(Onze heures trente minutes)
Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À l'ordre, s'il vous plaît! J'invite les membres de la commission à bien vouloir prendre place.
La commission des institutions reprend ses travaux relativement à l'examen des crédits du programme 4, Affaires autochtones, du ministère du Conseil exécutif pour l'année financière 1999-2000.
Discussion générale (suite)
J'informe les membres de cette Assemblée que, lorsque nous nous sommes quittés, nous en étions à une question qui avait été posée par le député de Jacques-Cartier. On avait consacré jusqu'à ce moment six minutes à sa question. Donc, en principe, M. le député de Jacques-Cartier, vous auriez la parole pour une quinzaine de minutes environ.
M. Kelley: M. le Président, moi, j'ai quelques questions à poser. Alors, je veux juste procéder comme ça, assez rapidement.
Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. Alors, vous avez la parole.
Entente avec les Mohawks de Kahnawake concernant les sports de combat
M. Kelley: C'est juste les suites des échanges qu'on a faits avec le ministre et les représentants du Secrétariat tantôt. On a fait, il y a deux semaines, tout un bloc, M. le Président, sur les ententes de Kahnawake, et il y en a un qu'on n'a pas soulevé. Et, pour une fois, je vais avouer que c'est un domaine que je ne connais pas du tout, et ça, c'est tout le domaine des sports de combat. Je suis prêt à admettre que ce n'est pas quelque chose que je connais de près.
Mais je veux juste demander au ministre: C'est quoi qui est différent au niveau des types d'événements possibles, avant et après la signature de l'entente? Parce que je sais qu'on a nos règlements et nos lois qui gouvernent la boxe au Centre Molson, etc. Alors, il y a déjà un code législatif qui existe, et réglementaire, pour ce genre d'activités. Alors, au-delà de la création d'une Kahnawake Athletic Commission, qu'est-ce que nous avons dans les possibilités, les événements qui sont admissibles ou permis maintenant? C'est quoi qui est nouveau?
M. Chevrette: La première des choses, c'est qu'il y a la reconnaissance par le Québec de la structure des Mohawks de Kahnawake, et, d'autre part, la deuxième des choses, c'est qu'eux s'engagent à harmoniser leurs règles à celles du Québec. Ce n'est pas une entente qui dit, par exemple, dans la lutte, il faut faire telle chose, dans la boxe et dans le kick boxing, etc. C'est deux engagements dans une entente où on reconnaît, d'une part, leur institution, et, d'autre part, eux reconnaissent qu'ils doivent harmoniser leurs règles aux nôtres.
M. Kelley: C'est parce qu'on a vu ça avec la vente de boissons, qu'ils acceptent le cadre général, c'est-à-dire pas après 23 heures, pas pour les mineurs de moins de 18 ans. Alors, ils ont accepté notre cadre général tout en réservant la possibilité, dans l'entente sur la boisson, d'être plus restrictifs, si j'ai bien compris. Alors, s'ils veulent fermer les bars à minuit plutôt qu'à trois heures le matin, s'ils veulent fermer les dépanneurs à 21 heures plutôt qu'à 23 heures, ils se réservent la possibilité d'être plus durs ou plus restrictifs que le cadre général.
Mais c'est juste... si, demain matin, un promoteur veut organiser un événement sur la réserve, pas demain mais quand l'entente sera mise en vigueur, il doit obtenir plutôt un permis de la Kahnawake Athletic Commission. Mais, dans le style d'événement permis, c'est la même chose qu'on peut faire au Centre Molson, si j'ai bien compris.
M. Chevrette: Exact. Ils pourraient être plus sévères que nous également, mais ils ne peuvent pas être moins sévères que nous.
M. Kelley: Oui. Alors, comme je le dis, je ne connais pas toute la réglementation, mais au niveau des gants, des choses qui sont permises et des choses qui ne sont pas permises, pour s'assurer... Parce que tout ça était mélangé avec le débat sur le combat extrême, qui est un débat autre. Et je pense que c'est une précision qui est importante: ici, ce n'est pas une entente sur le combat extrême. Parce que je pense que, dans certains médias, c'était repris comme ça, que ce qu'on est en train de faire ici, c'est de rendre nos règlements sur ce genre de sport de combat plus «lax».
M. Chevrette: C'est l'«extreme fighting», parce que c'est ça, on fait allusion à cela.
M. Kelley: Oui, c'est ça. Et c'est les médias qui ont mélangé les deux.
M. Chevrette: Ça, ça n'existe pas. C'est défendu en vertu du Code criminel, et ça, il n'en est pas question, on le sait. C'est sur l'ensemble des sports en général où on reconnaît leur commission athlétique, si on peut s'exprimer ainsi, et eux reconnaissent, d'autre part, qu'ils doivent harmoniser leur réglementation à la nôtre. Mais, tout comme dans le cas des débits de boissons, ils pourraient être plus sévères sur certaines règles, dans certains sports, qu'on peut l'être, mais ils ne peuvent pas être plus ouverts.
M. Kelley: Oui. Et je pense que c'est important, parce qu'il y avait une confusion.
M. Chevrette: Exact.
Conditions de vie dans les communautés algonquines
M. Kelley: Je pense que le ministre convient avec moi qu'il y avait la confusion dans les médias. Et je pense que c'est très important. Je suis prêt à l'admettre, je ne suis pas un grand amateur de boxe, point, alors ce n'est pas à moi, mais, vu qu'il y avait cette confusion, je pense que c'était important de revenir sur le sujet pour le bien préciser.
Deuxième dossier qu'on a abordé un petit peu la dernière fois, c'était toute la situation chez les Algonquins. J'ai continué de réfléchir, je regarde dans les chiffres, les tableaux fournis par le ministre, les déboursés, les aides et dépenses destinées aux autochtones, 1997-1998. Est-ce que, au niveau de cette nation, le Secrétariat aux affaires autochtones a fait une réflexion plus générale?
Je sais qu'on travaille dossier par dossier, alors, s'il y a une question d'abus des jeunes, ça peut être la police, ça peut être le ministère de la Santé et des Services sociaux qui est appelé; une autre fois, le ministre a soulevé la question de l'électricité dans une de ces communautés. Alors, on a beaucoup de morceaux d'information et des dossiers qui sont un petit peu diffusés à travers le gouvernement, mais est-ce que le temps est venu, si ce n'est pas encore fait, de faire une réflexion plus approfondie sur les conditions des neuf communautés algonquines?
M. Chevrette: C'est-à-dire que - je crois que c'est vous, d'ailleurs, qui avez soulevé la dernière fois - au niveau même de la nation algonquine, il y a des divergences de culture. Par exemple, il y en a qui parlent français, d'autres anglais. Le leadership est très dilué au niveau de la nation. Et je ne pense pas que ce soit faire une injure à la nation algonquine que de dire ça, puis je ne le dis pas dans un sens péjoratif, mais elle n'a pas, comme nation, un leader, un grand conseil qui rassemble les neuf communautés algonquines, qui sont dispersées, d'ailleurs, à partir, à peu près, de Maniwaki jusque dans l'Abitibi, tout près du Grand Nord. Les conditions de vie sont un peu différentes d'une communauté à une autre. Il y en a que ça fait énormément pitié, et vous avez tout à fait raison. Il y en a que c'est pratiquement des conditions de vie qu'on retrouve dans des pays... même pas en voie de développement. Il faut le dire comme on le voit. J'ai été personnellement, moi, assez ébranlé l'été passé, quand j'ai fait une certaine tournée.
