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Version préliminaire

42e législature, 2e session
(19 octobre 2021 au 28 août 2022)

Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.

Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions

Le mercredi 4 mai 2022 - Vol. 46 N° 28

Étude des crédits budgétaires du ministère des Finances, volet Finances


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Journal des débats

11 h (version non révisée)

(Onze heures vingt-trois minutes)

Le Président (M. Simard) : Bien. Alors, merci, chers collègues. Bienvenue à toutes et à tous. Je constate que nous avons quorum. Nous sommes conséquemment prêts à débuter nos travaux.

Comme vous le savez, la Commission des finances publiques est aujourd'hui réunie afin de procéder à l'étude du volet Finances des crédits budgétaires du portefeuille du même nom pour l'exercice financier 2022-2023. Une enveloppe de 1 h 45 a été allouée pour l'étude de ces crédits.

Mme la Secrétaire, bonjour. Y a-t-il des remplacements ce matin?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. Alors, M. Émond (Richelieu) est remplacé par M. Caron (Portneuf); Mme Foster (Charlevoix—Côte-de-Beaupré) est remplacée par Mme IsaBelle (Huntingdon); M. Skeete (Sainte-Rose) est remplacé par Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac); et M. Arcand (Mont-Royal—Outremont) est remplacé par Mme Nichols (Vaudreuil).

Le Président (M. Simard) : Très bien. Comme nous avons commencé près de sept minutes en retard, y aurait-il consentement afin de poursuivre au-delà de l'heure prévue et de respecter les temps impartis à chacun d'entre vous?

Une voix : Consentement.

Le Président (M. Simard) : Il y a consentement. Nous allons procéder comme nous procédons dans l'étude de ces crédits, c'est-à-dire par blocs d'échange, qui vont osciller autour de 15 à 20 minutes par intervention. Et nous commençons aujourd'hui par le porte-parole de l'opposition officielle et député de Robert-Baldwin. Cher collègue, à vous la parole, et vous disposez d'environ 18 minutes.

M. Leitão : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, bonjour, M. le Ministre, M. le sous-ministre, nos collègues de l'Autorité des marchés financiers ainsi que du ministère. Chers collègues. Alors, nous allons donc commencer cette partie de l'étude des crédits. Et, M. le Président, j'aimerais en discuter de quelques enjeux avec l'Autorité des marchés financiers, si cela... Vous regardez là, mais vous êtes là. C'est... Bonjour.

Et peut-être ça ne vous surprendra pas, M. Morisset, que j'aimerais parler un petit peu de cryptomonnaie, d'investissement. Comme quelqu'un a dit à un journaliste qui a dit, je pense, la semaine dernière, en parlant des cryptomonnaies, il s'est un peu échappé, il a dit "de la cryptomanie", et j'avais trouvé que, ah! ce n'est pas mauvais ça. Parce qu'en effet moi, je perçois ça comme étant une espèce de manie plutôt qu'un instrument d'investissement.

Je commence en vous citant un article du journal, du Globe and Mail, qui, lui, citait des travaux de la Banque du Canada en disant que... je lis juste juste la manchette, "Bitcoin investors tend to have low financial litteracy". Donc, les investisseurs en bitcoins ont tendance à avoir un très bas niveau de littératie financière. J'aimerais savoir d'abord si, à l'AMF, vous vous partagez cette opinion. Et, si oui, bon, qu'est-ce que vous... Quel est le plan? Qu'est-ce que vous allez mettre en œuvre?

Le Président (M. Simard) : Très bien. Donc, y aurait-il consentement afin que M. Morisset s'adresse à nous?

Une voix : Consentement.

Le Président (M. Simard) : Il y a consentement. M. Morisset, vous êtes un habitué de nos travaux, mais néanmoins auriez-vous d'abord l'amabilité de vous présenter en vos titres et fonctions, s'il vous plaît?

M. Morisset (Louis) : Bien sûr, M. le Président.

Alors, Louis Morisset, président-directeur général de l'Autorité des marchés financiers.

Bien, merci, M. le député, pour votre question. Vous référez, donc, à cette étude récente de la Banque du Canada, dont on partage, là, entièrement, si on veut, les conclusions ou les perceptions. C'était une étude qui a couvert la période de 2016 à 2020. Et je vous dirais que le phénomène s'est accentué, s'est exacerbé depuis. Même 2020, l'année dernière, on a vu véritablement, là, une frénésie, si on veut, dans le marché des cryptoactifs. Et, oui, notre perception est à l'effet que des investisseurs, d'abord jeunes, souvent les jeunes, s'intéressent aux cryptomonnaies dans l'espoir, là, de faire de l'argent rapidement...

M. Morisset (Louis) : ...des investisseurs peu éduqués, si on veut, au niveau financier, s'intéressent à ce phénomène. Alors, on partage, là, les mêmes conclusions. Nous, on avait mandaté le CIRANO pour faire une étude avec nous l'année dernière, puis on arrivait à peu près au même constat. Ce qu'on fait, bien, on met beaucoup d'énergie à la sensibilisation des investisseurs, des jeunes, des moins jeunes aux risques associés aux cryptoactifs, le risque de volatilité, mais le risque de fraude.

En ce moment, vous avez peut-être remarqué, on a une campagne, là, qui bat son plein, on est dans la presse, une fois par semaine, avec des messages de prévention liés à la fraude, liés aux cryptoactifs, on est sur Facebook, on est sur différents sites Internet. En ce moment, on est dans une campagne qui vise davantage les 45-65 ans, peut-être davantage les hommes qui s'intéressent plus, peut-être, que les femmes à ce phénomène, et y voient peut-être plus de valeurs. On s'est intéressés beaucoup aux jeunes. L'automne dernier, on a fait une campagne de sensibilisation sur les médias sociaux qui intéressent les jeunes. On était sur TikTok, par exemple, sur Twitch, qui est une plateforme qui intéresse les jeunes qui s'intéressent aux jeux vidéo, les jeunes gamers.

Alors, on est, je pense, très présents et puis on cherche à sensibiliser, donc, les jeunes et les moins jeunes à la fraude.

Le Président (M. Simard) : Merci.

M. Leitão : Très bien, merci. Et, écoutez, je suis entièrement d'accord et je vous encourage à continuer dans cette direction. D'ailleurs, je vous encourage même à aller plus loin, et c'est de ça que j'aimerais parler un peu plus avec vous. Parce que, personnellement, moi, je pense qu'on ne devrait même pas l'appeler un actif, parce qu'à mon avis une cryptomonnaie, un bitcoin ou une autre n'a pas, à mon avis, n'a pas vraiment de valeur intrinsèque, ça ne représente rien, ça ne donne aucun rendement, ce n'est pas comme une obligation, ce n'est pas comme un "stock", rien. Donc, est-ce qu'il n'aurait pas eu lieu, pour les autorités réglementaires, l'AMF et les autres, mais, ici, on parle de l'AMF, d'aller un peu plus loin et de dire ça très clairement : Cette affaire-là, ce n'est pas un actif, là? Ça ressemble... d'ailleurs, ça a beaucoup de caractéristiques d'un montage de Ponzi. Donc, d'aller plus loin et d'être beaucoup plus explicite. Ce n'est pas seulement les risques, mais c'est vraiment quelque chose... de l'air chaud, là, en tout cas, à mon avis.

• (11 h 30) •

M. Morisset (Louis) : Bien, écoutez, à certains égards, je vous dirais que je partage votre perspective d'économiste sur le produit en question. Maintenant, tu sais, le bitcoin se transige ces jours-ci à 42 000 $ US quand même, et c'est un actif qui a valu 67 000 $ US en quelque part au mois de novembre dernier. Donc, il y a des gens qui ont une perspective différente de la vôtre et qui attribuent de la valeur à cet actif-là qui est considéré comme une marchandise en quelque sorte. Alors, je suis personnellement d'accord avec votre analyse, mais la réalité, c'est que c'est un actif qui, aux yeux de plusieurs, a une certaine valeur et qui est un actif peut-être d'avenir.

Cela étant dit, notre perspective, c'est que le phénomène n'est pas appelé à disparaître, à moins qu'une catastrophe, là, technologique ou un autre enjeu majeur, là, se cristallise dans les prochaines semaines, prochains mois. C'est un phénomène qui est en expansion, qui intéresse malheureusement, je vous dirais, de ma perspective, Monsieur et Madame Tout le monde, mais qui intéressent de plus en plus des grands acteurs institutionnels des fonds de pension et autres.

Alors notre perspective, c'est qu'il faut l'encadrer. On ne peut pas encadrer la marchandise elle-même, mais on peut encadrer le produit financier, la valeur mobilière ou l'instrument dérivé qui a comme sous-jacents cette marchandise. Alors, on ne va pas aussi loin que vous le souhaiteriez parce qu'il est, pour nous... il ne serait pas justifié d'aller aussi loin, mais on sensibilise le plus possible les gens au risque. Et puis, comme je vous dis, il y a un risque de volatilité certain, mais il y a un risque de fraude, et ça, en ce moment, c'est notoire.

M. Leitão : Très bien. Merci. Bon, deux commentaires : D'abord, je pense qu'un des attraits, peut-être même l'attrait principal de ce produit-là, c'est justement anonymiser, donc on peut investir dans une affaire, et personne ne va nécessairement savoir si vous détenez cet investissement-là. Et comme M...


 
 

11 h 30 (version non révisée)

M. Leitão : ...le ministre l'a mentionné hier, et avec raison. S'il y a des gains en capital, bon, il faut les déclarer parce que c'est taxable. Mais si ce n'est enregistré nulle part et que vous détenez de tels produits, ça devient difficile. Donc, ça peut et, à mon avis, ça encourage l'évasion fiscale et le blanchiment d'argent, etc. Ça sera peut-être plutôt pour vos collègues de Revenu Québec que directement pour vous, mais directement pour vous, pour l'Autorité des marchés financiers, on comprend très bien que, maintenant, c'est un phénomène mondial. Donc, quelle que soit la réponse des autorités réglementaires, il faut que ce soit coordonné, avec toutes les autres autorités. Alors, à cet égard-là, bon, au Canada, on a le Heads of Agencies qui travaille sur plusieurs enjeux. J'aimerais savoir si cette discussion-là a lieu parmi ce groupe de régulateurs canadiens. Et au niveau international, qu'est-ce qui se passe?

M. Morisset (Louis) :  M. le Président, oui. Bien, absolument. Il y a des échanges au niveau pancanadien avec nos homologues régulateurs de marchés à travers le Canada, mais aussi avec... au sein, comme vous le dites, des Heads of Agencies, avec les homologues fédéraux. En ce moment, ce qui nous interpelle de façon spécifique, c'est ce qu'on appelle les "stable coins", les cryptostables, si on veut, les jetons stables qui ont davantage le potentiel de se développer avec des véritables caractéristiques, là, propres à l'argent, à des monnaies. En tout cas, je ne pense pas qu'on peut dire aujourd'hui que le bitcoin ou d'autres cryptomarchandises ont ces caractéristiques-là, mais les cryptostables ont ce potentiel-là. Alors, en ce moment, il y a des travaux qui sont en cours pour établir avec les homologues provinciaux fédéraux la bonne façon d'encadrer à terme les "stable coins", les cryptostables. Ça, c'est un sujet qui est actif en ce moment, mais il y a des échanges évidemment au niveau international, au sein de l'Organisation internationale des commissions de valeurs, auxquels on participe. Vous avez raison que c'est un phénomène qui a tout intérêt à être encadré de façon à harmoniser le plus possible. Et par exemple, au niveau de l'organisation internationale des commissions de valeurs, il y a des travaux actifs sur la finance décentralisée auxquels on participe. Alors, oui, c'est un phénomène qui est mondial. Il y a des joueurs locaux, il y a des joueurs nationaux, il y a des joueurs internationaux, mais on est pleinement conscients, là, qu'il faut trouver des solutions nationales, dans un premier temps, et internationales, et on y contribue.

M. Leitão : Parce qu'un effet, M. le Président, un effet, là, toute cette tendance vers la... décentralisée, ça amène beaucoup de questionnements, beaucoup d'enjeux de nature réglementaire.  Parce qu'on sait très bien que les institutions financières ont un pouvoir de création d'argent, qui a une masse monétaire, pouvoir extraordinaire. Et donc ça demande une réglementation très stricte, ce qui est le cas, avec les joueurs traditionnels. Maintenant, il y a toute une série de nouveaux joueurs qui ne sont pas traditionnels du tout et qui ont tendance à échapper à cette réglementation. Dans certains quartiers, cela est perçu comme étant une bonne chose. L'État ne nous contrôle plus, nous sommes libres, maintenant, là, la liberté. Bon. Je ne veux pas commencer sur ça parce que sinon, on sera ici toute la journée. Mais c'est ce pouvoir-là de création de monnaie que le système financier détient, qu'il faut qu'il soit bien réglementé et c'est là où je trouve qu'il y a une faille, maintenant. Je pense que les... c'est peut-être un commentaire qui est plus pertinent pour la Banque du Canada que pour vous, mais vous en parlez souvent, j'en suis certain, avec nos amis de la Banque du Canada. Mais comment on fait pour réglementer cette finance décentralisée et son pouvoir de création d'argent qui, potentiellement, peut échapper à toutes sortes de réglementation et tous les risques financiers que cela peut engendrer?

