(Onze heures vingt et une minutes)
Le Président (M. Ouellette) : À
l'ordre s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte. Je demande à toutes les personnes dans
la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils
électroniques.
La commission
est réunie afin de procéder à l'étude du volet Institutions démocratiques des
crédits budgétaires du portefeuille Conseil exécutif pour
l'exercice financier 2016‑2017.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le
Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Drainville (Marie-Victorin) remplace Mme
Hivon (Joliette) et M. Charette (Deux-Montagnes) remplace Mme Roy
(Montarville).
Réforme des
institutions démocratiques
Discussion générale
Le
Président (M. Ouellette) : Étant donné qu'une période de deux heures est prévue pour ce volet,
il n'y aura pas de remarques préliminaires. Nous allons procéder à une discussion d'ordre
général par blocs d'environ 20 minutes, y incluant les questions et les réponses. Comme on a débuté nos travaux à
11 h 22 et qu'une période de deux heures doit être consacrée à
l'étude de ce volet cet avant-midi, il y a consentement pour poursuivre nos
travaux jusqu'à 13 h 22.
Donc, je suis maintenant prêt à reconnaître une
première intervention. M. le député de Marie-Victorin.
M.
Drainville : Merci,
M. le Président. M. le Président, nous allons y aller tout de suite avec les
questions, parce qu'on n'a quand même
pas beaucoup de temps. Je salue, bien entendu, la ministre, je salue les
collègues qui l'accompagnent et les
collègues, évidemment, des autres formations politiques qui vont nous
accompagner pendant ces crédits. Alors, allons-y tout de suite sans
autre préambule, M. le Président.
Vendredi
dernier, au terme d'une interpellation qui portait sur le financement des
partis politiques, la ministre des Institutions démocratiques est allée
en point de presse puis elle a qualifié les objectifs de 100 000 $ ou
même de 150 000 $... objectifs de
financement des ministres libéraux, de pinottes. Elle a dit : C'étaient
des pinottes, ces objectifs à 150...
et à 150 000 $. Elle a vu par notre réaction qu'on ne trouvait pas
ça, mettons, d'à-propos. On ne trouvait pas que c'était une bonne idée pour elle de qualifier ces objectifs de pinottes,
puisqu'à titre de ministre des Institutions démocratiques elle se doit
de défendre la démocratie. Et, de notre côté, en tout cas, nous, M. le
Président, on pense que des objectifs à
100 000 $ puis à 150 000 $, c'est donner à des collecteurs
de fonds, les Bibeau, les Fava, les Marc-Yvan Côté, un pouvoir immense sur les élus qui ont besoin d'eux pour
collecter ces gros montants. Se donner des objectifs comme ça à
100 000 $ puis à
150 000 $, c'est donner aux collecteurs de fonds un pouvoir toxique
sur notre démocratie et un pouvoir de corrompre ceux et celles qui ont recours à leurs services. Alors, la ministre, par
la suite, a réagi en disant : Écoutez, je n'ai pas voulu banaliser
la situation. Elle a réagi par communiqué.
Hier, autre
déclaration qui en a fait sursauter quelques-uns, M. le Président, elle a
dit : «...il y a eu un comportement douteux [par] certaines personnes.» Elle a dit ça, je la cite mot à mot,
M. le Président. Alors, j'aimerais demander à la ministre : De quels gestes douteux parle-t-elle? Et, quand elle dit
«[par] certaines personnes», de quelles personnes parle-t-elle?
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre.
Mme de
Santis : Merci, M. le Président. Moi aussi, j'aimerais saluer le député de Marie-Victorin, le député de Deux-Montagnes, les collègues qui m'accompagnent
et tous ceux et celles qui nous accompagnent en plus.
J'aimerais
rectifier les propos qui sont tenus par mon collègue le député de
Marie-Victorin. Je suis désolée d'abord si on a pu croire
vendredi dernier que je voulais banaliser de quelque façon que ce soit des pratiques qui peut-être étaient douteuses
dans le passé. Ce que je faisais, c'était une comparaison avec d'autres
juridictions canadiennes. J'ai aussi dit lors de ma réponse en anglais à une journaliste anglophone que j'étais
très fière de tout ce que le Québec a fait depuis 2009‑2010 pour moderniser et
assainir nos lois électorales, qui touchent le financement politique,
qui touchent les contrats publics, etc. Et j'ai dit que j'étais fière parce
que ça a été fait par tous les partis. Ça a commencé en 2009, ça continue aujourd'hui. Ça a été fait sous un gouvernement
libéral, ça a été fait sous un gouvernement péquiste, et on va continuer, parce
que le droit est évolutif, on va
continuer maintenant à travailler ensemble avec les autres députés
dans l'Assemblée nationale
pour mettre en oeuvre les recommandations de la commission Charbonneau.
Je suis fière
et j'ai dit que, peut-être, dans les autres juridictions canadiennes,
où les objectifs des ministres sont encore
supérieurs, et par beaucoup, de ce qui était les objectifs
au Québec, peut-être, s'ils le souhaitaient, ils pourraient
s'inspirer de ce que nous avons fait, parce qu'on a fait du travail qui est
très bien. Quant à hier...
Une voix :
M. le député.
M.
Drainville : Comme on
n'a pas beaucoup de temps, il faut appliquer, je pense, avec souplesse, mais la
règle de la proportionnalité, qui est
bien inscrite, je pense, dans nos traditions, c'est-à-dire que la réponse doit
être d'une longueur qui est à peu
près comparable à la longueur de la question. Alors, ma question avait un
préambule. J'ai laissé aller la ministre très, très respectueusement, mais là je pense qu'il serait temps qu'on
revienne à l'opposition pour qu'on puisse enchaîner avec une autre
question, si c'est possible.
Mme de
Santis : ...répondre à la question d'hier parce que vous avez fait
allusion à hier. Moi, hier, ce que j'ai dit, c'est que ce n'est pas à moi à porter des jugements. Nous, on a créé
l'UPAC. L'UPAC fait son travail. Je respecte nos institutions. Et donc voyons qu'est-ce que l'UPAC, les cours vont nous
donner comme résultats. Je n'ai jamais dit que j'avais des noms ou que j'accusais qui que ce soit. Et, en plus, j'ai
confirmé que ce n'est pas à moi de porter des jugements.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Marie-Victorin.
M.
Drainville : M. le
Président, dans son communiqué de vendredi dernier intitulé La ministre
souhaite rectifier les faits, la ministre parle des objectifs de financement
qui se pratiquaient auparavant au Québec. «Mais je n'approuve aucunement des pratiques douteuses.» Elle a
utilisé les mots «pratiques douteuses» en faisant référence au Québec. Et là,
hier, en scrum, elle a dit : «...dans le passé[...], il y a eu un
comportement douteux [par] certaines personnes.» M. le Président, c'est normal, elle serait à ma place qu'elle poserait la même
question. Elle déclare : «...dans le passé[...], il y a eu un
comportement douteux — comportement
douteux — [par]
certaines personnes.»
Je lui pose
la question : De quels comportements douteux parle-t-elle et de quelles
personnes parle-t-elle? Elle doit
avoir des noms en tête si elle dit «des personnes». Les personnes; lesquelles?
Les comportements douteux; lesquels?
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre.
Mme de
Santis : Ce que j'ai dit, c'est que peut-être — peut-être — il y a eu des comportements ou des pratiques
douteux. Ce n'est pas à moi de porter des
jugements, c'est à l'UPAC, c'est à la cour, c'est aux autres institutions que nous
avons, telles que le Directeur général des élections, le Commissaire au
lobbyisme.
• (11 h 30) •
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Marie-Victorin.
M. Drainville : M. le
Président, là, elle rajoute le «peut-être», mais je peux...
Mme de Santis : ...c'est ça, la
citation.
M.
Drainville : Très
bien. Mais, M. le Président, à titre de ministre des Institutions démocratiques, son premier
mandat, c'est d'assurer l'intégrité, je dirais, du système démocratique.
Elle ne peut
pas ajouter un «peut-être», dans mon esprit, elle ne peut pas ajouter un «peut-être»
quand il y a des faits
avérés. Par exemple, le système à 100 000 $,
à 150 000 $, il a été confirmé par plusieurs ministres libéraux. Je
les ai cités ce matin à la période de
questions, et la ministre était là. Hein, Mme Blais l'a confirmé, M. Gautrin
l'a confirmé, M. Bolduc l'a confirmé,
l'actuel ministre des Relations internationales a confirmé le système à
100 000 $. Le député de Louis-Hébert,
même le premier ministre a confirmé le système à 100 000 $. Ça, ce
n'est pas un «peut-être», c'est un fait, M. le Président. L'utilisation du système des garderies, l'émission des
permis pour obtenir en échange du financement à la caisse électorale du Parti libéral, ça aussi, ça a été amplement
démontré. C'est un fait, M. le Président. Le rôle joué par Marc Bibeau,
par Marc-Yvan Côté, par Franco Fava dans les collectes de fonds du Parti
libéral, ça aussi, ça a été démontré et
avéré. Ce n'est pas un «peut-être», c'est un fait. Alors, j'ai beaucoup de
difficultés, M. le Président, à ce que la
ministre dise : Bien, ce n'est pas vraiment ce que j'ai dit, j'ajoute un
«peut-être» aux mots «pratique douteuse» ou aux mots «comportement
douteux».
M. le
Président, pourquoi elle rajoute un «peut-être»? Pourquoi elle rajoute un
«peut-être»? Est-ce que ce n'est pas
avéré, le système à 100 000 $? Le système à 150 000 $,
est-ce que la ministre nie qu'il a existé? Est-ce que la ministre nie qu'il y avait un système à 100 000 $
par ministre ou un système à 150 000 $ par ministre? C'est-u pour ça
qu'elle rajoute le «peut-être»?
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre.
Mme de
Santis : Merci, M. le Président. Le «peut-être» n'est pas à ajouter
aujourd'hui, et il faut me citer correctement si on va faire une
citation d'hier.
En plus, mon
collègue semble assumer que les montants qui ont été collectés sont
automatiquement illégaux. Je voudrais
lui rappeler que, dans son propre parti, il y avait des objectifs de
80 000 $ et plus, tel que confirmé par leur ancien collègue, aujourd'hui le chef du deuxième parti de
l'opposition. La déclaration faite par mon collègue assume que tout argent qui aurait pu être collecté, toute
contribution était illégale. Nulle part est-ce que cela n'a été prouvé et/ou
même allégué. Peut-être qu'il y a eu le comportement de certaines
personnes de tous les côtés, tous les bords ici, dans le salon bleu, à l'époque, qui ont agi de certaines
façons qu'aujourd'hui nous ne considérons plus comme étant acceptables. Je vous demande de
regarder les lois, les standards de l'époque et d'étudier à quel point tout ça
a été changé, quels sont les règles et les standards d'aujourd'hui.
Mon
travail, depuis le 28 janvier, quand j'ai été nommée ministre, c'est de
m'assurer que les lois en place, les standards
en place aujourd'hui répondent aux besoins et aux demandes des citoyens du
Québec. C'est ça, ma responsabilité. Je
demande aux personnes qui nous écoutent de nous juger aujourd'hui en vertu de
nos agissements aujourd'hui. Est-ce que
nous respectons ces règles, ces standards et est-ce qu'on est toujours en train
de s'assurer qu'on va encore vers un meilleur?
Et, ce meilleur, on va le faire ensemble quand on discute des recommandations
du rapport de la commission Charbonneau.
Le Président (M.
Ouellette) : M. le député de Marie-Victorin.
M. Drainville :
M. le Président, allons à l'essentiel. Est-ce que la ministre peut dire en
cette enceinte, ici, au salon bleu : Je
condamne le système des ministres à 100 000 $? Est-ce qu'elle peut
juste prononcer ces mots-là? Le système des ministres à 100 000 $ ou des ministres à
150 000 $, est-ce qu'elle peut le condamner en utilisant le mot
«condamner»?
Le Président (M.
Ouellette) : Mme la ministre.
Mme
de Santis : Ce n'est pas à moi de porter des jugements. On a créé
nous-mêmes l'UPAC, on lui a donné les outils et les pouvoirs nécessaires
pour bien faire son travail.
Depuis
quelques années, il y a un nombre de constats d'infraction qui ont été donnés
par le Directeur général des élections. Je respecte les institutions qu'on a créées ensemble
et j'ai foi que, s'il y a quoi que ce soit qui a été fait qui était
illégal, c'est eux qui vont nous le dire. Ce n'est pas moi qui peux rendre un
jugement aujourd'hui.
Le Président (M.
Ouellette) : M. le député de Marie-Victorin.
M. Drainville : M. le
Président, il n'y a
personne encore, dans le contexte formel du salon bleu, qui a condamné le système des ministres à 100 000 $ ou à 150 000 $ du côté du Parti
libéral, M. le Président, il n'y a personne qui l'a fait encore. Et là je l'ai
demandé à plusieurs reprises au premier ministre.
Je
l'ai demandé à la ministre vendredi passé en interpellation, je lui ai
dit : Condamner ce système-là, déjà ce serait une façon d'affirmer votre autorité morale comme
ministre de la Démocratie et aussi une façon très claire de rompre avec
le passé, avec le vieux Parti libéral. M. le Président, pourquoi refuse-t-elle
de condamner le système des ministres à 100 000 $,
dont tout le monde reconnaît l'existence? C'est reconnu par des documents du
Parti libéral. Il y a plusieurs ministres
ou ex-ministres qui ont reconnu l'existence de ce système-là de
100 000 $ et de 150 000 $. Pourquoi refuse-t-elle de
reconnaître, comment dire, l'effet très pernicieux, très toxique de ce
système-là sur notre démocratie?
Pourquoi
refuse-t-elle de condamner le système des ministres à 100 000 $ et à
150 000 $? Je lui repose la question. Mme la ministre, condamnez ce système, dites que ce système-là n'aurait pas
dû exister, s'il vous plaît, condamnez le système des ministres à
100 000 $ et à 150 000 $.
