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(Neuf heures quinze minutes)
Le Président (M. Kehoe): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Je déclare la séance ouverte. Je rappelle que le mandat de
la commission, c'est de procéder à l'étude des
crédits budgétaires du ministre délégué aux
Affaires Intergouvernementales canadiennes, programme 4 du Conseil
exécutif, pour l'année financière 1990-1991. Je demande
à la secrétaire d'annoncer les remplacements.
La Secrétaire: II n'y a aucun remplacement, M. le
Président.
Le Président (M. Kehoe): Je rappelle aux membres de la
commission que l'enveloppe de temps pour l'étude des crédits,
c'est quatre heures, soit de 9 heures à 13 heures. Compte tenu du fait
qu'on commence à 9 h 15, ça va aller jusqu'à 13 h 15, si
tout le monde le veut.
Pour commencer, je souhaite la bienvenue à M. le ministre, aux
membres de son personnel, aux membres de la commission du côté
ministériel et de l'Opposition. J'invite le ministre à introduire
les différents membres de son cabinet qui sont ici présents, et
à faire ses remarques préliminaires. M. le ministre.
Remarques préliminaires M. Gil
Rémillard
M. Rémillard: Je vous remercie, M le Président.
Vous me permettrez tout d'abord de présenter les gens qui m'accompagnent
à la table. Tout d'abord, à ma droite, j'ai Mme Diane Wilhelmy,
qui est secrétaire associée aux Affaires intergouvernementales
canadiennes; j'ai M. Marc Morin, qui est secrétaire adjoint et, à
ma gauche, j'ai Mme Suzanne Levesque, qui est ma directrice de cabinet. Nous
avons aussi avec nous ce matin, M. le Président, les cadres qui dirigent
les départements du ministère et qui peuvent être en cause
aujourd'hui dans nos discussions. J'ai tenu à ce qu'ils soient
présents parce que nous avons un objectif: c'est qu'on puisse
répondre de la façon la plus complète possible aux
questions qui pourraient être posées tant par les membres du parti
ministériel que par les membres de l'Opposition. Pour nous, il est
important que les fonctionnaires puissent avoir la possibilité de
répondre aux questions des élus. Moi, il m'apparaît que
c'est un principe qui est très important à développer.
Je profite, M. le Président, du début de nos travaux pour
souligner, comme ministre, la très grande qualité du travail de
nos fonctionnaires.
Je me réfère à mes fonctionnaires aux Affaires
intergouvernementales canadiennes, une petite équipe, une toute petite
équipe, mais qui fait un travail remarquable de qualité, de
compétence, de dévouement, et je voudrais les remercier
très sincèrement. Il y a, lorsqu'on se réfère
à l'État, au gouvernement, ces gens qui se dévouent
à la continuation de l'État, à la prise de décision
éclairée, à la continuation des dossiers, et je veux
souligner d'une façon tout à fait spéciale, M. le
Président, l'appui, le dévouement des fonctionnaires du
ministère et du secrétariat qui ne l'ont pas facile, je dois
dire, non pas parce que je suis un ministre difficile - Mme la sous-ministre
est là pour en témoigner, je suis certain qu'elle va confirmer ce
que je dis - mais...
M. Brassard: Laissons les juges... Des voix: Ha, ha,
ha!
M. Rémillard: ...parce que les événements
nous ont quelque peu bousculés. Je veux donc leur rendre hommage d'une
façon toute particulière, M. le Président.
Je voudrais tout d'abord, dans un premier temps, faire un bref
exposé, un rapide survol du mandat du Secrétariat aux affaires
intergouvernementales canadiennes, de ses activités, des dossiers
majeurs qui ont été traités au cours de l'année
1989-1990, du contexte à l'intérieur duquel ces activités
ont évolué ainsi que des perspectives qui se dessinent pour
l'année 1990-1991.
L'année 1989-1990, M. le Président, a été
marquée principalement par la mise en oeuvre de certains acquis des
années antérieures, par la continuité dans l'avancement
des dossiers, par le développement de la promotion économique,
commerciale et technologique, et par le renforcement de nos liens avec les
francophones du reste du Canada. On se souviendra que, l'année
dernière, nous avons eu l'occasion de nous réjouir d'un nombre
impressionnant de développements significatifs, des dossiers majeurs
pour le Québec qui étaient parvenus à maturité au
cours des années 1988 et 1989. C'est ainsi que nous avons
procédé à l'annonce de nouvelles politiques
québécoises de la francophonie et au renforcement du mandat
économique et commercial du Secrétariat, à la faveur des
amendements apportés en juin 1988 en vertu de la nouvelle loi des
affaires internationales.
Par surcroît, M. le Président, plusieurs dossiers
impliquant les deux ordres de gouvernement ont connu des résultats
tangibles au cours de l'exercice financier 1988-1989, et j'en
énumère rapidement quelques-uns: l'entrée en vigueur
de
l'Accord canado-américain de libéralisation des
échanges le 1er janvier 1989, la signature d'un protocole d'entente
prévoyant la bonification de 150 000 000 $ des ententes auxiliaires de
développement économique et régionale ainsi que la
négociation à compter de janvier 1989 du refinancement de ces
ententes pour la période 1990-1995, la conclusion d'une entente sur la
dépollution du Saint-Laurent le 3 juin 1988, le règlement du
dossier de l'Agence spatiale le 1er mars 1989 ainsi que celui de la papeterie
de Matane le 10 mars 1989, la mise en place de la nouvelle structure fiscale du
Québec à l'endroit des particuliers et des entreprises dans la
foulée de la réforme fiscale fédérale.
Ces multiples développements positifs survenus en 1988-1989, M.
le Président, étaient le fruit d'une conjoncture
particulièrement intéressante, du degré avancé des
diverses négociations et de l'approche que nous avons toujours
privilégiée dans nos relations avec le gouvernement
fédéral et avec les autres provinces. Cette approche consiste, M.
le Président, à défendre des dossiers prioritaires bien
préparés, en cherchant à concilier des
intérêts communs ou convergents. Notre approche consiste
également à promouvoir une volonté de collaboration
plutôt que de confrontation, dans le respect des compétences
respectives des gouvernements et du caractère distinct du
Québec.
L'année 1989-1990 marque aussi la continuité de nos
efforts dans un grand nombre de dossiers sectoriels à caractère
récurrent, qui forment le quotidien des relations intergouvernementales
du Québec. Avant d'examiner plus en détail les principales
activités ainsi que révolution des principaux dossiers qui ont
retenu l'attention en 1989-1990, il convient de faire brièvement
état de la conjoncture des relations intergouvernementales qui a
façonné l'évolution de ces dossiers au cours de la
dernière année
Tout d'abord, M. le Président, sur le plan économique, les
interventions financières du gouvernement fédéral ont
été marquées principalement par les contraintes que posent
conjointement la mondialisation des échanges, les menaces
inflationnistes et la lutte à un déficit fédéral
dangereusement élevé. Ces contraintes, M. le Président, se
sont traduites globalement par une politique monétaire
anti-inflationniste, via des taux d'intérêt très
élevés, et par une politique de compression des dépenses
fédérales, comprenant une diminution
accélérée du niveau des dépenses et des transferts
fédéraux aux provinces.
Le Québec a dénoncé fortement ces deux formes de
contraintes, auxquelles s'est ajoutée la décision
fédérale de mettre en place une taxe sur les produits et
services, la TPS De façon générale, le gouvernement du
Québec a constamment cherché à faire admettre au
gouvernement fédéral que ces politiques défavorisent
structu Tellement les provinces moins nanties, comme le
Québec. Celles-ci, ces provinces, doivent supporter des taux de
chômage élevés, ce qui fait que leur capacité
financière de s'acquitter de leur responsabilité
constitutionnelle est plus limitée que celle des provinces mieux
nanties. Les taux d'intérêt élevés établis
par la Banque du Canada dans ses efforts pour contrer l'inflation nous
pénalisent fortement dans notre développement économique
au Québec. Lorsque nous regardons les derniers chiffres sur les
degrés d'inflation, sur l'inflation dans les différentes
provinces, on s'aperçoit que le Québec a le taux d'inflation le
plus bas de toutes les provinces canadiennes. Par exemple, au Québec, en
avril 1990, les dernières statistiques, taux d'inflation: 3,9 %, alors
que l'Ontario est à 5,1 %, la Saskatchewan à 5,2 %, l'Alberta
à 6,1 %.
M le Président, par une politique gouvernementale qui n'est pas
sans problème, parce qu'il est beaucoup plus facile de dire oui que de
dire non dans des demandes de développement économique, mais par
un contrôle serré de nos finances publiques, comme il appert aux
différents budgets qui ont été présentés par
le gouvernement depuis qu'il est à la gouverne du Québec, nous
avons réussi, donc, à contrôler l'inflation
québécoise. On ne paut pas en dire autant des autres provinces
canadiennes, et il est profondément injuste et inacceptable, M. le
Président, qu'on ait à payer pour des provinces qui ne savent pas
comment contrôler leur inflation. Il est évident que la Banque du
Canada doit établir des taux d'intérêt qui s'appliquent
à l'ensemble canadien - on voit mal comment on pourrait avoir des taux
d'Intérêt qui pourraient varier selon les provinces - mais il faut
faire preuve d'imagination, il faut trouver une formule qui nous permettra
d'établir un juste équilibre entre des taux
d'intérêt qui doivent être établis en fonction de
l'intérêt national, mais aussi du respect des régions et
des provinces qui sont affectées en premier lieu par des taux
d'intérêt trop élevés et, par conséquent, par
une valeur du dollar elle aussi trop élevée.
M le Président, il est temps qu'on repense à ces
structures économiques canadiennes, il est temps qu'on les ajuste
à notre réalité. Il est temps qu'on mette fin à ce
qu'on pourrait appeler un fédéralisme de quêteux, avec un
système de péréquation qui doit être revu,
corrigé, et des structures économiques qui doivent tenir compte
d'un principe qui est établi dans la constitution depuis 1982, à
l'article 36, qui mentionne très clairement qu'on doit pouvoir
établir dans cette Fédération un juste équilibre
dans le partage de la richesse nationale. Ce principe, qui est
enchâssé dans notre constitution, doit nous guider pour trouver de
nouvelles formules. Qualifier les provinces de pauvres ou de riches,
établir un système de péréquation en fonction de
ces critères, c'est périmé. Il faut taire preuve
d'Imagination, revenir à nos tables
de travail et trouver des formules plus adaptées à notre
réalité économique.
Par ailleurs, M. le Président, sur le plan politique,
après plusieurs années marquées par le respect des
compétences provinciales et par la collaboration, on a vu le
gouvernement fédéral chercher à occuper, sinon à
influencer, certains secteurs d'intervention de compétence provin ciale:
je mentionne, par exemple, l'éducation, la formation, l'environnement,
les communications. On a même vu le fédéral
privilégier, dans certains cas, des interventions unilatérales
dans ces domaines qui relèvent de la juridiction provinciale. Le
gouvernement du Québec n'a pas ménagé ses efforts dans ses
interventions afin de faire bien comprendre au gouvernement
fédéral que la collaboration offerte par le Québec
à la réalisation des grands défis qu'affronte le Canada
avait comme prérequis incontournable le respect des compétences
et des priorités du Québec.
M. le Président, je tiens à le répéter, il
ne s'agit pas de faire une guerre de drapeaux, absolument pas. Il s'agit
d'avoir des gouvernements les plus efficaces possible. Parler de
fédéralisme veut dire parler de deux niveaux de gouvernement qui
ont des sphères de juridiction déterminées par la
constitution et qui peuvent travailler en étroite collaboration, avec
conciliation, dans l'application de leurs compétences. (9 h 30)
C'est évident, M. le Président, qu'on n'a pas de cloison
étanche entre les compétences fédérales et
provinciales. Il y a immanquablement des compétences qui peuvent avoir
des effets sur des compétences qui appartiennent à l'autre ordre
de gouvernement. Cependant, il y a des règles qui existent dans notre
fédéralisme et les compétences exclusives doivent
être respectées. Elles doivent être respectées pour,
justement, avoir un maximum d'efficacité dans les politiques tant
fédérales que provinciales. Toute dérogation, au
fédéral, à ces principes, M. le Président, est non
seulement préjudiciable aux intérêts du Québec, mais
elle ne respecte ni la lettre, ni l'esprit de notre
fédéralisme.
En ce qui regarde les dossiers majeurs, M. le Président,
l'exercice de 1989-1990 a vu la première année d'application de
l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis. Le
gouvernement du Québec s'est déclaré favorable à
cet accord et a soutenu qu'il était seul habilité pour assurer sa
mise en oeuvre dans les domaines de sa compétence. C'est pourquoi le
gouvernement du Québec a réclamé la mise en place de
modalités appropriées, qui permettraient une participation
provinciale adéquate à la gestion de l'accord, dont la
création d'un comité permanent de concertation
fédérale-provinciale.
Cette participation provinciale doit également s'étendre
au processus de règlement des différends, entre autres,
lorsqu'une compétence ou un intérêt économique
majeur d'une ou de plusieurs provinces est en cause. Une entente sur la gestion
de l'accord doit intervenir le plus rapidement possible du simple fait que les
négociations canado-américaines sur le dossier des subventions
entreront dans une phase intensive en 1991, soit après la conclusion de
la présente ronde de négociations commerciales
multilatérales qui se déroule dans le cadre du GATT.
Outre la réduction substantielle des tarifs douaniers et d'autres
entraves au commerce, la huitième ronde des négociations
commerciales multilatérales, lancée en septembre 1986, a aussi
comme objectif de libéraliser les échanges, principalement dans
les secteurs de l'agriculture, des textiles et du vêtement ainsi qu'au
niveau des subventions et des mesures de sauvegarde. Au plan
fédéral-provincial, des mécanismes de participation des
provinces à l'élaboration des positions canadiennes ont
été mis en place, tant au niveau politique qu'administratif.
Depuis mai 1988, 20 réunions du comité
fédéral-provincial et des conférences des ministres
responsables du commerce extérieur ont permis au gouvernement du
Québec de présenter ses positions sur les différents
sujets touchés par ces négociations. De plus, le premier ministre
et le ministre des Affaires internationales ont rencontré, à
Genève, en février 1990, l'équipé canadienne de
négociation auprès du GATT. Enfin, M. le Président, le
ministère des Affaires internationales a publié, en mars dernier,
un document sur les enjeux de ces négociations, dans une perspective
québécoise, document qui fait notamment état des positions
du Québec.
Il va de soi que cette volonté des gouvernements de chercher une
plus grande libéralisation de l'économie sera profitable aux pays
qui privilégieront des mesures qui se traduiront par une meilleure
adaptation de leur main-d'oeuvre et de leurs entreprises. Dans un tel contexte,
la décision du gouvernement fédéral de modifier en
profondeur le régime d'assurance-chômage soulève de
nombreuses inquiétudes parmi les provinces et, en particulier, au
Québec. Au Québec, M. le Président, ces modifications
concernant l'assurance-chômage se traduiront par une baisse des
prestations de 350 000 000 $, en 1990, ce qui affectera 210 000 personnes. De
plus, cela signifie que la clientèle de l'aide sociale, au
Québec, pourrait augmenter de 10 000 prestataires.
La nouvelle Loi sur l'assurance-chômage permettra au gouvernement
fédéral, tout en se retirant du financement de la caisse,
d'utiliser ces fonds pour des mesures visant au développement de la
main-d'oeuvre. Il est clair, M. le Président, que le gouvernement du
Québec entretient de sérieuses réserves à
l'égard de la volonté fédérale d'intervenir plus
directement dans le champ de la formation professionnelle. Ce champ est un
champ de compétence provinciale. C'est à nous de former notre
main-d'oeuvre en fonction de nos priorités économiques de
développement. C'est notre responsabilité et nous avons
l'intention d'exercer notre responsabilité.
Entre-temps, M. le Président, des discus sions sont en cours pour
prolonger l'entente sur la planification de l'emploi. Par ailleurs, l'entente
sur la formation professionnelle a été prolongée jusqu'au
31 mars 1991. Quant au dossier du refinancement des ententes auxiliaires de
développement économique et régional, pour la
période de 1990 à 1995, il a été
sérieusement affecté par le contexte des relations
férérales-provinciales de 1989-1990. Les interventions du
gouvernement du Québec dans ce dossier ont été
dictées par un souci de continuité et de cohérence.
Rappelons que les deux gouvernements, en signant le protocole de juin 1908,
s'étaient notamment engagés à bonifier les ententes
auxiliaires existantes d'une somme de 150 000 000 $. De longues
négociations se sont poursuivies pendant toute l'année 1989-1990,
et elles ont abouti à l'acceptation par Ottawa des priorités
établies par le Québec quant à la répartition des
150 000 000 $ en question. Ce protocole d'entente prévoyait ainsi que
les deux gouvernements entreprendraient, dès janvier 1989, des
négociations sur le refinancement des ententes auxiliaires de l'EDER
pour la période 1990-1995. Plutôt que de donner suite aux demandes
formelles et répétées du Québec à ce titre,
le ministre fédéral responsable du dossier faisait savoir qu'il
ne disposait que d'une enveloppe de 247 000 000 $ pour la période 1989
1994, afin de financer de nouvelles initiatives de développement
économique régional au Québec.
Dans ce dossier majeur, le Québec a par ailleurs insisté
auprès du gouvernement fédéral sur la
nécessité de maintenir les régimes d'en tentes
auxiliaires, d'en poursuivre l'exécution et d'en assurer le
refinancement adéquat. Ces conditions doivent être
respectées afin que le Québec puisse disposer d'une
égalité des chances pour développer son potentiel
économique et satisfaire ses besoins d'adaptation au
libre-échange. Le Québec tient également a avoir sa juste
part de la contribution fédérale en matière de
développement régional, conformément aux principes
inscrits dans la constitution. C'est cet article 36, auquel je me
référais il y a quelques minutes, M. le Président, cet
article 36 de la Loi constitutionnelle de 1982, qui précise que le
gouvernement fédéral partage avec les provinces la
responsabilité de favoriser le développement économique,
de façon à réduire l'inégalité des chances.
Or, la part qu'Ottawa consent au Québec, au chapitre du
développement économique et régional, est en constante
régression.
M. le Président, je me permettrais, à ce moment-ci, de
distribuer aux membres de la commission un tableau qui m'apparaît
particuliè rement significatif. C'est un tableau qui a été
préparé par le Secrétariat et qui se réfère
à des chiffres qui sont officiels, qui apparaissaient dans les budgets
Wilson. C'est un tableau que j'ai communiqué au gouvernement
fédéral depuis déjà un bout de temps, qui n'a pas
été contesté par le gouvernement fédéral
à ce jour. Mais c'est un tableau qui est particulièrement
éloquent, et je suis certain que vos questions me permettront, tout
à l'heure, d'y revenir. De 33, 9 % qu'elle était au cours de la
période de 1979 à 1984, elle s'établira à 25, 2 %
au cours des années 1989 à 1994, incluant la somme de 247 000 000
$ offerte par Ottawa pour de nouvelles initiatives. Cette part s'avère
insuffisante, voire inacceptable, compte tenu des besoins du Québec.
Pourtant, entre les périodes de 1979 à 1964 et de 1989 à
1994, la part des provinces atlantiques augmente, elle, de 33, 2 % à 37,
9 %, et celle des provinces de l'Ouest bondit de 20, 8 % à 32, 4 %. Il y
a de quoi s'interroger lorsqu'on regarde ces chiffres. Malgré les
demandes répétées du Québec, formulées tout
au long de l'année 1989-1990, le gouvernement fédéral n'a
pas été en mesure de donner les raisons de ce traitement qui nous
apparaît tout à fait injuste.
Dans ce contexte difficile, c'est avec satisfaction que nous avons
récemment accueilli la réponse du nouveau ministre
fédéral responsable du Développement économique et
régional, M. Benoît Bouchard, qui affirmait, le 18 avril dernier,
être disposé à entreprendre dès maintenant des
discussions sur le refinancement des ententes auxiliaires. Le gouvernement du
Québec entend poursuivre ses efforts et poser les gestes requis afin que
le processus de bonification des ententes actuelles de l'EDER soit
immédiatement mis en oeuvre et que les négociations sur le
refinancement des ententes soient enfin amorcées et mènent
à des résultats acceptables pour le Québec et les
régions. J'ai eu l'occasion, M. le Président, dans le dernier
mois, de rencontrer à deux reprises le ministre Bouchard pour discuter
de ce dossier. Je dois dire que nos discussions sont intéressantes.
Aux yeux du Québec, il paraît évident qu'en
n'agissant pas rapidement pour corriger cette situation
d'inéquité régionale, qui pénalise durement les
provinces moins nanties, le gouvernement fédéral ne joue pas son
rôle de redistributeur de la richesse à travers le pays; on peut
lui adresser le même reproche quant aux programmes d'habitations
sociales, par exemple, M. le Président. Entre 1986 et 1989, les
engagements fédéraux en habitations sociales ont connu une
croissance annuelle de 1, 6 % au Québec, de 8, 7 % dans les provinces
moins nanties, et de 17, 7 % dans les provinces nanties, dont 19, 9 % en
Ontario. Ces écarts proviennent essentiellement de la formule de
répartition des fonds fédéraux. Je le mentionnais tout
à l'heure, M. le Président, il faut repenser ces formules de
répartition des fonds fédéraux. Il faut trouver des
formules nouvelles. Compte tenu de leur capacité financière, les
provinces moins nanties doivent recourir à des efforts de
rationalisation de leurs dépenses dans ce secteur comme dans les
autres.
Une telle allocation des ressources fédérales ne peut que
contribuer à accroître les disparités économiques au
Canada et, de là, à faire naître des tensions dommageables
pour l'unité canadienne.
Comme vous pouvez le constater, les problèmes auxquels nous
sommes confrontés sont importants. Néanmoins, certains dossiers
ont connu, au cours des 12 derniers mois, des développements
significatifs qui sont à l'avantage du Québec. D'autres dossiers
importants sont aussi en phase de discussion. Au chapitre de l'environnement,
une entente fédérale-provinciale d'harmonisation et de
concertation fut signée le 8 juin 1989, entente par laquelle le
gouvernement fédéral s'est engagé à consacrer 103
000 000 $ afin de réaliser différents projets liés
à la dépollution du Saint-Laurent. De plus, un accord a
été conclu récemment avec le gouvernement
fédérai concernant la création d'un parc marin au
confluent de la rivière Saguenay et du fleuve Saint-Laurent. C'est
là, M. le Président, en ce qui regarde ce parc marin, un exemple
particulièrement éloquent d'une bonne relation entre le
gouvernement fédéral et le gouvernement québécois
au bénéfice des Québécois, qui voient là une
réalisation qui était longuement attendue. Et je suis certain que
le député de Lac-Saint-Jean sera du même avis que moi.
Cette entente, donc, qui crée le parc marin, représente un
investissement fédéral de 7 500 000 000 $ et respecte les
objectifs du Québec relativement à l'intégrité de
son territoire et au maintien de ses compétences.
Dans le domaine de l'énergie, l'annonce officielle du projet
Soligaz par le gouvernement du Québec, le 8 septembre 1989, donnait
l'aval à ce projet qui représente à la fois un enjeu
majeur de développement économique et un instrument important de
la sécurité énergétique du Québec. Par la
mise en oeuvre de ce projet, l'industrie pétrochimique
montréalaise pourra reprendre la place importante qu'elle
détenait dans ce domaine avant les années soixante-dix en
Amérique du Nord. Ce projet sera probablement soumis à l'Office
national de l'énergie, au début de la prochaine année.
