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Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le jeudi 19 juin 2014 - Vol. 44 N° 2

Ministère du Conseil exécutif


Ministère du Conseil exécutif, volet Réforme des institutions démocratiques


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Table des matières

Conseil exécutif

Remarques préliminaires

M. Philippe Couillard

M. Stéphane Bédard

Discussion générale

Adoption des crédits des programmes 1 et 2

Réforme des institutions démocratiques

Discussion générale

Autres intervenants

M. Gilles Ouimet, président

M. Jean-Marc Fournier

M. François Legault

Mme Agnès Maltais

M. David Birnbaum

M. Serge Simard

Mme Caroline Simard

Mme Nicole Ménard

M. Guy Ouellette

M. Marc Tanguay

M. Benoit Charette

Mme Nathalie Roy

M. Jean Rousselle

*          M. Juan Roberto Iglesias, ministère du Conseil exécutif

*          Témoin interrogé par les membres de la commission

Note de l'éditeur :  La commission a aussi siégé en soirée pour l'étude des crédits du ministère de de la Sécurité publique. Le compte rendu en est publié dans un fascicule distinct.

Les crédits du volet Implantation de la stratégie maritime du ministère du Conseil exécutif ont été étudiés à la Commission des transports et de l'environnement le même jour.

Les crédits du volet Jeunesse du Conseil exécutif ont été étudiés à la Commission des relations avec les citoyens le 20 juin 1014.

Journal des débats

(Huit heures trente-six minutes)

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : À l'ordre! Alors, bon matin. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte. Et je demanderais à tout le monde de fermer les sonnettes et sonneries de leurs téléphones cellulaires.

La commission est réunie afin de procéder à l'étude du volet Conseil exécutif des crédits budgétaires du portefeuille Conseil exécutif pour l'exercice financier 2014‑2015.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Boucher (Ungava) sera remplacé par Mme Simard (Charlevoix); M. Fortin (Sherbrooke), par M. Birnbaum (D'Arcy-McGee); M. Merlini (La Prairie), par M. Simard (Dubuc); M. Rousselle (Vimont), par Mme Ménard (Laporte); M. Bérubé (Matane-Matapédia), par M. Bédard (Chicoutimi); Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve), par Mme Maltais (Taschereau); M. Lemay (Masson), par M. Legault (L'Assomption); et Mme Roy (Montarville), par M. Bonnardel (Granby).

Conseil exécutif

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. Alors, nous allons entreprendre, dès maintenant, ce bloc d'étude et nous allons débuter par les remarques préliminaires.

Remarques préliminaires

M. le premier ministre, vous disposez d'un temps de 20 minutes pour vos remarques préliminaires, et je vous cède la parole.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Merci, M. le Président. Je veux à mon tour saluer tous les collègues de l'Assemblée nationale présents avec nous ce matin, de même que mesdames et messieurs de l'administration publique qui nous accompagnent aujourd'hui.

On le sait, M. le Président, l'étude des crédits constitue un moment important de la vie parlementaire et démocratique parce que, chaque responsable d'un portefeuille ministériel, pour cette personne, lui ou elle, c'est le moment de rendre compte de l'utilisation qui a été faite des fonds publics. On a été élu par les citoyens pour bien gérer les deniers publics, pour les utiliser en fonction des priorités que nous nous sommes engagés à mettre en oeuvre. On est donc imputables de notre action, et c'est cette imputabilité qui est à la base même de la démocratie.

L'étude des crédits, c'est aussi, et j'espère que ce sera le cas encore cette année, un exercice stimulant parce qu'elle fournit l'occasion à chaque membre du gouvernement de dresser un bilan de ce qui a été réalisé et de présenter la vision gouvernementale de l'action à venir. Dans le cas du ministère du Conseil exécutif, l'étude des crédits permet d'avoir une vue d'ensemble des réalisations et des initiatives futures.

Je suis donc très fier de rendre compte aujourd'hui de l'action du gouvernement que je dirige depuis maintenant deux mois et d'indiquer le sens de nos prochains efforts. Deux mois seulement se sont écoulés depuis que la population nous a confié la responsabilité de gouverner le Québec. Dès le lendemain du 7 avril, nous nous sommes mis au travail, et ces deux mois, on le sait, ont été fort remplis et nous ont permis déjà de commencer à faire avancer le Québec.

Lors du discours d'ouverture, le 21 mai dernier, j'avais comparé le travail que nous entreprenions à la construction d'un édifice. On a donc résolument entamé cette construction. On a clairement indiqué nos priorités et nos orientations et, en même temps, on a mis en place les bases de notre action et engagé un certain nombre d'initiatives majeures.

On l'a fait, et je pense qu'il faut s'en féliciter tous et toutes autour de la table, je crois, en établissant, malgré quelques incidents isolés, dirons-nous, un climat de travail et de discussions, à l'Assemblée nationale et sur la scène politique, qui a été marqué avant tout par la transparence et l'écoute des autres. Je pense qu'on a démontré à la population que nous savons où nous allons, dans le respect de nos engagements électoraux et en toute clarté.

Si je reprends l'image utilisée lors du discours d'ouverture, l'édifice que nous construisons va s'appuyer sur deux colonnes robustes, soit une économie en croissance et des finances publiques saines et équilibrées. Ces colonnes permettent, bien sûr, de soutenir la toiture de l'édifice, constituée des valeurs communes de notre société, une société juste, équitable, inclusive, ouverte sur le monde, assurant la promotion de notre identité au Canada comme sur le reste de la planète. Cet édifice repose sur des fondations qui sont déjà solides, faites de respect, de transparence et d'intégrité.

La clarté et la transparence ont marqué notre action dès le début de la session. Nous avons demandé à un comité d'experts d'abord puis au Vérificateur général de mettre à la disposition du public les informations les plus rigoureuses sur l'état des finances publiques. Le rapport de MM. Godbout et Montmarquette puis le rapport du Vérificateur général ont permis aux citoyens d'avoir rapidement l'heure juste sur notre situation budgétaire. Lors du discours d'ouverture, j'ai souligné que la transparence était la meilleure façon de garantir l'intégrité dans l'utilisation des fonds publics, et nous nous sommes engagés à être transparents dans la gestion de l'État.

• (8 h 40) •

Nous avons également pris, dans ce domaine, d'autres initiatives. Avec les collègues de l'opposition, nous avons déposé le projet de loi concernant l'inspecteur général de la ville de Montréal, projet de loi qui a été adopté la semaine dernière par l'Assemblée nationale. Nous avons annoncé dans le budget la publication d'un rapport préélectoral sur l'état des finances publiques au plus tard trois mois avant la tenue des élections générales. Nous avons également annoncé dans le budget un projet de loi confiant au Vérificateur général le mandat d'examiner ce rapport. On continuera donc dans cette voie. Le but est d'offrir aux citoyens un gouvernement ouvert et transparent, ce qui est la clé de l'intégrité et le fondement d'institutions démocratiques fortes.

Cette transparence est accompagnée, je crois que beaucoup l'ont noté, de l'instauration d'un nouveau climat à l'Assemblée nationale. On a vécu, au cours de cette première session, deux situations illustrant ce changement de climat. Nous nous étions engagés à ce que le projet de loi sur les soins de fin de vie soit repris au point où il était resté à la fin de la précédente législature, et c'est ce qui s'est produit. Il a été réintroduit par le gouvernement, mais de concert avec l'opposition officielle, ce qui est rare dans notre vie parlementaire. Et, au terme d'un vote de conscience, le projet a été adopté. Il fait maintenant partie de notre bilan de session, et c'est notre bilan commun, ce projet de loi. Autre première, le gouvernement a accepté le dépôt d'un projet de loi de député visant à modifier le Code civil pour protéger des droits des locataires aînés. Nous nous étions engagés à accepter un tel dépôt lors de la campagne électorale. Je crois que cela illustre également le changement de ton, qui, nous l'espérons, va se poursuivre.

Cette session a été marquée par la cohérence et par l'efficacité. Dès notre arrivée au pouvoir, nous avons souligné que l'action du gouvernement serait axée sur la relance de l'économie et le redressement des finances publiques. En même temps, nous avons rappelé notre engagement de protéger les services à la population, soit, en premier lieu, la santé, l'éducation et les services aux plus vulnérables. La relance de l'économie s'impose pour accroître la richesse. On le sait, il faut créer des emplois, faire bénéficier les Québécois d'un modèle social soutenable. En 2013, la croissance de l'économie du Québec s'est ralentie. Certains analystes ont même estimé que cette économie était, toutes choses étant relatives, en panne. Le Québec ne profitait pas de la reprise en cours chez nos principaux partenaires.

Lors de la formation du Conseil des ministres, j'ai voulu marquer clairement l'importance que j'attachais aux dossiers de développement économique. Nous avons remis en place un ministère exclusivement voué au développement économique, le ministère de l'Économie, de l'Innovation et des Exportations. Nous avons créé des postes de ministre de la Forêt, de la Faune et des Parcs, de ministre délégué aux Petites et Moyennes Entreprises, à l'Allègement réglementaire et au Développement économique régional de même que de ministre délégué aux Transports et à l'Implantation de la stratégie maritime. Le Plan Nord a été confié explicitement au ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles.

Nous avons ainsi fait preuve de cohérence en structurant les ministères à vocation économique autour des cinq grands axes que nous avons commencé à déployer par la suite. D'abord, nous apportons de nouveaux appuis aux investisseurs privés en mettant l'accent sur les PME et notamment les PME manufacturières. Nous commençons immédiatement la mise en oeuvre de la stratégie maritime, ce grand projet porté par notre gouvernement. Nous faisons renaître le Plan Nord dans ses dimensions économique, sociale et environnementale. Nous misons sur les ressources naturelles. Nous continuons à investir dans les infrastructures, tout en contrôlant la dette et en respectant la capacité de payer des Québécois.

La session qui se termine a été marquée par les initiatives majeures correspondant à chacun de ces cinq axes. Nous avons engagé une première série d'initiatives pour soutenir les investisseurs en portant une attention particulière aux PME. Je n'en citerais que quelques-unes. D'abord, le crédit d'impôt LogiRénov, qui fera en sorte que 220 000 ménages bénéficieront d'un allègement fiscal atteignant un peu plus de 333 millions de dollars pour les années 2014‑2015 et 2015‑2016 et permettant de soutenir 20 000 emplois dans l'industrie de la construction. Nous avons réduit et nous allons réduire de façon progressive mais rapide, de 8 % à 4 %, le taux d'imposition sur le bénéfice des PME manufacturières. Cette réduction est effectuée en deux temps. Une première diminution de 8 % à 6 % est déjà appliquée; une deuxième de 6 % à 4 % prendra effet le 1er avril 2015. Alors, le taux d'imposition des PME manufacturières du Québec rejoindra la moyenne canadienne, et cette mesure profitera à environ 7 500 entreprises. On y a ajouté une déduction additionnelle pour les coûts de transport des PME manufacturières éloignées des grands centres. Par exemple, les PME des Îles-de-la-Madeleine bénéficieront d'un allègement fiscal pour compenser en partie le fait qu'elles n'aient pas un accès direct au transport routier. Nous reconnaissons ainsi — et c'était demandé et attendu depuis longtemps — de façon formelle le caractère unique des Îles-de-la-Madeleine en raison de leur insularité.

Nous poursuivons et accélérons les efforts déjà engagés pour réduire la paperasserie et le fardeau administratif des entreprises en partant du rapport Audet, mais nous voulons aller plus loin. Parce que le rapport Audet avait comme objectif de réduire de 20 % d'ici 2015 le coût des formalités administratives imposées aux entreprises. On a donc mis en place un comité permanent de suivi de l'allègement réglementaire, et bien sûr ceci est dirigé par notre ministre délégué aux PME. On a mis en place le programme Créativité Québec pour soutenir l'innovation dans les PME, qui est doté d'une enveloppe de 150 millions de dollars sur trois ans et fera en sorte que nos PME soient plus innovantes, plus créatives et plus performantes.

Toujours pour soutenir l'innovation, nous avons décidé d'accorder un congé de cotisation au Fonds des services de santé sur le salaire versé, pour les PME embauchant un employé spécialisé, dans le but de favoriser l'innovation. Ce congé de cotisation est d'une application très large puisqu'il va profiter à plus de 175 000 PME exerçant leurs activités dans les différentes régions du Québec. Nous avons décidé de valoriser davantage l'innovation issue de la recherche universitaire en favorisant une meilleure synergie entre les milieux d'affaires et les organisations universitaires, comme l'Université de Sherbrooke l'a fait avec son Accélérateur de création d'entreprises technologiques. Nous avons donc alloué, dans le budget, une enveloppe de 500 000 $ afin d'appuyer la mise en place de centres semblables au sein des établissements universitaires du Québec.

Nous avons également adopté d'importantes mesures pour faciliter le financement des entreprises en démarrage. Nous portons à 100 millions de dollars la capitalisation du fonds Anges Québec Capital. Nous participons à la création d'un fonds de capital de risque en partenariat avec le gouvernement fédéral et le secteur privé, dont la capitalisation devrait atteindre 375 millions de dollars. Nous renforçons le soutien apporté à l'entrepreneuriat féminin. Nous révisions les paramètres du Programme Entrepreneurs pour faciliter l'immigration au Québec d'entrepreneurs étrangers talentueux. Nous bonifions la capitalisation de la fiducie du Chantier de l'économie sociale afin de faciliter le développement de cet important secteur de l'économie. Nous avons confirmé la contribution financière de 350 millions de dollars à Ciment McInnis, ce qui permettra la réalisation du projet de cimenterie à Port-Daniel—Gascons en Gaspésie, dont la valeur d'investissement totale est estimée à 1,1 milliard de dollars.

La relance de l'économie s'appuie sur un deuxième axe, soit la stratégie maritime, un grand projet porté par notre gouvernement, qui permet de mettre en valeur le potentiel du fleuve et de l'estuaire. Elle stimulera, bien sûr, le développement économique des régions côtières, mais jusqu'à la Montérégie à partir de la Côte-Nord. Nous engageons les premiers investissements dans les infrastructures portuaires et fluviales dans le cadre de cette stratégie.

Nous avons annoncé l'implantation d'un pôle logistique en Montérégie afin de réaliser un centre de transbordement international sur le territoire du Québec. Nous allons développer le transport intermodal par train, navire et camion avec le port de Montréal et nous engageons le réaménagement du site Dalhousie, le site de débarquement de croisière situé ici même, à Québec, en bordure du Saint-Laurent. Nous avons mis en place des incitatifs fiscaux pour promouvoir la modernisation et le renouvellement des navires dans les chantiers maritimes du Québec. Nous investissons 800 000 $ sur deux ans en recherche et développement en soutenant les activités du Centre de recherche sur les biotechnologies de Rimouski et de l'Institut des sciences de la mer de Rimouski.

Un troisième axe maintenant, le Plan Nord. Nous le faisons renaître sous une version bonifiée. Nous reprenons ainsi le développement du Plan Nord dans ses dimensions économique, sociale et environnementale. Nous allons créer la Société du Plan Nord afin de coordonner le développement sur le territoire. Nous créons par voie législative le fonds Capital Mines Hydrocarbures, doté de 1 milliard de dollars, pour prendre des participations dans les entreprises investissant dans le Plan Nord. Nous allons identifier rapidement des partenaires privés pour amorcer dès cet été des travaux visant à évaluer la construction d'un nouveau lien ferroviaire et reliant la fosse du Labrador à Sept-Îles.

Nous engageons par ailleurs plusieurs initiatives pour maximiser les retombées du Plan Nord pour les communautés locales et autochtones comme pour l'ensemble des régions du Québec. Ainsi, 100 millions de dollars sont consacrés à la formation des populations autochtones. Nous créons un bureau de commercialisation pour faire connaître aux entreprises les besoins en fournitures, en équipements afin d'associer tout le Québec, le Sud comme le Nord, au développement de ce plan. Nous envoyons des messages forts concernant l'ouverture du Québec aux investissements sur le territoire du Nord québécois.

Il y a maintenant un quatrième axe, celui des ressources naturelles présentes sur l'ensemble de notre territoire et d'ailleurs qui font l'envie de plusieurs. Nous devons les utiliser de façon responsable et durable pour créer des emplois et favoriser la croissance économique. L'une des premières initiatives du gouvernement consistait à augmenter les ressources consacrées aux travaux sylvicoles, dont l'enveloppe est ainsi portée à 225 millions de dollars dès 2014‑2015, et ce qui met au travail beaucoup de citoyens dans nos régions.

Nous avons mis en place un fonds de 20 millions de dollars pour le développement de la filière biomasse forestière résiduelle au Québec. Nous maintenons le régime d'impôt minier actuel afin de préserver la stabilité désirée par l'industrie. Nous allons nous assurer en même temps que le régime minier demeure en tout temps compétitif et favorise l'investissement minier au Québec.

Nous avons rendu public un plan d'action à la fois ambitieux et équilibré concernant le développement de la filière des hydrocarbures, car nous voulons tirer partie des possibilités économiques liées aux différents dossiers touchant cette ressource en exploitant les atouts dont nous disposons. Nous le ferons, bien sûr, en respectant les plus hauts standards grâce aux études environnementales stratégiques.

• (8 h 50) •

Dans le secteur de l'électricité, nous allons utiliser les surplus d'énergie actuels non pas comme un problème, mais comme un avantage concurrentiel, afin d'attirer des investissements industriels et de renforcer la compétitivité de notre base manufacturière, dont celle de l'aluminium. On poursuit donc les efforts engagés par les deux précédents gouvernements pour électrifier les transports, tout en redonnant vie au programme des petites centrales hydroélectriques. Toujours dans le secteur de l'électricité, Hydro-Québec planifie la construction d'une quatrième ligne de transport depuis le Nord, dont l'investissement atteint 1,1 milliard de dollars.

Pour les infrastructures, nous portons de 11,2 à 11,5 milliards de dollars les investissements publics dans les infrastructures programmés en 2014‑2015, tout en maintenant le montant global prévu pour la période 2014‑2024. Nous accélérons donc de 300 millions de dollars les investissements prévus pour la présente année en devançant le déroulement des investissements durant l'ensemble de la période couverte par le plan des infrastructures. Sur ce total de 300 millions, 250 millions seront consacrés à la réalisation de projets pour lesquels il est possible de réaliser des investissements dès cette année : rénovation d'écoles, soins de santé et autres secteurs d'activité. Le reste de l'enveloppe sera consacré à l'étude de grands projets d'infrastructures.

Au total, ces investissements vont profiter aux Québécois dans toutes les régions et dans tous les secteurs d'activité. Pour 2014‑2015, il s'agit de 2,4 milliards de dollars dans le réseau routier, 2,3 dans la santé et services sociaux, 1,5 milliard de dollars dans l'éducation, 1,2 milliard de dollars dans les infrastructures municipales, sportives, communautaires et de loisirs et 1 milliard dans le transport collectif.

Nous avons annoncé, par ailleurs, une révision du cadre de gestion des infrastructures qui s'appuiera sur deux principes. D'abord, les investissements seront identifiés selon des critères de priorisation établis par le Conseil des ministres. Un mode de gestion rigoureux et transparent sera spécifiquement appliqué aux grands projets.

Ces cinq axes permettront de stimuler rapidement les investissements, de créer des emplois et de stimuler la croissance, mais il faut aller plus loin. Nous entreprendrons donc une réforme majeure de la fiscalité québécoise afin de contribuer à bâtir une croissance économique solide et durable récompensant l'effort, le travail et l'investissement. À cette fin, une commission a été mise en place, présidée par M. Luc Godbout.

En même temps que la relance de l'économie, nous engageons un effort majeur pour redresser les finances publiques. Dès notre arrivée au pouvoir, j'ai souligné notre détermination à rétablir l'équilibre en 2015‑2016. Nous allons mettre fin à l'écart existant entre la croissance des dépenses et l'augmentation de nos revenus, ce qui est maintenant connu comme étant le déficit structurel du Québec.

Le rétablissement de l'équilibre budgétaire nous permet de conserver la liberté de choix dans la gestion des fonds publics. Les premières mesures de contrôle, on le sait, ont été mises en place, 305 millions de dollars de rendement dès le 24 avril, le cran d'arrêt qui a été expliqué à plusieurs reprises, ce qui signifie qu'aucune nouvelle dépense ne sera autorisée sans économie équivalente. Depuis cette date, le budget a défini le cadre et précisé la nature des efforts. Nous avons annoncé qu'en 2014‑2015 90 % des efforts de redressement proviendront d'un meilleur contrôle des dépenses de l'État. En 2015‑2016, cette part sera portée à 95 %.

Nous avons annoncé en particulier un gel global des effectifs de la fonction publique et des réseaux jusqu'au retour à l'équilibre budgétaire. Nous avons également annoncé un gel de la masse salariale des sociétés d'État. Il s'agit d'initiatives sans précédent qui sont nécessaires en vue de recadrer les dépenses publiques et de limiter leur croissance. Notre premier budget est donc un budget courageux, respectant le cadre exigeant que nous nous sommes fixé.

Il n'y a pas de hausse d'impôt ou de taxe, à l'exception d'augmentations de taxes qui ont été approuvées par la majorité des citoyens, on le sait, dans le domaine, par exemple, de l'alcool et du tabac. Nous protégeons ainsi les services en santé, en éducation ainsi que les services offerts aux personnes les plus vulnérables et nous respectons pleinement les conventions collectives signées avec les employés des secteurs public et parapublic.

La session a été marquée également d'initiatives visant à relancer l'économie et redresser les finances publiques. Nous voulons également agir afin de promouvoir les valeurs qui nous rassemblent : le développement d'une société juste, plus équitable, ouverte sur le monde, inclusive ainsi que la défense et la promotion du Québec au Canada et dans le monde. Nous allons intervenir dans les villes, dans nos régions, auprès des familles et des aînés. Et nous venons également de déposer, on le sait, le projet de loi favorisant la santé financière et la pérennité des régimes de retraite à prestations déterminées du secteur municipal. Des investissements majeurs seront faits à Montréal, à Québec, dans l'ensemble des régions. Nous avons annoncé l'indexation du tarif journalier des services de garde ainsi que l'ajout de 6 300 places en services de garde dès cette année.

Nous avons renforcé le programme des municipalités amies des aînés. Nous avons annoncé des discussions prochaines avec des institutions financières et les autres intervenants pour la mise en place d'un programme de prêt adapté pour les personnes âgées afin de faciliter le paiement des impôts fonciers, municipaux et scolaires. Nous avons également annoncé la construction de 3 000 nouveaux logements sociaux, communautaires et abordables dans toutes les régions du Québec. Sur ce total, 500 logements seront réservés aux personnes itinérantes. D'ailleurs, dans le budget, 8 millions de dollars sont réservés par année pour la lutte contre l'itinérance.

Lors de la formation du Conseil des ministres, nous avons confié explicitement le dossier de la lutte contre l'intimidation à la ministre de la Famille. Nous avons ainsi, hier, annoncé la tenue d'un forum.

Dans le domaine de la culture, nous avons décidé de mettre en place la stratégie numérique culturelle et de mieux financer le programme Mécénat Placements Culture.

Le début du travail est donc, à notre avis, impressionnant. Il n'est pas terminé. Il y a encore beaucoup de marches à gravir pour arriver à la résolution du déséquilibre structurel du Québec et également à la croissance durable de notre économie et à la création d'emplois dans toutes les régions du Québec.

Les Québécois peuvent compter sur un gouvernement qui sait où il va et qui place leurs intérêts au premier rang de ses priorités. Comme je l'ai souligné lors du discours d'ouverture, nous ne reculerons pas devant l'ampleur de la tâche et des difficultés. Nous connaissons notre direction. Surtout, nous connaissons notre destination. Nous mettons le cap sur un Québec prospère, juste et libre de ses choix. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. Je cède maintenant la parole au chef de l'opposition officielle pour les remarques préliminaires. Vous disposez d'un temps de 12 minutes.

M. Stéphane Bédard

M. Bédard : Merci, M. le Président. Donc, on vous salue. Très heureux que ça soit vous qui meniez ces travaux. Vous savez à quel point nous avons du respect pour vos compétences. Vous l'avez démontré peu importent les responsabilités que vous aviez. Donc, on va vous souhaiter la meilleure des chances pour relever ce défi au niveau de la commission, mais, tous les autres, on le souhaite, que vous aurez à avoir dans les prochaines années.

Je salue le premier ministre, évidemment, et ceux et celles qui l'accompagnent, les députés ministériels, pour leur présence, ma collègue Agnès, la députée de Taschereau, qui est à mes côtés, leader de l'opposition, mes collègues, le chef de la deuxième opposition, avec ceux qui l'accompagnent, le leader et les autres membres.

Donc, très heureux, effectivement, d'être ici pour ces crédits, d'autant plus que nous aurons peu de questions sur les crédits passés parce que nous savons, M. le Président, que ces crédits ont été fort bien gérés. Et ce n'est pas par hasard si le Québec a eu ses meilleures performances dans son histoire dans la dernière année et demie, principalement parce qu'il y a eu des équipes solides. Et je n'en prends pas tout le crédit. Au contraire, ça a été un effort global du Conseil du trésor, mais de tous les ministères, de tous les ministres, de faire en sorte d'être capables d'arriver à un contrôle des dépenses exemplaire, du jamais-vu dans l'histoire du Québec, 1,2 % l'an passé, mais, en même temps, de trouver les marges de manoeuvre nécessaires pour stimuler la création d'emplois.

Donc, nous serons plus, M. le Président, en analyse sur ce qui s'en vient, parce que nous connaissons peu de ce nouveau gouvernement. Le premier ministre a fait état des principales actions qui ont été posées lors de la dernière session : le projet de loi des soins de vie, qui, vous le savez, est un projet de loi fort, peut-être un des plus importants des 10 dernières années au Québec et qui a été mené de main de maître par l'ensemble des collègues de l'Assemblée, mais principalement par notre députée de Joliette, qui a fait un travail formidable, accompagnée de tous ses collègues de l'opposition, du gouvernement pendant tout près de cinq ans; et celui sur l'inspecteur général, celui que nous avions déposé, qui a été redéposé avec quelques oublis qui ont été corrigés par la suite, mais il reste que c'est un projet de loi qui était connu, qui avait été entendu.

Sur l'action gouvernementale, on est en attente parce que ce qu'on a vu jusqu'à maintenant nous inquiète, je ne vous le cache pas. Tout d'abord, le projet de loi sur les régimes de retraite. Nous avions déposé un projet de loi qui avait trouvé un équilibre et qui assurait de part et d'autre une confiance par rapport au processus. Cet équilibre, pour l'instant, semble avoir été fragilisé de façon importante. Et je pense que le gouvernement a bien des questions à se poser jusqu'aux consultations qui se dérouleront cet automne. J'espère qu'ils seront ouverts aux propositions qui assureront de maintenir la paix sociale, mais en même temps régler cet important problème des régimes de retraite qui avait été posé lors du dépôt du rapport D'Amours. Mais, de grâce, ne réparons pas ce qui n'est pas brisé, M. le Président.

L'autre élément qui soulève notre inquiétude, c'est ce qui est arrivé à Orsainville. Je crois à la responsabilité ministérielle. Je crois que, lorsqu'on a ce mandat important d'assumer la responsabilité d'un ministère, nous répondons des actes des gens qui s'y trouvent et, en même temps, nous avons la responsabilité de poser les bonnes questions. Et, dans ce cas-ci, je pense que le gouvernement a échoué son premier test de responsabilité. Ces questions auraient dû être posées en temps et lieu, on aurait dû agir plus rapidement, mais, en même temps, s'assurer que les responsabilités à l'intérieur du ministère soient assumées, ce qui n'a pas été le cas. Et le gouvernement, qui avait dit qu'il allait être transparent, aura cette obligation de transparence à très court terme pour expliquer les raisons et les responsabilités surtout. Les raisons, nous les connaissons bien maintenant, c'est la baisse du niveau de sécurité. Mais qu'est-ce qui a entraîné de telles décisions? Le gouvernement ne devra pas attendre parce que ça inquiète bien des gens au Québec.

• (9 heures) •

Donc, nous sommes dans l'attente des actions concrètes du gouvernement, quelle sera sa couleur, quelle sera sa saveur, qu'est-ce qu'il aura à proposer. Parce qu'actuellement ce qu'on sent du gouvernement c'est qu'il avait misé sur son plan économique, sur un élément qui ne pouvait être rencontré, c'est celui d'ajouter 15 milliards de dette sur le dos des familles québécoises. Et nous avions avisé le Parti libéral à l'époque, avant la préparation du budget, que cette avenue n'était pas la bonne. C'était celle qui s'assurait d'une décote presque instantanée du Québec. Or, le plan, à l'époque, de 250 000 emplois était basé — c'est ce qu'on constate actuellement — presque strictement sur cet ajout au niveau de la dette québécoise.

Lorsque le budget a été présenté, nous avons... le gouvernement a reculé, le gouvernement libéral a reculé sur cet engagement, qui ne pouvait, de toute façon, être tenu. Le problème, c'est qu'il n'a pas apporté de contrepartie ou fait un travail de réflexion pour se dire : Comment on peut compenser ce manque au niveau de la création d'emplois? Je suis inquiet, M. le Président, pour la suite des choses parce que le seul cran d'arrêt que nous voyons actuellement, c'est sur la création d'emplois, et c'est un cran d'arrêt qui est solide. Ce cran d'arrêt, il s'est manifesté en mettant fin à la politique économique littéralement, en la mettant aux poubelles, en mettant fin à la politique de recherche littéralement, mais en n'ayant aucune autre politique, en mettant fin aussi à la politique industrielle, qui était fort importante, qui se manifestait, entre autres, par l'initiative qu'on avait prise au niveau des gazelles, au niveau des PME québécoises.

Le secteur industriel a été lourdement touché dans les 10 dernières années. C'est près de 150 000 emplois qu'il s'est perdu au Québec. Nous devons agir concrètement pour relever ce tissu important au niveau de la création d'emplois. Et malheureusement le gouvernement a décidé de mettre à la poubelle nos initiatives, mais de ne pas proposer de nouvelles avenues. Et on ne pourra pas attendre le prochain budget avant d'avoir de nouvelles initiatives. Le gouvernement devra agir rapidement auprès des PME québécoises parce que la situation de l'emploi qu'on voit actuellement, qui est en cran d'arrêt, risque de continuer dans les prochains mois. Et la pire des choses qu'on peut souhaiter au gouvernement, aux Québécois, à nous, comme société, c'est de vivre une période où l'emploi n'est pas au rendez-vous.

Donc, j'espère que le gouvernement va être l'écoute de nos propositions. Et le choix, entre autres, qu'il a fait de couper de façon arbitraire, à l'aveugle, de façon purement paramétrique les crédits d'impôt aux PME, le 20 %, peu importe la valeur ou l'impact de ces crédits d'impôt pour la création d'emplois, est, je pense, une mauvaise indication. Elle relève plus de l'idéologie que d'une politique structurée au niveau du développement industriel du Québec. J'invite encore le gouvernement à écouter les intervenants, parce qu'ils ne semblent pas avoir été écoutés, dans le cadre des consultations budgétaires sur les impacts de telles mesures.

Nous avions, à l'époque, mis fin à un avantage fiscal qui était important. Souvenez-vous, c'était dans le secteur pharmaceutique, où il y avait une protection de 15 ans sur les brevets. Nous y avons mis fin, nous l'avons ramené à 10 ans parce que cette politique ne donnait plus les avantages qu'elle avait il y a à peu près une quinzaine d'années. Nous avons sauvé beaucoup d'argent, mais par contre nous avons adopté un plan d'affaires qui a permis aux pharmaceutiques de déposer de nouvelles initiatives et qui a permis au gouvernement de maintenir des emplois et d'en développer ici à partir d'un nouveau plan d'affaires. Je pense que ces consultations ont fait cruellement défaut.

J'invite le gouvernement à être l'écoute. Ma région et plusieurs régions du Québec sont en attente par rapport aux crédits d'impôt sur les régions ressources, par rapport à différents crédits d'impôt pour les entreprises, vous le savez, dans le domaine du commerce électronique, entre autres, où nous sommes en compétition avec le monde. Et actuellement le choix gouvernemental a baissé, a baissé notre compétitivité par rapport à nos concurrents : l'Ontario, les autres provinces canadiennes, mais aussi plusieurs villes et États aux États-Unis. Donc, j'invite le gouvernement à ne pas agir de façon dogmatique, mais d'adopter la position que nous avions, ce qui est inspiré du pragmatisme économique et qui fait en sorte que nous sommes en lien avec nos partenaires qui développent l'emploi.

J'invite le gouvernement à être très soucieux aussi. La responsabilité du premier ministre est de maintenir la paix sociale, et, dans le contexte actuel, je sens des relents de ce que nous avons vécu et je ne souhaite pas au gouvernement d'être dans la position que nous avons héritée lorsque nous sommes arrivés au pouvoir : un équilibre social brisé, une crise sociale sans précédent qui a fait en sorte que nous avons dû agir rapidement pour ramener la confiance des citoyens. Nous l'avons fait de différentes façons, vous le savez, oui, en rétablissant la paix sociale, mais en ramenant la confiance du public envers ses institutions.

La première loi du gouvernement a marqué l'imaginaire, je pense, et elle a inspiré même d'autres législatures à travers le monde, c'est la loi n° 1, favorisant l'intégrité en matière de contrats publics, qui marquait le pas et qui disait : C'est terminé maintenant, la cour est pleine, la récréation est terminée. Donc, le gouvernement ne fera plus affaire avec les mafieux ou avec des gens qui ont des procédés qui vont à l'encontre de nos lois. Même chose sur la loi sur le financement des partis politiques, encore une fois, le Parti québécois s'est distingué en rehaussant les standards au niveau du financement des partis politiques, et nous en sommes très fiers, ainsi que la loi permettant de suspendre un élu municipal dans le cadre de ses fonctions.

Donc, nous avons agi avec rigueur dans le contrôle des dépenses. Nous avons adopté des plans ambitieux en termes de développement économique. On parlait de la stratégie de l'électrification des transports. Mais, en même temps, nous avons stabilisé le secteur minier. La loi sur le régime minier a été adoptée dans un gouvernement minoritaire avec l'appui, d'ailleurs, de la CAQ, et j'en suis très fier. Nous avons donc stabilisé en adoptant aussi un régime fiscal qui va maintenant prévoir des hausses de salaire... pas des hausses de salaire, mais des hausses au niveau du prix des matières premières, qui est important. Donc, les Québécois vont tirer une bonne part de cette exploitation, et je pense que c'est la meilleure façon de faire.

Nous avons aussi... sommes assurés de la fin du nucléaire, que l'amiante n'était pas un produit d'avenir aussi au Québec, nous avons pris des décisions, je pense, courageuses à cet effet-là, ainsi que le moratoire sur le gaz de schiste, qui, je pense, est nécessaire pour maintenir cette paix sociale. En même temps, nous avons proposé l'exploration sur Anticosti avec un modèle d'affaires qui est bien particulier, vous le savez, M. le Président, qui fait en sorte que le gouvernement et les Québécois ont une part, sont actifs et vont avoir les retombées si ultimement nous exploiterons ces ressources naturelles quand viendra le temps.

Ultimement, M. le Président, nous sommes très fiers d'avoir réussi, à travers la rigueur budgétaire, à développer une politique sociale ambitieuse, entre autres, en favorisant ceux qui aident les gens, les groupes communautaires. C'était à la base de notre action. Et c'est un bien mauvais choix du gouvernement de discarter cette avenue. Ces gens attendaient ce réinvestissement depuis longtemps, il était raisonnable comparativement à la lourdeur des défis qui se posent à l'administration publique, et ça aurait été, je pense, un choix judicieux de conserver cette importante politique que nous avions déposée. Au niveau social, il faut conserver nos équilibres, M. le Président, et je pense qu'actuellement ils sont fragilisés par l'action du gouvernement. Merci.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le chef de l'opposition. Je cède maintenant la parole au chef du deuxième groupe d'opposition. Pour vos remarques préliminaires, vous disposez d'un temps de huit minutes.

M. Legault : Merci, M. le Président. À mon tour, je voudrais vous saluer, saluer le premier ministre, saluer le chef de l'opposition officielle, tous les collègues, tout le personnel politique, les sous-ministres et toutes les équipes des différents ministères qui sont ici. Je pense que c'est une belle opportunité qu'on a, ce matin, d'échanger avec le premier ministre dans un contexte qui est sûrement moins stressant que le débat des chefs. Donc, on va sûrement... Non? O.K. Donc, écoutez, pour le premier ministre, c'est aussi stressant que le débat des chefs, c'est ce que je comprends.

Donc, M. le Président, à ce moment-ci, étant donné que j'ai beaucoup de questions à poser au premier ministre, je préférerais ne pas faire de remarques préliminaires et garder ce temps pour poser des questions.

Discussion générale

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, merci, M. le chef du deuxième groupe d'opposition. On va effectivement tenir compte de la durée des remarques préliminaires. Ça va être redistribué selon les différents blocs. J'ai compris qu'il y avait eu des discussions au préalable sur la répartition, la façon de procéder de nos travaux, qu'il y aura des blocs en alternance. Je pense qu'il y a à peu près 14 blocs qui varieront de quelques minutes, mais à peu près 20 minutes, là, étant la norme. Alors, je comprends que c'est la façon que nous allons procéder. Et nous allons entreprendre, donc, le premier bloc, et je cède la parole au chef de l'opposition officielle pour un premier bloc de 21 minutes.

• (9 h 10) •

M. Bédard : Merci, M. le Président. M. le premier ministre, l'exercice budgétaire, on le sait, peu importent les gouvernements, est un exercice complexe et qui demande à chacun de faire sa part, peu importe le contexte dans lequel nous oeuvrons. Par contre, je vous dirais, il y a des blocs qui sont quasi immuables et qui impactent le gouvernement de façon très importante. Et, pour avoir eu ce beau défi, M. le Président, j'en connais un tout particulier qui donne une lourde tâche, qui m'a donné bien des maux de tête et qui a fait en sorte que la capacité, la marge de manoeuvre du gouvernement, elle est restreinte.

Et le succès du gouvernement, de tout gouvernement, va reposer sur un élément essentiel, c'est au niveau de la santé. Et, dans la santé, il y a un secteur encore plus important, névralgique, c'est celui de l'augmentation de la rémunération des médecins. Cette rémunération, M. le Président, elle a fait l'objet de deux ententes successives, dont une lorsque le premier ministre était à l'époque ministre de la Santé, je pense, et qui s'est renouvelée... la première en 2007, la deuxième en 2010, qui avaient pour but de concéder des augmentations importantes au niveau de la rémunération. Et cette augmentation, à terme, seulement depuis 2010, elle représente, en termes d'augmentation annuelle, pour le gouvernement du Québec, pour les payeurs de taxes, pour les familles du Québec, en addition au budget, elle représente 2,5 milliards de dépenses de plus. Ça veut dire qu'à partir des années successives, comparativement à 2010, c'est 2,5 milliards de dollars additionnels qu'on doit verser par rapport à la rémunération.

Cette rémunération, elle a augmenté de façon importante. En moyenne, c'est plus de 8 % que cette entente prévoyait en termes d'augmentation. Seulement en 2013‑2014, c'était 9,5 % d'augmentation. Donc, j'ai un petit tableau ici, où on fait état de l'augmentation de 2,5 milliards à terme. Ce que j'aimerais savoir du premier ministre, c'est où en est la négociation avec les médecins et quel est son échéancier pour trouver une entente pour s'assurer que les Québécois et les services gouvernementaux ne subissent pas les conséquences de cette entente, je pense, trop généreuse à l'époque.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, M. le premier ministre, la parole est à vous.

M. Couillard : Merci, M. le Président. Bien, je dirais, tout d'abord, pour aller au coeur de la question du collègue, que ces négociations ont cours actuellement, il s'agit, il le sait, d'étaler l'impact financier. Mais je dirais que cette question de la santé ou... même y compris les ententes des médecins omnipraticiens et spécialistes, à mon avis, doit être mise dans un contexte plus large. La santé n'est pas que la seule raison du déficit structurel du Québec. Et je dirais même que d'autres enjeux sont probablement plus importants, toutes choses étant égales, que la santé. Il faut se souvenir que le Québec dépense très peu, par rapport aux autres provinces canadiennes, per capita, en santé et que, par rapport au PIB, notre niveau de dépenses se situe dans la moyenne canadienne.

Donc, oui, il faut faire des efforts importants dans le domaine de la santé et des services sociaux compte tenu de la taille du portefeuille, mais il y a d'autres éléments qui nous ont menés à la situation — et je ne fais pas allusion uniquement au cours de la dernière année et demie, mais auparavant — à un état de déficit structurel. Mais, pour commencer ces discussions budgétaires ou financières sur une base solide, je crois que nous aurions avantage à prendre conscience de la situation financière dans laquelle nous sommes. Et, à cet effet, M. le Président, j'aimerais, si vous me le permettez, que la commission distribue aux membres un extrait des documents budgétaires qui permet d'établir certains éléments qui serviront de base à la discussion que je vais entreprendre maintenant.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Très bien. En fait, je vais revenir aussi, il y avait le tableau auquel le chef de l'opposition a fait référence, là, de l'opposition officielle. Est-ce qu'on peut distribuer aussi aux membres?

M. Bédard : Oui, oui, oui. Non, non, ça va aider nos discussions, effectivement.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : On va procéder à cet exercice pour que tous les membres aient les documents utiles à la poursuite de nos travaux.

M. Couillard : Ça va?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Oui, oui ça va...

M. Couillard : J'aimerais que les membres l'aient en main parce que je vais parcourir ce tableau avec les collègues.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : On le distribue à l'instant, et la même chose avec le tableau du chef de l'opposition officielle.

Des voix : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Ça va, ça va aller. Alors, je pense qu'on peut poursuivre.

M. Couillard : Je dirais là-dessus, très rapidement : Rien n'est plus immuable que le changement. Alors, nous allons prendre ensemble la lecture de cette feuille, qui vient du document budgétaire, qui, en fait, est un reflet direct également du travail de M. Godbout et de M. Montmarquette et également du travail du Vérificateur général.

Je voudrais, très rapidement, en profiter, M. le Président, pour rendre hommage à l'équipe du ministère des Finances, qui a réussi à présenter un budget en des temps record, je pense qu'ils n'ont pas vu souvent ça, en l'espace de sept ou huit semaines, même un peu moins, je crois, avec un livre des crédits, et je voudrais, avec le Trésor également, les féliciter pour cela. Également, brièvement, présenter les deux personnes qui m'accompagnent, parce que les téléspectateurs vont les voir souvent dans leur écran. À ma gauche, c'est M. Roberto Iglesias, qui est le secrétaire général du gouvernement, et, à ma droite, M. Jean-Louis Dufresne, qui est directeur de mon cabinet.

Alors, prenons ce tableau ensemble et parcourons-le de haut en bas. La première ligne, bien sûr, est connue des collègues, il s'agit des cibles de déficits. Après l'espoir d'un déficit zéro en 2013‑2014, la situation financière s'est imposée, et on a dû, donc, corriger les prévisions avec des déficits inscrits aux livres, pour 2013‑2014 et 2014‑2015 respectivement, de 2,5 et de 1 750 000 000 $.

La révision subséquente nous apprend plusieurs éléments, nous montre plusieurs éléments. D'abord, pour 2013‑2014, elle nous amène à un déficit réel de 3,1 milliards; pour 2014‑2015, un déficit sans correction de 5 868 000 000 $; et, pour 2015‑2016, de 7 608 000 00 $. Comment cela s'est-il produit? Bien, comme dans tout budget, à la fois par des impacts provenant de la colonne des revenus et de la colonne des dépenses.

D'abord, les revenus autonomes ont baissé de façon importante, ce qui est un reflet d'une diminution d'activité de la création d'emplois et de l'activité économique au Québec, et cette action s'est répétée et se répète au cours des années suivantes. Par rapport aux prévisions, il y a des écarts, on le voit, qui sont importants, qui nous amènent à 1,2 milliard d'écart en 2015‑2016. Les transferts fédéraux ont relativement peu changé sur cet horizon de temps, de même que le service de la dette. Il y a des variations de taux d'intérêt, ici, qui peuvent avoir des impacts qui, ces temps-ci, compte tenu du faible niveau des taux d'intérêt, sont en général positifs.

Là où le problème est devenu rapidement massif — et je choisis le mot «massifs» volontairement — c'est dans les dépassements aux dépenses de programmes. Je rappelle qu'il y a eu un budget présenté à l'automne 2012, en novembre ou en décembre 2012 — je pense que c'était novembre 2012 — qui avait avec lui un cahier de crédits, et il a fallu attendre février 2014 pour avoir un autre budget, celui-là sans cahier de crédits. Alors, ce qu'on constate, c'est qu'en 2013‑2014 il y a eu 693 millions de dépassements de dépenses qui nous amènent au déficit de 3,1; cela est déjà connu. Mais ce qui s'ajoute en 2014‑2015, c'est 2,5 milliards de dépassements de dépenses et un autre 2,5 milliards pour l'année subséquente, ce qui nous amenait, dans les faits, à un taux de croissance prévu des dépenses de l'État de l'ordre de 6 %.

Alors, je vais, je dirais avec respect, dire à mon collègue que, dans les premiers mois de l'exercice de son gouvernement, il y a eu effort de contrôle des dépenses, qui, d'ailleurs, avait commencé dans les années précédentes, mais qui a été tenu pendant quelques mois, mais ce qu'on constate, c'est que, rapidement — et je pense qu'il faut lier ça au contexte préélectoral de l'époque où probablement d'autres priorités ont absorbé l'énergie du gouvernement — il y a eu littéralement une... on l'a échappé, comme on dit chez nous, une perte de contrôle des dépenses de l'État qui est majeure et qui nous amène, avec les années, si rien n'est fait — et il n'est pas question que rien ne soit fait — à un déficit prévu de 5,8 milliards en 2014‑2015 et de 7,6 milliards en 2015‑2016, ce qui, clairement, est inacceptable en termes d'ampleur.

Maintenant, il faut savoir également qu'il y avait eu un début de travail pour la correction de ces faits-là, donc les faits qui certainement étaient connus de notre collègue puisqu'il était président du Conseil du trésor... Mais je continuerais la démonstration dans le prochain bloc.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Oui, j'apprécierais, M. le premier ministre, question de garder un certain équilibre entre les questions et les réponses. On aura l'occasion d'y revenir, j'en suis certain. Alors, je vais céder la parole au chef de l'opposition officielle.

M. Bédard : Amicalement, je ferais remarquer au premier ministre que le moment des remarques préliminaires est terminé. Donc, nous sommes rendus à la période des questions, où on va s'attendre effectivement à des réponses. Et le premier ministre nous disait qu'il souhaitait être le gardien de la transparence, je pense que les crédits sont un exercice de transparence.

Alors, au coeur de l'exercice budgétaire, il y a l'entente avec les médecins. Cette entente devait être négociée quelques jours avant le budget. On se souvient que c'est l'échéancier qui avait été prévu le vendredi, et finalement cet échéancier ne tient plus. Alors, ce que je demande au premier ministre : Quel est le nouvel échéancier pour s'entendre avec les médecins? C'est quand même une question à 1 milliard de dollars, je pense qu'elle mérite une réponse précise.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

• (9 h 20) •

M. Couillard : Bien, tout ce que je dirais là-dessus, c'est qu'on n'aura pas de négociation avec les fédérations médicales ici, à l'étude des crédits, mais ces négociations se poursuivent, et je crois qu'elles porteront fruit. Il y a un bon esprit des deux côtés de la table.

Maintenant, même si on veut, M. le Président, établir des enjeux de détail — et on continuera — on ne peut pas faire abstraction de l'explication. C'est ça, la transparence aussi. Et j'amènerais le collègue à se demander ou peut-être dire à la population pourquoi il n'y a pas eu de crédits déposés en février 2014. Je pense que la réponse est simple, c'était tout simplement impossible de balancer les crédits avec les dépassements qui étaient là. Si on ne prend pas conscience de ce phénomène-là, on ne dispose pas de l'information qui nous permet d'échanger sur les finances publiques.

Donc, où en étais-je? Alors, j'en étais aux cibles de déficits ou malheureusement aux conclusions sur les déficits qui étaient anticipés pour 2014‑2015. Et, pour ramener la cible à 1,7 milliard, ce qui était prévu, il y avait déjà eu, identifié par le Secrétariat du Conseil du trésor mais non validé politiquement, un effort de 1,7 milliard auquel devait s'ajouter un autre effort de 1,9 milliard qui, celui-là, n'avait pas fait l'objet de mesures ni même de discussions, je crois. Alors, ça nous amène à un effort de correction de 3,7 milliards qui aurait ramené le déficit à la cible, 1,7 milliard, selon les chiffres de l'époque. Mais ce qui s'est ajouté par la suite, c'est, comme je l'ai expliqué tantôt, le dépassement massif des dépenses publiques qui fait en sorte que la cible de déficit pour 2014‑2015 doit être ramenée à 2 350 000 000 $. Et, en poursuivant l'effort, parce qu'il y a également des efforts importants à faire en 2015‑2016, M. le Président, nous prévoyons retrouver l'équilibre budgétaire en 2015‑2016, ce qui sera un travail exigeant, ardu, qui demandera plusieurs décisions difficiles, courageuses, et il y aura la fermeté et le courage nécessaires, M. le Président, au gouvernement, pour prendre ces décisions. Alors, je pense que, si on ne fait pas cet effort d'explication, on ne peut pas discuter des détails des finances publiques.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. Mme la leader de l'opposition.

Mme Maltais : Simplement, je vous ferai remarquer que la question était brève en plus d'être claire.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Oui. En fait, vous connaissez tous les règles, et ce n'est pas une opération mathématique. Effectivement, on essaie de garder une certaine proportion dans le but de permettre des échanges fructueux et constructifs entre la question et la réponse, mais je pense que, pour l'instant, la question et la réponse respectaient ces balises. Je vais demander maintenant de poursuivre, toujours dans le ton respectueux. Alors, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Bédard : Encore une fois, je pense que le premier ministre manque à son obligation de transparence. Je pense que les mots peuvent avoir une valeur, mais ça fait longtemps que je ne crois plus les mots, M. le Président, je crois les gestes, et actuellement le premier ministre ne nous donne pas un bel exemple. Ce que lui appelle des détails, c'est 1 milliard de dollars. C'est sûr qu'en dedans de trois détails on va tout régler. Ça fait qu'on peut-u régler au moins un détail, 1 milliard?

Là, je comprends qu'il n'y a plus d'échéancier actuellement. Donc, le gouvernement n'a plus d'échéancier pour régler. Ce que j'aimerais savoir maintenant, c'est : Est-ce qu'il a appliqué l'augmentation qui était prévue, de 8,8 %, depuis le 1er avril, aux médecins? Est-ce qu'il a concédé cette augmentation ou il y a un gel en attendant une entente?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, M. le premier ministre.

M. Couillard : Alors, je vais juste répéter, M. le Président, que les négociations se poursuivent. Il s'agit d'étaler la hausse qui était prévue par les ententes avec les fédérations médicales. Il y a déjà un rendement qui est prévu au budget, et on doit y arriver, et on va y arriver. Il n'y a pas de raison que les fédérations médicales et les médecins ne participent pas, comme tous les Québécois, à l'effort nécessaire pour retrouver l'équilibre budgétaire. Alors, notre collègue le ministre de la Santé et des Services sociaux mène ces négociations, bien sûr secondé par le Conseil du trésor, et, en temps et lieu, il y aura une annonce, M. le Président, sur la réussite qu'on prévoit de ces négociations. Je crois que les conversations se font de la bonne façon et sur le bon ton.

Une voix : ...

M. Couillard : Je confirme qu'il y a eu des progrès dans les négociations.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. M. le chef de l'opposition.

M. Bédard : Nous tenterons, nous aussi, de progresser. Actuellement, l'augmentation, si elle était appliquée cette année, c'est à peu près autour de 600 millions. Donc, c'est peut-être encore un petit détail. Ce que je demanderais au premier ministre, c'est qu'on sait qu'on n'a pas d'entente actuellement, on ne sait pas quand elle aura lieu, mais, en attendant, est-ce qu'on a donné l'augmentation qui était prévue dans le cadre budgétaire qui avait été... dans l'entente qui avait été convenue en 2010 par le gouvernement libéral? Est-ce que cette augmentation a été concédée, au moment où on se parle, malgré le fait que les négociations n'ont pas donné de résultats?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Bien, M. le Président, on veut garder un bon climat à la table de négociation. On va faire quelques vérifications puis on reviendra aux collègues, d'ici la fin de la séance, avec les détails des déboursés pour l'année en cours. Je veux le vérifier comme il faut avant de répondre d'une façon non informée. On va s'informer correctement du détail des déboursés de l'année en cours. Mais je vais quand même rappeler l'importance de maintenir un bon climat à la table de négociation et de ne pas perturber cette négociation en ayant une négociation parallèle ici, à l'étude des crédits.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : De la même façon qu'il est important de garder un bon climat autour de cette table, à l'Assemblée. Alors, M. le chef de l'opposition, il vous reste à peu près... un peu moins de six minutes dans ce premier bloc.