Le Président (M.
Ouellette) : Mme la ministre.
Mme
de Santis : M. le Président, j'aimerais savoir si mon collègue, lui,
va condamner les objectifs des ministres du Parti québécois, au début des années 2000, qui étaient à
80 000 $. Est-ce qu'il va condamner ça? Est-ce qu'il va condamner
des soirées à 100 000 $?
On
se lance dans ce jeu-là, et je ne suis pas d'accord, parce que toute l'emphase
devrait être aujourd'hui de s'assurer qu'on
fait les bonnes choses, qu'on va dans la bonne direction. Ce que j'entends de
l'autre côté, c'est toujours des déclarations qui semblent vouloir faire les manchettes. Ce que je veux faire — peut-être, c'est parce que ça fait partie de
mon entraînement comme avocate — je veux trouver des solutions et je veux
répondre... Quand je dis «solution», c'est la solution aux demandes de la population québécoise
aujourd'hui. Je veux aider à éliminer le cynisme qui existe dans la population
vis-à-vis les politiciens, la politique.
M. Drainville :
...Mme la ministre. Vous dites vouloir trouver des solutions, vous dites que
vous voulez trouver des solutions,
mais, pour trouver des solutions, il faut d'abord reconnaître le problème, il
faut d'abord diagnostiquer le mal, il faut
d'abord dire : Les ministres à 100 000 $ puis à 150 000 $,
ce n'était pas bon. Il faut le dire, Mme la ministre. Avant de passer à
la solution, il faut d'abord reconnaître le mal.
Est-ce
que vous reconnaissez que ce n'était pas une bonne chose que de donner aux
ministres libéraux des objectifs de
financement à 100 000 $ puis à 150 000 $? Faites juste
répondre : Oui, je reconnais que ce n'était pas une bonne idée.
Le Président (M.
Ouellette) : Mme la ministre.
Mme
de Santis : M. le Président, je mets le miroir devant mon collègue et
je lui demande, de sa part, de condamner les soirées à
100 000 $, les ministres péquistes qui avaient des objectifs à
80 000 $. C'est quoi, ce jeu-là?
M. Drainville :
M. le Président, c'est moi qui l'ai fait voter, la loi à 100 $, c'est
nous, au Parti québécois, qui l'avons déposée.
Si ça n'avait pas été de nous, le système des prête-noms, il existerait encore,
puis les collecteurs de fonds, ils feraient encore la pluie puis le beau
temps au Parti libéral, M. le Président.
Je
n'ai pas de leçons à recevoir sur l'esprit réformateur puis la volonté
d'assainir les moeurs au Québec. C'est moi
qui l'ai fait voter, le système à 100 $, M. le Président, alors, le
miroir, je le retourne aisément. Puis Mme Normandeau, ce n'est pas une péquiste, puis M. Marc-Yvan Côté,
ce n'est pas un péquiste, bon, puis Fava, ce n'est pas un péquiste, puis
Bibeau non plus, ce n'est pas un péquiste. Puis elle doit, M. le Président...
elle est ministre responsable de la Démocratie,
elle doit dire : Le système à 100 000 $ puis à
150 000 $, c'était une erreur. Elle doit le reconnaître si elle veut,
par la suite, faire la démonstration qu'elle
a vraiment tourné la page sur le passé. Si elle veut faire la démonstration que
ce n'est plus le même vieux Parti libéral, qu'elle commence par dire que les
pratiques du vieux Parti libéral étaient inacceptables. Et il faut le dire.
• (11 h 40) •
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
M. le député de Marie-Victorin. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay : ...c'est pour un
bloc de combien de temps, je vous prie?
Le Président (M. Ouellette) :
19 min 30 s.
M.
Tanguay : Parfait. Je vous remercie beaucoup. Je vais prendre la balle au bond du collègue
leader de l'opposition.
Il parlait de pouvoir toxique, il parlait de
pouvoir de corrompre, il parlait d'un système à 100 000 $. Pour lui, est-ce que 80 000 $ est sur la même
planète que 100 000 $ ou 150 000 $? M. le Président, j'aimerais référer mon collègue, parce que... Et, quand il dit : J'ai fait voter la loi, je pense
qu'il fait peu de cas de ses collègues qui l'ont aidé, parce qu'il a une voix sur 125, à adopter cette voie-là. Alors, quand il dit : J'ai fait voter la
loi, chose certaine, je pense qu'il fait un petit peu trop peu de cas non seulement de ses collègues
libéraux, mais de ses collègues du Parti québécois. Et je serais curieux
de les entendre quant à cette solidarité
exprimée dans ce haut cri : J'ai fait voter la loi. Jusqu'aux dernières
nouvelles, le leader de l'opposition n'était pas l'Assemblée nationale.
Ceci dit, M.
le Président, le 26 mars 2014... Ce n'est pas un libéral, le chef de la
Coalition avenir Québec. Ce n'est pas un libéral, le leader de la deuxième
opposition. Il a été ministre, ministre de poids au sein d'un gouvernement
du Parti québécois. On vient d'entendre le
collègue leader parlementaire de l'opposition dénoncer à hauts cris ce que lui
qualifie, et je le cite, de «système
à 100 000 $». Je ne l'entends pas dénoncer à hauts cris ce que lui
pourrait peut-être aussi qualifier de
système à 80 000 $. Puis ce n'est pas un libéral qui l'a dit, c'est
un ancien ministre poids lourd du Parti québécois qui le disait en 2014,
le 26 mars, et je le cite, M. le Président. Et, cette source-là, tout le monde
peut s'y référer : Journal de Montréal, 26 mars 2014, travail du journaliste Charles
Lecavalier. Et il cite le chef de la Coalition avenir Québec, ancien
ministre du Parti québécois. Je le cite : «Chaque année, je devais
ramasser 80 000 $ parce que j'étais un [ministre du Parti québécois] sénior.» Fin de la citation. Et
là le journaliste écrit : «Il confirme ainsi qu'il y avait bel et bien des
quotas de financement au PQ, affirmation que le parti souverainiste
conteste.»
Le 26 mars 2014, il n'y a pas 10 ans, le 26 mars
2014, le parti souverainiste, le Parti québécois, contestait qu'il y avait un système à 80 000 $, des
quotas. Question au leader : Le conteste-t-il toujours? Il aura l'occasion
d'y répondre. J'ose espérer qu'il
dénoncera autant qu'il demande de ce côté-ci de le faire, qu'il dénoncera et
qu'il sera conséquent et que ce ne soit pas ambigu, M. le Président,
pour qu'il soit évidemment en toute logique avec lui-même.
Je poursuis,
je poursuis. Puis les gens à la maison sont à même, M. le Président, d'évaluer
quoi? La crédibilité, la sincérité de celles et ceux qui prennent la
parole aujourd'hui et qui ont l'accusation très facile.
Une voix : ...
M. Tanguay : Là, j'entends
qu'il y a un rappel au règlement.
Une voix : ...le donner.
M. Tanguay : M. le Président,
il n'y a pas de rappel au règlement? S'il y en a un, moi, je suis prêt à le
faire.
Le Président (M. Ouellette) : Non,
non.
M. Tanguay :
Indiquez-le-moi si je dépasse les limites, M. le Président, puis on va le
faire, le débat. Vous allez me l'indiquer?
Le Président (M. Ouellette) : Je vais
vous le signifier assez rapidement si vous dépassez les limites.
M. Tanguay :
Parfait. Alors, j'aimerais entendre le silence pendant que je m'exprime. Merci.
Alors, je poursuis. Il y a un rappel au règlement?
Le
Président (M. Ouellette) :
...il faut que ça se fasse dans le
respect, M. le député de LaFontaine, et continuez votre intervention.
M. Tanguay : Parfait. Alors, je poursuis, parce que, je veux
dire, M. le Président, ce n'est pas anodin, ce qu'on a là comme citation, pas anodin d'abord par le
témoin de fait, ancien ministre du Parti
québécois, chef de la CAQ aujourd'hui, qui a été là pendant plusieurs années, qui a été même président de la
campagne de financement du Parti
québécois une certaine année et qui
disait, et je poursuis, M. le
Président : «Quand Mme [la première ministre] Marois accuse le Parti
libéral d'avoir eu des quotas, eh bien, il y en avait aussi au Parti
québécois.»
Toujours la citation, M. le Président, de
l'ancien ministre péquiste aujourd'hui chef de la CAQ, et je le cite — mars
2014 : «Quand les gens n'atteignaient pas les objectifs,
ils étaient rencontrés par la permanence du parti.» Il poursuit : «À chaque caucus, on emmenait
la liste de financement avec le rang de qui [atteignait] quel pourcentage
de son objectif de financement — toujours l'ancien ministre péquiste, là, qui
parle. On essayait de faire honte à ceux qui étaient en bas de la liste.» Il a ajouté qu'il était en haut de cette
liste et que la première ministre, Pauline Marois, s'y classait très
bien, M. le Président.
Alors, pour
les gens qui nous écoutent à la maison, on entend à hauts cris le leader
parlementaire de l'opposition officielle
parler d'un système à 150 000 $, à 100 000 $, j'aimerais ça
l'entendre, dans son prochain bloc... je pense que ça vaudrait la peine pour sa crédibilité puis la
crédibilité de son parti quand on crie au loup, de l'entendre sur un système
dont la preuve est faite par un témoin de
fait, pas un libéral, un ancien péquiste, qu'il y avait un système à
80 000 $ au sein du Parti québécois. Il le dénonce
aujourd'hui. J'espère qu'il va le dénoncer sans aucune ambiguïté. Puis moi, je serais intéressé, M. le Président, d'en savoir
davantage, comment ça s'orchestrait, pourquoi on mettait, au Parti québécois,
de la pression sur les ministres qui étaient
rencontrés par la permanence du Parti québécois, qu'on les faisait défiler à la
permanence, qu'on essayait, et je cite l'ancien ministre péquiste, de leur
«faire honte» s'ils n'avaient pas atteint leurs objectifs.
Alors, est-ce
que, là, le leader parlementaire de l'opposition officielle y voit là un beau
modèle de poids et contrepoids?
Est-il fier de cet historique de parti qu'il porte, lui, aujourd'hui? Croit-il
que ça entache sa crédibilité quand il démonise
ou prétend vouloir démoniser ce qui se serait fait chez les autres et quand,
dans sa propre cour, il y a un fait indéniable
qui n'a pas été contesté? Je ne devrais pas dire ça, M. le Président, «qui n'a
pas été contesté», je retire mes paroles;
qui a été contesté — je vous
l'ai dit un peu plus tôt : «...[le] financement au PQ, affirmation que le
parti souverainiste conteste.» Ça, c'est mars 2014, M. le Président, ça
fait deux ans.
Une voix : ...
M. Tanguay :
Mars 2014, ça fait deux ans, M. le Président. Alors, les planètes ont-elles
changé de système au Parti québécois en 24 mois? Ça se peut, et
j'aimerais l'entendre là-dessus.
Et peut-être
y aurait-il lieu, là, également de faire toute la lumière sur ces activités de
financement. Puis je ne cite même pas une activité de financement qui a
permis au chef actuel du Parti québécois de ramasser en une seule soirée 100 000 $. 100 000 $ en une
seule soirée, M. le Président, il faut le faire, il faut être d'une efficacité
redoutable, redoutable. Et, en ce sens-là, il y a peut-être des
questionnements intéressants à poser.
Moi, M. le
Président, j'aimerais vous parler, évidemment, de notre Commissaire à
l'éthique, du projet de loi n° 48, et je pense qu'il est important. Nous avons eu, en février dernier, M.
le Président, un rapport de mise en oeuvre déposé par... Le Commissaire
à l'éthique et à la déontologie des membres de l'Assemblée nationale du Québec
a déposé, en février 2015, un rapport sur la mise en oeuvre du Code d'éthique,
qui a été — et
vous allez me permettre de faire un historique — adopté à l'unanimité des membres de
l'Assemblée nationale en décembre 2010 : 107 pour, aucun contre, aucune abstention. J'ouvre une parenthèse, puis je
fais, avec le sourire dans la voix et au coin des lèvres, un petit aparté
et je dis au leader de l'opposition que
107 députés avaient voté unanimement pour. Ce n'était pas un seul
ministre, ce n'était pas personne qui
s'octroyait... qui avait, je vous dirais, l'outrecuidance de s'en octroyer la
paternité. L'«outrecuidance», M. le
Président, c'est un beau mot — les mots ont leur sens — et je pense que ça traduisait peut-être les
signaux — ce
sera à lui à les corriger — que voulait envoyer le leader de
l'opposition. Il a 107 collègues. Ce n'est pas un ministre qui dit : Moi, j'ai fait adopter ça. Ça
appartient à tout le monde, puis on est fiers, puis c'est important en matière
d'éthique d'avoir l'unanimité.
Vous me
permettrez une autre parenthèse aussi, parce qu'au Parti québécois on
dit : Il faut avoir l'unanimité, même dans les séances de travail qui touchent à l'éthique. Bien, faux, M. le
Président. En séance de travail et lorsque l'on dit : On aimerait entendre, pour bonifier notre Code
d'éthique, tel ou tel témoin, il est important que, les 11 collègues autour
de la table, il n'y en ait pas un qui ait un
droit de veto pour ne pas entendre tel témoin. Sur des décisions très, je
dirais, de travail, d'organisation de
nos travaux, il n'y a pas besoin d'avoir l'unanimité là-dessus. On doit viser
l'unanimité quant à l'adoption du Code d'éthique. Je referme la
parenthèse.