M. Morisset (Louis) :  Oui. Bien, écoutez, c'est... Le phénomène des cryptoactifs, je le disais, est en expansion. Le Conseil de stabilité financière a annoncé, si on veut, il y a relativement peu de temps, que c'était un phénomène qui était susceptible de perturber évidemment à terme le système financier global. Donc, aujourd'hui, on voit, on sent qu'au niveau du Conseil de stabilité financière, des banques centrales, la nôtre, ici, au Canada, il y a une préoccupation qui est grandissante. Encore une fois, je... vous avez votre perspective sur ce phénomène-là. On la partage à bien des égards. À la banque du Canada...

M. Morisset (Louis) : ...les autorités, ici, fédérales, provinciales doivent travailler de concert pour trouver des solutions et, évidemment aussi, réfléchir avec les régulateurs internationaux, avec des homologues de d'autres pays sur ces solutions-là.

Le phénomène de la finance décentralisée, disons que c'est... on en entend parler davantage en ce moment. C'est complexe. On est en train, nous, ici, avec nos homologues des autres provinces, de l'analyser aussi. Mais la finance décentralisée, ça repose sur des protocoles informatiques, sur des contrats intelligents qui s'exécutent sans intervention humaine. Donc, il y a un monde d'acteurs décentralisés, informatiques, puis il y a un monde de véritables acteurs, comme vous et moi, qu'on peut rencontrer puis qu'on peut plus aisément mettre à l'ordre s'ils ne respectent pas la réglementation. Alors, c'est un phénomène en émergence qui prend beaucoup d'ampleur. Et, comme je le disais tout à l'heure, bien, on travaille avec nos homologues internationaux pour comprendre le phénomène, analyser, évidemment, ces nouvelles composantes, je vous dirais, quasiment chaque jour, et puis éventuellement trouver des solutions à l'échelle planétaire.

Le Président (M. Simard) : Je vous invite néanmoins, M. Morisset, à peut-être une plus grande synthèse. Le sujet est fascinant, mais nos traditions veulent qu'il y a quand même un équilibre entre le temps d'intervention de l'opposition et de l'intervenant. Monsieur...

M. Leitão : Ça va, M. le Président, merci. Mais, bon, je m'arrange bien avec M. Morisset, pas de problème. Parlant justement de stabilité financière, je veux parler un petit peu d'autre chose, mais, dans le cas de la stabilité financière, ça va peut-être vous surprendre, et peut-être vous aussi, M. le ministre, ça va vous surprendre là où je veux aller. Mais on commence à entendre aussi des avertissements des autorités réglementaires que le prochain problème potentiel en termes de stabilité financière, c'est le marché immobilier, puisque les taux d'intérêt augmentent, puisque les propriétaires de maisons au Canada, au Québec ont des niveaux d'endettement élevés, parce que les prix sont très élevés, donc, surtout ceux qui ont acheté plus récemment se retrouvent avec des hypothèques très élevées, et avec un risque de hausse de taux d'intérêt beaucoup plus rapide et beaucoup plus haut que ce qu'on pensait il y a à peine six mois. Donc, des risques financiers qui proviendraient d'une bulle immobilière qui éclate. «Been there, done that.» On a vu ça, qu'est-ce que ça peut provoquer. Je ne suis pas en train de dire que c'est ce qui va arriver ici, mais ce que ça peut provoquer si une bulle immobilière éclate.

• (11 h 40) •

L'AMF a, bien sûr, un rôle aussi, donc, de réglementation, de réglementer les institutions financières québécoises qui offrent des hypothèques. Est-ce que cela, pour vous, ce risque-là est un risque important? Encore une fois, comment vous voyez ça? Et puis je suis certain aussi que vous avez des discussions avec vos homologues canadiens. Alors, comment... Est-ce qu'il y a des mesures exceptionnelles qu'on devrait prendre? Ou est-ce qu'on a tout simplement en mode vigie, là, pour s'assurer que les risques de crash sont contenus? Voilà.

M. Morisset (Louis) : Merci pour votre question. Bien, c'est un risque sérieux qui nous interpelle et sur lequel on travaille activement avec les institutions qu'on encadre. On fait des tests de tension ou on s'assure que les tests de tension soient menés pour bien comprendre, là, l'impact et mitiger les risques si c'est la bulle immobilière éclatait. Donc, on regarde ça très sérieusement. Vous avez raison que l'accroissement du marché immobilier des dernières années a exacerbé ce risque-là, mais on suit ça de très près.

M. Leitão : Est-ce que vous pensez qu'au Québec ce risque-là est moins fort, plus fort qu'ailleurs au Canada? Écoutez, nous avons... bon, nous avons une institution dominante qui est le Mouvement Desjardins, mais il y en a d'autres aussi, il y a d'autres joueurs dans ce marché-là. Est-ce que vous pensez que les risques ici sont... Qu'est-ce que vous pensez?

M. Morisset (Louis) : Bien, notre perspective, c'est que les risques ici sont encore moins...

M. Morisset (Louis) : ...forts, moins présents qu'ailleurs au Canada. Le prix des maisons a augmenté de façon importante, très importante dans les dernières années, mais, je veux dire, n'était pas et n'est pas au niveau de ce qu'on peut observer à Toronto, à Vancouver ou dans certaines autres grandes villes canadiennes. Alors, à ce stade-ci, c'est un risque qu'on suit de très près et qui continue de nous préoccuper, mais on le considère moins présent, moins fort, si on veut, pour répondre à votre question, qu'ailleurs.

M. Leitão : Merci. Oui. L'autre partie de ma question était en ce qui concerne la stabilité, ou solidité, des institutions financières, donc des prêteurs hypothécaires. Oui, il y a les consommateurs, les débiteurs, les personnes qui ont des hypothèques qui peuvent être à risque ou pas, mais il y a aussi les institutions financières. Est-ce qu'elles sont... Est-ce qu'elles ont les reins assez solides pour pouvoir absorber un choc, si un tel choc devait arriver?

M. Morisset (Louis) : La réponse est oui.

Le Président (M. Simard) : En conclusion.

M. Morisset (Louis) : Oui, on...

M. Leitão : Déjà en conclusion?

Le Président (M. Simard) : Déjà. Mais vous pouvez emprunter sur votre bloc.

M. Leitão : D'accord.

M. Morisset (Louis) : Mais la réponse est oui. Quand je parlais de tests de tension, c'est justement ce qu'on évalue, notamment. Les ratios prêt-valeur sont moins élevés au Québec qu'ailleurs au Canada, qu'ailleurs... en Ontario, par exemple. Alors, oui, c'est quelque chose qu'on regarde de très près.

M. Leitão : Très bien. Merci. On continuera après. Merci.

Le Président (M. Simard) : Merci. Alors, je cède maintenant la parole à la députée de Mercier, qui dispose de 14 minutes.

Mme Ghazal : Oui, très bien. Merci beaucoup. Rebonjour, M. le ministre, bonjour. Je vais revenir à M. le ministre. J'ai 14 minutes, mais je vais en profiter, vu que j'ai M. Morisset devant moi. Bonjour, madame.

M. Girard (Groulx) : Retraite Québec est ici.

Mme Ghazal : Oui, c'est ça.

Le Président (M. Simard) : Pardon?

Mme Ghazal : Oui, c'est ça, on n'était pas au courant. Bon. C'est bon. Merci beaucoup.

Le Président (M. Simard) : On n'a pas compris, M. le ministre.

Mme Ghazal : Il voulait juste présenter aussi que madame...

M. Girard (Groulx) : Souligner qu'avec l'AMF, nous avons aussi Retraite Québec aujourd'hui.

Mme Ghazal : Oui.

Le Président (M. Simard) : Très bien. Alors, bienvenue à vous aussi, madame.

Mme Ghazal : Très bien. Donc, une minute plus tard... Je veux continuer sur l'accès à la propriété. Je pense que l'année passée - en fait, c'était plus le prêt hypothécaire puis la surchauffe immobilière - l'année passée, vous avez ajusté en fait l'encadrement des prêts hypothécaires résidentiels non assurés en établissant un nouveau taux admissible qui sera le taux le plus élevé entre le taux hypothécaire contractuel majoré de 2 % et un taux plancher établi à 5,25 %. Avec la situation actuelle qui a évolué, est-ce que c'est toujours le cas, ou vous allez réajuster ça? 

M. Morisset (Louis) : ...Non, c'est un taux qu'on considère encore acceptable. On continue d'évoluer et d'évaluer la situation. C'est un taux qui est arrimé aussi au taux, si on veut que, le BSIF, le régulateur fédéral qui encadre les banques, a mis également en place. Donc, les mesures sont arrimées. Mais il y a des échanges avec le BSIF, notamment. Puis, s'il y avait lieu de réajuster, on le fera, mais, à ce stade-ci, on considère que c'est encore acceptable.

Mme Ghazal : Mais il y aurait une possibilité que vous changiez ça. Parce que là vous dites que, là, à ce moment-là, c'est acceptable, mais, après ça, vous pouvez agir.

M. Morisset (Louis) : Oui. Si le prix de l'immobilier continuait d'augmenter, de décupler au fil des années, oui, il y aurait lieu de... Parce que c'est...

Mme Ghazal : Ça s'en va pour ça.

M. Morisset (Louis) : Pardon?

Mme Ghazal : Ça s'en va vers ça.

M. Girard (Groulx) : Non, mais l'objectif, c'est de limiter l'endettement, alors, et de protéger notamment les premiers acheteurs qui n'ont, par définition, pas d'équité dans leur maison parce que c'est leur premier achat. Mais on limite l'endettement en s'assurant que ceux qui font des achats ont la capacité de payer s'il y a des hausses de taux. Or, les hausses de taux se matérialisent devant nous, sous nos yeux, donc c'est très important d'avoir cette limitation de l'endettement.

Mme Ghazal : Puis est-ce qu'il y a d'autres outils dans la boîte à outils, si on veut, de l'AMF pour, justement, limiter ça, que d'avoir cet encadrement, là, des prêts hypothécaires avec les taux? Est-ce qu'il y a d'autres outils que vous pouvez faire pour limiter l'endettement?

M. Morisset (Louis) : Bien, c'est le principal outil. Puis comme M. le ministre l'a bien expliqué, c'est de créer des conditions pour que les emprunteurs, malgré les hausses de taux, puissent faire face à la situation. Alors, c'est pour ça que je le disais tout à l'heure, si les taux devaient augmenter de façon très rapide puis de façon très importante comme certains le pensent, bien, il y aura certainement lieu de réfléchir à ces mesures-là, mais c'est encore la mesure la plus appropriée, oui.

Mme Ghazal : On va suivre ça de près. J'avais demandé... j'avais envoyé une lettre, au mois de février dernier, à l'AMF pour faire une enquête, là, sur Celsius Network dans laquelle investit la Caisse de dépôt et placement du Québec. Puis là j'ai reçu la réponse, puis ce n'était pas très clair si on était en train de le faire ou pas, en train de le faire, oui ou non, en tout cas, c'était un petit peu laconique. Donc...

Mme Ghazal : ...est-ce que l'AMF est en train de faire une enquête sur cette société-là?

M. Morisset (Louis) : On fait des vérifications.

Mme Ghazal : ...qui est dans la cryptomonnaie, dont un des dirigeants avait été arrêté, mais maintenant il ne travaille plus là.

M. Morisset (Louis) : Exact, exact. Puis oui, on vous a répondu récemment. On fait des vérifications sur cette société en assumant qu'elle conduit les affaires au Québec. Et le type d'activités de cette société-là qui est nouvelle, là, dans le monde crypto, là, par rapport à ce qu'on pouvait observer il y a deux ans, par exemple, qui est de recevoir des dépôts en crypto, en bitcoins, par exemple, puis de payer des intérêts, notamment dans une crypto ou dans sa propre crypto. Est-ce que ce type d'activité là, bon, constitue un placement de valeurs mobilières? Est-ce qu'on est en train d'enfreindre la réglementation au Québec dans la mesure où il y aurait, au Québec, des gens qui sont clients de... ce dont on présume? Ce sont des vérifications qui sont menées également aux États-Unis. La SCC, comme vous l'indiquiez, est là-dessus. Donc, on travaille de concert avec la SCC. Mais l'angle qui est le nôtre, c'est : Est-ce qu'ils conduisent des activités au Québec? Et on le présume encore une fois. L'investissement de la Caisse de dépôt, c'est une autre question. Mais pas... encore une fois...

Mme Ghazal : Puis c'est quoi, le résultat de votre enquête?

M. Morisset (Louis) : Ah! bien, on continue de comprendre, d'abord, ce qu'ils font et éventuellement, tu sais, il se peut que ce qu'ils font en ce moment ne respecterait pas la réglementation en vigueur, donc, qu'ils émettent des valeurs mobilières, qu'ils distribuent des valeurs mobilières. Cela étant dit, cette activité-là, encore une fois, elle risque de se maintenir dans le temps. Puis la question va être, puis je reviens peut-être à la question précédente qui m'avait été posée : Quel genre d'encadrement approprié doit être mis en place pour ce type d'entreprise là?

Mme Ghazal : Puis est-ce que vous faites des recommandations au gouvernement pour avoir un encadrement législatif, par exemple?

M. Morisset (Louis) : Bien, on n'est pas rendus là, on n'est pas rendus là. Est-ce que c'est le type d'encadrement qui devrait être... en fait, qu'on a aujourd'hui pour les véritables institutions financières qui, à terme, devrait être un encadrement approprié pour une entreprise comme Celcius ou il y en a d'autres, là, dans ce domaine-là. Ça fait qu'on n'est pas rendus là. On regarde, donc on prend ce qu'ils font puis on cherche à trouver éventuellement l'angle d'encadrement approprié. Puis ça, on le fait aussi dans le contexte où on travaille avec nos homologues fédéraux là-dessus aussi.

