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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le vendredi 1 juin 1990 - Vol. 31 N° 16

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits du ministère de la Justice


Journal des débats

 

(Dix heures onze minutes)

Le Président (M. Dauphin): Je déclare la séance de la commission des institutions ouverte. Elle a comme mandat, aujourd'hui, de procéder à l'étude des crédits budgétaires concernant le ministère de la Justice, c'est-à-dire les programmes 1 à 11, pour l'année financière 1990-1991. Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements parmi les membres de la commission?

La Secrétaire: Oui, il y a un remplacement, M. le Président. M. Thérien (Rousseau) est remplacé par M. Poulin (Chauveau).

Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup. Alors, je rappelle aux membres de la commission que nous avons une enveloppe de cinq heures pour faire cette étude, c'est-à-dire de 10 heures à 12 h 30, et de 14 heures à 16 h 30.

J'aimerais d'abord souhaiter la bienvenue au ministre de ia Justice ainsi qu'au sous-ministre en titre, qui est à sa droite, et aux personnes qui l'accompagnent. Alors, je lui demanderais de nous présenter peut-être les autres personnes qui l'accompagnent. Ça risque d'être un peu long, parce que vous êtes très bien accompagné ce matin.

M. Rémillard: Oui.

Le Président (M. Dauphin): Et je vous demanderais de procéder ensuite a vos remarques préliminaires.

Remarques préliminaires M. Gil Rémillard

M. Rémillard: Oui, M. le Président, je vous remercie. Comme vous venez de le mentionner, je suis accompagné, à ma droite, par Me Jacques Chamberland, sous-ministre au ministère de la Justice, et, à ma gauche, par Mme Suzanne Lévesque, qui va être ici dans quelques instants, qui s'est absentée pour quelques instants. J'ai aussi avec moi, M. le Président, beaucoup de fonctionnaires dont, sur la première ligne de feu, les sous-ministres associés, qui sont ici avec moi, et les fonctionnaires responsables des différents programmes. J'aime bien, lorsque arrive le temps des crédits, une fois par année, que les fonction naires, les principaux responsables des programmes de mon ministère puissent m'accompagner parce qu'ils ont travaillé très fort dans une année pour mettre au point, pour administrer le ministère en fonction des politiques que nous définissons, mais aussi pour que les membres de cette commission, tant du parti ministériel que des partis d'opposition, puissent recevoir les réponses les plus complètes à leurs questions. J'ai donc demandé, comme par les années précédentes, à ces fonctionnaires de m'accompagner et je n'hésiterai pas, M. le Président, avec votre permission, bien entendu, et la permission de cette commission, à leur donner la parole pour qu'ils complètent mes réponses et puissent donner les réponses les plus complètes possible.

M. le Président, dans quelques jours, soit lundi prochain 4 juin, nous allons fêter le 25ième anniversaire de la création du ministère de la Justice et, la semaine prochaine, j'aurai l'opportunité de souligner tout ce chemin que nous avons parcouru en matière de justice au Québec dans ces dernières années. Aujourd'hui, M. le Président, je tiens simplement à profiter de l'occasion de l'étude des crédits pour alimenter notre réflexion sur la continuité logique des actions qui ont été posées depuis 25 ans au ministère de la Justice. Ces actions nous permettent, tels des jalons que nous posons, de cheminer davantage vers une société plus juste et plus équitable. Elles nous permettent aujourd'hui d'être fiers du système de justice que nous avons au Québec. Et je tiens, à cet égard, à remercier tout le personnel du ministère de la Justice pour le travail qu'il accomplit avec autant d'ardeur, de disponibilité et de compétence.

Cela fera bientôt deux ans que j'occupe les fonctions de ministre de la Justice et, durant ces deux dernières années, je sais que le ministère de la Justice a dû accomplir une tâche gigantesque pour répondre aux objectifs que nous nous sommes fixés. Au cours de la dernière année, nous avons présenté 11 projets de loi qui ont tous été adoptés par l'Assemblée nationale. Nous avons également posé plusieurs actions administratives d'envergure, afin de répondre davantage et mieux aux besoins des justiciables.

Si nous devions tracer un bilan sommaire de l'activité du ministère de la Justice pour l'exercice financier 1989-1990, il faudrait mentionner la loi sur le Curateur public; l'implantation des centres d'aide aux victimes d'actes "criminels; les modifications à la Loi sur la protection de la jeunesse et l'implantation de la salle de télétémoignages; la loi créant le Tribunal des droits de la personne; la réforme des Cours municipales; les modifications à la Loi sur les tribunaux judiciaires augmentant le nombre de juges au Québec; les suites au rapport du comité chargé d'étudier la rémunération, le Régime de retraite et les autres avantages sociaux des juges de la Cour du Québec, également connu sous le nom de rapport Vincent; la première phase de la mise en application du Code de procédure pénale; la

modification des tarifs consentis aux avocats et aux avocates de la pratique privée qui acceptent des mandats de l'aide juridique; la formation du comité sur l'accessibilité à la justice, le comité Macdonald; la formation d'un comité sur le système de justice en matière criminelle, le comité Guérin, et la formation d'un comité consultatif sur la réforme du Code civil, le comité Baudouin.

Avant de souligner, M. le Président, dans leurs grandes lignes, l'essentiel de ces mesures législatives et administratives, j'aimerais attirer votre attention sur l'évolution des crédits et des ressources humaines du ministère de fa Justice M. le Président, les crédits qui font l'objet d'une étude détaillée aujourd'hui se regroupent sous cinq grands secteurs: le secteur des institutions judiciaires, le secteur des régimes de sécurité du revenu, le secteur des services de soutien, le secteur du contentieux et le secteur socio économique.

Les crédits du ministère de la Justice pour l'exercice financier 1990-1991 s'élèvent à 446 671 200 $, soit une majoration de 34 650 600 $, c'est-à-dire 8,4 % d'augmentation par rapport à ceux de l'année financière précédente.

Cette augmentation s'explique principalement par les facteurs suivants: premièrement, l'accroissement de l'effectif au ministère; deuxièmement, l'application des paramètres d'indexation des dépenses de traitement et de fonctionnement; troisièmement, la révision du traitement et de certaines conditions de travail des juges nommés par le gouvernement du Québec et, quatrièmement, l'ajustement du coût des loyers payables à la Société immobilière du Québec.

L'effectif total autorisé du ministère de la Justice, au 1er avril 1990, s'établit à 5208 postes équivalents à temps complet, soit une augmentation de 228 postes par rapport au 1er avril 1989. L'attribution de ces ressources additionnelles devrait permettre au ministère de mieux faire face aux impératifs de l'administration de la justice. Cette augmentation d'effectif a été rendue possible suite à mon intervention auprès du Conseil du trésor. En novembre 1988, je transmettais un mémoire sur l'administration de la justice au Québec faisant état d'un ajout nécessaire des ressources dès 1989-1990

Ce mémoire constituait l'aboutissement d'une réflexion en profondeur que nous avions entreprise au ministère de la Justice. Au cours des dernières années, le Québec a modifié considérablement son corpus législatif, ajoutant ainsi aux responsabilités du ministère de la Justice. Nous avions dû modlfior nos façons do faire et ajuster nos activités suite à l'adoption des chartes et à la mise en place de diverses politiques axées sur la protection de la personne, par exemple en matière de violence conjugale, et la protection de la jeunesse. Ces modifications ont exigé du ministère qu'il réponde aux nou- veaux besoins sans pour autant que ne lui soient attribuées des ressources humaines en nombre adéquat.

C'est pourquoi, peu de temps après mon arrivée à la tête du ministère, j'ai entrepris de remédier à ce problème d'inadéquation des ressources en demandant un ajout d'effectif substantiel. Mon objectif était d'assurer que l'administration de la justice soit plus efficace et de meilleure qualité. Le 30 janvier dernier, le Conseil du trésor autorisait des effectifs nouveaux de 234 postes permanents, soit 172 en 1990-1991 et 62 en 1991-1992, en plus de 64 postes occasionnels, en 1990-1991. Cette décision du Conseil s'accompagnait d'un ajout de crédits de 6 300 000 $ pour les deux exercices en cause.

La plupart de ces nouveaux postes sont allés au service de la population et des diverses clientèles du ministère. En effet, ces postes ont servi à renflouer des effectifs des greffes des palais de justice, des bureaux des procureurs de la couronne et des services juridiques qui se sont vu accorder, respectivement, 101, 58 et 34 postes. L'apport de ces ressources supplémentaires contribuera à améliorer, dans un avenir rapproché, la situation de certains secteurs jugés les plus critiques, telles les chambres criminelles et pénales de la Cour du Québec à Montréal, Saint-Jérôme et Valleyfield.

D'autres secteurs, tels les services juridiques des divers ministères et organismes et les systèmes informatiques, seront consolidés. Enfin, la Direction générale des affaires législatives, la Direction de la vérification interne, la Direction générale du personnel et de l'administration, la Commission des droits de la personne, la Commission de la protection de la jeunesse et la Direction générale de l'enregistrement se sont vu attribuer des ressources leur permettant de faire face immédiatement aux besoins les plus prioritaires.

Vous me permettrez maintenant, M. le Président, de dresser un bilan sommaire des actions posées par le ministère au cours du dernier exercice et, du même souffle, de vous faire part des actions que nous espérons réaliser d'ici à 12 mois. La majorité de ces mesures, passées, en cours ou futures, s'inscrivent dans le cadre des trois grands thèmes de qualité, d'universalité et d'accessibilité à la justice qui ont guidé mes actions depuis mon arrivée au ministère et qui, dans la mesure du possible, sous-tendent l'ensemble des actions posées par le personnel du ministère de la Justice.

M. le Président, permettez-moi de rappeler que la réforme de la curatelle publique que l'annonçais lors do l'ôtudo dos crédits 1989 1990 s'est concrétisée par l'adoption de la loi sur le Curateur public, en juin 1989, et son entrée en vigueur le 15 avril dernier. Cette loi a fait l'objet d'un large consensus dans la société québécoise et mérite qu'on s'y attarde quelques minutes. Désormais, il n'y aura plus de curatelle

automatique sur simple vue d'un certificat médical. La nouvelle loi prévoit trois régimes de protection de différents niveaux: la curatelle, la tutelle et le conseiller au majeur. Afin de répondre au degré d'inaptitude réel des personnes, tous les cas des personnes sous un régime de protection seront réévalués à intervalles réguliers. Dorénavant, personne ne devrait être oublié par le système, comme ce fut malheureusement le cas dans le passé. D'ailleurs, le Curateur public procède actuellement à une réévaluation de tous les dossiers de curatelle déjà ouverts.

Un autre objectif majeur de cette nouvelle loi consiste à impliquer la famille et les proches. Elle oblige le Curateur public à privilégier la prise en charge d'une personne inapte par la famille ou les proches. Un des aspects les plus novateurs de cette réforme se trouve dans la possibilité pour toute personne majeure de contrôler ses affaires et de prendre soin d'elle et de ses biens en mandatant quelqu'un de son choix si elle devenait inapte. À cet égard, nous entendons mener, dès l'automne 1990, une campagne d'information sur ce mandat afin que tous et chacun, en région comme dans les grands centres urbains, puissent connaître leurs droits et les exercer. L'intégrité, le respect de la personne humaine sont des valeurs fondamentales pour toute société démocratique. Je ne ménagerai aucun effort pour assurer la dignité de chaque citoyen et de chaque citoyenne. Les impacts financiers de cette réforme sont importants, tant pour le Curateur public que pour le ministère de la Justice. Pour le ministère de la Justice en particulier, les sommes nécessaires pour l'application de cette réforme sont, pour l'année 1990-1991, de près de 2 000 000 $.

Outre les personnes âgées, qui sont au centre de notre préoccupation dans le dossier de la curatelle publique, deux autres secteurs de la population québécoise sont également vulnérables et le ministère que je dirige a l'intention, comme il l'a fait dans le dernier exercice, de continuer à s'en préoccuper de façon particulière. Je veux parler des victimes d'actes criminels et des jeunes.

Le Bureau d'aide aux victimes d'actes criminels continue son travail de coordination des dossiers de violence conjugale et familiale et fournit une aide financière et technique aux centres d'aide aux victimes d'actes criminels. Ces centres d'aide, ai-je besoin de le rappeler, ont pour but d'accueillir, de réconforter et d'aider les victimes d'actes criminels. Ils leur fournissent de l'information de base sur le processus judiciaire, leurs droits et leurs recours. Des bénévoles accompagnent les victimes d'actes criminels dans leurs démarches auprès des organismes privés et publics qui peuvent leur venir en aide. Lors de l'inauguration de plusieurs de ces centres, j'ai eu le privilège de rencontrer personnellement les responsables et intervenants bénévoles de plusieurs centres d'aide et je dois vous dire, M. le Président, que chaque fois je ressentais beaucoup d'émotion face à tant de compréhension, de dévouement et de sollicitude envers ceux et celles qui sont affligés par de telles épreuves. Au cours de l'exercice 1989-1990, un budget global de 277 000 $ a été distribué pour l'implantation et le développement de sept centres d'aide dans les régions de Chicoutimi, Hull, Longueuil, Montréal, Québec, Rimouski et Trois-Rivières.

Avec la Loi sur la protection de la jeunesse, d'autre part, nous garantissons aux jeunes les droits et même le privilège d'être traités différemment parce que ce sont des enfants. Il arrive, cependant, des situations malheureuses où leur développement risque d'être compromis. C'est le cas, notamment, des enfants victimes d'abus physiques. C'est pour cette raison que des modifications ont été apportées à la loi dans le domaine du témoignage des jeunes en matière criminelle et en matière civile. Je rappelle sommairement, M. le Président, qu'en matière criminelle le ministère, en collaboration avec les . ministères de la Santé et des Services sociaux et de la Sécurité publique, a posé des gestes concrets permettant de soustraire les enfants à l'obligation de témoigner en salle d'audience. Il est désormais possible de mettre en preuve l'enregistrement magnétoscopique du témoignage d'un enfant ou encore de permettre à cet enfant de témoigner par le médium de la télévision en circuit fermé. J'ai eu, d'ailleurs, le plaisir d'inaugurer une première salle de télétémoignage, il y a quelque temps, à Montréal, et d'en rappeler alors tous les bienfaits. Ce même système mobile est disponible à travers le Québec, dans toutes les régions du Québec, pour aider donc au témoignage des enfants abusés.

En matière civile, les récents amendements que nous avons apportés à la Loi sur la protection de la jeunesse permettent au juge d'entendre l'enfant seul, hors de la présence des parties. Ils permettent également au juge de dispenser un enfant de témoigner et, dans le cas d'un enfant trop jeune, de permettre que soit rapportée devant la Cour la déclaration reçue de celui-ci. (10 h 30)

Je tiens à informer les membres de cette commission que la situation de certaines Chambres de la jeunesse me préoccupe énormément. Tous les efforts nécessaires sont consacrés pour régler, en particulier, le problème des Chambres de la jeunesse de Saint-Jérôme, de Valleyfield et de Montréal. J'ai eu l'occasion de visiter personnellement certaines de ces Chambres de la jeunesse et vous pouvez être assuré, M. le Président, que nous sommes à mettre en place tous les éléments nécessaires pour trouver des solutions aux problèmes réels qui se posent pour que nos jeunes puissent avoir une justice de la meilleure qualité possible et la plus accessible

possible. Si je prends le cas, par exemple, de la Chambre de la jeunesse à Montréal, nous avons l'intention d'y aménager de cinq à dix nouvelles salles d'entrevue.

La justice, M. le Président, n'est pas équitable si elle n'est pas accessible à tous Au Québec, nous pouvons nous référer aux principes conférés par nos chartes. Il faut cependant que tous les citoyens et citoyennes puissent revendiquer le respect de leurs droits fondamentaux. La loi instituant le Tribunal des droits de la per sonne, sanctionnée le 22 juin 1989, répond essentiellement à cet objectif de pouvoir non seulement avoir un droit, mais de pouvoir aussi exercer ce droit, de le faire sanctionner.

Le Tribunal des droits de la personne a été institué, M. le Président, pour permettre aux citoyens d'avoir véritablement recours à un tribunal spécialisé et particulièrement attentif aux problèmes de discrimination et d'exploitation, notamment dans les domaines du travail, du logement et de l'accès aux services, domaines dans lesquels sont concentrées les plaintes portées à la Commission des droits de la per sonne et qui touchent les citoyens dans leur vie quotidienne.

Il convient de souligner un élément important de cette loi: le coût des procédures présentées au Tribunal des droits par la Commission sera défrayé par l'État. C'est là un élément particulièrement important lorsque nous parlons d'accessibilité à la justice, surtout lorsque nous nous référons au respect des droits fondamen taux, ces droits qui sont le fondement même de notre société démocratique. Le tribunal, présidé par un juge de la Cour du Québec, n'est pas encore opérationnel. Il fallait préalablement élaborer un règlement sur fa nomination des assesseurs qui assisteront le président du tribunal dans sa tâche. Et, dernièrement, j'ai participé à la commission parlementaire à qui a été soumise la procédure de sélection des assesseurs. Le rapport de la commission des institutions a maintenant été transmis à l'Assemblée nationale. Parallèlement, M. le Président, un concours a été ouvert pour la nomination d'un nouveau juge de la Cour du Québec qui pourrait assumer, après consultation du juge en chef de la Cour du Québec, les fonctions de président du Tribunal des droits de la personne. Des que ces démarches auront été complétées, y compris les concours menant au choix des personnes qui apparaîtront sur les listes d'assesseurs et d'arbitres qu'établira le gouvernement, nous pourrons inaugurer le nouveau Tribunal des droits de la personne.

Les cours municipales, M le Président, constituent une partie importante de nos institu tions judiciaires. Comme leur structure et leur développement dataient du début du siècle, il était urgent de procéder à une réforme majeure pour corriger les sérieuses lacunes observées au fil des ans. Avec la Loi sur les cours municipales, sanctionnée le 22 juin 1989, toutes les municipalités locales du Québec auront le pouvoir d'établir une cour municipale sur leur territoire. En plus d'intégrer les règles sur le statut des juges municipaux, la loi prévoit également des règles relatives à la compétence des cours, à leur fonctionnement, à la nomination et aux fonctions de leurs officiers ainsi qu'à leur organisation matérielle. Elle prévoit également que la cour devra siéger, dans une proportion d'au moins une séance sur deux, après 18 heures. Et pour moi, M. le Président, c'est un aspect important que dans ces cours de justice, ces Cours municipales qui, très souvent s'adressent aux citoyens qui ont à faire avec leur vie en société dans leur municipalité, les citoyens ne soient pas pénalisés s'ils veulent se présenter devant la cour pour faire valoir leurs droits durant des heures de travail, mais qu'ils puissent avoir accès à cette cour à l'extérieur de la période qu'on réserve normalement au travail dans la journée.

La loi assure aussi, M. le Président, une plus grande harmonisation du fonctionnement des cours au niveau de la procédure et des normes qui sont applicables à leur maintien. Afin de procéder à l'implantation de cette loi, un comité conjoint du ministère des Affaires municipales et du ministère de la Justice a été créé et poursuit ses travaux. Les règlements prévus par la loi sont virtuellement prêts et un processus de consultation avec tous les milieux intéressés est en élaboration. La mise en vigueur de cette loi est, pour le moment, en attente. Nous attendons l'issue des procédures judiciaires concernant les Cours municipales.

Au cours du dernier exercice financier, la Loi sur les tribunaux judiciaires a été modifiée de manière à permettre l'ajout de trois juges à la Cour d'appel, de trois juges à la Cour supérieure et la nomination de six nouveaux juges à la Cour du Québec. Après consultation auprès de l'honorable juge en chef Albert Gobeil, la répartition des nouveaux postes à la Cour du Québec a été faite de la façon suivante, trois juges ont été nommés à la Chambre criminelle à Montréal; un juge a été nommé à la Chambre criminelle à Saint-Jérôme; un juge a été nommé à la Chambre de la jeunesse à Valleyfield et un juge sera bientôt nommé à la Chambre de la jeunesse à Montréal. Ces nominations s'inscrivent dans nos démarches visant à fournir à l'appareil judiciaire les ressources nécessaires à l'accomplissement intégral de sa mission.

À ces nominations s'ajoute la création de huit postes de procureurs, de six postes de secrétaires de juges, de six postes de secrétaires judiciaires et de deux postes de secrétaires de procureurs et de deux postes de huissiers-messagers. Cette rubrique, à elle seule, M. le Président, génère des dépenses de l'ordre de 1 459 900 $, dont 1 283 200 $ sont récurrents.

Faisant suite au rapport du comité d'étude chargé d'étudier la rémunération, le régime de retraite et les autres avantages sociaux des

membres de la Cour du Québec, les magistrats de la Cour du Québec se sont vu attribuer une augmentation de leur rémunération. Par un décret du 4 avril 1990, le salaire des juges a été ajusté à la hausse pour être fixé à un niveau qui situe leur rémunération parmi les plus élevées des juges de nomination provinciale au Canada. Je tiens, de plus, à ajouter, M. le Président, que c'est bientôt que les membres de la commission des institutions pourront étudier les modifications à apporter incessamment au régime de retraite de ces juges dans le cadre du projet de loi que j'ai déposé à l'Assemblée nationale, le 15 mai dernier. Ces modifications que je souhaite apporter au régime de retraite des juges de nomination provinciale s'inscrivent dans ma démarche visant à perpétuer la qualité de notre justice.

La dignité de la personne humaine, le respect de ses droits et libertés fondamentales seront beaucoup mieux servis par la mise en vigueur éventuelle de la majorité des articles du Code de procédure pénale rendue possible par l'adoption, en avril dernier, d'une loi d'application. Cette loi d'application, qui compte au-delà de 1258 articles, permettra aux citoyennes et aux citoyens de bénéficier le plus rapidement possible des nombreuses dispositions du Code de procédure pénale qui leur sont favorables. Il faut se rappeler que le Code de procédure pénale retire les dispositions prévoyant l'emprisonnement pour défaut de paiement d'amende et qu'il élimine, d'ailleurs, la plupart des peines d'emprisonnement, sauf dans les cas où le recours ultime de cette sanction serait justifié, notamment en certaines matières de fiscalité, d'environnement et de conservation de la faune. Le principe qui nous guide est que l'emprisonnement est une mesure pour protéger la société beaucoup plus que pour punir. Lorsqu'on se réfère au coût de l'emprisonnement pour la société - en moyenne, 85 $ par jour par prisonnier - ce n'est certainement pas la meilleure façon que la société peut utiliser pour punir quelqu'un qui a enfreint les règles de notre vie en société. D'autres mesures seront de plus en plus développées pour que ces personnes, qui sont coupables de conduite déficiente quant aux règles qui gouvernent notre société, puissent payer leur dette en étant profitables à leur société. C'est donc dans des cas d'exception, en ce qui regarde le Code de procédure pénale du Québec, que nous nous référons à l'emprisonnement.

Si la justice doit être de qualité et universelle, elle doit être également accessible à tous et c'est dans cet esprit, M. le Président, que deux dossiers m'ont particulièrement préoccupé au cours de la dernière année. Il s'agit des seuils d'admissibilité à l'aide juridique et des tarifs pour les avocats de pratique privée qui acceptent des mandats de l'aide juridique. Ces dossiers, complexes en soi, le sont doublement en ces périodes d'intenses restrictions budgétaires. Des efforts considérables ont été mis dans cos dossiers. Leur conclusion, il me fait plaisir de l'annoncer, est imminente. Effectivement, dans le cas des avocats qui acceptent des mandats de l'aide juridique, il me fait particulièrement plaisir d'annoncer que nous sommes sur le point de ratifier l'entente de principe intervenue entre le Barreau et le ministère. Il s'agit d'une question de disponibilité des intervenants.

Cette entente est le fruit d'intenses négociations que j'ai eues avec le président du Conseil du trésor et le Bâtonnier du Québec, Me Gauthier. Elle tient compte à la fois de la nécessité d'augmenter certains tarifs pour assurer une rémunération plus adéquate des avocats et de la capacité de payer des Québécois. Dans le cas de la hausse des seuils d'admissibilité, nos démarches se poursuivent auprès du Conseil du trésor et du Conseil exécutif. Ces démarches ont pour but d'élaborer une solution intérimaire qui permettrait de maintenir l'admissibilité à l'aide juridique des personnes âgées, en attendant que soit réévalué tout le système d'aide juridique, notamment, bien sûr, à la lumière du rapport du comité Macdonald sur l'accessibilité à la justice, rapport qui devrait me parvenir dans. sa forme finale l'automne prochain.

Quant à la médiation aux petites créances, M. le Président, le projet-pilote instauré à Montréal et à Québec s'est continué en 1989 et les médiateurs ont traité au-delà de 2500 dossiers. Un règlement est intervenu dans 1800 de ces cas, pour un taux de réussite de 75 %.

L'arbitrage. Toujours à la recherche de moyens alternatifs d'accès à la justice, nous sommes à élaborer une politique d'arbitrage en milieu gouvernemental, que j'aurai le plaisir de soumettre à mes collègues du Conseil exécutif d'ici quelques mois. Je fais référence au Centre d'arbitrage commercial national et international du Québec qui a son siège social ici à Québec et qui, sous la direction de Me Antaki, fait un travail remarquable pour développer l'arbitrage comme moyen de solution des litiges dans le domaine commercial.

Ceci m'amène, M. le Président, à faire le point sur l'état des travaux menés par le comité sur l'accessibilité à la justice, lesquels devraient me permettre de proposer éventuellement de nouvelles mesures permettant aux gens de la classe moyenne d'avoir accès à des services juridiques. À ce sujet, il me fait plaisir de vous annoncer que ce groupe, présidé par Me Roderick Macdonald et constitué en juilfet dernier, a eu de nombreuses réunions pendant la dernière année. Dans le cadre de ses travaux, le groupe de travail a procédé à diverses consultations auprès de la population en général et auprès de groupes ou associations intéressés à l'un ou l'autre des volets de son mandat. Suite à une consultation publique, le groupe de travail a reçu 35 communications écrites. Il a tenu des audiences à Québec et à Montréal, au cours desquelles des personnes et groupes intéressés ont eu

l'occasion de préciser et d'ajouter à leur mémoire. (10 h 45)

Parallèlement à cette consultation, M. le Président, des rencontres ont eu lieu avec divers intervenants, dont les juges en chef des différentes cours de justice et également avec des membres ou représentants des communautés ethnoculturelles. Le groupe de travail a fourni, en avril dernier, un rapport d'étape et, il y a quelques jours à peine, un rapport intérimaire portant sur l'aide juridique au Québec Le rapport final de ce comité est attendu d'ici à la fin de l'année 1990.

