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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le jeudi 20 avril 2000 - Vol. 36 N° 67

Étude des crédits du ministère de la Sécurité publique


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Table des matières

Journal des débats

(Quinze heures quinze minutes)

Le Président (M. Paquin): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission des institutions reprend ses travaux. Elle est réunie pour poursuivre son mandat d'étude des crédits budgétaires du ministère de la Sécurité publique pour l'année 2000-2001, programmes 1 à 4, et, sur l'allocation de huit heures que nous avions à notre disposition, nous en avons six de prises.

Avant de commencer nos travaux, je voudrais vérifier avec vous s'il y a des remplacements.

Le Secrétaire: Non, M. le Président, il n'y a aucun remplacement.

Discussion générale (suite)

Le Président (M. Paquin): Alors, il n'y a pas de remplacement. On en est donc à la partie débat, et la parole était, lorsque nous nous sommes quittés, au député de Saint-Laurent et critique de l'opposition pour ses questions. Il vous reste 18 minutes à votre intervention. La parole est à vous.

Non-renouvellement du mandat de
M. Jacques Tremblay à la Commission québécoise
des libérations conditionnelles (CQLC)

M. Dupuis: Alors, je vous remercie, M. le Président. Comme à toutes les fois que nous nous rencontrons dans ce genre de forum, c'est-à-dire l'étude des crédits, on prépare un certain nombre de sujets dont on veut discuter avec le ministre. Je n'ai évidemment pas fait exception à la règle, j'ai préparé un certain nombre de sujets dont je voudrais m'entretenir avec le ministre. Mais, bien sûr, il faut aussi adapter nos représentations aux événements en cours. Le ministre a déposé à l'Assemblée nationale, au moment de la période de questions il y a quelques instants, le rapport de la Commission québécoise des libérations conditionnelles pour 1998-1999, et la lecture de la liste des membres du personnel de la Commission québécoise m'amène à poser une première question au ministre relativement, en général, au mode de nomination des membres de la Commission québécoise. Mais, pour que ce soit clair pour tout le monde, je voudrais faire référence à un cas particulier qui a été soulevé dans les journaux en début d'année par le journaliste Yves Boisvert, de La Presse, et sur lequel, à ma connaissance, il n'y a pas eu de réponse de la part du gouvernement, malgré le fait que plusieurs instances se posent des questions sur ce cas-là en particulier. Je veux bien sûr parler du cas de M. Jacques Tremblay.

M. Tremblay, pour les gens qui nous écoutent, était membre commissaire à temps plein à la Commission québécoise des libérations conditionnelles depuis 12 ans. En avril 1999, le gouvernement a décidé de ne pas renouveler le mandat de M. Tremblay et a plutôt décidé de le remplacer par une dame dont nous ne contestons pas la compétence, pas du tout, qui est Mme Alison Foy-Vigneault.

Là où on se pose des questions et là où le journaliste Yves Boisvert se posait des questions ? parce qu'il y a un article qui a été publié dans le journal La Presse, si ma mémoire est bonne, en janvier ou en février, en début d'année ? là où on peut se poser des questions, c'est qu'on ne comprend pas les raisons pour lesquelles le renouvellement de mandat de M. Tremblay n'a pas été effectué. À l'époque, lorsque j'ai lu l'article de M. Boisvert, M. le ministre, je me suis permis de me renseigner au sujet des évaluations qui avaient été faites du travail de M. Tremblay et j'en ai une en main. Si vous la voulez, je pourrais vous la fournir, mais je suis certain que vous l'avez vous-même ou que vous en avez pris connaissance, puisque à l'époque vous avez, j'imagine, recommandé son remplacement au Conseil des ministres. C'est une évaluation, donc, qui est faite pour l'année 1998-1999 et qui dénote sans aucun doute que le rendement de M. Tremblay, selon sa charge de travail, était tout à fait équivalent aux attentes qu'on avait à son égard, de telle sorte que, dans le fond, on ne comprend pas pourquoi M. Tremblay, qui est membre de la Société de criminologie, qui avait toutes les compétences pour exercer le métier, qui l'a exercé pendant 12 ans à la satisfaction du gouvernement, à la satisfaction de la Commission, à la satisfaction de tous les intervenants en la matière, n'a pas été renouvelé. L'opposition se pose des questions. M. Tremblay lui-même ? j'ai eu la curiosité de vérifier avec lui à l'ajournement ? n'a pas encore de travail. Il ne travaille pas encore, ce monsieur-là. Donc, il vit un drame personnel qui, vous en conviendrez, M. le ministre, est évident.

n (15 h 20) n

Il n'y a pas que l'opposition officielle qui se pose des questions et qui remet en cause le processus de renouvellement des membres de la Commission québécoise des libérations conditionnelles. La Conférence des juges administratifs du Québec, sous la plume de sa présidente, Mme Anne Leydet, vous a écrit une lettre le 24 mars de l'an 2000, une lettre qu'elle écrivait et qui était conjointe à la ministre de la Justice, Mme Linda Goupil, et je vais me permettre de vous lire quelques extraits de cette lettre. Je signale tout de suite pour les gens qui nous écoutent que la lettre fait directement référence au cas de M. Tremblay, mais que la lettre se veut évidemment un questionnement plus large sur le mode de nomination à la Commission québécoise des libérations conditionnelles. J'en cite donc des extraits et j'attire votre attention, M. le ministre, au troisième paragraphe de la lettre, si vous l'avez en votre possession, sinon la lecture va quand même être évocatrice.

«Il appert pourtant de l'évaluation du rendement de M. Tremblay ? là, c'est la présidente de la Conférence des juges administratifs du Québec qui parle ? pour l'année 1998-1999 que ce dernier a fait preuve à tous égards d'un rendement équivalent aux attentes de la direction de la Commission. Sur le plan de la motivation, de l'engagement et de la créativité démontrés dans la réalisation des objectifs de la Commission, son rendement dépasse les attentes. Les commentaires joints à l'évaluation font de plus état du travail pleinement satisfaisant de M. Tremblay, qui occupe les fonctions de commissaire depuis 1987, et de sa grande implication au niveau de l'opération de planification stratégique et de ses interventions visant à optimiser la performance de la Commission.»

Un peu plus loin: «Dans le présent cas, il s'agit d'un non-renouvellement fondé sur une recommandation ne cadrant aucunement avec l'évaluation écrite du rendement dont on assume qu'elle a été faite de bonne foi, effectuée par la direction de l'organisme. Compte tenu de ces faits, comment le gouvernement peut-il justifier sa décision? D'autres critères ou facteurs ont-ils été pris en ligne de compte par la direction de l'organisme, par le ministre titulaire ou encore par le Conseil des ministres, dont l'existence n'est pas dévoilée aux juges administratifs en renouvellement? Un non-renouvellement dans de telles circonstances peut générer la perception chez une personne raisonnablement informée qu'il y a place, dans le mécanisme de renouvellement, à l'arbitraire.»

Il ne s'agit pas, M. le ministre, de faire des personnalités ou de faire des cas personnels, mais vous conviendrez avec moi que le questionnement que la présidence de la Conférence des juges administratifs fait sien est extrêmement pertinent. Elle vous a écrit. Je ne sache pas qu'elle ait eu une réponse, mais, si elle en a eu une, j'aimerais bien savoir laquelle vous lui avez faite. Elle a pris la peine, le 27 mars de l'an 2000, d'envoyer une lettre au premier ministre du Québec, lettre dans laquelle elle reprend à peu près essentiellement les remarques qu'elle a faites.

Je vous sais à l'occasion un homme de compassion et je suis certain que vous comprenez le drame que vit M. Tremblay. J'en suis certain. M. Tremblay a été à l'emploi de la Commission québécoise pendant 12 ans. Il a fourni un rendement qui était tout à fait équivalent aux attentes de la Commission. Il a donné 12 années de sa vie, de service public à la Commission québécoise. Il n'avait aucune raison de penser que son mandat ne serait pas renouvelé et il se pose des questions. Il n'a eu aucune explication. Nous nous posons des questions, nous n'avons aucune explication. Mme Anne Leydet se pose des questions. À ma connaissance, elle n'a eu aucune explication. Il est difficile, M. le ministre, dans les circonstances de ne pas faire un certain nombre d'équations, équations qui sont les suivantes, et je les dis parce que tout le monde m'en souffle mot à l'oreille, et il faut les dire, je pense, publiquement.

Est-ce que M. Tremblay n'a pas été renouvelé parce que M. Tremblay a eu l'honneur d'être nommé à la Commission québécoise des libérations conditionnelles par le gouvernement qui vous a précédés, qui était un gouvernement libéral? Première question. Est-ce que M. Tremblay n'a pas été renouvelé parce que vous avez eu besoin de son poste pour nommer sa remplaçante qui est l'épouse de M. Vigneault qui est bien connu pour ses sympathies à l'égard de votre gouvernement? Et je ne veux pas, par là, prétendre que Mme Vigneault n'est pas compétente, mais est-ce qu'il n'y aurait pas eu là un facteur qui a fait en sorte qu'elle a été nommée ou qu'elle a été préférée à M. Tremblay? Finalement, est-ce que le fait que la présidente actuelle de l'organisme et ancienne chef de cabinet du ministre actuel des Relations avec les citoyens a quelque chose à voir avec le fait du non-renouvellement de M. Tremblay?

Ça, ce sont les questions qu'on me souffle à l'oreille, et, en l'absence de réponses significatives de la part du ministre, je vais être obligé de conclure et je vais être obligé d'inviter les gens qui me posent ces questions-là à conclure. Alors, moi, j'aimerais bien ça savoir comment vous avez pu en arriver à la conclusion de recommander au Conseil des ministres, manifestement sur la recommandation de la présidente de l'organisme, de ne pas renouveler M. Tremblay.

Et votre chef de cabinet de l'époque, Me Audet, écrivait à M. Tremblay, le 7 avril 1999: «Au nom du ministre de la Sécurité publique, M. Ménard, j'accuse réception de votre correspondance du 26 mars dernier nous faisant part de vos préoccupations faisant suite à votre non-renouvellement comme commissaire à la Commission québécoise des libérations conditionnelles. Nous en avons pris bonne note, et soyez assuré que le ministre en a été dûment informé. Nous gardons néanmoins en mémoire votre souhait de continuer de servir l'État dans un autre organisme.»

Depuis le 7 avril 1999, à ma connaissance, aucune nouvelle de la part du ministre, de son cabinet, du gouvernement, son employeur pendant 12 années qu'il a servi de façon fidèle, loyale, au meilleur de ses capacités, M. Tremblay dont on a reconnu la compétence dans des évaluations écrites, signées, prouvées. Pourquoi M. Tremblay n'a-t-il pas été renouvelé?

M. Ménard: Alors, Mme la présidente de la Commission québécoise des libérations conditionnelles va répondre.

M. Dupuis: Si vous me permettez, M. le ministre, si vous me permettez une dernière observation, je respecte Mme la présidente et je la salue, par ailleurs. Je pose la question au pouvoir politique. M. le ministre, Mme la présidente vous a fait une recommandation, mais c'est vous qui êtes allé au Conseil des ministres et c'est vous qui avez recommandé au Conseil des ministres cette action-là. Moi, je demande la question au pouvoir politique. Moi, je veux que l'élu du peuple, le représentant de la population réponde à mes questions. J'insiste. Je sais que c'est mal vu en certains milieux, mais j'insiste pour que ce soit le représentant de la population qui réponde à ma question.

M. Ménard: Alors, au moment où vous m'avez interrompu, j'allais justement vous expliquer que, après que Mme la présidente vous aura répondu, j'ajouterai moi-même mes propres commentaires. Mais vous avez dit dans votre longue introduction, où j'ai perçu quand même quelques jugements sans que vous ayez encore obtenu réponse à vos questions, qu'il se pose des questions, que vous vous posez des questions et que vous n'avez toujours aucune explication. Je crois que la personne qui peut vous fournir le mieux les explications que j'ai reçues et qui m'ont amené à faire les recommandations que j'ai faites est Mme la présidente de la Commission québécoise des libérations conditionnelles, Me Isabelle Demers.

Le Président (M. Paquin): Alors, madame, si vous voulez vous nommer pour les fins d'enregistrement.

Mme Demers (Isabelle): Oui, Isabelle Demers, présidente de la Commission québécoise des libérations conditionnelles.