Il nous faut donc aller à l'essentiel. C'est des conditions sanitaires, d'abord, puis des conditions communautaires. Il faut leur donner des outils pour la collectivité, au départ. Donc, les projets qui naissent, ce sont d'abord des projets pour répondre à des conditions minimales de qualité de vie, exemple l'électricité. Il faut absolument, d'ailleurs, que le fédéral... puis je le dis non pas pour faire de la politique, là, fédérale-provinciale, puis se lancer des pierres. Il faut investir dans le logement social. Ça n'a pas de bon sens, il faut le dire comme c'est.
Il y a des situations qui engendrent des problèmes sociaux. Quand ils sont 14, 12 dans des petites maisons de quatre pièces et demie, puis c'est une ou deux familles, le père héberge son fils qui est marié puis qui a des enfants, lui aussi, ça engendre toutes sortes de problèmes sociaux que je n'ai pas besoin de décrire ici, que vous avez lus, de toute façon, que vous avez entendus, et qui sont malheureux. Et c'est surtout ce que j'essaie de faire présentement avec chacune des communautés: signer des ententes sectorielles, agrandir, par exemple, une réserve parce qu'il n'y a plus de terrain pour bâtir une école ou un centre communautaire, des infrastructures d'aqueduc, d'égout. On va au plus rapide, et, en les structurant sur le plan communautaire et social, émergent bien souvent des leaders qui ont le goût de faire des affaires, et c'est là qu'on arrive avec des projets de développement économique. Mais ce n'est vraiment pas facile.
Puis je suis content de voir que le député a une sensibilité à cela, parce que je suis convaincu qu'un très grand pourcentage dans notre population ne sait pas ce que vivent certaines personnes dans ces communautés. Et, si on le voyait, on n'entendrait pas des lignes ouvertes prônant ou fermentant des germes de racisme, comme ça se fait. Je peux vous dire ça, moi: il y aurait une plus grande compréhension puis il y aurait une beaucoup plus grande collaboration, à part de ça. Moi, ça me fait de quoi, parce que j'ai pris ce dossier-là à coeur, puis beaucoup, et puis quand je vois des gens qui essaient de créer de l'animosité puis de braquer une communauté contre une autre, bien souvent parce qu'on prend l'exemple de l'exagération dans une communauté puis on le répand sur l'ensemble des 54 communautés, je trouve ça dommage, je trouve ça de valeur. Et je fais appel, d'ailleurs, aux chefs et aux grands chefs qui ont plus d'aisance de travailler avec le gouvernement pour sortir précisément de la misère certaines communautés. Ça nous aiderait beaucoup s'il y avait une forme de solidarité sociale dans cela. Je peux vous dire que ce n'est pas de tout repos.
(11 h 40)
Quand je regarde, là où on a conventionné... puis je suis bien fier, je ne fais pas ça pour faire un reproche à nos conventions puis aux traités modernes de la Convention de la Baie James, mais, quand on regarde que 80 % des sommes vont à trois nations puis qu'il y a 20 % pour les huit autres nations reconnues, je peux-tu vous dire que, quand on regarde les neuf communautés algonquines, les neuf communautés montagnaises dont certaines... Chez les Montagnais, il y en a qui se sont pris en main et qui ont réussi, mais il y en a quelques-unes, vous le savez très bien comme moi, qui n'ont pas encore réussi à s'en sortir. Je vais tout faire pour essayer, au moins, de doter ces communautés, à court terme, d'infrastructures communautaires et sociales.
M. Kelley: Juste pour enchaîner sur la pensée du ministre, M. le Président, juste à visiter Shefferville et visiter les Naskapis, visiter les Montagnais, et, je pense, les preuves des bénéfices de la Convention de la Baie James sont, de toute évidence... à une vingtaine de kilomètres, ou même pas, entre la communauté naskapie et la communauté montagnaise, on voit la différence.
M. Chevrette: Ah!
M. Kelley: Mais, pourquoi je pose la question? C'est ma crainte au niveau du fonds de 125 000 000 $. C'est évident que certaines communautés ou nations vont être beaucoup mieux équipées pour présenter des demandes. Moi, je pense, pour demander, les Inuit, ou le Grand Conseil des Cris, ou même les Mohawks de Kahnawake, ce sont des communautés qui ont l'infrastructure politique nécessaire. Ils vont arriver à vos portes avec un bon dossier, des projets pour le 125 000 000 $. J'ai toute confiance qu'ils vont être capables de livrer la marchandise. Mais, quand même, je regarde dans l'annexe 45, le cahier qui est déposé pour l'étude de nos crédits, il y a deux, trois projets de Lac-Simon, point, chez les Algonquins. Et ma crainte, c'est que, à cause de la faiblesse au niveau de leurs ressources politiques et communautaires, ça va être difficile pour eux autres d'être concurrentiels avec les demandes. Et ce n'est pas un reproche contre les Cris ni les Inuit, et je ne veux pas punir le projet, parce qu'ils ont des besoins qui sont importants dans leur nation aussi. Mais, ma crainte, c'est que les Algonquins sont moins équipés pour arriver avec des projets à la fois de développement économique et à l'intérieur des programmes d'infrastructures communautaires. Et je ne sais pas s'il y a moyen, au niveau soit des ministères du gouvernement ou soit du Secrétariat, de prêter un coup de main, ou quelque chose comme ça. Parce qu'ils ont des besoins qui sont très importants, et ma crainte, c'est qu'ils n'auront pas accès aux services techniques et aux expertises techniques nécessaires pour formuler des demandes à l'intérieur de l'enveloppe d'argent consacrée.
M. Chevrette: Vous avez entièrement raison. On va même prendre la précaution d'avoir une enveloppe préservée pour chacune des nations. Sinon, vous avez tout à fait raison, je suis convaincu que chez les Cris, ou chez les Inuit, ou chez les Mohawks, ou encore même chez les Montagnais, par exemple de Pointe-Bleue, Mashteuiatsh, Essipit, eux autres sont déjà assez structurés pour vous présenter des projets demain matin. Ce n'est pas le cas, effectivement, dans certaines communautés. Mais il va falloir les soutenir et les aider. Et c'est dans ce sens-là qu'on a demandé d'assurer des enveloppes minimales pour chacune des communautés.
