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Version finale

34e législature, 3e session
(17 mars 1994 au 17 juin 1994)

Le lundi 18 avril 1994 - Vol. 33 N° 6

Étude des crédits du ministère de la Sécurité publique


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Table des matières

Journal des débats


(Quinze heures six minutes)

Le Président (M. LeSage): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission des institutions entreprend ses travaux. Je vous rappelle son mandat pour aujourd'hui et demain matin, qui est de procéder à l'étude des crédits budgétaires concernant le ministère de la Sécurité publique, les programmes 1 à 8, pour l'année financière 1994-1995. Est-ce qu'il y a des remplacements, Mme la secrétaire?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Loiselle (Saint-Henri) remplace M. Bordeleau (Acadie); M. Bergeron (Deux-Montagnes) remplace M. Fradet (Vimont); M. Williams (Nelligan) remplace M. Gobé (LaFontaine); Mme Cardinal (Châteauguay) remplace M. Paradis (Matapédia); Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata) remplace M. Parent (Sauvé); M. Brodeur (Shefford) remplace M. Savoie (Abitibi-Est).

Le Président (M. LeSage): Merci, Mme la secrétaire. J'aimerais rappeler aux membres de la commission qu'il y a eu entente entre les parties pour procéder sujet par sujet plutôt que de procéder à l'appel de programmes, programme par programme. Alors, ce sera des discussions générales. Je rappelle également aux membres qu'il y a une enveloppe de sept heures qui est prévue pour l'étude, dont une première partie de cinq heures pour cette séance, soit de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 22 heures ce soir. Alors, sans plus tarder, M. le ministre, est-ce que vous avez des déclarations d'ouverture à faire?


Déclarations d'ouverture


M. Robert Middlemiss

M. Middlemiss: Oui, M. le Président. C'est avec grand plaisir que je viens présenter, cet après-midi, à la commission des institutions mes premiers crédits à titre de ministre de la Sécurité publique. J'occupe cette fonction depuis maintenant trois mois et je puis vous assurer que les défis sont de taille et que les enjeux sont fort importants pour la société québécoise. Nous aurons d'ailleurs l'occasion d'en discuter plus longuement au cours des prochaines heures.

Avant d'aborder avec vous l'étude détaillée des crédits du ministère de la Sécurité publique, il m'apparaît indiqué de vous présenter, dans ses grandes lignes, notre situation budgétaire. L'année financière que nous venons de terminer a été marquée au sceau d'une importante rationalisation puisque, vous vous en souviendrez, nos crédits 1993-1994 étaient en diminution de 5,7 % par rapport à nos crédits de l'exercice précédent. Bien qu'environ 20 000 000 $ des 49 000 000 $ que nous avons dû absorber à titre de mesures de compression étaient constitués d'une réévaluation actuarielle du régime de retraite des membres de la Sûreté du Québec, il n'en demeure pas moins que la marche était haute à descendre, si vous me permettez l'expression. Et ce n'est que grâce aux efforts soutenus de tous les gestionnaires du ministère que nous avons été en mesure de maintenir nos services tout en respectant les objectifs budgétaires du gouvernement. Pour ce qui est de l'exercice financier qui vient de commencer, il s'inscrit dans la continuité des compressions et des rationalisations. Les différents programmes du ministère ont en effet absorbé des compressions totalisant plus de 13 000 000 $ qui se traduisent, au net, par une diminution de 3,3 % des crédits 1994-1995 comparés aux crédits 1993-1994. Les crédits de la Sûreté du Québec, pour leur part, augmentent de 2 %, notamment parce que des ajouts de ressources s'avéraient absolument essentiels pour, entre autres, améliorer les services policiers dans les communautés autochtones et pour renouveler notre réseau de télécommunications, qui constitue, comme vous le savez, un élément capital dans la réussite des opérations policières. Le portrait d'ensemble, ministère et SQ, nous indique donc que nos crédits passent de 734 000 000 $ à 731 500 000 $, soit une diminution de 0,3 % qui témoigne des efforts consentis au sein du ministère, lorsqu'on compare ce résultat à celui de l'ensemble du gouvernement, dont les dépenses sont en croissance de 2,9 %.

(15 h 10)

Pour bien comprendre l'ampleur des efforts qui nous sont demandés, il m'apparaît opportun de vous rappeler que nous opérons, 24 heures sur 24, 365 jours par année, un réseau de 24 établissements de détention supporté, en outre, par 23 bureaux de probation, que nous devons être prêts, 24 heures sur 24, 365 jours par année, à intervenir n'importe où sur le territoire du Québec s'il survient une crise ou un sinistre, que les opérations policières de la Sûreté du Québec, elles aussi, couvrent tout le territoire et exigent une permanence constante de policiers.

Le sens de mon propos est de vous illustrer que les services que nous dispensons sont particuliers, qu'ils se comparent mal aux opérations des autres ministères et qu'ils ont, par définition, un caractère essentiel et universel, ce qui rend tout exercice de compression très délicat. L'autre particularité de nos opérations est que nous n'avons que très peu de prise sur la demande de services et qu'il ne nous est pas toujours possible, de ce fait, de réduire le volume de nos activités pour rencontrer des objectifs de compression. Il en est ainsi, par exemple, des admissions quotidiennes en détention qui résultent des sentences rendues par la magistrature, ou encore de dame nature, qui décide si, oui ou non, les rivières vont déborder ce printemps, sans parler des trafiquants de drogue qui ne consultent pas la SQ avant de planifier leurs opérations. Nous sommes donc, plus souvent qu'autrement, le dernier élément d'une chaîne de production, au demeurant fort complexe et, surtout, très névralgique puisque c'est de la sécurité des citoyens dont il s'agit.

Quelques mots maintenant au sujet des compressions d'effectifs, et ce, dans la foulée de l'adoption par l'Assemblée nationale de la loi 198. Si on exclut la Sûreté du Québec, les compressions d'effectifs, cette année, totalisent, au ministère, 178 ETC sur 4400, soit une réduction de 4 % qui vient s'ajouter à des réductions antérieures totalisant 281 ETC. À la Sûreté, la compression pour 1994-1995 est de 1,5 %, ce qui représente 86 ETC sur 5698. Pour l'ensemble du ministère, le résultat est de 2,6 %. À ce jour, je vous informe que nous sommes parvenus à gérer à l'interne la presque totalité de nos mouvements de personnel et que nous n'avons acheminé vers Carrefour-transit que sept de nos employés. En fait, cette année encore, l'effet des compressions ne s'est pas fait trop sentir, compte tenu que nous avions conservé vacants plus de 60 postes. Cela dit, il importe de préciser que nous avons demandé au Conseil du trésor un ajout important de postes pour pouvoir opérer les nouveaux centres de détention qui nous seront livrés cette année par la Société immobilière du Québec, ajout qui aura pour effet d'annuler une partie de ces compressions.

Ceci m'amène maintenant à vous entretenir brièvement de certaines questions d'intérêt en regard des activités du ministère de la Sécurité publique. En premier lieu, parlons de nos services correctionnels, puisque c'est là un secteur où le niveau de nos activités n'est pas en décroissance, le volume des sentences prononcées quotidiennement par les tribunaux continuant d'augmenter, bien que plus modérément qu'auparavant. Pour contrer le phénomène de surpopulation carcérale et nous permettre aussi de rajeunir aussi nos installations, le gouvernement a autorisé au cours des dernières années la mise en chantier d'un certain nombre de projets, en l'occurrence la construction à Rivière-des-Prairies d'un nouveau centre de détention de 294 places qui devrait être disponible en octobre 1995, la construction à Rimouski d'un nouvel établissement de 64 places qui nous sera livré au début de l'été, la construction à Rivière-du-Loup d'un centre de 28 places qui devrait être disponible l'automne prochain; l'agrandissement du centre de Saint-Jérôme, qui permettra, dans un premier temps, d'ajouter 63 places additionnelles aux 81 existantes dès l'automne 1994, suivi d'une deuxième phase comptant, elle aussi, 81 nouvelles places, laquelle sera complétée à l'été 1995; un projet de même type, à Hull, M. le Président, qui, lorsque terminé l'automne prochain, rendra disponibles 58 places additionnelles. Quant à l'établissement de détention de Montréal, Bordeaux, l'aile qui avait été saccagée lors de l'émeute du printemps 1990 a été totalement refaite et elle sera prête pour occupation sous peu, lorsque la réfection du sous-sol aura été complétée. J'entends en outre soumettre prochainement au Conseil du trésor, conjointement avec mon collègue ministre délégué aux Services gouvernementaux, un important projet visant la rénovation complète de cet établissement qui est – et j'ai eu l'occasion de le constater de visu – dans un état définitivement délabré.

Ces différentes initiatives, qui représentent des investissements publics de l'ordre de 150 000 000 $ et qui ont pour effet indirect de créer des emplois, sur une base temporaire, pendant la durée des chantiers, et après, sur une base permanente, en augmentant le nombre de postes d'agents en services correctionnels, vont nous permettre de mieux répondre à la demande de services, d'assurer une meilleure sécurité de la population et aussi d'améliorer – mais sans aucun luxe, je vous l'assure – les conditions de vie des personnes prévenues et détenues. En parallèle à ces investissements majeurs consentis par le gouvernement en matière de détention, nous maintenons avec notre réseau d'organismes communautaires une étroite et précieuse collaboration, puisque ce sont là des partenaires privilégiés pour assurer la réinsertion sociale de nos contrevenants et opérer certains programmes alternatifs à l'incarcération, qu'il s'agisse, par exemple, du Programme de travaux compensatoires, dont l'achalandage ne cesse d'augmenter.

S'il n'y a pas de solution miracle au contrôle de la criminalité, j'estime néanmoins qu'il est prioritaire, désormais, pour le ministère de la Sécurité publique d'orienter son action vers la prévention de la criminalité. En effet, comme beaucoup de sociétés, le Québec a investi de façon importante dans les interventions à caractère curatif et répressif, en omettant l'analyse de la source du problème. De plus en plus, nous avons pourtant des preuves incontestables du rendement de l'investissement consenti en prévention, et les succès remportés par la prévention au cours des récentes années dans le domaine de la santé et de la conduite avec facultés affaiblies sont riches d'enseignements.

Dans la foulée du Sommet de la Justice, mon prédécesseur créait, en août 1992, la Table ronde sur la prévention de la criminalité, à laquelle ont siégé des représentants de plus d'une quarantaine d'organismes de tous les milieux concernés par la prévention de la criminalité. En août 1993, le président de la Table ronde sur la prévention de la criminalité, notre collègue, le député de l'Acadie, M. Yvan Bordeleau, remettait au ministre de la Sécurité publique un rapport unanime dans lequel 24 recommandations suggéraient des réponses à trois grandes questions: Dans quels domaines devrons-nous intervenir? Quelles stratégies de prévention devons-nous retenir? Comment devront être partagées les responsabilités? Évidemment, le phénomène de la criminalité, qui engloutit des milliards de dollars en deniers publics, qui appauvrit et désorganise économiquement des quartiers complets de nos milieux urbains et, surtout, qui est à la source d'un nombre incroyable de tragédies humaines sous toutes leurs formes, ne peut que comporter des réponses complexes et requérir la collaboration de l'ensemble des partenaires en vue d'une action collective intégrée. À ce titre, le rapport de la Table ronde sur la prévention de la criminalité constitue la base même d'une politique gouvernementale en prévention de la criminalité. Lors de son discours inaugural, le 17 mars dernier, le premier ministre du Québec affirmait d'ailleurs que nous devons recourir davantage à la prévention. Nous donnerons des suites concrètes aux mesures de prévention de la criminalité qui impliqueront, suite au rapport déposé, les municipalités de tout le Québec.

(15 h 20)

En 1994-1995, la prévention de la criminalité représentera donc un axe d'intervention central du ministère de la Sécurité publique. Mon ministère prépare à cette fin un plan d'action triennal pour permettre la réalisation d'une partie importante des recommandations de la Table ronde sur la prévention de la criminalité. Tout en respectant le contexte budgétaire gouvernemental, il est de mon intention de donner des suites tangibles à ce plan d'action en vue de favoriser une diminution des occasions de la commission de délits. J'envisage également de solliciter la collaboration des ministères de la Santé et des Services sociaux et de l'Éducation afin de poursuivre une démarche intégrée de prévention de la criminalité.

J'aimerais aborder maintenant la question de l'organisation policière. Comme on le sait, le 20 juin 1991, l'Assemblée nationale adoptait la Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les finances municipales, communément appelée la loi 145. Parmi les mesures édictées par cette loi, une visait l'introduction d'une contribution des municipalités pour les services de la Sûreté du Québec; une autre, le maintien de l'obligation, pour les municipalités de 5000 habitants et plus, de se doter de services policiers soit par le biais d'une entente, soit par la création de leur propre corps de police. Ces mesures ont eu pour effet de transformer le portait de l'organisation policière au Québec. Au plan financier, cette réforme a permis à l'État de facturer aux municipalités les services de la Sûreté du Québec, ce qui a généré, en 1993, des revenus de 66 300 000 $. En regard de l'organisation policière, on peut noter la création d'un corps de police, l'abolition d'un autre, la concrétisation de 13 ententes intermunicipales de police et la mise sur pied de deux régies intermunicipales de sécurité publique.

Malgré le fait que l'adoption de la loi 145 ait représenté un incitatif certain en faveur d'un redécoupage de la carte policière au Québec, il n'en demeure pas moins que les modifications à l'organisation policière s'effectuent à la suite de nombreuses réflexions portant sur les enjeux de la sécurité publique dictées par l'approche communautaire privilégiée, en ce tournant de siècle. Alors qu'il n'y a pas si longtemps les corps policiers agissaient principalement en qualité de représentants de la loi et de l'ordre, ils sont maintenant de plus en plus actifs en matière de prévention de la criminalité et d'organisation de services communautaires. À ce titre, il y a lieu de noter les efforts considérables déployés par la Sûreté du Québec auprès de nos jeunes dans les écoles, le rapprochement constant des corps policiers des citoyens qu'ils desservent et leur implication considérable envers notre communauté.

Je porte à votre attention, par ailleurs, que l'action du ministère de la Sécurité publique en matière d'organisation et de pratiques policières a principalement été axée sur la qualité de nos corps policiers, le professionnalisme de leurs membres et la sécurité de nos concitoyens et concitoyennes. Ainsi, à la demande de mon prédécesseur, ont été réalisés cette année, un examen du corps de police de la ville de Laval, une enquête sur le degré de préparation des forces policières lors des émeutes de la coupe Stanley, de même que l'inspection du Service de police de la Communauté urbaine de Montréal. Ces examens ne doivent pas être perçus comme des réprimandes destinées aux autorités des corps policiers visés, puisqu'ils constituent en réalité une réflexion réalisée en collaboration avec les corps de police concernés sur les moyens de pouvoir améliorer la performance et la qualité de leurs interventions.

Par ailleurs, en 1993-1994, nous avons tous été à même de constater les efforts soutenus déployés par les corps de police municipaux, la Sûreté du Québec et le ministère de la Sécurité publique en matière de lutte contre les crimes majeurs. Outre des succès remarquables obtenus par la Sûreté du Québec dans le domaine de la lutte à la contrebande des stupéfiants, c'est assurément le plan d'action en matière de contrebande des produits du tabac qui a retenu le plus l'attention des Québécois et des Québécoises. L'enjeu était de taille, dans la mesure où nous avions la ferme conviction que les réseaux de contrebande de produits du tabac supportaient en partie d'autres types de contrebande en développement, telle celle des armes, de l'alcool et des stupéfiants. La mise en place du plan gouvernemental québécois au chapitre de la contrebande fut particulièrement difficile à établir. En plus de nécessiter une intervention sur plusieurs fronts, tel le resserrement des contrôles policiers, le rehaussement des amendes et les modifications aux politiques fiscales, il nous fallait obtenir un appui tangible du gouvernement fédéral, ce qui fut fait. En raison de la collaboration étroite entretenue entre les différents corps policiers municipaux, la Sûreté du Québec, la Gendarmerie royale du Canada et nos homologues du gouvernement fédéral, il nous a été possible de mettre en place un plan d'action comportant plusieurs mesures. S'appuyant sur une diminution substantielle des taxes sur les produits du tabac, d'un renforcement des contrôles aux frontières canado-américaines, d'un rehaussement des contrôles exercés sur les vendeurs, les consommateurs et les réseaux organisés, le tout en visant une réduction de la consommation du tabac, il nous a été possible de porter un dur coup au phénomène de la contrebande.

Bien que nous ayons, à toutes fins utiles, atteint nos objectifs au niveau de la contrebande des produits du tabac, nous devrons demeurer vigilants. Il y a encore des produits du tabac vendus sur le marché noir, et la contrebande des produits alcoolisés, même si le phénomène semble se stabiliser ou régresser en raison du plan d'action gouvernemental, constitue un secteur attrayant pour les responsables du crime organisé. À cet égard, l'adoption prochaine par la Chambre des communes du projet C-11, loi C-11, qui permettra aux différents corps policiers du Québec d'appliquer la Loi sur l'accise, et un contrôle accru par une application plus serrée de la Loi sur les infractions en matière de boissons alcooliques et la poursuite d'une collaboration étroite entre les principaux partenaires concernés par la contrebande devraient nous permettre, au cours de la prochaine année, de diminuer substantiellement les activités des réseaux de contrebande toujours actifs.

M. le Président, pour clore ces quelques réflexions concernant l'organisation policière, j'aimerais, si vous me le permettez, porter à votre attention quelques récentes statistiques. À titre de ministre de la Sécurité publique, je suis fier, en effet, de pouvoir constater que l'énergie consacrée par le ministère et ses partenaires au cours des récentes années commence à générer des dividendes. Ainsi, alors qu'entre 1985 et 1989, nous avons assisté à une progression des infractions au Code criminel de 7,8 % sur cinq ans, dont une hausse tristement spectaculaire de 38,6 % au chapitre des crimes avec violence, en 1993, pour la seconde année d'affilée, nous assistons à une réduction de la criminalité. Selon les premiers estimés de la compilation des données de l'année 1993 par rapport à 1992, les infractions au Code criminel se sont abaissées d'environ 6 %, dont des diminutions de 7 % et 10 % au chapitre des crimes avec violence et des crimes contre la propriété. Au niveau des crimes avec violence, ceux-ci passent de 57 000 à 53 000, alors que les crimes contre la propriété enregistrent une chute de 353 000 à 318 000. La baisse des crimes avec violence est concentrée principalement dans les catégories vol qualifié et voies de fait, lesquelles passent respectivement de 12 000 à 10 000 et de 43 000 à 41 000. Dans la même foulée, comparativement à l'année 1992, durant l'année 1993, le taux de solution de la criminalité a légèrement augmenté, tout particulièrement pour les crimes avec violence.

(15 h 30)

Cela dit, au-delà de ces variations statistiques à la baisse, la compilation des données absolues relativement aux infractions au Code criminel nous rappelle que le nombre de crimes commis, bien qu'en diminution, demeure élevé. Et, en ce sens, nous poursuivrons nos efforts envers le mieux-être de la société québécoise.

L'année qui vient de se terminer a également été marquée par la consolidation de la réforme entreprise en 1992 en matière de casinos et de jeux. On se rappelle en effet que, le 23 septembre 1992, le gouvernement du Québec décidait de s'engager dans l'exploitation de casinos d'État, d'où l'adoption par l'Assemblée nationale, le 18 juin 1993, de la Loi sur la Régie des alcools, des courses et des jeux, dont l'application était confiée au ministre de la Sécurité publique.

À l'instar de plusieurs États européens et américains, le gouvernement du Québec était convaincu de la nécessité d'encadrer rigoureusement l'évolution du secteur des jeux de hasard et d'argent. Au surplus, la prolifération des appareils de loterie vidéo et l'illégalité dans laquelle se trouvent ces appareils, depuis le jugement Stalker et la décision, en 1991, de l'ex-Régie des loteries du Québec de cesser de les immatriculer, généraient une situation à laquelle le gouvernement du Québec ne pouvait demeurer insensible.

Avec l'adoption de cette loi, un nouvel organisme a été créé, en l'occurrence la Régie des alcools, des courses et des jeux, qui a obtenu le mandat d'assumer les responsabilités anciennement dévolues à la Régie des permis d'alcool et à la Régie des loteries du Québec et une partie de celles qui relevaient de la Commission des courses. Ce nouvel organisme est également chargé de surveiller l'implantation et de régir l'exploitation des casinos d'État et du système public de loterie vidéo.

Au-delà de la mise en place des jalons visant un contrôle étanche des jeux d'argent et de hasard, la création de la Régie des alcools, des courses et des jeux a constitué un effort de rationalisation des interventions gouvernementales. En regard de l'ouverture, l'été dernier, du casino de Montréal, il faut rappeler que nous avons tous uni nos efforts afin, d'une part, d'assurer une étanchéité du système à la criminalité et, d'autre part, de minimiser les impacts sociaux d'un tel projet. Je me dois ici de souligner l'excellente collaboration reçue de la Sûreté du Québec, de l'Association des directeurs de police et pompiers du Québec, du Service de police de la Communauté urbaine de Montréal, de la Régie des alcools, des courses et des jeux, ainsi que de la Direction générale de la sécurité et de la prévention du ministère.

Dans ce champ d'activité, cette année, le ministère et la Régie déploieront tous les efforts pour épauler la société d'État Loto-Québec en vue de l'implantation du système public de loterie vidéo. Je veux cependant assurer mes collègues de la commission que, en qualité de ministre de la Sécurité publique, les mêmes motifs d'intégrité, de transparence et de prévention de la criminalité prévaudront dans les orientations poursuivies sous ma gouverne.

Dans le secteur de la sécurité civile, le gouvernement a, l'an dernier, adopté un programme-cadre d'assistance financière destiné aux victimes des crues printanières. Ce nouveau programme-cadre introduisait deux nouvelles mesures permettant d'apporter une solution permanente à certains dommages récurrents causés aux propriétés particulièrement exposées aux inondations printanières. Ces deux mesures permettent l'utilisation d'une indemnité à titre d'allocation de départ et une subvention spéciale afin de surélever une résidence admissible au programme. J'ai l'intention de proposer au gouvernement l'adoption d'un programme similaire pour aider les personnes qui ont été ou qui seront touchées par les inondations de ce printemps.

Toujours dans le secteur de la sécurité civile, j'aimerais vous entretenir brièvement de la problématique reliée à la formation des pompiers au Québec. Le ministère de l'Éducation, en collaboration avec le ministère de la Sécurité publique, a entrepris, de concert avec des intervenants du milieu, une révision globale du programme de formation des pompiers. Vendredi dernier, j'ai rencontré, avec mon collègue de l'Éducation, les représentants du milieu pour discuter de ce nouveau projet de formation qui, lorsqu'il sera mis en place, permettra de rehausser le niveau de compétence des différents intervenants appelés à oeuvrer dans le domaine de la sécurité incendie.

Mais le temps passe et je dois, M. le Président, vous céder la parole, ou à mon vis-à-vis, ce qui, malheureusement, m'oblige à abréger mon tour d'horizon. J'aurais aimé, en effet, vous entretenir de nos interventions en matière de services policiers auprès des communautés autochtones, tout comme il aurait été intéressant de faire le point sur la situation dans les communautés mohawks, ce que nous aurons le loisir de faire demain matin, si vous le souhaitez.

Je n'ai pu vous entretenir non plus des réalisations du Bureau du coroner, de la Commission québécoise des libérations conditionnelles et de l'Institut de police du Québec, organismes que le ministère subventionne pour s'assurer de la qualité de la force policière qui intervient sur l'ensemble du territoire du Québec. Je me permettrai cependant de souligner que l'Institut de police et le ministère de l'Éducation ont entrepris la révision du programme de formation des futurs policiers donné dans les cégeps et à l'Institut de police. La mise en place de ce nouveau programme de formation devrait permettre à nos futurs policiers de mieux accomplir leur tâche et de réduire les incidents qui nécessitent une intervention du Commissaire à la déontologie policière et du Comité de déontologie policière, dont je souligne l'excellent travail.

M. le Président, il me fera maintenant grand plaisir de répondre aux questions des membres de la commission. Merci.

Le Président (M. LeSage): Merci M. le ministre. Je demande maintenant au député de Jonquière, porte-parole de l'Opposition officielle, s'il a des remarques préliminaires à faire également. M. le député de Jonquière.


M. Francis Dufour

M. Dufour: Oui. M. le Président je comprends que le ministre avait certaines difficultés à faire le tour de tout le dossier, puisque ça n'a pas été son dossier durant toute l'année. J'imagine que ça représente un certain problème, puisqu'il a été obligé de prendre ce que les autres lui disent, de temps en temps, pour compléter ses notes. Et ça, c'est un peu plus difficile. Je voudrais tout de même le saluer d'une façon spéciale ainsi que son personnel et les organismes relevant de son ministère.

Les crédits du ministère de la Sécurité publique s'élèvent cette année à 725 900 000 $, soit une diminution de 2 900 000 $ par rapport à ceux de l'an dernier. Or, en termes d'importance budgétaire, le ministère de la Sécurité publique arrive au septième rang parmi l'ensemble des ministères. D'un strict point de vue budgétaire, il s'agit évidemment d'un ministère important. Cependant, ce qui distingue ce ministère, au-delà d'une colonne de chiffres, c'est sa portée. En effet, le ministère de la Sécurité publique, de même que les organismes qui relèvent de sa responsabilité, comptent près de 10 000 employés répartis à travers tout le territoire québécois.

Je profite donc de l'occasion qui m'est offerte aujourd'hui pour souligner l'excellent travail du personnel du ministère de la Sécurité publique. Ces hommes et ces femmes accomplissent un travail exigeant, dans des conditions parfois extrêmement difficiles, quand on pense, entre autres, aux policiers de la Sûreté du Québec, aux agents des services correctionnels ou encore aux employés affectés à la sécurité civile. Dans le contexte actuel, où le gouvernement considère ses employés uniquement en termes de dollars, je pense qu'il convient de rappeler le professionnalisme des employés de l'État, plus spécialement celui des fonctionnaires du ministère de la Sécurité publique.

(15 h 40)

Ceci étant dit, l'étude des crédits constitue à chaque année une occasion privilégiée de tracer un bilan de la dernière année. Dans le secteur qui nous concerne aujourd'hui, soit la sécurité publique, l'année financière 1993-1994 fut, une fois de plus, fertile en rebondissements de toutes sortes. Ce fut d'abord, et ça l'est toujours, une année marquée par la contrebande, le commerce illégal et le marché noir. Inutile de rappeler la saga du trafic du tabac qui, à elle seule, fit beaucoup de bruit. Hélas, on ne peut malheureusement pas louanger le travail des autorités du ministère de la Sécurité publique dans ce dossier. Et, évidemment, ça nous permet de dire que rarement on a vu une société s'ajuster aux actes criminels qui se passent sur le territoire. Je pense qu'il y a certainement quelque chose qui nous différencie vraiment – de l'Opposition par rapport au gouvernement – parce que, pour moi, une société qui est obligée de s'ajuster aux criminels est une société qui ne se respecte pas et qui ne se fait pas respecter et qui donne un message aux gens à l'effet que, d'affronter ou de contester les lois, c'est la seule façon de faire avancer un projet de société. Et ça, je n'ai jamais compris comment le gouvernement pouvait arriver à dire que c'est une bonne décision d'abaisser les taxes. Tantôt c'est le tabac, demain ce sera quoi? Et je pense que là, toute la panoplie des coûts est mise en question, ou si ce n'est que juste les criminels peuvent avoir raison dans notre société.

Au cours de l'année 1993, la contrebande des cigarettes s'est faite au vu et au su de tous sans que le gouvernement intervienne. Alors que le gouvernement libéral se cachait la tête dans le sable, refusant d'appliquer la loi de la même façon pour tout le territoire québécois, tout le monde au Québec était en mesure d'identifier l'origine de cette contrebande. Il va sans dire que cette attitude du gouvernement a fortement contribué à discréditer son système judiciaire aux yeux de la population, en démontrant qu'au Québec le gouvernement avait une politique de deux poids, deux mesures.

Ce sentiment est extrêmement malsain car, en plus de miner la crédibilité de l'État, il entraîne une diminution de la confiance des citoyens envers l'appareil étatique. C'est d'ailleurs à partir du moment où des citoyens ordinaires, fatigués de l'attitude gouvernementale, ont commencé à défier la loi que le gouvernement a décidé d'intervenir. Acculé au pied du mur, tassé dans un coin, le gouvernement s'est enfin réveillé. Mais il reste encore un énorme travail à accomplir avant de crier victoire.

L'économie souterraine n'a pas disparu parce que la contrebande de cigarettes a diminué. En effet, des réseaux bien implantés et de mieux en mieux structurés se sont lancés dans la contrebande de l'alcool, qui, à son tour, fait perdre des centaines de millions en revenu au gouvernement du Québec, sans compter le trafic des armes et de la drogue, également de plus en plus florissant.

Je ne veux pas, ici, tout peindre en noir. Le Québec n'est quand même pas une république de bananes; tout se vend et s'achète. Toutefois, il est important de souligner qu'un bonne partie du trafic des armes, de la drogue – la cocaïne en particulier, selon les médias – et de l'alcool se fait à partir de territoires bien identifiés par les corps policiers et le gouvernement, et que, comme pour le trafic du tabac d'il y a quelques mois, le gouvernement ferme les yeux tout en obligeant la police à en faire autant.

J'espère que, en ce qui concerne le trafic de l'alcool, le gouvernement n'attendra pas, pour réagir, que les propriétaires de dépanneurs, de bars ou de restaurants descendent dans la rue. Si le gouvernement libéral veut réellement donner l'impression qu'il agit, il devrait commencer par cesser de réagir à la sauvette et à la dernière minute ou lorsque la situation est devenue carrément intolérable.

Mais, pour agir réellement et non plus seulement réagir, ça prend de la volonté politique. Et, quant à moi, je veux bien laisser une chance au gouvernement. Peut-être que, contrairement à l'ex-ministre de la Sécurité publique, qui avait baissé les bras devant certains contrebandiers, le nouveau titulaire du ministère de la Sécurité publique saura-t-il faire preuve de plus de courage et de plus de volonté. Jusqu'à présent, cependant, ça regarde plutôt mal.

Quand on prend connaissance des diminutions draconiennes que le gouvernement libéral est en train d'élaborer dans les services qu'offrait la Sûreté du Québec, il y a largement de quoi s'inquiéter. En effet, en vertu de la loi 198, tous les organismes publics ont reçu l'ordre de réduire de 12 % le nombre de leurs effectifs. Il s'agit là de coupures aveugles qui ne font aucune distinction entre la qualité des services, la sécurité des personnes ou, encore, l'importance de certains organismes dans l'économie d'une communauté.

La Sûreté du Québec devra donc abolir prochainement 700 postes, soit 500 policiers et 200 civils. Cette réduction entraînera la fermeture de 44 postes sur les 112 qui existent actuellement sur le territoire du Québec. Plusieurs petites communautés perdront ainsi leur poste de la Sûreté du Québec au moment même où le gouvernement oblige les municipalités qui ne disposent pas de services policiers municipaux à payer pour les services de la Sûreté du Québec.

Je parlais tout à l'heure de diminution de 700 employés, ou 700 policiers. Je fais juste référence aux revenus que le gouvernement tire des municipalités depuis l'application de la loi 145: 66 600 000 $. Si on prend ce montant et qu'on dit que chaque policier coûte environ 100 000 $, c'est 660 policiers qu'on devrait mettre en plus, et non pas les enlever. Vous en enlevez 700. On devrait ajouter 660 policiers, si on s'en tient aux coûts vrais. On parle de budget; on ne parle jamais de revenus qui sont générés lorsqu'on fait appliquer les lois. Et Dieu sait si on a des endroits qu'on pourrait identifier où on est loin d'avoir notre compte. On n'en a pas pour notre argent. Prenez toutes les amendes qui sont perdues parce qu'elles ne sont pas perçues puis que la loi est mal appliquée, tous les coûts de la contrebande, le travail au noir, où l'application de la loi n'est pas faite. Ça représente des sommes extraordinaires qui ne sont pas perçues par le gouvernement, où la police aurait tout intérêt, bien sûr, à faire respecter, nos lois.

Malheureusement, on coupe des effectifs, on leur donne du travail de plus. Puis, je l'ai dit et je le crois sincèrement, on pourra crier ou dire des choses sur le dos des policiers ou sur le dos de nos fonctionnaires, mais je pense que la vérité a des droits, puis on devrait le considérer. Moi, je pense que, de ce côté-là, on n'en a pas pour notre argent, et le gouvernement choisit les mauvaises cibles. C'est beau d'avoir de la rationalité, c'est beau de vouloir couper du personnel, mais je pense qu'une société où on doit appliquer la justice d'une façon correcte à travers toutes les classes de la société, ça mérite qu'on s'y arrête. Pour moi, c'est la plus grande vertu qui puisse exister dans un État. Un, appliquer la justice pour tout le monde et, après ça, les autres, on peut s'en occuper, mais au moins celle-là.

Alors que, logiquement, on tente de faire plus avec moins, le gouvernement libéral, lui, fait moins avec plus. Toute une philosophie de gestion! Qu'à Rimouski et Gaspé, où l'on compte 700 km de territoire, il n'y ait qu'un seul poste de police, ce n'est pas grave. Que le poste de Québec-Métro desserve désormais un territoire s'étendant des limites de Portneuf à la Malbaie, ce n'est pas grave non plus. Je ne sais pas jusqu'où le gouvernement ira, mais il n'y a rien dans cette opération pour rassurer la population.