Dans le domaine des sciences et des technologies, le gouvernement
fédéral a dévoilé, le 26 octobre dernier, les 14
projets qui ont été retenus dans le cadre du nouveau programme
des réseaux de centres d'excellence. Des universités
québécoises font partie de 12 de ces 14 projets, dont 5 seront
dirigés par une institution du Québec. Comme cela fut
annoncé, le Québec compte bénéficier de 27 % du
budget fédéral consacré à ce programme. Ces projets
qui s'ajoutent au règlement de dossiers tels l'implantation de l'Agence
spatiale et la dépollution du Saint-Laurent contribueront à
améliorer la part relative du Québec dans des dépenses
fédérales en recherche-développement. (9 h 45)
Toutefois, le retard du Québec dans ce secteur demeure
énorme. La performance du Québec dans le cadre de la politique
fédérale de répartition des contrats en science et
technologie no cesse de se détériorer depuis 1976-1977. Elle
s'est même effondrée depuis 1985-1986, si bien qu'elle
n'atteignait même plus 10 % en 1986-1987. Il est à noter que
l'année 1988-1989 a vu apparaître un timide redressement pour le
Québec avec environ 14 % de la valeur des contrats. Pour les 11 premiers
mois de 1989-1990, la tendance n'apparaissait pas se poursuivre, puisque la
part du Québec serait de seulement 12, 14 % contre 44, 6 % pour
l'Ontario et 19, 3 % pour la Colombie-Britannique. Le gouvernement du
Québec entend poursuivre ses efforts en vue de corriger la
situation.
En ce qui regarde les dossiers en discussion, M. le Président, le
gouvernement du Québec cherche à établir les positions
susceptibles de faire évoluer les décisions du gouvernement
fédéral dans le sens des intérêts supérieurs
du Québec, et cela, dans le respect de tous les partenaires canadiens.
À titre d'exemple, on se rappellera que, face aux problèmes
soulevés par le projet fédéral de taxe sur les produits et
services, le gouvernement du Québec a multiplié les
représentations auprès d'Ottawa, que ce soit conjointement avec
les autres provinces ou de façon bilatérale, et ces discussions
ont commencé à porter fruit. Ainsi, la décision du
gouvernement fédéral de réduire de 9 % à 7 % le
taux fixé pour la TPS permettra de corriger les problèmes
soulevés par la présente taxe aux manufacturiers tout en
minimisant l'impact de cette réforme sur l'économie. De
même, la réduction de ce taux atténuera les risques de
rupture de l'équilibre fiscal actuel entre le gouvernement
fédéral et les provinces, quoique des garanties plus fermes
soient souhaitables à cet égard.
Les discussions avec le gouvernement fédéral ont aussi
progressé sur la question de l'impact de la TPS sur la situation
financière des provinces, notamment au chapitre du maintien du fardeau
fiscal actuel de nos municipalités, commissions scolaires,
universités et hôpitaux. Cependant, le problème de la
complexité administrative posé par la TPS reste entier. La
coexistence de deux régimes de taxe à la consommation, à
savoir la TPS fédérale et la taxes de vente provinciale,
représenterait un véritable cauchemar administratif et
constituerait une dépense improductive que ni les contribuables, ni les
deux niveaux de gouvernement n'auraient les moyens de se permettre.
Malgré les problèmes majeurs soulevés par cette taxe, le
gouvernement fédéral semble déterminé à
aller de l'avant avec son projet. C'est pourquoi il nous faut explorer, comme
le ministre des Finances l'a mentionné, toutes les solutions qui
seraient de nature à atténuer ces difficultés. Notre
objectif demeure de protéger les intérêts du Québec
et de ses contribuables et, plus particulièrement, de réduire les
possibilités de confusion administrative en ce
domaine.
Par ailleurs, tant sur la scène fédérale qu'au
Québec, le problème crucial que pose le financement du
système de santé est amplement discuté à l'heure
actuelle. Lors de leur dernière conférence, tenue à
Québec, en août 1989, les premiers ministres des provinces ont
pris connaissance du rapport déposé par le premier ministre du
Québec au nom des ministres de la Santé des provinces. Ils ont
alors convenu de l'urgence de réduire la croissance des coûts de
santé et de la nécessité que le gouvernement
fédéral mette un terme aux coupures de transferts aux provinces
dans ce secteur. Les premiers ministres ont aussi demandé à leurs
ministres de la Santé de poursuivre la coopération
intergouvernementale en vue de mettre au point des solutions de rechange
axées sur la prévention et sur la distribution de services
curatifs moins coûteux. Dans cette optique, les ministres provinciaux de
la Santé ont convenu, lors de leur rencontre de septembre 1989 à
Québec, de poursuivre leurs échanges en mettant l'accent sur le
partage de l'information ainsi que sur la nécessité d'effectuer
une évaluation approfondie des programmes de services de
santé.
Au plan économique, plusieurs dossiers ont aussi connu une
évolution significative. Mentionnons celui de la nouvelle
stratégie fédérale de mise en valeur des ressources
humaines. Les sous-ministres fédéral et provinciaux se sont
entendus, à leur rencontre du 31 janvier 1990, à Québec,
pour mettre en place un processus de discussion devant conduire à la
signature d'un cadre de principe multilatéral suivi d'ententes
bilatérales.
À l'heure de l'adaptation au libre-échange et de la
mondialisation des marchés, nous entendons faire en sorte que le
gouvernement fédéral s'associe au gouvernement du Québec
afin de mettre en oeuvre des mesures de formation qui tiennent compte des
compétences et des priorités propres au Québec dans ce
secteur. De fait, il s'agit pour tous les gouvernements au Canada de devenir
dans ce domaine des partenaires pour l'avenir, comme l'indique le titre du
document agréé par toutes les provinces et présenté
par mon collègue de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du
revenu.
Dans le domaine de la protection de l'environnement, les premiers
ministres du Canada et des provinces ont approuvé, lors de leur
conférence annuelle sur l'économie, les 9 et 10 novembre 1989,
les grandes lignes d'une déclaration de principe préparée
par les ministres provinciaux de l'Environnement et portant sur la
coopération intergouvernementale. Le Québec a maintes fois
rappelé sa volonté de collaboration et de coopération en
matière de protection de l'environnement dans le respect intégral
de ses compétences.
Pour éviter le dédoublement des procédures avec le
gouvernement fédéral, le Québec est en principe d'accord
pour qu'une coopération s'établisse et que le gouvernement
fédéral soit intégré dans ce processus
québécois en ce qui a trait à l'évaluation des
impacts qui relèvent de sa compétence. Toutefois, on ne
prévoit pas d'évolution dans le dossier des mécanismes
permanents de collaboration tant que le contenu du projet de loi
fédéral sur l'évaluation des impacts environnementaux
devant être déposé en cours d'année ne sera pas
connu.
Enfin, le secteur des télécommunications a
été également le théâtre
d'événements majeurs au cours de l'exercice financier 1989-1990.
Il y eut tout d'abord, le 14 août 1989, le jugement de la Cour
suprême du Canada dans la cause relative à la compagnie albertaine
de télécommunications AGT; et le 19 octobre 1989, le
dépôt du projet de loi C-41 ayant pour objet de lier
expressément la couronne aux dispositions de la Loi sur les chemins de
fer. Le ministre fédéral des Communications éliminait
ainsi l'immunité qui avait été reconnue par la Cour
suprême aux entreprises de télécommunications des provinces
des Prairies. Le gouvernement du Québec, même s'il reconnaît
le bien-fondé d'une politique nationale de
télécommunications, n'en exprime pas moins sa volonté
d'exercer ses responsabilités sur le plan économique, social et
culturel à l'endroit des entreprises de télécommunications
oeuvrant sur son territoire. Il est donc heureux que les pressions
exercées par la ministre québécoise des Communications
aient conduit au retrait, du moins pour une période de
réévaluation, de ce projet de loi fédéral.
De nombreuses activités contribuent à la
réalisation de nos objectifs en matière de relations
intergouvernementales, M. le Président. En ce qui a trait au volet de
promotion économique, commerciale et technologique sur le territoire
canadien, le Secrétariat a, au cours de l'année 1989-1990,
posé des jalons pour la mise en place d'un plan d'action qui lui
permettra d'être une plaque tournante entre le réseau des bureaux
du Québec au Canada et les différents ministères
économiques. De plus, le Secrétariat et le ministère de
l'Industrie, du Commerce et de la Technologie se sont concertés pour
assurer une participation québécoise à trois foires
commerciales importantes au Canada, soit le National Petroleum Show, à
Calgary, Wood Expo à Vancouver et le Canadian High Tech, à
Toronto.
En plus des relations bilatérales régulières avec
le gouvernement fédéral, nous entretenons des échanges
soutenus avec l'ensemble des autres provinces, afin d'améliorer nos
liens avec nos partenaires canadiens et de les rendre réciproquement
avantageux. En 1989-1990, le Québec a reçu la visite des premiers
ministres de l'Ontario, de l'île-du-Prince-Édouard et de
Terre-Neuve. De plus, les premiers ministres provinciaux se sont
rencontrés au mois d'août dernier, à Québec, dans le
cadre de la 30e conférence des premiers
ministres provinciaux. Cette conférence a donné lieu
à des consensus pertinents dont a été saisi le
gouvernement fédéral.
Lors de la conférence annuelle des premiers ministres sur
l'économie, tenue les 9 et 10 novembre 1989, je songe en particulier aux
prises de position concernant la TPS, l'économie, les questions
environnementales et le développement régional. Il me plaît
de souligner que cette conférence marquait le 30e anniversaire de la
conférence qui avait été tenue à Québec, en
1960, à l'initiative du premier ministre du Québec, M. Jean
Lesage. La réunion de Québec, les 22 et 23 août 1989,
marquait également le 125e anniversaire de la réunion tenue
à Québec le 18 octobre 1864. C'est à cette occasion, on se
souvient, M. le Président, que les Pères de la
Confédération avaient conçu les 72 résolutions qui
devaient permettre, trois ans plus tard, de jeter les bases constitutionnelles
de la Fédération canadienne.
Le caractère intense des activités intergouvernementales
se mesure également au nombre important de rencontres et de
conférences auxquelles le Québec a participé. Signalons
qu'en 1988-1989 il s'est tenu deux conférences au niveau des premiers
ministres et plus d'une quarantaine de conférences de ministres, tant au
niveau fédéral, provincial qu'interprovincial.
Enfin, les représentants du Québec on assisté
à plusieurs rencontres de fonctionnaires portant sur tous les dossiers
sectoriels qui composent le menu de nos relations
fédérales-provinciales et Interprovinciales. Ces rencontres et
conférences contribuent à faire avancer des dossiers importants
pour le Québec. Nous avons également maintenu en 1989-1990 un
niveau élevé d'activités dans nos programmes de
coopération avec l'Ontario et le Nouveau-Brunswick. L'année 1989
marquait le 20e anniversaire des accords de coopération et
d'échanges en matière d'éducation et de culture, ainsi que
la création des commissions permanentes de coopération
Québec-Nou-veau-Brunswick et Québec-Ontario. Plusieurs
manifestations spéciales ont souligné ce dernier anniversaire,
dont une importante exposition en design mobilier tenue successivement en
Ontario et au Québec, ainsi qu'une tournée conjointe des
ensembles vocaux Tudor, de Montréal et Elmer Iseler, de Toronto.
De plus, en juin dernier, à l'occasion de la visite à
Québec du premier ministre de l'Ontario, MM. Bourassa et Peterson
signalent un protocole additionnel de coopération entre les deux
provinces, lequel touche notamment le secteur scientifique, l'environnement,
l'économie et l'administration publique.
Mentionnons, en outre, que les premiers ministres de l'Ontario et du
Québec ont annoncé, le 17 octobre 1989, la création d'un
groupe de travail mandaté pour étudier la faisabilité d'un
lien Québec-Windsor par train à grande vitesse. Et c'est
là un projet d'avenir qui intéresse vivement le
Québec.
En 1989-1990, le Québec a également enrichi sa
coopération interprovinciale en signant un accord avec
l'île-du-Prince-Édouard. De plus, des discussions sont en cours
afin de resserrer la coopération avec d'autres provinces dans le but
d'en arriver à de nouveaux accords-cadres.
M. le Président, nous avons également renforcé nos
liens avec les francophones du reste du Canada et procédé, cette
année, à une consolidation de notre action à l'endroit des
communautés francophones. Les efforts de coopération avec les
francophones hors Québec ont été intensifiés dans
des domaines tels que l'éducation, la culture, les communications et la
coopération économique. De plus, une attention
particulière a été portée à la jeunesse,
notamment, par la mise en place de programmes d'échanges.
Enfin, rappelons que trois moyens sont privilégiés pour
renforcer l'ensemble de l'appui québécois à la
francophonie québeco-canadienne: premièrement, des programmes
d'aide destinés à soutenir directement les communautés
francophones; deuxièmement, des accords de coopération avec les
provinces concernées et, troisièmement, le maintien du lien
direct avec les associations francophones. Le gouvernement a substantiellement
augmenté son appui financier et technique aux francophones du reste du
Canada. De 1 400 000 $ qu'il était en 1987-1988, l'effort
budgétaire québécois est passé à 2 300 000 $
en 1989-1990.
Il y aurait matière suffisante pour s'étendre encore
longuement sur l'évaluation des dossiers des activités
intergouvernementales du Québec en 1989-1990, mais nous nous en tenons
à l'essentiel. Ce bilan des relations du gouvernement du Québec
avec le gouvernement fédéral et ceux des autres provinces
témoigne du caractère positif de l'approche
québécoise en matière de relations intergouvernementales,
de môme que de la cohérence et de la continuité de son
action au-delà des cycles qui ponctuent l'évolution de nos
relations économiques et politiques.
En effet, la gestion et l'avancement des dossiers intergouvernementaux
sont affaire de continuité et de permanence. Ceci est
particulièrement important considérant les nombreuses questions
majeures qui demeurent en suspens et qui sont appelées à occuper
l'avant-scène des relations fédérales-provinciales.
Ainsi, le Secrétariat continuera, en 1990-1991, à
accentuer le volet économique de son mandat, de manière à
permettre au gouvernement du Québec de disposer des meilleurs dossiers
de négociation avec le gouvernement fédéral dans les
secteurs prioritaires pour le Québec. Il en résultera des
interventions fédérales mieux ajustées aux besoins et aux
aspirations du Québec ainsi qu'un traitement plus équitable pour
le Québec en regard des décisions des actions
fédérales qui nous affectent.
Dans cet esprit, les dossiers prioritaires qui, au cours des prochains
mois, retiendront l'attention du gouvernement du Québec dans ses
relations fédérales-provinciales seront les suivants:
premièrement, le refinancement des ententes auxiliaires de CEDER. Le
Québec continuera de défendre l'intégrité des
principes qui sont les siens en matière de développement
économique et régional. Deuxièmement, la réforme de
la taxe de vente. Le gouvernement du Québec cherchera à
protéger les intérêts du Québec et de ses
contribuables et, notamment, à réduire les possibilités de
confusion administrative en ce domaine. Troisièmement, les
négociations du renouvellement des accords fiscaux 1992-1997. Le
Québec soumettra des propositions, afin que le gouvernement
fédéral puisse pleinement assumer ses responsabilités de
redistribution de la richesse au Canada et afin de réaliser un partage
plus équilibré des ressources réservées aux
provinces pour qu'il soit compatible avec les responsabilités que
celles-ci doivent assumer. Quatrièmement, la stratégie
fédérale de mise en valeur des ressources humaines. Le
Québec exigera que la réforme fédérale touchant la
formation de la main-d'oeuvre et l'assurance-chômage s'inscrive dans la
nouvelle réalité créée par le libre-échange
et tienne compte des intérêts du Québec.
Cinquièmement, la protection de l'environnement. Le Québec
poursuivra ses efforts en vue de la conclusion d'une entente sur
l'évaluation des impacts environnementaux.
Les activités prioritaires en 1990-1991, disons que le
réseau des bureaux du Québec au Canada, en étroite
collaboration avec les ministères économiques concernés,
sera en mesure d'exercer les nouvelles responsabilités que le
gouvernement lui a confiées en matière de promotion
économique, commerciale et technologique sur le territoire canadien. Et
les conseillers économiques en poste dans les bureaux du Québec
au Canada seront ainsi mandatés pour privilégier les secteurs
jugés prioritaires par le gouvernement. Nous parlons de
libre-échange avec les États-Unis, mais nous avons un libre
marché canadien qui est là et qui n'est pas exploité
à sa juste mesure. (10 heures)
Cette façon de procéder témoigne de l'importance
accordée à la représentation, dans les autres provinces,
des intérêts des entreprises québécoises. Des
initiatives intéressantes confirment déjà l'engagement
ferme du gouvernement du Québec à ce chapitre. C'est ainsi que
les conseillers économiques en poste dans les bureaux du Québec
au Canada, en compagnie de ceux qui sont affectés ailleurs dans le
monde, viennent d'effectuer une série de rencontres avec des gens
d'affaires québécois afin de mieux connaître leurs besoins
en matière d'aide à l'exportation.
Par ailleurs, dans l'ensemble de ses activités, le
Secrétariat, tout en continuant à promouvoir les positions du
Québec, maintiendra le caractère flexible de l'approche que
privilégie le Québec dans ses relations intergouvernementales. La
collaboration et la solidarité offertes par le Québec à
ses partenaires doivent être vues à la lumière du respect
que portent ceux-ci à l'égard des compétences du
gouvernement du Québec et du caractère distinct de la
société québécoise.
En conclusion, M. le Président, dans cette optique, par l'accord
du lac Meech, le Québec a voulu poser un geste de réconciliation
et tendre la main à ses partenaires de la Fédération pour
qu'on relève ensemble le défi posé par l'ouverture des
frontières et l'internationalisation des échanges. Tout en
maintenant sa spécificité, le Québec doit, pour poursuivre
son développement, s'ouvrir au monde et resserrer les liens avec ses
partenaires économiques afin d'affronter une concurrence internationale
accrue et de plus en plus difficile.
L'accord qui a été signé le 3 juin 1987 et qui doit
permettre au Québec de réintéger la dynamique
constitutionnelle à titre de partenaire majeur et distinct de plein
droit fut le résultat d'une approche consensuelle de la part de tous les
partenaires Impliqués. Il s'agit d'un accord qui, non seulement pour le
Québec est l'accord qu'il nous faut, mais qui peut aussi permettre au
Québec d'adhérer avec dignité à la constitution
canadienne et nous permettre aussi de rejoindre, comme partenaire a part
entière, l'ensemble canadien. Cet accord est avantageux pour chacune des
régions, qui trouvent aussi une possibilité de mieux se
développer en fonction de leur potentiel.
M. le Président, j'espère que, dans les prochains jours,
l'évolution de ce dossier nous permettra de conclure, de tourner la page
pour qu'on puisse concentrer nos efforts à relever les défis, en
particulier les défis économiques très importants que nous
avons devant nous. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Kohoe): Merci, M. le ministre. J'invite
donc maintenant le porte-parole de l'Opposition officielle à faire des
remarques préliminaires.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: M. le Président, si j'avais un titre à
donner au discours de trois quarts d'heure que vient de nous faire le ministre,
je l'appellerais "le discours de la résignation tranquille". Je
demanderais même à la commission de le verser presque au complet,
ce discours-là, comme pièce à conviction au procès
du régime fédéral. Si je l'avais connu, d'ailleurs, si
j'en avais pris connaissance quelques jours avant, probablement que ça
m'aurait évité d'en écrire un moi-même, parce que
c'est très accablant comme critique et comme bilan des relations
fédérales-provinciales.
Mais ce qui me laisse pantois, M. le Président, c'est que,
malgré ce bilan accablant du régime fédéral, la fol
fédéraliste du ministre n'est quand marne pas
ébranlée, ce qui me fait dire que... Il est, comme on le sait, de
formation juridique. C'est un juriste de métier et de formation, mais
quand on examine sa foi, on pense plutôt au métier de
charbonnier.
Des voix: Ha, ha, ha!.
M. Brassard: C'est vraiment la foi du charbonnier. Le ciel peut
lui tomber sur la tête, sa foi n'est pas ébranlée pour
autant. Il continue de croire aux vertus du régime
fédéral, malgré le bilan accablant qu'il en fait
lui-même parce que son discours est une très belle pièce
à conviction à verser dans le cadre du procès du
régime fédéral.
Sur Meech et sur le dossier constitutionnel, ma foi, je l'ai
trouvé très succinct. On y reviendra sûrement dans nos
échanges. Je l'ai trouvé très bref. Est-ce qu'on doit
interpréter sa brièveté, sa concision sur le dossier
constitutionnel comme nous démontrant qu'il se déroule,
présentement, des négociations secrètes ou est-ce qu'on
doit conclure que l'air de Provence inspire davantage le ministre quant au
dossier constitutionnel et quant à l'avenir du Québec? Il est un
peu, d'ailleurs, comme le premier ministre lui-même. L'air
étranger est plus inspirant, semble-t-il. De sorte qu'après le 23
juin, moi, je proposerais que le ministre et le premier ministre s'en aillent
pour un bon mois sur la Côte d'Azur.
Une voix: Ha, ha, ha!
M. Brassard: Comme ça, pendant un mois, je pense qu'on
réussirait pas mal à savoir où ils se casent et leur
positionnement quant à l'avenir du Québec.
M. le Président, l'Impasse relative à l'accord du lac
Meech perdure toujours, à 23 jours de l'échéance
fixée pour sa ratification. Et au-delà de son contenu - on y
reviendra sans doute dans nos échanges tout à l'heure - l'accord
est devenu en quelque sorte le symbole de l'émergence de deux nations
engagées dans un débat fondamental sur leur avenir respectif.
Alors, d'un côté le Canada anglais qui tente, depuis 1982 surtout,
de se définir un pays autour de la Charte canadienne des droits et
libertés enchâssée dans la constitution et selon laquelle
tous les citoyens doivent avoir les mômes droits et, par
conséquent, toutes les provinces doivent être égales entre
elles. D'où leur réticence et la résistance chez certaines
à reconnaître le Québec comme une société
distincte par crainte, justement, de lui conférer un statut
particulier.
Je dirais, M. le Préskient, que cette conception du Canada est
légitime et que je ne vois pas pourquoi, par exemple, certains
Québécois fédéralistes, peut-être par
déception, considèrent cette vision du Canada comme
illégitime. C'est une vision tout à fait légitime du
Canada, II faut le reconnaître, mais qui, évidemment, va à
l'encontre des aspirations fondamentales du Québec. La nation
québécoise - et j'ai été heureux de constater que
le ministre a attendu sa visite en France pour recourir à cette notion
ou à ce concept de nation québécoise; je l'ai vu en toutes
lettres dans son discours d'Aix-en-Provence - recherche depuis plus de 30 ans
l'obtention d'un statut particulier à l'intérieur de la
Fédération canadienne qui soit conforme à son
identité et à sa culture. Et tous les gouvernements
québécois qui se sont succédé depuis la
Révolution tranquille ont multiplié les tentatives pour obtenir
ce statut particulier permettant au Québec d'avoir les pouvoirs
nécessaires pour assurer son développement. L'accord du lac Meech
conclu en juin 1987 s'inscrit dans cette volonté constante du
Québec d'obtenir un statut particulier, même si cela s'est fait
sur la base des conditions les plus faibles et les plus inoffensives
présentées par un gouvernement québécois en
matière de réforme constitutionnelle.
L'accord du lac Meech a permis de constater que la vision du Canada
anglais, fondée sur la charte de 1982, d'une part, et la quête
d'un statut particulier pour le Québec, d'autre part, sont
incompatibles. Et à cet égard, le débat relatif à
l'accord du lac Meech a agi comme un puissant révélateur pour les
Québécois et les Québécoises,
révélateur dans le sens photographique du terme, qui fait
apparaître la photo. Le rejet probable de cet accord par le Canada
anglais, considéré par une majorité de
Québécois comme l'ultime et dernière chance du
fédéralisme, sera interprété comme un refus de la
tentative du Québec d'obtenir un statut particulier et ce, sur la base
des conditions les plus faibles, les plus modérées, les plus
raisonnables et les plus modestes mises de l'avant en cette matière par
un gouvernement québécois. Ce rejet de l'accord sera aussi
interprété comme un reniement de la promesse de ceux qui les
avaient invités à voter "non" au référendum de mai
1980 en affirmant que leur "non" serait un "oui" au fédéralisme
renouvelé. Pour tout Québécois, un
fédéralisme renouvelé passe par un statut particulier pour
le Québec, ce qui était, évidemment, loin d'être la
conception de Trudeau.
