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Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le jeudi 14 avril 2016 - Vol. 44 N° 106

Ministère du Conseil exécutif


Ministère du Conseil exécutif, volet Affaires autochtones


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Table des matières

Conseil exécutif

Remarques préliminaires

M. Philippe Couillard

M. Pierre Karl Péladeau

Discussion générale

Adoption des crédits

Documents déposés


Affaires autochtones

Remarques préliminaires

M. Geoffrey Kelley

M. Guy Leclair

M. Mathieu Lemay

Discussion générale

Document déposé

Adoption des crédits

Document déposé

Autres intervenants

M. Guy Ouellette, président

M. Richard Merlini, président suppléant

M. François Bonnardel

M. Marc Tanguay

M. François Legault

M. Jean Rousselle

Mme Marie Montpetit

Mme Karine Vallières

M. Serge Simard

Mme Marie-Claude Nichols

M. Guy Bourgeois

Mme Véronyque Tremblay

Mme Caroline Simard

M. Jean Boucher

Note de l'éditeur : Les crédits du volet Jeunesse du ministère du Conseil exécutif ont été étudiés à la Commission des relations avec les citoyens le 14 avril 2016.

               Les crédits du volet Stratégie maritime du ministère du Conseil exécutif ont étéétudiés à la Commission des transports et de l'environnement le 21 avril 2016.

Journal des débats

(Onze heures vingt-neuf minutes)

Le Président (M. Ouellette) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de procéder à l'étude du volet Conseil exécutif des crédits budgétaires du portefeuille Conseil exécutif pour l'exercice financier 2016‑2017.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

• (11 h 30) •

Le Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Boucher (Ungava) est remplacé par Mme Vallières (Richmond); M. Merlini (La Prairie) est remplacé par M. Simard (Dubuc); M. St-Denis (Argenteuil) est remplacé par Mme Nichols (Vaudreuil); Mme Hivon (Joliette) est remplacée par M. Péladeau (Saint-Jérôme); M. Leclair (Beauharnois) est remplacé par M. Drainville (Marie-Victorin); M. Jolin-Barrette (Borduas) est remplacé par M. Bonnardel (Granby); et Mme Roy (Montarville) est remplacée par M. Legault (L'Assomption).

Le Président (M. Ouellette) : Nous allons débuter par des remarques préliminaires. Par la suite, nous allons procéder à une discussion d'ordre général par blocs d'environ 20 minutes, incluant les questions et les réponses. Je compte sur votre collaboration pour que les questions puissent... Il va y avoir sensiblement le même temps pour les réponses pour que ce soit équitable.

Comme nous avons débuté nos travaux à 11 h 30 et qu'il y a une entente entre les leaders de chacun des groupes pour qu'on puisse se rendre jusqu'à 13 h 15, je comprends aussi que le temps qui est imparti pour cette étude de crédits, qui doit être deux heures, va être comptabilisé comme étant fait, suite à l'entente qu'il y a entre les leaders.

L'autre chose, chacun des chefs de parti a droit à des remarques préliminaires. Vous comprenez que le temps que vous ne prendrez pas dans les remarques préliminaires sera comptabilisé sur votre temps de question.

Conseil exécutif

Remarques préliminaires

Nous débutons donc par M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord vous saluer, vous-même, M. le Président, de même que le personnel de la commission et les personnes de la fonction publique qui sont avec nous. Je vais également présenter les personnes qui m'accompagnent : à ma gauche, M. Juan Roberto Iglesias, secrétaire général du gouvernement; à ma droite, M. Jean-Louis Dufresne, directeur de mon cabinet; et, derrière moi, des membres du ministère du Conseil exécutif et également du cabinet. Bonjour également aux collègues parlementaires de notre groupe ministériel mais également des partis d'opposition.

L'étude des crédits constitue un exercice démocratique central de la vie parlementaire, un acte de transparence. Pour chacun des responsables d'un portefeuille ministériel, c'est le moment de rendre compte de l'utilisation qui a été faite des deniers publics. Les citoyens s'attendent, avec raison, à une gestion exemplaire de ceux-ci.

Depuis notre élection il y a deux ans, on a fait avancer le Québec. Déjà, nous avons réalisé de nombreux engagements. Nous avons mis de l'ordre dans les finances publiques, nous avons ainsi déposé des budgets équilibrés. Nous nous sommes donc donné la marge de manoeuvre nécessaire pour réinvestir dans les secteurs qui nous tiennent à coeur : l'éducation, la santé, la réduction du fardeau fiscal des entreprises et des particuliers. On a conclu des ententes avec la très grande majorité des employés de la fonction publique, soit près de 500 000 personnes, dans le respect de la capacité de payer des Québécois et de même une entente de partenariat historique avec les municipalités, tout ça en assurant la croissance économique et une croissance de l'emploi.

Les finances publiques en ordre sont, bien sûr, le premier volet de notre plan d'action. Les résultats obtenus ne laissent aucune place à l'interprétation. On a réussi à passer d'un manque à gagner, dans les finances publiques, de 7 milliards de dollars il y a deux ans à un second budget équilibré consécutif. C'est une première depuis 2008 qui est attribuée à la bonne tenue de nos revenus et à un contrôle des dépenses exemplaire. En fait, le Québec est la seule juridiction au Canada, avec la Colombie-Britannique, à avoir présenté un budget équilibré en 2015‑2016. Cette performance est d'ailleurs saluée par les marchés financiers.

Le gouvernement avait annoncé une réduction de la taille de l'État. Nous avions des cibles ambitieuses et nous les avons dépassées, M. le Président. Pour la fonction publique, il s'agit d'une réduction de 3 700 équivalents temps complet, ou 5,3 %, par rapport à l'exercice 2013‑2014. Rappelons que ces résultats ont été obtenus alors qu'au cours des années précédentes les actifs totaux ont connu une hausse moyenne de plus de 5 000 équivalents temps complet annuellement. Il s'agit donc d'un renversement de la tendance et la preuve d'un effort important de la part de l'appareil gouvernemental. En parallèle, nous poursuivons la réduction du poids de la dette par nos versements au Fonds des générations, dont on souligne cette année, M. le Président, les 10 années d'existence. Il s'agit d'une mesure d'équité entre les générations par excellence. Chaque versement y est effectué en pensant d'abord aux jeunes. Cette année, 2 milliards y sont versés. On a mis de l'ordre dans la maison des finances publiques.

En 2015, malgré l'incertitude mondiale, qui a retardé la reprise des investissements, l'environnement économique reste favorable pour le Québec. La baisse du dollar canadien, la croissance de l'économie américaine ont eu un effet positif sur notre économie. Le marché du travail a poursuivi sa croissance, soutenu par le secteur privé. En 2015, le Québec a enregistré un gain de 48 600 emplois. Ces emplois sont essentiellement à temps plein et proviennent, en majorité, du secteur privé, de sorte que le Québec a ainsi contribué à la création de la moitié des emplois créés dans le secteur privé au Canada au cours de la même période.

En 2016‑2017, d'autres signaux positifs nous permettent d'être optimistes. Il est prévu que la consommation des ménages va s'accélérer, les exportations internationales de biens poursuivront leur progression. Grâce à sa gestion rigoureuse des finances publiques, le gouvernement dispose maintenant de la marge de manoeuvre nécessaire pour stimuler davantage notre économie et la création d'emplois.

La situation actuelle est favorable à l'investissement privé. Les finances publiques sont solides, la stabilité économique et politique est assurée, les occasions d'investir sont nombreuses. Pour relever les défis de demain, notre plan est clair : mieux former, innover, tirer profit de la transition vers une économie plus sobre en carbone, attirer, développer et retenir les meilleurs talents. Avec ce plan, nous offrons un soutien additionnel de plus de 3,6 milliards pour les prochaines années. Avec ce plan, nous redonnons au Québec la liberté de faire ses propres choix et de miser sur le talent des Québécoises et des Québécois. Avec ce plan, nous maintiendrons l'équilibre budgétaire recouvré en 2015‑2016.

De plus, par son programme d'investissement en infrastructures de 88,7 milliards de dollars sur 10 ans, en hausse de 300 millions de dollars par rapport à celui portant sur la période 2015‑2025, le gouvernement du Québec poursuit les actions prioritaires mises en oeuvre pour appuyer de façon substantielle la croissance et assurer le maintien des services à la population.

Ça va mieux, donc, mais on peut faire encore beaucoup mieux, on doit faire beaucoup mieux. Faire mieux, ça doit donc commencer par l'éducation et l'enseignement supérieur, les pierres angulaires de notre développement social et économique. On veut offrir aux jeunes de toutes les régions du Québec des milieux d'apprentissage plus stimulants qui favoriseront la réussite et le dépassement. Pour ça, on a le Plan pour la réussite en éducation et en enseignement supérieur. 500 millions de dollars supplémentaires seront consacrés à accroître la réussite des jeunes, 300 millions pour leur offrir un environnement innovant, afin de prévenir le décrochage scolaire, par le déploiement de personnel spécialisé, 120 millions pour donner aux élèves le goût de réussir et de se dépasser notamment par la pratique d'activité physique et culturelle. On continuera d'innover en éducation en allouant 80 millions au renforcement des liens entre le système d'éducation et le marché du travail. Une enveloppe de 165 millions ira aux établissements d'enseignement supérieur. On va renforcer les maillages entre les collèges, universités et entreprises, surtout en région. Notre plan prévoit un soutien additionnel de 16 millions aux centres collégiaux de transfert de technologie pour favoriser l'innovation dans les entreprises. 700 millions de dollars sont déployés dans les infrastructures en éducation afin de rénover et d'améliorer les établissements, offrir des milieux plus sains et stimulants, accroître l'accès à des installations sportives, rendre les établissements plus écoresponsables.

Ces jeunes d'aujourd'hui seront les leaders de demain, ceux qui amèneront le Québec vers de nouveaux sommets. Nous devons les appuyer pour qu'ils atteignent leur plein potentiel. Avec la nouvelle Politique québécoise de la jeunesse, nous avons défini une vision rassembleuse dans leur intérêt, parce qu'une société qui mise sur ses jeunes est une société tournée vers l'avenir qui se donne toutes les chances de réussir. Nous aurons l'occasion d'en discuter ce soir dans le cadre de l'étude des crédits jeunesse.

Le plan économique 2016‑2017 envoie un signal clair aux entrepreneurs : investissez davantage dans l'économie québécoise et dans le talent des Québécois, prenez le virage vers une économie plus innovante, plus ouverte aux nouvelles technologies et plus sobre en carbone, et on va vous accompagner dans cette transition. Ce virage, plusieurs entreprises l'ont pris récemment. Pensons à Bridgestone, qui, par son investissement de 312 millions pour moderniser son usine de Joliette, a choisi le Québec et ses 1 300 travailleurs; Exagon Motors, qui mènera en partenariat avec Hydro-Québec et Peugeot Citroën une étude de préfaisabilité qui pourrait mener au développement, au Québec, de composants pour des véhicules électriques à haute performance; Pages jaunes, qui réalisera un projet de transformation numérique de plus de 160 millions en créant 300 nouveaux emplois; Kruger, en Mauricie, un investissement de 190 millions pour un projet de conversion d'une machine à papier dans la production de carton et regroupement des activités de cette usine avec celles de l'entreprise Emballages Kruger, c'est 600 emplois consolidés, un projet de 250 millions.

Nous voulons que le plan économique 2016‑2017 soit le déclencheur qui confirmera la confiance des entreprises. Nous prévoyons des initiatives frôlant les 850 millions aux entreprises du secteur manufacturier pour y accélérer l'innovation et susciter l'investissement. Pour y arriver, nous utiliserons d'abord notre électricité propre produite chez nous. Ainsi, un nouveau crédit tarifaire d'électricité sera accordé aux entreprises détentrices du tarif L, tarif de grande puissance, qui investissent. Cet allègement de 539 millions d'ici cinq ans sera offert à des entreprises de 15 secteurs d'activité, dont la première transformation des métaux, la fabrication d'aliments, la fabrication du papier et la fabrication de produits chimiques. Grâce à cette nouvelle mesure, le gouvernement prévoit déclencher près de 2,6 milliards d'investissement privé au cours de la période 2016‑2020.

La réduction d'impôt découlant de la commercialisation d'une propriété intellectuelle représentera un allègement de 135 millions pour les sociétés innovantes. Le taux d'imposition des revenus attribuables à un brevet sera réduit de 11,8 % à 4 %, un taux très avantageux qui incitera à choisir le Québec pour les activités à haute valeur ajoutée de fabrication et de recherche et développement.

Le passage de nos entreprises manufacturières vers l'industrie 4.0 et la mise en place d'usines intelligentes représentent un incontournable pour assurer leur compétitivité. Cependant, le développement très rapide de l'économie numérique représente un défi pour les entreprises québécoises. Afin de demeurer à l'affût des tendances mondiales, nous consacrerons 162 millions de dollars à une stratégie numérique d'avant-garde à être annoncée ultérieurement et reposant notamment sur l'intégration des TIC dans les petites et moyennes entreprises, l'appui au grand projet visant la transformation numérique, Québec branché, afin de fournir un accès numérique dans toutes les régions.

La transition énergétique vers une économie plus sobre en carbone est également une tendance, voire une nécessité mondiales. Chef de file dans les domaines de l'efficacité énergétique et énergies renouvelables, le Québec est bien positionné. Guidé par sa cible de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 37,5 % en 2030 par rapport à 1990, il s'engage sur la voie de la transition énergétique vers une économie à plus faible empreinte de carbone.

• (11 h 40) •

L'énergie des Québécois, c'est une source de croissance. Les sociétés qui seront les plus prospères aujourd'hui et demain seront celles qui produiront des énergies renouvelables, qui exporteront de l'énergie renouvelable, qui inventeront des solutions pour faire une meilleure utilisation de l'énergie. La politique que nous avons présentée nous rassemble autour d'un objectif commun : faire du Québec un chef de file nord-américain dans les domaines de l'efficacité énergétique et des énergies renouvelables et ainsi bâtir une nouvelle économie forte, diversifiée et à faible empreinte carbone.

Via les trois plans d'action qui se succéderont sur l'horizon de 15 ans de la politique, le gouvernement entend mettre à la disposition des ménages, des entreprises et des établissements publics plus de 4 milliards de dollars pour des mesures d'efficacité et de substitution énergétiques.

Par ailleurs, le gouvernement souhaite une implication de plus en plus active dans le processus d'électrification des transports collectifs et individuels de la part d'Hydro-Québec, bien sûr, avec la poursuite du Circuit électrique, son implication dans les projets de transport sur le pont Champlain et le Train de l'Ouest.

Pour sa part, le budget 2016‑2017 prévoit l'instauration de RénoVert, un crédit d'impôt de 20 % visant à encourager les particuliers à entreprendre des travaux de rénovation résidentielle écoresponsable réalisés par des entrepreneurs reconnus. Cette mesure représente un allègement fiscal de près de 175 millions de dollars, un levier de croissance économique et d'emploi. RénoVert devrait représenter un soutien à des dépenses de 1,2 milliard dont les effets seront comparables au retrait de la circulation de plus de 30 000 automobiles. Le remplacement des fosses septiques de résidence principale sera admissible, tout comme la décontamination des sols contaminés au mazout.

Ce développement d'une économie plus propre se manifeste également par l'appui au consortium Valorisation carbone Québec, un appui à l'efficacité énergétique des écoles et l'aide offerte aux municipalités pour réhabiliter leurs terrains contaminés.

Les PME sont un moteur très important de la croissance économique et de la création d'emplois au Québec. Depuis notre premier budget, nous travaillons à réduire leur fardeau fiscal. Le plan économique réitère cet appui et ajoute 282 millions sur cinq ans, une réduction additionnelle de la cotisation au Fonds des services de santé pour les PME des secteurs primaire, manufacturier et des services, un appui de 32,5 millions aux PME exportatrices pour faciliter la commercialisation de leurs innovations qui n'ont pas été testées sur les marchés commerciaux — à ce sujet, une nouvelle stratégie à l'exportation sera dévoilée au cours de 2016 — une augmentation du soutien aux fonds fiscalisés dans tous les stades de développement des entreprises québécoises, surtout, bien sûr, des PME, et un allègement fiscal au transfert d'entreprises familiales.

Notre plan économique prévoit aussi de nouvelles initiatives totalisant plus de 600 millions sur cinq ans afin de soutenir l'innovation des entreprises des secteurs clés de l'économie et de contribuer à la création d'emplois dans toutes les régions du Québec. Parmi ces secteurs clés, deux trouvent leurs ramifications dans la région de Montréal. L'industrie aérospatiale québécoise y joue un rôle stratégique pour l'économie du Québec, c'est plus de 40 000 emplois répartis dans près de 200 entreprises. En 2015, cette industrie, toutes entreprises confondues, réalisait des ventes de près de 15,5 milliards, dont 80 % à l'étranger, mais elle doit affronter une concurrence féroce à l'étranger. Dans le cadre de la nouvelle Stratégie québécoise de l'aérospatiale, nous offrirons un appui additionnel de 70 millions, portant l'aide gouvernementale à 250 millions sur cinq ans. Elle viendra soutenir la croissance de l'industrie, la diversification de sa filière industrielle et puis l'innovation et la consolidation chez ces PME. Cet aspect stratégique justifie la participation du gouvernement du Québec de 1 milliard de dollars américains dans la série C, pour laquelle l'appui du gouvernement fédéral est attendu. Il serait d'ailleurs souhaitable de pouvoir compter sur l'appui des oppositions afin de réaliser ce projet novateur et créateur d'emplois.

Le secteur des sciences de la vie regroupe 25 000 emplois bien rémunérés au Québec à lui seul. 80 % sont concentrés dans la région de Montréal. Notre appui de 34 millions viendra renforcer sa compétitivité et favoriser la commercialisation des découvertes québécoises et des projets d'étude clinique.

D'autres secteurs clés génèrent de l'activité économique dans toutes les régions du Québec, ils y jouent un rôle essentiel dans la création d'emplois. L'un d'eux, le secteur forestier, très présent dans ma région, fait partie de l'ADN des Québécois et offre plus de 60 000 emplois de qualité sur notre territoire. Pour accélérer sa modernisation, favoriser sa compétitivité, accroître la contribution de la forêt privée aux approvisionnements, 230 millions sont prévus. De plus, depuis l'arrivée du gouvernement, des sommes de 225 millions par année ont été annoncées afin de soutenir les travailleurs de la forêt.

Au cours des prochains mois, notre gouvernement entamera l'élaboration d'une stratégie agroalimentaire afin d'accompagner l'évolution du secteur de l'agriculture et de la transformation alimentaire et ses 120 000 travailleurs. Notre plan prévoit 45 millions, une action rapide afin de relever les défis liés à la commercialisation de nos produits et à la modernisation des usines.

Concernant le secteur minier, il y a un plan en deux temps. D'abord, on accélère la restauration des sites miniers abandonnés avec des investissements importants de 620 millions de dollars qui stimuleront les régions minières affectées actuellement par la baisse des prix des matières premières, tout en améliorant la qualité de l'environnement. Comme nous devons être prêts lorsque l'industrie mondiale sera relancée, nous prévoyons des interventions de plus de 450 millions par la Société du Plan Nord et le développement des infrastructures ferroportuaires de Sept-Îles.

Pour l'industrie maritime, l'action gouvernementale est en phase de déploiement. 16 zones industrialoportuaires situées dans 10 villes du Québec, dont Trois-Rivières, Bécancour, Port-Cartier et Saguenay, pour lesquelles une intervention de 300 millions a été confirmée le 3 mars 2016, ont été lancées. 10 millions seront ajoutés pour stimuler davantage l'économie maritime.

L'industrie touristique, quant à elle, doit tirer le plein potentiel de la baisse du dollar canadien. Afin de diversifier son offre, 35 millions seront notamment affectés à promouvoir le tourisme hivernal, le tourisme de nature et d'aventure et le tourisme culturel. Avec les sommes allouées à la mise en valeur du patrimoine de la SEPAQ et la route verte, notre plan se veut un effort global de 67 millions à l'industrie. 34 millions viendront également favoriser la culture et la création artistique.

En plus de ces secteurs clés, nous allons appuyer l'entrepreneuriat dans des secteurs généralement délaissés par les investisseurs traditionnels. Ainsi, nous appuierons les fonds locaux d'investissement, la création du fonds Femmessor Québec et de fonds d'amorçage.

Notre vision ne peut se traduire en réalité sans le talent des gens. Or, d'ici 2020, le Québec doit affronter de grands défis démographiques. Près de 1,4 million d'emplois seront à pourvoir sur le marché du travail, résultat d'une diminution de la population en âge de travailler. Afin de réduire la pression exercée par ce frein à la croissance économique, nous allons stimuler la participation au marché du travail par trois incitatifs fiscaux : la bonification de la prime au travail annuellement de 42 millions pour encourager les personnes vivant seules et les couples sans enfants à quitter l'aide financière de dernier recours pour le marché du travail; le bouclier fiscal, qui protège les Québécois avec des revenus de travail en hausse contre une baisse trop forte de la prime au travail et du crédit d'impôt remboursable pour frais de garde d'enfants, sera bonifié de 500 $ par conjoint; l'âge d'admissibilité au crédit d'impôt pour travailleur d'expérience, graduellement diminué de 65 à 63 ans au précédent budget, sera réduit à 62 ans. En complément, le marché du travail recevra une participation plus active des jeunes, des étudiants étrangers, dont nous favoriserons la rétention, de nouveaux arrivants qui pourront mieux s'intégrer au marché du travail comme le vise la nouvelle politique en matière d'immigration, de participation et d'inclusion notamment par une offre améliorée de services de francisation. C'est donc un total de 310 millions de dollars qui sera consacré à répondre aux aspirations des travailleurs et aux besoins des employeurs.

À travers ces transformations, nous allons accompagner les familles, les aînés, les personnes vulnérables et les populations autochtones par la réduction immédiate de la contribution santé et son abolition devancée au 31 décembre 2017 — 4,5 millions de contribuables québécois verront leur fardeau fiscal réduit, à terme, de 759 millions de dollars; par la réduction de moitié de la contribution additionnelle applicable aux tarifs de garde pour un deuxième enfant — près de 30 000 jeunes familles pourront économiser jusqu'à 1 000 $ par année; par la construction de 1 500 nouveaux logements sociaux, communautaires et abordables pour les ménages qui peinent à assurer... assumer, pardon, leurs frais d'habitation; par des initiatives en santé visant à accroître de 88 millions les sommes consacrées aux services aux personnes vulnérables; par un soutien accru aux centres d'amitié autochtones et l'accessibilité accrue du système de justice en milieux cri et inuit.

De plus, les transformations apportées à l'organisation du réseau de la santé suite à l'adoption du projet de loi n° 10 favoriseront un meilleur accès. En appui à ces transformations, la mise en place récente du Guichet d'accès à un médecin de famille viendra simplifier la vie des personnes qui sont encore à la recherche d'un médecin de famille. Cette solution s'inscrit donc en parfaite complémentarité avec nos efforts visant l'amélioration de l'accès aux soins de première ligne et de proximité.

La transparence et l'intégrité sont les fondations de notre action gouvernementale. En deux ans, une nouvelle culture en matière de transparence s'est installée : diffusion des agendas des membres du Conseil des ministres, renseignements relatifs à leurs rencontres avec des acteurs non gouvernementaux, divulgation de certaines dépenses de fonctionnement du gouvernement, partage des réponses aux demandes d'accès à l'information, appels d'intérêt public pour des candidats aux postes de dirigeants et de membres d'organismes publics nommés par l'Assemblée, abolition des allocations de transition des députés démissionnaires en cours de mandat, rapport préélectoral indépendant sur l'état des finances publiques.

Si des recommandations du rapport Charbonneau ont interpellé la classe politique, elles ont confirmé que les nombreux gestes posés au préalable avaient été utiles. On les rappelle rapidement : l'adoption du projet de loi n° 26 pour récupérer les sommes payées; l'intention de créer une autorité des marchés publics; le dépôt du projet de loi n° 83, qui propose de réformer le financement politique municipal en abaissant de 300 $ à 100 $ la contribution versée par électeur; consultations sur le projet de loi n° 87 pour encadrer la divulgation d'actes répréhensibles; et directives afin d'assurer la neutralité des comités de sélection dans le cadre de contrats publics de construction.

Le gouvernement est déterminé à mettre en oeuvre les recommandations du rapport. Le 24 mars, nous nous engagions à agir avec diligence sur ces questions, renforcer la gouvernance et l'éthique au sein des ordres professionnels, créer une autorité des marchés publics, mener des consultations auprès des partis d'opposition en vue de rapidement donner suite aux recommandations sur le financement des partis politiques, confier à un comité d'experts indépendants l'examen annuel de la programmation ministérielle en matière de transport routier. D'ailleurs, plus de 15 recommandations ont déjà été mises en oeuvre ou sont en voie de l'être.

La maison a été remise en ordre, et nos finances publiques sont sous contrôle. Le contexte est favorable. Nous nous sommes donné une marge de manoeuvre retrouvée pour réinvestir dans les secteurs qui nous tiennent à coeur. Le Québec est en marche, prêt à assumer son développement, prêt à profiter des occasions à saisir dans une économie en transition. Pour cela, nous déployons 3,6 milliards de dollars d'ici cinq ans en appui additionnel à l'économie, un support à la réalisation de près de 13 milliards d'investissement, la création de 25 000 emplois dans tous les secteurs de l'économie.

Depuis deux ans, ce sont des investissements, dans l'économie, de près de 35 milliards qu'entraîneront l'ensemble des mesures du plan économique du Québec. On veut développer notre talent et notre expertise, innover, exporter notre savoir-faire, rester compétitifs face à nos concurrents en tirant profit de la transition carbone, attirer les investissements privés. Ensemble, soyons ambitieux et relevons les défis de demain pour se redonner la liberté de faire nos choix, miser sur le talent des Québécois, faire du Québec un Québec moderne et prospère. Merci, M. le Président.

• (11 h 50) •

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. J'invite maintenant le chef de l'opposition officielle à faire ses remarques préliminaires.

M. Pierre Karl Péladeau

M. Péladeau : Merci, M. le Président. C'est effectivement à mon tour de réitérer, comme l'a fait le premier ministre, l'importance de l'étude des crédits pour le ministère du comité exécutif. À mon tour également de saluer la présence de ses proches collaborateurs, également des miens, mes collègues Bernard Drainville et Nicolas Marceau, ainsi que la seconde opposition, le chef de la seconde opposition.

M. le Président, le chef du Parti libéral du Québec s'était fait élire, donc, en 2014 sur sa volonté de s'engager solidement et fermement pour le développement économique et il avait certainement raison, puisque la conjoncture économique dans un univers nord-américain était plutôt favorable. Nous avons constaté que la chute du dollar canadien de plus de 30 % permettait à notre industrie manufacturière de diminuer ses coûts d'exploitation, et en même temps qui était accompagnée d'une baisse du prix du baril de pétrole qui, là aussi, faisait en sorte que, les coûts d'exploitation, donc, nos entreprises manufacturières étaient mieux positionnées et créait aussi un bassin d'épargne pour les consommateurs.

Durant les deux dernières années, même les trois dernières années, nous avons vu qu'effectivement, aux États-Unis, ces considérations ont été extrêmement favorables, puisqu'il s'est créé 7 millions d'emplois. Et l'année dernière, sous, donc, l'impulsion de la politique économique du président Obama, il s'est créé 3 millions d'emplois aux États-Unis.

En Ontario aussi, qui constitue une économie sensiblement similaire à la nôtre, puisque son secteur manufacturier est développé et il existe aussi, du côté des ressources naturelles, de grandes entreprises, bien, plutôt que de plonger son économie dans le régime de l'austérité, la collègue du premier ministre, Mme Wynne, a décidé d'investir, et les résultats sont là pour le prouver, puisqu'il s'est créé 85 000 emplois en Ontario. Alors, la démonstration, d'une certaine façon, est faite que, lorsque vous plongez avec votre action législative, les moyens législatifs que vous avez pour mettre en oeuvre au niveau économique... bien, vous avez le résultat, essentiellement, qui est celui de la performance économique du gouvernement du premier ministre depuis les deux dernières années. Elle a décidé, elle, d'investir, et les résultats sont là pour le prouver.

Alors, le résultat des courses pour le gouvernement du premier ministre, c'est qu'il ne s'est créé aucun emploi depuis les 12 derniers mois. C'est très inquiétant, M. le Président, très inquiétant. Et, la tendance qui est encore plus inquiétante, j'en conviendrai, qu'il s'agit d'un mois, mais, durant le mois de mars dernier... les chiffres qui sont sortis vendredi dernier ont démontré que le Québec a perdu 22 500 emplois à temps plein. Alors, est-ce que c'est une nouvelle direction dans laquelle se dirige l'économie, malgré les mesures qui sont proposées par le premier ministre?

On constate également que, dans le dernier budget, les prévisions de son ministre des Finances ne sont pas particulièrement enthousiasmantes. Et, lorsque nous comparons, là aussi, les performances économiques du gouvernement, les performances économiques du Québec, nous constatons que la croissance du PIB s'est limitée à 1 % au Québec et qu'elle a été de 2,5 % en Ontario et de 2,8 % en Colombie-Britannique. J'en conviens également, que la Colombie-Britannique a une économie différente de celle du Québec, mais celle de l'Ontario encore est historiquement toujours calquée sur... Alors, les performances sont là pour le prouver, les comparatifs. Parce que je comprends que le premier ministre blâme l'Inde, la Chine, le prix des métaux, le prix du fer, mais, si c'était le cas, pourquoi alors, à ce moment-là, les autres économies de notre grande région nord-américaine ne seraient pas, donc, au même rendez-vous?

Nous constatons également que les prévisions sont en baisse, elles ont été en baisse systématiquement. Son ministre des Finances a refait à tous les six mois une mise à jour qui nous a amenés à conclure que nous allons dans la direction, justement, de la perte d'emploi. Et ce n'est pas le ministre des Finances qui est seul à conclure ces éléments-là, ce sont également les économistes, et les économistes que ce soit des grandes institutions financières ou des universitaires.

Alors, tous les gestes qui ont été posés, le fait d'avoir plongé le Québec dans l'austérité, le fait d'avoir diminué de façon significative les crédits d'impôt, bien, nous ont amené les effets néfastes auxquels le Québec fait face depuis maintenant les deux dernières années.

Alors, tout ça n'est pas arrivé comme ça par magie, là, de la cuisse de Jupiter. Il faut se souvenir que le premier ministre, justement, dans cette perspective de l'austérité, dans cette obsession du déficit zéro, d'ailleurs qui est de moins en moins retenue par ceux et celles qui ont des responsabilités à assumer pour relancer l'économie, bien, il a aboli les CLD, des outils originaux qui avaient fait la preuve de leur efficacité. Combien sont nombreuses les entreprises qui ont été créées depuis les 20 dernières années? Vous savez, M. le Président, le Québec a pris ces outils en main relativement récemment, si on compare avec les grands autres pays, et les CLD nous ont permis, justement, de faire la promotion de nos entreprises, d'accompagner nos entrepreneurs, de stimuler la création de nos PME. Et le Québec inc., dont les Québécois sont fiers, bien, ça fait partie de cet engagement, et cet engagement, il a également passé par l'État. Alors, ça fait 18 mois maintenant que les CLD ont été abolis, nous avons réduit de façon significative les budgets qui étaient alloués à la relance de l'économie et de nos entreprises, et le résultat des courses, bien, c'est effectivement ce que nous constatons depuis les derniers mois, une baisse significative de l'emploi. Il ne s'est créé aucun emploi depuis les 12 derniers mois, et nous en avons perdu 22 500 au mois de mars.

Un autre élément qui est extrêmement préoccupant, M. le Président, c'est l'indifférence totale — l'indifférence totale — du premier ministre concernant la perte de nos fleurons québécois. Alors qu'il aurait dû s'objecter, alors qu'il aurait dû éventuellement aussi considérer que c'était un geste qui n'allait pas dans le sens de notre développement économique, bien, il a dit que c'était une bonne nouvelle que RONA soit achetée par une entreprise américaine et il n'a rien dit en ce qui concerne le Cirque du Soleil et, encore tout récemment, en ce qui concerne St-Hubert, là aussi un fleuron du Québec. Alors que nous avons des outils financiers depuis les 30 dernières années qui devraient être mis à contribution pour faire en sorte, avec des tours de table, d'arriver à maintenir nos sièges sociaux, nos entreprises au Québec, parce que nous connaissons très bien toutes les retombées économiques qui y sont associées, le premier ministre s'est croisé les bras et il a utilisé des formules en boutade à l'effet que nous souhaitions, nous, l'opposition, créer un mur autour du Québec. Bien, voyons donc! Il n'y a personne qui va acheter cet argument.

Alors, nous sommes obligés de conclure qu'aux 250 000 emplois que le chef du Parti libéral avait promis aux Québécois et aux Québécoises durant la campagne électorale, bien, c'est terminé. C'est terminé aussi, le fameux trio économique, il a été démantelé. Et le soi-disant effet libéral, que personne n'a cru, sinon cette propagande du parti, bien, il s'est complètement démasqué. Alors, aux mêmes causes les mêmes effets. Si nous n'investissons pas en économie, nous allons continuer à perdre des emplois. Nous souhaitons que le premier ministre va se ressaisir, va poser des gestes pour que nous puissions nous engager dans notre développement économique.

• (12 heures) •

Il semble qu'il s'est lui-même un petit peu réveillé, parce que la semaine dernière, plutôt que de considérer que l'ancienne économie devait être... Parce que, dans le fond, ça se résume à ça, sa politique, le Plan Nord, Plan Nord dans le même décor que son prédécesseur, et la Stratégie maritime, qui, on constate, pour la grande, majeure partie des situations... ce sont des infrastructures fédérales, et le fédéral les abandonne, ces infrastructures. Allez voir, à Rimouski, le quai, qu'est-ce qu'il en est. Il est abandonné. Alors, ce n'est pas de cette stratégie dont nous avons besoin, bien qu'il y ait des centaines de milliers de personnes qui travaillent encore dans le domaine de l'ancienne économie. Ce que nous souhaitons, pour ressaisir, solidifier notre industrie, notre industrie minière, qui est très importante, bien, ça nous prend une véritable stratégie dans le domaine de la transformation, transformation secondaire, transformation tertiaire. Et qu'est-ce qu'a fait le premier ministre? Bien, il a coupé les crédits d'impôt en ce qui concerne la vallée de l'aluminium. Bien, ce n'est certainement pas de cette façon-là que nous allons y arriver.

Donc, je constate, M. le Président, qu'il me reste quelques instants. Alors là, il vient de se réveiller, le premier ministre. Il considère que dorénavant nous devons nous engager dans la nouvelle économie. Mais qu'est-ce qu'il a fait depuis les deux dernières années? C'est comme s'il venait de se rendre compte que l'Internet existait. C'est comme s'il venait de se rendre compte que le commerce électronique existait. Mais ça existe depuis 20 ans, M. le Président. Alors, est-ce qu'il a pris des mesures adéquates pour faire en sorte de s'engager directement, solidement? Bien non, il coupe les crédits d'impôt et il crée de l'incertitude systématiquement en les rétablissant. Alors, oui, M. le premier ministre, le commerce électronique, ça existe, oui, il faut prendre des mesures énergiques pour y arriver.

Et là, M. le Président, on s'est fait déposer ce matin en Chambre, là, un soi-disant plan stratégique, là, que les Québécois et les Québécoises attendent depuis deux ans. Il est tellement bon que les trois commanditaires n'ont même pas eu le temps de signer le document. Alors, est-ce que c'est à ça que se résume la politique économique du gouvernement du Parti libéral du Québec? Si c'est ça, là, regardez en quoi ça consiste, une véritable politique, c'est celle du gouvernement précédent, celle de Mme Marois, alors une politique à l'innovation, une politique en électrification des transports et une véritable politique du développement de nos entreprises. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le chef de l'opposition officielle. Je veux juste valider. M. le chef de la deuxième opposition nous a indiqué qu'il ne fera pas de remarques préliminaires et que son temps lui sera imparti cet après-midi lors des échanges avec M. le premier ministre.

Discussion générale

Nous allons maintenant reconnaître une première intervention du chef de l'opposition officielle.

M. Péladeau : Merci, M. le Président. Donc, encore une fois, j'ose espérer que le premier ministre va avoir l'occasion de nous détailler, là — ça tient sur 22 pages — sa politique.

Mais il y a un élément sur lequel j'aimerais revenir, parce que, pourtant, le premier ministre a quitté sa profession médicale et il a eu l'occasion, donc, de siéger sur un certain nombre de conseils d'administration et il se rend compte de l'importance de nos entreprises. Et il se rend bien compte, j'ose espérer, qu'une entreprise, ça a un périmètre d'action important. Oui, certes, évidemment la direction fait en sorte d'orienter la stratégie de l'entreprise. Mais une entreprise et son conseil d'administration, c'est bien plus que ça, et, lorsqu'un siège social existe — et les exemples sont tellement nombreux pour en témoigner — bien, nous reconnaissons l'effet direct que ça amène au niveau économique. La première chose, ce sont les rémunérations importantes. Mon collègue le chef de la seconde opposition fait souvent référence au fait que ce que nous souhaitons, au Québec, depuis les 20, 30 dernières années, ce sont des grosses rémunérations. Nous en avons besoin.

L'État a toujours procuré des missions aux Québécois et aux Québécoises, la santé et l'éducation. Pour les financer, bien, ça prend des sources de revenus, et une des sources de revenus importantes, évidemment c'est le revenu des particuliers. Alors, ce que nous souhaitons, ce sont des membres de l'équipe de direction d'une entreprise qui vont justement être adéquatement rémunérés pour payer des impôts. Et, si nous ne sommes pas en mesure de comprendre une donnée aussi essentielle et fondamentale, bien, nous ne comprenons pas le monde de l'entreprise. Alors, ça, c'est extrêmement important. Et il ne se rend pas compte que, lorsqu'une entreprise est vendue à l'étranger, bien, son siège social déménage avec toutes les fonctions de direction. Les fonctions, justement, qui sont associées à des grosses rémunérations disparaissent. Le P.D.G., il ne sera pas à Montréal, il va être ailleurs, alors. C'est sans compter toutes les retombées économiques sur les professionnels qui entourent l'existence d'un siège social, que ce soient les comptables, les avocats, même les banques. Nous avons des institutions financières que nous avons bâties depuis les 20, 30 dernières années. Ce que nous souhaitons, c'est leur procurer, justement, des perspectives d'affaires, et, que ce soit le Mouvement Desjardins ou la Banque Nationale, ils ont été très présents dans le domaine de nos entreprises. Là aussi, ça vient affaiblir de façon significative notre capacité de pouvoir procurer des services à nos entreprises.

Un autre volet extrêmement important, c'est toute l'action philanthropique et caritative que la présence d'un siège social permet. Les CGI, les Bombardier, les Alimentation Couche-Tard, bien, ce sont également aussi des partenaires sociaux qui participent, que ce soit au niveau culturel ou au niveau des hôpitaux. J'ai eu l'occasion de participer fréquemment à des campagnes de financement avec Alain Bouchard, mais ça, c'est extrêmement important. Le jour où le siège social est parti... Et d'ailleurs les organismes communautaires qui justement, antérieurement, étaient financés par le Cirque du Soleil dans l'est de Montréal n'ont pas pris deux mois pour dire qu'effectivement ils s'étaient fait couper les rênes. Alors, c'est important de les garder.

Mais là le premier ministre assiste comme un spectateur à la dépossession tranquille de notre économie. Nous étions fiers des entreprises. Et une entreprise, ça se démarre comme une PME. Alimentation Couche-Tard, je viens d'en parler. Que penser de CGI, partie dans un garage à Québec, aujourd'hui une entreprise de 80 000? Que penser de Lavalin, pour lequel nous avons tristement perdu un de ses fondateurs, Bernard Lamarre, là aussi? Alors, quelle est la prochaine entreprise? Alors que nous avons déposé une politique de maintien et de protection des sièges sociaux, alors que le premier ministre lui-même, chef du Parti libéral du Québec, durant la campagne électorale, avait mentionné qu'il prendrait des fonds à l'intérieur du Fonds des générations pour mettre en place une politique de protection et de maintien des sièges sociaux, où est cette politique? Nous l'attendons toujours. Et cette politique tiendra-t-elle sur trois pages comme, malheureusement, le plan stratégique d'Investissement Québec? Nous aurons espéré... nous osons espérer, pardon, que le premier ministre aura un peu plus d'audace et un peu plus d'ambition.

Alors, ma question au premier ministre est simple : Quand procurera-t-il aux Québécois et aux Québécoises une véritable politique de protection et du maintien de nos sièges sociaux tel qu'il l'avait promis durant la campagne électorale?

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Bien, merci, M. le Président. Évidemment, c'est la première fois que j'ai le plaisir de faire l'examen des crédits avec mon collègue le député de Saint-Jérôme et chef de l'opposition officielle, que je salue. Je vais, bien sûr, traiter cette question, on l'a fait à l'Assemblée à plusieurs reprises, la question des sièges sociaux, des acquisitions, mais je voudrais quand même relever certains éléments de sa présentation initiale en lui rappelant quand même qu'il s'est créé 48 600 emplois au Québec en 2015, ce qui est la deuxième meilleure performance au Canada — il ne s'agit pas non plus de s'autoflageller lorsque ce n'est pas requis — en lui rappelant également que les mêmes chiffres de Statistique Canada — et j'aimerais qu'on ait une conversation, dans ces crédits, sur cette question — montrent également une chute de 17 000 personnes de la population active du Québec, ce qui est un défi considérable pour notre économie au cours des prochaines années.

Il parle de l'austérité. Il n'y a pas eu d'austérité au Québec, M. le Président, il y a eu une réduction de la croissance des budgets gouvernementaux, qui n'ont jamais baissé par rapport à ceux de l'année précédente. C'est une différence fondamentale. Et, lorsqu'il parle du gouvernement de l'Ontario, bien, en tout respect, il fait erreur : le budget du gouvernement de l'Ontario était plus sévère pour les programmes, notamment pour l'éducation, que celui de notre gouvernement. Et nous avons également, comme il le sait très bien, maintenu les investissements en infrastructures. Alors, je crois qu'il faudrait peut-être revenir et remettre les choses en perspective.

Quant à l'équilibre budgétaire, il a l'air d'en faire un problème aujourd'hui, mais son parti, à l'époque, d'ailleurs son voisin de gauche, s'était engagé deux fois à déposer des budgets équilibrés. On sait que ça ne s'est pas produit. Et il y a eu un dépôt de budget, avant l'élection en 2014, sans crédits, et on a constaté l'ampleur de l'impasse budgétaire qu'il fallait corriger. Alors, je vais répéter ce que j'ai dit à plusieurs reprises : Les trois partis principaux étaient d'accord pour l'équilibre budgétaire en 2015‑2016, y compris le Parti québécois, y compris la Coalition avenir Québec. C'est très facile de dire, maintenant qu'on l'a atteint, que ce n'est pas une bonne chose, mais il faudrait expliquer comment nous, on l'aurait fait.

• (12 h 10) •

Je veux également saluer le dépôt des éléments dont il a parlé au sujet d'Investissement Québec. Il va constater, lorsqu'il va les étudier à tête reposée, qu'il s'agit de changements importants dans la culture, la façon de faire d'Investissement Québec, qui, je crois, va être beaucoup plus présente auprès de nos entreprises, notamment en région, et auprès également des travailleurs qui dépendent de ces entreprises pour leurs emplois.

Il a fait mention de la Stratégie maritime et du Plan Nord. Je pense qu'il fallait le faire, et c'est une bonne chose que ce soit en place. Par exemple, nous annonçons cette année plus de 600 millions de dollars de budget pour la réhabilitation des sites miniers, ce qui, je crois, il va convenir avec nous, est une excellente initiative, compte tenu de la baisse des cours des métaux. Ça va faire travailler du monde, beaucoup de monde, notamment sur la Côte-Nord, et également le développement des infrastructures routières, et autres. Et on voit qu'il y a de la reprise dans certains métaux. Soyons réservés, on va voir ce que l'avenir nous apportera. Mais je voudrais quand même lui rappeler — il parle de transformation — l'annonce récente à Shawinigan, qui, en passant, est un cas type très intéressant, Shawinigan, l'annonce d'un investissement de 40 millions pour la première transformation du lithium. Il me semble qu'il y a là une excellente nouvelle. En passant, le lithium, c'est un nouveau métal précieux, ça rentre dans la nouvelle économie, notamment l'économie digitale.

La Stratégie maritime, elle se déploie. Il a parlé des zones industrialoportuaires indirectement. En fait, c'est 300 millions qui y seront consacrés, au développement, 200 millions en infrastructures portuaires, un demi-milliard de dollars. Et je suis heureux de dire que, jusqu'à maintenant — d'ailleurs, il y avait un communiqué hier à cet effet — il y a eu 45 projets avec environ 90 millions d'investissement gouvernemental qui ont généré près de 700 millions d'investissement complet, ou total, depuis le début de cette stratégie. Il y a des plans qui ont été déposés, il le sait très bien, outre le Plan Nord, la Stratégie maritime et la politique énergétique, qu'il a eu l'élégance de saluer, parce qu'effectivement c'est une politique qui est de très grande qualité. Il y a eu une politique de l'aluminium qui a été déposée, une politique d'électrification des transports. Je rappellerais que le premier plan d'électrification date de 2011, et, je pense, c'est toujours important de le rappeler, et que le plan actuel, en continuité avec ce qu'avait fait le gouvernement précédent, du Parti québécois, nous amène vers une diffusion beaucoup plus large des véhicules électriques ou à zéro émission sur nos routes.

Maintenant, on a parlé à plusieurs reprises de cette question des sièges sociaux et des acquisitions. Je vais quand même rappeler à tout le monde que la majorité des échanges se font dans le sens opposé à celui que décrit notre collègue, puisque, si on regarde les données réelles, concrètes, les compagnies québécoises ont procédé à l'achat de 258 compagnies hors Québec, alors que 87 entreprises québécoises ont été achetées par des intérêts hors Québec. Alors, ce n'est jamais une bonne nouvelle, on est toujours tristes de voir ces transactions se faire, mais on doit être également fiers et heureux de voir que les transactions vont dans l'autre direction et également que, dans ces cas-là, chacune de ces entreprises qui ont été acquises par des entrepreneurs québécois, comme Couche-Tard d'ailleurs, a probablement la même réaction que lui : Bien, malheureusement, le siège social, il va être au Québec. Il ne sera plus en Norvège, il va être au Québec avec Couche-Tard. Alors, on le fait beaucoup plus souvent dans le sens d'acquisitions hors Québec que dans le sens inverse. Je pense que c'est très, très, très important de le dire. Sur les 258 transactions faites du Québec vers l'extérieur, 180 ont divulgué la valeur de leur transaction. C'est une moyenne de 447 millions par transaction, une valeur médiane de 102 millions. Dans l'autre sens, vers chez nous, 54 sur 87 l'ont divulguée, il s'agit d'une moyenne de 392 millions par transaction, une valeur médiane de 85 millions.

Mais je veux parler plus spécifiquement de deux éléments qu'il a touchés lors de sa présentation. D'abord, effectivement, il y avait eu un rapport — si je me souviens bien, le nom du rapport était le rapport Séguin — sur des mesures suggérées sur la protection des sièges sociaux. L'examen du rapport nous amène à être excessivement prudents, parce que, oui, on veut prendre des mesures et préserver notamment les sièges sociaux de nos fleurons, ceux qui sont véritablement des fleurons. Il faut penser aux travailleurs également, pas uniquement aux membres du conseil d'administration ou aux hauts salariés de l'entreprise. Mais il faut le faire de façon à ne pas créer une dévalorisation des entreprises québécoises.

Il y a certaines de ces mesures-là qui risquent de créer la perception ailleurs que les entreprises québécoises ne peuvent être acquises et que donc elles vont perdre de la valeur.

Une voix : ...

M. Couillard : C'est quoi, le problème?

Une voix : ...

M. Bonnardel : Pour notre gouverne personnelle, est-ce qu'on peut obtenir les documents du premier ministre qui citent les acquisitions d'entreprises?

M. Couillard : C'est des notes personnelles, M. le Président. Alors, il sait très bien que c'est comme ça que ça se passe. Il pourra les obtenir avec un minimum de recherche. On lui indiquera où chercher. Alors, je voulais continuer. On m'a interrompu, malheureusement, M. le Président.

Alors donc, je parlais d'abord de la question du rapport Séguin. Il y a quelques mesures intéressantes, mais il faut être prudents, il ne faut pas adopter des mesures qui créeraient l'impression que les entreprises du Québec deviennent non achetables, on ne peut plus faire de transactions au Québec. Notamment, nos entreprises québécoises inscrites en bourse risquent d'être les premières à souffrir de cet élément-là. Donc, on va le faire de façon très prudente.

Mais, ceci dit, je suis toujours heureux, moi, d'échanger avec les collègues de l'opposition sur des mesures. D'ailleurs, ma collègue la ministre de l'Économie va présenter les mesures suggérées pour la protection des sièges sociaux de nos fleurons, comme il l'a dit. Et toute entreprise acquise, en passant, n'est pas nécessairement un fleuron. Un fleuron, c'est une entreprise qui est spécifique, à valeur ajoutée, qui génère des emplois de grande qualité. Parfois, c'est le cas, parfois c'est moins le cas. Alors, il y a aura là moyen, je crois, de poursuivre ces échanges-là.

Pour ce qui est du Fonds des générations, je me souviens, avec mon collègue le chef de la deuxième l'opposition, l'an dernier, avoir eu un échange là-dessus. Ce qu'on a effectivement constaté après réflexion, c'est que, si on prend une partie du Fonds des générations et qu'on la dédie à de l'investissement à plus haut risque, le Fonds des générations, à la lueur de l'évaluation qu'en font notamment les agences de crédit, perd de sa valeur comme garantie de la dette. Donc, on risque d'avoir une perte d'efficacité. Et la principale efficacité du Fonds des générations, c'est de diminuer le poids de la dette par rapport au PIB, et il faut être excessivement prudents avec la comptabilisation et l'affectation de ces sources-là et s'assurer qu'on ne les soumet pas à un risque différent du profil de risque habituel des investissements gouvernementaux. Alors, je pense, également, ça, c'est une question importante, mais on est toujours prêts à des échanges sur cette question, on ne prétend pas avoir le monopole des bonnes idées et on sera heureux d'avoir des suggestions.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. Pour la deuxième partie de nos échanges, M. le chef de l'opposition, en vous indiquant qu'il vous reste cinq minutes.

M. Péladeau : Merci, M. le Président. Bien, écoutez, je vais exhiber, là... et peut-être que le premier ministre se souvient de ses promesses : 13 mars 2014 — Protection des sièges sociaux  Agir rapidement et simplement pour protéger nos entreprises et nos emplois. Là, ce que vient de dire le premier ministre, dans le fond, c'est que, sa promesse électorale, il vient de constater... mais je ne suis pas nécessairement d'accord avec qu'est-ce qu'il dit, là, mais il vient de constater que, dans le fond, elle ne tenait sur rien du tout, parce que le Fonds des générations, avec l'argumentation qu'il fait valoir, bien, ne serait plus dorénavant l'outil nécessaire pour justement rencontrer sa propre promesse électorale. C'est un aveu, un aveu d'échec, là, que le premier ministre vient de nous faire.

Et, par ailleurs, moi, je pense que c'est important effectivement d'utiliser... Parce que, la façon dont il est en train de nous dire, le premier ministre, est-ce qu'investir au Québec, c'est antinomique avec obtenir du rendement? Bien sûr que non. Mais c'est ce qu'il est en train de nous dire, parce qu'on poserait des gestes qui augmenteraient les risques. Bien, moi, je peux vous dire quelque chose, M. le premier ministre, j'ai rencontré, durant de très nombreuses années, des représentants de la Caisse de dépôt, des représentants qui gèrent, justement, le Fonds des générations, et d'aucune façon on ne doit conclure qu'investir au Québec, c'est investir et mettre en risque notre argent. C'est dévaloriser la capacité d'avoir du rendement. Au contraire, parmi les meilleurs investissements que la Caisse de dépôt a faits, c'est justement en investissant dans nos entreprises québécoises. Alors, cette appréciation, là, qui est la sienne, m'apparaît tout à fait inappropriée.

Alors, ça va très vite, j'en conviens, M. le Président, mais j'aimerais aussi que le premier ministre puisse nous parler de sa politique d'électrification des transports. Il a fait un gros spectacle, là, il nous a dit en revenant de Paris qu'il allait éventuellement réduire les émissions de gaz à effet de serre de 37,5 %. Nous en émettons 80 millions de mégatonnes, M. le Président. Comment le premier ministre va véritablement s'y prendre? Parce que ce n'est pas dans la politique énergétique qui a été déposée la semaine dernière qu'il y a des mesures concrètes. Ce n'est que du verbiage, que de beaux principes, des voeux pieux. Ce sont des véritables et mesures concrètes que les Québécois et les Québécoises veulent avoir. Alors, c'est la même chose que ce document-là, il n'y a rien là-dedans. Des mesures concrètes, vous en aviez une dans votre campagne électorale. Vous n'avez même pas été capable de la réaliser.

Est-ce que vos pouvez aujourd'hui penser qu'en politique énergétique et en politique économique vous allez faire autre chose que de nous balancer des documents de 26 pages dans lesquels nous ne retrouverons rien du tout?

Le Président (M. Ouellette) : C'est votre question, M. le premier ministre, pour les 2 min 25 s qui demeurent.

M. Couillard : Bien, très rapidement. C'est de bonne guerre, de l'opposition, d'utiliser ce genre de langage, mais, malheureusement, il ne choisit pas les bons exemples, parce que je ne me souviens pas d'une politique gouvernementale qui ait été autant saluée par les intervenants de tous les secteurs que la politique énergétique lancée par mon collègue il y a quelques jours. Autant les gens du milieu environnemental que du milieu des affaires, que du milieu économique l'ont saluée comme innovante, constructive et fondamentale pour l'avenir énergétique du Québec. Bien sûr, il faut diminuer nos émissions de gaz à effet de serre, notamment dans le domaine des transports, notamment par le plan d'électrification des transports.

Je voudrais juste vous souligner, en passant — je l'ai dit tantôt, mais je voudrais qu'ils prennent l'habitude de le dire : quand on écoute nos collègues de l'opposition officielle, on a l'impression que c'est eux qui ont inventé l'électrification des transports, alors que le premier plan a été déposé par Jean Charest en 2011. Alors, il faut quand même le reconnaître, il faut le répéter, il faut être justes. Moi, je suis juste, je vous dis qu'on continue le travail de Mme Marois. Alors, ce n'est quand même pas très aimable de leur part de ne pas reconnaître ce que les prédécesseurs ont fait.

Maintenant, on va être encore plus ambitieux, on va présenter une loi pour les véhicules zéro émission, on a également de nombreuses initiatives dans la politique énergétique, et, de partout, M. le Président, on salue le courage et la vision de ces politiques.

Le Président (M. Ouellette) : Il vous reste une minute, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Péladeau : Écoutez, sur...

Le Président (M. Ouellette) : Je peux la reporter sur votre prochain bloc, si vous voulez.

M. Péladeau : Pardon?

• (12 h 20) •

Le Président (M. Ouellette) : Je peux la reporter sur votre prochain bloc, si vous voulez.

M. Péladeau : Oui, O.K., parce qu'une minute, là...

Le Président (M. Ouellette) : Bien, commencez une idée pour pouvoir avoir une réponse.

M. Péladeau : Bien, je préférerais la mettre dans mon prochain bloc, s'il vous plaît.

Le Président (M. Ouellette) : On va la reporter sur votre prochain bloc. M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, ce que vous allez reporter, finalement, ça ne sera pas une minute, mais ça va être 30 secondes, avec la discussion que vous venez d'avoir avec le chef de l'opposition. Alors, sur un ton un peu plus serein...

Une voix : ...

M. Tanguay : Puis j'entends mon collègue de Rousseau, qu'il ne se préoccupe pas... J'aurai l'occasion de le citer, notre porte-parole de l'opposition officielle en matière de finances, entre autres, parce que je veux parler, M. le Président, de saine gestion des finances publiques.

Puis j'ai entendu la voix de mon collègue de Rousseau. J'aime ça quand il vient m'interpeller comme ça. Puis je lui rappellerai ce qu'il avait prévu en septembre 2013, et ce qu'il avait constaté en novembre 2013, et ce qui l'avait amené à dire, M. le Président, et je le cite, notre collègue de Rousseau aujourd'hui, qui a été identifié par le chef de l'opposition officielle comme étant le porte-parole de l'opposition officielle en matière de finances publiques. Il disait, en novembre 2013 : «C'est vrai que, cette fois-ci, on n'a pas été bons. C'est vrai que, cette fois-ci, on s'est trompé beaucoup.» Fin de la citation. Pourquoi il disait ça en novembre 2013? Parce qu'en septembre il disait : C'était déficit zéro. Puis, en novembre 2013, deux mois et demi après, ce n'était pas le déficit zéro, M. le Président, c'était 2,5 milliards. Alors, 2,5 milliards, M. le Président, sur deux mois et demi, ça a fait quoi après l'élection de 2014? Ça a fait un déficit de 7 274 000 000 $. Quand on se trompe de 2,5 milliards sur trois mois... Et je le sais, que les collègues de l'opposition officielle vont dire : Bien, non, ce n'est pas ça, c'est soufflé, c'est gonflé. Les gens à la maison comprennent. Quand on se trompe de 2,5 milliards sur trois mois, on peut se tromper, effectivement, sur une période de 18 mois qui a été la période de gouvernement du Parti québécois, de 7 274 000 000 $. Donc, ça, c'est l'héritage du Parti québécois, un déficit avec lequel, évidemment, on devait travailler.

Lors de l'élection, il avait été mis de l'avant, et c'est chose faite aujourd'hui, M. le Président, que nous allions retourner à l'équilibre budgétaire. Et, quand on parle de l'importance de retourner à l'équilibre budgétaire, M. le Président, ce sont des sommes d'argent que nous pouvons consacrer, lorsqu'on ne les met pas à un déficit accumulé sur une dette... c'est des sommes d'argent que l'on peut consacrer dans nos services. C'est une chose. Deuxième des choses, c'est un taux d'intérêt, lorsque l'on n'accumule pas les déficits, M. le Président, qui va être meilleur, on va payer moins cher d'intérêt. Ce qui fait en sorte que, le collègue de Rousseau, porte-parole de l'opposition officielle en matière de finances publiques, qui était ministre des Finances à l'époque, après sa déclaration de novembre 2013, l'agence de notation Fitch avait ainsi revu la perspective de la cote de crédit du Québec à la baisse : de stable à négative. Élections 2014, héritage du Parti québécois : on s'est beaucoup trompé, on n'a pas été bons, bien, c'est 7 274 000 000 $.

