(Treize heures trois minutes)
Le Président (M. Simard): Veuillez s'il vous plaît prendre vos places. La Commission des institutions est réunie cet après-midi afin de remplir un mandat que lui a donné l'Assemblée nationale, la Chambre. La commission est donc réunie afin de procéder à l'étude des crédits budgétaires du ministère du Conseil exécutif, les programmes 1 et 2, pour l'année financière 2004-2005.
Donc, conformément à l'avis donné par le leader du gouvernement, une enveloppe de trois heures a été allouée pour l'étude de ces programmes. Évidemment, vous êtes tous conscients qu'il s'agit de crédits un peu spéciaux et qui sont, dans notre tradition parlementaire, l'occasion d'un débat qui oppose dans un premier temps le premier ministre et le chef de l'opposition. Évidemment, toute la commission peut et est invitée à y participer ainsi que le député de Rivière-du-Loup, qui évidemment aura ses droits de parole.
Alors, devant des parlementaires aguerris comme vous, je n'ai pas de mise en garde à faire, sinon que, devant cette commission, la liberté la plus entière existe. Cependant, la pratique veut que nous soyons respectueux et de l'équité et de l'égalité de part et d'autre, et je pense que tout devrait se passer de la meilleure des façons. Si jamais il y avait quelque apparence de débordement, je me permettrai de mettre mon grain de sel, mais j'espère ne pas avoir à le faire.
Et j'invite tout de suite le secrétaire de la commission à nous dire quels sont les remplacements aujourd'hui.
Le Secrétaire: Merci, M. le Président. M. Brodeur (Shefford) sera remplacé par M. Morin (Montmagny-L'Islet); M. Descôteaux (Groulx) sera remplacé par M. Bernier (Montmorency); et j'informe cette commission que M. Létourneau (Ungava) sera remplacé de 16 heures à 17 heures par M. Bourdeau (Berthier).
Lieutenant-gouverneur et premier ministre
Remarques préliminaires
Le Président (M. Simard): Alors voilà, les remplacements sont faits. Maintenant, j'invite, dans un premier temps, pour les remarques préliminaires, d'abord le premier ministre à prendre la parole.
M. Jean Charest
M. Charest: Merci, M. le Président. Et, d'emblée, j'aimerais vous présenter les deux personnes qui m'accompagnent. À ma gauche. M. André Dicaire, qui est le secrétaire du Conseil exécutif, et, à ma droite, M. Stéphane Bertrand, qui est également mon chef de cabinet.
Vous me permettrez de saluer les collègues députés, en particulier le chef de l'opposition officielle et le député de Rivière-du-Loup, et de vous dire que nous allons effectivement respecter vos consignes, d'autant plus que c'est votre anniversaire de naissance aujourd'hui. On va donc faire un effort supplémentaire, j'en suis convaincu, pour vous donner une journée ou une séance aussi agréable que possible, M. le Président.
D'abord, on entame aujourd'hui un processus d'étude de crédits et de dépenses gouvernementales pour 2004-2005. Au cours des prochains jours, c'est plusieurs commissions qui vont siéger simultanément et qui permettront aux élus qui en sont membres de débattre des crédits associés à nos choix budgétaires pendant les 200 heures qui sont prévues à nos règlements.
C'est, il faut le souligner, un moment fort dans la session parlementaire, puisque c'est vraiment l'occasion d'avoir un échange qui est plus détaillé que ce que nous avons l'habitude de pouvoir le faire dans l'enceinte de l'Assemblée nationale du Québec. C'est donc un exercice démocratique et parlementaire qui est très important non seulement aux yeux des élus, mais aux yeux de tous ceux et celles qui s'intéressent aux affaires de l'État québécois.
Pour ma part, les prochaines minutes vont me donner l'occasion de discuter de manière peut-être plus spécifique des crédits associés bien sûr au ministère du Conseil exécutif, mais ce sera aussi l'occasion de faire le point, j'en suis convaincu, de manière générale sur l'ensemble des crédits du gouvernement.
Il y a un peu plus d'un an, M. le Président, les Québécois ont porté mon gouvernement au pouvoir. Ils l'ont fait sur la base d'engagements précis que nous avions fait connaître dès septembre 2002. Permettez-moi de vous les rappeler brièvement: priorité à la santé, à l'éducation; baisses d'impôts; conciliation travail-famille a été longuement débattue également pendant la campagne électorale ? je vous les mentionne rapidement; mais il y avait également la volonté de moderniser le fonctionnement de l'État; réexaminer les modes d'intervention de l'État dans l'économie; donner plus de pouvoir et d'autonomie aux citoyens des régions; et mieux appuyer les familles québécoises. En toile de fond à tout cela, il faut le dire, M. le Président, il y a également une ferme volonté de maintenir l'équilibre budgétaire, ce qu'on appelle le déficit zéro, et de gérer les finances publiques de façon serrée.
Ces engagements constituent le fil conducteur de notre action depuis le 14 avril 2003. Nos choix budgétaires de cette année, présentés lors du dernier budget de M. le député d'Outremont, le 30 mars dernier, sont effectués en cohérence avec nos valeurs et avec nos engagements.
La priorité est tout d'abord accordée à la santé et à l'éducation. En matière de santé ? c'est notre priorité numéro un ? des investissements importants ont été faits, depuis un an, dans un contexte budgétaire qui, on le sait, là, n'a rien de facile. Depuis un an, c'est 2,2 milliards de dollars qui ont été réinvestis dans la santé, 1 milliard supplémentaire presque dans le dernier budget, et, il faut le souligner, ça représente 72 % de la croissance des dépenses de programmes du gouvernement. 72 % de ce qu'on avait de disponible en termes de croissance de dépenses est allé directement à la santé.
Ces investissements viendront renforcer la démarche visant la mise en place des réseaux locaux de services de santé que nous avons lancés il y a de cela plusieurs mois. Cela s'ajoute aussi aux 120 millions de dollars consacrés à l'agrandissement de nos quatre facultés de médecine et à l'accroissement substantiel du nombre d'étudiants en médecine et en techniques infirmières. Concrètement, ce sont des milliers de patients de plus qu'avant qui ont été opérés ou qui ont pu bénéficier de services de soins de santé à domicile.
En matière d'éducation, un effort important a également été effectué sur le plan budgétaire: un budget de 11,8 milliards, soit 309 millions de dollars de plus que l'année précédente. Ça, ça représente un accroissement de 2,7 %. Mais, pour le situer dans l'ensemble des choix, c'est 23 % de la croissance des dépenses de programmes qui ont été canalisés vers le secteur de l'éducation. Alors, vous voyez, dans un cas, 72 % est allé à la santé, 23 % est allé à l'éducation. Ça vous donne le portrait du choix, des choix que nous avons faits et de la conformité des engagements que nous avions pris bien avant l'élection générale.
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(13 h 10)
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Le gouvernement effectue également un premier pas pour soulager le fardeau des contribuables en leur retournant 1 milliard, tel qu'il s'était engagé à le faire. Dans une première étape, la priorité est accordée à celles et à ceux qui ont le plus de besoins, c'est-à-dire aux familles puis aux travailleurs à faibles revenus. À travers ces baisses du fardeau fiscal, nous posons des gestes concrets afin d'aider les familles, les personnes à faibles revenus et la classe moyenne. 550 millions de dollars sont prévus pour le soutien aux enfants; 240 millions pour la prime au travail, une initiative dont je suis particulièrement fier et qui va valoriser le travail et la pleine participation des citoyens québécois à la société québécoise, via le travail, via l'occasion de se valoriser, de travailler, de contribuer; 220 millions de baisses d'impôts pour l'ensemble des contribuables par l'instauration d'un régime unique d'imposition des particuliers. Cette réforme aide en priorité, je le répète, les familles à faibles et à moyens revenus. Ce soutien aux familles et aux travailleurs sera plus simple, plus équitable, plus incitatif au travail.
De plus, le revenu disponible pour les familles de la classe moyenne sera augmenté significativement. Ensemble, le soutien aux enfants et la prime au travail procureront des gains substantiels pour les familles à faibles et moyens revenus. Par exemple, pour un couple ayant deux enfants puis un revenu modeste de 15 000 $ par année, c'est 4 530 $ annuellement de plus qu'actuellement. Pour un revenu de 35 000 $ par année, c'est 1 405 $ de plus qu'actuellement. Pour un revenu de 85 000 $ par année, c'est 249 $ de plus qu'actuellement. Et on se rappellera qu'au Québec le salaire industriel moyen est d'environ 35 000 $. Les couples avec deux enfants seront avantagés jusqu'à un revenu de 91 225 $ par rapport au régime actuel. Sur le milliard de réduction d'impôts, nous accordons 775 millions aux familles à faibles et moyens revenus. Près de 1 million de familles bénéficieront de l'allégement fiscal. Pour près de 30 % des familles ? c'est presque 300 000 familles ? les gains dépasseront 1 000 $ par année.
Le gouvernement, il faut le dire, a respecté ses engagements en matière de lutte contre la pauvreté: 2,5 milliards sur cinq ans pour respecter la loi contre la pauvreté; 256 millions pour 16 000 nouveaux logements sociaux.
Le budget pose également les premiers jalons d'une nouvelle stratégie de développement économique davantage axée sur les PME et les régions et qui vise à mieux soutenir et mieux stimuler l'investissement privé, en vous rappelant, M. le Président, que l'investissement privé, c'est précurseur de création d'emplois, d'où notre insistance de toujours aller voir ce qui se passe de ce côté-là pour s'assurer que nous fassions, que nous proposions les meilleurs choix possibles.
Il y a la création d'un nouveau fonds de 300 millions, le Fonds d'intervention économique régional ? FIER, pour l'acronyme ? en partenariat avec le secteur privé. Il y a aussi les mesures pour aider les régions ressources: prolongation du crédit d'impôt pour les activités de transformation; la réintroduction de l'admissibilité des équipementiers; l'augmentation de 30 % à 40 % du taux de crédit d'impôt pour la création d'emplois en Gaspésie et dans les régions maritimes; la reconduction permanente des actions accréditives; la réforme du Régime d'investissement coopératif; et les mesures pour le retour des jeunes en région.
Maintenir le déficit zéro, je l'ai dit il y a une minute, était aussi et demeure une priorité de mon gouvernement. Les gestes que nous avons posés ont pu l'être malgré un contexte budgétaire qui est très difficile, car nous avons eu le courage de faire les bons choix. C'est pourquoi nous présentons pour cette année un budget équilibré. Il en est aussi de même pour l'année dernière, hormis les pertes exceptionnelles de la Société générale de financement.
Il y a deux défis incontournables à relever, M. le Président: le piège budgétaire et le défi démographique. Gouverner, comme je viens de l'indiquer, de toute évidence, c'est choisir, on le sait, mais c'est aussi prévoir, prévoir et se préparer aux grands défis qui nous confrontent, gouverner pour que non seulement nous puissions avoir la capacité de réaliser nos ambitions, mais aussi pour que la génération qui nous suit puisse, elle aussi, réaliser les siennes. Dans cet esprit, parallèlement à la gestion courante des affaires de l'État, nous devons aussi regarder loin en avant et nous préparer à relever deux grands défis collectifs vitaux qui, par leur portée, vont fortement influencer l'avenir du Québec en termes de prospérité et de qualité de vie.
Le premier, c'est l'assainissement structurel des finances publiques, et le deuxième, c'est les changements démographiques majeurs qui, lentement mais sûrement, vont changer en profondeur le visage du Québec au cours des prochaines années. Je dis lentement, mais, dans le fond, c'est beaucoup plus rapide que ce que la majorité des gens ont pu apprécier.
Je commence sur le plan budgétaire. D'abord, le Québec est confronté à un problème de fond qui rend ses finances publiques chroniquement fragiles. Ce problème, on peut le résumer en quelques constatations fondamentales.
La première, la première de ces constatations, c'est que nous dépensons plus en services publics que les autres provinces canadiennes même si nous sommes collectivement moins riches. En 2002-2003, le Québec a dépensé 715 $ de plus par personne que la moyenne des autres provinces en services publics, alors que la richesse par habitant y était inférieure de presque 5 000 $, 4 900 $ pour être plus précis. Par rapport à l'Ontario, notre voisin immédiat, cet écart est encore plus frappant, c'est 1 457 $ de plus, alors que la richesse est inférieure de 6 500 $ par personne. Concrètement, ce que ça veut dire, c'est que ça veut dire que nous allons continuer à dépenser parce que nous tenons aux services publics et nous pouvons le faire, mais il faut être conscients que cela devra s'accompagner d'une création de richesse plus importante.
La deuxième constatation, non seulement nous dépensons plus qu'ailleurs en étant moins riches, mais le rythme de croissance de nos dépenses est plus élevé qu'ailleurs au Canada. De 1999 à 2003, les dépenses du gouvernement du Québec ont augmenté de 15 %, contre 13 % pour la moyenne canadienne, 9 % pour l'Ontario.
La troisième constatation, c'est que nos dépenses croissent plus vite que nos revenus. Ici aussi, le message est simple à comprendre. À défaut de changer les choses, le Québec est engagé sur la voie rapide du déficit et d'un endettement chronique.
Quatrième constatation, malgré l'atteinte du déficit zéro, le poids de la dette publique n'a cessé de s'alourdir depuis quelques années. Elle a augmenté de 14 milliards de dollars depuis 1997-1998. Le service de la dette est le troisième poste de dépenses du gouvernement du Québec après la santé et l'éducation. Alors, en dépenses en priorité pour la santé cette année, c'est plus de 20 milliards de dollars pour la première fois de notre histoire, suivi de l'éducation qui est presque, presque à 12 milliards de dollars, suivi des intérêts sur la dette à 7 milliards de dollars. Alors, ça vous donne une idée de la situation avec laquelle nous devons composer.
Cinquième constatation, on est déjà les plus imposés au Canada. L'État québécois ne peut pas accroître les impôts. Au niveau des finances publiques, nous sommes donc dans une situation où manifestement, ça, il faut le dire d'emblée, le statu quo n'est plus possible au Québec. Ce n'est pas possible pour nous de défendre, de maintenir ou d'accepter le statu quo sur ces deux grandes questions.
C'est un peu comme si on était devant trois portes. La première de ces portes, ça, c'est celle de l'impôt, si on choisissait d'agir. Puis, quand on ouvre cette porte-là, c'est un mur qui se dresse devant nous. On ne peut pas augmenter le fardeau fiscal des Québécois, on est déjà les citoyens les plus taxés en Amérique du Nord. La deuxième porte, c'est l'endettement, s'endetter davantage et utiliser le crédit pour réaliser nos projets. Sauf qu'on est déjà parmi les plus endettés en Amérique du Nord. Et cette porte a été ouverte, très grande ouverte depuis les 40 dernières années.
Concrètement, nous nous retrouvons devant une situation où l'État ne peut plus se permettre d'augmenter la dette ni d'accroître les impôts. À ce titre, nous sommes en face d'un véritable piège budgétaire qui, de plus, s'aggrave d'année en année. Ce qui nous amène à la dernière porte, la seule qu'il nous reste, en fait, celle qui nous amène à faire les choses différemment, et la seule que nous pouvons ouvrir si nous voulons construire le Québec. Si le Québec veut continuer, et il doit continuer à se développer, il est évident, sur le plan des finances publiques, que la situation actuelle ne peut se prolonger. Et je ne pense pas exagérer aujourd'hui en vous affirmant qu'il y a urgence d'agir.
Dans un autre ordre d'idées, une autre question de plus en plus préoccupante, c'est la deuxième que j'avais identifiée, c'est celle de la démographie, qui ajoute en plus, comme on le sait, un élément de pression supplémentaire sur les finances publiques, parce qu'un vient se juxtaposer à l'autre. Jusqu'à tout récemment, il n'y avait que les démographes qui parlaient de démographie. Aujourd'hui, tout le monde en parle. Ce n'est pas un problème lointain pour lequel on a amplement de temps à réfléchir non plus, plus maintenant, parce qu'il y a aussi urgence d'agir.
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(13 h 20)
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La baisse continue de la natalité, depuis 40 ans, change lentement mais de façon incontournable le visage du Québec. Le vieillissement de la population qui en découle a des impacts majeurs sur notre économie et notre société. D'ici sept ou huit ans ? hein, quand on y pense, c'est demain ? on prévoit un plafonnement et une diminution de la population en âge de travailler. Autour de 2018, pour l'illustrer autrement, le nombre de personnes de 65 ans et plus va dépasser le nombre de jeunes de 18 ans et moins.
Les conséquences de tout ça sont énormes. En 1971, on comptait huit personnes en âge de travailler pour un retraité. En 2001, c'est cinq pour un, puis, si la tendance se maintient, dans 25 ans le rapport ne sera plus que de deux pour un. On peut d'ores et déjà imaginer la pression fiscale qui va s'exercer sur les générations futures si rien n'est fait. Alors, justement là-dessus on n'a pas l'intention de rester les bras croisés.
Face aux défis associés aux finances publiques et à la démographie, j'ai une conviction profonde, comme gouvernement, nous avons deux tâches colossales à mener de front. Il faut dépoussiérer et moderniser le fonctionnement de l'État québécois. C'est en bonne partie pour cette raison que nous avons été élus, et nos priorités à plus court terme vont en ce sens. La deuxième tâche fait rarement la première page des journaux. Elle est extrêmement importante. Il s'agit pour nous d'anticiper, de se préparer, de poser des gestes maintenant pour préparer le Québec de demain. Et notre volonté d'apporter des réponses aux défis des finances publiques et de démographie s'inscrit exactement dans cette logique.
L'objectif recherché ici va donc bien au-delà d'un dépoussiérage de l'État. On veut plutôt nous assurer, en plus d'avoir un État qui dessert mieux les citoyens, un État qui est en lien avec leur capacité de payer aussi, on veut que le Québec ait entre les mains les outils et les réflexes nécessaires pour que nous puissions tirer notre épingle du jeu dans cette nouvelle économie et que nous puissions justement saisir les occasions qui se présentent à nous. Et nous voulons accroître la prospérité et la qualité de vie de chacun de nos concitoyens.
Relever ces défis commande des choix, et ces choix, bien, on veut que ce soit les bons. C'est dans cet esprit que nous avons procédé, le 11 mars dernier, au lancement du plan d'action stratégique que notre gouvernement a baptisé Briller parmi les meilleurs et d'une démarche de dialogue que nous amorçons ce printemps avec tous les Québécois dans le cadre des forums en région. Nous avons une idée claire du Québec que nous voulons pour demain. Cependant, la portée des enjeux en cause, sur les plans démographique et budgétaire, nécessite des décisions et des choix collectifs qui vont influencer le Québec pour longtemps.
M. le Président, vous connaissez le thème de ces forums thématiques. On va parler de santé et de services sociaux, d'éducation, de formation en emploi, de développement économique, régional et durable, de famille et de développement social. Et l'objectif poursuivi, c'est que nous puissions ensemble, Québécois, apprécier et bien comprendre les défis qui se présentent à nous et qui vont se décliner sur les quatre thèmes et sur notre vie pour les prochaines années.
M. le Président, je sais que le temps nous échappe. Il y a peut-être quelques informations que j'aimerais partager avec vous, les membres du comité, sur les crédits du Conseil exécutif avant de céder la parole au chef de l'opposition officielle. J'aimerais vous souligner qu'il y a, cette année, une augmentation à première vue substantielle des dépenses du Conseil exécutif. Mais, pour bien comprendre les chiffres qui vous sont présentés, j'aimerais vous préciser ceci.
Les dépenses de fonctionnement du Conseil exécutif ont été réduites de 8 % en 2004-2005, soit une baisse de 4,6 millions de dollars. Il y a des augmentations de dépenses à quatre postes en particulier. Le premier de ces postes, c'est suite à l'entente que nous avons conclue, le gouvernement du Québec, avec les Cris, la «Paix des Braves» que connaît bien le chef de l'opposition officielle. Les sommes versées aux Cris seront en hausse de 24 millions de dollars en 2003-2004. Cela va permettre, entre autres, à la communauté crie de livrer des services que livrait autrefois le gouvernement du Québec sur le territoire de la Baie-James en particulier. Par ailleurs, j'aimerais souligner avec beaucoup de fierté la réussite de la négociation d'Hydro-Québec avec la communauté crie, qui a été rendue publique la semaine dernière, et qui est faite dans la foulée de la «Paix des Braves», et qui va nous permettre également de régler des contentieux qui sont vieux de plusieurs années.
Le deuxième facteur, c'est le prolongement de l'entente de développement économique signée avec les Inuits. Encore là, M. le Président, il s'agit d'un exercice administratif où on a regroupé au Conseil exécutif l'ensemble des dépenses faites dans d'autres ministères. Il y a une augmentation nette aussi de 3,3 millions de dollars par rapport aux dépenses de 2003-2004, mais cela se reflète également dans les crédits du Conseil exécutif.
Troisième facteur, c'est la dépense, les dépenses liées au Conseil de fédération: 2 millions de dollars dévolus pour la quote-part du Québec. Le Conseil de fédération ? j'anticipe des questions du député de Mercier là-dessus ? c'est, vous le savez, une nouvelle approche que nous avons proposée pour la Fédération canadienne. Et cela explique les crédits de 2 millions.
Quatrième facteur, c'est le Plan d'action jeunesse. On prévoit une somme de 10 millions de dollars supplémentaires pour les forums jeunesse régionaux.
Vous avez donc là, M. le Président, des explications sommaires pour ce qui est des chiffres stricts qui touchent les dépenses et les crédits du Conseil exécutif. Je terminerais en vous remerciant de l'attention que vous nous accordez aujourd'hui. Mais j'espère avoir l'occasion de discuter de façon très ouverte avec mes collègues des choix que nous avons faits et surtout des grands débats qui viennent. Et j'espère surtout avoir l'occasion d'entendre de la part de tous mes collègues, M. le Président, des suggestions constructives pour que nous puissions travailler ensemble pour l'édification du Québec. Merci.
Le Président (M. Simard): Je vous remercie, M. le premier ministre. Maintenant, nous allons entendre le chef de l'opposition officielle qui va, au cours des 20 prochaines années... ? 20 prochaines années, c'est bien parti ? des 20 prochaines minutes nous faire valoir son point de vue.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bernard Landry
M. Landry: Je suis prêt à faire un bout, M. le Président, mais là vous êtes allé vraiment...
Une voix: ...prolonger votre carrière.
M. Landry: D'abord, puisque vous parlez d'années, je veux vous souhaiter un bon anniversaire pour celle qui commence pour vous. Et, quand je vous dis bonne fête, c'est au sens premier du terme et non pas au sens agressif qui fut utilisé au Québec, au cours des dernières semaines.
J'ai écouté attentivement le premier ministre et je me suis posé plusieurs questions mais une centrale: Est-ce que, alors qu'il nous donne ce discours du début des crédits, le premier ministre est conscient de l'état d'esprit du Québec dont il dirige le gouvernement national? J'espère qu'il le sait que le taux de satisfaction est dérisoirement bas et que jamais un gouvernement en 12 mois n'a semé autant d'inquiétude, autant d'angoisse, autant de déprime dans à peu près toutes les couches de la société québécoise. J'espère qu'il le sait. Et, s'il le sait, il peut y avoir un certain espoir qu'il fasse les corrections qui s'imposent. S'il ne le sait pas et il fait semblant de ne pas le savoir, bien là c'est une très, très mauvaise nouvelle parce que ça veut dire que ce cauchemar va durer.
Comme opposition, on pourrait dire: On va profiter de ça politiquement, on va... C'est comme citoyens et comme citoyennes du Québec que nous sommes désolés par la situation présente. Ce qui est important, ce n'est pas le niveau de popularité d'un gouvernement ou d'impopularité, dans le cas qui nous occupe, c'est le niveau d'avancement du Québec, le niveau de cohésion de la société, la croissance économique, le développement social, le développement culturel, toutes choses qui sont en panne comme elles ne l'ont probablement jamais été depuis la Révolution tranquille et même avant. Depuis 1960, un gouvernement qui mécontente tout le monde et qui sème autant d'angoisse en moins de 12 mois, ça ne s'est jamais vu.
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(13 h 30)
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Et on peut être perplexe sur les causes tellement il y en a. Comment un tel éventail de gestes négatifs a pu être conçu? Ça va rester un mystère pour les politologues pendant longtemps. Mais je pense bien que le mot «improvisation» est un mot clé. Les ados sont aptes à développer des blagues rapidement avec tous les éléments de la conjoncture. Quand on demande à un ado aujourd'hui: Es-tu prêt? s'il répond oui, ça veut dire: Attends-moi deux, trois heures. Ils se sont développé une blague avec ce qui était le slogan de l'ancienne opposition et aujourd'hui devenue gouvernement parce que la réponse que leurs actions ont donnée est tellement opposée à ce qu'ils claironnaient. Dans toutes les régions, dans tous les groupes sociaux, travailleurs, travailleuses, étudiants, gens d'affaires ? où normalement, au moins pour un segment, le Conseil du patronat, on aurait pu voir se développer une certaine sympathie ? groupes communautaires, l'inquiétude est généralisée.
Le premier ministre pourrait me dire que j'ai plus de temps que lui pour le faire. Oui et non. J'ai visité toutes les régions du Québec, en particulier j'ai été dans 30 cégeps et universités, ce qui m'a amené dans l'ensemble du territoire. Je lui conseille de le faire. C'est impérieux qu'il le fasse pour aller se rendre compte jusqu'à quel point il fait fausse route dans tous les domaines de la gestion.
Le réseau de la santé est frappé de plein fouet par des réformes de structures, alors que la priorité devait être aux malades, évidemment. Les réformes de structures, même si elles étaient pertinentes ? et cela n'est pas démontré ? n'étaient sûrement pas la priorité de notre système de santé. Des structures qui avaient été mises en place d'ailleurs par un gouvernement qui nous a précédés et que nous avions raffinées et corrigées ne valaient pas la peine qu'on sème l'inquiétude et l'insatisfaction dans tout ce réseau pendant des mois, et des mois, et des mois, où, au lieu de s'occuper des vraies priorités, on s'occupe des organigrammes.
Les cégeps eux-mêmes se demandent s'ils vont survivre parce que le gouvernement a laissé planer sur ces institutions un doute qu'il a été lent et mou à corriger. Les universités, dont j'ai rencontré à peu près tous les recteurs, n'ont reçu aucun réinvestissement.
Au niveau du développement régional, autre beau cas de structurite aiguë, on avait fait un sommet national des régions où personne n'avait réclamé de changements de structures. Tout le monde avait réclamé des programmes d'action, des programmes de développement, des programmes de soutien à l'entrepreneurship, à la technologie en région. On se lance dans une réforme de structures accueillie très froidement au mieux, de façon très agressive dans bien des cas. Et de toute façon ça n'est encore que de la structurite qui ne crée pas un seul emploi, n'améliore aucunement les infrastructures, n'améliore aucunement le climat d'espoir dans les régions. Et, en prime, un très grand nombre de participants de la société civile, des bénévoles impliqués dans le développement de notre société, ont été mis au rancart par ces réformes de structures, et malheureusement une majorité de ces personnes étaient des femmes qui courageusement s'étaient impliquées dans le développement de notre société.
Alors, comme Québécois, comme citoyen, comme député, comme ancien premier ministre et ancien ministre des Finances, je m'inquiète sérieusement du climat d'affrontement généralisé dans lequel le premier ministre a plongé le Québec. Je m'inquiète aussi des conséquences de l'amateurisme dont le gouvernement fait preuve et de la morosité qui règne dans les régions, où l'espoir avait continué à monter au cours des dernières années.
