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Version préliminaire

43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)

Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.

Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions

Le jeudi 8 février 2024 - Vol. 47 N° 38

Étude détaillée du projet de loi n° 42, Loi visant à prévenir et à combattre le harcèlement psychologique et la violence à caractère sexuel en milieu de travail


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Journal des débats

11 h 30 (version non révisée)

(Onze heures trente-six minutes)

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Après avoir constaté le quorum, alors nous déclarons la séance de la Commission de l'économie du travail ouverte.

La commission est réunie aujourd'hui afin d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 42, Loi visant à prévenir et à combattre le harcèlement psychologique et la violence à caractère sexuel en milieu de travail.

Alors, Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements aujourd'hui?

La Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. Mme D'Amours (Mirabel) est remplacée par Mme Mallette (Huntingdon), M. Tremblay (Dubuc) est remplacé par Mme Poulet (Laporte), Mme Cadet (Bourassa-Sauvé) est remplacée par M. Morin (Acadie) et Mme Lakhoyan Olivier (Chomedey) est remplacée par Mme Caron (La Pinière).

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci beaucoup. Alors, avant de débuter les remarques préliminaires, je dépose le mémoire reçu depuis la fin des auditions, soit celui du Syndicat québécois de la construction, dont vous avez reçu l'avis de greffier à cet effet là tout à l'heure. Donc, nous débutons avec les remarques préliminaires. M. le ministre du Travail, vous disposez de 20 minutes.

M. Boulet : 20 minutes. Merci, Mme la Présidente. D'abord, vous remercier, puis saluer l'ensemble des collègues gouvernementaux, les collègues des partis d'opposition. Je pense qu'on amorce l'étude détaillée d'un projet de loi qui est vraiment fondamental pour le Québec, parce que ça concerne un fléau qui est devenu endémique dans plusieurs milieux de travail, c'est-à-dire le harcèlement psychologique et les violences à caractère sexuel.

Le climat de travail d'une commission parlementaire, pour moi, il est vraiment important. Je pense qu'on est tous ici avec une volonté ferme d'entreprendre un dialogue qui est constructif. On a un objectif commun, c'est-à-dire d'aider les travailleuses et les travailleurs à œuvrer dans un environnement qui est sain, qui est sécuritaire, qui est exempt de harcèlement, quel qu'il soit. Et on a évidemment entendu les groupes qui sont venus en consultations particulières. C'est extrêmement crucial pour ces groupes-là d'être convaincus, d'être entendus. Moi, chaque fois, je leur dis qu'on va le faire avec attention et considération. Et au-delà des groupes qui ont été entendus ici, devant nous, tous les mémoires sont et seront analysés. Là, je comprends qu'il y en a un nouveau du Syndicat québécois de la construction. On va faire l'analyse qui s'impose, on va étudier, on va s'assurer que ces recommandations soumises par le Syndicat québécois de la construction soient bien véhiculées.

• (11 h 40) •

Puis ça me tient à cœur de aussi réitérer qu'à chaque fois qu'on a eu des études détaillées, bon, j'en ai eu quand même un certain nombre avec notre collègue de Hochelaga-Maisonneuve, à chaque fois, on prend le temps de s'assurer que tout le monde comprend bien. S'il y a des amendements, on les analyse. S'ils sont pertinents puis qu'ils s'imposent, on s'assure aussi de les faire. Parce qu'un projet de loi, dans le cas qui nous concerne, il est généralement précédé de beaucoup de consultations.  Puis je rappelle ici que les trois expertes sont...

M. Boulet : ...on bénéficie d'une réputation extrêmement enviable, non seulement au Québec, mais à l'échelle internationale. Anne-Marie Laflamme... elle est doyenne de la Faculté de droit de l'Université Laval... Dalia Gesualdi-Fecteau, qui était en relations industrielles à l'UQAM, et, maintenant, à l'Université de Montréal, et Rachel Cox, qui est en relations industrielles à l'UQAM, c'est des personnes qui ont écrit beaucoup, qui sont reconnues comme étant des personnes objectives, et elles ont fait un rapport qui a été honoré, qui a été louangé, qui contenait 82 recommandations, et il y en a un certain nombre à saveur administrative, puis, c'est important, au cours de l'étude détaillée, je rappellerai les recommandations administratives, qui, pour la vaste majorité, ont été mises en application par la CNESST ou le Tribunal administratif du travail. Et il faut être en action, parce que chaque cas en est un de trop. Il faut tendre vers l'objectif, qui est le moins possible de cas. On sait tous à quel point il y a des effets corrosifs non seulement dans l'environnement de travail, mais au sein des familles et parmi les proches des personnes qui sont victimes, particulièrement de violence à caractère sexuel.

Donc, on est tous ouverts à bonifier le projet de loi, et moi, pour la cohérence de nos discussions puis de nos travaux, étant donné qu'on a eu très peu de temps... puis je suis un petit peu désolé que vous ayez reçu la séquence hier, en fin d'après-midi... j'en ai parlé avec le collègue d'Hochelaga-Maisonneuve... ce que je propose, c'est que nous y allions loi par loi, les lois qui sont amendées par le projet de loi, et on finit par la Loi sur les accidents de travail, maladies professionnelles, où il y aura peut-être le plus de discussions et d'amendements potentiels. Et j'ai divisé... Donc, on commencerait par la loi santé et sécurité, le Code du travail, la Loi sur les normes du travail, la loi concernant la protection des stagiaires et les articles de concordance, la Loi santé et sécurité du travail, la loi sur les relations de travail, formation professionnelle et gestion de la main-d'œuvre dans le secteur de la construction — c'est la loi R-20 — ensuite, la LATMP, la loi sur les accidents de travail, maladies professionnelles, et, enfin, les mesures transitoires et finales.

Il y a un certain nombre d'amendements — j'ai toujours travaillé de cette manière-là — qui sont consécutifs aux consultations particulières. Il y a certaines recommandations qu'on a transformées en amendements, mais il y a un certain nombre d'amendements, vous vous en doutez bien, que je dois présenter au Conseil des ministres, puis je n'ai pas eu le temps de le faire cette semaine. Ce sera fait la semaine prochaine. Mais il y a deux amendements que j'aimerais vous soumettre ce matin, après que les allocutions soient terminées. Si on consent tous pour y aller de cette manière-là, nos cahiers en colonnes, qui sont partagés, je pense, par voie électronique, avec vous autres, je veux qu'on y aille rondement, qu'on soit le plus efficaces possible, et moi, je vais, après nos allocutions, vous présenter les deux amendements, je vais les présenter sommairement, on arrêtera quelques minutes, puis, après ça, ça nous permettra d'amorcer nos discussions de la manière la plus diligente possible.

Alors, Mme la Présidente, on est disposés à débuter. Merci.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci, M. le ministre. Alors, j'invite maintenant le porte-parole de l'opposition officielle, le député de l'Acadie, à faire ses remarques préliminaires, pour une durée maximale de 20 minutes.

M. Morin :Merci, Mme la Présidente, j'apprécie. M. le ministre, collègues parlementaires, je... en fait, c'est un... je me sens privilégié d'être ici avec vous ce matin pour traiter d'un projet de loi qui est très important. On pourra... Évidemment, on aura des commentaires constructifs à faire à M. le ministre au fur et à mesure qu'on étudiera le projet de loi article par article. Mais j'aimerais, dans mes remarques préliminaires, souligner que ce projet de loi vise à réglementer, aider à la dénonciation, éventuellement, enrayer toute la question de la violence, du harcèlement et des violences à caractère sexuel...

M. Morin :...le domaine du travail, et c'est très important. Puis c'est très important aussi, comme parlementaires, qu'on puisse traiter de ces questions-là, parce que, dans notre quotidien, la majorité des Québécois et des Québécoises vont consacrer des heures, et des heures, et des heures de leur vie à travailler, et, je pense, une des choses qu'on doit leur garantir, c'est d'être capables de travailler dans un milieu qui est sain, dans un milieu qui est accueillant, dans un milieu qui est sûr, dans un milieu où la personne n'aura pas à vivre des situations de harcèlement.

Il y a toute la question de la santé et de la sécurité au travail. C'est fondamental. On veut que les travailleurs et travailleuses du Québec aient accès à un milieu qui est sécuritaire. Mais, en plus, il y a toute la question de la lutte contre le harcèlement et de la lutte contre les violences sexuelles, et, c'est malheureux, mais je pense qu'il faut en faire le constat, cette situation, elle existe, elle existe dans notre milieu de travail, et c'est ce que M. le ministre tente de corriger avec son projet de loi. C'est important de traiter de ces questions-là et de prendre le temps de le faire, parce que...

Je me rappelle très bien quand le document Rebâtir la confiance a été déposé, divulgué et publié, avec toutes les recommandations. Il y avait plusieurs recommandations qui traitaient, justement, de toute la question du harcèlement sexuel et des agressions sexuelles en milieu de travail. Et c'est fondamental de rebâtir la confiance de notre système de justice, et ça, je peux vous en parler, parce que j'y ai passé une grande partie de ma vie, notamment à plaider des dossiers, et à plaider des dossiers, et à déposer des accusations en matière d'agression sexuelle, pas toujours dans un contexte de milieu de travail, mais, quand même, des agressions... des accusations d'agression sexuelle à l'égard, évidemment, d'agresseurs, mais tout en tenant compte et tout en essayant de travailler, et d'encourager, et, évidemment, d'accompagner, le plus possible, la victime. Et ça, c'est hyperimportant, à mon avis, parce que c'est déjà difficile de dénoncer, alors, une fois qu'on a dénoncé, et qu'il y a un volet qui devient public, et donc il y a des procédures. Il faut être capables d'accompagner les victimes pour faire en sorte que le processus puisse se rende jusqu'au bout. Et ça arrive, ça arrive assez souvent que, malheureusement, des victimes vont se décourager. Il faut éviter ça, il faut être capables de leur donner un milieu de travail où elles vont être capables, ces victimes, de dénoncer, et faire en sorte que le processus puisse aller de l'avant.

Le harcèlement sexuel, c'est une problématique importante dans les milieux de travail, puis, quand on regarde les statistiques, le nombre est quand même important. On parle souvent, là, d'une personne sur deux, presque une personne sur deux, 49 % des gens qui ont subi un comportement sexualisé, inapproprié ou discriminatoire. Il y a un fort pourcentage de femmes, mais il y a aussi des hommes qui sont victimes de ces comportements-là, et c'est totalement inacceptable. Puis il faut savoir aussi, pour avoir accompagné, traité de ces dossiers-là, accompagné des victimes... voir ce que ça fait chez les gens, et, croyez-moi, c'est loin d'être banal. À un point où des victimes vont arrêter de travailler. Elles ne seront plus capables d'aller dans leur milieu de travail, elles ne seront plus capables de dormir, vont être obligées d'avoir recours à des ressources externes, médicales, ou autres, parce qu'elles ne fonctionnent plus. Et imaginez une personne qui doit retourner dans son milieu de travail, mais qui sait ou qui anticipe qu'elle va devoir vivre ce genre de situation là. C'est totalement inacceptable. Donc, il est important de s'adresser, de s'attaquer au problème. C'est ce que tente de faire M. le ministre.

• (11 h 50) •

Et donc il y a plusieurs lois, et on va le voir, éventuellement, qui... où il y a des modifications pour essayer d'avoir un milieu de travail sécuritaire et sûr. Et il faudra aussi s'assurer... puis ça, bien, ça va être notre rôle, dans l'opposition officielle, à ma collègue députée de La Pinière et à moi... de faire en sorte que ce projet de loi, finalement, pourra être la meilleure possible pour garantir un milieu...

M. Morin :...non seulement qui est sain, sécuritaire, mais de s'assurer également que des victimes qui déposent plainte ne seront pas l'objet de représailles, c'est aussi fondamental, et de s'assurer qu'il y aura des mécanismes en place qui vont faire en sorte que ce sont des gens totalement indépendants qui traiteront de ces dossiers-là pour s'assurer qu'il n'y ait aucune apparence de partialité.

Alors, pour mes remarques préliminaires, Mme la Présidente, je vais m'arrêter ici, mais je tenais quand même à brosser un tableau un peu global de la problématique, de la difficulté et puis, après ça, on va voir, article après article, comment on peut améliorer la situation. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci, M. le député. Alors, j'invite maintenant le porte-parole du deuxième groupe d'opposition et député d'Hochelaga-Maisonneuve à faire ses remarques préliminaires pour une durée maximale de 20 minutes.

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, tout le monde. Très content de vous retrouver en étude détaillée. Je faisais le décompte avec mon collègue de la recherche... de combien de projets de loi, là, j'ai eu à échanger avec le ministre du Travail. On a compté huit. Je ne sais pas si vous voulez compter, vous aussi, M. le ministre, ce serait le huitième, je pensais neuf, mais c'est peut-être le huitième. Vous ferez votre calcul, puis on s'en reparlera, puis il y aura la construction qui viendra assez tôt aussi, on aura certainement un neuvième cette année. Sinon, Mme la Présidente, bien, moi aussi, je veux saluer tous les gens qui sont venus en commission nous parler dans la section des auditions. C'est toujours important, c'est une partie essentielle de la démocratie, là, de pouvoir entendre les gens à l'extérieur de notre enceinte, mais venir nous dire ce qu'ils pensent de ce qu'on s'apprête à faire avec des lois qui les concernent directement.

Sur le fond du projet de loi, je ne reprendrai pas l'essentiel de la présentation de mon collègue, là, qui était fort fort pertinente. Je pense, en effet, que c'est une loi qui était attendue, une loi qui, grosso modo, se base, en effet, sur les recommandations des trois expertes citées par M. le ministre aussi. Tu sais, vous allez voir, on a peut-être quelques amendements qu'on va déposer de notre côté, mais, grosso modo, ça va, je pense, bien aller. Il y aura des questions qu'on va poser au ministre sur comment il pense appliquer tel ou tel article. Est-ce qu'il a entendu les arguments des groupes? Est-ce qu'il penche plus vers telle lecture que l'autre, comment il a éventuellement évolué sur sa pensée? Donc, des fois, ce sera des amendements, des fois, ce sera des échanges, qui nous permettra de voir où est-ce qu'il loge, qui laissera aussi des traces, hein, on l'oublie trop souvent, mais, des fois, quand une loi est contestée devant les tribunaux, pour en déterminer l'interprétation, quand il y a un conflit d'interprétation, bien, les échanges ici, en cette Chambre, dans cette commission, peuvent être utilisés pour dégager l'intention du législateur, comme on l'appelle.

Alors, moi, je prends ce rôle-là d'opposition à cœur, de dégager le plus possible, de clarifier l'intention du législateur dans plusieurs sections des différentes lois que j'ai travaillé avec le ministre. Alors, je vais m'en tenir à ça pour l'instant. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci, M. le député. Alors, est-ce qu'il y a d'autres membres qui souhaiteraient faire des remarques préliminaires? M. le député de Jean-Talon.

M. Paradis : Merci beaucoup, Mme la Présidente. J'aimerais me joindre d'abord à mes collègues pour remercier toutes les personnes qui ont travaillé à la préparation de ce projet de loi qui est vraiment très important. J'aimerais remercier toutes les personnes qui ont transmis des mémoires très informatifs, très utiles pour nous et toutes les personnes également qui sont venues témoigner. Je remercie particulièrement le ministre de sa perspective ouverte.

Je n'ai pas huit projets de loi, moi, de faits, avec le ministre, ça va être mon... ma première expérience avec le ministre. Mais j'aime beaucoup le fait qu'il se montre ouvert, et je pense que c'est ce qui nous doit nous guider comme groupe aujourd'hui. Je l'ai mentionné hier au salon bleu, il y a... les enjeux qu'on va devoir... qu'on va avoir à traiter, c'est des enjeux de hauteur politique. On est là pour faire la meilleure chose possible, Mme la Présidente. Il faut qu'on ait... Il faut qu'on ait le courage d'aller le plus loin possible pour que le Québec soit un endroit innovant, un endroit à la fine pointe des meilleures pratiques pour lutter contre le harcèlement psychologique qui... de violence sexuelle en milieu de travail, pour qu'on assainisse les pratiques en milieu de travail, pour qu'on on prévienne ces formes de violence, ces formes de harcèlement, qu'on crée un milieu de travail qui est propice, en fait, à éviter les situations et qu'on les traite bien quand il y en a, quand il y a des plaintes, quand il y a des enjeux réels qui se posent.

Je l'ai mentionné au début des audiences... la perspective de quelqu'un qui, pendant 20 ans, a travaillé dans une organisation qui cherchait à faciliter la représentation juridique des personnes qui sont victimes de ce genre de violence...

M. Paradis : ...pas toujours en milieu de travail, mais parfois en milieu de travail. Donc, j'arrive avec ce cœur d'avocat, de droits humains. Mais de l'autre côté aussi, j'ai été gestionnaire d'une organisation, donc je suis conscient aussi de ce que ça veut dire pour les employeurs de... de travailler dans ce domaine-là et je suis conscient qu'il va y avoir des questions délicates à traiter sur lesquelles nous arrivons pour certaines sans a priori d'idées et qu'on fasse la meilleure chose. On en a nommé plusieurs hier, au salon bleu, et ces enjeux-là. Donc, il va falloir s'assurer aussi qu'on tienne compte de l'état existant du droit. On a eu des discussions, notamment lors des audiences, et par bonheur, je l'ai mentionné, je le réitère encore aujourd'hui, par bonheur... quel bonheur de nous appuyer sur le travail des trois expertes. Vous l'avez mentionné, M. le ministre, c'est vraiment éclairant. Elles sont venues aussi nous nous rappeler leurs recommandations et ce qu'on peut faire de mieux aussi pour améliorer le projet de loi en fonction de ces recommandations-là. Mais d'autres aussi nous ont incités à la prudence à bien considérer l'état du droit. Et là-dessus, M. le ministre. Je... on en a parlé brièvement, mais le Barreau s'est montré disponible pour continuer à nous éclairer sur l'état du droit, sur certaines dispositions, notamment sur les fameuses clauses d'amnistie dont on va parler. Elles arrivent assez rapidement dans le plan de travail, M. le ministre, et je vois la logique d'aborder les modifications loi par loi. Peut-être aussi qu'il y a certains enjeux qui arrivent tôt. On a tous collaboré, je pense, pour traiter ce projet de loi-là avec lui donner la priorité qu'il mérite. Mais est-ce qu'il y a des questions qui mériteront qu'on prenne le temps, peut-être, de recevoir de l'information additionnelle? Je me le demande notamment donc pour qu'on soit vraiment éclairé sur l'état actuel de la situation et les tenants et aboutissants des décisions qu'on pourrait prendre. Alors, moi, très disposé donc à collaborer avec tous les collègues et toutes les collègues ici présents, et hâte d'aborder donc les discussions sur ces enjeux-là. Merci.

La Présidente (Mme Boivin Roy) :  Merci, M. le député. Alors, Mme la députée de La Pinière, pour vos remarques préliminaires.

• (12 heures) •

Mme Caron : Merci, Mme la Présidente. Alors, comme les collègues, et je partage le... le souci de bien faire le travail, non pas de perdre le temps, mais, comme le ministre l'a dit, de... bien, en fait, je dis, de prendre le temps pour, comme le ministre l'a dit, de s'assurer que tout le monde comprend bien ce qu'on est en train de faire. L'objectif du projet de loi de protéger les victimes, puis, évidemment, on veut idéalement prévenir ce genre de comportement dans tous les milieux de travail pour pouvoir protéger toutes les victimes, et on espère réduire aussi le nombre de victimes. Alors je pense que ça va être important qu'on s'assure que c'est le plus... malgré, c'est très délicat toutes ces questions-là, que la mise en application de la loi sera le plus simple possible à faire. Donc, que ce soit clair, par exemple, qu'on n'est pas une victime dans... dans... qui, dans un milieu comme l'enseignement supérieur et une victime qui est dans un milieu comme le secteur de la construction, et qu'on ait des définitions différentes qui fassent en sorte que dans un tel milieu, la victime va recevoir le traitement, comme... que le... que la loi prévoit et que l'autre victime, bien, aura aussi le traitement de son dossier, mais avec un résultat peut-être différent, parce que la définition... il y a des éléments de la définition qui ne sont pas dans une loi et qui sont dans l'autre. Alors, je pense qu'il va falloir s'assurer que tous les angles sont couverts dans tous les milieux de travail pour que ce soit équitable pour tous et pour toutes. Je suis donc à cet égard là, heureuse d'avoir constaté, durant les consultations, l'ouverture dont le... le ministre faisait preuve par rapport aux propositions qui étaient faites ou aux préoccupations qui étaient soulevées. Alors, mon souhait, évidemment, c'est que cette ouverture-là continue pendant l'étude détaillée pour qu'on s'assure d'avoir le projet de loi et, au bout... en bout de piste, la loi qui sera la plus utile possible et dont la mise en application ne fera pas problème. Et quand je parle de la mise en application, c'est qu'on veut protéger toutes les personnes dans tous les milieux de travail...