M. le Président, première chose, premier élément que je veux souligner qui a été mis de l'avant par notre gouvernement afin d'éviter de revivre de tels scénarios, où un gouvernement dissimule des dépenses avant les élections, parce qu'il y avait eu dépôt d'un budget, mais un budget sans crédits... Les crédits, c'est ce qu'on fait là, ce n'est pas juste la colonne des revenus, c'est la colonne des dépenses aussi. Puis, les gens à la maison, imaginez-vous donc que votre gouvernement, notre gouvernement, qui était le gouvernement du Parti québécois à l'époque, jusqu'en 2014 — heureusement, ça a changé — avait déposé un budget : revenus, mais pas de dépense. Les dépenses, on les a sues, elles excédaient les revenus de 7,2 milliards. Alors, afin d'éviter cela, la Loi sur le ministère des Finances fait en sorte que le ministre des Finances va préparer et publiera un rapport préélectoral de la situation financière du gouvernement, et la publication se fera en août 2018. Également, au Vérificateur général du Québec sera confiée la responsabilité d'analyser la plausibilité de ces prévisions. Alors ça, déjà là, on vient de régler un élément négatif très majeur, qui était de ne pas avoir les crédits, un héritage du Parti québécois. On vient de régler cet élément négatif là, qui était l'héritage du Parti québécois.

Maintenant, 7,2 milliards, M. le Président, c'est une somme, évidemment, très, très substantielle. Le gouvernement a fait en sorte, par la saine gestion des finances publiques — puis j'aimerais entendre notre premier ministre à cet effet — fait en sorte... Et cette saine gestion des finances publiques, M. le Président, ça participe d'une valeur libérale qui est l'équité intergénérationnelle, faire en sorte que l'on puisse s'assurer que les générations qui vont nous suivre, bien, n'auront pas la facture, ne termineront pas avec la facture et pourront avoir les moyens de leurs ambitions. Bien, ça fait en sorte que ça prenait un gouvernement libéral dès 2014 pour faire en sorte que nous puissions permettre cette équité intergénérationnelle et s'assurer que les générations qui vont nous suivre auront les moyens de leurs ambitions.

84 % de l'effort, M. le Président — ça, c'est important — 84 % de l'effort pour annuler ce déficit-là a été fait dans le contrôle des dépenses du gouvernement. Je vous donne quelques exemples : modifications à l'organisation et la gouvernance du réseau de la santé, étalement de la rémunération des médecins, contrôle de la rémunération par le gel global des effectifs, limiter les facteurs liés aux dépenses de rémunération et suspension des bonis au personnel de direction et d'encadrement. Ce sont là quelques mesures qui ont fait en sorte qu'aujourd'hui le retour à l'équilibre budgétaire pour un deuxième exercice financier consécutif... chose qu'on n'avait pas vue, si ma mémoire est fidèle, depuis 23 ans, M. le Président. Ce n'est pas peu dire. Puis on ne partait pas de 2,5 millions : le trois mois, mauvaises prévisions, pas de rapport des dépenses. On s'est beaucoup trompé, c'est la voix de l'opposition...

Une voix : ...

M. Tanguay : 2,5 milliards, vous avez raison. C'est la voix aujourd'hui de l'opposition officielle. Bien, quand on dit ça, M. le Président, on peut se questionner quant à la crédibilité.

Alors, M. le Président, j'aimerais entendre le premier ministre sur les pistes de réflexion et faire en sorte que l'on doit, évidemment, dans ce contexte-là, retour à l'équilibre budgétaire, non seulement garantir la pérennité des services publics, mais on veut maintenir des services de qualité aux citoyens, investir dans nos infrastructures, assurer un climat économique propice à la prospérité et soutenir les plus démunis de notre société, toujours en appliquant une valeur aussi qui est toute libérale : il faut d'abord créer la richesse pour après la redistribuer et faire en sorte qu'il y ait une justice sociale. Et, à cet effet-là, le bilan des gouvernements libéraux successifs quant à la mise en application de programmes qui nous permettent d'avoir une justice sociale au Québec, bien, je pense que le bilan est extrêmement positif.

Et j'aimerais, en quelque sorte, M. le Président, entendre notre premier ministre sur l'importance de la saine gestion des finances publiques et sur la façon d'y arriver et d'assurer la pérennité de la qualité de nos services.

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Merci, M. le Président. Cette question de l'équilibre budgétaire, pourquoi est-elle importante, pourquoi y avons-nous accordé une si grande importance? Ce n'est certainement pas pour en faire un exercice stérile de comptabilité ou de chiffres.

Je vais quand même donner le contexte des finances publiques du Québec afin de mieux comprendre l'urgence d'agir, qui n'est pas la même pour le Québec, malheureusement, que pour d'autres juridictions, dont le gouvernement fédéral, on l'a vu avec la présentation de son budget. Nous avons la dette brute, par rapport à notre richesse, la plus élevée au Canada, mais surtout nous avons les paiements de dette, par rapport à nos revenus, en pourcentage, les plus élevés, je crois, avec Terre-Neuve-et-Labrador. On est au-dessus de 10 % de nos revenus qui sont consacrés uniquement au paiement de la dette.

Si on n'avait qu'une dette ayant réussi à... les infrastructures, M. le Président, on en serait très heureux, on dirait : Écoutez, nous avons ce pont, nous avons cette école, cet hôpital, donc voilà ce qu'il était justifié de faire. Malheureusement, une bonne partie de la dette, je crois que c'est les deux tiers de la dette accumulée, vient de déficits passés. Alors, on n'a tout simplement plus la place de faire d'autres déficits budgétaires, et particulièrement lorsqu'on n'est pas en récession. Tout le monde s'entend que, lorsqu'on est en récession, ce qui a été le cas en 2008‑2009, il faut ouvrir les vannes et investir largement, y compris dans les dépenses courantes. On n'est pas en récession actuellement, et il faut garder de la marge de manoeuvre et de la capacité d'agir si, malheureusement, un jour — et c'est probable, parce que ça arrive régulièrement, c'est cyclique, l'économie — on se retrouvait en récession.

Il faut également faire en sorte d'établir les principes selon lesquels on gère les finances publiques. Pour nous, le principe est clair et simple, il faut d'abord générer des revenus, le plus possible avec des politiques qui génèrent l'investissement privé, la croissance économique, l'installation et la croissance d'entreprises, et avoir un principe très simple, pour les personnes qui nous écoutent, dans la gestion de nos dépenses publiques, il s'agit tout simplement, chaque année, de dépenser moins que ce qu'on gagne, de façon à ce qu'on gère nos finances de façon responsable, qu'on ait une marge de manoeuvre qui nous permette de continuer à diminuer notre dette, on en a parlé tantôt, mais également d'investir dans des domaines cruciaux comme l'éducation. Ce n'est pas compliqué, ce n'est pas sorcier. Malheureusement, si on avait fait ça au fil des années, le Québec ne se serait pas retrouvé dans cette situation d'endettement important. Il y a eu, malheureusement, une détérioration de la situation avec ce plus de 7 milliards d'impasse qu'on a retrouvé, et ça aurait donné, sur trois ans, il faut se rendre compte, là, 22 milliards de déficit supplémentaire et des centaines de millions de remboursement au service de la dette supplémentaires. Alors, c'est pour ça qu'il fallait agir. Mais, lorsqu'on parle d'austérité — et on va penser que je reviens sur ce thème encore, mais je vais le faire — il faut définir ce dont on parle.

• (12 h 30) •

Ce que le gouvernement, notre gouvernement, a fait, c'est tout simplement ramener le pourcentage des dépenses publiques au même niveau, par rapport à la richesse québécoise, qu'il était il y a quelques années : à son niveau historique, tout simplement. On n'est pas descendus en dessous, on est revenus au niveau historique des dépenses par rapport au produit intérieur brut du Québec. Il y a d'ailleurs des illustrations dans le discours du budget à cet effet là. Aucun ministère n'a vu ses budgets réduits. L'austérité, c'est ce qui est arrivé dans les années 90, 95, 96, 97, où on a eu des réductions massives des programmes gouvernementaux, notamment l'éducation et la santé, pas une faible augmentation, un recul.

L'autre chose également qu'il faut mentionner, c'est que, malgré cela, on a maintenu nos investissements en infrastructures, donc on a maintenu la partie d'investissement public qui correspond le plus... ou qui déclenche le plus de croissance économique, qui est l'investissement en infrastructures. On est autour de 9 milliards par année, ce qui nous amène à la limite, M. le Président, de notre capacité en termes d'endettement, et la raison pour laquelle on a eu à innover avec la Caisse de dépôt, avec cette entente commerciale, qui leur permettra, eux, d'ajouter 5 milliards dans la grande région de Montréal pour développer les transports collectifs.

Alors, il faut donc agir, il faut également prévoir des orientations économiques qui sont bien précises : un plan pour la réussite en éducation et en enseignement supérieur; l'accompagnement de nos entreprises dans une économie qui se transforme excessivement rapidement; la baisse du fardeau fiscal autant pour les particuliers que pour les entrepreneurs; le maintien de l'équilibre; l'établissement de la croissance des dépenses, comme je l'ai indiqué, en fonction de la capacité de payer; le soutien de la transition vers une économie à faible intensité en carbone, qui est une opportunité de croissance économique; la réduction du fardeau fiscal en débutant, comme on l'avait dit, par l'élimination de la contribution santé; et la poursuite de la réduction de la dette par rapport à l'économie.

Alors, ça a toujours été une priorité pour notre gouvernement, c'est une question d'équité entre les générations. Moi, c'est bien simple, M. le Président, je me souviens de l'époque où, à l'âge qu'ont mes enfants maintenant et même un peu avant, on disait : Bien nous, on va faire la Baie James, on va avoir l'Expo 67, on va avoir le métro de Montréal, et on avait les moyens de ces ambitions-là, puis l'État était là à nos côtés pour agir avec nous et nous permettre d'aller plus loin et d'accomplir ces rêves-là. Je veux que nos enfants et les enfants de nos enfants aient la même capacité de rêver, puis non seulement de rêver, mais d'agir et transformer leurs rêves en réalité. Et c'est ce qu'on est en train de faire en générant cette marge de manoeuvre répétée. Là, on donne un horizon de trois ans, puis il faudra poursuivre par la suite, sauf lorsqu'il y aura des récessions, raison pour laquelle il faut garder cette marge de manoeuvre. On permet à notre génération, mais surtout à la génération suivante d'avoir les mêmes ambitions et les mêmes rêves que ceux auxquels notre génération a eu droit. Et, pour moi, c'est excessivement important. C'est ça, en pratique, l'équité entre les générations.

Je veux quand même répéter qu'il n'y a que deux provinces à l'équilibre budgétaire en 2015‑2016, la Colombie-Britannique et le Québec, ce n'est pas anodin. La plupart des provinces canadiennes font face à des défis budgétaires considérables. On va continuer à gérer avec rigueur. Pas question d'austérité du tout, on continuera à gérer avec rigueur, on va faire croître nos dépenses consolidées, en 2015‑2016, à 2 %, mais ça va s'accélérer et ça s'accélère à 2,5 % en 2016‑2017 alors que les revenus sont en hausse de 3,2 %. Donc, qu'est-ce que ça montre? Effectivement, qu'on dépense un peu moins que ce qu'on gagne, de façon à garder un coussin en cas d'imprévus, des possibilités d'investir notamment en éducation et de contribuer au Fonds des générations, comme les agences de crédit, bien sûr, l'ont souligné à plusieurs reprises, parce qu'il faut rappeler cet élément-là : c'est important de maintenir la cote de crédit du Québec, M. le Président, très important. On aura l'occasion d'y revenir tantôt. Pourquoi c'est important? Pourquoi ce n'est pas juste une affaire de banquiers? Parce que ça a des impacts directs sur notre capacité de développer et de soutenir les services publics.

Le Président (M. Ouellette) : Deuxième série d'échanges, M. le député de LaFontaine, en vous rappelant qu'il reste 4 min 30 s.

M. Tanguay : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. J'aimerais entendre le premier ministre, et je vais être très court dans ma question, quant à la réduction du fardeau fiscal, qui se traduit par plus d'argent dans les poches des Québécois. Et je vois que mon collègue chef du deuxième groupe d'opposition est d'accord avec moi et fait signe de oui de la tête. Alors, je l'en remercie et je vais lui aider à concrétiser cet accord-là.

Alors, M. le Président, le nouveau programme d'aide aux aînés pour le paiement des taxes municipales est un élément. Aussi, pour donner quelques exemples — et j'aimerais entendre le premier ministre là-dessus : crédit d'impôt pour la solidarité, qui fait en sorte qu'aujourd'hui il y en a une administration qui est beaucoup plus effective, notamment lorsque l'on considère la situation des ménages à la fin d'une année et la composante logement. Autre exemple : l'abolition de la contribution santé. Quand on dit de façon tangible : Réduction du fardeau fiscal, force est de constater que l'abolition graduelle de la taxe santé fait en sorte que c'est un élément très tangible, M. le Président.

Donc, plus d'argent dans les poches des citoyens par la réduction du fardeau fiscal. J'aimerais entendre le premier ministre sur cet important élément.

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre, pour trois minutes.

M. Couillard : Alors, merci, M. le Président. Oui, bien sûr, on a mentionné à plusieurs reprises, on aura l'occasion d'y revenir, l'abolition complète de la... on appelle ça de la contribution, mais c'est une taxe, parce que ça a été transformé en impôt sur le revenu littéralement au cours des dernières années et ça équivaut à peu près à 759 millions d'allègement fiscal pour les familles, et ce sera complété en fin de mandat, je pense que c'est important de le dire.

J'aimerais parler plus spécifiquement de deux éléments. Le programme d'aide aux personnes aînées pour le paiement des taxes municipales. On connaît la situation surtout... je ne dirais pas «uniquement en région», mais beaucoup en région, mais également dans certains quartiers des grandes villes. Un couple de retraités est à la maison avec un revenu qui est stable, qui n'augmente pas, et l'évaluation de sa maison augmente année après année, après année, ce qui est une bonne nouvelle, en théorie, pour le patrimoine familial mais une mauvaise nouvelle parce qu'avec l'application des taxes foncières on se trouve avec une facture de taxes qui augmente, de sorte qu'on permet maintenant aux personnes les plus démunies, aux personnes âgées de 65 ans ou plus qui sont propriétaires de leurs résidences depuis au moins 15 ans et qui ont un revenu familial net de 50 000 $ ou moins — et c'est beaucoup, beaucoup de personnes aînées — d'avoir de l'aide pour payer les taxes municipales. C'est un coût de 3 millions par année, ça me semble tout à fait justifiable, et ça va faire un gros changement pour les couples, et les familles, et les personnes aînées qui veulent rester plus longtemps dans leurs maisons.

Le crédit d'impôt pour la solidarité, en passant, c'est une mesure qui est presque unique et, je crois, unique en Amérique du Nord, qui fait partie de notre portefeuille de soutien social, notre filet social, qui explique que le Québec est une société plus équitable qu'ailleurs. On veut en faciliter l'application et surtout la rendre plus équitable, plus pratique également pour les gens. Alors, un versement unique, par exemple, sera effectué pour un montant de moins de 240 $, alors que des versements trimestriels seront réalisés pour un montant de 280 $... 240 $, pardon, et 800 $, et des versements mensuels pour un montant supérieur à 800 $. Je pense que c'est important, et également ça fait une vraie différence dans la vie des gens, et surtout des personnes, M. le Président, à faibles revenus.

Un petit mot, pour terminer, sur la contribution santé. Je rappelle que c'est une réduction importante de la fiscalité, beaucoup d'argent dans la poche des gens. Le montant maximal des deux premiers paliers sera réduit rapidement de 100 $ à 50 $ puis de 200 $ à 175 $. Pour 2017, les contribuables à faibles revenus ne paieront plus de contribution santé, et le montant maximal des deux derniers paliers sera diminué pour être complètement aboli en 2018. C'est une très bonne nouvelle. On s'y était engagés, on l'a fait. Et j'ajouterais là-dedans également, M. le Président, le crédit d'impôt RénoVert, dont on reparlera dans les crédits, qui est une mesure pour également rendre de l'argent disponible pour nos familles.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. M. le chef de la seconde opposition et député de L'Assomption.

M. Legault : Merci. Bien, je voudrais vous saluer, M. le Président, saluer mes collègues de l'Assemblée nationale, tout le personnel qui est ici aujourd'hui.

Ma première question va concerner justement le fardeau fiscal des Québécois. Durant la dernière campagne électorale, le premier ministre avait promis de réduire le fardeau fiscal des Québécois, avait fait certaines promesses précises. Rapidement, bon, le fardeau fiscal, c'est quand on additionne les taxes, les tarifs, les impôts, hein? Que ça soit une taxe, ou un impôt, ou un tarif, ça vient toujours de la même poche.

Les tarifs d'électricité, le premier ministre avait promis que ça n'excéderait pas l'inflation. Depuis deux ans, les tarifs d'électricité ont augmenté, en moyenne, de 10 %, donc c'est beaucoup plus que l'inflation. Les tarifs de garde, le premier ministre avait promis durant la campagne électorale que ça n'augmenterait pas de plus que l'inflation. Selon les revenus, là, pour plusieurs personnes, ça a augmenté de 30 % à 40 %. Les taxes scolaires, le premier ministre avait promis que ça n'augmenterait pas de plus que l'inflation. À beaucoup d'endroits, incluant dans mon comté, il y a eu des augmentations de plus de 10 %. Les taxes municipales, bien, le premier ministre a coupé dans les transferts aux municipalités, plusieurs municipalités ont augmenté leurs taxes, ont même mis une taxe — je ne dirai pas le nom du premier ministre, là — mais sur leurs comptes de taxes. Taxe sur l'essence : il y a eu une augmentation beaucoup plus grande que l'inflation.

Les gens de l'équipe de recherche de la CAQ ont compilé toutes les hausses de taxes, tarifs, impôts et les diminutions, parce que, c'est vrai, il y a eu une diminution d'annoncée, entre autres, sur la taxe santé. Au net — au net — aujourd'hui, après deux ans de gouvernement libéral, le fardeau fiscal des familles québécoises a augmenté, en moyenne, de 1 300 $. Donc, les familles québécoises ont 1 300 $ de moins dans leurs poches aujourd'hui que lorsque le premier ministre est devenu premier ministre.

Donc, question très simple — et j'aimerais avoir une réponse courte, si possible : Est-ce que le premier ministre peut confirmer que le fardeau fiscal des familles a augmenté, en moyenne, depuis deux ans, de 1 300 $? Sinon, quel est son chiffre?

Et, deuxièmement, quel est son objectif pour les deux dernières années de son mandat? Il compte terminer l'année 2018 à quoi? Là, pur l'instant, il est à une augmentation de 1 300 $ par famille. Est-ce que ça va être zéro? Moins? Est-ce que ça va rester une augmentation? Est-ce qu'il vise toujours une diminution?

Donc, est-il d'accord, pour les deux premières années, que c'est 1 300 $ d'augmentation? Et quel est son objectif pour les deux dernières années de son mandat?

• (12 h 40) •

Le Président (M. Ouellette) : Une petite réponse de trois minutes, M. le premier ministre.

M. Couillard : ...avec le chiffre de la deuxième opposition, parce que c'est un amalgame de plusieurs choses. D'ailleurs, il l'a dit lui-même dans sa question. Il parle des tarifs d'électricité. En arrivant, on avait le résultat de la Régie de l'énergie qui datait du régime précédent. L'augmentation a été beaucoup moins importante l'année qui a suivi, beaucoup moins que ce qu'il dit. 10 %, je ne sais pas où il prend ça, là.

Et puis également on a eu l'annonce, par Hydro-Québec, très récemment, de l'engagement de maintien de l'augmentation aux inflations, qui était notre engagement, qui va donc être rempli. Puis je suis très fier de le dire, parce qu'il y a eu beaucoup d'inquiétude autour de cette question. Les Québécois vont continuer à payer le plus bas tarif d'électricité en Amérique du Nord, et l'augmentation annuelle va être autour de l'inflation.

Maintenant, ce que je voudrais lui dire quand on parle d'objectifs, c'est qu'avec les mesures en place depuis le budget 2015‑2016, et si on ajoute celles annoncées en 2016‑2017, si on considère plusieurs éléments — et je pense qu'il devra refaire ses calculs — l'abolition graduelle de la contribution santé, le bouclier fiscal, qui, en passant, est une augmentation de revenus disponibles pour les gens moins favorisés, la bonification du crédit d'impôt pour les travailleurs d'expérience, qui est également de l'argent dans la poche du monde, la bonification des primes au travail notamment pour les personnes seules et les familles sans enfants, on arrive à un total, d'ici 2020‑2021, de 3 914 000 000 $. Alors, c'est ça, l'importance de la réduction... de l'allègement fiscal, pardon, pour les particuliers depuis le premier budget et au cours du cadre qui est celui du budget qui a été présenté. Alors, je pense qu'il faut quand même reconnaître, M. le Président, qu'il s'agit de gestes très, très, très significatifs.

Alors, au total, on parle de 950 millions de dollars par année. Si on le fait sur cinq ans, avec l'effet de récurrence et cumulation, on arrive à 4 milliards de dollars sur près de cinq ans. Ça fait longtemps qu'on n'a pas vu un effort aussi important.

Mais, qu'on s'entende bien, moi, je voudrais bien aussi réduire davantage le fardeau fiscal des citoyens, lui aussi le veut. D'ailleurs, il a mentionné un chiffre au cours des débats hier, je crois, 500 $. Je n'ai pas su si c'était par individu ou par famille. Il pourra le... par individu. Alors, j'aimerais qu'il nous donne le coût envisagé de cette mesure et la façon de compenser ce coût-là dans les budgets des services publics. Parce que ce que je remarque du côté de la deuxième opposition, c'est qu'on nous reproche presque parfois d'avoir fait l'équilibre budgétaire, alors qu'ils s'y engageaient également. On a critiqué chaque mesure qui a permis d'atteindre cet objectif-là, et la grande majorité des mesures ont été faites du côté gouvernemental. Puis là on nous demande à la fois de dépenser plus dans plusieurs secteurs puis de diminuer les impôts. Alors, à première vue, ça semble une recette incontournable pour le retour vers les déficits et l'endettement. Je suis certain que ce n'est pas ce que le collègue veut. On se souvient de sa confrontation avec la dette au cours de la campagne électorale.

Il a toujours été préoccupé par la dette publique, avec raison. Mais ce qu'il propose actuellement, à moins qu'il nous en donne l'explication, va accentuer, va alourdir la dette publique du Québec et risque de replonger le Québec en déficit.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. Deuxième ronde de questions, M. le chef de la seconde opposition.

M. Legault : M. le Président, les gens qui nous écoutent auront tous remarqué que le premier ministre n'a pas répondu à mes deux questions, donc je les repose à nouveau.

Est-ce que le premier ministre peut nous dire de combien a augmenté ou diminué le fardeau fiscal, en moyenne, d'une famille québécoise depuis son arrivée? Nous, on arrive à une augmentation de 1 300 $. On ne sait toujours pas, lui, à combien il arrive. Et, deuxièmement, pour les deux dernières années de son mandat, quel est son objectif? Là, le premier ministre nous parle de 2020‑2021. Juste lui préciser, là, qu'on souhaite tous qu'il ne soit plus là après le 1er octobre 2018. Donc, je veux juste savoir, moi, pour son mandat, là, dans ma deuxième question, quel est son objectif.

Donc, quel est son chiffre pour les deux premières années, quel est son chiffre, pour les deux dernières années de son mandat, pour la famille moyenne québécoise concernant l'évolution du fardeau fiscal?

Le Président (M. Ouellette) : ...d'une minute, M. le premier ministre.

M. Couillard : Alors, c'est très simple. On a déjà réussi, au Québec, à avoir une performance très supérieure à d'autres provinces canadiennes, notamment la moyenne canadienne, mais également nos voisins, pour l'allègement du fardeau fiscal et surtout des familles à plus faibles revenus. Effectivement, on peut choisir d'alléger également les charges des revenus plus élevés, 250 000 $, 300 000 $, 350 000 $. Nous, on choisit les gens à faibles revenus et les gens de la classe moyenne.

En fait, si on regarde chacune des catégories de revenus — il parle d'objectifs, mais moi, je lui parle de la réalité — on a diminué de façon considérable les charges fiscales au Québec par rapport aux autres provinces canadiennes. Par exemple, pour un revenu de 25 000 $, c'est 17 338 $ de charge fiscale de moins, c'est 69 %. Et, bien sûr, plus on augmente de revenus, moins l'impact est visible parce que c'est ça qui est prévu, ça dépend du revenu. Alors, sa question serait plus complète s'il disait : Pour les revenus.

Par exemple, il parle de la contribution du service de garde, qui, en passant, est établie comme tous les pays modernes qui ont des services de garde subventionnés, modulée selon le revenu, qui fait en sorte que les gens à bas revenus ne paieront pas plus que 7,55 $ par jour, que 60 % des gens ne paieront pas plus que 9 $ par jour, ce qui est une mesure qui est socialement juste et qui nous permet encore une fois de mettre plus d'argent dans la poche des gens.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. Troisième ronde de questions, M. le chef de la seconde opposition.

M. Legault : Oui, M. le Président. Les gens qui nous écoutent savent qu'ils ont moins d'argent dans leurs poches, mais, encore une fois, ils auront noté que le premier ministre, comme à son habitude, ne répond pas à la question.

Je veux aborder un nouveau sujet : Bombardier. On sait que le gouvernement a annoncé, en novembre dernier, un investissement important : 1,3 milliard de dollars dans Bombardier. On est tous d'accord pour aider Bombardier. On aurait souhaité en échange avoir des conditions, donc, des engagements de maintien de siège social, d'emplois au Québec. Le premier ministre n'a rien demandé. Par contre, le premier versement, 500 millions US, devait être fait le 1er avril, donc, il y a deux semaines. On comprend que le versement n'a pas été fait. Donc, on se dit : Peut-être que le gouvernement est en train de renégocier l'entente.

Donc, je voudrais que le premier ministre nous mette à jour où en sont les négociations avec Bombardier, où en sont les négociations concernant le premier versement de 500 millions US. Et est-ce que le premier ministre attend après le gouvernement fédéral pour demander des conditions à Bombardier?

Le Président (M. Ouellette) : Réponse d'une minute, M. le premier ministre.

M. Couillard : Bien, d'abord, je suis heureux — ce n'est pas souvent qu'il l'a dit, là — de dire qu'il fallait soutenir Bombardier. On a eu de la misère à l'entendre à la période de questions, ça. Puis je pense que c'est bien, bien, bien important. Et il faut qu'on soit prudents dans ce qu'on soutient. Il faut soutenir l'innovation dans Bombardier. La série C, c'est le projet d'innovation le plus important au Canada actuellement, puis c'est québécois. Il y a de quoi en être très fiers.

Alors, le premier versement, à la demande de l'entreprise, n'a pas été fait encore, parce qu'il y a des conditions à remplir de leur côté pour le versement de la première aide, puis on ne sait pas encore vraiment ce que le gouvernement fédéral va faire, on n'a pas eu de nouvelles récemment. Mais nous, dès que les conditions de la part de l'entreprise sont remplies, on va faire le versement. C'est crucial, M. le Président. Et, si j'avais à lui rappeler la raison pour laquelle — j'aimerais qu'on ait un échange là-dessus — il faut qu'on soit particulièrement prudents de l'endroit où on dirige l'aide... Il a certainement noté comme moi les remarques de la Maison-Blanche et de l'administration américaine sur la situation de Bombardier, et clairement nos voisins du sud, qui ont également Boeing, qu'ils ont grassement soutenu, en passant, avec des fonds publics pour développer les nouveaux modèles... il a clairement noté que nos voisins américains sont en veille constante sur le type d'aide qu'on va apporter, sur les accords commerciaux, et on ne voudrait certainement pas que ça se retourne en désavantage pour le Québec et pour nos travailleurs aéronautiques.

Alors, moi, je crois que la décision d'investir dans la série C, c'est la bonne décision. Oui, il y a une garantie d'emploi avec le centre d'excellence et le maintien des sièges sociaux de la nouvelle compagnie d'administration de la série C. On parle de 1 000 emplois environ. Puis, en passant, on préserve les emplois actuels de la série C et on en ajoute à peu près 300. On parle de 2 200 à 2 500. On était dans une trajectoire qui mettait le programme même en danger. Alors, je veux quand même répéter que, si on n'avait pas annoncé cette aide-là, c'est le programme même de la série C qui était en danger. Et c'est pour ça que ça a été difficile d'avoir nos échanges, parce qu'on n'était pas sur la même cible.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. Quatrième ronde de questions, M. le chef de la seconde opposition.

M. Legault : Question très courte : Est-ce que le premier ministre exclut de verser une partie ou la totalité du 1,3 milliard avant une entente avec le gouvernement fédéral?

Le Président (M. Ouellette) : Réponse, M. le premier ministre.

M. Couillard : Ce n'est pas comme ça qu'on peut aborder ça. Nous, on va respecter notre signature. Il faut que l'entente soit signée. Et puis, dans l'entente, en passant, il y a deux parties qui signent : il y a le gouvernement puis la compagnie. Alors, il faut que la compagnie également remplisse ses engagements en matière de liquidités et d'autres dispositions. Dès que tout ça est réalisé, bien sûr, on fera le versement. Mais c'est acquis pour nous, on va soutenir la série C, puis j'enjoins le gouvernement fédéral de se joindre à nous le plus vite possible puis j'enjoins nos collègues, au-dessus des divisions de parti, d'expliquer aux Québécois pourquoi c'est justifié d'investir de façon importante dans un projet innovant comme la série C et supérieur en termes de retour pour la collectivité québécoise aux autres options qui ont été mentionnées.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. Cinquième ronde de questions, M. le chef de la seconde opposition.

• (12 h 50) •

M. Legault : ...que le gouvernement du Québec pourrait verser le montant avant que le gouvernement fédéral signe avec Bombardier, et donc le gouvernement fédéral pourrait avoir des conditions que le gouvernement du Québec n'a pas, des garanties, par exemple, de plancher d'emploi.

Je veux changer de sujet, M. le Président. On le sait, au Québec, on manque d'investissements des entreprises. Au Québec, on a à peu près 30 milliards de dollars, par année, d'investissement des entreprises. Quand on se compare avec le reste de l'Amérique du Nord, ça en prendrait 50 milliards. Donc, il nous manque 20 milliards d'investissement des entreprises par année. Aujourd'hui, le gouvernement a déposé une politique d'Investissement Québec. Je l'ai lue deux fois et je n'ai pas vu nulle part d'objectifs.

Donc, est-ce que le premier ministre pourrait nous dire, grâce à Investissement Québec, de combien pense-t-il que les investissements des entreprises vont augmenter au Québec au cours des trois prochaines années?

Le Président (M. Ouellette) : ...minutes, M. le premier ministre.

M. Couillard : Alors, s'il voit dans le tableau synoptique du plan stratégique qui a été déposé, il va constater qu'il y a des cibles : an 1, an 2, an 3, offrir aux entreprises du financement qui répond à leurs besoins; valeur des interventions autorisées, cibles : près de 1 milliard, plus de 1 milliard, beaucoup plus de 1 milliard. Augmenter les nouveaux investissements étrangers et la croissance des filières étrangères au Québec : an 1, 1 150 000 000 $; an 2, 1 200 000 000 $; an 3, 1 250 000 000 $.

Mais il n'y a pas qu'Investissement Québec comme outil, il n'y a pas qu'Investissement Québec.

Une voix : ...

M. Couillard : Il n'y a pas qu'Investissement Québec comme outil. Investissement Québec, c'est un outil majeur comme nos autres sociétés d'État, comme Hydro-Québec, en passant, à laquelle on veut redonner son rôle de moteur économique. Mais il y a d'autres outils, d'ailleurs, qu'on a déployés dans ce budget, et j'aimerais qu'on en parle, par exemple la mesure sur les tarifs d'électricité pour soutenir l'investissement privé.

Une voix : ...M. le premier ministre.

M. Couillard : Ah! déjà, on m'indique, M. le Président, que tout le monde a bien reçu ce plan, qu'on essaie de ridiculiser de l'autre côté. Le Conseil du patronat du Québec, Aéro Montréal également, Manufacturiers et exportateurs du Québec : très heureux du virage en innovation annoncé par le gouvernement du Québec.

Alors, quand on a d'un côté une opposition ou des oppositions qui s'époumonent pour dire que c'est tout mauvais puis que tout le monde le soutient, c'est comme la politique énergétique, bien, ce n'est pas crédible.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. Sixième ronde de questions, M. le chef de la seconde opposition.

M. Legault : Oui, M. le Président. On n'a pas beaucoup de réponses, là. Je répète ma question, parce que je l'ai lu deux fois puis je ne le vois pas, là. Je vois effectivement qu'on prévoit prospecter des investissements étrangers pour à peu près 1 milliard. Donc, on sait qu'il nous en manque 20, là. Il n'y a aucun objectif concernant les investissements des entreprises québécoises. Je l'ai lu deux fois, là.

Donc, je répète ma question. Que ça soit avec Investissement Québec ou avec les autres outils, actuellement il nous manque 20 milliards d'investissement des entreprises par année. Avec son fameux plan qu'il a déposé aujourd'hui, pour les trois prochaines années, il prévoit augmenter les investissements des entreprises de combien? 1 milliard, 5 milliards, 10 milliards, ou il n'en a aucune idée?

Le Président (M. Ouellette) : ...une minute, M. le premier ministre.

M. Couillard : Bien, M. le Président, dans mon allocution d'ouverture, il y avait des chiffres précis sur l'impact, par exemple, de notre annonce sur les tarifs d'électricité pour soutenir l'investissement en termes d'investissement attendu, sur l'impact, et ça a été annoncé déjà à quelques reprises, de la Stratégie maritime et du Plan Nord, sur l'impact d'autres stratégies comme la stratégie de l'aluminium, également, sur l'investissement. Et la Stratégie maritime, en passant, c'est déjà 730 millions d'investissement qui ont été réalisés, alors qu'on dit, de l'autre côté, qu'il n'y a rien qui se passe. Bien, ce n'est pas le cas.

Mais je vais quand même répéter ça, là, puis on aura l'occasion d'y revenir, puis je suis très heureux qu'on ait fait cette présentation aujourd'hui. Ce que j'entends du collègue, c'est que tous les gens qui soutiennent le plan qui a été annoncé aujourd'hui sont dans l'erreur. Lui, il a raison. Lui, il dit que ce n'est pas bon, c'est lui qui a raison. Mais les Manufacturiers et exportateurs, le Conseil du patronat, Aéro Montréal, ça, c'est du monde qui ne connaît pas leur affaire, et ils n'ont pas raison de soutenir le plan, qui, à mon avis, est un changement profond de culture à Investissement Québec. Lui-même demandait ce changement-là, je me souviens, et il est là, ce changement-là, et il va être très bien accueilli sur le terrain.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. Septième ronde de questions, en vous rappelant qu'il vous reste deux minutes, M. le chef de la seconde opposition.

M. Legault : M. le Président, les gens qui nous écoutent, là, ont bien vu que le premier ministre n'a pas donné de réponse. C'est pathétique. La question est simple : De combien veut-il augmenter les investissements des entreprises au cours des prochaines années? Il me semble qu'il ne peut pas y avoir une question plus simple que ça. Ce que je sais, par contre, c'est que, quand on regarde son propre budget, à la page A.7, il prévoit une augmentation des investissements des entreprises, tenez-vous bien, de 0,0 %. C'est dans son budget, page A.7.

Donc, je lui repose la question : Quel est l'objectif d'augmentation des investissements des entreprises du premier ministre?

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre, pour 1 min 15 s.

M. Couillard : Bien, juste en 2016‑2017, on prévoit soutenir des investissements de près de 13 milliards de dollars. Ça fait qu'on est déjà pas mal là, hein? 13 milliards de dollars, ce n'est pas pire, il parlait de 20 milliards, puis on va continuer à agir dans d'autres domaines puis on aura l'occasion d'y revenir.

Mais, M. le Président, je vais l'amener sur ce tableau qu'il mentionne. Qu'il aille voir deux, trois pages plus loin puis il va constater que l'investissement en matériel, en équipement a déjà repris et va continuer à reprendre au cours des prochaines années. Ce qu'il faut réaliser, c'est qu'au Québec et ailleurs, et notamment au Québec, mais pas juste au Québec, l'investissement privé — des entreprises — non résidentiel est en décroissance, depuis 2012, constante. Il le voit sur le graphique. On est dans le creux de la vague, on reprend. On a des signes de reprise actuellement et on s'attend à ce qu'on repasse de l'autre côté de la courbe, et c'est déjà en cours pour l'investissement en machinerie et en équipement, qui est crucial pour la productivité du Québec. Alors, si je me souviens bien, en termes nominaux, on est à plus de 4 %, mais je pourrais avoir le chiffre s'il le veut, là.

Le Président (M. Ouellette) : Il vous reste 30 secondes, M. le...

M. Legault : Oui. M. le Président, selon les chiffres du ministre des Finances, 2015, c'était le premier ministre qui était premier ministre, baisse des investissements non résidentiels des entreprises de 4,7 %. Prévision 2016, investissement des entreprises, augmentation de 0,0 %. Est-ce qu'il est en train de nous dire qu'il n'est pas d'accord avec son ministre des Finances, là?

Que nous dit le premier ministre? Ce qu'il nous dit aujourd'hui, dans le fond, là, c'est qu'il ne prévoit aucune augmentation des investissements des entreprises. Il a beau nous donner toutes sortes de plans puis avoir sa nouvelle ministre qui fait des sparages partout, il reste que 0,0 % de prévu d'augmentation des investissements des entreprises, c'est triste, c'est malheureux, c'est inquiétant, puis le premier ministre n'a pas l'air inquiet du tout.

Le Président (M. Ouellette) : ...de la deuxième opposition. Merci. M. le premier ministre, si vous voulez répondre.

M. Couillard : Amicalement. Je crois discerner une pointe de regret lorsqu'il parle de notre nouvelle ministre de l'Économie. J'ai comme l'impression que c'est le cas.

Effectivement, il faut distinguer les croissances réelles des croissances nominales. Il faut qu'il aille voir les autres tableaux après. Il va constater que déjà l'investissement manufacturier a repris, les investissements en machinerie et en équipement ont repris, on est sur la bonne voie. L'environnement économique n'est pas facile, mais on a fait tourner le coin, on est maintenant dans la direction de la croissance. Mais il va falloir être vigilants parce que l'économie reste encore très incertaine, donc il faut très bien cibler nos interventions, et elle serait, certes, incertaine, cette économie, quel que soit le parti représenté ici qui serait là. La différence avec nous, c'est qu'on a une idée très précise de ce qu'il faut faire pour ramener le Québec vers la croissance et la prospérité.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. M. le député de Vimont.

M. Rousselle : Merci, M. le Président. Bien, moi, je voudrais parler du Plan d'action en électrification des transports. Je ne fais pas la même analyse que le chef de l'opposition ici. Moi, je pense que c'est un bon plan, et surtout quand on remarque que le CAA—Québec appuie, justement, puis il félicite, justement, notre mesure, qui semble, selon eux, réaliste et concrète, prévue dans ce plan et quand ils parlent aussi des augmentations de bornes de recharge. Donc, je pense, c'est des bonnes nouvelles.

Oui, on s'est donné un objectif pour réduire de 37,5 % notre niveau d'émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030 puis on le sait, que la principale source d'émissions de GES, ça provient du secteur du transport. Donc, je pense, c'est un objectif à atteindre, surtout que le Québec, c'est le plus gros producteur d'électricité au monde. Ce n'est pas rien, là. Et l'électrification des transports, bien, je pense que c'est une avenue à prioriser.

D'ailleurs, dans la province, on peut compter une expertise vraiment incroyable, étant justement les meilleurs au monde. Puis, en plus, ça crée des emplois. On sait qu'il y a 31 000 emplois directs et indirects qui touchent à 650 entreprises, c'est beaucoup d'entreprises. Puis, parmi ces entreprises-là, bien, il y en a beaucoup qui sont de la classe mondiale. On parle de Bombardier Transport, de Paccar, Bombardier Produits récréatifs, Nova Bus, je pourrais vous en nommer d'autres, mais juste vous nommer ceux-là. Donc, on a des champions chez nous, puis je pense qu'il faut continuer dans cette lignée-là. On est les plus spécialisés dans le transport électrique, puis je pense qu'il faut aller là-dedans, moi, M. le premier ministre. Puis, en plus, je peux vous dire qu'on a été chanceux, à Laval, moi puis notre président, on a eu le premier autobus scolaire électrique chez nous, à Laval. On peut s'en féliciter.

M. le premier ministre, j'aimerais vous entendre sur les mesures proposées par notre gouvernement pour encourager, justement, l'électrification des transports.

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Alors, pourquoi c'est gagnant pour le Québec d'aller dans la direction de l'électrification des transports? D'ailleurs, deux gouvernements de deux partis différents l'ont constaté et l'ont mise en place au fil des dernières années. D'abord, parce qu'on est le quatrième producteur d'hydroélectricité au monde, parce qu'on a une infrastructure de recherche à Hydro-Québec, dans nos universités et nos centres de recherche industriels qui est considérable et qu'on est dans une ambiance sociale et politique où la population appuie ce virage-là. C'est très important. Elle l'appuie parce qu'elle sait que notre richesse collective, elle vient de l'eau et de l'électricité, elle ne vient pas d'autres sources d'énergie, et c'est important.

On a donc renouvelé le Plan d'électrification des transports. On sait que la cible est ambitieuse, on parle de 100 000 véhicules d'ici 2020. Pourquoi il faut agir au niveau des véhicules? Parce que, on l'a bien entendu du député de Vimont, c'est dans le domaine des transports que les sources d'émissions sont importantes — 43 %, 44 % des émissions — et c'est le seul secteur où les émissions continuent à croître. Donc, il faut absolument, au minimum, arrêter la croissance et surtout réduire les émissions en agissant au niveau du transport léger et au niveau du transport lourd.

• (13 heures) •

Alors, je rappelle qu'il y a des programmes de soutien financier important pour les particuliers qui achètent des véhicules électriques ou hybrides rechargeables, il y a un réseau de recharges également qui s'est répandu et qui continue à se répandre. Il y a plus de 700 stations. Il y en a même chez nous dans les petites villes comme celle où j'habite; il y a une station de recharge de véhicules électriques. Et, lors de la politique énergétique, d'ailleurs, notre collègue a annoncé la mise sur pied de stations de recharge multicombustibles où il y aura, bien sûr, l'électricité mais également le gaz naturel et éventuellement l'hydrogène, parce que la technologie à l'hydrogène semble également se développer.

Je veux également donner des informations sur un programme qui, je crois, vaut la peine d'être répété, puis je crois que mon collègue le député de Saint-Jérôme va être particulièrement sensible à ça. On a annoncé un programme de soutien d'acquisition d'autobus scolaires électriques de 30 millions de dollars. Et on sait qu'il y a une entreprise, à Saint-Jérôme, qui est l'entreprise Autobus Lion, qui fabrique un autobus électrique entièrement fait au Québec, sauf les pneus — ils me demandent toujours d'ajouter «sauf les pneus» — mais le reste, la carrosserie, le moteur, tout ça est fait au Québec. On soutient avec 30 millions les commissions scolaires qui font le bon choix d'investir dans ces véhicules-là. Puis, en passant, ces autobus-là, ils ont été testés dans toutes les conditions climatiques dans les régions. Ça fonctionne bien, c'est confortable, c'est fiable.

Mais je ne voudrais pas qu'on fasse juste, au Québec, d'avoir comme ambition d'augmenter le nombre de véhicules électriques, pour la raison que j'indiquais tantôt, parce qu'on est des producteurs d'électricité importants, parce qu'on a Hydro-Québec qui fait des recherches sur les batteries et les moteurs électriques. Il se vend des milliers de moteurs d'Hydro-Québec, en Chine, là, TM4.

On a de quoi développer une filière industrielle du véhicule électrique au Québec. Il faut donc aller également dans cette direction-là, M. le Président.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. On avait besoin d'une touche féminine pour notre première partie de crédits. Mme la députée de Crémazie, à vous la parole.

Mme Montpetit : Merci, M. le Président. M. le premier ministre, chers collègues, j'aimerais aborder une des missions particulièrement importantes de notre gouvernement, celle de l'éducation, qui a bénéficié d'importants investissements dans le dernier budget grâce à la saine gestion de nos finances publiques, auxquelles faisait référence mon collègue un peu plus tôt.

D'entrée de jeu, je voudrais souligner que les décisions qu'on prend en matière d'éducation et les investissements qu'on fait ont un impact sur 1 003 158 jeunes au Québec, 1 003 158 élèves qui évoluent dans nos écoles du Québec. C'est un nombre important, puis je pense qu'on doit avoir ça en tête à chaque fois qu'il est question d'éducation.

J'aimerais aussi rappeler qu'au cours des dernières années il y a des progrès importants qui ont été réalisés pour améliorer la réussite scolaire, notamment au niveau du taux de réussite chez les moins de 20 ans, qui a augmenté de 6 % — on a tendance à parler souvent des problèmes en éducation, on ne souligne pas assez souvent ce qui va bien dans nos écoles — et 6 % pour atteindre 77,7 %. Donc, grâce aux efforts qui ont été faits, c'est 5 000 jeunes de plus qu'on diplôme au Québec à chaque année, et donc je pense qu'il y a de quoi se réjouir, même s'il faut encore aller plus loin dans cette voie, viser qu'encore plus de jeunes réussissent et s'épanouissent dans nos écoles.

Et c'est exactement dans cet objectif-là que, dans le dernier budget, des investissements importants ont été annoncés, notamment 700 millions pour les infrastructures. D'ailleurs, le ministre de l'Éducation était à Montréal encore ce lundi pour annoncer 367 millions qui seront consacrés à la rénovation des écoles de Montréal. Je ne peux pas vous cacher mon enthousiasme par rapport à cette grande nouvelle, parce qu'effectivement c'est de l'argent qui sera certainement bien investi pour faire des environnements sains et stimulants pour les élèves de la région de Montréal mais pour tout le Québec également, puisque ce 700 millions sera investi dans toutes les régions du Québec.

Il y a également, plus important encore, 500 millions qui ont été annoncés en services directs aux élèves, dont 300 millions qui seront consacrés directement pour prévenir le décrochage scolaire et atteindre notre objectif de 80 % de diplomation.

Donc, j'ai souvent entendu le premier ministre dire que l'éducation constitue le meilleur investissement pour favoriser la prospérité et le bien-être d'une société au plan individuel, mais également aux plans social et collectif, et j'aimerais donc profiter de l'occasion pour l'entendre sur l'importance que représente l'éducation comme mission au sein de notre gouvernement.

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Merci, M. le Président. Vous savez, quand on parle des défis économiques du Québec, il faut également parler des défis personnels. Ce qu'on veut, c'est que les enfants, les jeunes puissent aller au bout de leurs rêves et de leur potentiel, puis, bien sûr, ça passe par l'éducation.

On a un bon réseau d'éducation au Québec, il faut faire attention de ne pas le... Oui, on peut le critiquer, mais il ne faut pas le surcritiquer. Les performances de nos enfants sont bonnes, notamment dans les tests internationaux. La réussite, comme on l'a entendu tantôt, a augmenté. Et, ce qui est également encourageant, parce que ça a un lien direct avec notre productivité, je voyais un rapport, il y a quelques jours, qui montre que le pourcentage de Québécois qui détiennent un diplôme postsecondaire, également, est très voisin maintenant de ce qu'on observe dans les autres provinces, particulièrement en Ontario, ce qui est excessivement important pour réduire l'écart de productivité entre notre économie et celle de certains de nos voisins.

Alors, on sait qu'on a annoncé, au cours des trois prochaines années, des investissements totaux de 1,2 milliard de dollars. Là-dessus, il y a 500 millions directement pour la réussite des jeunes. Puis je veux rappeler qu'on ne va pas juste parler d'argent puis d'investissement, on va parler de réussite. Notre collègue le ministre de l'Éducation va publier une politique de la réussite scolaire et éducative qui doit s'ajouter aux investissements, s'ajouter avec les modifications de gouvernance que, j'espère, on va faire ensemble ici, à l'Assemblée, et il faut que les trois soient cohérents les uns avec les autres.

Alors, il faut, on le sait, pour que les jeunes soient plus en mesure de réussir leurs études, que les actions doivent être prises le plus tôt possible. Il y a un investissement totalisant 300 millions au cours des trois prochaines années afin de favoriser le développement des jeunes tôt dans leur développement pour éviter qu'ils soient à risque de décrochage scolaire. On a également annoncé, je crois, aujourd'hui, ou ça va être annoncé, le maintien du financement des organismes régionaux de persévérance scolaire également, et, je pense, c'est une très bonne nouvelle. Je pense au CREPAS, dans ma région, qui est un bel exemple de réussite. Il faut également donner le goût aux jeunes d'apprendre et de se dépasser, d'être heureux à l'école, alors il faut qu'ils fassent ça dans un environnement où ils pourront pratiquer des activités physiques, des liens avec la société, dont le milieu culturel. Là-dessus, il y a 120 millions pour les trois prochaines années. Et on veut continuer à bâtir des liens entre les réseaux de l'éducation, de l'enseignement supérieur et les entreprises, toujours dans l'esprit de faire l'adéquation entre la formation et les emplois offerts. Il faut rappeler qu'il y a 56 000 emplois offerts sur le site d'Emploi-Québec non comblés. Une somme totalisant 80 millions, donc, est prévue pour ces trois prochaines années.

Aux 500 millions pour la réussite s'ajoutent les 700 millions pour les infrastructures, et on a eu un indice de ça avec le ministre de l'Éducation dans les écoles de Montréal, où il y a un retard important. Ces investissements se déclineront tant dans les établissements primaires et secondaires que dans les établissements d'enseignement supérieur, et une partie de cette somme, soit environ... pas environ, 50 millions, servira à améliorer les installations sportives et récréatives au au Québec, et notamment dans nos régions, M. le Président.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. Mme la députée de Crémazie pour la prochaine ronde de questions, en vous rappelant qu'il reste 7 min 30 s.

Mme Montpetit : Je vous remercie. Merci pour la réponse également. Je vais continuer dans le sujet de nourrir et bâtir des esprits curieux.

Donc, j'aimerais ça aborder la question de la culture, plus particulièrement le Plan culturel numérique. C'est un sujet qui me tient particulièrement à coeur. Puis, M. le Président, vous le savez, là, j'ai eu moi-même le plaisir d'étudier la musique pendant près de 20 ans et je suis encore aujourd'hui entourée des gens avec qui j'ai étudié, qui sont soit des musiciens à l'Orchestre symphonique de Montréal, à l'Orchestre Métropolitain, aux Violons du Roy ou des administrateurs de ces institutions, dont on peut s'enorgueillir. Et, au Québec, on a une immense qualité et une grande diversité d'institutions musicales, que ce soit... bien, d'institutions, en fait, culturelles, que ce soit au niveau de la musique, au niveau du théâtre, les musées, la danse, la littérature, il y a de quoi être extrêmement fiers.

Et, bon, on le sait, la culture, c'est une façon de nous affirmer entre nous, mais c'est aussi une façon de rayonner à l'extérieur du Québec, et il y a des grandes transformations quant aux modes de diffusion des différentes formes d'art. Et, à cet effet, pour suivre la tendance, en septembre 2014, le premier ministre et la ministre de la Culture annonçaient le Plan culturel numérique du Québec, qui va permettre, dans le fond, une plus grande diffusion de notre culture, de la musique, de la littérature notamment, mais une diffusion à un plus grand nombre de personnes aussi. Et ce plan est évidemment un puissant vecteur de la transmission de notre culture, et c'est pour ça que j'en reviens au fait que ça va nous permettre de nourrir et de bâtir des esprits curieux ici et ailleurs.

Donc, je ne prendrai pas plus de temps pour l'introduction, parce qu'il ne nous reste pas beaucoup de temps, mais je sais à quel point c'est un sujet qui est bien important pour notre premier ministre, la culture, et je voudrais lui donner l'occasion de nous parler des objectifs que nous avons, comme gouvernement, par rapport à cette mission-là.

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre, pour les cinq prochaines minutes.

M. Couillard : Bien, merci, M. le Président. Merci à ma collègue pour sa question. Effectivement, l'expression d'un peuple, oui, est sa langue, mais également sa culture. Et on est tellement chanceux, au Québec, d'avoir des créateurs aussi talentueux que sont les nôtres et également d'avoir une réputation internationale qui franchement est, et il faut le dire avec fierté, hors de proportion avec notre nombre. On est une... je pense, on est 1 % de la population mondiale, mais on a beaucoup plus de rayonnement et de retentissement que ce petit pourcentage ne nous le permettrait d'espérer, encore une fois parce que la créativité est au rendez-vous. Je voyais d'ailleurs Xavier Dolan qui est vient d'être mis en lice pour la plus belle récompense au Festival de Cannes, c'est quand même quelque chose qu'il faut souligner.

Pourquoi on a décidé d'aller dans la direction d'un plan culturel numérique? Bon, ça peut aller dans le contexte plus large du numérique, mais plus spécifiquement ça permet à la culture d'aller à la rencontre des gens ou, à l'inverse, à des gens d'aller en contact avec la culture malgré les grandes distances. Chez nous, où j'habite, à Saint-Félicien, dans le nord du Lac-Saint-Jean, ce n'est pas facile d'aller visiter même le Musée national ici ou le Musée des beaux-arts de Montréal puis voir l'exposition permanente ou certaines expositions spécifiques.

• (13 h 10) •

Donc, d'avoir la capacité d'aller de façon virtuelle mais très concrète également et être en contact avec ces créations-là, pour les milieux scolaires, pour les jeunes, pour les familles, c'est vraiment très important.

Alors, j'étais très heureux de faire ça avec notre collègue, à l'époque, qui était ministre de la Culture et des Communications. C'est un audacieux plan, c'est la première fois au Canada qu'on fait ça. Et je dois dire qu'à l'étranger, lorsqu'on me disait : Bien, on est intéressé, au Québec, à ceci ou cela, en général, le Plan culturel numérique est dans la liste, les gens veulent voir pourquoi on a fait ça, comment on l'a fait. 110 millions sur sept ans, une première canadienne. On est donc un précurseur. Il faut être à l'avant-garde, il faut le répéter et en être fiers. C'est bon pour la culture, mais c'est également bon pour l'économie, pour le tourisme, l'éducation, le développement des connaissances, la protection du patrimoine, la cohésion sociale, l'ouverture sur le monde, etc. Les deux premières années, déjà, ont permis de mettre en oeuvre 56 mesures qui ont permis de soutenir quelque 690 projets à travers le Québec, et j'insiste sur le nombre, 690 projets, et la distribution partout au Québec. Et je veux juste répéter ce que j'ai dit dans mon introduction, à quel point c'est important de s'assurer que les jeunes Québécois mais les Québécois et Québécoises de toutes les régions ont accès à notre formidable patrimoine culturel.

Alors, le milieu culturel était unanime, c'est un plan qui est nécessaire, qui permet un accompagnement accru des jeunes entreprises et organismes culturels, qui favorise l'apprentissage et le perfectionnement exigés par l'essor du numérique. On est à l'écoute des différents secteurs culturels en adaptant le plan au fil des phases de réalisation.

Il va bientôt y avoir l'annonce, par le ministre de la Culture et des Communications, de la troisième phase du Plan culturel numérique du Québec. La ministre de l'Économie, de la Science et de l'Innovation, qui fait, elle, la mise sur pied ou la conception de la Stratégie numérique, bien sûr, va pouvoir s'inspirer des travaux du Plan culturel numérique du Québec, parce que c'est un bel exemple du rôle du numérique dans la société, pas uniquement dans le gouvernement, et surtout pas uniquement dans le gouvernement, mais dans la société beaucoup plus large. Alors, c'est comme ça, entre autres, mais également on le verra plus largement avec la Stratégie numérique, que notre consoeur présentera bientôt. C'est grâce à ces idées novatrices, à la mise en commun des talents d'ici que le Québec saura faire la transition vers cette économie culturelle numérique et, plus largement, vers l'économie numérique.

Pourquoi c'est important? Bien, je pense que tout le monde le sait, le sent, le monde est dans une rapidité de transformation incroyable. D'ailleurs, on peut se demander, là... J'écoutais mon collègue le chef de l'opposition officielle qui parlait des circonstances des finances publiques qui pourraient être favorables au Québec, notamment la baisse du dollar canadien. On peut se demander comment ça se fait que la baisse du dollar canadien ne s'est pas accompagnée d'un aussi grand nombre de création d'emplois que la dernière fois que c'est arrivé. Bien, une de ces réponses, c'est que les entreprises ont fortement accru leur productivité notamment par le numérique, par l'automatisation, par la robotisation, de sorte que, pour faire le même projet aujourd'hui, on a besoin de beaucoup moins d'employés. C'est, je pense, une partie un peu moins agréable à dire mais qui est réelle. Donc, ce qu'il faut penser, c'est qu'il y aura plus d'entreprises qui vont se développer, plus d'entreprises dans le secteur numérique, donc, au total et au net, on devrait en bénéficier sur le plan de l'emploi, mais là il y a une transformation qui est absolument profonde de la société.

J'ai coutume de dire ces jours-ci qu'une nouvelle qui m'a le plus marqué au cours des dernières semaines, c'est la victoire de l'ordinateur Google au jeu de go contre le champion du monde. Est-ce qu'on se rend compte à quel point ça va changer nos vies? Pas la victoire au go; l'intelligence artificielle et son intrusion dans toutes les facettes de nos vies. On s'inquiète, à juste raison, des taxis Uber. Qu'est-ce qui va arriver quand il va y avoir des voitures sans chauffeur? Qu'est-ce qui va arriver à ce domaine du transport collectif, du transport individuel? Est-ce qu'on aura encore besoin d'avoir nos propres autos? Donc, on est non seulement devant, mais on est dans une transformation dans laquelle on doit absolument tirer notre épingle du jeu et être à l'avant-garde, nos entreprises de partout en ont besoin.

Puis je veux juste terminer en disant que c'est pour partout au Québec. Je pense, ma consoeur la ministre de l'Économie a annoncé un soutien important pour les manufacturiers innovants tantôt. Ce n'est pas juste à Montréal pour les grandes entreprises comme Bombardier, c'est aussi une petite PME qui peut décider de s'acheter une imprimante 3D pour améliorer la qualité de ses prototypes et de ses produits. Alors, c'est pour tout le Québec et partout sur notre territoire, M. le Président.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. Je vous remercie, tout le monde, de votre collaboration. J'espère juste qu'on verra peut-être Mme la députée de Crémazie dans le même genre d'événement qu'on a vu M. le ministre des Affaires municipales, en fin de semaine, gratter la guitare dans un événement caritatif.

La commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures, où elle poursuivra son mandat. La salle va être barrée, si vous voulez laisser vos choses ici, pour les parlementaires. Merci.