• (11 h 50) •
Alors,
rapport de mise en oeuvre, trois ans d'application, le Commissaire à l'éthique,
Me Saint-Laurent, qu'on a eu
l'occasion d'entendre, si ma mémoire est fidèle, en mai, juin 2015 sur son
rapport de mise en oeuvre de trois ans du
Code d'éthique, et il le faisait, M. le Président, en vertu de l'article 114 de notre Code d'éthique, qui visait, après
une certaine période de mise en
application — ça, c'étaient les trois ans — à nous faire des recommandations, nous
n'étant pas un seul ministre qui
dit : C'est ma loi, hein? Ce ne serait pas correct. Les 125 députés, il
devait nous faire évidemment un rapport et nous faire des
recommandations. Il en a fait 23.
Sur trois ans
d'application — il est
important et intéressant, devrais-je dire, de voir les statistiques qu'il nous
a permis de voir — des enquêtes du Commissaire d'éthique, M. le
Président, il y en a eu cinq à l'égard des membres de l'Assemblée nationale, cinq enquêtes du
Commissaire d'éthique qui ont touché pas juste un parti, qui ont touché les
partis et qui ont touché, entre
autres, des membres du Parti québécois, puis c'est correct, puis c'est comme ça
que ça fonctionne, puis on respecte
les institutions. Alors, cinq enquêtes qui ont touché des membres pas d'un seul
parti, mais notamment du Parti québécois également, donc, des enquêtes,
et le commissaire a eu l'occasion de trouver sur ces gens, sur ces collègues qu'ils avaient commis des erreurs mais
n'a pas recommandé, à ce moment-là, n'a pas recommandé qu'il y ait des sanctions. Parce que, là, on sait le processus, puis c'est
important que les gens à la maison le sachent. Le processus, c'est : lorsque le commissaire dépose son
rapport d'enquête, il est remis au président de l'Assemblée nationale, il le
dépose devant les collègues, et la
sanction, le cas échéant, que le Commissaire à l'éthique recommanderait face à
ce collègue-là devrait être, pour
être mise en application et sanctionnée, devrait être... ou devra être votée
aux deux tiers des voix des collègues de l'Assemblée nationale.
Alors,
cinq membres de cette Assemblée nationale ont fait l'objet d'enquêtes. Il y a
des vérifications qui se font présentement quant au collègue de Louis-Hébert.
Parfait, c'est ce qui avait été souhaité par tous, y incluant le collègue
de Louis-Hébert, qui est un député
responsable, qui va participer à cette vérification, à cette enquête, et nous
aurons le fruit de cette enquête-là.
Alors, M. le Président, il est important de respecter les institutions, et nous
verrons ce qu'il adviendra avec le
résultat de cette enquête. Deux membres de l'Assemblée nationale, du personnel
ont, durant cette période-là, fait l'objet
d'enquêtes. Également, au niveau des statistiques, conseils et avis, durant ces
trois années, des demandes verbales et écrites provenant des membres de
l'Assemblée nationale : 759, durant trois ans, demandes adressées au
Commissaire à l'éthique quant aux façons de fonctionner, quant aux précisions à
apporter, ça, c'est important de le souligner. Le Commissaire à l'éthique est
une institution qui fonctionne.
Alors,
le projet de loi n° 48, M. le Président, première mouture du Code
d'éthique, a été déposé par un gouvernement libéral, par, à l'époque, le ministre délégué à la Réforme des
institutions démocratiques, déposé en mai 2009. Il y avait eu, en juin et octobre 2009, 14 témoins qui avaient
été entendus, sur cinq jours d'auditions, qui avaient permis... Et c'était
notre première mouture, M. le Président, et
j'y vais de mémoire, la page 12 du rapport. Ma mémoire ne me trahit pas. On
peut citer, dans le rapport du
commissaire : «En 2010, les députés ont été unanimes à considérer que le
moment était venu d'établir un cadre
d'éthique et [de déontologie] plus élaboré pour les membres de l'Assemblée
nationale, y compris les membres du
Conseil exécutif...» Ça, c'est les règles, M. le Président, quand vous êtes
membre du Conseil exécutif, qui font
en sorte que vous devez notamment mettre vos actions de compagnie dans une
fiducie sans droit de regard. Ça, c'est un exemple, je ne sais pas pourquoi l'exemple me vient à la tête, mais
ça, c'est un exemple de règle qui s'applique à tous les membres du Conseil exécutif, ministres ou premiers
ministres, de mettre tous ses intérêts financiers dans des entreprises — notamment médiatiques — dans une fiducie sans droit de regard. Ça
veut dire qu'on ne peut pas dire : Ne vendez jamais les blocs
d'actions, parce que ça, c'est sans droit de regard, mais avec un droit de
regard.
Bref,
je continue la citation. Le Commissaire à l'éthique nous dit, donc, en février
2015 : «Ils n'étaient pas sans savoir — il parle des membres de l'Assemblée
nationale — que
l'Assemblée nationale était la seule Assemblée législative au Canada qui n'avait pas codifié l'ensemble de
ses règles déontologiques — et ils devaient donc constituer une autorité indépendante.»
Alors, projet de loi
n° 48, 14 témoins sur cinq jours d'auditions. Par la suite, étude des
125... évidemment, en commission parlementaire, c'était un groupe d'une
douzaine de députés de tous les partis qui ont travaillé ensemble pendant 22 jours à rédiger la première mouture de
notre Code d'éthique, qui a été adopté le 3 décembre 2010 — 107 pour, aucun contre, aucune abstention — et qui entrait en vigueur le 8 décembre
2010. Le Code d'éthique, aujourd'hui, nous avons le fruit de la mise en application par le commissaire... et il y a
23 recommandations, et moi, pour la ministre... et je veux m'assurer qu'elle a l'occasion évidemment de
répondre à mon interrogation, il y a 23 recommandations. Vous le savez, M. le Président, vous présidez les séances
de travail de notre Commission des institutions, je vous avoue que ça va
très bien, puis je pense que vous serez à
même de le confirmer, ça va très bien, on est capables de s'entendre sur une
liste de témoins qui vont venir nous
aider à tester, à la lumière des expertises de femmes et d'hommes qui en ont
beaucoup à dire, qui ont beaucoup
recherché et qui ont fait des études comparatives, faire en sorte de venir nous
aider à bonifier ça.
Le
Parti québécois a déposé une liste de 14 témoins; adoptée. Nous avons déposé
une liste de six témoins, elle a été
adoptée mais pas à majorité... c'est-à-dire, à majorité, mais pas à
l'unanimité, puis c'est correct, on va entendre les six témoins. Et nous aurons l'occasion aussi
d'entendre une liste supplémentaire de trois témoins qui est déposée par le
Parti québécois. Puis on a voté pour, on
veut entendre les gens. Alors, l'unanimité dans nos séances de travail, là, je
ne veux pas rouvrir la parenthèse,
mais on repassera, on est là pour faire nos travaux. Et, le cas échéant, s'il y
a des amendements, on les adoptera,
ça sera l'objectif, à l'unanimité. Alors, nous entendrons — 14 plus six, plus trois — 23 témoins durant les prochaines semaines et prochains mois. Votre secrétariat est
à contacter ces gens. Il y aura des institutions et il y aura évidemment
des femmes et des hommes experts.
23
recommandations. Je sais que la Mme la ministre ne peut pas aujourd'hui
outrepasser le travail non partisan qui
est fait en Commission des institutions, mais j'aimerais, s'il vous plaît, M.
le Président, si vous nous le permettez, l'entendre quant à ces 23 recommandations. Encore une fois, je ne veux
pas la mettre dans une situation où elle devait devancer les travaux non partisans de tous les collègues, mais, à sa
première lecture, y a-t-il des recommandations qui ont attiré son
intérêt, particulièrement comme ministre responsable? Merci, M. le Président.
Le Président (M.
Ouellette) : Mme la ministre. 2 min 30 s.
Mme
de Santis : Merci, M. le Président. Parmi les recommandations du
commissaire à la déontologie, il y en a deux en particulier que j'ai trouvées intéressantes. Une, c'est quant à
la formation. Lui, il recommande que, le code, les règles et les
règlements, il y ait une formation des nouveaux députés ou des députés et, en
plus que les députés... les membres du
Conseil exécutif et les membres de leurs personnels dans les six mois du début
de leurs mandats. Ça rapproche énormément
une recommandation que nous trouvons dans le rapport de la commission
Charbonneau où les commissaires recommandent au gouvernement de rendre
obligatoire la formation sur les règles de financement politique pour les
représentants officiels et agents officiels des partis politiques.
La formation,
c'est important. Trop souvent, on adopte, on édicte des lois, mais les
personnes concernées n'ont pas
connaissance de leurs obligations et quoi faire. Des fois, en éthique et
déontologie, ils pensent que peut-être, utilisant le
«common sense», ou sens commun, ils peuvent respecter les dispositions du code.
Mais cette recommandation du commissaire,
comme la recommandation des commissaires à la commission Charbonneau, nous aide
à s'assurer que, quand quelqu'un fait
comme... On a su après les élections de 2014 que certains députés avaient
peut-être agi contrairement au Code
d'éthique et de déontologie. Ils n'ont pas reçu de sanction, parce qu'ils ne le
savaient pas et peut-être agissaient de bonne foi. Ça ne devrait pas
être une excuse, la formation est absolument essentielle.
L'autre,
c'est la recommandation qui touche les lanceurs d'alerte, parce qu'il y a une
recommandation qui est faite par le
commissaire et aussi est faite par la commission Charbonneau. Je sais qu'il y a
le projet de loi n° 87, mais peut-être on aura l'occasion plus tard de parler plus longuement de comment nous
allons procéder avec les lanceurs d'alerte et le projet de loi
n° 87.
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
Mme la ministre. M. le député de Deux-Montagnes.
• (12 heures) •
M. Charette : Merci, M. le
Président. Un plaisir d'être avec vous aujourd'hui.
Tout d'abord, mes salutations à la ministre et
aux gens qui l'accompagnent, les députés gouvernementaux également, mon collègue de Marie-Victorin et la
recherchiste qui a la gentillesse et la patience également de m'accompagner.
Le temps est
limité, donc je vais y aller, d'entrée de jeu, avec une première question. Mme
la ministre, en 2013, le DGEQ, le
Directeur général des élections, a mis sur pied une unité spéciale d'enquête pour examiner tout ce qui est financement sectoriel. On avait identifié à ce moment-là que 12,8 millions avaient été récoltés par les différentes formations politiques, j'en conviens, en
financement sectoriel. Cette même unité, pour les années 2013 et 2014, a coûté
aux contribuables 944 700 $.
Ma question,
elle est fort simple : Est-ce qu'elle peut me confirmer quel est le
montant dont a bénéficié cette unité-là pour l'année 2015 et quel est le
montant qui est prévu pour l'actuelle année financière, soit 2016‑2017?
Le Président (M. Ouellette) : ...
Mme de
Santis : Merci, M. le Président. Les données que vous demandez, je ne les ai pas,
c'est des données que le Directeur général des élections aurait, et je
ne sais pas c'est quoi, la procédure. Nous, on ne l'a pas.
M. Charette : ...
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Deux-Montagnes.
M. Charette : ...qu'on est à l'étude
des crédits. Donc, je comprends que vous êtes certainement en mesure de recueillir l'information, parce que,
dans les faits, c'est davantage une demande de complément d'information que j'aurais, parce
que les indications que nous avons de notre côté, c'est qu'il n'y aurait aucune
somme qui ait été prévue pour l'année 2015
et 2016 pour cette fameuse unité spéciale, là, qui vise à faire la lumière sur
tout le financement sectoriel. Peut-être me rassurer, à tout le moins.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre.
Mme de
Santis : Ces crédits sont
les crédits du Directeur général des
élections, ce n'est pas les crédits
qui sont sous étude aujourd'hui. Donc, je n'ai pas une réponse pour vous. Il y aurait une réponse, mais
pas dans l'étude des crédits aujourd'hui.
M. Charette : ...à la commission les
montants en question? Et, encore une fois, j'insiste, dans notre cas, c'est essentiellement pour nous rassurer, parce que les indications que nous avons, c'est que c'est
une unité qui ne bénéficierait d'aucun
budget pour l'année... qui n'en a pas bénéficié, c'est-à-dire, pour l'année
dernière et qui n'en aurait pas davantage pour la présente année. Donc, à
tout le moins, peut-être
vous engager à faire le dépôt lorsque l'information vous sera connue.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre.
Mme de
Santis : Le DGE relève de l'Assemblée nationale, et, lors de l'étude des crédits de l'Assemblée nationale, vous
pouvez poser votre question. Ce n'est pas une question à laquelle on peut
répondre, nous, aujourd'hui dans l'étude
des crédits de mon secrétariat et de mon ministère.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Deux-Montagnes.
M. Charette : Dans ce cas, vous
allez me permettre peut-être de sonder votre perception. Si, effectivement, il n'y avait
aucun budget de consenti à cette unité-là, quel est, selon vous, le message
qu'on envoie à la population de dire : Oui, on a créé en 2013 une
unité, mais on ne lui confère aucun moyen pour faire son travail, et, ultimement,
ce qu'on souhaitait enquêter, on ne pourra pas le faire? Et ça continue à
alimenter ce même cynisme que vous avez déploré, en quelque sorte, comme quoi le politique ne donne pas les moyens
nécessaires à une institution comme le Directeur général des élections pour faire toute la lumière sur des
pratiques qui, vous l'avez avoué, ont entaché un petit peu la classe politique
et les institutions au cours des dernières années.
Le Président (M.
Ouellette) : Mme la ministre.
Mme de Santis : Merci, M. le
Président. D'abord, je ne peux pas répondre à des questions hypothétiques.
Deuxièmement,
le Directeur général des élections ne relève pas de mon ministère, il est
indépendant. Il a été désigné par l'Assemblée nationale unanimement.
Alors, je ne peux pas exprimer une opinion particulièrement quand c'est
hypothétique. Alors, ce n'est pas le forum ici de parler de ce sujet-là.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Deux-Montagnes.