Le Président (M. Paquin): Merci.

Mme Demers (Isabelle): Alors, tout d'abord, M. Dupuis, pour répondre à votre interrogation en rapport avec ce qui concerne M. Jacques Tremblay, c'est évident que je n'entrerai pas ici dans ce qui concerne toute la question de l'évaluation de M. Jacques Tremblay, ce sont des choses qui, à mon avis, sont confidentielles. Par ailleurs, vous le savez, vous devez savoir ? je présume, en tout cas; si vous ne le savez pas, je vais vous l'apprendre ? qu'il y a différents types de tribunaux administratifs, et, dans notre cas, dans notre loi, ce qui est prévu, c'est que la nomination des membres, c'est une prérogative du gouvernement.

Quand M. Tremblay a été renouvelé à son dernier mandat qui se terminait le 5 avril 1999, c'était un mandat d'une durée fixe de cinq ans, et c'était prévu même dans son décret de nomination, et c'était un mandat de cinq ans, puis ces termes fixes là sont balisés par la loi. Le gouvernement, après son mandat de cinq ans, a décidé de pourvoir à son remplacement conformément à la loi parce que la loi prévoit un mandat de cinq ans. Le renouvellement d'un tel mandat n'est pas automatique. C'est une réalité qui est liée à la charge, à l'occupation de certaines charges publiques dont M. Tremblay connaissait les tenants et aboutissants au moment de son acceptation et au moment où il a signé le contrat lorsqu'il est passé aux emplois supérieurs pour signer le contrat de cinq ans. Le gouvernement a une prérogative en rapport avec ce type de contrat là et le renouvellement.

n(15 h 30)n

En ce qui concerne l'évaluation, c'est un des éléments dont on tient compte lors du renouvellement, mais ce n'est pas le seul élément. Je le répète, c'est une prérogative du gouvernement. En ce qui concerne Mme Leydet, c'est qu'il faut bien comprendre que, actuellement, à cause de deux commissaires qui n'avaient pas été renouvelés au Tribunal administratif du Québec, il y a un recours qui a été pris, et la lettre de Mme Leydet, elle est écrite dans la foulée du jugement du juge Rochon. Mais il faut bien comprendre que, dans la Loi sur la justice administrative, il est prévu aussi comment se fait le renouvellement des commissaires au Tribunal administratif du Québec, ce qui n'est pas notre cas. Nous, notre loi est différente, et la nomination des commissaires, c'est une prérogative du gouvernement, et, je le répète, l'évaluation est une des choses qui sont considérées pour le renouvellement mais non la seule.

Le Président (M. Paquin): M. le ministre, il vous reste deux minutes pour compléter cette réponse, après quoi nous aurons un autre bloc.

M. Ménard: Bon, je pense qu'il est clair quand même que, si je n'ai pas recommandé le mandat de M. Tremblay, c'est parce que la présidente de l'organisme m'a suggéré de ne pas le renouveler pour des raisons qui me sont apparues suffisantes au moment où ça a été fait et qui ont été élaborées largement aussi avec mon chef de cabinet. Comme ministre, je ne peux pas surveiller chacun des membres des tribunaux administratifs qui relèvent de ma juridiction et porter un jugement éclairé sur leur efficacité, je dois me fier à la présidence des organismes, ce que je fais.

Je dois ajouter là-dessus que le Québec est absolument exemplaire par rapport à tous les gouvernements d'Amérique. Essayez de m'indiquer un endroit où les nominations et le renouvellement se font mieux qu'au Québec. Simplement à titre d'exemple, regardez ce qui a été fait à Ottawa avec la Commission canadienne des relations de travail qu'on a tout simplement abolie alors qu'il y avait des mandats de 10 ans parce qu'on n'aimait pas son président, et là on a jeté tout le monde dehors sans aucune espèce de rémunération ou quoi que ce soit même si son mandat n'était pas expiré. Regardez ce qui s'est fait en Ontario à l'arrivée du gouvernement Harris, le ménage qui s'est fait là-bas. Ici, au Québec, et particulièrement dans les nominations ? je pense que vous le reconnaîtrez vous-même ? que, moi-même, j'ai faites, les renouvellements ont tous été faits selon la compétence des gens, la satisfaction qui nous avait été donnée. C'est pourquoi je pense qu'on peut certainement affirmer que, si je n'ai pas recommandé le renouvellement de M. Tremblay, c'était à cause des recommandations qui m'avaient été faites quant à la satisfaction que, au moment où venait la date du renouvellement, il donnait dans son travail.

Vous savez, ces gens-là ne sont pas nommés à vie. Cela ne veut pas dire qu'au moment de leur renouvellement je ne porte pas attention au fait que, s'ils ont donné un bon rendement, je ne les renouvellerai pas. D'ailleurs, pas plus tard qu'hier, le gouvernement a accepté mes recommandations de renouveler les mandats de Mme Suzanne Lévesque ainsi que de M. Gilles Mignault. Gilles Mignault a été nommé par un gouvernement libéral au Comité de déontologie policière. Mme Suzanne Lévesque, comme vous le savez, est entrée au gouvernement, où elle a d'ailleurs donné satisfaction, au ministère de la Justice, pour ensuite prendre du service au Comité de déontologie policière à notre grande satisfaction. Ils ont tous les deux été renouvelés.

Quand j'étais ministre de la Justice, j'ai modifié le règlement de nomination qui avait été proposé pour le renouvellement des membres du Tribunal administratif pour enlever la clause qui les fatiguait le plus, celle qu'ils appelaient eux-mêmes du sang nouveau, c'est-à-dire de la nécessité de renouveler parfois, indépendamment de la satisfaction qu'avaient donnée des décideurs auparavant... Enfin, évidemment, vous porteriez un meilleur jugement, M. le député, si vous écoutiez les réponses que je donne, n'est-ce pas?

Le Président (M. Paquin): M. le ministre, c'est que le temps est maintenant terminé. Cependant, je veux bien vous permettre de compléter la réponse et donner une question supplémentaire au député et une autre réponse de manière à faciliter les travaux. Cependant, je l'amputerai ultérieurement dans un autre bloc. Alors, si vous voulez compléter votre réponse.

M. Dupuis: M. le Président, j'apprécierais que sa réponse soit amputée pour le temps des ministériels. Ma question étant amputée sur mon temps, je n'ai pas de problème avec ça.

Le Président (M. Paquin): Bien, disons que, quand la question vient de vous... Vous avez posé une question qui a duré 13 minutes sur une période de 15 minutes; alors, il n'y a pas eu un temps déraisonnable de réponse. Cependant, compte tenu de cette circonstance particulière, je vais vous permettre une question supplémentaire, une réponse supplémentaire, et on ajustera le temps en fonction des meilleurs intérêts de la discussion et du bon climat des travaux. M. le ministre.

M. Ménard: Donc, je pense que j'en étais au point où j'expliquais que, justement, quand j'étais ministre de la Justice, j'ai modifié le règlement qui était proposé pour enlever la clause de ce qu'ils appelaient du sang neuf, c'est-à-dire la clause qui permet au gouvernement, lorsqu'il estime qu'un corps administratif a besoin de sang neuf pour renouveler ses membres, de les renouveler, et j'ai enlevé cette clause au Tribunal administratif.

Maintenant, je suis absolument convaincu aussi, par les explications qui m'avaient été données, que Mme Vigneault représentait une amélioration par rapport au travail que pouvait faire Mme Foy-Vigneault. Je ne crois pas que dans son cas ce soit la nécessité sur le plan financier qui l'ait poussée à solliciter un pareil emploi. J'imagine bien que l'épouse de notre poète national, même si je sais qu'on rémunère bien mal la culture au Québec en général...

M. Dupuis: C'est une remarque qui est extraordinairement sexiste, M. le ministre. Vous saurez, M. le ministre...

M. Ménard: Laissez-moi donc finir! Cessez de m'interrompre. Je peux faire parfaitement...

M. Dupuis: Vous saurez, M. le ministre, que les femmes existent sans leur mari.

M. Ménard: Justement!

Le Président (M. Paquin): Messieurs, s'il vous plaît! Il faudrait... S'il vous plaît! MM. les députés, M. le ministre, il y a un règlement, qui est un de nos règlements que nous avons adoptés ensemble, qui est le 35 et qui fait en sorte que le climat des discussions est toujours favorisé lorsqu'on le suit. Il incite les uns et les autres à utiliser un vocabulaire qui n'est susceptible d'agresser d'aucune façon et à s'en tenir, donc, à des propos parlementaires. Dans ce sens-là, je voudrais, s'il vous plaît, que, M. le ministre, vous terminiez votre réponse dans les prochaines secondes et permettre une question supplémentaire au député de Saint-Laurent sur le même sujet. M. le ministre.

M. Ménard: Ça s'applique pour les deux sexes, voyons donc! En tout cas. Il est évident que cette dame avait le droit de faire sa carrière. Elle était déjà commissaire communautaire à la Commission des libérations conditionnelles, elle offrait un rendement tout à fait exceptionnel, elle avait la formation requise et j'étais absolument convaincu, au moment où j'ai fait ces recommandations par rapport évidemment aux informations qui nous étaient données, que nous améliorerions, à ce moment-là, la Commission québécoise des libérations conditionnelles. Je vous signale aussi que, à cette Commission, moi-même, j'ai suggéré le renouvellement de Réginald Day qui avait été membre du cabinet de Robert Bourassa. Donc, moi en particulier mais le gouvernement en général, nous sommes absolument exemplaires par rapport à ce qui se fait en Amérique.

Aux États-Unis, c'est le nettoyage une fois qu'il y a un changement de gouvernement. Dans les autres provinces et au fédéral, il n'y a aucune pratique équivalente aux garanties que nous donnons dans les renouvellements de mandat, mais il arrive à un moment donné des cas pénibles à discuter qui, malgré des évaluations antérieures qui pouvaient être justifiées à cette époque, au moment où nous devons faire ce renouvellement, nous amènent à prendre ces difficiles décisions. Mais c'est toujours après consultation et généralement à la suggestion des présidents des organismes.

Le Président (M. Paquin): Souhaitez-vous toujours poser une question supplémentaire? La parole est à vous.

n(15 h 40)n

M. Dupuis: Oui. M. le ministre, lorsque vous avez demandé à la présidente de l'organisme, au point de vue de la compétence du membre Jacques Tremblay, de sa connaissance des lois, règlements, politiques, pratiques, jurisprudence, de sa connaissance du système de justice pénale, des services correctionnels et psychosociaux, de sa connaissance de l'évaluation clinique, de son autonomie, quel était son rendement et qu'elle vous a répondu: Il est équivalent aux attentes, M. le ministre, lorsque vous avez demandé la question à Mme la présidente au point de vue de la gestion des dossiers, de la préparation des dossiers, du sens de l'organisation, de la capacité d'analyse, quand vous lui avez demandé son sens des relations humaines, son sens de l'écoute et des communications orales, ses habiletés d'évaluation clinique, sa maîtrise du déroulement des audiences, sa capacité de rédaction des décisions, sa capacité de concertation et de célérité, son esprit de synthèse, le respect des délais, le volume de travail est-il satisfaisant, et qu'elle vous a répondu: C'est équivalent aux attentes, lorsque vous lui avez demandé son implication dans la réalisation du mandat de la Commission québécoise, la représentation de l'organisme, la capacité de travailler en équipe, et qu'elle vous a répondu: Sa capacité est équivalente aux attentes, lorsque vous lui avez demandé sa motivation, son engagement dans la créativité démontrée dans la réalisation des objectifs de la Commission, et qu'elle vous a répondu: Son rendement dépasse les attentes, lorsqu'elle vous a dit, en résumé, M. le ministre: M. Tremblay a fourni un travail pleinement satisfaisant tout au cours de l'année, il a maintenu ses connaissances et a démontré un intérêt marqué pour l'amélioration de celles-ci, il s'est définitivement inscrit dans le virage informatique, il a même développé des habiletés jusqu'ici inespérées, de concert avec une collègue, il a continué à participer à la préparation des journées cliniques qui ont eu lieu mensuellement et s'est très bien acquitté de cette tâche, lorsqu'elle vous a dit: Dans le cadre de l'opération de planification stratégique, M. Tremblay s'est grandement impliqué, il a très bien collaboré à l'élaboration du diagnostic et du plan d'action, il s'est distingué, entre autres, dans ses interventions qui visaient à optimiser la performance de la Commission, lorsqu'elle vous a dit: M. le ministre, finalement, M. Tremblay a aussi répondu aux attentes qui lui avaient été signifiées lors de la précédente évaluation en ce qui a trait à la constance de ses décisions, à sa ponctualité et à la procédure de ses audiences, vous voulez me dire que la seule réaction que vous avez eue, c'est de dire: Bien, c'est un mandat de cinq ans, on ne le renouvelle pas? C'est ça, votre réponse? Puis vous pensez que ce monsieur-là ne se sent pas injustement traité?