Donc, j'espère que le premier ministre le sait, qu'il le sent, que ses conseillers le lui disent, il doit se ressaisir. Le gouvernement national du Québec, qui a été un levier de premier ordre de notre reconstruction collective, doit rapidement le redevenir. Il faut que les divers groupes sociaux, qui ont trouvé cohérence dans leur action de société à travers l'action du gouvernement, ses plans, ses espoirs, retrouvent cet esprit et le plus rapidement possible.
On aurait pu croire, puisque le premier ministre savait déjà dans quel désarroi il avait plongé la population, que son ministre des Finances et lui-même se serviraient du dernier budget pour rétablir les choses. On sait qu'il n'en fut rien. En termes de scepticisme, de bris de confiance entre le gouvernement et la population, le dernier budget a aggravé les choses. Ça ressemble à une supercherie, à une imposture, même dans le vocabulaire employé. Le premier ministre paie aujourd'hui pour des écarts auxquels il s'est laissé aller alors qu'il était chef de l'opposition et après qu'il fut devenu premier ministre.
Je donne un exemple: confier une étude à Guy Breton, ancien Vérificateur général. Breton, avec une méthode qui lui est propre et qui n'était pas fondamentalement fausse... Il disait des choses réalistes. Il disait: Le budget des hôpitaux n'est pas dans le cadre comptable du gouvernement, il y a 800 millions de déficit là, donc il y a eu 100 millions de déficit des hôpitaux. Et, en faisant ça, il monte à quatre virgule quelques milliards de dollars. Et là le premier ministre se lance dans un spectacle invraisemblable, carnavalesque, crie au meurtre: 4,4... Un trou, il appelait ça.
Il sait très bien que, s'il prend la même méthode Breton ? je lui avais suggéré d'ailleurs de demander à M. Breton d'appliquer sa méthode à ce que le gouvernement fait depuis qu'il est là ? il n'arrive pas à 4, il arrive à 6. Si le premier ministre hurlait à 4, il faut qu'il hurle une bonne fraction de plus pour être simplement sincère. C'était grave, 4? Alors, 6,5, c'est plus grave. Ça, la population est capable de compter largement plus qu'à 6,5, et est capable de faire la différence entre 4 et 6, et est capable de faire la différence entre une préoccupation sincère pour les finances publiques et une mascarade.
Pour la dette, c'est un peu la même chose. Et c'est l'addition de toutes ces forfaitures qui a fini par miner profondément la confiance dans le gouvernement. La dette, là, le premier ministre vient encore d'en parler de la dette, oui, il y a une dette au Québec, une dette accumulée importante, d'une centaine de milliards de dollars, qui doit être affrontée un jour. Elle ne l'a pas été, presque à aucun moment, au cours des dernières années, sauf à quelques reprises dans des budgets, sous notre gouvernement, où on a mis l'argent à la dette. Mais il ne faut pas jouer avec le concept de dette. Il faut dire les choses vraies, telles qu'elles sont.
Il nous disait, quand il était dans l'opposition, que la dette avait augmenté de 11 milliards au cours des cinq dernières années, et c'est vrai. Ce qu'il ne disait pas, c'est que c'est largement pour une question de convention comptable, approuvée par tous les experts comptables, y compris Breton, à l'effet que les profits d'Hydro-Québec, par ce mécanisme comptable, sont comptés à la dette. Alors, quand le chef de l'opposition d'autrefois ou le premier ministre d'aujourd'hui se promène en disant 11 milliards, il essaie de rameuter tout le monde avec une chose extrêmement sérieuse sans dire ce qu'il en est vraiment.
Mais là il est plus coincé que ça. Parce que, quand il parlait de 11 milliards d'augmentation au cours des cinq dernières années, il nous faisait un sacré beau compliment parce que, en effet, cette année, la dette a augmenté de 3,4 alors qu'il est premier ministre, que le député d'Outremont est ministre des Finances, mais, si on avait eu ce rythme d'augmentation avant, ce n'est pas 11 milliards qu'on aurait eu, c'est 17. Puis, si je vais un peu plus loin, il nous a fait un double compliment parce que, dans les années qui ont précédé notre arrivée, mon arrivée en particulier personnellement au ministère des Finances, le déficit annuel était de 6 ? pas des conventions comptables concernant Hydro-Québec, là, le vrai déficit ? alors, ça aurait fait, ça... pendant cinq ans, ça aurait fait 30 milliards accumulés juste par le déficit. Là, on en a eu 11, là, en cinq ans, sous notre régime, et, lui, il a eu 3,4 en un an. C'est ça qui finit par miner la crédibilité d'un chef d'État.
Je ne veux pas dire que les finances publiques, c'est chose facile, hein. Je ne suis pas en train de dire que le premier ministre est coupable du déséquilibre fiscal. Je suis en train de dire que, s'il veut regagner de la crédibilité auprès de la population du Québec, s'il veut que les gens reprennent confiance, il faut qu'il leur dise les choses franchement quand elles sont bonnes à entendre comme quand elles sont mauvaises à entendre.
Ce qui a fait très mal aussi à notre vie collective et notre vie civique de la dernière année et des derniers mois, c'est toutes ces promesses rompues. La population est déjà sceptique pour toutes sortes de raisons vis-à-vis les institutions démocratiques, qui ne sont pas parfaites et qui pourraient être améliorées, mais il ne faut pas en remettre, il ne faut pas pousser le viol des promesses jusqu'à la comédie d'erreurs. Ça, tout le monde s'en est aperçu aussi, hein? Même les sympathisants libéraux s'en sont aperçus. Il y a moins de sympathisants libéraux qu'il y en a avait d'ailleurs avant que ce dérapage ne se produise.
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(13 h 40)
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Il avait promis 2 milliards en santé. La santé, c'est crucial, on est d'accord là-dessus. Il sait que c'est une priorité, je le sais que c'est une priorité. Il met la moitié moins. Pensez-vous qu'il n'y a pas des gens dans le réseau de la santé qui savent compter puis qui ont regardé ça puis qui ont vérifié?
En éducation, il y a 300 millions pour l'éducation dans le budget du ministre des Finances, alors que la présidente du Conseil du trésor indique que 340 seront nécessaires seulement pour payer l'augmentation des coûts reliés à la rémunération. Pas besoin d'être recteur d'université pour faire le calcul, pas besoin d'être étudiant en mathématiques, n'importe qui voit bien, là. Vous auriez pu dire: On n'a pas l'argent, alors on ne vous en donnera pas, et on n'en mettra pas, on n'en a pas, et on va vous indiquer quelles sont les causes de ce manque d'argent. Au lieu de ça, vous avez fait des promesses.
Baisses d'impôts, c'est un mot... C'est important, baisses d'impôts. Pour le ministre des Finances, c'est très agréable de baisser les impôts, puis c'est important de le faire, quand il le peut. J'ai eu le plaisir, moi, de baisser les impôts de 12 milliards quand j'étais ministre des Finances, et c'est une des belles choses que j'ai faites dans ma vie. Mais c'étaient des vraies baisses d'impôts, ce n'étaient pas des mouvements déguisés dans le budget. Ce que le premier ministre a annoncé et ce que son ministre des Finances a confirmé dans le budget, c'est que les soi-disant baisses d'impôts prendront effet à partir de 2006-2007, dans deux ans. Un travailleur de Contrecoeur, là, qui attend la baisse d'impôts, il le sait quand est-ce qu'elle va arriver, il le sait qu'il ne l'a pas puis il le sait que ça va être dans deux ans.
Une autre chose aussi. Et ça, les fonctionnaires des Finances, qui sont la catégorie sociale pour laquelle j'ai à peu près le plus d'admiration, au moins en termes intellectuels, ont dû être outrés de voir qu'un programme social a été baptisé de baisse d'impôts. Mais voyons donc! Ça a dû vous faire mal, messieurs et mesdames, de voir que votre compétence a été mobilisée malgré vous pour une imposture lamentable. Si on baisse les impôts, on baisse les impôts puis on en est fier et content. Puis, si on fait un programme social, on fait un programme social puis on en est fier et content. Puis, si on fait un programme social ? sur lequel je reviendrai ? et qu'on le déguise en baisse d'impôt, c'est un élément de destruction de la confiance dans nos institutions démocratiques.
Le ministère des Finances du Québec, depuis des décennies, c'est une équipe d'hommes et de femmes fiables et qui nous ont habitués à un vocabulaire, aussi bien du temps du regretté Gérard D. Levesque que par la suite, qui ne confondait pas le jour et la nuit ou un cheval avec un lapin. Je souhaite que le ministère des Finances reviendra à la transparence à laquelle on était habitués et non pas à des confusions de vocabulaire grossières qui consistent à déguiser un programme social en baisse d'impôts.
Alors, tout le monde s'est rendu compte que les engagements du Parti libéral n'ont pas été respectés. Et, aujourd'hui, ce qu'on a vu, c'est que le premier ministre persiste et signe. Je comprends que sa situation n'est pas facile. Il avait aujourd'hui le choix de faire un discours de courage qui aurait été: On s'est trompés dans notre cadre financier, on vous a fait toutes sortes de promesses qu'on n'est pas capables de réaliser. Son niveau d'estime dans la population aurait remonté à l'issue de son discours. Il n'a pas fait ça. Il a continué, il nous a fait le discours des trois portes, etc. Bon. On n'a pas le temps d'en parler, mais j'en aurais une quatrième porte dont je vous reparlerai un de ces jours.
Les gens, là, qui ont fait le calcul, là, qui ont des hausses de tarifs de 785 millions de dollars, hein, et qui se sont rendu compte que, par une astuce comptable touchant la formule d'indexation, le ministre des Finances en plus va chercher dans leurs poches un autre 400 millions de dollars, ils n'ont pas, après le discours du premier ministre, eu une meilleure impression ni du premier ministre ni de nos institutions démocratiques. Alors, quand on est dans une situation complexe comme le Québec l'est sur le plan financier, il faut être prudent, il faut faire attention. Malgré ce qu'il peut y avoir d'intéressant de baisser les impôts et le niveau de la fiscalité, quand on ne peut pas le faire, il faut avoir le courage de dire: On ne peut pas le faire.
L'actuel ministre des Finances, il a écrit un rapport pour le compte de notre gouvernement qui a eu l'appui unanime du Québec, y compris celui de l'opposition officielle du temps, qui a été confirmé par le Conference Board, qui disait qu'il y avait un déficit structurel avec Ottawa de 2,5 milliards par an. Sur deux ans, si on parle du budget qui a été mis sur la table par le ministre une fois, plus le deuxième, ça fait 5 milliards. Tout le monde aurait compris, s'il avait parlé franchement, qu'il n'était pas capable de baisser les impôts. Ça aurait même été une erreur et même une erreur stratégique grave de prétendre qu'il peut baisser les impôts puis aller à Ottawa le lendemain puis dire: Tu me dois de l'argent.
S'il dit qu'il va baisser les impôts... Puis d'ailleurs, là, je vais l'écouter, le premier ministre, là. Il a dit qu'il baissait de 1 milliard par année, pendant cinq ans. Là, il y a déjà deux budgets de passés puis il n'y a pas de baisse d'impôts. Et celles qui viendront viendront dans deux ans, elles seront bien loin de 1 milliard par année, c'est quelques centaines de millions de dollars. Pourquoi n'avoir pas dit tout simplement aux Québécois et aux Québécoises, surtout quand on est député d'Outremont et qu'on s'appelle Yves Séguin, qu'on a donné son nom au rapport Séguin: Le déficit fiscal, qui, depuis que j'ai écrit mon rapport, a coûté trois fois 2,5 milliards de dollars, m'empêche de baisser vos impôts et taxes; à l'oeuvre pour aller chercher cet argent où il est?
C'en est une, porte, ça, et ça pourrait être la grande porte aussi si le premier ministre voulait se mettre à réfléchir sérieusement au destin national du Québec. La grande porte, c'est 100 % des impôts et des taxes. Il n'y en a plus de déséquilibre fiscal. La grande porte, c'est ne plus jamais dire: C'est la faute à Ottawa. La grande porte, c'est de dire: Nous sommes responsables de notre destin.
Le Président (M. Simard): Merci, M. le chef de l'opposition. Maintenant, nous allons passer au député de Rivière-du-Loup, pour ses remarques préliminaires.
M. Mario Dumont
M. Dumont: Merci, M. le Président. Donc, je vais prendre seulement quelques minutes, je vais garder le maximum de temps pour nos échanges. D'abord, mes premier mots seront pour souhaiter un joyeux anniversaire, à mon tour, au président de notre commission.
J'ai entendu tout à l'heure le premier ministre parler d'une façon qui sonne juste à mon oreille de la situation des finances publiques et de la démographie. Le seul hic, avec ces propos que nous tient aujourd'hui le premier ministre sur la démographie notamment puis avec des illustrations chiffrées, documentées fort intéressantes, c'est que le premier ministre avait manqué d'information avant le 14 avril. Autant, sur la situation des finances publiques, tout le monde avait constaté que, dans le budget de l'ancienne ministre des Finances, il y avait un trou, nous, de notre côté, on avait préparé un cadre financier, à l'ADQ, en tenant compte d'un trou qui existait, puis les chroniqueurs financiers l'avaient vu, tout le monde l'avait vu, et, malchance, celui qui n'avait pas vu ce trou puis qui a préparé son cadre financier sans pouvoir en tenir compte parce qu'il ne l'avait pas vu, c'est celui qui est devenu premier ministre.
Et même chose sur le plan de la démographie. Nous avions, nous, conçu un programme politique qui était entièrement basé sur les données qu'il nous présente aujourd'hui. Puis c'est intéressant qu'il nous présente ces données-là sur l'évolution du marché du travail, sur les nouvelles réalités démographiques, sur les pressions que ça met. Mais là il faut quand même rappeler qu'il y a 13 mois c'était celui qui disait: Moi, je vais baisser les impôts de 27 %, puis qui avait toute une série de mesures qui allaient diamétralement à l'encontre du choc démographique.
On est bien heureux d'entendre que maintenant ces données-là, il les a intégrées puis il travaille en conséquence, mais on ne peut pas s'empêcher de trouver un peu dramatique, pour ne pas dire farfelu, qu'il ait tout découvert ça après les élections. Alors, toutes ces données, toutes ces réalités fondamentales de finances publiques, des données pourtant qui sont sur des horizons de long terme, celui qui est devenu premier ministre a tout découvert ça dans les mois qui ont suivi l'élection. Mais enfin, mieux vaut tard que jamais.
Par ailleurs, pour ce qui est d'avoir le leadership pour poser les gestes qui en découlent, je me souviens de l'avoir entendu... on était en face de Lucien Bouchard, qui était premier ministre à l'époque, et je me souviens de l'avoir entendu questionner et critiquer la pertinence des sommets. Mon souvenir, c'est que grosso modo il y en avait un par année ou par année et demie à l'époque. Là, on est complètement perdus dans les consultations. Vous me pardonnerez, je sais qu'il y a plus qu'une vingtaine de consultations qui sont de tous ordres dans les régions et autres, sur les cégeps, sur toutes espèces de questions, mais on est dans les consultations. Généralement, c'est en fin de mandat, les gouvernements essoufflés vont dans ces processus de consultation pour essayer de trouver un peu d'oxygène. On a peine à imaginer ce que sera la fin de ce mandat, alors qu'après seulement un an le gouvernement a perdu le leadership et est empêtré dans toute une série de consultations dont personne ne comprend exactement ni le dessein ni la pertinence de la forme.
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(13 h 50)
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Cela étant dit, je parle de leadership, et la question sur laquelle je veux interpeller aujourd'hui le premier ministre du Québec, c'est une question qui a toujours été fondamentale dans l'histoire du Québec, une question qui a animé, qui a fait la carrière, en fait, même de plusieurs premiers ministres, c'est le développement énergétique et sa décision et celle de son gouvernement de lancer le Québec dans le projet du Suroît.
Historiquement, le Québec s'était positionné d'une façon très forte, très claire comme un champion du développement de l'énergie renouvelable, l'hydroélectricité au premier chapitre. Au lendemain de l'élection, assez rapidement, on a vu le gouvernement de l'actuel premier ministre se lancer avec Hydro-Québec dans le projet du Suroît, un projet, à mon oeil, extrêmement défavorable à la fois au positionnement du Québec, positionnement du Québec comme environnementalement propre dans sa production énergétique, au positionnement du Québec comme exportateur et exportateur potentiel parce que, même si on va connaître une restriction pendant quelques années de l'offre d'énergie, le Québec doit, dans mon esprit, demeurer, sur le moyen et le long terme, un fort exportateur, une décision qui va complètement à l'encontre de ce dont le Canada et le Québec, signataires, ont adhéré, qui est le Protocole de Kyoto, qui nous oblige à des efforts en termes de réduction des gaz à effet de serre, efforts pour lesquels on va repayer. Et ce qu'on va générer avec le Suroît va devoir être payé ailleurs dans l'industrie.
L'opposition à ce projet-là, elle est de partout, le premier ministre l'a bien senti parce qu'il a lui-même reculé sur une première annonce qui avait été faite. Elle est des scientifiques, elle est des gens qui connaissent bien le dossier énergétique, elle est interne à son propre parti qui a une tradition en matière de développement hydroélectrique. Ce n'est pas un hasard si son recul est survenu à quelques heures d'un conseil général du Parti libéral. L'opposition, elle est de partout. D'ailleurs, les mémoires tombent devant la Régie de l'énergie. Je suis très fier que notre parti, notre formation politique soit la seule à avoir déposé un mémoire d'opposition ferme au projet du Suroît. Mais des mémoires de tous les horizons viennent attaquer, questionner, demander au gouvernement le retrait de ce projet-là.
Et je veux questionner le premier ministre parce que, si, sur le fond, j'exprime un désaccord vif sur ce projet, sur la forme, ça n'a pas été digne de mention. On a vu... D'abord, il y avait quelque chose dans le programme libéral qui laissait clairement entendre qu'on n'irait pas de l'avant avec le Suroît. Puis ensuite il y a eu l'annonce après les Fêtes, et puis là après ça il y a eu le recul pour aller vers une consultation, qui après ça est devenue deux consultations, puis après ça est devenue trois consultations. Mais il est toujours resté une grande inconnue, à savoir: Est-ce que la décision se prend entre la première puis la deuxième, entre la deuxième puis la troisième, ou la décision va finalement se prendre après avoir écouté les trois consultations?
Alors, je ne veux pas être méchant envers le premier ministre, mais le moins qu'on puisse dire, c'est que, pour un sujet aussi fondamental où la population est aussi allumée, qui a autant d'impact sur l'image du Québec à l'étranger et sur ce que le Québec devient à la fois comme producteur d'énergie, comme exportateur, comme partenaire de Kyoto, c'est difficile de voir un gouvernement exercer peu de leadership et de voir son premier ministre parler aussi peu souvent, hein, son premier ministre minimiser ses paroles, se réfugier derrière toutes sortes d'organismes bureaucratiques.
Alors, je conclus. Je l'avais dit, je veux être bref, je veux qu'on garde le maximum de temps pour des échanges qui seront, sur ce sujet-là, pour moi, fort importants avec le premier ministre. Mais son gouvernement, dans ce dossier du Suroît, commet une erreur, j'en suis profondément convaincu, et je veux l'entendre là-dessus aujourd'hui.
Discussion générale
Le Président (M. Simard): Alors, merci. Comme nous en étions à l'étape des remarques préliminaires, cela n'implique pas évidemment de réplique immédiate. Donc, nous allons procéder maintenant aux questions et réponses classiques dans ce genre d'exercice. Et j'invite, dans un premier temps, le chef de l'opposition à poser la première question au premier ministre.
Mesures visant à résoudre l'impasse budgétaire
M. Landry: Oui. Alors, je voudrais qu'elle soit assez courte et assez précise pour qu'on puisse échanger le plus possible et que le premier ministre ait le temps de répondre. On va parler chiffres, là.
Le Président (M. Simard): On parle de blocs ici ? excusez-moi, M. le premier... M. le chef de l'opposition ? de blocs d'une vingtaine de minutes par sujet.
M. Landry: Vous parlez de blocs? Parfait!
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Simard): Ça vous va comme ça?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Landry: C'est le temps de parler blocs, là. Bon. Alors, parlons blocs. Parlons chiffres. Le premier ministre a pris des engagements face à la population du Québec, avec son parti, de 4,5 milliards de dollars pour 2005-2006. Je lui rappelle que c'est, en santé, 2,8 milliards; en éducation, 402 millions; des baisses d'impôts évidemment de 1 milliard par année; et d'autres engagements de 253. Ça fait à peu près 4,5 milliards. Ça, c'était votre cadre financier.
Mais là le ministre des Finances nous dit que «les prévisions que je publie aujourd'hui montrent en effet une impasse budgétaire à régler de l'ordre de 1,6 milliard». Ça, c'est avant le 4,5. Alors, la somme algébrique, hélas, ça fait 6,1 milliards. Là, déjà, il n'y a plus beaucoup de gens au Québec qui croient les promesses ni du premier ministre ni du Parti libéral.
Ma question, qui est en même temps une chance que je lui donne, là. Il va lui manquer 6,1 milliards de dollars. Est-ce qu'il ne pourrait pas dire courageusement et bravement à la population: Oubliez mes promesses non calculées, non fondées, je n'ai pas l'argent qu'il faut, et je ne vais pas remettre 6,1 parce que je ne l'ai pas, il m'en manque au contraire un montant analogue?
M. Charest: Je prends bonne note du fait que le chef de l'opposition officielle veut me donner une chance parce que je ne peux pas m'empêcher de lui dire qu'il a eu une chance, il y a quelques minutes, dans son intervention, de nous livrer au moins une nouvelle idée, une seule suggestion constructive. Et, depuis plus d'un an qu'il est chef de l'opposition officielle, on attend toujours qu'il puisse nous suggérer une seule chose pour que le gouvernement du Québec puisse examiner cette idée pour qu'on puisse en débattre ensemble. Et je constate malheureusement qu'il n'a rien à dire, zéro, rien, c'est le vide total. Et vous avez dû remarquer qu'il a passé plus de temps à défendre le bilan de son ancien gouvernement, alors qu'on est rendu un an plus tard, qu'à suggérer une seule idée depuis la dernière année ou dans l'intervention qu'il vient de faire.
Je le regrette parce que j'ai toujours compris, moi, que, dans nos institutions, l'opposition avait un rôle à jouer qui dépassait simplement critiquer et surtout gonfler à l'hélium le vocabulaire, comme le fait le chef de l'opposition officielle au point de s'en rendre insignifiant. C'est son prédécesseur, M. Parizeau, qui disait: Qui exagère paraît insignifiant. Eh bien, on doit être rendus à un nouveau record d'insignifiance aujourd'hui si je tiens compte des mots choisis par le chef de l'opposition.
Et, tiens, je vais lui en faire la démonstration. Il parle de rupture, puis les mots, là, se succèdent les uns après les autres. On va parler de résultats. Quand on fait l'examen de l'économie en 2003, vous dites que ça va mal. Ce que nous avons comme résultat concret, là, qui ne peut pas faire l'objet de débat, ça, c'est la réalité: la confiance des ménages québécois est demeurée vigoureuse et la plus élevée au Canada en 2003. Il y a 3 650 000 Québécois qui détenaient un emploi, soit 60 % de la population en âge de travailler, en 2003. Il y a eu, en 2003, plus de 50 000 mises en chantier au Québec, le plus haut niveau depuis près de 15 ans. Les ventes au détail ont progressé de 4,4 % au Québec, beaucoup mieux qu'au Canada qui était à 3 %.
Oui, il est vrai que, en 2003, il y a des défis puis on les a encore. Par exemple, la valeur du dollar canadien a augmenté de 20 % en l'espace d'un an. Oui, ça a un impact sur le secteur manufacturier, oui, ça a un impact sur la création d'emplois. Mais, malgré cela, la performance du Québec au niveau de la création d'emplois ? on a créé 57 000 emplois en 2003 ? est au-delà de la moyenne des 10 dernières années, qui était à 55 000, et le pourcentage d'emplois créés au Québec était plus grand que sa population, ce qui est une performance bien supérieure à celle qu'on a connue sous le gouvernement précédent.
Je ne vous dis pas, M. le Président, que ça va toujours être comme ça. Mais je vous souligne cette réalité, là, qui est chiffrée, là ? personne ne peut remettre ça en question ? pour dire à quel point le chef de l'opposition officielle malheureusement perd son temps à essayer de gonfler à l'hélium son discours qui ne correspond en rien à la réalité.
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(14 heures)
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D'ailleurs, je peux continuer la progression. Pour 2004, le nombre de mises en chantier atteint un nouveau record, déjà, là, pour ce qu'on connaît, alors qu'il progressait de 28 % depuis le début de l'année, c'est 2 % au Canada. La progression des ventes au détail de 4,1 %, c'est 1,2 % au Canada. Le pourcentage de personnes détenant un emploi est encore plus élevé, 60,1 % par rapport à l'année dernière, puis le taux de chômage est à 8,8 %. Je vous dis ça modestement, là, pas pour vous donner l'impression que tous les problèmes sont réglés puis... Non, non, je ne tomberai pas dans le piège du chef de l'opposition officielle, je vais vous dire les choses comme elles sont. Il y a là des signes encourageants, mais avouons que ça ressemble... c'est drôle, ça ne ressemble pas du tout au discours que vient de nous tenir le chef de l'opposition officielle. Et, au niveau des investissements privés, Statistique Canada, qui suit ces choses-là, nous prévoit une augmentation de 4,2 % en 2004; au Canada, ça va être 1,7 % puis, en Ontario, 0,7 %. C'est quand même des signes qui sont plus encourageants que ce qu'on avait. Alors, là-dessus, M. le Président, je veux être très clair.
Pour ce qui est de la remarque du chef de l'opposition sur Breton, ça m'étonne qu'il revienne là-dessus. Il me semble que, à sa place, j'aurais fait preuve d'un peu plus de prudence parce que la grande différence entre Breton et le budget qu'on a livré le 30 mars dernier est la suivante, c'est que vous aviez caché dans votre budget des équilibres budgétaires qui n'existaient pas. C'est ça, la différence. Vous n'aviez pas dit à la population du Québec que vous aviez surestimé les transferts fédéraux de l'ordre de 2,4 milliards. Vous avez livré un budget la veille du déclenchement d'une élection générale, vous avez dit: On fait le déficit zéro, ah, en passant, le 2,4 milliards, bien, on va augmenter le chiffre, on n'en parlera pas aux Québécois. Vous n'aviez pas dit aux Québécois que vous aviez planifié des augmentations de tarifs. M. Breton le documente. Ils ne l'ont pas dit, ils ont oublié de le dire.
D'ailleurs, ma réponse vaut pour le député de Rivière-du-Loup qui a dit, il y a quelques minutes, que tous les chroniqueurs, avant l'élection, avaient remarqué qu'il y avait un trou dans le budget de Mme Marois. On n'a pas dû lire les mêmes chroniqueurs, certain, là, parce que ceux qui ont fait l'analyse des cadres budgétaires n'ont pas dit ça, c'est faux. Mais vous n'aviez pas dit non plus, dans votre budget du 11 mars, qu'il y avait un dépassement de coûts pour le métro de Laval, alors que vous le saviez. C'est documenté. C'est connu. Ça, non, on laisse ça aux autres. Parce que vous avez livré un budget la veille d'une élection générale, puis c'était plus important de faire semblant, de mettre le couvercle là-dessus et de ne pas dire ce qui se passait plutôt que de dire les choses comme elles étaient.
