(Neuf heures trente minutes)
Le Président (M.
Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! Bon
matin. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des
institutions ouverte. Avant de débuter, je vous rappelle que le port du masque
de procédure est obligatoire en tout temps, hormis au moment de prendre la
parole.
Justice
La commission est réunie afin de procéder à
l'étude du volet Justice des crédits budgétaires du portefeuille Justice pour
l'exercice financier 2021-2022. Une enveloppe de trois heures est allouée
pour l'étude de ces crédits.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M.
le Président. Mme D'Amours
(Mirabel) est remplacée par M. Lefebvre (Arthabaska);
Mme Lachance (Bellechasse),
par M. Lévesque (Chauveau); M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), par M. Kelley (Jacques-Cartier); M. Zanetti (Jean-Lesage),
par M. Nadeau-Dubois (Gouin).
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. L'étude de ce portefeuille sera divisée en parties pour permettre la présence en salle des représentants et des
organismes visés par cesdits crédits. Ce matin, de 9 h 30 à midi, le
ministre sera accompagné des représentants
de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, de la
Commission des services juridiques et de la
direction des poursuites criminelles et pénales. Et, cet après-midi, de
15 h 30 à 16 heures, il sera accompagné des représentants
de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse.
Ce matin,
nous allons procéder aux échanges entre les groupes d'opposition et le ministre
par blocs d'environ 20 minutes pour permettre à chaque groupe
d'écouler graduellement son temps de parole. Je vous rappelle que la mise aux
voix de ces crédits sera effectuée à la fin du temps qui leur est alloué, cet
après-midi, donc vers 16 heures.
Discussion générale
Donc, je suis maintenant prêt à reconnaître une
première intervention. M. le député représentant l'opposition officielle,
M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.
M. Tanguay : Merci beaucoup,
M. le Président. Pour 21 min 14 s, je crois?
Le Président (M.
Bachand) : Exactement, 21 min 14 s.
M. Tanguay : Merci beaucoup.
Bien, d'abord, vous saluer, merci de présider nos travaux, saluer le ministre
et les collègues également, et toutes les personnes qui accompagnent, qui
gravitent autour du ministère de la Justice. Merci d'être là, pour votre
présence pour cet important exercice ce matin.
Décembre 2020, rapport Rebâtir la
confiance, rapport extrêmement important en matière d'agression sexuelle et de
violence conjugale, recommandation 178 : Bureau de l'ombudsman
québécois des victimes d'actes criminels. 23 mars 2021, le premier
ministre : On va appliquer les 190 recommandations. Une porte... une
fenêtre d'opportunité était disponible au ministre pour mettre en application
cette importante recommandation-là, parmi les 190. J'aimerais savoir, parce
qu'il n'a pas saisi l'occasion à ce moment-là, quand... pas savoir si... À
moins qu'il me détrompe. Est-ce que le ministre en est à l'étape de la question
s'il va le mettre en application? Mais moi, j'aimerais savoir quand, dans la
prochaine année, parce qu'il reste deux sessions parlementaires, va-t-il mettre
cette importante recommandation-là en application.
Le Président (M.
Bachand) : M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Oui. Alors,
bonjour, M. le Président. Salutations à mes collègues également. Salutations
également au député de Chapleau qui m'accompagne pour l'étude des crédits. M.
le Président, d'entrée de jeu, je voudrais faire quelques remarques en lien
avec l'intervention du député de LaFontaine. Juste vous souligner que
m'accompagnent Me Drouin, qui est sous-ministre à la Justice, ainsi que
les quatre sous-ministres associés, les représentants de la Commission des
droits de la personne, du Directeur des poursuites criminelles et pénales ainsi
que de la Commission des services juridiques ce matin.
Alors, M. le Président, l'exercice des crédits,
c'est un moment qui est important. C'est un moment où les oppositions peuvent
poser des questions en lien avec l'ensemble des crédits budgétaires qui sont
consacrés au ministère de la Justice. On parle de plus d'un milliard de dollars
par année, avec différents organismes.
Et donc, sur le point
précis du député de LaFontaine relativement au rapport Rebâtir la confiance, M.
le Président, 190 recommandations et nous sommes déjà, M. le Président, en
action. Le député de LaFontaine fait référence aux travaux que nous avons eus
dans le cadre du projet de loi n° 84, donc, qui vise à réformer le programme... la Loi sur l'indemnisation des
victimes d'actes criminels. Alors, on a terminé l'étude détaillée jeudi
dernier, et je remercie mes collègues. Et, dans le cadre de ce projet de loi
là, M. le Président, on a eu l'occasion de discuter d'un ombudsman. Et ce que j'ai dit, c'est que... Et ça venait de la
députée de Joliette, cette intervention-là relativement au fait est-ce
qu'il va y avoir un ombudsman. Alors, j'ai dit que, présentement, on étudiait
le rapport Rebâtir la confiance et que j'avais l'intention de donner suite aux
190 recommandations, comme le premier ministre l'a dit.
Dans le cadre du projet de loi n° 84, M. le
Président, ce que nous avons fait, c'est donner davantage de droits aux
personnes victimes, et surtout dans la première partie de la loi qui reprenait
la loi sur l'aide aux victimes. Et, alors là, ce qu'on a fait pour l'instant,
M. le Président, c'est qu'on a créé, à l'intérieur du Bureau d'aide aux
victimes d'actes criminels... on a élargi son mandat, actuellement, pour
pouvoir accompagner et soutenir les victimes. Et, par les amendements que nous
avons effectués, ça vise à faire en sorte que, maintenant, tous les organismes
publics et privés qui offrent des services
aux personnes victimes vont devoir se doter de déclarations de services et de
processus de plaintes, toujours dans
l'optique de servir le mieux possible les personnes victimes, notamment
d'agression sexuelle, de violence
conjugale, pour faire en sorte qu'elles soient accompagnées dans le cadre de
leurs démarches à travers la justice.
Et, M. le Président, je dois vous dire que notre
gouvernement est fortement mobilisé pour les victimes d'agression sexuelle et
de violence conjugale, parce que, depuis qu'on est arrivés au gouvernement, M.
le Président, on a aboli la prescription en matière civile pour les victimes en
matière d'agression sexuelle, de violence conjugale, violence subie pendant
l'enfance, on a déposé le projet de loi n° 84, M. le Président, un quart
de milliard de dollars qu'on a consacré, un projet de loi que ça faisait
50 ans qu'il était en place, 30 ans qu'on demandait sa réforme.
Alors, on l'a fait, et j'ose espérer qu'il sera adopté par l'Assemblée au cours
des prochaines semaines.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Merci beaucoup,
M. le Président. On ne pourra pas continuer de même. Puis je ne veux pas me
chicaner avec le ministre, là. J'ai appris... Je l'ai découvert durant le 84.
Je pense, ça va bien, mais on ne pourra pas continuer de même. Ma question
était à peu près une minute, puis ça a pris trois minutes pour me faire... me vanter le projet de loi n° 84. Je l'ai déjà
entendu, ça. Ma question... Puis, je l'en remercie, en toute franchise, il
dit : On a l'intention de donner suite aux
190 recommandations. Parfait. Ça, c'est le bout clair. Le reste, je
l'avais déjà entendu.
Il doit le faire par loi. Il lui reste deux
sessions. Va-t-il déposer un projet de loi pour mettre en application la
recommandation 178, créer un bureau de l'ombudsman? Va-t-il déposer un projet
de loi à la session d'automne ou à la dernière session d'hiver prochain?
M. Jolin-Barrette : Mais, M. le
Président, vous savez, le député de LaFontaine, souvent, me critique parce que
je vais dans la précipitation. Donc là, il m'invite à agir de façon précipitée,
à me commettre déjà, d'entrée de jeu, à quelle session parlementaire un
éventuel ombudsman se retrouverait dans un véhicule législatif. M. le Président,
ce que je peux vous assurer, c'est que le ministère de la Justice, le ministère
de la Sécurité publique, de la Santé et des Services sociaux, tous les ministères
qui sont interpelés par le rapport Corte-Desrosiers, le rapport Rebâtir la
confiance, M. le Président, tous les ministères sont à l'oeuvre pour donner
suite aux recommandations.
Alors, comme je l'ai dit dans le cadre de
l'étude du projet de loi n° 84, certaines mesures
vont devoir être mises en vigueur par voie législative, M. le Président. On en
a déjà fait une partie avec le projet de loi n° 84. Écoutez, on a donné suite à plusieurs
recommandations de Rebâtir la confiance. La semaine dernière, M. le
Président, la vice-première ministre,
ministre de la Sécurité publique, a annoncé du financement additionnel pour les
maisons d'hébergement. Et, notamment, ça faisait suite à certaines
recommandations du rapport Rebâtir la confiance, M. le Président. Il y a des volets administratifs... En fait, il y a des
recommandations qu'on peut donner suite par voie administrative. Et là-dessus, M. le Président, ce qu'il est important de
savoir, c'est que, parmi les 190 recommandations qu'il y a dans le rapport, il y en a plusieurs qui étaient déjà en
vigueur et déjà en fonction à travers différents organismes, notamment
le DPCP et le ministère de la Justice. Alors, on va continuer, M. le Président,
de travailler pour les personnes victimes.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.
M. Tanguay : Justement, M. le
Président, le ministre nous habitue à agir dans la précipitation. Donc, quand
il n'agit pas dans la précipitation : drapeau jaune, c'est justement sur
ce point-là où on a des préoccupations. Alors, je n'ai pas eu de réponse
claire. Je vais passer à une autre recommandation, deux recommandations
importantes du tribunal spécialisé, recommandations 156 et 157 :
«Instaurer un Tribunal spécialisé en matière d'agressions sexuelles et de
violence conjugale au sein de la Cour du Québec» et «déployer le tribunal
spécialisé à l'échelle provinciale pour desservir toutes les régions...» Pour
faire ça, question très précise, le ministre a-t-il besoin d'un projet de loi,
oui ou non?
M. Jolin-Barrette : Bien, en fait,
M. le Président, oui, ça prend un projet de loi pour modifier la Loi sur les
tribunaux judiciaires. Et, M. le Président...
M. Tanguay : ...déposer à
l'avant-dernière ou à la dernière session?
M.
Jolin-Barrette : Bien, écoutez, déjà, dès le 8 février dernier,
j'ai annoncé la création d'un groupe de travail
pour voir de quelle façon est-ce qu'on peut mettre en oeuvre un tribunal
spécialisé, M. le Président. Alors, il y a plusieurs partenaires qui sont sur le comité, notamment le Directeur des
poursuites criminelles et pénales, le ministère de la Justice, la
Commission des services juridiques, le ministère de la Sécurité publique ainsi
que la Cour du Québec. M. le Président, il est de la volonté ferme et claire du
gouvernement du Québec d'instaurer un tribunal spécialisé en matière de
violence conjugale et sexuelle. Il ne fait aucun doute pour les parlementaires
élus du gouvernement de cette volonté.
Il va falloir, M. le
Président, que tous les acteurs du système de justice, tous les acteurs sans
compromis, mettent du sien, M. le Président, et s'assurent de répondre à la volonté du comité d'experts, du rapport
Corte-Desrosiers, des victimes de violence conjugale et sexuelle
d'appuyer et de mettre en oeuvre... et d'avoir l'ouverture d'esprit de changer
nos façons de faire, M. le Président. Et ça doit passer notamment, M. le
Président, par un tribunal spécialisé pour les victimes de violence conjugale
et sexuelle.
Alors, à la question
précise, oui, j'ai l'intention de mettre en place un tribunal spécialisé. Et je
demande le concours de tous les acteurs du système de justice pour mettre en
oeuvre un tribunal spécialisé. Et l'État québécois accompagnera, à juste titre,
les victimes de violence sexuelle et conjugale.
• (9 h 40) •
Le
Président (M. Bachand) : M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
Ah tiens! Une folie, je vais essayer la question. Qui, dans le système de
justice, est le plus réfractaire? C'est délicat de répondre à ça. Vous pouvez
ne pas répondre, mais il y a des gens visiblement qui sont réfractaires à ça.
M.
Jolin-Barrette : M. le Président, ma volonté en tant que ministre de
la Justice, c'est de mettre en oeuvre ce tribunal-là. Et je vais demander le
concours et j'aurai besoin du concours des collègues de LaFontaine, de Joliette
et de Gouin de nous appuyer dans cette démarche qui, je pense, est hautement importante
pour la société québécoise, pour, notamment, les victimes d'agression sexuelle
qui ne se sont pas senties à l'aise à travers le système de justice. Alors, il
faut moderniser nos institutions, et il va falloir travailler ensemble pour le
mettre en place.
M. Tanguay :
J'ai devant moi, donc, le communiqué de presse du 8 février 2021 par
lequel le ministre constituait le groupe de travail. Quel est son échéancier?
Vous vous attendez à avoir le rapport quand?
M.
Jolin-Barrette : J'ai demandé, je crois, un rapport préliminaire au
mois de mai, si je ne me trompe pas. Donc, je devrais avoir un rapport
préliminaire au mois de mai.
M. Tanguay :
Et en vue d'avoir un rapport final autour de?
M.
Jolin-Barrette : Écoutez, dépendamment de l'avancement des travaux
relativement à ce groupe de travail là. Je vais prendre acte du rapport
préliminaire. C'est possible qu'uniquement avec le rapport préliminaire le
travail soit bien engagé et qu'on puisse donner suite assez rapidement.
Mon objectif — et je
pense que ça fait part du rapport Corte-Desrosiers : de dire quelle est la
mesure la plus structurante qui va influencer sur l'accompagnement des personnes
victimes, quelle est cette mesure-là. Et je crois que ce qui a été identifié
dans le rapport, c'est la mise en place d'un tribunal spécialisé. Alors, pour
arriver au tribunal spécialisé, il y a toutes sortes de mesures à mettre en
place dans les différentes organisations, de l'accompagnement. On parle
beaucoup d'accompagnement, mais, ultimement, ce que le rapport nous dit, c'est
il faut avoir un lieu pour les personnes victimes d'agression sexuelle et
conjugale.
M.
Tanguay : Le ministre s'engage-t-il à rendre public le rapport préliminaire puis, le cas échéant, le rapport
final?
M. Jolin-Barrette :
Bien, écoutez, je ne sais pas si je peux le rendre public. Je vais en prendre connaissance.
Et vous comprendrez que ça va guider l'action gouvernementale, notamment, mais
je vais en prendre connaissance dans un premier temps, puis je vais évaluer si
je peux le rendre public.
M. Tanguay :
Oui, oui. Mais j'invite le ministre, il fera ce qu'il voudra, là, dans le sens
où on ne peut pas l'obliger, là, par un subpoena duces tecum, là, mais à le
rendre public, parce que, je veux dire, il n'y aura pas de renseignements
personnels là-dedans, c'est des acteurs centraux, puis, je pense, ça
participerait, justement, au débat public. Alors, je l'invite évidemment, dans
les jours qui suivront le préliminaire et, le cas échéant, le final à nous
rendre ça public, qu'on puisse en débattre.
Autre recommandation
importante, M. le Président, et ma question est sous l'angle : Est-ce
qu'actuellement les crédits alloués au ministère de la Justice permettent la
mise en oeuvre des mesures suivantes — alors, j'en aurai trois — la recommandation 25 du rapport Rebâtir
la confiance : «Octroyer à toutes les personnes victimes
d'agressions sexuelles ou de violence conjugale le droit à quatre heures de
conseils juridiques gratuits, dans tous les domaines du droit, et ce,
indépendamment de leur revenu.» Alors, est-ce qu'actuellement les crédits
alloués au ministère de la Justice lui permettent de donner suite à cette
recommandation?
M. Jolin-Barrette :
En fait, pour pouvoir donner suite à cette recommandation-là, je vais devoir
obtenir des sommes supplémentaires dans le cadre du budget de la Justice. Et on
a passé le premier cycle budgétaire et on travaille présentement à donner suite
à chacune des recommandations du rapport. Alors, ça fera partie des demandes
budgétaires que j'aurai, M. le Président.
M. Tanguay : Est-ce que
le ministre a en sa possession une évaluation de ce que représente cette somme
supplémentaire là, nécessaire?
M. Jolin-Barrette : Pas, à ce
stade-ci, en termes de montant. Mais, vous savez, on travaille sur chacune des mesures. Donc, au fur et à mesure... Vous savez,
on a passé beaucoup de temps ensemble, avec bonheur, dans le cadre du
projet de loi n° 84, de nombreuses heures ici. Donc, je me suis concentré
sur l'IVAC, et à partir de maintenant je vais me consacrer sur le rapport
Rebâtir la confiance pour donner suite à chacune des recommandations.
M. Tanguay : Est-ce que
le ministre a une sorte de tableau, parce qu'on ne peut pas lui faire grief de
ne pas tous les faire d'une seule journée, toutes en même temps, un tableau de
son échéancier des 190 recommandations? On
vient d'en parler... On vient de parler de quatre recommandations. Est-ce que
le ministre a un tableau, dire : O.K., ça, on pourrait faire exécution par voie législative, tel calendrier, par
voie administrative, demande de budget pour celle-là? Est-ce que le
ministre a un tableau qu'il pourrait nous partager quant à carte routière pour
la mise en application des 190 recommandations?
M. Jolin-Barrette : Bien, il
faut comprendre, dans un premier temps, dans le rapport Rebâtir la confiance, la
majorité des recommandations relève du ministère de la Justice, mais il y en a
plusieurs aussi qui relèvent du ministère de
la Santé et des Services sociaux ou du ministère de la Sécurité publique. Donc,
on travaille en collaboration avec les collègues ministres, et notre
objectif est de donner, le plus rapidement possible, suite aux recommandations.
Je donne un exemple. J'ai annoncé, peut-être il
y a un mois ou un mois et demi, avec Mme Dufour, je crois, du CAVAC de
l'Outaouais, Mme Kathleen Dufour, le Programme enfant témoin qui
allait être élargi à la grandeur du Québec. Alors, dès que j'ai le financement
requis et que la mesure est complète et travaillée, je peux annoncer la mesure,
elle est financée. Alors, ce que ça fait, ce programme-là, c'est que, dans
toutes les juridictions, les victimes d'agression sexuelle mineure, notamment,
vont avoir un soutien, un accompagnement d'une trentaine d'heures pour être
préparées à aller témoigner par rapport à des agressions sexuelles, notamment,
par des enfants... qui ont été commises sur des enfants. Alors, on a donné
suite à ça.
Et aussi on a donné le mandat, justement, de
développer le même type de programme, et le financement est attaché également,
pour faire en sorte que les personnes vulnérables qui ont à témoigner dans des
contextes de violence sexuelle ou de violence conjugale puissent le faire, de
la même façon que les enfants ont ce programme-là, le Programme enfant témoin.
Donc, on est train de... les CAVAC sont en train de développer ce programme pour
faire en sorte qu'une personne qui a un handicap physique ou mental ou une
personne qui a des dépendances ou une personne qui a été victime d'agression
sexuelle, ça soit adapté, qu'on puisse l'outiller pour bien... bien, en fait,
que son environnement à la cour, elle
connaisse l'environnement et qu'elle puisse être à l'aise pour le processus
judiciaire.
M. Tanguay : On va revirer ça
de bord. Les 190 recommandations, est-ce qu'il y en a, que le ministre
pourrait nous identifier, ou peut-être la réponse... dire : Non, il n'y en
a aucune, qu'il trouverait très difficile de mettre en application d'ici la fin
du mandat, peu importe la raison?
M. Jolin-Barrette : Est-ce qu'il y
en a qui sont très difficiles?
M. Tanguay : ...à mettre en
application techniquement, sur le plan législatif, administratif, budgétaire,
ou, aujourd'hui, il peut nous affirmer que non, avec... d'ici la fin du mandat,
il n'y a pas d'écueil majeur pour certaines recommandations quant à leur mise
en application?
M. Jolin-Barrette : Bien, je vous
dirais, pour celles qui relèvent du plan législatif, M. le Président, je
retournais la question au député de LaFontaine : tout dépendamment de la
collaboration que j'aurai des collègues des oppositions lorsque je déposerai un
projet de loi pour donner suite aux recommandations qui nécessitent un aspect
législatif. À ce moment-là, ça ne relève pas de moi ni de ma précipitation, M.
le Président, ça relève de la précipitation des collègues. Il y a certaines
recommandations, exemple la recommandation 64 relativement au Code
criminel, ça, c'est de juridiction fédérale. Alors, il y a des enjeux
relativement à ça, parce que, modifier le Code criminel, supposons, ça relève
du fédéral. Mais, d'entrée de jeu, notre objectif est de donner suite le plus
rapidement possible à toutes les mesures prévues dans le rapport.
Je voudrais juste faire un point également. J'ai
annoncé, avec mon collègue le ministre responsable des Affaires autochtones, au
mois de février ou mars, également des mesures, M. le Président, pour les
communautés autochtones, notamment davantage d'intervenants, des
parajudiciaires autochtones, davantage de personnes pour faire des rapports
Gladue aussi, qui font suite également aux recommandations du rapport, aussi,
dans le contexte autochtone, M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) : Merci.
M.
Tanguay : En rafale, deux recommandations. La 28 :
«Assurer dans les organismes d'aide aux victimes, une présence régulière et
suffisante d'avocats, avocates dédiés de l'aide juridique et de procureurs
dédiés du DPCP afin de combler les besoins de formation des intervenants et de
répondre à leurs questions juridiques spécifiques, de même qu'à celles des
personnes victimes.» Cette recommandation-là... Le ministre a-t-il l'intention
de mettre tout son poids derrière cette
recommandation-là afin qu'elle voie le jour de façon substantielle, partout au
Québec, rapidement?
• (9 h 50) •
M.
Jolin-Barrette : Oui. La réponse à cette question-là, c'est oui. On
est déjà en discussion avec le Directeur des poursuites criminelles et pénales
ainsi qu'avec la Commission des services juridiques. Notre objectif, là, c'est
vraiment d'outiller les personnes victimes, qu'elles se sentent le plus à
l'aise possible à travers le processus judiciaire. Donc, ça signifie, dès le
moment, là, où elles ont été victimes d'une infraction criminelle, qu'elles
puissent consulter un avocat, qu'elles puissent être accompagnées par le
Directeur des poursuites criminelles et pénales pour faire en sorte qu'elles
sachent dès le départ qu'est-ce que représente le système de justice, quelles
sont les règles, démystifier aussi les opinions qu'on peut avoir par rapport au
système de justice.
Et ça, je tiens à le
dire et à faire un point, M. le Président, ce n'est pas parce qu'une
victime de violence conjugale ou d'agression sexuelle ou de violence sexuelle
ne porte pas plainte à la police, M. le Président, qu'elle n'est pas sans
ressources. La démonstration, c'est qu'on a fait le projet de loi n° 84 et
le fardeau de preuve n'est pas le même. Alors, j'encourage toutes les victimes
de violence sexuelle et conjugale à... dans un premier temps, de consulter les
ressources qui leur sont offertes, notamment par l'IVAC, notamment d'être
indemnisées, d'obtenir le soutien pour qu'elles puissent retrouver une vie
normale, M. le Président. Dans un deuxième temps, aussi, M. le
Président, les acteurs du système de justice, les avocats au DPCP, les
techniciens juridiques, les membres du personnel judiciaire sont là pour
accompagner les personnes victimes à travers le processus. Il y a de
l'excellent travail, déjà, qui est fait. Je pense que c'est important de le
souligner.
Il
y a de l'amélioration à faire. Il y a eu des vagues de dénonciation au cours
des dernières années. Le fardeau de preuve en matière criminelle et
pénale, il est élevé, c'est hors de tout doute raisonnable. Il arrive que des
personnes victimes soient déçues des résultats. Cela étant dit, l'État québécois
est là pour soutenir les personnes victimes.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
Et la dernière recommandation à laquelle j'aimerais attirer l'attention du ministre,
29 : «Constituer une section spécialisée en matière d'agression sexuelle
et de violence conjugale au sein des bureaux d'aide
juridique.» J'imagine, à moins qu'il dise le contraire, que ses réponses
précédentes vont aller dans le sens également de son application.
Et
le ministre a raison quand il dit : Les victimes d'agression sexuelle, violence conjugale ne sont pas totalement sans ressource.
Mais l'on voit, encore une fois, jusqu'à tout récemment, qu'il manque des
outils, qu'il manque des leviers, que la confiance, là, rebâtir la confiance...
Elles ne sont pas sans ressource, mais on a énormément de choses à faire. Le
temps nous est compté, et j'invite le ministre, donc, à y aller de façon la
plus diligente possible, parce que, visiblement, on est très loin d'être
parfaits quant à l'accompagnement et à rebâtir cette confiance-là.
Le
Président (M. Bachand) : Très rapidement, M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Bien, M. le Président, on est en action depuis qu'on
est arrivés au gouvernement : projet de loi n° 55,
projet de loi n° 84. On a consacré des centaines de
millions de dollars pour les personnes victimes, chose qui n'a été pas faite
par les gouvernements successifs. Puis, à ce que je sache, M. le Président, les
vagues de dénonciation ne datent pas de cette année. Alors, nous, on agit, M.
le Président. On va continuer à agir pour les victimes de violence sexuelle et
conjugale. Puis, M. le Président, vous le savez, c'est un dossier qui me tient particulièrement
à coeur, et j'ai bien l'intention, M. le Président, de continuer à travailler
dans cette ligne.
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup.
Je cède maintenant la parole au porte-parole du deuxième groupe d'opposition en
matière de justice, M. le député de Gouin, pour 21 min 9 s. M.
le député, s'il vous plaît.
M.
Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président. Salutations au ministre, aux collègues
députés, à l'ensemble de nos invités, au personnel politique également.
Il y a quelques
sujets que je souhaite aborder aujourd'hui. J'ai une vingtaine de minutes. Je
vais y aller en rafale. D'abord, pour le ministre, lors de sa nomination comme ministre
de la Justice, il s'est montré particulièrement enthousiaste, voire empressé de
réformer le droit de la famille. On avait eu un échange lors des crédits
budgétaires du mois d'août dernier. Il était... il nous disait être... il nous
plaçait ce projet de loi ou ces projets de loi en haut de sa liste des
priorités. On est au mois d'avril. Comme l'indiquait le député de LaFontaine,
il reste deux sessions parlementaires, deux périodes de travaux. J'aimerais...
Et, depuis ce temps-là, en fait, le 1er avril dernier, il y a la loi fédérale
sur le divorce qui est entrée en vigueur. Ça comporte des avancées, des
protections supplémentaires pour les enfants qui sont exposés à la violence
conjugale, par extension, leurs mères aussi, dont les parents divorcent. Tout
ça, ça représente une occasion, là, un momentum, là, d'harmoniser le Code civil
avec la loi fédérale notamment. J'aimerais connaître l'échéancier de travail du
ministre, savoir quand est-ce qu'il entend déposer les projets de loi visant à
modifier le droit de la famille au Québec.
M.
Jolin-Barrette : Bon, c'est une question importante, M. le
Président. J'ai l'intention de déposer deux projets de loi, donc, en
deux phases distinctes. Le premier projet de loi, M. le Président,
que j'ai l'intention de déposer sera sur la filiation, la gestation pour
autrui, la connaissance des origines, M. le Président, et pour donner suite
également au jugement sur le Centre de lutte contre l'oppression des genres qui
nous impose de modifier la loi d'ici décembre 2021. Ça, c'est le premier
volet.
Le deuxième volet, la deuxième loi que j'ai
l'intention de déposer sera sur la conjugalité, qui fait suite, notamment, au
rapport sur le droit de la famille qui a été déposé en 2015. Alors, quand je
suis arrivé comme ministre de la Justice, M. le Président, j'en ai fait une
priorité, et on travaille activement sur la réforme du droit de la famille.
Et mon objectif, et pourquoi est-ce que je
débute par la filiation, M. le Président, et par la gestation pour autrui,
la procréation assistée, M. le Président, c'est parce qu'on veut s'assurer
que tous les enfants soient égaux devant la loi, et on ne veut pas qu'il y ait
de vide juridique, M. le Président, en termes de protection des enfants. Et ça
va de pair, M. le Président, avec, éventuellement... Vous savez que le rapport
Laurent va sortir, éventuellement, M. le Président. Je pense qu'au Québec on
doit s'assurer que, peu importe, pour un enfant qui naît sur le territoire
québécois, qu'il soit né en mariage, hors mariage ou qu'il soit issu d'une gestation
pour autrui, M. le Président, il faut que cet enfant-là ait les mêmes
droits. Et c'est la première des priorités en matière de droit de la famille.
C'est l'intérêt de l'enfant qui va guider nos actions.
Alors, pour savoir à quel moment je vais le déposer,
écoutez, je travaille activement là-dessus. J'ai été pris sur le projet de loi
n° 84 un bout de temps, mais c'est ma prochaine priorité.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de Gouin.
M. Nadeau-Dubois : Donc, le ministre
s'engage à déposer ces deux projets de loi avant la fin du mandat.
M. Jolin-Barrette : Oui,
certainement.
M. Nadeau-Dubois : Donc, il y aura
dépôt de deux projets de loi de réforme du droit de la famille avant qu'on s'en
aille tous en élection en 2022.
M. Jolin-Barrette : Bien, je ne peux
pas vous dire que les deux projets de loi seront déposés. Dans le fond,
présentement, je travaille sur la phase I de la réforme du droit de la
famille qui touche la filiation, qui touche la connaissance des origines, qui
touche la procréation assistée.
M. Nadeau-Dubois : Donc, ça, donc,
la phase I sera déposée assurément avant la fin du mandat. Pour ce qui est
de la phase II, c'est encore à voir. Est-ce que je comprends bien?
M. Jolin-Barrette : Bien, mon
souhait, ça serait de faire les deux phases avant la fin du mandat, mais,
matériellement, je vais commencer par la phase I, tout dépendamment la
rapidité et la vitesse à laquelle les travaux se déroulent ici, en cette
Assemblée.
M. Nadeau-Dubois : Oui. On sait que
ça tient beaucoup au leader au gouvernement, la rapidité avec laquelle les
travaux se déroulent. Bien, merci, ça répond à mes questions. Avec le
consentement des collègues, j'aurai des questions pour M. Tessier de la
Commission des droits de la personne et de la jeunesse.
Le Président (M.
Bachand) : Est-ce qu'il y a consentement? M. le ministre,
est-ce que vous êtes...
M. Jolin-Barrette : Sous
réserve de la question, M. le Président.
Le Président (M. Bachand) : O.K., merci. Alors donc, M. le député de Gouin.
M. Nadeau-Dubois : Toutes mes questions sont pertinentes. Le leader
du gouvernement, ministre
de la Justice le sait bien. Donc, je n'ai aucun doute qu'il va consentir
à ce que j'interroge notre invité sur un sujet qui est important.
On est en pleine crise sanitaire. Il y a un état
d'urgence sanitaire à l'heure actuelle qui a été mis en place par décret par le gouvernement du Québec. C'est
un décret qui donne au gouvernement des prérogatives assez importantes. La Loi
sur la santé publique permet au gouvernement de prolonger cet état d'urgence
par décret ou par vote de l'Assemblée nationale.
Il y a des voix qui se sont élevées dans la communauté
juridique, dans les réseaux de défense des droits et libertés, des gens qui
s'intéressent à l'État de droit puis à l'importance du respect des droits et
libertés dans la société québécoise qui ont questionné, des gens très
crédibles, très sérieux, là, on va placer les affaires tout de suite, là, pas
des gens qui nient l'existence d'une pandémie ou qui pensent que ce n'est pas
grave, que c'est une grippe, des gens très sérieux, très compétents, qui ont
exprimé certaines inquiétudes à l'égard de la manière de fonctionner du gouvernement,
c'est-à-dire de prolonger ce décret d'état d'urgence strictement par des votes
au Conseil des ministres plutôt que de passer par un vote de l'Assemblée
nationale.
La commission, comment dire, s'est vu confier, à
sa création, le mandat d'examiner les différentes lois, les différents règlements
au Québec puis d'examiner leur conformité ou non avec la charte des droits et
libertés. Puis la question plus générale du respect des
droits et libertés, c'est au coeur du mandat de la commission. J'aimerais
savoir : Est-ce que la commission a un avis sur la situation actuelle? Est-ce
qu'elle se pense sur les modalités de prolongation de l'état sanitaire? Est-ce
que ça fait partie de vos préoccupations?
Le Président (M.
