(Onze
heures quarante-cinq minutes)
Le
Président (M. Bachand) : Bon matin. À l'ordre, s'il vous plaît!
Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des
institutions ouverte. Tout d'abord, je vous rappelle que le port du masque de
procédure est obligatoire en tout temps, hormis au moment de prendre la parole.
La commission est réunie afin de procéder à
l'étude du volet Accès à l'information des crédits budgétaires du portefeuille
Conseil exécutif pour l'exercice financier 2021‑2022.
Une enveloppe de 1 h 15 min a été allouée pour l'étude de ces
crédits.
Avant de débuter, M. le secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
Le Secrétaire :
Oui, M. le Président. Mme Lachance (Bellechasse) est remplacée par
M. Girard (Lac-Saint-Jean) et M. Zanetti (Jean-Lesage) est remplacé
par M. Nadeau-Dubois (Gouin).
Accès à l'information
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup.
Nous allons procéder aux échanges entre les groupes d'opposition et le ministre
par blocs de 14 à 29 minutes.
Discussion générale
Je suis maintenant
prêt à reconnaître une première intervention de l'opposition officielle pour un
premier bloc d'échange. M. le député de LaFontaine, la parole est à vous pour
29 minutes.
M. Tanguay :
Merci beaucoup, M. le Président. Alors, heureux de vous retrouver et de vous
saluer ce matin, merci de présider nos débats, saluer le ministre qui est
présent aujourd'hui, les collègues également autour de la table et celles et
ceux qui accompagnent le ministre, notamment Me Diane Poitras. On essaie
de... Je vous replace. Malgré les masques, on essaie de voir, de reconnaître
les visages, mais on n'est pas pire, on n'est pas pire.
M. le Président,
contexte de pandémie, on dit : Pouvoirs exceptionnels, transparence
exceptionnelle nécessaire. J'aimerais, dans un premier temps, si on a
consentement, j'aimerais entendre Mme Poitras, si on a consentement.
Le
Président (M. Bachand) : ...pour Mme Poitras?
M. Caire :
Est-ce qu'on peut savoir sur quel sujet, M. le Président?
M. Tanguay : Bien, M. le Président, il y a-tu consentement pour... le sujet, c'est l'accès à l'information. M. le Président,
là, je sais que ça s'est fait dans d'autres commissions, là, puis vous
présidiez ça, mais le consentement n'est pas sous réserve des questions, là. Je
ne vais pas mettre ma liste de questions au préalable, là. Alors, il y a-tu
consentement, oui ou non?
Le
Président (M. Bachand) : Bien, de toute
façon, le consentement est pour la séance, mais le ministre peut décider de
répondre...
M. Caire :
Bien, M. le Président, en tout respect pour le collègue, c'est un exercice de reddition
de comptes qui implique d'abord et avant tout le ministre. Donc, si on me pose
des questions, je vais y répondre au meilleur de mes capacités, et, si je ne
suis pas capable de donner l'information à mes collègues parlementaires, ce
sera avec plaisir que je passerai la parole à Me Poitras, là. L'idée n'est
pas de bâillonner personne, là, mais c'est juste que c'est un exercice du gouvernement,
des ministres.
Le
Président (M. Bachand) : Donc, je comprends que, pour le
moment, il n'y a pas de consentement. M. le député de LaFontaine, s'il vous
plaît.
M. Tanguay :
O.K. Le ministre peut-il m'informer si Me Poitras a vu un changement suite
à son commentaire à la page 23 de son dernier rapport annuel?
M.
Caire :
Le commentaire était à l'effet de?
M. Tanguay :
Le commentaire était à l'effet de dire l'importance que des décisions,
principales actions soient documentées de manière adéquate dans le contexte de
pandémie. Est-ce que Me Poitras a vu un changement depuis septembre
dernier? Est-ce que le ministre peut m'en informer?
M. Caire :
Alors, je vais laisser Me Poitras répondre à cette excellente question.
Pas de problème.
Le Président (M.
Bachand) : Est-ce qu'il y a consentement
pour Me Poitras? Consentement. M. le ministre, il y a consentement?
Alors, Me Poitras, s'il vous plaît, si vous
voulez vous identifier officiellement avec votre nom et votre titre, s'il vous
plaît.
Mme Poitras (Diane) :
Merci. Diane Poitras, présidente de la Commission d'accès à l'information.
Le commentaire était... auquel vous faites
référence, c'est sur l'obligation de documenter les décisions. On n'a pas une
étude ou un rapport qui nous permet de faire un bilan. Le commentaire se
voulait : dans le télétravail qui se
met en place rapidement, bien, évidemment, il y a l'utilisation du numérique de
plus en plus, et c'est quelque chose qu'on
commençait... une tendance qu'on commençait à voir, où il arrive assez
régulièrement que des organismes vont dire :
On n'a pas l'information. Parfois, c'est compréhensible, d'autres, quand c'est
une explication ou une justification de recommandation d'analyse ou de
document pertinent à un processus décisionnel, c'est un petit peu plus
questionnable, disons.
Et c'est une tendance, là, une obligation de
documenter dans la loi, c'est une nouveauté qui a été adoptée dans certaines
autres lois. C'est celle-là que nous avions recommandée dans notre rapport
quinquennal. Et on disait qu'en temps de pandémie, compte tenu du télétravail
qui s'est mis... en vitesse, il fallait particulièrement apporter une attention
à cet élément-là. Mais malheureusement je n'ai pas de chiffre, là, qui vous
permet de dire s'il y a une modification aux tendances.
M. Tanguay : O.K. En
septembre 2020, donc, c'est le rapport annuel de gestion de la Commission d'accès
à l'information. À la page 23, je cite l'extrait au milieu de page, sous
le titre Sur l'accès aux documents : «Bien qu'elle comprenne que la
pandémie actuelle constitue un défi à plusieurs égards, dont l'accès à
l'information, la commission a invité tous les organismes publics à faire
preuve, le plus possible, de transparence de manière proactive,
particulièrement à l'égard des décisions et des actions concernant la gestion
de la pandémie.» Alors, sur ce premier volet, lorsqu'on dit : «La commission
a invité tous les organismes publics», ça s'est fait par communiqué de presse
ou ça s'est fait autrement? Comment ça s'est fait, cette invitation-là?
Mme Poitras (Diane) : De
deux façons : il y a eu un communiqué qui a été fait sur le site et
il y a eu un article dans le journal qui m'a permis de réitérer l'invitation
qui a été faite à l'ensemble des ministères et organismes. Et je crois que le
SAIRID, le Secrétariat à l'accès à l'information, réforme des institutions
démocratiques, avait envoyé aussi un courriel à l'ensemble des responsables aux
ministères et organismes, là.
M. Tanguay : Ah! O.K.
Ça, est-ce qu'on pourrait avoir copie de ce courriel-là, s'il vous plaît? Merci
beaucoup. Y a-t-il eu d'autres courriels ou échanges suite à ce premier courriel
là, des écrits envoyés aux organismes de votre part, ou c'est essentiellement
ce courriel-là?
• (11 h 50) •
Mme Poitras (Diane) :
Pour l'instant, c'est essentiellement ce courriel-là. Toutefois, j'ai demandé
qu'on fasse une étude auprès d'un échantillonnage de je ne me souviens pas du
nombre d'organismes, mais des différents secteurs d'activité pour évaluer les
pratiques sur le traitement des demandes d'accès, incluant est-ce que la
pandémie a eu un impact. Ça, les lettres devraient partir cette semaine ou la
semaine prochaine pour, en fait, être envoyées aux sous-ministres des
organismes ou aux dirigeants des organismes.
Le Président (M.
Bachand) : Me Poitras, donc, je comprends que vous allez
nous faire parvenir le courriel, au secrétaire de la commission.
Mme Poitras (Diane) :
On pourra vous envoyer une copie de cette lettre-là.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Merci. M. le député de
LaFontaine.
M. Tanguay :
O.K. Deux choses : copie du courriel, effectivement, de septembre, ou
contemporain à septembre, et copie de la lettre, le cas échéant,
lorsqu'elle sera, évidemment, envoyée. Je trouve ça extrêmement intéressant,
donc, vous dites vous avez commandé une étude qui a débuté ou qui va débuter
avec l'envoi de la lettre?
Mme Poitras (Diane) :
Qui va débuter avec l'envoi de la lettre.
M. Tanguay : Ah! O.K.
Quel est le plan de match par rapport à cette étude-là? Vous avez parlé d'un
échantillonnage. Pouvez-vous nous parler de l'échantillonnage? Quel est votre
calendrier de remise d'un rapport?
Mme Poitras
(Diane) : L'objectif est de vérifier les pratiques. On a
identifié, oui, il y a des organismes... Vous savez, ça fait quatre ans qu'il y
a des organismes qui ont un nombre de demandes de révision qui sont adressées à
la commission pour non-réponse dans le délai de 20 ou 30 jours qui est
prévu par la loi. Donc, on a visé certains de ces organismes-là, qui reviennent
plusieurs années, mais on a aussi visé des organismes qui ne semblent pas avoir cette problématique-là, donc, pour voir s'il n'y a
pas des bonnes pratiques qui pourraient être partagées à l'ensemble des organisations.
Puis, dans ceux qui se retrouvent dans notre palmarès, entre guillemets, de
façon récurrente, on veut s'assurer qu'ils mettent en place ce qu'il faut pour
corriger une fois pour toutes la situation.
Le plan de match est
aussi : à la suite de cette étude, s'il faut faire une enquête, une
inspection auprès de ministères ou d'organisations où on juge qu'il y a matière
à, on pourra faire cette deuxième étape.
M. Tanguay :
O.K. Et l'étude culminera par un rapport, j'imagine.
Mme Poitras
(Diane) : Oui, qui sera rendu public.
M. Tanguay :
Il sera rendu public. Et autour de quel mois vous croyez pouvoir rendre public
ce rapport?
Mme Poitras (Diane) : C'est une bonne question. On aimerait que ça
soit complété dans l'année, évidemment, pour être capable d'en rendre
compte...
M. Tanguay :
D'ici décembre, autrement dit, dans 12 mois.
Mme Poitras
(Diane) : Bien, dans l'exercice financier pour pouvoir en
rendre compte dans notre prochain rapport annuel, pas celui qui s'en vient, là,
mais l'autre année.
M. Tanguay :
O.K. Donc, il serait dans le rapport annuel de l'autre année, donc probablement
autour de septembre 2022, c'est ça? Il serait dans le rapport annuel ou il
serait publié indépendamment?
Mme Poitras
(Diane) : Mais dès... Excusez-moi.
M. Tanguay :
Oui, je vous en prie.
Mme Poitras
(Diane) : Dès qu'il va être prêt, il va être publié, mais on
veut être sûr de pouvoir en rendre compte dans le rapport annuel. Puis on
m'indique : c'est 25 ministères et organismes qu'on a choisis dans
tous les secteurs d'activité.
M. Tanguay :
O.K. Merci pour la lettre qui sera envoyée. Puis, si on peut avoir également
l'information quant à la liste des 25, qui sont les 25 qui seront sélectionnés,
si c'est possible.
Mme Poitras
(Diane) : Pas de problème.
M. Tanguay :
Et toute autre information aussi, dans ce contexte-là, pour éclairer nos
réflexions, que vous jugerez à-propos, je
vous en prie de les... et je vous remercie à l'avance de les communiquer au
secrétariat de la commission.
Maintenant, dernier
angle, puis après ça je vais retourner vers mon bon ami le ministre, là. Puis
j'espère qu'il n'aura pas été éconduit par notre début un petit peu cahoteux,
qu'il ne s'en fait pas, là, j'aurais des questions à lui poser. Je le sens un peu,
pas boudeur, un peu esseulé, un petit peu shaké.
M. Caire :
Je me sens seul.
M. Tanguay :
Il se sent seul. Peut-être, tantôt, vous vous sentirez moins seul.
M. Caire :
Parfait.
M. Tanguay :
Je m'y engage. «La commission a aussi rappelé l'importance que ces décisions et
principales actions soient documentées de manière adéquate, malgré le contexte
d'urgence sanitaire et de travail à distance qui prévaut.» Ça, c'est une phrase extrêmement importante, puis, quand vous l'écrivez, en septembre 2020,
c'est parce que vous avez fait des
constats. Vous dites : Doit être documenté... les «décisions et
principales actions doivent être documentées de manière adéquate». Je
pense que je suis honnête intellectuellement en vous disant que vous avez
forcément dû constater des décisions qui étaient inadéquatement documentées.
Pouvez-vous nous en parler?
Mme Poitras
(Diane) : Le commentaire était plus préventif, dans un contexte
de pandémie. Le constat qu'on avait fait,
c'est que, dans l'ensemble, les décisions... comme je vous disais, l'avènement
du numérique, l'envoi de textos, ça
arrive. Mais je donne un exemple fictif inspiré de faits vécus, là. Mettons une
municipalité, les élus vont s'envoyer des textos pour échanger au sujet
d'une décision à prendre. Finalement, O.K., parfait, mais les échanges, donc,
qui ont mené à la réflexion, à la décision, on va avoir la décision, mais on
n'aura pas ces échanges-là, textos, parce qu'on oublie que même un texto, c'est
un document qui est assujetti à la loi. Donc, cette documentation, pour
l'avenir des décisions, on l'a vu dans
quelques décisions dans notre volet juridictionnel, il nous arrive d'avoir
des... on nous donne les documents en litige à la suite d'une demande
d'accès, puis là on regarde puis on dit : Mon Dieu! Comment ça se fait que
l'organisme n'a pas davantage documenté la décision? Et c'est une tendance
qu'on avait vue à travers le Canada, là, c'est un échange que j'ai avec des
collègues d'autres provinces.
Et
je vous disais qu'il était préventif, parce qu'on voyait le télétravail qui
s'est mis rapidement en place, on voyait beaucoup de ministères ou organismes
qui disaient : Mais là on n'a pas accès à nos documents, on ne peut pas
traiter les demandes d'accès, on n'a pas accès à nos documents qui sont papier.
Et le commentaire se voulait de dire : Bien, attention, si tout le monde
se met en télétravail puis qu'on se met à utiliser beaucoup nos technologies
pour pouvoir continuer à travailler, ce qui est très bien, assurez-vous de bien
documenter les décisions pour le futur, parce que c'est une période cruciale.
Mais ce n'était pas basé sur un constat, c'était préventif. On se doutait que
la tendance dans d'autres secteurs pouvait se concrétiser dans le contexte de
la pandémie.
M. Tanguay :
Je comprends. Et, juste pour ma gouverne, cette obligation-là, pour un décideur
public de documenter ses décisions, elle découle de quelle disposition?
Mme Poitras
(Diane) : Il n'y en a pas. C'est qu'on recommande... dans notre
dernier rapport quinquennal de 2016, on recommande d'inclure dans la loi une
telle obligation, obligation qui commence à être incluse dans les lois sur
l'accès à l'information de certains pays et qui est incluse en Colombie-Britannique,
au Canada.
M. Tanguay :
Ah oui? Est-ce que vous pourriez envoyer cette disposition-là — on
pourrait la chercher, mais, j'imagine, vous l'avez sous la main — l'envoyer
au secrétariat, cette disposition-là? J'imagine, c'est un article de loi qui
fait cette exigence, qui fait naître cette exigence.