M. Bédard : Oui, et ce n'est pas parce que... Moi, je garde toujours un bon ton, M. le Président, mais, c'est sûr, quand je pose des questions, je souhaite des réponses. Mais je suis bien content, donc, je suis prêt à donner le temps au premier ministre, effectivement, qu'il réponde... qu'il prenne le temps, à moins que M. Iglesias ait cette information.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Alors, je pressentais la réponse, mais je voulais en avoir la vérification factuelle. Il n'y a pas eu de dépense. C'est un gel jusqu'à ce qu'il y ait une entente.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef de l'opposition.

M. Bédard : Je comprends de ces négociations, M. le Président, qu'advenant, dans le cadre financier, advenant un échec des négociations ou advenant une solution partielle, les sommes qu'on n'a pas réussi à aller chercher ou à étendre en vertu de cette entente, qu'elles seront absorbées par le secteur de la santé. Autrement dit, si le gouvernement échoue ou réussit en partie d'étendre ces différentes augmentations — et là on parle de centaines de millions — toutes les sommes qu'on n'aura pas réussi à aller chercher dans cette entente seront attribuées ou seront enlevées à l'ensemble du secteur de la santé, qui devra opérer des compressions en fonction de l'entente qui aura été convenue. Est-ce que mon affirmation est exacte?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, M. le premier ministre, il reste à peu près quatre minutes.

M. Couillard : Alors, M. le Président, on ne fera pas d'hypothèse d'échec. Moi, je travaille sur les hypothèses de réussite et je peux vous dire que le climat de négociation est bon, les conversations se font. Il faut savoir également que la nouvelle entente également, le cadre de l'entente, de la prochaine entente, fait partie de ces discussions. Alors, tout ça est à la fois complexe et important, mais ce qui est clair, c'est que le message a été passé et, je crois, bien reçu par les fédérations médicales, qu'on s'attendait de leur part à une collaboration dans l'atteinte de l'équilibre budgétaire.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef de l'opposition.

M. Bédard : Que nous souhaitons aussi. Malheureusement, nous n'avions pas, à la table, à ce moment-ci, des gens toujours raisonnables, le premier ministre doit le savoir. Mais la santé, on a prévu une augmentation de 973 millions, donc, et l'augmentation des médecins, à elle seule, représente 539 millions, sans compter les arrérages. Ce que je veux savoir du premier ministre, c'est... Chaque montant qu'on n'aura pas abaissera l'augmentation qu'on a prévue au niveau de la santé. Est-ce que c'est le cas?

M. Couillard : M. le Président, le cadre financier demeure, là. D'ailleurs, l'augmentation de 3 %, puis on vise 4 % lors du retour à l'équilibre budgétaire, permet à la fois de rencontrer... — «rencontrer» est un mauvais mot en français — de combler ce qu'on appelle l'indexation spécifique du système de santé de même que toutes les ententes, incluant les conventions collectives en cours et incluant les ententes. Alors, le cadre budgétaire prévoit ça. Maintenant, il est clair qu'on veut avoir une entente, c'est notre objectif, et on est confiants qu'on va l'avoir.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Avec 2 min 30 s, M. le chef de l'opposition.

M. Bédard : Son ministre des Finances a clairement laissé... a confirmé que le 973 millions était un montant qui était fermé. Autrement dit, si on ne s'entendait pas ou si un montant forfaitaire était versé aux spécialistes, aux omnis... ce montant serait amputé, on diminuerait d'autant les sommes disponibles pour la santé et pour le réseau. Est-ce que le premier ministre pense qu'on devrait faire supporter à tout le réseau et aux services à la population l'échec ou non des négociations dont son ministre a la responsabilité?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Bien, M. le Président, de façon globale, je dirais que c'est l'ensemble de la population et des réseaux de services qui soutiennent ou qui ont à affronter le déficit structurel du Québec, puis les chiffres que j'ai présentés tantôt, il faut quand même remettre ça en contexte. Alors, oui, on veut protéger les services, oui, on veut maintenir... Et d'ailleurs, parmi les autres ministères du gouvernement, la santé obtient un rythme d'augmentation relativement élevé par rapport à ce qu'on voit dans le reste du gouvernement. Mais il n'est pas question de renoncer à avoir une entente.

On aura une entente. Moi, je suis convaincu que les fédérations médicales voient leur intérêt également de participer comme citoyens à l'effort budgétaire du gouvernement. Donc, je ne me place pas dans une ambiance négative ou d'échec. Je crois que nous allons réussir. Le président du Conseil du trésor, lorsqu'il était en exercice, a été au fait des climats de discussion. Elles ne sont pas toujours faciles, les discussions avec les fédérations médicales. Mais ce que je peux dire, c'est qu'il y a eu une évolution du ton des conversations entre le début de ces conversations et maintenant. On est parti d'une attitude relativement fermée — et j'utilise le mot «relativement» avec optimisme également — quant à toute conversation, à une attitude maintenant qui est participative et qui ouverte sur l'étalement des hausses.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. Il vous reste 30 secondes, M. le chef de l'opposition, dans ce premier bloc.

• (9 h 30) •

M. Bédard : Simplement de rappeler, à une question très claire, très rapidement, le ministre des Finances, on lui a posé la question : Est-ce que l'augmentation salariale des médecins sera puisée à même cette variation dans les dépenses de programmes pour le ministère de la Santé? Et il a dit : Oui, tout à fait, absolument. Et c'est pour ça que j'interpelle le premier ministre sur cette question importante de faire supporter à l'ensemble du réseau seulement de la santé et aux services à la population... que ce processus de négociation, ou cette entente, ou cette absence d'entente aurait des effets déstructurants au niveau du réseau de la santé.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le chef de l'opposition officielle. On aura l'occasion d'y revenir, peut-être? On a un bloc du gouvernement qu'on entame, et je crois que le député de D'Arcy-McGee va entreprendre ce premier bloc. M. le député, pour 19 minutes.

M. Birnbaum : Merci, M. le Président. Chers collègues, M. le premier ministre. Il me semble que c'est de mise de revenir à l'enjeu central qui est devant notre gouvernement et qui est au centre de la vision qu'a mise de l'avant notre gouvernement lors de la campagne électorale et durant cette session qui vient de se terminer, c'est-à-dire comment créer la richesse nécessaire, comment faire face aux défis structurels tout en assurant la pérennité de nos services sociaux, de nos services de santé, de l'éducation, et tout en mettant en place les conditions propices pour exploiter les richesses qu'offre notre Québec.

Dans ma circonscription, cet enjeu a résonné durant la campagne, tout au long de notre session et dans les quelques petits jours qui nous ont été accordés tout dernièrement pour revenir parler avec nos concitoyens. La circonscription de D'Arcy-McGee compte une proportion de citoyens de l'âge d'or, des aînés, qui est plus large que presque chaque circonscription du Québec, et ces gens-là me parlent souvent de leur préoccupation en ce qui a trait à la pérennité des services qui sont tellement essentiels pour eux et, à la fois, à leur grande préoccupation que le financement de ces services et ce qui va assurer leur pérennité ne soit pas mis sur le dos de leurs petits-enfants, sur leurs enfants.

Alors, comment est-ce qu'on peut réconcilier ces besoins en comprenant que ces deux enjeux sont complètement liés? On n'a pas les services, dont on est très fiers, si on n'a pas l'argent pour les appuyer. En même temps, ils sont très préoccupés par la qualité de ces services qui font l'envie du monde. Et, en même temps, ils sont préoccupés par l'état actuel de nos infrastructures, qui ne font pas, chaque jour, nécessairement, l'envie du monde. Et, pour en attaquer à ces deux défis, il faut créer la richesse et s'adresser, j'imagine, aux défis structurels actuels. Et voilà pourquoi j'inviterais, si je peux, le premier ministre à élaborer sur comment on réconcilie ces deux incontournables de façon à s'assurer à la fois notre richesse et à la fois la pérennité de nos services sociaux, et pas dans une optique de court terme, mais dans une optique de court, moyen et long terme, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le député. M. le premier ministre.

M. Couillard : Merci, M. le Président. Je dois d'abord saluer notre collègue de D'Arcy-McGee pour sa question, mais également par son travail important à titre d'adjoint parlementaire pour toute la question de l'adéquation entre les emplois disponibles, les formations puis l'immigration, ce qu'on appelle en anglais le «mismatch» entre le marché du travail et l'offre de main-d'oeuvre, un élément majeur, d'ailleurs, du défi qui attend le Québec.

Parce que ce défi, on l'a dit à plusieurs reprises, on l'a qualifié de structurel. Mais, pour les citoyens et les citoyennes qui nous écoutent, qu'est-ce que ça veut dire, «structurel»? Bien, ça veut dire qu'il y a, dans nos états financiers, dans notre économie, des facteurs qui sont tellement implantés que juste des ajustements annuels ne seront pas suffisants à ramener l'équilibre. Et je crois que les citoyens ont vu chaque année, au cours des dernières années, le même cycle : le gouvernement arrive, fait des coupes budgétaires, rétablit les choses, relance un nouveau cycle de dépenses; l'élection se présente, on revient après l'élection, et c'est la même chose qui recommence parce que le grand bloc de ce qu'on appelle la reconduction des programmes, combien ça coûte juste pour refaire l'année suivante ce qu'on a fait l'année précédente, n'est jamais vraiment montré. Et c'est ça qui nous a menés progressivement à cette situation qu'on doit absolument résoudre non seulement pour nous, M. le Président, mais pour les générations futures. Et je rejoins exactement ce que le collègue dit.

Parce qu'il y a, au-dessus de tout ça, il y a l'ombre de la démographie. Moi, je me souviens, quand je suis arrivé au ministère de la Santé, en 2003, on parlait du mur de la démographie. Bien, le mur, on est dedans actuellement. C'est la première année, cette année, où le nombre de personnes en âge de travailler, au Québec, de 15 à 64 ans, va diminuer par rapport à l'année précédente. C'est également une époque devant nous où la majorité des nouveaux ménages vont provenir de l'immigration, l'installation des nouveaux ménages va provenir de l'immigration. Donc moins de monde, il faudra être plus productif.

Et, au fil des années, le Québec a utilisé trois élastiques qui sont maintenant tellement tendus qu'il ne leur reste pas grand-chose avant de briser. D'abord, l'élastique de la dette, non seulement des emprunts en infrastructures, qui est une bonne façon de générer de la dette parce qu'elles génèrent de la croissance économique et de la capacité, mais malheureusement une part de dette, qui atteint chez nous environ 35 % du PIB, qui est constituée des déficits accumulés. Il faut savoir que, chaque fois qu'il y a un déficit, ce n'est pas juste un chiffre théorique qui disparaît par magie, chaque déficit d'opération bascule sur la dette, et on recommence l'année suivante. Donc, la dette, premier élastique.

Le deuxième, c'est la fiscalité. Les Québécois et Québécoises, même si on les compare à d'autres régions du monde, on pourrait dire, ne sont pas si mal en termes de fardeau fiscal, mais, si on les compare où ça importe, nos voisins d'Amérique du Nord, là, ça ne va pas bien parce qu'on prélève presque 37 % de notre produit intérieur brut en taxes et en impôts, ce qui est très élevé, j'insiste, dans le contexte nord-américain.

Enfin, le troisième élastique, c'est les transferts fédéraux, qui ont beaucoup augmenté entre 2003 et 2012, mais qui demeurent actuellement, là, notamment pour la péréquation et le transfert en santé, l'objet de conversations, mais on voit que ces trois façons coutumières de garder l'équilibre, elles sont un peu rendues à leur limite. Que devons-nous faire? D'abord, corriger la situation telle qu'elle se présente aujourd'hui — je l'ai expliqué tantôt, elle est vraiment très problématique — mais également engager des politiques qui sont durables, qui vont nous permettre, d'une part, de rétablir l'équilibre financier, mais surtout de faire croître l'économie. Parce que ce que les expériences internationales ont montré, c'est qu'une politique uniquement basée sur les restrictions budgétaires, ou les coupes budgétaires, ou ce qu'on appelle, dans certains milieux, l'austérité, a, en général, comme conséquence de diminuer la croissance économique et également peut mettre en jeu, bien sûr, comme vous l'avez dit avec les aînés, les services publics. Donc, il faut agir à la fois sur le contrôle des dépenses publiques et recadrer dans la capacité de payer réelle du Québec, mais à la fois prendre des initiatives qui permettent de faire croître l'économie et l'emploi.

Alors, nos grands axes, on les a décrits tantôt : les PME, très important, les PME au Québec, on y reviendra, la stratégie maritime, le Plan Nord, les ressources naturelles, dont l'industrie forestière, dans les régions comme la mienne, c'est une source d'activité économique et d'emploi qui est absolument majeure. Les autres ressources financières, minières, hydrocarbures également doivent être développées. Et on doit s'assurer également de partager les retombées, on le disait tantôt, avec tous les Québécois, des ressources naturelles, mais spécifiquement avec les communautés locales et dans les régions. C'est pour ça que notre gouvernement s'est engagé, à la faveur de la négociation du pacte avec les municipalités et les régions, s'est engagé à partager, à établir un régime de partage des redevances gazières, pétrolières et minières avec les collectivités locales, incluant les communautés autochtones, qui bien sûr sont souvent sur les territoires dont il est question.

Donc, ces mesures — on y reviendra — de relance économique, mesures de resserrement des dépenses, mais on doit s'engager dans une démarche durable. Alors, c'est pour ça qu'on a créé les deux commissions, d'une part la commission sur la fiscalité pour ramener le fardeau fiscal des Québécois au contexte de nos voisins et également engager une démarche et une culture de révision permanente des programmes, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Birnbaum : Merci, M. le Président, et merci, M. le premier ministre, pour l'ouverture. Justement, ça m'a frappé, ce n'est pas chaque jour que chacun de nos concitoyens suivent les détails... c'est un grand détail, mais ça m'intriguait de voir l'intérêt auprès de mes concitoyens pour nos deux commissions qui ont été annoncées. Et je crois qu'ils comprennent qu'on parle des gestes à la fois très transparents, rigoureux et qui visent la pérennité de l'approche dont on parle, qui va être pénible. Je me demande si je peux inviter le premier ministre d'élaborer un petit peu sur l'échéancier, les mandats et la signification de ces deux commissions.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, M. le premier ministre.

• (9 h 40) •

M. Couillard : Merci, M. le Président. Alors, pour chacune des commissions, on veut des résultats dès l'année en cours, mais elles diffèrent dans leur nature et leur échéancier. Celle sur la fiscalité a un mandat limité dans le temps qui devrait nous amener en décembre et même présenter peut-être des recommandations intérimaires au début de l'automne afin que ces recommandations soient déjà mises en place, s'il est possible de les mettre en place, avant le prochain budget et bien sûr dans le budget de l'année suivante, qui sera déposé au printemps 2015.

Le problème de la fiscalité, outre la taille du fardeau fiscal des Québécois, c'est qu'elle n'est malheureusement pas assez incitative à l'effort, au travail, à l'investissement, à la création d'emplois. Et elle se contredit parce qu'au fil des années on a corrigé les situations qui font l'actualité par des mesures ciblées, éparses, qui finalement ont très peu de cohérence les unes avec les autres. Ainsi, il y a des revenus relativement bas au Québec, où ce n'est clairement pas avantageux de gagner plus d'argent. Ça, ce n'est pas normal. Si on passe, disons, de 33 000 $ à 36 000 $ par année de revenu, ce qui n'est pas un revenu élevé, on s'entend, puis qu'on se retrouve avec moins d'argent dans nos poches, on a un problème de motivation puis d'incitatif qui est tout à fait réel.

De la même façon, pour les entreprises, puis on aura l'occasion d'échanger, je crois, sur la façon de soutenir les entreprises au Québec, il y a deux grandes philosophies qui vont s'opposer. D'une part, le recours aux mesures traditionnelles d'aide financière aux entreprises; il y en a pour trois milliards au Québec. Comme dit l'autre : Si ça marchait, on le saurait, alors qu'on a moins d'entreprises, moins d'entreprises qui durent, moins d'entreprises qui grossissent au Québec, malgré ces sommes considérables. Donc, toute la philosophie du soutien aux entreprises. Est-ce qu'on y va avec des mesures fiscales ciblées pour des secteurs particuliers ou on y va plutôt par un allègement fiscal général? Je veux dire que, si on lit les tendances mondiales, on est plutôt maintenant dans la deuxième orientation. Mais on verra le travail de cette commission. Il ne s'agit pas de balayer complètement les outils fiscaux pour soutenir les entreprises, mais bien vérifier leur pertinence et leur utilité. Donc, ça, c'est la commission de la fiscalité, puis on voit que la composition est de très haut niveau.

Même chose pour la commission permanente de révision de programmes. Le mot «permanent» est très important parce qu'il faut à la fois implanter dans le gouvernement cette culture qui fait que tout va être révisé en tout temps de façon permanente, chaque année, et également une culture d'évaluation. Et ça, c'est une idée qui, je me souviens, est venue il y a quelques mois du deuxième groupe d'opposition. Le député de Lévis a parlé de la nécessité d'implanter une culture d'évaluation permanente dans ce qu'on fait : Quels sont les objectifs? Quels sont les moyens mis en place pour mesurer l'atteinte des objectifs? Quelle est l'imputabilité en rapport avec les crédits? Il me semble que, si on réussit à implanter ça, l'exercice d'étude des crédits va être, je crois, plus intéressant à suivre, à la fois pour les médias et pour la population.

Donc, quand on révise un programme, quand on prend un programme, il faut se poser des questions tout à fait fondamentales. Puis on n'est pas le seul État au monde à faire ça. Il y a beaucoup d'États actuellement qui l'ont fait ou qui vont le faire. D'abord, quel était le but poursuivi par ce programme? Est-ce que les objectifs demeurent pertinents dans le Québec de 2014 ou de 2025? Si nous avions à recréer ce programme à partir de zéro, est-ce que nous l'établirions comme il existe actuellement? C'est ça, à mon avis... la question la plus pertinente, c'est celle-là. Et, si le programme demeure pertinent et utile, comment peut-il être amélioré? Est-ce que les ressources doivent être parfois augmentées, parfois réduites pour favoriser l'efficience?

Il faut faire cet exercice logique à chaque fois que c'est fait. Et on compte, bien sûr, sur les ministères, qui vont soutenir cette démarche, mais également la commission qui est présidée par Mme Robillard. Mais je veux indiquer clairement à nos concitoyens et concitoyennes que ce n'est pas les commissions qui vont prendre les décisions. C'est les élus de l'Assemblée nationale puis c'est le gouvernement démocratiquement élu qui va déposer un budget, qui va déposer des mesures, qui va annoncer des changements, qui seront parfois très importants à certains programmes de l'État parce qu'on n'a pas le choix.

Quand il m'arrive parfois de me dire : Ah! Quelle tâche immense est devant nous — c'est vrai qu'elle est grande, cette tâche — tout de suite, j'ai juste à penser à mes enfants puis aux petits-enfants que j'aurai un jour pour me dire que je ne peux tout simplement pas faire l'économie de ce travail et que ce serait, pour moi, échouer dans mes responsabilités de ne pas prendre à bras-le-corps ce défi-là puis d'y arriver. Et Dieu sait que ce ne sera pas facile. Il y a des moments où on va trouver que c'est difficile, où on a l'impression qu'on recule, que ça n'avance pas, mais on n'a tout simplement pas les moyens d'échouer.

Et je peux rassurer la population qui nous écoute, j'ai la détermination la plus totale à prendre des décisions, même celles qui seront difficiles, au moment approprié, en les communiquant à la population, en laissant un espace de dialogue pour connaître l'opinion de la population sur ces mesures-là. Mais le dialogue ne signifiera pas la paralysie, le dialogue ne signifiera pas la remise à plus tard aux décisions nécessaires. Et je pense que c'est notre devoir, comme gouvernement, de le faire et, là, de commencer à voir à plus long terme qu'uniquement le prochain rendez-vous électoral ou la prochaine...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. Je pense que le député de Dubuc va entreprendre... Il reste un peu plus de cinq minutes.

M. Simard : M. le Président, je vous remercie. D'abord, je salue les gens de cette table, bien sûr, les gens de l'opposition, mes collègues ici et, bien sûr, vous, M. le Président.

M. le Président, hier, j'ai passé, moi, la journée à rencontrer des gens en forêt. J'ai passé la journée en forêt, j'ai rencontré... J'ai été visiter des chantiers forestiers toute la journée et des usines de sciage également. J'ai également visité des usines de nouveaux produits forestiers, des usines d'huiles essentielles, des usines énergétiques, des usines pour créer de la matière pour faire de l'énergie avec la forêt. Mais ce qui est plus important, M. le Président, j'ai rencontré des gens passionnés, des gens qui aiment leur travail, des gens qui... Tout ce qu'ils demandent, ces gens-là, bien sûr, c'est de continuer à faire profiter le Québec de leur savoir-faire, de leur donner la possibilité, justement, d'amener des revenus au gouvernement en travaillant et en gagnant leur vie pour la famille. C'est très, très important. Ils m'en ont fait part, M. le Président. Maintenant, je leur rends hommage ici, à cette commission. Et, bien sûr, je dois vous dire que, chose surprenante, M. le Président, j'ai vu des gens qui n'avaient pas des cheveux gris comme les miens. J'ai vu des jeunes qui travaillaient en forêt. J'ai vu des gens qui étaient des camionneurs, qui étaient... possédaient de la grosse machinerie neuve, M. le Président. Alors qu'on dit toutes sortes de choses sur la forêt, j'ai été surpris de ça.

Maintenant, je pense que le Québec mérite véritablement qu'on porte une attention particulière à cette industrie parce qu'elle crée des emplois partout dans les régions du Québec. Je pense que le premier ministre est bien au courant de ça, que la forêt, dans notre région tout au moins, même dans la région du chef de l'opposition, c'est très important. Et puis une chose qui est certaine, M. le Président, je pense qu'ils méritent qu'on leur donne les moyens, justement, que leur industrie, qui est leur passion, puisse devenir encore plus passionnante pour les jeunes, que nos institutions puissent bien former ces gens-là en raison des nouvelles technologies.

Et moi, je voudrais entendre, M. le Président, du premier ministre, je voudrais entendre quels sont les moyens que notre gouvernement veut mettre en place, justement, pour que ces gens-là, ces Québécois-là, des passionnés de l'industrie forestière puissent avoir un avenir, mais, bien sûr, je dis, encore plus, avoir un espoir de continuer et de bien gagner leur vie, M. le Président. J'aimerais entendre le premier ministre là-dessus.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le député de Dubuc. M. le premier ministre, avec un peu plus de deux minutes pour votre réponse.

M. Couillard : Ça sera rapide, M. le Président, pour un sujet si important, étant moi-même député de Roberval puis citoyen du Saguenay—Lac-Saint-Jean, avec beaucoup de fierté, même si c'est relativement récent comme installation. C'est une région absolument formidable, des gens passionnés, actifs, qui ont de la résilience, comme on dit, parce qu'ils sont passés dans plusieurs périodes économiques difficiles. Puis il est clair que l'industrie de la forêt, chez nous puis partout au Québec, dans les régions notamment, c'est un élément majeur de l'économie. Tout ce qu'on voit autour de chez moi, à Saint-Félicien, là, est, de près ou de loin, directement ou indirectement relié à l'industrie de la forêt. Concessionnaires automobiles, les hôtels, les restaurants, les services, les bureaux de comptables, tout ça tourne beaucoup autour de l'activité forestière.

Alors, pour donner, d'abord, une vision de priorité réelle au secteur, on a commencé par nommer, dès le 23 avril, un ministre responsable des Forêts, de la Faune et des Parcs. Ça existait il y a bien des années, je suis certain que notre collègue se souvient de ça. C'est parce que ses cheveux sont maintenant blancs...

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Couillard : ...alors, il se souvient de l'époque où il y avait un ministre spécifique pour les forêts. On a remis, donc, cette pratique en place parce que la taille économique du secteur forestier est telle que ça prend l'attention non divisée d'un ministre.

Et la première annonce qui a été faite — et il y en aura d'autres, le mandat de quatre ans et demi nous donnera l'occasion d'agir profondément sur le secteur forestier — a été, bien sûr, le rehaussement des budgets de travaux sylvicoles. Pourquoi? D'abord, pour faire travailler le monde dans nos régions, et on a rehaussé les budgets en conséquence, jusqu'à 225 millions, comme ça avait été annoncé, puis la répartition régionale a été annoncée récemment. Mais parce que l'entretien des forêts, le jardinage de nos forêts, si je peux m'exprimer ainsi, par la sylviculture nous permet d'espérer que notre forêt va devenir beaucoup plus productive. Parce qu'il y a beaucoup de pression pour réduire les territoires exploités, que ce soit par des considérations reliées à nos relations avec les communautés autochtones, avec certaines espèces animales, avec des territoires, donc il faut que ce qu'on exploite soit exploité de façon maximale, donc que le rendement par hectare soit beaucoup élevé qu'il ne l'est actuellement. Et la sylviculture, pour ça, est un élément majeur de ce qui doit être fait.

Et également, comme notre collègue député de Dubuc a dit, tous les nouveaux produits issus de la cellulose — on aura l'occasion d'y revenir dans un prochain bloc — doivent être soutenus, de même que l'utilisation de la biomasse forestière. Comme il sait, il y a beaucoup d'avenir, d'espoir, dont une très près de chez moi, que je suis avec beaucoup d'attention, établir des serres, M. le Président, des serres à grande surface dans une région nordique grâce à l'activité forestière.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci beaucoup, M. le premier ministre. Je cède maintenant la parole au chef du deuxième groupe d'opposition pour un bloc d'environ 19 minutes.

• (9 h 50) •

M. Legault : Merci, M. le Président. Le premier sujet que je voudrais discuter avec le premier ministre concerne le fardeau fiscal des Québécois. On se rappellera tous qu'en campagne électorale le premier ministre avait été très clair, il s'était engagé à ne pas augmenter le fardeau fiscal des Québécois. Il avait dit clairement, entre autres, que la hausse des tarifs d'électricité, qui s'est produite en pleine campagne électorale, le 1er avril, la hausse de 4,3 %, il a dit clairement : Je m'engage à annuler cette hausse de 4,3 % et la remplacer par une hausse équivalente à l'inflation, donc autour de 2 %.

On connaît la suite des choses, M. le Président. Le premier ministre est arrivé au pouvoir, et, un peu comme l'ont fait les premiers ministres avant, a constaté que les finances publiques étaient moins bonnes que prévues et commençait à renier ses promesses. D'abord, il a changé d'idée concernant les tarifs d'électricité, il les a augmentés de 4,3 %, donc totalement à l'opposé de ce qu'il avait dit durant la campagne électorale.

Et on apprend, depuis quelques semaines, que, concernant les taxes scolaires, bien il y aura des augmentations de 8 %. Et pourtant je me rappelle encore, il y a quelques mois, des députés libéraux qui critiquaient l'approche du Parti québécois. Parce que, bon, on comprend, là, le gouvernement réduit les budgets des commissions scolaires et donne le choix aux commissions scolaires entre faire des gains d'efficacité dans leur commission scolaire ou augmenter les taxes. Et j'ai compris clairement de la part du ministre de l'Éducation que c'était possible pour une commission scolaire d'augmenter les taxes scolaires. On prévoit qu'en moyenne les taxes scolaires vont augmenter de 8,6 %.

Donc, si on prend seulement ces deux exemples, tarifs d'électricité et taxes scolaires, l'augmentation va dépasser l'inflation. Donc, ce que ça veut dire, c'est que le fardeau fiscal des Québécois va augmenter. Donc, j'ai une question toute simple au premier ministre : Est-ce que, selon lui, selon ses calculs, selon les consultations qu'il a faites avec son équipe, est-ce qu'il croit et est-ce qu'il confirme que le fardeau fiscal des Québécois va augmenter, cette année, au Québec? Et donc est-ce qu'il admet qu'il a renié cette promesse?

Le Président (M. Bernier) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Bien, M. le Président, d'abord, je salue le chef de la deuxième opposition de même que le ton de collaboration remarqué qui a été le leur, celui de son parti, à la suite du dépôt du budget. Puis je répète qu'on est très ouverts à des conversations, des suggestions, des conversations non seulement sur la question des dépenses, mais également sur la question de l'activité économique.

Alors, j'ai expliqué, dans mes remarques d'introduction et après, M. le Président, que, comme le chef de la deuxième l'opposition, je considère que le fardeau fiscal des Québécois, dans le contexte nord-américain, est trop élevé, à 37 % du PIB. Et il faut bien sûr se donner les moyens de le baisser, de le ramener plus près de nos voisins compétiteurs. Mais, là où nos avis diffèrent, c'est quant au moment, compte tenu... Puis je sais que ce n'est pas agréable d'entendre ça, mais il voit comme moi les chiffres — j'ai fait circuler la feuille tantôt — il voit l'ampleur de l'impasse budgétaire.

D'ailleurs, il y a au moins un éditorialiste réputé sur le plan économique qui lui a fait la remarque qu'il fallait, avant de commencer à réduire le fardeau fiscal, d'abord établir l'équilibre budgétaire. Je pense que ça semble la réponse logique de la majorité des observateurs et des commentateurs. Et ce qu'on a dit, c'est qu'une fois que... puis je vais le redire encore une fois, une fois que l'équilibre budgétaire sera atteint, on va, donc, dégager des marges de manoeuvre, dont 50 % seront affectés à la dette et 50 % à la réduction du fardeau fiscal des Québécois, en commençant par la taxe santé qu'il connaît bien puisqu'il en a parlé très souvent. Alors, là-dessus, on est tout à fait constants sur l'objectif.

Maintenant, là où, encore une fois, je ne suis pas d'accord avec ses remarques, c'est... Je dirais qu'au contraire — et on peut en faire un relevé, ça serait même intéressant de le faire et de le présenter — je pense que rarement on aura vu, en huit semaines, un gouvernement tenir un aussi grand nombre de ses engagements. Et c'est factuellement vérifiable.

Des voix : ...

M. Couillard : Je vois qu'on s'étouffe, de l'autre côté. Alors, pour les encourager... pour les encourager, M. le Président, à mieux respirer et de ne pas devenir cyanosés, ce qui serait dommage... Malgré que le ciel soit bleu, ce n'est pas une raison pour le devenir nous-mêmes. Je vais présenter... on va colliger assez rapidement une liste franchement exhaustive et impressionnante des engagements qui ont été tenus en très peu de semaines. Alors, on va continuer à tenir nos engagements et on garde le cap sur tous nos engagements.

Maintenant, effectivement, on a parlé de la tarification des services publics, puis je pense qu'on a eu, lui et moi, des échanges à l'Assemblée nationale sur cette question. Il y a deux éléments qui ont été mentionnés pendant et avant l'élection : la question des services de garde et des tarifs d'électricité. Pour les services de garde, vous avez vu, dans le budget, l'annonce de l'indexation au coût du programme, qui fait passer les tarifs de 7 $ à 7,30 $. Pour l'électricité, le collègue sait très bien que la Régie de l'énergie détermine indépendamment les tarifs et qu'il faut donc légiférer pour modifier la façon de faire de la Régie de l'énergie.

Je dirais que, dans les deux cas, l'histoire n'est pas terminée. Je rappelle à nos collègues... Je sais que ça peut être un peu déprimant de l'entendre répéter, mais nous avons quatre ans et demi devant nous. Donc, cette histoire, on n'est pas arrivés à la fin du chapitre un, même. Il y aura, entre autres, la commission de la fiscalité, la commission de la révision de programmes pour lesquelles on va demander de se pencher spécifiquement sur ces deux tarifications. Parce que, ma préoccupation, M. le Président, et je l'ai dit à plusieurs reprises, c'est, outre la tarification... Puis on pourrait démontrer avec toutes sortes de chiffres que, compte tenu des coûts réels, etc., compte tenu des coûts de nos voisins, d'électricité entre autres, ce n'est pas si mal que ça, mais je ne veux pas m'en tenir à cette logique-là. Il va falloir faire en sorte surtout que les familles à revenus bas soient protégées contre les augmentations tarifaires.

Maintenant, le tarif, le fardeau fiscal général des Québécois, je voudrais le répéter, là, dans le discours du budget, il n'y a aucune augmentation d'impôts ou de taxes. Si les impôts augmentent, c'est parce que les gens gagnent plus. Si les taxes foncières augmentent, c'est parce que leur maison vaut plus. Mais on n'a pas, nous, augmenté le taux d'imposition, ni le taux de la TVQ ni le champ d'application de la TVQ.

Une voix : Il y a le tabac.

M. Couillard : Bon, il y a... Sauf le tabac. On me rappelle le tabac.

Une voix : Et la bière...

M. Couillard : Et la bière. D'ailleurs, j'en prenais une délicieuse et très froide, hier, sur la galerie, ce qui était fort agréable. Mais, sur ces deux plans-là... D'abord, le tabac — merci au collègue de me le rappeler — on a également soutenu davantage la lutte contre la contrebande, puis, au Québec, on paie la cartouche de tabac encore moins cher pas mal que nos voisins. Et, pour ce qui est de l'alcool, on a tout simplement voulu mettre une équité entre le traitement fiscal de la consommation d'alcool dans les restaurants et à domicile. Je pense que c'était attendu, notamment par les restaurateurs, et qui ont d'ailleurs salué la mesure. Mais, outre cela... Il y a donc des augmentations de paiement d'impôt chaque année en raison des taux d'imposition...

Des voix : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le... une question...

M. Bonnardel : M. le Président, une question de règlement. Le chef a posé une question qui a duré trois minutes, on est à 7 min 20 s, donc...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Oui. En fait, je comprends... Je le rappelle, on l'a dit tantôt, ce n'est pas une question de mathématique. Je comprends... M. le premier ministre, je peux vous demander de conclure votre réponse? M. le premier ministre.

Des voix : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, allez-y, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. Legault : Oui, M. le Président. Je pense, tout le monde aura remarqué que le premier ministre n'a pas du tout répondu à ma question. Donc, je répète ma question. Durant la campagne électorale, il avait promis d'annuler la hausse des tarifs d'électricité de 4,3 % du 1er avril 2014, il a changé d'idée après l'élection. C'est tout à fait possible de légiférer pour annuler cette hausse. En tout cas, nous, on offre notre collaboration pour le faire rapidement. Donc, c'est son changement. Moi, je voudrais, là, savoir : Aujourd'hui, clairement, là, quand on tient compte, entre autres, des tarifs d'électricité, des taxes scolaires, est-ce qu'il peut, oui ou non, nous confirmer que le fardeau fiscal des Québécois va augmenter cette année? Et est-ce qu'il admet qu'il a renié sa promesse, entre autres sur les tarifs d'électricité?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : M. le Président, je répète qu'on garde le cap sur tous nos engagements, et notamment de protéger les familles, et surtout les familles à bas revenus, de l'impact de la tarification. Parce qu'au Québec on connaît la structure de nos tarifs, on connaît la structure de notre population puis les revenus disponibles, ce n'est pas vrai que les différents tarifs ont le même impact pour une famille qui gagne 50 000 $ ou 60 000 $ par année que pour une famille qui en gagne 200 000 $ ou 300 000 $ par année. Alors, il faut tenir compte de ça. Puis moi, je veux aborder cette question-là de façon plus large.

Mais je pense que c'est quelque chose que je pourrais amicalement mentionner au collègue, c'est que souvent on a tendance à peut-être, de leur côté, aborder les choses de façon très isolée : Telle chose est problématique, il faut régler ça. On veut le voir de façon plus large. Par exemple, la Régie de l'énergie, oui, il faudra légiférer probablement sur la Régie de l'énergie non seulement sur la question des tarifs, mais également sur, par exemple, la capacité d'utiliser les surplus d'électricité, dont on parlera au cours de cette session, à des fins de développement économique. Ça nécessite également des changements au niveau de la Régie de l'énergie. Alors, on va faire ça de façon planifiée, ordonnée et raisonnée et, là-dessus, on compte beaucoup, à la fois sur la commission de la fiscalité et sur la commission de révision de programmes.

• (10 heures) •

M. Legault : M. le Président, je repose ma question, parce que je n'ai toujours pas de réponse. Disons qu'on prend une famille de la classe moyenne, au total, là — je ne veux pas avoir quelque chose d'isolé, là — au total, est-ce que, selon le premier ministre, le fardeau fiscal de cette famille, cette année, va augmenter, oui ou non? C'est ça, ma question.

M. Couillard : Si on prend l'ensemble de ce qui constitue ce à quoi le député fait allusion, il n'y a pas d'augmentation d'impôt sur le revenu, il n'y a pas d'augmentation de taux de taxe à la consommation ni du champ d'application. Alors, il n'y a pas d'augmentation des taxes et impôts des Québécois. Maintenant, s'il y a des augmentations des taxes foncières, c'est souvent parce que la valeur de l'évaluation des résidences augmente — et je pense que lui ne reviendrait pas là-dessus non plus certainement, s'il était au gouvernement — de même que l'indexation annuelle des tables d'impôt. Mais je voudrais rappeler, M. le Président, parce qu'il parle des taxes scolaires...

M. Legault : ...

M. Couillard : Mais, M. le Président, je peux m'exprimer, quand même?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Absolument. M. le premier ministre.

M. Couillard : Oui, merci. Alors, sur les taxes scolaires, de la même façon que je disais que j'étais préoccupé par la situation des familles à bas revenus, pour les taxes scolaires et les taxes foncières en général, on est préoccupés par l'impact sur les retraités qui nous écoutent, dont le revenu est stable alors que la valeur résidentielle augmente, donc les taxes augmentent. C'est pour cette raison que, dans le discours du budget, on a annoncé une mesure, qui, à mon avis, est majeure et n'a peut-être pas reçu toute l'attention qu'elle méritait, de négocier rapidement entre le ministère des Finances et les institutions financières un programme de prêt garanti basé sur la valeur de la résidence qui permettra aux aînés, aux retraités, de rester chez eux et de faire les paiements de taxes foncières, municipales et scolaires. Il y a quand même là une mesure qui est majeure.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. Legault : Avec tout le respect, je pense que le premier ministre ne comprend pas le dossier. La taxe scolaire, c'est vrai, quand il y a une augmentation de la valeur foncière, il y a une augmentation de la taxe. Ce n'est pas de ça qu'on parle, là. On parle de l'abolition du programme de péréquation, qui n'a rien à voir avec l'augmentation de la valeur de la maison, non, rien à voir. Donc, une maison pourrait avoir la même valeur que l'année dernière, et il y aura une augmentation des taxes scolaires.

Mais je veux répéter ma question, parce que je ne sais pas si ça va être comme ça pendant les cinq heures, là, M. le Président, mais, pour moi, là, quand je regarde le fardeau fiscal d'une famille de la classe moyenne, selon moi, avec l'augmentation des taxes scolaires puis des tarifs d'électricité, à la fin de l'année, cette année, il va y avoir eu augmentation du fardeau fiscal. Donc, je voudrais savoir... À moins que le premier ministre connaisse quelque chose que je ne connais pas. Peut-être qu'il y a d'autres baisses qui s'en viennent dans les prochains mois, là. Moi, je voudrais savoir : Est-ce qu'il est d'accord avec moi que, cette année, le fardeau fiscal des Québécois va augmenter, donc ce qui est en contradiction totale avec sa promesse électorale, oui ou non?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, M. le premier ministre.

M. Couillard : Bien, d'abord, M. le Président, j'apprécie les efforts d'enseignement du député à mon endroit, mais je lui rappellerais amicalement qu'un tarif et une taxe, ce n'est pas la même chose, d'abord. Deuxièmement, la taxe scolaire, oui, elle augmente, mais elle augmente également à cause d'augmentations d'évaluations. Il ne peut pas nier ça, là. Effectivement, il y a un impact de l'annulation de la péréquation, qu'on a d'ailleurs condamnée à l'époque parce qu'elle a amené des conséquences — on s'en souvient, de toute cette histoire-là — mais il n'y a plus d'argent dans les caisses. On voudrait bien, là, rétablir un système de subvention quelconque pour rétablir l'équilibre, mais il n'y a plus d'argent dans les caisses de l'État. Je pense qu'il ne faut pas banaliser la situation, puis j'ai l'impression parfois qu'on la banalise du côté de la deuxième opposition.

On fait face à un déficit de plus de 5 milliards de dollars pour l'année 2014‑2015 et qui approche les 7 milliards de dollars pour 2015‑2016. Ça fait longtemps qu'on a vu ça. On va régler cette question d'équilibre budgétaire et on va regarder spécifiquement, dans la revue de programmes, M. le Président, la question des commissions scolaires, la question de la taxe scolaire. Comme il le sait, il y a des travaux en cours, il y en a d'autres à faire. Je pense qu'il faut réviser cette question de façon profonde. Alors, on ne posera pas de gestes isolés et incohérents. On va le faire de façon ordonnée et cohérente.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Deuxième groupe. M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. Legault : Oui. Je ne veux pas savoir, là, s'il y a eu des surprises, si les finances publiques sont pires que ce que s'attendait le premier ministre. Ce que je veux juste savoir, là : Pour une famille de la classe moyenne, cette année, est-ce qu'il constate comme moi que le fardeau fiscal va augmenter? Ça veut dire que les taxes scolaires, les tarifs d'électricité vont augmenter de plus que l'inflation, plus que l'augmentation moyenne des salaires. Donc, à la fin de l'année, une famille de la classe moyenne va avoir moins d'argent dans ses poches qu'au début de l'année. Est-ce qu'il est d'accord avec ça, oui ou non?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, M. le premier ministre, en vous rappelant qu'il reste un peu moins de cinq minutes à ce bloc.

M. Couillard : Bien, je trouve ça un peu court comme raisonnement, M. le Président, parce que les chiffres montrent, au contraire, au cours des dernières années, que le revenu disponible des familles dont il parle a augmenté au Québec, notamment les revenus de classe moyenne à plus bas revenus. Les revenus ont augmenté au Québec. Puis, encore une fois, il mélange les tarifs et les taxes. Ce n'est pas la même chose. On ne peut pas mettre tout ça dans le même panier. Alors, il va y avoir une augmentation, pour certains contribuables, de la taxe scolaire, pas pour toutes les commissions scolaires, pas pour tous les contribuables, dépendant à la fois de la variation de l'évaluation foncière et de l'impact de l'annulation de la péréquation, qui varient selon les régions et les commissions scolaires.

Donc, la réponse qu'il demande, la question qu'il pose doit être davantage précisée, parce que la situation n'est pas la même. Il pourra la poser au ministre de l'Éducation, qui a les tables détaillées de l'impact sur les différentes commissions scolaires. Mais personne ne peut nier que, lorsqu'une résidence augmente en valeur, les taxes foncières augmentent, et on peut s'assurer que ça reste raisonnable, et également que la péréquation... l'annulation de la péréquation a eu un impact là-dessus.

Et autant cette question que les services de garde, que les tarifs d'électricité, on ne peut pas régler ça de façon rapide et non réfléchie. On va le faire, encore une fois, dans un exercice très profond et sans précédent au Québec, où, lorsqu'on va parler de la taxe scolaire— puis c'est un sujet qui devrait intéresser beaucoup la deuxième opposition — on va parler également du rôle des commissions scolaires, de leur mandat, de leur taille, de leur coût de fonctionnement par rapport au budget de l'éducation, on va parler, par exemple, pour les services de garde, de la façon dont les places sont attribuées, de la façon dont elles sont priorisées. Et ça, c'est une conversation, à mon avis, beaucoup plus utile et une façon de gouverner beaucoup plus intéressante que d'y aller à la pièce et de façon un peu rapide parfois, comme le suggère le chef de la deuxième opposition.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. Legault : Je pense que, même si je posais la question 10 fois, là, le premier ministre ne semble pas vouloir répondre. Donc, ce que je conclus, c'est qu'il avait promis à tous les Québécois, en campagne électorale — il s'était fait élire avec ça — qu'il n'y aurait aucune augmentation du fardeau fiscal pour tous les Québécois, mais ce qu'on comprend, c'est que, lui, dans sa définition, quand il y a une augmentation de tarifs de plus que l'inflation, ce n'est pas une augmentation du fardeau fiscal, quand il y a une augmentation des taxes scolaires à cause de la péréquation, pour lui, ce n'est pas une augmentation du fardeau fiscal. Donc, ce que je conclus, là... D'abord, je n'ai pas de réponse, mais je m'en fais une, réponse, là. Je conclus entre les lignes qu'il y aura moins d'argent dans les poches des contribuables à la fin de l'année ou, en tout cas, de certains contribuables. Ah! Je le vois faire un signe de la tête. Donc, est-ce qu'il admet — là, là, j'aimerais qu'il mette en paroles son signe de tête — que certains Québécois auront moins d'argent dans leurs poches à la fin de l'année? Est-ce qu'il admet au moins ça?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre, il reste 1 min 30 s.

M. Couillard : Je hochais la tête parce que je reconnais la dialectique habituelle de mon collègue, je la reconnais avec facilité et sympathie, je dois dire, là. Mais je vais dire non. Le monde auront plus d'argent dans leurs poches parce qu'il y aura plus d'emplois de créés, il y aura plus d'emplois de bonne qualité de créés puis il y aura plus d'emplois dans les régions et partout au Québec. Les gens vont avoir plus de revenus disponibles, comme ça a été le cas, d'ailleurs, au cours des dernières années, même s'il prétend ne pas le remarquer, et que ça va s'accompagner d'une révision en profondeur du fardeau fiscal, de la question de la tarification — deux choses différentes — des principaux réseaux et des efforts de rationalisation administrative. Je rappelle que les directions régionales en éducation ont été abolies. Je rappelle qu'il y a d'autres gestes à poser dans d'autres secteurs et d'autres grands réseaux, qu'ils seront faits, mais sous l'examen attentif et raisonné de la commission de révision de programmes, par une décision politique annoncée par le gouvernement. J'invite notre collègue à être patient, il y en a pour quatre ans et demi à écouter ça, on va le faire pendant quatre ans et demi. Au bout de quatre ans et demi, les citoyens pourront juger du résultat.

M. Legault : M. le Président, je conclus que le premier ministre est la seule personne au Québec qui croit que les gens vont avoir tous plus d'argent à la fin de l'année dans leurs poches.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le chef du deuxième groupe d'opposition. Je cède maintenant la parole au député de Dubuc pour le prochain bloc d'une durée de 19 minutes.

M. Simard : Merci, M. le Président. D'abord, j'ai trouvé le premier ministre intéressant par rapport à la forêt tout à l'heure, je vais continuer dans le même sens, M. le Président. La question que je voudrais poser à M. le premier ministre, M. le Président, c'est... Considérant que l'industrie forestière du Québec, elle couvre 45 % de la superficie du Québec, donc c'est très, très important, mais c'est surtout dans les régions. Et les régions véritablement servent bien cette ressource naturelle. Ils ont développé de l'expertise, ils se sont assurés justement de créer des emplois. Et moi, ce que je voudrais nécessairement, c'est aider cette industrie, et je pense que le premier ministre également veut le faire.

La raison de ça, c'est... Vous savez comme moi que, dans les derniers miles, dans les dernières années, cette industrie a été malmenée par les ordinateurs, les iPad, les iPhone, toutes sortes de livres électroniques. On sait que les journaux se vendent moins bien qu'ils se vendaient pour toutes sortes de raisons, et c'est la technologie. Donc, il y a, dans cette industrie, de grands défis, je vous dirai, de grands défis qu'il faut relever, des défis de compétitivité, des défis de productivité. Donc, il faut qu'on s'adresse à ces problèmes, qu'on trouve des solutions. Mais, M. le Président, j'aimerais entendre le premier ministre par rapport à ce qui a été déposé dernièrement. C'est quoi que le gouvernement va faire pour s'assurer que la productivité, que la compétitivité de cette industrie... quelles solutions qu'on va lui offrir? J'aimerais entendre le premier ministre là-dessus.

• (10 h 10) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le député. M. le premier ministre.

M. Couillard : M. le Président, je remercie encore une fois notre collègue député de Dubuc pour aborder la question forestière. On sait qu'il y a eu beaucoup de perturbations au cours des dernières années, une sorte d'orage parfait qui a frappé le milieu forestier. Ça a commencé par les interrogations sur la façon d'exploiter la forêt, les réductions de possibilités de coupe, avec le rapport Coulombe, ça s'est continué avec la chute... l'augmentation, pardon, du dollar canadien qui a miné la compétitivité de beaucoup de nos entreprises. Ensuite, ça s'est poursuivi avec les négociations sur le bois d'oeuvre — tout ça est arrivé en même temps, là — les négociations sur le bois d'oeuvre avec les Américains, qui ont également fragilisé cette question-là, et puis toute la question des aires protégées, la protection des espèces animales s'ajoutant, les revendications autochtones sur les territoires.

Tout ça pour dire qu'il y a une immense pression sur l'industrie forestière. Puis, quand on parle de l'industrie forestière, lui et moi et tous les collègues, on parle des travailleurs forestiers et de leurs familles. Les grandes entreprises forestières ont les reins solides, elles sont capables de se débrouiller. Mais ce qui nous préoccupe, c'est les familles de chez nous qui vivent directement ou indirectement de la forêt. Alors, j'ai parlé tantôt de la question des travaux sylvicoles. Je pense que c'est important de le répéter, c'est une augmentation importante. Je peux dire que, chez nous, on me l'a déjà dit que les gens avaient été rappelés au travail. Alors, moi, c'est la chose que je vérifie, là, comme on fait tous dans nos circonscriptions : Quel est l'impact? Je peux dire que l'impact est positif.

Il y a d'autres mesures également qui ont été annoncées dans le budget. On sait que nos entrepreneurs forestiers doivent opérer... ou utiliser, pardon, des équipements très coûteux qu'il faut remplacer. C'est des investissements importants. Alors, il y a un programme de garantie de prêts de 20 millions de dollars qui a été mis sur pied pour favoriser le renouvellement de l'équipement de nos entreprises forestières.

Et il y a toute la vision qu'on a de l'avenir de l'industrie de la forêt, qui n'est pas derrière elle, qui est devant elle. Il y a un avenir extraordinaire pour l'industrie forestière au Québec. C'est faux de dire que c'est une industrie du passé, elle s'est transformée et elle va se transformer considérablement, d'abord par l'amélioration des méthodes de coupe, de la sylviculture, le fait qu'on va toujours... Puis, lorsqu'on fait allusion aux iPad qu'on a puis aux ordinateurs, bien, on lit moins les journaux papier, ça, c'est clair, ça, c'est irréversible comme tendance, mais on va continuer à faire du deux-par-quatre pour construire des maisons, puis le marché immobilier américain actuellement reprend. Donc, cette transformation primaire, elle doit continuer. Elle est la base du reste de la transformation.

Mais ce qui est actuellement tout à fait intéressant devant nous, c'est les opportunités qu'offre la biomasse forestière... des résidus forestiers, et également les nouveaux produits tirés du bois. Alors, dans le budget, également, pour ce qui est de la biomasse, on a annoncé un nouveau fonds de 20 millions de dollars pour favoriser les projets d'utilisation de la biomasse. Puis je donne un exemple auquel j'avais commencé à faire allusion dans mon intervention précédente. À Saint-Félicien, il y a un projet absolument fascinant avec l'entreprise Résolu qui a une usine de pâte... pas de pâte à papier journal, de pâte au niveau, si on veut dire, qui a passé à travers la crise forestière, qui dégage beaucoup de chaleur. Alors, cette chaleur-là va être récupérée pour installer sur les terrains de l'entreprise, avec la municipalité, des immenses serres pour produire bien sûr des légumes. Qui aurait cru ça possible il y a à peine quelques années? Alors, ce genre de projet là — j'en ai vu également en Montérégie, chez notre collègue le député de Huntingdon, j'ai vu ça un peu partout au Québec — ça montre qu'on peut faire naître de nouvelles industries grâce à l'industrie forestière. On a également tous les nouveaux produits... Je ne sais pas c'est combien de temps qu'il nous reste, M. le Président?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Ah, vous avez encore 14 minutes.

M. Couillard : Formidable! Alors, il y a toutes sortes de nouvelles choses qu'on fait, d'abord avec le bois lui-même, les produits architecturaux. Le gouvernement précédent libéral, même le gouvernement précédent du Parti québécois, ont amélioré la Charte du bois ou le code du bâtiment pour que le bois puisse être utilisé jusque dans des édifices de six étages. Alors, on voit de plus en plus, de plus en plus de bâtiments publics où le bois est très apparent, et c'est d'une qualité architecturale qui est équivalente aux autres méthodes. Récemment, j'étais à Gatineau, au sommet de l'UMQ, puis il y avait des kiosques d'exposition de projets municipaux d'excellence, et c'était visible que tous les bâtiments qui étaient montrés étaient largement constitués en bois. Alors, les produits architecturaux du bois, c'est un domaine important.