M. Charette : La réponse me déçoit,
je dois le dire en ces termes, parce que, lorsqu'on parle d'institutions démocratiques, on parle aussi de confiance de la population,
et quel est le meilleur moyen de donner confiance à la population?
C'est certainement en donnant les outils nécessaires aux chiens de garde de
notre démocratie.
Mais, sans me
faire trop insistant, je vais maintenant vous parler des délais de prescription. On a eu l'occasion, au cours des dernières semaines, de poser à maintes reprises la
question, on a eu l'occasion aussi de déposer bon nombre de motions sans
préavis, et, malheureusement, du côté du gouvernement, à chacune des
fois, on refusait de débattre de la question.
On est bien conscients que la commission Charbonneau, dans ses propositions, parle d'un délai de prescription qui doit être de sept ans. On était d'accord avec les propositions de la commission Charbonneau
en disant dès le départ qu'il n'y a
rien qui nous empêche d'être plus ambitieux ou sinon de donner plus de muscle
encore aux différentes mesures que l'on met de l'avant.
Et c'est dans
cette foulée-là que, l'année dernière, on a adopté à l'unanimité, je pense
bien, une loi qui permet pour l'industrie
de la construction de retourner jusqu'à 20 ans dans le passé pour corriger des
agissements qui étaient soit questionnables,
soit illégaux, soit carrément frauduleux. Donc, on a volontairement, et d'un
commun accord, rallongé le délai de
prescription. Et nous, toujours dans l'optique de redonner confiance à la
population, on dit : Il faudrait faire de même avec la classe
politique.
Ce que l'on a
exigé et permis pour les entrepreneurs en construction, pourquoi ne pas faire
de même au niveau de la classe
politique? Pourquoi ce refus de débattre? Et pourquoi ce refus de même
considérer l'idée de s'imposer les mêmes contraintes que nous imposons à
d'autres?
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre.
Mme de
Santis : Merci, M. le Président. D'abord, c'est le Directeur général
des élections qui a écrit dans son Rapport
sur la mise en oeuvre de la réforme des lois électorales — je cite : «...il faut souligner que les
récentes enquêtes menées par le DGEQ montrent de grandes difficultés à
récupérer une preuve documentaire permettant d'établir une contravention à la loi si un délai de plus de sept
ans s'est écoulé depuis l'événement. Par conséquent, le DGEQ recommande
que le délai de prescription de cinq ans actuellement prévu aux lois
électorales soit augmenté à sept ans.»
Ce n'était
pas la seule fois que le Directeur général a fait un commentaire dans ce
sens-là ou une recommandation dans ce
sens-là. Si on adopte une loi, il faut qu'on soit capable de l'exécuter. La
prescription, au-delà de sept ans ou quand c'est trop long, le témoignage dégrade, les preuves dégradent. Il faut
avoir les témoignages et les preuves suffisants pour être en mesure
d'appliquer une loi. Maintenant...
M.
Charette : ...vous citez, c'est très, très juste, mais vous
conviendrez que nulle part le Directeur général des élections ne dit que c'est impossible. Il
recommande, donc n'impose pas, et, en même temps, si c'est impossible, il
l'aurait mentionné. Tout ce qu'il a
trouvé à dire, c'est que ce serait plus difficile, comme c'est le cas dans bon
nombre d'enquêtes criminelles. Oui, effectivement, lorsque le crime est
commis il y a plusieurs années, c'est certainement plus difficile à démontrer,
mais ce n'est pas impossible. Et le Directeur général des élections, dans
aucune des citations que vous mentionnez ou
qu'on pourrait retrouver, ne dit que c'est impossible d'aller au-delà du sept
ans. Plus difficile, on en convient tous. Impossible, certainement pas.
Et
d'ailleurs, je sais qu'on ne peut pas rentrer dans le détail, mais il y a des
accusations criminelles qui ont été portées il y a quelques semaines
contre d'anciens acteurs politiques pour des faits allégués qui remontent à
plus de cinq ans, sinon à plus de sept ans.
Donc, les procureurs de la couronne ont jugé avoir amassé une preuve suffisante
pour porter des accusations. Donc, il
ne faut pas s'astreindre parce qu'il y a une difficulté, c'est le propre même
de tout système judiciaire. Et je
vous mettrais, dans ce cas, au défi d'identifier une seule citation du
Directeur général des élections qui dit que c'est impossible. Plus difficile, on en convient, mais il ne faut
pas baisser les bras. En fait, c'est un dossier, on le sait, au cours des
dernières années, qui a occupé beaucoup l'attention des médias, qui a généré
énormément de questions au niveau de l'Assemblée nationale, et ultimement le
résultat que l'on constate, c'est une perte de confiance de l'électorat envers ses institutions. Donc, il faut leur donner
la preuve de notre conviction à enrayer un système qui ne dessert pas
nos institutions.
Donc, je vous
invite à ne pas renoncer parce que c'est difficile. On trouvera les moyens de
donner à nos institutions et nos administrations les outils nécessaires,
là, pour bien faire leur travail, tout simplement.
• (12 h 10) •
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre.
Mme de
Santis : Merci, M. le Président. Mais, vous savez, le 1er février 2016, il n'y a
pas longtemps, le DGE a comparu devant cette commission, et je cite : «Donc, au-delà de sept ans, ce
serait difficile d'obtenir la preuve documentaire nécessaire
pour entreprendre des poursuites. Donc, effectivement, je pourrais
bien vous dire 10 ans, mais, dans les faits, ces 10 ans là, en raison
des délais de conservation des documents, ce serait inutile.»
Vous
savez, sa preuve dépend beaucoup sur une preuve documentaire. Les banques sont
tenues à conserver leurs documents
pendant une période de sept ans. C'est la juridiction fédérale. Nous, on n'a
aucun pouvoir de changer cela au fédéral.
C'est vrai, dans la Loi électorale, on pourrait imposer une période plus longue
pour la conservation de documents par
les partis politiques et par des particuliers, une des suggestions qui
parvient de la commission Charbonneau, que cette conservation soit augmentée à sept ans. Aujourd'hui, c'est cinq ans. Donc, la preuve documentaire, c'est cinq ans, ce n'est
pas 10 ans, ce n'est pas 20 ans.
Quand tu adoptes une loi, c'est absolument nécessaire de s'assurer que tu peux mettre cette loi
en application.
Le Président (M.
Ouellette) : M. le député de Deux-Montagnes.
M.
Charette : ...M. le Président, et ça démontre un petit peu le questionnement que nous avons, de notre côté.
Si
on se soumet au jeu des citations, en commission
parlementaire, le Directeur général des élections a mentionné il n'y a pas si longtemps : «Aller jusqu'à 10 ans, encore une fois, ce serait intéressant, puis ça
nous donnerait beaucoup plus de marge
de manoeuvre.» Donc, c'est le Directeur général des élections qui dit : Oui, davantage,
sept ans, ça peut être plus difficile, mais 10 ans, ça nous donnerait davantage
d'outils.
Bref,
on a le Directeur général des
élections qui nous dit : Ce
serait plus que souhaitable de l'étendre à 10 ans, et on a une commission Charbonneau qui, elle, remontait dans le temps
quelques années encore davantage, donc il faut faire la lumière. Et, dans les citations que l'on peut évoquer, il y a
quelques instants à peine, vous avez publié un tweet qui insistait beaucoup
sur les actions actuelles pour envisager l'avenir. Il y a
comme un malaise, de votre côté, sur le passé, et, ce passé-là, quoi qu'on en dise, et je ne dis pas qu'il n'y a
qu'une seule responsabilité à assumer, mais ce passé-là doit être révélé pour
qu'on puisse apporter les corrections nécessaires.
Et, les craintes que nous avons, au niveau de la Coalition avenir Québec,
on a eu l'occasion de les mentionner
déjà, c'est qu'il y a possiblement des sommes colossales qui ont été amassées
pendant les années 2006, 2007, 2008,
2009, 2010 au sein du Parti libéral
du Québec — on parle de plusieurs dizaines de millions de dollars — et
ces sommes-là ont peut-être permis au Parti libéral de mener, en
2012, une campagne avec de l'argent
qui n'était pas légalement amassé — 2014 potentiellement aussi.
Et est-ce que ce sera le cas en 2018?
Donc, si le Parti
libéral veut se faire une certaine virginité aux yeux de l'électorat, il doit
étendre son délai de prescription comme le Directeur général des élections le
mentionne.
Et peut-être vous
poser autrement une autre question : Dans l'éventualité où les procès
criminels que nous annonçons arrivent à des verdicts de culpabilité, donc, si
ces procès-là démontrent noir sur blanc qu'il y a eu fraude, qu'il y a eu financement illégal d'amassé au cours
des années 2006, 2007, 2008, des années qui normalement sont prescrites en vertu du règlement, comment le Parti libéral va
se comporter? Je m'explique. La loi ne l'obligera pas à rembourser ces sommes-là, mais, s'il y a une reconnaissance
de culpabilité qui est démontrée, comment le Parti libéral va se comporter
si jamais il est démontré en vertu des
accusations déposées que le Parti libéral a peut-être amassé quelques millions
de dollars de façon illicite?
Le Président (M.
Ouellette) : Mme la ministre.
Mme
de Santis : Merci, M. le Président. D'abord, j'aimerais souligner que,
de 2012 à 2016, le Directeur général des
élections a constaté 289 infractions,
il y a 289 constats d'infraction qui ont été émis, et les amendes réclamées,
c'est de 738 000...
M.
Charette : ...en tout
respect — je
n'ai que très peu de temps et je n'ai pas du tout abordé cette question-là — si
vous pouviez davantage vous pencher sur la question
abordée : S'il y avait reconnaissance de culpabilité, comment le Parti libéral va se comporter dans les circonstances, étant donné que ce sont des
années qui sont prescrites en vertu
de notre loi actuellement?
Le Président (M.
Ouellette) : Mme la ministre.
Mme
de Santis : M. le Président, notre premier ministre a dit et redit que le Parti libéral du Québec va rembourser toute somme qui a été perçue illégalement par le parti. Donc, si ça
rentre à l'intérieur d'être considéré comme une contribution illégale, si le DGE fait ce constat, ça va être
remboursé.
Le Président (M.
Ouellette) : M. le député de Deux-Montagnes.
M.
Charette : ...M. le Président. Le DGEQ, dans cette histoire-là, n'a, malheureusement, aucun
pouvoir, il est le premier à la déplorer. Si, suite aux actions
judiciaires, il y a une reconnaissance de culpabilité, le DGEQ n'a pas les moyens, sa loi lui dit : En dehors de la
prescription, je n'ai pas de marge de
manoeuvre. Donc, il ne faut pas
attendre que le DGEQ demande des remboursements, il ne le fera pas, la
loi ne lui permet pas.
Je
demande à la ministre : Le Parti
libéral, comment entend-il se
comporter si, suite à des accusations criminelles, il y a
une reconnaissance tacite que des sommes ont été amassées
illégalement? Les remboursera-t-il, même si la loi ne l'oblige pas à le faire?
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre.
Mme
de Santis : D'abord,
c'est une question hypothétique.
Aussi, on ne connaît pas la nature des jugements qui vont être rendus et la nature... si jamais
quelqu'un est coupable, coupable de quoi. Ce n'est pas une question à laquelle
on peut donner une réponse exacte aujourd'hui, c'est hypothétique.
Et donc je
reviens à ce que le premier ministre a déjà dit, que, s'il y a un constat de
contribution qui est illégale par le DG, on va le rembourser, ce qu'on a
fait à chaque fois que ça a été demandé.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Deux-Montagnes.
M. Charette :
...permettre, M. le Président, de partager ma déception, pour ne pas dire mon
inquiétude. La loi a ses limites, et
là ce que nous dit la représentante des institutions démocratiques, de
surcroît, c'est que le Parti libéral ne peut même pas s'engager à
rembourser des montants qui ont été démontrés comme étant amassés illégalement.
On parlait de confiance de la population, on
parlait de contrer le cynisme. Ce serait déjà un minimum que de s'engager à rembourser ces sommes-là, même si la
loi ne l'oblige pas. Et la population espérait naturellement que le délai
de prescription soit aussi allongé, mais,
malheureusement, je vois qu'il y a aussi une fin de non-recevoir de ce côté, et
c'est bien dommage, parce que la population est certainement en attente de
directions plus affirmées à ce niveau-là.
Il me reste à
peine quelques petites minutes, M. le Président, je vais passer à un tout
autre... en fait, à quelques petites questions plus rapides. On a
adopté, au niveau de l'Assemblée nationale, une loi confirmant les élections à
date fixe. Est-ce que vous êtes en mesure de nous confirmer aujourd'hui sans
aucune hésitation quelle sera la date du prochain scrutin au Québec?
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre.
Mme de Santis : M. le Président, je
sais, c'est en octobre 2018. Quelle date?
Le Président (M. Ouellette) : Le
1er.
Mme de Santis : Le 1er octobre
2018.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Deux-Montagnes.
M.
Charette : ...la date que
j'avais en tête. Donc, vous confirmez que cette date-là, elle est inamovible,
elle est confirmée, parce que cette
loi, là, a été adoptée effectivement par un gouvernement précédent — ce
qui n'a pas empêché ce dernier de ne pas la respecter.
Donc, vous nous confirmez que les élections
auront bel et bien lieu le 1er octobre 2018, peu importe quelle
conjoncture politique pourrait se dessiner d'ici là.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre.
Mme de
Santis : M. le Président, à moins qu'il y ait une catastrophe, et je
ne peux pas garantir qu'il n'y en aura pas — je n'ai aucune idée de qu'est-ce que
l'avenir va nous apporter — mais l'intention ferme du gouvernement, c'est que les
prochaines élections aient lieu le 1er octobre 2018.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Deux-Montagnes.
M. Charette : Merci.
Mme de Santis : ...
• (12 h 20) •
M. Charette : Bien, c'est apprécié,
on ne s'attendait pas à autre chose comme intention.