Mme Poitras
(Diane) : Celle de Colombie-Britannique? On peut vous envoyer
les extraits pertinents du rapport quinquennal et les dispositions législatives
auxquelles il réfère. Il y en a en Australie aussi.
M. Tanguay :
De documenter les décisions, c'est un... O.K. Merci beaucoup, Me Poitras.
Ça se peut qu'on revienne à vous un peu plus tard, après avoir, évidemment, au
préalable soumis toute notre liste de questions pour approbation au ministre à
l'Accès à l'information. Je badine, je referme la parenthèse.
Ça, c'est un exemple
excessivement intéressant et précis d'un amendement, puis je sais que j'avais
eu une discussion avec vous, M. le ministre,
d'un amendement que nous pourrions apporter dans le contexte du projet de loi n° 64. On sait tous, projet de loi n° 64, ce n'est
pas ça, ce n'est pas l'accès à l'information, c'est la protection des
renseignements personnels. Mais on a ouverte devant nous, encore, là où on est
rendus dans l'article par article, la Loi à l'accès à l'information, puis on
sait que la Loi à l'accès à l'information, elle mériterait une réforme, on en a
parlé. Puis le ministre s'était montré ouvert. Puis corrigez-moi si j'ai tort,
c'est-à-dire corrigez-moi si j'ai mal interprété vos propos, mais le ministre disait :
Écoutez, une réforme majeure, pas là, puis ce n'est pas activement poussé de
l'avant, mais d'ici, peut-être, la fin du mandat, on pourra y revenir quand on
aura atteint tel, tel objectif, qu'on aura livré entre autres le 64. Pour ce
qui est des amendements pour... sans que ce soit une réforme complète, des
amendements à l'accès à l'information, de façon systématique à l'intérieur du
64, non, mais peut-être des amendements... vous seriez ouvert à : on va
donner un petit tour de vis là, un petit tour de roue là. Ça ne prétendra pas
être la réforme qui s'en vient plus tard, mais vous étiez ouvert à ça. Puis
vous avez dit, bien, que vous, vous n'alliez pas en déposer, ça, c'était clair,
puis le ministre me confirme, effectivement, mais vous nous invitiez à en
déposer.
Ma question : De
façon très tangible, sur cet exemple-là, de la Colombie-Britannique, si nous
arrivions avec... Parce que vous allez me dire : Moi, vous comprenez, je
ne veux pas travailler pour rien. Puis je ne veux surtout pas vous faire perdre
votre temps. Ça, moi, quand je me lève le matin, là, c'est mon premier objectif
dans la journée : ne pas faire perdre le temps au ministre de l'Accès à
l'information. Alors, c'est un article tout simple, c'est excessivement
pertinent, ça ne traite pas du 64, je vais-tu avoir un débat sur la
recevabilité? Le ministre, si ça a bien de l'allure, va-t-il me permettre de le
déposer? Puis va-t-il voter en faveur? Parce que j'en ai probablement une
couple, ce matin, que j'aimerais ça tester avec lui. Je veux juste savoir si la
porte est vraiment ouverte. Ça, c'est un exemple tangible, un article
copié-collé. Est-ce qu'on va le faire?
• (12 heures) •
M. Caire :
Oui, merci, M. le Président. Bien, en fait, je vais réitérer ce que j'ai dit à
mon collègue de LaFontaine : Oui, je suis très ouvert à ce qu'il y
ait des amendements, qu'on puisse regarder ça, qu'on puisse, oui, prendre pied sur le projet de loi n° 64 pour
aller modifier l'accès à l'information, s'il y a des modifications
intéressantes à apporter, là. Je n'ai pas d'enjeu. L'intention, puis je réitère
ce que j'ai dit, l'intention, c'est de compléter le projet de loi n° 64,
c'est la grande priorité. Je pense que c'est un projet de loi qui est appelé de
tous ses voeux par, notamment, la Commission d'accès à l'information, mais
aussi par plusieurs acteurs du milieu, donc on va le compléter.
Je souhaite,
évidemment, qu'on priorise le 64, puis, ce que je veux dire par là, c'est que
je ne voudrais pas non plus laisser entendre
qu'on pourrait ajouter une longue série d'amendements puis qu'on retarde
l'adoption du 64 puis, dans le fond, on fait indirectement ce que
j'aimerais mieux qu'on ne fasse pas directement. Donc, s'il y a quelques
amendements intéressants, tout à fait disposé à les regarder. Si on commence à
dire : Bien, écoute, là, quelques amendements,
tu sais, c'est... les «quelques», là, c'est selon l'interprétation de chacun,
là. Donc, c'est-tu deux, c'est-tu trois,
c'est-tu 20, c'est-tu 50, ça, ce sera à discuter avec le collègue, là, donc,
s'il y a un ou deux ou trois amendements à apporter, bon, qui font consensus, soit, s'il y a 10, 15, 20,
30 amendements à apporter qui ne font pas consensus puis qui
impliquent qu'on fait des débats pendant la commission parlementaire, qui ont
pour effet de retarder l'adoption du 64, qui est la grande priorité, je pense,
du gouvernement, mais aussi, je l'espère, du législateur en général, ça, c'est
une autre paire de manches, donc j'évaluerai.
Puis je n'ai pas connaissance de l'article en
question, là, ça fait que vous comprendrez qu'avant de dire : Je suis d'accord, je ne suis pas d'accord, j'aimerais
ça prendre le temps de le regarder puis de l'analyser. Mais je souligne
au passage la noble intention de mon collègue de
LaFontaine de ne pas nous faire perdre notre temps, je peux lui assurer que j'ai la même intention, de ne faire perdre son
temps à personne. Et, dans ce sens-là, lorsqu'il y aura des propositions
concrètes — là
j'entends que, ça, c'en est une — je prendrai connaissance des documents en
question, j'évaluerai les incidences de cet amendement-là puis je me réserve le
droit de revenir vers le collègue avec une réponse plus précise sur cet
amendement-là en particulier. Mais, sur l'intention générale, là, je pense que
mon propos est assez clair, en tout cas, du moins, je l'espère.
M. Tanguay :
Donc, j'annonce, M. le Président, que, durant le contexte... dans le
contexte du débat, lorsqu'on reprendra l'article par article du projet
de loi n° 64, que je déposerai un amendement tout simple qui
va dire : Chaque décideur au sein d'un organisme public doit, de
façon suffisante — puis
on verra le terme à employer — documenter la décision qu'il prend, et
reprendre, donc, une recommandation de la Commission d'accès à l'information,
rétablir l'équilibre de 2016. C'était là-dedans, tout simple, une phrase, et
ça, j'entends que, le ministre, sur le principe, il va être d'accord avec ça,
là.
M. Caire : Je ne
vois pas d'objection majeure, là, maintenant le diable est dans les détails, il
faudra voir le libellé précis. Parce que, vous comprenez, M. le Président,
que je ne suis pas une intelligence supérieure, mais je ne pense pas être
totalement stupide non plus, là, je me dis : Qu'est-ce que ça implique, de
quels décideurs parle-t-on, quel est l'accès qu'on va donner à ça. Alors, il y
a tout un contexte autour de ça, là. On comprend que des documents qui
président aux décisions du Conseil des ministres ne sont pas soumis aux mêmes
règles d'accès que des décisions qui sont
prises, en tout respect, par le directeur général d'un département d'un
ministère X et Y, là. Je pense que — puis
j'espère que tout le monde est très clair là-dessus et, là-dessus, on ne
changera pas — les
documents qui président aux décisions du Conseil des ministres sont des
documents qui sont protégés et ils vont le demeurer.
M. Tanguay : Sur cette
même lancée, Loi sur la santé publique, articles 118 à 131, il y a
13 articles qui encadrent, qui nous
gouvernent la démocratie québécoise, qui encadrent la démocratie québécoise, la
démocratie québécoise n'est pas sur pause, on est là ce matin, mais
13 articles qui nous encadrent, qui donnent des pouvoirs extraordinaires
au gouvernement, octroyer des contrats sans appel d'offres, répondre à une
urgence, mais on comprend qu'il y a une urgence qui dure depuis plus
d'un an. Alors, il y a la lettre et l'esprit et de la loi.
Pouvoir exceptionnel devrait engendrer de facto
transparence exceptionnelle. Sur cette affirmation-là, pouvoir exceptionnel devrait engendrer transparence exceptionnelle, le
ministre d'Accès à l'information est-il d'accord, sans ambiguïté, sur ce
principe-là?
M. Caire : Ah! je
suis d'accord, absolument.
M. Tanguay : Donc,
parfait, une fois qu'on a dit ça, on a commencé avec la Santé publique qui
conseille le gouvernement, la Santé publique qui donne des avis verbaux, on
parlait, tantôt, d'un contexte, où, tout le monde, ça doit aller bien vite,
j'imagine que c'est la même chose aussi pour la Santé publique, puis qu'il y a
des discussions.
Ce qu'on comprend, là, des conférences de presse
du premier ministre, c'est qu'ils se parlent puis qu'ils n'ont pas toujours copie conforme de ce qu'ils
viennent de dire par écrit puis qu'ils ne tiennent pas les minutes par
minutes, justement, de ce qui... Mais il y a
des documents, ça doit être documenté, puis peut-être que ça pourra faire
partie du volet du débat, documenter
les organismes publics, a fortiori dans un contexte d'application de la Loi sur
la santé publique.
Alors, comme
on vient de reconnaître avec le ministre que pouvoir exceptionnel devrait aller
avec transparence exceptionnelle, le ministre croit-il qu'il serait une
bonne chose de modifier la Loi sur la santé publique afin de prévoir la
diffusion proactive des avis de la Santé publique? Parce que tout n'est pas
écrit, mais il y a des écrits. On avait fait une demande, puis je ne veux pas
ressortir cet épisode-là un petit peu litigieux, puis, finalement,
c'était : Oui, il y en a, non, il n'y en a pas, non, on ne les rend pas
publics parce qu'il y en a, mais on va les rendre publics. Finalement, ils ont
été rendus publics un vendredi en fin de journée. Et là on s'attend à ce qu'il
y ait une autre publication de certains avis, on ne sait pas si c'est tous,
d'ici quelques jours ou semaines.
Le ministre,
dans l'application de ce qu'il vient d'affirmer, pouvoir exceptionnel,
transparence exceptionnelle, croit-il
qu'il serait une bonne chose, sur le principe, de modifier la Loi sur la santé
publique afin de prévoir la diffusion proactive des avis de la Santé
publique?
M. Caire : Bien,
c'est intéressant, la question du collègue, M. le Président. Puis, c'est
la beauté d'avoir été pendant 11 ans et
demi dans l'opposition, M. le
Président — ce qui est mon cas, hein, sur 14 ans de vie
parlementaire, j'en ai passé 11 et demi dans l'opposition — je me
souviens, dans le cas du Centre Vidéotron, d'avoir demandé les avis juridiques
au ministre responsable, qui était Normand Lessard. Je me souviens que le
gouvernement de l'époque nous avait dit : Non, non, non, voyons, on ne
peut pas commencer à donner des avis qui président aux décisions du
gouvernement, ça ne se fait pas, puis, de toute façon, la loi le protège, puis
ce n'est pas pour rien.
Je me souviens de la fameuse clé USB de... mon
Dieu! Annie, j'ai oublié son nom, qui était...
M. Nadeau-Dubois : Trudel.
M.
Caire :
...Trudel, merci, la fameuse clé d'Annie Trudel — merci, M. le
député de Gouin — qui
avait fait l'objet du sceau de la protection de la confidentialité de la
commission parlementaire, pour laquelle on ne pouvait diffuser
les documents qui avaient été caviardés, parce que c'étaient des documents,
notamment, qui avaient présidé à des décisions du Conseil des ministres, donc,
évidemment, qui étaient protégés. Puis je ne me souviens pas, là, ça, par
contre, je ne me souviens pas d'avoir entendu un membre du gouvernement, à
l'époque, dire : Aïe! Voyons, au nom de la transparence, là, puis
situation exceptionnelle, il faudrait vraiment qu'on rende tout ça public.
Donc, M. le
Président, je vais répondre au collègue que, non, je ne serais pas d'accord
puis je vais lui expliquer pourquoi. Parce que, quand le conseil... prenons le
Conseil des ministres à titre d'exemple, puisque, dans le fond, c'est de ça
dont il est question, quand le Conseil des ministres prend des décisions, les
avis dont il parle, puis là, il me parle des avis de la Santé publique, mais ça
peut être des avis juridiques, ça peut être des avis des fonctionnaires, mon
sous-ministre à l'Accès à l'information fait des avis, donc on a cet ensemble
d'informations là qui nous présente un point de vue, puis Santé publique
présente son point de vue, mais l'Éducation a un point de vue, la Santé a un
autre point de vue, et on a à faire des arbitrages, on a à faire des
arbitrages. Et c'est sur les décisions qu'on prend que le gouvernement a des
comptes à rendre, puisque le gouvernement à des comptes à rendre, M. le
Président, là, on n'est pas lâchés dans la nature. Alors, sur quelle base le
gouvernement prend les décisions? Je pense, personnellement, que ça appartient
au gouvernement, et je pense, après ça, que le gouvernement doit rendre des
comptes : pourquoi il a pris cette décision-là, qu'est-ce que ça a eu
comme conséquences, a-t-il pris la bonne décision,
oui ou non. Et là, à partir de là, je pense que les collègues ont,
effectivement, un rôle à jouer, puis
le gouvernement a une obligation d'expliquer ses décisions, de rendre
des comptes sur ses décisions et d'assumer les conséquences de ses décisions.
Ça, j'y crois, fortement.
Maintenant, puis je
vais juste compléter, M. le député, maintenant, dans un contexte... Parce
que la question du collègue
était : Est-ce qu'à circonstance
exceptionnelle il devrait y avoir transparence exceptionnelle? Et j'ai dit
oui, et je persiste et signe, c'est la
raison pour laquelle, par exemple, le Dr Arruda s'est présenté en
commission parlementaire. Moi, je vous dis, en 11 ans et demi dans
l'opposition, le seul moment où vous allez entendre un sous-ministre en
commission parlementaire, c'est à la Commission de l'administration publique
sur des auditions qui sont préétablies, pour lesquelles les fonctionnaires se
préparent et arrivent, et il y a cette reddition de comptes là qui se fait.
Mais ce que nous avons vécu avec le Dr Arruda est inédit. Et le fait de
rendre publics, parce qu'on les a rendus publics, les fameux avis, ça aussi,
c'est inédit parce qu'il n'est pas dans l'habitude des gouvernements de rendre
publics les avis sur lesquels il se base pour prendre des décisions.
Donc,
à situation exceptionnelle, transparence exceptionnelle, oui, mais est-ce qu'on
devrait en faire un mode opératoire, je ne le crois pas.
• (12 h 10) •
Le
Président (M. Bachand) : M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
On a constaté, dans la réponse du ministre, que, dans l'opposition, il a
beaucoup souffert. Il a beaucoup souffert de ne pas avoir Accès à
l'information, puis qu'il a rongé son frein.
M. Caire :
Non, je l'ai demandé, je n'ai pas dit que j'avais souffert.