Le beau risque s'effondre, emportant avec lui l'honneur et
l'enthousiasme sous le poids de l'incompréhension et du mépris
croissant à l'endroit du Québec. La démission courageuse
de Lucien Bouchard sonne en quelque sorte le glas de la troisième voie,
celle d'un Québec ayant un statut particulier fondé sur des
pouvoirs spécifiques à l'intérieur d'un cadre
fédératif canadien. Elle est devenue une vole sans issue. Le
débat sur l'accord du lac Meech aura fait oeuvre de clarté,
à tout le moins, en ramenant l'avenir du
Québec à deux options: première option, le maintien
du Québec à l'intérieur du Canada avec le statut d'une
province tout à fart comme les autres ou, alors, l'accès à
la souveraineté qui lui procurera les outils et les pouvoirs permettant
au Québec de devenir pleinement responsable de lui-même.
Souverain, il pourra alors exercer un rapport de force favorable à la
négociation des modalités d'une association avec le Canada.
La voie de la souveraineté apparaît être la seule
voie possible et digne pour un nombre croissant de Québécois. Un
sondage d'opinions reflète d'ailleurs - il y en a eu un dernier pas plus
tard qu'hier - cette progression de l'idée de la souveraineté
parmi la population québécoise en recueillant près de 60 %
d'appuis dans certains cas. Les Québécois sont de plus en plus
nombreux à envisager la voie de la souveraineté parce qu'ils ont
acquis cette confiance, cette assurance que le Québec possède sur
le plan économique les moyens et les capacités requis pour
assumer son avenir politique. La faisabilité économique du projet
de souveraineté n'est plus un enjeu du débat comme ce fut le cas,
on s'en rappellera, en 1980. Les analyses de la firme de courtage Merrill
Lynch, du mouvement Desjardins, des banques Toronto Dominion, de
Montréal ainsi que du magasine d'affaires américain Business
Week démontrent sans équivoque la viabilité de la
souveraineté du Québec sur le plan économique. Cela
s'explique en bonne partie par le dynamisme de la garde montante, Issu
notamment du REA et du décloisonnement des institutions
financières, qui a permis aux Québécois d'accroître
de façon considérable le contrôle de leur économie
depuis le référendum de mai 1980.
L'échec éventuel de l'accord du lac Meech marquera la fin
des tentatives répétées du Québec visant à
obtenir un statut particulier à l'intérieur du cadre
fédératif canadien. Cet échec appréhendé
constituera le troisième reniement du Canada anglais à
l'égard du Québec, le premier étant le détournement
de la promesse référendaire de Trudeau au profit d'un
rapatriement unilatéral de la constitution, le second étant la
décision des provinces du Canada anglais d'abandonner le Québec
à son propre sort au terme de la nuit des longs couteaux en novembre
1981. On comprend mieux le désarroi de l'actuel gouvernement du
Québec face à l'échec de plus en plus certain de l'accord
du lac Meech.
Une question fondamentale se pose pour ce gouvernement
d'obédience fédéraliste et c'est la suivante: Avec quelle
crédibilité pourra-t-il prétendre négocier a
nouveau avec le reste du Canada pour obtenir davantage après que
celui-ci eut dit non aux cinq conditions minimales du Québec incluses
dans l'accord du lac Meech? Comment peut-il sérieusement convaincre les
mêmes partenaires qu'il veut désormais obtenir plus, obtenir
davantage alors que ceux-ci s'apprêtent tout juste à lui refuser
le moins, le minimum? De plus, le processus lui-même de modification de
la constitution a perdu beaucoup de sa crédibilité et de sa
légitimité en raison du reniement répété de
la parole donnée de certains premiers ministres par leurs successeurs.
Dans un tel contexte, toute tentative de réforme constitutionnelle dans
le cadre qu'on connaît devient pour le moins hasardeuse. L'échec
de l'accord du lac Meech se traduira non seulement par un Isolement du
Québec, mais davantage par un affaiblissement considérable de son
poids politique suite au revers Infligé à un gouvernement aux
convictions fédéralistes se prétendant mandaté par
fa population pour négocier la réintégration du
Québec dans le giron constitutionnel sur la base de ces cinq conditions
minimales.
Dérouté par l'attitude du Canada anglais, le premier
ministre cherche à gagner du temps en multipliant les comités sur
les scénarios de l'après-Meech, renvoyant les décisions de
son gouvernement au congrès de son parti en février 1991,
à moins, comme je le disais tantôt, qu'il n'aille faire un
séjour prolongé en Europe en Invoquant le nébuleux concept
de la superstructure, tout en espérant secrètement qu'un miracle
se produise lors de la conférence des premiers ministres qui aura,
semble-t-il, lieu d'ici quelques jours.
L'espoir est vain, à cet égard, pour nous comme pour bon
nombre de Québécois qui, pour reprendre les propos de M.
Béland, président du mouvement Desjardins, considère que
le mal est fait. Et j'irais même jusqu'à dire, M. le
Président, qu'advenant la ratification même, dans les prochains
jours, de l'accord du lac Meech tel quel, je pense que ce serait accordé
tellement à contrecoeur par le Canada anglais et à partir de
tordages de bras et de fractures de jambes que, finalement, le peu de valeur
qu'on pouvait accorder à l'accord du lac Meech serait réduit
à néant. Il faut donc jeter dès maintenant les bases de
l'avenir du Québec en convoquant, par exemple, des états
généraux, où les forces vives de la nation
québécoise pourraient clairement indiquer la voie à
suivre. Pour nous, du Parti québécois, bien sûr, cette vole
passe d'abord par la souveraineté. (10 h 15)
Le débat sur l'accord du lac Meech a relégué au
second plan un autre débat fort important: celui de la
non-rentabilité croissante du fédéralisme pour le
Québec. En effet, depuis quelques années, les
Québécois paient davantage d'impôts à Ottawa que ce
qu'ils reçoivent de ce dernier, en termes de transferts et de
dépenses de toutes sortes. Selon les comptes économiques
provinciaux, Ottawa retourne, depuis trois ans, 1986, 1987, 1988 - et pour 1989
on n'a pas encore les chiffres, ça m'étonnerait que ça ait
changé - moins d'argent au Québec que le total des Impôts
et des taxes qu'il y prélève, et aussi de la part de
l'accroissement de la dette fédérale imputable au
Québec.
Ainsi, contrairement à la situation prévalant à la
fin des années soixante-dix et au début des années
quatre-vingt, ce qui s'expliquait, en bonne partie d'ailleurs, par les
subventions pour le pétrole - on en a entendu assez parler pendant la
campagne référendaire, de ces fameuses subventions -
contrairement à cette situation qui prévalait à cette
époque-là, alors que l'on agitait fébrilement la
rentabilité du fédéralisme pendant la campagne
référendaire de mai 1980, Ottawa a réalisé des
surplus dans ses comptes économiques et financiers avec le Québec
de l'ordre de 1 300 000 000 $ en 1988, de 1 100 000 000 $ en 1987 et de 350 000
000 $ en 1986. Compte tenu de la piètre situation financière du
fédéral et du niveau élevé de son déficit
budgétaire et de son endettement, la tendance actuelle risque de
s'accentuer, et le fédéralisme deviendra de moins en moins
rentable.
Dans les faits, le gouvernement fédéral se
désengage progressivement des programmes dont il partage le financement
avec le Québec, créant des pressions additionnelles sur les
finances publiques de celui-ci. Je vous réfère, d'ailleurs, au
discours de M. Gérard D. Levesque, tout récemment. De plus, les
transferts fédéraux augmentent à l'égard des
provinces les mieux nanties, la Colombie-Britannique, l'Alberta et l'Ontario,
alors que ces mêmes transferts plafonnent pour le Québec. L'annexe
E du discours sur le budget prononcé le 26 avril dernier par le ministre
québécois des Finances constitue la pièce à
conviction la plus accablante et la plus éloquente qui soit, lorsque
l'on veut mesurer l'impact de ce fédéralisme de moins en moins
rentable pour les Québécois. Ajoutons-y le tableau, que le
ministre nous a distribué tantôt, sur le financement du
développement régional per caplta. Ajoutons-le. Il ne fait pas
partie de l'annexe E, mais if est tout aussi accablant.
Je reviens à l'annexe E. Ainsi, de 1984 à 1988, les
transferts fédéraux ont connu, au Québec, un taux de
croissance annuel de 3,5 %, ce qui est nettement inférieur au taux de
croissance de 5,7 % pour ce qui est des provinces moins nanties, mais de 7,7 %
dans le cas des provinces mieux nanties et de 8,1 % pour l'Ontario, la province
la plus riche du Canada. Cette situation déplorable s'explique,
évidemment, par le désengagement du gouvernement
fédéral, par le biais de coupures affectant plusieurs secteurs:
développement régional, logement social, garderies. Au seul
chapitre du financement des programmes établis en matière de
santé et d'enseignement supérieur, le manque à gagner, au
Québec, s'élève à 1 300 000 000 $ pour la seule
année financière 1990-1991. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est
toujours dans l'annexe E du discours sur le budget du ministre des Finances du
Québec. Ce manque à gagner s'explique par le gel, pour deux ans,
de la progression des transferts par habitant en matière de santé
et d'édu- cation postsecondaire, annoncé lors du dernier budget
Wilson, soit 220 000 000 $ de moins, ce qui s'ajoute à la coupure de 1
100 000 000 $ décrétée en vertu de la loi
fédérale C-96, adoptée en juillet 1986. Rappelons
qu'à elle seule la loi C-96 privera le Québec d'un montant de 2
000 000 000 $ de transferts du gouvernement, au chapitre du financement des
programmes établis pour la période 1987-1992. Les transferts
fédéraux, qui représentaient, en 1984-1985, 28,4 % des
revenus budgétaires de l'État québécois, ne
représentent plus que 20,1 % de ses revenus, cette année. Et en
1992-1993, ils ne représenteront plus que 17,7 % des revenus
budgétaires de l'État québécois, confronté
à une progression importante des coûts pour les services de
santé et d'éducation.
En termes clairs, les Québécois sont appelés
à payer de plus en plus d'impôts pour contribuer à la
réduction du déficit fédéral et pour financer les
coûts de projets de développement réalisés à
l'extérieur du Québec par un accroissement des transferts
fédéraux vers les provinces les mieux nanties pendant qu'Ottawa
réduit progressivement ses dépenses au Québec. Le
fédéralisme budgétaire est en voie de devenir une
véritable camisole de force, un carcan pour le Québec
déjà asservi par la politique monétaire de taux
d'intérêt pratiquée par la Banque du Canada afin de
contenir la surchauffe de l'économie ontarienne. Je n'en dis pas plus,
je vous réfère au discours du ministre là-dessus. Le
fédéralisme de la bonne entente a un goût de plus en plus
amer pour le Québec, sur le plan financier et budgétaire.
Parallèlement à cela, le gouvernement Bourassa,
obsédé par la ratification de l'accord du lac Meech, a
sacrifié constamment la défense des intérêts du
Québec dans plusieurs dossiers afin de ne pas indisposer Ottawa et le
Canada anglais. Des relations harmonieuses Québec-Ottawa,
prétendront certains, mais à quel prix! La stratégie
obsessionnelle du gouvernement libérai à l'égard du
dossier de Meech coûte cher aux Québécois par sa
résignation tranquille dans plusieurs dossiers. Les régions du
Québec, par exemple, sont toujours privées des retombées
de l'entente fédérale-provinciale sur le développement
régional annoncée en grande pompe par MM. Bourassa et Mulroney en
juin 1988, soit il y a deux ans. Ça va faire deux ans que cette
entente-là est signée. Il s'est dépensé 27 000 000
$, dont 24 000 000 $ pour la papeterie de Matane. C'est un vrai scandale! C'est
tout à fait indécent, ce qui se passe présentement. Une
entente signée depuis deux ans qui n'est pas encore en vigueur et dont
on ne connaît pas encore les programmes. Scandaleux!
De plus, l'effort fédéral consenti au Québec en
cette matière pour la période... Les régions peuvent bien
être en colère. La colère peut bien gronder dans les
régions. La révolte peut bien gronder dans les régions.
Elles se sont fait avoir, berner, tromper, flouer par ce gouvernement. Et
l'effort fédéral, donc, consenti au Québec en
matière de développement régional, pour la période
1989-1993, s'élève à 1 400 000 000 $, comparativement
à 1 800 000 000 $ pour l'Ouest et à 2 100 000 000 $ pour les
Maritimes.
Au chapitre des contrats fédéraux de recherche et
développement, le Québec doit se contenter d'un maigre
pourcentage de 11, 9 % des contrats pour les 10 premiers mois de 1989,
comparativement à 46, 1 % pour l'Ontario. La situation ne s'est donc
aucunement améliorée dans ce secteur névralgique pour le
développement économique. Rappelons qu'avant 1985 le
Québec obtenait en moyenne, par année, 20 % de ces contrats
fédéraux. L'Agence spatiale risque de n'être qu'une
coquille vide longtemps puisque le Québec n'a pas obtenu à ce
jour de contrat relié au projet de participation canadienne à la
station orbitale américaine, le volet le plus important du programme
spatial canadien impliquant, comme on le sait, des investissements de
I 200 000 000 $. Forte de la maîtrise d'oeuvre qu'on lui a
laissée... En annonçant l'Agence spatiale à Saint-Hubert,
on a laisse la maîtrise d'oeuvre du programme spatial et surtout de la
station orbitale à Spar Aerospace, de Toronto. Eh bien! forte de cette
maîtrise d'oeuvre, l'Ontario s'est accaparée jusqu'ici des
contrats octroyés relativement à ce projet pour une somme de 80
000 000 $.
Deux ans après le lancement de sa croisade pour corriger
l'iniquité des interventions fédérales dans le secteur
agroalimentaire au Québec, le ministre Pagé, faute de
résultats, réclame à nouveau l'équité des
interventions fédérales alors qu'Ottawa vient d'annoncer un autre
programme d'aide spéciale taillé sur mesure pour les producteurs
de l'Ouest. C'est l'éternel recommencement.
II recommence ce qu'il avait initié il y a deux ans. On est au
même point. En raison de la multiplication, d'ailleurs, de ces programmes
d'aide, programmes spéciaux d'aide destinés aux producteurs de
céréales de l'Ouest, la part du Québec, au chapitre du
budget fédéral, consacrée à l'agriculture ne cesse
de diminuer. Le Québec ne reçoit que 7 % des subventions
fédérales en cette matière alors qu'il représente
16 % de la valeur de la production agroalimentaire canadienne. De plus, par sa
nouvelle politique agricole nationale, son énoncé "Partenaires
dans la croissance", Ottawa propose de financer la diversification de la
production agricole de l'Ouest au détriment des intérêts
des producteurs agricoles du Québec. Le gouvernement devra être
extrêmement vigilant à cet égard.
Enfin, autre dossier, après avoir refusé aux
pêcheurs québécois un accès à la zone de
pêche de 200. milles dans l'Atlantique au cours des trois
dernières années - ça a été "niet" à
trois reprises, de sorte que je ne suis même pas sûr si cette
année ils l'ont demandé, tellement ils étaient sûrs
de se faire dire non une autre fois - Ottawa annonçait récemment
un plan d'adaptation des pêches de l'Atlantique doté d'un budget
de 584 000 000 $ sur cinq ans, destiné aux pêcheurs des provinces
maritimes et excluant les pêcheurs québécois. Les provinces
maritimes n'étaient pas contentes de ce programme-là; d'ailleurs,
elles le trouvaient Insuffisant. Imaginez les pêcheurs
québécois! Ils n'ont rien là-dedans.
Indigné, le ministre... Ah ça! pour l'Indignation, il est
fort! Il est capable d'être Indigné à
répétition. Indigné, le ministre québécois
des Pêches a dû annoncer le plan de relance de son gouvernement
destiné à l'industrie québécoise des pêches:
50 000 000 $, sans compter sur l'aide financière d'Ottawa.
En matière d'aide fédérale au logement social, le
ministre en a parié, la part du Québec a chuté de 27 % en
1986 à seulement 17 % en 1989, alors qu'elle passait de 31 % à 40
% en Ontario.
L'octroi du contrat de six frégates, au coût de 3 500 000
000 $, accordé en exclusivité au chantier maritime de St. John's
Shipbuilding du Nouveau-Brunswick a compromis très sérieusement
l'avenir des chantiers maritimes québécois. La rationalisation
des chantiers maritimes au Canada s'est faite sur le dos des chantiers
québécois. Faute de nouveaux contrats de construction, les
chantiers de Marine Industrie à Tracy et à Lauzon fermeront
probablement à moyen terme: plus de 3000 emplois sont en Jeu. Ottawa n'a
toujours pas donné suite au plan de sauvetage de Marine Industrie.
Dans le secteur ferroviaire, les coupures à Via Rail ont
affecté durement le Québec avec des pertes de 1100 emplois
directs et 2400 emplois indirects, particulièrement dans la
région de Montréal. Le gouvernement fédéral n'a pas
jugé bon également de donner suite à la demande du
gouvernement du Québec, relativement à la mise en place de
programmes spécifiques d'adaptation au libre-échange, alors que
cette demande était une condition de l'adhésion du Québec
à l'accord canado-américain de libre-échange. Aucun.
Depuis la signature de l'accord du lac Meech, Ottawa a multiplié
les Ingérences dans les secteurs de compétence du Québec.
La loi C-72 sur les langues officielles permet maintenant à Ottawa de
subventionner directement les entreprises, les organismes communautaires, les
syndicats qui contribueront au bilinguisme dans le cadre de leurs
activités. Si on donne à Ottawa un rôle de promotion de la
dualité linguistique en plus, ça va venir tout simplement
confirmer le pouvoir qu'il s'est déjà donné dans la
nouvelle loi sur les langues officielles.
La mise en oeuvre de la réforme de l'assurance-chômage
impliquant les programmes fédéraux de formation professionnelle
dotés de budgets de plus de 800 000 000 $, financés à
même les économies réalisées par cette
réforme, constitue aussi une nouvelle ingérence d'Ottawa
dans ce secteur de Juridiction du Québec. Ces programmes
ajouteront encore au fouillis actuel qui règne dans ce secteur avec plus
d'une vingtaine de programmes fédéraux et québécois
existants. Le gouvernement fédéral subventionne directement cinq
centres d'excellence dans les universités québécoises, en
dépit de la compétence du Québec en matière
d'éducation, alors qu'en même temps il réduit du même
souffle et de façon drastique les transferts fédéraux
qu'il verse au Québec dans le secteur de l'enseignement
supérieur.
Suite à un jugement de la Cour suprême, Ottawa a
décidé de se doter des pleins pouvoirs en matière de
télécommunications. Son recul actuel n'est que temporaire et
stratégique. Le gouvernement fédéral, on peut en
être sûr, reviendra à la charge. La ministre
québécoise des Communications se réjouit un peu trop
rapidement dans ce dossier. Le recul fédéral ne vise qu'à
éviter d'alourdir le climat tendu régnant autour de l'accord du
lac Meech.
Voilà, M. le Président, le triste bilan de ce gouvernement
en matière de relations fédérales-provinciales et je vous
avoue bien sincèrement que les quelques éléments positifs
signalés par le ministre, dont le parc marin et une entente sur
l'environnement, ça m'apparaît tout à fait anodin et
dérisoire à côté du lourd bilan négatif du
régime depuis quelques années.
Voilà, M. le Président, ce que je tenais à dire
comme remarques préliminaires. Donc, le fédéralisme,
à mon avis, n'est pas renouvelable dans le sens des aspirations du
Québec. C'est un constat qu'on doit faire à la suite du
débat sur le lac Meech. Le fédéralisme n'est pas
renouvelable, dans le sens des aspirations du Québec. Le
fédéralisme n'est pas rentable; il le sera de moins en moins,
mais, par contre, la viabilité économique d'un Québec
souverain est de plus en plus reconnue. Et c'est là-dessus, M. le
Président, que je termine mes notes et mes remarques
préliminaires. (10 h 30)
Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le
député de Lac-Saint-Jean et porte-parole de l'Opposition
officielle. Est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission qui aimeraient
faire des remarques préliminaires?
M. HoWen: M. le Président... Le Président (M.
Dauphin): Oui. M. Holden: J'en ai pour deux minutes.
Le Président (M. Dauphin): D'accord. Alors, je vais
reconnaître M. le député de Westmount.
M. Richard Holden
M. Hokfen: C'est parce que je suis, comme le ministre, un
inconditionnel du fédéralisme et qu'au lieu de trouver le
discours du ministre comme une pièce à conviction je l'ai
trouvé comme une preuve de la difficulté de gouverner ce pays et
le génie dont font preuve, non seulement notre ministre, mais les
ministres à travers le pays à essayer de faire marcher le
Canada.
Vous savez, j'ai des gros doutes sur l'accord du lac Meech, non pas pour
ce qu'il y a dedans, mais pour que ce soit une réussite cette semaine.
J'ai des gros doutes principalement parce que vous savez ce qu'on disait de M.
Lesage? On disait de M. Lesage qu'à côté de lui le
général de Gaulle avait l'air humble. Et, moi, je trouve
malheureusement qu'à côté de M. Wells M. Trudeau a l'air
humble. Alors, j'ai des gros doutes sur l'habileté de neuf ou huit
premiers ministres à convaincre M. Wells de ses erreurs. Mais il ne faut
pas croire que le Québec est laissé pour compte là-dedans.
Et si l'accord ne passe pas, et si le député de Lac-Saint-Jean
suggère que le ministre et le premier ministre s'en aillent en Europe,
je dirais que lui aussi devrait s'en aller, que tout le monde devrait s'en
aller en Europe pour l'été pour se calmer les esprits, pour qu'en
revenant on recommence à essayer de remettre le Canada pièce par
pièce, parce que c'est un pays beaucoup trop, beaucoup trop important
pour le perdre même à cause de la faillite du lac Meech. Merci, M.
le Président.
M. Brassard: Je suis d'accord avec la dernière proposition
du député de Westmount, M. le Président. Je vais
accompagner le ministre et le premier ministre sur la Côte d'Azur?
M. Rémillard: Oui, mais ce serait dommage, M. le
Président...
Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.
M. Rémillard: ...parce que le parc marin qui sera en
application cet été, on ne pourra pas voir toute sa belle
réalisation au mois de juillet. Je suis certain que le
député voudrait être ici pour en profiter pleinement...
M. Brassard: II va y avoir des audiences, avant.
M. Rémillard: Alors, c'est important, justement, il faut
être ici.
Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le
député de Westmount. Est-ce qu'il y a d'autres membres qui
aimeraient faire des remarques préliminaires? Ça va? Alors,
j'appelle donc le programme 4 du ministère du Conseil
exécutif.
Discussion générale M. Brassard: M. le
Président...
Le Président (M. Dauphin): M. le député de
Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: En termes de mode de travail ou de façon de
fonctionner, je souhaiterais, comme ça se fait très souvent dans
l'étude des crédits - moi, j'ai un certain nombre de sujets
à aborder avec le ministre - échanger sur ces sujets-là
et, après coup, adopter les crédits selon nos règles.
Le Président (M. Dauphin): M. le ministre, ça vous
convient comme formule?
M. Rémillard: Je n'ai pas d'objection, M. le
Président.
Le Président (M. Dauphin): M. le député de
Lac-Saint-Jean.