Bachand) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui. Juste,
un premier temps, avant de céder la parole à Me Tessier, la Loi sur la
santé publique, à l'article 123 notamment, prévoit que l'état d'urgence
peut être déclaré soit par un vote à l'Assemblée nationale pour une période de
30 jours, soit par un décret renouvelable aux 10 jours. Le gouvernement
a fait le choix de renouveler par décret l'état d'urgence, M. le Président. Et
cette décision-là a été contrôlée par les tribunaux judiciaires, notamment la Cour
supérieure dans l'arrêt Bricka, M. le Président. Et je crois que c'est le juge
Riordan qui a rejeté les arguments relativement à la contestation du fait qu'on
aurait dû passer par l'Assemblée nationale, par un renouvellement à
l'Assemblée. Et le juge confirme la légalité de l'utilisation des décrets aux
10 jours pour renouveler l'état d'urgence sanitaire. Alors, je voulais
juste placer ça, M. le Président.
• (10 heures) •
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Donc,
Me Tessier.
M. Tessier (Philippe-André) : Merci,
M. le Président. Merci pour la question. Effectivement, la question de la
situation sanitaire a occupé beaucoup la commission dans la dernière année.
Dans un premier temps, peut-être juste rappeler, ça fait déjà un an, mais, au
début de la crise pandémique, la commission a mis sur pied un comité de veille
stratégique présidé par la vice-présidente charte de la commission,
Mme Myrlande Pierre, qui m'accompagne aujourd'hui. Et, dans le cadre de ce
comité, la commission a émis une quantité assez importante de lettres, d'avis
tant... publics, également auprès du gouvernement, pour s'assurer puis bien
baliser, parce que ce qu'on avait constaté à l'origine de la pandémie, c'est
que les personnes en situation de vulnérabilité étaient doublement vulnérables,
les aînés, les populations marginalisées, les... donc, et certaines communautés
aussi qui occupent des... qui font du travail dans le milieu de la santé, des
communautés racisées. Donc, la commission était initialement très préoccupée
par ça, et on a fait beaucoup, beaucoup de démarches en ce sens-là.
Par la suite, si vous vous souvenez, l'été
dernier, le débat, c'était sur le port du masque obligatoire. La commission a
émis un avis de conformité, au sens de l'article 9.1 de la charte, de
l'obligation du port du masque. Donc, et puis là, depuis l'automne et
dernièrement, c'est sûr et certain que nos représentations... Vous vous
souviendrez également qu'il y a eu contestation judiciaire du décret par
rapport à l'application du couvre-feu sur les personnes en situation
d'itinérance. La commission a interpelé directement le premier ministre à cet
égard-là, lui a demandé de modifier le décret pour le rendre conforme à la
situation de vulnérabilité des personnes en situation d'itinérance. Évidemment,
cette lettre-là a trouvé application dans le jugement qui... et le fait que le
Procureur général n'a pas appelé de cette
décision-là. Donc, la situation s'est régularisée de ce point de vue là. La
recommandation de la commission a été suivie, mais par la voie des tribunaux.
Donc, c'est sûr et certain que tous ces éléments-là, nous, on est en... on
travaille là-dessus.
Maintenant, c'est toujours la même chose en
situation pandémique, en situation de crise sanitaire, puis ça a été l'exercice qu'on a fait dans la dernière
année, c'est de concilier, oui, les droits prévus à 1 à 9 de la charte, les
balancer avec 9.1, qui est la disposition qui fait en sorte que l'intérêt
public, l'intérêt collectif doit aussi être pris en compte quand on regarde ces
éléments-là puis ces dispositions-là, pour s'assurer, évidemment, que les gens
ne décèdent pas de la COVID-19.
M. Nadeau-Dubois : Je me demandais
si la commission avait un avis spécifique sur la question des modalités de
prolongation de l'état d'urgence sanitaire. Parce qu'il y a un débat
actuellement, et ce n'est pas un débat juridique, hein, par ailleurs, les
tribunaux ont été clairs, c'est un débat politique du point de vue de la
légitimité entre des modalités de reconduction strictement au Conseil des
ministres ou à l'Assemblée nationale.
M. Tessier (Philippe-André) : Je
vais répondre très simplement à votre question. Lors de l'adoption de la Loi
sur la santé publique, c'était en 2000-2001 si ma mémoire est bonne, je n'étais
pas là, mais il me semble que c'est à peu près ça, la commission n'avait pas
pris de position. Donc, on a regardé à l'intérieur de la commission, là, dans
les avis, dans les mémoires, la commission n'avait pas pris position sur cet
élément spécifique. Alors, je vous dirais que c'est un élément qui nous
préoccupe pour la suite. Dans la mesure où la Loi sur la santé publique serait
révisée, c'est sûr et certain que la commission regardera cette question-là
attentivement.
M. Nadeau-Dubois : J'aimerais vous
entendre sur le couvre-feu, parce que vous venez de parler de l'impact de la
pandémie sur les populations plus vulnérables ou marginalisées. Vous aviez pris
position. J'allais... Bien, vous en avez vous-même parlé quand est venu le
moment d'appliquer ou non le couvre-feu aux personnes en situation
d'itinérance. Vous avez pris une position courageuse et juste, celle de
dire : On ne peut pas demander à des gens qui n'ont pas de chez-soi de
rester chez soi après 20 heures. Les tribunaux et l'opinion publique, je
pense, vous ont donné bien raison là-dessus. Le couvre-feu est une mesure, et
les voix commencent à se lever du côté des organismes de défense de droits, qui
a des conséquences différenciées selon le statut socioéconomique.
Bon. Moi, par exemple, j'ai une petite maison à Montréal, assez confortable, j'ai une petite cour, le
couvre-feu ne m'incommode pas trop, je peux sortir à l'extérieur. Il y a
des gens en situation de vulnérabilité, en situation de pauvreté
qui n'ont pas de balcon, pas de cour, peuvent être dans des appartements
surpeuplés, il y a des gens qui ont des problèmes de toxicomanie, il y a des
gens en situation de marginalité. Il y a des organismes en réduction des
méfaits, par exemple, qui ont témoigné à l'effet que la fréquentation de leurs
organismes a considérablement diminué depuis l'imposition d'un couvre-feu.
Donc, il y a vraiment, encore une fois, des gens très respectables, là, on est
dans ce domaine-là, qui émettent des préoccupations sur les conséquences du
couvre-feu sur les populations vulnérables ou marginalisées.
Je sais que, le 22 janvier dernier, vous
aviez demandé au gouvernement de collecter plus de données sur les conséquences
de la pandémie sur les catégories de la population les plus vulnérables au Québec.
Avez-vous obtenu ces données-là? Avez-vous des données sur l'impact du
couvre-feu sur les populations plus marginalisées? Est-ce que c'est un enjeu
qui vous interpelle? Est-ce que vous travaillez là-dessus? Est-ce que vous avez
l'intention de prendre position sur cette question-là?
Le Président (M.
Bachand) : M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Bien, simplement
rappeler, M. le Président, sur la question du couvre-feu, là, les questions du
député de Gouin sont légitimes, mais ça serait important, M. le Président, que
toutes les formations politiques appuient les mesures qui sont mises en place, M.
le Président, pour s'assurer de limiter la propagation de la pandémie. Et le
couvre-feu est une des mesures, M. le Président, qui permet de s'assurer de faire
en sorte qu'on réduit le nombre de cas au Québec,
qu'on réduit la transmission. Alors, mettre en doute les mesures de santé
publique qu'on met en oeuvre, M. le Président, pour s'assurer de protéger la population
du Québec, M. le Président, je vous le soumets, c'est un terrain glissant. Mais
je peux céder la parole.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de Gouin, allez-y,
oui.
M. Nadeau-Dubois : Bien, je vais
profiter de mon temps. Moi, j'essaie d'avoir une conversation intelligente,
ici, avec quelqu'un d'intelligent, au sujet de l'impact des mesures sanitaires
sur les populations les plus vulnérables. Si le ministre souhaite faire
descendre le débat dans le caniveau, je ne le suivrai pas. Ça fait que
j'aimerais avoir une discussion intelligente avec une personne très
intelligente dont l'expertise et le rôle dans la société québécoise, c'est de
se pencher sur l'impact des décisions gouvernementales sur les populations les
plus vulnérables. Moi, je crois que, dans une institution comme la nôtre, on
est capables d'aspirer à ces débats-là sans faire redescendre le débat dans les
plus bas étages. Ça ne me tente pas d'aller là. On appuie toutes les mesures
sanitaires à Québec solidaire, on invite tout le monde à les respecter. On
pense juste qu'il y a des choses dont il faut discuter, notamment l'impact de
ces mesures-là sur certaines parties de la population québécoise. Je suis sûr
que le ministre est capable, avec nous, d'avoir cette conversation-là.
Le Président (M.
Bachand) : M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Alors, M. le
Président, ça dépendra de l'évaluation que le député de Gouin fait de mon
intelligence, mais je vais essayer de m'insérer dans le débat quand même, M. le
Président. Tout au long de l'année qu'on a connue, au niveau de la pandémie, M.
le Président, les collègues des oppositions ont soulevé des doutes à de
multiples reprises, M. le Président, sur les règles demandées par la Santé
publique pour limiter la propagation de la pandémie. Alors, mon propos, M. le
Président, va en ce sens : Nous souhaitons la collaboration et l'adhésion
de chacun des parlementaires ici, en cette Chambre, pour faire en sorte, M. le
Président, de soutenir les mesures qui sont mises en place pour limiter la
propagation de la pandémie et surtout pour lutter efficacement. Mais, d'entrée
de jeu, je laisse la discussion au niveau intellectuel entre le député de Gouin
et Me Tessier.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Me Tessier, s'il vous plaît.
M. Tessier
(Philippe-André) : Oui.
Alors, pour ce qui est de la question du couvre-feu et de son impact, il est certain que, et je
pense que c'est une des préoccupations de notre commission, on voulait... vous
avez fait référence à certaines démarches que nous avons entreprises, nous
avons effectivement demandé à la Santé publique, à M. Arruda, Dr Arruda, le directeur national, de procéder à une
collecte de données, parce
qu'effectivement il est très difficile présentement
de savoir quel est l'impact et s'il y a impact disproportionné non seulement de
la pandémie mais également des mesures visant corriger la pandémie sur
certaines populations plus vulnérables. Ça, c'est pour ce qui en est.
Maintenant, peut-être ajouter un élément qui
est, je pense, important dans la considération. Puis je l'ai dit d'entrée de
jeu, l'exercice qui est celui de la Commission des droits de la personne et des
droits de la jeunesse, comme fiduciaire de la charte, est aussi de s'assurer
que le débat se fasse de façon sereine dans la population. Et un des éléments
que nous avons trouvé malheureux, comme commission, c'est que certaines
personnes — puis
ce n'est pas celle dont vous parliez, M. le Président, ce n'est pas celle dont
le député parlait, évidemment — se sont approprié un discours en
disant : C'est mes droits ou mes libertés, et en faisant, disons, une
interprétation quelque peu exagérée des principes prévus à la charte, qui, eux,
étaient... mettait à mal, si on veut, les protections et les garanties. Parce
que, quand on exagère un droit, bien, on vient nuire à l'équilibre et à
l'ensemble de ces droits-là, et c'est aussi de la préoccupation de notre
commission de s'assurer de ne pas jouer non plus dans ce discours et de jouer
un rôle équilibré, ce qu'on a tenté de faire tout au long de la dernière année.
Et, en conclusion, ce que
je voudrais juste ajouter, c'est que c'est sûr et certain que, la question du
couvre-feu, il y a plusieurs exceptions qui sont prévues par décret, il y a
plusieurs modalités qui sont prévues par décret. Ces modalités-là méritent
d'être bien connues. Le parallèle que je fais, c'est pour le port du masque. À
la commission, puis je le soumets à l'attention des députés, je pense que c'est
important que vous le sachiez, la plupart des plaintes que nous avons reçues
dans la dernière année en lien avec l'application des mesures sanitaires sont
celles avec le port du masque, parce qu'il y a une incompréhension, chez
plusieurs dans la population, sur les exceptions prévues au décret même. Et
donc on a un... nous, on fait un travail, à la commission, lorsque les plaintes
rentrent, pour dialoguer avec les mis en cause, donc les personnes qui refusent
l'accès, pour leur expliquer les exceptions qui sont prévues noir sur blanc au
décret. Donc, on a aussi ce travail-là qu'on a fait dans la dernière année.
• (10 h 10) •
Le Président
(M. Bachand) : M. le député de Gouin.
M. Nadeau-Dubois : Est-ce que
vous trouveriez pertinent que la Direction générale de la santé publique et/ou
l'INSPQ documentent les impacts du couvre-feu sur les populations plus, disons,
marginalisées ou vulnérables dont on discute vous et moi?
M. Tessier (Philippe-André) :
C'est une de nos demandes.
M. Nadeau-Dubois : O.K. C'est
aussi une demande de ma formation politique. Je suis content de savoir qu'on
partage cette proposition-là. Mais combien de temps est-ce que je dispose, M.
le Président?
Le Président
(M. Bachand) : Un peu plus de trois minutes.
M. Nadeau-Dubois : Un peu plus
de trois minutes. Bien, merci d'avoir... pour vos réponses à mes questions. Je
pense qu'en effet c'est important qu'on documente l'impact d'une mesure quand
même musclée comme le couvre-feu sur les gens les plus vulnérables de notre
société.
J'aurais une question pour le ministre de la
Justice. Il y a, au Canada et au Québec, une épidémie de surdoses, et ça a fait
prendre position beaucoup de gens en faveur d'une décriminalisation de la
possession simple de drogues. Je sais que
c'est un enjeu... le Code criminel est de compétence fédérale, mais le ministre
est un nationaliste, donc je suis sûr qu'il a des opinions quand même
sur ces choses-là. Il y a la Direction de la santé publique de Montréal, le
SPVM, l'Association canadienne des chefs de police, l'OMS qui ont fait cette
proposition d'aller vers une décriminalisation de la possession simple de
drogues. Qu'est-ce que pense le ministre de la Justice du Québec de cette question-là
puis de cette proposition-là qui vient de ces acteurs-là?
M. Jolin-Barrette : Bien, dans
un premier temps, M. le Président, je crois que l'on doit être prudents relativement
à la possession de stupéfiants, M. le Président, parce que, oui, il y a
certaines organisations qui font des recommandations relativement à la
déjudiciarisation et par rapport à certaines substances, il faut aussi garder
en tête, M. le Président, qu'il y a une
multitude de substances aussi pour lesquelles les gens sont accusés, et tout
dépendamment, notamment, M. le Président, de la nature de la substance aussi.
Alors, c'est un travail qui mérite réflexion, et on réfléchit, au ministère de la
Justice, relativement à ce sujet,
mais je pense que, comme dans tout débat aussi fondamental que celui-là,
il faut qu'il y ait un débat de société. Il faut que la population réfléchisse
aux conséquences d'amener une décriminalisation ou une déjudiciarisation. Il y
a certains États dans le monde qui l'ont fait, et c'est à géométrie variable,
les résultats rattachés à la décriminalisation de la possession simple aussi, M.
le Président. Alors, c'est un sujet très sérieux, et je pense qu'on doit être
prudents avec ce sujet.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de Gouin, s'il vous plaît.
M. Nadeau-Dubois : L'équivalent au
fédéral du DPCP a déjà, lui, donné une directive de ne plus entamer de
procédures pour possession simple de drogues. Je suis sûr que le ministre de la
Justice ne qualifie pas le DPCP au fédéral d'imprudent. Est-ce que c'est
quelque chose que le ministre de la Justice envisage au Québec?
Le Président (M.
Bachand) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : De
décriminaliser, non. De déjudiciariser, peut-être que c'est une avenue qui
pourrait être envisagée éventuellement. Mais il faut toujours se rappeler, M.
le Président, qu'il y a plusieurs composantes à cette problématique qui est
complexe : il y a des questions de dépendance, il y a des questions de
personnes vulnérables qui consomment, il y a des questions de crime organisé,
il y a la question de la santé de la population aussi. Alors, c'est un dossier
fort complexe qui mérite une réflexion approfondie, et je suis présentement
dans le cadre d'une réflexion, le ministère de la Justice travaille sur cette
réflexion-là, mais je crois que... et ça devient une question de société,
aussi, fort importante. Alors, certains États l'ont fait, certains États également...
Le Président (M.
Bachand) : ...s'il vous plaît.
M.
Jolin-Barrette :
...durcissent la possession, la criminalisation aussi. Alors, ça mérite une
réflexion approfondie.
Le Président (M. Bachand) : Merci. Merci beaucoup, M. le ministre. Merci, M.
le député de Gouin. Maintenant, le député de LaFontaine, s'il vous
plaît.
M. Tanguay : Pour combien de
temps déjà?
Le Président (M.
Bachand) : C'est 21 min 10 s.
M. Tanguay :
21 min 10 s, parfait. Merci beaucoup. J'aimerais que le ministre
puisse peut-être nous redonner, s'il vous plaît, la phase I, droit
de la famille, quels sont les sujets. Je vais vous laisser les dire,
phase I.
M. Jolin-Barrette : Donc, dans la phase I,
j'ai l'intention de traiter de la filiation relativement à l'intérêt de
l'enfant, la connaissance des origines, la gestation pour autrui, et notamment
de donner suite au jugement de la Cour supérieure relativement au jugement, là,
centre de l'oppression des genres, qui nous invite... en fait, qui oblige le
législateur à modifier son corpus législatif. Et ce dossier-là, d'ailleurs, il
y a un des points qu'on a portés en appel, relativement aux enfants de plus de
14 ans de consulter un professionnel.
M. Tanguay : Ça, ce sera
l'entièreté de la phase I. La phase II, est-ce qu'il peut répéter les
sujets, phase II?
M. Jolin-Barrette : Donc, au
niveau de la phase II, c'est la conjugalité, donc tout ce qui concerne les
rapports entre conjoints.
M. Tanguay : O.K. Là, je
parle au ministre de la Justice, je parle au leader, puis j'interpelle mes
collègues également, qui ont beaucoup d'expérience, autour de la table. Je dis
une chose excessivement importante au ministre. Il y a une obligation de donner
suite au jugement de la Cour supérieure d'ici décembre prochain. Ne mettez
pas... Cet impératif, ce couperet-là, ne le mélangez pas avec des questions qui
touchent tous les Québécois — puis je vous vois avec votre sourire de
leader efficace : filiation, gestion pour autrui, connaissance des
origines. Je ne veux pas — je
vous envoie le signal, c'est clair — qu'on soit pressés, avec
fusil sur la tempe, pour adopter tout ça en décembre, parce qu'il y a
x nombres d'articles que l'on doit absolument adopter d'ici décembre. Je
vous le dis, là, ça, on n'achètera pas ça. Alors, si vous voulez déposer un
projet de loi qui donne suite au jugement, on va l'adopter de façon
excessivement efficace et efficiente, mais ne mettez pas cet ingrédient-là pour
après ça nous dire : Ah! bien, vous êtes... vous retardez l'adoption de
toute cette enveloppe-là. Puis je vois mon collègue de Chomedey qui a déjà
présidé quelques heures, là, des commissions parlementaires. Je vous le dis,
là. Comment vous recevez mon commentaire? N'allez pas mélanger les deux choses,
parce qu'on ne veut pas d'échéancier puis de «gun» sur la tempe d'ici décembre
pour des questions qui touchent tous les Québécois. Alors, j'aimerais savoir
comment vous recevez mon commentaire.
Le Président (M.
Bachand) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien,
écoutez, M. le Président, je prends le commentaire du député de LaFontaine
comme une mise en garde. Alors, je vais tenter de me gouverner en conséquence,
M. le Président. Mais, vous savez, mon travail n'est pas de faire plaisir au
député de LaFontaine. Mon travail est de répondre aux demandes des Québécois
d'avoir une réforme du droit de la famille, réforme qui aurait dû avoir lieu
sous l'ancien gouvernement libéral, parce que le rapport date de 2015. Et, je
me souviens, on lisait dans les journaux qu'au bureau du premier ministre, le
premier ministre Couillard, on disait : On ne sait pas par quel bout le
prendre, la réforme du droit de famille, M. le Président.
Alors, durant des années, il y a des enfants qui
n'ont pas eu la même protection juridique parce qu'ils étaient nés hors
mariage. Et on va s'assurer que tous les enfants au Québec, qu'ils soient nés
dans le mariage ou hors mariage ou qu'ils soient nés en gestation pour autrui,
M. le Président, ils puissent bénéficier des mêmes droits, d'avoir notamment
droit à la filiation, d'avoir notamment droit à la connaissance de ses origines
aussi. Et surtout je crois que c'est important de donner suite au jugement de
la Cour supérieure aussi.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup.
M. Jolin-Barrette : Alors, la
mécanique, le véhicule législatif, le député de LaFontaine pourra la critiquer.
Je ne dis pas qu'on va aller là, mais on travaille tellement bien ensemble, M.
le Président, que les délais, pour moi, je ne pense pas que ça va être un
enjeu.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Merci beaucoup.
Alors, effectivement, heureux de souligner qu'on travaille très bien ensemble.
Ne mettez pas cette épée de Damoclès là au-dessus de nos têtes pour qu'on ait
le temps. Puis, être le ministre, je prendrais garde, à la place du ministre,
de comparer les délais de l'administration précédente. Le rapport Roy est de
2016, ce qui laissait deux ans au mandat. Le rapport Roy, il a cinq ans, ce qui
fait en sorte qu'il y a déjà trois ans de passés sur leur mandat, alors... puis
là on va y aller en phase I, phase II dans les deux dernières
sessions parlementaires. Puis là j'invite le ministre à faire
en sorte que, la phase I, là, on ne bâcle pas ça, qu'on ne bâcle pas ça
d'ici décembre.
M. Jolin-Barrette : Juin 2015, M. le
Président, juin 2015, le rapport d'Alain Roy.
M. Tanguay : Bon, il a
raison, trois ans-trois ans. Trois ans-trois ans, un, de deux, ça fait six ans.
M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez, M.
le Président, moi, je sais que je suis ministre de la Justice depuis juin, et ça
va être déposé.
M. Tanguay : Ah! O.K. Ce
n'est pas gentil pour sa prédécesseure, mais c'est correct. M. le Président,
avec le sourire dans la voix et sur les lèvres, j'aimerais maintenant me
tourner vers le nouveau DPCP, Me Patrick Michel. Félicitations pour votre...
Est-ce qu'il y a consentement à lui adresser la parole, M. le Président?
• (10 h 20) •
Le Président (M.
Bachand) : Est-ce qu'il y a consentement?
M. Jolin-Barrette : Sous réserve de
la question, M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) : Il y a consentement, et, M. le
ministre...
M. Tanguay : Ça fait la
première fois que j'entends ça : Sous réserve de la question.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député.
M. Tanguay : O.K. Alors, j'étais en train de féliciter
Me Michel. Félicitations... votre nomination à l'unanimité de l'Assemblée
nationale. Vous avez des défis, évidemment, importants.
J'aimerais vous entendre au niveau de
l'importante présence médiatique du DPCP. Le DPCP, je crois, on peut le
reconnaître, doit être davantage présent. Je ne suis pas en train de dire...
Vous le savez mieux que quiconque, on le voit à votre C.V., vous connaissez
l'historique du DPCP, la nécessité d'avoir une juste réserve, mais aussi de
faire oeuvre pédagogique, d'expliquer les choses. Comment, Me Michel, vous
comptez faire en sorte que le DPCP soit plus présent, toujours en gardant, évidemment,
son rôle, mais plus présent dans les médias, puis qu'un matin on vous entende à
la radio, vous ou votre représentant, représentante? Puis, dans des cas... puis
on a eu des cas récents, là, où on aurait aimé que le DPCP vienne expliquer
certaines choses, remette en contexte, ainsi de suite. Alors, comment vous
allez mettre en application ce désir-là?
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Me Patrick
Michel, s'il vous plaît.
M. Tanguay : C'est-u correct? Il peut-u répondre?
Le Président (M.
Bachand) : C'est beau. Me Michel.
M. Michel (Patrick) : Merci, M. le
Président. Merci, M. le député de LaFontaine, pour votre question. Je prends un
petit deux secondes pour remercier tous les représentants des différentes formations
politiques qui ont appuyé ma nomination. J'en suis honoré, et je vous remercie
de votre confiance.
Pour ce qui est de votre question... de la
question, pardon, de M. le député de LaFontaine, M. le Président, évidemment, j'étais bien conscient, en postulant sur le poste, en soumettant ma candidature, qu'il y a
des attentes élevées, plus élevées
que jamais en matière d'imputabilité
personnelle, de façon générale, à l'égard des dirigeants d'organisme en
général, en particulier, peut-être, à l'égard du DPCP. Alors, j'en ai la pleine
conscience, j'en prends la pleine mesure.
Et, oui, il y aura... il y a certainement des
situations dont, disons, la gravité ou l'importance va commander que le
Directeur des poursuites criminelles et pénales s'adresse à la population.
Maintenant, la direction du Directeur des poursuites criminelles et pénales,
dans mon esprit, ce n'est pas seulement moi seul qui incarne cette
direction-là. Cette direction-là est incarnée aussi par le directeur adjoint,
par les différents procureurs en chef du Directeur des poursuites criminelles
et pénales, qui seront aussi appelés à prendre la parole lorsque la situation
le commandera. Alors, oui, j'ai l'intention d'être plus présent dans les
médias, et je le serai dans les prochains jours d'ailleurs.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Oui. Bien,
heureux de savoir, effectivement, que vous allez être, dans les prochains jours...
Effectivement, peut-être une petite tournée des médias, ce n'est pas à moi à
vous dire comment remplir votre mandat, mais ça pourrait déjà établir les
bonnes lignes de communication. Donc, heureux de vous entendre que, dans les prochains jours, vous aurez l'occasion,
peut-être, de faire une petite tournée des médias pour qu'on vous
connaisse mieux, «on» étant la population en général, et que les médias aient
le réflexe DPCP. Puis il y a des fois que vous ne pourrez pas du tout
commenter, mais des fois que vous pourrez faire oeuvre pédagogique. Ça, je suis
heureux de vous l'entendre dire.
Deuxième volet que
j'aimerais aborder avec vous : la nécessité d'améliorer — c'est
moi qui parle, là, c'est de même que je le
qualifie — les
relations, la collaboration entre le DPCP, les procureurs et les corps
policiers. Quelle est votre évaluation de ce défi-là? Et comment
entendez-vous modifier la situation, bonifier cette collaboration-là?
Le Président (M.
Bachand) : Me Michel.
M. Michel (Patrick) : Oui. Alors,
merci, M. le Président. Je vous dirais que c'est clairement une priorité, en
fait, pour moi, d'établir, disons, les ponts, les relations avec les directeurs
des différents corps de police. J'ai commencé à le faire. Malheureusement, en
72 ou 80 quelques heures, je n'ai pas encore réussi à m'adresser à chacun
des directeurs de corps de police. Le message que j'envoie, en fait, c'est que
le DPCP est dans un esprit de collaboration avec eux. Il a pu y avoir des
tensions qui ont surgi dans les rapports entre les corps de police et les
procureurs. Je tiens à voir, à explorer cette situation-là, à comprendre
quelles sont les origines de ces tensions-là et... parce qu'au bout du compte
nous avons des rôles différents, des responsabilités différentes à assumer,
mais nous faisons équipe ultimement. Si on ramène les choses à leur plus simple
expression, nous faisons équipe avec nos partenaires policiers dans la lutte au
crime.
Le Président
(M. Bachand) : Merci. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Donc, de
façon un peu plus tangible, comment vous abordez ce défi-là dans les prochains
jours, semaines? Comment vous allez réaliser ça de façon un peu plus tangible?
M. Michel (Patrick) : Bien, il
faut que je commence par établir des contacts. J'ai commencé à le faire avec
des collaborateurs que j'ai fréquentés, ou, disons, avec lesquels j'ai eu
l'occasion de travailler, la Sûreté du Québec, au SPVQ, dans mon passé. Je n'ai
pas eu le temps d'établir cette communication-là avec tout et chacun des corps
de police. Je ne pourrai probablement pas le faire avec tous les corps de
police, mais j'ai l'intention de communiquer avec le nouveau président de
l'ADPQ prochainement.
Et, très concrètement, je crois qu'on est dus,
entre la police et la couronne, pour, je dirais, un lac-à-l'épaule, une
réflexion, une mise au point sur l'état des relations, bien comprendre. Nous,
on a des choses à expliquer aux corps de police quant à nos exigences. Il y a
une perception que nos exigences sont plus importantes en termes de qualité de
dossiers, qualité d'enquêtes, qualité de preuves. Il y a des raisons. Je vous
en... Ça serait fastidieux de toutes les exposer. Il y a des raisons juridiques
et opérationnelles qui justifient ces nouvelles exigences-là. Il faut peut-être
les expliquer. Les expliquer davantage, c'est déjà un début pour atténuer les
perceptions qu'il y aurait tension entre nous et la police.
M. Tanguay : O.K. On
pourrait peut-être même dire que les effets de l'arrêt Jordan se font sentir en
amont aussi, parce que, quand vous déposez un dossier, l'horloge part. Donc,
jadis, j'imagine qu'on pouvait avoir un petit peu plus de lousse, si vous me
permettez l'expression, puis parfaire la preuve, mais là, dans notre jeu, là,
si l'atout est en coeur, il faut avoir l'as, la dame, le 10, puis un chien de
coeur, là. Autrement dit, je comprends qu'il peut y avoir, là aussi, une certaine frustration chez les corps
policiers, dire : Bien, c'est le fruit de mon travail, puis tu me renvoies
à mes... Donc, il y a ça aussi. Je pense qu'en ayant une discussion honnête et
franche sur cela... je pense que ça va être important.
Puis j'aime votre expression, lac-à-l'épaule, et j'imagine aussi — j'aimerais vous entendre là-dessus — qu'il
n'y a pas juste dans les hautes sphères, mais dans tous les niveaux
hiérarchiques des organisations également.
Le Président
(M. Bachand) : Me Michel, oui.
M. Michel (Patrick) : Oui,
merci. Bien, tout à fait. Comme vous le dites, alors, la collaboration, ça se
manifeste et ça se vit au quotidien sur le terrain entre les procureurs et
entre les policiers qui oeuvrent en première ligne, mais il faut comprendre que
l'esprit de ces communications-là et de cette collaboration-là, bien, ça doit
être convenu entre les dirigeants, et les messages doivent descendre dans les
organisations.
Par rapport à la question des exigences, oui, il
y a la qualité du dossier, ou, en fait, ce que nous, on appelle le dossier
complet, là, pour éviter qu'on s'enlise dans des débats de divulgation de la
preuve avant d'arriver au coeur du procès
puis à la détermination de la crédibilité, mais on tente aussi, autant que
faire se peut, d'anticiper et d'éviter des débats juridiques par rapport...
en matière d'admissibilité de preuve,
débats dans lesquels on pourrait s'enliser inutilement. Alors, il est possible aussi que, dans nos
conseils auprès des corps de police, on soit, disons, plus prudents, pas parce qu'on craint de plaider une requête ou
d'affronter une requête à la cour, mais parce qu'idéalement on
souhaiterait l'éviter pour bien contrôler nos délais et s'assurer que le procès
soit toujours focussé sur la question ultime : la culpabilité.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Quelle est votre
réflexion au niveau du rassemblement de plusieurs causes, là, des procès, là,
avec un intimé, deux intimés, trois intimés, 20 défendeurs... pas des
défendeurs, mais des parties poursuivies, les mégaprocès, et tout ça? Est-ce
qu'on a une réflexion... Avez-vous une réflexion à avoir là-dessus, sur
l'efficacité de la justice quand on veut regrouper différentes causes ensemble
et qu'on va toujours à la vitesse de la plus lente? Je ne sais pas quelle est
votre réflexion là-dessus.
Le
Président (M. Bachand) : Me Michel.
M. Michel (Patrick) : Oui, merci, M.
le Président. Alors, bien, on a fait une grande réflexion sur cette
question-là, et le mérite ne m'en revient pas, mais à mes prédécesseurs, suite
à l'arrêt des procédures dans le procès... dans le dossier SharQc. Vous le
savez, il y a eu un examen conduit par Michel Bouchard, un ancien
sous-procureur général qui a été procureur de la couronne, qui nous a fait des
recommandations. On a intégré la plupart de ces recommandations-là dans nos
pratiques. Je vous dirais que la formule des mégaprocès classiques, là, comme
on a pu le concevoir à l'époque de SharQc, même à l'époque de Printemps 2001,
au début des années 2000, c'est un peu révolu. On s'enligne vraiment
autrement depuis quelques années.