M. Tanguay :
Puis qu'il en a souffert, puis qu'il disait que c'était épouvantable, puis
qu'il déchirait sa chemise, il n'avait pas
assez de chemises le jour pour pouvoir continuer son oeuvre. Puis il a dit au
monde : Avec l'équipe du premier ministre, faites-nous confiance,
les choses vont changer, avec nous, vous pourrez dire «désormais». Il y a eu
l'élection, puis là, le ministre nous dit aujourd'hui qu'il va faire comme ceux
à qui il adressait des reproches quand il était dans l'opposition. Alors,
j'aimerais savoir à quel moment, depuis l'élection, à partir de quelle date il
a changé d'opinion, parce qu'il dit, il déchire sa chemise. Ça, c'est un
premier élément.
Deuxième élément, il
faut que le ministre responsable de l'Accès à l'information — puis
je suis certain qu'il le sait mais il pourra peut-être corriger le tir — fasse
une distinction entre des avis juridiques et des avis de la Santé publique. Oui, les avis juridiques sont protégés
par le secret professionnel et c'est à ce titre que l'on ne les divulgue
pas, ils appartiennent au client. L'avis de la Santé publique, la Santé
«publique», devrait être public et pas privé, ce n'est pas la Santé «privée».
Alors, première grande distinction.
Deuxième distinction,
il dit : Bien, c'est protégé par le Conseil des ministres. Moi, quand
j'entends le premier ministre faire ses points de presse, puis c'est bien
correct, il consulte M. Arruda, il y a beaucoup de choses qui se décident
probablement debout, à côté de la machine à café, à deux mètres de distance, en
train de brasser son café. Ce n'est pas toutes des décisions des conseils des
ministres qui font en sorte que : Oh! c'est protégé, allez jouer ailleurs, ça va vous prendre 25 ans — parce que, c'est 25 ans, là il ne faut
pas attendre 25 ans — ce ne sont pas toutes des décisions du Conseil des
ministres. Je ne pense pas que M. Legault dit à M. Arruda : Oui,
ça a bien de l'allure, ça, le couvre-feu va passer à 20 heures,
convoquez-moi les 26 ministres, on les met sur l'appel conférence, puis
vous êtes d'accord, parfait, décision du Conseil des ministres timbrée, merci.
Non, les avis de la Santé publique... Mon point, là, le ministre a raison, je
pense, de reconnaître qu'à pouvoir exceptionnel, transparence exceptionnelle
est de mise, il y a des comptes à rendre, je pense, et c'est important, le
ministre a parlé du concept de comptes à rendre, oui, les comptes à rendre sur
les décisions qui sont excessivement importantes.
Puis là je ne veux
pas manger tout le temps comme je faisais, des fois, M. le Président. Je
veux laisser du temps au ministre, parce que sa réponse est importante pour
celles et ceux qui nous écoutent à la maison, puis il me reste
1 min 30 s, puis je lui donne, là, pour répondre à ça.
M. Caire : Mais,
M. le Président... Puis je pense qu'avec les travaux qu'on fait sur le
projet de loi n° 64, le député de LaFontaine et moi, là, on n'est pas dans deux fuseaux horaires
différents, là, c'est ce que je sens en commission parlementaire,
là, on a la même ambition, j'ai la même ambition. Ce... Là où je diffère...
Bon, je comprends que le député de
LaFontaine est avocat, puis je comprends qu'il dit, bon, que c'est un avis
juridique, c'est protégé par le secret professionnel, mais,
comprenons-nous, M. le Président, ce n'est pas la seule raison. Je veux
dire, les avis qui sont donnés au ministre,
ce sont des soutiens à la décision, et, ce qui doit être évalué, ce n'est pas
tant les avis qui sont donnés au
ministre que la décision qui a été prise par le ministre. Parce que, la
décision qui est prise par le Conseil des ministres, là, oui, il y a la Santé publique, mais ce que je dis au
collègue, c'est que ce n'est pas les seuls avis qui président à la décision, donc
c'est l'ensemble des avis qu'il faudrait rendre disponible puis il faudrait
refaire le débat des conseils des ministres.
Puis je ne le dis pas, là, pour ridiculiser le
propos du collègue, je pense que, son intention, elle est louable, puis je
partage l'intention, je ne partage pas le chemin par lequel on veut en arriver.
Mais je pense que les avis, qui sont donnés par les fonctionnaires, qui sont
donnés... qu'ils soient avocats ou qu'ils aient d'autres compétences
professionnelles, sont des avis qui sont destinés au Conseil des ministres pour
la décision du Conseil des ministres. Et ensuite les ministres rendent des
comptes, comme je le fais aujourd'hui, devant les collègues.
Maintenant, où je suis d'accord avec le collègue
de LaFontaine, c'est que, si c'est une règle générale, c'est une règle qui peut aussi avoir ses exceptions.
C'est la raison pour laquelle, tout à
l'heure, je disais à
Me Poitras : Bien, répondez
au collègue, parce que, de toute
évidence, moi, je ne suis pas capable de répondre adéquatement à sa
question, qui était légitime, qui était pertinente puis qui méritait une
réponse. Alors, Me Poitras est là, elle peut répondre. Me Côté est
là, éventuellement, peut-être que Me Côté pourra répondre, si, moi, je ne
suis pas capable de le faire.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup.
M. Caire : Mais,
l'idée, c'est de donner l'information.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. M. le député de Gouin, pour
14 min 30 s, s'il vous plaît.
M. Nadeau-Dubois : Merci,
M. le Président. Je vais vouloir discuter avec la représentante de la
Commission d'accès à l'information des ressources qui sont mises à sa
disposition pour faire son travail, mais, juste avant, j'aimerais aborder un
autre enjeu avec le ministre.
On apprenait, ce matin dans Le Devoir,
que les données personnelles de milliers de Québécois, Québécoises sont
laissées sans protection ou avec de très, très minimes protections par le
Tribunal administratif du logement. Très brièvement, là, comment le ministre,
qui est responsable de la Protection des données personnelles des Québécois,
Québécoises, comment il qualifie cette situation-là?
M. Caire : Bien,
je la qualifie d'inacceptable et je dirais : Je vous l'avais bien dit.
Pourquoi je dis ça? Parce que, M. le
Président, j'ai dit, puis les collègues en sont témoins, je l'ai dit, j'ai
dit : Il faut arrêter de parler de données de santé, il faut
arrêter de parler de données d'éducation, il faut arrêter de parler de... La
valeur d'une donnée n'est pas conditionnée par la source émettrice ou
l'organisation qui l'utilise. La valeur d'une donnée, elle est intrinsèque à
elle-même.
Et là le problème qu'on a, c'est qu'on a le
Tribunal administratif du logement, et la justice est publique, et donc ce qui
émane de la justice est public. Et donc un renseignement personnel qui... Soit
dit en passant, là, le même renseignement personnel, il est à la santé, il est
cadenassé, protégé, il ne bouge pas de là. Alors, ce qu'il faut, c'est changer
la façon dont on aborde la donnée — puis je sais que le collègue
m'a entendu dire ça en commission parlementaire — par sa
catégorisation : est-ce que c'est une information qui n'est pas sensible,
est-ce qu'elle est sensible, peu sensible,
très sensible, extrêmement sensible, et c'est à partir de là qu'il faut établir
un régime de protection, pas du fait qu'elle est en Santé, ou en
Éducation, ou en Finances, ce n'est plus comme ça avec le numérique. Et là, le
problème qu'on a, c'est que la justice est publique, donc ce qui en émane est
public.
Mais, dans l'ère
numérique, on vient de se rendre compte que, le numérique, lui, nous permettait
d'aller en ramasser pas mal, parce qu'avant ça, là, le petit commis, il
allait au greffe, il se faisait sortir un dossier papier, puis il y avait les
renseignements qui étaient relatifs à ça, puis tout était beau. Mais, avec le
numérique, aujourd'hui, là, le collègue, il voit ce qu'on peut faire.
M. Nadeau-Dubois : J'aimerais,
dans le fond, que le ministre... Est-ce que c'est inquiétant pour lui, cette
information-là?
M. Caire : C'est
inquiétant, c'est inquiétant. C'est très, très, très inquiétant, M. le
député, très inquiétant.
M. Nadeau-Dubois : Parce que,
là, ce qu'on apprend aussi, c'est que cette brèche-là est utilisée par certains
locateurs pour constituer, grosso modo, des listes noires de locataires qui ont
déjà eu affaire avec le Tribunal administratif du logement. Est-ce que le
ministre est d'accord avec moi pour dire que c'est une utilisation inquiétante
des données personnelles?
M. Caire : Bien,
toute utilisation qui n'est pas aux fins pour lesquelles la donnée a été
collectée est une utilisation inquiétante, celle-là en est une parmi tant
d'autres.
Puis je veux juste peut-être rectifier un terme,
puis il est superimportant, puis je sais que le collègue de Gouin ne l'a pas
utilisé pour banaliser la situation, mais le problème, c'est que ce n'est pas
une brèche, c'est permis par la loi. Ce qui est une brèche, c'est que notre loi, notre façon d'aborder
les données doit changer. Le numérique doit nous amener à revoir nos
concepts de ce qu'est, et de quelle façon on doit protéger nos données. Puis
là, bien, on se rend compte que, la donnée, ce n'est pas une brèche de
sécurité, là, ce n'est pas un hackeur qui a volé la donnée, là.
M. Nadeau-Dubois : Est-ce que
le ministre responsable de la Protection des renseignements personnels des Québécois
va faire quelque chose, et, si oui, quoi, pour régler cette situation qu'il
vient de qualifier de très, très, très — je ne sais plus combien il y
en avait — inquiétante?
M. Caire :
«Inquiétante», bien oui. Écoutez, là, je vais prendre le bâton du pèlerin puis
je vais continuer à prêcher la bonne parole, de dire : Écoutez, le
numérique, c'est un univers en soi qui a ses règles, et, autant dans l'univers
juridique que dans l'univers technologique, on doit revoir nos concepts, on
doit revoir les concepts, il faut rentrer au XXIe siècle.
M. Nadeau-Dubois : Oui, bien,
je comprends, mais là, il y a une crise du logement en ce moment, ça fait que
je demande pour la situation au Tribunal administratif du logement, là, qui
vient d'être révélée, médiatiquement. Moi, j'avoue, je n'avais pas connaissance
que c'était aussi facile que ça, là, on l'apprend par les médias. Je ne
m'attends pas à ce que le ministre connaisse les pratiques de chaque organisme
public, c'est bien légitime qu'il l'ait appris lui aussi par les médias. Là,
c'est révélé, ce n'est pas une brèche, en effet, d'un certain point de vue, ce
n'en est pas une, d'un autre point de vue, c'est une utilisation qui est très
inquiétante de données personnelles. Qu'est-ce qu'il va faire pour protéger les
données personnelles des citoyens et citoyennes qui font affaire avec le TAL et
qui n'ont pas envie que ces données-là servent, par exemple, à la constitution
de listes noires de locataires? Concrètement, là, dans les prochaines semaines,
qu'est-ce qu'il va faire?
• (12 h 20) •
M. Caire : Bien,
en fait, en fait, je suis un peu menotté et je vous explique. Le TAL, c'est un
tribunal administratif. Même s'il est administratif, c'est un tribunal, il a
son indépendance. Comme ministre, je ne peux pas, au nom de l'indépendance des
tribunaux, je ne peux pas interférer. On va généreusement...
M. Nadeau-Dubois : Est-ce que,
question...
M.
Caire : Si vous...
juste... Mais je lance un message au TAL, M. le député, que le Centre
gouvernemental de cyberdéfense est à sa disposition, parce qu'il y a des mesures
qui peuvent être mises en place pour éviter ces situations-là, il y a des
façons de se protéger contre ça. Et, si le TAL le juge à propos, nous serons au
rendez-vous pour les aider à mettre en place ces mesures-là.
M. Nadeau-Dubois :
Me Poitras, merci d'être avec nous. C'est bien maître? Merci d'être avec
nous aujourd'hui. Quel est l'avis de la Commission d'accès à
l'information sur cette situation préoccupante?
Mme Poitras (Diane) :
C'est sûr que vous comprendrez que je vais faire attention, en n'ayant pas
vérifié les faits, la commission n'a pas été voir qu'est-ce qu'il en était.
C'est sûr que, ce que je lis ce matin, je comprends que c'est préoccupant,
mais, comme ça a été affirmé, la problématique, c'est que ces données-là ont un
caractère public. Et on l'avait exposée, dans notre rapport quinquennal, la
difficulté, avec le numérique, que, les renseignements qui ont un caractère
public, de trouver une façon pour qu'ils ne soient pas utilisés à une autre fin
que celle pour laquelle ils ont un caractère public.
M. Nadeau-Dubois : O.K. La
commission dispose d'un pouvoir d'enquête, est-ce que la commission va ouvrir
une enquête sur cette situation?
Mme Poitras (Diane) :
On va, à tout le moins, faire les vérifications, effectivement, pour voir s'il
y a matière à enquête. C'est sûr que, si, a
priori, il y a respect de la loi, c'est difficile pour nous d'émettre une
ordonnance, mais, à tout le moins, on va avoir un échange, une conversation
avec le Tribunal administratif du logement.
M. Nadeau-Dubois : Parfait.
Est-ce que je comprends, donc, que vous n'excluez pas d'ouvrir une enquête?
Mme Poitras (Diane) :
Toutes les... On a plusieurs pouvoirs à notre disposition, alors on choisit
toujours le plus approprié.
M. Nadeau-Dubois : Parfait.
L'utilisation de ces données publiques pour constituer des listes noires de
locataires qui ont fait affaire, d'une manière ou d'une autre, avec la Régie du
logement, est-ce qu'à première vue ça vous apparaît comme une utilisation
légitime et justifiée des données personnelles des Québécois et Québécoises?
Mme Poitras (Diane) :
Vous avez utilisé le bon terme, la question qu'il faut se poser c'est :
Est-ce que cette collecte de renseignements là est à des... et la constitution
d'un dossier à cette fin-là, est-ce que c'est légitime? Sans avoir la position
d'un locateur, qui m'exposerait son point de vue, c'est sûr que c'est le doute
que j'aurais et pour lequel j'aurais besoin qu'on vienne faire des
justifications.
M. Nadeau-Dubois :
Autrement dit, vous vous interrogez sur la légitimité d'une telle pratique?
Mme Poitras (Diane) : Tout à fait. Et c'est une obligation dans la loi, là, le
premier critère, c'est, pour constituer un dossier sur un individu, il faut
avoir une fin légitime.
M. Nadeau-Dubois : Bien, je
suis content d'obtenir des réponses quand même précises et intéressantes, là.
Moi, je me permets de vous inviter à regarder la situation de près, là. Je ne
pense pas que c'était la fin attendue par les gens, qui vont... parce que,
c'est leur droit, faire affaire avec un tribunal administratif pour faire
reconnaître leurs droits, qu'en transmettant ces données-là, ça devienne un
instrument pour discriminer les locataires en fonction de : est-ce que
c'est quelqu'un qui a déjà fait valoir ses droits, puis, si oui, c'est
peut-être un peu tannant de lui louer mon logement. Je ne vous demande pas de
commenter, mais je soumets qu'il m'apparaîtrait très surprenant que c'est la
fin pour laquelle les renseignements personnels, initialement, ont été
collectés, pour permettre à des locateurs de dire : Quelqu'un qui se
défend, là, ça ne me tente pas. Fin de l'éditorial.
J'aimerais, Me Poitras, avec vous, parler
des ressources qui sont mises à la disposition de la commission, par le
gouvernement actuel et par les gouvernements précédents, pour faire son
travail, puis je vais avoir des questions très précises. Puis je veux qu'on
s'entende bien, mon objectif ici n'est pas d'accabler la commission, bien au
contraire, c'est d'essayer de voir qu'est-ce que les gouvernements vous donnent
comme outils pour faire votre job puis pour remplir votre mandat.