Accord du lac Meech
M. Brassard: Le premier sujet, Meech. Il n'en a pas parlé
beaucoup tout à l'heure. J'ai un certain nombre de questions à
poser au ministre à ce sujet-là, surtout relativement à ce
qu'on apprend dans les journaux d'aujourd'hui, d'hier aussi. Quand M. Mulroney
a décidé de confesser les 10 premiers ministres provinciaux et
qu'il les a fait défiler à son confessionnal de Sussex - 24
Sussex, c'est 24? - on nous apprend aujourd'hui qu'il avait entre les mains un
document - on me dit que ça s'intitulait: "State of the play" - document
de 24 pages, dans lequel on retrouvait certaines propositions, l'une portant
sur la société distincte, l'autre portant sur le Sénat et
la troisième, sur la promotion de la dualité linguistique
canadienne, et que ce document aurait été remis aux premiers
ministres des provinces pour en discuter et pour essayer de trouver un terrain
d'entente.
C'est ce document-là, semble-t-ll, que M. Murray avait
également en main lorsqu'il a rencontré M. Wells et, au cours de
cet entretien-là, ce dernier, M. Wells, aurait proposé une
modification ou un nouveau libellé concernant la clause de la
société distincte. Hier, en Chambre, le premier ministre du
Québec, interrogé par votre humble serviteur et aussi par des
journalistes - avant ou après la période de questions, je ne sais
pas trop; je pense que c'est après - a d'abord affirmé qu'il ne
connaissait pas le libellé proposé par M. Wells, qu'il n'avait
pas eu l'entretien téléphonique qu'il devait avoir, selon M.
Wells lui-même, et qu'il ne connaissait pas le document
fédéral distribué aux premiers ministres des provinces
lors des entretiens des premiers ministres du Canada à Ottawa avec
chacun des premiers ministres.
Curieuse réponse, ça! Alors, question bien précise
au ministre: Quand avez-vous eu en main ce document fédéral
comportant certaines propositions sur trois sujets clés de l'accord du
lac Meech? Est-ce que M. Mulroney vous l'a remis au moment de la rencontre
d'Ottawa de la fin de semaine? Est-ce que vous l'avez entre les mains depuis
cette époque-là ou ce temps-là? Est-ce que vous avez
réagi à ces propositions-là? Mais, d'abord, depuis quand
avez-vous entre les mains ce document-là?
Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.
M. Rémillard: M. le Président, tout d'abord,
lorsqu'on parle de document de travail de la part du gouvernement
fédéral, il y a eu plusieurs documents. Alors, il ne faudrait pas
faire de confusion. Il y a eu plusieurs documents qui ont circulé. Tout
d'abord, Je vais répéter la position du gouvernement du
Québec qui a toujours été la môme qui, aujourd'hui,
est la môme qu'elle était hier et qui, demain, sera la môme
qu'elle est aujourd'hui. li n'y a pas d'amendement possible à l'entente
du lac Meech. Et ça respecte la décision qui a été
prise par résolution par l'Assemblée nationale du Québec
et nous allons discuter d'un deuxième "round" de négociations
constitutionnelles lorsque l'entente du lac Meech sera acceptée. Alors,
à partir de ces principes-là qui, pour nous, nous guident dans
toutes les actions que nous faisons, l'entente du lac Meech, pour nous, a
été signée le 30 avril 1987 et elle a été
solennellement acceptée devant la population canadienne par tous les
premiers ministres qui étaient là au matin du 3 juin 1987,
après que les meilleurs experts canadiens se furent penchés sur
l'entente qui avait été signée le 30 avril et qu'on eut
pensé, repensé et analysé chaque mot, chaque virgule.
Donc, pour le gouvernement du Québec, il s'agit tout simplement
de faire accepter par trois provinces qui ne l'ont pas encore fait et une qui
l'avait fait et qui est revenue sur sa décision l'accord du lac Meech,
comme il était le 30 avril, comme il est présentement, à
la suite du 3 juin 1987.
Les documents fédéraux. À ma connaissance, le
rapport Charest a été rendu public, si ma mémoire est
bonne, un jeudi, il y a deux semaines. Quelle date ça peut être,
pour être plus précis? Le jeudi 18. Le mercredi, mes
fonctionnaires ont été Informés d'un document juridique
fédéral, qui ne leur a pas été communiqué
formellement, mais qui leur a été expliqué dans ses
grandes lignes, qui était une traduction, en termes légaux, du
rapport Charest. Cette traduction légale du rapport Charest, telle qu'on
pouvait la comprendre - les fonctionnaires qui étaient là ont pu
me faire rapport après - était aussi inacceptable que le rapport
Charest lui-même. Pour nous, le rapport Charest, c'est nettement
inacceptable. On considère que le rapport Charest a complètement
raté son objectif, mettant de côté le fait que l'entente du
lac Meech, c'est la réponse du reste du Canada aux
cinq conditions du Québec. Dans la mesure où on ne
respecte pas ça, et c'est le problème actuellement, l'entente du
lac Meech perd toute sa signification et les premiers ministres, en 1986,
à Edmonton, le 9 août 1986, si ma mémoire est bonne,
avaient pris cette décision de procéder tout d'abord, dans un
premier "round" de négociations, en fonction des cinq conditions du
Québec.
Je me souviens, à ce moment-là, que la presse qui nous
avait interviewés après notre rencontre à Edmonton nous
avait dit: Qu'est-ce que ça veut dire tout ça? C'est bien mince
comme premier pas dans le dossier constitutionnel. On était en 1986, on
commençait. Pour nous, c'était extrêmement important et
ça avait été difficile à faire accepter à
tous les premiers ministres provinciaux. Ça avait été
très difficile de faire accepter qu'ils mettraient de côté
leurs propres demandes et qu'on procéderait, tout d'abord, exclusivement
en fonction des demandes du Québec. C'est ça le processus qu'il
faut suivre.
M. Brassard: Je fais juste constater que ça a
changé depuis.
M. Rémillard: Oui, mais je constate moi aussi que
les...
M. Brassard: Parce que là, ils sont arrivés avec
leur liste d'épicerie depuis ce temps-là.
M. Rémillard: Non, mais regardez bien, laissez-moi
répondre. C'est dans la mesure où le rapport Charest n'a pas
respecté cette donnée fondamentale première. Il a
passé complètement à côté. Ils ont voulu
essayer de chercher un consensus en faisant plaisir à tout le monde. Il
ne faut pas faire plaisir à tout le monde dans cette affaire-là,
II faut répondre aux cinq conditions du Québec, c'est
évident. Quand on explique à la population canadienne, au lieu de
faire de la démagogie, quand on explique rationnellement à la
population canadienne, on lui dit pourquoi le Québec a cinq
conditions... Quand je me promène dans le Canada, mol, les gens me
disent: Pourquoi avez-vous cinq conditions? Pourquoi exigez-vous cinq
conditions pour rester dans le Canada? Je leur explique tout simplement que
lorsque eux ont négocié en 1981 ils avaient, chaque province
canadienne avait ses propres conditions. Le gouvernement fédéral
leur a dit oui dans, entre autres, une nuit du 4 au 5 novembre 1981; le
gouvernement fédéral leur a dit oui, mais le
fédéral n'a pas tenu compte que le Québec n'était
pas présent. Le Québec n'était pas là, à la
table de négociation, et de dire que c'est parce qu'il y avait un
gouvernement qui était indépendantiste, ce n'est pas une raison,
ce n'est pas une excuse qui est valable. C'était un gouvernement qui
était légitime, qui avait un mandat très fort de
l'Assemblée nationale, comprenant des députés
libéraux, mais, en plus, on aurait pu simplement avertir les membres de
la délégation du Québec de ces négociations pendant
cette nuit du 4 au 5 novembre. Et s'ils n'avaient pas voulu, à ce
moment-là, qu'ouvertement, rien en cachette... Et je peux vous assurer
d'une chose, pendant toutes les négociations de l'entente du lac Meech,
il n'y a rien qui s'est fait en cachette. Je vais continuer ensuite en ce qui
regarde vos documents juridiques parce qu'il n'y a pas de cachette à
avoir là-dedans. On n'a jamais négocié en cachette,
d'aucune façon.
M. Brassard: Le document traduisant légalement le rapport
Charest, vous dites, à un moment donné: Ottawa en a parlé
avec vos fonctionnaires.
M. Rémillard: Regardez bien...
M. Brassard: Est-ce que vous l'avez eu en main par la suite? (10
h 45)
M. Rémillard: Alors, voici l'évolution des choses.
Ce document, nous ne l'avions pas, mais on nous l'a communiqué le
mercredi soir, dans ses grandes lignes. Jeudi, le rapport Charest a
été rendu public. Le premier ministre, M. Bou-rassa, mentionne
très clairement que c'est inacceptable pour nous. Et ensuite, le samedi,
si ma mémoire est bonne, une autre rencontre où on nous fait
part, à ce moment-là, d'un document préparé par le
gouvernement fédéral, nettement inacceptable; des modifications
à la société distincte, des relations avec des articles de
la constitution qui existent présentement. Quand mes fonctionnaires
m'ont fait rapport de ce document-là, j'ai simplement dit: C'est tout
à fait inacceptable, ce n'est pas discutable, d'aucune façon.
Lorsque nous avons eu notre rencontre avec le premier ministre du Canada,
à ma connaissance, entre les premiers ministres, il ne s'est pas
discuté d'un document. Moi, je connaissais le document qui m'avait
été transmis par mes fonctionnaires et qu'on avait
qualifié d'inacceptable.
M. Brassard: Le deuxième.
M. Rémillard: Le deuxième, le premier on ne l'avait
pas eu...
M. Brassard: C'est ça.
M. Rémillard: ...directement comme document. On nous avait
informés verbalement de certains principes.
M. Brassard: Est-ce que c'est ce document-là dont vous
parlez, qui s'intitulait "State of the play"? "L'état du jeu"?
M. Rémillard: II faudrait que je vole son nom. Ça
s'Intitule "Résolution d'accompagnement, gouvernement
fédéral".
M. Brassard: Et ce document-là dont on parle, qui
s'appelle "State of the play", vous ne l'avez jamais eu entre les mains?
M. Rémillard: "State of the play", qu'est-ce que c'est que
ce document-là?
M. Brassard: C'est ce document fédéral dont on
parle qui, si on vous suit bien, serait peut-être le troisième. Il
y en a un qui traduisait légalement, donc, le rapport Charest, que vous
n'avez pas eu entre les mains. Il y en a un deuxième que vous avez eu
entre les mains, que vous avez jugé inacceptable. Mais là, il est
question d'un autre document fédéral...
M. Rémillard: Non, non.
M. Brassard:... où on aurait, encore une fois, trois
propositions d'amendement, à la fois sur la société
distincte, le Sénat, et le rôle de promotion du gouvernement
fédéral.
Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.
M. Rémillard: M. le Président, mol, je ne connais
pas ce document. Le seul document que je connais, c'est la résolution
d'accompagnement à l'accord du lac Meech. C'est un document de travail
du gouvernement fédéral, qui était un dossier, un
brouillon, qu'on nous a dit, une première ébauche de
possibilité...
M. Brassard: Ça a été remis au moment de la
rencontre...
M. Rémillard: Non, de...
M. Brassard: II n'y a pas eu de document qui a été
remis aux premiers ministres au moment où ils ont rencontré, l'un
à la suite des autres, le premier ministre fédéral? Lundi,
par exemple, M. Bourassa n'a pas...
M. Rémillard: Non, non. Moi, à ma
connaissance...
M. Brassard: M. Bourassa n'a pas obtenu un document de la part de
M. Mulroney?
M. Rémillard: Non, absolument pas. À ma
connaissance, absolument pas, absolument pas. Le seul document que nous avons
eu, c'est un document de travail, un premier jet, et qui nous est venu du
gouvernement fédéral. Nous l'avons reçu samedi
dernier.
M. Brassard: Samedi dernier, le document dont vous parlez,
là?
M. Rémillard: Le 19 mai.
M. Brassard:... que vous avez jugé inacceptable. Vous
l'avez eu entre les mains samedi dernier?
M. Rémillard: C'est ça.
Une voix: Ce n'est pas le 19 mai, samedi dernier.
M. Brassard: Le 19 mal, ça c'est il y a deux semaines.
M. Rémillard: Est-ce qu'il y a deux semaines de ça?
Non, non, c'est samedi, c'est samedi dernier. Remarquez, je ne veux pas faire
de confusion dans les dates. C'est quoi? Je n'ai pas de calendrier devant mol,
aidez-moi...
M. Brassard: Donc, samedi dernier, c'est-à-dire au
moment...
M. Rémillard: Attendez, je vais vérifier cette
date-là. Je ne veux pas vous induire en erreur. Attendez qu'on
vérifie comme il faut. On a eu le rapport Charest... Écoutez, le
rapport Charest a été publié le jeudi, on a eu une
première rencontre des fonctionnaires le mercredi. Il y en a eu une le
samedi suivant. Bon, alors c'était le 19, le samedi 19, qu'on a eu ce
document du gouvernement fédéral, pour la première fois,
là. On en avait entendu parler le mercredi, on a eu...
M. Brassard: Et depuis ce temps-là, aucun autre
document?
M. Rémillard: Non, non, on n'en a pas eu.
M. Brassard: C'est un peu curieux. Comment se fait-il qu'on
apprenne qu'il y a un document qui a été - à moins que ce
ne soit le même -qui a circulé au moment de la rencontre de M.
Mulroney avec les premiers ministres?
M. Rémillard: Ah! Là, je peux vous dire que je
n'étais pas à la rencontre entre M. Mulroney et les autres
premiers ministres. Je n'y étais pas et je peux vous dire qu'à ma
connaissance le premier ministre, M. Bourassa, n'a pas reçu de document
de M. Mulroney. Les fonctionnaires m'avaient informé et j'ai reçu
un document, qui est un document de travail, un premier jet qui
élaborait différentes hypothèses.
M. Brassard: Est-ce que ce document-là, M. le
Président, est-ce que ce document-là, on peut en demander le
dépôt?
Le Président (M. Dauphin): C'est à la
discrétion du ministre qui en prend la décision.
M. Rémillard: Non, Je ne crois pas que ça puisse
aider la discussion de déposer des documents de travail qui nous sont
confiés par le gouvernement fédéral, et je pense que le
député de Lac-Saint-Jean comprend très bien que, si on se
mettait à faire ça, on détruirait cet
élément de confiance qu'il doit y avoir entre les deux niveaux de
gouvernement lorsqu'il y a des discussions. Moi, j'aimerais bien pouvoir le
faire, mais je suis conscient que...
M. Brassard: Vous comprendrez, M. le ministre, que ça nous
aiderait beaucoup à mesurer le degré de lâchage du
gouvernement fédéral à l'égard du gouvernement du
Québec: dans quelle mesure le gouvernement fédéral est
disposé à lâcher le Québec et quel est le bout de
chemin, semble-il, considérable... Parce que vous avez jugé
ça inacceptable. Ça nous permettrait de voir le bout de chemin
que le gouvernement fédéral est prêt à faire pour
obtenir, dénouer l'impasse constitutionnelle.
M. Rémillard: M. le Président, là-dessus, je
voudrais quand même être très clair. Pour nous, il n'est pas
question qu'on soit isolés, abandonnés par d'autres partenaires,
parce que nous ne nous sommes jamais fiés aux autres mais à
nous-mêmes. Notre position constitutionnelle, contrairement à
celle de 1981, ne repose pas sur une coalition avec d'autres provinces mais
repose essentiellement sur nous. Nous avons basé nos demandes
constitutionnelles sur la légitimité des demandes du
Québec et nous ne nous sommes jamais fondés sur les demandes des
autres provinces comme telles. On ne sera jamais isolés. Pour nous,
l'entente du lac Meech, elle est faite; l'entente de l'édifice Langevin,
c'est fait. Par conséquent, on ne sera jamais isolés, parce que
nous n'avons que nous comme partenaires, nous-mêmes, et s'ils ne veulent
pas de l'entente du lac Meech, bien, ils le garderont.
M. Brassard: Dans ces conditions-là, puisque vous ne
voulez pas déposer le...
M. Rémillard: Ils pourront l'encadrer au Musée de
la guerre.
Une voix: Vous avez des alliés, quand même.
M. Brassard: Ou au Musée de la civilisation.
M. Rémillard: Non, c'est du côté
québécois, ça.
Une voix: Ha!
M. Rémillard: Le Musée de la guerre est de l'autre
côté.
M. Brassard: II y en a un à Ottawa, peut- être dans
la section de l'ethnologie ou de l'anthropologie. Bien, puisque vous ne voulez
pas déposer le document en question, d'après votre analyse,
compte tenu de ce que...
M. Rémillard: On me donne une information encore,
complémentaire, parce que je veux informer le plus adéquatement
possible l'Opposition. Entre fonctionnaires, il y a un autre document, donc un
deuxième document.
M. Brassard: Bon!
M. Rémillard: Je récapitule, pour qu'on se
comprenne. Il y a tout d'abord une communication verbale de certains grands
principes, qui est faite le mercredi. Le samedi, il y a un document, qui est
une ébauche des possibilités qu'on évoque en termes
juridiques et une nouvelle version de ce document du samedi, une nouvelle
version, est communiquée aux fonctionnaires le lundi matin, lors de
notre rencontre au 24 Sussex.
M. Brassard: Cela a été communiqué.
M. Rémillard: Pas à M. Bourassa, elle est
donnée à Mme Wilhelmy, qui me l'apporte et je l'ai
regardée le matin, au 24 Sussex, le lundi.
M. Brassard: Vous avez failli oublier... Le Président
(M. Dauphin): M. le député.
M. Brassard: Vous avez failli oublier quelque chose
d'intéressant.
M. Rémillard: Quelque chose d'intéressant? Je vous
avoue que, moi, ça ne me paraissait pas trop trop intéressant,
et, deuxièmement...
M. Brassard: Est-ce que c'était différent de
l'autre?
M. Rémillard: Non, ce n'était pas
particulièrement différent. Il y avait des variations, mais
c'était essentiellement... Il y avait des précisions, il y avait
des ajouts...
M. Brassard: C'est peut-être...
M. Rémillard: ...mais c'était aussi inacceptable
pour nous que pouvait l'être le précédent texte.
M. Brassard: C'est peut-être celui-là qui s'appelait
"State of the play"?
M. Rémillard: À ma connaissance, non.
M. Brassard: Non. Maintenant, étant donné que c'est
lundi dernier, 28 mai, on est le 31 mai, vous l'avez eu entre les mains le
lundi. J'imagine
que vous l'avez refilé au premier ministre aussi dans les heures
et au moins les jours qui ont suivi.
M. Rémillard: J'ai eu l'occasion d'en parler avec le
premier ministre pour lui mentionner les grandes lignes - le premier ministre
n'a pas le temps de lire tous les documents - et lui dire mon
appréciation de ce document-là, c'était nettement
inacceptable pour nous, parce qu'il n'avait rien...
M. Brassard: Un document de cette importance-là qui
comportait des éléments amendant, modifiant, de façon
substantielle, l'accord du lac Meech, proposé par le gouvernement
fédéral, vous n'avez pas jugé utile d'en remettre au moins
une copie au premier ministre du Québec.
M. Rémillard: Première des choses, ce n'est pas un
document officiel. C'étaient des ébauches, c'étaient des
échanges entre fonctionnaires qu'ils ont voulu, du côté
fédéral, traduire en termes juridiques, c'étaient des
tentatives de documents qui... le rapport Charest. Ce sont des choses qui ne
changeaient pas de ce qu'on avait entendu dire. Le rapport Charest, ça
signifie cinq modifications au concept de société distincte.
Ça n'a nettement pas de bon sens. Il ne faut quand même pas rire
de nous. Alors, l'évolution des choses, ces documents étaient des
simples copies de travail échangées entre fonctionnaires. Moi, le
sénateur Murray ne m'a jamais donné de copie. Entre
fonctionnaires, il s'est échangé des documents de travail, des
ébauches. Et je peux vous dire que ces ébauches sont nettement
inacceptables, parce que ça signifie des modifications à Meech.
Tant qu'on parlera de modifications à Meech, il n'en est pas
question.
M. Brassard: Donc, on peut dire, en quelque sorte, que vous
établissez une espèce de cordon de sécurité autour
du premier ministre. Vous ne lui refilez pas tous les documents. Vous ne le
surchargez pas.
M. Rémillard: J'en ai manqué. J'ai manqué le
dernier bout.
M. Brassard: Vous ne le surchargez pas de documents. Il y a un
système de filtrage ou de tamisage, une agence de tamisage des
documents.
M. Rémillard: Vous avez questionné à
plusieurs reprises le premier ministre, vous connaissez sa grande connaissance
du dossier et vous savez très bien qu'il possède fort bien ce
dossier depuis de nombreuses années. Parce que M. Bourassa a
été le premier ministre en 1970-1971 à Victoria. Il
l'était dans les tentatives, aussi, faites en 1975-1976 par le
gouvernement fédéral, des premières tentatives pour
rapatrier la constitution. Je l'ai informé et nous l'Infor- mons
adéquatement de toute l'évolution des dossiers. Et, à ce
niveau, pas plus que mol, je n'ai été informé par le
sénateur Murray, il s'agit, vous savez, de ces documents qui peuvent
circuler au niveau des fonctionnaires, et il y en a plusieurs. Peut-être
qu'il va y en avoir d'autres, mais ils seront tous rejetés par le
Québec tant qu'ils signifieront des amendements à la
constitution, à l'entente du lac Meech. Il n'en est pas question. Il n'y
aura pas d'amendement à Meech.
M. Brassard: Mais là, au moins, II y en a trois. Je ne
sais pas si vous avez lu les journaux.
M. Rémillard: II n'y en a pas eu trois. Il y en a eu deux,
dont un, le dernier, est la version...
M. Brassard: Attendez, II y en a deux que vous avez eus en main.
On vous a fait des communications uniquement verbales sur le premier.
M. Rémillard: Verbales ou certains principes.
M. Brassard: Mais vous en avez eu deux en main. Vous avez sans
doute lu les journaux ce matin de même qu'entendu les nouvelles à
la TV hier. Est-ce que, d'après vous, c'est le dernier document dont
parlent les médias aujourd'hui? Est-ce que c'est sur la base de ce
document-là qu'on... Est-ce que c'est la base de discussion? Est-ce que
ça a servi de base de discussion entre M. Murray et M. Weils, à
Terre-Neuve, lors de son dernier pèlerinage dans l'Est?
M. Rémillard: Je ne peux vraiment pas vous le dire. Je ne
le sais vraiment pas. Quand M. Murray est venu ici nous rencontrer avec M.
Spector, il a rencontré le premier ministre - j'étais là -
et le premier ministre a été très clair: II n'y aura pas
d'amendement à Meech. M. Murray est reparti. D'ailleurs, il a
rencontré la presse et il a même dit que le Québec
n'était pas le problème et ils savent très bien qu'il n'y
aura pas d'amendement accepté par le Québec à Meech. Meech
doit être accepté comme il est là. A partir de là,
les discussions qui ont pu avoir lieu entre M. Murray ou M. Mulroney et les
autres premiers ministres, je ne saurais vous dire.
M. Brassard: Donc, si vous les avez rejetées, ces
propositions-là, c'est que ça comportait véritablement des
amendements à l'accord du lac Meech. Ce qu'on proposait...
M. Rémillard: Notre compréhension de...
C'étaient peut-être simplement des brouillons, c'étaient
des idées qui étalent comme ça mises sur papier à
la suite du rapport Charest, mais ça m'apparaissait évident que
c'était inacceptable.
Ça signifiait au moins cinq modifications à la
société distincte. Ça mettait des relations entre
différents articles, surtout lorsqu'on a vu le témoignage de 40
constltutionnalistes les plus réputés au Canada qui sont venus
dire qu'il n'y a pas d'erreur sur le plan du droit constitutionnel et de
l'histoire constitutionnelle de ce pays dans l'entente du lac Meech et qu'on
essaie de faire des relations entre la société distincte, la
charte, le reste de la constitution, qui viennent mettre en cause
l'équilibre qui existe déjà et qu'on a établi avec
grand soin, avec l'aide des meilleurs spécialistes canadiens et
québécois. Alors, par conséquent, c'était nettement
inacceptable pour nous.
M. Brassard: Est-ce que vous avez pu, finalement, prendre
connaissance... Parce que là, il semble bien que c'est sur la base de
ces documents-là, probablement le dernier dont on vient de parler, c'est
sur la base de ce document-là que M. Wells, en discussion avec M.