 
 

12 h (version non révisée)

Mme Caron : ...mais on comprend que les milieux de travail ne sont pas tous égaux... ce sens que certains milieux... dans certains milieux de travail, il y a des conventions collectives, où il y a possibilité de faire des griefs. Dans d'autres milieux de travail qui ne sont pas syndiqués, il peut y avoir de très grandes entreprises, où on a des directions de ressources humaines qui sont bien dotées, avec des personnes qui peuvent faire... qui ont les compétences et les connaissances nécessaires pour mener à bien les enquêtes et bien traiter les dossiers, alors qu'il y a de très petites entreprises où les ressources sont moindres, les ressources ne sont pas présentes à l'interne. On peut dire que ces entreprises-là paieront pour des ressources externes. C'est certain que c'est faisable, mais en même temps, on ne veut pas que ça devienne un fardeau épouvantable sur les petites entreprises, d'où l'importance de s'assurer que la mouture finale du projet de loi fera en sorte que les processus qu'il faudra respecter seront clairs et le plus... le plus simple, et je le mets entre guillemets, parce que, comme je l'ai dit tout à l'heure, ce sont des questions délicates. Il faut que ce soit bien fait puis il faut que ce soit fait par des personnes qui ont... qui ont les compétences. On a appris durant les consultations que les membres du Barreau avaient droit à une formation, ils pouvaient suivre une formation de 60 heures pour traiter ce genre de cas, parce que c'est très délicat. Il faut savoir, surtout si on... Bien, évidemment, le Barreau offre des formations aux membres du Barreau, mais d'autres personnes qui ne sont pas avocats ou avocates spécialisés dans ce domaine ont besoin aussi de formation. Donc, comment... comment ça va... ça va s'articuler tout ça? C'est important de bien... de bien faire le travail parce qu'on veut encore une fois que toutes les victimes aient un traitement qui est équitable.

Et je reviens sur un point, j'y reviendrai sûrement durant l'étude détaillée, un point qui me... qui me préoccupe à propos des utilisateurs, des personnes qui utilisent le programme chèque emploi-services pour recevoir des services de soutien à domicile, par exemple. Alors, on parle de personnes aînées qui ont peut-être des troubles cognitifs ou qui ont des... des... qui sont en perte d'autonomie. On parle de personnes en situation de handicap, qui ont besoin d'aide à domicile et qui utilisent le programme emploi-services dans le cadre duquel... ce chèque emploi-services, donc dans le cadre duquel la personne qui reçoit les services est considérée comme employeur. Alors, cette personne-là, quant à moi, ne peut pas mettre en place tout ce qui est prévu dans la loi. Par contre, on veut quand même que la personne qui vient rendre le service, l'employé qui vient rendre le service, préposée par exemple, soit protégée elle aussi, ou lui aussi, par ce qui est prévu dans la loi en cas de harcèlement ou de violence à caractère sexuel dans le cadre du travail. Parce que la personne qui reçoit le service, même si ce n'est fort probablement pas elle qui va faire... qui pourrait commettre des violences à l'égard de l'employé, bien, il peut y avoir d'autres personnes dans l'entourage, dans la famille ou dans les voisins qui... qui sont sur le milieu de travail de la préposée, par exemple. Alors ça, comment... comment ça va s'articuler? C'est une... c'est une préoccupation parce qu'il ne faudrait pas que les gens décident de ne plus avoir recours au programme chèque emploi-services, parce que la... le fardeau, qui leur serait amené par... par cette loi, serait... serait impossible à mettre... à mettre en place, à respecter.

Alors ça, c'est un de mes grands... de mes grandes préoccupations. Et aussi préoccupation qui... dont on pourra parler, celle de s'assurer que les milieux de travail, qui sont aussi des milieux de vie pour personnes vulnérables, soient protégés dans le sens où on ne soit pas... que les... les employeurs sachent si un candidat potentiel à travailler dans leur milieu a déjà été reconnu fautif de violences à caractère sexuel ou de harcèlement psychologique ou harcèlement sexuel, parce qu'on ne voudrait pas que... qu'on continue. Parce que ça s'est... ça s'est produit, on l'a vu dans certains mémoires qui nous ont apportés des cas. Donc, on ne voudrait pas qu'une telle personne vienne travailler dans un milieu où il y a des résidants qui sont...

Mme Caron : ...sont très vulnérables et où il y a aussi des employés, donc les collègues de cette personne-là, qui sont des populations très vulnérables, parce qu'on le sait, les femmes sont le plus souvent les victimes de ces actes-là, et, dans des milieux de vie comme CHSLD, comme maison des aînés, comme ressource intermédiaire, comme RPA, bien, il y a beaucoup de femmes, beaucoup de femmes immigrantes et qui sont aussi des victimes. Je ne sais pas si j'oserais... j'ose utiliser le mot des victimes peut-être faciles ou qui n'oseront pas nécessairement porter plainte. Et on veut que toutes ces femmes, que tous les employés, hommes ou femmes, soient protégés par cette loi. C'est l'objectif, je le pense, du projet de loi. Alors, ce sont des questions fort importantes dont on aura à discuter. Et, comme mon collègue député de l'Acadie, c'est un honneur pour moi de pouvoir faire partie des discussions des travaux sur ce projet-là. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci beaucoup, Mme la députée. Alors, nous en sommes maintenant au bloc des motions préliminaires. M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve, vous nous avez déjà annoncé avoir une motion que vous avez dûment déposée et transmise à la commission en vertu de l'article 190. Maintenant, est-ce qu'il y aurait d'autres motions préliminaires? Très bien. Alors, M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve, on va vous demander de lire votre motion.

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. Ça va comme suit :

«Qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure la Commission de l'économie du travail, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 42, Loi visant à prévenir et à combattre le harcèlement psychologique et la violence à caractère sexuel en milieu de travail, tienne des consultations particulières et qu'à cette fin elle l'entende les groupes suivants : Fédération autonome de l'enseignement, Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec, Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux, Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec, Centrale des syndicats démocratiques ainsi que tout autre groupe jugé pertinent par la Commission.»

Est-ce que j'explique tout de suite, Mme la Présidente? Est-ce que j'explique tout de suite la motion?

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Juste un instant, on attend de voir la projection de la motion.

On va suspendre une petite minute.

(Suspension de la séance à 12 h 07)

(Reprise à 12 h 08)

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Voilà. Merci beaucoup. Donc, M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve, vous avez 30 minutes pour discuter de votre motion et les représentants des chefs des groupes parlementaires auront également la même durée, 10 minutes pour les autres intervenants. Alors, la parole est à vous.

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. J'ai fait une longue intervention hier au salon bleu sur l'adoption du principe et j'y ai fait un segment sur ma déception quant au nombre de groupes qui ont été invités pendant la semaine dernière où on a fait les audiences. Je souligne au passage que ce n'est pas toujours facile de négocier avec le bureau du leader de mon estimé collègue, le leader du gouvernement. Ce n'est pas simple. Il faut toujours, comme, étirer, étirer, étirer. Mais bon, c'est la vie, c'est la négociation et ce n'est pas nous qui sommes majoritaires.

• (12 h 10) •

Or, moi, j'ai un principe de base. Lorsqu'on va aller toucher au droit du travail, le code, la loi des normes, la loi de la santé et sécurité, la LATMP, c'est toutes des lois qu'on modifie à travers ce projet de loi là, et bien d'autres lois, d'ailleurs, loi de la protection du stagiaire, loi du statut professionnel des arts visuels, j'en ai-tu oublié, loi des relations de travail, la formation professionnelle dans l'industrie de la construction... lorsqu'on touche au droit du travail, à mon avis, on ne peut pas faire l'économie d'entendre tous les groupes qui représentent les travailleurs et travailleuses. Je serais ouvert aussi à ce qu'on inclut, évidemment, les groupes qui représentent les patrons aussi pour les mêmes raisons. Pourquoi? Parce que ce sont eux et elles qui vont avoir à appliquer ce droit du travail que nous sommes en train de modifier. Ce n'est pas moi, ce n'est pas M. le ministre, c'est les groupes sur le terrain, à plus forte raison, des groupes représentant les travailleurs et travailleuses. Est-ce que tel ou tel universitaire, on aurait pu l'inviter ou pas? Il y a de la place pour en débattre, ils ont... je veux dire, ils peuvent émettre leur opinion, tout ça. Mais les gens qui auront à gérer les conventions collectives, l'application de normes du travail, l'application de principe de santé et sécurité... On ne peut pas dire...

M. Leduc : ...ah bien, il y a eu deux, trois centrales syndicales, ils ont représenté le mouvement. En plus que, dans le cas qui nous intéresse, le projet de loi no 42, si on fait l'examen des différents mémoires qui ont été déposés par les centrales syndicales, c'est très éclaté. Souvent, les centrales syndicales... bien, souvent, sur certains projets de loi, il y a le camp des travailleurs, le camp des patrons, bon, grosso modo, avec quelques nuances, ça reprend grosso modo les mêmes choses, mais, dans ce cas-ci, les centrales syndicales avaient quand même beaucoup d'approches distinctes, notamment sur les fameuses clauses d'amnistie. Je pense qu'il n'y avait aucune centrale qui avait exactement la même position sur les clauses d'amnistie, il y avait des nuances, là, des virgules, mais on avait un portrait très éclaté, ce qui n'est pas une mauvaise chose. Les centrales syndicales, c'est démocratique, c'est des gens qui réfléchissent puis ils ont tous des façons de voir différentes... le droit du travail, et ils auraient dû être entendus, chacune d'entre elles. Là, je ne suis pas en train de dire qu'on invite tous les syndicats locaux de toutes les shops du Québec, hein, je ne suis pas là du tout, mais, honnêtement, des regroupements syndicaux de la taille de la Fédération autonome de l'enseignement, de la FIQ, de l'APTS... des gros syndicats, ça, là, ce n'est pas petit, là, c'est des milliers de personnes, c'est des conseillers syndicaux. Ils ont des départements de recherche. Ils en ont produit, des mémoires, ils nous les ont envoyés, ils sont dans le Greffier, là. Moi, j'en ai rencontré quelques-uns, de ces groupes-là, en parallèle. N'ayant pas été entendus, j'imagine qu'ils ont sollicité aussi mes collègues des autres oppositions, mais moi, je les ai rencontrés aussi parce que je voulais les entendre. J'aurais pu juste dire : Bah! Je vais juste lire votre mémoire, puis merci de votre contribution. Mais je voulais les entendre puis avoir un échange avec eux, hein? On a un ancien premier ministre qui disait... hein, d'entendre l'autre partie, mais on ne l'a pas fait complètement, on ne l'a pas fait suffisamment lors de cette commission.

Et, encore une fois, moi je ne suis pas quelqu'un qui abuse de la procédure des motions préliminaires, là, on a une négociation, on s'entend sur une liste puis on procède, mais je réitère que, pour moi, le principe de base devrait être le suivant, et je... peut-être que je m'en sers aussi pour les audiences qui viendront sur le projet de loi sur la construction, quand on touche au droit du travail, on devrait inviter ou, en tout cas, accepter la requête de se faire entendre de chacune des organisations syndicales qui le désire, parce qu'on touche à leur droit de travail. Ce n'est pas juste à nous, le droit du travail, c'est aux gens qui l'appliquent, c'est aux gens qui le traitent, qui se mettent les mains dans le pétrin, comme on dit, pour moudre la pâte.

Alors, c'était ma déception, en plus qu'on avait un après-midi de libre, jeudi dernier, qu'on aurait pu consacrer à ça, à rajouter quelques groupes. Je comprends, avec le recul que, finalement, c'était la date qui avait été choisie pour présenter le projet de loi de la construction du ministre. Je pense que ça aurait pu être retardé un peu pour respecter ce principe du fait que tous les groupes qui représentent des travailleurs et des travailleuses dûment accrédités par le Code du travail devraient être entendus quand on touche au droit du travail. Merci.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci, M. le député. Alors, est-ce qu'il y a d'autres commentaires sur la motion? M. le député de l'Acadie.

M. Morin :Oui, Mme la Présidente. Merci. En fait, je trouve intéressante la motion de mon collègue. C'est vrai que ma compréhension de nos travaux parlementaires, c'est que c'est le... enfin, l'expérience que j'ai eue dans des dossiers en justice, c'est que c'était le bureau du leader, qui est aussi le ministre de la Justice, qui... bon, finalement, après nos recommandations, envoyait des invitations.

Maintenant, je constate que c'est un projet de loi qui... bien, je l'ai dit d'emblée, qui est important puis qui est essentiel, je pense, pour toute la question du marché du travail au Québec, des travailleurs, des travailleuses, mais aussi des patrons. Et compte tenu de l'impact de ces dispositions-là, c'est toujours, je pense, important de pouvoir écouter le plus grand nombre de groupes possible, particulièrement quand on est dans l'opposition, parce que, non seulement ça nous permet de lire les mémoires mais ça nous permet aussi d'entrer dans un dialogue constructif avec plusieurs groupes.

Et je constate, entre autres, que, parmi certains groupes qu'on avait demandés... et moi, je n'ai pas eu le privilège d'entendre les groupes précédemment, mais j'ai regardé, j'ai lu les mémoires, on voulait entendre la commission...

M. Morin : ...les droits de la personne. Je comprends qu'ils ont déposé un mémoire et on a un peu le sens de ce qu'ils voulaient dire, mais lire un mémoire puis entrer dans un dialogue, poser des questions à un groupe, ça permet parfois de nous faire réaliser qu'il y a des éléments qu'on n'avait pas vus. Et je vais vous donner... je vais vous donner un exemple de ça.

Dans la session dernière, j'ai passé un grand nombre d'heures dans le fameux projet de loi qui a modifié la Loi sur l'expropriation au Québec. Et je me souviens, entre autres, d'une experte, Me Burel, qui a déposé un mémoire, mais quand elle est venue nous parler, elle a été capable évidemment de... non seulement de bonifier, mais de nous donner des explications particulières, puis de nous expliquer concrètement sur le terrain ce qui allait donner... ce qui allait arriver de ces modifications. Donc, tout ça pour vous dire que, pour moi, c'est très important. Et je constate que, bon, la Commission des droits de la personne, on ne l'a pas entendue. On m'informe également que nous, on avait demandé d'entendre le regroupement des jeunes chambres de commerce, ça n'a pas été accepté, ça n'a pas été retenu, puis, également Force jeunesse. Ce sont des groupes importants qui, quant à moi, représentent aussi éventuellement l'avenir du Québec. C'est ces gens-là qui, éventuellement, auront un rôle à jouer dans le milieu du travail, que ce soit comme propriétaires d'entreprise ou comme représentants syndicaux, travailleurs ou travailleuses, etc.

Et donc d'où l'importance, d'où l'importance d'entendre le plus de groupes possibles, non pas pour retarder indument des travaux, là, ce n'est pas... ce n'est pas l'objectif, mais quand on touche à des éléments qui sont tout aussi importants, je pense que nous, en tout cas, comme législateurs, plus on a de groupes, plus on a d'opinions, plus on a de recommandations et de conseils, plus ça permet éventuellement d'adopter des projets de loi qui vont être très pertinents pour... pour la population québécoise. Donc, c'est des remarques que je voulais partager avec les membres de la commission en ce qui a trait ou en lien avec la motion que mon, en fait, collègue parlementaire, député d'Hochelaga a présentée. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci, M. le député de l'Acadie. Alors, est-ce qu'il y a d'autres remarques préliminaires? Parfait. Du côté de la banquette du ministre.

M. Boulet : On a entendu 16 groupes, Mme la Présidente, des groupes qui sont extrêmement représentatifs de la société québécoise, qui ont été discutés entre les partis politiques, incluant le parti gouvernemental, et moi, j'ai énormément de respect pour l'APTS et la FIQ, qui n'étaient pas d'ailleurs proposées, ni par mon collègue du Parti libéral ou mon collègue du Parti québécois. J'ai beaucoup de respect pour la Commission des droits de la personne. Pas Force Jeunesse, mais, en même temps, je vous rappellerai qu'on a entendu la CSN, la FTQ, la CSQ, on a entendu les trois expertes, on a entendu Juripop, puis on a entendu la Fédération des chambres de commerce, le Conseil du patronat. Je pense qu'on a un échantillon qui est extrêmement représentatif, encore une fois. Mais moi, je sais que les groupes auxquels vous avez fait référence, on a analysé les mémoires, on a tenu compte des recommandations. Et, comme je mentionnais lors de mes propos préliminaires, on l'a fait avec attention, considération, puis on les remercie pour... Je profite de l'occasion pour les remercier de leur intérêt et d'avoir préparé des mémoires à notre attention. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci, M. le ministre. Alors, on comprend que M. le député de Jean-Talon, vous auriez des remarques à effectuer. Donc, vous avez 10 minutes.

• (12 h 20) •

M. Paradis : Oui, merci. Puis j'ai bien... j'ai bien entendu le ministre. J'aurais... moi, je suis très intéressé aussi par la motion de mon collègue le député d'Hochelaga-Maisonneuve. Dans sa présentation, il a beaucoup insisté sur les syndicats et les gens qui représentent les employés en matière d'emploi. Je pense que c'est sage, en effet, de chercher à consulter le plus largement possible lorsqu'on vient toucher des dispositions fondamentales du droit du travail. Et là, il y a une ouverture aussi. Il a dit : On pourrait en profiter aussi pour entendre d'autres personnes. Je pense qu'il y a... du côté patronal, du côté des employeurs, on n'a peut-être pas non plus fait le tour de la question, M. le ministre. Et...

M. Paradis : ...je reviens là-dessus. Sur le plan juridique, je pense que des avis objectifs aussi pourraient nous aider. Je pense qu'on n'a pas entendu, par exemple, la conférence des arbitres de griefs, qui sont parmi les principaux concernés, sur la mécanique, sur la façon dont on prend des décisions, sur ces dispositions-là. Et je comprends que la motion n'est pas présentée, là, du tout, là, dans une optique, là, de... de ralentir les travaux ou de faire de la procédure, mais bien dans une perspective d'un éclairage le plus complet possible de nos travaux. Et moi, en tout cas, je l'ai mentionné hier, je serais très intéressé à prendre juste un petit peu plus de temps pour entendre des personnes très compétentes qui vont nous donner des recommandations, des avis éclairés sur l'état de la situation actuellement pour qu'on puisse vraiment mieux avancer. Et je pense que ce n'est pas une question, là, de retarder indûment, mais vraiment de prendre un petit peu plus de temps pour, oui, nous... nous alimenter avant de plonger dans des questions très techniques. Puis je le réitère. M. le ministre, on commence notamment avec la définition de violences sexuelles, puis je pense qu'un des premiers éléments, ensuite, qu'on va voir, c'est la fameuse question des clauses d'amnistie. Je pense qu'il faut faire la bonne chose et qu'on pourrait se donner un petit peu plus de temps et un petit peu plus de matériel pour bien décider. Moi, je suis... je suis intéressé à ce qu'on... à ce qu'on puisse réouvrir aux personnes mentionnées et peut être à d'autres, M. le ministre. J'y pense encore, je les mentionne, je ne veux pas les... leur mettre trop de pression sur les épaules, mais le Barreau du Québec, notamment, s'est montré ouvert à nous alimenter sur d'autres questions. Et ça, ça pourrait être très intéressant pour tout le monde.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci, M. le député de Jean-Talon. Alors, M. le député de Hochelaga-Maisonneuve, j'ai vu votre petit doigt. Cependant, en vertu de l'article 209 et 217 de notre règlement, vous n'avez droit qu'à une seule intervention et aucune réplique. Alors, le débat maintenant étant clos, nous allons mettre aux voix cette motion. Donc, les membres de la commission qui sont pour la motion.

Des voix : ...

M. Leduc : ...demanderais un vote par appel nominal.

Une voix : ...un dernier commentaire.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Malheureusement. M. le ministre.

M. Boulet : O.K. Parfait.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Alors, du côté de la banquette gouvernementale...

La Secrétaire : Je vais aller le faire moi-même.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Très bien. Alors, la secrétaire va procéder à la mise aux voix.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention.

M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve)?

M. Leduc : Pour.

La Secrétaire : M. Boulet (Trois-Rivières)?

M. Boulet : Contre.

La Secrétaire : Mme Tremblay (Hull)?

Mme Tremblay : Contre.

La Secrétaire : Mme Mallette (Huntingdon)?

Mme Mallette : Contre.

La Secrétaire : M. Dufour (Mille-Îles)?

M. Dufour : Contre. Pas Mille-Îles, Abitibi-Est.

La Secrétaire : Excusez-moi de l'erreur. Oui, M. Dufour (Abitibi-Est)?

M. Dufour : Contre.

La Secrétaire : Mme Poulet (Laporte)?

Mme Poulet : Contre.

La Secrétaire : M. Morin (Acadie)?

M. Morin : Pour.

La Secrétaire : Mme Caron (La Pinière)?

Mme Caron : Pour.

La Secrétaire : Mme Boivin Roy (Anjou—Louis-Riel)?

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Abstention.

La Secrétaire : Alors, la motion est rejetée.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci beaucoup, Mme la secrétaire. Donc, puisque nous avons terminé le bloc des motions préliminaires, selon les discussions entre les groupes parlementaires, il y a un plan de travail qui nous a été proposé par le ministre. Est-ce qu'il y a consentement pour étudier le projet de loi selon le plan de travail et la feuille de route qui y est incluse?