Dans les... Actuellement, combien de gens sont à
l'embauche de la commission?
Mme Poitras (Diane) :
Un petit peu plus que 70.
M. Nadeau-Dubois : Un petit peu
plus que 70. Quelle a été l'évolution, dans les 20 dernières années,
en termes de nombre de personnel à la commission?
Mme Poitras (Diane) :
Les 20 dernières années, ça, vous...
M. Nadeau-Dubois : Dans les
10 dernières années, dans les 10 dernières.
Mme Poitras (Diane) :
Je fais appel à ma mémoire, mais je sais que, dans le cadre du mémoire qu'on a
déposé pour le projet de loi n° 64, on a mentionné que, tu sais, si je
remonte, là, bon, dans les débuts des années 2000, je pense qu'on avait
59, 60 personnes, là, donc il n'y a pas eu une évolution très, très
grande. Puis, avant l'ajout de 1,5 million, en 2018, on était à peu
près au même stade qu'il y a sept, huit, neuf ans, de mémoire.
M. Nadeau-Dubois : O.K., donc
une dizaine de ressources de plus en une dizaine d'années?
Mme Poitras (Diane) :
En fait, dans les deux dernières années, seulement.
M. Nadeau-Dubois : O.K., dans
les deux dernières années. Puis, sur les 10 dernières années, combien de
gens se sont ajoutés à l'effectif de la commission, à peu près, une estimation?
Mme Poitras
(Diane) : Bien, c'est ça,
dans les années, là, on voit 59, 63, 58, etc., puis le 70 a été atteint
juste cette année, je crois.
M. Nadeau-Dubois : O.K. Pendant
cette même période, de 2010 à 2019, les fraudes ont augmenté de
75 % au Québec, ce n'est quand même pas rien, il y a eu
4 000 infractions liées à la cybercriminalité au Québec en 2018,
la moitié d'entre elles étaient des
incidents de fraude. Autrement dit, puis je pense que tout le monde s'entendra
là-dessus, la cybercriminalité, les
menaces, en général, parce que je sais que les affaires criminelles, ce n'est
pas sur votre bureau... mais je pense
qu'on s'entend sur le fait que, de manière générale, les menaces aux données
personnelles des Québécois et Québécoises
augmentent très rapidement. Jugez-vous que les ressources ont augmenté au même
rythme que les menaces?
Mme Poitras (Diane) :
Absolument pas, évidemment. J'ajouterais : elles n'ont pas augmenté au
même rythme des investissements dans les nouvelles technologies, dans
l'innovation et dans toutes sortes de technologies très utiles, qui nous
permettent d'exploiter ou de valoriser les données.
M. Nadeau-Dubois : En toute
sincérité, là, par rapport à ce que vous aimeriez être capables de faire comme
organisme de surveillance et, par extension, de protection des données
personnelles des Québécois et Québécoises, par rapport à ce que vous aimeriez
faire, est-ce que la commission a les ressources nécessaires pour accomplir ce
mandat-là?
Mme Poitras (Diane) :
Bien, clairement pas.
M. Nadeau-Dubois : O.K. Il y a
un volet juridictionnel, à la commission, puis il y a un volet Surveillance.
Combien de gens, approximativement, travaillent à la commission pour accomplir
son mandat de surveillance?
Mme Poitras
(Diane) : Je peux vous le donner en termes de budget?
M. Nadeau-Dubois : Allez-y.
Mme Poitras (Diane) :
Je ne sais pas si ça fait... Parce qu'on a quand même des ressources, là, où,
au prorata, on va attribuer à un ou à
l'autre au niveau du juridictionnel. En ce moment, c'est à peu près 40...
Excusez-moi, je vais juste prendre les chiffres exacts. Alors, il y a
37,5 des ressources qui sont attribuées à la section de surveillance contre
40,5 pour le juridictionnel, et, bon, le reste...
M. Nadeau-Dubois : Donc,
37 personnes, grosso modo, sous le mandat Surveillance?
Mme Poitras (Diane) :
Pas 37 personnes.
M. Nadeau-Dubois : 37,5 %?
Mme Poitras (Diane) : En pourcentage du budget en ressources financières.
M. Nadeau-Dubois : O.K. Puis,
en membres du personnel, est-ce que vous êtes capable de l'estimer?
Mme Poitras (Diane) :
En membres du personnel, c'est à peu près, à la section de surveillance... Il
faut faire attention parce que la section de surveillance a plusieurs autres
mandats, je veux dire, elle ne fait pas juste des enquêtes, là.
M. Nadeau-Dubois : O.K. Parfait.
Mon temps...
Des voix :
...
Mme Poitras (Diane) :
À peu près 30.
M. Nadeau-Dubois : Une
trentaine de personnes, donc, pour la section de surveillance. La commission...
Mme Poitras (Diane) :
Entre 20 et 30.
M. Nadeau-Dubois : Entre 20 et
30.
Mme Poitras (Diane) :
Je ne suis pas sûre qu'on se rend à 30.
M. Nadeau-Dubois : Entre 20 et
30. Vous nous ferez parvenir les données, mais j'ai peu de temps, je ne veux
pas vous bousculer, mais en deuxième opposition, là, on n'a pas le temps de
niaiser.
Mme Poitras (Diane) :
Oui, oui, oui. Désolée, je n'ai pas le... Désolée.
M. Nadeau-Dubois : La
commission a un mandat d'inspection, a des pouvoirs d'inspection qui lui sont
conférés par la loi. Combien il y a d'inspecteurs à la commission?
Mme Poitras (Diane) :
En fait, ils ont des postes d'analystes enquêteurs qui peuvent réaliser des
enquêtes et des inspections.
M. Nadeau-Dubois : Combien?
Mme Poitras (Diane) :
À peu près sept ou huit, je crois, parce qu'il y en a qui vont faire des
activités de conformité, parce qu'on fait des avis sur des ententes, des
autorisations de recherche, etc.
M. Nadeau-Dubois :
O.K. Est-ce que ces gens-là sont affectés à la fois au secteur privé puis au
secteur public?
Mme Poitras (Diane) :
Oui.
M. Nadeau-Dubois : Donc, il y a
sept ou huit personnes à la commission?
Mme Poitras (Diane) :
Disons huit.
M. Nadeau-Dubois : Qui
s'occupent de faire toutes les enquêtes?
Mme Poitras (Diane) :
Oui.
M. Nadeau-Dubois :
Pour tous les organismes publics du Québec?
Mme Poitras (Diane) :
Et les entreprises privées.
M. Nadeau-Dubois : Et toutes
les entreprises privées du Québec?
Mme Poitras
(Diane) : Oui. Il y en a qui
travaillent sur l'analyse préliminaire, il y a un gros volet de dossiers
qui sont réglés à l'analyse préliminaire, mais, ça, c'est deux personnes.
M. Nadeau-Dubois : Donc, si je
dis qu'il y a au Québec, à la Commission d'accès à l'information, huit
personnes dont le mandat, c'est de surveiller puis d'enquêter sur les pratiques
des entreprises dans la collecte des données personnelles, est-ce que vous êtes
d'accord avec cette affirmation-là?
Mme Poitras (Diane) :
Pour enquêter, inspecter, parce qu'il y a un volet Conformité.
M. Nadeau-Dubois : Enquêter et
inspecter?
Mme Poitras (Diane) : Il y a un volet Conformité, il y a des analystes enquêteurs qui sont
affectés à ce volet-là.
M. Nadeau-Dubois : Donc, vous
êtes d'accord avec mon affirmation?
Mme Poitras (Diane) :
À peu près.
M. Nadeau-Dubois : Est-ce que
c'est assez de gens, à l'ère de l'explosion des technologies de l'information,
huit personnes pour surveiller ce que, théoriquement, toutes les entreprises
privées et tous les organismes publics font avec les données personnelles des
Québécois, Québécoises?
Le Président (M.
Bachand) : En quelques secondes.
Mme Poitras (Diane) :
Clairement pas.
M. Nadeau-Dubois :
Est-ce que vous souhaitez que le gouvernement vous donne plus de ressources
dans l'avenir?
Mme Poitras (Diane) :
Oui.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Merci beaucoup. M. le député de
LaFontaine, s'il vous plaît.
M. Tanguay :
Bien, on pourrait peut-être permettre à Me Poitras de répondre pour une
période de 29 minutes, M. le Président?
Le Président (M.
Bachand) : 29 minutes, oui.
• (12 h 30) •
M. Tanguay : Merci. Sur
les ressources, là, à l'heure actuelle, au niveau de cette expertise requise en
TI, en technologie de l'information, à l'heure actuelle, quel est l'état des
lieux en termes de spécialisation ou de disposition de spécialisation?
Mme Poitras (Diane) :
Combien on a d'employés spécialisés en TI?
M. Tanguay : Oui.
Mme Poitras (Diane) :
Dans la Direction de la surveillance, un seul.
M. Tanguay : O.K. Et ce
poste-là a été créé quand?
Mme Poitras
(Diane) : On... Il y en a
déjà eu un. Après ça, quand la personne est partie, il n'a pas été
comblé. Et, quand on l'a réaffiché, on a mis
deux ans à avoir une personne intéressée et compétente à venir travailler à la
commission.
M. Tanguay : Et à quelle
date ou mois la personne intéressée et compétente a-t-elle été engagée?
Mme Poitras (Diane) :
Dans la dernière année, au cours de la dernière année.
M. Tanguay : O.K. Avec
le projet de loi n° 64, est-ce que les choses vont changer? Je suis ici à
la page 172 du cahier des crédits, document préparé par la commission, là,
à l'attention de la Commission des institutions, à la page 172. Donc, à
l'heure où on se parle, il y a une personne. Quel est le plan de match pour en
avoir plus?
Mme Poitras
(Diane) : Bien, il faut d'abord avoir des ressources
financières, évidemment.
M. Tanguay : Les
avez-vous présentement? Dans le dernier budget, les avez-vous?
Mme Poitras (Diane) :
Non, je n'ai pas de marge de manoeuvre pour engager d'autres spécialistes en
technologie, bien que c'est un grand besoin.
M. Tanguay : O.K. Et
quand cette marge de manoeuvre là va-t-elle arriver? Avec le projet de loi
n° 64?
Mme Poitras (Diane) :
On a fait une demande de financement additionnel, évidemment, pour être capable
de répondre aux attentes et nous assurer d'une mise en oeuvre adéquate. C'est
beau d'adopter une loi, mais on est convaincus
qu'il faut avoir les ressources nécessaires pour aussi... On a entendu le
besoin d'accompagnement des entreprises.
M. Tanguay : Au-delà de
la loi.
Mme Poitras (Diane) :
Au-delà de la loi.
M. Tanguay : 64. Cette
demande-là, vous l'avez exprimée quand?
Mme Poitras
(Diane) : La date exacte,
dans les dernières semaines, en... 15 mars, autour du 15 mars, je
crois.
M. Tanguay : O.K. Par
écrit, j'imagine, vous avez documenté comme il se doit. Ha, ha, ha!
Mme Poitras (Diane) :
Oui. Ha, ha, ha! Oui.
M. Tanguay : Il faudrait
peut-être vous ajouter dans l'échantillon des 25, comme ça, ça augmenterait
le... Serait-ce possible d'avoir copie, communiquée au secrétariat de la
commission, de cette demande-là écrite?
Mme Poitras (Diane) :
Bien sûr.
M. Tanguay : Merci
beaucoup. À quel chiffre, à quel... Quel montant demandiez-vous?
Mme Poitras (Diane) :
Pour cette... En fait, on a fait deux demandes, là. Il y en a une pour l'année
en cours, à très, très, très court terme, qui était de 3 millions. Et pour
la demande pour la CAI 3.0, on va l'appeler comme ça, elle se chiffrait... la
demande de crédits supplémentaires se chiffrait à un total de
13,1 millions pour la première année et 12,4 pour les années subséquentes.
M. Tanguay : O.K. Et ça,
ce deuxième volet là, avec les chiffres que vous mentionnez, ça, c'est
postprojet de loi n° 64.
Mme Poitras (Diane) :
Idéalement, la commission a des travaux à faire pour que le jour 1 de son
adoption... Il y a un an avant son entrée en vigueur, selon ce qui est prévu
actuellement. Moi, je suis une entreprise privée, j'imagine que j'aimerais ça
que, le jour 1, on m'accompagne. Donc, si la commission commence ses
travaux pour développer des outils puis qu'elle prend l'année pour les
développer, on n'est pas en train d'accompagner les entreprises durant cette
année, là. Donc, idéalement, le plus tôt possible.
M. Tanguay : Donc, si je
vous comprends bien, oui, quand le projet de loi n° 64... puis ça avance,
là, un jour, probablement d'ici la fin du mandat, il va être adopté, moi, je
pense que c'est tout à fait réaliste et raisonnable de le penser, peut-être
même cette année, vous avez un an, notamment, pour engager 118 personnes.
Et j'espère... et détrompez-moi si j'ai tort, j'entends une demande assez
pressante pour dire : Ne nous donnez pas les ressources pour combler
118 postes dans 12 mois, là, si on peut travailler en amont. C'est ce
que j'entends, là.
Mme Poitras (Diane) :
Et c'est pour ça qu'on a fait une première demande, au moins pour l'année en
cours, de 3 millions, pour commencer les travaux préparatoires, commencer
l'embauche du monde. Mais, de toute façon, je n'aurais même pas le nombre
suffisant de gens en ressources humaines pour être capable d'absorber ça, là.
118 personnes, c'est énorme.
M. Tanguay : Est-ce qu'à la
limite, si d'aventure le projet de loi était adopté — ce qui est tout à fait,
encore une fois, raisonnable —
cette année, donc d'ici à décembre, vous rajoutez un 12 mois, est-ce
que... Même si vous aviez toutes les ressources demandées aujourd'hui, vous
allez reconnaître que ça serait assez titanesque de recruter 118 personnes
qualifiées. J'aimerais vous entendre sur ce défi-là.
Mme Poitras (Diane) :
Bien oui, effectivement, et la commission entend bien se faire accompagner, là,
mais effectivement, on irait par étapes, là. Le plan de match, c'est d'y aller
par vagues. Et on est déjà, dans la mesure de nos
ressources, en train de préparer plein de documentation au niveau de l'accueil
de ces personnes-là. Mais on le ferait par vagues, on ne ferait pas
118 personnes en même temps.
M. Tanguay : Le
3 millions qui était le premier volet, qui visait pour beaucoup, puis
détrompez-moi si j'ai tort, à venir renchausser la personne qui est spécialiste
en TI au sein de la commission, donc de l'épauler, d'engager du monde, ce
3 millions là vous permettrait... Puis l'objectif serait d'engager combien
de nouvelles personnes pour épauler cette personne-là?
Mme Poitras (Diane) :
Dans la demande de financement de 3 millions, il y avait... je ne me
souviens pas du nombre de personnes exact, mais ce n'est pas juste du monde en
TI. Une des priorités qu'on a... D'avoir été sous-financés pendant autant
d'années, même nos systèmes informatiques, notre infrastructure technologique
et nos outils sont désuets. Et ça, pour nous, c'est primordial de le mettre à
jour avant d'accueillir tout ce monde-là éventuellement ou de pouvoir
développer des outils avant l'adoption du projet de loi, là. Pour nous, c'est
comme un prérequis, là, il faut avoir les outils nécessaires pour être capables
ensuite de commencer à planifier, là, le... Bien, on a quand même déjà commencé
à planifier l'entrée en vigueur du projet de loi n° 64, là, mais...