(Suspension de la séance à 13 h 15)

(Reprise à 15 h 3)

Le Président (M. Ouellette) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des institutions reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de poursuivre l'étude du volet Conseil exécutif des crédits budgétaires du portefeuille Conseil exécutif pour l'exercice financier 2016‑2017.

Lors de la suspension de nos travaux cet avant-midi, nous avions terminé nos travaux par un bloc d'échange du groupe parlementaire formant le gouvernement. Nous poursuivons donc nos travaux avec M. le chef de l'opposition officielle.

M. Péladeau : Merci, M. le Président. Donc, ce matin, M. le Président, nous avons eu l'occasion de parler d'économie. Vous vous souviendrez que, lors de la campagne électorale de 2014, le chef du Parti libéral s'était engagé à développer notre économie. Il s'était également engagé à faire en sorte que l'éthique allait être une de ses préoccupations majeures.

Alors, nous allons parler d'éthique, et j'aimerais débuter en vous citant le témoignage de Mme Violette Trépanier à la commission Charbonneau, qui a eu lieu le 25 juin 2014, Mme Trépanier étant responsable du financement et du recrutement au Parti libéral du Québec. Alors, je cite : «On les rencontrait systématiquement en groupe, et c'est arrivé dans les... disons, dans les 12 ans, je dirais, trois fois où on a rencontré à certains moments, certains... que j'ai rencontrés avec... avec habituellement M. Marc Bibeau et des fois avec la direction générale, certains députés et d'autres fois tous les... tous les députés pour leur parler de leur... de leur objectif de financement et voir comment ils allaient l'atteindre.»

Un peu plus tôt dans la matinée, M. le Président, Mme Fatima Houda-Pepin... et je me permets donc de lire sa biographie. Elle est élue députée du Parti libéral dans La Pinière en 1994. Elle est réélue en 1998, en 2003, en 2007, en 2008, en 2012. Elle est présidente de la Commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation du 6 juin 2003 au 21 février 2007. Elle est première vice-présidente de l'Assemblée nationale du 8 mai 2007 au 30 octobre 2012. Elle est présidente de la Commission des transports et de l'environnement du 7 novembre 2012 au 20 janvier 2014.

Donc, Mme Fatima Houda-Pepin écrivait ce matin, donc, dans son blogue — et c'est substantiel, je vais vous lire les passages pertinents. Une nouvelle culture s'installe, c'est à la page 3 : «Avec l'arrivée de Jean Charest à la tête du Parti libéral du Québec, en 1998, la culture de financement a commencé à changer. Plusieurs visages que nous n'avions jamais vus dans nos instances auparavant vont prendre du galon au défunt siège social de la rue Saint-Denis.»

Le Président (M. Ouellette) : Un instant, M. le chef de l'opposition. M. le député de LaFontaine, question de règlement.

M. Tanguay : Oui, M. le Président, oui, question de règlement sur la pertinence : 211. J'ai laissé le chef de l'opposition compléter la biographie de Fatima Houda-Pepin, et là il est rendu sous Jean Charest, Parti libéral. Oui, la pertinence, en vertu de notre règlement, doit être interprétée de façon large, mais, en vertu d'une jurisprudence claire aussi, 211.9°, il doit y avoir «un lien direct», et ce sont les termes mêmes, là, «un lien direct».

Alors, je ne veux pas couper le chef de l'opposition officielle et je le fais rapidement et respectueusement, mais je ne vois, à l'heure actuelle, aucun lien direct.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le député de LaFontaine. J'imagine, M. le chef de l'opposition, que ça fait partie d'une mise en contexte.

M. Péladeau  : C'est tout à fait ça, M. le Président.

Le Président (M. Ouellette) : Ça fait que je vous laisse continuer, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Péladeau : Ça ne devrait pas être trop long, M. le Président. Donc : «C'est dans ce contexte — et je continue à citer — que Jean Charest nous a présenté, lors d'une réunion du caucus, à l'Assemblée nationale, celui qu'il venait de nommer président de la Commission des finances du Parti libéral du Québec, Marc Bibeau. Il viendra nous rencontrer au caucus deux ou trois fois par année, avec sa collaboratrice, Violette Trépanier, [directeur] du Service de recrutement et [de] financement, et le directeur général du parti.»

Alors, ma question est très simple, M. le Président. J'aimerais savoir si le premier ministre a assisté à ces séances.

Le Président (M. Ouellette) : Pour une réponse de trois minutes, M. le premier ministre.

M. Couillard : Bien, d'abord, comme introduction, M. le Président, je dirais qu'on peut fort bien s'échanger ici les pratiques respectives de nos partis politiques en financement pour constater qu'elles ont été très similaires pendant plusieurs années. Ce qui est plutôt important, c'est de dire, M. le Président, à quel point ces pratiques ont évolué pour tous les partis et par consensus, et je pense que c'est important de rassurer notre population là-dessus.

Maintenant, sur les questions des objectifs de financement, j'ai déjà eu l'occasion de dire que les députés, individuellement rencontraient ou obtenaient leurs objectifs de financement, j'ai déjà parlé des objectifs pour les ministres. Je trouve que, même s'ils sont encore présents dans d'autres provinces canadiennes, ce n'est pas une pratique idéale, je l'ai redit et je le redis encore une fois. Mais je ne crois pas qu'on va être utiles à la population avec ce genre d'échange parce que moi, je peux remettre le rapport Moisan, je peux mettre Oxygène 9, je peux mettre Ginette Boivin, mais qu'est-ce que ça va donner? On sait très bien que les pratiques de financement ont évolué avec les années. On sait très bien maintenant qu'on est dans un régime de financement à 100 $. Et je pense que c'est ça qu'il faut dire à la population et c'est ça qui est pertinent pour les gens qui nous écoutent.

Le Président (M. Ouellette) : M. le chef de l'opposition officielle.

M. Péladeau : Ma question est très simple, M. le Président. J'aimerais savoir si le premier ministre a assisté à ces séances au caucus en présence de Marc Bibeau.

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre.

M. Couillard : C'est difficile pour moi d'avoir un souvenir précis de ça. On voyait M. Bibeau. Il avait une responsabilité au parti, comme vous le dites, comme il y avait, à l'époque, Mme Boivin, je suppose, qui a dû visiter le caucus du Parti québécois à quelques occasions. Mais moi, je n'avais pas de rôle dans l'administration du Parti libéral du Québec, je n'avais pas de rôle dans le financement non plus. Alors, je voyais ces choses-là de l'altitude où je me trouvais.

Je vais juste répéter encore une fois que ce n'est pas unique au Parti libéral. Le Parti québécois a utilisé les mêmes méthodes de financement. Ça a été bien établi. Les autres provinces canadiennes, malheureusement, ont encore des pratiques, sur le plan des objectifs, qui semblent similaires. Je les enjoins à se joindre au Québec parce que, maintenant, on a vraiment la législation la plus avancée. Mais, encore une fois, je ne vois pas ce qui ici va éclairer le débat public.

Le Président (M. Ouellette) : M. le chef de l'opposition officielle.

M. Péladeau : Merci, M. le Président. Est-ce que nous devons conclure que le premier ministre a des trous de mémoire? Parce qu'il nous dit qu'il ne s'en souvient pas. Donc, je repose une question très simple, M. le premier ministre : Combien de fois avez-vous assisté à ces rencontres, à ces présentations faites par Marc Bibeau?

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre.

• (15 h 10) •

M. Couillard : Je n'en ai aucune idée. Si c'est arrivé, c'est un très petit, faible nombre de cas. Moi, je m'occupais du ministère de la Santé, je m'occupais de ma circonscription. Puis, comme à l'époque chez lui, on avait une personne responsable du financement, c'est la même chose au Parti québécois.

Mais, encore une fois, moi, je ne veux pas rentrer là-dedans. Je ne veux pas commencer à rétorquer à chaque fois qu'il va mentionner des éléments de financement au Parti libéral sur les éléments identiques au Parti québécois. Je ne veux pas faire ça, je ne veux pas faire ce genre de débat là ici. Ayons plutôt des échanges sur la commission Charbonneau, sur les recommandations de la commission Charbonneau, sur les pratiques en vigueur de financement actuellement, et je pense que ce sera beaucoup plus intéressant pour la population qui nous écoute.

Le Président (M. Ouellette) : M. le chef de l'opposition.

M. Péladeau : Si je comprends bien la réponse du premier ministre, M. le Président, c'est que... Il est quand même le chef du Parti libéral du Québec, et il a été membre du Conseil des ministres de 2003 à 2008, et il a également dit, durant sa campagne électorale, qu'il souhaitait faire en sorte que le Parti libéral se préoccupe d'éthique.

Alors, n'est-il pas raisonnable de penser que la population souhaiterait savoir, M. le premier ministre, si vous avez participé à ces présentations faites au caucus par le directeur et le responsable du financement du Parti libéral du Québec, Marc Bibeau? La question est très simple, M. le premier ministre.

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre.

M. Couillard : M. le Président, je répète, c'est possible qu'il y ait eu des présentations sur le financement, mais elles étaient entièrement et toujours faites sur le sceau du respect des lois existantes, et ça, je pense que c'est important de le dire.

Mais je pense que la population qui nous écoute, et j'ai eu l'occasion de leur dire à plusieurs reprises via les médias, sait très bien que moi, j'assume le passé de notre parti politique, mais j'assume la responsabilité de la direction depuis mars 2013. Et ce que je veux redire à la population aujourd'hui, et c'est important de le redire, c'est qu'en plus des gestes préalables qui avaient été posés, en plus de l'adoption unanime, M. le Président, de la loi sur le financement à 100 $ maximum par citoyen, notre parti a posé des gestes dès le début. Dès le début de ma campagne à la direction, j'ai établi une limite de contribution inférieure à la limite légale. Par la suite, nous avons adopté un code d'éthique, au Parti libéral du Québec, avec un comité d'éthique qui siège en permanence. Et nous ne faisons que du financement populaire dans nos circonscriptions avec nos associations, de telle façon... et c'est important, et j'aimerais — je donne encore une fois l'occasion au collègue de dire que c'est la même chose dans son parti politique — souligner que les objectifs de financement de nos circonscriptions sont exactement les mêmes et très modestes, qu'on soit député ou député et membre du Conseil des ministres. C'est important. C'est ça qu'il fallait changer.

Moi, j'ai eu l'occasion de dire à plusieurs reprises que l'attribution d'objectifs différenciés à des ministres, ce qui était d'ailleurs le cas également au Parti québécois, n'est pas une bonne idée sur le plan de la perception. Il fallait changer ça. Ça a été changé. Tant mieux! Maintenant, on va vers l'avenir.

Le Président (M. Ouellette) : M. le chef de l'opposition officielle.

M. Péladeau : Merci, M. le Président. Mais je persiste à demander au premier ministre, compte tenu de ses engagements durant la campagne électorale, compte tenu de cet engagement fort de faire la lumière sur les questions d'éthique, si la population n'est pas en droit... et n'est-il pas raisonnable que vous vous expliquiez à la population, que vous disiez à la population si vous étiez ou non assujetti à cet objectif de 100 000 $? Et, lorsque vous l'avez été, à partir de quelle date et quelles étaient les méthodes que vous utilisiez pour justement rencontrer les objectifs qui ont été dictés par le responsable du financement du Parti libéral du Québec, Marc Bibeau?

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Étrange question parce que je pourrais lui retourner exactement la même. Lorsqu'on a appris, de la voix du chef de la deuxième opposition, qu'à l'époque où il dirigeait le financement du Parti québécois les gens avaient des objectifs, que c'étaient des objectifs pour les ministres qui étaient différents des autres, que les résultats étaient affichés avec une tentative de mettre un peu mal à l'aise les gens qui n'avaient pas atteint les objectifs... On parle de la même chose pour ce parti politique là. Il essaie de donner l'impression que le Parti libéral du Québec se comportait différemment du Parti québécois, mais les faits montrent que ce n'est pas le cas.

Alors, effectivement, moi, j'ai déjà dit qu'effectivement les membres du Conseil des ministres recevaient des objectifs de financement différents. C'était le cas au Parti québécois. Nous faisions des activités de financement dans le respect des lois électorales, et c'est comme ça que ça s'est fait, comme, je suppose, ça s'est fait également dans sa formation politique à l'époque.

Le Président (M. Ouellette) : M. le chef de l'opposition officielle.

M. Péladeau : Merci, M. le Président. Donc, nous avons des témoignages qui, sous serment, ont été prononcés par Violette Trépanier. Elle indique qu'elle a eu l'occasion de rencontrer certains membres du caucus, certains députés.

Alors, ma question est très simple, M. le Président : Est-ce que le premier ministre, alors qu'il était membre du caucus en 2003 jusqu'en 2008, s'il a rencontré Marc Bibeau, il s'est fait fixer un objectif de financement par Marc Bibeau? Et, si c'est le cas, quel était-il?

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Alors, la réponse est non. C'était un objectif qui m'a été communiqué par Mme Trépanier, et l'objectif qu'a rencontré, d'ailleurs, l'ensemble des membres du caucus était de 100 000 $. Je l'ai déjà dit, ce n'est pas une nouvelle information.

Je ne sais pas si le chef de l'opposition essaie de jouer à la commission Charbonneau. La commission Charbonneau a déjà eu lieu. Il y a eu des témoignages, il y a des recommandations. Je pense que c'est beaucoup plus utile de parler ensemble de la façon dont ces recommandations vont être mises en place parce que moi, je pourrais, encore une fois, faire un long monologue sur les pratiques, au Parti québécois, de financement, qui sont exactement celles que vient de décrire le collègue en parlant de notre formation politique. Les membres du caucus recevaient des objectifs, les objectifs étaient différents selon qu'ils étaient ministres, les objectifs étaient divulgués publiquement lors du caucus, les gens qui n'avaient pas atteint l'objectif étaient pointés du doigt dans la salle du caucus. Voilà la réalité de l'époque pour beaucoup de partis politiques.

Et heureusement, M. le Président, je l'ai déjà dit, moi, je suis très heureux de faire de la politique maintenant dans une ambiance totalement différente, où, encore une fois, on fait du financement populaire par nos associations, où on le fait de façon correcte. C'est bien de rencontrer des citoyens pour avoir des petits montants de contribution. Il fallait le faire. D'ailleurs, on a appuyé à l'époque... je crois que c'est votre voisin de gauche qui avait présenté ce projet de loi, on l'a appuyé, et il fallait le faire. Et c'est une nette amélioration. Je souhaite que les autres provinces canadiennes fassent de même. Mais il n'y a absolument rien d'anormal à ce qu'essaie de démontrer le collègue, là, autre que de faire des associations et des amalgames. Mais on n'est pas en train, j'espère, de refaire ici une autre commission Charbonneau. Ce n'est pas l'endroit. Ça, c'est la commission des crédits. Alors, pourquoi ne pas parler des crédits budgétaires?

Le Président (M. Ouellette) : M. le chef de l'opposition officielle.

M. Péladeau : Bien, écoutez, M. le Président, vous savez, lorsque le premier ministre était en campagne électorale, il s'était engagé de faire toute la lumière sur l'éthique. Alors, il doit vivre avec les gestes et les conséquences qu'il a lui-même proposés.

Donc, je comprends de son témoignage ou de sa proposition... On n'appellera pas ça témoignage. Il ne s'agit pas, effectivement, de la commission Charbonneau. Mais peut-il éventuellement penser également que la population, les citoyens et les citoyennes sont intéressés d'en savoir davantage? Et, vous le savez fort bien, M. le premier ministre, il existe un cynisme aujourd'hui qui est mauvais pour la démocratie. Vous êtes le garant de la démocratie au Québec. Vous êtes le premier ministre. Vous êtes, dans le fond, celui qui est en mesure de pouvoir poser les gestes appropriés pour rétablir le lien de confiance qui existe entre le citoyen et son représentant. Donc, ce que vous nous dites, c'est que vous n'avez pas rencontré M. Bibeau pour avoir vos objectifs de financement.

Ma question est simple : À partir de quand avez-vous eu vos objectifs de financement de 100 000 $? Ou étaient-ils de 100 000 $ ou davantage?

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Je vous l'ai déjà dit, c'était 100 000 $ pour les membres du Conseil des ministres. Et ça a été fait au début du mandat, je serais bien incapable de lui dire la date exacte.

Mais, s'il veut jouer les inquisiteurs, moi, je lui demanderais de nous dire comment il a fait pour amasser 100 000 $ dans une seule soirée, qui était là, quels étaient les donateurs. Qu'espéraient-ils obtenir avec ces dons? J'ai également noté que notre collègue a fait des dons au Parti libéral du Québec dans ces années-là, même des années où il n'y avait aucun don au Parti québécois, puis des dons au Parti libéral du Québec. Dans quel but? Qu'espérait-il obtenir? Pourquoi faire ces dons-là?

Alors, je pense que c'est inutile, M. le Président, de nous faire ici un replay ou une révision de la commission Charbonneau. Il l'a dit lui-même parce qu'il s'était trompé dans le mot. Ce n'est pas ça qu'on fait ici. Aujourd'hui, on parle des priorités gouvernementales. Il est certainement judicieux de parler d'éthique et de financement politique à l'intérieur de cette conversation, mais je pense qu'il faut faire une nette démarcation entre les pratiques antérieures, autant dans son parti que les nôtres, et de la façon dont, maintenant, les choses procèdent. Moi, j'ai dit la façon dont ça procède chez nous, parlant des objectifs différenciés. Je ne sais toujours pas comment ça procède au Parti québécois.

Une voix : ...

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Oui, M. le Président. Vous avez décidé qu'il s'agissait d'un préambule vers une question, une ligne de questions, puis je m'en rappelle très bien, et les gens à la maison sont témoins de votre décision, un préambule qui nous a amenés à des questions en lien direct avec ce que les gens veulent savoir aujourd'hui : les crédits du Conseil exécutif. Là, on parle du financement du Parti libéral du Québec. Puis, M. le Président, s'ils veulent tomber sur le financement du Parti québécois, les gens à la maison ne le veulent pas. Et vous êtes le garant du respect de notre règlement, M. le Président. Merci.

Le Président (M. Ouellette) : ...M. le député de LaFontaine. M. le chef de l'opposition officielle.

• (15 h 20) •

M. Péladeau : Merci, M. le Président. Alors, si ça intéresse le premier ministre, voilà. Voici la liste des hommes et des femmes qui ont contribué à ma campagne, là. Tout est disponible sur le site du Directeur général des élections.

Alors, je persiste à devoir demander parce que l'état dans lequel a plongé le premier ministre, c'est la paralysie générale. Depuis l'arrestation de Mme Normandeau, votre ancienne collègue au Conseil des ministres, depuis l'arrestation de Marc-Yvan Côté, depuis la crise, qui a été un fiasco de la façon dont vous l'avez gérée, M. le premier ministre, la semaine dernière, bien, nous sommes en paralysie générale.

L'action gouvernementale, l'action législative, l'action qu'attend la population du Québec, les citoyens et les citoyennes, c'est que nous nous engagions dans la reprise de notre développement économique, c'est d'avoir de véritables propositions en matière d'éducation, c'est d'être en mesure d'améliorer l'accessibilité dans nos soins de santé. Et, tristement, en raison des faits qui vous précèdent mais auxquels vous avez participé et auxquels vous devez assumer la responsabilité puisque vous êtes chef d'une formation politique, la population du Québec souhaite que cette opacité permanente en ce qui concerne le financement du parti politique dont vous avez la direction soit levée et que nous puissions rétablir la confiance qui est nécessaire en démocratie entre le citoyen, les représentants et leurs formations politiques.

Alors, ma question est simple, M. le Président : Est-ce que le premier ministre s'engage à chasser l'opacité qui existe afin que cesse la paralysie dans laquelle le gouvernement est plongé à l'heure actuelle?

Le Président (M. Ouellette) : 1 min 30 s pour la fin de ce bloc, M. le premier ministre.

M. Couillard : Alors, M. le Président, au contraire, non seulement n'y a-t-il pas de paralysie, mais il y a une succession d'actions continue.

Je lui rappelle que, pendant la période qu'il vient de mentionner, nous avons déposé une politique énergétique qui a été uniformément saluée pour sa qualité, nous avons annoncé des investissements pour le manufacturier innovant, tiens, aujourd'hui même, de 500 millions de dollars, nous avons annoncé de nombreuses ententes dans le cadre de la Stratégie maritime pour les zones industrialoportuaires et, récemment encore, un guichet unique pour l'accès aux médecins de famille.

Il n'y a plus d'opacité. Heureusement, il n'y a plus d'opacité pour personne en financement politique maintenant, pas plus au Parti québécois, où il y en a eu beaucoup pendant une période, que du côté de notre formation politique. Les dons se font au niveau des associations de comté, c'est 100 $ maximum pour tout le monde par année. Les dons dans notre comté sont les mêmes, qu'on soit membre du caucus ou membre du Conseil des ministres. C'est ça qu'il est important de dire à la population. La population a une bonne idée du passé. Il y a eu de nombreuses commissions, de nombreux documentaires, de nombreuses émissions là-dessus. Ce qu'ils veulent savoir, c'est, maintenant, aujourd'hui et demain, ce que nous entendons faire.

Alors, j'entends travailler avec mes collègues de l'opposition suite au dépôt de la commission Charbonneau pour revoir toutes les recommandations et les mettre en application. Il y a quelques recommandations à mettre en place qui touchent le financement politique au niveau municipal mais également ailleurs. On va les mettre en place. Et, pour ça, il faut travailler ensemble. Ça ne sert à rien de faire croire à la population que les comportements étaient différents. Les comportements étaient les mêmes. Ils ont changé, ces comportements, pour tout le monde. Tant mieux, parfait. Avançons vers l'avenir maintenant.

Le Président (M. Ouellette) : On revient à Mme la députée de Richmond. Juste pour les besoins des collègues, la règle de la proportionnalité est scrupuleusement suivie. Je m'assure que la question et la réponse ont des temps tout à fait équivalents. Mme la députée de Richmond.

Mme Vallières : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, on parlait de cynisme tout à l'heure. J'aurais envie de distribuer quelques miroirs, on pourrait trouver peut-être certaines sources, M. le Président.

J'aimerais revenir, pour ma part, à des enjeux, des vrais enjeux, ce qui touche les citoyens du comté de Richmond, ce qui touche les citoyens de l'ensemble du Québec. Pour les gens de ma région, c'est très important. Je voudrais donc reparler d'économie. On a passé rapidement tout à l'heure au niveau économique, mais j'aimerais parler du tourisme et de son apport sur l'économie du Québec, justement. Alors, allons-y de façon factuelle.

On sait que cette industrie-là est majeure et significative pour notre économie. Les recettes, en 2015, avec les recherches faites, représentaient près de 14 milliards, soit environ 2,5 % de notre PIB. C'est vraiment quand même majeur. On parle de 3 milliards de recette fiscale. Bref, on n'a pas besoin de fouiller longtemps pour constater que c'est vraiment un levier important pour déclencher des investissements et créer des emplois, notamment en région. Les régions, c'est un des sujets qui me passionnent particulièrement, étant moi-même d'un comté davantage rural.

L'industrie touristique au Québec, ça représente 32 000 entreprises et 350 000 emplois. Donc on parle, au total, là, au niveau des emplois, de près de 4 milliards. Donc, un autre chiffre important à retenir. Et ces emplois-là, les 350 000 emplois, bien, évidemment, ce sont des personnes qui donnent tout d'elles-mêmes pour offrir un service client et une satisfaction exemplaires, une expérience positive aux 92 millions de touristes qui nous visitent chaque année.

Je vous parlais de l'importance dans les régions. J'aimerais faire un petit aparté pour les Cantons-de-l'Est, justement, une région que le premier ministre connaît d'ailleurs très bien pour y avoir vécu pendant quelques années. Et le secteur touristique en Estrie, on estime que c'est 2 200 entreprises qui sont associées à ce secteur-là, ça génère près de 25 000 emplois, ce qui place justement le tourisme au quatrième rang, en termes d'emploi, dans notre région au niveau de l'emploi. C'est vraiment majeur. Des dossiers que nous avons travaillés, d'ailleurs, j'aimerais souligner un dossier que nous avons travaillé pendant plus de 30 ans avec M. Alain Larouche, directeur général de Tourisme Cantons-de-l'Est, qui a annoncé, après 30 ans d'exercice en fonction chez nous, qu'il allait quitter, là, au courant de l'année. Alors, salutations à lui également.

En 2012, on a lancé le PDIT, le Plan de développement de l'industrie touristique, jusqu'en 2020. Les cibles de performance, les objectifs étaient quand même ambitieux. Et, en 2014, la ministre du Tourisme a commencé, entrepris vraiment un vaste chantier pour l'ensemble de l'industrie, et les constats ont mené à l'établissement d'un nouveau plan d'action, justement, un nouveau modèle d'affaires d'une gouvernance renouvelée, qu'on a annoncé justement en octobre dernier, modèle qui a reçu de très bons commentaires, d'ailleurs, et, entre autres, par l'Association québécoise de l'industrie touristique, que je me permets de citer : «On prend part aujourd'hui à un tournant majeur pour notre industrie touristique[...]. [Et] le plan d'action 2016‑2020 en six mesures de la ministre fait écho directement à des demandes de priorisation et des exigences d'agilité, d'imputabilité et d'unification...»

Bref, alors qu'on veut faire croître notre industrie touristique, qu'on veut faire croître le nombre de touristes et les dépenses qu'ils font chez nous, et alors qu'on sait aussi que, si chaque Québécois passait une fin de semaine de plus au Québec par année, on générerait des recettes supplémentaires de 3 milliards, et alors également que l'alliance du tourisme du Québec salue la place faite au tourisme parmi les secteurs clés de l'économie du Québec et qu'elle dit — et je me permets de citer également — que «le budget donne les moyens [de] l'industrie [pour] renforcer ces produits», pour la bonne connaissance des gens qui nous écoutent puis parce qu'il y a des moyens considérables également qui sont octroyés à ce secteur — pour les gens de nos régions, quand on parle des vraies affaires, c'est ça, justement — peut-être que le premier ministre pourrait-il expliquer quels sont les gestes posés, les investissements qui sont prévus également pour stimuler l'industrie touristique, donc nos régions, que ce soit autant à l'interne ou à l'externe.

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Merci, M. le Président. Bien, écoute... écoutez, pardon, il faut remonter un peu en arrière, à la grande contribution de notre consoeur la députée de Laporte et présidente de notre caucus, qui avait fait le premier Plan de développement de l'industrie touristique avec de nombreux partenaires de l'industrie, plan d'ailleurs qui avait été uniformément salué.

Nous avons continué ce travail depuis notre arrivée au gouvernement en lançant le nouveau modèle d'affaires et le plan d'action qui en découlent. C'est une série de mesures qui nous permettent d'atteindre des cibles très ambitieuses. Par exemple, la mise sur pied de l'alliance de l'industrie touristique du Québec afin de fédérer les efforts de tous les partenaires pour le marketing pour la promotion hors Québec s'est réalisée, le financement est prévu dans le budget 2016‑2017; la poursuite du déploiement des versants touristiques de plusieurs stratégies; le Plan Nord; la Stratégie maritime — il y a encore eu une annonce récemment au Musée maritime de La Malbaie; la Stratégie de mise en valeur du tourisme hivernal; la Stratégie de mise en valeur du tourisme culturel; la Stratégie de mise en valeur du tourisme de nature et d'aventure; la Stratégie de mise en valeur du tourisme d'affaires et de congrès. Tout ça est en cours, et le financement est prévu dans le budget 2016‑2017. C'est effectivement une industrie très importante pour le Québec.

On a également initié des travaux pour mettre en place une stratégie d'ensemble en matière d'accueil, poursuivi l'aide financière aux festivals et événements touristiques, qui est d'ailleurs dans le budget, actualisé l'encadrement des établissements d'hébergement. Et on sait que le problème de ce qu'on appelait Airbnb a été résolu de façon particulièrement imaginative au Québec et salué ailleurs également.

Dans le cadre du plus récent budget, on a investi près de 150 millions de dollars sur cinq ans pour réaliser le plan d'action 2016‑2020, 90 millions pour la mise en valeur du tourisme hivernal — et je vois mon collègue de Dubuc à côté de moi et d'autres également qui connaissent très bien l'importance du tourisme hivernal, particulièrement de la motoneige — 40 millions pour la réalisation du projet stratégique et structurant, 29,6 pour permettre à la SEPAQ de bonifier son offre d'activités, 12 millions pour mettre en oeuvre de nouvelles ententes de partenariat régional, 8 millions pour accompagner les entreprises dans la réalisation de leurs projets et stimuler l'innovation, également près 31 millions pour la mise en valeur du patrimoine bâti, culturel et naturel de la SEPAQ, 9,6 millions pour le décloisonnement du Programme d'appui au développement des attraits touristiques, 16 millions pour la promotion, encore une fois, destinée au marché hors Québec.

Il y a également 52 millions d'autres mesures contributives au développement touristique, par exemple, 50 millions pour le développement et l'entretien de la route verte, 400 000 $ pour la construction d'une promenade temporaire à Percé à l'été 2016, qui s'en vient, la réalisation d'une étude destinée à trouver une solution permanente — on sait l'influence des intempéries sur cette infrastructure — 2 millions pour consolider le financement des grandes institutions muséales, dont 1,5 million au Musée des beaux-arts de Montréal. Et on collabore actuellement avec des promoteurs autochtones pour trouver une façon de les impliquer et souligner le fait autochtone historique et actuel dans le cadre des célébrations du 375e anniversaire de Montréal en 2017.

Donc, un plan d'action qui est diversifié, qui est large et qui nous propulse vers l'avenir dans une industrie, encore une fois, répétons-le, qui est créatrice de prospérité pour le Québec et d'emplois de bonne qualité.

• (15 h 30) •

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de Vimont.

M. Rousselle : Merci. Moi, je voudrais parler d'infrastructures. On sait que le gouvernement du Québec maintient son engagement de créer des emplois, mais stimuler l'économie en procurant aux entreprises et aux citoyens des infrastructures dont ils ont besoin. On sait que, depuis longtemps, les infrastructures, elles ont été comme laissées à elles-mêmes, puis je pense qu'un investissement était nécessaire, vraiment, dans le domaine. Surtout, malheureusement, au milieu des années 2000, on a subi des conséquences assez fatales de ces décisions.

Comme c'est le cas partout dans le monde, les investissements d'infrastructures publiques et des retombées positives sur la productivité et sur la croissance économique, bien, c'est très important. La croissance de l'emploi a son compte aussi. Moi, je sais qu'à Laval on est chanceux, on en a bénéficié, puis, M. le premier ministre, je peux vous dire que les citoyens sont vraiment contents, à Laval, juste avec la construction de la Cité de la culture et du sport à Laval, appelée Place Bell, l'aménagement de l'Établissement de Leclerc à Laval, mais surtout le mur antibruit qui, actuellement, est en construction sur la 440, entre le boulevard des Laurentides et la route 19. Ça faisait tellement longtemps que les gens attendaient pour ce mur antibruit là! Donc, je peux vous dire qu'ils sont très heureux. Et je sais qu'il y a d'autre chose qui s'en vient dans le même segment de la 440 pour abaisser le bruit. Donc, les gens, je peux vous dire qu'ils apprécient.

Je sais qu'avec les investissements en infrastructures ça touche tout le Québec aussi parce que, quand on parle de... je parlais de réseau routier, mais, au niveau de la santé et des services sociaux, aussi dans les logements sociaux. Il faut penser aux logements sociaux, et, justement, ce budget-là y a pensé. Les infrastructures, aussi, municipales, on connaît que nos municipalités ont des besoins en particulier, puis, justement, je pense que ces investissements-là vont les aider grandement.

Moi, j'aimerais vous entendre, M. le premier ministre, sur vos actions, sur les réflexions à venir parce que je sais que, par ces actions et par ces investissements-là, l'économie, d'habitude, se sent mieux, on le sait. D'ailleurs, si le Québec s'est mieux tiré, dans les dernières années, de la crise économique que plusieurs autres, en passant, bien, c'est notamment parce qu'un gouvernement formé du Parti libéral a décidé d'investir massivement dans les infrastructures. Donc, je voudrais vous entendre, M. le premier ministre, là-dessus.

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Merci, M. le Président. Effectivement, je pense qu'il est important de répéter, on l'a dit ce matin, que notre gouvernement a continué d'investir de façon importante dans les infrastructures. Ce n'est donc pas un budget de restrictions, c'est un budget d'expansion économique avec une croissance moins grande des investissements de budget de programmes mais préservée pour les investissements en infrastructures, qui sont particulièrement créateurs de richesse et d'emplois. On parle de 9,6 milliards pour 2016‑2017, c'est quatre fois plus que ce qui était investi en l'an 2000. Donc, on maintient notre effort en étant conscients de la limite possible de notre endettement, et je crois que c'est la discipline qu'il faut garder.

Il faut rappeler cependant, parce que le gouvernement fédéral également a annoncé des investissements, tant mieux, des investissements en infrastructures, qu'au prorata de notre économie, par rapport à notre économie, le Québec investit quatre fois plus dans les infrastructures que le fera le gouvernement fédéral dans tout le Canada. Je pense que c'est important de mettre ça en perspective. Notre effort est considérable, se déploie, dans toutes les régions du Québec, dans de nombreux projets.

Effectivement, à Laval, je crois qu'il y a deux projets particulièrement importants pour notre collègue : le mur antibruit, qui a été annoncé le 26 octobre 2015, un investissement de 6 millions pour la construction d'écrans à Laval, c'était très attendu dans le secteur, je crois, et le pavage de l'autoroute 440. Si ma mémoire est exacte, c'est près des Marronniers, c'est à l'endroit où il y a un embranchement pour la montée Monette. J'ai habité dans ce coin-là, et effectivement ça nécessitait des travaux importants. Alors, ces travaux seront réalisés, cet été sur la 440, entre l'autoroute 13 et la route 117 puis entre le pont d'étagement enjambant la voie ferrée du CP et l'autoroute 19 à Laval. Ça permet de recouvrir la dalle de béton et de maintenir la sécurité des usagers de la route, et ça, c'est très concret pour nos concitoyens, particulièrement ceux que représente mon collègue le député de Vimont.

Le Président (M. Ouellette) : Merci. Mme la députée de Crémazie, cinq minutes.

Mme Montpetit : Cinq minutes. Donc, je vais faire une question très, très, très courte, compte tenu du temps qu'il nous reste dans cette enveloppe, parce que, bon, le premier ministre l'a abordée à plusieurs reprises, là, depuis le début de cette étude des crédits, la politique énergétique, et je voudrais lui donner l'occasion de pouvoir nous en parler davantage, là.

Donc, jeudi dernier, notre gouvernement déposait la nouvelle politique énergétique du Québec, politique qui a été saluée par une cinquantaine de groupes de tous les milieux, hein, autant l'environnemental, le socioéconomique, et elle a été saluée parce qu'elle est constructive, et elle est innovante, et elle renforce notre volonté d'être un chef de file, là, nord-américain dans les domaines de l'énergie renouvelable et de l'efficacité énergétique. Et donc je voudrais laisser le temps qu'il reste à... puis je ne veux pas prendre plus de temps, dans le fond, pour faire un contexte, je pense qu'elle a été bien couverte, cette politique-là, au niveau des médias, mais je voulais donner l'opportunité au premier ministre de nous en parler davantage et comment elle s'inscrit, justement, dans notre vision gouvernementale.

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Merci, M. le Président. Effectivement, politique énergétique très bien reçue, on l'a vu, et, de façon intéressante, autant par les corroborateurs du milieu environnemental que par ceux du milieu économique, ce qui est assez rare, hein, de faire l'unité dans un enjeu semblable, où il y a, de toute évidence, beaucoup, beaucoup d'opinions divergentes.

Il faut placer d'abord cette politique énergétique dans le contexte où elle doit s'articuler avec deux éléments du plan gouvernemental : le plan de lutte aux changements climatiques et de réduction d'émission de gaz à effet de serre et les politiques de développement économique. Il faut que les trois soient en accordance et en cohérence. Donc, cette volonté s'est orientée en quatre volets au profit de la politique énergétique : revoir la gouvernance de l'énergie — on sait qu'il y aura une action législative sur le Régie de l'énergie, il y aura la création d'un organisme qui va coordonner la transition énergétique, comme c'est le cas dans les meilleurs exemples internationaux; mettre de l'avant la transition énergétique avec des objectifs très concrets, par exemple, de 40 % de réduction de consommation de produits pétroliers; une augmentation importante des énergies renouvelables — on va passer de 46 % à un peu plus de 60 % en 2030, alors qu'on est déjà parmi les meilleurs au monde; et une augmentation de 15 % de nos efforts en efficacité énergétique.

Donc, la gouvernance, la transition énergétique, plus de choix aux consommateurs et même la possibilité de contrôler eux-mêmes leur énergie dans leur domicile et définir une nouvelle approche en lien avec les énergies fossiles, particulièrement le gaz naturel, qui peut servir de source d'énergie de transition très utile dans ce qui nous amène vers cette nouvelle économie à basse teneur en carbone.

On veut également faire travailler le monde partout en région, continuer également à miser sur Hydro-Québec comme moteur économique du Québec avec, d'une part, ses exportations, les plus bas tarifs en Amérique du Nord maintenus et maintenant gardés, en termes d'augmentation annuelle, au niveau de l'inflation, des activités d'innovation saluées dans le monde entier, commercialisées également dans le monde entier, jusqu'en Chine, et également une présence internationale accrue qui va tous nous rendre fiers et qui va nous permettre de récolter davantage de retombées, au Québec, des activités d'Hydro-Québec.

Alors, on a donc lancé une consultation. On s'est basés également sur les consultations qui avaient été tenues précédemment pour annoncer cette politique avec un beau titre : L'énergie des Québécois — Source de croissance. Je pense que c'est important de la qualifier comme ça. Et je crois qu'avec cette politique on est vraiment... je ne dirais pas au premier rang, mais certainement parmi les meilleurs exemples actuellement d'une concrétisation de la volonté d'assortir croissance économique, lutte contre les changements climatiques et politique énergétique dans un contexte, il faut le dire, qui est favorable au Québec. On est quand même bénis d'avoir, pour 1 % de la population, 3 % des réserves en eau et d'être le quatrième producteur au monde d'hydroélectricité. Ça nous permet de tabler sur ces atouts que d'autres n'ont pas et d'aller de l'avant.

Ça nous permet également, M. le Président, de développer de grands projets mobilisateurs. On a parlé, ce matin, de l'électrification des transports. Il faut également parler des grands projets que l'entente commerciale avec la Caisse de dépôt nous permettra de réaliser, une entente qui est unique, qui est nouvelle au Québec, qui a été saluée partout ailleurs. On demande beaucoup d'informations ailleurs dans le monde sur la façon dont cette entente a été conclue parce qu'elle garantit l'indépendance de la Caisse de dépôt pour développer particulièrement deux grands projets : le lien électrique rapide, fiable sur le nouveau pont Champlain entre la Rive-Sud et le centre-ville et le train vers l'ouest, y compris la desserte de l'aéroport international de Montréal. Franchement, lorsque j'ai visité Vancouver, et que j'ai utilisé le skytrain, et que j'ai vu que c'était fait par la Caisse de dépôt, je me suis bien demandé comment ça se fait que, jusqu'à maintenant, il avait fallu même passer une loi pour permettre à la Caisse de dépôt de faire la même chose, si c'est jugé utile pour eux, au Québec que ce qu'ils font partout dans le monde et ailleurs au Canada.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. M. le chef de la seconde opposition.

• (15 h 40) •

M. Legault : Oui. Merci, M. le Président. On a adopté à l'unanimité, à l'Assemblée nationale, le projet de loi n° 26, qui est une loi qui permet de récupérer les sommes qui ont été payées injustement suite à de la fraude par des entreprises de construction.

Or, on voit dans ce projet de loi, à l'article 16, qu'on est capables d'aller récupérer des sommes qui ont été collectées illégalement au cours des 20 dernières années, hein? On a tous voté en faveur de ce projet de loi, incluant le Parti libéral. Or, si on veut, parce qu'on parle des crédits, récupérer le maximum d'argent des entreprises de construction, évidemment il faut que le premier ministre montre l'exemple.

Or, il y a quelques semaines, Marc-Yvan Côté a été arrêté et a eu cinq chefs d'accusation. Je suis prudent.

Le Président (M. Ouellette) : Bonne idée.

M. Legault : Je lis les cinq chefs d'accusation : entrepreneur qui souscrit à une caisse électorale, corruption de fonctionnaires, fraudes envers le gouvernement, abus de confiance et avoir frustré le public d'une somme dépassant 5 000 $. Or...

Le Président (M. Ouellette) : Donc, M. le chef de la seconde opposition...

M. Legault : Oui.

Le Président (M. Ouellette) : ...je vous demande d'être très prudent.

M. Legault : Je suis très prudent.

Le Président (M. Ouellette) : Très, très prudent.

M. Legault : Très, très prudent.

Le Président (M. Ouellette) : O.K.

M. Legault : La CAQ a déposé les certificats de solliciteurs de Marc-Yvan Côté pour les années 2007, 2008 et 2009. Petit problème, c'est que le Directeur général des élections n'a pas le droit d'aller dans les années 2007, 2008, 2009. Donc, s'il y a de l'argent qui a été collecté illégalement — on voit les chefs d'accusation, ça peut être possible — en 2007, 2008, 2009, le DGEQ, le Directeur général des élections, ne peut pas exiger le remboursement du chef du Parti libéral.

Or, le chef du Parti libéral semble vouloir tourner la page de l'époque de Jean Charest puis des façons de faire du financement politique, qui sont différentes de ce qu'on fait aujourd'hui. Donc, je voudrais savoir quels sont les efforts qui ont été faits par le chef du Parti libéral du Québec pour identifier les sommes qui ont été collectées par Marc-Yvan Côté, entre autres, durant les années 2007, 2008, 2009.

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre, pour une réponse de 2 min 30 s.

M. Couillard : Merci. Je remercie le collègue pour sa question. On a déjà eu des échanges, à la période de questions, sur le sujet. Et je vais lui répondre en deux parties parce que sa question comporte deux volets.

Sur la question de la récupération des sommes et la limite temporelle qu'on connaît actuellement, je vais commencer ma réponse comme je l'ai fait à l'habitude et je la compléterais comme je l'ai fait au dernier échange qu'on a eu à la période de questions. La recommandation de la commission Charbonneau qui s'applique à cette question place une limite d'augmentation de la période de récupération à sept ans. Il le sait bien, il a eu le rapport, comme nous. Ça, c'est la première chose à dire.

Mais moi, je suis ouvert. On va déposer un projet de loi à l'Assemblée nationale pour certainement mettre en place cette recommandation où, dans la version déposée — probablement, je ne préjuge pas, on verra la version qui sera déposée — on aura ça. Mais moi, je suis tout à fait disposé que... Lors de la commission parlementaire, on va faire des auditions. J'aimerais entendre pourquoi cette recommandation a été mise dans le rapport de la commission Charbonneau. Par exemple, est-ce que la direction générale des élections du Québec, qui a fait cette recommandation à la commission Charbonneau, l'a faite parce que, selon elle, il serait très difficile, voire parfois impossible de monter des dossiers permettant d'obtenir une preuve de qualité suffisante dans un débat devant le tribunal? Est-ce que c'est ça, la raison? Est-ce qu'il y a d'autres raisons qui s'appliquent? Je pense qu'on a tous besoin d'être informés là-dessus pour savoir sur quoi était basée cette recommandation sur le sept ans, et comment on la justifie, où on peut l'améliorer. Je suis ouvert à toutes les discussions en commission parlementaire là-dessus.

Maintenant, sur les dons précédents antérieurs au Parti libéral du Québec, on fait des vérifications continues. C'est certain que, chaque fois qu'une personne est mentionnée, on fait des vérifications. Mais je ne suis pas un expert de ces questions, laissez-moi...

Une voix : ...

M. Couillard : O.K. On me montre que c'est le DGE, effectivement, qui a recommandé ça. Je pourrais faire la recherche, s'il le désire. Est-ce qu'à partir d'un certificat de solliciteur on peut trouver tous les noms en rapport avec le certificat de solliciteur, oui ou non? Je ne suis pas certain. Je ne suis pas certain que, sur le rapport du DGE, il y ait un lien entre la contribution et la personne qui a sollicité. Peut-être que c'est le cas, peut-être que non. Alors, je vais m'informer puis on pourra lui revenir là-dessus.

Moi, je veux agir correctement, je veux agir de façon à, comme il dit, changer d'époque. C'est une époque qu'il a connue. Je ne le lui reproche pas, là, la classe politique était dans cette ambiance-là au cours de ces années-là. Elle l'est encore dans d'autres provinces canadiennes. Nous, on est avancés beaucoup plus loin. Je pense qu'il faut demeurer à ce niveau d'avancement, garder les précautions utiles. Mais je vais voir. Cette question, honnêtement, je ne connais pas la réponse, alors que je la pose, là : Est-ce qu'il est possible, sur les rapports de dons, d'établir un lien entre la personne qui a sollicité pour le don spécifique ou non? Je ne sais pas la réponse. Je vais l'obtenir, puis on pourra y revenir.

Le Président (M. Ouellette) : M. le chef de la seconde opposition, pour une deuxième ronde de questions.

M. Legault : M. le Président, je suis très surpris que le chef du Parti libéral du Québec n'ait pas encore fait cette recherche, là. Je vous rappelle que Marc-Yvan Côté a été banni à vie du Parti libéral du Canada en 2005 pour financement politique illégal. Et là on a dit déjà, depuis quelques semaines, au premier ministre : Marc-Yvan Côté collectait de l'argent pour le Parti libéral du Québec en 2007, 2008, 2009. Et là il vient nous dire, comme chef, là, comme leader qui essaie de lutter contre le cynisme de la population : Je n'ai fait aucune recherche, je n'ai rien demandé aux gens du Parti libéral du Québec concernant l'argent qui a été collecté par Marc-Yvan Côté. Et là il me dit, M. le Président : Je suis ouvert à changer la loi pour aller plus loin que sept ans. Ouvert! Écoutez, là, s'il voulait vraiment envoyer un message fort, bien, il dirait aujourd'hui, là : Moi, comme chef du Parti libéral du Québec, je m'engage, comme on le demande pour les entreprises de construction, à reculer 20 ans en arrière. Bien non, il dit : Je suis ouvert. Ce n'est pas rassurant, ça, M. le Président.

Donc, je répète ma question : Quel travail a-t-il fait, quel travail va-t-il faire? Est-ce qu'il s'engage à rembourser l'argent qui a été collecté illégalement par le Parti libéral du Québec au cours des 20 dernières années?

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre, pour une réponse de deux minutes.

M. Couillard : M. le Président, notre parti, comme, je suppose, le sien également, fait une vérification assidue et étroite de tous les comptes, y compris les contributions politiques. Je vais le répéter, là.

Je veux juste lui rappeler ma remarque de tantôt, ce n'est pas une remarque anodine, je pense qu'elle mérite au moins qu'il s'y attarde et qu'il y réfléchisse. Ce n'est pas le gouvernement libéral qui a décidé de demander à la commission Charbonneau, de toute évidence, de marquer sept ans dans ses recommandations, c'est la direction générale des élections elle-même qui a demandé à la commission Charbonneau d'établir cette limite.

Moi, je veux entendre la raison pour laquelle elle a fait cette demande. Est-ce que, par exemple, c'est à cause du fait, peut-être, c'est une supposition, on aura l'occasion d'échanger là-dessus... pour la raison qu'il est impossible ou quasi impossible de développer une preuve documentaire valable au-delà de cette période? Parce que, si c'est le cas puis qu'on fait ce que recommande le collègue, ça va complètement décrédibiliser l'institution. S'il est impossible de développer des arguments juridiques valables et solides, il va être très difficile d'aller concrètement dans la direction que souhaite notre collègue, même si elle peut être fondée.

Alors, moi, je lui réitère mon ouverture à ce qu'en commission parlementaire il y ait un échange sérieux avec la direction générale des élections du Québec sur la façon de remonter dans le temps. On pourra remonter même à l'époque où il présidait une campagne de financement puis voir comment les dons, à l'époque, étaient faits. Moi, je ne préjuge de rien. Et ça serait le cas également pour les autres formations politiques. Mais moi, je m'engage à faire la lumière, tout ce qu'il est possible de faire, et de faire la récupération qu'il est possible de faire dans le respect de nos lois.

Mais je pense qu'il faut répéter qu'il faut expliquer d'abord pourquoi cette recommandation a été faite. Je sais que ce n'est pas ce qu'il veut faire, il donne l'impression que c'est le gouvernement qui a décidé que ce serait sept ans. Ce n'est pas le gouvernement qui a décidé que ce serait sept ans, c'est la commission Charbonneau qui recommande que ce soit sept ans, sous la recommandation du Directeur général des élections. Donc, il faut savoir pourquoi cette recommandation a été faite.

Le Président (M. Ouellette) : Troisième ronde de questions, M. le chef de la seconde opposition.

M. Legault : M. le Président, on a un gouvernement qui est majoritaire, donc, si le premier ministre le décide, il peut demain faire adopter un projet de loi puis décider que l'argent qui a été collecté illégalement par les partis politiques au cours des 20 dernières années devra être remboursé. De toute évidence, il ne veut pas prendre cet engagement-là, il ne veut pas.

Donc, la population qui nous écoute, là, peut voir le chef du Parti libéral du Québec qui refuse de s'engager à rembourser l'argent qui a été collecté illégalement avant 2010. Et, M. le Président, le premier ministre, là, en tout respect, dit que moi, quand j'étais au PQ, j'ai déjà été président d'honneur. Écoutez, là, je ne me suis pas retrouvé les menottes au poing comme Marc-Yvan Côté. Je ne suis pas accusé «entrepreneur qui souscrit à une caisse électorale». Il y a une grande différence, là, j'espère qu'il la voit, entre moi puis Marc-Yvan Côté. Mais ce qu'on sait, c'est que Marc-Yvan Côté a collecté de l'argent en 2007, 2008, 2009 pour le Parti libéral du Québec.

Moi, j'ai une autre question à poser au premier ministre. Depuis qu'il est revenu en politique, est-ce que Marc-Yvan Côté a été impliqué au Parti libéral du Québec?

• (15 h 50) •

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre, pour 1 min 30 s.

M. Couillard : La réponse, c'est non, et il n'a pas été impliqué non plus dans ma campagne à la direction du parti. J'ai déjà eu l'occasion de le dire publiquement à de nombreuses reprises. Et, je voudrais le répéter encore une fois aujourd'hui, les choses ont changé. Cependant, je ne préjuge pas de la décision du tribunal, comme lui-même doit le faire avec prudence.

Maintenant, je vais revenir sur ce qu'il a mentionné, encore une fois, sur cette question de la récupération, parce qu'on a trouvé, dans les écrits du rapport de la commission Charbonneau, la raison pour laquelle le DGE... Et je ne dis pas qu'on n'aura pas l'occasion de poursuivre la démarche. Et il prend à témoin la population, moi, je prends à témoin la population, de dire que, si la seule raison de la recommandation du collègue, c'est de faire un débat ici, ça n'avance personne, parce que, si, en pratique, il n'est pas possible de monter une preuve solide, c'est impossible de récupérer les sommes. Alors, je lis l'extrait de la recommandation n° 5 :

«Toutefois, il faut souligner que les récentes enquêtes menées par le DGEQ montrent de grandes difficultés à récupérer une preuve documentaire permettant d'établir une contravention à la loi si un délai de plus de sept ans s'est écoulé depuis l'événement.» Ce n'est pas inventé, cette affaire-là. «Par conséquent, le DGEQ recommande que le délai de prescription de cinq ans actuellement prévu aux lois électorales soit augmenté à sept ans.»

Ça, c'est une institution indépendante qui fait cette recommandation-là de façon indépendante. Alors, c'est : il faut prolonger le délai de prescription de cinq à sept ans, tout comme le délai de conservation des documents. Alors, voilà la question. Moi, je suis tout à fait pour, favorable au fait de récupérer des sommes. Il l'a dit de façon très correcte, il dit : Si on prouve qu'elles sont illégalement versées. Mais, pour prouver qu'elles sont illégalement versées, encore faut-il en avoir la preuve documentaire, sinon il n'y aura pas d'action possible en cour. Alors, il faut quand même avoir cet échange, mais je suis ouvert à avoir cette discussion lors du dépôt du projet de loi.

Le Président (M. Ouellette) : M. le chef de la seconde opposition, pour la quatrième ronde de questions.

M. Legault : M. le Président, je ne parle pas des pouvoirs puis du travail du Directeur général des élections, je parle du travail d'un leader qui a à poser un acte moral, à faire sa propre enquête au Parti libéral du Québec. Comment se fait-il qu'il ne sent pas le besoin, avec tout ce qu'on entend depuis des semaines, de lui-même faire son enquête à l'interne? À mon avis, c'est un manque de leadership, là, il n'a pas à attendre après le Directeur général des élections ou d'avoir des preuves, quelles qu'elles soient. Je veux dire, il peut aller voir les gens de son parti puis dire : Sortez-moi l'argent qui a été collecté en 2007, 2008, 2009 par Marc-Yvan Côté.

Ce que je voudrais savoir aussi, selon les informations qu'il a : Est-ce que Marc-Yvan Côté a collecté des sommes pour le Parti libéral du Québec après 2009, selon ses informations?

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre, pour une minute.

M. Couillard : Alors, je vais être très clair avec lui, je n'ai pas cette information. Je n'ai pas cette information, et, à la question, on m'a répondu non.

Maintenant, ce qu'on est capables, de faire, M. le Président... puis il faudrait qu'il soit réaliste un peu. Je comprends qu'on veut avoir des effets oratoires ici, là, mais il faudrait qu'il soit réaliste et se rende compte que ce qu'on peut faire, et ce qu'on fait, et ce qu'on doit faire, c'est de faire le relevé, parmi les documents qui sont disponibles, de qui, monsieur ou madame X ou Y, a fait tel don, si on est capables de le faire, pour autant qu'on ait les documents. Là, on a vu tantôt la limite de conservation des documents.

Alors, moi, je suis prêt à aller au maximum possible, dans le respect des lois et dans la capacité qu'on a de mener une preuve, pour récupérer les sommes. Ce n'est pas ça qui est en jeu, je suis d'accord avec lui. Il essaie de nous montrer en désaccord, je suis d'accord avec lui, mais...

Une voix : ...

M. Couillard : Mais oui parce que, s'il propose quelque chose qui est irréalisable, ce n'est qu'une apparence de volonté, et sa position ne tient pas.

Je lui ai lu tantôt l'explication du DGE. Ce que le DGE nous dit... Non, ce n'est pas une question autre que ça, M. le Président. Je vois le chef qui hoche de la tête. Il s'agit de voir qu'est-ce qu'il est possible de récupérer comme information, tout simplement. Alors, voilà la limite devant laquelle on est.

Ce n'est pas, en aucun cas, en aucun cas, un désir de notre part de ne pas rembourser les sommes qui auraient été perçues illégalement. On l'a fait à chaque fois que le DGE nous l'a demandé, comme d'ailleurs les autres partis politiques. Récemment, il y a eu des réclamations, d'ailleurs, faites dans les partis qui sont autour de cette table.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. Cinquième ronde de questions. M. le chef de la seconde opposition.

M. Legault : M. le Président, je vais être très clair, je ne parle pas du Directeur général des élections. Ce que je demande au chef du Parti libéral du Québec : Est-ce qu'il est prêt, aujourd'hui, à s'engager à faire une enquête à l'interne pour identifier l'argent qui a été collecté illégalement par le Parti libéral au cours des 20 dernières années et de rembourser l'argent qui a été collecté illégalement, de rendre son enquête publique, être transparent? Est-ce que, oui ou non, il s'engage à le faire?

Le Président (M. Ouellette) : Une minute, M. le premier ministre.

M. Couillard : M. le Président, je suis un peu déçu parce que mon collègue essaie de nous placer en opposition sur cette question, alors qu'on poursuit le même but.

M. Legault : Non.

M. Couillard : On poursuit le même but.

M. Legault : Non.

M. Couillard : D'abord, c'est de continuer à assainir continuellement nos pratiques en financement mais également de corriger ce qui a été fait qui n'est pas correct dans le passé. Mais c'est la même question et la même réponse. Même, si je demande au parti, et je vais faire toutes les vérifications possibles, si les documents n'existent pas, ils n'existent pas.

Moi, ce que je veux savoir, c'est quelle est la relation... comment peut-on établir la relation entre le solliciteur et le donateur? Si on a cette information, on va les trouver, certainement, et on est en train de la chercher. Mais, pour ce qui est des dons individuels, ce qui est disponible est disponible, et, lorsque le DGE nous demande un remboursement, on le fait, comme l'a fait le Parti québécois et comme l'a fait, je suppose, son parti lorsque le DGE demande des remboursements.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. Sixième ronde de questions, en vous rappelant qu'il reste 2 min 30 s, M. le chef de la seconde opposition.

M. Legault : M. le Président, ce que je comprends, c'est que le chef du Parti libéral du Québec, malgré tout ce qu'on a entendu, là, bien, les Québécois ne seront pas fiers de lui. Il n'a fait aucune enquête, aucune vérification à l'interne pour identifier l'argent qui a été collecté illégalement. Il attend, là, que le Directeur général des élections — qui est hors délai de prescription — fasse la job à sa place.

Quand va-t-il faire preuve de leadership? Je répète ma question pour une dernière fois : Est-ce que le premier ministre s'engage à faire une vérification à l'interne pour identifier l'argent qui a été collecté illégalement par le Parti libéral du Québec au cours des 20 dernières années et de rendre publique cette enquête-là? Est-ce qu'il est d'accord ou non? Mais qu'il arrête de dire qu'on est d'accord, là. Il me dit qu'on est d'accord, mais il ne veut pas faire l'enquête à l'interne. Est-ce qu'il veut faire l'enquête à l'interne pour identifier l'argent collecté illégalement, oui ou non? Est-ce qu'il va s'engager à rembourser, pour les 20 dernières années, l'argent qui a été collecté illégalement ou s'il va se cacher derrière le Directeur général des élections...

Le Président (M. Ouellette) : Oups! Oups! Monsieur...

M. Legault : ...pour les cinq ou sept dernières années, puis là il ne remboursera pas l'argent collecté illégalement?

Le Président (M. Ouellette) : M. le chef de la seconde opposition, je comprends que vous allez me retirer le mot «cacher».

M. Legault : Se réfugier derrière le DGE, bon.

Le Président (M. Ouellette) : Oui. M. le premier ministre, pour la 1 min 30 s qui reste pour votre réponse.