Autre question. Au niveau
du vote libre, on a eu quelques discussions ces derniers jours, et le leader du gouvernement a eu l'occasion de se prononcer. Toujours
dans l'optique d'améliorer nos pratiques, on s'est engagés, au niveau de la Coalition avenir Québec, à
mener une réflexion sur le sujet, et, dès que ça a été mentionné, le leader du gouvernement s'est offusqué, disant que c'était contraire à nos pratiques parlementaires, alors que le Québec, qui a un Parlement de type britannique, est l'endroit où on vote le
moins librement dans tous ces Parlements
qui ont la même tradition que nous.
Et, lorsque ce commentaire-là a été publié, il y a certains députés... dont
votre collègue de Jean-Lesage, qui s'est exprimé de façon très
spontanée, disant que, oui, on devrait réfléchir à cette question-là.
Quelle est
votre vision de la chose? Est-ce qu'il y a lieu d'améliorer nos pratiques
parlementaires? Est-ce que, pour vous, reconsidérer l'approche sur le
vote libre serait pertinent dans les circonstances?
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre.
Mme de
Santis : M. le Président, comme j'ai dit tout à l'heure, le monde
n'est pas fixé dans le temps, il y a une évolution dans la pensée, il y a une
évolution dans les lois, il y a une évolution dans la façon dont on fait les
choses. Si on veut améliorer la façon que notre Parlement fonctionne,
absolument, il faut en discuter.
Maintenant, quant au vote
libre, il faut se rappeler que nos citoyens, quand ils votent, ils votent pour
un parti, pour un leader et pour un programme
politiques. Les personnes qui nous élisent, qui font qu'on soit là, elles
s'attendent à ce qu'on livre sur la
plateforme électorale qui nous a amenés à la victoire. Si on laisse le vote
libre, qui va empêcher la réalisation de ce programme électoral, ça va aller à
l'encontre de la façon que nous pratiquons le Parlement aujourd'hui au
Québec. Ça ne veut pas dire que, de temps à autre, sur des questions qui
touchent la moralité ou qui touchent la sensibilité des différents Québécois,
il ne pourrait pas y avoir le vote libre. Oui.
Le
Président (M. Ouellette) :
Ne bougez pas, Mme la ministre. C'est parce que je veux lui donner son dernier
30 secondes. M. le député de Deux-Montagnes.
M.
Charette : Quelques secondes. Un principe que l'on perd peut-être de
vue trop souvent dans cette Assemblée : nos députés représentent une population avant de représenter un parti
politique. Donc, les citoyens au Québec s'attendent à ce que leurs députés les représentent plutôt que
les députés ne fassent que reproduire ou reformuler ce que le parti demande
d'eux. Bref, je vous invite à cette réflexion pour la suite.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
députée de Crémazie.
Mme
Montpetit : Merci, M. le Président. On a parlé beaucoup, au cours des
dernières minutes, de questions de démocratie, donc je vais en profiter
pour poser deux questions — dans
le fond, j'aimerais entendre la ministre sur deux
aspects, là : la première, sur la refonte de la carte électorale, qui est
en cours à l'heure actuelle; et, dépendamment du temps qu'il nous
restera également dans ce bloc, sur la réforme du mode de scrutin.
Pour le
bénéfice des gens qui nous écoutent, je vais me permettre de faire une courte
mise en contexte sur la question de
la refonte de la carte électorale, là, dans laquelle nous sommes présentement,
parce que, bon, je pense que ça vaut la peine qu'on mette les assises
pour bien faire cette discussion.
Donc, la Loi
électorale, on le sait, là, prévoit que la Commission sur la représentation
électorale doit procéder à une
nouvelle délimitation après la deuxième élection générale qui suit la dernière
délimitation. Donc, l'actuelle délimitation des circonscriptions électorales a été utilisée lors des élections du
4 septembre 2012 et de la dernière élection provinciale, donc, du 7 avril 2014. Donc, à cet effet, la
Commission de la représentation électorale a entamé un processus de
délimitation des circonscriptions à
la suite des dernières élections de 2014. Cette révision-là se fonde sur
différentes considérations d'ordre
démographique, géographique et sociologique, là, à savoir la densité de la
population, le taux relatif de croissance de la population,
l'accessibilité, la superficie et la configuration de la région, les frontières
naturelles du milieu, les territoires des municipalités locales ainsi que le
caractère parfois unique de certaines circonscriptions, là, nommons notamment
les Îles-de-la-Madeleine.
Donc, le
17 mars 2015, la Commission de la représentation électorale déposait
un rapport préliminaire qui a été déposé
à l'Assemblée nationale, soit 12 mois après le début du processus de
délimitation. Les conclusions de ce rapport étaient donc les suivantes : 15 circonscriptions sont en situation
critique, c'est-à-dire que l'écart du nombre d'électeurs d'une circonscription
par rapport à la moyenne provinciale se situe entre plus de 20 % et
25 % ou moins de 20 % et 25 % de la moyenne provinciale; 11 circonscriptions sont en situation
d'exception, c'est-à-dire que l'écart du nombre d'électeurs d'une circonscription
par rapport à la moyenne provinciale est supérieur à moins de 25 % ou à
plus de 25 % de la moyenne provinciale; et, depuis le
30 novembre 2007, année de référence pour la dernière délimitation de
la carte électorale, la population électorale de l'ensemble du Québec a
augmenté de 7 %.
Le Directeur
général des élections du Québec, chargé de la refonte, bon, propose également
de modifier certaines circonscriptions qui se trouvent dans les régions
de la Capitale-Nationale, de l'Estrie—Centre-du-Québec, de Laval, de la Montérégie, de l'Outaouais et de Montréal.
Il propose également d'ajouter deux circonscriptions dans la région des Laurentides-Lanaudière afin que la région
corresponde à son poids électoral par rapport à l'ensemble du Québec. Il
propose également de retirer une
circonscription dans la région de l'île de Montréal — la circonscription d'Outremont — ainsi que, dans la région de la Mauricie, la circonscription de Saint-Maurice,
pour les mêmes raisons, donc, le poids électoral, et donner un statut de circonscription d'exception à
six circonscriptions dont le nombre d'électeurs par rapport à la moyenne
provinciale se trouve sous le seuil minimal
prévu par la Loi électorale, donc, les circonscriptions d'Abitibi-Est,
Abitibi-Ouest, Bonaventure, Gaspésie, René-Lévesque et Ungava.
Donc, une
fois cette mise en contexte faite, le principal élément sur lequel j'aimerais
entendre la ministre est sur la question
de la densité de population, qui est un des critères, dans le fond, qui est
retenu par la CRE, dans le fond, pour délimiter les circonscriptions. Et
c'est important de mentionner que, pour les propositions qui ont été faites, un
des éléments qui est pris en considération,
c'est le nombre de citoyens par circonscription, et non le nombre de résidents
par circonscription, ce qui peut
amener un écart extrêmement important notamment dans des circonscriptions de
Montréal où le poids démographique
augmente non pas au niveau des citoyens, mais bien au niveau du nombre de
résidents. On se retrouve, dans certaines
circonscriptions, dont celle de la ministre — je pense qu'elle est bien au courant — dans un écart qui est très, très, très important, là, qui peut être de plusieurs
milliers, dans le fond, entre le nombre de résidents et de citoyens. Et vous savez très bien, M. le Président, que,
comme députés, on ne demande pas aux gens qui se présentent à nos bureaux
pour les aider s'ils sont officiellement
citoyens du Québec pour faire le travail qu'on a à faire comme députés. Et je
pense que cette façon de calculer a
un impact extrêmement important sur la région de Montréal et sur la
représentativité électorale également de la région de Montréal.
Et donc je
profiterais de l'occasion pour entendre la ministre sur cette question-là, dans
le fond, de représentation citoyens versus résidents.
Le Président (M.
Ouellette) : C'est une réponse qui est très attendue, Mme la députée
de Crémazie, étant moi-même dans la
circonscription de Chomedey, ayant fait l'objet des deux dernières révisions
justement par rapport à la densité. Donc, Mme la ministre.
• (12 h 30) •
Mme de
Santis : Merci, M. le Président. D'abord, j'aimerais souligner que la
loi actuelle parle d'électeurs, et pas d'habitants. Donc, toutes les
décisions qui vont devoir être prises aujourd'hui vont devoir être prises à
l'intérieur des exigences de la loi
actuelle. Quand on parle des habitants, ça, c'est un élément qui pourrait être
pris en considération, mais la loi parle des électeurs.
Et, en plus,
je dois dire que la Commission sur la représentation électorale, c'est une
commission indépendante. Si je
participe pour faire une présentation, je le ferais en tant que députée
intéressée par ce qui se passe dans mon comté de Bourassa-Sauvé. Donc,
en tant que ministre, je n'ai aucun poids sur les agissements de cette
commission.
Il faut dire
aussi que la commission doit tenir compte du principe de l'égalité des votes,
mais, quand on parle de l'égalité de
votes, ce n'est pas compris comme étant un homme-un vote. On peut permettre à
l'intérieur d'une circonscription électorale
qu'il y ait plus ou moins 25 % d'un certain chiffre. Ce chiffre est établi
en prenant le nombre d'électeurs au Québec
et le divisant par 125. La situation avec laquelle on est pris, c'est que la
moyenne provinciale, ce quotient, c'est 48 387 électeurs. Donc, ça
veut dire qu'on peut être à l'intérieur de l'exigence de la loi si on a de
36 290 électeurs jusqu'à 60 484
électeurs. Et ça, c'est la loi actuelle. Est-ce qu'on devrait être en accord
qu'il devrait y avoir plus d'exceptions à cette enveloppe-là? Est-ce qu'on devrait permettre qu'on ajoute aux
Îles-de-la-Madeleine six autres comtés qui seront des comtés d'exception qui auraient moins de
36 290 électeurs? Ça, c'est une décision qui sera prise par la commission.
J'encourage
tous les députés de participer à la prochaine étape, qui est la prise en
considération du rapport de la commission
par la Commission de l'Assemblée nationale. La dernière fois, ça a pris deux
ans entre le dépôt du rapport initial
et l'étude devant la Commission de l'Assemblée nationale. Cette fois-ci, ça va
être presque la même chose. Le rapport a
été déposé en avril 2015. Je crois que, plus tard cette année, il y aura cette
Commission de l'Assemblée nationale qui va prendre en considération le rapport, et j'invite tous les députés à
venir présenter leurs causes devant la commission. La commission, je
répète, est indépendante.
Il y a un
autre critère, c'est que la circonscription électorale représente ce qu'on
appelle une communauté naturelle. Cette
communauté naturelle se fonde sur des considérations d'ordre démographique,
géographique, sociologique. Qu'est-ce que
ça veut dire? C'est qu'on prend en considération la densité de la population,
le taux relatif de croissance de la population — et c'est là peut-être que, quand vous parlez
de Montréal, ça... parce que ceux qui arrivent en tant qu'immigrants deviennent citoyens et ça va augmenter les
électeurs — l'accessibilité,
la superficie du territoire, la configuration de la région, les
frontières naturelles et les territoires des municipalités locales. Et je suis
contente que vous ayez soulevé ce point-ci, parce que je ne crois pas que dans
le public, quand le rapport initial a été déposé, on a pris conscience de l'importance qu'on devrait donner à la
délimitation des circonscriptions électorales. Il y a des enjeux, et le public
devrait être au courant de ça. Il y a
des enjeux régionaux, il y a des enjeux urbains, il y a les enjeux d'à quel
point est-ce qu'un homme-un vote...
la valeur de ce vote peut aller de 0,88 pour quelqu'un dans un comté jusqu'à
1,8 dans un autre comté. Je répète ça : Mon vote, dans certains
comtés, ça vaut 0,88 d'un vote et, dans l'autre comté, ça vaut 1,8.
Mais en même
temps il faut reconnaître que le Québec, c'est un territoire particulier, c'est
immense, et il faut avoir aussi la
préoccupation que nos régions sont représentées suffisamment et correctement à
l'intérieur de notre Parlement. Je
regarde mon collègue d'Ungava. Son comté est tellement énorme que c'est la
taille de, quoi... Combien de pays ensemble peuvent...
Une voix : ...
Mme de
Santis : 1,3 fois plus grand que la France. Alors, quand tu regardes
ce territoire, et même si c'est aussi grand,
la population est très peu. Alors, il faut aussi répondre à ces inquiétudes.
Alors, encore une fois, je vous encourage de venir devant la Commission
de l'Assemblée nationale et de faire vos représentations.
L'autre question que vous m'avez posée, c'était
sur les modes de scrutin?
Mme Montpetit : Je n'ai pas eu le
temps de la poser encore.
Mme de Santis : Alors, vous allez la
poser.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
députée de Crémazie.
Mme
Montpetit : Vous me
devancez, Mme la ministre. Merci pour votre réponse, puis on sera présents de
façon certaine dans ces consultations qui vont se faire sur la carte
électorale également.
Donc, je
voulais profiter, c'est ça, de l'occasion, donc, pour vous entendre sur la question
de la réforme du mode de scrutin, parce que
c'est un sujet qui alimente de nombreux débats périodiquement, bon, après
chaque élection, entre autres, sur
les différentes disparités qu'on peut
retrouver entre le nombre de députés élus et le vote qui a été exprimé. Puis je vais me permettre encore de refaire un certain
historique, parce que l'idée de réformer le mode de scrutin au Québec, ce n'est pas une idée qui est nouvelle, c'est une
idée qui date... bien, en fait, qui est dans le paysage depuis les années 60,
puis je pense que c'est bien important qu'on
voie, en fait, ce qui s'est fait au cours des dernières décennies, et ça nous
permettra de voir, bon, d'où on part, ce qui
a été fait et ce qui sera fait par la suite des choses aussi, et je serai fort
intéressée de vous entendre là-dessus.