Fonctionnement du programme d'infrastructure
M. Kelley: Je sais que c'est toujours au niveau de l'élaboration, mais je pense que les membres de la commission ont tout intérêt à voir comment on va baliser ou comment le programme d'infrastructure va fonctionner. Et, si la réflexion n'est pas encore terminée au Secrétariat aux affaires autochtones, je pense qu'on a tout intérêt à voir comment on va évaluer les projets, parce qu'on peut prévoir déjà qu'il y aura des projets pour, quoi, le triple. Si on a 125 000 000 $ disponibles, on peut prévoir 400 000 000 $ de projets, 500 000 000 $ de projets. Il y aura des choix à faire. Et je pense qu'on a intérêt à s'assurer ça va être quoi les critères qui vont guider les choix du Secrétariat aux affaires autochtones. On a parlé déjà qu'on a réservé une enveloppe pour les Inuit...
M. Chevrette: Oui, mais on va réserver... Je peux vous dire qu'on va discuter avec les autochtones. Je suis convaincu que, dans certaines communautés, ce sera des priorités communautaires parce qu'on peut faire appel aux infrastructures communautaires et au développement économique. Dans certaines communautés, comme on en a parlé depuis tantôt, c'est évident qu'il va falloir répondre à des besoins communautaires à court terme. C'est clair, ça. Et, dans d'autres, ils vont être plus économiques, effectivement, parce qu'ils sont plus prêts puis ils ont déjà accès, ils ont déjà des projets sur la table. Mais, ceci dit, ça sera avec consultation des nations. Ça, soyez assuré de ça. On en a discuté déjà, par exemple avec les Inuit. Mais j'ai déjà des approches avec plusieurs communautés pour des projets d'ordre communautaire.
Maintenant, je formule le voeu que vous nous appuyiez pour qu'on aille chercher l'autre 125 000 000 $ du fédéral. Il serait indispensable, parce que 125 000 000 $ sur cinq ans, ça peut paraître gros, mais c'est minime par rapport aux besoins, par exemple, de certaines communautés. Et le 125 000 000 $ du fédéral aiderait énormément à détiers-mondialiser certaines communautés, si vous me permettez l'expression. Il faudrait absolument. Dans le logement social, il faut le voir pour le croire. Allez au Lac-Simon, allez au Lac-Victoria, allez au lac Barrière, c'est inacceptable, les conditions de logement. C'est inacceptable. Dans certains quartiers, vous le savez, quand on a des poches de pauvreté extrême, c'est pire que ça. Il faut absolument qu'on fasse front commun, tous les élus du Québec, pour se battre pour le logement social. Ça n'a pas de bon sens, c'est inacceptable, on n'endurerait pas ça.
Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Jacques-Cartier, je permettrais au député de Dubuc de poser une question.
Nouvelles ententes avec les autochtones en voie de réalisation
M. Côté (Dubuc): Merci, M. le Président. Alors, dans la foulée, M. le ministre, de l'objectif général du gouvernement, je pense, qui est d'harmoniser les relations entre le Québec et les autochtones, est-ce que d'autres ententes du même genre que celles qui ont été conclues avec Kahnawake sont en voie de réalisation? Si c'est le cas, est-ce que c'est possible de connaître le contenu de ces ententes?
M. Chevrette: Oui, il y a beaucoup de négociations qui se font au moment où on se parle. D'abord, il y a une négociation territoriale qui se fait avec les Montagnais, sous forme de deux tables: la table Mamuitun et Mamit Innuat, c'est-à-dire que ceux de Pointe-Bleue et des environs négocient à la table avec M. Rémy Kurtness comme responsable, chef négociateur; pour Mamit Innuat, c'est Guy Bellefleur, de Mamit Innuat, qui négocie pour Natashquan, Mingan. Et il y a une communauté montagnaise, dans tout ça, qui a été laissée pour compte au moment de la Convention de la Baie James - et M. le député de Jacques-Cartier y faisait allusion tantôt - c'est les Matimekosh, Schefferville, qui se retrouvent entre deux chaises actuellement. Et on regarde concrètement, au SAA, qu'est-ce qu'on pourra faire avec ça. C'est M. Louis Bernard, l'ancien secrétaire général du Québec sous M. Lévesque, qui est chef négociateur pour cette ronde-là, et qui, aussi, coordonne la négociation du projet Churchill-Hydro-Québec, qui négocie avec les deux tables.
Au niveau de ces mêmes communautés montagnaises là - je vais essayer de faire vite le tour - il y a deux ententes sectorielles qui seront signées avec deux communautés: Essipit et Natashquan; et Natashquan négocie, en plus, deux ententes sectorielles sur la forêt et la faune. Donc, au niveau des Montagnais, il y a cela. Vous savez qu'on a déjà signé une entente avec Mashteuiatsh, pour une minicentrale, entre Hydro-Québec et puis la communauté.
Au niveau des Algonquins, il y a des ententes au niveau de la forêt dans deux ou trois communautés, puis il y a des... Il y a le lac Barrière? Il y en a trois, ententes sur la forêt, qu'on est en train de négocier. Ils participent à des projets pour des aménagements de plans de coupe, etc. Il y a des négociations qui se font également avec les Attikameks, et c'est Me Henri Grondin, de Québec, qui négocie sur la territorialité et la négociation globale avec les trois communautés attikameks: à Manawan, Obedjiwan et Weymotaci.
(11 h 50)
Il y a également 50 et quelques ententes de police de signées dans toutes les communautés. Ça, c'est assez généralisé, ce secteur-là. Il y en a d'autres, c'est la santé qu'on négocie avec une communauté en particulier, ou on a négocié, par exemple, pour les infirmières dans le Grand Nord, avec les Cris. Les deux, c'est réglé.
On négocie des ententes pour les pompiers chez les Inuit, entre autres. Il y a les Micmacs. Je signerai très bientôt une entente avec les Micmacs de Gaspé. Je signerai deux ententes; il y en a une à Maria, de signée, puis il y a Listuguj qui s'en vient, et il y a l'entente-cadre de respect mutuel qui enclenche des négociations avec Natashquan et Essipit, comme je l'ai dit tantôt. Le village huron Wendake aussi s'en vient également. Et il y a une communauté qui est en restructuration, c'est les Malécites, qu'on a reconnus, que l'Assemblée nationale a reconnus en 1989, je crois.
Il y a beaucoup de travail sur le terrain. D'ailleurs, on est à restructurer le Secrétariat, parce que c'est une poignée d'hommes et de femmes qui travaillaient, puis, avec la nouvelle politique et la volonté de faire des choses concrètes sur le terrain, je peux vous dire que le sous-ministre, M. Sauvé, qui est à ma droite, a fait un travail assez phénoménal avec son équipe. Et le gouvernement a consenti des effectifs additionnels, et on va pouvoir réaliser, je pense bien d'ici la fin de la présente année, encore une quarantaine d'ententes sectorielles, minimalement.
M. Côté (Dubuc): Merci.
Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Jacques-Cartier.
M. Kelley: ...sur la question du député de Dubuc, au niveau de l'entente sur la taxe - nos cellulaires, la peste! - de Kahnawake sur les impôts et les achats faits à l'extérieur de la réserve, est-ce qu'il y a des demandes des autres nations pour signer une entente similaire? Et, si oui, est-ce qu'on a un échéancier prévisible pour l'exportabilité de cette entente?