Du côté des services correctionnels, l'année 1993-1994 semble avoir été relativement tranquille, si ce n'est la situation difficile vécue au Centre de détention de Montréal, sur laquelle je reviendrai plus tard aujourd'hui. Je note cependant que les crédits affectés à la garde des détenus et à la réinsertion sociale des délinquants ont diminué de 8 600 000 $ et que, de façon encore plus précise, les crédits de transfert, c'est-à-dire les subventions aux organismes de réinsertion sociale, ont chuté de près de 10 %. Je suppose donc que les organismes communautaires de réinsertion sociale, qui ont toutes les misères du monde à joindre les deux bouts, ont une fois de plus subi les contrecoups des restrictions budgétaires. Je reviendrai aussi sur cette question.

Puisque le ministre parle régulièrement – il en a parlé dans son propos – que la réinsertion sociale, c'est important, on veut faire de la prévention, moi, je pense que rien ne sert d'appliquer de grosses condamnations, on ne les applique pas, les condamnations. Donc, encore là, il y a des phénomènes sur lesquels on aurait à échanger sérieusement, parce que, moi, je pense que la réinsertion sociale, depuis des années qu'on en parle, c'est devenu un mot passe-partout, mais qui ne règle absolument rien, parce qu'on ne prend pas ça au sérieux.

J'ai constaté, par ailleurs, que la Régie des alcools, des courses et des jeux, qui n'a même pas encore un an, est en train de prendre sa vitesse de croisière. Déjà, elle a été amenée à prendre des décisions concernant les nouveaux mandats dont elle est responsable. Le dossier des loteries vidéo, ou, si l'on préfère, des vidéopokers, en est un. Je m'interroge toutefois sur le cheminement suivi par la Régie dans le processus d'accréditation du fournisseur d'appareils vidéopoker, la compagnie américaine VLT. Il me semble en effet que des doutes subsistent sur cette entreprise qui a encore des démêlés avec la justice des États-Unis. J'aurai donc un certain nombre de questions à poser au président de la Régie des alcools, des courses et des jeux à ce sujet.

J'aurai également des questions à poser quant à la saisie des quelque 25 000 appareils vidéopoker, également illégaux, encore en circulation. Les directives du gouvernement, celles de la Sûreté du Québec et celles de la Régie des alcools, des courses et des jeux sont loin d'être claires et limpides. Par ailleurs, la confusion la plus totale règne sur le terrain, ce qui ne facilite en rien l'implantation des loteries vidéo opérées par Loto-Québec. Bien sûr, comme à chaque année et outre ce que j'ai déjà mentionné, la Sûreté du Québec fera l'objet de nombreuses questions, notamment sur la façon dont certaines enquêtes sont menées et sur la manière dont certaines opérations sont conduites. J'aurai évidemment des questions à poser au Commissaire à la déontologie policière sur des dossiers bien précis.

Enfin, le Bureau du coroner ne sera pas oublié non plus, puisque l'Opposition attache une très grande importance à ses activités. Entre autres, en 1993-1994, l'enquête du coroner Gilbert sur la mort du caporal Lemay a retenu l'attention. Il s'agit ici d'une enquête importante, mais extrêmement difficile; puis, malgré qu'elle ne soit pas encore complétée, il y a d'ores et déjà lieu de poser certaines questions. En outre, le Bureau du coroner, mais surtout le ministre de la Sécurité publique devront également nous fournir de bonnes explications quant à la fermeture du laboratoire de médecine légale de Québec, décision qui va à l'encontre de l'efficience et de l'efficacité.

Enfin, plusieurs autres sujets feront l'objet d'un questionnement serré au cours des prochaines heures. Ainsi, sans plus tarder, compte tenu du menu chargé, je suis prêt à débuter l'étude de chacun des programmes du ministère de la Sécurité publique. Je vous remercie, M. le Président.

(15 h 50)

Le Président (M. LeSage): Merci, M. le député de Jonquière. Est-ce qu'il y a d'autres membres de cette commission qui désirent faire des déclarations d'ouverture? Sinon, je demanderais au ministre de bien vouloir, pour les fins d'enregistrement du Journal des débats , identifier les personnes qui l'accompagnent. M. le ministre.

M. Middlemiss: M. le Président, tous les gens ici avec moi?

Le Président (M. LeSage): Les deux personnes qui sont assises avec vous.

M. Middlemiss: O.K. À ma gauche, le sous-ministre du ministère, M. Jean-Marc Boily; à ma droite, mon directeur de cabinet, M. Jeff Polenz. Est-ce que c'est assez, là?

Le Président (M. LeSage): M. le ministre, il n'est pas nécessaire d'identifier toutes les personnes. À tout événement, les personnes qui seront appelées à témoigner ou à prendre la parole, nous leur demanderons, avant de procéder, de bien vouloir s'identifier et indiquer le poste qu'elles occupent au sein de votre ministère.

M. Middlemiss: C'est bien, M. le Président.

Le Président (M. LeSage): M. le député de Jonquière, la parole est à vous.


Discussion générale


Effectif policier et situation en territoire mohawk

M. Dufour: Oui. Bien sûr qu'on a une certaine difficulté, le ministre en a parlé, le directeur de la Sûreté du Québec n'est pas présent, mais il y a beaucoup de dossiers qui touchent le directeur de la Sécurité publique. Je pense qu'on va essayer tout de même de toucher certains sujets qui, sans prendre le global, où c'est le plus... Surtout certains petits sujets qui nous permettront peut-être d'élaborer ou d'avoir des réponses, même en son absence. Il y a son adjoint qui est là, ça fait qu'on peut le faire.

Je voudrais parler d'abord de la situation en territoire mohawk. On a demandé, bien sûr, à travers l'étude des crédits, certaines informations concernant le territoire mohawk de Kahnawake, Kanesatake, Akwesasne. On sait aussi que, à part de très rares exceptions, la Sûreté du Québec ne pénètre pas dans ces territoires. J'aimerais peut-être à ce moment-ci faire état de certaines situations puis demander en même temps au ministre de faire le point. Sur les renseignements que nous avons demandés, à Akwesasne, et si on tient compte des années 1990-1991 puis 1993-1994, les effectifs qui sont là, de la Sûreté du Québec, sont, en 1990-1991, 55 à 91 personnes, une moyenne de 62. En 1992, on diminue de 23, à 47 – en 1990-1991, il y avait une situation particulière qu'on connaît – policiers, une moyenne de 45 pour l'année. De 1992 à 1993, là, on descend à un policier; 1993 à 1994, un policier. Kahnawake, c'est la même chose: une moyenne de 18, une moyenne de 36, une moyenne de 53, 53. Kanesatake, c'était 15, 8, 8. Donc, il y a des variations très importantes. Est-ce que ça veut dire, au moment où on se parle, qu'il n'y a plus de problèmes, il n'y a plus de difficultés? C'est quoi la raison pour laquelle on descend d'une façon aussi drastique le nombre de policiers auprès de ces réserves-là?

Le Président (M. LeSage): M. le ministre.

M. Middlemiss: Oui, M. le Président. Mais, comme l'indiquait le député de Jonquière, 1990 était une année qui était exceptionnelle à cause de la crise que nous avons vécue. Et c'est pour ça qu'il y avait une moyenne de 62 effectifs à Akwesasne, qui ont été réduits en 1991-1992. Ensuite, 1992-1993 – comme vous le savez, il y a une force policière à Akwesasne, et les gens ont demandé à la Sûreté du Québec... Ils ont dit que ce n'était pas nécessaire que la Sûreté du Québec déploie autant de forces policières à Akwesasne, dans cette municipalité ou dans cette région. Et, à leur demande, nous avons retiré les effectifs qu'on avait en place.

Le Président (M. LeSage): M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Mais j'imagine que le positionnement du ministre, même s'il écoute la demande des gens concernés, il a fait une analyse de la situation. Qu'est-ce qui pouvait justifier... Parce que, même s'il y a la présence d'une force policière autochtone ou des Peacekeepers, sur quoi vous vous êtes appuyé pour enlever ou retirer... Parce qu'on sait que c'est une plaque tournante de pas mal de choses, ce coin-là. Puis ce ne sont pas des accusations, ça arrive comme ça.

M. Middlemiss: M. le Président, regardez, en 1990, il y avait une entente quadripartite entre le gouvernement canadien, l'Ontario, le Québec et la communauté d'Akwesasne pour une force policière. Elle existait. On a augmenté les effectifs en 1990-1991, à leur demande, à cause de la crise. Et c'est pour ça. Parce que, avant ça, c'était la force policière d'Akwesasne qui s'occupait de faire, de façon générale, la surveillance policière. Et, pour les seconder... Si vous réalisez, Akwesasne, c'est assez loin du restant du Québec et, pour s'y rendre, il faut passer par l'Ontario, il faut passer par l'État de New York pour rejoindre la partie d'Akwesasne qui est au Québec. Donc, il y a la GRC qui travaillait avec les Peacekeepers ainsi que la police provinciale de l'Ontario, parce que c'est plus accessible. Donc, en 1990, au moment de la crise, eux nous ont demandé d'envoyer la Sûreté du Québec, et nous l'avons fait. Une fois que les choses se sont tranquillisées, ils nous ont dit: nous croyons que c'est possible pour vous de vous retirer, et on va continuer à faire la surveillance policière comme on la faisait avant. C'est certain que depuis le 8 février, au moment où on a décidé de bouger sur l'affaire de la contrebande, avec une meilleure surveillance de la frontière canado-américaine, avec un déploiement de plus de policiers de la GRC, toutes ces choses-là ensemble, certainement, donnent le résultat qu'il y a une plus grande surveillance qui se fait – le député a mentionné qu'il y avait beaucoup d'activités qui se passaient dans ce coin-là. Donc, il y a une surveillance accrue qui se fait concernant le trafic de contrebande.

Le Président (M. LeSage): M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Oui. Mais, avec un policier, qu'est-ce que vous pensez qu'il peut faire? Un policier! Vous avez dit que vous avez des opérations 24 heures par jour, sept jours par semaine. Ça fait que ce policier-là, c'est un super-policier.

M. Middlemiss: Non. M. le Président, je pense que, peut-être, le député de Jonquière n'a pas tout à fait saisi. Il y a une force policière...

M. Dufour: J'ai saisi ça.

M. Middlemiss: ...à Akwesasne qui fait partie d'une entente quadripartite, qui est payée par le fédéral, l'Ontario et le Québec. Et, en temps normal, cette force policière peut s'occuper de faire les interventions qui sont nécessaires. Avant 1990, avant la crise, c'est eux qui s'en occupaient, et ça date de longtemps, ce n'est pas arrivé comme un cheveu sur la soupe. Donc, en 1990, durant la crise, ils nous ont demandé de déployer plus de policiers, et nous l'avons fait. Et, après la crise, ils ont dit: nous ne croyons pas que ce soit nécessaire que vous déployiez autant de personnes ici, à Akwesasne; et on a laissé une personne, un policier, qui n'est pas là tout le temps, là, en passant. C'est un agent de liaison. C'est de cette façon-là que nous opérons. Si le besoin se fait sentir d'en avoir plus, ne vous inquiétez pas, nous devrons poser des gestes à ce moment-là.

M. Dufour: Mais, comme on n'a pas beaucoup de pouvoirs sur les territoires autochtones, quelle garantie a-t-on que les lois sont respectées? Moi, je ne sais pas. On regarde un peu ce qui se passe sur le territoire... Il y a des places, la contrebande, elle rentre, elle va dans des endroits, et... Moi, je n'ai aucune garantie, là; à moins d'être bien naïf, là, je n'ai aucune garantie que les lois sont respectées. À qui ils font rapport, ces gens-là? Comment on peut contrôler ces rapports-là? C'est notre super-policier, le superman, là, qui s'en va partout et qui règle tout ça? Moi, je vous dis, c'est inquiétant. Et à Kahnawake, ils ne sont pas tous retirés, ils ne vous l'ont pas demandé. Et si, demain matin, là, les bandits vous disent: enlevez donc la police, ça va marcher bien mieux, ça ne coûtera pas un sou, allez-vous accepter ça? Les bandits pourraient bien dire: on va se policer, nous autres; notre mafia, on va s'organiser, on n'a pas besoin de police, on va s'arranger entre nous autres. Ça m'inquiète, ce que vous me dites, moi, là.

M. Middlemiss: Bien, M. le Président, la situation, avant la crise, était que c'étaient les Peacekeepers d'Akwesasne qui faisaient la surveillance policière. Et, durant la crise, on nous a demandé de renforcer, et, aujourd'hui encore, nous sommes prêts... Mais nous travaillons de près, comme je vous l'ai dit, avec la police provinciale de l'Ontario et la Gendarmerie Royale, à cause de la situation géographique d'Akwesasne. Et la partie d'Akwesasne sur le territoire québécois – je vous l'explique, là – y êtes-vous déjà allé? Savez-vous où c'est?

M. Dufour: Je sais où c'est, mais je ne suis pas allé...

M. Middlemiss: Vous n'y êtes jamais allé. Pour y arriver, vous êtes obligé de traverser à Cornwall...

M. Dufour: Je sais où c'est. On passe le pont.

(16 heures)

M. Middlemiss: ...et vous traversez l'Ontario. Ensuite, vous arrivez dans l'État de New York et, de là, vous revenez au Québec, où il n'y a presque pas d'activités du tout; il n'y a pas de restaurants, il n'y a pas d'hôtels. À ce moment-là, c'est extrêmement difficile. Donc, les Peacekeepers, qui s'occupent de tout le territoire d'Akwesasne, la partie dans l'état de New York, la partie en Ontario et aussi la partie au Québec, font cette surveillance. En cas de besoin, comme ça s'est produit en 1990, ils nous ont demandé d'augmenter la force policière de la Sûreté du Québec, et nous l'avons fait.

M. Dufour: Mais, en Ontario, ils ne leur ont pas demandé de se retirer.

M. Middlemiss: Regardez l'Ontario, ils sont juste là, ça fait partie intégrante du territoire de l'Ontario. Mais oui, c'est ça. Il me semble, M. le Président, que ça serait une bonne chose que la commission... qu'on puisse aller voir ça, puis, après ça, on va comprendre bien plus c'est quoi. Moi, je l'ai vu, je sais où c'est.

Une voix: Les journalistes aussi en verraient...

M. Middlemiss: Oui oui, il y a peut-être des gens qui devraient aller voir. Ils verraient...

Une voix: ...plusieurs qui ne connaissent pas ça.

M. Middlemiss: M. le Président, s'il y a des choses qui se produisent, il y a déjà la Gendarmerie royale qui est là et la police provinciale de l'Ontario. Et s'ils ont besoin d'une intervention de notre part, bien, il y a une relation constante. Donc, à ce moment-là, on va y aller. Et il me semble que la preuve est là. Depuis 1990, à part certains blâmes qu'on fait dans ce coin-là, il semble que la sécurité des gens est protégée.

M. Dufour: Oui, peut-être que la sécurité des gens est protégée, mais...

M. Middlemiss: Est-ce que ce n'est pas leur rôle... Oui, d'accord.

M. Dufour: ...les rapports, ou la finance, ou les taxes du gouvernement du Québec... La justice, je ne suis pas assuré qu'elle soit appliquéee. Ils peuvent être, bien sûr, protégés à l'interne, ça, ils ne se tirent peut-être pas trop dessus, là. Ce n'est pas ça que je soulevais. Je soulevais que la moralité, par exemple... Il n'y a rien là; il n'y a pas de bars, d'après ce qu'on entend, il n'y a pas d'hôtels, mais il y a une chose qu'on sait, la contrebande passe par là. Puis, à moins que mes yeux n'aient pas vu, il y a beaucoup d'endroits où on sait que ça se passe comme ça. On l'a vu à la télévision, on l'a vu un peu partout, les journaux en ont rapporté. Il ne faut pas...

M. Middlemiss: M. le Président, si on dit: on a vu à la télévision... La plupart de ces choses-là, c'était en Ontario, Cornwall Island. Ce n'est pas au Québec, ça, là. Il me semble qu'il faut faire la distinction. C'est pour ça que, des fois, c'est très prudent d'aller voir puis de voir les conditions avant de dire que la télévision a montré... Ces choses-là ont été prises soit dans l'État de New York ou soit dans la province de l'Ontario. M. le Président, il y avait un gros problème de maintenir nos policiers à Akwesasne, au Québec. Il fallait avoir la permission, premièrement, qu'ils passent par l'État de New York avec leurs armes. Il fallait qu'ils aient la permission de traverser, parce qu'il n'y a aucun moyen de se rendre sur le territoire québécois sans passer par l'Ontario. Donc, il y avait un problème de les garder là. Mais, tant et aussi longtemps qu'il y a eu la crise, oui, nous avons maintenu une force policière à Akwesasne. Toutefois, une fois que les mêmes personnes qui nous ont demandé de nous présenter là pour renforcer et protéger la population d'Akwesasne nous ont demandé de nous retirer, nous l'avons fait. Nous gardons un agent de relation qui fait affaire avec les Peacekeepers et qui s'assure aussi de la relation avec la police provinciale de l'Ontario et la Gendarmerie royale.

M. Dufour: J'espère que M. le ministre ne persistera pas à dire qu'il faut tout voir de quoi on parle, parce que je vais avoir un problème tantôt. Moi, je n'ai jamais vu de meurtre de ma vie en personne. Je sais que ça existe et qu'il s'en fait. Puis les juges ne l'ont pas fait non plus. Alors, moi, je ne voudrais pas qu'on continue là-dessus. Je veux juste vous dire une chose: s'il y a un problème de frontières, bien, les contrebandiers n'en ont pas, de problèmes. Ils ne demandent pas la permission, eux autres. Puis ce que j'essaie de vous démontrer, c'est qu'il faut qu'il y ait des mesures de prises pour empêcher la contrebande, que ce soit la contrebande du tabac, des armes, de l'alcool. Puis ce n'est pas avec un policier, même s'il est superman, que vous allez régler ce problème-là. Donc, je dis que le gouvernement, depuis le temps que ça se passe, il aurait dû regarder et faire quelque chose. La police pour rire, là, on ne devrait pas avoir ça. Enlevez-la, ça va vous en donner une à mettre ailleurs. Au moins, on aura l'impression qu'elle travaille, tandis que là, on a l'impression que vous avez mis un «dummy» qui ne fait plus rien; c'est un pion qui ne bouge plus. Ça, n'appelons pas ça... ne le disons même pas, on devrait marquer: zéro policier dans le coin. Parce que, comment vous le contrôlez, ce qui se passe là? Moi, vous ne me ferez pas croire ça à moi, là. Vous ne le contrôlez pas.

M. Middlemiss: M. le Président, pour un député d'un parti politique qui dit qu'ils veulent donner cette autonomie aux communautés autochtones, qui se pètent les bretelles, comme ils l'ont fait en 1985, je suis surpris. Akwesasne a sa force policière. On vient de signer, là... On va signer une nouvelle entente quadripartite pour que ces gens-là puissent faire la surveillance policière. Mais ce n'est pas le néant. J'ai dit que la Sûreté de l'Ontario est là, la Gendarmerie royale, elle est là pour... Parce que le problème du député de Jonquière, M. le Président, ce n'est pas de protéger les gens d'Akwesasne; il parle de contrebande. Je l'ai dit puis j'ai mentionné tantôt que, depuis le 8 février, on a mis en place, avec le gouvernement canadien, des mesures pour limiter et réduire, dans la mesure du possible, le plus tôt possible, toute la contrebande. Ça, si on veut parler de ça... mais je ne vois pas le lien avec la police d'Akwesasne, là. C'est que vous voulez leur donner leur autonomie? Oui ou non? C'est une façon de le faire. On vient... C'est votre problème. Vous vous pétez les bretelles que vous étiez les premiers, vous vouliez le donner. Mais il me semble que, dans l'entente quadripartite qu'on a là, tout le monde fait sa part. Et nous espérons... On en a d'autres, ententes, avec des forces policières autochtones, dans d'autres régions du Québec, et on continue à vouloir... on a un programme de ça. Mais si on veut parler de contrebande, c'est une autre paire de manches.

M. Dufour: Bien, je pense qu'on est bien placés pour parler de l'autonomie. En 1985, dans la résolution, si je me rappelle bien, puis si j'ai bien lu, c'est que le gouvernement, l'Opposition, à ce moment-là, a voté contre. Ne nous faisons pas d'illusions, là. Moi, je ne déplacerai pas le problème.

M. Middlemiss: On agit.

M. Dufour: Je ne déplacerai pas le problème. Je pense que, même en étant autonomes, il faut faire comprendre à tout le monde au Québec qu'il y a une politique; il y a une justice qui s'applique pour tout le monde. Ça, ça n'a pas d'affaire à l'autonomie territoriale, la question de la justice puis la question du respect des lois. Et ça, je vous dis, quand on ne respecte pas nos lois... C'est un accroc, puis ça fait mal, au point de vue social, quand on ne perçoit pas nos revenus, que nos taxes ne rentrent pas puis que tous les gens ne paient pas leur écot, bien, c'est d'autres qui paient pour ou bien c'est les programmes qui s'en vont chez le diable. Et j'ai l'impression que ce sont les programmes qui s'en vont chez le diable. Puis, en plus, on paie plus. On paie plus, puis on a moins en retour.

Et, dans cette question qui nous préoccupe – puis c'était la question de la contrebande – je dis qu'actuellement, à moins que vous ne me fassiez la preuve que la contrebande a diminué d'une façon... Je ne parle pas de la contrebande du tabac, c'est facile, ça. Vous avez juste à dire: on va tout régler comme ça. En appliquant les lois, quel est le succès que vous avez au point de vue de l'alcool? Est-ce que ça a diminué de façon raisonnable? Quel est le contrôle que vous exercez sur ces territoires-là? Puis, quand vous allez aller à l'intérieur pour voir ce qui se passe? Pas de policier...

M. Middlemiss: M. le Président, est-ce que je dois assumer ou présumer que le député de Jonquière croit que toute la contrebande de l'alcool passe par Akwesasne? Est-ce que c'est ça que je dois croire de sa question?

M. Dufour: Je n'ai pas dit ça.

Le Président (M. LeSage): M. le député de Jonquière, est-ce que vous voulez...

M. Dufour: Je ne le sais pas, moi. Ça a l'air que le ministre a hâte d'être dans l'Opposition pour questionner. Moi, je n'ai pas d'objection.

M. Middlemiss: Non, non, non.

M. Dufour: Bien, moi, je dois vous dire que je n'ai pas de problème là-dessus. Je ne dis pas que tout l'alcool passe là...

M. Middlemiss: Ne gardez pas votre respir.

M. Dufour: ...mais il y a une notoriété publique. Je m'aperçois que les ministres ont hâte de poser des questions...

M. Middlemiss: Ah, ne vous inquiétez pas de ça.

M. Dufour: Ça fait que ça va arriver, peut-être, ça, un jour.

M. Middlemiss: «Peut-être». Le mot est bon, «peut-être».

M. Dufour: Peut-être plus vite qu'on pense. Ce que je veux vous dire par rapport à ça, c'est que.. bien sûr que toute la contrebande passe là, mais il y a une sorte de contrebande qui est reconnue, puis à peu près tout le monde le sait, c'est le trafic des armes. Elles passent toutes par là ou à peu près. Ça, ça en est un.

Le problème de l'alcool, il va ailleurs. Le problème de tabac aussi passerait dans d'autres endroits. Mais on peut parler d'une plaque tournante. C'est possiblement là qu'il s'en passait le plus.

(16 h 10)

Le Président (M. LeSage): M. le ministre.

M. Middlemiss: M. le Président, je veux juste vous donner un exemple que, sur la contrebande du tabac, l'Ontario n'était pas trop, trop friande. Parce que leur problème, c'était l'alcool. Pourtant, si tout passait par Akwesasne, comment ça se fait qu'il y avait... Pourquoi l'Ontario souffre plus de problèmes d'alcool? C'est parce qu'il y a d'autres frontières tout le long de la frontière de l'Ontario et de New York. Il y a des endroits, là aussi.

Mais, pour revenir à Akwesasne, M. le Président, il me semble que la force policière... Si on veut dire que les gens d'Akwesasne ne sont pas protégés, ils le sont. On vient de signer une autre entente quadripartite. Sur l'affaire de la contrebande, on a mis en place des structures et des méthodes pour améliorer, dans le but de tout régler la contrebande, le 8 février. Et je dois vous dire que, d'après les saisies et toutes ces choses-là, M. le Président, il y a une réduction. Et le jour, comme je l'indiquais tantôt dans mes notes préliminaires, le moment où on aura les pouvoirs, la Sûreté du Québec et les forces policières municipales, d'appliquer la loi sur l'accise, à ce moment-là, on va avoir un plus grand potentiel, aussi, d'arrêter toutes ces choses-là. C'est un peu ça qu'on veut se donner.

Et, concernant, comme j'ai dit tantôt, toutes les autres communautés autochtones, on s'est donné un programme pour qu'elles puissent avoir leurs propres forces policières sous la juridiction et selon les lois du Québec. C'est ça qu'on veut avoir, dans le respect de l'autonomie, aussi, de ces communautés-là.

M. Dufour: Comme on n'est pas encore un pays, j'ai compris que le gars à Akwesasne, le policier, il va avoir le rang de consul, il ne peut pas être ambassadeur. Ça fait que lui va être là pour voir ce qui se passe et bénir je ne sais pas trop quoi, là...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dufour: Mais je pense que, d'une façon ou de l'autre, si la situation ne vous préoccupe pas, moi, je vous le dis, elle me préoccupe au plus haut point.

J'aimerais continuer en parlant de la situation qui se passe à Kahnawake, et...

M. Kehoe: M. le Président, j'ai une question sur la contrebande. Avez-vous fini avec ce sujet-là?

Le Président (M. LeSage): M. le député de Jonquière, est-ce que...

M. Dufour: Bien, on parle de contrebande aussi, parce que je parle de la drogue et tout ça.

M. Kehoe: Bien, allez-y, allez-y pour le moment, et on posera des questions après.

M. Dufour: Je vais faire un peu le tour de ça.

Le Président (M. LeSage): Allez-y, M. le député de Jonquière. On reviendra avec le député de Chapleau par la suite.

M. Dufour: Akwesasne, je pense qu'on a fait le tour du sujet. On ne l'a pas réglé, mais on en a parlé.

Le trafic de la drogue qui se passe...

Le Président (M. LeSage): M. le député de Jonquière, un instant. Un instant, M. le député de Jonquière.

M. Middlemiss: M. le Président, je pourrais peut-être donner plus de détails demain. M. Lavigne va être ici, et il pourra vous donner encore... Il est pas mal plus familier que moi avec les activités policières. Je peux vous dire qu'il est satisfait de la situation... de voir à ce que les gens soient protégés. Il pourra certainement, demain, être plus spécifique que moi sur ça.

Le Président (M. LeSage): Merci, M. le ministre. M. le député de Jonquière, poursuivez.

M. Dufour: Oui. À Kahnawake, il y a de la drogue. Est-ce que vous êtes au courant si les Warriors sont bien impliqués dans le trafic de la drogue?

M. Middlemiss: M. le Président, je n'ai rien de concret qui pourrait identifier plus certaines personnes dans les communautés autochtones que d'autres personnes dans la communauté québécoise ou canadienne en général. On a, oui, ouï dire que beaucoup de choses se transigent par les réserves, que ce soit Kahnawake, Akwesasne ou Kanesatake ou d'autres communautés autochtones à travers le Québec, mais, de me poser la question... Non, moi, je n'ai aucun indice, aucune indication qu'il y a des individus qui... Ça se peut, comme dans toute société, qu'il y ait des choses qui se passent là aussi.

M. Dufour: Je vais laisser le député de Chapleau.

Le Président (M. LeSage): M. le député de Chapleau.

M. Kehoe: Oui. M. le Président, quand on est dans l'Opposition, c'est bien facile de faire des affirmations et de dire n'importe quoi, de critiquer, de faire de la démagogie. Enfin, tout ce qu'on a entendu dans ses déclarations en ce qui concerne la contrebande, ça me surprend beaucoup. Je pensais qu'aujourd'hui il était pour nous féliciter, le Parti libéral, pas le ministre de la Sécurité publique ou la police provinciale, mais le Parti libéral pour ce qu'on a fait, justement, pour régler la question de contrebande des cigarettes.

M. Dufour: ...

M. Kehoe: Excusez-moi, vous avez parlé, je pense que j'ai le droit de dire juste...

M. Dufour: Vous n'étiez pas là quand j'en ai parlé, justement.

M. Kehoe: Pardon?

M. Dufour: Vous n'étiez pas là quand j'en ai parlé.

M. Kehoe: J'en ai entendu beaucoup, et ce que j'ai entendu, là...

Une voix: Oui, il était là.

M. Dufour: Au début.

Le Président (M. LeSage): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Kehoe: C'est facile, quand on est dans l'Opposition, de dire des affaires comme ça. Là où je veux en venir, M. le Président, c'est que...

Le Président (M. LeSage): Allez-y, M. le député de Chapleau.

M. Kehoe: ...je pense que la question de la contrebande des cigarettes dans son ensemble – et je vais poser des questions au ministre en temps propice – c'était réglé justement par le courage qu'on a eu de changer la loi, de régler le problème une fois pour toutes. On savait qu'il n'y avait pas d'autre manière. Le député de Jonquière parle de deux poids, deux mesures. C'est sûr et certain, quand on a vu à la télévision, des personnes, à Jonquière, vendre des cigarettes, puis des personnes, sur la réserve, qui vendent des cigarettes, puis on ne peut pas...

Une voix: ...

M. Kehoe: Excusez-moi. Je vais parler encore, quand même. J'ai le droit de parole, je pense – 50 % de ce bord-ci aussi. Quand on voit ça, c'est vrai, à la télévision, c'est dramatique, puis tout le reste, puis ça donne l'opportunité à des personnes qui veulent se faire du capital politique, comme le Parti québécois a fait durant le temps que se sont produites ces affaires-là, de faire toute sorte de démagogie... puis, deux poids, deux mesures. Si, malheureusement, un jour, vous prenez le pouvoir, j'aimerais savoir comment vous allez régler ces affaires-là. C'est facile de faire toutes sortes d'accusations, mais je pense que le geste posé par le premier ministre, de quasiment forcer le fédéral à agir aussi dans ce dossier, de forcer la province de l'Ontario et, surtout, de prendre nos responsabilités, de baisser la taxe sur les cigarettes, bien sûr que c'est ça qui a réglé le problème. Ce n'est pas fini encore, la contrebande des cigarettes, mais je pense que c'est diminué sensiblement. Il n'en reste quasiment plus.

Je pense que, sur ça, il faut quand même se rendre compte qu'on a posé un geste concret, définitif, qui a réglé un problème. C'est bien sûr, puis c'est un peu la question que je veux poser à M. le ministre. La contrebande des cigarettes, à toutes fins pratiques, compte tenu que la baisse des taxes, c'est plus ou moins réglé, il y en aura toujours un peu, j'imagine. Mais en ce qui concerne les autres contrebandes, les autres items, auparavant, j'imagine qu'il y avait moins d'importance, que ce soient la boisson, les parfums, les poulets; même, ils ont parlé dans des journaux de toutes sortes d'autres items. Est-ce qu'il y a eu une augmentation et y a-t-il eu un changement radical? Est-ce que les personnes, autrement dit, qui faisaient la contrebande des cigarettes auparavant, elles ont réorienté leurs activités dans un autre domaine, des armes, des drogues, etc? Avez-vous des indications à cet effet?

Le Président (M. LeSage): M. le ministre.

M. Middlemiss: M. le Président, comme je l'ai indiqué tantôt dans mes notes préliminaires, le fait d'agir sur le tabac... C'étaient les mêmes réseaux qui, certainement, s'occupaient aussi de faire la contrebande d'alcool, des parfums, etc. C'est certain que le fait d'avoir réussi à enlever cette tentation, parce que c'était très alléchant de vendre du tabac, c'était facile et, en même temps, on utilisait peut-être le même réseau pour vendre de l'alcool et d'autres produits; c'est certain que ça a eu un effet de réduire. Et on continue d'utiliser des moyens, une meilleure surveillance. On va avoir d'autres pouvoirs qui vont nous permettre... De dire que, aujourd'hui, on a tout réglé, l'alcool puis les autres, ça serait de tenter de lancer de la poudre aux yeux. Ce n'est pas ça. Ça s'améliore. On n'a pas toutes les statistiques nécessaires pour être capables de démontrer, mais le fait qu'on a démantelé une partie puis qu'on a enlevé un produit qui était, sur le plan économique... Disons-le, si les gens sont impliqués dans la contrebande, c'est parce qu'il y a des sous à faire, des gros sous. Maintenant qu'on a enlevé les cigarettes, c'est moins intéressant, et on va se donner les moyens d'appliquer d'autres lois qui devraient nous permettre de resserrer et, éventuellement, de réduire. Je pense qu'il y a toujours eu un peu de contrebande. De croire qu'on pourra avoir suffisamment de force policière, de lois et de moyens pour éliminer et avoir une société qui va être parfaite, je pense que c'est un peu utopique d'y croire. Mais, au moins, on vise à réduire, dans la mesure du possible, toutes ces choses-là, et je pense que, avec le premier pas de la contrebande du tabac, on s'en va dans cette direction pour réduire les autres contrebandes et se donner les moyens. On agira en temps et lieu.