Donc, on commence le 17 juin 1970, là,
pour vous dire à quel point ça ne date pas d'hier, là. Suite à des élections
générales, les élections d'avril 1970, qui,
dans le fond, avaient eu un résultat avec une disparité entre le vote exprimé
et le nombre de députés élus, les
parlementaires avaient investi à l'époque la Commission de l'Assemblée
nationale du mandat d'étudier le
système électoral, et aucun consensus sur le mode de scrutin, à l'époque,
n'avait été établi lors des travaux de la
commission, et donc déjà le gouvernement optait pour un certain statu quo. Et
ça continue : en 1971, la même Commission de l'Assemblée nationale, qui met sur pied un comité afin d'étudier le
mode de scrutin. Dans son rapport d'étape produit en 1972, le comité ne formule aucune
recommandation formelle, il sollicite plutôt un nouveau mandat afin d'étudier
en profondeur trois formules, soit un système mixte, un vote unique
transférable et une représentation proportionnelle modérée. Craignant qu'un système de représentation proportionnelle ne
génère de l'instabilité politique, à l'époque, le gouvernement,
finalement, ne donnera pas suite au projet de réforme du mode de scrutin.
En 1979, le ministre
responsable de la Réforme électorale et parlementaire dépose un livre vert
portant sur la réforme du mode de scrutin à
l'Assemblée nationale. Le projet de réforme du mode de scrutin est finalement
reporté après les élections de 1981.
En 1983, l'Assemblée nationale demande à la Commission de la représentation
électorale d'étudier le mode de
scrutin majoritaire de même que les modes de scrutin qui furent précédemment
proposés. Au terme de sa démarche, la Commission de la représentation
électorale conclut qu'un changement de scrutin s'impose et elle recommande une proportionnelle territoriale, un mode de scrutin
inspiré de la représentation proportionnelle régionale modérée. Le rapport
de la commission, à l'époque, sera étudié en
commission parlementaire à l'automne 1984, mais toutefois, bon, encore une fois, ni les députés ministériels ni ceux de
l'opposition ne donneront leur aval à la recommandation d'une proportionnelle
territoriale, donc le gouvernement de l'époque renoncera au projet de réforme
du scrutin.
On continue. En 1998,
suite aux élections générales, le parti qui a recueilli le plus grand nombre de
votes, à l'époque, au suffrage populaire
forme l'opposition, donc ça relance encore une fois le débat sur le mode de
scrutin. Et donc, en décembre 2001,
la Commission des institutions se donne un mandat d'initiative portant sur la
réforme du mode de scrutin. En 2002,
le gouvernement met de nouveau un comité sur pied sur la réforme des
institutions démocratiques afin de
concevoir, préparer et tenir des états généraux sur la réforme des institutions
démocratiques. Dans le rapport qui sera
rendu à l'époque, en mars 2003, à la suite des états généraux, le comité
directeur formulait 14 recommandations. La première se lit comme suit : «Que le gouvernement prenne acte de la
volonté populaire très ferme de réviser le mode de scrutin actuel en soumettant aux Québécoises et
aux Québécois la possibilité d'adopter par référendum, et ce, avant la fin
du prochain mandat gouvernemental, un mode de scrutin de représentation
proportionnelle régionale...»
Et
là je veux me faire plus succincte sur ce qui s'en est suivi, là, depuis cette
époque, mais il y a eu différentes commissions parlementaires, une
consultation, en fait, par une commission parlementaire spéciale à l'hiver
2006. Le gouvernement, à l'époque, confiait
au Directeur général des élections le mandat d'analyser les modalités d'un
éventuel mode de scrutin mixte compensatoire, et nous voilà aujourd'hui,
dans le fond.
Puis
je sais qu'il reste très peu de temps, donc je voudrais vous entendre, dans le
fond, Mme la ministre, sur ce qui
nous attend à cet effet-là et où on est, en fait, en termes de mode de scrutin.
Je sais qu'il n'y a pas de mode de scrutin parfait, et ce n'est pas des
décisions qui sont... Je vous écoute là-dessus.
• (12 h 40) •
Le Président (M.
Ouellette) : Mme la ministre, pour 2 min 30 s.
Mme
de Santis : Merci, M. le Président. C'est intéressant qu'en 1944, en
1966 et 1998 le parti qui a formé le gouvernement
avait moins de votes que le parti qui était en opposition. Et le plus
intéressant, c'était en 1966. Quand j'ai vu les chiffres, ça m'a surprise. En 1966, le Parti libéral a eu
47,29 % des votes mais n'a pas formé le gouvernement. Le gouvernement a été formé par l'Union nationale,
qui a reçu 40,82 % des votes, presque 7 % de moins. Et je crois que
c'est suite à ça qu'il y a eu
énormément de discussions et suite aux résultats de 1972, quand le Parti
québécois est venu et, pour la première fois, s'est présenté, et, là
aussi, on a noté que peut-être on n'était pas heureux par le nombre de sièges
qui avait été reçu. Donc, ça a apporté énormément de discussions et, à la fin,
ça n'a pas donné des résultats.
Je
dois vous dire qu'il y a cinq provinces au Canada qui, depuis 2005, ont entamé
des démarches pour modifier leurs
modes de scrutin et, en quatre juridictions, il y a eu des référendums :
en Ontario, en 2007; en Colombie-Britannique, en 2006 et 2009; et l'Île-du-Prince-Édouard, en 2005. Dans aucun de ces
référendums-là est-ce qu'on n'a choisi de changer le mode de scrutin. En Colombie-Britannique, la
première fois, ils ont voté à presque 57 %, mais il fallait 60 %.
Mais, quand ils ont refait le vote,
ces 57 % sont descendus à 38 %. On parle de cela au gouvernement
fédéral. Le gouvernement fédéral n'a
pas encore annoncé les détails et les modalités de sa consultation. Alors, moi,
je trouve difficile de pouvoir me prononcer sur cette question.
Alors,
s'il n'y a pas un consensus entre les différents acteurs, entre les différents
partis, etc., ça va être difficile de procéder.
L'Institut Broadbent a fait une étude en décembre 2015, et ce qu'ils ont
trouvé, c'est que la réforme électorale canadienne montre que 55 % des répondants veulent un système simple
et facile à comprendre et... simple, facile et stable. Merci.
Le Président (M. Ouellette) : Merci, Mme la ministre. M. le député de
Marie-Victorin, pour votre dernier bloc.
M. Drainville :
Pour combien de temps, M. le Président?
Le Président (M.
Ouellette) : 17 min 30 s.
M.
Drainville : Très
bien. Merci. La ministre est responsable de la transparence, M. le Président,
et c'est la ministre responsable de
la Loi d'accès. Je lui rappelle que c'est elle qui doit mettre en oeuvre
l'engagement que le premier ministre a énoncé lorsqu'il a pris le pouvoir. Quelques
jours, en fait, après son élection, il a déclaré, le premier ministre, qu'il
entend diriger, et je le cite, «le
gouvernement le plus transparent que les Québécois auront eu, avec une
divulgation proactive de renseignements de toutes sortes». Fin de la
citation du premier ministre.
Alors,
M. le Président, nous allons donner l'occasion à la ministre de divulguer,
justement, des renseignements qui
sont d'intérêt public et qui nous permettront, comme élus, et qui permettront
aux gens qui nous écoutent de comprendre comment fonctionnait le financement du Parti libéral à partir de l'année
2003 jusqu'à aujourd'hui. Alors, je vais, M. le Président, parler, donc, de ces documents. En fait, ce sont des rapports
financiers du Parti libéral qui sont déposés auprès du Directeur général des élections en fonction de
la Loi électorale, M. le Président. Donc, ce sont des documents qui doivent
être déposés tel que le prévoit la Loi électorale.
Alors, de 2003
jusqu'à aujourd'hui, M. le Président, c'est une période, donc, qui couvre un
certain nombre d'années, et ce que nous
constatons, lorsque nous regardons les documents qui ont été déposés par le
Parti libéral pour l'année, mettons,
2008, ou 2009, ou 2010, quand on regarde les documents qui sont déposés par le
Parti libéral auprès du DGE, M. le
Président, on voit : «Parti libéral du Québec», avec le chiffre total,
donc, de l'argent qui a été recueilli par le Parti libéral, mais, lorsque vous tournez les feuilles, vous voyez
les comtés, les circonscriptions, Abitibi-Est, Abitibi-Ouest, Acadie, puis tout ce que vous voyez, c'est des
lignes pointillées, on ne connaît pas le montant recueilli par chacune des
circonscriptions. Ça, c'est le document de
2008. Le document de 2009, M. le Président, c'est la même chose : si vous
allez aux circonscriptions, vous
voyez, c'est des colonnes blanches, il n'y a absolument rien. 2010, même chose.
Et, à partir de 2011, changement, M.
le Président, là, on voit, toujours pour le Parti libéral, «Abitibi-Est», on
voit l'argent qui a été collecté.
Donc, les contributions reçues dans le comté d'Abitibi-Est, c'est 4 000...
enfin, 44 770 $, ainsi de suite. Donc, de 2003, année où le gouvernement de Jean Charest
prend le pouvoir, jusqu'en 2010, on n'a pas les chiffres par circonscription,
on n'a pas la ventilation.
Alors,
si vous me permettez, M. le Président, je vais remettre à la ministre les
documents que je viens de vous présenter.
Je veux qu'elle les ait sous les yeux pour que nous puissions continuer cette
intéressante discussion. Alors, je vais aller les lui porter, M. le
Président.
(Interruption)
Je reviens. Alors, la ministre, donc, constatera avec moi, si on prend les
documents que je viens de lui
remettre... donc, 2008, 2009, 2010, il n'y a pas de ventilation par
circonscription électorale. À partir de 2011, il y a la ventilation par circonscription électorale. Je
parle, encore une fois, M. le Président, des circonscriptions libérales. Alors,
nous, on voudrait avoir, M. le Président, la
ventilation par comté de 2003 jusqu'à 2010. On voudrait qu'elle soit rendue
publique. Et elle existe, M. le Président.
Ce n'est pas parce qu'elle n'existe pas dans les documents soumis auprès du DGE
que le Parti libéral n'a pas fait cette
ventilation par circonscription, et la preuve en est, M. le Président, le
document rendu public par l'émission Enquête. On peut retrouver
ce document sur le site de Radio-Canada.
Et, dans ce document
que j'ai remis à la ministre, j'ai même mis des petites couleurs vertes, là, on
voit le financement 2008 et le financement
2009 par circonscription électorale. C'est comme ça, M. le Président, qu'on
sait qu'en 2008 l'objectif pour le
comté de Bonaventure, le comté de Mme Normandeau dans le temps, était de
100 000 $, on le sait, puis
on sait qu'en 2009 c'était 150 000 $. Grâce à ce document du Parti
libéral, M. le Président, on sait ça. C'est pour ça qu'on sait que Mme la députée de Bonaventure a ramassé
165 000 $ en 2008, même si son objectif était de 100 000 $.
Puis elle avait un objectif de
150 000 $ en 2009, elle a ramassé moins que son objectif en 2009. Si
on tourne la page, on voit :
l'objectif du député de LaFontaine en 2009, c'était 150 000 $, on
voit qu'il a ramassé 164 000 $; le député de Louis-Hébert,
c'était 100 000 $ en 2008, c'était 150 000 $ en 2009, il a
ramassé 156 000 $; le député d'Outremont... et tout le reste.
Alors,
M. le Président, la question est fort simple : Est-ce que la ministre de
la transparence, responsable de la Loi
électorale peut s'engager à déposer en cette Chambre les documents, les
rapports financiers du Parti libéral du Québec de 2003 à 2010, avec les
montants reçus par chacune des circonscriptions libérales?
M. Merlini :
M. le Président, une question de règlement.
Le Président (M.
Ouellette) : Oui, M. le député de La Prairie.
M.
Merlini : Simplement un rappel au collègue que, lorsque nous
intervenons dans cette Assemblée, on doit utiliser les titres appropriés. Mme la députée de
Bourassa-Sauvé n'est pas la ministre de la transparence, elle a un titre, et il
faut quand même respecter le titre que la ministre a dans cette Chambre.
Merci, M. le Président.
Le Président (M.
Ouellette) : Merci, M. le député de La Prairie. Mme la ministre,
pour votre réponse.
• (12 h 50) •
Mme
de Santis : Merci beaucoup, M. le Président. D'abord, j'aimerais
rappeler à tout le monde qu'on est ici pour étudier les crédits 2016‑2017 et qu'on est loin de ça. Deuxièmement, je
suis ici pour l'étude des crédits et je représente le gouvernement
du Québec, et ici on me pose des questions comme si je pouvais répondre au nom
du Parti libéral du Québec.
Ayant
souligné ça, j'aimerais aussi souligner
que les états financiers qui ont été déposés de 2003 à 2010 l'ont été conformément aux exigences du Directeur général des élections et les rapports qui ont été déposés indiquent le nom et
le montant que chaque personne a
contribué au Parti libéral du Québec par année. Donc, si on veut regarder la liste de
tous les donateurs avec tous les
montants qu'ils ont contribués, le Directeur
général des élections a déjà ces
renseignements, et c'est public.
C'est
le Directeur général des élections qui détermine comment les états financiers sont
déposés. Je peux dire que, depuis 2011... Et c'est pour ça qu'on me
montre tous ces documents avec des points et sans point, avec des chiffres et sans des chiffres, c'est qu'en 2011 les
exigences du Directeur général des
élections ont changé, et le Parti libéral du Québec a répondu en donnant
ses états financiers avec les renseignements demandés, qui étaient les contributions par comté.
Le
Président (M. Ouellette) : M. le député de Marie-Victorin.