M. Chevrette: C'est une très bonne question. Je dois vous dire d'abord qu'il y a des députés aussi qui me le demandent. Je pense au député d'Ungava, il a hâte qu'on puisse exporter ce modèle, parce qu'il y a des commerces dans l'Ungava qui, à 80 %, 85 %, ont une clientèle autochtone. Il y a déjà des demandes de faites par Listuguj, je crois. Il y a des demandes de faites également au niveau de certains chefs cris qui nous demandent comment ça va s'opérationnaliser et est-ce que c'est exportable. Dès qu'on aura finalisé, là, les ententes avec Kahnawake puis toute la technique de cela - parce que ça prend une entente avec une institution pour la carte magnétique, etc. - j'ai l'impression qu'après on pourra l'exporter, et on va régler un gros problème d'achats hors réserve versus achats sur réserve, et tout. Je pense qu'on va rendre service à bien des gens. Et on va éviter, en plus, la concurrence déloyale qui s'est installée, dans certains cas, par collusion, purement et simplement. On s'imagine qu'il y a seulement des autochtones qui fraudaient, mais ce n'est pas vrai. Il y avait quelqu'un qui achetait, il y avait quelqu'un qui vendait.
Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Jacques-Cartier.
Besoins en matière de logements sociaux
M. Kelley: Oui. Le ministre a mentionné plusieurs sujets dans la dernière réponse, mais je voudrais revenir sur le logement, parce que c'est de bonne guerre de toujours dénoncer le gouvernement fédéral, mais, quand j'ai questionné votre collègue la ministre des Affaires municipales hier, il y a une entente de signée pour le logement social chez les Inuit pour cette année, qui va, je pense, ajouter une quarantaine de maisons chez les Inuit. Alors, il y a des progrès qui sont possibles, et moi, dans mon comté, ce n'est pas toujours facile de voter avec le gouvernement, mais, sur les questions de l'importance d'un programme d'infrastructure, c'était un vote unanime de l'Assemblée nationale, alors. Mais, sans venir à la défense du gouvernement fédéral, il faut mentionner quand même, pour les personnes qui nous écoutent, qu'il y a effectivement une cinquantaine d'ententes policières qui fonctionnent d'une façon tripartite et que le gouvernement fédéral participe. Je pense que ce qu'il dépense au Québec, c'est de l'ordre de 400 000 000 $ par année dans les premières nations. Alors, ce n'est pas un dossier dont il est absent complètement. Mais le logement, effectivement, est un problème criant, surtout à cause du profil démographique des communautés autochtones, qui est différent du nôtre. Notre baby-boom est fait, le leur arrive, et les besoins, soit chez les Inuit, les Cris, les autres nations, pour les nouveaux ménages, mais également chez les Algonquins et les autres, de restauration et de rénovation des maisons existantes sont très très importants.
Est-ce que, au Secrétariat des affaires autochtones, on a fait une évaluation des besoins? Est-ce que ça existe, comme document qui pourrait être déposé pour la commission, pour les membres de la commission? Pas aujourd'hui, mais est-ce qu'on a fait une réflexion: c'est quoi, les besoins? On peut rencontrer n'importe quels conseils de bande ou conseils tribaux au Québec, et le logement est toujours la priorité numéro un. Mais, d'une façon concrète, est-ce qu'il y a des études de besoins qui sont faites, qu'on peut, peut-être pas aujourd'hui mais dans une autre séance, déposer pour les membres de la commission?
M. Chevrette: C'est-à-dire que, pour les Inuit, on pourrait le faire, par exemple. Chez les Cris, on est en train de le finaliser. Pour ce qui est des conseils de bande, des réserves, nous ne l'avons pas; c'est une responsabilité fédérale.
M. Kelley: Responsabilité fédérale, à 100 %.
M. Chevrette: Et on n'a pas fait l'analyse communauté par communauté, mais c'est astronomique. Je peux vous dire qu'on parlait de... Vous disiez tantôt, et de bonne foi, j'en suis sûr: Il faudrait restaurer. Je ne sais pas ce qu'on fera au Lac-Victoria; là, ce n'est pas de la restauration, c'est de la construction qu'il faut faire. C'est clair. Il faudrait un plan de tant de maisons par année, puis avoir un plan quinquennal ou sur 10 ans, mais il faudrait que ça soit conclu rapidement, ça. Parce que c'est bien beau, avoir une entente de police pour régler la violence conjugale, puis régler la violence par rapport aux enfants, ou régler des problèmes sociaux, mais vous savez que, le crime, il peut être souvent évité quand on met des conditions de vie qui ont de l'allure un peu. Si on fait tout pour favoriser le crime sans s'en rendre compte...
Moi, je pense que je vais vraiment appuyer très, très fort sur la négociation avec le fédéral concernant le logement social. Je pense qu'il y a des communautés... Prenez les Inuit, prenez les Cris, c'est structuré de façon très évidente, mais, malgré tout, ils ont des problèmes de logements sociaux. Imaginez-vous quand on tombe chez les Algonquins, ce n'est pas croyable, ce n'est vraiment... tout simplement pas croyable. Donc, moi, je pense qu'il faut arrêter de faire les constats, puis il va falloir organiser une stratégie ou un plan de bataille, un plan de sensibilisation. On va se servir de l'Assemblée nationale, on va demander une intervention dans le logement social. Puis j'ai l'intention de le faire, après en avoir parlé. Je ne veux pas prendre le monde par surprise, je ne veux pas faire de la petite politique là-dessus, je veux que l'Assemblée nationale unisse sa voix à la volonté politique qui règne présentement pour qu'on puisse aller chercher véritablement, pas pour nous, pour des nations qu'on a reconnues, par exemple, à l'Assemblée nationale... Et, si on a reconnu ces nations-là, avec une possibilité d'autonomie gouvernementale, de droit à la négociation davantage pour leur collectivité, il ne faudrait pas être scandalisé, au contraire, de les appuyer très sérieusement dans leurs revendications sur le logement social. Il faut faire quelque chose là-dessus. Je pense que c'est une des clés.
(12 heures)
M. Kelley: Et, sur ça, le ministre a fait allusion au lien entre le logement et d'autres problèmes sociaux, et je pense, même chez les Inuit où le prix de construction... Quand j'ai questionné votre collègue hier, juste sur le déménagement de 25 maisons à Kangiqsualujjuaq suite à l'avalanche, la facture de déménagement - juste le déménagement, il n'y a aucune construction, juste les déplacer - c'est de l'ordre, de mémoire, de 2 000 000 $ pour 25 maisons, juste les mettre sur un autre... Et il y a la construction des routes, qui s'impose pour remplacer les rues qui sont maintenant à l'intérieur de la zone qui est interdite. Mais, à cause de l'isolement de plusieurs de ces communautés, les coûts de construction sont énormes. Et, si on ajoute à ça le phénomène du Grand Nord avec la provision de l'eau potable, etc., ce sont des coûts astronomiques. Mais je me rallie à la position du ministre que le logement est la clé pour résoudre pas uniquement la question de logement, mais que ça déborde sur beaucoup d'autres questions dans ces communautés.