M. le ministre, ma question, c'est la suivante: Compte tenu de ces faits-là, compte tenu du fait que votre chef de cabinet lui a dit que le ministre, dans sa compassion, considérerait son intérêt marqué pour le service public, est-ce qu'il n'y aurait pas moyen que vous voyiez, dans votre majestueuse grandeur, une façon de rétablir l'injustice qui a été causée à M. Tremblay et de lui offrir d'occuper un poste dans une de vos commissions? Parce que ce monsieur-là veut servir publiquement, et il a prouvé depuis 12 ans qu'il était capable de servir l'appareil d'une façon compétente et d'une façon loyale. C'est ça, ma question. Il écoute, là.

Le Président (M. Paquin): M. le ministre.

M. Ménard: M. le Président, Mme Demers ne m'a rien dit de ce que vous avez lu. Mme Demers m'a parlé de son attitude et de son rendement au moment où nous devions le renouveler. C'est vrai qu'il avait, dans les années antérieures ? et c'est ce que vous avez lu ? dans les formules qui sont utilisées, eu des rapports satisfaisants, mais, au moment où nous devions le renouveler... Et ça arrive dans la vie que des gens ne donnent plus le rendement qu'on attendait d'eux et qu'ils avaient donné auparavant, qu'ils ne soient plus capables de donner ce rendement-là, et j'en veux pour preuve toutes les autres nominations que j'ai faites, et vous savez très bien que j'ai fait toujours preuve d'une recherche de la compétence au-delà des options politiques.

M. Dupuis: M. le ministre.

Le Président (M. Paquin): Une lilliputienne.

M. Dupuis: Alors, à qui Mme la présidente dit-elle la vérité, le 23 avril 1999, lorsqu'elle signe l'évaluation que je viens de vous lire, qui est signée par elle, ou, en catimini dans votre bureau, lorsqu'elle vous dit autre chose? Mais elle n'a pas pu vous dire beaucoup d'autres choses très négatives au sujet de M. Tremblay quand on considère l'évaluation qui est là. C'est la raison pour laquelle je vous pose la question, M. le ministre. Est-ce que vous pouvez être certain, en votre âme et conscience, qu'il n'y a pas eu une injustice qui a été causée à M. Tremblay et que les représentations qui, semble-t-il, vous ont été faites verbalement par la présidente n'étaient pas du tout les représentations qu'elle n'a pas osé faire par écrit mais étaient plutôt contraires aux représentations qu'elle vous a faites par écrit? Dans ces circonstances-là, c'est sa loyauté à elle que vous devriez questionner.

Le Président (M. Paquin): M. le ministre, brièvement.

M. Ménard: Je suis convaincu, en mon âme et conscience, que j'ai rendu la meilleure décision à partir des informations que j'avais à ce moment-là, des informations que j'avais oralement, sachant que les informations que j'avais étaient contraires à bien des points de vue à ce qui était écrit.

M. Dupuis: M. le ministre...

M. Ménard: Bien, enfin, est-ce que vous voulez me laisser répondre ou bien si vous allez continuellement m'interrompre à chaque fois que ça ne fait pas votre affaire?

Le Président (M. Paquin): Non, mais, actuellement, c'est M. le ministre qui a la parole. Mme la députée de Blainville, vous avez une question de règlement?

Mme Signori: C'était ça.

Le Président (M. Paquin): Alors, s'il n'y a pas de question de règlement, on va écouter M. le ministre. M. le ministre, si vous voulez compléter votre réponse à cette dernière question de ce bloc-ci.

M. Ménard: O.K. Donc, je vous dis que je suis convaincu que...

M. Dupuis: ...

M. Ménard: Encore une fois, il n'écoute pas, n'est-ce pas? Il veut des réponses, puis après ça il va dire qu'il n'a pas d'explication puis qu'il ne peut pas comprendre.

Le Président (M. Paquin): M. le ministre...

M. Ménard: Il ne comprend pas parce qu'il n'écoute pas. C'est très simple.

Le Président (M. Paquin): M. le ministre, vos réponses s'adressent au président.

M. Ménard: Mais, vous, M. le Président, vous allez comprendre. Alors, je vais vous l'expliquer à vous. Je vais vous l'expliquer à vous plutôt que l'expliquer à lui... me préoccuper, puisqu'il n'écoute même pas, une fois qu'il a posé la question. Je suis convaincu, en mon âme et conscience, que j'ai rendu la meilleure décision, aussi difficile fût-elle, avec les informations que j'avais, informations orales comme informations écrites. Il faut parfois prendre des décisions difficiles de ce type si nous voulons maintenir un niveau assez élevé de compétence, particulièrement dans une commission comme celle que préside Mme Demers, qui décide quotidiennement du sort des gens, de leur liberté ou de leur incarcération. Il faut qu'une personne soit capable de donner, soit dans un état de donner le meilleur de sa capacité. Les gens ont des faiblesses dans la vie et ils peuvent s'en relever, et c'est avec délicatesse, je trouve, que mon chef de cabinet a écrit cette lettre qui veut dire exactement ça à celui à qui elle s'adressait. S'il peut régler les problèmes qui lui ont été soulignés alors, je pense qu'il a effectivement les capacités de revenir et de donner le niveau de rendement qu'il avait déjà donné auparavant à cette Commission.

Le Président (M. Paquin): Alors, nous allons maintenant redonner la parole au député de Dubuc. L'intervention précédente aura duré au total 33 minutes. Le cas échéant, on fera le rééquilibrage. Je vous redonnerai la parole incessamment, mais, pour le moment, M. le député de Dubuc.

Administration des sentences
d'emprisonnement avec sursis

M. Côté (Dubuc): Merci, M. le Président. Alors, M. le ministre, bienvenue, ainsi que les gens qui vous accompagnent. Permettez-moi de changer de tribunal, de passer du Tribunal administratif à la Cour suprême du Canada. Vous avez vu, dernièrement, dans l'arrêt Proulx, la Cour suprême s'est prononcée sur les ordonnances de sursis. Il semble ? il m'apparaît, du moins, là ? que ce jugement va vous obliger à apporter des modifications majeures au niveau de la surveillance des gens qui bénéficiaient d'une telle sentence. Alors, ce que je vous demande, c'est: Est-ce que c'est exact qu'il y aura des changements à faire? Et qu'est-ce que vous entendez faire à ce sujet-là?

M. Ménard: Bon, d'abord, je n'ai pas tardé, le jugement de la Cour suprême auquel vous référez a été rendu le 31 janvier 2000. Dès que je l'ai lu, j'ai su tout de suite qu'il allait certainement transformer la façon dont nous devions administrer cette nouvelle forme de sentences, les sentences avec sursis, mais dans lequel la Cour suprême nous disait que ces sentences devaient avoir un aspect punitif mais n'être données qu'à des personnes dont la liberté ne représentait pas un danger pour la société. Alors, immédiatement j'ai demandé... Bon.

On a pu engager immédiatement 17 nouveaux agents de probation. Nous en avons mis 29 de plus en probation. Nous avons prévu d'ailleurs immédiatement que nous en ajouterions 30 autres l'année suivante et puis 30 autres l'année suivante de sorte que, à la fin de l'exercice qu'immédiatement nous avions prévu, nous aurions augmenté notre capacité de surveillance en milieu ouvert de 50 %.

Mais, parallèlement à ces décisions, j'ai demandé immédiatement à ce que l'on fasse ? comment peut-on appeler ça? ? en tout cas, une étude, enfin que l'on établisse un nouveau cadre de gestion des sentences parce que je savais que cette transformation devait être en profondeur. On appelle ça un cadre de gestion de surveillance des sursis en fonction du jugement.

n(15 h 50)n

Remarquez que, jusqu'à la cause de Proulx, nous avions administré... Je disais plus de 10 000, récemment. C'est en fait plus de 10 000, c'est plus de 12 000 sentences avec sursis sans recevoir une seule plainte de la magistrature quant au contrôle qui était apporté aux gens qui étaient en liberté. Mais, étant donné l'augmentation que je prévoyais, la qualité des personnes aussi qui bénéficieraient des sentences avec sursis, je croyais qu'il fallait augmenter la surveillance. Donc, ce rapport pour établir un nouveau cadre de gestion et de surveillance, je l'attends, je pense, pour le début juin.

Je peux dire que le comité qui s'en charge a déjà prévu des rencontres avec les procureurs-chefs de la couronne. Il a aussi prévu des rencontres avec les autorités d'autres provinces du Canada qui ont administré le même type de sentences et qui, l'avons-nous constaté, sont bien en retard. Encore une fois, voilà un domaine où le Québec est à l'avant-garde actuellement au Canada, mais aussi à l'avant-garde... Nous savons que ce n'est pas encore assez, mais je pense que les juges aussi peuvent comprendre que ça prend un certain temps avant de réorganiser le service correctionnel pour donner ce type de service. Maintenant, on a quand même fait des progrès. Lorsque je suis entré en fonction il y a 15 mois dans mon poste actuel, la moyenne de cas qui étaient consacrés aux agents de probation était de 90. Actuellement, je peux vous dire qu'à Longueuil c'est 71 cas; à Sherbrooke, c'est 65; à Montréal, c'est 75.

Je regardais, tout à l'heure, parce qu'il faut ramasser les statistiques d'un peu partout, nous avons amélioré d'à peu près 50 % en général... nous avons diminué d'à peu près... Ah non, pas 50 %, c'est...

Une voix: 20 %.

M. Ménard: ...d'à peu près 20 %. Je m'excuse. Nous avons diminué d'à peu près 20 % la charge des officiers de probation. Maintenant, on a eu des jugements différents récemment selon certains tribunaux. Je pense qu'ils illustrent cependant la preuve qui a été faite devant ces tribunaux. Ainsi, devant un tribunal, le juge Barrière, où je pense que la preuve a été plus complète que devant d'autres juges quant aux moyens que nous devions, a maintenu une sentence avec sursis. Je dois dire que les juges doivent comprendre que nous ne compterons pas uniquement sur les officiers de probation pour s'assurer que les conditions des sentences avec sursis sont respectées. Mais, par exemple, quant à moi, il est de la nature même de la philosophie de la police communautaire que les policiers qui ont charge d'un quartier ou d'un territoire connaissent non seulement les clientèles qu'ils doivent protéger mieux que d'autres, par exemple les personnes âgées, ou un hôpital, ou certains types de commerces, connaissent les ressources communautaires qui peuvent orienter les jeunes vers des activités de sport plutôt que de les laisser aller dans la délinquance, connaissent les gangs de rues, mais connaissent aussi les personnes qui sont sur leur territoire, qui subissent des sentences avec sursis à certaines conditions, de sorte que la vérification que ces policiers devraient faire va se faire pour ces gens-là à l'improviste sans pouvoir s'attendre au moment où ils seront vérifiés.

D'ailleurs, nous allons pouvoir... parce que nous le faisons dans certains domaines avec le fédéral. Je pense qu'il y a des équipes volantes qui ont été créées justement pour pouvoir aller vérifier au hasard comme ça parmi les gens qui sont en liberté sous certaines conditions ou en libération conditionnelle avec le même genre de conditions, pour aller vérifier à l'improviste si les personnes respectent les conditions qu'elles ont.

J'ai demandé, de plus, que l'on réactualise une étude qui avait déjà été faite au ministère sur les expériences de contrôle électronique. Je sais... En tout cas, j'attends ce rapport, et nous verrons quelle décision nous devons prendre ailleurs. Je suis certain d'une chose, cependant, la surveillance électronique n'est pas une panacée qui réglerait tous les problèmes. Et puis, en plus, il y a divers systèmes. La technologie permet de développer actuellement des systèmes différents des premiers qui étaient sur le marché. Mais il est quand même significatif que certains pays qui avaient compté sur la surveillance électronique pour diminuer leur taux d'incarcération ne l'aient pas diminué et soient en train d'abandonner cela. Mais, cependant, avec les nouveaux outils que la technologie nous permet, j'ai demandé que l'on réactualise cette étude qui pourra nous inspirer.