Maintenant, il y a tous les résidus de la cellulose. La cellulose, c'est le sucre qui constitue le bois, et, avec ça, on peut faire littéralement tous les produits qu'on fait actuellement avec l'industrie pétrochimique. C'est absolument extraordinaire. D'abord, la rayonne de textile, ça fait longtemps qu'on fait ça, de la rayonne, puis on en fait chez nous, à Thurso puis à Lebel-sur-Quévillon, mais il y a également des petits produits, des filaments de cellulose. Par exemple, il y a une usine qui va être inaugurée sous peu en Mauricie là-dessus pour solidifier les papiers fins qui sont faits avec la cellulose. Il y a la nanocellulose cristalline qui permet de faire des plastiques, des cosmétiques, des peintures, des choses absolument incroyables à partir du bois. Et il y a déjà des usines sur place — j'en ai visité une à Windsor là-dessus — qui vont nous amener vers de nouveaux horizons. Mais tous ces nouveaux horizons sont possibles seulement si on conserve l'exploitation de la forêt de façon durable et la transformation primaire. Parce que ces affaires-là, on les voit juste à un endroit qu'on fait déjà du deux-par-quatre puis de la pâte de papier, journal de moins en moins, mais d'autres types de pâte également. Et là-dessus on peut baser une industrie de transformation qui est beaucoup plus profonde et beaucoup plus complexe.

Alors, moi, contrairement à certains prophètes de malheur des dernières années, moi, je suis plein d'optimisme pour l'industrie forestière. Il y a des beaux métiers, également, pour notre jeunesse. C'est le dernier axe, là, un des axes du rendez-vous de la forêt auquel on a tous participé. Il y a des professions et des métiers extraordinaires pour la jeunesse, beaucoup d'opportunités d'emploi. Alors, lorsqu'on dit qu'on crée de l'emploi au Québec, ça existe également, la création d'emplois, la modernisation, l'innovation dans nos industries traditionnelles, autant l'agriculture, d'ailleurs, que l'exploitation des forêts. Alors, je crois qu'il est également, comme moi, très optimiste. Ce n'est pas facile. Il y a encore beaucoup de défis devant nous. D'ailleurs, l'entente du bois d'oeuvre avec les États-Unis, elle arrive au terme, là, il faut qu'elle soit renouvelée. Alors là, encore, c'est un rendez-vous, c'est un passage qui est important. Mais, encore une fois, on est très optimistes pour l'avenir de l'industrie de la forêt.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. M. le député de Dubuc.

M. Simard : M. le premier ministre, vous parliez tout à l'heure du rendez-vous sur la forêt, que j'ai assisté, moi, également. Je vous ai rencontré là également. Et on sait qu'on a parlé, à ce moment-là, beaucoup... Il y avait des intervenants, je pense, très intéressants, des intervenants qui étaient directement reliés à la forêt, des intervenants qui se posaient des questions sur la protection, la conservation, la mise en valeur des ressources forestières et sur l'ensemble du territoire. Et, je pense, c'étaient des questions très pertinentes. Il y a des suggestions qui ont été faites aussi, aussi pertinentes. J'aimerais, si c'est possible, que le premier ministre nous indique quelles sont les mesures qui peuvent rapidement être mises en place pour aider cette industrie tellement importante pour l'ensemble des régions du Québec et, bien sûr, la mienne, la sienne et la sienne, celle du député de... du chef de l'opposition, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le député. En fait, une question qui touche de nombreuses circonscriptions directement, là. M. le premier ministre.

M. Couillard : Alors, je me souviens très bien du rendez-vous de la forêt, je pense que mon collègue de Chicoutimi était présent, hein? Et ce qui était tout à fait intéressant dans cet exercice, c'est que tout le monde avait fait les mêmes consultations auprès des mêmes personnes essentiellement — nous-mêmes, on avait présenté des propositions dans les deux jours qui ont précédé le rendez-vous de la forêt — de sorte qu'on est arrivés à des zones de consensus qui sont très intéressantes, et les travaux vont se poursuivre dans ce sens-là. On a touché tous les axes dont on vient de parler, la sylviculture, la productivité de la forêt, les équipements forestiers, on a même parlé des chemins l'hiver, la possibilité de faire des expériences pilotes pour les chemins forestiers pendant l'hiver pour permettre aux camions d'y cheminer. On a parlé également des nouveaux produits du bois, comme on vient de le faire. Puis on a parlé de la main d'oeuvre. Puis ça, je pense que c'est un appel qu'il faut lancer encore une fois. Les opportunités de création d'emplois dans le domaine de la forêt sont très, très importantes.

Alors, ce travail-là va se poursuivre parce que c'est un travail de consensus. Et je pense qu'on était là le même jour... à la conclusion, tout le monde était sur les mêmes pistes, et avec les mêmes objectifs, et les mêmes constats, puis également le même optimisme. Moi, ce que je retiens du rendez-vous de la forêt, c'est une attitude généralement optimiste par rapport à l'avenir de l'industrie de la forêt.

Tantôt, vous parliez, M. le député, vous parliez des défis apportés par le commerce électronique puis les journaux qui sont sur iPad. Il y a également un autre versant à ça, qui, bien sûr, ne produira pas autant de feuilles que les journaux papier le faisaient, mais prenez, par exemple, l'explosion actuelle du commerce électronique. De plus en plus de personnes commandent des livres, toutes sortes d'éléments par Internet. Ça arrive comment chez vous, ça? Dans des boîtes en carton. Alors, l'augmentation du commerce électronique, paradoxalement, d'un côté, peut nuire à la circulation de papier comme ça ou papier journal, d'un autre côté, peut favoriser l'utilisation d'autres produits qui viennent de l'exploitation de la forêt.

Alors, il faut rester aux aguets puis toujours se moderniser. L'industrie est passée par une grande phase de rationalisation. Il y a beaucoup moins de scieries qu'il y en avait, on le sait maintenant, hein? Par contre, celles qui restent, ayant passé à travers l'orage, ont les reins plus solides. Elles devraient être capables d'aller vers l'avant. Puis il y a les autres défis dont on peut parler, qui, par exemple... je pense que notre collègue également et tous les députés de notre région le savent, la question de la certification de l'entreprise Résolu, par exemple, qui a un impact majeur sur leurs clients puis la capacité d'écouler leurs produits, donc directement sur les emplois du secteur forestier.

Alors voilà, M. le Président, ce sommet... ce rendez-vous était une bonne initiative. On y a participé activement, de façon positive, je me souviens très bien, et on va continuer à mettre en place les initiatives qui en découlent.

• (10 h 20) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. M. le député de Dubuc.

M. Simard : M. le Président, je pense que le premier ministre m'a très bien informé par rapport aux questions que je lui ai posées, et je l'en remercie, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le député. Je suis prêt à reconnaître un autre député du côté gouvernemental. Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré.

Mme Simard : Est-ce que c'est possible de savoir de combien de temps nous disposons?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Vous disposez d'un gros sept minutes.

Mme Simard : Je vous remercie. Dans un premier temps, bien, bonjour, M. le premier ministre et les collègues. J'aimerais vous préciser, comme c'est une première expérience pour moi, que je me sens très privilégiée d'être avec vous aujourd'hui, et donc vous parler des éoliennes, qui sont quand même très importantes dans Charlevoix, plus précisément sur la Côte-de-Beaupré. Donc, dans ma circonscription, nous avons les parcs éoliens de la Seigneurie de Beaupré, qui consistent en un des plus grands sites, donc, au Canada, et le plus grand chantier de construction dans la Capitale-Nationale. On sait que c'est très important au niveau du Québec, et ça représente plus de 150 entreprises qui génèrent plus de 2 000 emplois.

Alors, il faut vraiment réfléchir de façon soigneuse à la meilleure façon d'accompagner l'industrie dans son développement futur, tout en se souciant, bien sûr, de l'impact de cette industrie sur les tarifs offerts, donc, pour l'ensemble des consommateurs québécois. Alors, j'aimerais demander au premier ministre, pour savoir... en fait, qu'il nous parle davantage de sa vision du développement éolien dans notre stratégie de développement énergétique.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, merci, Mme la députée. Avant de céder la parole au premier ministre, je... La commission est heureuse de compter sur votre participation et de vous accueillir comme nouvelle membre aujourd'hui. M. le premier ministre.

M. Couillard : Merci. Bien, à mon tour de souhaiter la bienvenue à notre collègue. Alors, voilà un enjeu sur lequel la deuxième opposition et nous, clairement, sommes en désaccord. La deuxième opposition — M. le Président puis les gens des régions qui nous écoutent — ils n'aiment pas ça, l'éolien. Alors, soyez avisés, les citoyens du Bas-Saint-Laurent, de la Gaspésie, de la Côte-de-Beaupré : ils n'en veulent pas, d'éolien.

Maintenant, l'éolien, oui, oui, mais pas de façon aveugle et également en considérant tous les impacts. D'abord, il est bon pour un État d'avoir un portefeuille énergétique varié. On a la chance, au Québec, d'avoir une importante contribution de l'hydroélectricité dans notre portefeuille d'énergie, mais il est bon d'avoir un peu de variation, et l'éolien fait partie de ce concept-là. Bon, le solaire éventuellement, mais ça, compte tenu de nos latitudes, c'est un enjeu un peu plus compliqué. Mais au moins l'éolien nous a permis à la fois de développer cette filière d'énergie renouvelable différente de l'hydroélectricité, qui demeurera toujours une énergie de soutien parce que, par définition, le vent est inconstant, comme les passions humaines, et parfois il monte, parfois il baisse. Donc, des fois, on a du courant, des fois, on en a moins. Donc, c'est un système d'appoint.

L'éolien, c'est un système énergétique d'appoint, mais ça a permis de créer, au Québec, une activité économique considérable, notamment dans nos régions. Et il faut avoir parcouru la Gaspésie à plusieurs reprises comme je l'ai fait pour voir à quel point l'impact de cette énergie-là a été déterminant dans l'économie régionale, les régions qui étaient... qui demeurent encore aux prises avec des défis économiques considérables et auxquelles on a littéralement redonné espoir de façon visible. Alors, ça génère en moyenne, cette filière, par exemple, 1 200 emplois en Gaspésie et dans la MRC de Matanie, dont 800 emplois manufacturiers. Parce que l'idée, ce n'est pas juste faire des hélices qui font de l'électricité, mais bâtir une véritable industrie qui fabrique des éléments des parcs éoliens, les remplace, les entretient, développe une main-d'oeuvre spécialisée et qui peut éventuellement exporter ses connaissances et ses façons de faire.

Ce qu'on a dit, et je vais le répéter, c'est qu'on va continuer le plan de développement jusqu'à la prochaine étape qui devrait nous permettre d'avoir environ 2 900, presque 3 000 MW de puissance installée en éolien au Québec. Il reste le dernier bloc de 800 MW qui a été lancé, je crois, par le gouvernement précédent, le dernier bloc d'appels d'offres, on va le poursuivre. Il y a déjà des éléments qui ont été adjugés, notamment avec les Micmacs en Gaspésie. Également une bonne façon d'impliquer les communautés autochtones dans le développement économique.

Mais, lorsqu'on aura installé ce 800 MW, je l'ai dit à quelques reprises, il faut faire une pause et une réflexion : Quel est le rôle de l'éolien dans le portefeuille énergétique du Québec vers l'avenir? Disposons-nous de la masse critique actuelle qui permet de créer cette industrie dont je parlais? Quel est l'impact sur les tarifs résidentiels? Alors, c'est une question qui est tout à fait légitime. Et, si on continue l'éolien, à quels endroits et à quelles conditions? Par exemple, j'avais des conversations récentes sur cette question-là, puis on me faisait remarquer que souvent un des éléments qui augmentent le coût de l'éolien, c'est les coûts de raccordement au réseau électrique, alors qu'il existe dans le Nord-du-Québec apparemment des potentiels éoliens très, très intéressants à proximité directe des grands réseaux de transmission et dont le coût peut-être serait amenuisé. Puis je rappelle que, dans le Plan Nord, il y a également un bloc d'énergie renouvelable qui est prévu. Alors, on fera cette évaluation-là. D'ailleurs, notre collègue le ministre de l'Énergie a déjà commencé à regarder et à y réfléchir. On n'a pas fini de donner le bloc de 800 MW, donc on peut prendre le temps de la réflexion.

Mais je crois que c'était une décision qui a été bénéfique pour le Québec, qui a ajouté une corde à notre arc, autant énergétique que sur le plan des industries en région. Puis je trouve qu'il faut garder une certaine sensibilité au fait que les régions du Québec, comme la Gaspésie, comme Charlevoix, comme le Bas-Saint-Laurent, ont droit à leur part de prospérité. C'est sûr qu'on pourrait leur dire : Trouvez-vous des jobs ailleurs, faites du tourisme, ouvrez des roulottes à patates sur le bord de la route, puis on va aller prendre des photos, l'été, quand on va en vacances chez vous. Mais les familles, elles veulent plus que ça dans les régions. Puis, quand elles entendent un parti politique qui dit non, qui tourne le dos à des projets de développement économique majeurs, elles disent : Bien, qui parle pour nous ici? Qui parle pour nous à l'Assemblée nationale?

Moi, je tiens à ce que les citoyens des régions — et j'en suis un, maintenant, citoyen de région, puis j'en suis fier — aient leur part de prospérité, aient leur part de modernité, aient leur part d'espoir pour que les familles des régions non seulement y restent, mais y reviennent. Et ça, ça prend plus que l'industrie touristique, qui est importante, bien sûr, ça prend la modernité économique dans nos régions. Et on va s'assurer que toutes les régions du Québec participent à la croissance et aux bénéfices, et ça inclut le développement de l'industrie éolienne.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. Je pense qu'il reste une petite minute. On pourra la reporter au prochain bloc. Alors, je vais céder la parole au chef de l'opposition pour un bloc de 20 minutes.

M. Bédard : Merci, M. le Président. Restons sur les ressources naturelles, sur le bois. Le premier ministre nous a parlé longuement du bois. Je vais y aller de façon un peu plus précise, peut-être par un commentaire d'abord sur la Charte du bois. La Charte du bois a été adoptée par le gouvernement du Parti québécois et elle provient de notre région, M. le premier ministre, donc elle vient de l'Université du Québec à Chicoutimi, intégrée à la plateforme électorale des députés du Parti québécois en 2007 et qui est devenue une politique. Dans cette politique, il y avait, entre autres... ce qu'on prévoyait, évidemment, c'est une place accrue du bois dans le secteur de la construction. Il y a des lobbys très forts qui s'y opposent. Nous y avons réussi, entre autres, en modifiant le code du bâtiment, d'ailleurs, avec ma collègue qui est ici, à ma gauche.

Il reste que nous avions un grand projet de faire un bel immeuble signé ici, à Québec, dans le quartier D'Estimauville. Est-ce que le premier ministre est au courant de ce projet? Est-ce qu'il compte encore, pour valoriser le secteur du bois et de la transformation du bois, y aller de l'avant avec ce projet immobilier, avec le ministère du Revenu, de faire un immeuble signé en bois dans Québec et dans D'Estimauville?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Bien, M. le Président, d'abord, je dirais à notre collègue que moi, je n'ai aucun problème à reconnaître les mérites des autres formations politiques. Et ce qu'il dit est exact, la Charte du bois a été adoptée par le gouvernement du Parti québécois. Quand même, les travaux initiaux, les conversations, et il va le reconnaître, avaient également été démarrés. Ça, c'est manquer un peu de bonne foi, de ne pas reconnaître ça. Je vois notre collègue qui fait signe que non. Bien oui! Ça ne veut pas dire que tout se fait d'un coup. C'est une chaîne, le gouvernement du Québec, puis les gens interviennent les uns après les autres. Mais, oui, effectivement, ils ont créé la Charte du bois, ce qui est une très bonne chose. Puis ça ne diminue en rien ce que je fais en politique de le reconnaître, puis je suis content de le faire, puis, lorsque ce sera nécessaire, je le ferai avec plaisir.

Maintenant, je suis au courant du projet dont il nous parle. Dans mon esprit, il se poursuit. Alors, c'est mon niveau de compréhension actuel. Je suis certain que les gens qui m'écoutent au ministère en question sont en train frénétiquement de trouver les informations que je communiquerai avec plaisir, mais...

Des voix : ...

M. Couillard : Oui, bon. À ma connaissance, ce projet-là va aller de l'avant, j'y tiens, là. Puis, si on fait des édifices publics au Québec, un député d'une région forestière, là, entre autres, va s'assurer qu'on utilise le bois. Et il a raison de dire qu'il y a des lobbys importants qui essaient de changer ça.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef de l'opposition.

M. Bédard : Merci. Le premier ministre parlait du sommet, sommet auquel, effectivement, j'ai participé, il a participé, et tous les intervenants... qui s'est terminé dans les applaudissements et dans le contentement de l'ensemble des intervenants de la forêt. C'était le premier, puis il se déroulait dans le beau comté de Roberval, dans son comté maintenant. Je pense qu'il peut en être très fier. Ce sommet a abouti de plusieurs initiatives, plans d'action. Est-ce que le premier ministre maintient l'ensemble des actions qui avaient été reconnues et saluées lors de ce sommet?

M. Couillard : ...M. le Président, la réponse est oui, là, mais bien sûr que ce déploiement continue. D'ailleurs, il a vu qu'il y a des initiatives qui ont été prises, notamment sur l'équipement forestier puis les travaux sylvicoles, qui sont en relation directe avec ça. Ça va se poursuivre, mais, comme d'habitude, selon la formule consacrée, conformément aux ressources financières disponibles. On a parlé du défi financier du Québec, mais c'est un secteur prioritaire pour moi. Alors, comme député de Roberval puis ministre régional, je vais m'assurer, bien sûr, que toutes ces initiatives vont de l'avant. Je sais qu'il y a des chantiers spécifiques qui ont été lancés après le rendez-vous de la forêt; ça va continuer. Il n'y a aucune raison de reculer là-dessus, au contraire, parce qu'on a eu un rare consensus des intervenants du milieu et, M. le Président, encore une fois je salue ça.

• (10 h 30) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef de l'opposition.

M. Bédard : ...pas prévu l'aborder avec le premier ministre, mais on a posé la question au ministère des Ressources naturelles. La question était la suivante. On avait annoncé des initiatives sur la forêt dans le cadre du Rendez-vous national de la forêt québécoise, les prévisions pour 2014‑2015, étude... On a posé la question, aux renseignements particuliers, voici la réponse que nous avons eue : «Dans le contexte économique actuel, plusieurs mesures proposées ont été annulées, et la Commission de révision permanente des programmes, sous la présidence de Mme Lucienne Robillard, examinera les actions existantes ou envisagées.» J'aurais le goût de poser au premier ministre la question : D'abord, qui dit vrai? Est-ce que c'est la réponse... C'est la réponse qu'il vient de me donner. J'aurais tendance, j'espère, à le croire, lui. Mais quelles sont les actions qu'il compte retarder?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le chef de l'opposition. Vous savez qu'on ne met pas en doute la parole des collègues, des députés.

M. Bédard : C'est ce que j'ai...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, M. le premier ministre.

M. Couillard : Alors, M. le Président, c'est pour cette raison que j'avais ajouté le caveat essentiel à ma réponse : Tout cela dépendant, bien sûr, des ressources financières disponibles. Et c'est exactement ce qu'il vient de me répéter. Donc, effectivement, on va revoir ces choses-là. Mais je veux le rassurer que je vais m'assurer que le développement du secteur forestier continue, en lien avec les engagements, en lien avec les engagements spécifiques du rendez-vous de la forêt. Je l'invite à garder contact avec moi. On est tous les deux des députés de la région, c'est important pour toutes nos circonscriptions. Et on va s'assurer, bien sûr, que ça fasse l'objet d'un examen, mais qu'on aille de l'avant. Il y a déjà des mesures qui sont en place actuellement et qui vont continuer.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef de l'opposition.

M. Bédard : C'est quand même deux réponses différentes entre la première puis la deuxième.

M. Couillard : C'est la même chose : Compte tenu des moyens disponibles.

M. Bédard : La première, c'était : On compte aller de l'avant, suite à la question de mon collègue de Dubuc. Et j'ai une réponse qui me dit qu'il y a même des mesures qui ont été annulées. Ça, je suis étonné qu'on ait annulé des mesures d'un sommet qui avait fait l'unanimité.

Une voix : ...quelques-unes, plusieurs, plusieurs mesures.

M. Bédard : On parle de... La réponse, j'imagine, avait été... C'est ça, on parle de... «Plusieurs mesures proposées ont été annulées.» Est-ce qu'il est au courant? Est-ce qu'il compte intervenir pour éviter que ce grand succès, finalement, se tourne plutôt en exercice, finalement, là, qui n'aura pas donné... qui n'aura pas rencontré les espoirs qui avaient été déposés et reçus lors de ce rendez-vous?

M. Couillard :  M. le Président, je répète que je vais m'assurer qu'on continue dans la voie qui a été tracée au rendez-vous de la forêt. Cependant, je dois lui dire que malheureusement on est obligés de revoir tous les engagements du gouvernement précédent et malheureusement d'en reporter ou même d'en annuler plusieurs, compte tenu de l'impasse budgétaire qui est devant nous. Et ça, c'est une réalité qui est incontournable et ça se fait pour tous les programmes et tous les engagements. Mais je répète que je veux que les choses aillent de l'avant dans l'esprit et dans la direction que le rendez-vous de la forêt a préservés. Puis il n'y a pas juste une année devant nous, il y a quatre ans et demi devant nous. Alors, on verra, au cours des prochaines années, où est-ce qu'on en sera.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef de l'opposition.

M. Bédard : Bon. Ça m'inquiète, je ne vous le cache pas. D'autant plus que, quand même, si on regarde le budget à la page B.7, malgré le contexte budgétaire, le gouvernement a quand même annoncé, dans le contexte actuel, des initiatives de près de 816 millions. Et, moi, le fait de reporter des initiatives dans le domaine de la forêt est, pour moi, un fort mauvais choix par rapport aux autres initiatives qui ont été choisies par le gouvernement. Je vous dirais que nous serons très attentifs. Et nous demeurons inquiets quant à la suite des choses sur ce grand rendez-vous. Il ne faut surtout pas décevoir tous ceux et celles qui étaient présents.

Le premier ministre nous a dit aussi qu'il révise certains projets. On va les passer ensemble, si le premier ministre a l'occasion. On a annoncé, la semaine passée, FerroAtlántica. Donc, lui, il a été révisé, je comprends qu'il est bon. C'est un bon projet?

M. Couillard : Alors, est-ce que c'était une question?

M. Bédard : Oui, oui, c'était une question.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Oui. Bien, c'est un investissement... En fait, il n'y a pas de subvention là-dedans; moi, j'aime ça comme ça. Et je rappelle que c'est un projet qui a évolué depuis quelques années. Ça a commencé en 2011 à Madrid, ça s'est poursuivi avec les collègues du gouvernement précédent, et ça s'est conclu au cours des derniers jours. C'est une très bonne nouvelle.

Je veux juste rappeler la nature de la contribution du gouvernement du Québec, qu'il connaît probablement parce que, comme responsable du Conseil du trésor, il a dû suivre toutes ces négociations-là. Et il s'agit d'abord de consentir un allègement de tarif d'électricité industriel, qui serait consenti à tout projet de ce type-là, donc qui n'est pas spécifique pour cette entreprise-là, mais également de bénéficier de mesures fiscales pour les investissements dépassant 300 millions. Là-dessus, comme il le sait, il faut que les deux phases soient constituées pour que l'investissement soit confirmé comme étant plus de 300 millions, mais M. Villar Mir, qui est président de l'organisation, nous a confirmé qu'il entendait faire les deux phases en continuité. Alors, c'est un montage qu'on a regardé, qui nous satisfait parce qu'on n'y retrouve pas de subvention, on y trouve un arrangement d'affaires. Parce qu'il faut toujours avoir à l'esprit le regard que les organisations commerciales internationales pourraient poser sur ce genre d'engagement là, et on est satisfaits qu'il est correct sur le plan de la compétitivité.

M. Bédard : Notre gouvernement avait annoncé — et j'en suis fort... effectivement, c'est un fort beau projet — Ericsson, 1,3 milliard, à Vaudreuil-Dorion. C'est un investissement important, une entente qui avait été conclue, qui créait des centaines d'emplois. Est-ce que ce projet est aussi en révision? Il avait été annoncé au printemps dernier.

M. Couillard : Alors, là-dessus, j'invite le collègue... Je n'ai pas de nouvelle qu'il soit révisé, mais j'invite le collègue à poser la question au ministre de l'Économie dans ses crédits.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef de l'opposition.

M. Bédard : Non, c'est ça, c'était quand même 1,3 milliard. Mais c'est correct, on va le faire, effectivement.

Cimenterie McInnis, ce que je comprends aussi maintenant, c'est qu'on va de l'avant avec ce projet. Il est bon.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Là-dessus, j'ai une petite modulation dans ma réponse, là. Oui, il est bon, mais il est mieux maintenant, c'est-à-dire que le montage financier, à mon avis, est plus satisfaisant comme il est maintenant, en ce qui a trait à la répartition de l'équité et du niveau de dette de l'État, qui faisait en sorte que le partenaire, l'État, était le premier à décaisser s'il y avait des problèmes avec l'entreprise. On a remis les niveaux de risques à niveau. Alors, le risque de l'investisseur privé correspond au risque de l'État, ce qui, à mon avis, est correct. Ça a été bien fait. Puis également il y a une entente sur la question des dépassements de coûts éventuels — on souhaite qu'il n'y en ait pas — dans la construction de l'entreprise. On a également vérifié les données qui étaient à la base du plan d'affaires, parce que notre collègue sait bien qu'il y a plusieurs cimenteries québécoises qui sont très inquiètes de l'arrivée de ce nouveau compétiteur au Québec. Mais le plan d'affaires de l'entreprise est clairement dirigé vers l'exportation vers la côte Est des États-Unis. Donc, autant sur le plan d'affaires que sur le montage financier — qu'il a fallu quand même améliorer — on est satisfaits de ce projet-là. D'ailleurs, on l'a confirmé.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef de l'opposition.

M. Bédard : Bien, je serais curieux de voir les différences, M. le Président. Mais le premier ministre faisait référence aux dépassements de coûts. Est-ce qu'il me dit que le projet, tel que nous l'avions annoncé, faisait en sorte que le gouvernement supportait les dépassements de coûts?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Disons que le projet était relativement silencieux sur cette question-là. Mais il y avait une disposition qui... On comprendra qu'on ne doit pas donner trop de détails parce qu'on ne veut pas lancer un appel aux dépassements de coûts ici, là, hein? Alors...

M. Bédard : ...

M. Couillard : Mais disons que le niveau de sécurité et de répartition de l'effort est amélioré considérablement.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef de l'opposition.

M. Bédard : Sans dévoiler de secret, ce que je dirais au premier ministre : En aucun temps le gouvernement n'avait la responsabilité d'un dépassement de coûts éventuel.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Sauf que, quand on détient de l'équité dans une entreprise, on est forcément responsable, hein? Alors, il fallait s'assurer que ça soit fait correctement. Mais je l'invite à la prudence parce qu'on ne veut pas entacher le climat qui entoure le projet.

M. Bédard : Non, non! Au contraire...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef de l'opposition.

M. Bédard : C'est que souvent, là, on dit que le diable est dans les détails. On peut y aller de formules générales, mais après ça, moi, j'aime bien aller au fond des choses. Parce que je ne me souviens pas, moi, d'avoir pris la responsabilité de laisser au gouvernement le soin d'assumer des dépassements de coûts éventuels dans le cadre de la construction, et, si je l'ai fait, j'en serais fort déçu.

M. Couillard : Mais, M. le Président...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : ...on peut le faire par action ou par omission. Quand on fixe, par exemple, les niveaux de responsabilité des différents partenaires, par omission on transfère le fardeau sur les autres partenaires. Alors, encore une fois, je ne veux pas aller dans le détail. Puis peut-être qu'en privé, lui et moi, compte tenu de sa fonction, je pourrais lui en parler de façon plus détaillée. Mais disons qu'encore une fois la répartition du risque et de l'effort m'apparaît plus raisonnable, là, maintenant.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef de l'opposition.

M. Bédard : ...quantifier, effectivement, en millions. Mais, sur Anticosti, le premier ministre... de ce que je comprends, c'est : l'exploration va de l'avant?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

• (10 h 40) •

M. Couillard : Alors, on a autorisé la phase 1 de l'exploration. Je dois dire — puis on aura peut-être une discussion approfondie là-dessus, s'il veut, pendant les crédits, c'est un sujet très intéressant — je n'aurais pas autorisé le projet tel qu'il a été lancé, de la façon dont il a été lancé — ayant été lancé, on doit respecter la signature de l'État — et encore une fois pour des questions de partage de risques qui ne m'apparaissaient pas satisfaisantes. L'État, à mon avis, devrait se poser de sérieuses questions avant d'investir au stade de l'exploration initiale dans un projet semblable.

Ceci dit, on va faire, au cours de l'été, la phase 1 de l'entente, qu'il connaît très bien — l'entente — qui, cette année, consiste uniquement en des prélèvements de carottes. Donc, il n'y a pas de fracturation hydraulique, à Anticosti, au cours de l'été 2014. Parallèlement, comme il le sait, parallèlement, il y a une évaluation environnementale stratégique, outre la globale, rigoureuse et intégrée dont nous a parlé souvent notre collègue de l'Environnement à l'Assemblée, il y en a une spécifique sur Anticosti. Et la décision d'aller de l'avant ou non avec la deuxième phase de l'exploration, qui, je lui rappelle, et il le sait, comprend une activité de fracturation hydraulique... Parce que, dans la deuxième phase, on veut faire une douzaine ou une quinzaine de puits avec de la fracturation, ce qui a des conséquences, bien sûr, différentes. Si on fait de la fracturation, c'est nécessairement qu'on veut aller vers l'exploitation. Donc, il y a deux conditions préalables pour aller de l'avant pour la deuxième phase : un, le résultat des études stratigraphiques et également l'évaluation environnementale stratégique.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef de l'opposition.

M. Bédard : Donc, justement, je voulais voir si on allait de l'avant effectivement parce qu'on annonçait «révision».

Alcoa est un projet important qu'on a annoncé. Le gouvernement maintient l'engagement qu'on avait... l'entente qu'on avait eue avec Alcoa?

M. Couillard : Oui. Puis, M. le Président, notre collègue connaît très bien — puis il m'en a parlé souvent, de même que mes collègues de la région — l'importance de l'industrie de l'aluminium. Donc, oui, on va de l'avant clairement avec ces ententes-là. Il fallait le faire. D'ailleurs, il se souvient, on a pressé le gouvernement, à l'époque, comme opposition officielle, de le faire. Mais là se pose maintenant la question des autres alumineries du Québec... Je veux juste m'assurer que mon collègue écoute mes paroles. O.K. Là se pose maintenant, M. le Président, la question des autres alumineries du Québec, qui, bien sûr, vont se présenter, si ce n'est déjà fait, pour parler des mêmes enjeux.

Non, mais je veux réitérer notre disponibilité pour négocier ces questions-là avec les entreprises. Je l'ai déjà dit avant l'élection également, on est tout à fait prêts à consentir des aménagements sur les tarifs d'électricité en retour — puisque, je pense, c'est une attitude qui a été commune — de garanties sur l'investissement et la pérennité de l'entreprise et des emplois.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef de l'opposition.

M. Bédard : Et là en rafale, Aldo, on avait aussi proposé une entente avec un de nos, je pense... Un de nos plus beaux fleurons, Aldo...

M. Couillard : Oui.

M. Bédard : ...qui avait été annoncé au... pas au printemps, mais dans le courant de l'hiver, avec Warner aussi, concernant un studio à Montréal. À sa connaissance, est-ce que ces projets sont remis en cause?

M. Couillard : À ma connaissance, ces projets ne sont pas remis en cause, mais, s'il y avait un changement, on informera notre collègue. Mais, à ma connaissance, ils ne sont pas remis en cause.

M. Bédard : Parfait.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef de l'opposition, il reste un peu plus de quatre minutes à votre temps.

M. Bédard : Dans son plan de développement d'emplois, le premier ministre avait indiqué dans le cadre financier qu'une bonne partie de la création d'emplois allait reposer sur le 15 milliards d'investissement. Est-ce qu'il peut nous dire, à ce moment-ci, combien d'emplois étaient rattachés à ce réinvestissement de 15 milliards?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : M. le Président, c'était un des éléments qui créaient de l'emploi. Puis je vais rappeler les autres éléments. Les infrastructures, oui; d'ailleurs, on accélère pour l'année 2014‑2015, alors qu'il faut repartir l'emploi au Québec, il le constate, lui aussi. On augmente le niveau d'investissement prévu pour 2014‑2015 à 11,5 millions de dollars, je crois. Les autres éléments sont aussi importants. Le Plan Nord, la stratégie maritime, les PME, la revue des programmes, tout ça fait en sorte également de participer à la création d'emplois.

Alors, il y a certainement des éléments ou des parties de la création d'emplois qui étaient reliés à ça, mais on ne l'a jamais fait de façon rigide parce que tout ça change selon le niveau d'activité. Il va clairement continuer à y avoir un niveau d'investissement important dans les infrastructures. D'ailleurs, cette année, je rappelle ce que j'ai mentionné dans mes remarques d'ouverture, c'est qu'il y a 250 millions qui est devancé en exécution cette année, notamment pour les travaux d'école, d'institution de santé et autres qu'on peut mettre en oeuvre dès maintenant. Alors, ça, en soi, c'est créateur d'emplois. Et on va continuer à développer les infrastructures. Puis on va également, M. le Président, sans tourner le dos à l'ensemble des projets — parce qu'il y a beaucoup de projets sur la table, il les a tous vu passer sur sa table au Conseil du trésor — revoir tous les mécanismes de gestion, le mode de gestion des projets d'infrastructures, s'assurer qu'on puisse aller de l'avant, notamment pour les très grands projets de transport collectif de la région montréalaise.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef de l'opposition, il vous reste un peu plus de deux minutes.

M. Bédard : Écoutez, la démonstration est la suivante, c'est que les projets qu'on a annoncés étaient bons, finalement, à quelques nuances près, là, à ce que je comprends. Puis j'ai vu que le premier ministre a quand même les détails assez gros. Donc, finalement, l'ensemble de la révision donne que les grands projets d'investissement qu'on avait annoncés étaient bons pour le Québec, étaient bons pour l'emploi.

Lui, par contre, au coeur de sa stratégie, il y avait 15 milliards, et il est capable de me quantifier à quoi... combien d'emplois étaient rattachés à l'initiative LogiRénov. On m'a parlé de 20 000 emplois, ce que je peux douter, mais disons qu'il y a une évaluation qui a été faite par le ministère des Finances. Le problème, c'est que je suis capable de lui faire une règle de trois : sur 15 milliards de son plan de 250 000 emplois, le 15 milliards devait représenter à peu près 100 000 emplois. Or, ces emplois n'existent plus en création d'emplois, le 15 milliards n'est plus au rendez-vous. Et malheureusement je n'ai pas d'exemple... d'autre exemple de mesures auxquelles on rattache un nombre d'emplois aussi important. J'aimerais savoir du premier ministre : Par quoi compte-t-il remplacer 100 000 emplois perdus? Dans l'impossibilité de réendetter de 15 milliards, par quoi il le remplace au niveau de la création d'emplois?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre, il vous reste à peu près une minute pour répondre à la question.

M. Couillard : Bien, d'abord, je le rassure, on a quatre ans et demi devant nous pour juger de ce résultat-là, puis les citoyens nous jugeront, en termes de création d'emplois, dans quatre ans et demi. Maintenant, dans son raisonnement, il y a une pièce manquante, à mon avis. C'est que, quand il fait ça, il assume que les projets qui étaient prévus ne seront pas réalisés. Alors, j'ai indiqué qu'on va trouver les moyens de réaliser tous les projets nécessaires, y compris les très grands projets d'infrastructures dans la région de Montréal. Et on est au travail là-dessus puis éventuellement on aura des conversations sur cette question-là.

Mais il y a d'autres éléments de croissance économique sur lesquels la croissance d'emplois repose, sur lesquels on va vouloir s'appuyer, le Plan Nord, stratégie maritime, les PME, 50 % des emplois du Québec sont dans les PME. Alors, là-dessus, on va faire les avancées nécessaires, puis il y aura des gens au travail sur nos chantiers cet été, et je suis confiant qu'on va atteindre les cibles de création d'emplois. Il a remarqué, d'ailleurs, dans le discours du budget, qu'on est très conservateurs — sans étiquette politique liée au terme — dans la projection d'emplois. On le fait volontairement, on aime mieux avoir des objectifs conservateurs et dépasser ces objectifs dans la réalité.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. Ça conclut ce bloc. Je cède maintenant la parole à la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré pour un prochain bloc de 19 minutes.

Mme Simard : Merci beaucoup. Comme vous l'avez mentionné, M. le premier ministre, en campagne électorale, et à ma grande satisfaction, vous avez annoncé la toute première stratégie maritime de l'histoire du Québec. Alors, vous savez à présent — parce qu'on en a discuté quand même relativement — que j'ai un profond attachement au fleuve Saint-Laurent pour être née et avoir grandi à proximité.

En tant que députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré, entre autres, je me sens interpellée par la stratégie parce qu'elle cible évidemment le transport maritime, mais parce qu'elle vise également à soutenir les chantiers maritimes du Québec, à améliorer l'offre de services des traversiers et à préserver les ports et les quais. Je me sens également interpellée par la stratégie maritime parce qu'elle souhaite moderniser le tourisme maritime, donc continuer à développer le couloir du Saint-Laurent comme destination de croisières internationales, qui est une industrie que je connais très bien et avec laquelle j'ai travaillé de 2002 jusqu'à mon élection. Alors, j'aimerais savoir de la part du premier ministre en quoi consiste la mise en oeuvre de la stratégie maritime?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, Mme la députée. M. le premier ministre.

• (10 h 50) •

M. Couillard : Bien, M. le Président, je suis très heureux de répondre à cette question, d'autant plus que l'idée initiale m'a été donnée dans le comté de Charlevoix, à une rencontre que j'ai faite dans mes premières tournées du Québec, avant le congrès de la direction et après le congrès de direction de Parti libéral du Québec.

D'abord, pourquoi faire une stratégie maritime? Il y a une raison évidente, c'est notre localisation géographique, le fait qu'on a accès direct au grand large, à l'océan, à travers le fleuve, le golfe et jusqu'au coeur de l'Amérique du Nord, par la voie maritime. Mais il y a également des éléments qui ajoutent à cette occasion. D'abord et surtout la conclusion de l'accord de libre-échange entre le Canada et l'Europe va augmenter considérablement le trafic de marchandises en provenance de l'Europe vers l'Amérique du Nord. Et le Québec demeure la principale voie d'accès des marchandises exportées d'Europe vers le Québec ou exportées du Québec ou du Canada vers l'Europe.

D'ailleurs, aujourd'hui même, on rencontre ici, à Québec — et c'est une première, ça fait des années que ça ne s'est pas vu — un groupe d'ambassadeurs de la Communauté européenne qui viennent rencontrer le gouvernement. Ils voulaient en savoir plus notamment sur la stratégie maritime et le Plan Nord. Alors, c'est quelque chose qui recommence heureusement à susciter énormément d'intérêt dans la communauté internationale, et on va s'assurer d'en faire la promotion. Donc, le libre-échange, premier élément et l'élément principal, je dirais.

Deuxième élément, c'est l'élargissement du canal de Panama. Ça a l'air loin de chez nous, mais cet élargissement va permettre à des bateaux de très grande taille de traverser le canal du Panama et d'avoir accès à la côte Est de l'Amérique du Nord. Il y a déjà... D'ailleurs, la plupart des ports de l'Est des États-Unis sont en train de se moderniser pour accueillir ces nouveaux navires.

Et, à plus long terme... parce que ça, ce n'est pas à court terme mais, à plus long terme, dans tout l'enjeu du réchauffement climatique, il y a une conséquence potentiellement positive pour l'économie, c'est l'ouverture du passage du Nord-Ouest. Il y a un ou deux bateaux qui viennent de le faire pour la première fois avec des cargaisons commerciales. Mais on n'est pas encore au stade d'un trafic régulier. Donc, ça, c'est des éléments qui justifient la stratégie.

Elle permet également au Québec d'unir tous les éléments, qui sont assez épars depuis quelques années, qui tournent autour de l'exploitation durable —et j'insiste sur l'exploitation durable — du fleuve Saint-Laurent et du golfe. Ça commence par les infrastructures. Alors, bien sûr, les infrastructures portuaires sont largement de juridiction fédérale, sauf une. Et moi, je ne le savais pas jusqu'à temps que j'aille visiter la municipalité de Port-Cartier pour la première fois, où on était il y a quelques jours pour FerroAtlántica, il y a deux quais, au Québec, de juridiction municipale et non pas fédérale : le quai de Port-Cartier, d'ailleurs FerroAtlántica va l'utiliser, et également, hier, on voyait l'annonce d'une autre entreprise minière qui va également utiliser le quai de Port-Cartier à cause du fait qu'il donne accès à l'eau profonde et qu'il n'y a pas de gel, donc le trafic peut être continu; et le deuxième, je pourrais poser la question parce que peu de gens le savent, c'est le quai de Valleyfield. Alors là, il y a deux quais municipaux au Québec, le quai de Valleyfield et le quai de Port-Cartier.

Les infrastructures fédérales, bien sûr, il y a un programme fédéral pour les développer. Le port de Montréal a un important projet d'agrandissement vers Contrecoeur. Il faut donc procéder. On commence les travaux d'étude sur cette question, à l'installation, comme on l'avait dit, d'un pôle logistique important en Montérégie pour permettre au transport maritime d'avoir accès direct aux transports ferroviaire et routier vers les États-Unis, autour du carrefour de la 30, mais également on sait que le port de Montréal veut élargir ses activités à Contrecoeur.

Il y a également un programme, dans les infrastructures, de transfert graduel des quais de plus petite taille du gouvernement fédéral aux municipalités. On est disposés à discuter avec les municipalités, une fois que ce transfert sera fait, d'un programme conjoint d'entretien de ces quais qui ont une grande valeur sur la vie économique des localités, même si c'est des plus petits villages, des plus petites villes de la Gaspésie, de la Côte-Nord ou de Charlevoix, qui ont également un rôle touristique majeur et également un rôle pour, je dirais, la vie sociale de la communauté.

Il y a toute la question des traversiers. Il y a le tourisme de croisière. Notre collègue députée de Laporte a beaucoup travaillé là-dessus à l'époque quand elle était ministre du Tourisme. Il y a également la question du développement durable. Alors, là-dessus, on a annoncé un montant important, 800 000 $, pour l'Institut des sciences de la mer et le centre de biotechnologies marines de Rimouski. Il y a énormément d'économie bleue à développer, des nouveaux produits, incluant les produits pharmaceutiques, qui peuvent être développés à partir de la mer. Et on a l'intention également de créer, en collaboration avec le gouvernement fédéral, des zones... ou surtout une zone marine protégée. Et le dossier qui est le plus avancé actuellement, c'est celui qui est autour des Iles-de-la-Madeleine.

Il y a bien sûr la question des chantiers navals au Québec. Alors, il y a une autre initiative dans le budget qui est reliée à ça. Il y a huit ports en eau profonde au Québec, mais il y a également huit chantiers navals qui ont des activités réduites, on a vu, au cours des dernières années, et fluctuantes. Alors, on a mis en place des mesures, d'une part, d'amortissement prolongé et la capacité pour les armateurs de constituer des réserves monétaires à l'abri de l'impôt seulement... si et seulement si ces sommes sont utilisées pour renouveler, remplacer, moderniser leur flotte dans des chantiers navals québécois.

Et déjà on a vu un des grands chantiers du Québec manifester sa satisfaction — Davie pour ne pas le nommer — à l'annonce de cette mesure-là, qui va permettre également d'encourager, dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique, la transition vers des navires beaucoup plus performants écologiquement, notamment la transition de moteurs utilisant le mazout ou l'huile lourde vers des moteurs au gaz naturel liquéfié. Et ça, c'est une tendance mondiale à laquelle le Québec va certainement se joindre.

Et, au-dessus de tout ça, il y a des opportunités, de la même façon que je disais tantôt qu'il y a des occasions importantes pour la main-d'oeuvre pour nos jeunes, autour des métiers maritimes il y a énormément de belles carrières très bien rémunérées pour les jeunes Québécois et les jeunes Québécoises.

Je donne un exemple récent. Lorsque j'ai visité les installations du Groupe Océan ici, au port de Québec, j'ai rencontré une jeune femme qui a été formée à l'institut de Rimouski, l'Institut maritime de Rimouski, je ne voudrais pas prendre des hypothèses, mais je ne pense pas qu'elle ait plus de 40 ans, et qui est responsable de toute la logistique des remorqueurs dans le port de Québec, avec une formation acquise à Rimouski puis certainement un niveau de responsabilité et de rémunération en conséquence. Alors, il y a des très belles carrières.

À Rimouski, bien sûr, on a un centre de formation, on veut le consolider. Il y a également des centres de formation pour les métiers de la pêche et de l'aquaculture, un à Grande-Rivière, c'est l'école nationale des pêches, qui aborde ses activités d'une façon nouvelle maintenant, puis j'en suis content parce que les activités n'étaient pas très importantes au cours des dernières années. Et, aux Îles-de-la-Madeleine, il y a également une formation de niveau secondaire — et notre collègue le député des Îles nous en parle souvent — pour également les activités reliées aux métiers de la pêche. Donc, on voit que c'est très large, c'est très, je pense, ambitieux, mais ça nous permet, au Québec, de capturer tout l'immense potentiel relié à la présence du fleuve et du golfe Saint-Laurent sur notre territoire.

C'est quelque chose également... puis je tiens à le dire, parce que je sais que nos collègues de la deuxième opposition ont travaillé sur le Saint-Laurent également, et c'est bien, mais je crois que notre plan de stratégie maritime diffère du leur — on aura l'occasion d'échanger là-dessus — et, à mon avis, il est plus large et plus profond. Mais on pourra peut-être avoir des arguments intéressants à développer là-dessus. Donc, il y a déjà des initiatives dès cette année qui ont été prises. On pourra y revenir, M. le Président, dans l'échange.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. Je cède maintenant la parole au député de Dubuc.

M. Simard : Merci, M. le Président. M. le Président, moi, je viens d'une région et puis, si je suis en politique, M. le Président, c'est parce que... je suis en politique pour aider ma région, pour aider mon comté. C'est ce qui me motive et ce qui me donne l'ambition justement, je vais dire... je vais prendre les mots, là, pour bûcher pour ma région. O.K.?

Je suis ici, en commission, M. le Président, justement parce que j'ai des préoccupations. Je voudrais poser des questions qui correspondent aux besoins de ma région. Je pense que le premier ministre également est préoccupé par la question régionale parce qu'il vient de ma région. Et également le député de l'opposition, je vous dirai, là, leader de l'opposition... plus que leader, c'est maintenant le chef par intérim, est préoccupé aussi par le développement d'une région. Mais j'ai des questions qui sont bien importantes puis qui sont fondamentales pour moi.

D'abord, ma région, je dois vous dire que, comme plusieurs régions... et je veux, je vous dirais, maintenir des gens chez eux. Parce qu'on le sait, la richesse d'une région, c'est ses ressources humaines, c'est les gens qui y habitent. C'est comme ça que ça fonctionne. Pour occuper, justement, ces territoires-là, il faut qu'on ait des emplois. Chez nous tout au moins, mais, je dirais même, sur la Côte-Nord, qui est représentée par deux collègues de l'opposition officielle, O.K., on a perdu beaucoup... des dizaines de milliers de personnes qui sont parties. Pourquoi? Parce qu'il n'y avait pas d'emploi, il n'y avait pas de richesse qui se créait. On a connu ça dans les dernières années, c'était préoccupant. Et il y avait des actions, des actions qui ont été posées pour éviter ça. Donc, il faut s'activer et poser des gestes pour s'assurer que nous puissions conserver les emplois actuels, existants, et que nous puissions en développer de nouveaux, et également de nouveaux revenus, M. le Président, de nouveaux revenus parce que les municipalités ont besoin véritablement d'arrêter d'aller chercher de l'argent sur les taxes municipales. Ça arrive à des limites, ça. Donc, ça prend de nouvelles façons de voir, de nouveaux revenus.

En février 2013, M. le Président, le précédent gouvernement a mis fin au programme des minicentrales dans six municipalités du Québec, causant ainsi un choc puisque cela représentait des investissements de près de 300 millions de dollars pour les régions, là où étaient ces municipalités. Et il y en avait dans ma région, il y en avait aussi sur la Côte-Nord, représentée, je le dis bien, par le précédent gouvernement. Et ce sont eux qui ont mis fin à ces projets-là et, véritablement, qui ont causé un choc très important pour ces gens-là.

Puis moi, M. le Président, ce que je voudrais savoir... Le premier ministre, est-ce qu'il peut nous parler un peu justement de quelle vision il a pour ces projets de minicentrales là, M. le Président? Qu'est-ce que ça peut créer d'intérêt? Et puis ils étaient là auparavant, les projets des minicentrales. Maintenant, j'aimerais l'entendre à ce sujet-là, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le député. Alors, M. le premier ministre.

• (11 heures) •

M. Couillard : Bien, M. le Président, ça me fait également plaisir de répondre à cette question-là parce que, dans les faits, on est la seule formation politique qui est clairement en faveur du développement du programme de minicentrales. On se souvient que malheureusement ce programme a été interrompu, et, dès l'arrivée au gouvernement, on l'a repris. Il faut dire qu'il avait été interrompu presque complètement parce que, chose intéressante, dans ma circonscription de Roberval, le projet de Val-Jalbert n'a pas été interrompu. Puis, d'ailleurs, c'est magnifique, ce projet-là. J'encourage les gens qui vont passer en vacances à Val-Jalbert, cet été, d'aller voir les travaux. Puis, la façon dont la rivière est aménagée, il n'y a pas de conséquence esthétique ou touristique sur le site. Au contraire, c'est aménagé de façon formidable. Et c'est l'exemple même de la raison pour laquelle il faut continuer ces projets-là.

On n'en fera pas 150 au Québec; on en a reconfirmé six, là. C'est que ce sont enfin, pour les régions... — et je reviens aux régions, parce qu'on ne parle pas souvent assez de la réalité des citoyens des régions autour de ces tables — une façon pour les gens des régions de capter directement chez eux la richesse naturelle de leur coin de pays, l'autre étant, bien sûr, lorsqu'on y arrivera au règlement, le partage des redevances pétrolières, gazières et minières. Mais la façon de capter directement la richesse hydroélectrique...

Là, on parle de très petits projets. Pour nous mettre un peu dans l'ambiance, là, il y a 40 000 MW installés à Hydro-Québec; un projet de minicentrale, en général, c'est 15, 16 MW. On n'est pas à la veille de débalancer l'équilibre énergétique du Québec avec ça. Et ce sont des projets qui sont menés par les communautés locales, souvent, comme c'est le cas de Val-Jalbert, par des OSBL, et qui font également appel, et, pour moi, c'est une grande qualité...

Parce que la coexistence du Québec entre les non-autochtones et les autochtones, elle est majeure, en termes économiques, pour les prochaines années. Si on veut développer nos ressources naturelles, si on veut développer le Nord, il faut absolument qu'on trouve un moyen de collaborer avec les autochtones de façon à ce que ces nations autochtones voient pour elles également un bénéfice direct dans l'exploitation des ressources. Alors, c'est pour ça que, pour les redevances, on dit que les communautés locales incluent les communautés autochtones et que, dans les programmes de minicentrales, les projets qui ont été relancés, pas tous mais souvent ont un partenaire autochtone. Par exemple, le projet de Val-Jalbert associe la communauté innue de Mashteuiatsh au projet, de sorte que les bénéfices vont être partagés par l'OSBL qui gère le projet dans les deux MRC, dans le Domaine-du-Roy puis Maria-Chapdelaine, et également dans la communauté autochtone pour choisir sur place des petits projets de développement économique, de formation des jeunes.

Puis, encore une fois, le concept, c'est que les gens des régions — puis ça, c'est une réalité puis c'est une perception que, si on n'habite pas en région... que moi, je n'avais pas avant d'habiter en région et que j'ai développée — l'impression qu'ils ont, c'est que les gens viennent chercher chez eux les ressources naturelles et que tout ça leur passe par-dessus la tête et pour revenir, ce qui est assez dévalorisant, sous forme de subventions et de programmes de gouvernement. Alors, eux, ils disent, et elles, elles disent, avec raison : Laissez-nous-en une partie. Nous également, on est capables de fixer nos priorités puis de faire des projets qui vont bénéficier à nos communautés. On a acquis la maturité puis le savoir-faire nécessaire pour faire ça.