Le point sur les relations avec les Micmacs
Sur un autre ordre d'idées, s'il n'y a pas d'autres questions, la mise au jour de la situation chez les Micmacs, on a vu, l'été passé, on a passé un moment difficile. J'étais de ceux qui prônaient la patience parce que, avant tout, il y a toujours les personnes qui vont conseiller au gouvernement de prendre une position plus agressive ou plus proactive pour régler la situation. Des fois, ça prend des années pour créer les situations, alors de prétendre qu'on peut les résoudre en 48 heures, c'est difficile.
Mais, avec l'ajout de coupe de bois, est-ce que c'est suffisant ou est-ce que, au niveau du développement économique, les questions de fond demeurent avec nos relations chez les Micmacs? Et, surtout, le contrôle soit des forêts... Il y a également la pêche, le saumon dans la baie des Chaleurs. Où est-ce qu'on est rendu avec ces problèmes? Est-ce qu'on est en bonne voie ou est-ce qu'il y a quand même des litiges importants qui restent à résoudre?
M. Chevrette: Donc, on a déjà une entente avec les Micmacs de Maria. Je signerai d'ici peu une entente avec les Micmacs de Gaspé. Nous avons renégocié une entente entre les «loggers» puis les forestières, là, les compagnies forestières pour l'été qui vient. On pense être capable de négocier une entente-cadre avec Restigouche également. Ils regardent ça présentement, on pense qu'on doit être capable de signer une entente un peu comme on a signé, ce qui représente la clé de voûte pour les ententes sectorielles. On devrait être capable de le faire avec Restigouche très prochainement. Je pense que les relations sont passablement bonnes.
Écoutez, à l'intérieur de certaines communautés, il ne faut pas se le cacher, il y a des problèmes aussi dans certaines communautés puis il y a des oppositions. Ça ne se manifeste pas toujours comme nous où on peut s'enguirlander joyeusement, mais, quand on regarde le passé ou l'histoire de certaines communautés, c'est souvent de grandes familles qui se partagent le pouvoir d'un mandat à un autre mandat. À un moment donné, la grande famille x fait deux mandats, et puis elle est remplacée par l'autre grande famille x. Puis vous savez comment ça marche dans certaines communautés, donc on doit respecter leur mode, leurs traditions, leur démocratie, leur processus démocratique, et c'est ce que j'ai essayé de faire le plus l'été passé malgré tous les problèmes qu'on a vécus, qui ne sont pas drôles, c'est vrai, je n'en disconviens pas.
Mais, le jour où ils se prononcent et qu'ils ont élu... Ils élisent des gens qui les représentent, on doit, qui que nous soyons, de quelque formation politique que ce soit, respecter leur processus démocratique. Et c'est peut-être ce qui ressort de plus positif au niveau du règlement de la crise micmac, on a transigé avec leurs représentants élus. J'ai parlé à l'opposition élue aussi, mais j'ai parlé avec leurs... Ce sont des représentants élus, et je crois qu'on doit le respecter à la lettre, ça, sinon on achète des troubles pour longtemps. Si on passait par-dessus la tête de ceux qu'ils ont élus pour les représenter... Quelle que soit leur façon de faire, c'est leur processus, ce n'est pas le nôtre, et ça, je m'en suis tenu à cela, je me le répétais 24 heures par jour, je dois vous dire. Il y en a qui m'ont découvert une grande patience, moi aussi.
Mais je pense que, somme toute, ça peut démontrer qu'on est capable d'arriver à des dénouements heureux sans effusion de sang, sans confrontation physique, sans graves problèmes, là, humains. Et le plus dommageable, en fait, ça a été l'économie de la Gaspésie. Ne nous leurrons pas, là, c'est arrivé à un moment stratégique où le tourisme... La Gaspésie fut fortement pénalisée dans ce secteur-là, et j'ose espérer que l'exemple qu'on est en train de donner que la négociation est capable de porter ses fruits servira à l'ensemble des communautés autochtones québécoises.
Négociations territoriales relatives au projet hydroélectrique de Churchill Falls
M. Kelley: Sur un autre ordre d'idées, quand nous avons fait cet exercice, il y a un an, c'était tout de suite après l'annonce de la possibilité d'un projet à Churchill Falls et, à ce moment, c'était une annonce qui a été faite un petit peu en parallèle ou à côté des tables qui existaient pour les négociations. Un an après, au niveau de l'acceptation de ce projet par les Innu, est-ce qu'on a fait des progrès ou... À l'époque, c'était Me Grondin qui était à l'oeuvre. C'est quoi, l'échéancier ou les prévisions pour discuter? Je sais qu'il y a une table à part, car on a soulevé la question la dernière fois, mais, sur le dossier précis de Churchill Falls, où est-ce qu'on est rendu? Je sais qu'il y a également le gouvernement de Terre-Neuve qui est impliqué avec les autochtones de l'autre côté de la frontière, mais, vu qu'il y avait des impacts très importants quant aux terres qui sont revendiquées par les Montagnais du Québec, où est-ce qu'on est rendu dans ce dossier?
M. Chevrette: En fait, c'est clair que les Innu, ils se parlent. Ceux qui étaient assez naïfs pour penser que les Innu du Labrador ne parlaient pas aux Innu québécois, je pense qu'ils se trompaient. Et on a découvert très rapidement qu'ils avaient à peu près la même stratégie, que les Innu du Labrador avaient la même stratégie qu'au Québec, ils ne voulaient pas parler nécessairement aux compagnies d'électricité sans vouloir parler de territorialité. Et, comme les Innu du Labrador liaient leurs revendications territoriales à la négociation du projet de Churchill, j'ai vite compris qu'on n'avancerait pas du tout à une table de négociation territoriale sans mêler les deux grands sujets.
Et c'est là que j'ai décidé... Plutôt que de tergiverser six mois sur une entente sectorielle, j'ai dit: Sectoriellement, on peut signer avec n'importe quelle communauté n'importe quand pour l'éducation, la santé. Ce n'est pas ça qui crée problème à une table parce qu'il peut y avoir des spécificités dans chacune des communautés, mais, sur la territorialité, ils se doivent d'avoir un consensus parce qu'ils ont foulé le sol probablement... Les communautés montagnaises ont probablement foulé le même sol même si c'est une communauté de Mingan ou de Natashquan. Ils ont à faire un consensus entre les communautés sur la dimension territoriale ou les terres revendiquées selon leurs droits ancestraux, de sorte que j'ai demandé à M. Bernard d'aller directement sur la territorialité. Et il est donc chef négociateur pour le gouvernement du Québec en ce qui regarde la territorialité pour les huit communautés montagnaises - et remarquez bien que ça touche plus le secteur de Mamit Innuat, mais ça touche quand même une partie de Mashteuiatsh aussi - et il est aussi coordonnateur de la table de négociation d'Hydro-Québec. En d'autres mots, M. Bernard est assis aux deux tables. Dans un cas, il négocie comme chef négociateur et, dans l'autre cas, il participe à la négociation et assure la coordination gouvernementale. Et c'était ça que les Innu voulaient, ils voulaient avoir une présence gouvernementale, y compris dans les négociations avec Hydro-Québec.
