé notre soutien. La motion, je la lirais. C'était le 12 juin dernier :

«Que l'Assemblée nationale exprime sa vive préoccupation, après la confirmation par la Cour suprême du Royaume d'Arabie Saoudite, de la peine inhumaine infligée à Raif Badawi;

«Qu'elle réaffirme sa profonde solidarité et toute sa compassion avec M. Badawi, ainsi qu'avec son épouse Ensaf Haidar et leurs trois enfants;

«Qu'elle réitère son souhait que, à l'instar du gouvernement du Canada et d'autres alliés de la communauté internationale, la mobilisation et les interventions se poursuivent afin que M. Badawi soit libéré et puisse retrouver sa famille;

«Qu'elle souligne en ce sens la délivrance d'un certificat de sélection par le gouvernement du Québec à M. Badawi.»

• (22 h 20) •

Alors, ma collègue la ministre des Relations internationales et de la Francophonie a été très active, même encore récemment, avec son homologue canadien afin de maintenir la pression internationale en faveur de la libération de M. Badawi. Ce qui nous a tellement horrifiés, c'est qu'on puisse parler d'un crime, un crime qu'il aurait commis, et qu'il a mérité une sentence parce qu'il a critiqué, par son organisme le Liberal Saudi Network, la Commission de la promotion de la vertu et la prévention du vice, la police religieuse, et les propos de certaines figures religieuses de son pays.

Alors, quand on s'est réunis, on a chacun pris la parole. Et, évidemment, l'article 18 du Règlement sur la sélection des ressortissants étrangers qui stipule... Et c'est un règlement qu'on utilise très, très peu. L'article 18, c'est : «La catégorie des ressortissants étrangers qui sont dans une situation particulière de détresse comprend un ressortissant étranger qui, [...]est dans une situation de détresse telle qu'il mérite une considération humanitaire du fait que : son bien-être physique, mental ou moral de même que celui de sa famille légalement au Québec se trouveraient fortement perturbés s'il ne pouvait demeurer ou venir au Québec.»

Par ce geste, nous avons réitéré notre soutien indéfectible envers lui et sa famille. Ce certificat de sélection se voulait et se veut toujours un geste donnant espoir, l'espoir d'un futur heureux en paix au Québec.

Le cas de la famille Badawi a permis, tout comme l'accueil des réfugiés syriens au Québec, de mettre en lumière la longue tradition humanitaire du Québec. Cette tradition, dont nous sommes très fiers, est reconnue à l'international. On se souviendra qu'en 2014 le haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés de l'époque, António Gutteres, avait tenu à venir au Québec pour me rencontrer afin de témoigner de son appréciation envers tous les efforts déployés par le Québec pour les personnes réfugiées.

Au cours des dernières années, au gré des conflits internationaux et des violences politiques internes, des centaines de réfugiés ont en effet trouvé ici un havre de paix pour repartir à zéro. Et, s'il est possible de tout recommencer pour se bâtir une vie ailleurs, c'est en grande partie grâce au travail de centaine de personnes qui oeuvrent partout au Québec au sein d'organismes partenaires du ministère et d'organismes de parrainage.

À chaque fois que je le mentionne, sur chaque tribune, je tiens à réitérer toute mon admiration pour le dévouement et l'engagement de ces organismes communautaires qui oeuvrent auprès de ces personnes. Dans le cas de la famille Badawi, j'aimerais souligner, donc, la grande passion démontrée par les organismes de la ville de Sherbrooke, une ville qui est reconnue depuis longtemps pour l'accueil et l'intégration des personnes immigrantes et réfugiées. J'aimerais souligner aussi la mobilisation hors du commun qu'ils ont su créer au sein de la population sherbrookoise. Je souligne aussi tout particulièrement l'engagement extraordinaire d'Amnistie internationale et spécialement le travail accompli par Mme Mireille Elchacar, coordonnatrice du groupe à Sherbrooke. Je rappelle aussi qu'en accueillant tous ces hommes et toutes ces femmes comme M. Badawi et Mme Haidar, avec leur courage et leur résilience, notre souhait le plus cher est que le Québec devienne pour eux et pour leurs enfants l'occasion de réaliser leurs rêves.

Évidemment, avec l'actualité, on peut... je pense qu'il faut maintenir notre volonté de mobiliser et de faire des gestes de mobilisation. C'est difficile, hein, parce qu'on a des discussions avec le gouvernement fédéral, M. Stéphane Dion, évidemment, qui est le ministre responsable des relations, des affaires internationales extérieures, très sensible à cette question. Mais le pouvoir qu'on a qu'il soit libéré de cette prison, ce qu'Amnistie internationale nous dit, c'est évidemment par une mobilisation constante, constante. Et le fait que la question m'est posée évidemment ce soir, c'est une occasion de réitérer l'importance qu'on reste mobilisés.

Je ne sais pas si vous, vous suivez les actions de Mme Ensaf Haidar. C'est une femme extraordinaire, extraordinaire, qui est partout, d'ailleurs. Elle a trois enfants, elle est très soutenue par la communauté sherbrookoise. D'ailleurs, le député de Sherbrooke, qui est en congé de maladie pour quelques semaines, a joué un rôle extraordinaire. D'ailleurs, tout au long, il l'a accompagnée, mais d'autres aussi. Tous les partis, d'ailleurs, ont joué un rôle... tous les partis ici, à l'Assemblée nationale, ont eu un contact avec cet enjeu, avec la famille, tous les élus de la région, les élus des différents partis au gouvernement fédéral.