Des voix : Consentement.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Consentement. Merci beaucoup. Alors, M. le ministre, la parole est à vous.

M. Boulet : Bien, je demanderais une suspension, Mme la Présidente, de quelques minutes. Je vais présenter deux amendements puis...

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Très bien.

M. Boulet : ...juste pour me préparer puis m'assurer qu'ils sont bien déposés. Ils sont bien déposés, les deux amendements? O.K. Quelques minutes.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci beaucoup. Alors, suspension des travaux...

(Suspension de la séance à 12 h 24)


 
 

12 h 30 (version non révisée)

(Reprise à 12 h 31)

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci beaucoup. Alors, M. le ministre, on comprend que vous avez deux amendements en vertu des articles 196 et 197. Est-ce qu'il y a consentement pour que le ministre puisse lire les amendements?

Des voix : Consentement.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Consentement. Merci. M. le ministre.

M. Boulet : Oui, merci, Mme la Présidente. Donc, le premier amendement, c'est l'article 18 : Insérer dans le paragraphe 4° du troisième alinéa de l'article 81.19 de la Loi sur les normes du travail, proposé par le paragraphe 2° de l'article 18 du projet de loi, et après «un document», «incluant la personne désignée pour en prendre charge».

Donc, commentaire. On a entendu plusieurs groupes. Donc, cet amendement-là vise à préciser que l'employeur doit indiquer la personne désignée pour prendre en charge une plainte ou un signalement dans la politique de prévention et de prise en charge des situations de harcèlement psychologique. Je pense que ça ne requiert pas d'explication additionnelle. Et le deuxième amendement... Oui, vas-y.

M. Leduc : Pour bien comprendre, là...

M. Boulet : Bien, il y en a... Il y a quelques groupes qui suggéraient que pour bonifier le contenu minimal de la politique de prévention et de prise en charge, qu'on indique aussi la personne qui est désignée pour en prendre charge, la personne qui s'en occupe de l'application et de l'effectivité de la politique, là.

M. Leduc : Donc, on crée l'obligation d'avoir une politique à travers le projet de loi.

M. Boulet : Oui. Puis il y a le contenu qui est déterminé par plusieurs alinéas. Et, dans le contenu, ce que des groupes nous ont dit, il faudrait aussi que vous mentionniez qui...

M. Leduc : Qui va s'en occuper pour que... savoir à qui on...

M. Boulet : ...va s'en occuper de, tu sais, la personne qui veut le signaler ou la personne qui veut faire une plainte, qui est responsable de l'application de la politique.

M. Leduc : Que ça soit signalé dans la politique.

M. Boulet : Exact.

M. Leduc : Pas nécessairement, mettons, sur un babillard ou...

M. Boulet : Que ce soit écrit dans la politique qui est la personne désignée pour en prendre charge.

M. Leduc : Ça fait que si moi je suis victime d'une agression, je réfléchis à potentiellement faire une plainte, je sais qu'il y a une politique. Il faut que je la trouve d'abord.

M. Boulet : Bien, la politique.

M. Leduc : Mais bon.

M. Boulet : Oui, mais en même temps, il y a de la formation...

M. Leduc : Oui, oui, oui.

M. Boulet : ...de l'information, de la sensibilisation.

M. Leduc : Mais, en tout cas, il y a...

M. Boulet : Mais tu vas voir, dans la politique, c'est à qui. Qui est la personne, qui est responsable de recevoir ton signalement.

M. Leduc : La politique de chaque employeur.

M. Boulet : Exact.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve, pour une prochaine fois, vous m'indiquerez que vous souhaitez prendre la parole, s'il vous plaît, plutôt que d'interpeler le ministre directement? M. le député de l'Acadie.

M. Morin : Merci. Merci, Mme la Présidente. Merci pour le rappel. En fait, là, je comprends, M. le ministre, que vous nous avez proposé un plan de travail, mais que, dans votre plan de travail, finalement, on passe directement à la Loi sur les normes du travail et que vous vous intéressez à l'article 18 du projet de loi. Je... Non? Ce n'est pas ça?

M. Boulet : Non, non. En fait, c'est conformément à une habitude de travail que j'ai développée avec le collègue d'Hochelaga-Maisonneuve, avant d'entreprendre des discussions, je dépose en amont les amendements et je fais un commentaire explicatif. Et après ça, ça nous permet d'aller beaucoup plus rondement. Puis ça permet à vos conseillers, si jamais ils ont des remarques à faire ou une modification de l'amendement, à bien se préparer. C'est juste pour des raisons de planification. C'est une habitude de travail. Je pense qu'elle est saine et elle est louée constamment par mon collègue d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Morin : Alors donc...

M. Morin : ...je... Je comprends que, dans le cadre de la planification des travaux, nous pouvons faire des remarques, finalement, préliminaires avant qu'on se consacre, selon votre plan de travail, à l'étude comme telle. Je n'y vois pas d'inconvénient, M. le ministre, là.

M. Boulet : Puis vraiment des remarques... Puis vraiment des remarques préliminaires, comme vient de le faire le collègue d'Hochelaga-Maisonneuve. Et moi, c'est mon habitude aussi. À chaque fois, j'essaie le plus rapidement possible, quand mes amendements sont disponibles, de les transmettre à la greffière pour que ça puisse être disponible à vous autres.

M. Morin : D'accord. Bien, en fait, je peux vous dire que dans un premier temps je reçois bien cette proposition-là, M. le ministre, parce que, dans la préparation, avec ma collègue, la députée de La Pinière a, en vue de l'étude article par article, un questionnement que l'on avait en regardant l'article 18 du projet de loi, et plus particulièrement le paragraphe 4°, c'est de dire : Bien, à qui?

M. Boulet : Bien, exactement.

M. Morin : Parce que... Parce que... Bon. Puis on pourra reparler éventuellement de toute la question de la politique, mais un des éléments qui m'apparaît hyper important. On a beau avoir une politique, si elle n'est pas connue, si elle n'est pas diffusée, si elle n'est pas expliquée, puis si les employés ne savent pas à qui s'adresser, bien là, on vient de diminuer d'une façon importante, à mon avis, l'efficacité de la politique. Donc, je comprends qu'avec cette proposition-là, l'employeur ou la personne qui devra développer la politique devra clairement identifier une personne pour en prendre charge.

M. Boulet : Tout à fait.

M. Morin : Bien.

M. Boulet : Tout à fait.

M. Morin : Parfait. Maintenant... Puis on pourra aussi en reparler, mais est ce que vous voulez... Je vois que ce n'est pas le cas. On l'identifie. Est-ce que vous voulez qualifier le statut de cette personne-là au sein de l'organisation pour évidemment s'assurer que les gens qui auront à porter plainte pourront s'adresser à quelqu'un, par exemple, qui... qui est assez indépendant, qui a les coudées franches pour agir, compte tenu de la nature même de la plainte?

M. Boulet : Oui, ça ne veut pas dire que c'est nécessairement la personne qui va faire enquête, mais on ne nomme pas la personne généralement parce que ça peut être par exemple le coordonnateur, ou le directeur en ressources humaines, ou la directrice en ressources humaines qui peut être une personne différente. Mais il faut dire qui est la personne désignée, qui va recevoir les signalements, les plaintes. Et oui, tout à fait, il faut que ce soit clair, clairement énoncé. Et c'était le but des représentations des groupes qui sont venus en consultations particulières. Vous avez la même compréhension que j'ai.

M. Morin : Merci.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Mme la députée de La Pinière.

Mme Caron : Merci, Mme la Présidente. Alors, est-ce que je... Est-ce que je comprends que, dans votre méthode de travail que vous avez développée avec le collègue, vous déposez les amendements parce que vous en avez uniquement... Bon, j'ai entendu parler de deux amendements. Donc, vous avez seulement deux amendements à déposer sur l'ensemble du projet de loi, ou simplement deux aujourd'hui, ou deux qui sont prêts maintenant, puis il y en aura d'autres, et vous fonctionnerez de la même façon.

M. Boulet : C'est une bonne question. Je pense qu'on va être prêts à passer au vote, là, tellement on en discute. Là-dessus, Alexandre, collègue, me fait aller un peu plus loin dans nos discussions. En fait, c'est les deux amendements que je pouvais préparer et déposer ce matin, qui ne requéraient pas une approbation par le Conseil des ministres. Oui, collègue de La Pinière, j'ai d'autres amendements que je devrai présenter au Conseil des ministres mercredi, la semaine prochaine. Donc, à la poursuite de nos travaux, j'aurai d'autres amendements, mais pour ce matin, c'est les deux amendements que j'étais en mesure de déposer. Mais les autres amendements qui requièrent une approbation, ils concernent plus la Loi sur les accidents de travail maladie professionnelles. Donc, c'est un de nos derniers blocs et c'est une autre des raisons qui me motivaient à y aller de cette manière-là.

Mme Caron : Merci.

M. Boulet : C'était une excellente question.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : M. le ministre. On va vous inviter à lire rapidement votre deuxième amendement sur l'article 19.

• (12 h 40) •

M. Boulet : Merci, Mme la Présidente. Article 19. Remplacer le sous-paragraphe a) du paragraphe 1° de l'article 19 du projet de loi par le suivant :

«a) par le remplacement de «123.7, 123.15 et 123.16» par «123.15, 123.16 et 123 point...

M. Boulet : ...explication. Bon, en fait, c'est pour ajouter le nouvel article 123.17 qui concerne, là, la possibilité pour les partis de convenir de la confidentialité, là, dans une entente de confidentialité, et de convenir de la levée de cette confidentialité-là. Donc, énumérer cette disposition-là aussi comme devant faire partie intégrante d'une convention collective. Donc, ça avait été omis dans le projet de loi initial, donc c'est une précision additionnelle. Ça devra aussi faire partie de la convention collective de travail convenue entre les parties, et ça, ça avait été... est-ce que ça avait été souligné? Mais ça avait été souligné dans l'analyse qui a été faite suite à la réception de mémoire.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci, M. le ministre. Alors, juste en guise de rappel pour la gouverne de nos travaux, les deux amendements ont été lus. Pour l'instant, simplement, l'objectif du ministre était d'annoncer et de présenter ceux qui s'en venaient, évidemment, question de courtoisie, question de bonne collaboration entre les collègues. Mais évidemment les amendements seront présentés en bonne et due forme selon le plan de travail. M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Je veux juste réitérer à quel point c'est apprécié du côté des oppositions, en tout cas, de chez nous à Québec solidaire, parce que, bien que ce n'est pas des amendements, justement, fondamentalement structurants ou déstructurants du projet de loi. Nous... de voir un peu où est-ce que le ministre s'en va, aussi, où est-ce que le ministre ne va pas, s'il ne dépose pas d'autre amendement, en tout cas, là on sait qu'il y en aura d'autres sur d'autres aspects d'une autre loi. Mais, en ce sens-là, nous, après ça, on se retourne puis on dit : O.K. Bien, dans ce cas-là, il bouge là-dessus ou il ne bouge pas là-dessus, on peut commencer déjà à se faire une tête puis à écrire des choses. Donc, c'est une pratique que j'apprécie, je voulais le souligner.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci pour vos commentaires. Je pense que c'est ce qui fait que nous avons tous gaiement fait entorse à la procédure. Alors, M. le ministre, votre plan de travail. Vous débutez avec l'article 33.

M. Boulet : Oui. Merci. Article 33. L'article 1 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail, modifié par l'article 122 du chapitre 27 des lois de 2021, est de nouveau modifié par l'ajout, à la fin, de la définition suivante :

«Violence à caractère sexuel : toute forme de violence visant la sexualité ou toute autre conduite se manifestant notamment par des gestes, des pratiques, des paroles, des comportements ou des attitudes à connotation sexuelle non désirés, qu'elles se produisent à une seule occasion ou de manière répétée, ce qui inclut la violence relative à la diversité sexuelle et de genre.»

L'article 1 tel que modifié se lit comme suit : «Dans la présente loi et les règlements, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par "Tribunal administratif du travail", le Tribunal administratif du travail institué par la Loi instituant le Tribunal administratif du travail.

«Violence à caractère sexuel : Toute forme de violence visant la sexualité ou toute autre conduite... inconduite se manifestant notamment par des gestes, des pratiques, des paroles, des comportements ou des attitudes à connotation sexuelle non désirés, qu'elles se produisent à une seule occasion ou de manière répétée, ce qui inclut la violence relative à la diversité sexuelle et de genre.»

Commentaire. Donc, ça introduit une définition, la définition qui est nécessaire à l'application des dispositions de la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Merci.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : M. le député de l'Acadie.

M. Morin : Merci, merci, Mme la Présidente. Alors, M. le ministre, quand j'ai lu l'article 33 et la définition... en fait, la première question qui m'est venue à l'esprit, c'est : Est-ce qu'on retrouve des définitions semblables ou qui veulent définir le même type de comportement indésirable dans d'autres lois? Parce que le collègue député d'Hochelaga le mentionnait dans nos travaux, évidemment, éventuellement, les tribunaux pourront s'en servir pour interpréter l'esprit du législateur, il y aura évidemment un produit fini. Mais il y a une chose qui est sûre, c'est que, plus on a des définitions qui sont cohérentes, se ressemblent, comportent les mêmes éléments, plus évidemment ça va faciliter un travail d'interprétation. Et d'ailleurs...

M. Morin : ...pour éviter évidemment éventuellement des décisions qui pourraient être contradictoires. Et le Barreau du Québec, dans son mémoire, soulevait cet enjeu, et permettez-moi de citer le mémoire du Barreau à la page 3. Le Barreau disait : «Nous saluons la volonté du législateur de mieux reconnaître et de faciliter l'indemnisation de ce type de légions... de lésions. Cependant, nous souhaitons attirer l'attention sur l'enjeu que soulève l'ajout de cette fonction — pardon. Rappelons d'abord que la notion de violence à caractère sexuel a été introduite en 2018 à la Loi sur les normes du travail. La Loi sur la santé et la sécurité du travail a également été modifiée par l'ajout d'obligations pour l'employeur. Dans la Loi sur les normes du travail, on a une définition de harcèlement psychologique.»

Et le Barreau disait : Nous sommes d'avis que la coexistence de deux notions distinctes de harcèlement psychologique et de violence à caractère sexuel pourrait donner lieu à des interprétations et à des décisions différentes basées sur les mêmes faits. Plus précisément, nous souhaitons porter à l'attention du législateur que la coexistence de ces deux définitions distinctes peut poser une difficulté dans le contexte où deux divisions du Tribunal administratif du travail sont en cause. D'autant que quand on regarde aussi dans l'ensemble du corpus législatif québécois, il y a quelques années, le législateur québécois dans la Loi sur l'enseignement supérieur a aussi adopté une définition pour lutter plus particulièrement sur les campus d'établissements d'enseignement supérieur. Donc une définition visant à lutter contre les violences, évidemment à caractère sexuel.»

Donc, est-ce que, dans votre travail, M. le ministre, vous avez tenu compte de ces autres lois? Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de mettre en application les recommandations proposées par le Barreau du Québec et s'assurer que, finalement, autant pour les tribunaux que pour les gens qui veulent porter plainte ou les employeurs qui vont devoir adopter des politiques pour éviter ce genre de comportement, là, on ait une définition qui va... qui va éviter des incohérences ou enfin qui vont complexifier le travail de l'ensemble des intervenants dans ce... dans ce domaine? C'est... c'est ma première question.

M. Boulet : Mme la Présidente, c'est pour des raisons de stabilité et d'harmonie qu'on a retenu cette définition-là, puis là, je veux tenter d'être le plus clair possible. C'est une loi qui vise à combattre, à lutter contre les violences à caractère sexuel, et c'est une définition qui est celle de l'Organisation internationale du travail, et c'est une définition qui est exactement la même de celle qu'on retrouve dans la Loi visant à prévenir et à combattre les violences à caractère sexuel dans les établissements d'enseignement supérieur.

Dans cette loi-là, c'est cette définition-là qui s'impose pour éviter de l'instabilité jurisprudentielle. Puis là, mon collègue d'Hochelaga-Maisonneuve œuvre était là pour le projet de loi n° 59 qui modernisait le Régime de santé-sécurité du travail où on a ajouté la santé psychologique. Bon. On a référé constamment à l'intégrité psychique au-delà de l'intégrité physique et on obligeait, dans un programme de prévention ou un plan d'action, à identifier pour mieux contrôler et éliminer les risques psychosociaux, dont notamment on référait à la violence physique et à la violence psychologique. Puis, souvenez-vous, collègue, la violence physique, psychologique, ça incluait la violence conjugale, familiale et sexuelle. Donc, il y a déjà une obligation d'identifier dans le programme de prévention ou le plan d'action. Ici, c'est une définition qui vise à ajouter des dispositions, mais pas à être une définition qui est redondante...

M. Boulet : ...et dans la Loi sur les normes du travail, c'est différent.

• (12 h 50) •

Et vous faites référence, collègue de l'Acadie... En 2018, la notion de harcèlement psychologique... puis c'est entré en vigueur, je pense, le 12 juin 2018... elle a été modifiée pour dire que le harcèlement psychologique incluait... en fait, on le disait en mentionnant : le harcèlement psychologique comprend une telle conduite lorsqu'elle se manifeste, bon, pour des raisons à caractère... des paroles, tels actes ou de tels gestes à caractère sexuel. Parce que dans le harcèlement psychologique, c'est difficile, quand la plainte est présentée, de savoir s'il va y avoir une connotation sexuelle ou non. Et le corpus... bien, la jurisprudence est bien établie, là, sur les cinq critères qui s'appliquent, là, la répétitivité ou l'événement isolé, l'atteinte à l'intégrité physique ou psychologique... bon, et c'est bien établi. Ça fait que... Et cette loi-là n'a pas la même portée, et il y aurait un risque d'avoir un impact sur les décisions de jurisprudence développées, parce que notre définition est plus large que celle de la LNT, de la Loi sur les normes du travail. Ça fait qu'on ne voulait pas la limiter. Parce que, dans la loi santé et sécurité, moi, ce qui est important pour moi, c'est «sans égard à la gravité», puis avant qu'une atteinte survienne. Ça fait que je trouve que c'est avantageux pour les victimes, et c'est beaucoup plus clair, parce que la violence à caractère sexuel, elle est définie de la façon la plus libérale, entre guillemets, possible.

Puis, enfin, la LATMP, il faut faire attention, parce que la LATMP, aussi, elle, c'est une loi qui a une portée d'indemnisation, puis là il ne faut pas avoir une définition qui réduit la portée de l'indemnisation en vertu de la Loi sur les accidents de travail et maladies professionnelles. On sait que, quand c'est un événement qui survient sur les lieux de travail, par le fait ou à l'occasion du travail, tu peux faire une réclamation à la CNESST puis recevoir une indemnité de remplacement de revenu. Ça fait qu'on ne peut pas avoir non plus une définition qui pourrait être interprétée comme réduisant la portée de la définition de ce qu'est un accident de travail en vertu de la Loi sur les accidents de travail et maladies professionnelles.

Donc, oui, j'ai entendu les groupes, mais j'ai analysé, réanalysé, puis je trouve que ça n'a pas... je veux dire, ça ne tiendrait pas la route, et on créerait... au lieu d'être en quête d'une meilleure harmonie, on créerait comme un chaos dans l'interprétation. Puis je finirais en disant : L'OIT est là. On a une loi qui le définit clairement et qui a exactement la même portée dans le domaine de l'enseignement supérieur, et donc cette définition-là, elle est tout à fait compatible, elle est large, mais elle vise à lutter puis à combattre contre les violences à caractère sexuel, et c'est cette définition-là qui est nouvelle et qui est amenée grâce à ce projet de loi là. Alors, voilà. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci, M. le ministre. Alors, Mme la députée de La Pinière.

Mme Caron : Merci, Mme la Présidente. Alors, M. le ministre, j'ai compris que vous disiez que cette définition-là était celle de la Loi visant à prévenir et combattre les violences dans les établissements d'enseignement supérieur, mais dans celle sur les établissements supérieurs, il y a la notion de moyens technologiques. On dit... Alors que la notion de moyens technologiques, on ne la retrouve pas ici. Et je dirais qu'aussi la notion de moyens technologiques répondrait à une préoccupation qui a été faite, durant les consultations, à propos du télétravail, parce qu'il y a des employés qui sont en télétravail. Alors, puisque la notion de moyens technologiques existe déjà dans la loi pour les établissements supérieurs, je pense qu'on ne viendrait pas réduire la portée de la définition ou de la loi si on incluait cet aspect-là ici.

Et une autre... un autre aspect, une phrase qui est incluse dans la Loi sur les normes du travail, à l'article 81.18, c'est le fait qu'une seule conduite grave peut aussi constituer du harcèlement psychologique si elle porte...

Mme Caron : ...une telle atteinte et produit un effet nocif continu pour la personne salariée. Et certains mémoires nous ont... et certaines personnes qui sont venues en consultation nous ont dit aussi être inquiètes du fait qu'on n'avait pas cette notion de quand... d'un seul événement grave qui constitue aussi du harcèlement. Alors, si on... Je ne pense pas qu'on viendrait réduire la portée de... encore là, de la définition ou de l'actuel projet de loi, si on s'assurait d'ajouter ce point-là qui existe déjà dans la Loi sur les normes du travail et qui, à mon sens, viendrait assurer une cohérence avec la Loi sur les normes du travail.