Alors, ce projet de Val-Jalbert, de même que celui de la Onzième Chute, qu'on connaît bien également, en haut de la rivière Mistassini, qui est à une phase plus précoce, va aller de l'avant. Lui aussi implique la communauté autochtone. Celui de Haute-Mauricie, Manawan Sipi, implique également une communauté autochtone. Alors, ce n'est pas le cas pour les six projets, mais, pour nous, c'est un facteur favorisant pour l'autorisation de ces projets-là, qu'on va garder limités, là. On ne développera pas des milliers de mégawatts au Québec en minicentrales.

Mais chacun de ces projets-là, c'est un signal d'espoir et de confiance envers les régions du Québec. Et, pour moi, ça fait partie de gestes qui ne sont pas très importants sur le plan des nombres, parce qu'on parle de très petits... d'un nombre de mégawatts très faible, et puis également, sur la question des tarifs d'électricité par rapport à l'éolien, l'impact est tout à fait minime, presque microscopique, des minicentrales, mais, sur le plan du signal envoyé aux régions, en leur disant : Voici votre ressource, présentez-nous un projet pour l'exploiter, montrez-nous comment il est bâti, autant que possible avec un OSBL pour que l'argent reste en région, comment vous en faites profiter votre communauté, puis, si vous pouvez rentrer une communauté autochtone avec vous, c'est un gros point bonus.

Alors, on a confirmé six projets. On va être prudents avant d'en faire d'autres. Mais également, ceux-là, je peux vous dire que, dès l'arrivée du gouvernement, c'est quelque chose qui a été très, très bien reçu, un immense soupir de soulagement, parce qu'on était rendus, de façon curieuse, à proposer, pour les dédommager, aux projets annulés de compenser pour des projets éoliens dans d'autres régions. Alors, c'était un peu particulier comme approche. Alors, ces gens-là sont, bien sûr, très satisfaits de notre décision d'aller de l'avant. Et je crois que ça fait partie de ce qu'on doit faire de façon structurante pour envoyer un message d'espoir puis de développement aux régions, pas juste un message de tourisme — ce qui est bien, le tourisme, on veut développer le tourisme au Québec — mais un message de richesse véritable puis de prospérité par les gens des régions pour les gens des régions. J'en suis excessivement fier, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. Alors, il reste à peine une minute, je comprends qu'on va la reporter au prochain bloc, du côté du gouvernement. Ça va? Alors, je suis prêt à céder la parole maintenant au chef du deuxième groupe d'opposition pour un bloc de 19 minutes.

M. Legault : Oui. Merci, M. le Président. Il y a quelques jours, le ministre des Finances a fait une déclaration qui, à mon avis, est très surprenante, il a dit qu'il était plutôt favorable à augmenter la taxe de vente, la TVQ, puis de réduire de l'équivalent les impôts, quoique, quand on lui a demandé : Est-ce que ça pourrait vouloir dire, pour certaines personnes de la classe moyenne, une augmentation du fardeau fiscal?, il a répondu : Ce n'est pas impossible. On sait, quand on regarde la TVQ au Québec, quand on regarde les taxes de vente qui sont payées au Québec, on paie beaucoup plus de taxe de vente au Québec que chez nos voisins. Donc, les taux de taxe de vente sont plus élevés au Québec qu'en Ontario, qu'au Nouveau-Brunswick, que dans l'État de New York, que dans l'État du Vermont. Donc, tous nos voisins ont des taxes de vente plus basses que le Québec.

Moi, je ne comprends pas qu'on puisse même envisager d'augmenter la TVQ. Je peux comprendre que, dans certains manuels d'économie, surtout des manuels européens, la question est posée : Est-ce que c'est une bonne idée... En Europe, là, on sait que les taux de taxe de vente sont plus élevés, les impôts moins élevés, c'est plus incitatif pour l'économie. Mais je trouve que, lorsque le ministre des Finances du Québec dit qu'il est favorable, qu'il voit ça d'un bon oeil d'augmenter la TVQ, j'ai l'impression qu'il vit sur une autre planète. C'est comme si le ministre des Finances faisait de la théorie économique plutôt que de parler de la réalité québécoise en Amérique du Nord. Peut-être que c'est une erreur, peut-être que ça lui a échappé, peut-être que le premier ministre l'a rappelé à l'ordre. Moi, je voudrais poser une question toute simple au premier ministre : Est-ce qu'il exclut, oui ou non, d'augmenter la TVQ au Québec?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, merci, M. le chef de la deuxième opposition. M. le premier ministre.

M. Couillard : Alors, M. le Président, je vais d'abord rassurer mon collègue en disant : Je suis d'accord avec ce qu'il a dit, que, dans le contexte nord-américain — on est rendu à un taux combiné qui approche les 15 %, là, si on combine la TPS puis la TVQ — c'est un taux élevé par rapport à nos voisins. On pourrait, bien sûr, faire des modèles économiques qui nous comparent aux autres pays, aux autres continents. Alors, à ce que je sache, le ministre des Finances n'a pas annoncé d'augmentation de la TVQ, à moins que j'aie manqué un bout de son discours du budget, là. Je ne me souviens pas de l'avoir entendu dire ça du tout.

Ce qu'il a dit, c'est deux choses qui sont des constats que nos collègues peuvent faire également mais qui doivent se rapporter au contexte québécois, et, là-dessus, on est d'accord, lui et moi. C'est que, si vous regardez les tendances, puis pas juste les tendances européennes, si vous regardez les documents de l'OCDE, par exemple, qui sont publiés sur la fiscalité, ce qu'on constate comme tendance, c'est une diminution relative du recours à l'impôt sur le revenu, une augmentation relative de la taxe à la consommation. Mais, une fois qu'on a dit ça, on est devant la réalité géographique. C'est certain qu'on ne peut pas débalancer la compétitivité de l'économie québécoise par rapport à nos voisins.

L'autre élément, c'est que les décisions sur le plan de la fiscalité, elles seront prises par le gouvernement, pas par les commissions. Mais moi, je ne commencerai pas les travaux d'une commission en leur disant : Vous n'avez pas le droit de réfléchir à ceci ou cela. Laissons-les travailler, et nous ferons des recommandations. Une partie de leur mandat, d'ailleurs, c'est le panier fiscal, la répartition des divers modes de prélèvements de l'État. Laissons-les travailler. C'est des gens excessivement compétents, qu'il connaît très bien d'ailleurs, qui sont aussi conscients et probablement même encore plus conscients que nous des réalités qu'on vient de mentionner. Donc, je ne crois pas qu'ils vont faire des propositions qui vont diminuer la compétitivité du Québec. Au contraire, une autre partie de leur mandat, c'est de garder le Québec encore plus compétitif.

Alors, il n'est pas question d'augmenter la TVQ. Le ministre des Finances n'a jamais annoncé ça, là. Mais la commission de la fiscalité, elle va faire son travail puis elle va nous faire des recommandations, et, à la lueur de ces recommandations, on prendra les décisions.

M. Legault : M. le Président, je n'ai pas la citation avec moi, là, mais je peux vous garantir que le ministre des Finances a dit qu'il voyait d'un oeil favorable l'augmentation de la TVQ. Donc, je repose ma question, là, puis j'aimerais avoir une réponse claire : Est-ce que le premier ministre du Québec exclut ou non une augmentation de la TVQ?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

• (11 h 10) •

M. Couillard : M. le Président, on veut réduire, comme lui, le fardeau fiscal des Québécois puis on veut garder la taxation du Québec compétitive. Puis je vais répéter, je veux donner une indication forte. J'ai dit qu'à 15 % on était probablement à la limite de la compétitivité avec nos voisins. Mais je répète encore une fois — puis là je pense que le collègue ne rend pas service à l'effort de réflexion qui est devant nous — il faut laisser la commission de la fiscalité réfléchir à tous les scénarios, faire les études appropriées, incluant la compétitivité du Québec, mais il n'y a absolument aucun projet d'augmenter la TVQ, là. Puis le ministre des Finances, ce n'est pas ça qu'il a dit. Ce qu'il a dit, sur le plan du concept, le plan théorique, comme le collègue l'a dit, c'est que, juste savoir lire, là, on voit les documents, c'est ça la tendance actuelle, mais, à 15 % en Amérique du Nord, on est déjà très élevés.

Mais laissons la commission faire son travail, laissons-les expliquer leurs recommandations, puis on avisera par la suite. Mais je ne commencerai pas à nommer une commission d'enquête... pardon, une commission de révision en leur disant : Vous pouvez réfléchir à tout sauf la liste qui est en annexe. Laissons-les faire son travail. Les gens sur cette commission sont plus qualifiés que toutes les personnes autour de cette table, y compris moi, y compris le chef de la deuxième opposition puis le chef de l'opposition officielle. Ces gens-là sont plus qualifiés pour faire ce travail d'examen puis nous faire des recommandations. Il faut quand même laisser les gens réfléchir. Et je répète que je suis d'accord avec son constat de base que la compétitivité du Québec pourrait être mise en danger par l'augmentation de la TVQ.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. M. le...

M. Legault : Tout d'abord, juste rappeler au premier ministre, peut-être qu'il a manqué un petit bout, là, il était peut-être à l'extérieur, mais on est rendus à 13 %. On a baissé de 2 %, ce n'est plus 15 %, au Québec. O.K.? Mais, même 13 %, c'est plus élevé que chez nos voisins. Et là ce que je comprends, ce que je décode de ce que vient de dire le premier ministre, c'est que, si la commission de Luc Godbout recommande d'augmenter la TVQ — si — lui, il n'exclut pas d'augmenter la TVQ. Je voudrais, là, qu'il soit très clair. Est-ce qu'on augmente, oui ou non? Est-ce qu'il exclut ou non d'augmenter la TVQ? Il n'a pas répondu clairement. Il a dit : Je ne veux pas écrire les conclusions du rapport avant que le rapport soit écrit. Donc, est-ce qu'il exclut, oui ou non, d'augmenter la TVQ?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : M. le Président, notre collègue veut prendre les décisions avant le moment de les prendre. Il n'y a pas d'augmentation de la TVQ. La commission va faire son travail. J'encourage, d'ailleurs, la deuxième opposition puis l'opposition officielle à se présenter devant la commission. C'est bien beau, là, toute cette discussion, c'est intéressant, mais qu'ils se présentent devant la commission sur la fiscalité, qu'ils présentent leurs points de vue, qu'ils fassent des suggestions. Le député de Lévis, lui, il était très enthousiaste pour les suggestions qu'il voulait nous faire sur plusieurs éléments du budget. Je ne retrouve pas le même enthousiasme aujourd'hui du côté de la deuxième opposition. Moi, je voudrais les encourager à se présenter devant la commission de M. Godbout et de ses collègues puis de leur présenter leurs observations, incluant celle qu'il vient de faire, puis leurs suggestions peut-être également, parce que je suis certain qu'il constate comme moi que le régime fiscal du Québec doit être mieux organisé, non pas uniquement en... de son niveau, mais de la façon dont il est un incitatif ou non à la croissance économique. Je pense qu'on partage ce souci-là. Alors, qu'il aille présenter ses recommandations.

Ce n'est pas la commission qui va décider quoi que ce soit, c'est le gouvernement du Québec qui présentera un budget l'an prochain, qui va s'assurer de viser à réduire le fardeau fiscal des Québécois, qui va s'assurer à faire en sorte que le système fiscal du Québec ne soit pas qu'un outil passible de prélèvements d'argent dans la poche du monde, mais un levier de développement économique qui est cohérent avec les politiques de développement économique du Québec. Alors, ça, c'est ce qu'on va faire.

Maintenant, M. le Président, le collègue voudrait avoir le budget de l'an prochain puis de l'année d'après aujourd'hui. Alors, laissons la commission faire son travail. Ils vont travailler jusqu'en décembre, il n'y aura pas beaucoup à attendre. Puis je l'invite encore une fois à se présenter devant la commission de M. Godbout puis de faire part de ses observations.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. M. le chef de la deuxième opposition.

M. Legault : Donc, M. le Président, je pense que je l'ai posée trois fois, là, ça ne donnerait rien de poser trois autres fois, là. Je conclus que le premier ministre n'exclut pas d'augmenter la TVQ.

Maintenant, je voudrais passer à un autre sujet : l'écart de richesse entre le Québec et l'Ontario puis entre le Québec et le reste du Canada. On sait que, quand on regarde... Le meilleur indicateur qui est utilisé par tous les économistes, c'est le PIB par habitant. Quand on compare le PIB par habitant du Québec avec celui de l'Ontario puis avec celui du reste du Canada, il y a un écart de 14 % avec l'Ontario et de 24 % avec le reste du Canada. C'est énorme, là. Je vous donne un chiffre, si, demain matin, le Québec avait le même niveau de richesse que l'Ontario, le gouvernement du Québec pourrait compter sur 8 milliards de dollars de plus de revenus, 8 milliards. Imaginez-vous, avec les problèmes qu'on vit actuellement, un déficit, 2, 3 milliards, on aurait 8 milliards de plus seulement si on avait le même niveau de richesse que l'Ontario.

Moi, je voudrais savoir... Moi, c'est mon obsession, cet écart de richesse. J'ai écrit un livre sur le Projet Saint-Laurent, j'ai fait des propositions concrètes pour réduire cet écart. Moi, je voudrais savoir... Le premier ministre doit s'être donné des objectifs. Il va être premier ministre du Québec pendant quatre ans et demi. Donc, moi, je voudrais savoir, là, quel est son objectif, dans quatre ans, en termes d'écart de richesse avec l'Ontario puis avec le reste du Canada. On est actuellement à 14 % d'écart avec l'Ontario, 24 % d'écart avec le reste du Canada. Quel est son objectif dans quatre ans?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le chef de la deuxième opposition. M. le premier ministre.

M. Couillard : Alors, M. le Président, encore une fois, la conversation commence bien, c'est-à-dire que, sur le constat, on est d'accord avec le collègue de la deuxième opposition. Je lui dirais, et il le fait dans la fin de son intervention, de concentrer sa comparaison avec l'Ontario, parce qu'il sait comme moi que l'économie canadienne est largement teintée par les activités économiques liées aux ressources naturelles de l'Ouest. Donc, il faut garder les comparables comparables, et je pense que la cible, la bonne cible, c'est celle de l'Ontario, comme il le dit.

Moi, j'ai tendance à l'exprimer également de façon un peu différente. La façon de l'exprimer que je suggère représente tout ce qu'on doit faire au Québec, non seulement sur la création de richesse, mais également sur le contrôle des dépenses publiques. Alors, ce sont les fameux chiffres que j'ai mentionnés souvent, là, trois, là : 20 %, 23 %, 27 %. On est 23 % de la population canadienne, on ne crée que 20 % de la richesse canadienne — et c'est là qu'il retrouve ce qu'il vient de mentionner — puis on représente paradoxalement 27 % des dépenses provinciales canadiennes. Alors, d'un côté, on a une communauté qui ne crée pas assez de richesse; là-dessus, lui et moi, on se rejoint, donc ça doit être effectivement notre obsession. Mais le même niveau d'obsession doit être apporté à l'autre bout de l'équation, qui est de rapprocher le 27 % du 23 % autant que de rapprocher le 20 % du 23 %.

Donc, à la fois, il faut créer de la richesse et à la fois il faut contrôler les dépenses publiques et les rapprocher de la moyenne canadienne. Pour ça, M. le Président, ça prend des ingrédients essentiels. D'abord, la détermination forte et inébranlable d'y arriver, ce qui est notre cas, également une appréciation juste et objective de la situation du côté des dépenses avec la commission de révision de programmes. Et notamment, il faut se poser des questions, au Québec : Comment ça se fait qu'on a cet écart-là? Je pense que, lui et moi, on aurait une discussion intéressante sur les raisons fondamentales pour lesquelles on a cet écart-là.

Mais je reviens à ce que je disais un peu plus tôt puis, là-dessus également, je pense qu'on était un peu dans les mêmes eaux. Depuis plusieurs années, le Québec consacre environ, grosso modo, 3 milliards de dollars au soutien des entreprises, par plusieurs façons, notamment par les aides fiscales. Comme je l'ai dit un peu de façon ironique, si ça marchait, on le saurait. Alors, clairement, la façon dont on soutient les entreprises au Québec, et c'est pour ça que ça doit être revu, notamment par la commission de fiscalité, clairement, cette façon-là n'apporte pas les résultats souhaités. Il faut changer considérablement nos façons de faire.

Puis je terminerais en mentionnant, M. le Président, l'ingrédient principal, dont on va donner un échantillon et une démonstration très forte au cours des prochaines années, incluant les jours qu'on vit, un mot qu'il a prononcé lui-même à plusieurs reprises durant la campagne électorale et de plus en plus souvent alors qu'on s'approchait du jour de l'élection, même au prix de s'en prendre, M. le Président, à une mascotte, le mot «courage». Du courage, il va y en avoir. Je sais que le chef de la deuxième opposition en a également, et de la détermination. Nous, on en a. On va sortir tout ce qu'il faut d'effort, de détermination et, oui, de courage pour faire les changements nécessaires pour ramener le 20 % de richesse au 23 % et rapprocher le 27 % de dépenses au 23 %.

Puis là-dessus je tiens à dire que je compte sur la collaboration du deuxième groupe d'opposition. Je suis tout à fait prêt puis je vais en prendre l'engagement, M. le Président, de la même façon qu'ils ont remarqué certaines de leurs idées qu'il nous arrivait de citer, si une suggestion vient de la deuxième opposition, on le dira que ça vient de la deuxième opposition puis que c'est leur idée. Ça va nous faire plaisir de la mettre en application.

Alors, une fois qu'on dit qu'on veut augmenter la richesse des Québécois, diminuer cet écart, la question fondamentale, c'est : Comment on fait ça? Le collègue n'a qu'une réponse : des baisses d'impôt. Nous, on pense que ça comprend l'allègement du fardeau fiscal, mais ça comprend bien d'autres interventions pour rendre notre économie plus productive et rapprocher notre création de richesse de la moyenne canadienne.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. M. le chef de la deuxième opposition.

M. Legault : Oui. M. le Président, le premier ministre continue à ne pas répondre à mes questions. Pourtant, ma question est simple : Quel est son objectif d'écart de richesse dans quatre ans? Tout le monde a entendu, je pense que les gens qui nous écoutent ont tous entendu cette question claire et ont vu un déluge de mots pour ne pas répondre ensuite à cette question.

Moi, j'ai appris, en gestion, là, que la première chose qu'il faut faire, c'est de fixer un objectif, ensuite se donner un plan. Sincèrement, là, je ne vois pas ni un ni l'autre de la part du premier ministre, là. Puis, pour ce qui est du plan, on ne parle pas juste de baisser les impôts — en passant, là, je l'invite à lire tous les chapitres du livre sur le Projet Saint-Laurent, là — on propose des zones d'innovation, puis je vais y revenir tantôt, là. Mais, avant de passer à la deuxième étape, il ne faut pas sauter la première, la plus importante.

Donc, je répète ma question. Je suis d'accord avec lui, l'important, c'est l'écart avec l'Ontario. Aujourd'hui, le Québec a un écart de 14 %, dans son PIB par habitant, avec l'Ontario. Quel est l'objectif du premier ministre dans quatre ans? Est-ce que c'est plus que 14 %, moins de 14 %? Qu'est-ce qu'il vise, dans quatre ans, comme écart de richesse avec l'Ontario? Ça, ce sera l'objectif.

• (11 h 20) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre, en soulignant qu'il reste un peu moins de quatre minutes à ce bloc d'échange.

M. Couillard : Merci, M. le Président. Bien, d'abord, oui, 14 % aujourd'hui, mais le collègue sait certainement, ou il a peut-être oublié de le dire, qu'en 2007 c'était 18 %. Donc, on a démontré qu'avec un gouvernement qui se concentre sur la croissance économique puis la gestion saine des finances publiques on peut arriver à réduire l'écart et on va continuer à réduire l'écart.

Alors, la réponse est claire : On veut continuer à s'améliorer. On veut continuer à s'améliorer. M. le Président, on rediscutera de ça dans le débat des chefs de 2018 parce que chaque année on va faire des gains. Chaque année, on va faire des gains et on va diminuer l'écart. Et les défis de l'Ontario, en passant, ne sont pas moindres que ceux du Québec, je voudrais l'amener à considérer ça dans sa réflexion, parce que, s'il considère les défis des finances publiques ontariennes actuelles, ça ressemble certainement à ceux auxquels on fait face. Alors, oui à la création de richesse, oui à la réduction et à l'encadrement des dépenses de l'État. Quand on fait une gestion, comme il dit si bien, on regarde la colonne des revenus puis la colonne des dépenses, puis il y a un objectif, qui est le 20 %, 23 %, 27 %, puis il y a un plan qu'il connaît très bien.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef de la deuxième opposition.

M. Legault : Je m'excuse, avec tout le respect que j'ai pour le premier ministre, il vient de dire quelque chose qui n'est pas exact, hein? Je pense que ce terme-là, on a le droit de le dire, là. Il nous dit : L'écart de richesse va réduire à chaque année avec l'Ontario. Quand je regarde les documents budgétaires, on prévoit, pour chacune des deux prochaines années, que la croissance économique va être plus grande en Ontario qu'au Québec. Donc, est-ce qu'il vient nous annoncer aujourd'hui que, pour les deux prochaines années, l'écart de richesse entre le Québec et l'Ontario va être réduit? Est-ce que, ça, c'est une nouvelle? Pour moi, ça serait la nouvelle du jour, là. Mais je suis content, c'est ce qu'il vient de dire, là.

Donc, je repose ma question. Commençons pour les deux prochaines années. Est-ce qu'il prévoit que l'écart de richesse de 14 % avec l'Ontario va être réduit au cours des deux prochaines années? Puis idéalement j'aimerais avoir un chiffre. À combien? À 13 %, à 12 %, à 11 %? Quel est son objectif? Il ne peut pas mobiliser les Québécois puis toute son équipe s'il ne se donne même pas un objectif. Quel est son objectif d'écart de richesse avec l'Ontario pour les deux prochaines années?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. Alors, M. le premier ministre, avec une minute à ce bloc d'échange.

M. Couillard : M. le Président, je salue les efforts soutenus du collègue pour générer un titre dans les journaux, mais je vais lui dire qu'on va continuer à s'améliorer à chaque année, qu'à chaque année on veut augmenter la contribution du Québec à la croissance économique et diminuer l'écart, notamment avec l'Ontario. Chaque année, je veux qu'on fasse des gains. On a des prévisions de croissance qui sont très conservatrices, et je l'amènerais à la prudence, parce qu'on verra les résultats au bout de l'année. Puis la croissance de l'autre équation, on ne la connaît pas. Quelle sera la croissance réelle de l'Ontario, aux prises, M. le Président, avec des enjeux budgétaires qui sont considérables et, je dirais, au moins aussi sévères que les nôtres?

Maintenant, un plan de développement économique, ce n'est pas juste un plan d'expropriation de terres agricoles. C'est aussi un plan beaucoup plus large de réformes fiscales, de révision permanente des programmes, de relance du Plan Nord, la stratégie maritime, les PME, l'exploitation responsable des ressources naturelles. Parce que, une grande révélation, M. le Président, aux collègues : les régions, ça existe aussi.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. Je cède maintenant la parole à la députée de Laporte pour un prochain bloc, du côté gouvernemental, pour 19 minutes.

Mme Ménard : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, à mon tour de saluer tous les collègues. Alors, M. le Président, moi, j'aimerais aborder le sujet des infrastructures. Alors, on s'entend que les investissements dans les infrastructures sont essentiels pour la relance économique. On n'a seulement qu'à se rappeler de 2008‑2009, lors de la pire crise économique que l'on a vécue au cours des dernières décennies, le Québec est le seul endroit qui s'est le mieux sorti de cette crise, et ce, bien sûr, grâce au plan d'investissement dans les infrastructures que l'on s'était donné.

Alors, on s'entend que les investissements dans les infrastructures sont nécessaires pour maintenir la qualité des équipements publics, pour aussi assurer la pérennité et surtout la sécurité de la population. Il faut absolument éviter d'ajouter au déficit de l'entretien que nos infrastructures ont connu au cours des dernières décennies. Toutefois, je comprends que nous investirons en respectant la capacité de payer des contribuables et aussi en respectant les objectifs de réduction de la dette.

Alors, les investissements annoncés pour 2014‑2015, le premier ministre l'a mentionné au cours de ses remarques préliminaires, sont maintenus au même niveau qu'avant les coupures de 15 milliards que l'ancien gouvernement avait annoncées. Alors, ceci étant dit, lors de la dernière campagne électorale, nous avons promis que la planification des infrastructures qui sont comprises dans le Plan québécois des infrastructures se ferait de manière transparente. On sait que le Plan québécois des infrastructures rassemble les grands projets, tels que les hôpitaux, les écoles, les équipements publics, les équipements sportifs. Il y a aussi les équipements en logements sociaux, les édifices gouvernementaux et naturellement les projets majeurs tels que le réseau routier et aussi le transport collectif. Alors, j'aimerais entendre le premier ministre sur les mesures prévues pour que la planification des projets majeurs soit transparente, vigoureuse et responsable.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, Mme la députée. Alors, M. le premier ministre.

• (11 h 30) •

M. Couillard : Alors, M. le Président, merci. Je voudrais dire d'abord que... je dirais que, par effort parlementaire — et je voudrais saluer la contribution du gouvernement précédent à cet effet-là — il y a beaucoup plus de transparence dans les annonces d'infrastructures, je pense, au cours des dernières années. Alors, on a publié pour la première fois cette année, et on le dit, M. le Président, c'est une première au Québec et au Canada, on a publié chaque projet de plus de 50 millions, avec son emplacement, le coût, etc. Je pense qu'il faut aller plus loin dans la transparence également et faire en sorte que le progrès des projets soit également visible pour les citoyens. S'il y a des fameux extras ou des rallongements de budgets pour des imprévus, il faut que ce soit su. Ce qui est irritant pour les citoyens, ce n'est pas nécessairement le fait que ça arrive, ce qui est déjà regrettable, mais qu'on a l'impression que ça arrive de façon un peu... pas très visible, là, si je peux dire. Alors, ça, sur cette question de la transparence, je crois qu'il y a déjà une amélioration importante.

Alors, on veut également prioriser les investissements liés à la stratégie maritime, au Plan Nord, aux régions puis, bien sûr, à Montréal et à Québec. Puis je voudrais quand même mentionner que la répartition des projets est quand même équitable, compte tenu de la répartition de la population sur le territoire du Québec. On sait qu'à Montréal il y a au moins 31,6 milliards de dollars d'ici 10 ans, ce qui représente 35 % du PQI; Capitale-Nationale, 13,7 milliards d'ici cinq ans, c'est 15,2 % du PQI. Et bien sûr, dans les autres régions du Québec, il y a également de nombreux projets.

J'ai d'ailleurs ici, M. le Président, les chiffres absolus et en augmentation... et en répartition, pardon, des différentes enveloppes d'infrastructures selon les régions du Québec. Alors, par exemple, pour notre région du Saguenay—Lac-Saint-Jean, sur les 10 prochaines années, c'est 2,6 milliards qui seront investis dans la région, ce qui représente environ 3 % des investissements provinciaux en infrastructures, en rappelant que Montréal récolte la part du lion avec 35 %, ce qui est normal pour la métropole, et la Capitale-Nationale, 15 %. Alors, je pense que l'équilibre s'est bien fait.

Je pense qu'il faut également préciser les critères selon lesquels les décisions sont prises. Et je pense que notre collègue le ministre des Transports a fait allusion, M. le Président, au fait que c'était moins enthousiasmant d'annoncer de la réparation d'infrastructures désuètes que d'annoncer des nouveaux projets. Moi, je pense que beaucoup d'observateurs, au cours des dernières années, ont fait la même remarque. Il faut absolument entretenir nos infrastructures de sorte que le premier critère de priorisation, pour nous, c'est la vétusté et ce qui met en jeu la sécurité des citoyens et des citoyennes. Alors, on va prendre beaucoup de ressources pour rénover nos écoles, malheureusement souvent touchées par des problèmes de levure puis d'autres problèmes de ce type-là. Les établissements de santé, les routes et les viaducs, est-il besoin d'en parler davantage à quel point on a besoin d'investir pour les entretenir?

Puis il y a également de la place pour les nouveaux projets. Il y a également d'autres projets, des grands projets qui doivent être réalisés. Si on prend juste la grande région métropolitaine, les projets de transport collectif représentent des milliards et des milliards de dollars. Ils sont nécessaires. Comment va-t-on les inscrire dans le développement des infrastructures? Comment va-t-on les prioriser? Comment va-t-on les financer? Voilà des questions sur lesquelles on va se pencher au cours des prochains mois et des prochaines années.

Mais je voudrais quand même répéter que notre stratégie est de continuer la transparence, bien sûr, la loi nous y oblige. Ce n'est pas un choix, en passant, la publication des projets de plus de 50 millions, c'est une obligation législative. Il est une bonne chose que ce soit le cas. On veut ajouter la transparence des projets en évolution. On veut ajouter également la répartition équitable entre les grandes villes et les régions du Québec et on veut encore faire en sorte, M. le Président, que nos choix d'investissements soient liés à nos choix de développement économique, donc relier les investissements à la stratégie maritime, au Plan Nord, aux régions, à la Capitale-Nationale ainsi qu'à la métropole.

Par exemple, les prolongations d'autoroutes, il y en a plusieurs demandées au Québec, mais certaines d'entre elles ont une caractéristique de développement économique importante, par exemple les autoroutes de Montérégie qui nous permettent, comme la 35, de rallier les autoroutes américaines, ou la 185, dans le Témiscouata, qui nous permet également d'arriver au Nouveau-Brunswick. Ça, c'est des outils de développement économique autant que des infrastructures. Je sais, également les collègues de Laval sont préoccupés par l'autoroute 19 qui doit être prolongée vers le nord, alors ça fait partie de nos horizons également. Ayant moi-même porté l'épinglette, un jour, de la 19 avec mes collègues, je peux en témoigner.

Il faut également, M. le Président, s'assurer qu'on est, encore une fois, équitables dans l'attribution des projets et dans la gestion des projets. Et je crois que ce qui a été fait, avec la publication, rendue maintenant nécessaire par la loi, des projets de plus de 50 millions, ça ajoute beaucoup à la transparence puis à la confiance que les citoyens ont quant à la façon dont les décisions sont prises et aux raisons pour lesquelles elles sont prises.

Puis je terminerais en racontant une histoire d'infrastructure qui est petite, mais qui est à la base de ce qu'on fait, nous, comme députés ici. Hier, avec notre collègue de l'Éducation, j'ai reçu les élèves d'une école d'Hochelaga-Maisonneuve, à Montréal, l'école Baril. Alors, les enfants sont déplacés à l'extérieur de l'école depuis plusieurs mois à cause d'un problème d'environnement. Et, bien sûr, ils ont même écrit un livre, chaque enfant a écrit une histoire de l'école dont ils rêvaient. Alors, ils sont venus nous présenter leur livre hier, et on leur a assuré qu'on allait faire en sorte que le projet, pour lequel les fonds sont prévus d'ailleurs, débloque au niveau municipal, qui est l'endroit actuel du boulot, là. Alors, il faut se souvenir que les plus beaux projets les plus porteurs pour nos concitoyens ne sont pas toujours nécessairement les plus grands projets. Pour ces enfants et leurs familles, l'école Baril — si je ne me trompe pas, il y a environ 19 millions de dollars de réservés pour ce projet-là — c'est le projet le plus important du Québec. Il faut avoir conscience également de ces réalités-là et des véritables priorités.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. Mme la députée de Laporte.

Mme Ménard : Merci, M. le Président. J'apprécie que le premier ministre ait parlé du travail qui a été fait par le chef de l'opposition officielle, quand il a parlé de la loi, du projet de loi. D'ailleurs, j'ai travaillé sur cette commission avec, à ce moment-là, le président du Conseil du trésor et j'avoue qu'il avait été très à l'écoute de nos commentaires, et on avait eu de très bons résultats, on avait eu une bonne commission.

Vous avez... Le premier ministre a parlé de la proportion Montréal et il a parlé d'une région en particulier. La question que j'avais — et il a répondu en partie — la question que j'avais était justement sur la proportion qui va être faite dans les infrastructures. Il a parlé de Montréal. J'aimerais l'entendre sur la Capitale aussi par rapport à toutes les régions.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, Mme la députée. M. le premier ministre.

M. Couillard : Combien de temps avons-nous, M. le Président?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Ah! Vous avez neuf minutes.

M. Couillard : Ah! Ça devrait nous permettre d'énumérer les différentes régions et de préciser leur importance dans le cadre du plan d'infrastructure. Alors, dans le Bas-Saint-Laurent, 2 133 000 000 $, c'est sur 10 ans, 2014‑2024, 2,4 % des investissements; Saguenay—Lac-Saint-Jean, je l'ai mentionné tantôt, 2,9 %; Capitale-Nationale, 13 728 000 000 $, 15 %, 15,2 %; en Mauricie, 2,4 milliards, 2,7 %; en Estrie, 2 560 000 000 $, 2,8 %; à Montréal, 31,6 milliards, 35 % — on connaît la taille des projets qu'il y a à Montréal; en Outaouais, 2 450 000 000 $, pour 2,7 %; en Abitibi-Témiscamingue, 1,5 milliard, pour 1,7 %; Côte-Nord, 2 000 058 000 $, 2,3 %; Nord-du-Québec, 2 720 000 000 $, 3 %; Gaspésie—Îles-de-la-Madeleine, 1 260 000 000 $, 1,4 %; Chaudière-Appalaches, 4 milliards, 4,5 %; Laval, 2 697 000 000 $, 3 %; Lanaudière, 2 950 000 000 $, 3,3 %; Laurentides, 4 milliards, 4,5 %; et Montérégie, 9 986 000 000 $, 11 %; Centre-du-Québec, enfin, 1,4 milliard, 1,6 %; pour un total de 100 %.

Donc, il y a un bon équilibre qui, clairement, favorise l'agglomération montréalaise et la Capitale-Nationale, mais pour de bonnes raisons, c'est là que la population se concentre et c'est là que les grands projets sont le plus fréquemment situés. Bien sûr, ces projets-là n'incluent pas tous ceux à l'étude ni les projets de moins de 50 millions de dollars. On a l'impression qu'il n'y a que ça d'investissement, mais il faut également rappeler que les projets de 50 millions ne sont pas listés dans les documents qui ont accompagné le budget.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Ça complète votre réponse, M. le premier ministre?

M. Couillard : Oui, oui. Excusez-moi.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député...

Une voix : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. M. le député de Chomedey.

M. Ouellette : Merci, M. le Président. Je veux dire bonjour aux collègues, même si on est avancés dans notre première période de crédits, M. le premier ministre. Et vous me permettrez de vous ramener dans une mesure qui a été annoncée dans notre budget, dont le chef de l'opposition officielle a parlé tantôt, qui est une mesure de relance de l'économie, là, qui est le programme LogiRénov qui était très attendu. Et je pense que c'est une des premières mesures que notre gouvernement a annoncées pour relancer l'économie. M. le chef de l'opposition faisait mention tantôt que nous avons pu chiffrer à 20 000 emplois les emplois qui sont directement reliés à ce programme.

On se souviendra, les plus jeunes de nous autres, on pensait qu'en 2009 c'était la panacée parce qu'il y avait eu un programme de crédit d'impôt de rénovation domiciliaire autant au fédéral qu'au provincial et qui avait permis à beaucoup de gens de faire des rénovations dans leur maison à l'époque. On s'est toujours demandé si ce programme pourrait revoir le jour parce qu'il avait été très, très, très bien accueilli, sauf que celui au niveau provincial, en 2009, ça nous donnait juste un avant-goût, le seuil d'admissibilité était à 7 500 $. C'était un crédit d'impôt, mais sur les dépenses dépassant le seuil de 7 500 $, alors que le programme LogiRénov va être beaucoup plus attrayant pour les ménages du Québec et va probablement favoriser la relance économique qui est demandée.

C'est directement en relation avec la question de mon collègue de Dubuc. Et, la réponse que vous avez fournie, M. le premier ministre, quand on parle des forêts puis des deux-par-quatre, quand on parle de rénovations domiciliaires, on a tout de suite frais à la mémoire : Bon, des deux-par-quatre, on va faire des rénovations dans notre maison. Ça va un petit peu plus loin que ça. Je regardais tous les critères d'admissibilité et je regardais les endroits où on peut améliorer notre patrimoine, bien je pense que c'est très intéressant. Ça va aussi dans la suite d'un autre programme, qui est ÉcoRénov, qui avait été annoncé par le gouvernement. Et je ne sais pas s'il va y avoir un arrimage entre les deux. Mais définitivement je pense qu'on peut encourager tous les citoyens à se prévaloir de ce programme-là, que vous allez, je pense, M. le premier ministre, nous expliquer en quoi il consiste, parce que je pense que c'est une mesure qui est très importante et c'est un très bon départ pour relancer notre économie.

• (11 h 40) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, merci, M. le député. M. le premier ministre, avec trois minutes à faire au chronomètre.

M. Couillard : Bon, rapidement, M. le Président, c'est 222 000 ménages qui vont bénéficier de ce programme. Il faut rappeler que sa finalité, son objectif, c'est bien sûr relancer l'économie, mettre les gens au travail. Mais il ne faut pas cacher également le fait que c'est un instrument de lutte contre l'évasion fiscale ou le travail au noir puisque, pour obtenir le crédit, il faut avoir un entrepreneur reconnu puis des factures en bonne et due forme. Alors, je pense qu'il ne faut pas faire abstraction de cette question-là. Souvent, les gens nous disent : Bien, écoutez, comment ça se fait, si c'est si bien, que ce n'est pas permanent? Alors, c'est une question qu'on entend souvent les citoyens nous poser. Alors, je pense que c'est important d'y répondre. C'est que la raison pour laquelle on veut le concentrer dans une année, une année et demie ou deux ans maximum, c'est d'amener les activités économiques à se concentrer également. Sinon, si c'est permanent, on pourra toujours remettre à dans cinq ans, dans 10 ans les travaux qu'on a à faire et on n'obtient pas l'impact de relance d'emploi rapide comme on va l'avoir.

Alors, je rappelle que, pour les particuliers, c'est une aide fiscale de 20 % pour les dépenses de plus de 3 000 $ jusqu'à un maximum de 2 500 $, et on atteint le maximum lorsqu'on a dépensé 15 500 $. Je pense que c'est important. Puis ça permet aux gens qui nous écoutent de quantifier le genre de travaux qui peuvent être éligibles. Et le genre d'habitation également est très large : la maison individuelle, la maison usinée, la maison mobile, le condo ainsi que le duplex et le triplex.

Bonne question également quant à la coexistence des deux programmes. Le gouvernement précédent avait lancé ÉcoRénov. Il faut expliquer que, pendant la période de transition durant laquelle la nouvelle mesure s'appliquera en même temps qu'ÉcoRénov, soit jusqu'au 31 octobre 2014, les travaux qui sont déjà admissibles à ÉcoRénov ne le seront pas avec le deuxième crédit d'impôt. Il faut choisir un des deux. Cependant, après le 31 octobre, les travaux de rénovation qui étaient admissibles à Écorénov le seront également à LogiRénov. Donc, on ne peut pas combiner en même temps, dans la même période, les mêmes travaux, mais, une fois que le premier programme se termine, on peut les rouler, si vous me permettez l'expression, dans l'autre programme.

Alors, on estime que les bénéfices économiques vont être importants, puis ça va relancer l'industrie de la construction. On sait que, comme on dit... comme le dit l'adage, quand la construction va, tout va. Donc, c'est une façon également de repartir l'activité économique. Puis c'est beaucoup de PME, de petites entreprises de chez nous. Et je crois que c'est une très bonne initiative. Et donc on devrait voir rapidement... Moi, j'en entends parler moi-même. Lorsque je vais faire mes courses, les gens me disent : On est contents, on a pu faire notre projet de salle de bain ou de rénovation pour lequel on attendait depuis quelques années. Et ça fait travailler bien du monde, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. Il reste à peine quelques secondes au bloc. Bref commentaire, M. le député de Chomedey?

M. Ouellette : Non.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Ça vous va?

M. Ouellette : Ça rejoint les objectifs qu'on s'était fixés. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le député. Alors, je cède maintenant la parole au chef de l'opposition officielle pour un bloc de 20 minutes.

M. Bédard : Merci, M. le Président. Je tiens à revenir rapidement sur les commentaires de la députée de Laporte. Effectivement, elle aura eu un rôle important dans deux lois qui vont avoir un impact dans le temps, celui sur le PQI, et je tiens à reconnaître son apport, et celui au niveau de la fonction publique aussi, sur la dotation, où on a travaillé main dans la main. Puis je salue humblement sa contribution à ces débats, et je l'en félicite, puis je lui souhaite aussi bien des beaux défis à relever.

Donc, sur le PQI, effectivement, où on a trois étapes à l'étude maintenant... Avant, il y avait plein d'étapes, c'était compliqué : avant, après, les plans et devis finaux, définitifs, machin. Là, on est à l'étude en planification, en réalisation. C'est simple puis c'est clair pour tout le monde. Ce que je voudrais rappeler au premier ministre très rapidement, il est de ma région, le PQI, maintenant, prévoit un taux d'investissement qui est en bas de notre poids populationnel. La deuxième chose, c'est que je l'invite à avoir une oreille très attentive ou le regard vif sur... on ne fait pas mention du PQI fédéral. Mais je tiens à lui dire que le PQI fédéral, il n'est pas beaucoup dans les régions puis il est principalement à Montréal, et c'est quand même nos taxes et nos impôts. Et c'est sûr que l'infrastructure du pont Champlain va représenter un investissement majeur. Et pas que Montréal ne le mérite pas, au contraire, et les banlieues, ça prend une nouvelle infrastructure, mais je pense qu'ils doivent faire partie de nos calculs quand vient le temps de répartir les investissements publics. Alors, c'est simplement un commentaire. Parce que, si lui, il ne s'en occupe pas, il va voir qu'il n'y a pas grand monde qui va s'en occuper. Et j'ai eu la chance d'être au coeur de l'élaboration de ce PQI, donc il faut, à un moment donné, ramener des choses par rapport à l'investissement public.

Mais mon commentaire va plus aller, M. le Président, mes questions, sur le mandat qu'il a donné à la Commission de révision permanente des programmes et ses commentaires que j'entends tantôt, qui m'étonnent un peu. Si je comprends bien, le premier ministre, son objectif, ce n'est pas simplement l'équilibre budgétaire, ce qu'il souhaite, c'est ramener le niveau de dépenses, au Québec, à peu près au même niveau que les autres provinces canadiennes. C'est ce que je comprends?

Une voix : ...

M. Bédard : Comparable, là, au niveau comparable.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Je vais peut-être... Je vais répondre de façon détaillée à sa question, M. le Président. Mais juste pour donner des éclaircissements sur deux éléments précédents de nos discussions...

D'abord, il a demandé des informations sur le projet Ericsson. Alors, il y a deux dossiers différents dans ce projet-là, comme il le sait. Celui du centre de données a été approuvé, annoncé par l'ancien gouvernement et suit son cours tel que prévu, je pense même la construction est commencée. La deuxième partie, c'est le centre d'expertise mondial qui est en cours d'approbation selon les processus normaux.

Pour ce qui est des médecins, alors, effectivement, il n'y a aucun argent neuf qui a été versé. Il y a 285 millions qui ont été versés, qui est la récurrence de l'année précédente, mais il n'y a pas d'argent... Il n'y a pas de somme neuve qui a été versée aux fédérations médicales, mais il y a une somme de 285 millions qui a été versée, mais qui était une entente de récurrence de l'année précédente, à laquelle il a participé.

Une voix : ...

M. Couillard : C'est la... Non, ça fait partie de l'entente qui...

M. Iglesias (Juan Roberto) : Oui, ça fait partie de l'entente. C'est l'application.

M. Bédard : ...sur la pratique médicale?

M. Iglesias (Juan Roberto) : C'est ça. Y compris la pratique, mais c'est la récurrence des mesures déjà versées.

M. Couillard : On doit faire attention au dialogue parallèle, là. Je sais ce que vous allez dire, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, est-ce qu'on peut passer à la question?

M. Couillard : Mais je vais peut-être revenir à la question en question puis...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Si, parfois, pour des projets spécifiques on manque de détails, bien, je m'engage à y revenir soit maintenant soit après, là, aux collègues.

Oui, c'est-à-dire que, oui, il faut rétablir l'équilibre budgétaire, mais, si on ne fait que cela, on va retomber dans la même valse où c'est le cycle auquel les citoyens sont habitués : un gouvernement x arrive, constate l'état des finances publiques, entreprend des mesures de rationalisation budgétaires pendant deux ans, deux ans et demi, équilibre les finances publiques, lance des initiatives, fait l'élection, puis on recommence le cycle après.

Alors, oui, il faut rétablir l'équilibre budgétaire clairement, mais il faut aller plus loin que ça. Mais ce qu'on veut faire, c'est faire deux choses à la fois, c'est-à-dire rapprocher le 27 % du 23 %. Je ne dis pas qu'on veut atteindre 23 %, parce qu'on a des missions, au Québec, qui diffèrent de ce qui existe dans d'autres provinces canadiennes et pour de bonnes raisons. Il faut rapprocher ce... Le 27 % et le 20 %, il faut les rapprocher du 23 %. Mais, également, il faut sortir du déséquilibre structurel parce que, si on ne fait que colmater le déficit de l'année en cours et de l'année suivante, on ne corrige pas le déficit structurel du Québec. Il faut ramener le coût de reconduction des programmes — c'est un thème qu'il connaît très bien, ayant été au Conseil du trésor — ce qu'il faut ajouter chaque année pour juste reproduire ce qu'on fait, à des niveaux compatibles avec les revenus du Québec. Alors, c'est ça, la correction du déficit structurel.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : ...chef de l'opposition.

M. Bédard : ...à partir de là, c'est tout à fait normal d'équilibrer à partir des revenus. Mais, où le premier ministre va plus loin, c'est qu'il semble me dire qu'au Québec notre objectif maintenant, c'est d'avoir un niveau de dépenses comparable. Ça, ça veut dire... ce n'est pas par rapport à nos revenus, parce qu'on peut décider d'avoir plus de revenus mais plus de services. On peut être différents, par exemple, de l'Ontario ou de l'Alberta, par exemple. Mais lui, son objectif, c'est plutôt d'avoir un niveau comparable de dépenses. C'est ce que je comprends.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Le collègue prend les choses de façon isolée. Les trois chiffres que j'ai cités sont importants. Ce n'est pas juste le 27 % qu'il faut rapprocher de 23 %, mais ce qui nous permet de garder le surplus de dépenses par rapport — qui sont justifiés, là, souvent — à notre poids démographique, c'est l'insuffisance de la création de richesse qu'il faut corriger. Alors, c'est aussi le 20 % qu'il faut rapprocher du 23 %. Mais l'objectif fondamental, fondamental comptable ou financier, c'est de rapprocher l'augmentation des dépenses réelles de reconduction notamment des revenus de l'État. Et, si on ne fait pas ça, les prochains gouvernements vont vivre le même psychodrame à chaque quatre ans. Alors, il faut absolument retomber dans ça.

M. Bédard : ...ou une valeur. Puis j'ai lu les documents du Conseil du trésor. Vous voyez j'ai des bonnes habitudes, hein? Je les lisais avant, donc j'ai continué à les lire. Fort bien écrits, mais, des fois, il y a des phrases qu'on peut retrouver, tout dépendant des gouvernements, mais il y en a d'autres qui ont une valeur particulière parce qu'elles reposent sur des choix gouvernementaux, des choix politiques. Et je le réfère à la page 20 du document du Conseil du trésor. Et, regardez, comme tout bon avocat, j'avais prévu un document additionnel pour lui, à la page 20, pour le bénéfice du premier ministre.

• (11 h 50) •

Une voix : Document déjà déposé.

M. Bédard : Il n'aura même pas à aller le chercher. À la page 20, je l'invite à lire sur la création d'une commission de révision permanente des programmes. Donc, premier alinéa. Deuxième alinéa, on a le mandat : «Les travaux de la commission devront permettre au gouvernement de statuer sur l'opportunité d'éliminer certains programmes, de réduire leur portée ou de les repositionner, et d'être en mesure de les évaluer de façon continue — et là je lui demande de prendre une attention particulière. Ultimement, l'objectif est de se rapprocher d'un niveau de dépenses comparable à celui des autres provinces et...» Et là on a l'autre objectif.

Ça, c'est différent d'avoir un objectif d'équilibre budgétaire. Ça, c'est dire : Moi, ce que je veux, au Québec, c'est que, peu importent mes revenus, je veux que mon niveau de dépenses soit assimilable ou comparable à celui des autres provinces. Est-ce que... Et, par exemple, au Québec, on a les services de garde qui n'existent pas au Canada, qui n'existent pas dans les autres provinces; on a des frais de scolarité plus bas; on a l'assurance médicaments qu'on donne pour les gens, pour les familles, parce qu'on pense que c'est une bonne mesure, ça évite des gens à être sur l'aide sociale quand vient le temps d'affronter des maladies, des coûts de médicaments très élevés; l'assurance parentale; on a l'aide aux victimes d'actes criminels, qui est très particulière, qui est généreuse, parce qu'on pense qu'au Québec on doit être solidaires des victimes d'actes criminels. Ce n'est pas le cas pour le reste du Canada. Du moins, leur solidarité est moins dans la poche, elle est peut-être ailleurs, je n'en doute même pas. Est-ce que le premier ministre partage les objectifs du président du Conseil du trésor?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le chef de l'opposition officielle. M. le premier ministre.

M. Couillard : Bien sûr, M. le Président. Je pense qu'à l'époque où il était président du Conseil du trésor, s'il s'était advenu que sa première ministre ne partage pas ses objectifs, il aurait été en situation fort complexe, j'imagine, de semaine en semaine. Mais je dirais que, M. le Président, on vient de dire l'évidence. En fait, notre collègue vient exactement de dire pourquoi il faut faire ça. Le problème n'est pas uniquement le fait que les dépenses du Québec sont élevées provincialement. Il a cité de nombreux exemples de programmes très utiles que d'autres provinces n'ont pas jugé bon de se donner. Pourquoi? Parce que je suppose qu'elles ont parfois jugé qu'elles n'avaient pas le niveau de prospérité collective et de revenus pour se les payer, ce que, dans le cas du Québec, malheureusement, fait partie du problème fondamental. On n'a pas généré...

Je veux insister là-dessus parce que les discours de solidarité sur la carte de crédit, avec des déficits de 5 puis de 7 milliards, c'est du vent, c'est de l'illusion pour la population. La véritable solidarité, les véritables programmes sociaux qu'on a au Québec, la solidité de ces programmes repose sur des finances publiques saines et également sur une croissance économique et la création de richesse. Sinon, on plonge le Québec dans l'illusion que tout est possible. Alors, si on veut préserver ces programmes, il faut les réviser, les ajuster de façon à ce qu'on puisse les reconduire chaque année sans chaque fois avoir à passer par cet exercice. Et je pense que, là-dessus, personne ne peut être contre cet objectif-là.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef de l'opposition.

M. Bédard : Le premier ministre fait référence à deux concepts complètement différents. Le premier, c'est l'équilibre budgétaire entre les revenus et les dépenses.

Une voix : Tout le monde est d'accord.

M. Bédard : Tout le monde est d'accord, moi le premier. L'ancien gouvernement et même l'autre d'avant nous disaient aussi que c'était l'objectif. Alors, on a un niveau de revenus et on a un niveau de dépenses, puis ça, ça doit arriver. Ce que le premier ministre nous dit par contre, c'est que lui, il croit que notre niveau de dépenses est trop élevé... notre niveau de dépenses est trop élevé, puis on doit le rendre comparable au reste du Canada, pas par rapport à l'équilibre budgétaire. Donc, il nous demande de baisser le niveau de dépenses simplement parce qu'au Canada ils sont différents. Ils ont moins d'impôt sur le revenu parfois; des fois, ils ont moins de taxes. Mais ils ont moins de services aussi. Lui, il dit : Il faut avoir moins de services, comme le reste du Canada.