Mme Ghazal : Puis, quand vous allez faire l'enquête en parlant avec vos homologues fédéraux, aux États-Unis, etc., est-ce que... quand est-ce que ça va aboutir? Puis qu'est-ce que vous allez faire? Est-ce qu'il va y avoir des recommandations? Est-ce qu'il va y avoir un rapport d'enquête qui va être rendu public pour que les gens sachent qu'est-ce que ces gens-là font, qu'ils les comprennent? Si vous, vous êtes en train de le comprendre, on peut imaginer que l'équipe de... ne le savent pas. Quand est-ce que ça va aboutir, ça?

M. Morisset (Louis) : En fait, je ne peux pas vous répondre de façon précise. Et, encore une fois, la réflexion, c'est : Quel type d'encadrement doit être mis en place, ici, ailleurs pour ce type d'entreprises là? Puis, éventuellement, bien, il y aura des actions qui vont être posées, encore une fois, ici ou ailleurs, et ailleurs. Soit les activités telles qu'elles sont conduites aujourd'hui vont devoir cesser, soit les activités vont éventuellement devoir évoluer, mais à ce stade-ci, c'est encore, là, très prématuré pour s'avancer.

• (11 h 50) •

Mme Ghazal : Bien, merci. Là, je me dirige vers le ministre. J'avais une question aussi par rapport à ça. Est-ce que vous trouvez... Est-ce que vous trouvez ça risqué que la Caisse investisse dans la cryptomonnaie dont on... même l'Autorité des marchés financiers essaie de comprendre, qu'est-ce que ces gens-là font?

M. Girard (Groulx) : Bien, je pense que... juste pour faire un peu... poursuive l'idée de l'AMF, c'est que l'encadrement d'une institution de dépôt est beaucoup plus serré que l'encadrement d'une plateforme de transaction sur le Web, là. Alors, c'est pour ça qu'on dit qu'on doit d'abord comprendre ce qu'ils font. Parce qu'effectivement, s'ils sont ici pour récolter des dépôts, là, c'est une autre histoire et il y aura tout un encadrement formel extrêmement rigoureux. Alors, votre question, précisément c'est : Est-ce que je suis inquiet que la Caisse de dépôt...

Mme Ghazal : Oui, c'est que la Caisse investit l'argent des Québécois dans cette... je ne sais pas comment appeler ça, secteur, industrie encore inconnue, qui... Est-ce que vous trouvez ça risqué ou pas que la Caisse investisse là-dedans, alors qu'on ne sait pas encore... C'est un peu une boîte noire.

M. Girard (Groulx) : Bien, c'est... Dans les 420 milliards d'actifs de la caisse, là, il y a toute une allocation d'actifs. Alors, il va y avoir un... puis je l'ai, je pourrais donner les chiffres exacts, mais je ne veux pas prendre trop de temps. Mais il y a des liquides, des actions, des obligations, il y a des placements privés, il y a de l'infrastructure, il y a l'immobilier. Puis là il y a un panier d'actifs très risqués. Et puis là, ce qui est important, c'est que le risque...

M. Girard (Groulx) : ...total soit contrôlé. Et c'est certain que cet actif-là, il est est certainement... dans la distribution de probabilité de la nature rendement risque, là, il est certainement à l'extrême droite de la distribution, c'est-à-dire très haut risque... très haut rendement potentiel et risque très élevé.

Mme Ghazal : Oui. Donc, ce que je comprends, ce que vous dites, c'est : C'est risqué. C'est dans le petit pot risqué, ce n'est pas, peut-être, des gros montants, là, on ne le sait pas, ils disent 750 millions, mais ça inclut des partenariats, là. Je parle juste de cette compagnie-là, là, je ne connais pas les autres. Donc, vous dites : C'est très risqué, on ne le sait pas, ce que ça va donner, mais c'est correct que la caisse tente sa chance puisque...

M. Girard (Groulx) : Bien, c'est-à-dire que, moi, en tant que ministre, là, bon, je suis là, il y a le conseil d'administration, il y a la caisse, la caisse est un fiduciaire, il y a des déposants avec des politiques de placement. Par exemple, si un déposant voulait mettre dans sa politique de placements que, sous aucune considération, il veut avoir des cryptos ou des cryptoactifs ou des des entreprises dans des cryptoactifs, il peut le demander dans sa politique de placements.

Mme Ghazal : Mais le ministre ne peut pas dire : Hum! je suis mal à l'aise.

M. Girard (Groulx) : Mais le ministre n'est pas un gestionnaire de portefeuille. J'essaie de... Ce n'est vraiment pas le rôle du ministre de comparer, par exemple, Loblaws à Métro, puis de dire : Pourquoi vous avez tant d'actions de Loblaws puis tant d'actions de Métro? Ce n'est pas mon rôle.

Mme Ghazal : Je comprends. Mais il peut y avoir comme :  Hum! il me semble qu'on devrait attendre avant de mettre les billes des Québécois, peu importe combien , là-dedans, alors qu'il y a beaucoup de choses nébuleuses puis beaucoup de fuites d'enquêtes qui sont faites. Peut-être que ça pourrait être juste une indication que le ministre peut donner.

M. Girard (Groulx) : Mais j'ai plein d'indications que je pourrais leur donner. J'en fais un devoir de ne pas leur donner, parce que ce n'est pas mon rôle. Ils ont des politiques de placement, ils ont des rendements anticipés, ils doivent... et c'est à eux de prendre leurs décisions, et c'est toujours la relation rendement-risque anticipé.

Le Président (M. Simard) : Merci. Mme la députée.

Mme Ghazal : Très bien. Il me reste peu de temps.

Le Président (M. Simard) : Il vous reste 3 min 30 s

Mme Ghazal : Oui, merci. Moi ça m'inquiète. Je me dis, c'est quand même le bas de laine des Québécois. Il faut faire attention. Oui, ils peuvent aller dans des choses plus risquées, etc. Peut-être qu'ils devraient se tenir loin de la cryptomonnaie. Ce n'est peut-être pas mon rôle de le dire, mais je le fais quand même. Puis je trouve que c'est important, puis j'aurais aimé entendre le ministre donner ces indications-là, mais ce n'est pas son rôle.

M. Girard (Groulx) : Mais je n'ai pas fait... au cours de nos échanges, hier, et aujourd'hui, vous ne m'entendrez pas faire aucun document des cryptoactifs. Je l'ai dit, ce n'est pas une monnaie d'échange, ce n'est pas un véhicule d'investissement. Et, dans ce cas-là, la Caisse de dépôt a choisi d'investir dans une entreprise parce qu'elle la considère innovante. C'est à eux de défendre ce choix et pas à moi.

Mme Ghazal : Accès à la propriété, surchauffe immobilière, le ministre a déjà dit : Bien là, on est en processus de rattrapage de la folie immobilière qui se passe en Ontario et ailleurs. Il le répète souvent. Il ne dit pas, évidemment, «la folie», mais cette surchauffe-là, c'est comme si c'était normal. On rattrape, on a quand même du retard dans cette surchauffe immobilière qui fait mal aux familles, puis aux premiers acheteurs. Et, tout à l'heure, je l'entendais répondre à une question en Chambre, et il a dit que le marché est en train de s'ajuster automatiquement, puis ça va rentrer comme dans l'ordre, ça va se faire tout seul, sans intervention pour protéger les premiers acheteurs. Est-ce que le ministre croit à la main invisible du marché?

M. Girard (Groulx) : Ah! ça, c'est une excellente question pour une étude de crédits, là, hein? Ça, c'est sûr, là, qu'on va essayer de faire une manchette avec ça. Le ministre a étudié en économie, et le concept de la main invisible est bien enseigné dans les facultés d'économie, dépendamment du professeur que vous avez ou le cours

Mme Ghazal : J'ai étudié aux HEC. J'ai étudié aux HEC.

M. Girard (Groulx) : Ça dépend, là. On vous enseigne l'ensemble de l'histoire de la pensée économique. Ça va du néosocialisme au libre marché. Alors, votre question, c'est?

Mme Ghazal : Est ce que le ministre croit... Le néosocialisme, oui, je note. Est-ce que le ministre croit que le marché immobilier, en ne faisant rien, va s'ajuster puis va permettre aux premiers acheteurs d'acheter tout simplement? Puis, de toute façon, c'est tout à fait normal, on est en train de rattraper la surchauffe d'ailleurs. Est-ce qu'il croit, que ça va se faire tout seul sans aucune intervention de l'État?

M. Girard (Groulx) : O.K. Bien, d'abord, j'aimerais être clair, là. Quand vous dites qu'on ne fait rien, là, je suis un complet désaccord avec ça. D'abord, on a resserré les règles d'octroi hypothécaire des institutions financières pour limiter l'endettement. Ensuite, on a fait une consultation publique sur les pratiques des courtiers immobiliers...

M. Girard (Groulx) : ...s'assurer qu'ils travaillent dans l'intérêt des acheteurs. Parce que...

Mme Ghazal : Oui.

M. Girard (Groulx) : Vous êtes d'accord.

Mme Ghazal : Oui, oui. Je la connais, celle-là, c'est une vieille, vieille demande qui ne va pas... rien changer. Est-ce qu'il y a d'autres mesures?

M. Girard (Groulx) : Bien, puis ce que j'ai dit... quand vous dites : Le ministre pense que ça va s'ajuster tout seul, ce que j'ai dit, c'est une information, c'est que les mises en chantier en 2021, au Québec, sont en hausse de 50 % par rapport à la moyenne 10 ans. Donc, les constructeurs de maisons résidentielles constatent que la demande est forte et donc construisent plus.

Le Président (M. Simard) : En conclusion.

M. Girard (Groulx) : Et le gouvernement construit plus de logements sociaux et veut construire des logements abordables. Donc, puisque la demande est extrêmement forte, on travaille sur l'offre.

Mme Ghazal : ...

Le Président (M. Simard) : Malheureusement, ce sera partie remise.

M. Girard (Groulx) : Mais c'est un excellent sujet, ça me fera plaisir...

Le Président (M. Simard) : Merci beaucoup pour votre collaboration. Je cède maintenant la parole au député de Robert-Baldwin, qui dispose de 18 minutes 40. Et je suis très, très attentif du temps et de nos règles, parce que j'ai, à côté de moi...

M. Leitão : Je vous surveille aussi.

Le Président (M. Simard) : Bien oui, puis j'ai à côté de moi la présidente de la Commission de l'économie qui me souffle dans le cou, alors il faut que je sois vraiment, là, rigoureux. Bien, à vous la parole.

M. Leitão :  Bien, 19 secondes. Monsieur Morisset, on va continuer dans le domaine des risques financiers et le rôle des régulateurs. Donc, on avait parlé, bon, de la stabilité des prêteurs, des entreprises financières qui accordent des prêts. Ça semble être sous contrôle. Très bien. Mais ce que le BSIF a aussi souligné, c'est qu'ils s'inquiètent un peu. En fin de compte, ce sont les mêmes enjeux qu'on avait remarqués, surtout aux États-Unis, 2006, 2007, des enjeux de vérification de revenu. Donc, les prêteurs hypothécaires, encore là, je ne parle pas des grandes banques ou de Desjardins, mais les... parce qu'il y en a, d'autres prêteurs hypothécaires, où, peut-être... pas peut-être, mais où, des fois, toutes ces bonnes pratiques de bien vérifier toute l'information, notamment la vérification du revenu, semblent être plus ou moins rapides et pas très rigoureuses. Est-ce que c'est quelque chose que vous remarquez au Québec aussi? Et, si oui, comment est-ce qu'on fait pour s'assurer que les bonnes pratiques soient respectées?

M. Morisset (Louis) :  Ce n'est pas un aspect qu'on a remarqué de façon particulière. C'est un aspect qui, dans le contexte, encore une fois, dans lequel on évolue, peut être peut-être plus susceptible, avec le prix de l'immobilier qui croît, plus susceptible d'arriver. Mais on s'assure, si on veut, avec les institutions qu'on encadre, que ces enjeux-là sont regardés de près. Mais est-ce qu'on a constaté quelque chose de particulier dans la dernière année? Non, la réponse est non.

• (12 heures) •

Le Président (M. Simard) : Très bien. Parce que, maintenant, c'est l'AMF aussi qui supervise, réglemente les courtiers hypothécaires. Je ne suis pas en train de dire que les courtiers hypothécaires ne font pas un bon travail. Je ne suis pas en train de dire ça du tout. Il ne faut pas qu'ils commencent à envoyer des messages, parce que ce n'est pas ça du tout. Mais, des fois, dans le feu de l'action, on va aller vite dans le processus d'approbation. Et, des fois, ces vérifications-là se font un peu en retard, et c'est ça qui peut amener à des risques systémiques importants. Alors, vous, est-ce que... Donc, vous avez dit que vous n'avez pas remarqué ça, ce n'est pas préoccupant. Et, même avec les courtiers hypothécaires, ça aussi, ce n'est pas une question qui se pose?

M. Morisset (Louis) : Sur les institutions financières, je l'ai mentionné, nos lignes directrices sont claires puis nos institutions surveillent ça de près. À l'égard des courtiers hypothécaires, exemple, ils ont des obligations claires dans la loi, doivent s'assurer évidemment de comprendre la situation financière de leurs clients, tout ça, donc on va assumer, pour les fins de notre discussion, que ces obligations-là sont respectées. Mais il est clair que, si on avait des indices que le travail des courtiers hypothécaires est problématique à cet égard-là, on interviendrait. Mais on n'a pas d'indice à cet effet en ce moment.