Donc, comme vous le voyez, dans ce cas, je pense que nous avons été proactifs. Quant à moi, j'ai été très heureux quand j'ai lu la cause de la Cour suprême dans Proulx. Elle correspondait à ce que j'ai plaidé toute ma vie comme avocat, même quand j'étais procureur de la couronne au début. Ce n'est pas, quant à moi, un virage philosophique imprévu, c'est celui que j'ai souhaité, c'est celui que je voulais déjà appliquer en 1995 lorsque j'ai engagé le premier virage correctionnel, et les juges peuvent être certains de ma détermination à m'assurer que ce moyen de combattre la criminalité, d'arrêter chez certains délinquants la criminalité aura une certaine force dissuasive, que je ferai tout pour qu'ils soient assurés que les conditions seront respectées et que véritablement la sentence qui sera servie sera conforme à celle qu'ils ont voulu donner.

M. Côté (Dubuc): Est-ce que, M. le ministre, ça veut dire que, désormais, pour ceux qui bénéficient de sentences avec sursis, il y aura des agents de probation et que les policiers pourront également être utilisés, mais pas de façon systématique, c'est-à-dire simplement au hasard, ou faire des contrôles, des vérifications?

M. Ménard: Oui. Remarquez qu'il n'y a rien de surprenant. Depuis au moins 20 ans, n'est-ce pas, les juges remettent en liberté sous cautionnement avant leur procès des individus en leur imposant certaines conditions. Depuis plus de 20 ans, les juges donnent, dans le cadre de sentences suspendues, c'est-à-dire cette procédure par laquelle les juges ne rendent pas la sentence qu'ils pourraient rendre mais la suspendent à certaines conditions... Si les conditions sont respectées, le juge ne pourra pas rendre la sentence qu'il a suspendue. Mais, si les conditions ne sont pas respectées, le juge, à ce moment-là, pourra rendre la sentence. Ça se distingue de la sentence avec sursis en ceci que le juge donne une sentence. Il dit, par exemple: Vous êtes condamné à 18 mois, mais 18 mois à servir dans la communauté, donc avec sursis.

Mais déjà, dans le cadre des sentences suspendues ou des ordonnances de probation, les juges donnaient des conditions, comme des conditions de couvre-feu, d'être chez soi, par exemple, de 23 heures à 7 heures, de ne pas fréquenter les bars. Il y en a même un qui disait toujours «les salles de pool» ? ha, ha, ha! ? parce qu'il y voyait un lieu de perdition, sans doute. Ils étaient généralement satisfaits de la surveillance qui est faite là, comme on est généralement satisfait du fait que, lorsqu'on ordonne à une personne... Lorsqu'on lui retire son permis de conduire, n'est-ce pas, elle respectera cette condition de ne pas conduire un véhicule. Mais c'est évident que, dans ce cas-ci, dans le cas des sentences avec sursis, la surveillance que l'on veut faire sera plus grande que celle que nous faisons des gens qui se voient donner une ordonnance de ne pas... C'est un peu comme quand vous allez sur les routes. Il n'y a pas un radar à tous les kilomètres pour s'assurer... Mais vous savez que, si vous allez régulièrement plus haut que la vitesse, un de ces jours vous allez vous faire prendre. Alors, vous êtes prudent un peu partout.

Mais on a remarqué déjà dans les études préliminaires qu'on a faites puis dans les connaissances qu'on a que la meilleure façon de s'assurer que les gens respectent les conditions lorsqu'ils sont en liberté, c'est la connaissance des individus. C'est pourquoi c'est sûr que la personne la plus importante, c'est l'agent de probation, et il doit connaître, évaluer son client pour savoir quelle surveillance il doit faire. Alors, nous aurons donc les agents de probation, nous aurons donc les policiers.

n(16 heures)n

Soit dit en passant, dans le cas du juge Barrière, il était informé de ce fait, que les policiers étaient au courant des personnes qui avaient des sentences avec sursis dans le territoire où ils habitaient. Il y aura probablement, enfin on verra, dans le cadre de gestion, des équipes volantes qui surveilleront, et puis on pourra voir, à ce moment-là, aussi quels sont les officiers de probation qui assurent, au fond, la meilleure surveillance de leurs détenus. Donc, je crois que nous aurons un ensemble crédible, plus crédible encore que ce que nous avions auparavant pour s'assurer que les gens qui étaient condamnés sous le coup d'une ordonnance de probation respectaient cette ordonnance de probation.

M. Côté (Dubuc): Une dernière question, M. le ministre: Est-ce que présentement il y a eu des nouveaux engagements pour les agents de probation ou si c'est à venir dans votre cadre de gestion?

M. Ménard: Oui. Comme j'ai dit, il y en a eu 17 dès le premier coup, 29 en formation.

M. Côté (Dubuc): Dix-sept. O.K. Merci.

M. Dupuis: Soixante pour les deux prochaines années après.

M. Ménard: Oui, mais il y a plus que ça. Vous voyez, juste pour vous donner une idée, d'abord, il faut former ces gens-là, hein? On n'est pas pour les envoyer dans le champ, sans formation, tout de suite. En plus, soit dit en passant, nous avons augmenté le nombre d'agents correctionnels qui travaillent pour les projets d'emploi en milieu ouvert, sur les fameux PEMO.

Une voix: ...

M. Ménard: C'est ça. Il y en a 49 de plus. Mais nous avions d'autorisés, au 1er avril 1998, 230 agents de probation, nous en avons fait autoriser 293 pour l'année courante.

En plus, je dois vous dire ? puis on le verra si vous allez dans le détail tout à l'heure des crédits ? que vous verrez à un moment donné qu'il y a 58 emplois qui sont perdus quelque part, enfin qui semblent perdus, puis vous allez les retrouver ailleurs, puis on va vous expliquer qu'il s'agit de la réserve ministérielle parce que, vous savez, j'ai à gérer un système, moi, où les besoins sont en dents de scie, ce n'est pas régulier. Donc, pour offrir une meilleure gestion, quand nous pouvons libérer des emplois ou des postes dans un certain secteur, nous les mettons dans une réserve ministérielle qui nous permet d'augmenter nos employés dans un autre secteur selon nos priorités. Je peux vous dire que ma priorité, c'est justement la surveillance en milieu ouvert et que tous les emplois que nous allons pouvoir déplacer, presque tous les emplois que nous allons pouvoir déplacer dans cette réserve ministérielle iront en plus de ce qui est déjà autorisé ici, c'est-à-dire 293.

Le Président (M. Paquin): Alors, il reste quatre minutes dans ce bloc. M. le député de Nicolet-Yamaska.

Circulation de drogue dans les centres de détention

M. Morin: Une courte question, M. le ministre. C'est concernant ceux qui doivent subir les sentences. Je suis toujours un peu surpris d'apprendre dans les médias ou de lire dans les journaux qu'il y a de la circulation de drogue dans nos centres de détention. Est-ce qu'il y a des actions de prises de la part de votre ministère pour contrer ce problème-là, ce fléau-là dans nos centres de détention?

M. Ménard: Alors, oui, effectivement, je m'apprête, en fait, à annoncer... Mais je peux bien l'annoncer tout de suite, parce qu'elle est pratiquement formée. Nous avons créé une espèce de cousin de Carcajou pour les prisons, c'est-à-dire une unité mixte de lutte à la drogue dans laquelle nous allons regrouper non seulement les agents correctionnels, évidemment, mais des membres de la Sûreté du Québec, et, je pense, de la GRC, et des corps locaux, selon les prisons que nous avons, pour voir ce que nous allons faire. Oui, elle est déjà créée à Montréal avec le SPCUM, la GRC et la Sûreté du Québec qui devraient nous permettre de faire le lien entre les fournisseurs extérieurs et les distributeurs à l'extérieur des murs ainsi que leur influence à l'intérieur des murs.

En plus, je dois vous dire que, écoutez, à chaque fois qu'une personne entre en prison, qu'un détenu entre en prison, il y a une fouille à nu, il y a aussi, pour un certain nombre de visiteurs, des fouilles à nu, il y a des fouilles au sortir des visites. En tout cas, il y a déjà... C'est ça. Lorsque nous soupçonnons, enfin lorsque nous avons des raisons de croire que les gens ont avalé des substances avant d'entrer en prison, nous avons des cellules d'isolement où nous avons quelques moyens techniques afin de nous livrer à des opérations qui ne sont particulièrement agréables mais qui sont nécessaires et qui nous permettent de récupérer ces objets qui ont été dissimulés de cette façon. D'ailleurs, nous avons quand même porté, vous savez, à Montréal 92 accusations relativement à la possession et au trafic de drogue l'an dernier. C'est donc que nous agissons.

Mais je dois vous dire que, dans ce domaine, c'est comme dans le domaine de la criminalité. C'est Me Dagenais qui disait ça, le procureur dans la cause de Boucher. Vous savez, c'est comme le ménage, il faut toujours recommencer, et je ne crois pas que nous soyons pires que les autres institutions pénitentiaires en Amérique. Il faut comprendre que nous avons 40 % de notre clientèle qui consommait déjà de la drogue, une large partie en a un besoin, les sentences qui sont données sont souvent données à des trafiquants de drogue. Alors, on est dans un milieu, nécessairement, où la demande est forte et où les connaissances pour fournir sont nombreuses. Et puis les drogues les plus fortes sont généralement celles qui prennent le moins de place et qui se cachent encore mieux. Mais nous menons une lutte, je pense, la plus efficace possible à la drogue.

Le Président (M. Paquin): Ça va, M. le député?

M. Côté (Dubuc): Ça va.

Le Président (M. Paquin): Alors, ça complète le bloc, qui a duré exactement 20 minutes. M. le député de Saint-Laurent.

Administration des sentences
d'emprisonnement avec sursis (suite)

M. Dupuis: Je vous remercie, M. le Président. Le problème de la drogue dans les prisons, il faut s'en occuper, et je pense qu'on pourrait y revenir dans la deuxième partie de l'intervention. Mais, évidemment, je ne voudrais pas non plus qu'on laisse de côté si rapidement la surveillance pour les sentences d'emprisonnement avec sursis. Ce que le ministre ne vous a pas dit, M. le député de Dubuc, c'est que cette sentence-là, ce n'est pas né par osmose hier matin. Depuis 1996 que la possibilité de cette peine est prévue au Code criminel, et le ministre nous dit aujourd'hui: Je vais tout faire pour qu'on puisse faire respecter cette sorte de peine qui est imposée par les tribunaux. C'est un petit peu tard. C'est tellement tard, d'ailleurs, que c'est pour ça que les juges commencent à s'impatienter et que c'est pour ça que les juges refusent de donner des emprisonnements avec sursis dans certains cas, quand ils ne sont pas capables de s'assurer que la surveillance va pouvoir être effectuée.

Il faut savoir que l'emprisonnement avec sursis, dans le fond, c'est une liberté surveillée, et le jugement Proulx évidemment est venu le confirmer. Mais ce que le jugement Proulx a surtout fait, ça a été de confirmer que le juge, avant d'imposer un emprisonnement avec sursis, devait s'assurer que cette sentence-là fasse en sorte que la collectivité, la communauté, la société n'est pas mise en danger par le fait de laisser cette personne-là en liberté.

Moi, là, ce que je veux savoir de façon bien concrète, au-delà des grands principes, puis des grandes théories, puis des beaux discours préparés du ministre suite aux questions plantées des ministériels, c'est la chose suivante. Je pense que tout le monde constate que malheureusement le système actuel, le service correctionnel n'est pas équipé. Ce n'est pas de leur faute, là. Je leur parle régulièrement, aux agents de probation, je parle régulièrement aux agents de la paix puis je parle à certaines ressources communautaires, ce n'est pas de leur faute, ils font leur possible mais ils manquent de moyens et, en certains cas, oui, ils manquent de ressources.