Et, quand vous faites des comparaisons, par exemple, vous relevez le Fonds d'investissement régional qu'on a proposé de 300 millions, vous savez très bien que ce n'est pas... que c'est une dépense, que ce fonds-là, c'est un placement, que ce n'est pas une dépense.
Les ventes d'actif, vous revenez là-dessus. Vous aviez prévu des ventes d'actif. Vous n'en avez pas parlé, vous ne l'avez pas dit. Ça n'a pas été dit. Nous, oui, on dit qu'il y aura des ventes d'actif. Évidemment, on ne les énumère pas, parce que les gouvernements ne font pas ces choses-là. On va prendre une approche prudente qui va nous permettre de tirer le maximum pour le contribuable québécois. Mais c'est ça, la différence entre les deux.
Vous parlez de la surestimation de transferts fédéraux. La différence, c'est que, nous, on l'a dit puis on a conclu une entente avec le gouvernement fédéral pour faire un étalement de la réduction, parce qu'il y a une formule de péréquation qui est mathématique, vous en conviendrez. Je ne l'aime pas, la formule, elle est défectueuse, défectueuse, parce que les écarts d'une année à l'autre sont trop importants, et elle doit être changée. Mais on a négocié avec le gouvernement fédéral pour l'étaler de telle sorte qu'on puisse en diminuer les impacts. Ça, on l'a dit dans notre budget, contrairement à ce que vous aviez fait. Nous, c'était là, c'est annoncé, c'est clair. Les gens le voient, ils sont en mesure de mesurer. C'est ça, la différence entre l'approche que vous avez choisie et celle que nous avons prise. Alors, ça me semble assez fondamental.
Je veux revenir sur une question sur les engagements parce que le chef de l'opposition officielle revient là-dessus puis on claironne comme si le gouvernement n'avait pas respecté ses engagements, alors que, pour ceux qui prennent le temps d'en faire un examen objectif, s'il y a une chose qui ressort clairement, c'est qu'on a effectivement respecté nos engagements, quoi qu'en disent tous ceux qui font du bruit autour de ça.
Je prends à témoin un papier publié dans le journal Le Soleil du 10 avril qui fait la colonne des engagements puis qui fait la colonne des réalisations. On va dire que vous les suivez. Moi, j'ai ça sur quelques pages, là. Que ce soit dans le domaine de l'éducation, on a dit qu'on dépenserait plus en santé puis en éducation puis qu'on allait à peu près geler les budgets de l'ensemble des autres ministères et qu'à l'intérieur de cela nous allons faire des choix, c'est exactement ce qu'on a fait.
Dans le domaine de l'éducation, on a donc augmenté les dépenses. Vous parliez tantôt du 340 millions de dollars, vous savez très bien que le 309 ? ou plus de 300 millions de dollars ? annoncé va strictement à des programmes dans le domaine de l'éducation. C'est 10 millions, 10 millions pour l'aide aux devoirs. On annonce de l'argent également pour les enfants en difficulté. On annonce également de l'argent pour l'éducation physique. Enfin, c'est un 300 millions qui va directement dans les programmes.
Vous avez affirmé... Le chef de l'opposition officielle, je le regrette, a dit une chose fausse, et je suis obligé de le corriger, ça ne me fait pas plaisir de le faire, mais il a affirmé que, dans le domaine... pour les universités, il avait parlé aux recteurs d'universités qui disaient qu'il n'y avait pas eu de réinvestissement. On a réinvesti à la hauteur de 6,6 %. C'est 125 millions de dollars qu'on a remis. Il faudrait faire vos devoirs.
Alors, on fait la liste des engagements, que ce soient les régions, la décentralisation, que ce soit la réduction du nombre d'unités d'accréditation dans le réseau de la santé, c'est plus de 40 millions de dollars qui seront réinvestis en soins de santé parce qu'on réduit le nombre d'unités d'accréditation. Le député de Rivière-du-Loup est d'accord avec ça. On ne peut pas être en désaccord avec ça. Il n'y a pas un syndiqué de moins. Mais est-ce qu'il y a une personne qui croit qu'elle peut défendre le statu quo à ce plan-là puis me dire, moi, qu'avoir 3 800 unités d'accréditation ? dans certains hôpitaux, il y avait jusqu'à 68 unités d'accréditation avec tout ce que ça comporte de listes de rappel et de complications ? que ça servait les intérêts des citoyens du Québec? Bien au contraire. Il fallait changer ça, il fallait avoir le courage de le faire. Je me serais attendu à ce que le chef de l'opposition le dise au moins. Ah, il peut toujours dire ? ça fait partie de l'opposition: On n'est pas d'accord sur la façon dont vous le faites, c'est trop vite, c'est trop lent, ce n'est pas assez, c'est peut-être trop. Ça, ça fait partie du discours. Mais, bon sens, il doit y avoir au moins une chose, une nouvelle idée, une chose qu'on a faite. Même pas. C'est le désert, c'est le vide total.
Au niveau des régions, on a dit qu'on allait décentralisé, on est en train d'entreprendre une grande décentralisation dont ont parlé les gouvernements ? au pluriel ? incluant les gouvernements libéraux, depuis 30 ans. Ça ne s'est pas fait. Mais là ça se fait. Puis, oui, on a fait ça vers les élus. Pourquoi? Parce que c'est une vraie décentralisation; à cela, on doit associer de l'imputabilité.
Domaine de la santé. On est en train de mettre en réseau notre système de soins de santé.
Au niveau du développement économique, on est en train de faire un ménage qu'on aurait dû faire il y a très longtemps parce qu'on dépensait des milliards de dollars en crédits d'impôt puis en subventions. Puis on voit les résultats avec ce qui arrive à la SGF, hein, les pertes énormes de la SGF. C'est un échec lamentable, ce que le gouvernement précédent a fait.
Même chose au niveau de la réduction du nombre de ministères. Enfin, faites la liste, et on voit bien que le gouvernement a tenu parole. Est-ce que les résultats sont parfaits? Bien, je peux vous dire qu'on fait des progrès.
Pour donner un autre exemple, le 10 avril dernier, toujours dans le journal Le Soleil, le titre, c'est L'attente hors normes diminuée de moitié. Je ne vous dis pas que c'est parfait. C'est vaste, le réseau de la santé, c'est comme arrêter... C'est comme l'État comme tel. C'est comme ralentir un navire puis le tourner, ça ne se fait pas du jour au lendemain. Mais on a fait des progrès. Les délais d'attente, dans beaucoup de cas, ont été réduits, puis on réussit à faire des progrès, puis on est sur la bonne voie, puis on va arriver à terme. Mais ça va prendre un effort très, très important pour y arriver de la part des citoyens.
En ce sens-là, bien, je reprends les commentaires du député de Rivière-du-Loup qui se plaint de consultations. Mais de quelles consultations? Laquelle vous ne voulez pas qu'on fasse? Dites-moi-le. Celle des universités, on s'était engagés là-dedans, même chose pour l'avenir des cégeps. On avait dit qu'on le ferait. On avait dit qu'on gèlerait les frais de scolarité, on l'a fait, puis on est en train de consulter. Mais, bon sens, on l'avait dit avant la campagne électorale. Si vous étiez contre, si vous ne voulez pas y participer, faites-le pas.
Pour les forums régionaux, il me semble que, compte tenu de l'importance du sujet, les deux sujets, démographie et finances publiques, vous devriez vous réjouir du fait qu'on va aller en parler directement, qu'on va faire le maximum pour que le plus grand nombre de personnes puisse participer au dialogue. Vous vous en plaignez aujourd'hui. Je ne sais pas pourquoi, je ne suis pas sûr pour quelle raison, mais ça m'intrigue.
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(14 h 10)
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Sur la question du Suroît que vous soulevez, j'arrive d'une visite que j'ai faite chez M. McGuinty il y a quelques jours. Ça vaudrait la peine que vous alliez jeter un coup d'oeil sur ce qui se passe en Ontario, ne serait-ce que pour remettre en perspective l'enjeu. En Ontario, ils ont un problème très important de sécurité sur le plan énergétique. Ils ont vécu une panne majeure, l'été dernier, comme toute l'Amérique du Nord. Ils ont un problème parce qu'ils s'alimentent beaucoup de centrales au charbon, ils sont très dépendants du nucléaire. Ils seront appelés prochainement à annoncer des choix énergétiques. Je vous invite à examiner ça de très près pour en tirer des bonnes leçons. Je ne leur souhaite aucun mal, à nos voisins de l'Ontario, je leur souhaite tout le bien au monde, mais il y a des leçons à tirer de ce qui s'est passé du coté de l'Ontario.
Puis une des leçons que nous devons en retirer, c'est de ne pas répéter l'erreur qu'a faite le gouvernement précédent, qui a mis le frein sur le développement et qui, vous le savez, nous crée un trou sur le plan énergétique, dans les années, quoi, 2006, 2007, 2008, d'alimentation, hein, de sécurité énergétique. C'est dans ce contexte-là que le projet du Suroît est apparu. Et c'est un sujet qui est important pour la population du Québec. Nous savons à quel point ça a été un élément central dans le développement du Québec. Et, pour cette raison-là, quand la population s'interroge, on n'a pas hésité, nous, à permettre à la Régie de l'énergie de pouvoir justement aller au fond des choses et de nous présenter le portrait de la situation québécoise sur le plan de la sécurité énergétique et sur le choix qui est proposé avec la centrale du Suroît. Moi, je veux que la régie puisse faire son travail. Mais c'est un débat assez important pour nous pour que nous puissions aller justement au fond des choses puis ensuite se donner l'information, surtout s'assurer que la population du Québec puisse avoir l'occasion de se prononcer sur le choix que nous ferons.
Une chose qui ne changera pas, par contre, c'est le choix de prioriser l'hydroélectricité. Ça, ça ne changera pas. Et, sous mon gouvernement, Hydro-Québec a annoncé des investissements qui sont de l'ordre de 3,5 milliards par année pour les 20 prochaines années, et c'est la filière évidemment hydroélectrique qui va être priorisée. On le sait, on l'a fait, ce débat-là. Au Parti québécois, ils voulaient développer le nucléaire. C'était le nucléaire qui était la filière privilégiée. On s'était battu contre ça. Heureusement que ça n'a pas été le cas parce que, imaginez-vous, si on avait vécu la panne de l'été dernier... Quand une centrale nucléaire est en panne, avant de la repartir, là, ce n'est pas une affaire qui est simple. Ça prend des jours avant de pouvoir repartir une centrale nucléaire une fois qu'elle est tombée en panne. Sans parler de tous les autres enjeux qui touchent la question de l'enfouissement de déchets nucléaires. Alors, on a fait le bon choix.
Mais l'énergie, pour nous, c'est devenu un outil de développement économique formidable. Notre énergie, oui, elle n'est d'abord pas chère, 50 % moins chère que nos voisins de l'Ontario puis du Nouveau-Brunswick, 300 % moins chère que chez nos voisins de l'État de New York. Notre énergie est propre et maintenant notre énergie en plus est reconnue comme étant fiable parce que notre réseau a été modernisé, a eu des investissements majeurs suite à la tempête magnétique de la fin des années quatre-vingt et la tempête du verglas. Et, en plus de cela, elle est désynchronisée... notre réseau par rapport à nos voisins. Et l'été dernier, bien, on a eu la démonstration justement de la force de ce réseau que nous devons maintenir pour l'avenir si nous voulons justement continuer à utiliser l'énergie comme outil de développement économique. Je vous rappelle que toute la question de la sécurité énergétique est plus importante que jamais et que ce sera à la Régie de l'énergie de faire son travail, de nous faire un rapport, des recommandations, et qu'on va agir là-dessus.
Le Président (M. Simard): Merci, M. le premier ministre. Je veux juste signaler que la notion de départ qui était de fonctionner par blocs, avec des réponses relativement courtes, des questions relativement courtes et des réponses relativement courtes, ne sera pas possible. Juste une petite contrariété, la question a duré trois minutes; la réponse, 17. Alors, à ce rythme-là, il faut maintenant se gouverner en fonction de ce type de réponse. Et vous êtes invités maintenant à tenir compte de ce nouveau facteur. À nouveau, M. le premier ministre... M. le chef de l'opposition.
M. Landry: Ah, j'espère que cette logorrhée du premier ministre était involontaire et qu'il ne faisait pas ça simplement pour couper le temps à l'opposition officielle. Ma question était courte, elle était simple et claire. Sa réponse était longue, embrouillée. Et ma question, ce n'était pas un piège, c'était un pont. Je le sais d'après les chiffres, puis il le sait, lui aussi, qu'il va être dans une situation désespérée par rapport à ses promesses, l'an prochain. Je voulais, par ma question, lui donner la chance de dire d'avance au monde qu'en toute sincérité l'insatisfaction qu'il a créée depuis 12 mois, il ne veut pas la créer dans les 12 prochains mois, parce que, là, s'il continue comme ça, on va manquer de Québécois et de Québécoises pour être insatisfaits du gouvernement, là. Ça commence à frôler des seuils de crise. Et puis j'ai peur, par sa réponse, qu'il se prépare encore, en économie, des choses pires.
Deux choses graves qu'il a laissé entendre. Il ne s'est pas rendu compte qu'il y a eu une décélération économique grave due partiellement à son action et à l'incertitude qu'il a semée en 2003. Il ne s'est pas rendu compte de ça. Quand va être le temps de faire les rapports d'impôts 2003, rentrés en 2004, il va avoir encore des déceptions puis il ne sera pas capable de gouverner le Québec convenablement.
Une série de questions claires. Il ne s'est pas rendu compte qu'en 2002 il y a eu 164 000 emplois de créés et puis il y en a eu 27 000 en 2003; ça va faire moins d'impôt, ça. En 2002, on a créé 30 % des emplois du Canada; en 2003, 10 %. L'écart entre le taux de chômage de l'Ontario et du Québec a été le plus faible depuis 24 ans en 2002, à 1,5 %; il est remonté à 2,2 %. La croissance économique du Québec en 2002, 4 %, supérieure à celle du Canada, 3,3 %, et de l'Ontario, 3,6 %; en 2003, 1,7 %.
Croissance des investissements privés, il l'a dit ? ça, c'est une des seules choses qu'il a dites qui était vraie ? que c'est la croissance des investissements privés qui prépare les emplois. Bien, en 2002, la croissance des investissements privés était de 7,6 % au Québec, elle est de la moitié cette année, et puis elle était supérieure à celle de l'Ontario, puis elle est redevenue inférieure. À ne pas prendre conscience de la réalité, on ne peut que se préparer des déconvenues supplémentaires, même si c'est pour des raisons de politique partisane.
Alors, deuxième exemple de politique partisane, il vient de le dire, là, il prétend que c'est à cause de l'ancien gouvernement qu'il y a des problèmes d'approvisionnement en électricité. Bien, lui, je lui suggère, M. le Président, de prendre son téléphone puis d'appeler le président d'Hydro-Québec, M. André Caillé ? le gouvernement est actionnaire à 100 %, le premier ministre doit avoir le droit de lui téléphoner ? parce que le premier ministre a répondu de façon diamétralement opposée au président d'Hydro-Québec, et, sur l'électricité comme sur bien d'autres choses, j'ai plus confiance au président d'Hydro-Québec. Caillé a dit, le 16 avril 2004, à la question: «Qui a créé la rareté?», d'une façon claire et nette: «J'ajoute aussi que, comme de 10 à 12 ans sont nécessaires pour réaliser un projet hydroélectrique, c'est donc avant 1994 que l'on doit regarder pour trouver des raisons expliquant la rareté des projets que l'on constate aujourd'hui.» Le fonctionnaire numéro un, président-directeur général de la plus grosse société de production de courant électrique du monde, dit noir, puis notre premier ministre vient de dire blanc à la face de la population pour des raisons partisanes. Le premier ministre dirige le Parti libéral; André Caillé dirige Hydro-Québec. André Caillé a dit la vérité hydraulique, et tout le monde la sait, la vérité hydraulique. S'il n'y avait pas eu la «Paix des Braves», à laquelle le premier ministre a fait allusion...
Il a oublié de dire aussi, peut-être parce qu'il ne connaît pas son dossier ou qu'il n'avait pas assez de temps pour répondre, qu'au-delà de la «Paix des Braves» il y a une entente avec les Inuits, qui sont plus au nord, où il y a encore plus de projets hydroélectriques que dans la «Paix des Braves». Et c'est ça qui va assurer l'avenir et qui va sauver la situation énergétique, plus les éoliennes que nous avons commencé à construire en Gaspésie, qui peuvent nous permettre de passer à travers une période critique. C'est ça que les Québécois et les Québécoises veulent entendre. Autrement, on se prépare des déconvenues majeures.
Respect des engagements électoraux
en matière de baisse d'impôts
Alors, je vais essayer encore une fois de donner une chance au premier ministre, d'empêcher que sa popularité n'atteigne encore des planchers et les fracasse l'an prochain. Vous avez fait une promesse, en 2005-2006, de baisser les impôts de 1 milliard. Allez-vous ? et je vous le demande formellement ? respecter votre engagement? Allez-vous diminuer le fardeau fiscal de 1 milliard de tous les contribuables, et ce, au-delà de l'impact des mesures du dernier budget sur l'exercice financier 2005-2006? Vous pouvez me répondre pendant trois quarts d'heure sur 56 000 sujets, moi, je vous donne une chance, avec une question simple et claire, de vous éviter, l'an prochain, quand ça va être l'anniversaire de votre deuxième année de gouvernement, de vous faire crier: C'est ta fête!
Le Président (M. Simard): M. le premier ministre.
n(14 h 20)nM. Charest: Merci, M. le Président. Si je prends un certain temps pour répondre, c'est peut-être parce que j'ai des choses à dire ou à suggérer, contrairement au chef de l'opposition officielle. Parce que, là, je constate que, depuis le début des travaux de votre commission parlementaire, là, c'est une autre intervention du chef de l'opposition officielle où il a zéro à suggérer, rien à dire. Et on va rouler jusqu'à 4 heures cet après-midi avec lui, je présume. J'espère que, d'ici 4 heures, il y a quelqu'un autour de lui qui trouvera une nouvelle idée à lui souffler à l'oreille pour quelque chose de constructif pour que nous puissions au moins quitter, aujourd'hui, avec une nouvelle idée de la part du chef de l'opposition officielle. Une nouvelle, je dis bien, parce qu'on sait qu'il a une réponse passe-partout à tout, c'est de dire: Bien, c'est la souveraineté, la réponse, peu importe. Santé? Souveraineté. Problème dans l'éducation? Souveraineté. Ça, on connaît la formule. Mais je me serais attendu à un petit peu plus que ça de la part du chef de l'opposition officielle.
Revenons à des réalités, là, qui sont incontestées, parce que le chef de l'opposition officielle aime bien parler de chiffres puis il dit que les Québécois... Il a affirmé, au début de ses remarques, que, les Québécois, il y avait de la déprime, puis qu'il y avait un problème au niveau du marché intérieur. Je veux juste lui citer, là, les résultats en 2003 pour le Québec et le Canada sur certains éléments qui témoignent justement de la vigueur de notre marché intérieur. Les investissements non résidentiels ont augmenté de 1,3 % au Québec, ça a été de 1,1 % au Canada, un écart de 0,2 %. Les mises en chantier ont augmenté de 18,5 %, c'était 6,5 % au Canada, une différence de 12 %. Les ventes au détail ont augmenté de 4,4 %, c'était 3 % au Canada. Toujours en 2003, les ventes des grands magasins ont augmenté de 5,2 %, c'était 3,3 % au Canada. Salaires et traitements ont augmentés de 3,9 %, c'était 3,3 % au Canada.
Alors là on vient de défaire factuellement, objectivement ce que vient d'affirmer le chef de l'opposition officielle. Si, sur le plan économique, il y a eu des obstacles, on les connaît très bien, ça nous a touchés, nous, comme ça a touché l'ensemble du Canada, c'est l'augmentation de la valeur du dollar canadien sur la monnaie américaine de 20 % dans l'espace d'un an. Évidemment, ça a un impact. Oui, ça a un impact. Quand on a des crises comme on a eues avec le SRAS, avec la vache folle, ça a un impact aussi sur l'économie. Et ça, ça nous amène bien sûr à faire un certain nombre de choses pour qu'on puisse en diminuer l'effet. Mais je peux vous dire, moi, que, si on avait évalué les efforts qu'on a faits par rapport à ceux du gouvernement précédent, je pense qu'on a fait les bons choix.
Quand le chef de l'opposition parle de développement hydroélectrique, il faut examiner aussi de plus près les faits. Quand on fait l'examen de 1971 à 2001 du développement fait par les gouvernements qui se sont succédé sur cette période de temps ? je peux vous donner les chiffres factuellement, M. le Président, ça va vous intéresser parce que ça vous dresse le vrai portrait des choix qui ont été faits ? de 1971 à 1977, l'année de changement de gouvernement, sous un gouvernement libéral, les investissements majeurs en production, selon l'année d'autorisation, ça a été de presque 2 000 MW, pour un gouvernement libéral, ça a été de l'ordre de plus de 2 milliards de dollars. Sous le gouvernement du Parti québécois, de 1977 à 1985, ça a été de 149 MW, 98 millions. Retour d'un gouvernement libéral, sous Robert Bourassa, de 1985 à 1995: 727 MW, pour plus de 1 milliard de dollars. Et, toujours la moyenne sous un gouvernement péquiste, de 1995, donc, à 2003 ? j'ai jusqu'à 2001 ? 133 MW par année. Vous l'avez, la réponse, elle est là. Et vous avez fait la même chose quand M. Parizeau est arrivé au pouvoir, vous le savez, il a arrêté un certain nombre de projets parce que, lui, il avait son référendum à gérer. Puis il a été en poste, M. Parizeau, jusqu'à temps que vous exigiez sa démission ? par téléphone ? et après ça, bien, ça explique le trou qu'on a aujourd'hui.
Le Président (M. Simard): C'est la fin, M. le premier ministre?
M. Charest: Oui.
Le Président (M. Simard): Alors, M. le chef de l'opposition, hein.
Contribution fédérale au financement
de la santé et de l'éducation
M. Landry: Alors, tout le monde a été en mesure de se rendre compte que, malgré la deuxième perche...
Le Président (M. Simard): La prochaine question ira au député de Rivière-du-Loup.
M. Landry: ...que j'ai tendue au premier ministre, il s'en est servi pour faire de la politique partisane au lieu d'assurer l'avenir. Je vais continuer à essayer de l'amener à considérer l'avenir et considérer le bien commun du Québec plutôt que son entêtement partisan. Il a dit à plusieurs reprises, sur des tons feignant l'agressivité, qu'il y avait une bataille, la mère de toutes les batailles commençait avec le gouvernement fédéral.
8 avril: Je dis aux Québécois que c'est... «le lendemain de l'élection il va y avoir une bataille en règle sur le déséquilibre fiscal. Et ça va être la première de nos priorités dans nos relations avec le reste du pays. Je pèse mes mots, je ne parle pas de mois, je parle de semaines.» 52 semaines et plus plus tard, on a vu le genre de bataille qu'il y a eu, qui consiste tout simplement à l'humiliation de notre premier ministre et du Québec en même temps parce que, en janvier dernier, dans cet esprit de bataille, avec la nouvelle ère qui était supposée commencer avec le premier ministre Paul Martin, le premier ministre revient d'Ottawa les mains vides, rien. Et une des raisons pour lesquelles il n'a rien eu, c'est parce qu'il n'avait rien demandé. Mais il s'est fait avoir, et pas à peu près.
Ça me surprend qu'il n'ait pas déclenché un débat virulent avec Ottawa au lendemain de ces rencontres, parce qu'il s'est fait dire que le surplus fédéral atteindrait 2,3 milliards. On a vu ça dans les journaux, les fédéraux lui ont dit ça. Lui, il a fait semblant de le croire. Deux semaines plus tard, la Vérificatrice générale parle d'un surplus de 44 milliards à la caisse d'assurance-emploi seulement. Le lendemain, le ministre des Finances du Canada annonce que le gouvernement fédéral avait enregistré non pas un surplus de 2,3 ? comme ils vous ont dit quand vous êtes allés les voir et que vous avez absorbé naïvement ? mais un surplus de 5,2, et même pas pour l'année complète, juste pour les neuf premiers mois. Puis, deux semaines après, le gouvernement fédéral, vos amis, ceux qui sont venus vous aider à vous faire élire, celui qui a dit que vous étiez la cerise sur le sundae ? vous vous rappelez de ça, vous deviez être content, hein ? bien, il coupe dans les transferts au Québec, deux semaines après tout ça, là, tout ce que je viens de dire, il coupe dans les transferts.
Et, pour comble de malheur, le Conference Board nous fait une mise à jour de la fameuse étude sur le déséquilibre fiscal puis il dit que le fédéral va accumuler des surplus de l'ordre de 500 millions... 500 millions, que dis-je, plus que par année, il y aura 500 milliards d'accumulés, sinon 600 milliards au cours des 12, 15 prochaines années. C'est des montagnes d'argent, ça, alors qu'on a montré quels étaient les problèmes que le gouvernement du Québec doit régler. Puis le ministre des Finances du Canada, le premier ministre du Canada, reprenant les paroles l'un de l'autre: Il n'y a pas de déséquilibre fiscal, cette analyse est dépassée. Le gouvernement du Canada vous dit qu'il n'y a pas de déséquilibre fiscal. Vous allez à Ottawa, vous vous faites raconter n'importe quoi. Vous venez, vous n'avez pas récolté un dollar.
Alors, suite à cette série d'événements, j'aimerais savoir si vous avez eu le courage de contacter Paul Martin afin de l'exhorter à prendre un engagement financier ferme pour combler les besoins du Québec, notamment pour la santé. Nous sommes dans une période vraisemblablement préélectorale. Je comprends que vous n'êtes pas un modèle de respect des promesses, les gens ont vu que vous ne respectiez pas les vôtres, mais vous pourriez dire à Paul Martin: Ne faites pas ce que je fais, je vous demande de dire que vous allez respecter vos promesses, et vous allez promettre que le Québec aura de l'argent pour la santé et l'éducation dans des délais relativement brefs. Il peut y avoir des élections comme il peut ne pas y en avoir. Mais, élections ou pas, les besoins du gouvernement du Québec et de la population du Québec restent les mêmes.
n(14 h 30)n Vous étiez supposés être en bons termes avec eux, vous aviez choisi l'alliance, l'harmonie, la coopération. Je pense que vous avez plutôt choisi la soumission parce que même votre main tendue a été repoussée. Le 9 mars 2002, on pouvait lire dans Le Journal de Montréal: «Le ministre Paul Martin ? ce qu'il était dans le temps ? a repoussé hier la main tendue par le chef libéral Jean Charest en excluant toute réforme en profondeur des transferts aux provinces», même en cas de victoire des libéraux aux prochaines élections. Alors, vous l'avez eue, cette victoire, qui, on se rend bien compte, pour le Québec est globalement une défaite. Pourquoi attendre?
Les transferts fédéraux diminuent. Les choses auraient été encore pires si on n'avait pas ramené 1,6 milliard d'Ottawa en février 2003. Parce que, là, on avait fait une attaque en règle, appuyée sur des sommets justement de la société québécoise, où les gens allaient d'ailleurs, oui. Quand on a fait le sommet sur la santé et sur le déséquilibre fiscal, vous étiez là, et sont venus tous les syndicats, les groupes populaires, les représentants des régions. Là, j'ai vu que vous aviez eu encore une annulation pour vos forums, là. La Fédération des femmes du Québec n'ira pas. Remarquez que ça ne me surprend pas, après ce que vous leur avez fait avec la réforme de structures, ça ne me surprend pas qu'elles n'y aillent pas.