Maintenant, on ne peut pas écarter que certains
dossiers... On ne peut pas écarter complètement, là, les dossiers à multiples
accusés, parce que, des fois, on peut imaginer que la preuve est tellement
interreliée, c'est vraiment une aventure commune. Ça va être difficile de
dissocier l'intervention de tout un chacun des intervenants et, au contraire,
ça pourrait être de nature à multiplier les procédures puis l'utilisation des
ressources judiciaires que de diviser de multiples procès... de créer de
multiples procès pour un dossier qui repose essentiellement sur la même preuve. Alors, c'est vraiment une analyse de
coût-bénéfice qu'on doit faire au moment où on élabore l'acte
d'accusation, notre stratégie d'accusation.
• (10 h 30) •
M. Tanguay : Merci beaucoup.
On va parler, évidemment, de votre... de la force de travail, qui sont les
procureurs. Vous avez pris connaissance de la lettre du 22 mars 2021
du président de l'Association des procureurs aux poursuites criminelles et
pénales, qui parle, évidemment, de problèmes de santé mentale criants, d'un
manque de ressources, tenir le système de justice à bout de bras, mais à bout
de force, approche budgétaire un peu pas mal rigide qui participe à ça
également, on parlait du temps supplémentaire, et ainsi de suite. Bref, santé
mentale, procureurs aux poursuites criminelles et pénales ne sont pas
désincarnés de la population en général, où on voit qu'il y a des problèmes de
santé mentale.
Mais une fois qu'on a dit ça, c'était déjà, même
avant la pandémie, un enjeu. J'ai devant moi, ici, le rapport
d'avril 2019, Enquête sur la santé des procureurs de la couronne du Québec.
45 % ont signalé des niveaux élevés d'épuisement professionnel. Ça, c'est
un an avant la pandémie. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus. Quel est
votre plan de match, à l'interne, pour que l'on ait des procureurs qui puissent
être évidemment moins sous la pression et moins en détresse psychologique? Mais
il y a un épuisement professionnel, et la santé mentale... leur santé mentale
en est clairement affectée, et la lettre de mars dernier était un cri du coeur,
là. Alors, à court, moyen terme, j'aimerais savoir comment vous abordez cet enjeu
interne là, majeur.
Le Président (M.
Bachand) : Me Michel.
M. Michel (Patrick) : Merci,
M. le Président. Merci pour votre question. J'ai déjà, d'entrée de jeu, en
fait, communiqué avec un représentant de l'association, de l'exécutif de l'Association
des procureurs aux poursuites criminelles et pénales pour convenir qu'il
fallait s'asseoir assez rapidement pour faire le point sur le contenu de cette
lettre-là. Je me garde une réserve, je ne voudrais pas m'engager dans un débat
public, là, point par point, sur le contenu de cette lettre. Je la prends très
au sérieux.
Évidemment, lorsqu'on parle de santé mentale, en
général, dans la société, mais chez nous, au DPCP, c'est une priorité, cette priorité-là, elle se manifeste
dans nos programmes d'aide aux employés, elle se manifeste aussi dans
les formations que nous demandons à nos gestionnaires de suivre en matière de
santé mentale pour être capables d'identifier en temps opportun et intervenir
en temps opportun auprès des employés qui en souffrent. Alors, ça va... c'était
une priorité et ça va demeurer une priorité.
Maintenant, sur l'ensemble de ce qui se trouve
exposé, des problématiques qui se trouvent exposées dans la correspondance de l'association, je vous dirais
que, personnellement, pour avoir dirigé un bureau de 25 procureurs — c'est
sûr que c'est un petit échantillon, mais c'est quand même un échantillon assez
représentatif — en
tout respect, la situation ne m'apparaît pas
aussi sombre et aussi généralement sombre qu'on le dépeint dans cette correspondance-là. Alors, c'est pour ça que je veux prendre le temps
de faire le point avec l'association, point par point. Moi aussi, j'ai
des choses à leur dire sur certaines perceptions qu'ils peuvent avoir de la
charge de travail, de la santé des procureurs.
Et je profite aussi de l'occasion pour vous
exprimer que, disons, la personne que l'on dépeint dans cette
correspondance-là, en la personne de mon collègue, Me Martinbeault, je le
fréquente, comme gestionnaire, depuis huit ans, nous avons été collègues, il a
été mon patron, nous sommes à nouveau collègues, et ce qui est dépeint par
l'association, en tout respect, ça ne correspond pas à la perception que j'ai
de Me Martinbeault.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
Et je vous réfère encore une fois au rapport d'avril 2019 de
Dre Nathalie Gagnon et Dre Lisa Kitt, là, qui donnait des
statistiques, là : 28 % des participants remplissaient les critères
de dépression, 61 % ont des résultats élevés concernant au moins la
dépression, l'anxiété généralisée, symptômes de stress post-traumatique et
épuisement professionnel. Donc, avant la lettre, avant la pandémie, il y avait
ça. C'est votre défi aujourd'hui.
Pour les quelques secondes qui restent,
computation des requêtes Jordan, le DPCP collabore avec le ministère de la
Justice. On va-tu avoir un jour l'information quant au nombre de requêtes d'accusés
libérés à la suite d'une requête Jordan? Est-ce que les statistiques seront
disponibles bientôt?
Le
Président (M. Bachand) : Me Michel.
M. Michel (Patrick) : Oui. Merci, M.
le Président. Alors, on parle bien des arrêts de procédures judiciaires?
M. Tanguay : Exact. Autrement
dit... Je croyais... je vais... il me reste une minute, je croyais qu'il
restait quelques secondes, je vais prendre le temps de formuler comme du monde
ma question. Statistiques sur le nombre d'accusés libérés à la suite d'une
requête Jordan, requête en arrêt des procédures, ce n'était pas disponible,
c'était compliqué pour avoir les chiffres, tout ça. À la fin de la réponse,
page 86, là, des renseignements particuliers : «Le DPCP collabore à
des travaux menés par le ministère de la Justice Québec, qui devraient lui
permettre à terme de colliger cette information relative aux arrêts Jordan.»
Donc, on parle, à terme, de quand on va avoir cet outil-là? Et jusqu'où
sera-t-il fiable et complet pour tout le Québec?
Le Président (M.
Bachand) : Rapidement, Me Michel, s'il vous plaît.
M. Michel (Patrick) : Quelques
secondes, oui. Alors, je ne veux pas vendre la mèche de mes collègues du
ministère de la Justice qui vont probablement me suivre, mais nous avons effectivement
collaboré à des travaux avec le ministère de la Justice pour que des
modifications soient apportées au plumitif afin qu'on soit en mesure de
compiler les arrêts de procédures prononcés suite à une requête. On m'informe
que ces travaux-là aboutissent prochainement. Ils vont permettre la compilation
des arrêts de procédures, mais pas nécessairement la compilation des requêtes,
mais uniquement... En fait, on va savoir combien il y a eu d'arrêts de
procédures prononcés par le juge pour un motif de délai suite à une requête de
la défense.
M. Tanguay :
O.K. Merci.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Mme la députée de Joliette, s'il
vous plaît.
Mme
Hivon : Merci
beaucoup, M. le Président. À mon tour de saluer le ministre, toute son équipe,
les dirigeants d'organismes et mes collègues.
Donc, je vais
y aller sur le rapport Rebâtir la confiance, je pense
que c'est un enjeu extrêmement important. Depuis quelques années, on
entend à quel point il y a une désaffection des victimes à l'égard du système
de justice, du système policier, donc, dans son ensemble,
particulièrement dans les crimes d'agression sexuelle et de
violence conjugale.
Donc, première question en lien avec différentes
recommandations du rapport : Est-ce que le ministre peut nous dire...
Tantôt, je l'ai entendu affirmer, donc, qu'il allait commencer sa réforme du
droit de la famille avec la filiation plutôt que la conjugalité. Mais est-ce
qu'il peut tout de suite prendre l'engagement de faire en sorte que, dans sa
réforme du droit de la famille, l'élément de la violence, de la présence de
violence conjugale va être pris en compte quand on parle du meilleur intérêt de
l'enfant, notamment dans les ordonnances de garde?
Le Président (M.
Bachand) : M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Oui. Dans le
cadre de l'intérêt de l'enfant, à l'article 33 du Code civil du Québec,
j'ai l'intention de faire référence à la violence familiale. Alors, on veut
donner suite aux recommandations du rapport. Et, vous savez, ça constitue un
enjeu bien souvent dans le cadre de la garde des enfants, dans le cadre d'un
litige entre parents, entre conjoints qui se divorcent ou des conjoints de fait
qui se séparent. Alors, très certainement, on va faire écho aux recommandations
du rapport à l'article 33, l'article qui fait part de l'intérêt de
l'enfant.
Mme
Hivon : Puis juste
pour être certaine, quand le ministre parle de violence familiale, il inclut bien
sûr de la violence entre conjoints, qui, évidemment, se répercute sur la vie
des enfants, et non pas uniquement de violence à l'égard des enfants.
M. Jolin-Barrette : Effectivement, parce
que ça fait part, dans le fond, de l'environnement familial. Donc, on veut...
Et on a entendu toutes sortes de situations que, à titre d'exemple, certaines
femmes victimes de violence conjugale qui étaient en instance de séparation,
supposons, disaient : Bien, je ne veux pas alléguer la violence conjugale
que j'ai subie parce que je ne veux pas que ce soit retenu contre moi par le
tribunal pour ne pas avoir la garde de mes enfants. Ça, c'est horrible, et il
ne faut pas que ça se produise.
Dans le fond, si une personne est victime de
violence conjugale, il faut qu'elle puisse dénoncer. Il ne faut pas que ça ait
d'impact sur la garde des enfants dans l'évaluation du juge pour consacrer la
garde, et, au contraire, ça devrait être pris en considération dans le portrait
général. Je crois qu'il ne doit pas y avoir d'éléments qui doivent être cachés
au tribunal. Et je pense que nos règles... puis l'intérêt de l'enfant doit
militer en faveur du fait que ça soit pris en considération pour le juge et où
l'enfant est en sécurité et où va son intérêt.
Mme
Hivon : Dans cette
même foulée là de la question, je dirais, de la prise en compte de toute cette
réalité-là liée notamment à la violence conjugale, il y a un chapitre complet
qui est dédié, le chapitre 11, qui est d'assurer la cohérence du système
judiciaire. Parce qu'on sait à quel point quelqu'un qui est aux prises avec de
la violence conjugale, il peut y avoir des impacts en chambre
criminelle, en chambre de la jeunesse, et il y a deux recommandations
très précises. Donc, l'idée d'un projet pilote «une
famille, un juge», pour faire en sorte que le même juge puisse s'occuper autant des aspects de jeunesse,
protection de la jeunesse, que criminelle, puisque c'est à l'intérieur de la Cour du Québec,
est-ce que le ministre entend avoir des discussions pour un tel projet pilote et, si oui, dans quel échéancier?
Et la deuxième, c'est la recommandation 153
qui recommande, de manière, selon moi, centrale, de créer des postes de
coordonnateurs pour faire la liaison, non seulement à l'intérieur des chambres
de la Cour du Québec, mais avec les instances de la Cour supérieure pour les
litiges familiaux, le cas échéant, dans ces circonstances-là de violence
conjugale. Est-ce que le ministre peut nous dire s'il va donner suite et avec
quel échéancier?
• (10 h 40) •
M. Jolin-Barrette : La réponse à la question,
c'est oui, j'ai l'intention de donner suite. En ce qui concerne l'échéancier, écoutez,
ça, ça fait part de discussions qu'on doit avoir notamment avec la cour, avec
la magistrature. Alors, tout le monde travaille dans la... bien, en fait, le ministère
de la Justice, et je travaille dans la direction de donner suite aux recommandations
du rapport.
Et il faut comprendre qu'une personne, là, qui
vit une séparation avec des enfants, là, là, on est dans une situation, M. le
Président, où, si vous êtes marié, vous vous retrouvez à la Cour supérieure. Si
vous êtes... S'il y a la DPJ, vous vous retrouvez à la chambre de la jeunesse à
la Cour du Québec. Puis si, en plus, il y a des voies de fait ou de la violence
conjugale, vous vous retrouvez à la Cour du Québec chambre criminelle et
pénale. Donc, voyez-vous, il faut simplifier.
Mme
Hivon : C'est exactement
le sens de la demande, donc, c'est d'être sûr que le ministre va agir. Et je
veux savoir si ces dispositions-là, ces recommandations-là ont fait l'objet, à
ce jour, de discussions avec la cour.
M. Jolin-Barrette : Dans le fond, ça
va faire partie notamment du tribunal spécialisé, parce que ça fait part de ça.
Il y a l'aspect également en droit de la famille aussi. Il faut se pencher sur
la recommandation du rapport Corte-Desrosiers, qui fait part du tribunal unifié
en droit de la famille. Moi, j'envisage positivement une telle instance pour
simplifier le processus judiciaire des familles, notamment, mais il faut
s'assurer qu'un tribunal unifié se fasse à la Cour du Québec et ne se fasse pas
à la Cour supérieure. Ça, c'est fondamental.
Mme
Hivon : On se
comprend toutefois, M. le Président, que c'est deux choses très différentes,
tribunal unifié versus tribunal spécialisé,
bien qu'il puisse y avoir des liens, là. Un tribunal spécialisé, on parle bien
d'un tribunal spécialisé violence conjugale, violence sexuelle, qui pourra avoir des liens, et donc une meilleure
circulation de l'information, mais ce sont deux choses différentes. Je veux juste un oui ou non, là,
pour être sûre qu'on se comprend bien sur ça.
M.
Jolin-Barrette : Bien, oui,
ce sont deux choses distinctes, sauf... ce sont deux recommandations
distinctes du rapport Corte-Desrosiers, et là on me demande, M. le Président,
de donner suite à toutes les recommandations. Alors, j'ai l'intention de donner
suite à toutes les recommandations. Puis, dans le fond, la recommandation 149,
c'est un tribunal unifié en droit de la famille. Alors, oui, c'est deux choses
distinctes, mais je souhaite donner suite à tout ça.
Mme
Hivon : Oui. Le
défi, M. le Président, c'est d'essayer d'avoir des échéanciers. Alors donc, je
vais continuer. Le tribunal spécialisé, vous savez que c'est une idée pour
laquelle je milite depuis maintenant plus de trois ans. Et donc j'entends ce
que le ministre nous dit ce matin, mais j'ai quand même été déçue de lire, quand
il a émis son communiqué, qu'il allait former un comité de travail sur la
question, de lire que c'est une idée qui mérite d'être étudiée. Donc, ça ne
donnait pas du tout le caractère d'engagement auquel on aurait pu s'attendre de
la part du ministre de la Justice. Donc, je
veux comprendre pourquoi ce choix de mots et est-ce que les choses, depuis, ont
changé. Donc, quand il s'y engage aujourd'hui, est-ce à dire que ça a évolué
depuis deux mois? Et par ailleurs est-ce qu'il peut nous dire, ce comité-là, combien
de fois il s'est réuni depuis sa création en février?
Le Président (M.
Bachand) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui. Pour le
nombre de fois — on
va me donner la réponse — il
y a eu cinq rencontres, M. le Président, depuis la formation du comité, je
crois, qui a... qui s'était formé le 8 février dernier, je crois. Pour ce
qui est de votre deuxième question...
Mme
Hivon : «Mérite
d'être étudiée», dans le communiqué, au lieu de dire «s'engage à implanter».
M.
Jolin-Barrette : Moi, j'ai
l'intention de donner suite à la recommandation. Donc, la volonté
ministérielle, elle est claire, nette et
présente. Ceci étant dit, ça prend le concours de tous les intervenants du
système de justice, parce que je crois... et le gouvernement croit que
le tribunal spécialisé pour la violence sexuelle et conjugale doit être mis en
place. Alors, tous les acteurs doivent se rallier au rapport Corte-Desrosiers.
Et, comme je l'ai dit, je crois qu'il s'agit de la recommandation-phare du
rapport Corte-Desrosiers.
Alors, si on veut être en mesure d'accompagner
tout au long du processus les victimes de violence conjugale et sexuelle, bien,
on les accompagne à travers le système. Mais l'institution que représentera le
tribunal spécialisé, c'est la colonne vertébrale de la démarche
d'accompagnement. Donc, je pense que si on a le tribunal spécialisé, ça va
permettre de mobiliser tous les acteurs du système de justice à travers ça.
Mme
Hivon :
Est-ce que le ministre peut nous dire pourquoi il n'est pas prêt à dire que ça
va voir le jour? D'où vient cette résistance qu'il semble indiquer sans la
nommer?
M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez,
ce que je peux vous dire, c'est qu'il y a une volonté ferme ministérielle de
mettre en place un tel tribunal. Puis moi, à titre de ministre de la Justice,
je trouve ça important de mettre en oeuvre un tribunal spécialisé pour les
victimes de violence conjugale et sexuelle. Alors, je travaille dans cette
direction-là et puis je sollicite le concours de tous les partenaires. Et donc
je peux vous assurer que le ministère de la Justice... Et les directives que
j'ai données sont très claires, c'est la mise en vigueur d'un tribunal
spécialisé.
Mme
Hivon : Si le ministre
nous dit qu'il sollicite le concours, c'est qu'il n'a pas encore le concours de
tout le monde, et je pense que ce serait important, d'un point de vue transparence,
parce que, oui, comme il l'a dit lui-même,
c'est une recommandation, selon moi aussi, la recommandation-phare, parce que ça amène toute une philosophie et un changement de regard sur la place des
victimes dans le système. Donc, est-ce
qu'il est en train de nous dire qu'il ne sera pas en mesure de le faire
du manque du concours de certains partenaires? Et, si oui, lesquels?
M. Jolin-Barrette : Moi, je pense
qu'on travaille bien avec le groupe de travail. Il y a un rapport préliminaire
qui va m'être déposé au mois de mai. C'est important de partager une vision
commune. C'est important de prendre en
considération les visions des différents partenaires du système
de justice. C'est important de prendre en considération aussi les commentaires
des organisations qui défendent les victimes. Donc, vous savez, il y a plusieurs... on en a entendu, dans le cadre du projet de loi n° 84, plusieurs organisations qui sont là pour
les personnes victimes, alors on va prendre tous leurs points de vue en
considération.
Mais, moi, mon objectif, il est clair : de
mettre en place un tribunal spécialisé. Alors, on travaille bien avec les
différents acteurs du système de justice, et il va falloir que tous les acteurs
du système de justice se rallient à la proposition du ministère de la Justice
de mettre en place un tribunal spécialisé.
Mme
Hivon : Je pense
que je n'aurai pas ma réponse, M. le Président, mais je vais continuer à suivre
ça avec beaucoup d'intérêt. Et j'invite le ministre à déployer toutes ses
énergies. Et je peux l'assurer, pour avoir été partie prenante du travail
Rebâtir la confiance, que tous les partenaires qui étaient autour de la table,
tous les représentants étaient convaincus de l'opportunité de la mise en place
d'un tribunal spécialisé, ce qui en a fait une recommandation unanime, même si
c'est une idée très novatrice.
Je voulais par ailleurs revenir sur le fait que,
dans le dernier budget, il n'y a pas eu d'argent comme tel de déployé, de prévu
pour la mise en place du rapport Rebâtir la confiance. On a vu vendredi
les deux collègues du ministre sortir pour la question des fonds pour les
maisons d'hébergement pour femmes victimes de violence conjugale. Elles ont
laissé entendre qu'il y avait des annonces qui s'en venaient pour les ressources
pour les hommes et quelques autres éléments en lien avec la violence conjugale.
Mais on sait que le rapport est très large, il
touche aussi toute la question de la violence sexuelle, le tribunal spécialisé,
les formations, la spécialisation. Je ne ferai pas le tour de tout ce qui est
contenu dans les 190 recommandations. Mais il y a une grande inquiétude, à
savoir, c'est beau d'entendre le ministre nous répéter qu'il va mettre en place
les recommandations, mais, s'il n'a pas de moyens, peut-être que c'est dans 10 ans
qu'il espère les mettre en place, même si, M. le Président, je ne gagerais pas
qu'il va toujours être ministre de la Justice pendant 10 ans, mais ça, on
pourra en redébattre un autre jour.
Alors, je veux juste savoir si le ministre peut
nous dire comment expliquer qu'il n'y a pas de sommes dédiées aux aspects
justice du rapport Rebâtir la confiance dans le dernier budget. Est-ce
qu'on doit comprendre que, dans la prochaine année, il n'y aura rien, dans le
fond, d'implanté des recommandations, outre ce qui a été annoncé par ses
collègues vendredi?
Le Président (M.
Bachand) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : La réponse à
cette question-là, c'est non. Il va y avoir... au fur et à mesure qu'on avance,
qu'on est capables de répondre à une des recommandations, les mesures vont être
annoncées. La démonstration de cela, c'est le Programme enfant témoin, puis le
fait de bâtir également un programme pour les victimes vulnérables, qu'on a
annoncé au mois de mars dernier. Mais, déjà, ça, je pense, c'était
3 millions ou 2 point quelques, on l'a annoncé. Donc, c'est une des recommandations, je pense, ça répondait à
deux recommandations, on l'a annoncé, on l'a fait.
Également, il
y a des recommandations qui se font à l'interne également, qu'on met en place
aussi. Ça fait que, parfois, ça ne
nécessite pas des sommes supplémentaires. Lorsque ça nécessite des sommes
supplémentaires, je donne un exemple, avec l'IVAC, dans le cadre de la
réforme de l'IVAC, bien, on a répondu à plusieurs des recommandations du
rapport Rebâtir la confiance. Donc, ça, on l'a fait, on a investi un
quart de milliard, ça ne touche pas juste Rebâtir la confiance, mais
c'est en grande partie, notamment.
Puis il faut le rappeler, là, maintenant, toutes
les femmes qui ont été agressées sexuellement dans le passé, après 1972, n'auront pas de délai pour présenter
leur demande et être indemnisées et soutenues, M. le Président. Alors,
ça, je pense, c'est important. Alors, ce que je veux dire, c'est qu'au fur et à
mesure qu'on va avoir des mesures, bien, on va pouvoir les faire financer, et
le gouvernement va donner suite au rapport.
• (10 h 50) •
Le Président (M.
Bachand) : Mme la députée de Joliette.
Mme
Hivon :
Donc, même s'il n'y a pas de sommes prévues dans le budget de cette année, le
ministre est en train de nous dire que, finalement, ce n'est pas vraiment si
fondamental. Le budget, on l'a vu vendredi dernier, il y a eu un
200 millions qui est sorti comme ça, puis ça va être la même chose pour
les autres recommandations, donc il va y avoir des dizaines de millions
nécessaires à l'implantation, probablement des centaines de millions qui vont
pouvoir être déployés dès cette année.
M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez...
Mme
Hivon : Même s'ils
n'apparaissent pas au budget, là. Je veux juste comprendre comment on marche,
maintenant, en termes de finances au gouvernement.
M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez,
l'État québécois dépose un budget, mais, en cours d'année, vous savez, c'est
comme un budget familial, il y a certaines situations qui arrivent. Donc, le ministre
des Finances et la présidente du Conseil du trésor administrent le budget, M.
le Président, et, lorsqu'il y a des besoins, bien, il y a des ajustements qui sont faits, comme on a fait la
semaine dernière, où est-ce qu'il y a plus de 200 millions qui ont été
annoncés pour répondre aux besoins des maisons d'hébergement pour femmes
violentées, et on s'ajuste, M. le Président.
Alors, il faut comprendre aussi qu'afin de
pouvoir mettre dans le budget certaines mesures, il faut que la mesure soit livrable au moment de constituer le
budget, notamment. Alors, on est dans un travail constant pour donner
suite au rapport. Il a été déposé en décembre. On a déjà répondu à plusieurs recommandations.
On continue de travailler là-dessus et, au moment opportun, on dépose le tout
au Conseil du trésor qui nous accorde les sommes.
Mme
Hivon : Je vais
maintenant avoir des questions sur le même rapport, mais pour le Directeur des
poursuites criminelles et pénales, que je félicite à mon tour de sa toute
récente nomination. Vous ne pouviez pas demander un meilleur début de mandat
avec l'étude des crédits, j'en suis certaine.
Donc, vous savez qu'il y a plusieurs
recommandations qui vous concernent. Il y en a une qui parle... donc, aux
recommandations 55 et 56, c'est toute la question, et on a eu énormément
de témoignages à cet effet-là, que les victimes, souvent, ne sont pas
rencontrées avant le jour même de leur témoignage dans des causes de violence
conjugale, d'agression sexuelle. Est-ce que c'est quelque chose qui va être
changé? Et quelle est la perspective de l'accompagnement qui est vu en amont du
jour du procès? Parce que c'est quelque chose qui, selon nous, ne tient pas la
route qu'une victime ne puisse pas, donc, être préparée en conséquence avant
même la journée de son procès.
Le Président (M.
Bachand) : Me Michel, s'il vous plaît.
M. Michel (Patrick) : Oui. Merci, M.
le Président. Merci, Mme la députée de Joliette, pour votre question. Alors, il
y a lieu de... je vais essayer de faire court, mais il y a lieu de distinguer,
vous le savez, les victimes de violence conjugale des victimes de violence
sexuelle.
En matière de violence conjugale, ce qu'on fait
déjà, en fait, ce qu'on s'efforce de faire, c'est une rencontre
postautorisation qui arrive le plus tôt possible après le dépôt des accusations
pour créer le lien de confiance avec la victime puis, évidemment, le maintenir
jusqu'au procès.
En matière de violence sexuelle, alors on parle
d'une rencontre préautorisation où on a établi ce premier contact là. En
matière de violence sexuelle, vous le savez, nous sommes en poursuite
verticale, pour les gens qui nous écoutent, donc ça signifie essentiellement
que c'est le même procureur qui va suivre le dossier à toute et chacune des
étapes des procédures jusqu'à la fin. Et on impose, en fait, on souhaite qu'il
y ait une rencontre préparatoire au procès qui vienne s'ajouter à la rencontre
initiale. Et on souhaite que cette rencontre-là, c'est notre volonté — nos
directives, nos politiques sont élaborées de cette façon-là — que
cette rencontre-là survienne avant, évidemment, le matin même du procès, alors,
en fait, le plus tôt, le plus près du procès, mais idéalement pas le matin même
du procès ou la veille du procès.
On est conscient que, bon, c'est un objectif qui
est louable qu'on poursuit. On est conscient, parce que j'ai entendu, comme Mme
la députée de Joliette, que ce n'était peut-être pas toujours possible d'y
arriver dans tous les cas à cette rencontre
préparatoire avant la journée du procès, mais c'est un objectif qu'on poursuit.
On se le donne dans notre plan stratégique 2019-2023 avec des
indicateurs clairs qu'on va mesurer. Alors, voilà, un début de réponse.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Mme la députée de Joliette, s'il vous plaît.
Mme
Hivon : J'entends
que c'est un objectif, que c'est un souhait, mais est-ce que le directeur peut
prendre l'engagement d'en donner la directive claire à tous ses procureurs et
que lui s'engage à ce que ce soit une pratique obligatoire, pas juste une
volonté?
Le Président (M.
Bachand) : Me Michel.
M. Michel
(Patrick) : Oui. Merci, M. le Président. Alors, je suis prêt à prendre
cet engagement, mais dans la mesure où j'aurai eu un petit moment pour faire,
disons, l'état des troupes, l'état des ressources pour m'assurer que... et là
je ne parle pas nécessairement en termes de ressources au DPCP en général,
mais, disons, dans l'organisation des ressources, dans la distribution des
ressources, il y a peut-être un point à faire là avant de prendre cet engagement-là. Et, si jamais je réalise que nous ne sommes
pas en mesure d'y arriver et de le garantir, bien, j'aurai des représentations
à faire en matière de ressources.
Mme
Hivon :
O.K. Moi, je veux juste rappeler au directeur, puis je pense qu'il en est
conscient, mais à quel point on a eu des témoignages qui arrachent le coeur de
victimes qui étaient terrorisées à l'idée de leur journée de procès et qui
n'ont pas réussi à voir le procureur avant d'être amenées devant la cour, et je
pense que c'est complètement inadmissible. Je suis sûre que le directeur va
être d'accord avec moi. Donc, si on veut rebâtir la confiance, c'est le cas de
le dire, c'est quelque chose qui m'apparaît absolument incontournable. Alors,
j'espère que le directeur va pouvoir, dans sa tournée médiatique à venir, dire
qu'il en prend formellement l'engagement après avoir fait le tour de ses
équipes.
Je veux continuer
aussi sur le rapport Rebâtir la confiance qui parle beaucoup de
l'importance de la spécialisation... de la formation et de la spécialisation.
Ça procède aussi de la philosophie d'un tribunal spécialisé. On comprend qu'il
y a certaines équipes spécialisées dans les grands centres. Les défis peuvent
être plus importants à l'ensemble du Québec. Ceci dit, ça ne veut pas dire que
parce qu'un procureur est formé et spécialisé qu'il ne va faire que des crimes
de violence sexuelle ou de violence conjugale, mais au moins les victimes
sauraient que ces personnes-là, ces procureurs-là sont spécialisés. Ça ne veut
pas dire qu'ils ne peuvent pas faire 25 % d'autres choses.
Est-ce que
c'est un engagement que le nouveau directeur est prêt à prendre que tous les
procureurs qui vont, donc, faire des dossiers de violence conjugale et de
violence sexuelle vont être formés et spécialisés dans le domaine? Parce que la formation, ce n'est pas
juste de la formation juridique, c'est de la formation sur le trauma, sur
la connaissance des conséquences sur la
victime de ce type d'agression. Est-ce que c'est un engagement qu'il peut
prendre?
Le
Président (M. Bachand) : En 20 secondes, Me Michel.
20 secondes, s'il vous plaît.
M. Michel
(Patrick) : En 20 secondes, oui, dans la mesure où on fait, comme
Mme la députée de Joliette le fait, la distinction entre spécialisé, qui passe
par la formation, et dédié. Oui, on s'y attarde déjà depuis un moment, et ça va
rester un objectif que tous nos procureurs qui font de la violence conjugale ou
de la violence sexuelle reçoivent des formations spécialisées. On a continué à
en donner au cours de la pandémie, à distance, même si on était plus limités,
mais, oui...
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup, Me Michel. Merci beaucoup
à la députée de Joliette. M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.
M. Tanguay :
...35, quelque chose comme ça, 20, 35.
Le
Président (M. Bachand) : 35, oui.
M. Tanguay :
Parfait. Merci beaucoup. C'est mon dernier bloc. Triste de l'apprendre au ministre.
Je vois dans ses yeux derrière son masque la tristesse, mais qu'il se fasse une
raison, nous avons déjà rendez-vous dans les prochains jours, semaines, et nous
pourrons renouveler ce bonheur-là.
Je devrai quitter
parce qu'il nous reste deux blocs, M. le Président, et j'aurai... vous aurez
l'occasion d'échanger, M. le ministre, et les personnes autour de la table,
avec notamment le collège de Jacques-Cartier dans le dernier bloc ce matin et
cet après-midi avec la collègue de Westmount—Saint-Louis, qui aura des questions
plus particulières, entre autres, à la CDPDJ.
Alors, merci. Et,
après mon dernier bloc, quand je quitterai, n'y voyez pas là un
mécontentement... l'expression d'un mécontentement sur la dernière réponse qui
m'aura été donnée. Ce n'est pas le cas, mais il faut qu'on se partage. Puis,
vous voyez, il y a beaucoup de dossiers, ça fait qu'on essaie d'être efficaces
là-dedans.
J'ai quand même une
question pour Me Tessier, Commission des droits de la personne et des
droits de la jeunesse. Puis je trouve ça intéressant, des fois, dans les
crédits, on trouve des petites choses intéressantes. Alors, page 347 des
renseignements particuliers de l'opposition officielle, il y a une lettre
écrite le 24 février 2021, 24 février 2021, page 347, à la toute
fin : lettre relative à la réforme parlementaire et — ça,
c'est un sujet, là... je vois le ministre — aux délais accordés pour la préparation
des auditions dans le cadre de consultations parlementaires. Serait-ce possible
d'avoir copie de la lettre, Me Tessier? Et j'aimerais savoir quelle a été
jusqu'à maintenant la réponse accordée par le ministre, incidemment leader du
gouvernement, quant à cette lettre-là.
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Juste avant de passer
la parole à Me Tessier...
(Interruption)
Le
Président (M. Bachand) : On est en train de rénover le
parlement, on entend le marteau cogner. Juste informer qu'effectivement il y a
eu consentement pour que la députée de Westmount—Saint-Louis remplace la députée de
Laporte pour le volet Justice cet après-midi. Juste pour...