(16 h 20)

J'ai eu l'occasion de le dire au député de Jonquière, en Chambre, pour le tabac, oui, ça a pris du temps, mais il fallait convaincre d'autres personnes et être certain que, lorsqu'on fait un pas en avant, on ne serait pas obligé d'en reculer un ou deux. On l'a fait. Sur le tabac, je pense que c'est essentiellement réglé; les autres, on travaille pour les régler, eux aussi.

M. Kehoe: M. le Président, juste une autre question dans le même domaine. Lorsque le député de Jonquière parlait de deux poids deux mesures en ce qui concerne notre système de justice, sans doute qu'il faisait justement référence à la personne à Jonquière – je pense que c'est dans votre région – qui fut arrêtée par la police, tandis que les autres sur la réserve ne l'étaient pas. J'aimerais ça que vous nous expliquiez qu'est-ce que c'est la juridiction, quels sont les pouvoirs des Peacekeepers puis quels sont les pouvoirs, que ce soit pour la Sûreté du Québec ou la RCMP, pour aller sur la réserve. Quelles sont les juridictions, que sont les fonctions des Peacekeepers au juste? Autrement dit, la question que je veux poser: est-ce que la Sûreté du Québec aurait pu aller sur la réserve où la vente de cigarettes avait eu lieu pour renforcer la loi à ce moment-là?

M. Middlemiss: Regardez, le rôle des Peacekeepers, c'est certainement d'agir comme policiers sur les réserves. Et la raison pour laquelle on l'a fait, c'est de reconnaître un peu l'autonomie de ces communautés et, toutefois, de vouloir des gens qui appliqueront les lois du Québec... Lorsque vous me parlez de... Un des problèmes qu'on avait... On avait la police du tabac, vous savez. Donc, pour arrêter les gens qui avaient du tabac, on n'avait pas les pouvoirs, puis on ne les a pas tout à fait, les pouvoirs, on ne les a pas encore, les pouvoirs, de vouloir appliquer les lois sur l'accise et les douanes. D'accord, on peut bien dire qu'un système nous permettrait de faire mieux. C'est un peu comme la grande théorie de dire que, si on était seuls, on aurait plus d'emplois qu'on en a présentement, dans un système. C'est un peu ça, les commentaires qui viennent du député de Jonquière. Si on était seuls, on aurait réglé tous nos problèmes. Mon oeil! Pour vous dire qu'il y a certainement... Et c'est toujours facile de nous pointer du doigt. L'un des problèmes que nous vivons avec la communauté, disons à Kahnawake, c'est depuis 1980, là, que c'est les Peacekeepers qui sont là; depuis 1980 qu'on a sorti la Sûreté du Québec de là. Ce n'est pas d'hier qu'on a donné... Et la pratique qu'on a aujourd'hui n'est pas différente de celle qu'il y avait avant 1985.

M. Kehoe: En 1980, quel parti était au pouvoir? Je ne m'en rappelle pas.

M. Middlemiss: Ah, ça, je ne veux pas parler de ça, là. Je vous parle dans le temps...

M. Kehoe: Oui, bien, moi, je vous le demande.

M. Middlemiss: ...dans le temps. Je vous parle dans le temps. C'est là où le problème... Si on veut parler de Kahnawake.

M. Kehoe: Oui, mais, monsieur le...

M. Middlemiss: La situation, elle est comme ça depuis ce temps-là, et on a tenté à plusieurs reprises, et nous tentons encore...

M. Dufour: ... On faisait si bien les choses.

M. Kehoe: Attendez une minute, là...

M. Middlemiss: Laissez-moi finir sur ça. On tente encore de signer une entente policière avec les gens de Kahnawake pour qu'ils puissent appliquer les lois et être soumis au même code de déontologie et tout. Nous travaillons sur ça, et depuis longtemps qu'on le fait, et le jour où on va réussir à le faire, ça va éliminer certains problèmes. Ce n'est pas facile, mais, avec la patience, on va réussir à le régler, ce problème-là, et là, les gens, les communautés autochtones vont s'apercevoir que, nous autres, ce n'est pas seulement des paroles. C'est dans les actes qu'on va reconnaître leur autonomie; mais, en retour, eux autres aussi, ils vont être obligés de reconnaître qu'ils sont sur le territoire du Québec et du Canada, et ils devront, à ce moment-là, se soumettre à ces lois-là qui sont là. C'est une chose qui n'est pas une rue à sens unique, c'est une rue à deux sens.

M. Kehoe: Mais, M. le ministre, est-ce que les «peace makers» eux-mêmes, en ce qui concerne les infractions qui sont commises sur la réserve, ont une juridiction exclusive pour appliquer les règlements de la municipalité, la loi provinciale ou le code criminel? Est-ce eux qui le font ou... Quelle police?

Le Président (M.LeSage ): Alors, M. le ministre, à la question du député de Chapleau, je voudrais vous faire remarquer qu'il parlait bien des Peacekeepers.

M. Middlemiss: Oui, oui, d'accord. Non, pas des «peace makers», mais les Peacekeepers. Je vous indiquais tantôt que c'est depuis les années quatre-vingt. Et, au moment où la Sûreté du Québec est sortie de là, c'étaient des policiers qui appliquaient tout, tout. Mais, depuis, les Peacekeepers, eux, sont surtout là pour appliquer les règlements de la bande. S'il y a des infractions au code criminel, ainsi de suite, ça se fait avec la Sûreté du Québec. Les Peacekeepers transigent avec la Sûreté du Québec, qui s'occupe de ces choses-là. Donc, en réalité, le rôle principal des Peacekeepers, c'est d'appliquer, sur la réserve, les règles du jeu de la bande.

Le Président (M. LeSage): Ça va, M. le député de Chapleau?

M. Kehoe: C'est juste pour clarifier ce point-là. Le Code de la route, c'est des «peace makers» qui appliquent ça?

M. Middlemiss: Peacekeepers.

M. Kehoe: Excusez-moi. J'ai de la misère en anglais.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Middlemiss: Ils l'appliquent à l'intérieur de la réserve. Et qu'est-ce qui arrive? C'est qu'ils considèrent que les routes 132 et 138, dans la région de Kahnawake, font partie de la réserve. C'est sur le territoire de la réserve. Donc, à ce moment-là, oui, ils l'appliquent là.

M. Kehoe: Merci, M. le Président.

Le Président (M. LeSage): Ça va? Mme la députée de Groulx.

Mme Bleau: Est-ce que les Peacekeepers ont le droit... S'ils voient, supposons, des contrebandiers parmi leurs gens, est-ce qu'ils ont l'autorité pour les arrêter? Supposons qu'ils arrêtent une automobile puis qu'ils s'aperçoivent qu'il y a... Ils ne le feront peut-être jamais, là, mais est-ce qu'ils auraient le droit de le faire?

M. Middlemiss: Oui.

Mme Bleau: Ils auraient le droit de le faire.

Le Président (M. LeSage): M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Je voulais juste rétablir certaines choses. Bien sûr, c'est vrai qu'on peut faire de la démagogie quand on est dans l'Opposition. Mais, si vous voulez regarder ce qui s'est dit de 1976 à 1985, vous allez en avoir pour votre argent aussi, là. Pas mal plus que ça.

M. Middlemiss: Nous autres? Jamais!

M. Dufour: Moi, je pense que j'ai été raisonnable. Quand je parle d'appliquer la justice, je dis: le gouvernement n'a pas le droit de laisser pourrir des situations, puis se lever comme en ayant le bon droit et, à ce moment-là, se mettre à genoux pour régler les problèmes. C'est là-dessus que j'en ai. Je dis: une loi, ça ne prend pas trois ans avant de s'apercevoir si elle est abusive, si elle est correcte ou pas correcte. On devrait les appliquer. Quand on n'est pas capables de les appliquer, on les change. Ça fait plusieurs fois que je le dis, ça, comme message. Ça me semble excessivement clair dans mon esprit.

C'est évident que, quand on parle des communautés ou des gens qui font de la contrebande, ce n'est pas un domaine facile. Il y en a toujours eu, puis je pense qu'il y en aura toujours. Je pense que, ça, on peut admettre ça. On est assez grands garçons puis assez sérieux. Mais de là à dire que les situations qu'on a étaient vivables puis qu'elles étaient normales, on prétend que non, et on aurait dû agir beaucoup plus vite.

En ce qui concerne les Peacekeepers sur le territoire, c'est vrai que, depuis 1980, ils ont certains pouvoirs qui leur ont été accordés, mais, depuis 1985... Ils n'ont pas eu de statut, entre 1980 et 1985 puis, de 1985 à 1994, on ne connaît pas encore leur statut. Qu'est-ce qui se passe? Si c'était correct, ce qu'on a fait, pourquoi vous êtes-vous fait élire? C'était pour changer quelque chose. Vous ne l'avez pas changé. Je veux bien être patient. Ça fait neuf ans que c'est au vu et au su de tout le monde. Ils n'ont pas de pouvoir reconnu. C'est quoi, leur statut, au point de vue du Québec? Quel est le contrôle qu'on a? On parle des automobilistes. Ils les arrêtent, les automobilistes. Où va le montant des amendes perçues? Il reste probablement dans le coin, là, puis... C'est quoi, ça?

(16 h 30)

Moi, je trouve qu'il y a quelque chose qui n'est pas sain dans notre société, même vis-à-vis des autochtones. On sait ce qu'ils veulent mais on ne leur a jamais dit ce qu'on voulait correctement. Quelque part dans le temps, il va falloir qu'on arrête les horloges puis qu'on mettent les horloges à l'heure pour tout le monde, les autochtones comme les autres. Moi, je ne pense pas que j'ai l'impression que tout le monde fait ce qu'il veut sur le territoire du Québec. Il y a des choses qui peuvent se faire, d'autres qui ne peuvent pas. Puis, pour les autochtones, ailleurs, moi, je sais ce qu'ils veulent. Mais, nous autres, est-ce qu'on leur a dit dans quelle mesure on ne veut pas que ça aille plus loin? Je pense que ce serait tout à fait normal que la majorité ne soit pas au service de la minorité. Il y a un bout! Ça ne se passe pas nulle part dans une société, puis nous autres, on est rendus comme ça. C'est quoi, la reconnaissance des corps policiers? Quel est leur statut, puis quels sont les pouvoirs qu'ils ont? En vertu de quelle loi, de quel traité, de quels droits ancestraux ils sont capables de faire ça? Je ne sais pas. Si vous pouvez me faire le point là-dessus, M. le ministre, j'apprécierais.

M. Middlemiss: M. le Président...

Le Président (M. LeSage): M. le ministre.

M. Middlemiss: ...comme je l'indiquais tantôt, nous avons hérité de situations qui existent à Kahnawake. Je vous dis que nous avons réussi, à Akwesasne, à avoir une entente quadripartite de policiers qui respecte l'application des lois du Québec, la déontologie policière du Québec. C'est réellement un exemple d'une entente où les policiers pourront appliquer les lois, et ils devront répondre au code de déontologie. C'est ça qu'on a. On a réussi à l'avoir.

Nous travaillons dans ce sens-là. Ça fait longtemps qu'on travaille à Kahnawake, aussi. Et nous continuons à travailler dans l'espérance de l'avoir. À ce moment-là, on aura réglé une partie du problème. On aura une force policière avec tous les pouvoirs et qui va aussi être obligée de répondre, comme tous nos autres policiers, au même comité de déontologie et d'avoir le même code de déontologie. C'est ça que nous tentons de faire. Je vous dis que les négociations continuent, et c'est un peu de patience. Et on le veut. On veut que ces communautés-là aussi puissent avoir... C'est dans le même sens que d'avoir une certaine autonomie, mais ce n'est pas une rue à sens unique. Ils vont être obligés de réaliser qu'ils sont sur le territoire du Québec. Il y a les lois québécoises et les lois canadiennes, et c'est ça qu'il faut... Mais, de l'autre côté, en disant que nous sommes prêts à reconnaître leur autonomie, on est prêts à faire des accommodements pour qu'ils se sentent bien à l'aise et qu'ils sentent qu'on respecte leurs différences.

M. Dufour: Je pense que, là-dessus, les déclarations de principe, ça va. Moi...

M. Middlemiss: Bien, c'est ça.

M. Dufour: Mais ce n'est pas tout à fait ce que, moi... Ce n'est pas ce que j'entends qui m'inquiète, c'est ce qui se passe. C'est évident que l'autonomie complète, ça n'existe pas. Ce n'est pas des droits de vie ou de mort, c'est la société. Ce n'est pas comme ça qu'on prend ça. Nous autres, on dit: Oui, l'autonomie... Quand je dis qu'on doit leur dire jusqu'où, nous, on peut aller décemment; je pense que ça peut s'expliquer quelque part, ça peut se négocier et ça pourrait, d'après moi, s'établir, ces règles-là. Il faut que ça se fasse quelque part. Mais on n'est pas rendu là, malheureusement, parce qu'on n'a pas encore dit clairement sur quoi on se basait et jusqu'où on pouvait aller. On a toujours essayé de régler les problèmes avec de l'argent. On essaie de les acheter, et ça ne marche pas. On voit bien que ça ne marche pas, les acheter. On paie pour les Inuit, on paie pour les communautés autochtones et tout ça, et on se rend compte qu'ils sont pires qu'ils étaient. On les rend plus malheureux. On ne les aide pas, on les détruit, ces peuples-là. La façon de les détruire, c'est d'essayer de les acheter. Moi, je suis contre ça complètement. Ce n'est pas une bonne façon de le faire. Si on leur parlait de temps en temps, comme à toute la société en général... On a des obligations, on a des devoirs et on a des droits. Il y a trois choses dans une société organisée. Ça, il me semble que c'est le gros bon sens qui dit ça.

La question des corps policiers autochtones qui opèrent au Québec et qui n'ont pas leur approbation du gouvernement du Québec. Est-ce qu'il y en a actuellement, des corps policiers autochtones qui opèrent sans l'approbation, à part les Peacekeepers, dont on sait qu'ils ne l'ont pas non plus?

M. Middlemiss: Non. C'est qu'il y a cinq... On a à peu près sept... On est en négociation avec sept différentes communautés. Il y en a cinq qui ont déjà des corps policiers.

M. Dufour: Donc, il y en a deux.

M. Middlemiss: Pardon?

M. Dufour: Il y en aurait deux.

M. Middlemiss: Deux qu'on veut compléter. Certainement que le problème des Peacekeepers de Kahnawake, c'est un problème en soi. Comme je vous dis, Akwesasne, nous avons réussi à avoir une entente policière qui est bonne, qui est dans le respect de tout. On a cinq autres communautés à travers le Québec où il y a des forces policières. Je suis allé, il n'y a pas tellement longtemps, à Obedjiwan signer une nouvelle entente policière avec ces gens-là, et, à ce moment-là... Celui-là, c'est un peu, M. le Président, comme dans la douzaine d'oeufs: il y a un oeuf qui est brisé, et on parle seulement de celui-là. Les onze autres, ça va assez bien. On vous dit: À Akwesasne, ça va bien. Kahnawake, on travaille sur celui-là. Mais il y a d'autres communautés autochtones à travers le Québec avec qui on a pu s'entendre, avoir des ententes policières et où il y a des gens de leur communauté qui vont chercher l'entraînement soit à l'école de police – ils travaillent avec la Sûreté du Québec – ils vont appliquer les lois québécoises et les lois canadiennes. C'est ça. Le but visé, M. le Président, c'est de réussir. C'est plus difficile à Kahnawake, mais je dois vous dire qu'il y a eu des gestes, récemment, qui démontrent une grande ouverture, de vouloir changer d'attitude et de régler ces différends-là.

Le Président (M. LeSage): M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Oui. J'ai complété sur ce sujet-là, moi. Je passerais à un autre.

M. Kehoe: Oui. Je voulais juste poser une question dans le même...

Le Président (M. LeSage): Vous voulez intervenir, M. le député de Chapleau? Allez-y.

M. Kehoe: Oui. Concernant les Peacekeepers, vous avez dit qu'il y a des ententes avec différentes réserves, et ainsi de suite, vous essayez de les intégrer... pas les intégrer, mais, je veux dire, le même code de déontologie, la même... Ont-ils le même entraînement? Est-ce qu'ils vont... Les autres sont-ils préparés? Les Peacekeepers, actuellement, qui travaillent dans les différentes réserves, quelle est leur formation et comment est-ce que... je veux dire...

(Consultation)

M. Middlemiss: Je vous l'indiquais tantôt, le problème, c'est certainement les Peacekeepers à Kahnawake, au point de vue de leur statut. Eux, ils n'ont pas nécessairement un entraînement. Les autres, maintenant, les autres policiers, dans les ententes policières qu'on a avec les autres communautés, eux, ont un entraînement qui est fait par l'entremise de l'école de police, ainsi de suite. Ils sont formés pour agir comme policiers. Les Peacekeepers, c'est quelque chose, comme je vous ai dit, dont on a hérité, qui est là et qu'on tente de vouloir changer. C'est vrai, ces gens-là n'ont pas nécessairement une formation policière comme les policiers, dans les ententes que nous avons présentement.

Le Président (M. LeSage): Ça va, M. le député de Chapleau? M. le député de Jonquière.


Appareils de vidéopoker

M. Dufour: Oui. Merci, M. le Président. J'aimerais, dans un autre ordre d'idées, parler des vidéopokers. Mis à part l'appel logé en Cour d'appel par l'Association de l'amusement du Québec sur la constitutionnalité de la loi 84, aucun obstacle ne se dresse sur le chemin de Loto-Québec pour enfin implanter des loteries vidéo d'État. L'un des derniers obstacles qu'il restait à franchir était le choix du fournisseur avec lequel Loto-Québec entendait transiger. Le fournisseur retenu au départ, VLT, n'avait pas reçu l'accréditation nécessaire pour l'obtention d'une licence d'opération, la Régie des alcools, des courses et des jeux estimant, en novembre dernier, que le passé douteux de VLT à travers le monde justifiait son refus de lui accorder une licence. En mars dernier, finalement, la nouvelle compagnie VLT a obtenu ladite licence. Seuls les changements survenus au sein de la compagnie VLT ont suffi pour que la Régie renverse sa décision du mois de décembre. Comment pouvez-vous expliquer ça?

M. Middlemiss: M. le Président, vu que c'est un cas assez spécifique et avec beaucoup de background, pour utiliser le bon mot français, je demanderais à M. Laflamme de, peut-être, donner tout l'historique de ces changements...

M. Dufour: Pas tout l'historique, bien non.

M. Middlemiss: ...qui ont eu lieu.

Le Président (M. LeSage): Alors, pour les fins...

M. Dufour: Pas tout.

Le Président (M. LeSage): ...d'enregistrement du Journal des débats , la personne qui répondra à la question est M. Ghislain K.-Laflamme, qui est président de la – comment on dit ça? –...

Une voix: La Régie des...

M. K.-Laflamme (Ghislain): La Régie des alcools...

Le Président (M. LeSage): ...régie des jeux...

M. K.-Laflamme (Ghislain): ...des courses et des jeux. Ha, ha, ha!

M. Dufour: La régie du vice.

Une voix: L'alcool, les courses et les jeux.

M. K.-Laflamme (Ghislain): La régie du vice.

M. Dufour: Des vices.

Le Président (M. LeSage): Parfait.

Une voix: ...

M. Dufour: La régie des vices...

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Dufour: ...pas des vicieux.

M. K.-Laflamme (Ghislain): Alors, la question...

Le Président (M. LeSage): Allez-y, M. Laflamme.

(16 h 40)

M. K.-Laflamme (Ghislain): ...est dirigée spécifiquement vers une entreprise qui a formulé une demande de licence de manufacturier à la Régie. C'est l'entreprise connue sous le nom de VLC-VLT. C'est une entreprise qui résulte de l'agglomération de plusieurs entreprises au cours des trois ou quatre dernières années; c'est pour ça que son nom, VLC-VLT, peut recouvrir d'autres noms. Cette entreprise a répondu à un appel d'offres de Loto-Québec, qui a demandé à la Régie des alcools, des courses et des jeux de faire enquête sur l'à-propos de lui délivrer une licence ou pas. Au cours de l'automne dernier, la Régie, après avoir reçu cette demande, a transmis le dossier à la Sûreté du Québec pour faire enquête sur l'entreprise. La Régie a tenu des auditions publiques pendant plusieurs jours pour prendre connaissance du rapport de la Sûreté du Québec sur l'entreprise et pour permettre, évidemment, aussi à l'entreprise de répondre aux allégations des personnes qui avaient des sujets à lui reprocher. Essentiellement, ce qu'on a constaté à l'automne – parce que la décision a été rendue aux alentours du 20 décembre – c'est que cette entreprise, qui résulte d'un amalgame d'entreprises, avait un président qui s'appelait Lippen, et ce monsieur avait été impliqué dans plusieurs transactions concernant des criminels. À cause du contrôle qu'il pouvait garder encore sur l'entreprise, l'Australie, entre autres, lui avait refusé une licence, et les diverses preuves qui nous ont été amenées, pour faire une histoire courte, nous ont amenés à refuser de lui accorder une licence, en décembre. Nous avons par la suite reçu une nouvelle demande de cette entreprise et nous avons à nouveau demandé à la Sûreté du Québec de procéder aux enquêtes habituelles. Au mois de mars, après avoir pris connaissance, toujours en auditions publiques, du contenu du rapport de la Sûreté du Québec, nous avons conclu qu'à ce moment l'entreprise avait apporté des modifications substantielles qui nous convainquaient que le bloc d'actions de l'ancien président Lippen de cette entreprise n'était plus entre ses mains ni entre les mains de personnes qui pouvaient agir en son nom.

L'acquéreur de ce bloc d'actions de 20 % était la compagnie General Motors, qui avait fait une enquête, à son tour, sur la compagnie et qui avait jugé intéressant de s'associer à cette entreprise, VLC, à la condition que General Motors ait au conseil d'administration une personne désignée par elle pour s'assurer du contrôle de ses intérêts. Il y a d'autres changements qui étaient survenus aussi parmi le personnel du conseil d'administration, changements relativement mineurs dans un sens, mais qui, alliés au contrôle que General Motors s'était donné là-dessus, ont convaincu la Régie de délivrer la licence à VLC.

Le Président (M. LeSage): M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Mais, en même temps qu'il y avait des complications ou des problèmes avec la compagnie VLT, est-ce qu'il n'y avait pas à ce moment-là une compagnie québécoise qui, elle aussi, faisait des représentations pour avoir non seulement le droit de soumissionner, mais pour espérer être considérée?

M. K-Laflamme (Ghislain): Parallèlement à cette demande, nous avions à étudier la demande de plusieurs entreprises, dont la compagnie Spielo, qui est installée à Sainte-Anne-des-Monts, la compagnie Primetech, la compagnie LG Technologies, la compagnie Williams, la compagnie IGT... et je pense que ça fait le tour du sujet. Nous avons, sur examen, toujours en auditions publiques, du dossier de ces entreprises, accordé des licences à toutes ces entreprises. Alors, le processus est le suivant: une fois que les licences sont accordées, c'est à Loto-Québec d'attribuer des contrats parmi l'ensemble des détenteurs de ces licences.

M. Dufour: Et vous, comme président de la Régie, globalement, est-ce que vous avez droit de regard sur Loto-Québec, qui... Lorsque, par exemple, elle va en soumissions, est-ce que vous vous assurez que le processus est suivi?

M. K-Laflamme (Ghislain): Non.

M. Dufour: Est-ce que vous vous assurez que tout se fait correctement?

M. K-Laflamme (Ghislain): Non.

M. Dufour: Vous n'avez pas ce pouvoir-là.

M. K-Laflamme (Ghislain): Non, on n'a pas ce pouvoir. Le pouvoir de la Régie à l'égard de Loto-Québec, à l'égard du casino et à l'égard des systèmes de loterie vidéo, repose sur la certification des fournisseurs. Donc, dans le cas présent, Loto-Québec lance un appel d'offres, nous n'avons pas à examiner la qualité de l'appel d'offres. Tout ce que nous avons à examiner, c'est si des personnes se qualifient en fonction de la loi et des règlements pour obtenir une licence. À partir de ce groupe de détenteurs de licences, Loto-Québec choisit avec qui elle veut contracter.

M. Dufour: Actuellement, la loi permet de saisir des appareils de vidéopoker, et, à ce que je sache, il ne s'en saisit pas beaucoup. Je vais faire un peu le tour du sujet, parce que ça me semble important, et on va peut-être sauver des questions si je le fais directement. Vous n'en avez pas saisi, mais on parle d'en installer dans des établissements. Dans le règlement que vous avez, on dit: Pour obtenir une licence, on ne doit pas avoir été condamné pour possession illégale de tels appareils – il n'y en a pas beaucoup qui sont condamnés, donc il y en a beaucoup qui seraient susceptibles d'en avoir – ni en avoir en sa possession. C'est pour ça que je dis, bien, là, c'est complètement déconnecté de ce que je pense qui pourrait arriver. Comment vous allez appliquer tout ça? Je vous dis: Combien de machines on pourrait installer et comment vous pourriez les installer, en tenant compte de votre réglementation?

Le Président (M. LeSage): M. le ministre.

M. Middlemiss: Oui, M. le Président. Sur ça, c'est vrai qu'à l'automne on avait indiqué qu'on était pour confisquer les machines. Toutefois, on a eu un avis du ministère de la Justice que... Suite aux injonctions qui ont été déposées contre la loi 84, on nous avait suggéré d'attendre pour voir le résultat des injonctions. On avait commencé à les enlever, les machines, mais nous nous sommes arrêtés dans le contexte de les garder, et on va voir quels vont être les jugements.

Aujourd'hui, ça fait quelques mois, il y a seulement une des causes où il y a eu une décision de rendue dans le sens de dire: Il est prématuré, parce qu'on ne vous a pas enlevé les machines encore. Donc, vous ne pouvez pas évoquer qu'il y a eu une perte de revenus; on ne les a pas enlevées encore. Donc, c'est la raison pour laquelle... premièrement.

Deuxièmement, il y avait une autre raison, qui n'était pas sur le plan légal mais sur le fait que si on enlève les machines aujourd'hui et on n'a pas les machines de Loto-Québec pour les remplacer... À ce moment-là, il aurait pu y avoir un jeu: on enlève les machines, on en rentre d'autres le lendemain. C'est un peu ça qui était la crainte. C'est pour ces raisons-là que nous n'avons pas enlevé toutes les machines. Aujourd'hui, le fait qu'on a maintenant placé des commandes pour les machines, on a évité aux gens d'appliquer pour avoir des machines. Nous sommes en train de revoir à quel moment, dans le temps, on devra procéder à enlever ces machines-là. Comme vous l'avez dit, on ne peut pas... Tant et aussi longtemps que quelqu'un a une machine illégale, il ne peut pas en avoir une de Loto-Québec. Je dois vous dire que nous sommes présentement en train de revoir – aujourd'hui, la semaine passée – à savoir à quel moment dans le temps on va procéder à enlever les machines.

Maintenant, pour le restant, je vais certainement laisser M. Laflamme procéder.

Le Président (M. LeSage): M. Laflamme.

M. Dufour: Est-ce que ça veut dire, là-dessus, que les gens qui vont faire application pour installer les machines de vidéopoker... Comment on va procéder? D'abord, premièrement, votre règlement dit: Vous ne devez pas en avoir d'illégales en possession. Elles ne sont pas illégales, donc on peut dire qu'ils n'en ont pas. En principe, dans la loi, ça n'existe pas; il y a un vide quelque part. Comment vous allez établir ça? Quelqu'un va appliquer, et il a encore d'autres machines. Vous dites dans votre règlement qu'il ne doit pas en avoir. Ça veut dire qu'au moment où il va appliquer il va falloir qu'il fasse disparaître sa machine. Mais, comme elle est illégale, il ne pourra pas la transporter, il ne peut pas être propriétaire. En tout cas, je vous souhaite bonne chance, mais il me semble qu'il y a quelque chose là-dedans qui est complexe, qui n'est pas clair.

Le Président (M. LeSage): M. Laflamme.

(16 h 50)

M. K.-Laflamme (Ghislain): Il s'agit effectivement d'un processus délicat. C'est délicat, sans remonter au déluge, pour un contexte historique qui fait que les machines qui sont actuellement dans les établissements ne sont pas arrivées aussi clandestinement que l'appellation «illégal» peut le laisser entendre. Entre 1979 et 1991, le gouvernement du Québec émettait des vignettes, une espèce de permis, à ce genre d'appareil, avec la restriction qu'ils ne devaient pas être utilisés à faire des paiements, à faire du jeu moyennant de l'argent. Donc, le gouvernement a autorisé pendant un bon nombre d'années un bon nombre d'appareils de loterie vidéo à s'installer à travers le réseau québécois. Au dernier recensement de 1991, il y en avait 18 000 qui étaient détenteurs d'une vignette validement délivrée par la Régie des loteries. 1991, ça coïncide avec la décision de la Cour suprême de ne pas accueillir d'appels suite à un jugement de la Cour municipale de Montréal – quelque chose que vous connaissez bien – à l'effet que ces appareils, conçus comme ils étaient, ne pouvaient plus rester en usage par des particuliers. Mais ça devait se faire par le gouvernement, selon le Code criminel. Bon.

Ces appareils étaient évidemment possédés par des gens, étaient possédés, entre autres, par des gens regroupés dans deux associations, la CLAQ, la Corporation du loisir automatique, et l'Association de l'amusement du Québec. Ces gens-là, au moment où la loi est entrée en vigueur, ont évidemment voulu protéger leurs biens et ont pris des injonctions contre l'application de la loi. Ils ont pris leurs injonctions de façon assez générale pour attraper tout le monde, parce qu'ils les ont prises contre le Procureur général, contre la Régie, contre Loto-Québec et contre le gouvernement, à la fois pour empêcher les saisies et pour empêcher la mise en place du réseau. Et se sont formées, à ce moment-là, des associations circonstancielles, l'association des propriétaires de bars et des propriétaires de tavernes, pour contester également ce système-là. Donc, il y a eu un contexte juridique assez important devant les tribunaux, mais pas surprenant. Évidemment, en commission parlementaire, on nous avait dit que ça représentait un chiffre d'affaires de 1 000 000 000 $, et on ne s'attendait pas à ce que les gens abandonnent 1 000 000 000 $ sans lutter.

Ces injonctions ont été plaidées et on attend des jugements. Par déférence pour les tribunaux, il a été convenu qu'on ne saisissait pas, sous la loi 84, les appareils actuellement en service dans l'ensemble du territoire. Cependant, ces appareils étaient illégaux en vertu du Code criminel, et un certain nombre de saisies ont été faites, quand même, là-dessus.

Comment nous entendons procéder pour entrer le réseau légal? Le processus est relativement simple. Nous avons déjà, la Régie des alcools, des courses et des jeux, écrit à 9000 détenteurs de permis d'alcool, bars, tavernes et brasseries, leur expliquant le système, les informant que, pour pouvoir obtenir des appareils légalement, il fallait qu'ils se départissent de leurs appareils actuels. Actuellement, des réponses nous sont formulées face à cette offre. Loto-Québec est en train de s'installer, par ailleurs, et l'envoi de notre lettre est une invitation, aussi, à se départir, préalablement à des saisies, des appareils qu'ils ont actuellement en main. Comme ces appareils ont voyagé, d'une façon ou d'une autre, on espère que ces appareils vont voyager en sens inverse de la même façon sans qu'on ait besoin d'aller saisir tous les appareils qui sont en circulation.

Mme Pelchat: Avez-vous eu des réponses, M. Laflamme?

M. K.-Laflamme (Ghislain): On a eu, à cette date – ça fait 15 jours que ça a été envoyé – 225 réponses.

Mme Pelchat: Qui disaient: Oui, ils étaient pour se départir de...

M. K.-Laflamme (Ghislain): Et qui veulent adhérer au système gouvernemental. Les réponses commencent à entrer de plus en plus nombreuses. La semaine dernière, c'étaient quelques réponses par jour. Là, ça prend son envol.

Le fait qu'un jugement a été rendu sur les injonctions, un jugement qui a été rendu par la juge Nicole Duval Hesler, à l'effet que les gens n'avaient pas d'intérêt à l'égard de leurs injonctions parce que la menace n'était pas encore présente puisqu'il n'y avait pas de saisie selon la loi 84, nous a permis de repenser à la question avec le ministère de la Justice, et c'est à ça que le ministre de la Sécurité publique faisait allusion tout à l'heure. La machine est en train de digérer cette information, autant la semaine dernière que cette semaine. Nous entendons, si le processus se déroule tel que convenu, avoir un réseau légal au cours de l'été prochain.

Le Président (M. LeSage): Mme la députée de Groulx.

Mme Bleau: Quand vous dites que vous avez eu 225 réponses, est-ce que cela sous-entend que les gens qui vous ont répondu se sont déjà débarrassés des machines qu'ils avaient? Ça, vous ne pouvez pas le savoir encore.

M. K.-Laflamme (Ghislain): On ne peut pas le savoir encore. Ce qu'on a fait, c'est qu'on a envoyé 9000 lettres, une lettre accompagnée du formulaire pour faire application pour l'obtention de la licence appropriée de même que la réglementation qui explique à quelles conditions on peut l'avoir. La réglementation dit qu'on ne peut avoir de ces appareils si on a été condamné pour possession de ces appareils. Alors, ceux qui retirent leurs appareils n'auront pas été condamnés pour possession de ces appareils, d'où le grand intérêt pour les gens de retirer leurs appareils avant qu'on aille les saisir et faire une infraction à leur encontre.

Mme Bleau: Est-ce que vous vous attendez vraiment à ce qu'ils se départissent de leurs appareils avant même de savoir à quelle date vous allez amener les vôtres?