M. le Président, permettez-moi aussi de rappeler la constitution d'un autre groupe de travail, présidé celui-ci par l'honorable juge Guy Guérin de la Cour du Québec. Ce groupe de travail a pour mandat d'étudier certains aspects de l'administration de la justice en matière criminelle, notamment en ce qui concerne les relations entre les forces policières, les procureurs de la couronne et les médias, les recours aux témoins délateurs dans la poursuite de certains crimes et, enfin, le rôle des divers intervenants dans le processus de négociation et de dépôt de plaidoyer de culpabilité à des infractions réduites. Ce groupe de travail a commencé ses travaux et devrait me faire rapport d'ici à la fin de 1990.

M. le Président, j'aimerais vous faire part de certains projets que j'entends prioriser au cours des prochains mois. Je pense ici à la réforme du Code civil, à la réforme de la justice administrative et aux suites à donner au rapport du groupe de travail portant sur la protection de la vie privée.

Je me. permets donc de faire le point sur les travaux de la réforme du Code civil. Cette réforme suppose, vous le savez déjà, l'adoption d'un Code civil de plus de 3000 articles, sans compter une loi d'application d'au-delà de 1000 articles.

Une version intégrée du projet a été étudiée par le comité de coordination et une équipe de juristes affectée à la réforme du Code civil. Une nouvelle version devrait être terminée et révisée sous peu. Il me fait d'ailleurs plaisir de souligner la collaboration particulière de l'Office de la langue française dont les compétences dans le domaine linguistique sont largement mises à contribution dans la révision du Code.

Un mémoire portant sur les grands enjeux de la réforme et sur les orientations encore requises pour compléter le travail amorcé m'a été remis. Ce mémoire a été étudié par le comité consultatif présidé par l'honorable juge Jean Louis Baudouin de la Cour d'appel du Québec, lequel m'a fait rapport sur les orientations à privilégier.

Les dernières orientations à donner à la réforme sont actuellement en phase finale de discussion. Dès qu'elles seront arrêtées, le dossier législatif sera complété. L'objectif que je me suis fixé est de présenter le projet de Code civil du Québec à l'Assemblée nationale au cours de l'année. L'ampleur et l'importance de la réforme du Code et la nécessité que cette réforme soit acceptée non seulement par la communauté juridique, mais également par le plus grand nombre d'intéressés dans notre société, requièrent qu'on lui apporte un soin extrême.

J'entends également soumettre à mes collègues du Conseil des ministres certaines propositions en vue du dépôt, au cours de l'année 1990, d'un projet dé loi portant sur la réforme de la justice administrative. Il s'agit ici encore d'un sujet qui au cours des 20 dernières années, a fait couler beaucoup d'encre. Je pense au rapport du groupe de travail sur les tribunaux administratifs qui a été produit en 1970 sous la direction de Me René Dussault, aujourd'hui à la Cour d'appel, au recueil de Me André Gélinas, qui a été publié en 1975, sous le titre "Les organismes autonomes et centraux de l'administration québécoise" ainsi que, plus dernièrement, au "Rapport du groupe de travail sur les tribunaux administratifs", de 1987, rapport qui est aussi connu sous le nom de rapport Ouellette.

Ces rapports nous ont rappelé l'importance du rôle que jouent dans notre système administratif et judiciaire les organismes administratifs exerçant des fonctions de nature quasi judiciaire. Ils ont également souligné lé rôle de ces organismes auprès des justiciables et les avantages qu'ils leur procurent. Ils ont, de plus, suggéré la révision de l'institution dans son ensemble, afin d'en clarifier les limites, tout en proposant, selon révolution de la société, diverses modifications susceptibles de favoriser l'exercice des droits. L'étude de ces rapports, les changements survenus depuis par l'adoption de nouvelles règles de droit, les nouveaux courants jurispru-dentiels, de même que les exigences que demande l'exercice des droits des citoyens auprès de ces instances m'ont convaincu de l'importance de ce dossier Et c'est pourquoi j'entends consacrer des efforts à en favoriser le dénouement.

Parmi les autres préoccupations auxquelles j'entends m'arrêter en matière de protection des droits individuels s'inscrit la tenue prochaine d'une commission parlementaire portant sur le contenu du rapport intitulé "Vie privée: zone à accès restreint". Ce rapport, qui s'intéresse aux progrès de la technologie informatique en regard du stockage de données sur les personnes et l'usage qui en est fait, contient des recommandations destinées à compléter les garanties fondamentales prévues dans la Charte des droits et le régime juridique de base prévu au nouveau Code civil.

Voilà, M. le Président, présentés tout à fait sommairement les principaux dossiers sur lesquels le ministère de la Justice s'est attardé dans l'exercice qui vient de se terminer. C'est là un

aperçu de ce sur quoi nous entendons oeuvrer au cours du prochain exercice.

M. le Président, en terminant, je me permets d'offrir mes remerciements à l'équipe que j'ai le plaisir et l'honneur de diriger a la Justice. Cette équipe dont les membres se retrouvent dans toutes les régions du Québec, de Hull à Chibougamau, de Val-d'Or à Havre-Aubert, a réussi, malgré le contexte budgétaire difficile, à continuer l'exercice de promotion des grandes valeurs de justice auxquelles les Québécois et les Québécoises attachent tant d'importance. Je vous remercie, M. lé Président.

Le Président (M. Dauphin): Alors, merci beaucoup, M. le ministre de la Justice, pour vos remarques préliminaires. Si vous me le permettez, juste avant de permettre à Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve de faire ses remarques préliminaires, je vais vous présenter les membres de la commission, surtout pour le bénéfice des haut fonctionnaires qui vous accompagnent. Tout d'abord, évidemment, à ma gauche, la porte-parole de l'Opposition officielle en matière de justice, Mme Harel, députée de Hochelaga-Maisonneuve. Ensuite, nous avons Mme Jocelyne Caron, députée de Terrebonne, qui est de la cuvée 1989, qui est à son premier mandat; à ma droite, M. Albert Houde, député de Berthier; ensuite, M. Williams, député de Nelligan. On poursuit avec M. Kehoe, député de Chapleau; M. Hamel, député de Sherbrooke; et M. Larouche, député d'Anjou; à ma gauche, la secrétaire de la commission, Me Lucie Giguère, et Mme Beaure-gard qui est collaboratrice de la commission. Alors, merci. Je vais demander à Mme Harel de présenter la recherchiste qui l'accompagne.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. Je vous présente immédiatement Me Fernande Rousseau qui est à la critique de l'Opposition en matière de justice ce que vous êtes au ministre de la Justice, ce matin. Je crois comprendre qu'il y a peu de femmes parmi vous, malgré tout.

M. le Président, je veux d'abord vous indiquer que c'est avec mon consentement tacite que vous avez permis au ministre de dépasser le temps qui lui était alloué pour des remarques préliminaires. Je veux simplement que vous en teniez compte dans l'évaluation du temps qui me sera imparti ultérieurement lors de l'échange avec le ministre pour l'étude de nos crédits. Je mets ça au compte, dans la banque, dans la réserve du temps qui me sera alloué d'ici à la fin de la journée.

D'abord, vous allez me permettre de saluer le ministre de la Justice et de souhaiter également la bienvenue au sous-ministre de même qu'à tous les fonctionnaires et conseillers qui les accompagnent. C'est la première fois que j'entre- prends l'étude des crédits alloués au ministère de la Justice. Je veux en profiter, avant que ne Soft largement entamé le second mandat du présent gouvernement et que la volonté de réforme ne bascule irrémédiablement dans l'immobilité électorale, pour rappeler au ministre l'urgence d'agir maintenant pour raffermir l'administration de la justice au Québec. Oui, je dis bien raffermir l'administration de la justice qui a été minée par la sous-budgétisation qui est toujours existante, malgré le modeste plan de redressement qui a été obtenu et qui est différent, dois-je comprendre, de celui qui était réclamé. Affaiblie également par l'inaction d'un gouvernement qui préfère attendre l'épreuve de force pour réagir, même en matière de justice.

M. le Président, les réformes majeures qui ont été réalisées depuis deux ans et dont le ministre nous a parlé ont d'abord été programmées par son prédécesseur ou amorcées par la commission parlementaire des institutions elle-même, que ce soit la réforme de la curatelle publique, ou encore la création du Tribunal des droits de la personne, ou l'ouverture des centres d'aide aux victimes d'actes criminels. Le ministre a ainsi pu compléter la réforme ou le travail qui avait été amorcé par d'autres. Maintenant, le ministre doit s'engager résolument à agir. Je constate que depuis son arrivée à la direction du ministère, il philosophe avec brio sur les principes qui doivent guider des solutions qui n'arrivent pas. Il me semble que son incapacité à introduire des correctifs simples et pratiques discrédite les grands principes qu'il énonce avec éloquence. Le mieux est l'ennemi du bien, particulièrement en matière de justice, et l'engouement du ministre pour les solutions globales qui touchent, et je cite, "tous les aspects de la question dans une perspective la plus complète possible" ne trompe plus personne. L'opération a surtout consisté jusqu'à maintenant à faire gagner du temps à son gouvernement en le faisant perdre au système de la justice au Québec.

M. le Président, le procédé pour éviter de procéder est à peu près le même dans bien des dossiers, que ce soit en matière d'accessibilité à la justice, de médiation familiale, de réforme des tribunaux administratifs ou de protection des renseignements personnels. L'exercice consiste à remettre à plus tard en plaidant la recherché d'une solution toujours meilleure.

Mon prédécesseur au poste que j'occupe maintenant, l'ancien député de Taillon, avait l'habitude de dire que si le même manque de ressources existait dans des secteurs plus visibles qu'à l'intérieur du secteur judiciaire, comme ceux de la santé et ou de l'éducation, par exemple, l'opinion publique aurait été secouée par les manchettes des médias, mais lorsque juges, procureurs de la couronne, avocats de l'aide juridique, avocats de pratique privée, avocats et notaires de la fonction publique, à peu près tous

les Intervenants du milieu de la justice en sont rendus, en même temps, à exprimer discrètement, mais publiquement que la justice est en train d'étouffer, c'est là un signal d'alarme qui devrait pourtant préoccuper le gouvernement, même si la manifestation n'en est pas spectaculaire.

Si vous me permettez, M. le Président, une comparaison que le ministre, pédagogue averti, va certainement bien comprendre à ce moment-ci de l'année, c'est comme la date de remise des travaux d'un étudiant reportée trop souvent et dépassée depuis longtemps. L'élève brillant a beau plaider qu'il travaille sur une solution parfaite, son professeur est en droit d'exiger, sous peine d'un zéro, de l'évaluer immédiatement.

En matière d'admissibilité à la justice, M. le ministre, agissez maintenant, ne laissez plus la situation s'aggraver au détriment de notre conception de la justice elle-même. Par votre inaction, ne laissez pas bafouer la loi sur les services juridiques conçue en 1972 pour offrir la gratuité des services juridiques à toute personne se situant au seuil de la pauvreté, pas seulement aux personnes âgées. Ne négligez pas les "working poors", ceux pour lesquels la loi avait d'abord été pensée, les pauvres qui travaillent et qui devraient, eux aussi, en bénéficier, et qui en sont maintenant les principaux exclus.

Ai-je besoin de vous rappeler ce que la Commission des services juridiques et le Protecteur du citoyen ont dénoncé véhémentement depuis quelques années maintenant, le fait que même les personnes les plus pauvres du Québec ne sont plus admissibles à l'aide juridique? (11 heures)

M. le Président, laissez-moi rappeler aux membres de la commission, depuis la réforme de l'aide sociale en vigueur depuis le 1er août 1989, l'exclusion de 140 000 Québécoises et Québécois faisant partie d'une famille d'au moins deux personnes qui se prévalent de certaines allocations spéciales de participation à des programmes prévus par la loi. Et permettez-moi également de rappeler l'exclusion, depuis le 1er octobre 1988, des personnes seules qui travaillent 37 heures par semaine au salaire minimum et, depuis le 1er octobre 1989, l'exclusion d'une famille de deux personnes qui gagne plus de 210 $ par semaine en travaillant 43 heures au salaire minimum.

Le ministre nous dit, ce matin, travailler à des modifications à être incessamment apportées quant à l'accessibilité des personnes âgées à l'aide juridique. Qu'il me soit permis, à cet effet, de rappeler que 64 000 personnes âgées, qui ont bénéficié de l'indexation de leur pension de vieillesse et de la sécurité du revenu, sont maintenant exclues du service de l'aide juridique.

La Commission des services juridiques, dans son rapport de 1988, qui date maintenant d'il y a deux ans, constatait qu'en dépit des recommanda tions formulées un an prùcédommonl ot du l'inflation des propos du ministre, les critères étaient pourtant demeurés les mêmes. Les constatations de la Commission des services juridiques témoignaient d'une impatience de plus en plus grandissante. Je veux reprendre un extrait de ce qu'elle mettait en évidence: "Nous souhaitons, exprime la Commission, que les nombreuses déclarations du ministre de la Justice, tant à l'Assemblée nationale que dans les médias, favorisant un ajustement de la norme d'admissibilité, trouvent enfin leur aboutissement. On doit songer plutôt que cette hausse des critères d'admissibilité, qui tarde tant à venir pour les pauvres, ne ferait que compenser en partie les subventions que l'État accorde régulièrement aux riches individus et aux corporations qui, on le sait, sont les plus grands utilisateurs de services juridiques. Tout l'appareil judiciaire, ajoute la Commission des services juridiques, juges, personnel, palais de justice, est mis à leur disposition presque gratuitement. Les timbres judiciaires, d'un montant excédant rarement 200 $ par cause - c'était en 1988 - représentent un déboursé infime comparé aux dépenses de la cour. De plus, tes frais juridiques étant déductibles aux fins d'impôt, l'État se prive d'autant de revenus: c'est une autre forme de subvention aux riches. De plus, ces privilèges sont perpétuels et acquis, sans nécessité d'aucune mobilisation de l'opinion publique." Et la Commission évaluait, en 1988, qu'il en coûterait 4 000 000 $, dont 48 % remboursés par le gouvernement fédéral, pour hausser la norme d'admissibilité des personnes au seuil ou en dessous du seuil de pauvreté dans notre société.

Je dis au ministre qu'il avait des solutions il y a un an, solutions qu'il a abondamment commentées, au cours de dîners officiels et qui ont été rapportées par les médias d'information. Ces solutions, appliquez-les, maintenant. Qu'est-ce qui vous empêche d'offrir tout de suite aux Québécoises et Québécois un meilleur système de médiation en matière familiale, à la grandeur du Québec? Pas besoin d'attendre un rapport de commission. Les tergiversations entre le ministère de la Justice et celui de la Santé et des Services sociaux, qui retardent le développement des services de médiation familiale et qui, pendant ce temps, gèlent les fonds qui seraient susceptibles d'y être consacrés sont totalement, je dirais inacceptables, pour ne pas dire scandaleuses, M. le Président.

Qu'est-ce qui retient le ministre de la Justice de maintenir les barèmes d'accessibilité à l'aide juridique au moins au niveau des seuils de pauvreté? Pourquoi ne pas procéder immédiatement à la hausse du maximum de 1000 $ fixé par la Cour des petites créances et pourquoi ne pas mettre fin à ce privilège douteux d'être, avec Terre-Neuve, la seule province à maintenir un si faible montant maximum? Pourquoi, si ce n'est l'insensibilité que le ministre connaît bien certainomonl du Conseil du trésor ot de son gouvernement à l'égard de l'appareil judiciaire et

de l'administration dé la justice? il faudrait mettre un peu plus d'argent. Et la meilleure manière de sauver les apparences, avec une certaine élégance j'en conviens, consiste, évidemment, à confier à un comité de personnalités le soin de réfléchir plus globalement sur la question.

En prenant connaissance des propos du ministre, M. le Président, je me rends compte que l'étapisme", malheureusement, n'est pas dans les solutions, mais dans les rapports des comités. D'abord annoncé par voie de communiqué de presse pour la fin de l'année 1989, le rapport du comité sur l'accessibilité à la justice, le ministre se félicite maintenant, ce matin, d'un rapport intermédiaire qui lui aurait été fourni il y a quelques jours et nous annonce le rapport final, sur cette question, d'ici à la fin de l'année 1990. Malheureusement, l'"étapisme" est dans les rapports des comités qu'il a mis sur pied. Il vaudrait mieux qu'il agisse par "étapisme" en appliquant des solutions intermédiaires qu'il connaît maintenant et qu'il remette à plus tard les solutions parfaites qu'il envisage. Surtout, M. le Président, qu'en prenant connaissance du discours du ministre on se rend compte que si le comité sur l'accessibilité à la justice a tenu tant de réunions, ça devait être en l'absence de son président, certainement ou, en tout cas, il n'a pas dû être là très souvent, étant donné que Me Roderick Macdonald était en congé sabbatique en Australie depuis le mois de janvier dernier et qu'il devrait y être jusqu'en juillet prochain.

La lenteur à agir est peu de chose, en comparaison avec la négligence à remplacer les membres des commissions dont les mandats sont expirés. La Commission des services juridiques, par exemple, où les mandats des 12 commissaires sont expirés depuis des mois, n'a pu tenir ses trois dernières réunions, faute de quorum. Sans parler des membres de la Commission des droits de la personne, où le mandat de la majorité est expiré et où certains siègent sans renouvellement de mandat depuis 1987. Qu'est-ce qui peut, d'ailleurs, justifier le retard à nommer le président du nouveau Tribunal des droits de la personne, créé il y a maintenant un an?

M. le Président, permettez-moi également d'indiquer notre inquiétude d'entendre ce matin le ministre parler de soumettre à ses collègues du Conseil des ministres un éventuel projet de loi qu'il souhaiterait pouvoir déposer sur la réforme de la justice administrative dans le . courant de l'année 1990, en rappelant que, dans le discours inaugural du premier ministre en mars 1988, il était déjà annoncé l'intention gouvernementale de rationaliser les tribunaux adminis-tratrifs et que le ministère parlait d'un projet de loi pour l'automne 1988. Alors, soumettre à ses collègues un projet de loi en espérant le déposer en 1990, il y a là, évidemment, un délai sur lequel le ministre va certainement avoir à s'expliquer dans le courant de la journée.

On connaît, M. le Président, l'importance de ces organismes qui ont pour mandat de trancher les litiges opposant le gouvernement et les administrés. Et, compte tenu du caractère arbitraire de certaines nominations spectaculaires qui sont faites présentement - je fais évidemment allusion à la Caisse de dépôt et placement - il faut savoir que ces nominations, selon le bon vouloir du gouvernement, dans ces tribunaux administratifs - évidemment, le bon vouloir du gouvernement signifiant le bureau du premier ministre - sans critères déterminés, souvent en récompense pour services rendus au parti, génèrent un sentiment d'urgence quant à la nécessité de réformer les principes qui doivent guider les règles du jeu qui doivent être à la base des modes de nomination, des conditions de travail, du renouvellement des mandats et du salaire des membres de ces organismes, de ces tribunaux administratifs.

M. le Président, qu'il me soit également permis de m'inquiéter que le ministre de la Justice qui avait, à la fin de 1988, promis solennellement la mise en vigueur du chapitre du Code civil sur le respect de la réputation et de la vie privée et l'extension au secteur privé des principes de la loi sur l'accès et qui avait pris cet engagement solennel à l'occasion d'un dîner bénéfice commémorant le 40e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme et le 25e anniversaire de la Ligue des droits et libertés... Laissez-moi m'inquiéter que le ministre qui avait pris cet engagement solennel, qui lui a été rappelé récemment d'ailleurs par le maire de Montréal qui lui écrivait, en date du 15 mai dernier, son inquiétude quant à l'absence de règles claires de protection des renseignements personnels dans les lois actuelles et qui sollicitait son intervention pour que les mesures législatives déjà annoncées par le gouvernement en cette matière, puissent entrer en vigueur le plus tôt possible... Laissez-moi vous dire notre inquiétude qu'après avoir, à la fin de 1988, promis solennellement pour novembre 1989 une telle législation le ministre nous annonce tout au plus une commission parlementaire sur la question.

En terminant, M. le Président, je voudrais faire miennes les déclarations que le député de Taillon a eues à plusieurs reprises à l'occasion soit des travaux de cette commission parlementaire des institutions ou à l'extérieur de ce Parlement, quand il faisait valoir la nécessité non pas simplement d'ajouter de l'argent, mais également d'introduire un dialogue inexistant entre les intervenants de l'appareil judiciaire et de l'administration de la justice au Québec. Le député de Taillon souhaitait un sommet sur la justice permettant à tout le monde de mettre sur la table des solutions aux problèmes qu'il vivait. De temps en temps, dans une société, rappelait le député de Taillon, le moment vient de faire le point dans un domaine. C'est l'heure de la

justice au Québec. À peu près tous les groupes d'intervenants du milieu de la justice sont prêts à s'asseoir, à se parler pour résoudre les problèmes qui se posent: surcharge de travail, délais qui s'allongent, coûts des systèmes. Il faut dialoguer, réunir tous les intervenants dans le cadre d'un sommet sur la justice. Là-dessus, le ministère et le ministre de la Justice doivent exercer un leadership légitime. C'est ce que je souhaite, M. le Président. Je vous remercie.

Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Est-ce que vous voulez procéder aux programmes tout de suite, ou peut-être une courte réplique. M. le ministre de la Justice.

M. Gil Rémillard (réplique)

M. Rémillard: Pas vraiment une réplique, M. le Président, mais simplement pour dire que Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve vient de terminer ses propos en se référant à des propos de l'ancien député de Taillon, Me Claudo Filion Je dois dire que Me Filion a été un critique de l'Opposition qui a beaucoup contribué à nous aider à ce qu'on puisse travailler ensemble et améliorer l'administration de la justice au Québec. J'en suis très reconnaissant. A cette époque-ci l'an dernier, entre autres, nous avions 11 lois en marche. On travaillait jusqu'à 1 heure le matin, 2 heures le matin pour faire des lois. Je dois dire que, oui, ça me touche d'entendre la députée de Hochelaga-Maisonneuve nous dire qu'on ne fait rien. C'est un ton de partisanerie qu'on n'est pas habitué d'entendre dans une commission parlementaire sur l'administration de la justice. Ce n'est pas comme ça qu'on exerce un rôle de critique de l'Opposition en matière de justice. On n'est pas ici pour parler de partisanerie politique. On est ici pour parler d'administration de la justice. Vous pouvez critiquer mon rôle et dire que je n'en ai pas fait assez. Oui, je pense que c'est tout à fait légitime, normal. Je vais essayer d'en faire plus, je peux vous le dire, très sincèrement, d'en faire le plus que je peux. Je ne suis pas en politique pour faire carrière, moi. Mais je peux vous dire qu'il y a un ton, il y a un moyen qu'on peut prendre pour en discuter très sérieusement, que votre collègue qui vous a précédée avait fort justement. Je tiens à vous le recommander au début de nos travaux.

Mme Harel: M. le Président.

Le Président (M. Dauphin): Oui, Mme la députée. (11 h 15)

Mme Harel: D'accord. J'inviterais le ministre à ne pas être paternaliste dans son ton S'il me reproche d'être partisane, je lui reproche d'être paternaliste. Alors, M. le Président, je souhaite- rais pouvoir débuter immédiatement nos travaux d'examen des crédits.

Le Président (M. Dauphin): D'accord. Au niveau de nos travaux, est-ce qu'on va procéder programme par programme ou si vous désirez...

Mme Harel: M. le Président, parce qu'on n'aura peut-être pas l'occasion, étant donné le peu de temps qui nous est imparti, étant donné que ma collègue de Terrebonne est avec nous pour pouvoir également Interroger le ministre sur certains éléments de programme et compte tenu que j'ai des collègues qui, durant la journée, vont également venir échanger avec le ministre sur toute la question de la fusion des directions régionales, en particulier, en Abitibi, au Saguenay-Lac-Saint-Jean et à Trois-Rivières, je préférerais qu'on puisse peut-être commencer immédiatement par les questions qui me préoccupent, M. le Président, et mes collègues me suivront par la suite.

Le Président (M. Dauphin): Ou, si vous permettez, ce qu'on pourrait faire...

Mme Harel: Alors, le programme 8, si c'est possible.

Le Président (M. Dauphin): D'accord. Ou bien, ce qu'on va faire, c'est que nous adopterons tous les programmes à la fin...

Mme Harel: À la fin.

Le Président (M. Dauphin):.. alors, ils seront tous ouverts...

Mme Harel: Très bien.

Le Président (M. Dauphin):... au courant de la journée, pour des discussions.

Mme Harel: Parfait.

M. Williams: M. le Président?

Le Président (M. Dauphin): Oui, M. le député de Nelligan.

M. Williams: Excusez-moi, je voudrais savoir exactement ce que nous sommes en train de décider. Est-ce que... Parce que, moi aussi, j'ai plusieurs questions...

Le Président (M. Dauphin): Oui, d'accord.

M. Williams:... moi aussi, j'ai un horaire assez chargé.

Le Président (M. Dauphin): Ce que je viens de dire...

M. Williams: Est-ce que ça va être plus efficace de faire ça, programme par programme?

Le Président (M. Dauphin): Ce que je viens de dire à la fin, c'est qu'on n'adoptera pas de programme ce matin. On va tous les adopter à la fin. Alors, s'Il y a un député qui vient dans l'après-midi, il va pouvoir poser des questions sur n'importe quel programme, si le ministre y consent. Nous les adopterons tous à la fin. Si vous avez des questions à poser tantôt, je vous reconnaîtrai.