M. Tanguay :
...
Le Président (M.
Bachand) : Me Tessier, pardon, allez-y.
M. Tessier
(Philippe-André) : Oui, merci. La réponse est très simple, c'est une
lettre qui visait... parce qu'il y a eu des
dépôts, tant par le président de l'Assemblée nationale que par le leader
parlementaire, de projets de réforme, et donc c'était pour indiquer
l'intérêt de la commission à travailler et à collaborer à ces questions-là et
par le fait même, également, sensibiliser
les parties au fait que les délais en situation aussi pandémique, pour les
commissions parlementaires, imposent aussi des contraintes pour les
organismes qui passent en commission parlementaire et qu'il faut tenir compte
de ça quand on fait ce genre de réflexion sur le parlementarisme québécois.
M. Tanguay : Est-ce qu'on
pourrait avoir copie de ladite lettre?
M. Tessier (Philippe-André) : Moi,
je n'ai pas de problème à vous fournir copie de la lettre.
M. Tanguay : Ça vous
appartient.
M. Tessier (Philippe-André) : Oui,
tout à fait.
M. Tanguay : Oui, vous allez
la transmettre au secrétariat?
M. Tessier (Philippe-André) : Oui,
sans problème.
• (11 heures) •
M. Tanguay : Merci beaucoup.
Le Président (M.
Bachand) : ...à faire parvenir la lettre à
la commission?
M. Tessier
(Philippe-André) : Oui. Je
m'excuse. Je ne vous entendais pas bien. Oui, oui, tout à fait, je m'engage.
Le Président (M.
Bachand) : Parfait. Merci beaucoup.
M. Tanguay : Merci.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Est-ce que vous avez une réponse à cette lettre-là?
Avez-vous une réponse? Avez-vous eu une réponse?
M. Tessier (Philippe-André) : Il y a
eu des échanges, mais il n'y a pas eu de réponse formelle. Ce n'était pas une
lettre qui appelait une réponse formelle.
M. Tanguay : Je comprends. Parfait. Bien, merci,
Me Tessier. Donc, ma collègue, entre autres, cet après-midi, aura beaucoup de questions pour vous. Puis je vous
remercie de votre passage ce matin.
J'aimerais
maintenant me retourner, M. le Président, avec le consentement de la
commission, vers Me Niquette, de la Commission des services
juridiques.
Le Président (M. Bachand) :
Merci. Est-ce qu'il y a consentement? M. le ministre, vous consentez?
M. Jolin-Barrette : ...
Le Président (M.
Bachand) : O.K. Me Niquette, s'il vous plaît.
M. Tanguay :
Me Niquette, merci d'être là. Bonjour. Avec le temps qui m'est imparti, il
y a une question au niveau budgétaire qui m'interpelle. Et j'aimerais connaître
la raison, en 2019-2020, donc pas le dernier budget mais le précédent, le
budget total de la Commission des services juridiques est passé de
180 millions à 175, donc une réduction
de 5 millions. J'aimerais savoir pourquoi cette réduction-là. Il y a
sûrement une explication. Et, dans le dernier budget, vous êtes
passés... plus 1 million, 175 millions à 176 millions. Vous
pouvez m'expliquer les deux variations, s'il vous plaît?
Le Président (M.
Bachand) : Me Niquette, s'il vous plaît.
M. Niquette (Yvan) : Merci. Merci,
M. le Président. Merci pour la question.
Dans un premier temps, je bénéficierais de la
tribune rare qui m'est offerte en cette période de pandémie pour féliciter tous
les avocates et les avocats d'aide juridique pour leurs efforts, leur talent et
leur créativité en cette période de pandémie où ils offrent les services, et
maintiennent les services de qualité, juridiques, auprès des plus démunis, des
plus vulnérables de la société. Salut à ces 400 quelques personnes là.
Vous
savez, M. le Président, que le budget
de la Commission des services juridiques se décline non seulement en termes de crédits, mais en termes également de
revenus autonomes et de recours aux surplus accumulés, donc une année
donnée, les crédits peuvent être d'un certain montant. Et la variation peut
s'expliquer du fait qu'on est en mesure d'anticiper des
revenus autonomes plus importants, sans tomber dans le détail, là, des chiffres
que le député de LaFontaine vient d'avancer. Et aussi on peut avoir recours à
nos surplus accumulés d'une année à l'autre, qui fait en sorte que... Et ça, c'est rare dans... Ça fait
depuis sa création que la Loi sur l'aide juridique prévoit que la
Commission des services juridiques et les centres communautaires juridiques ne
peuvent, dans une année financière, accuser de déficit. Et, à chaque année, le
défi est relevé grâce à ces trois composantes là.
M. Tanguay :
Ah bon. Parfait. Donc, il n'y a pas, malgré la variation, aucun impact sur le
niveau de service?
M. Niquette
(Yvan) : Il n'y a pas des compressions budgétaires, si vous voulez...
M. Tanguay :
C'est ça.
M. Niquette
(Yvan) : ...M. le Président, si je peux répondre à la question du
député.
M. Tanguay :
Parfait. Bien, merci beaucoup, Me Niquette. Au niveau du nombre de
procureurs, au niveau de votre organisation, Commission des services
juridiques, quels sont vont principaux défis, là, dans la prochaine année, là?
On espère, on touche du bois, comme la personne derrière moi depuis tantôt,
sortir de la pandémie dans les meilleurs délais, mais on est encore pris avec.
Et quels sont vos principaux défis, dans la prochaine année, en termes, notamment,
peut-être d'effectifs, de qualité de services? J'aimerais vous entendre là-dessus.
M. Niquette
(Yvan) : Il est évident qu'on reconnaît, puis je l'ai fait d'entrée de
jeu, là, dans mon introduction, la charge de travail qu'ont les procureurs à
l'aide juridique, les avocats de l'aide juridique. Il y a aussi des enjeux ponctuels, et vous en avez fait mention
aujourd'hui, là. On est fiers d'être interpelés dans les
grands enjeux d'actualité, là, en
matière de communautés autochtones. Il y a des défis grandissants pour nous,
là, de déployer le nombre d'effectifs suffisants pour que les services
soient améliorés et accélérés, surtout principalement dans le Grand Nord.
Il y a toute la
composante jeunesse. On attend, nous aussi, le dépôt du rapport Laurent, là.
Vous savez qu'en matière jeunesse les avocats de l'aide juridique ont la
référence automatique des jeunes de 14 ans et moins. Donc, tous les dossiers
qui se judiciarisent pour les enfants de 14 ans et moins sont des
bénéficiaires du système d'aide juridique.
Nous sommes donc les procureurs qui y sont affectés, la voix de ces enfants-là.
Et le rapport Laurent viendra sûrement concrétiser les besoins qu'on
constate déjà, là, en matière de ressources. Pendant la période de pandémie,
là, on a constaté, nous, statistiquement, que, dans l'ensemble des champs de
pratique que nous couvrons, il y a eu une baisse qui était de 24 %. Selon
une lecture, là, statistique qui a été faite avant-hier, on est rendus à pas
loin de 18 %, mais, en matière
jeunesse, en période de pandémie, 0,6 % de variation, uniquement. Ça fait
que vous comprenez que la charge de travail est énorme, qu'en termes de
ressources en matière jeunesse c'est clair que la Commission des services
juridiques, au bénéfice des centres communautaires, va faire des demandes à cet
effet-là.
En matière de
violence sexuelle, violence conjugale, tant le plan d'action du Secrétriat de
la condition féminine, là, le groupe transpartisan, a fait une recommandation,
l'action 1, qui concerne l'aide juridique, et il y en a sept, dans le
rapport Corte-Desrosiers ou Rebâtir la confiance, où nous sommes
directement interpelés. Et on travaille là-dessus, actuellement.
Nécessairement, encore là, il y aura des ressources supplémentaires qui devront
être allouées pour qu'on puisse faire l'exercice avec le professionnalisme
qu'on reconnaît aux avocats d'aide juridique.
M.
Tanguay : Et, pour mettre en application, quel est votre
échéancier? Au niveau des ressources supplémentaires, vous allez les
chercher où, ces ressources supplémentaires là?
M. Niquette
(Yvan) : C'est des démarches qui sont près... qui sont faites auprès
du ministère de la Justice afin que soient reconnus, là, selon le budget qui
est alloué au ministère, les besoins spécifiques à la Commission des services
juridiques. Mais il faut comprendre, là, il y a un élément central dans l'exercice.
Et, quand on nous demande de préciser à quelle hauteur sont les besoins en
ressources au niveau du système d'aide juridique, nous ne sommes pas les
initiateurs des recours, nous sommes, nous, en fin de parcours. C'est-à-dire
que, s'il y a ajout de juges, il y a ajout de termes, il y a ajout de salles
d'audience ouvertes, s'il y a ajout de poursuivants, tant chez le DPCP que chez
la Direction de la protection de la jeunesse, nous, on arrive à la toute fin où
on est devant le fait accompli qu'il y a une nouvelle contrainte de temps pour
notre personnel, qu'on doit, à ce moment-là, acheminer directement au ministère
de la Justice pour avoir l'écoute nécessaire à jouer le rôle qui revient aux
avocats d'aide juridique.
M. Tanguay :
O.K. Alors, vous allez avoir l'occasion, dans les meilleurs délais aussi,
j'imagine, donc, de chiffrer et d'exprimer vos demandes budgétaires. Est-ce
qu'il pourrait y avoir, là, dans notre État québécois... Jusqu'à quel point
cette discussion-là pourrait être transparente? Ça, ça va se faire derrière des
portes closes avec vos discussions avec le ministère de la Justice, mais, pour
les crédits supplémentaires, la mise en application des recommandations,
comment vous abordez ça? On va avoir le fruit final, mais le processus? Il
n'est pas dans votre intention ou même dans votre mandat, puis vous pouvez me
le préciser, de faire des demandes publiques, là, ça va se faire réellement à
l'interne, puis vous allez vous déclarer satisfaits de ce qu'on vous aura donné,
là. Je ne veux pas être réducteur mais j'essaie d'aller au plus court, là.
M. Niquette
(Yvan) : Il faut comprendre encore l'organisation du système d'aide
juridique au Québec. L'aide juridique, au Québec, est dirigée par
12 conseils d'administration composés de 12 membres qui offrent leurs
services gratuitement, là, des administrateurs dans
chacun des centres communautaires juridiques, qui, eux, sont nommés sur ces conseils d'administration là,
justement, pour leurs connaissances spécifiques des régionalités. Ça fait
que, nous, à la commission, notre premier rôle, c'est de consulter ces gens-là
en toute discrétion et faire le départage des besoins qui sont plus
prioritaires d'une région à l'autre. Et là, il faut distinguer aussi des
centres urbains puis des régions un peu plus éloignées, là, les composantes
sont différentes. Par la suite, on achemine le résultat de notre analyse et de nos travaux dans des revendications,
des demandes qui sont faites au ministère. Mais sachez que, lorsque les
ressources sont insuffisantes, on ne devient pas muets pour autant, là, et
qu'on doit quand même manifester notre désapprobation ou notre incapacité de
donner suite à certains mandats qui pourraient nous être confiés.
M. Tanguay :
Et, le cas échéant, on accueillera vos commentaires, qui pourront être tantôt
très... ils sont toujours constructifs, tantôt glorifiants, mais tantôt
inquiets. On accueillera toujours, évidemment, vos commentaires. Votre voix est
importante pour donner suite, entre autres, à ces nombreux rapports là. Vous
parliez du rapport qui s'en vient. Alors, bravo, merci pour ce que vous faites.
Je me tourne vers le
ministre maintenant. On parlait, justement, que vous étiez davantage en aval
qu'en amont. En matière civile... J'en suis à la page 306 des renseignements
particuliers de l'opposition officielle, 306. En matière civile, on voit
l'évolution du nombre de dossiers ouverts. Oui, il y a la pandémie, l'éléphant
dans la pièce. 2019‑2020, en chambre civile,
Cour du Québec, c'était, j'arrondis, 57 000 dossiers, 2019‑2020,
57 000 dossiers, 2020‑2021, 34 000 dossiers. Alors,
il y a eu une baisse majeure du nombre de dossiers, ce qui n'a pas empêché les
délais d'augmenter. On comprend le contexte, mais, écoutez, de 57 000 à
34 000, baisse du nombre de dossiers, mais les délais sont passés de
169 jours, pour une cause d'un jour, à 195 jours, et ainsi de suite,
là. Les causes de deux jours et les causes de plus de deux jours, il y a une
augmentation.
Le ministre, dans la
page E-46, parle d'un objectif de rattrapage judiciaire, parle de
15,7 millions de dollars. Ici, j'en suis en matière chambre civile.
J'aimerais savoir quel est son plan de match, quelles sont les sommes,
spécifiquement, ou s'il peut me le ventiler pour toutes les chambres, là, en
matière de budget et en matière de juges suppléants. On semble approcher la
stratégie d'y aller par juges suppléants, comment va-t-il répondre à cela, là?
Quel est le plan de match?
• (11 h 10) •
Le
Président (M. Bachand) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
Bien, dans un premier temps, c'est vrai de dire qu'on fait face à des défis
relativement aux délais. Et, au fur et à
mesure qu'on avance il faut toujours être vigilants par rapport aux délais dans
les trois volets, là, autant en jeunesse, en criminel et pénal qu'en
civil. Alors, on a accordé un budget pour avoir 30 juges suppléants, donc,
pour, justement, aider à diminuer les délais pour que ces juges soient
affectés.
Les juges suppléants,
il faut comprendre, c'est des juges qui sont désormais à la retraite. Et donc,
contrairement aux juges surnuméraires de la Cour supérieure ou de la Cour
d'appel, dans le fond, c'est des juges qui sont payés à la journée qu'ils vont
siéger. Donc, lorsqu'ils atteignent... à la Cour du Québec, lorsque vous atteignez
l'âge de 70 ans, c'est la retraite
obligatoire. Puis la juge en chef peut nous faire une demande pour des juges
suppléants. Donc là, on a débloqué un budget pour avoir 30 juges
suppléants pour, justement, rattraper le retard, qui est dû notamment à la
pandémie.
Autre point aussi, on
est en train de transformer le système de justice. Modernisation, donc
davantage de recours aux outils technologiques. Et on travaille avec les
partenaires sur la Table Justice-Québec, également, pour faire en sorte de réduire
les délais. Vous savez, on a certains enjeux au niveau des petites créances, en
matière de la jeunesse, également, dans certains districts, alors, notre
objectif, c'est de réduire le plus possible les délais. Mais, c'est une
coordination, que ça nécessite, entre les différents acteurs, parce que, vous
savez, les délais, ils sont causés parfois, bon, par la disponibilité des
parties, par la disponibilité des avocats en matière civile, en matière
criminelle et pénale, parfois, c'est les avocats de la défense, parfois, c'est
la disponibilité du juge aussi. Donc, c'est complexe, les délais, mais on
travaille sur plusieurs mesures.
M. Tanguay :
Est-ce qu'il serait possible, si ce n'est pas déjà disponible, par engagement,
au ministre de communiquer au secrétariat de la commission une ventilation puis
un échéancier par rapport à l'action de ces 30 juges suppléants là? Autrement
dit, quand vont-ils être en fonction, en termes de nombre, là? Je ne sais pas
s'il y en a présentement, si les 30 juges... Est-ce que les 30 juges
sont déjà en action?
Des voix :
...
M.
Jolin-Barrette : C'est ça. Dans le fond, les juges suppléants, j'ai déjà
autorisé le...
M. Tanguay :
Les fonds?
M.
Jolin-Barrette : Les fonds. Donc, à partir du moment où les juges sont
autorisés, c'est la Cour du Québec qui les assigne, donc...
M. Tanguay :
Quel est le délai, selon le ministre, qu'il s'est fait dire?
M. Jolin-Barrette : Qu'ils peuvent
siéger?
M.
Tanguay : Oui, qu'ils seront effectifs? Est-ce qu'ils sont
identifiés, les 30 juges?
M.
Jolin-Barrette : Bien, en fait, oui. Dans le fond, la façon que ça
fonctionne, c'est que la juge en chef nous fait une demande par rapport à des
besoins, on a accordé le financement pour les 30 juges. Alors, moi, j'ai
signé les autorisations, ils peuvent être assignés à n'importe quel moment.
M. Tanguay :
Ils sont déjà identifiés, là? Il n'y a pas de recrutement, entre guillemets, à mettre
en place?
M. Jolin-Barrette :
Bien, en fait, annuellement, je resigne, dans le fond, les demandes qui sont
effectuées par la juge en chef. Donc, il y a un bassin de... Combien de juges environ
on a, de juges suppléants qui sont à la retraite, annuellement?
Une voix :
...
M.
Jolin-Barrette : Donc, c'est un bassin de juges. Dans le fond, c'est à
la discrétion... La majorité, je vous dirais, acceptent de prolonger leur
carrière et, dans le fond, poursuivent, et, à partir de ce moment-là, ils sont
assignés. Donc, dans le fond, vous comprendrez qu'en vertu de l'indépendance
judiciaire je n'ai pas de pouvoir d'assigner les juges, M. le Président,
donc ça relève de la Cour du Québec et donc c'est la cour qui assigne dans les
matières où elle voit des besoins.
M. Tanguay :
Je ne lui demanderai pas il y en a combien qui sont bilingues là-dessus.
Quel est
l'échéancier, dans les discussions qu'il a avec la juge en chef, quel est
l'échéancier de rattrapage, je dirais, du retard? On peut espérer quand?
M. Jolin-Barrette :
Bien, je vous dirais, ça dépend des chambres. Mais, le plus rapidement où on
peut réduire les délais, ça, c'est avantageux. Le premier élément qu'on doit
dire, supposons en chambre criminelle et pénale, les partenaires sont guidés, notamment,
par les délais de Jordan, entre autres. Ça fait que, l'idée, c'est de ne pas
échapper de dossiers. Moi, mon objectif, c'est d'avoir une justice efficace et
efficiente. On a fait ensemble le projet de loi n° 75, qui a donné des
outils, notamment, technologiques, qui a donné... qui a modifié aussi des
façons de faire pour rendre ça plus efficace. Donc, ça, c'est une chose qu'on a
faite ensemble, vous vous souviendrez sûrement, au mois de décembre. Et ça
demande une vigilance constante, les délais judiciaires. Donc, en matière
criminelle et pénale, on reste à l'intérieur des dossiers, il n'y a pas eu beaucoup
de nolle l'année passée ni de requête en
arrêt des procédures. Là, en matière civile, vous savez, la pandémie, ça a fait
en sorte que ça a suspendu, donc il y
a du retard à reprendre. En jeunesse aussi, c'est important aussi de mettre les
efforts en jeunesse pour faire en sorte qu'avec la DPJ, bien, les dossiers
procèdent rondement devant les tribunaux, mais encore faut-il fédérer l'ensemble
des partenaires, notamment la Direction de la protection de la jeunesse, sur
les différentes mesures. Puis, vous savez, dans des dossiers comme ça, vous
avez la DPJ, des fois, vous avez le PG, vous avez l'avocat du parent, l'avocat
de l'enfant, le juge, donc, des fois, c'est des questions de disponibilité.
L'autre point que je
pourrais dire aussi, on met en place, là, des programmes de prémédiation, de
médiation pour, justement, essayer de régler des dossiers qui peuvent être
réglés avant d'aller devant le juge.
Le
Président (M. Bachand) : ...
M. Tanguay :
Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Le ministre pourrait-il nous...
prendre l'engagement, parce que ça a été refusé par Accès à l'information, de
rendre publique la correspondance qu'il a avec la juge en chef? On a soulevé l'article 34 :
«Produit pour le compte d'un membre de l'Assemblée nationale». Mais pourrait-il
prendre l'engagement, en toute transparence, de rendre publique sa
correspondance avec la juge en chef?
Le
Président (M. Bachand) : M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Non. Les discussions que j'ai avec la juge en chef
sont confidentielles. Et, entre le ministre de la Justice et la juge en chef de
la Cour du Québec, je crois que les discussions que nous avons sont confidentielles
et doivent le demeurer ainsi pour la bonne marche des deux institutions.
M. Tanguay :
On aura essayé, M. le Président.
Rapport
Lise Verreault, Autorité centrale du Québec, quel suivi tangible a été apporté à l'ACQ? Il y a combien d'employés, puis quel est
l'état des lieux à l'heure où on se parle?
M.
Jolin-Barrette : Oui. Alors, suite au rapport Verreault, il y a plusieurs
mesures qui ont été mises en place. Et peut-être je pourrais céder la parole à
Me Drouin, comme sous-ministre de la Justice, parce que ça relève vraiment
d'un aspect administratif sur les mesures qui ont été mises en place suite au
rapport Verreault.
M. Tanguay :
Il ne nous reste que quelques secondes. On avait fait une question au
feuilleton. Puis là, on avait toutes les questions. On va entendre Mme la
sous-ministre, mais, si on peut donner suite, par engagement, à toutes les questions, on l'apprécierait, via le
secrétariat, oui. Puis maintenant entendons, écoutons Mme la sous-ministre.
Le Président (M. Bachand) : Est-ce qu'il
y a consentement?
Des voix :
Consentement.
Le
Président (M. Bachand) : Consentement, M. le ministre.
Mme la sous-ministre, quelques secondes. Je suis désolé.
Mme Drouin
(Line) : Oui. Effectivement, à la suite de... voyons, des faits qui
ont été rendus publics, on comprend que le ministère a mandaté Mme Lise
Verreault pour mener une enquête au sein du ministère. Et elle a rendu des
recommandations afin d'élaborer et adopter un cadre de gestion, ce qui a été
fait, clarifier les rôles et responsabilités en regard de l'ACQ, ce qui a été
fait aussi en grande partie, respecter les champs de compétence reliés à ces
fonctions et mettre en place des mécanismes de contrôle. Donc, plusieurs des
activités et des mesures ont été mises en place, et la réorganisation, en
conséquence, a été faite en très grande partie.
M. Tanguay :
...l'engagement, de répondre aux questions au feuilleton, du ministre?
M. Jolin-Barrette :
Oui.
M. Tanguay :
Merci.
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le
député de Chomedey, s'il vous plaît.
M. Ouellette :
Merci, M. le Président. Être quasiment un des derniers, il faut avoir la
perspicacité de... Parce qu'il y a beaucoup de questions que j'ai cochées.
Bienvenue au ministre. Merci, Mme Drouin, pour les réponses aux questions
que j'avais l'an dernier et les réponses qui ont été données par le ministère
avec célérité dans les jours qui ont suivi. J'aurai des questions, si vous le
permettez, M. le Président, cet après-midi pour M. Tessier et, ce
matin, j'ai quelques questions pour le ministre. Mais je voudrais me concentrer
sur le nouveau Directeur des poursuites criminelles et pénales, concentrer,
dans le bon sens du mot, M. le Président, vous conviendrez.
Ma première question
pour le ministre. On a beaucoup parlé d'agression sexuelle puis de violence
conjugale. Dans les demandes de renseignements particuliers, on retrouve, à la
page 195 des demandes du troisième groupe d'opposition... On voulait
savoir le nombre de victimes d'agression sexuelle puis de violence conjugale
dont les dossiers ont été rejetés par l'IVAC. Je comprends qu'on vient de faire
l'étude détaillée du projet de loi n° 84, mais on donne comme
réponse : «Cette information n'est pas disponible.» Je me suis posé des
questions. Puis est-ce que ça peut être changé, cette réponse-là, les demandes
qui sont faites par les victimes d'agression sexuelle et violence conjugale,
que les dossiers ont été rejetés par l'IVAC? Et, si on ne l'a pas immédiatement,
bien, peut-être que le ministre pourrait nous faire suivre au secrétariat? Mais
je pense que vous l'avez.
• (11 h 20) •
M. Jolin-Barrette :
Votre question, elle est uniquement sur les victimes de violence sexuelle et
conjugale?
M. Ouellette :
C'est violence conjugale et agression sexuelle, victimes d'agression sexuelle.
C'est page 195 du cahier des renseignements particuliers, troisième groupe
d'opposition.
M. Jolin-Barrette :
Je n'ai pas l'information précise. On pourra vous revenir sur le site du
secrétariat.
Par contre, l'année
passée, on a accepté... il y a eu 8 779 demandes, puis on en a
accepté 7 400. Donc, 84 % des demandes ont été acceptées à l'IVAC.
Et, à mon souvenir, violence conjugale, violence sexuelle, c'est environ, je
pense, 60 % des cas, là, mais on me corrigera. On va pouvoir vous
détailler ça de façon plus approfondie.
Le
Président (M. Bachand) : ...fournir l'information, M. le
ministre, à la commission? Oui?
M. Jolin-Barrette :
On va le déposer au secrétariat.
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup.
M. Ouellette :
Merci. Dans le cahier des renseignements particuliers de l'opposition
officielle, à la page 373, j'avais une interrogation. Toujours par rapport
à l'IVAC, ils ont 50 dossiers qui sont à l'extérieur du Québec puis à
l'extérieur du Canada. Puis je pense qu'il y a beaucoup de gens que ça les
intéresse de savoir dans quel cas est-ce que notre loi s'appliquerait à des
gens à l'extérieur du Québec et à l'extérieur du Canada.
M. Jolin-Barrette :
Dans le fond, avec l'ancienne loi sur l'IVAC, il n'y avait aucun dossier à
l'extérieur du Québec qui était couvert. Désormais, à partir du moment de la
mise en vigueur de la loi, donc, qui va arriver à la date de la sanction, plus,
maximum, cinq mois, toutes les infractions criminelles relativement à une
infraction contre la personne vont être
désormais couvertes. Donc, agression sexuelle, voie de fait, leurre d'enfant,
tout ce type d'infraction là va être couvert désormais après l'entrée en
vigueur de la loi.
M. Ouellette : Merci. Je me suis aussi posé une autre question,
toujours dans les mêmes cahiers des renseignements
particuliers.
1 429 employés occasionnels au ministère de la Justice, je pense,
c'est beaucoup. Il y a-tu quelque chose de particulier qui s'est passé en 2020 pour avoir un chiffre aussi
élevé d'employés occasionnels au ministère de la Justice?
Le Président (M.
Bachand) : M. le ministre.
Des voix : ...
M. Jolin-Barrette : Donc, on
m'indique que c'est le personnel des services judiciaires. Donc, c'est en
fonction des besoins des... du fonctionnement. Donc, on me dit que ce n'est pas
différent, là, de normalement.
M. Ouellette : Bien, vous comprendrez qu'en partant du moment où
je le soulève, et que vous avez pris la peine de l'indiquer, je trouvais
que c'était un chiffre... je trouvais que c'était un gros chiffre quand on
parlait de 37 %.
M. Jolin-Barrette : On me dit
qu'on a des employés sur appel, des huissiers audienciers, notamment.
M. Ouellette : Merci. M. le Président, si vous permettez,
j'irais au nouveau Directeur des poursuites criminelles et pénales.
Je dois reprendre mon collègue de LaFontaine, il
ne m'en voudra pas. Il a dit que votre nomination a été acceptée à l'unanimité.
Mais je suis obligé de lui dire qu'il y a eu deux abstentions, et pas parce
qu'on ne voulait pas, mais parce que le
gouvernement, et particulièrement le ministre de la Sécurité publique, dans
l'étude du projet de loi n° 1, n'a
pas considéré l'apport des indépendants dans les... dans trois nominations qui
sont faites aux deux tiers, puis vous êtes une de ces trois
nominations-là. Donc, je me suis abstenu contre mon coeur, Me Michel. Et
vous avez toutes mes félicitations, et je suis très heureux de vous voir
prendre la tête de cette institution. Je comprends que vous êtes en poste
seulement depuis le 23 avril. Je vais avoir des petites questions pointues
pour vous.
Mon collègue
de LaFontaine en a parlé quand on
parlait d'études scientifiques : 45 %
de procureurs en épuisement professionnel, 28 % en dépression,
31 % avec des problèmes d'anxiété, 24 % en syndrome post-traumatique.
On a parlé du climat de travail qui était «so-so». Vous comprendrez que, dans
une institution comme le DPCP, le climat de travail est une des choses les plus
importantes, parce qu'on parle de confiance de la population, on parle de... on
a besoin de sentir que la personne qui est le directeur est vraiment en charge
et vraiment le leader de cette organisation-là. Et ça me préoccupe puis ça
préoccupe beaucoup de gens quand on entend parler de climat de travail. Je ne
ferai pas la petite histoire des dernières années mais c'est un mot qui a été
bien à la mode, il y a quelques années, le climat de travail, ça a fini par
toutes sortes de choses qui, espérons-le, ne se reproduiront pas. Comment...
Est-ce que c'est... Je comprends que vous êtes là depuis le 23 avril, officiellement,
vous êtes quand même dans la boîte depuis quand même une vingtaine d'années,
là, et est-ce que c'est quelque chose que vous aviez pu percevoir? Et comment
vous allez vous y prendre pour, je vous dirais, rétablir cette confiance
nécessaire de la population à l'égard de l'institution qu'est le Directeur des
poursuites criminelles et pénales?
Et
j'ajouterais, il y a eu une demande qui a été faite dans les renseignements particuliers, il y a huit procureurs qui ont démissionné
en 2020. C'est rare, ça. En tout cas, moi, je pense que c'est rare que des
procureurs démissionnent. Est-ce que
ça a un rapport avec le climat de travail ou c'est des raisons qui sont complètement autres?
Le Président (M.
Bachand) : ...s'il vous plaît.
M. Michel (Patrick) : Merci,
M. le Président. Merci, M. le député de Chomedey, pour vos questions,
et je vous remercie aussi d'avoir la délicatesse de souligner, en fait, mon
entrée en fonction. Je vous en remercie.
Il y a plusieurs aspects à votre question. Je
sais que le temps nous manque. Au niveau des démissions, je ne connais pas, je
n'ai pas le détail des motifs de ces démissions. Ce qu'on me disait, bon, vous
l'avez dit, je suis là depuis quatre jours mais, ce qu'on me disait, c'est que,
huit démissions, ça ne représentait pas une augmentation anormale ou ce n'était
pas un chiffre anormal par rapport à ce qu'on a connu les années précédentes.
Il y a un aspect de votre question, en fait, qui
porte sur la confiance, comment rétablir la confiance ou maintenir la confiance
de la population à l'égard de l'institution du DPCP. Et vous liez cette
question-là, si je comprends bien, au climat de travail et à la santé
psychologique des procureurs. Évidemment, je l'ai dit, la santé psychologique
de nos procureurs, comme de tout le personnel du DPCP d'ailleurs, c'est une
priorité. C'était une priorité avant moi, ce n'est pas moi qui en fait une, là,
c'est une priorité traditionnelle de l'institution.
Ça me permet de revenir, peut-être, brièvement.
Les résultats de ce sondage ou de cette étude à laquelle on fait référence, et
sans aucunement diminuer l'importance de la situation, les chiffres qui sont
là, comme dirigeant, je veux dire, on ne peut pas laisser ça lettre morte, je
dois m'en occuper, je dois m'enquérir de cette situation-là, mais, si on
compare ces chiffres-là... sans diminuer l'importance de la situation, si on
compare ces chiffres-là à l'état, disons, de la santé psychologique de la
profession d'avocat en général, on voit que c'est des... on est dans des eaux,
des chiffres à peu près comparables. Alors, le travail de l'avocat est
anxiogène, le travail des procureurs l'est tout autant et surtout, dans le contexte qu'on vit actuellement, comme toutes
les personnes qui sont en service de première ligne auprès de la
population, la situation est encore plus difficile à vivre.
Maintenant, ce que j'ai... si j'ai encore un peu
de temps, M. le Président? Merci. Ce que j'ai l'intention de faire,
concrètement? En fait, vous disiez, il y a un aspect de votre question :
Est-ce que vous le percevez? Moi, je suis au... je suis
gestionnaire depuis huit ans au DPCP et, si je me fie à l'expérience de
mon bureau à moi, j'ose dire, puis on pourra me contredire si ce n'est pas le
cas, mais j'ose dire que le climat de travail était plutôt bon, plutôt, même
très bon au bureau, chez nous. Alors, j'ai été un peu surpris, comme je vous le
disais, comme je l'expliquais plus tôt en
réponse à la question du député de LaFontaine, de lire cette lettre-là et de voir la situation
qu'on y dépeignait comme vraiment une situation générale au DPCP. Alors,
quand je vous dis, quand je répondais à la question du député de LaFontaine
qu'il faut que je m'assoie avec l'association puis qu'on fasse le point, je me
demande, bon, où est-ce qu'il y a des surcharges de travail, distinguer la
surcharge de travail du climat de travail. Moi, climat de travail, pour moi,
dans ma conception des choses, quand on parle, je ne sais pas, moi, d'abus de
pouvoir, d'incivilité, de situation de harcèlement, ça interpelle ça, moi, la
notion de climat de travail. Je ne sens pas ça ni au bureau chez moi ni de mes
discussions que j'ai avec les différents procureurs en chef.