Mais, d'un échec à l'autre, là, échec intérieur, échec à Ottawa, qu'est-ce que vous avez à dire, là, par rapport à votre... la mère de toutes les batailles, là, que vous deviez commencer avec Ottawa, où jusqu'à maintenant ils vous ont donné des faux chiffres et rien d'autre. Qu'est-ce que vous allez faire pour que nos impôts et taxes, qui nous sont ravis à hauteur de 2,5 milliards par année, 50 millions par semaine, depuis des années, vont être rapatriés de façon convenable?
M. Charest: M. le Président, le chef de l'opposition officielle mentionne les groupes de femmes. J'en profite pour lui rappeler que le Parti libéral avait pris un engagement, pendant la campagne électorale et avant, de venir en aide aux femmes victimes de violence. Et je veux le dire parce que c'est un choix que nous avons fait qui vaut la peine d'être appuyé par la population, que, dès le premier budget du 12 juin, qui était le budget, on le sait, là, qui n'était pas prévu dans le cadre fiscal parce que notre cadre commençait en 2004-2005, mais néanmoins c'est là où on a commencé à faire des efforts, c'est un budget pour stabiliser la situation qui nous a amenés à faire un choix et à investir 8 millions de dollars dans un engagement que nous avions pris, que nous avons reconduit cette année et auquel nous avons ajouté 7 millions de dollars, pour un total de 15 millions de plus que ce que dépensait le gouvernement précédent. Je le mentionne en passant parce que c'est un enjeu important. Puis on a l'intention de continuer nos efforts en ce sens-là.
Je veux, pour le bénéfice de la commission, dire au chef de l'opposition que déjà, là, dans, il me semble, un court espace de temps, là, il semble, je pense, malheureusement avoir perdu le fil un peu dans le dossier du déséquilibre fiscal. D'abord, ce sommet qu'il a... dont il parlait tantôt n'était pas sur la santé et le déséquilibre fiscal. Ça s'est tenu ici même, j'étais assis de l'autre côté, c'était sur le déséquilibre fiscal. Le député de Rivière-du-Loup était là aussi, là. Vous venez de nous dire que c'était sur la santé puis le déséquilibre fiscal. C'était sur le déséquilibre fiscal, j'y étais et je m'en rappelle très bien.
Parce qu'il y a un élément dans les échanges qu'il faut relever, que vous avez... dont vous avez perdu le fil de toute évidence, c'est que vous insistez beaucoup sur les transferts en santé puis en éducation. C'est important. Là-dessus, on s'entend. Mais, également importants, il y a les transferts de péréquation. Vous n'en avez pas parlé. Sauf qu'au total quand on fait la mathématique, quand on fait les calculs, là, il faudrait en parler avec autant d'insistance qu'on parle de santé.
La péréquation, pour bien camper l'enjeu, là, c'est une formule mathématique, ce n'est pas une décision arbitraire que prend le fédéral. Il faut faire la part des choses, là. Quand il y a des baisses dans les transferts de péréquation, ce n'est pas parce qu'il y a quelqu'un à Ottawa qui dit: On va couper le Québec puis, demain, on leur envoie x montant de moins. Ce n'est pas comme ça que ça se passe. C'est une formule qui est complexe, qui est basée sur beaucoup de facteurs, je pense qu'il y en a 33 en tout.
Et la formule actuelle, elle est défectueuse d'abord parce qu'il y a des écarts très importants d'une année à l'autre, puis ça nous rend la vie très difficile pour planifier les budgets de l'État québécois, pas juste chez nous, mais chez tous les autres gouvernements également. Je le sais, mes collègues, on s'en parle souvent, c'est difficile de planifier quand, d'une année à l'autre, les transferts changent de façon aussi importante. Et les autres transferts, bien, évidemment, c'est des transferts au niveau de la santé et ce nouveau transfert dans lequel le gouvernement fédéral, avec M. Martin, a décidé de fondre dans un seul transfert l'argent qu'il nous envoyait pour la santé et l'éducation.
C'est un sujet que je connais bien parce que, en 1997, quand j'étais chef d'un parti au niveau fédéral, j'ai proposé justement des changements là-dessus. Je vous le répète parce que, sur cette question-là, les positions que je défends aujourd'hui au nom du Québec, c'est des positions que j'ai défendues ailleurs et sur toutes les tribunes.
Une voix: ...
M. Charest: Et j'y crois ? vous vous en souvenez? Bien, bravo ? puis parce que j'y vois, moi, un élément très important dans le fonctionnement de la fédération canadienne. C'est très important que, sur ces questions-là, on puisse respecter l'esprit fédératif. Respecter l'esprit fédératif, ça veut dire quoi? Ça veut dire, à la base, faire en sorte que chaque palier de gouvernement puisse, selon les compétences qui lui sont attribuées, avoir les moyens de livrer les services et non pas de le faire en fonction d'un grand plan national, mais en fonction de valeurs communes que nous partageons avec nos concitoyens du Canada, mais de le faire en fonction des objectifs qui nous sont propres et de nos besoins. Alors, c'est un sujet que je connais bien, que j'ai défendu sur toutes les tribunes.
Et, moi, mon objectif, c'est d'arriver à des résultats et de dépasser le discours, parce que votre discours, on le sait bien, est truffé, là, de toute la vieille rhétorique d'humiliation, puis de soumission, puis d'exagération, comme c'est toujours le cas. Puis il y a la réalité qui, elle, nous amène à mesurer les résultats.
On avait dit qu'on ferait quoi? Moi, je me rappelle très bien, on était en Beauce quand on s'était engagés à le faire. On avait dit qu'on allait créer, dans les semaines qui suivaient, un secrétariat sur le déséquilibre fiscal. Ça a été fait. On avait dit qu'on proposerait au reste du Canada la création d'un conseil de fédération. Contre les attentes ? parce qu'on était convaincus de réussir, mais on ne pensait pas réussir rapidement, aussi rapidement parce que c'est un changement majeur ? ça a été créé formellement au mois de décembre dernier, alors que les gouvernements se sont entendus pour le créer dès l'été. Le Conseil de la fédération existe. On a, depuis ce temps-là, travaillé en étroite collaboration avec nos collègues.
Et je dois vous dire que, si vous cherchez une façon de mesurer les progrès, vous avez dû prendre note que le premier ministre de l'Ontario, M. McGuinty, a livré un discours, vendredi dernier, devant un groupe d'infirmières où, pour la première fois, M. McGuinty parlait du déséquilibre fiscal. Alors, ce n'est pas rien, ça. Ça, c'est le premier ministre de l'Ontario qui reprend à son compte un argument que vous et moi avons fait ensemble. Ça, ça signifie que nous avons fait des progrès. Puis il le fait, lui aussi, à la veille d'une campagne électorale. Alors que M. McGuinty ne se gêne pas pour dire que, sur la santé, il est aligné sur les objectifs de M. Martin, moi, je ne le suis pas parce que le parti que je mène est un parti indépendant de celui de M. Martin. Je représente les intérêts des Québécois et Québécoises, point. Mais, sur cette question-là, on a en tout cas une vision très claire des choses puis on a posé des gestes qui vont nous permettre d'obtenir des résultats.
Maintenant, je vais aller à la conclusion. Quand on parle des relations, vous oubliez de mentionner qu'on est en négociation pour les congés parentaux et que, ça aussi, c'est plus que ce que nous avions évidemment alors que vous étiez au gouvernement et que les résultats, vous ne les avez pas eus. Mais le gouvernement fédéral, contrairement à ce qu'il a fait au budget... Puis là-dessus on a été déçus parce qu'au budget on aurait voulu que le gouvernement fédéral nous annonce à ce moment-là qu'il a l'intention d'augmenter les ressources financières puis les transferts; il ne l'a pas fait. Mais, dans les jours qui ont suivi et depuis ce temps-là, incluant par la voix de son ministre de la Santé, le gouvernement fédéral nous annonce qu'il a l'intention d'augmenter les transferts. Alors, voilà un indice qui me semble assez probant de résultats à venir.
n(14 h 40)n Ce n'est pas fait. Il y aura une conférence du Conseil de la fédération cet été, suivie, je présume, de la conférence à laquelle va nous convier M. Martin. Il nous a dit qu'il allait nous réunir sur cette question-là. Les positions québécoises, elles sont bien connues, elles ne sont pas très différentes de votre côté que du nôtre, que du côté du député de Rivière-du-Loup. Et, dans la mesure où on nous annonce qu'il y aura une approche à plus long terme puis des ressources financières additionnelles, bien, moi, ça m'annonce qu'on va faire des progrès en tout cas et qu'on aura, nous, des résultats à montrer, contrairement ? je vous le dis, malheureusement ? malheureusement à ce que vous avez eu, vous, comme résultats dans vos relations avec l'État fédéral.
Le Président (M. Simard): La parole maintenant est au député de Rivière-du-Loup.
Politique de développement
énergétique et projet de centrale
thermique du Suroît, à Beauharnois
M. Dumont: Oui. Merci, M. le Président. Je veux immédiatement revenir sur la question du développement énergétique du Québec et du choix du gouvernement du projet le Suroît.
D'abord, le premier ministre tout à l'heure a repris à son compte, hein, il a mentionné différentes périodes et a repris à son compte les grands projets de développement hydroélectrique des gouvernements libéraux. Il semble oublier... Il a publié un livre, il y a quelques années à peine, je pense, en 1998. Il semble oublier ce que lui-même diffuse dans son propre livre, où il se présente comme... Il parle plus spécifiquement du projet Grande-Baleine, il dit: «Le gouvernement Bourassa avait fait preuve d'un grand entêtement», là, une opposition très vive à ce projet-là. Plus tard, il avait été mandaté pour venir rencontrer M. Bourassa pour le convaincre d'abandonner le projet. Il dit: «Ma rencontre avec le premier ministre Bourassa a été très cordiale. Cependant, à l'issue de ma conversation avec lui, je n'étais pas rassuré. Il ne m'avait pas du tout donné l'impression que le gouvernement du Québec était conscient de l'impact négatif que le projet Grande-Baleine avait sur la réputation de son gouvernement et sur celle du Québec en général.» Je passe des extraits. Mais c'est grossier, hein, de venir aujourd'hui prendre à son compte le bilan d'une époque et de dénoncer que Jacques Parizeau, au lendemain de son élection, a relégué aux oubliettes le projet, alors que le principal allié de Jacques Parizeau à l'époque, c'était le ministre de l'Environnement fédéral, l'actuel député de Sherbrooke, premier ministre du Québec. Et là, aujourd'hui, il dit: C'était un gouvernement libéral qui avait fait le développement hydroélectrique, puis là M. Parizeau est arrivé ensuite puis il a abandonné ça, avec lui-même comme principal allié, et il oublie d'en faire le cas.
D'ailleurs, puisqu'on... À chaque étape, celui qui aujourd'hui nous propose le Suroît, il n'était pas du côté du développement hydroélectrique à ce moment-là, il n'était pas du côté de la construction de la ligne Hertel-des Cantons quand venait le temps de sécuriser... Je comprends qu'aujourd'hui il reprend à son compte, là, les développements qu'Hydro-Québec veut faire en matière d'hydroélectricité. Mais je ne peux pas m'empêcher d'observer que celui qui, aujourd'hui, se fait le promoteur du Suroît, il a, en matière de développement hydroélectrique, un bilan qui est loin d'être rose. Puis on fait la liste de ses interventions à l'Assemblée nationale dans l'opposition, jamais, hein, jamais il n'a fait de discours, jamais il ne s'est prononcé, jamais il n'est allé questionner sévèrement le gouvernement précédent sur la question du développement hydroélectrique.
Autre élément dont il se souvient sûrement, l'une des choses qui retardent son gouvernement, comme l'ancien, dans le domaine du développement des projets hydroélectriques, c'est la duplication, le dédoublement des processus d'évaluation environnementale, hein, qu'on essai d'harmoniser. Mais qui a fait adopter la loi C-13? Qui était ministre de l'Environnement à Ottawa qui a fait adopter la loi C-13 qui a complexifié la vie d'Hydro-Québec pour des décennies à venir quand vient le temps de faire des projets environnementaux, alors que le Québec avait déjà le BAPE et le Québec avait déjà un processus reconnu en matière d'évaluation environnementale? C'est le même député fédéral de Sherbrooke de l'époque.
Et juste rappeler à l'Assemblée nationale une motion qui avait été adoptée unanimement à l'instigation du député de Brome-Missisquoi, l'exclu de son cabinet d'aujourd'hui, qui disait: «Que l'Assemblée nationale désapprouve vivement le projet de loi C-13 du gouvernement fédéral, Loi de mise en oeuvre du processus fédéral d'évaluation environnementale, puisque le projet de loi est contraire aux intérêts supérieurs du Québec, et s'oppose à son adoption par le Parlement fédéral.» Et juste rappeler comment le gouvernement du Québec avait qualifié à l'époque le projet de loi de l'actuel premier ministre: «Le projet de loi C-13 constitue un rouleau compresseur condamnant tous et chacun à l'uniformisation forcée, qui risque de bouleverser, par contrecoup, tout le domaine de l'évaluation environnementale au Québec et de remettre en question inutilement tous nos efforts.» Ça, c'est l'histoire, là. Et aujourd'hui, bien, on a des sérieuses questions à se poser. Il y a tout un historique qui nous conduit dans cette soi-disant obligation, que je ne reconnais pas et que je ne partage pas, de construire le Suroît. Et ma question au premier ministre, elle est précise. Tout à l'heure, il nous a dit: On a besoin, hein, la Régie de l'énergie, on a besoin de son avis. Bien, s'il avait besoin de l'avis de la Régie de l'énergie, pourquoi il avait annoncé la décision deux semaines avant? Pourquoi son ministre, avec les hauts dirigeants d'Hydro-Québec, avait annoncé une décision deux semaines avant? Il n'a pas besoin de la Régie de l'énergie. Il a été mal pris, il a sous-estimé l'opposition au projet et il s'est réfugié derrière la Régie de l'énergie.
Mais ma question, c'est: Est-ce que... On a vécu, au Québec, toutes époques, hein... Jean Lesage s'est fait un promoteur du développement hydroélectrique, ensuite de la nationalisation de l'électricité, avec René Lévesque comme porte-flambeau. Robert Bourassa a développé ? il n'y avait pas eu de commission parlementaire puis de Régie de l'énergie, il y avait une vision ? il a développé l'hydroélectricité. Est-ce qu'aujourd'hui notre développement énergétique est réfugié derrière les décisions bureaucratiques? Est-ce que c'est dans les bureaux de la Régie de l'énergie qu'on va décider des grandes orientations énergétiques du Québec ou est-ce que, lui, comme ses prédécesseurs, va être capable d'assumer le leadership, de dire: Voici la vision de mon gouvernement en matière de développement énergétique?
Et ce que je lui demande, comme premier ministre du Québec, au nom de tous ceux qui s'opposent au Suroît, au nom de l'avenir du Québec, c'est de mandater... il est le premier ministre, il peut mandater les dirigeants d'Hydro-Québec, mandater les gens de son équipe pour qu'on trouve les alternatives. Au niveau de l'économie d'énergie, il sait très bien, il a coupé 30 % dans l'Agence de l'efficacité énergétique, il sait très bien qu'il y a de l'espace. Le développement éolien peut s'accélérer, l'Allemagne nous en donne tout un exemple. Qu'il nous annonce aujourd'hui qu'il donne un mandat à des gens et qu'il veut renoncer au projet du Suroît, on comprendra enfin sa vision en matière de développement énergétique.
Le Président (M. Simard): Merci, M. le député de Rivière-du-Loup. M. le premier ministre.
M. Charest: M. le Président, le député de Rivière-du-Loup nous avait habitué à ce qu'on l'entende surfer sur l'actualité quand il fait des interventions. Là, on sait que sa vie est gouvernée pas mal par les titres de journaux puis le journal de la journée. Là, aujourd'hui, il change d'approche, puis il fait un petit peu de recherches, puis il retourne faire des lectures. Moi, si j'avais un conseil à lui donner, je pense qu'il est mieux de rester sur l'actualité, ce serait peut-être un peu plus facile pour lui que de retourner en arrière puis de nous dire des choses qui sont grossièrement fausses sur des sujets que je connais assez bien et pour lesquels j'ai un très bon souvenir.
Commençons avec le projet Grande-Baleine. Vous avez affirmé... ou il affirme que le gouvernement fédéral... et que j'étais contre le projet. C'est faux, totalement faux. Nous n'étions ni pour ni contre. Le gouvernement fédéral, à ce moment-là, avait un processus d'évaluation environnementale prévu par règlement qui faisait en sorte qu'il devait... selon l'interprétation qu'avait faite la Cour suprême dans certains travaux, dans certains jugements, devrais-je dire, avait déterminé que le gouvernement fédéral devait légalement faire une évaluation environnementale. Et nous avions eu des négociations à ce moment-là avec le gouvernement du Québec sur une évaluation environnementale qui devait avoir lieu, pour un projet comme celui-là, qui n'interpellait pas un niveau de gouvernement, mais les deux, et qui en plus imposait, selon la Convention de la Baie James, quatre évaluations environnementales. Je vous souligne que le projet était contesté vivement par la communauté crie, qui en avait fait l'objet d'une campagne sur le plan international qui avait des répercussions sur la réputation du Québec et sur la possibilité que ce projet-là puisse se développer.
Et, si vous aviez été le moindrement informé, contrairement à la démonstration que vous nous avez faite aujourd'hui, vous auriez été en mesure de faire la distinction entre ce qui est une évaluation environnementale et un sujet qui ne relevait pas de la compétence de l'État fédéral. C'est ça que je suis en train de vous dire. Ce n'était pas à l'État fédéral ? puis ça relève, ça, de ma perception du fédéralisme canadien ? ce n'était pas au gouvernement fédéral à dire au gouvernement de Robert Bourassa quoi faire ou ne pas faire sur le plan énergétique. Je pensais ça à ce moment-là puis je pense exactement la même chose aujourd'hui, contrairement à vous. Alors, si vous aviez eu le minimum d'honnêteté dans les citations que vous donnez dans ce livre-là, vous auriez relevé la réalité au lieu de faussement présenter une situation qui n'a jamais existé. Alors, la prochaine fois, faites donc toutes vos lectures au lieu de lire juste quelques phrases pour essayer d'alimenter vos arguments.
Et là-dessus je vous rappelle que, moi, à tout le moins, ma vision du système fédéral n'a pas évolué dans le sens où je diminuerais les intérêts du Québec. Au contraire, j'ai toujours été droit là-dessus. Puis, ma vision des choses ? je vois que même le chef de l'opposition officielle reconnaît ça ? je n'aurais jamais livré le discours à Toronto que vous avez livré, par exemple. Alors, oui, là il recommence à lire le livre. Vous cherchez des passages? C'est le temps! Vous auriez dû le lire avant de poser des questions.
Sur la loi C-13 de l'évaluation environnementale, en passant, ça va vous intéresser. Puis, si vous cherchez de l'information, parlez donc, oui, à votre chef de cabinet, il faisait partie de ce gouvernement-là au moment même où la loi C-13 a été présentée. S'il ne faisait pas partie du gouvernement, il travaillait au parti. Alors, il ne devait pas être contre ça, puisqu'il travaillait avec nous à ce moment-là. Alors, il peut peut-être mieux vous renseigner. C'est une loi qui avait été préparée par Lucien Bouchard, en passant, qui, juste pour les fins de l'histoire, était absent au moment du vote à l'Assemblée nationale, au moment où la loi a été proposée.
n(14 h 50)n En cela, nous rejoignons une appréciation puis une question de fait sur l'environnement et le partage des compétences, soit dit en passant, parce que, dans votre rapport Allaire, vous, vous envoyez ça du côté du Québec, alors que l'environnement, c'est une compétence partagée, c'est l'accessoire au principal. Puis l'évaluation environnementale se fait en fonction des compétences qu'on partage comme étant soit du côté fédéral ou du côté du gouvernement du Québec.
Tout cela nous amène, soit dit en passant... Parce que je veux partager avec vous les bonnes nouvelles du travail fait dans ce domaine-là depuis notre élection. On travaille avec le gouvernement fédéral actuellement pour conclure une entente qui nous permettrait de resserrer l'évaluation environnementale, et de minimiser les dédoublements, et de faire en sorte que ça puisse se faire de façon efficace, sans pour autant faire de raccourcis, soit dit en passant, le faire de façon à ce que nous puissions respecter intégralement notre obligation de faire une évaluation environnementale et que nous puissions ensuite obtenir de façon concurrente l'aval des communautés.
Je vous souligne là-dessus que mon gouvernement a beaucoup travaillé dans la dernière année, puis on l'a fait, soit dit en passant, dans la foulée de ce que le gouvernement précédent avait fait avec la «Paix des Braves», pour justement conclure des ententes avec les communautés autochtones. On a fait ça avec les Cris, l'entente de la semaine dernière en témoigne, on a fait ça avec les communautés innues, on a créé une table de concertation des peuples autochtones avec le gouvernement du Québec pour que nous puissions créer un environnement favorable à ce que ces projets-là puissent se réaliser.
Je ne vous dis pas que la table a été créée à la condition que les projets se réalisent, parce que, ça, c'est une décision qui doit être prise en temps et lieu et avec les communautés. Mais, s'il y a une leçon que je tire de l'épisode de Grande-Baleine, c'est que, si nous voulons nous donner une chance que ces projets-là puissent se réaliser, il faut créer un environnement qui le permet, qui le rend possible. Et, s'il y a une chose dont je suis très fier, dans la dernière année, c'est de tous les efforts qu'on a mis là-dedans, incluant le ministre responsable des Affaires autochtones, M. Pelletier, pour que nous puissions justement créer un environnement qui nous permet, qui rend possible l'évaluation environnementale si les communautés autochtones sont prêtes à y souscrire.
Pour parler d'énergie, permettez-moi... J'avais, il y a deux minutes, le document de la campagne électorale qu'on a rendu public sur les questions d'énergie. Je vais vous reprendre des éléments clés de ce qu'on s'était engagés à faire. D'abord, c'est à la page 8 d'un document qui s'intitule Pour une diversité énergétique, que nous avons rendu public au mois d'avril, où on dit ceci sur le plan de la... Un, la première priorité, c'est la sécurité, le mot «sécurité». Là-dessus, on dit: «Dès notre élection, nous ferons de l'hydroélectricité notre premier choix d'approvisionnement électrique», et on va «accélérer le développement de son potentiel». C'est exactement ce qu'on a fait. Au niveau des moyens aussi, on a dit: «Afin de contrer la possibilité d'un déficit énergétique d'ici la mise en opération de nouveaux projets hydroélectriques d'envergure, nous comptons assurer la diversification de notre potentiel énergétique par le recours à des sources d'énergie non polluantes et acceptables pour les communautés locales.» Et là on parle de biogaz, d'énergie éolienne, de cogénération également. Et nous terminons avec: «Nous encouragerons la production, le transport, la distribution et l'utilisation de gaz naturel», parce qu'il faut aussi diversifier un petit peu le menu énergétique. Alors, voilà factuellement les faits.
Je suis très fier, en terminant, de vous dire que j'ai eu une très bonne rencontre, moi, avec M. Bourassa, j'avais beaucoup d'estime pour lui, et que, quand je lui donnais ma parole, je la tenais.
Le Président (M. Simard): M. le député de Rivière-du-Loup.
M. Dumont: Bien, je remercie le premier ministre d'avoir lu... j'allais le faire, lire son programme énergétique pour voir la contradiction évidente. Il disait prioriser l'hydroélectricité, il nommait une série de diversifications. Il y a un autre passage où il parlait de ne pas aller vers ce genre de centrale au gaz. Alors, je le remercie d'avoir lui-même plaidé les propres écarts entre son programme et le Suroît, qui a été la priorité numéro un au lendemain de l'élection.
Mais il parle de voyage à Toronto, je vais lui en parler, moi aussi, parce que, dans son voyage à Toronto... Énergie ? une dépêche du Droit: L'Ontario ne devrait plus compter sur le Québec. «Le premier ministre [...] a fait comprendre hier à son homologue ontarien [...] qu'il ne devrait plus compter sur le Québec pour s'approvisionner», etc. Et même chose: «Toronto a proposé à plusieurs reprises l'installation d'une ligne de transmission entre le Québec et l'Ontario», l'interconnexion, puis il fallait oublier ça.
Il a raison de dire ? il en a parlé tout à l'heure ? que l'Ontario va connaître des pénuries. Mais combien il faut être sans vision au Québec quand on entend parler que notre voisin va avoir une pénurie dans ce que, nous autres, on est les champions puis qu'on ne fait rien, on ne bouge pas, on regarde ça, puis on s'en va à Toronto, puis ce qu'on trouve de mieux à leur dire, c'est: Ne comptez pas sur nous autres, on n'est pas là!
Ils font quoi, le Manitoba, de l'autre côté? Dans le budget du Manitoba, cette année, «Growing the economy», une des premières priorités de développement économique du Manitoba ? je traduis, là, au fur et à mesure ? poursuivre les opportunités de développement vers l'est, en Ontario, et vers le sud, aux États-Unis, pour faciliter les exportations d'énergie qui pourraient mener à des développements hydroélectriques significatifs. Les gens du Manitoba ont compris que, s'il y a une pénurie puis si l'Ontario est mal pris avec le nucléaire, eux, là, ils ont de l'argent à faire avec ça. Ils vont pouvoir créer de l'argent pour les générations futures.
Bien, le premier ministre du Québec, non seulement il n'a pas la vision, non seulement il s'embourbe dans le Suroît... Bien, je dis qu'il s'embourbe dans le Suroît, il m'a répondu pendant 10 minutes tout à l'heure, il a parlé de toutes sortes de choses, il n'a jamais parlé du Suroît. On ne l'entend pas défendre ce projet-là, on n'a pas entendu son leadership dans ce dossier-là, on a l'impression qu'il est ballotté par les événements. Mais la réalité, c'est qu'il est allé à Toronto pour dire que le Québec ne devait plus être vu par nos voisins comme un exportateur, comme un joueur de qui on doit attendre l'exportation, pendant que nos voisins, juste l'autre côté, à l'ouest, le Manitoba, qui sont partis de bien plus loin que le Québec...
Et je comprends qu'il n'est pas le seul responsable. J'accuse du même coup le manque de vision du gouvernement précédent. Mais je suis estomaqué que notre réaction, quand notre voisin dit: Moi, je suis mal pris avec le nucléaire, je vais manquer d'électricité, puis nos voisins du Sud ont un problème qui est encore plus aigu, que notre réaction, au Québec, ne soit pas de dire: Regardez-nous bien arriver, nous, on va produire, nous, on va développer. On donne à notre société d'État, qui est Hydro-Québec, un mandat très clair: Faites le rattrapage pour répondre à la demande intérieure, puis on va devancer la demande intérieure pour exporter.
Regardez comment l'Alberta, avec le fonds de l'héritage, comment l'Alberta a permis de soulager sa classe moyenne, de réduire son endettement, de mettre de l'argent de côté pour les générations futures parce qu'ils ont profité de leur richesse énergétique. Ils ne sont pas aussi chanceux que nous autres, hein, ils n'ont pas d'énergie renouvelable, ils ont une énergie fossile et ses dérivés. Nous, on a l'énergie renouvelable, puis en plus il vente, on a le vent, on a l'éolienne qu'on pourrait développer. Et ce qu'on trouve à dire à nos voisins, on va les voir à Toronto pour leur dire: Fiez-vous pas sur nous autres, là, nous autres, là, on a regardé ça, ça va tout prendre pour répondre à nos propres besoins, puis l'interconnexion avec l'Ontario, ne comptez pas sur nous autres là-dessus. C'est un manque de vision, et c'est le même manque de vision.