M. Leitão : Très bien...


 
 

12 h (version non révisée)

M. Leitão : ...à toutes sortes de nouveaux produits, là, qui sont apparus dans le marché, des choses que moi, je ne connaissais pas, et je commence à m'intéresser à ça, des hypothèques avec équité partagée, «shared equity mortgages», des «combined loan plans»... ou il me semble qu'encore une fois, donc, la réglementation de ce nouveau type de produits est peut-être un peu plus complexe. Est-ce que cela tombe dans votre cour? Est-ce que c'est l'AMF qui doit s'assurer que ces nouveaux produits soient bien encadrés ou est-ce que ça dépend du BSIF?

M. Morisset (Louis) : Encore une fois, on a des responsabilités similaires à l'égard d'institutions différentes. C'est des questions, des enjeux qu'on regarde, et qu'on étudie, et pour lesquels on discute avec le BSIF. Si des mesures devaient être mises en place pour contrôler et mieux contrôler ces phénomènes qui, comme je vous dis, sont émergents, bien, on le ferait de façon, idéalement, là, conjointe avec le BSIF.

M. Leitão : Parce que surtout, il me semble, que les hypothèques avec équité partagée, ça devient... je pense que ça va devenir un outil quand même assez intéressant, surtout dans un contexte de prix extrêmement élevé et où, peut-être, plusieurs générations, deux générations peuvent partager une même propriété. Donc, cet aspect-là, il faut que les règles soient claires pour éviter des problèmes plus tard.

Un autre sujet, monsieur Morisset, parce que ça fait partie aussi des enjeux des autorités réglementaires, ce sont les changements climatiques. Et là j'aimerais l'aborder de deux côtés, deux choses. D'abord, en ce qui concerne l'adaptation aux changements climatiques et en ce qui concerne surtout l'industrie de l'assurance. Parce qu'avec les changements climatiques, bon, les événements extrêmes se multiplient, et donc potentiellement, pour les compagnies d'assurance, les pertes ou les coûts, les coûts peuvent être significatifs inondations, incendies, etc. Alors, dans ce domaine-là de l'adaptation aux changements climatiques et les impacts financiers de ce qui existe déjà, est-ce que l'AMF... D'abord, c'est quelque chose qui vous préoccupe et puis qu'est-ce que vous faites pour suivre cette nouvelle tendance?

M. Morisset (Louis) : bien, ça nous occupe, ça nous préoccupe sous différents fronts. Peut-être, ça, je prends de l'avance, celui sur qui touche les institutions financières québécoises. Comment ces institutions-là intègrent, dans leur processus de gestion de risques, les risques climatiques? Comment ils tentent de les mitiger? On est là-dessus en ce moment. D'ailleurs, l'automne dernier, on a, par voie de sondage, sondé chacune des institutions financières faisant affaire au Québec, y compris les assureurs, pour comprendre leur processus de gestion de ces risques, et on est en train d'analyser les données qu'on a récoltées pour se faire une tête, si je peux m'exprimer ainsi, sur comment ces risques-là sont intégrés en ce moment et est-ce que des encadrements plus spécifiques devraient être développés par l'autorité là-dessus? Alors, on le regarde de très près.

Sur le plan, par exemple, des émetteurs assujettis, des compagnies publiques, compagnies cotées en bourse, on a publié, l'automne dernier, en octobre, un projet de règlement visant à exiger de la divulgation spécifique sur les risques et opportunités climatiques. Ça, on a publié ce règlement-là en octobre. Depuis, bien, vous savez, je pense tous, on a... l'International Sustainability Standards Board a été créé en novembre. L'ISSB a publié un exposé sondage avec leurs attentes en termes de divulgation climatique. Ça fait qu'on est en train d'analyser tout ça pour, éventuellement, être en mesure d'imposer aux émetteurs canadiens des obligations spécifiques sur les risques climatiques. Alors, on regarde ça, ça nous occupe passablement, je vous dirais.

M. Leitão : Oui, en tout cas, merci. Parce que, oui, je pense que ça m'intéresse beaucoup aussi et je pense que c'est un enjeu qu'on doit non seulement suivre de près, mais arriver avec des propositions concrètes. Et c'était ça, la deuxième partie de ma question sur les changements climatiques, c'est que tout le monde, et tout le monde, et son beau-frère se réclament, maintenant, d'être verts, et d'adhérer à des critères environnementaux, et à sujet, et tout ça. Mais, à la fin de la journée, il faut que quelqu'un vérifie ça...

M. Leitão : ...c'est très beau de faire un «mission statement», écrire ça, mais, dans les faits, donc ce sont les autorités réglementaires, l'AMF au Québec... Il me semble qu'ils doivent s'assurer, certifier qu'en effet la banque X, Y, Z qui a... ou la coopérative X, Y, Z. qui a dit... qu'elle a comme mission de toutes ces choses-là, bon, qu'ils ont, en même temps, mis en œuvre aussi les procédures pour les concrétiser. Donc, ça, vous me dites que vous travaillez sur ça aussi, sur une série de protocoles pour pouvoir vérifier et certifier ces déclarations-là.

M. Morisset (Louis) : Oui. Bien, je dirais qu'on n'est pas rendus à pouvoir penser même certifier ça, mais c'est une préoccupation qu'on partage l'écoblanchiment aujourd'hui. Comme vous dites, tout le monde qui s'estime respecter les principes ESG, le font-ils dans les faits.

Je vous donne un exemple pour vous signifier notre intérêt puis les travaux qu'on a faits : En janvier, on a publié un avis, au niveau pancanadien, avec nos collègues des autres provinces qui s'adressaient spécifiquement aux fonds d'investissement qui se prétendent être des fonds ESG avec des lignes directrices, des lignes de conduite, des bonnes pratiques pour permettre aux investisseurs d'être plus confortables que, quand on prétend être un fonds ESG, on en est un véritablement. Donc, on a regardé ce front-là, on va, c'est sûr, faire des vérifications, notamment avec les collègues des autres provinces, au cours de la prochaine année sur l'intégration de ces lignes de conduite. Mais c'est un sujet, là, qui nous préoccupe et qui préoccupe bien sûr les régulateurs à l'échelle internationale.

M. Leitão : Donc, comme vous établissez ces lignes directrices, par la suite, vous allez vous... Après ça, il faut aussi s'assurer, faire le suivi qu'en effet ce que vous aviez émis comme ligne directrice soit suivi par l'entreprise.

M. Morisset (Louis) : Exact. Dans les processus de vérification ou d'inspection, oui, c'est certain qu'on va faire des «spot check», si je peux m'exprimer ainsi, on va faire des vérifications ponctuelles, ciblées, spécifiques, on va le faire, absolument.

M. Leitão : Et l'arrivée du ISSB, à Montréal, l'International Standards Board, je présume que vous allez travailler en très étroite collaboration avec eux, puisqu'ils vont être ici, donc...

M. Morisset (Louis) : On espère. On espère que le fait qu'ils vont avoir un de leurs deux bureaux d'importance à Montréal va nous permettre de développer des liens étroits avec cet organisme-là, ça serait dans notre intérêt collectif. Évidemment, ça demeure une organisation internationale qui se doit de répondre à des besoins planétaires, mais, oui, j'ose croire qu'on va pouvoir développer avec eux un lien privilégié. À ce stade-ci, ils sont en train de s'organiser, de s'installer, c'est, disons, embryonnaire, mais c'est notre espoir, oui.

• (12 h 10) •

M. Leitão : Très bien. Merci. J'aimerais revenir un petit peu sur les cryptomonnaies, un enjeu que j'avais soulevé d'ailleurs, hier, avec le ministre des Finances et Revenu Québec et qui concerne les fameux guichets. Avec l'AMF, M. Morisset, vous vous rappellerez qu'on a une certaine histoire avec les fameux guichets, mais bon, c'est une autre histoire. Mais là, maintenant, c'est des guichets de bitcoins qui existent et qui maintenant sont sous la responsabilité de Revenu Québec. Mais la question que j'ai pour l'AMF, c'est : Qui vérifie, pas nécessairement les guichets, là, mettre les vignettes, ce n'est pas ça - bon, ça, c'est Revenu Québec- mais la propriété de ces guichets-là. Les compagnies qui installent ces affaires-là, qui leur donne le permis pour pouvoir déployer ces guichets? Est-ce que c'est l'AMF, ou est-ce que c'est Revenu Québec, ou personne?

M. Morisset (Louis) : Ça doit être Revenu Québec. Nous, à l'Autorité, on s'intéresse puis on est très actifs au niveau des plateformes d'échange de cryptomonnaies, des plateformes virtuelles. On en voit plusieurs, là, qui s'affichent de plus en plus à la télévision offrant leurs services et autres. Donc, on travaille à inscrire des plateformes d'échange de cryptomonnaies, mais en ce qui a trait aux guichets automatiques...

M. Morisset (Louis) : ...ça, c'est vraiment de... c'est du ressort de Revenu Québec à tout égard.

M. Leitão : Très bien. Même pour les échéances, délivrer des permis, une compagnie, compagnie XYZ, qui veut installer des machines, donc ces compagnies-là doivent obtenir leur autorisation de Revenu Québec, pas de l'Autorité des marchés financiers. Donc, ça, c'est un peu particulier. Moi, je penserais que ça serait plutôt dans la cour de l'AMF parce que, par exemple, au Royaume-Uni, il y a quelque chose qui, il me semble, est un peu semblable à l'AMF, qui est le Financial Conduct Authority. Et, là-bas, eux ont décidé de suspendre la délivrance de permis pour de telles machines jusqu'à ce qu'ils puissent avoir une meilleure idée d'exactement qui est propriétaire de quoi. Alors, vous me dites qu'ici c'est quelque chose qui n'est pas vraiment dans votre cour.

M. Morisset (Louis) : Non, parce qu'encore une fois c'est associé à l'autorisation qui doit être donnée à l'entreprise qui veut exploiter un tel guichet. Donc, dans le processus, j'imagine, on va remonter la chaîne puis on va faire les vérifications appropriées. Nous, peut-être juste vous resituer, on encadre le marché des valeurs mobilières, les instruments dérivés. Lorsqu'un produit financier est une valeur mobilière, puis plus spécifiquement un contrat d'investissement, bien, on a juridiction. Et donc les plateformes qui permettent les transactions de cryptoactifs sont plus souvent qu'autrement, pas dans tous les cas mais plus souvent qu'autrement, des plateformes qui transigent des valeurs mobilières. Puis ça, ces entités-là doivent être inscrites, doivent s'inscrire et être encadrées par les régulateurs au Canada.

M. Leitão : Très merci. Donc, merci. Mais, bon, moi, je pense que, et peut-être là je m'adresserais plutôt au ministre des Finances, parce qu'il me semble que ces guichets-là, ces machines-là, souvent, sont une porte d'entrée dans cette industrie-là, et donc les personnes, surtout les jeunes, surtout la clientèle que M. Morisset essaie de cibler avec ces campagnes de sensibilisation, entrent dans ce milieu-là par les guichets de bitcoins, parce que là on peut acheter des fractions de bitcoins, investir, entre guillemets, 100 $ de 100 $, etc., et donc c'est perçu comme un investissement. Vous avez déjà dit, M. le ministre, on est d'accord, que ce n'est pas un véhicule d'investissement, le bitcoin. Mais plus précisément, pour l'autorisation du déploiement de ces machines-là, bon, c'est Revenu Québec qui est responsable de superviser ça. Vous ne pensez pas que ça devrait être, peut-être, suivi d'un peu plus près? De nous assurer qu'il n'y a pas une prolifération de machines à chaque coin de rue, là?

M. Girard (Groulx) : En fait, ce qui s'est passé, c'est que c'est une industrie innovante, en émergence, qui était nettement en avance sur la réglementation. Alors, on a vu des guichets de cryptomonnaies apparaître au Québec avant qu'on soit bien organisés pour les réglementer puis les encadrer. Et puis là c'est pour ça que l'AMF, puis Revenu Québec, puis le ministère des Finances, puis, dans certains cas, le ministère de la Sécurité publique, bien, on travaille ensemble pour les encadrer. Parce que les guichets sont apparus avant qu'il y ait un département d'octroi des vignettes de guichets cryptomonnaies, là. Cette industrie-là est en émergence, puis ça se passe rapidement. Alors là, on coordonne nos actions. Revenu Québec fait des inspections.

Et là où je suis complètement d'accord avec vous qu'on doit mieux encadrer cette industrie, qu'on doit surveiller la provenance des fonds, totalement d'accord avec vous, c'est une de nos inquiétudes, qu'il y a du blanchiment d'argent qui se fait dans ces guichets-là. Mais là où je ne suis pas d'accord, ce serait d'interdire parce que, si on interdit, par exemple, l'activité x, c'est certain que les gens vont continuer d'aller sur d'autres plateformes à l'extérieur. On ne peut pas contrôler tout ce qui se fait sur le Web en cryptomonnaie, et donc il faut prendre une approche d'encadrement et de réglementation et non d'interdiction.

Le Président (M. Simard) : Merci. Merci, M. le ministre. Je cède maintenant la parole...

Le Président (M. Simard) : ...Ça vous va? Bien, vous auriez un troisième bloc si vous voulez poursuivre légèrement.

M. Leitão : On va poursuivre.

Le Président (M. Simard) : Ça vous va?

M. Leitão : Oui, oui.

Le Président (M. Simard) : M. le député de René-Lévesque, vous disposez de quatorze minutes.