M. Williams: Correct. Merci.

Le Président (M. Dauphin): On va être équitable.

Mme Harel: Programme 9, M. le Président.

M. Williams: Excusez-moi. Est-ce que nous allons être équitables ce matin? Comment...

Mme Harel: Équitables, il faudrait bien s'entendre. L'équité ne consiste pas à partager par alternance le temps dans l'étude des crédits, n'est-ce pas, M. le Président?

M. Williams: Je voudrais juste savoir ce que nous allons faire. Je voudrais que ce soit clair. C'est tout.

Le Président (M. Dauphin): O. K.

M. Houde: C'est quoi les enveloppes de temps qu'on peut avoir, auxquelles on a droit, autant d'un bord que de l'autre, de votre part?

Le Président (M. Dauphin): C'est-à-dire que l'information que j'ai obtenue du bureau du leader, c'est qu'étant donné qu'il n'y a pas d'entente formelle, en règle générale, c'est censé être une enveloppe de temps 50-50, sauf, à moins que je ne me trompe - ça fait trois mandats que je fais ici - à l'étude des crédits, où il y a toujours un peu plus de temps à l'Opposition qu'au parti ministériel. Maintenant, c'est une question de GBS, de gros bon sens, à un moment donné, de reconnaître un député ministériel, mais on sait qu'en règle générale il y a plus de temps à l'Opposition qu'au parti ministériel. Je tiens à vous dire tout de suite que, si vous avez des questions, je vais vous reconnaître. Soyez sans crainte là-dessus. Si vous me dites, M. le député de Nelligan, que cet après-midi vous allez être absent, à ce moment-là, je vais faire un effort, doublement, pour vous reconnaître ce matin. C'est un peu...

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Dauphin):... ce que j'ai à vous dire. Alors, si le ministre n'a pas d'objection, vous désireriez qu'on appelle le programme 9.

Mme Harel: C'est bien ça.

Le Président (M. Dauphin): Le programme 9, c'est Affaires criminelles et pénales.

Mme Harel: Voilà.

Le Président (M. Dauphin): Est-ce que ça vous convient, M. le ministre, de procéder comme ça ou...

M. Rémillard: Que vous nous résumiez...

Le Président (M. Dauphin): Parce que vous avez un mot à dire là-dessus?

M. Rémillard:... votre conclusion, M. le Président. Vous pouvez nous résumer votre conclusion.

Le Président (M. Dauphin): C'est-à-dire que Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve me faisait part qu'au courant de la journée, il y a d'autres députés, précisément de l'Opposition officielle, qui vont se joindre à nous et qui auraient peut-être des questions sur différents programmes. Alors, au lieu d'adopter ça programme par programme, au fur et à mesure de nos travaux, nous allons adopter tous les programmes à la fin de nos travaux, à 16 h 30 ou 16 h 15.

M. Rémillard: Je n'ai pas d'objection.

Le Président (M. Dauphin): Si vous n'avez pas d'objection, on va peut-être passer du programme 1 au programme 5, sans nécessairement suivre l'ordre. Mme la députée me demande de procéder tout de suite avec le programme 9. Si vous n'avez pas d'objection, on va procéder tout de suite avec le programme 9.

M. Rémillard: Très bien, M. le Président.

Mme Harel: M. le Président, je voudrais, pour les fins de nos travaux, vous rappeler que l'exercice démocratique que nous entreprenons consiste, finalement, à examiner les comptes publics. C'est ce que le législatif a à faire de plus fondamental, en regard de l'exécutif. Le Parlement ne siégerait que pour ça, dans une année, que son rôle serait déjà justifié. Dans ce sens-là, évidemment, la commission n'a pas pour objet de donner aux députés ministériels qui ont l'occasion, lors de caucus, d'échanger en séance d'information avec leur ministre... Je pense bien et je conçois qu'un député ministériel est un parlementaire aussi, mais un parlementaire qui doit éviter les questions plantées pour justement conserver sa crédibilité. Alors, ceci dit, M. le

Président...

M. Larouche:... intervention. Alors, si vous croyez que...

Le Président (M. Dauphin): Sur une question de règlement.

M. Larouche: C'est sur une question d'interprétation aussi. On participe à l'étude des crédits et on a autant le droit que l'Opposition de poser des questions. Alors, quand, à chaque ministre qui passe... Alors, il n'est même pas membre de la commission. On peut lui poser des questions. Je sais que vous essayez un peu de créer des précédents à ce niveau-là, mais, moi, je pense qu'en tout temps on peut poser des questions comme députés de cette Assemblée. Ce n'est pas plus à l'Opposition qu'aux députés ministériels. Alors, sur ce, vous pouvez poser toutes les questions que vous voudrez et, lorsqu'on voudra en poser, on interviendra aussi. Ce n'est pas des questions plantées. Quand on a des questions, on les pose.

Mme Harel: Alors, M. le Président...

Le Président (M. Dauphin): Si jamais vous m'avez mal compris tantôt, ce que j'ai dit tantôt, c'est qu'en l'absence d'entente formelle, c'est 50-50 pour le temps, sauf que je sais pertinemment qu'en règle générale, à l'étude des crédits, il y a un peu plus de temps à l'Opposition. Je pense qu'on va tous le concéder. C'est une question de bon sens et d'équité.

M. Larouche: C'est ce qu'on fait.

Le Président (M. Dauphin): Alors, soyez sans crainte, je vais être équitable avec les principes que je viens de mentionner. Alors, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve, sur le programme 9, s'il vous plaît.

Affaires criminelles et pénales

Mme Harel: Très bien. M. le Président, compte tenu de l'inquiétude qui est manifestée quant à l'intention du Procureur général, compte tenu plutôt de l'incertitude de l'opinion publique présentement quant à la position du Procureur général suite à l'adoption de la loi C 43 à Ottawa et à la recriminalisation de l'avortement et compte tenu de la tradition depuis maintenant plusieurs années, plus d'une décennie, de ne pas poursuivre les médecins qui pratiquent les avortements, compte tenu des verdicts d'acquittement intervenus à la fin des années soixante-dix, j'aimerais savoir du ministre de la Justice s'il entend reconduire la même façon de voir que tous ses prédécesseurs depuis bientôt 13 ans.

M. Rémillard: M. le Président

Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.

M. Rémillard:... je remercie Mme la députée pour cette première question qui touche un sujet de très grande importance pour notre société et qui est aussi de grande actualité. Évidemment que l'avortement, c'est une question qui est fondamentale au sein de notre société et c'est une question qui est fort difficile. Il est très difficile d'établir un consensus au sein de notre société entre, d'une part, le droit à la vie et, d'autre part, le droit de la femme de disposer de son corps.

M. le Président, le gouvernement fédéral a donc choisi de légiférer sur cette question et de criminaliser l'avortement, c'est-à-dire que le gouvernement fédéral a choisi d'utiliser sa compétence exclusive en matière de droit criminel pour légiférer sur l'avortement dans un contexte que l'on connaît très bien. En fonction donc de cette loi C-43, l'avortement est, dans certaines circonstances, considéré comme un acte médical qui doit être accompli par un médecin conformément aux normes généralement admises dans la profession médicale. Il n'appartient pas, évidemment, au Procureur général mais plutôt à la profession médicale elle-même d'établir les normes dans lesquelles on va pouvoir déterminer ce diagnostic du médecin pour déterminer si la santé de la femme est en cause et qu'il y a, donc, nécessité de procéder à un avortement. C'est essentiellement le point le plus important de cette loi C-43 sur l'avortement. C'est un point qui se réfère directement à cette capacité professionnelle du médecin de poser un diagnostic quant à la santé de la mère, de la femme, et à la nécessité de procéder à un avortement.

Cependant, il est évident, M. le Président, que si nous avons la preuve qu'un avortement a été pratiqué sans que le médecin arrive à la conclusion qu'autrement la santé mentale, physique ou l'état psychologique ou la vie de la personne serait vraisemblablement menacée, si ce diagnostic a été posé par le médecin sans qu'il y ait eu cette conclusion comme le stipule la loi, alors, c'est évident que le Procureur n'a pas le choix et nous devrons évaluer s'il y a matière à poursuite. Et c'est mon devoir, comme Procureur, de le faire. Mon devoir premier, M. le Président, c'est de faire appliquer la loi.

Or, nous sommes devant une nouvelle loi fédérale qui criminalise l'avortement, donc, qui est de juridiction fédérale, puisque le Code criminel est de juridiction fédérale. Comme Procureur général, je vais appliquer cette loi et évaluer les preuves que nous avons, si on nous rapporte des cas, pour voir si la loi a été respectée ou pas. Mais il est évident que cette loi devra se référer, dans un aspect important, au diagnostic posé par le médecin, parce que c'est la clé de cette loi, et, par conséquent, se référer à la compétence, à l'éthique que la

corporation médicale pourra se donner. Alors, mon rôle, M. le Président, comme Procureur général, comme dans toutes les lois, ce sera d'évaluer la preuve qu'on nous apportera si on nous souligne des cas qui posent problème. ' Et, à ce moment-là, j'analyserai et je verrai en mon âme et conscience s'il faut poursuivre.

Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le ministre. Mme la députée.

Mme Harel: Alors, faut-il comprendre, M. le ministre, à titre de Procureur général, que vous entendez mettre fin au consensus qui s'était établi au Québec depuis plus d'une décennie maintenant et qui avait amené vos prédécesseurs et vous-même à ne pas poursuivre en matière d'avortement, compte tenu des verdicts d'acquittement antérieurs et qui, je pense, nous amènent à constater qu'il n'y a pas eu de poursuite depuis 13 ans?

M. Rémillard: Ce quit est important de noter dans ce cas-ci, c'est qu'il est vrai qu'il n'y avait pas eu de poursuite à la suite de décisions qui étaient pendantes devant les tribunaux - on attendait des décisions des tribunaux et, finalement, on le sait, la Cour suprême s'est prononcée - et à la suite aussi de procès qui, par voie de jury, ont acquitté des gens qui étaient poursuivis. Et je dois dire que les décisions qui ont été prises à ce moment-là par les procureurs généraux qui m'ont précédé ont été fort justement prises dans les circonstances.

Pour ma part, ce que je peux vous dire simplement, c'est que je dois faire appliquer une nouvelle loi. Donc, la situation, elle est nouvelle. Il faut se référer à une loi qui est nouvelle qui nous arrive avec des données juridiques qui sont tout à fait nouvelles. Dans le cas qui précédait, dans les dispositions du Code criminel qui précédaient cette loi, on se souvient que, par exemple, on faisait référence à des comités thérapeutiques qui devaient donner leur consentement. Et la Cour suprême a dit que ces comités thérapeutiques étaient des empêchements administratifs qui pouvaient toucher, empêcher l'exercice des droits fondamentaux, mais il s'agit de décisions et de façons d'agir qui ont été développées sous l'égide des anciennes dispositions qui gouvernaient l'avortement. (11 h 30)

Maintenant, comme Procureur général, comme citoyens, nous avons une nouvelle loi et ce que je vous dis, c'est que cette loi repose essentiellement sur le diagnostic que posera le médecin. Ce diagnostic se réfère donc à la compétence du médecin, à son éthique et, par conséquent, comme Procureur général, il faudra voir, je verrai au fur et à mesure qu'on nous rapportera des cas et les éléments de preuve qu'on peut nous apporter. J'évaluerai, dans ce cas comme je le fais dans tous les autres cas, s'il faut poursuivre ou pas, mais je voudrais simplement, en terminant, bien faire comprendre que ce qui s'est passé précédemment, c'est en fonction de dispositions législatives dans le Code criminel qui n'existent plus et que maintenant nous avons une situation nouvelle avec cette loi C-43.

Le Président (M. Dauphin): Mme la députée.

Mme Harel: Le ministre ne craint-il pas que la loi, finalement, l'application qu'il en fera ne décourage les médecins de procéder à des avortements par crainte de poursuites au criminel et que la tentation soit forte de réduire les services qui étaient maintenant offerts puisque des médecins pourront avoir peur d'être dénoncés, d'être poursuivis ou d'être l'objet de subterfuges de n'importe quel Jean-Guy en mal de vengeance?

Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.

M. Rémillard: M. le Président, la seule contrainte du médecin, c'est d'appliquer dans son diagnostic les normes qui sont généralement admises. Et on sait que ces normes sont établies par la profession médicale. Alors, comme Procureur général, qu'est-ce que j'aurai à faire? C'est d'évaluer, en fonction des éléments de preuve qu'on peut nous apporter, si ces normes ont été suivies et je peux vous dire que c'est un droit tout à fait nouveau, une loi nouvelle. Je ne peux pas vous dire, comme Procureur général, si je suis d'accord avec cette loi ou pas, parce que, comme j'aurai à prendre la décision si on doit poursuivre ou pas, je ne peux pas me prononcer sur le bien-fondé de la loi, mais je peux vous dire qu'au fur et à mesure que les circonstances évolueront nous verrons comment cette loi s'appliquera, on la suivra attentivement et j'exercerai en mon âme et conscience ma discrétion de poursuivre ou pas, selon les circonstances.

Le Président (M. Dauphin): Merci.

Mme Harel: Vous nous dites en fait: La balle est dans le camp des médecins, mais l'Association médicale canadienne elle-même avait fait valoir que cette loi est une invitation au mensonge et à la supercherie et qu'en tout état de cause l'Association considère que l'exercice de la médecine sera beaucoup plus défensif et s'attend que de plus en plus de médecins exigent des consultations psychiatriques avant d'accepter de pratiquer un avortement. Alors, vous considérez que vous aurez à faire de la jurisprudence avec la nouvelle loi. C'est comme ça qu'il faut comprendre votre point de vue.

M. Rémillard: Mon point de vue, c'est que chacun a un rôle à jouer. Le médecin a un rôle clé à jouer, respectant son éthique, respectant

tes normes qui s'appliquent dans de telles circonstances et, moi, comme Procureur général, j'ai mon rôle à jouer avec mes procureurs, ici, du ministère de la Justice. On évaluera les éléments qui se présenteront à nous de façon à pouvoir déterminer où peut se situer le droit, mais nous sommes devant une situation qui est nouvelle et c'est ce que j'aimerais que Mme la députée comprenne très bien. La situation que nous avons avec cette nouvelle loi fédérale est une situation qui est nouvelle. Il faut donc qu'on voie comment elle pourra s'appliquer chez les médecins et comment elle évoluera dans les prochains mois, Tes prochaines années et les éléments qui pourront venir à notre connaissance, dans certains cas, pour que je puisse apprécier en mon âme et conscience, comme Procureur général, si je dois poursuivre ou pas.

Mme Harel: À partir, évidemment, de ce que vous considérez comme étant de la responsabilité des médecins. Mais les médecins eux-mêmes font valoir que cette nouvelle loi contient des notions absolument mal définies en matière de santé physique, de santé mentale, de santé psychologique, et aussi des notions qui ajoutent à la confusion. Et, à partir de là, vous savez sans doute que l'Association médicale souhaitait qu'aucune poursuite pénale ne puisse être intentée sans l'obtention du consentement du Procureur général provincial. Avez-vous fait des représentations? Est-ce que vous avez attendu, là, que la conclusion vienne d'elle-même à Ottawa, ou si vous avez fait des représentations sur cette question?

M. Rémillard: Dans la mesure où le gouvernement fédéral a décidé de criminaliser l'avorte-ment, il se référait au Code criminel, donc, à sa compétence exclusive. Par conséquent, notre possibilité d'action est fort limitée. La seule chose que l'on peut faire, c'est d'appliquer la loi en se référant à des normes médicales qui seront établies ici par les médecins, par la Corporation médicale, en fonction de leur éthique, de leur compétence, et c'est dans ce contexte-là que j'aurai à prendre mes décisions comme Procureur général.

Mme Harel: Oui. Alors, M. le Président, je souhaitais également interroger le ministre cette semaine sur le dossier de Mark Levy. Le député de Westmount, je pense, l'a fait auprès du ministre de l'Environnement, mais compte tenu qu'il n'y a aucune poursuite intentée contre Mark Levy, je veux savoir du ministre de la Justice s'il a pris connaissance du dossier et quel est son point de vue sur cette question.

M. Rémillard: Oui, bien sûr. M. le Président, que j'ai pris connaissance du dossier J'ai fait le point avec mes sous-ministres sur cette question cette semaine, avant que le ministre de la Justice annonce sa décision de ne pas poursuivre M. Levy. Dans ce cas comme dans tous les autres, il s'agit pour le ministère de la Justice d'évaluer les éléments de preuve qui nous sont apportés par l'enquête policière, de les évaluer à leur juste mesure, dans la perspective d'une régie qui est fondamentale dans notre droit: nous sommes tous innocents, et l'État, si on veut nous poursuivre, doit démontrer hors de tout doute raisonnable que nous sommes coupables. Donc, on ne poursuit pas pour le plaisir de poursuivre, on poursuit si nous avons en main des éléments de preuve qui nous amènent à croire que quelqu'un a commis un crime hors de tout doute raisonnable:

Après plus d'un an, près d'un an et demi de travail minutieux de la part de nos procureurs et des enquêteurs, qui ont travaillé en étroite collaboration parce que, dans certains cas, les procureurs ont demandé aux enquêteurs de compléter sur certains points des éléments de recherche qu'ils voulaient avoir plus complets, pour voir tous les aspects que nous avions dans ces dossiers, et, après avoir étudié minutieusement, donc, tous ces éléments de preuve recueillis par les enquêteurs, après un travail de collaboration étroite entre les procureurs du ministère de la Justice et les enquêteurs pour tenter de compléter tous les éléments de preuve qui pouvaient se présenter, la conclusion qui s'est imposée, c'est qu'il était impossible de démontrer hors de tout doute raisonnable que M. Levy avait commis un acte criminel. Ça ne veut pas dire qu'il n'est pas poursuivi sur le plan pénal, c'est-à-dire en fonction d'infractions à des lois qui n'ont pas été respectées. Et on sait que le ministère de l'Environnement, qui a la capacité de poursuivre, poursuit lui-même. Mais je n'ai pas à élaborer sur ces dispositions, parce que vous savez, M. le Président, que nous avons à respecter la règle du sub judice. Cependant, je me restreindrai à dire que, suite à une analyse minutieuse du dossier, la conclusion est que nous n'avons pas de preuve pouvant nous amener à croire que M. Levy a commis quelque acte criminel que ce soit.

Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le ministre. Ça va sur ce point. Avez-vous d'autres questions sur le programme 9?

Mme Harel: M. le Président, je préférerais peut-être reprendre à partir d'un certain nombre d'autres dossiers, à partir du programme 1.

Le Président (M. Dauphin): D'accord. Sur le programme 9, est-ce qu'il y a d'autres collègue6 qui auraient des questions à poser? Pas sur le programme 9? Alors, ça va.

Mme Harel: Le programme 1, M. le Prési-

dent.

Formulation de jugements et soutien administratif à l'activité judiciaire

Le Président (M. Dauphin): J'appelle le programme 1, Formulation de jugements. Je crois que, M. le député de Nelligan, vous aurez une question à poser tantôt sur le programme 1.

M. Williams: Ou deux, je ne le sais pas.

Le Président (M. Dauphin): Au niveau de la magistrature.

M. Williams: J'ai pensé plus à deux ou trois, mais...

Le Président (M. Dauphin): En tous les cas. Mme Harel: Allez-y.

Le Président (M. Dauphin): Voulez-vous y aller tout de suite? Mme la députée, ça va?

Mme Harel: Non, non, ça va.

Le Président (M. Dauphin): M. le député de Nelligan.

M. Williams: Je ne sais pas si...

Le Président (M. Dauphin): Mais on verra.

Si ce n'est pas le bon programme, ce n'est pas grave. Je suis au courant un peu de votre question. Allez-y.

Soutien à la magistrature

M. Williams: M. le ministre, sur les questions de notre politique de la Direction générale des services judiciaires, je pense, Soutien à la magistrature, programme 2. Nous avons créé une direction générale pour avoir un accès plus près de la population, pour diriger notre système judiciaire plus près de la population. À Montréal, nous avons plusieurs chambres de notre Cour de Québec. Je voudrais connaître notre politique sur ces chambres et, en particulier, j'en ai une sur l'ouest de Montréal. J'aimerais savoir si nous sommes en train de centraliser les services ou si nous décentralisons nos chambres, les tribunaux, pour être plus près du peuple et mieux répondre aux questions. Je parle particulièrement du tribunal à Pointe-Claire, mais ma question est un peu plus large: la politique de la direction générale de nos services. Je ne sais pas si c'est la meilleure place pour poser cette question, mais c'est un peu la direction par où je voudrais commencer.

M.. Rémillard: M. le Président, je remercie le député de Nelligan pour sa question qui, je dois le dire en passant, n'est pas une question plantée. C'est évidemment un sujet que j'ai mentionné dans mes notes d'introduction. Dans certains endroits, nous avons des difficultés administratives et de locaux en ce qui regarde les Chambres de la jeunesse et, pour nous, c'est une priorité de trouver des solutions à ces problèmes administratifs que nous avons. Mais, quand on regarde la situation d'une façon générale, je dois quand même bien comprendre qu'il y a pour nous l'importance d'avoir des locaux qui soient adéquats, suffisants et qui assurent à nos tribunaux et à nos jeunes la sécurité et l'accessibilité. Lorsque je parle d'accessibilité, il faut aussi que je me réfère, par exemple, aux moyens de communication qu'on peut avoir pour se rendre à ces tribunaux. Si je parle de Montréal, comme se réfère par exemple le député de Nelligan, est-ce que le métro se rend à ces endroits? Est-ce que le système de transport en commun est adéquat? Parce que des gens qui utilisent les transports en commun doivent pouvoir se rendre à ces endroits sans inconvénient. J'ai un ensemble de facteurs administratifs, de conditions matérielles que je dois apprécier. Il ne s'agit pas simplement qu'il y ait des locaux qui soient des locaux très convenables, des locaux accueillants, qui offrent des qualités matérielles très intéressantes mais, en plus, je dois me référer aussi à toutes ces conditions matérielles qui font en sorte que ces locaux seront accessibles aux gens qui ont à faire face à la justice et aussi à ceux qui ont à participer au processus judiciaire. (11 h 45)

Alors, j'ai eu des consultations avec les juges en chef, en particulier, le juge en chef Jasmin, le juge en chef associé à la Cour de la jeunesse, à la Chambre de la jeunesse. Et, dans ce cas-là, il faut que j'évalue tous les éléments qui nous permettent d'en arriver à des conclusions les plus équitables possible.

Le Président (M. Dauphin): Oui, M. le député de Nelligan.

M. Williams: Merci, M. le Président. Merci, M. le ministre, pour la réponse. Mais je pense que le problème, ça arrive quand nous avons les salles, les chambres à temps partiel, parce que-Oui, vous avez raison de mentionner qu'il y a plusieurs critères pour une sélection dans un bassin de population et tout ça. Et nous avons maintenant, dans l'ouest de l'île, une salle qui est ouverte environ deux jours par semaine. Et je pense que c'est le problème, parce que si nous voulons garder ouvertes les salles comme celles de l'ouest de l'île, c'est prendre peut-être une masse critique un peu plus large que le pourcentage de jour. Mais je pense que c'est vraiment un système plus efficace de rendre nos services accessibles à la population avec exactement le but que vous avez soulevé.

Si nous avons un tribunal à plein temps, je pense que la réponse va être plus facile. Et quand nous allons avoir les chambres à temps partiel - j'espère que nous pourrons garder les tribunaux comme ça - je pense que ça va prendre une masse critique un peu plus élevée pour répondre aux besoins spécifiques de quelques territoires. Et je sais que le territoire chez nous est spécifique, mais il n'est pas plus important que les autres. Mais chaque territoire a des besoins particuliers.

Je n'ai pas à donner toutes nos choses spéciales, parce que je pense que les autres députés sont capables de faire de même, mais j'espère que nous allons privilégier cette approche pour l'avenir. J'ai peur qu'avec toutes les coupures que nous effectuons pour rendre les budgets efficaces... Enfin, j'espère que nous allons aussi garder les services efficaces et accessibles.

M. Rémillard: M. le Président.

Le Président (M. Dauphin): Oui, M. le ministre.

M. Rémillard: Je dois dire que je comprends très bien l'intervention du député de Nelligan. il m'en a parlé à plusieurs reprises. D'autres députés m'en ont aussi parlé. J'ai fait valoir des arguments d'ordre administratif qui nous amènent actuellement à composer avec une situation qu'on considère comme difficile, à certains égards, et qu'on essaie d'améliorer. Et évidemment que la Chambre de la jeunesse, elle siège présentement et elle continuera de siéger, entre autres, à Pointe-Claire, et la Cour des petites créances aussi.

Maintenant, est-ce qu'on peut faire évoluer ça? Dans un avenir pas tellement lointain, lorsqu'on réglera le problème de nos autres cours, de nos autres Chambres de la jeunesse qui ont des difficultés administratives, je pense qu'il sera possible d'aborder ce sujet-là dans un autre contexte. Mais je dois dire que je suis particulièrement sensible aux interventions que fait le député de Nelligan. Ce qu'il m'a dit, à plu sieurs reprises... Il est venu me voir à mon bureau à plusieurs reprises. Mais je dois lui dire que, pour le moment, nous devons procéder dans un contexte administratif global pour qu'on puisse garantir le meilleur accès possible, en tenant compte des différents éléments et pas simplement de la qualité des locaux; comme tels, mais de leur accessibilité, du genre de clientèle qui doit se rendre là. Et c'est ça, pour moi, qui est un argument important.

Et quand j'ai eu à en discuter avec le juge en chef, le juge Jasmin, qui fait un travail remarquable pour les jeunes et dans des situa tions pas toujours faciles... Et on travaille en étroite collaboration avec M. le sous-minislro Chamberland pour lui donner tous les moyens administratifs nécessaires pour faire son travail. Avec raison, M. le juge a insisté à ce niveau-là sur les moyens d'accessibilité en ce qui concerne ces édifices, ces bureaux. Alors, je prends bonne note, comme je l'ai fait à plusieurs reprises, des remarques du député de Nelligan. D'autres députés m'ont fait valoir ce point de vue aussi, très valable, et je peux leur dire qu'on regarde cette situation de très près.