M. Tanguay :
Donc, grosso modo, à court terme, sur le 3 millions, ce serait combien,
deux, cinq, 10 personnes qui viendraient épauler la personne en TI?
Mme Poitras (Diane) :
En TI, dans cette demande de 3 millions là, ça serait... je pense qu'il y
avait trois ou quatre personnes, là.
M. Tanguay :
O.K. Quand vous dites... parce que je trouve ça important, vous parlez du
financement du matériel informatique,
dans votre tableau, page 172, je vois : Ressources financières,
12,6 millions — on
parle, encore une fois, les besoins supplémentaires — et
ressources technologiques, 500 000 $. J'imagine que c'est plus que
500 000 $, là, le 500 000 $,
ce n'est pas tout ce que vous estimez, si vous voulez revamper et mettre à
niveau votre système informatique.
Mme Poitras (Diane) :
Il y a des investissements qui sont prévus dans le 3 millions, il y en a
beaucoup qu'on a mis dans le 3 millions, parce que le gros, là, il faut
faire une migration de Novell vers Windows, en tout cas, bref, il faut changer
le...
M. Tanguay : De Lotus
à...
Une voix : ...
Mme Poitras (Diane) :
Oui, bien, c'est ça, c'est ça pareil, on n'a pas les ressources. J'ai en ce
moment un analyste en informatique qui s'occupe des systèmes de la commission.
M. Tanguay : Alors,
j'espère qu'il s'alimente bien, qu'il dort bien puis qu'il est en forme parce
que...
Mme Poitras (Diane) :
On en prend soin.
M. Tanguay : ...s'il ne
rentre pas lundi, là...
Mme Poitras (Diane) :
On en prend soin. Mais il y a un poste à combler, ceci dit, quand même, là, il
y a deux postes.
M. Tanguay : C'est bon.
C'est bon. Parfait. Et cette estimation-là, donc 118 nouvelles ressources,
pour commencer à recruter, le projet de loi n° 64 est adopté, vous avez un
an pour embaucher 118 personnes, il y a un 3 millions, on vient d'en
parler, pour aider la personne en TI à acheter du matériel aussi, mais ça vous
prend aussi, dans le deuxième volet, de l'argent aujourd'hui. Vous estimeriez,
aujourd'hui, pour commencer à travailler sur l'embauche de 118 personnes,
puis, là encore, là, je m'étais mis des notes puis je ne vous en ai par parlé,
oui, il y a recrutement, mais il y a les locaux, il y a les ressources aussi,
ça leur prend un bureau, ça leur prend une lampe, puis du papier, puis des
crayons, aujourd'hui, pour ce volet-là, là, ça vous prendrait combien, là? Puis
j'exclus le 3 millions, là, qui est autre chose, là, ça vous prendrait combien
pour partir, là?
Mme Poitras
(Diane) : C'est sûr que le
3 millions, pour nous, c'était un minimum pour être capables de
faire cette planification-là. On peut penser
à une deuxième phase où on pourrait prendre un pourcentage de la demande aussi
qu'on a formulée, là, à tout le moins un 20 %, donc ce qui voudrait dire à
peu près un autre 3 millions dans une deuxième étape. Mais à la limite, sinon, avec le budget, on pense être capables
de bien planifier par phase pour engager ces gens-là.
M. Tanguay : Donc,
20 % du 13,1 millions supplémentaires requis.
Mme Poitras (Diane) :
Oui.
M. Tanguay :
Parfait. Quelle est votre stratégie pour aller chercher le talent en TI?
Mme Poitras
(Diane) : C'est une excellente question, parce que si ça a pris
deux ans pour combler un poste... Ceci dit, dans le dernier appel d'offres, on
me dit qu'il y avait quand même plus de candidats qui étaient intéressés. Mais
c'est clair qu'il faut que la commission soit attractive.
• (12 h 40) •
M. Tanguay :
Compétitive, point de vue financier aussi.
Mme Poitras
(Diane) : Oui, c'est ça.
M. Tanguay :
Ça prend des bons salaires.
Mme Poitras
(Diane) : Et la difficulté, c'est que les gens en TI veulent
faire des TI. Alors, d'aller chercher quelqu'un qui va être analyste enquêteur
avec un volet TI, c'est plus difficile à trouver. Déjà, les ressources en TI,
le ministre est bien placé pour en témoigner, c'est déjà très difficile
d'attirer des ressources en TI au gouvernement. Mais effectivement on espère
que la popularité, je dirais, ou, en tout cas, le mandat de la commission est
souvent quelque chose qui est attractif, c'est-à-dire de protéger les
renseignements personnels puis de travailler dans ce milieu-là pour faire
changer les pratiques vers des pratiques plus responsables, une utilisation
plus responsable des technologies de l'information.
M. Tanguay :
Est-ce que c'est vous qui déterminez l'encadrement des échelles salariales pour
aller recruter ou, ça, c'est déjà encadré par un tiers? Pouvez-vous me
l'expliquer, comment ça fonctionne?
Mme Poitras (Diane) : On est soumis aux règles de... aux autres règles,
là, comme les autres organismes publics.
M. Tanguay :
Trouvez-vous que vous être compétitrice sur le marché privé?
Mme Poitras
(Diane) : La fonction publique par rapport au...
M. Tanguay :
Dans votre cas à vous, face au défi que vous avez de recruter des gens, des
femmes et des hommes compétents.
Mme Poitras
(Diane) : Au niveau des salaires, non, je pense que ce n'est
pas compétitif, dans le domaine des technologies de l'information, par rapport
à ce qui leur est offert dans le privé, mais...
M. Tanguay :
Comment on va... comment vous allez les attirer?
Mme Poitras
(Diane) : Comme je vous disais, on va miser beaucoup sur le
mandat, et je sais qu'on a des contacts, là, avec... on a des gens dans les
universités, des professeurs d'université, et je fais du lobby, un peu, auprès
de ces gens-là pour voir : Si tu as des étudiants, soit qui seraient
intéressés par le mandat... On en a eu, quelques C.V., comme ça, des gens qui ont appliqué, qui sont plus intéressés par
le mandat que tout simplement par le salaire, alors...
M. Tanguay :
O.K. Merci beaucoup. Merci pour votre apport à la commission, ça éclaire
beaucoup nos travaux, puis, par la suite, on
peut faire le suivi avec M. le ministre, notamment en période de questions,
mardi prochain.
J'aimerais maintenant
tester deux autres points très précis quant à l'appétit du ministre à, dans le
contexte... Le ministre, il disait... Je
suis d'accord avec lui, là, je n'arrive pas avec une brouette, M. le Président,
d'amendements. J'en aurai testé trois. Là, j'en ai testé un, je pense que la
réception est bonne, je pense qu'on va se mettre à essayer de rédiger, on va
prendre le modèle de la Colombie-Britannique, on va vous présenter de quoi.
Puis, si ça fait plus que trois lignes, faites-vous-en pas, on va le réduire
pour être sûr que ça passe, là, ce ne sera pas trop compliqué.
Deuxième de trois,
ajouter une disposition sur la primauté de l'intérêt public. Ça, ce que je dis
là, là, ce n'est pas nouveau, c'était dans
le 179 puis c'est ajouter une disposition dans la Loi à l'accès quant à la primauté de l'intérêt public,
qui ferait en sorte qu'on rendrait accessible un document ou une information
lorsque l'intérêt public surpasse l'intérêt particulier de la restriction,
d'avoir un principe interprétatif général. Simplement dit comme ça, je peux... L'amendement,
il serait rédigé comme ça, là. Est-ce que vous voteriez pour?
M. Caire :
Bien, en tout cas, on prendrait très certainement... Parce qu'avant de dire si
je vote pour ou contre, il y a quand même un processus...
M. Tanguay :
Un petit débat.
M. Caire :
Oui, bien, c'est...
M. Tanguay :
Vous demandez une suspension, d'habitude.
M. Caire : Il
faut toujours que je me retourne vers ma conscience.
M. Tanguay :
Ah! Me Miville, il est là, Me Miville-Deschênes, il est là.
M. Caire : Bien
oui, bien oui, mais il n'est jamais...
M. Tanguay : Câline, je
pensais que vous étiez tout seul aujourd'hui.
M. Caire : Non,
non, non, monsieur...
M. Tanguay : Je passais
entre les deux.
M. Caire : Non,
bien, moi aussi, j'aurais aimé ça, mais ça ne marche pas de même.
M. Tanguay : Il est là.
M.
Caire : Je ne suis
pas lousse de même. Non, plus sérieusement, c'est... D'abord, c'est une question
qui est très intéressante, puis ça fait écho à un article très intéressant que
j'ai lu cette semaine, je ne sais pas si les collègues ont eu l'occasion de le voir passer, sous la
plume de François Bourque qui essayait d'avoir des informations
concernant le projet du Phare, à Québec, puis, bon, lui se dit : Il me
semble que l'intérêt public serait d'avoir accès à cette information-là versus le secret professionnel, versus le
secret commercial, versus... Bon, je
pense qu'on a un débat intéressant
à avoir. Je sais que Me Poitras en a fait une recommandation, là, de
parler de l'intérêt public comme critère
pour savoir si un renseignement devrait être accessible ou non. Moi, je vous
dirais que j'ai un préjugé favorable, puis je ne le dis pas parce que
Me Poitras est là, là, j'ai le même discours. J'ai un préjugé favorable.
Moi, je pense effectivement que... Et puis je l'ai dit, d'entrée de jeu, quand
j'ai pris les fonctions : On oublie souvent que la loi d'accès à
l'information et la protection des renseignements personnels a d'abord été
adoptée pour que les gens aient un meilleur accès à l'information. Donc, j'ai
un préjugé favorable là-dessus.
J'ai un préjugé favorable aussi, puis je le
souligne aux collègues, là, qu'on prend une orientation sur les données
ouvertes au gouvernement du Québec pour... Quand je parlais de catégorisation
des données, tantôt, avec le député de Gouin, j'en parlais dans une perspective
où les données très sensibles devraient être mieux protégées, indépendamment de qui les utilise. À l'inverse,
les données qui ne sont pas sensibles devraient être, par défaut, des données
ouvertes. Puis je le dis publiquement parce que c'est ce que je pense. Je pense
qu'une donnée qui n'est pas sensible, un ministère ou un organisme devrait les mettre en données ouvertes. Ce
faisant, ça permettrait une plus grande transparence du gouvernement, ça éliminerait un nombre important
de demandes d'accès à l'information qui n'ont pas lieu d'être parce que
cette donnée-là, elle est accessible à sa face même. Donc, moi, je suis de
cette école de pensée là, M. le député.
M. Tanguay :
Très bien. Dans le rapport Rétablir l'équilibre — Rapport quinquennal de 2016, la
Commission d'accès à l'information, à la page 30... je vais vous lire un
simple paragraphe constitué par deux phrases : «Les bases de données constituent une source précieuse
d'information parce qu'elles contiennent une myriade de renseignements pouvant être exploités sous forme diffusable si
l'organisme dispose du matériel, du logiciel et des compétences
techniques nécessaires. Par ailleurs, les avancées technologiques rendent les
manipulations et les recherches visant à produire des documents plus aisées.»
Ça, les organismes publics, dès 2016, on disait : Ils ont... on ne leur
demande pas de refaire le monde, là, si on leur demande une demande toute
simple, ils ont les moyens, puis ils peuvent juger de la raisonnabilité ou pas,
puis ils peuvent s'exécuter.
Troisième élément de trois, le fameux
article 15 de la loi d'accès à l'information, qui est une porte, là, qu'on
nous ferme en pleine face, puis il faut le revisiter, une phrase : «Le
droit d'accès ne porte que sur les documents dont la communication ne requiert
ni calcul ni comparaison de renseignements.» Le ministre serait-il ouvert à ce
qu'on abroge cette disposition-là ou qu'on vienne, à tout le moins, l'encadrer
en ajoutant un critère de raisonnabilité selon les ressources disponibles?
M. Caire :
L'abroger maintenant, non, à terme, oui. Je vous explique, M. le député.
J'aurai, dans les prochains jours, un projet de loi à proposer aux
parlementaires, qui va changer, de façon assez importante, la façon dont on
gère les données au gouvernement du Québec.
Je pense que le contexte actuel fait en sorte,
puis j'ai bien lu cette recommandation-là de la Commission d'accès à
l'information, avec laquelle je suis, à terme, d'accord, mais dans le contexte
un peu schizophrénique dans lequel on
travaille actuellement au gouvernement du Québec, donc, où on crée un paquet de
silos qui ont une impossibilité de se parler pour toutes sortes de
bonnes et de mauvaises raisons, je pense que la force du numérique, on ne peut
pas l'utiliser pleinement, et donc ce n'est pas si simple que ça, même si, oui,
il y a des bases de données, même si c'est sur
un support numérique. La non-interopérabilité des systèmes, souvent,
l'incapacité légale entre deux organismes publics de s'échanger des
informations, tout ça, là, ça préside au fait que ce n'est pas si simple que ça
de monter les rapports.
Maintenant,
le changement de culture que je vais proposer aux parlementaires, si les
parlementaires l'acceptent, ferait en sorte qu'on irait exactement dans
la lignée de ce que la Commission d'accès à l'information préconise, et dans ce sens-là, à moment-là, je serais tout à
fait d'accord que, quand on peut utiliser pleinement la force du
numérique, cette excuse-là ne tiendrait plus
la route, mais actuellement je pense qu'il est prématuré d'aller dans cette
direction-là.
M. Tanguay : ...projet
de loi déposé dans les prochains... d'ici le 11 juin, là, dans les
prochains jours?
M. Caire :
Je vous dirais d'ici le 5 mai.
M. Tanguay :
O.K. Le ministre...
M. Caire :
Approximativement.
M. Tanguay :
Oui, c'est ça. Là, je me contenterais très bien de ce délai-là qui est assez...
qui est plus court que le délai de
l'article 47 pour répondre à une demande d'accès à l'information, qui est
20 jours, ça fait que je salue le ministre. Puis vous n'allez pas
demander le prolongement de 10 jours?
M. Caire :
Non. Ah! non, non. Non seulement je ne demande pas...
M. Tanguay :
Non.
M. Caire :
En tout cas, bref, non, c'est ça.
M. Tanguay :
Le ministre, quelle est sa réflexion par rapport à ça, justement, où le
20 jours, dans le fond, là, on se rend tout de suite au bas de
l'article 47, puis le 20 jours, c'est un 30 jours? Puis souvent
la première réaction à une demande d'accès, c'est que la lettre est déjà prête
pour mettre ça à... C'est quoi, votre...
M. Caire :
Oui, oui, c'est... Ils ont une pile.
M. Tanguay :
Oui, c'est ça, on change l'entête. C'est quoi, le...
M. Caire :
Bien, moi, je vous dirais, la vision que j'ai là-dessus à terme, c'est, à sa
face même, une demande d'accès à l'information, dans un nombre important de
cas, pour moi, c'est une aberration. C'est une aberration parce que, moi, je
devrais aller là-dessus, là, je devrais avoir mon dossier citoyen, je devrais
cliquer sur mon dossier citoyen, là, puis je devrais avoir accès à toutes les
informations que le gouvernement du Québec possède sur moi. Ça, là, c'est ma
vision à terme.