M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le Président, je vais les utiliser judicieusement. Donc, merci aux gens de l'AMF, merci aux gens de Retraite Québec, mais je veux m'adresser au ministre pour ces 14 minutes, ce n'est pas sans discrédit sur votre travail, là, mais j'ai d'autres enjeux que j'aimerais discuter avec le ministre.

Surprise au Salon bleu ce matin, votre chef, notre premier ministre, le premier ministre a dit qu'il était peut-être ouvert à revoir la rémunération variable des sociétés d'État. Donc, je pianotais depuis tout à l'heure et comme on en a discuté hier en commission, puis les gens le savent maintenant, c'est du domaine public, la SQDC, elle, n'a pas de rémunération variable, c'est inscrit, je ne sais pas si c'est dans une loi ou dans un règlement, mais c'est inscrit comme étant proscrit.

M. Girard (Groulx) : Dans sa loi constitutive.

M. Ouellet : Dans sa loi constitutive. Donc, pendant que les collègues échangeaient avec vous, j'ai écrit quelques amendements pour Loto-Québec et de la SAQ et j'aimerais vous les soumettre parce que ce n'est pas compliqué. En tout cas, quand j'ai entendu le premier ministre ce matin nous dire : Il faut respecter les contrats, je comprends, il y a des conventions collectives puis il y a des ententes qui ont été faites avec les salariés, mais je vous soumets ça bien humblement. Est-ce qu'il serait possible que : dans l'exercice d'un travail au sein de la Société des alcools du Québec ou de Loto-Québec, que toute nouvelle embauche ou tout renouvellement ne contienne pas de rémunération variable, autant pour la haute direction que pour les employés-cadres, point, deuxième alinéa, que les conventions collectives qui arriveront à échéance ne pourront pas être renouvelées avec des conditions incluant des rémunérations variables? Est-ce que c'est le genre d'amendement qui serait possible selon vous?

M. Girard (Groulx) : Bon, là, moi, je dois vous dire, ça fait quatre ans que je suis ministre des Finances...

M. Ouellet : Tu as été surpris à matin?

M. Girard (Groulx) : ...puis je suis surpris qu'à l'étude des crédits on parle toujours des mêmes sujets, O.K. Parce que si on prend la SAQ, 1.3 milliard de ventes, il y a une pandémie, les restaurants ferment, ils sont en détresse, la fréquentation des succursales augmente or il faut accroître... C'est complexe, gérer la Société des alcools, on a une femme exceptionnelle, Mme Dagenais...

M. Ouellet : Je ne remets pas ça en question.

M. Girard (Groulx) : ...On la rémunère approximativement un demi-million de dollars pour gérer une business de plus de 6000 employés, 1.3 milliard de revenus. Alors, moi, je ne comprends pas qu'à chaque année on vient ici puis on fait une grosse histoire avec la rémunération de Catherine Dagenais.

M. Ouellet : Non, non, attendez un petit peu, là, là, vous me mettez des mots dans la bouche que je n'ai pas dits. Je vous ai dit ma surprise ce matin et probablement la vôtre aussi d'entendre le premier ministre dire qu'on devrait commencer à regarder pour qu'il y ait plus de rémunération variable dans les sociétés d'État, puis je pense qu'il a exclu la Caisse de dépôt. Ça fait que ma question n'est pas sur la Caisse de dépôt, elle est sur les sociétés d'État comme la SAQ et Loto-Québec. Alors, j'entends le premier ministre dire ça ce matin, j'ai préparé un amendement. On n'est pas en étude détaillée, mais je vous dis juste, M. le ministre, que si on veut le faire, on peut le faire. Donc ma question : êtes-vous d'accord avec votre premier ministre?

M. Girard (Groulx) : Ma question... D'abord, j'étais à la même période de questions que vous.

M. Ouellet : Oui.

M. Girard (Groulx) : J'étais assis un petit peu plus proche que vous, je n'irais pas jusqu'à prétendre que j'ai mieux entendu que vous parce que j'étais plus proche, mais je n'ai pas entendu les mêmes choses que vous, O.K. Bon, ce que... Dans le fond, ce que vous me dites, c'est que vous voudriez prendre la rémunération variable de madame Dagenais puis la transformer en salaire pour qu'elle ait une rémunération équivalente?

M. Ouellet : Non, ce n'est pas ça que.

M. Girard (Groulx) : Ou vous voulez l'éliminer puis qu'elle gagne moins?

M. Ouellet : Non, ce n'est pas ça que je dis.

M. Girard (Groulx) : Bien, je vous pose la question, je veux de la clarification avant de me prononcer sur votre amendement.

M. Ouellet : Bien oui, bon coup. Ce que je veux, c'est que je veux répondre à l'affirmation du premier ministre en ayant une solution pragmatique. Le premier ministre nous a dit : il faut faire attention, dans une société de droit, il y a des droits qu'on doit respecter, et ça, c'est vrai, il y a des conventions collectives qui incluent, pour le personnel syndiqué, des rémunérations variables pour les sociétés d'État.

• (12 h 20) •

M. Girard (Groulx) : Le gouvernement du Québec respecte ses contrats.

M. Ouellet : Absolument. Deuxième chose, il y a des contrats individuels pour le personnel-cadre et les hauts dirigeants, ça, ce sont des contrats qui sont signés entre le conseil d'administration et les individus et il faut honorer ces contrats-là, je suis d'accord. Ce qu'il nous a dit ce matin, c'est qu'on pourrait commencer à regarder si, effectivement, la rémunération fixe est encore applicable ou devrait s'appliquer dans le cas des sociétés d'État. Et donc, ce que je postule ce matin : quelle est, vous, votre vision de cette rémunération fixe qu'on devrait peut-être enlever et peut-être la transformer par une autre forme de rémunération? Je veux juste... vous, là, ce matin, quand vous avez entendu ça, du...

M. Girard (Groulx) : À rémunération équivalente.

M. Ouellet : Donc, vous, rémunération équivalente, O.K., au moins c'est clair.

M. Girard (Groulx) : O.K., non, mais je veux... Non, je vous pose...

M. Ouellet : Ce n'est pas clair?

M. Girard (Groulx) : C'est une question que vous pose...

M. Girard (Groulx) : ...est-ce que vous, vous dites que c'est à rémunération équivalente?

M. Ouellet : Avez-vous répondu à ma question? Est-ce que vous êtes d'accord à l'abolition de la rémunération variable?

M. Girard (Groulx) : Bien, écoutez, on va prendre le cas de Loto-Québec. Eux, là, ils n'ont pas eu une bonne année, O.K.? On attendait 1.4 milliard de dollars, en 2020, ils ont fait à peu près 300 millions. Comprenez-vous? Il n'y en a pas eu, de rémunération variable. Les résultats n'étaient pas bons. Ce n'est pas étonnant, les casinos étaient fermés, O.K., donc pas de rémunération variable.

Donc, avec votre proposition de prendre sa rémunération variable et de lui verser une rémunération équivalente en salaire, on n'aurait pas pu corriger pour la performance. C'est ça. La rémunération variable est fonction de la performance de l'institution et aussi de rencontrer les objectifs. Par exemple, dans le cas de Loto-Québec, il y a toute une responsabilité sociale. Ce n'est pas... La rémunération du principal dirigeant n'est pas seulement en fonction des revenus, également en fonction du respect de sa responsabilité sociale.

Bref, si votre proposition, c'est de prendre la rémunération variable, de l'inclure dans le salaire, puis que la somme de l'absence de rémunération variable plus le salaire donne exactement le même montant qu'il aurait eu de toute façon, je pense qu'on y perd au change parce qu'on n'aura pas l'évaluation de sa performance dans sa rémunération.

M. Ouellet : Et donc, selon vous, si on enlève la rémunération variable, on va perdre des hauts dirigeants et du personnel-cadre dans les sociétés d'État.

M. Girard (Groulx) : Ça dépend si... et c'est pour ça que je vous demande : Est-ce que c'est à rémunération équivalente?

M. Ouellet : Non.

M. Girard (Groulx) : Non. Vous, vous coupez la rémunération variable?

M. Ouellet : Oui. C'est ma proposition.

M. Girard (Groulx) : O.K.. Votre proposition, c'est donc de couper la rémunération de nos dirigeants de sociétés d'État.

M. Ouellet : Ma proposition, c'est d'enlever la partie variable des rémunérations. Et comme tout contrat sera à renégocier, il s'agira de voir dans quelles conditions le dirigeant ou le cadre veut opérer en fonction du nouveau cadre législatif qui va exister. Tout est une question de négociation.

M. Girard (Groulx) : O.K.. Donc, dans les faits, ce que vous proposez, c'est couper la rémunération de nos dirigeants de sociétés d'État à vocation commerciale. Et puis non, je ne suis pas en faveur de ça, et puis je ne suis pas convaincu que les autres employés de l'État seraient en faveur de ça non plus, qu'on coupe leur rémunération.

M. Ouellet : Ça fait partie d'un débat de société que je pense qu'on doit avoir. Parce que, oui, M. le ministre, sans discrédit à votre commentaire, les mêmes sujets reviennent parce que les mêmes problèmes existent. Et ce n'est pas juste dû à votre gouvernement. C'est dû aux autres gouvernements qui sont passés avant vous et les prochains qui seront subséquents à votre gouvernement aussi. Donc, prenez-le pas personnel, mais, si les mêmes sujets reviennent, c'est que, dans certains cas, il y a des problématiques qui ne sont pas réglées, et, à force de les ramener, et d'en discuter, et d'en débattre, la société évolue, et les projets de loi...

Combien il me reste de temps, M. le Président?

Le Président (M. Simard) : 6 minutes 20 secondes.

M. Ouellet : Parfait. On va aller ailleurs. Un tout nouveau sujet, quelque chose de nouveau, tout récent, d'accord? Je vous fais une fleur, là. Je veux vous parler de deux exemples qui nous ont été soumis par les groupes OSBL en habitation, le Réseau québécois des OSBL habitation. La Villa Belle-Rivière de Richelieu, un immeuble de 60 logements, la convention avec la SCHL est échue en 2014, et on a appris que trois administrateurs ont vendu l'immeuble le 8 avril pour la somme de 2 millions, soit 32 000 unités. Et on ne sait surtout pas qu'est-ce qui va advenir avec l'organisme et ces actifs et surtout les locataires qui étaient là, qu'est-ce qui va arriver avec eux. La même chose est arrivée avec la Cité des retraités de l'Estrie, Projet Faubourg... peut-être que je la prononce mal, là, complexe de 172 logements à Sherbrooke, convention SCHL échue en 2015. Les cinq administrateurs ont vendu l'immeuble le 25 février pour la somme de 18 millions. L'organisme a été dissous. L'avis de dissolution indique que les actifs ont été partagés entre les cinq actionnaires.

La discussion que je veux avoir avec vous, M. le ministre, ce n'est pas l'enjeu... l'argent vient-u du fédéral ou il vient du Québec, parce que, tôt ou tard, lorsqu'on construit des logements sociaux, ça appartient au final à l'État, mais ça appartient à l'OSBL. Mais lorsqu'il y a des conventions échues, il y a un vide, puis là on voit apparaître des administrateurs qui décident, puis dans certains cas, même, là, je n'ai pas tous les détails, il y en a qui ont même changé les noms des administrateurs juste avant que ça se passe, on vend les bâtiments, les administrateurs mettent l'argent de poche et on change la vocation. Et on est en train de perdre un capital de patrimoine, qui nous sert, comme Québécois, Québécoises à offrir des logements abordables à des clientèles qui en ont besoin et, dans certains cas, des clientèles plus âgées.

Donc, ma question : Avez-vous commencé à réfléchir, au gouvernement, à cette problématique? Parce que ça commence à arriver. Il y a d'autres villas, d'autres bâtiments qui vont arriver à échéance, parce qu'ils ont tous été construits... pas tous en même temps, mais le programme a 35 ans, ils vont comme tous arriver à échéance. Est-ce que vous avez déjà porté votre réflexion pour que le Québec ne perde pas ce patrimoine, qu'il demeure accessible et disponible pour les personnes pour avoir un toit sur la tête et, surtout, que des gens sans scrupule...

M. Ouellet : ...millionnaires avec de l'argent qui a été payé par l'impôt des contribuables.

M. Girard (Groulx) : Il me reste combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Simard) : 4 min 6 s

M. Girard (Groulx) : O.K. Bien, à mon tour de vous lancer des fleurs. Je vous remercie d'amener ce sujet qui est extrêmement important. Et je vous remercie même de votre fairplay de m'avoir averti qu'on allait avoir cette discussion, parce que, sinon, on n'aurait pas pu aller au fond des choses. Je pense, c'est une question qui est extrêmement importante. Je dois dire que le ministère des Affaires municipales et le ministère des Finances sont concernés par cette situation. C'est quand même assez récent que nous avons été éveillés à cette problématique, et donc qu'on la regarde. Et, si vous permettez, j'aimerais que mon sous-ministre responsable de la réglementation du secteur financier, mais il pourra vous expliquer pourquoi c'est lui qui suit ce dossier... Est-ce qu'il pourrait venir nous dire que ce qui se passe dans ce dossier pour deux minutes, par exemple?

M. Ouellet : Consentement, M. le Président. 

Le Président (M. Simard) : Très bien. ...vous présenter, s'il vous plaît.

M. Stevenson (Eric) : Oui. Je m'appelle Eric Stevenson. Je suis sous-ministre adjoint au ministère des Finances, et, comme le ministre l'a dit, je suis responsable des lois du secteur financier, dont la loi qui concerne, là, ces organismes.