M. Boulet : C'est un bon point. Je vais m'assurer qu'on soit... C'est parce que c'est important cette discussion-là sur la définition, parce qu'elle va se retrouver aussi dans d'autres articles.

Une voix : ...

M. Boulet : Non, mais j'attendais... Est-ce que... O.K. Je l'ai entendu de certains groupes qui disait : Un seul événement avec un effet nocif. Mais dans notre définition, on en «à une seule occasion», mais on n'a pas l'effet nocif, d'où l'élargissement du concept. Ce n'est pas le rétrécissement du concept, c'est une condition de moins. Donc, la violence à caractère sexuel, telle que définie dans la loi santé-sécurité, qui vise à prévenir, elle est plus large que dans la Loi sur les normes du travail. Puis je comprends votre commentaire, mais c'est l'effet inverse. On l'a «à une seule occasion» puis on n'a pas à prévenir, même s'il n'y a pas d'effet nocif ou de dommage important qui se perpétue dans le temps, comme c'est prévu par la jurisprudence qui interprète la définition dans la Loi sur les normes du travail. C'est quand?

La Présidente (Mme Boivin Roy) : M. le député de l'Acadie.

M. Morin : Oui. Merci...

M. Boulet : ...juste pour compléter, le télétravail est couvert aussi. On l'avait couvert dans la modernisation du régime de santé-sécurité. Vous allez voir, je pense, c'est 5.1 de la loi santé-sécurité, le concept de télétravail est couvert. On avait déjà demandé un avis au Comité consultatif du travail et de la main-d'œuvre qui nous confirmait, et c'était notre interprétation, que les lois du travail s'appliquent au télétravailleur ou à la télétravailleuse. Puis il y a même des dispositions, là, en matière d'inspection, mais je vais juste vous référer à 5.1 de la loi.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci, M. le ministre. Alors, le député de l'Acadie, juste vous indiquer qu'il reste deux minutes avant de devoir ajourner les travaux.

M. Morin : Merci. Merci, Mme la Présidente. Alors, merci, M. le ministre. Vous avez répondu d'emblée à une des questions que j'allais vous poser en ce qui a trait au télétravail. Maintenant... maintenant, indépendamment du télétravail, moi, je veux simplement m'assurer que votre définition couvre aussi toute l'utilisation de moyens technologiques qui peuvent entraîner évidemment des conduites, des messages avec une violence à caractère sexuel et... et je ne vois pas que c'est inclus dans votre définition.

Par contre, quand je vous faisais référence à la loi qui traite de l'enseignement supérieur et des violences, on a pris la peine de mentionner ou de faire référence à des moyens technologiques. Donc, je veux juste m'assurer... Je comprends votre idée de vouloir élargir la définition, mais je veux juste m'assurer que, même dans une situation où on n'est pas en télétravail, un travailleur pourrait très bien utiliser un moyen technologique pour commettre des actes de violence à caractère sexuel auprès de d'autres travailleurs.

M. Boulet : La réponse : Oui, totalement. Et contrairement à l'autre loi que vous mentionnez, on ne fait pas référence au télétravail alors que nous c'est couvert. Donc, toute forme, indépendamment du moyen, de violence à caractère sexuel, c'est inclus dans la définition que vous avez à l'article 33.

M. Morin : Donc, l'utilisation de moyens technologiques serait incluse dans des pratiques?

M. Boulet : Oui. Oui, tout à fait. En fait, toute forme de violence visant la sexualité, indépendamment du moyen utilisé, et on le dit assez clairement, où toute autre inconduite qui se...


 
 

13 h (version non révisée)

M. Boulet : ...par des gestes, des pratiques, des paroles, des comportements, des attitudes à connotation sexuelle non désirée, oui, c'est couvert. C'est une définition que je considère large, ambitieuse, mais tout à fait respectueuse de l'objet de notre projet de loi. Puis on va le retrouver dans les clauses... on va le retrouver dans plusieurs articles qui vont suivre l'étude du projet de loi.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci, M. le ministre. Alors, M. le député de l'Acadie, sans inquiétude, vous pourrez poursuivre vos réflexions au retour de l'heure du lunch. Merci à tous pour votre collaboration. Nous devons suspendre et on se retrouve à 14 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 01)


 
 

14 h (version non révisée)

(Reprise à 14 h 05)

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci beaucoup. Alors, rebonjour à tous, j'espère que vous êtes bien rassasiés suite à l'heure du lunch. La Commission de l'économie et du travail reprend ses travaux. Nous poursuivons l'étude détaillée du projet de loi n° 42, Loi visant à prévenir et à combattre le harcèlement psychologique et la violence à caractère sexuel en milieu de travail. Alors, nous étions dans votre plan de travail d'étude détaillée, M. le ministre, sur l'article 33...

La Présidente (Mme Boivin Roy) : ...vous aviez terminé votre échange. Notre député de l'Acadie avait peut-être des réflexions, je pense, lorsque nous avons conclu pour le lunch.

M. Morin : Merci. Merci, Mme la Présidente. Effectivement, vous avez tout à fait raison. Puis je voudrais revenir, je voudrais revenir avec la définition qui est proposée et qui vise, évidemment, dans ce cas-ci la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Mais, dans la définition qui est proposée à l'article 33, on dirait... on dit, en fait, «des attitudes à connotation sexuelle non désirées, qu'elles se produisent à une seule occasion ou de manière répétée», et il n'y a pas de qualification quand il s'agit d'une seule occasion. Donc, on ne dit pas, par exemple... on ne qualifie pas la gravité du geste qui aurait pu se produire à une seule occasion. Cette définition-là, on veut l'inclure dans la Loi sur la santé et la sécurité du travail.

Maintenant, je comprends que, dans la Loi sur les normes du travail, à l'article 81.18, le harcèlement psychologique est défini et on fait aussi référence à des paroles, des gestes, des actes à caractère sexuel, mais là on dit «une seule conduite grave peut aussi constituer du harcèlement psychologique si elle porte une telle atteinte et produit un effet nocif contenu pour la personne salariée». Donc, je reviens à ce que je disais précédemment, avant la pause pour le repas du midi, donc, on va se ramasser avec deux définitions qui, pour moi, sont un peu différentes.

Donc, quelqu'un qui porterait une plainte en vertu de la Loi sur les normes du travail, ce qui est possible en vertu de la loi, notamment aux articles 123 et suivants, si la personne a été victime d'un seul geste, il va falloir que ça soit une seule conduite grave, alors que si la personne porte plainte en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité du travail, il n'y a pas... la personne n'aura pas à démontrer la gravité. Donc, c'est comme si on avait deux standards, tout dépendant en vertu de quelle loi on se situe et on se plaint et comment la personne victime, elle...  bien, n'aura peut-être pas nécessairement toujours consulté un avocat avant d'intenter un recours. Comment va-t-elle savoir? Il y a une loi qui semble être privilégiée ou plus facile à prouver que l'autre, à moins qu'il y ait quelque chose que je ne comprenne pas, mais, quand je regarde les définitions puis les deux lois, c'est ce qu'il m'apparaît.

M. Boulet : Bon. Est-ce que ça va, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Tout à fait.

M. Boulet : Bon. Comme j'ai mentionné ce matin, notre définition s'inspire de celle provenant de l'Organisation internationale du travail et de celle apparaissant dans la loi luttant et combattant les violences à caractère sexuel dans le secteur de l'enseignement public. Et vous avez raison, c'est deux définitions différentes. Il faut que ce soit deux définitions différentes, pour ne pas créer d'instabilité et pour ne pas réduire la portée de ce qu'est une violence à caractère sexuel.

Dans la Loi sur les normes du travail, qui est une loi qui comporte des recours et qui vise à corriger des situations, le harcèlement est défini, vous avez raison, ça peut être une seule conduite grave, et il faut que ça génère des effets nocifs. Dans la loi sur la santé et sécurité, qui a une portée purement et strictement préventive, on veut avoir une définition la plus large possible, donc on n'a pas à démontrer ni la gravité ni l'effet nocif qui est la conséquence d'une seule atteinte, pour, bien sûr, faire de la prévention et s'assurer que le concept de violence soit bien saisi dans les milieux de travail. On ne peut pas réduire le concept de violence, là, on viendrait diluer la portée de notre projet de loi no 42.

• (14 h 10) •

Je ne sais pas si vous me... Puis je veux le répéter, là, c'est une loi purement préventive, puis ce n'est pas le mot «harcèlement», c'est le mot «violence». Une violence, en soi, c'est grave, mais ça peut être, plus subtilement, moins grave, mais c'est important de rappeler que la définition est plus large dans la loi santé et sécurité, et il n'y a pas d'obligation. On ne fait pas une plainte en disant...

M. Boulet : ...une violence à caractère sexuel au sens de la Loi santé-sécurité, si on veut avoir une indemnité... puis là je m'en vais à une autre loi, la Loi sur les accidents de travail maladie professionnelle, qui est une loi d'indemnité, tu n'as pas à démontrer ce qui est dans la LNT. Puis je l'ai travaillée avec mon collègue d'Hochelaga-Maisonneuve, on a ajouté la santé psychologique, le «risques psychosociaux», la violence physique, psychologique. Ça incluait la violence conjugale, familiale ou à caractère sexuel. C'est beaucoup plus large. Puis ça fait partie d'un programme de prévention, pour les plus petites entreprises à moins de 20 salariés, c'est un plan d'action. Mais ce n'est pas pour être indemnisé... pour être indemnisé en vertu de LATMP, tu n'as rien qu'à démontrer que c'est relié à ton travail ou par le fait ou à l'occasion du travail. C'est pour ça que notre définition vise à assurer l'harmonie, je dirais dans la portée respective de chacune de ces lois là, et puis, pour ne pas rétrécir indûment ce qu'est une violence à caractère sexuel. C'est ce qui nous... qui rend ça impératif, là, puis ça va être un des éléments conducteurs, là, de d'autres articles aussi de la loi, du projet de loi, plutôt.

M. Morin : Merci.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Mme la députée de La Pinière.

Mme Caron : Merci, Mme la Présidente. Alors, j'essaie de vous suivre, M. le ministre. Dans une autre vie, j'ai déjà eu à siéger à un comité d'éthique où on étudiait des plaintes, comité... je ne suis pas avocate. Le comité, qui était présidé par une avocate spécialisée dans les dossiers de harcèlement psychologique, harcèlement sexuel, et tout ça. Et, quand venait le temps de statuer pour savoir si on recevait la plainte ou si on ne la recevait pas, il y avait toujours la notion de gravité, dont il fallait... il fallait... qu'il fallait considérer. Par exemple, est-ce que le harcèlement sexuel... c'est-à-dire que pour que ce soit considéré du harcèlement sexuel, bon, outre la crédibilité des témoignages, et tout ça, il fallait que ce soit répétitif ou que ce soit passé une seule fois, mais que ce soit suffisamment grave que la personne... que la victime, admettons, ait eu peur, tu sais, qu'elle ait été traumatisée par ça ou... Puis là ce n'était pas dans un... ce n'était pas dans un régime d'indemnisation ou quoi que ce soit.

Alors donc, je comprends bien que, tu sais, pour que ce soit reconnu comme du harcèlement sexuel ou psychologique, il y a deux choses, ou bien c'est répétitif sur une certaine période, ou bien c'est une... c'est arrivé une seule fois, mais c'est très grave. Alors, là où j'essaie de vous suivre dans cette définition-là, je me dis : Bon, alors, «toute forme de violence visant la sexualité ou toute autre inconduite se manifestant notamment par des gestes, des pratiques, des paroles, des comportements ou des attitudes à connotation sexuelle non désirée, qu'elles se produisent à une seule occasion ou de manière répétée, ce qui inclut la violence relative à la diversité sexuelle et de genre», et je comprends très bien que ça vient de l'Organisation internationale du travail. Je suis allée lire la définition. Mais moi, quand je le lis, je comprends qu'une personne qui aurait... mise en cause, qui aurait commis une parole, un geste, une seule fois ou bien 50 fois, ça va être considéré de la violence à caractère sexuel. Peu importe, même si c'est le même geste ou la même parole qui a été fait une seule fois puis qui n'est peut-être pas, entre guillemets, grave, là, mais ça a été fait une seule fois bien, bien, la plainte va être reçue de la même manière que quelqu'un qui a fait ce même geste-là pendant des semaines. C'est comme ça que je le comprends. Peut-être que je le comprends mal, mais c'est comme ça que je le comprends et je me dis que d'autres vont peut-être interpréter comme moi. Alors, c'est pour ça que j'essaie de vraiment préciser votre pensée là-dessus.

M. Boulet :  Oui, puis c'est une bonne question. Puis la définition n'est pas pour emprunter le corridor d'une plainte, ça l'est dans la loi sur les normes. Et ce n'est pas pour emprunter le corridor de l'indemnisation comme ça l'est dans la loi sur les accidents de travail, maladie professionnelle. Ce n'est que le corridor, en fait, c'est le grand corridor de la prévention. Donc, quand on dit : La violence à caractère sexuel, puis l'OIT fait ce raisonnement là, il faut que ce soit une définition suffisamment libérale pour sensibiliser, parce que, là, on met ça dans un programme de... dans une politique de...

M. Boulet : ...prévention qui va être intégrée, on va le voir plus tard, dans le programme de prévention, et c'est pour être attentif aux symptômes où il y a des pratiques, des paroles, puis ça peut être une seule occasion, et c'est à connotation sexuelle, ça vise la sexualité. Puis, oui, tout à fait, la sexualité, c'est plus pointu, c'est plus aigu, puis c'est ce que les expertes nous disent, et c'est plus pernicieux dans les milieux de travail. C'est pour ça que ça requiert une définition qui est suffisamment englobante.

Puis, je le répète, comme je l'ai dit à votre collègue de l'Acadie, moi, là, si vous me disiez : Bien, on va voter, là, de toute façon, ultimement, là... Mais je ne voudrais pas dire : Il faut que ce soit grave puis il faut qu'il y ait un effet nocif. Non. Les violences à caractère sexuel, là, ce n'est pas nécessairement de quoi de grave puis ce n'est pas nécessairement de quoi qui génère un effet nocif. Ça fait qu'on viendrait diluer, selon moi, je dis le «scope», mais c'est plus la portée de notre projet de loi si on incluait ou on essayait de l'harmoniser, alors qu'au contraire on l'harmonise en la définissant dans le respect de ce que vise la Loi santé, sécurité du travail. Son objectif, c'est d'éliminer à la source, à la source les dangers pour la santé, sécurité, intégrité physique et psychique. On l'a répété... J'ai dû le dire quelques fois, hein, collègues. Mais, sérieusement, c'est comme ça qu'on l'a réfléchi et pensé.

Mme Caron : D'accord. Maintenant, est-ce qu'une personne qui est victime, qui lit la nouvelle loi puis qui lit la définition dans la nouvelle loi - ça va être au début - de la «violence à caractère sexuel», elle va... la personne va lire ça puis elle va dire : Bien, c'est arrivé juste une fois, mais, selon la loi, c'est de la violence à caractère sexuel?

M. Boulet : C'est une forme de violence. Il faut définir le terme «violence» aussi, là. Tout n'est pas violence, tout n'est pas violent, puis je n'utiliserai pas des exemples, de peur de faire des erreurs, là...

Mme Caron : Exactement.

M. Boulet : ...mais tout n'est pas violent. On dit «toute forme de violence visant la sexualité». Donc, c'est manifestement de quoi de... puis violent, si... En soi, dans la définition, c'est inhérent au concept de «violence» qu'il y a de quoi de brusque, il y a de quoi d'inacceptable, là.

Mme Caron : Alors, je comprends ça. Mais, là où je voulais en venir, c'est que la personne qui lit cette définition peut juger qu'elle a été... qu'elle a subi une violence à caractère sexuel et peut se dire : Bien, moi, je suis... admettons, je suis... C'est une personne salariée qui est visée par le régime de la LNT puis qui dirait : Bien, je vais... tu sais. Puis là, elle va se rendre compte que, woups! dans le régime de la Loi sur les normes du travail, ce n'est pas tout à fait la même chose. Ça fait que peut-être qu'elle se... elle pensait qu'elle était... bien, tu sais, qu'elle avait effectivement vécu de la violence à caractère sexuel, elle l'a senti comme ça, elle l'a vécu comme ça, et puis elle va aller de l'avant avec des recours, peut-être, si elle est évidemment visée par le régime de la Loi sur les normes du travail, puis là elle va se rendre compte que, non, elle ne l'est pas.

Ça fait que j'essaie juste de me mettre dans la peau d'un citoyen ou d'une citoyenne qui doit comprendre ça. Puis la cohérence, donc, des lois et des définitions, c'est important pour cette personne-là, alors j'essaie de me mettre dans la peau de cette personne-là. Mais je comprends ce que vous voulez faire, ne pas restreindre, que ce soit le plus large possible. Mais comment le citoyen ou la citoyenne va s'y retrouver dans ça?

• (14 h 20) •

M. Boulet : Ah mon Dieu! Vous allez voir d'ailleurs les présomptions. Je disais qu'il va y avoir des adaptations dans des articles plus loin, puis ça, c'est la Loi sur les accidents de travail, pour les fins d'application de présomptions qui ne plaisent pas nécessairement aux employeurs. Comme vous savez, à chaque fois qu'on rajoute une présomption, les employeurs sont moins confortables. Mais on retient cette définition-là de «violence à caractère sexuel». Ça fait que tout est fait de manière à ce que ce soit cohérent et harmonieux. Puis chaque loi, en droit du travail, a sa spécificité puis a son objectif. Puis ce n'est pas du harcèlement sexuel, c'est de la violence sexuelle. Ce n'est pas la même affaire. Dans la Loi sur les normes du travail, que vous avez amendée puis...

M. Boulet : ...je trouvais que c'était une belle loi, là, qui a été adoptée par ma prédécesseure en 2018. On a modernisé ou actualisé la notion de harcèlement psychologique, parce que, harcèlement psychologique, je me souviens que votre réflexion, c'était que... Il y a beaucoup de groupes qui disaient : il faut qu'il y ait un bloc uniquement pour le harcèlement sexuel. Puis, tu sais, le raisonnement que vous teniez, c'était de dire le harcèlement psychologique, il comporte souvent une connotation à caractère sexuel qu'on ne peut pas tout le temps détecter en amont, qu'on détecte souvent lors de l'enquête. C'est la raison pour laquelle, quand vous avez amendé la définition à 81.18, vous avez dit que le harcèlement psychologique, là, les termes, là, c'est... ça inclut aussi le harcèlement sexuel. Puis là, on en revient à la seule... la seule conduite grave, si elle engendre des effets nocifs, mais ça, c'est la même définition pour le harcèlement psychologique, qui est le grand concept qui contient aussi le harcèlement sexuel.

Ici, ce à quoi les expertes se sont attardées, c'est la notion de violence à caractère sexuel en milieu de travail. Et c'est ça qu'on constate, où il y a une forte prévalence dans les milieux de travail. Puis là, je ne reviendrai pas avec les statistiques. Et c'est pour ça, là, c'est une définition qui est suffisamment large pour permettre de bien comprendre que, quand ça vise la sexualité et que c'est de la violence, c'est visé par une loi qui vise à prévenir. Puis, dans les présomptions ou dans la loi sur les accidents de travail, qu'on va voir plus tard, on ne fait pas des présomptions «at large», mais on fait des présomptions pour s'appuyer aussi sur une définition comme celle-là.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Alors, merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'article 33? M. le député de Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. Je veux faire parler le ministre sur la notion de non désiré. Quand on dit, dans la définition, là, «des attitudes à connotation sexuelle non désirées», je pense que ça n'inclut pas ce que je vais donner comme exemple, mais je veux clarifier : si je me fais inviter par quelqu'un au travail, une collègue de travail, à aller prendre un verre après le travail. Parce que là, dans le fond, c'est comme à la frontière du consentement aussi. Est-ce que de se faire inviter à aller prendre un verre, que ce soit à la maison de la personne ou dans un bar, pour vous, ce n'est pas une attitude à connotation sexuelle?

M. Boulet : Non. Si ça se résume à ce que vous venez de me dire, non.

M. Leduc : C'est le «non désiré», dans ce cas-là, qui est ici en question.

M. Boulet : Effectivement. Mais «non désiré», ça veut dire un comportement qui n'est pas souhaité, qui n'est pas désiré par la personne. Ce n'est pas une invitation, mais ça peut être un toucher, ça peut être un acte, ça peut être une parole aussi, sur un attribut.

M. Leduc : Bien, c'est ça, les paroles, c'est là que je veux aller.

M. Boulet : Bien oui, ça, ça peut être... ça pourrait. Il faut prévenir ça. Il y a des milieux de travail, puis là je ne veux pas donner d'exemples, là, pour ne pas banaliser ou cibler des milieux de travail, mais où c'est à forte prépondérance masculine, il y a des risques. Puis vous le savez, puis il y a un passé. Puis il y a peut-être eu des événements, il y a peut-être eu des données empiriques qui démontrent qu'il y a des risques, dépendamment des types d'environnement de travail, puis ça, oui, il faut... Ça peut être un toucher, ça peut être une parole, ça peut... Puis on l'a vu. Puis il y a des paroles qu'échangées entre nous deux dans une commission parlementaire peuvent être considérées comme plus acceptables, mais dans un milieu de travail, puis en tenant compte de la personnalité des deux personnes, ça peut être de la violence à connotation ou à caractère sexuel, là, tu sais.