M. Drainville : Mais, M.
le Président, en tout respect, ce
n'est pas une réponse à la question que j'ai posée. La question que j'ai posée, c'est
fort simple, M. le Président. Ça existe, les montants recueillis par chaque circonscription libérale. Ça existe, ces documents-là, la preuve, c'est que Radio-Canada les a rendus publics pour les années 2008‑2009. Le problème, c'est que le Parti libéral n'a pas rendu publics ces documents-là auprès du Directeur général des élections,
il a gardé pour lui ces chiffres-là.
C'est comme ça, parce que ce document-là a été rendu public pour 2008‑2009,
qu'on a su qu'il y avait des ministres non seulement à
100 000 $, mais des ministres à 150 000 $.
Moi,
ce que je dis, M. le Président, ce nous disons, c'est qu'à partir du moment où
le chef du Parti libéral et premier
ministre dit : On va être le gouvernement le plus transparent de l'histoire, et qu'on a
devant nous la ministre responsable de la loi d'accès à l'information, celle qui doit veiller — c'est sur son site Internet — à la bonne efficacité des institutions
démocratiques québécoises — plus
particulièrement, dans son cadre électoral, elle doit élaborer les orientations
gouvernementales en matière de transparence
des institutions — nous, ce
qu'on lui dit, c'est que c'est un très beau test de sa volonté de transparence que de rendre publics aux Québécois les
documents du Parti libéral qui existent, qu'elle les rende publics pour que tous les Québécois puissent
voir, à partir de 2003 jusqu'en 2010, quels étaient les objectifs de chacun
des députés et, en particulier, de chacun
des ministres jusqu'en 2010, pour qu'on sache notamment, M. le Président, le
système des ministres à 100 000 $, là, il a commencé en quelle année.
On ne le sait pas, ça, M. le Président.
Alors,
tout à l'heure, je lui ai demandé de condamner le système des ministres à 100 000 $,
elle m'a dit : Non, ce n'est pas
mon travail de le faire, ou je ne sais pas quoi. Mais là je me dis : Bon,
bien, si elle ne veut pas condamner le
système des ministres à 100 000 $ puis à 150 000 $, est-ce
qu'elle peut au moins faire la lumière sur ce système-là en rendant publics les documents du Parti libéral,
les rapports financiers du Parti libéral qui existent et qui ne sont pas
publics, qui n'ont pas été rendus publics auprès du DGE?
Alors,
est-ce qu'elle s'engage à rendre publics les documents, M. le Président, qui
nous permettraient de savoir quels étaient les objectifs de chacun des
ministres libéraux à partir de 2003?
Le Président (M.
Ouellette) : Mme la ministre.
Mme
de Santis : M. le Président, mon collègue m'a présenté, avec une
liste, une comparaison de financement 2009, 2008. Je ne sais pas qui a
dressé cette liste ou d'où viennent les chiffres, je ne sais pas si c'étaient
des chiffres qui parviennent du Directeur
général des élections, je n'ai aucune idée d'où ce document parvient et je n'ai
aucune idée de la véracité du document. Alors, ça, je ne le sais pas.
M. Drainville :
...du Québec.
Mme
de Santis : Que ce soit marqué «Parti libéral du Québec» n'indique pas
que ça parvient du Parti libéral du Québec. Je pourrais taper moi-même
«Parti québécois», et je n'aurais aucune... je ne sais pas d'où ça vient.
Deuxième
chose, les règles de l'époque pré-2011 ont été respectées. Les rapports
financiers qui ont été déposés respectaient les exigences du Directeur
général des élections. Aujourd'hui, je peux vous dire que moi, j'ai collecté, en 2013, 21 010 $, et, en 2014,
21 385 $, et, en 2015, environ 10 500 $. Je respecte, nous
respectons les règles qui sont en place aujourd'hui.
Le Président (M.
Ouellette) : M. le député de Marie-Victorin.
M. Drainville :
M. le Président, le document que je lui ai remis, son existence a été confirmée
par le Parti libéral du Québec. Il y
a un porte-parole du Parti libéral du Québec qui a reconnu l'existence du
document, M. le Président. Donc, l'origine,
la provenance du document n'est pas remise en question par personne, personne,
personne. Il n'y a personne, d'ailleurs,
qui a nié les chiffres depuis qu'ils ont été rendus publics par l'émission Enquête,
par Radio-Canada, il n'y a personne, M. le Président, qui a remis en
question les chiffres.
Moi,
ce que je dis, M. le Président, c'est : Pourquoi la ministre ne veut-elle
pas rendre publics ces documents? Pourquoi?
Qu'est-ce qu'ils pourraient contenir qui pourrait être nuisible au Parti
libéral du Québec? Puis, s'il n'y a vraiment aucune matière à nuisance, si vraiment le Parti libéral veut montrer
toute sa transparence et qu'il n'a rien à cacher, bien, qu'il rende
publics les documents. Je le demande à la ministre des Institutions
démocratiques, M. le Président, là.
Le Président (M.
Ouellette) : Mme la ministre.
Mme
de Santis : M. le Président, nonobstant ce que mon collègue dit, moi,
je ne connais pas la véracité de ce document,
parce que ça m'a été remis ici aujourd'hui. Moi, je ne l'ai jamais vu. Il n'y a
personne au Parti libéral du Québec qui
m'a dit : C'est notre document. Je n'ai pas entendu ça nulle part. Si
quelqu'un, un porte-parole a fait une déclaration, moi, je ne suis pas
au courant.
Je
ne peux pas commenter sur des choses que je ne connais pas et sur lesquelles je
n'ai aucun contrôle. Je sais qu'aujourd'hui
nous avons des lois en place, et on s'assure que ces lois soient respectées. On
demande à chaque comté... pardon, à
chaque député, soit ministre, pas ministre, que l'objectif soit
10 000 $ pour tout le monde. Et, peut-être, dans les comtés où il n'y a pas de député, c'est
peut-être un montant moindre, d'environ 5 000 $, mais pour les
députés c'est le même objectif. Je
peux parler d'aujourd'hui. Je n'étais pas là en 2003, je n'étais pas là en
2010, je n'ai jamais vu ces documents et je ne peux pas me permettre de
commenter là-dessus.
Le Président (M.
Ouellette) : M. le député de Marie-Victorin.
M.
Drainville : M. le
Président, je veux juste vous dire que je suis extrêmement déçu et franchement
je suis surpris qu'une nouvelle
ministre comme la députée de Bourassa-Sauvé, qui arrive dans un nouveau
ministère, qui a la chance de laisser
sa marque, qui a la possibilité, l'occasion de rompre avec le passé, de montrer
qu'elle fait partie d'une nouvelle génération
d'élus au Parti libéral et qu'elle a bien l'intention de montrer que le Parti
libéral du Québec est sous une nouvelle administration... Je lui donne l'occasion de le faire, M. le Président,
et elle ne saisit pas cette occasion-là. Je trouve ça surprenant puis je trouve ça décevant. Puis je me
pose la question : Pourquoi? Pourquoi ne pas prendre l'engagement de
rendre publics les chiffres, les montants
recueillis par les ministres libéraux à partir de 2003? Pourquoi? Je ne
comprends pas, M. le Président.
Bon. Il me reste deux minutes. On va changer de
sujet, parce que visiblement on n'ira pas plus loin. J'ai une question toute simple, M. le Président :
Est-ce que la ministre des Institutions démocratiques est favorable à ce
qu'Hydro-Québec soit assujettie à la
Loi du Protecteur du citoyen? On sait que c'est une demande qui a été formulée
par la Protectrice du citoyen. Elle
dit que ce serait très utile pour nombre de nos concitoyens qui ont des
plaintes. Selon la protectrice, il y aurait jusqu'à 1 500 demandes qui seraient reçues annuellement par la
Protectrice du citoyen qui concernent Hydro-Québec, et, malheureusement, bon, elle essaie d'aider ces
citoyens-là, mais elle n'a pas l'autorité, dans les faits, de traiter de ces
cas-là, parce qu'Hydro-Québec n'est pas assujettie à la loi de la
Protectrice du citoyen.
Je vous
rappelle, M. le Président, que, sous le gouvernement du Parti québécois, le
Vérificateur général a reçu tous les
pouvoirs pour aller faire des vérifications à Hydro-Québec sans demander
l'autorisation d'Hydro-Québec. Et, dans
le fond, ce qu'on voudrait, c'est que la ministre de la démocratie prenne un
engagement et dise : Bien, moi, je vais travailler avec la Protectrice du citoyen, puis je pense que tous les
partis d'opposition seraient d'accord pour qu'on change la Loi sur le Protecteur du
citoyen et qu'on permette donc à la
protectrice d'avoir ce mandat-là de se saisir des cas, de se saisir des
plaintes qui sont adressés par les citoyens à l'égard, donc, d'Hydro-Québec.
Alors, est-ce
qu'elle est d'accord pour élargir le mandat du Protecteur du citoyen afin d'y
assujettir Hydro-Québec?
• (13 heures) •
Le Président (M. Ouellette) : 30
secondes pour la réponse, Mme la ministre.
Mme de
Santis : Merci, M. le Président. Ce que je peux affirmer, c'est qu'on est en train d'étudier cela, cette question, avec la
Protectrice du citoyen, et, suite à cette étude, une décision sera prise,
et on va participer avec l'ensemble
des députés pour déterminer quel sera le résultat après cela.
Le
Président (M. Ouellette) : Merci, Mme la ministre. M. le
député d'Argenteuil, c'est bon pour vos présences, à vous la parole.
M. St-Denis : Merci, M. le Président.
Alors, peut-être changer un petit peu de sujet, parce que moi, j'ai une préoccupation, je voulais juste savoir, Mme la
ministre, une question bien simple
quant à la création de votre ministère.
Juste m'expliquer le fait qu'on ait scindé
les responsabilités du ministère
des Relations canadiennes pour créer un cabinet ministériel
supplémentaire.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre.
Mme de
Santis : M. le Président, comme ceux qui nous écoutent peuvent s'en
apercevoir, nous avons énormément de
travail à faire dans le ministère. On a un projet de loi sur le lobbyisme qui
devrait être étudié avec des consultations particulières bientôt, mais avant ça, parce que ce projet de loi touche
aussi les OBNL et il y a eu toute une réaction dans la communauté des OBNL, nous avons demandé au
commissaire de faire une étude, une étude qu'il a menée. Il a rencontré 54, 55 organismes et, durant ces consultations, il
a reçu plus qu'une centaine de mémoires, et son rapport sera prêt à la mi-mai. Suite à ce rapport, dont on va prendre
connaissance, on devrait procéder avec les consultations particulières sur le
projet de loi. Il y a cela.
Il y a aussi
le fait qu'il y a eu des orientations sur la loi à l'accès à l'information et
la protection des renseignements personnels
dans le secteur public qui ont été publiées l'année dernière et dont il y a eu
des consultations aussi en automne dernier,
et maintenant on est en train de faire un suivi aux consultations pour sortir
une loi qui va remplacer la loi existante. Ça, ça prend énormément de
temps et d'énergie.
Il y a aussi ce qui est important pour le
public, c'est les démarches qu'on fait pour mettre en oeuvre les recommandations de la commission Charbonneau, et
là-dessus il y a des recommandations qui touchent la Loi électorale, qui
touchent le Code d'éthique et de déontologie, qui touchent la transparence.
Tout à l'heure, mon collègue le leader de l'opposition
officielle parlait de transparence. Je souhaite fortement qu'on va travailler
ensemble pour s'assurer qu'on met en oeuvre les recommandations de la
commission Charbonneau — et
pas seulement mon collègue qui est leader de l'opposition officielle, mais
aussi mon collègue qui est député de Deux-Montagnes.
Alors, il y a
énormément de travail à faire. Et beaucoup de ce travail a été commencé par la
personne qui était là avant moi, qui
est le leader du gouvernement. Mais, pour qu'on puisse réussir à faire le
nécessaire dans les plus brefs délais, je
crois que c'était peut-être très utile
de créer ce cabinet, qui correspond un peu au cabinet qui existait au moment
que mon collègue le leader de l'opposition officielle... quand il était ministre
lui-même du même ministère.
Et, si on
fait une comparaison intéressante entre ce qui était les dépenses à l'époque et
ce qui sont les dépenses pour mon
cabinet, on va voir qu'à l'époque l'équipe qu'avait mon collègue avait 1,4 million de dollars dans leur budget, dont
785 000 $ était pour la masse salariale. Cela compare à
500 000 $ aujourd'hui pour mon ministère. À l'époque, il y avait 419 600 $ dans le budget de
fonctionnement, comparativement à 259 600 $ dans le budget
aujourd'hui ou dans les crédits
aujourd'hui. Il y avait 200 000 $ en discrétionnaire à l'époque;
aujourd'hui, c'est 54 600 $. On doit parler aussi du montant
important qui a été dépensé pour faire la promotion de la fameuse charte qui a
divisé tant de Québécois, c'était un budget de 1,8 million de dollars,
alors que ce projet n'a jamais été adopté par l'Assemblée nationale.
Si on voit le montant des crédits pour...
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Marie-Victorin.
M.
Drainville : C'est
important d'ajouter que ça faisait partie d'un exercice de consultation, la
consultation la plus large de l'histoire du Québec, M. le
Président.
Des voix : ...
M. Drainville : La
consultation la plus large, la plus importante de l'histoire du Québec.
Le Président
(M. Ouellette) : Ce n'est
pas une question de règlement, M. le député de Marie-Victorin. Mme la ministre.
Mme de
Santis : Nous faisons beaucoup de consultations quand... on va en
faire pour la loi sur l'accès à l'information,
on va le faire pour la loi sur le lobbyisme. Alors, on fait beaucoup de
consultations et on va faire plus, parce que je crois fermement dans la participation citoyenne. Alors, à
l'époque, 1,8 million de dollars dépensés pour la promotion de la
charte, ça me semble avoir été beaucoup.