Mais je reçois ce message-là, je le prends très
au sérieux et je vais m'asseoir avec l'association pour faire le point
là-dessus.
• (11 h 30) •
Le Président
(M. Bachand) : M. le député de Chomedey.
M. Ouellette : Mais je me
permettrai, Me Michel, un petit complément. Probablement qu'au niveau de
la branche des services juridiques, la direction, le climat de travail devait
être excellent, vous étiez responsable.
Si on parle de la branche des procureurs
spécialisés en crime organisé, en agression sexuelle, en violence conjugale, en
grande criminalité, je comprends, et je pense que vous me suivez là-dedans, la
barre est haute pour le bureau du Directeur des poursuites criminelles et
pénales. Et, peu importe le secteur dans lequel... si la majorité ou
quelques-uns des problèmes qui sont spécifiés dans la lettre dont a fait part
le député de LaFontaine ou dans les dossiers que les citoyens voient plus
régulièrement, qui touchent les 200 procureurs qui sont en spécialité
organisée... les gens ne font pas la différence. Et la Commission des
institutions, normalement, doit recevoir le Directeur des poursuites
criminelles et pénales, je dirais, régulièrement, mais c'est arrivé une fois.
Probablement que vos réponses d'aujourd'hui, on pourra, suite au rapport de
gestion, les regarder et juger de l'évolution.
Quand je vous parle de vos procureurs
spécialisés, on regarde les renseignements particuliers et on voit que vous
avez huit procureurs qui sont affectés aux gangs de rue. On pose la question
s'il y a eu des dossiers de gangs de rue en 2020. Il n'y en a pas eu. Bien, je
vais avec les réponses des renseignements particuliers. Et donc on nous dit
qu'il y a des procureurs en crime organisé et en grande criminalité. Je ne suis
pas sûr qu'on a toute l'information dans les renseignements particuliers qu'on
a demandés.
Et vous avez parlé de perception tantôt. Vous
s'avez qu'en politique il y a beaucoup de choses qui sont jugées par les
perfections. Puis, présentement, il y a comme cette perception-là que, un, le
climat n'est peut-être pas à son maximum. Il y a comme la perception qu'il y
aurait peut-être lieu de rebrasser des cartes, de regarder est-ce que j'ai
assez de procureurs en violence conjugale, en agressions sexuelles, parce que
c'est la nouvelle saveur, si on veut, là, ou, en tout cas, c'est la saveur qui
est d'actualité beaucoup.
Est-ce que... On parle beaucoup d'armes à feu.
On regarde dans les renseignements particuliers qu'on a demandés. Bien, il y a
55 dossiers qui ont été déjudiciarisés qui touchent les armes à feu. Ça
aussi, bien, c'est dans les cahiers. Je ne vous amènerai pas à la page, je vous
donne le bénéfice du doute pour notre première rencontre, là, puisqu'en trois
jours vous auriez dû prendre connaissance de tout ça. Et je me dis qu'il y a
2 400 dossiers qui sont déjudiciarisés à l'intérieur de la province
de Québec. Le quart, 25 % de tous ces dossiers-là s'est déjudiciarisé à
Longueuil puis à Saint-Jérôme. Je me pose des questions, puis je me dis :
Il y a-tu quelque chose de particulier dans certaines régions du Québec qui se
passe? Donc, ça m'amène à vous poser la question. Quand vous aurez fait l'état
des lieux, peut-être qu'un rebrassage de cartes pourrait être envisageable ou
envisagé dans le but de mieux s'adapter à la criminalité de 2021, ou vers où on
s'en va, là.
M. Michel (Patrick) : Oui. Merci, M.
le Président. Bien, il y a plusieurs aspects à votre question. Je ne sais pas
si je vais être en mesure de tous les aborder. Mais effectivement, bon, il y a
un enjeu de répartition des ressources. Je
l'ai abordé en réponse à une question de Mme la députée de Joliette. Les
dossiers de violence conjugale et de
violence sexuelle, ça représente, bon an mal an, maintenant, 20 % du
volume de dossiers au DPCP. C'est des dossiers... Bon, si on prend les
dossiers de violence conjugale, c'est des dossiers peut-être, à une certaine
époque, et je le dis, là, une époque qui est révolue, qu'on pouvait considérer
comme des dossiers peut-être moins complexes. Mais, compte tenu des enjeux
sociaux, psychologiques et d'accompagnement nécessaire dans le traitement de ces dossiers-là, ce sont devenus des
dossiers importants, ils l'étaient avant, mais des dossiers qui comportent
peut-être une plus grande complexité, pas tant sur les éléments factuels ou de
la preuve, mais qui demandent plus en termes
d'accompagnement. Alors, on a peut-être effectivement une réévaluation à faire
de la répartition de nos ressources. Ça représente un cinquième de tous nos dossiers. Est-ce
qu'un cinquième de toutes nos ressources sont accordé au traitement de ces
dossiers-là? Je ne sais pas. Je devrai faire un état de situation, comme vous
le suggérez d'ailleurs dans votre question.
En matière de
non-judiciarisation, malheureusement, je ne maîtrise pas encore tous les
cahiers, mais en matière de traitement non judiciaire de certaines
infractions, vous avez fait référence à des dossiers d'armes à feu. Là, de
mémoire, je n'ai pas le programme en tête, mais je sais qu'il y a des
infractions d'entreposage non réglementaire, là, des armes à feu, une
infraction qui est criminelle, mais qui chevauche le criminel puis le
réglementaire, là. Alors, on parle peut-être de ce type de dossiers là qui ont
été traités en non-ju.
Vous en parliez, bon, le traitement non
judiciaire de certaines infractions, ça s'inscrit dans une tendance vers la
recherche de mesures alternatives à la judiciarisation traditionnelle, parce
qu'on veut que les ressources de nos tribunaux, les
ressources de nos procureurs soient consacrées aux vrais criminels. Et il y a
moyen de sortir du système de justice criminelle par ces recours-là, la
non-judiciarisation, les mesures de rechange, de sortir des gens qui ne
devraient pas s'y retrouver, qui font un écart de conduite mineur ou dont
l'écart de conduite est dû à une problématique sous-jacente qu'on devrait
traiter pour les sortir du système de justice. Alors, ça, ça va être une de mes
priorités dans l'évolution de la culture au DPCP pour les prochaines années.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de Chomedey.
M. Ouellette : Juste pour vous
aider, c'est dans le deuxième cahier, mais non vous n'avez pas besoin de le
regarder immédiatement, c'est à la page 268. Il y a une mine
d'informations là-dedans. Puis, comme je vous ai dit, Me Michel,
l'important, ce n'est pas de tout le savoir, c'est qu'en partant du moment où
on nous le souligne et que... La période des crédits budgétaires, ça nous amène
à souligner certaines choses, mais on est ici pour s'améliorer aussi puis faire
en sorte d'être en mesure de répondre aux citoyens du Québec.
D'autres choses, parce que j'en ai regardé, à la
page 280 — faites
juste le prendre en note : aucun constat cette année par rapport à la loi
sur la transparence puis sur le lobbyisme. C'est assez particulier, ça aussi.
Je regardais, le ministre serait très content...
On parle beaucoup de langue française, de ce temps-ci, et de la Charte de la langue française. Bon, on a très peu
de poursuites. Ça va probablement changer quand on aura vu la nouvelle
mouture d'une nouvelle loi potentielle à un moment donné. Puis ce n'est
sûrement pas parce que tout le monde est très...
tout le monde suit la loi à la lettre, là. C'est des petits points,
effectivement, qu'on note. On parle en perception.
On parle bien perception. On a beaucoup entendu
parler des élus municipaux cette année dans différentes municipalités, dans
différentes villes, on a beaucoup entendu parler des affaires municipales, la
Commission municipale, mais il n'y a aucune enquête, il n'y a aucun constat
d'infraction qui a été émis par le DPCP qui touche des élus, même s'il y en a
certains dans certaines villes qui ont été... qui ont quitté ou qu'on a forcé à
quitter en vertu d'autres lois. Ça fait partie des petits détails qu'on
remarque. Quand je vous mentionnais que le...
Le Président (M.
Bachand) : ...il reste 10 secondes.
• (11 h 40) •
M. Ouellette : Bon, bien, la
meilleure des chances pour la prochaine année, Me Michel. Et on aura
sûrement l'opportunité de retravailler ensemble.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. C'est une belle finalité. M. le
député de Jacques-Cartier, s'il vous plaît.
M. Kelley :
Merci beaucoup, M. le Président. Je veux, aujourd'hui, juste poser des
questions sur l'administration de la
justice en lien avec les peuples autochtones, les Premières Nations et les
Inuits de Québec. Je sais que le ministre des Affaires autochtones et le
ministre de la Justice a posé des questions... excuse-moi, a annoncé
19 millions dollars pour améliorer les
services pour les Premières Nations et Inuits du Québec. Dans le communiqué de
presse, le ministre a dit qu'il répond à certains appels à l'action dans
le rapport de la commission Viens, mais aussi dans le rapport des femmes
assassinées et disparues. C'était bien reçu, mais des gens ont aussi dit que
c'est juste un premier pas vers une plus grande réforme.
Alors, je veux juste savoir, selon le ministre,
c'est quoi, les prochaines étapes. Parce que l'argent qui a été annoncé, c'est
des sommes qui sont importantes pour les différents groupes, mais certains
experts ont souligné que ça prend toujours une réforme plus importante du
système de notre côté. Ce n'est pas nécessairement des groupes qui travaillent
en collaboration avec les Premières Nations et les Inuits, mais, des fois, c'est
plus une question d'une meilleure adaptation de notre système envers les
peuples autochtones.
Alors, je veux juste savoir, selon le ministre,
c'est quoi, les prochaines étapes, c'est quoi, le prochain suivi, pour lui, qui
est le plus important, selon les appels à l'action qui ont été déposés par la
commission... excusez-moi, le rapport de la commission Viens.
Le Président (M.
Bachand) : M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Merci, M. le
Président. Salutations au député de Jacques-Cartier. Écoutez, justement, à
juste titre, le 5 mars dernier, le ministre des Affaires autochtones ainsi
que moi-même, on a annoncé 19,2 millions de dollars sur cinq ans, ça répondait à des appels à l'action, notamment,
de la commission Viens, donc : 5,5 millions pour des interprètes, donc, au niveau judiciaire, pour
permettre que le système de justice soit adapté et de faire en sorte que
les justiciables puissent être compris; ensuite, les conseillers
parajudiciaires, 6 millions sur cinq ans également — ça, c'est des gens qui accompagnent les personnes
autochtones dans le système de justice, à la fois les victimes, à la fois
les contrevenants, pour leur expliquer la démarche, donc si elle fait des rappels, la
cour, les procédures également — et
les intervenants auprès des victimes, 7,7 millions sur cinq ans, M. le
Président. Alors, vraiment, on se mobilise, avec le ministre des Affaires autochtones, pour adapter le système de justice.
Donc, on va continuer de travailler en collaboration.
Vous savez, il y a plusieurs éléments à mettre
en place avec le système de justice, notamment l'amélioration des ressources
qui sont là-bas, mais aussi, vous savez, présentement, avec la COVID, il y a
des enjeux notamment avec la cour itinérante, mais la question notamment des
délais de comparution. Vous vous souvenez, à une certaine époque, les détenus
autochtones étaient transférés par Montréal, ensuite étaient transférés à Amos.
Donc, souvent, le délai de trois jours n'était pas
respecté. Alors, on a corrigé ça. Maintenant, les comparutions... pardon, pas
les comparutions, les enquêtes sur remise en liberté sont faites, à hauteur de
87 %, par visioconférence. Donc, on a adapté sur place en donnant les
outils technologiques pour faire en sorte que les enquêtes sur Verbmise en
liberté soient effectuées rapidement dans le Nord.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de Jacques-Cartier.
M. Kelley : Oui. Et, M. le
ministre, juste une question sur les interprètes. J'ai une demande qui vient
pour la famille de Joyce Echaquan, la famille Dubé. Bien, ils veulent juste
être rassurés qu'un interprète va être présent dans l'enquête et la partie
publique avec le coroner. Je sais que vous êtes le ministre de la Justice, mais
je passe le message que c'est très important pour eux autres d'avoir quelqu'un
qui est présent qui peut faire la traduction du français vers la langue
attikamek. Alors, c'est juste si le ministre peut regarder ça. C'est une
question précise. Et, comme j'ai dit, je sais que c'est le coroner, mais, quand
même, si lui peut s'assurer, avec le ministre des Affaires autochtones et la vice-première
ministre du Québec, juste que cette personne ou personnes qui sont présentes
pour le processus... excusez-moi, pour la partie qui est publique et pour aider
la famille dans la suite de trouver la vérité à qu'est-ce qui a passé à Joyce
Echaquan.
Mais juste une autre question, parce que le
ministre...
Le Président (M.
Bachand) : ...sur ça, M. le ministre? Oui.
Allez-y, M. le ministre.
M. Kelley : O.K., M. le
ministre, vous pouvez répondre. Vas-y.
M.
Jolin-Barrette : M. le
Président, avec... on va donner suite à la recommandation du député de Jacques-Cartier.
Donc, on va s'assurer qu'il y ait quelqu'un pour faire la traduction.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de Jacques-Cartier.
M. Kelley : Parfait. Merci
beaucoup. Puis je reviens un petit peu sur, oui, avec la COVID, on a eu des
délais, ça arrive, mais aussi qu'est-ce que le ministre parle, le processus à
Amos. Puis, dans le rapport de la commission Viens, c'est bien indiqué qu'il
faut faire des investissements dans l'administration de la justice dans le
Nord. Et c'est sûr que, dans les petites communautés, qu'on pense à des petites
communautés inuites, ce n'est pas toujours évident.
Les stations de police, ça sert à plusieurs
services communautaires. Alors, je comprends que c'est des investissements
énormes. Mais je veux juste voir, là, c'est quoi, les démarches que le ministre
de la Justice et le ministère de la Justice ont prises cette année ou depuis
deux ans, depuis le dépôt du rapport de la commission Viens, pour regarder
comment on peut mieux investir dans les services communautaires, puis aussi, quand
même si c'est par visioconférence, qu'on sait une réalité, que des juges et tout
le monde autour du processus de quelque chose qui passe par visioconférence
soient bien formés. Parce qu'ils parlent aussi, dans le rapport de la
commission Viens, de cet élément, qu'il y a une formation qui est donnée à
plusieurs personnes qui travaillent dans l'administration de la justice au Québec.
Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui. Deux choses
l'une, c'est sûr qu'après la pandémie l'objectif est de reprendre la cour
itinérante, notamment, parce que je crois que c'est opportun. Malgré toute la
technologie que nous pouvons avoir, en termes d'efficacité aussi, je crois que
c'est important que la cour itinérante maintienne ses activités et aille dans les différentes communautés. Les solutions
technologiques, c'est un outil qui améliore le processus judiciaire,
sauf que ça ne remplace pas le fait d'avoir le juge qui est présent, d'avoir le
procureur de la couronne, d'avoir l'avocat de la
défense, à la fois pour l'accusé, mais à la fois aussi pour la personne victime
qui doit se sentir soutenue sur les lieux.
En ce qui concerne les bâtiments, vous savez, le
ministère de la Justice, la cour itinérante va dans plusieurs communautés. Elle va plus régulièrement dans
certaines communautés, moins souvent dans d'autres. Et, bien souvent, il
arrive que les installations sur place, effectivement, ne sont pas tout à fait adaptées. Donc, on travaille en
collaboration avec les communautés pour louer des espaces qui vont être
adaptés, notamment pour s'assurer, un, que les personnes victimes puissent être
rencontrées dans des locaux séparés, que les accusés aussi puissent consulter
leur avocat dans un local séparé aussi. Ça soulève des enjeux dans le Nord
relativement à la disponibilité. Il y a un autre... Ça, c'est justice au niveau
de la cour itinérante.
Il y a un autre aspect, qui relève de la
Sécurité publique, relativement à la détention. Donc, quand il n'y a pas de
mise en liberté, bien, à ce moment-là, en fait... puis le délai pour la mise en
liberté, il est restreint, donc, il y a les blocs cellulaires aussi, des
différents corps de police autochtones, qui doivent être mis à niveau. Donc,
c'est paramétrique, mais, déjà, le fait qu'on ait développé les outils
technologiques pour faire en sorte que l'enquête sur mise en liberté se fasse
plus rapidement et à distance pour éviter que le prévenu ait besoin d'aller
dans le Sud, c'est déjà une nette amélioration. Mais on va continuer, puis ça,
ça demande de collaborer avec le DPCP, avec l'aide juridique, avec la Cour du
Québec également.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Kelley :
Merci, M. le ministre, pour votre réponse. Je veux revenir un petit peu sur la
question aussi de la surreprésentation des peuples autochtones et des Premières
Nations, des Inuits au sein de nos institutions, et ça, c'est les chiffres qui
viennent du ministre de la Justice du Québec qu'on trouve dans le rapport de la
commission Viens, que 4,8 % des chefs d'accusation portés au Québec
concernent des personnes ayant déclaré une adresse dans une communauté ou dans
un village autochtone. Pour le reste de la population, c'est 1,4 %.
Quand on regarde, le taux de judiciarisation des
autochtones a doublé entre 2001 et 2017, passant de 31,1 membres des
Premières Nations ou Inuits judiciarisés sur 1 000 habitants à 62.
Puis, en comparaison, quand on prend l'exemple des allochtones, c'est 55,1 sur
1 000 habitants, et maintenant c'est 55,3. Alors, on a vu une petite augmentation avec les allochtones, mais, avec les
autochtones, on a vu une croissance malheureusement très importante.
Puis je regarde aussi des chiffres établis...
excusez-moi, juste regarder ici, un autre que j'ai trouvé très triste comme
chiffre, mais une moyenne de 6,7 % des accusations portées visent des
personnes résidant dans une communauté ou un
village autochtone, et c'était de 2001 à 2017. C'est vraiment une disproportion
touchant particulièrement les Inuits et... que les autres. Alors, il y a
clairement un enjeu qui vient particulièrement dans le Nord. C'est tout dans le
rapport de la commission Viens.
Mais, je veux juste savoir, est-ce que le
ministre a des cibles et des plans d'action en place pour essayer d'attaquer
cette question, la surreprésentation des autochtones? Si c'est dans une prison
du Québec, ou quand même juste des chiffres des accusations qui sont portées
contre les autochtones, des Inuits, je veux juste savoir s'il y a des cibles
pour réduire ça, des approches avec d'autres ministères pour s'assurer qu'il y
a quand même des plans d'action en place qui sont sur le côté social, et tout
ça. Mais c'est juste : En bout de la ligne, c'est quoi, le plan de match
du ministre et ministère de vraiment attaquer cette question de la surreprésentation
des Premières Nations et des Inuits dans des prisons du Québec?
• (11 h 50) •
Le Président (M.
Bachand) : Merci, M. le député. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui, merci,
M. le Président. Bien, en fait, ce qui est soulevé par le député de
Jacques-Cartier, c'est un très bon point. Puis souvent on a tendance à voir,
supposons, le système de justice comme étant... Il y a des enjeux avec le
système de justice, il y a des condamnations par rapport aux personnes
autochtones, mais ce qu'il faut regarder
entre autres, c'est la genèse de tout ça, parce que le système de justice
arrive en bout de piste. Il y a beaucoup de travail à faire, et c'est ce
qui est fait par mes collègues de la Santé et des Services sociaux et mon collègue des Affaires autochtones, sur les
conditions, dans le fond, le soutien qui est offert aux personnes
autochtones dans les différentes
communautés. Et, vous savez, il y a plusieurs défis à répondre sur le plan
social, et c'est sûr qu'en travaillant
sur cet aspect-là, ça va notamment réduire la criminalité, M. le Président, en
lien avec les condamnations qu'il y a.
Mais déjà, d'entrée de jeu, M. le Président, il
y a plusieurs collaborations qui sont faites par le ministère de la Justice,
notamment avec le Centre d'amitié autochtone de Val-d'Or dans le programme
d'accompagnement judiciaire et d'intervention communautaire. Il y a un soutien
similaire qui est accordé aussi au Centre de justice des premiers peuples de
Montréal, pour la délivrance d'un programme à Montréal, et pour le centre
d'amitié Eeyou de Chibougamau. Il y a
15 initiatives de justice communautaire représentant 28 communautés
et trois milieux urbains qui sont financés par le MJQV à l'heure
actuelle, et on va développer des nouveaux projets également pour 2021‑2022.
Alors, ce qu'on veut faire, c'est vraiment
outiller les communautés. Et également, en termes de justice alternative aussi,
M. le Président, je pense que c'est important d'adapter la réalité en fonction
des communautés autochtones. Alors, on travaille là-dessus, M. le Président.
Mais, vous savez, ce n'est pas uniquement le système de justice, il faut
regarder ça dans son continuum. Puis je pense que la commission Viens, c'est ce
qu'elle énonçait aussi. Donc, le ministère de la Justice participe à améliorer
le tout, mais il faut travailler sur plusieurs axes aussi.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de Jacques-Cartier, s'il vous plaît.
M. Kelley : Merci beaucoup.
Je vais poser une question qui est juste... c'est un petit peu précis, puis
c'est en lien avec la réponse du ministre. C'est l'appel à l'action...
excusez-moi, j'ai juste perdu... c'est l'appel à l'action 49 :
«Financer de façon pérenne les programmes d'accompagnement à la justice,
d'intervention communautaire pour les personnes vulnérables en situation
d'itinérance ou à risque de le devenir.» Je pose la question sur les
autochtones à risque d'itinérance, parce qu'on a vu, à Montréal, et je prends
l'exemple de Montréal malgré le fait qu'on sait que c'est une clientèle très
vulnérable, qu'ils se font donner des amendes par les forces policières, des
amendes qu'ils ne sont pas capables de payer. Alors, encore, je reviens un
petit peu sur cette partie-là. Le système de la justice, comment on peut encore
s'assurer qu'on ne donne pas des amendes à des personnes autochtones ou des
Premières Nations, Inuits, des infractions qu'ils ne sont pas capables à payer,
puis ils sont maintenant forcés d'avoir une dette lourde? Je veux juste savoir
c'est quoi, les pensées du ministre sur cette situation au sein de notre
population itinérante autochtone à Montréal.
Le Président (M.
Bachand) : M. le ministre, s'il vous plaît.
M.
Jolin-Barrette : Oui. Bien, je suis bien au fait de cette réalité-là,
et le député de Jacques-Cartier fait bien de le souligner. Il y a notamment des
programmes de mesures de rechange aussi qui existent pour faire en sorte que,
lorsqu'une personne en situation de vulnérabilité reçoit un constat
d'infraction, M. le Président... Et, vous savez, parfois, on se retrouve avec
une multitude de constats d'infraction, puis, un, les gens ne sont pas capables
de les payer, et, deuxièmement, on se retrouve dans une situation
où, pour payer les constats d'infraction, bien, on se retrouve dans une situation
où, ultimement, la personne ne s'en sortira pas. Donc, il y a des mesures de
rechange qui existent déjà. Et on valorise l'utilisation de ces programmes de
mesures de rechange et d'accompagnement pour faire en sorte de régulariser les
dossiers judiciaires des personnes, donc que ça soit adapté à la réalité, puis
surtout de prendre en charge les personnes, de les outiller pour qu'elles
puissent faire face aux défis qu'elles doivent surmonter.
Le
Président (M. Bachand) : M. le député de
Jacques-Cartier, s'il vous plaît.
M. Kelley :
Merci beaucoup. Je vais poser une question maintenant sur un autre sujet, et ce
n'est pas notre formation politique qui pose la question, c'est plusieurs chefs
et élus autochtones qui demandent que le gouvernement abandonne sa contestation
judiciaire de la loi fédérale C-92 et trouve une solution hors cour.
Alors, je veux juste savoir, je comprends l'argument des compétences, mais est-ce
que c'est quelque chose que le ministre examine présentement, de peut-être
juste mettre ça à côté, laisser des avocats à côté puis trouver une façon, avec
le gouvernement fédéral, le gouvernement du Québec et les différentes nations
concernées, une façon de travailler ensemble,
de respecter toutes les lois et des compétences qui existent sur notre
territoire, mais aussi au sein du Canada?
Le
Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Donc, vous le savez, M. le Président, il y a un enjeu
présentement avec le projet de loi C-92, et c'est devant la cour, M. le
Président, et on a exprimé notre position devant la cour, M. le Président, et
ça fait... On va toujours continuer le dialogue, mais le législateur fédéral
décide d'empiéter sur les compétences québécoises, M. le Président. Alors, il y
a des discussions qui ont cours avec les nations autochtones, comme il y en a
toujours eu, M. le Président. Là, on est véritablement dans un enjeu
fédéral-provincial, M. le Président, et je ne peux pas faire davantage de
commentaires, M. le Président, parce que le dossier est devant la cour, et
l'audition est prévue le 13 septembre prochain.
Cela étant, vous
savez, pour le Québec, les nations autochtones, c'est extrêmement important,
notamment, de respecter leurs droits, leur culture, et on va toujours se
gouverner ainsi, M. le Président, comme les gouvernements successifs du Québec
l'ont toujours fait. Cela étant, ce n'est pas au gouvernement fédéral à venir
empiéter dans les compétences du Québec. Et le gouvernement du Québec négocie
de nation en nation avec les communautés autochtones, mais le tout étant en
fonction du partage des compétences. Et le gouvernement du Québec défendra toujours
ses compétences, M. le Président, et le gouvernement fédéral doit, dans ce
contexte-là, céder le pas à la prérogative de l'État québécois.
Le
Président (M. Bachand) : M. le député de Jacques-Cartier.
M. Kelley :
Merci, M. le Président. Une question maintenant sur l'accès à la justice pour
la communauté d'expression anglaise. Encore, on parle un petit peu de l'administration,
le système. C'est très important, c'est un droit pour les anglophones du Québec,
puis, on sait, c'est un droit très important envers les francophones hors
Québec. C'est dans notre Constitution. Et je veux juste savoir quelles
ressources le ministre a mises en place pour s'assurer que notre système
respecte les droits constitutionnels de la communauté d'expression anglaise.
Le
Président (M. Bachand) : M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : En fait, M. le Président, le système de justice
respecte les droits consacrés, M. le Président, par la Loi constitutionnelle
qui gouverne le Canada, M. le Président, et les tribunaux ont toujours respecté
les droits de la communauté anglophone et continueront de les respecter.
Le
Président (M. Bachand) : M. le député de Jacques-Cartier.
M. Kelley :
Merci, M. le Président. Ça, c'est pourquoi je pense que c'est important que le
ministre adopte mon projet de loi n° 590, pour s'assurer que, quand même,
tout le monde a au minimum une bonne compréhension de la langue française. Et
peut-être on va inspirer le prochain juge qui va être hyperbilingue dans la
langue française et dans la langue anglaise pour travailler sur un banc de la
Cour supérieure, ou quelque chose comme ça. Alors, encore, je vais interpeller
le ministre d'adopter mon projet de loi. Mais merci pour les réponses.
Puis je veux juste
savoir si le ministre a pris la relève du dossier que sa prédécesseure a
travaillé sur, en collaboration avec le Barreau anglophone de Montréal, et ça,
c'est concernant la traduction de nos lois ici, à l'Assemblée nationale. Ce
n'est pas juste le ministère de la Justice qui a la responsabilité, il y a
aussi une question qui touche plus l'Assemblée nationale. Mais, bref, c'est
juste... le point qui était toujours soulevé par le Barreau de Montréal,
c'étaient juste les questions que les deux lois, en anglais et en français,
s'appliquent sur notre territoire, et, des fois, il y a des lacunes dans les
versions anglaises. Puis ça, ça peut créer un problème pour un juge quand il y
a une différence entre les deux lois. Alors, je veux juste savoir si le
ministre a continué de travailler sur le dossier pour embaucher plus des gens
qui travaillent sur la traduction des lois, en avant qu'elles sont déposées,
pour s'assurer qu'on a une bonne qualité de loi dans les deux langues.
Le Président (M.
Bachand) : 30 secondes, M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Bien, deux choses l'une, le Barreau, l'Assemblée
nationale ont travaillé avec le MJQ, justement, pour aller dans le sens du député
de Jacques-Cartier, et, pour ce qui est du projet de loi du député de Jacques-Cartier,
écoutez, je l'ai dit, c'est une bonne idée qui a été reprise de mon collègue le
député de Sainte-Rose, et, très certainement, ça pourra faire l'objet de débats
dans le projet de loi qu'on va déposer sur la Charte de la langue française. Et
j'aurai le plaisir de travailler, je l'espère, avec le député de Jacques-Cartier.
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup.
Compte tenu de
l'heure, la commission suspend ses travaux jusqu'après les affaires courantes,
soit vers 15 h 30. Merci beaucoup. Bon lunch.
(Suspension de la séance à
12 heures)
(Reprise à 15 h 29)
Le
Président (M. Bachand) : Bon après-midi à tous et à toutes.
Nous reprenons nos travaux. Nous allons reprendre, donc, les travaux, car la commission
est réunie afin de poursuivre l'étude du volet Justice des crédits budgétaires
du portefeuille Justice pour l'exercice financier 2021-2022.
Cet
après-midi, 30 minutes seront allouées à l'étude de ce
volet. Les blocs d'échange seront d'une durée d'environ quatre minutes à
17 minutes.
Donc, nous
commencerons avec un bloc d'intervention de l'opposition officielle. Mme la
députée de Westmount—Saint-Louis,
pour une période de 18 min 40 s. Bienvenue.
• (15 h 30) •
Mme
Maccarone : Merci beaucoup, M. le Président. C'est un plaisir pour moi d'être parmi vous
aujourd'hui et un plaisir de pouvoir échanger avec mes collègues ainsi que les
représentants de la CDPDJ. Bonjour. J'ai plein de questions, alors je vais
débuter tout de suite, profiter du temps que nous avons ensemble.
D'emblée, je veux
mentionner que, pendant la période d'été, après que j'ai été confié avec grand
plaisir le dossier de diversité et inclusion par ma cheffe, j'ai commencé tout
de suite à rencontrer des groupes qui représentent ces communautés qui sont
visées par la discrimination, la racisation, etc. Puis à l'intérieur de ces
rencontres, la majorité de ces personnes, surtout des groupes racisés, les personnes
noires, les personnes autochtones, les personnes arabes, les personnes
chinoises ou asiatiques, ils ont mentionné que beaucoup de difficultés dont ils
font face, c'était lié avec le processus de plainte par rapport à la CDPDJ. Ce
n'est pas un reproche, c'est plus de dire : C'était complexe, souvent, il
se trouvait qu'il y avait des gens au bout de la ligne qui soit ne
connaissaient pas la cause, ne connaissaient pas leur situation, ou c'était très,
très long avoir des réponses ou très, très long de traiter la plainte. Alors...
Puis comme j'ai dit, ce n'est pas un reproche, ce n'est pas une critique, on ne
peut jamais nier la perception de la victime, je pense que c'est très important
de reconnaître leur situation.
Alors, je voulais
savoir un peu comment que la CDPDJ voit ceci, avec la permission du ministre
qu'on intervienne avec M. Tessier et
son équipe, mais pour voir un peu comment qu'ils voient ça, s'il y a
une façon d'améliorer le processus pour les victimes qui dénoncent.
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup.
Je vous inviterais, par exemple, de vous réidentifier de nouveau, avec votre
nom et votre titre, s'il vous plaît. Merci.
M.
Tessier (Philippe-André) : Oui.
Alors, merci, M. le Président. Bonjour. Philippe-André Tessier,
président de la Commission des droits de la personne et des droits de la
jeunesse. Alors, merci à la députée pour sa question très intéressante.
Effectivement, la question
du traitement des plaintes est une préoccupation de tous les instants de la
direction puis de l'équipe de gestion et de l'ensemble du personnel de la commission,
parce que c'est une responsabilité quand même importante. Parce qu'on peut
avoir des droits, ils sont dans notre Charte des droits et libertés de la
personne, la Loi sur la protection de la jeunesse, la Loi sur l'accès à
l'égalité en emploi, mais encore faut-il s'assurer de l'effectivité de ces
droits-là. Puis pour s'assurer de l'effectivité de ces droits-là, bien, il faut
que le système de plainte, et ultimement le recours au tribunal, soit le plus
efficient possible.