Murray, a proposé une Idée lumineuse - en tout cas, c'est comme
ça qu'il la perçoit, lui - concernant la définition de la
société distincte. Hier, le premier ministre a dit: Je ne la
connais pas; je sais que M. Wells devait communiquer avec moi. Probablement que
la ligne était occupée, il n'a pas réussi à
communiquer avec M. Wells. Est-ce que depuis M. Wells vous a donné signe
de vie? Est-ce que vous êtes maintenant au courant du libellé de
M. Wells concernant la société distincte?
M. Rémillard: Non, absolument pas. On n'est au courant
d'aucun libellé de nouvelle proposition ou quoi que ce soit. On n'est
pas...
M. Brassard: À votre connaissance, M. Wells n'a pas
cherché à communiquer avec M. Bourassa.
M. Rémillard: À ma connaissance, à 11
heures, ce matin, non. Pas d'Information...
M. Brassard: M. Wells est parti à la pêche.
M. Rémillard: Je sais que c'est votre sport favori, mais
il ne faudrait pas prêter toutes ces intentions à tout le
monde.
M. Brassard: Bon. Ça, ce sont des documents qui
véhiculent des amendements à Meech, ce que vous avez
déclaré inacceptable compte tenu de la position
déjà connue du gouvernement du Québec. Maintenant,
à partir de la fin de semaine dernière, cependant, il est apparu,
je dirais, un nouvel objet constitutionnel. C'est la déclaration
politique. C'est apparu là. Avant, on a parlé d'amendements
à Meech. On a parlé aussi de résolution d'accompagnement,
mais qui comportait des amendements à Meech aussi. Alors c'était
assimilable à des amendements à Meech. Mais là, depuis une
semaine, on parle de declama- tion politique. Cette idée de
déclaration politique qui est apparue récemment, le ministre
pourrait-Il expliciter ce nouveau concept constitutionnel?
Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.
M. Rémillard: M. le Président, avant d'aborder ce
sujet, est-ce qu'il serait possible de suspendre, pour des raisons
humanitaires...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Rémillard: ...pour quelques instants?
M. Brassard: Oui, certainement.
Le Président (M. Dauphin): D'accord. Alors, nous
suspendons nos travaux pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 11 h 5)
(Reprisée 11 h 14)
Le Président (M. Dauphin): La commission des institutions
reprend ses travaux. M. le député de Lac-Saint-Jean.
Notion de déclaration politique
M. Brassard: M. le Président, alors j'en étais au
concept nouveau qui nous arrive dans le paysage depuis une semaine, le concept
de déclaration politique. Alors, là, si je comprends bien le
ministre, tout ce qui constitue un amendement formel à Meech, à
l'une ou l'autre des clauses de l'accord de Meech, ce n'est pas acceptable et
c'est rejeté automatiquement par le gouvernement du Québec,
d'ailleurs conformément à la motion adoptée à
l'Assemblée nationale le 5 avril dernier. Je comprends aussi qu'une
résolution d'accompagnement comportant elle aussi des amendements
à Meech, même si ces amendements-là surviendraient un peu
plus tard, ça aussi, je comprends que c'est également
rejeté. Là, on en arrive maintenant à cette nouvelle
notion de déclaration politique, une sorte de document signé par
les premiers ministres du Canada et des provinces et qui pourrait comporter un
certain nombre d'éléments. D'abord, comme on a la chance d'avoir
un juriste, un constitutionnaliste comme ministre, j'aimerais, et ce,
très rapidement, qu'il nous éclaire sur la notion de
déclaration politique.
Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.
M. Rémillard: Le député de Lac-Saint-Jean
m'honore en me demandant de l'éclairer.
M. Brassard: Un avis gratuit, je ne vous verserai pas
d'honoraires, M. le ministre.
M. Rémillard: Des fois, je pense, si j'étais encore
professeur d'université...
M. BrasMrd: Ce serait plus payant? On y reviendra
tantôt.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Dauphin): M. le ministre, c'est à
vous la parole.
M. Rémillard: M. le Président, vous arrivez
à point.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Rémillard: Alors, M. le Président, une entente
politique est une entente qui est signée par les premiers ministres en
fonction d'un accord qu'ils acceptent tous et c'est un accord qui a un poids
politique et qui peut amorcer une procédure juridique, comme ce fut le
cas, par exemple, pour l'entente du lac Meech, où l'accord politique qui
a été tout d'abord conclu au lac Meech le 30 avril a
été confirmé formellement le 3 Juin suivant à
l'édifice Langevin et s'est traduit, juridiquement, par des
résolutions, tant au Parlement canadien que dans les résolutions
des provinces qui ont accepté l'entente du lac Meech. Alors, par
conséquent, une entente politique n'est pas dénuée de sens
quant à la continuité de l'action que les premiers ministres
pourraient décider de prendre après avoir fait consensus sur
certains points importants.
Dans l'histoire de ce pays, il y a eu plusieurs déclarations
politiques qui ont été importantes et qui ont même
marqué l'évolution constitutionnelle de ce pays - la
déclaration Balfour en particulier et bien d'autres déclarations
qu'on peut mentionner - qui sont des accords politiques et qui se
réfèrent à la bonne foi, à la bonne
compréhension de ceux qui les signent et qui sont à la tête
de gouvernements qui acceptent de se lier politiquement.
M. Brassard: M. le Président, donc, si je comprends bien
le ministre - je le trouve assez clair - une déclaration politique,
ça a une portée qui n'est pas inoffensive. Ça peut avoir
une portée constitutionnelle majeure, puisqu'il admet que l'accord
conclu en... L'accord du lac Meech a été conclu à quel
mois?
M. Rémillard: En 1987, au mois d'avril.
M. Brassard: L'accord conclu en avril 1987, ça a d'abord
pris la forme d'une déclaration politique, et, par la suite, à
l'édifice Langevin, on lui a donné une forme juridique et
constitutionnelle, la forme d'un amendement à la constitution. Par
conséquent, vous me direz si j'ai tort ou pas, si le gouvernement du
Québec refuse, et ça c'est depuis longtemps, tout amendement
formel à l'accord du lac Meech, rejette également toute
résolution d'accompagnement comportant des amendements à l'accord
du lac Meech, même à retardement, j'en conclus également
que le gouvernement du Québec serait en désaccord avec une
déclaration politique dont certains éléments
constitueraient une interprétation de certaines dispositions de l'accord
du lac Meech ayant pour effet d'en affaiblir le sens, la signification ou la
portée. Donc, une déclaration politique qui comporterait des
éléments assimilables à des amendements à l'accord
du lac Meech, on peut d'ores et déjà comprendre des propos du
ministre que ce serait également rejeté par le gouvernement du
Québec.
M. Rémillard: On n'accepterait pas par une entente
politique qu'on vienne faire indirectement ce qu'on refuse de faire
directement. Ça, c'est très clair. Si une entente politique
venatt affecter de proche ou de loin le concept, entre autres, de
société distincte ou d'autres éléments importants
de l'entente du lac Meech, ce serait clair que, pour nous, ce serait nettement
inacceptable. Mais une entente politique peut nous permettre aussi de tracer
des paramètres de la deuxième ronde de négociations
constitutionnelles et, à ce niveau-là, ça peut être
très intéressant et nous sommes ouverts à toute discussion
à ce sujet-là.
M. Brassard: Au sujet de?
M. Rémillard: De discuter de la deuxième ronde de
négociations constitutionnelles.
M. Brassard: Donc, c'est ça que j'ai compris et ce que je
comprends - c'est ce que vous confirmez de nouveau - c'est que le gouvernement
du Québec serait d'accord avec une déclaration politique
uniquement si le sujet et le texte de cette déclaration politique ne
portaient que sur un ordre du jour ou un agenda d'une deuxième ronde
constitutionnelle, ce qui correspondrait d'ailleurs à la position du
gouvernement du Québec connue depuis longtemps, c'est-à-dire
l'accord du lac Meech tel quel, sans amendement, mais on est toujours ouverts
à des discussions pour en arriver à mettre au point l'ordre du
jour de la deuxième ronde. Une déclaration politique qui
porterait là-dessus serait jugée acceptable par le gouvernement
du Québec, mais si elle allait au-delà de cela, je comprends que,
là, ce ne serait pas jugé acceptable ou recevable par le
gouvernement.
M. Rémillard: Vous mettez beaucoup de "si" et je veux
être très clair dans ma réponse. Aucune entente politique
qui signifierait un amendement à Meech n'est acceptable par le
gouvernement du Québec. Voilà!
M. Brassard: Cependant, une déclaration politique
signée par les premiers ministres, qui comporterait ce qu'on pourrait
appeler un texte visant à clarifier ou à interpréter des
dispositions de l'accord du lac Meech, est-ce que ça, ce serait
Jugé acceptable?
M. Rémillard: Oui, vous mettez beaucoup de "si" et je ne
veux pas qu'il y ait de confusion. Je ne veux pas ôtre mal compris. Je
veux qu'on s'entende très bien. On ne fera pas indirectement ce qu'on
refuse de faire directement. Il n'y aura pas de modification à Meech par
le biais d'une entente politique et il n'y aura pas d'amendement qui pourrait
être fait à Meech par le biais d'une entente politique, peu
importe comment on peut voir cette entente politique. Alors, je vais essayer de
répondre à votre question...
M. Brassard: Mais sans que ce soit...
M. Rémillard: ...malgré toutes les nuances que vous
voulez apporter, les "si", les "ça". Moi, je vous dis: C'est ça
le principe qui nous guide et il n'est pas question, je peux vous l'assurer, il
n'est pas question qu'on dévie de ça; il n'y aura pas
d'amendement à Meech d'une façon directe ou indirecte; il n'y
aura pas d'amendement à Meech; Meech doit ôtre accepté
comme il est là. Ça, à partir de là, faites les
"si" que vous voulez...
M. Brassard: Mais sans que ce soit...
M. Rémillard: ...prenez le principe, appliquez-le et vous
allez avoir votre réponse...
M. Brassard: Oui.
M. Rémillard: ...parce que, sans ça, on risque de
tomber dans toutes sortes,,,
M. Brassard: Mais sans que ce soit...
M. Rémillard: ...de nuances et d'être
interprétés... Je ne voudrais pas être mal
interprété.
M. Brassard: Ça, je vous comprends bien et je veux bien
vous comprendre aussi parce que c'est important.
M. Rémillard: Je ne veux pas être mal
interprété par vous, par nos amis de la presse, je sais que je ne
serai pas mal interprété.
M. Brassard: Mais sans que ce soit un amendement à Meech,
une modification à Meech qu'on retrouve dans une entente politique, on
peut quand même imaginer que les premiers ministres puissent s'entendre
sur un texte dans lequel ils nous diraient: Voici comment on comprend telle
disposition de l'accord du lac
Meech. Voilà comment on comprend ou on interprète telle
disposition. Alors, ce n'est pas un amendement, ce n'est pas une modification
ni pour maintenant ni pour plus tard, c'est une déclaration des premiers
ministres qui donnent leur compréhension d'une disposition de Meech et
11 pourrait arriver . que cette compréhension des dispositions de Meech
ou cette interprétation des premiers ministres ait un effet
peut-être restrictif quant à la portée de telles
dispositions de Meech.
M. Rémillard: Je reprends exactement votre fin de phrase.
Si une déclaration politique pouvait affecter la portée de Meech,
c'est non. C'est aussi clair que ça. C'est non, il n'en est pas
question, sous aucune considération, et ça, je peux vous
l'assurer, je veux être très clair: L'entente politique ne doit
pas être un amendement à Meech.
M. Brassard: Bien. Vous êtes cependant ouvert à une
déclaration politique qui porterait sur l'agenda ou l'ordre du jour. Or,
on sait que dans l'accord politique du lac Meech on a prévu
déjà que, pour la prochaine ronde de négociations,
certains sujets seront abordés: la réforme du Sénat dont
on parle beaucoup ces temps-ci, mais également les pêches et tout
autre sujet à la convenance des premiers ministres. J'imagine
évidemment qu'on ne fera pas une déclaration politique sur
l'ordre du jour d'une deuxième ronde où l'on ne ferait que
reprendre le texte de Meech sur le Sénat et les pêches, il est
déjà là. Alors j'imagine que la déclaration
politique porterait sans aucun doute sur le troisième
élément où on dit: Tout autre sujet convenu par les
premiers ministres. Est-ce que sur cet élément-ià, si on
en arrivait à une déclaration politique qui porterait sur l'ordre
du jour d'une deuxième ronde, le Québec a déjà
indiqué à ses partenaires, aux autres interlocuteurs son
intention de faire inscrire un certain nombre de sujets qui le
préoccupent, qui l'intéressent au premier chef, dans cet ordre du
jour qui pourrait apparaître dans une déclaration politique? Je me
souviens bien de vos réponses; on a souvent échangé sur
cette question-là de Meech depuis trois ans. Je me souviens aussi de la
commission parlementaire sur l'accord du lac Meech au mois de juin 1987, quand
les organismes défilaient avec leurs mémoires; très
souvent on faisait reproche au gouvernement d'avoir oublié tel sujet. Je
me souviens de la CEQ, par exemple, qui vous disait: Comment se fait-il que
vous n'ayez pas profité de cette négociation-là pour
amender l'article 93, de façon que l'on puisse établir
constitutionnellement au Québec des commissions scolaires linguistiques?
Votre réponse répétitive, qui revenait constamment,
était: Écoutez, c'est une première ronde. C'étaient
les cinq conditions d'abord; il y aura d'autres rondes et, dans une
deuxième ronde, le sujet que vous évo-
quez, que vous soumettez, oui, le Québec trouve ça
très intéressant et on va en discuter dans une deuxième
ronde.
Là, il est de plus en plus question qu'on se retrouve avec une
déclaration politique qui établirait l'ordre du jour de la
deuxième ronde. Ce dont on entend parler depuis cependant pas mal de
temps, c'est des sujets qui Intéressent les autres provinces. Le
Sénat intéresse beaucoup l'Ouest; les pêches
intéressent les Maritimes. Par contre, jamais on n'a entendu parler de
sujets qui intéressaient au premier chef le Québec qu'on aurait
des chances de voir apparaître sur cet ordre du jour. Alors, ma question
est très simple: Est-ce qu'on va se retrouver dans une deuxième
ronde de négociations sans aucun sujet intéressant le
Québec ou est-ce que, déjà, vous avez commencé dans
vos démarches et dans vos échanges avec vos interlocuteurs des
autres provinces du Canada à leur faire admettre et à leur dire
que, dans l'ordre du jour d'une deuxième ronde, II faudra que tel, tel
et tel sujet intéressant le Québec apparaisse: l'article 93, par
exemple?
Le Président (M. Dauphin): M. le ministre. (11 h 30)
Ordre du jour de la deuxième ronde de
négociations constitutionnelles
M. Rémillard: M. le Président, tout d'abord, en ce
qui regarde la deuxième ronde, première des choses: les sujets
qui sont déjà prévus et qui pourraient être
prévus à la demande de certaines provinces dont, entre autres, le
Nou-veau-Brunswick, sont des sujets qui intéressent
particulièrement le Québec. La réforme du Sénat,
premier sujet. Nous voulons réformer le Sénat. C'est inacceptable
de conserver le Sénat tel qu'il est. Je ne dis pas que nous n'avons pas
de bons sénateurs. On peut en nommer, des Québécois et des
Québécoises qui nous honorent comme sénateurs du
Québec, qui siègent au Sénat canadien et qui font
très bien leur travail.
Il est évident qu'il faut réformer le Sénat sur la
base du fait qu'on doit avoir une deuxième Chambre, capable de
représenter les régions et les provinces adéquatement.
C'était la vocation qui avait été donnée au
Sénat par les Pères de la Fédération canadienne en
1867. Et ils ont pris un petit peu le modèle de la House of Lords en
Angleterre, du Parlement de Westminster et du Sénat américain.
D'une part, ils ont voulu que ce soit un endroit qui permette à des gens
d'avoir la capacité de réfléchir en toute liberté
sur des projets de loi importants et aussi ils voutalent pouvoir avoir
là une deuxième Chambre capable de représenter des
régions et des provinces.
Mais il est évident, M. le Président, que le Sénat
a raté sa vocation, parce qu'il s'est collé trop près de
l'enlignement politique à la Chambre des communes. Le résultat
est très clair: le Sénat a raté sa vocation. Il faut
réformer le Sénat et c'est un désir du Québec, une
priorité pour le Québec de réformer le Sénat. Pour
nous, Je crois qu'il a sa place dans un régime fédéral et
tous les régimes fédéraux ont une deuxième Chambre
qui est capable de représenter les intérêts
régionaux - et provinciaux dans notre cas. Comme la Chambre des communes
représente la population, la deuxième Chambre doit
représenter soit les régions, soit les provinces.
Alors, par conséquent, nous voulons réformer le
Sénat. Mais nous ne discuterons pas du contenu de la réforme du
Sénat tant que l'entente du lac Meech n'aura pas été
faite, parce que tant que nous ne sommes pas de retour à la table de
négociation constitutionnelle comme partenaires à part
entière pour réparer ce qui a été fait en 1981 -
pour compléter ce qui a été fait en 1981 - on ne discutera
pas du contenu de la réforme du Sénat. Mais il faut
réformer le Sénat.
Ensuite, en ce qui regarde le droit des minorités, nous voulons
nous asseoir à table dès que le lac Meech sera accepté. Et
nous vouions établir avec les autres provinces et le gouvernement
fédéral un véritable code du droit des minorités,
c'est-à-dire des réponses concrètes aux problèmes
qui se posent dans chacune des provinces à la suite de la
décision de la Cour suprême dans l'affaire Mahé concernant
l'un des aspects les plus importants pour les droits des minorités au
Canada, l'application de l'article 23 de la Charte canadienne sur le droit des
minorités à l'enseignement dans leur langue.
Il est donc évident, à la suite de cette décision
dans l'affaire Mahé, que l'on doit trouver au niveau de chacune des
provinces la possibilité de répondre directement aux
préoccupations, aux besoins des minorités dans chacune des
provinces. Chaque province a son système d'éducation. Chaque
province a son système social, son système de santé. Et si
on veut répondre adéquatement aux besoins des minorités,
il faut qu'on soit capable de trouver les réponses concrètes
respectant les juridictions des provinces.
Lorsque le député de Lac-Saint-Jean se
référait au rôle de promotion du gouvernement
fédéral, pour nous, le seul rôle de promotion qui est
acceptable par le gouvernement fédéral, c'est celui qui se situe
dans le cadre de C-72 respectant les juridictions fédérales, se
limitant aux juridictions fédérales et respectant les
juridictions des provinces. Nous avons toujours été
extrêmement, je dirais, vigilants pour que le fédéral
respecte son champ de juridiction en ce qui regarde la promotion des langues
officielles. Le Québec est la seule province où nous avons deux
langues officielles qui nécessitent des interventions gouvernementales:
le français qui est la langue officielle du Québec et le
français qui, à l'extérieur du Québec, est une
langue qui
est parlée par très peu de Nord-Américains, et
l'anglais qui est la langue d'une minorité au Québec, mais qui
est la langue de la majorité à l'extérieur du
Québec. À partir de là, respectant des juridictions qui
existent dans la constitution canadienne, nous pouvons faire beaucoup plus pour
les minorités si nous nous assoyons et si nous identifions les
problèmes concrets que nous avons pour faire respecter les droits des
minorités et si nous apportons des solutions concrètes à
ces problèmes, respectant les juridictions des provinces.
Un exemple que je peux citer, c'est la loi 142 qui a été
votée par cette Assemblée, l'Assemblée législative
du Québec, en ce qui regarde les services en langue anglaise dans le
domaine de la santé pour notre minorité anglaise. C'est là
un exemple particulièrement intéressant que l'on peut suivre au
niveau des autres provinces. Il faut qu'on dépasse le simple stade des
grands principes. Je comprends qu'en 1982, dans la Charte, II fallait
établir de grands principes et II fallait établir des principes
comme le nombre suffisant pour donner des droits, mais est-ce qu'il va falloir
aller à la Cour suprême chaque fois qu'une commission scolaire,
qu'une école, dans une province canadienne, va vouloir se faire
reconnaître en fonction de l'article 23 pour être
administrée par des francophones? Ça n'a aucun bon sens. Il faut
être pratique. Il faut laisser les grands principes et retourner à
ce qui est la réalité des choses dans chacune des provinces et
apporter des réponses concrètes aux problèmes de nos
minorités dans chacune des provinces.
Nous, nous sommes la province qui traite le mieux sa minorité.
Mol, je me souviens, à mon dernier voyage de tournée dans l'Ouest
canadien, au Manitoba, j'ai rencontré M. Blsson, qui est le
président de l'Association des francophones du Manitoba. M. Bisson m'a
dit: Dites donc à M. Filmon qu'il applique ici l'équivalent de la
loi 101 et c'est plus que ce qu'on peut rêver avoir. C'est ça
qu'il m'a dit. Et qu'est-ce que M. McKenna a fait, depuis deux ans et demi
qu'il est au pouvoir, pour sa minorité francophone? Qu'est-ce qu'il a
fait, M. McKenna? Peut-être que ça serait bien qu'il fasse le
bilan de ce qu'il a fait pendant deux ans et demi. Il a une minorité,
nos Acadiens qui s'expriment d'une façon tellement extraordinaire dans
leur culture, leur spécificité. M. McKenna n'a pas d'opposition.
Qu'est-ce qu'il a fait depuis qu'il est au pouvoir pour sa minorité
acadlenne?
M. le Président, donc, le droit des minorités, c'est une
priorité pour le Québec, aussi bien qu'un autre sujet, le droit
de nos amis autochtones. Quand on a fait la constitution en 1982, on a inscrit
qu'il devait y avoir cinq conférences, une par année, sur les
droits des autochtones. Malheureusement, ces conférences se sont
terminées par un échec et c'est malheureux. Nous
considérons qu'on doit répondre aux droits de nos amis
autochtones, entre autres en ce qui regarde un gouvernement autonome que nous
pourrons définir ensemble. Et s'il y a une concession, M. le
Président, que nous sommes prêts à faire, c'est pour nos
amis autochtones. Nous sommes prêts à débuter nos
conférences constitutionnelles dès que l'entente du lac Meech
sera acceptée. Nous sommes prêts à commencer sur la base
d'un gouvernement autonome pour nos amis autochtones. Ça, nous sommes
prêts à faire cette concession-là. Nous sommes prêts
parce que nous considérons qu'il est temps qu'on s'assoie et que, de
façon systématique, ces conférences se préparent
sur la base d'un gouvernement autonome pour les autochtones, qu'on discute et
qu'on en arrive à des conclusions.
M. le Président, donc: Sénat, droits des minorités,
droits des autochtones. Aussi, lors de ma dernière tournée dans
l'Ouest canadien, j'ai parlé avec d'autres ministres et des premiers
ministres concernant les communications et on sait que ma collègue, la
ministre des Communications, lors d'un voyage dans l'Ouest canadien tout
dernièrement, a parlé avec ses autres collègues des autres
provinces concernant le problème des communications. Nous ne nions pas
un rôle, pour le gouvernement fédéral, en matière
dé communications, loin de là, mais ce que nous voulons, c'est
qu'on respecte les intérêts régionaux, les
intérêts du Québec dans le développement des
télécommunications, qui est directement relié au
développement économique du Québec. Lorsqu'on parle de
télécommunications, on ne parle pas simplement de
télévision, de radio, pas simplement de téléphonie,
on parle, comme on les appelle, des transporteurs communs, les "common
carriers", avec la fibre optique, de la possibilité pour des entreprises
de télécommunications d'être des éléments
essentiels au développement économique de nos petites et moyennes
entreprises.
Alors, M. le Président, c'est une priorité pour nous, les
communications, et ma collègue des Communications fait un travail
remarquable. Je dois dire que, de plus en plus, les discussions que ma
collègue a avec ses homologues des autres provinces et du gouvernement
fédéral nous amènent à une bonne
compréhension du dossier.