Je crois
que c'est un petit cabinet, un cabinet qui a beaucoup de projets, un cabinet
qui doit s'assurer que la démocratie fonctionne — la démocratie au Québec — que le gouvernement soit ouvert et
transparent. Et donc je crois que j'ai répondu à ta question. Ou tu
voulais autre chose?
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député.
M. St-Denis : Ça complète très bien,
Mme la ministre. Merci.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député d'Ungava.
M. Boucher : Bonjour, M. le
Président. De combien de temps je dispose?
Le Président (M. Ouellette) : Vous
avez 12 minutes, M. le député d'Ungava.
M. Boucher : 12 minutes. On va
essayer de vivre avec 12 minutes.
Alors, M. le
Président, permettez-moi de saluer, premièrement, Mme la ministre, mes
collègues un salut spécial aux gens du comté d'Ungava. (S'exprime dans
une langue autochtone). Bon midi à tous.
Je voudrais
revenir un petit peu, là, sur le propos, là, du député de Marie-Victorin, M. le
leader de l'opposition officielle,
concernant le financement et puis, bon, les ministres à 100 000 $,
etc. Je voudrais lui rappeler qu'à une certaine époque il y avait l'actuel chef de la deuxième opposition qui était
membre du gouvernement du Parti québécois. À une certaine époque, M. le chef de la deuxième opposition était ministre de
la Santé. C'est sûr qu'à cette époque-là la loi n'était pas la même qu'aujourd'hui, les règles de
financement des partis politiques n'étaient pas les mêmes qu'aujourd'hui. Puis
je ne veux pas accuser personne de
rien, mais je vais quand même laisser le soin à ceux qui nous écoutent de tirer
leurs propres conclusions suite au questionnement que je vais soulever.
Lors d'un
événement de financement, entre autres, M. le ministre de l'époque s'était fixé
un objectif de 100 000 $, pas
en un an, M. le Président, pas en un mois, pas en une semaine; tenez-vous bien,
en une soirée. Comment ramasser 100 000 $
en une soirée? C'est bien simple, on organise un souper gastronomique. J'espère
pour les gens, au prix que ça a coûté,
que ce n'étaient pas des toasts aux cretons. Je n'ai rien contre les cretons,
j'aime bien ça, j'en mange régulièrement. Mais c'était un souper de 100 couverts à 1 000 $ du couvert où
les gens de l'industrie pharmaceutique étaient invités. Ça a donné 100 000 $ en une soirée. Comme
disait mon défunt père, qui est sûrement à quelque part ici en haut en train de
nous regarder...
• (13 h 10) •
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Marie-Victorin.
M.
Drainville :
...déposer, avec l'appui unanime des députés ici, le document qui est sur le
site du Directeur général des
élections, c'est tous les dons à la campagne de M. Péladeau lors de la campagne
à la chefferie. Tous ces dons sont déjà publics, ils sont sur le site du
DGE.
Est-ce que je peux déposer le document, M. le
Président?
Le
Président (M. Ouellette) :
Il est déjà déposé, M. le député de Marie-Victorin, puis je ne pense pas que
c'était le sujet dont le collègue d'Ungava parlait.
Une voix :
...
Le
Président (M. Ouellette) :
Non, il parlait du chef de la deuxième opposition quand il était ministre de la
Santé.
M. Drainville : ...venir sur
autre chose, ça fait que je voulais déposer le document.
Le Président (M. Ouellette) : Bon.
Bien, ce n'est pas une question de règlement. M. le député d'Ungava.
M. Boucher : ...mon cher collègue,
le temps file rapidement, puis je voudrais garder mon temps.
Alors, comme
mon défunt père me disait souvent : Dans la vie, le calcul vaut le
travail. Ça fait qu'on peut dire que
100 000 $ en une soirée, c'est pas mal plus rentable qu'essayer de
ramasser 100 $ en mille soirées, comme on dit.
Donc, est-ce
que c'était légal? Tout à fait. Selon les règles de l'époque, c'était légal.
Est-ce que les règles de l'époque ont
été appliquées de façon légale? Je suppose que oui. Je n'ai pas de raison de
prétendre le contraire. Est-ce que c'était moral? On pourrait en discuter, hein? Est-ce que c'était éthique, pas
dans le sens du Code d'éthique à l'article 3.1, non, l'éthique dans un sens large? Est-ce que c'était
éthique avec un grand E? J'en suis moins sûr un petit peu. Est-ce que le
ministre de la Santé de l'époque s'était
placé, pour reprendre les propos du leader de l'opposition officielle, en situation
de danger, de vulnérabilité par rapport à
ces gens-là de l'industrie pharmaceutique, qui venaient de payer
1 000 $ le couvert pour
souper en compagnie puis entendre les propos du ministre de la Santé de
l'époque? Vous savez, le ministre de la Santé de l'époque, qui est aujourd'hui le chef de la deuxième
opposition, est un individu de commerce agréable, comme on dit dans les bons salons, avec qui c'est
sûrement très plaisant de passer une soirée, mais, bon, ces gens-là ont payé
cette somme-là pour avoir l'occasion
d'avoir quelques minutes en compagnie du ministre en question pour passer les
messages, c'était bien clair.
Est-ce qu'on
ferait ça aujourd'hui? Si on regarde ça avec les yeux d'aujourd'hui, est-ce que
c'est correct? Pas du tout. La
preuve, les règles ont changé. Mais il n'en demeure pas moins que
100 000 $ avaient été amassés en une seule soirée à l'époque, en 2002, puis je n'entends pas
beaucoup le député de Marie-Victorin, là, condamner ça puis dire que... Est-ce que je prétends que tout ça, c'est de
l'argent sale qui était... Pas du tout, je veux dire, jusqu'à preuve du
contraire, tout ça était «legit»,
comme on dit en latin, et puis pour les règles de l'époque ce n'était
absolument pas condamnable. Le chef
de l'opposition officielle... de la deuxième opposition, pardon, actuel...
J'entendais tantôt le député de Deux-Montagnes qui disait : Il faudrait que le Parti libéral se refasse une
virginité, puis etc., tout ça en prétendant encore une fois que des
enquêtes vont démontrer de façon bien évidente qu'il y a de l'argent sale puis
qu'il y a eu des élections faites avec de l'argent sale.
Je
rappellerais au député de Deux-Montagnes que son chef actuel avait fait des
activités de financement, il y a quelques
années, où, en deux soirs, pas en deux mois, pas en deux ans, en deux soirs,
ils avaient ramassé 200 000 $, en deux soirs — 400 $ du billet pour 500
personnes — pour
assister à un cocktail en compagnie du chef de la deuxième opposition actuel. J'espère que c'était du bon
vin, j'espère qu'au moins on servait des grands crus, que ce n'était pas du vin
de dépanneur, quoique dans les dépanneurs on
trouve maintenant de bons vins. Est-ce qu'on doit supposer que tout ça, ça
a été fait illégalement, que c'était de
l'argent sale, qu'il y avait du financement sectoriel? Est-ce qu'on doit
extrapoler jusque-là? Pas du tout.
Jusqu'à preuve du contraire, tout ça est fait dans les règles applicables à
l'époque. Si on regarde ça avec les
yeux d'aujourd'hui, est-ce que c'est correct de faire une chose comme ça? Pas
du tout. La preuve, les règles ont changé.
Donc, encore
une fois, j'aimerais que, bon, les deux oppositions regardent un petit peu dans
leur cour quelles étaient leurs
pratiques avant de regarder dans la cour du voisin. C'est sûr que dénoncer les
mauvaises herbes... Ça va être bientôt le
temps des pissenlits, là, M. le Président. Chaque voisin va regarder dans le
parterre de l'autre pour contempler ses belles fleurs jaunes mais va oublier ce qui pousse dans son propre parterre. Donc, j'aimerais que chacun prenne soin
de son jardin avant de s'occuper du jardin des autres.
Ça m'amène tranquillement à vous parler des organismes d'éducation politique, M. le
Président. Qu'est-ce que des organismes d'éducation politique? C'est des organismes qui sont voués, bon, à
étudier certaines facettes de la politique
québécoise, à faire la promotion de certaines choses.
Le
24 février 2016, l'institut de recherche sur l'autodétermination des
peuples et l'indépendance nationale, l'IRAI, était lancé. Il est
possible que cet organisme adresse une demande de reconnaissance à titre
d'organisme d'éducation politique fondée sur les dispositions de la loi sur l'impôt
ou encore comme organisme de bienfaisance auprès de l'agence de revenu du Canada et du Québec.
On sait que la loi sur l'impôt prévoit un régime applicable spécial pour les
organismes d'éducation politique. Ce régime-là permet à des organismes qui ne se
qualifieraient pas comme organismes de bienfaisance
d'obtenir tous les avantages apparentés à ce statut. Qu'est-ce que, bon, l'institut de recherche sur l'autodétermination des peuples et l'indépendance nationale? C'est, en
fait, l'institut sur l'indépendance qui a été lancé par le chef
de l'opposition actuelle, plus précisément le 24 février 2016. Encore
une fois, on va parler d'éthique et de morale, M. le Président. On titre dans le journal — laissez-moi une seconde, je cherche le
titre — dans La Presse,
c'est ça, sous la plume d'Alexandre
Robillard : L'institut de la souveraineté — on cite le nom du chef de l'opposition
officielle — paie
de sa poche pour un chasseur de têtes, trouver un directeur général pour l'institut en
question, article qui a été repris par M.
Régys Gagnon le 11 février dans Le Journal de Montréal, la même
chose, et qui a été aussi repris, bon, dans le journal Le Devoir.
Tout ça, on
sait que, bon... sans trop vouloir entrer dans les détails, je pense que c'est
de notoriété commune que le chef de
l'opposition actuel est l'heureux héritier d'un empire. Grand bien lui fasse,
je ne suis pas jaloux, je ne changerais pas de vie avec lui pour quelque raison que ce soit, tant mieux pour
lui. Mais est-ce que c'est bien, est-ce que c'est éthique, est-ce que c'est moral
qu'un individu chef de parti politique, par surcroît, finance de sa poche un
institut soi-disant indépendant qui fera la promotion de l'option numéro
un du parti qu'il dirige? Imaginez deux secondes, là, M. le Président, qu'un ministre de l'Énergie, par exemple, ferait un don
important ou paierait de sa poche le chasseur de têtes pour trouver un président d'un organisme faisant la promotion du
pétrole, vous diriez : Voyons! ça n'a aucun sens. Imaginez un ministre
de l'Environnement qui ferait un don
important de sa poche à Greenpeace, ça n'a aucune importance... ça n'a aucun
bon sens, pardon. Donc, c'est la même chose.
Tout ça,
est-ce que c'est légal? À ce moment-ci, je crois que oui. Je ne pense pas qu'il
y a rien d'illégal dans ça. Est-ce
que tout ça est moral? J'en suis moins sûr. Le chef du parti peut-il financer
au-delà de 100 $ un organisme qui fait la promotion de l'article 1 du
Parti québécois? Puis, de surcroît, pour être sûr que l'institut en question
soit bien lancé et puis soit sur les
rails, le chef actuel dit qu'il fera un don substantiel de sa poche pour faire
l'organisation de départ. Encore une fois, on peut questionner tout ça.
Donc, sur les
règles actuelles, on peut demander, comme je vous disais tantôt, au ministère
pour que l'organisme en question soit
reconnu, aux fins de la loi sur l'impôt, auprès du secrétariat d'accès à
l'information, de la réforme des institutions
démocratiques, qui fait des vérifications dans les demandes de reconnaissance
qui lui sont adressées. Alors, j'aimerais
savoir, Mme la ministre, qu'est-ce que le SRID, là, le secrétariat à l'accès à
l'information puis à la réforme des institutions
démocratiques, peut faire pour élaborer des outils qui soient le plus objectifs
possible pour formaliser puis encadrer davantage le traitement des
demandes de reconnaissance d'organismes d'éducation politique?
Le Président (M. Ouellette) :
...beaucoup d'outils, il reste une minute.
• (13 h 20) •
Mme de
Santis : Merci, M. le Président. Quant à la conformité avec la Loi
électorale, ça, c'est le Directeur général des élections qui peut le
déterminer. Et, lors de son audition devant la Commission des institutions le
1er février dernier, il a laissé
entendre qu'il n'y avait pas suffisamment d'éléments d'information pour statuer sur
la conformité d'un éventuel institut de recherche. Alors, cela, c'est le
Directeur général qui pourra répondre.
Maintenant,
quant à si, oui ou non, cet institut peut appliquer comme organisme d'éducation
politique, alors, au secrétariat, on a constaté qu'il
n'y avait pas de procédure établie
quant au traitement de demandes formulées conformément à l'article
985.36 de la Loi sur les impôts. Et alors j'ai mandaté le secrétariat :
que soient élaborés des outils pour formaliser
et encadrer davantage le traitement de ces demandes de reconnaissance
d'organismes d'éducation politique.
Ce travail est en train d'être fait. Une
fois que nous en connaissons les règles, on va les rendre publiques, parce que
les décisions vont être prises d'une façon transparente.
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
Mme la ministre. C'est tout pour notre période de crédits.
Document déposé
Je dépose les réponses aux demandes de
renseignements de l'opposition. Au sein de la commission, je vous remercie pour votre collaboration, M. le député de Marie-Victorin, M. le député de
Deux-Montagnes, MM. les députés de Vimont, Ungava, La Prairie...
Une voix : ...
Le Président (M. Ouellette) :
...Argenteuil, et Mme la députée de Crémazie, qui avez rehaussé notre débat.
Mme la ministre, merci.
La commission...
Une voix : ...
Le Président (M. Ouellette) : Oui.
Une voix : ...hein?
Le
Président (M. Ouellette) :
Non. La commission ajourne ses travaux à demain, le jeudi
14 avril 2016, après les affaires courantes, vers 11 heures, où
elle entreprendra l'étude du volet Conseil exécutif des crédits budgétaires du
portefeuille Conseil exécutif. Merci.
(Fin de la séance à 13 h 22)