M. Couillard : Je salue la créativité linguistique de mon collègue, mais je vais encore répéter. M. le Président, que les vérifications, elles sont faites en permanence, il y a des audits dans tous les partis politiques, il y a des rapports déposés annuellement, au Directeur général des élections, qui sont scrutés à la loupe, il le sait très bien, ils sont scrutés à la loupe par le Directeur général des élections. Je rencontre même des gens qui ont fait des contributions qui reçoivent des téléphones du Directeur général des élections pour vérifier qu'ils ont effectivement fait cette contribution. Jusqu'à maintenant, chaque fois que le Directeur général des élections a noté une irrégularité ou une illégalité, les remboursements ont été faits immédiatement, bien sûr, et sans discussion. On va faire toutes les vérifications qu'il est possible de faire, et chaque fois qu'une contribution sera manifestement illégale, elle sera remboursée. Mais encore faut-il prouver qu'elle est effectivement illégale. C'est une simple question de droit commun, M. le Président.

Mais, encore une fois, on voudrait aujourd'hui parler également des pratiques en cours maintenant, et je crois qu'on devrait dire aux Québécois qu'heureusement les pratiques de financement au politique au Québec ont changé. Elles ont changé profondément. C'est à l'initiative du Parti québécois, la loi de 100 $. Moi, je l'ai saluée et j'ai recommandé son adoption, puis on a voté unanimement pour l'adopter. Ça a changé beaucoup de choses puis ça a corrigé beaucoup de problèmes, notamment le problème de perception.

Parce qu'on avait un échange tantôt, mon collègue de l'opposition officielle et moi, sur les objectifs de financement qui existaient dans nos partis politiques respectifs. Ça ne dit pas qu'il y a des objectifs... que c'est anormal qu'il y ait des objectifs. Ça crée une perception, qui est mauvaise pour la démocratie de proximité entre le donateur et l'organisation qui reçoit le don, qui est injuste pour les deux. C'est injuste pour l'organisation qui reçoit le don puis c'est injuste pour la personne qui fait le don parce que ça crée une impression de proximité autour de sommes d'argent relativement importantes.

Alors, les objectifs ont existé, sont complètement différents maintenant, et j'espère qu'on va continuer à travailler ensemble pour assainir les pratiques politiques de façon continue parce qu'il faut conserver notre vigilance.

Le Président (M. Ouellette) : Je nous rappelle, avant qu'on entame la deuxième ronde de questions, que nous sommes réunis... on a fait un premier bloc sur l'éthique, on a fait deux heures d'institutions démocratiques hier et on est réunis pour l'étude des crédits budgétaires du Conseil exécutif.

M. le député de LaFontaine.

• (16 heures) •

M. Tanguay : Merci. M. le Président, vous êtes un devin et vous êtes perspicace de faire ce rappel au règlement. C'est pour ça que je ne passerai pas, évidemment, énormément de minutes sur le sujet du cynisme. Autrement dit, le cynisme, c'est dire une chose et faire son contraire.

Mais vous allez me permettre, par contre, M. le Président, de passer quelques minutes sur le cynisme appliqué à la sauce du Parti québécois. Et ça, M. le Président, c'est en lien direct avec les questions que vous avez posées. Mais, rassurez-vous, ça ne durera que trois, quatre minutes parce que je sais que ma collègue a des questions à notre premier ministre concernant les crédits. Mais vous me permettrez de soulever deux éléments.

«Cynisme», c'est dire une chose et faire son contraire. Le député de Saint-Jérôme est propriétaire de 40 % des médias au Québec, il a annoncé en septembre 2015...

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de LaFontaine! M. le député de LaFontaine!

M. Tanguay : M. le Président, oui?

Le Président (M. Ouellette) : Si j'ai pris la peine de nous rappeler, au début de cette deuxième ronde de questions, que j'espérais que les questions portent sur les crédits budgétaires du Conseil exécutif, j'entends bien que les questions vont porter, sur la deuxième ronde de questions, sur les crédits du Conseil exécutif. Merci, M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Alors, M. le Président, vous me permettrez... Vous savez, quand une partie traite d'un sujet et que vous la rendez pertinente, vous devez accorder à la partie adverse, évidemment, l'occasion de répliquer. Puis je vous ai annoncé que ça allait durer quelques minutes. Si vous me dites, M. le Président, puis je suis prêt à reconnaître votre autorité là-dessus — de toute façon, je ne l'aurais jamais contestée, en vertu de l'article 41 de notre règlement — que les questions, à partir de maintenant, seront, ce que je vous ai plaidé il y a une heure, en lien direct, M. le Président, avec les crédits, moi, je n'ai pas de problème avec ça, je vais céder la parole à ma collègue. Mais, si d'aventure... Puis je ne veux pas bâillonner, selon la règle que vous avez établie, je ne veux pas bâillonner mes collègues. Vous avez dit que c'était pertinent. Mais, si vous me dites que, comme président, à partir de maintenant, on va parler des crédits budgétaires du Conseil exécutif — c'est-u ça que vous me dites? — je me tais et je n'y vais pas, sur les objectifs de financement de 80 000 $ par année du Parti québécois. Si vous me le dites, M. le Président, pas de problème, on va revenir à ce qu'on n'aurait jamais dû mettre de côté, c'est les crédits du Conseil exécutif. Je vous écoute, M. le Président.

Le Président (M. Ouellette) : Vous m'enlevez les mots de la bouche, M. le député de LaFontaine. J'ai pris la peine, après la première ronde de questions, de vous mentionner qu'on venait de faire une ronde sur l'éthique, qu'on a fait deux heures de crédits sur les institutions démocratiques pas plus tard qu'hier et que, dorénavant, je souhaiterais que les questions portent, pour les prochaines rondes de questions, sur les crédits budgétaires du Conseil exécutif.

M. Tanguay : M. le Président, je salue votre décision. Je mets de côté mes exemples de cynisme et les quotas de financement au Parti québécois...

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : ...et je cède la parole à ma collègue pour parler enfin, M. le Président, des crédits du Conseil exécutif.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le député de LaFontaine. Mme la députée de Crémazie.

Mme Montpetit : Je vous remercie, M. le Président. Je salue aussi votre décision. Je pense qu'on est là pour parler des vrais dossiers, des vraies affaires, des vrais enjeux, et on va revenir, donc, aux décisions gouvernementales quant aux crédits du comité exécutif.

Et je voulais parler plus particulièrement d'un événement qui a eu lieu en décembre dernier à Paris, dont on peut être extrêmement fiers comme société. Je parle évidemment de la COP21. Le Québec a eu l'occasion de réitérer son leadership dans la lutte contre les changements climatiques, et le rayonnement positif qu'a eu le Québec lors de cet événement est absolument sans équivoque. Et je vais me permettre de faire quelques citations parce que je pense que ça nous fait du bien, des fois, de parler de choses positives et qu'on devrait le faire plus régulièrement collectivement. Et je veux citer notamment Al Gore, l'ancien vice-président des États-Unis, prix Nobel de la paix, qui, à la sortie de cette conférence, avait dit : «Merci au peuple du Québec. Vous êtes de plus en plus connus comme des héros de la lutte aux changements climatiques.» Il en avait profité pour louanger longuement le leadership fantastique, là je le cite, fantastique de notre gouvernement en soulignant que le Québec montre la voie.

Et les louanges ont été nombreuses, puis j'en profite aussi pour souligner un éditorial du New York Times du 19 janvier 2016 qui confirmait le leadership du Québec et le statut de pionnier de notre société en matière de lutte contre les changements climatiques. Puis je me permets de citer un extrait de l'article, qui disait : «Ces actions méritent d'être applaudies, mais leur vraie valeur réside en l'exemple qu'elles procurent au reste du monde.» Et je pense qu'elle est là, notre force, d'être progressistes et d'avoir un grand leadership dans ce dossier-là.

Et je vais me permettre un très court aparté, M. le Président, un peu plus personnel. Vous savez, j'ai travaillé dans le réseau de la santé fort longtemps et, à force de nombreuses lectures, nombreuses discussions avec des médecins, j'ai réalisé, au cours des dernières années, combien l'un des risques qui planaient au-dessus de notre société était la question de l'impact des facteurs environnementaux sur la santé des populations, et sujet qui m'est apparu tellement important, à l'époque, que j'étais retournée faire une maîtrise en environnement, et mon mémoire était consacré spécifiquement à cet enjeu-là, l'impact des facteurs environnementaux sur la santé. Ce que j'en ai retenu, c'est que non seulement l'environnement, c'est un enjeu qui est transversal, mais qu'il faut surtout lui accorder une importance et une attention particulières et urgentes parce qu'on ne peut pas revenir en arrière. Et je suis extrêmement fière qu'on mette cet enjeu-là au coeur de notre action gouvernementale puis je pense qu'on a eu l'occasion de le réitérer à de nombreuses reprises au cours des deux dernières années déjà, notamment par la cible de réduction des gaz à effet de serre qui a été adoptée dernièrement, qui a été fixée au mois de novembre dernier, qui se trouve à être la cible la plus ambitieuse du Canada et également par le marché du carbone, qui va nous permettre d'atteindre cette cible.

Et je veux me permettre aussi de citer, à cet effet-là, notre premier ministre, qui disait : «Le Québec s'engage dans la lutte globale aux changements climatiques, parce qu'ils ne connaissent pas de frontières et traversent les générations.» Et je pense que c'est une phrase qui est particulièrement inspirante. Et c'est ce qui montre aussi le vrai leadership d'un gouvernement, c'est sa capacité à se projeter dans des enjeux qui sont futurs et qui sont bien au-delà de la durée, probablement, de notre gouvernement et de notre durée de vie à chacun d'entre nous. Et les impacts des décisions qu'on prend aujourd'hui à cet effet-là perdureront dans le temps pour des décennies et des décennies, et je pense qu'il faut en être extrêmement fiers.

Et je sais que notre premier ministre ne tarit pas de parler de ce sujet et je voudrais lui donner l'occasion de réaborder la raison pour laquelle on apporte autant d'importance à toute la question environnementale et à la lutte aux changements climatiques.

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Merci, M. le Président. Effectivement, c'est une question majeure et prioritaire pour le Québec. Disons cependant d'abord et d'entrée de jeu que le Québec a les moyens de ses ambitions en raison de ses atouts. Si notre économie, si notre profil énergétique étaient basés sur les combustibles fossiles, comme c'est le cas dans d'autres régions canadiennes, effectivement, ce ne serait pas la même situation, mais parce que la nature, je dirais, nous a bénis avec 3 % des réserves mondiales d'eau, avec la quatrième plus grande puissance de production hydroélectrique au monde, avec une population, également, qui est fortement sensibilisée et engagée sur les questions environnementales, non pas qu'il n'y ait pas d'amélioration à faire, mais on sent qu'il y a un fort soutien populaire. Effectivement, ce ne serait pas possible sans cela.

Il faut également dire deux choses. D'abord, les changements climatiques, il faut agir pas pour empêcher ce qui va arriver plus tard, oui, bien sûr, mais empêcher ou diminuer ce qui arrive maintenant, aujourd'hui. Si vous allez sur les côtes gaspésiennes ou la Côte-Nord, les gens savent très bien quels sont les impacts des changements climatiques, ils ont juste à regarder de l'autre côté de la route qu'est-ce qui est arrivé à la falaise qui donne sur la mer au cours des cinq dernières années. Elle a reculé et reculé. Il y a cette photo célèbre d'une maison qui est presque dans le vide. Donc, l'érosion des côtes, c'est dû à quoi? C'est dû à l'augmentation du niveau des mers, et l'augmentation du niveau des mers, on le sait, est due à la fonte des glaces, notamment des glaces polaires, qui ont déjà cet impact. Premier élément.

Le deuxième élément, c'est notre territoire nordique. On a un immense territoire subarctique au Québec, dans le Nunavik, avec du permafrost, du pergélisol, et déjà les impacts se font sentir par la fonte de ce pergélisol, qui entraîne des conséquences majeures pour les infrastructures, par exemple, des pistes d'aérodrome qui s'affaissent, par exemple des planifications de bâtiment qui doivent être complètement refaites parce que les fondations deviennent instables. Et ça, je peux vous dire que les gens du Nord le voient. Ils sont aux premières loges, ils voient les effets du changement climatique.

Et il y a deux autres éléments qu'il faut ajouter : les éléments climatiques extrêmes et également les impacts sur la santé, qui sont déjà bien connus. Et je pense qu'un de ceux qui ont le mieux posé le problème, depuis quelques années, c'est le président Obama. Lorsqu'il a présenté la question à la population américaine, il n'a pas commencé en disant combien ça va coûter, lutter contre les changements climatiques. Il a commencé en disant combien ça coûte, les changements climatiques, et combien ça va continuer à coûter si on n'agit pas. Et d'ailleurs, au Québec, on a fait faire une étude par le groupe CIRANO qui établit à plusieurs milliards de dollars le coût des changements climatiques, notamment dans le domaine des infrastructures et dans le domaine de la santé.

Donc, on a une responsabilité pour nous-mêmes, mais on a, bien sûr, notre part de responsabilité planétaire dont il faut s'acquitter. On a donc été des précurseurs. En 2007, le Québec a établi une tarification de carbone par des redevances sur les hydrocarbures, qui ont été remplacées lorsque le Québec, après s'être joint au WCI, Western Climate Initiative, a formé un marché du carbone qui s'est lié progressivement avec la Californie, ce qui est le cas actuellement. Nous sommes à six ou sept enchères, j'ai le nombre quelque part, ici, dans mes données. On est rendus à plusieurs enchères faites conjointement avec la Californie. L'Ontario a annoncé son intention de s'y joindre, le Manitoba et peut-être des États américains. Donc, c'est une tendance mondiale parce que la Chine également évolue vers un marché de carbone, de même que d'autres régions du monde.

• (16 h 10) •

Pourquoi c'était un bon choix, un marché du carbone? Parce que ça met le choix sur les épaules des émetteurs d'émissions. Si je suis un entrepreneur et que j'émets des milliers et des milliers de tonnes de CO2, j'ai le choix : ou bien je vais payer mes droits d'émission chaque année, ce qui va gruger ma marge de profit, ou bien je vais investir dans des technologies vertes — et on a beaucoup de belles entreprises au Québec qui peuvent faire ça — diminuer mes émissions, ne plus avoir besoin d'acheter ces crédits ou moins de crédits et même peut-être devenir un vendeur de crédits sur le marché du carbone.

Donc, c'est ça, l'esprit, et, je dirais, la souplesse, et l'efficacité du marché du carbone parce que, contrairement à l'autre option, qui est la taxe sur le carbone, le marché du carbone comprend un aspect de limitation des émissions. En anglais, on dit le «cap-and-trade». En français, on dit le système de plafonnement d'émissions. Ça veut dire qu'il n'y a pas seulement l'échange financier sur les droits d'émission, mais il y a une limite annuelle sur ces émissions et qui nous assure de l'atteindre parce que toute émission doit être comptabilisée dans les échanges de crédits. Alors, ça, je pense que c'est également quelque chose qui est à considérer. Effectivement, beaucoup d'acteurs internationaux nous ont salués et félicités.

Mais la lutte aux changements climatiques, c'est également, et je voudrais en parler parce que je suis toujours frappé lorsque les gens essaient de mettre en opposition développement économique et action environnementale, lutte aux changements climatiques, la lutte aux changements climatiques, c'est une occasion extraordinaire de croissance économique, de développement et de création d'emplois, de bons emplois, dans toute la filière des technologies vertes et des énergies renouvelables. Et on a, au Québec, des regroupements d'entreprises qui sont dynamiques et très réputés et qui commencent de plus en plus à exporter leurs compétences à l'extérieur.

Donc, il s'agit de faire une transition. Je pense qu'il faut répéter ça à la population. Ce n'est pas vrai que, demain, on va mettre le commutateur à «off», puis il n'y aura plus de pétrole au Québec. D'ailleurs, la politique énergétique prévoit une réduction de 40 % d'ici 2030, mais on va faire cette transition progressivement en introduisant de plus en plus d'énergies renouvelables, notamment l'hydroélectricité, pour compenser et également en utilisant des combustibles de transition comme le gaz naturel ou le gaz naturel liquéfié.

Alors, c'est le genre d'action que le Fonds vert, qui est donc le produit du marché du carbone, nous permet de faire. On a bien reçu les critiques sur la gouvernance du Fonds vert. D'ailleurs, notre ministre de l'Environnement a annoncé des modifications significatives à sa gouvernance. Elles seront déposées dans un projet de loi de façon à créer un comité aviseur extérieur qui s'assure que les sommes versées par le Fonds vert sont véritablement engagées à des objectifs clairs et vérifiables de réduction d'émissions.

Il y a cependant une grande majorité de projets actuellement soutenus qui sont clairement en rapport avec les objectifs de réduction des gaz à effet de serre. Par exemple, on parlait ce matin des subventions pour les acheteurs d'autos électriques. Bien, ça, ça vient du Fonds vert. Pas de Fonds vert, pas de subvention pour les acheteurs d'autos électriques. Le crédit RénoVert n'est pas complètement mais largement soutenu à l'aide du Fonds vert. Des initiatives de transport collectif également sont fournies par le Fonds vert parce que, je l'ai dit ce matin, le plus grand pourcentage de nos émissions vient du domaine des transports, M. le Président.

C'est un endroit où le Québec fait office de leadership, c'est un endroit où on peut développer nos relations internationales et notre visibilité internationale avec la langue, la culture, l'économie et nos entreprises. Il faut en profiter, il faut l'utiliser comme levier de croissance, de reconnaissance et de prospérité pour les Québécois.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. M. le député de LaFontaine, pour quatre minutes.

M. Tanguay : Oui, rapidement, M. le Président, je me rappelle l'élection... la campagne électorale de 2014, et ma question portera sur le bouclier fiscal et, de façon tangible, comment, lors du dernier budget, on a fait en sorte, justement, de s'assurer qu'il y ait ce fameux bouclier fiscal. Campagne électorale 2014, je me rappelle, notre premier ministre avait rencontré des gens qui nous exprimaient la réalité qui était la suivante : une augmentation de salaire voulait, d'autre part, dire également une baisse des avantages fiscaux. Alors, des gens, dans certains cas précis, mais quand même des cas qui revenaient beaucoup trop souvent, se voyaient plus avantagés de refuser une augmentation de salaire parce que, par ailleurs, une augmentation de salaire voulait dire la perte d'avantages fiscaux, sociofiscaux. Alors, faire en sorte que la fiscalité québécoise soit plus compétitive, plus efficace, plus équitable, j'aimerais entendre le premier ministre, M. le Président, sur les applications très, très, très tangibles de ce bouclier fiscal et de l'impact que ça a dans la vie des Québécois et Québécoises.

Le Président (M. Ouellette) : Une réponse de trois minutes, M. le premier ministre.

M. Couillard : Oui, merci, M. le Président. En fait, c'est une des recommandations de la commission sur la fiscalité présidée par Luc Godbout, et une des recommandations particulièrement intéressantes. Effectivement, en campagne électorale, j'avais été frappé par ces anecdotes, qui sont répétées, d'entrepreneurs qui me disaient que les employés refusaient des augmentations de salaire ou des primes parce que ça les faisait basculer dans une zone de revenus où ils avaient moins d'argent dans leurs poches après avoir reçu l'augmentation ou la prime. On ne peut pas penser développer une économie avec un mécanisme fiscal qui décourage la progression et l'effort. Donc, cette question des taux implicites, des taux de pénalité lorsqu'on augmente de revenus, elle était vraiment centrale, et d'ailleurs M. Godbout en a fait une belle recommandation qui s'intitule, donc, le bouclier fiscal.

C'est quoi, ça, le bouclier fiscal? C'est une mesure qui permet de compenser pour les familles, particulièrement à plus faibles revenus et revenus moyens, moyens bas, les impacts de la perte de certaines prestations gouvernementales sur le revenu lorsqu'ils augmentent de salaire, particulièrement deux d'entre elles : la prime au travail et le crédit d'impôt pour frais de garde d'enfants. Ce sont des primes et des crédits qu'on perd lorsqu'on augmente de salaire, et il s'agit de protéger les gens contre cet effet néfaste là.

Il y a d'ailleurs, dans le livre du budget, plusieurs illustrations qui montrent comment ceci se produit, mais je peux donner un exemple très concret. Pour un couple dont les revenus de travail passeraient de 40 000 $ à 46 000 $ en 2016, qui a des pertes importantes dues à la prime au travail et le crédit d'impôt pour frais de garde, avec le bouclier, avant la bonification, on avait une protection de 555 $, avec le bouclier bonifié, c'est 720 $, donc 165 $ de plus de protection, ce qui nous permet vraiment de faire en sorte que quelqu'un — et c'est bien la moindre des choses et ce qui doit être fait — ait le goût de travailler plus, ait le goût d'avoir une promotion, ait le goût de recevoir une prime de performance et ne soit pas pénalisé pour ça. Je me souviens très bien, c'est à Repentigny qu'on m'avait conté cet épisode d'une employée qui avait refusé une augmentation de salaire. Ça m'avait beaucoup, beaucoup frappé.

Alors, je crois que c'est une mesure innovante. Et c'est une des raisons pour lesquelles le Québec demeure une des sociétés les plus égalitaires, pas parfaite mais une des sociétés les plus égalitaires en Amérique. Si on étudie divers indicateurs tels que le coefficient de Gini ou la polarité des revenus le long des revenus possibles et le pourcentage de bas revenus, le Québec fait toujours meilleure figure que les autres provinces canadiennes parce qu'on a su développer un filet de protection sociale qui est équitable. Et le bouclier fiscal fait partie de ça. La modulation des frais de garde, ça fait partie de ça également. L'assurance parentale, ça fait partie de ça. La prime aux enfants, le soutien aux enfants, ça fait partie de ça.

Alors, on a choisi collectivement de nous donner ces mécanismes de protection, mais il s'agit de faire en sorte que ces mécanismes de protection ne soient pas un frein à l'ambition et à l'effort. C'est la raison pour laquelle le bouclier fiscal était nécessaire. Il est en place. Il peut toujours être bonifié parce que les éléments, les montants que j'ai mentionnés peuvent être bonifiés dans l'avenir.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. M. le chef de l'opposition officielle.

M. Péladeau : Merci, M. le Président. Donc, vous avez rappelé à juste titre, M. le Président, que nous sommes à l'étude de crédits pour le ministère du comité exécutif. Donc, une étude de crédits doit prendre le temps de faire le nécessaire pour savoir comment et combien nous dépensons l'argent des contribuables, des citoyens et des citoyennes, pour lequel ils travaillent fort et pour lequel ils sont en mesure de recevoir des services et également un environnement qui s'engage solidement vers le développement économique.

Mais également ce que la population souhaite, c'est de bien connaître qui dépense cet argent. Et il y a un principe fondamental en démocratie, en démocratie parlementaire britannique, qui est la responsabilité ministérielle, et ça, c'est incontournable, M. le Président.

Alors, tout à l'heure, le premier ministre nous a dit qu'il avait, donc, pris connaissance de l'existence de pratiques de financement du Parti libéral dès 2003...

Le Président (M. Ouellette) : Monsieur...

M. Tanguay : ...je n'ai pas besoin de faire le rappel au règlement, M. le Président, je vous laisse rendre votre décision. C'est évident, là.

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de LaFontaine, merci. Ce n'était pas une question de règlement.

Juste vous rappeler, M. le chef de l'opposition officielle, que je pense avoir statué que je souhaite que les questionnements, dans cette deuxième ronde de questions et les subséquentes, portent sur les crédits du Conseil exécutif. On a eu tout le temps d'explorer, chacun des partis, la question de l'éthique lors de la première et, avec votre collègue de Marie-Victorin hier, nous avons, deux heures, fait l'étude des crédits des institutions démocratiques. Donc, je souhaite que vous concentriez votre intervention ou vos interventions sur les crédits budgétaires du Conseil exécutif, M. le chef de l'opposition officielle.

• (16 h 20) •

M. Péladeau : C'est exactement ce que je fais, M. le Président. Et je vous réitère ce que je vous disais tout à l'heure : Oui, dépenser l'argent des contribuables nécessite l'examen minutieux des représentants à l'Assemblée nationale, mais je pense également que cette analyse doit se poursuivre à l'égard de ceux et celles qui ont cette responsabilité ministérielle qui est incontournable, je vous le répète une fois de plus, M. le Président, en matière de démocratie et en matière de parlementarisme britannique.

Alors, il se trouve que, dans son Conseil des ministres, le premier ministre, après qu'il nous ait dit qu'il avait eu connaissance des pratiques de financement en 2003, la députée de Laviolette et l'actuelle ministre du Tourisme a déclaré sous serment, M. le Président, sous serment, je le répète, sous serment, et je lis son témoignage, le 14 mai 2014 : «Bien, écoutez, moi, j'ai appris l'objectif de financement, le montant que M. MacMillan a sorti, et je l'ai appris quand M. MacMillan l'a dit. Moi, je n'étais pas au courant [de cet objectif].» Alors, c'est un témoignage sous serment à la commission Charbonneau.

Le lendemain, M. le Président, le premier ministre a donné une entrevue au journaliste Michel Corbeil, d'ailleurs que nous avons salué à l'Assemblée nationale récemment, et nous y lisons le paragraphe suivant : «Le chef libéral — dont je vais taire le nom — ne croit pas sa députée — députée de Laviolette et ministre du Tourisme — lorsqu'elle affirme qu'elle ignorait l'objectif de financement qui lui était assigné en tant que ministre. Sa place au caucus est en péril.»

M. Tanguay : ...appeler au règlement.

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Je veux juste que vous m'indiquiez... Là, on parle d'objectifs de financement politique. Si c'est pertinent, pas de problème, j'ai l'intention, après ça, de parler, moi, M. le Président, d'objectifs de financement politique péquiste. Si c'est pertinent pour un, il faut que ce soit pertinent pour l'autre. Vous m'avez coupé tantôt.

Le Président (M. Ouellette) : M. le chef de l'opposition, en vous rappelant les souhaits de la présidence relativement à l'étude des crédits budgétaires du Conseil exécutif. Je comprends que c'est un préambule, je comprends que vous allez arriver à une question, mais, si effectivement votre question est dans le même type que la première ronde de questions, je ne la permettrai pas, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Péladeau : Tout à fait, M. le Président. Donc, je pense qu'il est utile de mentionner qu'encore une fois nous sommes aux crédits du ministère du comité exécutif, et je parle en l'occurrence d'une membre du comité exécutif, la députée de Laviolette et l'actuelle ministre du Tourisme. Alors, il y a une relation. C'est certainement le premier ministre qui a le privilège, la prérogative de former son Conseil des ministres, et, dans cette prérogative, il doit faire aussi acte de jugement et de leadership.

Alors, c'est le premier ministre lui-même qui dit, le 15 mai 2014 — on ne parle pas d'il y a 15 ans, là, on parle de tout récemment — qu'il ne croit pas la députée de Laviolette qui a témoigné sous serment à la commission Charbonneau. Alors, ma question est simple, M. le Président : Le premier ministre a décidé de nommer la députée de Laviolette au Conseil des ministres le 28 janvier 2016. Ça aussi, là, ce n'est pas il y a 15 ans, là, c'est tout récent. Donc, elle est membre du comité exécutif, et voici les raisons pour lesquelles je me crois tout à fait justifié de poser la question que je vais poser au premier ministre. Le premier ministre avait une opinion le 15 mai 2014, il ne la croyait pas. Maintenant, je vais lui poser la question : Est-ce qu'il la croit maintenant, lorsqu'elle a témoigné sous serment à la commission Charbonneau qu'elle n'était pas au courant des objectifs de financement alors qu'elle était membre du caucus pour le Parti libéral du Québec?

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Bien, justement, M. le Président, parce que ce témoignage a été fait, je n'ai aucune raison de le mettre en doute, et il n'a aucune raison, lui non plus, de le mettre en doute. Le témoignage a été fait, il a été jugé par la commission Charbonneau, qui, dans son rapport, n'a donné aucun blâme à la députée de Laviolette. Je voudrais quand même faire remarquer ce détail, qui n'est pas anodin.

Maintenant, aux gens qui nous écoutent, de Laviolette puis de la Mauricie, je vais leur dire à quel point j'ai confiance en la députée de Laviolette, dans sa capacité de représenter les citoyens et citoyennes de son comté, dans sa capacité d'agir au nom des gens de la Mauricie qui aiment la députée de Laviolette et qui souhaitent qu'elle demeure longtemps parmi eux comme leur représentante et leur ministre régionale.

Alors, effectivement, M. le Président, j'ai expliqué tantôt que, dans mon cas à moi, j'ai reçu les objectifs, mais rien ne me permet de mettre en doute le témoignage de la députée de Laviolette, qui a été fait sous serment. À moins que lui ait d'autres informations, je ne vois pas ce qui me permettrait de le mettre en doute.

Et d'ailleurs la commissaire Charbonneau, qui, à mon avis, a là-dessus... et son collègue, l'autre commissaire, ont là-dessus, si on me permet de le dire, un regard plus impartial que notre collègue le chef de l'opposition officielle pour des raisons évidentes, ils n'ont pas jugé bon... Si c'était terrible, aussi terrible que ce que dit notre collègue, il me semble que ça aurait été au moins mentionné dans les conclusions de la commission Charbonneau. Ce n'est même pas mentionné, il n'y a même pas l'ombre d'un blâme à la députée de Laviolette. Alors, on peut bien essayer de refaire la commission Charbonneau ici... Je sais bien qu'ils n'ont pas aimé le rapport, ils auraient aimé un rapport différent, mais c'est le rapport que les commissaires ont publié, et il faut s'y fier, il faut leur accorder le respect qui leur est dû.

Et je répète que la députée de Laviolette fait un excellent travail comme représentante des citoyens de son comté et de sa région à titre de ministre régionale, et je souhaite qu'elle continue à le faire longtemps.

Le Président (M. Ouellette) : M. le chef de l'opposition officielle.

M. Péladeau : Merci, M. le Président. Écoutez, effectivement, on peut considérer que la population, les citoyens et les citoyennes, les électeurs, les électrices de Laviolette soient très heureux d'être représentés par la députée actuelle. Là n'est pas la question, M. le Président. La question, c'est que le chef du Parti libéral ne croyait pas le témoignage de la députée de Laviolette au moment où il a été effectué à la commission Charbonneau, et aujourd'hui, à partir du 28 janvier 2016, il l'a nommée au Conseil des ministres. Vous savez, c'est donc de lui octroyer toute la confiance nécessaire. Et, je le répète, c'est sous serment qu'elle a témoigné, alors que le premier ministre nous a dit un petit peu plus tôt, durant le témoignage précédent, que les députés étaient au courant des objectifs de financement, les membres du caucus, depuis 2003, M. le Président, 2003.

Alors, ne trouve-t-il pas qu'à partir de ses propres propos, à partir des informations qu'il nous a procurées, que cette situation n'aurait pas dû le préoccuper et peut-être éventuellement aussi faire en sorte... Puisqu'il a milité pour l'éthique et la transparence durant sa campagne électorale, il l'a réitéré à plusieurs reprises, n'aurait-il pas dû utiliser, excusez-moi l'expression, M. le Président, de prudence aristotélicienne pour faire en sorte que les événements que nous avons connus, comme ceux qui se sont produits avec le député de Louis-Hébert, ne viennent pas paralyser son gouvernement comme c'est malheureusement le cas depuis plusieurs semaines?

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre pour une réponse de deux minutes.

M. Couillard : Alors, je vais répéter à mon collègue que, malheureusement pour lui, le gouvernement n'est en rien paralysé. Le gouvernement est en action continue. Le gouvernement est en train de transformer le Québec dans la bonne direction, transformer par une saine gestion des finances publiques, par un développement ordonné de l'économie dans la direction de la nouvelle économie, par de nombreuses initiatives qui sont structurantes et qui nous permettront de donner les moyens aux générations futures d'avoir également des rêves et de pouvoir les mettre à profit.

Je voudrais lui faire remarquer, M. le Président, que la nomination de la députée de Laviolette s'est faite après la publication du rapport de la commission Charbonneau, qui, je le répète, à moins qu'il ait une information différente, ne blâme en rien la députée de Laviolette. Ce qu'il dit là, c'est assez sérieux quand même. Il me semble que, si les commissaires avaient jugé qu'il y avait matière à blâme, on aurait pu s'attendre à ce que ça se retrouve dans le rapport, non? Ce n'était pas dans le rapport, ce n'est pas dans les conclusions, de sorte que ça me permet de réitérer, M. le Président, ma confiance en la députée de Laviolette, qui a droit comme tout le monde au respect de son témoignage qui a été apporté lors de la commission Charbonneau.

Je vais juste également dire que j'ai retrouvé l'entrevue de M. Corbeil, que je respecte beaucoup, et je ne me souviens pas d'avoir prononcé les mots qu'il écrit là, d'ailleurs il ne les met pas entre guillemets. Il dit : «Le chef libéral[...] — moi-même — ne croit pas sa députée», ce qui est également mentionné par mon collègue. Je ne crois pas que j'aie dit ça et je ne me souviens pas d'avoir dit ça.

Par contre, j'ai dit que moi, j'avais eu communication de l'objectif. D'autres collègues, en passant, l'ont fait également. Et le témoignage de la députée de Laviolette lui appartient, il a été prononcé sous serment.

Et moi, j'avais dit : «Actuellement, elle demeure au caucus, c'est clair. [...]On verra le témoignage. On verra le rapport.» On a vu le rapport, il n'y a pas de blâme, la vie continue, M. le Président.

Le Président (M. Ouellette) : M. le chef de l'opposition officielle.

• (16 h 30) •

M. Péladeau : Merci, M. le Président. Donc, le premier ministre nous parle de la commission Charbonneau et qu'il n'y a pas eu de blâme. Est-ce qu'il est nécessaire de lui mentionner que Nathalie Normandeau n'a reçu aucun blâme de la commission Charbonneau? Pourtant, elle est aujourd'hui accusée de complot, de fraude, d'abus de confiance et de corruption.

Le Président (M. Ouellette) : Soyez prudent, M. le chef de l'opposition officielle, en vertu de l'article 35. Soyez prudent dans vos propos à compter de maintenant. Merci.

M. Péladeau : Marc-Yvan Côté, M. le Président, n'a pas reçu de blâme non plus par la commission Charbonneau. Est-ce qu'on doit conclure que, parce qu'il n'y a pas eu de blâme et qu'il y a eu une dissidence d'un des vérificateurs... ou d'un des commissaires plutôt en fonction des événements qui se sont produits... Et je reviens sur ce que j'ai mentionné, c'est-à-dire la prudence à laquelle devrait s'astreindre le premier ministre dans la composition de son Conseil des ministres afin de rassurer la population, les citoyens et les citoyennes qui paient leurs impôts de façon honnête, qui travaillent fort pour les payer, qui s'attendent à des services... Est-ce que le premier ministre, compte tenu du fait qu'il ne croyait pas la députée de Laviolette après son témoignage, a fait justement oeuvre de prudence lorsque, le 28 janvier 2016, il a décidé de la nommer à son Conseil des ministres?

Le Président (M. Ouellette) : Une réponse de deux minutes, M. le premier ministre.

M. Couillard : Alors, M. le Président, oui, j'ai été prudent. D'ailleurs, j'ai attendu de voir le rapport de la commission Charbonneau. Et je pense que notre collègue exagère un peu, si je peux me permettre de le lui dire, de comparer les deux situations, qui sont très différentes. Dans un cas, il parle de situations qui ont mené à des accusations criminelles. Je lui donne la chance de dire s'il pense que c'est le même cas pour la députée de Laviolette. Je ne l'entends pas dire ça. Donc, clairement, il ne peut pas faire d'équivalence entre les deux situations.

Moi, ce que je lui répète, c'est que ce qui a été entendu à la commission a été évalué par les commissaires, a été étudié de façon approfondie. Et le rapport publié par la commission Charbonneau ne blâme pas la députée de Laviolette, en laquelle, je le sais, les députés, les citoyens de son comté, les citoyens de sa région ont la plus grande confiance. Et je maintiens ma confiance envers elle. Les choses ont été dites. Elles ont été dites en témoignage sous serment. Elles ont été jugées par la commission Charbonneau. Maintenant, allons de l'avant. La députée de Laviolette continue à exercer son rôle important de ministre régionale pour la Mauricie.

Je savais qu'il préférerait peut-être que ce soit une ministre moins populaire et moins importante pour la Mauricie qui soit là, mais ce n'est pas le cas. C'est la députée de Laviolette, elle fait bien son travail et elle va continuer de le faire au bénéfice des citoyens qui, comme il l'a dit, travaillent fort pour gagner leur vie, payer leurs impôts et voient les résultats, les investissements, les développements qui se font en Mauricie non pas uniquement à cause de la députée de Laviolette, mais toute l'équipe de députés de la région qui travaillent, conjointement et en équipe, de façon à faire progresser la région vers davantage de prospérité et davantage de réussite. C'est le cas dans plusieurs domaines, et, si j'avais le temps, M. le Président, et je n'ai peut-être pas le temps, je ne sais pas combien...

Le Président (M. Ouellette) : Vous n'avez pas le temps.

M. Couillard : Non.

Le Président (M. Ouellette) : Pour la règle d'équivalence, vous n'avez pas le temps, M. le premier ministre.

M. Couillard : J'aimerais bien raconter l'histoire de Shawinigan. C'est une belle histoire illustrative.

Le Président (M. Ouellette) : Probablement que vous aurez une autre occasion. M. le chef de l'opposition officielle, vous dire qu'il vous reste 3 min 30 s.

M. Péladeau : Merci, M. le Président. Écoutez, c'est le premier ministre qui fait référence à la commission Charbonneau, alors je pense que c'est important également de mentionner qu'à la commission Charbonneau il y a des hommes, et il y en a un, justement, un témoin qui a été arrêté pour parjure et qui a été condamné la semaine dernière. Ce que je dis là, c'est que c'est le premier ministre qui a dit — ce n'est pas moi, là — qu'il ne croyait pas la députée de Laviolette au moment où elle a effectivement fait son témoignage à la commission Charbonneau. Ce n'est pas le député de Trois-Rivières, ce n'est pas le député d'Abitibi-Ouest, c'est le premier ministre qui l'a dit. Or, il décide malgré tout de la nommer au Conseil des ministres. C'est sa prérogative, c'est son droit le plus strict. Est-ce que le premier ministre a fait ce qu'il avait dit qu'il allait faire, c'est-à-dire passer les différents membres de son Conseil des ministres au confessionnal, excusez-moi l'expression, pour bien s'assurer que toutes les règles de l'éthique allaient être respectées? On a vu que ça ne semble pas avoir été le cas avec le député de Louis-Hébert, la semaine dernière, puisque, contrairement à ce qu'il a déclaré, c'est-à-dire qu'il s'était retiré de lui-même du Conseil des ministres, le premier ministre a dit, samedi dernier dans une entrevue au journal La Presse, que c'est lui qui est intervenu pour demander la démission du député de Louis-Hébert ou son retrait du Conseil des ministres.

Écoutez, M. le Président, c'est une question de confiance, c'est une question de confiance de la population à l'endroit de ses représentants, à l'endroit de ceux et celles qui gèrent leur argent. Alors, ma question est très simple : Est-ce que le premier ministre va renouveler sa confiance en la députée de Laviolette, alors qu'il a déjà dit qu'il ne la croyait pas?

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre, il vous reste une minute dans le bloc pour votre réponse.

M. Couillard : Alors, je répète que je ne crois pas avoir prononcé ces paroles. J'amène mon collègue à beaucoup de prudence parce qu'à mots couverts ou même pas trop couverts il est en train de dire que, par l'analogie qu'il a faite, la députée de Laviolette est coupable du même délit pour lequel l'autre personne est accusée. Qu'il le dise publiquement. Je le mets au défi de le dire publiquement. Et je veux lui assurer que, bien sûr, les vérifications sont toujours faites, mais je veux lui assurer également que les gens de la Mauricie sont bien représentés.

Et laissez-moi lui raconter, M. le Président, l'histoire de Shawinigan parce que, là, tous les députés ont agi de façon conjointe, y compris la députée de Laviolette. Il y a eu une fermeture dramatique d'usine à Shawinigan, la Laurentide, de Résolu. C'était le désastre, la ville craignait de perdre sa vitalité même, de fermer. En l'espace de quelques semaines, de quelques mois, on s'est mobilisés, tous les députés ensemble, les membres du Conseil des ministres, faire en sorte que CGI s'installe à Shawinigan, faire en sorte de soutenir Sotrem pour la transformation de l'aluminium. Et, tout récemment, encore une fois avec la ville de Shawinigan, on regarde le DigiHub, qui est la nouvelle orientation digitale numérique que la ville veut donner à son économie, et récemment l'annonce de l'implantation d'une usine de transformation de lithium à Shawinigan. Ça, c'est les actions concrètes que la députée de Laviolette et ses collègues mènent, qui veulent dire des choses concrètes pour les gens, les citoyens et les citoyennes de la région et du comté.

Maintenant, je vais répéter mon invitation au collègue. S'il est si persuadé de ce qu'il dit, qu'il aille le dire à l'extérieur de la Chambre. Il aura l'occasion de présenter ses arguments, et on verra par la suite.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. M. le député de Dubuc.

M. Simard : Merci, M. le Président. D'abord, M. le Président, étant donné que c'est la première fois que j'interviens aujourd'hui, M. le Président, vous me permettrez bien sûr de saluer le premier ministre et également mes collègues, le chef de la première opposition, le chef de la deuxième opposition, les collègues du gouvernement et les collègues de l'opposition. Bien sûr, également, les personnes ici présentes dans cette salle.

D'abord, M. le Président, je voudrais vous parler d'un exercice qui s'est fait dans ma région et, je dois vous dire, qui fait l'envie de plusieurs régions au Québec parce que j'en entends parler et puis on me demande comment faire, on me pose toutes sortes de questions. Et c'est un exercice chez nous qui s'est fait, bien sûr, en collaboration et avec les gens de la région, effectivement.

En août 2014, lors d'une rencontre que nous avons eue, le premier ministre et moi, avec la conférence administrative régionale, le premier ministre a signifié son intention que l'on fasse, bien sûr, un sommet économique régional, que j'en sois le président, bien sûr épaulé par la conférence administrative régionale. Et la volonté du premier ministre, M. le Président, c'était bien sûr que ce ne soit pas un sommet économique fait par les fonctionnaires mais, autrement, que ce soit un sommet économique par les gens de la région, pour les gens de la région. Et ce fut exactement qu'est-ce qui s'est fait, M. le Président.

Dans un premier temps, je dois vous dire que les étapes qui ont été suivies, c'est d'abord, premièrement, la formation d'un comité aviseur, que je vais vous nommer tout à l'heure. Il y a eu la consultation des régionaux, et suivie du sommet lui-même et, bien sûr, par la suite, un suivi du sommet. La consultation qui a précédé la tenue du sommet économique a été de grande envergure. En effet, la démarche de consultation entreprise en février 2015 a permis la participation de plus de 1 200 personnes et le dépôt de près de 95 mémoires.

• (16 h 40) •

La consultation a été réalisée notamment lors de six rencontres territoriales organisées par les MRC, la ville de Saguenay, et lors de 16 rencontres sectorielles organisées par les différents milieux, à laquelle, je vous dirais, toutes sortes d'interventions ont eu lieu de gens... des gens d'affaires, des citoyens ordinaires, des autochtones, etc. Le mandat de mobiliser et de consulter le milieu m'a été confié, bien sûr, comme adjoint parlementaire du premier ministre, et j'ai été épaulé, comme je disais tout à l'heure, par la conférence administrative régionale.

La consultation publique a été réalisée sur trois thèmes précis, M. le Président : renforcer les conditions de succès, consolider et accroître les secteurs structurants et créer de nouveaux piliers. Les comités aviseurs, c'est important que les gens sachent qui faisait partie du comité aviseur parce que vous allez voir par là que l'ensemble de la région était présente. D'abord, j'y étais comme président, comme adjoint parlementaire au premier ministre. Il y avait Jean-Pierre Boivin, préfet de la MRC de Maria-Chapdelaine. Il y avait Ghislaine Hudon, préfète de la MRC Domaine-du-Roy. Il y avait Gilbert Dominique, chef du Pekuakamiulnuatsh Takhuaikan de la communauté innue de Mashteuiatsh. Il y avait André Paradis, préfet de la MRC de Lac-Saint-Jean-Est, Dave Gosselin, directeur général de Négawatts Productions et représentant désigné du Regroupement des chambres de commerce du Saguenay—Lac-Saint-Jean. Il y avait Marc Maltais, directeur régional de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec. Il y avait Carole Tremblay, présidente de Femmessor Saguenay—Lac-Saint-Jean, Jean Tremblay, maire de Saguenay, Martin Gauthier, recteur de l'Université du Québec à Chicoutimi, Gérald Savard, préfet de la MRC du Fjord-du-Saguenay, et Charles Lambert, directeur de l'Agence de Développement économique du Canada pour les régions du Québec. Donc, vous voyez, M. le Président, que ça, c'était le comité aviseur pour la réalisation du sommet.

Le Sommet économique régional du Saguenay—Lac-Saint-Jean a eu lieu, lui, je vous dirai, le 18 juin 2015. Pour l'occasion, des acteurs régionaux se sont réunis afin d'établir un constat commun sur les atouts et les leviers de développement de la région et de cibler les champs d'intervention à mettre en priorité pour les 10 prochaines années. Plus de 250 personnes ont participé à la journée du Sommet économique régional sur l'un des neuf thèmes de consultation.

En plus du premier ministre, il y avait le ministre Paradis. La ministre Vien, les ministres Lessard, Kelley ont participé à l'événement. Le président-directeur général d'Investissement Québec, M. Pierre Gabriel Côté, était présent ainsi que le président-directeur général de la Société du Plan Nord, M. Robert Sauvé. Denis Lebel était présent comme ministre fédéral des Infrastructures, des Collectivités et des Affaires intergouvernementales et ministre de l'Agence de développement économique du Canada pour la région du Québec... a également participé à ces échanges. Justement... ont fait la démonstration que l'ensemble des intervenants régionaux étaient préoccupés par l'économie de la région et voulaient mettre l'épaule à la roue, M. le Président. Le sommet a été un franc succès et s'est déroulé dans une ambiance de collaboration.

Les mécanismes de suivi, M. le Président, maintenant, parce que c'est l'étape où nous sommes. La tenue du sommet a créé plusieurs attentes auprès des intervenants de la région. À l'issue de l'événement, le premier ministre et moi, on... se sont engagés à assurer un suivi très serré des discussions. Le 19 juin dernier, c'est-à-dire le 19 juin 2015, le lendemain de la journée du sommet, nous avons rencontré les membres du comité aviseur pour discuter des suivis au sommet. Et il a ainsi été convenu que, pour chacune des neuf thématiques discutées au sommet — l'agriculture, l'agroalimentaire, le tourisme, la forêt, l'aluminium, mines et métaux, numérique, transport et entrepreneuriat, collaboration avec les Premières Nations — un groupe de travail devait être constitué ou un organisme existant devait être mandaté. Le 7 octobre 2015, le premier ministre a annoncé la mise sur pied de 11 groupes de travail relevant de la CAR, dont le mandat sera de poursuivre le travail amorcé au Sommet économique régional.

Donc, M. le Président, l'ensemble des intervenants s'est nommé des groupes de travail pour s'assurer que la démarche va effectivement arriver et faire des recommandations pour être en mesure de se développer dans les 10 prochaines années. L'objectif initial demeure : mettre en synergie les acteurs du milieu afin de créer les conditions favorables à l'investissement et à l'aboutissement de projets d'entreprises et de création d'emplois. Rappelons-le, M. le Président, c'est un sommet économique par la région et pour les gens de la région.

Donc, il y a eu, bien sûr, des actions de posées pour chacune des neuf thématiques que j'ai nommées tout à l'heure. Il y a un groupe de travail qui, actuellement, est en travail... pas au moment où on se parle, mais, de toute façon, dans un échéancier bien précis choisi par eux. Parce qu'il faut le dire, M. le Président, ce sont tous des régionaux qui ont d'autres choses à faire que de s'occuper de tout le monde, là, mais ils se sont donné comme mission d'arriver à faire des recommandations pour que la région puisse nécessairement se donner des créneaux intéressants pour regarder l'avenir pour les jeunes qui vont demeurer dans notre région, et ça, c'est extrêmement important, et je les en remercie ici.

Donc, M. le Président, j'aimerais poser une question au premier ministre, qui est la suivante : M. le premier ministre, quelle est l'importance que vous accordez justement à cet exercice pour le développement de notre région?

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Bien, merci, M. le Président. Ça a été un exercice vraiment formidable. Je veux en profiter pour féliciter et remercier mon collègue pour son dévouement, autant dans la préparation, la tenue et le suivi du Sommet économique régional. Je pense qu'effectivement c'est un outil qui pourrait être utilisé ailleurs. Je sais que d'autres régions également ont regardé l'initiative avec beaucoup d'intérêt. Évidemment, je ne pense pas réaliste de le faire pour chacune des régions du Québec, mais certainement en particulier les régions qui ont des défis économiques importants, particulièrement les régions ressources qui sont durement affectées actuellement par la chute des prix des matières premières de même que les incertitudes dans le domaine forestier. Il y a avantage à réunir les forces et tenter de trouver des avenues qui nous permettent, selon des priorités sur lesquelles les gens sont en consensus, de faire progresser l'économie et l'emploi.

Alors, les participants aux différents thèmes se sont préparés et se sont réunis. La commission administrative régionale, pour ceux qui nous écoutent, ce sont les représentants régionaux des différents ministères, ont servi de soutien administratif pour bien donner les données et les informations nécessaires. Ce qui nous a amenés à la constitution... bien sûr, à la tenue de ce sommet et, par la suite, à des conclusions, des priorités et la création de 11 groupes de travail qui sont présidés ou coprésidés parfois par des intervenants socioéconomiques de la région, encore une fois, avec le soutien de la commission administrative régionale. Il y a actuellement 130 personnes qui sont mobilisées dans les travaux des 11 groupes de travail que, d'ailleurs, le député de Dubuc suit avec attention. Les groupes se réunissent à plusieurs reprises, et chacun progresse dans la réalisation des livrables.

Je veux encore une fois saluer l'engagement de la région à travailler aux suites de ce sommet. Tous doivent mettre la main à la pâte, et, bien sûr, on est satisfaits de la participation. Il faut qu'elle se poursuive et qu'elle se maintienne. Et, bien sûr, la rançon de cette participation en termes positifs, c'est l'annonce de projets, régulièrement et de façon successive, qui sont en rapport avec des priorités du sommet et également avec les travaux des groupes de suivi. Par exemple, l'annonce du plan de développement du Zoo de Saint-Félicien, annoncé en février 2016. D'ailleurs, à l'époque, certains collègues ont eu le mauvais goût de critiquer ce soutien, alors que c'est un choix régional de priorité pour des raisons économiques très, très fortes, ce qui montre un total manque de connaissance de la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean à cette occasion-là. La mise en service de la tour de télécommunications à Girardville, l'initiative Savoir Affaires, tenue à Alma et Chicoutimi — les suivis sont en cours — le lancement de la stratégie de positionnement axé sur la typicité boréale de l'agriculture, j'en parlais, encore récemment avec les gens de Nutrinor, avec notre industrie agroalimentaire, et le soutien à la formation en taxidermie et à la coordination du plan d'action de la filière de la fourrure nordique qui a également été annoncé.

Alors, ce sont des exemples. Il y a d'autres groupes de travail, notamment sur les métaux et notamment sur le transport — ferroviaire en particulier mais d'autres types de transport — qui sont actuellement au travail, sur la forêt, également. Et, chaque fois qu'un groupe de travail remet son rapport, soit une action précise, soit une démarche subséquente, on va bien sûr donner suite.

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de Dubuc.

• (16 h 50) •

M. Simard : Merci, M. le Président. Merci, M. le premier ministre. Dans un autre ordre d'idées, M. le Président, j'aimerais faire une intervention pour... je vous dirai, qui est très préoccupante pour ma région au moment où on se parle. Bien sûr, c'est la forêt. L'industrie forestière, M. le Président, a été frappée par la crise de 2008 et en subit toujours les conséquences. Certaines régions sont plus touchées que d'autres, dont ma région, M. le Président. Vous comprendrez que, lorsque tu possèdes 28 % de la possibilité forestière du Québec et qu'il y a une crise en forêt, donc, tu es plus touché que n'importe quel autre.

Vous savez, M. le Président, dans ma région, ça a des effets très, très difficiles. Seulement qu'à penser, M. le Président, à des usines qui ont fermé, il y a des usines qui ont fusionné, des travailleurs qui ont perdu leur emploi. Et ça a effectivement des conséquences très néfastes. Seulement qu'à penser également à tout ce qui s'est dit sur la forêt boréale, tout ce qui s'est dit au niveau du caribou forestier. Donc, à partir de là, vous comprendrez que la crise, elle est toujours présente chez nous.

M. le Président, j'entendais, ce matin, le chef de la première opposition, M. le Président, qui faisait... faisait... je vous dirai, chose surprenante, là, il parlait de mesures concrètes, dans ses propos, M. le Président. Et la mesure concrète que le gouvernement actuel a faite, la première décision qu'il a prise pour aider la forêt, M. le Président, ça a été de voter un budget en 2014 — et ça a été renouvelé cette année — mais, en 2014, de 225 millions pour — il me reste trois minutes, merci — 225 millions pour la sylviculture. Donc, à partir de là, c'est extrêmement concret.

Quand on parle de concret au Parti québécois, M. le Président, eux autres, ils avaient 230 millions, M. le Président, qu'ils nous avaient votés dans le budget sans crédits, là, mais sauf qu'ils ont effectivement livré 170 millions, M. le Président. Donc, c'est ça, du congrès, pour le... du concret, concret, pour le Parti québécois, M. le Président. Je m'excuse, ce n'est pas ça que les travailleurs attendent d'un gouvernement. Les travailleurs attendent d'un gouvernement... lorsqu'il dit quelque chose, il le fait. Et c'est exactement ce que le gouvernement actuel fait.

Vous allez comprendre, M. le Président, qu'actuellement le gouvernement pose des gestes, des gestes, bien sûr, pour soutenir la forêt. Seulement que pour en nommer dans le budget actuel : un programme de remboursement pour les coûts de chemins multiressources, le financement progressif des coûts de protection de la forêt. Et, bien sûr, je vais laisser le premier ministre, M. le Président, nous donner effectivement tout ce qui se passe au niveau budgétaire.

Le Président (M. Ouellette) : Pour 1 min 45 s, M. le premier ministre.

M. Couillard : C'est bien peu de temps, M. le Président, pour un enjeu aussi important, mais on aura l'occasion d'y revenir, j'espère, dans un bloc subséquent.

Effectivement, l'industrie de la forêt est soumise à des pressions énormes. Rapidement : l'incertitude entourant le renouvellement ou non de l'accord avec les États-Unis d'Amérique, baisse de prix de certains produits du bois, enjeux liés à la certification, notamment avec les autochtones, et le caribou forestier, on en a parlé récemment. Et donc on met toute notre attention à régler ces enjeux et également amener l'industrie à innover. C'est certain qu'il faut continuer à faire la récolte, la transformation primaire, mais il faut aller vers les nouveaux produits de la cellulose, les nouveaux dérivés également. On a vu, avec Kruger en Mauricie, passer du papier journal au carton d'emballage, ce qui est une excellente décision, et j'ai accueilli avec beaucoup d'espoir et de satisfaction le message du président de Résolu, qui a parlé d'un investissement de 25 millions pour les filaments cellulosiques. Alors, ça, c'est le type de projets qu'on veut absolument soutenir et qu'on va soutenir.

Maintenant, effectivement, dans le dernier budget, on a annoncé un soutien budgétaire sans précédent, sans précédent, M. le Président. Il s'agit de 230 millions de dollars sur cinq ans qui visent à favoriser le développement et la compétitivité de l'industrie, accroître la contribution de la forêt privée. Chez nous, au Saguenay—Lac-Saint-Jean, c'est très largement la forêt publique. Il y a un peu de forêt privée, mais déplacez-vous au sud du Saint-Laurent et vous allez constater l'importance de la forêt privée dans l'économie régionale. Alors, il s'agit de faire en sorte que les chemins soient pris en charge de façon progressive, les chemins multiusagers, le financement progressif du coût de protection des forêts, le soutien à l'innovation, les données forestières, l'amélioration de la qualité du bois récolté, accroître la contribution de la forêt privée par plusieurs méthodes, ce qui nous amène à un montant record de 230 millions, M. le Président.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. M. le chef de la seconde opposition, pour la première ronde de questions.

M. Legault : Oui. Merci, M. le Président. J'aimerais, à ce moment-ci, parler des crédits pour, entre autres, les cours de français pour les nouveaux arrivants. On le sait, bon, on a des discussions sur le fait qu'au Québec on n'a pas un taux de natalité très élevé. Si on veut accélérer la croissance économique, ça va prendre plus de gens. Et par contre, au-delà des qualifications économiques, ça prend des gens aussi qui acceptent d'apprendre le français.

Lorsqu'on regarde les 50 000 immigrants qui arrivent à chaque année au Québec, on voit qu'au cours de la dernière année qui est disponible, là, 41 % de ces immigrants ne parlaient pas français. Donc, 41 % des 50 000, donc à peu près 20 000, ne parlaient pas français. Dans les 20 000, il y en a la moitié que ce sont des enfants, donc, à cause des obligations de la loi 101, vont devoir aller à l'école en français. Mais, si on regarde chez les adultes, chez les adultes, 72 % ne suivent pas de cours de français. Donc, le trois quarts des adultes qui arrivent au Québec, qui ne parlent pas français, ne suivront jamais de cours de français. Donc, si on fait un calcul, là, 20 % d'adultes fois 72 %, ça veut dire 14 % de tous les immigrants ne suivront jamais de cours de français et ne parlent pas français.

Bon, moi, je trouve ça inquiétant. J'ai eu l'occasion de poser la question au premier ministre. Il avait l'air, lui, d'être confortable avec ça. Et, quand on regarde les budgets, il n'y a pas d'augmentation importante, là, des budgets pour donner des cours de français aux immigrants. Bon, on est content de voir que le premier ministre a reculé sur l'idée d'augmenter à 60 000 le nombre d'immigrants, mais, même à 50 000, moi, je voudrais savoir, là, est-ce que le premier ministre a un plan d'action pour que les nouveaux arrivants qui ne parlent pas français, qu'ils puissent avoir accès à des cours de français? Évidemment, il n'est pas d'accord avec les cours de français obligatoires qu'on propose, mais je voudrais savoir au moins s'il pense mettre en place les moyens pour que ces immigrants qui arrivent puissent au moins avoir accès à des cours de français.

Le Président (M. Ouellette) : Pour une réponse de 2 min 30 s, M. le premier ministre.

M. Couillard : C'est court pour un sujet aussi important, mais la première chose que je voudrais rappeler à mon collègue, c'est qu'involontairement dans ses questions il donne l'impression que la majorité des gens qui arrivent au Québec ne connaissent pas le français, alors que les chiffres donnent un message totalement différent.

Au cours des 20 dernières années, la proportion des immigrants qui connaissent le français a doublé, doublé, pour passer de 36,8 % à 61,3 %. Il reste les enfants, comme il l'a dit, les gens qui sont en processus de francisation, et, franchement, les 41 % en question, il faut tenir compte du fait que cette statistique, encore une fois, inclut les enfants qui seront scolarisés et les nouveaux arrivants qui suivront des cours de francisation.