Vous avez ajouté des ressources, j'en conviens. Mais ce qu'il faut savoir, c'est que ce n'est pas toujours le Service de probation qui fait la surveillance des sentences d'emprisonnement avec sursis. Il y a les agents de la paix, ce qu'on appelle les PMO, qui en font pour les cas les moins lourds. Ils font du suivi technique. Le Service de probation fait aussi un suivi pour les cas un petit peu plus lourds, puis il y a les ressources communautaires qui font aussi un suivi pour une autre classe de personnes qui ont ces sentences-là.

Trois questions. La première: Pour ce qui concerne les surveillances qui sont effectuées par les agents de la paix, les PMO ? pas la police mais les PMO ? qui font une espèce de suivi qu'on appellera technique, pour ces gens-là qui font de la surveillance autant que pour les agents de probation qui font de la surveillance d'une autre catégorie de gens qui sont sentencés à des emprisonnements avec sursis, qu'est-ce que vous allez faire pour contourner le problème de surveillance de couvre-feux, etc., qui sont la fin de semaine et le soir, par exemple? On sait bien que ces gens-là ne travaillent pas la fin de semaine, en général, ou ne travaillent pas le soir et donc ne peuvent pas effectuer de surveillance pendant ces heures-là.

n(16 h 10)n

Au fond, vous avez pratiqué en droit criminel, M. le ministre, j'ai pratiqué en droit criminel aussi, vous savez que vos clients, les miens et les clients des avocats qui pratiquent actuellement en droit criminel sont assez vites pour s'apercevoir des trous qu'il y a dans le système et profiter des trous dans le système, et, dans le fond, c'est ça qui est décourageant pour les juges, c'est ça qui est décourageant pour les procureurs de la couronne, c'est ça aussi qui est décourageant pour les policiers, et c'est décourageant pour les gens des services correctionnels. Alors, dans le fond, là, voici un genre de peine qui requiert qu'on regarde des solutions originales.

Moi, je vous ai entendu dire, me semble-t-il, qu'il y avait peut-être des négociations ? corrigez-moi si je me trompe ? avec les syndicats pour permettre que la surveillance puisse s'effectuer par ces deux entités, les PMO et le Service de probation, en dehors des heures actuelles régulières de travail, c'est-à-dire le soir et les fins de semaine. Première question: Est-ce que dans votre plan de gestion cette question-là a été abordée?

Deuxième question. Je vous les donne toutes, M. le ministre, pour que vous puissiez répondre dans un tout. Deuxièmement, vous évoquez souvent l'idée, et je pense que c'est une bonne idée, qu'on puisse demander aux services policiers de donner leur aide dans la surveillance des sentences d'emprisonnement avec sursis. Je pense que le Service de probation n'aurait pas d'objection. Mais est-ce qu'il y a de telles ententes de conclues au moment où on se parle, effectivement? Et, finalement, est-ce que vous allez ajouter non seulement des gens au Service de probation, dans ce qu'il est convenu d'appeler la DESMO, la Direction de l'évaluation et des services en milieu ouvert, à laquelle ont été greffés récemment les PMO, mais des éléments, des ressources dans les PMO? Parce qu'il se fait un suivi technique.

Et, pour ce qui concerne les ressources communautaires, je sais qu'il y a des contrats qui se signent avec les ressources communautaires, je sais que les ressources communautaires, d'autre part, peuvent effectuer une surveillance en dehors des heures dont on parle, des heures régulières, parce que certaines de ces ressources-là sont des maisons de transition, etc. Mais est-ce que vous comptez aussi ajouter des ressources dans ce domaine-là?

Je termine, pour vous laisser répondre, en vous disant qu'il m'apparaît que, si vous ne réagissez pas... Je ne dis pas que vous ne réagissez pas, je ne vous fais pas de... mais je dis que votre réaction m'apparaît ne pas être assez énergique et assez rapide, au moment où on se parle. Je pense que le système est en train de craquer, c'est-à-dire que la confiance que les juges, que les procureurs de la couronne, que les policiers ont, vont avoir dans ce genre de peine, l'emprisonnement avec sursis, est directement reliée à votre façon, à la façon dont le ministère de la Sécurité publique va réagir en termes de surveillance.

Moi, j'ai malheureusement eu l'occasion de dire récemment, avant que les juges commencent à refuser de donner des emprisonnements avec sursis, que j'étais inquiet et que le fait qu'on ne soit pas capable de répondre à cette demande de surveillance des gens qui ont des sentences d'emprisonnement avec sursis... J'ai eu déjà l'occasion de dire que j'étais inquiet, que les juges allaient se décourager et recommencer à emprisonner. D'ailleurs, dans le cas des juges Vaillancourt, Sansfaçon et Chevalier, qui ont été plus publicisés, dans ces cas-là, évidemment, les sentences d'emprisonnement avec sursis ont été refusées et ils ont décidé d'imposer une sentence d'emprisonnement. Et, dans tous les cas où les juges vont refuser l'emprisonnement avec sursis, ils vont emprisonner parce que l'une des décisions primaires qu'ils doivent faire avant de donner un emprisonnement avec sursis, c'est que la sentence doit être une sentence d'emprisonnement. Ensuite, il s'agit juste de déterminer si elle peut être purgée dans la collectivité.

Alors, dans le fond, vous voulez faire de la réinsertion sociale. Le virage correctionnel, qui a été tant critiqué par le Protecteur du citoyen il y a un an, veut faire de la réinsertion sociale, mais encore faut-il que les autorités aient confiance dans le système. Alors, moi, je vais vous demander: Est-ce que dans votre plan de gestion il est prévu une réaction plus énergique? Et, si vous n'avez pas les ressources... Parce qu'on regarde les budgets, puis vous ne les avez pas, les budgets.

Le Président (M. Côté, Dubuc): Alors, M. le ministre.

M. Ménard: Bon, il y a beaucoup d'affirmations dans la question qui est posée. Je vais répondre aux questions et aux affirmations qui m'apparaissent avoir besoin de correction. Nous sommes peut-être tard, comme le dit le député, mais nous sommes les premiers. Alors, nous sommes vraiment en avance sur toutes les autres provinces au Canada pour l'application des sentences avec sursis et nous avons le meilleur système.

Je signale tout de suite quand même que les conséquences pour un individu qui ne respecte pas les conditions d'une sentence avec sursis sont beaucoup plus dramatiques que pour les individus qui ne respectaient pas la condition d'une ordonnance de probation parce que, dans le cas d'un manquement au couvre-feu, par exemple, ou aux conditions d'une sentence avec sursis, la personne retourne en dedans pour purger la sentence qu'il lui restait à faire. Dans le cas des probations, je crois qu'il s'était laissé glisser un certain laxisme dans la poursuite des contrevenants à cela, de sorte que, comme vous le disiez, si le mot se passait, il se passait que ce n'était pas aussi sérieux que ç'aurait dû l'être, et les juges ont eu peur. Peut-être que c'est ça qui justifie la peur de certains, mais je peux les assurer que, convaincu que le système doit marcher, je vais tout faire pour qu'il marche et qu'ils aient confiance en lui.

Je crois qu'ils sont plus susceptibles de m'écouter évidemment si je parle, et, dans les premières émissions de télé qui ont été faites, je n'ai pas pu parler parce qu'ils ne sont pas venus me voir, parce que sinon je leur aurais volontiers expliqué les systèmes que nous avons mis en place. Donc, il faut quand même prendre ça en considération. La personne est avertie que, si elle ne respecte pas le couvre-feu, elle a à purger le reste de la sentence, alors qu'avant elle devait passer devant un juge qui pouvait lui donner toutes sortes de sentences pour ne pas avoir respecté les conditions de sa probation puis ne pas nécessairement rendre toujours la sentence qu'il aurait pu rendre, la sentence qu'il avait suspendue. Donc, il y a ça.

Deuxièmement, vous parlez de votre expérience. J'ai comme l'impression que votre expérience a été plus longue en poursuite qu'en défense, si je ne me trompe, parce que vous avez toujours vu les manquements, puis probablement les manquements les pires. Mais, quand on est de l'autre côté... Vous avez été assez longtemps en défense aussi. Moi, j'ai remarqué que, pour la majorité du monde, les conditions qui sont imposées par la cour ? et je dis pour la majorité des gens dont on entend peu parler parce que justement ils les respectent, les conditions ? la majorité des gens ont assez peur quand des conditions leur sont données, chez tous ceux, en tout cas, qui ne récidivent pas. Et, comme vous le savez, il n'y a pas plus que 10 % des gens qui viennent en cour qui récidivent. Pour la majorité des gens qui ne récidivent pas, les conditions imposées par la cour sont quand même assez intimidantes, et, généralement, ils les respectent. C'est la même chose d'ailleurs pour les gens à qui on a interdit de conduire. Il y a des évaluations de la SAAQ qui ont été faites, je ne me souviens pas des chiffres, mais je sais que c'est loin d'être la majorité, d'après les évaluations de la SAAQ, qui ne respectent pas ces...

M. Dupuis: Ça dépend, M. le ministre.

M. Ménard: Laissez-moi donc terminer, bon Dieu!

M. Dupuis: Si vous permettez...

M. Ménard: Il me semble que vous parlez assez longtemps, des fois. Je peux bien répondre aussi.

Le Président (M. Côté, Dubuc): Oui. M. le député de Saint-Laurent, laissez terminer M. le ministre. Vous aurez l'occasion, parce qu'il vous reste encore du temps, pour reposer des questions.

M. Ménard: ...

M. Dupuis: Peut-être que je peux parler pendant que vous vous étouffez.

M. Ménard: Maintenant, je pense que votre première question visait l'utilisation de ce que vous appelez les PEMO. Je vous signale que les PEMO, ce n'est pas des gens. PEMO, c'est pour Programme d'emploi en milieu ouvert, et, ces programmes d'emploi, la surveillance en est assurée par des agents de services correctionnels parce qu'ils s'adressent à des gens qui sont incarcérés et qui vont travailler en emploi. Donc, oui, on les utilise, puis, oui, on a augmenté, puis je pense que c'est 49 personnes que nous avons rajoutées à ces agents de services correctionnels qui vont surveiller les gens qui sont en emploi en milieu ouvert.

Je peux vous dire aussi que nous sommes en négociation ? et nous avons l'accord de la ministre actuellement ? pour que les gens qui font l'objet de décisions judiciaires soient effectivement reconnus comme une des clientèles particulières pour Emploi-Québec. Vous savez, je l'ai dit assez souvent, la majorité des gens que nous avons en prison sont mésadaptés et sont très mal équipés pour gagner leur vie. Or, il y a un certain nombre de métiers, dans l'état actuel de l'économie et même à l'époque où nous avions au-dessus de 10 % de chômage, où il y a de la place. Je pense particulièrement aux métiers de la métallurgie, je pense à soudeur, à mécanicien, même dans le domaine de la restauration de toute sorte, dans le domaine de l'informatique où il y a de la place absolument à tous les niveaux, à partir de ceux qui ont un doctorat jusqu'à ceux qui ne pourraient pas faire autre chose que manipuler une souris. Alors, je sais que nous avons identifié un certain nombre de métiers où, nous croyons, ces gens-là pourraient peut-être trouver un emploi utile, et nous comptons arrimer justement nos besoins à des possibilités de placer ces gens-là dans une formation, un court parcours à l'emploi, comme on les appelle à Emploi-Québec, donc une formation courte qui pourrait les amener à exercer un métier.

n(16 h 20)n

À partir du moment où on le confie, bien, pour un agent de probation, je veux dire, c'est évident qu'il va aller se renseigner: Comment performe-t-il? Est-ce qu'il suit? Est-ce qu'il est là tous les matins? Il y a une certaine surveillance qui est faite comme celle-là, et on peut juger un peu du genre de nuit qu'il passe aussi, ce qu'il fait à ce moment-là. Donc, vous voyez, on aura déjà... Il ne faut pas se fier uniquement à l'agent de probation qui téléphone une fois de temps en temps.

Puis ensuite nous avons une entente particulière avec la police de Hull. Mais je vous dis honnêtement ma philosophie, quant à moi, je pense qu'on n'a pas besoin d'entente, que, du moment qu'on informe les corps policiers qui ont juridiction au domicile des gens qui ont des sentences avec sursis, il me semble que c'est un élément dont ils doivent tenir compte s'ils appliquent la philosophie de la police de proximité ou de la police de quartier. Ils doivent s'en occuper, ils doivent aller faire eux-mêmes de temps en temps leurs vérifications. On leur envoie quelqu'un qui est à problème. Alors, ça compte, ça, quand on évalue, quand notre objectif, c'est de diminuer la criminalité dans le quartier, de vérifier qu'effectivement ces gens-là ne se mettent pas à avoir des habitudes qui probablement leur ont été défendues par la cour et qui risqueraient de les ramener dans la criminalité.