Je pense qu'il ne faut pas qu'on se décourage, je pense qu'il faut qu'on reste, comment dire... on essaie d'être optimistes, on veut être positifs et on sait que le défi est énorme, est énorme. Mais je pense que, juste de pouvoir encourager Ensaf, d'encourager les gens qui sont autour d'elle aussi pour que tout le monde puisse maintenir cette force de pouvoir militer en sa faveur, c'est important de le faire, et qu'on ne soit pas découragés, je ne pense pas qu'il faut être découragé, et qu'on maintienne, donc, la pression, la mobilisation. Donc, je... la députée de Crémazie qui aurait des...

Le Président (M. Picard) : Mme la députée de Crémazie, il reste quatre minutes.

Mme Montpetit : Quatre minutes, hein? Je pense qu'à ce stade-ci... Bien, premièrement, si je peux me permettre de féliciter la ministre pour ce grand geste... Après l'exposé qu'elle vient de faire, après tout le travail qui a été fait, effectivement, avec les collègues, c'est un grand geste de solidarité dans un contexte, je pense, où l'humanité, de façon générale, est relativement ébranlée sur beaucoup de choses qui se sont passées. Je pense que des gestes comme ça, ce sont de petits, mais de grands gestes qui sont empreints de beaucoup d'humanisme.

Et, bien, j'aurais tendance à, comme la tradition le veut, lui laisser les quelques minutes qu'il reste pour remercier son équipe, faire ses remerciements.

Mme Weil : Alors, M. le Président, mon collègue de l'opposition officielle le député de Bourget, ma collègue du deuxième groupe de l'opposition la députée de Montarville, mon collègue député de... ah! non... et mes collègues, évidemment, mes collègues, mes chers collègues députés du parti formant le gouvernement, merci à tous, toutes les personnes qui ont participé aux discussions sur l'étude des crédits du ministère, un exercice démocratique important. J'aimerais aussi, évidemment, remercier de tout coeur toute cette formidable équipe qui m'accompagne aujourd'hui, tant au cabinet qu'au ministère.

Donc, la révision en profondeur de l'action du Québec en matière d'immigration, de participation et d'inclusion est une démarche qui exige beaucoup de rigueur et d'engagement. Notre objectif est de continuer à améliorer les services et de mieux servir les personnes immigrantes afin non seulement de les attirer au Québec, mais qu'elles s'y établissent de façon durable.

J'aimerais souligner le travail de nos partenaires communautaires, économiques et institutionnels actifs dans les différentes régions du Québec. Ils jouent un rôle clé pour favoriser l'ouverture des milieux à l'inclusion et pour favoriser la pleine participation en français des personnes immigrantes et réfugiées à la société québécoise.

Le nouveau système d'immigration permettra des avancées majeures favorisant l'apport de l'immigration au développement du Québec. En appuyant la sélection sur des portraits régionalisés du marché du travail et en mettant en place des programmes pilotes d'immigration, le gouvernement confirme l'importance de son engagement à l'égard de l'immigration en région. Le nouveau système d'immigration aura la flexibilité nécessaire pour permettre aux employeurs de bénéficier de l'apport d'une main-d'oeuvre qualifiée et à nos villes et régions de compter sur de futurs citoyens engagés à contribuer au dynamisme de leur collectivité d'adoption.

Cette belle entreprise est possible grâce au personnel du ministère, une équipe performante et créative avec qui j'ai le plus grand plaisir de collaborer, je tiens à le souligner. On a vraiment beaucoup de plaisir, et je pense qu'on est tous fiers de l'année qu'on vient de vivre.

Et il me reste à vous remercier, M. le Président, et des gens qui vous accompagnent aussi pour avoir bien, évidemment, présidé de main de maître l'étude des crédits, qui a été une séance évidemment fort agréable, M. le Président.

• (22 h 30) •

Le Président (M. Picard) : Merci, Mme la ministre. Moi aussi, je tiens à vous remercier, tous les parlementaires, pour le bon déroulement des travaux. Et aussi je tiens à remercier et féliciter Mme Anne-Marie Larochelle pour sa première séance à la CRC à titre de nouvelle secrétaire de la commission.

Adoption des crédits

Le temps alloué à l'étude des crédits budgétaires du portefeuille Immigration, Diversité et Inclusion étant presque écoulé, nous allons maintenant procéder à la mise aux voix des crédits.

Le programme 1, Immigration, Diversité et Inclusion est-il adopté?

Des voix : Adopté.

M. Kotto : Sur division.

Le Président (M. Picard) : Sur division. L'ensemble des crédits budgétaires du portefeuille Immigration, Diversité et Inclusion pour l'exercice financier 2016‑2017 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

M. Kotto : Sur division.

Le Président (M. Picard) : Sur division.

Documents déposés

En terminant, je dépose les réponses aux demandes de renseignements de l'opposition.

Je lève la séance, et les travaux de la commission sont ajournés au mardi 26 avril 2016, après les affaires courantes, où nous entreprendrons l'étude des crédits budgétaires du portefeuille Famille.

Bonne soirée à tous.

(Fin de la séance à 22 h 31)

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