En ce qui regarde l'environnement, M. le Président, là
encore, un dossier qui est extrêmement important pour le Québec,
pour les autres provinces, pour le gouvernement fédérai d'une
façon générale, et nous devons travailler ensemble. Qu'on
se réfère à la jurisprudence canadienne établie par
la Cour suprême canadienne, entre autres dans l'affaire Dryden Chemical.
Il est évident qu'on doit établir des bases de coopération
pour que l'action du gouvernement fédéral, comme celle des autres
provinces, puisse être concertée pour une meilleure protection de
l'environnement au Canada. Lorsqu'on revendique le respect des juridictions
pour les provinces, ce n'est pas parce qu'on veut faire des batailles de
drapeaux, ce n'est pas pour les "flags" sur le "hood", c'est pour
l'efficacité.
M. Brassard: Tut, tut, tut!
M. Rémillard: M. le Président, le
député de Lac-Saint-Jean fait "tut, tut, tut", il ne faut pas
qu'il fasse: "tut, tut, tut"! Mais non) Non! Simplement, je me
réfère à une expression pour illustrer mon propos. Je sais
qu'il aime bien, lui, illustrer son propos de belles citations. Il le fait
très bien, je dois dire...
M. Brassard: C'est parce que ça vous convient mal, le
langage "chrétien".
M. Rémillard: Vous savez, méfiez-vous de la fosse
aux lions.
Une voix: Ha, ha, ha!
M. Rémillard: Mais, M. le Président, en ce qui
regarde l'environnement, il est évident qu'on doit établir le
plus tôt possible des éléments de concertation et nous en
avons déjà saisi les autres provinces et le gouvernement
fédérai. Même chose dans un autre dossier dont j'ai
parlé tout à l'heure, M. le Président: j'ai parlé
de la répartition de la richesse nationale et de certaines règles
qui remontent aux années cinquante. Je veux parler, entre autres, des
règles de la péréquation. J'ai dit tout à l'heure,
M. le Président, qu'on est encore dans une espèce de
fédéralisme de quêteux, où il faut aller
quémander à Ottawa la part qui nous revient en fonction de
formules, de mécanismes de répartition de la richesse nationale
qui ne sont plus adéquats. Il faut qu'on mette fin à ce
fédéralisme de quêteux pour revenir à un
fédéralisme qui serait plus équitable pour les
différentes régions canadiennes, pour (es différentes
provinces. Le système de péréquation qui était
établi dans les années cinquante n'est plus adéquat. La
répartition de la fiscalité, telle que nous la connaissons
présentement, n'est plus adéquate. Ça n'a pas de bon sens
que nous payions ici, au Québec, pour une surchauffe économique
ou une mauvaise administration des budgets provinciaux dans certaines provinces
qui fait qu'on se retrouve avec un taux d'intérêt
extrêmement élevé dans certaines provinces alors que le
Québec a le taux d'intérêt le plus bas.
M. le Président, lorsque le député de
Lac-Saint-Jean me dit: Est-ce que vous avez d'autres sujets, dans un
deuxième "round" de négociations constitutionnelles? Est-ce que
vous en avez informé vos collègues ou le gouvernement
fédéral, ou les collègues des autres provinces ou les
autres provinces? Je vous dis: Oui, nous avons d'autres sujets qui nous sont
prioritaires. L'entente du lac Meech est une première étape pour
réparer et compléter ce qui a été fait en 1981-1982
avec le rapatriement de la constitu- tion. Dans une deuxième
étape, il s'agira maintenant de compléter la réforme
constitutionnelle qui est nécessaire non seulement pour le
Québec, mais pour le reste de ce pays si on veut faire face aux
défis qui nous attendent dans les prochaines décennies, dans le
prochain siècle. (11 h 45)
M. Brassard: M. le Président?
Le Président (M. Dauphin): Oui, M. le député
de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Je ne suis pas sûr qu'on se comprenne
bien.
M. Rémillard: Oh! il ne faut pas exagérer!
M. Brassard: Oui, parce que je n'ai pas demandé une liste
des sujets contentieux entre le gouvernement fédéral, le
gouvernement du Québec et les autres gouvernements des provinces. J'ai
eu droit à ça assez longuement. Ce que je voulais savoir de
façon précise, c'est ceci: Dans une deuxième ronde
constitutionnelle, est-ce que le Québec a exigé qu'un certain
nombre de sujets qui le préoccupent apparaissent à l'ordre du
jour, si cet ordre du jour devait se retrouver dans une déclaration
politique? C'est de ça dont il est question. Parce que je sais bien
qu'il y a des problèmes d'environnement entre le Québec, le
fédéral et les provinces. Est-ce que je dois comprendre des
propos du ministre que le Québec a demandé spécifiquement
que le sujet de l'environnement soit inscrit à l'ordre du jour d'une
deuxième ronde? Je sais bien qu'il y a des problèmes dans le
domaine des communications. Ça, on le sait. Est-ce qu'on comprend les
propos du ministre, est-ce qu'on les interprète bien en disant que le
Québec a exigé que les communications, les
télécommunications soient inscrits comme sujet à l'ordre
du jour d'une deuxième ronde? Même chose pour la
péréquation?
C'est ça qu'il faut savoir là. Parce que même si le
ministre me dit que le Québec est très intéressé
par le Sénat et que le Sénat va apparaître à l'ordre
du jour, ça, on le sait déjà, que le Sénat va
apparaître à l'ordre du jour. Je ne suis pas sûr que ce soit
la grande préoccupation majeure des Québécois, la
réforme du Sénat. Ils sont peut-être très fortement
intéressés par ça dans l'Ouest, mais au Québec, la
réforme du Sénat, ça ne se bat pas dans les autobus pour
ça. Alors, essayer de prétendre que le Sénat, la
réforme du Sénat inscrite à l'ordre du jour d'une
deuxième ronde, c'est vraiment un sujet qui préoccupe le
Québec, j'ai de la misère à croire ça. Et
là-dessus, d'ailleurs, sur le Sénat qui, lui, va
apparaître, c'est sûr et certain - ils en ont convenu dès
1987, c'est sûr que ça va apparaître à l'ordre du
jour d'une deuxième ronde - j'aimerais cependant savoir de la part du
ministre si, dans la déclaration politique - s'il y en a une, puisqu'on
pourrait peut-être retrouver les
paramètres d'une réforme du Sénat - on va retrouver
des engagements des premiers ministres portant sur les principes et les assises
d'une réforme du Sénat. Par exemple, est-ce que le Québec
est prêt à s'engager dans une déclaration politique sur
l'un ou l'autre des fameux "e" véhiculés par le projet de
l'Ouest: l'efficacité, l'égalité et le caractère
électif? Est-ce que le Québec, dans une déclaration
politique, va aller jusqu'à dire qu'il est d'accord avec le
caractère électif d'un futur Sénat réformé?
Est-ce qu'il est d'accord? Est-ce qu'il va indiquer dans une déclaration
politique qu'il est d'accord avec l'égalité de
représentation des provinces dans un futur Sénat
réformé? Puis est-ce qu'il va même s'avancer sur un certain
nombre de pouvoirs visant à rendre plus efficace le Sénat?
Ça, ça deviendrait inquiétant si le gouvernement allait
jusque-là. J'espère qu'on ne fera qu'indiquer les
éléments qui seront discutés dans une réforme du
Sénat. En tout cas, c'est comme ça que j'ai cru comprendre les
propos du premier ministre.
Quant aux minorités, le code des minorités, ça
intéresse les francophones hors Québec, c'est bien évident
mais pour le Québec lui-même, est-ce que c'est vraiment une
priorité majeure? Pour les francophones hors Québec,
peut-être, mais pour le Québec comme tel, sa minorité
anglophone étant la mieux traitée au monde, on n'a pas un urgent
besoin d'un code des minorités pour le Québec.
M. Rémillard: On peut l'améliorer. On peut
améliorer la situation de notre minorité. Oui.
M. Brassard: Sans doute. Quant à la promotion de la
dualité linguistique par le gouvernement fédéral, vous
dites que vous êtes d'accord avec le fait que le gouvernement
fédéral fasse la promotion de la dualité dans le cadre de
ses juridictions. Vous savez sans doute qu'il y a une distinction très
nette à faire entre les institutions fédérales et les
juridictions fédérales. C'est pas mal plus large, les
juridictions fédérales que les institutions
fédérales. Et là, quand on parle d'un rôle de
promotion de la dualité linguistique par le gouvernement
fédéral dans le cadre de ses juridictions, ça peut aller
très loin aussi. Il faut en être bien conscient. Par exemple, tout
le réseau des banques, c'est de juridiction fédérale.
Toutes les entreprises qui ont des chartes fédérales, ça
peut être compris dans les juridictions fédérales. Toutes
les entreprises de communications qui sont régies par le CRTC, ça
peut être également inclus dans les juridictions
fédérales, ce qui fait qu'on pourrait fort bien imaginer que, par
exemple, le gouvernement fédéral fasse la promotion du
bilinguisme, donc de l'anglais au Québec chez Bell Canada, par exemple,
ou dans le réseau des banques ou dans ie réseau des institutions
de communications où déjà, actuellement, le gouvernement
du Québec, par sa politique de francisation des entreprises, tente
justement de promouvoir le français. Il y aurait comme une
incompatibilité et un choc, si on acceptait que la promotion de la
dualité linguistique par le gouvernement fédéral se fasse
dans le cadre des juridictions fédérales et non pas uniquement
des institutions fédérales, ce qui est très
différent. Ça risque d'aller très loin si on accepte ce
principe-là. Et on risque d'avoir un choc des visions ou des objectifs
assez grave entre les objectifs de la Loi sur les langues officielles et les
objectifs de la loi 101 qui, comme chacun le sait, ne sont pas tout à
fait compatibles.
Alors, M. le Président, ce que je veux savoir, c'est dans
l'hypothèse d'une déclaration politique qui nous indiquerait un
ordre du jour d'une deuxième ronde, je voudrais savoir vraiment... Il ne
s'agit pas de savoir si le gouvernement du Québec, au cours des
dernières années, a informé les gouvernements des
provinces ou le gouvernement fédéral que tel sujet fait
problème et qu'il y aurait peut-être lieu de l'examiner,
d'échanger là-dessus, mais là, vraiment, d'un ordre du
jour de négociations constitutionnelles, donc, d'autres amendements
à la constitution; c'est de ça dont on parle dans une
deuxième ronde. À ce moment-là, je ne suis pas certain
encore que le Québec a des exigences. Si vous voulez que je m'exprime
très clairement, j'ai l'impression que la première ronde, celle
nous ayant conduit à l'accord du lac Meech, a été
présentée comme étant la ronde du Québec
basée sur les cinq demandes du Québec. Ç'a donné
lieu à l'accord du lac Meech. Et j'ai l'impression que, dans une
deuxième ronde, le Québec est gêné de
présenter des propositions et des sujets de discussion à l'ordre
du jour d'une deuxième ronde. Il est gêné parce qu'il sent
qu'il va se faire répondre par le Canada anglais: Auriez-vous
l'obligeance de prendre votre trou? Vous avez eu votre première ronde
basée sur les cinq demandes; maintenant, c'est assez. La deuxième
ronde, ça nous regarde, ça nous concerne. C'est nos sujets qu'on
va discuter. Alors, ne nous embêtez pas. Ne nous embarrassez pas avec vos
exigences et vos sujets. On ne veut pas discuter d'une deuxième ronde.
Vous avez eu votre première ronde. La deuxième, c'est à
nous.
C'est ça que j'ai l'impression qu'il est en train de se passer
présentement, ce qui fait que le Québec se retient. Il est un peu
gêné de présenter des sujets ou d'exiger que des sujets
soient inscrits à l'ordre du jour d'une deuxième ronde, parce
qu'il sent, il devine qu'il va se faire rabrouer par ie Canada anglais qui va
lui répondre avec vigueur: Vous avez eu votre première ronde, la
deuxième, c'est à nous autres; laissez-nous tranquilles,
laissez-nous en paix avec vos sujets. Ce qui fait qu'on ne retrouve pas, par
exemple, la question des commissions scolaires linguistiques. C'est important,
on le sait Dieu sait que c'est important, particulièrement à
Montréal, l'établissement de commissions scolaires
linguistiques pour régler le problème une fois pour
toutes. On ne peut pas le faire à cause de la façon dont est
libellé l'article 93. Il faut amender l'article 93 pour permettre au
Québec d'établir des commissions scolaires linguistiques.
Ça, c'est un sujet qui préoccupe le Québec, qui
intéresse le Québec, qui est fondamental pour le Québec.
Et le premier ministre Bourassa le reconnaissait pas plus tard qu'en
décembre 1987, pas longtemps après la signature de l'accord du
lac Meech. Il reconnaissait qu'il faut absolument régler ce
problème-là dans une deuxième ronde. Est-ce qu'on va le
retrouver, cet article-là, à l'ordre du jour d'une
deuxième ronde, pouvant apparaître dans une déclaration
politique?
Est-ce qu'on va retrouver l'article 96 de l'Acte de l'Amérique du
Nord britannique, qui porte sur la nomination des juges? Est-ce qu'on va
retrouver l'article 23 portant sur la fréquentation scolaire, où
le premier ministre, déjà, disait, en 1987: II faut corriger des
échappatoires. Il y a des échappatoires dans l'article 23, il
faut le revoir et le corriger.
Est-ce qu'on va traiter de formation professionnelle, où c'est un
véritable fouillis, actuellement, avec toute une série de
programmes au fédéral, toute une série de programmes au
Québec, un tel fouillis qu'une chatte ne retrouve pas ses petits? Ce qui
fait que c'est tout à fait inefficace comme système de formation
professionnelle pour une société moderne comme le Québec.
Est-ce qu'on va l'Inscrire dans une deuxième ronde?
La politique familiale. Avec la dénatalité qu'on
connaît au Québec, tout le monde convient qu'il faut mettre en
place une véritable politique familiale au Québec,
cohérente, articulée, efficace. Mais on ne peut pas en imaginer
une si on ne rapatrie pas un certain nombre de pouvoirs importants en ce
domaine-là, qui sont actuellement exercés par le
fédéral. Il faut aménager, par exemple, un système
d'allocations familiales plus intéressant pour les familles. Et
ça, ça suppose, évidemment, des modifications
constitutionnelles importantes. Ça, c'est des sujets qui
intéressent le Québec, qui intéressent les
Québécois. Et, jusqu'à maintenant, on n'a pas le sentiment
que le gouvernement du Québec, à cause de cette gêne dont
j'ai parlé tantôt, revendique, exige que, dans une deuxième
ronde, il apparaisse dès maintenant des sujets qui préoccupent le
Québec.
Je voudrais savoir, vraiment, là, de la part du ministre, dans
vos discussions avec le gouvernement fédéral, puisqu'il est
question d'une déclaration politique qui porterait sur un ordre du jour,
où l'on établirait l'ordre du jour d'une deuxième ronde...
C'est de ça dont il est question. Est-ce que ça va aboutir
à ça? Je ne le sais pas. En tout cas, il en est fortement
question. Et puisqu'il en est question, il faut donc que le gouvernement du
Québec se positionne face à ça et qu'il ait
déjà des exigences quant aux sujets qui vont se retrouver
à l'ordre du jour de cette deuxième ronde. Et je voudrais donc
savoir quels sont les sujets que le Québec a exigé d'inscrire
à l'ordre du jour d'une deuxième ronde, qui pourraient
apparaître dans une déclaration politique signée par les
premiers ministres.
Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.
M. Rémillard: M. le Président, en fait, la
première ronde, elle a eu lieu en 1981-1982. Le résultat de la
première ronde, c'est la constitution de 1982. Et le Québec
n'était pas partie à ce premier "round". L'entente du lac Meech,
présentement, vient compléter le compromis qui, à certains
égards, est Intéressant, qui a été fait en 1982,
avec le rapatriement, mais qui était nettement inacceptable pour le
Québec. L'entente du lac Meech, donc, a toutes fins pratiques, un
deuxième "round" de négociations, est une entente qui vient
compléter ce qui a été fait en 1982, en répondant
aux conditions du Québec. Parce que, dans un premier "round", en 1982,
on a répondu aux conditions des autres provinces. Quand je vols le
Manitoba venir demander des conditions, on se souvient que le Manitoba, c'est
la province qui avait demandé la clause "nonobstant' dans la Charte
canadienne, qui en avait fait une question de vie ou de mort pour le
rapatriement de la constitution. Il y a des gens qui pensent que la clause
"nonobstant" est inscrite dans l'entente du lac Meech. La clause "nonobstant"
est inscrite dans la constitution de 1982, à la demande des provinces de
l'Ouest et, en particulier, du Manitoba qui s'est battu pour que la clause
"nonobstant" soit inscrite et ça a fait partie de l'arrangement de la
cuisine en cette nuit du 4 au 5 novembre 1981. Puis, on a changé
complètement la formule d'amendement. Les provinces de l'Ouest ont
changé complètement la formule d'amendement. (12 heures)
Quand j'entends, M. le Président, des critiques, que ce soient
d'anciens dirigeants de ce pays ou de présents premiers ministres qui
viennent dire que l'entente du lac Meech vient bouleverser le
fédéralisme, notre situation des provinces par rapport au
gouvernement fédéral, eh bien, M. le Président, ce n'est
pas avec l'entente du lac Meech qu'on vient tout bouleverser, on l'a fait en
1982 avec une formule d'amendement qui, pour la première fois dans notre
histoire, consacrait constitutionnellement le statut particulier. Et ça,
c'est les provinces de l'Ouest qui ont demandé qu'on ait une formule
d'amendement fondée sur la reconnaissance d'un statut particulier pour
les provinces. Ce n'est pas l'entente du lac Meech qui fait ça;
ç'a été fait en 1982. Les provinces de l'Atlantique ont
exigé d'autres conditions: même nombre de représentants
à la Chambre des communes qu'au Sénat; que la reine demeure le
chef de l'État canadien;
en fait, d'autres demandes qu'on peut retrouver dans la constitution de
1982, mais le Québec n'y était pas.
Donc, l'entente du lac Meech, c'est le "round" du Québec, mais,
à toutes fins pratiques, c'est un deuxième "round", parce que le
premier "round" a été en 1982. Avec l'entente du lac Meech, on
devient partenaire à part entière et il y aura un autre "round"
de négociations constitutionnelles pour refaire la constitution
canadienne comme nous devons la refaire, tant au niveau des institutions qu'au
niveau de la distribution des compétences législatives entre les
deux niveaux de gouvernement. À ce niveau-là, je dois dire, en ce
qui regarde cet autre "round" de négociations, que les
intérêts du Québec se retrouvent très
fréquemment avec les Intérêts des autres provinces sur bien
des sujets. Et le député de Lac-Saint-Jean mentionnait tout
à l'heure l'article 93, l'article 23 de la constitution, de la charte,
de la Lof constitutionnelle de 1982. Je lui en ai parié tout à
l'heure; je lui ai dit qu'il faut s'asseoir, revoir et établir un
véritable code des minorités. Il faut s'asseoir et en discuter.
Moi, je considère que même si nous, nous sommes la province qui
traitons...
M. Brassard: Est-ce que ça fait partie de vos
exigences...
M. Rémillard: Mais ça fait même partie des
exigences aussi des autres provinces. Nous voulons...
M. Brassard: ...dans l'établissement d'un ordre du jour?
Est-ce que vous allez exiger que ça apparaisse dans un ordre du jour
d'une deuxième ronde?
M. Rémillard: Nous voulons discuter des droits des
minorités, comme nous voulons discuter de la réforme du
Sénat, comme nous voulons discuter des droits des autochtones, comme
nous voulons discuter aussi de nouveaux mécanismes pour établir
la répartition de la richesse nationale, comme nous voulons trouver des
mécanismes nouveaux pour nous permettre une meilleure concertation pour
la protection de l'environnement, comme nous voulons faire en sorte que
l'ensemble de notre constitution corresponde mieux à notre
réalité et nous permette de faire face aux défis que nous
avons devant nous. C'est ça que nous voulons.
M. Brassard: L'article 93 aussi?
M. Rémillard: L'article 93, lorsque nous allons discuter
du droit des minorités, devra être discuté, c'est
évident. Ça fait partie du droit des minorités, l'article
93. Ça a des relations directes avec ce qui regarde la langue. Vous
l'avez fort bien démontré tout à l'heure. Alors, tout
ça est interrelié. Mais tout à l'heure, dans sa question,
le député de Lac-Saint-Jean se référait au
Sénat. Même si on s'y référait, on ne discutera pas
du contenu de la réforme du Sénat, il n'en est pas question.
Même si on se réfère aux trois "e" au "triple e" qu'ils
appellent - élu, efficace et égal - même si on se
réfère à ces trois concepts, la perception de ces trois
concepts qu'on peut avoir dans certaines provinces canadiennes est à
l'opposé de la perception qu'on peut en avoir dans d'autres parties,
dans d'autres provinces canadiennes.
Par exemple, pour M. Wells, il considère qu'un Sénat
efficace ne respecte pas nécessairement ce que nous pouvons appeler un
fédéralisme exécutif, c'est-à-dire le rôle
des premiers ministres au niveau des conférences
fédérales-provinciales. Et c'est comme ça que M. Wells a
été un critique d'un aspect de l'entente du lac Meech qui est
très important, dont on ne parle pas souvent, mais qui est très
important. C'est l'obligation pour le premier ministre du Canada de convoquer
au moins une fois par année une conférence sur l'économie
de la Fédération. Toutes les provinces vont être là
représentées par leur premier ministre ou son
représentant. Et elles vont discuter de l'économie de la
Fédération, faire valoir leurs points vue. Je crois que c'est
Important, essentiel. Remarquez, ce n'est pas une idée nouvelle. C'est
une idée qui avait été développée par M.
Trudeau dans sa charte de Victoria, en 1971. Mais, là, on a la chance de
l'avoir dans l'entente du lac Meech. M. Wells critique cette conférence,
parce qu'il considère que c'a devrait revenir peut-être à
un Sénat élu. Mais ce n'est pas la position d'autres premiers
ministres.
Ce que je veux dire, M. le Président, c'est que nous
n'accepterons pas de discuter du contenu de la réforme du Sénat
et on a du travail à faire pour avoir un terrain commun à toutes
les provinces canadiennes où nous pourrons élaborer les grands
principes qui vont nous guider dans la réforme du Sénat. Et il va
falloir qu'on s'entende; même si on se référait à
ces concepts du "triple e", il va falloir qu'on s'entende sur la signification
de "élu", "efficace", "égal", quelle perception les premiers
ministres peuvent avoir de ces trois concepts. Et simplement par les
commentaires qui sont faits ici et là, on s'aperçoit que cette
perception n'est pas la même d'un bout à l'autre du pays.
Par conséquent, M. le Président, la réforme du
Sénat pour nous, est une priorité. Et le premier ministre du
Canada a convoqué une conférence constitutionnelle pour le 1er
novembre prochain sur le Sénat. On a beaucoup de travail à faire.
Et, moi, je peux vous assurer que le lendemain du jour où l'entente du
lac Meech sera partie de la constitution canadienne, nous serons prêts
à nous asseoir et à discuter sérieusement de la
réforme du Sénat.