Et puis vous avez raison de soulever les ententes avec les maisons communautaires dont je n'avais pas parlé tout à l'heure. Effectivement, nous en avons un certain nombre. Je pense que c'est 300 cas actuellement qui sont dans le réseau communautaire et où le réseau communautaire non seulement est responsable de les accueillir, mais de les accompagner, ensuite de ça, dans la réinsertion sociale même s'ils n'habitent plus chez eux. Puis, en plus, de façon générale, nous comptons qu'il y aura des vérifications, au moins deux vérifications téléphoniques aléatoires par semaine entre 23 heures et 6 heures, au moins une vérification à domicile à tous les 15 jours et puis un appel de, je pense, la PC ? c'est la police communautaire, n'est-ce pas? non, ce n'est sûrement pas ça ? à son lieu de travail une fois par semaine. Ça, c'est un minimum. Parce que, encore une fois, si un agent de probation remarque qu'il est en présence d'une personne moins fiable ou qui a besoin de plus d'accompagnement, bien, il peut le faire plus souvent.

M. Dupuis: M. le ministre, est-ce que vous avez terminé? Avez-vous terminé?

M. Ménard: Oui, oui. Il me semble que vous n'avez pas besoin de me poser cette question. Il me semble que, quand vous m'interrompiez, vous étiez plus vite que ça.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dupuis: Si on faisait cet après-midi un pas important dans ce domaine-là qui serait le suivant? Vous avez mentionné qu'il vous semblait que vous n'aviez pas besoin d'entente avec les corps policiers pour faire effectuer certaines vérifications des gens qui sont soumis à un emprisonnement avec sursis. Moi, je suis assez d'accord avec vous, je pense que ça fait partie de leur mandat général. Mais, si le ministre de la Sécurité publique, qui a quand même l'autorité, et non seulement une autorité morale, mais une autorité, de par sa fonction, vis-à-vis des corps policiers, nous disait cet après-midi qu'effectivement il va communiquer de façon officielle avec les corps de police pour leur demander d'effectuer ce genre de surveillance ou pour leur rappeler qu'il est dans leur mandat, à son avis, que ce genre de surveillance puisse s'effectuer, déjà, je pense, la communauté judiciaire serait passablement rassurée parce que, effectivement, à ce moment-là, toute la question de l'inquiétude de la magistrature relativement aux couvre-feux et aux vérifications qui sont faites la fin de semaine pourrait être apaisée. Dans le fond, je pense que c'est ça, le cri qu'ils ont lancé.

Alors, dans le fond, si cet après-midi ensemble nous convenions que le ministre de la Sécurité publique va faire valoir son autorité morale et son autorité qui lui vient de son mandat auprès des corps de police pour leur signifier qu'à son avis ça fait partie de leur mandat et qu'il leur demande de le faire, et qu'il y ait, avec le ministère de la Sécurité publique, une espèce de communication qui se fasse avec les corps de police des différentes régions, je pense qu'on accomplirait cet après-midi quelque chose d'extrêmement utile qui contribuerait sans aucun doute à apaiser la magistrature sur ce genre de question là.

Le Président (M. Paquin): M. le ministre, en deux minutes.

M. Ménard: Bien, je suis très heureux de l'occasion que vous me donnez, mais je vous signale que ça fait quand même déjà trois fois que je l'ai dit en public, et, malheureusement, ce n'est pas toujours rapporté ou pas rapporté de la même façon. Et puis, en plus, quand les juges municipaux m'ont fait l'honneur de m'inviter à leur dernier colloque, à leur banquet final, je leur ai dit ce que je viens de vous exposer. Mais, quant à moi, s'il faut le répéter, je le répète. Puis il me semble l'avoir dit encore tout à l'heure, mais, s'il est nécessaire de le répéter encore pour que le message passe bien, j'estime qu'il est du devoir des officiers de police qui font la police communautaire ou la police de quartier de vérifier à l'improviste les conditions de sursis des gens qui habitent leur territoire lorsqu'il y a effectivement des personnes qui sont condamnées à des sentences avec sursis. Il me semble que c'est une application intelligente et raisonnable de la philosophie de la police de quartier. Si vous savez qu'il y a quelqu'un à problème quelque part et que le juge lui a imposé des conditions qui, il espère, vont faire qu'il ne commettra pas d'autre crime, justement, bien, c'est une bonne prévention que de s'assurer qu'il ne le fera pas puis qu'il va respecter ces conditions...

M. Dupuis: Je vous ai entendu. Mais il serait présomptueux de notre part à tous les deux ou ensemble de penser que, parce que nous sommes ici, dans ce lieu, tout le monde nous entend. Moi, ce que je croyais, c'est que nous nous entendions sur votre volonté. Peut-être nous entendons-nous sur votre volonté de communiquer aux divers corps de police ce que vous venez de mentionner, mais de façon plus officielle, si vous voulez, que simplement l'indiquer à l'étude des crédits parce qu'il serait présomptueux de croire que tout le monde nous écoute. Mais vous pourriez peut-être le faire de façon écrite sous la forme ? je ne veux pas employer le mot parce que je ne suis pas sûr que c'est le bon mot ? à défaut de trouver un meilleur mot, d'une espèce de directive, si vous voulez, quoique le mot puisse vous sembler un peu fort, mais d'une espèce de... Que votre autorité morale, dans le fond, soit donnée sous la forme épistolaire à tous les corps de police, je pense que ça pourrait aider.

M. Ménard: Oui, ce sera fait. Nous allons commencer par faire un communiqué, et puis on verra. De toute façon, j'ai l'occasion de leur parler aussi parce que, là, c'est la saison des congrès annuels. Ça fait que je vais en parler lorsque je vais faire mon tour des congrès annuels de l'ADPQ ? je pense que l'APPQ, cette année, ne m'invite pas, mais enfin ? des autres, de la Fédération des policiers. Ha, ha, ha!

M. Dupuis: M. le ministre, ça dépend à quelle date il est, le congrès de l'APPQ.

M. Ménard: Ah! il est à l'automne, c'est vrai. Ah bon! Ha, ha, ha!

M. Dupuis: On ne les entend pas beaucoup, de ce temps-là. Alors, j'imagine que c'est de bon augure.

M. Ménard: Voilà.

M. Dupuis: O.K.

Le Président (M. Paquin): Alors, sur cette bonne note, la parole est à la députée de Blainville.

Mme Signori: Merci, M. le Président. Combien de temps avons-nous?

Le Président (M. Paquin): Une vingtaine de minutes. Le dernier bloc a duré 22 minutes.

Indemnisation des victimes des inondations
au Saguenay et du verglas

Mme Signori: C'est bien. Alors, M. le ministre, moi, ça va être une question en trois volets. Ma première question: Est-ce que tout est réglé en regard du déluge du Saguenay? Et, sinon, à quel moment prévoyez-vous la fin des traitements de ces dossiers-là? Pourriez-vous aussi nous dire quels ont été les montants versés jusqu'à ce jour?

M. Ménard: Bon, comme il y a des chiffres, là, j'aime autant consulter les documents. Mais M. Crépeault, en fait, qui est mon sous-ministre adjoint à la sécurité civile et à la sécurité incendie, au fond, je pense, est la personne le plus fiable pour répondre correctement à vos questions.

Mme Signori: Moi, je n'ai pas objection, M. le ministre, à ce que vous soyez aidé de vos collaborateurs pour la période d'étude de crédits.

M. Ménard: Merci.

Mme Signori: C'est tout à fait normal, même.

Le Président (M. Paquin): Cela étant, si le collaborateur veut bien s'identifier pour les fins de nos enregistrements.

M. Crépeault (Luc): Oui, Luc Crépeault, sous-ministre adjoint à la sécurité civile et à la sécurité incendie. Dans le cas des pluies diluviennes du Saguenay mais qui ne sont pas exclusives au Saguenay ? il y a des régions...

Mme Signori: Dans la région...

n(16 h 30)n

M. Crépeault (Luc): ...la Côte-Nord et autres, qui ont été affectées ? au moment où on se parle, il y a eu 366 296 000 $ de payés par le gouvernement du Québec, et, de cette somme, on a eu un remboursement de l'ordre de 170 millions par le gouvernement fédéral.

Donc, ce n'est pas encore terminé, sauf que, pour probablement la fin juin de cette année, tous les dossiers devraient être complétés.

Et peut-être une remarque là-dessus. Au niveau du nombre de dossiers, même si, dans le cas du verglas, il y a eu beaucoup plus de montants d'argent imposants, dans le cas du nombre de dossiers traités, ceux des pluies diluviennes du 19 et du 20 juillet 1996 ont compté pour 7 554 dossiers à traiter par rapport à environ un peu plus de 1 000 dans le verglas. Donc, le nombre de dossiers à traiter ? et des montants beaucoup plus petits ? était très, très important dans ce cas-là.

Mme Signori: Excusez-moi. M. le sous-ministre, je crois?

Des voix: Oui.

Mme Signori: Il ne faut pas que je me trompe. Est-ce que vous m'avez aussi parlé des montants qui ont été utilisés pour le déluge du mois de juillet?

M. Crépeault (Luc): Oui. C'est, à ce jour, 366 296 000 $ qui ont été versés par le gouvernement du Québec.

Mme Signori: Pour le déluge. Et, pour le verglas, vous avez mentionné ça aussi?

M. Crépeault (Luc): Le verglas, je n'ai pas mentionné de chiffres, mais je peux vous les donner de façon approximative mais quand même assez précise. Au moment où on se parle, il y a 670 millions qui ont été versés dans le cas du verglas et, sur cette somme, il y a eu un remboursement, à ce jour, du fédéral de 410 millions.

Mme Signori: Et croyez-vous qu'il va vous rester des dossiers à traiter aussi dans ce cas-là ou si c'est presque terminé?

M. Crépeault (Luc): Dans le cas du verglas, on se rappelle que c'est arrivé au début de janvier 1998, et donc l'année 2000 devrait nous permettre de compléter la très grande majorité des analyses. Donc, 99,9 % réglés dans l'année en cours.

Mme Signori: Autant pour le déluge que pour le verglas.

M. Crépeault (Luc): Oui. Dans le déluge du Saguenay, ça devrait être un peu plus tôt. L'échéancier, c'est fin juin de cette année, alors qu'on parle de décembre pour le cas du verglas.

Mme Signori: Merci beaucoup. Et, M. le député de Saint-Laurent, juste pour l'informer, ce n'était pas une question plantée. Mais il est parti.

Le Président (M. Paquin): M. le ministre.

M. Ménard: Il y a quand même quelques informations purement objectives qui peuvent être ajoutées. Vous avez remarqué qu'il y a donc 260 millions, dans le cas du verglas, que le Québec a dépensés et pour lesquels il n'a pas été remboursé. Or, nous, nous avons versé aux municipalités de l'intérêt sur tout ce qui avait un retard. Nous avons versé jusqu'à 4 millions d'intérêt. Mais le fédéral ne nous rembourse pas les intérêts sur les sommes qui sont en retard, de sorte que ça représente des frais d'intérêt, pour 1998-1999, de l'ordre de 12 millions de dollars. Ça, c'est dans le cas du verglas.

Je vous signale aussi que, dans le verglas, quand nous parlons des montants qui seraient en retard, cela ne comprend pas les réclamations d'Hydro-Québec pour la reconstitution de son réseau de distribution, des compensations qui avaient été payées dans des circonstances antérieures ailleurs au Canada mais qui, à l'occasion de ce désastre, n'ont pas été payées. Je dirais en toute objectivité qu'elles n'ont pas été payées en Ontario non plus, mais il reste quand même que, lors d'inondations tenues ailleurs, si je me souviens bien, au Manitoba et à Terre-Neuve, les coûts assumés pour la reconstitution du système de distribution d'électricité avaient été couverts par les assurances.

Quant aux pluies diluviennes, nous avons versé 1,5 million aux municipalités d'intérêt, mais, nous, nous n'avons pas été remboursés des intérêts dus au retard du fédéral de nous rembourser, de sorte que ça a entraîné une perte d'environ 18 millions de plus.