M. K.-Laflamme (Ghislain): Je pense que Loto-Québec est tellement prête à mettre son système en place – maintenant qu'on a rendu les décisions sur les fabricants, ça permet à Loto-Québec de contracter avec les fabricants et d'avoir des appareils à offrir – qu'on croit que ça va coïncider.

Le Président (M. LeSage): M. le député de Chapleau.

M. Kehoe: C'est dans le même sens, peut-être, que je peux poser cette question.

Le Président (M. LeSage): M. le député de Jonquière, est-ce que vous vouliez poursuivre dans les vidéopokers?

M. Dufour: Non. C'est dans ça?

M. Kehoe: Oui, c'est dans le même...

Le Président (M. LeSage): Alors, allez-y, M. le député de Chapleau.

M. Kehoe: Oui. M. Laflamme, si je comprends bien la politique... Les machines, maintenant, vont payer aux joueurs jusqu'à 83 % des montants mis dans la machine, n'est-ce pas, à partir de maintenant.

M. K.-Laflamme (Ghislain): C'est ça.

M. Kehoe: Et il y a 17 % qui vont rester pour l'État et pour le propriétaire de l'établissement où elles sont situées.

M. K.-Laflamme (Ghislain): C'est ça.

M. Kehoe: Si je comprends bien, à date, les propriétaires d'établissements vont avoir, quoi, 20 % du 17 %. Mais ce n'est pas ça... La question que je me pose: D'après les médias, ce qu'on a lu, les propriétaires de brasseries et de bars, ils ont pris une position assez rigide, assez vigoureuse – je ne sais si c'est seulement à Montréal ou si c'est dans les régions aussi – à l'effet que le montant que vous allez donner, soit 20 % du 17 %, si je ne me trompe pas sur le montant, c'est nettement insuffisant. Et la majorité refuse d'accepter des machines. Vous avez mentionné tantôt que vous aviez envoyé 9000 formulaires, et il y a eu une réponse, je ne sais pas, 225, c'est ça que vous dites?

M. K.-Laflamme (Ghislain): Mais ça fait 15 jours.

M. Kehoe: Est-ce que c'est une indication... ou est-ce que l'affaire va se régler? Y a-t-il des négociations? Où en est rendu le dossier, en ce qui concerne cette partie-là?

M. K.-Laflamme (Ghislain): Évidemment, lorsqu'on est un exploitant d'appareils de loterie qu'on dit illégaux et qu'actuellement on retire 50 % de ce que l'appareil génère, on considère que le 20 % que Loto-Québec offre, ce n'est pas très concurrentiel. Sauf qu'il faut réaliser que la concurrence est illégale. Aussitôt qu'on aura retiré la concurrence, c'est-à-dire aussitôt qu'on aura retiré les appareils illégaux, 20 %, ça va être plus que zéro, pour eux. Il n'y aura plus de concurrence pour offrir 50 %. Alors, les appareils illégaux vont être retirés. Alors, les gens, s'ils veulent retirer quelque chose de ce jeu, s'ils veulent retirer quelque chose pour leur établissement, auront à traiter avec Loto-Québec. Loto-Québec est une entité, sur ce point-là, complètement différente de la Régie, et son offre de 20 %, n'est pas sous notre contrôle. Alors, possiblement que Loto-Québec aurait des réponses à donner sur ce point spécifique. Sauf que le 83 % qui est en question, c'est 83 % de retour assuré aux joueurs. Et ça, c'est dans un règlement sous l'autorité du ministre de la Sécurité publique et de la Régie. Donc, les gens qui joueront avec ces machines-là seront assurés qu'il y a 83 % sur une longue durée et non pas... Sur 0,25 $ qu'ils vont donner, il ne reviendra pas 0,17 $.

M. Kehoe: Mais c'est la même chose ailleurs. Dans les États du Nevada et du New Jersey, c'est toujours autour de ça, 83 %. Ce n'est pas parce qu'on est bien généreux, ici, au Québec.

M. K.-Laflamme (Ghislain): C'est autour de... Ça varie entre 75 % et 82 %, 83 %. On est un petit peu plus généreux au départ.

(17 heures)

M. Kehoe: O.K. Juste une autre question dans le même domaine. Vous avez dit que votre Régie, une de ses fonctions, c'est la certification des fournisseurs. Jusqu'à date, si je comprends bien, il y a combien de compagnies qui sont certifiées qui peuvent vendre leurs machines à Loto-Québec? Avez-vous parlé de cinq? Il y a VLC, Spielo, Williams...

M. K.-Laflamme (Ghislain): ...IGT, Primetech, LG Technologies...

M. Kehoe: Bally?

M. K.-Laflamme (Ghislain): Bally, non. Bally en a fourni au casino; IGT en a fourni au casino, mais ceux qui ont été retenus pour fournir des machines au casino ne seront pas nécessairement les mêmes entreprises qui vont être retenues pour fournir...

M. Kehoe: Mais elles peuvent être, elles peuvent fournir les deux.

M. K.-Laflamme (Ghislain): Oui, elles peuvent être, elles peuvent être.

M. Kehoe: Mais Bally n'a pas demandé de certification pour vendre des vidéopokers?

M. K.-Laflamme (Ghislain): Non, Bally n'a pas demandé de licence chez nous. Ceux qui ont demandé une licence chez nous, c'est Spielo, c'est Williams, c'est IGT, c'est Primetech, LG Technologies. Il n'y en a pas d'autres.

M. Kehoe: En fin de semaine, si je comprends bien, il y a eu un communiqué de presse disant que Spielo a eu un contrat pour 4000 machines, et il y a deux autres compagnies, je pense, qui en ont eu pour 2000 machines chacune. Est-ce que c'est ça? C'est-à-dire qu'il y a 8000 machines déjà commandées par Loto-Québec?

M. K.-Laflamme (Ghislain): Ce que je sais, à part de ce qui s'est dit dans le journal en fin de semaine, c'est que Loto-Québec devrait prochainement prendre la décision à l'égard de ces contrats et l'annoncer demain ou après-demain. Alors, je pense que les décisions définitives ne sont pas prises.

M. Kehoe: Mais les communiqués de presse sont déjà sortis. Ça arrive.

M. K.-Laflamme (Ghislain): C'est des choses qui arrivent.

Mme Bleau: C'est comme ailleurs. J'aurais seulement une autre question encore sur sur le même sujet.

Le Président (M. LeSage): Mme la députée de Groulx.

Mme Bleau: Quand on pense aux machines illégales qui sont en circulation dans le moment, qui sont en opération dans le moment, est-ce que, vous autres, vous savez exactement où sont toutes ces machines-là?

M. K.-Laflamme (Ghislain): On a fait faire un relevé par des corps policiers pour avoir une bonne idée de l'endroit où se trouvent ces machines-là. Mais notre objectif premier n'est pas de saisir ces machines, n'est pas de les détruire. Notre objectif premier, c'est de les faire disparaître, et, s'ils veulent les envoyer aux îles Galapagos pour que les tortues jouent avec, ça...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Bleau: Moi, je pense que ceux qui en ont déjà et qui veulent se soustraire à la loi vont les mettre quelque part pour qu'elles marchent encore. Comment allez-vous faire... À part d'une plainte ou quelque chose de même, vous ne pourrez pas savoir où elles sont.

M. K.-Laflamme (Ghislain): Évidemment, si elles ne sont pas en usage, si elles ne sont qu'entreposées, ça ne crée pas...

Mme Bleau: Non, moi, je parle en usage.

M. K.-Laflamme (Ghislain): ...de problème, mais si elles sont en usage, nos inspecteurs – «nos» en termes gouvernemental – sont les corps policiers, et, en vertu de la loi 84 – la loi 84 a été faite précisément pour que la saisie soit facile – le fait qu'un appareil ne soit pas rattaché au réseau de Loto-Québec est une raison de saisie à vue immédiate. Alors, ces personnes-là vont se trouver à les perdre, mais, en plus de les perdre, à ce moment-là, elles vont avoir une infraction contre elles.

Mme Bleau: Oui.

M. K.-Laflamme (Ghislain): Et là, elles ne pourront plus avoir d'appareils légaux...

Mme Bleau: Ah!

M. K.-Laflamme (Ghislain): ...pendant cinq ans.

Mme Bleau: Bon, c'est bien, ça.

M. K.-Laflamme (Ghislain): Donc, c'est une question importante que vous avez posée, parce que...

Mme Pelchat: Ce n'est pas rattaché aux permis d'alcool ou...

M. K.-Laflamme (Ghislain): En plus.

Le Président (M. LeSage): Vous désirez intervenir, Mme la députée de Vachon?

Mme Pelchat: Je vous remercie, c'est déjà fait, M. le Président. Merci, M. Laflamme.

Le Président (M. LeSage): Merci. Alors, M. le député de Jonquière, la parole est à vous.

M. Dufour: Oui, juste pour compléter, combien de machines prévoit-on installer, et dans combien d'établissements? Une question précise, là.

M. K.-Laflamme (Ghislain): Combien de machines on veut installer? Évidemment, là...

M. Dufour: Et dans combien d'établissements?

M. K.-Laflamme (Ghislain): Sont visés les détenteurs de permis de bar, de taverne et de brasserie. Il y en a 9000 au Québec; c'est les 9000 établissements qui ont droit d'avoir ce genre d'appareil. Évidemment, on ne peut pas les forcer. Ceux qui n'en veulent pas n'en prendront pas, mais on estime que, sur une période de peut-être un an, il y a probablement 8000 de ces entreprises-là qui pourront prendre deux ou trois machines en moyenne par établissement, ce qui peut faire un réseau comparable à celui qui existerait actuellement.

M. Dufour: Ça, c'est une première phase, mais est-ce que vous pouvez nous dire qu'après il y aura une phase subséquente pour en entrer dans d'autres domaines? Parce qu'il y avait eu un engagement assez précis de la part de l'ex-ministre de la Sécurité publique concernant une table de concertation entre les opérateurs de vidéopokers et le ministère. Ça, c'était avec la Sûreté du Québec. Il y avait un certain nombre d'intervenants. Et, à ce que je sache, cet engagement n'a jamais été respecté. C'était la question de discuter des coûts. Comment ça allait s'installer? De quelle façon? La table de concertation n'a jamais existé. Là, je vous demande: est-ce que vous prévoyez, dans un premier temps... C'est 9000 établissements, on peut dire, en gros, mais est-ce qu'il y a d'autres établissements qui pourraient être visés en plus?

Le Président (M. LeSage): M. Laflamme.

M. K.- Laflamme (Ghislain): Évidemment, il est prématuré de répondre à cette question, parce que, ce qu'on a mis en place, c'est un comité d'évaluation de l'impact de l'arrivée de ces appareils-là, entre autres, mais aussi du phénomène général du jeu au Québec. Si vous vous souvenez, dans la loi 84, à l'article 2, on rend la Régie responsable de l'examen de la situation du jeu au Québec et de la production de rapports au ministre de la Sécurité publique sur l'état du jeu au Québec.

Jusqu'à relativement récemment, le jeu au Québec était confiné dans les hippodromes et dans les diverses loteries de Loto-Québec, mais maintenant qu'il y a deux casinos autorisés et qu'il y a un réseau d'appareils de vidéoloterie qui va exister en addition à tout l'ensemble, on pense qu'il ne serait pas prudent de se lancer dans une phase nouvelle sans avoir donné le temps d'évaluer l'impact de ces jeux nouveaux pour éviter les joueurs compulsifs et pour éviter toutes sortes de problèmes dans la population.

Alors, la Régie fera l'évaluation de tout ça, fera rapport au ministre de la Sécurité publique, qui, lui, comme responsable, pourra aiguillonner la politique dans le sens approprié, en fonction des rapports.

M. Dufour: La table de concertation supposément promise et qui n'a jamais eu lieu, comment vous expliquez ça?

M. K.-Laflamme (Ghislain): Il y avait une table de concertation qui avait été envisagée avec l'association CLAQ et l'Association de l'amusement. Mais, comme ils ont choisi la voie judiciaire, c'était drôlement difficile d'avoir une table de concertation pendant qu'eux autres se débattaient devant les tribunaux à l'encontre de notre réglementation et de nos lois. Alors...

M. Dufour: Mais quand vous parlez de la voix judiciaire, vous pourriez me donner la date, si on a adopté la loi au mois de juin.

M. K.-Laflamme (Ghislain): Oui.

M. Dufour: Et la date où la voie judiciaire a été employée?

M. K.-Laflamme (Ghislain): Les premières opérations judiciaires ont eu lieu aux alentours d'octobre.

M. Dufour: Juillet, août, septembre, octobre, quatre mois? Mais il y a eu des tentatives.... Il n'y a pas de repos; ça, pour des gens, c'est comme une drogue. Les joueurs de vidéopoker, ils n'arrêtent pas. Ce n'est pas l'été qu'ils arrêtent. Ils continuent. Ça va.

Le Président (M. LeSage): Ça va? M. le député de Chapleau.

M. Kehoe: M. le Président, j'aimerais poser une question au ministre. M. le ministre, le gouvernement, dans sa sagesse, ou je ne sais pas pour quelle raison, a décidé de permettre aux dépanneurs qui ont actuellement des vidéopokers dans leurs établissements... ce sera défendu. Seulement des détenteurs de permis de boisson, soit des brasseries, des bars, ainsi de suite. Je comprends que la province du Nouveau-Brunswick a fait la même chose. Déjà, c'était permis dans des dépanneurs. La Législature, ils ont décidé de défendre ça, et je pense qu'ils sont revenus sur leur décision. C'est rendu, si je ne me trompe pas, que les vidéopokers sont permis maintenant, encore, dans des dépanneurs dans la province du Nouveau-Brunswick.

Je me demande si la question est venue sur le tapis ici, dans la province de Québec, et si c'est une décision finale qui est prise maintenant? Parce que c'est bien sûr, dans nos comtés, depuis que la loi est changée pour la contrebande de cigarettes, les dépanneurs sont beaucoup plus satisfaits parce qu'une source de revenus est revenue. Mais on enlève, en défendant les dépanneurs d'avoir des vidéopokers dans leurs établissements...

(17 h 10)

Pouvez-vous faire l'état de la situation? Où est-ce qu'on en est rendu? Est-ce que les dépanneurs peuvent espérer l'avoir un jour, ou c'est une décision irrévocable du gouvernement?

M. Middlemiss: Non, regardez, la loi 84 dit, définitivement, qu'il n'y en aura pas dans les dépanneurs.

Mme Pelchat: Bravo.

M. Kehoe: Je sais.

M. Middlemiss: Toutefois, il me semble qu'il n'y a rien de coulé dans le béton. Si on peut nous apporter des raisons valables pour démontrer que les dépanneurs peuvent opérer ça sans que... Je pense que la plus grosse objection qu'on avait au niveau des dépanneurs, c'était les jeunes, les mineurs qui iraient jouer au vidéopoker.

Maintenant, je pense que c'est une situation qu'on peut analyser de façon plus approfondie et voir s'il n'y a pas des moyens de permettre à ces dépanneurs-là d'avoir des machines de vidéopoker. Parce qu'il y a un certain danger que, s'ils sont totalement éliminés, ils vont peut-être tenter de l'avoir de façon illégale quand même. Il ne faut pas s'imaginer que tout le monde va être pur et va obéir aux choses. Les années passées, c'étaient les «slot machines» qui étaient, comme on disait, dans le «back-store». C'est des choses qui sont possibles. Donc, à la lumière de ça, nous sommes prêts à regarder, et nous le regarderons avec les gens impliqués, si on ne pourrait pas revenir sur ça, mais, toutefois, avoir quelque chose, des dents, dire que, si on permet aux dépanneurs, un jour, d'avoir des vidéopokers, leur licence de vente de boisson soit aussi rattachée à ça. Si ces gens-là sont pris à laisser des mineurs jouer, ainsi de suite, tout va y passer. Donc, c'est des choses, je pense, qu'il faut regarder. Nous les regardons. Comme disait M. Laflamme, dans la première phase, il y a 9000 établissements à qui on va offrir des vidéopokers. On verra si nous avons évolué dans ce sens-là et si, un jour, on pourra permettre aux dépanneurs d'avoir des machines de vidéopoker.

Le Président (M. LeSage): Ça va, M. le député de Chapleau?

M. Kehoe: Oui, merci.

Le Président (M. LeSage): M. le député de Jonquière.


Pratiques commerciales dans certains bars

M. Dufour: Oui, on va profiter de la présence du président de la Régie pour parler de la promotion de l'alcool dans les bars. On en a parlé l'an passé. C'est un phénomène qui semble nouveau; il y a des spéciaux, actuellement, dans des bars qui n'ont pas de permis. Ils appellent ça du «cinq plus un», c'est-à-dire qu'en payant 5 $ de frais d'entrée toutes les consommations de la soirée coûtent 1 $, sans distinction du type de consommation.

Mme Pelchat: Où ça?

M. Dufour: Bon, j'en vois qui avait... Il existe aussi la formule bien connue du «deux pour un», soit deux consommations pour le prix d'une. Ça, vous le savez, par exemple, deux consommations pour le prix d'une.

Mme Pelchat: Oui, ça, ça marche.

M. Dufour: Dites-moi pas que vous ne le savez pas. Enfin, la formule «bar ouvert», où, pour un montant fixe à l'entrée, vous obtenez toutes vos consommations gratuitement. Certaines de ces promotions sont légales, d'autres ne le sont pas. Chose certaine, ça existe, puis la publicité est interdite pour ce genre de promotion qui est en progression. Est-ce que vous êtes au courant? Est-ce que la Régie est au courant de ce type de promotion?

Mme Pelchat: Est-ce que vous avez la liste de ces établissements?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dufour: Bon, si vous êtes au courant – je viens de voir votre signe affirmatif – est-ce que vous comptez faire des... Qu'est-ce que vous en pensez? Est-ce que vous avez l'intention de faire des recommandations au gouvernement concernant ces promotions?

M. K.-Laflamme (Ghislain): Oui, nous sommes au courant. C'est une situation, évidemment, qui se continue. C'est une pratique qu'on trouve dans les bars depuis toujours. Plus les affaires deviennent difficiles, plus ce genre de promotion augmente. En temps de prospérité, ça diminue. Nous sommes en face d'une recrudescence, effectivement, de ces activités promotionnelles où on peut entrer dans des bars et, moyennant une somme variable d'un bar à l'autre, on peut boire toute la soirée. Nous avons un règlement et nous avons aussi une disposition dans la Loi sur les permis d'alcool, l'article 24.1, qui concerne la tranquillité publique, qui a pour effet de mettre en cause le permis d'alcool de l'établissement où ça se produit et où il y aurait des comportements répréhensibles de la part des détenteurs de permis de bar ou de leur personnel pour faire boire les gens.

Lors de l'adoption de la loi 132, d'ailleurs, en décembre dernier, on a modifié la LIMBA pour responsabiliser encore davantage les détenteurs de permis d'alcool. Nous sommes à revoir, avec les forces de police, les mesures additionnelles qui pourraient être prises pour ramener ça à une portion congrue, c'est-à-dire à de la publicité toute simple, et éviter cette surenchère qu'il y a au niveau des prix. Nous avons, comme nous sommes aussi un tribunal, par ailleurs, quelques causes qui sont en convocation devant nous, et je ne voudrais pas les commenter, mais l'idée générale est que, à chaque fois qu'on nous apporte la preuve qu'après être sorti d'un établissement où on fait de ce genre de promotion il y a des conséquences dramatiques qui se sont produites, comme des accidents de la route, des bagarres, des coups, des blessures, nous convoquons le détenteur du permis pour voir s'il y a un lien direct entre la surconsommation qui a été faite et l'accident qui est arrivé. Et nous sommes aidés en ça par le coroner, qui, dans l'examen qu'il fait des accidents de cette nature, nous fait systématiquement rapport, et on fait convocation. Mais on pense aussi qu'il y aurait peut-être lieu de revoir la réglementation pour la rendre encore plus stricte à ce sujet-là.

M. Dufour: Mais, dans le contexte actuel, à part des événements malheureux que vous nous donnez, est-ce que la Régie a des moyens pour appliquer la loi? Puis est-ce que la réglementation est respectée?

M. K.-Laflamme (Ghislain): La Régie a comme moyen les forces de police, puisqu'on a des protocoles avec les corps policiers qui font l'inspection systématique des bars.

La loi est généralement respectée. Le mot «généralement» a l'air d'une précaution d'avocat, mais c'est parce qu'on voit plus les cas problèmes que les cas où il n'y a pas de problème. Et les cas problèmes aboutissent généralement à la radio, à la télévision et dans les journaux, et nous nous en occupons assez facilement. Il serait juste de dire que la loi est généralement respectée.

M. Dufour: Vous parlez qu'il y a des cas problèmes, on les voit plus que les cas chanceux où il ne se produit rien.

M. K.-Laflamme (Ghislain): C'est vrai.

M. Dufour: Ceux-là, on n'en parle pas, mais ils sont latents.

M. K.-Laflamme (Ghislain): C'est vrai.

M. Dufour: C'est du potentiel.

M. K.-Laflamme (Ghislain): C'est vrai.

M. Dufour: Donc, si je comprends bien puis si je résume, c'est que, oui, vous voulez essayer de proposer certaines réglementations plus sévères, plus strictes, pour aussi avoir les moyens pour les appliquer. Ça va pour ça.


Mini-brasseries

Il y a un autre élément, qui s'appelle les mini-brasseries, qui, aussi, a été le sujet de discussions l'an dernier. Et vous aviez indiqué à ce moment-là que vous auriez des consultations qui seraient tenues à l'automne – je parle de l'automne 1992 – puis que vous remettriez un rapport au ministre concernant les mini-brasseries. Vous pourriez faire le point sur ce dossier, qui a intéressé... Cette année, elles ne soulèvent peut-être pas trop, trop de passions, les mini-brasseries, mais je sais que, les années précédentes, on en a discuté assez largement.

Le Président (M. LeSage): M. Laflamme.

M. K.-Laflamme (Ghislain): Il y a effectivement une étude qui a été faite et il y a effectivement un rapport qui a été remis au ministre de la Sécurité publique. Le rapport était à l'effet que les mini-brasseries... Et, pour qu'on se comprenne bien, les mini-brasseries, ce seraient des endroits où les gens se rendraient pour fabriquer leur propre bière à partir de quelques ingrédients qu'ils choisiraient à l'intérieur de l'établissement. Le phénomène était prospère en 1992 parce que, en Ontario, il y avait toute une série de ces mini-brasseries, surtout le long de la frontière québécoise, qui étaient très actives. L'étude que nous avons menée, les consultations que nous avons faites, aussi bien auprès de ceux qui voulaient se lancer dans cette activité qu'au niveau des corps de police et au niveau des autres brasseurs réguliers, et du ministre du Revenu, et du ministre des Finances, nous a amenés à conclure qu'on ne devait pas permettre, au Québec, ce genre d'activité qui n'était, en quelque sorte, qu'une façon déguisée de contourner la législation sur la fabrication des boissons alcooliques.

(17 h 20)

Depuis ce temps-là, en Ontario, ils ont fait des études à peu près semblables aux nôtres, et ils sont arrivés à la conclusion que, puisqu'il y avait plusieurs de ces établissements, ils ne pouvaient pas les fermer à cause d'un semblant de droit acquis. Alors, ils ont imposé une taxe sur le «gallonnage» de bière qui était fabriquée, taxe qui équivalait presque à celle qui était imposée aux brasseurs. Et ça a mis le couvercle très fort sur cette pratique. Si bien que, depuis ce temps-là, moi, je n'ai eu, au Québec, qu'une demande de quelqu'un qui persiste à vouloir faire ce genre d'activité.

M. Dufour: Est-ce que vous croyez qu'on devrait ouvrir un peu plus pour permettre à des mini-brasseries d'obtenir leur part du marché? Le réseau commence à se développer lentement, mais, au point de vue des coûts, elles vont avoir de la difficulté à s'implanter, j'ai l'impression.

M. K.-Laflamme (Ghislain): En fait, la situation actuelle est compliquée du fait que, entre-temps, il y a eu l'Accord de libre-échange avec les États-Unis; il y a eu l'arrivée des brasseurs américains au Québec et des brasseurs du Nouveau-Brunswick et de l'Ontario qui sont venus s'installer au Québec et qui veulent, eux aussi, offrir à des prix défiant toute compétition des produits qui, souvent, résultent de leur surcapacité de production. Alors, il y a comme une espèce de château de cartes assez délicat à toucher.

Alors, on est au coeur de ça et on essaie de prendre les meilleures décisions. Donc, pour le moment, je pense que l'arrivée des brasseurs américains va être le phénomène majeur là-dedans et qu'il va y avoir inévitablement une baisse du coût de la bière au Québec.

M. Dufour: Mais c'est aussi une question de volonté politique de développer ou de ne pas développer. Parce que c'est vraiment un marché intérieur, pour moi, les mini-brasseries.

M. K.-Laflamme (Ghislain): Oui.

M. Dufour: Ça ne sort pas, ça, du Québec; donc, à ce moment-ci, il s'agirait de savoir si on doit favoriser ce genre d'industrie. Est-ce qu'on peut les favoriser? Parce qu'elles n'ont pas besoin d'une si grande part de marché que les compagnies à grand gabarit qu'on connaît bien.

M. K.-Laflamme (Ghislain): Ce qui les rend intéressantes, c'est la différence de taxation, c'est-à-dire l'absence de taxes. Je pense que le gouvernement, à ce moment-ci – je ne réfère pas à un parti politique – n'est pas à une époque où il fait des ouvertures de diminution de taxes ou d'abandon de taxes dans un secteur donné. Et la bière est un secteur qui rapporte de façon intéressante.

M. Dufour: Ça va pour ce dossier-là.

Le Président (M. LeSage): Ça va, M. le député de Jonquière? Est-ce qu'il y a des ministériels qui veulent...

M. Kehoe: M. le Président.

Le Président (M. LeSage): M. le député de Chapleau.

M. Kehoe: M. Laflamme, sur le même sujet, en ce qui concerne les régions frontalières, ça veut dire qu'en Ontario une activité semblable est permise et, à Gatineau, ça ne le serait pas, n'est-ce pas?

M. K.-Laflamme (Ghislain): C'est exact. C'est..

M. Kehoe: C'est ça.

M. K.-Laflamme (Ghislain): ...permis en Ontario et ce n'est pas permis au Québec.

M. Kehoe: Est-ce qu'on a le droit d'amener le produit de l'Ontario à Gatineau?

M. K.-Laflamme (Ghislain): En principe, non. Dans la LIMBA, le transport de boissons alcooliques n'est pas permis, pas de cette nature-là. Par contre, avec le relèvement de taxes qu'il y a eu en Ontario, ça commence à être pas mal moins intéressant pour les Québécois d'aller s'approvisionner de l'autre côté.

M. Kehoe: D'aller dans les magasins et d'amener le produit fini au Québec, ça ne vaut pas la peine, quasiment...

M. K.-Laflamme (Ghislain): C'est ça.

M. Kehoe: ...maintenant.

M. K.-Laflamme (Ghislain): Non, ça ne vaut pas...

M. Kehoe: Auparavant, jusqu'à récemment, je sais pertinemment bien... Je vis à Gatineau; je ne mentionnerai pas de noms de gens qui, justement, faisaient ça. C'était permis d'aller la faire faire dans une mini-brasserie en Ontario, mais pas de l'apporter.

M. K.-Laflamme (Ghislain): C'est ça.

M. Kehoe: Si vous la buvez là-bas, c'est correct. D'accord.

M. K.-Laflamme (Ghislain): C'est ça.

Le Président (M. LeSage): Ça va, M. le député de Chapleau? C'est complété? M. le député de Jonquière.


Permis de bingo

M. Dufour: Ça va pour ça. Oui, j'aurais aimé parler des permis de bingo. Depuis quelques mois, la Régie des alcools a tenu des consultations – des courses et des jeux, c'est sous-entendu, je mets tout le paquet, la Régie – publiques concernant un projet de réglementation des bingos. Plusieurs députés ont été saisis de demandes à l'effet d'empêcher l'ouverture de nouveaux bingos. Il y a un problème réel là-dessus puisque ça va un peu en opposition avec des bingos existants. Les organismes communautaires financés par les bingos ont constaté une diminution de leurs profits à cause de la saturation grandissante du marché. Contrairement aux vidéoloteries ou aux casinos, les bingos servent d'abord à financer des organismes à but non lucratif, et il est important de préserver cet aspect de l'activité des bingos.

On sait que vous avez tenu ces consultations. On sait aussi qu'elles sont terminées. Est-ce qu'on pourrait savoir quelle est la direction que la Régie a retenue?

M. K.-Laflamme (Ghislain): Alors, nous avons effectivement tenu, et nous sommes en train de rédiger un projet de règlement à présenter au ministre. Et, comme nous sommes en train de le rédiger, il m'apparaîtrait prématuré de dire quelle orientation nous allons prendre, parce que nous voulons le discuter avec le ministre avant d'en faire un règlement ou une proposition de règlement.

Mais, en substance, les difficultés que nous avons rencontrées sont des difficultés qui sont liées, d'une part, aux grandes agglomérations et, d'autre part, aux petites agglomérations. Et, si on apporte une réglementation d'un certain type, on va nuire aux petites agglomérations tout en favorisant les grandes. Et, si on en apporte une autre, ça va être l'inverse.

Alors, ce à quoi nous pensons, sans être rendu à en faire une proposition globale, c'est d'introduire un critère un peu discrétionnaire, c'est-à-dire d'arriver, dans les cas litigieux où il y a plusieurs associations qui sont en cause, où il y a plusieurs bonnes oeuvres qui sont en cause, à publier les demandes additionnelles qui nous arriveraient, afin que chacun puisse faire valoir son point de vue et qu'on puisse éviter, dans l'arbitraire, de le refuser à des gens qui mériteraient de l'avoir, mais de le refuser aussi si ce n'était pas approprié de le faire.

M. Dufour: Est-ce que vous avez l'intention de publier ou de faire connaître les résultats de la consultation puis les avenues ou les pistes retenues? Par exemple, il y a des principes qu'on doit accepter. D'abord, le bingo, est-ce qu'il doit, d'abord et avant tout, s'adresser à des organismes sans but lucratif? C'est important de le faire, parce qu'il me semble que... En tout cas, même la députée de Groulx nous dit: oui, c'est correct. Et, à Montréal, il y en a beaucoup, et je pense qu'on s'est tous exprimés dans ce sens-là.

Après ça, est-ce qu'on doit privilégier les organismes existants? Quels sont les critères que vous pourriez retenir pour qu'un organisme puisse avoir ces permis-là? J'imagine que vous avez fait le tour de la question pas mal, avec toutes les représentations qui vous ont été faites. Quand allez-vous pouvoir faire connaître les orientations? Peut-être que ça doit être accepté par le gouvernement par règlement, moi, je ne le sais pas, là. Je veux juste vous poser ces questions-là.

M. K.-Laflamme (Ghislain): Ce à quoi on s'est engagé auprès des 150 personnes qui sont venues nous faire des représentations, c'est que, avant même de faire le rapport au ministre, nous allons retourner auprès des principales associations pour leur indiquer des pistes qu'on entend retenir pour qu'elles puissent nous indiquer si on a compris comme il faut leurs problèmes ou pas. Alors, au plus tard dans les semaines qui viennent, ces associations vont être à nouveau consultées par nous sur un schéma général du projet de règlement.

M. Dufour: Est-ce que vous allez le faire par consultation publique ou consultation informelle, par des écrits ou...

M. K.-Laflamme (Ghislain): On va le faire par consultation publique, mais avec ceux qui nous ont fait des représentations. On ne relancera pas le débat dans le public. Les gens qui n'ont pas saisi la balle au bond, lorsqu'on a lancé les consultations, ne seront pas invités à refaire des commentaires. Mais les gens qui nous ont fait des commentaires, on va mettre ça en forme, on va retourner auprès de ces gens-là. Ils vont nous dire si on a bien compris ou pas, et, après ça, on va se retourner vers le ministre puis on va dire: voilà, c'était ça, le problème, puis les solutions.

M. Dufour: Une dernière question. Est-ce qu'il y a des organismes qui vous ont suggéré que l'émission de permis, au lieu d'être centralisée, ça devrait revenir soit aux MRC, aux municipalités, ou autres?

M. K.-Laflamme (Ghislain): Il y a eu des suggestions dans ce sens-là.

M. Dufour: Il y a eu des suggestions dans ce sens-là, que vous examinez en même temps.

M. K.-Laflamme (Ghislain): C'est ça.

M. Dufour: Ça va pour les bingos.

M. Kehoe: M. le Président, juste une question.

Le Président (M. LeSage): M. le député de Chapleau.

M. Kehoe: M. Laflamme, je sais que c'est difficile de répondre aux questions, mais vous avez dit que 150 personnes ont fait des recommandations à un groupe de travail; les autres en ont fait l'analyse. J'imagine qu'ils ont travaillé avec vous, là. Vous dites que vous êtes en mesure maintenant... Vous avez préparé des règlements, et là, vous allez retourner en consultation avec eux de nouveau pour leur dire à peu près ce que vous allez recommander au ministre, pour demander leur opinion. «C'est-u» ça au juste?

M. K.-Laflamme (Ghislain): On va retourner auprès d'eux pour leur montrer ce qu'on pense avoir compris de leurs représentations...