M. Brassard: Est-ce que je dois comprendre
des propos du ministre qu'il n'est pas question, à ce moment-ci -
ni dans une déclaration politique éventuelle signée par
les premiers ministres - que le Québec signe une déclaration
politique qui irait dans le sens d'une réforme du Sénat à
l'albertaine? Donc, il n'est pas question que le Québec signe une
déclaration politique où ça comporterait le moindrement un
engagement sur l'un ou l'autre des principes mis de l'avant par certaines
provinces, en particulier, celles de l'Ouest et que ça se limiterait
à indiquer les éléments qui seraient discutés dans
une éventuelle réforme du Sénat, sans qu'on puisse y voir
apparaître un engagement de principe de la part du Québec sur un
tel sujet? Et, en d'autres termes, l'engagement sur des principes de la part du
Québec, ça ne viendra qu'après. Ce n'est qu'après
le 23 juin que le Québec va commencer à examiner les principes
d'une réforme du Sénat et à déterminer ses
orientations quant à la réforme du Sénat, mais aucun
début d'orientation, aucun début d'engagement de principe
n'apparaîtra dans une éventuelle déclaration politique
comme, par exemple - il en est question, d'ailleurs, dans le fameux document
dont on parlait au tout début de nos échanges - le principe que
la représentation de certaines provinces soit augmentée dans un
Sénat réformé. Là, ce n'est pas un engagement sur
l'égalité de représentation, mais c'est un engagement sur
le principe que la représentation de certaines provinces serait
augmentée. Déjà, c'est un début d'engagement sur un
principe. Donc, môme pas ça n'apparaîtra dans une
déclaration politique?
Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.
M. Rémillard: M. le Président, le
député de Lac-Saint-Jean se réfère à
l'Alberta. Je dois dire, tout d'abord, que l'Alberta est une province qui
représente l'un des partenaires les plus fiables du Québec dans
la Fédération canadienne. Nous avons des relations que je
qualifierais de privilégiées avec l'Alberta et, ça,
ça ne date pas des dernières années. C'était la
même chose sous l'ancien gouvernement. C'était la même chose
il y a plusieurs années. Nous avons une relation particulière
avec le gouvernement de l'Alberta. Et dans tout le dossier de l'entente du lac
Meech, il nous l'a bien montré.
Vous me permettrez de saluer, M. le Président, le travail qu'a
fait le ministre, M. Horsman, responsable du dossier constitutionnel, et M.
Getty, le premier ministre de l'Alberta qui a pris des positions en faveur de
l'entente du lac Meech, souvent courageuses, parce que son contexte politique
était très difficile. Avec toutes les faussetés qu'on a
dites sur l'entente du lac Meech, II était difficile, à un moment
donné, pour des premiers ministres qui avaient signé l'entente,
au lac Meech, de pouvoir s'exprimer très clairement et de dire la
réalité des choses.
Et M. Getty n'a jamais hésité à le faire, la
dernière fois, entre autres, devant le congrès de son parti
où, très clairement, il a dit la réalité des choses
sur l'entente du lac Meech. M. Getty a toujours été très
franc. Il a toujours honoré sa signature et la résolution
votée par son Assemblée législative.
Vous savez, M. le Président, lorsqu'on voit les trois premiers
ministres qui, maintenant, hésitent encore à signer l'entente du
lac Meech, II faut comprendre qu'ils n'étaient pas là lorsqu'on
en a discuté pendant un an, avant le 30 avril 1987, avant l'entente du
lac Meech et après l'entente de l'édifice Langevin. Mais les
premiers ministres qui l'ont fait, les 10 premiers ministres qui l'ont fait,
ils ne l'ont pas fait à la légère. Ils ne l'ont pas fait
à la légère. Ces premiers ministres étalent
là; ils ont étudié les textes qui étalent
préparés longtemps d'avance. Des spécialistes
étaient sur place pour étudier et leur faire comprendre toute la
signification des termes utilisés. C'est faux de dire que l'entente du
lac Meech et l'entente de l'édifice Langevin ont été
négociées après quelques heures. C'est tout à fait
faux, ça. Chaque mot et chaque virgule ont été
pesés, analysés.
Or, M. le Président, ces premiers ministres ne sont quand
même pas des gens qui ont apposé leur signature sans avoir compris
ce qu'ils signaient, il faut comprendre ça. Alors, par
conséquent, lorsqu'on se réfère à la réforme
du Sénat, on ne se réfère pas à la réforme
du Sénat de M. Getty ou de M. Ghiz, ou peu importe le premier ministre,
on se réfère à une réforme du Sénat qui doit
être dans les meilleurs intérêts de toutes les parties
à la Fédération canadienne. Ce que ça signifie, M.
le Président, c'est qu'on devrait avoir un Sénat qui soft capable
de représenter le plus adéquatement possible les régions,
les provinces et qui soit capable d'être efficace, respectant quand
même ce que nous appelons notre fédéralisme
exécutif, c'est-à-dire le rôle des premiers ministres dans
chacune des provinces au niveau national. Le premier ministre d'une province
doit avoir la possibilité d'aller au niveau de la
Fédération canadienne exprimer ses préoccupations et, dans
l'entente du lac Meech, c'est exactement la philosophie que vous avez, entres
autres, avec cette assemblée économique sur l'économie de
la Fédération qui devrait avoir lieu une fois par année,
demandée par le premier ministre du Canada.
Ensuite, il ne faut pas non plus, par une réforme du
Sénat, affaiblir le gouvernement fédéral. Il faut qu'on
garde au gouvernement fédéral la force nécessaire pour
gouverner ce pays. Le gouvernement fédéral doit avoir la
possibilité, par une concertation, une collaboration avec les provinces,
de gouverner ce pays qui n'est pas facile à gouverner, un pays qui est
vaste, qui est faiblement peuplé, avec son régionalisme, son
multiculturalisme, avec sa dualité...
M. Brassard: Et ses belles montagnes Rocheuses.
M. Rémillard:... avec le Québec. Ce n'est pas
facile à gouverner, un pays comme ça, mais c'est ce qui fait...
Je reprends les paroles du Secrétaire général des Nations
Unies, M. Javier Perez de Cuellar, hier, qui me disait: C'est ce qui fait le
charme, la beauté de ce pays, un immense pays, un pays de
liberté, de démocratie, capable de respecter sa
spécificité, l'identité du Québec aussi bien que sa
dualité et le multi-cuturallsme...
M. Brassard: Arrêtez, vous allez me faire pleurer. (12 h
15)
M. Rémillard:... les droits de ses autochtones. M. le
Président, non, je ne voudrais pas faire pleurer de joie le
député de Lac-Saint-Jean...
M. Brassard: J'ai déjà les yeux dans l'eau.
M. Rémillard:... mais je sais très bien qu'il me
comprend. Il citait son ami Lucien Bouchard, tout à l'heure, au
début de son intervention. C'est mon ami aussi, M. Bouchard, et je dois
dire que M. Bouchard a pris des décisions qui n'ont certainement pas
été faciles à prendre, mais il a pris ses décisions
et je les respecte. J'aurais aimé mieux avoir M. Bouchard au niveau du
gouvernement fédéral comme interlocuteur capable de
défendre les intérêts du Québec dans une perspective
fédérale, c'est évident. J'aurais aimé mieux qu'il
soit là, mais II a pris ses décisions et je les respecte. Pour
moi, c'est un ami qui m'est cher.
M. le Président, II faut bien comprendre aussi que l'entente du
lac Meech, c'est une entente qui semble tenir aussi à coeur les
intérêts de tous ceux qui croient dans cette
Fédération et qui croient au rôle du Québec dans
cette Fédération. Qu'on parle de souveraineté,
d'autonomie, de nation, de peuple. Peu importent les termes qu'on emploie, M.
le Président, une chose est certaine, c'est qu'il y a une
réalité québécoise qui est là et qui doit
être respectée. Et si elle n'est pas respectée, ça
signifie des conséquences qui sont sérieuses, c'est
évident.
Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le ministre. À
ce moment-ci, je vais reconnaître le député de
Nelllgan.
M. Williams: Merci, M. le Président. J'ai une question sur
la péréquation fédérale mais je voudrais commencer
avec quelques remarques avant de poser ma question.
M. Brassard: M. le Président, avant de passer à la
péréquation, on pourrait peut-être finir avec Meech.
M. Williams: C'est rattaché à Meech. J'ai
écouté assez longtemps vos questions pour que, peut-être,
vous me donniez une chance de poser une question aussi.
Le Président (M. Dauphin): Allez-y, M. le
député de Nelligan.
M. Williams: Merci, M. le Président. Quelques remarques
avant. J'ai souvent entendu, ce matin, l'expression "Canada anglais" et je
voudrais juste souligner, je pense, que ce n'est pas nécessairement
respectueux de tous nos voisins. Je sais qu'il y a plus de 1 000 000 de
francophones hors Québec, mais je pense que ça ne respecte pas
exactement le visage que j'ai du Canada et du Québec. Je voudrais juste
souligner un autre aspect qui a été discuté. Nous parlons
toujours du Canada anglais. Il y a certainement un Canada très
pluraliste qui ne touche pas seulement les anglophones, mais les francophones
et les allophones aussi.
L'autre remarque que je voulais juste souligner, c'est la question de la
dualité. Je pense que le but de cette expérience, c'est de
protéger notre dualité canadienne toujours en respectant notre
société distincte, mais de ne pas créer un ghetto de
façon à être Isolés.
Dernière remarque sur les quelques remarques que j'ai entendues,
cette promotion fédérale... Je pense que nous avons tous
bénéficié d'un exemple de promotion
fédérale. C'est Radio-Canada, CBC. And I think that is a good
example of some of the promotion in protection, when we do it in a way that
respects the Québec distinct society. So, I approach things differently
and I think there are other visions in terms of what we can do, in terms of
building a Québec and a Canada.
J'ai juste voulu faire quelques commentaires sur ça parce que je
pense qu'une société est souvent évaluée sur la
façon dont elle traite ses minorités. Et je pense que le
Québec a vraiment démontré que nous sommes capables de
travailler avec des minorités. Je pense que nous sommes le chef de file
dans quelques dossiers, comme l'éducation et les affaires sociales. Mon
but, ce n'est pas de chercher le minimum mais de trouver un moyen
d'améliorer le système. Je pense que le cas des minorités
dont le ministre a discuté, c'est vraiment peut-être la prochaine
démarche au niveau pratique pour les minorités. Ma question
est...
Système de péréquation
J'ai aussi été frappé un peu par les chiffres que
le ministre nous a donnés sur le financement du développement
régional per capita, le financement du développement
régional, l'importance relative... Nous avons eu un plafond de
transferts fédéraux depuis 1983-1984, je pense. Nous n'avons pas
vraiment eu d'augmentation réelle. Je
sais que dans l'accord du lac Meech il y a des conférences
fiscales chaque année sur les questions financières. Je voudrais
savoir quel moyen nous allons prendre pour corriger cet accord, pour trouver un
meilleur équilibre entre le Québec et les autres provinces dans
ce système. Parce que je sais que c'est dans l'accord du lac Meech, le
système, mais je voudrais savoir quel moyen nous allons prendre.
Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.
M. Rémillard: Oui. M. le Président, nous avons
débuté - le ministre des Finances l'a dit à plusieurs
reprises et le premier ministre l'a dit aussi à plusieurs reprises -
nous avons commencé à sensibiliser les autres provinces et le
gouvernement fédéral sur la nécessité de penser
à de nouveaux mécanismes. Nous disons que le système de
péréquation n'est plus adéquat. La philosophie qu'il y a
derrière ce système de péréquation, c'est qu'il y a
des provinces riches et des provinces pauvres. C'est un faux principe,
ça. C'est un faux principe parce que, dans la mesure où vous
acceptez ce principe, vous acceptez qu'il y ait des gens qui quêtent et
qu'il y ait des gens qui donnent aux quêteux. Ce n'est pas comme
ça qu'on règle nos problèmes, ça ne marche pas
comme ça. On est un pays, nous vivons ensemble et chacun, chaque
province a droit à une partie qui lui revient de la richesse nationale.
Et, quand une province a une économie qui va bien, c'est très
souvent parce qu'il y a la part d'autres provinces qui peut venir,
peut-être, d'une façon indirecte, à d'autres niveaux. Et,
aujourd'hui, c'est le tour de l'un, et demain, ce sera le tour de l'autre.
C'est ça, c'est ça, une fédération, c'est ça
la possibilité de vivre ensemble. Mais il n'y a pas des gens pauvres et
des gens riches. C'est faux, ce principe-là. Et c'est le principe qui a
fondé la Fédération canadienne, le système de
péréquation dans les années cinquante.
Il faut revoir ce principe-là. Il faut qu'on puisse ensemble
trouver de nouveaux mécanismes. Il faut qu'on puisse s'asseoir aussi et
faire le bilan. J'ai rencontré, à deux reprises, le mois dernier,
le ministre Benoît Bouchard, qui est le nouveau responsable du dossier du
développement économique régional, et je lui ai
expliqué que, pour nous, le développement économique du
Québec passe par le développement économique des
régions; c'est essentiel. Il faut que l'on puisse, le plus tôt
possible, avoir une entente qui nous permettra de continuer ce que nous avons
fait dans (es cinq dernières années et qui nous permettra de
développer nos régions adéquatement, en fonction de la
spécificité économique qu'elles peuvent développer,
en fonction des pôles économiques des régions-ressources.
Et cette possibilité, M. le Président, elle sera là dans
la mesure où le gouvernement fédéral comprendra qu'il doit
travailler avec le gouver- nement du Québec pour le développement
économique régional de la façon la plus efficace, la plus
concertée possible pour que, lorsqu'on dépense 1 $, ce dollar
soit rentable. On dépense les taxes de nos contribuables. Â quoi
ça sert si deux ordres de gouvernement viennent dépenser leur
argent en fonction d'un développement économique qui n'est pas
coordonné, qui est complètement désorganisé
à la suite de querelles politiques qui peuvent s'installer
immanquablement entre les niveaux de pouvoir fédéral et
provincial, et même, ajoutons municipal, dans tout ça?
M. le Président, ce que nous disons, c'est que nous avons
réussi à établir avec l'entente de développement
économique régional que nous avons signée au mois de juin
1988 une entente qui fait partie des Ententes de développement
économique et régional, l'EDER, qui nous permet d'avoir avec le
gouvernement fédéral une concertation en fonction des
priorités du Québec pour son développement
économique régional.
M. le Président, tout à l'heure, II y a quelques minutes,
le député de Lac-Saint-Jean disait: C'est épouvantable,
les régions attendent encore les sommes d'argent qui leur reviennent en
fonction du développement économique régional. Et je sais
que ça le préoccupe, il est un député des
régions... M. le Président, je vais lui donner, je vais
déposer un organigramme du processus de décision qui existe en ce
qui regarde le développement économique régional.
Le Président (M. Dauphin): La présidence accepte le
dépôt.
M. Brassard: M. le Président, un organigramme, ça
fait une belle jambe pour les régions. Ce n'est pas un organigramme
qu'elles veulent, les régions, c'est que le programme soit en vigueur et
que l'argent soit dépensé.
M. Rémillard: M. le Président, le
député de Lac-Saint-Jean parle d'une belle jambe. Ce que nous
voulons, c'est qu'il n'y ait plus de boiteux dans le développement
économique régional, qu'on marche allègrement sur nos deux
jambes partout sur le territoire québécois. Et le premier
principe qui nous guide, c'est que les projets qui sont
développés pour les régions soient des projets qui collent
à la réalité des régions. Trop souvent, M. le
Président, il est arrivé des gens de l'extérieur de ces
régions, des fonctionnaires, des gens bien Intentionnés, des
politiciens aussi, bien intentionnés, qui ont Imposé des
développements économiques qui ne correspondaient pas à la
réalité économique de ces régions. Mentionnons le
plan de l'Est, à bien des égards, ARDA, et je pourrais en citer
des cas, au résultat qu'on connaît.
M. le Président, je me réfère à l'immense
travail qui a été fait par le député de
Charles-
bourg lorsqu'il était ministre responsable du
Développement économique régional; je me
réfère au travail que fait présentement ma
collègue, la ministre responsable du Développement
régional, qui, dans un premier temps, a respecté un principe qui,
pour nous, est fondamental. Les projets de développement
économique des réglons doivent venir des régions
elles-mêmes. Ils doivent venir des habitants de cette région qui
connaissent leur réalité économique, qui connaissent leurs
besoins et qui vont nous permettre d'établir le développement
économique de la région en fonction de leurs aspirations et en
fonction, aussi, de la connaissance de leur milieu.
Par conséquent, M. le Président, ce que ça
signifie, c'est que nous avons établi de nouveaux mécanismes de
décision qui, au départ, il faut l'avouer, ont demandé de
nouvelles structures, de nouveaux accommodements, pour que l'ensemble des
intervenants puisse se faire valoir, que les décisions soient prises,
ensuite, les décisions prises au niveau du Conseil du trésor.
Mais, maintenant, le mécanisme est en place et il s'avère de plus
en plus efficace et ça démontrera que c'est rentable qu'on prenne
un peu plus de temps au début pour avoir une bonne expertise sur le
terrain, pour avoir les voeux, la réalité, tels que
définis par les gens du milieu, les gens qui vivent dans ces
régions, que c'est plus rentable pour nous d'avoir pris quelques mois de
plus pour avoir cette réalité et pour avoir ensuite un
développement économique régional qui sera
coordonné, efficace.
M. le Président, les montants qui sont déjà
engagés par les deux ordres de gouvernement - et je me
réfère au 25 mai 1990 -c'est 102 000 000 $ sur 820 000 000 $; 102
000 000 $ - et j'ai les chiffres ici - par les deux ordres de gouvernement qui
sont engagés.
M. Brassard: Dépôt de la liste. Dépôt
de la liste, M. le Président, parce que, en mars, il y avait exactement
25 700 000 $ seulement d'engagés ou de dépensés, dont 24
500 000 $ pour la papeterie de Matane. C'est ça le bilan en mars,
quasiment deux ans après la signature d'une entente dotée d'un
budget de 820 000 000 $. Là, on nous signale qu'on est passé de
25 000 000 $ à quelque 100 000 000 $; je demande à voir. Je ne
veux pas jouer au saint Thomas, mais je demande à voir, je veux voir la
liste. Je veux voir la liste des projets financés et en vertu de quels
programmes parce que, dans les régions, les programmes qui devaient
être en vigueur, issus de cette entente-là, ne sont toujours pas
connus. On ne les connais pas, alors... Puis ce n'est pas parce qu'il n'y a pas
de projets dans les régions, il n'y a aucune pénurie de projets
dans les régions, il y en a à profusion, des projets, dans tous
les domaines, dans tous les secteurs, puis des projets intéressants, en
plus. Ce n'est pas un manque de projets du tout, ce n'est pas une
pénurie de projets, c'est une extraordinaire inefficacité du
gouvernement à mettre en vigueur cette entente-là. (12 h 30)
Je demande, M. le Président, le dépôt de la liste
des projets totalisant quelque 100 000 000 $, parce que le dernier
dépôt qu'on a eu, c'est en date de mars 1990. Ça a
d'ailleurs été déposé par son propre
secrétaire, par le Secrétariat. C'est dans le document qu'ils
nous ont remis pour l'étude des crédits: Entente de
développement économique régional, en page... Je ne sais
pas trop, il n'y a pas de page, ce n'est pas paginé, l'annexe 22. C'est
ça, 25 700 000 $.
Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.
M. Rémillard: M. le Président, je vais donner les
derniers chiffres. Tout d'abord, en date du 24 mai 1990, dans les sommes
autorisées à être engagées par les deux
gouvernements, du côté d'Ottawa, c'est 339 300 000 $ et ça
représente 77, 1 %, et du côté du Québec les sommes
autorisées à être engagées, 203 400 000 $, ce qui
représente 53, 5 % de l'enveloppe globale de l'entente. Et maintenant
les autres chiffres, les montants qui sont déjà engagés -
là, il faut faire la différence entre ce qui est
engagé...
M. Brassard: Oui, en effet.
M. Rémillard:... et ce qui est dépensé.
M. Brassard: En effet, faisons-la vite.
M. Rémillard: Bien, oui. Mais ce qui est
dépensé, c'est dépensé.
M. Brassard: Ne soyons pas naïfs.
M. Rémillard: Au contraire, il ne faut pas être
naïfs, il faut être réalistes. Soyez réalistes,
regardez les chiffres.
M. Brassard: Parce que des budgets engagés et de l'argent
dépensé dans les régions, c'est très
différent. Vous me dites que le fédéral a combien, un
montant de 337 000 000 $ d'engagé?
M. Rémillard: Un montant de 339 000 000 $ autorisé
à être engagé. Les projets sont là.
M. Brassard: Bien, oui, ce sont des autorisations. C'est le
Conseil du trésor qui dit: Vous êtes autorisés à
dépenser tel montant. Mais, là, on est encore loin des
dépenses concrètes dans les régions.
M. Rémillard: Regardez bien, on va se comprendre. On va se
comprendre, parce que, où votre critique est fondée, c'est
lorsque vous nous dites: Ça a pris du temps. Eh oui! ça a pris
quelques mois de plus pour mettre en place des structures qui...
M. Brassard: On va fêter le deuxième anniversaire de
la signature au mois de juin.
M. Rémillard: Laissez-moi vous expliquer. Je vous dis:...
ce qui nous a permis d'avoir une structure qui se réfère, en
premier lieu, aux habitants directement de la région, aux
décideurs dans la région même. Et ça, vous avez
raison de dire: Ça a été plus long. Oui, ça a
été de quelques mois plus long. Je vous dis, par contre, que les
résultats maintenant nous arrivent et, là, on s'aperçoit
qu'il valait la peine d'attendre quelques mois de plus. Regardez les
résultats et les autres chiffres que je vous ai cités tout
à l'heure. Les montants qui sont engagés - pas
dépensés, ceux qui sont dépensés, c'est
dépensé -je vous dis engagés par les deux ordres de
gouvernement au 25 mal 1990, c'est 102 000 000 $.
M. Brassard: Sur des projets précis?
M. Rémillard: Sur des projets qui sont engagés.
M. Brassard: Peut-on avoir la liste?
M. Rémillard: Bon. Alors, écoutez, il n'y a rien de
cachette là-dedans. Il s'agit simplement de demander, je pense,
à.. Est-ce que ma collègue, la ministre du Développement
régional, a fait ses crédits, a soutenu ses crédits? Le
savez-vous?
Une voix: Non.
M. Rémillard: Pas encore. Bon. Avec les crédits de
l'OPDQ, vous allez avoir la chance...
C'est vous qui êtes le critique officiel? Elle n'a pas de chance,
alors.
M. Brassard: Oui, mais ça n'implique pas uniquement
l'OPDQ. Il y a plusieurs autres ministères qui sont impliqués
dans l'entente. Alors, ça serait peut-être
préférable que la liste vienne du Secrétariat aux affaires
intergouvernementales canadiennes...
M. Rémillard: Je peux la demander, oui. M.
Brassard:... qui chapeaute les ententes.
M. Rémillard: Voilà. Je peux la demander. Mon
rôle, moi, comme ministre des affaires canadiennes, c'est que je suis le
négociateur avec Ottawa. Je ne suis pas responsable. Le ministre
responsable a suite de l'administration en ce qui regarde l'administration de
ces sommes. Alors, c'est la ministre responsable du Développement
régional, Mais je vais faire ce que je peux faire pour que ces
informations vous soient communiquées.
M. Brassard: Merci.
M. Rémillard: Alors, vous allez voir, en conclusion, que
ça va quand même maintenant assez bien et que ça va aller
de mieux en mieux. Ça ne veut pas dire que nos relations avec Ottawa en
ce qui regarde le renouvellement des ententes de l'EDER.
M. Brassard: Voilà.
M. Rémillard:... ça va bien.
M. Brassard: Voilà.
M. Rémillard: Ça va difficilement. Là, vous
devriez m'interroger là-dessus. Je vous laisse poser la question.
M. Brassard: Oui, j'y arrivais. M. Rémillard:
Allez-y là. M. Brassard: J'y arrivais.
Le Président (M. Dauphin): M. le député de
Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Parce que, effectivement, vous l'avez
mentionné dans votre discours, tout ce que nous offre Ottawa, c'est un
maigre montant de 247 000 000 $ pour ce qui est du renouvellement de l'entente
sur le développement régional et ça, sur une
période de cinq ans, 1990-1995. Alors, c'est...
M. Rémillard: Mais c'est pire que ça.
M. Brassard: C'est pire que ça?
M. Rémillard: C'est pire que ça.
M. Brassard: C'est pire que ça. Alors là...
M. Rémillard: C'est pire que ça parce que c'est 247
000 000 $, mais payables seulement dans les deux dernières années
des cinq ans, c'est-à-dire à partir de 1992, 1993.