Donc, c'est sûr et
certain qu'à mon arrivée à la commission, il y a déjà trois ans, on a mis en
place plusieurs mesures pour s'attaquer à ces questions-là. Juste un petit pas
de recul aussi puis juste pour rappeler aussi qu'il y a quatre domaines d'activité dans lesquels la commission
agit. Premier domaine, c'est la question liée à la discrimination et harcèlement,
donc les articles, si on veut, 10 à 19 de la charte, les questions aussi en
lien avec l'article 48 de la charte, les dossiers d'exploitation, personnes
âgées ou personnes handicapées, les dossiers en accès à l'égalité, en vertu de
la Loi sur l'accès à l'égalité en emploi, et le mandat que nous avons en vertu
de la Loi sur la protection de la jeunesse, donc les droits de l'enfant, qui
sont garantis par la loi et la charte.
Dans ces quatre
volets d'activité là, on s'assure d'avoir des pratiques qui sont adaptées.
Donc, c'est sûr et certain qu'au niveau de la jeunesse on a une équipe
spécialisée, une équipe Enquêtes jeunesse qui va s'occuper spécifiquement de ce
genre de dossier là.
On a également, en
accès à l'égalité, une équipe spécialisée pour traiter des questions d'accès à
l'égalité pour les cinq groupes visés : les femmes, les autochtones,
personnes en situation de handicap, les minorités visibles et les minorités
ethniques.
Même chose pour ce qui est
de l'exploitation, donc on a une équipe qui s'occupe vraiment, avec beaucoup de
talent, de la question de l'exploitation des personnes âgées et handicapées.
C'est sûr que je le précise puis je le dis à chaque année, la charte prévoit
une protection spéciale pour les personnes handicapées et les personnes âgées,
à 48 de la charte, mais plus de 90 % de nos plaintes, c'est vraiment les
personnes âgées. Donc, c'est vraiment un mandat qui est spécifique aussi pour
les personnes âgées.
Donc, encore une fois, on est partenaires dans
le cadre de la loi sur la maltraitance, dans le cadre du plan d'action sur la
maltraitance qui est mis en place sous la gouverne de la ministre Blais. Donc,
ces éléments-là... Et on est en concertation avec un ensemble d'organismes, le
Curateur public, l'Autorité des marchés financiers, les services policiers,
dans le cadre de plans d'intervention concertés pour contrer la maltraitance
dans l'ensemble des régions du Québec. Donc, ça, c'est le volet maltraitance.
Et le dernier volet, puis c'est celui sur lequel
je termine parce que je veux répondre à votre question plus précisément, la question du mandat sur la
discrimination et harcèlement, c'est les articles 10 à 19 de la charte,
c'est un peu ce qu'on a dans notre
imaginaire, quand on pense souvent à la commission, on pense à ces causes-là de
discrimination.
Mais c'est sûr et certain qu'une des
problématiques à laquelle on s'est attaquée, comme équipe de gestion, c'est la
question des délais à la commission. Puis je suis très content de pouvoir vous
dire que cette année, pour la première fois, moi, depuis que je suis président,
le délai moyen à la commission a baissé. Et ça, je vous dirais que c'est un
effort collectif de l'ensemble de la commission.
Nous avons également eu un effort budgétaire qui
a été consenti par le gouvernement actuel pour nous donner un petit coup de
pouce pour, disons, reprendre un petit peu du retard budgétaire que la
commission avait eu dans les 15, 20 dernières années. Il faut appeler un
chat un chat, c'est quand même ça qui est arrivé. Et ça fait en sorte que notre
délai moyen est passé de 651 jours à 527 jours. C'est 124 jours
de moins, ça, on se comprend, c'est quatre mois de moins en termes de délai
moyen. Évidemment, c'est un délai moyen.
L'autre chose aussi qui était problématique,
puis vous y avez fait référence, dans les délais de traitement, c'était le fait qu'il y avait, malheureusement,
certains dossiers plus complexes qui avaient des durées qui allaient au-delà
de trois ans d'enquête, et de processus, et de tout. Alors, je suis très
content de vous dire encore une fois qu'en date d'aujourd'hui des dossiers en
enquête de plus de trois ans, il n'y en a plus, à la commission, on les a tous
sortis, O.K.? Donc, on a fait un effort
particulier comme équipe pour vraiment s'attaquer à ces longs délais là puis
s'assurer que ce n'était plus la réalité, là, la façon de fonctionner de
la commission. Donc, ça, c'est pour ce qui est de la question des délais plus
spécifique.
Maintenant, pour ce qui est de l'approche
individualisée auprès des différents groupes dont vous parlez, c'est sûr et certain qu'avec ma collègue Myrlande Pierre, vice-présidente charte, on a
mis... Mais je vais vous laisser peut-être
me poser d'autres questions.
Mme Maccarone : Oui, mais...
Le Président (M.
Bachand) : Allez-y, Mme la députée.
Mme Maccarone : ...juste avant de
répondre à la question, parce que j'aimerais vous entendre plus élaborer par
rapport à la question aussi... parce qu'on n'a pas mentionné la communauté des
personnes qui font partie de LGBTQ2. La raison que je le nomme, c'est parce
qu'aussi à l'intérieur des débats que nous avons eus ici, à l'Assemblée nationale, on a entendu, par exemple,
les personnes trans qui disent que, exemple, souvent, elles font face à
la discrimination. Elles vont appeler au CDPDJ pour placer une plainte, puis on
a eu des témoignages des gens qui ont
dit : Bien, la personne au bout de la ligne ne connaissait pas c'était
quoi, une personne non binaire, ne connaissait pas c'était quoi, une
personne trans, une personne trans féminine, trans masculine.
Alors, à l'intérieur de votre réponse, si vous
pouvez aussi préciser qu'est-ce que vous faites par rapport à la formation
aussi pour s'assurer que les intervenants comprennent c'est quoi, la réalité
des personnes... les victimes de la discrimination, intimidation, et autres.
M. Tessier
(Philippe-André) : Un des grands défis pour la commission, évidemment,
c'est de pouvoir répondre avec toute l'attention puis toute la
délicatesse nécessaires lorsqu'une personne porte plainte chez nous. Parce que
la personne qui porte plainte chez nous, elle vit une situation qui l'a rendue
vulnérable, elle se trouve dans une situation de vulnérabilité, que ce soit en
matière de logement, en matière d'emploi, en... donc, en matière d'accès aux
services.
Donc, c'est sûr et certain que, déjà, en
partant, il y a des éléments de la charte qui sont des éléments qui sont
beaucoup travaillés par nos équipes en formation puis il y a des éléments plus
nouveaux. Vous faites référence à la communauté LGBT puis aux questions liées
aux personnes trans. Il faut comprendre que l'identité de genre aussi, c'est le
dernier motif, c'est le petit nouveau de l'article 10, ça a été adopté
sous le gouvernement précédent par l'Assemblée nationale comme nouveau motif.
Et c'est sûr et certain que nous, on s'est
employés à former l'ensemble des employés sur la question. On a eu la chance et
on a la chance d'avoir deux membres de la commission, je les nomme, Martine
Tremblay puis Marie Laure Leclercq, et les deux sont des formatrices et sont
des personnes reconnues dans la communauté LGBT pour faire avancer les droits
des lesbiennes et des trans, des personnes trans et pour faire des formations.
Marie Laure, puis je la salue si elle écoute, forme l'ensemble des juges
de la Cour d'appel, la Cour supérieure, la Cour du Québec. Et on a la chance
d'avoir une personne comme Marie Laure qui fait bénéficier à l'ensemble du
personnel de son expérience puis de son regard.
Donc, oui, c'est sûr que
ce genre de choses là se font auprès du personnel, puis on met à contribution
aussi les membres de la commission. C'est un peu pour ça aussi que c'est bien
d'avoir ce collège-là de membres à temps partiel, ça amène cette expertise-là à
la commission, ces regards-là.
Mme Maccarone : Merci. Je vais
poursuivre maintenant, on va parler un peu de la publicité pour faire
reconnaître un peu qu'est-ce qu'ils font, la CDPDJ, tous les services qui sont
offerts pour l'accompagnement des victimes puis les gens de la communauté.
La raison que je pose la question, c'est parce
que, quand on a fait la demande dans les crédits, on a demandé comment que ça
fonctionne par rapport à la publicité, puis pas pour dire que ce n'est pas
bien, beaucoup de publicité est gérée et générée pour la DPJ, secteur jeunesse.
C'est très important, on ne nie pas ça, on veut que ça continue. Mais est-ce
qu'il y a aussi un plan par rapport à la publicité, par rapport aux communautés
qui sont racisées, qui font partie de la discrimination, les personnes
handicapées, par exemple, LGBT, mais pour s'assurer qu'on rejoigne aussi les
besoins de ces personnes? On en parle vraiment beaucoup, par rapport aux
communautés qui sont racisées, dernièrement. Puis ça se peut que ce n'est pas
tout à fait bien connu, les services qui sont offerts. Puis, quand on regarde
qu'est-ce qui est vraiment fait sur le terrain, c'est vraiment beaucoup secteur
jeunesse, pas beaucoup pour les autres communautés concernées.
• (15 h 40) •
M. Tessier (Philippe-André) : O.K.
Bien, peut-être que mon regard à moi est peut-être un petit peu indirect. Je
vous dirais qu'on a fait un travail important, à la commission, avec les
ressources dont on dispose, pour faire des campagnes de communication. Premier
principe, puis je l'ai déjà dit à vos collègues dans les crédits précédents,
les budgets de la commission ne lui permettent pas de faire des campagnes
grande échelle, des campagnes grand public. Nous n'avons pas, contrairement à
d'autres organismes de l'État, des budgets qui nous permettent, par exemple, de
faire une publicité à la télé. Une publicité à la télé, c'est des sommes de
centaines de milliers de dollars. Pour nous, ça, c'est le budget global pour
une année, et même plus, de toutes nos campagnes. Donc, on est obligés d'être
un petit peu plus agiles, un petit peu plus innovants. Donc, ce qu'on fait,
c'est qu'on utilise beaucoup les médias sociaux qui coûtent moins cher, on
utilise aussi les médias régionaux.
Alors, récemment, on a fait une campagne dans
les médias régionaux, Mythes et réalités sur les peuples autochtones, pour diffuser... c'est un outil-phare
de la commission, qui a été fait en collaboration avec l'Institut
Tshakapesh d'Uashat-Maliotenam, et donc cet outil-là, donc, on a fait en sorte
que, dans des journaux régionaux où il y a des présences de communautés autochtones... des publicités ciblées dans les
médias régionaux sur les questions autochtones.
Vous parlez de groupes racisés, on a une
campagne spécifique, À louer sans discrimination, parce que, dans le
logement, on constate qu'il y a beaucoup de discrimination encore sur des refus
de louer. Bon, évidemment, il y a toujours l'état civil, donc, conditions
sociales, les personnes qui sont à faibles revenus, où des mères monoparentales
avec des enfants se font refuser des logements, mais on a aussi des groupes
racisés qui vivent de l'exclusion dans le contexte du logement. Donc, notre
campagne À louer sans discrimination ciblait spécifiquement les
communautés racisées et les deux autres groupes que j'ai mentionnés.
On a fait également une campagne à grande
échelle pour nous dans le métro, puis là on était superfiers de cette
campagne-là, et là la pandémie est arrivée. Et donc, c'est ça, donc, lieu de
haute fréquentation, de grande diffusion sur les 14 motifs de
discrimination de la charte. Il faut se rappeler que, sur les 14, il y en a
trois qui sont... on les appelle les cousins, donc race — je
mets des guillemets — couleur,
origine ethnique nationale, donc trois sur 14 qui sont liés, justement, à l'enjeu
des groupes racisés, des minorités ethniques, minorités visibles. Et donc c'est
sûr et certain que, pour nous, cette campagne-là... on a eu beaucoup de
félicitations, on met en valeur 14 bédéistes québécois, québécois et québécoises,
donc on a... qui illustrent à leur façon chacun des motifs de discrimination
pour faire connaître au grand public c'est quoi un peu, ces motifs-là.
Puis, bien — merci de donner l'occasion
d'en parler — je
vous avoue honnêtement qu'on était très, très, très déçus... bien, pour
d'autres raisons, de la pandémie, mais celle-là aussi en particulier, ça nous a
fait mal parce qu'on avait mis beaucoup d'efforts sur cette campagne-là. Puis
là, ce qu'on a fait, c'est qu'on l'a gardée précieusement, puis, quand il y
aura peut-être un peu plus d'affluence, bien, on pourra revenir là-dessus.
Mme Maccarone : Je suis contente de
savoir, en espérant que tous les députés vont aussi faire diffusion de cette
campagne, que ça ne soit pas uniquement dans les métros puis de la publicité
«outdoor», comme on dit, pour nous donner aussi l'occasion de partager ce que
vous faites puis ce que vous... pour quoi vous militez et pour qui vous
militez, parce que je pense que ça va être très important qu'on y participe.
Changement un
peu de volet. Là, je parle... Vous avez fait des recommandations dernièrement dans le rapport... le Bilan de la mise en oeuvre des recommandations du
Rapport de la consultation sur le profilage racial et ses conséquences. Alors, je vous amène à la recommandation n° 3, qui lit comme
suit : «La commission recommande que
le gouvernement prenne les mesures nécessaires pour augmenter la représentation
des minorités ethniques et des minorités visibles dans l'administration publique et que, concurremment,
l'article 92 de la charte soit modifié afin — "sorry" — d'assujettir
les programmes d'accès à l'égalité en emploi de la fonction publique aux
mécanismes de reddition de comptes et de contrôle de la commission.»
Savez-vous où est-ce qu'on en est avec cette
recommandation? Parce que c'est sûr, actuellement, on sait que c'est important,
on sait que nous avons des cibles, on sait qu'il y a quand même le document qui
a été déposé, actions et recommandations du groupe contre le racisme. Ça fait
que je sais que c'est quand même quelque chose qui est visé par le
gouvernement, mais on ne sait pas si ça va s'appliquer au secteur public, par
exemple. Pouvez-vous nous élaborer un peu sur ce que vous
faites, vous, comme CDPDJ, pour s'assurer que ça s'applique vraiment partout,
incluant le secteur public?
M. Tessier (Philippe-André) : Oui,
tout à fait. Puis juste souligner pour les députés, là, que, ça, c'est un
travail que je fais en collaboration avec ma collègue Mme Pierre, qui est
à mes côtés. Donc, je veux juste la saluer parce que c'est un dossier qu'on
porte étroitement ensemble. J'ai confié le mandat à Mme Pierre de voir à
la supervision du mandat que la commission s'est vu donner en vertu de la Loi
sur l'accès à l'égalité en emploi. Donc, j'ai
la chance d'avoir quelqu'un qui est une experte sur ces questions-là et qui
accompagne la commission, évidemment, comme vice-présidente, mais aussi
les organismes publics, et qui participe à de nombreuses rencontres avec l'ensemble de l'appareil gouvernemental et
différents organismes, dont notamment — puis c'est pour ça, vous y faites
référence dans votre question, j'allais y venir en réponse — le
Groupe d'action contre le racisme.
Donc, on a eu, évidemment, la chance de
rencontrer le nouveau ministre responsable de la Lutte contre le racisme,
M. Charette, et on a également rencontré évidemment, donc, d'autres
acteurs pour les sensibiliser à cette recommandation-là de la commission. Je
dirais qu'il y a une convention historique, là... puis je ne veux pas exagérer
le mot «historique», mais ce n'est pas nouveau, cette recommandation-là, ça
fait quand même un certain temps que la commission le recommande, parce que,
lors de l'adoption de la Loi sur l'accès à l'égalité en emploi, en 2000, et sa
mise en vigueur en 2001, effectivement, la fonction publique s'est retrouvée
non assujettie au rôle de supervision de la commission, alors que tout le reste
de la fonction publique élargie, donc les centres de services scolaires, le
réseau de la santé et services... les municipalités, le réseau de l'éducation,
eux, sont assujettis. Et donc la commission a, depuis les 20 dernières
années, rappelé aux gouvernements successifs que ce ne serait peut-être pas une
mauvaise idée d'assujettir aussi la fonction publique.
Évidemment, quand on a vu le rapport du Groupe
d'action contre le racisme, qui mettait cette question-là aussi de la diversité
dans la fonction publique, bien, on a pris un peu la balle au bond puis on a
dit : Bien, regardez, voici peut-être une façon pour vous d'accomplir et
de... Parce que le rapport... puis je ne me rappelle pas c'est quel numéro de
recommandation, mais c'est dans... d'ici cinq ans, d'atteindre un objectif. On
dit : Écoutez, une façon pour nous de vous aider aussi à accomplir ces
objectifs-là, ça serait d'assujettir la fonction publique au regard de la
commission sur ces questions-là. Donc, le tout a été encore une fois réitéré
auprès des autorités.
Mme Maccarone : O.K., c'est très
bon, c'est une très bonne nouvelle. Je vais aussi... je continue sur les recommandations,
puis là ce serait vraiment dans la section 1.5, la définition
d'indicateurs et de la collecte de données. Je reviens un peu à la pandémie. On
sait que ce qui est demandé par les communautés, c'est d'avoir des données qui
sont ventilées un peu, puis je pense que vous avez eu des échanges un peu plus
tôt aujourd'hui par rapport à... les statistiques avec le collègue de Gouin.
Ce que je veux savoir, parce qu'évidemment je
n'étais pas présente, mais je veux mieux savoir qu'est-ce qui est recommandé par
la CDPDJ par rapport à la COVID puis le nombre de personnes affectées dans les
régions, mais surtout des données qui soient ventilées par rapport aux
communautés qui font partie des communautés qui ont subi de la discrimination,
qui sont racisées, etc., parce qu'actuellement ce n'est pas le cas. Alors,
est-ce qu'il y a des recommandations qui vont venir du CDPDJ pour s'assurer que
ça soit le cas, pour qu'on comprenne mieux l'impact de la pandémie sur les
communautés minoritaires, culturelles ou autres?
M. Tessier
(Philippe-André) : Oui, tout à fait. Bien, écoutez, c'est tout à fait
le sens de nos recommandations, comme je le disais plus tôt, là, au
député de Gouin, ce matin en commission parlementaire. Ce qu'il faut
comprendre, c'est que l'objectif poursuivi par cette recommandation-là de la
commission ou par ces recommandations de la commission sur la collecte de
données... elles visent à venir documenter un phénomène pour mieux le
comprendre et pouvoir faire des réponses adaptées à la réalité des faits. Parce
qu'en politique publique c'est sûr que pour pouvoir prendre une bonne
orientation, encore faut-il pouvoir savoir et le documenter.
Alors, je vous donne un exemple... je donne un
exemple aux membres de la commission, M. le Président, très simple. Cette
recommandation-là de collecte de données, on la trouve aussi dans notre bilan
sur le profilage racial, hein, qu'on a déposé et qui était une recommandation qu'on avait faite lors du dépôt du rapport de consultation sur
le profilage racial en 2011. Pourquoi? Parce que ce qu'on disait là-dedans,
c'est que pour pouvoir corriger ce phénomène-là systémique de profilage racial,
il faut pouvoir savoir qui au juste est visé, dans quel contexte. Donc, on
disait... une des recommandations-phares de...
Le Président (M.
Bachand) : En terminant, Me Tessier. Il reste quelques
secondes.
M. Tessier (Philippe-André) :
...bien, c'était de faire de la collecte de données, et donc on a juste réitéré
la même recommandation récemment dans le cas de COVID en disant : Pour
pouvoir comprendre les phénomènes en présence, il faudrait avoir de la donnée.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Mme la députée
de Joliette, s'il vous plaît, pour 4 min 40 s. Le temps passe
très vite.
Mme
Hivon :
Merci beaucoup, M. le Président. Je veux revenir sur la question de la violence
conjugale. Le ministre, ce matin, m'a dit qu'il était disposé, donc, à
inclure l'élément de violence
conjugale pour être pris en
compte dans les ordonnances de garde en matière familiale
pour déterminer le meilleur intérêt de l'enfant. Mais il nous a aussi dit ce
matin que ce volet-là de sa réforme serait le second volet, avec un échéancier beaucoup
moins clair, parce que c'est lié à la question de la conjugalité. Il me dit
non. Donc, ma question, c'est : Est-ce que ça va pouvoir être inclus dans
le premier volet, donc, de sa réforme du droit de la famille, et donc nous
assurer que ça va être déposé pendant son mandat?
• (15 h 50) •
Le
Président (M. Bachand) : M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : ...ce matin, je n'ai pas été assez clair, mais, dans
le fond, ce qui touche l'intérêt de l'enfant, ça va être dans la partie 1
de... dans le premier projet de loi sur le droit de la famille, donc ce qui est
filiation, ce qui est intérêt de l'enfant. Donc, ce qui touche la conjugalité
au sens pur entre conjoints, ça, ça va être la phase deux. Donc, j'ai
l'intention de mettre ça dans la phase un.
Mme
Hivon :
J'ai ma réponse. Parfait. Je veux maintenant arriver sur la question de la reconnaissance
de la violence conjugale comme infraction criminelle. On a eu un long débat, le
ministre et moi, M. le Président, pendant le débat sur la réforme de l'IVAC,
parce que je lui plaidais l'importance de reconnaître la violence conjugale
comme un crime alors que nous avions l'opportunité de le faire. Il n'a pas
voulu le faire.
Et je l'ai amené sur
toute la question de la violence psychologique et du contrôle coercitif, à quel
point c'était fondamental de reconnaître que ça faisait partie intégrante d'un
crime de violence conjugale. À l'heure où on se parle, il n'y a non seulement
pas de reconnaissance que la violence conjugale, nommément, est un crime, on
doit passer par voie de fait, ou menace, ou harcèlement criminel, et les
victimes disent que c'est extrêmement difficile parce que, quand elles se
présentent à la police, il n'y a pas de bleu, on ne reconnaît pas vraiment. Et
on peut pourtant voir les ravages que ça fait, et on a vu un témoignage assez
percutant de Mme Laurence Jalbert, notamment, cette semaine à cet effet.
Et sa collègue la vice-première ministre a dit, pas plus tard que vendredi
dernier, que la violence psychologique était aussi grave que la violence
physique.
Alors, je veux savoir
ce que le ministre de la Justice du Québec, qui a refusé d'inclure ça dans la
réforme de l'IVAC, va faire pour que le crime de violence conjugale, avec sa
composante de contrôle coercitif et de violence psychologique, soit reconnu et
soit sanctionnable au Québec.
Le
Président (M. Bachand) : M. le ministre, s'il vous plaît.
M.
Jolin-Barrette : Alors, plusieurs éléments qui méritent d'être nuancés
parce que, d'entrée de jeu, on a beaucoup de
débats là-dessus dans le cadre du projet de loi n° 84 sur l'IVAC. Il faut
comprendre que le projet de loi n° 84, la Loi sur l'indemnisation
des victimes d'actes criminels, la nouvelle loi puis, en fait, tout le régime,
il est basé pour indemniser les personnes victimes d'une infraction criminelle.
Donc, auparavant, sous l'ancien régime, il y avait une liste de
42 infractions. Maintenant, on va être à plus de 80, puis ça a fait débat,
M. le Président. Alors, ce sont des infractions contre la personne.
Mme
Hivon :
M. le Président, si vous me permettez, je ne veux pas qu'on refasse le débat de
84, justement, le ministre a refusé dans 84, ça fait que je veux entendre ce
qu'il va faire, par ailleurs, puisqu'il n'a pas voulu le faire dans le cadre de
l'IVAC.
M. Jolin-Barrette :
Alors, M. le Président, je pense que la députée de Joliette a fait une mise en
contexte qui manque de nuances. Alors, je pense que c'est important que je
puisse réponde avec les nuances requises puis d'indiquer ce que j'ai fait
depuis le projet de loi n° 84. Alors, pour poser bien les choses, le
régime d'indemnisation vise à faire en sorte d'indemniser une victime qui est
une personne victime d'infraction criminelle.
L'infraction de
violence conjugale n'existe pas, ce sont des voies de fait dans un contexte
conjugal, ce sont... une agression sexuelle dans un contexte conjugal. Donc,
dans le Code criminel, l'infraction n'existe pas. Par contre, ce à quoi on
s'est engagés à travailler, puis c'est déjà ce que j'ai fait, j'ai communiqué
avec le ministre Lametti, le ministre fédéral, tel que je m'y étais engagé dans
le cadre du projet de loi n° 84, c'est d'indiquer notamment, maintenant,
d'élargir et de créer de nouvelles infractions criminelles qui vont pouvoir
prendre en compte le contrôle coercitif, et notamment que la notion de violence
conjugale soit reconnue dans le Code criminel.
Alors, j'ai discuté à
deux reprises avec le ministre Lametti, je lui ai écrit également pour que le
législateur fédéral bouge à cet effet-là, parce que l'objectif étant de faire
en sorte que la loi québécoise qui, dans le fond, venait indemniser une
personne relativement à une infraction criminelle... puisse être indemnisée. Je
pense que c'est important de spécifier les choses, M. le Président.
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de
Chomedey, s'il vous plaît. Quatre minutes, ça passe très vite. M. le
député de...
Mme
Hivon :
Je n'avais pas cinq minutes presque?
Le
Président (M. Bachand) : C'était 4 min 40 s. M.
le député de Chomedey, pour 4 min 40 s.
M.
Ouellette : Effectivement, M. le Président, vous nous surprenez cet
après-midi, là, mais c'est correct. J'avais mentionné, M. le Président, ce
matin, que j'aurais quelques questions pour la Commission des droits de la
personne et des droits de la jeunesse.
Je vais d'abord
débuter en réponse à une de vos réponses à ma collègue de Westmount—Saint-Louis.
Vous avez une baisse de délai, on en
convient. Vous êtes très contents d'avoir baissé d'une centaine de jours. Votre
objectif, à vous, ça serait quoi, le délai idéal? Parce que vous passez, je
comprends, de 631 jours à 520. Pour les gens qui portent plainte, c'est
excessivement long. Donc, avez-vous un délai idéal ou une cible que vous voulez
atteindre qui pourrait être... pour les gens
qui portent plainte, là, qui pourrait être quelque chose qu'ils
pourraient considérer? Parce que déjà, 520 jours, puis je ne
critique pas, mais je vous dis tout simplement que c'est excessivement long.
Vous avez sauvé quatre mois, on est encore à deux ans, là.
Le
Président (M. Bachand) : Me Tessier, oui.
M. Tessier
(Philippe-André) : Oui, tout à fait. Bien, merci beaucoup pour la question,
ça me permet de compléter ma réponse de tout à l'heure puis de venir dire une chose
très claire. La déclaration de services aux citoyens que la commission a adoptée
il y a 10 ans déjà parlait d'un objectif d'un délai moyen de 15 mois.
Ça, c'est 457 jours. Donc, déjà, en partant, vous me demandez ce serait
quoi, un objectif à court terme, bien, ce serait de respecter notre déclaration
de services aux citoyens, et c'est le mandat que nous nous sommes donné, moi et
l'équipe de présidence, depuis mon arrivée à la commission, pour rattraper et
revenir à ce délai-là moyen.
Dans un deuxième
temps, maintenant, et c'est très important de comprendre une chose, c'est un
délai moyen. Et il faut comprendre que, dans la très vaste majorité de nos cas,
on est capables d'agir plus rapidement que le délai moyen dont il est question
ici, parce qu'évidemment c'est un délai moyen. Donc, il y a beaucoup de nos
dossiers... en médiation, on a présentement un projet pilote de médiation
anticipée, disons, de devancer, parce que ce qu'on se rend compte aussi, c'est
que beaucoup de dossiers qu'on reçoit, ce sont des dossiers dans lesquels les
gens ne sont pas à la recherche d'une journée à la cour, «their day in court»,
là, comme on dit dans les films, là, ils veulent vraiment avoir quelqu'un qui
va les entendre, les écouter puis participer à une résolution de problème, puis
aussi souvent de faire prendre conscience aux mis en cause du tort subi.
Alors, nous, ça,
vraiment, on a mis beaucoup d'emphase là-dessus dans notre plan stratégique
puis dans les actions qu'on met. Puis moi, je fonde beaucoup d'espoir pour ça,
pour aller plus bas encore que le 457 jours, puis aller vraiment avec des
délais qui vont faire en sorte que les gens vont se sentir à l'aise de déposer
une plainte puis de savoir qu'ils sont traités avec toute la diligence nécessaire.
Le
Président (M. Bachand) : ...le temps va rapidement. M. le
député de Chomedey, vous avez la parole.
M.
Ouellette : Merci. Dans les avis et recommandations de la commission,
je veux aller là-dessus, parce que vous avez écrit 30 fois en 2020. Huit
de ces 30 fois là, avis ou recommandations ont été suivis. Ça vaut-u la
peine d'écrire? Allez-vous continuer à écrire ou vous écrivez pour rien?
M. Tessier
(Philippe-André) : Non, je ne pense pas qu'on écrit pour rien. Je vais
vous donner un exemple très simple, M. le député... M. le Président, je vais
donner un exemple très simple aux membres de la commission. Premièrement, il
faut comprendre que l'article 71 de la charte prévoit que la commission
doit faire des avis et des recommandations au gouvernement et à l'Assemblée
nationale sur la conformité des projets de loi à la charte. Donc, en partant,
c'est une obligation qu'on a en vertu de la charte, et on s'y conforme.
Dans un deuxième
temps, notre travail en commission parlementaire... Je vous donne l'exemple de p.l.
n° 83. J'étais en commission parlementaire virtuelle
la semaine dernière, Santé et Services sociaux, sur la couverture des enfants
pour les personnes à statut migratoire précaire, hein, donc un projet de loi où
les droits de l'enfant étaient mis à mal par une couverture déficiente de
l'assurance maladie. Nous sommes venus en commission parlementaire, nous avons
plaidé pour une couverture plus étendue par la RAMQ de ces enfants, souvent...
des fois même citoyens, qui ne sont pas couverts. Et les quatre partis, le
parti gouvernemental et les trois partis d'opposition ont salué notre mémoire
et ont dit que ce mémoire-là aidait dans la préparation, dans leur travail de
législateur, pour s'assurer que la solution qui était mise de l'avant était
optimale. Alors, la réponse, c'est : Oui, on va continuer à écrire.
Le
Président (M. Bachand) : 10 secondes, M. le député... Ça
va? Merci beaucoup.
Adoption des crédits
Donc, le temps alloué
à l'étude du volet Justice des crédits budgétaires du portefeuille Justice
étant presque écoulé, conformément à l'entente du 13 avril 2021, nous
allons maintenant procéder à la mise aux voix de ces crédits par appel nominal.
Pour la mise aux voix
du programme 2, intitulé Activité judiciaire, Mme la secrétaire, s'il vous
plaît.
La
Secrétaire : Pour,
contre, abstention. Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque
(Chapleau)?
M. Lévesque (Chapleau) : Pour.
La
Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle,
Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis)?
Mme
Maccarone : Pour.
La Secrétaire :
Mme Hivon (Joliette)?
Mme
Hivon :
Contre.
La Secrétaire :
M. Ouellette (Chomedey)?
M.
Ouellette : Contre.
Le
Président (M. Bachand) : Donc, c'est adopté. Merci beaucoup.
Pour la mise aux voix du programme 3, intitulé Justice administrative, Mme
la secrétaire, s'il vous plaît.
La
Secrétaire : Pour,
contre, abstention. Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque
(Chapleau)?
M. Lévesque
(Chapleau) : Pour.
La Secrétaire :
Pour les membres de l'opposition officielle, Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis)?
Mme
Maccarone : Contre.
La Secrétaire :
Mme Hivon (Joliette)?
Mme
Hivon :
Contre.
La Secrétaire :
M. Ouellette (Chomedey)?
M.
Ouellette : Contre.
Le
Président (M. Bachand) : Donc, c'est adopté. Merci. Pour la mise
aux voix du programme 4, intitulé Indemnisation et reconnaissance, Mme la
secrétaire, s'il vous plaît.
La
Secrétaire : Pour,
contre, abstention. Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque
(Chapleau)?
M. Lévesque
(Chapleau) : Pour.
La Secrétaire :
Pour les membres de l'opposition officielle, Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis)?
Mme
Maccarone : Contre.
La Secrétaire :
Mme Hivon (Joliette)?
Mme
Hivon :
Contre.