M. Kehoe: Oui.

(17 h 30)

M. K.-Laflamme (Ghislain): ...parce que, entre le moment où les gens s'expriment et le moment où un groupe se met à analyser tout ça, des fois, il y a des différences. Alors, on veut leur dire: Voilà ce qu'on pense avoir compris et voilà ce qu'on pense être les pistes. Et si, dans ces pistes-là, il y a des pièges, si on se trompe, on aime mieux que ces groupes-là nous le disent avant qu'on induise le ministre à prendre une position qui, elle, pourrait s'avérer problématique.

M. Kehoe: Si je comprends bien, toute cette opération-là, ça peut prendre encore un certain temps. Ça va prendre le... Est-ce un autre groupe de travail qui va faire la prochaine consultation?

M. K.-Laflamme (Ghislain): Non. Ça va être le même groupe, et on espère pouvoir la faire dans les quelques semaines qui viennent.

M. Kehoe: Par la suite, ce sera par règlement que vous allez discuter avec le ministre. Ce n'est pas un changement de loi. C'est juste un changement de règlement.

M. K.-Laflamme (Ghislain): C'est d'abord un changement de règlement. Si jamais il y avait des changements de lois, on le verra aussi. Mais c'est d'abord au niveau de la réglementation que nous envisageons les solutions.

M. Kehoe: Tout le problème dans l'ensemble des bingos, l'octroi des permis de bingo, la question des salles de bingo, le contrôle de la vente des billets, enfin, tout ça va être compris dans la nouvelle réglementation, si je comprends bien.

M. K.-Laflamme (Ghislain): On va tâcher d'avoir une vision globale de l'activité et on va tâcher de faire en sorte que ce soient vraiment les organismes sans but lucratif qui soient les bénéficiaires de ça.

M. Kehoe: Puis là, les personnes, les organisateurs de salles de bingo, ces affaires-là, ce sera réglementé aussi. Actuellement, je pense qu'un des problèmes majeurs, ça provient du fait que les organismes eux-mêmes... Auparavant, les bingos avaient lieu dans des salles d'église, dans les soubassements des églises, dans des salles d'école, dans des petites affaires, mais, maintenant, je pense qu'il s'agit des salles de bingo énormes où il y a quatre, cinq ou six cents personnes qui... où ont lieu les bingos et où des organisateurs professionnels organisent des bingos.

M. K.-Laflamme (Ghislain): C'est ça. En fait, c'est parti d'oeuvres paroissiales, puis il y a des gens qui en ont fait une activité commerciale sous forme de gigantesques «bingo halls». Ça perd vraiment le sens que ça avait à l'origine. On voudrait ramener ça à une activité de bienveillance.

Mme Bleau: Je suis bien d'accord.

M. Kehoe: Si je comprends bien, ça, c'est l'orientation générale, globale de l'affaire, de ramener ça à la vraie vocation d'un bingo: une organisation à but non lucratif dans une petite salle. Puis des petits bingos, pas des énormes bingos comme on a actuellement.

M. K.-Laflamme (Ghislain): C'est ça. On veut ramener ça à sa vocation initiale, mais, en même temps, on essaie de tenir compte de l'ensemble de la question. En voulant aller uniquement dans les petites salles, souvent on se trouverait... C'est pour ça que ça nous était... Au début, ça m'était apparu beaucoup plus simple que ça ne l'est après l'étude. C'est qu'en renvoyant tous les bingos dans les petites salles seulement, on se trouverait, dans certains cas, à créer des problèmes à ces associations qui n'ont pas les reins assez solides pour prendre sur elles-mêmes l'organisation d'un bingo. Alors, on essaie de prendre la balance et de proposer quelque chose au ministre qui soit équilibré.

M. Kehoe: Juste sur le même sujet... Vas-y.

Le Président (M. LeSage): Mme la députée de Groulx.

Mme Bleau: C'est tout de suite après sa question, là. Ce n'est pas le nombre de personnes qui peut faire la différence. Chez moi, j'ai quatre organismes qui se sont mis ensemble pour faire un seul bingo. Ils se séparent les profits. Puis il y a 600 à 700 personnes qui sont là quand ils... leurs soirées de bingo. Alors, si c'est organisé quand même pour quatre ou cinq organismes, c'est la même chose. Ce n'est pas le nombre de personnes qui sont présentes qui va faire que ça va changer le sens.

M. K.-Laflamme (Ghislain): C'est ça. Mais c'est ça qui complique une problématique qui a l'air simple au début. Et puis on se rend compte en cours de route que c'est multiforme. Ce qu'on veut essayer de trouver, c'est une solution à la Salomon qui va satisfaire tout le monde en créant le moins de problèmes possible et qu'il y ait aussi le moins de bris de confiance. Il y a beaucoup de gens qui se font jouer, là-dedans. Alors, c'est ça qu'on veut essayer d'éviter.

Le Président (M. LeSage): M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Ça va. Je pense que, pour le président de la Régie, pour moi, j'aurais terminé dans les questions. Ça ne veut pas dire, par exemple, que, demain, il n'y aura pas quelqu'un de notre côté qui aimerait vous poser quelques questions sur un sujet particulier. Moi, je pourrais parler des courses de chevaux, mais c'est un autre système. Mais ce n'est pas ça. On va laisser... On va aller dans un autre programme, ou un autre sujet.


Traitement des plaintes concernant les forces policières

On pourrait parler, bien sûr, du code de déontologie, un petit peu, le traitement des plaintes au point de vue de la Sûreté du Québec. À la suite du décès de Trevor Kelly, abattu par des policiers au début de l'année 1993, la coroner Teresa Sourour avait suggéré au ministre de la Sécurité publique de créer une équipe civile spécialisée pour enquêter sur le comportement des policiers lorsque leurs interventions entraînent un décès ou des séquelles permanentes – je pense que ça équivaut à un décès. L'ex-ministre de la Sécurité publique avait déclaré, à propos de cette recommandation, qu'il préférait que les citoyens ordinaires ne se mettent pas trop le nez là-dedans, en parlant, bien sûr, des affaires policières.

Ma question: Le nouveau ministre de la Sécurité publique partage-t-il l'opinion de son prédécesseur?

M. Middlemiss: Mme la Présidente, est-ce que le député de Jonquière pourrait me répéter...

M. Dufour: La question...

M. Middlemiss: Oui.

M. Dufour: ...ou la problématique?

M. Middlemiss: La problématique, oui.

M. Dufour: La problématique, c'est qu'il y a quelquefois des incidents malheureux qui se produisent lorsque les policiers interviennent. Ça peut être des séquelles permanentes ou ça peut être même des morts, la mort de personnes qu'on appréhende ou des futurs détenus. Là-dessus, il y a la coroner Teresa Sourour, qui, elle, dans une recommandation, avait suggéré au ministre de la Sécurité publique, dans ces cas-là, que le ministre pourrait mettre sur pied une équipe composée de civils, donc de monde ordinaire, qui pourrait enquêter sur le comportement des policiers dans ces cas-là. Donc, l'ex-ministre de la Sécurité publique avait déclaré: Ça, je ne suis pas trop, trop chaud à ça, parce que je n'aimerais pas trop, trop que les civils se mettent le nez dans nos affaires. Bon, ça fait que c'est demeuré là.

Moi, je vous demande: Est-ce que c'est votre opinion aussi? On sait que, dans la plupart des cas – je peux élaborer quelque peu – il y a souvent que des groupes acceptent que des gens en dehors de certaines sections ou certaines facettes de la vie soient impliqués. Par exemple, les comptables, je sais qu'ils ont un code, et il y a des gens ordinaires qui font partie de la corporation au moment... pour juger des plaintes ou du comportement de cette faculté ou de ces groupes.

M. Middlemiss: Mme la Présidente, moi, je dirais, disons, de prime abord: Oui, je suis d'accord avec mon prédécesseur, dans le sens que, lorsqu'il y a des enquêtes vis-à-vis d'un corps policier, les enquêtes se font par un autre corps policier, disons. À ce moment-là, ce n'est réellement pas des gens qui sont nécessairement en conflit d'intérêts. On a un code de déontologie concernant les polices et ainsi de suite. Mais ça ne veut pas dire – donc, je vous ai dit: de prime abord – qu'au fur et à mesure qu'on va avancer on ne trouvera pas que ce serait peut-être une avenue à regarder, dans le sens de dire... Vous, ce que vous dites, c'est de faire comme d'autres corps professionnels, ingénieurs ou architectes ou comptables, qui, au moment d'un accroc au code de déontologie... il y ait une personne qui vient du monde ordinaire, qui n'est pas nécessairement le professionnel, qui soit là. Est-ce que ça pourrait ajouter quelque chose? Il me semble que l'activité policière, c'est tellement pointu que... Est-ce que la personne pourrait apporter des choses qui pourraient faire changer? Il me semble que c'est ça qu'il faudrait regarder, dans ce contexte-là.

(17 h 40)

M. Dufour: Le ministre ne doit pas douter du jugement de la population en général. N'oubliez pas que vous êtes ministre de la Sécurité publique, et vous n'êtes pas issu du milieu policier. Vous êtes... Bien, j'espère, je souhaite et je crois que vous pouvez porter des jugements sur le comportement du milieu policier. Moi, je pense que... D'abord, quand je regarde de quelle façon on fait des nominations dans des groupes, même des corporations, quand on amène des gens d'en dehors – j'appelle ça des laïcs – à l'intérieur, ce n'est pas n'importe qui. Ils choisissent tout de même des gens qui, en règle générale, ont un bon jugement. Ils sont un peu tamisés, je pourrais dire, avant d'être nommés ou choisis. Je pense que ça pourrait ajouter de la crédibilité, à certains endroits. Je pense que la personne pourrait être choisie... sans être un professionnel, pourrait apporter des éléments importants. Vous n'avez peut-être pas eu le temps de vous pencher là-dessus puis de l'examiner, là. Moi, je dis: On peut prendre le temps, mais on est rendu en 1994, où le public pense avoir des droits, et ces droits-là pourraient peut-être être exercés d'une façon très saine qui serait de nature à rassurer la population.

M. Middlemiss: Sur ça, M. le Président, le comité de déontologie... Sur ce comité-là, il y a des gens qui viennent de la population en général. Ce n'est pas tous des gens qui sont... Et, à ce moment-là, je pense qu'on répond, d'une certaine façon, aux préoccupations du député de Jonquière. Le comité lui-même qui juge des actes des policiers dans l'exercice de leurs fonctions, il y a des gens, là, qui viennent du milieu que le député nous suggère. Mais, comme il a dit, il me semble que nous sommes toujours en évolution de tenter de vouloir être plus transparents et de faire réellement l'analyse des choses. Ceci étant dit, il n'y a rien qui dit qu'à un certain moment donné on ne pourra pas changer. Mais, pour le moment, nous croyons que nous répondons d'une façon assez adéquate à cette préoccupation du député de Jonquière.

M. Dufour: Même au niveau de l'enquête, ça pourrait peut-être être une ouverture, moi, je pense. Quand des faits se produisent, il y a une enquête. Le Commissaire à la déontologie, lui, il se prononce après, pas durant, là. Il s'en vient après, puis là, il juge du comportement. Mais il y a une enquête qui se fait. Cette enquête-là, est-ce qu'elle couvre toutes les facettes? Est-ce qu'elle est faite selon certaines normes? Est-ce qu'elle n'a pas tendance, des fois, à escamoter des choses? C'est dans ce sens-là.

M. Middlemiss: Regardez, M. le Président, comme je l'ai dit, de prime abord, j'ai la même attitude que mon prédécesseur...

M. Dufour: Mais vous ne le dites pas de la même façon.

M. Middlemiss: ...mais il n'y a rien qui est coulé dans le béton. Non. Regardez, on cherche à s'assurer que ces décisions-là, ces jugements-là... C'est assez difficile. Chaque fois qu'il y a un incident de cette nature qui se produit, on a peut-être toujours une tendance de n'avoir aucune sympathie pour les membres de la force policière. Il me semble que, à ce moment-là, c'est faux. Il ne faudrait pas créer une situation qui serait encore plus difficile. Mais, comme je vous dis, je pense que la façon dont on procède présentement semble réellement nous donner des résultats qui sont favorables, qui sont acceptables. Mais il n'y a certainement rien qui nous empêche de regarder à vouloir les améliorer. Si c'est ça que ça prend, bien, on verra.

M. Dufour: Est-ce que le nombre de plaintes a augmenté? Est-ce que vous avez les statistiques?

(Consultation)

M. Middlemiss: On m'indique, M. le Président, que, l'an passé, le nombre de plaintes était de 1032, comparativement à cette année, où il serait de 1092. Donc, ça a augmenté.

M. Dufour: Vous me donniez les statistiques pour 1991-1992. Ça, ce serait pour 1992-1993.

M. Middlemiss: 1032, c'était 1992-1993.

M. Dufour: Ah, vous les avez pour 1993-1994. C'est ça?

Une voix: C'est que les chiffres... Excusez.

Le Président (M. LeSage): Pour les fins d'enregistrement du Journal des débats , est-ce que vous pourriez vous identifier, s'il vous plaît?

(Consultation)

M. Côté (Fernand): Mon nom est Fernand Côté. Je suis Commissaire à la déontologie policière.

Le Président (M. LeSage): Allez-y, M. Côté.

M. Côté (Fernand): En 1992-1993, le chiffre était de 1032. Ce que vous avez dans vos documents ne couvre que 11 mois pour l'année 1993-1994. Alors, jusqu'au 31 mars, les plaintes ont grimpé jusqu'à 1092...

M. Dufour: 1092, ça va.

M. Côté (Fernand): ...ce qui veut dire que la ventilation s'ensuit.

M. Dufour: Est-ce que, dans ces plaintes-là – la brutalité policière – quelle est la quantité que vous pouvez identifier? Est-ce qu'on peut savoir le nombre de plaintes concernant la brutalité policière?

M. Côté (Fernand): Nous pouvons dire qu'en matière d'abus d'autorité nous avons à peu près 45 % à 48 % des plaintes. La faute de comportement, qui est comprise dans l'article 5, s'établit de façon constante à 25 %.

M. Dufour: Là, vous me dites des beaux mots. L'article 5, c'est quoi?

M. Côté (Fernand): C'est la faute de comportement. Le blasphème, le sacre, l'injure, la grossièreté, l'irrespect, les injures à connotation raciale, sexuelle et autres, tout ça est de la faute de comportement.

M. Dufour: Ça, c'est 25 %...

M. Côté (Fernand): Des plaintes.

M. Dufour: Mais, ça, c'est 25 %; l'abus d'autorité, 45 % à 48 %.

M. Côté (Fernand): Ça, ça comprend le harcèlement, l'intimidation, l'excès de force et des choses de même nature.

M. Dufour: O.K. Je pense que, tous tant qu'on en est, on sait bien que ce n'est pas facile à vivre. Moi, je veux le faire avec beaucoup de mesure parce que je sais que ce n'est pas facile, dans des situations, des fois, de se retenir, et je pense qu'on peut le constater. Ce n'est pas propre à chez nous ou ailleurs. J'ai bien l'impression que c'est un comportement humain concernant ça, parce que c'est un problème. C'est définitif que, pour nous, ça représente des choses qui sont malheureuses en soi. Est-ce que le ministère de la Sécurité publique effectue de la formation, par exemple, des policiers, de la sensibilisation auprès des personnes arrêtées ou interpellées? Parce que tout ça est lié ensemble. Quand vous êtes rendu dans une situation de force, où vous exercez la force, ce n'est pas le temps... Il faut que ça devienne un réflexe, de protéger les personnes qu'on arrête. Est-ce que le ministère est suffisamment sensible à ces cas-là et est-ce qu'il peut nous donner la réponse à l'effet que vous prenez toutes les mesures possibles pour sensibiliser non pas seulement les corps policiers, mais les individus vis-à-vis de ce problème-là?

(17 h 50)

M. Côté (Fernand): Du côté du Commissaire à la déontologie policière, bien sûr, ça ne fait pas partie du mandat que de former ou d'informer les policiers, mais étant donné que nous n'avons pas non plus le mandat de laisser s'accroître sans dire mot les plaintes, il nous a semblé de notre devoir de faire quelque chose dans ce sens-là. À cet égard-là, nous avons quelques publications, notamment une brochure que nous avons faite à l'adresse des policiers, qui a été distribuée au mois de décembre. Nous avons un rapport quadrimestriel qui informe des statistiques des plaintes en ventilant la Sûreté, le SPCUM et les autres municipalités avec des commentaires et des extraits de jugements qui sont appropriés. Nous avons également une participation dans le nouveau bulletin juridique que le ministère vient de lancer. En plus, nous avons prodigué, si on peut dire, des cours dans les cégeps, les neuf cégeps de la province; nous en avons donné à l'Institut de police, aux candidats policiers, et, présentement, nous axons notre effort sur les corps policiers eux-mêmes, c'est-à-dire les constables, les agents eux-mêmes. Je vous dirai, par exemple, que toute la région de l'Abitibi, la semaine dernière, a pu bénéficier de cours. Tous les policiers de La Sarre, Rouyn, Amos, Val-d'Or, Lebel-sur-Quévillon ont bénéficié de cours de formation en matière de déontologie policière, des règles qui les régissent et qui régissent leur conduite. Ça s'est échelonné sur quatre jours. Nous en avons donné un peu partout dans la province, et nous avons offert ces cours-là à tous les directeurs de corps policiers. Nous nous sommes retournés tout récemment vers les associations policières pour leur offrir ces mêmes cours-là. C'est notre apport à la formation. Je voudrais bien profiter de cette occasion-là pour sensibiliser tous les gens, tous les intervenants, en leur disant que c'est par là seulement que nous réussirons à réduire le nombre de plaintes et, forcément, à réduire quelques exagérations auxquelles certains policiers, la minorité, évidemment, se prêtent parfois.

M. Dufour: Je pense qu'on doit se réjouir que cette avenue ou cette facette du travail policier ne soit pas mise de côté. Pour moi, ça me semble excessivement important qu'on continue à accentuer les efforts pour sensibiliser, comme partout. Je pense qu'il faut essayer de mettre en situation pour que ça arrête. Il y a moyen de diminuer. Je pense que, au moins, c'est quelque chose d'important; prévenir plutôt que guérir, ça doit aller dans la facette ou dans la...

M. Côté (Fernand): Nous l'avons offert à Jonquière, il y a 15 jours.

M. Dufour: ...dans la bible du ministre de la Sécurité publique, qui nous dit qu'on fait beaucoup de prévention. Des fois, ça coûte moins cher.

M. Middlemiss: M. le Président, j'aimerais ajouter qu'à l'Institut de police, dans la formation des policiers, tous les cours sont donnés pour le respect des personnes; ça, c'est primordial. En plus, dans la pratique aussi, lorsqu'ils ont des cours de pratique, que ça soit fait dans le respect de la personne, de plus en plus. Donc, on le fait dans la formation même des policiers à l'Institut, à Nicolet.

M. Dufour: Je voudrais ouvrir un peu sur ce qui s'est passé en novembre 1991, où le Commissaire à la déontologie a cité à comparaître six policiers qui avaient repêché d'un lac le corps d'un homme noyé, un autochtone, si je ne me trompe pas. La plainte avait été formulée par des membres de la famille de la personne décédée, alléguant que la dépouille avait été profanée par les policiers en raison de la façon dont on l'avait retirée des eaux. La Sûreté du Québec, de son côté, maintenait que toute l'opération s'était faite conformément aux règles et pratiques en vigueur au Québec et au Canada. Finalement, le jour de l'ouverture de l'audience, le Commissaire laissait tomber les charges retenues à l'endroit de ces policiers. C'est vrai qu'il y a eu pas mal de publicité faite autour de cette question. Ma question, bien sûr, parce qu'il y a des coûts rattachés à ça... Quand le Commissaire siège, il y a des coûts et des témoins, etc. Pourquoi on a attendu le jour de l'ouverture des audiences pour retirer les charges qui pesaient sur les six policiers? Est-ce que ça n'aurait pas pu se faire autrement, là, au départ?

M. Côté (Fernand): La réponse facile, M. le député, c'est que, devant tous les tribunaux, tant et aussi longtemps qu'une cause ou une audition n'a pas lieu, l'enquête n'est pas close, n'est-ce pas. Il arrive fréquemment à la couronne, dans les tribunaux de droit commun, que le matin même, le procureur de la couronne déclare qu'il n'a pas de preuves, parce qu'il vient de se rendre compte qu'il y a des éléments essentiels dans son dossier qui lui manquent. Ce qui est arrivé dans ce cas-là, c'est que notre enquête avait démontré qu'il semblait y avoir eu des façons de faire plus ou moins agréables à voir, d'abord, et plus ou moins admissibles. Certains détails nous avaient été fournis, évidemment, au cours de notre enquête et par la plainte elle-même. Le Commissaire n'a pas beaucoup, dans certains cas en tout cas, de marge. Dès qu'il peut s'apercevoir qu'il y a des éléments de preuve qu'un acte dérogatoire ou un comportement est dérogatoire, il doit agir en conséquence. Voilà pourquoi il y avait eu une citation. Sauf que le procureur qui était chargé de ce dossier, dans la préparation immédiate de sa cause, a fait des vérifications qui sont à l'extérieur de la province. Il a pris des informations dans les Maritimes. Il a pris des informations en Ontario. Il a pris des informations sur le sauvetage, si on peut dire – malheureusement, il est trop tard – de ces personnes dans des lacs, dans des fleuves ou dans la mer. Sa recherche, je pense, est allée jusqu'en Colombie-Britannique, pas par voyage ou par déplacement, mais par voie d'information, de communication. Sauf dans un cas, tous les corps policiers qui avaient affaire dans ce type d'opération agissaient de la manière que les agents de la Sûreté ont agi cette fois-là. Encore une fois, sauf dans un cas où les méthodes étaient différentes.

Alors, voyant cela, on s'est dit: Aussi bien exposer aux plaignants l'état de la situation. Et le procureur a rencontré les plaignants. Malheureusement, il en était rendu à l'extrême limite parce que la cause devait avoir lieu et il les a persuadés, à ce moment-là, il leur a exposé la situation pour leur faire comprendre que, même si ça avait l'air d'une profanation de cadavre, c'étaient les méthodes qui étaient employées pour la protection de la santé de ceux qui faisaient l'opération, pour les biens matériels aussi, etc. C'était une façon qui était admise partout. Donc, à ce moment-là, il y a eu compréhension de la part des plaignants, et c'est pourquoi nous avons retiré la citation.

M. Dufour: Est-ce que vous voulez dire par là que la plainte, vous avez pu convaincre les gens qu'elle était non fondée? Mais s'ils avaient persisté, est-ce que vous voulez dire qu'ils auraient pu la mener à terme et causer du trouble? Il me semble qu'il y a une directive interne où c'est comme ça que ça doit se passer. Ça a été respecté, ça me semble suffisamment clair. Là...

M. Côté (Fernand): C'est...

M. Dufour: ...vous nous dites que vous avez convaincu les gens de retirer leur plainte. S'ils ne la retirent pas, qu'est-ce qui arrive?

M. Côté (Fernand): Ce n'est pas si clair que ça, M. le député, qu'une directive est nécessairement une norme de droit. Une directive d'un corps policier d'agir de telle et telle manière n'est pas une règle de droit en soi. C'est la loi qui est la règle. Il peut arriver, il pourrait arriver et il arrive que certaines directives ne sont pas tout à fait conformes au droit et au jugement des tribunaux, de sorte que le policier, lui, on peut l'absoudre d'avoir agi en conséquence des directives qui lui sont enseignées et qu'il a apprises, mais, à la rigueur, il pourrait être quand même blâmé pour sa conduite, parce qu'il est allé contre des règles de droit. Et là, évidemment, il y a tout le problème de la sanction qui intervient.

M. Dufour: C'est ça. Là, on s'est rendu compte que si ces règles étaient appliquées un peu partout, il n'allait pas à l'encontre des droits de la personne.

M. Côté (Fernand): Il n'y avait pas de texte de loi qui allait à l'encontre de ça. On a fouillé dans la Loi sur les coroners. On a essayé de trouver des textes de loi qui définissaient, d'une certaine manière, une infraction de cette nature, et on n'en a pas trouvé dans les textes de loi mêmes. Donc, il fallait se retrancher sur les directives.

M. Dufour: Comme il n'y a pas de cause type, ça n'a jamais été en cour, qu'est-ce qui va arriver à partir de maintenant, dans un cas comme ça?

M. Côté (Fernand): Dans ce cas-là? Ça va...

M. Dufour: Non. Dans d'autres cas similaires qui pourraient arriver n'importe quand.

(18 heures)

M. Côté (Fernand): Savoir si les directives...

M. Dufour: Comme il n'y a pas de règle de droit, puisqu'il n'y a pas de cour ayant statué...

M. Côté (Fernand): On ne peut pas dire, à ce moment-là, qu'il y a eu manquement au respect de l'autorité de la loi.

M. Dufour: Non, mais vous êtes toujours à la merci d'un quidam qui déciderait demain matin de vous poursuivre, de poursuivre le corps policier.

M. Côté (Fernand): Ah oui.

M. Dufour: C'est le cas?

M. Côté (Fernand): À la rigueur... Bien, c'est-à-dire que, dans chaque cas, il y aura une analyse particulière des faits.

Le Président (M. LeSage): Alors, compte tenu de l'heure et compte tenu également qu'il y a eu entente entre les parties, je suspends les travaux jusqu'à 19 heures.

M. Dufour: Autrement dit, on travaillerait de 19 heures à 21 heures. Ça va.

(Suspension de la séance à 18 h 1)

(Reprise à 19 h 4)

Le Président (M. LeSage): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission des institutions reprend ses travaux, et je cède la parole au député de Jonquière.


Enquête du coroner sur la mort du caporal Lemay

M. Dufour: Merci, M. le Président. Je voudrais attaquer le programme 1 de l'élément 1, qui concerne l'enquête du coroner Gilbert sur la mort du caporal Lemay de la Sûreté du Québec qui semble s'éterniser et qui n'avance pas véritablement. En outre, elle fait constamment l'objet de menaces visant à la stopper ou à empêcher son bon fonctionnement.

J'aimerais savoir de la part du ministre, si c'est possible, combien a coûté l'enquête du coroner Gilbert jusqu'à présent.

Le Président (M. LeSage): M. le ministre.

M. Middlemiss: Le total des déboursés, à date, est de 559 981,24 $.

M. Dufour: TPS et TVQ incluses.

M. Middlemiss: Pardon?

M. Dufour: TPS et TVQ incluses?

M. Middlemiss: Oui, je crois.

M. Dufour: Incluses. Et pendant combien de temps encore on prévoit poursuivre cette enquête? Est-ce qu'on a des éléments?

M. Middlemiss: On m'indique que, la semaine dernière, le coroner a indiqué qu'il y aurait de cinq à 10 jours d'audition de témoins et que ce serait terminé.

M. Dufour: Mais le résultat de l'enquête... Il reste encore le délibéré du coroner, puis l'écriture, etc.

M. Middlemiss: Je demanderais au coroner en chef, M. Morin...

Le Président (M. Lafrance): Alors, M. Morin, pour les fins d'enregistrement du Journal des débats , si vous voulez bien vous identifier, s'il vous plaît.

M. Morin (Pierre): Pierre Morin, coroner en chef.

Le Président (M. LeSage): À vous, M. Morin.

M. Morin (Pierre): En fait, une fois que l'audition des témoins est terminée, effectivement, comme le dit M. Dufour, il y a délibéré, mais délibéré non pas pour rendre une décision ou pour prononcer un verdict comme autrefois, mais pour... En fait, le délibéré, c'est la phase de rédaction du rapport. Le dernier commentaire qui m'avait été fait, à l'époque, par le coroner, c'est qu'il espérait toujours avoir déposé son rapport d'enquête publique – le rapport est public – avant de partir en vacances, c'est-à-dire au début de juillet.

M. Dufour: Suite au délibéré, autrement, sans présumer ce qui va arriver, est-ce que c'est possible qu'il y ait d'autres mesures qui suivent, après ça?

M. Morin (Pierre): Non. Dans son rapport – vous savez que le coroner, au stade de la rédaction du rapport, peut formuler des recommandations. Vous l'avez fait, vous avez parlé de recommandations de la coroner Thérèse Rousseau, cet après-midi. Simplement, s'il le juge opportun, approprié – et on peut penser que, effectivement, ça va être le cas – le coroner intègre ses recommandations au rapport, et, sur réception du rapport, il appartient au coroner en chef, lui, s'il le juge approprié, d'acheminer aux organismes, aux ministères, aux personnes visées par les recommandations, les recommandations en question.

M. Dufour: Dans les coûts dont M. le ministre nous a informé, est-ce que, vraiment, tout est compris? Par exemple, je sais que la Sûreté du Québec est présente régulièrement, et c'est normal. Il y a d'autres groupes qui sont là, qui occasionnent des coûts. Est-ce que les 559 000 $, c'est dû à l'enquête, directement avec le coût des témoins, ou si la présence de tout le monde... Parce qu'il y a l'appareil gouvernemental qui est là. Est-ce que ces coûts-là sont additionnés?

M. Morin (Pierre): Ce que ça comprend comme coûts, ce montant-là, ce sont les honoraires et les dépenses, les déboursés du coroner, ceux des procureurs qui ont assisté le coroner, les frais de secrétariat. Ça comprend également la transcription au jour le jour des témoignages, les notes sténographiques. Ça comprend ça. C'est rentré dans ce coût-là, les interprètes et les indemnités versées aux témoins.

M. Dufour: Donc, les gens qui sont témoins ou qui sont présents dans la salle pour surveiller les intérêts, par exemple, la Sûreté du Québec et autres, ne sont pas comptabilisés.

M. Morin (Pierre): Pas du tout.

M. Dufour: Vu que le montant est tellement précis, est-ce qu'il serait possible de déposer l'aération de ces coûts-là, la ventilation... C'est mieux «ventilation».

M. Morin (Pierre): Il n'y a pas de problème.

M. Dufour: On pourrait la déposer à la présidence, qui nous en fera parvenir des copies.

M. Morin (Pierre): D'accord.

Le Président (M. LeSage): C'est noté, M. le député de Jonquière.


Enquête sur la mort de Wilfrid Côté, à Sept-Îles

M. Dufour: Oui. Il y a un autre dossier qui est préoccupant. Ça concerne la mort de Wilfrid Côté, à Sept-Îles, si je ne me trompe pas, où il y a eu une enquête de poursuivie, mais il n'y a jamais eu d'enquête publique. Il semblerait qu'il y a certains éléments qui ont été soulevés par la famille ou par le public, qui ne sont probablement pas rendus à la satisfaction de tout le monde. Est-ce que vous croyez qu'on devrait aller plus loin avec ce dossier-là?

M. Morin (Pierre): Je vais vous dire qu'effectivement, quand on a eu cette requête-là via un média, une journaliste du journal Le Soleil basée à Sept-Îles, en l'occurrence Annie Saint-Pierre, moi, j'ai réexaminé ce dossier-là au complet et j'en suis venu à la conclusion qu'il n'y avait pas lieu, compte tenu des critères qui se retrouvent dans ma loi, aux articles 104 et 105, de décréter une enquête publique là-dessus. Les circonstances qui ont été établies par le coroner Cliche à l'époque, coroner investigateur, me semblaient assez bien appuyées sur ce qu'on avait comme preuve. Je n'ai pas cru opportun d'ordonner une enquête publique.

M. Dufour: Bien, ce n'est pas en cour, on peut en parler quelque peu. Il n'y a rien, actuellement, devant le tribunal. En tout cas, moi, je suis un profane dans ces questions-là, c'est évident. Par contre, les éléments qui ont été soulevés publiquement à l'effet qu'il y a deux personnes, il y a juste un témoignage d'une personne versus l'autre, qui est décédée, c'est clair, où... On peut s'interroger.

(19 h 10)

M. Morin (Pierre): C'est vrai qu'il y a une...

M. Dufour: Il y a certainement, quelque part dans le temps, un point qu'on n'est pas capable d'éclaircir et que vous n'avez pas, et on est obligé de prendre ce que l'autre dit, le témoignage d'un autre. Est-ce que c'est plausible ou pas? Là, vous me dites: On a tout aligné, on a tout vu, on a tout examiné...

M. Morin (Pierre): Vous avez raison de dire qu'il y avait deux personnes qui se sont rencontrées dans le bois, et il y a une personne qui est décédée, mais le témoin qui n'est pas décédé, toutes les versions qu'il a données à des individus, autant à ceux qu'il connaissait, à la sortie du bois, qu'à ceux qu'il ne connaissait pas... Il a rencontré, entre autres, un petit véhicule dans lequel il y avait un homme et une femme qu'il ne connaissait pas et, tout de suite, il a fait une déclaration spontanée à l'effet de l'aider, qu'il venait d'y avoir un accident, que, malencontreusement... et tous les témoignages étaient dans ce sens-là. C'est là-dessus que je me suis basé pour me dire: De toute façon, s'il y a une enquête publique, qui va venir témoigner? Ça va être encore le même individu. Et toutes les versions, ça a toujours été plausible et ça s'est toujours corroboré, peu importe les témoins à qui il en parlait. La version n'a jamais été changée. Évidemment, la Sûreté du Québec aussi a beaucoup enquêté ce dossier-là, dans son rôle de détection du crime. Les policiers ont vu beaucoup de témoins, ont interrogé moult témoins. Ils ont même demandé, à l'époque, l'opinion du procureur de la couronne, etc. Je pense que c'est un dossier qui a été très bien fouillé, qui était très bien documenté quand même, toujours, évidemment, avec le fait que cette personne-là était toute seule dans le bois avec l'autre.