M. Williams: Merci beaucoup, M. le ministre, pour votre réponse. Moi aussi, je voudrais souligner l'excellent travail de notre juge, chez nous, et tout le personnel avec lui. J'espère que nous allons garder ce personnel très proche de nous. Merci beaucoup.

Le Président (M. Dauphin): Merci. M le député de Nelligan. Mme la députée de Hochela-ga-Maisonneuve, sur le programme 1.

M. Rémillard: Si vous me permettez, M. le Président.

Le Président (M. Dauphin): Oui.

M. Rémillard: Simplement pour terminer en disant au député de Nelligan que ça, oui, vous pouvez être assuré que vous allez le garder. Ça, il n'y a pas de problème à ce niveau-là.

M. Williams: Merci

Mme Harel: Alors, toujours sur le même sujet, M. le Président.

Le Président (M. Dauphin): Oui, Mme la députée.

Mme Harel: II était donc question du point de service à Pointe-Claire, qui est ouvert deux jours-semaine mais où il y a peu de volume, je pense, comparativement à celui de Bellechasse. Quel est, en pourcentage, le volume à Pointe-Claire pour ces deux jours-semaine, par rapport à l'encombrement, à l'engorgement de Bellechasse?

M. Rémillard: M. le Président, étant donné l'importance de cette question soulevée par Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve et qui touche aussi toute la question des Chambres de la jeunesse, est-ce que vous me permettriez de demander au sous-ministre associé, M. Henderson, de compléter nos éléments de réponse?

Le Président (M. Dauphin): Avec plaisir.

M. Rémillard: M. Freddy Henderson, qui est sous-ministre associé.

Le Président (M. Dauphin): Alors. M le sous ministre.

M. Henderson (Freddy): Pour l'information de la commission, c'est qu'actuellement le palais de justice de Pointe-Claire entend les causes au niveau du Tribunal de la jeunesse et au niveau de la Cour des petites créances. Il y a une vacation qui va de deux jours à deux jours et demi par semaine, et ça répond, en fait, aux dossiers qui sont déposés là.

Maintenant, quant à l'ensemble de l'île de Montréal, si on aborde le dossier du Tribunal de la jeunesse dans son ensemble, là-dessus, c'est que l'île de Montréal est divisée au niveau des villes par rapport au système du Tribunal de la jeunesse. Actuellement, par cette division, tous les dossiers qui touchent le West Island, en fait, sont donnés au palais de justice de Pointe-Claire, ce qui fait, à ce moment-là, actuellement... Et si vous le désirez, je vais déposer cet après-midi les statistiques concernant le volume des dossiers qui sont traités à Pointe-Claire. Ça va?

Mme Harel: Oui, merci.

Le Président (M. Dauphin): Oui, Mme la députée.

Mme Harel: Certainement, M. le Président. D'ailleurs, je veux tout de suite en profiter pour remercier le ministre d'avoir autorisé ma visite à la Chambre de la jeunesse à Montréal - je n'ai pas pu me rendre à Pointe-Claire, mais je souhaiterais éventuellement pouvoir le faire - et, également, la tournée que j'ai pu faire de quelques services. Malheureusement, je n'ai pas pu tous les faire au palais de justice de Montréal. J'ai donc compris dans le discours que vous avez fait, M. le ministre, que vous entendez, notamment, aménager de nouvelles salles d'entrevue, 5 à 10 nouvelles salles d'entrevue, dites-vous, à la Chambre de Montréal. Quand est-ce que ces travaux devront avoir lieu? Parce que pour m'y être rendue, je dois vous dire qu'il y a là comme un caractère d'urgence. J'ai vraiment vu comment il y avait, finalement, des entrevues qui se passaient dans les corridors, etc. Alors, est-ce que ces aménagements devraient se faire incessamment?

Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.

M. Rémillard: D'abord, je dois vous dire qu'il s'agit de 10 salles.

Mme Harel: 10.

M. Rémillard: Alors, c'est vraiment 10. On m'informe qu'on a des ajustements à apporter avec le MAS, le ministère des Approvisionnements et Services, mais que cet automne, ce sera opérationnel.

Mme Harel: Ça a été pour moi une visite extrêmement enrichissante. Vous savez sûrement que j'ai la responsabilité du dossier de la rnain-d'oeuvre, de la sécurité du revenu et de la formation professionnelle et que j'ai évidemment encore beaucoup à apprendre dans le fonctionnement, notamment, de la Chambre de la jeunesse. Je comprends qu'il y a une surchauffe, présentement, entre autres à cause du phénomène des gangs. On me faisait valoir qu'il y a certainement un problème d'intégration de certaines communautés immigrantes, en particulier dans des communautés de minorité visible. On me disait que presque 30 % des dossiers au rôle étaient, finalement, des cas de jeunes en difficulté d'intégration appartenant à la communauté noire de Montréal. Est-ce qu'il y a une réflexion, un projet qui se dessine avec, peut-être, la Protection de la jeunesse et, éventuellement, des ressources autres à l'extérieur du milieu de la justice pour identifier les problèmes et les solutions qui doivent intervenir dans l'aggravation de cette situation?

Le Président (M. Houde): M. le ministre, vous avez la parole.

M. Rémillard: M. le Président, le problème que soulève Mme la députée est, je dirais, un problème général de notre société à nous, comme de bien d'autres sociétés, dans le sens que nos jeunes sont souvent désabusés, parce qu'il faut avouer qu'ils ne l'ont pas facile. Ce sont des jeunes qui peuvent venir de différents milieux. Souvent, on dit que ce sont des jeunes qui viennent de milieux défavorisés, mais souvent, aussi, on peut voir des jeunes qui viennent de milieux matériellement favorisés mais qui, pour diverses raisons, se retrouvent, finalement, délinquants, violents. Nous avons de ces cas de violence dans la région de Montréal comme aussi dans d'autres villes, mais plus particulièrement dans nos grandes villes. Quand j'étais ministre de la Sécurité publique, nous avons fait face, au printemps 1989, à une série d'actes de violence dans le métro, par exemple, dans le transport en commun, dans les autobus, et on a pris les moyens pour mettre fin en grande partie, du moins, à ces actes de violence. Mais ça ne règle pas le problème de nos jeunes qui, souvent, sont complètement démunis devant les problèmes qu'ils ont, problèmes face à leur famille, problèmes face aussi à leur avenir dans leur secteur d'activité. Co n'est pas facile.

M. le Président, à la question de Mme la députée, je dirais qu'à ce niveau-là nous avons la Commission de protection des droits de la jeunesse. M. Vaughan Dowie, qui est avec nous aujourd'hui, pourrait peut-être nous en parler plus longuement tout à l'heure. Nous devons travailler en étroite collaboration, surtout en ce dixième anniversaire de la Loi sur la protection de la jeunesse. Dix ans après, mon collègue, le ministre de la Santé et des Services sociaux, et

moi avons convenu, il y a quelques semaines, de former un groupe de travail conjoint du ministère de la Justice et du ministère de la Santé et des Services sociaux pour établir, justement, des paramètres de collaboration pour ajuster cette loi à notre réalité après dix ans d'application. Il y a deux organismes, comme on sait: il y a le Directeur de la protection de la jeunesse, mais il y a aussi la Commission de protection des droits de la jeunesse. Cette Commission dépend du ministère de la Justice, alors que le Directeur dépend du ministère de la Santé et des Services sociaux. Il y a souvent des problèmes administratifs qui nous causent des embêtements pour être le plus efficace possible. Il ne faut pas s'en cacher, ça pourrait aller beaucoup mieux. Tout à l'heure, peut-être qu'on pourra aller plus en détail sur ces sujets-là et faire le point. (12 heures)

Je pense qu'on peut faire beaucoup mieux que ce qu'on fait, en ce qui regarde nos jeunes et l'administration de la justice à nos jeunes. Et ce n'est pas parce que nos gens qui sont en place ne font pas leur travail, mais je pense que nos structures administratives et législatives doivent être revues et corrigées. Alors, le groupe de travail va faire sa première rencontre très prochainement et va nous permettre d'établir des paramètres pour actualiser, si vous voulez, la Loi sur la protection de la jeunesse, dix ans après sa promulgation.

Le Président (M. Houde): Mme la députée, vous avez la parole.

Mme Harel: Merci, M. le Président. J'ai eu l'occasion, au moment de la visite de la Chambre de la jeunesse, évidemment, de constater aussi le dévouement des personnes qui y travaillent. Et j'ai pu constater que le centre l'Escale, qui sert de centre de transition, est encombré. On y retrouve des jeunes filles et garçons d'entre 12 et 18 ans, quand on sait pourtant qu'il y a assez clairement une distinction à faire chez les adolescents de 12 à 15 ans et les autres, qui sont presque à l'âge adulte et qui ont parfois des comportements d'adulte, aussi. Et puis, finalement, dans la même salle, on retrouve à la fois ceux d'entre eux qui y sont pour avoir enfreint la Loi sur les jeunes contrevenants et les autres qui sont, disons, en besoin de protection. Et que tous ces jeunes se retrouvent, finalement, dans les mêmes lieux, surtout les filles.. Parce que ce pourcentage-là m'a quand même surprise: il n'y a que 5 %, finalement, de toutes les jeunes filles qui s'y trouvent qui y sont en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants, parce que 95 % sont là en besoin de protection. Évidemment, je sais qu'il y a une partie des responsabilités qui incombent au ministère de la Santé et des Services sociaux. J'ai personnellement vu, là, des jeunes filles de 13 ou 14 ans qui, depuis plus de trois semaines, venaient chaque jour dans le sous-sol, à côté des garages, dans une salle qui était fermée à clé, regarder la télévision toute la journée, et qui allaient, au fil des lits disponibles, être hébergées dans un centre d'accueil ou l'autre, différent chaque soir. Bon, c'est sûr que tout ça a un côté totalement inacceptable, et je me demande si tout cela a été porté à votre attention. Qu'est-ce que vous entendez faire, notamment en termes d'aménagement des locaux, pour distinguer les préadolescents des plus vieux, qui sont quand même presque à l'âge adulte.

Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.

M. Rémillard: Oui, M. le Président, il y a des aspects de la question de Mme la députée qui ne relèvent malheureusement pas de la juridiction du ministère de la Justice, parce que ça se réfère à des locaux qui sont sous l'administration du ministère de la Santé. Mais il y a une situation qui est très difficile. Je crois qu'il serait intéressant si on pouvait demander à M. Vaughan Dowie, qui est le président de la Commission de protection des droits de la jeunesse, de venir donner un complément d'information. Je crois qu'il y a une étude qui est amorcée par son organisme, et il serait particulièrement intéressant, je pense, qu'on entende des explications à ce niveau-là, si vous le permettez, M. le Président.

Le Président (M. Dauphin): Alors, M. Dowie, président de la commission des droits de protection...

M. Dowie (Vaughan): Commission de protection des droits de la jeunesse.

Le Président (M. Dauphin): Commission de protection des droits de la jeunesse, c'est exact.

M. Dowie: Si je peux répondre d'abord à la première question qui a été posée par la députée, sur la question de la représentation des minorités culturelles dans le système de protection de la jeunesse. C'est juste pour vous dire que la Commission vient d'amorcer une recherche sur cette question-là, avec la collaboration de l'Association des centres d'accueil du Québec et le ministère de la Santé et des Services sociaux, le bureau du sous-ministre responsable pour les minorités culturelles, pour voir, d'abord, le nombre de jeunes qui se trouvent effectivement dans le système de protection de la jeunesse actuellement et qui viennent de différents milieux ethnoculturels. Il y a beaucoup de personnes, par exemple, qui ont dit que les membres des communautés visibles sont surreprésentés dans les centres d'accueil, par exemple, à travers le Québec, Incluant des enfants qui viennent des communautés amérindiennes. Comme ça, le premier but de la recherche est de faire un recensement sur le nombre d'enfants qui s'y

trouvent, qui font partie de ces différents groupes et, avec cette information, de regarder comment ça se fait qu'ils se trouvent là pour voir s'il y a des facteurs de discrimination systémique qui peuvent être en jeu là-dessus. C'est une recherche qui a été commencée il y a à peine trois semaines. Nous attendons d'avoir le résultat du premier volet, qui est l'échantillon, pour septembre.

Sur la deuxième question qui a été posée par la députée sur la situation à l'Escale, effectivement, la situation est pire cette année que ça n'a jamais été. Il y a doux éléments au problème. Le promier élément qui a été soulevé par la députée, c'est la mixité en termes de protection des jeunes contrevenants et mixité en termes d'âge. Je dois souligner à la députée que . la situation est plus aiguë cette année, en partie à cause de l'incendie triste qui est arrivé à Shawbridge, dont l'unité pour les filles anglophones n'existe pas. Ça veut dire que beaucoup de filles anglophones qui ont dû se trouver dans le milieu du centre d'accueil Shawbridge auparavant, étant donné qu'il n'y a pas de place pour elles en attendant un réaménagement des locaux ailleurs, ça a eu un effet sur l'encombrement des ressources de l'Escale.

Or, je dois vous dire, bien que ce ne soit pas de la juridiction de ce ministère, que je sais que le ministère de la Santé et des Services sociaux est en train de réaménager ces centres d'accueil en fonction de deux règles de mixité. La première règle de mixité est d'éliminer, dans la mesure du possible, les enfants qui sont des cas de protection qui se trouvent dans le même milieu que les enfants jeunes contrevenants. Le deuxième volet est d'essayer d'éliminer ou de minimiser la mixité des enfants jeunes contrevenants, milieu fermé, qui se trouvent dans la même unité que jeunes contrevenants, milieu ouvert. Je dois vous dire que, malgré tout ça, le centre l'Escale n'a jamais été conçu comme un hébergement de longue durée. L'Escale a été conçu comme une place pour un enfant, par exemple, qui a été arrêté et, donc, qui a dû être hébergé le soir ou la fin de semaine en attendant l'admission dans un endroit beaucoup plus stable pour son séjour. Comme ça, c'est difficile de réaménager des locaux qui se trouvent effectivement dans un sous-sol du tribunal de façon que tous ces facteurs-là, j'imagine, puissent être respectés. Il me semble que si les autres facteurs, soit la courte durée de l'hébergement, de l'Escale sont respectés, la question va être de moins en moins importante.

Mme Harel: II est évident que c'est beaucoup moins crucial si ça ne dure qu'une journée, le temps de la comparution, etc. C'est bien évident que c'est bien différent si ça dure trois semaines ou plus. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Dauphin): Maintenant, M. le député de Nelligan, à moins que... Voulez-vous qu'on attende d'être rendus au programme 3, ça concerne la Commission de protection des droits de la jeunesse.

M. Williams: Oui, ça concerne la Commission de protection des droits de la jeunesse, mais je peux attendre au programme 3, parfait.

Mme Harel: On y reviendra, d'accord? Parce que si on veut terminer les programmes 1 et 2 avant la suspension de nos travaux pour le dîner...

Le Président (M. Dauphin): Si vous me le permettez, Mme la députée, juste un petit commentaire de trente secondes pour revenir à la question du député de Nelligan, c'est qu'effectivement, dans le sud-ouest et dans l'ouest de Montréal, nous n'avons pas la chance d'avoir de métro, mais je pense que ça ne serait pas une raison non plus pour ne pas avoir de point de services...

Mme Harel: Dans l'est, non plus.

Le Président (M. Dauphin):... du gouvernement. Alors, pour le sous-ministre Henderson, dans vos prises de décision éventuelles, ou vous, M. le ministre, je comprends que dans l'ouest on n'a pas de métro, mais il ne faudrait pas ne rien avoir non plus en tant que services. Juste un petit commentaire que je voulais faire. Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Accessibilité à la justice

Mme Harel: Sur l'accessibilité à la justice. Quand entendez-vous modifier les critères d'accessibilité pour les personnes âgées? Et quand entendez-vous le faire pour l'ensemble des autres justiciables?

M. Rémillard: En ce qui regarde l'accessibilité à la justice, donc, l'aide que nous devons apporter aux plus démunis pour qu'ils puissent avoir accès à la justice, faire valoir leurs droits et répondre devant la justice de leurs obligations, c'est un sujet qui me préoccupe grandement, M. le Président, parce que la situation que nous avons présentement se réfère aux années 1970 à 1974, si ma mémoire est bonne, où on a créé notre loi d'aide juridique permettant à celui qui n'a pas les moyens financiers de se payer les services d'un avocat d'avoir recours, soit à un avocat qui est membre de la commission juridique, c'est-à-dire un employé de l'État, ou de faire affaire aussi avec un avocat de la pratique privée qui est rémunéré par l'État.

M. le Président, on a établi des seuils d'admissibilité à ce service, qui ont évolué pendant un certain temps, mais qui, à un moment donné, ont arrêté d'évoluer. Et, quand nous

regardons, actuellement, les seuils d'admissibilité, si on se réfère, par exemple, à une personne seule, l'admissibilité, c'est 170 $ par semaine; c'est tout à fait inacceptable pour, je regarde ici, une personne seule avec un dépendant, 210 $ de revenu brut hebdomadaire. Pour une personne seule avec deux dépendants, c'est 230 $. Ce sont des critères qui sont vraiment inadéquats, qui ne sont plus conformes à notre situation dans notre société.

En particulier, j'avais deux problèmes particulièrement aigus, qui ont été, d'ailleurs. soulignés par le Protecteur du citoyen en ce qui regarde les personnes âgées, qui peuvent recevoir ce que nous appelons une aide financière pour pension et, par suite de la majoration, de l'indexation de ces pensions, ça signifiait qu'elles n'avaient plus droit à l'aide juridique. Même chose pour les personnes qui, présentement, bénéficient de prestations d'aide sociale et qui pourraient se retrouver dans une situation semblable. Ça n'a quand même pas de bon sens, qu'on laisse ces gens-là sans possibilité d'avoir recours à l'aide juridique.

Nous sommes toujours devant le Conseil du trésor avec ce dossier, M. le Président. Nous le plaidons déjà depuis au moins deux semaines, M. le sous-ministre.

Mme Harel: Est-ce que je pourrais vous aider?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Rémillard: Et, ce que je peux vous dire, c'est que j'essaie de les convaincre que ça n'a pas de bon sens qu'on laisse les choses comme ça et qu'il faut qu'on puisse, pour ces deux catégories... Parce que, pour le reste... Je veux que ce soit vraiment une situation intérimaire, parce que ça ne règle pas le problème. Le problème, il est beaucoup plus profond que ça Et, même si j'augmentais les taux, les seuils d'admissibilité de l'aide juridique, je disais, par exemple, même si vous gagnez 500 $ par semaine, si je prends l'exemple de 170 $, qui est actuellement le seuil d'admissibilité pour une personne seule, si on montait ça à 225 $, on me dit que si je voulais l'ajuster, parce que ça n'a pas été touché depuis 1981-1982, je devrais remonter ça à 225 $, 230 $.

Alors, c'est donc dire qu'une personne seule, qui aurait 225 $ de revenu brut, pour avoir accès à l'aide juridique, avoir accès à l'aide d'un avocat qui est payé par le gouvernement d'une façon salariale ou dont les honoraires sont payés par le gouvernement.. Mais, est-ce que ça réglerait le problème? Est-ce que ça réglerait tout le problème de ces gens à revenu rnême moyen, qui n'ont plus les moyens de s'offrir le droit de revendiquer leurs droits devant les tribunaux, de se défendre devant les tribunaux? Qui peut se payer un procès, M le Président, maintenant? Qui peut se payer ça? Quelqu'un qui est très riche, ou quelqu'un qui est très très pauvre, de par les chiffres que je viens de vous donner. Et ça n'a pas de bon sens. On ne peut pas demeurer là. (12 h 15)

C'est pour ça que j'ai créé un groupe de travail, le groupe de M. Macdonald, parce qu'il me faut des solutions qui vont être plus globales, susceptibles de nous apporter des solutions à ce problème-là parce qu'actuellement, il ne faut pas se leurrer, nous avons un beau système judiciaire, mais ce système est inéquitable dans la mesure où il est inaccessible pour des personnes à revenu moyen ou modeste parce que nous avons laissé aller une situation et, maintenant, ça ne nous donne absolument rien d'aller faire du "patchage", si vous me permettez l'expression, il faut qu'on trouve des situations, des solutions globales à ce problème. Ça peut être, M. le Président, quelque chose comme l'assurance judiciaire. Ça existe maintenant dans certains pays: en France, aux États-Unis dans certains États Ça peut être aussi qu'on développe des moyens pour déjudlciariser, donc, médiation, conciliation, arbitrage, qu'on développe ces moyens-là Tout à l'heure, peut-être qu'on parlera de la médiation dans le domaine familial dont les expériences à Québec et à Montréal devront évoluer prochainement un peu partout sur le territoire québécois. Lorsqu'on se réfère au Tribunal des droits qui sera en application prochainement, le Tribunal des droits prévoit aussi la possibilité d'avoir recours, soit à la médiation-conciliation par la Commission des droits, soit à l'arbitrage avec un arbitre qui est là et qui pourra se prononcer sur la situation de droits entre les deux parties.

Or, M. le Président, ce que je veux vous dire, c'est que j'espère que dans un avenir très très prochain, au Conseil du trésor, on pourra réussir à au moins avoir une mesure qui, dans un premier temps, nous permettra de répondre à un besoin qui est là pour nos personnes âgées, les personnes qui bénéficient d'aide sociale, pour qu'elles aient droit à l'aide juridique, mais ça ne règle pas le problème, loin de là. Dès que j'aurai le rapport complet de la commission Macdonald, nous allons procéder probablement par commission parlementaire et nous allons trouver des solutions pour garantir une accessibilité à la justice à tous les citoyens. On ne peut pas continuer comme ça. C'est inacceptable, la situation actuelle.

Le Président (M. Dauphin): Merci. M. le ministre. Mme la députée.

Mme Harel: Si je comprends bien, M. le Président, le ministre a présentement de la misère à faire accepter par le Conseil du trésor le relèvement du seuil d'admissibilité pour les seules personnes âgées. Est-ce que c'est ce qu'il

faut comprendre?

M. Rémillard: J'ai présenté pour deux catégories de personnes. J'ai présenté pour les personnes âgées et pour les personnes bénéficiant d'aide sociale et dont les prestations indexées ont fait qu'elles ont dépassé le seuil d'admissibilité. C'est une situation qui a été dénoncée par le Protecteur du citoyen, fort justement d'ailleurs, et nous en sommes parfaitement conscients. Présentement, comme je vous l'ai mentionné tout à l'heure, nous sommes devant le Conseil du trésor. J'en ai parlé à mon collègue du Conseil du trésor qui, je pense, comprend très bien la situation. Il faut trouver un moyen pour pallier cette situation-là. Maintenant, il s'agit d'une mesuré qui est, je dirais, simplement dans le temps, pour nous permettre de trouver une situation globale au problème.

Mme Harel: En fait, il s'agit de rendre à peu près 200 000 personnes qui avaient été exclues à nouveau admissibles en cas de pépin juridique. Mais il n'en demeure pas moins que l'esprit de la loi qu'avait fait adopter Jérôme Choquette en 1972 consistait à rendre aussi admissibles à l'aide juridique ce qu'on appelait à cette époque-là les "working poors", c'est-à-dire ceux qui travaillent et qui sont malgré tout pauvres parce que leurs revenus de travail se situent en-deçà du seuil de pauvreté.

Je m'interrogeais sur le fait que le volume de dossiers à la Commission des services juridiques ne m'avait pas eu l'air de diminuer. On m'informait que, si ç'avait été le cas, finalement, les dossiers des nouveaux arrivants, particulièrement des immigrants, avaient pu prendre la relève, d'une certaine façon, des dossiers en moins des gens qui avaient été exclus. Mais if faut aussi une sorte d'équité sociale parce que je pense qu'on ne favorise pas un climat sain dans une société quand on donne, finalement, plus de droits à une certaine catégorie de personnes dans la môme situation économiquement défavorisée. La première question au ministre est la suivante: Est-ce que l'esprit de la loi de 1972, celle qui consistait à vouloir offrir pas simplement aux gens dans la misère, mais aussi aux personnes défavorisées, est-ce que l'esprit de la loi lui convient toujours? Qu'attend-il, par exemple... Parce que, dans ses crédits, il n'y a rien de plus en matière de médiation familiale? C'est une indexation au coût de la vie. Ça ne m'a pas l'air d'être élargi à d'autres régions du Québec. Par exemple, au niveau du Tribunal des droits de la personne, en tout et pour tout, je pense qu'il y a 250 000 $, pour l'année qui vient, en termes de fonctionnement. Je ne pense pas... Est-ce qu'il a une décision qu'il a recommandée qui pourrait être intérimaire aussi au niveau du relèvement du plafond de la Cour des petites créances? On a fait faire une étude par la bibliothèque de l'Assemblée nationale pour se rendre compte qu'on était finalement les derniers avec Terre-Neuve. Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu - ha, ha, ha! - évidemment, compte tenu de l'amitié que vous portez au premier ministre de Terre-Neuve, de nous distinguer un peu? Est-ce que ce ne seraient pas, évidemment, des mesures intérimaires qu'il serait souhaitable de mettre en vigueur à court terme?

Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.

M. Rémillard: Oui. Je pense que la remarque de Mme la députée se réfère justement à la philosophie qui est toujours nôtre, qui est la philosophie du projet de loi de mon prédécesseur, le ministre Jérôme Choquette. Il faut assurer l'accessibilité à la justice et, par conséquent, ce n'est pas simplement ceux qui sont très pauvres, mais ceux qui n'ont tout simplement pas les moyens de se payer des frais d'avocat: Le problème que nous avons, M. le Président.,. C'est bien malheureux, mais nous avons malheureusement cette tendance, comme dans bien d'autres pays, à ce que les pauvres soient toujours plus pauvres et les riches plus riches. Et la classe moyenne des citoyens est souvent très défavorisée, entre autres, en ce qui regarde les services publics. On pourrait parler des services de transport parce que, tout à l'heure, M. le Président a fait des allusions au métro. Mais je voudrais dire aussi qu'en ce qui regarde un service public qui est essentiel, c'est certainement dans une société de faire valoir ses droits, de se défendre devant les tribunaux, devant la justice de sa société, de son pays.