Ça ne fait pas toujours plaisir, là, de voir la présence de l'État dans une société d'État, ils aiment mieux qu'on ne soit pas là, mais les Innu m'avaient demandé, même, de signer une lettre - ce que j'ai fait - sans préjudice à leurs droits territoriaux: Si on négocie avec Hydro-Québec, là, on ne voudrait pas que ça atténue ou que ça diminue nos prétentions, nos droits sur le territoire. C'est pour ça que j'ai signé la lettre, mais j'ai aussi fait en sorte que M. Bernard représente la présence gouvernementale dans le dossier de Churchill. Ils se sont vus, à date, à deux ou trois reprises. Il y a du défrichage qui se fait présentement autant à la table sur la territorialité, chaque chef négociateur a été rencontré, et, moi, j'ai eu une demande, hier, de Mamuitun pour refaire le point avec les trois chefs impliqués dans la négociation, ce que j'ai accepté, on va mettre ça à mon agenda.
Et, quant à la négociation de Churchill, les pourparlers sont vraiment entamés, là. On commençait à échanger. Il y a des perceptions. Hydro arrive avec une recette, les Innu vont vouloir peut-être d'autres formules, mais c'est par le jeu de la négociation concrète. Et, comme ils savent très bien maintenant que la territorialité est liée au projet de Churchill, on n'aura plus cette dichotomie d'une table à l'autre, puis s'attendre. Ils savent que M. Bernard est présent aux deux tables.
(12 h 10)
Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. Alors, je permettrai une question au député de Frontenac. On vous reviendra par la suite.
Mesures envisagées dans le but d'assurer une cohabitation harmonieuse entre autochtones et blancs
M. Boulianne: Merci, M. le Président. Alors, d'abord, je veux saluer le ministre étant donné que je me joins à la commission, ainsi que votre équipe. Moi, dans Frontenac, évidemment, je n'ai pas de communautés autochtones, sauf que je suis natif de Tadoussac, j'ai vécu avec des Montagnais qui sont aujourd'hui des Malécites, semble-t-il. Alors, il y a eu...
M. Chevrette: Essipit, peut-être.
M. Boulianne: Pardon?
M. Chevrette: Ça doit être Essipit.
M. Boulianne: C'est des Montagnais...
M. Chevrette: Essipit.
M. Boulianne: Non, à Tadoussac.
M. Chevrette: Tadoussac, oui, mais ça...
M. Boulianne: C'est-à-dire, il n'y a pas de réserve, sauf qu'il y a des populations qui sont à l'intérieur de la municipalité. Sauf que j'ai travaillé à Betsiamites, alors j'ai vécu et demeuré à Betsiamites où, là, il y a des Montagnais. On construisait à l'époque, évidemment, des barrages. Ça fait quelques années. J'ai même appris le montagnais, M. le ministre.
M. Chevrette: Ah oui?
M. Boulianne: Je ne sais pas si je pourrais m'en rappeler.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Dites-moi bonjour. Ha, ha, ha!
M. Boulianne: Ce que je veux souligner, c'est que vous avez raison, il y a des ententes, mais aussi il y a sur le terrain. Et, sur le terrain, c'est très différent, je pense, quand on a à y vivre. Vous avez parlé du logement social, et, c'est vrai, c'est extrêmement tragique à certains endroits, le développement culturel aussi, l'égalité des femmes. Alors, vous avez beaucoup - la santé - de problèmes sur le terrain.
Mais, si je me souviens bien, c'est que, à l'époque, les chefs et les organismes se méfiaient beaucoup de ce qu'on appelait le provincial. Tout ce qui venait à ce moment-là... Bon, c'étaient des interventions dont on disait, bon, qu'elles n'étaient pas appropriées. Ça relevait surtout du fédéral. Et je suis très heureux, maintenant, de constater que l'initiative du Québec, depuis quelques années, en la matière vient compenser et vient développer, par des ententes, tout le développement économique.
Mais vous avez parlé... Je reviens à ce que vous avez dit, sur le terrain, il y a du travail à faire, alors est-ce que vous avez des mesures, des initiatives pour justement concrétiser ce travail-là sur le terrain à partir des ententes? Merci.
M. Chevrette: Bien, moi, je voudrais profiter de la porte que vous m'ouvrez pour parler du travail qu'on a à faire auprès de notre propre communauté aussi dans ces régions-là. Il est évident que, si on n'explique pas puis qu'on n'informe pas, on accréditera la thèse qu'il y a deux poids, deux mesures. Et ça, c'est un fait qu'on a du travail à faire auprès des communautés qui avoisinent les communautés autochtones, on doit expliquer. Puis je me rappelle ce que j'ai dit dans le premier quatre heures des crédits. Mais les gens nous disent: Y a-tu deux lois? Y a-tu deux mesures? On entend ça à coeur de jour. Je l'entends sur un poste de radio à coeur de jour.
Donc, je l'entends, bien sûr. Je l'entends de mes propres amis personnels, ils me disent: Guy, qu'est-ce qui te prend? T'as deux poids deux mesures dans le traitement. Il faut réexpliquer sans cesse qu'en 1876 - ce n'est pas d'aujourd'hui, on n'était pas au monde personne, là, nous autres; 1876, ça fait 99 plus 24, on aurait 123 ans - il y a eu une loi qui détaxait pour fins de consommation personnelle. C'était un genre de traité qui a été confirmé dans une loi puis a dit: Bon, on ne chargera plus la taxe sur la consommation pour fins de consommation personnelle.
C'est vrai qu'il y a deux lois, c'est un fait. Mais «fins de consommation personnelle», ce n'était pas le commerce, puis, au fil des ans, pendant 123 ans, il y en a qui ont étendu ce droit de non-taxation pour fins de consommation personnelle à des commerces. Et, quand t'es rendu à 15,56 % de taxes, TVQ, TPS confondues, en payant la taxe sur la taxe, bien, imaginez-vous, quand ce n'est pas chargé, quel commerce peut résister à une vente de 15,56 %, au départ, de moins que l'autre. C'était évident que ce n'était pas un droit collectif, sinon on tuait n'importe quelle économie. Tout autochtone qui aurait été s'installer en bordure, en frontière d'une ville ou d'un village faisait mourir n'importe quel dépanneur, n'importe quel marchand d'autos, n'importe quel garage, n'importe quoi. Il a fallu expliquer aussi aux autochtones que c'était un droit pour fins de consommation personnelle et non pas un droit de compétitivité ou de compétition déloyale, et c'est ça qu'on cherche à régler par les ententes qu'on fait présentement, puis je pense qu'on va réussir si on y met de la bonne volonté, tout le monde, mais si on l'explique correctement.