En soi, c'est une idéologie qui est différente, qui mérite d'être regardée. Parce que moi, j'ai fait le petit calcul très rapide, j'ai pris notre niveau de dépenses — on l'a fait à la main, avec l'aide, d'ailleurs, de mon collègue qui, il n'y a pas si longtemps, était aux Finances — j'ai regardé notre niveau de dépenses, autour de 83 milliards au niveau des dépenses de programmes, puis ça n'inclut pas... J'ai regardé l'ensemble du Canada, autour de 323 milliards environ. Et, prenons le pourcentage, notre pourcentage, c'est 25,67 %. Et là on nous dit : Il faut se ramener à la moyenne, la moyenne canadienne, la moyenne des provinces, autour de 23 %, ce qui serait, pour le premier ministre, un bon exemple. Est-ce que le premier ministre sait ça représente combien de milliards de coupures additionnelles après l'atteinte de l'équilibre budgétaire? Est-ce qu'il a une idée du nombre de milliards que ça représente, ça, comme objectif?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : M. le Président, certainement, j'ai fait une longue démonstration de l'impasse budgétaire du Québec. C'est des milliards, et des milliards, et des milliards de dépenses. Puis je vois très bien où il est puis je ne suis pas d'accord avec lui. Les dépenses puis les revenus, oui, mais, dans les revenus puis les dépenses, il y a le coût de reconduction des programmes. Puis là on ne sera pas d'accord là-dessus. Les dépenses publiques au Québec, c'est 47 % du PIB, c'est trop dans le contexte nord-américain. Il faut réduire le poids de l'État dans l'économie tout en préservant nos programmes puis l'aide aux plus démunis puis aux personnes vulnérables. C'est ça qui est le défi. Et on va le faire, on va passer à travers cet obstacle et ce défi-là, ce qu'on aurait dû faire bien avant. Puis je ne blâme pas uniquement le gouvernement précédent quand je dis ça. On aurait dû prendre ces actions bien avant. La population le demande. On veut continuer à bénéficier de nos programmes, on veut les soutenir, mais dans des moyens qui correspondent à nos revenus, qui correspondent à notre génération de richesse et qui correspondent à la capacité des Québécois d'être taxés davantage, qui n'existe pas, et avec raison. Alors, c'est ça qui est en cause ici, et malheureusement, par...

Je vois que l'idée sous-jacente aux questions du chef de l'opposition, c'est apparemment de maintenir le Québec dans l'illusion qu'on peut tout se payer sans limites, sans égard à notre richesse réelle puis à notre taux de taxation. On ne peut pas regarder ça de façon isolée. On doit absolument faire ce travail-là puis on va le faire. Et il y aura, oui, il y aura des modifications substantielles à des programmes de l'État qui existent depuis longtemps, en conservant leur mission fondamentale, qui est de protéger les gens, donner du soutien social et de protéger les gens vulnérables. On est arrivés avec la détermination de le faire, M. le Président, et on va le faire. On ne peut pas continuer avec ce déficit structurel, avec cette habitude qu'on a de surdépenser par rapport à nos moyens puis par rapport à un taux de taxation, un fardeau fiscal qui est déjà très élevé. Puis il oublie la dette là-dedans, il ne parle pas de la dette.

Alors, tout ça ensemble nous a amenés dans la situation où on est actuellement. Et je pense qu'il n'y a pas une famille, au Québec, qui ne comprend pas ça. Quand tu dépenses continuellement plus que tu gagnes, ça finit par ne plus marcher, et, un jour, il faut corriger les choses. Puis, si on fait juste des corrections d'équilibre budgétaire année après année, on n'en sortira jamais, puis la prochaine génération va être prise avec un problème massif. Alors, on va régler le problème non seulement pour l'équilibre budgétaire de 2015‑2016, mais de façon fondamentale, en rétrécissant le poids des dépenses publiques, ce qui ne veut pas dire nécessairement — puis il l'a dit souvent lui-même quand il était au Trésor — réduire les services. Changer la façon dont les services sont donnés, changer la façon dont on administre l'État et changer la façon dont les programmes sont suivis, enfin, avec des objectifs réels et suivis.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. M. le chef de l'opposition.

M. Bédard : Encore là, deux concepts différents. Contrôler ses dépenses par rapport aux revenus, c'est une chose, mais contrôler ses dépenses par rapport à la moyenne canadienne, c'en est une autre complètement différente. Je peux décider de me donner des services de garde en demandant un peu plus de tarification pour les parents. Je peux demander, je pense, à tout le monde de contribuer à l'assurance médicaments parce que je pense que c'est une bonne chose pour les familles, ce que le reste du Canada ne pense pas, et ils ont le droit de ne pas le penser. Je peux penser, au Québec, que l'assurance médicaments... plutôt l'aide aux victimes d'actes criminels, c'est une bonne chose, mais de demander une contribution additionnelle aux gens.

Ce que le premier ministre nous convie, c'est de dire : Bien, il y a des services qu'on ne se paiera pas, peu importe l'atteinte de l'équilibre, parce qu'il faut atteindre un pourcentage comparable au reste du Canada. Beau débat! Beau débat, M. le Président! Mais, à un moment donné, il va falloir le chiffrer, ce débat-là.

Et, avec une simple règle de trois, là, je vais proposer un chiffre au premier ministre. Après l'atteinte budgétaire, là, environ, là, on parle de... On disait 4 milliards, là, pour l'atteinte du déficit budgétaire cette année. Lui, il parle de 4 milliards, je pourrai le dégonfler plus tard. Mais le chiffre additionnel que lui nous convie, par simple règle de trois, savez-vous c'est combien de coupures? 7 milliards annuellement. 7 milliards de dollars annuellement qu'on va donner. Alors, quand le premier ministre me dit : 7 milliards par année de moins, en plus du 4 milliards qu'il est en train de chercher... qu'il nous dit qu'il cherche, et il nous dit qu'il va trouver ça dans les frais administratifs puis dans seul Dieu sait quoi, impossible. Là, on est rendus dans le panier de services.

Et comment on va le calculer, le panier de services? C'est qu'on va dire : Voici le Canada, ce qu'il se paie; voici ce que nous, on se paie; et voici, après ça — dans la catégorie en bas, du président du Conseil du trésor — voici ce qu'on se donne de plus que le reste du Canada. Moi, je lui ai donné cinq exemples qu'on se donne de plus que le reste du Canada. Qu'est-ce qu'on doit enlever dans cette liste-là, dans l'assurance médicaments, frais de scolarité, services de garde, congés parentaux, aide aux victimes d'actes criminels? Qu'est-ce qu'on doit enlever? C'est ça, la différence du 7 milliards, là. Qu'est-ce qu'on doit enlever là-dedans? Parce que c'est ça, la vraie question, là. Ce n'est pas en coupant un cadre de temps en temps, là, qu'on va résoudre ça, là, qu'on va arriver à son objectif de ramener le niveau de dépenses sur la moyenne canadienne.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le chef de l'opposition. M. le premier ministre, en soulignant qu'il reste un peu plus de trois minutes.

• (12 heures) •

M. Couillard : Merci, M. le Président. Alors, près de la moyenne canadienne, j'insiste encore. Mais c'est là la chose qui nous sépare, c'est pour ça qu'on est chacun du côté qu'on est de l'Assemblée aujourd'hui. Il y a eu une élection le 7 avril. Le trajet que le chef de l'opposition propose à la population, c'est le trajet de l'appauvrissement du Québec, de la surtaxation puis des dépenses incontrôlées. Puis je sais bien qu'il veut dire et qu'il veut dégonfler les chiffres, mais il ne sera pas capable de dégonfler les chiffres de Godbout-Montmarquette puis les chiffres du Vérificateur général.

Alors, je vois la députée qui s'agite parce qu'elle est bien inquiète qu'on se compare aux autres. Mais il faut absolument qu'on revienne à nos moyens réels. Si on peut créer plus de richesse, tant mieux. Et il faut se comparer, et on va toujours se comparer. Maintenant, il me semble avoir plein d'idées puis plein d'observations utiles. On partage tous l'ambition de maintenir nos services. Alors, qu'il se présente lui aussi, avec sa formation politique, à la commission. Puis franchement, pour un collègue puis un parti politique qui nous amènent dans des questions importantes de détails financiers alors que son gouvernement n'a pas déposé de crédits budgétaires avec son budget, puis je sais pourquoi... Bien, je vois qu'il est un peu incommodé par ma question...

Des voix : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : S'il vous plaît!

M. Couillard : Mais c'est quand même, M. le Président, une tradition qui, jusqu'à maintenant, était relativement suivie par les différents gouvernements, de, chaque année, déposer un budget avec un cahier de crédits. Ça fait que, quand on demande, après, des justifications pour telle mesure ou telle mesure, puis il n'y avait aucuns crédits budgétaires pour les soutenir, bien on ne peut pas être surpris de dire que les mesures doivent être reconsidérées. Alors, c'est des milliards et des milliards de dollars. Puis moi, je vais émettre l'hypothèse, M. le Président, que c'était impossible, les fonctionnaires resteront discrets, comme c'est leur devoir, mais c'était impossible de présenter un cahier de crédits avec l'impasse budgétaire. Si c'était possible, pourquoi n'y a-t-il pas eu de crédits? Pourquoi il n'y pas eu de cahier de crédits? Mais on n'avait jamais vu ça. On a eu un budget du Québec en novembre 2012 puis on n'a pas eu de budget jusqu'en février 2014, puis on a eu un seul cahier de crédits déposé pendant l'exercice du gouvernement précédent. Alors, ça, c'est un fait indubitable.

Et là on veut continuer dans l'illusion : Ce n'est pas grave, 5, 6 milliards, 7 milliards, on va tout payer ça, on va se taxer, on va faire toutes sortes de choses intéressantes. Mais l'illusion, elle est terminée, les faux enjeux sont terminés, c'est ce que la population a dit le 7 avril. On va redresser la situation de l'économie et des finances publiques du Québec, on va le faire avec détermination, avec beaucoup de courage — parce qu'il en faudra — beaucoup de fermeté, puis on va aller jusqu'au bout, parce que, si on ne recadre pas le Québec dans ses moyens tout en croissant son économie et ses richesses collectives, on va laisser à nos successeurs, à nos générations qui suivront une tâche quasi impossible à gérer. On ne fera pas ça.

Alors, le choix est clair, la population qui écoute, c'est : le chemin de la taxation sans limites, les dépenses sans limites, du rêve que tout est possible tout le temps à n'importe quel prix; ou le choix de la réalité, que certains programmes, on veut les garder, on veut tous les garder, on veut les garder de façon solide et durable. Les programmes de solidarité collective sur la carte de crédit, ce n'est que du vent. Et on est rendus sur la carte de crédit actuellement, il y a juste à voir le nombre de milliards de dollars d'impasses qui sont devant nous dans le budget actuel et celui de l'année suivante.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. Ça termine ce bloc. On pourra y revenir dans le prochain bloc, M. le chef de l'opposition. Je cède maintenant la parole au député de Chomedey pour un prochain bloc de 19 minutes.

M. Ouellette : Merci, M. le Président. M. le premier ministre, j'aimerais qu'on... On va parler, dans le prochain bloc, particulièrement du Plan Nord. C'était un projet qui était très porteur. Je me souviens encore de la première fois qu'on en a entendu parler, en septembre 2008. Ça a été lancé officiellement en mai 2011. Et le Plan Nord, c'était un plan de vision, c'était un plan qui faisait rêver le Québec, c'était un plan qui impliquait et qui mobilisait justement l'ensemble des Québécois, autant les Québécois du Sud que les Québécois du Nord. C'est assez particulier que ce soit un député de Laval qui veuille parler du Plan Nord, mais c'est parce qu'il y a beaucoup d'entreprises et beaucoup de citoyens de Laval, de ma circonscription, Chomedey, qui se sentent interpellés et qui se sentent impliqués dans toutes les ramifications du Plan Nord.

Et j'entendais avec beaucoup de satisfaction, M. le premier ministre, que vous mentionniez tantôt qu'il y avait des gens... que vous rencontriez des gens justement, à Québec, ces jours-ci, justement pour le développement du Plan Nord. On a suivi les travaux du libre-échange avec l'Europe, le traité de libre-échange avec l'Europe, c'est sûrement quelque chose qui aura un incitatif avec le Plan Nord. La stratégie maritime aura définitivement sa partie dans tout ce qui touche le Plan Nord. On était très bien partis, 2008, 2009, 2010, 2011. Et, en 2013, vous vous souviendrez des articles et vous vous souviendrez de la stupeur que les citoyens ont ressentie quand... Je me souviens encore de la première page du Journal de Montréal qui faisait état de la mort du Plan Nord, qui a insécurisé beaucoup de gens, qui a insécurisé les investisseurs, qui a insécurisé les citoyens du Québec qui sont dans des métiers très spécialisés et qui voyaient, dans les occasions d'affaires du Plan Nord, voyaient leur avenir et leur survie. D'ailleurs, souvenez-vous qu'à cette époque plusieurs citoyens de plusieurs corps de métier, plusieurs propriétaires d'entreprises avaient dénoncé la tangente qui avait été prise par le gouvernement précédent sur le développement du Plan Nord. C'est sûr que ça a amené beaucoup d'insécurité.

Quand on parle du Plan Nord, on parle de 70 %, en territoire, du territoire du Québec. Quand on est à Laval, et que ta circonscription est bordée par deux autoroutes... par trois autoroutes et que ça te prend 30 minutes aller d'un bout à l'autre quand il n'y a pas de circulation, puis qu'il y a six comtés sur l'île de Laval, tu as de la misère à t'imaginer la superficie que le Plan Nord couvre. Et c'est tout près de 70 % du territoire du Québec, c'est plus de 1 million de kilomètres carrés, puis c'est deux fois la superficie de la France. Je ne sais pas le comté de Chomedey rentre combien de fois dans la France, mais j'ai l'impression qu'on est capable d'en mettre beaucoup.

Le Plan Nord nous avait amenés aussi une mobilisation des acteurs du milieu. Vous vous souviendrez, M. le premier ministre, que l'Université Laval avait produit un document extraordinaire qui s'appelait Mobilisés pour le Nord durable,sous la plume et sous la direction de Mme Sophie D'Amours, qui était la vice-doyenne à la recherche, à l'Université Laval, qui faisait état des enjeux puis des priorités pour avoir un Plan Nord qui soit durable et avoir un Plan Nord qui tienne compte de toutes ces possibilités-là.

J'aurais le goût de vous demander, M. le premier ministre... Vous en avez parlé en campagne, on vous a suivi assidûment en campagne électorale dans les différentes régions du Québec. Et d'ailleurs on vous remercie de l'importance que vous attachez aux régions du Québec. On a trop souvent tendance à penser que tout se passe dans les grands centres et que, si ça ne vient pas des grands centres, c'est moins bon. Des fois, c'est à tort. Et vous n'avez jamais minimisé... Je me souviens d'un passage, quand vous étiez passé en Abitibi-Témiscamingue, où vous aviez reparlé de la relance du Plan Nord et des priorités... de vos priorités lors de votre arrivée au gouvernement. Et j'aimerais ça, pour les gens qui nous écoutent aujourd'hui avec beaucoup d'intérêt, que vous leur expliquiez ce que signifie pour vous, concrètement, dans le quotidien des gens, la relance du Plan Nord.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le député de Chomedey. M. le premier ministre.

• (12 h 10) •

M. Couillard : Merci, M. le Président. Effectivement, ça a été une grande déception non seulement au Québec, mais ailleurs, hein, puis j'en suis témoin presque de façon hebdomadaire dans les contacts avec les représentants étrangers. L'attention du monde avait été tournée vers le Québec comme terre fertile pour les investissements, notamment à cause de la promotion active du Plan Nord et des nombreuses occasions que ça produisait. Et, à l'inverse, il y a eu une immense déception, et je dirais même une incompréhension de la situation lorsque, de toute évidence, cette initiative a été très freinée sinon arrêtée complètement; et, à l'inverse, encore une fois, maintenant que le gouvernement a annoncé son désir de relancer ce grand projet, bien énormément d'intérêt des représentations étrangères, des investisseurs pour travailler avec le Québec dans ce projet de développement qui est majeur.

Et c'est beaucoup plus qu'un projet minier. On a eu malheureusement tendance à le rétrécir, le Plan Nord. Oui, bien sûr, les ressources minières en font partie, mais également il y a un élément de développement durable, un élément d'énergie renouvelable, de développement social également pour les communautés du Nord, notamment pour nos relations avec la communauté autochtone, de sorte que, lorsqu'on a repris les affaires du gouvernement et qu'on a annoncé la relance du Plan Nord, on l'a fait avec des initiatives précises qui vont permettre de donner la crédibilité nécessaire dès le début à ce projet.

Je rappelle également qu'il faut mettre en filigrane de ça, en arrière-plan de ça, le projet du gouvernement de partager les redevances avec les communautés locales. Donc, ça s'ajoute également, c'est une valeur ajoutée par rapport à la version initiale. Mais on a annoncé dans le budget déjà plusieurs initiatives. D'abord, on va légiférer pour remettre en place la Société du Plan Nord, qui était un organisme à distance du gouvernement, avec les grands partenaires, de façon à planifier, à établir la stratégie de développement. Et ça sera certainement un acteur prépondérant dans le déploiement de la stratégie du développement du Nord québécois. On a également, dans le budget, annoncé plusieurs mesures, dont 1 milliard de dollars pour la création du Capital Mines et Hydrocarbures, favorisant la prise de participation de l'État dans certains projets et ainsi de maximiser les retombées économiques des projets pour le Québec.

Un élément qui me tenait beaucoup à coeur et également pour tout notre gouvernement, notamment notre collègue ministre responsable des Affaires autochtones : 100 millions pour la formation des populations autochtones et le logement. Si on veut embarquer — passez-moi l'expression — les communautés autochtones dans le Plan Nord, il faut qu'elles y voient un bénéfice direct, non seulement le partage de redevances, mais le rehaussement de l'éducation de leurs jeunes et de la formation, de façon à ce que les jeunes autochtones du Québec aient accès à ces emplois associés au développement du Nord. Donc, c'est une somme considérable. Il y a déjà un centre prévu à Sept-Îles, près de Sept-Îles, un centre de formation autochtone, qui va certainement contribuer à solidifier nos relations, mais également à accélérer le développement.

Il y a un enjeu stratégique majeur. De la même façon que le pôle logistique pour la stratégie maritime est important, dans le développement du Nord il y a un verrou qui est là depuis plusieurs années, qu'il faut lever, un verrou qui est double, hein? Il y a le fait que la fosse du Labrador, qui est cette grande formation géologique qui contient des minerais de fer en grande quantité, doit être désenclavée, c'est-à-dire qu'on doit la relier au port de Sept-Îles de façon à pouvoir acheminer les ressources vers les marchés. Alors, le fameux chemin de fer, il y a eu toutes sortes de péripéties, projet qui a été mis de l'avant, qui n'a pas été bien accueilli, les travaux ont repris.

On lance, cette année, 20 millions de dollars pour le lancement d'une étude relative à un nouveau lien ferroviaire qu'on voudrait développer si possible de façon conjointe avec le secteur privé pour permettre l'accès à la fosse du Labrador et surtout désenclaver les ressources. Il faut savoir qu'il y a beaucoup d'investissements étrangers qui sont en attente de la confirmation tangible de l'action du gouvernement pour construire ce lien-là. Ces entreprises vont chercher les investisseurs, et souvent, on m'a dit, la réponse des investisseurs, c'est : On trouve ça intéressant, on veut embarquer, mais on veut être certains que le gouvernement va effectivement agir pour mettre en place ce lien ferroviaire là, dont dépend la rentabilité de notre entreprise. Et, arrivés à Sept-Îles, on a un autre enjeu, un autre verrou, qui est le conflit qui malheureusement oppose encore le Port de Sept-Îles et la compagnie minière Cliffs, de façon à faire de cet endroit une infrastructure commune pour tous les usagers.

Il y a également la stratégie touristique québécoise. Le plan de développement de l'industrie du tourisme, à l'époque, que notre collègue la députée de Laporte a fort bien construit, comportait un volet nordique, 3,2 millions de dollars sont confirmés au budget pour cet élément-là au nord du 49e parallèle. Et, vous parliez de la participation du milieu académique, il y a 3 millions de dollars pour contribuer à la création de l'Institut nordique du Québec, qui vise à parfaire nos connaissances également autour du développement nordique.

Maintenant, il y a également, pour la Côte-Nord — parce que je viens de parler du chemin de fer — un autre enjeu stratégique majeur qui est l'approvisionnement en gaz naturel. Alors, quand on va sur la Côte-Nord et qu'on parle aux communautés d'affaires et aux gens de la région, l'accès au gaz naturel sur la Côte-Nord est considéré comme un facteur déterminant dans le développement économique de la région, pour les nouveaux acteurs industriels qui veulent s'y implanter. Alors, on n'aura pas l'occasion, certainement, dans un proche avenir, de construire un nouveau gazoduc, mais on peut certainement envisager d'acheminer du gaz naturel liquéfié par voie routière et maritime jusqu'à la Côte-Nord. Ça, c'est un projet qui est excessivement important également.

Puis il faut s'assurer également... Parce que, si on fait un peu le retour en arrière, de la même façon dont je parlais tantôt des régions qui ont l'impression parfois que les ressources ou le bénéfice des ressources passe par-dessus leurs têtes, nos PME québécoises veulent sentir qu'elles ont une participation puis un intérêt direct à participer au Plan Nord. D'ailleurs, on a tous vu, dans toutes les régions du Québec, des entrepreneurs, des PME dont le carnet de commandes a été singulièrement affecté par l'arrêt du Plan Nord. J'en ai vu en Beauce, j'en ai vu en Gaspésie, j'en ai vu en Abitibi, en Montérégie, en Mauricie, je pense qu'il n'y a pas une région...chez nous, au Saguenay—Lac-Saint-Jean. Je n'ai pas une région qui n'a pas noté dans ses activités l'impact direct de l'arrêt du Plan Nord.

Alors, on a donné le mandat à notre collègue le ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles de développer un véritable réseau de fournisseurs et d'équipementiers, et bien sûr avec son collègue le ministre de l'Économie, et s'assurer que les retombées économiques du Plan Nord sont bien planifiées. Et là-dessus on a la chance d'avoir parmi notre députation de grande qualité, M. Bourgeois, le député d'Abitibi-Est, qui a travaillé au cours des dernières années dans un organisme régional favorisant les retombées économiques du Plan Nord. Alors, on compte beaucoup sur sa participation de même que celle de M. le ministre de Trois-Rivières pour mobiliser les PME dans l'exploitation du Nord, et surtout pour en partager les bénéfices. Alors, on veut également continuer, donc, ce projet, qui va s'étaler sur plusieurs années.

Mais ce qui est très important au stade initial de notre mandat de gouvernement, c'est d'envoyer un message très clair à la communauté internationale, que ce soient les investisseurs ou les gouvernements étrangers, que le Plan Nord est de retour. Et je peux vous dire déjà que ça suscite l'intérêt de cette communauté. Je parlais, plus tôt ce matin, de la visite rare qu'on a ici, aujourd'hui, à Québec. C'est la première fois depuis très longtemps, et même on me dit que c'est une première, qu'un groupe nombreux d'ambassadeurs de la Communauté européenne vient visiter le gouvernement du Québec dans un seul moment, notamment pour connaître les intentions de développement économique et notamment en savoir plus long sur le Plan Nord et la stratégie maritime.

Alors, je pense que déjà cet objectif est en voie d'être atteint, mais il faut poursuivre et envoyer des signaux clairs qu'on continue dans la même direction, de sorte que la législation qu'on déposera sur la Société du Plan Nord également sera un autre élément.

Une voix : ...

M. Couillard : Et, oui, on me rappelle que je rencontrais le corps consulaire il y a une semaine ou deux, puis la plupart des questions portaient là-dessus, des différents consuls généraux qui étaient autour de la table. Alors, je pense que l'intérêt est renouvelé. Heureusement, la période n'a pas été assez longue pour que ce soit oublié, donc les gens l'ont encore en mémoire, et on peut repartir la roue vers l'avant.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. M. le député de Chomedey, en soulignant qu'il reste un peu plus de cinq minutes.

• (12 h 20) •

M. Ouellette : Merci. Merci, M. le Président. C'est rassurant de vous écouter, M. le premier ministre, par rapport au plan de relance. Parce qu'il ne faudra pas oublier... parce qu'il faudra arrimer le sud avec le nord. On a un Plan Nord, notre traité de libre-échange avec l'Europe, la visite des Européens, la visite des investisseurs, etc., mais notre main-d'oeuvre, notre main-d'oeuvre qualifiée, elle est autant locale, dans les quatre nations autochtones que nous avons là-bas, qu'elle est dans chacune de nos régions du Québec.

Je me souviens, il y a tout juste deux ans, j'avais assisté à une rencontre, à Laval, d'information sur tout le déploiement du Plan Nord. On avait eu des gens qui étaient venus... des gens de Laval, qui faisaient affaire avec le Plan Nord, qui profitaient justement de vendre leurs équipements et de faire des échanges avec les hommes d'affaires et les entreprises qui étaient au nord du 49e parallèle. On avait eu un très beau témoignage, et je veux rendre hommage au Dr Ted Moses, aujourd'hui, qui a été très, très, très impliqué dans la mise sur pied de la stratégie du Plan Nord.

La question que les gens se posent, et je pense qu'ils ont pu être rassurés par votre réponse de ce matin... On va avoir besoin d'un guichet unique, une place qu'on pourra tout centraliser, où les gens qui seront intéressés à participer au développement du Nord pourront s'inscrire, offrir leurs services et faire en sorte qu'ils pourront combler des besoins. Je me réfère... Parce que l'étude qui avait été faite à l'Université Laval, Mobilisés pour le Nord durable, vous savez, la première question que les gens nous posent, quand ils me disent : J'irais travailler dans le Nord : Y ont-u l'Internet? Et ça va être quelque chose de très, très, très tangible, ça, parce qu'aujourd'hui, à l'ère des communications, c'était une des recommandations qui était dans le rapport de recherche de Mme D'Amours et de son équipe, le transport, le lien ferroviaire, les routes terrestres, tout l'aspect des communications avec les communautés autochtones et les différents lieux.

J'ai un aspect de sécurité publique aussi qui m'interpelle beaucoup, parce qu'on ne peut pas... Il faut qu'il y ait une organisation qui se fasse. On ne pourra pas déplacer autant de gens du Sud vers le Nord sans avoir prévu des infrastructures, sans avoir prévu toute une façon de faire, de façon à ce que les gens du Sud n'aillent pas contaminer le Nord, mais qu'on fasse en sorte qu'on soit en mesure de répondre à cette demande-là.

Je vous dirai, en conclusion, M. le premier ministre, que, juste le fait qu'il y ait une relance du Plan Nord, vous sécurisez les citoyens du Québec, vous sécurisez ceux qui voudront aller y travailler, plusieurs qui étaient sortis en septembre 2013 et qui nous faisaient part de leur insécurité. Et je vous dirai que, depuis le 7 avril...

J'avais une discussion avec mon gérant de caisse, qui est dans le même édifice où mon bureau de comté est, et il me disait que, le 8 avril au matin, il y avait plus de monde que d'habitude, à la caisse, qui venait changer de voiture, acheter une maison, investir des sous, changer leur véhicule financier et qui avait retrouvé un sourire... probablement que c'était à l'arrivée du printemps, deux semaines plus tard, mais ce qui fait en sorte qu'on le sent sur le terrain. Et je pense que les nouvelles que vous venez de nous donner, ce matin, relativement à la relance, et que le ministre des Ressources naturelles va chapeauter le plan de relance, je pense que c'est des très bonnes nouvelles pour la prospérité économique des Québécois.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le député. M. le premier ministre, en à peine 15 secondes pour un bref commentaire.

M. Couillard : M. le Président, très rapidement. Il y a un comité ministériel qui a été créé. Puis je voudrais rajouter que les conséquences sociales du Plan Nord également sont reflétées dans ce comité-là, notamment par la présence du ministre de l'Éducation, et de Santé et Services sociaux, et également de la consoeur la ministre de la Justice et responsable de la Condition féminine — parce que le Conseil du statut de la femme a eu des préoccupations — de même qu'Emploi et Solidarité sociale.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : C'est tout le temps dont nous disposions dans ce bloc. Je vais maintenant céder la parole au deuxième groupe d'opposition pour un dernier bloc de 21 minutes. M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. Legault : Merci, M. le Président. J'entendais tantôt les échanges sur comment on va revoir l'équilibre entre les revenus puis les dépenses. C'est certains que, oui, il faut revoir le contrôle des dépenses, mais on ne peut pas passer à côté de revoir aussi le niveau de revenus, d'augmenter la richesse. Et je veux revenir à l'échange un peu spécial qu'on a eu tantôt sur l'écart de richesse avec l'Ontario.

Le premier ministre nous dit que, lui, il veut, pour chacune des années, réduire l'écart de richesse avec l'Ontario. Or, je faisais sortir les chiffres de croissance économique qui sont prévus pour les deux prochaines années. On prévoit, au Québec, en 2014, une croissance économique de 1,8 %. En Ontario, la Banque Royale prévoit une croissance de 2,3 %. En 2015, le gouvernement libéral prévoit, au Québec, une croissance économique de 2 %. La Banque Royale, en Ontario, prévoit que ça va être 2,8 % en 2015. Donc, c'est un peu avancer par en arrière, là. Ce qu'on se rend compte, c'est que, si ces chiffres-là sont bons, l'écart de richesse va grandir, avec l'Ontario, au cours des deux prochaines années.

Moi, je le répète, je ne vois pas comment on peut mobiliser la population, tous les acteurs, autant patronal que syndical, sans donner un objectif. Et ce que je comprends, c'est que le premier ministre ne semble avoir aucune idée de ses objectifs en termes de croissance économique, en termes de comment on va faire non seulement pour rejoindre l'Ontario, mais pour dépasser l'Ontario. Parce que, si on veut réduire l'écart avec l'Ontario, il faut non seulement faire aussi bien, mais il faut faire mieux. Or, ce n'est pas parti pour ça. Donc, moi, je repose ma question, là : Quels sont les objectifs du premier ministre en termes de réduction de l'écart de richesse avec l'Ontario au cours des quatre prochaines années?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : M. le Président, on a la même question, on aura la même réponse. L'objectif qu'on veut atteindre, c'est de diminuer l'écart de façon régulière pendant tout le mandat. Puis, pour y arriver, il y a deux joueurs : il y a le Québec puis l'Ontario. Alors, je rappelle à notre collègue que l'Ontario également fait face à des déficits, des problèmes structurels qui sont considérables, fait face au même enjeu du secteur manufacturier, fait face, en fait, à des enjeux beaucoup plus graves que les nôtres sur le secteur énergétique. Alors, il y a des atouts, au Québec, qui sont considérables. Maintenant, pour libérer ces atouts-là puis aller au bout du talent des Québécois — ce qu'il veut, lui également — il y a des problèmes structurels dans la façon dont l'économie québécoise est bâtie, dans la façon dont l'État québécois occupe trop de place, selon nous, dans l'horizon économique, auxquels il faut s'attaquer.

Alors, oui, bien sûr, il faut réduire les dépenses, réviser les programmes, oui, il faut faire de la fiscalité un outil de développement économique, mais également il faut des politiques spécifiques qui encouragent la création d'emplois et la relance économique. Alors, je lui rappellerais, puis on y reviendra tantôt, que 50 % des emplois au Québec sont dans les PME — il le sait. 80 % environ, 75 % des nouveaux emplois sont créés dans les PME. Alors, il y a une succession de mesures dans le budget qui déjà ont un impact sur le terrain pour amener nos PME à prendre l'initiative d'exporter davantage, puis transporter leur produit plus loin, et également de démarrer plus facilement, et, bien sûr, d'innover. Et là, sur l'innovation, on pourrait avoir une discussion intéressante parce que, dans le budget, il y a des propositions spécifiques, il y a une proposition spécifique pour l'innovation dont la base provient de ce que m'ont dit les entrepreneurs dans la tournée du Québec.

Alors, je ne veux pas m'éloigner de sa question, mais je veux qu'on revienne aux actions spécifiques. Parce qu'il dit parfois, notre collègue, dans ses interventions publiques, que le gouvernement n'a pas de plan de relance économique. Je suis en total désaccord avec lui. Il y a, au contraire, une image très claire et très bien formée des axes de développement économique et des actions qui s'y réfèrent, dans le budget, pour chacun de ces axes-là. Mais la relance des PME, c'est quelque chose qui est fondamental, au Québec, il le partage, il le sait. Notre structure économique diffère de celle du reste du Canada, notamment à cause de la surprésence des PME dans l'économie par rapport au reste du pays. Alors, il ne peut pas nier qu'il y a de nombreuses mesures très concrètes pour amener nos PME à démarrer plus facilement, à innover plus facilement, créer de l'emploi et exporter plus rapidement.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. Legault : Moi, je suis quelqu'un, là... j'ai été habitué, peut-être dans l'entreprise privée, à être un homme de résultat. Puis, on peut bien avoir des longs échanges, moi, je pense que les mesures du gouvernement libéral sont mauvaises, qu'il n'y a pas de plan économique. Lui, il pense qu'il en a un puis que ses mesures sont bonnes. Évidemment, on va regarder les résultats, mais les résultats prévus pour les deux prochaines années, c'est que le Québec va faire moins bien que l'Ontario. Puis, comme le dit le premier ministre, c'est peut-être ce qu'il y a de plus facile, rejoindre l'Ontario, parce que, quand on regarde l'écart de richesse, il y a un écart de richesse de 14 % avec l'Ontario, 24 % avec le reste du Canada, puis 40 % avec les États-Unis dans le PIB par habitant. Donc, là, on prend une province qui va plus ou moins bien, l'Ontario, puis ce qu'on se rend compte, c'est que, pour les deux prochaines années, on prévoit faire moins bien que l'Ontario.

Donc, moi, je voudrais juste, là, qu'il me confirme ça : Est-ce que le premier ministre prévoit faire moins bien que l'Ontario au cours des deux prochaines années en termes de croissance économique? Et, si oui, est-ce qu'il pense que ça va être mieux dans sa troisième, dans sa quatrième année? Dans le fond, là, quand il va avoir fini son quatre ans et demi, est-ce que l'écart va être plus grand ou plus petit avec l'Ontario? Il me semble qu'il pourrait au moins me répondre : Plus petit, plus grand. Un début de réponse, s'il vous plaît.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

• (12 h 30) •

M. Couillard : M. le Président, franchement, depuis le début, je lui dis qu'on va rétrécir l'écart; ça n'a pas changé puis ça ne changera pas. Maintenant, évidemment, toute citation de chiffres, au départ, provient de la source des chiffres, mais je voudrais vous mentionner d'autres prévisions qui nous montrent qu'on part à un niveau quand même, je crois, plus intéressant que celui qu'il cite. Le Conference Board, dans sa dernière prévision, prévoit que la... exactement l'indicateur qu'il mentionne, le PIB par habitant, au Québec, en 2014, va croître de 2 %; également 2 % pour l'Ontario, pareil. En 2015, 3,4 % au Québec; 3,3 % en Ontario. Ça, c'est les prédictions du Conference Board. Les prévisions du Conference Board.

Maintenant, on ne s'enflammera pas pour des détails de décimales, puis on trouve toutes sortes de chiffres, mais il est clair qu'on a déjà une idée. Et on a volontairement placé des chiffres, dans le budget, plus bas que ça pour avoir des objectifs qu'on est certains d'atteindre et qu'on va dépasser. Il sait très bien — il a parlé de l'entreprise — l'idéal, c'est de sous-promettre et de surréussir, dans l'entreprise comme au gouvernement. Alors, on va s'assurer de partir sur des bases réalistes qui correspondent à l'état des lieux, la croissance économique nord-américaine, mais j'ai confiance qu'on va faire mieux. Et j'ai confiance, encore une fois, que, lorsqu'on se retrouvera à la table du débat des chefs en 2018 — c'est bientôt — on pourra constater que l'écart de richesse entre le Québec et l'Ontario a diminué.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. M. le chef de la deuxième opposition.

M. Legault : Écoutez, je m'excuse, là, mais, quand on dit une croissance de 3,4 %, là, moi, je ne crois pas à ça, là, pas avec les mesures qui sont là. Et, si le premier ministre croit à une croissance de 3,4 %, là, il doit être tout seul à croire ça au Québec, là. Mais, M. le Président, ce que je me rends compte depuis ce matin avec les échanges qu'on a, c'est que le premier ministre est dans la théorie, qu'il n'a pas d'objectif précis.

Je prends un exemple. Le 11 juin dernier, le député de Lévis a demandé au ministre des Finances : Pour les deux prochaines années... pour les quatre prochaines années, le PIB par habitant, est-ce que vous pensez réduire l'écart avec le reste du Canada? Le ministre des Finances a répondu : Je crois qu'on va rejoindre la moyenne canadienne d'ici quatre ans. Donc, il va éliminer tout l'écart de 24 %. Voyons donc, là! C'est irréaliste, là, c'est... Je n'ai pas de mot pour qualifier ce que le ministre des Finances a dit, là. Il veut, d'ici quatre ans, rejoindre la moyenne canadienne pour ce qui est du PIB par habitant. De toute évidence, là, on a un gouvernement qui ne sait pas où il s'en va, qui n'en a pas, d'objectif. Comment vous voulez qu'il mobilise la population avec ensuite un plan de développement économique quand on n'est même pas capables de se donner des objectifs ambitieux pour faire au moins aussi bien que l'Ontario puis mieux pour réduire l'écart de richesse?

Et c'est ça dans tout, là. Je regarde, ce matin, ce que le premier ministre nous a dit sur le fardeau fiscal. Je lui suggère de passer de la théorie à la réalité, à la réalité des familles. Ça n'a pas de bon sens quand il nous dit, là, selon sa définition du fardeau fiscal, que ça n'inclut pas les tarifs. Les tarifs, ce n'est pas dans le fardeau fiscal. Il nous dit : Ah! Les taxes foncières, comme les taxes scolaires, ça ne compte pas. Il est vraiment, là, le... On a un premier ministre qui est dans la théorie, qui n'est pas dans la réalité. La réalité, c'est que les Québécois vont avoir moins d'argent dans leurs poches, à la fin de l'année, qu'ils en avaient au début de l'année.

Même chose avec la TVQ. J'offre l'opportunité au premier ministre, aujourd'hui, de clarifier les propos de son ministre des Finances en disant si, oui ou non, il exclut une hausse de la TVQ. Il ne saisit pas l'opportunité, continue d'être dans la théorie, de dire : Oui, c'est peut-être une bonne chose d'augmenter la TVQ, c'est moins incitatif et peut-être que c'est mieux d'avoir un mixte. Écoutez, là, je n'en reviens pas! Ça, c'est le premier ministre du Québec qui n'exclut pas d'augmenter la TVQ. Alors que le Québec a déjà des taxes de vente plus élevées que l'Ontario, plus élevées que le Nouveau-Brunswick, plus élevées que New York, que le Vermont, on a un premier ministre, au Québec, qui dit : Je n'exclus pas d'augmenter la TVQ, je vais d'abord laisser la chance à un comité, à une commission, de se pencher là-dessus, d'examiner la théorie. Les Québécois, là, ils ne sont pas dans la théorie, là. On ne veut pas un premier ministre puis un gouvernement qui est théorique, on veut avoir quelqu'un qui est dans la réalité.

Même chose avec l'économie. Si on ne se fixe pas d'objectifs ambitieux, si on fait juste faire des belles phrases pour dire : Oui, j'aimerais que l'écart se réduise avec l'Ontario à chaque année, mais ça n'a pas l'air parti pour ça pour les deux prochaines années... Écoutez, là, on est dans la théorie, là. On a besoin d'un plan. Puis moi, je veux bien, là, que le premier ministre dise : Ce n'est pas nécessaire de relancer la consommation, je suis en désaccord avec le chef de la deuxième opposition à l'effet qu'il faut réduire le fardeau fiscal à court terme, il faut d'abord tout mettre nos oeufs dans le panier du contrôle des dépenses. Je m'excuse, il fait une erreur. C'est théorique.

Autant, durant la campagne électorale, il ne parlait pas de contrôle des dépenses, ça, là-dessus, bien, il a épousé un peu le discours de la Coalition avenir Québec, autant, aujourd'hui, il est comme juste d'un côté. Juste d'un côté. C'est comme s'il y avait maintenant, au Québec, juste une priorité : le contrôle des dépenses. La relance de l'économie, l'augmentation des revenus, ce n'est plus dans ses priorités. Or, si on veut protéger nos programmes sociaux, il faut faire les deux. Il faut faire les deux. On ne peut pas garder un écart de 14 % avec l'Ontario, ça représente 8 milliards de dollars de manque à gagner dans nos revenus. Il faut arrêter d'être dans la théorie.

On a un ministre des Finances puis un premier ministre qui sont dans la théorie : Théoriquement, je respecte ma promesse de ne pas augmenter le fardeau fiscal, même si je sais que j'ai changé d'idée sur les tarifs d'électricité puis que finalement ils vont augmenter de 4,3 %, contrairement à ma promesse. Je change d'idée sur les taxes scolaires. Alors que j'étais dans l'opposition, je disais au Parti québécois : Ça n'a pas de bon sens d'abolir la péréquation avec les commissions scolaires et de laisser les taxes foncières qui parfois augmentent de 10, 15 % à cause de la valeur foncière, de laisser les taxes scolaires, de laisser les commissions scolaires faire ce qu'elles veulent. Et là il arrive au gouvernement, il est premier ministre, puis son ministre de l'Éducation dit : Pas de problème, allez-y, augmentez de 8 %, 10 %, 15 % les taxes scolaires, ça, ça ne compte pas dans le fardeau fiscal parce que c'est des taxes foncières, puis les gens, ils ont une maison qui vaut plus cher. Écoutez, là, les Québécois ont des augmentations de salaire de 2 %, 3 %. Quand on augmente les tarifs d'électricité de 4,3 %, bien on vient gruger dans leur pouvoir d'achat. Puis pourquoi on augmente les tarifs de 4,3 %? Parce qu'on doit absorber les pertes sur l'éolien. J'entendais le premier ministre, d'une façon un petit peu démagogique, tantôt, dire : Ah...

Une voix : ...

• (12 h 40) •

4131 4131 M. Legault : Bien, je retire le mot «démagogique». Mais il disait tantôt : Le chef de la deuxième opposition n'aime pas les régions parce qu'il n'aime pas l'éolien. Écoutez, M. le Président, on donne 200 000 $ de subventions par année, par emploi, dans l'éolien pour créer des jobs à 48 000 $ par année. Il me semble qu'on n'a pas besoin d'un bac en économie pour comprendre que ça n'a pas de bon sens. On a peut-être besoin d'un bac en petite politique, mais un bac en économie, là, ce n'est pas nécessaire pour dire... faire supporter à tous les Québécois une augmentation de 4,3 % des tarifs d'électricité parce qu'on a des pertes à absorber dans l'éolien alors qu'on est déjà en surplus d'électricité.

Puis là le premier ministre s'amuse, tantôt, en répondant à une des questions d'un de ses députés, dire : En plus, on va faire des minicentrales. Donc, ce que le premier ministre nous dit, là, c'est : Que ça soit avec les minicentrales, que ça soit avec l'éolien, on va acheter de l'électricité à 0,09 $ par kilowattheure puis on va le revendre à 0,04 $. On achète à 0,09 $, on revend à 0,04 $. Comme disait mon prof aux HEC, là, on ne se reprendra pas sur le volume, là. Au contraire, plus on en fait, plus on creuse notre trou. Puis ça, c'est le premier principe qu'on devrait apprendre : quand tu es dans un trou, arrête de creuser. Mais le premier ministre nous dit : Non, non, non, moi, je veux continuer à faire de l'éolien, je veux continuer à faire des minicentrales, je veux continuer à augmenter les tarifs d'électricité de plus que l'inflation, je veux continuer à augmenter le fardeau fiscal des Québécois.

Écoutez, ce n'est pas comme ça qu'on va relancer l'économie. La consommation des ménages, là, c'est 60 % du PIB. Comment vous voulez, quand on a de la misère avec 60 % du PIB parce que les gens sont étouffés, qu'ils ont des taxes qui s'ajoutent, qu'on a des tarifs qui augmentent de plus que l'inflation, comment vous voulez relancer l'économie? Mais le premier ministre dit : Non, non, non, moi, je pense que mes mesures sont bonnes, que j'en ai un, plan économique. On le cherche, là. On a tout lu les cahiers deux fois, on ne le voit pas. On ne le voit pas.

Nous, on propose des zones d'innovation. On a proposé un projet où on investit 5 milliards dans des zones d'innovation en réallouant les crédits d'impôt aux entreprises. Il le disait lui-même tantôt, on a 3 milliards par année, 3 milliards par année de crédits d'impôt qui... — comme il disait, si ça existait, on le saurait — ça ne donne pas des bons résultats. Mais là on va perdre un an avec une commission parce que le premier ministre n'a pas fait ses devoirs avant la campagne électorale. Parce que le Parti libéral n'a pas fait ses devoirs avant la campagne électorale, on se retrouve dans une situation où on va perdre un an, l'économie du Québec va perdre un an. On va avoir un comité qui va faire un premier rapport sur les programmes puis un deuxième comité qui va faire un rapport sur la fiscalité, et, à moins qu'il me dise le contraire, il ne se passera rien avant le printemps 2015. Donc, on va avoir perdu un an. Puis, pendant cette année-là, l'écart de richesse avec l'Ontario ne va pas être diminué, le premier ministre vient de le dire lui-même : Dans le meilleur scénario, ça va être égal, la croissance. Donc, l'écart va rester à 14 %. Quand on regarde ses chiffres en 2015, l'écart va grandir un peu, même avec les chiffres les plus optimistes.

Moi, j'invite le premier ministre à sortir de la théorie, à sortir de la théorie. Il n'est plus à l'Université de Sherbrooke, là, avec son collègue, il est premier ministre du Québec, il est dans la réalité. Puis la réalité des familles, là, ce sont des gens qui ont un fardeau fiscal qui n'arrête pas d'augmenter. La réalité, c'est une consommation des ménages qui n'est pas là, c'est une croissance économique qui n'est pas là, ce sont des emplois qui ne se créent pas, c'est... Il faut regarder le projet qui est indiqué, là. On a proposé des zones d'innovation. On a proposé des zones d'innovation. Pourquoi le premier ministre n'aime pas les zones d'innovation? Il m'a dit...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef... à peine une minute à votre question.

M. Legault : Oui, oui, j'arrive à ma question.

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Legault : Le premier ministre, le premier ministre nous dit, dans son budget, qu'il aime bien le modèle de Sherbrooke, hein, pour les zones d'innovation. Il y a une minizone d'innovation à Sherbrooke, mini, mini, il faudrait la multiplier par 100 ou par 1 000. Mais, pour toutes les zones d'innovation — nous, on parle d'en créer 20, surtout dans la vallée du Saint-Laurent — nous, on proposait 5 milliards, le premier ministre propose 500 000 $, 500 000 $ pour toutes les zones d'innovation. Ce n'est pas sérieux!

Non, le premier ministre n'a pas de plan de relance économique, et je comprends pourquoi il ne veut pas se donner d'objectif de croissance économique. Il refuse de se donner des objectifs de réduction de l'écart de richesse avec l'Ontario parce qu'il n'a pas de plan. Donc, on devrait avoir des objectifs et un plan; lui a ni un ni l'autre. Merci.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le chef de la deuxième opposition. Il n'y a malheureusement plus de temps dans ce bloc, on pourra peut-être y revenir. Alors, je vais céder la parole, pour le bloc du côté gouvernemental, au député de LaFontaine. Vous disposez de 19 minutes.

M. Tanguay : Merci beaucoup, M. le Président. Je suis heureux de voir qu'on donnera l'occasion à notre collègue chef de la deuxième opposition de reprendre son souffle et je le sais également grand démocrate et avide de recevoir la réponse du premier ministre. Alors, j'inviterais, M. le Président, que vous reconnaissiez le premier ministre et j'aurai, le cas échéant, d'autres questions.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Merci, M. le Président. Bien, de toute évidence, notre collègue ne voulait pas avoir de réponse à sa tirade, de sorte que je remercie notre collègue de LaFontaine de me donner l'occasion de le faire. Alors, l'Université de Sherbrooke, c'est une très bonne institution, je voulais le rassurer là-dessus. Il se donne d'ailleurs d'excellents cours de développement économique, social et de formulation de politiques publiques. J'encouragerais notre collègue à s'inscrire d'urgence. Il a le temps, il a quatre ans et demi. Il peut même le faire par correspondance ou par Internet. Je pense que ça permettrait d'affiner le discours un peu.

Une voix : On va le recommander.

M. Couillard : On va le recommander? À la commission des programmes, on va le recommander. Alors, il y a tellement d'éléments contradictoires qui ont été mentionnés puis de demi-vérités, M. le Président, qu'on ne sait plus par où commencer. Mais le ton du discours, la façon d'aborder les éléments de façon très partielle ou partiale est une des raisons pour lesquelles on est à l'endroit où on est aujourd'hui. Parce que les gens ont compris que le discours superficiel, facile, rapide, qui n'est pas soutenu par des éléments de profondeur ne va pas très loin.

Alors, par exemple — je ne sais plus par où commencer, il y en a tellement — il dit : Le premier ministre devrait faire ses devoirs. Je le cite. Bien, M. le Président, ça fait deux ans que je me promène dans les régions du Québec, où ils ne l'ont jamais vu, le député de L'Assomption, et puis qu'ils ont entendu également très, très bien son message aux régions. Il a beau vouloir ne pas écouter ce que je dis, mais je peux vous dire que les citoyens des régions, eux autres, elles, ils ont entendu ce qu'il dit.

Il leur dit : Les projets de développement économique, ce n'est pas pour vous autres. On va désigner des sites de subventions géographiques le long du Saint-Laurent, mais, si vous habitez en Gaspésie, au Saguenay—Lac-Saint-Jean, sur la Côte-Nord, oubliez ça. Continuez de nous faire prendre des photos de vacances l'été, faire des bed and breakfast — c'est bien, c'est très bien, il faut continuer à en faire — puis le développement économique, oubliez ça. En fait, on va un peu fermer la région puis, quand on voudra aller en vacances, nous autres, on va y aller, puis on va vous voir, puis on va vous jaser.

Alors, il n'y a rien, dans le discours de cette formation politique, il n'y a rien, rien pour les régions du Québec. Il n'y a même pas un signe d'espoir. Tout ce qu'il dit, c'est ce qu'il ne veut pas faire pour les régions. Mais il ne dit jamais aux gens de Gaspésie puis le Bas-Saint-Laurent qu'est-ce qu'il ferait pour les aider à créer de l'emploi puis bâtir leur part de prospérité. Puis je le sais parce que moi, je me suis promené dans ces régions-là. Puis les devoirs, c'est ça, c'est aller voir sur place, rentrer dans les PME, demander aux entrepreneurs qu'est-ce qu'ils pensent des programmes de démarrage, qu'est-ce qu'ils pensent des programmes d'innovation, comment est-ce que ça pourrait être mieux. J'ai mis deux ans à faire ça puis le résultat, je l'ai eu le 7 avril.

Alors, la bonne nouvelle, c'est que le député de L'Assomption a quatre ans et demi pour faire la même chose. Lui, il doit sortir de sa bulle théorique également, qui est un discours facile, rapide sur les politiques publiques, un peu idéologique par moment : On va abolir les commissions scolaires, mais on ne vous dira pas trop qu'est-ce qu'on veut faire à la place, parce qu'on ne le sait pas nous-mêmes, finalement. On va présenter un cadre financier où on prévoit 0,9 % en santé, ce qui est une impossibilité totale, mais ce n'est pas grave, ça marche. L'équation au bout de ça va fonctionner.

On dit qu'on ne veut pas consacrer de l'argent pour créer de l'emploi. C'est toujours trop cher. Avez-vous remarqué, M. le Président? C'est toujours trop cher pour créer de l'emploi au Québec. Bien, moi, je vais lui poser deux questions, puis il pourra répondre tantôt. Il dit qu'il veut mettre 5 milliards pour ses pôles d'innovation pour combler l'emploi. Ça fait qu'il divise 5 milliards par le nombre d'emplois...

Une voix : 50 000.

M. Couillard : 50 000. 5 milliards divisés par... On calculera ensemble, parce que je ne suis pas sûr du résultat, hein?

L'autre chose, c'est qu'il y a eu une fermeture d'usine dans son coin, dans le comté de L'Assomption. On est intéressés puis on s'occupe de ça, puis il le sait très bien. Mais c'est quoi, la limite qui serait acceptable, pour lui, de capitalisation divisée par le nombre d'emplois pour son comté pour remplacer Electrolux? Supposons qu'on arrive avec un projet comme FerroAtlántica ou comme Ciment McInnis pour le comté de L'Assomption, comment il va faire son calcul, pour les citoyens de sa circonscription, pour dire combien ça vaut la peine de dépenser pour leur donner des bonnes jobs, pour leur créer des bonnes jobs? Ça, c'est la réalité.

Alors, la théorie puis la réalité, je lui retourne l'argument. Lui, il est dans la théorie idéologique; nous, on est dans le vécu des gens puis le vécu des entrepreneurs. Alors, c'est comme ça qu'il faut continuer à travailler. Puis, lorsqu'il dénature ou qu'il diminue l'importance des deux commissions qu'on forme, je l'invite à la prudence, je l'invite à y participer. Ça s'adonne qu'on est dans une démocratie. Ça fait que, dans une démocratie, on prend le temps de prendre des décisions importantes et difficiles, d'en débattre, de présenter les diverses solutions puis de procéder de façon ordonnée. Aller sabrer comme il veut le faire...