Le Président (M. Simard) : Bienvenue parmi nous. Nous vous écoutons.

M. Stevenson (Eric) : Oui. J'y vais? Bien, M. le député, on est au courant de cette situation. Les deux cas que vous mentionnez, je les ai sur mon bureau avec mon équipe. On est en train d'en faire l'analyse. C'est certain que les lois corporatives qui concernent les OBNL, en fait, les OBNL sont encore dans la Loi sur les compagnies, partie III, et elles de lettres patentes, là. Donc c'est des vieilles structures, alors que les corporations, maintenant, au Québec, c'est la Loi sur les sociétés par actions du Québec. Il y a certains pouvoirs qui existent dans cette loi-là, d'enquête de certaines entités, puis c'est ça qu'on est en train de regarder pour voir si on peut intervenir dans ces cas-là.

M. Ouellet : Est-ce qu'il serait pensable de modifier la Loi sur les compagnies? Moi, j'ai un amendement déjà prêt. Vous savez, vous connaissez, M. le ministre, moi, une idée, un projet de loi, un amendement, ça sort tout de suite. J'en ai un à vous soumettre, qui probablement... puis je pense qu'ils l'ont transmis à la ministre de l'Habitation, mais :

«L'aliénation autrement que par l'expropriation ou par vente forcée d'un immeuble de logements ayant été construit, acquis, restauré ou rénové dans le cadre d'un programme d'aide à l'habitation du gouvernement, du gouvernement fédéral ou de l'un de ces ministères ou organismes, l'établissement d'une emphytéose sur tel immeuble ainsi que la modification de son affectation par une personne morale devra être autorisé par le ministre, qui peut assortir son autorisation à des conditions qu'il détermine.

«Le premier alinéa ne s'applique pas dans le cas de la prise de paiement de l'immeuble ou de l'exercice d'un droit autre hypothécaire par le créancier hypothécaire dont l'entreprise consiste le prêt d'argent assorti du sûreté réelle ou par le gouvernement, le gouvernement fédéral et l'un des ministères ou organismes pour une personne morale publique.»

Donc, ce qu'il faut comprendre, c'est que le gouvernement du Québec pourrait avoir un droit de regard sur ces propriétés-là qui ont été payées par les impôts des contribuables pour dire : Non, on garde ce bâtiment-là. Parce que. La collègue de Mercier en faisait mention tout à l'heure. Il y a une crise du logement, il y a du monde qui cherche à se loger, et là on va transformer ça, en certains cas, en condos et on va délocaliser des gens à faible revenu qui avaient besoin de ce toit-là pour eux.

• (12 h 30) •

M. Girard (Groulx) : En fait, ce qu'on vous a dit, M. le député, puis encore une fois c'est une question extrêmement importante, c'est que... à la question : Est-ce qu'on a un droit de regard? C'est oui. On est en train d'étudier si on a les pouvoirs nécessaires et si on a besoin de plus de pouvoirs. Et le MAMH et le ministre des Finances travaillent sur cette question qui est extrêmement importante, et je vous en remercie de souligner l'importance. Puis votre amendement, vous pouvez le transmettre, il est à côté de vous, le sous-ministre. On n'est pas rendu à rédiger des amendements, mais puisque vous l'avez écrit, ça nous fera plaisir de consulter.

M. Ouellet : On peut-u penser faire ça avant la fin de la session?

M. Girard (Groulx) : S'il y a urgence, il y aura action rapide.

Le Président (M. Simard) : Très bien. Merci. Je cède la parole à la députée de Vaudreuil qui dispose de 18 min 15 s

Mme Nichols : Merci, M. le Président. Je vais partager mon temps avec mon collègue, mais je vais continuer à faire du pouce sur le sujet. C'est vraiment... Oui, vous pouvez rester. C'est vraiment... c'est super pertinent, parce qu'il y a plein d'OBNL, là, qui arrivent en fin de convention. On sait que la plupart des conventions, c'est 35 ans. Et il y en a plusieurs, là... les deux qui ont été cités, là, Sherbrooke et Richelieu, c'est vraiment problématique. Moi, M. le ministre, puis, c'est correct, là, je suis bien contente que mon collègue...


 
 

12 h 30 (version non révisée)

Mme Nichols : ...une suggestion, un amendement, mais ça a été fait. Mon collègue de Ronert-Baldwin a travaillé en 2017, puis c'est des changements qu'on a faits, entre autres, pour les coopératives. Ça fait que ça a déjà été fait, là, dans le... Puis je vois le sous-ministre qui fait signe oui de la tête, là. Ça fait que, est-ce que ça ne pourrait pas être envisagé d'apporter le même genre de modifications? Parce que, moi, je soulève... On est dans la crise du logement, on a un problème d'offres, puis là, ce qui arrive en fin d'une convention comme ça, là, c'est que, justement, c'est des logements sociaux qui sont repris, qui sont transférés en logements privés, mais qui ne sont pas nécessairement abordables. Puis il y a un problème au niveau de la pérennité. On n'a pas de logement social, on n'a pas de... Ça fait que ça nous permettrait au moins de garder une... On cherche à en faire, là, je suis en train de régler votre problème, là, on cherche à offrir du logement social et abordable, là. Juste ces deux projets-là, là, ça ferait combien de logements qui pourraient rester justement abordables, sociaux, communautaires? Je reviens sur la question relativement aux coopératives :  Est-ce que ça peut être envisagé de faire quelque chose de similaire?

M. Stevenson (Eric) : Bien, en fait, comme le disait le ministre, ça ne fait pas longtemps, là, qu'on est au courant de cet enjeu-là. Et effectivement, là, on m'a soulevé le précédent, là, que vous évoquez, de 2017, là, comme étant justement un mécanisme où un ministre aurait à intervenir pour accepter, par exemple, autoriser une vente ou un changement de propriétaire, etc.

M. Girard (Groulx) : Avant de faire une intervention, il faut s'assurer qu'on a le pouvoir d'intervention. On est tout en train d'analyser cette situation-là. Et, si on n'a pas le pouvoir d'intervention, bien, il faudra voir si des modifications législatives adoptées avant la fin de la session aideraient.

Mme Nichols : Oui, en effet, particulièrement en cette deuxième année consécutive de crise du logement, je pense qu'il faut justement, là, agir un petit peu plus rapidement. Si vous permettez, là, M. le Président, là, en parlant d'agir rapidement, je reviens sur un autre sujet que ça fait longtemps qui traîne, M. le ministre, l'article 274.2 du Code civil du Québec, qui est justement, là, une problématique au niveau du libellé en copropriété. On s'est rencontrés début décembre, projet de loi n° 5. Vous avez reconnu qu'il y avait une problématique là en lien avec le 274.2. Le libellé, d'ailleurs, a été changé, là, trois fois, là, mais ça reste problématique dans la copropriété, de la façon que c'est appliqué. Puis je le sais, vous allez me dire : Oui, mais là, il y a la responsabilité contractuelle, extracontractuelle, là, moi, je vous ramène à la volonté du législateur. Puis je vous ramène aussi à ce qui s'applique dans le milieu, là. Il y a un vide juridique, là. Si vous regardez les tribunaux, puis là peut-être pour ceux qui nous écoutent, là, le 1074.2, là, dans le fond, c'est un changement qui a été apporté au Code civil en 2018. Puis il faut maintenant prouver qu'un copropriétaire est responsable du sinistre pour que l'assureur paie la facture. Mais c'est parce qu'en copropriété, tout le monde paie leurs propres assurances. Mais maintenant,c'est... je trouve qu'on vient déresponsabiliser le copropriétaire, c'est-à-dire qu'un copropriétaire pourrait être négligent. Puis ça ne change rien parce que c'est l'ensemble des copropriétaires du bloc qui va payer pour le négligeant que ça fait quatre fois qu'il fait un dégât d'eau parce qu'il s'en va en Floride six mois par année, puis que ça déborde à chaque fois.

Ça fait qu'il y a vraiment.... c'est vraiment au niveau du libellé. Et l'interprétation qu'en font les tribunaux présentement, là, tu sais, ils interprètent, là... Ça crée des précédents, puis on les utilise puis ça fait une jurisprudence. Je parlais à des collègues de la magistrature qui me disaient, puis je vous l'ai déjà dit, là, ils sont rendus à trancher le papier de toilette qui bloque la toilette, là, c'est la faute de qui? Je pense qu'ils ont sûrement d'autre chose de plus important que ça à entendre dans les cours du Québec, là, qui débordent, comme la toilette.

Mais on s'est parlés en décembre. Il y a eu une pétition de 10 000 noms en février. Vous vous êtes engagés, vous l'avez reconnue, la problématique, vous vous êtes engagés à le changer. Votre sous-ministre était là, d'ailleurs, M. Hubert...

M. Girard (Groulx) : ...

Mme Nichols : Non, mais... Oui, mais ce n'était pas vous qui étiez là au p.l. 5, je pense...

M. Girard (Groulx) : C'était le directeur.

Mme Nichols : Ah! c'était le directeur. O.K. je m'excuse.

M. Girard (Groulx) : ...

Mme Nichols : Oui, c'est ça, merci, M. le ministre. Mais vous vous êtes engagés à le regarder entre trois mois et six mois, c'était en décembre, le sablier coule. On en est rendus où, au 1074.2, alors qu'il y a vraiment plusieurs copropriétaires qui ont besoin d'aide?

M. Girard (Groulx) : O.K. Alors, ça, c'était une législation qui a été adoptée en 2018. Vous l'avez mentionné. Et on est au fait de cette problématique-là. Et ce qu'on... on a toutes sortes de représentations qui sont faites au ministère, elles ne vont pas toutes dans le même sens. Parce que, là, vous, vous énoncez le problème, vous êtes parfaitement cohérente. Vous l'avez dit, il y a un problème...

M. Girard (Groulx) : ...on est d'accord, il y a un problème, mais les solutions qu'on nous propose, elles, ne sont pas cohérentes, O.K.? Et donc là on pense qu'on a un travail d'information à faire, d'abord, de consultation, et, oui, on va apporter des changements. Mais on pense que la réglementation actuelle n'est pas bien comprise, c'est un des principaux problèmes de la situation que nous vivons. Et, si vous voulez plus de précisions, là, on va partir dans une discussion de juristes, et je vais passer la parole à mon ministre, et vous pouvez poser des questions supplémentaires sur ce sujet si vous voulez.

Mme Nichols : Je vous remercie de répondre à ma question. Je fais juste vous dire que vous m'aviez dit que vous étiez pour consulter, là, certains groupes parce qu'on ne s'entendait pas sur l'interprétation, malgré que moi, je pense, ce qu'il faut faire, c'est certainement protéger le consommateur avant de protéger les assureurs ou protéger le syndicat de copropriété, là. Mais, quand on a déposé en commission, là, il y a des regroupements qui veulent se faire entendre, qui veulent vous donner leur position. Il y a le Regroupement des gestionnaires des copropriétaires du Québec, il y a l'Association des syndicats de copropriété, il y a l'Association québécoise des gestionnaires. Il y a Me Yves Joli-Coeur, vous le connaissez, c'est une sommité, vous demanderez à votre collègue en Habitation, il a participé au projet de loi n° 16. Il y a Elise Beauchesne de SolutionCondo. Il y a le Barreau du Québec. Il y a la Chambre des notaires, la Chambre des notaires met beaucoup de pression sur cet article-là. Donc, moi, ce que je me demande, c'est : Vous en êtes rendu où dans le cheminement? Je comprends qu'il y a des interprétations, mais on peut s'attendre à une intervention de votre part autour de quand? Avant la fin de la session, ça serait vraiment apprécié, M. le ministre.

M. Girard (Groulx) : M. Stevenson, voulez-vous intervenir? Sur le processus, puis je...

M. Stevenson (Eric) : O.K. Sur le processus, là, on parle à tous ces gens-là que vous avez énumérés pour s'assurer qu'on fait la bonne chose. Je rajouterais le Bureau d'assurance du Canada aussi dans la liste, qui est un joueur important. Vous avez mentionné que l'article a été modifié à quelques reprises. C'est sûr qu'on ne voudrait pas le modifier encore puis faire la mauvaise chose, donc on est un petit peu... on est très prudents, en fait, je devrais dire, sur comment on va le modifier si on a à le modifier. On pense que nous, on a fait des bonnes choses. Nous, je m'exclus, là, je n'étais pas là quand ça a été fait, mais mon équipe, mon prédécesseur ont fait des très bonnes choses en matière de condo. Et, d'un point de vue politique publique, là, on est d'avis qu'on a fait une bonne mesure.

Maintenant, il y a deux choses, comme a dit le ministre, il y a : Est-ce qu'il faut toucher l'article ou si on peut faire des interventions au niveau d'éducation par rapport à l'application de l'article en tant que tel? Mais ça va être deux affaires.

Mme Nichols : Mais, puis je le dis très poliment, là, l'interprétation, là, la cour la fait déjà, là, l'interprétation, puis il est mal interprété. Ça fait qu'il faut changer le libellé de la façon qu'il est écrit puis peut-être, en même temps, à ce moment-là, faire de l'éducation sur ce que veut le législateur. Puis je le soumets comme ça, je vais céder la parole à mon collègue après, là, mais on peut changer le libellé et le rendre de nature déclaratoire, c'est-à-dire que ça n'aura pas d'incidence pour avant, mais le fait qu'il soit de nature déclaratoire, bien, tu sais, au moins, on va s'assurer, là, que, pour le reste des dossiers, bien, il n'y aura pas de préjudice pour les copropriétaires.