Par conséquent, le problème que nous avons, c'est qu'on doit trouver des moyens pour que la justice soit accessible au citoyen moyen. La personne qui gagne 15 000 $ par année, est-ce qu'elle peut s'offrir un procès? Mais est-ce que celle qui gagne 20 000 $ peut s'offrir un procès? M. le Président, je reçois des lettres de citoyens qui sont particulièrement touchantes, qui me touchent particulièrement. J'en donne un exemple que j'ai en mémoire. J'oublie les noms, mais, tout simplement, c'est un jeune cuisinier, 27 ou 28 ans, qui est en instance de séparation avec sa conjointe. Lui, il gagne, comme cuisinier, 26 000 $. Elle, elle ne travaille pas. Elle n'a pas de revenu comme tel. Ils ont une petite fille: Et pour la garde de l'enfant, il y a eu disputé entre les deux et procédures judiciaires. Il m'écrit pour me raconter qu'il a dépensé à date plus de 16 000 $, alors que son ancienne conjointe a l'aide juridique. Parfois, ça pourrait être l'inverse. Ça pourrait être le conjoint qui a l'aide juridique et la conjointe qui ne peut pas en bénéficier. Ça aussi, ça fait une situation profondément injuste. Comment voulez-vous, à ce moment-là, que cette personne puisse faire valoir ses droits face à son enfant, si elle n'a pas les moyens de se défendre? Lui, il est en train de

se miner radicalement. Ah! c'est un problème qui est très sérieux!

Alors, c'est pour ça que la commission Macdonald, qui a tenu beaucoup de réunions et rencontré beaucoup de gens, tente de trouver des solutions. Bien sûr qu'on va penser comme solution, on va dire: Mais la Cour des petites créances qui est à 1000 $, on peut monter ça à 3000 $, peut-être 5000 $. C'est des possibilités. Évidemment, c'est des possibilités, mais j'ai d'autres questions aussi concernant la Cour des petites créances. Est-ce que des avocats pourraient être présents, comme c'est le cas dans, certaines provinces? Pour ma part, j'ai énormément de réticences; ce n'est pas ça le but des petites créances. D'autre part, est-ce qu'on devrait permettre que les corporations aient accès aux petites créances? Et, là aussi, c'est. une question extrêmement importante.

Alors; M. le Président, c'est pour ça que j'ai créé un groupe de travail, et le résultat de ce groupe de travail, j'aimerais pouvoir l'étudier en commission parlementaire pour qu'on puisse l'étudier ensemble, même si on veut faire témoigner d'autres personnes, mais qu'on trouve des solutions qui vont nous permettre d'assurer non seulement aux très pauvres de notre société, mais à ceux aussi qui sont de classe moyenne et qui se voient privés d'un droit qui est fondamental dans une société démocratique, d'avoir accès à nos tribunaux soit pour faire valoir leurs droits, soit pour répondre de leurs obligations dans notre société.

Le Président (M. Dauphin): Sur le même sujet, Mme la députée de Terrebonne; ensuite de ça, M. le député de Chapleau, sur le même sujet.

Mme Caron: Non, ce n'est pas sur le même sujet.

M. Kehoe: Moi, c'est le même.

Le Président (M. Dauphin): Ah! Ce n'est pas sur le même sujet, excusez-moi. Alors, M. le député de Chapleau et, ensuite de ça, je reviendrai à vous.

M. Kehoe: M. le ministre, l'exemple que vous nous avez servi tantôt concernant le cuisinier qui a dépensé 16 000 $, je pense que ça se répète souvent dans les régions frontalières comme chez nous, dans l'Outaouais, où il arrive souvent, dans des cas de divorce ou de séparation, qu'une des deux parties reste en Ontario et l'autre au Québec, et où les critères pour l'admissibilité à l'aide juridique sont de beaucoup différents. Je pense que vous avez déjà eu de la correspondance avec le bureau de l'aide juridique, justement, de Hull qui est souvent saisi de ce problème-là, vous demandant s'il y a quelque chose, si vous avez une solution possible ou si vous avez étudié le problème. C'est un problème particulier pour voir s'il y a une solution possible à apporter. Personnellement, je suis au courant de beaucoup de situations similaires à la vôtre où la personne en Ontario, gagnant à peu près le même salaire que la personne au Québec, mettons après la séparation, en Ontario, la personne peut être éligible pour l'aide juridique et au Québec elle n'est pas eligible. Quand c'est contesté, ce n'est certainement pas à armes égales qu'ils vont devant le tribunal, mais je demande spécifiquement la question pour des régions frontalières comme la région de Hull-Gatineau. Est-ce que vous avez des possibilités de solution à ce problème-là?

M. Rémillard: Oui, M. le Président. Le député de Chapleau fait référence à un problème qui est très important. On m'a souligné des cas vraiment d'injustice incroyable, d'iniquité par rapport à ces situations qui mettraient en cause des gens qui viennent de l'Ontario, du Québec ou d'une autre province, remarquez, mais surtout en ce qui regarde nos régions du Québec qui sont proches des régions ontariennes et qui causent des problèmes évidents. C'est un des sujets qui sont étudiés par la commission Macdonald et j'entends bien pouvoir avoir des éléments qui vont nous permettre d'apporter des correctifs à cette situation-là. Mais le député de Chapleau a parfaitement raison de dénoncer cette situation-là; on m'a rapporté des cas tout à fait inacceptables. Il faut trouver une solution à ça.

M. Kehoe: Mais une solution, est-ce que c'est de changer les critères pour ces régions-là? Y a-t-il une exception qui pourrait être faite pour des régions frontalières? Je pense que la région la plus touchée par ça, c'est justement la région de l'Outaouais. Il y en a d'autres probablement dans la province de Québec mais, où il y a une concentration importante de la population des deux côtés, nécessairement, je pense que c'est là que le problème est le plus important. C'est ça que je demande. Est-ce que vous avez envisagé la possibilité de faire des exceptions dans des circonstances comme ça?

M. Rémillard: Je ne voudrais pas aborder un élément de solution possible sans avoir tout d'abord le rapport de la commission Macdonald puisque c'est un des sujets que la commission Macdonald va aborder. Alors j'aime mieux, si le député me permet, attendre le rapport de la commission et, à ce moment-là, comme je vous l'ai mentionné tout à l'heure, j'aimerais avoir une commission parlementaire qui pourra étudier tous ces sujets-là et apporter nos solutions.

Le Président (M. Dauphin): Merci. M. le ministre. Sur le même sujet, M. le député de Berthier. (12 h 30)

M. Houde: Merci, M. le Président. Je ne

sais pas si c'est hors d'ordre, M. le ministre. C'est au sujet des cultivateurs dans des comtés ruraux comme le mien. C'est des personnes qui sont sur le bien-être social, qui attaquent un cultivateur, soit pour une question de droit de passage, soit pour une question de clôture, puis là, elles vont faire dépenser 5000 $, 10 000 $ à des cultivateurs puis, en bout de ligne, elles ont complètement tort, mais elles ont fait dépenser de l'argent un peu pour mal faire. Dans un cas qui est devant la cour actuellement - ça va passer d'ici peu, là - le type était enregistré: ils l'ont écouté, ils ont mis son téléphone sur écoute puis, il s'est parjuré, le gars. Selon celui qui accuse, c'est complètement faux, puis il le sait, à part ça, il sait que c'est quasi réglé. Il va passer en cour au mois de juin, à la fin de juin, au début de juillet, ça fait quoi? Ça fait deux fois que ça arrive pour le même gars, à part ça. Le gars, ça lui a coûté 5000 $, il y a trois ans, puis il dit: Ça m'a coûté au moins 10 000 $, parce que j'ai pris des avocats de l'extérieur de la région pour ne pas qu'il y ait de problèmes, puis ça lui coûte 10 000 $ actuellement, puis il n'a pas fini encore. Qu'est-ce qui peut arriver à une affaire de même? Est-ce que... Le gars n'a rien. Est-ce que je suis hors sujet, c'est peut-être plus tard, je ne le sais pas, là.

M. Rémillard: Non, M. le Président...

Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.

M. Rémillard: ...je ne veux pas me prononcer pour le président, mais je pense que vous n'enfreignez pas le règlement, ce sont des problèmes que, malheureusement, nous avons aussi. Alors, dans ce contexte-là, M. le député de Berthier, ce que je peux vous dire, c'est qu'il faut se référer au code d'éthique des avocats: un avocat ne doit pas prendre une cause pour le plaisir de prendre une cause, mais doit prendre une cause lorsqu'il s'agit de faire valoir les droits ou de défendre les droits et obligations de son client. Si une cause a été prise sans fondement juridique, à ce moment-là, le Barreau est là et il y a un syndic qui existe, une plainte peut être portée, on peut s'adresser au Barreau, mais c'est une situation dont on entend parler - je ne sais pas si elle est fondée ou pas - mais on entend de ces commentaires, de ces critiques, et la seule réponse qu'on peut donner, c'est qu'il faut que le Barreau, à ce moment-là, en soit saisi et que le Barreau fasse enquête par un syndic. Et, quand on regarde le nombre de plaintes qui sont portées devant nos corporations professionnelles et la façon dont nous procédons maintenant, je crois que, de plus en plus, on va se retrouver devant une justice au niveau de l'administration de nos codes d'éthique de nos corporations professionnelles, une justice plus ouverte et une justice qui pourrait être plus accessible, à ce niveau-là aussi, de la part des citoyens.

Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le ministre. Alors, pour le bénéfice des membres de la commission et de vous, M. le ministre, nous allons poursuivre nos travaux jusqu'à 12 h 45 et nous terminerons plus tôt cet après-midi, à 16 h 15, tel que convenu avec votre directrice de cabinet.

Alors, Mme la députée de Terrebonne, sur le programme 11, apparemment, vous vous étiez entendus la dernière fois pour revenir sur le programme 11, qui concerne la protection du consommateur, et plus spécialement sur les éléments 2 et 3 concernant les plaintes, je crois.

Protection du consommateur

Mme Caron: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Dauphin): Mme la députée de Terrebonne.

Commissaire aux plaintes des clients des distributeurs d'électricité

Mme Caron: L'élément 2 du programme 11 se réfère justement au Commissaire aux plaintes des clients des distributeurs d'électricité.

Ce nouvel organisme a débuté ses activités en septembre 1989. Le commissaire est chargé d'étudier les plaintes des clients lorsque ceux-ci sont insatisfaits des démarches effectuées auprès de leur distributeur d'électricité. On sait que le commissaire possède un simple pouvoir de faire des recommandations, ce qui a d'ailleurs été dénoncé par les ACEF, lors de la création du bureau.

J'aurais quelques questions très précises, M. le Président. En premier lieu, combien de plaintes ont été reçues au bureau du commissaire et combien de plaintes ont été traitées jusqu'à maintenant?

Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.

M. Rémillard: M. le Président, avec votre permission, est-ce que je peux demander à M. le commissaire Schwartz de répondre à ces questions techniques de sorte que Mme la députée puisse avoir les réponses les plus complètes possible?

M. Schwartz (William O.): Alors, M. le Président, si...

Le Président (M. Dauphin): Alors, M Schwartz.

M. Schwartz: Si on regarde les demandes d'intervention depuis l'entrée en vigueur de la loi 135, au 1er septembre, on voit que le total des plaintes qu'on a traitées à date monte à 700.

On constate également une augmentation constante dans le nombre de plaintes qui nous sont soumises. En effet, si vous me permettez, en septembre 1989, notre premier mois d'existence, on a reçu 19 demandes d'intervention. Cinq mois après, au mois de janvier, ce chiffre montait à 99 et, au mois de mai qui vient de se terminer, nos chiffres nous démontrent qu'on a reçu 180 demandes d'intervention.

Mme Caron: Est-ce que vous pouvez nous donner un aperçu de la nature de ces plaintes?

M. Schwartz: Oui. Je dirais que la grande majorité, plus de 80 % de nos plaintes sont en rapport avec la facturation et les problèmes qui y sont reliés.

Mme Caron: Est-ce que ça concerne précisément les suspensions en alimentation d'électricité?

M. Schwartz: Non. Il y en a des plaintes en rapport avec les interruptions de service, mais la plupart de ces plaintes sont traitées de façon très efficace par la société d'État elle-même. Ces plaintes en rapport avec la facturation sont de l'ordre suivant: ceux qui se plaignent que la facture est trop élevée, ce qui est tout à fait normal; ceux qui se plaignent des factures qui contiennent des erreurs, ce qui arrive souvent; ceux qui se plaignent que leur facture est basée sur une consommation estimée, parce que le releveur n'a pas pris la lecture réelle du compte; il y a également ceux qui n'ont même pas reçu un compte pendant des mois.

Mme Caron: Combien de plaignants ont reçu une réponse positive suite à leur plainte à votre bureau?

M. Schwartz: Je dirais qu'on a réglé, parce que c'est notre but de favoriser le règlement entre les parties, 99 % des plaintes qui nous ont été soumises.

Mme Caron: Je vous remercie. Est-ce que le ministre considère que les consommateurs sont suffisamment informés de l'existence de ce nouveau bureau?

M. Rémillard: À ce niveau-là, M. le Président, il est évident que, quand on fait face à un service public de l'importance de l'électricité, on n'a jamais assez d'information auprès du public pour l'informer de ses droits Je dois dire que je suis le ministre qui administre la loi, tuais la responsabilité de cette loi appartient à la ministre de l'Énergie. Il est évident que nous pourrions développer les moyens que nous pouvons avoir à notre disposition pour informer le public de l'existence de ce commissaire. Son existence est toute récente. Le commissaire va pouvoir intervenir sur la place publique, mentionner dans quelles conditions les citoyens peuvent avoir recours à ses services et je crois que nous pourrions certainement utiliser d'autres moyens, mais la préoccupation de la députée est fort légitime. Pour ma part, dans la mesure où c'est possible de le faire, je crois qu'on devrait développer le plus de moyens possible pour faire connaître l'existence du commissaire et faire connaître la façon dont les citoyens peuvent avoir accès aux services de ce commissaire. Mais je vais demander à M. le commissaire de compléter ma réponse, parce qu'il y a aussi l'Office de la protection du consommateur qui peut être impliqué dans cette situation-là.

M. Schwartz: Je crois que c'est important de souligner le fait que la loi comme telle prévoit la nécessité pour le distributeur même d'Indiquer dans la réponse qu'il donne au client qui s'adresse à lui, par écrit, l'existence de notre bureau. Il faut s'adresser en premier au distributeur. Le distributeur a un certain délai prescrit par la loi durant lequel il doit répondre également par écrit à l'abonné. Dans sa réponse, il doit, suivant les exigences de la loi, de la procédure qui était prévue par la loi, indiquer à l'abonné notre existence et le fait que s'il n'est pas content de la réponse qu'on lui donne dans cette lettre il a toujours la possibilité de demander l'intervention du commissaire.

Mme Caron: Dernière question sur cet élément. Est-ce que le ministre a le pouvoir de demander au commissaire, suite à l'examen de son rapport annuel, rapport que vous devez présenter, d'enquêter ou d'examiner des dossiers précis si un secteur s'avère très problématique?

M. Schwartz: Disons que la loi prévoit très clairement que le commissaire est obligé de déposer un rapport une fois par année et notre premier rapport va être émis avant le 31 décembre. La loi prévoit également que, dans ce rapport, le commissaire peut faire n'importe quelle recommandation. Il se prononce sur les politiques d'Hydro-Québec ainsi que sur l'application de la procédure d'examen des plaintes que le distributeur a été obligé d'établir et de diffuser auprès de sa clientèle.

Mme Caron: Est-ce que vous comptez accorder une attention particulière aux suspensions d'alimentation en électricité, quand on sait qu'en 1988 30 188 suspensions ont été faites à Hydro-Québec et, durant la période hivernale seulement, c'est à-dlre de novembre à avril, 10 622 coupures d'électricité? Est-ce que vous comptez intervenir sur ce sujet-là?

M. Schwartz: J'aurai certainement quelque chose à dire lors de mon rapport annuel à ce sujet. Les services d'électricité sont des services

essentiels, à mon avis, et je déplore le fait qu'il soit nécessaire pour cette société d'État de prendre une mesure aussi drastique que d'interrompre les services d'électricité, surtout durant l'hiver. Mais je préfère attendre jusqu'au moment où on déposera notre rapport annuel, parce que, présentement, on est réellement dans une période de réflexion cl d'évaluation.

N'oubliez pas que, lors de l'entrée en vigueur de la loi, la société d'État était en conflit de travail, c'était un moment difficile pour les employeurs et les employés et, dans ces circonstances, ça a été un peu difficile de déterminer avec précision la nature et l'étendue même des problèmes qui existent à la boîte.

Mme Caron: Je vous remercie. M. Schwartz: De rien.

Mme Caron: Nous allons suivre très attentivement le dépôt de votre rapport. Comme le temps s'écoule très vite, j'aurais peut-être deux petites questions concernant l'élément 3, c'est-à-dire le Commissaire aux plaintes en matière de protection du territoire agricole.

Le Président (M. Dauphin): Merci, M. Schwartz, pour votre coopération. En deux minutes, Mme la députée de Terrebonne.

Commissaire aux plaintes en matière de protection du territoire agricole

Mme Caron: Ce bureau, lui aussi, en est à sa première année d'existence. J'aimerais, en gros, poser exactement le même type de questions, c'est-à-dire le nombre de plaintes reçues, le nombre de plaintes traitées et s'il y a suffisamment d'information sur l'existence de ce bureau.

Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.

M. Rémillard: M. le Président, j'essayais de trouver M. le commissaire qui était ici ce matin puis qui, tout à coup, a dû s'absenter, m'in-forme-t-on. Il vient de s'absenter, tout le monde me confirme ça. Il ne s'est pas dissimulé quelque part. Il s'est vraiment absenté.

Le Président (M. Dauphin): Je vous dirai qu'il est attendu, M. le ministre.

M. Rémillard: Oui. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Rémillard: Parce que j'aimerais qu'on puisse donner le maximum de compléments de réponse. J'ai ici l'information qu'il y a eu 13 demandes d'information qui ont été acheminées au bureau du Commissaire aux plaintes en matière de protection du territoire agricole, impliquant des réponses par écrit ainsi que la transmission du formulaire préparé à I'intention d'un producteur agricole qui désire formuler une plainte, et il y a eu 8 plaintes qui ont été dûment formulées. Après examen, aucune n'a été jugée recevable. Dans les circonstances, aucun rapport n'a fait l'objet d'une publication par le commissaire.

Mme Caron: M. le Président, est-ce que le ministre n'a pas l'impression que ce bureau a été créé plutôt pour calmer les esprits devant certaines décisions de la CPTAQ l'an dernier, puisque le résultat semble plutôt nul au niveau des plaintes ou est-ce qu'il n'y a pas suffisamment d'information, que les citoyens ne sont absolument pas au courant de l'existence de ce commissaire?

M. Rémillard: M. le Président, il m'apparaît, pour répondre à cette question de la députée, qu'il faut revoir ce rôle du commissaire et peut-être compléter son rôle. J'ai écrit au ministre de l'Agriculture et au ministre des Affaires municipales et je leur ai demandé de collaborer avec nous pour que l'on puisse cerner de plus près le rôle du commissaire, à la lumière de l'expérience que M. le commissaire, M. Rioux, a maintenant, et de peut-être compléter le mandat du commissaire pour qu'il y ait le plus d'efficacité possible.

Maintenant, si vous soulignez aussi la question de l'information auprès des citoyens, là encore je vais vous répondre que, oui, on devrait essayer d'informer le public de l'existence de ce commissaire. Mais j'espère donc, dans un avenir prochain, pouvoir travailler avec mes deux autres collègues pour compléter le mandat du commissaire.

Mme Caron: Surtout, M. le ministre, si on considère que ce bureau compte cinq personnes et un budget de 361 900 $ pour 13 demandes d'information et 8 plaintes, je pense qu'il y a vraiment lieu de revoir ce dossier.

M. Rémillard: C'est justement sur ce sujet-là que j'entends faire le point avec mes collègues.

Mme Caron: Merci.

Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup, M. le ministre, et nous reprendrons nos travaux à 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 48)

(Reprise à 14 h 16)

Le Président (M. Dauphin): La commission des institutions reprend ses travaux sur le

mandat bien précis de voir à l'étude des crédits budgétaires du ministère de la Justice. Nous allons poursuivre avec Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve sur les programmes 1 et 2 toujours. Alors, Mme la députée.

Formulation de jugements (suite)

Mme Harel: Alors, M. le Président, pour les compléter, compte tenu du peu de temps qui est à notre disposition et du grand nombre de dossiers que nous espérions aborder cet après-midi. Quant à la présence de nouveaux juges avec l'ajout de 6 juges, je pense que l'évaluation proprement dite était de 9 juges qu'il manquait à Montréal. On comprend que, des 6 nouveaux juges, 3 d'entre eux seront assignés à Montréal et les autres à Saint-Jérôme et Valleyfield. D'abord, une question: Est-il exact qu'il n'y a que 22 femmes juges sur le total de 285 juges au Québec?

M. Rémillard: Combien? Mme Harel: Vingt-deux... M. Rémillard: Je vais vérifier.

Mme Harel: ...avec la nouvelle juge nommée parmi les 6 nouvellement désignés, à la Cour du Québec, évidemment.

M. Rémillard: On a une juge qui est juge en chef associée, Mme la juge Huguette Saint-Louis, qui fait un travail remarquable. Remarquez qu'elle est juge associée pas parce qu'elle est femme, mais parce qu'elle est compétente, comme dans tous les cas. Mais, à l'intérieur du ministère de la Justice comme à l'intérieur de la magistrature, définitivement, il n'y a pas assez de femmes, ça, c'est évident. À l'intérieur du ministère, il y a un plan pour établir un plus juste équilibre; au niveau de la magistrature, nous tentons aussi d'avoir un équilibre plus juste. Pendant que je vous parle, on vérifie si le nombre est exact. Alors, il faudrait avoir la liste de tous les juges pour savoir si ce chiffre est exact, mais, si vous l'avez fait, probablement que je me fie à votre parole.

Mme Harel: De toute façon, que ce soit 7 % ou 10 %, vous et moi, nous nous entendons sur le fait que c'est insuffisant...

M. Rémillard: Nettement insuffisant.

Mme Harel: ...et qu'il ne s'agit pas de nommer des femmes parce qu'elles sont femmes, mais parce qu'elles sont compétentes. Il y en a certainement plus que les 7 % ou 10 % qui sont en poste présentement.

M. Rémillard: Définitivement, c'est ça.

Mme Harel: Je le connais, ce plan d'action au ministère, c'est excellent, et quel est celui que vous envisagez au niveau de la magistrature?

M. Rémillard: Encourager les femmes à se présenter aux concours de la magistrature, à postuler. Le problème, c'est qu'on m'a informé qu'il n'y a pas beaucoup de femmes qui postulent pour les postes de la magistrature et là, je ne pourrais pas vous dire les raisons, je ne sais pas pourquoi. Mais on m'a informé qu'il n'y avait pas beaucoup de femmes qui postulaient. On vient de nommer, je viens de nommer...

Mme Harel: Une...

M. Rémillard: ...une nouvelle femme, Mme Matte...

Mme Harel: ...sur six, c'est ça.

M. Rémillard: ...et puis, il y a quelques mois aussi, Mme Villeneuve, qui a été nommée à Valleyfield. Alors, il y a des nominations, on essaie. Pour moi, c'est une priorité, c'est une préoccupation, le principe qu'on puisse avoir les recommandations adéquates en fonction des règles et de la réglementation qui existent pour la nomination des magistrats.

Mme Harel: Évidemment, une...

M. Rémillard: II y en a une autre aussi, on a nommé dernièrement, à Val-d'Or, Mme Denise

Leduc, qui vient d'être nommée. Alors, on en a nommé quatre ou cinq dernièrement, dans les six derniers mois.

Mme Harel: Sur un total de combien?

M. Rémillard: Peut-être d'une dizaine, je pense, huit ou dix. Je pense que notre moyenne s'améliore grandement. Il y a encore beaucoup de chemin à faire et je ne voudrais pas devancer ici des nominations qui peuvent être faites et qui sont faites à des gens compétents qui, en l'occurrence, sont des femmes.

Mme Harel: II y a certainement un rattrapage à faire. On a parfois l'impression que c'est le secteur de la société québécoise qui a le moins bougé depuis les 30 dernières années, celui où, finalement, visiblement, il y a encore énormément de rattrapage à faire.

M. Rémillard: Oui, dans le domaine juridique. Ça change parce que dans la profession juridique, chez les avocats... Maintenant, je serais curieux de savoir la proportion de femmes avocates, mais elle a évolué énormément, je dirais, dans les dix dernières années. Il faut au moins dix ans pour être avocat, avocate. J'ai

l'impression que, dans les prochaines années, on va avoir beaucoup plus de candidatures féminines. C'est sûr que la profession d'avocate comme d'autres professions, ingénieur, par exemple, ou médecin... La médecine aussi, depuis les dernières années, il y a beaucoup plus de femmes qui sont dans le domaine professionnel de la médecine. J'ai bon espoir qu'on va pouvoir en arriver à une situation plus équitable, plus respectueuse de ces données qui sont fondamentales, évidemment, dans notre société; c'est pour ça qu'on est ici, mais on a un bon bout de chemin à faire encore.

Mme Harel: M. le Président...

Le Président (M. Dauphin): Mme la députée.

Mme Harel:... avant de compléter le programme 1, j'aimerais demander au ministre comment il se fait que dans un contexte d'évolution du droit et aussi de bouleversement de la société elle-même les crédits alloués au perfectionnement des juges n'aient pas connu d'augmentation, selon ce que je comprends dans les crédits. C'est un budget qui se stabilise. Est-ce qu'il n'y a pas pourtant une forte demande d'actualisation, souvent, des problèmes juridiques ou des problèmes sociaux?

Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.