Ils ont un droit qui remonte à 123 ans, là, dans la loi de 1876, mais c'est un droit pour fins de consommation personnelle et non pas une loi pour fins de concurrence dans les commerces. On ne tuera pas nos commerces. Si ça ne s'était pas pratiqué en bordure de Châteauguay, pensez-vous que les gens de Châteauguay seraient agressifs autant qu'ils le sont? Pensez-vous que, dans les commerces dans le comté d'Ungava, il y a des gens qui seraient aussi agressifs si on avait appliqué exclusivement la loi de 1876? Mais il y a des gens qui ont joué là-dedans, là. Ce n'est pas seulement que des autochtones qui ont élargi le droit, il y a des commerçants d'autos qui ont joué avec certains commerçants autochtones. Quand t'es rendu à 15 autos dans l'année, c'est clair que ce n'est pas pour ta consommation personnelle, ou bien t'as une grosse, grosse famille, puis t'as gros, gros d'argent pour en acheter pour tous les membres de ta famille, hein? C'est évident que ça ne marche pas, ça.
Donc, on est en train, correctement, de responsabiliser les... Puis je peux vous dire qu'il y en a qui sont prêts à se responsabiliser au profit de leur communauté et non pas de certains commerçants et détaillants, puis on va réussir. Mais on va réussir si on veut tous puis si on ne fait pas de petite politique sur ça, puis je ne pense pas qu'on en ait fait à date dans l'Assemblée nationale, en tout cas pas depuis que j'ai le dossier en main. Et je dois féliciter les parlementaires là-dessus, pour le support qu'ils apportent à ce dossier. Je pense qu'on va réussir à instaurer une cohabitation harmonieuse, puis on va replacer les choses dans leur vraie perspective.
M. Boulianne: Merci.
Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Jacques-Cartier.
Pratique des sages-femmes
M. Kelley: Oui, juste une toute petite question sur un dossier ponctuel. J'ai eu l'occasion de rencontrer la présidente de l'Association des femmes autochtones du Québec qui suit de près le projet de loi sur les sages-femmes et la demande qui a été faite, à cause de certaines pratiques traditionnelles, d'un genre d'exemption, dérogation qui s'appliquerait dans les premières nations. Est-ce que le Secrétariat a fait un avis au Conseil des ministres? Est-ce que c'est quelque chose qu'ils ont pris en considération sur la recevabilité de cette demande?
M. Chevrette: J'ai fait des remarques - parce que j'avais eu effectivement cette demande - au Comité de législation, et il y a une rencontre cette semaine - je crois que c'est vendredi qui vient - entre la ministre de la Santé et le groupe, et, à partir de l'officialisation de la demande... Parce qu'il faut faire attention à la responsabilité civile. Ce n'est pas qu'on veuille le mettre à tout prix, mais il faut bien comprendre qu'il faut une entente là-dessus parce que, si jamais, il y avait pratique et poursuite, vous comprenez que...
M. Kelley: Non, non.
M. Chevrette: Ce n'est vraiment pas parce qu'on ne veut pas. Il y a deux lois, là, je ne me souviens plus de l'autre sujet. Il y a les conjoints de fait également pour lesquels il y a eu une demande pour ne pas marquer de coutumes dans une communauté que je nommerai pas. Mais on est à faire des rencontres expressément là-dessus.
M. Kelley: Non, non, et je sais tout le... Parce que, également, on a nos projets-pilotes pour les sages-femmes dans notre société, mais même leur statut est toujours à confirmer dans un projet de loi éventuel.
M. Chevrette: Exact.
M. Kelley: Et la réflexion, l'impact sur les traditions, mais tout en tenant compte... Et je ne dis pas que... Mais je pense que c'est une question qu'il faut étudier et prendre au sérieux.
(12 h 20)
M. Chevrette: J'ai plaidé qu'il ne fallait pas le mettre précisément, moi, personnellement, parce que je me disais: Elles ont toutes accouché avec l'aide de quelqu'un, et il n'y a pas si longtemps que ça, là. Et ils demandaient que ça ne soit pas dedans. Par contre, on veut aussi, d'autre part, les considérer comme citoyens à part entière et non pas d'avoir des droits aussi fondamentaux... On verra selon les échanges, mais on ne veut pas forcer la main des autochtones dans ça. On veut offrir la possibilité d'inscrire dans la loi. S'ils n'y tiennent pas, on signera des ententes sectorielles puis on le retirera.
Suites à donner à une enquête médicale réalisée par l'Assemblée des premières nations
M. Kelley: Et, sur le même ordre d'idées, j'ai soumis la question par écrit à votre collègue la ministre de la Santé, mais c'est un énorme ministère, et je trouve quand même que le rapport qui a été fait, le rapport sur l'analyse et l'interprétation de l'enquête médicale régionale faite par l'Assemblée des premières nations et déposée au mois de janvier, deux des phénomènes qui sautent aux yeux, c'est toute la question du phénomène du diabète chez les autochtones qui a une incidence beaucoup plus importante et également toute la question du suicide. Je sais que, ça, c'est un phénomène sur lequel le gouvernement se penche à travers le Québec, mais on a juste à regarder le nombre des suicides en milieu autochtone, et on parle du triple, quatre, cinq fois, des fois, parmi des nations. Moi, je me rappelle, une fois j'ai visité Puvirnituq, et c'était après une série de, je pense, neuf suicides chez les adolescents en un an, un an et demi, quelque chose comme ça. Sur une communauté de 1 000 personnes, c'est énorme comme phénomène.
Et, juste pour peut-être m'aider un petit peu, mais, au niveau du Secrétariat aux affaires autochtones, qui a à coeur ces préoccupations, un ministre qui a un budget de 12 000 000 000 $ 13 000 000 000 $, qui a des feux un petit peu partout à travers le réseau, est-ce que le Secrétariat, précisément suite au rapport qui a été déposé, a fait des pressions auprès du ministère de la Santé et des Services sociaux? Parce que, encore une fois, on est dans les phénomènes ou les situations où les besoins de santé sont différents de ceux du reste de la population, et c'est toujours le défi d'aller chercher les besoins spécifiques de certaines nations et de les mettre en évidence. Et à quel point ou par quel moyen... Quelle démarche est-ce que le ministre a prise pour souligner... Je pense que c'est la première fois que c'est les autochtones eux-mêmes qui ont fait une recherche de cette envergure-là. Je pense qu'il faut les saluer pour la prise en charge et l'analyse des besoins de leur communauté, mais quelle suite est-ce que le Secrétariat a donnée auprès du ministère de la Santé et des Services sociaux et à votre collègue?
M. Chevrette: D'abord, c'est la première fois que les autochtones se prennent vraiment en main sur le plan de la santé puis, collectivement, présentent un rapport comme ils ont présenté, et, nous, au Secrétariat, on va financer le comité du suivi de ce rapport.