En passant, son 5 milliards, il fait ça, il supprime tous les crédits d'impôt des entreprises puis il transforme ça en pôles d'innovation, à la vieille façon de subventions géographiques qu'il a peut-être appris dans l'ancien temps, dans son précédent passage politique. Il dit à l'entrepreneur : Si tu t'installes là, là, de telle rue à telle rue, là, on va exproprier des terres agricoles, ce n'est pas grave, on s'occupera de ça après, mais on va te donner des subventions. Par contre, si tu t'installes l'autre bord de la rue, bien là tu n'en auras pas, de subvention. Alors ça, c'est un modèle de développement qui a fait son temps puis qui est tout à fait dépassé. Alors, il faut également revenir à ces horizons-là.

Lorsqu'il dit... — je regrette, parce que ce n'est pas acceptable de l'entendre dire ça — lorsqu'il dit que le gouvernement n'a pas de plan de développement économique, c'est archifaux. Qu'il relise le discours inaugural, qu'il relise le discours du budget, qu'il relise les remarques que j'ai faites au début. Au contraire, le plan de développement économique du gouvernement du Québec, du gouvernement actuel est très précis. Il se concrétise dès la première année et va continuer de se concrétiser année après année.

Alors, moi, je fais bien mon possible, puis là je n'ai pas pu m'empêcher, sur une couple de choses, notamment des histoires de subventions géographiques puis le cas hypothétique d'une installation industrielle dans son comté... Ce sera intéressant, d'ailleurs, d'avoir cette discussion. J'espère qu'on va attirer un investisseur au comté de L'Assomption pour donner de l'emploi aux personnes qui sont actuellement en crise, là, souvent sérieuse parce qu'elles viennent de perdre leur emploi. Combien ça vaut la peine... combien qu'on peut payer pour créer un emploi dans le comté de L'Assomption? Une belle discussion. Parce que, là, on est dans le modèle théorique, là. Ah non! C'est nous autres, maintenant. Mais là ça l'intéresse moins, apparemment. Bon, on espère trouver un investisseur sérieux, on lui présentera les équations — puis nous, c'est simple, on veut créer de l'emploi — et il nous dira, lui, comment il va les aider, les gens.

Puis je l'encourage également, d'ici à la prochaine élection, à aller voir le monde dont il parle un peu légèrement, les gens des régions, qui, eux, sont très contents de l'éolien en Gaspésie puis ailleurs, qui, eux et elles, sont très contents du fait que les minicentrales reprennent, qui, eux et elles, sont très contents également de projets comme ceux auxquels on a donné l'autorisation, parce que je pense qu'il manque de réalité dans sa vie, dans sa réalité de région.

• (12 h 50) •

Une voix : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : S'il vous plaît!

M. Couillard : Puis je peux vous dire, M. le Président, ça fait deux ans que je me promène, puis ils ne l'ont pas vu souvent. Et surtout ils ont l'impression que leurs préoccupations ne trouvent aucun écho dans ses paroles. Je pense qu'il ne se rend pas compte, lorsqu'il parle des minicentrales, ou lorsqu'il parle des éoliennes, ou lorsqu'il parle de certains industriels comme la cimenterie McInnis en Gaspésie, le message qui est reçu par les gens des régions n'est pas celui qu'il pense. Ça, je peux le lui dire de façon très claire, puis ça lui a certainement été exprimé directement.

Maintenant, pour le travail essentiel qui est devant nous, de rebâtir les finances publiques du Québec, de relancer l'économie, je sais bien, on le voit, qu'il n'a pas beaucoup de respect pour les deux commissions qu'on a formées, mais je l'encourage quand même à se présenter devant ces commissions et de nous donner des idées.

D'ailleurs, je remarque, M. le Président, et c'était formidable, dans la réplique du budget, je pense qu'on a tous salué la collaboration puis le discours positif du député de Lévis. Puis je ne peux pas mentionner la présence ou l'absence des collègues, M. le Président, autour de cette table, mais sa voix nous manque. On aurait envie de l'entendre à nouveau nous dire à quel point ce qu'on a prévu pour contrôler les dépenses publiques est nécessaire et indispensable, nous dire qu'ils vont nous aider avec des idées, des suggestions pour diminuer et mieux gérer les finances publiques, pour également revoir les programmes gouvernementaux, débattre, par exemple, de la gouvernance scolaire devant la commission de révision de programmes.

J'aime cette voix, on aime l'entendre. Les citoyens aiment ça également. Ils ont aimé ça, entendre le député de Lévis dire au gouvernement qu'il leur tendait la main pour travailler avec nous dans les différents enjeux de stabilisation des finances publiques et de relance économique. Puis je veux le rassurer, parce qu'en politique on veut bien sûr être reconnu pour ce qu'on fait, moi, je prends l'engagement que, si l'idée vient de la CAQ, et puis qu'on trouve qu'elle est bonne, puis qu'on l'utilise, on va dire qu'elle vient de la CAQ avec fierté. Les gens nous seront reconnaissants de le dire.

Je l'amènerais à avoir un peu plus de générosité également dans ses propos à l'endroit du gouvernement. On est tous partagés par l'ambition de mieux réussir pour le Québec, de faire un Québec plus prospère — mais nous, on pense que plus prospère, ça va avec plus juste également — et de faire le développement économique avant tout, stabiliser les finances publiques et d'assurer le développement social du Québec puis l'équité, qui est plus importante au Québec qu'ailleurs. Alors, on est attachés à ça puis on veut préserver ça. Nous, on le dit, on veut préserver cet élément de notre société, mais on réalise qu'on n'a pas les finances publiques suffisantes pour le faire et le soutenir et surtout qu'on n'a pas... — et là on se rejoint — qu'on n'a pas le niveau de création de richesse suffisant pour y arriver.

Alors, ce à quoi on convie les Québécois et les Québécoises... Puis ça ne sera pas facile, il y aura beaucoup de périodes difficiles. Ce qu'on voit avec le projet de loi sur les retraites, c'est un élément parmi d'autres. Il y aura des décisions majeures qui vont être annoncées sur différents programmes gouvernementaux ou la façon dont on gère les finances publiques. Alors, je l'invite à participer à ça.

Ça n'aura pas, d'après moi, beaucoup d'influence, qu'il ait accepté ou non de participer, rendu dans quatre ans et demi. Mais, d'ici là, les gens vont dire : Voici un Parlement qui travaille ensemble, qui va plus loin que les jugements faciles... oui, je dirais faciles, rapides sur...

Une voix : ...

M. Couillard : ...à l'emporte pièce, voilà, sur ce que nos collègues veulent réaliser. Moi, je réalise que le député de Lévis — encore lui, on l'aime bien, finalement — a salué l'exercice de révision de programmes. Écoute, je pense qu'il y a eu, sur 15 minutes de discours de réplique, il y a eu un bon neuf, 10 minutes d'accueil positif pour les mesures du gouvernement. Et je suis persuadé que ça va continuer. On veut entendre ces suggestions-là.

Et, pour ce qui est de la réalité puis de la théorie, vous voyez qu'on ne partage pas la même interprétation de ce qui est la réalité puis ce qui est la théorie. Alors, la réalité, c'est également être capable de sortir de son cadre idéologique qui est bien défini, dans lequel tout doit rentrer puis dans lequel on repousse les affaires pour être bien sûr que ça rentre; ce n'est pas grave si ça dépasse un peu, on va couper ce qui dépasse.

Alors, on veut faire ça puis on veut le faire avec les partis d'opposition. Et je l'invite encore une fois, avec ses collègues, à se présenter devant ces deux commissions. Comment lui envisage-t-il la réforme fiscale au Québec? Comment lui envisage-t-il la révision des programmes? Et allons-y de façon spécifique. Ça fait des années que la CAQ et leur parent, l'ADQ, parlent des commissions scolaires. Bien, qu'ils aillent devant la commission présenter leurs idées sur les commissions scolaires avec des arguments et les différentes missions, là, qui sont prises en charge par ces commissions-là, comme le transport scolaire, par exemple, qu'est-ce qu'on va faire avec ça.

Mais, en attendant, nous, on agit. On a aboli les directions régionales du ministère de l'Éducation. On va également prendre d'autres initiatives sur la gouverne scolaire, comme on en prendra sur la gouverne de la santé, comme on en prendra sur les grands programmes de l'État, dans le but de préserver les acquis du Québec et de faire du Québec, je le répète, une société prospère, mais prospère pour tout le monde. Quel que soit l'endroit d'où on vient, où on vit, d'où on vient et quel que soit notre niveau de richesse, on a droit à la même part d'espoir. Alors, pour nous, c'est important et c'est ce pour quoi on est là. Et c'est là-dessus — puis je le rassure là-dessus — comme ils viennent de le faire le 7 avril avec des résultats variés, que, dans quatre ans et demi, les Québécois auront l'occasion de poser un autre jugement. D'ici là, ce que je crois, c'est qu'on aura remis le Québec sur la voie de la prospérité durable, pas la prospérité d'illusion d'avoir équilibré le budget en un an puis de recommencer deux ans plus tard, la véritable prospérité durable, assise sur des bases saines, des bases solides.

Et je vais terminer mon intervention, M. le Président, en demandant encore à notre collègue le chef de la deuxième opposition de faire preuve d'un peu plus de générosité dans ses commentaires et de venir se présenter avec ses collègues devant les deux commissions, la fiscalité et la révision de programmes, afin de nous faire bénéficier de son expérience de gestionnaire et de ses bonnes idées. Il a remarqué, d'ailleurs, que plusieurs de ses idées ont trouvé écho dans nos actions, et on est prêts à continuer.

Et je suis certain qu'il le fera, parce qu'au-dessus de nos affiliations politiques on partage tous la même ambition pour le Québec. On lui donne l'occasion de mettre à profit, et de concrétiser, et, pour une fois, oui, M. le Président, de passer de la théorie à la pratique. Allez voir la commission de Mme Robillard et dites-lui qu'est-ce que vous feriez avec la gouverne scolaire précisément, quelles seront les différentes missions, par qui seraient-elles prises en charge, par quoi on remplacerait la taxe scolaire, s'il faut la remplacer, comment on gérerait cette question de l'impôt foncier. Ça ne se peut pas, avec le nombre d'années depuis lesquelles ils travaillent là-dessus, qu'ils n'aient pas des idées plus concrètes que juste dire : On veut abolir. Il y a certainement des travaux plus précis qui existent quelque part dans les tiroirs. Alors, encore une fois, faites-en bénéficier l'ensemble de la société, présentez-vous aux commissions, et c'est avec plaisir, M. le Président, qu'on accueillera les bonnes idées, parce que personne n'a le monopole des bonnes idées.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. M. le député de LaFontaine.

• (13 heures) •

M. Tanguay : Oui, merci beaucoup, M. le Président. Pour reprendre la balle au bond lancée par le premier ministre, l'importance de travailler en commission, l'importance, comme parlementaires, les 125 parlementaires, indépendamment de l'affiliation politique, de participer aux débats concernant les finances publiques et l'importance pour les parlementaires également — M. le Président, j'aimerais revenir là-dessus — de détenir toute l'information pertinente pour que nos travaux en commission parlementaire, auxquels évidemment, on vient de le souligner, le premier ministre invite de façon plus spécifique, là, le chef du deuxième groupe d'opposition... l'importance, donc, de détenir toute l'information nécessaire et utile pour notre travail de parlementaires...

Il y a eu, au lendemain de l'élection, le 7 avril dernier... le gouvernement a demandé au Vérificateur général du Québec de faire le point, de donner l'heure juste au gouvernement quant aux défis qui étaient devant nous et qui sont devant nous. Et il s'agissait donc d'avoir une vision complète, non seulement au niveau de la colonne des revenus, mais également au niveau de la colonne des dépenses, d'où s'en allait le Québec. Il avait, pour ce faire, loisir, et c'est ce qu'il a fait, de revenir sur l'administration précédente, et force lui a été de constater que toute l'information n'avait pas été disponible à l'époque, ou l'information disponible, le peu d'information disponible, ne donnait pas une image juste et ne permettait pas de savoir où nous allions.

Il y a évidemment, M. le Président, l'importance de souligner — et ça, ça figure à la page A.28 du plan budgétaire — de souligner, lorsque l'on parle de la croissance des dépenses de l'État... C'est un des éléments sur lequel j'aimerais que l'on revienne. Et il y a là un tableau de 2010 à 2019 pour les gens qui nous écoutent à la maison, et j'aimerais que l'on puisse peut-être transposer cette gestion dans nos finances personnelles, voir si ça a de l'allure ou pas. 2010, la croissance des dépenses était de 3,6 %; 2011, 3,2 %; 2012, 2,5 %. Et là, à la veille des élections, le Québec, pour 2013, avait une croissance des dépenses du plus du double : 5,4 %, M. le Président. Cette information, nous l'avons, encore une fois, en page A.28 du plan budgétaire. Force nous a été de constater, il y a eu là une hausse, plus du double de la croissance des dépenses de l'État.

Le Vérificateur général du Québec a remis son rapport début juin, a remis son rapport avant le dépôt du budget, et il venait statuer sur l'information qui avait été rendue disponible par le gouvernement du Parti québécois de l'époque, tant au niveau du point économique de novembre 2013 que du budget juste avant l'élection, M. le Président, un budget où nous avions les revenus, mais on n'avait pas les dépenses. Les dépenses, on l'a su, je viens d'en faire état, on sautait le plafond à 5,4 %, il s'agissait de la croissance des dépenses consolidées excluant le service de la dette.

J'aimerais maintenant, M. le Président, permettre au premier ministre de commenter sur l'importance évidemment d'avoir tous les chiffres et cet exercice financier qui... enfin, après plus de 15 mois, nous avons un budget avec les revenus et les dépenses, et j'aimerais l'entendre, M. le Président, entendre le premier ministre sur la démarche dans laquelle il nous invite et la démarche quant aux faits et à l'importance de reprendre le contrôle des finances publiques.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le député. M. le premier ministre, en 1 min 15 s.

M. Couillard : Ah! Il reste peu de temps. Mais je voudrais d'abord féliciter notre collègue pour la qualité de son intervention. Et également je ferais remarquer à notre collègue le chef de l'opposition, à plusieurs reprises il dit qu'il veut dégonfler ce qu'ont dit MM. Godbout et Montmarquette et ce qu'a dit le Vérificateur général. J'attends toujours. oÇa, ça doit être comme dans le temps... souvenez-vous, dans le temps du maire Drapeau, la réponse au juge Malouf. Ceux qui ont mon âge s'en souviennent : on l'attend encore.

Une voix : Même les plus jeunes.

M. Couillard : Même... Alors, la réponse au rapport du Vérificateur général et au rapport Godbout-Montmarquette, je pense qu'on a l'été devant nous pour la préparer, mais je n'ai encore entendu, M. le Président, aucun argument sérieux qui nie les chiffres qui sont devant nous en termes de dépassements de dépenses et de problèmes budgétaires.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. Alors, avec quelques secondes à faire, je pense qu'on peut passer au prochain bloc de l'opposition officielle. Alors, M. le chef de l'opposition officielle, vous disposez de 17 minutes.

M. Bédard : Très rapidement, M. le Président. La réponse, il l'aura... J'invite le premier ministre, et le député de... — quel est le comté? — ...

Une voix : LaFontaine.

M. Bédard : ...LaFontaine, à prendre son plan budgétaire à la page A.16, et il verra qu'on l'a bien, oui... Non, effectivement, c'est quand même important, puis c'est un document opaque, mais il y a quand même des informations pertinentes sur le contrôle des dépenses. Et, ce qu'on nous dit, cette année, pourquoi on a manqué la cible, A.16, et c'est écrit en toutes lettres, je l'ai dit, je l'ai dit à l'automne, et on nous dit la même chose avec le nouveau gouvernement, l'augmentation de... Donc : «En 2013‑2014, les dépenses de programmes sont supérieures de 693 millions de dollars à l'objectif en raison d'une augmentation de l'aide financière accordée à la communauté de Lac-Mégantic — peut-être nous aurions dû ne pas le faire ou nous aurions dû prévoir ce qui s'est passé l'été passé — et des coûts additionnels des régimes de retraite de 523 millions...» Eh bien! Eh bien!

Une voix : Ça, c'est la révision actuarielle...

M. Bédard : Révision actuarielle. Peut-être que je n'aurais pas dû tenir compte de la révision actuarielle, c'est vrai, j'aurais dû la tasser. Et, cette révision, savez-vous pourquoi on a supporté autant? Parce que le gouvernement avait signé une mauvaise entente à l'époque et qu'on va revenir et maintenant dont il va subir... s'il y a une autre révision actuarielle, il va en subir les conséquences. Pour des petits gains, on a sacrifié... c'est nous qui prenons la facture, ce qui n'aurait pas dû être le cas. Je lui dis ça en passant mais en toute transparence, et ça, je l'ai dit à l'automne. Très fier...

Et, quand il parle du graphique, ce qui est drôle... vous regarderez le graphique qu'il a cité dans le plan budgétaire, évidemment on commence en 2010, on prend bien soin, 2011, 2010-2011... parce que, si on reculait seulement une année d'avant, la croissance des dépenses serait de 7,3 % — et là je l'ai de mémoire — l'année d'avant, 6,8 %, et la moyenne était autour de 5 % dans les années libérales, imaginez-vous! Ma pire année est une des meilleures années libérales parce qu'est arrivé Lac-Mégantic et parce qu'est arrivée la révision des régimes de retraite, imaginez-vous! Ça fait que, oui, effectivement... Puis le 1,2 %, ça, il ne trouvera ça nulle part dans les années libérales, de l'histoire des... de l'histoire des dépenses du gouvernement du Québec, il ne le trouvera jamais. Alors, voici la réponse. S'il l'attendait, il n'aura pas besoin d'attendre une suite du rapport Malouf, il l'a maintenant.Alors, voilà.

Et moi, j'aime bien, moi, surtout quand on fait un critère de réalité où on a un contrôle des dépenses, mais évidemment, le contrôle libéral, pour être sûr qu'on ait un peu d'allure, M. le Président, on va dans l'avenir. Vous regarderez le graphique, on parle jusqu'à 2018‑2019. M. le Président, vous étiez où, en 2018‑2019, vous? Mais ça aurait été bien, plutôt, de reculer dans le passé, de dire ce qui s'est passé pour de vrai. Et, dans les faits, c'est qu'ils ne les ont pas contrôlées, et il y avait une moyenne d'augmentation de 5 %. J'ai été le premier à arriver en bas de la cible... nous avons été, parce que ça a été un travail collectif. Alors, j'en suis particulièrement fier, M. le Président.

Mais, ceci dit, moi, ce que j'aimerais savoir du premier ministre... Il nous disait tantô1t : Ça prend une société plus juste. J'y crois aussi. Je pense que la richesse, au Québec, doit être répartie. Je pense que le premier ministre avait proposé, à l'époque où il était dans l'opposition, que nous rehaussions les seuils des groupes communautaires parce que c'était nécessaire, parce que, depuis 10 ans, ils attendaient une augmentation qui n'était pas à la hauteur de leurs demandes, mais qui représentait un signe fort pour ces gens-là. Et nous avions déposé, à l'automne, souvenez-vous, La solidarité : une richesse pour le Québec. Dans ces initiatives, il y avait le rehaussement des groupes communautaires : 54 millions par année. C'est vrai que ça peut paraître beaucoup, mais je sais que, pour le premier ministre, c'est un détail. Un milliard, c'est un détail, donc, j'imagine, 54 millions, on est vraiment dans l'infiniment petit. Mais ce 54 millions, il valait cher pour ces groupes, il était important, parce que j'y croyais aussi, comme président du Conseil du trésor, qu'on devait aider les gens des groupes communautaires.

Le premier ministre a annoncé, dans son plan budgétaire, à la page... J'y réfère, là... je n'ai pas amené le gros cahier, mais j'imagine... plusieurs copies. À la page B.7, il annonce des initiatives de l'ordre de 816 millions pour les trois prochains exercices — des nouvelles initiatives, là, de 816 millions.

Une voix : ...

M. Bédard : C'est un choix. Effectivement, il est payé pour gouverner, il est payé pour choisir. Mais est-ce qu'il ne pense pas que, dans ce 816 millions, il aurait dû garder le 54 millions pour le rehaussement des groupes communautaires, que ç'aurait été un bon choix pour les Québécois de partout, là, dans toutes les régions du Québec, que ç'aurait été un choix plus judicieux que celui qu'il a fait?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le chef de l'opposition officielle. M. le premier ministre.

M. Couillard : Oui, M. le Président, merci. Fort intéressante intervention, également. Je veux juste compléter la lecture du paragraphe qu'on a commencé à lire, qui se termine par «régimes de retraite de 523 millions de dollars». Alors, je continue la lecture. C'est la page A.16 :«Pour les années subséquentes, en l'absence de mesures pour le retour à l'équilibre budgétaire, les dépassements récurrents aux dépenses par rapport aux objectifs auraient été : de 2 555 000 000 $ en 2014-2015; de 2 549 000 000 $ additionnels en 2015-2016.»

Je ne sais pas s'il se rend compte de l'ampleur du problème. Puis je vois qu'il semble douter de ces réalités, mais je n'entends aucun argument qui m'amène à considérer que les chiffres ne sont pas exacts. Mais le problème fondamental...

Une voix : ...

• (13 h 10) •

M. Couillard : Confirmés par les experts et par le Vérificateur général. Mais le problème fondamental — puis ça revient exactement à sa question sur les groupes communautaires, M. le Président — un engagement budgétaire du gouvernement sans cahier des crédits, ça n'existe pas, ça ne veut rien dire, ça n'a pas de signification réelle. Et c'est clair, parce que la tradition puis la pratique, puis la bonne pratique, c'est d'avoir un cahier des crédits avec un budget. Alors, on peut bien dire aux gens : Vous allez avoir ça, vous allez avoir ça, vous allez avoir ça; si on y croit vraiment, bien on publie des crédits. Alors, clairement — puis je comprends, là, je vois les chiffres — d'après moi, c'était impossible, avec ces chiffres-là, un, de les révéler à la population avant une élection puis, deuxièmement, de faire les opérations de réduction budgétaire. Il l'a dit lui-même, il a dit de façon élégante : On aurait fait des choix. Bien, avoir fait des choix, pour l'ampleur de l'impasse qui était devant nous, c'est des coupures majeures dans les services publics dont il parle avec tant d'éloquence.

Alors, ça fait un total, ces deux éléments de dépassements là, considérable, qui dépasse les 5 milliards de dollars. Alors, on pourra lui poser la question : Quels auraient été les choix qui auraient mené à l'effacement de l'impasse de plus de 5 milliards de dollars? Dans quels secteurs des services publics aurait-il coupé : santé, éducation, solidarité sociale, et incluant les groupes communautaires? Comme il n'y a pas de livre de crédits, on n'aura pas de réponse à ces questions-là, parce que, bien sûr, la technique, c'est de dire : Bien, voici comment tout va bien, puis on fait l'élection; puis après, en fait, ça n'allait pas si bien, puis voici ce qu'il faut faire maintenant. Alors, je pense que les citoyens n'ont pas été dupes de cette question-là.

Maintenant, je voudrais juste rappeler que, pour ce qui est des groupes communautaires, entre les années 2003 et 2012, le financement a augmenté de façon majeure, hein? On est passés de 302 millions à près de 500 millions, et des augmentations à chaque année. Et je me souviens très bien qu'à l'époque on était fort heureux de ces augmentations. Alors, effectivement, on est dans une situation budgétaire excessivement difficile. Mais je reviens à ma question : Comment peut-il contredire les chiffres d'impasse budgétaire qui sont là? Je lui ai même donné grâce, je lui ai reconnu que, pour la première année de son mandat, il avait effectivement contrôlé les dépenses publiques. C'est après ça que ça s'est gâté. Il y a eu une échappée totale des dépenses parce que, je crois qu'on l'a constaté également dans la société, le gouvernement a choisi alors d'autres priorités eot l'approche d'une élection. Je voudrais quand même rappeler que ce n'est pas nous qui avons déclenché l'élection. De sorte que ces chiffres-là étaient connus, ils auraient été révélés, il y aurait eu des coupes massives dans les services publics. Mais c'était préférable peut-être de ne pas en parler. Mais il ne peut pas dire maintenant au gouvernement : Où est telle somme, telle somme, telle somme à laquelle on s'était engagés quand on n'a pas été capables de l'inscrire dans un livre des crédits? Ça n'existe pas, ça ne se peut pas. Ça ne peut pas fonctionner comme ça.

Alors, on maintient l'enveloppe des groupes communautaires, M. le Président, puis on espère faire mieux au cours des prochaines années. Il y a également, du côté des groupes — je sais qu'elles le font, qu'ils le font également — toujours un effort de s'assurer qu'il n'y ait pas de duplication, que les groupes bien sûr sont astreints à des résultats également, qu'il y a une reddition de comptes pour l'utilisation des fonds publics. Mais là-dessus je n'ai pas de crainte parce que je sais que le mouvement communautaire est bien au fait de ces questions-là.

Mais je reviens encore à cette question fondamentale, puis je l'avertis parce qu'on en aura peut-être pour deux, trois ans avec les mêmes questions et réponses. À chaque fois qu'on va me dire : Où est passé cette mesure qu'on avait dans notre budget de février 2014?, ma réponse, ça va être : Où est le livre des crédits? Où trouve-t-on cette dépense?, compte tenu de l'impasse budgétaire qui était devant nous et qu'on voit maintenant qui est considérable.

Alors, moi, je fais l'équilibre. Je dis aux collègues qu'effectivement, la première année, il y a eu un effort sérieux de réduction des dépenses, mais je ne pense plus que c'était la priorité du gouvernement précédent dans les mois qui ont précédé l'élection.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. M. le chef de l'opposition.

M. Bédard : Bon, je ne veux pas tomber dans la rhétorique, mais, si ne pas respecter le contrôle des dépenses, c'est ne pas avoir prévu le Lac-Mégantic et la révision des régimes de retraite, bien, écoutez... Bien, c'est exactement ça. Il dit qu'il y a eu des dépenses incontrôlées. Or, le dépassement était expliqué par deux items en particulier qui sont bien indiqués. Et, à chaque année, le Conseil du trésor est face à des demandes et il agit en conséquence.

Ce que j'invite le premier ministre... Il m'invite à sa commission. Alors, moi, je lui fais une autre invitation. Qu'il aille au Conseil du trésor, peut-être deux séances au Conseil du trésor, où, à chaque semaine, de façon hebdomadaire, il y a une révision des programmes, à chaque semaine. Peut-être que les fonctionnaires ne sont pas assez bons, peut-être que Mme Robillard va être meilleure qu'eux, mais, à chaque semaine, les gens qui sont là révisent les programmes, qu'ils soient sur un an, deux ans ou trois ans, donnent des indications aux ministères pour voir... quand il y a des programmes similaires, ils demandent des analyses, de voir : Est-ce qu'on doit le faire?

Tout ça pour lui dire que sa commission, elle existe déjà, et elle est faite sur base de gens qui ont une compétence et qui sont... et autour d'eux gravitent des élus de l'Assemblée, des gens qui ont une responsabilité envers la population et qui doivent déterminer, à partir du contexte budgétaire, les choix qui doivent se faire. Et je pense qu'il aurait eu avantage... Et il peut encore le faire. Parce que la chance qu'il va voir, c'est que ces gens-là ont un historique, un historique de 10, de 20, des fois de 30 ans, et ils peuvent savoir si le programme est nécessaire, pourquoi il est nécessaire, puis, si on le baisse de 10 %, de 20 %, de 30 %, voici les conséquences. Et on éviterait bien des pertes de temps. Donc, la commission, on va la regarder, mais ce que ça fait, c'est que ça retarde. Ça retarde.

Et, ce que je comprends, le gouvernement... le premier ministre nous dit, lui, ce qu'il souhaite, c'est des coupes massives dans les services publics. C'est ce qu'il a dit tantôt : C'est le choix que nous avons. Moi, je pense qu'il a d'autres choix. Il a le choix de la rigueur budgétaire, mais il a aussi le choix d'investir dans la création d'emplois puis dans la croissance économique, et il doit maintenir cet équilibre.

Un bon exemple, je pense, qu'il a fait une erreur, je pense sincèrement, à moins qu'il me démontre le contraire, il a décidé de couper le crédit d'impôt au niveau des affaires électroniques, multimédia mais affaires électroniques particulièrement, de 20 %. Nous avions, à l'époque, reconduit ces avantages, pas parce qu'on les aimait particulièrement, parce qu'on était contents ou, je ne sais pas, on trouvait ça le fun de donner des crédits d'impôt; c'est parce qu'il y avait une étude sérieuse qui avait été faite, qui concluait que ces crédits d'impôt maintenaient la position concurrentielle du Québec vis-à-vis ses concurrents, entre autres l'Ontario, et nous permettaient de maintenir des emplois, d'en développer, mais d'en maintenir dans le commerce électronique.

J'aimerais lui poser la question suivante. Il a, disons, décidé de couper de 20 %. Alors, j'imagine qu'il y a des études ou il y a des prévisionnistes, au ministère des Finances, qui ont conclu que ce crédit d'impôt n'aurait pas d'impact sur la création d'emplois et le maintien de l'emploi. Est-ce qu'il peut nous confirmer que ce 20 % n'aura aucun impact sur le maintien ou le développement de l'emploi dans le domaine du commerce électronique?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le chef de l'opposition. M. le premier ministre.

M. Couillard : Bien, ce que je peux lui confirmer, c'est que maintenir l'impasse budgétaire au niveau où elle était aurait eu un impact direct sur la cote de crédit du Québec; ça, je peux lui confirmer ça. Puis, en passant, effectivement, c'est les équipes du Conseil du trésor qui ont fait le travail qui a permis de ramener le déficit à plus de 5 milliards, 5,8 milliards, à 2,3 milliards. C'est les chiffres réels. S'il doute des chiffres, bien il faut qu'il les contredise. Parce qu'il revient avec Mégantic — puis, bien sûr, on continue à soutenir Mégantic — et puis les régimes de retraite, mais il oublie la fin du paragraphe qui fait état des deux années subséquentes.

Mais, ceci étant dit, il y a quelque chose qui est, comment dire, là... — je ne veux pas utiliser un terme médical pour rien, là — symptomatique. Si on dit que, parce qu'on réduit... qu'on maintient à 80 % un crédit d'impôt, ça débalance l'économie du Québec, on a tout un problème au Québec. Si c'est rendu de ça que ça dépend, la croissance économique puis la création d'emplois, on a un fameux problème.

Alors, il faut réviser complètement le régime d'aide aux entreprises. Nous, contrairement à d'autres, on ne pense pas qu'il faut tourner le dos complètement aux mesures fiscales, M. le Président, de crédits d'impôt, mais il faut les regarder un par un. Alors, la même chose pour le cinéma, pour ce milieu, qui, en passant, est construit de grosses entreprises très bien pourvues, là, si, pour le milieu, on est capables de démontrer le bénéfice économique maintenant, en 2014, pas au moment où le crédit a été créé, qu'on le fasse. Classiquement, en pratique économique, des mesures de crédits d'impôt sont là pour la transition, pour mettre en place une industrie, et normalement elles doivent avoir un terme au moment où cette industrie est en place.

Et beaucoup soutiennent — puis c'est peut-être un point sur lequel on est en désaccord — que, plutôt que d'y aller avec une gamme de crédits d'impôt qui devient de plus en plus incompréhensible pour les gens qui ont à remplir les papiers puis les formulaires pour y avoir accès, qui sont nécessairement ciblés pour des problèmes ponctuels qui souvent sont des réponses à des enjeux d'actualité, tellement que la bible des crédits d'impôt actuellement est à peu près épaisse de même, M. le Président, on n'y retrouve plus rien, beaucoup disent, les entrepreneurs me l'ont dit : Pourriez-vous nous laisser tranquilles avec toute cette paperasse-là? Prenez vos crédits d'impôt, transformez-les en allègement fiscal généralisé qui s'applique à toutes les entreprises, en maintenant peut-être certaines mesures lorsqu'elles auront démontré leur utilité, et là l'économie du Québec va pouvoir repartir.

Alors, il y a quand même quelque chose de paradoxal dans le fait qu'on est un endroit, au Canada, qui consacre énormément d'argent au soutien aux entreprises et, en même temps, un des endroits où il y a le moins de naissances d'entreprises par année, où les entreprises durent le moins longtemps et où le nombre d'entreprises qui ont du succès est également réduit. Alors, si continuellement ajouter des dépenses fiscales et des subventions aux entreprises était la solution, on l'aurait constaté. Ça ne veut pas dire qu'il faut tout balayer. Il faut y aller de façon sérieuse et spécifique. C'est pour ça que la commission va se pencher sur chacun de ces crédits d'impôt là. Puis, comme le ministre des Finances l'a dit aux gens du milieu du cinéma de Montréal, bien, venez présenter votre position, vos arguments, et on est prêts à évaluer ça puis apporter des correctifs. Mais arrêtons de penser que, parce qu'on diminue un crédit d'impôt, on met en danger l'économie du Québec. Ça fait partie du problème, ça fait partie de notre problème québécois que tout ce qu'on fait, toujours, c'est empiler par-dessus ce qu'on a déjà fait, la même chose.

Puis ça me rappelle peut-être une citation d'Einstein, quand même quelqu'un d'intéressant. Il dit : «On ne peut pas créer un problème en utilisant la méthode par laquelle le problème a été créé.» Alors, on a un problème de complexité administrative puis de mauvais ciblage de nos initiatives économiques, puis ce que nous dit, c'est que, pour régler le problème, il faut en faire plus. Alors, permettez-moi d'en douter. Et puis je ne suis pas le seul à en douter. Là-dessus, notre collègue de la deuxième opposition est d'accord.

Une voix : Ça a été essayé.

M. Couillard : Ça a été essayé pendant plusieurs années. Si ça marchait, on le saurait, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. 10 secondes, M. le chef de l'opposition?

M. Bédard : ...non seulement ça a marché, ça a fait du Québec une plaque tournante dans ce domaine. Mais ce que je vois, c'est que le premier ministre n'en a pas, d'étude. Or, il coupe 20 %, de façon paramétrique. Pourquoi pas 30 % si ça ne sert à rien? Pourquoi pas 40 %? Pourquoi pas 50 % si ça ne doit servir à rien?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : On va maintenant...

M. Bédard : Pourquoi pas 10 %?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : ...aborder le dernier bloc...

M. Bédard : On agit à l'aveuglette, M. le Président, et c'est un des problèmes.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. M. le chef de l'opposition, s'il vous plaît! On va passer maintenant au dernier bloc. Et je cède la parole au député de Chomedey.

• (13 h 20) •

M. Ouellette : Merci, M. le Président. Pour ce dernier bloc, M. le Président, j'aimerais beaucoup que le premier ministre nous parle de la question des aînés. Je sais qu'on aura l'opportunité, avec la ministre de la Famille et des Aînés, de le traiter, mais je voudrais avoir, dans la bouche du premier ministre... On sait que le vieillissement de la population... Peut-être que je parle pour mon collègue de Dubuc et moi-même, là, qu'on se considère dans cette catégorie-là, parce que, rendus à une certaine catégorie, calculé qu'on est des aînés, même si, à 50 ans, tu peux avoir ta carte de l'âge d'or... Puis ça va avec la couleur des cheveux.

Les aînés, c'est sûr, M. le Président, ont continué à bâtir le Québec puis c'est pour cette raison-là que... Puis le premier ministre en a parlé tantôt de la main-d'oeuvre... la proportion de main-d'oeuvre va aller en diminuant au cours des prochaines années. Puis les aînés veulent vivre en dignité puis en sécurité, puis vivre dans leur maison le plus longtemps possible. Puis ils veulent continuer de contribuer à la société, M. le Président. Ça fait que c'est pour ça qu'on a eu le ministère des Aînés. C'est pour ça... Puis je pense à tous les efforts qui ont été faits par ma collègue la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, au cours des dernières années, pour lutter contre la maltraitance au niveau des aînés.

En campagne électorale, M. le premier ministre, vous aviez pris des engagements pour mieux répondre aux besoins de nos aînés. Puis je sais qu'un des engagements s'est traduit par une mesure dans le budget... vous est apparu parce que vous étiez à l'écoute des gens de Chomedey, en passant à Chomedey. Et, pour les quelques minutes qu'il nous reste, pourriez-vous nous dire ce que le gouvernement entend prioriser pour améliorer... ou pour offrir des meilleures conditions à nos aînés et faire en sorte qu'ils restent les plus actifs possible?

M. Couillard : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre. Je m'excuse.

M. Couillard : Merci, M. le Président. Avant de terminer, je m'en voudrais de ne pas présenter la personne à ma droite, qui est Mme Johanne Whittom, la directrice de cabinet associée. Vous savez, on emprunte beaucoup dans les autres formations politiques, alors on a décidé d'emprunter de Québec solidaire également pour la direction commune de l'organisation. Donc, on a un directeur de cabinet puis une directrice associée de cabinet. Puis j'en suis très, très, très heureux.

M. le Président, merci au député de Chomedey. Et d'ailleurs il y a une des mesures dont je vais parler qui m'a été suggérée lors de la visite avec lui...

M. Ouellette : À la Place des aînés.

M. Couillard : ...à la Place des aînés, je m'en souviens très bien. C'est ce qu'on appelle la pratique plutôt que la théorie : parler aux aînés de leurs besoins.

Alors, d'abord, il faut s'assurer que les aînés puissent contribuer au marché du travail. Alors, pour les travailleurs d'expérience de 65 ans et plus, afin que ceux-ci ou celles-ci puissent demeurer plus longtemps sur le marché du travail, on ajoute à ce qui était déjà en place 1 000 $ additionnels, ce qui porte ceci, les crédits d'impôt, à 4 000 $, à compter du 1er janvier 2015. On sait qu'on a une population décroissante, donc il faut garder le monde sur le marché du travail et amener les gens à y rester plus longtemps, dont les aînés.

Alors, il y a un nouveau, également, crédit, celui dont on m'a parlé à la Place des aînés, pour les activités physiques. Souvenez-vous cette personne aînée qui a levé la main, elle m'a posé la question suivante : Comment ça se fait que les enfants qui font du sport — je me souviens très bien — ils ont droit... les parents ont droit à un crédit d'impôt pour acheter de l'équipement de hockey, des choses comme ça — qui est très coûteux, en passant, l'équipement de hockey, maintenant — et puis, nous autres, les aînés, si on fait des cours de gymnastique, de taï chi, du sport, on n'a pas d'encouragement? Alors, on a gardé ça en mémoire. Puis, lorsqu'on en a parlé avec d'autres aînés, ils trouvaient également que c'était une bonne idée. On pense qu'il y a à peu près 300 000 personnes qui vont participer à ça et on est très contents d'avoir posé ce geste-là.

Il y a une autre initiative également dans la vie courante des personnes aînées du Québec qu'est la Municipalité amie des aînés. C'est une initiative que notre collègue la députée, Mme Blais, a mise sur pied...

Une voix : Saint-Henri—Sainte-Anne.

M. Couillard : Saint-Henri—Sainte-Anne. Le deuxième «Saint», je n'étais pas sûr, alors c'est pour ça que...

Des voix : Ha, ha, ha!

Une voix : ...

M. Couillard : Il est temps que ça finisse. Alors, effectivement, c'est une très belle initiative parce qu'on est connus comme un leader mondial dans cette démarche, la Municipalité amie des aînés. On veut y faire adhérer 860 autres municipalités d'ici 2017. Donc, il y aura un financement supplémentaire de 2 millions de dollars, passant donc d'un investissement annuel de 3 millions à 5 millions de dollars, M. le Président. Donc, il y aura des sommes récurrentes, à partir de l'année suivante, de 6 millions de dollars par an. Et ça, ça permet des petits projets d'infrastructures dans les municipalités, dans les parcs, pour rendre les installations plus compatibles avec la réalité de la vie quotidienne des aînés. Alors, il y a d'autres initiatives qui vont suivre, mais le maintien en emploi, la qualité de vie, l'activité physique, ça me paraît des éléments importants.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. M. le député de Chomedey.

M. Ouellette : Je pense qu'il nous reste une minute ou deux. Je laisserais...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : ...il reste trois, quatre minutes, là.

M. Ouellette : Hein, dans trois, quatre minutes? Parce qu'on était...

M. Couillard : On va demander une prolongation.

M. Ouellette : Non. Je ne pense pas qu'on ait besoin de demander une prolongation, je pense que...

Une voix : ...

M. Ouellette : Oui, hein?

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Ouellette : Alors, malheureusement, ça ne sera pas pour cette année. Et je pense que, pour les aînés... On va avoir les crédits Jeunesse dans les études de nos crédits. Et je pense que c'était très important qu'on puisse ne pas juste rassurer nos aînés, mais leur donner toute l'importance qu'ils ont.

Je garderais les deux minutes de la fin puis je les donnerais au premier ministre parce que... les mots de remerciement pour la fin. Parce que je sais, M. le Président, quand vous allez reprendre la parole, il n'y a plus personne qui va pouvoir parler après vous pour voter les crédits. Et je pense qu'il n'est que de coutume de donner au premier ministre le mot de la fin, le mot de conclusion. Si vous aviez une conclusion à faire sur les crédits, M. le premier ministre...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le député de Chomedey. En fait, il reste encore trois ou quatre minutes, là, avant d'arriver au moment fatidique de clore nos travaux. Alors, M. le premier ministre.

M. Couillard : «Fatidique», M. le Président, ou «attendu», je ne sais pas. Alors, je vais peut-être faire de brèves remarques finales, parce que je crois qu'on a bien travaillé, ce matin, ensemble. Je voudrais d'abord, encore une fois, remercier tous les collègues pour la qualité des échanges autour de la table... parfois, ont été vigoureux mais ont été intéressants, je crois, de part et d'autre.

Et remercier, bien sûr, les membres du cabinet. Les membres de l'excellente fonction publique du Québec qui sont avec nous aujourd'hui. Je vous remercie de votre patience. Je sais que vous étiez très heureux de passer toute votre matinée ici, que vos tâches se déroulaient automatiquement pendant que vous étiez ici. Alors, je vous remercie de nous avoir assistés dans la présentation et la préparation de ces crédits.

Et je pense qu'on a réussi quand même à avoir des échanges qui montrent qu'on a tous le même objectif à coeur, qui est l'intérêt commun des Québécois, et c'est ce qui compte, je crois, pour la population qui nous écoute.

Alors, j'ai été heureux... On a très peu parlé des crédits du ministère du Conseil exécutif. Je suis un peu déçu, M. le Président. Je pensais que, maintenant que j'ai changé de ministère, on me permettrait de m'exprimer sur les crédits dont je suis directement responsable. Mais ce sera peut-être pour l'an prochain, c'est ce que je comprends. J'ai l'impression que, l'an prochain, on pourra s'y attarder.

Mais, ceci dit, M. le Président, je vous félicite également pour la qualité de votre présidence. Et je remercie tout le monde, et je pense qu'on se voit demain pour les crédits Jeunesse, avec d'autres porte-parole.

Adoption des crédits des programmes 1 et 2

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre.

Alors, compte tenu de l'heure et compte tenu des points que nous avons abordés, on va maintenant procéder au vote sur les crédits budgétaires du portefeuille du Conseil exécutif, les programmes 1 et 2.

Le programme 1, Cabinet du lieutenant-gouverneur, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Des voix : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Sur division. Le programme 2, Service de soutien auprès du premier ministre et du Conseil exécutif, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Sur division. Merci.

Je vais maintenant procéder au dépôt des réponses à des demandes de renseignements supplémentaires des oppositions. On les dépose. Merci.

En terminant, à mon tour de remercier tout le monde, les collègues qui ont participé à cet exercice. J'ai apprécié le ton respectueux, malgré tout. Par moment, on a senti des divergences de points de vue, mais ça s'est fait dans le respect, ce qui est toujours apprécié de la part des personnes que nous servons. Alors, je vous remercie infiniment.

Sur ce, la commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 29)

(Reprise à 15 h 2)

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, on est prêts? Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. Et je demanderais à tous et toutes de s'assurer que la sonnerie de téléphone et autres appareils électroniques est en mode silencieux, à défaut de les fermer complètement.

Réforme des institutions démocratiques

Alors, la Commission des institutions est réunie afin de procéder à l'étude du volet Réforme des institutions démocratiques des crédits budgétaires du portefeuille Conseil exécutif pour l'exercice financier 2014‑2015.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Boucher (Ungava) sera remplacé par Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré); M. Fortin (Sherbrooke), par M. Birnbaum (D'Arcy-McGee); M. Merlini (La Prairie), par M. Simard (Dubuc); M. Ouellette (Chomedey), par M. St-Denis (Argenteuil); Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve), par Mme Maltais (Taschereau); et M. Lemay (Masson), par M. Charette (Deux-Montagnes).

Discussion générale

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. Alors, je comprends des discussions entre les différents groupes que nous allons procéder à une discussion d'ordre général par blocs d'environ 20 minutes, incluant les questions et les réponses, et que la mise aux voix de ces crédits ne serait effectuée que le 2 juillet prochain. J'ai la bonne compréhension?

Alors, nous allons entreprendre immédiatement l'étude des crédits, et je suis prêt à céder la parole à la leader de l'opposition officielle pour un premier bloc de 18 minutes.

Mme Maltais : Merci, M. le Président. Je sais qu'il est d'usage de ne pas faire de remarques préliminaires... Je peux avoir un micro? Oui, merci. Je sais qu'on fait peu de remarques préliminaires, surtout quand on a si peu de temps pour étudier des crédits comme cette section-ci, mais je veux quand même vous saluer, M. le Président, saluer les gens de l'Assemblée nationale qui vous accompagnent, saluer les collègues qui sont là, du côté ministériel et du côté de la deuxième opposition, bonjour, et les gens qui nous accompagnent, qui ont fait sûrement... dans le cas des oppositions, qui ont fait des travaux sur les crédits. Et je veux saluer le ministre, qui est aussi leader, avec lequel j'ai souvent l'occasion d'échanger, mais cette fois-ci dans un contexte tout à fait différent, c'est-à-dire lui à titre de ministre. Puis je salue aussi l'équipe qui vous accompagne.

Ce sont des crédits sur nos grandes institutions. Les institutions démocratiques, c'est ce qui est bien, c'est qu'on essaie de voir quel est l'état de nos institutions et comment on peut les améliorer. Évidemment, je ne passerai pas beaucoup de temps à vous poser des questions sur les chiffres, puisque les crédits, en général... les dépenses sont celles qui ont été faites pour la plupart sous notre gouvernement, donc je les connais assez bien. Je vais laisser à mes collègues, s'ils en ont le goût, le goût de poser des questions là-dessus. Ça, c'est amusant, parce que c'est le contraire d'il y a un an et demi, où c'était ce qui s'était passé.

Maintenant, je veux parler d'un sujet important, je pense, pour les parlementaires, il a été discuté souvent ici, c'est la modernisation de la loi sur le lobbyisme. La loi date de 2002, et, dès 2007, c'est-à-dire sous le gouvernement préprécédent... c'est sous un gouvernement libéral, en 2007, que le ministre de la Justice soulignait la nécessité d'apporter des modifications à la loi.

Et il y a eu beaucoup de travaux qui se sont succédé ensuite. Il y a eu un mémoire du Commissaire au lobbyisme qui entérinait cela, qu'il fallait modifier la loi. Il y a eu des consultations particulières dans le cadre de la révision quinquennale de la loi en 2008. 2012, le Commissaire au lobbyisme a transmis un rapport à l'Assemblée nationale avec 105 recommandations, et il y a eu des travaux ensuite. Il y a eu une commission, je pense, c'est la Commission des institutions qui s'est réunie autour de cette loi-là et qui a transmis son rapport, alors rapport transmis en décembre 2013.

Alors, voilà beaucoup d'années, six ans, six ans qui ont été passés à essayer de revoir et de moderniser la loi sur le lobbyisme. J'aimerais ça en jaser avec le ministre. Est-ce qu'il a ça dans ses cartons? Qu'est-ce qu'on peut faire pour améliorer cette institution importante?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : ...Mme la leader de l'opposition. M. le ministre.

M. Fournier : Bonjour, M. le Président. Alors, mes salutations, à mon tour, à tous les membres de la commission, les membres députés, les membres qui font aussi la recherche et qui accompagnent nos collègues. Permettez-moi de vous présenter, M. le Président, ceux qui m'accompagnent à la table des témoins : d'abord, Nicole Dussault et Jean-Philippe Marois, qui sont du secrétariat, et les trois personnes de mon cabinet : Daria Hobeika, Patrick-Emmanuel Parent et Guy-Anne Massicotte, qui est avec nous. Et je les remercie à l'avance de passer du temps avec nous.

Peut-être, pour souligner à ceux qui nous regardent à la télévision, qui peuvent être surpris que nous retardions jusqu'au 2 juillet l'adoption des crédits, peut-être qu'il est utile de signaler que nous allons faire deux heures aujourd'hui sur la réforme des institutions. Donc, tous ceux qui ont commencé à nous écouter peuvent rester à l'antenne. Et on aura un autre deux heures du même secrétariat sur l'accès à l'information, qui est donc le Secrétariat de la réforme des institutions et de l'accès à l'information, divisé en deux tranches de deux heures, la prochaine étant le 2 juillet, et c'est pourquoi le vote se fera à ce moment-là sur les crédits dudit secrétariat.

Maintenant, bonne question sur le commissaire au lobbying. Notre collègue a fait le retour : 2002, la création, les étapes qui ont suivi. Moi, j'aimerais bien donner, comme date de départ, 2012, puis je vais expliquer pourquoi je donne 2012 comme date de départ de ce que je pourrais appeler le processus rigoureux, sérieux, bien enclenché de révision de la loi. Je le dis parce qu'en 2012, je m'en souviens très bien, à cette époque-là, donc dans cette vie antérieure, j'étais ministre de la Justice, et il revenait au ministre de la Justice d'assumer la responsabilité du suivi de la loi sur le lobbying et, bon, jusqu'à un certain point avec une distance évidemment normale, du commissaire au lobbying.

Et il y a eu des échanges, à l'époque, donc, et il y a eu quelques rencontres,  et, à un moment donné, on est arrivés à l'étape où c'est : Comment ça se libelle, ces demandes-là? Quels sont les libellés? Quel est le projet de loi en question? Et, à l'époque — qui est un peu différent de la position que j'ai maintenant — il n'y avait pas de fonctionnaire ou de machine attitrée à la réflexion, qui pouvait aussi avoir une opinion sur un texte de loi concernant la modernisation de la loi sur le lobbying. Mais j'avais donc demandé au commissaire : Bien, c'est-u possible de nous fournir, pas juste un énoncé sous forme d'argumentaire, mais un projet de loi? Ce qui a été fait. Et, en juin 2012, presque jour pour jour — c'était, je crois, probablement plus au début juin, peut-être à la fin mai — j'ai écrit au président de l'Assemblée pour que l'Assemblée se saisisse de cette proposition du commissaire.

On en parlait quand on était dans la réforme des institutions, on a un membre de l'Exécutif dans une loi qui concerne une autorité relevant de l'Assemblée nationale. Donc, exécutif, législatif, il y a toujours une espèce de positionnement délicat à prendre là-dedans. Et il me semblait utile, à ce moment-là, de demander, dans le fond, au législatif de se saisir de ce que le commissaire voulait proposer. On connaît nos règles, on le sait que ça prenait quelqu'un de l'Exécutif qui dépose ce type de projet de loi là, il y a des mesures budgétaires, on connaît tout ça, mais il me semblait normal qu'il y ait une réflexion, ce qu'il y a eu parce que la Commission des institutions s'est saisie de cela, en a discuté.

• (15 h 10) •

Bon, on avance dans le temps un peu rapidement et on revient à il y a peut-être deux semaines ou trois semaines, où j'ai rencontré le commissaire pour reparler du sujet et voir comment on faisait avancer les choses. Entre les deux, dois-je dire, à la décharge de ceux qui m'accompagnent et de ceux qui m'ont précédé dans mes fonctions, il y a eu un peu d'échanges entre le secrétariat et le commissaire sur des... je dirais, des discussions concernant certains libellés — appelons ça comme ça, là. Avant d'arriver à une proposition finale, il faut qu'on se comprenne les uns et les autres sur le sens des mots, puis sur la finalité visée, puis est-ce qu'on est d'accord à aller dans ce sens-là ou pas.

Alors, ça, ce travail-là, s'est un peu fait, là, au cours des travaux. Je ne voudrais pas qualifier la proportion qui en est faite, mais, en toute honnêteté, il faut dire qu'il y a eu des échanges entre le secrétariat et le commissaire. Je peux témoigner du fait qu'il n'y a pas, en ce moment, un accord entre les deux. Ce n'est pas nécessairement que je vise à ce qu'il y ait un accord entre les deux. Je cherche évidemment à ce que tout le monde comprenne le même sens qu'on donne aux mots, mais inévitablement, dans mon esprit, il y aura des propositions qui seront faites à l'Assemblée, évidemment sous forme de projet de loi, concernant cette loi-là.