Parce que, évidemment, quand on remet les projets, comme le premier ministre l'a fait dans le cas du Suroît, quand on remet les projets dans les mains de la Régie de l'énergie, quand il n'y a pas de leadership politique, quand, sur un dossier comme le Suroît, on a créé... je pense, dans l'espace de quelques semaines, là, il y a eu six fois des changements d'orientation puis des nouveaux comités de consultation qui ont été créés, et ça, après qu'il ait été annoncé officiellement. Le projet était annoncé, le ministre, les hauts dirigeants d'Hydro-Québec... Je serais curieux d'entendre le premier ministre. Est-ce que son ministre, est-ce que les dirigeants d'Hydro-Québec avaient son approbation, à la mi-janvier, pour s'asseoir en conférence de presse, convoquer l'ensemble de la population du Québec et leur annoncer la construction du Suroît? Il nous dit aujourd'hui qu'il a besoin de la Régie de l'énergie, il a besoin des avis.
Poussez le ridicule plus loin, dans le mandat de la Régie de l'énergie, on a dit: Il faudrait vérifier s'il n'y aurait pas des alternatives, nous indiquant, à nous, citoyens du Québec, que la vérification de l'existence d'alternatives n'avait pas été préalable à l'annonce de la mi-janvier, mais que finalement, parce qu'il y a eu opposition, parce qu'il y a eu des manifestations, parce que des militants libéraux, Dieu merci, ont rappelé le premier ministre à l'ordre à la veille d'un conseil général, il a lancé un processus de consultation, dont on peut espérer qu'il conclue à l'abandon du projet. Mais ce qu'on aimerait, c'est l'entendre de sa bouche aujourd'hui, l'abandon du projet du Suroît puis une nouvelle vision du développement énergétique un peu plus convaincante puis qui a un peu plus d'avenir.
Le Président (M. Simard): M. le premier ministre.
M. Charest: Bon. Il y a beaucoup de verbiage là-dedans. Si j'ai bien compris, le député de Rivière-du-Loup en redemande, là. Il était apparemment mieux informé sur la rencontre que j'ai eue avec Robert Bourassa que je l'étais moi-même. Pourtant, je ne me rappelle pas l'avoir vu quand je suis allé rencontrer M. Bourassa. De souvenir, là, je ne l'ai même pas croisé dans le corridor. Mais là, si je comprends bien, il est encore mieux informé de la rencontre que j'ai eue avec Dalton McGuinty que je le suis moi-même. C'est drôle, je ne me rappelle pas l'avoir vu à Toronto non plus. Il devait être à l'Empire Club, si c'est le cas.
n(15 heures)n Le dossier Ontario-Québec, au plan énergétique, ce n'est pas la première fois que ça a été soulevé. J'ignore si c'est la première fois que vous en preniez connaissance, vous, la semaine dernière. Mais, juste au cas où ça vous a échappé, il y a eu une panne électrique l'été dernier, en Ontario. Et, avant ça, il y a eu un débat assez pénible merci sur la question de la tarification de l'énergie en Ontario. Et il y a eu une campagne électorale en Ontario, où le gouvernement actuel, alors dans l'opposition, a pris l'engagement de fermer un certain nombre de centrales d'énergie au charbon en Ontario parce que la principale source, c'est du nucléaire puis ils ont un problème très important d'alimentation de leur propre marché. C'est ça qui se passe en Ontario. Depuis très longtemps, nous avons une ligne d'interconnexion qui nous permet de recevoir ou d'envoyer environ 2 000 MW en Ontario.
Du côté du Manitoba, juste au cas où vos notes ne vous l'ont pas indiqué, là, le barrage dont il est question s'appelle Conawapa, qui est dans le nord du Manitoba, qui, juste en passant, avait fait l'objet d'une évaluation environnementale contestée aussi au début des années quatre-vingt-dix et qui a été retardé parce que les tribunaux ont été saisis de cette affaire-là. Et là le gouvernement du Manitoba avec le gouvernement de l'Ontario étudient la possibilité qu'ils puissent construire une ligne qui va partir du nord du Manitoba et qui va descendre en Ontario pour alimenter justement le marché.
D'ailleurs, je pense que c'est dans le Globe and Mail, aujourd'hui, où on a un éditorial là-dessus, si ma mémoire est fidèle. Si ce n'est pas d'aujourd'hui, c'est de la fin de semaine. La proposition qui serait, il paraît... Parce que je ne suis pas dans le secret des dieux, voyez-vous, Ontario-Manitoba, ce n'est pas directement les affaires du Québec, quoiqu'on suit ça de très près, comme vous avez dû le remarquer. Il est question que le gouvernement de l'Ontario subventionne ou paie les coûts de la ligne de transmission.
Or, si le gouvernement de l'Ontario veut effectivement obtenir de l'énergie du Québec, la première question à laquelle nous devons répondre est la suivante: Avons-nous, oui ou non, de l'énergie à leur offrir? Or, on sait qu'il y a un trou énergétique en 2006, 2007, 2008, on vient d'en parler. Êtes-vous surpris que je dise au premier ministre McGuinty: Oui, je vais acheter de... Je suis supposé faire quoi, moi? Lui dire que je vais acheter de l'énergie aux États-Unis pour la lui revendre en Ontario? Bien, voyons, ça tombe sous le sens. Si, ces années-là, on a de la difficulté à alimenter... Puis on va s'occuper d'abord de notre propre marché, M. le député. Avant d'aller alimenter l'Ontario, le Nouveau-Brunswick ou les États-Unis, je vais commencer par alimenter les Québécois. Ma première responsabilité, c'est envers le Québec, pas l'Ontario.
Alors, en ce sens-là, je veux bien leur en vendre, mais, si ça devait être le cas, encore faut-il qu'on ait de l'énergie de disponible, un, deux, encore faut-il que nous ayons une capacité de l'envoyer. Alors, on aurait beau avoir 4 000 MW à leur envoyer, si la ligne en permet 2 000, c'est 2 000, on ne peut pas inventer. Et, pour cette raison-là, suite à la première rencontre que j'ai eue avec M. McGuinty après son élection ? parce que je l'avais vu à quelques reprises avant ? M. McGuinty et moi, on s'est entendus pour former un groupe de travail, des gens d'Hydro Ontario puis Hydro-Québec qui vont examiner ces questions-là à plus long terme et qui vont nous arriver avec des réponses.
Mais, en attendant et à la première occasion, ça me fera plaisir de dire au premier ministre Doer, du Manitoba, que le député de Rivière-du-Loup travaille pour lui, qu'il était à Toronto il y a un an, mais que, là, il s'en va vers l'Ouest puis qu'il est rendu à Winnipeg. Et je vous encourage à continuer à faire ça, ça doit vous garder occupé. Sauf que je ne suis pas sûr, moi, que les Québécois s'attendent à ce que vous défendiez les intérêts de la population du Manitoba. Moi, je pensais que vous étiez élu pour défendre les intérêts de la population du Québec.
Le Président (M. Simard): Alors, voilà pour cette partie. Le parti ministériel va maintenant poser un certain nombre de questions, va occuper... Oui.
M. Whissell: Peut-être, pour le bénéfice des membres de la commission, nous indiquer le temps qui a été utilisé à ce moment-ci par les membres de l'opposition, le temps cumulatif, et de bien...
Le Président (M. Simard): Oui, on peut... Bien, écoutez, on a commencé à 1 heure et il est 15 h 5, c'est assez facile à voir, puisque la première partie, les interventions préliminaires ont été égale de part et d'autre. Vous voyez qu'on est ici... maintenant, 1 h 30 min plus tard, on a 60 minutes de questions, voilà.
M. Whissell: Alors, je vous demanderais d'appliquer, là, l'alternance et l'équilibre également.
Le Président (M. Simard): À ce moment-ci, on m'avait fait signe.
M. Whissell: Merci.
Le Président (M. Simard): Et évidemment je vous reconnais à partir de maintenant, de façon à ce que la partie ministérielle puisse poser les prochaines questions, Mme la députée d'Anjou et vice-présidente de cette commission.
Stratégie de lutte contre la pauvreté
et l'exclusion sociale
Mme Thériault: Merci, M. le Président. Moi aussi, j'aimerais vous souhaiter un joyeux anniversaire, tout comme le premier ministre, le chef de l'opposition officielle et le député de Rivière-du-Loup.
M. le premier ministre, vous savez que le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale a déposé dernièrement son plan d'action gouvernemental pour lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. On se rappellera que les membres de l'Assemblée nationale ont voté à l'unanimité en faveur d'un plan d'action pour lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Dans vos remarques préliminaires, M. le premier ministre, vous parliez du défi démographique. Et, alors qu'actuellement il y a une personne à la retraite pour cinq travailleurs, tout le monde sait que, dans 25 ans, il n'y aura seulement que deux personnes qui vont travailler pour une personne qui va être à la retraite.
Dans le plan de lutte à la pauvreté et à l'exclusion, les mesures touchant la réinsertion en emploi et les incitatifs au travail proposés par le ministre sont-ils selon vous les bons moyens pour réduire la pauvreté et augmenter la main-d'oeuvre disponible? Je pense que c'est important qu'on en parle, qu'on le regarde dans ce contexte-là, d'autant plus qu'à mon avis c'est un excellent plan que le ministre a déposé. Et malheureusement, du côté de l'opposition, on ne semble pas nous féliciter lorsqu'on fait des bons coups. Donc, M. le premier ministre, j'aimerais vous entendre sur le plan.
M. Charest: Je veux d'abord vous dire que nous sommes, je pense, sur cette question-là, à l'Assemblée nationale du Québec, depuis quelques années maintenant, sur la même longueur d'onde, nous partageons une volonté commune. Il y a eu des débats en commission parlementaire, vous vous rappellerez, avant l'élection générale, où toute cette question de la loi sur la pauvreté a été débattue. À ce moment-là, la formation politique dont je suis toujours le chef était dans l'opposition, mais vous vous rappellerez qu'on avait défendu avec beaucoup d'énergie la question du barème plancher, par exemple, que le gouvernement précédent, sur cette question-là, malheureusement avait proposé un certain nombre de gestes, ne semblait pas prêt à bouger. Et, nous, on a pris des positions et on a pris un engagement d'établir un barème plancher. C'est un des éléments que je relève.
Mais je veux reculer un peu pour vous dire que, de mon point de vue, c'est un des éléments les plus importants qu'on a livrés dans le dernier budget, toute cette question de Prime au travail. Je vais vous dire pourquoi. Parce que, en Amérique du Nord, depuis une trentaine d'années, plusieurs analystes, des gens qui s'intéressent entre autres aux questions sociales, se préoccupent d'un phénomène qu'on appelle en anglais «the working poor», c'est-à-dire les gens qui sont dans le marché du travail, qui ont un emploi et qui malgré cela sont des gens à faibles revenus, sont souvent dans la catégorie de citoyens qu'on peut décrire comme étant sous le seuil de la pauvreté.
C'est des gens, ça, qui, dans un marché où il y a beaucoup de précarité au niveau du travail, où il y a du temps partiel, où il y a de l'instabilité et des emplois qui sont dans le secteur des services ? parce qu'il faut placer ça dans le contexte où 70 %, là, des emplois et plus sont dans le secteur des services aujourd'hui ? sont souvent dans une situation très, très, très fragile. Alors, leur seuil de revenu est très bas. Et, pour ces personnes-là, il arrive que le choix ne soit pas toujours très clair entre un programme de soutien au revenu puis le fait de détenir un emploi. Et c'est un problème sur lequel se penchent plusieurs analystes, depuis plusieurs années, et qui cherchent des solutions pour que, ces gens-là, on puisse agir en leur faveur et, entre autres, créer un environnement qui leur permet de faire le meilleur choix possible pour eux-mêmes, c'est-à-dire rester dans le marché du travail et de favoriser leur participation à la société via le marché du travail.
Alors, c'est la première fois, à ma connaissance, en Amérique du Nord, qu'un gouvernement propose, comme nous l'avons fait dans le dernier budget, un programme de Prime au travail. L'effet de ça, l'effet recherché est le suivant. C'est d'abord de s'assurer que le choix de travailler soit toujours un choix qui, sur le plan matériel, soit le bon, qu'il n'y ait plus d'équivoque sur cette question-là, et que nous puissions augmenter les revenus, le revenu disponible de gens qui sont dans le marché du travail dans des conditions qui ne sont pas toujours faciles, et que nous puissions ainsi favoriser effectivement la création d'emplois mais que nous puissions surtout favoriser, M. le Président, leur pleine participation.
n(15 h 10)n Je vais juste ouvrir une parenthèse sur un élément qui affecte directement ces gens-là. Vous savez, quand... On le sait tous, là, parce que c'est des parlementaires d'expérience, qu'une des choses qui a un impact très important sur ceux qui sont à l'extérieur du marché, c'est une perte de confiance quand... Et on sait que, plus une personne est à l'extérieur du marché, plus longtemps elle est à l'extérieur du marché du travail, plus c'est difficile pour cette personne-là d'y retourner et de se réintégrer, et qu'un des phénomènes, c'est que ? ce n'est pas surprenant ? il y a une perte de confiance qui a un impact sur leur capacité de pouvoir retourner. Or, un programme comme celui-là vise justement directement, là, à encourager chaque citoyen à toujours pouvoir participer directement dans le marché du travail. Alors, moi, j'y vois beaucoup, beaucoup d'espoir, beaucoup de potentiel, d'abord parce qu'il y aura des pénuries de main-d'oeuvre puis on a besoin de tout le monde, entre autres des jeunes, et parce que, sur le plan social, je pense que ça va avoir un impact très important.
Pour ce qui est du plan de lutte à la pauvreté, c'est 2,5 milliards de dollars qu'on va y mettre, les contribuables québécois, sur une période de cinq ans. Et ça va nous permettre de venir en aide à ces gens-là. Il va y avoir l'instauration d'un barème plancher pour les prestataires de l'assistance-emploi. Il va y avoir des mesures spécifiquement destinées aux jeunes et favorisant la prévention de la pauvreté et de l'exclusion. Il va y avoir des investissements très importants dans le logement social. Je vous souligne qu'on est en avance sur les engagements qu'on avait pris. C'est 16 000 logements sociaux, je pense que c'est 265 millions de dollars, là, de mémoire, que nous allons investir au niveau du logement social. On est en avance sur les engagements qu'on avait pris. Il va y avoir la création d'un fonds québécois d'initiatives sociales aussi pour appuyer les stratégies locales et régionales de lutte contre la pauvreté et l'exclusion.
Alors, là-dessus, je pense qu'on innove, les Québécois innovent, on donne le ton. Et je peux même confirmer à la députée d'Anjou que, lors de ma visite de la semaine dernière à Toronto, je coprésidais une réunion du Public Policy Forum, le forum des politiques publiques qui réunit plusieurs hauts fonctionnaires et les gens des milieux d'affaires de partout au Canada. C'est un dîner annuel, et il y a plus de 1 000 personnes, 1 200 personnes. Et j'ai rencontré plusieurs personnes qui s'intéressent directement à cette nouvelle mesure, parce que le gouvernement du Québec innove dans ce domaine-là, on est les premiers à le faire. Et je peux vous assurer, je peux vous garantir que ça va être suivi de très près par les autres gouvernements.
Le Président (M. Simard): Oui. Mme la députée d'Anjou, vous m'aviez signalé l'intérêt du député de Marguerite-D'Youville pour la prochaine question.
M. Moreau: Merci, M. le Président. Alors...
Le Président (M. Simard): Ce sera plus que deux minutes, cette fois-ci, là.
Mesures de soutien aux familles
M. Moreau: Je l'apprécie, M. le Président. Vous savez qu'on est les spécialistes, dans cette commission, des deux minutes de fin de séance. Évidemment, on a beaucoup plus de temps aujourd'hui, et je suis heureux qu'on ait beaucoup plus de temps. D'abord, ça me permet de vous souhaiter un joyeux anniversaire sans que mon temps de parole soit totalement écoulé. D'autre part, ça me permet de revenir sur des éléments importants qui sont, je pense, à la base même de l'engagement du Parti libéral du Québec lors de la dernière campagne électorale. Et je pense particulièrement aux familles québécoises. Et, dans le comté que je représente, Marguerite-D'Youville, on sait à quel point il y a un développement de jeunes familles, l'établissement des jeunes familles est très marqué.
Et tantôt, dans les remarques d'introduction de même que dans les questions autant du côté du député de Rivière-du-Loup que de l'opposition, j'ai noté qu'on s'était restreint énormément dans les questions qui touchent justement ces mesures sociales pour lesquelles le premier ministre et le gouvernement qu'il représente a, à l'encontre de ce que suggérait le chef de l'opposition, non pas seulement tenu un discours courageux, mais posé des gestes courageux. Et je pense que, de côté-ci, nous estimons que, poser des gestes courageux, c'est plus important que de faire des discours.
Alors, ma question au premier ministre... Et d'ailleurs je le félicite sur la question de la Prime au travail, puisque, pendant toute la campagne électorale, nous nous sommes inspirés des valeurs libérales qui justement visent une plus grande justice sociale et à aider les plus démunis de la société. Et, au-delà des valeurs libérales, on pourra indiquer que, en ce qui a trait à la Prime au travail, nous nous sommes même inspirés des paroles de Félix, Félix Leclerc, qui nous dit que la meilleure façon de tuer un homme, c'est de le payer à ne rien faire. La Prime au travail est donc une réaction à ce que nous suggérait ce grand poète québécois.
Je reviens à ma question au premier ministre sur l'aide aux familles et j'aimerais savoir, M. le premier ministre, ce que nous pouvons dire notamment à mes électeurs de Marguerite-D'Youville et aux familles québécoises quant aux engagements de notre gouvernement et à la façon dont elle se répercute, en particulier depuis le budget qui a été déposé par le ministre des Finances, et de quelle façon concrètement le gouvernement indique son aide aux familles.
M. Charest: Merci. Parce que, avec la députée d'Anjou, on a parlé de Prime au travail qui... Quand on additionne la Prime au travail aux réductions... au retour, devrais-je dire, de 550 millions de dollars aux familles avec enfant, bien là on a une combinaison assez puissante de ce que nous pouvons faire, même avec des choix très limités, de ce que nous pouvons faire pour les familles québécoises.
Mais vous me permettrez de toucher un sujet qui est très important pour les familles aussi, c'est toute la question des services de garde ? parce qu'il y a eu beaucoup de discussion là-dessus, les garderies ? les services de garde à 7 $ par jour, subventionnés, et qui étaient à 5 $, puis tout le débat qui s'est fait autour de ça, pour vous dire qu'un des objectifs qu'on s'est fixés, c'est l'équité aussi dans l'accessibilité des familles aux services de garde, et qu'on s'est fixé comme objectif de créer 200 000 places, et que nous allons effectivement pouvoir atteindre l'objectif dans les délais prescrits. Et ça, c'est extrêmement important aussi.
Au Québec, on a un système qui ne ressemble à aucun autre. 7 $ par jour, c'est un prix raisonnable. Je pense qu'on est rendus ? je vous dis ça sous toutes réserves, là ? on doit être rendus au moins à 9 000 $ par année par enfant que paie l'État pour un enfant qui a accès ? une famille ? à des services de garde. Mais, en même temps, avouons que ce n'était pas normal que plusieurs parents n'aient pas accès à ces services-là, et que ces parents-là payaient, eux, entre 20 $ et 30 $ par jour pour faire garder leurs enfants, et qu'il fallait bien agir pour que nous puissions rendre disponibles des places. Puis on va y arriver, je suis très optimiste là-dessus, on va y arriver dans les délais qu'on s'était fixés, en plus.
Maintenant, dans les choix qu'on avait à faire, compte tenu de notre situation financière, on avait dit bien avant la campagne électorale que nous allions prioriser, dans la réduction des impôts, les familles avec enfants et la classe moyenne. Alors, c'est dans ce contexte que nous avons effectivement pris cette décision de venir en aide directement aux familles avec enfants, de le faire pour les familles, quand on combine la Prime au travail, de la classe moyenne et à faibles revenus. Ça représente, pour un millier de familles québécoises, pas... 1 million, je crois, de familles, ça représente l'espoir d'améliorer leur situation financière. C'est un montant d'argent qu'ils auront à leur disposition pour dépenser sur leurs priorités. Et là-dessus je pense que ça reflète bien notre volonté.
Parce qu'on en a parlé, moi, j'en ai pris bonne note, là, pendant la campagne électorale, il a été beaucoup question de l'enjeu de conciliation travail-famille, hein? Et, oui, moi, en tout cas, c'est une chose que j'ai retenue, la volonté de la population du Québec est que nous puissions davantage aider les familles avec enfants. Alors, on a proposé un certain nombre de mesures. Et je me permets, si vous avez la patience de m'écouter, de juste vous rappeler quelques éléments de l'impact que ça aura sur les jeunes familles. Un instant! Ah tiens, je l'ai, le tableau, ici.
Soutien aux enfants et Prime au travail, là, 1 million de familles pour 2005, si on prend les deux mesures ensemble, là, pour une famille, un couple ayant deux enfants et un revenu de travail de 15 000 $, ça représente 4 530 $; à 25 000 $, deux enfants toujours, un revenu, les deux mesures ensemble toujours, là, c'est 4 000 $, plus de 4 000 $; à 35 000 $ ? puis ça, c'est la moyenne du salaire d'un manufacturier ? je crois, c'est 1 400 $ de revenus supplémentaires; puis, à 40 000 $, vous êtes à 928 $; à 60 000 $, à 720 $; et là ça va jusqu'à 75 000 $, 570 $; puis, à 85 000 $, 249 $, un revenu, deux enfants. Pour une famille monoparentale, c'est également très intéressant. Donc, monoparentale, deux enfants, pour un revenu de 15 000 $, c'est 2 098 $; 25 000 $, 1 343 $. C'est donc dire... Jusqu'à 75 000 $, où il y a 135 $. Remarquez, c'est 75 000 $, ce n'est pas... 135 $, ce n'est pas non plus la mer à boire, mais c'est mieux que ce que nous avions avant et...
n(15 h 20)nLe Président (M. Simard): Nous allons conclure là-dessus, M. le premier ministre.
M. Charest: Je conclus, M. le Président, pour vous dire que, dans... En tout cas, je vais remarquer aussi que, dans la somme totale des critiques et des félicitations que nous avons reçues, il y a eu très peu de critiques sur cette question-là, de l'opposition officielle, en passant, ni sur la Prime au travail. Alors, j'en conclus qu'il y a là des mesures avec lesquelles peut-être qu'ils voudront dire un jour qu'ils sont en accord.
Le Président (M. Simard): Alors, il faut maintenant répartir le temps dans le peu de temps qu'il reste, parce que, à 3 h 55, il faudra déjà passer à un premier vote. Alors, le bloc de 20 minutes étant terminé, M. le député de...
M. Whissell: Vous noterez qu'à date ils ont eu une heure, alors...
Le Président (M. Simard): Qui a eu une heure?
M. Whissell: Bien, eux, de questions et réponses.
Le Président (M. Simard): Si je mets dans le temps de votre parti les réponses du premier ministre...
M. Whissell: Les réponses étant bonnes...
Le Président (M. Simard): ...vous admettrez avec moi qu'on a dépassé très largement le temps qui a été utilisé de l'autre côté. Donc là le bloc qui vient de vous être consacré était, je pense, équivalent. Je vous le dis tout de suite, là, on peut partir un débat de procédure là-dessus, mais il est de tradition qu'il s'agisse d'un moment où il y a des échanges et des questions et réponses. Je veux bien monopoliser pour le pouvoir la moitié du temps, mais ça ne fonctionnerait pas, vous le comprendrez bien. Alors, maintenant, c'est au député... J'invite le chef de l'opposition à poser les prochaines questions.
Position gouvernementale dans le débat
sur la réorganisation municipale
M. Landry: Oui. M. le Président, sur l'affaire de Grande-Baleine, même si on avait des heures, je ne parviendrais pas à réconcilier un ancien conservateur avec un ancien libéral sur des événements qui se sont passés à l'époque où ils avaient d'autres allégeances. Ce qui est certain par ailleurs: celui qui aurait forcé la construction de Grande-Baleine contre les Cris aurait fait une erreur historique monumentale. Et Jacques Parizeau ne l'a pas faite, cette erreur, ce qui nous a permis de faire la «Paix des braves». Et, aujourd'hui, au moment où on parle, il y a des hommes et des femmes qui travaillent sur les chantiers à Eastmain. Et, si Grande-Baleine doit être envisagé un jour, il le sera en parfaite harmonie avec les représentants de la nation crie. Je ne voudrais pas qu'il y ait un kilowatt dans le réseau québécois qui aurait été fait en méprisant les peuples et en bafouant leurs droits. Ceci pour la responsabilité historique.
Responsabilité historique aussi mais par le petit côté, le premier ministre rappelait que M. McGuinty ? j'ai remarqué ça ? des mois et des mois après son élection, a parlé pour la première fois de déséquilibre fiscal. J'y vois une négligence de notre premier ministre, encore une fois, là. Le lendemain où Ernest Eeves est devenu premier ministre de l'Ontario, j'ai fait avec lui une alliance sur le déséquilibre fiscal qui nous a permis non pas de faire des discours et de fonder des conseils qui coûtent plus cher qu'ils rapportent, mais aller chercher, dans une unanimité historique des provinces contre le gouvernement central, 1,6 milliard uniquement pour le Québec, lors de ma dernière rencontre officielle avec Jean Chrétien.
Mais, pour le temps qu'il nous reste, il y a des choses graves que nous devons évoquer. Autant la construction de la Baie James a été à la gloire du Parti libéral et de Robert Bourassa en particulier, autant le démembrement des grandes villes sera une tache indélébile au dossier du Parti libéral et de l'actuel premier ministre en particulier. Ce processus de démembrement ? auquel ils ont fini par trouver un nom qui évoque la cruauté du phénomène ? fera reculer le Québec. Il est à contre-courant de ce qui se passe dans le monde occidental dans les grandes villes canadiennes.
De l'autre côté de la rivière des Outaouais, immédiatement à l'ouest, il y a une grande ville appelée Ottawa, et on veut menacer la grande ville de Gatineau du côté est. Pendant ce temps-là, on canalise l'énergie des élus, qui devrait être au développement. Gérald Tremblay, maire de Montréal, est un homme de développement, ancien ministre libéral, ancien ministre de l'Industrie et du Commerce qui rêve de développer l'économie. Il patauge dans des querelles stériles et inutiles depuis des mois et des mois.
Dans les grands sujets universels de mécontentement par rapport à l'actuel gouvernement et au Parti libéral, il y a ce phénomène des défusions qui, lui, est une espèce de chef-d'oeuvre à créer le mécontentement parce qu'il crée le mécontentement chez les tenants des deux thèses. Pourtant, le premier ministre a affirmé devant des millions de personnes qu'il souhaitait la réussite des grandes villes. Il y a des gens qui l'on cru à l'époque où il avait plus de crédibilité qu'il n'en a aujourd'hui, puisqu'il l'a dissipée très rapidement au cours des 12 derniers mois.