M. Dufour: Est-ce que vous pourriez nous dire s'il y a encore des représentations à l'effet qu'on devrait pousser l'enquête un peu plus loin? Parce que la journaliste, elle ne l'a pas inventé. Elle a sûrement eu des sources pour l'alimenter. Si elle a fait un article, il y a des chances qu'elle ait mis la main sur des papiers. Ce n'est sûrement pas de son ressort à elle seule.

M. Morin (Pierre): Non. Effectivement, la journaliste, sur certains aspects du dossier, disons, l'a peut-être teinté quand j'ai réexaminé le dossier. Je n'ai pas eu d'autre demande de ce type-là dans ce dossier-là. Par contre, je dois vous dire qu'il y a une disposition de ma loi, qui est l'article 101, qui dit que si quelqu'un a besoin d'annexes au rapport du coroner... Parce qu'il faut bien savoir que la soeur de la victime a eu accès au rapport d'investigation du coroner, mais, en plus du rapport, tous les documents en annexe au rapport sont déposés au Bureau du coroner et constituent des annexes. Or, ce que j'ai expliqué, moi... Parce que cette dame-là, la soeur de la victime, a pris un avocat, qui m'a fait des représentations. J'ai bien fait valoir que si elle avait des droits à faire valoir, elle pouvait faire une demande chez nous, en vertu de l'article 101, pour obtenir les annexes pour voir ce qu'il y avait là-dedans. Et, à ma connaissance, on n'a pas reçu de demande à cet effet-là.


Dossier de Louis-Georges Dupont, de Trois-Rivières

M. Dufour: Un troisième dossier qui est assez préoccupant, qui a fait l'objet aussi de publicité assez importante dans tout le Québec, c'est le dossier de M. Dupont, de Trois-Rivières. En fait, effectivement, les événements ont eu lieu il y a 25 ans. Mais, encore là, est-ce qu'on peut dire que la justice a obtenu satisfaction? Moi, j'ai le dossier en main. Il y a des éléments encore qui sont questionnables. Pour les fins de la justice, est-ce qu'il y a des mesures qui devraient être prises pour essayer de donner satisfaction? Par exemple, un coroner ou un légiste dit: Le coup de feu aurait pu arriver d'en arrière plutôt que d'en avant, etc. Donc, ce n'est pas un suicide, etc. Est-ce qu'il y a des éléments qui pourraient nous permettre de mieux éclairer cette situation-là? Parce que c'est le public qui est concerné, dans tout ça. Il y a quelque chose qui s'est présenté, qui s'est passé. Est-ce qu'on devrait demander l'avis d'un autre spécialiste? Qu'est-ce qui pourrait demeurer, ou qu'on pourrait faire pour, au moins, donner l'apparence que la justice s'est appliquée?

Le Président (M. LeSage): Si vous le permettez, avant de céder la parole à qui voudra bien répondre à cette question, je vous indique qu'il y a lieu d'être prudent dans la réponse. Il semblerait que ce dossier soit devant les tribunaux présentement.

M. Dufour: Je ne crois pas. Moi, je n'ai pas d'information à l'effet qu'il soit devant les tribunaux. Je ne crois pas.

Le Président (M. LeSage): Je pense qu'il est devant la Cour supérieure. En tout cas, j'incite à la prudence.

M. Dufour: Avec le groupe qui est là, il devrait bien y avoir quelqu'un dans le groupe qui est au courant si c'est devant la cour ou pas. Moi, je ne l'ai pas comme...

Le Président (M. LeSage): On aura la réponse dans quelques instants, M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Moi, je n'ai pas cette indication.

(Consultation)

M. Middlemiss: M. le Président, on m'indique que la famille a demandé récemment de peut-être rouvrir toute cette chose-là parce qu'elle n'était pas d'accord avec la décision rendue. Donc, oui, il y a certainement quelque chose qui pourrait être... Il faudrait certainement faire attention à ce qu'on dit pour ne pas créer de problème.

Sauf que, dans ce cas-ci, il semblerait... Tout ce qui a été fait dans le cas de Georges Dupont, tout indiquait la décision rendue. Il semblerait qu'il y a eu un autre expert qui, peut-être, n'ayant pas toutes les données, aurait émis une opinion que, peut-être, ça aurait pu être différent. Nous n'avons pas d'indication, nous autres, que ça pourrait être différent de tout ce qui a été rapporté à date dans ce cas précis, M. le Président.

Le Président (M. LeSage): M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Oui. J'ai un document, ou une lettre qui est adressée à M. le sous-ministre Jean-Marc Boily, qui est signée par le coroner, M. Pierre Morin, où on dit: «Après discussion sur le dossier avec M. Jean-René Marchand, je dois reconnaître qu'il est pour le moins agaçant de constater que les photographies du corps puissent nous laisser penser que le coup fatal ait pu être tiré de l'arrière vers l'avant de la victime. J'ose espérer que le directeur général de la Sûreté du Québec, M. Robert Lavigne, à qui une copie du dossier a également été transmise, sera en mesure d'apporter des éclaircissements à ce dossier pour le moins nébuleux.»

Après ça, il ne semble pas qu'il y ait eu d'enquête du coroner au moment où ça s'est passé. Donc, c'est un dossier qui me semble avoir été, au départ – puis là, c'est difficile de porter des jugements 25 ans en arrière. On peut constater que ce dossier-là a été traité, il nous semble, en tout cas, de façon assez rapide et assez légère. On a décidé, au départ, qu'il y avait suicide. Ça nous semble ça. Moi, je suis obligé de regarder les faits qui me sont rapportés. J'ai vu, incidemment, «Le Point», où a soulevé... Je regardais la photo. C'est vrai que quelqu'un qui va se tirer, il ne tire pas comme ça. Il y a des chances qu'il se tire plutôt en montant et droit. Ces éléments-là, ils sont troublants. Ce n'est pas plus fatigant que ça. Mais moi, je dis que, par rapport à ça, est-ce qu'on peut amener des éclaircissements ou amener la population à croire, au moins, qu'il y a eu apparence de justice, qu'il y a eu application? Parce qu'on n'a pas intérêt à laisser aller cette discussion. J'ai l'impression qu'elle est loin d'être terminée. Tant qu'il n'y aura pas certains éléments de satisfaction et tant que le public est sous l'impression qu'il y a des choses qui sont troubles... On s'abreuve là-dedans. On ne peut pas empêcher la rumeur comme la discussion tant que tout n'est pas suffisamment clair.

(19 h 20)

M. Morin (Pierre): Je vais vous dire le bout que j'ai fait dans ce dossier-là quand c'est revenu après x années. D'abord, moi, je voulais savoir si, à l'époque où ça s'est produit – c'est en 1969, je pense, de mémoire...

M. Dufour: C'est ça. C'est ça.

M. Morin (Pierre): ...je voulais savoir, premièrement, s'il y avait eu enquête publique ou simplement ce qu'on appelait, à l'époque, un cas de recherche, qu'on appelle aujourd'hui une investigation. J'ai même réussi à parler au coroner, qui est avocat pratiquant à l'Île-du-Prince-Édouard – j'ai réussi à le retrouver – j'ai parlé au procureur-chef de la couronne à Trois-Rivières, Me Roland Paquin, j'ai parlé à une dame des services judiciaires au palais de justice de Trois-Rivières, pour finalement comprendre qu'il n'y avait pas eu d'enquête publique dans ce dossier-là, mais uniquement un cas de recherche.

M. Dufour: Est-ce que vous croyez tout de même – parce que vous avez une grande expérience, vous êtes le procureur, c'est-à-dire que vous êtes le coroner en chef – qu'on aurait pu ou qu'on pourrait faire un peu plus?

M. Morin (Pierre): C'est-à-dire qu'on pourrait toujours ordonner une enquête publique, d'accord, sauf qu'il faut bien comprendre que l'enquête publique, à ce moment-là, en vertu de l'article 185 de la nouvelle loi, dit bien qu'une recherche – on appelait ça un cas de recherche, à l'époque, comme je vous le disais – ou qu'une enquête en cours, en vertu de la Loi sur les coroners, au moment de l'entrée en vigueur de l'article 185, est complétée suivant les dispositions de cette loi – c'est-à-dire de l'ancienne loi – avec les règles ordinaires de la preuve en matière criminelle, si on se reporte dans le passé, sauf que le coroner ne peut se prononcer sur la responsabilité civile ou criminelle d'une personne. Il en est de même d'une enquête tenue pour donner suite à une recherche en cours. On peut travailler un peu avec ça, en disant: Bien, la recherche n'est plus en cours, elle est terminée, et l'enquête n'est pas en cours, on ordonne une nouvelle enquête. Mais, nonobstant cette problématique-là, en fait, le gros problème qu'on aurait, c'est de retrouver les témoins qui étaient reliés à ce dossier-là. Il y en a probablement qui sont décédés; il y en a peut-être qu'on ne sera pas capables de rejoindre. Je vous avoue qu'après... Vous dites: Mon expérience. Oui, j'ai supervisé les coroners, sous l'ancienne loi, pendant 10 ans; maintenant, ça fait 14 ans. Moi, j'ai l'impression qu'on ne se rendrait pas au premier but avec une enquête publique dans un dossier comme celui-là.

M. Dufour: Mais, avant d'aller un peu plus loin, je dis que le principal accusé ou le principal témoin dans tout ça, lui-même n'est pas demeuré dans le corps de police. Ça aussi, ça devient... Qu'est-ce qui est arrivé, dans ce temps-là? Le principal accusateur n'est plus là. Ça fait qu'il y a quelque chose qui se produit quelque part. Celui qui a fait l'enquête n'est plus là. Il a été mis à pied. Pourquoi? Il a été sorti du corps de police, en tout cas, d'une façon ou de l'autre.

M. Morin (Pierre): Il faut rappeler une chose, c'est que depuis le 3 mars 1986, par contre, la question de faire des enquêtes publiques pour détecter les criminels, ça a été sorti de la philosophie du système. L'argumentation qu'on a de la famille, c'est que si ce n'est pas un suicide, c'est un homicide. Ce n'est pas quelque chose d'accidentel. La famille n'a jamais prétendu... Je n'ai jamais entendu la famille, moi, dans ce dossier-là, dire que ce serait quelque chose d'accidentel. Alors, si c'est une question de recherche de coupable, là, sur le plan criminel, c'est le rôle de la police; ce n'est pas le rôle du coroner.

M. Dufour: Est-ce que vous croyez que – et je pense que je vais demander une question d'opinion – rendus où on est là, avec tous les éléments qu'il y a là, à vos yeux, le dossier est clos, que tout est complété pour vous ou pour le ministère? Ça me semble important de savoir si on peut aller plus loin ou pas.

M. Morin (Pierre): Tout est réglé.

Le Président (M. LeSage): M. le ministre.

M. Middlemiss: Je voudrais indiquer que, à date, nous avons demandé à la Sûreté du Québec de faire un examen, une enquête. On a aussi demandé au pathologiste du laboratoire de médecine légale de Montréal de faire l'étude de tous les documents, et, en bout de piste, M. le Président, on en vient à la même conclusion. Donc, on a poussé ça. On a demandé à la Sûreté du Québec d'examiner toutes les choses, et elle les a examinées. On a demandé au pathologiste de faire tout le cheminement, ce qui a été fait, et on en vient à la même conclusion. Tout semble indiquer, dans ce cas-là, que la décision qui a été retenue dans les années passées, c'est la même: c'est un suicide.

M. Dufour: Mais vous admettez tout de même, M. le ministre, que, par rapport à ce cas-là, il y a un expert... Je ne connais pas la qualité de l'expert qui s'est prononcé, en disant: Il y a une autre version qui est plausible, et on n'a pas trouvé d'empreintes sur le revolver ou sur l'arme et... Bon. Ça aussi, c'est des éléments que, moi, je ne sais pas comment il a fait pour essuyer ça. En tout cas, ou il n'y avait pas d'empreintes, je ne le sais pas, il était habile, il voulait peut-être laisser quelque chose de difficilement contrôlable. Je veux dire, ça aurait été facile d'essayer d'obtenir au moins un expert qui confirme ou infirme la théorie qui a été avancée. Moi, je ne connais pas l'Américain qui dit: C'est comme ça. Je n'ai pas besoin de cours pour savoir que, si quelqu'un se tue, d'habitude ce n'est pas en tirant comme ça. Ça va être soit direct ou en montant. Le bras, il fait ça.

M. Middlemiss: M. le Président, on peut... Une question qu'on peut se demander, et je l'ai posée, moi: Est-ce que l'expert, le Dr Louis S. Roh, avait tous les renseignements? Est-ce qu'il a analysé tout? Il me semble qu'avant on pourrait certainement... Une des premières choses... Comment elle peut avoir, cette personne-là, plus de crédibilité que ceux qui l'ont faite en 1969, ceux qui ont fait la révision avec les faits? Il me semble que si on me dit que M. Roh avait tous les mêmes faits, a fait les mêmes analyses et il est venu à une conclusion différente, si j'avais ça comme renseignements... Est-ce que le député de Jonquière est assuré que M. Roh avait toutes les mêmes données que les gens ici ont utilisées pour faire l'analyse? Il me semble que ce serait une des choses qu'on pourrait vérifier, dans ce contexte-là. Je ne sais pas si M. Morin voudrait ajouter quelque chose à ça.

Le Président (M. LeSage): M. Morin.

M. Morin (Pierre): En fait, l'information qui vient du sous-ministre associé à la Sécurité publique, Charles Côté, est à l'effet que cette expertise du médecin américain n'aurait été faite qu'à partir de photographies. C'est tout ce qu'il avait en main, qu'on me dit. Suite à ça, suite aux déclarations de ce médecin-là, les pathologistes, tous les pathologistes du laboratoire de médecine légale de Montréal ont refait un rapport détaillé, signé de tous et dans lequel, effectivement, on appuie la décision du pathologiste qui avait fait l'autopsie, à l'époque, le Dr Jean Houde.

M. Dufour: Vous admettez que la controverse que peut soulever le légiste américain n'a pas été contredite très fortement, publiquement. Donc, il faut retenir une chose. La famille, je ne sais pas si elle est au courant de ce processus-là que vous nous donnez, mais ce sont des éléments qui, publiquement, ne sont pas connus. En tout cas, nous, on ne les connaît pas. Ça fait que je suis obligé de dire qu'il y a un travail à faire. Ce n'est pas juste faire comme la pluie qui tombe et endurer l'orage qui passe. De temps en temps, il faut expliquer que, quand on a des éléments pour contredire, on le fait et, à ce moment-là, le public peut juger, comme la famille peut juger. Vous l'avez fait dans le cas du cadavre qu'on tire dans l'eau, au fil de l'eau plutôt qu'ailleurs. Bon, c'est ça pareil.

M. Middlemiss: M. le Président...

Le Président (M. LeSage): M. le ministre.

M. Middlemiss: ...on m'indique que le pathologiste, M. Houde, a fait une analyse du rapport de M. Roh qu'il a envoyée à la famille. Il semblerait que – enfin, c'est une affaire d'opinion – la famille accepte plutôt l'opinion de M. Roh.

M. Dufour: Mais...

M. Middlemiss: Mais le pathologiste a réellement fait l'analyse et donné les points. C'est ça, c'est une affaire de...

M. Dufour: Non, mais M. Houde – Houle ou Houde – il donne...

M. Middlemiss: Houde.

M. Dufour: ...son rapport et c'est le premier. Il ne se contredira pas non plus. Je serais surpris. Entre nous autres, là, c'est difficile. Pour moi, ce n'est pas crédible, à mon point de vue. Il a fait le premier rapport et il fait le deuxième.

M. Middlemiss: Non, mais regardez, il me semble, tu sais, pourquoi... C'est là, c'est une affaire. Pourquoi un étranger comme M. Roh, qui, peut-être, n'a pas eu l'avantage de voir toutes les choses que M. Houde a vues, pourrait être plus crédible? Qu'est-ce que M. Houde aurait à cacher, comme pathologiste, sinon de ne pas avoir fait une analyse objective, aussi objective que celle que M. Roh a pu faire avec les données qu'il avait? Peut-être que c'est une chose qu'on peut faire, je ne sais pas. Il me semble que nous avons réexaminé... On n'a pas repoussé ça du revers de la main; on a demandé de revoir tout, tout, tout ce qui a été fait, et on arrive à la conclusion que tous les faits correspondent à la décision qui avait été rendue à ce moment-là.

M. Dufour: Moi, je pense que, vis-à-vis de ce que vous nous dites, ce qu'on a comme dossier, ça devient assez technique, là...

(19 h 30)

M. Middlemiss: Oui.

M. Dufour: Je ne pense pas qu'on puisse nous faire la preuve et qu'on ait intérêt à le faire directement. Moi, je fais juste soulever le cas que, malgré tout, malgré les échanges qu'on a, le premier intervenant, le premier qui a fait l'enquête ou l'étude, c'est M. Houde. Et, après ça, l'expert américain dit des choses, puis vous nous dites: M. Houde nous redit ce qu'il avait dit la première fois. Moi, sans être un expert, je dis qu'il ne pouvait pas arriver à d'autres conclusions que la première fois; j'aurais été surpris qu'il le fasse. On va arrêter les échanges là-dessus. Vous avez le droit de dire ça; moi, je peux prétendre, au nom du public, que je ne suis pas satisfait, et la famille peut prétendre la même chose. C'est là-dessus qu'était justement mon questionnement, à savoir si les éléments qui sont là ont été soumis ou pourraient être soumis d'une autre façon, je ne sais pas, une enquête publique, une enquête du coroner, un expert qui pourrait dire: ce que M. Houde a dit la première fois, ce qu'il a dit la deuxième fois, oui, c'est correct. C'est un gars neutre. C'est comme un arbitre, un expert qui se prononce. Ça arrive qu'un expert se prononce sur un rapport d'un intervenant quelque part, puis il devient plus crédible parce que, lui, il est complètement dégagé. Mais, si vous ne voulez pas aller plus loin que ça, moi, je n'insisterai pas plus.

M. Middlemiss: Sauf que, M. le Président, il n'y a pas seulement M. Houde. On a dit que tous les pathologistes du Laboratoire de médecine légale de Montréal, après étude complète des documents disponibles, arrivent eux-mêmes à la conclusion que le pathologiste qui a effectué l'autopsie en 1969... Donc, il n'est pas seul dans tout ça. Ils sont six pathologistes qui ont regardé ça. Tout ce que je veux dire, M. le Président, c'est que ça n'a pas été pris à la légère. Je pense qu'on a fait tout ce qu'on a pu pour tenter d'éclaircir la situation. Je vois votre sourire, M. le Président, mais ce n'était pas dans ce contexte-là que j'utilisais le mot «légère»...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dufour: Non, mais on ne parle pas de Lesage non plus.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Middlemiss: Non. Cest que, lorsque j'ai utilisé le mot «légère», j'ai vu un sourire... le président a souri et c'était certainement... Sérieusement, M. le Président, je pense qu'on a pris tous les moyens qui étaient à notre disposition pour tenter de s'assurer que tout a été pris en ligne de compte. Toutefois, est-ce que l'expert américain avait autant d'informations, et est-ce qu'il a utilisé les mêmes choses pour arriver à sa conclusion? Il y a ça aussi. C'est beau là... Moi, je comprends qu'on veuille être transparents, on veut avoir la justice, mais il faut aussi reconnaître qu'on a des compétences puis on a des gens qui sont honnêtes, nous autres aussi, qui font des rapports, autant que des experts américains qui peuvent peut-être rendre des décisions basées sur peut-être pas tous les faits que les gens chez nous ont. Tout ce que je veux dire, c'est ça.


Documents déposés

Le Président (M. LeSage): Si vous le permettez, avant de céder la parole à la députée de Groulx, j'aimerais informer les membres de cette commission que j'accepte le dépôt du cheminement de l'enquête sur le décès du caporal Lemay, de même que les déboursés relatifs à cette enquête. Mme la députée de Groulx.

Mme Bleau: Je pourrais dire que, quand on pense aux pathologistes américains... Ils importent même des pathologistes d'ici, parce que j'ai ma nièce qui est pathologiste aux États-Unis, puis c'est une petite Québécoise. Mais surtout, ce qu'il faut bien se rappeler, je pense, dans tout ça, c'est de faire confiance à nos experts d'ici plutôt qu'à un expert américain. Moi, je suis plus portée à faire confiance à nos propres experts. Et, deuxièmement, si tous les autres pathologistes ont signé le rapport de M. Houde, à ce moment-là, je ne vois pas qu'est-ce qu'on pourrait ajouter de plus.

Le Président (M. LeSage): Merci, Mme la députée de Groulx. M. le député de Jonquière.


Fermeture du Laboratoire de médecine légale de Québec

M. Dufour: Ah bon! Ça m'amène à parler de la fermeture du Laboratoire de médecine légale de Québec. Ça aussi, depuis plusieurs mois, l'avenir du Laboratoire de médecine légale de Québec est incertain. Plusieurs parlent de fermer le Laboratoire, ce qui n'a jamais été démenti par l'ancien ministre de la Sécurité publique. La situation est considérée comme malsaine pour tout le monde, à commencer par les employés du Laboratoire de médecine légale. Pour notre part, nous nous opposons à la fermeture du Laboratoire de Québec, d'abord pour des raisons humanitaires. En effet, il a été démontré que des délais importants seraient à prévoir advenant un transfert des opérations à Montréal. Nous ne souhaitons pas prolonger inutilement la douleur vécue par les parents et amis d'une personne décédée.

Deuxièmement, il a été démontré que l'analyse d'un décès ne doit pas survenir trop tardivement après qu'il ait été constaté, car les prélèvements seraient moins valables scientifiquement. Enfin, il y a certainement un coût à transporter les cadavres à Montréal plutôt qu'à Québec, et on peut parler des policiers qui accompagnent, etc. Est-ce que, comme ministre de la Sécurité publique, vous avez pris une décision à ce sujet?

M. Middlemiss: Non, M. le Président. Toutefois, j'aimerais éclaircir la situation. Le problème qu'on a, ici à Québec, on n'a pas de pathologiste. On a ouvert un concours de pathologiste médico-légal il y a un an ou deux, et, malheureusement, on n'a pas de personnes... Il y a une personne qui a «appliqué». Tout récemment, on a demandé à cette personne-là si elle voulait venir à Québec, et la réponse a été négative. Donc, quand j'ai dit que je n'avais pas pris de décision, maintenant, nous allons encore ouvrir le poste de pathologiste à Québec et, si on a preneur, on devra prendre une décision à ce moment-là.

Toutefois, M. le Président, si nous n'avons pas de preneur, et c'est la raison pour laquelle, présentement, on fait les autopsies médico-légales à Montréal... Et je dois vous dire, en passant, M. le Président, que, lorsqu'on regarde la situation présente, on est obligés de comparer des coûts. Et le fait que toutes les autopsies ne sont pas nécessaires, pour des raisons médico-légales... Il y a des autopsies qui peuvent être faites dans des centres hospitaliers, et ceci représente un moindre coût. Donc, le fait de ne pas avoir de pathologiste, ça nous a forcés à regarder le rationnel. Et il y aurait certainement des économies, présentement, si on décidait...

L'autre problème, M. le Président, c'est que ça prend un volume suffisant d'autopsies pour rentabiliser un laboratoire de ce genre. Moi, on m'indique que c'est 150 autopsies nécessaires. Et, si on regarde le nombre d'autopsies qui sont réellement médico-légales, ici à Québec, on parle de 50. Donc, il y a tout ça. C'est tout ça qui fait partie de l'analyse du dossier. Sauf que, je vous dis que nous allons ouvrir encore le poste, espérant que quelqu'un va «appliquer». Sinon, M. le Président, on devra poser les gestes qu'il faudra poser. Mais je veux vous assurer d'une chose. Tout récemment, il y a eu un incident qui s'est produit ici, et je dois vous dire que les policiers de la ville de Québec nous ont indiqué que même s'il n'y avait pas un laboratoire médico-légal ici et qu'on est obligés de transférer à Montréal, tout a été bien fait et ça n'a pas créé de retard, rien du tout. Donc, sur le fonctionnement...

M. Dufour: Ils voulaient peut-être faire un voyage en ville, les policiers, là.

M. Middlemiss: Non, non, non. M. le Président, juste pour vous dire que la situation telle que décrite par le député de Jonquière tantôt, c'est tout à fait le contraire, parce que, là, on parle d'un cas concret. Ce n'est pas hypothétique, on parle d'un événement qui s'est produit. Nous avons réussi à procéder, à faire l'autopsie qui s'imposait, et le corps policier de Québec nous dit que tout a été bien fait. Ce n'est pas hypothétique, c'est vrai dans les faits.

(19 h 40)

Je vais vous lire le dernier paragraphe: Quant à la partie budgétaire assumée par le service de... Non. O.K. Pour ces deux demandes d'expertise, notre personnel a été agréablement surpris de la cordialité avec laquelle ils ont été reçus, de même que la qualité des relations professionnelles qu'ils ont pu constater chez votre personnel. Les commentaires de nos policiers ne sont qu'élogieux à l'endroit de vos ressources, tant par leurs qualités professionnelles que personnelles. Il me fait extrêmement plaisir de vous transmettre toute notre appréciation. Ça, ça vient de Québec. Oui, c'est Québec.

Mme Bleau: Québec.

M. Middlemiss: C'est signé par...

Mme Bleau: C'est bien qu'ils fassent des compliments à Montréal.

M. Middlemiss: ...Richard Renaud, le directeur, Division des enquêtes criminelles. Donc, toute cette préoccupation, ou ce qui semblait créer problème par le fait qu'on n'aurait pas ça ici à Québec, l'expérience a démontré, dans un cas particulier, que le service, tout a été fait.

Il y a aussi la Sûreté du Québec, la division Québec, qui disait que les commentaires de nos enquêteurs qui ont eu à se déplacer vers Montréal pour assister aux autopsies sont élogieux à l'égard du personnel et du professionnalisme qu'ils ont démontré.

Donc, dans le moment, on est obligés, c'est la force des choses, on ne peut pas le faire ici, on le fait à Montréal. Et toutes les préoccupations qu'on avait, de dire: ça va nous créer des problèmes, des retards, et ainsi de suite, à date, tout semble être plutôt positif que négatif.

M. Dufour: Est-ce que vous avez pris connaissance de la lettre du 13 septembre qui est adressée au ministre de la Sécurité publique et signée par tous les employés de...

M. Middlemiss: Du Laboratoire?

M. Dufour: C'est ça, c'était le 13 septembre 1993, et c'est signé par les employés de la morgue.

M. Middlemiss: Oui, du Laboratoire.

M. Dufour: Oui, je ne sais pas, moi, ces gens-là...

M. Middlemiss: C'est tout à fait normal que ces gens-là se défendent, et je ne les blâme pas du tout. Et c'est pour ça que je vous ai dit...

M. Dufour: M. le ministre, je pense que c'est de mettre le professionnalisme un petit peu bas que de penser qu'ils font juste se défendre. J'espère qu'ils apportent aussi...

M. Middlemiss: Non, non.

M. Dufour: ...des faits sérieux.

M. Middlemiss: Bien oui, mais, M. le Président, c'est pour ça que, tantôt, je vous ai dit que je vous parlais d'un cas concret, réel, qui s'est présenté et qui a démontré que la préoccupation de ces gens-là n'est pas fondée dans ce cas-là. C'est pour ça que je disais que les gens ne... Je comprends pourquoi.

M. Dufour: Oui, mais il y en a 750 cas de corps par année qui vont à la morgue de Québec.

M. Middlemiss: J'ai dit tantôt....

M. Dufour: Vous parlez d'un sur 750. Ce n'est pas probant.

M. Middlemiss: Non. J'ai dit tantôt qu'il y en avait 750, mais qu'il y en a peut-être seulement 50 qui ont besoin d'autopsie médico-légale. Les autres, on les faisait là. Maintenant, les autres cas, on les envoie dans les hôpitaux. Et même, M. le Président, il y en a qui se font dans les hôpitaux en région. Au lieu de transporter les gens de Rimouski à Québec, quand ce n'est pas nécessaire que ce soit médico-légal, on fait l'autopsie dans l'hôpital, en région. Ça se fait un peu partout à travers le Québec.

Mais, M. le Président, on va s'assurer, si on n'a plus les services disponibles ici parce qu'il y a un manque de pathologistes, que le service... et que tout soit fait aussi bien que le cas qu'on vient de vous rapporter. On va s'en assurer.

M. Dufour: S'il n'y a pas plus de volonté politique que vous avez là, vous laissez les règles s'appliquer comme ça, on est aussi bien de dire que Montréal va tout décider.

M. Middlemiss: M. le Président.

M. Dufour: Si les gens décident que ça demeure tout à Montréal, centralisons à Montréal et fermons en région. C'est ça que vous êtes en train de nous dire.

M. Middlemiss: Ce n'est pas vrai, M. le Président.

M. Dufour: Bien, je suis obligé de vous prendre au pied de la lettre puis au mot.

M. Middlemiss: J'ai dit que la situation que nous vivons, c'est parce que nous n'avons pas de pathologiste ici. On n'en a pas. Il y en avait deux, ils sont partis, ils ont pris leur retraite. On a ouvert un concours, personne n'est venu. On va ouvrir un autre concours. C'est ça que je vous ai dit. Mais, ceci étant dit, dans le moment, on doit procéder avec les moyens du bord, et on les envoie à Montréal. Les gens qui s'objectaient à ce qu'on aille à Montréal parce qu'ils trouvaient qu'ils n'auraient pas un bon service, on vient de démontrer, dans un cas particulier, qu'il y en a eu.

M. Dufour: Je pense que la question du bon ou du mauvais service, ce n'est pas la question, moi, que je posais. La question, c'est: est-ce qu'on doit tout centraliser à la même place? Est-ce qu'on va accepter que tout se vide? Il y a des coûts à ça, c'est évident. Il y a un service à la population qu'il faut considérer. Si vous aviez comme approche: oui, ça va rester ouvert; deux, on va aller chercher le monde pour mettre dedans. C'est évident que si vous nous dites: bien, s'il n'y en a pas... Ce n'est pas compliqué, hein.

M. Middlemiss: M. le Président, c'est ouvert. Il me semble, là...

M. Dufour: C'est difficile, déménager quelqu'un.

M. Middlemiss: Le laboratoire, il est là, mais on n'a pas de pathologiste; on ne peut pas le faire sans pathologiste. On a ouvert un concours d'un bout à l'autre du Canada. On n'a pas eu preneur. On va en faire un autre. Ce n'est pas une volonté, ça? Le fait d'avoir un concours, d'essayer d'avoir un pathologiste à Québec, ce n'est pas une volonté, ça? C'est quoi, sinon? Si je vous avais dit: c'est fini, il n'y en aura pas et on ferme... Ce n'est pas ça que je vous ai dit. Je vous ai dit qu'on va ouvrir le concours encore, espérant qu'un pathologiste vienne. Sinon, devant la situation, on devra prendre une décision. Et je vous dis que, présentement, la situation nous force à envoyer ça à Montréal et que, de cette façon-là, on donne un bon service.

M. Dufour: Combien en forme-t-on, de pathologistes, dans un an?

M. Middlemiss: Pardon?

M. Dufour: Est-ce qu'on en forme, des pathologistes, dans un an? C'est une bibite, ça, qui ne reste pas sur la planète?

M. Middlemiss: Un des problèmes des pathologistes, il semblerait que ça prend au moins deux ans de pratique avant d'être capables de devenir des experts pour témoigner, et un des problèmes... Si on avait un pathologiste ici qui n'ait pas cette expérience-là, à Québec, on serait obligé de l'envoyer à Montréal pour qu'il puisse acquérir cette expérience. C'est un des problèmes, et c'est pour ça qu'on cherche quelqu'un avec l'expertise...

M. Dufour: Non, mais ma question est: est-ce qu'on en forme année par année? Est-ce qu'il s'en forme, des pathologistes? S'ils sont formés, il faut bien qu'ils aillent travailler quelque part.

Mme Bleau: Ils sont médecins avant. Il faut qu'ils soient médecins avant.

M. Dufour: Oui, mais on les forme pour aller aux États-Unis, ou bien si on les forme pour... Moi, je pense qu'il va falloir être plus directifs que ça.

M. Middlemiss: M. le Président, pour devenir un pathologiste qui va être utile pour le médico-légal, c'est qu'il faut qu'il travaille dans ce laboratoire-là pendant deux ans pour acquérir de l'expérience, pour devenir un expert-conseil. Donc, nous autres, on en forme un; on en forme présentement un à Montréal. Donc, c'est là où on les forme. Mais il faut qu'ils travaillent sous la surveillance de gens qualifiés, des experts qui sont là, en place. C'est pour ça que je vous dis que, si on peut en avoir un à Québec, on va en avoir un. C'est pour ça qu'on a ouvert le concours, on va réouvrir le concours.

M. Dufour: Et quand ils sont formés, ils prennent le large. Bonjour.

M. Middlemiss: Oui, mais c'est comme toute chose, hein. Vous avez été maire d'une municipalité, M. le député de Jonquière...

M. Dufour: Moi, il y a une chose, je pense que le contingentement, là, de toutes les professions...

M. Middlemiss: Non, non, mais vous le savez, là...

M. Dufour: ...c'est ça que ça produit, quelque part.

M. Middlemiss: Non, mais regardez, M. le Président, le député de Jonquière a déjà été maire, et il sait le jeu qui se jouait dans les municipalités, disons, qui envoyaient quelqu'un à l'école de police, et il revenait, il travaillait là et il partait parce que quelqu'un lui offrait un meilleur salaire. Et c'est la municipalité qui a peut-être payé pour sa formation. Donc, c'est le problème qu'on a dans la concurrence, dans une société comme la nôtre.