M. Leduc : Bien sûr, bien sûr. Parfait. Bien,c'est ça que je voulais vérifier. C'est que, dans le fond, la question du consentement, elle vient un peu... parfois, les... ce n'est pas des... ce n'est pas des catégories étanches, hein?

M. Boulet : Non.

M. Leduc : Les situations peuvent se recouper et avoir plus qu'une connotation. Mais, de fait, de demander à quelqu'un d'aller prendre un verre, toujours dans mon exemple, pour vous, ça ne constitue pas un truc non désiré. Parce que, nécessairement, si on invite quelqu'un, on ne peut pas présumer que c'était désiré, il y a toujours des indices, bien sûr, mais...

M. Boulet : Mais, tu sais... tu sais, comme... collègue, ici, c'est un supérieur immédiat...

M. Leduc : Oui, ça, c'est différent.

M. Boulet : ...qui invite une dame, une collègue, à répétition, ou même s'il l'invite une fois...

M. Boulet : ...dépendamment du contexte, ça peut être... la lumière jaune doit s'allumer.

M. Leduc : Oui, le ton utilisé, les mots utilisés, on s'entend.

M. Boulet : Oui.

M. Leduc : O.K., ça clarifie pour moi. J'avais une autre question aussi. J'ai eu des discussions avec des groupes qui se demandaient pourquoi vous n'avez pas retenu le mot «sexiste» dans votre définition. Parce que de dire quelque chose à connotation sexuelle, c'est une chose, des pratiques, des gestes, des paroles, des attitudes à connotation sexuelle. On pourrait considérer ça un peu limitatif par rapport aux rajouts. «Sexuel», on peut le laisser là, mais on pourrait rajouter «sexiste» aussi.

M. Boulet : Moi, je pense que ça l'inclut. Moi, à ma compréhension, c'est que c'est plus large. Puis je sais que vous me le fait dire parce que vous avez de saines raisons. Tu sais, on dit : «toute forme de violence visant la sexualité, d'une part, ou toute inconduite...», bon, là, il y a des mots «...ou des attitudes à connotation...», donc connotation sexuelle. Selon moi, c'est extrêmement large. Puis c'est sûr que dans l'application, ça requiert un certain jugement, puis un examen de la valeur probante des personnes qui s'expriment, puis le contexte de travail. Mais moi, je pense que c'est... en fait, je dis, ça inclus.

M. Leduc : Parce qu'on m'a fait état... je n'ai pas lu les jurisprudences, mais on m'a fait état de parfois certaines jurisprudences où on peut avoir des confusions sur... Parfois s'il y a eu un touché, bien sûr, sur la personne, là, c'est clairement du harcèlement sexuel, mais si c'est, par exemple, un patron qui dit à son employé femme de davantage mettre en valeur sa poitrine pour satisfaire plus de clients ou attirer plus de clients, là, on est plus dans le harcèlement psychologique. Il y a des fois une espèce de frontière qui n'est pas tout le temps claire entre les deux.

M. Boulet : Moi, je pense que notre définition est la plus large et l'exemple que vous venez de donner, ça fait partie de cette définition-là, clairement, dans mon esprit. De demander à quelqu'un de mettre en valeur des attributs physiques pour des raisons d'affaires, c'est inacceptable, intolérable, puis c'est inclus là-dedans, puis ça peut être une, puis ça ne serait pas nécessairement... là, vous allez me suivre, c'est le fun que vous vous référiez à des exemples, ça ne serait pas nécessairement une seule conduite grave qui produit un effet nocif. Je pense que vous m'avez bien compris.

M. Leduc : Est ce que Mme Cox et ses collègues avaient référé à ça dans leur rapport, sur la notion sexiste versus sexuelle?

M. Boulet : Non. Bien, pas à ma connaissance, non.

M. Leduc : O.K. Ça va être tout.

M. Boulet : O.K., merci.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci, M. le député. Alors, M. le député de Jean-Talon, pour vos commentaires.

M. Paradis : Oui, merci. M. le ministre, vous avez indiqué à quelques reprises que la définition suggérée à l'article 33, qui modifie l'article 1 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail, est inspirée du droit international. Je suis plutôt content d'entendre ça. Donc, pour les fins de l'établissement de l'intention du législateur...

M. Boulet : ...

M. Paradis : Bien oui, bien oui, l'avocat de droit international est réjoui par cette mention.

M. Boulet : Pour qui j'ai beaucoup de respect d'ailleurs.

M. Paradis : Je vous en remercie, c'était réciproque, M. le ministre. Mais est-ce que j'ai raison de penser que vous faites référence à la Convention 190 de l'Organisation internationale du travail?

M. Boulet : Oui, totalement. C'est la Convention 190 sur la violence et harcèlement. Puis ce n'est pas très vieux, collègue, hein? Ça date de 2019 puis ça s'inspire de ça. Oui, tout à fait.

M. Paradis : Oui, et qui est une avancée, je le confirme, intéressante en droit international. Mais est-ce que j'ai raison de penser, en fait, que le libellé que vous avez adopté n'est pas tout à fait celui de la convention elle-même?

M. Boulet : Tout à fait. Ce que j'ai mentionné, ça s'inspire, ce n'est pas le libellé exact, mais on a travaillé en équipe, on a consulté beaucoup et on a fait unanimité autour d'une définition de cette nature-là pour qu'elle soit la plus large et la plus libérale et qu'elle se détache notamment, collègue, de celle apparaissant notamment dans la loi sur les normes, parce qu'on parle plus de harcèlement, on parle de violence. Puis on l'a adaptée aussi à nos... avec notre équipe de légistes, là, aux définitions qu'on a dans nos lois aussi.

• (14 h 30) •

M. Paradis : Qui est un processus que je comprends...


 
 

14 h 30 (version non révisée)

M. Paradis : ...que je comprends très bien, mais il me semble y avoir quand même des différences assez... assez importantes entre la définition qui a été choisie aux fins du projet de loi et celle de la Convention 190 de l'Organisation internationale du travail. Et je pose la question pas parce que, nécessairement, je suis en désaccord avec les termes qui ont été choisis aux fins du projet de loi, mais parce que l'intérêt de s'inspirer du droit international, et là on arrive à l'intention du législateur, c'est de permettre, en quelque sorte, à nos tribunaux, aux arbitres de griefs, à toute personne qui interprète cette définition de pouvoir aussi s'inspirer de la jurisprudence ou de décisions qui ont été rendues ailleurs en vertu des mêmes dispositions du droit international, sans bien sûr être liés. Je ne dis pas qu'on serait liés par ces définitions, mais l'intérêt, c'est d'aller chercher, donc, les mêmes inspirations dans le droit international. Donc, est-ce que vous seriez en mesure de nous parler un petit peu de ces choix que vous avez faits dans l'adaptation de la définition québécoise qui, comme vous le dites, s'inspire de cette source du droit international?

M. Boulet : Évidemment, lors des consultations, on veut s'assurer que la définition soit la plus compatible possible avec l'objet de la loi. Et, quand on travaille avec la direction des affaires juridiques de mon ministère notamment, on veut s'inspirer des meilleures définitions, notamment à l'échelle internationale, mais pas en disant : Ça va impliquer nécessairement que la décision de jurisprudence rendue ailleurs s'applique chez nous, comme vous le dites superbien, puis vous connaissez ça mieux que moi, mais pour s'assurer que notre définition soit la plus moderne et d'actualité. Et, après ça, les avocats travaillent avec d'autres équipes d'autres ministères, notamment en justice, pour s'assurer qu'il y ait une cohésion dans notre corpus législatif et une définition qui soit compatible aussi avec les concepts qui sont généralement étudiés par nos tribunaux en matière de travail. Ça fait que c'est un peu ça, mon raisonnement. Alors, ce n'est pas si sophistiqué que ça, là, mais c'est une définition qui est non seulement inspirante, mais qui nous rapprochait de celle qu'on a dans la Loi visant à prévenir et combattre les violences à caractère sexuel, là, dans les établissements d'enseignement supérieur, qui n'est pas la même non plus...

M. Paradis : Non.

M. Boulet : ...pas le même libellé, mais compatible avec les mots qu'on utilise en droit du travail québécois. Puis, tu sais, les mots comme les gestes, les paroles, les... on retrouve ça aussi, par ailleurs.

M. Paradis : Je réitère, moi, une nouvelle fois que je suis... je me réjouis du fait qu'il y ait eu cette inspiration en droit international parce que la Convention 190, elle a vraiment été saluée comme une grande avancée en droit international. Cependant, je le redis, il me semble que la définition s'écarte quand même beaucoup. Et là je vais vous dire pourquoi je vous pose la question, c'est parce qu'il y a probablement des choix, comme vous le dites, qui ont été indiqués pour la rendre plus... à même de cadrer avec le corpus...

M. Boulet : Plus compatible avec le droit québécois.

M. Paradis : ...exactement, le corpus québécois. Mais là, donc, on se retrouve avec une définition qui n'est pas la même que celle d'autres lois, donc celle qu'on vient de nommer, là, la loi pour prévenir... la Loi visant à prévenir et à combattre les violences à caractère sexuel dans les établissements d'enseignement supérieur, les autres définitions en droit du travail. Et là j'en arrive en fait au risque qui est quand même souligné, mon collègue l'a mentionné tout à l'heure, le risque qu'il y ait tellement de définitions et tellement de sources que ce soit un enjeu d'interprétation et qu'on commence à permettre, notamment au gré des dossiers, et du tribunal qui entend les dossiers, et des avocats qui plaident, qu'on aille chercher des éléments, des définitions qui nous plaisent le plus dans une loi par rapport à l'autre. Et, encore une fois, j'ai bien entendu vos explications sur la justesse des termes qui ont été choisis ici. J'aimerais ça vous entendre sur ces risques-là d'interprétations contradictoires et surtout ces risques-là par rapport à ce que plusieurs intervenants en audience nous ont mentionné, c'est-à-dire que ce qu'on veut aussi, c'est simplifier l'exercice des droits et recours dans ce domaine-là, où les gens nous disent : Aïe! là, il y a tellement de lois, puis il y a tellement de recours, puis il y a tellement de définitions, puis tellement de mécanismes que ça devient complexe.

M. Boulet : Oui, puis je suis assez d'accord avec vous. Ce qui me guide aussi, là, dans la rédaction finale, c'est de m'assurer que les définitions soient les plus simples possibles pour éviter les trop grandes périodes de transition ou d'instabilité...

M. Boulet : ...instabilité jurisprudentielle, que ce soit plus facile à interpréter et donc plus facile à appliquer. Et je pense que cette définition-là, bien, il y a beaucoup quand même de décisions jurisprudence, surtout les arbitres de grief, puis en application de 81.18, parce que les griefs de harcèlement psychologique, il y en a beaucoup. La jurisprudence est bien établie, là, sur les cinq critères qui vont inspirer, mais encore une fois, c'est deux mondes différents, et c'est nouveau dans le corpus législatif québécois qu'on réfère, dans les milieux de travail, il l'avait en enseignement supérieur, mais là, c'est l'ensemble des milieux de travail, à la violence à caractère sexuel. Puis j'oserais croire, mais nos juristes nous le confirment, on va être à la... tu sais, on va être les premiers au Canada. C'est une loi qui va inspirer le reste du Canada. Moi, je suis bien fier de ça. Puis que vous référiez à à votre confort qu'on utilise des règles de droit international, notamment la convention 190, moi, je suis tellement sur cette longueur d'onde là. Je comprends ce que vous me dites cependant. Mais le plus vite ça va être adopté, le plus vite ça va être mis en application, et y a aussi le temps de former les juges, les conciliateurs formés sur les mythes et stéréotypes et avec cette définition-là, le cas échéant. Et à la CNESST qui va voir à l'application formation, sensibilisation et information, moi, je pense qu'on va déployer ça comme on a réussi, comme on réussit actuellement à faire avec la vaste modernisation du Régime de santé et sécurité. Il y a des collègues qui avaient des appréhensions, mais il y a des leaders syndicaux qui aujourd'hui nous remercient pour ce que nous avons fait. Puis bon, moi, je suis dans le camp des confiants.

M. Paradis : Et puis je partage certainement en partie votre confiance, M. le ministre. Et justement parce que vous dites qu'on est en train de montrer la voie, peut être pour préciser peut être, le mémoire du Barreau du Québec ne le dit pas comme ça, mais... mais vous savez, il y a ce bon vieil adage qui dit : Le législateur ne parle pas pour rien dire, et s'il y a des différences entre les définitions, c'est parce qu'on a voulu qu'il y ait de telles différences. Et là, quand je vous entends, M. le ministre, j'ai l'impression qu'il y a quand même une volonté de... d'unifier, mais de permettre à chaque loi d'atteindre des objectifs qui peuvent être différents. Mais est ce qu'il n'y a pas un risque? Est-ce que les gens au ministère qui ont travaillé avec vous ne voient pas ce risque, qu'en maintenant des différences alors que nous sommes en train de créer le droit, on lance un message clair qu'on a voulu ces différences-là? Donc là, quand on va voir une décision d'une division du Tribunal administratif du travail, on va avoir un type de décision X sur la définition de la violence sexuelle, puis là, quand on va être devant l'autre division, on va avoir un autre type de décision. Ce n'est peut-être pas ça qu'on voulait faire aujourd'hui.

M. Boulet : Je suis extrêmement sensible à ce que vous venez de dire, mais je le répète, les lois ont des portées différentes. Ici, c'est une loi préventive. Il faut s'assurer que tous les milieux de travail se prennent en main et comprennent bien ce qu'est une violence à caractère sexuel. Ça va passer par beaucoup de pédagogie, puis les tribunaux vont avoir à le faire aussi, là. Il va y avoir une période évidemment d'adaptation, comme je mentionnais un peu plus tôt, mais on s'est assuré qu'il y ait la meilleure harmonisation possible. Ce n'est jamais parfait, mais avec cette définition-là, ça rentre bien dans les... les compartiments qui appartiennent à chacune des lois. Puis plus tard dans la LATMP, on va le voir pour l'application des nouvelles lois, les deux nouvelles présomptions. Et les exemples que... auxquels référait le collègue, il y a des situations qui ne seraient pas du harcèlement parce que le harcèlement, c'est répétitif en vertu de la LNT. Quand c'est un événement, il faut que ce soit grave. Un, puis deux, il faut qu'il y ait un effet nocif, et là, on est plus là-dedans et on peut être devant un événement. Évidemment, c'est de la violence, il y a forcément de la brusquerie aussi. Mais tu n'as pas à démontrer un effet nocif, là. Il faut que tu préviennes puis il faut mettre la barre la plus haute possible, et ça, il y a beaucoup de groupes qui nous l'ont mentionné. Puis les expertes souhaitaient d'ailleurs qu'on développe au Québec, dans les milieux de travail, une sensibilité particulière à tout ce qui est à connotation sexuelle.

• (14 h 40) •

M. Paradis : Donc... donc je comprends que c'est cette... c'est cette volonté de ratisser le plus largement possible, d'avoir la définition la plus généreuse possible pour couvrir le plus de situations possibles qui vous a guidé.

M. Boulet : Exact.

M. Paradis : De même que les membres de votre équipe, et que donc...

M. Paradis : ...les risques qu'on vient de mentionner, d'interprétations divergentes, ils ont été considérés et ils sont assumés, si je peux parler de cette façon-là.

M. Boulet : Totalement d'accord. Puis je ne suis pas naïf, on connaît le droit puis on sait c'est quoi, les relations de travail. Les risques sont considérés d'une part, et ils sont très faibles selon notre compréhension. Puis juste vous rappeler que... ce que j'ai mentionné aussi, dans la loi sur les accidents de travail et maladies professionnelles, qui est une autre loi, qui vise à indemniser des travailleurs qui ont des lésions, la définition est tellement différente, là, c'est un événement imprévu et soudain, survenu par... C'est très, très différent. Mais, pour répondre à votre question plus précisément, les risques, oui, ont été considérés, et on s'est assurés de les éliminer.

M. Paradis : Je termine là-dessus, Mme la Présidente. Est-ce que l'idée d'utiliser cette nouvelle définition, que vous proposez aux fins de ce projet de loi, qui peut-être pourrait être qualifiée de plus généreuse de l'ensemble des définitions qu'on a devant nous, là, dans les différents projets de loi... que ce soit elle qui soit utilisée pour peut-être modifier les autres lois et donc avoir une définition unifiée en bout de ligne?

M. Boulet : Non. Il y aurait toute une levée de boucliers si on utilisait une définition de cette... Non. La réponse, c'est non.

M. Paradis : C'est non, O.K.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci, M. le ministre. Alors, M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. Pendant que j'écoutais les autres échanges, je relisais un peu des trucs sur le... l'échange précédent que nous avions, moi et le ministre, là, par rapport à «sexuel» versus «sexiste». D'abord, je suis allé revérifier un peu le rapport Cox, là. À la page six, elles font un tableau où elles font référence à harcèlement sexuel incluant le harcèlement sexiste, qui recoupe agressions à caractère sexuel, qui ensemble forment des violences à caractère sexuel. Ça fait que là je comprends que c'est en ligne droite avec ce que vous disiez précédemment.

M. Boulet : Totalement.

M. Leduc : Et j'ai trouvé aussi la décision que, je pense, dans le jargon, on appelle la décision Lippé du tribunal du droit de la personne de 1998. Je veux juste en lire quelques phrases pour encore être vraiment certain qu'on est à la même place.

Le paragraphe 167 de la décision Lippé de 1998 : «Le harcèlement sexuel résultant d'un milieu hostile est donc une manifestation plus subtile, plus insidieuse que le harcèlement à connotation sexuelle. Ce type de situation ne comporte habituellement pas d'élément qui pourrait laisser croire à une démarche de séduction. Au contraire, les paroles, les gestes ou les... les actes, pardon, convergent vers la démonstration de l'inadéquation de la personne face à son milieu de travail, généralement à prédominance masculine, mais pas exclusivement non plus, et ce simplement parce qu'elle est caractérisée par l'un des motifs énumérés à l'article 10 de la charte, en l'occurrence parce qu'elle est une femme. C'est pourquoi il est possible de qualifier ce type de harcèlement sexuel de harcèlement sexiste. Le genre plutôt que la sexualité est l'objet du harcèlement.»

Paragraphe 168 : «Le harcèlement sexiste est susceptible de revêtir diverses formes allant de l'usage de langage cru, blagues grivoises, remarques désobligeantes, rebuffades, brimades, injures, insultes et/ou menaces, voies de fait ou autres agressions, en passant par des caricatures, graffitis, dommages causés à la propriété de la victime ou aux lieux et objets mis à sa disposition, le tout en mettant particulièrement en cause les caractéristiques proprement féminines. Essentiellement, ce type de harcèlement cherche à isoler les femmes en leur rappelant soit qu'elles ne sont pas à leur place dans ce milieu, soit qu'elles sont fragiles et que c'est à leurs risques et périls qu'elles intègrent le milieu. Le milieu comporte ses codes et ses règles qui tendent à conforter les préjugés et les stéréotypes en vertu desquels les abus de pouvoir s'exercent.»

Là, il y a d'autres trucs, là, je m'arrête ici. Bon, je répète, c'est la décision Lippé, c'était le tribunal... droit de la personne en 1998. Est-ce que... Je comprends qu'il y a la jurisprudence qui est une chose, ça, c'est là, ça reste, mais est-ce que, dans sa lecture, dans sa proposition de définition, le ministre se rattache à ça?

M. Boulet : Je me rattache aux propos que vous venez de citer. Évidemment, je n'ai pas la décision devant moi, je ne connais pas l'ensemble des éléments factuels qui ont été mis en preuve, mais oui, sur le fond de ce que vous venez de citer, c'est tout à fait compatible avec ce qu'on vient de discuter.

M. Leduc : Est-ce que dans ce sens, alors, ça ne pourrait pas être intéressant de rajouter la référence à sexiste dans votre définition?

M. Boulet : Elle est incluse, la connotation, tout ce qui vise la sexualité. Donc, c'est large et... attends minute, et plus tard on répète «tout ce qui est à connotation sexuelle». Non, c'est... Dans le corpus...

M. Boulet : ...en tout cas, moi... pour moi, c'est inclus dedans, collègue. Si c'est la réponse que vous souhaitez, là.

M. Leduc : Ça fait que, mettons, de dire violences à caractère sexuel incluant un caractère sexiste ou si on faisait référence à quelque chose, pour vous, ce n'est pas nécessaire?

M. Boulet : Non.

M. Leduc : Parce que c'est clairement, clairement, clairement implicite que c'est là et que ça l'inclut.

M. Boulet : Oui, tout à fait.

M. Leduc : Je chercherais juste à... Parce qu'il y a des gens qui nous écoutent qui vont pouvoir peut-être aller plaider, pourront se référer, bien sûr, à nos échanges, puis, si jamais il y a un juge à quelque part...