D'ailleurs, il a une chance de se refaire. Je lui retends la main encore une fois. À plusieurs reprises, on lui a dit que, s'il reculait devant ce projet absurde et injustifiable, il aurait notre appui sans réserve et il pourrait dire: J'ai dit que je voulais la réussite des grandes villes, je le prouve. Il a prouvé le contraire. Plutôt que de prendre cette décision sage, il va de l'avant avec un projet de loi qui mécontente tout le monde, les défenseurs des grandes villes comme les défusionnistes. D'abord, il plonge les maires dans un processus de décision qui aura de lourdes conséquences. J'ai rencontré des maires des grandes villes, ces derniers jours, ils sont vraiment outrés. Le langage qu'ils emploient en privé doit rester privé au nom de la décence tellement ces gens-là sont en colère contre le premier ministre et contre l'actuel gouvernement.
Toutes les villes doivent tenir des registres, même celles où personne ne veut la défusion. Les greffiers se plaignent de la désorganisation dans laquelle le gouvernement les a plongés. Le greffier de la ville de Trois-Rivières, qui est un des hommes les plus paisibles et pacifiques de sa région, dans un cri du coeur, a menacé de désobéissance civile tellement il était dégoûté par les actions du gouvernement. Puis les défusionnistes sont mécontents, puisqu'ils ne retrouvent pas leurs villes comme elles étaient.
Les études publiées, on voit leur impact, elles ont été analysées par les journaux, ça a été extrêmement pénible: des études confuses, basées sur des scénarios irréalistes, biaisées, inutiles, bref uniquement des qualificatifs négatifs. Je n'ai vu personne être satisfait des études. Et c'est à l'image du processus d'ailleurs dans lequel le gouvernement nous a plongés.
Alors, insistons de nouveau. Le premier ministre a dit qu'il souhaite la réussite des grandes villes. Il est chef du Parti libéral en plus d'être premier ministre du Québec. De ses députés s'allient ouvertement aux défusionnistes et sont complices des défusions. Le député de Hull, par exemple, a convoqué la presse vendredi dernier pour confirmer qu'il appuierait les défusionnistes pour démembrer la ville de Gatineau. Le premier ministre est pour les grandes villes. Le député de Hull veut démembrer la ville de Gatineau. Les députés d'Anjou et de Marguerite-D'Youville assistent à des réunions partisanes tenues par les défusionnistes. La députée de Jean-Talon s'en lave les mains. Députée de notre capitale nationale, une circonscription de notre capitale nationale, ancienne maire de Sillery, elle s'en balance alors que le premier ministre dit qu'il veut la réussite des grandes villes.
La semaine dernière, le ministre des Affaires municipales n'a pas voulu se mouiller lorsqu'on lui a demandé si un mot d'ordre allait être lancé aux députés libéraux de prendre position en faveur des grandes villes, il a préféré s'en remettre au premier ministre. Bien, que le premier ministre assume ses responsabilités, qu'il ait le courage de faire ce qu'il a à faire. Le premier ministre est un citoyen du Québec et un citoyen municipal, est-ce qu'il va entreprendre, dans la grande ville de Montréal qu'il habite, une campagne en faveur de cette grande ville et de son maintien? C'est son devoir, je crois, élémentaire de le faire. Est-ce qu'il va faire la même chose dans la ville de Sherbrooke, où il y a aussi des inquiétudes, ville de Sherbrooke dont il est le député? Alors, comme premier ministre, comme citoyen municipal, comme député, il a des responsabilités.
n(15 h 30)n Alors, il a pu noyer dans des paroles qui n'étaient pas toujours pertinentes ? sans vouloir dire qu'elles étaient impertinentes, c'est un autre sens ? mais, à mes questions... Là, je voudrais, sur cette chose dramatique qui préoccupe les Québécois et les Québécoises au jour le jour et d'heure en heure, quelques premières questions.
Le premier ministre peut-il profiter de notre rencontre d'aujourd'hui pour donner deux signaux très clairs à ses députés qu'ils ne peuvent pas rester silencieux? Et le premier ministre peut-il rappeler à l'ordre ses députés qui appuient publiquement les défusionnistes et demander à tous ses députés d'appuyer publiquement les défenseurs des grandes villes? Et, lui-même, chef du gouvernement national du Québec, peut-il donner l'exemple ou va-t-il se laver les mains ou, pire, être complice d'un processus de démembrement des villes?
Le premier ministre peut bien nous répondre que les députés ne signeront pas les registres, qu'ils ne feront pas campagne active pour aucun des deux camps, qu'il veut laisser les citoyens se prononcer dans le débat sans interférer, mais cette réponse ne tient pas la route. Nous sommes ici des députés, des personnes engagées dans notre vie collective et nous avons le devoir de dire de quel camp nous sommes, ce que nous favorisons: les grandes villes ou leur démantèlement. Cet événement triste va passer à l'histoire. Il faut savoir qui aura construit l'histoire d'une façon positive ou négative. Les députés élus doivent se prononcer. Nos députés, nous, se prononcent, comme c'est leur devoir de le faire, et on attend que tous les députés dans l'Assemblée nationale en fassent autant. Si le premier ministre croit que c'est justifié pour ses députés de garder le silence sur un enjeu aussi important, il devra leur donner comme ligne de conduite de ne pas prendre part au débat référendaire sur la souveraineté du Québec quand elle viendra. C'est justement le rôle des députés de s'impliquer dans des débats de cette importance.
Bien que les défusionnistes, eux, soient outrés du projet de loi n° 9 ? parce que, je l'ai dit, tout le monde est mécontent ? qui ne leur donne pas l'espoir de ravoir leur villes telles qu'elles étaient avant les fusions, ils sont à pied d'oeuvre quand même partout au Québec pour faire signer les registres dans les jours qui viennent. Et la loi n° 9, on le sait, prévoit la création, dans toute agglomération où il y aura défusion, d'un conseil dans lequel les maires auront un poids proportionnel à la population de leur ville.
D'ailleurs, le député de Hull a eu des propos absolument scandaleux, de ce point de vue là. Il veut que l'ancienne ville renaisse pour pouvoir dominer budgétairement et démocratiquement les populations avoisinantes, même dans la ville de Gatineau, qui est plus populeuse que la ville de Hull. C'était des propos vraiment incohérents ou scandaleux, suivant l'hypothèse que l'on veut retenir.
Donc, un conseil complètement antidémocratique instauré par un gouvernement qui tente de faire croire aux citoyens qu'il agit de façon démocratique en proposant une consultation sur les défusions. C'est un chef d'oeuvre d'incohérence. On veut, au nom d'une démocratie feinte, créer des structures qui violent les principes les plus élémentaires de la démocratie, dont celui de la représentation et de la taxation. «No taxation without representation.» Donc, je demande au premier ministre de dire franchement et clairement à ses alliés défusionnistes qui se promènent en disant: C'est la première étape, «this is the first step», après ça, c'est vrai que, si la structure est antidémocratique, on aura plus de pouvoirs puis on recheminera vers le statu quo ante... Alors ça, ça m'apparaît d'un grand intérêt pour la population que le premier ministre soit clair sur cette question: Est-ce qu'il s'engage à dire à ses alliés défusionnistes que tout espoir de retour aux anciennes villes telles qu'elles l'étaient est vain, et qu'il n'y aura aucune modification à la loi n° 9 dans les prochaines années, et que les espoirs que les défusionnistes font miroiter, de retour au statu quo, sont vains et que le premier ministre du Québec ne permettra pas une telle chose? Il en a déjà assez fait de saccage dans ce dossier, est-ce qu'il peut s'engager à ne plus en faire?
Le Président (M. Simard): M. le premier ministre.
M. Charest: Bon. Alors, le chef de l'opposition nous a habitués à l'énumération des adjectifs, puis je constate qu'il est en tout cas égal à lui-même, là. À force de gonfler le langage à l'hélium, là... J'attends toujours une suggestion, une nouvelle idée. Mais enfin, de toute évidence, ça ne viendra pas aujourd'hui.
Mais je veux, sur cette question-là... il y a une chose sur laquelle, lui et moi, on va certainement s'entendre, c'est qu'il y a une vision... nous avons une vision très différente de la façon dont on doit pratiquer la démocratie au Québec. Et là-dessus il y a vraiment deux visions qui de toute évidence ne sont pas du tout, du tout les mêmes. Je vous dirais que, dans notre cas à nous ? parce que je peux expliquer notre position sur la base des valeurs qui nous animent, nous, les libéraux du Québec ? une des grandes valeurs libérales, c'est justement ce respect de la démocratie et des institutions démocratiques. Mais le chef de l'opposition officielle de toute évidence a une autre vision des choses et ne voit pas cette affaire-là de la même façon.
Il faut rappeler la courte histoire de ce débat. Parce que l'origine vient d'où? Elle vient d'un gouvernement du Parti québécois qui n'avait aucun mandat de faire des fusions forcées, il n'en avait jamais parlé pendant la campagne électorale de 1998, et qui soudainement décide d'imposer aux citoyens qui habitent un certain nombre de villes du Québec des fusions forcées. Alors, difficile aujourd'hui de réconcilier le mot «démocratie» sortant de la bouche du chef de l'opposition officielle et ses actions parce qu'il y a une contradiction historique entre les deux.
Et ça, je ne suis pas le seul à le penser. Le député de Borduas, qui faisait partie de votre gouvernement, pense la même chose. Puis ça vaut la peine de le citer, là. Je vais citer, M. le Président, des paroles du député de Borduas, M. Charbonneau, du 14 juin 2003, après la campagne électorale, où il disait, et je cite ceci: «On ne peut pas penser que l'on va gouverner les gens de façon autoritaire et autocratique sans qu'il y ait une réaction. [...]le bien commun veut aussi dire d'écouter les gens.» Fin de la citation. Ça, c'est votre propre député qui a fait un long débat sur les débats démocratiques, sur les institutions démocratiques au Québec, qui dit au chef de l'opposition officielle ce qu'il pense de ses positions, là, il vous le dit.
Il continue en disant ceci: «On refuse de faire un vrai post mortem ? il s'adresse au Parti québécois. Pourtant, les fusions municipales découlent de pratiques autoritaires de notre gouvernement. Nous avons eu des attitudes inacceptables, comme d'être arrogants? je le cite au mot. Nous avions des pratiques de gens qui disent: Voici ce qui est bon pour vous et vous devriez y adhérer. De toute façon, vous n'avez pas grand-chose à dire.» Fin de la citation. Bien, M. le chef de l'opposition officielle, c'est votre propre député qui vous parle, qui vous dit ce qu'il pense de ce que vous venez, vous, de porter comme critique. Si, lui, il pense ça ? puis, lui, il travaillait à l'interne, il faisait partie de votre Conseil des ministres, il était assis autour de la table ? je peux-tu vous dire que ça se multipliait par 10 en termes d'impacts auprès de citoyens qui ne siégeaient pas à l'Assemblée nationale et qui ont dû subir ? le mot n'est pas mal choisi ? dû subir votre politique?
Le même député Charbonneau disait: Quand tu écoutes Diane Lemieux, députée de Bourget ? qui vous assiste aujourd'hui, elle est assise derrière vous ? aujourd'hui, elle dit encore que nous avions raison de faire les fusions municipales et que ce sont les gens qui n'ont pas compris. Donc, tous les gens qui nous ont laissé tomber en cours de route sont des imbéciles, et, nous, nous sommes les seuls à avoir raison.» C'est dur, hein? Ça, c'est un député du Parti québécois qui parle à son chef puis qui dit à son chef qu'il prend les gens pour des imbéciles. Pourtant, M. le chef du Parti québécois nous répète essentiellement le même discours aujourd'hui.
Vous voyez, la différence, elle est là. Notre politique, elle est fondée sur un principe, une valeur libérale auxquels nous croyons profondément, c'est la démocratie. Et ce que j'ai dit lors de la campagne électorale, vous l'avez noté, je ne vous l'avais pas relevé, mais, puisque vous insistez pour en parler, je vous le rappelle, c'est que l'adhésion aux nouvelles villes passe par une adhésion démocratique. Nous croyons que les citoyens, qui sont d'ailleurs des contribuables au niveau municipal, devraient avoir le droit de se prononcer sur l'avenir de leurs communautés. Je pense que c'est vrai pour l'ancienne ville de La Baie ? le député du comté est ici aujourd'hui ? moi, je pense que c'est vrai pour ces gens-là.
n(15 h 40)n Ce que je constate, c'est que vous n'avez pas changé d'idée, malgré ce que le député... les remontrances que vous a faites le député de Borduas, votre propre député. Quand vous parliez de la déception des maires lors du congrès de l'UMQ, moi, j'ai tout de suite pensé que vous faisiez référence à leur réaction suite à votre discours. Vous avez réussi, comme chef de l'opposition officielle, à les décevoir. Ils parlaient de douche froide. Vous êtes allé leur dire... Vous êtes allé leur dire quoi? Vous êtes allé leur dire: «Je trouve que les municipalités n'ont pas raison. Le gouvernement du Québec a la compétence exclusive sur les municipalités.» C'est vrai. Sur le plan constitutionnel, c'est une compétence qui relève de l'Assemblée nationale du Québec. C'est vrai que c'est juridiquement une créature du gouvernement du Québec. Il y a quand même des citoyens qui habitent dans les municipalités. Puis on est en 2004, et ces gens-là paient des impôts, ils paient des taxes. Il me semble que le minimum, c'est qu'on leur donne le droit de se prononcer sur l'avenir de leurs municipalités. Mais vous n'y croyez pas.
Vous avez même dit aux élus municipaux et également fait valoir aux élus municipaux qu'il ne «leur servait à rien de demander davantage d'argent au gouvernement du Québec. Il faut être réaliste et regarder la comptabilité telle qu'elle est. Le gouvernement du Québec doit recevoir des sommes énormes d'Ottawa, autrement il peut à peine satisfaire ses propres besoins. Comment peut-il aider les municipalités, sauf pour les infrastructures? Vous pouvez dire à Québec: On manque d'argent, on manque d'argent. N'insistez pas, la cour est pleine. Ils le savent, mais n'en ont pas à vous donner.» Fin de la citation.
Je souligne, en passant, qu'il y aura une discussion avec les municipalités sur la question du pacte fiscal et que, même si la situation est difficile, on s'est engagés à s'asseoir avec les élus municipaux pour débattre de cette question-là.
Mais je vais terminer avec une dernière citation qui reflète l'état d'esprit du chef de l'opposition officielle, que je regrette, où il dit ceci: «Québec a le droit de défusionner mais n'a pas le droit de donner aux populations le droit de le faire.» Point.
Une voix: C'est ça.
M. Charest: Vous le dites, c'est ça.
Le Président (M. Simard): Il nous reste...
M. Charest: Permettez-moi...
Le Président (M. Simard): Oui, très rapidement.
M. Charest: ...d'ajouter un commentaire rapidement, M. le Président. Notre action est fondée sur ce principe de respect de démocratie. Nous croyons que les grandes villes peuvent réussir à la condition d'avoir de l'adhésion. On va permettre aux citoyens de se prononcer. Les députés chez nous ne vont pas participer à l'étape du registre. Ils n'ont pas l'intention de faire de campagne dans un sens ou l'autre.
Il se peut qu'il y ait des députés qui se prononcent, ça peut arriver. Je m'attends à ce que vos députés se prononcent aussi. À moins que vous ne disiez aujourd'hui au député qui représente l'ancienne ville de La Baie qu'il va se taire. Si vous me dites aujourd'hui que lui va se taire, qu'il ne dira rien, bien, je m'en déclare déçu. Mais je vous souligne, moi, que, une fois qu'on aura passé l'étape des registres puis que le débat aura lieu, il se peut qu'il y ait des députés qui se prononcent sur cette question-là. Mais chez nous les gens ne vont pas faire de campagne dans un sens ou dans l'autre parce que tout le sens, fondamentalement, de notre démarche, c'est de respecter ce principe démocratique de donner à ceux à qui revient la décision l'occasion de se prononcer, et ces personnes-là, ce sont les citoyens qui habitent les villes.
Le Président (M. Simard): M. le premier ministre, Mmes, MM. de la commission, je vais vous faire une proposition. Il nous reste quelques minutes seulement avant de passer à l'adoption de ce premier bloc. Je vous propose deux questions rapides ? et des réponses équivalentes, puis-je le demander ? de la part de la partie ministérielle et du député de Rivière-du-Loup rapidement pour terminer cette période, et ensuite nous passerons à l'adoption de ce bloc, et ensuite, à partir de 4 heures, à l'étude du bloc Jeunesse. Alors, je vais inviter maintenant le député de Trois-Rivières à poser une courte et rapide question qui invitera à une réponse aussi rapide.
Orientations en matière
de développement régional
M. Gabias: Vous pouvez quand même me permettre, M. le Président, de joindre ma voix à celle de mes collègues pour souligner votre anniversaire avec...
Le Président (M. Simard): Ça ne prendra pas de temps, ça.
M. Gabias: ...toute l'affection que j'ai reçue, moi, également le 14 avril dernier par les gens de mon comté. M. le premier ministre, il y a une décision importante qui a été prise par le gouvernement libéral en termes de direction de développement régional, c'est-à-dire la création des conférences régionales des élus, une décision qui a été largement critiquée par l'opposition et, j'imagine, par des gens qui étaient sympathiques au maintien de ce qui existait avant, c'est-à-dire des tables avec un nombre incalculable de personnes qui en arrivaient à des décisions qui n'allaient pas dans le sens du développement des régions. Pourriez-vous nous indiquer la volonté ferme du gouvernement de voir au développement des régions grâce aux élus sur les conférences régionales des élus?
M. Charest: Ça fait 30 ans qu'on parle de décentralisation au Québec, et malgré cela les vraies mesures de décentralisation se sont fait attendre. Je pense que... Puis je dis ça, c'est vrai autant pour les gouvernements libéraux que les gouvernements du Parti québécois qui se sont succédé puis qui n'étaient pas de mauvaise foi. Mais, quand on prend un peu de recul puis on fait l'examen de tout ce qu'on a proposé, on a eu de la déconcentration, on a eu des transferts de fonds, mais la décentralisation au sens réel du terme, ça s'est fait attendre.
Dans la réflexion qu'on a faite ensemble, nous, bien avant la campagne électorale, on a tiré un certain nombre de conclusions. On l'a fait aussi suite au Sommet des régions qui a eu lieu ici sur la fin du mandat du gouvernement du Parti québécois, où il y avait... cette question-là de décentralisation et vers qui elle devait aller s'était posée: Est-ce que ça devrait aller vers les élus? Est-ce que ça devrait aller vers les représentants de la société civile? Et ceux qui étaient à ce moment-là au sommet se rappellerons qu'il n'y a pas eu de réponse de donnée à la question comme telle. Alors, nous, on a tiré un certain nombre de conclusions.
D'abord, dans tout le travail qu'on a fait dans les régions, une des choses qui nous est parue très claire, c'est qu'une des conditions de développement des régions, c'est que les leaders régionaux puissent avoir entre les mains les outils nécessaires pour faire leur propre développement, que le développement d'une région ne peut pas se faire à partir de Québec ou d'ailleurs. Ça, c'est la première chose qui nous a paru très évidente.
Deuxièmement, que chaque région était différente. Ça paraît évident de le dire, sauf que rappelons-nous que le gouvernement précédent puis d'autres gouvernements aussi ont appliqué des mesures qui étaient du mur-à-mur, traitaient tout le monde de la même façon, la même formule partout. On a fait des CLD où c'était la même chose à peu près partout. À certains endroits, ça a marché puis ça a bien marché, puis, à d'autres endroits, ça n'a pas marché, ça n'a pas fonctionné. Alors, nous, on veut respecter le fait que chaque région est différente, les besoins sont différents.
Troisième chose, si on doit faire de la décentralisation, on doit justement éviter ce piège du mur-à-mur et permettre à chaque région de le faire sur mesure, et, si on doit faire une vraie décentralisation, cela a pour conséquence de l'imputabilité. Une vraie décentralisation, la clé est là. Pour comprendre pourquoi on a voulu y aller vers les élus, c'est parce qu'une vraie décentralisation signifie une responsabilité qui commande de l'imputabilité, que les gens concernés répondent de leurs décisions. Et c'est la formule que nous avons donc privilégiée.
On va maintenant passer à la prochaine étape où on va, avec les ministères, là, région par région, faire l'examen de ce qui peut et doit être décentralisé ou ce que les gens veulent décentraliser, et ça, c'est l'étape qui nous attend. En attendant, les conférences régionales seront mises à contribution, dans un premier temps, avec les forums thématiques. Moi, je vois ça comme étant un signal très positif parce que le gouvernement effectivement envoie un signal aux forums que... aux nouveaux conseils régionaux des élus qu'ils sont des acteurs importants et que ce grand débat qui touche l'ensemble du Québec va passer par les conseils régionaux.
Le Président (M. Simard): Je vous remercie, M. le premier ministre. Et j'invite, pour la dernière question, le député de Rivière-du-Loup.
Politique de développement
énergétique et projet de centrale
thermique du Suroît, à Beauharnois (suite)
M. Dumont: Oui, très brièvement. On a fait le tour, dans le dossier énergétique, des grands enjeux. Le premier ministre, à travers ça, n'a jamais malheureusement parlé du dossier qui est le plus proche de nous, le Suroît. Il y a quelques semaines, il s'est dit mal cité par Le Devoir, quand on disait qu'il forcerait Beauharnois à accueillir le Suroît. Je fais un rappel très, très bref des événements. Le 13 janvier, un membre de son Conseil des ministres annonçait la construction. Le 6 février, il reculait en confiant un mandat à la Régie de l'énergie sur le même sujet, annonçant que l'annonce du 13 janvier était devenue caduque.
Ma question, elle est fort simple. Les citoyens du Québec n'attendent pas, d'une régie, d'un organisme, de fonctionnaires quelconques, une orientation, ils veulent savoir de leur premier ministre qu'est-ce qu'il va faire avec le Suroît. Et la réponse ne peut pas être: Je n'ai pas le choix, ou on n'a pas le choix, ou on est coincés. Les alternatives sont là, il y a plusieurs possibilités, il a le choix, et on veut savoir quel sera son choix.
Le Président (M. Simard): M. le premier ministre.
M. Charest: M. le Président, je me suis permis de relire au député de Rivière-du-Loup la politique du gouvernement libéral sur les questions énergétiques que nous avions énoncée avant la campagne électorale; tout ça est très clair. Un des enjeux très importants pour l'avenir du Québec, c'est la question de la sécurité énergétique. Et ça, c'est un enjeu qui est extrêmement important et qui est encore souligné en caractères gras compte tenu de ce qui se passe chez nos voisins, tant au sud qu'à l'ouest, et surtout à la lumière de cette panne d'électricité que l'Amérique du Nord a vécue l'été dernier.
n(15 h 50)n Et ajoutez à ça toute la question de l'avenir du développement économique du Québec parce que la disponibilité d'énergie à un coût raisonnable, propre et fiable, ça va devenir un outil de développement très puissant pour l'avenir du Québec. Et là j'ajoute l'élément de fiabilité qui a pris une importance qu'on n'aura jamais connue auparavant, là, une importance, une nouvelle importance par rapport aux événements de l'été dernier et qui va prendre une nouvelle importance par rapport aux choix que l'Ontario aura à faire incessamment. Puis je vous souligne que j'ai rencontré, moi, des développements... des gens qui sont dans le secteur industriel, entre autres de l'automobile, qui m'ont dit à quel point cette question de sécurité était importante dans les choix qu'eux font sur le plan de leurs propres investissements. Alors, voilà, voilà ce que j'en retiens.
Dans le cas du Suroît, la population du Québec souhaitait avoir un débat sur le choix du Suroît, ses conséquences, et a voulu que ce débat ? moi, je l'ai compris comme ça ? soit le plus large possible, que non seulement on puisse parler de sécurité, qu'on puisse parler d'alternative, qu'on puisse le faire dans le contexte de l'ensemble des autres alternatives énergétiques et mesurer la conséquence sur le plan environnemental. Si on a voulu confier à la Régie de l'énergie le soin de conduire ce débat, c'est parce qu'on cherchait justement un environnement, un forum indépendant qui pouvait nous permettre, avec un peu de distance, d'évaluer le sens de ces choix-là et permettre la plus grande participation possible des citoyens.
Vous semblez vous contredire quand vous nous dites, d'une part: On est les seuls à avoir déposé un mémoire devant la régie, mais, en même temps, on ne tiendra pas compte de ce que la régie va nous recommander parce que peu importe ? parce que moi, c'est ce que j'entends du député de Rivière-du-Loup, là ? peu importe ce que la Régie de l'énergie va recommander, dans votre cas à vous, vous êtes contre le Suroît, point à la ligne. Moi, je trouve ça court, en termes de raisonnement, si vous pensez vraiment que l'énergie est un outil important pour l'avenir du Québec, que c'est trop court de simplement affirmer une affaire comme ça, parce que c'est populaire de le dire aujourd'hui, alors que les conséquences de ce choix-là sont beaucoup plus importantes que ça.
L'autre chose que je tiens à préciser, là ? parce que vous parlez de notre vision de l'avenir ? sous mon gouvernement, Hydro-Québec a annoncé des investissements de l'ordre de 3,5 milliards par année, pendant une vingtaine d'années. Si cette décision-là en soi ne réussit pas à vous convaincre de notre engagement de développer la filière énergétique au Québec, je ne sais pas ce qu'on peut faire de plus. Mais on va y donner suite, à cet engagement-là, avec l'annonce de projets, puis ça, ça va venir en temps et lieu et dans l'ordre.
Le chef de l'opposition officielle, quand il parle de projets qui doivent recevoir l'appui des communautés, je pense, a une expérience que vous n'avez pas, c'est vrai. Puis c'est une des leçons qu'il faut retenir de tout ce qu'on a appris dans les 20 dernières années. Alors, moi, je suis très optimiste pour le développement de la filière hydroélectrique et énergétique du Québec, mais il faudra le faire dans un contexte où on prend des décisions responsables. Et, comme chef de gouvernement, moi, j'ai l'intention d'être à la hauteur de la tâche. Merci.
Adoption des crédits
Le Président (M. Simard): Merci, M. le premier ministre. Je suis absolument ravi de la discipline que tout le monde s'est donnée aujourd'hui. Il nous reste le temps qu'il faut maintenant pour voter ces deux premiers blocs. Je vous les rappelle, il s'agit du programme n° 1, qui est le cabinet du lieutenant-gouverneur. Je veux juste rappeler, puisqu'il n'y a jamais un chiffre qui a été changé ici à ce sujet, qu'il s'agit d'une dépense quand même aux crédits de 914 080 $ et que, le deuxième, le service de soutien du premier ministre et du Conseil exécutif, représente quand même une somme de 71 919 000 $. Alors, qu'en est-il maintenant du programme n° 1, Cabinet du lieutenant-gouverneur. Est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Des voix: Sur division.
Le Président (M. Simard): Sur division. Est-ce que le programme 2, Service de soutien auprès du premier ministre et du Conseil exécutif, est adopté?
Des voix: Adopté.
Des voix: Sur division.
Le Président (M. Simard): Sur division. Alors, nous entreprendrons dans quelques minutes l'étude des crédits sur les volets Jeunesse. Je vous propose une pause jusqu'à 4 heures et vous remercie, M. le chef de l'opposition, je vous remercie infiniment, M. le premier ministre, M. le député de Rivière-du-Loup, pour votre collaboration. Merci.