Au total, en 2012, et probablement qu'on s'est améliorés, même, depuis ce temps-là, près de 86 % des personnes immigrantes admises au Québec étaient soit francophones, soit en processus de francisation, soit des enfants scolarisés en français. Plus de 90 % des travailleurs qualifiés qui veulent s'installer chez nous connaissent le français. Alors, je pense qu'il faut rappeler ça parce que je suis certain que c'est involontairement que notre collègue donne l'impression à la population qu'on est menacé par une immigration sur le plan de la langue française, ce qui n'est pas le cas du tout. Les immigrants sont francisés. Nous soutenons, avec des montants record, d'ailleurs, la francisation et nous soutenons la francisation de plusieurs façons. On a ajouté d'ailleurs des crédits, cette année, pour la francisation des nouveaux arrivants.

Lorsqu'il parle des cours de français, je voudrais lui faire remarquer deux éléments. D'abord, c'est que, s'il regarde les statistiques de chômage des immigrants, et je pense qu'il les a regardées parce qu'il les a citées dans une de ses questions, il va constater un fait qui, ma foi, est assez curieux et qui nécessite une analyse supplémentaire : le taux de chômage des immigrants francophones est plus élevé que le taux de chômage des immigrants anglophones. Il y a des raisons possibles pour ça qui ne sont pas nécessairement toutes flatteuses, mais il y a des raisons possibles pour ça.

Deuxièmement, lorsqu'on parle aux gens qui s'occupent véritablement de l'immigration au jour le jour, qui sont en contact avec les immigrants, le message qui nous est donné, c'est que la meilleure façon d'intégrer quelqu'un au Québec et au français, c'est le marché du travail. Alors, j'espère qu'il ne préconise pas de retirer quelqu'un du marché du travail pour le forcer à prendre des cours de français. Ce qu'il faut faire plutôt, c'est le maintenir au travail et aller le franciser dans son milieu de travail. D'ailleurs, notre collègue la ministre de l'Immigration va faire en sorte d'augmenter les efforts de francisation sur les lieux de travail, et ça me paraît un objectif tout à fait légitime.

Mais revenons encore une fois à l'essentiel : on a besoin d'immigration. On a besoin d'immigration croissante au cours des prochaines années. On va d'abord mettre en place la réforme de notre collègue, s'assurer qu'elle fonctionne bien, puis on aura d'autres débats, chaque année, sur les seuils d'immigration. Mais la réalité démographique du Québec, c'est notre principal handicap économique aujourd'hui. Je voudrais qu'il réalise ça, puis j'aurais des données à lui présenter, si ça l'intéresse, là-dessus. Je ne dirais pas que c'est dramatique — pour ne pas augmenter l'effet trop — mais c'est sérieux. C'est certainement aussi sérieux que bien d'autres défis économiques qu'on a au Québec. On n'a pas de problème, actuellement, tellement, de gens qui se cherchent du travail. On a bien des problèmes d'entreprises qui se cherchent des travailleurs, et, demain, je vais en rencontrer, d'ailleurs. Et c'est ça, le problème réel de l'immigration.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. M. le chef de la deuxième opposition, pour la deuxième ronde de questions.

• (17 heures) •

M. Legault : M. le Président, les gens qui nous écoutent, là, doivent un peu rire, là, parce que le premier ministre a répété exactement les mêmes chiffres que moi. Donc, probablement qu'il ne m'avait pas écouté lorsque j'ai parlé.

Par contre, lui, ça ne semble pas l'inquiéter. Étant donné qu'il y a une majorité qui apprennent le français, qu'il y ait une minorité qui n'apprennent pas le français, ça ne le dérange pas. C'est ce que je comprends.

Je rappellerais au premier ministre... parce qu'il parle de l'importance, pour le marché du travail, d'avoir plus d'immigrants. Je lui rappellerais que quand on regarde les chiffres de décrochage scolaire, à chaque année, il y a 12 000 jeunes qui décrochent avant, là, d'avoir obtenu un diplôme. Je lui rappellerais aussi, lorsqu'il regarde le solde migratoire entre les provinces, que l'année passée il y a 13 000 personnes qui ont quitté le Québec, net. Donc, si on veut aller chercher des gens pour le marché du travail, il y a d'autres façons que d'augmenter le nombre d'immigrants. On peut lutter contre le décrochage, on peut s'assurer que les personnes qui quittent pour l'Ontario, bien, plutôt, apprennent le français.

Mais je veux revenir parce qu'il n'a pas du tout répondu à ma question, à savoir : Est-ce qu'il va mettre plus de ressources pour les cours de français? Mais je veux revenir sur la proposition de la CAQ de dire : Les cours de français devraient être obligatoires. Je sais que le premier ministre, là, la fois que j'ai parlé de ça, il a monté au plafond en disant que c'était inacceptable, intolérant. Je veux lui rappeler qu'en France toutes les personnes qui veulent s'établir doivent signer un contrat d'accueil et d'intégration puis doivent suivre une formation linguistique de 400 heures. En Allemagne, les gens qui veulent s'installer en Allemagne doivent suivre un cours de langue de 600 heures pour avoir leur certificat de cours d'intégration, au Danemark, doivent suivre un cours soit de niveau 1 pour ceux qui viennent sous le chapeau «réunification familiale» ou de niveau 2 pour ceux qui veulent venir travailler.

Donc, ça existe en France, ça existe en Allemagne, ça existe au Danemark. Est-ce que le premier ministre peut nous expliquer pourquoi il est contre le fait que les cours de français soient obligatoires pour tous les immigrants au Québec?

Le Président (M. Ouellette) : Pour une réponse de 2 min 30 s, M. le premier ministre.

M. Couillard : Bien, moi, je ne suis pas de ceux qui pensent qu'il faut faire perdre l'emploi à quelqu'un pour cette raison-là. Je suis de ceux qui pensent qu'il faut aller lui enseigner le français dans son entreprise pour lui montrer comme il faut l'importance de connaître le français surtout pas, surtout pas, l'enlever du milieu du travail.

Alors, M. le Président, au Québec aussi, on signe des contrats de respect des valeurs avant l'arrivée au Québec. Au Québec aussi, on a une vaste gamme d'offres de cours de francisation. Et, en tout respect, je ne suis pas certain que les modèles européens d'intégration sont si exemplaires. Il n'y a qu'à lire l'actualité actuellement.

Alors, ce qu'on veut faire actuellement pour favoriser la connaissance et l'usage du français, c'est d'accroître la gamme de cours de français spécialisés à certains métiers et professions, mettre en place, de concert avec les partenaires économiques, pas en vase clos, des formules, écoutez bien, alliant francisation et expérience en emploi — il me semble qu'au moins on pourrait s'entendre là-dessus — répondre aux besoins différenciés d'un plus grand nombre de personnes immigrantes en matière de connaissance du français selon les exigences spécifiques du domaine d'emploi et de l'employeur en diversifiant les services de francisation à visée professionnelle qui sont offerts à l'étranger et au Québec, en classe et en milieu de travail, assurer la promotion des services gouvernementaux de francisation, renforcer le rôle du français comme principale langue de travail en renouvelant la Stratégie commune d'intervention pour le Grand Montréal et les milieux... bien sûr, les collaborations avec les milieux associatifs de la métropole, et on a accordé des crédits supplémentaires pour 2016‑2017 afin d'augmenter et de diversifier l'offre de service en francisation aux personnes immigrantes.

Je veux encore revenir sur le fait, M. le Président, que... j'espère que ce n'est pas ce qu'il pense, je ne dis pas que c'est ce qu'il pense, mais l'immigration et la diversité, ce n'est pas une menace pour le Québec, c'est un atout extraordinaire, c'est un facteur de croissance. Il faut absolument qu'on gère bien la diversité, qu'on accueille les gens, parce qu'ils ont le choix d'aller à bien d'autres endroits dans le monde que de venir au Québec. Alors, il faut qu'ils choisissent le Québec. On veut les meilleurs talents, les meilleurs cerveaux, on veut mieux les sélectionner. Là aussi, il devrait nous appuyer.

La réforme de la ministre de l'Immigration vise à beaucoup mieux accorder les besoins du milieu de travail avec les grilles de sélection des candidats à l'immigration au Québec, ce qui, en passant, n'est pas fait en Europe. S'il connaît très bien le modèle d'immigration en Europe, il n'y a pas de sélection, il n'y a pas de grille d'évaluation, il n'y a pas d'harmonisation avec les besoins du milieu du travail. Il doit également considérer qu'au cours des dernières années le qualificatif de connaissance du français a été rehaussé dans la grille d'évaluation, ce qui explique une bonne partie, pas toute, mais une partie des progrès qu'on a faits dans la connaissance du français à l'arrivée ici.

Mais je voudrais encore une fois qu'il me donne son interprétation. Comment ça se fait qu'au Québec c'est les immigrants francophones qui chôment plus que les immigrants anglophones? Pourquoi? Pourquoi c'est comme ça? Comment ça se fait? Également, il a parlé de la migration. Il doit reconnaître ce fait que la plupart des nouveaux ménages de la grande région de Montréal, maintenant, sont issus de l'immigration. Ça, c'est la réalité mondiale, c'est la réalité démographique qui est la nôtre. Il faut en faire un facteur de croissance, de prospérité et de mieux-vivre ensemble. C'est ce qu'on veut faire, nous. On est positifs, on veut dire aux gens : Venez chez nous, on va vous accueillir, vous parlerez notre langue commune, vous aurez un emploi de qualité et vous allez contribuer à notre prospérité.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. M. le chef de la seconde opposition, pour la troisième ronde de questions.

M. Legault : M. le Président, le premier ministre semble se réjouir du fait que le taux de chômage est plus élevé chez les immigrants qui parlent français. Donc, il est en train de nous dire, là, que les immigrants qui parlent anglais, qui ont accès à des emplois en anglais au Québec, il est content de ça. Il est content du fait que la loi 101, là, qui déclare que ta langue de travail au Québec, ça devrait être le français, qu'elle ne soit pas toujours respectée.

Mais, M. le Président, je veux revenir sur une autre question qui est reliée à l'immigration. Quand on regarde les 50 000 immigrants qui sont acceptés à chaque année, 70 % sont choisis par le gouvernement du Québec. Dans ce 70 %, la majorité parle français, mais il y a 30 % des immigrants, quand même 15 000 par année, qui sont choisis par le gouvernement fédéral, et, dans ce groupe, la majorité ne parle pas français. Et ce groupe est choisi au nom de la réunification familiale. Et il a probablement suivi les débats en Europe sur cette catégorie, réunification familiale, pour laquelle, actuellement, on est moins exigeants, disons, sur l'intégration.

Une des propositions de la CAQ, c'est de demander que le Québec négocie avec Ottawa pour récupérer ce pouvoir pour choisir les immigrants qu'on appelle réunification familiale. Est-ce que le premier ministre est d'accord pour qu'ensemble on négocie avec Ottawa pour que le Québec, au lieu de choisir 70 % des immigrants, choisisse tous les immigrants en fonction des critères de la réalité des défis qu'on a? Parce qu'on est tous d'accord pour accueillir des immigrants, mais le premier ministre ne semble pas comprendre qu'au Québec on sera toujours vulnérables pour protéger le français en Amérique du Nord.

On est 7, 8 millions de francophones dans un océan de centaines de millions d'anglophones, et c'est son rôle, comme chef du seul État qui représente une majorité de francophones, de protéger le français. Mais ça ne semble pas le préoccuper, ça ne semble pas être dans ses priorités, au premier ministre.

Donc, je répète ma question. Est-ce que le premier ministre serait d'accord pour qu'on négocie avec Ottawa pour récupérer le 30 % d'immigrants qui est choisi actuellement par Ottawa, que ça soit le gouvernement national du Québec qui choisisse tous les immigrants au Québec?

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre, pour une réponse de 2 min 30 s.

M. Couillard : Alors, je commencerais par lui dire que, comme francophone québécois, moi, je ne me sens pas vulnérable du tout. Je me sens très fort, très fier. Je n'ai aucune crainte pour l'avenir du français. Elle est forte, notre langue, puis elle rayonne partout dans le monde entier grâce à nos artistes, à nos entrepreneurs et à tous les Québécois et les Québécoises qui parcourent le monde et qui parlent avec fierté du Québec. Moi, je ne souscris pas à la mentalité de l'assiégé, jamais. Je souscris à la confiance, à la confiance renouvelée chaque année envers le Québec et son immense potentiel.

Maintenant, nous avons une entente unique au Canada. Il oublie de le dire. Chaque province canadienne rêverait d'avoir l'entente que nous avons signée au début des années 90 avec le gouvernement fédéral pour l'immigration. Et là il dit : Bien, il faudrait récupérer la juridiction sur les autres. Ce n'est pas une bonne idée. Je vais lui expliquer pourquoi.

Une voix : ...

M. Couillard : Non, ce n'est pas une bonne idée parce qu'il va nous expliquer, dans ces autres-là, les réfugiés, c'est quoi, ses critères, lui, de choix des réfugiés.

Une voix : ...

M. Couillard : Non, non, c'est là-dedans, les réfugiés. Oui, oui, c'est là-dedans. Alors, les réfugiés, pour moi, les critères, c'est simple, c'est la guerre, c'est la persécution, c'est le malheur, c'est les Syriens qui arrivent chez nous.

La réunification familiale, il ne prétend pas, tout de même, empêcher les familles de se réunir. J'espère que non. Alors, on offre également des services à ces gens-là. Les enfants qui arrivent, ils vont à l'école en français, puis les parents âgés, bien ils sont âgés, puis ils viennent finir leur vie en bonne santé, puis à l'abri de la guerre, puis de la persécution, et de l'incertitude économique au Québec.

Alors, tout son discours — puis je suis obligé de lui dire amicalement, quand même, là est imprégné de la crainte des étrangers, des immigrants : Ça va fragiliser le Québec, ça va fragiliser le français. Moi, je suis imprégné par la confiance et j'aimerais qu'il ait un discours de confiance également.

On a montré, au Québec, qu'on a un excellent modèle d'intégration. D'ailleurs, on vient d'ailleurs dans le monde pour le voir, ce modèle-là. On est capables, avec l'entente unique dont on dispose, de disposer de pouvoirs uniques au Canada en domaine d'immigration.

Moi, je n'ai pas envie de me transformer en agence d'évaluation de réfugiés ni en agence d'évaluation de risques de santé ou de sécurité pour les réunifications familiales. On a assez de dépenses publiques de même, on va laisser le fédéral — qui sont, en passant, beaucoup des Québécois, là — le gouvernement fédéral... Et j'espère qu'il ne glisse pas avec son ancien parti, là. Ce n'est pas un gouvernement étranger, c'est notre gouvernement à nous autres. On est citoyens de ce pays-là. C'est normal qu'il s'occupe de leurs juridictions. Et l'accord qu'on a eu avec le gouvernement fédéral est à l'honneur du Québec et le gouvernement libéral qui, alors, l'a conclu. Et il faut s'en féliciter et continuer à le faire fonctionner.

• (17 h 10) •

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. Il vous reste 30 secondes, M. le chef de la seconde opposition.

M. Legault : Oui. M. le Président, c'est triste que le premier ministre mélange réfugiés puis réunification familiale, qu'il ne connaisse pas le dossier de l'immigration. Mais j'ai une dernière question rapide pour lui.

Il y a quelques mois il nous disait que, concernant l'affichage, le descriptif, là, de compagnies comme Costco, il était d'accord pour mettre un descriptif français. Or, on apprend, ce matin dans Le Devoir, qu'il aurait changé d'idée, qu'il aurait reculé, qu'il n'est pas prêt à changer la loi 101 pour mettre un descriptif français à côté de Costco, Best Buy, Guess, GAP, Toys "R" Us. Il a changé d'idée sur ce dossier-là, alors qu'il disait : «...toutes ces entreprises au nom anglais [manquent] de "délicatesse" en refusant d'y ajouter un peu de français.» Est-ce qu'il est toujours d'accord pour ajouter un descriptif français devant les marques comme Costco ou Best Buy?

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le chef de la seconde opposition. M. le premier ministre, pour votre réponse.

M. Couillard : Tout à fait. Merci de me donner l'occasion de le dire. D'ailleurs, bientôt on va déposer le règlement. Il pourra en débattre et il verra très bien que notre position n'a jamais changé. Ce qu'on a dit depuis le début, c'est qu'il était extrêmement risqué, sur le plan juridique, entre autres, d'obliger les entreprises à changer leur marque de commerce ou leur raison sociale. Je le vois hocher de la tête, il est d'accord avec moi. Par contre, il est nécessaire qu'ils manifestent de façon visible la connaissance et le respect de la communauté dans laquelle ils font des affaires, notamment du fait français, et qu'il y ait des messages français visibles sur le descriptif. Et il verra le libellé du règlement.

Alors, c'est une excellente position, pour une fois une position équilibrée, une position respectueuse et surtout une position légale. J'espère que le collègue ne va pas nous engager dans la direction d'une position illégale. Il aura donc la possibilité de voir le règlement sous peu, et il y aura une période de publication, des discussions, puis il sera adopté.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. Mme la députée de Vaudreuil.

Mme Nichols : Oui, merci, M. le Président. Alors, dans le cadre des présents crédits, il y a un sujet qui m'interpelle particulièrement, puis c'est l'adéquation formation-emploi. Peut-être parce que j'habite un comté qui est le comté de Vaudreuil, qui est un comté en pleine effervescence, mais ce sujet-là est un sujet très chaud, entre autres, dans ma région. Puis d'ailleurs il y a des gens qui se sont réunis, il y a des gens du milieu qui se sont rassemblés ensemble puis ils se sont donné comme mandat d'analyser, entre autres, les enjeux du marché du travail pour la région de Vaudreuil et de Soulanges.

Je dois parler de Soulanges, M. le Président, parce que c'est la MRC Vaudreuil-Soulanges, qui compte 23 municipalités. Donc, quand les gens du milieu se mettent ensemble, ça vient souvent de la MRC Vaudreuil et Soulanges, des deux comtés, puisque c'est commun.

Alors, ils se sont mis ensemble puis ils ont analysé en gros le marché du travail. Ils ont analysé plusieurs choses, mais parlons d'abord de la démographie.

Au recensement en 2011, la démographie de Vaudreuil, ça représentait 140 000 personnes. Et c'est un comté qui est en pleine effervescence parce que l'augmentation de la population, c'est à peu près 36 % dans les cinq dernières années. Et on doit faire face aussi au vieillissement de la population. Puis là je parle pour ma région, mais je sais que le vieillissement de la population, on peut en parler pour Laval, M. le Président, mais on peut en parler aussi pour le Québec au grand complet. Mais, particulièrement chez nous, c'est un enjeu important parce que, comme je vous dis, le territoire se développe.

On a plusieurs entreprises qui viennent s'établir dans Vaudreuil, entre autres, à cause des caractéristiques routières. On est à l'axe des autoroutes 20, 30, 40, donc plusieurs entreprises viennent s'établir dans notre coin. On est aussi à proximité de Montréal. Souvent, on dit que Vaudreuil, c'est dans le West Island, mais c'est souvent pour localiser Vaudreuil. On ne fait pas partie de l'île de Montréal. On est le premier comté à l'extérieur de l'île de Montréal. On est quand même à 20, 30 kilomètres de Montréal. Et on est aussi à proximité de l'Ontario. Plusieurs entreprises hésitent entre s'établir à Vaudreuil ou s'établir à Cornwall, en Ontario, puisqu'on est à peu près à 40 minutes de l'Ontario.

Donc, on fait face à un contexte particulier relativement à l'emploi, à la formation. Et, dans les recensements qu'ont pris les gens du milieu, ce que je trouvais intéressant puis que je voulais souligner aussi, c'est qu'il y a 35 945 emplois locaux, et il y a 39 885 emplois qui sont occupés à l'extérieur de notre territoire, et il y a 5 985 travailleurs qui viennent de l'extérieur, qui viennent travailler sur notre territoire. Et les raisons qui sont évoquées, entre autres dans le sondage, je dirais un sondage interne, c'est qu'il n'y a pas d'emploi adéquat au sein de notre région. C'est 56 % des répondants qui ont répondu qu'il n'y avait pas d'emploi adéquat au sein de notre région. Il y a 35 % des répondants qui ont répondu que le salaire était meilleur à l'extérieur de la région de Vaudreuil — je rappelle la proximité de Montréal — et il y a 19 % qui ont dit que le déplacement était plus facile en dehors la région. Donc, c'est des contraintes auxquelles notre région doit faire face.

Évidemment, comme je vous disais, on a une analyse des forces et faiblesses aussi de notre région. La situation géographique est très enviable chez nous : l'intermodalité au niveau des transports, les axes routiers, des voies ferrées, le CN, le CP. On a aussi une offre résidentielle importante et variée puis on a une qualité de vie. On a, je dirais, une mixité entre l'urbain et la campagne. On a cependant des faiblesses, comme ça a été relevé : le transport en commun, qui est déficient, la disponibilité puis l'abordabilité du logement, c'est aussi déficient. Il y a des lacunes aussi quant à l'intégration des personnes immigrantes. On voit aussi un mouvement, là, de la population de Montréal ou beaucoup d'immigrants qui s'en viennent dans la région de Vaudreuil. Entre autres, 70 % — on a sondé, là — de la population de Vaudreuil parle français, alors que 27 % sont anglophones. Le reste, je vous dirais que c'est plutôt varié.

Donc, on voit quand même qu'il y a une modification de Vaudreuil, qu'il y a un étalement vers notre région. Mais on fait face, entre autres, à un vieillissement de la population. Puis le taux de croissance de la population active de notre région par rapport à celle du Québec, je vous dirais que nous, notre taux de croissance de la population active est en augmentation de 18 %, alors que, pour le reste du Québec, c'est une diminution, une baisse de 1,2 %.

Alors, nous, on parle souvent de l'adéquation formation-emploi, de la problématique au niveau de la main-d'oeuvre. Les entreprises de notre région ont de la misère à trouver de la main-d'oeuvre qualifiée, et on doit donner de la formation, on doit franciser notre monde aussi. Donc, il y a beaucoup de travail à faire. Et l'adéquation formation-emploi est une grande préoccupation des gens de notre milieu.

Je sais que notre gouvernement a posé beaucoup d'actions, entre autres, pour améliorer l'adéquation formation-emploi. Je sais que, dans le budget 2015‑2016, il y a des sommes qui ont été prévues, autour de 123 millions de dollars. Il y a aussi, en novembre dernier, le p.l. n° 70 qui apporte des nouvelles mesures justement avec des objectifs précis pour améliorer cette problématique-là.

Mais j'aimerais justement, M. le premier ministre, là, vous entendre peut-être un petit peu plus sur l'orientation qu'on donne, notre gouvernement, en lien avec l'adéquation formation-emploi.

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Combien de temps, M. le Président? Combien de temps?

Le Président (M. Ouellette) : Ah! 8 min 30 s.

M. Couillard : Oh! c'est la pléthore! C'est trop, presque. Alors, merci, M. le Président. Je voudrais remercier notre collègue pour son intervention. Elle a certainement bien accueilli, de même que sa consoeur de Soulanges, l'annonce du choix pour la construction de l'hôpital. Ça également, c'est important dans le tissu socioéconomique pour les familles qui choisissent de s'installer. On sait que c'est une des régions qui a la plus forte croissance démographique au Canada actuellement, et ça pose des enjeux de soins de santé, ça pose des enjeux d'éducation, ça pose des enjeux de transport collectif, donc toutes sortes d'enjeux sur lesquels on est actuellement au travail.

Effectivement, l'adéquation formation-emploi, c'est une des modalités et une des façons les plus utiles de contrer certains éléments négatifs de l'économie du Québec parce que — je reviens à notre conversation d'il y a quelques instants sur l'immigration — l'immigration n'est pas la seule façon de contrer les impacts de la baisse de la population active du Québec. Compte tenu de la numérisation, de la robotisation, on ne peut pas penser que le même nombre d'emplois seront offerts, de toute façon, mais certainement que l'adéquation formation-emploi doit faire partie des solutions.

• (17 h 20) •

Alors, effectivement on a un objectif de favoriser l'intégration en emploi d'un maximum de travailleurs, des jeunes, des décrocheurs, s'assurer que la main-d'oeuvre soit qualifiée parce qu'on a besoin d'employés. On a plus besoin d'employés au Québec que jamais. De 2013 à 2022, c'est 1,4 million de postes qui seront à pourvoir, alors que la population en âge de travailler diminue. On l'a dit, on le répète, alors que notre population active diminue de 0,2 % par année, elle augmente, dans le reste du Canada, d'un montant équivalent dans l'autre direction, ce qui est un facteur très négatif sur le plan économique. Donc, l'adéquation formation-emploi est critique. Bien sûr, la sélection de la main-d'oeuvre immigrante, mais également le maintien de la formation toute la vie durant. C'est pour ça qu'on parle maintenant de réussite scolaire et éducative, parce que la formation des travailleurs va se poursuivre au cours des années.

On a bien sûr, donc, déposé un projet de loi, qui est le projet de loi n° 70, qui est actuellement à l'étude ici, à l'Assemblée. Je souhaite qu'il soit adopté par les partis politiques parce qu'on a besoin de ces dispositions pour aider notre croissance économique et aider les employeurs qui cherchent des travailleurs à trouver des travailleurs qui sont bien formés.

Je mentionne également un autre fait qui a été cité récemment. Il y avait, en 2014, 38 000... un peu avant, 2012, je crois, 38 000 emplois disponibles affichés à Emploi-Québec; il y en a 56 000 aujourd'hui. Et on sait donc que les recherches d'employés sont au moins aussi nombreuses que les recherches d'emploi.

Qu'est-ce que ce projet de loi vise à faire? Il vise d'abord à voir le rôle de la Commission des partenaires du marché du travail. On veut travailler avec les partenaires du gouvernement, de l'État, et les instances régionales pour choisir les bonnes actions adaptées dans chaque région et de façon à avoir les meilleures mesures, les plus rentables en termes de résultats, en faveur de l'adéquation formation-emploi, d'élargir la portée de la Loi favorisant le développement de la reconnaissance des compétences, la fameuse loi du 1 %, et les interventions de son fonds en faveur de la participation active des employeurs à la formation de la future main-d'oeuvre, notamment par une plus grande offre de stages en formation professionnelle et technique. Et, dès le niveau de la formation professionnelle et technique, il faut évoluer vers un modèle qui se rapproche de celui de quelques pays européens où il y a un pourcentage beaucoup plus élevé de stages qui sont effectués en entreprise, de créer le programme Objectif emploi, qui est un programme visant à offrir un accompagnement intensif, personnalisé aux nouveaux demandeurs, les jeunes nouveaux demandeurs d'aide sociale aptes au travail afin de favoriser leur intégration en emploi, particulièrement par la formation.

Alors, les budgets du Québec 2015‑2016 et 2016‑2017 prévoient d'importants d'investissements, principalement au cours des cinq prochaines années. On parle de plus de 200 millions pour accroître la performance du marché du travail, notamment par une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi.

Demain, j'aurai l'occasion, et dans les jours subséquents, de visiter une région où, lorsqu'on demande aux employeurs : Quel est votre défi principal, la première réponse au-dessus de tout, c'est : Trouver des travailleurs qualifiés, qualifiés parfois et non qualifiés, dépendant du type d'entreprise qu'on rencontre. Ça devient même un frein au développement économique, même pour nos régions qui sont très performantes sur le plan de l'emploi et de la croissance économique.

Alors, on travaille là-dessus depuis les premières semaines de notre gouvernement. On avait été interpellés fortement par les milieux économiques sur la fameuse loi du 1 %, dont plusieurs doutaient de la réelle efficacité et de l'efficacité du fonds défini par le 1 %, alors que maintenant on veut le définir. Mais surtout c'est important de rappeler, et je terminerais là-dessus, M. le Président, qu'on veut le faire avec les partenaires du marché du travail, les syndicats, les employeurs, de façon à ce qu'on choisisse ensemble les meilleures cibles possibles.

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de Vimont.

M. Rousselle : Oui, merci. Il ne reste pas beaucoup de temps, je pense, M. le Président, hein? Bon, écoutez, je vais y aller au niveau des appuis des travailleurs d'expérience, dû au fait que je n'ai pas beaucoup de temps.

En sachant que l'espérance de vie... je sais qu'en 1950 l'homme était de 66 ans, puis la femme de 71 ans. Donc, une chance que c'est bon pour nous parce que l'espérance de vie, elle s'est améliorée énormément. En 2016, je sais que les hommes, c'est 81 ans, puis les femmes 84 ans. En espérant que, d'ici ce temps-là, on va pouvoir l'améliorer encore plus. En tout cas, au moins pour nous, les hommes. Je pense que ça serait un avantage, qu'on pourrait aller au moins chercher l'espérance de vie des femmes.

On sait que les travailleurs, justement, ont, dans leur bas de laine, de l'argent, mais ils n'ont peut-être pas planifié aussi longtemps, parce que, justement, à cause de notre espérance de vie. Le vieillissement de la population, bien je pense que c'est significatif aussi au niveau de notre bassin de main-d'oeuvre disponible. Et je sais que, dans notre plan appui aux travailleurs d'expérience, on a installé un incitatif pour que les gens d'expérience puissent rester au travail, et je pense que c'est une expertise, bien souvent, qui est bonne pour nos entreprises.

Donc, M. le premier ministre, j'aimerais vous entendre sur le programme pour garder justement ces travailleurs-là qui ont de l'expérience et une expertise à pouvoir continuer justement à travailler.

Le Président (M. Ouellette) : 2 min 30 s, M. le premier ministre.

M. Couillard : Alors, avec l'adéquation formation-emploi, avec le programme Objectif emploi pour les jeunes demandeurs d'aide sociale, la rétention des travailleurs plus âgés au marché du travail est également une bonne façon de faire face à notre défi démographique. Mais encore faut-il que ce soit intéressant pour les gens d'expérience de rester sur le marché du travail, compte tenu des prestations de retraite, par exemple, dont ils ou elles peuvent disposer.

Alors, déjà, dès le budget 2015‑2016, on avait apporté plusieurs mesures. D'abord, la diminution graduelle de l'âge d'admissibilité de 65 ans à 63 ans, une hausse annuelle de 2 000 $ de la tranche de revenus de travail excédentaire admissible au crédit d'impôt, qui va atteindre 10 000 $ en 2018, une réduction du crédit d'impôt en fonction du revenu afin de cibler, comme d'habitude, davantage les travailleurs à faibles ou à moyens revenus.

Ces modifications sont entrées en vigueur le 1er janvier 2016, mais en 2016‑2017, lors du dépôt du budget 2016‑2017, on a continué la bonification de ce crédit d'impôt. On entend maintenant l'étendre à un plus grand nombre de travailleurs susceptibles de s'en prévaloir. À compter de 2018 les travailleurs âgés de 62 ans seront admissibles au crédit d'impôt pour les travailleurs d'expérience et pourront bénéficier de l'allégement fiscal. On parle de revenus de travail excédentaires annuels de 4 000 $.

La bonification du crédit d'impôt pour les travailleurs d'expérience, c'est une mesure sociale qui permettra d'inclure plus de citoyens dans le développement du Québec. Puis, de nos jours, 62 ans, c'est encore bien jeune. En tout cas, j'espère bien. Cette mesure incitera à continuer pour ceux et celles qui croient qu'ils ont encore quelque chose à apporter, peut-être à un autre rythme, au marché du travail.

Alors, j'ai ici un tableau, qui est dans le discours du budget, qu'on pourra retrouver qui illustre le gain fiscal pour un travailleur âgé de 62 ans en 2018. Alors, il s'agit de gains, pour des revenus respectifs de 20 000 $, 30 000 $ et 40 000 $, respectivement de 324 $, 602 $ et 346 $. Donc, ce sont des montants significatifs qui devraient amener plus de motivation dans le désir de rester sur le marché du travail.

On ne peut pas se permettre de perdre trop de monde du marché du travail : ni les jeunes, certainement, qui arrivent sur l'aide sociale, ni les plus expérimentés qu'on veut garder actifs le plus longtemps possible. Alors, c'est une mesure utile, c'est une mesure très concrète pour nos concitoyens et concitoyennes et qui montre qu'il y a plusieurs actions qui permettent de faire face au défi démographique du Québec. Oui, il y a l'immigration, dont on a discuté tantôt, mais il y a également l'adéquation formation-emploi, il y a le programme Objectif emploi pour les jeunes demandeurs d'aide sociale et il y a ce programme de crédit d'impôt pour les travailleurs expérimentés qui a été bonifié de façon assez significative depuis le budget 2015‑2016.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. M. le chef de l'opposition officielle, pour votre dernier bloc.

M. Péladeau : Merci, M. le Président. Le premier ministre a eu l'occasion, donc, de s'exprimer sur Bombardier. Alors, j'aimerais quand même lui faire remarquer qu'alors que j'étais porte-parole en matière d'économie j'avais soulevé, au salon bleu, quelques questions concernant la situation financière de l'entreprise. Vous aviez à ce moment-là, M. le premier ministre, comme ministre de l'Économie l'actuel ministre des Transports, le député de Verdun. Alors, bien, je lui avais souligné que la situation financière de Bombardier était préoccupante. Est-ce que vous vous souvenez que le député de Verdun et ministre de l'Économie m'a répondu que non, il n'y a pas de problème avec Bombardier, leur situation financière est très bonne? Elle est tellement bonne, puis excusez-moi l'expression parce que c'est lui qui l'a utilisée, que la cote de crédit est «investment grade». C'est assez curieux pour un ministre de l'Économie que de ne pas connaître la cote de crédit d'une des entreprises les plus importantes au Québec parce que la cote de crédit de Bombardier, ça faisait huit ans qu'elle était «investment grade». Elle a perdu son statut depuis de très nombreuses années et elle est aujourd'hui bien en deçà du seuil pour être une obligation de qualité.

Alors là, tout d'un coup, il a commencé éventuellement à se préoccuper de Bombardier. Et effectivement nous souhaitions que votre gouvernement s'en préoccupe. Vous avez à juste titre mentionné l'importance de l'industrie aérospatiale et aéronautique au Québec. Et ce fleuron, d'ailleurs, à un certain moment, vous avez dit : Pas n'importe quel fleuron. Mais peut-être qu'un jour vous aurez l'occasion de nous dresser la liste de ce que vous considérez être les fleurons du Québec inc., là. Bon, probablement que Bombardier, vous considérez qu'il est membre de ce club sélect des fleurons.

Alors là, tout d'un coup, on s'en est occupé. Alors, vous avez annoncé une transaction que nous souhaitions se produire, mais la problématique, M. le Président, c'est qu'elle est mal structurée. Et les exemples sont tellement nombreux, et les commentateurs sont tellement nombreux pour avoir dit que c'est une mauvaise transaction...

• (17 h 30) •

Alors, avez-vous confié le mandat à votre ministre de l'Économie de structurer cette transaction, lui-même qui ne connaissait pas la cote de crédit de Bombardier, ou vous avez éventuellement décidé de confier cette responsabilité, en ce qui concerne ce genre de transaction et son envergure... Parce que je vous ferai quand même remarquer, M. le Président, que c'est le plus important investissement de l'État à l'intérieur d'une entreprise, c'est 1,3 milliard.

Là, M. le Président, le premier ministre, bon, à un certain moment, il nous a dit qu'on n'avait pas le droit de poser de question sur cette transaction-là de peur éventuellement d'ouvrir, excusez-moi l'expression, une canne de vers. Alors, je suis obligé de lui dire, M. le Président, que c'est lui-même qui l'a ouverte, cette canne de vers. Et il mentionnait une problématique qui est susceptible d'être soulevée par l'administration américaine. Bien, M. le Président, effectivement, c'est le cas. Était publié, pas plus tard que le 7 avril dernier dans le Globe and Mail,U.S. sees planned bailout for Bombardier as trade barrier. Effectivement, la façon dont la transaction a été structurée, le fait de mettre 49 % à l'intérieur d'une coquille dans laquelle il y a un seul actif, bien, c'est certain que ça a soulevé les inquiétudes et les préoccupations des concurrents de Bombardier.

J'ai eu le privilège de rencontrer le président de Bombardier, M. Bellemare, un homme qui a travaillé toute sa vie dans l'aéronautique, un homme qui, justement, on en est fiers, a été en mesure d'avoir une expertise exceptionnelle. Il a été chez Pratt & Whitney. Mais il faut comprendre que le président-directeur général de Bombardier, il ne travaille pas pour les contribuables, il travaille pour les actionnaires de Bombardier. Alors, la Caisse de dépôt a structuré une transaction avec Bombardier, mais elle l'a structurée à l'intérieur de Bombardier Transport, avec tous les actifs qu'on y retrouve. Et là le premier ministre nous dit que, oui, certes, c'est un produit extrêmement innovant, et nous en sommes fiers, mais lui a décidé de mettre ça dans une coquille, alors qu'il aurait très bien pu... Et la conséquence de la transaction, si on avait mis des fonds de 1,3 milliard dans la compagnie mère, un, d'une part, nous aurions bénéficié de tous les actifs, les actifs de transport mais également les actifs aéronautiques... Il s'en vend encore, M. le Président, des Challenger. Imaginez-vous, il s'en vend encore, et on n'attendra pas après les Russes pour qu'il s'en achète, là. Il s'en vend encore, des Q400. Il s'en vend encore, des CRJ. Il s'en vend encore, des Global, des avions de grande qualité. Alors, la transaction qui aurait dû être faite, c'est de mettre l'argent dans la compagnie mère, mais la conséquence de ça, M. le Président, c'est que la famille Bombardier, Beaudoin-Bombardier, aurait été diluée, elle serait passée de 10 % à environ 3 %, mais, avec une convention d'actionnaires et Investissement Québec, nous maintiendrions la capacité de contrôle de l'entreprise et une protection solide du maintien du siège social à Montréal.

Alors, je suis obligé d'effectivement rafraîchir la mémoire du premier ministre pour lui dire que la transaction qu'il a structurée soulève aujourd'hui de très nombreuses inquiétudes, et, si nous l'avions faite de cette façon-là... Et il est encore temps éventuellement de le refaire puisqu'il attend, et il l'a mentionné, que le gouvernement fédéral... Oui, oui, je suis d'accord, le gouvernement fédéral, mais j'aimerais quand même lui mentionner qu'il est alimenté des impôts, des taxes des Québécois. Alors, que le gouvernement fédéral fasse le nécessaire pour qu'il rende l'argent afin de protéger notre industrie aéronautique.

Alors, là où le bât blesse dans cette transaction, M. le Président, c'est que la responsabilité confiée à son ancien ministre de l'Économie, ministre des Transports... est-ce qu'ils ont été conseillés adéquatement? Est-ce que vous avez retenu les services d'une banque d'affaires pour structurer une transaction? Parce qu'en même temps aussi je vous ramène au point où vous avez mentionné, tout à l'heure, que le Fonds des générations, lorsque vous vouliez faire le nécessaire pour protéger nos sièges sociaux, bien vous avez changé d'idée parce que vous augmentiez les risques. Ne croyez-vous pas que la transaction, telle que vous l'avez structurée, met à risque, énormément de risque, sans avoir les bénéfices de tous les autres actifs de Bombardier? Et je suis convaincu que, si vous aviez mandaté des experts, des banquiers d'affaires, ils ne vous auraient certainement pas, comme d'ailleurs a fait la Caisse de dépôt, proposé une structure de cette nature-là.

Alors, ma question, M. le Président : Est-ce que le premier ministre a fait ça dans son bureau avec le ministre de l'Économie ou il a fait appel à des experts, à des banquiers d'affaires?

Le Président (M. Ouellette) : Possibilité de huit minutes pour votre réponse, M. le premier ministre.

M. Couillard : Alors, merci, M. le Président. Il y a de nombreuses personnes, pas trop nombreuses parce que c'est très confidentiel, ces conversations, il le sait très bien, qui sont intervenues dans cette transaction. Et chacune de ces personnes, encore récemment, constate que c'était le bon choix, qu'il fallait faire ce choix-là.

Et je veux quand même lui mettre en lumière certains éléments. Je suis content, d'ailleurs, que et lui et son collègue de la deuxième opposition, enfin, développent un discours plus positif envers Bombardier. Ça aurait été bien qu'on l'entende plus tôt parce que ça n'a pas aidé l'entreprise, en passant, ce qui a été dit à l'Assemblée nationale sur cette transaction-là. Et je voudrais lui faire remarquer la chose suivante...

Des voix : ...

M. Couillard : Il y a des conversations croisées, là. Mais oui, en fait, c'est le même parti, là.

Le Président (M. Ouellette) : C'est votre réponse, M. le premier ministre, qu'on veut entendre.

M. Couillard : Il n'y a pas de problème. Donc, la Caisse de dépôt et placement du Québec, elle a fait une transaction d'investisseur; le gouvernement, lui, fait une transaction d'agent économique. Ce n'est pas la même chose. Quand on investit dans Bombardier Transport, on investit également dans la division dont le siège social est en Allemagne. Donc, on protège beaucoup d'emplois en Europe. C'est très bien. Tant mieux pour les employés de Bombardier en Europe, mais ça n'aide pas tant que ça les employés de Bombardier au Québec. Au Québec, c'est nécessairement l'aéronautique. Et, il a raison, il y a d'autres modèles que la série C. Il y a des modèles qui ont été durement affectés par la crise économique. Qu'il prenne les avions d'affaires. S'il a parlé avec M. Bellemare, il a dû lui raconter la chute radicale de la demande pour les avions d'affaires qui a frappé sa compagnie, il l'a dit lui-même publiquement à plusieurs reprises.

Alors, la décision économique qui était la bonne... Et c'est justement ce qu'il propose qui aurait encore plus inquiété les Américains. La décision économique, c'était d'investir dans l'innovation. Pourquoi? Parce que, quand le gouvernement américain a soutenu Boeing, comment ils ont soutenu Boeing? Pas en devenant actionnaire de Boeing, en investissant dans l'innovation de Boeing. Quand les Européens soutiennent Airbus, ils soutiennent nécessairement le développement de nouveaux appareils. C'est ce qu'il faut faire pour éviter d'être pris dans une chicane avec nos voisins du Sud, qui, en passant, ne sont pas très amicaux envers Bombardier, on le comprend, hein? Bombardier, la série C, ce n'est pas une bonne nouvelle pour Boeing et Airbus, puis on voit quels efforts ils font pour diminuer le crédit ou faire des remarques négatives sur l'appareil.

En passant, il y a une rumeur, c'est une rumeur, hein, qui circule sur le fil de presse, elle n'est pas confirmée, que Delta serait fortement intéressée à faire une nouvelle commande de série C. Tant mieux! J'espère que ça se produira. Ce n'est pas confirmé, mais c'est certainement une bonne nouvelle.

Alors, quand on regarde l'intérêt économique du Québec, c'est, dans l'innovation, dans ce qui est probablement, au Canada actuellement, le plus important projet d'innovation technologique, d'ailleurs beaucoup d'autres à l'extérieur du Québec l'ont confirmé, qui est le développement de la série C, qui est l'avion le plus innovant et le plus performant de sa catégorie. Soyons fiers, comme Québécois, que ça ait été développé chez nous. Alors, c'est ça qui doit réussir pour préserver le secteur aéronautique du Québec. C'est le succès du programme de la série C qui va faire en sorte de préserver le secteur aéronautique du Québec, et c'est là-dessus qu'on doit mettre la majeure partie de nos efforts.

L'autre élément... Puis évidemment la compagnie Bombardier, la compagnie mère, a ses enjeux, puis il ne s'agit pas de les diminuer ou de les discuter. Lorsqu'il parle des actifs, bien il faudrait qu'il parle du passif également. Il y a 8 milliards, au moins 8 milliards de dette dans la société mère. Je ne suis pas certain que rendre les Québécois propriétaires de cette dette-là est nécessairement une transaction à leur avantage, alors que le bilan de la nouvelle compagnie qui est formée, le bilan de la série C, est un bilan qui a été libéré de dette, qui comporte des actifs, des appareils commandés véritablement, des commandes fermes et les autres qui viendront par la suite. C'est certain que c'est un geste risqué. Ce qui ne serait pas risqué, c'est ne rien faire. Mais le risque, ce serait de perdre des emplois, la majeure partie des emplois aéronautiques à Montréal. Puis moi, je ne prendrais pas ce risque-là.

Alors, il est clairement nécessaire de soutenir Bombardier, de soutenir Bombardier Aéronautique et spécifiquement la série C. Et, lorsqu'on a eu des conversations avec l'entreprise, avec d'autres personnes également, tout le monde reconnaît la logique de ça, il y a une logique dans ce geste-là, qui n'est pas une improvisation, malgré ce que laisse entendre notre collègue, mais qui est un geste mûrement réfléchi.

On verra ce que le gouvernement fédéral, lui, pense faire, on verra son choix, mais je veux lui rappeler également que, lors de cette transaction, nous avons obtenu de Bombardier l'assurance du maintien de cette société nouvelle, société en commandite nouvelle de la série C, de son siège social chez nous, au Québec, du maintien de tous les emplois liés à l'assemblage de la série C et probablement l'ajout de 300 nouveaux emplois. Et, dans le cadre du centre d'excellence qui serait éventuellement mis sur pied, on parle de 1 000 nouveaux emplois. C'est très préférable à l'horizon très incertain, en tout respect pour l'entreprise, qui peut toucher d'autres divisions de cette entreprise extraordinaire du Québec.

Alors, moi, je souhaite que Bombardier passe à travers cette circonstance économique difficile, mais, pour l'avenir du Québec, il faut absolument, absolument, qu'on s'unisse, qu'on s'unisse pour non seulement faire la promotion de Bombardier, soutenir Bombardier, mais faire en sorte que le projet extraordinaire de la série C réussisse. On doit faire en sorte qu'il réussisse. On aura beaucoup plus de contrôle sur ce qui va arriver à la série C où on est que si on était très minoritaires au niveau de la société mère. Je pense qu'il faut réaliser ça.

• (17 h 40) •

Et je l'amène à également considérer le bilan financier de l'entreprise pour considérer que ce qu'il suggère n'est pas nécessairement à l'avantage des contribuables du Québec. Et je crois que ça se défend très bien, ça se justifie très bien. On aura l'occasion de voir le geste qui sera posé par le gouvernement fédéral. Il y a des conditions qui doivent être... je souhaite qu'elles soient posées. D'ailleurs, je suis content de voir qu'il espère, lui aussi, que ce le sera. Il y a des conditions à remplir, du côté de l'entreprise, pour les liquidités.

On a obtenu également, pour ce qui est de la société mère, la possibilité d'avoir des bons de souscription qui nous donneraient une position dans la société mère à partir de l'atteinte d'un certain niveau de l'action. Évidemment, tout ça est fluctuant. Ça nous amènerait à peu près à 9 % de la compagnie mère. L'action a beaucoup augmenté au cours des derniers jours, mais on va garder notre respiration. Comme on dit, c'est très fluctuant, ça peut aller dans les deux directions. Elle est actuellement beaucoup plus élevée qu'elle ne l'était il y a à peine une semaine ou deux. Pourquoi? Parce que les gens voient les commandes, entre autres, Air Canada, peut-être ce qu'on a annoncé tantôt et qui n'est pas une annonce, en passant, qui est une rumeur et qui devra être confirmé, bien sûr, et voient également la façon déterminée dont les gouvernements, certainement le nôtre et, j'espère, le gouvernement fédéral du Canada... veut apporter son soutien à Bombardier, qui crée des emplois partout au Canada, bien sûr au Québec largement, mais également en Ontario. Le Q400, il y a beaucoup d'activités d'assemblage qui sont faites en Ontario. Mais moi, je suis préoccupé des emplois au Québec, et c'est les emplois au Québec que je veux non seulement protéger, mais développer.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. Il vous reste 2 min 30 s, M. le chef de l'opposition officielle, pour la dernière ronde de questions.

M. Péladeau : 2 min 30 s?

Le Président (M. Ouellette) : Il vous reste 2 min 30 s.

M. Péladeau : Ah oui? Alors, bien, si j'écoute bien le premier ministre, M. le Président, c'est qu'il pense probablement que la Caisse de dépôt a fait une mauvaise transaction en investissant dans Bombardier Transport. Et, si j'écoute bien, également, le premier ministre, bien je suis obligé de commencer à comprendre qu'il trouve que Bombardier est dans une situation financière précaire. Alors, ce n'est pas un message à envoyer, à l'entreprise et à la communauté financière, extrêmement positif.

Maintenant, je vais lui poser une question : Est-ce que la République fédérale allemande, est-ce que l'État français, la République française, qui sont actionnaires dans Airbus, est-ce qu'ils ont investi dans le 320, dans le 350, dans le 380, dans les différents actifs, ou ils ont investi dans la compagnie mère? Poser la question, c'est y répondre. Ils ont investi et ils sont actionnaires de la compagnie mère justement pour faire en sorte de bénéficier de l'ensemble des actifs. Et vous savez quoi? Et dans Boeing et dans Airbus il y a de la dette, mais il y a également, aussi, des actifs qui, lorsqu'effectivement vous les mettez à contribution, ils sont en mesure de pouvoir générer des bénéfices. Et, pas plus tard que la semaine dernière, il y a une grosse commande faite de Challenger. Alors, je persiste à penser que cette transaction n'est pas adéquatement structurée et elle met l'argent des contribuables à risque.

Le point, également, que je voudrais soulever et la question que j'aimerais poser au premier ministre : A-t-il une petite interrogation concernant la gouvernance de l'entreprise puisqu'il a décidé de nommer Daniel Johnson président du conseil d'administration de cette société? Or, Daniel Johnson était celui même qui a organisé la transition du candidat du Parti libéral du Québec à son poste de premier ministre. Il se sent à l'aise avec ça? Il n'a pas de problème de gouvernance? Moi, je pense qu'il y en a un et que, puisque la caisse est, elle, une championne de la gouvernance, il aurait dû faire en sorte que ce soient des administrateurs indépendants qui soient nommés au conseil d'administration et qu'il soit présidé également par un administrateur indépendant.

Le premier ministre, M. le Président, fait la démonstration de son incapacité de comprendre la dynamique financière et les questions concernant la gouvernance des entreprises. Alors, est-ce qu'il va penser à ça ou il va simplement, encore une fois, balayer la poussière sous le tapis en prétendant qu'on n'y connaît rien du tout?

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le chef de l'opposition officielle. Pour une réponse, M. le premier ministre.

M. Couillard : M. le Président, je ne prétends pas qu'on ne connaît rien du tout, je manifeste une différence d'opinions sur la façon de regarder cette transaction-là. Et ce que je veux lui répéter, c'est que la Caisse de dépôt a posé un geste d'investisseur. Comme geste d'investisseur, la logique est différente du geste d'agent économique. Moi, ce qui me préoccupe avant tout, c'est de préserver l'aéronautique au Québec puis les dizaines de milliers d'emplois qui dépendent non seulement de Bombardier, mais de toutes les entreprises qui en dépendent. La gouvernance actuelle a été faite... Puis je suis quand même surpris de voir notre collègue de l'opposition officielle mettre en doute l'intégrité et la compétence de Daniel Johnson, un ancien premier ministre du Québec. Je vais lui rappeler également qu'il y a deux partenaires, un majoritaire qui n'est pas nous, qui est Bombardier, et un minoritaire qui est nous.

Est-ce que la gouvernance pourrait être revue, à la venue du gouvernement fédéral, selon le modèle qu'ils auront choisi? Peut-être, mais actuellement on a une entente signée avec Bombardier qui comprend ces nominations. On espère ratifier l'entente, mais je répète qu'il faut, pour cela, que Bombardier rencontre certaines obligations, particulièrement sur le plan des liquidités.

Mais ayons confiance dans Bombardier Aéronautique, ayons confiance dans la série C, faisons en sorte de réussir ce projet-là. Lorsque je vois ces nouvelles qui circulent sur le fil de presse, ça m'encourage. Rien n'est confirmé, mais c'est une très bonne nouvelle. Si elle se réalise, c'est une excellente nouvelle pour tout le secteur aéronautique du Québec. Ce n'est pas seulement Bombardier. Il a parlé de Pratt & Whitney, il faut parler de centaines de PME du Québec qui sont des fournisseurs du secteur aéronautique, M. le Président, à Montréal. Et c'est à tous ces travailleurs que je pense avant tout. Et notre rôle, comme gouvernement, c'est d'être un agent économique positif avant tout et pour les emplois au Québec, pas les emplois ailleurs.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. M. le député de Vimont.

M. Rousselle : Merci, M. le Président. En parlant d'emploi puis en parlant d'entreprise, je vais vous parler de l'allègement réglementaire et administratif des petites et moyennes entreprises.

Chez moi, bien, vous savez, je rencontre souvent mes entrepreneurs de Vimont et ceux de Laval, veux veux pas, c'est comme... Laval, c'est une île, vous le savez, et les entrepreneurs, bien souvent, ils me parlent et puis ils sont tannés ou il y a beaucoup de paperasse à prendre, et il y a une perte de temps puis une perte d'argent aussi en même temps parce que, pour remplir cette paperasse-là, ça prend du personnel bien souvent. Et ça, bien souvent, c'est des petites entreprises qui sont en bas de 11 employés, donc, pendant qu'ils remplissent ces papiers-là, bien, ils ne peuvent pas, à ce moment-là, aller sur le terrain puis aller chercher d'autres contrats. Puis je pense que... je suis vraiment persuadé que ces énergies-là pourraient vraiment servir à d'autre chose qu'à remplir de la paperasse, on le sait. Puis d'ailleurs ces entreprises-là étaient contentes de voir que Jean-Denis Girard, le député de Trois-Rivières, avait commencé, justement, en 2015, des consultations. Et maintenant, c'est Mme Lise Thériault qui est comme la coprésidente de ce comité-là avec Mme Martine Hébert, qui est la vice-présidente, et je réalise qu'il y a des gens de partout qui sont consultés, que ce soit dans l'agroalimentaire, commerce de détail, tourisme, restaurants, secteur manufacturier, secteur de la construction. Donc, tous les secteurs sont vraiment bien représentés, puis, je pense, c'est vraiment intéressant de voir qu'à ce moment-là il y a eu un travail vraiment très adéquat qui a été fait pour avoir justement une bonne idée, une bonne image, donc avoir une idée, vraiment, qu'est-ce qui se passe sur le terrain.

Donc, là-dessus, j'aimerais entendre le premier ministre sur ce programme-là parce que je sais qu'il y a beaucoup d'argent qui... on parle de beaucoup d'argent là-dedans, là, parce que ces entreprises-là vont sûrement sauver de l'argent. Je voudrais savoir comment qu'on... les actions qu'on propose pour régler le problème que vivent actuellement les entreprises.

Le Président (M. Ouellette) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Lorsqu'on demande comme je l'ai fait, comme on l'a tous fait, je crois, en faisant le tour du Québec, aux entrepreneurs des PME particulièrement quels sont leurs enjeux principaux, alors, je reviens encore sur la pénurie de main-d'oeuvre. Également, on me parle de la fiscalité, puis, quand on parle de la fiscalité, on parle des taxes sur la masse salariale, notamment du fonds de santé et services sociaux, sur lequel on agit, et on me parle de la lourdeur administrative, avec raison, hein? On se souviendra qu'à l'époque un comité avait été formé, le comité Audet, du nom de notre collègue l'ancien ministre des Finances, qui avait fait plusieurs recommandations. Bien, je suis heureux de répéter aujourd'hui que la grande majorité, la quasi-totalité de ces recommandations sont en place. Et l'objectif de rejoindre... de réduire de 20 % les coûts reliés aux démarches administratives des entrepreneurs a été presque atteint, je pense, c'est 19,62 %, on est vraiment là.

Mais ça ne suffit pas, ça ne suffit pas parce que c'est encore plus long et plus compliqué, au Québec, de démarrer une entreprise et de faire affaire avec le gouvernement que ce ne l'est ailleurs. Donc, le travail se poursuit. Il se poursuit de nombreuses façons. Par exemple, on parlait tantôt de l'adéquation en formation-emploi. On a épargné, M. le Président, les entreprises dont la masse salariale est de 1 à 2 millions de dollars du versement et des redditions de comptes associées. Donc, pour beaucoup d'entreprises, c'est une diminution majeure de leur fardeau administratif.

Il faut également continuer à travailler, ce que nous faisons, sur le dossier unique d'entreprise, Entreprises Québec, que l'entrepreneur n'ait qu'une fenêtre ou deux maximum avec Revenu Québec parce que Revenu Québec, pour des raisons qui sont les leurs, tiennent à leur indépendance, mais qu'il n'y ait qu'une fenêtre de contact pour avoir accès aux renseignements et à la navigation dans le dédale qu'est malheureusement parfois l'espace gouvernemental.

• (17 h 50) •

Alors, on a déjà agi. D'ailleurs, il aura certainement remarqué que notre gouvernement a été honoré, hein, par un regroupement qui évalue les impacts des actes d'allègement, a été honoré même comme étant un des plus efficaces dans l'allègement réglementaire des entreprises au cours de deux dernières années. Et c'est un honneur qu'on a été contents de recevoir mais sans penser que ça suffit. On pense qu'il faut continuer à aider nos entreprises à être libérées le plus possible de leurs tâches administratives.

Je crois que, déjà, c'est mieux parce que, si vous regardez le dernier sondage fait par la fédération canadienne des entreprises indépendantes, qui sondait les entreprises du Québec et des autres provinces sur les principaux obstacles à leur croissance et leurs intentions, d'abord, on constate que le niveau de confiance et d'ambition des entrepreneurs québécois est plus élevé que celui des autres provinces canadiennes, notamment leurs intentions d'embauche, ce qui, ma foi, n'est pas une mauvaise nouvelle, loin de là, et également que les obstacles à leur croissance sont ceux que j'ai mentionnés tantôt, mais que la lourdeur réglementaire n'est pas aussi élevée comme facteur qu'elle l'est dans d'autres provinces canadiennes. Alors, des fois, on a tendance à s'autoflageller, au Québec, et dire qu'on est moins bons que les autres. Ça arrive, hein, mais pas nécessairement tout le temps et pas nécessairement dans tous les domaines.

Mais il faut certainement continuer à faire ça. Quand on a fusionné les organismes du marché du travail, la Commission des normes du travail et la CSST, on a réduit les prélèvements de taxe sur la masse salariale des entreprises en conséquence. Donc, chaque fois qu'on fait un geste, on essaie de voir quels sont les impacts sur nos entrepreneurs en termes fiscaux et également en termes de lourdeur administrative.