M. Boulet : Mais comment vous définissez «sexiste»? Sexiste, c'est une attitude de discrimination fondée sur le sexe. C'est exactement le libellé de la Charte des droits et libertés de la personne, et ici, c'est encore plus large, c'est visant la sexualité. Donc, ce qui est sexiste, tel que défini dans nos dictionnaires, oui, c'est compris dans cette définition-là.

M. Leduc : O.K. Je termine en vous resignifiant ma crainte, M. le ministre. Ça fait que, là, on a un échange, puis c'est clair pour vous, c'est clair pour moi, c'est clair pour ceux qui nous auront écoutés puis qui auront l'occasion peut-être d'aller référer à notre échange, si jamais un juge à quelque part...

M. Boulet : Tellement. Tellement.

M. Leduc : ...n'es pas d'accord ou n'a pas nécessairement pensé à ça, mais qu'arrivera-t-il pour les personnes qui n'auront pas eu connaissance de cet échange-là? On espère que le juge ou la juge, peut-être, dans sa formation, éventuellement, aura compris que «sexuelle», ça inclut sexiste aussi.

M. Boulet : Oui. Bien oui. Puis, tout ça, là, ça réfère à ce que notre collègue de Jean-Talon disait : Après ça, c'est de faire le pont entre ce qui est dans la loi après son adoption et sa mise en application. Et pour que ce soit une mise en application compatible avec ce qui est écrit dans la loi, ça va requérir formation, information, sensibilisation, retaper sur le clou, ce qu'on a fait dans d'autres lois en matière du travail. Moi je pense que c'est l'incontournable : persistant, former, former, former.

M. Leduc : Parfait. Merci.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci beaucoup. Alors, M. le député de Jean-Talon.

M. Paradis : On a tellement de plaisir à parler de droit international, permettez-moi d'y revenir juste une minute. La définition de la convention 190, dont on dit qu'elle est l'inspiration, c'est... je vais me permettre de la lire, là, pour les fins du débat : «L'expression violence et harcèlement, dans le monde du travail, s'entend d'un ensemble de comportements et de pratiques inacceptables ou de menaces de tels comportements et pratiques, qu'ils se produisent à une seule occasion ou de manière répétée, qui ont pour but de causer, causent ou sont susceptibles de causer un dommage d'ordre physique, psychologique, sexuel ou économique, et comprend la violence et le harcèlement fondés sur le genre», qui est définie tout de suite après.

Ce qui m'intéresse particulièrement, M. le ministre, là, je vais le dire très clairement, c'est qu'ici il y a... alors que, dans la définition qui est proposée dans le projet de loi, c'est le caractère non désiré, là, qui est la clé, donc, on se place du côté subjectif de la personne qui en est l'objet puis on dit : Ce n'est pas désiré, l'intérêt de la convention 190, c'est qu'on dit que c'est fait dans le but de causer, ça cause ou c'est susceptible de causer un dommage d'ordre physique. Et ça, cet élément de causalité qui est inclus dans la définition, ne se retrouve pas dans le projet de loi, et je voulais savoir si c'était voulu pour... encore une fois, pour les fins d'interprétation ou si on avait voulu atteindre cet objectif-là autrement. Parce qu'ici c'est intéressant, hein, ça peut couvrir... Je reprends l'exemple qui était donné par mon collègue de la circonscription d'Hochelaga-Maisonneuve, il a dit une invitation à souper, mais une invitation à souper qui revient le mardi, le jeudi, le mercredi suivant, l'autre jeudi, le samedi suivant puis plusieurs fois, bien là, on peut dire, bien, ça, il y a comme un but de causer, ça à cause ou c'est susceptible de causer une forme de violence ou un dommage.

• (14 h 50) •

M. Boulet : C'est parce que la définition de la convention 190, c'est une définition globale, qui concerne la violence, le harcèlement, les formes d'abus, puis là il y a un lien de causalité pour démontrer, donc, le dommage, peu importe sa nature. Et ça revient à la discussion qu'on avait, nous, dans notre cas, on a une définition qui vise à permettre au milieu de travail de faire de la prévention. Cette définition-là, elle s'apparente un peu plus à celle qu'on a dans la Loi sur les normes du travail, qui est plus restrictive, mais qui donne ouverture à des recours. Et cette définition-là est différente aussi de celle de la Loi sur les accidents de travail et maladies professionnelles, mais c'est comme si, nous, il y avait plusieurs...

M. Boulet : ...morceaux qui forment un casse-tête, parce qu'on a plusieurs lois, alors que la convention 190, bien, vous le savez, c'est une définition qui sert de guide, qui nous a servi d'inspiration pour l'objet spécifique de la loi santé-sécurité qui vise à faire de la prévention.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci beaucoup. Alors, M. le député de l'Acadie.

M. Morin :Oui. Merci, Mme la Présidente. Donc, juste brièvement, M. le ministre, pour que ce soit bien... bien clair. Dans la définition que vous proposez de «violence à caractère sexuel» : Toute forme de violence... et qui se manifeste par des gestes, des pratiques, des paroles, des comportements, des attitudes... Je reviens à ce que je disais précédemment. Si une personne utilise un moyen technologique pour utiliser une forme de violence, ce serait inclus dans quel élément de votre définition?

M. Boulet : Toute forme de violence, indépendamment du moyen utilisé. Est-ce que c'est en présentiel? Est-ce que c'est virtuel? Est-ce que c'est électronique? Est-ce que c'est par une autre technologie? Toute forme, indépendamment de l'utilisation ou indépendamment de... du moyen qui est utilisé.

M. Morin :Merci.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci beaucoup. Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'article 33? Ça va. Alors, s'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix. Est-ce que vous souhaitez un vote nominal? Ça va. Très bien. Alors, est-ce que l'article 33 est adopté?

Des voix : Adopté.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Adopté. Parfait. Merci beaucoup. ...ça vous va, Mme la secrétaire? Très bien.

M. Leduc : ...

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Oui?

M. Leduc : Bien, si je comprends bien, on entrerait dans la section du Code du travail?

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Exactement. Et on comprend que vous souhaitez déposer un amendement qui rajouterait un article.

M. Leduc : Exact. On peut le faire à ce moment-ci?

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Oui. Juste vérifier avec la secrétaire si le document a bien été déposé sur Greffier. Alors donc, le document a été déposé. Nous allons l'afficher à l'écran. Alors, l'article est affiché sur l'écran. Il n'y aura pas de... de format papier qui va circuler, là. Donc, M. le député d'Hochelaga...

M. Boulet : ...déposer tout de suite pour qu'on l'étudie au rang... Vous voudriez qu'on le... qu'on l'étudie immédiatement?

M. Leduc : Pourquoi? Oui.

M. Boulet : On va vous écouter.

M. Leduc : J'y vais?

La Présidente (Mme Boivin Roy) : ...oui.

M. Leduc : Parfait. Amendement : Insérer, avant l'article 1 du projet de loi, le suivant :

«0.1 Le Code du... le Code du travail, pardon, (chapitre C-27) est modifié par l'insertion, dans son article 47.3, des mots «pour un motif autre que celui d'être l'auteur d'une violence à caractère sexuel au sens de la Loi sur la santé et la sécurité du travail (chapitre S-2.1) après le mot «disciplinaire».

Et ça se... ça se lirait comme suit, donc, l'article 47.3 : «Si un salarié qui a subi un renvoi ou une mesure disciplinaire pour un motif autre que celui d'être l'auteur d'une violence à caractère sexuel au sens de la Loi sur la santé et sécurité du travail ou qui croit avoir été victime de harcèlement psychologique, selon les articles 81.18, 81.20 de la Loi sur les normes du travail, croit que l'association accréditée contrevient à cette occasion à l'article 47.2, il doit, s'il désire se prévaloir de cet article, porter plainte et demander par écrit au tribunal d'ordonner que sa réclamation soit déférée à l'arbitrage.»

Sur le fond, maintenant, Mme la Présidente. Quand ce débat-là a commencé sur la façon de mieux protéger les potentielles victimes et les... donc les réelles victimes sur les milieux de travail, les associations étudiantes ont commencé à faire circuler la question des clauses d'amnistie, dont nous discuterons un peu plus tard, selon le plan déposé par le ministre, moi, je trouvais ça intéressant. J'avais des questionnements. On a échangé beaucoup, les associations étudiantes et moi, et aujourd'hui je suis assez ouvert à ça... puis on aura des questions tantôt. Mais ça devrait bien aller pour le... ce volet-là, sur les clauses d'amnistie, qui viendront dans... peut-être cet après-midi ou, au plus tard, dans notre prochaine séance. Moi, je me suis dit : Qu'est-ce que je... qu'est-ce qu'on peut faire aussi de supplémentaire, pas nécessairement en remplacement, mais de supplémentaire à cette approche-là sur les clauses d'amnistie? Et ayant moi-même pratiqué longtemps le droit du travail — j'ai été un conseiller syndical avant mon élection en 2008 — je me rappelle de cette injonction...

M. Leduc : ...et de cette crainte qu'ont développée les syndicats à l'égard de l'article 47.2. Tous les conseillers syndicaux, je dirais, la plupart des militants syndicaux connaissent l'article 47.2. Parce que c'est un fléau, c'est l'obligation de représentation, et je dis «un fléau» pas parce que c'est une obligation de représentation, mais parce qu'on l'utilise trop souvent pour des raisons un peu farfelues. D'ailleurs, il y a des articles qui circulent, là, c'est à 95 % ou... en tout cas, entre 9... en haut de 90 % de cas de 47.2 qui sont finalement refusés. C'est le moment où un salarié considère qu'il a été mal représenté par son syndicat qui dépose une plainte qui se rend au tribunal et donc il dit : J'ai été mal représenté, je poursuis mon syndicat. Dans tous les cas où on a entendu des histoires, là, telle personne s'est retrouvée à avoir une petite tape sur les doigts, il est resté en place... Chaque fois qu'une chronique écrite sur ce dossier-là ou sur d'autres types de dossiers, d'ailleurs, mais concentrons-nous sur les dossiers de violence à caractère sexuel, systématiquement, vient la question : Pourquoi le syndicat défend les pourris? Systématique. C'est une grande question qui est soulevée de manière systématique dans ces textes-là, dans ces opinions-là. Et je le comprends pourquoi, parce que, lorsqu'historiquement le mouvement syndical a demandé et obtenu la cotisation obligatoire, ce qu'on appelle dans le jargon la formule Rand, qui fait en sorte que, si on négocie une hausse de salaire dans une entreprise donnée, elle ne s'appliquera pas juste à ceux qui ont signé leur carte de membre du syndicat, elle va s'appliquer à tout le monde, forcément... Alors, en contrepartie, logiquement, tout le monde de cette entreprise-là, qu'ils aient signé leur carte de membre ou pas cotise au syndicat. Éventuellement, s'il n'y a presque personne qui n'a signé sa carte de membre, le syndicat peut être révoqué, bon, ça, c'est une autre partie du code.

En toute logique aussi, on a mis la formule Rand, donc vient cette... ce monopole de représentation, qu'on appelle, cette obligation de représentation et qui fait en sorte qu'en effet, si quelqu'un commet une violence à caractère sexuel dans son milieu de travail, le syndicat est, à toutes fins pratiques, tenu de le représenter. Il y a toute une jurisprudence qui s'est développée sur quelle est la limite de cette obligation de représentation. Elle n'est pas totale et absolue, hein? Une des limites très claires que la jurisprudence a tracée, c'est le fait d'obliger de référer à un grief à l'arbitrage. On n'est pas obligé de référer un grief à l'arbitrage, comme syndicat, si on fait l'examen conscient et rigoureux que ce grief-là n'a à peu près aucune chance d'être gagné. Et là la jurisprudence a dégagé qu'une bonne utilisation des ressources, et des tribunaux, d'ailleurs, et des arbitres permettait au syndicat de faire ce genre d'exercice là et de ne pas référer à un grief à l'arbitrage, même si c'était le désir du salarié.

Par contre, il s'est développé beaucoup cette culture où, pour se protéger contre un éventuel 47.2, on dit : Dépose un grief, fais une enquête, dépose un grief, plaide au moins une fois dans un comité de relations de travail, un CRT, fais un genre de service de base et, après ça, bien, on verra ce que ça donne. Mais il s'est développé, donc, cette culture-là d'avoir peur, en quelque sorte, et de... d'avoir peur de cette surenchère alentour du 47.2.

• (15 heures) •

J'ai écrit une lettre au ministre, en octobre, où je lui soumettais cette idée-là : Pourquoi, dans le dossier spécifique des violences à caractère sexuel... je ne suis pas en train de remettre en question l'économie générale du projet de loi ni l'économie générale du droit du travail, mais, dans les cas de 47.2... dans les cas de violences à caractère sexuel, pardon, pourquoi on ne lèverait pas partiellement cette obligation de représentation en disant : Bien sûr, il y a mille et une situations, mille et une nuances, le syndicat est à même d'apprécier ce qui est devant lui, le cas qui est devant lui, il pourrait décider, en effet, de vouloir défendre l'agresseur quand même? Mais, si on veut envoyer un signal très clair dans les... dans le milieu de travail, il faut casser à la source, je dirais, l'intention ou les gestes de harcèlement, d'agression sexuelle. Pourquoi ne pas envoyer le signal très clair que ce n'est pas vrai que, peu importe ce que tu fais, ton syndicat va te défendre? Si tu fais une connerie à caractère sexuel, puis qu'à sa face même tu es dans le tort, puis, après une enquête sommaire, tu es dans le trouble...


 
 

15 h (version non révisée)

M. Leduc : ...pourquoi le syndicat serait obligé de défendre cette personne? Alors, c'est un peu l'esprit de l'amendement que je soumets aujourd'hui pour la considération du ministre.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres commentaires? M. le ministre, est-ce que vous souhaitez suspendre?

M. Boulet : Non, je pense, je pourrais faire des commentaires généraux. Évidemment, ça nous amène... ce n'est pas dans l'esprit du projet de loi, là, je sais que c'est un sujet qui vous intéresse, on en a déjà discuté. 47.2, c'est pour prévenir ou protéger les syndiqués contre la mauvaise foi, l'abus, la négligence grave des syndicats. Parce qu'il n'y a pas, par ailleurs, une obligation des syndicats, tu sais, il faut toujours qu'ils trouvent un équilibre entre les droits des individus, puis il faut qu'ils s'assurent qu'il y ait un droit qui soit légitime en vertu de la convention collective qui les gouverne. Puis les statistiques que j'ai en tête, c'est qu'il y a seulement 30 % des plaintes qui vont au Tribunal administratif du travail puis 97 % des plaintes sont rejetées. Mais je sais que ça peut ennuyer certains syndicats, mais il y en a...    Puis l'étape qui suit le Tribunal administratif, c'est l'arbitre de griefs, ça fait qu'il n'y en a à peu près pas qui vont là, s'il n'y va pas. C'est sûr que c'était un ennui considérable pour les employeurs, parce que les employeurs, ils sont mis en cause au Tribunal administratif du travail. Ils ne savent pas s'ils doivent y aller ou faire des représentations. Puis le syndicat, bien, il est comme... bien, le syndiqué est souvent représenté par un avocat ou un conseiller externe. Puis le syndicat est contraint de démontrer qu'il n'a pas agi avec négligence grave. Je sais que ça peut être un ennui pour les syndicats.

Ceci dit, au-delà de s'éloigner du principe du projet de loi, ça créerait... Puis là là, je vous dis, de façon très, très télégraphique, collègue, une disparité importante entre les syndiqués puis les non-syndiqués, il y a 40 % des travailleurs qui sont syndiqués au Québec, il y en a 60, donc, qui ne le sont pas, qui peuvent faire une plainte à la CNESST, qui bénéficient d'une enquête, une décision de la CNESST. Ils peuvent être accompagnés, il peut y avoir de la médiation. Puis, après ça, ils peuvent même demander la révision administrative. Puis ils peuvent même aller au Tribunal administratif du travail. Puis, s'ils ne sont pas accompagnés par le service juridique de la CNESST, parce que la décision a été rejetée, ils peuvent y aller avec leur propre avocat. Ça fait que, moi, je pense que ça serait une disparité de traitement profonde entre les syndiqués puis les non-syndiqués, puis ça risquerait de viser de facto toutes les plaintes, là, parce que les formulaires sont faits. Il faudrait, comme, adapter des formulaires qui n'enverraient pas nécessairement le bon message. Quand c'est du harcèlement, tu ne peux pas avancer. Puis, quand ce n'est pas du harcèlement, à la limite, 47.2 puis 47.3. Puis 47.3, il faut quand même s'assurer que le syndicat a contrevenu à 47.2, qui réfère la négligence ou à l'abus ou aux mauvais traitements. Puis ça serait un peu en contradiction avec la position, vous vous souvenez, là, dans le cadre des modifications au Code du travail en 2019, les principes de justice naturelle, le droit d'être entendu, le droit de s'assurer d'être représenté de façon juste, sincère et adéquate, ça pourrait empêcher un syndiqué qui, de façon sommaire, est considéré comme l'auteur de violence ou de harcèlement, parce que là vous référez au harcèlement.

Et puis quand on réfère à au droit d'être entendu, bien là, il y a la liberté d'association, à mon avis, il y aurait, potentiellement, au-delà de l'enjeu d'équité procédurale, un enjeu constitutionnel. Puis, si je peux vous rassurer, dans la loi, dans la LITAT, la Loi sur le tribunal administratif du travail, il y a un article qui permet au TAT de rejeter sommairement, parce que je sais qu'un groupe, notamment la CSN, référait à la possibilité de rejeter sur dossier. Il y en a d'autres qui ont différentes formules, là, si l'employeur a sanctionné, il ne pourrait pas, sauf que l'employeur, des fois, il peut avoir sanctionné de façon abusive ou inéquitable. Ça fait que le TAT...

M. Boulet : ...quand même le pouvoir de rejeter sommairement une plainte de cette nature-là. Ça fait que c'est sûr qu'on pourrait en débattre pendant des heures, mais moi, j'ai beaucoup de motivation. Puis on va sûrement en rediscuter, peut-être dans le cadre d'un autre projet de loi, mais... Puis je comprends très bien la légitimité de ce que vous avancez comme amendement, mais à ce stade-ci, pour les raisons que je viens de mentionner, je ne suis pas confortable.

M. Leduc : Je peux y aller?

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Oui. Allez-y, M. le député.

M. Leduc : D'accord. Vous m'avez dit tantôt d'attendre que vous me donniez la parole.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Vous êtes un bon élève. Merci beaucoup.

M. Leduc : J'essaie de... J'essaie. M. le ministre, vous faites référence à la question du droit naturel. Puis c'est drôle parce que je l'ai vu venir, cet argument-là, parce que pas plus tard qu'hier, dans mon intervention au salon bleu, j'ai parlé de ça précisément. Puis j'ai émis la réflexion suivante à deux volets. D'abord, plus tard, là, quand on va commencer à... non seulement faire sauter, mais interdire les clauses d'amnistie, vous allez jouer un peu dans le droit naturel, là. Hein, vous allez décider que... Ce n'est pas étanche à 100 %, là, votre définition du droit naturel en faisant sauter les clauses amnistie. Je ne suis pas en train de dire je compte. Je viens de dire tantôt que j'étais assez ouvert à ça. Ça fait que, moi, je trouve ça un peu particulier de me faire servir cet argument-là quand dans quelques instants on va parler aux clauses d'amnistie puis vous faites précisément la même chose, c'est-à-dire que vous allez jouer dans... de droit naturel.

M. Boulet : Non. Ceci dit, avec respect, on n'interdit pas les clauses d'amnistie. On empêche... c'est-à-dire on permet à l'employeur de ne pas en tenir compte. C'est tout à fait différent. Puis les spécialistes en droit constitutionnel... Tu sais, parce que je sais qu'il y a un risque, là. Il peut y avoir des recours. Les risques sont faibles. On les a analysés. Puis, tu sais, l'employeur, là, tu sais, quand on parlait... Bien, on va... Puis ça, c'est un autre débat, là, mais tu sais, quand une personne est réhabilitée, ça fait partie des circonstances atténuantes, là. Si le travailleur est capable de démontrer qu'il s'est réhabilité, l'employeur dans l'exercice de son pouvoir de décision, si c'est disciplinaire ou administratif, il va considérer la réhabilitation comme un élément atténuant. Mais dans la vaste majorité des cas, le potentiel récidivant est extrêmement élevé. Puis il y a des experts scientifiques et médicaux qui le confirment, là. En matière de violence et de harcèlement sexuel, le risque est... Mais c'est différent. C'est pour ça que j'ai retenu une approche différente pour les clauses d'amnistie. Que mon collègue, dans une autre loi pour les fins de protéger les élèves, a utilisé un libellé aussi similaire.

M. Leduc : Oui, au final, vous avez bien pu prendre un chemin différent... Ça revient au même. Si on dit un patron n'est pas obligé d'en prendre compte, vous auriez tout aussi pu les abolir, puis ça aurait été la même affaire, là.

M. Boulet : Ah bien, les parties peuvent les négocier, les clauses d'amnistie.

M. Leduc : Oui, mais si elles sont inopérantes?

M. Boulet : Sauf que pour ces fins là, l'employeur dans l'exercice, dans l'examen, dans l'analyse de la situation d'un employé, ça ne pourra pas l'empêcher de tenir compte d'un événement qui est survenu quatre ans ou huit ans avant.