La Secrétaire :
M. Ouellette (Chomedey)?
M.
Ouellette : Contre.
Le
Président (M. Bachand) : Donc, c'est adopté. Merci beaucoup.
Pour la mise aux voix du programme 6, intitulé Poursuites criminelles et
pénales, Mme la secrétaire, s'il vous plaît.
La
Secrétaire : Pour,
contre, abstention. Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque
(Chapleau)?
M. Lévesque
(Chapleau) : Pour.
La Secrétaire :
Pour les membres de l'opposition officielle, Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis)?
Mme
Maccarone : Contre.
La Secrétaire : Mme Hivon (Joliette)?
Mme
Hivon : Contre.
La Secrétaire :
M. Ouellette (Chomedey)?
M.
Ouellette : Contre.
Le
Président (M. Bachand) : Donc, c'est adopté. Merci beaucoup.
La commission suspend
ses travaux quelques instants, environ 10 à 15 minutes, puis elle va
entreprendre l'étude du volet Lutte contre
l'homophobie et la transphobie des crédits
budgétaires du portefeuille Justice. Merci. À tantôt.
(Suspension de la séance à
16 heures)
(Reprise à 16 h 15)
Le
Président (M. Bachand) : À l'ordre,
s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la
Commission des institutions ouverte. Avant de débuter, je vous rappelle que le
port du masque de procédure est obligatoire en tout temps, hormis au moment de
prendre la parole.
Lutte contre l'homophobie et
la transphobie
La commission est
réunie afin de procéder à l'étude du volet Lutte contre l'homophobie et la
transphobie des crédits budgétaires du portefeuille Justice pour l'exercice
financier 2021-2022. Une enveloppe d'une heure a été allouée pour l'étude
de ces crédits.
Avant de débuter, Mme
la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire :
Oui, M. le Président. Mme D'Amours (Mirabel) est remplacée par M. Lévesque
(Chauveau); Mme Lachance (Bellechasse) est remplacée par M. Lefebvre
(Arthabaska); M. Birnbaum (D'Arcy-McGee) est remplacé par Mme Maccarone
(Westmount—Saint-Louis); et M. Zanetti
(Jean-Lesage) est remplacé par
Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques).
Discussion générale
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Cet après-midi,
nous allons aux échanges entre les groupes d'opposition et le ministre par
blocs de 10 à 20 minutes pour permettre à chaque groupe d'écouler
graduellement son temps de parole. La mise aux voix de ces crédits sera effectuée
à la fin du temps qui leur est alloué cet après-midi, donc vers
17 h 15. Mme la députée de Westmount—Saint-Louis, vous avez la parole.
Mme Maccarone :
Merci beaucoup, M. le Président. Je vais débuter à parler de la question des
personnes intersexes. Ça a été un sujet qui a été soulevé lors de nos débats
sur la loi n° 70, la loi qui interdit les pratiques
de conversion. Alors, juste pour que ce soit clair, les personnes intersexes,
c'est des personnes qui naissent avec les caractéristiques des deux sexes
biologiques. Alors, on sait que, souvent, puis c'est très courant, ce qui
arrive, lors de la naissance de ces bébés, c'est : le médecin prend des décisions
très tôt puis il décide ça va être quoi... il désigne ça va être quoi, le sexe
de l'enfant en question. Puis on comprend que ça se peut qu'il y ait aussi des
mesures de santé qui sont prises en considération pour protéger les enfants,
mais il y a aussi des situations, des enfants qui sont nés intersexes qui n'ont
pas des problèmes de santé.
Et c'est quand même
une communauté qui milite pour être reconnue. Ils ont déposé un mémoire lors
des auditions de la loi n° 70, et ce qui... ils
aimeraient savoir si on peut avoir une loi qui protège les personnes intersexes
pour avoir la liberté de choisir, lors d'un âge où ces personnes peuvent
déterminer, peuvent militer pour eux-mêmes, de dire : Moi, mon identité de
genre, c'est homme, mon identité de genre, c'est femme, mon identité de genre,
c'est non binaire. Alors, on sait que c'est une question qui est très
importante pour eux.
Et, lors de nos
échanges, le ministre a quand même dit, en commission parlementaire, qu'il
était pour regarder cette situation plus tard, parce qu'il ne voulait pas
l'adresser à l'intérieur du projet de loi en question, quand nous étions en
train de le débattre. Alors, je voulais savoir c'était quoi, la position du
ministre aujourd'hui. Et compte-t-il encadrer davantage la question des
personnes intersexes pour les protéger dans une loi future?
Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. J'avais oublié, Mme la
députée, de vous dire que votre premier bloc d'intervention, c'est
20 minutes.
Mme
Maccarone : 20 minutes. Merci.
Le
Président (M. Bachand) : Alors donc, M. le ministre, s'il vous
plaît.
M. Jolin-Barrette : Alors, merci, M.
le Président. Salutations à la députée de Westmount—Saint-Louis. Bien, oui, effectivement,
je réfléchis toujours à cette réalité-là, parce qu'on a été sensibilisés
fortement, dans le cadre de l'étude du projet de loi
n° 70, à la réalité des personnes intersexes. Et c'est une réalité qui, jusqu'à
ce jour, n'a pas été beaucoup abordée, M. le Président, et, de plus en plus,
les personnes intersexes font entendre leur voix. Mais c'est surtout aussi pour
les enfants qui naissent avec deux sexes à la naissance. Bien souvent, dans le
passé, M. le Président, le corps médical faisait en sorte de, et les parents,
choisir le sexe rapidement, de l'enfant, avec une opération. Alors, ça posait
plusieurs questions pour la personne intersexe elle-même, qui parfois se
retrouvait avec des organes génitaux qui n'étaient pas en conformité avec son
identité de genre, notamment, M. le Président.
Alors, présentement, on est en train de regarder
comment est-ce qu'on peut reconnaître la notion de personne intersexe dans notre corpus. Ma réflexion n'est
pas terminée, mais, très certainement, comme je m'y étais engagé, M. le Président, je suis en train d'y
réfléchir. Et, dans le projet de loi n° 70, on avait notamment modifié le
libellé, en collaboration avec la députée de
Westmount—Saint-Louis, également avec la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, pour inclure également les
personnes intersexes. Alors, on soutient des initiatives également du Centre
Interligne et du Conseil québécois LGBTQ sur, notamment, un guide de sensibilisation
pour les professionnels de la santé et des services sociaux. Mais la réflexion
se poursuit, M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) : Mme la députée.
• (16 h 20) •
Mme Maccarone : À l'intérieur de
cette rédaction, est-ce que le ministre s'engage à déposer un projet de loi prochainement, ou, par contre, mettons, de
rencontrer Janik Bastien-Charlebois, qui est quand même un expert à ce
sujet?
M. Jolin-Barrette : Bien, en fait,
comme je vous le dis, pour l'idée d'un projet de loi, j'y réfléchis. Il y a beaucoup
de dossiers présentement sur lesquels on travaille, mais c'est un des
dossiers parmi lesquels on travaille. Il
faut documenter le tout, et les gens au ministère de la Justice vont certainement rencontrer tous les experts dans le
domaine.
Mme Maccarone : Merci. Je reste toujours
à l'intérieur des travaux que nous avons faits dans ce qui concerne le projet
de loi n° 70, le projet de loi qui va bannir les pratiques de conversion
dans la province du Québec. Puis là je vais parler de l'article 14 que
nous avons adopté : «Afin d'assurer la mise en oeuvre de la présente loi,
le gouvernement doit, au plus tard le 11 décembre 2021, adopter et rendre
public un plan d'action gouvernemental pour lutter contre les thérapies de
conversion en y précisant les activités qu'il prévoit réaliser pour atteindre
les buts poursuivis.» Alors, on sait que ça
prend du temps pour faire ce type de travaux, on sait que ça prend des
consultations, du travail d'équipe, des consultations entre les autres
ministères. Alors, je veux entendre le ministre, de savoir quels avancements
ont été réalisés jusqu'ici en ce qui concerne le plan d'action gouvernemental
pour lutter contre les thérapies de conversion.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Donc, M. le
Président, on travaille activement à l'élaboration du plan d'action gouvernemental
pour lutter contre les thérapies de conversion. Il y a un comité formé de
14 ministères et organismes qui est chargé de mettre sur pied le plan
d'action d'ici son adoption le 11 décembre 2021. Alors, présentement, les ministères
travaillent en collaboration avec... tous ensemble pour être en mesure de
déposer le plan d'action avant la date anniversaire du projet de loi que nous
avons adopté l'année passée, bien, c'est ça, le 11 décembre 2020.
Mme Maccarone : Alors,
14 experts, mais est-ce qu'il y a des rencontres qui ont eu lieu?
M. Jolin-Barrette : Donc, on a
eu une rencontre à ce jour, M. le Président, et on va... il va y avoir d'autres
rencontres pour faire en sorte de peaufiner le plan d'action.
Mme Maccarone : Et est-ce qu'il
y a un budget qui est associé à ce plan d'action?
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, pour la question du budget, dans le fond, déjà, les fonctionnaires du ministère
de la Justice et des autres ministères travaillent en collaboration avec eux,
et, lorsque le plan d'action sera mis en oeuvre, s'il y a nécessité d'avoir des
sommes qui y seront rattachées, elles y seront. Donc, on va se donner les
moyens de mettre en oeuvre le plan d'action.
Mme Maccarone : O.K. Merci. Toujours
à l'intérieur des engagements qui ont été pris par rapport au projet de loi
n° 70, le ministre, c'est sûr, ne sera pas surpris que je veux aborder la question
par rapport à l'amendement que j'avais déposé à son projet de loi pour insérer,
après l'article 3.2, l'article suivant : «Nul ne peut offrir une aide
financière favorisant la dispense de thérapies de conversion, et ce, qu'elle
soit faite à partir de fonds public ou privé ou qu'elle résulte de mesures
fiscales.» La raison pour le dépôt de cet amendement, qu'évidemment j'étais
très déçue que ce n'était pas adopté... mais la raison, c'est parce qu'on sait actuellement
qu'il y a 25 millions de dollars qui sont versés annuellement en crédit
d'impôt aux organismes qui font des pratiques de conversion. Alors, l'amendement
en question, qui a été refusé, visait à empêcher la pratique.
Alors, pendant qu'on a eu des échanges, le ministre
a dit qu'il était quand même d'accord avec le principe, mais il dit que ce
serait vraiment un omnibus fiscal à régler la question d'empêcher les crédits
d'impôt pour les organismes qui peuvent continuer à offrir de telles thérapies.
Comme nous avons dit en commission parlementaire, ce
n'est pas comme si on a une grosse pancarte avec des néons qui dit :
Pratique de conversion ici. On le sait, souvent, ça peut être les églises, les
personnes qui font des pratiques religieuses qui vont offrir ceci. Puis on sait
aussi que ça peut être complexe en ce qui concerne la façon que les crédits
d'impôt sont offerts par les municipalités.
Alors, je comprends tout ça, sauf que le ministre
s'est engagé de discuter de ce sujet et de cette problématique avec le ministre
des Finances, puis il a dit que c'était important et que c'était pertinent.
Alors, c'est clair, j'aimerais entendre le ministre, de savoir où il en est
pour trouver une solution pour empêcher ces organismes de bénéficier de 25 millions
de dollars, qui pourraient être très bien utilisés pour le plan dont on vient tout
juste de parler ou de venir en aide aux organismes qui luttent contre
l'homophobie, la transphobie dans les territoires de toute la province.
Le Président (M.
Bachand) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Avec le projet
de loi n° 70, on avait eu plusieurs discussions relativement, un, à la
fiscalité municipale, à la Loi sur la fiscalité municipale, mais également, il
y a une partie qui relève du ministère des Finances, relativement à la
fiscalité et aux crédits d'impôt en général, notamment aux corporations
religieuses, qui, parfois, offrent des services thérapies de conversion, ce qui
est totalement répréhensible. Alors, j'étais et je suis en accord avec la collègue
de Westmount—Saint-Louis
de frapper là où ça fait mal, notamment au niveau des subventions, M. le
Président, des crédits d'impôt.
Et donc la première réunion du comité
interministériel s'est tenue le 12 avril, la prochaine est prévue le
5 mai prochain, et c'est discuté dans le cadre de ce forum
interministériel là. Et le ministère des Finances y est présent également.
Donc, en vue du plan d'action, on discute également de comment est-ce qu'on
peut mettre en place des mesures qui vont venir corriger les crédits d'impôt et
le soutien fiscal effectué par la Loi sur la fiscalité municipale.
Mme Maccarone : Quels ministères
seront impliqués à l'intérieur de cette réforme fiscale? Je comprends que le ministre
des Finances, mais aussi, comme j'ai évoqué, je sais qu'il y a une
préoccupation par rapport aux municipalités par exemple. Alors, c'est quels ministères
qui feront partie des discussions et ainsi que des solutions?
M. Jolin-Barrette : Bien, en fait,
sur le comité, il y a 14 ministères et organismes. C'est sûr qu'en matière
de fiscalité, c'est le ministère des
Finances, les Affaires municipales, mais parmi les autres groupes qu'il y a,
là, il y a la Commission des droits de la personne, le ministère du
Conseil exécutif, le Secrétariat aux affaires autochtones, le ministère de
l'Éducation du Québec, le ministère de l'Enseignement supérieur, le ministère
de la Famille, le ministère des Finances, le ministère de l'Immigration, le
MJQ, le ministère des Relations internationales et de la Francophonie
également. Donc, voyez, cet enjeu-là, il est paramétrique au sein de l'État
québécois, puis c'est pour ça qu'on a mis tous ces ministères-là ensemble pour
travailler pour le plan d'action, et notamment aussi traiter de la question de
la fiscalité.
Mme Maccarone : Donc, d'ici le plan
d'action, le ministre s'engage à éliminer tout soutien financier aux organismes
qui continuent à offrir des pratiques de conversion qui reçoivent encore les
crédits d'impôt, le 25 millions de dollars que nous savons? C'est déjà chiffré,
c'est déjà dénoncé dans les médias.
M. Jolin-Barrette : Bien, en fait,
la question, M. le Président, comment elle est formulée, la députée de Westmount—Saint-Louis
dit : Le 11 décembre 2021, il n'y aura plus de crédits d'impôt, il
n'y aura plus de... la Loi sur la fiscalité municipale, elle sera changée. Ça,
je ne peux pas vous affirmer ça, M. le Président, parce que ça ne relève pas
uniquement de moi. Ça relève de l'Assemblée elle-même, parce que, si on doit
modifier la législation, ça va prendre le concours des collègues aussi.
Donc, moi,
mon objectif, c'est d'arriver avec un plan, justement, gouvernemental, et
éventuellement peut-être dans un
omnibus fiscal qui va faire en sorte de corriger ces éléments-là, parce que je
pense que c'est un message de société que
nous devons envoyer pour faire en sorte de lutter contre ce phénomène. Puis il
y a déjà, avec le projet de loi n° 70, le fait de protéger les personnes contre les
thérapies de conversion. Donc, il y a des amendes élevées, il y a des
poursuites pénales. Mais l'autre aspect sur
lequel la députée de Westmount—Saint-Louis et moi, on est d'accord, c'est sur l'aspect financier. Si, comment on dit, on frappe là où ça
fait mal, c'est là qu'il va y avoir le plus de changements de
comportement.
Mme Maccarone : Je suis contente
que, oui, on est sur la même page vis-à-vis enlever les crédits d'impôt, sauf
que ce que je ne comprends pas, c'est que le ministre a dit qu'il y a quand
même eu des rencontres vis-à-vis le plan d'action, puis, à l'intérieur du plan
d'action, on vise ces organismes qui reçoivent les crédits d'impôt, mais le
ministre ne prend pas d'engagement soit de déposer un projet de loi pour
empêcher ceci ou de... Dans le fond, ce que je cherche, c'est un engagement
ferme. On fait des rencontres à l'intérieur du plan d'action, mais on dit que
ça se peut que ça ne va pas être révisé d'ici le 11 décembre puis ça se
peut qu'au-delà du 11 décembre les organismes vont continuer à
fonctionner, vont continuer à offrir des thérapies de conversion ou des
pratiques de conversion, et, en plus de ça, ils vont être subventionnés.
Alors, ce que je cherche vraiment, c'est un
engagement ferme. Évidemment, je pense que la communauté s'attend à ça, parce
que ça fait une secousse depuis qu'on a discuté de ceci à l'intérieur du projet
de loi. Puis, si ça fait partie des discussions pour le plan d'action, bien,
pourquoi pas que ça fait partie aussi des engagements à être réalisés d'ici le
11 décembre?
Le
Président (M. Bachand) : M. le ministre.
• (16 h 30) •
M. Jolin-Barrette : Bien, l'enjeu,
comme je l'ai dit, M. le Président, est à l'effet que, pour modifier les
crédits d'impôt, pour modifier la Loi sur la fiscalité municipale, ça nécessite
notamment un projet de loi. Alors, je ne peux pas vous garantir, monsieur le
projet de loi... M. le Président, qu'il y aura adoption d'un projet de loi
d'ici le 11 décembre prochain, et ça demande le concours des collègues de
l'opposition. Mais, aussi, on travaille au gouvernement pour faire en sorte de
réformer le tout, M. le Président.
Et j'en profite, M. le Président, de la
tribune qui m'est offerte pour réitérer, s'il y a des organisations qui offrent
des thérapies de conversion, c'est important de les dénoncer. Il y a des
recours de nature pénale, donc une poursuite
avec plusieurs milliers de dollars d'infraction... de pénalité en cas
d'infraction à la loi, mais il y a également le fait qu'une personne qui
est victime de ce genre de thérapie peut poursuivre au civil, également. On est
venus interdire le tout, M. le Président.
Mme Maccarone : Oui, mais ce
n'est pas la même chose. Je comprends ça.
M. Jolin-Barrette : Alors,
c'est important de dénoncer ce genre de personne morale qui offrirait ce genre
de thérapie, M. le Président.
Mme Maccarone : Bien,
évidemment, je compte sur le ministre de faire preuve de leadership. C'est pour
ça qu'on a un ministre contre l'homophobie et la transphobie, dans le fond,
c'est de prendre, d'être à l'action puis d'avancer la cause pour ces personnes
qui, souvent, qui sont victimes, souvent, qui n'ont pas de voix. Je trouve
qu'on a fait des belles avancées à l'intérieur de l'adoption du projet de loi
n° 70, alors, évidemment, la communauté a des attentes que le ministre va
prendre le leadership en ce qui concerne les crédits d'impôt, parce que, sans
que ça soit réglé, on sait que ça va continuer. Alors, vraiment, c'est quand
même une action assez majeure à mettre en place, alors je compte sur le
ministre de poursuivre. Et on espère, je croise mes doigts, qu'il y aurait
quelque chose qui serait actualisé puis en place d'ici le dépôt du plan
d'action.
En parlant toujours du projet de loi n° 70,
on a aussi parlé beaucoup d'une campagne de promotion, de c'est quoi, que ça
soit les pratiques de conversion, les thérapies de conversion. Mais ça faisait
partie beaucoup de nos échanges et nos discussions, de qu'est-ce que nous
allons faire pour sensibiliser la population, de c'est quoi et pourquoi que
c'est interdit maintenant, pourquoi que c'est non, au Québec, les pratiques de
conversion, mais, à date, on n'a rien vu et on n'a pas vu du budget qui était
mis de côté pour cette cause, spécifiquement. Alors, est-ce que ça fait partie
du plan du ministre d'aller vers l'avant avec une campagne de publicité, prochainement?
Et pourquoi que ce n'est pas fait à date?
M. Jolin-Barrette : Bien, d'entrée de jeu, moi, ce que j'envisage,
M. le Président, c'est en lien avec le plan d'action pour lui donner de la force. Ce serait à ce
moment-là qu'il serait opportun de faire une campagne aussi. Alors, c'est
sûr que les différents partenaires ont été
informés de l'adoption du projet de loi n° 70. Le bureau de lutte aura les
outils nécessaires pour faire la promotion de son plan d'action. Et on
va s'assurer, M. le Président, de diffuser cette information-là.
Mais, déjà, avec le projet de loi, je pense que
les partenaires du milieu, je pense que les organismes ont appuyé positivement
et ont accueilli positivement l'adoption du projet de loi, et donc ça donne des
outils dans le milieu aussi. Mais on va s'assurer également de continuer à
sensibiliser et, éventuellement, on aura, en lien avec le plan d'action, fort
probablement, une campagne, qui appuiera le plan d'action à partir du moment où
on l'aura lancé. Mais, dans le fond, on est allés chercher l'assise
législative, donc on a fait le projet de loi.
Puis ça, je dois le dire, M. le Président,
en tant que ministre de la Justice, j'ai voulu que ça soit mon premier projet
de loi, M. le Président, pour démontrer toute l'importance que j'accorde à
la communauté puis surtout pour envoyer un message de société pour dire qu'on
ne choisit pas notre identité de genre, on ne choisit pas notre orientation
sexuelle. Puis je pense que c'est important que les gens ou les organisations qui
font des thérapies de conversion soient punis, et qu'on soutienne les gens qui
en sont victimes. Et c'était pour ça que ça a été le premier projet de loi que
j'ai déposé, M. le Président, et qu'on a fait adopter.
Mme Maccarone : Moi aussi, c'était
mon premier projet de loi que j'ai déposé, parce que, moi aussi, c'est
important. Alors, je suis contente qu'on partage la cause, M. le ministre.
Puis, si je continue, vous avez mentionné aussi
le renouvellement du plan d'action pour lutter contre l'homophobie. On sait que
ça se termine l'an prochain, alors je veux savoir, il nous reste très peu de
temps, quelles démarches ont été effectuées pour commencer le prochain plan?
Et, à l'intérieur du prochain plan, est-ce que c'est visé de revoir le mode de financement
des organismes?
M. Jolin-Barrette : M. le
Président, la question est relativement au financement des organismes rattachés...
Mme Maccarone : Pas seulement le
financement, c'est vraiment pour le plan d'action, le plan d'action pour lutter
contre l'homophobie parce que, bientôt, ça va... ça termine l'an prochain.
Alors, qu'est-ce qui a été fait, à date? Puis, à l'intérieur des démarches
aussi, est-ce qu'on est en train de regarder le financement des organismes?
M. Jolin-Barrette : Pour mieux
financer?
Mme Maccarone :
Pour mieux financer ou financer d'une autre façon. Mais, c'est sûr, on va
renouveler le plan, alors quelles mesures est-ce que le ministre est en train
de regarder dans le renouvellement du plan?
M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez,
on est à l'écoute des organismes puis on va s'assurer de bien les financer en
fonction de leurs demandes, de leurs besoins. Il y a des appels à projets,
annuellement, qui sont faits. D'ailleurs je pense qu'il y a plus de
600 000 $ qu'on a octroyés dernièrement, M. le Président. Alors,
je pense que c'est important de faire en sorte d'outiller. Mais, déjà, le
ministère de la Justice, avec le Bureau de lutte à l'homophobie, finance les
initiatives qui sont soumises par les organismes, également.
Le Président (M.
Bachand) : 30 secondes dans ce bloc.
Mme Maccarone : Mais la difficulté,
dont ils font face, c'est souvent qu'ils sont épuisés. Parce que, je comprends
que c'est financé par projet, mais vous savez que ce n'est pas pérennisé, alors
c'est très difficile pour eux de survivre. Alors, c'est pour ça que je posais
la question de qu'est-ce qui est visé pour s'assurer qu'on a une pérennité
pour ces organismes, pour s'assurer qu'ils peuvent militer, ils peuvent faire
la promotion. Ils sont quand même les sous-traitants du gouvernement en ce qui
concerne la sensibilisation de la cause des personnes qui font partie de la
communauté LGBTQ2, alors je pense que c'est très important de revoir le
financement.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Merci beaucoup. Mme la députée de
Sainte-Marie—Saint-Jacques,
s'il vous plaît.
Mme Massé : Merci, M. le
Président. Bonjour. Bon après-midi, tout le monde.
En fait, ma première question, je vais aller,
parce que je crois que j'ai 10 minutes...
Le Président (M.
Bachand) : 9 min 40 s, exactement
Mme Massé :
9 min 40 s. Alors, il en reste neuf, donc allons à
l'essentiel. Donc, succinctement, le plan d'action dont on vient de faire état
a, dans sa mesure n° 9, la nécessité de soutenir
l'action communautaire en matière de lutte
contre l'homophobie et la transphobie. L'année qu'on vient de passer a été
difficile pour tout le monde, y compris pour les gens qui interviennent
auprès des personnes de nos communautés. Et donc ce que j'ai vu, c'est qu'il y
avait du financement, du financement par projet. Est-ce qu'il y aura, dans le
prochain plan d'action, une majeure en ce qui a trait au financement à la
mission, puisque c'est ça que les groupes demandent, du financement à la
mission?
Et, deuxième
question sur le même thème. On apprend donc qu'il y aura encore cette année
52 subventions accordées à
27 organismes, alors je me demandais si c'étaient les mêmes organismes qui
ont été financés en 2019? Peut-être ne pas me lire la liste complète,
mais, mon inquiétude, c'est qu'il y avait des groupes qui, en 2019, n'avaient
pas eu d'argent.
Alors donc, voilà mes deux questions pour
ce premier point.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. M. le ministre, s'il vous
plaît.
M. Jolin-Barrette : Alors, le
programme, annuellement, là, finance plusieurs organismes. Depuis que le programme a été créé, il y a 168 initiatives
pour une aide financière totale de 4,1 millions de dollars qui a été
accordée à des projets d'organismes communautaires.
Je voudrais juste émettre un commentaire, là. Je
n'entrevois pas les organismes communautaires comme des sous-traitants, comme
l'a dit la députée de Westmount—Saint-Louis.
Je pense qu'à la fois les organismes communautaires sont là pour offrir des
services à la communauté puis, dans le fond, ce sont des partenaires aussi.
Bon, en ce qui concerne cette année, il y a
660 211 $ qui ont été accordés pour la réalisation de 20 projets
à 19 organismes provenant de neuf régions administratives différentes
à la suite de l'appel à projets via le Programme de lutte contre l'homophobie
et la transphobie. Donc, en 2019-2020, le ministère du Travail, de l'Emploi et
de la Solidarité sociale a doublé le financement à la mission — donc,
ça, l'an passé, ça a été une avancée majeure — et celui des organismes qui
relèvent du ministère de la Santé et des Services sociaux a été indexé
également cette année. Alors, au niveau du financement à la mission, ceux qui
ont relevé du MTESS, ils ont été financés, il y a eu un rehaussement du
financement, et ceux du ministère de la Santé et des Services sociaux sont
indexés, également.
Alors, je pense que l'État québécois fait sa
part pour bien soutenir à la fois la mission... Parce qu'on le sait, que c'est
un enjeu, hein, dans le domaine communautaire. C'était un enjeu où on
disait : Bien, écoutez, nous, on dépose des projets parce qu'on vise à
financer les activités courantes de notre organisme. Mais là en rehaussant le
financement à la mission, comme le fait le MTESS, ça donne un coup de main.
• (16 h 40) •
Le Président (M.
Bachand) : ...Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme Massé : Et, concernant le plan
d'action qui se termine en 2022, est-ce que vous prévoyez faire le bilan
avec les groupes? Et est-ce que... Quel sera le processus que vous allez
entamer pour le nouveau plan?
M. Jolin-Barrette : Bien, c'est sûr
qu'en prévision du nouveau plan il y a également la politique, également, là,
que ça fait un bout de temps, il va falloir mettre à jour. Ça fait que
j'envisage, dans le fond, de renouveler le tout, de faire
des consultations, éventuellement, pour mettre à jour le plan, mettre à jour,
également, la politique. Je pense qu'après plusieurs années on devrait se
rasseoir avec les organisations, avec les membres de la communauté pour
actualiser le tout. Je pense que, vous savez, une politique, ça dure plus
longtemps qu'un plan, mais là, je pense, ça fait 10 ans, 10 ou 12 ans
environ.
Une voix : ...
M.
Jolin-Barrette : 2009. Bon,
voyez-vous, ça fait 12, 13 ans. Donc, je pense qu'il va falloir entamer
les travaux, également, et le plan aussi, donc actualiser le tout.
Mme
Massé : Bien. 2022, pour le plan, arrive très tôt. On sait qu'arrive
bientôt... On sait que les plans s'appuient sur la vision d'une politique. Vous parlez de revoir la politique, je
pense que les gens de la communauté vont être contents.
Ceci étant dit, et je vais... que, faire un...
Les gens, là, ils ne s'attendent pas à être consultés à la dernière semaine,
M. le ministre. Les gens ont besoin d'être partie prenante. Il y a eu
beaucoup de changements dans les 10 dernières années dans nos communautés.
Il y a des prises de conscience qui ont été faites, il y a de la solidarité
entre les différentes communautés qui s'est faite. Alors, je pense que... si
vous voulez entamer sérieusement ce projet-là, je pense que ça vaut vraiment la
peine de le faire dans ce sens-là. Vous avez avantage à impliquer, très tôt
dans le processus, les gens des différentes communautés tant, je dirais, des
grands centres que partout à travers les régions parce qu'on sait que c'est un
défi.
Et d'ailleurs ma prochaine question va
exactement dans ce sens-là. C'est-à-dire qu'on le sait, puisque la réalité des
personnes trans, je dirais, est une réalité qu'on prend de plus en plus
conscience comme société, on chemine là-dedans, il y a des questions qui ont
déjà été posées, je ne veux pas revenir là-dessus. Mais on voyait dernièrement,
dans un sondage transcanadien, mais qui parle beaucoup aux gens des communautés
trans ici, qu'en fait le défi, là, souvent, quand tu es une personne trans,
c'est d'avoir des services de santé, pas des services de santé pour ta
transition, quoique là aussi, il y a aussi des besoins, mais juste d'avoir
accès à la santé. Alors, ce que je me demandais, c'est : Puisque notre
réseau de la santé, qui est grandement impacté actuellement, j'en suis
consciente, à cause de la pandémie, mais, ceci étant dit, il demeure qu'il y a
toujours le défi de la formation auprès de nos professionnelles de la santé et
les médecins inclus pour accueillir les personnes trans dans le respect puis
dans l'ouverture face à leur identité de genre et leur expression de genre, et
tout, alors, est-ce que vous entrevoyez, dans l'année qui vient et dans votre
vision à long terme, que la formation des gens, du personnel soignant, c'est
quelque chose qui est fondamental et qu'on doit y mettre l'argent nécessaire
pour qu'ils soient formés sur les réalités trans?
Le Président (M. Bachand) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, sur
le premier volet de votre question, relativement aux consultations pour la
politique et le plan, j'en suis. Donc, on se prépare, au ministère, à faire une
consultation, notamment, au niveau des grands centres, notamment, aussi au
niveau des régions, parce que la réalité n'est pas la même des personnes de la
communauté en fonction des deux. Ça fait que je pense que c'est important de
tout mettre, tout le monde ensemble pour avoir une discussion sur les
différentes réalités régionales au Québec. On va consulter, bien entendu, les
personnes, les partenaires, les chercheurs du milieu, également.
Pour ce qui est de votre seconde question sur la
formation, je suis d'accord, plus les gens vont être formés en lien avec les
différentes réalités dans le domaine, dans le système de santé, mieux que ça
sera. Juste pour votre information, en janvier 2021, le ministère de la
Justice, conjointement avec le ministère de la Santé et des Services sociaux, a
mis en place un comité national sur l'adaptation et l'accès aux services de
santé et aux services sociaux pour les personnes de la diversité sexuelle et de
genre. Le mandat du comité est de produire des avis qui alimenteront la
rédaction, par le ministère de la Santé et des Services sociaux, de lignes
directrices ministérielles sur la santé et le bien-être des personnes de la
diversité sexuelle et de genre. Et la première rencontre s'est tenue le
19 février 2021. Donc, il y a 23 personnes qui composent le comité,
provenant du ministère de la Santé, du réseau de la santé et des services
sociaux, du Bureau de lutte contre l'homophobie et la transphobie, d'organismes
LGBTQ, du milieu de la recherche ainsi que d'usagers LGBTQ. Et donc le comité
va pouvoir faire appel, également, à l'expertise spécifique de chercheurs, de
médecins et d'autres professionnels pour établir des lignes directrices.
Mme Massé : C'est parfait. Il ne
restera plus qu'à mettre de l'argent pour être certaine que la formation pourra
avoir lieu, et j'ai confiance en vous. Il me reste combien de temps?
Le Président (M.
Bachand) : 50 secondes.