M. Girard (Groulx) : On s'est engagé à regarder. On le fait, on parle de tous ces gens-là. Mais je le répète, tous ces gens-là ne disent pas la même chose. Ce n'est pas comme si, là, c'est facile, la solution.

• (12 h 40) •

Mme Nichols : Moi, je demande juste qu'on garde en tête le point de vue du copropriétaire qui est lésé.

M. Girard (Groulx) : Certainement.

Mme Nichols : Merci. Je vais céder le temps à mon collègue.

Le Président (M. Simard) : Cher collègue.

M. Leitão : Merci, M. le Président. Alors, M. le Ministre, nous allons donc terminer de notre côté. Et je vous ramène sur le budget. Quand même, nous sommes ici aux crédits sur le budget, il faudrait qu'on parle un peu de ça aussi. Sur deux enjeux, le premier un peu plus rapide, on a parlé un peu de ça hier, et puis le deuxième.

Le premier un peu plus rapide, ça concerne encore un chiffre que votre collègue, la ministre de la Métropole, ministre déléguée aux Transports a encore mentionné, aujourd'hui, ce matin, à la période de questions, qu'il y a pour 56 milliards de dollars de projets en transport collectif. On avait parlé de ça hier, et je veux juste m'assurer qu'on comprend tous, là, qu'il n'y a pas 56 milliards. Ça, c'est des projets qui, éventuellement, vont peut-être avoir lieu ou pas. On est encore très loin d'inscrire ces sommes-là au PQI. Donc, aujourd'hui, là, au moment où on se parle, au PQI, il n'y a pas 56 milliards de dollars en projets de transport collectif. Juste m'assurer que c'est bien le cas...

M. Girard (Groulx) : ...56 milliards, c'est la valeur nominale des projets qui sont considérés, mais comment le traitement comptable du PQI lorsque vous êtes à l'étude, ce n'est pas la valeur du projet qui est dans le PQI, mais la valeur de l'étude. Lorsque vous êtes en développement, c'est : Vous provisionnez des montants en fonction de l'évolution du dossier et c'est lorsque vous êtes en la réalisation que vous êtes pleinement provisionné. Donc, c'est pour ça qu'il y a une divergence entre la valeur nominale des projets qui sont considérés ou à l'étude et la valeur qui est dans le PQI qui tient compte du traitement comptable des entités publiques.

M. Leitão : Très bien, mais certains de ces projets-là, comme, par exemple, un futur REM ou quoi que ce soit sur la Rive-Sud est, ouest, à Longueuil, ce n'est même pas encore à l'étude, là. C'est une idée qui a été lancée et peut être un jour, il y en aura, ou peut-être pas.

M. Girard (Groulx) : Mais c'est-à-dire qu'on a demandé à la Caisse de dépôt d'étudier ce tronçon. Il est donc à l'étude, hors bilan.

M. Leitão : Hors bilan, c'est ça.

M. Girard (Groulx) : Il serait hors bilan, mais il est à l'étude.

M. Leitão : C'est ça, mais ça pourrait arriver la même chose qui est arrivée avec le REM de l'Est, mais en tout cas. Donc, c'était juste ça, cette question des 56 milliards. Mais l'autre, mais là où en finir, M. le Président, M. le ministre... pas «en finir», mais terminer notre discussion sur le budget, concerne aussi quelque chose que le premier ministre a mentionné aujourd'hui et plusieurs fois d'ailleurs, et d'ailleurs, vous aussi, M. le ministre, hier, on avait parlé de ça aussi, qui concerne l'obsession du ... «obsession» pas dans le sens péjoratif, donc l'ambition, disons-le comme ça, du gouvernement, de rattraper l'écart de richesse avec l'Ontario. Donc, il y a deux voitures qui circulent sur l'autoroute : la voiture Ontario, et puis la voiture Québec. Et ce qu'on souhaite, ce que le gouvernement souhaite, c'est que la voiture Québec dépasse la voiture Ontario. Mais pour que la voiture Québec puisse dépasser la voiture Ontario, il faut que la voiture Québec accélère.

M. Girard (Groulx) : C'est juste pour confirmer : C'est deux voitures électriques, hein?

M. Leitão : Électriques, en tous les cas, oui. Une faite en Ontario et l'autre peut-être au Tennessee, bon. Mais, donc, il faut aller plus vite que la voiture de l'Ontario. Deux enjeux : il faut d'abord accélérer la vitesse de notre voiture. Et puis, il faut avoir une certaine idée quelle est la vitesse de l'autre voiture? Parce que si l'autre voiture aussi circule à une vitesse aussi rapide que la nôtre, on ne va jamais les dépasser.

Parlons de la vitesse de la voiture Québec. Dans le budget, les prévisions du ministère des Finances et que je partage entièrement. Après, bon, on va sur une période d'ajustement après la pandémie, rebond, retour à la normale. Et les prévisions à moyen terme, c'est que la croissance économique va s'établir aux alentours de 1,5 %. Je ne mets pas ça en doute. Et d'ailleurs, vous, M. le ministre, vous avez dit hier que votre souhait ou votre objectif, c'est de ramener cette croissance-là à 2 % pour qu'on puisse accélérer la voiture Québec. Là, ma question, c'est : Mais comment on va faire? Comment on va faire pour hausser la croissance qu'on peut considérer comme étant le potentiel de croissance du Québec à 1,5 %, donc comment on va faire pour le ramener à 2 %? Ça a l'air... ce n'est pas beaucoup de 1,5 % à 2 %, mais c'est quand même...

M. Girard (Groulx) : C'est énorme.

M. Leitão : C'est énorme. Et donc comment on va faire pour pouvoir y arriver?

M. Girard (Groulx) : O.K. Bon, alors là, il y a évidemment plusieurs composantes à ça, puis c'est pour ça qu'on a travaillé avec un consultant externe. C'était pour aller... pour décomposer l'effort qui devra être fait dans chacune des composantes. Parce qu'il y a un volet offre de travail. Il y a un volet productivité. Il y a un volet infrastructures publiques. Puis il y a un volet climat de travail... climat d'affaires. Excusez-moi, pas le bon terme «climat de travail», climat d'affaires au Québec. Alors, au niveau de... et les estimés qu'on a, c'est que 20 % de l'effort va venir de l'offre de travail, 80 % de l'effort devra venir de la productivité. Alors, au niveau de l'offre de travail, c'est toutes les mesures qui vont permettre d'augmenter le taux d'activité, la proportion de la population de plus de 15 ans qui est intéressée à occuper un emploi et...

M. Girard (Groulx) : ...ensuite le taux d'emploi, c'est-à-dire la proportion de ceux qui cherchent un emploi, qui ont un emploi, et le capital humain, c'est-à-dire la contribution d'un emploi donné, plus le capital humain est élevé, plus cet emploi-là est productif. Donc, 20 % au niveau de l'offre de travail, d'où le plan main-d'oeuvre de mon collègue avec 2,9 milliards de crédits, 3,9 milliards de capital. Ensuite il y a le volet productivité... Puis là je vais être bref parce que vous voulez me couper...

Le Président (M. Simard) : En conclusion

M. Girard (Groulx) : Productivité, on travaille là-dessus sur trois aspects : le fiscal, l'aide directe et la consultation ou le support au développement des entreprises.

Le Président (M. Simard) : Merci, M. le ministre.

M. Leitão : Merci. Je ne voulais pas vous couper, mais...

M. Girard (Groulx) : C'est bon, c'est bon, allez-y.

M. Leitão : ...le temps presse un peu. Écoutez, 20 %, 80 %, moi, j'arriverais peut-être à un autre pourcentage, mais on ne va pas passer beaucoup de temps à discuter de ça, c'est 25 %, c'est «whatever».

M. Girard (Groulx) : Mais juste pour être clair, parce que le Québec a fait à peu près comme l'Ontario les dix dernières années, n'a pas... Pour utiliser votre terminologie, la voiture n'a pas surperformé la voiture ontarienne, mais le Québec a fait mieux au niveau du marché du travail et moins bien au niveau de la productivité dans les dix dernières années qui nous précèdent. Dans les dix années qui suivent, il va falloir faire beaucoup mieux au niveau de la productivité que l'Ontario.

M. Leitão : Voilà, c'est là où je voulais aller. Parce que, dans les dix années qui vont suivre, on va travailler sur la productivité, on en discutera un autre moment. Mais parlons de l'offre de travail, ce qui s'en vient, on le sait, on le sait tous, là, la réalité démographique, ce n'est pas une surprise, là, depuis le temps qu'on le sait, mais ça a été bien confirmé, la semaine dernière, par les données du recensement publiées par Statistique Canada.

Donc, nous ce à quoi on va assister, au Québec, de façon plus prononcée que dans les autres provinces canadiennes, c'est une diminution de la population active en termes absolus. Il y aura moins de personnes sur le marché du travail parce qu'il va y avoir, au cours des dix prochaines années, une vague, une vague de personnes qui vont prendre la...

M. Girard (Groulx) : Non, je ne suis pas d'accord avec vous. Il n'y aura pas une diminution de la population active, il va y avoir une augmentation de la population inactive. Non, mais ce n'est pas la même chose.

M. Leitão : Bon, O.K., une diminution de la population en âge de travailler.

Le Président (M. Simard) : En conclusion, s'il vous plaît.

M. Leitão : Déjà en conclusion, M. le Président?

Le Président (M. Simard) : Oui, 10 secondes.

M. Leitão : Franchement, il n'y a pas de crédit... Non, mais juste pour vous dire que pendant que l'Ontario, la population augmente beaucoup plus rapidement qu'ici, ici elle stagne ou elle diminue. Et ça, moi, je prétends qu'on n'arrivera pas à 2 % de croissance économique avec notre réalité démographique.

Le Président (M. Simard) : Merci.

M. Leitão : On en discutera...

Le Président (M. Simard) : Merci beaucoup, cher collègue.

Une voix : ...

Le Président (M. Simard) : Mon rôle est bien ingrat. Je cède la parole au député de Vanier-Les Rivières qui dispose, avec son groupe parlementaire, de 16 min 30 s.

M. Asselin : 16 min 30 s. Bonjour, M. le ministre.

M. Girard (Groulx) : Bonjour.

• (12 h 50) •

M. Asselin : Salutations à tous. Et je vais profiter peut-être de la présence de quelqu'un de l'AMF pour poser une petite question de mon point de vue d'observateur en éducation, vous savez que c'est un sujet qui m'intéresse. Il y a plusieurs semaines, il y a un enjeu important au niveau des assurances concernant les associations étudiantes. Et il est important d'offrir de l'accessibilité aux étudiants par rapport aux programmes d'assurance, puis l'AMF a émis un communiqué, en février, pour montrer un peu la voie par rapport aux assureurs pour qu'ils modifient leurs pratiques. Il y a une volonté de mettre sur pause en même temps les mesures qu'avait... Il y avait des plaintes, 10, 15 plaintes, mais il y a au-delà de plusieurs milliers d'étudiants qui se soustraient à des régimes d'assurance. Donc, je voudrais vérifier où est l'avancement du dossier concernant les assurances, puis qu'est-ce qui a été réalisé à l'heure actuelle.

M. Morisset (Louis) : Bien, merci... M. le Président, oui, je peux... Vous avez tout à fait raison, en février, on a émis un communiqué annonçant que nous allions suspendre les mesures qu'on avait effectivement imposées aux assureurs, qui devait entrer en vigueur pour la session de septembre, et lancer une vaste consultation sur le sujet, consultation qu'on va lancer le 15 juin, ou, en tout cas, à partir de la mi-juin pour une période de quatre mois. Ce qu'on cherche à faire ici, c'est d'avoir...

M. Morisset (Louis) : ...une consultation de fonds qui vise à explorer la question de l'accessibilité, comme vous avez mentionné, là, pour les étudiants à ces régimes d'assurance, dont plusieurs étudiants ont certainement besoin, et en même temps, également, la question de la protection des étudiants comme consommateurs de produits et services financiers. Donc, il y a deux éléments centraux à cette consultation-là. Au cours des dernières semaines, on a rencontré des représentants d'associations étudiantes, de fédérations. On comprend que les objectifs des uns et des autres peuvent ne pas tous être alignés. Certains préféreraient qu'on consulte plus vite, d'autres veulent avoir du temps. Bref, on s'est entendus sur une période, donc, de quatre mois qu'on va lancer, comme je le mentionnais, à partir de la mi-juin jusqu'à la mi-octobre. On veut une consultation vaste, exhaustive, que toutes les parties intéressées viennent nous donner leurs perspectives, leurs idées, leurs solutions. Et notre objectif au terme de la période de consultation, c'est de faire rapport, comme on l'avait annoncé, au ministre, avec, forts des constats qu'on aura, des pistes de solutions pérennes pour réconcilier, en quelque sorte, ces deux éléments fondamentaux. Alors, ça va être annoncé officiellement à la mi-juin, comme je le mentionnais.

Une voix : Merci. M. Morisset.

Le Président (M. Simard) : Merci à vous. Je cède maintenant la parole au député de Portneuf.

M. Caron : Merci, M. le Président. Je voulais revenir, moi aussi, sur la question de la cryptomonnaie. C'est un univers à la fois fascinant, à la fois effrayant. Et puis il n'y a pas une journée qui se passe sans qu'on constate qu'il y soit une histoire à succès ou une histoire d'horreur. On voit des gens qui font fortune de manière colossale rapidement, d'autres qui tombent dans le précipice. Moi, je voulais... Puis, tout à l'heure, on a bien compris que vous essayiez de mettre en place des mécanismes ou en tout cas des moyens de communication pour avertir la population. Je pense plutôt à M. et Mme Tout-le-monde ici. Est-ce qu'on connaît, pour l'instant, la valeur approximative du marché de la cryptomonnaie au Québec?