Maintenant, à moins que vous me posiez une autre question qui va me permettre de me relancer, je voudrais juste conclure, puis peut-être que vous voudriez l'entendre. À mon avis, il y a un lien à faire entre cette modernisation de la loi sur le lobbyisme et le mandat qui m'a été confié par le premier ministre à l'égard de tout ce qui s'appelle le gouvernement ouvert, la transparence, la livraison proactive d'information concernant... — et là je vais dire «notamment», parce que ça, ça le vise assez précisément — notamment sur les agendas. Là, ce qu'on va retenir, qu'il y a plusieurs dispositions dans la loi sur le lobbying, mais il y en a une majeure, très grande, qui est l'enregistrement, qui est le dévoilement public des influences — mis entre guillemets — au sens de la loi. Parce que, des fois, le mot «influences» a un sens négatif, mais la loi sur le lobbying rappelle qu'il y a des influences illégitimes. Alors, je fais ce détour-là. Mais donc le dévoilement proactif des agendas devient un élément en relation, quand même, avec certaines des dispositions de la loi sur le lobbying. Alors, voilà une réponse longue à une question.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le ministre. Mme la leader de l'opposition.

Mme Maltais : Je suis convaincue, M. le Président, que je n'ai pas besoin souvent de relancer le ministre pour le voir élaborer sur un sujet. On a assez souvent échangé autour de tables, ici, de tables de parlementaires pour savoir que, l'un et l'autre, on est tout à fait capables de se relancer nous-mêmes.

Mais c'est intéressant, ce qui vient d'être abordé parce que... Je suis contente de voir, d'abord, qu'il y a des travaux qui se continuent. Je vois ça dans l'ensemble de la rénovation des grandes institutions qu'on a faite. Je vous rappelle que, quand on est arrivés au pouvoir, il y a 18 mois, on a fait la loi n° 1 et qui a été adoptée à l'unanimité, la loi sur l'anticorruption. On a changé la loi sur le financement des partis politiques aussi, ce dont aujourd'hui on se félicite tous. Et vraiment, tu sais, il était vraiment temps de faire ça. Moi, je crois que ça fait partie... ça doit compléter les travaux qu'on a sur nos grandes institutions. Il n'y a pas d'échéancier, mais évidemment, je comprends, parce qu'il y a des discussions avec le commissaire. Mais on peut s'attendre à essayer de faire ça pendant ce mandat-ci?

M. Fournier : ...oui, certainement. Je m'excuse, j'interromps...

Mme Maltais : Oui, mais, écoutez, pendant ce mandat-ci... Puis, je dirais, aussi la question que je voulais poser, c'est... pendant ce mandat-ci... Et j'aimerais ça, après ça, aborder, là, les sujets qui sont touchés par... Est-ce qu'on va regarde, par exemple... on va simplifier ce que vous appelez l'agenda... le Registre des lobbyistes, qui est assez complexe? Est-ce que...

Je vais vous nommer des volets. J'aimerais ça que vous preniez des notes, que vous me disiez si... Il y a le pouvoir de poursuite qui a été questionné souvent, le registre, la simplification du registre, la révision des sanctions et des amendes et évidemment les délais de prescription de la loi pour permettre un plus grand nombre de poursuites. J'ai soulevé ici, dans mon passé d'opposition, quelques dossiers où on a vu que les délais de poursuite, les courts délais de prescription faisaient qu'on n'arrivait pas à poursuivre les contrevenants à la loi.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Est-ce que votre question est terminée, madame?

Mme Maltais : Oui.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le ministre.

M. Fournier : Merci. Bon, la façon dont la question est posée, je peux répondre : Très certainement durant le mandat. C'est la question qui a été posée. Je vais même apporter une précision. Si on m'avait demandé : Avant Noël?, j'aurais dit : Je ne pense pas, mais, par contre, dans le mandat, oui. Puis, bon, si je veux être plus précis, là, moi, je vois ça comme peut-être un horizon qui risque d'être le printemps prochain, si ça déborde, peut-être, mais ça reste dans cet horizon-là, là. Ce n'est pas la fin du mandat, loin de là.

Mais la raison pour laquelle je le dis, c'est que ça pourrait peut-être être même un peu plus vite si c'était juste ça, mais, pour moi, il y a réellement un lien à faire entre ça et les éléments de transparence, d'information proactive, de données ouvertes, ne serait-ce que sur la question du registre puisqu'on me demande : Est-ce qu'il y aurait des modifications à l'égard du registre? Bien, sans vous dire où on va chuter, il est évident que cette question-là est déjà abordée. Moi, j'ai rencontré le commissaire, j'ai rencontré l'association des... — je ne sais pas comment est-ce qu'on les appelle, là — ...

Une voix : ...

M. Fournier : ...l'association professionnelle des lobbyistes. Alors, il y a un peu tout le monde qui a des demandes, notamment sur les facilités accessoires au registre. Je peux aussi vous dire qu'à l'égard de la poursuite, honnêtement, il y a des... sur le droit de poursuite donné au commissaire ou laissé au DPCP, je vais vous dire qu'en ce moment je suis à 95 % au DPCP. Je ne suis pas en train de me dire qu'on doit multiplier les poursuivants, mais, bon, je ne ferme pas la porte à ce qu'il y ait des discussions sur le sujet.

La question des sanctions et autres sera analysée, mais le coeur, pour moi, de la réforme à faire est d'abord de s'assurer que tout le monde comprend la même affaire. En ce moment, dans cette loi-là, il y a un certain nombre d'interprétations qui, me semble-t-il, doivent être clarifiées. Alors, je vais ajouter une expression que je risque d'utiliser dans d'autres dossiers, notamment celui de la transparence, et je le dis pour ceux qui sont à mes côtés, qui l'ont déjà entendue : Il va devoir y avoir une période de pédagogie avant la période, je dirais, de législation. Prenons la loi sur le lobbying. Il y a bien des dispositions où... D'abord, dont l'étendue : Pourquoi telle association n'est pas là-dedans? Pourquoi l'autre est visée? Il faudrait qu'on puisse se comprendre.

Maintenant, je pense qu'on a besoin de se dire : S'il y a une loi sur le lobbying qui l'encadre, elle ne le rend pas illégal. C'est légal. C'est légitime. C'est légitime que les gens fassent des représentations. Et, en ce moment, vous verrez qu'il arrive que, dans nos rapports médiatiques — qui sont, dans le fond, le moyen de communiquer avec la population pour nous les élus comme pour tout le monde, là, qui ont des avis — souvent, on va lire des textes à l'effet que : Oh, quelqu'un s'est inscrit, c'est donc qu'il veut influencer! Mais c'est parce que : un, en démocratie, tout le monde cherche à influencer, ça fait partie de la démocratie; deux, la loi l'encadre et le permet. Donc, ce n'est pas négatif. Ce qui est négatif, c'est de ne pas s'inscrire. Mais pourquoi, même... Oui, je comprends que vous...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : C'est parce... En fait, merci, M. le ministre. Il reste trois minutes au bloc.

Mme Maltais : Trois minutes, ça peut parfois être utile. On se bat pour des minutes, parfois, ici, autour de la table, M. le Président. Est-ce que le ministre est... semble-t-il, s'il veut moderniser la loi, il considère qu'elle est valable, qu'elle est solide, qu'elle est, le moins qu'on puisse dire, constitutionnelle? C'est une vraie question.

M. Fournier : Si je juge qu'elle est constitutionnelle?

Mme Maltais : Oui.

M. Fournier : Devrais-je juger qu'elle ne l'est pas?

Mme Maltais : C'est parce que vous avez un collègue, M. le ministre, qui juge qu'elle ne l'est pas. On attend même le jugement. C'est-à-dire que le ministre de la Santé et des Services sociaux actuellement conteste, est en cour et conteste la constitutionnalité de la loi dont vous êtes responsable. Nous attendons le jugement pour septembre. M. le ministre, si vous nous parlez de cette loi, et on veut la moderniser, loi adoptée à l'unanimité à l'Assemblée nationale, je suis sûre que vous avez parlé à votre collègue et lui avez demandé de retirer sa poursuite.

M. Fournier : Excellente question, M. le Président, posée dans le cadre ...

Mme Maltais : ...trois minutes, M. le Président.

• (15 h 20) •

M. Fournier : ...posée dans le cadre d'une discussion sur la réforme des institutions. Il y a des institutions à réformer, il y en a d'autres à protéger, il y en a d'autres à maintenir, il y en a d'autres dont on doit faire la promotion, dont celle-ci, M. le Président : la grande indépendance du judiciaire, comment il est important pour nous, de l'exécutif ou du législatif, de ne pas aller empiéter dans cette sphère dont je sais, M. le Président... pour laquelle vous avez un respect le plus total, et je sais que tous nos collègues ont le même respect. Alors, loin de moi l'intention de commenter des causes qui peuvent être devant les tribunaux. Imaginez, le ministre responsable de la Réforme des institutions qui commencerait à poser de tels jugements, commentaires, interventions. Je ne serais pas à la hauteur du mandat qui m'a été confié et je suis sûr que ma collègue le reconnaît.

Mme Maltais : Oui, mais ce que vous devez reconnaître aussi, M. le ministre, c'est que vous allez déposer une loi, une modernisation d'une loi, alors que votre collègue, assis actuellement à la table du Conseil des ministres, nie la constitutionnalité même de cette loi. Je pense que, sans vous demander de juger de la constitutionnalité, ce que je trouve un peu aberrant, là, parce que vous êtes... c'est votre responsabilité que de protéger cette loi et de la défendre. Je comprends que c'est un peu compliqué pour vous, mais, à tout le moins, je pense que vous allez avoir un échange au Conseil des ministres et que vous avez un sérieux problème.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : En 30 secondes, M. le ministre.

M. Fournier : Oh! Je pense que je n'ai pas du tout de problème, M. le Président. On doit respecter l'ensemble des droits individuels des citoyens de notre société. On doit s'assurer, dans nos fonctions... Évidemment, on se transpose un peu comme une autre personnalité une fois qu'on est dans nos fonctions. Et, lorsqu'on les habite ces habits-là, M. le Président, dans nos autres fonctions, on se doit de respecter les ordres, que ce soit l'exécutif, le législatif. Et je ne me sens pas du tout... ni mal à l'aise, M. le Président, à cet égard.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci beaucoup, M. le ministre. Alors, on va entreprendre maintenant un bloc du côté gouvernemental pour 19 minutes. Et je cède la parole au député de LaFontaine.

M. Tanguay : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. D'abord, juste question de directive, M. le Président, nous avons trois blocs, en ce qui nous concerne, la banquette ministérielle, trois blocs d'imparfaitement 19 minutes?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : À peu près.

M. Tanguay : Parfait. Merci beaucoup.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : À peu près 19.

M. Tanguay : Tout à fait. Et, M. le Président, je suis évidemment, comme le ministre, le dernier surpris d'une question quant à la constitutionnalité ou l'inconstitutionnalité de nos lois, sachant que, du côté du Parti québécois, ça aura toujours été une préoccupation de premier plan de s'assurer que chaque loi ou projet de loi respecte rigoureusement, étude à l'appui, la Constitution canadienne, et d'où la non-surprise, en ce qui me concerne, M. le Président, qui est un élément, évidemment, qui n'est pas anodin.

Ceci dit, M. le Président, avec votre permission, j'aimerais poser une question au ministre, qui concerne justement des concepts qui sont à l'ordre du jour du gouvernement, des concepts en matière de transparence qui vont se conjuguer avec étude, avec analyse — c'est rafraîchissant — avec pédagogie, d'autant plus rafraîchissant. Lors du discours inaugural, le premier ministre affirmait qu'il voulait un gouvernement davantage ouvert et transparent. Et nous avons le bénéfice d'avoir avec nous le ministre responsable de l'Accès à l'information et de la Réforme des institutions démocratiques. Il s'agit... Et je le sais que le ministre, pour l'avoir entendu sur plusieurs tribunes, a eu l'occasion de donner le ton et de préciser l'intention du gouvernement quant à la transparence à mieux faire. J'aimerais l'entendre sur le suivi, les étapes. Comment compte-t-il s'y prendre? Quel est le plan d'action gouvernemental face à cette transparence qui est à l'ordre du jour, qui est demandée et que, j'en suis certain, le ministre a la ferme intention de donner à la population du Québec? Alors, voilà ma question. Merci, M. le Président.

M. Fournier : Merci, M. le Président. Cher collègue, merci de la question. C'est intéressant parce que, comme je disais tantôt d'entrée de jeu, on étudie aujourd'hui les crédits de la réforme des institutions et on va étudier, le 2 juillet, l'accès à l'information, et c'est intéressant que vous choisissiez de le soulever dans le forum concernant la réforme des institutions parce que le fond même d'une question, qu'on pourrait dire, d'accès à l'information est intimement lié, pour ne pas dire directement associé aux institutions. Partout, là où on discute du gouvernement ouvert... Je pourrais même laisser tomber la question du gouvernement ouvert.

Je pourrais, dans un premier temps, répondre comme ceci. Juste la question de l'accès à l'information en vertu de la loi actuelle, on la change ou on ne la change pas, on la garde dans la forme où quelqu'un doit demander l'information et on se demande si on la donne, si je ne fais que ça, si je ne fais que discuter de ça, je suis directement en lien avec comment fonctionnent nos institutions et quel est le lien du citoyen face à ces institutions, ou du demandeur d'information qui est souvent citoyen journaliste ou, autrement dit, relais d'information entre l'institution et le public. Et tout ça met en relief la question de l'adhésion à la décision, de l'acceptation de l'autorité. Donc, la participation du citoyen, son inclusion dans le processus passe par la capacité de le tenir informé. Alors, ce ne serait que le bout d'accès à l'information en vertu de la loi actuelle qu'on serait déjà beaucoup dans une réflexion d'institution, même si ça relève plus précisément d'accès à l'information. On aura peut-être, d'ailleurs, l'occasion d'en rediscuter le 2 juillet sur plusieurs dimensions.

Maintenant, la question qui est posée est intéressante parce qu'elle me permet d'informer nos collègues peut-être de façon un peu plus précise s'ils n'ont pas eu l'occasion de m'entendre sur les quelques tribunes qui se sont intéressées à ce sujet. Le premier ministre du Québec m'a demandé, m'a donné le mandat de travailler dans le sens d'une plus grande transparence. Le gouvernement ouvert, qu'est-ce que ça veut dire?

Alors, d'abord, il y a une dimension qui est celle de décider qu'à l'avenir... — on n'est pas le premier, ça se fait ailleurs, à des degrés différents par contre — de donner de façon proactive de l'information, un; deux, de se poser des questions à l'égard de ce qui ne sera pas donné de façon proactive : Est-ce que la loi d'accès, pour quelqu'un qui est en demande — vu que ce n'est pas donné proactif, ça n'empêche pas que quelqu'un puisse le demander — est-ce que la loi d'accès, pour quelqu'un qui est en demande, est satisfaisante dans l'état actuel? Alors, clairement, là-dessus, la réponse, c'est non. Elle doit être modifiée, puis on aura l'occasion d'y revenir.

Ces deux volets-là nous amènent à un autre élément à considérer. Si on est pour donner de l'information, que ce soit proactif ou que ce soit en réponse à des demandes faites, comment le fait-on? Et là intervient la question — pour moi, je connaissais moins ça avant, mais là on commence à m'informer sur ces choses-là — des données ouvertes, qui sont ni plus ni moins que, dans le fond, des informations qui peuvent être traitées, qui peuvent être utilisées. Ce n'est pas juste d'être capable de les retrouver à une place puis qu'on sait où est la place qu'on les retrouve, mais comment sont confectionnées les données pour qu'elles puissent être d'usages multiples par même quelqu'un qui ne les aurait pas demandées, que ce soit une personne, que ce soit un chercheur, peu importe. Comment on réussit à offrir à la société le plus d'information possible?

Alors, le gouvernement ouvert, c'est comment on peut donner des informations. Et là-dedans, le premier ministre a été clair, vous avez les agendas — j'en ai parlé un peu tantôt, avec le commissaire au lobbying — les ressources monétaires qui sont affectées aux fonctions, les allocations et l'utilisation qui en est faite, ça aussi de manière proactive, et puis un bon nombre de données qui sont à l'intérieur d'un gouvernement. Il y en a déjà un peu, d'ailleurs, qu'on retrouve en ce moment sur différents sites gouvernementaux. Mais, bon, pour prendre l'histoire simple, là, puis que tout le monde comprend, là : il y a un appel d'offres pour que les travaux débutent telle date, puis on pense qu'ils vont finir telle date, puis finalement est-ce qu'on le dit au monde, selon le processus évolutif, on est-u rendus là ou si on est rendus... quelque chose qui permet aux gens de mieux suivre l'activité étatique pour laquelle ils paient.

Bon, une fois que j'ai dit tout ça... ça, c'est la demande, mais à quoi sert-elle, cette demande-là? Alors, tantôt, d'entrée de jeu, j'ai dit : Elle permet une participation citoyenne, une compréhension citoyenne plus grande de ce qui se passe à Québec, dans l'État, et donc susceptible d'encourager une participation. Non seulement on sait, mais on veut intervenir, on veut faire entendre sa voix, on veut se regrouper pour défendre une cause ou une autre à partir d'informations connues. Donc, il y a vraiment une sensibilisation qui est faite. Ça, c'est, je dirais, l'aspect démocratique qui vient de la base.

L'autre élément, c'est l'aspect démocratique d'en haut, la transparence pour assurer une bonne gouvernance. Et j'utilise cette expression-là parce que, dans le débat sur la transparence, il y a un certain courant qui est de dire : Tout transparent. Mais parfois il y a des limites, et la limite, c'est une information qui entraînerait une mauvaise gouvernance, des effets pervers qui pourraient être associés avec une information qui est donnée.

Je donne un exemple puisqu'on est à la réforme des institutions, en ce moment, en train de discuter. Il y a eu une question en Chambre, et je ne me souviens plus qui l'avait posée, il y a eu une question en Chambre sur le fait que le ministère de l'Environnement avait fait une étude ou commandé une étude à l'égard du port de Québec, contre la poussière rouge. Je ne sais pas si je le dis...

• (15 h 30) •

Une voix : ...

M. Fournier : C'est une motion? Peut-être une motion qui a peut-être suivi une question. Enfin, peu importe, la question a été soulevée. Alors donc, la question est : Bien, les Québécois ont payé l'étude, on peut-u l'avoir? Or, l'étude est au soutien d'un processus judiciaire.

Alors, je reviens sur la réforme des institutions. Allons-nous transmettre une information, au nom de la transparence — pourquoi pas — dont l'effet sera d'empêcher un recours judiciaire qui est prévu selon une loi? Alors, quand je parle de la transparence pour la bonne gouvernance, je donne cet exemple-là, mais là vous pouvez le multiplier, là, par 100 puis par 1 000. La transparence, elle demande le bon moment, elle doit servir la bonne finalité, elle ne doit pas nous amener dans une direction qui va nous pénaliser comme société. Elle doit servir le débat démocratique, mais elle ne doit pas empêcher les sanctions qui sont prévues par les lois qui ont été adoptées en fonction d'un processus démocratique. Alors, c'est un peu... je dirais, c'est un des paramètres de notre réflexion, puis vous voyez bien le lien qu'il y a avec les institutions démocratiques. Le paramètre de tout ça, puis si on avait à le résumer bien simplement : la transparence pour une bonne gouvernance et pour une adhésion plus grande des citoyens.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le ministre. M. le député.

M. Tanguay : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Je trouve ça extrêmement intéressant. J'aimerais... Basé sous deux angles, là, toujours sur le même sujet, basé sur ce qui se fait ailleurs également, est-ce que le gouvernement a l'intention, et jusqu'à quel point, de vérifier ce qui se fait ailleurs, on parle toujours des bonnes pratiques, donc d'aller chercher ces bonnes pratiques là?

Et j'aimerais profiter, M. le Président, de l'expérience du ministre, qui n'en était pas, le 7 avril dernier, à sa première élection, qui a eu l'occasion de voir, depuis plusieurs années, le gouvernement, peu importe, là, qui est à la tête du gouvernement... J'aimerais ça qu'il nous brosse un tableau sur l'évolution qui nous amène aujourd'hui à réaliser un besoin, une demande accrue de transparence et de divulgation proactive, comme vous l'avez déjà dit. J'aimerais... peut-être si vous pouvez étayer sur cette importance-là.

Parce qu'on parle beaucoup, M. le Président, de cynisme, on parle beaucoup évidemment d'avoir accès à l'information. Et cette initiative-là n'est pas anodine, encore une fois, c'est majeur. Et j'aimerais, donc... sur le premier volet, s'il entend regarder ce qui se fait ailleurs; également, basé sur sa propre expérience personnelle, ce qui justifie la démarche à laquelle il nous invite; et peut-être le troisième volet également, pour les quelques minutes qu'il nous restera malheureusement, comment voit-il la suite des choses. Voilà.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. Alors, il reste, pour votre information, 7 min 30 s à ce bloc. M. le ministre.

M. Fournier : Merci, M. le Président. D'abord, évidemment, dans la réflexion là-dessus, ce n'est pas comme si on prétendait que le Québec allait tout inventer de lui-même puis qu'il n'y avait rien qui existait, là. Honnêtement, il y a des précédents, comme je le disais tantôt, qui ne sont vraiment pas tous à la même hauteur. Vraiment, ça va un peu dans tous les sens. D'ailleurs, il y a un mandat particulier qui m'a été confié par le premier ministre, qui souhaite la transparence, justement, pour combattre le cynisme, comme vous l'avez dit, puis il l'a dit lui-même. Ce n'est pas né non plus de la dernière élection. Je me souviens d'un de nos collègues, l'ancien député de Verdun, qui avait fait toute une initiative en la matière, qui a d'ailleurs entraîné des comités de gouvernance puis qui a entraîné, là, des transformations qui ont déjà commencé.

Je veux essayer d'être non seulement modeste, mais véridique. Il y a des choses qui sont faites. Maintenant, il y a une grande, grande bouchée qu'il faut prendre, là. Alors, clairement, pour cette bouchée-là, on va se référer à ce qui se passe ailleurs, aux meilleures pratiques qu'il y a. Puis, je vous le dis tout de suite, ça va entraîner des règlements, des directives, des lois, ça va entraîner des phases d'application. On ne peut pas faire ça : on adopte une loi, on va chez le lieutenant-gouverneur, elle est sanctionnée, puis le lendemain, c'est fait, là. On se comprend. Juste ramasser l'information, juste la transformer en données ouvertes, c'est tout un contrat. Bien, dans le fond, prenons-le pas comme étant un moment, le grand soir de la transparence, mais plutôt comme une culture qui doit nous accompagner, autant pour cette législature que les autres qui vont suivre.

Puis autant, tantôt, je disais : Bien, il y a l'information proactive puis il y a la loi d'accès, dont j'ai déjà dit qu'elle contient peut-être trop de «peut» et pas assez de «doit», parce qu'on ne finit jamais... On finit par ne jamais comprendre, finalement. Si c'est «peut» puis que tu dis toujours non, c'est-tu parce que tu ne pouvais pas la donner ou... Parce que les gens disent : Si c'est «peut» puis que tu ne me la donnes pas, c'est parce que tu ne veux pas me la donner, mais tu pourrais me la donner. Alors, et les gens finissent par ne plus saisir parce que...

Là, je ne veux pas... c'est mon interprétation, puis je ne dis pas qu'elle est juste, mais je suis amené à penser : Est-il possible que, lorsqu'on a adopté cette loi-là, on ait favorisé la décision au cas par cas? C'est-à-dire qu'à certains où on a dit clairement c'est «doit»; dans certains cas, c'est «ne doit pas»; puis, dans certains cas, c'est «peut». Donc, vous regarderez la matière qui est devant vous puis vous jugerez pour le mieux, pour la bonne gouvernance. Je pense que c'était un peu ça. Mais l'étude cas par cas entraîne un certain nombre de complications sur la perception, où les gens ont fini par dire : Bien, c'est toujours «peut» puis c'est toujours non, donc finalement vous êtes contre la transparence, alors qu'il est possible que ce soit plus parce que les gens voulaient assurer une bonne gouvernance; transparence, bonne gouvernance qui sont toujours les deux éléments.

J'ajoute, parce que je n'ai pas dit... Et le collègue faisait référence à ça. Il a fait référence à mon expérience ou... toute modeste quand même, là, je ne suis pas... Je suis loin d'être un des doyens de cette Assemblée, encore tout jeune. Ceci étant, le premier ministre du Québec a aussi rajouté son souhait qu'il y ait, avant chaque élection, un moment, une période tampon où la population, les députés sont saisis de la réalité financière de l'État, de manière à ce que le débat démocratique d'une campagne électorale puisse se faire à partir des chiffres tels qu'ils sont. Et il envisage que nous nous donnions une instance indépendante qui pourra dresser cet état des lieux financiers pour que chacune des formations politiques ou des candidats puisse faire une offre de services — si vous me laissez l'expression... passez l'expression, M. le Président — basée sur la réalité des chiffres, parce que le cynisme vient entre autres du fait que des partis se font élire à partir d'une information, et, lorsqu'ils arrivent, l'information n'est plus la même. Alors là, les gens disent : Mais vous ne respectez pas la proposition que vous avez faite. Oui, mais là, je n'ai jamais dit qu'on ferait une décote et, si je le fais, on est décotés parce que je n'avais pas l'information juste au début.

On est toujours dans la réforme des institutions, on est toujours à se demander comment le citoyen peut être le mieux servi. Certainement avec des partis qui sont mieux avisés de la situation financière, qu'il n'y ait pas de choses qui ne leur sont pas données, démontrées, puis que, là, il y a un sain débat démocratique. On ne s'attend pas à avoir tous la même position, on ne le souhaite pas, mais on souhaite avoir tous une base égale d'information, notamment en matière financière. Ça me semble évident.

Alors, tout ça fait partie du même grand portrait où je pense qu'il faut saluer... Bien, on verra évidemment à la fin des... À la prochaine élection, les gens feront leur jugement, mais l'intention que nous avons, c'est de réussir ce test-là, d'avoir un jugement positif à l'égard d'une grande manoeuvre de transparence pour une bonne gouvernance. C'est le retour chez le citoyen de la confiance dans les institutions.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le ministre. M. le député, avec un peu plus de deux minutes.

M. Tanguay : Deux minutes. Très rapidement. Puis je trouve particulièrement pertinents et intéressants les commentaires du ministre. À la vue du point financier, novembre 2013, on avait une partie de la réponse. Budget, février, le 20 février 2014, on avait une partie de la réponse, on n'avait pas toute la réponse. Et là, à la lumière des commentaires du Vérificateur général, moi, j'aimerais vous entendre là-dessus dans le contexte de ce que vous venez de dire, le rapport du 3 ou 4 juin derniers du Vérificateur général, qui, enfin, nous donnait l'heure juste, revenus, dépenses, et l'importance capitale, dans tous les sens du terme, que ça a en débat démocratique, j'aimerais vous entendre et vous entendre commenter votre réception de ce rapport du Vérificateur général là, qui était majeur et qui pointait vers une carence à laquelle tous, on avait dû faire face lors de la dernière élection.

• (15 h 40) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Un commentaire d'une minute, M. le ministre.

M. Fournier : Bien, d'abord, peut-être pour souligner que le Vérificateur général du Québec est une des grandes institutions du Québec, une institution à laquelle on doit renouveler sans cesse notre grande confiance, qui fait son travail de façon indépendante. Et je crois qu'il a témoigné encore une fois, outre le jugement que certains ont pu y porter... je crois qu'on doit réaffirmer, tous, le travail exigeant qui leur est demandé et la grande rigueur qu'il y met. Maintenant, il est vrai, puis je ne veux pas faire un excès de partisanerie ici, M. le Président, mais il est vrai que, dans le dernier rapport du vérificateur, on note qu'il n'a pas pu avoir toute l'information lui-même. Alors, je m'arrête juste là-dessus pour dire que... et, s'il est normal que les citoyens soient informés avant de faire un choix, s'il est normal pour les partis politiques de le savoir avant de faire les propositions, ça serait normal que le vérificateur aussi puisse le savoir. Voilà. Je laisse mon commentaire sans partisanerie là-dessus.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le ministre, à quelques secondes... On va passer au prochain bloc. Alors, je suis prêt à céder la parole au deuxième groupe d'opposition. Le député de Deux-Montagnes...

M. Charette : Bien gentil. Merci, M. le Président...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : ...pour 23 minutes pour votre bloc.

M. Charette : C'est effectivement l'information que j'avais. Merci de le rappeler. Un temps qui est, somme toute, limité, mais j'aimerais malgré tout prendre quelques instants pour saluer M. le ministre, les personnes qui l'accompagnent cet après-midi, les collègues du gouvernement, ma collègue de Taschereau également, mon estimée collègue de Montarville et la recherchiste qui m'accompagne pour l'après-midi.

Et, oui, le sujet ou les sujets abordés cet après-midi sont importants, M. le Président. Ma collègue de Taschereau a abordé le Commissaire au lobbyisme, qui est une institution importante. Une autre qui est tout aussi importante est le Secrétariat à la réforme des institutions démocratiques. Et, M. le ministre, à la lecture du site Internet, en le consultant, on se rend compte que c'est un site qui détient ou qui transmet bien, bien peu d'information et on constate également qu'il n'y a aucun rapport stratégique ou d'activité qui a été produit depuis un certain nombre d'années. Ce n'est pas une institution ou une organisation qui a produit aussi, ces dernières années, de planification stratégique. Peut-être nous parler un petit peu des objectifs à ce niveau-là pour le présent mandat, s'il vous plaît.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, M. le ministre, la parole est à vous.

M. Fournier : Évidemment... Puis je ne veux pas évacuer la question. Je vais commencer par faire une explication hiérarchique. Plusieurs secrétariats comme celui-ci ou celui aux affaires intergouvernementales canadiennes, pour lequel j'occupe aussi la fonction, relèvent du ministère du Conseil exécutif, qui chapeaute ces opérations auxquelles vous référez. Une fois que j'ai dit ça, il ne s'agit pas de mettre le singe sur l'épaule de quelqu'un d'autre, il s'agit simplement d'expliquer de façon hiérarchique comment ça fonctionne.

Ceci étant, votre question, elle est à la même hauteur, importance, enfin, elle est sur le même niveau que ce qu'on a déjà soulevé tantôt. Lorsqu'on s'interroge à la question de nos institutions, de ce qu'on doit en faire et ce qu'on doit améliorer, modifier, je crois que l'aspect de la transparence, l'aspect de l'information, l'information proactive dont je parlais tantôt — comme vous le savez, c'est le mandat qui m'a été confié — elle s'applique dans plusieurs dimensions, et il faut s'assurer de pouvoir couvrir tous ces terrains-là. Alors, bien sûr, on va commencer par faire l'état des lieux de nos problématiques actuelles, établir le plan de match de ce qui sera notamment... Parce que ce que vous soulevez, c'est ce que j'appellerais... Dans les données ouvertes et dans l'information proactive, il y a déjà un certain nombre de choses dans lesquelles on pourrait déjà être plus proactif, sans même attendre qu'on ait une politique de fourniture proactive de l'information. C'est un fait.

Mais c'est toute la question du changement de culture. Ce que vous avez noté, je suis sûr que vous allez peut-être, dans votre additionnelle, me parler depuis combien de temps, dans plusieurs dimensions du gouvernement, on va chercher que les informations n'ont pas été remises à jour. Je suis même capable d'imaginer qu'une de vos additionnelles serait de nous dire que la commission ici n'a pas été capable de demander des redditions de compte de tout le monde qui sont supposés d'en faire devant la Commission des institutions. Je termine là-dessus. C'est exactement le genre d'élément de changement de culture. Donc, il faut changer nos techniques, nos stratégies, nos façons de faire pour essayer de répondre le plus possible.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le ministre. Simplement une précision. On ne se livre pas à un exercice mathématique de la durée de la réponse, de la durée de la question. On essaie de conserver une proportion relative égale entre l'importance de la question et de la réponse. Mais, vous savez, M. le député, ce n'est pas la prérogative de la présidence d'intervenir dans la justesse de la réponse, même si on n'en est pas satisfait.

M. Charette : ...de le faire. C'est gentil.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, je vous cède la parole...

M. Fournier : ...et de me dire que peut-être qu'il est temps que je termine.

M. Charette : ...essayer de nous deviner de la sorte. Et, sur le même enjeu, le secrétariat a la possibilité de produire des avis, le ministre a la possibilité de lui en solliciter. Depuis votre entrée en fonction, avez-vous demandé des avis au secrétariat? Est-ce qu'il a des analyses qui sont en cours? Est-ce qu'il y a des résultats ou des sommaires d'analyse qui vous ont été présentés jusqu'à présent?

M. Fournier : Jusqu'ici on a eu plusieurs... Évidemment, vous vous doutez bien qu'on a eu plusieurs rencontres sur l'ensemble des paramètres qui sont dans le mandat que m'a confié le premier ministre, sur les pistes qui s'offrent à nous, les différents scénarios qui s'offrent à nous. Il y a eu des mandats de recherche qui ont été donnés. Alors, on est à la collecte de toutes ces informations-là qui vont nous amener à pouvoir nous faire une tête complète sur... complète... J'annonce à l'avance, je pense que la tête va être fragmentaire parce que c'est tellement vaste. Alors, ça va être par étapes que tout ça va se faire, mais je...

Puis je pense que c'est peut-être votre question. À l'automne, je souhaite pouvoir mettre la rondelle en jeu, c'est-à-dire expliquer nous sommes rendus où, qu'est-ce qu'il y a d'étapes devant nous. Et cette mise au jeu là, moi, j'appellerais ça la mise au jeu pédagogique en même temps. Il y a des affaires qu'on peut faire peut-être à court terme, il y a des affaires qui sont plus à moyen terme, mais, dans tous les cas, il va falloir expliquer ce qu'on peut faire et ce qu'on ne peut pas faire. Parce que la difficulté...

Puis j'aime qu'on ait cette discussion-là, et ça me permet de déjà commencer cette pédagogie. La transparence, ça ne veut pas dire tout donner ce que le monde te demande au risque de mettre en péril l'État québécois, ou les processus judiciaires, ou les saines pratiques commerciales. Ça ne peut pas être ça. Par contre, il y a bien des affaires à faire, qu'on peut faire, qui ne mettent pas en péril, au contraire, l'État, mais qui améliorent la capacité de décision et surtout la capacité d'adhésion des citoyens à ces décisions.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Deux-Montagnes.

M. Charette : Vous avez mentionné... le premier ministre mentionne régulièrement que vous serez jugés sur les résultats, en quelque sorte. Le mandat est encore jeune, donc on laisse la chance au coureur, mais ça fait plus de 30 ans au Québec qu'on a un ministre responsable des institutions démocratiques et des réformes des institutions démocratiques. Il y a eu de belles avancées au niveau du financement des partis politiques, notamment au cours des dernières années, mais je suis curieux de voir si, l'année prochaine, dans le cadre du même exercice, si les mêmes questions vous sont posées, si on aura davantage de matière par rapport aux différents avis qui vous auront été soumis ou par rapport aux décisions qui auront été celles de votre gouvernement.

J'ai évoqué rapidement la notion du financement des partis politiques. À l'Assemblée nationale, le 2 octobre 2013, il y a un an et demi de ça, la Coalition avenir Québec avait soumis, dans le cadre d'une motion du mercredi, une motion qui a recueilli l'adhésion des différentes formations à l'Assemblée nationale, bref qui a été adoptée à l'unanimité. Elle se lisait en deux points.

Le premier : «Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement de présenter un projet de loi prolongeant le délai de prescription prévu à la Loi électorale et permettant au Directeur général des élections du Québec de poursuivre pour les infractions commises pendant toute la période couverte par la commission Charbonneau.»

Le Parti libéral, qui était alors dans l'opposition officielle, a voté en faveur de cette motion-là. Le Parti québécois, qui était au gouvernement, avait voté aussi en faveur de cette motion-là, ce qui fait qu'elle avait été adoptée à l'unanimité. Le Parti québécois, pour ses raisons qui lui appartiennent, n'a pas déposé le projet de loi en question.

Est-ce qu'on peut s'attendre de votre part qu'il y ait un projet de loi qui modifiera la loi sur le financement des partis politiques et qui permette d'étendre les poursuites à la période que couvre la commission Charbonneau?

• (15 h 50) •

M. Fournier : Excellente question. Je vais commencer par répondre au préambule puis ensuite je vais répondre à la question, parce que vous être revenu sur le jugement, pas dernier, mais le jugement de fin de mandat, pour dire : Jugés à l'égard des gestes qui sont posés. La démocratie est ainsi faite. Il y a un gouvernement, il s'engage à faire des choses, puis il y a un jugement qui vient à un moment donné; c'est comme ça. Je vous dirais, pour simplement donner un exemple, mais, encore là, très modestement, vous demandiez... sur le financement, puis : Depuis longtemps, on a fait des lois, et tout ça... Moi, j'ai été sept mois ministre de la Réforme des institutions et j'ai fait trois lois sur le financement qui ont été adoptées, en sept mois. Alors, j'imagine que j'ai passé le test pour la dernière fois, mais c'est toujours un test à renouveler. Alors, je comprends très bien qu'il y a encore des choses à faire.

Sur la question de la prescription, c'est une bonne question parce qu'on a commencé à en discuter, et il appert une difficulté que vous allez peut-être m'aider à résoudre. En tout cas, je pense que c'est intéressant qu'on ait ça à cette commission, qu'on puisse en débattre. Dans la loi actuelle, les obligations des titulaires, des représentants officiels, tous ceux qui sont nos adjoints électoraux, là, dans tous nos comtés, là, qui s'occupent de surveiller les dépenses, et tout ça, c'est cinq ans, la période de conservation des documents. Alors, la question qui se pose évidemment à l'égard de la décision éventuelle que vous suggérez de dire à mon voisin, au vôtre, à l'ensemble des Québécois : Nous allons étendre la prescription : Quelle est la réelle portée de cette étendue de prescription s'il n'y a aucun moyen pour le DGE de faire une preuve et pour l'éventuel poursuivi de faire une défense pleine et entière qui serait à l'encontre des chartes? Bien, je vous pose la question parce que vous allez m'aider, on a des discussions là-dessus.

Alors, j'ai cette difficulté, qui n'a pas été soulevée lors de cette motion, mais qui m'a semblé soulever un réel problème. Faudrait-il que je fasse un point de presse pour annoncer aux citoyens que nous étendons la prescription, alors que, dans la vérité, ça ne veut rien dire? Je suis en train de parler depuis tantôt de transparence, de reprise de confiance des citoyens dans leurs institutions. Ce serait certainement le dernier conseil que je suivrais d'informer la population que nous posons un geste qui semble susciter leur adhésion mais qui, dans les faits, n'est pas praticable. Il me semble que je devrais au moins accompagner le tout de... — et jusqu'ici, c'est pour ça que je vous pose la question — dans la compréhension que j'ai, qui serait : Je prolonge la période de prescription, et cela n'aura aucune application. Je ne voudrais pas dire ça. Dites-moi comment je devrais régler le problème du cinq ans.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le ministre. M. le député de Deux-Montagnes.

M. Charette : Au cours des auditions de la commission Charbonneau, on ne parle pas d'allégation. Souvent, ce sont les compagnies elles-mêmes qui volontairement s'incriminent. Donc, ce sont les témoins de la commission Charbonneau eux-mêmes qui admettent avoir, à travers différents procédés, versés des centaines de milliers de dollars. Donc, la preuve vient de la personne elle-même ou de l'entreprise elle-même. Et, à travers leur propre comptabilité, ils arrivent à démontrer qu'ils ont versé des centaines de milliers, dans certains cas, à différentes formations politiques en contournant la Loi électorale.

Donc, vous demandez comment assurer une défense pleine et entière. C'est l'incriminé lui-même qui admet ses torts. Donc, on ne parle pas d'allégation dans ce cas-là, on parle d'admission. Donc, la personne ou l'entreprise admet ses torts et précise les montants qui sont en cause, ces montants sont connus. Donc, il reste maintenant à les aider à aller au bout de leur parcours de repentance, en quelque sorte.

M. Fournier : Si vous soulevez la question auprès du DGE, et je vous invite à le faire, ils vont vous dire qu'ils ne peuvent pas utiliser cette preuve. Ils vont vous dire que ce n'est pas une preuve pour eux. Ils vont vous dire que le cadre dans lequel cela a été offert est inutile pour eux. Mais je ne veux pas que ce soit ma réponse à moi. Je vous invite à prendre... Ils vont être très heureux, d'ailleurs, d'avoir une discussion avec vous, là. Le DGE, c'est une institution pour tous les Québécois, là. Je vous invite à avoir cette discussion avec le DGE pour éviter... Encore une fois, je ne voudrais pas être dans la situation de dire : Nous pouvons... Je sais que c'est ce que vous avez dit, mais je suis obligé de vous dire ce qu'on m'a dit, jusqu'à un certain point. Mais ne prenez pas ma parole, là, demandez à l'institution, au DGE. Ils ne peuvent pas utiliser cette information-là, un. Deux, ils ont à faire leurs propres dossiers. Et, à cela, ils me répondent : La commission sert une fin, et cette fin-là n'est pas celle du DGE.

Mais, ceci étant, là, je comprends bien comment vous l'amenez, puis, dans le sens commun, on pourrait continuer de discuter, mais, dans les systèmes qui existent ou la preuve hors de tout doute, suivant certains mécanismes, certains droits concédés aux uns et aux autres entraînent cette conséquence chez le DGE. Peut-être que le mieux, M. le Président, puis je ne sais pas si c'est possible, peut-être que l'institution du DGE pourrait peut-être venir à la Commission des institutions exposer ces problématiques, ces éléments, parce que je crois que ça serait une belle façon de mettre sur la table, sans que vous preniez ma parole à moi... Bon, je suis un collègue d'en face, de l'autre côté. En politique, des fois, on dit : Bien, peut-être qu'il ne me dit pas tout à fait ce qu'est la vérité, bon, mais même si vous devez, selon le règlement, prendre ma parole. Mais, ceci étant, je comprends très bien que vous ayez un certain doute. Je vous encourage à faire le même type de questionnement. Parce que ce que vous avez fait, je l'ai fait.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député, simplement vous rappeler que la commission a décidé de procéder à l'audition... Et nous entendrons au cours des prochains mois, là, on l'espère, le DGE. Donc, nous pourrons, M. le député, soulever cette question-là. À vous la parole.

M. Charette : Merci de la précision. Donc, je reviens à cette fameuse motion. Est-ce à dire que vous avez décidé de l'appuyer sans avoir pris soin, à l'époque, de bien évaluer sa portée? Est-ce que c'était un vote, peut-être, qui permettait tout simplement de relayer ou de faire en sorte que le sujet, qui peut être sensible, soit tout simplement évacué?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le ministre.

M. Fournier : Non, mais je crois que vous avez dit que c'était une motion de la CAQ.

M. Charette : Effectivement.

M. Fournier : J'en ai juste conclu, après mes discussions avec le DGE, que la CAQ n'avait pas bien étudié son dossier. Mais peut-être qu'on avait pris la parole de la CAQ. On n'aurait peut-être pas dû.

M. Charette : Donc, vous avez voté sans avoir tous les éléments que vous estimez nécessaires aujourd'hui pour trancher la question.

M. Fournier : En fait, nous nous sommes fiés un peu à la CAQ, mais on s'est aperçu que...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Terminez, M. le député de Deux-Montagnes.

M. Charette : J'apprécie la teneur de nos échanges jusqu'à maintenant, en espérant que ça puisse se poursuivre. Vous êtes leader, également, du gouvernement. Je présume que vous êtes, pour votre formation politique, le représentant auprès du Directeur général des élections. C'est vous qui êtes sur le comité de suivi...

M. Fournier : Je ne suis pas sûr que c'est parce que je suis leader... comme ministre responsable de la Réforme des institutions...

M. Charette : Généralement, c'est d'usage...

M. Fournier : Mais ça n'a pas toujours été le leader qui était ministre de la Réforme des institutions.

M. Charette : Souvent, c'est le leader de chaque formation politique qui représente, sur ce comité, là, les différentes formations auprès du Directeur général des élections. Bref, simple introduction. Est-ce que vous êtes en mesure de me confirmer quelles sont les sommes que le Parti libéral, jusqu'à maintenant, a remboursées auprès du Directeur général des élections?

M. Fournier : ...ça éventuellement, là, avant la fin, là, sans doute, là. Je sais qu'on a une note là-dessus. Je pourrais vous fournir ça tantôt.

M. Charette : S'il vous plaît. Et sans dire qu'un seul parti a été visé à travers les différentes allégations, hein, on l'a vu ces dernières semaines, là, il y a eu vraisemblablement des abus de part et d'autre. Mais ce sont quand même plusieurs centaines de milliers de dollars qu'on attribue à du financement illégal. Reste à savoir si c'était fait consciemment par les partis politiques, et ça, à ce niveau-là, je ne prête pas de jugement. Mais, au final, on parle de plusieurs centaines de milliers de dollars et on peut évoquer certains millions à l'occasion. Est-ce que, par rapport au montant que le Parti libéral a versé jusqu'à maintenant, vous avez le sentiment d'avoir suffisamment agi pour rétablir la confiance de la population?

M. Fournier : Les sentiments, je ne sais pas si je devrais en traiter ici, M. le député. Ceci étant, nous, comme, je crois, tous les partis, je crois... en tout cas, tous les partis autour de cette table, avons tous pris l'engagement que, lorsque le DGE nous indique qu'il doit y avoir remboursement, il y en a. À la question que vous avez posée, je vais tenter d'avoir le chiffre...

Une voix : ...

M. Fournier : On ne l'a pas en ce moment, mais on va essayer de l'avoir avant... Alors, quelqu'un fait des téléphones. On va essayer de l'avoir avant 17 heures, je pense.

Mais alors la question est : Est-ce que j'ai le sentiment que cela devrait satisfaire ou, en tout cas, répondre aux attentes de la population? Je pense que la population s'attend, lorsqu'un processus légal a été suivi, qui entraîne comme conséquence qu'il doit y avoir un remboursement, que le remboursement soit fait. Et le processus légal est celui du DGE. Et, à ce que je sache, personne... je n'ai pas d'information contraire, pour toutes les formations politiques, quand le DGE a demandé des remboursements, le remboursement a eu lieu. Donc, cela répond, je crois, au souhait de la population.

Maintenant, lorsque vous dites : Dès qu'il y a eu une déclaration par une personne à la commission, cela veut dire que l'argent est dû, je dois vous dire que la commission Charbonneau n'est pas le DGE, qu'un témoignage n'est pas l'ensemble d'une preuve, qu'il y a des règles qui existent dans des forums qui sont définis pour cela, et c'est ces processus-là qui devraient être suivis. C'est pour ça qu'à chaque fois la réponse est : Quelle est l'instance qui doit décider des faits pour conclure illégalité ou pas, ce qui entraîne compensation ou pas, paiement ou pas? C'est le Directeur général des élections.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le ministre.

• (16 heures) •

M. Charette : ...plaisir, M. le Président, de revenir à travers un autre bloc. Est-ce que vous pouvez prendre cet engagement de donner, de fournir l'information, même si je n'aurai pas le plaisir d'échanger de nouveau avec vous avant 17 heures, soit avant la fin des...

M. Fournier : Si l'information est obtenue avant... si je l'ai avant 17 heures, vous pouvez être sûr qu'on la met sur votre bureau. Restez avec nous. Mais, si jamais c'était après 17 heures, M. le Président, on va trouver le moyen de le donner à la commission pour qu'elle puisse le distribuer.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le ministre. Alors, cet engagement est noté.

Mme Maltais : ...président de la commission qui le...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Il verra à l'acheminer à tous les membres. M. le député de Deux-Montagnes, il vous reste un peu moins de quatre minutes à votre bloc.

M. Charette : Ah! Et déjà j'informe la commission que ma collègue de Montarville aura aussi une question à vous poser. Très, très rapidement. Au niveau du processus de nomination de certains hauts fonctionnaires ou hauts représentants, il y a eu ce rapport qui a été déposé il y a quelques mois maintenant, le rapport Moisan, au niveau de la nomination des hauts dirigeants. Quelles suites entendez-vous y donner? Et je vous donne un exemple bien simple. Si, dans les prochains mois, le gouvernement devait convenir de remplacer, que ce soit le D.G. de la Sûreté du Québec ou encore le P.D.G. de l'AMT, quel est le processus que le gouvernement entend suivre?

Nous avions fait aussi, au niveau de la coalition, une proposition qui semblait juste et bien, bien raisonnable, c'est-à-dire aller chercher un vote d'appui auprès de l'Assemblée nationale. Bref, est-ce que c'est une mesure qui vous semble intéressante ou allez-vous faire ce qui malheureusement est fait depuis des années et qui vient un petit peu alimenter le cynisme, c'est-à-dire faire une nomination qui souvent peut être davantage associée à la partisanerie que liée aux compétences réelles, là, de la personne nommée? Une réponse très rapidement, parce qu'il faudrait laisser à ma collègue la possibilité de poser sa question également.

M. Fournier : Dans les cas que vous mentionniez ne relèvent pas nécessairement de ce ministre-ci, et je serais bien embêté de répondre au nom des autres, ne serait-ce que par respect et de leur charge et de leur personne même. Ceci étant, je trouverais utile, par contre, même si je ne veux pas répondre pour eux, qu'à chaque fois on explique les avantages et les inconvénients pour un poste ou un autre. Parce qu'on peut très bien dire : Voici, le principe, c'est qu'on devrait faire comparaître chaque personne qui est identifiée, et on pourrait à notre gré les disqualifier, puis vous en choisirez quelqu'un d'autre. Et on peut toujours se demander : Est-ce qu'il y a des effets pervers à ça? Mais, bon, cette discussion-là, rarement elle a lieu dans des débats sur des motions. Mais on devrait s'interroger : Est-ce que c'est le meilleur moyen pour avoir les meilleures personnes? Alors, je ne dis pas oui, je ne dis pas non, mais je dis : Il manque beaucoup d'éléments dans la question.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le ministre. Il reste 1 min 30 s. Mme la députée de Montarville.

Mme Roy (Montarville) : Je serai très brève. Je suis surtout curieuse. Bonjour, tout le monde. Dans les fameux cahiers questions et réponses que nous avons, je vous amène à la question 7, programme 06, élément 03. Vous auriez payé... pas vous personnellement, mais on aurait payé la cotisation annuelle au Barreau du Québec pour une personne, je ne sais qui, pour la période du 10 janvier 2013 au 30 septembre 2014. Donc, on paie encore quelques mois. Pourrait-on savoir pour qui? À qui a-t-on payé la cotisation annuelle au Barreau du Québec?

M. Fournier : Ça, c'est la question...

Mme Roy (Montarville) : Question 7.

M. Fournier : C'est cela, la réponse? Et vous avez comme montant total des cotisations...

Mme Roy (Montarville) : 1 892,25 $. Mais moi, je suis curieuse de savoir à qui a-t-on payé une cotisation annuelle.

M. Fournier : Je crois que cela... Et là on me corrigera parce que ça a été fait antérieurement, mais néanmoins l'information que j'ai pour vous répondre... Me Dussault, qui est à mes côtés... Je crois, une juriste... peut-être pas. Non, parce que je pense que c'est le MJQ qui l'a... C'est le MJQ qui l'a payée, et ça, je n'en ai aucune idée.

Des voix : ...

M. Fournier : Alors, c'est celle de Me Dussault.

Mme Roy (Montarville) : Ça répond à la question. Merci à vous.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Il restait 10 secondes. Ça va? Vous faites un don à la communauté? On va maintenant entreprendre un autre bloc avec le côté gouvernemental. Le député de D'Arcy-McGee.

M. Birnbaum : M. le Président, M. le ministre, chers collègues, nous avons commencé à aborder les questions qui touchent à la Loi électorale, qui relève de vos fonctions, M. le ministre. C'est dans ce texte-là qu'on retrouve les règles du jeu sur tout aspect du scrutin avant, suivant et après, les procédures électorales à suivre ainsi que les infractions qui sont énumérées et les plaintes correspondantes. Durant l'exercice électoral qui vient de se terminer il y a quelques mois, il y a certaines personnes qui ont contesté à l'application des règles prévues par cette Loi électorale, dont M. St-Arnaud, ministre de la Justice dans le gouvernement, maintenant l'opposition, qui a fait la suggestion publique que l'élection était à risque d'être volée, entre guillemets, par des gens de l'Ontario.