Je veux également rappeler, parce que la fiscalité est très proche de la lourdeur administrative, que des actions significatives ont été posées pour baisser les impôts de nos PME, particulièrement les impôts des PME manufacturières et du secteur primaire, et également s'adresser à leur plainte principale, leur complainte principale, qui était la lourdeur de la taxe sur la masse salariale, en diminuant les taux de cotisation au fonds de santé et services sociaux, qui va être rapidement accélérée. Elle va être rapidement accélérée, cette réduction, au cours des prochaines années. On fait donc en sorte, M. le Président, qu'une entreprise manufacturière québécoise avec un chiffre d'affaires correspondant aux PME aura très bientôt un fardeau fiscal équivalent à celui de l'Ontario. Ça fait longtemps que les entrepreneurs québécois demandent ça. Ils ont raison, vous avez raison, on arrive bientôt à cet objectif-là parce qu'il faut rappeler que nos PME sont les plus grands générateurs d'emplois et les plus grands créateurs d'emplois. Et, comme on le disait plus tôt aujourd'hui, c'est parmi nos PME d'aujourd'hui qu'on trouve nos géants de demain. Nos géants d'aujourd'hui ont tous été des petites PME à leurs origines. Il faut donc être certain de les identifier et les aider à grandir.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. M. le député de LaFontaine, pour 5 min 30 s.

M. Tanguay : 5 min 30 s. Alors, rapidement, M. le Président, j'aimerais parler de l'évolution des effectifs de la fonction publique. Lorsque l'on sait toute l'importance de cette question, quand on reconnaît la statistique et la réalité à l'effet que 60 % des budgets de l'État sont liés à la rémunération, alors question extrêmement importante qu'est l'évaluation des effectifs de la fonction publique. Et j'aimerais entendre le premier ministre suite à l'adoption, en décembre 2014, de la Loi sur la gestion et le contrôle des effectifs des ministères, des organismes et des réseaux du secteur public ainsi que des sociétés d'État, donc loi importante adoptée par un gouvernement libéral en décembre 2014, qui, ni plus ni moins... Et ça, c'était important. En conformité, on ne peut pas, évidemment, améliorer ce que l'on ne mesure pas. Alors, c'était une loi déterminante. 60 % des coûts, donc, sont liés à la rémunération. J'aimerais entendre le premier ministre quant à cette importante loi qui a été adoptée sur, justement, l'évaluation de l'évolution de la taille de l'État et s'assurer enfin qu'on est cohérent avec les orientations gouvernementales.

Le Président (M. Ouellette) : Merci. Pour la dernière réponse de ces crédits, pour quatre minutes, M. le premier ministre.

M. Couillard : Bon, d'abord, M. le Président, il faut expliquer, là, pourquoi on veut faire en sorte non pas de réduire massivement mais d'au moins limiter la croissance de la taille du secteur public dans l'économie, et notamment ça a un lien étroit avec l'effectif.

D'abord, parce que, dans l'espace économique, l'ensemble des économistes s'accordent pour le dire, la place prise par le pouvoir public est, par définition, une place qui n'est pas prise ou ne peut être prise par les investisseurs privés et les entrepreneurs. Il faut donc avoir un équilibre judicieux.

Deuxièmement, actuellement au Québec, 27 % de tous les emplois sont dans le secteur public, ce qui est très élevé par rapport à des comparables de notre région géographique.

Enfin, on a une occasion devant nous. Avec la démographie, il y a des impacts de toutes sortes de la démographie qui font en sorte que le niveau, le nombre de départs à la retraite s'accélère, et on doit être capables de bien gérer nos effectifs. Et la technologie devrait nous permettre de donner d'aussi bons services avec un peu moins de monde et, bien sûr, préserver les emplois qui donnent des services directs à la population en santé et en éducation mais également des administrateurs de grande qualité dans nos ministères, organismes et sociétés d'État.

On avait d'abord abordé cette question, dès le début, en constatant — ce qui est un peu regrettable de dire aujourd'hui qu'on a constaté ça à notre arrivée au gouvernement — qu'il était impossible pour l'État de compter ou de savoir précisément combien de personnes travaillaient dans le secteur public et parapublic et quelles étaient leurs catégories d'emploi. Alors, c'est un peu regrettable d'avoir à dire ça parce que comment peut-on planifier des changements si on ne connaît pas la situation de départ et qu'on n'est pas en mesure de se fixer des objectifs? Donc, il faut d'abord bien connaître les effectifs, ce qui a été fait par l'adoption d'un projet de loi ici, à l'Assemblée nationale, et annoncer des objectifs ambitieux qui étaient une réduction globale de 2 % du niveau d'effectif de la fonction publique par rapport à 2013‑2014, un gel global des effectifs des organisations hors fonction publique par rapport à 2014.

En fait, des données prévisionnelles pour 2015‑2016 montrent que le gouvernement est en voie de dépasser significativement son objectif global. En effet, le niveau d'effectif prévu présente une réduction de 7 158 équivalents temps complet ou 1,5 % comparativement à l'exercice financier 2014‑2015. C'est 3,3 %, 2 268 dans la fonction publique, 1,2 % dans les organisations hors fonction publique. Et c'est un progrès, mais il faut répéter que ce n'est pas un progrès dogmatique, c'est un progrès qui est utile et nécessaire pour ramener l'État à une taille plus appropriée dans l'économie, permettre au secteur privé de prendre de l'expansion et maintenir la qualité de nos services publics, de nos organisations, ministères et de nos sociétés d'État.

On va continuer, bien sûr, à mesurer ça de façon régulière, on va continuer, bien sûr, M. le Président, à s'assurer qu'on maintient la qualité des services et, dans certains cas, on va s'assurer de rapatrier les compétences. Par exemple, dans le domaine informatique, on prévoit non pas des diminutions d'emploi mais des augmentations d'emploi dans la fonction publique. J'étais récemment sur le site Web du ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles, où on annonce l'embauche d'ingénieurs. Alors, il y a des corps professionnels qu'on doit ramener dans la fonction publique, et c'est très important. Il y a plusieurs éléments qui nous ont amenés à cette conclusion.

Je voudrais, en terminant, M. le Président, je crois, remercier tous les gens qui ont travaillé à la préparation de ces crédits, les députés de tous les côtés pour leur participation. Je pense qu'on a eu majoritairement des échanges intéressants et productifs et j'espère que ce sera le cas pour le reste des crédits.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le premier ministre. Le temps alloué à l'étude du volet Conseil exécutif des crédits budgétaires du portefeuille Conseil exécutif étant presque écoulé, nous allons maintenant procéder à la mise aux voix des crédits.

Adoption des crédits

Le programme 1, intitulé Cabinet du lieutenant-gouverneur, est adopté sur division de l'opposition officielle et de la deuxième opposition. Le programme 2, intitulé Services de soutien auprès du premier ministre et du Conseil exécutif, est adopté sur division de l'opposition officielle et de la deuxième opposition.

Documents déposés

En terminant, je dépose les réponses aux demandes de renseignements de l'opposition. Je remercie particulièrement le premier ministre, le chef de l'opposition officielle et le chef de la seconde opposition pour votre collaboration au cours de cette commission.

La commission suspend ses travaux jusqu'à 19 h 30, où elle entreprendra l'étude des crédits budgétaires du volet Affaires autochtones du portefeuille Conseil exécutif. La commission se réunira à la salle Louis-Joseph-Papineau.

(Suspension de la séance à 17 h 58)

(Reprise à 19 h 31)

Le Président (M. Ouellette) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des institutions reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de procéder à l'étude du volet Affaires autochtones des crédits budgétaires du portefeuille Conseil exécutif pour l'exercice financier 2016‑2017.

M. le secrétaire, y a-t-il de nouveaux remplacements?

Le Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Bourgeois (Abitibi-Est) remplace Mme Montpetit (Crémazie); Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré) remplace M. St-Denis (Argenteuil); Mme Tremblay (Chauveau) remplace M. Tanguay (LaFontaine); et M. Lemay (Masson) remplace Mme Roy (Montarville).

Le Président (M. Ouellette) : Merci. Nous allons débuter avec les remarques préliminaires et, ensuite, nous allons procéder à une discussion d'ordre général par blocs d'environ 20 minutes, incluant questions et réponses. Et je serai gardien du temps pour m'assurer d'une équité entre la longueur de la question et la longueur de la réponse aussi. Et la mise aux voix des crédits sera effectuée à la fin de l'étude de ce volet.

Affaires autochtones

Remarques préliminaires

Et, sans plus tarder, M. le ministre, pour vos remarques préliminaires.

M. Geoffrey Kelley

M. Kelley : Alors, merci beaucoup, M. le Président. C'est encore une fois un grand plaisir d'être devant la Commission des institutions pour défendre les crédits du Secrétariat aux affaires autochtones, qui fait partie, le ministère, du Conseil exécutif. Je veux saluer les députés autour de la table. Plusieurs, nous avons participé au même exercice il y a un an. Il y a quelques nouveaux visages, je vois la nouvelle députée de Chauveau, entre autres, qui a la communauté huronne de Wendake dans son comté, et notre consoeur de Charlevoix. Puis, je pense, c'est la première fois qu'on a fait ça ensemble. Alors, bienvenue.

C'est avec une certaine fierté... Je pense, c'est la septième fois que je défends ces crédits devant cette commission. Je ne sais pas si c'est... très fier et très, très prêt à expliquer les démarches que nous avons faites, les défis qui sont devant nous, qui — il faut admettre — sont d'une très grande taille, on a juste à lire nos journaux depuis un certain temps. Et la question autochtone ne préoccupe pas uniquement le Québec, mais le Canada dans son ensemble. Il y a des enjeux qui sont très préoccupants, et nous allons travailler ensemble.

En premier lieu, M. le Président, je veux présenter l'équipe qui est avec moi au niveau du Secrétariat des affaires autochtones. La secrétaire générale associée, c'est Mme Marie-Josée Thomas, une autre personne avec beaucoup d'expérience dans le domaine. On a fait cet exercice ensemble à maintes reprises. À côté d'elle, c'est Patrick Brunelle. Il y a également Lucien-Pierre Bouchard, Olivier Sylvain-Bourdages et Jacques Bureau, qui sont ici au niveau du Secrétariat des affaires autochtones. À ma gauche, c'est mon nouveau directeur du cabinet, Félix Rhéaume, avec une vaste expérience, maintenant, de neuf jours, mais qui a travaillé dans mon cabinet entre 2011 et 2012. Alors, c'est quelqu'un qui a déjà une bonne connaissance. Il y a également Chantale Gauvin, Nicolas Tremblay et Josée Levesque, qui font partie de mon cabinet, qui sont ici ce soir.

Alors, 2015‑2016, c'était une année où il y avait la commémoration d'une certaine date importante dans l'histoire de nos relations entre les Premières Nations et le gouvernement du Québec. Je pense notamment au mois de novembre, où c'était le 40e anniversaire de la signature de la Convention de la Baie James et le Nord du Québec. Nous avons fêté ça avec les Cris à Montréal au mois de décembre, et d'être capables d'être assis avec les signataires de la Convention de la Baie James... À la fois les Cris et les Inuits ont présenté des documentaires, M. le Président, et, juste de retourner en 1975, on est dans une époque sans cellulaire, sans les communications modernes, les grandes salles de rassemblement... Il y a des moments, dans les films que les Inuits ont fait qu'ils descendaient à Fort-George, qui était la communauté qui est devenue Chisasibi, mais c'était sur une île, alors... Toutes les négociations entre les Billy Diamond, les Charlie Watt, les Zebedee Nungak, et tout le reste, c'était vraiment extraordinaire de voir ces films qui ont été conservés et de prendre la peine de faire les entrevues avec les personnes toujours vivantes qui faisaient partie de la conception... la confection de ce traité moderne.

Et, si toujours on a un modèle à suivre pour l'ensemble du Canada, ça demeure la Convention de la Baie James. Il y a d'autres nations puis il y a d'autres intérêts, mais je trouve quand même que la preuve est faite. D'avoir un document de base, un document fondateur comme ça, qui définit nos relations, nos responsabilités entre le gouvernement fédéral, le gouvernement du Québec, les Cris, les Inuits et, après, les Naskapis, c'est vraiment... Je pense, la preuve est faite. Alors, nous avons commémoré ce moment très important.

Également, c'était le 30e anniversaire de l'adoption, par l'Assemblée nationale et le gouvernement de «Premier» René Lévesque, de la reconnaissance des 11 nations, qui est un autre moment marquant dans l'histoire de nos relations, une reconnaissance formelle, il y a 30 ans, des nations et certains domaines d'intérêt et devoirs que nous devrons respecter comme gouvernement.

Sur un côté un petit peu plus sombre, c'était également le 25e anniversaire de la crise d'Oka, et j'étais dans un moment très touchant le 11 juillet à Oka. Et ça été un moment d'un bon voisinage parce qu'enfin la ville d'Oka et la communauté de Kanesatake ont signé un genre d'entente de, on peut dire, bon voisinage. Alors, le grand chef Serge Simon et le maire Pascal Quevillon ont vraiment fait un travail très important pour accepter que toutes les questions qui vont toucher La Pinède et son développement vont être faites ensemble. Alors, il n'y en a pas un qui va agir unilatéralement. Mais c'est la preuve — ça, c'est 25 ans plus tard — quand on a des conflits, quand la paix sociale est perturbée dans notre société, ça prend longtemps pour corriger les erreurs. Alors, je pense que c'était un grand moment. Il reste le travail à faire, mais j'ai trouvé ça, au niveau symbolique, d'avoir le maire et le grand chef ensemble, une preuve d'un avancement.

Également, au mois de juin, il y avait le dépôt à Ottawa du rapport de la commission sur la vérité et réconciliation, qui était un autre moment très important. C'est une manoeuvre de plusieurs années. La commission, les commissaires ont traversé le pays, ont déposé 94 recommandations, dont une trentaine qui touchent le gouvernement du Québec. Alors, les ministères sont déjà à l'oeuvre pour préparer un bilan. Il y a des choses qui sont déjà en marche, déjà en place. Il y a d'autres choses que nous devrons continuer de développer.

Je parlais avec... votre histoire personnelle, M. le Président, entre autres. Je pense aux formations des professionnels appelés à travailler en milieu autochtone, je pense que la formation donnée pas uniquement à nos policiers, mais ça peut être nos infirmières, nos médecins, les travailleurs sociaux, les enseignants, tous les autres domaines, il y a déjà certaines choses qui sont en place. Mais, de toute évidence, il faut aller beaucoup plus loin, et je pense qu'un des défis pour le gouvernement, c'est une meilleure préparation pour les jeunes policiers à travailler en milieu autochtone, également les jeunes enseignants qui vont enseigner dans les écoles, dans le comté de notre collègue d'Ungava et d'autres lieux au Québec. Alors, je pense que ça, c'est un grand défi et une des recommandations de vérité et réconciliation qui est très importante.

De toute évidence, il y avait trois autres questions très préoccupantes, je suis certain, qu'on va aborder au long de la soirée, mais la première, c'est toujours la question des femmes assassinées et disparues. Avec le changement de gouvernement à Ottawa, on a maintenant une volonté claire, à Ottawa, de faire une enquête pancanadienne à ce sujet, et je pense que c'est quelque chose qui est très important. J'ai assisté, à Winnipeg, à la deuxième table ronde avec plusieurs membres des familles des victimes, des femmes assassinées, disparues, et c'est toujours les moments de très grande émotion. Ce sont des personnes qui ont perdu une mère, une soeur, une fille, une tante, une cousine. Il y avait des dizaines de membres des familles présents. Tout l'après-midi était consacré à leurs histoires, et c'était vraiment très difficile, comme père de quatre filles, de voir ces familles qui sont toujours déchirées et trop souvent toujours dans l'inconnu. Qu'est-ce qui s'est passé à leurs proches? Alors, ça, c'est quelque chose que nous devons travailler ensemble. Nous avons des familles de victimes aux Québec. Deux de ces représentantes ont participé à la table ronde aussi : Mme Grégoire de Uashat et Mme McDonald de Kanesatake. Alors, leurs histoires sont très difficiles à écouter, mais il faut les mettre en évidence, il faut rappeler tout ça.

• (19 h 40) •

Il y avait tous les incidents qui touchaient la communauté de Val-d'Or et les allégations sérieuses contre les policiers de Val-d'Or. Alors, il y avait tout un travail à faire, qui soulevait d'une façon plus générale la situation des autochtones en milieu urbain. Je suis certain que c'est un autre sujet qu'on va aborder ce soir, mais il y a des dispositions, dans le budget qui a été déposé par notre collègue le ministre des Finances, qui vont adresser certaines de ces questions aussi.

Et finalement, et très préoccupant, là, deux communautés en particulier, mais ce n'est pas uniquement ces deux communautés, ont été touchées par toute la question des suicides, notamment des jeunes. Je pense à Kuujjuaq, où il y avait cinq suicides depuis Noël et qui ont ébranlé cette communauté. Également Uashat, dans la Côte-Nord, où il y avait également une autre vague de suicides, qui est très préoccupante aussi. Alors, ça, c'est les choses qui n'interpellent pas uniquement le Secrétariat des affaires autochtones, mais l'ensemble du gouvernement, et ça interpelle notre devoir de consultation et de collaboration avec nos collègues pour trouver des réponses à ces questions.

Alors, on va aborder toutes ces questions en gros, et il reste une couple de minutes, mais, je pense, c'est toujours important de rappeler les crédits que nous allons regarder ce soir, qui passent de 245 millions de dollars à 258 millions de dollars. Alors, c'est quand même une augmentation qui s'explique principalement par deux ajouts. 7,2 millions de dollars, c'est juste l'indexation des ententes nordiques déjà assignées, notamment avec la nation crie et les Inuits. Alors, ça explique le 7,2 millions, de l'augmentation de 13,4 millions de dollars. Et 6,2 millions, c'est l'argent disponible dans le FIA II. Alors, ça, c'est, entre autres, pour le soutien des projets communautaires, les projets de développement économique, les projets de soutien des organismes communautaires. Alors, ça, c'est les deux grands postes budgétaires qui verront une augmentation dans les crédits que nous allons étudier attentivement ce soir, M. le Président.

Alors, sur ça, je cède la parole aux autres porte-parole et je vais être prêt à répondre aux questions. Et l'équipe qui est derrière moi va également travailler pour fournir toute l'information nécessaire aux membres de la commission. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le ministre. J'invite maintenant le député de Beauharnois et porte-parole de l'opposition officielle à faire ses remarques préliminaires.

M. Guy Leclair

M. Leclair : Alors, tout d'abord, je tiens à vous saluer, M. le Président, ainsi que le secrétariat de la commission, saluer aussi le ministre, les gens qui l'accompagnent, Mme la sous-ministre, bien entendu les collègues et collègues autour de la table. Je vous salue en cette belle soirée de crédits.

Bien entendu, M. le ministre, une année aux Affaires autochtones assez mouvementée, quelque peu triste parfois parce que je crois que c'était plus mouvementé vers des côtés qu'on aurait aimé ne pas voir et ne pas savoir. Mais heureusement, heureusement, je crois qu'en tant que ministre vous allez pouvoir nous rassurer. Nous savons qu'il y a une grosse partie qui vient aussi du fédéral, une aide du fédéral, alors on aura sûrement des questions face à ces aides-là, où est-ce qu'on en est. On sait que le gouvernement nouvellement élu semble vouloir mettre un peu plus de sommes d'argent, on sait que, souvent, l'argent c'est le nerf de la guerre dans les communautés, là, pour leur venir en aide.

Bien entendu, lorsqu'on parle de nos communautés autochtones, on parle souvent d'éducation, souvent de logement, car c'est un gros problème encore aujourd'hui, en 2016. On le répète, je pense, à chaque crédit. Ça fait une couple de fois que je fais les crédits, puis pareillement pour vous, M. le ministre. Je pense que les sommes ne seront jamais adéquates. C'est triste, mais c'est comme ça. Mais il faut quand même continuer l'effort parce que, lorsqu'on ne peut même pas bien dormir, alors, comment voulons-nous apprendre à l'école puis se donner un mode de vie, une qualité de vie qui est minimale?

Alors, tous les problèmes qu'on a eus en sécurité publique, bien entendu, on aura plusieurs questions sur la sécurité publique, les avancements... Il y a eu des promesses, il y a eu des déboursés d'argent. Alors, on va essayer de ventiler ces choses-là parce que, qu'on le veuille ou non, les événements de Val-d'Or ont été un des premiers événements... Puis, à tort ou à raison, je crois que ça nous a fait voir une réalité, ni plus ni moins, pour les gens de Val-d'Or, qui sont vraiment accotés sur une communauté autochtone. Puis, avec toute l'histoire qui s'ensuit, je crois que la sécurité publique, puis les liens avec Val-d'Or et les communautés qui sont directement reliées, bien, on aura plusieurs questions à ce sujet-là aussi.

Puis j'ose espérer que le ministre... Je n'ai aucun doute que sa volonté, il faut qu'elle transparaisse dans tout ça parce qu'au-delà de dire : Bien, on attend des montants à gauche, à droite, la volonté, il faut qu'elle vienne premièrement du représentant qui est le premier, qui est le ministre des Affaires autochtones. Et ensuite, on comprend très bien que certaines situations sont reliées à la ministre de la Sécurité publique, au Trésor pour certaines sommes. Alors, on ne vous fera pas porter tout le chapeau de ça, mais, une chose est certaine, au minimum, je m'attends à ce que le ministre, ce soir, nous dise : Bien là, les Affaires autochtones, on a eu une année 2016 difficile, en espérant qu'il y aura une aide et une volonté gouvernementale.

Bien entendu, je ne peux pas passer sous silence aussi notre fameuse entente qui perdure depuis plusieurs années face à la CSST, la CCQ. On sait, la construction de l'hôpital, là, qu'on me dit qu'elle est commencée ou elle va commencer. Alors, peut-être avoir une nouvelle image d'où est-ce qu'on en est avec ça. Est-ce que ça va toujours bien comme qu'on le souhaitait ou non? Alors, j'aurai aussi quelques questions, là. On a rencontré des chefs de... M. le chef Happyjack, qui attendent toujours après une rencontre, là. Puis ce n'est pas un reproche que je fais, je pense qu'avec tout qu'est-ce qui était du pipeline, et tout ça, ces gens-là, ils s'avaient fait dire : Bien, suite au BAPE, et tout ça, il y aura des rencontres avec les différents chefs de différentes nations puis de différentes communautés autochtones. Puis ces gens-là, bien, je pense qu'ils sont anxieux de savoir où est-ce qu'on s'en va, où est-ce qu'on en est avec ça. Alors, j'aurai la chance de vous questionner sur ça.

Alors, ça fera à peu près le tour. Ça ne devrait pas faire trop mal, M. le ministre. Mais, comme qu'on vous connaît, bien, je pense que, si vous avez des réponses pour nous, vous allez être fier de nous les donner. Puis je pense que c'est dans le bien-être de tous les gens ainsi que la communauté autochtone. Alors, bonne soirée à tous, et on se revoit très bientôt.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le député de Beauharnois. J'invite maintenant M. le député de Masson, porte-parole du deuxième groupe d'opposition, à faire ses remarques préliminaires.

M. Mathieu Lemay

M. Lemay : Alors, merci, M. le Président. Donc, à mon tour de saluer M. le ministre ainsi que toute son équipe. Vous savez, c'est la troisième fois qu'on fait nos crédits ensemble, M. le ministre, donc on a déjà une bonne habitude de collaboration. Donc, j'entends bien poursuivre cela ce soir avec vous. J'aimerais saluer mon collègue député de Beauharnois ainsi que les collègues de la Commission des institutions. C'est un plaisir d'être de retour avec vous. Et puis, assurément, j'ai entendu la liste, là, des sujets que vous avez mentionnés dans votre allocution de départ ainsi que le député de Beauharnois. Vous savez, nous autres aussi, on a plusieurs sujets. On ne réussira pas à passer au travers de tous les sujets ce soir. Donc, on choisira en fonction, là, de qu'est-ce que les autres ont déjà parlé pour essayer de trouver d'autres sujets qui n'ont pas été abordés. Mais, bref, avec le peu de temps qu'il nous reste, je vais limiter mes remarques préliminaires en ce moment pour pouvoir reporter le plus de temps possible aux questions. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Ouellette) : Ça va être une soirée de questionnement. Je ne sais pas s'il y a quelqu'un qui va oser poser une question à votre chef de cabinet, là. Il est là depuis neuf jours, là, ça serait peut-être intéressant d'avoir sa réponse.

Discussion générale

Donc, nous allons immédiatement débuter. M. le député de Beauharnois.

M. Leclair : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, commençons tout de suite avec le chef de cabinet.

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Leclair : Je commencerais en lui souhaitant la bienvenue. Alors, M. le ministre, il était une fois en 2016. On avait promis, dans le temps qu'on avait eu notre passage au gouvernement... ça a commencé de 2013, on avait dit, jusqu'en 2016, qu'on mettait une somme de 69 millions de dollars, 69,5 exactement... 79, excusez-moi, pour bâtir 300 nouveaux logements. On sait que la demande est beaucoup plus forte que ça. J'aimerais savoir, de votre côté, où est-ce qu'on en est avec ces sommes-là qui avaient été mises de côté pour ces 300 logements-là de 2013 à 2016? Nous sommes en 2016. Est-ce que c'est à terme à l'heure que l'on se parle? Est-ce qu'il reste encore d'autres logements à terminer pour rencontrer, du moins, ce 300 logements là? Il n'y a pas eu d'autres avancées là-dessus? Alors, j'aimerais savoir un peu le topo des logements, là, qu'on a. C'était surtout chez les Inuits, ça.

• (19 h 50) •

M. Kelley : Alors... Oui, exactement. Et ça, c'est les logements qui étaient annoncés quand l'ancien premier ministre Jean Charest annonçait le Plan Nord en 2011. Alors, on a pris l'engagement de construire 300 logements. De mémoire, les dernières de ces maisons étaient construites l'été passé?

Une voix : Oui.

M. Kelley : Alors, les 300 sont faites. Également, il y avait une entente 2010‑2015 avec le gouvernement fédéral, une entente tripartite. Nous avons prolongé ça d'une année et, de mémoire, nous avons construit un autre — 60 ou 65? — 60 maisons l'été passé. Dans l'annonce que nous avons faite dans le Plan Nord, la deuxième version, nous avons pris l'engagement de construire un autre 90 maisons. Alors, ça, c'est en préparation et en planification.

Et vous avez fait référence, M. le député, au nouveau gouvernement fédéral. Et, dans le budget qui a été déposé par M. Morneau au mois de février, mars, il y a 50 millions de dollars sur deux ans pour la construction des maisons à Nunavik. Alors, on est en train... parce que c'est des vases communicants. L'argent dépensé par un gouvernement a des conséquences parce qu'il y a le coût de construction, mais également c'est le soutien des loyers et de leur entretien qui va dans ces ententes. Alors, il y a 50 millions. Alors, il y a des discussions présentement entre le gouvernement du Québec, le SAA, et la Société d'habitation, et le gouvernement fédéral quant à l'utilisation de ces 50 millions de dollars. Mais, de toute évidence, c'est une question qui est très importante.

Le Président (M. Ouellette) : Merci. M. le député de Beauharnois.

M. Leclair : Merci, M. le Président. Il y a une étude qui avait sorti, je crois que c'était en 1993. On disait que, pour combler le manque, ça prenait environ, puis je n'ai pas le nombre de maisons, 185 millions de dollars.

Une voix : En 2013.

M. Leclair : En 2013. Alors là, vous nous dites : Il y a quand même un 50 millions qui sera peut-être sur deux ans, les négociations restent à être faites. J'aimerais savoir : Pour vous, ce 50 millions là, si on ne parle que de lui, la portion fédérale, ça veut dire combien de maisons de plus, ça?

Le Président (M. Ouellette) : M. le ministre.

M. Kelley : Moi, je n'ai pas le chiffre précis, on peut le fournir, mais, règle générale, une unité coûte plus ou moins 400 000 $ par logement. Je pense que le député d'Ungava est peut-être encore mieux placé pour répondre, mais je pense qu'on est dans ces eaux-là, alors 400 000 $ dans 50 millions. Mais je pense, M. le député, ça soulève la question... On parle peut-être d'une pénurie entre 900 et 1 000 logements dans le Nunavik. Avec 400 000 $ par unité, faire les maths, on est devant un chiffre très important dans les communautés qui sont très jeunes.

Alors, quelque chose que je répète au gouvernement fédéral, aux instances du gouvernement du Québec quand je suis en réunion avec la Société Makivik ou l'Administration régionale Kativik, il faut imaginer une autre façon de faire le logement au nord du 55e parallèle parce qu'uniquement par le logement social on ne va jamais arriver. Alors, est-ce qu'il y a... Et c'est très difficile, et je comprends tous les obstacles pour devenir propriétaire d'une maison à Kuujjuaq, par exemple, mais nous devrons continuer de travailler avec la Société Makivik, avec le leadership inuit pour trouver les façons que les personnes qui ont les moyens puissent construire leur propre maison. Mais il y a des obstacles au niveau de l'assurance, il y a des obstacles au niveau des hypothèques, on n'est pas propriétaire des terrains.

Alors, ce n'est pas simple, qu'est-ce que je suis en train de dire, mais, quand je regarde la pyramide démographique dans ces communautés, la pénurie de logements existante aujourd'hui, pour les personnes qui vont être dans nos sièges dans 10, 15 ans, de répondre à ces questions, si on ne change pas nos façons de faire, la problématique va être encore plus grave dans 10, 15 ans. Alors, je pense qu'il faut imaginer autrement le logement. C'est un défi que j'ai lancé, entre autres, avec le nouvel Institut nordique, qui est associé avec l'Université Laval, comment se pencher sur les autres façons de faire en milieu nordique, parce que, je pense, sans ça, on peut continuer d'ajouter les logements — c'est quelque chose que les gouvernements vont continuer de faire — mais ça va être toujours insuffisant. C'est ma crainte.

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de Beauharnois.

M. Leclair : Merci, M. le Président. Donc, vous nous avez parlé que le 300 logements était fait, vous prévoyiez ajouter 90 nouvelles maisons. Alors, c'est quelle somme que vous avez, dans vos budgets, de réservée pour ces 90 maisons là? Est-ce que c'est 2016 ou il y a un échéancier un peu plus long?

M. Kelley : Première question, ce n'est pas dans mes budgets, alors il faut référer à la Société d'habitation du Québec, qui a le mandat pour le faire. Règle générale, c'est étalé parce qu'il y a des... c'est une saison de construction qui est assez courte. La logistique, parce que ce n'est pas loin de chez vous, dans votre comté, M. le député, les bateaux partent de Valleyfield pour monter au Grand Nord, toute la planification... Alors, je n'ai pas la réponse, mais je peux trouver la réponse au niveau de combien de maisons vont être construites cet été. Mais également, comme j'ai dit, les discussions avec le gouvernement fédéral sont intensifiées pour leur engagement de dépenser 25 millions cette année et 25 millions l'année prochaine, qui est un engagement très important.

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de Beauharnois.

M. Leclair : Merci, M. le Président. Donc, à chaque fois qu'on va faire un surplus ou qu'on va faire une maison de plus, ça va être un gain pour ces gens-là, mais, sans jouer le défaitiste, à 50 millions, 60 millions, lorsqu'on parle de ni plus ni moins, là, 180 ou 200 millions — qui serait la nécessité — est-ce qu'on baisse les bras face à eux? Parce que, si on dit juste les 90 maisons, ce sera sur un échéancier de deux, trois ans, vu les possibilités et ce que l'on connaît. Donc, on peut dire que c'est à perpétuité, là. On n'atteindra jamais les besoins, même pas à 50 %, d'ici les 20 prochaines années.

M. Kelley : Mais il faut continuer, et il y a des limites au nombre de maisons, par année, qu'on peut construire aussi. Mais je reviens toujours à ma réponse précédente, si c'est toujours... la seule et unique réponse, c'est d'ajouter les logements sociaux. Le budget pour le logement social n'est pas illimité. Alors, il y a également des besoins dans tous les coins du Québec pour le logement social. Alors, oui, on peut faire moins de logements sociaux sur l'île de Montréal, ou dans la ville de Québec, ou dans d'autres endroits au Québec, mais il y a une certaine limite à ça aussi. C'est pourquoi nous devrons repenser le logement dans son ensemble au nord du 55e parallèle. Il faut trouver d'autres solutions.

Je sais que la société d'habitation est à l'oeuvre, encore une fois, pour peaufiner le programme pour devenir propriétaire de votre propre maison. Mais, pour voir à quel point c'est difficile, c'est un programme qui a été lancé par Louise Harel, de mémoire, en 1998, 1999, dans ces eaux-là. On est rendus maintenant à environ 80, je pense, maisons privées dans le Nunavik, alors, dans 17, 18 ans... C'est dans ces eaux-là. Mais c'est la voie de l'avenir parce que, si la seule et unique solution, c'est de continuer de construire le logement social, on va toujours être devant une pénurie avec toutes les conséquences graves qu'on connaît.

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de Beauharnois.

M. Leclair : Bien. Merci, M. le Président. Bien, j'ose imaginer qu'on peut se fier sur le ministre des Affaires autochtones pour... Comme qu'il y a une ouverture au fédéral, en ce moment, qui ne semblait pas y être dans les dernières années pour toutes sortes de raisons, je pense qu'il faut encore crier plus fort parce que, s'il y a une ouverture d'esprit puis que ces gens-là prennent conscience aussi que ça prend 200 millions... Le 50 millions, on ne peut pas le revirer du revers de la main, on le prend, bien entendu. Est-ce qu'il va être complètement affecté là? En négociation, je pense que vous y ferez partie, mais je pense qu'il faut profiter de cette ouverture d'esprit là du fédéral en ce moment pour dire qu'on a des grands besoins. Puis le logement, on sait qu'eux, en temps normal, ça fait plusieurs années qu'ils ne donnent pas les sommes nécessaires. Alors, sur ce, on va se souhaiter bonne chance, bien entendu.

J'aimerais qu'on revienne plus près encore, justement, de tout ce qui s'est passé à Val-d'Or. Alors, sur un premier volet, il y a eu une annonce du premier ministre, puis vous étiez là, M. le ministre, concernant une aide financière de 6 millions. Dans nos questions particulières, on a fait une demande pour avoir la ventilation de ce 6 millions là. Alors, j'aimerais vous entendre sur cette ventilation-là parce que ce qu'on a reçu, c'est une ventilation de 1 million de dollars, alors qu'il y en avait 6 ou 6,5 millions de promis. Alors, j'aimerais vous entendre.

Le Président (M. Ouellette) : M. le ministre.

• (20 heures) •

M. Kelley : O.K., parfait. Comme il dit, la réponse du gouvernement, dans l'immédiat, comprenait plusieurs volets. Certains venaient du Secrétariat des affaires autochtones, d'autres venaient de la société d'habitation. Alors, il y a vraiment les deux volets.

Au niveau des engagements précis, nous avons octroyé un soutien additionnel au Centre d'amitié autochtone de Val-d'Or de presque 70 000 $, nous avons aidé pour le refuge de jour pour les itinérants à Val-d'Or Chez Willie. Alors, il y a deux montants au niveau des salaires des personnes qui travaillent Chez Willie et également l'hypothèque pour l'édifice. Moi, j'ai eu le plaisir d'aller à Val-d'Or avec notre collègue d'Abitibi-Est et notre collègue de Rouyn-Noranda au début du mois de mars. C'était une belle journée où il ne faisait pas plus que moins 25, et la conférence de presse pour l'ouverture était à l'extérieur. Alors, les pieds n'étaient pas très chauds. Mais l'engagement pour Chez Willie, ensemble, c'était 300 000 $. Je donne les chiffres ronds, M. le député. J'ai un chiffre plus précis ici. Et le gros de l'annonce était un projet de logement social, un HLM qu'on va construire, qui s'appelle Kijaté. Et ça, c'est un projet qui vaut, je pense, 6 millions de dollars. Et, sur ça, pour boucler le budget, le Secrétariat des affaires autochtones a donné 150 000 $.

 Alors, si on met tout ça ensemble, plus un autre projet qui était déjà à l'analyse au SAA, qui était Kinawit, qui est un genre de parc culturel juste à l'extérieur de Val-d'Or, si je mets tout ça ensemble, le total, c'est 7,5 millions de dollars qui était dépensé à Val-d'Or. Sur ça, 1 150 000 $ venait du Secrétariat des affaires autochtones, 287 000 $ venait du ministère de la Santé et des Services sociaux, notamment pour les salaires des intervenants au centre d'amitié et également Chez Willie, et presque 6 millions de dollars, pour la société d'habitation, pour la réalisation du projet Kijaté, qui était... de mémoire, c'est 24 unités pour les familles autochtones vivant à Val-d'Or.

Alors, sur ces projets, comme je dis, je peux annoncer que Chez Willie est ouvert. Et c'est vraiment un lieu pas uniquement pour les itinérants autochtones. Mais Willie Hester était un Cri itinérant qui est décédé il y a trois, quatre ans, mais, de toute évidence, c'était quelqu'un extraordinaire qui a donné un coup de main à d'autres itinérants. C'était vraiment un bon voisin. Les membres de sa famille étaient là. Alors, c'était vraiment un moment solennel, mais un moment d'espoir de voir l'ouverture de Chez Willly. Alors, c'était une conséquence directe des mauvaises nouvelles, mais c'est une installation permanente qui va aider les itinérants à Val-d'Or. Et il y a un pourcentage de plus en plus important de ces itinérants qui sont autochtones à Val-d'Or. Le projet Kinawit progresse bien aussi. Je pense, c'est quelque chose qu'on va commencer d'utiliser cet été, de mémoire. Kijaté est dans les plans et devis, mais il va être très bientôt en construction. Alors, les engagements qui étaient annoncés par le premier ministre ont été respectés à 100 %.

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de Beauharnois.

M. Leclair : Merci, M. le Président. Est-ce que c'est possible d'avoir le dépôt? Parce que nous, on... Bien, je pense qu'en suivant, là, votre élaboration, là, des coûts, nous, il nous manquait le 6 millions, là, du HLM, du 24 logements.

M. Kelley : Moi, j'ai écrit sur ça, alors je vais faire une photocopie propre et je vais vous envoyer ça. Mais toutes les données sont ici.

M. Leclair : Oui, ça peut nous être parvenu par la suite, là, oui.

M. Kelley : Mais, comme j'ai dit, le gros du montant, c'était effectivement le projet Kijaté. C'est un projet qui a beaucoup d'appui de la ville de Val-d'Or aussi. À maintes reprises, notre ancien collègue Pierre Corbeil, notre actuel collègue d'Abitibi-Est m'a... pas harcelé, c'est trop fort comme mot, mais avoir les rappels, toujours polis, que c'est très important, ce projet. Alors, Kijaté, comme je dis, pour les familles avec des moyens modestes, ça va donner un endroit, pour eux autres, de stabiliser leur vie. Pour, souvent, les femmes monoparentales avec les enfants qui vivent à Val-d'Or, ça va être vraiment un pas en avant pour eux, pour Val-d'Or et pour ces femmes.

Le Président (M. Ouellette) : Je souhaiterais, M. le ministre, que vous preniez le temps de regarder pour les documents. Vous pouvez les faire suivre à la commission quand ils seront prêts, là.

M. Leclair : Exact. Il n'y a pas de presse.

Le Président (M. Ouellette) : Il n'y a pas d'urgence dans l'immédiat. M. le député de Beauharnois.

M. Leclair : Merci, M. le Président. Alors, le 23 novembre 2015, vous, M. le ministre, avec le ministre qui était à la Sécurité publique, maintenant aux Affaires municipales, M. Moreau... en tout cas, qui n'est plus là, la Sécurité publique, vous aviez proposé aux chefs autochtones d'établir un lieu de dialogue permanent suite aux événements de Val-d'Or. Alors, j'aimerais savoir où est-ce qu'on en est avec ce fameux supposé lieu là.

M. Kelley : On est toujours en discussion avec l'Assemblée des Premières Nations, avec le Grand Conseil des Cris, pour trouver le moyen le plus efficace et le plus rapide. De toute évidence, les relations entre les corps de police et les communautés ont été ébranlées, notamment par les événements à Val-d'Or, mais pas uniquement. On a juste à penser aux événements tragiques à Lac-Simon, le décès du jeune officier Thierry Leroux au mois de février, le dernier incident impliquant un policier à Lac-Simon. Alors, je pense, il faut trouver un moyen efficace où on peut s'asseoir, le leadership des Premières Nations, les représentants du gouvernement du Québec, les corps de police, et dire comment est-ce qu'on peut faire mieux parce que, de toute évidence, le corps de police est une nécessité dans nos sociétés. Il faut être capable de promener en sécurité en tout temps dans notre société, et, pour le faire, les policiers doivent avoir la confiance des personnes qui sont desservies.

Comme je dis, ce lien de confiance était ébranlé par certains événements. Alors, moi, je cherche toujours le moyen le plus efficace, mais c'est un partenariat, alors je ne peux pas imposer un modèle. Moi, je trouve toujours un genre de table de haute instance où les hauts dirigeants de la Sûreté du Québec, les hauts dirigeants des corps de police autochtone, les représentants du ministère de la Sécurité publique, les représentants du Secrétariat des affaires autochtones et les leaderships autochtones puissent s'asseoir autour de la table et dire comment est-ce qu'on peut améliorer les choses parce qu'il faut la police, mais il faut avoir confiance dans la police, et ça, c'est les conditions qui sont, pour le moment, fragiles dans notre société.

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de Beauharnois.

M. Leclair : Merci, M. le Président. Donc, comme vous me l'avez si bien dit, je ne compterai pas les fois, M. le ministre, mais, à chaque fois qu'on a eu des débats, des projets de loi... puis vous étiez un des premiers à tenter de faire mon éducation face aux communautés autochtones, je vous dois... à votre expérience, vous me disiez toujours : M. le député, il faut que vous sachiez que, lorsqu'on veut faire un pas de l'avant avec les autochtones, quelque communauté que ce soit, il faut être ouvert, il faut leur laisser organiser leurs choses. Ils ne veulent pas qu'on empiète, qu'on soit des dictateurs des normes à suivre ou des règles à suivre. Puis on a fait plusieurs projets de loi, puis il y a des fois qu'on était un peu, l'opposition, sur nos talons en disant : Il me semble qu'on ouvre la porte très large, puis, bien, vous avez fini par me le vendre parce que, dans d'autres commissions parlementaires que je siège avec des collègues du gouvernement, je réitère ça puis, aujourd'hui, j'y crois. Vous me l'avez vendu puis j'y crois.

Dans ce cas précis de Val-d'Or, vous dites, avec votre collègue député de la Sécurité publique du temps : On va trouver un endroit où est-ce qu'on va pouvoir échanger l'information, qui va être un point commun, alors que les gens de Val-d'Or, les autochtones, nous disent : Nous, on veut une enquête publique. Eux ont plus ou moins la grande confiance envers les Peacekeepers et la même chose envers la SQ. En ce moment, la seule chose, depuis, qu'on a faite, on a donné ce 6 millions là, là. Puis c'est correct, ça leur vient en aide, aucun doute là-dessus, mais, sur le problème de fond, vous n'avez pas appliqué ce que vous m'aviez toujours dit : Faisons ce qu'ils veulent et non leur dicter. Là, en ce moment, là, on leur dit : On va tenter de trouver un lieu commun. À date, c'est «win-win».

Après ça, ils nous demandent : On veut une enquête publique, on veut voir ce qui se passe autant chez nous que sur la Sécurité publique du Québec. Puis là vous dites : Bien non, nous, ce n'est pas comme ça qu'on va faire. On va donner l'enquête à la SPVM parce qu'en ce moment les règles sont comme ça. Donc, vous appliquez les règles en ce moment, mais vous ne trouvez pas que c'est parler des deux côtés de la bouche en disant : Si on veut régler ce problème-là puis... sans le régler, juste mettre le pied dans la porte, pourquoi qu'on ne les écoute pas pour ce problème-là? Est-ce qu'on a des craintes? Est-ce qu'on a peur? Pourquoi qu'on ne prend pas au moins leur côté puis dire : On va vous écouter puis on va regarder comment qu'on peut meubler ça avec nous, avec notre Sécurité publique, puis tenter de faire... Tantôt, on va parler, plus tard, de la CSST, et on a sorti complètement des champs de bataille, là. Aucun autre Québécois n'a le droit à ça, mais on s'est dit : Si on veut que ça fonctionne... Puis vous nous en ferez un peu le post-mortem, où est-ce qu'on en est rendus. Bien, je pense que ça fonctionne.

Alors, pourquoi, dans ce cas-là... Bien entendu, on met des sommes, qui sont nécessaires, puis tant mieux si ça fait leur affaire. Mais pourquoi que, dans le cas de la Sécurité publique, où est-ce que la transparence ne semble pas être au rendez-vous, pourquoi que, là on ne les écoute pas, puis on ne fait pas une enquête publique, puis pousser ça plus loin? Puis là, je comprends, vous allez me répondre : Bien, sur les femmes disparues, et tout, c'est fédéral. Mais regardons notre portion à nous, ce qu'on contrôle, nous.

Le Président (M. Ouellette) : Non, un instant, M. le ministre. Vous comprenez, M. le député de Beauharnois...

M. Leclair : J'ai dépassé.

Le Président (M. Ouellette) : ...que vous allez me retirer votre expression qui est dans les mots non parlementaires. Je sais que vous n'avez pas fait exprès, mais je...

M. Leclair : Je me suis échappé.

Le Président (M. Ouellette) : ...compte sur votre collaboration pour me retirer les mots que vous avez prononcés.

M. Leclair : J'en suis déjà désolé.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le député de Beauharnois. M. le ministre.

M. Kelley : C'est une question complexe, ici. Si j'ai bien compris, le temps pour répondre est assez limité.

Le Président (M. Ouellette) : Le temps pour répondre? Vous avez du temps pour répondre, M. le ministre.

• (20 h 10) •

M. Kelley : O.K., parfait, parce qu'il y a beaucoup d'éléments dans la question, et je veux les décortiquer. Moi, je n'ai jamais dit qu'il n'y aura pas une enquête publique, mais moi, je pense, il faut faire ça complémentaire à qu'est-ce que le gouvernement fédéral va faire. D'arriver deux enquêtes publiques à Val-d'Or, d'une semaine d'intervalle, qui touchent les sujets qui vont être cousins, pour dire le moins, à grands coûts, il faut se questionner avant d'aller de l'avant. Et, moi, les messages de la rencontre avec laquelle vous avez fait référence avec... Quand notre collègue de Châteauguay était le ministre par intérim de la Sécurité publique, les messages étaient mixtes quand même parce qu'ils voulaient une enquête publique, mais ils veulent les actions rapides. Et on peut faire un, on peut faire l'autre, mais on ne peut pas faire les deux parce qu'une enquête publique, comme gouvernement, avec une certaine expérience comme ministre, on sait à quel moment le train quitte la gare, mais après ça on a très peu de contrôle.

Et on va nommer un commissaire, comme hypothèse, mais, le moment que le commissaire va sur le terrain, va peut-être constater : il y a d'autres questions, les ajoute, va retourner au gouvernement pour un prolongement de leur mandat. Et il y en a beaucoup, d'exemples dans l'histoire récente où ça a passé. Le gouvernement n'a pas de choix que de dire oui parce que, si on dit non à un prolongement de mandat, on est en train de faire l'ingérence ou bâillonner la commission.

La commission va demander, de toute évidence, un ajout de ressources parce que, s'ils prolongent le mandat, il faut ajouter l'argent pour le faire. Et c'est correct, ce n'est pas... Mais, moi, mon expérience, une enquête comme ça peut durer longtemps. Alors, d'une certaine façon, c'est plus facile pour moi, ministre, on va donner ça à une commission, et je ne serai pas obligé de répondre aux questions du député de Beauharnois pour une couple d'années, tant et aussi longtemps que la commission est en champ. Moi, je pense, les questions qui sont soulevées sont assez graves et urgentes que nous devrons trouver un autre véhicule.

Alors, c'est ça, mon message. Mais je vais continuer notre dialogue à la fois avec le grand chef Coon Come et le Grand Conseil des Cris, avec l'Assemblée des premières nations et le chef Ghislain Picard, avec le Regroupement des centres d'amitié autochtones, avec les Femmes autochtones du Québec. Je suis très conscient de leur position, je n'ai jamais dit non à leur position, mais moi, je pense, avec tous les besoins qui existent dans notre société, en milieu autochtone, avant d'aller de l'avant avec quelque chose qui va être dispendieux, moi, je veux faire l'arrimage nécessaire avec le gouvernement fédéral, qui a déjà mis à côté, de mémoire, 40 millions de dollars pour leur commission sur les femmes assassinées et disparues. À un certain moment... Moi, j'ai déjà toutes les recommandations du rapport Erasmus-Dussault des années 90, j'ai les 94 recommandations de la Commission vérité et réconciliation. Il y avait à la fois la Colombie-Britannique et Manitoba qui... Saskatchewan, pardon, qui ont déjà fait les enquêtes sur les relations entre la police, dans leur cas la GRC, et les communautés autochtones, qui ont donné des recommandations. Moi, je pense qu'on a beaucoup de recommandations sur lesquelles on peut commencer à travailler dès demain.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le ministre. M. le député d'Abitibi-Est.

M. Bourgeois : Merci, M. le Président...

Le Président (M. Ouellette) : Je vous prends par surprise. Bien là, vous pouvez poser votre première question. Le chef de cabinet, là, il vous attend.

M. Leclair : Moi, j'en ai d'autres, là. Moi, j'en ai d'autres.

M. Bourgeois : Bien sûr, avec... Non, je ne vous ferai malheureusement pas cette joie, M. le député de Beauharnois.

M. Leclair : Non, non, ça va.

M. Bourgeois : On vous a écouté avec grande attention, mais je vais me permettre quand même, moi aussi, d'échanger avec le ministre pour quelques instants. Je salue aussi le député de Masson et mes collègues de la partie parlementaire.

J'ai bien aimé, M. le ministre, la mise en situation que vous avez faite, mais vous allez me permettre de revenir un peu en arrière et de vous exprimer aussi un état de fait. Et d'ailleurs je tiens à saluer les membres des communautés autochtones qui vivent dans le magnifique comté d'Abitibi-Est. Donc, «kwe» à Anishinabeg, «kwe» à Eeyou Istchee.

M. le ministre, moi aussi, à l'occasion, je me plais de dire que je suis un... «I'm a native» puis que je suis né en Abitibi-Témiscamingue. C'est aussi ma terre, et j'ai grandi avec...

Le Président (M. Ouellette) : Ça va, M. le député d'Abitibi-Est, on peut comprendre.

M. Bourgeois : Bon, vous comprendrez, j'ai été élevé à Amos avec une communauté algonquine d'Abitibiwinni. Pour nous, quand j'étais jeune, on allait jouer au pensionnat indien...

Le Président (M. Ouellette) : J'ai eu le plaisir de commencer ma carrière, M. le député d'Abitibi-Est, au Témiscamingue. Et, pour les trois premières années de cette longue carrière au sein de la Sûreté du Québec particulièrement, j'ai eu l'occasion de visiter plusieurs endroits, plusieurs municipalités, autant en Abitibi qu'au Témiscamingue, et je vous dirai, sans l'ombre d'un doute, que ça fait partie de mes plus belles années de carrière.

Je vais vous laisser continuer, M. le député d'Abitibi-Est. Prenez tout le temps qu'il faut.

M. Bourgeois : Oui. Merci, M. le Président. Je m'excuse, mais vous comprendrez donc que, naïvement, comme enfant, on allait au pensionnat... Donc, j'ai été à l'école avec mes amis. Donc, ce qui s'est passé, ce qu'on a vécu, ce n'est pas ce qu'on... Et là-dessus vous comprendrez que tout ce qui a été fait, l'écoute que vous avez eue, la capacité de pouvoir venir sur le terrain, prendre le temps de discuter avec les intervenants suite aux événements qui ont été révélés dans le dossier d'enquête, c'est un bouleversement qui a touché tout le monde. Personne n'était indifférent. Parfois, j'ai senti qu'à l'extérieur de la région les gens pensaient que c'est un phénomène qui était banalisé et que les gens, nos voisins, nos amis n'étaient pas touchés. C'est bien le contraire.

Vous avez été à même de le constater, M. le Président, et c'est pour ça que je veux que ça soit clair, ça dépasse largement la responsabilité gouvernementale. Le quotidien de tout le monde qui vit sur le territoire, c'est de pouvoir vivre ensemble. On l'a fait. Oui, il y a sûrement eu des erreurs. Oui, il y a sûrement eu des écueils, mais je dois dire, et je vois et je suis fier de ce que des gens chez nous font : On a besoin de vous, on a besoin de tout le monde. Les communautés ont besoin d'aide, mais il faut bien les identifier.

Il y a trois acteurs, hein? On parle du monde autochtone, mais, attention, chez nous, dans le même comté, j'ai trois réalités autochtones. J'en ai une qui est une communauté qui est reconnue, qui est conventionnée, comme on dit, la communauté du Lac-Simon, qui vit ses difficultés. Je reviendrai là-dessus. Il y en a une autre qui a été connue, mais, encore là, pas pour nécessairement les bonnes choses, qui n'est pas conventionnée, qui est Kitcisakik. Et on en reparlera tout à l'heure, de Kitcisakik, M. le ministre. Et finalement une communauté autochtone de la ville. Des fois, les gens se disent : Les autochtones sont dans les réserves. C'est tellement mal connaître cette réalité-là. Et il faut, dans le fond, que les gens la comprennent. Quand on parle de Kijaté, ce projet-là d'habitation, il est fait pour des autochtones qui ont décidé de résider en ville. Pas pour rien, parce qu'ils ont fait des choix. Des fois, c'est des choix déchirants pour eux autres. Ils ont décidé de quitter leur communauté pour pouvoir donner la chance à leurs enfants, à leur famille d'avoir accès à l'éducation, de les sortir d'un milieu parce qu'ils considèrent que celui que leur offre leur communauté ne peut pas correspondre, M. le Président, à leurs valeurs et à leur vision de l'avenir qu'ils veulent donner à leurs enfants, à la volonté qu'ils ont concrétisée en prenant le choix de quitter leur communauté pour s'installer en ville. Ce n'est pas banal, comme décision, mais ils l'ont fait pour aussi se donner d'autres choix.

• (20 h 20) •

Donc, je pense que là-dessus, et là à tous les acteurs concernés du territoire, moi, je lève mon chapeau. Vous l'avez constaté, M. le ministre, le travail qui s'est fait dès le début, et il y a eu des réactions qui sont tout à fait normales de la part des chefs, de la part des membres des communautés qui étaient choqués, avec raison. Mais je pense que ce qu'on peut retenir, c'est que tout le monde a mis l'épaule à la roue pour recréer un climat, un climat d'échange, de respect, parce que c'est la première notion, le respect, qu'il faut rétablir entre les acteurs et s'assurer que tout le monde regarde vers l'avenir.

Et là-dessus, M. le ministre, je veux souligner votre travail. Je pense que vous avez été un catalyseur de ce côté-là, de rapidement, à pied levé, vous rendre disponible pas seulement dans un geste, dans plusieurs gestes, d'être revenu fréquemment sur le territoire pour nous accompagner dans cette démarche-là pour venir positionner le gouvernement du Québec en lien avec les enjeux des communautés à chaque fois parce que, là, M. le Président, on l'a illustré, le député de Beauharnois le disait, ce n'est pas un événement, c'est plusieurs événements. Et je ne souhaite pas ça à personne. Mais cette réalité-là, elle est là. Donc, on a le choix : ou bien on plie l'échine ou on se relève. Et actuellement les membres des communautés, malgré les grands enjeux, malgré la tristesse qu'ils ont, ils veulent aller de l'avant, ils veulent se prendre en main.

M. le ministre, vous avez parlé des engagements qu'on a pris en lien avec, je dirais, la crise du mois de novembre, mais vous avez aussi été à même de constater les autres actions qui se sont faites par d'autres acteurs, et vous avez mentionné, entre autres, le travail de M. Corbeil, M. Corbeil, et la communauté d'affaires, et les organismes qui ont mis l'épaule à la roue pour, entre autres, venir à créer la Déclaration de Val-d'Or sur le racisme et tout cet engagement-là non seulement à dénoncer cette situation-là, mais à travailler ensemble pour la suite des choses. J'aimerais voir, pour vous, cette action-là, comment vous la considérez par rapport à votre mandat actuel. Et je viendrai vous entretenir par la suite des crédits associés sur certains éléments.

Le Président (M. Ouellette) : Merci. M. le ministre.

M. Kelley : Bien, premièrement, merci beaucoup pour ce témoignage parce que le député d'Abitibi-Est était au centre de ces moments de très grande émotion. Et il a très bien résumé la situation : c'est les choses qui déchirent une communauté. Et malheureusement, dans la vie parfois ça prend un choc pour changer des choses. Et comment ça se fait qu'on ne pouvait pas avancer le projet Kajaté plus rapidement, et c'est le gouvernement... et c'est parfois comme ça, mais parfois ça prend un choc.

Mais moi, j'ai eu l'occasion d'aller avec, entre autres, Mme Thomas et notre collègue Mme la ministre déléguée au... Réhabilitation, services sociaux... il y a ce long titre que j'oublie toujours, et c'était une journée sombre du mois de novembre, de mémoire, et, grâce au député d'Abitibi-Est, on a organisé une série de rencontres, les intervenants de la Santé et services sociaux, nous avons rencontré le centre d'amitié autochtone, nous avons rencontré les chefs algonquins du coin, nous avons rencontré la ville de Val-d'Or, nous avons rencontré beaucoup d'intervenants. C'était une journée où le monde... Comme je dis, c'était probablement huit ou neuf jours après l'émission d'Enquête, et tout le monde était toujours dans un état de choc et/ou colère. Et ça, c'est la réaction tout à fait humaine et naturelle.

Alors, nous avons commencé le... J'ai énuméré, avec le député de Beauharnois, certains des gestes concrets que le gouvernement du Québec a posés, mais le député d'Abitibi-Est souligne avec raison le travail extraordinaire fait sur le terrain, notamment le leadership du grand chef Matthew Coon Come, le leadership de la communauté algonquine, maire Corbeil, la communauté d'affaires, le centre d'amitié autochtone qui est à Val-d'Or. Alors, tout le monde a dit : Well, devant le constat — je pense, les commissions scolaires étaient impliquées — comment est-ce qu'on peut mieux travailler ensemble? Alors, il y a une déclaration de bonne entente, de bon voisinage qui a été faite. La ville de Val-d'Or a fait l'adhésion... une politique de l'UNESCO au niveau de comment mieux travailler ensemble, mieux vivre ensemble. Alors, c'est vraiment extraordinaire, qu'est-ce que la communauté a fait.

Alors, quand je suis retourné, au début de mois de mars, et j'ai dit, et je vais le répéter ce soir, ce n'était pas dans l'optique de dire : Mission accomplie parce que c'est les problèmes profonds, et ce n'est pas quelques semaines... Mais, quand même, j'ai constaté une très grande différence. Et il y a quand même une fondation très intéressante à Val-d'Or. Il y a un centre d'amitié autochtone qui est peut-être parmi... avec les ressources, et le travail que Mme Edith Cloutier et son équipe ont fait, ils ont un centre d'amitié autochtone très, très solide. Et d'autres preuves que la communauté, on travaille ensemble, il y a 10 ans, c'était la réalisation... le Pavillon des premiers peuples, l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue. Il y avait une campagne de financement conjointe. Je pense, c'était Ted Moses et le maire Trahan, à l'époque, qui sont allés chercher presque 1 million de dollars pour soutenir ce pavillon qui fait partie du campus à Val-d'Or.