M. Rémillard: M. le Président, on pourrait certainement donner encore plus d'argent pour la formation permanente de nos juges. Déjà, il y a un budget que je qualifierais d'intéressant, pas plus, parce qu'on pourrait en mettre plus, je suis bien d'accord là-dessus, il faut, à un moment donné, avoir des limites budgétaires. Le juge en chef Gobeil est le premier à faire en sorte que l'on puisse trouver toutes les ressources qu'on peut avoir pour que nos juges aient une formation adéquate qui suit l'évolution du droit. J'en profite pour rendre hommage à notre magistrature qui est toujours une magistrature dont on peut être très fiers au Québec. Il y a des colloques, des séminaires, il y a différents moyens qui sont utilisés par les juges pour se tenir à date, mais le prochain défi est un défi de taille, c'est celui du nouveau Code civil qui comprendra près de 3000 nouveaux articles, donc une réforme considérable de tout notre droit civil. C'est un défi pour tous les avocats, toutes les avocates, pas simplement pour nos magistrats. Tout le monde doit retourner à sa table de travail, excepté ceux qui ont suivi assidûment les commissions parlementaires et quelques professeurs de droit qui ont déjà une bonne connaissance de la réforme du Code civil. Je pense, entre autres, au président qui préside ces séances, qui connaît bien la réforme du Code civil, et à plusieurs membres de cette commission qui sont là.

Par conséquent, M. le Président, le juge

Tellier, qui est le secrétaire du Conseil de la magistrature, est ici. Je crois qu'il est ici, il rne semble que je l'ai vu.

Une voix: II était ici ce matin.

M. Rémillard: Est-ce que le juge Tellier est ici?

Une voix: Non, il n'est pas revenu cet après-midi.

M. Rémillard: Bon, définitivement, je manque de chance dans mon recours à mon personnel au moment où je trouverais ça intéressant d'avoir recours à mon personnel.

Une voix: M. Rioux est là.

M. Rémillard: On m'informe que M. Rioux est de retour.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Rémillard: Alors, je veux saluer M. Rioux.

Le Président (M. Dauphin): Bienvenue.

M. Rémillard: Je vous ai cherché, M. Rioux.

Une voix: II n'est jamais trop tard!

Le Président (M. Dauphin): Est-ce qu'ils ont droit à leurs frais de déplacement quand même, à ce moment-là?

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Alors, le programme 1 est adopté, M. le Président.

Le Président (M. Dauphin): Alors, nous allons, évidemment, tous les adopter à la fin. J'appelle le programme 2.

Soutien administratif à l'activité judiciaire (suite)

Mme Harel: J'aimerais aborder la question de l'engorgement de certaines cours, notamment celle de Saint-Jérôme. Doit-on comprendre que le plan directeur, qui est différent du plan de redressement, le plan directeur pour l'aménagement de locaux a été reporté aux calendes grecques ou faut-il comprendre... Pourquoi avoir reporté des travaux qui devaient débuter à Saint-Jérôme? Qu'en sera-t-il à Trois-Rivières? Qu'en est-il à Dolbeau? Bon, je n'ai pas, évidemment, à illustrer la situation plus qu'elle ne l'a été abondamment dans les journaux. Alors, quelle sera l'intervention du ministère? Aux crédits, on

ne voit rien venir, là.

Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.

M. Rémillard: Oui, M. le Président. Quand je suis arrivé au ministère, je me suis fait un devoir de visiter les palais de justice en région et j'en ai visité beaucoup, même, je dois dire, la très très grande majorité. Je suis allé dans la belle région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, comme je suis allé dans la région de Montréal, comme je suis allé dans la région de la Gaspésie, de l'Outaouais, des Laurentides, et, en parlant des Laurentides, il y a Saint-Jérôme. J'ai visité, je me suis attardé à deux reprises au problème du palais de justice de Saint-Jérôme. Il faut apporter d'abord des solutions ponctuelles pour répondre à la situation actuelle qui n'a pas de bon sens et j'ai rencontré mon collègue des Approvisionnements et Services, justement hier, qui m'a confirmé que toutes les démarches administratives étaient complétées pour qu'on apporte maintenant des solutions à Saint-Jérôme, dans un premier temps, en attendant d'apporter des solutions plus globales pour solutionner notre problème plus global que nous avons là. Le problème de Saint-Jérôme - c'est un palais de justice qui date de pas tellement longtemps; il a peut-être, quoi, une dizaine d'années?

Une voix: 15 ans.

M. Rémillard: 15 ans, M. le sous-ministre. Alors, il a 15 ans, mais on n'avait pas prévu l'évolution, je pense, des choses. En particulier, situé à côté de Mirabel, il y a toute la criminalité qui peut survenir autour d'un aéroport international de l'Importance de Mirabel. Or, ça arrive au palais de justice. Je veux rendre hommage au personnel qui est là, tant du côté de la magistrature que du côté des procureurs et des employés de soutien qui font un travail magnifique, malgré des situations difficiles. Alors, j'ai reçu l'assurance, hier, qu'on trouverait des solutions ponctuelles en attendant une solution globale.

Quant au plan général que nous avons, mon ministère est en train de mettre la dernière main à ce plan, après avoir fait l'état de la situation de chacun; alors, les 59 palais de justice. Combien y a-t-il de palais de justice? Il y en a 58 1/2, 59 palais de justice partout au Québec. Et je vais demander à M. le sous-ministre Chamberland de compléter ma réponse, M. le Président, si vous n'avez pas objection.

Le Président (M. Dauphin): D'accord. Alors, M. Chamberland. (14 h 30)

M. Chamberland (Jacques): Alors, pour compléter la réponse de M. Rémillard, je veux simplement dire qu'en ce moment il y a, en voie de réalisation, cinq projets majeurs. Comme vous le savez, Laval. Rivière-du-Loup, Saint-Jean-sur-Richelieu sont au nombre de ces projets. Maintenant, le ministère s'est rendu compte qu'un des problèmes que nous avions, c'est qu'on n'avait pas le portrait global de la situation des palais de justice et des points de services à travers la province, de telle sorte qu'on arrivait avec des demandes ponctuelles, sans vraiment savoir si la demande qu'on faisait était pour un palais en particulier, et ça devait passer avant la demande qu'on aurait pu faire pour un autre palais. Alors, ce que nous avons réalisé au cours de la dernière année, c'est une évaluation de l'état de nos locaux dans toute la province. Alors, dans ce sens-là, et je pense que ce sera un bon point de départ, à partir de maintenant, on a le portrait global de la situation. On a analysé, en ce sens-là, 25 palais de justice; ça va d'Arthabaska à Trois-Rivières en passant même par Ville-Marie, Val-d'Or, etc. Maintenant, il y a quelques palais qui n'ont pas été évalués parce qu'ils sont tellement récents que ce serait inutile, des palais qui ont été construits tout récemment. Il y a un troisième volet à l'étude qu'on a faite, c'est le dossier du palais de justice de Montréal. Étant donné son importance, il fait l'objet d'un dossier particulier.

Alors, pour me résumer, il y a cinq projets majeurs en voie de réalisation dont Laval, Rivière-du-Loup, Saint-Jean-sur-Richelieu, un pian directeur qui évalue l'ensemble des palais de justice qui ont plus de 15 ans, si on veut, et le dossier du palais de justice de Montréal qui fait l'objet d'un dossier particulier.

Le Président (M. Dauphin): Mme la députée.

Mme Harel: Voulez-vous me renommer les cinq projets majeurs? Vous disiez: Laval, Rivière-du-Loup, Saint-Jean-sur-Richelieu...

M. Chamberland: Cowansville et le Tribunal de la jeunesse à Montréal, l'édifice Bellechasse, que vous avez eu l'occasion de visiter et auquel vous faisiez allusion tantôt.

Mme Harel: II y a eu un plan directeur qui a été soumis au Conseil du trésor en janvier dernier.

M. Chamberland: C'était le premier volet du plan directeur.

Mme Harel: Avez-vous eu des réponses sur ce plan directeur d'il y a quatre mois, cinq mois maintenant?

M. Chamberland: II faudrait que je vérifie peut-être avec les gens des ressources matérielles pour être certain de vous donner une réponse complète. Si vous me permettez. C'est ça. C'est que le premier volet, le premier projet directeur comportait les cinq projets que je vous ai

mentionnés tantôt.

Mme Harel: Alors, c'est soumis depuis janvier dernier. Est-ce qu'il y a dos réponses qui ont été apportées?

M. Chamberland: Bien oui. Par exemple, Laval est en voie de construction, Rivière-du-Loup, Saint-Jean-sur-Richelieu. Ce sont des dossiers qui sont en voie de réalisation, ils sont à différentes étapes du processus gouvernemental.

Mme Harel: Et Saint-Jérôme n'en faisait pas partie, c'est ça qu'il faut comprendre?

M. Chamberland: Saint-Jérôme ne faisait pas partie de ce premier groupe qui avait été déposé. En fait, ça avait été déposé le 31 août 1988, mais depuis ce temps-là il en fait partie. Il fait partie de la deuxième phase, l'étude que nous avons complétée.

Mme Harel: Très bien. Ma collègue de Chicoutimi aimerait particulièrement interroger le ministre sur la question de la fusion des directions régionales et mon collègue d'Abitibi-Ouest aurait souhaité le faire aussi, mais, finalement, il n'a pas pu être parmi nous. Alors, j'imagine que tu en parleras également.

Mme Blackburn: Oui, je vais faire les deux.

Le Président (M. Dauphin): Alors, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Comme l'a bien introduit la députée de Hochela-ga-Maisonneuve, j'aimerais savoir où en est la réflexion du ministre quant à ce qui a couru, que j'ai voulu interpréter comme étant une rumeur ou peut-être une réflexion, l'idée à l'effet qu'on abolirait différentes directions régionales des services judiciaires, et en particulier celle de la région 02, celle de l'Abitibi, pour les fusionner. La rumeur voulait, dans un premier temps, que ça soit Abitibi, Saguenay, Chicoutimi et Trois-Rivières qui en formeraient une et, ensuite, il a été question de Chicoutimi, Québec, Abitibi et Hull. Chez nous, ça a soulevé un tollé de protestations. Je sais qu'il y a eu quelque 85 résolutions qui ont été acheminées au ministre et, je pense, avec raison. Je vais essayer d'en expliquer quelques-unes, la première étant... D'abord, il en va d'une certaine autonomie des régions, d'une volonté d'assurer des services les plus complets possible en région et, quand on parle d'un bureau régional, on parle de perte de services, s'il disparaissait et de perte d'emplois. Alors, la question est très claire. J'ai déjà eu l'occasion d'en parler avec le ministre. Je sais que le député d'Abitibi-Ouest également, comme le disait Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve, aurait souhaité être ici. Il me prie de poser à sa place les questions concernant sa région, mais, de façon plus générale, est-ce que ce projet à été abandonné?

M. Rémillard: M. le Président...

Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.

M. Rémillard:... c'est une question qui est très importante parce qu'elle se réfère à un point qui, pour moi, est fondamental lorsqu'on parle de l'administration de la justice: c'est l'accessibilité à la justice. Et parler d'accessibilité à la justice au Québec, c'est se référer à un territoire qui est immense, qui est faiblement peuplé et qui comprend, donc, un régionalisme très articulé, très présent. Pour ma part, je suis un tenant du régionalisme, c'est-à-dire de la décentralisation des services en ce qui regarde, entre autres, des services publics. Je crois que le développement social, politique, économique et culturel du Québec passe par la régionalisation. C'est ce à quoi je crois. À partir de là, en ce qui regarde le ministère de la Justice, nous avons actuellement 10 régions administratives; nous avons des gens qui administrent des régions regroupant des services judiciaires dans despalais de justice, des bureaux d'enregistrement, et nous sommes à avoir différents plans, différentes possibilités de réorganisation de l'ad-. ministration de la justice dans les régions dans l'objectif de développer et d'améliorer notre service à la clientèle. Nous voulons avoir plus d'accessibilité dans nos services et plus de qualité aux services que nous présentons à la clientèle. C'est donc dire que, pour nous, ce qui est important, c'est qu'on protège la qualité du service, qu'on protège son accessibilité et qu'on protège, par le fait même, cette relation du service à la spécificité de la région. Et, pour moi, c'est un élément qui est important. Quand je parle de régionalisme, je ne parle pas simplement de déconcentration, je parle de décentralisation. Dans la mesure où le ministère de la Justice est impliqué, pour nous, il s'agit de voir les différentes possibilités que nous avons de développer la qualité de nos services à la clientèle tout en respectant ce régionalisme.

Mme Blackburn: Moi, j'aime bien le discours, mais je n'ai pas de réponse. Ce que les gens me demandent, à moi, c'est essayer de voir où s'adresse le ministre là-dedans. Il fait un beau discours sur le régionalisme, mais ce que je veux savoir, en clair: Est-ce que le ministre a, oui ou non, l'intention d'abolir les directions régionales et de fusionner la direction du Saguenay et celle de l'Abitibi avec d'autres régions? Et le discours que le ministre nous lient.. Il y a un courant actuellement qui veut qu'on décentralise les effectifs de fonctionnaires dans les directions des régions. Et une bonne qualité des services à l'endroit de la clientèle, ça

débute quand vous avez une bonne qualité des rapports entre la direction régionale et les services qui sont à offrir là. Je pense qu'il y a un lien direct, qui va de l'organisation de la direction régionale, ensuite la qualité des services, et la spécificité de la région, ça passe aussi. par là. Ce que je vous demande, en mon nprn et au nom du député d'Abitibi Témiscamingue, mais des gens de sa région comme des gens de la mienne: Est-ce que vous pouvez nous dire que ce projet de fusionner les directions du Saguenay-Lac-Saint-Jean et de l'Abitibi, c'est un projet qui est abandonné?

Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.

M. Rémillard: M. le Président, si je me réfère au principe que vient d'énoncer Mme la députée, j'ai fait mien dans bien des cas, et c'est ce que j'ai énoncé tout à l'heure...

Mme Blackburn: Oui.

M. Rémillard: Maintenant, comme administrateur, comme ministre, j'ai à prendre des décisions sur une administration qui serait la plus susceptible possible d'assurer une bonne qualité du service qu'on doit rendre.

Mme Blackburn: Oui.

M. Rémillard: Et quand Mme la députée dit. Qualité des services veut dire respecter la spécificité de la région, je dis: Oui, vous avez parfaitement raison. Et, à ce niveau-là, pour nous, il ne s'agit absolument pas de faire perdre de l'emploi à qui que ce soit, les mêmes postes vont demeurer. Il s'agit de voir comment on peut aménager les différentes régions pour qu'on puisse respecter la spécificité et aussi assurer une qualité des services la meilleure possible. Alors, nous voyons cas par cas les situations, mais je veux simplement dire qu'il n'est. pas question, pour nous d'éliminer des postes dans les régions, d'éliminer des responsabilités qu'il peut y avoir. On peut établir différents autres éléments administratifs qui nous permettraient de développer la qualité du service, oui, mais il y a bien des scénarios qui sont envisagés et je peux vous dire que, pour ma part, il n'y a pas de fusion, mais on peut, penser à des restructurations possibles, on peut penser à des aménagements, mais je n'ai pas de scénario de fusion comme telle.

Mme Blackburn: Pourtant, j'ai ici en main une lettre qui a été...

Le Président (M. Dauphin): Mme la députée.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Une lettre adressée au député d'Ungava, Christian Claveau, et qui émane de votre cabinet, qui est signée par Jean-il. Lavoie, conseiller politique, et qui est datée du 19 janvier 1990: "L'intention du ministère est de fusionner certaines directions afin d'en réduire le nombre et ainsi réduire les coûts y afférents. " Alors...

M. Rémillard: II faudrait que vous me montriez ça. Voulez-vous la déposer, puisque vous la citez?

Mme Blackburn: Oui.

M. Rémillard: Parce qu'il faudrait que je regarde ça. Je vous avoue que je ne connais pas cette lettre-là.

Le Président (M. Dauphin): Alors, j'accepte le dépôt.

Mme Blackburn: Oui, merci, M. le Président. Une des façons de s'assurer que la qualité des services qui sont offerts dans les régions corresponde aux besoins de la région, c'est de rapprocher ceux qui ont la responsabilité de l'application de la justice des services. Et ça, c'est aussi vrai, parce que, autrement, vous savez comment ça va fonctionner. Puis, ce qu'il y a en-dessous de ça, c'est, encore une fois, qu'on va vider les régions, puis on l'a fait. Écoutez, on l'a fait dans tant de secteurs, là, qu'on ne compte plus les pertes d'emplois dans les régions, parce qu'on centralise de plus en plus. C'est que, quand il y a des coupures, curieusement, elles se font peu à Québec, elles se font dans les régions. Et moi, ce que j'attendais aujourd'hui de la part du ministre, c'est qu'il me dise de façon claire: II n'est pas question, pour nous, de fermer la direction régionale des services dans la région 02, pas plus qu'en Abitibi-Témiscamingue..

Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.

M. Rémillard: Oui, M. le Président. Mme la députée faisait référence, donc, à une lettre qui est signée vraisemblablement par M. Lavoie, qui est un conseiller politique de mon cabinet. Elle citait un passage qui l'inquiétait. Moi, je peux lui citer, dans le deuxième paragraphe, je lis ici: "En premier lieu, il est à préciser que ce projet est encore sous étude au sein du ministère et qu'aucune décision quant à la façon dont seraient restructurées entre elles les différentes directions des services judiciaires n'a encore été prise. " On parle de restructuration, on parle d'aménagement...

Mme Blackburn: Et on parle de fusion dans le paragraphe d'en haut.

M. Rémillard: Et, là, vous me soulignez... Je vois, de fait, le mot "fusion" qui est là, comme tel. Moi, ce qui me guide dans tout ça, c'est d'assurer le meilleur service possible et d'alléger

les structures administratives, mais pas au détriment des régions, parce que l'argument de la députée, c'est mon argument aussi. Je viens d'une région puis je connais ça aussi, le problème qu'on a d'avoir des services en région. Les gens de Montréal qui sont ici, par exemple, ne connaissent pas ça. Je vois leur réaction.

Mme Blackburn: J'ajoute une brève question...

Le Président (M. Dauphin): Oui, allez y, Mme la députée.

Mme Blackburn:... parce que je ne me ferais pas pardonner si je ne la posais pas. On a un problème quant aux demandes d'expertise professionnelle qui émanent d'un juge pour savoir où les enfants vont être placés. Les délais d'attente sont de 12 à 18 mois, ce qui fait dire, tant au Barreau chez nous qu'aux juges eux-mêmes, qu'il y a là un déni de justice.

Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.

M. Rémillard: Peut-être pas un déni de justice, mais une situation difficile, en tout cas, très difficile. Je vais regarder ça. Je me demande s'il y a quelqu'un qui pourrait apporter des éléments ou un complément d'information, parce qu'il y a une situation, pour nos jeunes... Qui peut répondre à ça? Peut-être que M. Vaughan Dowie peut venir un instant. Moi, je n'ai jamais entendu ce commentaire-là, Mme la députée. On ne m'en a jamais informé. Peut-être que M. Vaughan Dowie a plus d'information que moi à ce sujet-là. (14 h 45)

Le Président (M. Dauphin): Alors, M. Dowie, qui est le président du comité de protection de la jeunesse.

M. Dowie: Je dois admettre que c'est la première fois que j'entends parler de ce problème-là. Je suis au courant du fait que le tribunal à Chicoutimi est plus engorgé qu'auparavant, suite à un certain nombre de décisions qui ont été prises par le tribunal en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants mais c'est la première fois que j'entends dire qu'il y a une attente pour des expertises pour les enfants qui viennent de la région 02.

Mme Blackburn: Je sais qu'on a peu de temps, mais vous pourriez peut-être vérifier. De même, il y a 700 dossiers qui ne sont pas informatisés et on passe de neuf occasionnels à quatre. C'est vraiment la pénurie. Ce n'est pas compliqué. Ce qui fait dire, et je le rappelle au ministre - il vérifiera auprès des juges et ils vont vous dire la même chose - qu'on a une situation que les juges eux-mêmes qualifient de déni de justice.

M. Rémillard: La députée m'informe d'une situation que je ne connaissais pas. Il semblerait aussi que les responsables de ce secteur ne la connaissaient pas. On va s'informer et, si vous avez des éléments complémentaires à nous donner, je vous saurais gré de nous les faire parvenir. Vous pouvez être assurée que, dès qu'on le pourra, on communiquera tout de suite avec ces gens-là pour voir quelle est la situation et pour vérifier cette situation-là.

Mme Blackburn: Merci.

Le Président (M. Dauphin): Merci.

Mme Harel: Vous de même, M. le Président.

Le Président (M. Dauphin): Merci, Mme la députée de Chicoutimi. Je reconnais maintenant la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Blackburn: Merci de me reconnaître, même si je ne suis pas membre de la commission.

Mme Harel: Alors, j'inviterais la commission à étudier le programme 6 sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels.

Le Président (M. Dauphin): J'appelle le programmée.

Indemnisation des victimes d'actes criminels

Mme Harel: M. le Président, les crédits 1990-1991 indiquent, en faveur de l'indemnisation des victimes d'actes criminels, un niveau de dépenses équivalent à celui des années précédentes, autour de 17 000 000 $. Faut-il comprendre qu'il n'y a pas eu d'élargissement de la connaissance de la loi et qu'à peine toujours 5 % des victimes présentent une demande d'indemnisation pour les dommages subis?

Le sous-ministre à la Justice avait l'an passé, et je vais le citer dans le texte... Selon le sous-ministe de la Justice, Me Jacques Chamber-land, quelque 15 000 000 $ ont été versés en indemnisations aux victimes d'actes criminels en 1988. Le ministère s'attend à hausser les prestations à 20 000 000 $ en 1990-1991. Il n'en fut rien, les crédits nous permettent de le vérifier. Donc, les questions sont les suivantes: Qu'est-ce que vous entendez mener comme campagne d'information pour faire connaître la loi sur l'indemnisation qui, manifestement, ne semble pas plus connue qu'avant?

En fait, les budgets qui sont accordés à l'indemnisation des victimes pour l'année qui vient n'ont pas non plus augmenté de façon substantielle et, d'autre part, le prédécesseur du ministre actuel avait annoncé 2 000 000 $ en faveur des centres d'aide aux victimes d'actes

criminels. Les budgets nous indiquent pour l'année dernière, pour les sept centres, un montant de 277 000 $ et il semble, pour l'année qui vient, que ce soit à peu de chose près les mêmes montants qui sont maintenus. Alors, qu'est-ce qu'il va y avoir de plus en faveur des victimes d'actes criminels, que ce qui avait été entrepris précédemment et que le train-train des dernières années où très peu de victimes sont au fait qu'une loi existe pour les indemniser?

Le Président (M. Dauphin): M. le ministre

M. Rémillard: M. le Président, je crois que la question se réfère aux déclarations du sous-ministre. Je vais demander au sous-ministre de répondre à la question.

Le Président (M. Dauphin): M. Chamberiand.

M. Chamberiand: Avec plaisir, M. le Prési dent. Effectivement, quand on regarde le programme 6 de cette année, on voit que les crédits alloués à l'indemnisation des victimes d'actes criminels se chiffrent à 20 000 044 $. Évidemment, il y a des dépenses de fonctionnement qui ramènent les versements qu'on prévoit effectuer à 17 500 000 $. Je ne suis pas familier avec les circonscriptions électorales, mais Mme Harel a touché un point important en disant que la loi n'est pas assez connue. Je pense qu'elle faisait allusion à un discours que j'ai prononcé à un colloque qui s'est tenu à Montréal, il y a quelques mois déjà, et où j'encourageais les gens à faire connaître l'existence de la loi sur l'indemnisation. C'est bête à dire, mais ça nous ferait plaisir de verser plus d'argent. Les gens ne semblent pas la connaître.

Maintenant, il faut dire qu'avec la création du Bureau d'aide aux victimes d'actes criminels et avec la création des sept bureaux régionaux, les centres locaux d'aide aux victimes d'actes criminels, notre espoir est que la loi va être mieux connue, parce que, justement, le mandat de ces centres locaux d'aide aux victimes d'acte criminels est de guider les victimes dans le dédale administratif. C'est de les encourager, les appuyer moralement, mais c'est aussi de leur tenir la main pour leur dire: Voici, vous avez des droits à exercer à tel endroit. Exercez-les!

Alors, notre prévision - et c'est peut être ce qui me faisait faire preuve d'optimisme - c'est que les bénévoles des centres locaux qu'on encadre au ministère de la Justice, grâce au personnel qui travaille au Bureau d'aide aux victimes d'actes criminels, vont justement faire connaître la loi à ces victimes. Il reste à attendre pour voir si ça va fonctionner, mais j'ai bon espoir, parce que les bénévoles impliqués localement sont très impliqués et ils sont - très ardents, très fervents dans leur désir d'aider les victimes. Et j'ai toute raison de croire que, la loi étant mieux connue, les versements vont suivre.

Mme Harel: Est-ce qu'il y aura d'autres CAVAC qui seront implantés au cours de la présente année sur le territoire du Québec?

M. Chamberland: Je ne le sais pas. Il faudrait que je me réfère à la directrice du Bureau d'aide aux victimes d'actes criminels. Notre idée, ce n'est pas d'arrêter à sept. Pour l'instant, on couvre de façon approximative, de façon régionale, tout le territoire québécois, mais, idéalement, il y en aura encore plus. Pour vous donner une réponse précise, II faudrait que je vérifie si on évalue, en ce moment, des projets spécifiques d'ouverture de centres locaux. Ça me fera plaisir de vous donner la réponse dans les jours qui viennent.

Je ne serais pas étonné qu'on en évalue, mais je n'oserais pas vous donner une réponse qui serait une déduction, plutôt qu'une réponse factuelle.

Mme Harel: Mais il n'y a aucun crédit qui est prévu au cours de la prochaine année pour ouvrir de nouveaux centres, par contre.