M. Dufour: En tout cas, moi, je veux juste dire, en conclusion, qu'on fait beaucoup de contingentement, des fois à tort, des fois à raison. Actuellement, on se rend compte que, dans beaucoup de professions, la population paie pour la formation, et, quand ils sont formés, ils disparaissent. Je pense que c'est un coût trop élevé. Il faudra peut-être qu'un jour on essaie de trouver le juste milieu et forcer les gens. Sans ça, on va fermer les régions. C'est vrai pour les médecins. En région, ils ne veulent pas y aller. Est-ce qu'on va vider les régions pour autant? Ce n'est pas acceptable. Là, vous nous parlez d'un problème. Il y a du chômage, et on dit souvent: Ah! c'est toujours le petit; lui, ce n'est pas grave, on les laisse aller. On décontingente à mort pour la construction, et on dit: arrangez-vous comme vous voudrez, on va séparer la misère. Mais, dans les places où on peut faire des choses, si on forme des gens, des pathologistes, on devrait peut-être aussi trouver le moyen que l'État ait des directives, quelque part, pour mieux servir la population. Ce n'est pas vrai qu'on doit laisser tout à l'abandon, laisser tout le monde faire ce qu'il veut. Il y a un coût, et c'est un coût social qui est trop élevé, et le monde paie pour ça.

(19 h 50)

M. Middlemiss: M. le Président.

M. Dufour: Je ne paie pas, moi, pour les autres, je veux qu'on paie pour nous autres.

M. Middlemiss: Ce n'est pas ça. Et même, M. le Président, le fait qu'on fasse des autopsies maintenant en région – on ne les envoie plus à Québec ou à Montréal lorsque ce n'est pas médico-légal – ça garde de l'activité en région. Bien oui, on en fait à l'hôpital de Jonquière, puis on n'en faisait pas avant. On va en faire maintenant. Il me semble que c'est peut-être quelque chose qui va inciter les médecins à aller demeurer là. Quand ce n'est pas nécessaire d'avoir une autopsie, quand c'est juste ordinaire et qu'il n'y a pas de crime impliqué, on en faisait plusieurs ici. On le fait maintenant dans des hôpitaux en région, puis je pense que pour les gens concernés, les gens impliqués, c'est pas mal plus humain que ça soit fait là, ne pas les envoyer à Québec ou à Montréal. On pense qu'on ne s'occupe pas des régions; au contraire, cette situation-là va permettre aux régions d'en faire encore un peu plus.

Le Président (M. LeSage): Mme la députée de Groulx, vous vouliez ajouter quelque chose?

Mme Bleau: Oui, justement, je prends l'exemple que j'ai vécu, parce que c'est une nièce. Quand elle a commencé, elle a travaillé dans un hôpital avant de se spécialiser. Elle a travaillé pendant plusieurs années, M. le député de Jonquière. Après ses études de médecine, elle a travaillé dans les hôpitaux avant de devenir pathologiste. Elle a travaillé à Sacré-Coeur pendant plusieurs années, puis c'est l'amour qui l'a amenée ailleurs.

Des voix: Ah!

M. Dufour: Ah, ce n'est pas l'amour de la profession, c'est le vrai amour.

Mme Bleau: C'était l'amour tout court.


Formation des pompiers

M. Dufour: J'en prends bonne note. Je voudrais, M. le Président, parler de la formation des pompiers. On sait que...

Le Président (M. LeSage): Allez-y, M. le député de Jonquière.

M. Dufour: ...le service des incendies ou des pompiers a toujours été sous la responsabilité du ministre des Affaires municipales, et, il y a environ quatre ou cinq ans, on a décidé de faire passer cette direction à la Sécurité publique. J'avais dit à ce moment-là qu'il n'y avait pas grand-chance que ça devienne une vraie préoccupation pour la Sûreté du Québec. Pour la Sécurité publique, c'était vraiment quelque chose qu'ils pouvaient prendre, mais qui n'aurait pas de résultats. Et je pense que le temps me donne raison.

Il y a eu d'abord des pompiers volontaires. Il y a des pompiers qui meurent en combattant l'incendie, et c'est curieux à dire, mais, par tête de pipe, il y a plus de pompiers que de policiers qui meurent en service. C'est un travail qui est difficile, que je connais assez bien pour avoir eu un service des incendies dans ma municipalité, un service de policiers, bien sûr, mais j'ai constaté que le service des incendies est vraiment quelque chose... Quand ça se produit, c'est l'urgence tout le temps, et ils ne peuvent pas trop, trop faire plus que ça. Donc, il y a une question de formation qui diffère, actuellement. Il n'y a pas de normes comme telles pour former les pompiers. Ça relève de la direction de la Sécurité civile au ministère de la sécurité publique.

Donc, il y a beaucoup de personnes qui disent: le ministère ne s'occupe pas suffisamment de la formation des pompiers. Moi, je suis convaincu que c'est vrai, parce qu'on ne peut pas mettre autant de temps là-dedans, c'est deux directions différentes. Puis, depuis 1987, aucun programme d'études des pompiers n'a été élaboré. Donc, on ne peut même pas, puis le ministère ne peut pas le faire, obliger les municipalités à former leurs pompiers.

Est-ce que le ministre ne considère pas qu'il devient de plus en plus pressant d'élaborer un programme de formation des pompiers ou, à tout le moins, d'obliger les municipalités à former leurs pompiers? Je pense que vous avez déjà été conseiller municipal; je pense que vous connaissez un peu ce que c'est, un service d'incendie. Définitivement, c'est toujours dans le feu de l'action, sans jeu de mots. Quand ils sont sur les lieux, il faut qu'ils bougent puis il faut qu'ils fassent des choses correctes. Donc, il y a des dangers, les statistiques sont là. Avec les températures qu'on a connues cet hiver, c'est définitif qu'il y a eu beaucoup d'incendies, puis tout le reste s'ensuit. Est-ce que vous ne croyez pas qu'on devrait actuellement forcer un peu plus la note pour avoir des gens mieux qualifiés pour travailler dans ce domaine-là? Parce que, là, c'est comme pour la construction, tout le monde pense qu'il est qualifié pour le faire. Moi, je vous dis, pour être pompier, ça prend des gens qui suivent des cours spéciaux, qui soient qualifiés pour le faire, puis en santé aussi.

M. Middlemiss: M. le Président, regardez, j'aimerais faire un état de la situation. La situation de la formation actuelle en sécurité incendie au Québec est tout le contraire d'un système cohérent et efficace. On est plutôt en présence de multiples initiatives fragmentées entre plusieurs réseaux d'enseignement qui ne coordonnent pas leurs actions. Le passage d'un niveau de compétence à un autre plus avancé n'est guère simple. Les activités de formation, très inégalement accessibles, ne sont pas toujours reconnues officiellement et gratuites.

Dans les 937 services d'incendie municipaux du Québec, on dénombre environ 21 000 pompiers embauchés à temps partiel – ce qu'on appelle les pompiers volontaires – et 4000 pompiers embauchés à temps plein; ça, c'est des pompiers professionnels. Pour les pompiers volontaires, la formation est jugée inadéquate et insuffisante. Pour leur part, les pompiers professionnels ne peuvent compter sur l'offre actuelle de formation pour poursuivre la mise à jour continuelle de leurs compétences et faire face aux défis nouveaux que doit affronter le secteur de la sécurité incendie. Cette situation peut donc remettre en cause la sécurité des services incendie municipaux.

Aussi, le ministère de la Sécurité publique, de concert avec ceux de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur et de la Science, a-t-il formé, à la fin de novembre 1992, un comité aviseur afin de revoir l'ensemble de la formation des intervenants, qu'ils soient pompiers, gestionnaires, préventionnistes ou instructeurs. Composé d'une vingtaine de personnes représentant les principaux organismes concernés du milieu de la sécurité incendie, les unions municipales, les industries, les hôpitaux et les aéroports, le comité a depuis siégé à sept reprises, et des groupes de travail ont également été créés.

Donc, un projet global de formation qui a été déposé en juillet 1993 par le ministère de l'Éducation et de la Science. Il répond à l'essentiel des revendications des représentants du milieu de l'incendie relativement à la gratuité et à l'accès de la formation en région, à l'harmonisation des programmes pour les diverses professions ainsi qu'à la création d'un centre intégré de formation géré administrativement et pédagogiquement avec leur participation. Par contre, le rehaussement au niveau collégial de la formation des pompiers n'a pas été retenu dans ce projet, malgré la demande du milieu.

Donc, suite aux demandes de juillet 1993 d'un certain nombre de représentants du milieu de la sécurité incendie concernant la formation, une rencontre a été tenue le 15 avril dernier – ça, c'est vendredi dernier – entre ces gens, les ministres de la Sécurité publique et de l'Éducation, M. Chagnon et moi. Et, lors de cette rencontre, le ministre de l'Éducation a présenté une nouvelle proposition qui bonifie l'offre que son ministère déposait en juin 1993. En effet, cette nouvelle proposition, tout en maintenant la formation des pompiers au secondaire, facilite l'accès de ceux-ci à deux diplômes de niveau collégial, un DEC en prévention ou en gestion, et ce, avec environ une année d'études de moins à compléter.

Suite à certaines questions du milieu, le ministre de l'Éducation a aussi confirmé l'accessibilité gratuite de la formation des pompiers au secondaire, la situation s'avérant encadrée différemment au collégial. Les huit représentants du milieu se sont par la suite rencontrés à huis clos pour analyser cette proposition. Ils nous ont signalé qu'ils enverront, en début de semaine du 18 avril, une lettre aux deux ministres signifiant leur accord à cette proposition, sous réserve que leur soit confirmé que le milieu participera activement à la gestion du futur centre intégré. Un comité provisoire sera mis en place dans les meilleurs délais pour favoriser la création de ce centre. Des démarches d'harmonisation seront entreprises avec l'École polytechnique afin qu'elle élimine son certificat de technologie en prévention des incendies et qu'elle se concentre davantage sur le perfectionnement des «préventionnistes» et des gestionnaires dans un cheminement de carrière. Et disons que ces conditions-là ne semblent pas, à première vue, causer problème.

Donc, pour répondre, Mme la Présidente, au député de Jonquière, nous sommes heureux de dire que, après de longues discussions, nous avons réussi, avec le milieu, à arriver avec un programme de formation pour les pompiers, et je pense que ça va certainement répondre adéquatement aux préoccupations du député de Jonquière, que, dorénavant... Et ça veut dire, ça, que les 21 000 pompiers volontaires vont avoir aussi l'occasion de se perfectionner. Je pense que tout le monde réalise... aujourd'hui, ce n'est plus seulement un... Les interventions des pompiers, ce n'est pas seulement d'éteindre un feu d'une maison qui était totalement en bois, etc. Aujourd'hui, on a tout le problème des déversements, les problèmes, aussi, de propane. Donc, les pompiers ont besoin d'avoir une formation particulière. Maintenant, nous avons, avec le milieu, réussi à préparer un cours, une formation professionnelle pour ces gens-là.

(20 heures)

M. Dufour: Les informations dont vous nous faites part, est-ce qu'elles sont publiques, ou si c'est... Parce que les rencontres de comité, j'imagine qu'il n'y a rien de colligé, les décisions. À moins que tout soit en...

M. Middlemiss: Regardez, ça vient d'arriver. Moi, c'est une note que j'ai eue. On a eu la rencontre vendredi...

M. Dufour: Ce n'est pas complété, si je comprends bien.

M. Middlemiss: Non. Bien, ça, regardez, on dit qu'on va nous envoyer une lettre. Tout ce que je vous donne, c'est ce qu'on nous a dit verbalement. On ne voit pas de problème, nous autres, on ne voit pas d'accrochage majeur, présentement. On ne voit pas d'accrochage majeur. On attend. Cette semaine, on devrait recevoir la réponse officielle de la part des personnes impliquées. C'est la liste... Il y a M. Denis Branchaud, Service de protection contre l'incendie, ville de Québec; M. Gaétan Daigle, Service de la sécurité, Hôpital Laval; M. Gaston Fauvel, le président du Regroupement des associations de pompiers du Québec; M. Guy Lafortune, directeur du Service d'incendie, ville de Pierrefonds; M. André Ouellet, Association québécoise des pompiers volontaires et permanents; M. Richard Ruel, président de l'Association des chefs de service d'incendie du Québec; M. Alain Charbonneau, Association des techniciens en prévention incendie du Québec, et M. Robert Poulin, Association des pompiers-instructeurs du Québec. Tous ces gens-là étaient là, ils faisaient le noyau. Ils ont accepté le programme de formation qui leur a été soumis. Ils sont censés nous confirmer ça avec certaines réserves, comme je l'indiquais tantôt, qui ne semblent pas faire problème. Et ça, c'est le premier pas dans cette direction-là.

M. Dufour: Est-ce que vous avez déjà décidé de la participation... En supposant que ce programme-là serait appliqué et applicable, est-ce que vous avez décidé quelles seront les sommes qui seront mises à la disposition des écoles, provenant soit du système d'instruction publique ou du ministère de l'Éducation et du ministère de la Sécurité publique? Parce qu'il ne faut pas juste les former, il faut leur donner de l'exercice, aussi. Il faut que ces gens-là aient des instruments pour se familiariser.

M. Middlemiss: Non. Regardez, M. le Président, on attendait la réponse. Le ministre de l'Éducation a été très clair vis-à-vis des intervenants en leur disant: Aussitôt que j'aurai votre réponse, je vais me charger, moi, d'aller au Conseil du trésor pour trouver les sommes d'argent nécessaires pour assurer cette formation.

C'est tout récent, M. le Président. C'est tout récent. Comme je vous dis, c'est vendredi...

M. Dufour: Mais là, c'est ça...

M. Middlemiss: ...et c'est le hasard qui a permis que ça arrive juste avant les crédits. Ça fait...

M. Dufour: Oui. Si on n'avait pas eu de commission parlementaire aujourd'hui, je ne suis pas sûr qu'il y aurait eu l'assemblée vendredi.

M. Middlemiss: Non. M. le Président, en toute...

M. Dufour: Ha, ha, ha! Ça aide, des fois. On devrait peut-être en avoir plus.

M. Middlemiss: Le député de Jonquière me connaît depuis longtemps. C'est une réunion qui était «cédulée» au mois de septembre entre mon prédécesseur et le prédécesseur du ministre de l'Éducation. Et, pour une raison quelconque, ils ont été obligés de contremander. À mon arrivée, on m'a dit: Vite! ça presse. Les gens veulent rencontrer... On s'est organisé, et le hasard a permis que ça arrive vendredi dernier. Ça n'avait pas été... Si on avait pu l'avoir avant... Mais on n'a pas pu le faire avant. On aurait pu le faire après, aussi.

M. Dufour: Est-ce que vous pouvez vous engager à nous faire connaître les résultats de votre...

M. Middlemiss: Oui, oui, oui. Regardez, sur ça... Je pense que c'est une très, très bonne nouvelle et que c'est bon pour toute la population du Québec de se sentir en sécurité avec les nouveaux pompiers.


Chauffage radiant

M. Dufour: Je voudrais parler d'un sujet – parce qu'on est dans les pompiers, puis ça nous fait penser à ça – les plaques chauffantes, le plafond rayonnant. Divers médias annonçaient, le lundi avant Pâques, que le ministre de la Sécurité publique attribuait un mandat à Me Cyrille Delage, commissaire-enquêteur ad hoc, pour évaluer les dangers reliés aux systèmes de chauffage électriques de plafond par rayonnement. Est-ce que la Régie du bâtiment, qui administre la Loi sur la sécurité dans les édifices publics et celle sur les installations électriques pour tous les bâtiments, n'aurait pas fait son travail convenablement, puisque vous demandez à un enquêteur d'aller plus loin? Il y a déjà eu une enquête de faite et vous continuez à le faire.

M. Middlemiss: Regardez...

M. Noël de Tilly (Michel): M. le Président, en ce qui a trait...

Le Président (M. LeSage): Si vous voulez bien vous identifier, pour les fins d'enregistrement du Journal des débats , s'il vous plaît.

M. Noël de Tilly (Michel): Michel Noël de Tilly, sous-ministre associé à la sécurité civile.

Le Président (M. LeSage): Allez-y, la parole est à vous.

M. Noël de Tilly (Michel): Alors, en ce qui a trait à la Régie du bâtiment, effectivement, elle a eu l'occasion de se prononcer à quelques reprises au cours des derniers mois sur la question du chauffage radiant, et elle a demandé, jusqu'à ce que des expertises additionnelles puissent être faites et que l'Association canadienne de normalisation puisse examiner la situation un peu plus dans son ensemble partout au Canada – parce que c'est un problème qui se présente un peu partout au Canada – de faire en sorte qu'on arrête d'installer les systèmes en question.

En parallèle à ça, il y a le notaire Cyrille Delage, qui, dans le cas d'un examen d'un dossier d'incendie qui s'est produit dans la région de Québec – je n'ai pas les données précises, mais c'est un dossier très précis – a constaté, lui aussi, de son côté, qu'il semblait y avoir un problème qui est relié à un certain nombre de ces pellicules. Alors, c'est dans ce contexte que Me Delage a écrit aux autorités du ministère pour qu'il puisse être autorisé à faire une enquête sur la question, de façon à ce qu'on puisse détecter des problèmes de sécurité en incendie qui sont reliés à l'enquête au dossier sur lequel son attention avait été alertée. C'est dans ce contexte que le ministre a demandé à Me Delage de faire une enquête.

Évidemment, la préoccupation qu'on avait tous... C'est une enquête qui va se faire en collaboration avec les experts, bien sûr, du ministère, mais également avec les experts de la Régie du bâtiment et tous ceux qui sont susceptibles d'avoir une opinion à émettre dans le dossier. La préoccupation qui est reliée à ce dossier, c'est que – bien sûr, tout le monde l'a constaté au cours de l'hiver – suite aux événements de la Colombie-Britannique et au Québec aussi, depuis un certain nombre de mois, et en particulier dans la période qui est reliée aux grands froids du mois de janvier 1994, il y a eu des incidents importants et des incendies qui ont été allumés un peu partout et qui impliquent un certain nombre de ces pellicules, dont la Flexel, la Flexwatt et la ESWA. C'est dans cette optique, étant donné que la température est devenue un petit peu plus clémente, que Me Delage a suggéré qu'on fasse une enquête pour approfondir la question, de façon à ce que, éventuellement, avec la Régie du bâtiment, on puisse, si on en vient à la conclusion que d'autres pellicules que celles qui ont déjà été identifiées sont des pellicules déficientes, faire en sorte de recommander, à tous les endroits au Québec où ces pellicules ont été installées, qu'elles puissent être enlevées et remplacées par des systèmes plus adéquats, le cas échéant.

C'est le contexte dans lequel se situe la décision que le ministre de la Sécurité publique a prise récemment sur la question.

M. Dufour: Donc, c'est à la demande de Me Cyrille Delage qu'il a son mandat.

M. Noël de Tilly (Michel): Oui, effectivement, puisque c'est dans le cadre d'une enquête, je ne dirais pas de routine, qu'il a constaté, lui, qu'il y avait un problème. Ça faisait quelques fois qu'il en entendait parler. Il a discuté avec les experts de la Régie du bâtiment, il a discuté avec les experts de la Direction générale de la sécurité civile, et, effectivement, tout le monde a jugé opportun qu'on se penche sur la question d'une façon très approfondie, de façon à faire en sorte que, s'il y a d'autres pellicules que celles qui ont déjà été identifiées qui sont des pellicules déficientes, on puisse profiter de la belle saison pour aviser les propriétaires, de façon à ce que les changements appropriés puissent être faits avant que les froids de l'hiver 1995 ne se produisent.

M. Dufour: Est-ce que vous avez les statistiques du nombre d'incendies qui ont été causés par les plaques chauffantes?

M. Noël de Tilly (Michel): Je serais porté à dire qu'il y en avait autour de 25. Je n'ai pas mes...

M. Dufour: Bien, si vous ne les avez pas tout de suite, vous pourrez nous les donner après.

M. Noël de Tilly (Michel): On les a au bureau. Je pourrais vous les faire parvenir sans aucune difficulté.

(20 h 10)

M. Dufour: Ça va. Moi, je n'ai pas d'objection, je vous ai retardé. Mais quand je vois ce qui se passe – et je m'adresse au ministre, à ce moment-ci – il y a beaucoup de phénomènes surnaturels, où on se retourne vers le gouvernement et on dit: Bien, vous devriez nous dédommager pour le sinistre qui nous est causé; soit un phénomène surnaturel ou naturel, ça arrive. Dans le cas des plaques chauffantes, moi, je comprends que ce sont les fabricants qui les font. On a eu la MIUF, dont on pourrait peut-être parler, où le gouvernement est intervenu après beaucoup de tergiversations, mais c'est un problème beaucoup plus étendu que le dossier des plaques chauffantes, à venir jusqu'à maintenant. Est-ce qu'il n'y a pas un danger, le fait que... Le but de l'enquête qui se fait actuellement, est-ce que c'est... Il y a deux choses qui peuvent se produire. Est-ce que vous avez l'intention, un jour, de dédommager les victimes ou bien si c'est pour empêcher les fabricants d'installer des plaques chauffantes dans le futur?

M. Middlemiss: Premièrement, on n'a pas l'intention de dédommager les gens. C'est dans la sécurité des gens. S'il y a des gens qui ont un système de chauffage dans leur maison qui pourrait causer un feu, il me semble que c'est notre devoir de nous assurer qu'il y a des produits qui ont été acceptés de façon... par des standards normaux. Si c'est défectueux, il me semble que, le plus tôt possible qu'on va trouver une solution, on va protéger... C'est la sécurité des citoyens du Québec qui nous préoccupe.


Achalandage et capacité d'accueil des centres de détention

M. Dufour: Ça va pour ce dossier-là. Ce qui m'amènerait à parler de l'état de la situation dans les centres de détention, où plusieurs organismes ont dénoncé les coupures budgétaires dans les centres de détention, affirmant que cela a grandement contribué à la détérioration des services correctionnels. L'Association des services de réhabilitation sociale du Québec avait d'ailleurs produit un rapport à cet effet en mars 1993. Il semble bien que le ministère de la Sécurité publique n'ait pas tenu compte des observations effectuées par l'Association. En outre, le centre de détention de Bordeaux a connu divers problèmes au cours de la dernière année, des émeutes et des évasions. Question: Quel est l'état de la situation dans les centres de détention du Québec actuellement, notamment quant au nombre de places disponibles versus le nombre de détenus?

Le Président (M. LeSage): M. le ministre.

M. Middlemiss: Oui.

(Consultation)

M. Middlemiss: M. le Président, hier, il y avait 3770 détenus. C'est la population présente, sur une... 3521 de capacité. Ça, ça veut dire que, oui, il y a une surpopulation de ce temps-ci, et on est obligé d'utiliser d'autres endroits qui, normalement, ne sont pas utilisés pour ces raisons-là.

M. Dufour: Vous nous dites qu'actuellement il y a 3770 détenus.

M. Middlemiss: Hier. Oui, en date d'hier, il y en avait, dans un... et on a trois...

M. Dufour: Combien il y en a, de places effectives, dans les prisons au Québec?

M. Middlemiss: O.K. Je vais demander...

M. Dufour: Les vraies places réelles, là; pas la surpopulation.

M. Middlemiss: ...à M. Carrier, le sous-ministre adjoint...

M. Dufour: Oui.

M. Middlemiss: ...de répondre.

M. Carrier (Normand): Alors...

Le Président (M. LeSage): Alors, M. Carrier, si vous voulez bien vous identifier, pour les fins d'enregistrement du Journal des débats .

M. Carrier (Normand): Normand Carrier, sous-ministre associé au ministère de la Sécurité publique.

Le Président (M. LeSage): Alors, la parole est à vous, M. Carrier.

M. Carrier (Normand): Dans les centres de détention du Québec, on a 3163 places qu'on qualifie de «normales» et 358 places occasionnelles. Les places occasionnelles sont constituées surtout par les cellules où on a des lits superposés, et on a 478 places de support. Les places de support, ce sont les places dans les infirmeries, ce sont les places de réclusion et ce sont des cellules qui sont en réserve pour lorsqu'il y a des travaux de réparation. Alors, ce que M. le ministre disait tout à l'heure, c'est que, dans la nuit d'hier, le compte, à minuit, était de 3770 personnes qui ont couché, hier soir. Nous avons un total, si on prend les places normales et les places occasionnelles, de 3521. On utilise les places de support pour combler lorsqu'il y a de la surpopulation ou, encore, on utilise des salles qui sont disponibles dans certains centres de détention.

M. Dufour: Et ça, ce n'est pas juste au printemps, là, qu'il y a du surplus. Depuis quelques années, on voit ça régulièrement, il y a du surplus. Il y a une surpopulation. En plus, on voit bien que les peines, on aura beau donner les peines qu'on voudra, elles ne sont pas appliquées. On s'amuse pas mal, là-dedans, là. On condamne des gens. La fin de semaine, ils vont faire leur chiffre, ils poinçonnent, puis ils s'en vont. C'est un peu spécial, comme système.

M. Carrier (Normand): Là, vous faites référence de façon plus spécifique à la question des sentences intermittentes ou des sentences de fin de semaine.

M. Dufour: Même les sentences régulières, on sait bien qu'on en laisse aller souvent; le sixième de la peine, le tiers de la peine.

M. Carrier (Normand): Non. Actuellement, on a, en moyenne, quand on calcule les personnes inscrites versus les personnes qui sont à l'extérieur sur des programmes qui sont des programmes d'encadrement en milieu ouvert ou dans des ressources communautaires... Si on calcule le total des personnes inscrites, on a à peu près 35 % des personnes qui sont sur des programmes et on a 65 % des personnes qui sont à l'intérieur. Et je me réfère plus spécifiquement à la journée du 2 mars, pour laquelle vous nous avez demandé des chiffres plus précis. Alors, les gens qui sont à l'extérieur sont sur des programmes spécifiques. Ils sont surveillés soit par un agent des services correctionnels ou ils sont dans des ressources communautaires. Et ils sont libérés sur un programme formel d'absence temporaire, avec certaines conditions à respecter.

M. Dufour: Mais, s'il y a 39 % du monde qui est à l'extérieur, est-ce parce que vous êtes obligé de faire des contorsions parce que vous n'avez pas de place? Est-ce que c'est parce que ça coûte moins cher à l'État qu'il est laissé libre?

M. Carrier (Normand): Non. C'est que les programmes de réinsertion sociale que nous avons... Les individus qui sont condamnés à la détention, on a tout intérêt à les libérer sur des programmes spécifiques, avec des conditions spécifiques. Alors, à ce moment-là, ils ont un contrôle par un fonctionnaire de l'État ou dans une ressource communautaire pour les aider à se réinsérer socialement. Ça vise deux aspects. Ça vise un aspect de sécurité, parce qu'ils continuent à être surveillés jusqu'à la fin de leur sentence, parfois en libération conditionnelle, pour les gens qui ont plus de six mois, ou, pour les gens qui ont moins de six mois, en absence temporaire. L'autre aspect, c'est de les aider à se réinsérer socialement dans la société. Alors, ce n'est pas une question de surpopulation. Souvent, c'est une question de réinsertion sociale. Il est vrai de dire qu'il y a des périodes de pointe, à l'automne et au printemps, où la pression est plus forte dans le système.

M. Dufour: On a, à votre cahier, répartition des personnes condamnées à une peine continue, selon leur situation, la durée de la peine dans les établissements de détention du Québec, pour le 2 mars. On parle du nombre de ressources communautaires; il y en a 130. Les autres programmes, il y en a 1245. Le total, le nombre, là... Nombre de détenus, le 2 mars, bon, il y en avait 1375 à l'extérieur, pour 3914. Bon, ça fait 100 %. Les 1375, êtes-vous en train de me dire que ces gens-là étaient tous dans des ressources communautaires, ou, s'ils sont libérés, là, ils se promènent dans la nature, là, avec... Ils se rapportent, j'imagine, à toutes les semaines, ou quelqu'un va voir?

M. Carrier (Normand): Il y en avait une partie. On a 460 places dans les ressources communautaires. Sur ces 460 places, il y a un certain nombre de ces gens-là qui sont des personnes en absence temporaire, il y en a une autre partie qui sont des personnes en libération conditionnelle, et une autre partie référée directement par la cour. Donc, sur les personnes, les 1375 personnes, il y en a une partie, soit 130, qui étaient dans des ressources communautaires, et les autres étaient sur un programme d'encadrement en milieu ouvert. Ça signifie qu'il y a un agent des services correctionnels qui les rencontre régulièrement. Les agents des services correctionnels ont un «case load» de 15 à 20 personnes qu'ils surveillent régulièrement pour s'assurer que les conditions sont respectées et pour leur fournir de l'aide, au besoin.

M. Dufour: Quand ils sont en programme PEMO, je ne sais pas trop comment...

M. Carrier (Normand): Oui, PEMO.

M. Dufour: ...PEMO, quand ils sont là-dessus, qui paie pour... La ressource communautaire reçoit ses sommes d'argent du Service ou du BS ou du bien-être?

M. Carrier (Normand): Des services correctionnels. Les ressources communautaires qui sont sous contrat avec nous, c'est nous qui payons pour les ressources communautaires qui reçoivent ces gens-là, en absence temporaire.

M. Dufour: O.K.

(20 h 20)

M. Carrier (Normand): Le coût moyen est de 54 $ par jour.

M. Dufour: Est-ce que vous pouvez nous informer des compressions budgétaires qui seront appliquées par le Service correctionnel au cours de l'année?

(Consultation)

M. Middlemiss: M. le Président, est-ce que...

Le Président (M. LeSage): Allez-y, M. le ministre.

M. Middlemiss: Est-ce que vous voulez avoir une ventilation ou...

M. Dufour: Bien, si c'est possible, j'aimerais bien mieux, c'est évident. Si vous avez la ventilation... puis la déposer, ce serait peut-être mieux de la donner en gros, mais si elle est déposée, on peut s'informer. On va sauver du temps, puis...

M. Middlemiss: D'accord. La réduction du personnel d'encadrement, et en détention et en probation, il y a 60 ETC réguliers. La réduction des autres effectifs dans l'ensemble des directions est 214 ETC réguliers, 27 ETC occasionnels. Pour y arriver, il y a: une réduction du nombre de cadres qui seront présents en journée, l'abolition de 50 % des postes de directeur adjoint en détention, la diminution de la rétribution des stages d'accueil, la réduction du nombre de membres des comités de discipline et d'absences temporaires, la privatisation de la garde dans les hôpitaux, la restriction du nombre des jours de formation et des candidats, l'élimination des occasionnels dans les services centraux, la substitution, dans les cuisines, de certains ouvriers par des incarcérés, l'augmentation de la productivité en regard des interventions en probation, l'augmentation de la productivité en regard des évaluations en probation, la rationalisation des opérations liées aux comparutions, la réduction des volumes, l'harmonisation des horaires, la rationalisation des comparutions le samedi et la réduction du temps supplémentaire.

M. Dufour: Ça, ça fait combien de monde de moins?

M. Middlemiss: Ça, c'est pour les deux dernières années, et ça fait... 60 plus 214 plus 27, ça fait 301, sur deux ans.

M. Dufour: Mais est-ce que c'est de l'année passée et cette année ou cette année et l'année prochaine?

M. Carrier (Normand): L'année passée et cette année.

M. Dufour: O.K. 1992-1993.

M. Carrier (Normand): Parce qu'il y a des mesures qui s'appliquent sur une période de deux ans.

M. Dufour: C'est l'année passée et cette année. C'est 1993-1994, 1994-1995...

M. Middlemiss: 1994-1995, oui.

M. Dufour: ...ou 1992-1993?

M. Carrier (Normand): 1993-1994 et 1994-1995.

M. Dufour: O.K. C'est cette année et l'an passé. Est-ce que vous allez déposer la diminution des effectifs? Est-ce que vous pouvez déposer ce rapport-là?

M. Middlemiss: O.K. Ça, c'était juste une note résumée. On pourrait certainement vous faire parvenir ces choses-là. On pourrait vous le faire parvenir. Peut-être que vous voudrez ajouter...

(Consultation)

M. Middlemiss: M. le Président, comme je l'indiquais dans mes remarques préliminaires, il va certainement y avoir des ajouts, parce qu'on va ouvrir d'autres centres de détention. Donc, on va être obligés de retourner, comme je l'indiquais, au Conseil du trésor pour des ajouts, parce qu'on fait de l'expansion. On va avoir plus de places en détention, on va avoir besoin de plus de personnel pour s'en occuper.

M. Dufour: J'avais cru comprendre ça à travers...

M. Middlemiss: Oui.

M. Dufour: ...les papiers dont j'ai pris connaissance.

M. Middlemiss: Il y a Saint-Jérôme, Hull, Rimouski...

M. Dufour: Rivière-du-Loup.

M. Middlemiss: ...Rivière-du-Loup, tout ça. Donc, ça veut dire qu'il va falloir augmenter, et c'est ça qu'on indiquait. Contrairement à d'autres, nous sommes en progression au lieu d'être en diminution.

M. Dufour: Ça veut dire que les affaires vont bien.

M. Middlemiss: Bien, regardez, c'est certain que la prévention de la criminalité, c'est une chose qui pourrait au moins nous permettre de plafonner dans ce sens-là et qui nous permettrait certainement d'empêcher de ces gens-là de retourner dans des centres de détention, et de peut-être participer plus au bien de la collectivité québécoise.