Alors, il y a beaucoup d'exemples quand même où, dans le passé, ils ont travaillé ensemble, ils ont réalisé les choses ensemble entre les composantes de la ville de Val-d'Or. Alors, ce n'est pas tout noir, il y avait déjà des atouts, mais, avec la crise, et tout le reste, nous avons réussi de faire des progrès. Et moi, je dis, je voulais des choses tangibles. Alors, le fait que le centre d'amitié avait des moyens d'embaucher des conseillers, les travailleurs sociaux, les personnes qui vont venir en aide avec les femmes en détresse, ça, c'est une démarche tangible importante que nous avons mise en place très rapidement.

Le fait qu'on a déjà... Et nous avons rencontré le jeune architecte d'Architectes sans frontières, hein, qui était pour le design de Chez Willie, et tout le reste, c'est un autre bel exemple. C'est quelqu'un de jeune, M. Lévesque. Est-ce que c'était ça? Guillaume? Alors, parce qu'il croyait dans le projet de Chez Willie, il a compris le besoin, est allé travailler avec la ville, avec le centre d'amitié autochtone, et Chez Willie existe aujourd'hui. Il n'était pas là au mois de novembre, mais ça existe aujourd'hui.

Le Kinawit et le Kijaté vont être les atouts intéressants aussi, mais c'est également la façon que la ville de Val-d'Or a mis en place la formation pour l'ensemble de son personnel. La Sûreté du Québec, tous les officiers qui sont là, l'Université du Québec—Abitibi-Témiscamingue a mis en place une formation. Tous les policiers qui sont là ont rapidement passé dans une formation intense sur la réalité autochtone. Alors, une fois que le choc, la colère, la tristesse est passée, c'est une communauté dynamique qui s'est mise à l'oeuvre pour comment est-ce qu'on peut corriger la situation.

Et, M. le Président, une des mes préoccupations... si je veux donner orientation pour le gouvernement, je vais laisser le temps. Alors, très rapidement : vérité et réconciliation, et il faut faire le passage obligatoire. Vérité, il y a les chapitres très tristes dans notre histoire. Et les événements... Vous avez évoqué, M. le député, des pensionnats. C'est difficile à lire. Moi, je me rappelle, j'étais à Montréal au moment que Romeo Saganash, votre député fédéral, a témoigné devant la Commission sur vérité et réconciliation, sur son vécu dans un pensionnat. Et c'était très difficile à écouter parce que c'est une histoire d'une très grande tristesse. Alors, il faut faire le constat de vérité, mais sur lequel on ne peut rien changer parce que c'est la vérité, c'est l'histoire.

Mais on a la chance comme leaders dans nos communautés, au gouvernement, le leadership des communautés autochtones, d'avoir une influence sur la réconciliation. Alors, il faut tout mettre sur la réconciliation. Et c'est là où je pense qu'on peut faire du progrès. Et la réconciliation accomplie à Val-d'Or depuis l'automne passé est tout à fait remarquable.

• (20 h 30) •

Le Président (M. Ouellette) : Merci. M. le député d'Abitibi-Est, il vous reste deux petites minutes.

M. Bourgeois : Merci, M. le Président. Peut-être juste une mention, c'est — vous l'avez apportée — Chez Willie. Chez Willie fait une différence. C'est un projet qui était déjà existant, qui avait été un projet pilote, qui a fait ses preuves. Et, si je peux vous encourager à quelque chose, M. le ministre, cet exemple-là pourrait servir ailleurs, peut-être dans d'autres communautés qui ont des réalités qui nous ressemblent. Et c'est un outil important, puis là je pense qu'il faut le mentionner, M. le Président.

Il y a toute la relation avec la sécurité civile, les services policiers. Et, les chefs nous l'ont dit, on a besoin d'une police qui est efficace, qui est là, que ce soit celle de la communauté, que ce soit la Sûreté du Québec. Puis, plus récemment dans les événements de Lac-Simon, dans les deux derniers cas, qui a été appelé à venir supporter le corps policier de Lac-Simon? C'est la Sûreté du Québec.

Donc, il y a des ponts. Encore là, je pense que vous l'avez bien mentionné, ce qui est à faire est identifié de plus en plus, mais il y a une réalité très claire. Et je me rappelle très bien de la chef de Kitcisakik, qui nous a dit clairement dans une de nos rencontres : La police, moi, c'est la Sûreté du Québec, et on cohabite bien avec. Combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Ouellette) : C'était votre dernier commentaire, M. le député d'Abitibi-Est?

M. Bourgeois : Je reviendrai.

Le Président (M. Ouellette) : Je trouve que votre commentaire est très à propos. Je pense que tous les collègues, on peut vous remercier d'avoir partagé vos réalités. Je pense que c'est important pour la population qui nous écoute. Des fois en milieu urbain, on est très loin de ce que les gens vivent sur le terrain, et je pense que vous êtes un très digne représentant des citoyens et citoyennes d'Abitibi-Est, et je vous en remercie publiquement, M. le député. M. le député de Masson.

M. Lemay : Merci, M. le Président. Donc, à mon tour un peu de poursuivre sur la lignée, là, du sujet de Val-d'Or, Sept-Îles, les prisons au Nunavut, là. J'avais une question différente, mais sur le même sujet, qui est en lien avec la question 72, là, dans le cahier des renseignements particuliers du deuxième groupe d'opposition.

Mais, bon, on sait, l'APNQL a réclamé du gouvernement la mise sur pied d'une enquête indépendante sur l'administration de la justice envers les autochtones. Bon, on en a parlé, là, des allégations sexuelles qui étaient à Val-d'Or. Ensuite il y a eu le scandale des conditions de vie dans les prisons au Nunavut, du rapport de la Protectrice du citoyen. Et puis il y avait aussi un autre reportage très troublant, là, à Sept-Îles, par des agents de la Sûreté du Québec. Mais ça, c'est des faits qu'on est tous déjà au courant, qui ont fait partie de notre actualité cette année. Mais nous, dans le fond, notre formation politique, on est quand même en lien avec la demande de l'APNQL, là, qui réclame une enquête indépendante sur l'administration de la justice envers les peuples autochtones.

Je comprends que vous dites qu'il y a des situations, des fois, qu'on veut avoir des résultats immédiats, et puis il y a d'autres fois qu'on voudrait avoir toute la lumière sur l'administration de la justice, mais, quand même, moi, j'aimerais savoir c'est quoi, les mesures qu'a déployées le Secrétariat aux affaires autochtones pour s'assurer que l'administration de la justice est équitable pour tous les citoyens québécois, autochtones ou non. Et puis, dans le fond, est-ce que vous avez mis des effectifs là-dessus? Est-ce que vous avez dépensé des sommes pour travailler sur la problématique de l'administration de la justice? Et puis comment est-ce qu'on pourrait faire pour évaluer les résultats des mesures que vous mettriez en place?

Le Président (M. Ouellette) : Deux minutes, M. le ministre.

M. Kelley : Merci beaucoup, M. le député, pour votre question. Il faut toujours rappeler que le rôle du Secrétariat des affaires autochtones en est un de coordination. Et beaucoup de questions précises au niveau des crédits et des fonds... malheureusement, M. le député, je dois vous référer aux crédits de mon collègue le ministre de la Sécurité publique et également ma collègue la ministre de la Justice parce qu'au niveau des effectifs, au niveau des budgets qui sont consacrés, c'est dans leurs crédits, c'est dans leur budget. Moi, je ne paie pas les policiers et moi, je ne paie pas les effectifs dans nos tribunaux, nos cours, nos palais de justice, et tout le reste.

Cependant, encore une fois, je n'ai jamais dit non à l'idée d'une enquête publique, mais je dois évaluer ça à l'intérieur. Le fait que le gouvernement fédéral va faire une enquête publique sur les choses qui vont être dans le même domaine... Je ne dis pas que ça va être identique. Moi, j'ai rencontré maintenant la ministre Carolyn Bennett à deux ou trois reprises. Elle est toujours en réflexion au mandat qu'elle veut donner à sa propre commission d'enquête.

Et, encore une fois, M. le député, vous convenez avec moi, de voir deux enquêtes publiques arriver à Val-d'Or à une semaine d'intervalle ou un mois d'intervalle, peu importe, pour poser les questions pas mal similaires, est-ce que c'est la meilleure utilisation de fonds publics? S'il faut le faire, moi, je suis prêt à le dire, mais, avec ces mêmes sommes d'argent, moi, je peux bonifier dès maintenant la formation donnée aux jeunes policiers, par exemple.

À la demande... Parce que c'est une autre question qui était soulevée dans votre question. Il y avait le rapport de la Protectrice du citoyen quant à l'administration de la justice. Alors, vous allez trouver, dans les crédits de ma collègue la ministre de la Justice, de mémoire, 1,1 million de dollars qui va être destiné pour améliorer l'accès à la justice en Nunavik, notamment une présence plus importante de la cour itinérante? Est-ce que c'est huit, les villages où la cour itinérante fait les visites? C'est bien compliqué parce qu'on est loin, au Grand Nord québécois, où les conditions météorologiques ne sont toujours pas au rendez-vous.

Et moi, j'ai assisté, il y a quelques années, avec notre ancien collègue Yvon Marcoux, qui était ministre de la Justice, une journée à la cour itinérante à Kangirsuk. Et on voit que l'écart entre la justice des Blancs ou la justice du Sud et réalité nordique... il y a des choses que nous devrons continuer à travailler.

J'ai visité, avec ma collègue la ministre de la Justice, des communautés à Nunavik au mois d'octobre, et notamment nous avons rencontré une femme très dynamique, qui est la maire de Kangiqsualujjuaq, Hilda Snowball. Et elle avait un comité de justice, et, pour les crimes moins graves, ils sont en train... est-ce qu'il y a des travaux communautaires, est-ce qu'il y a d'autres solutions qu'on peut mettre en place? Parce que, souvent, il y a un incident, et la cour va arriver comme neuf mois plus tard.

Mettons, par hasard, j'ai frappé mon collègue de Chomedey un soir parce qu'on était en chicane, mais le lendemain on a dit : M. le Président, je m'excuse, ce n'était vraiment pas une bonne idée. Mais, neuf mois plus tard, la cour itinérante arrive. Et je pense à ça comme il faut, je dis : Non, j'avais raison de frapper le député de Chomedey, je vais le faire encore. Alors, tout ça pour dire que notre justice, parfois, est mal adaptée à la réalité là-bas. Et, dans la mesure du possible, il faut toujours travailler pour... Non, ce n'est pas pour les crimes graves, et je ne veux pas, par ma petite anecdote, prendre ça au léger. Il faut protéger les victimes de crime. Ça, c'est les choses qui sont non négociables. Mais, en milieu nordique surtout, avec les longs délais, avec un système de justice qui, pour les Inuits, n'est pas le leur encore, c'est notre système qu'on impose, alors il y a le travail à faire pour mieux adapter. Mais vous allez trouver dans le budget un engagement de 1,1 million qui fait partie de notre devoir.

En conclusion, M. le Président, on a jusqu'au 31 mai pour préparer une réponse au rapport de la Protectrice du citoyen que ma collègue ministre de la Justice, mon collègue ministre de la Sécurité publique et le Secrétariat aux affaires autochtones sont en train de préparer.

Le Président (M. Ouellette) : Et que nous attendons avec grande impatience, M. le ministre. M. le député de Masson.

• (20 h 40) •

M. Lemay : Merci, M. le Président. Merci pour les éclaircissements. Donc, nous aussi, nous allons attendre ce rapport, assurément.

J'aimerais vous parler aujourd'hui... On a vu, ça a fait les manchettes, après 17 ans de procédures juridiques, la Cour suprême du Canada a rendu sa décision unanime jugée historique par les peuples autochtones du pays. Puis, on le voyait aux nouvelles, il y avait un grand moment de réjouissance. Et puis, bien, en effet, là, la décision qui est rendue aujourd'hui, elle reconnaît le statut d'Indien aux métis puis aux autochtones qui n'étaient pas rattachés à une réserve. Puis là on mentionnait que ça peut toucher à environ 600 000 individus au Canada.

Donc, moi, j'aimerais savoir, là, compte tenu de la façon, là, qu'est présentement écrite la Loi sur les Indiens, il va sûrement y avoir des négociations qui vont être lancées avec le gouvernement québécois, vous, bon, le Canada, les autochtones qui sont concernés par cette décision. Puis il va sûrement y avoir des conséquences, là, puis des impacts au Québec au niveau financier, là, par rapport à toute cette modification-là. Est-ce que c'est quelque chose qui était prévu au sein de votre Secrétariat des affaires autochtones? Est-ce que vous aviez fait des prévisions en fonction de? Quel sera votre rôle? Est-ce que vous en avez déjà évalué l'impact puis vous êtes déjà confiant ou c'est tout à fait nouveau puis il faut commencer à réfléchir?

M. Kelley : Moi, je suis toujours hésitant à commenter quelque chose qui est arrivé aujourd'hui. C'est une décision qui est très sérieuse. Alors, honnêtement, je n'ai pas eu le temps aujourd'hui de lire comme il faut le jugement. Je peux vous assurer, les avocats au ministère de la Justice sont en train de le faire. Alors, je pense, par prudence, je vais limiter mes commentaires ce soir en rappelant que la personne interpellée par la décision de la Cour suprême est le gouvernement fédéral. Alors, les premières conséquences sont vraiment au niveau du ministère des Affaires indiennes à Ottawa plutôt qu'ici, au Québec.

Mais, de toute évidence, nous avons analysé le jugement comme il faut pour voir les conséquences sur la population métisse et également pour les «non-status Indians». Alors, ça, c'est des choses qu'on va regarder, mais, pour l'instant, je pense que c'est très prématuré pour commenter sur un jugement qui est sorti aujourd'hui.

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de Masson.

M. Lemay : Merci, M. le Président. Est-ce que vous êtes en mesure, selon vos estimés... Peut-être que vous avez déjà ces chiffres-là. On fait mention de 600 000 Canadiens. Mais est-ce que vous avez un estimé de la proportion en sol québécois, des Québécois sur les 600 000?

M. Kelley : ...pas à ma connaissance, mais... Parce que Mme Thomas, Me Thomas, avocate, m'a dit que, même dans le jugement, ce n'est pas exactement clair comment on va définir quelqu'un d'origine métisse, par exemple. Alors, je pense qu'il y a beaucoup de questions techniques qu'il faut... Alors, avant d'avancer un chiffre ou un autre, je pense, par prudence, on va regarder ça. Si le président et la commission veulent, au moment que ces genres d'analyses sont faites, je peux fournir ça aux membres de la commission. Mais, comme j'ai dit, c'est un jugement de 10 heures ce matin. Alors, moi, je ne veux pas m'avancer trop sur ces questions.

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de Masson, seriez-vous intéressé à avoir ces chiffres-là?

M. Lemay : Oui, certainement.

Le Président (M. Ouellette) : Bon, vous voudrez, M. le ministre, quand vous aurez l'opportunité, dans les prochains jours... en rappelant au collègue que, mardi, nous aurons les crédits de la ministre de la Justice et qu'on pourra sûrement explorer le jugement de la Cour suprême. M. le député de Masson.

M. Lemay : Parfait! Merci, M. le Président. Puis peut-être une dernière question de précision, là. Peut-être que vous allez me référer à la Justice, là, mais, si vous êtes en mesure de répondre, tant mieux, là. Je veux juste savoir... Là, vous avez dit : Bon, je n'ai pas pris le temps de prendre connaissance du document qui a été déposé ce matin par la Cour suprême du Canada. Je comprends, mais c'est quand même un jugement qui était attendu, là, que ça fait 17 ans qui a été travaillé.

Selon vous, là, qu'est-ce que ça va avoir comme impact au niveau des autochtones qui sont présentement reconnus au Québec? Est-ce que ça veut dire techniquement... Peut-être, vous n'avez pas la réponse, là, mais est-ce que ça veut dire que tous les autochtones qui sont reconnus vont être exemptés d'impôts puis de taxes, là, peu importe le lieu de la transaction?

Le Président (M. Ouellette) : M. le ministre.

M. Kelley : Comme j'ai dit, le gouvernement qui est interpellé par la décision, c'est le gouvernement fédéral. Alors, je pense que vos questions, il faut les poser au gouvernement fédéral parce que c'est eux autres qui sont interpellés pour la définition. Alors, moi, je ne veux pas m'avancer sur les conséquences éventuelles de la décision. Ça va être vraiment, avant tout, au gouvernement fédéral de faire l'analyse et comment ils vont réagir à la décision de la Cour suprême du Canada de ce matin.

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de Masson.

M. Lemay : Merci, M. le Président. Merci, M. le ministre. Donc, je vais passer à un autre sujet.

Vous savez, dans ma région, dans Lanaudière, on a la communauté autochtone de Manawan, que j'ai eu la chance de me rendre pour le grand pow-wow et puis que j'ai eu beaucoup d'intérêt. Et puis, en me rendant sur la route de 80 kilomètres au nord de Saint-Michel-des-Saints, c'est sûr que c'est une route que ça faisait du bien d'y aller avec un véhicule 4x4.

Mais, bref, moi, j'aimerais vous parler, parce que les gens là-bas... le grand chef m'a parlé des pannes électriques qu'il y a de façon très fréquente sur son territoire et puis dans sa communauté. Et puis on a fait une demande d'accès à l'information auprès d'Hydro-Québec, mais c'est quelque chose de... je pourrais en faire le dépôt à la commission, là, si vous voulez, il n'y a pas de problème, mais, en fait, là, c'est des pannes qui sont majeures et importantes. On parle de 35 pannes importantes par année, de plus de 72 heures de panne en moyenne par personne dans une seule année. Puis là, bien, dans le fond, on voudrait savoir... Tu sais, c'est un problème qui est récurrent. On a les données de 2010 à 2015, et puis il y a la nouvelle ligne Chamouchouane—Bout-de-l'Île qui va passer par là, là, pour se rendre jusqu'à Terrebonne, à côté de chez nous, pour alimenter la grande région de Montréal. Puis, en fait, au sud de Lanaudière, on a la plus forte croissance démographique au Québec. Mais est-ce que vous, avec votre ministère, les gens de la communauté de Manawan vous ont approchés pour vous signifier qu'il y avait des problématiques avec l'alimentation en électricité? Et puis est-ce que vous avez agi ou est-ce que vous êtes en discussion présentement avec Hydro-Québec ou avec la communauté pour essayer d'être un peu un médiateur puis de trouver un terrain d'entente ou de faire avancer ce dossier?

Le Président (M. Ouellette) : Vous vouliez déposer un document, M. le député de Masson?

M. Lemay : Ça ne me dérange pas, ça va me faire plaisir.

Le Président (M. Ouellette) : Bien, si vous voulez le déposer...

M. Lemay : Je peux en faire une copie puis distribuer à tout le monde.

Document déposé

Le Président (M. Ouellette) : Oui, on va faire une copie pour les parlementaires. M. le ministre, en réponse à la question du député de Masson.

M. Kelley : Premièrement, il faut adresser ces questions à mon collègue le ministre de l'Énergie et Ressources naturelles. Je pense qu'Hydro-Québec va être devant une des commissions permanentes de l'Assemblée nationale pour répondre aux questions.

Moi, je suis allé à Manawan avec notre collègue le ministre des Forêts, Faune et Parcs au mois d'octobre, et la question n'était pas soulevée. On était là pour annoncer une série de bonnes nouvelles pour la communauté de Manawan. On va rénover l'épicerie, et je pense à un projet dans le Fonds d'initiatives autochtones qui est autour de 500 000 $, plus ou moins. Nous avons fait l'ouverture d'un projet innovant, c'étaient les bûches pour faire le camping. Alors, j'ai trouvé ça très génial, mais ça a créé une dizaine d'emplois dans la communauté. Ils font les bûches qui sont faciles à allumer pour quand on fait le camping. Les gens de ville comme moi, qui sont paresseux, c'est plus facile de commencer le feu comme ça que faire ça à la traditionnelle.

Je sais que mon collègue le député de Marguerite-Bourgeoys, quand il était ministre des Transports, a annoncé 1 million de dollars pour améliorer la route entre Saint-Michel-des-Saints et Manawan aussi. Alors, il y a des choses intéressantes.

Avec mon collègue le ministre des Forêts, nous avons visité un chantier de Rexforêt pour voir un nombre de jeunes... je pense une quinzaine de jeunes Attikameks qui étaient en formation pour les techniques forestières, pour travailler, entre autres, pour le déboisement. Il y a des contrats importants d'Hydro-Québec de déboisement pour réaliser la ligne Chamouchouane—Bout-de-l'Île. Et j'avais un autre rappel du fait que je suis un député de banlieue parce qu'avec mon collègue le ministre des Forêts j'ai vu quelque chose de noir avec ma vision : Oh! regarde, il y a un chien. Et le monde riait de moi parce que c'était un ours et pas un chien. Alors, mon réflexe de banlieue : C'est quelque chose de noir, ça doit être un chien. Et c'était vraiment un ours qui n'était pas loin du chantier de Rexforêt.

Mais c'est une communauté avec un leadership dynamique du chef Jean-Roch Ottawa mais une communauté avec des grands défis, et on veut les aider. Mais, honnêtement, M. le député, la question des pannes d'électricité n'était jamais soulevée. J'ai vérifié vite avec mon équipe. Alors, c'est une nouvelle pour nous autres aussi.

Le Président (M. Ouellette) : Merci. Il reste une minute, M. le député de Masson. On peut la remettre sur votre bloc si vous ne voulez pas recommencer un autre sujet.

M. Lemay : Bien, je vais juste faire un court commentaire, puis on arrêtera ça.

Le Président (M. Ouellette) : Allez, allez, allez.

M. Lemay : Mais merci, M. le ministre, de... Peut-être, s'il y a quelqu'un au sein de votre ministère qui peut faire le suivi pour la question des pannes électriques... Peut-être qu'à ce moment-là lors de la visite ils ne vous en ont pas mentionné, mais c'est quelque chose quand même qui semble préoccuper la communauté de Manawan. Et puis, bien, je vous remercie pour ces questions, M. le ministre.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le député de Masson. On revient en milieu urbain. Mme la députée de Chauveau, je pense qu'on va se promener à Wendake ce soir.

Mme Tremblay : Oui, je pense que oui. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Ouellette) : Bon, bien, à vous la parole, Mme la députée de Chauveau.

• (20 h 50) •

Mme Tremblay : Je tiens à saluer le ministre et toute son équipe, dont le nouveau chef de cabinet Félix Rhéaume, avec qui j'ai eu la chance de vivre mes premières expériences terrain dans le monde politique et qui a eu la chance de découvrir aussi et de visiter la réserve de Wendake, donc un très bel endroit. Je tiens à saluer également mes collègues de l'opposition, mes collègues du pouvoir. Je vous dirais «kwe kwe», comme on dit à Wendake.

J'aimerais revenir sur la population autochtone qui habite à l'extérieur des communautés. Elle est de plus en plus nombreuse. C'est le cas dans mon comté, celui de Chauveau, où il y a la réserve de Wendake, mais il y a aussi des autochtones qui demeurent en milieu urbain. Et il y a le centre d'amitié autochtone pour améliorer leur qualité de vie, les aider à s'intégrer de façon sécuritaire. Il y a plusieurs projets ponctuels qui sont d'ailleurs financés par le SAA pour améliorer l'inclusion sociale. On pense à la Journée nationale des autochtones, le pow-wow, tout ce qui peut aider aux études, projets éducatifs, sauf que les besoins sont tellement grands!

Le financement de base octroyé au centre d'amitié autochtone est insuffisant et, souvent, il ne tient pas compte du phénomène de transit de la clientèle autochtone, du fait que c'est une population grandissante. Il faut le dire, il y a différentes raisons qui amènent les autochtones à quitter leur communauté. Ça peut être le travail, ça peut être les études, ça peut être la santé aussi, et c'est clair que ça crée une mouvance et ça génère une pression aussi sur les services. Donc, les problématiques vécues sont plus complexes également. Il y a certains centres d'amitié autochtone qui reçoivent un financement de base du gouvernement fédéral par le Programme des centres d'amitié autochtone, ce qu'on appelle le PCAA, mais cette enveloppe n'a pas été indexée et bonifiée depuis près de 15 ans.

M. le ministre, je sais que, là, il y a de nouveaux programmes qui ont été annoncés, alors je voulais savoir si, justement, ça pourrait peut-être pallier au sous-financement des centres d'amitié autochtone.

Le Président (M. Ouellette) : M. le ministre.

M. Kelley : Merci beaucoup, Mme la députée, pour votre question. Et c'est très agréable, on a déjà visité Wendake ensemble à quelques reprises, mais effectivement il y a un nombre croissant. Je sais que la Commission des relations avec les citoyens est en train de... un mandat d'initiative sur toute la question, mais, une chose qui est évidente, le nombre d'autochtones qui se trouvent dans le milieu urbain est en croissance à Montréal, à Québec, à Val-d'Or, à La Tuque, à Sept-Îles. Il y a plusieurs villes, ce n'est pas uniquement les grands centres, mais c'est plusieurs... Alors, c'est pourquoi nous avons toujours soutenu le réseau des centres d'amitié autochtone. Il y en a 10 pour le moment au Québec. Alors, il y a une entente-cadre avec le Secrétariat des affaires autochtones qui donne un financement annuel. Je pense, il y a 4 millions sur cinq ans... Ça, c'est mon bon chiffre?

Une voix : ...

M. Kelley : Chiffre rond, encore. On peut donner les précisions, s'il faut. Alors, ça, c'est le financement de base, qui est très important. Oui, il faut toujours trouver les moyens de bonifier. C'est pourquoi, dans le budget que notre collègue le ministre des Finances a déposé le 17 mars — la fête des Irlandais, date inoubliable — on va mettre de l'avant un autre 8,9 millions de dollars qui va être divisé en deux. Il y aura 1 million de dollars par année pour les prochains cinq ans pour l'embauche de personnel, pour l'achat d'équipement, alors les choses qui peuvent aider à court terme au niveau de... surtout l'ajout des ressources humaines pour, je pense, entre autres, tout le dossier des femmes, les femmes en difficulté, un petit peu dans la foulée des événements tristes à Val-d'Or, et tout le reste.

Alors, il y a un 5 millions qui est réservé pour ce genre de besoins en addition des engagements existants du Secrétariat des affaires autochtones et d'autres ministères du gouvernement du Québec. Il y a 3,9 millions qui va être un soutien pour les projets d'infrastructure. Alors, je sais que Mme Gros-Louis est ici, à Québec, elle a certains projets d'agrandissement pour le centre d'amitié dans votre comté mais également le Café Roreke, qui a besoin de certaines rénovations, les projets comme ça. Alors, tous ces genres de projets vont être admissibles, et c'est une reconnaissance que ces besoins sont de plus en plus importants.

Dans le Fonds d'initiatives autochtones, la deuxième version, il y avait un montant réservé pour les besoins des autochtones en milieu urbain hors communauté, et tout cet argent était épuisé après trois ans sur les cinq ans. Alors, de toute évidence, il n'y avait pas assez de fonds. Alors, j'étais très content quand notre collègue le ministre des Finances a annoncé 8,9 millions de plus qui va nous aider pour les projets structurants, les projets d'infrastructures mais également les projets au niveau d'ajout des... soit les conseillers, les travailleurs sociaux, les personnes pour aider les personnes.

Parce que certains autochtones arrivent en ville avec un magnifique plan de vie : ils vont aller aux études, ils ont trouvé un emploi. Alors ce n'est pas toujours noir. Et souvent ce sont des personnes qui arrivent pour étudier au magnifique centre de développement, formation de la main-d'oeuvre à Wendake. Et je salue toujours Julie Vincent et son équipe parce qu'ils font un travail formidable. Et le nombre de personnes qui ont passé par le centre, et que ça leur a permis de continuer dans le développement de leur carrière, c'est vraiment magnifique. C'est déjà 25 ans que le centre est là. Nous avons participé ensemble, avec notre collègue le ministre de la Famille, à une magnifique annonce d'un ajout de places, une soixantaine de places dans les CPE à Wendake.

Alors, ça, c'est les choses qui sont essentielles, mais il faut toujours prendre en considération cette réalité que, pour Wendake, la ville de Québec dans son ensemble, pour Val-d'Or, pour Uashat et Sept-Îles, pour La Tuque, pour Maniwaki, pour Montréal, d'autres villes au Québec, ça, c'est les choses que nous devrons avoir les capacités de venir en aide des projets à venir.

Mme Tremblay : Justement, vous parliez du Centre de développement de la formation et de la main-d'oeuvre huron-wendat, ce qu'on appelle communément le CDFM. On a eu la chance de le visiter en campagne électorale ensemble et de faire l'annonce d'un CPE de 60 places, en novembre dernier, avec la ministre de la Famille. L'éducation, il faut le dire, et la formation des autochtones, c'est une priorité de notre gouvernement. Et les questions de la réussite scolaire et de formation sont primordiales pour les milieux autochtones. Ça aide à une meilleure inclusion sociale aussi.

Dans un contexte où les besoins de main-d'oeuvre sont criants, j'imagine que c'est important de tenir compte du fait que les autochtones représentent un bassin de population qui pourrait répondre à la demande de plusieurs employeurs. Qu'est-ce qu'on entend faire comme gouvernement pour leur permettre encore plus facilement l'accès à la formation? Là, on a parlé du CPE tout à l'heure. C'est sûr que c'est un élément qui aide parce que les jeunes femmes autochtones ont des enfants plus jeunes, et, quand tu vas aux études, évidemment, avec de jeunes enfants, bien, si tu te sens en sécurité de voir que tes enfants sont entre bonnes mains, ça aide. Donc, c'est un beau concept, mais qu'est-ce qu'il y a d'autre également?

Le Président (M. Ouellette) : M. le ministre.

M. Kelley : C'est tellement important! Et moi, j'ai toujours de l'impatience. J'aimerais que, demain matin, le taux de réussite scolaire va être comparable à la moyenne québécoise, et ça prend le temps. Mais, depuis une dizaine d'années, les gouvernements successifs ont vraiment ajouté à l'offre des services éducatifs en milieu autochtone. Je pense qu'entre autres j'ai évoqué ça dans mon échange avec notre collègue d'Abitibi-Est.

Mais, il y a 10 ans, il y avait un grand sommet socioéconomique à Mashteuiatsh, et un des engagements était d'avoir un pavillon des premiers peuples à Val-d'Or, qui fait partie du campus de l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue. Et c'est un lieu magnifique avec une certaine architecture à saveur autochtone. Alors, c'est leur coin de campus, si vous voulez. Mais, dans un campus où je pense qu'au milieu des années 80 peut-être il y avait deux étudiants autochtones, on est rendus maintenant à 150, 200. Alors, c'est vraiment un progrès continu.

Un autre engagement que nous avons pris à Mashteuiatsh, c'est l'institut Kiuna, qui est dans la communauté abénaquise d'Odanak. Et moi, quand je peux, j'assiste aux remises des diplômes à chaque année. J'étais là de nouveau à Drummondville fin mois d'août, et c'est formidable. C'est les cours au niveau collégial mais surtout dans le domaine des services sociaux. Et, sur les 17 diplômés cette année, 17 sur 17 étaient acceptés pour poursuivre leurs études universitaires.

• (21 heures) •

Alors, les chiffres sont quand même modestes, mais ça, c'est 17 histoires de réussite, 17 personnes qui vont retourner dans leur communauté et dire : C'est possible, regardez qu'est-ce que j'ai fait. Et peut-être que ça va encourager leur petit frère ou leur petite soeur de faire la même chose. Alors, Kiuna fait un travail extraordinaire. Je pense qu'il faut, avec ma collègue la ministre responsable pour l'Enseignement supérieur, faire le renouvellement de leur entente, mais l'équipe à Kiuna fait un travail extraordinaire.

Également, j'essaie de faire les petits. Il y a le centre de développement à Wendake, mais on a quatre autres centres de formation à travers le Québec qui découlent également de Mashteuiatsh. Les premiers deux étaient un de langue anglaise à Kahnawake et un de langue française à Lac-Simon qu'avec notre collègue d'Abitibi-Est on a eu le privilège de visiter de nouveau au mois de mars parce que, quand nous avons visité Lac-Simon, c'était tout de suite après le décès du jeune policier Thierry Leroux. Alors, la première moitié de la rencontre était très triste parce qu'on était dans les séquelles, c'était comme deux semaines après le décès, c'était une communauté toujours sous le choc, mais la chef par intérim, Mme Papatie, insistait qu'il y a quand même l'espoir dans la communauté, il y a quand même des bonnes nouvelles.

Alors, juste en face du bureau du conseil de bande, c'est le centre de formation à Lac-Simon. Alors, Martin Adam, qui est le directeur, un homme formidable, mille et un programmes toujours. Et il y a un mur en bas avec les activités des étudiants. Alors, à chaque année, ils commencent au mois de septembre, et, rendu au mois de mars, c'est, le mur, plein d'activités, souvent les activités traditionnelles. Les étudiants partent dans le bois pour aller à la chasse puis aller à la pêche, faire les activités traditionnelles, c'est vraiment... Alors, juste pour voir qu'il y a des choses possibles. Il m'a raconté, ils ont fait un programme avec le cégep à Val-d'Or pour tous ceux qui n'ont pas tout à fait complété leurs études secondaires, c'est un D.E.S. moins six ou moins 10 ou quelque chose comme ça. Alors, ils peuvent compléter leurs études secondaires et commencer leurs études collégiales en même temps. Taux de réussite dans le programme : 100 %. Alors, on ne peut pas demander mieux. Alors, c'est des petits pas comme ça.

Il y a un troisième centre de formation en langue anglaise à Listuguj, dans la communauté micmaque, et j'ai eu le plaisir, au mois d'août, d'aller à Uashat et annoncer un quatrième qui a commencé ses activités au mois de janvier de cette année. Alors, c'est le quatrième centre de formation. Et il faut un certain service adapté parce que, parfois, les connaissances de base ne sont pas au rendez-vous. Alors, il faut combler, compléter les études secondaires mais commencer également soit un cours de formation professionnelle, peut-être un A.E.C. au niveau collégial. Alors, il faut une mixité des offres de services.

Mais moi, je pense, depuis 10 ans, on a fait un certain progrès. C'est des centaines et des centaines d'étudiants qui ont passé par là. Et moi, je crois fermement que, si on ne règle pas la question de l'éducation, tout le reste, on parle à travers notre chapeau, d'une certaine façon. Une autonomie gouvernementale, une prise en charge dans la communauté, prendre une main-d'oeuvre formée. Alors, ça commence avec ça.

Alors, on fait des progrès chaque fois que je vois le grand chef Matthew Coon Come... Parce que c'est un objet de fierté pour lui aussi. Le taux de réussite scolaire dans la communauté crie devient de plus en plus intéressant. Il reste le chemin à faire. Alors, encore une fois, je ne suis pas en train de dire : Tout est réglé, mais le chef Coon Come me dit toujours : Cette année, on a 400, ou 500, ou 600 étudiants cris aux études postsecondaires. Je pense, le dernier chiffre était au-delà de 600. Alors, ça, c'est les personnes qui sont le leadership de demain de la nation crie, ce sont les personnes qui vont aider à construire la nation crie mais également l'ensemble de la société québécoise.

Alors, il faut continuer. Comme je dis, le rythme est toujours trop long parce que, comme politiciens, on est toujours impatients, mais, chaque fois que je visite des communautés, je dois voir les écoles, je dois voir les centres de formation professionnelle, Kiuna, quand je suis à Val-d'Or, faire un arrêt au Pavillon des premiers peuples, il y a des signes encourageants. Nos autres universités, comme Laval, comme McGill, Concordia et les autres, ont des programmes destinés aux étudiants des Premières Nations. Alors, il y a des signes encourageants, il y a des signes d'espoir.

Et, encore une fois, c'est un milieu où il faut travailler avec le gouvernement fédéral, et je suis très encouragé de, peut-être, l'engagement le plus précis que le parti du nouveau premier ministre Justin Trudeau a pris. C'est un engagement envers la formation en milieu autochtone. C'est un bon départ parce qu'on sait qu'il y a des lacunes très importantes. Mais même au mois d'août passé, j'avais le privilège... On était en campagne électorale fédérale, alors aucun élu fédéral n'était présent pour l'ouverture de la nouvelle école primaire à Wemotaci. Et c'est magnifique. Et ça été une longue bataille. Bravo à David Boivin, notamment, qui était le chef à l'époque, pour se battre pour avoir la construction d'une nouvelle, parce que l'ancienne était condamnée, c'était plein de moisissures, et tout le reste, mais c'est magnifique. Il y a un genre de falaise, à Wemotaci. Alors, l'école a la même forme, et tout le reste. Alors, c'est juste bien ancré dans la géographie de la communauté de Wemotaci.

Et j'étais là avec notre collègue la députée de Laviolette, ministre du Tourisme, et on a fait nos discours, mais il y avait comme 200 étudiants et leurs parents qui n'ont pas vu leur nouvelle école encore. J'ai senti la tension : M. le politicien, fais le discours «short and sweet» parce que je veux voir ma nouvelle salle de classe, et tout le reste. Alors, nous avons coupé les rubans avec le chef et les autres représentants de la nation attikamek. Puis après ça dans la foule qui est allée voir leur école pour la première fois, quel sentiment de fierté qu'on a donné à ces jeunes!

Et c'est ça, l'avenir. Il faut faire ça correctement. Je sais qu'il y a une nouvelle école en construction à Winneway, dans le Témiscamingue, et ça, c'est une autre chose. Je pense qu'il y a une ouverture prévue pour l'automne, et, si je peux m'arranger avec le bureau du whip pour être présent, je vais le faire parce que ça, c'est les choses qu'il faut continuer d'investir, et c'est vraiment un des éléments clés pour changer la donne dans ces communautés. L'éducation, c'est vraiment la priorité numéro un. Et ça nécessite une collaboration, mais je pense qu'on aura une bonne écoute avec le nouveau gouvernement à Ottawa.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Chauveau. Deux minutes.

Mme Tremblay : Oui. Je prendrais les deux dernières minutes pour vous parler d'un beau projet multigénérationnel à Wendake, c'est un projet qui est cher au grand chef de la nation huronne-wendat, Konrad Sioui, le projet Tortue. Je sais que vous en avez déjà entendu parler, ça vous a été présenté. Ça inclut un centre de jour, logements supervisés, un CHSLD public, ensemble locatif adapté. Bref, c'est un beau projet pour conserver aussi les personnes âgées dans leur milieu, hein, parce que, souvent, elles doivent aller à l'extérieur dans un CHSLD, dans un milieu où elles n'ont pas vécu, parce qu'elles ont passé leur vie à Wendake et elles aimeraient vivre, continuer à vivre dans leur culture.

Alors, moi, j'aimerais savoir ce que vous pensez de ce type de projet qui est unique, novateur dans les milieux autochtones, là, au Québec, et sur les chances, peut-être, de réussite.

M. Kelley : C'est un très beau projet. Moi, j'ai eu l'occasion d'assister à une présentation avec notre collègue le ministre de la Santé. Tout projet qui implique plus qu'un ministère rend la vie un petit peu plus compliquée. La société d'habitation est dans le portrait, le ministère de la Santé est dans le portrait. Il y a d'autres éléments, mais moi, je trouve, c'est très intéressant. Et je sais qu'il y a un ardent défenseur du projet qui est à ma droite, Mme Thomas, qui m'a dit à maintes reprises à quel point c'est un beau projet.

Alors, il y a des choses que nous devrons regarder au niveau de l'analyse des conséquences sur les services dans la région, et tout le reste, mais moi, j'ai toujours dit au grand chef Konrad Sioui que, je pense, c'est un projet innovateur, c'est un projet qui est très intéressant, qui répond notamment aux besoins de plus en plus importants des aînés de la communauté de Wendake. Et également l'autre chef dans la cuisine, c'est le gouvernement fédéral, parce qu'on est sur la réserve, qui complique parfois la responsabilité, là, qui fait quoi, qui paie pour quoi. Mais c'est un très beau projet. Et moi, je pense qu'on va continuer de collaborer avec le grand chef Sioui, avec le gouvernement fédéral pour voir si on peut trouver une solution, mais, comme je dis, certains engagements sont déjà pris au niveau de la société d'habitation notamment. Il y a un très grand intérêt pour que ce projet avance.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le ministre. M. le député de Beauharnois.

• (21 h 10) •

M. Leclair : Merci, M. le Président. Alors, en fin de la période des questions, tantôt, j'ai manqué de temps, mais j'étais sur une grande, grande lancée. Alors, je vais y revenir.

Alors, on disait un petit peu plus tôt, M. le ministre, qu'avec les autochtones, les communautés, lorsqu'il y a des projets, il ne fallait pas tout leur imposer parce qu'à chaque fois qu'on l'a fait dans le passé, ça ne fonctionnait pas. Il faut leur laisser de la place, et tout. Nous étions sur le cas de Val-d'Or. On était sur le cas de l'enquête publique qu'eux demandaient, alors que nous, on utilise plutôt l'enquête de la SPVM. Si on se remet dans ces dates-là, c'est un cas plus ou moins isolé. Lorsqu'on parle de Val-d'Or, là, ça débutait. Après ça, il y a eu une série d'actions et de choses qui se sont passées à plusieurs endroits différents. Puis, sur la même lancée que vous nous dites : On va se trouver un endroit à parler, on va mettre une enquête publique, alors que les autochtones, eux, voulaient plus une enquête publique que de dire : On va faire une simple enquête de ce cas isolé là, je peux comprendre, dans ce temps-là, peut-être de dire : Bien, commençons par ça puis regardons où est-ce que ça va en venir. Mais aujourd'hui on ne peut plus parler du cas de Val-d'Or... d'un cas isolé, là. On sait tout qu'est-ce qui est arrivé un peu partout, avec toutes les histoires qu'on entend, là, puis pas simplement sur la sécurité publique. Puis, pour en ajouter encore une fois, lorsqu'on nomme l'observatrice, c'est une observatrice, encore une fois, que les autochtones disent : Bien, nous, ça n'aurait pas été notre choix.

Alors, comme je vous le répétais tantôt, vous me disiez si bien, de dire : Bien, il ne faut pas tout imposer. Alors, pourquoi que dans ce cas-là, jusqu'à aller à l'observatrice, on n'a pas écouté, on n'a pas donné une place aux autochtones, alors qu'on le sait très bien que ces gens-là, à chaque fois qu'on leur impose, bien, ça va être un résultat qui va être quasi nul parce qu'ils vont se braquer de leur côté, puis le résultat ne sera malheureusement pas là? Alors, même si on est encore à une étape d'une enquête de la SPVM, policiers qui enquêtent un policier, puis là on ne fera pas l'histoire médiatique, ça me surprend venant de vous, M. le ministre, de ne pas avoir pressé le citron plus fort que ça pour dire : Laissons-leur de la place si on veut avoir une chance de voir la réalité en arrière de ça.

Le Président (M. Merlini) : M. le ministre.

M. Kelley : Il y a plusieurs éléments dans la question, M. le Président.

Premièrement, l'enquête précise sur les allégations n'est pas mélangée avec l'enquête publique parce qu'elles sont vraiment différentes. Il y a un nombre de femmes, je ne sais pas combien exactement, qui ont porté plainte très spécifique contre certaines actions, les allégations contre les policiers. Alors, éventuellement, comme vous le savez, le gouvernement a créé le Bureau d'enquêtes indépendantes, qui est censé d'être fonctionnel très prochainement, mais ce n'était pas fonctionnel au moment de ces incidents, à l'automne passé.

Deuxièmement, dans la loi habilitante pour le Bureau d'enquêtes indépendantes, les agressions sexuelles n'étaient pas parmi la liste des choses qu'on peut conférer au bureau. Alors, je pense, prochainement, mon collègue le ministre de la Sécurité publique va faire les ajustements nécessaires que les agressions sexuelles peuvent être référées au Bureau des enquêtes indépendantes, mais ce n'était pas un choix qui était disponible pour nous autres à l'automne passé.

Alors, je comprends le sens de votre question. Une fois que nous avons ajouté cette possibilité, il y a une formation requise pour les membres du bureau aussi pour s'assurer qu'ils peuvent correctement faire les enquêtes sur les allégations d'agression sexuelle. Mais le SPVM est là pour les accusations précises qui ont été soulevées, notamment dans l'émission Enquête, et c'est de ne pas mélanger ça avec la question plus large quand vous avez dit...

Et personne n'a dit que Val-d'Or est un cas isolé, même à travers le Canada. Et c'est quoi, le nom en français pour les «moonlight rides»?

Une voix : Une cure géographique.

M. Kelley : Cure géographique, pardon. C'est quelque chose qu'on a vu dans d'autres villes, le triste décès, à Saskatoon, de Neil Stonechild quand il a été pris et abandonné à côté de l'aéroport à moins 30° et il est décédé. Alors, ces allégations ne sont pas uniques à Val-d'Or ni au Québec, mais c'est quelque chose qu'il faut prendre au sérieux.

Alors, je reviens toujours... Et je n'ai jamais dit non à la question d'une enquête publique, mais moi, je veux voir... parce que, de toute évidence, l'enquête fédérale que Mme Bennett va mettre en place va regarder certaines de ces questions aussi. Alors, moi, je veux m'assurer qu'une démarche du Québec est complémentaire.

Également, je reviens toujours... Ma perspective, on peut agir rapidement ou on peut faire une enquête publique, mais difficile de faire les deux. Et, une enquête publique, comme j'ai dit, on sait le moment que le train quitte la gare, mais, une fois que le train quitte la gare, on n'a pas grand contrôle au moment qu'il va déposer le rapport final. Et ça, c'est juste l'expérience d'un parlementaire de 21 ans. Mais je vais continuer notre dialogue, notamment avec l'Assemblée des premières nations du Québec et Labrador, avec Femmes autochtones du Québec, avec les centres d'amitié autochtone, avec le Grand Conseil des Cris, pour trouver un forum, un mécanisme le plus efficace possible pour corriger la situation.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le ministre. M. le député de Beauharnois.

M. Leclair : Merci, M. le Président. Vous voyez, M. le ministre, je pense que les attentes sont quand même hautes. Vous êtes quand même le ministre des Affaires autochtones, donc, s'il y a quelqu'un qui doit prendre le leadership, il n'y a pas personne d'autre que vous. Donc, je comprends que la sécurité publique, c'est un autre créneau, et tout, mais je pense que vous devez être le maître d'orchestre de tout ça puis de dire : Il faut que ça cesse, et qu'est-ce qu'on fait, qu'est-ce qu'on pousse.

Je reviens juste un petit peu en arrière. Là, on a les événements de Val-d'Or, on a d'autres événements, là, du Lac-Simon, et tout, puis ça s'amplifie. Dans le temps, vous avez bien expliqué, là, avec les droits, et tout, qu'on ne pouvait peut-être pas aller dans une enquête publique à ce moment-là, mais en ce moment on attend quoi? Reculons juste voilà quelques crédits. On a parlé, en 2015, là, que, vous vous souvenez, on était supposés de faire un plan d'action sur le racisme et la discrimination. Puis on n'avait pas encore ces événements majeurs là, qui aujourd'hui ont pris totalement une autre ampleur, je dirais, quintuplée. Puis malheureusement on dit que ce sera difficile de rencontrer les attentes. On parle ici juste de discrimination et racisme, là, après ça on a tous les faits qu'on a vus puis qui sont tristes, puis là on dit : Bien, le fédéral, et tout... Mais moi, je m'attends... On attend quoi? On attend quoi de plus que... C'est quoi, le souffle, là? Il y a-tu une date? On attend-u d'autres événements? Parce qu'attendre après attendre... Puis je comprends, là, vous êtes ministre, vous n'avez pas juste une chose à faire, là. Vous avez parlé d'éducation et de tout, c'est bien correct. Mais, dans ces cas-là, on attend-u après la lune? Il faut qu'il y ait quelqu'un qui prenne le leadership puis qui brasse les choses parce que, sinon, on va être face à de nouveaux événements encore comme qu'on a vus, malheureusement, au Lac-Simon, là. C'est juste des répercussions, qui ne sont pas pareilles, mais c'est similaire, encore une fois, c'est de la violence. Puis là vous me dites : On attend. Il me semble que...

M. Kelley : ...au contraire, je pense, dans l'échange que nous avons eu sur Val-d'Or, il y avait des gestes concrets qui ont été posés rapidement. Aujourd'hui, ce que nous avons entendu, ce n'est pas tout à fait ça. Dans certaines... Vous avez mentionné l'enquête du SPVM. Je peux vous assurer que les noms possibles des observatrices, nous avons consulté les autochtones, les noms circulaient avant. Là, nous avons décidé de nommer Mme Fannie Lafontaine, c'est quelqu'un qui a beaucoup d'expérience au niveau des droits de la personne. Également, à la demande de l'Assemblée des premières nations, au moment de la rencontre avec notre collègue de Châteauguay, le 23 novembre, ils ont proposé l'ajout de deux enquêteurs des corps de police autochtone à l'enquête du SPVM, donc une Mme Trudeau, qui est une policière abénaquise, de mémoire, et M. St-Cyr, qui est un policier cri, qui ont été greffés.

Alors, nous avons entendu, nous avons agi au niveau... La question de la formation, nous avons répondu. Nous avons à s'assurer que la police à Val-d'Or peut travailler avec les travailleurs sociaux pour s'assurer que... Souvent, c'est le cas où ce n'est pas vraiment d'un policier qu'on a besoin mais plutôt d'un travailleur social, un conseiller, des choses comme ça. Alors, il y a eu beaucoup de choses que nous avons mises en place.

Mais je reviens toujours... Moi, je pense, et qu'est-ce que je propose au leadership autochtone, il y a des recommandations existantes sur lesquelles on peut commencer à travailler demain, mais il faut travailler ensemble. Moi, je ne peux pas dire... Alors, si c'est une enquête... Mais une enquête va ralentir le processus plutôt qu'accélérer le processus. Mais, si, d'un commun accord, il faut ralentir le processus, je vais me rallier à ça, M. le député, mais ma préférence sera toujours de s'attaquer à la question de la formation des policiers à l'École nationale de police dès maintenant. Moi, je pense, le renfort au niveau des besoins, notre collègue, Mme la députée de Chauveau, l'a évoqué tantôt, les besoins dans les milieux urbains sont croissants. Et il y a des choses que nous pouvons faire pour bonifier davantage les centres d'amitié autochtone, d'autres programmes qui existent pour un accueil meilleur et un bon voisinage à l'intérieur de notre milieu urbain, il y a des choses comme ça. Quand je parlais à ma collègue la ministre responsable pour la réadaptation, réhabilitation et les services sociaux, il y a beaucoup de projets pour les refuges de femmes, il y a beaucoup de projets au niveau des programmes des personnes avec des problèmes de dépendance. Moi, je pense qu'avec un petit peu d'imagination, moi, je peux prendre le même argent pour une enquête publique et le mettre à l'oeuvre tout de suite pour répondre à certains des besoins. Ça, c'est mon opinion, que je ne vais jamais imposer sur personne, mais moi, je persiste à croire, surtout dans l'optique qu'il y aura une grande enquête publique fédérale au même moment, que je peux prendre ces mêmes ressources et je peux, au niveau des gestes concrets, tangibles, à court terme, réaliser des choses intéressantes. Mais, si, au bout de la ligne, mes négociations et mes discussions avec le leadership autochtone, on n'arrive pas à la même conclusion, on va tirer d'autres conclusions. Mais, pour le moment, M. le député, moi, je demeure convaincu qu'avec...

Et un petit peu à l'image de qu'est-ce que le gouvernement, en Ontario, vient de faire. Mme Wynne, dans son dernier budget, a mis l'argent ensemble, je pense, 80 %, c'est pour les services de première ligne. Alors, c'est une somme importante, je pense, c'est 100 millions sur trois ans. Alors, moi, je pense, avant de procéder avec une enquête publique, regarder comme il faut ce modèle en Ontario ou d'autres idées mais avec le leadership. Encore une fois, vous avez entièrement raison, mon style n'est pas d'imposer les choses, c'est de consulter. Mais moi, je demeure convaincu qu'avec la même somme d'argent on peut faire les choses très, très importantes dans les communautés. Mais ça, c'est ma position ce soir, le 14 avril.

• (21 h 20) •

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le ministre. M. le député de Beauharnois.

M. Leclair : C'est très sage comme position, M. le Président.

Le Président (M. Ouellette) : On le dirait à moins, M. le député de Beauharnois.

M. Leclair : M. le ministre, je reviens sur le chef autochtone Happyjack. Ils veulent préserver, là, une certaine partie de territoire. Est-ce que vous pouvez me réconforter et peut-être les réconforter, s'ils sont à l'écoute, à savoir s'il y a vraiment des rencontres de prévues, là? Parce que ça fait quand même une couple de mois. Peut-être vous les avez déjà rencontrés. Je n'ai pas rentré en contact avec les gens, là. Ils étaient venus nous rencontrer voilà plusieurs mois. Ils étaient ici, à l'Assemblée nationale. Moi, j'aimerais savoir où est-ce qu'il en est, ce dossier-là avec ces gens-là, puis juste la rencontre, là, sans avoir les résultats de tout ça, là.

M. Kelley : Oui, bien j'ai rencontré le chef Happyjack le 23 février, qui est le chef de Waswanipi. Pour mettre la question, M. le Président, dans le contexte, il y avait litige entre le gouvernement du Québec et la nation crie sur un échange de lettres entre Gilles Baril, qui était le ministre de l'époque, en 2001 ou 2002, et Ted Moses, qui, à l'époque... Alors, c'est l'affaire Baril-Moses, ou les lettres Baril-Moses, ou l'entente Baril-Moses. Il y a plusieurs lexiques. Alors, nous avons trouvé une solution, qui est une entente qui a été signée au mois de juillet par le premier ministre, et certains de mes collègues, et la grande nation... le Grand Conseil des Cris, qui a créé une aire protégée de 9 000 kilomètres carrés autour de la rivière Broadback. Alors, c'est une aire protégée très importante. Ça fait partie des engagements que le gouvernement a pris dans le Plan Nord, d'avoir un certain pourcentage du territoire du Plan Nord protégé.

La communauté de Waswanipi voulait toujours une aire protégée plus importante, mais, dans toutes ces questions, M. le Président, il y a les équilibres à trouver entre le besoin de développement de la forêt, la création d'emplois dans la région de Lac-Saint-Jean notamment, et alors nous avons pensé, avec le Grand Conseil des Cris : Avec une aire protégée de 9 000 kilomètres carrés, nous avons un compromis acceptable.

Il y avait en même temps une demande qui était faite devant le COMEX, qui est le genre de BAPE qui découle de la Convention de la Baie James, pour la construction de certaines routes d'accès forestier dans la région en question. Le COMEX, comme vous vous rappelez, c'était deux membres cris, deux membres nommés par le gouvernement du Québec. Tout récemment, c'était sous la présidence de l'ancien chef du Parti québécois André Boisclair. Alors, dans une décision unanime, au mois de mars, on n'a pas donné le feu vert à l'ensemble de ces chemins d'accès, mais on a donné, je pense, c'était deux tiers ou quelque chose comme ça, il y avait un feu vert unanime du COMEX pour procéder, qui va mettre en suspens la question des zones plus proches de la rivière Broadback, mais qui quand même va créer la possibilité pour une récolte forestière pour deux ou trois ans ou quelque chose comme ça. Ça fait partie également du plan caribou parce qu'avec l'aire protégée ça va aider dans le plan qui a été déposé par mon collègue le ministre des Forêts, Faune et Parcs pour la protection du caribou forestier aussi.

Alors, je pense qu'on a un compromis ici qui a été permis pour protéger la Broadback. Et le chef Happyjack a dit clairement qu'il n'était pas contre le développement forestier. Et on est toujours à la recherche de l'équilibre dans ce dossier.

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de Beauharnois, je me tarde que vous me parliez de Kahnawake, là, parce qu'on était dans les crédits l'an passé.

M. Leclair : Bien, c'est sûr. Mais là on a parlé plus du Nord. On va descendre au sud un petit peu puis on va se rapprocher de chez moi.

Alors, effectivement, mon prochain sujet... On dirait que vous avez lu mes notes, monsieur.

Le Président (M. Ouellette) : Non, je n'ai pas lu vos notes. Tant que vous ne parlerez pas du pont Mercier, je n'ai pas de problème.

M. Leclair : Moi, il ne faut plus que j'aille à la salle de bains, il vient lire mes notes.

M. le ministre, juste peut-être nous faire un peu rapport avec qu'est-ce qui se passe, là, sur notre projet, la nouvelle fusion, avec les rapports de la CSST, les enquêtes sur les chantiers en réserve soit à Kahnawake ou Akwesasne. Puis en même temps, là, peut-être nous parler, là, le système d'équivalence, la reconnaissance de compétences, si c'est toujours bien accepté de la part autant de la CCQ, des gens qui ont à le gérer avec eux, puis toute la sécurité au travail, qu'on avait d'énormes problèmes dans le temps. On parle de gens qui se blessaient au travail, que c'était difficile de recevoir les sommes d'argent parce qu'il y avait une obstination. Alors, avec ce nouveau réseau là, là, partagez, expliquez-nous où est-ce qu'on en est. Puis peut-être un petit mot en même temps sur l'hôpital. Est-ce que c'est débuté ou est-ce que ça débute?

Le Président (M. Ouellette) : On avait hâte, M. le ministre, que vous nous actualisiez parce que ça a fait l'objet des crédits et de l'étude du projet de loi. Ça fait qu'à vous la parole.

M. Kelley : En tout cas, toutes les nouvelles que j'ai à date sont encourageantes. Quand on est dans l'innovation, il y a beaucoup de discussions, et tout le reste, mais à la fois la Commission de construction du Québec et la CSST sont toujours en négociation. Il y a un certain nombre de travailleurs qui ont été qualifiés suite au processus, on me donne le chiffre de 463, qui ont passé dans le processus.

Sur la question précise... À ma dernière visite à Kahnawake, j'ai pris la peine d'aller voir le chantier de l'hôpital Kateri Memorial, et c'est effectivement un chantier. La journée où j'étais là, c'était un grand trou. Il y avait les travailleurs mohawks mais également les compagnies parce que beaucoup des choses spécialisées venaient de la Rive-Sud plutôt que de la communauté. Alors, la plomberie, les électriciens, c'étaient souvent les entreprises de la région qui travaillaient là.

Alors, l'hôpital suit son chemin. Alors, ça, c'est une bonne nouvelle. Et, je pense, c'est un exemple... c'est un héritage, encore une fois, du gouvernement de René Lévesque, la création de l'hôpital Kateri Memorial, que nous avons... permettre l'agrandissement. Alors, ça suit son chemin.