Deuxièmement, le député d'Ungava et moi-même avons fait des démarches, déjà, auprès du ministre délégué à la Jeunesse, M. Baril, Gilles, qui est en train de regarder comment on peut venir en aide concrètement, là, comme on l'a fait dans certaines autres communautés du sud, ici. Et on devrait avoir des annonces à faire d'ici peut-être un mois, maximum: aider certaines maisons de jeunes, commencer à instaurer soit des maisons de jeunes, soit, à l'intérieur des centres communautaires déjà existants, des sommes d'argent qui peuvent aider à l'animation, l'encadrement, le soutien. Et ça, je pense qu'il faut, oui, exact, et les statistiques que vous énoncez sont frappantes.
Ressources communautaires pour les autochtones hors réserves
M. Kelley: Oui. Et peut-être juste en guise de conclusion - on n'a pas eu l'occasion de le faire, et peut-être qu'on peut revenir dans une autre séance - également le phénomène des autochtones hors réserve qui, avec le phénomène démographique, risquent... On ne sait jamais, mais on voit à Montréal, à Val-d'Or, dans d'autres endroits... Et je sais qu'on a les «friendship centers», les ressources qu'on finance en tissu urbain, mais avec... Les jeunes aiment les villes. Je pense que, ça, c'est quelque chose d'un petit peu universel, et il y aura un pouvoir d'attirer le monde vers nos grandes villes, et on voit ça dans le reste du Canada où le pourcentage des autochtones est plus élevé. Je pense à Winnipeg, entre autres, où souvent les jeunes vont quitter les réserves au nord pour venir s'installer à Winnipeg, sans emploi, des fois sans abri, et les conséquences de leur pauvreté sont très frappantes sur les rues à Winnipeg.
Et je pense, peut-être, il y a des leçons à tirer, nous autres, mais, quand je regarde le nombre de jeunes dans les communautés et le taux de chômage qui existe dans ces communautés, je pense qu'un certain pourcentage aura l'intérêt de descendre soit à Montréal, ou à Val-d'Or, ou d'autres villes, et est-ce qu'on a un plan de doter une certaine ressource communautaire pour ces personnes qui risquent d'être, d'une certaine façon, perdues à l'intérieur de nos grandes villes?
M. Chevrette: Oui. Je dois vous avouer que ça a été un petit peu, depuis deux, trois ans, une découverte pour moi de voir qu'on ne vivait pas le même phénomène qu'ailleurs au Canada, quoique ça commence ici. Mais, je suis allé à Régina, c'est 30 % de la population ou 33 % de la population autochtone qui vit en ville. Le tiers d'une ville, là, constitué d'autochtones, ils ont des problèmes. Nous, on n'a pas eu ce phénomène-là, c'est vraiment au Québec que les gens vivent le plus dans leur communauté.
Par contre, avec le baby-boom qu'on connaît dans ces réserves-là, il est évident que le jeune qui se scolarise, qui va aux études puis qui n'a pas de perspective d'emploi... Ce n'est pas pour rien qu'on a remis l'accent sur le développement économique, parce que, autrement, ou bien ils vont vivre des problèmes sociaux majeurs, des taux de suicide, des découragements, etc., ou bien ils vont quitter puis ils vont venir vivre en ville. C'est le cas de plusieurs jeunes. Moi, j'en ai même à Joliette, des Attikameks qui vivent à Joliette. À Maniwaki, il y a beaucoup d'Algonquins qui vivent dans la ville de Maniwaki puis qui se promènent soit sur la réserve... Parce qu'il y a même eu des chicanes, c'est quasiment... le contrôle de la réserve était fait par des membres de l'extérieur de la communauté.
Donc, nous, à date, ce qu'on a toujours fait, là, depuis quelques années, c'est qu'on aide les communautés en place à s'occuper de ceux qui sont en ville. On dit aux gens qui sortent de leur réserve: Rapportez-vous à vos communautés. On va soutenir vos communautés pour donner certains services. Il y a des centres d'amitié. Il y a beaucoup de communautés qui donnent des services soit à leurs étudiants, soit à leurs personnes qui vivent en ville, à Montréal, ou ailleurs. Mais le phénomène n'est pas encore suffisamment fort pour qu'on connaisse ce qui se vit à Winnipeg, comme vous dites, ou à Régina, ou dans plusieurs grandes villes de l'Ouest. C'est un phénomène qu'on connaîtra sans doute, par exemple, parce que l'explosion démographique de ces communautés-là va faire en sorte qu'il y en a un bon nombre qui vont venir travailler dans le milieu urbain, qui vont se bâtir une vie en dehors de leur réserve, ce qui nous amènera à être obligés de faire ce que présentement il se fait dans l'Ouest. Mais ça crée une problématique extrêmement difficile.
Si je me base sur ce que j'ai entendu lors de la Conférence des premiers ministres... Parce que je remplaçais M. Bouchard à la Conférence des premiers ministres à Régina, et je dois vous dire que, en écoutant les groupes autochtones, c'est surtout les problèmes hors réserve qui étaient mis en évidence et pas ceux qu'ils vivaient sur les réserves, si bien que j'avais l'air un peu isolé. Un peu avec le Nouveau-Brunswick, on avait l'air de deux personnes qui ne vivaient pas les mêmes problèmes que les autres.
Je pense que nos défis sont grands, nous aussi, puis eux en ont tout un à relever parce que, là, à ce moment-là, c'est: La démocratie s'exerce comment quand un groupe d'autochtones hors réserve vivant dans une ville veut de l'autonomie gouvernementale? Ce n'est pas tout à fait la même problématique qu'on peut vivre ici. Je préfère les miens, présentement, aux leurs.
Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors, j'aimerais remercier le ministre pour sa collaboration. Le temps imparti pour l'étude des crédits étant épuisé, je mets aux voix...
M. Kelley: Juste...
Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Jacques-Cartier.
M. Kelley: ...30 secondes. Juste pour dire merci beaucoup au ministre et à M. Sauvé et son équipe pour leur disponibilité et également, à ma droite, au stagiaire Stéphane Villeneuve qui m'a aidé à préparer les crédits. Et je veux le féliciter publiquement parce que, jeudi passé, il est devenu père pour la première fois. Alors, bonne chance à Noémie et à la famille.
M. Chevrette: Il est autochtone, en plus. C'est un Montagnais.
M. Kelley: Oui.
Adoption des crédits
Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors donc, je mets aux voix le programme 4, Affaires autochtones, des crédits budgétaires du ministère du Conseil exécutif pour l'année financière 1999-2000. Est-ce que ce programme est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Adopté. J'informe les membres de la commission que l'ensemble des crédits budgétaires du ministère du Conseil exécutif pour l'année financière 1999-2000 seront adoptés le jeudi 29 avril. Et, sur ce, j'aimerais également remercier les membres de la commission pour leur travail, le ministre et ses collaborateurs de même que le personnel pour son appui. Et je suspends les travaux de la commission jusqu'à cet après-midi, après la période des affaires courantes. Je vous remercie.
(Fin de la séance à 12 h 30)