Alors, on va prendre
combien d'années à mettre en application, M. le député, là-dessus, je ne
m'engagerai pas. Mais je comprends que je... Probablement que ça ne sera pas
une réalité avant que je mette fin à ma carrière politique, ne comprenez pas
ici que j'ai l'intention de mettre fin à ma carrière politique prochainement,
n'espérez pas, mais dans le sens où c'est un processus qui va être long. Mais à
terme, c'est ça qu'il faut viser, c'est ça qu'il faut viser. Je veux dire, une demande
d'accès à l'information devrait viser exclusivement une information pour
laquelle il y a un certain degré de
sensibilité et qui nécessite le jugement d'un individu, à savoir, selon la notion de l'intérêt public, etc.,
est-ce que cette information-là, je peux la communiquer.
• (12 h 50) •
M. Tanguay :
Et on est même à des années-lumière, pas dans tous les cas, mais d'avoir
l'information, c'est une chose, oui, mais de
l'avoir... pour la personne qui le demande, puis que c'est correct qu'elle le
demande, puis que c'est raisonnable,
de l'avoir en temps opportun aussi, c'est un autre facteur, d'avoir
l'information en temps opportun. Alors...
M.
Caire :
Peut-on parler d'en temps réel, M. le député, là? Sérieusement, à l'ère du
numérique, là...
M. Tanguay :
Bien, idéalement, là... Bien, j'essaie d'être raisonnable dans le contexte du
défi qui est devant nous, qui est devant
vous, mais le 20 jours, puis le 10 jours, puis finalement on a
l'information... Et peut-être que ça pourrait être un quatrième élément,
le 47, l'article 47, qui dit : «Si le traitement de la demande dans
le délai prévu pour le premier alinéa ne lui paraît pas possible — donc,
dans le 20 jours — sans
nuire au déroulement normal des activités de
l'organisme public...» C'est que cette échappatoire-là... Mais on sait que le
10 jours, bien souvent, dans les demandes de prolongation, on va
citer en disant : Parce qu'il nuirait ou risquerait de nuire. Mais
souvent, on demande le 10 jours sans même le justifier. Il y aurait
peut-être lieu de peut-être resserrer ça aussi, là.
M. Caire :
Oui. Sans compter, M. le député, que vous et moi savons qu'il y a des gens dont
c'est la fonction au sein d'un organisme de répondre à ça. Donc, en quoi je
nuis aux opérations de quelqu'un qui est payé pour répondre à des demandes d'accès à l'information, quand il répond à des
demandes d'accès à l'information? J'avoue que...
M. Tanguay :
Alors, ça, il faudrait changer la loi. On va-tu le faire avec votre projet de
loi, d'ici le 5 mai, qui sera déposé, ou on peut le faire dans le
n° 64?
M.
Caire :
Bien, le...
M. Tanguay :
«Je vous tends la main», comme disait Jacques Parizeau, «je vous tends la
main», mon premier ministre.
M. Caire : Oui. Non, je suis... non, pas premier ministre,
par exemple, puis je n'aspire pas à cette fonction-là, Dieu m'en
préserve.
M. Tanguay :
M. le ministre.
M.
Caire :
Mais, non, bien, écoutez, moi, je suis très...
M. Tanguay :
Et nous aussi.
M. Caire :
Non, bien, en fait... Oui, mais je serais disposé à en discuter puis je vous
explique pourquoi. C'est que le projet de loi que je déposerai n'aurait pas
pour impact de régler cette situation-là à court ou à moyen terme. Donc, si on
veut adresser cette question-là à court ou à moyen terme, mais, encore là, sous
réserve de consulter ma conscience et d'en évaluer les impacts correctement,
puis sous réserve aussi, M. le député, de voir, dans une vision peut-être un
peu plus globale de l'accès à l'information, est-ce qu'on fait des mesures
comme ça à la pièce ou est-ce que, comme parlementaires, on se dit : Bon,
bien, de la même façon... Puis moi, je pense qu'on a relevé un sapristi de beau
défi en réformant le volet Protection des renseignements personnels. Je me
souviens, puis peut-être Me Poitras s'en souvient, du député de La Pinière,
quand on a déposé le projet de loi n° 14, qui a dit : Ça prendrait
une refonte de la loi d'accès à l'information et de la protection des
renseignements personnels, mais il a dit : Mais je ne verrai pas ça de mon
vivant. Et je vous ai entendu, et soyez assuré que ce n'est pas tombé dans
l'oreille d'un sourd, quand vous avez dit que d'ici la fin de cette année nous
pourrions adopter le projet de loi n° 64. Moi, je vous avoue que
j'ambitionne que ce soit effectivement le cas, effectivement le cas.
M. Tanguay :
Mais il faut travailler parce qu'il y a le domaine privé aussi, là.
M.
Caire :
On s'entend, là, je n'ai pas dit que c'était simple, mais je pense que le
travail qu'on fait, qui est un travail sérieux, qui est un travail non
partisan, qui est un travail de législateur, je pense qu'on le fait et on le
fait bien, puis je pense qu'on avance bien, puis je pense qu'on pose des bonnes
questions, puis on se donne des bonnes réponses, puis je ne vois pas... avec
l'ambiance qu'il y a à la commission, je pense que, moi, j'ai bon espoir, là,
qu'à l'automne prochain on va pouvoir adopter ce projet de loi là.
Ceci étant dit, le
travail n'est pas fini parce que tout le volet Accès à l'information, il
commence, et ça, c'est quelque chose que je peux dire, puis, je veux dire, le
sous-ministre est là, je l'ai dit, quand 64 est terminé commence le volet Accès
à l'information, là, parce que ce volet-là aussi, il a besoin d'être réformé,
je le dis, et je le répète, puis je ne dévie pas de la trajectoire.
M. Tanguay :
Deux questions en rafale, il me reste cinq minutes, deux questions en rafale,
mais c'est des questions qui mériteraient plus qu'un développement en rafale,
mais c'est les crédits, là, qui nous y obligent. Vous avez entendu le défi de
Me Poitras : aller chercher le talent. Comment les organismes
publics, dans les ministères et organismes... C'est quoi, votre plan de match,
si vous pouvez me faire ça, là, en quelques secondes, là, c'est quoi, en gros,
le plan de match?
M. Caire :
Bien, écoutez, premièrement, il y a le projet de loi n° 60 qui vient
faciliter l'embauche sur la base des compétences acquises, donc, ça, c'est une
avancée très importante. Deuxièmement, le salaire, vous l'avez dit, il faut
qu'on trouve une façon au niveau des TI du gouvernement, comme on l'a fait avec
les professeurs, comme on l'a fait avec les infirmières, d'avoir, pour nos gens
en TI un salaire qui est compétitif. Il n'y a pas de magie, je veux dire, quand
le privé prend le salaire de votre employé, dit : Regarde, je fais fois
deux, là, puis c'est ça, ton salaire, je veux dire, la négociation vient de
s'arrêter là, là.
M. Tanguay :
Pouvez-vous, s'il vous plaît, avoir cette conversation-là avec le ministre de
la Famille quant aux éducatrices?
M. Caire : Moi, je vais m'occuper des TI, si ça ne vous
dérange pas, puis je vais laisser mon collègue s'occuper...
M. Tanguay :
Malheureusement. On aura essayé. Je referme la parenthèse. Deuxième question en
rafale, je reviens là-dessus parce que c'est important, le collègue, tantôt, de
Gouin, parlait de ce qui s'est passé au tribunal administratif, le tribunal du logement. 64 n'aura effet que pour
l'avenir et pas effet pour les systèmes actuels. Y aurait-tu moyen parce
que, ça, c'est le système actuel qui a fait défaut, puis qu'il y a eu un trou,
puis que ça ne prend pas un gros trou pour qu'ils se faufilent, les
malfaiteurs.
M. Caire :
Mais, collègue, encore une fois, ce n'est pas une faille du système
d'information, c'est le fait que la justice est publique. Alors, ce n'est pas
un hackeur qui est rentré puis qui a déjoué les failles de sécurité. C'est que
le TAL, le Tribunal administratif du logement, doit rendre ces informations-là
publiques. Maintenant, dans un contexte numérique, ça fait en sorte qu'au lieu
de faire une demande pour un dossier puis recevoir un dossier, moi, je peux
rentrer là-dedans puis c'est un jardin grand ouvert. Ceci étant dit, vous le
savez, collègue, le tribunal, il est indépendant du pouvoir exécutif. Moi, je
ne peux pas aller vers le TAL puis lui dire : Fais ci, fais ci, fais ça.
M. Tanguay :
Alors, pour les organismes.
M.
Caire :
Mais je peux, par contre, leur offrir nos services, ce que j'ai fait tout à
l'heure, puis, tu sais, si vous avez besoin, on est là pour vous accompagner.
Il y a des choses qui peuvent être mises en place pour corriger la situation à court
terme, puis, à moyen terme, je nous convie tous à la réflexion sur la façon
dont on traite l'information, dont on la catégorise et dont on la protège.
M. Tanguay : Mais pour les organismes publics, pourrions-nous
envisager avoir l'ambition de pouvoir appliquer 64 au système actuel?
Parce que c'est là qui est 100 % de la donnée à l'heure où on se parle.
M. Caire : Oui,
mais on a eu ce débat-là, cher collègue.
M. Tanguay : Je me
réessaie, là.
M. Caire : Oui,
je le sais, mais malheureusement...
M. Tanguay : Je fais mon
hackeur, j'essaie de passer entre les fentes.
M.
Caire : Quand vous
me faites cette face-là, j'ai presque envie de vous dire oui, mais
malheureusement...
M. Tanguay : Ça va être
non. On peut-tu parler... Puis là gardez votre beau sourire, on va parler des
agendas publics des ministres.
M. Caire : Oui.
Oui.
M. Tanguay : En passant,
je suis convaincu que votre journée ne finit pas dans trois minutes, mais ce
qui est à l'agenda du ministre après les crédits, c'est «ciao, bye!», vous
allez écouter un film à la maison.
L'agenda des ministres, je vais le dire de même,
70 %, 60 %, 80 %, c'est caucus, période de questions, travaux en
Chambre. Il y a une période de trois mois... On parlait tantôt de répondre à
une demande d'information dans un délai pertinent. Les ministres doivent
envoyer l'information aux 30 jours, puis il peut, dans les trois mois, il
peut déclarer.
Alors, on voit que c'est encore nettement
insuffisant. Quel est le plan de match du ministre? Parce que je le sais que
c'est compétences partagées, là, mais vous êtes le ministre de l'Accès à
l'information, c'est nettement encore, malheureusement, déficient, ça.
Qu'est-ce qu'on va faire avec ça?
M.
Caire : Bien, j'ai eu
une discussion là-dessus, sans révéler la teneur de la discussion, avec le
commissaire au lobbying, qui est, lui aussi, dans des refontes de systèmes
d'information, puis à qui j'ai dit : Bien, écoute, il me semble que ce
serait une belle opportunité pour faire un arrimage entre le système puis le
système qui gère l'agenda public des ministres, puis s'assurer qu'il y ait un
meilleur...
M. Tanguay : Mais il y a
déjà quelqu'un responsable de l'agenda du ministre qui peut le mettre.
M.
Caire : Bien, oui,
mais en même temps, si le commissaire aux lobbyistes est capable de faire des
arrimages entre les dossiers pour lesquels il y a des demandes de lobbyistes
puis les agendas des ministres, moi, je pense que vous avez une information qui
est plus complète puis qui est plus... par un tiers neutre, là.
Adoption des crédits
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Le temps alloué à l'étude du volet
Accès à l'information des crédits budgétaires du portefeuille Conseil exécutif
étant presque écoulé, conformément à l'entente du 13 avril 2021, nous
allons maintenant procéder à la mise aux voix de ces crédits par appel nominal.
Pour la mise aux voix du programme 6, intitulé Accès à l'information et
Réforme des institutions démocratiques, M. le secrétaire.
Le
Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant
le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?
M. Lévesque (Chapleau) : Pour.
Le Secrétaire : Pour les
membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?
M. Tanguay : Contre.
Le Secrétaire :
M. Nadeau-Dubois (Gouin)?
M. Nadeau-Dubois : Contre.
Le Président (M.
Bachand) : Donc, c'est adopté.
Documents
déposés
En terminant, je
dépose les réponses aux demandes de renseignements de l'opposition.
Compte tenu de
l'heure, la commission suspend ses travaux jusqu'à 16 heures, où elle va
entreprendre l'étude du volet Relations avec les Québécois d'expression
anglaise du portefeuille Conseil exécutif.
Merci, bon
après-midi.
(Suspension de la séance à
13 heures)
(Reprise à 15 h 59)
Le
Président (M. Bachand) : Alors, bonjour, tout le monde. À l'ordre,
s'il vous plaît! La Commission des institutions reprend ses travaux.
La commission est
réunie afin de procéder à l'étude du volet Relations avec les Québécois
d'expression anglaise des crédits budgétaires du portefeuille Conseil exécutif
pour l'exercice financier 2021‑2022. Une enveloppe de 30 minutes a
été appliquée pour l'étude de ces crédits.
Avant de débuter, Mme
la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
• (16 heures) •
La Secrétaire :
Oui, M. le Président. Mme D'Amours (Mirabel) est remplacée par M. Skeete
(Sainte-Rose); Mme Lavallée (Repentigny) est remplacée par M. Poulin
(Beauce-Sud); M. Birnbaum (D'Arcy-McGee) est remplacé par M. Kelley
(Jacques-Cartier); et Mme Hivon (Joliette) est remplacée par M. Bérubé (Matane-Matapédia).
Relations avec les Québécois
d'expression anglaise
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup.
Nous allons procéder aux échanges entre les groupes d'opposition et le premier
ministre par blocs d'environ quatre à 19 minutes pour permettre à chaque
groupe d'écouler graduellement son temps de parole. Le temps d'échange inclut bien
sûr les questions et les réponses. La mise aux voix de ces crédits sera
effectuée à la fin du temps qui leur est alloué, cet après-midi, vers
16 h 30.
Discussion générale
Cela dit, je cède maintenant
la parole au député de Jacques-Cartier pour un bloc de
18 min 40 s. M. le député, s'il vous plaît.
M. Kelley :
Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour, M. le premier ministre. Je veux juste
commencer à dire un grand merci à tous les
fonctionnaires du MCE, qui, je sais, font un travail colossal pour préparer
vous puis tout le monde pour les études des crédits. Alors, je veux
juste saluer tout le monde. Puis aussi juste rapidement un mot pour votre chef
de cabinet et vous aussi, M. le premier ministre, qui étaient vraiment à
l'écoute quand j'ai lancé l'appel de s'assurer...
les anciens combattants, à l'hôpital de Sainte-Anne-de-Bellevue, étaient vaccinés en
priorité, déjà, une clientèle de Deuxième Guerre mondiale
très, très vulnérable, déjà dans l'âge... âgés, excusez-moi, de 80,
90 ans. Alors, je sais que le bureau du premier ministre a suivi la situation
de près. Alors, merci pour ça, parce que c'est très important, pas juste pour
les gens de mon comté, mais tous les Québécois et tous les Canadiens, qu'on
prenne soin de la dernière place où on trouve un grand regroupement des
vétérans de la Deuxième Guerre mondiale.