Alors, les discussions continuent entre les organisations de l'État et les Mohawks, mais, les échos que j'ai à date, ça suit son chemin, ça va très bien, il y a des travailleurs qui sont qualifiés. Et, au niveau de la protection, les assurances, et tout le reste, le système hybride que nous avons mis en place tient la route.

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de Beauharnois.

M. Leclair : Il me reste-tu du temps? Oui? Peut-être une autre petite question, là. Concernant, justement, ce système hybride là. On se souvient, dans le temps, là, il y avait beaucoup de critiques. On disait : Les inspecteurs de la CCQ ne peuvent pas parvenir au chantier, et tout. Alors, comment que ça se passe, tout ça? Est-ce que les inspections sont normales? Est-ce qu'on peut entrer et sortir sur la réserve, là, pour regarder les chantiers?

Le Président (M. Ouellette) : M. le ministre.

M. Kelley : Les informations que j'ai sont que le système de concordance va très bien, il y a un esprit de collaboration. Alors, il n'y a pas de problèmes qui ont été signalés à ce niveau. On est toujours dans les compétences comparables et les standards comparables. Et on m'a dit que l'entente tient la route, comme j'ai dit.

Juste pour compléter ma réponse, la fin des travaux sur l'hôpital sera prévue pour l'été 2017. Alors, ça va être une occasion. On peut aller couper le ruban ensemble.

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de Beauharnois, on va avoir une belle ouverture à aller faire.

• (21 h 30) •

M. Leclair : Ah! ça va être de toute beauté!

Peut-être une dernière question, en ce qui me concerne. Dans vos détails de crédits, il y a une compagnie qui est là depuis plusieurs années qui défend les intérêts, là, côté avocats, la compagnie Norton Rose. On regarde d'année en année, là, ce n'est pas juste cette année, d'année en année, là, c'est approximativement... plus ou moins 500 000 $ par année de frais d'avocat, puis, si on recule, là, aussi loin qu'on peut regarder, c'est quasiment toujours ce montant-là. Est-ce qu'il y a un prix de revient à tout ça? Est-ce qu'ils ont quelque chose de vraiment précis ou c'est un genre d'abonnement au journal? J'imagine que ces gens-là travaillent sur quelque chose de précis, mais c'est toujours égal, il n'y a pas de «peak», il n'y a pas de crise. J'aimerais savoir. Peut-être ventiler un peu, là, ce 460 000 $ là.

Le Président (M. Ouellette) : M. le ministre.

M. Kelley : Avant tout, c'est l'expertise développée dans la longue négociation d'une entente avec la nation innue qui s'appelle Petapan. Alors, un des avocats dans cette entreprise... M. Laveau?

Une voix : Pierre-Christian Labeau.

M. Kelley : Pierre-Christian? Pierre-Christian Labeau qui suit ça. Alors, il a vraiment développé une expertise. Alors, sa collaboration est précieuse. Comme vous savez, on est toujours en négociation avec les communautés de Mashteuiatsh, d'Essipit et de Natashquan. Alors, son expertise est essentielle dans le développement de tout ça.

Également, il y avait une intensification parce qu'on voulait arriver à une entente avant l'élection fédérale. De toute évidence, on n'a pas fait ça, mais il y avait beaucoup de négociations pendant l'été de 2015. Et, depuis l'élection du nouveau gouvernement, ça demeure une priorité pour le gouvernement fédéral d'arriver à une entente. Alors, il y avait une intensification des négociations qui justifie les montants qu'on trouve dans les crédits de cette année.

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de Beauharnois.

M. Leclair : Parce que, si je prends comme exemple, on avait donné à M. Bouchard pour un contrat précis avec un délai de temps précis — puis il y a des gens qui critiquaient, à tort ou à raison, je ne veux pas embarque dans ce chemin-là — mais c'était environ 160 000 $ ou 175 000 $ qu'on lui donnait. Puis là on voit 460 000 $ annuellement depuis belle lurette. Est-ce que ça prend fin? Est-ce que, vraiment, il est à temps plein? Parce que M. Bouchard avait un groupe de travail et puis avait à livrer une certaine marchandise pour 160 000 $. Alors, avocat pour avocat, je comprends, il peut avoir une expertise, mais c'est parce que ça répète toujours, toujours, toujours.

Le Président (M. Ouellette) : Il reste deux minutes, M. le ministre.

M. Kelley : On est dans le domaine de la confection d'un traité. Alors, c'est une expertise assez spécialisée. Moi, je partage l'impatience des Innus, des contribuables, de tout le monde. Les négociations avec la nation innue durent depuis 1979. Mais moi, je demeure convaincu — et, je pense, la preuve est là — qu'un traité moderne comme nous avons réalisé avec les Cris, c'est la voie de l'avenir. Et, si je peux arriver avec un genre d'entente avec la nation innue semblable, ça va être de l'argent bien investi. Mais je partage les frustrations, ce n'est pas facile. On approche d'une entente, et une élection est enclenchée au niveau provincial, au niveau fédéral, dans la communauté. Alors, c'est très compliqué.

M. Leclair : On n'a pas de négociateur en chef, puis, à ce prix-là... Ou bien, non, il n'a juste pas le titre?

M. Kelley : Mais les prix... Il y a d'autres mandats qui sont accordés à M. Labeau aussi, ce n'est pas uniquement Petapan. C'est également les négociations avec la communauté de Kitigan Zipi. Il y a également les négociations avec la communauté de Pikogan. Au niveau des sommes, et tout le reste, ça, c'est les normes du Conseil du trésor, ce n'est pas le ministre qui négocie ces sommes, et tout le reste. On m'informe, c'est ça que ça prend. Et moi, je veux donner toutes les chances possibles pour une réussite dans nos négociations avec les Innus parce que je demeure convaincu, comme j'ai dit dans mes remarques préliminaires, M. le Président, d'avoir un document de base, un document qui va définir nos relations avec la première nation innue, c'est la voie de l'avenir.

Mais je comprends très bien les frustrations. Si c'est une frustration au niveau gouvernemental, c'est encore plus grave pour la nation innue parce que les Innus investissent beaucoup d'argent en frais d'avocat dans ces questions aussi depuis 35 ans. Mais je demeure convaincu que le résultat final, il faut se rendre là, et ça va aider dans nos relations avec les Innus, ça va clarifier des responsabilités du gouvernement du Québec et du gouvernement fédéral. Ça va avancer l'éducation, ça va avancer au niveau développement économique. Alors, c'est la voie de l'avenir. Mais je comprends très bien vos commentaires, M. le député.

Le Président (M. Ouellette) : Merci. M. le député de Beauharnois, il y a une partie de votre réponse qui a été sur le temps du gouvernement.

M. Leclair : Oh yes!

Le Président (M. Ouellette) : Bon.

M. Leclair : ...

Le Président (M. Ouellette) : Non. Avant de passer la parole à M. le député d'Abitibi-Est, je veux souligner une chose, M. le ministre. Depuis quelques années, probablement et j'ose espérer qu'à cause des relations que vous développez avec les communautés, on a de plus en plus de grands chefs : le grand chef Matthew Coon Come, qui est venu déposer en commission parlementaire, je me souviens, il y a quelques années, il y avait eu le chef d'Akwesasne, on a eu le grand chef de Wendake, on a eu le chef régional des Premières Nations. Et on voit de plus en plus la présence des grands chefs, lors des commissions parlementaires, qui viennent nous partager leurs réalités et qui viennent nous faire part de leurs besoins. Et je voulais le souligner parce que c'est quelque chose qui est très apprécié des parlementaires, d'avoir cette partie de vision du Québec qui est une très grande nation.

M. Kelley : Et, juste sur ça, très rapidement. Il y a une évolution dans la pensée autochtone aussi parce qu'il y a la notion que c'est nation à nation, où on s'adresse directement à la couronne. Alors, une province à l'intérieur de tout ça, ce n'était pas toujours clair. Mais effectivement il y a beaucoup d'enjeux où les programmes du gouvernement du Québec, les relations avec les gouvernements du Québec et les parlementaires sont très importants. Alors, à chaque fois, j'encourage soit de participer dans nos commissions parlementaires, les audiences du BAPE...

Alors, ça ne remplace pas d'autres mécanismes de consultation et de dialogue direct avec les Premières Nations, mais ils sont les bienvenus devant nos commissions. Ils amènent toujours une perspective importante pour les députés et les ministres, de les entendre. Alors, je les encourage en tout temps de venir témoigner.

Le Président (M. Ouellette) : Et vous êtes très assidu à leur comparution devant les commissions parlementaires.

M. le député d'Abitibi-Est.

M. Bourgeois : Merci, M. le Président. Vous me permettrez, M. le Président... J'ai mentionné... tout à l'heure, je voulais aborder un autre point important pour une réalité dans notre beau comté d'Abitibi-Est, c'est celle de la communauté de Kitcisakik. Kitcisakik, pour ceux qui ne connaissent pas exactement ce qu'il en est, c'est une petite communauté qui est ce qu'on appelle dans le parc de La Vérendrye, hein? Ceux qui font la route l'identifient comme ça. Il y a un poète de chez nous, Richard Desjardins, qui a appelé la communauté de Kitcisakik les représentants du peuple invisible parce que ceux avec qui... dans le fond, on passe le long de la route, mais on ne les voit pas, on ne les voit pas.

Et, je pense, pour ceux qui ont été dans le territoire de la communauté... pour le Québec, ce n'est pas une fierté. C'est triste quand on va dans cette communauté-là. Bon, il y a beaucoup d'enjeux qui sont en lien avec la réalité de cette communauté-là, mais, en même temps — et là, pour faire la suite avec ce que le député de Beauharnois disait — dans tous les événements qui se sont produits dans les derniers mois dans le territoire, les gens ont gardé une approche positive sur des dossiers parce qu'on était déjà à travailler avec eux, on était déjà en écoute auprès d'eux.

Et il y a un projet qui s'est fait, qui avait été piloté, à l'époque, par l'ancien député d'Abitibi-Est, mon précédent collègue du Parti libéral, M. Corbeil, qui avait lancé, à l'époque, un projet avec la communauté pour la réfection des habitations de la communauté. Et ça s'est fait, ça, avec une approche tout à fait particulière. Ce n'est pas juste la question de donner un meilleur milieu de vie, et je vous le définirai peut-être un peu plus tout à l'heure, mais aussi avec un objectif de prise en charge par le milieu, par les individus. Et là la communauté a donc choisi de voir, avec les membres de la communauté, comment on pouvait travailler à améliorer cette situation-là.

Donc, il y a des individus qui se sont engagés, avec la collaboration de la communauté, à faire une formation de charpentier-menuisier. Et cet engagement-là, il est plus que significatif. M. le ministre, vous avez été à même de venir visiter la communauté avec moi, de voir l'état des lieux, mais de parler avec les leaders, avec les membres de la communauté qui peuvent témoigner de l'importance de ce projet-là parce que ces gens-là, ils se sont engagés dans une formation qu'ils ont réussie. Donc, ils ont fait leur formation de charpentier-menuisier, la communauté a pris des ententes avec un contracteur pour pouvoir réaliser les travaux selon les normes de la CCQ, et donc d'obtenir leurs cartes de compétence, de pouvoir être habilités à travailler dans le monde la construction. Et ils ont réussi à rénover dans le parc immobilier, qui est, au total, de 90, 35 maisons. Et la communauté est en demande pour pouvoir... et espérait pouvoir faire au moins un bloc, idéalement. On les a rencontrés ensemble. Moi, j'ai harcelé, je pense que c'est un peu le terme...

• (21 h 40) •

Le Président (M. Ouellette) : ...

M. Bourgeois : Ah! Excusez-moi... C'est non parlementaire?

Le Président (M. Ouellette) : Non, ce n'est pas que c'est non parlementaire, mais, avec le discours du ministre tantôt, je trouve qu'on est dans la violence un petit peu ce soir.

M. Bourgeois : Ah! d'accord. Donc...

M. Kelley : Je fais toujours la nuance importante entre «tenace» et «tannant». Et le député et le maire de Val-d'Or étaient toujours très tenaces. Mais c'était borderline.

M. Bourgeois : Merci, M. le Président. J'apprécie cette reconnaissance. Il y a de la place. Et, dans ce dossier-là, je pense qu'on vraiment fait une différence pour la communauté, pas seulement sur la qualité de vie pour les gens qui habitent la communauté en réalisant des travaux d'amélioration des résidences, mais pour les modèles, les modèles, des gens qui se sont pris en main, qui sont retournés aux études, qui sont allés se chercher des compétences, une reconnaissance de ces acquis-là, et qui sont maintenant habilités à travailler partout sur le territoire parce que les contracteurs avec qui ils ont travaillé, ils les sollicitent pour aller faire d'autres travaux ailleurs, dans d'autres communautés à Val-d'Or.

Qu'est-ce que vous pensez que ça donne comme message, M. le ministre, aux jeunes qui voient leurs parents partir, le matin, aller réaliser, soit dans leur communauté ou ailleurs sur le territoire d'Abitibi-Est, des travaux et de revenir le soir, dire : Je ramène ma réalisation de la journée, je peux échanger, je suis capable de devenir un modèle pour mon enfant, pour mon frère, pour ma soeur, une fierté pour mes parents? On change la donne complètement.

Et là-dessus, M. le Président, je dois souligner, oui, nous avons été tenaces, mais toute la reconnaissance qu'on a envers le ministre et, oui, envers le ministre des Finances de nous avoir accordé un budget qui, somme toute, j'oserais dire, était presque au-delà de nos espérances. Et j'aimerais, M. le ministre, peut-être que vous me confirmiez cet engagement-là de façon claire.

Le Président (M. Ouellette) : M. le ministre.

M. Kelley : Alors, moi, quand j'ai... en Chambre au moment du dépôt du budget, je suis arrivé avec le gros cahier des renseignements additionnels — chut, chut, chut — pour trouver... voir ça noir sur blanc parce que c'est un engagement tellement important. Avec le député d'Abitibi-Est, on a visité Kitcisakik dans l'été de 2014. Alors, à ce moment, environ 25 des maisons étaient rénovées. Et ce n'est pas des maisons de grand luxe, même rénovées, mais c'est jour et nuit entre le parc des maisons existantes et qu'est-ce que nous pouvons faire via ce programme. Alors, nous avons rappelé avec insistance auprès de la société d'habitation, de l'importance... Alors, ils ont fait un programme un petit peu tardivement l'été passé pour faire un autre bloc. Ils veulent étaler ça parce que ça permet de la formation, ça permet à des personnes d'avoir les heures pour les cartes de compétence.

Mais, quand j'ai lu dans le budget qu'on va compléter, alors, les 55 maisons à faire, sur cinq ans, c'est un engagement de 2 millions de dollars. Il y avait beaucoup de bonnes nouvelles dans le budget, mais, honnêtement, quand j'ai lu cette ligne... Parce que nous avons travaillé ça très, très ensemble au niveau de faire une différence, et, je pense, tout le monde autour de la table, ici, nous sommes en politique pour faire une différence. Et ça, c'est quelque chose de tangible, ça, c'est quelque chose, tout comme la décision de, je pense, le gouvernement de Lucien Bouchard d'installer un centre de la petite enfance dans cette communauté, que la décision du gouvernement fédéral afin de construire une école primaire...

Parce que Kitcisakik est une communauté dite temporaire qui est là depuis 35 ans maintenant. Et on ne sait pas encore, au niveau de l'assise territoriale finale, c'est une longue conversation avec le gouvernement fédéral. Alors, qu'est-ce qu'on fait en attendant? Il y a toujours un débat comme ça. Mais de prendre la décision de donner les logements, l'habitation adéquate, moi, je pense que c'est une très bonne nouvelle qui découlait du budget déposé le 17 mars par notre collègue ministre des Finances. Mais bravo à la fois à Pierre Corbeil, mais également au député actuel de l'Abitibi-Est de soutenir ça parce que c'est vraiment un exemple où on peut dire avec fierté que nous avons fait une différence!

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le ministre. Je pense que la ténacité du député d'Abitibi-Est, M. le ministre de l'Environnement peut en parler aussi. Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré?

M. Bourgeois : Bien là, si vous me permettez. Non, mais...

Une voix : ...il a une autre demande.

Mme Simard : Vous avez trop de questions. Je suis rendue à une, tu sais.

Le Président (M. Ouellette) : Non... M. le député d'Abitibi-Est.

M. Bourgeois : Juste un petit simple comparateur pour que les gens saisissent bien l'enjeu. La différence que ça fait, ces travaux-là, c'est qu'on parle souvent d'une habitation avec une ou deux pièces, souvent une troisième pièce. Donc, ça fait un endroit, quand les enfants arrivent, pour pouvoir faire leurs devoirs. Ça fait un endroit où il y a deux chambres à coucher plutôt qu'une pour toute la famille. C'est vraiment, là, quelque chose de majeur. Et on ne parle pas d'habitation de luxe, on parle de dignité, on parle de respect des gens. Merci.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré.

Mme Simard : M. le Président, est-ce que je peux vous demander combien il reste de temps? S'il reste du temps.

M. Bourgeois : 30 secondes.

Le Président (M. Ouellette) : Alors, vous avez 6 min 30 s, Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré, 6 min 30 s.

Mme Simard : Merci beaucoup. Alors, je vais faire des salutations très courtes, chers collègues. Je suis bien heureuse d'être ici parmi vous, M. le ministre, personnel politique. Alors, je veux m'entretenir aujourd'hui un peu de la jeunesse autochtone, sujet extrêmement important, qui me touche particulièrement de par mon ancienne fonction d'adjointe parlementaire du premier ministre à la Jeunesse et à la Petite enfance. Alors, je ne peux parler de la jeunesse autochtone sans penser à celle qui habite Kuujjuaq et Inukjuak où je me suis rendue récemment avec mon collègue d'Ungava ainsi que mon collègue de Portneuf dans le cadre du mandat d'initiative sur les conditions de vie des femmes autochtones. Nous étions accompagnés également d'un représentant de chacun des partis représentant l'opposition.

Et, tout à l'heure, j'écoutais mon collègue d'Abitibi-Est faire son témoignage, et des témoignages comme ça, des témoignages sensés, qui viennent nous chercher, mais qui sont juste la réalité, on en a entendu plusieurs là-bas. Et la jeunesse autochtone vit des réalités totalement différentes de ce que nous vivons ici, donc, au Québec. Et, selon le... «au Québec», bien, dans cette partie du sud, comme on nous appelle, parce qu'on nous dit là-bas qu'on est les gens du Sud. Alors, selon le recensement 2011 de Statistique Canada, il y a près de 50 % de la population autochtone du Québec qui aurait moins de 30 ans. C'est déjà une différence qui est énorme avec nous, donc, et qui est importante. Les jeunes autochtones représentent à la fois la tranche de population qui connaît la plus forte croissance démographique mais également celle qui connaît le taux de pauvreté le plus élevé, de chômage, de suicide. Et les suicides, justement, lorsqu'on y était, à Kuujjuaq, le jour même, il devait y avoir les funérailles d'un d'entre eux.

Alors, on a senti cette détresse-là chez les jeunes. J'ai parlé avec plusieurs de ces jeunes-là. Ce qui est intéressant, c'est que, dans la nouvelle Politique québécoise de la jeunesse 2030, on fait une place aux jeunes autochtones et on va même consacrer une partie de la stratégie aux jeunes autochtones. Et c'était pour moi extrêmement important.

Dans le cadre des consultations publiques qu'on a faites, que ce soit au niveau du forum sur la lutte contre l'intimidation, où la communauté autochtone était représentée, ou encore la table ronde jeunesse, il y avait plusieurs intervenants de la jeunesse autochtone qui étaient autour de la table pour nous faire part de leurs priorités. Alors, les consultations auxquelles ils ont participé ont envoyé un message très clair quant au fait que la culture est au centre de leur réflexion bien sûr et de leurs demandes.

Tout à l'heure, M. le ministre, vous avez mentionné que l'éducation, c'est la priorité en termes de jeunesse. Pourriez-vous nous parler des autres priorités, entre autres, en situant avec le milieu de vie et la culture?

• (21 h 50) •

Le Président (M. Ouellette) : 3 min 30 s, M. le ministre.

M. Kelley : Je vais faire de mon mieux. Mais merci beaucoup pour la question. Et effectivement je pense que la première chose, la pyramide démographique autochtone est tellement différente. Moi, je suis un baby-boomer, alors vous autres, qui sont plus jeunes que moi autour de la table, va être condamné de prendre soin de moi dans les années à venir. Mais la jeunesse des communautés autochtones est complètement différente. Et vous avez bien évoqué, Mme la députée, cette réalité.

Alors, il y a plusieurs éléments. Je sais, dans la politique jeunesse, ça nous a permis de faire une entente avec l'aile jeunesse de l'Assemblée des Premières Nations qui va leur permettre d'avoir un genre de colloque jeunes à la fin de l'été. Moi, j'ai assisté dans le passé, et c'est vraiment intéressant parce que, même pour les autochtones, de voir les personnes d'autres nations, d'autres régions du Québec ensemble, c'est toujours enrichissant. Et que les Algonquins de l'Abitibi puissent s'asseoir avec les Innus de l'Est-du-Québec ou les Cris, ou les Mohawks dans la région de Montréal, c'est toujours enrichissant.

L'autre chose que j'ai vue qui est très intéressante, le renouvellement du groupe jeunesse chez les Inuits. J'ai rencontré la nouvelle présidente — le député d'Ungava peut me corriger — Alicia Aragutak et je pense qu'il y a Louisa Yeats aussi qui travaillent ensemble. Alors, un nouveau dynamisme au niveau du leadership inuit, qui est très, très important.

Et finalement j'ai eu le privilège, dans ma visite à la communauté innue de Pessamit au mois d'août, de voir à l'oeuvre pour la première fois le Wapikoni mobile, qui est une institution formidable qui a gagné des prix internationaux pour ses oeuvres. Et il arrive dans les communautés avec les vidéocaméras, il y a une roulotte avec l'ordinateur, et c'est vraiment de l'équipement très haut de gamme. Mais l'idée, c'est de donner les outils aux jeunes pour faire les films dans leur communauté, c'est les courts métrages. Les meilleures quinzaines étaient à Montréal au mois de novembre cette année, et c'est vraiment extraordinaire. Et j'étais là jusqu'après le grand pow-wow à Pessamit. Alors, toutes les images qu'ils ont prises, tout... Alors, de voir le Wapikoni mobile, qui était le soutien de la SAA depuis des années... je pense qu'on a maintenant une entente sur cinq ans de 90 000 $ par année, alors 450 000 $ pour soutenir le Wapikoni mobile.

Mais c'est un autre exemple parce qu'il y a certains jeunes, c'est un commentaire générique, que c'est les sports, c'est le hockey, c'est les choses comme ça qui peuvent les aider de s'impliquer et peut-être rester à l'école. Et, pour les autres, c'est la culture, et souvent les choses comme Wapikoni mobile sont des programmes qui sont très importants pour renforcer cette fierté culturelle autochtone.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le ministre. M. le député de Masson... Mme la députée, vous parlerez à votre collègue d'Abitibi-Est, qui a tout pris votre temps. M. le député de Masson.

M. Lemay : Merci, M. le Président. Alors, bien, le sujet de la politique jeunesse est quand même très intéressant, et je vais poursuivre sur cette lignée pour vous consoler.

Donc, le document, qui est quand même générique, là, qui a été présenté par le premier ministre il y a quelques semaines à peine, on mentionne qu'on veut aménager une place pour faire place aux réalités des jeunes autochtones. Et puis on mentionne qu'on veut mettre un budget de 6 millions de dollars sur cinq ans. Donc, ça, c'est environ, là, 1,2 million de dollars par année. Mais, pendant sa présentation, le premier ministre, lui, il s'est engagé à faire une politique jeunesse spécifique aux Inuits, une politique jeunesse spécifique aux Cris et une politique jeunesse spécifique aux autres nations représentées par l'APNQL. Donc, ça veut dire que, dans le fond, on va diviser ce 1,2 million là en trois volets différents. Et puis, bien, compte tenu que les nations représentées par l'APNQL, elles ont un poids démographique beaucoup plus élevé, là, que les Inuits ou les Cris, on peut s'attendre à ce que ça ne va pas être distribué de façon équitable, ça ne sera pas 400 000 $ à chaque. En tout cas, c'est ma supposition pour le moment.

Donc, moi, j'aimerais savoir : Est-ce que vous êtes au courant, M. le ministre, ça serait quoi, la répartition des sommes que le gouvernement va faire à travers les trois politiques qui ont été promises par le premier ministre?

Le Président (M. Ouellette) : Une petite réponse de deux minutes, M. le ministre.

M. Kelley : Encore une fois, je dois malheureusement référer le député aux crédits du secrétariat de l'action jeunesse. Alors, ce n'est pas l'argent qui va être distribué ici. Moi, je pense, l'argent va être distribué équitablement, pas également, et, je pense, la nuance est importante parce que, oui, au niveau démographique, les communautés représentées par l'Assemblée des Premières Nations sont peut-être plus nombreuses, mais je regarde les coûts de déplacement dans le comté d'Ungava, et c'est énorme. Alors, juste de faire une rencontre des jeunes Inuits, c'est les billets d'avion de peut-être 2 000 $ par participant, j'imagine, M. le député. Alors, ça, c'est les réalités qu'il faut tenir compte dans le Nunavik, qui sont différentes des déplacements dans les Premières Nations au sud... peut faire en voiture. Tous les déplacements des Inuits, on doit faire ça par avion. Mais, je pense, ça reflète la réalité de la Convention de la Baie James. Alors, la situation pour les Cris, qui sont dits conventionnés, est un petit peu différente que la réalité des communautés de l'Assemblée des Premières Nations.

Mais, comme j'ai dit, j'ai eu l'occasion à deux, trois reprises d'assister au colloque, le congrès des jeunes autochtones au mois d'août, et c'est vraiment révélateur. Mais c'est là qu'on voit la relève, on voit les jeunes qui vont prendre le leadership dans les communautés dans les années à venir.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le ministre. M. le député de Masson.

M. Lemay : Merci. Donc, bien, c'est bien, comme recommandation, que ça soit équitable à travers les trois politiques.

Maintenant, est-ce que vous et votre secrétariat vous jugez quand même que c'est un montant qui est suffisant pour la mission, là, que s'est confié le Secrétariat à la jeunesse au sujet des autochtones? Parce qu'il semblerait que le premier ministre, tout à l'heure, là, en étude des crédits, s'est dit ouvert à revoir les montants. Vous, est-ce que vous auriez une recommandation à la hausse à faire?

Le Président (M. Ouellette) : M. le ministre.

M. Kelley : M. le député, gouverner, c'est toujours de faire les choix difficiles. Alors, me demander : Est-ce que c'est suffisant, moi, je pense, tout ministre... si vous me donnez 10 % de plus, je suis confiant que les personnes derrière moi vont, d'une façon très responsable, dépenser cet argent.

Le Président (M. Ouellette) : Ils ont tous des sourires, M. le ministre.

M. Kelley : Oui. Alors, c'est très difficile, mais je sais qu'on est toujours au niveau ponctuel avec les fonds qui existent au Secrétariat des affaires autochtones, d'aider dans les programmes destinés à la jeunesse aussi. Je pense qu'il y a un volet réservé dans le Fonds d'initiatives autochtones pour les jeunes entrepreneurs. Je sais que le centre de formation à Wendake, il y a de l'argent additionnel accordé par le Secrétariat des affaires autochtones pour les cours culturels et linguistiques qui ne sont pas nécessairement couverts par l'argent du ministère de l'Éducation. Alors, on compte ça, je pense. On donne un certain ajout additionnel de l'entente avec l'Assemblée des Premières Nations pour les jeunes de 60 000 $ par année sur cinq ans. Alors, on est toujours en train de combler les besoins additionnels.

J'essaie, dans l'argent qui est à ma disposition comme ministre, d'envoyer l'argent où les programmes existants du gouvernement ne le couvrent pas. Alors, en anglais, «the things that fall between the cracks». Alors, il y a des programmes qui... ce n'est pas nécessairement le Secrétariat à la jeunesse, pas nécessairement au ministère de l'Éducation. Il y a toujours les projets comme ça. On essaie d'utiliser soit le Fonds d'initiatives autochtones, qui est un fonds qui est assez normé, ou un autre qui s'appelle le programme ponctuel autochtone, le PPA, où ce n'est pas tout à fait discrétionnaire, mais, quand même, ça me donne la marge de manoeuvre un petit peu plus intéressante pour combler certains besoins. Donc, pour la jeunesse, en complémentarité avec l'argent du secrétariat de l'action jeunesse, on donne un 60 000 $.

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de Masson.

• (22 heures) •

M. Lemay : Très bien, M. le Président. Donc, en fait, c'est bien, ça. C'est sûr que peut-être que vous pourriez faire un rappel au premier ministre, vu qu'il s'est montré ouvert à avoir des sommes plus élevées, parce que, dans votre synthèse des consultations que vous avez faites sur le Plan d'action pour contrer le racisme et la discrimination envers les autochtones, le document qu'on avait demandé à l'étude des crédits de l'année dernière, il y a un volet, dans les recommandations, que tous les groupes qui sont passés... sur les jeunes. Et puis permettez-moi de simplement lire, là, la recommandation qui avait été sortie sur les jeunes.

On mentionne ici : «Les jeunes sont une ressource inestimable pour le milieu autochtone. Il est important de travailler avec eux puisqu'ils pourront être porteurs de meilleures relations entre autochtones et allochtones dans les années à venir.

«Le nombre d'enfants autochtones placés sous la protection de la jeunesse est, comparativement aux enfants non autochtones, très élevé. Des recommandations ont été émises pour s'assurer que les jeunes autochtones reçoivent des services qui tiennent compte de leur réalité et de leur culture et que ces services puissent être offerts par les communautés autochtones elles-mêmes.»

Donc, peut-être que, si on pouvait faire mention de cela pour considérer des montants supplémentaires, ça serait apprécié, compte tenu du fait que c'est tout de même une stratégie, là, qui doit être concertée et qui était attendue depuis plusieurs années au sein des communautés. Est-ce que vous avez un court commentaire à faire sur ça?

M. Kelley : Moi, je veux juste dire, d'avoir un premier ministre qui a une communauté autochtone importante dans son comté est toujours aidant, et le premier ministre a une très grande sensibilité. Sa présence, je pense, aux cérémonies de clôture des jeux autochtones qui ont eu lieu à Mashteuiatsh, dans son comté, au mois de juillet, est preuve de son intérêt dans ces questions.

Mais j'inclus dans tout ça l'échange que j'ai eu avec Mme la députée de Chauveau sur la formation et l'éducation. Moi, je pense, ça, c'est les engagements les plus importants que le gouvernement doit travailler avec les communautés, travailler avec le leadership, travailler avec les familles, les parents autochtones pour s'assurer que la jeunesse autochtone a la formation requise pour participer dans la société moderne.

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de Masson, neuf minutes.

M. Lemay : Merci. Ma prochaine question va porter sur la question 74, là, des renseignements particuliers du deuxième groupe d'opposition. En fait, dans le fond, ce que vous nous avez déposé l'année dernière, suite aux études de crédits, le plan d'action pour le racisme et la discrimination... En fait, c'est mentionné ici... puis j'aime bien l'encadré, c'est : Synthèse des consultations. Et puis donc on a un résumé de qu'est-ce qui s'est dit. Et puis à la fin, en annexe, on a quelques pages, là, avec quelques volets. Je vous ai parlé le volet des jeunes tantôt, mais on a : juridique, international, diffusion des connaissances, relations, culturel, logement, femmes, jeunes, ressources naturelles, emploi, santé. Donc, c'est plusieurs volets qui ont été abordés, mais je n'ai pas vu, dans ce document de synthèse de consultations, un plan d'action de votre ministère avec un budget lié pour mettre en place les recommandations.

Est-ce que, dans les crédits 2016‑2017, il y a une portion — parce que je ne semble pas l'avoir vue — qui est en lien avec le plan pour lutter contre le racisme et la discrimination?

Le Président (M. Ouellette) : M. le ministre.

M. Kelley : Moi, je pense, le devoir de lutter contre le racisme et la discrimination est un devoir quotidien du Secrétariat des affaires autochtones. Moi, je pense, dans les actions que nous avons posées à Val-d'Or, moi, je pense, dans le soutien qu'on donne aux centres d'amitié autochtone, moi, je pense que nous avons mis les tables locales d'accessibilité des services à Val-d'Or, à La Tuque, à Trois-Rivières, à Sept-Îles, à Maniwaki. Moi, je pense au projet Harmonie entre la communauté de Pointe-à-la-Croix et Listuguj, dans le Gaspé, qui permettent aux jeunes des deux communautés de mieux se connaître. Trop souvent il y avait comme une frontière entre Listuguj et Pointe-à-la-Croix. On a beaucoup d'autres exemples comme ça sur une base quotidienne. On fait la promotion de vivre-ensemble et le bon voisinage. Alors, oui, on peut passer beaucoup de temps de transformer ça dans un plan d'action, mais moi, je pense que ça, c'est les choses qui motivent le Secrétariat des affaires autochtones et les gestes qu'on pose à tous les jours.

Mais je reviens toujours, parce que les centres d'amitié autochtone, on a toujours mis une certaine emphase sur son rôle au moment d'une grande détresse, et tout le reste, mais c'est également un lieu de rencontre et de transmission de la fierté autochtone en milieu urbain.

Alors, ça, c'est l'autre volet qui est peut-être moins bien connu. Mais je cite toujours comme exemple le CPE qui est dans le centre d'amitié autochtone à Val-d'Or. C'est un lieu magnifique où il y a les jeunes Cris, les jeunes Algonquins, les gens de Val-d'Or. Chaque classe, c'est nommé auprès d'un animal. Alors, on va voir le mot en français, en cri, en algonquin, parfois en anglais pour un loup, pour un ours et tout le reste. Et c'est vraiment un lieu d'échange et de partenariat.

Alors, moi, je pense qu'au niveau de la lutte contre racisme et discrimination toutes les choses légales sont en place. On a une charte des droits de la personne qui s'applique à tout le monde au Québec, y compris les autochtones. Le racisme, la discrimination sont déjà... il y a les lois contre ça. Si je leur refuse de vous louer un appartement ou de vous donner un emploi à cause de vos origines, c'est déjà prohibé dans notre société.

Mais moi, je pense qu'au niveau d'une lutte contre la discrimination et le racisme c'est quelque chose qui nous anime dans notre travail à tous les jours.

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de Masson, cinq minutes.

M. Lemay : Merci, M. le Président. Donc, en fait, par la réponse du ministre, là, je comprends que les mesures sont en place à travers son secrétariat, à travers l'aide qu'il fait, comme les centres d'amitié autochtone, qu'il a mentionnés. Mais, tu sais, c'est simplement que sans tableau de bord, c'est difficile de pouvoir évaluer le succès des mesures ou de lier ça aux recommandations qu'on avait eues suite à la consultation sur le racisme et la discrimination. Mais, tu sais, je comprends ce que vous mentionnez. Puis effectivement vous semblez mettre des choses en place, puis c'est très apprécié pour les communautés. Donc, c'est simplement que je ne peux pas relier les dollars à ces activités, M. le ministre.

Mais j'aimerais passer à une autre question. J'aimerais revenir sur un sujet que j'aborde avec vous quelquefois, peut-être une fois par année, au sujet des réserves fauniques des Laurentides. Et puis, juste pour faire une mise en situation ici ce soir, dans le fond, ça fait déjà quelque temps qu'il règne des conflits, là, sur les territoires de chasse entre les communautés de Mashteuiatsh et de Wendake. Mais moi, je ne veux pas prendre part au conflit ce soir, là, entre les deux communautés autochtones, mais c'est simplement qu'il y a des situations particulières dans la réserve faunique des Laurentides, et puis c'est suite aux besoins de chasse grandissants.

Bien, dans le fond, la communauté de Wendake, elle, elle s'est accordé une semaine de chasse supplémentaire. Et puis, bien, ça, c'est parce que, dans le fond, les jeunes, ils poussent, puis il y a plus de gens qui veulent aller à la chasse, et c'est très bien ainsi. Mais, par contre, ça empiète sur une des semaines de chasse qui est réservée aux allochtones via l'achat de droits de chasse sur les territoires de la SEPAQ. Et puis Wendake ne s'est... jamais fait ça en catimini, là, il a averti le gouvernement dans cette affaire à plusieurs reprises. Ça a parti avec le gouvernement qui était avec l'opposition dans le temps, et puis maintenant ils ont transféré les informations à votre gouvernement.

Dans le fond, la question est fort simple, là. Ça fait déjà deux ans, là, qu'on en discute, et puis ce qui a été mis en place, là, à la SEPAQ, dans le fond, il y a eu un petit comité qui s'est mis en place, là, pour essayer de résoudre cette problématique-là. Mais vous, là, aux termes du Secrétariat des affaires autochtones, là, est-ce que vous avez fait des gestes concrets, là? Est-ce que vous avez alloué des ressources pour régler ce dossier depuis votre arrivée ou vous vous dites que c'est votre collègue le député de la Forêt qui s'en occupe, là... Faune et Parcs?

Le Président (M. Ouellette) : 2 min 30 s.

M. Kelley : Oui, une question à deux volets... des questions à deux volets, M. le Président. Quant aux négociations entre la SEPAQ et Wendake, il y avait une entente qui était arrivée pour la saison de chasse 2015. On m'a dit qu'il y a déjà des discussions pour faire une entente pour l'automne 2016 entre les clients de la SEPAQ et la nation huronne de Wendake. Alors, sur le niveau de ça...

Sur la deuxième question, je pense que c'est la preuve encore, comme j'ai dit... le besoin d'avoir des règles de base claires. Et, s'il y aurait un traité... De toute évidence, la cour fédérale a insisté auprès du gouvernement fédéral dans les négociations Petapan avec la nation innue, toute la question de la consultation. Et d'arriver avec un certain arrangement avec la nation wendat est très important aussi. Alors, en attendant, dans le passé, quand les deux communautés, c'est-à-dire Wendake et Mashteuiatsh, voulaient les services d'une médiatrice, bien, la juge Louise Otis a agi, mais c'était parce que les deux côtés étaient ouverts à la conciliation.

Alors, comme toute situation de conflit, ça prend les deux de dire qu'on est prêts à faire une conciliation. Ça a bien fonctionné dans l'année, et, je pense, les principes que le juge Otis a établis dans le partage des aires entre les Innus de Mashteuiatsh et les Hurons de Wendake, ça ne faisait pas l'unanimité, mais il y avait des règles du jeu et certains principes qui ont été respectés. Et on a eu des saisons de la chasse, malgré tout, qui étaient pacifiques. Alors, le SAA est toujours ouvert à la nation de jouer un rôle de médiation, mais, comme j'ai dit, comme préalable, ça prend de l'intérêt et de la collaboration des deux parties pour arriver avec une solution.

Mais à chaque année, au mois de septembre, vous allez me poser une question, et moi, je vais répéter que je vais toujours faire appel à la paix et une chasse pacifique, et respectueuse, et sécuritaire. Alors, je vais préparer mes lignes en conséquence pour votre question que vous allez poser quelque part au mois de septembre, 21 ou 22, selon les dates des sessions... les séances de l'Assemblée nationale.

• (22 h 10) •

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le ministre. Merci, M. le député de Masson. C'est tout le temps qui vous était imparti. J'aurais voulu revenir à Charlevoix, mais on m'a dit qu'il fallait que...

M. Bourgeois : ...

Le Président (M. Ouellette) : Non, M. le député d'Abitibi-Est, vous n'aurez pas la parole. M. le député d'Ungava.

M. Boucher : Merci, M. le Président. Toutefois, M. le député d'Abitibi-Est demande s'il peut rester après pour continuer.

Le Président (M. Ouellette) : Ce sera des crédits en différé, M. le député d'Ungava.

M. Boucher : Ça sera d'avance pour l'année prochaine.

Le Président (M. Ouellette) : Oui.

M. Boucher : Alors, bonsoir, M. le ministre. Bonsoir à votre équipe, bonsoir, chers confrères. Permettez-moi de faire des salutations spéciales, fidèle à mes habitudes, à mes concitoyens du comté d'Ungava : «Unnusakkut», «wachiya», «kwe», bonne soirée à tous.

Vous savez, je vais vous entretenir, M. le ministre, du Plan Nord, puis d'une façon assez large, là, puis vous allez voir où est-ce que je m'en vais avec ça. On a lancé, bon, le Plan Nord il y a à peu près un an de ça. Et puis, souvent dans l'imaginaire des gens, le Plan Nord, c'est un plan minier, c'est un plan de développement des ressources naturelles, c'est un plan où le gouvernement entend glaner les ressources naturelles du Nord, saigner le Nord et le vider de toutes ses richesses, et puis ça s'arrête à peu près là. C'est complètement pas ça. C'est tout sauf ça, finalement.

Le Plan Nord est un plan de développement des communautés nordiques, autant côté infrastructures, côté développement du tourisme. Là-dessus, j'ai avec moi, bon, un article de journal, un exemple, par exemple, où, à Oujé-Bougoumou, dans le secteur de Chibougamau, on a ouvert une expérience autochtone où les gens peuvent aller pour voir comment, bon, les autochtones vivent de manière traditionnelle, etc.

Et puis ça, tout ça, ce n'est pas compétitif à la Jamésie, hein? Ce n'est pas : Bon, bien, on va aller à Oujé-Bougoumou puis on n'ira pas à Chibougamau ou on n'ira pas à Chapais. Il y avait Mitchell Dion, que je vais me permettre de vous citer, qui est directeur de Tourisme Baie-James, qui disait : «C'est de plus [en plus] en vogue, mais [...] les gens ne partiront pas deux semaines seulement pour ce genre de tourisme [pour une journée ou deux]. Si on regarde les statistiques, [les gens feront] en moyenne quelques heures de tourisme autochtone dans tout [le] voyage.»

Donc, ça prend des activités complémentaires pour développer le tourisme. Puis, à travers tout ça, bien, le gouvernement régional Eeyou Istchee Baie-James, qui a été mis en place le 1er janvier 2014 — ça, c'est tiré du journal La Sentinelle, en passant, j'avais oublié de vous le dire — il joue un grand rôle où — une première au Québec, sinon au Canada, peut-être même au monde — où il y a une administration paritaire d'un territoire qui était autrefois la plus grande municipalité au Québec — encore une fois, peut-être au monde aussi — et qui maintenant est un territoire administré de façon paritaire par les Jamésiens et les Cris. Et puis ces gens-là ont appris à travailler ensemble, puis ça va très bien.

Le Plan Nord, là-bas, suscite de grands espoirs, autant en création d'entreprises que d'amener du travail pour les entreprises existantes, création aussi d'infrastructures, rénovation d'infrastructures. Si on pense, par exemple, à la route de la Baie-James, qui en a bien besoin, autrefois, c'était la route de tous les mototouristes, les caravaniers, les autobus des gens du troisième âge, les autobus des écoles. Je pense que tout Québécois qui se respecte doit voir au moins une fois les installations du barrage Robert-Bourassa. Mais, comme on dit, quand ton copain est allé l'année d'avant avec son motorisé puis qu'il te dit : Ne va pas là, ça m'a coûté 8 000 $ de réparations en revenant, j'ai cassé ma suspension puis... ça décourage un petit peu.

Une voix : C'est vrai.

M. Boucher : Et c'est vrai. Je peux vous le dire, je l'ai expérimenté. Pas en réparations, mais... Donc, c'est une route qui en a bien besoin, puis le Plan Nord va contribuer à ça puis justement rouvrir une région, puis une région qui est habitée, hein? Souvent, les gens disent : Ah! je vais aller voir le barrage Robert-Bourassa, je reviens. Mais il ne faut pas oublier que, tout le long de la route, il y a un chapelet de communautés cries. Puis ces gens-là vivent là, ils passent là peut-être pas à tous les jours, mais régulièrement, puis c'est la route qu'ils doivent emprunter pour aller à la maison, faire les commissions, faire les affaires.

Souvent... bon, on parlait de Val-d'Or tantôt. Si tu as besoin d'aller chez Wal-Mart, tu t'en vas à Val-d'Or. Bon, ça fait peut-être six, sept heures, huit heures de route, mais tu t'en vas à Val-d'Or quand même. Tu as un mariage, souvent, bon, tu te maries à Val-d'Or. Et puis c'est une route qui est pas mal plus empruntée qu'on pense. Ce n'est pas seulement une route, là, réservée aux camions, là, puis aux touristes perdus une fois de temps en temps.

Si on parle du côté des Inuits, hein, le Plan Nord suscite aussi des espoirs côté emploi, formation. M. le ministre parlait tantôt avec Mme la députée de Chauveau concernant la formation, comment c'était important, d'avoir de la formation. Tu as beau vouloir rêver d'être un électricien, puis aimer l'électricité, puis t'intéresser à ça, tant que tu n'as pas ton diplôme d'électricien, c'est bien de valeur, tu ne seras jamais électricien.

Souvent au Nord, au Nunavik, le problème, ce n'est pas de trouver un emploi, c'est de trouver du monde pour occuper les emplois. Oui, il y a du monde, mais souvent ils n'ont pas les compétences ou ils n'ont pas les aptitudes. Et puis les emplois sont souvent occupés par des Blancs. Puis là ça crée des... pas des frictions mais des genres de dissensions : les Blancs viennent ici, ils prennent les meilleures jobs, ils prennent les maisons, ils prennent tout, puis nous autres, on reste avec rien. Mais le secret puis la voie royale, si on veut, c'est à travers la formation. Puis ça, le Plan Nord va être un pas en avant là-dessus pour justement favoriser la formation puis après ça te trouver un emploi pas à Montréal, pas à Québec, parce que ces populations-là, on sait qu'en vaste majorité ils préfèrent grandement rester dans les villages nordiques plutôt que de venir s'expatrier dans le sud et puis de vivre dans un monde avec lequel ils sont moins à l'aise, moins confortables, puis qui ne correspond pas à leur culture.

Côté infrastructures aussi je peux vous dire que, bon, même si la qualité de vie s'est beaucoup améliorée au Nunavik depuis les 20 dernières années, souvent, on parle à des gens qui disent : Ah! j'étais à Kuujjuaq en 1979, je suis monté puis... Je lui dis : Si tu retournais aujourd'hui, je suis convaincu que tu ne reconnaîtrais même pas la place, tu aurais de la misère à dire que tu es à Kuujjuaq. C'est une communauté qui grandit à la vitesse grand V, presque à vue d'oeil. Et puis, encore une fois, bien, côté emploi, côté infrastructures, ils en ont besoin.

Ça m'amène à vous parler, bon, de ce qui s'est passé à Kuujjuaq au cours des derniers mois, hein? On a vu des reportages à la télévision. Je peux vous dire que moi, je l'ai vécu d'une façon assez proche. Souvent, bon, c'est un petit peu dommage de dire ça, mais on est immunisés aux mauvaises nouvelles, hein? C'est comme des vaccins : à chaque jour, on a notre petite dose de mauvaises nouvelles, puis là finalement on devient presque insensibles. On va retourner à la maison tout à l'heure, on va ouvrir la télé, puis on va voir dans tel pays un attentat, 20 morts, un assassinat à telle place, deux morts, ci, ça. Puis on trouve ça bien de valeur, mais en même temps c'est tellement loin. Puis qu'est-ce qu'on peut y faire? Donc, on va aller se faire un petit jus d'orange, puis, bon, on va aller se coucher là-dessus, puis on va dormir très bien. Puis souvent, bien, le Nunavik, c'est plus près de nous autres, mais on voit ça : cinq suicides de jeunes en trois mois. C'est bien triste, c'est bien de valeur, mais qu'est-ce qu'on peut y faire? C'est tellement loin!

Je peux vous dire que, bon, les suicides qu'il y a eu là... Je vais me permettre de nommer quelques noms parce que j'ai contacté les familles, puis ils sont en accord, et puis même ils souhaitent que les noms soient nommés.

• (22 h 20) •

À quelques semaines avant Noël, Brent Koneak, le fils de ma bonne amie Kitura, qui, bon, dans un geste de désespoir... Brent, qui était un bon jeune, qui n'est pas un drogué, qui n'est pas un délinquant, qui n'est pas un faiseur de trouble, qui était vraiment un actif pour la communauté, qui était professeur d'éducation physique à l'école... C'est sûr qu'il n'avait pas suivi son cours universitaire pour enseigner l'éducation physique, mais on sait que, chez les Inuits, il y a un programme destiné aux professeurs inuits pour faire en sorte qu'ils puissent avoir une formation qui leur permet d'enseigner malgré tout. Il était apprécié de ses élèves. Il avait 19, 20 ans. Puis suite, bon, à une chicane amoureuse, un découragement, il ne voit pas l'heure qu'il va avoir sa propre maison, son propre chez-eux. Il avait des bons parents, un bel endroit, mais, à un moment donné, bon, les maisons sont encombrées, surpeuplées. Donc, dans un geste de désespoir, Brent a décidé de s'enlever la vie. Je me souviens exactement d'où est-ce que j'étais puis ce que je faisais au moment où j'ai appris la nouvelle. Je l'ai appris à ma conjointe Sonya, qui lui avait enseigné quelques années auparavant à l'école Jaanimmarik, puis elle a éclaté en sanglots. Brent... Tu sais, les professeurs, ils n'osent pas le dire, là, mais ils ont toujours un chouchou dans la classe à chaque année. Tu sais, ils essaient... Je les aime tous égal, mais il y en a un que j'aime peut-être plus que les autres. Brent, c'était celui-là, dans la classe de Sonya, avec ses beaux grands yeux verts.

Puis, je me souviens, à Noël on était à Kuujjuaq. Ma femme ne parle pas anglais, la mère de Brent ne parle pas français. Mais on est arrivés à l'épicerie, puis, tu sais, des fois on vire une allée puis on tombe face à face avec quelqu'un. Elle est tombée face à face avec Kitura. Les deux sont parties à pleurer puis elles se sont jetées dans les bras l'une de l'autre. Puis, tu sais, on n'avait pas besoin de parler pour comprendre ce qui se passait là.

Le 30 décembre, sur la fin de l'après-midi, on est à l'aéroport. Bon, on a passé une belle petite vacance à Kuujjuaq malgré tout. Tu sais, c'était quand même... le bilan était positif. Quelqu'un arrive : Une jeune vient de se suicider, Mary Cooper. Elle vient de s'enlever la vie. Mary, une jeune, 16 ans, dans ces coins-là. Une bonne jeune, l'ado que tous les parents souhaiteraient avoir, tu sais. Des fois, on a les enfants qu'on peut, on n'a pas toujours les enfants qu'on veut, mais tous les parents souhaiteraient avoir une ado comme Mary.

Mary, encore une fois, dans un geste de désespoir... Moi, je compare ça, des fois, tu sais, ceux qui ont déjà cuisiné, là, avec des poêles à gaz, là, tu sais, quand le pilote s'éteint, tu aurais beau mettre le rond à maximum, ça ne s'allumera pas. Donc, ces jeunes-là ont perdu la petite flamme qui aurait pu allumer la mèche pour créer le feu d'artifice éventuellement. Ils avaient tout dans la vie, mais, encore une fois, découragement.

Quelques semaines plus tard, début février, Lukasi Forrest, le fils de mon amie Lucy, qui a déjà... une vedette de cinéma. Pour ceux qui ne le connaissent pas ou... Si vous avez la chance de mettre la main sur le film Uvanga, qui est un film qui a été tourné au Nunavut dans lequel Lukasi joue le rôle d'un jeune Inuit né de mère blanche et de père Inuit, élevé à Montréal... Puis sa mère, qui est un ancien professeur du Nord, l'amène dans son village pour un peu reconnecter avec ses racines. Puis, dans ça, Lukasi était très bon. Franchement, là, pour quelqu'un qui n'a pas passé par l'école de théâtre ou le... bon, à New York, là, je ne me souviens plus comment ça s'appelle, là, mais il y a une école d'art dramatique...

Des voix : Juilliard.

M. Boucher : C'est ça. Très célèbre. Je peux vous dire que Lukasi, il en avait beaucoup, de talent, puis il aurait pu aller très loin dans ce domaine-là, s'il avait choisi. Encore une fois, Lukasi était le meilleur ami de Brent depuis presque la naissance. Ils étaient comme les deux doigts de la main, c'étaient les deux frères siamois, même s'ils n'avaient aucun lien de parenté. Et puis Lukasi ne pouvait pas se résoudre à vivre sans son copain Brent. Et puis lui aussi, la petite flamme, le pilote, là, qui garde la fournaise allumée s'est éteint, puis Lukasi a décidé de s'enlever la vie. Ça fait que tout ça a créé beaucoup de remous.

J'avais décidé à un moment donné de faire une déclaration de député à cet effet-là pour souligner le départ de ces trois nouvelles étoiles qui venaient de s'allumer au firmament parce que, bon, c'est des étoiles qui ne brilleraient plus parmi nous, mais elles vont briller dans le ciel à un moment donné.

Je ne sais pas si vous êtes allés dans le Nord puis regardé par un temps dégagé. C'est phénoménal, le nombre d'étoiles qu'on peut voir là. Vous regardez le ciel à Québec puis vous regardez le ciel là-bas, ce n'est pas le même ciel. Il n'y a pas de pollution lumineuse. C'est magique, tellement qu'il y a des étoiles. Donc, je me plaisais toujours à dire qu'il y avait trois nouvelles étoiles qui s'étaient allumées pour veiller sur cette communauté-là.

Je vois le temps qui défile à vitesse grand V, pourtant je n'ai pas la moitié de ce que j'avais à dire de dit. Tout ça pour vous dire que...

Une voix : ...

M. Boucher : Oui, c'est ça, je compatis avec mon voisin d'à côté. Tout ça pour vous dire que ma déclaration de député était prête, c'était réservé, tout. Le mercredi je devais passer, une déclaration soulignant la résilience, etc. Je reçois un appel le mardi, un autre vient de se suicider. Là, bon, regarde, ce n'est pas le temps de faire une déclaration de député pour souligner ça, là. Comme on dit à Paris : Le timing n'est pas là, on va laisser couler le temps un peu.

J'ai mon amie Lizzie qui m'écrit par Facebook, parce que mes amis Inuits passent leur temps à m'écrire sur Facebook : Hé! Jean, t'as-tu entendu parler de telle affaire? Puis, si tu vois tel ministre, dis-y donc ça. Puis, tu sais, je suis le point de contact, là. Elle me dit comment est-ce que c'est épouvantable puis comment c'est triste, ce qui se passe là. Le lendemain, elle m'annonce que son neveu s'est suicidé. Son neveu chéri qui est... etc., qui a 21, 22 ans.

Lors de la visite qu'on a faite en compagnie de la députée, là, de Charlevoix, on a rencontré une communauté à terre, une communauté qui est à bout de souffle, qui est dépassée par les événements puis qui ne comprend plus elle-même qu'est-ce qui se passe. Malgré tout ça, notre gouvernement, puis M. le ministre en tête, s'est mis en action dans tout ça. Puis des fois on voudrait que tout... Tu sais, on a nos réflexes de Blancs, là : arriver, bing, bang! Cinq suicides, envoie, on va faire ci, on va faire ça, puis paf! Puis là tu arrives face aux Inuits, puis ils vous disent : Non, pas tout de suite, attends, on va y penser, on va te revenir. Mais là tu dis : Revenir? Tu attends qu'il y en ait un autre qui se tue, là? Tu sais, il faut respecter leur vitesse. Puis les solutions vont se prendre avec eux, en collaboration avec eux.

Mais là il me reste 3 min 50 s, là, puis je veux vraiment, même si je n'ai pas fini...

Le Président (M. Ouellette) : Non, il reste 1 min 30 s...

M. Boucher : 1 min 30 s? C'est encore pire! Donc, je vais céder la parole, même si je n'ai pas fini, à M. le ministre pour qu'en une minute il nous dise à peu près, là, c'est quoi, son plan, puis comment il voit ça, la situation à Kuujjuaq.

Le Président (M. Ouellette) : Vous savez que... Dans une minute, M. le ministre.

M. Kelley : Moi, juste très rapidement, parce que les sujets abordés par mon collègue d'Ungava, je ne peux pas répondre dans une minute, mais je pense ça démontre l'importance d'avoir une voix de Nunavik à l'Assemblée nationale. C'est la première fois qu'on a un député qui a demeuré à Kuujjuaq, qui connaît très bien, hein? Avec tout le respect pour les autres députés d'Ungava, c'était issu de la communauté de Chibougamau, entre autres. C'est un énorme comté, et c'est difficile pour les autres députés autour de la table d'imaginer le défi de bien représenter le comté d'Ungava ici. Mais merci beaucoup pour le député qui est le porte-parole du Nunavik dans notre caucus, dans notre Assemblée. Je pense qu'il joue un rôle très important.

Quant à la question des suicides, je sais que ma collègue la ministre déléguée aux Services sociaux est très active. Il y a des démarches à court terme qui ont été faites. Mais, en parlant à Minnie Grey, qui, elle, est la présidente de la régie de la santé là-bas... Comme vous avez dit, M. le député, toutes les solutions doivent venir de la communauté. Ce n'est pas les gens ici, sur la Grande Allée, qui vont trouver des solutions. On est là en soutien. Mais, devant cette tragédie humaine, tout le monde est interpelé. Je sais que les gens au niveau de la Santé et Services sociaux sont à l'oeuvre... à l'Éducation pour soutenir la commission scolaire. Mais on a tous ces enjeux.

Mais, si on veut voter les crédits, je vais m'arrêter là en disant merci beaucoup à tout le monde derrière moi qui ont participé à la préparation des cahiers et l'information destinée aux députés et membres de la commission.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le ministre. Le temps alloué à l'étude du volet Affaires autochtones des crédits budgétaires du portefeuille Conseil exécutif étant presque écoulé, nous allons maintenant procéder à la mise aux voix des crédits.

Adoption des crédits

Le programme 4, intitulé Affaires autochtones, est adopté sur division de l'opposition officielle et de la deuxième opposition. C'est bien ce que j'ai compris?

Document déposé

En terminant, je dépose les réponses aux demandes de renseignements de l'opposition.

Je tiens à remercier M. le ministre, l'équipe qui l'accompagne, M. le député de Beauharnois, M. le député de Masson, Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré, M. le député d'Abitibi-Est — si vous voulez rester avec le député d'Ungava, ça va nous faire plaisir, on va garder une équipe juste pour vous — M. le député de La Prairie, M. le député de Vimont, et je garde ma collègue de Chauveau pour la fin. C'est toujours intéressant de l'entendre parler de la réalité qu'elle a journalièrement à Wendake.

La commission ajourne ses travaux au mardi 19 avril 2016, après les affaires courantes, à 10 heures, où elle entreprendra l'étude des crédits budgétaires du portefeuille Justice.

Merci. Bonne soirée.

(Fin de la séance à 22 h 30)

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