M. Leduc : Elles n'existeront que sur papier. Parce que, dans le réel, le patron aura toujours le choix de ne pas...

M. Boulet : Pour ces cas spécifiques là.

M. Leduc : Bien, il n'aura plus bien, bien d'intérêt de les négocier. Dans tous les cas, je suis d'accord avec vous sur le fond. Je dis juste que, sur la forme, vous êtes en train de jouer dans le droit naturel avec ça.

M. Boulet : ...

M. Leduc : Ce n'est pas vrai que c'est étanche. Puis là, moi, je dis : D'accord. Faisons un peu la même logique puis allons jouer un peu dans le droit naturel pour l'obligation de représentation. Vous avez dit dans un article du Devoir la semaine dernière, là, lorsque vous avez présenté votre projet de loi sur la construction au journaliste. C'était-tu Le Devoir? Je ne me rappelle plus quel journal. Je pense c'était Le Devoir. On vous interrogeait là-dessus en lien avec un élément que j'avais mis au jeu dans un point de presse, ici même, là à l'Assemblée. Vous étiez ouvert à la situation. Vous avez même dit : Oui, oui, je regarde ça, je trouve ça intéressant. Je comprends que c'était une ouverture intellectuelle, mais qu'après examen, la porte s'est refermée.

• (15 h 10) •

M. Boulet : ...serai ouvert intellectuellement, dans six mois, dans un an, tout le temps. Moi, j'aime ces discussions-là qu'on fait en étude détaillée, puis c'est fait dans le plus grand des respects, puis j'aime ça faire ces discussions-là. Mais je me vois mal en plus nier à un salarié injustement accusé, lui nier le droit de faire une plainte dans un cas comme celui-là. Parce que, là, on vient d'ouvrir la porte pour permettre au syndicat de dire : Non, malheureusement... Alors qu'il y a quand même... Le syndicat quand même une protection particulière...

M. Boulet : ...particulièrement efficace. On va relire 47.2 — là, excusez-moi — juste pour me remettre dedans.

«47.2. Le syndicat... l'association accréditée ne doit pas agir de mauvaise foi ou de manière arbitraire ou discriminatoire ni faire preuve de négligence grave.» Puis là, après ça, faut quand même que le salarié ait fait l'objet d'un renvoi ou d'une mesure disciplinaire, là. Je te dis` : Aïe! et c'est 30 %, collègue, des plaintes qui se rendent au Tribunal administratif du travail, puis 97 % sont rejetées.

M. Leduc : Non, mais tout ce temps-là, là...

M. Boulet : Je sais qu'il y a une appréhension puis, je sais, j'en ai côtoyé des représentants syndicaux que ça les ennuie, mais souvent, ce n'est pas analysé nécessairement de manière compatible avec ce qui est écrit à 47.2 et suivants. Mais je comprends votre point.

M. Leduc : Moi, j'ai... je vais donner un exemple d'une situation que j'avais connue quand j'étais conseiller syndical. Un employé s'était mis à envoyer des photos à des collègues de travail, des photos... vous devinez,  mettons, de quelle nature.

Une voix : Explicites.

M. Leduc : Photos explicites, on va dire ça de même. Ça s'était su, bon. Le syndicat se sentait obligé, de crainte du 47.2, de défendre cette personne, de déposer un grief, d'aller... alors que les plaintes... pas les plaintes, mais la preuve, elle était flagrante, là. Il n'y avait pas de... il n'y avait absolument aucune forme de doute sur le fait que lesdites photos avaient été envoyées par ladite personne, et que ça méritait une sanction qui était, dans ce cas-là, un renvoi. Vous, vous voulez continuer à obliger le syndicat à procéder à la défense de cette personne-là?

M. Boulet : Non. Ce n'est pas ce que la loi dit. Ce n'est pas ce que le code dit. Il pourrait, dans un cas manifeste comme ça, mettre en application son devoir de juste représentation, de représentation sans mauvaise foi, sans discrimination, sans négligence. Je vais vous donner le meilleur truc.

M. Leduc : Oui, mais...

M. Boulet : Moi, je recommanderais aux syndicats d'avoir des politiques en la matière et l'appliquer avec équité, et ça leur permettrait de dire, par exemple, on ne va pas de l'avant parce qu'on a respecté nos critères d'équité. Mais on ne peut pas nier à cette personne-là le droit d'être entendu si le syndicat... Dans un cas comme ça, là, selon moi, là, juste à vol d'oiseau, là, parce que c'est très, très sommaire, il n'y aurait pas de mauvaise foi. Il y a des syndicats qui interprètent 47.2 comme un devoir, indépendamment des circonstances. Non, les syndicats modernes auront ou doivent avoir des politiques pour décrire clairement comment ces syndicats-là doivent se comporter devant des auteurs de violences à caractère sexuel ou du harcèlement psychologique. Et pour les fins de la discussion, peu importe la nature de l'offense, si... Tu ne peux pas... Il faut quand même que tu assures un équilibre entre les intérêts des travailleurs. Puis à la limite, si tu n'es pas certain,  puis que ta politique te dit : Tu dois le représenter, puis qu'il est en conflit avec la victime, bien tu fais une muraille de Chine, ce que la plupart des syndicats font, mais ils n'ont pas systématiquement, ceci dit avec respect pour les syndicats qui nous écoutent, à faire des 47.2.

M. Leduc : Mais ça, cette pratique-là, elle existe déjà. S'il y a deux salariés, un agresseur et un agressé, c'est déjà souvent deux conseillers syndicaux différents ou des élus différents d'un exécutif qui s'occupent de ces dossiers-là, puis c'est bien correct, puis c'est bien normal. La question n'est pas là. Puis on... quand on a des échanges dans nos... dans nos différents projets de loi, M. le ministre, on a toujours eu cette différence-là où vous vous collez à une interprétation très, très stricte de la loi, puis moi, je vous parle de la réalité du terrain, puis des fois, on n'arrive pas à se comprendre. Bien sûr qu'en théorie le syndicat pourrait se construire un argumentaire qui dit : Je ne le déposerai pas grief. Mais qu'est-ce qui va arriver? Le salarié, là, l'agresseur, là, il le sait, là, le 47.2, ça existe. Il s'est peut-être poigné un avocat privé. Qu'est-ce qu'il lui a dit, l'avocat privé? Il a dit : Tu menaces ton syndicat d'un 47.2, puis tu vas voir, ton syndicat va plier parce que ça coûte tellement cher, c'est tellement long, c'est tellement pénible que, parfois, il fait le choix de t'écouter puis de le déposer ton grief ou ta référence à l'arbitrage, même s'il sait que tu es un tout croche...

M. Leduc : ...parce que c'est moins pénible que de se taper un 47.2, et c'est ce côté-là qu'il faut aller régler, M. le ministre, en retirant l'obligation.

M. Boulet : Je le comprends, puis c'est intéressant. Puis, tu sais, 47.2 vise à protéger un syndiqué contre les abus d'un syndicat, puis là vous me dites : Il faudrait protéger les syndicats contre les abus des salariés. Or, les tribunaux sont là pour ça, ultimement. C'est la raison pour laquelle le tribunal administratif rejette le quasi 97 % des dossiers, et, en plus, il a le pouvoir... puis vous me le faites dire en étude détaillée... il a ce pouvoir là spécifique de rejeter sommairement une plainte, puis c'est prévu dans la loi, puis ça devrait être fait plus régulièrement dans des cas d'abus de syndicats par des salariés syndiqués.

Mais on ne peut pas juste, en regardant puis en disant : Il a autant de harcèlement ou de violence, puis il n'a pas droit à rien, là... Il a quand même droit d'aller dans un canal lui permettant de s'exprimer. Le droit d'être entendu, c'est ça. Puis tout non-syndiqué, ce régime à deux vitesses là, il serait fantastique, et du non-vu, en droit du travail. Le non-syndiqué, là, il aurait tout, la représentation, l'enquête, la décision initiale, la révision administrative, la représentation, le cas échéant, par un avocat de la CNESST ou un autre avocat, puis une audience au TAT. Tu sais, c'est comme... Puis là on vient dire ici : Toi, si tu es victime de négligence... en fait, si tu es renvoyé ou tu es l'objet d'une mesure disciplinaire, puis que, dans ce contexte-là, le syndicat a agi de mauvaise foi ou de manière arbitraire ou discriminatoire, donc fait preuve de négligence, tu te retrouves le bec à l'eau. En tout cas.

Mais je comprends ce que vous me dites. Je sais... Puis j'espère que notre échange va contribuer à une meilleure compréhension de ce que c'est. Parce que vous étiez conseiller syndical. Moi, je ne faisais pas le même travail, mais il y en a beaucoup, de syndicats, dans le cadre de mon travail, qui me disaient : Nous, on a cette contrainte-là, on doit systématiquement les représenter. Puis moi, je n'argumentais pas, à ce moment-là. Mais là je suis dans une position où je peux le dire.

M. Leduc : Cet article là, là, M. le ministre, 47.2, 47.3, de mémoire d'historien de formation que je suis, là, ça avait été introduit pour éviter les effets de gang, hein, qu'il y a... Parce que les syndicats, c'est des petites bibittes politiques aussi, hein, il y a un exécutif, puis il peut y avoir des élections, puis, si tu as une gang qui se présente à l'exécutif contre une autre gang, puis quelqu'un, dans l'autre gang, qui subit un renvoi ou une mesure disciplinaire, bien, il peut y avoir une espèce de côté revanchard, de dire : Bien, je ne te défendrai pas, parce que tu as voté contre moi à l'élection de l'année passée. Tu sais, l'humain étant l'humain, il y a de tout partout, et ça peut se retrouver, évidemment, dans le milieu syndical comme ailleurs. Donc, ce genre d'article là était prévu pour ça, c'était prévu pour éviter que tu gagnes ton élection avec ta gang puis que tu décides que ton appareil syndical ne sert plus à défendre tout le monde, mais ne sert qu'à défendre ceux qui ont voté du bon bord. Ça fait que c'est une bonne idée qu'on ait introduit ça, à l'origine.

Mais quand vous dites vous-même... Puis la statistique, elle est pire que je pensais, là, 97 % des plaintes rejetées. Ça ne vous envoie pas un signal qu'il y a quelque chose qui ne va pas dans le système, qu'il y a quelque chose de brisé si 97 % de vos plaintes sont rejetées?

M. Boulet : Non, mais c'est...

M. Leduc : Ça ne veut pas dire que ça fonctionne bien, là.

M. Boulet : Non, mais il n'y en a que 30 %. Il n'y en a pas beaucoup. Il n'y en a que 30 % qui se rendent au Tribunal administratif du travail, là, donc c'est peu. Je ne sais pas combien il y a de plaintes en vertu de 47.2, au Québec, par année. Je vous donnerai le chiffre... 465. C'est peu. 465 plaintes par année, ce n'est pas le désastre qui nous est annoncé ou auquel on fait référence. C'est... Sur combien d'unités d'accréditation syndicale au Québec? Il y en a combien? Des milliers.

M. Leduc : Bien, 465, ce n'est pas banal.

M. Boulet : Mais il y en a combien, d'accréditations syndicales?

M. Leduc : Il n'y a pas 150 personnes dans les services juridiques des centrales syndicales, là.

M. Boulet : 465, collègue.

M. Leduc : Oui, mais il faut les préparer, ça, il faut monter le dossier, il faut y aller...

• (15 h 20) •

M. Boulet : Il y en a 30 %, de ces plaintes-là, qui vont au Tribunal administratif du travail, puis 97 % sont rejetées. Et là on ferait un amendement qui comporte des enjeux constitutionnels, qui crée un régime à deux vitesses, qui nuit à... au pouvoir, notamment, de rejeter...

M. Boulet : ...du Tribunal administratif du travail avec les conséquences en matière d'équité procédurale. Moi, je pense que, quand on fait la balance des avantages et des inconvénients, ça nous fait réaliser que ce que ça nous impose comme parlementaires, c'est de mieux expliquer. Puis je sais que vous profitez de cette discussion-là pour passer des messages, puis ça me fait plaisir d'y contribuer, parce qu'il ne faut pas que 47.2 soit interprété comme donnant un droit à n'importe qui, n'importe quand, indépendamment de ce qu'il a pu faire ou de ce qu'elle a pu faire aussi.

M. Leduc : Bien, ce n'est pour ça que je dis du tout, ce que je dis, c'est que, moi, je pense que 467 plaintes, 464, ce n'est pas banal non plus, ça nécessite du gros travail, qu'il y a des gens qui passent quasiment du temps plein dans certaines centrales à gérer ce fardeau que sont les plaintes... la... à 97 % du temps frivoles ou, en tout cas, pas basées. Puis qu'au-delà de ça, au-delà de ça, il faut envoyer un signal clair et il faut permettre aux syndicats... Puis là on... je reviens à la base, là, pas en train de dire que le syndicat devient incommunicado dès qu'il y a un moindre soupçon, là. Le... dit : A subi un renvoi ou une mesure disciplinaire. Puis, d'habitude, si le patron fait bien sa job, s'il y a un renvoi ou une mesure disciplinaire, c'est qu'il y a une enquête sommaire ou... une enquête en bonne et due forme. Ça fait que, le syndicat, on assume qu'il aura pris connaissance du dossier, qu'il aura fait sa... son enquête aussi. Et c'est suite à ça que là, moi, je dis : Pourquoi il serait obligé de procéder?

M. Boulet : C'est intéressant qu'on me dise que le syndicat assume que l'employeur a bien fait son enquête et donc que la mesure est bien fondée. Tu sais, je ne suis pas sûr que ça, c'est la réalité, mais vraiment pas.

Puis là j'ai les chiffres plus précis, là, c'est 489, mais il y en a 226 de ces 489 qui ont été réglés ou il y a eu un désistement. Donc, ce n'est vraiment pas un phénomène important au Québec, c'est vraiment très, très marginal, ce n'est vraiment pas un enjeu. Quand on le comprend bien, c'est beaucoup plus une protection, une équité procédurale au bénéfice des salariés, puis indépendamment de ce qui s'est passé, là, mais pour les protéger contre les abus syndicaux, contre les négligences dont ces personnes-là peuvent faire l'objet.

M. Leduc : Incluant l'auteur d'une violence à caractère sexuel.

M. Boulet : Oui. Là, vous parlez...

M. Leduc : C'est important de protéger les droits de l'auteur d'une violence à caractère sexuel.

M. Boulet : C'est important de donner une plateforme où la personne a le droit d'être entendue. Le non... le...

M. Leduc : Bien, personne ne dit qu'il n'a pas le droit d'être entendu ici, là.

M. Boulet : Oui, mais «si un salarié qui a subi un renvoi pour un motif autre».

M. Leduc : Il n'est plus obligé d'être entendu en lien avec un grief ou un arbitrage.

M. Boulet : Tu sais, 47.3, il faut quand même qu'il croie, à cette occasion-là, avoir été victime d'abus, discrimination ou négligence grave. Puis, je le répète, le régime à deux vitesses, on ne peut pas faire un amendement à un article du Code du travail qui crée...

M. Leduc : M. le ministre, vous le faites sur les...

M. Boulet : Oui, c'est un régime à deux vitesses.

M. Leduc : ...vous le faites sur les clauses d'amnistie où c'est précisément ça que vous allez faire.

M. Boulet : Non, parce qu'en milieu non syndiqué, là, l'employeur, il n'en a pas, de clauses d'amnistie, c'est négocié par les syndicats et les employeurs. La convention, c'est la loi des partis. En milieux non syndiqués, il n'y a pas de clause de pardon ou d'amnistie, ça n'existe pas. Ça fait que...

M. Leduc : Mais vous décidez que, sur certains sujets, il n'y en aura plus, des clauses d'amnistie, ou elles ne seront pas considérées par l'employeur.

M. Boulet : Oui. Tout à fait.

M. Leduc : Mais c'est un peu la même chose que je fais ici.

M. Boulet : Non. Mais là, quand on parle du droit d'être entendu, ça serait créer vraiment un régime distinct pour les non-syndiqués, parce que le non syndiqué, là, auquel vous pensez, là, qui ne devrait pas avoir accès à tout le processus de 47.2 et suivant, lui, là, il pourrait aller à la CNESST en révision administrative puis au tribunal. Ça, pour moi, c'est un enjeu profond, puis je suis sûr qu'on se ferait casser ça.

M. Leduc : Moi, ce que je retiens, c'est que vous trouvez ça important de maintenir cette possibilité-là, pour l'auteur d'une violence à caractère sexuelle. Je suis un peu déçu, parce que je trouvais que c'était une façon supplémentaire de serrer la vis envers les agresseurs sur les milieux de travail, d'envoyer le message que ce n'est pas vrai que tu vas te faire défendre n'importe quand, n'importe où, de donner davantage de liberté de jugement des dossiers à la partie syndicale, d'envoyer le message que ce n'est pas vrai que c'est le bar ouvert pour les agresseurs. Je sentais un appétit de ce côté-là dans l'espace public, donc je suis...

M. Leduc : ...un peu déçu de voir que cette porte-là se referme aujourd'hui. Puis j'insiste encore une fois, hein, quand je disais tantôt : Vous faites la même chose dans les clauses d'amnistie, je vais être d'accord, tantôt, on va avoir des échanges, on va avoir des questions, mais, au final, je vais être d'accord d'avoir un petit régime à deux vitesses sur les clauses d'amnistie pour serrer la vis. Ça fait que je ne vois pas pourquoi on se permet de le faire là-bas puis on ne se permet pas de le faire ici.

M. Boulet : Mais, en fait, j'apprécie votre amendement. Je sais le sentiment qui vous habite, puis on en a parlé, je pense que d'avoir une politique de représentation avec des critères d'équité, des critères objectifs de la part des syndicats, vous permettrait exactement d'atteindre le même objectif sans nier un droit fondamental. Je suis profondément convaincu que, si le syndicat avait une politique de représentation pour baliser l'application de 47.2, il atteindrait le même objectif. Puis moi, j'apprécie toutes les discussions puis je trouve d'ailleurs que, depuis le début de l'étude détaillée, c'est superintéressant, puis je comprends très bien votre amendement, puis je le respecte, puis je respecte encore plus les motivations que vous avez, collègue.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci, M. le ministre. Alors, le député de Jean-Talon, la parole est à vous.

M. Paradis : J'ai écouté avec attention cet échange. Je pense que mon collègue le député d'Hochelaga-Maisonneuve apporte, arrive avec un enjeu qui est vraiment important en droit du travail, là, celui des articles 47.2 et 47.3 du Code du travail. Je suis heureux d'entendre que le ministre en prend bonne note, parce que c'est peut-être un débat qui devrait avoir lieu de nouveau. Notamment, on a parlé tout à l'heure de l'importance d'entendre les acteurs concernés. Ces changements-là, proposés par mon collègue d'Hochelaga-Maisonneuve sont des changements importants. Je pense que ça serait bien d'entendre les syndicats eux-mêmes, les représentants des travailleurs et les représentants patronaux.

Et là un angle que je n'ai pas entendu dans cette discussion, là, mais que... je pense, auquel il faut faire attention, c'est que la création d'une exception, par exemple, à 47.3, peut être interprétée, en quelque sorte, comme une confirmation du régime général, et peut-être qu'on veut faire attention à ça aussi, là. Si on veut jouer dans ces articles-là, 47.2, 47.3, il faut faire attention aux effets qu'une modification précise, ici, pourrait avoir sur l'interprétation du régime général. Donc, en quelque sorte, peut-être que cet échange entre le ministre et le député d'Hochelaga-Maisonneuve devrait mener à une initiative plus large de révision de ces deux articles-là du Code du travail, sur lesquels on pourrait entendre les parties concernées, parce que c'est un véritable enjeu qui est discuté aujourd'hui.

M. Boulet : Moi, je suis totalement d'accord avec ça, puis on va avoir d'autres opportunités. Il y a d'autres projets de loi, éventuellement, sur lesquels nous travaillons. Puis, moi, je suis prêt à avoir de nouveau une discussion. Puis le Comité consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, où sont les leaders patronaux et les centrales syndicales, pourraient aussi nous donner un éclairage, puis il y aura des... Mais la porte n'est pas fermée à jamais, là, à discuter puis à trouver des solutions différentes de l'état actuel du droit. Tout à fait d'accord.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci, M. le ministre. Il y avait M. le député de l'Acadie.

• (15 h 30) •

M. Morin :Merci, Mme la Présidente. Écoutez, je comprends et j'ai suivi avec attention les explications du collègue député d'Hochelaga-Maisonneuve, mais mon intervention ira sensiblement dans le même sens que le collègue, du député de Jean-Talon, c'est-à-dire qu'on a... j'ai dit précédemment, aujourd'hui, quand on a commencé l'étude article par article, qu'il était important de consulter, d'entendre différents groupes. Et là je comprends ce qu'a à l'esprit le collègue d'Hochelaga-Maisonneuve, mais c'est quand même... on va se démarquer du régime général qui existe présentement en droit du travail, et là on n'a pas entendu personne, pas entendu de patron, pas entendu de syndicat. J'ai ce malaise, et c'est la raison pour laquelle... et là le gouvernement, M. le ministre, décidera, mais, si jamais il y a une poursuite, je pense qu'il faudrait que ce soit fait dans un forum où on aura eu l'opportunité d'entendre plusieurs groupes, pour ne pas prendre une décision précipitée qui va avoir un impact sur le droit du travail sans qu'on ait tous les...