M. le Président, sur plusieurs
reprises, j'ai posé les questions en Chambre concernant une réforme à la Charte
de la langue française avec mon projet de loi n° 590,
qui a l'objet de rendre les cours de français gratuits, sur tout le territoire
du Québec, à tout le monde qui réside sur le territoire du Québec. Alors, je
veux juste savoir si le premier ministre est toujours d'accord avec mon projet
de loi et est prêt à adopter ça rapidement.
Le
Président (M. Bachand) : M. le premier
ministre, s'il vous plaît.
M. Legault :
Oui, merci, M. le Président. Donc, je veux saluer les gens qui m'accompagnent,
aussi le député de Sainte-Rose, qui est aussi porte-parole des relations avec
les Québécois d'expression anglaise. Et je veux saluer, évidemment, les députés
qui sont là, en particulier le député de Jacques-Cartier, qui est le député de
ma mère. Et puis il me parlait de l'Hôpital des vétérans, à Sainte-Anne. Ça ne
me rajeunit pas, mais je l'ai vu construire, puis, aujourd'hui, c'est presque
rendu désuet, donc, tu sais, ça fait longtemps.
Et, M. le Président, effectivement,
le député de Jacques-Cartier a déposé un projet de loi, avec lequel j'ai déjà
dit que j'étais d'accord, pour offrir non seulement aux nouveaux arrivants mais
aux anglophones qui veulent suivre des cours de français que ce soit disponible.
Et, bon, je lui demande d'être patient, on devrait déposer notre réforme de la
loi 101 au cours des prochaines semaines. Donc, je pense qu'il va être
content, quand il va voir notre projet de loi, sur cette partie-là.
Le
Président (M. Bachand) : M. le député de Jacques-Cartier.
M. Kelley :
Merci beaucoup, M. le premier ministre. La raison pour quoi j'ai commencé avec
mon projet de loi, c'est parce que c'est toute la question de l'approche avec
la protection et promotion de notre langue commune. Puis je sais que, depuis le
début de cette semaine, on a eu plusieurs, plusieurs débats autour de la clause
dérogatoire, l'application de ça dans un projet de loi éventuel, mais je veux
juste rappeler, quand le premier ministre a pris le pouvoir, il a livré un
discours dans le salon bleu où il a dit, et je cite : «To our fellow
Anglo-Quebeckers, I want to say again our will to define our common future
together. Your historical community is an enrichment for
Québec in many regions. We are proud to protect your historical rights and we
will keep doing just that.»
C'est important, M. le
Président, parce qu'on parle des droits des Québécois, et moi, je préfère
d'avoir une approche autour de la langue française qui va créer de la cohésion
sociale. C'est très important. Ma génération est différente. Moi, je suis un
bébé de la loi 101. Je ne me rappelle pas le premier référendum, je
n'étais pas né. Je me rappelle un petit peu le deuxième. Mais pour moi, c'est
très important, parce que, quand on commence avec la clause dérogatoire, je pose la question : C'est où, le dialogue? C'est où, le débat de s'assurer qu'on
peut faire la protection sans aller là? Parce que la communauté
d'expression anglaise est prête à faire leur part pour protéger la langue française.
Alors, je veux juste écouter le premier ministre.
Vous avez dit ça en Chambre. Est-ce que vous avez toujours l'intention de tenir
votre parole envers la communauté d'expression anglaise, que vous êtes
responsable comme premier ministre et ministre?
Le Président (M.
Bachand) : M. le premier ministre, s'il
vous plaît.
M. Legault : Oui, M. le
Président, effectivement, je me sens responsable et je suis le premier ministre
de tous les Québécois, incluant les Québécois d'expression anglaise. Je pense
que c'est important d'offrir les services aussi à la communauté anglophone dans
nos écoles, dans nos hôpitaux.
Mais c'est important aussi, puis j'étais content
d'entendre le député de Jacques-Cartier parler d'une langue commune,
évidemment, une langue commune, le français, qui sera toujours vulnérable en
Amérique du Nord. Puis ce n'est pas seulement le Parti québécois ou la CAQ qui
le dit. Je me rappelle entre autres Robert Bourassa, qui a utilisé la clause
dérogatoire pour protéger le français dans l'affichage. Parce que ça fait
partie, évidemment, du paysage. Est-ce qu'on
veut vraiment avoir le français comme langue commune, comme seule langue
commune? Je pense qu'il y a un impact sur l'affichage.
Bon, j'ai bien compris du député puis, hier, de
la cheffe de l'opposition officielle qu'ils ne sont pas prêts à utiliser la
clause dérogatoire. Mais, je pense, M. le Président, il y a des droits
individuels, mais il y a aussi des droits collectifs, et je pense que, comme
nation vulnérable en Amérique du Nord, on est tout à fait justifié. Puis moi,
comme premier ministre, le seul premier ministre qui représente une majorité de
francophones, j'ai des devoirs puis je dois faire respecter aussi les droits
collectifs.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de Jacques-Cartier, s'il vous plaît.
M. Kelley : Merci pour
votre réponse, M. le premier ministre. Et moi, je rappelle un premier ministre,
René Lévesque, qui a déposé la loi 1 sur la Charte de la langue française,
qui, après ça, a déposé un projet de loi n° 101, où il a retiré la clause
dérogatoire, parce qu'il a dit — quand même, on sait, le Parti québécois,
ils ont eu un débat : Au minimum, de laisser les cours du Québec de voir
si cette loi-là est toujours légale. C'est eux autres qui ont dit : On va
laisser les tribunaux regarder ces questions-là, puis, après ça, on prend une
décision. Alors, il y a des autres façons à régler ça. Et je pense que tout le
monde ici croit que René Lévesque était un grand premier ministre, une grande figure dans notre histoire. Alors, il y a plein
des exemples où on peut regarder où le dialogue est capable... est
possible.
Et je peux dire que ma grand-mère, Marylee
Kelley, a travaillé avec Camille Laurin pour s'assurer que certains droits pour
la communauté anglophone étaient mis dans les lois, l'acte sur la santé, et tout
ça. Elle a fait un travail avec plusieurs membres de la communauté
anglophone : Tom Mulcair, Kathleen Weil, députée de Notre-Dame-de-Grâce,
l'ancien député de Jacques-Cartier, Geoff Kelley, qui étaient membres
d'Alliance Québec, qui est quand même... — le sous-ministre associé, je
pense qu'il a eu un rôle avec Alliance Québec — qui a fait un travail de
travailler en collaboration avec le gouvernement.
Alors, une question pour le ministre. Vous êtes
responsable pour la communauté. Je sais que vous êtes préoccupé avec la
pandémie, je comprends ça très bien, mais est-ce que vous avez pris
l'opportunité de parler avec des représentants de la communauté pour s'assurer
que la loi ne va pas enlever, ou, quand même, restricter les droits de la
communauté?
Le Président (M.
Bachand) : M. le premier ministre, s'il vous plaît.
M. Legault : Oui. M. le
Président, on va déposer, donc, un projet de loi au cours des prochaines
semaines, puis on s'attend à ce qu'il y ait un débat, puis il y aura sûrement
des consultations. Puis on pourra effectivement avoir un débat sur un certain
nombre de mois. Je vous dis tout de suite qu'on n'a pas l'intention de forcer
l'adoption du projet de loi dans la session actuelle. Donc, on va se donner un
certain temps, d'ici l'automne, pour pouvoir débattre, écouter les différents
groupes.
Mais, M. le Président, ce qu'il est
important de rappeler, le député de Jacques-Cartier parlait de René Lévesque,
René Lévesque, effectivement, a déposé la loi 1, puis ensuite la
loi 101, mais malheureusement, il y a des parties importantes de la
loi 101 qui ont été charcutées par les tribunaux. Donc, il est temps, je
pense, de mettre à jour cette loi puis de corriger,
autant que c'est possible de le faire, donc, en utilisant la clause dérogatoire,
des pans complets de la loi 101 que souhaitait Camille Laurin, que
souhaitait René Lévesque, mais malheureusement, qui ont été charcutés par des
tribunaux, à travers les années.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de Jacques-Cartier.
M. Kelley : Merci,
M. le Président. Mais je pense qu'où il y a une préoccupation de la
communauté, c'est qu'on a déjà vécu l'expérience avec le projet de loi
n° 40, où les droits de l'anglophone n'étaient quand même... et leur droit
à la commission scolaire n'étaient quand même pas débattus par les
parlementaires ici parce que le gouvernement a décidé d'utiliser un bâillon.
Alors, on n'était quand même pas capable de prendre les arguments de la
communauté pour dire : Hé! est-ce qu'on peut faire un projet de loi qui
marche pour tout le monde, qui respecte les droits de la communauté?
Parce qu'on a vu, il y a plusieurs différents
groupes qui étaient présents et prêts à travailler avec le ministre et le gouvernement
de s'assurer que la loi n° 40 respecte les droits de
la communauté anglophone, mais malheureusement on est rendu devant les
tribunaux puis on a déjà vu quatre différents juges qui ont dit : Il y a
des problèmes avec ce projet de loi. Et, peut-être, quand
même, il y a un juge qui a dit dans
la jurisprudence que peut-être
c'est mieux pour le gouvernement de commencer de regarder pour une discussion hors cour ou commencer de
préparer la réalité que c'est possible que
le gouvernement doive modifier ce projet de loi. Alors, je veux
entendre le premier
ministre : Est-ce qu'on est capable d'éviter ça, oui, avec le projet de
loi qui s'en vient, mais aussi, peut-être, regarder, pour le projet
de loi n° 40 sur les commissions scolaires, une façon de régler ça
hors cour et trouver une solution qui est agréable pour tout le monde?
• (16 h 10) •
Le Président (M.
Bachand) : M. le premier ministre.
M. Legault : Oui. M. le
Président, j'ai bien entendu, il y a quelques jours, la cheffe du Parti libéral
du Québec dire qu'il y avait... que le français était vulnérable, qu'il y avait
une certaine urgence d'agir, et je suis d'accord avec elle. Mais je veux rassurer le député de
Jacques-Cartier, là, on n'ira rien bulldozer dans la session
actuelle. Je pense que, si on a la collaboration de tout le monde, on est capables
d'avoir des débats d'ici l'automne pour entendre tous les partis.
Concernant la loi n° 40,
je veux être prudent parce que la cause est devant les tribunaux, mais je
continue à penser qu'on avait tout à fait le droit de faire la réforme, qui, à
notre avis, était nécessaire, parce qu'il y a un taux de participation beaucoup
trop bas dans les élections scolaires.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de Jacques-Cartier.
M. Kelley : Merci, M. le
Président.
Again, I just... I want to reiterate
that it's important, the rights of the community are important. We want to make sure that we all together work on our common
language, which is French. The
community is there, my generation is there.
Je, quand même, pense, dans la proposition qui a été faite par le leader... et le chef de
notre formation politique
propose des idées très intéressantes, comme des échanges culturels pour la
communauté anglophone vers les régions. Ça, c'est très important. Je pense qu'il
y a des gens qui veulent voir le Québec. Moi, je suis tellement chanceux que
j'ai eu l'opportunité d'aller aux Îles-de-la-Madeleine, d'aller à Gaspé,
d'aller, quand même, à Kuujjuaq, mais pas tout le monde a l'opportunité de
faire ces voyages comme ça. Alors, j'espère qu'on va mettre des choses sur la
table qui sont positives autour, oui, de la langue française, mais aussi... Ça
commence avec la langue, mais, après ça, on peut mieux apprendre puis apprécier
la culture québécoise aussi. Alors, je pense, ça, c'est très important. Sur
notre côté, on va demeurer vigilants. Puis j'espère encore que le premier
ministre va insister que son leader n'utilise pas le bâillon pour le projet de
loi qui s'en vient, puis on peut travailler sur ça.
Mais je vais juste poser une autre question,
parce que le temps, ça coupe. Mais, sur les services pour les anglophones, il y
a des plans d'accès. Puis on a vu, oui, la pandémie a mis beaucoup de pression
sur le système, et une place où on sait qu'il y a vraiment une urgence d'agir,
pas juste avec le financement mais avec des vraies politiques, c'est la santé
mentale des jeunes, puis aussi pour tout le monde, mais particulièrement, je
pense, que... les jeunes dans mon comté qui m'ont appelé, puis on a parlé sur
Zoom, et tout ça, pour dire : Greg, ça ne va pas bien, et je... pas
vraiment capable de trouver une façon d'aimer la vie que je vis présentement,
des parents qui me disent : Mes enfants pleurent chaque jour. Alors, je
sais qu'il y a des sommes qui ont été mises en place, mais c'est quoi, la
stratégie pour les anglophones? Et je pense particulièrement, oui, Montréal,
mais aussi en région, où la communauté est loin de ces institutions.
Le Président (M.
Bachand) : M. le premier ministre.
M. Legault : Oui. M. le
Président, je laisserais le député de Sainte-Rose, qui a fait la tournée de
toutes les communautés anglophones qu'il y a dans les différentes régions du
Québec, qui a évidemment entendu des préoccupations, entre autres en santé
mentale, répondre plus précisément à la question.
Le
Président (M. Bachand) :
Est-ce qu'il y aurait consentement? Consentement. M. le député de Sainte-Rose,
s'il vous plaît.
M. Skeete :
Bonjour, M. le Président. Merci beaucoup. Salutations à tous les
collègues.
Effectivement, M. le premier ministre,
M. le Président, on a fait la tournée panquébécoise où est-ce qu'on a
rencontré les Québécois d'expression anglaise partout à travers le Québec, en
région, tant à Montréal, tant en région. Rapidement, je peux vous dire qu'on a
rencontré plus de 147 organismes régionaux dans 15 régions du Québec,
et, en tout et partout, ils nous ont fait valoir, justement, les défis qu'ils
ont. Et il faut le dire, il faut le souligner, M. le Président, dans
l'histoire du Québec, il n'y a jamais eu une consultation qui a eu lieu par
rapport à la communauté d'expression anglaise comme celle que j'ai menée
en 2019.
Pour répondre
précisément à la question du collègue de Jacques-Cartier, nous avons
remarqué, suite à la pandémie, qu'il
y avait une inquiétude accrue par rapport à la communauté d'expression
anglaise, notamment à ce qui trait la
santé mentale. C'est pour cette raison qu'on a dépêché des fonds de 0,5 million de dollars à un groupe communautaire responsable de la
santé pour la communauté d'expression anglaise, dans le but de supporter les
communautés ainsi.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de Jacques-Cartier.
M. Kelley : Merci pour
la réponse. Et peut-être mon collègue de Sainte-Rose peut nous informer sur une
autre question concernant le taux des anglophones au sein de la fonction
publique de Québec. J'ai fait une recherche, j'ai vu que c'était environ à
1 %. Ça demeure un petit peu stable, dans un sens, depuis plusieurs années.
Mais est-ce que le taux a changé? Et est-ce qu'il y a des fruits qui étaient
portés des efforts qui ont été faits, en 2018, de faire un recrutement au
sein de nos institutions, nos universités au Québec, pour voir s'il y a des
anglophones qui sont intéressés par la fonction publique du Québec?
Le Président (M.
Bachand) : Merci. M. le député de Sainte-Rose.