Mme Signori: Alors, M. le ministre, est-ce que les frais encourus par Hydro-Québec, ça ne relevait pas de votre ministère, à ce moment-là, pour la reconstruction du réseau?

M. Ménard: C'est-à-dire que la question, c'est de savoir: Est-ce que c'était éligible? C'est sûr que, nous, puisque le fédéral ne nous le remboursait pas à 90 %, on ne l'a pas remboursé à Hydro-Québec non plus. Ça, c'est vrai. Mais c'est quand même des pertes qui ont été subies au même titre que ce qui a été perdu dans les municipalités, de toutes sortes, les dommages aux arbres sur le mont Royal ou les nombreuses pertes qui ont été encourues en Montérégie et ailleurs.

Mme Signori: Merci, M. le ministre.

Le Président (M. Paquin): Brièvement sur le même sujet, hein?

M. Côté (Dubuc): Sur le même sujet.

Le Président (M. Paquin): Alors, je vais donner la parole au député de Dubuc, puis je vais vous laisser ensuite terminer cette période-là, M. le député de Frontenac. M. le député de Dubuc, pour une question complémentaire sur le même sujet.

M. Côté (Dubuc): Sur le même sujet, ma question s'adresse à M. le sous-ministre: Est-ce qu'il y a un délai de prescription pour les réclamations? Là, je parle du déluge du Saguenay. C'est que je vis, moi, présentement dans mon comté certains cas problèmes où les gens découvrent, après quelques années, lorsqu'ils ont eu de l'eau dans leur maison lors du déluge, qu'il se développe une espèce de champignon qui cause des dommages énormes à la santé. On est obligé de faire sortir les personnes de leur propriété, et même il y a des propriétés qui ont été complètement condamnées ainsi que les meubles qui se trouvaient à l'intérieur parce que ce n'est pas vivable. Les gens se mettent à... les yeux pleurent et c'est dangereux pour la santé. Moi, je voudrais savoir. C'est qu'il est arrivé quelques cas dernièrement. Est-ce qu'il est toujours possible de faire des réclamations au ministère ou s'il y avait une date butoir qui fixait jusqu'à telle date les réclamations?

Le Président (M. Paquin): M. Crépeault.

M. Crépeault (Luc): Oui, on a toujours des dates, mais qu'on n'applique pas de façon rigide et doctrinaire. Et, dans les cas de contamination, si la cause à effet est très claire, même s'il y a un délai assez important entre le moment de l'événement et la réclamation, on est de façon générale assez large et même très large à ce niveau-là. Maintenant, il faut être capable de prouver la cause à effet.

M. Côté (Dubuc): Merci infiniment.

Le Président (M. Paquin): M. le député de Frontenac.

M. Boulianne: Merci, M. le Président. Alors, je veux rassurer le député de Saint-Laurent au sujet des questions plantées, je pense que les ministériels travaillent très bien leurs dossiers. On les connaît bien et on pose des questions pour couvrir l'ensemble du dossier pour bien informer la population. Alors, c'est un objectif. Je pense que, si l'opposition officielle avait cet objectif-là, peut-être qu'à l'Assemblée nationale les questions seraient plus originales et plus diversifiées.

Mesures prises à la suite de l'avalanche
à Kangiqsualujjuaq

Ceci étant dit, M. le Président, je lisais dans La Presse de mercredi, le 19 avril, une de vos citations: «"Tout le monde doit s'impliquer ? et je vous cite ? dans la prévention", estime le ministre de la Sécurité publique.» Alors ça, ça fait suite au rapport de Jacques Bérubé concernant l'avalanche de Kangiqsualujjuaq.

Il y a des constatations troublantes dans cet accident-là tragique, évidemment. Le coroner en constate juste deux au moins qui sont importantes. Il n'y avait aucune organisation régionale ni municipale de sécurité civile, c'était une première constatation. Il y en avait une deuxième aussi, que dans aucun des 14 villages du Nunavik il n'existait des casernes de pompiers, des camions d'incendie, etc. Et il y a, suite à ça, une série de recommandations qui ont été faites. De quelle façon comptez-vous donner suite à ces recommandations-là face au rapport?

M. Ménard: D'abord, je peux vous dire qu'on n'a pas attendu les recommandations du coroner Bérubé pour prendre les mesures qui, à notre avis, s'imposaient par les faits que nous avons connus et qui ont été rendus publics au cours de l'enquête de M. Bérubé, mais déjà, avant même que l'enquête ne débute, nous avions pris un certain nombre de mesures, et puis on a continué au fur et à mesure que les faits nous démontraient qu'il fallait agir.

D'abord, la première chose, quand je suis arrivé sur les lieux le 2 janvier 1999, j'ai tout de suite suggéré à la communauté ? parce qu'on s'est aperçus que c'est eux qui avaient les pouvoirs de le faire et non pas nous ? d'établir un périmètre de sécurité de 75 mètres de la montagne, que maintenant nous avons étendu, après les rapports du Dr Jamieson, qui est l'expert en avalanches, à 100 mètres. Ensuite, on a établi tout de suite un programme d'indemnisation. Bon, je ne peux peut-être pas élaborer là-dessus par rapport à votre question, ou on pourra le faire si vous voulez des détails, mais je peux vous dire que je crois que c'est à la satisfaction totale des communautés qui habitent le Grand Nord.

n(16 h 40)n

Mais, la première chose, on a décidé d'identifier tous les sites d'avalanche potentielle et de faire le nécessaire partout où la vie humaine était menacée. On a fait venir de Norvège, parce qu'on s'est fait dire que c'est à peu près l'endroit où l'expertise en avalanches est la meilleure et la plus utilisée, donc où il y a le plus d'expérience... D'ailleurs, un petit détail intéressant, la directrice de ce service est une Québécoise. Je pense même qu'elle vient de la région du Lac-Saint-Jean, et elle travaille en Norvège depuis plusieurs années. Mais, de toute façon, ce n'est pas elle qui est venue, elle nous a envoyé deux personnes de son service. Nous avons fait le tour complet de toutes les communautés nordiques pour examiner les risques d'avalanche, et, partout où il y avait des mesures à prendre, comme l'établissement de périmètres de sécurité, bien, ça, ça se fait relativement facilement, on l'a fait.

Puis, on a commencé à prendre des mesures de protection là où il y avait des édifices qui avaient déjà été construits dans le passé mais que l'on pouvait sécuriser à l'aide de travaux. On nous suggérait de développer une expertise en matière d'avalanches auprès d'experts mondialement reconnus. C'est vrai qu'au Québec il y a relativement peu d'expertise en avalanches. Il y a quelques héros qui avaient commencé à le faire; je crois que c'est l'Université du Québec à Rimouski.

Une voix: C'est ça.

M. Ménard: C'est ça. Alors, il y en a un qu'on a envoyé en Europe parfaire ses connaissances et qui nous revient, là, puis qui va être capable de développer une expertise locale.

Ensuite, il y a une entente qui a été passée avec le ministre délégué aux Affaires autochtones et l'Administration régionale Kativik. Cette enquête fait que nous allons dépenser ? en fait, nous avons commencé même cette année ? au-delà de 700 000 $ pendant une période de trois ans pour fournir aux diverses communautés nordiques des équipements pour combattre les incendies ainsi que d'autres équipements qui peuvent servir en matière de sécurité civile, et je crois que cela couvre d'ailleurs toutes les recommandations qui avaient été faites et qui visaient le ministère de la Sécurité publique.

En plus de ça, je vous signale quand même que l'école a été reconstruite par le ministère de l'Éducation à une distance très respectable de la fameuse montagne, de sorte qu'elle ne devrait plus jamais courir ce risque. Nous avons aussi payé le déplacement de plusieurs commerces. En tout cas, les sommes versées dans ces diverses mesures et en compensation des objets qui ont été perdus se sont élevées à près de 30 millions de dollars.

M. Boulianne: Vous semblez dire aussi que le problème de la prévention serait dû à un mauvais partage ou encore à une imprécision dans le partage des responsabilités entre les divers secteurs des divers paliers de gouvernement. De quelle façon vous pouvez remédier à ça?

M. Ménard: Bien, je pense qu'on le fera dans la nouvelle loi en établissant les responsabilités claires pour tout le monde. Nous avons l'intention, effectivement, d'appliquer la philosophie développée dans le rapport Nicolet. Je pense que c'est évident aussi pour bien des intervenants que nous nous en sommes déjà inspirés dans la Loi sur la sécurité incendie, à laquelle vous avez collaboré, n'est-ce pas, en tant que membre de la commission. Mais c'est une chose que les gens oublient rarement. Quand on détermine les niveaux de gouvernement, je pense qu'il faut chercher quel est le niveau de gouvernement le plus apte à rendre le service à la communauté. Alors, les matières de prévention des sinistres, essentiellement, c'est de l'aménagement par rapport à la connaissance du terrain. Pensez-vous que c'est des fonctionnaires qui sont à Québec qui sont les mieux placés pour déterminer ces règles d'aménagement? On peut aider les gens en développant une expertise, entre autres. On peut voir à ce que les gens soient conscients que des falaises, c'est dangereux, qu'il y en a qui sont plus dangereuses que d'autres ? c'est des événements qui peuvent se produire une fois tous les 500 ans peut-être mais qui, quand ils arrivent, sont absolument désastreux ? informer les gens qu'il y a des conditions qui favorisent les glissements de terrain.

Les grandes pluies, les périodes de dégel sont des périodes où des pans de terre peuvent se détacher de falaises et avoir des résultats désastreux en bas. Si on décide d'installer des constructions, on peut installer des constructions au sommet des falaises ? il y en a à Québec, ici, dans cette grande ville ? mais il faut être certain de les ancrer dans la base rocheuse et non pas dans une base de schiste qui est elle-même déjà à angle et qui peut glisser au cours des années, comme on a vu à Cap-Rouge. Mais on peut aider à développer des expertises comme celles-là.

Mais notre territoire est si vaste et, à certains endroits, si peu densément peuplé qu'il me semble que ça devrait sauter aux yeux de tout le monde que les autorités locales ont une responsabilité dans l'aménagement, dans la réglementation qui permet aux gens de s'installer pour prévoir des zones inondables, les dangers des falaises, etc., et en tenir compte dans leur schéma d'aménagement. D'ailleurs, vous pourrez voir dans la loi que nous allons faire, qui va avoir un peu le même modèle que celui de la Loi sur la sécurité incendie ? d'ailleurs, dans ce cas-ci, la première loi s'inspire de la deuxième, mais c'est parce que la deuxième est plus compliquée encore à faire parce que l'incendie, c'est un domaine particulier ? que ce sera un peu le même principe, planification régionale, responsabilité locale, que les élus vont se mettre ensemble avec des experts que nous leur fournirons pour faire l'inventaire systématique des risques qu'il y a sur leur territoire, et nous croyons qu'ils seront assez responsables pour prendre des mesures pour prévenir ces risques, et nous croyons fermement ? ce n'est pas une question de dumper une responsabilité aux gouvernements locaux ? nous croyons sincèrement que c'est le meilleur niveau de gouvernement qui peut décider de ces choses-là.

Le Président (M. Paquin): Alors, ça complète?

M. Boulianne: Oui, ça complète.

Le Président (M. Paquin): Est-ce qu'il resterait des questions de votre côté ou si vous avez complété?

M. Boulianne: Non, c'est beau.

Le Président (M. Paquin): Alors, ça complétera la participation du groupe qui forme le parti gouvernemental. Pour les dernières questions, M. le représentant de l'opposition.

M. Dupuis: Je vous remercie, M. le Président. Je voudrais tout de suite dissiper une impression qui a pu se laisser dans l'esprit des députés ministériels à l'effet que je n'appréciais pas leurs questions. Ce n'est pas vrai, j'apprécie votre avalanche de questions, d'autant plus que les sujets que vous touchez sont des sujets que j'avais prévu toucher avec le M. le ministre et qui me permettent de poser... sur d'autres sujets. C'est vrai que j'ai une aversion pour les questions plantées, les questions plantées étant des questions suggérées par le ministre, dont évidemment il a préparé la réponse, parce que, dans mon métier précédent, quand on posait des questions plantées devant les juges, ils appelaient ça du «self-serving evidence» et ils nous empêchaient de les poser, ces questions-là. Donc, j'ai appris de ces jugements-là.