Sécurité à la prison de Bordeaux

M. Dufour: En ce qui concerne la situation à Bordeaux, le ministère peut-il nous indiquer les résultats de l'enquête concernant les deux émeutes de l'année dernière et les nombreuses évasions de l'été dernier? Est-ce que vous avez un rapport là-dessus dont vous pourriez nous faire part?

M. Carrier (Normand): Effectivement, le ministre de la Sécurité publique a ordonné une enquête sur la sécurité à Bordeaux, suite aux évasions. Ça a été M. Therrien, qui a été mandaté, avec un groupe de personnes, pour étudier la situation. Le rapport a été déposé au cours de l'été, plus précisément au mois d'août. Le rapport Therrien a directement relié les évasions aux travaux de construction qui étaient en cours à Bordeaux. Et le rapport le dit clairement: «Bordeaux n'est pas une passoire.» Il a précisé que, dans une situation normale, Bordeaux était un établissement très sécuritaire.

Il a en même temps précisé combien il était difficile de faire des travaux de construction dans un établissement de détention qui garde quotidiennement plus de 1000 détenus. Alors, pour faire les travaux de construction, on a dû faire une brèche assez large dans les murs de Bordeaux. Ça a évidemment occasionné une pression énorme. Alors, même s'il y avait eu des mesures de sécurité qui avaient été prises, il y a quand même eu des évasions, comme vous le savez.

Le rapport a fait plusieurs recommandations, notamment au niveau de l'intégration des travaux de construction et des besoins de sécurité. Le rapport fait ressortir le besoin de coordination entre les différents intervenants. Il y a plusieurs intervenants quand il y a des travaux de construction: il y a le contracteur, les sous-contractants, la SIQ, il y a évidemment les employés de Bordeaux. Alors, c'est la coordination de ces différents éléments qui n'est pas facile, parce qu'on ne travaille pas tous dans le même objectif. Les employés de Bordeaux travaillent dans l'objectif de sécurité, alors que le contracteur travaille pour que les travaux se réalisent le plus rapidement possible. Alors, le rapport Therrien fait ressortir la nécessité d'intégrer ces différents intervenants.

(20 h 30)

Donc, il recommande de prévoir des budgets pour la sécurité dès la planification des travaux. Il recommande de prévoir, dans le contrat, des contraintes pour les contracteurs, prévoir un certain nombre de contraintes dès le moment du contrat, prévoir les aménagements physiques particuliers pour la durée des travaux, notamment au niveau des clôtures sécuritaires, au niveau de l'aménagement de certains chemins de ronde, au niveau de l'aménagement de tours d'observation et la mise en place de caméras. Par ailleurs, il propose l'ajout de ressources humaines temporaires pour surveiller les cours et surveiller le chantier.

Alors, il y a eu beaucoup de discussions entre le comité Therrien, le ministre de la Sécurité publique et les gens des services correctionnels, et la plupart des recommandations du rapport Therrien ont été entérinées pour les futurs travaux qui doivent avoir lieu à Bordeaux, et pour la fin de ces travaux-là.

M. Dufour: Donc, actuellement, vous pensez que la situation est devenue sous contrôle.

M. Carrier (Normand): La situation est sous contrôle. Actuellement, il n'y a pas de travaux en cours. Mais, pour les prochains travaux qui seront réalisés, évidemment, les recommandations du rapport Therrien seront, dans la très grande majorité, appliquées. Et, pour les travaux qui sont actuellement en cours à Saint-Jérôme et à Hull, où on fait des travaux dans un centre qui est en opération, il n'y a pas eu de problèmes opérationnels, à date.


Résultats d'une enquête sur le harcèlement sexuel à la prison Tanguay

M. Dufour: Aujourd'hui, on a appris qu'il y a quatre employés cadres, qui travaillent à la prison Tanguay, à Québec, qui ont été sous enquête pour harcèlement sexuel, et qui sont en congé sans solde depuis le 26 octobre 1993 – congé avec solde, oui, pas sans solde – c-e-n-t. Ça devient drôlement intéressant d'être sous enquête, quand c'est payant. Moi, je veux dire, qu'est-ce qui se passe dans ce dossier-là? Depuis le 26 octobre, il n'y a rien qui a coulé sur la place publique. Les décisions ne sont pas encore prises, on ne sait même pas si l'enquête est complétée, puis on paie tout le monde. On peut toujours se donner comme... pas comme objectif, mais, au moins, on peut examiner ce qui s'est passé depuis ces cinq mois, depuis le 26 octobre. Ça devait être assez grave, puisqu'on met les gens en congé. Il y a des montants d'argent importants, là-dedans. Si c'était suffisamment grave, on aurait dû mettre tout l'effort pour avoir les résultats de l'enquête au plus vite. Et, si les résultats de l'enquête sont concluants, on sait quoi faire dans ces cas-là. S'ils ne sont pas concluants, on lève les accusations. Qu'est-ce qui se passe dans ce dossier-là? Est-ce qu'on peut avoir des explications?

M. Middlemiss: M. le Président, dans un premier temps, nous avons eu certaines informations qui ont justifié le déclenchement d'une enquête administrative. Si on l'a déclenchée, c'est parce qu'on avait des renseignements. Nous avons reçu le rapport et nous sommes en train de l'analyser.

M. Dufour: Quand? Est-ce qu'on a une date du rapport déposé?

M. Middlemiss: On vient d'avoir le rapport, tant administratif que légal, et nous sommes sur le point de prendre une décision. La décision sera prise sous peu.

M. Dufour: Ce n'est pas éclairant beaucoup.

M. Middlemiss: Bien non. Regardez, je vous dis qu'on vient d'avoir le rapport. On est en train de faire l'analyse qui s'impose et on posera les gestes qu'on doit poser.

M. Dufour: Oui, mais est-ce que vous trouvez normal qu'une enquête qui a tout de même de l'envergure... Ça ressemble à un réseau, là. Il y a quatre personnes impliquées. Je connais les noms. Je ne les donnerai pas, mais je connais les noms. Il y a quatre personnes impliquées dans le dossier. Le 26 octobre... Si je suis correct – novembre, décembre, janvier, février, mars, avril – presque six mois se sont écoulés. On ne peut pas dire que le ministère s'est essoufflé dans l'enquête. Il me semble que ce n'est pas si complexe que ça. Une enquête interne, surtout, puis administrative, comme vous nous dites, ça ne prend pas de temps à se virer de bord. Moi, je ne voudrais pas voir l'entreprise privée jouer là-dedans, mais il me semble que c'est trop long.

M. Middlemiss: M. le Président, c'est...

M. Dufour: Comme L'État paie, ce n'est pas bien grave, mais...

M. Middlemiss: Non. C'est que, M. le Président, on peut bien penser que ça prend beaucoup de temps, mais, avant de poser des gestes, il faut s'assurer qu'on a fait l'analyse complète, là. Il me semble que c'est assez grave, il y a des conséquences, des gestes, et on rendra une décision. Puis je ne veux pas faire sursauter le président de la commission, il ne faut pas prendre ça non plus à la légère. Il me semble que c'est important, et on devra poser des gestes. S'il y a des gens qui ont posé des gestes qu'ils ne devaient pas poser, il y a des conséquences. Donc, il faut s'assurer qu'on a fait l'analyse et que les décisions qu'on va prendre vont être bien fondées. Il me semble que c'est tellement important, lorsqu'il y a des conséquences graves, de prendre le temps que ça prend pour s'assurer qu'on va poser le geste qui doit être posé envers ces gens-là.

M. Dufour: Qu'est-ce qui fait que le temps apporte des preuves plus grandes? Le cas est précis. S'il y a eu du harcèlement sexuel... À moins que vous vouliez savoir si elles sont enceintes ou pas, je ne sais pas ce qui se passe, là. Moi, je vous dis qu'avec la preuve au bout...

M. Middlemiss: M. le Président, c'est toujours tellement simple, des fois, ça a tout l'air tellement simple, mais il faut toujours apporter les preuves, la preuve, et c'est pas toujours facile. Il me semble que c'est important.

M. Dufour: Mardi! Je ne comprends plus rien.

M. Middlemiss: On m'indique, M. le Président, que l'enquête et tout ça, ça comprend 8000 feuilles de notes sténographiées. On est obligés de prendre le temps que ça prend. Il me semble que, au point de vue de justice envers tous ces gens impliqués, il faut s'assurer que tout a été analysé avant de rendre une décision. Souvent, on peut se plaindre que ça prend trop de temps, mais j'aime autant, moi, prendre tout le temps nécessaire et m'assurer que, en bout de piste, on a tout examiné et que les gestes qu'on va poser, c'est des gestes... et qu'on ne sera pas obligés de reculer.

M. Dufour: M. le ministre, si vous étiez la victime, peut-être que vous trouveriez que le temps est trop long. Ce n'est pas compliqué. Qu'il y ait 8000 feuilles, là, il y a du monde qui se font plaisir. Il y a des chercheurs qui cherchent et il y en a d'autres qui trouvent. Il devrait peut-être y en avoir qui trouvent plutôt que chercher.

M. Middlemiss: M. le Président, le député de Jonquière a le droit de passer ses jugements.

M. Dufour: Ça n'a pas de bon sens.

M. Middlemiss: Il devient le juge et le jury. Moi, au contraire, avant de poser des gestes, parce que c'est moi qui devrai les poser, les gestes, je veux m'assurer que tout a été analysé et qu'on pose les bons gestes.

M. Dufour: En tout cas, moi, je fais juste une constatation. On n'ira pas plus loin là-dessus, mais je vais vous dire une chose: j'ai déjà été dans le système de l'administration, j'en ai déjà fait, des enquêtes sur des individus, et, des enquêtes de six mois, je n'en ai pas eu. Et il y avait des cas assez graves, et on a été au bout assez rapidement. C'est évident que si vous voulez avoir une preuve ficelée, avec un coffre-fort, etc., et il n'y a plus rien qui bouge... Moi, je pense qu'on n'a pas besoin d'avoir tout ça pour prendre des actions. Il y a l'évidence, aussi, c'est quelque chose. Faire la preuve de la preuve de la preuve, je peux bien y aller, moi, mais je ne pensais pas que c'était un roman qu'on était pour écrire.

Dans le ministère de la Sécurité publique, je vais vous donner juste une chose, vous voulez avoir de l'efficacité? Brassez quelque part. Ce n'est pas vrai! La contrebande, ça a pris trois ans, et là, vous nous dites qu'une petite enquête comme ça, ça a pris six mois, et vous semblez dire: c'est bien normal, c'est bien correct. Bien, moi, je m'interrogerais sérieusement, parce qu'il y a des coûts attachés à ça. C'est pas vrai qu'on doit avoir la bretelle et les ceintures, et le casque de sécurité, et la ceinture de sauvetage en plus, et les palmes et le parachute. Un instant, là!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dufour: Il faut que ça arrête un peu cette affaire-là. Il me semble qu'il y a des éléments suffisants, et, quand c'est clair, c'est clair. Moi, je n'ai pas besoin de preuve. Quand il vente, je regarde dehors et, si le vent me fouette le visage, je sais qu'il vente. Je ne le vois pas le vent, il paraît qu'il existe pareil.

M. Middlemiss: Vous regardez les girouettes aller. M. le Président, est-ce que je peux présumer que tous les éloges et les félicitations que le député de Jonquière a faits aux employés de la Sécurité publique cet après-midi, il vient de les retirer?

M. Dufour: Ils ont un patron.

M. Middlemiss: C'est ça? C'est ça qu'il vient de faire?

M. Dufour: Ils ont un patron, ces gens-là. Moi, ce dont j'ai peur, je vais vous le dire. Vous savez, je peux en faire, des félicitations, je pense que c'est mérité. Je vais vous dire où je pense que je peux vous donner un blâme. C'est que je pense que le ministère, des fois, le ministre – je ne sais pas si vous, vous le faites – contrôle trop, des fois, à des places. Il ne laisse pas assez de marge de manoeuvre. Moi, j'ai des moyens doutes à des places. C'est pas les employés qui ne font pas leur travail, c'est pas le système policier qui n'opère pas, je pense que c'est le ministre qui empêche l'opération. Le ministre devient le problème, et il n'a pas la solution.

(20 h 40)

Dans ce cas-là, pourquoi avoir attendu six mois et 8000 pages de texte? Je m'interrogerais. Si, votre spécialité, c'est d'écrire des romans, bien, là, on va s'engager, on va les publier, mais, si c'est pour avoir des résultats, il me semble que le gros bon sens, des fois, quand vous posez une question, c'est oui ou non. Il y a des choses visibles et il y a des choses qu'on peut prouver. Et puis quand deux témoins ou trois témoins corroborent la même chose, on n'en a pas besoin de 150. Ça ajoute quoi à la preuve? Pour moi, ça n'ajoute rien. S'il y en a deux ou trois, c'est suffisant pour avoir une évidence. Si vous me dites: on n'est jamais assez certains, bien, c'est là que je parle des bretelles et de la ceinture, puis du casque de sécurité, puis tout ce que vous voudrez. Mais ce ne sont pas tous les mêmes instruments partout. Vous voulez avoir tout pour aller n'importe où: en l'air, dans l'eau, en vol, n'importe où.

M. Middlemiss: M. le Président, moi, je porte seulement une ceinture et je n'ai pas peur de perdre mes culottes non plus. M. le Président, je comprends, mais on a tenté de dire au député, tantôt, par votre entremise, M. le Président, que c'est une semaine ou deux. On est rendus à ce point-là. Mais, une chose, la décision, elle doit être rendue, et nous allons être obligés de la rendre, la décision. Il me semble que ce sont des gestes qu'il faut peser. Parce que, le député de Jonquière étant le critique, s'il n'aime pas la décision que je vais prendre, il va être le premier à me pointer du doigt et dire: vous n'avez pas pris la bonne décision. Puis là, il va dire: bien, vous n'avez pas pris assez de temps pour l'analyser. Là, il me dit qu'on en a pris trop. On verra, en temps et lieu, lorsqu'on aura rendu la décision, à savoir si on a raison ou non. Moi, je veux m'assurer de prendre tout le temps qu'on doit prendre, parce qu'il y a des conséquences à des gestes qu'on pose, et il me semble que tout le monde a le droit à ce qu'on prenne le temps nécessaire et qu'on ait la preuve, sans aucun doute.

M. Dufour: Je voudrais bien agir de la façon que vous dites, mais vous savez bien que ça ne peut pas tenir le coup, là, de dire: je veux agir sans aucun doute. Vous savez bien que je ne pourrais pas marcher, je ne me lèverais pas le matin si je n'avais aucun doute dans mon esprit. Je ne suis pas sûr, moi, de tout ce que je fais. Je ne suis pas sûr qu'en mettant le pied en bas du lit je ne me casserai pas une jambe. Je ne suis pas sûr qu'en mettant de l'eau chaude ce n'est pas de l'eau frette qui va sortir....

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dufour: Vraiment, M. le ministre, je vais vous dire une chose. Je vais juste vous poser une question, parce que, moi, je trouve que c'est sérieux, ce qu'on fait là. Ça peut être drôle, les choses que je dis, mais j'essaie de vous faire comprendre, avec des mots simples, ce que je crois. Si c'était votre propre argent ou votre argent propre que vous administriez – c'est ça qu'on a comme responsabilité – puis que vous payiez les gens à plein salaire pendant six mois pour faire une enquête, ça serait votre propre entreprise, vous auriez fait ça? Moi, je ne suis pas convaincu. Je ne suis pas convaincu que votre assurance de donner autant de justice, comme vous faites là – puis on a discuté sur d'autres dossiers – que vous vous comporteriez de la même façon. Je veux juste vous rappeler ça.

Moi, je n'ai jamais oublié ça. Quand on administre les fonds publics, je ne veux pas vous donner de leçon, mais, moi, mon impression, mon attitude, c'est l'argent du contribuable, là, il a le droit de poser des questions. Quand je vois six mois de salaire, puis qu'on est toujours sous enquête... Aïe! ce ne sont pas des enquêtes spécifiques, là, hein. C'est spécifique, mais du harcèlement sexuel, il y a des choses qui sont visibles, des fois, il y a des choses qui sont possibles. Je ne vous demande pas de trouver des choses qui sont introuvables, là. Ça se touche, ça, ces choses-là...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dufour: ...dans tous les sens du terme, là. Et vous, ça vous prend six mois pour constater ça? Achetez-vous des lunettes!

M. Middlemiss: M. le Président, moi, j'ai été dans l'entreprise privée pendant 20 ans, ça fait 13 ans que je fais de la politique, et j'applique les mêmes façons. Je dépense l'argent de l'État comme si c'était l'argent de ma compagnie et je vais continuer à le faire. Sauf qu'il y a des circonstances où on veut s'assurer de ne pas errer. Parce qu'il y a des personnes impliquées, il y a des emplois impliqués, il y a des réputations impliquées. Peut-être qu'on pourra faire l'examen quand ce sera tout fini, pour dire: oui, ç'a peut-être pris trop de temps et qu'on devra rationaliser dans l'avenir. Mais, pour le cas présent, de le critiquer présentement, il me semble que ça ne nous avance pas. Mais je retiens, puis je suis d'accord avec le député de Jonquière, à savoir que, si on exagère puis ça prend trop de temps puis on gaspille l'argent des citoyens, on devra rationaliser. Mais, quand on veut rationaliser dans d'autres choses, puis ça n'affectera pas personne, on nous dit: on ne devrait pas fermer ça. On ne devrait pas faire ci. Il me semble qu'il va falloir qu'à un moment donné on se décide. Ça s'applique, que ça fasse notre affaire ou non, la rationalisation. Dans ce cas-ci, c'est une affaire de réputations, d'emplois et de personnes qui sont impliqués. Il me semble qu'on devrait prendre le temps que ça prend. On va rendre la décision.

Et, déjà, au ministère, on est en train de revoir tout ce qu'on fait. J'ai donné, cet après-midi, dans mes notes préliminaires, toute la rationalisation que nous avons réussi à faire dans les deux années passées. Donc, ça, c'est un signe qu'on ne prend pas ça à la légère.

M. Dufour: Ça va. Ça fait que je devrais vous féliciter, vous pensez, M. le ministre?

M. Middlemiss: Non.

Le Président (M. LeSage): De toute façon, M. le député de Jonquière, la parole est à vous.


Programme de travaux compensatoires

M. Dufour: Le peuple jugera. Le Programme de travaux compensatoires. L'Association des services de réhabilitation sociale avait porté un jugement très sévère à l'endroit des services correctionnels du Québec dans son rapport de mars 1993. La principale critique de l'Association était la suivante: Ces services correctionnels du Québec ne connaissent pas vraiment la clientèle des prisons, n'ont pas de politique correctionnelle, n'ont pas de vision unifiée, ont une vision étriquée et trompeuse du communautaire, et les services correctionnels agissent dans un cadre légal administratif porteur de contradictions et d'incohérences, puis ne font jamais d'évaluation des programmes mis en place.

Est-ce que vous pourriez me dire quelles suites ont été données à ce rapport?

Le Président (M. LeSage): M. Carrier, vous voulez répondre à ces questions?

M. Carrier (Normand): Oui.

Le Président (M. LeSage): Alors, allez-y.

M. Carrier (Normand): Quand on regarde ce qui s'est passé au cours des dernières années dans les services correctionnels du Québec, on remarque une augmentation de 40 % à 50 % de la clientèle dans les programmes de réinsertion sociale auxquels vous faites référence. Quand on regarde la population au niveau de la probation, la population au niveau des libérations conditionnelles, les travaux compensatoires ont augmenté de l'ordre de 111 % au cours des cinq dernières années; le programme Travaux communautaires a augmenté aussi de façon significative.

Alors, ce qu'on remarque, au cours des quatre ou cinq dernières années, bien qu'il y ait eu une augmentation de la clientèle en détention, il y a eu en même temps une augmentation de la clientèle dans les différents programmes de réinsertion sociale. Au niveau des organismes communautaires, au cours des cinq dernières années, si on regarde les effets budgétaires dans les cinq dernières années au niveau des ressources communautaires, on voit une augmentation de l'ordre de 30 %, en incluant dans ces programmes-là, le Programme de travaux compensatoires au sujet duquel il y a eu, au cours de la dernière année, 25 000 dossiers; c'est une mesure de solution de rechange à l'incarcération. Alors, de dire qu'aux services correctionnels, au cours des dernières années, il ne s'est rien passé en matière de réinsertion sociale, ça m'apparaît assez inexact.

Évidemment, en même temps qu'on fait des mesures de rationalisation en détention et en probation, comme on l'a fait au cours des dernières années – M. le ministre vous l'a souligné tout à l'heure – on a dû comprimer, compte tenu de la situation des finances publiques, d'une part, compte tenu de la volonté du gouvernement de réalignement dans l'ensemble des ministères, et compte tenu de la loi 198, on a réalisé, au cours des dernières années, certaines rationalisations. Ces rationalisations-là, on a commencé, au cours de la dernière année, à en demander aussi aux organismes communautaires avec qui nous sommes sous contrat. Alors, il y a des effets... Évidemment, ces ressources-là, qui se voient dans l'obligation de rationaliser, n'apprécient pas ces mesures de rationalisation. Alors, il y a des réactions, mais on est quand même en discussion avec l'ensemble des ressources communautaires et on a de très bonnes relations avec l'ensemble des ressources communautaires, bien qu'on ait eu certaines relations conflictuelles avec les associations, notamment avec l'ASRS, au cours de la dernière année.

(20 h 50)

M. Dufour: Alors, moi, vous me convainquez. Je sais que vous avez demandé beaucoup plus aux ressources communautaires, ça, je suis au courant de ça, mais je sais... Vous avez demandé plus aux ressources communautaires parce que vous en donnez plus, vous mettez plus de monde là-dedans; il y a plus de détenus qui vont là-dedans. Mais, en faisant ça, il y a d'autres phénomènes aussi. Je peux vous rappeler qu'il y avait 19 organismes, en 1986-1987, qui se partageaient 506 700 000 $, et en... 506 700 $; ça allait trop bien là. On n'est pas à des zéros près. On fera payer ça par les six, là; si on avait sauvé du salaire, on aurait plus d'argent à leur donner. En 1993-1994, il y a 29 organismes qui se partagent 461 500 $. Donc, on fait plus avec moins: vous avez rationalisé, vous demandez beaucoup plus, vous mettez moins d'argent à leur disposition, et je sais que ces groupes-là, ils ont des difficultés. Est-ce qu'on va les maintenir comme ça, là, affamés, encore longtemps, ou est-ce qu'on ne veut pas les faire disparaître, purement et simplement? On permet qu'il y en ait plus, puis on met moins d'argent.

M. Middlemiss: M. le Président, avant de passer la parole à M. Carrier, j'aimerais, moi, réitérer que les organismes impliqués dans le communautaire, nous avons rencontré ces gens-là. Nous avons une bonne relation. Avec nous, ils travaillent à tenter de régler la situation que nous vivons, qui n'est pas facile. Mais je dois vous dire que, si on avait un fossé qui nous séparait, nous avons réussi à faire les ponts pour traverser ce fossé, et nous allons travailler dans le sens de vouloir... Et on réalise l'importance de ces groupes. Je veux juste assurer le député de Jonquière que tout le monde doit vivre avec la rationalisation, mais que nous sommes en train de travailler avec ces groupes-là dans le but d'améliorer leur sort et d'améliorer le sort des gens dont ils s'occupent. Parce que la réinsertion sociale est très importante. Ça fait partie de tout notre développement, de la prévention de la criminalité. Et je veux vous assurer que vous allez voir que les relations avec ces groupes-là, dans l'avenir, vont être meilleures qu'elles ne l'ont été. Puis, c'est normal que, lorsqu'on demande à tout le monde de faire des sacrifices, il y a des gens qui sentent qu'on leur en demande plus à eux qu'à d'autres. Ceci étant dit, je vais laisser M. Carrier vous donner les détails sur votre question.

M. Carrier (Normand): La plus grande partie de la diminution du budget dont vous parlez, M. le député, ç'a été comprimé dans les budgets de recherche. C'est qu'on a un montant pour accorder des budgets de recherche à des universités concernant la problématique de la délinquance. Compte tenu de la situation des finances publiques, on a diminué de façon importante ce budget-là pour cette année. C'est la majeure partie de la compression des 522 000 $ dont vous parlez.

M. Dufour: Je pense que le temps va assez rapidement. Il y a huit minutes qu'on a perdues. Ce n'est pas la faute du porte-parole de l'Opposition, il y a quelques retards indus. Ce n'est pas beaucoup, huit minutes. Si vous voulez, on peut aller plus vite. Je vais vous posez une série de questions. Si vous pouvez répondre à mes questions ou déposer les réponses demain matin, je serais bien content. Quand je parle de demain matin, ce n'est pas à 8 heures, au début, à 10 heures. Puis, moi, je vous les poserais, là, en vrac, sans qu'on échange là-dessus. Ça sauverait du temps puis ça nous permettrait d'être plus pratiques. J'aimerais vous demander, par exemple...

M. Middlemiss: Ça va, M. le Président.


Autres sujets

M. Dufour: L'Association des services de réhabilitation sociale du Québec, qui existe et qui voit des choses, nous fait la demande. Moi, je pense qu'on ne s'en cache pas, là, on aimerait avoir la demande telle qu'elle est faite, qu'elle est formulée par l'Association. Vous avez des bonnes relations. On va avoir tendance à les garder. Et, moi, je pense que ça pourrait être intéressant. Est-ce qu'on pourrait obtenir la ventilation des crédits des services correctionnels du Québec pour l'année 1994-1995? Vous me direz oui ou non. Est-ce que c'est possible, par programme et élément de programme?

M. Middlemiss: M. le Président, le fait qu'on rencontre les groupes, toute la ventilation elle-même n'est pas tout à fait complétée, là. Une des choses, les discussions qui ont lieu, c'est de tenter de voir de quelle façon on va être capables de distribuer ces choses-là pour que chacun puisse exécuter son mandat.

M. Dufour: O.K. Est-ce que vous pourriez vous engager, lorsque disponibles, à nous les donner?

M. Middlemiss: Oui. Ça, pas de problème.

M. Dufour: Bon. Vous devez les avoir aussi, 1987-1994, ces éléments-là que je viens de vous demander pour les crédits, est-ce qu'ils existent, 1987 à 1993? Ça, est-ce qu'on pourrait avoir le dépôt?

M. Middlemiss: Oui. Oui, d'accord.

M. Dufour: Ça va? Vous me dites oui?

M. Middlemiss: Oui.

M. Dufour: Est-ce qu'on pourrait obtenir les projections budgétaires des services correctionnels pour 1994 à 1997, parce qu'il y a un élément là-dedans, on veut voir comment ça se dirige, ces choses-là. Ce n'est pas compliqué.

(Consultation)

M. Middlemiss: Il y en a, des choses, M. le Président, qu'on ne pourra peut-être pas sortir demain, là, mais il y a des choses qu'on...

M. Dufour: Je comprends. Je vous le demande, mais...

M. Middlemiss: Oui.

M. Dufour: ...je vous dis, je ne fais pas de discussion dessus, je vous demande de me...

M. Middlemiss: O.K.

M. Dufour: C'est à l'état brut, ce que je fais là.

M. Middlemiss: O.K.

M. Dufour: Si vous me dites oui, je prends votre parole et je fonctionne.

M. Middlemiss: D'accord. Tout ce qu'on peut vous livrer le plus tôt possible, on vous le livrera, et les autres, lorsque ce sera prêt.

M. Dufour: Bon. Les services correctionnels, qu'est-ce qu'on prévoit couper cette année, et les montants qu'on réserve aux organismes communautaires? Est-ce que ça, c'est connu? C'est dans le budget, ça. On ne peut pas le trouver et le déceler comme ça, là.

M. Carrier (Normand): Les compressions dans les services correctionnels au cours des dernières années. On a coupé, au cours des deux dernières années, comme M. le ministre vous l'a indiqué tout à l'heure, autour de 8 % dans le budget global des services correctionnels. Si on prend la même période pour le budget des ressources communautaires, de l'ensemble du communautaire, la compression a été de 1,5 %.

M. Dufour: De 1,5 %?

M. Carrier (Normand): Oui, 1,5 %; si on prend les deux dernières années, les compressions qui ont été réalisées dans les services correctionnels se situent autour de 8 %. Si on prend l'ensemble des budgets consacrés au communautaire, sur les deux dernières années – parce que l'année passée, le budget du communautaire a augmenté, j'y vais de mémoire, de l'ordre de 3 % ou 4 %, et il a diminué cette année. Sur les deux dernières années, la compression est de l'ordre de 1,5 %.

M. Dufour: Ça va. Est-ce que je pourrais savoir combien il y a d'argent qui a été investi pour l'application de la loi 147, et quels résultats ça a donné?

M. Carrier (Normand): On a eu, pour l'application de la loi 147 – j'y vais encore de mémoire, là...

M. Middlemiss: On peut vous envoyer la réponse demain, celle-là aussi?

M. Dufour: Aussi.

M. Middlemiss: Oui?

M. Dufour: Ah oui, je n'ai pas d'objection. En fait, je...

M. Middlemiss: O.K.

M. Dufour: ...j'apprécie. Moi, je vous le dis, je ne vous poserais pas des questions pour en poser, là. J'ai des questions bien précises. Il y a des gens qui sont intéressés. Nous autres aussi, on l'est, honnêtement, parce que je pense que la réinsertion sociale, c'est un élément important. Ça fait plusieurs années... Ça fait quelques fois que j'ai l'occasion d'échanger, et moi, je vous dis honnêtement, j'ai comme l'impression que ça ne va pas assez vite, ça ne donne pas les résultats escomptés. Vous pouvez peut-être me dire: non, non, ce n'est pas tout à fait ça. Moi, je ne suis pas dans le milieu, là. Je veux dire, l'impression que j'ai, c'est que ça ne donne pas ce que ça pourrait donner. Parce qu'il y a des coûts à construire des prisons, il y a des coûts à avoir de la surpopulation, parce qu'on fabrique, bien souvent, des criminels, mais sur commande, ce n'est pas compliqué. Quand il y a de la surpopulation, ça cause aussi un autre phénomène. Et il ne faut pas être un grand clerc ou un grand expert pour savoir que, là-dedans – ce n'est peut-être pas quelque chose qui fait un bon programme électoral, là; ce n'est pas électoralement parlant que je parle, là, c'est beaucoup plus au point de vue humanitaire, où on peut chercher des solutions à des problèmes concrets. Si une société comprend mieux ces démarches-là, on pourrait peut-être avoir des économies importantes pour construire des prisons. Et, moi, je pense que ça peut mieux utiliser les ressources du milieu. C'est dans ce sens-là que les questions sont posées là-dedans.

Le Président (M. LeSage): Est-ce que ça complète...

M. Dufour: Si vous me répondez que oui, je vais avoir des réponses, pour quelques-unes, demain, un peu plus tard... Ça me satisfait.

M. Middlemiss: Oui.

Le Président (M. LeSage): Est-ce que ceci complète votre série de questions, M. le député de Jonquière? Alors...

M. Dufour: Ah, non, il y en a d'autres, mais je vous dis qu'on va se résumer. Ça va pour le moment.


Adoption des crédits

Le Président (M. LeSage): En ce qui concerne l'entente qui a eu lieu à l'effet que nous commencions nos travaux à 19 heures et que nous terminions à 21 heures, et compte tenu de l'heure et compte tenu, également, d'une entente entre les parties, est-ce que le programme 1, élément 1, concernant la recherche des causes et des circonstances des décès, est adopté?

M. Dufour: Adopté.

(21 heures)

Le Président (M. LeSage): Alors, je comprends que nous pouvons libérer le coroner en chef.

M. Dufour: Mais mettez-vous à la recherche de ce qu'on cherche.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. LeSage): Alors, compte tenu de l'heure, j'ajourne les travaux de cette commission...

M. Middlemiss: M. le Président, juste...

Le Président (M. LeSage): Oui, M. le ministre.

M. Middlemiss: Ça veut dire que tous les gens qui sont ici, on a laissé la porte ouverte qu'on pourrait revenir demain sur n'importe quel autre sujet, et je ne pourrai pas libérer personne d'autre que le coroner.

Le Président (M. LeSage): C'est ce que j'ai compris, M. le ministre. À moins qu'il y ait une entente pour adopter d'autres programmes et libérer, par le fait même, les personnes responsables.

M. Dufour: Oui, on pourrait peut-être... La présidente des libérations conditionnelles, on pourrait en faire, des questions. On a sept heures à notre disposition; l'an passé, on a eu cinq heures. Il va peut-être falloir qu'on prenne une semaine complète.

M. Middlemiss: Bien, peut-être. C'est parce qu'on est tous soucieux des coûts à l'État.

M. Dufour: On pourrait peut-être la libérer.

M. Middlemiss: Je cherchais, moi, à libérer des gens dont on n'aura pas nécessairement besoin ici demain, sauf que, si on ne le sait pas...

M. Dufour: La présidente des libérations conditionnelles, on vous donne le feu vert, vous pouvez la libérer, si vous y tenez.

(Consultation)

Le Président (M. LeSage): Est-ce que le programme 3, Garde des détenus et réinsertion sociale des délinquants, est adopté? Alors, on me dit que M. Carrier...

M. Middlemiss: Ce serait le programme 3.2?

M. Dufour: Bon, bien, le fait que ça va déposer demain, je voudrais bien voir ce qu'on dépose, s'il y a des éléments.

Le Président (M. LeSage): Écoutez, il n'y a pas d'entente pour adopter d'autres programmes et, compte tenu de l'heure, j'ajourne les travaux de cette commission à demain matin, le mardi 19 avril 1994, à 10 heures.

(Fin de la séance à 21 h 2)

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