M. Skeete : Excellente question
du collègue. On l'a vu, il y a... le taux de représentation des Québécois
d'expression anglaise dans la fonction publique québécoise stagne, et ce,
depuis plusieurs décennies. L'enjeu est, d'un côté, le nombre d'applications
qu'on reçoit dans la fonction publique par rapport... de la communauté
d'expression anglaise. C'est comme s'ils ne réalisent pas les opportunités que
l'État du Québec peut leur offrir. Et, de l'autre côté, il y a une barrière. La
barrière, malheureusement, c'est la langue, et c'est une des raisons pourquoi
mon collègue le ministre de la Francisation regarde les façons novatrices,
justement, pour offrir de façon accrue des cours de français aux Québécois
d'expression anglaise.
On en a parlé
un petit peu dans l'autre volet, jeunesse, là, on parle ici de la poule ou
l'oeuf, là. Malheureusement, la sous-représentation est causée par le
manque, d'un côté, de confiance, d'intérêt et de savoir qu'il y a des
opportunités pour eux et, de l'autre côté, une déficience en français écrit
notamment.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de Jacques-Cartier.
M. Kelley : Merci
beaucoup, M. le Président. On sait, il n'y a pas beaucoup de temps qui reste.
Alors, je veux lancer un petit peu un cri de coeur envers le premier ministre,
et ça, c'est l'important, de bâtir notre avenir ensemble. Oui, j'ai voté contre
le projet de loi n° 21, oui, j'ai voté contre le projet de loi n° 9,
oui, j'ai voté contre le projet de loi n° 40, je sais que certains de ces
projets de loi étaient populaires avec la majorité, mais ça ne dit pas que je
ne suis pas un bon Québécois, entre guillemets. Moi, je ne parle pas pour
chaque anglophone au Québec, comme le premier ministre ne parle pas pour chaque
francophone.
I voted against Bill 21, I
voted against Bill 9, I voted against Bill 40. I understand these are not
necessarily bills that the entire population are against, but, for me, in my
values, I'm against them. But I'm always willing to sit down with somebody on
the other side of the aisle, on the other side of the debate, and have a good
discussion, a common discussion over these
things that are crucial to our society, and I think that what's important. I do
not dislike people who voted for or are in favor of Bill 21. I think we
can have a reasonable discussion. We have to keep that tone in our society.
Parce que, pour moi,
l'avenir de ma génération, c'est de bâtir un Québec ensemble, franco, allo,
autochtones et anglophones, et je pense qu'on est possible, mais c'est
important, dans ces débats qui sont très importants, qui sont très délicats,
qu'on garde un ton qui est respectueux pour tout le monde. Alors, merci
beaucoup, M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) : M. le premier ministre, là-dessus, oui.
M. Legault : M. le Président,
je pourrais faire mienne une partie... une bonne partie des paroles du député
de Jacques-Cartier. Moi, je ne suis pas contre la communauté anglophone, j'ai
été élevé dans le West Island et puis évidemment, comme vous pouvez l'imaginer,
j'ai souvent eu à faire avec des anglophones. Mais de la même façon que Robert
Bourassa a eu le courage d'adopter, avec une clause dérogatoire, des mesures
pour l'affichage en français au Québec, je pense qu'il y a aussi une
responsabilité. Si on y croit vraiment, à la langue commune qu'est le français,
si on croit vraiment que cette langue est vulnérable, bien, comme l'a dit, là,
puis j'ai vu un certain virage de la part de la cheffe du Parti libéral, qui
semble enfin comprendre que notre langue est menacée, en particulier à
Montréal, donc, il faut poser des gestes et puis, bon, il faut, dans certains
cas, utiliser la clause dérogatoire.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de Jean-Lesage pour
4 min 40 s, s'il vous plaît.
M. Zanetti :
Merci, M. le Président. Merci beaucoup, M. le premier ministre. Merci à tout le
monde ici qui est présent, aux collègues.
En septembre 2018, le premier ministre a soutenu
qu'il modifierait la structure du Secrétariat aux relations avec les Québécois
d'expression anglaise, mais sans dire comment. Il a aussi dit que le
secrétariat serait maintenu s'il était prouvé utile, entre guillemets, là. Et
je voulais savoir quel est le bilan du premier ministre par rapport à ce
secrétariat-là. À quoi on peut s'attendre par rapport à ça?
Le Président (M.
Bachand) : M. le premier ministre.
M. Legault : Oui, M. le
Président. Effectivement, on se souviendra tous que le Parti libéral a créé ce
secrétariat avec un très petit budget, là, on parle de 3 millions de
dollars par année. Alors, cette année, on est rendu à 11,5 millions de
dollars. Donc, on s'est assuré, entre autres, que l'aide aux organismes
anglophones ne passe pas toute par un organisme, mais soit dirigée vers tous
les organismes dans toutes les régions du Québec.
Comme le disait le député de Sainte-Rose, on est
allé consulter sur le terrain pour voir les priorités, que ce soient les
services en santé, en santé mentale, les services pour donner des cours de
français. Et donc c'est certain qu'avec 11 millions plutôt que
3 millions, bien, on a réussi à être capable de rejoindre les besoins des
communautés. Et, M. le Président, pour l'instant, pour répondre clairement à la
question du député de Jean-Lesage, on ne prévoit pas modifier la structure
actuelle.
• (16 h 20) •
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de Jean-Lesage, s'il vous plaît.
M. Zanetti : Je vous remercie.
La question de la sous-représentation des anglophones dans la fonction publique
du Québec a été abordée déjà par mon collègue de Jacques-Cartier. Est-ce que
vous seriez ouvert, par exemple, à donner des pouvoirs de contrainte à la
Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse envers les
organismes soumis à l'obligation d'un programme d'accès à l'égalité pour être
capable d'augmenter un peu la représentation?
M. Legault : Bon, comme l'expliquait
tantôt le député de Sainte-Rose, j'ai eu des discussions avec le secrétaire général. On souhaite avoir plus
d'anglophones, plus de représentants des communautés, plus de
représentants des nations autochtones, mais malheureusement, quand on ouvre les
postes, il n'y en a pas qui soumettent leur candidature. Donc, on a vraiment un
défi d'attirer. C'est pour ça que le député de Sainte-Rose disait tantôt :
Il va falloir comme mieux faire connaître la fonction publique, mieux valoriser
la fonction publique auprès, entre autres, des communautés anglophones. Ce
n'est pas qu'on ne le souhaite pas, on le souhaite, mais malheureusement...
Bon, il faut dire qu'il y a beaucoup des postes
qui sont à Québec, dans la fonction publique. Donc, les anglophones sont plus à
Montréal, donc ils ont peut-être, pour toutes sortes de bonnes ou de mauvaises
raisons, pas le goût de déménager à Québec, donc n'appliquent pas sur les
postes. Mais, honnêtement, le secrétaire général m'a dit qu'il souhaitait en avoir plus, mais qu'actuellement,
malheureusement, il n'y en a pas qui soumettent leur candidature.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de Jean-Lesage.
M. Zanetti : Je vous remercie,
ça fait le tour pour moi.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de Matane-Matapédia, pour
4 min 40 s.
M. Bérubé :
Merci, M. le Président. M. le premier ministre, chers collègues, peut-être un
mot pour dire que le Parti québécois a une riche histoire de relations avec la
communauté anglophone, notamment à travers ses élus. Je pense à Robert Dean,
qui nous a quittés récemment, à David Payne, David Levine, qui a travaillé avec
le premier ministre étroitement, qui a été ministre dans le gouvernement de
Bernard Landry.
Comme il est d'usage à l'étude des crédits,
bien, on questionne l'intention du législateur, on questionne l'attribution des
fonds, et je veux parler du projet prioritaire pour le gouvernement, qui est le
financement du collège Dawson. Écoutez, il y a 48 cégeps publics au
Québec. Le seul qui reçoit ce privilège, c'est le cégep Dawson, et, en plus,
accéléré. C'est un projet qui provenait du Parti libéral, et pour la CAQ,
c'était très important que ça se fasse dans le projet de loi n° 61
puis le projet de loi n° 66. On parle de
50 millions pour l'agrandissement, qui est devenu 100 millions. Et ce n'est pas rien, le symbole est fort, si le
français est menacé à Montréal, s'il y a un équilibre linguistique qui
est fragile, ce geste-là a des conséquences importantes sur l'équilibre. C'est
le cégep le plus populeux et le plus riche.
Il attire un très grand nombre d'allophones et de francophones, et on prend les
meilleurs étudiants francophones. Je n'ai jamais eu la réponse du
premier ministre à savoir pourquoi, de tous les cégeps du Québec, c'est
celui-là qu'il fallait financer à cette hauteur-là et prioritairement.
Le Président (M.
Bachand) : M. le premier ministre.
M. Legault : Oui. M. le
Président, c'est important de le dire, la ministre de l'Enseignement supérieur
traite les demandes pour des espaces additionnels de la même façon, que ça soit
du côté anglophone, que ça soit du côté francophone.
Depuis plusieurs années,
le cégep Dawson fonctionne actuellement au-dessus de sa capacité. Bon, là, il y
a deux approches qui vont s'affronter, probablement, dans les prochaines
semaines. Il y a une approche où on dit : On veut plafonner le nombre de
places dans les cégeps anglophones. J'ai déjà dit que j'étais plus partisan de
cette option. Puis il y a le Parti québécois qui veut interdire aux
francophones d'aller dans les cégeps anglophones, ce qui est tout un virage, parce
que, quand j'étais au Parti québécois, je me souviens de discussions épiques,
prolongées, dures au caucus du Parti québécois, puis à chaque fois il y avait toujours
une majorité de députés du Parti québécois qui s'opposait à étendre la
loi 101, c'est-à-dire interdire aux francophones d'aller dans les cégeps
anglophones. Donc, je constate, là, que les neuf députés, maintenant, du Parti
québécois, sauf un, je pense qu'il y en a huit du Parti québécois qui sont
d'accord avec cette mesure. Bien, c'est tout un changement.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de Matane-Matapédia.
M. Bérubé : Bien, ça arrive,
des changements. De passer d'indépendantiste pressé et sincère à président du
Conseil de l'unité canadienne, comme Jean Charest, je ne l'ai pas vu venir, je
le concède au premier ministre.
D'ailleurs, il n'y a pas seulement nous qui
pensons ça. Son ministre est d'accord qu'il ne fallait pas financer Dawson. Il
le sait. Moi, je le sais, en tout cas. Mathieu Bock-Côté, c'est un des auteurs
préférés du premier ministre, n'est-ce pas? Oui? Je vais citer Mathieu
Bock-Côté sur sa décision : «En gros, le gouvernement du premier ministre
décide d'accélérer l'anglicisation du système collégial à Montréal, qui
travaille déjà à notre assimilation. C'est consciemment
qu'elle finance l'anglicisation de notre peuple à même les fonds publics. Son
aile affairiste et fédéraliste triomphe.»
Le titre qu'il a choisi : Une trahison linguistique, Mathieu
Bock-Côté. Ce n'est pas mes paroles, M. le Président.
Ce n'est pas rien, financer. Sur les
48 cégeps, il y en avait, des demandes de financement. Je peux vous en
nommer plein dans les circonscriptions de vos députés. Ce n'est pas anodin.
C'était le projet des libéraux. Le premier ministre avait l'option de ne pas
financer, il a choisi de le faire. Et qu'est-ce qui arrive? Plus il y a
d'étudiants, plus il faut agrandir, ça n'arrêtera jamais.
L'équilibre
est fragile à Montréal. Bientôt, le nombre d'étudiants anglophones sera
supérieur aux francophones, avec l'évolution qu'on voit présentement.
Alors, le premier ministre peut bien parler de différentes visions qui vont
s'affronter, il y en a deux. Il y a ceux pour qui c'est vraiment sérieux, la
langue, qui en ont fait des combats pendant des années les plus crédibles avec
la loi 101, qui ont eu le courage d'amener la loi n° 14,
contre laquelle le premier ministre était contre parce que ça allait trop loin,
avant, quand il était dans l'opposition... Alors, si on est vraiment sérieux
sur l'enjeu du français, bien, on pose les gestes en conséquence. Et je trouve
dommage que le premier ministre ait choisi
de financer Dawson à l'encontre des voeux de son propre ministre responsable de
la Langue.
Le Président (M.
Bachand) : M. le premier ministre.
M. Legault : Oui, M. le
Président, le chef parlementaire du Parti québécois rappelle que le Parti
québécois n'a pas réussi à faire adopter un projet de loi pour protéger les
valeurs québécoises, incluant la laïcité de l'État. Il n'a pas réussi non plus
à faire une réforme de la loi 101. On verra bien, dans les prochains mois,
si le gouvernement de la CAQ réussira.
Maintenant, M. le Président, c'est important de
rassembler, mais il y a plusieurs façons d'atteindre le même objectif. Si on
veut protéger et promouvoir le français, d'obliger les francophones... ou
d'interdire aux francophones d'aller dans les cégeps anglophones, c'est le
choix du Parti québécois. Moi, je pense qu'il y a d'autres mesures qui sont beaucoup
plus efficaces. Le français langue de travail, incluant dans les petites entreprises,
je pense, c'est très important. Le français bien identifié dans l'affichage, je
pense que c'est très important. Donner des cours de français puis rendre le
français bien utilisé par tous les nouveaux arrivants, c'est très important. Le
Parti québécois choisit une méthode de dire : À l'avenir, les
francophones, même après avoir fait 12 années au primaire puis au
secondaire, bien, il pense que, parce qu'il va leur interdire d'aller dans les
cégeps anglophones, ça va changer la situation.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup, M. le premier
ministre. Merci. Quelques secondes, M. le député de Matane-Matapédia.
M. Bérubé : Donc, un virage, parce que le premier ministre a toujours été contre les petites entreprises,
25 à 49. Ça en est un, virage, mais il y en a un virage important. Avant
même son plan costaud, il vient de plomber sa crédibilité linguistique en
finançant...
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup, M. le député.
M. Bérubé :
...Dawson, et c'est malheureux.
Adoption des crédits
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Le temps alloué à l'étude du volet Relations
avec les Québécois d'expression anglaise des crédits budgétaires du
portefeuille Conseil exécutif étant presque écoulé, conformément à l'entente du 13 avril 2021, nous allons maintenant
procéder à la mise aux voix de ces crédits. M. le député de Sainte-Rose, s'il vous plaît, vous pouvez
restez assis. Non, mais restez assis, s'il vous plaît, il n'est pas encore
4 h 30. Merci.
Alors
donc, pour la mise aux voix du programme 7, intitulé Relations avec les
Québécois d'expression anglaise, Mme la secrétaire.
La
Secrétaire : Pour, contre, abstention. Pour les membres du
groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Skeete
(Sainte-Rose)?
M. Skeete : Pour.
La Secrétaire : Pour les
membres de l'opposition officielle, M. Kelley (Jacques-Cartier)?
M. Kelley : Contre.
La Secrétaire :
M. Zanetti (Jean-Lesage)?
M. Zanetti : Contre.
La Secrétaire :
M. Bérubé (Matane-Matapédia)?
M. Bérubé :
Contre.
Le Président (M.
Bachand) : Donc, adopté.
Documents déposés
En terminant, je dépose les réponses aux
demandes de renseignements de l'opposition.
Compte tenu de l'heure, la commission ajourne
ses travaux jusqu'au mercredi 5 mai, à 12 h 15, où elle va
entreprendre l'étude du volet Ordres professionnels, lois professionnelles des
crédits budgétaires du portefeuille Enseignement supérieur.
Merci. Bonne soirée.
(Fin de la séance à 16 h 30)