M. Chamberiand: Peut-être pas de façon spécifique, mais il ne faut pas oublier que le Bureau d'aide aux victimes d'actes criminels se finance à même le Fonds d'aide aux victimes d'actes criminels. Et c'est un fonds qui est financé, en partie, par un programme fédérai, une subvention du fédéral, et, en partie, par la suramende compensatoire. Alors, on a quand même pas mal de souplesse. Et vous savez, encourager la formation d'un CAVAC, ça peut se faire avec relativement peu de fonds. Je sais bien que, si on est mal pris, le ministre n'hésitera certainement pas à nous prêter un peu d'argent de son budget discrétionnaire pour nous aider à lancer un projet comme celui-là, un des projets qui lui tiennent à coeur. Alors, je pense que ce ne serait pas, en soi, un obstacle.

M. Rémillard: Question de privilège, M. le Président!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Dauphin): C'est noté dans le Journal des débats

M. Rémillard: C'est moi qui vais répondre aux questions!

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Lors de l'annonce officielle de la mise sur pied des CAVAC en juin 1988 - ça fait déjà deux ans - le prédécesseur du ministre avait annoncé 2 000 000 $, en fait, pour ouvrir des centres dans toutes les régions du Québec.

Finalement, on voit qu'il y a un total de presque 300 000 $ qui est alloué à ces centres Doit on comprendre que c'est sur présentation, sur demande? Comment rentrent les suramendes compensatoires? Quel est le volume des rentrées de fonds? Est-ce que c'est considérable?

Le Président (M. Dauphin): M. Chamberland.

M. Chamberland: Bon, c'est un nouveau programme. Ce sont de nouvelles dispositions de la loi qui doivent, comme toute autre nouvelle disposition, être mieux connues, mieux présentées aussi de la part des procureurs de la couronne et aussi de la part de la magistrature. Évidemment, nous en suivons l'évolution, au ministère, pour voir. C'est important pour nous, c'est ce qui finance le Fonds d'aide aux victimes d'actes criminels. Ça ne rentre pas aussi vite qu'on ne le souhaiterait et il y a des problèmes particuliers. Je pense en particulier à Montréal où ça ne semble pas être bien compris encore. Il y a une certaine résistance aux changements et aux nouveautés. Maintenant on y travaille; toutes les fois qu'on a une occasion de faire valoir ce qu'est l'amende compensatoire et faire valoir aussi les projets que la suramende compensatoire va nous permettre de réaliser, on le fait. Je sais, entre autres, que Christine Viens, qui est la directrice du Bureau a participé au dernier colloque des juges de nomination provinciale pour, leur faire connaître cette nouvelle loi. Alors, encore une fois, c'est du travail à faire. Ça va pas mal, mais ça ne va pas aussi bien qu'on ne le souhaiterait.

Mme Harel: Dans les dépenses du Fonds d'aide, n'est-il pas possible d'envisager une campagne d'information pour mieux faire connaître la loi sur l'indemnisation?

M. Chamberland: Bien, écoutez, à l'égard de la suramende compensatoire, la campagne d'information est très limitée.

Mme Harel: Oui.

M. Chamberland: Ce sont les 300 procureurs de la couronne et les 300 juges. Quant à la loi sur l'indemnisation, comme je vous le dis, la campagne d'information se fait indirectement, si vous voulez. On fait la promotion des centres locaux d'aide aux victimes d'actes criminels et ce sont ces locaux ensuite, ces centres locaux, qui vont, à leur tour, présenter les avantages de la loi. Ça fait partie de leur "kit" d'information, si vous voulez. Ça fait partie des informations de base qu'ils fournissent aux victimes d'actes criminels. Maintenant, si ça ne donne pas de résultats, il faudra, évidemment, penser à autre chose, peut-être à une campagne publique, mais vous savez combien ça coûte une campagne publique.

Mme Harel: On évalue à environ 46 000 le nombre de crimes perpétrés contre la personne et on sait qu'à peine 5 % des victimes demandent une indemnisation. À combien évaluez-vous réalistement le pourcentage de victimes qui seraient susceptibles d'utiliser la loi et qui ne le font pas?

M. Chamberland: Je n'en ai aucune idée. Je ne pourrais pas vous mentionner de chiffres. Ce qu'on souhaite, c'est que le plus de gens possible qui sont admissibles au paiement prévu à la loi sur l'indemnisation en fassent la demande et en profitent. La loi est là, aussi bien en profiter, mais je ne pourrais pas répondre de façon précise à votre question.

Mme Harel: La loi est administrée par la CSST dans les bureaux de la CSST en région.

M. Chamberland: C'est exact.

Mme Harel: Est-ce qu'il ne faut pas envisager qu'il y ait une campagne qui n'assujettisse pas la connaissance de la loi uniquement à la connaissance d'un centre d'aide, mais qui, de façon plus générale, diffuse des informations sur les bénéfices de la loi?

M. Chamberland: C'est une alternative qu'il serait possible de considérer.

Mme Harel: D'accord. Merci, M. le Président, et je vous inviterais à appeler le programme sur la réforme des tribunaux administratifs. Quel numéro? (15 heures)

Le Président (M. Dauphin): C'est au début, je crois. Le programme 2...

Mme Harel: C'est ça.

Le Président (M. Dauphin):... élément 2.

M. Rémillard: Est-ce que je pourrais savoir à quoi vous vous référez? On a de la difficulté à situer le programme.

Mme Harel: Semble-t-il que c'est le programme 2, Soutien aux tribunaux administratifs,, élément...

M. Rémillard: Programme 2?

Mme Harel: Oui, élément 2, programme 2.

M. Rémillard: Élément 2, programme 2.

Mme Harel: J'essaie de retrouver dans votre discours de ce matin ce que vous nous en disiez.

M. Rémillard: Est-ce que vous vous référez

à notre projet de loi sur la justice administrative?

Mme Harel: Non, je me réfère, en fait, à la réforme de la justice en matière administrative.

M. Rémillard: Oui, c'est ça, le projet de loi que j'aimerais déposer?

Mme Harel: C'est ça.

M. Rémillard: Ah bon! O. K.

Mme Harel: Celui qui était annoncé.

M. Rémillard: Ce n'est pas dedans?

Une voix: II n'y a pas de programme encore.

Mme Harel: En fait, il n'y a pas de programme comme tel.

Le Président (M. Dauphin): Évidemment, le sujet est dans le programme 2, mais ce n'est pas nécessairement le but de votre question, je pense.

Mme Harel: Non.

Le Président (M. Dauphin): Non, d'accord.

Réorganisation des tribunaux administratifs

M. Rémillard: Pour situer ça, M. le Président, ce que j'ai dit ce matin, si je peux le répéter très brièvement, c'est que c'est un sujet qui est discuté depuis très longtemps. On se souvient qu'il y a eu M. Gélinas qui a fait son rapport, qui est devenu un livre qui a été publié sur les organismes administratifs québécois, il y a M. le juge Dussault, aussi, qui a fait un rapport et, plus récemment, M. le professeur Ouel-lette qui a déjà dirigé un groupe de travail qui, il y a trois ans, a produit un rapport pour réorganiser nos tribunaux administratifs en fonction des exigences de nos chartes. Nous savons, M. le Président, que nos chartes - je me réfère, entre autres, à la Charte québécoise - sont très claires à l'effet qu'un processus quasi judiciaire doit offrir une audience impartiale, donc ce qui signifie beaucoup d'éléments administratifs pour garantir l'impartialité des personnes qui sont habilitées à siéger à des tribunaux ou à des organismes quasi judiciaires.

Le problème qui s'est posé à la suite du rapport du professeur Ouellette, c'est que nous n'avions pas vraiment, d'abord, de définition de ce qui peut être quasi judiciaire, et que les décisions quasi judiciaires auxquelles peuvent s'appliquer les chartes et la fameuse règle audi alteram partem, qui signifie qu'on doit entendre l'autre partie... Alors entendre veut dire que vous puissiez avoir les moyens de faire valoir votre point de droit, que vous puissiez être entendu de façon impartiale. Tous ces principes, qui nous viennent, entre autres, du vieux droit anglais et de la Magna Carta de Jean sans Terre, ont été confirmés, M. le Président, par la Charte des droits du Québec en 1975 et, ensuite, par la Charte canadienne de 1982.

Il faut s'ajuster en conséquence et je travaille sur un projet de loi. Je dois vous dire que ce n'est pas facile d'essayer d'accommoder tous les principes qui doivent nous guider en fonction des objectifs que peuvent développer bien des intervenants. Je parie autant de mes collègues ministres que je veux parler des dirigeants de ces tribunaux ou organismes quasi judiciaires, ces tribunaux administratifs, que je veux parler aussi de différents intervenants dans le domaine de la consommation ou de la production, par exemple des commerçants qui peuvent être touchés par ces organismes quasi judiciaires qui prennent des décisions en fonction, très souvent, de services publics qui sont essentiels: Par conséquent, la responsabilité que nous avons est très importante et nous espérons pouvoir trouver un terrain d'entente qui nous permettrait d'en arriver à un consensus.

Alors on est assez avancé dans notre travail et, sur la base du rapport Ouellette, nous avons élaboré un projet de loi, que j'espère bien pouvoir déposer au courant de l'année, probablement l'automne prochain. Ça fait déjà un bon bout de temps que j'y travaille, à ce projet de loi. Mon prédécesseur, le juge Marx, y a travaillé et mes autres prédécesseurs, du début des années quatre-vingt, y ont travaillé aussi. Donc, je profite de leur expérience sur ce sujet.

Nous espérons bien trouver un consensus qui nous amènerait à traiter deux éléments. Le premier serait de qualifier des tribunaux administratifs, c'est-à-dire des organismes qui entendent en appel d'une décision qui peut être administrative et, ensuite, qui entendent en appel de ces décisions-là. Il s'agit donc de quelques organismes, il n'y en a pas énormément, comme on dit chez nous: "II n'y en a pas un char puis une barge". Il y en a quelques-uns, mais ce sont des organismes administratifs, des tribunaux administratifs qui sont importants et auxquels on doit apporter la première attention pour assurer aux membres de ces tribunaux administratifs l'impartialité la plus complète, étant donné leur fonction. Ça, ça se réfère à leur nomination, à leur rémunération, à leurs conditions de travail. Alors, il y a toute une série d'éléments d'ordre administratif qu'on doit établir pour garantir cette impartialité.

L'autre élément, le deuxième ce sont des organismes qui peuvent avoir des fonctions quasi judiciaires, mais qui ne sont pas des tribunaux quasi judiciaires. Et là, on en a beaucoup d'organismes et de personnes administratives qui prennent des décisions quasi judiciaires. Qu'est-

ce que c'est qu'une décision quasi judiciaire?

M. le Président, si je suis trop long, soyez bien à l'aise, vous me le dites, je veux simplement essayer de donner des explications.

C'est une décision qui implique, selon la jurisprudence, les droits des individus. Il y a des décisions administratives qui se réfèrent strictement à l'administration de certaines normes et ça, c'est un pouvoir qu'on dit lié. Un fonctionnaire constate des directives, des normes établies, vérifie si la demande qu'il a devant lui, une demande de permis par exemple, correspond à ces normes. S'il y a correspondance, il accorde le permis; s'il n'y a pas correspondance, il ne l'accorde pas. Ça, ce n'est pas un pouvoir quasi judiciaire, c'est un pouvoir qui est lié, il n'y a pas de discrétion là-dedans. Mais, lorsqu'on arrive à une appréciation de la part de l'organisme ou de la personne qui doit prendre cette décision, une appréciation de circonstance, d'opportunité, ça signifie qu'il peut y avoir - il peut y avoir - des droits qui sont en cause et, à ce moment-là, on appelle ça quasi judiciaire.

Nous avons des tribunaux qui sont spécialisés dans ces domaines administratifs pour permettre, dans certains secteurs de notre activité, d'avoir une expertise particulière. Parce que le but de ces tribunaux administratifs, c'est que les gens qui y siègent aient de l'expertise et puissent faire. part de leur expertise dans là décision qu'ils doivent prendre pour trancher des droits. Alors, dans ce cadre-là, M. le Président, nous sommes à mettre la dernière main à ce projet de loi, que j'espère pouvoir déposer l'automne prochain et qui, je l'espère, pourra faire consensus, parce que c'est un projet de loi que je n'imposerai pas, sur un sujet aussi important que ça, mais qui, en fonction des principes qui nous guident, devra être accepté. J'espère bien, à l'automne, pouvoir arriver avec un projet de loi qui pourra rejoindre les préoccupations que nous avons.

Le Président (M. Dauphin): Mme la députée.

Mme Harel: Qu'est-ce qui rend si difficile la rédaction du projet de loi? Vous avez déposé un mémoire au Conseil des ministres...

M. Rémillard: Oui.

Mme Harel:... dont nous avons copie, le 18 septembre dernier. Déjà, votre gouvernement avait annoncé, dans le discours inaugural, il y a deux ans, en mars 1988, la rationalisation des tribunaux administratifs. Qu'est-ce qui résiste, présentement? Il semble que le projet de loi soit prêt...

M. Rémillard: Oui.

Mme Harel:... aux dernières nouvelles.

M. Rémillard: Oui. Le " problème... Tout d'abord, il y a deux problèmes. Le premier problème, c'est cette différence que nous voulions faire entre des tribunaux administratifs et des organismes qui ont des fonctions quasi judiciaires mais qui ne sont pas des tribunaux. Cette distinction amène des considérations différentes sur le plan administratif en fonction de ces deux catégories. Par exemple, en. ce qui regarde la permanence des membres, je pense qu'on ne peut pas assurer la permanence de la nomination pour tous les organismes et toutes les personnes qui ont des pouvoirs quasi judiciaires, ça n'aurait pas de bon sens. L'État ne peut pas se permettre ça. Alors, il y a des tribunaux, des personnes qui ne seront pas contentes, parce qu'elles vont voir que leur rôle n'est pas garanti par une permanence de par la loi. Alors ça, c'est un premier problème.

L'autre problème, c'est que j'ai voulu aussi qu'on revoie le projet de loi qu'on avait pour pouvoir y ajouter des éléments qui nous permettraient de développer l'accessibilité pour les consommateurs. Très souvent, les tribunaux administratifs sont des domaines de spécialisation qui sont en relation directe avec des services publics: électricité, gaz, téléphonie. En fait, on peut parler même, parce qu'on a entendu tout à l'heure le commissaire en ce qui regarde l'électricité, le commissaire aux plaintes pour HydroQuébec, on peut donc se référer à des services publics. Le problème de ces services publics, c'est que le consommateur est un peu démuni d'aller devant ces tribunaux-là qui très souvent ont développé une procédure qui est très proche des tribunaux ordinaires, ce qui fait qu'on n'a plus la souplesse qu'on voulait avoir avec les tribunaux administratifs, qu'on n'a plus la possibilité pour les gens ordinaires d'aller se plaindre et dire: Écoutez, moi, je n'accepte pas que mon compte de téléphone monte, soit majoré de tant. Je n'accepte pas ça, telle, telle ou telle chose... Il faut qu'on leur permette ça. Il faut qu'on puisse leur donner la possibilité qu'ils puissent intervenir, et avec des moyens pour intervenir. Alors, on essaie de trouver des moyens pour bonifier le projet de loi à ce sujet-là.

Donc, c'est ça qui fait que nous continuons nos consultations. J'ai rencontré beaucoup d'intervenants. J'ai reçu leurs commentaires. Le Barreau m'a fait parvenir ses commentaires très récemment. Je suis en train de colliger tout ça. J'espère bien arriver avec un projet de loi qui pourrait être très intéressant l'automne prochain.

Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le ministre. Mme la députée.

Mme Harel: Sur un autre aspect qui concerne les délais d'appel devant les tribunaux administratifs, j'ai eu l'occasion en commission parlementaire à l'étude des crédits cette semaine

d'échanger avec le juge Poirier qui préside la Commission des affaires sociales et de me faire confirmer que le délai d'appel est de 30 mois présentement en matière d'accidents du travail - 30 mois, c'est deux ans et demi - minimum et qu'en matière d'accidents d'automobile, c'est 12 mois. C'est un progrès immense, parce que c'était de 24 mois, il y a deux ans. À l'égard des rentes du Québec, c'est de 7 à 8 mois. Mais on se trouve toujours devant un engorgement des tribunaux administratifs. Je voulais simplement vous le mentionner. Évidemment, ce ne sont pas les crédits de la Justice qui sont concernés, mais te ministre de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu qui fait voter ses crédits chaque année, lorsque je lui ai posé ces questions, m'a justement suggéré de venir vous en parler. Ça n'avait pas l'air évident que c'était une de ses principales préoccupations. D'ailleurs, j'ai apporté les galées de l'échange qu'on a eu en commission parlementaire. (15 h 15)

M. Rémillard: On a de sérieux problèmes avec les tribunaux administratifs. Les retards, c'est sérieux et très préoccupant. On essaie de voir les cas un par un. Comme ministre de la Justice, nous, nous avons la CALP, qui dépend directement de nous et avec son président, M. Georges Lalande, nous avons mis au point un programme de redressement et, au 1er avril 1990, il y a 132 postes ou leur équivalent, à temps plein, qui ont été affectés à la CALP, de nouveaux commissaires aussi, plusieurs nouveaux commissaires qui ont été nommés et on espère bien - M. Lalande s'est donné les six prochains mois pour rétablir passablement la situation - dans la prochaine année, rétablir la situation. Mais la situation était très sérieuse à la CALP, comme elle l'est à la CSST et comme elle peut l'être dans d'autres domaines. Là, il faut trouver des mécanismes administratifs pour alléger les choses et il ne s'agit pas seulement de nommer de nouveaux commissaires, mais il faut trouver des moyens pour avoir des procédures qui sont plus rapides tout en protégeant les droits des individus, le droit de l'audition. Alors, en ce qui regarde la CALP, en ce qui regarde un effort du gouvernement, si on veut trouver un effort pour essayer de pallier ce problème-là, si vous regardez les budgets de la CALP, en 1989-1990, le budget de la CALP était de 10 625 500 $ et, en 1990-1991, il est passé à 18 427 807 $, donc une augmentation considérable de près de 8 000 000 $.

Mme Harel: Je pense que je vais suggérer que la Commission des affaires sociales passe sous votre juridiction. Ça va être à peu près la seule façon de faire augmenter les budgets parce que, voyez-vous, il y a encore 6159 causes d'accident du travail et 3334 causes d'accident de la route en suspens. Évidemment Est-ce qu'on peut penser que le regroupement, justement, de la Commission des affaires sociales et de la Commission d'appel en matière de lésions professionnelles est définitivement écarté?

M. Rémillard: Est définitivement... Comment?

Mme Harel: Écarté, tel que le recommandait le rapport Ouellette.

M. Rémillard: Pour le moment, on va faire la loi-cadre; je ne dirais pas définitivement, mais je dirais que c'est à l'étude.

Mme Harel: M. le Président, compte tenu du peu de temps qu'il nous reste, je souhaiterais qu'on puisse tout de suite examiner le dossier de la protection de la vie privée. Je ne sais pas à quel programme. Je pense que c'est le programme... Oui, le programme 3, Protection des droits et libertés de la personne.

Le Président (M. Dauphin): C'est ça.

Protection des droits et libertés de la personne

Mme Harel: Qu'est-ce que le ministre peut apporter à sa défense pour expliquer qu'après avoir solennellement promis une législation qui allait promulguer les principes de la loi sur l'accès au secteur privé et après avoir solennellement promis la mise en vigueur du chapitre du Code civil sur le respect de la réputation et de la vie privée, à l'occasion d'un dîner auquel j'assistais d'ailleurs... Qu'est-ce qui peut justifier, là, sauf, évidemment - et là, il va m'en vouloir d'en reparler - cette vision globale qui l'amène à vouloir parfaire en reportant toujours des réformes pour qu'elles soient meilleures, le report encore du projet de loi qu'il prévoyait pour l'an passé?

M. Rémillard: M. le Président, c'est un sujet qui me préoccupe énormément. C'est vrai que j'ai dit publiquement qu'on se préparait à présenter un projet de loi. J'ai consulté beaucoup de gens à tous les niveaux. Il faut voir que ce projet de respecter la vie privée, qui est une valeur qui est reconnue dans notre Charte des droits du Québec, elle n'est pas dans la Charte canadienne. Certains voudraient la voir dans l'article 7 de la Charte canadienne, dans la constitution canadienne, mais elle l'est, par contre, dans la Charte québécoise, qui est une des chartes les plus progressives au monde.

Alors, dans ce contexte-là, M. le Président, on a eu le rapport Legendre, un très bon rapport, qui nous a fait le point sur les difficultés qui se présentent, et on pourrait ajouter d'autres choses. J'ai rencontré beaucoup de gens, de personnes qui sont venues m'expliquer des problèmes concernant le respect de la vie privée

et j'ai été complètement estomaqué de voir l'ampleur du problème. C'est incroyable. Ça part du moment où vous voulez avoir une assurance-vie - je prends un exemple - et où vous allez chez votre assureur pour avoir le certificat médical, avoir donc un examen médical; l'examen médical, à ce moment-là, est mis sur ordinateur, en banque, habituellement quelque part à Toronto. Ça va pour le prêt bancaire que vous avez contracté parce que vous voulez vous acheter une voiture neuve; le printemps arrive, il fait beau, vous voulez aller chercher votre prêt et tout votre crédit est alors compilé sur informatique et envoyé dans une banque qui est à peu près la même. Et ça va pour votre procédure judiciaire que vous avez intentée parce que vous avez une action en dommages et intérêts contre votre voisin, ou que votre voisin vous a poursuivi, ou que vous êtes en instance de divorce, peu importe, et, là aussi, ça peut être compilé sur informatique. Et toutes ces données, et je pourrais en ajouter, à votre crédit, crédit en fonction des autres instances de crédit qui peuvent exister, à votre employeur, qui peut avoir aussi sa banque de données sur vous, et tout ça peut se retrouver, sans garantie de protection, dans une même banque, et on donne accès à une même personne ou à un même organisme, à des informations qui peuvent, somme toute, être en très grande partie publiques, même si certaines peuvent être privées, comme le dossier médical, mais qui, colligées ensemble, vous donnent un portrait de vous qui met en cause, directement, votre vie privée. Ça, c'est un aspect.

L'autre aspect, c'est tout l'aspect du développement de la technologie. Et, là aussi, j'ai été estomaqué de voir comment le développement de la technologie fait en sorte qu'on se retrouve dans une société où on peut être épié de différentes façons. Vous avez une conversation privée, vous pouvez être enregistré par votre interlocuteur. On m'informait dernièrement que, pour faire, par exemple, les vérifications pour les cotes du BBM, pour les télévisions, ils pouvaient simplement passer dans la rue, en face des "buildings", et, par un appareil, ils pouvaient savoir si, dans tel appartement, on écoute tel poste de télévision. En passant dans la rue, en avant. C'est incroyable! Les micros, on a eu des expériences, dans des conférences fédérales-provinciales, au plus haut niveau, vont chercher des conversations privées entre deux individus en tête-à-tête dans un bout de salle, à peu près à 300 pieds.

En fait, bref, ce que je veux dire, c'est que le problème est énorme. Et il me semble que ce qui serait intéressant, ce serait d'avoir une commission parlementaire, qui se tiendrait dans un avenir prochain, à l'automne, où on ferait témoigner des experts pour nous expliquer ça. Ils viendraient nous montrer ça, ce qui nous amènerait à élaborer le genre de loi qu'on veut avoir.

Moi, j'ai été particulièrement heureux de voir le travail d'une commission parlementaire et particulier, M. le Président, c'est celle qui s'est penchée sur toute la question des droits et libertés de la personne et qui avait recommandé la création d'un tribunal des droits et libertés de la personne. Et si on a réussi à créer ce tribunal, après toutes les difficultés qu'on a eues - parce que faire cette loi, ç'a été extrêmement difficile, et je veux encore saluer la très grande compétence, la disponibilité et bien d'autres belles qualités personnelles et professionnelles de Me Claude Filion, alors porte-parole de l'Opposition... Mais je dois vous dire que, si on pouvait faire la même chose, quelque chose de semblable pour notre projet de loi sur la protection de la vie privée, je pense que ce serait la seule façon de s'en sortir. Alors, c'est vrai que j'avais pris des engagements, mais je me rends compte que, si on veut vraiment légiférer, de la façon la plus complète possible, on aurait besoin d'une commission parlementaire sur ce sujet-là.

Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le ministre. Mme la députée.

Mme Harel: L'ampleur du problème est telle qu'entre-temps le gouvernement légifère et j'en ai pour preuve, par exemple, une loi qui a été déposée le 15 mai dernier, la loi 76 modifiant la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Je reçois avis de la Commission d'accès à l'information signalant que ce projet de loi ouvre une brèche importante dans un régime de protection des renseignements personnels qui était très rigoureux en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Je vous lis textuellement la conclusion de la Commission: La Commission d'accès à l'information est. d'avis qu'il faut maintenir de telles dispositions visant à assurer la confidentialité absolue des renseignements personnels d'ordre médical. Il s'agit d'une reconnaissance explicite du droit au respect de la vie privée. Or, l'amendement proposé a pour effet d'exempter le ministre de la Main-d'oëuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle de ce régime rigoureux de protection des renseignements personnels.

Bon. Ça, ça en est un exemple. C'est une loi, la loi 76. Il y a la loi 42 qui est aussi à l'étude devant l'Assemblée nationale, sur un autre sujet. L'ampleur du problème est telle qu'il y a maintenant une absence de vision, je dirais même du gouvernement, à cet égard, et que ça vise toutes les directions dépendamment des ministères sectoriels: la loi 42 est présentée par le ministre de la Santé et des Services sociaux et la loi 76 par le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu.

Ce qui est inquiétant c'est qu'entre-temps il y a une sorte de prolifération des projets de communication de renseignements personnels ou

d'établissement de fichiers ou de croisement de fichiers. Certainement, M. le ministre, que vous avez pris connaissance du célèbre dossier Acro-fax et des ententes, non pas conclues uniquement par le ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu, mais aussi par d'autres ministères qui diffèrent, par ailleurs, de celles de la. Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu en ce sens que, contrairement au ministère du Revenu, qui fait appel aux informations contenues dans ses banques de données à partir de soupçons de fraude, il n'en est pas de même pour ce qui est du contrat intervenu entre le ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle et Acrofax Ce qui faisait dire à certains organismes, dont la Ligue des droits et libertés qui intervenait publiquement sur cette question dernièrement, qu'il leur semblait être, compte tenu de l'étude qu'ils avaient faite du contrat entre Acrofax et le ministère de la Main-d'oeuvre, face à un projet de perquisition et de saisie abusive de renseignements nominatifs confidentiels, ce qui est interdit par la Charte des droits et libertés du Québec.