(Suspension de la séance à 15 h 55)
(Reprise à 16 h 3)
Le Président (M. Simard): Alors, nos travaux reprennent. Alors, même si le député de Mercier n'a pas pu poser de questions au premier ministre, sa mère semble vouloir lui en poser.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Simard): Si le député de Mercier n'a pas pu vous poser les questions, sa mère peut vous en poser.
Jeunesse
Alors, il est 4 h 4. Je vous rappelle que la Chambre nous fait obligation d'étudier pendant une heure les crédits dévolus à la jeunesse et qui sont sous la responsabilité du premier ministre. Donc, nous sommes, je le dis pour ceux qui se joignent à nous à ce moment-ci, nous sommes réunis afin de procéder à l'étude des crédits budgétaires dévolus à la jeunesse, soit le programme 5 du Conseil exécutif, pour l'année financière 2004-2005. Donc, nous avons du travail devant nous pour la prochaine heure.
Discussion générale
J'invite sans plus de formalité et en essayant de bien répartir le temps de parole en blocs égaux, j'invite à ce moment-ci, puisque c'est la continuation de nos travaux et qu'il n'y a pas de remarques préliminaires, déjà le député de Berthier, de l'opposition officielle, à poser une première question.
Budget discrétionnaire
M. Bourdeau: Merci, M. le Président. Lors d'une récente période de questions, j'avais demandé au premier ministre, là, de rendre un peu des comptes sur les désirs de la jeunesse et le fait que la jeunesse était en colère. Je pense qu'il s'en souvient. Mais il m'avait donné après ça une multitude de programmes qu'il avait mis en place pour aider la jeunesse dans différents moyens. Sauf qu'il faut prendre conscience que ces mesures-là, c'étaient des mesures qui existaient déjà, qu'ils ont eux-mêmes coupées l'an passé pour remettre, cette année, suite à une lumière qui est peut-être venue du Conseil permanent de la jeunesse ou de différents organismes jeunes, je ne le sais pas, mais il y a une lumière qui a sonné au sein du cabinet du premier ministre pour dire: Oups! ces programmes-là qui avaient été abolis, bien, en fin de compte, ils étaient bons, on les remet en place.
Une voix: ...lumière qui a brillé.
M. Bourdeau: Une lumière qui a brillé, c'est ça. C'est peut-être ça, Briller parmi les meilleurs. Sauf que la jeunesse aura à vivre, lorsqu'on gratte un peu plus, la jeunesse aura à vivre avec des conséquences à long terme des décisions que le gouvernement prend. Je donne l'exemple, la vente d'actif de 880 millions de dollars, on va vendre des bâtisses qu'on a déjà payées pour les louer par la suite. Un ancien premier ministre libéral avait comme leitmotiv Maîtres chez nous; le nouveau premier ministre, aujourd'hui, libéral, c'est plutôt Locataires chez nous qu'il a comme leitmotiv. Bien, ces conséquences-là, les jeunes les vivront dans plusieurs années. Même chose quand on parle des baisses d'impôts.
M. le Président, vous le savez ? parce que, vous-même, ce matin, dans les journaux, lorsqu'on parlait de votre fête, vous étiez associé dans un petit bloc avec une nouvelle chanteuse de chez nous, Mme Ariane Moffat, où il y était marqué votre fête, vous êtes chanceux d'être associé dans le même bloc avec Mme Moffat ? on a une nouvelle génération justement qui tente de passer un message tant au niveau de la politique qu'au niveau des arts, de la culture. Ce message-là, on dirait que le premier ministre n'est pas capable de le décoder. Puis je vais l'aider ce matin justement à le décoder ? bien, c'est plutôt cet après-midi ? à le décoder.
Il y a des jeunes, des gens de la nouvelle génération, comme Daniel Boucher, qui parlent de vouloir avoir les clés de chez nous. Quand il parlait de ça, M. le Président, ce n'était pas vouloir avoir les clés d'une location, c'était plutôt de tenter d'avoir les clés, l'émancipation nationale du peuple du Québec pour pouvoir enfin gérer nous-mêmes nos avoirs et nos pouvoirs. Ça, je pense que le premier ministre l'avait mal... il ne l'a pas compris. Bien évidemment, il fait en sorte qu'on prend des décisions actuelles qui nuiront à la jeunesse de demain. Il est évident que le premier ministre, surtout dans le contexte électoral qui va suivre bientôt au niveau fédéral, a fait le choix du fédéralisme avant le choix des besoins de la jeunesse du Québec.
Et je commencerais avec une première question qui m'intrigue énormément. Dans le discrétionnaire du ministre... du premier ministre, concernant la jeunesse, il y a 10 000 $ qui est parti au Conseil de l'unité canadienne. C'est 5 % du budget discrétionnaire du ministre qui est allé au Conseil de l'unité canadienne. Moi, je pourrais vous donner en partant, M. le premier ministre... M. le Président, plutôt, plusieurs organismes jeunesse qui auraient besoin de ce 10 000 $ là justement pour faire plusieurs choses, pour donner des services directs aux jeunes. Mais non, à la place de ça, on va donner 10 000 $ dans le Conseil de l'unité canadienne. J'aimerais ça comprendre pourquoi ça a été fait. Et est-ce que le premier ministre fera encore la même chose cette année, privant ainsi plusieurs organismes jeunes de montants qu'ils auraient besoin pour pouvoir oeuvrer dans leurs différents milieux?
M. Charest: Bon. Je veux dire au député de Berthier, là, de faire... Je lui dis amicalement qu'il faut faire, je pense, attention. Vous avez fait une affirmation tantôt que je décrirais comme étant, à la limite, là, quand vous parlez de choix de fédéralisme, comme si c'était un choix qui était contre le Québec, alors que c'est tout à fait légitime pour vous d'avoir le choix que vous faites. Vous défendez, vous, l'idée de la souveraineté, mais je pense que vous allez respecter le choix que d'autres font, d'autres citoyens du Québec, peu importe leur âge, et que ce n'est pas un choix qui est moins bon que celui que vous proposez. Vous pouvez faire l'argument que vous croyez que le vôtre est le meilleur, mais démocratiquement c'est aussi légitime, puis je pense qu'il faut faire bien attention à ça.
Vous avez parlé d'artistes aussi. Bien, vous avez dû remarquer que, suite au budget que nous avons déposé, la communauté artistique a bien réagi. On n'a jamais tout ce qu'on veut, mais je prends à témoin Pierre Curzi qui remarquait qu'on a augmenté le budget du ministère de la Culture et des Communications de 3,8 % dans un contexte budgétaire extrêmement difficile puis qu'on a fait un certain nombre de choix qui reflètent en tout cas des priorités pour les jeunes.
Et, sur la question de la baisse des impôts, bien, je dois en conclure que vous êtes contre les baisses d'impôts. Les jeunes sont les plus taxés en Amérique du Nord. Et je vous invite juste à examiner une question. Une personne qui est seule au Québec, là, une personne seule, sans dépendants, là, paie, je pense, si on le compare à l'Ontario, probablement 40 % de plus d'impôts que quelqu'un qui réside en Ontario. Ça, en termes d'effet net, là, ça devient un incitatif pour aller travailler ailleurs. Alors, il ne faut pas faire trop d'économie dans l'examen de la question des impôts. Puis, nous, on croit...
n(16 h 10)nM. Bourdeau: ...
M. Charest: Bien, pour les jeunes...
M. Bourdeau: ...
Le Président (M. Simard): S'il vous plaît! S'il vous plaît, là, tout de suite, M. le député de Berthier, là, s'il y a une première règle fondamentale de fonctionnement ici, c'est qu'une personne parle à la fois. Alors, j'invite le premier ministre à reprendre là où il était.
M. Charest: Puis je vais essayer d'y aller rapidement. Je veux faire un certain nombre de mises au point, d'abord la question des impôts. Puis, quand on parle de jeunes en région, entre autres, vous avez dû remarquer, suite au budget aussi, qu'on a donné droit à un crédit d'impôt remboursable de 8 000 $ sur les prêts étudiants, les jeunes qui vont en région, qu'on a augmenté à 375 $ le crédit d'impôt disponible pour les jeunes qui font des stages en région. Tout ça a été bien accueilli, puis avec raison. Ça fait partie des choses auxquelles on croit.
Et, pour ce qui est de la vente d'actif, encore là faisons attention, votre propre gouvernement, dans le budget du 11 mars 2003, ne l'avait pas annoncé, mais il y avait des ventes d'actif de prévues. La différence, c'est qu'il ne l'avait pas dit. Pourquoi? Bien, parce que ce n'est pas vrai que le gouvernement doit toujours être propriétaire de tout. Le président du comité en sait quelque chose, il était président du Conseil du trésor. Puis on ne fait pas ça, ces choses-là, aveuglément, là. Faisons attention, là, il ne s'agit pas juste de dire: On va vendre, peu importe le prix. On fait ça de façon méthodique puis on fait ça en considérant les intérêts de la population.
Pour placer les choses dans leur contexte, le Secrétariat à la jeunesse, là, s'est vu augmenter son budget de 40 % l'an passé ? vous parlez de vieux programmes qui ont été reconduits ? puis, cette année, on a fait encore mieux, on a augmenté le budget du Secrétariat à la jeunesse de 20 millions. Ça, c'est une augmentation de 70 %. On a annoncé le défi entrepreneurial, c'est plus de 20 millions de dollars qu'on a annoncés sur trois ans. Il faut le dire, ce n'est pas mauvais, ça. Et on a un portail Internet qui devrait être en marche bientôt. On a annoncé 10 millions de dollars de plus aux forums jeunesse régionaux, on l'a fait en concertation avec les forums jeunesse, soit dit en passant. Et, au niveau de l'éducation, on a annoncé un certain nombre de mesures qui sont assez intéressantes. Je ne veux pas aller là-dedans dans les détails.
Vous me demandez pourquoi on a dépensé 10 000 $, eh bien c'est un programme, ça, qui permet aux jeunes de perfectionner leur langue seconde, de se familiariser avec d'autres cultures puis de favoriser une meilleure compréhension entre Canadiens de l'ensemble du territoire. Ça se fait au Centre Terry-Fox. Puis le gouvernement du Québec n'avait pas l'habitude d'y contribuer, pourtant il y a des jeunes Québécois qui y vont. Puis on a fait une contribution qui me semble tout à fait dans l'ordre des choses, à 10 000 $, pour le nombre de jeunes Québécois qui y vont. À moins que vous disiez que vous ne vouliez pas que ces jeunes-là puissent bénéficier du programme. Vous n'êtes pas contre ça, j'espère. Moi, je pense que c'est raisonnable pour nous de pouvoir leur permettre d'y assister. Puis ça fait partie...
Le Président (M. Simard): M. le député de Berthier.
M. Charest: Vous me permettez, juste... Parce qu'on favorise des échanges de Québécois au plan international aussi. Il y a l'Office franco-québécois de la jeunesse. On fait la même chose en Wallonie-Bruxelles, on fait la même chose dans les Amériques. Alors, pourquoi on ne le ferait pas aussi au niveau canadien? Ça se vaut, tout ça.
Le Président (M. Simard): M. le député de Berthier.
Consultation des groupes
concernés dans l'élaboration
d'une nouvelle stratégie jeunesse
M. Bourdeau: Oui. Merci, M. le Président. Je l'ai expliqué tout à l'heure, là, justement, là, lors de la dernière période de questions, j'avais posé une question au premier ministre relativement au fait que les jeunes ne se sentaient pas écoutés de la part de celui-ci. L'an passé, à l'étude des crédits, ici même, le premier ministre avait dit: Bien, je vais rentrer très rapidement en contact avec les jeunes, je l'ai fait. Depuis ce temps-là, il y a une seule rencontre qui a eu lieu, le 10 juin 2003, et c'est la seule rencontre qu'il y a eu entre le comité du suivi du Plan d'action jeunesse et le premier ministre.
Pourtant, il martèle à peu près sur toutes les tribunes que le dossier jeunesse, c'est important, c'est sa priorité. Cependant, les différents groupes jeunes se plaignent justement de la non-accessibilité et de la gouvernance des dossiers jeunesse. Je vais citer deux extraits, M. le Président. Le premier déclare que «le Conseil permanent de la jeunesse et plusieurs autres groupes directement impliqués dans l'amélioration des conditions de vie des jeunes Québécoises et Québécois demeurent incertains quant à la gouverne des dossiers jeunesse. Nous avons été étonnés et déçus de voir que les grandes orientations de votre stratégie jeunesse semblaient bien déjà définies dans votre tête, et cela, malgré l'absence manifeste de dialogue avec les groupes jeunes du Québec ? citation qui provient de la lettre justement que le premier ministre a reçue le 7 avril dernier. Une rencontre du Comité national de suivi par année, à quelques jours d'un budget, ressemble plus à une tentative d'apaiser toute grogne naissante chez les groupes jeunesse qu'à une véritable volonté de travailler en partenariat sur des objectifs partagés et compris par tous.» On apprend du même souffle qu'une nouvelle stratégie jeunesse est négociée à portes closes. On voit comment que le premier ministre fait confiance à la jeunesse et aux différents organes jeunesse pour le conseiller dans la mise en place d'une nouvelle stratégie jeunesse.
J'aimerais savoir aujourd'hui, M. le Président, si le premier ministre s'engage à faire cette stratégie jeunesse là et la faire en concertation avec les jeunes et non de faire comme plusieurs de ses ministres, fermer la porte aux groupes jeunes, à ne pas les consulter, à prendre des décisions sans les consulter. Et j'aimerais aussi savoir: Est-ce qu'il va daigner un jour rencontrer le comité de suivi du Plan d'action jeunesse?
Le Président (M. Simard): Merci, M. le député de Berthier. J'invite le premier ministre à répondre.
M. Charest: Je veux clarifier une affaire immédiatement. Oui, les jeunes vont être consultés, puis ils vont être consultés parce que ce n'est pas vrai qu'il y a une stratégie qui a été arrêtée à l'avance, décidée à l'avance et que tout est réglé, ce n'est pas vrai. Pourquoi on le ferait? De toute façon, il y a une stratégie jeunesse qui est en place actuellement, qui vaut jusqu'en 2005, qui suit une stratégie jeunesse qui a précédé celle-là, et, comme celle de 2005 va arriver à terme, il faudra bien la renouveler. Puis mon travail évidemment m'amène à planifier puis à prévoir le renouvellement, puis c'est ce que je fais. Alors, on va faire des consultations avec des groupes.
Puis mon mandat aussi, c'est de mettre sur la table des éléments de consultation, puis c'est ce que je vais faire. Puis on va toucher un certain nombre de sujets évidemment, l'éducation, la formation. Il y a la question du suicide qui est très préoccupante pour la jeunesse québécoise, on a, au Québec, un problème à ce niveau-là. Et, moi, j'aimerais beaucoup qu'on puisse, dans la consultation... que l'élaboration d'une nouvelle édition de la politique, on puisse justement toucher à ça. Alors, ça fait partie des éléments parmi d'autres qui sont relevés.
La semaine dernière, j'étais justement dans la région de Mauricie avec le député de Trois-Rivières puis la députée également du comté de Maskinongé, qui est adjointe parlementaire à l'éducation, j'étais également avec la ministre déléguée aux Transports, puis on a rencontré un groupe de jeunes du forum régional de la région, et on a eu l'occasion d'échanger là-dessus. Et je rencontre de temps en temps évidemment les jeunes. C'est faire, je pense, un peu d'économie, là, que de prétendre qu'on ne les voit jamais.
D'ailleurs, aujourd'hui, je n'ai pas eu l'occasion parce qu'on est entré de plein fouet, là, dans les échanges... mais je suis accompagné par mon adjoint parlementaire, député d'Argenteuil, qui est le responsable du dossier jeunes et qui y consacre beaucoup de temps. On fait ça en équipe, on travaille ensemble. Et Isabelle Jean, qui est avec moi aujourd'hui, s'occupe de ce dossier-là dans mon bureau, Simon Chabot est le secrétaire du Secrétariat à la jeunesse. Je n'ai pas eu l'occasion de les présenter. Et donc on travaille ensemble. Puis on a eu des beaux résultats. On a fait, je pense, moi, un travail assez remarquable.
Vous parlez du Conseil permanent de la jeunesse. Leur réaction au budget a été assez favorable. J'ai des citations ici, je pourrais vous les rependre, mais ça consommerait pas mal de temps. Puis je comprends que le Conseil permanent de la jeunesse n'est pas d'accord avec tout ce que le gouvernement fait, puis ils sont là pour exprimer leur avis, mais de prétendre qu'ils sont en désaccord avec tout ce que le gouvernement fait serait faux. Que ce soient les CPE, que ce soit au niveau de l'éducation, que ce soit au niveau des régions puis le développement, les mesures jeunesse, ils ont des commentaires qui étaient favorables sur beaucoup de sujets, puis ça inclut même le plan de lutte à la pauvreté. Alors, quand eux-mêmes applaudissent le fait qu'on parle de fin de «workfare» pour les jeunes, ça me semble assez positif.
Le Président (M. Simard): Alors, pour terminer ce bloc, une dernière question du député de Berthier.
Effets des modifications au régime
d'aide financière aux étudiants
M. Bourdeau: Oui. Ce que je viens de comprendre, c'est que maintenant c'est le député d'Argenteuil le responsable des dossiers jeunesse, ce n'est plus le premier ministre. C'est ce que je viens d'entendre. Puis l'autre chose, c'est sûr, à l'a priori, lorsque vous avez cité le Conseil permanent... bien, lorsque le premier ministre a cité le Conseil permanent de la jeunesse, c'est suite à la réaction à chaud, si on veut, du budget. Mais, lorsqu'on gratte un peu plus loin, on voit qu'il y aura des conséquences à long terme, et c'est ce que j'expliquais tout à l'heure.
Si on y va en éducation, encore une fois des décisions qui ont été prises sans concertation, on décide de couper directement dans l'aide financière aux étudiants. Pendant le même moment, on faisait une... ? je ne sais pas comment appeler ça, là, parce que d'habitude quand on fait une concertation on attend que ce soit fini avant de prendre des décisions ? ...
Une voix: ...consultation...
M. Bourdeau: ...une consultation bidon, je trouve, en tout cas, au niveau des universités, qui fait en sorte qu'on a déjà pris des décisions. Au même moment, après a, on apprend que le premier ministre dit que les jeunes ne font pas assez leur part. Il parle que les jeunes, pour l'équité, doivent faire leur part, mais, pendant le même moment on baisse les impôts de 220 millions. L'équité, je la cherche encore.
n(16 h 20)n L'autre chose, le gouvernement et l'État ont un rôle à jouer. C'est vrai qu'il y a des pressions énormes de la part de la population de plus en plus vieillissante au niveau de l'investissement qui doit être fait en santé et aussi de l'investissement au niveau des baisses d'impôts, je suis d'accord avec vous. Mais l'État un rôle à jouer, d'équilibre justement entre les aspirations des différentes générations. Et ce que le gouvernement fait actuellement n'est pas vraiment le point d'équilibre justement entre ces aspirations-là, et ça risque de créer un fossé énorme entre générations si rien n'est fait. Et ce n'est pas avec des pseudoconsultations ou forums régionaux qu'on va régler la chose. L'État doit jouer un rôle efficace.
Au niveau de l'éducation, je l'expliquais, le gouvernement a coupé directement dans l'aide financière. Je voudrais savoir si le premier ministre est conscient qu'il endette directement les plus pauvres de nos étudiants. Est-ce que c'est une solution pour lui pour contrer l'exode des jeunes en région? Comme ça, les jeunes ne pourront pas se déplacer et aller étudier ailleurs, ça coûte trop cher. Est-ce que cette... Au niveau de la formation professionnelle aussi, on sait que 65 % des étudiants reçoivent des bourses, c'est-à-dire que le gouvernement va endetter encore plus les jeunes qui font un retour aux études. Est-ce que cette décision est conciliable avec la volonté du premier ministre exprimée lors des études de crédits de l'an dernier où il affirmait qu'il allait poursuivre les efforts entrepris pour développer la formation professionnelle?
Le Président (M. Simard): M. le premier ministre.
M. Charest: Merci, M. le Président. D'abord, juste une correction, là. Vous me faites dire que j'aurais affirmé que les jeunes ne font pas leur part; je n'ai jamais dit ça. Je tiens à être clair là-dessus, je ne veux pas ne pas... donner l'impression... Moi, ce que je continue de croire, c'est que les jeunes doivent recevoir une attention du plus haut niveau dans le gouvernement du Québec. C'est pour ça que j'ai accepté, puis avec plaisir, de prendre le dossier jeunesse. C'est fondé sur l'expérience que j'ai eue quand j'étais dans un autre travail. Puis, moi, j'ai toujours compris que, si on voulait agir de façon concertée pour les jeunes, il fallait accepter que ça se passe du plus haut niveau dans la machine vers le bas, et c'est ce que j'ai fait.
Au niveau de l'éducation, c'est notre deuxième priorité. On a augmenté les fonds cette année de 2,7 %, c'est plus de 300 millions de dollars de plus. On a, à ce niveau-là, augmenté les fonds pour les programmes pour les universités, pour les collèges. Au niveau des cégeps et du secondaire, je pourrais vous donner les chiffres précis, je ne les ai pas exactement sous la main. Mais je peux vous dire que la Fédération des commissions scolaires, suite à notre énoncé budgétaire, se sont dits satisfaits. Réaction des commissions scolaires, budget 2004-2005: «Le ministre de l'Éducation a livré la marchandise», affirme... estime la FCSQ. Et, au niveau collégial, la réaction était somme toute assez positive aussi, là. Alors: «La Fédération des cégeps réserve un accueil plutôt favorable au budget 2004-2005 déposé aujourd'hui.» Alors, on a augmenté les crédits de 2,3 % dans leur cas, par rapport à 2003-2004, ce qui me semble assez intéressant. Au primaire et au secondaire, on a augmenté les fonds de 196 millions; au collégial, de presque 43 millions; au niveau universitaire, de 125 millions.
Et, à l'aide financière aux études, là, il y a des aménagements dans le programme. Mais rappelons-nous ceci. On a le système de prêts et bourses le plus généreux au Canada, puis il va continuer à l'être. Ça, ça ne changera pas. Maintenant, dans le contexte des choix budgétaires, il s'agit de faire un aménagement entre les prêts et les bourses puis d'obtenir un certain équilibre. Et l'autre élément qu'il faut retenir, c'est la mise en place d'un régime de remboursement, qu'on appelle proportionnel aux revenus, qui garantit en quelque sorte que les étudiants qui ont moins de revenus seront protégés avec un régime de remboursement qui reconnaît leur capacité de payer. Alors, cumulez, là, tous ces éléments les uns aux autres, il me semble qu'il y a là une situation qui est favorable aux étudiants québécois et qui leur permet surtout d'avoir accès à l'enseignement de niveau postsecondaire, que ce soit au collégial ou universitaire.
Maintenant, au niveau de la formation professionnelle, oui, on va continuer à mettre des efforts très importants parce qu'il y a plein d'occasions pour les étudiants qui souhaitent travailler dans des emplois prometteurs, des emplois intéressants, des emplois d'avenir. Et là-dessus on a déjà des pénuries dans plusieurs secteurs. Un de nos défis, c'est de retenir les étudiants dans la formation professionnelle dans certains cas parce que, dans certains scénarios, ils se font recruter par des employeurs qui sont à la recherche d'employés et qui vont les chercher avant même qu'ils terminent leurs études. Alors, sur ce plan-là, on a des problèmes, et il faut s'assurer de la réussite aussi puis d'un niveau de rétention parce que le taux de diplomation n'est pas encore assez élevé à ce niveau-là, dans les programmes de formation professionnelle. Mais on y travaille avec beaucoup de célérité.
Le Président (M. Simard): Merci. Ça met fin à ce bloc. J'invite maintenant le député d'Argenteuil à poser les prochaines questions.
Mise en place du Défi
de l'entrepreneuriat jeunesse
M. Whissell: M. le Président, tout d'abord, permettez-moi de souligner toute la fierté que j'ai à assister le premier ministre dans ses fonctions de porte-parole en matière de jeunesse. Et pour nous...
Le Président (M. Simard): Vous ne vous posez pas de question à vous-même, M. le député d'Argenteuil.
M. Whissell: Non, pas du tout, pas du tout. Mais permettez-moi quand même de souligner cet état de fait parce que, pour le Parti libéral du Québec, d'avoir le premier ministre comme ministre responsable du volet jeunesse, pour nous, c'est une grande fierté. Et on sait tout le poids politique que ça peut emmener au dossier. Alors, je tiendrais à souligner au député de Berthier que, de notre côté, le dossier est très bien piloté et nous sommes très fiers du premier ministre et du travail qui est accompli.
M. le premier ministre, vous avez annoncé, en février, le 17 février dernier, un projet très audacieux, projet sur trois ans qui découlait d'un constat au Québec au niveau de la création d'emplois. Malheureusement, au Québec, il y a eu beaucoup d'études qui démontrent que la création d'emplois, c'est-à-dire la culture entrepreneuriale est en retard comparativement à nos voisins et aux pays qui ont le même niveau de développement que le nôtre.
Est-ce que vous pouvez nous expliquer pourquoi vous avez décidé d'investir près de 20 millions de dollars dans ce projet et nous donner les grands pans qu'est ce projet qui, nous devons le dire, a été fait en partenariat avec tous les partenaires des milieux qui sont impliqués de près ou de loin au développement de la culture entrepreneuriale?
M. Charest: Bien, merci. Je le soulignais tantôt, M. le député d'Argenteuil, mon adjoint parlementaire, est responsable du dossier jeunes et il y consacre beaucoup d'efforts et, je dois dire, le fait avec beaucoup d'aplomb, M. le Président. Et un des dossiers sur lequel...
Le Président (M. Simard): Il va conserver son mandat, si je comprends bien, aujourd'hui, là.
M. Charest: Ça, il y a de très bonnes chances.
Le Président (M. Simard): Encore deux bonnes questions, là, puis...
M. Charest: En tout cas, ce n'est pas le député... Je ne pense pas que ce soit de l'autre côté qu'on attribue...
Le Président (M. Simard): Il y a peu de chances.
M. Charest: Non. Non. Alors, ça ne donne rien de faire application, là.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Charest: Mais il y a un dossier, un beau dossier dont on est très fiers, c'est le Défi de l'entrepreneuriat jeunesse. Un plan d'action a été livré, c'est plus de 20 millions de dollars qui seront investis là-dedans. Et je veux vous dire tout l'enthousiasme que nous avons pour ce projet important parce que, au Québec, ça a été relevé malheureusement, il y a eu moins de création d'entreprises qu'ailleurs au Canada dans les dernières années. Ça veut dire que, pour des raisons qui ne sont pas toujours claires, là, il n'y a pas autant d'entrepreneuriat qu'il devrait y en avoir. Et pourtant, quand on relève les succès de la Révolution tranquille, bien on pense spontanément à ce succès qu'on a connu dans les milieux d'affaires, au Québec inc., et avec raison, on a plusieurs raisons d'être fiers de ce qu'on a réussi, d'autant plus que les milieux d'affaires québécois sont réputés pour leurs talents.
D'ailleurs, juste pour vous raconter une anecdote, c'est dans le National Post, ils écrivaient un éditorial au sujet du groupe Jean Coutu suite à leur achat de la compagnie Eckerd puis ils soulignaient le talent et le dynamisme des gens d'affaires québécois par rapport au reste du Canada. Ce n'est pas ça, le problème. Le problème, c'est qu'il n'y en a pas assez puis il devrait y en avoir plus. Et le but de cette politique, c'est justement de favoriser un environnement, créer une culture où on pourra le faire. Alors, on s'est fixé des objectifs de mettre à contribution les milieux scolaires, le ministère de l'Éducation est mis à contribution. Il y a des agents qui vont être engagés, qui le sont... Je pense qu'ils le sont probablement tous à ce moment-ci. Et il y en a combien? 80?