Bon, pour avoir eu le plaisir de croiser cinq jeunes étudiantes, deux de Bishop's et trois de McGill, durant la campagne, qui étaient très branchées et intéressées par le processus, très dévouées et impliquées dans la vie communautaire, qui ont eu, suite à ces allégations et même les réponses très claires et nettes du Directeur général des élections... trois des cinq, si je ne m'abuse, n'étaient pas en mesure d'exercer leur droit de vote, qui a été assez clairement prévu par la loi, suite aux conditions qu'elles remplissaient tout à fait. À titre de ministre responsable des Institutions démocratiques, M. le ministre, est-ce que vous êtes en mesure de nous éclairer sur cette situation et son état actuel?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le ministre.

• (16 h 10) •

M. Fournier : Oui, bien, d'abord, je pense que c'est important de revenir sur ces éléments-là, ne serait-ce que parce que la protection de nos institutions est excessivement importante. Je commencerais par faire une parenthèse pour essayer d'être un tantinet objectif, M. le Président, ou, en tout cas, de porter des égards à tous ceux qui font campagne électorale. En campagne électorale, ça bouillonne, et parfois certains peuvent être amenés à utiliser des expressions qui dépassent peut-être leur pensée. Il y a effectivement eu des moments de presse, durant la campagne, où il a été affirmé que nous étions en train d'assister à un vol des élections par les étudiants d'autres provinces.

Reculons un peu dans le temps. Il y avait une chose de différent cette année. Il y a eu, dans nos modifications électorales, le vote dans les établissements d'enseignement, qui est une nouveauté qui a été souhaitée par les partis puisque ça a été voté, qui est une mesure qui favorise le vote des étudiants puisque le DGE s'approche d'eux, va vers eux pour leur dire : Votez. Puis on sait qu'essayer d'augmenter la participation au vote, là, c'est un travail de tous les instants, alors il faut trouver tous les moyens pour ça. Alors, le DGE s'est approché, donc, des établissements d'enseignement, ce qui a entraîné du monde qui ont dit : Bien, vu que tu es là, je vais aller voter. Et il y a des gens qui, donc, se sont présentés pour voter, où les questions de la résidence et du domicile ont été remises en question.

Le DGE, voyant l'attaque qui avait été faite, a fait une étude, et voici quelques éléments qu'il a répertoriés en réponse à l'attaque, qui s'est évidemment estompée par la suite. Il disait à l'égard... Et je ne me souviens pas de la date de la période électorale, mais on devait être à mi-campagne ou aux trois quarts de la campagne, je ne sais plus trop, là, mais... Et il pouvait constater ceci. Alors, il dit : Dans Sainte-Marie—Saint-Jacques, il y avait 351 demandes d'inscription en 2014, donc cette année, mais, en 2012, il y en avait 561. Est-ce qu'on assistait, cette année, à un phénomène d'inscriptions au-delà de ce qu'on assiste d'habitude? La réponse, c'est non. C'était un des comtés visés, là, hein? Dans Saint-Henri—Sainte-Anne, il y avait 396 en 2014, mais 340 en 2012. Est-ce qu'on assistait à quelque chose de dramatiquement différent d'avant? La réponse, c'est non. Dans Westmount—Saint-Louis, autre comté identifié par un des partis faisant campagne, il y en avait 317, demandes d'inscription en 2014, pour 520 en 2012. Ça m'amène déjà à me demander si la démarche de se rapprocher des étudiants pour les amener à voter a vraiment eu un effet parce que, même au niveau des inscriptions, ça n'a pas eu cet effet-là.

Mais, ceci étant, la difficulté est la suivante devant ce qui a été dit : on a, de toute évidence, laissé croire à la population qu'il y avait une atteinte portée à notre processus démocratique sans avoir d'élément probant. Et, lorsqu'une personne en autorité a vérifié les éléments pour en évaluer la force probante, le DGE, choisi aux deux tiers de notre Assemblée nationale, je ne vous répéterai pas ses mots, mais, ceux qui s'en souviennent, disons qu'il n'était pas très heureux de l'attaque faite au processus démocratique.

Alors, votre question, elle peut être, dans le fond... puis elle m'interpelle un peu pour l'avenir, parce que ce n'est pas juste une question pour le passé. Sur le passé, je pense bien que tout le monde, là, a compris qu'on ne fait pas ça, puis je pense qu'il n'y a personne qui va vouloir refaire ça à l'avenir. Parce que, là, il y a un étalon de mesure, là, la zone à ne pas aller. Je pense bien que ça n'a pas servi la ou les personnes qui ont fait l'attaque en question. C'est une lecture que je fais du résultat électoral, bon. Je le dis avec tous les égards.

Mais, une fois que j'ai dit ça, là, ce n'est pas suffisant. On fait quoi à l'avenir, hein? Est-ce qu'il y a vraiment une difficulté? Parce que, là, c'est soulevé, le fait que... Que veut dire la résidence, que veut dire le domicile? Alors, notre loi à nous parle du domicile, la loi ontarienne parle de la résidence. Alors, un Québécois peut voter plus en Ontario qu'un Ontarien peut voter au Québec. Ça, c'est comme ça que ça marche en ce moment, là. Mais je regarde notre... votre... notre président de la commission — c'est aussi le mien, excusez-moi, M. le Président — un adepte du droit et évidemment connaissant toutes les subtilités de la notion de domicile par rapport à celle de résidence, mais, franchement, tout le monde, dans le processus électoral, ne connaît pas toutes ces nuances, n'y a-t-il pas lieu d'accompagner un peu mieux le personnel électoral, de concevoir peut-être un certain nombre d'éléments qui vont permettre de mieux faire comprendre aux citoyens, ceux qui sont visés par le droit de vote, et donc le droit de l'inscription... ce qui m'amène à dire que le DGE, je le dis parce que nous avons abordé la question, devrait convoquer le comité consultatif qui aide dans tout le processus électoral pour essayer de voir comment on peut améliorer nos dispositions. Parce que, bon, même si c'était condamnable, en même temps, on n'est pas obligés de le répéter puis on peut essayer de s'aider. Alors, il y a une voie pour l'avenir, pour le faire.

Puis c'est excessivement important, M. le Président, c'est au coeur même de nos... C'est l'institution de toutes les institutions. C'est celle qui nous donne légitimité ici pour gouverner, légiférer, chercher l'adhésion des citoyens aux lois qu'on passe. Le citoyen, par définition, veut être libre, et chaque action de l'État compromet sa liberté. Pour qu'il accepte ce compromis, il doit savoir, comprendre que la règle de droit qui vient le limiter est passée avec toute la transparence, pour reprendre ce qu'on disait tantôt, mais aussi avec toute la force de la légitimité que donne une élection. Alors, dès le moment où vous laissez entendre qu'elle pourrait être volée, vous portez atteinte au coeur même du processus dans lequel vous êtes impliqué. Alors, ce n'est pas banal comme mouvement. Et je suis bien persuadé — je termine là-dessus — je suis bien persuadé que, si on avait tous la possibilité de mettre la main sur une machine à remonter le temps, il y a quelques-uns qui voudraient bien remonter avant pour effacer ce moment.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le ministre. M. le député de Vimont, à vous la parole. Il reste à peu près 10 min 30 s.

M. Rousselle : Merci, merci. J'ai bien écouté vos commentaires, et tout, justement. Mais moi, de Vimont, je me rappelle... Je vous ramène à la dernière élection. Effectivement, ça a sorti, justement, dans les journaux, dans les médias, puis, quand que je faisais, moi aussi, campagne, là, comme tous les autres, les gens avaient l'impression comme quoi que ça arrivait à coup d'autobus, là, le niveau de voteurs ontariens, là, ça arrivait d'une manière, là, effrayante, là, tu sais? Et je regarde le nombre de personnes qui ont amené ça, qui ont apporté ça devant les tribunaux puis je vois qu'il n'y en a pas beaucoup. Et c'est ça que je regarde, là, c'est comme... Pendant les élections, je pensais justement qu'il y en avait... des gens me rapportaient, ils disaient : Jean, ça n'a pas d'allure, il y en a tellement qui viennent. Effectivement, il va falloir faire quelque chose. Et je réalise qu'avec le nombre de personnes qui ont amené ça devant les tribunaux il n'y en a pas tant que ça. Pouvez-vous nous compter, voir vraiment l'impact, là, ou c'était tout simplement un faux impact ou un faux problème?

M. Fournier : ...honnêtement, là, que chacun évalue l'impact, chacun dit... a une opinion sur l'impact, mais il n'y a pas d'étude, puis il n'y a pas de sondage. Puis, même s'il y en avait, je ne suis pas sûr que je croirais que c'est le bon processus pour évaluer l'impact. Ce que je sais, c'est... ce que je peux tenter, en tout cas... C'est ma perception puis c'est tout ce que je peux vous offrir comme réponse, là, ça n'a as une valeur scientifique, ma perception. Je pense qu'au moment où, une journée, il y a eu cette allégation de faite, le lendemain, quand elle a été réaffirmée par le biais de communications médiatiques soutenant l'expression du vol d'élection, il y a certainement eu un effet dans la population.

Par contre, il y a eu correction des faits, c'est-à-dire que cette information-là n'est pas restée comme avérée pour toute la campagne. En fait, elle a été corrigée rapidement au troisième jour, peut-être au quatrième, là; mon souvenir est inexact, mais autour de ça. Donc, elle a été corrigée par une institution qui reçoit l'adhésion de la population, qui est le Directeur général des élections, qui est arrivé avec des chiffres puis il a dit : Écoutez, vous pouvez bien laisser entendre que ça déborde, mais il y en a moins qu'en 2012. Or, en 2012, personne n'a soulevé ça. Alors donc, je crois que ça a plutôt eu l'effet boomerang, c'est-à-dire que ceux qui ont soulevé cet élément-là, se faisant forts d'en déchirer quelques chemises sur le sujet, se sont retrouvés plutôt penauds quand le DGE est venu dire à la population : Bien, c'est inexact.

Alors, quelle est la perception? Je pense qu'il y a un effet sur le coup chez nos concitoyens, puis où, là, ils se demandaient vraiment : Bien, dans quel genre de république de bananes on est, hein? Puis là ils étaient inquiets. Mais après ça ils se sont dit : Bien, quel genre d'accusation cela est quand il y a si peu de fondement? Alors, les regards se sont portés à un endroit différent. Mais ce n'est pas... Moi, je ne suis pas la meilleure personne... je ne sais pas s'il y a quelqu'un qui est capable de dire : Ah, bien! Cet élément-là a entraîné ceci, cela. Personnellement, je pense que ça a plutôt eu un effet boomerang. Puis je pense que, tous, on doit apprendre de nos erreurs comme de ceux des autres. Et moi, comme gouverne, en tout cas, je me dirais qu'il faut être prudent avant de parler d'un vol d'élection. Je me dirais au moins ça.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le ministre. M. le député de D'Arcy-McGee, à vous la parole.

M. Birnbaum : Combien de temps?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Un peu moins de... un peu plus de six minutes.

M. Birnbaum : Merci, M. le Président. M. le ministre, vous avez, dans un premier temps, situé cet enjeu comme un des plus solennels, et j'en conviens. On parle de notre rendez-vous avec la démocratie le plus profond. On a vu aussi, au niveau fédéral, bon, on peut chacun avoir nos opinions, mais des projets de loi qui risquent de restreindre plus que bonifier ce rendez-vous-là. Vous avez aussi parlé de l'importance de sauvegarder l'intégrité de cet établissement, et tout ça, et vous avez dit que c'est une question qui devrait se poser pas juste sur l'État, qui s'est produit durant les élections, mais vers l'avenir. Je me demande si, de concert avec le DGE, vous avez quelques pistes de réflexion à partager avec nous sur comment bonifier cet exercice de façon évidemment étanche, légitime et démocratique? Y a-t-il des pistes à explorer?

• (16 h 20) •

M. Fournier : Bien, cette loi-là, comme beaucoup d'autres lois, demande toujours qu'il y ait adaptation, il y a une évolution. Certainement, la Loi électorale a connu suffisamment, au cours des dernières années, de modifications qui tenaient compte d'éléments qui apparaissaient tout à coup parce qu'il faut l'adapter. Alors, il y a une obligation, ce n'est même pas un désir, je pense que tout le monde souhaite qu'on ait la meilleure loi. Donc, il faut s'adapter à chaque circonstance. Dans ce cas-là, il y a une difficulté, il faut éviter qu'elle se représente ou, en tout cas, se donner les moyens pour essayer de rendre ça plus compréhensible.

Le but... on partage tous le même but. On veut que les élections soient respectées, reconnues, que les gens en aient confiance, du processus, un. On veut tous que tous ceux à qui on reconnaît le droit d'aller voter puissent y aller. Favoriser le vote, c'est presque aussi important que le processus lui-même, parce que vous pouvez avoir le meilleur processus, mais, s'il y a 10 % des gens qui vont voter, il va toujours y avoir quelqu'un qui va se demander : Est-ce qu'il y a une assise légitime très forte? Moi, j'ai toujours tendance à dire : Quand il y en a 90 % qui ont juste dit qu'ils n'y allaient pas, peut-être qu'ils se sont dit : Je fais confiance au 10 % qui y vont. J'ai toujours tendance à me dire aussi : Si tu ne prends pas la peine d'aller voter, est-ce que tu peux vraiment avoir le droit de chialer? Mais, bon, c'est très personnel. Je pense que, oui, ils ont le droit.

Mais, ceci étant, il faut essayer d'encourager la participation la plus grande. Alors, il va toujours y avoir des moments où il doit y avoir des inscriptions qui se rajoutent. Puis, vous savez, je ne referai pas le débat sur la liste permanente. On a eu, à l'Assemblée nationale, tout un débat sur la liste permanente. Je fais un aparté sur la liste permanente parce qu'effectivement, pour répondre à votre question, on a eu des discussions avec le DGE. Il faut qu'il convoque le comité consultatif, il faut qu'on analyse avec les partis puis les experts. On a plein de monde, dans nos partis, qui connaissent ça plus que nous autres, les processus, puis les moyens, puis tout ça. Mais on est revenus sur... On discutait de la modification qu'il y avait sur la liste permanente, et je me souviens d'avoir été des intervenants, dans ce débat, qui étaient, disons, plus ou moins très satisfaits d'aller dans cette direction-là.

Mais il me racontait — et je ne me souviens pas que ça avait été soulevé à l'époque, mais probablement — il racontait que ce n'était plus possible pour les mêmes raisons que vous tous vous savez, combien c'est un peu difficile de faire du porte-à-porte. On peut bien en faire, mais ce n'est pas chaque porte qui s'ouvre. Ça dépend du jour, ça dépend de l'heure, puis, quand il fait noir, la réponse n'est pas toujours bonne. Alors, imaginez que vous avez le vieux système de la confection de la liste faite parce qu'il y a des recenseurs puis il y a des gens qu'on envoie. Aujourd'hui, on aurait une complication énorme. Il y a une époque où les gens ouvraient la porte; il y en a une où, maintenant, les gens ne sont plus là ou, quand ils sont là, ils ne veulent pas vraiment l'ouvrir. Je dis ça parce que ça nous amène à dire que cette situation-là a amené un changement à la loi. Il y avait des changements dans les façons de faire.

Toutes les fois qu'on va trouver ou qu'on va favoriser... qu'on va trouver des nouveaux moyens pour favoriser le vote, c'est possible qu'il y ait un élément qui s'ajoute et qui amène une autre modification. Tantôt, je disais, parce que cela avait été touché, que peut-être que la nouvelle disposition qui favorise le vote, qui est d'amener... d'aller faire voter les jeunes ou moins jeunes dans leur établissement d'enseignement, peut-être que cela avait amené du monde à dire : Bien oui, justement, bien, je vais m'inscrire, parce que je ne suis pas inscrit. Il y en a une tonne là-dedans qui ont pu s'inscrire, et donc ça a favorisé le vote, et c'était vraiment l'objectif visé par tous les partis. Dans certains cas, ça a soulevé une problématique qui a été malheureusement dépeinte très différemment de la réalité, qui a entraîné la conséquence négative.

Ceci étant, je pense bien qu'il va falloir qu'on se dise... Puis je ne suis pas contre la notion de domicile, là, je ne suis pas du tout contre ça, là. Le fait qu'il y ait une question de résidence et de domicile me semble bien approprié. Cela étant, est-ce qu'on peut y ajouter quelques éléments de vérification du domicile? Parce que tout le monde n'est pas familier avec la notion juridique du domicile. Pour plusieurs, bien, si j'allais sur la rue, chez nous, puis je demandais à tout le monde : C'est quoi, ta résidence, c'est quoi, ton domicile, puis il y a-tu une différence dans ta tête pour toi?, je pense qu'ils me donneraient tous leur adresse résidentielle, alors que peut-être ils en ont plusieurs puis peut-être qu'ils ont une intention de résider à un autre endroit. Enfin, c'est ça qui est un peu compliqué. Mais je pense que c'est très possible d'arriver à le faire correctement.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, je vous remercie, M. le ministre. Il reste à peine quelques secondes. Je pense qu'on va passer à l'opposition officielle. Simplement pour prendre les cinq secondes qui restent pour souligner, M. le ministre, qu'effectivement le point que vous soulevez, c'est la question des lois qui sont claires, qui sont simples à comprendre pour nos concitoyens, et ça, c'est une de nos tâches importantes comme législateurs. Mme la leader de l'opposition officielle, pour un bloc de 17 min 30 s.

Mme Maltais : Merci, M. le Président. Je vais aborder le sujet qui avait été abordé puis après ça je veux parler de la refonte de la carte électorale. Je pense qu'on a quelques... j'ai une suggestion, une recommandation d'examen. Je voudrais vraiment qu'on examine une suggestion que je vais avoir. Mais, avant, je vais compléter puis je vais demander au collègue de D'Arcy-McGee d'être tout ouïe.

Vous savez, le ministre a dit quelque chose d'intéressant. Oui, il va être tout étonné que je dise ça, mais, oui, je l'écoute avec attention. Il arrive qu'il y ait des gens, en campagne électorale, qui réagissent promptement. Ça arrive. Moi, je ne m'attendais pas à ce qu'on revienne là-dessus, parce que ça arrive. Puis, à l'époque, d'ailleurs, c'était un article du Devoir qui disait qu'il y avait des problèmes au DGE, et on avait demandé que le DGE vérifie, et, à la fin, même, c'est le DGE... M. Drouin a reconnu que les membres des commissions de révision électorale pouvaient avoir certaines difficultés à interpréter la notion de domicile, exactement ce dont on parle tout à l'heure.

Mais le propos du ministre était : Il faut faire attention, en campagne électorale, parfois les esprits s'échauffent. Moi, je suis intervenue trois fois en campagne électorale. Si vous allez sur les sites, là, vous allez voir des communiqués trois fois. La première fois que je suis intervenue avec quelqu'un qui s'était échauffé, c'était l'actuel premier ministre qui a dit : Je hais ce parti, en parlant de mon parti. Je ne pensais pas resoulever ça aujourd'hui, mais, puisque vous soulevez des gens qui ont des propos échaudés, j'ai trouvé ça tout à fait inacceptable, j'ai trouvé que ça augmentait le cynisme, j'ai trouvé que ce n'était pas à la hauteur de l'homme que j'avais connu, et ce n'est pas à la hauteur des relations qu'on doit avoir entre parlementaires. Ces phrases-là, M. le Président, elles sont inacceptables, et je l'avais soulevé à l'époque. Et aujourd'hui...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la députée de Taschereau, une question de règlement. Le député de LaFontaine.

M. Tanguay : ...mais il n'a pas dit : Je hais ce parti. Il parlait des politiques de ce gouvernement. Il n'a jamais dit : Je hais ce parti.

Mme Maltais : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, très bien, alors...

M. Tanguay : Je vous en prie...

Mme Maltais : ...qui avait été dit. L'autre, cette fois-ci, elle est vraie, c'était le 19 mars. L'actuel premier ministre a dit de ma chef à moi, qui était première ministre à l'époque : Elle va y goûter. Elle va y goûter. À l'époque, j'ai dit, au nom de tout le monde, de tous les parlementaires, 19 mars, vous regarderez mon communiqué : C'est inacceptable. C'est inacceptable. C'était en campagne électorale, puis il voulait vendre sa salade, notre premier ministre, puis il était sur une radio de Québec, puis il a dit : Elle va y goûter.

Mais j'ai fait ça sobrement. J'ai fait ça très sobrement. Puis là, cette fois-ci, vous ne pouvez pas relever, parce que vous vous rappelez très bien que ma citation est exacte. C'était ce qu'a dit le premier ministre. Alors, moi, je ne revenais pas là-dessus, parce qu'en campagne électorale il arrive que les gens s'échauffent, M. le député de D'Arcy-McGee.

La dernière chose, c'est le DGE lui-même qui s'est excusé parce qu'un de ses membres avait dit qu'ils étaient en train de travailler sur un possible référendum. Bien, moi, je suis sortie puis j'ai dit : Ça ne se fait pas, parce que je respecte l'institution. J'ai même calmé le DGE en disant : On va tous se respecter, O.K., puis on va respecter l'institution. Et, le lendemain, le DGE s'est excusé. Donc, morale de l'histoire, M. le député, on fait attention parce qu'en campagne électorale, comme le disait le ministre, il y a des propos qui sont parfois réchauffés, qui sont dits à blanc, qui sont dits à chaud, puis il y a de la pression quand on recommence le travail ensemble, entre parlementaires.

La discussion que je voulais avoir avec le ministre, c'est sur la réforme de la carte électorale. Là, il y a quelque chose qui, à mon sens, ne fonctionne plus. Notre loi dit que la refonte de la carte électorale doit se faire après deux élections. Sauf que la loi, elle a été faite à une époque où on n'avait pas de gouvernement minoritaire. Là, on a une carte qui aura servi en 2012, en 2014 et on va déjà être en train de refaire la nouvelle carte électorale. Moi, ça me fait poser des questions parce que ça fait deux fois que ça arrive. Ça fait deux fois qu'on a des gouvernements minoritaires. Alors, maintenant, on a des élections à date fixe, mais maintenant, dans la loi sur les élections à date fixe, nous savons tous, nous savons tous que, dans le cas d'un gouvernement minoritaire, il peut y avoir soit renversement soit possibilité de déclencher les élections, on a gardé cet espace-là.

Je me demandais si le ministre a le goût de regarder ce qui se fait du côté du fédéral, où on a mis un certain nombre d'années minimal suite à des expériences de multiplicité de gouvernements minoritaires. Par exemple, eux, je crois que c'est aux 10 ans. Alors, je ne sais pas, c'est la première fois que j'aborde le sujet publiquement. J'ai commencé à en parler à mon caucus. Il y a des pour, il y a des contres. Il y a des comtés qui disent : Écoutez, on a beaucoup, beaucoup, beaucoup de monde, entre autres dans le 450, qui disent : C'est lourd, c'est 60 000, 70 000 électeurs. Mais, en même temps, refaire la carte électorale aux deux élections, ça aussi, c'est lourd. Je ne sais pas ce que le ministre pense de cette possibilité.

• (16 h 30) •

M. Fournier : D'abord, je veux remercier la collègue de l'aborder, parce que j'ai, moi aussi, soulevé la question. Je vais revenir sur le processus qui nous a donné la carte que nous avons en ce moment, qui va nous permettre de comprendre encore plus pourquoi on pose la question puis pourquoi ça doit nous amener à essayer de trouver une réponse, enfin.

Juste avant, je voudrais peut-être revenir sur le préliminaire, la discussion qu'il y avait entre mes collègues. Je maintiens qu'en campagne électorale il se dit beaucoup de choses, je le maintiens. Par contre, je dirais à notre collègue qu'il y a une différence entre les exemples qu'elle a donnés et ce dont on parlait à l'égard de ce qui a été dit : Un vol de votes. Et je vais m'expliquer pourquoi je vois une différence. Notre collègue a utilisé des expressions utilisées par l'actuel premier ministre à l'égard de compétiteurs dans la course électorale. Il y a une différence quand on est en train d'attaquer le DGE et le processus électoral lui-même. Lorsque l'ancien ministre de la Justice...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le ministre, un instant, on a une question de règlement. Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais : ...je ne veux pas rentrer dans un débat avec le ministre. Qu'on s'entende bien, c'est juste de dire qu'on attaquait le DGE au lieu de dire que ce n'était pas du tout d'attaque au DGE. Je pense que...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. Je ne suis pas certain que c'est une question de règlement. M. le ministre.

M. Fournier : Je fais état ici, puisqu'il y a eu l'utilisation d'expressions de l'actuel premier ministre... L'ancien ministre de la Justice, alors en fonction, ministre de la Justice, dit qu'il y a un vol de votes. «Vol de votes», c'est entre guillemets. Vol de votes! Ministre de la Justice! Et la première ministre de l'époque dit qu'elle trouve inquiétant qu'on puisse travestir le vote.

On est en train de cibler un processus électoral. Je sais bien qu'il y a une idée préconçue derrière tout ça, là, on le sait, mais honnêtement ce n'est pas de la même nature que ce que notre collègue a dit. Je ne lui enlève pas le droit de tenter d'apporter une certaine défense, mais, comme je le dis, tantôt je l'ai dit, si on avait tous accès à une machine à remonter le temps, M. le Président, je pense qu'il y en a certains qui seraient montés dedans puis qui auraient effacé ce moment. Cela dit, je n'en dirai pas plus. Ceux qui nous écoutent connaissent l'affaire, j'en ai assez dit.

Parlons de la carte. Alors, bien oui, la question de la périodicité, c'est une question qui vient nous interpeller. Comme ma collègue et d'autres qui sont ici, autour de la table, nous avons vu le processus qui a été suivi pour nous donner la liste actuelle. Je le dis parce que je pense que, pendant quelques mois, j'étais même là-dedans, je pense même que nous étions ensemble. Mais je n'ai été là que peu de temps, sept mois, mais il me semble qu'il s'en parlait déjà à l'époque. Enfin, on était dans les derniers miles de la chose. Et j'en ai discuté avec le DGE, et on me rappelait...

Parce que je me disais : Coudon, on l'a utilisée en 2012; dans le fond, elle a deux ans. C'est comme ça que je voyais la chose, hein? Et on m'a dit : Non, non, non, elle a beaucoup plus que deux ans parce que le processus est né en 2007, après l'élection de 2007, basé sur des statistiques, si je ne me trompe pas, de 2006. Donc, en fait, elle a huit ans. Bon, on peut voir ça comme on veut, là, mais — comme je dirais, on jase pour jaser — il reste qu'il y a eu une étape... Écoutez, de 2007 à, je pense — ça a fini quand? — 2011, en passant à travers un processus de : On suspend, on recommence, on change les critères, on en reparle... Ça ne finit plus! Aïe! Ça, on a vu une espèce de mélodrame autour de la carte, là, avouons-le, là. Et, bon, moi, je me dis : Est-ce qu'on doit revivre les mélodrames à chaque fois? Puis... peut-être oui, mais quand c'est nécessaire.

Alors, la réponse courte à la question qui m'est posée est de dire d'abord : J'apprécie la question parce que, dans le fond, ce n'est pas juste une question, c'est aussi un intérêt qui est déclaré, qui est présenté, qui dit : Bien, nous autres, on aimerait ça en jaser. Et je pense que le DGE, qui nous écoute, puisqu'il est tout puissant, il nous écoute en tout temps, je suis convaincu qu'il va l'ajouter à la liste des discussions qu'il a dans le comité consultatif parce qu'il veut prendre un peu l'avis de tout le monde puis voir comment les gens...

Et peut-être qu'il peut aussi donner son avis. Parce que moi, le son de cloche que j'ai eu, c'est quelque chose qui pourrait ressembler à ceci — puis là j'espère ne pas travestir ses propos, puis il les précisera, surtout que vous l'invitez : S'il fallait attendre après la prochaine, on se retrouverait à lancer le processus en 2019 ou à peu près, et ce qui impliquerait qu'en 2018 on se ferait une élection sur des statistiques de 2006. Et donc on considérait ça un peu long.

Par contre, je pense qu'il ne serait pas fermé, et nous non plus, à se demander : Est-ce qu'on doit le mettre en termes de nombre d'élections ou après une certaine période? Puis, jusqu'à un certain point, est-ce qu'on ne devrait pas faire coller la période sur des périodes de recensement? Bon, là, je ne suis pas le spécialiste des recensements. Il me semblait que ça se passait aux cinq ans puis qu'on peut en choisir deux, ça fait aux 10 ans. Mais, bon, je suis bien ouvert à ce qu'il n'y ait pas... Il faut éviter les effets pervers. Je ne les connais pas, là, mais on va demander aux gens qui sont des spécialistes là-dedans puis qui vont nous le dire, parce que je crois qu'il y a un intérêt à ce qu'on, en tout cas, au moins  évite nous-mêmes de nous dire la même chose : Elle a deux ans. Honnêtement, je me suis dit la même chose : Elle a deux ans. Et Dieu sait qu'on est passés à travers bien des péripéties.

Et toutes ces péripéties-là — parce que la question n'est pas banale — toutes ces péripéties-là, nous, on les voit sous l'angle de personnes qui font de la politique, qui font des élections, on connaît ça pas mal. Mais imaginez les gens sur votre rue. Visualisez, là, deux, trois de vos voisins, là. Eux autres, quand ils voient, dans les articles de journaux, qu'on est en train de se demander si les critères pour la liste sont bons, si c'est la bonne affaire, enlève un comté, rajoute là... il y en a quelques-uns qui peuvent se dire : Coudon, qu'est-ce qu'ils ont d'affaire à tripoter la carte? Puis ce n'est pas propice... Je le dis, je le soumets, je ne dis pas que les gens pensent ça, mais c'est une possibilité : Est-ce qu'on développe une confiance dans nos institutions quand on remet en question à chaque fois les critères qui nous...

Puis je ne dis pas que les considérations ne sont pas importantes. Dieu sait qu'on a entendu combien il est important de donner le droit de vote dans les régions, puis qu'il y a de nos collègues qui ont des comtés grands comme 10 comtés des autres, puis il faut qu'ils puissent bien représenter leur monde. Mais, en même temps, c'est une personne, un vote. Alors, comment tu... Et tout ça est un peu balayé... Je comprends de vos signes que vous voudriez que j'arrête.

Des voix : Ha, ha, ha!

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Donnez l'occasion à la députée de Taschereau de poser une dernière question.

M. Fournier : Oui, mais je l'aidais pour... Justement, je vais l'écouter.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Il reste cinq minutes.

M. Fournier : Je vais l'écouter.

Mme Maltais : Merci, M. le Président. Non, c'est toujours charmant d'entendre le leader se passionner, d'ailleurs, pour la carte électorale, qui est un sujet de passion, d'ailleurs, de débats ici. Je me souviens très bien, par exemple, que Nathalie Normandeau, alors qu'elle était ministre, avait attaqué le DGE sur la carte électorale. Alors, parlant... Tu sais, il faut toujours faire attention quand on touche au DGE, effectivement, c'est... Je suis d'accord... Finalement, j'ai réfléchi, je suis d'accord avec le ministre, il y a des gens qui rétropédaleraient, effectivement, si on remontait la machine à marcher dans le temps, de tous les côtés.

Une voix : La machine est pour tout le monde.

Mme Maltais : De tous les côtés, la machine est pour tout le monde. Non, je suis contente d'entendre ça, parce que, sur le... que vous ayez parlé au DGE. On a un peu tous ce sentiment d'inconfort face à... Ça fait deux élections, quand même, seulement que la carte est utilisée.

Moi, j'ai souvent plaidé pour que... À chaque fois qu'on a un changement de carte, on a des changements d'appartenance, on a des changements identitaires. Les gens... Dans quel comté je suis rendu? Pour qui je vote? Puis, en même temps, je comprends, un électeur, un vote, il faut se retrouver... Donc, c'est extrêmement complexe. Il ne faut pas introduire d'effet pervers, effectivement, c'est aussi très important. Mais, si on peut collaborer à ces travaux-là, ça nous fera plaisir, parce que chacun des caucus est toujours interpellé, et on a intérêt à ce que ça se passe bien puis que tout le monde se sente respecté dans toutes les régions du Québec. Je pense à votre collègue des Îles-de-la-Madeleine qui dit d'entrée de jeu : Je ne fusionnerai jamais avec Gaspé. On a collègue qui a dit ça. Alors, c'est toujours extrêmement délicat, les sensibilités régionales aussi. Donc, on peut collaborer.

Une dernière chose, peut-être un dernier sujet que je voudrais aborder. On avait, nous, de notre côté, déposé, quand nous étions au gouvernement, une loi pour abolir les primes de départ. Je sais que, soyons clairs, il n'y avait pas, mettons... il n'y avait pas unanimité autour de la table. Mais est-ce qu'on va retrouver un échange, une discussion sur soit les primes de départ, qui n'est pas obligé d'être la formule qu'on avait nécessairement déposée, nous? Mais il y a un questionnement à se poser. Les Québécois, les contribuables québécois, les payeurs de taxes se posent des questions. En même temps, moi, je comprends pourquoi la prime de départ a existé. Et on porte un lourd tribut, parfois, de faire de la politique. J'ai eu des collègues qui ont eu beaucoup de difficultés à se replacer ensuite, beaucoup de difficultés. Alors, la prime de départ existe pour certaines raisons. Maintenant, dans quelles situations devrait-on l'utiliser? Peut-être qu'il y a un autre échange à avoir là-dessus pour arriver à trouver une solution.

Enfin, il y a les primes de départ, mais l'autre chose, c'est qu'elles étaient vues dans le contexte aussi du rapport de la juge L'Heureux-Dubé et de son comité, qui voulaient qu'on revoie un peu les règles de rémunération. Ça, évidemment, ça dépend de l'Assemblée nationale, mais je ne sais pas si vous avez réfléchi à ça.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le ministre, avec deux minutes à faire à ce bloc d'échange.

Mme Maltais : Comment réussira-t-il?

M. Fournier : J'ai quand même pas mal de choses à dire, je ne sais pas si c'est possible d'utiliser d'autre temps.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Ah! On pourra peut-être solliciter le gouvernement...

• (16 h 40) •

M. Fournier : On le sollicitera. Enfin, peut-être que je répondrai en deux minutes. La question, lorsqu'elle a été soulevée, a amené un débat qui était un peu présenté de la façon suivante. En tout cas, je me souviens d'un de mes collègues de Beauce-Sud qui l'avait exprimé. C'est toujours dangereux pour des députés de régler eux-mêmes leurs propres conditions de travail. Lui, il disait : On est en conflit d'intérêts chaque fois qu'on commence avec un enjeu. Que ce soit l'un, ou l'autre, ou l'autre, il y a un problème. Alors, il avait plaidé, et, en fait, tout le monde s'était rallié à lui, là — je parle de toute l'Assemblée au complet — pour dire : Plutôt que de débattre d'un élément entre députés, pourquoi ne pas regarder l'ensemble des conditions d'emploi des députés et de le faire faire à l'écart des députés par un comité indépendant? Alors, Mme L'Heureux-Dubé, l'ancien secrétaire de l'Assemblée, et il y avait quelqu'un d'autre qui était la aussi, je ne me souviens plus de qui, en tout cas...

Une voix : ...

M. Fournier : ...le juge Bisson qui était aussi présent, donc on avait un comité de trois qui regardait ça. Et ils en sont venus à traiter plusieurs sujets, dont un sujet très pertinent dans l'actualité, le régime des rentes... le régime de retraite. Et une des recommandations du comité de l'Assemblée était de dire : Lorsque vous prenez ce rapport... Et on parlait de la prime de séparation en mandat, qui l'abolissait, qui abolissait la prime de séparation ou de transition en mandat, ne l'abolissait pas pour après le mandat, à mon avis, mais pendant le mandat. Mais il y avait plein de dispositions, sur le salaire, sur les aspects fiscaux des revenus, il y avait plein de dispositions. Le rapport dudit groupe, présenté à l'Assemblée le 29 novembre, disait : Surtout, ne prenez pas un élément à la pièce, c'est un ensemble. Alors, je me guide d'abord avec cet élément-là qui suggérait de prendre l'ensemble de l'oeuvre. Un.

Deux, élément d'information d'actualité. Donc, le comité a été créé par le Bureau de l'Assemblée nationale, le BAN, le rapport a été déposé. Suite à l'élection, le Bureau de l'Assemblée nationale s'est posé la question s'il devait revenir sur ce rapport-là et suggérer des suggestions, des recommandations, des scénarios à l'égard du suivi à donner à ce rapport. J'ai cru comprendre — en tout cas, c'est ce qui m'a été rapporté par un des membres de ma formation politique au BAN — qu'une des conclusions était de demander aux leaders des formations politiques s'ils souhaitaient permettre au BAN de faire ce travail. Je dois vous dire que j'ai signé mon autorisation à cet effet... «autorisation», c'est un grand mot, mon accord, je crois, hier — c'était peut-être ce matin, mais je pense que c'est hier — donc, permettant à ce que le Bureau puisse continuer d'approfondir... — d'ailleurs, toutes les formations sont là — d'approfondir les suites à donner à ceci.

Je crois que nous sommes... Je le dis comme ça, là, puis c'est une opinion personnelle, là, ce n'est pas... Je ne veux pas impliquer le caucus là-dedans, je ne veux pas impliquer le Conseil des ministres là-dedans. Je crois qu'on est un peu condamnés à regarder ce rapport-là à nouveau et d'y donner des suites. Je crois. Mais, bon, je suis... Il m'arrive souvent, M. le Président... Je ne suis pas toujours marié avec toutes mes idées, mais disons qu'en ce moment j'ai celle-là.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le ministre. Alors, on a amputé 1 min 40 s le bloc des députés du côté gouvernemental. Et je cède maintenant la parole au député de Dubuc. À vous la parole.

M. Simard : Merci. Merci, M. le Président. D'entrée de jeu, M. le Président, à cette commission, on a parlé de transparence. Maintenant, à la lecture des documents qu'on nous a déposés, M. le Président, nous retrouvons un énoncé dans nos cahiers qui a attiré mon attention, tout simplement. Je voudrais poser une question au ministre.

M. le ministre, le gouvernement précédent a divisé la population du Québec en présentant un projet de loi inconstitutionnel et en tentant de le faire passer pour une énonciation de valeurs québécoises. Cette énonciation a fait, je vous dirai, couler beaucoup d'encre dans les médias écrits, beaucoup d'images et de commentaires dans les médias électroniques, mais surtout beaucoup d'interventions acrimonieuses dans les médias sociaux.

En plus, on voit, à la lecture du cahier de crédits qui nous a été transmis, que des sommes importantes ont été dépensées pour ce faire. Un secrétariat a été créé, des argents ont été dépensés par le cabinet du ministre et une campagne de publicité a été mise sur pied. J'aimerais, M. le ministre, vos éclaircissements concernant ces dépenses, c'est-à-dire comment ont été utilisés ces millions de dollars des Québécoises et des Québécois et à quoi cela nous a servi, tout le monde ensemble.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, M. le ministre.

M. Fournier : Oui. Juste avant de répondre à votre question, j'ai des informations pour notre collègue de la deuxième opposition. De ce que j'ai comme relevé qui m'est fourni : en 2013, les remboursements du PLQ sont approximativement de 40 000 $; pour le Parti québécois, d'autour de 4 000 $; et, pour la Coalition avenir Québec, c'est 1 500 $ ou 7 500 $, là, le chiffre n'est pas... c'est ce qu'on me donne comme information, là, en bas de 10 000 $, disons. En 2014, pour le PLQ, 45 000 $, et on m'informe, pour le PQ, 75 000 $. Donc, c'est les informations que j'ai pour l'instant. Si jamais j'en avais d'autres, je vous en donnerai d'autres. Bon.

Bien, merci pour votre question. Je vais essayer de la remettre... Évidemment, ça relève du secrétariat. C'est des dépenses qui ont été faites durant les derniers mois. Puis, M. le Président, si vous me permettez, je vais la cadrer directement dans nos institutions.

D'abord, évidemment, on peut se poser des questions sur la pertinence de mettre pour 1,8 million de dollars de publicité. Chacun aura son opinion sur ce que voulait faire cette loi, puis je ne vais pas faire valoir mon opinion par-dessus celle d'un autre des membres de cette Assemblée. Chacun est capable d'avoir son opinion sur ce qu'était cette loi. Sans aller, donc, à ce qu'était ce projet — ce n'était pas une loi, ça ne l'a jamais été puis ça ne le deviendra pas, mais ce projet — il y a quand même eu des sommes d'argent importantes qui ont été dépensées. Bon. Je voudrais attirer votre attention surtout sur le fait que ces sommes ont été dépensées en septembre 2013 et que le projet de loi a été présenté à l'Assemblée nationale le 7 novembre 2013. J'ajouterais même qu'il apparaît à nos cahiers qu'un montant de 6 000 $ a été donné à Me Henri Brun au printemps — la date, je ne m'en souviens plus trop, c'était peut-être en mai, c'est peu important, là, mais dans cette période-là — pour donner ce qui a été présenté comme étant une opinion juridique sur ledit projet de loi qui n'a été présenté que pas mal de mois plus tard. De deux choses l'une : ou bien le projet de loi existait vraiment, et seuls les publicistes ont pu le voir pour faire de la publicité de 1,8 million; ou soit il n'existait pas avant le moment de sa présentation à l'Assemblée nationale, auquel cas l'opinion juridique valait quoi si elle était basée sur un document inexistant? Je vous laisse répondre à ça.

Mais imaginez la question suivante. Imaginez, imaginez que vous soulevez au président de l'Assemblée la grande question fondamentale pour la protection des membres de l'Assemblée nationale, la question de l'outrage au Parlement. Imaginez que vous plaidez, imaginez que vous plaidez que vous avez lu dans un article de presse deux ou trois orientations d'un projet de loi et que vous dites que de les lire dans un article... projet de loi qui visait pas mal de pompiers, pas mal de policiers, pas mal d'employés municipaux, pas mal de maires, pas mal de monde qui peuvent être tous des sources... à l'unité, tous des sources de cette une, ou deux, ou trois orientations. Imaginez que vous plaidez cela. Imaginez que vous l'avez fait il y a une semaine à peine et qu'on vous rappelle tout à coup une époque où pour 1,8 million de dollars ont été investis pour donner dans les médias, créer une impression sur un projet de loi dont les députés n'ont pas encore été saisis.

Je prends la peine de faire ce détour parce que je sais que ça intéresse particulièrement les membres de cette Assemblée, qui ont parfois eu à plaider cette chose. Je le fais avec un certain sourire, mais quand même la question se... Je le fais avec un sourire parce que je suis chaleureux et aimable, mais quand même la question de fond demeure. La question de fond demeure : Comment peut-on... Puis là je la mets sous l'angle de l'outrage au Parlement parce qu'on l'a soulevé la semaine passée, mais on peut le prendre sous un autre angle. On peut le prendre sous l'angle des citoyens. Comment les citoyens sont-ils à même d'absorber une publicité sur un projet de loi dont ils ne connaissent pas encore la teneur mais dont on veut leur dire à l'avance ce qu'elle sera? Comprenez du document, que vous ne lirez que plus tard, ce qu'il sera. Donc, j'ai déjà défini dans l'opinion publique un document qui n'existe peut-être pas encore, mais l'important, c'est que le monde ait l'impression que, lorsqu'ils vont le lire, c'est ça que ça veut dire. Un processus de définition avant terme.

Mais là je vous dis ça a posteriori parce qu'il a été effectivement déposé. Mais imaginez que vous faites toute cette opération-là et que vous envisagez de faire une élection avant même de faire le dépôt du projet de loi. Je ne veux pas prêter d'intention, mais il y a quand même eu une réunion, au lac... je ne sais plus lequel, où la première ministre s'est demandé : On va-tu en élection la semaine prochaine? Puis ça, c'était avant le dépôt. Alors, bien là, posez-vous la question : 1,8 million pour favoriser une certaine définition qui amènerait une élection? Là, je soulève la question, hein, parce que les faits ont démontré qu'il n'y a pas eu d'élection. Les faits ont démontré par la suite qu'il y a eu un dépôt de projet de loi. Mais on conditionnait l'opinion publique par le 1,8 million d'argent du public, on conditionnait l'opinion publique à voir dans ce projet quelque chose qui, une fois... lorsqu'on avait les dispositions, nous amenait à penser quelque chose d'autre. Là, je ne m'attarde pas ici sur le fond de ce que c'était que ce projet de loi, on a bien d'autres endroits... on a eu bien d'autres endroits pour en parler, et je crois qu'on devrait, dans ce cas-là aussi, utiliser la machine à remonter le temps.

• (16 h 50) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré, à vous la parole.

Mme Simard : Oui. Merci. Nous avons parlé de transparence et en parlons beaucoup, nous insistons sur cet aspect. Alors, dans un processus démocratique, je m'interroge sur l'importance d'avoir et de réaliser des études sur un projet qui effectivement divise autant la population. Est-ce que vous m'avez entendue?

M. Fournier : ...quelques décibels se sont rendus, mais il y en avait quelques autres qui embarquaient par-dessus. Je m'en excuse.

Mme Simard : C'est ce que je croyais. Alors, je disais que nous sommes dans un processus de transparence, nous parlons énormément de transparence. Dans un tel processus, alors je m'interroge sur la pertinence et l'importance de réaliser des études, donc d'avoir des études sur un projet qui divise autant et de rendre publics des résultats d'études. C'est une déformation professionnelle peut-être, me direz-vous, mais j'aime bien tout ce qui est étude et enquête et, lorsque je le fais, je mets à la disposition des gens les résultats. Alors, je voudrais vous entendre à ce sujet.

M. Fournier : Bien, c'est sûr que, dans toute matière, si on est capable de faire reposer les décisions sur ce que j'ai eu tendance à appeler dans un autre débat, la science, bien, la science, les analyses, les avis, les études dans toutes les matières, on ne se trompe pas quand on fait référence à ça. Parce que le danger, si on n'utilise pas la science, c'est d'utiliser une perception populaire orientée, hein, ou un souhait que ce que les gens pensent, que ce soit vrai ou faux, nous amène dans une certaine destination. Puis on ne se trompe pas, généralement, quand on prend même le défi d'essayer, sans changer les perceptions, au moins d'éclairer ces perceptions-là de faits scientifiques qui vont peut-être les amener dans la meilleure direction, tu sais? Donc, très favorable à ce que tous les processus décisionnels puissent être accompagnés de justifications. Bon.

Encore une fois, aborder cette question-là... Puis on sait à quoi ça fait référence. Puis je pense que, sur un débat aussi fondamental, où la Commission des droits avait été à tel point catégorique qu'il y avait une certaine lacune au niveau du support scientifique qui soutenait l'allégation que tout était constitutionnel, respectueux des chartes... à telle enseigne, de toute façon, qu'encore une fois, en période électorale, ceux qui le soutenaient ont dû le corriger et ont dû indiquer que la clause dérogatoire serait utilisée. Mais, encore une fois, c'est un élément.

La question des documents, quand ils sont des avis ou des informations qui servent au processus décisionnel, pour la bonne gouvernance, je crois que le décideur doit avoir l'ensemble de ces informations. Je donne un premier avis, je le rends public, la décision n'est pas prise, et, deux semaines après, je fais un autre avis qui fait le contraire. Je donne quoi, là? Je m'enligne vers ça, je m'enligne... J'ai-tu donné de la stabilité à ma société? Je suis-tu capable de dire que je contrôle les... Il faut garder un espace de réflexion. Donc, il y a un moment pour rendre tous ces éléments publics. Je crois qu'ils devraient être rendus publics. Je crois qu'il faut toujours s'interroger sur le moment où ils doivent être rendus publics, parce que ça fait référence à la notion de transparence. Tantôt, j'ai dit : La transparence pour une bonne gouvernance, et c'est vrai.

Prenons toujours... prenons l'exemple que je donnais tantôt sur la poussière rouge. Je crois franchement que, si c'est fait pour documenter un dossier dont l'intention, c'est de voir s'il doit y avoir des poursuites, je pense que ça doit rester confidentiel. Par contre, au moment de la poursuite, ils vont être rendus publics. Puis, à un moment donné, quand la décision est prise qu'il n'y a pas de poursuite, on peut les rendre publics. Il y a des moments, hein? C'est le moment opportun pour faire des choses. Et c'est ça qui est la réflexion sur la bonne gouvernance. Puis votre question m'amène à le rappeler, parce que, lorsque je dis... puis je vais le redire le 2 juillet, lorsqu'on refera les crédits sur l'accès à l'information, c'est probablement l'élément le plus important, au niveau pédagogique, qu'il faut faire.

Je lisais récemment le test de transparence... Le Devoir, qui titrait On a échoué le test de transparence parce que les documents qui ont été remis aux ministres lors de leur arrivée dans leur mandat n'ont pas été rendus publics. Et d'ailleurs je notais que le collègue de l'opposition officielle était d'accord avec le fait qu'ils ne soient pas rendus publics, d'abord parce que la loi actuelle, elle dit ça, un, puis on n'est pas en train de faire la prochaine loi, on est en train de faire la loi actuelle quand on prend des décisions comme celles-là.

Mais, deux, un journaliste me disait : Vous ne trouvez pas ça curieux que chacun des ministères a invoqué... — bien, souvent dans les mêmes articles, mais souvent pas les mêmes articles — vous ne trouvez pas ça curieux qu'ils ont trouvé plein d'articles différents pour dire qu'ils ne le donnaient pas? Bien, j'ai dit : C'est le contraire que j'aurais trouvé curieux. J'ai dit : Moi, là — puis là je peux me tromper — je pense qu'au secrétariat puis même à la CEIC, des secrets industriels, on n'en a pas beaucoup. Ça fait que je pense qu'on n'a pas invoqué le secret industriel. Mais il y a plein d'autres dispositions, notamment les relations avec d'autres gouvernements. Puis je le dis à l'égard de ce gouvernement-ci comme de celui qui m'a précédé, là : Quel est l'intérêt de bonne gouvernance pour la société de dévoiler des stratégies de négociation? Alors, je comprends que les gens peuvent avoir le goût de le savoir. Il y a un temps pour ça. Mais est-ce que la transparence offre la bonne gouvernance? Si la réponse, c'est oui, cent milles à l'heure. Si la réponse, c'est non, c'est : Comment on réussit à la faire en maintenant la bonne gouvernance? Alors, c'est ce défi-là.

Puis là je ne veux pas avoir de... Je ne veux pas donner l'impression, M. le Président, que je suis en train de dire que c'est la transparence sur le bout des pieds qu'on veut faire. Mais c'est tout le contraire, c'est un changement de culture global. Mais, en même temps, il faut exprimer dès le départ les effets pervers d'une avancée ou du changement de pendule d'un bord à l'autre complètement. Alors, c'est sûr que, lorsqu'on va faire de l'information proactive, honnêtement c'est quelque chose de gros, mais ça va être... puis ça ne se fera pas à un jour, un. Quand on va les faire sous la forme de données ouvertes pour que les gens puissent pouvoir comparer et faire des études, c'est gros, ça demande des ressources.

Lorsqu'on essaie... Puis ça, c'est le grand défi, je pense, puis je peux me tromper, là, mais je pense que, c'est le plus grand défi. Comment on est capables d'amener une loi d'accès qui va faire en sorte qu'on va tous comprendre la même chose? Bien, quand c'est écrit «peut donner», «peut ne pas donner si secret industriel», puis tout le monde dit : Bien, il invoque un secret industriel. Oui, mais... Parce que qu'est-ce que tu veux? Bien, je veux que tu me le donnes puis moi, je vais juger s'il y avait un secret industriel. Ah! On peut donner à tout le monde, puis tout le monde va le juger, mais c'est rendu public, puis il est trop tard.

Alors, il y a juste une... C'est cette limite-là, dans le fond, là, que... Je profite du micro pour un peu le télégraphier à ceux qui s'intéressent à ces questions-là, et je vous avoue qu'il y en a plusieurs, juste pour dire : C'est tout un changement de culture, mais on va essayer de le faire correctement. On va le faire le plus rapidement possible, on va le faire correctement. Mais l'objectif ici, ce n'est pas d'être transparent pour être transparent, c'est être transparent pour que les citoyens y trouvent un aspect de confiance, d'adhésion, pour que la gouvernance et les décisions qui sont prises soient les meilleures possible, avec le plus d'informations possible.

• (17 heures) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, je vous remercie, M. le ministre. Ceci complète les blocs que nous avions pour nos échanges, l'étude des crédits. Avant de terminer, je vais déposer les cahiers des réponses aux demandes de renseignements qui ont été transmis pour les besoins de notre étude. Voilà.

Et, en fait, avant de suspendre nos travaux, je vous remercie. C'étaient des échanges très intéressants. Lorsqu'il est question de la protection et du respect de nos institutions, particulièrement à la Commission des institutions, ça nous interpelle. Et je pense qu'il est clair pour tout le monde que ce n'est pas un enjeu de politique partisane. Alors, on va continuer à y travailler pour assurer le respect de nos institutions, la protection de nos institutions qui servent si bien le Québec.

Sur ce, la Commission des institutions suspend ses travaux jusqu'à 19 h 30. Merci.

(Fin de la séance à 17 h 1)

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