Services fournis par les bureaux de probation

M. le ministre, revenant au sujet des services correctionnels, je comprends bien que le mandat du service correctionnel, c'est la protection de la société et qu'évidemment la protection de la société se fait principalement ? c'est le souhait des autorités ? par la réinsertion sociale. J'ai eu l'occasion de dire à certaines reprises que, dans le virage correctionnel que ce gouvernement-là, le gouvernement péquiste, a voulu imprimer, il a commencé à l'envers, il a commencé par fermer des prisons puis a espéré qu'il n'y ait plus de détenus qui soient sentencés. Ce n'est pas ça qui est arrivé. Les prisons ont rapidement débordé, on l'a vu au fil des années. Alors donc, j'espère toujours que la leçon a porté fruit et que maintenant on essaie de prendre le problème à l'envers, c'est-à-dire donner les ressources suffisantes pour avoir les moyens de faire en sorte qu'on s'occupe d'abord et avant tout de réinsertion sociale au lieu d'emprisonner les gens.

Mais l'une des façons, me semble-t-il ? et j'aimerais ça qu'on en discute ensemble dans les minutes qui restent ? dont on peut essayer de la façon la plus pertinente d'imprimer déjà cette volonté de réinsertion sociale, c'est souvent au moment de la comparution de quelqu'un devant le tribunal criminel. Moi, j'ai toujours déploré le fait ? ça s'est fait pendant un certain nombre d'années à Québec, mais ça ne se fait pas systématiquement dans le système ? qu'on ne puisse pas utiliser le Service de probation de façon plus complète au moment de la comparution d'une personne dans le processus judiciaire. Ça m'a toujours étonné, d'abord, qu'on ne s'interroge pas là-dessus. Peut-être qu'on s'interroge. Moi, j'ai l'impression qu'il manque de ressources pour le faire. Mais il m'apparaît que, au moment de la comparution d'un individu, c'est peut-être à ce moment-là qu'on devrait mettre souvent des effectifs et des ressources pour une prise en charge par le Service de probation de l'individu qui demande qu'on le remette en liberté au moment de sa comparution.

n(16 h 50)n

D'abord, c'est sûr qu'au moment de sa comparution la déstabilisation de la personne qui comparaît est plus évidente que six mois plus tard. Il est déstabilisé, il vient de se faire arrêter, il vient de se faire prendre. Moi, j'ai souvent dit en boutade, quand j'étais avocat de la défense, que je n'ai jamais vu un client dans mon bureau qui était venu me consulter avant de commettre le crime. Ils commettent le crime puis ils pensent toujours qu'ils ne se feront pas prendre, puis, à un moment donné, ils se font prendre, et là, évidemment, au moment de la comparution, il y a une déstabilisation. Il y a aussi souvent une déstabilisation de la famille, de l'entourage qui vient de subir l'arrestation d'un de ses proches. Il y a un «acting out» qui vient de se produire aussi par la commission d'un crime, par le biais de l'arrestation, et donc tout le monde dans son entourage est sensibilisé.

Souvent, les gens qui comparaissent devant les tribunaux ? on oublie de le mentionner, mais ça arrive souvent ? ils ne sont pas tous des délinquants, ils ne sont pas tous des criminels. Souvent, il y a des gens qui commettent des actes criminels et qui ne sont pas des criminels mais qui ont commis un acte criminel et qui comparaissent à la suite de problèmes personnels. Ça arrive souvent: problèmes d'alcoolisme, violence conjugale, etc. Donc, il y a fréquemment, on le sait, devant les tribunaux, au moment de la comparution, des demandes de la part des individus qui comparaissent d'être remis en liberté sous certaines conditions. Souvent, si le Service de probation pouvait de façon systématique être utilisé, d'une part, je pense qu'il y aurait plus de remises en liberté parce qu'on pourrait remettre en liberté sous certaines conditions qui pourraient être efficacement surveillées par le Service de probation, une chose. La deuxième, si le Service de probation pouvait être mis à profit au moment de la comparution, on pourrait déjà entreprendre auprès de l'individu qui comparaît un certain travail relativement à un problème qui pourrait être identifié.

Dans le fond, lorsqu'un individu comparaît, il arrive fréquemment, comme je l'ai mentionné, qu'il comparaisse à la suite d'un «acting out» qui est créé à l'intérieur de lui par un problème personnel. Prenons l'exemple de l'alcoolisme, ou de la violence conjugale, ou de ce genre de dossier là. Si le Service de probation pouvait systématiquement, à ce moment-là, être utilisé pour prendre en charge... Quand je dis «prendre en charge», ce que je veux dire, c'est utiliser les moyens mis à sa disposition pour s'occuper dès la comparution de l'individu qui manifestement devrait être plus enclin, à ce moment-là, à accepter ce genre d'aide là. Moi, il m'apparaît qu'on ferait un travail utile du point de vue de l'objectif ultime qui est la réinsertion sociale.

Ce que j'ai constaté quand je pratiquais, c'est que, malheureusement, le Service de probation manquait de ressources pour répondre à cette demande-là qui serait exprimée au moment de la comparution. Je sais, pour l'avoir vécu, qu'on faisait des évaluations en matière de violence conjugale parce que, évidemment, les besoins étaient criants dans ce domaine-là. Mais, outre l'évaluation, je ne sache pas ? les efforts, une fois l'évaluation faite, sont plus que timides relativement à certaines demandes qui sont effectuées devant les tribunaux ? que le Service de probation soit mis à profit au moment de la remise en liberté, au moment de la comparution.

Dans le fond, est-ce que, M. le ministre, il ne serait pas intéressant de s'interroger là-dessus puis peut-être de mettre des efforts en matière de ressources pour que, les agents de probation, plus nombreux ou, en tout cas, dans leur mandat, on puisse leur confier cette responsabilité-là d'intervenir au moment de la comparution et d'intervenir en force au moment de la comparution? Je dis ça et je me tais, sous réserve bien sûr des demandes qui peuvent être faites par les avocats de la défense. Ce n'est pas tous les avocats de la défense dans toutes les circonstances qui souhaitent que leur client soit pris en charge. Mais il y a plusieurs avocats de la défense qui, dès la comparution, pour toutes sortes de raisons, savent qu'éventuellement il va y avoir un plaidoyer de culpabilité dans le dossier et souhaiteraient que, dans l'éventualité de ce plaidoyer de culpabilité là, il y ait une prise en charge immédiate de leur client par voie d'un traitement, par voie d'une thérapie, par voie d'un certain nombre de moyens que le Service de probation peut mettre à la disposition des individus et qui feraient en sorte que, au moment du plaidoyer de culpabilité et au moment de la sentence, il y aurait déjà des efforts qui auraient été accomplis par l'individu lui-même, que le Service de probation le connaîtrait bien, pourrait recommander au juge un certain nombre de sentences qui pourraient ne pas comporter de sentence d'emprisonnement. Alors, dans le fond, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu, M. le ministre, de se pencher là-dessus et de voir la pertinence d'ajouter des ressources au Service de probation pour systématiquement offrir à ceux qui le demandent un service de suivi dès le moment de la comparution, sous réserve évidemment des demandes que les avocats de la défense pourraient faire?

Le Président (M. Paquin): M. le ministre.

M. Ménard: Bon, vous nous proposez une mesure intéressante de développement de nos services, mais, pour le moment, disons que vous reconnaîtrez certainement avec nous ? et je pense que les premières questions que vous avez posées le démontraient clairement ? que les priorités pour le moment doivent être de consolider la surveillance des gens qui sont en liberté sous... qui ont, en tout cas, des sentences avec sursis et des gens qui ont obtenu des sentences suspendues avec des ordonnances de probation.

Ensuite, ça pose quand même le problème pour un État que d'offrir, vous dites «des services», mais c'est aussi une certaine privation de liberté, priver les gens de leur liberté alors qu'ils plaident non coupables et que la loi les présume non coupables, et de les soumettre au régime de ceux qui sont... Je sais bien que, dans ce domaine-là, il ne faut pas être doctrinaire. D'ailleurs, nous ne le sommes pas parce que je peux vous dire que, alors que la Charte des droits et libertés de la personne nous demande de garder des détenus qui ne sont pas condamnés mais qui n'ont pas eu de cautionnement d'une façon distincte de ceux qui ont été condamnés, nous offrons aux détenus, s'ils veulent suivre des programmes de réhabilitation qui sont au service de ceux qui ont déjà eu leur procès et qui purgent une sentence, de suivre les mêmes programmes, et la majorité d'entre eux acceptent de suivre ces programmes. Donc, nous le faisons déjà à l'intérieur de nos prisons.

Je peux vous dire aussi que je pense que... En tout cas, moi, je l'ai fait beaucoup avec mes clients. D'ailleurs, je ne donnerai pas de nom, mais un parmi les plus célèbres, n'est-ce pas, avait profité de la libération sous cautionnement pour une infraction qu'il estimait ne pas avoir commise bien qu'il reconnût que, une autre dont il était accusé, il l'avait commise. Mais, puisqu'on l'accusait d'une infraction plus grave, alors il plaidait non coupable pour entrer à Portage, commencer une cure de désintoxication, et puis, quand finalement il a été trouvé coupable, enfin même partiellement, d'une partie des accusations dont on l'avait accusé, ça a permis au juge de lui donner une sentence qui permettait de continuer la cure de désintoxication qu'il avait... à Portage. Et puis je l'ai fait dans beaucoup d'autres domaines aussi. Parmi les clients les plus célèbres que j'ai défendus, je me souviens encore que j'avais, justement cherchant à obtenir une sentence non privative de liberté à cause des épreuves qu'ils avaient subies depuis qu'ils étaient partis du Canada et qu'ils avaient des jeunes enfants, en leur faisant entreprendre des travaux communautaires alors qu'à l'époque ça ne se donnait pas...

n(17 heures)n

Donc, je suis très sensible à ce que vous dites, mais on a quand même un problème de logique, au gouvernement, nous concevons un système pour les gens qui sont condamnés, et puis vous lui demandez de le prévoir pour les gens qui ne le sont pas et qui sont présumés innocents. Moi, je pense que, pour le moment, on peut laisser ça à l'imagination des avocats. Moi, il m'a été facile, dans ma pratique, quand je m'en donnais la peine, de trouver des solutions de ce genre auprès d'organismes privés de toutes sortes. Et puis, si les gens sont vraiment intéressés à cesser le genre de vie criminelle qu'ils menaient, généralement, ça signifie qu'en travaillant régulièrement ils peuvent mener une vie plus normale dans laquelle ils dépenseront moins en drogue, moins en alcool, et ils auront très souvent l'argent pour avoir accès à des services, même d'ordre médical, ce dont ils ont besoin.

Le Président (M. Paquin): M. le ministre, on va devoir interrompre. Et je vais devoir aussi vous empêcher de poser même une petite question. Mais, grâce à la collaboration de tout le monde, à cette petite question près, notre commission aura pu passer à travers les travaux et occuper ces heures très adéquatement.

Adoption de l'ensemble des crédits

Alors, à ce moment-ci, le temps imparti pour l'étude des crédits étant épuisé, je mets aux voix chacun des programmes. Est-ce que le programme 1, Gestion interne du ministère et encadrement des activités reliées à l'alcool, aux courses et aux jeux, est adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Président (M. Paquin): Sur division. Est-ce que le programme 2, Sûreté du Québec, est adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Président (M. Paquin): Adopté sur division. Est-ce que le programme 3, Garde des détenus et réinsertion sociale des délinquants, est adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: Sur division.

Le Président (M. Paquin): Adopté sur division. Est-ce que le programme 4, Sécurité et prévention, est adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: Sur division.

Le Président (M. Paquin): Adopté sur division. Est-ce que l'ensemble des crédits du ministère de la Sécurité publique pour l'année financière 2000-2001 sont adoptés?

Des voix: Adopté.

Une voix: Sur division.

Le Président (M. Paquin): Alors, ils sont adoptés sur division. Avant d'ajourner les travaux, je voudrais remercier tout le monde de sa collaboration et indiquer que j'ajourne les travaux à mardi le 2 mai, à 9 h 30, dans cette même salle, où nous étudierons d'autres crédits budgétaires, ceux dévolus à la Justice.

(Fin de la séance à 17 h 2)



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