Mme Massé : Les personnes intersexes,
vous avez dit votre ouverture. Je ne sais pas si vous le savez, on a fait une
demande d'accès à l'information, 838 enfants de moins de deux ans ont
subi une intervention chirurgicale dans les cinq dernières années,
547 enfants de 13 à 14 ans. Donc, ce qu'on a écrit dans le projet de
loi n° 70, que ça devait être de façon consentante que les interventions
devaient se faire, je pense que, dans le cas qui nous occupe, ce n'est pas le
cas. S'il vous plaît, M. le ministre, ne tardez pas à mettre ce comité-là
sur pied, de réflexion, si vous voulez réfléchir, et les gens qui sont
impactés, pas les médecins, les gens qui sont intersexes seront vos meilleurs
alliés dans cette réflexion-là, j'en suis certaine.
Le Président (M. Bachand) : Merci
beaucoup, Mme la députée. Mme la députée de Westmount—Saint-Louis, pour
18 min 40 s.
Mme Maccarone : Merci,
M. le Président. Moi, je veux retourner, juste pour clarifier, quand j'ai
dit «sous-traitant». Peut-être c'est une question de langue, mais, tu sais, on
peut imaginer, ce n'était pas pour attaquer de rien par rapport à la façon que
ça fonctionne au niveau du gouvernement. Mais on sait qu'on ne peut pas
demander à un organisme dans les régions, par exemple dans l'Outaouais ou dans
l'Estrie ou dans le Saguenay, qui a peut-être une personne pour couvrir un
territoire qui est vraiment immense, de mettre en oeuvre un plan d'action du
gouvernement tout seul. Alors, c'est clair, la façon, l'esprit de ce que je
voulais partager avec le ministre, c'est qu'ils sont un type de sous-traitants
dans le sens qu'ils viennent et ils sont des partenaires du gouvernement, mais
ils travaillent très, très fort puis ils sont souvent sous-financés. Ils ne
peuvent pas réaliser et répondre aux besoins des personnes concernées dans
leurs territoires. Alors, c'est vraiment un cri de demande d'aide, c'est un cri
d'au secours, parce qu'il faut vraiment faire quelque chose pour changer la
façon qu'ils sont financés. Alors... en espérant qu'à l'intérieur du prochain
plan pour lutter contre l'homophobie et la transphobie on va revoir un peu la
façon qu'ils sont financés pour s'assurer qu'il y ait une pérennité et aussi pour revoir la façon que, dans les régions, les organismes
sont financés. Parce que ce n'est pas du tout la même réalité, quand
nous sommes dans une région plus urbaine, métropole, que dans les régions qui
sont plus éloignées, la collègue vient de le mentionner, accès à des soins de
santé et services sociaux, par exemple, mais aussi accès à des programmes,
accès à la sensibilisation, accès à des mesures de l'éducation.
Alors, je veux savoir si le ministre a quand
même un plan à l'intérieur de de son plan d'action, qui sera déposé d'ici l'année prochaine, quand on va faire
le renouvellement, si on vise à regarder peut-être
un peu différemment les organismes dans les régions au lieu de seulement
dans les régions montréalaises ou dans la région de Québec, comme par
exemple TransEstrie, par exemple, parce qu'on sait qu'ils ont beaucoup,
beaucoup, beaucoup
de difficultés.
Le Président
(M. Bachand) : M. le ministre, s'il
vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Alors, oui.
Bien, en fait, M. le Président, c'était déjà le cas, la mesure 38,
qui visait à favoriser le plein déploiement des activités du Bureau de lutte
contre l'homophobie. Alors, dans le cadre de cette mesure, le bureau de lutte a
réalisé une tournée virtuelle des régions au cours de laquelle il a rencontré
33 personnes de 29 groupes ou organismes qui luttent contre
l'homophobie et la transphobie dans 11 régions du Québec. Depuis 2017, le
bureau de lutte a tenu neuf rencontres régulières du comité consultatif, il a
aussi publié un bilan annuel de son plan d'action 2017‑2022.
M. le Président, je crois que c'est
important d'avoir le pouls de toutes les régions et de tous les partenaires.
Alors, c'est ce que s'emploie à faire le bureau de lutte, M. le Président,
qui consulte en région, mais aussi qui finance des organismes en région aussi.
Alors, dans les projets qui ont été approuvés, puis dans les organismes qui
sont financés à la mission aussi, il y en a dans les différentes régions du
Québec. Puis, ça, je pense que c'est important de le dire, M. le
Président, parce que, bien souvent, pour les personnes issues de la communauté
en région, parfois, c'est plus difficile pour elles. Alors, c'est important de
dire qu'il y a des ressources, qu'il y a des gens qui sont là pour les
accompagner, pour les soutenir, et de ne pas hésiter à avoir recours aux
organismes qui sont présents sur le territoire. Je pense que le gouvernement
les finance justement pour offrir des services.
Puis, je me souviens, on a eu des bons
témoignages au projet de loi n° 70, notamment d'un
organisme au Saguenay—Lac-Saint-Jean,
je ne me souviens plus du nom de l'organisme, mais...
• (16 h 50) •
Des voix : ...
M. Jolin-Barrette :
Diversité 02. Excusez-moi, avec les plexiglas, ce n'est pas évident,
M. le Président. Alors, puis c'est un organisme fort dynamique et qui
offre des services à la population. Alors, je pense que c'est en finançant
comme ça, sur l'ensemble du territoire québécois, qu'on va s'assurer de faire
en sorte d'offrir du soutien, M. le Président.
Mme Maccarone : C'est intéressant.
Puis, c'est sûr, j'ai d'autres sujets à aborder avec le ministre, mais, c'est
parce que, moi aussi, j'ai rencontré Diversité 02, moi aussi, j'ai
rencontré des organismes de la Mauricie, de La Tuque, dans le Saguenay, et ce
n'est pas la même réponse que je reçois. Entre autres, il y a beaucoup de
groupes régionaux qui ne reçoivent aucun financement, ou on reçoit seulement
28 000 $, par exemple, pour aider une région en entier. Alors, ça, ce
n'est même pas le salaire d'une intervenante ou un employé, ça ne comprend pas
le transport qui est nécessaire pour être sur la route pour rejoindre les
personnes qui sont peut-être vulnérables ou, comme j'ai dit, d'offrir des
mesures de l'éducation.
Alors, ma question était : Est-ce qu'on
peut revoir la façon qu'on finance les organismes dans les régions, pas
que : Est-ce qu'il y en a qui sont financés? Je comprends qu'il y en a qui
reçoivent des petites, petites sommes, mais peut-être revoir la façon que c'est
financé. Parce que je pense qu'il y a une autre manière, si on pense «outside
the box», là, pour venir en aide, pour avoir des sommes qui sont plus
importantes, bonifiées, pour qu'ils puissent vraiment réaliser leur mission.
Cela étant dit, je ne sais pas si le ministre peut répondre rapidement à ça,
mais, parce que j'ai vraiment autres questions à poser.
Le Président (M.
Bachand) : M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Rapidement, juste regarder le financement de chacun
des organismes. Parce qu'il y a le bureau de lutte, oui, qui finance, puis on
rajoute de l'argent à chaque année, mais il y a aussi le financement à la
mission, souvent, qui est fait par le ministère de la Santé et des Services
sociaux ou par le ministère de l'Emploi et du Travail aussi. Ça fait que chaque
cas est un cas d'espèce, M. le Président, disons ça comme ça.
Mme Maccarone : O.K. Je veux changer
un peu de sujet puis je veux parler des suites de la décision de la Cour
suprême. Alors, dans la décision du 28 janvier du juge Moore, qui invalide
certains articles du Code civil... à la Cour supérieure, excusez-moi. Je ne
sais pas si je n'ai pas dit «suprême». Désolée, Cour supérieure, dans le
jugement de la décision du 28 janvier, le juge Moore invalide certains
articles du Code civil. Principalement, le jugement conclut qu'il est
discriminatoire de ne pas donner une autre option que femme ou homme, ou mère
ou père — on
se comprend — sur
les documents de l'état civil. Il ordonne aussi que les personnes non
canadiennes... citoyennes canadiennes puissent procéder à ces changements.
Alors, rien, dans la décision, n'indique qu'il
ne sera plus possible... — juste
pour que ça soit clair, parce que je sais
qu'il y a quand même des personnes qui sont préoccupées par ceci — qu'on ne peut plus être identifié comme
mère ou père. Ça, je pense que ce n'est pas
ça, le sens de... le «Judge» Moore, ce qu'il voulait partager. Mais ce que
le jugement dit, c'est que de n'offrir aucune autre option pour les
personnes non binaires, dont le genre n'est ni complètement homme ni
complètement femme est discriminatoire. Puis il faut noter qu'en Ontario, en
Colombie-Britannique, en Alberta, une personne peut choisir mâle, femelle ou x.
Alors, moi, je veux entendre le ministre,
d'expliquer pourquoi la décision de porter en appel certaines conclusions suite
à ce jugement.
Le Président (M.
Bachand) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, dans
le fond, dans un premier temps, ce qui est important de souligner, c'est qu'on
n'a porté qu'une seule partie du jugement en appel. Donc, on a porté uniquement
la partie sur l'obligation, pour un enfant entre 14 et 18 ans, de
consulter un professionnel au niveau de la modification pour sa transition.
Alors, c'est la seule partie qu'on a portée en appel à la Cour d'appel.
Pour les
autres modalités du jugement, relativement à ce qui a été énoncé par la députée
de Westmount—Saint-Louis, on a l'intention de modifier le
corpus législatif qui... bien, en fait, que la cour nous impose de modifier
d'ici le mois... bien, en fait, c'est en décembre, je crois, donc d'ici le mois
de décembre. Donc, on a l'intention de déposer des modifications législatives
pour adapter le corpus en fonction du jugement de la Cour supérieure, donc on
aura l'occasion, très certainement, de travailler ensemble sur ce point-là. Et
c'est jusqu'au 31 décembre, dans le fond, que... d'ici le 31 décembre
qu'on doit modifier la loi.
Mme Maccarone : C'est parce que ça
ne répond pas à la question. Ce que je voulais savoir, c'est d'expliquer
pourquoi aller en appel. Pourquoi, pour les 14 ans, pourquoi aller en
appel pour cette conclusion?
M. Jolin-Barrette : En fait, le
dossier est présentement devant les tribunaux, donc, pour moi, vu que je porte
plusieurs chapeaux, vous comprendrez que je dois réserver certains
commentaires. Mais on considère que c'est fondamental
que les personnes mineures puissent consulter un professionnel lorsqu'il s'agit
d'une décision importante. Et je pense que c'est bon que les personnes
mineures puissent consulter un professionnel de la santé externe, qui puisse les accompagner dans cette
démarche-là. Donc, d'où l'importance associée pour les enfants, pourquoi
nous allons en appel sur cette disposition-là du juge Moore... du jugement du
juge Moore.
Mme Maccarone : J'entends le
ministre, mais, si on peut faire une motion pour la communauté des personnes
trans, on sait qu'elle attend avec beaucoup d'impatience, hein? C'est un
jugement qui va vraiment changer la vie de plusieurs personnes non binaires,
plusieurs personnes de la communauté trans, transféminine, transmasculine.
Alors, si on peut «plaidoyer» pour une adoption rapide, j'ai hâte d'avoir la
décision puis le projet de loi pour faire en sorte des changements pour les
communautés qui sont visées. Parce que, vraiment, de reconnaître les mesures,
les dispositions proposées par le ministre, actuellement, je pense qu'il faut
faire ça en collaboration avec les groupes
concernés. Évidemment, ça va prendre une consultation pour qu'ils puissent
s'exprimer. Alors, je comprends l'inquiétude du ministre, mais,
évidemment, ça va être important d'avoir ces personnes qui participent dans les
décisions. Parce que, c'est sûr, ce qu'on veut faire, c'est d'aller rapidement.
Ça fait que la raison pour tous les mots que je
viens de partager, c'est parce que j'ai entendu, dans les autres échanges que
le ministre a eus ce matin... c'est que le ministre a l'intention d'aller vers
l'avant avec la réforme de droit de la famille et il a l'intention de déposer
deux projets de loi. Mais, le projet de loi dont il va modifier, il va aller
vers l'avant avec les recommandations de la Cour supérieure, le jugement de
«Judge» Moore. Ça aussi, ça va être jumelé avec la filiation, la coparentalité,
la gestion par autrui, puis j'ai des inquiétudes par rapport à ceci. Alors, je
veux mieux comprendre pourquoi tous les regrouper, si on sait qu'on a des
groupes qui sont en attente, impatiemment, parce que ça va retarder le
processus, quand on a déjà un accord par rapport à ce qu'on veut faire, par
rapport à, exemple, mâle, femelle ou x. Pourquoi ne pas aller plus rapidement
et déposer un petit projet de loi qui peut être très efficace, au lieu de le
mettre à l'intérieur d'un omnibus, à l'intérieur de Justice, qui peut avoir
200 articles, dont ça va faire partie des heures puis des heures de
débats, parce que ça va retarder une adoption d'un changement majeur pour la communauté
concernée?
Le Président (M. Bachand) : M. le
ministre.
M. Jolin-Barrette : Alors, deux choses. À la suggestion qui m'est faite par la députée
de Westmount—Saint-Louis,
de consulter les personnes et les différents groupes qui sont touchés par le
jugement puis l'adaptation du corpus, ça, c'est fait. On a demandé aux
différents groupes de nous revenir d'ici le 30 avril 2021, donc, c'est-à-dire
d'ici jeudi ou vendredi cette semaine. Donc,
ça, le travail de consultation est déjà fait pour prendre leurs commentaires par
rapport aux suites à donner avec le projet de loi qu'on va déposer, en lien
avec le jugement du juge Moore.
Pour ce qui est du
véhicule législatif que nous allons utiliser, je l'ai énoncé ce matin, que, notamment,
dans le premier volet du droit de la
famille, j'avais l'intention d'inclure ces dispositions-là. Et ça va de pair
nécessairement aussi avec le droit de la famille aussi. Et lorsque vous lisez
le jugement aussi, c'est rattaché notamment à la famille. Alors, je crois que
c'est approprié que, lorsqu'on va aborder ces questions-là, on ait l'optique
aussi globale du droit civil et du droit de la famille.
Alors,
je comprends que la députée de Westmount—Saint-Louis et le député de LaFontaine me disent : N'allez pas là, ne faites
pas ça, mais c'est la décision que j'ai prise d'aller dans ce sens-là.
• (17 heures) •
Mme
Maccarone : Ce n'est pas une question d'aller ou n'allez pas là. Je
veux mieux comprendre, honnêtement. Parce que, exemple, quand on a parlé des
personnes intersexes, on a dit que ce n'était pas le moment d'aborder ce sujet
à l'intérieur du projet de loi n° 70 parce que
c'était deux cas complexes, puis là on voulait vraiment donner une attention
importante aux deux communautés, les besoins de chacun, mais ça, c'est quelque
chose que je veux comprendre, parce qu'on peut aller rapidement faire quelque
chose de bien pour la communauté. C'était un gain tellement important pour eux.
Ils ont des attentes, alors... C'est ça, je comprends, le ministre a pris une
décision parce que, oui, O.K., c'est tout ce qui concerne le Code civil, mais,
depuis que je suis ici puis je pose des questions par rapport au Code civil, je
comprends que c'est complexe, puis on ne peut pas faire ci parce que ça va
changer mille choses dans le Code civil, alors pourquoi pas avoir... si déjà on
va avoir deux projets de loi, pourquoi ne pas avoir trois? Ça peut être
efficace, ça peut être rapide. C'est clair, la communauté sera contente, vous
aurez des alliés derrière une adoption d'un projet de loi, qui peut être 10
articles, très rapide. Et là on va pouvoir se concentrer
sur les autres sujets qui sont majeurs, très importants, la filiation, la
gestion par autrui, c'est très, très important, mais là ça va prendre
vraiment beaucoup de discussions en commission parlementaire, qui va retarder
une adoption d'une loi et des changements
pour les communautés, qui sont en attente depuis des années, et des années, et
des années.
Le
Président (M. Bachand) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Mais je vous dirais, M. le Président, c'est quand même des situations qui sont complexes. Et ça s'imbrique également
avec le droit de la famille, donc, ça s'imbrique également avec la connaissance
des origines. Alors, ça, je pense que c'est important de traiter ça ensemble. Et, je pense,
c'est important, lorsqu'on va faire le débat, d'avoir un point
de vue global par rapport à l'ensemble du droit de la famille rattaché, notamment,
aussi à l'identité de genre. Ça, je pense que... Puis vous allez le voir dans
le cadre du projet de loi. Et, dans le cadre du projet de loi, nécessairement,
il y a des choses qui vont se regrouper avec la communauté également. J'ai bien
l'impression que des organisations de la communauté ou des membres de la communauté
vont vouloir témoigner également sur l'aspect filiation du droit de la
famille ou sur l'aspect connaissance de leurs origines.
Ça fait que moi, je
pense que, pour être efficaces, on va faire ça dans le cadre du même projet de
loi, parce que, vous savez, la réforme du droit de la famille, ça fait des
années et des années aussi. Et là on se retrouve dans une situation où,
nécessairement, on va aller jouer dans des articles du Code civil qui ont un
impact aussi sur le droit de la famille en lien avec les articles qu'on doit
modifier en fonction du jugement à la Cour supérieure. Alors, pour être
cohérents et logiques, on va utiliser le même véhicule législatif.
Mme
Maccarone : À l'intérieur des changements qui sont proposés, de la
Cour supérieure... puis le ministre a dit... puis je sais que c'était une
question qu'on avait déposée au feuilleton, que le ministre a dit, puis il l'a
répété ici, en commission, en crédits, qu'il a consulté à peu près
40 organismes. Les consultations vont être faites de quelle façon? Puis est-ce qu'il y a un échéancier? Parce
que, là, vous avez dit : La fin... je pense que le ministre a dit :
La fin du mois. Mais est-ce qu'il y a
un échéancier sur les travaux? Puis est-ce que ça se fait, mettons, en ligne?
Est-ce que c'est juste qu'on demande
aux organismes de soumettre un mémoire? Les consultations, elles vont se faire
de quelle façon?
M.
Jolin-Barrette : Bien, en fait, on leur a écrit, aux organismes, pour
les questionner sur les suites à donner au jugement. Donc, on leur a demandé de
nous répondre par écrit sur comment ils envisageaient les modifications à
apporter au Code civil du Québec. Donc, on leur a écrit, je pense, au mois de
février, mars... au mois de février. Donc, on leur a écrit au mois de février
pour qu'ils nous donnent une réponse jusqu'au 30 avril. Puis le bureau de
lutte, il est en contact avec les différents organismes aussi, donc, s'ils ont
des questions supplémentaires. Mais l'idée, c'est
de pouvoir orienter le tout en fonction de leurs commentaires sur le libellé
des dispositions qu'on va mettre de l'avant.
Mme
Maccarone : O.K. Il me reste combien...
Le
Président (M. Bachand) : 1 min 40 s.
M.
Jolin-Barrette : Et ils
peuvent transmettre des avis et des mémoires, des courriels. On prend tous les
commentaires.
Mme Maccarone : O.K. Merci. Je vais
lire la Déclaration des droits des femmes fondés sur le sexe biologique. Alors, je vais le lire
rapidement : «Les États devraient reconnaître que l'inclusion d'hommes
revendiquant une "identité de
genre" féminine dans la catégorie des femmes dans la loi, les politiques
gouvernementales et les pratiques constitue une discrimination à l'égard
des femmes en nuisant à la reconnaissance des droits des femmes fondés sur le sexe
biologique.
«Les États devraient reconnaître que l'inclusion
d'hommes revendiquant une "identité de genre" féminine dans la
catégorie des femmes entraîne leur inclusion dans la catégorie lesbienne, ce
qui constitue une forme de discrimination à l'égard des femmes en nuisant à la
reconnaissance des droits humains fondés sur le sexe biologique des lesbiennes.
«Les États "devront, dans tous les
domaines, en particulier politiques, sociaux, économiques et culturels, prendre
toute mesure appropriée, y compris législative, afin d'assurer le développement
et la promotion des femmes, dans le but de
leur garantir l'expression et la jouissance des libertés fondamentales sur la
base de l'égalité avec les hommes".
«Ceci devrait inclure la restriction, dans la loi,
les politiques gouvernementales et les pratiques courantes de la définition de
la catégorie femme comme être humain de sexe féminin, la catégorie lesbienne
comme être humain et sexe féminin dont l'orientation sexuelle se porte sur les
autres êtres humains de sexe féminin, et la catégorie mère comme parent de sexe
féminin; et l'exclusion des hommes revendiquant», etc. Je peux continuer. Est-ce
que le ministre pense que ce genre de déclaration est transphobe, homophobe?
Le
Président (M. Bachand) : Malheureusement, ça met fin au bloc. Alors, je dois céder la
parole à la députée de Joliette pour 9 min 40 s.
Mme
Hivon : Merci
beaucoup, M. le Président. Donc, je voulais commencer à la question 69
qu'on a posée dans nos demandes de renseignement. On a demandé combien d'argent
avait été investi pour la mise en oeuvre de la politique, donc, de lutte contre
l'homophobie. Et, quand on compare 2020-2021 à 2019-2020, on constate une diminution de 700 000 $ d'investissement pour la mise en oeuvre de la politique,
ce qui nous a surpris parce qu'il nous semble
que les besoins continuent à être très importants. Donc, on aimerait ça que le
ministre nous explique la différence, donc,
entre 2020-2021 et 2019-2020, cette baisse de 700 000 $. Et on est
passés, en fait, de 2,5 millions à 1,8 million.
Et on a
demandé le chiffre pour cette année, quel investissement était prévu pour
2021-2022. On ne l'a pas reçu. Donc,
je ne sais pas si le ministre pourrait nous donner le chiffre qu'il entend
investir pour la mise en place de la politique.
Le Président (M.
Bachand) : M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Oui. Alors, en
2019-2020, il y a une campagne sociétale de 650 000 $. Votre deuxième
question, c'est : Cette année, combien est-ce qu'on va investir par
rapport...
Mme
Hivon :
C'est : Pourquoi il y a une baisse de 700 000 $?
M. Jolin-Barrette : Pourquoi il y a
une baisse de 700 000 $? Si vous permettez, je vais prendre votre
question en délibéré puis on va me répondre.
Mme
Hivon : C'est bon.
Et puis, oui, le deuxième volet de ma question, c'était : En 2021-2022,
quel est le montant prévu d'investissement pour l'application de la politique,
puisqu'on est passés de 2,5 millions à 1,8 million? Et là j'espère
qu'on ne baisse pas encore.
M. Jolin-Barrette : Alors, en 2020‑2021,
il n'y a pas eu de campagne. C'est pour ça qu'il y a eu une baisse. Et là, pour
cette année, 2021-2022, est-ce que la somme sera... est-ce qu'elle baissera, est-ce
qu'elle sera la même, tout ça, je vais pouvoir vous revenir très bientôt,
j'imagine.
Mme
Hivon : Je veux
juste souligner au ministre que je pense qu'il y a toujours un besoin aussi important
de sensibilisation et d'investissement, et on constate que ce ne sont pas des
sommes faramineuses pour l'application de la politique. Donc, je suis surprise
de cette baisse-là, mais il pourra me l'expliquer. Je veux dire, si, cette
année, on décide de ne pas refaire une campagne, il doit y avoir pas mal
d'autres actions qui pourraient se déployer sur le terrain. Donc, pourquoi
cette baisse? Et puis il va me revenir avec le chiffre de l'investissement qui
est prévu pour cette année. Parfait.
En attendant, je veux parler des crimes
contre... des crimes haineux, en fait, qui ciblent l'orientation sexuelle. Il y a
eu une sortie de faite, au début du mois, par la directrice générale du Conseil
québécois LGBT, Mme Marchand-Labelle, qui
disait qu'on voyait une hausse de ce type de crime là. Et elle parlait qu'en
2019 il y aurait eu 29 crimes haineux du genre recensés au Québec. Donc,
je ne sais pas si, eux, c'est par le réseau, donc, qu'ils sont capables
d'arriver à ce chiffre-là. Et je me demandais si le ministère de la Justice
recensait ces types de crimes, qui, donc, seraient basés sur l'orientation
sexuelle, crime haineux, voies de fait, où il y aurait eu une divulgation de la
personne agressée que c'est en lien avec son orientation sexuelle. Est-ce qu'on
a ce genre de statistique?
M.
Jolin-Barrette : Au Bureau de lutte contre l'homophobie, ce qu'on me
dit, c'est que c'est des données stables au cours des dernières années. Mais est-ce
qu'on recense... On nous dit également : 41 % de hausse pour le Canada.
Mais, au Québec, ça serait quand même stable. Donc, je comprends que le bureau
de lutte collige et regarde ces informations-là relativement au nombre de
crimes annuellement.
Mme
Hivon :
Puis je suis curieuse de savoir, le bureau de lutte, comment il fait pour
colliger. Donc, est-ce qu'il a une entrée? Est-ce qu'on a une collaboration
avec les forces policières pour qu'il y ait un répertoire de ce type de crime
haineux là, basé sur l'orientation?
M.
Jolin-Barrette : C'est le ministère de la Sécurité publique qui nous
informe des types de crime, au Bureau de lutte contre l'homophobie,
relativement à ce genre de crimes haineux là.
Mme
Hivon :
O.K. Et le ministre est conscient qu'évidemment il peut y avoir une
sous-divulgation de ces crimes-là parce qu'il y a des gens qui vont porter
plainte sans divulguer la raison pour laquelle elles pensent qu'elles ont été
agressées. Donc, je me demandais s'il y avait une sensibilisation qui était
faite par rapport à ça. Parce qu'on peut se réjouir de voir qu'il y en a moins
au Québec, j'espère que c'est fondé sur le fait qu'on est une société ouverte,
mais ça pourrait être aussi peut-être parce qu'il y a une sous-divulgation. En
fait, c'est dur d'évaluer. Est-ce que cette sensibilité-là est présente? Et est-ce
qu'on en a informé les corps policiers? Je comprends que le ministre n'est pas responsable des corps policiers, mais est
responsable de la politique. Est-ce
qu'on a une idée et des hypothèses
sur ça?
• (17 h 10) •
M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, vous savez, le bureau de lutte,
avec ses différents partenaires, très certainement, fait la promotion,
divulgue également, dans le fond, le plan d'action, s'assure que les
partenaires sont au courant. Je ne peux pas parler pour les corps de police,
pratico-pratique, comment ça fonctionne, mais un des objectifs de l'État québécois,
c'est de faire en sorte que des crimes de nature haineuse... bien, en fait, premièrement,
qu'il n'y ait pas de crime, mais, deuxièmement, de sensibiliser également la population
au fait qu'il y a des ressources lorsque les personnes sont
victimes de ce genre de crimes haineux là.
Mme Hivon :
Je ne sais pas si le ministre a mon information à ma première question, mais,
sinon, je vais continuer. Je veux juste être sûre de l'avoir avant la fin de
notre temps.
M. Jolin-Barrette :
...également que le Centre d'Interligne recense l'information aussi relativement
aux crimes haineux.
Mme Hivon :
Oui. Et donc tout ça est basé sur ce qui est donné comme information par les
forces policières, je présume.
M. Jolin-Barrette :
Oui. Bien, en fait, dans la mesure 26, là, du plan d'action, c'est :
«Outiller les policiers, les policières afin d'assurer une intervention
adéquate et adaptée en matière d'homophobie et de transphobie.» Donc, ça fait
part, notamment, de la sensibilisation qu'il y a auprès des corps de police
relativement... plus largement, pas uniquement aux crimes haineux, mais
également avec la sensibilisation rattachée aux questions de la communauté.
Mme Hivon :
Bien, ça m'amène, justement, à ce point-là. Je voulais parler de la question,
donc, parce que, cette année, ça retient beaucoup l'attention, notamment, de la
Fondation Émergence, qui va baser sa campagne de sensibilisation au mois de
mai, dans la journée de lutte, donc, contre l'homophobie et la transphobie, sur
les violences à l'égard des personnes LGBTQ+, donc je pense que c'est important
de recenser et de suivre ça avec beaucoup d'attention, et la question aussi du
manque de confiance des membres de la communauté à l'égard des forces
policières qui pourrait expliquer aussi une sous-divulgation.
Puis ça m'amène au
fait qu'en parcourant le plan d'action, j'ai juste vu la mesure 24 qui
parle de renforcer la sensibilisation des intervenants. Puis là ils parlent de
tous les secteurs et des services publics. Je présume que les policiers sont
là-dedans, mais, comme tel, précisément pour les forces policières, là, donc,
la recommandation... en fait, la mesure à
laquelle le ministre fait référence, en fait, c'est beaucoup lié à la question
des fouilles, et je me demandais si, plus globalement, il y avait
vraiment de la formation qui était donnée. Parce que la formation a l'air très
générale quand on regarde la mesure 24, c'est la même que tu sois policier
ou santé, services sociaux. Est-ce qu'il y a une formation spécifique donnée
aux forces policières? Et je rappelle que j'attends ma réponse sur les
investissements.
M.
Jolin-Barrette : Oui, on va me revenir sur les investissements. La
mesure... Bien, en fait, premièrement, Nicolet, à la formation des policiers,
ils offrent de la formation relativement à l'interaction avec les personnes
issues de la communauté. Puis la mesure 24, également, du plan,
c'est : «Renforcer la sensibilisation des intervenantes et des
intervenants de la santé et des services sociaux, de l'enseignement et des
services publics ou communautaires sur les
réalités des personnes de minorités sexuelles.» Donc, depuis 2017,
3 143 intervenants et intervenantes de 13 régions
administratives ont reçu gratuitement les formations sexe, genre et orientation
sexuelle.
Mme
Hivon :
...quelque chose qui est adapté à la réalité des policiers, parce que, là, ils
sont tous dans le même bateau, que tu travailles en santé, services sociaux ou
policiers. Je comprends que c'est une bonne formation de base sans doute, là,
mais...
M.
Jolin-Barrette : Depuis l'automne 2020, l'Institut national de
santé publique du Québec a amorcé des travaux en vue d'adapter au format
virtuel la formation qui pourra être partagée aux différents partenaires.
Mme
Hivon : Oui, mais
ça ne répond pas à ma question à savoir s'il y a quelque chose de ciblé. Moi,
j'invite le ministre à ce qu'il y ait vraiment une formation précise, en continu,
pour les forces policières, parce qu'il y en a beaucoup qui ne sont pas passés
à Nicolet dans le temps où c'était une réalité puis une préoccupation, et je
pense qu'ils devraient avoir une formation très spécifique.
Et, si, donc, le ministre n'a pas les chiffres,
j'aimerais qu'il les transmette à la commission pour savoir les investissements
prévus en 2021-2022, et l'explication de la baisse entre 2019-2020 et
2020-2021. Parce que je veux juste lui souligner que je pense qu'il y a encore
énormément de travail à faire dans la lutte contre l'homophobie, et je m'explique mal qu'on puisse passer de
2,5 millions à moins que ça quand ce n'est quand même pas un montant
faramineux.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Donc, M. le ministre, vous en prenez
l'engagement?
M. Jolin-Barrette : Oui, je vais
transmettre le tout à la commission.
Adoption des crédits
Le
Président (M. Bachand) :
Merci beaucoup. Le temps alloué à l'étude du volet Lutte contre
l'homophobie et transphobie des crédits budgétaires du portefeuille Justice
étant presque écoulé, conformément à l'entente du 13 avril 2021, nous
allons maintenant procéder à la mise aux voix de ces crédits par appel nominal.
Pour la mise aux voix du programme 1, intitulé Administration de la
justice, Mme la secrétaire, s'il vous plaît.
La
Secrétaire : Pour, contre, abstention. Pour les membres du
groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque
(Chapleau)?
M. Lévesque (Chapleau) : Pour.
La Secrétaire : Pour les
membres de l'opposition officielle, Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis)?
Mme Maccarone : Contre.
La Secrétaire :
Mme Hivon (Joliette)?
Mme
Hivon : Contre.
Le Président (M.
Bachand) : Donc, c'est adopté. Merci beaucoup.
Documents déposés
En terminant, je dépose les réponses aux
demandes de renseignements de l'opposition.
Compte tenu
de l'heure, la commission ajourne ses travaux au mercredi 28 avril, à
11 h 45, où elle va entreprendre l'étude du volet Réforme des
institutions démocratiques des crédits budgétaires du portefeuille du Conseil
exécutif. Merci beaucoup. Supersoirée! Merci.
(Fin de la séance à 17 h 15)