Évidemment, les problèmes se multiplient. C'est tout simplement peut-être quelques illustrations que j'ai voulu en faire, mais il y en a bien d'autres que je n'aborderai pas cet après-midi. Mais les problèmes se multiplient pendant ce temps-là. N'y aurait-il pas lieu... Oui, certainement, c'est assez emballant ce que vous projetez de faire, mais n'y aurait-il pas lieu, qu'entre-temps il y ait comme une sorte de réserve de la part des ministères qui s'abstiennent d'être en appétit quant aux renseignements confidentiels ou aux amendements qu'ils veulent obtenir pour pouvoir procéder à établir des fichiers. Y a-t-il un débat quelconque, au gouvernement, sur cette question? (15 h 30)

M. Rémillard: Oui, il y a, de fait, beaucoup de sensibilité de tous mes collègues sur ce sujet. On est tous préoccupés, parce qu'on est tous touchés par ça. On est tous touchés par cet élément-là.

Maintenant, vous vous référez à des dossiers qui ne relèvent pas nécessairement de ma juridiction. Et je me souviens de plusieurs discussions que j'ai eues avec des collègues sur certains aspects qui peuvent mettre en cause la vie privée, je me souviens et qu'on a changé des aspects de projets de loi... Vous venez de souligner des commentaires, des avis qui ont été donnés par des organismes qui oeuvrent en matière de respect des droits fondamentaux. Ces gens m'ont quelquefois aussi envoyé copie de leur lettre. J'ai été sensibilisé et, à ce moment-là, je n'hésite pas à intervenir comme ministre de la Justice responsable de faire appliquer la Charte des droits, et aussi au niveau de la présidence du comité de législation, dans la mesure où je peux le faire. Mais je pense que je comprends des propos de la députée de Hoche-laga-Maisonneuve qu'elle est d'accord avec mot pour dire que la commission parlementaire est la façon de procéder et qu'on devrait la tenir, si je comprends bien, le plus tôt possible, qu'on la prépare bien. On pourrait bien la préparer, faire témoigner des experts, et ce serait une commission parlementaire qui nous permettrait vraiment, là, de faire le point là-dessus, sur les différents aspects que ça comprend. On pourrait faire ça à l'automne et préparer un projet de loi le plus tôt possible.

Entre-temps, ce que me dit Mme la députée, c'est d'être vigilant et de faire attention pour avoir de la réserve - pour prendre son expression - et je suis parfaitement d'accord avec elle. Je sais qu'elle soulève à l'occasion des cas qui l'amènent à croire que la vie privée pourrait être atteinte et, à ce moment-là, je pense que c'est son devoir de le faire, comme c'est aussi mon devoir de le faire, dans la mesure où je serai informé de la situation.

Mme Harel: M. le Président, j'aimerais bien aborder avec le ministre, toujours au programme sur la protection des droits et libertés de la personne, le sujet Interracial et, donc, la Commission des droits de la personne.

Le Président (M. Dauphin): Alors, toujours au programme 3, à l'élément 1.

Mme Harel: Tout dernièrement, vous annonciez, avec votre collègue de la Sécurité publique, un comité consultatif sur la sécurité publique et le multiculturalisme. Vous l'avez faite conjointement, cette annonce, je crois... Vous l'avez faite conjointement avec votre collègue de la Sécurité publique, l'annonce du comité consultatif sur le multiculturalisme et... Ah bon! C'était uniquement M. Elkas qui avait fait cette annonce.

Une voix: Je pense que...

Une voix: Le ministre délégué aux Communautés culturelles aussi, je crois.

M. Rémillard: Oui, pas nous.

Mme Harel: Avez-vous été partie prenante, en fait, à la décision de nommer un comité qui doit comprendre un mandat de proposer une politique ministérielle sur les relations avec les communautés culturelles?

M. Rémillard: Je vais vérifier. Mme Harel: C'est bien le cas?

M. Rémillard: Non, je n'ai pas souvenance d'avoir été consulté à ce niveau-là.

Mme Harel: En fait, oui, là. je relis le

communiqué de presse du bureau du ministre de la Sécurité publique, et oui, je m'en excuse, en fait, je pense que, par erreur, j'ai cru que ça avait été une annonce conjointe. Mais le ministre a demandé au comité dont il annonçait la formation que lui soit proposée une politique ministérielle portant sur les relations avec les communautés culturelles pour la fin du mois de juin prochain. En fait, moi, je voulais surtout savoir si la Commission des droits de la personne avait été, évidemment, impliquée, consultée, si elle entendait, compte tenu de son expertise, travailler à l'élaboration de cette politique ministérielle.

M. Rémillard: M. le Président, on n'a pas été impliqués directement, mais on m'informe que la Commission des droits de la personne l'a été. Alors, avec votre permission, si vous me permettez, je pourrais demander à M. Lachapelle, le président de la Commission, de donner des éléments d'information.

Le Président (M. Dauphin): Merci. Alors, Me Lachapelle.

M. Lachapelle (Jacques): Bien, vous savez, madame, n'est-ce pas, qu'à la suite de l'enquête de la Commission des droits de la personne sur les relations entre les communautés culturelles et la police nous avions fait des recommandations pour que le ministère de la Sécurité publique se dote d'une politique sur les relations interraciales dans la police, À la suite de cette recommandation, le ministre a institué ce comité qui est présidé... J'imagine que vous parlez du comité présidé par M. Bourget. C'est ça, voilà. La Commission des droits de la personne a été invitée à participer à ce comité, et je sais que les travaux ont commencé tout dernièrement. Il y a une personne de la Commission des droits de la personne qui a été invitée à participer à ce comité, Mme Maryse Alcindor, de la direction de l'éducation.

Mme Harel: II y a un dossier qui m'intéresse personnellement beaucoup: c'est celui qu'a commencé à aborder la Commission des droits de la personne à l'égard des autochtones et, en particulier, des relations entre la police et les autochtones. Je sais que la Commission a déposé une demande de fonds au ministère de la Justice pour financer des audiences dans les différentes communautés autochtones. Dois-je comprendre que cette demande de fonds a été reçue positivement?

M. Lachapelle: Je dois vous dire, madame, qu'au moment où on se parle j'aimerais bien qu'elle soit reçue positivement, mais la lettre est partie hier.

Mme Harel: Ah!

M. Lachapelle: Alors, la décision de la Commission a été prise jeudi dernier, et là lettre a été signée hier. Elle est peut-être sur le bureau de M. le ministre. Peut-être qu'il peut nous donner une réponse favorable.

Mme Harel: On devance un peu, mais j'aimerais peut-être, avec le consentement du ministre, connaître un peu la problématique que vous voulez développer pendant ces audiences.

M. Rémillard: Je pense que M. Lachapelle peut très bien répondre à cette question.

Le Président (M. Dauphin): M. Lachapelle.

M. Lachapelle: À la Commission des droits de la personne, nous avons reçu, depuis ces derniers mois, des plaintes qui nous proviennent des communautés autochtones de nombreux endroits, que ce soit de Oka, de la réserve des Escoumins, concernant le traitement qu'elles reçoivent par les corps policiers et par les membres de ces corps policiers.

Depuis quelque temps également, nous avons de nombreuses communications avec les communautés autochtones, entre autres et plus récemment avec les Inuit du Labrador qui, eux aussi, se plaignent de traitements semblables, qui les empêchent d'exercer leurs droits de chasse et de pêche dans ces territoires. Bien sûr, c'est des territoires qui ne recouvrent pas seulement le territoire du Québec, mais qui vont également jusque dans le Labrador.

Or, la Commission des droits de la personne, après avoir étudié ces différentes questions, constate que ce n'est pas l'unique objet de plaintes. On en a eu une autre, récemment, qui venait justement du Lac Barrière, des Algonquins du Lac Barrière et qui a, excusez le mot, un "pattern" un peu semblable. Donc, il se développe des relations extrêmement tendues, lorsqu'il y a des interventions policières dans les réserves. Alors, la Commission des droits de la personne aimerait étudier, de la même façon que nous l'avons fait pour les groupes des minorités visibles et ethniques, toute cette question des relations avec les corps policiers.

Mme Harel: Je dois vous dire que ça m'a beaucoup intéressé au moment où ç'a été rendu public, parce qu'on a souvent porté à ma connaissance un profond malaise, notamment dans la réserve de Pointe-Bleue, par exemple, où les relations sont très tendues entre le corps policier et les autochtones, également. Alors, vous entendez siéger et procéder à des audiences dans les communautés elles-mêmes sur le territoire des réserves?

M. Lachapelle: Exactement. Nous avons l'intention de faire des audiences publiques, bien sûr, si nous avons les ressources nécessaires, de

la même manière que nous l'avons fait pour les communautés ethniques. Évidemment, dans les circonstances, on comprenait que c'était surtout à Montréal, mais nous avons l'intention de nous rendre sur les réserves.

Mme Harel: Est-ce qu'on peut demander au président de la Commission des droits de la personne s'il a hâte que le tribunal soit mis en place?

M. Lachapelle: J'espère que ça se fera bientôt. J'ai entendu tantôt M. le ministre nous dire que ça devrait se produire dans les prochains mois, et je suis très heureux d'entendre qu'on puisse enfin apporter une solution à l'acheminement de nos dossiers et au traitement des dossiers à la Commission.

M. Rémillard: Sur ce sujet-là, M. le Président, je peux informer Mme la députée que l'entrée en vigueur de la loi se fera en deux étapes. Tout d'abord, la première étape qui concerne la mise en place du tribunal seulement, de façon que le tribunal puisse fonctionner dès la mise en vigueur de l'ensemble de la loi. Ça, ça pourrait être le 16 juillet prochain. Et le reste de la loi pourrait être mis en vigueur plus tard. Un projet de décret de mise en vigueur a déjà été soumis. Alors, ça pourrait être en novembre, environ, de sorte que le président puisse être nommé.

Nous avons ouvert un concours pour trouver le président. Selon les normes établies par la loi, ça doit être quelqu'un qui, en particulier, est sensible et a démontré sa sensibilité à tout ce secteur des droits et des libertés fondamentaux. J'espère que ce concours nous permettra de trouver quelqu'un qui voudra relever ce défi d'un premier tribunal. Le tribunal débutera en fonction des demandes des causes qu'il pourra y avoir. Et je me réfère à une discussion que nous avons eue... Tout ça nous a amenés à de grandes discussions, l'an dernier, à peu près à la même époque, à savoir si le tribunal devrait être accessible à tous, sans passer nécessairement par la Commission des droits de la personne. Et, finalement, on sait que la conclusion qui a été retenue de nos discussions, après maintes réflexions, c'est que la Commission qui accepte de prendre fait et cause pour un plaignant peut se présenter devant le tribunal au nom de ce plaignant, mais qu'un plaignant dont la cause est refusée par la Commission peut aussi s'adresser, mais à ses frais, directement au tribunal.

On espère, à ce moment-là, qu'on va dégager plus d'accessibilité, parce que l'accès sera encore plus facile à ce tribunal des droits. C'est une nouvelle structure. On peut en être fiers. Il n'y a pas de précédent au Canada de ce genre de tribunal. Et nous allons faire tout ce que nous pouvons pour que ce soit un succès, pour rendre plus accessible l'expression des droits et libertés fondamentaux.

Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le ministre.

Mme Harel: M. le Président, quand le ministre entend-il, entre-temps, renouveler le mandat expiré d'une grande majorité des membres siégeant à la Commission des droits et libertés de la personne?

M. Rémillard: Tout d'abord, les mandats se terminent quand on décide d'y mettre fin. Et il y a des mandats, dans le cas de la Commission... J'ai demandé à M. Lachapelle, tout d'abord, en premier lieu, d'avoir l'amabilité de nous faire profiter de son expérience et de sa compétence pour encore un petit bout de temps, pour nous permettre de mettre en application la nouvelle loi et le nouveau tribunal. C'est donc un élément très important, et je le remercie de sa collaboration.

Ensuite, en ce qui regarde les autres nominations, qui doivent être faites avec l'Assemblée nationale, j'espère pouvoir les faire dans le courant du mois de juin. Des consultations ont été fartes, et j'espère pouvoir être en mesure - on devrait l'être, de fait - d'être en communication avec l'Opposition pour proposer des noms de remplacement pour les personnes qui veulent se retirer. Et, malheureusement, il y a des personnes de grande valeur qui ont décidé qu'après un certain temps elles veulent oeuvrer ailleurs, et on ne pourra plus compter sur leur expertise et leur compétence.

Mais nous aurons à vous proposer des noms dans un avenir prochain pour que nous puissions, au niveau de l'Assemblée nationale, faire ces nominations.

Commission des services juridiques

Mme Harel: Je remercie le président de la Commission. Et, M. le ministre, j'aimerais vous poser la même question concernant la Commission des services juridiques. Peut-être avez-vous pris connaissance du communiqué émanant de la Fédération des avocats d'aide juridique du Québec, en date d'hier, qui était assez sévère à l'égard de l'absence de politique, disait-on, inquiétante du ministre de la Justice vis-à-vis de l'aide juridique du Québec. Et la Fédération des avocats de l'aide juridique demandait au ministre, dans les plus brefs délais, notamment, de hausser les critières d'admissibilité à l'aide juridique - ça, on en a déjà parlé - de nommer les commissaires à la Commission des services juridiques, en rappelant qu'à la Commission, formée de 12 commissaires, tous les mandats étaient expirés et qu'à cause de la négligence à renouveler ou, tout au moins, à désigner de nouveaux commissaires les trois dernières réunions n'avaient pu avoir lieu faute de quorum.

(15 h 45)

D'autre part, la Fédération des avocats demandait également au ministre de nommer un nouveau vice-président à la Commission des services juridiques, faisant valoir que la nomination, en novembre 1989, d'un vice-président susceptible, je pense, d'être en conflit d'intérêts flagrant, disait-elle, avait empêché qu'il occupe le poste qui était toujours vacant. Et, finalement, la Fédération des avocats de l'aide juridique demandait également de renouveler le mandat du président de la Commission des services juridiques. Est-ce que le ministre entend, à l'égard de la Commission des services juridiques, intervenir dans les jours qui viennent?

M. Rémillard: Oui, dans les prochaines semaines. Des consultations sont en cours parce que, selon l'article 12 de la Loi sur l'aide juridique, je dois consulter des intervenants et tous les groupes intéressés. Par conséquent, on a établi une liste de personnes, d'intervenants qu'on doit consulter, entre autres, les ACEF, la Commission des droits et libertés de la personne, le Protecteur du citoyen, l'Association des services externes de main-d'oeuvre, la Ligue des droits et des libertés de la personne, le Barreau du Québec. Les consultations sont en cours. Elles vont assez bien et ça devrait nous amener, dans le mois, à pouvoir faire les nominations au niveau des commissaires. Au niveau de la vice-présidence, il y a une situation qui devrait se régler aussi dans un avenir très prochain, qu'on me dit, ce qui veut dire que, normalement, tout devrait procéder correctement dans un avenir prochain.

Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le ministre.

Problème de la médiation familiale

Mme Harel: M. le Président, je souhaiterais pouvoir aborder avec le ministre toute la question de la médiation familiale. Qu'est-ce qu'il entend faire pour dénouer le problème avec le ministère de la Santé et des Services sociaux?

M. Rémillard: Alors, la médiation familiale, de par l'expérience qui a été menée à Québec et à Montréal, même si ce n'est pas tout à fait au même niveau dans les deux villes, il reste que la conclusion qui s'impose très clairement, c'est que c'est un succès et ça répond à un besoin, c'est évident. Par conséquent, le désir que nous avons, la volonté ferme que nous avons, c'est d'étendre ce service partout au Québec. Nous avons eu une rencontre avec mon collègue, avec les gens de mon ministère, le sous-ministre et les fonctionnaires impliqués dans ce dossier. Nous avons eu une rencontre avec mon collègue de la Santé et des Services sociaux et ses sous-ministres et nous en sommes arrivés à la conclusion que la responsabilité de cette médiation qui se déroulera à l'intérieur d'une procédure judiciaire, au palais de justice, sera sous la responsabilité du ministère de la Justice en ménageant bien une intervention en ce qui regarde la santé et les services sociaux dans les domaines qui relèvent de leurs juridictions.

Alors, le dossier est en train de se terminer dans les prochains jours. M. le sous-ministre m'informe à l'instant même qu'il y a eu encore des contacts tout récemment avec le ministre de la Santé et des Services sociaux qui a les mêmes objectifs que nous. Tout semble très bien aller, ce qui veut dire qu'on devrait être capables. Il reste à trouver les ressources matérielles parce que je ne suis pas le genre de ministre à m'avancer sur des choses et dire ensuite: Je vais retourner au Conseil du trésor. Il faut trouver les ressources matérielles, mais je pense que c'est une cause qui en vaut vraiment le coup et j'ai bien l'intention de faire tous les efforts qu'il faut faire pour aller chercher les moyens matériels pour appliquer ce processus de médiation, cette possibilité de médiation partout sur le territoire québécois. On va y aller progressivement, mais on devrait le faire dans un avenir prochain.

Le Président (M. Dauphin): Merci. Mme la députée.

Mme Harel: On compte environ 500 dossiers de médiation par année. Il y a environ 15 000 divorces. Il y a peut-être à faire connaître aussi ce service. J'ai été surprise, en. regardant les budgets du ministère en comparaison avec d'autres ministères, de voir que, malgré tout, il y a relativement peu d'argent alloué aux communications. La hausse des budgets aux communications, je pense, est de l'ordre d'à peu près 600 000 $ cette année. Je me demandais quelle campagne vous entendiez mener. Un reproche qui est fait fréquemment au ministère de la Justice, c'est de ne pas savoir mettre en marché, de ne pas savoir diffuser, de ne pas savoir mieux communiquer les nouvelles lois qui sont adoptées. Nous ne parlons pas, évidemment, de la loi sur le patrimoine familial ou le partage économique des conjoints, mais parlons, disons, du divorce par déclaration conjointe ou de la médiation familiale. Le divorce par déclaration conjointe, c'est aussi une façon douce de procéder sans que ce soit trop coûteux. Est-ce qu'il y aura de l'information, ne disons pas de la publicité, ça fait peut-être trop trivial pour la justice, mais est-ce qu'il y aura des campagnes d'information qui seront faites pour faire connaître cette façon de procéder?

Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.

M. Rémillard: Tout d'abord, c'est vrai qu'on ne sait pas prendre les moyens nécessaires, dans

bien des cas, pour informer adéquatement les gens des services qu'on peut offrir. C'est très vrai. Souvent parce qu'on n'a pas les moyens matériels nécessaires, d'autres fois parce qu'on n'a pas tout à fait l'imagination qu'on devrait avoir. Je crois que, définitivement, on a un effort majeur à faire là-dessus. En ce qui regarde ce service, j'insiste pour que ce service soit offert gratuitement aux gens. Je veux que ce soit offert gratuitement. Je veux aller chercher l'argent dans les amendes qui ne sont pas perçues. Je vais aller chercher ces amendes - ce sont quand même des millions de dollars qu'on va aller chercher là - ça va nous servir à financer des services comme celui-là qui permettent à des couples de se séparer et à des enfants de vivre une séparation tellement mieux, parce que l'expérience est là.

Maintenant, les couples ne demandent pas le service de médiation, parce qu'ils ne sont pas assez informés, et le juge, le magistrat, aussi, va l'offrir, c'est évident. Là, avec l'entente qu'on fait avec mon collègue de la Santé et des Services sociaux, à partir de là, je crois qu'on va prendre ce dossier-là. Il y a une volonté ferme de notre part, et tout mon ministère là-dessus est très sensibilisé à cette question-là On va mener ce dossier-là.

Mme Harel: Concernant les...

M. Rémillard: II y a peut-être un élément important, si vous me permettez, par M. le sous-ministre, un complément d'information.

Le Président (M. Dauphin): M. Chamberiand.

M. Chamberiand: Merci, M. le Président. Madame, vous avez fait référence à la déclaration conjointe en matière de divorce Pour l'information de la commission, le ministère a mis au point un dépliant justement pour faire connaître cette possibilité-là, et je suis heureux de vous annoncer qu'il sera disponible dans les palais de justice d'ici à deux semaines. Ce sera un dépliant qui s'intitulera "Déclaration conjointe en matière de divorce", qui a été mis au point à la suite de consultations avec le Barreau parce que, évidemment, il ne faut pas empiéter sur son champ de responsabilités, mais, finalement, tout est réglé et le dépliant en question, qui vous satisfera sûrement, sera disponible d'ici à deux semaines.

Mme Harel: Est-ce qu'il ne serait pas opportun que ce dépliant puisse aussi être mis à la disposition des centres locaux de services communautaires, des CLSC, des organismes où des personnes susceptibles de demander de l'aide se retrouvent?

M. Chamberiand: Probablement Je ne connais pas exactement le détail de la mise en marché, si vous voulez, du dépliant, mais la Direction des communications, je me ferai fort de lui porter votre message, que ce serait une bonne idée que ce soit dans les CLSC.

Mme Harel: En 1989, il y a quand même eu 4326 demandes de divorce Introduites par déclaration conjointe et 954 dossiers en séparation qui l'ont été aussi par déclaration conjointe. On voit que tout n'est pas nécessairement antagonique dans les négociations que les membres d'un couple font.

Je terminerais, M. le Président, pour qu'on puisse peut-être se quitter avant la fin de la récréation prescrite à 16 h 15. On pourrait peut-être espérer le faire à 16 heures, de consentement de la commission. Mais j'aimerais que le ministre nous indique son intention à l'égard de la réforme du Code civil. Son prédécesseur avec qui j'ai travaillé il y a quelques années maintenant la prévoyait dans le cadre d'un premier mandat de son gouvernement. Ça se terminait, évidemment, l'an passé. Le ministre nous a indiqué qu'il avait l'intention d'accélérer le pas. Peut-il nous donner un peu le tempo?

M. Rémillard: On vise toujours, M. le Président, l'automne prochain pour qu'il y ait une loi générale d'application. Cependant, ça voudrait dire l'entrée en vigueur en janvier 1993. Mais on travaille beaucoup. J'ai des rencontres très régulières avec les légistes du ministère à la suite du rapport de M. le juge Baudouin qui a fait un rapport remarquable sur beaucoup de questions importantes qui se posaient encore. J'ai eu à prendre des décisions et à faire quelques nouvelles consultations à la suite d'autres interventions qu'on a eues. Mais je n'ai pas l'intention de brusquer quoi que ce soit. Et je crois que, lorsqu'on réforme une loi aussi fondamentale que son Code civil, ce qui veut dire plus de 3000 articles, il est important qu'on puisse avoir un consensus le plus large possible dans la société. En conséquence, notre objectif, nous visons le 1er janvier 1993 autant que faire se peut.

Mme Harel: Dans ce dossier, est-ce que le ministre a cette vision qu'il faut parfaire l'échafaudage et qu'il soit totalement achevé pour que certains chapitres soient mis en vigueur. Je pense, entre autres, à ceux concernant la vie privée, les dispositions de la loi 20 qui sont déjà adoptées et qui sont en attente d'une mise en vigueur.

M. Rémillard: Le principe qui nous guide, c'est l'adoption en bloc, l'application en bloc. Cependant, on a fait une exception au principe pour la curatelle. Et si besoin était, j'en ferais une autre exception pour ne pas priver les gens de droits qu'ils pourraient avoir si la loi était en application. Alors, c'est clair qu'en ce qui

regarde la vie privée en particulier, si vous vous référez à ce cas-là - je pense que vous vous référez à ce cas-là - c'est évident pour moi que si on devait retarder l'application du Code civil parce qu'on veut compléter des consultations, etc. - est-ce que, d'autre part, on se rend compte d'une façon bien évidente de l'urgence de légiférer en matière de protection de la vie privée - on pourra évaluer la situation à ce moment-là?

Mme Harel: Alors, M. le Président, je veux remercier le ministre, son sous-ministre et les personnes qui l'ont accompagné durant tout cet examen des crédits du ministère de la Justice et l'assurer de toute ma collaboration en gardant, évidemment, un point de vue critique qui sied bien, d'ailleurs, à l'Opposition.

Le Président (M. Dauphin): Merci, Mme la députée. M. le ministre, le mot de la fin.

M. Rémillard: M. le Président, je veux remercier Mme la députée de Hochelaga-Maison-neuve, comme je voudrais remercier le député de Berthier, le député de Sherbrooke qui ont été aussi avec nous dans cette commission parlementaire, remercier M. le sous-ministre Chamberland et tous les fonctionnaires qui étaient ici et qui nous ont aidés à donner des réponses les plus complètes possible, remercier Mme la secrétaire et tous les gens et vous-même, M. le Président, qui, avec votre brio habituel, avez su présider nos travaux.

Adoption des crédits

Le Président (M. Dauphin): Alors, merci, M. le ministre. Avant de nous quitter, est-ce que les programmes 1 à 11 des crédits budgétaires du ministère de la Justice sont adoptés?

Mme Harel: Adopté.

Le Président (M. Dauphin): Adopté. Pour ne pas prendre de chance, est-ce que l'ensemble des crédits budgétaires sont adoptés?

Mme Harel: Adopté.

Le Président (M. Dauphin): Adopté. Alors, à mon tour, au nom des membres de la commission, je vous remercie, M. le ministre, ainsi que M. le sous-ministre en titre, la directrice de cabinet qui vous accompagnait et tous vos hauts fonctionnaires et le personnel de la commission, y Incluant monsieur, et Mme Beauregard. J'ajourne donc les travaux de la commission des institutions jusqu'au lundi 4 juin, après les affaires courantes de l'Assemblée, pour l'étude des crédits du Conseil exécutif. Merci et bon retour.

(Fin de la séance à 16 heures)

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