M. Brassard: Alors là, on va leur prêter de l'argent
en plus!
M. Rémillard: Alors, j'ai simplement dit que
c'était inacceptable.
M. Brassard: A quel taux d'intérêt?
M. Rémillard: J'ai rencontré M. Benoît
Bouchard à deux reprises dernièrement et je pense qu'il comprend
très bien la situation. J'ai reçu, je pense, une oreille
attentive et intéressée do la part de M. Bouchard, de ses
fonctionnaires. Nous discutons actuellement. Il y a nos fonction-
naires qui se rencontrent très très très
fréquemment de ce temps-ci. Je revois M. Bouchard dans un avenir
très prochain et je pense qu'on est dans une phase qui pourrait
évoluer correctement, d'une façon plus juste, en tout cas, pour
le Québec surtout quand vous vous référez au tableau que
je vous ai fait distribuer. Alors, nous avons réussi, avec l'entente de
développement économique régional que nous avons
signée en juin 1988, à établir un précédent
Intéressant qui établit une bonne relation de concertation entre
le fédéral et le Québec. Moi, je demeure confiant qu'on
puisse le faire dans le renouvellement des ententes de CEDER et on demande
notre juste part.
M. Brassard: Mais vous vous rendez compte que vous
négociez avec un gouvernement de cassés. C'est ce qui explique
d'ailleurs la minceur de l'offre, la maigreur de l'offre du gouvernement
fédéral: 247 000 000 $ sur cinq ans et en plus, les trois
premières années, il ne peut pas donner une cenne. C'est le
gouvernement québécois, donc, qui doit financer la part du
fédérai. Il va contribuer uniquement dans les deux
dernières années. Cest encore pire, effectivement, que vous ne
l'évoquiez dans votre discours. Vous négociez avec un
gouvernement de cassés et ça explique le fait que le gouvernement
fédéral est incapable de livrer la marchandise et de
répondre aux attentes et aux demandes légitimes du Québec
non seulement dans le domaine du développement régional, mais
également en matière de transferts fiscaux, des programmes
établis. Le gouvernement du Québec est perdant parce que le
gouvernement fédéral étant un gouvernement de
cassés, dont le niveau d'endettement est un des plus
élevés des pays développés... Il s'est même
fait semoncer par le Fonds monétaire international. Ça n'arrive
pas souvent, ça. Les pays du tiers monde se font faire des remontrances
par le Fonds monétaire international, mais c'est rare que ça
arrive pour des pays développés. Le Canada a pu se payer des
remontrances de la part du Fonds monétaire parce qu'il est quasiment
techniquement en banqueroute avec son endettement et son déficit
astronomique. Donc, la réaction, la politique du gouvernement
fédéral maintenant, et pour pas mal d'années à
venir, ça va être de se désengager. C'est un processus de
désengagement du gouvernement fédéral. On se
désengage des programmes établis en matière de
santé et d'enseignement supérieur. On se désengage en
matière de développement régional. On se désengage
en matière de logement social. C'est un processus de
désengagement. On réduit et, par conséquent, ça se
traduit par une réduction considérable des transferts fiscaux et
des transferts sous toutes les formes de la part du gouvernement
fédéral.
Ça, évidemment, II suffit de lire encore une fols, et je
le disais dans mes remarques prélimi- naires, l'annexe E. C'est un
bijou. C'est même l'acte de décès du
fédéralisme rentable, l'annexe E du discours de M. Gérard
D. Levesque. C'est pas mai plus intéressant, d'ailleurs, qu'une bonne
partie de son discours. Mais c'est vraiment éloquent. Ça
crève les yeux. Le gouvernement fédéral n'est plus capable
d'assurer, comme vous le disiez tout à l'heure, sa responsabilité
de redistribution. En plus, quand il redistribue, il redistribue davantage dans
les provinces mieux nanties que dans les provinces moins nanties à cause
de la façon d'opérer les transferts. Gêné ralement,
c'est sur la base du per capita.
J'admire votre optimisme. J'admire votre optimisme. C'est quelque chose
de tout à fait remarquable quand vous pensez que Benoît Bouchard,
même si c'est un bon gars du Lac-Saint-Jean, va pouvoir vous offrir plus
que les maigres 247 000 000 $ qu'ils vous ont déjà offerts en
matière de développement régional. Ça n'arrivera
pas de même, c'est évident. La tendance est à l'inverse. La
tendance est au désengagement, à la réduction des
transferts sous toutes les formes, de la part du gouvernement
fédéral, parce qu'il est cassé, il n'a pas une cenne. Il
est "pogné" avec un déficit de fou et avec un niveau
d'endettement effarant, quasiment infernal. Alors, il ne peut pas faire ce que
vous voulez qu'il fasse. Il ne pourra pas le faire. Et c'est ce qui me faisait
dire, me faisait conclure que le régime fédéral n'est plus
rentable. Le Québec est perdant dans ce régime-là. Et
penser que ça va changer, c'est faire preuve d'un optimisme béat
et qui est assimilable à de la pensée magique. Parce que ce n'est
pas ça qui va se passer, d'autant plus que quand vous parlez de
renégociation le terme n'est même pas juste.
Les transferts fiscaux, dans le cadre des programmes établis, ce
n'est pas le résultat d'une négociation. Le gouvernement
fédéral consulte les provinces, mais il décide
lui-même, tout seul, de façon unilatérale, par une loi
déposée et votée par la Chambre des communes. C'est comme
ça que ça se passe. Après ça on gueule, on
critique, on s'indigne, on déchire ses vêtements. Ça fait
quatre fois que Gérard D. Levesque met en lambeaux ses chemises, par
rapport au gouvernement fédéral. C'est tout ce qu'il peut faire,
parce que ce n'est pas une négociation. Les transferts ne se
négocient pas. Le gouvernement fédéral consulte et,
après ça, il vous dit: Voilà comment ça va se
passer. Et depuis cinq ou six ans, c'est toujours en termes de réduction
que ça se passe. On aura beau faire toutes les représentations
qu'on voudra, vous aurez beau faire toutes les demandes et toutes les critiques
que vous voudrez, et étoffer votre dossier, qu'il ait trois, quatre ou
cinq pouces d'épais, ça ne changera rien. C'est le gouvernement
fédéral qui procède, de façon unilatérale.
Et, compte tenu de sa situation financière, il ne peut pas faire
autrement que ce qu'il a fait et
que ce qu'il fait depuis quatre ou cinq ans, c'est-à-dire
réduire. Et c'est ce qu'il va faire encore. Vous vous faites des
illusions si vous pensez que vous allez briser cette dynamique-là,
compte tenu de la situation financière du gouvernement
fédéral, si vous pensez que vous allez corriger et
réorienter et effectuer un virage en matière de transferts
fiscaux et de transferts du gouvernement fédéral aux provinces,
et particulièrement au Québec.
Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.
M. Rémillard: M. le Président, le
député se réfère, tout d'abord, à sa
région, le Saguenay-Lac-Saint-Jean, et II a bien raison de dire qu'il
s'agit d'une belle région, d'une région où il y a du bien
bon monde. On en connaît tous, et j'ai même à mes
côtés ma sous-ministre, Mme Wilhelmy, qui vient du Lac-Saint-Jean
et qui en est très fière.
M. Brassard: Ça vous ferait une bonne
déléguée générale du Québec à
Paris.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Rémillard: Je ne dis pas qu'elle ne serait pas une
bonne déléguée, mais je peux vous dire qu'elle est une
très bonne sous-ministre. D'ailleurs, je dois dire qu'elle a eu la
médaille - ahl mais c'est important, je le mentionne, M. le
Président - il y a trois ans, la médaille d'excellence en
administration publique, en particulier pour son travail sur l'entente du lac
Meech. Je tiens à le souligner.
M. Brassard: Je n'ai rien à dire contre la sous-ministre,
M. le Président.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Brassard: J'en ai beaucoup à dire sur le ministre et le
gouvernement.
M. Rémillard: Tout ça pour vous dire que vous avez
raison de vous référer à votre belle région. Et
j'étais avec le Secrétaire général des Nations
Unies, hier...
M. Brassard: Ce n'est pas le seul sous-ministre du gouvernement,
d'ailleurs, issu de la région. Celui du ministère des Affaires
municipales est également un fils d'Alma, M. Gagné. Il y en a
sans doute plusieurs. Le pouvoir bleu est assez important dans l'administration
publique.
M. Rémillard: II s'effrite, à certains niveaux. Et
donc le Secrétaire général des Nations Unies, M. Javier
Perez de Cuellar, me disait justement, hier, qu'il connaissait bien la
région du Québec. Avant d'être secrétaire des
Nations Unies, iI était venu en touriste. Il a visité, entre
autres, le Lac-Saint-Jean, il a fait le tour du lac, et il a pris sa
décision...
M. Brassard: Le Lac-Saint-Jean pourrait générer
quelque chose de pas mal mieux que le lac Meech. (12 h 45)
M. Rémillard: Moi, je le dis, les lacs inspirent, au
Québec.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Rémillard: Alors, on verra, on verra ce que l'avenir
nous réserve. Mais les lacs sont...
M. Brassard: L'Inspiration serait plus forte... M.Rémillard: II y a plusieurs lacs.
M. Brassard:... et plus substantielle, venant du
Lac-Saint-Jean.
M. Rémillard: Mais je trouve la relation que vous faites
avec votre région très juste. Je pourrais faire la relation avec
ma région à moi, aussi, Charlevoix. M. le Président,
lorsque le député de Lac-Saint-Jean se réfère au
désengagement du gouvernement fédéral, d'une part,
ça peut être intéressant qu'on puisse avoir la
capacité d'exercer pleinement nos juridictions, mais
désengagement devrait être accompagné aussi d'un transfert
fiscal en conséquence. C'est là où le bât blesse et
c'est là que nous demandons que l'on puisse recevoir les transferts
fiscaux qui correspondent au désengagement du gouvernement
fédéral.
Il est évident que le gouvernement fédéral doit
restreindre ses dépenses, nous devons tous restreindre nos
dépenses, parce qu'il apparaît de plus en plus évident que
nous vivons au-dessus de nos moyens, il faut se serrer la ceinture, rajuster
nos économies, avoir des mécanismes plus adéquats, comme
on le mentionnait tout à l'heure. Mais, M. le Président,
ça nous permet... Vous savez que, dans des situations difficiles, que je
n'ose pas qualifier de crise, on ne vit pas une situation de crise
économique, on n'est pas en période de récession, on est
en période de ralentissement économique, vous savez la
différence, M. le député de Lac-Saint-Jean. Moi, c'est mon
fils, Nicolas, qui me l'a appris. En période de ralentissement
économique, c'est lorsque votre voisin perd son emploi. Mais en
période de récession, c'est vous qui perdez votre emploi. C'est
ça la grande différence entre récession et ralentissement
économique. Dans ce cas-ci, nous avons une période
économique difficile, mais c'est le temps qu'on se serre les coudes.
C'est pour ça que, lorsque vous vous référiez à
l'entente du lac Meech, en terminant tout à l'heure votre intervention,
pour nous, iI est grand temps qu'on tourne la page et qu'on aborde tes
problèmes auxquels nous sommes
confrontés, en particulier, les problèmes
économiques qui sont extrêmement Importants.
Le Président (M. Dauphin): M. le député.
M. Brassard: Je reviens un peu à Meech, on s'en
était écarté. C'est une question bien, bien simple. Tout
à l'heure, le ministre faisait allusion à sa
rémunération qui est sans doute moindre que s'il était un
consultant sur le plan constitutionnel. Aujourd'hui, dans La Presse, on
a des éléments, ou des chiffres, concernant la
rémunération de M. Tremblay, Me André Tremblay, qui est
l'avocat ou le constttutionnallste le plus consulté par le gouvernement
du Québec en matière constitutionnelle. On parle du
constitu-tlonnallste volant, il doit être en train de négocier
d'ailleurs, parce qu'habituellement il participe à l'étude des
crédits. Est-il à Terre-Neuve ou au Nouveau-Brunswtck ou à
Ottawa? On ne le sait pas. Ça nous indiquerait peut-être où
se font les négociations et avec qui.
Est-ce que les chiffres qui apparaissent dans La Presse
d'aujourd'hui sont exacts? On y parte d'honoraires de l'ordre de 130 000 $
pour cette année, plus 30 000 $ de frais de déplacements. L'an
passé, les honoraires se situaient à peu près autour de 70
000 $, donc, on double presque. Est-ce que ces chiffres-là sont
exacts?
Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.
M. Rémillard: M. le Président, tout d'abord, je
dois dire que le professeur Tremblay est un constitutlonnaliste, un juriste de
grande renommée partout au Canada...
M. Brassard: Loin de moi l'idée de mettre en doute sa
compétence.
M. Rémillard: II est reconnu comme un eminent
constltutionnaliste, un juriste de grand renom, qui a occupé
différentes fonctions, différents niveaux et qui est professeur
à l'Université de Montréal, qui est très utile au
gouvernement du Québec, par ses avis en matière constitutionnelle
et dans d'autres domaines du droit. C'est un spécialiste du droit
municipal, aussi, qui a publié plusieurs volumes, dont un en droit
municipal. Il a été mon professeur en droit municipal. Je peux
dire que c'est un excellent professeur, en plus.
Les chiffres qui sont parus dans les quotidiens aujourd'hui, on
m'informe que ces chiffres sont faux. Ce n'est pas la première fois,
d'ailleurs, sur ce contrat de M. Tremblay. L'an dernier, si ma mémoire
est bonne, on avait rapporté, aussi, des chiffres qui n'étaient
pas exacts.
M. Brassard: Est-ce qu'on pourrait avoir la vérité
là-dessus?
M. Rémillard: La vérité, je vais même
laisser Mme Wilhelmy, la sous-ministre, vous l'expliquer.
Mme Wilhelmy (Diane): La prévision en ce qui concerne le
contrat de M. Tremblay pour une durée de 13 mois, parce que,
évidemment, je ne peux pas vous dire quel sera le montant complet qui
sera versé, parce que le contrat de M. Tremblay va jusqu'au 31
août 1990, alors, les honoraires qui sont prévus sont de l'ordre
de 79 100 $ et les autres frais sont de l'ordre de 35 450 $. L'an dernier, je
n'ai pas le chiffre exact, mais je pense que c'était autour de 70 000 $,
le montant global des honoraires qui avaient été versés.
On pourra vous le donner par la suite, parce qu'il faudrait que je regarde
l'état des comptes publics exacts à la fin du contrat. En
1988-1989, c'était 75 622 $; en 1989-1990 71 077 $ de prévus.
Alors, l'erreur qui s'est produite, c'est que dans les journaux on a
additionné les frais de déplacements avec les honoraires: le
montant que vous avez. La décision du Conseil du trésor
était à l'effet qu'on autorisait un montant global qui
comprenait, bien sûr, les honoraires, les frais de déplacements et
les frais de représentation. Alors, on dit le montant de 130 000 $. Je
n'ai pas la copie de journal...
M. Brassard: 130 000 $, oui.
Mme Wilhelmy: Oui, c'est ça, on additionne tout.
D'ailleurs, les honoraires, c'est pour 13 mois.
M. Brassard: C'est 79 000 $ pour les honoraires
prévus.
Mme Wilhelmy: Prévus Jusqu'au 31 août 1990:13
mois.
M. Brassard: Le reste étant les frais de
déplacements.
Mme Wilhelmy: C'est ça.
M. Brassard: Et les frais de représentation
également.
Mme Wilhelmy: C'est ça.
M. Brassard: En plus de Me Tremblay, est-ce qu'il y a d'autres
constltutionnalistes qui ont été engagés ou mis sous
contrat?
M. Rémillard: Pas sur cette base-là.
C'est-à-dire que le professeur Tremblay est un cas particulier, parce
que c'est à la suite d'une entente avec l'Université de
Montréal où il est professeur. Alors, nous avons une entente avec
l'Université de Montréal pour les services de Me Tremblay. Nous
avons consulté plusieurs autres
constitutionnalistes et juristes dans différents domaines,
juristes québécois et canadiens, et il y a plusieurs avis, je
peux vous dire que beaucoup d'avis juridiques ont été
demandés par le gouvernement dans le dossier constitutionnel depuis les
quatre dernières années.
M. Brassard: Si je vous demande ces avis, vous allez me
répondre...
M. Rémillard: Non, non, vous savez que je ne peux pas vous
les donner, tout simplement parce que, et comme ministre de la Justice et comme
ministre, je ne peux pas vous donner des avis qui pourraient nous servir
à défendre les intérêts du Québec devant les
tribunaux.
Dossier des pêches: accès à la
zone de 200 milles
M. Brassard: M. le Président, étant donné le
peu de temps qui nous reste, j'aimerais aborder quelques sujets rapidement qui
impliquent évidemment le gouvernement fédéral et le
gouvernement du Québec, en particulier, les pêches. Est-ce que le
ministre est en mesure de reconnaître finalement que son gouvernement a
lamentablement échoué dans le dossier des pêches, dossier
crucial pour l'économie de la Gaspésie et des
Îles-de-la-Madeleine et aussi en partie de la Côte-Nord, soit celui
de l'accès à la zone de 200 milles, accès qui a
été refusé par Ottawa à trois reprises, soit pour
la saison de pêche 1988, celle de 1989 et celle de 1990? Alors, j'imagine
qu'on doit maintenant faire une croix sur ce dossier-là, qu'on ne peut
plus espérer sérieusement obtenir un jour pour nos pêcheurs
québécois un accès à la zone de 200 milles. C'est
aussi bien mettre ça sur la tablette; soyons réalistes et
parlons-nous franchement: C'est fini, il n'y a plus rien à faire avec
ça. Après trois non, on peut Imaginer que le secteur des
pêches au Québec va continuer de péricliter et de
connaître des problèmes graves à cause, en particulier, de
ce non-accès à la zone de 200 milles.
M. Rémillard: M. le Président...
Le Président (M. Dauphin): Oui, M. le ministre.
M. Rémillard:... pour avoir une réponse la plus
complète possible, je vais demander au fonctionnaire qui est directement
Impliqué dans ie dossier de nous faire l'état de la situation.
Et, par conséquent, ensuite, je pourrai répondre aux questions du
député de Lac-Saint-Jean. C'est M. Daniel Beaudet qui est le
directeur des affaires économiques au Secrétariat qui pourra vous
donner les Informations de base pour répondre à cette
question.
Le Président (M. Dauphin): Merci. Alors,
procédez.
M. Beaudet (Daniel): Merci, M. te Président. Comme vous le
savez, dans toute la région est depuis deux ans, il y a des diminutions
successives de quotas. Donc, la demande de quotas, entre autres, pour Nova Nord
est l'accès à la zone de 200 milles. Elle demeure une demande du
Québec, mais II faut bien comprendre que dans la diminution ou dans la
situation actuelle, c'est difficilement réalisable. Mais la demande est
toujours sur la table et dès qu'il y aura une révision à
la hausse de ces quotas-là, la demande du Québec est toujours
à l'effet d'obtenir un accès direct et des quotas pour les
bateaux québécois.
M. Brassard: Merci. Alors, on aurait pu s'attendre, à tout
le moins, que dans le cadre du programme d'adaptation initié par le
gouvernement fédéral, pour permettre aux pêcheurs et aux
entreprises de pêche de s'adapter à cette nouvelle situation d'une
réduction des stocks, le Québec soit pris en
considération. C'est quand même un monde étonnant de voir
que, dans le programme mis de l'avant par le gouvernement fédéral
de quelque 584 000 000 $, le Québec n'est pas là. Et Dieu sait
que nos pêcheries connaissent aussi des problèmes et des
difficultés. Non seulement on leur refuse l'accès à la
zone de 200 milles mais, en plus, quand on met sur pied et qu'on lance un
programme pour permettre aux pêcheurs et aux entreprises de pêche
d'essayer de s'en sortir, le Québec est absent, mis de
côté, mis à l'écart.
Est-ce que c'est encore ça, un exemple de
fédéralisme rentable? Parce que M. Pagé est obligé
d'en initier un, de son propre chef, d'une cinquantaine de millions, donc, avec
des budgets du Québec, alors qu'il semble qu'on paie toujours des
impôts à Ottawa et il y a certainement une partie de nos
Impôts qui sert à financer le programme de 584 000 000 $ qui a
été mis de l'avant, puis on n'en profite même pas. On est
obligés de puiser à même le Trésor public du
Québec pour initier un programme concernant nos pêcheurs. Un autre
bel exemple.
M. Rémillard: M. le Président, le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation a mentionné
dernièrement qu'il avait un plan quinquennal de restructuration du
secteur des pêches et de l'aquiculture commerciale et qu'on y consacrera
50 000 000 $. Il est évident qu'il est inacceptable que, dans le plan de
relance annoncé par le gouvernement fédéral, nous n'ayons
pas notre part qui nous revient au Québec.
Maintenant, j'en ai discuté avec le ministre Bouchard lors de ma
dernière rencontre et on m'a assuré qu'il y avait des
négociations qui pouvaient se faire et qu'on pourrait réparer
cette situation-là qui est nettement Inacceptable. Alors,
dans ma prochaine rencontre avec M. Bouchard, c'est un sujet que
j'aborderai et vous savez que mon collègue, le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, est en
négociation présentement.
Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le ministre. Je crois
que M. le député d'Anjou aurait une question.
M. Larouche: Peut-être en introduction, on a
démasqué tantôt ceux qui venaient du Lac-Saint-Jean. Je
passe tout de suite aux aveux. J'en suis natif aussi.
Des voix: Ha, ha, ha!
Une voix: C'est le troisième.
M. Brassard: C'est vrai! D'Alma aussi!
M. Larouche: Je n'ai pas de question sur des millions de dollars,
seulement sur quelques milliers de dollars. Dans la liste
détaillée des dépenses de transfert, on fait
référence à une subvention de 5000 $ au club de
philatélie Oméga, Anjou. Je voudrais savoir si c'est Anjou de
France ou Anjou de mon comté.
M. Rémillard: II faudrait vérifier. Je vous avoue,
M. le député... Je pourrais lui répondre dans un avenir
prochain, s'il me le permet.
M. Larouche: D'accord.
Le Président (M. Dauphin): Ça va? Alors, il n'y a
pas d'autres questions?
M. Brassard: Non, M. le Président. Là-dessus, je
voudrais évidemment remercier les membres de la commission, le ministre
et aussi tous les fonctionnaires qui ont bien voulu participer à nos
travaux, ne serait-ce qu'à titre d'observateurs. Mais on sait que, de
toute façon, derrière toutes les informations qu'on peut avoir
dans une commission semblable, il y a beaucoup de travail de la part des
fonctionnaires. Au nom de l'Opposition, M. le Président, je voudrais les
en remercier, de même que vous, pour la conduite de ces travaux.
Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le
député de Lac-Saint-Jean. M. le ministre, pour le mot de la
fin.
M. Rémillard: Oui, tout simplement, M. le
Président, pour remercier moi aussi les fonctionnaires qui m'ont
accompagné. J'ai mentionné au tout début à quel
point ils faisaient un travail remarquable et je le mentionne en terminant. Je
vous remercie, M. le Président, vous-même et Mme la
secrétaire de la commission et les députés qui ont
participé à cette commission et qui nous ont permis de pouvoir
discuter des principaux principes qui nous guident dans nos relations
fédérales-provinciales et entre nos provinces. Merci, M. le
Président, de la façon que vous avez présidé nos
travaux.
Adoption des crédits
Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup, M. le ministre.
Alors est-ce que le programme 4 du ministère du Conseil exécutif
est adopté?
M. Brassard: Adopté.
Le Président (M. Dauphin): Adopté. Alors, j'ajourne
les travaux à demain, 10 heures, pour l'étude des crédits
budgétaires du ministère de la Justice. Nous nous reverrons
demain, M. le ministre.
(Fin de la séance à 13 h 2)