Une voix: 75.
n(16 h 30)nM. Charest: 75. Il y en a 75 qui sont engagés à travers tout le Québec. Quand j'étais dans l'Outaouais, celui de l'Outaouais venait tout juste d'être engagé. Il était relié au CLD et il va agir comme agent dans leur milieu justement pour la mise en application de la politique. Et ça va rejoindre absolument tous les milieux. C'est 20 millions de dollars encore là sur trois ans qui seront investis là-dedans, vraiment au sens de l'investissement, et ça, c'est une excellente nouvelle pour les jeunes. Alors, je souhaite ardemment que vous puissiez encourager la mise en oeuvre de cette politique-là. Le député de Berthier, je l'invite à aller voir dans les carrefours jeunesse-emploi, dans les CLD, si c'est le cas, les endroits où les jeunes sont rattachés à ça. Et je souligne en passant que les carrefours jeunesse-emploi ont salué cette décision-là, cette politique-là lorsqu'elle a été annoncée, avec raison parce que c'est très prometteur comme initiative.
Le Président (M. Simard): M. le député de...
M. Bernier: Montmorency.
Le Président (M. Simard): Je vais finir par le dire, Montmorency.
Orientations gouvernementales
quant à l'amélioration
des conditions de vie des jeunes
M. Bernier: Oui. Merci, M. le Président. Je désire vous saluer, saluer M. le premier ministre, saluer mes collègues. Ce matin, M. le premier ministre, j'ai été rencontrer une classe d'étudiants de cinquième et sixième année. La rencontre a duré environ une heure. J'ai répondu à leurs questions et je me suis permis de leur dire que, cet après-midi, j'étais en votre compagnie, et ils m'ont remis une enveloppe avec des questions qu'ils vous adressent, que je vous ferai parvenir pour que vous puissiez leur répondre. Et ces jeunes-là, qui représentent notre futur, notre avenir, notre devenir sont fort importants, et la preuve, c'est que vous en êtes le titulaire responsable.
Ces jeunes-là... En éducation, il y a quand même des investissements importants qui ont été faits par notre gouvernement au cours des deux dernières années; cette année, des investissements de l'ordre d'au-dessus de 300 millions. Mais ces jeunes-là ont des questions simples aussi. Et ils me posaient des questions à savoir c'était quoi, les répercussions qu'ils avaient dans leur vie. Vous allez voir, les questions sont assez précises. J'aurais pu leur donner la réponse, mais je pense que ce serait intéressant que le premier ministre leur réponde cet après-midi en ce qui regarde ces jeunes-là, ces jeunes qui vont atteindre le secondaire prochainement, qui vont atteindre le cégep peut-être.
Et je leur disais: Dans 10 ans d'ici, c'est vous autres qui allez être à notre place, vous allez être à la place de vos professeurs, vous allez être à la place de nos médecins, vous allez être à la place de nos dirigeants. Je pense, ce serait intéressant d'essayer de leur mentionner c'est quoi, les mesures concrètes, qui ne sont pas des mesures compliquées, mais que notre gouvernement a prises dans le cadre de l'éducation pour accompagner ces jeunes-là au cours des prochaines années dans leur formation?
Le Président (M. Simard): M. le premier ministre.
M. Charest: Bien, moi, il m'arrive aussi de rencontrer régulièrement des groupes de jeunes. J'en ai rencontré un groupe de mon comté dernièrement, puis c'est toujours intéressant parce qu'ils ont effectivement une vision des choses qui n'est pas influencée par l'environnement immédiat dans lequel on se trouve. Nous, on est un peu dans une serre chaude, et ça ne nous fait pas toujours réaliser que, pour les jeunes qui sont un peu plus loin de l'Assemblée nationale du Québec, des fois les choses sont... les questions se posent différemment.
Une des choses qu'il faut, je pense, marteler, continuer à dire ? puis on a tendance à ne pas le faire au Québec ? c'est à quel point c'est vrai que plus un jeune a une éducation, plus cette personne-là a de chances d'obtenir un travail et un travail qui est rémunérateur. Et ça, c'est une chose qu'on devrait répéter constamment partout où on va, parce qu'on a encore trop de jeunes au Québec qui malheureusement ne terminent pas leurs études de secondaire V, ne le font pas dans les délais. Les chiffres... Il faut faire attention aux statistiques sur ces questions-là parce que ça peut varier, hein? Et je voyais des chiffres dernièrement qui laissaient entendre qu'au Québec le niveau de diplomation dans les délais prescrits était plus élevé qu'ailleurs au Canada, que les jeunes Québécois réussissent mieux les tests que les jeunes ailleurs au Canada, ce que je pense être vrai.
Mais en même temps nous savons qu'il y a des faiblesses dans notre système, qu'il y a encore trop de jeunes, surtout dans un contexte où il y en aura de moins en moins sur le plan démographique, qui quittent l'école avant de terminer leurs études de niveau secondaire V, que ces jeunes-là, il faut les sensibiliser au fait qu'ils compromettent beaucoup leurs choix pour l'avenir en agissant ainsi, qu'ils ont des besoins particuliers dans certains cas. Il faut être capables de reconnaître ces besoins et d'y répondre. Et on a trop souvent eu une approche qui était programmatique et qui forçait les gens à s'inscrire dans le programme plutôt que d'avoir une approche où on reconnaissait leur situation propre.
Dans l'élaboration d'une stratégie jeunesse, un des objectifs que je poursuis, moi, c'est que nous puissions assouplir de façon à répondre davantage et mieux répondre aux besoins de chaque jeune qui se présente par exemple à la porte d'un programme d'aide sociale. Et les carrefours jeunesse-emploi peuvent jouer un rôle très important à ce niveau-là. Parce que ces jeunes-là peuvent avoir des problèmes d'abus de drogue ou d'alcool, peut-être que c'est un problème de formation, peut-être que c'est un problème familial, peut-être que... ? enfin, on peut décliner ? il faut être capable de le reconnaître.
Alors, notre ambition à nous, c'est d'avoir plus de flexibilité, répondre à ça, rappeler aux jeunes à quel point c'est important de poursuivre leurs études, de pouvoir leur permettre de comprendre l'ensemble des choix qu'ils ont. Je pense entre autres à la formation professionnelle qui, sur le plan de la culture familiale, n'est pas toujours perçue positivement. Et ce n'est pas vrai que les parents, une majorité de parents pensent spontanément qu'un emploi au secteur professionnel, c'est mieux que d'aller à l'université, alors qu'il y a des occasions en or de pouvoir se trouver un travail qui va leur permettre de s'épanouir, puis de gagner leur vie, puis de le faire dans un environnement intéressant. Alors, ça, ça fait partie des choses sur lesquelles on veut travailler prochainement. Je ne sais pas si vous allez me remettre toutes les questions que vous avez. Je serais très heureux de...
M. Bernier: Je vais vous les remettre, je les ai... conservé une enveloppe. Mais je pense que de leur faire un clin d'oeil ou de leur faire un sourire cet après-midi, en complément de la rencontre que j'ai eue ce matin, pour eux, c'est fort plaisant, et je vous remercie en leur nom de leur répondre.
Le Président (M. Simard): Alors, merci. Alors, j'invite maintenant le député de Rivière-du-Loup à poser la prochaine question. Parce que, là, sinon, il ne restera plus de temps.
M. Whissell: Pour être bien certain, est-ce que nous avons épuisé notre premier bloc de 20 minutes?
Le Président (M. Simard): Oui.
Une voix: Je ne suis pas sûre, moi.
Le Président (M. Simard): Alors, maintenant, c'est au député de Rivière-du-Loup. Et nous conclurons par une dernière question du député de...
M. Whissell: ...combien de temps nous avons utilisé?
Le Président (M. Simard): De et quart à moins vingt-cinq, alors c'est à peu près 22 minutes, à peu près.
M. Whissell: Bien, il semble...
Une voix: Non, on ne l'a pas tout pris, là.
Le Président (M. Simard): Alors, il resterait... C'est parce que là, si on fonctionne et on respecte parfaitement les blocs de 20 minutes, ça veut dire qu'il n'y aura plus de temps pour poser... L'exercice, ici, n'est pas simplement de donner la parole de façon équitable entre les partis, c'est de permettre à tout le monde de s'exprimer. Alors là il reste 20 minutes. Si, dans ces 20 minutes, je ne permets pas une question du député de Rivière-du-Loup et un retour à une troisième question ? pas 50 questions, une troisième question ? au député de Berthier, bien l'exercice... Vous pouvez bien vous poser les questions entre vous, mais ça... M. le député de Rivière-du-Loup, s'il vous plaît.
Financement des maisons des jeunes
M. Dumont: Oui. Alors, merci, M. le Président. Avec tous les éloges que le député d'Argenteuil a reçus de son chef tout à l'heure, je suis convaincu qu'il va pouvoir avoir un petit entretien privé pour poser ses questions, jamais je croirai.
M. le Président, il y a deux sujets que je veux aborder avec le premier ministre. D'abord, le député de Berthier l'accusait de ne pas rencontrer suffisamment de jeunes. Le premier ministre a quand même rencontré les jeunes de Star Académie, il ne faudrait quand même pas passer ça sous silence. Évidemment, ça n'a pas été aussi facile que les questions, là, du député de Montmorency, mais quand même.
Deux sujets que je veux aborder. D'abord, en fin de semaine, je rencontrais un groupe d'une centaine de jeunes et intervenants des maisons de jeunes de la région Chaudière-Appalaches, là, de la Rive-Sud de Québec, mais qui parlaient au nom des jeunes de l'ensemble de la région Chaudière-Appalaches. Et il y a beaucoup d'inquiétude, à l'heure actuelle, dans les maisons de jeunes.
D'abord, l'ancien gouvernement avait... Il y avait un plan de rattrapage, là, qui était demandé pour permettre une meilleure présence, de meilleures interventions des maisons de jeunes à travers le Québec. Et le plan de rattrapage, là, en question, il y avait eu, de la part de l'ancien gouvernement, un coup qui avait été donné de 1,5 million de rattrapage, il y a une couple d'années. Et évidemment les jeunes attendent du nouveau gouvernement... Ils n'ont pas d'indication que le plan de rattrapage va se poursuivre et ils attendent ça du nouveau gouvernement.
De la même façon, il y a des inquiétudes aussi... Évidemment, là, tout le financement change, avec les réformes qui ont été adoptées dans la santé. Le pouvoir hospitalier grandissant, pour des organismes qui ont une vocation essentiellement communautaire, ils sont inquiets de ça aussi.
Alors, je vais permettre au premier ministre, comme responsable de la jeunesse, de rassurer les gens des maisons de jeunes. Il se fait un travail extraordinaire pour des jeunes ? je pense qu'il le sait ? des jeunes qui sont à un âge où il n'y a pas grand-chose, hein? On n'est pas assez vieux pour faire un certain nombre d'activités, on est trop vieux pour en faire un certain nombre d'autres accompagné par les parents. Et, pour beaucoup de jeunes, pour beaucoup de jeunes aussi qui n'ont pas beaucoup d'adultes de référence sur qui se fier, les maisons de jeunes font un travail qui est remarquable. Ils se sont déployés à travers les régions du Québec.
n(16 h 40)n Et j'espérais aujourd'hui qu'il prenne l'occasion, quelques minutes, pour donner une orientation, donner de l'espoir, donner la confiance aux gens qui travaillent dans les maisons de jeunes comme aux jeunes qui les fréquentent que le gouvernement y croit puis que le plan de rattrapage financier, tout le monde sait que ça ne se fera pas dans un seul coup, mais qu'au moins on va dans la bonne direction avec son gouvernement.
Niveau d'endettement des étudiants
L'autre question où je veux vraiment l'interpeller, une question qui m'inquiète beaucoup. Moi, je prétends, depuis un certain nombre d'années, qu'il y a eu faillites étudiantes à répétition, le nombre de faillites des étudiants a augmenté. Je pense, l'endettement étudiant est déjà un problème. Le programme libéral ? puis j'invite le premier ministre à être transparent ? le programme libéral disait, sur la question des prêts et bourses, là: «Revoir certains paramètres du système de prêts et bourses afin que celui-ci reflète les réalités nouvelles des étudiants québécois.»
Jamais je ne croirai que cette phrase-là devait être comprise par les étudiants que: Votre endettement va augmenter de 1 000 $ par année, puis les étudiants avec un bac vont avoir 5 000 $ de plus d'endettement. Je le relis, là: «Revoir certains paramètres du système de prêts et bourses afin que celui-ci reflète les réalités nouvelles des étudiants québécois.» Ça, là, l'étudiant qui était en campagne électorale, qui avait ça dans les mains devait comprendre que ça allait lui coûter... qu'il allait s'endetter de 1 000 $ de plus par année, 5 000 $ pour un bac. Ça ne se peut pas.
Puis il y a des efforts, dans le discours comme dans certaines actions, là, du budget du ministre des Finances puis des discours du premier ministre, pour faciliter la natalité. Bien, je m'excuse, mais l'endettement étudiant, quand un couple, là, ils se marient puis qu'ils ont chacun un bac, puis que leurs parents n'étaient pas fortunés, puis qu'on additionne l'endettement étudiant des deux, puis on va arriver à des 50 000 $, 55 000 $, 60 000 $ de dettes, bien, je m'excuse, ça a un impact direct sur la décision d'avoir un premier enfant. Ça fait qu'ils reportent cette décision-là. Et je pense que le gouvernement fait...
D'abord, c'est toute la question du maintien du gel des frais de scolarité qui est devenue une fausse réalité. On le fait financer finalement par l'endettement étudiant. Et je pense qu'on a mal mesuré les impacts indirects que ça peut avoir jusque sur les familles.
Alors, j'aimerais que le premier ministre nous parle de sa vision à moyen et à long terme de la vie des maisons de jeunes, du travail important des maisons de jeunes et de l'endettement étudiant.
Le Président (M. Simard): Merci, M. le député de Rivière-du-Loup. M. le premier ministre.
M. Charest: Vous étiez dans la région Chaudière-Appalaches. J'y étais moi aussi dernièrement, il y a quelques semaines. On était allé annoncer, dans le cadre du fonds régional jeunesse justement, un montant de 1 360 000 $, auquel s'ajoutent 186 000 $ de frais de fonctionnement. Et ça fait partie des efforts que nous faisons pour l'ensemble des jeunes. Dans ce sens-là, je pense que je peux vous dire, moi, sans... parce que ce n'est peut-être pas à moi de l'interpréter, mais je peux vous dire que les jeunes, en tout cas, des fonds régionaux qui participent aux forums réagissent assez bien puis positivement à cette décision-là de réinvestir.
Financement des maisons des jeunes (suite)
Du côté des maisons de jeunes, elles existent au Québec depuis plusieurs années. Moi, j'en ai dans mon compté ? je pense à une maison qui s'appelle Spot Jeunesse ou la Maison Jeunes-Est ? et qui font un certain nombre de projets aussi qui reçoivent l'appui du gouvernement, un appui ponctuel. Alors, il n'y a pas que le financement de base qui leur est attribué.
Je vais vous donner un exemple. La Maison Jeunes-Est ? Est étant l'est de la ville de Sherbrooke ? fait, depuis quelques années maintenant, deux choses. Ils font un programme d'aide aux devoirs, qui a reçu un appui financier ponctuel. Ils font également de l'hébergement pour des jeunes qui sont en difficulté, ce qu'ils ne faisaient pas au tout début lorsqu'ils ont commencé à offrir des services aux jeunes.
Ce que je peux vous donner comme information sur les efforts les plus récents là-dessus, c'est que... Et on investit près de 9 millions de... C'est-à-dire, pour combler, là, le manque à gagner qu'ont identifié les maisons, il faudrait investir 9 millions de dollars pour combler les attentes. C'est le ministère de la Santé et des affaires sociales qui en fait le financement. Un groupe de travail avait été mis sur pied et a produit un rapport en 2002. En 2003-2004, les maisons de jeunes ont bénéficié d'un financement de l'ordre de 18,9 millions, presque 19, ce qui représente une hausse de 16,4 % si on compare à 2000-2001.
M. Dumont: Est-ce que c'est récurrent?
M. Charest: Oui. Il n'y a pas de raison pour laquelle ce ne soit pas récurrent. Mais, si ce ne l'est pas, je vous le dirai. Mais il n'y a pas de raison pour laquelle... Maintenant, ça relève du programme de soutien aux organismes communautaires qui se décide sur le plan local. C'est donc chaque agence de développement des réseaux... Pour que les gens sachent de quoi on parle, autrefois c'étaient des régies, maintenant c'est devenu des agences de développement des réseaux qui ont la responsabilité de prendre des décisions à ce niveau-là.
Niveau d'endettement des étudiants (suite)
Vous parlez des prêts et bourses et des attentes des étudiants. C'est important de donner tout le portrait. D'abord, revenons au point de départ, au Québec, on a toujours le système le plus généreux au Canada, ce qui garantit l'accessibilité. Je pense qu'on est un des seuls endroits à encore faire des bourses, alors que partout ailleurs ca s'est transformé en programmes de prêts seulement. Nous allons mettre en place un programme de remboursement proportionnel aux revenus, ce qui garantit à l'autre bout que la personne qui est en situation de difficulté aura un traitement qui correspond à sa capacité de payer.
Et je vous souligne qu'on a posé d'autres gestes aussi qui touchent directement le Programme de prêts et bourses pour les étudiants. Je pense entre autres au remboursement de 8 000 $, hein, un crédit d'impôt remboursable pour les étudiants qui vont étudier en région. On l'a introduit, ça, c'est nouveau. C'est drôlement intéressant pour un étudiant, là, qui a une dette de pouvoir bénéficier de cette mesure-là. Et la mesure de crédit d'impôt pour les stages, aussi en région, en milieu de travail qui est augmentée à 375 $, on l'a doublée. Ça aussi, c'est drôlement intéressant pour les jeunes.
On a mis en place une mesure aussi qui s'applique aux étudiants qui reçoivent une pension alimentaire. Alors, évidemment on parle de femmes qui vivaient selon une formule où on déduisait de leurs... où on ajoutait à leurs revenus le montant de la pension alimentaire. Et nous avons réduit, je crois, du tiers le montant qui était pris en considération pour les femmes ? entre autres, il peut y avoir des hommes, quelques-uns, je présume, mais c'est surtout des femmes ? qui reçoivent une pension alimentaire. Alors, c'est la non-considération du premier 100 $ mensuel reçu à titre de pension alimentaire comme revenu à l'étudiant qu'on aura changée. Et ça veut dire, ça, que le premier 1 200 $ de revenus n'est pas pris en considération dans le calcul de la contribution de l'étudiant. Et on estime que cette mesure-là va bénéficier à 1 500 familles qui vont recevoir donc un montant de 1 200 $ additionnel.
Il y a un programme de soutien financier pour l'achat d'un micro-ordinateur. Il y a l'instauration d'un système de remboursement proportionnel aux revenus ? on a touché à ça. Il y a la mise en place d'un certain nombre de mesures qui vont faciliter le Programme de prêts et bourses. Alors, quand on a dit qu'on allait effectivement changer et que nous allions l'améliorer, on l'a fait, on a respecté notre parole. Puis on n'a pas fini, c'est le début du mandat, on va continuer à travailler en ce sens-là. Juste pour vous confirmer que... On me confirme effectivement que c'est récurrent, l'augmentation aux maisons de jeunes.
Le Président (M. Simard): Merci. J'invite le député de Berthier à poser les dernières questions.
Plan de rajeunissement de la fonction publique
M. Bourdeau: Merci, M. le Président. Quand on parle des conséquences à long terme du budget, je pense que le député de Rivière-du-Loup a fait une démonstration au niveau de l'impact sur la famille. Il y a aussi la problématique par rapport à l'emploi. On sait que, pour fonder une famille, c'est important d'avoir un emploi stable.
On sait que 44 % de la fonction publique va prendre sa retraite d'ici 10 ans. Sauf que les annonces qu'on a présentement au niveau de la jeunesse et de la fonction publique, c'est, premièrement, gel des embauches, ce qui n'amènera pas un transfert des connaissances. Au contraire, on gèle les embauches, on attendra que les gens prennent leur retraite, après ça on rajoutera des jeunes. Deuxième décision, on coupe les occasionnels, postes occupés par des jeunes. En 2002, il y avait eu 26 000 créations d'emplois pour les jeunes, en 2003, 5 000, qu'en plus de créer moins de postes pour les jeunes on en coupe pour des raisons que j'explique mal, encore une fois.
J'aimerais ça que le premier ministre nous explique comment, d'un côté, il peut couper des postes occupés par les jeunes et, de l'autre, vouloir contribuer au rajeunissement de la fonction publique, au transfert de l'expertise, à l'instauration d'une culture de relève. Et est-ce que vous avez l'intention de mettre sur pied un véritable plan de renouvellement de la fonction publique ou vous allez faire comme vous avez fait avec le défi de l'entrepreneurship, attendre un an, changer la page couverture puis remettre le plan que, nous, on avait déposé et qu'on avait fait?
M. Charest: Défi entrepreneurship, je ne comprends pas pourquoi vous êtes si déçus. C'est une bonne nouvelle, c'est une bonne affaire. C'est une bonne affaire, il faut s'en réjouir. Puis on n'a pas attendu, croyez-moi. Dès l'instant où on a l'occasion d'annoncer une bonne nouvelle comme celle-là, on...
Une voix: ...
Le Président (M. Simard): Bon.
n(16 h 50)nM. Charest: Je veux quand même donner une réponse au député de Berthier pour lui dire que nous avons, au cours de la dernière année, là, chez les catégories d'emploi professionnelles et techniques particulièrement visées par le recrutement étudiant, on a quelque 3 300 jeunes. Ça, c'est des gens, des personnes de moins de 35 ans qui ont obtenu un emploi occasionnel ou régulier. Alors, ça, c'est le portrait de ce qu'on a. On a fait des stages, 1 048, dont 222 dans les régions du Québec. Et on a un programme d'accueil gouvernemental, 19 sessions du programme ont été diffusées à 1 300 participants. Il y en a eu huit à Québec, quatre à Montréal puis sept en région. Il y a le programme de mentorat, je pourrais vous décliner tout ça dans le détail.
Mais je veux vous dire que je partage votre préoccupation de pouvoir mettre en valeur les jeunes, de s'assurer que, dans le contexte des mises à la retraite, là ? puis ça va nous arriver en grand nombre rapidement, 44 %, là, dans l'espace de 10 ans, c'est vite ? que nous avons une très forte préoccupation pour la façon dont on va gérer les ressources humaines, d'autant plus qu'on a une excellente fonction publique, des gens de grand talent. D'ailleurs, je me suis fait dire ça, vous savez, pas plus tard que la semaine dernière à Toronto. Un des récipiendaires d'un prix dans le Forum des politiques publiques, c'est une dame qui s'appelait Rita Burak, ancienne secrétaire générale du gouvernement, l'équivalent de ce que M. Dicaire fait aujourd'hui, qui, dans son discours d'acceptation a pris la peine de souligner le fait qu'il n'y avait pas suffisamment de représentants de la fonction publique québécoise à l'intérieur du forum et de l'événement et à quel point c'étaient des gens de grand talent, ce avec quoi je suis en total accord, surtout après un an de gouvernement.
Cela étant dit, Mme Jérôme-Forget, présidente du Conseil du trésor, la semaine prochaine, je crois, aura une annonce à...
Le Président (M. Simard): ...
M. Charest: Pardon?
Le Président (M. Simard): Ça a été retardé d'une semaine.
M. Charest: Alors, le plaisir va durer une semaine de plus. Elle aura l'occasion de livrer une réflexion sur justement la modernisation de l'État, les travaux faits et à venir. Et il y aura une place de faite justement sur cette question de l'avenir de la fonction publique, et de quelle façon on doit la renouveler, et quelles mesures elle propose pour que nous puissions nous assurer que nous puissions avoir les ressources qu'il nous faut et mettre en valeur le talent des hommes et des femmes qui font la fonction publique du Québec.
Le Président (M. Simard): Une très courte dernière question, M. le député.
Suivi des recommandations
du rapport du Conseil permanent
de la jeunesse sur la prostitution juvénile
M. Bourdeau: Parfait. Ce matin, le Conseil permanent de la jeunesse déposait un avis sur la prostitution. J'aimerais savoir: Quels moyens concrets le premier ministre entend-il prendre pour améliorer la situation des personnes qui se prostituent dans la rue? Et est-ce qu'il va respecter, dans le Plan d'action jeunesse, assurer... dans le point «assurer le plein potentiel des jeunes»... Est-ce qu'il pourrait me dire quelles sommes ont été consacrées justement à la mesure intitulée Renforcer les services sociaux aux jeunes en difficulté en 2003-2004, quelles sommes étaient prévues initialement, quelles seront les prévisions pour 2004-2005? Parce qu'une des recommandations justement du Conseil permanent de la jeunesse, c'est: agir directement auprès des jeunes.
Le Président (M. Simard): Toute cette réponse en deux minutes, M. le premier ministre.
M. Charest: Vous comprendrez que, depuis le dépôt du rapport, ça a été fait ce matin, je n'ai pas eu l'occasion d'en prendre connaissance, mais je vais le faire. Et vous vous rappellerez qu'on a... le ministre la Justice, M. Bellemare, a annoncé il n'y a pas très longtemps un montant d'argent pour un groupe, ici même dans la région de la Capitale-Nationale, dont la mission est justement de faire la prévention ou d'aider à... ou à proposer des mesures préventives pour les jeunes qui pourraient être victimes de gens qui les invitent à faire de la prostitution. Alors, ça, ça fait partie des mesures qu'on a déjà annoncées. Et on va être très vigilants là-dessus, on va... Il le faut. L'expérience de la dernière année nous amène à vouloir, je pense, être très vigilants sur cette question-là. Je vous assure que nous le serons, M. le Président. Merci.
Le Président (M. Simard): Merci.
M. Whissell: M. le Président, vous permettez un bref...
Le Président (M. Simard): Le député d'Argenteuil insiste pour poser une dernière question. Je suis sûr qu'elle sera inattendue. M. le député d'Argenteuil, je vous écoute.
M. Whissell: Oui. Ce serait une remarque et également peut-être une question si le premier ministre veut renchérir. Je voudrais que l'opposition soit consciente qu'on s'apprête à voter des crédits qui augmentent de près de 80 % par rapport aux crédits de l'année dernière. Alors, c'est plus de 8 millions de dollars qui sont rajoutés au volet jeunesse. Et il serait important que les gens de l'opposition soient bien conscients que voter contre ces crédits, c'est voter contre une augmentation des crédits à la jeunesse.
Adoption des crédits
Le Président (M. Simard): En parlant de voter, il faut donc maintenant voter. Alors, avant d'aller plus loin, je vous invite maintenant à me dire si la commission adopte le programme 5, Jeunesse.
M. Bourdeau: Sur division.
Le Président (M. Simard): Sur division. Je voudrais, en terminant, remercier les membres de la commission pour leur collaboration pour cette longue séance de... M. le premier ministre, ça s'est passé...
M. Charest: ...M. le Président.
Le Président (M. Simard): ...je pense, de façon correcte. Chacun a pu s'exprimer à tour de rôle. Alors, nous mettons fin à ces travaux. Je suspends donc nos travaux.
(Fin de la séance à 16 h 55)