M. Morisset (Louis) : Non, nous n'avons pas cette cette information, non. On sait que la valeur globale, si on veut, des cryptomonnaies était quelque chose comme autour de 3 000 milliards en quelque part l'année dernière. Les marchés ont été ébranlés et la valeur a chuté. Mais précisément au Québec, non, on n'a pas cette information-là. Elle est très difficile, par ailleurs, aussi à... Ça fluctue tous les jours, donc ce serait difficile à chiffrer, là, de façon précise.

M. Caron : Puis, tout à l'heure, le collègue de Robert-Baldwyn parlait de guichets. Moi, j'avais noté les plateformes. Est-ce qu'on doit comprendre que... Moi qui suis un novice complètement dans ce domaine-là, est-ce qu'on doit comprendre que certaines plateformes sont inscrites... Déjà, je voudrais faire la nuance entre la plateforme et le guichet, si vous pouviez m'éclairer. Et ensuite, est-ce qu'il existe, donc, un répertoire des plateformes inscrites ou des guichets, en fonction de la réponse que vous ferez à ma première question?

M. Morisset (Louis) : Parfait. Oui. Bien, la différence fondamentale, c'est que le guichet permet d'obtenir de relatives petites sommes directement dans le portefeuille virtuel, si on veut, des individus. Alors, il y a une livraison, si on veut, immédiate de la cryptomonnaie dans le portefeuille de l'individu. Les plateformes, elles, d'abord, peuvent permettre des transactions beaucoup plus importantes, là, en valeur, et il n'y a pas nécessairement... et dans la plupart des cas, je vous dirais, il n'y a pas une livraison immédiate de la cryptomonnaie dans un portefeuille virtuel. La plateforme crée en quelque sorte un droit contractuel à la cryptomonnaie en question, ce qui constitue une valeur mobilière et ce qui fait en sorte qu'on a juridiction.

Il y a, en ce moment, au Canada six plateformes seulement qui sont inscrites. Il y a une cinquantaine d'autres plateformes qui ont fait application pour obtenir une inscription. Ça demeure probablement une fraction des plateformes disponibles aux Québécois, parce que, via l'Internet, il y a des plateformes établies partout dans le monde qui n'ont pas nécessairement démontré leur volonté de s'inscrire et d'être réglementées au Canada. Mais en ce moment, donc, il y en a six inscrites. Il y en a une cinquantaine qu'on est en train de processer, si on veut, avec nos collègues des autres provinces. Je dirais que ces plateformes-là sont les plateformes à privilégier, leur identité, des six...

M. Morissette (Louis) : ...plateforme va être mise en évidence sur notre site Internet. Par ailleurs, sur notre site Internet, on a une liste des plateformes des cryptomonnaies et des entités qui nous apparaissent, probablement, conduire des frauduleuses. C'est une liste qu'on maintient à jour, basée sur l'information... l'intelligence, là, qu'on obtient, les signalements aussi de consommateurs. Alors, il faut amener les consommateurs vers notre site qui... encore une fois, nos messages sont de prévention.

Le Président (M. Simard) : ...merci.

M. Caron : Je comprends. C'est tellement intéressant, M. le Président, je vous remercie de nous ramener à l'ordre, mais c'est enrichissant de savoir tout ça. Donc, cette liste en question des six plateformes est publique?

M. Morissette (Louis) : Elle le sera.

M. Caron : O.K.. Et le processus, donc, je comprends que c'est assez complexe pour les 50 autres, là. Parce qu'il y a des échanges qui doivent être menés, de part et d'autre, et toutes sortes d'analyses, mais est-ce qu'on doit comprendre que le fait de faire affaire avec une plateforme inscrite apporte un sentiment additionnel de sécurité à celui qui traiterait via cette plateforme?

M. Morissette (Louis) : La réponse est oui. L'inscription ne sera jamais un rempart total à la fraude, mais c'est certain que, dans le processus d'inscription, les plateformes qui veulent s'inscrire, vraiment, donnent lieu à des vérifications de probité, d'intégrité, et de compétences, et autres. Alors, je vous dirais, oui, c'est un rempart efficace, mais, en même temps, il faut le signaler, il y a des entités inscrites qui ont commis des fraudes dans le passé et c'est toujours possible, mais oui. Et c'est pour ça qu'on veut diriger les investisseurs vers ces plateformes inscrites. En même temps, on ne veut pas non plus... tu sais, il faut être prudent, parce qu'il y a des plateformes qui souhaiteraient être inscrites immédiatement, mais le processus, le flot de demandes, la complexité aussi des activités de ces plateformes-là font en sorte qu'on ne peut pas les inscrire du jour au lendemain. Alors, il faut nuancer le propos, mais je vous dirais que, oui, allons vers les plateformes, dans un premier temps, inscrites. Et il y a d'autres initiatives en cours pour faire en sorte que les plateformes non inscrites mais qui souhaitent s'inscrire s'assujettissent d'elles-mêmes à certaines de nos exigences. Donc, on sera davantage rassurés. Et ça, on travaille là-dessus, en ce moment, avec nos collègues des autres provinces.

M. Caron : Donc là, actuellement, vous naviguez, si je peux me permettre cette expression, entre cet équilibre, puisqu'il y a une cinquantaine de plateformes qui sont en attente, on va dire, d'approbation. Donc, vous nous dites : Bien, on ne peut pas exclure toutes celles qui ne sont pas inscrites. Pour l'instant, il y en a que six, mais... Et, à côté de ça, bien, je comprends aussi dans vos propos ou je crois comprendre, mais corrigez-moi si ce n'est pas le cas, c'est que ce n'est pas un gage. Les six qui sont inscrites, est-ce que vous émettez une carte blanche ou... quelle est votre responsabilité dans tout ça, c'est-à-dire, pour sécuriser, finalement, un investisseur?

M. Morissette (Louis) : Bien, ce que je disais tantôt, la nuance, c'est que l'inscription n'est pas un gage absolu, en tout état de cause, de l'absence de fraude, parce qu'on a déjà constaté, malheureusement, que des entités inscrites pouvaient contribuer ou participer à des fraudes. Cela étant dit, le processus d'inscription est un processus très robuste qui nous rassure et qui devrait rassurer les investisseurs quant à l'intégrité de ces plateformes-là. Les risques demeurent. Ce sont des actifs extrêmement volatils, dont la valeur peut augmenter, peut diminuer, mais le risque de fraude est largement, largement minimisé en procédant à travers une plateforme inscrite.

• (13 heures) •

M. Caron : O.K. Merci. Moi, ça fait le tour de la question que je voulais poser. Est-ce que j'ai un autre collègue qui voulait intervenir?

Le Président (M. Simard) : Oui, la députée de Saint-Jérôme souhaite intervenir.

M. Chassin :...

Le Président (M. Simard) : 5 minutes 30 s.

M. Chassin :Ah! parfait. Parce que j'ai deux sujets. Alors, évidemment, M. le ministre, souvent, je pose des questions sur des sujets qui me préoccupent, mais là j'ai envie de rendre service à ma collègue de Mercier puis de parler un petit peu avec vous d'évasion fiscale. Certains...

M. Girard (Groulx) : ...

M. Chassin :Bien, écoutez, la main invisible, évidemment, pour Adam Smith, c'était une image, hein, une allégorie pour dire : ça n'existe pas, la main invisible, mais c'est comme si on observait un résultat de... tu sais. Puis, en même temps, l'évasion fiscale, là, des fois, on a l'impression que c'est quelque chose d'énorme puis qu'il s'agirait finalement, là, littéralement, de se pencher pour récupérer des sommes faramineuses, comme si le ministère des Finances, et Revenu Québec, et tout ça, ne faisait rien à l'heure actuelle. Alors, moi, j'aimerais, au contraire, entendre ce qui est fait. Et sachant, là, que c'est toujours facile, dans un cadre financier électoral, de...


 
 

13 h (version non révisée)

M. Chassin :...quelques millions de dollars provenant de la lutte à l'évasion fiscale, est-ce qu'on a déjà des outils? Est-ce qu'on fait déjà de la récupération, est-ce qu'on a des sommes qu'on a récupérées annuellement en évasion fiscale?

M. Girard (Groulx) : Bien, la réponse, c'est évidemment oui. Ce qui est récupéré au sens large de l'évasion fiscale, si on inclut tout le travail qui est fait au niveau de l'économie souterraine, comme la lutte à la contrebande du tabac, du cannabis, et il y a aussi là-dedans la taxation des plateformes numériques, le Québec a été un précurseur. Alors, lorsqu'on... tout ça, ça totalise plus de 2 milliards par année. Lorsqu'on parle d'évasion et d'évitement fiscal, on fait souvent référence aux planifications fiscales abusives, et là les gens pensent à Panama Paper, ces grandes divulgations qui ont eu lieu? Et alors, au niveau des planifications fiscales abusives, là, le Québec est quand même un précurseur. On a des lois d'obligation de divulgation. On a aussi des pénalités pour ceux qui font la promotion de ces véhicules-là, ça totalise plus de 350 millions par année. À ça s'ajoutent les divulgations volontaires, c'est-à-dire q'on permet, une fois dans la vie de contribuable, de faire... de rectifier sa situation fiscale, et ça, c'est un autre 150 millions.

Donc, au niveau des planifications fiscales, à peu près 500 millions par année, mais si on prend une définition plus large... l'économie souterraine, ça, ça totalise près de 2 milliards par année. Et je vous dirais qu'il reste énormément de travail à faire, notamment au niveau de la construction résidentielle, rénovation résidentielle, une industrie qui pourrait... on travaille avec l'industrie pour améliorer les pratiques. Alors, il reste du travail à faire, mais on a fait beaucoup de progrès.

M. Chassin :Puis je comprends...

M. Girard (Groulx) : Puis il y a une partie de ce progrès qui est le résultat du travail de la Commission des finances publiques, alors il faut le dire.

M. Chassin :Alors, monsieur le Président, vous recevez des félicitations du ministre.

M. Girard (Groulx) : C'est un autre président, j'oserais... mais c'est quand même du bon travail.

M. Chassin :Ceci étant...

M. Girard (Groulx) : Excusez-moi de la précision, monsieur le Président.

M. Chassin :Évidemment, je crois comprendre aussi que quand il reste... on parle du travail qui reste à faire, puis c'est un peu :100 fois sur le métier, remettez votre ouvrage, là, il y a toujours un peu des nouveaux, permettez-moi l'anglicisme, des nouveaux «loopholes» à boucher, etc. Néanmoins, j'imagine que, quand on fait de la lutte à des planifications fiscales agressives, bien, on trouve les trucs peut-être les les plus payants en premier. Puis plus on essaie d'aller vers des nouvelles voies de récupération, bien, ça demande peut-être des efforts plus grands pour aller chercher des sommes un peu moins grandes, est-ce que je me trompe?

M. Girard (Groulx) : Non, mais on est mieux outillés, c'est-à-dire que la collaboration avec l'Agence du revenu du Canada n'a jamais été aussi bonne. D'ailleurs, notre nouvelle P.D.G. de Revenu Québec vient du gouvernement fédéral, c'était une haute fonctionnaire au niveau du gouvernement fédéral. On a vraiment une excellente collaboration avec l'Agence du revenu du Canada. On a aussi des ressources, on a plus de 150 personnes qui se lèvent, chaque matin, chez Revenu Québec, pour faire la lutte aux planifications fiscales...

M. Chassin :Il me reste 20 secondes à peu près...

Le Président (M. Simard) : En conclusion.

M. Chassin :...pour juste dire qu'il y a un sujet que j'aurais voulu aborder, mais je ne l'ai pas abordé, puis qui est les opérations du financement de la dette du Québec. Et je tiens quand même à souligner qu'avec la remontée des taux d'intérêt, c'est un travail très important...

Le Président (M. Simard) : Très bien. Merci, cher collègue.

M. Chassin :...alors je vous tire mon chapeau.

Le Président (M. Simard) : Merci beaucoup. Alors, le temps alloué à nos échanges est maintenant terminé, et nous allons procéder, bien entendu, à la mise aux voix de nos crédits. Conséquemment, le programme 1, intitulé Direction et administration, est-il adopté? Adopté sur division. Le programme 2, intitulé Activités en matière économique, fiscale, budgétaire et financière, est-il adopté...

Une voix : ...sur division.

Le Président (M. Simard) : Adopté sur division.

Le programme 3, intitulé Contribution, frais de services bancaires et provisions pour transférer des crédits, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Des voix : Sur division.

Le Président (M. Simard) : Adopté sur division.

Le programme 4, intitulé Service de la dette est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Des voix : Sur division.

Le Président (M. Simard) : Adopté sur division.

Et, finalement, l'ensemble des crédits budgétaires du portefeuille Finances pour l'exercice financier 2022-2023 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Des voix : Sur division.

Le Président (M. Simard) : Adopté sur division.

Alors, en terminant, je dépose les réponses aux questions de l'opposition. Je vous remercie à nouveau pour votre précieuse collaboration, et compte tenu que notre commission a accompli son mandat, j'ajourne nos travaux sine die. Au plaisir de vous retrouver. Merci à vous tous.

(Fin de la séance à 13 h 8)


 
 

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