 
 

15 h 30 (version non révisée)

M. Morin :...Merci.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci beaucoup. M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve, pour votre information, il vous reste 5 min 15 s.

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. Je prends la balle au bond que le ministre vient de lancer au jeu, à savoir obtenir l'opinion de la CCTM, le Comité consultatif du travail et de la main-d'œuvre, qui est une instance intéressante, là, qui nous avait guidés notamment sur les travaux de la santé-sécurité puis sur plusieurs autres. Je veux juste l'entendre un peu plus clair, là. Est-ce que j'ai bien compris que le ministre était intéressé à donner un mandat au CCTM d'étudier cette question là du 47.2?

M. Boulet : J'en discuterai avec le CCTM. Est-ce qu'ils ont déjà fait des travaux sur 47.2 et suivants? Je pense que oui. On pourra faire l'inventaire des travaux. Et s'il y a des opinions complémentaires ou des avis complémentaires, plutôt, à obtenir, moi, je suis ouvert à les obtenir. Et il y aura une discussion franche entre les syndicats puis les patrons, puis on obtiendra l'avis, puis ça pourra nous guider dans un autre projet de loi qui sera plus centré sur la simplification des procédures. Puis, oui, le CCTM est le forum approprié pour faire la réflexion qui s'impose et la finaliser, cette réflexion.

M. Leduc : Parce qu'on sait comment ça marche dans la CCTM... fait des travaux. Mais vous, vous pouvez donner des mandats au CCTM.

M. Boulet : Tout à fait. Alors, j'en discute, je vais obtenir l'inventaire des travaux qui ont été effectués et, si besoin en est, on obtiendra un avis complémentaire.

M. Leduc : Ça serait quoi un délai raisonnable pour que je vous relance là-dessus?

M. Boulet : Ah, mon Dieu! Moi, je pense que je leur mets tellement de pression, au CCTM. Ils savent que j'ai peu de patience, mais certainement quatre, cinq mois, six mois, là. Sûrement au début de l'automne, collègue.

M. Leduc : Pour voir s'ils ont déjà fait des travaux là-dessus?

M. Boulet : Non, non, pour... Ah! non, non, non, l'inventaire des travaux, ça, ça peut prendre quelques semaines, là, ça ne sera pas long, là.

M. Leduc : O.K. Au retour du congé de la relâche, vous aurez pu avoir cette information-là.

M. Boulet : Ah! Bien oui, au retour du congé de la relâche, oui, oui, je serai en mesure de dire : Il y a eu des réflexions, il y a eu des échanges, il y a eu des rapports, il y a eu des consultations...

M. Leduc : Oui s'il n'y en a pas eu.

M. Boulet : Oui, exactement. Tout à fait. À ce moment-là, moi, je pourrais leur donner leur mandat de nous faire un avis.

M. Leduc : Intéressant. Je vous tiens au mot. On se reparle rapidement sur ce sujet-là.

M. Boulet : Et ce sera fait.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci beaucoup. Alors, si n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix.

M. Leduc : Un vote par appel nominal, s'il vous plaît, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Très bien. Alors, est-ce que la question... est-ce que l'amendement introduisant le nouvel article 0.1 du Code du travail est adopté? Mme la secrétaire, nous avons une demande de vote nominal.

La Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. Pour, contre, abstention. M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve)?

M. Leduc : Pour.

La Secrétaire : M. Boulet (Trois-Rivières)?

M. Boulet : Contre.

La Secrétaire : Mme Tremblay (Hull)?

Mme Tremblay : Contre.

La Secrétaire : Mme Mallette (Huntingdon)?

Mme Mallette : Contre.

La Secrétaire : M. Dufour (Abitibi-Est)?

M. Dufour : Contre.

La Secrétaire : Mme Poulet (Laporte)?

Mme Poulet : Contre.

La Secrétaire : M. Morin (Acadie)?

M. Morin :Contre.

La Secrétaire : Mme Caron (La Pinière)?

Mme Caron : Contre.

La Secrétaire : Mme Boivin Roy (Anjou—Louis-Riel)?

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Abstention. Alors, le nouvel article est rejeté.

Donc, nous allons poursuivre l'étude détaillée. M. le ministre, nous serions rendus donc au Code du travail, les articles 1 et 2. Je rappelle à tous les membres de la commission que vous avez 20 minutes par intervention pour chacun des articles, évidemment, en une seule intervention ou morcelée en plusieurs interventions en vertu de l'article 245. Alors, je ne le rementionnais pas, à défaut d'avoir un temps supplémentaire pour un article donné. M. le ministre.

M. Boulet : ...

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Oui, effectivement.

M. Boulet : Ça fait que j'allais demander une pause, là, mais. O.K. Alors :

1° Le Code du travail est modifié par l'insertion, après l'article 100, du suivant :

L'arbitre qui procède... En fait, 100.0.0.1 : L'arbitre qui procède à l'arbitrage d'un grief relatif à une conduite de harcèlement psychologique au sens de la Loi sur les normes du travail doit avoir subi... suivi, excusez-moi, une formation sur la violence à caractère sexuel dont les conditions sont déterminées par le ministre.

Commentaire. Donc, c'est un nouvel article qui répond à une recommandation. C'est la recommandation 39, là, du comité d'expertes. Donc, l'obligation pour un arbitre... puis là c'est large, dès que c'est un grief de harcèlement psychologique. Pourquoi? Parce qu'il peut y avoir, sans que ce soit mentionné, une connotation sexuelle...

M. Boulet : ...de suivre, puis là, ça fait référence, collègue de Jean-Talon, là, à l'harmonisation, là, tu sais, c'est plus que pas assez, donc de suivre une formation portant sur la violence à caractère sexuel dont les conditions sont déterminées par le ministre. Donc, le ministre va prévoir, dans ces conditions, le contenu, la durée, les personnes, les organismes autorisés à donner cette formation. Alors, ça complète.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci, M. le ministre. Alors, M. le député de l'Acadie.

M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Alors, j'ai... en fait, j'ai quelques observations et une ou deux questions pour M. le ministre, dans un premier temps.

Quand on regarde l'article 18 du projet de loi, qui va modifier la loi sur les normes du travail, et qu'on fait référence à l'ajout d'une politique, vous prenez la peine, M. le ministre, d'indiquer dans la loi plusieurs éléments pertinents qui vont devoir être inclus dans la politique. Par ailleurs, ici, on parle de formation. Mais plutôt que d'inclure dans la loi certains éléments essentiels qui pourraient être inclus dans la formation et donc qui, d'une certaine façon, pourraient suivre la logique de l'article 18, vous vous réservez le droit de les déterminer vous-même. J'imagine que ce sera éventuellement par règlement ou un décret du gouvernement. Et puisqu'il s'agit d'un élément important, je comprends que... je comprends qu'ici c'est un peu plus restreint, on parle de formation pour les arbitres, mais il n'en demeure pas moins que, s'il y a des éléments qui sont éminemment importants, je pense que ce serait intéressant de les mettre dans le projet de loi, ce qui permettrait aux parlementaires d'en débattre ou de vous faire des suggestions là-dessus. C'est mon... c'est ma première remarque, ma première... ma première observation, puis qui est aussi une question, donc M. le ministre pourra évidemment m'expliquer davantage pourquoi il a choisi de décider... en fait, d'agir et de prendre cette décision-là, ici.

L'autre élément que j'aimerais soulever, parce qu'on en a parlé beaucoup depuis le début de l'étude article par article, et je fais référence au document, au mémoire du comité d'expertes, maîtres Cox, Gesualdi-Fecteau et Lalamme, qui font une recommandation de modification spécifiquement pour cet article, et je vous réfère, M. le ministre, à la page 16 de leur mémoire, et qui disent qu'en fait on devrait faire une référence aux enjeux de violence à caractère sexuel, qui sont plus larges, et non pas en vertu de la Loi sur les normes du travail, mais plutôt en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Et ça, pour qu'il y ait une cohérence et pour que votre modification proposée soit vraiment efficace. Et ça revient, finalement, à toute la discussion qu'on a eue, là, depuis le début de la journée, sur les différentes définitions. Et je me demandais pourquoi vous n'avez pas ici suivi la recommandation du comité d'experts.

Donc, ce sont mes deux premières questions, M. le ministre.

M. Boulet : O.K. J'en ai discuté avec les expertes, puis c'est... la formation, c'est bien sûr la violence à caractère sexuel, donc telle que définie dans la loi santé et sécurité du travail, mais c'est imposé à tous les arbitres qui entendent des griefs en matière de harcèlement psychologique. Pour les raisons que j'ai précisées un peu plus tôt, souvent, ces griefs-là finissent par se transformer en plaintes pour faire suite à des violences à caractère sexuel. Donc, je pense que le but visé par les expertes était rencontré, puis c'est comme ça qu'on l'a libellé.

• (15 h 40) •

Puis pour la formation, bien, la formation, ce qui est souhaité, c'est que ce soit un article, une... des activités de formation, conformément à la politique du CCTM. Donc, ça va être déterminé par le CCTM, mais le ministre va consulter avant de déterminer le contenu de la formation. Mais déjà, la formation est amorcée. La conférence des arbitres et le CCTM, qui nomme... en fait, moi... le ministre du Travail, en fait, nomme les arbitres sur recommandation du CCTM. Et le CCTM s'est engagé...

M. Boulet :  ...à modifier sa politique générale pour la confection puis la liste des membres en y ajoutant l'obligation de formation. Donc, tout est attaché. C'est sûr que tout n'est pas dans la loi, mais il y a... Puis c'est pour ça que je répétais souvent, dans mes notes préliminaires : Il y a tellement de recommandations à saveur administratives. On aurait eu 250 articles de loi. Puis, ce qui est administratif, c'est CNESST... c'est CCTM, c'est la conférence des arbitres. Mais ce qui était... ce qui est au cœur de la recommandation, c'est d'obliger les arbitres à être formés sur les mythes et stéréotypes en matière... Est-ce que je comprends que le collègue avait demandé... le collègue d'Hochelaga-Maisonneuve?

La Présidente (Mme Boivin Roy) : En fait, ce n'était pas clair parce que... tout de suite, c'est ça, nous, on a 15 h 50, je pense qu'il est simplement allé à la chambre de bain, peut-être.

M. Boulet : Ah! O.K. Parfait.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : M. le député de l'Acadie.

M. Morin : Oui, parce que... Parce que, compte tenu de votre réponse, M. le ministre, et je vous en remercie, en ce qui a trait à la consultation, j'aurais... j'aurais un amendement à proposer à cet article-là du projet de loi que nous pouvons envoyer sur Greffier, puis je pourrai expliquer pourquoi par la suite.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Parfait. Merci, M. le député. Alors, est-ce qu'il y a d'autres commentaires?

M. Leduc : En attendant que ça soit envoyé? Oui, bien, je peux y aller.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : ...allez-y, M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : J'ai dit quelque chose de drôle?

M. Boulet : Non, non...

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Non, on se demandait...

M. Boulet : ...l'opportunité d'être entendu.

M. Leduc : Bien oui, on y va dans ce cas là!

M. Boulet : Vous... je savais que vous alliez la saisir.

M. Leduc : Vous connaissez mon tempérament, M. le ministre. J'ai des questions. Donc, 100.0.0.1, ça fait beaucoup de points, mais bon, quand vous parlez de l'arbitre de griefs, en fait, l'arbitrage de griefs, donc un arbitre de griefs, c'est bien. Est-ce que les juges... Est-ce que les médiateurs vont être formés aussi?

M. Boulet : Oui, je vais répondre à ça tout de suite. La lettre du TAT, s'il vous plait. Je l'ai lu, à quelque part, mais c'est important que je la lise, parce que ça, ça fait partie de ce qui est administratif. Je vais lire de quoi, là, ça va prendre deux minutes.

Des voix : ...

M. Boulet : Ça ne sera pas long, Mme la Présidente. Bon, ça va rassurer aussi ceux qui nous écoutent. Je l'ai demandé. Et j'ai obtenu la confirmation, puis je pourrai vous transmettre la copie, là, mais ça vient de la secrétaire générale du Tribunal administratif du travail. C'est pour donner suite à la recommandation pour former et créer une division spécialisée. Et c'est...

Des voix : ...

M. Boulet : Bon, le tribunal... Le 15 novembre dernier, Mme Catherine Gareau-Blanchard, du ministère de la Justice, a dispensé une formation intitulée Mythes et stéréotypes avec lesquels composent les personnes victimes de harcèlement sexuel et d'agression à caractère sexuel, à tous les juges administratifs, les conciliateurs, ainsi que les assesseurs. Puis cette formation a été adaptée aux besoins du tribunal. Puis elle, Mme Gareau-Blanchard, du ministère de la Justice, elle dispense une formation aussi à tous ceux qui vont intervenir avec le tribunal spécialisé... puis l'équipe spécialisée est en fonction. Donc, la formation est déjà donnée. Puis c'est des juges administratifs qui détiennent déjà l'expertise. Ils sont dans la division santé-sécurité. Ils sont dans la division relations de travail puis les dossiers vont être traités par des conciliateurs dument formés aussi. Puis cette équipe spécialisée là, bien, elle va atteindre les objectifs recherchés par nos trois expertes pour la création d'une division spécialisée. Puis il y a des pouvoirs prévus, là, dans la loi constitutive du tribunal. Il va y avoir une conférence préparatoire. Il va y avoir des mesures d'aide aux témoignages, des paravents...

M. Boulet : ...des témoignages à distance, l'obtention d'une ordonnance pour remettre le nom de personnes impliquées, s'il y a des préjudices, des ordonnances de non-divulgation, non-publication non-diffusion, de l'accompagnement, puis, en tout cas, il y a une série de mesures, mais pour répondre plus spécifiquement à votre question, oui, c'est déjà fait.

M. Leduc : Donc, mais pourquoi, dans la loi, on fait juste référence aux arbitres de grief?

M. Boulet : Bien, parce que le code du... Il y a la loi, c'est une autre loi. C'était une recommandation qui pouvait se mettre... devenir effective par la voie administrative. Dans le Code du travail, ça concerne les arbitres, pas les juges. Il y a une autre loi, qui s'appelle la Loi sur le tribunal administratif du travail, et on pouvait le mettre en œuvre, comme j'avais expliqué à Me Laflamme... Fecteau puis... oui, effectivement.

M. Leduc : Bien, donc, autre question, pourquoi avoir choisi seulement cette loi-là et pas les autres?

M. Boulet : Bien, parce que le Code du travail, c'était la recommandation, que les arbitres qui étaient saisis de griefs en matière de harcèlement psychologique aient une formation obligatoire, alors moi...

M. Leduc : D'accord, donc, découlant de la recommandation du rapport Cox, vous avez dit : Je vais le faire, mais, à défaut d'ouvrir les autres lois... ce qui n'aurait pas nécessairement été plus long, j'imagine?

M. Boulet : Non, mais ça pouvait se faire administrativement, puis ce qui pouvait se faire administrativement... beaucoup de recommandations pouvaient se faire via la CNESST et 90 % des recommandations administratives qui concernent la CNSESST sont déjà en application, ça fait que...

M. Leduc : Mais ce qui est administratif, ça peut aussi être arrêté n'importe quand.

M. Boulet : Ah! tout à fait. Ça peut...

M. Leduc : ...tandis que, dans la loi, tu ne peux pas faire ça.

M. Boulet : Ce n'est pas la même procédure. Ce qui est administratif peut être évolutif, donc s'adapter, tu sais. Par exemple, on se parle, nous deux, à l'occasion, puis s'il y a des façons différentes de faire, on les change, on les adapte, vous l'avez vu pour les travailleurs étrangers temporaires, pour l'escouade de prévention, pour les services d'aide personnalisée, pour les entreprises. Ça, ça évolue, mais pour ce qui est des recommandations du rapport Cox, je pense qu'on va l'appeler comme ça, c'est les arbitres qui étaient visés.

M. Leduc : Qui étaient, uniquement, identifiés.

M. Boulet : Dans le Code du travail, oui.

M. Leduc : Et non les autres.

M. Boulet : Exact.

M. Leduc : Bon. Quand vous dites «suivi une formation sur la violence à caractère sexuel dont les conditions sont déterminées par...», de quelles conditions on parle?

M. Boulet : Les conditions, bien, c'est ce que devra obligatoirement être...

M. Leduc : Le contenu?

M. Boulet : Le contenu de la formation. Mais c'est déjà amorcé, puis, comme je mentionnais un peu plus tôt, le CCTM s'est déjà engagé à modifier sa politique générale pour la confection puis la gestion de la liste des membres arbitres. Comme vous savez, ils me font des recommandations, que j'entérine, on nomme des arbitres, puis ça va être autant les arbitres nommés par le ministre que les arbitres convenus entre les parties, là. Souvent, dans les conventions collectives, il y a des arbitres déjà identifiés. Quand ils ne sont pas identifiés... C'est les arbitres qui décident, hein, c'est la particularité de la justice arbitrale, mais ils vont ajouter une... quand la loi va être adoptée, ils vont ajouter une obligation de formation, et c'est l'organisme qui va déterminer ce que constituent les conditions, là, de formation.

M. Leduc : O.K., c'est ça, ça fait que... ce n'est pas vous.

M. Boulet : Puis la conférence des arbitres, on a eu des discussions avec eux autres, parce qu'ils font partie des organismes qu'on a consultés, et eux aussi, ils en font déjà, de la formation obligatoire, puis ils vont s'engager à l'adapter en fonction des besoins du système.

M. Leduc : Ça fait que chacun des groupes qu'on a parlé tantôt, là, les arbitres, les médiateurs, les juges, ils vont s'autoréguler, ou c'est en lien avec votre ministère? Parce que c'est...

• (15 h 50) •

M. Boulet : Bien, bon, le TAT, c'est l'équipe spécialisée, des juges relations de travail puis santé et sécurité, les conciliateurs, les assesseurs, les intervenants formés. Les arbitres, c'est prévu dans le Code du travail, puis la CNESST, collègue, on a annoncé, en septembre, à Montréal, un partenariat avec Maître Sophie Gagnon puis l'équipe de Juripop, puis la CNESST a déjà formé, bien, a engagé 18 conseillers en santé psychologique pour l'identification des risques psychosociaux, donc la violence physique, psychologique, incluant la conjugale, familiale et sexuelle. Il y a déjà beaucoup d'ateliers de formation qui ont été faits. Puis les intervenants, là, les conseillers en réadaptation, vous connaissez ça, les agents d'indemnisation, ceux qui auront à gérer des dossiers de violence...

M. Boulet : ...à caractère sexuel seront formés. Les dossiers vont être traités prioritaires. Il y a tout... je n'aime pas utiliser ce mot-là, là, mais un écosystème qui va graviter autour de notre tronc commun, qui est notre projet de loi, pour s'assurer que ça soit... ça nous permette d'atteindre nos objectifs qu'il y en ait le moins possible, évidemment.

M. Leduc : Pourquoi vous n'aimez pas ça dire «écosystème»?

M. Boulet : Bien, je trouve que...

M. Leduc : Je suis curieux.

M. Boulet : Je trouve, c'est surutilisé.

M. Leduc : Ah! c'est surutilisé. O.K.

M. Boulet : Oui.

M. Leduc : Dernière question, Mme la Présidente, on parle de quel délai pour que cette formation-là soit construite, coordonnée et livrée, surtout?

M. Boulet : Bien, elle est déjà donnée dans plusieurs cas. Évidemment, quand l'obligation va être effective, quand ça va entrer en vigueur, ça va devoir se faire, il va y avoir... je pense, c'est un... c'est-tu un délai de six mois?

Des voix : ...

M. Boulet : On va en discuter...

M. Leduc : Dans les délais d'application.

M. Boulet : ...dans les dispositions d'entrée en vigueur, oui.

M. Leduc : Mais j'ai entendu un an à peu près, pour avoir complété l'ensemble des formations pour tout le monde.

M. Boulet : Exact. Mais il y a une bonne partie, sinon la majorité des formations qui sont déjà complétées.

M. Leduc : Est-ce que ça va être une formation d'une seule fois ou il y aura des mises à niveau?

M. Boulet : Ah mon Dieu! Vous me le faites dire. Il y aura des suivis puis il y aura des formations mises à jour, là, parce que ça évolue tellement.

J'ai rencontré une dame qui a écrit un livre, je ne sais pas si vous la connaissez, une dame qui est originaire de l'Abitibi-Témiscamingue, elle vit dans la région de Montréal, elle a écrit un livre sur les relations toxiques au travail puis en affaires, puis j'ai trouvé ça tellement intéressant parce que... bien, elle, elle s'intéresse beaucoup à ce qu'elle appelle les pervers narcissiques, là, mais elle a beaucoup d'exemples de symptômes, de comportements pour permettre aux employeurs de détecter des signes. Puis, tu sais, je le disais souvent, les risques psychosociaux, là, tu peux avoir une dame qui travaille différemment, qui a des ecchymoses, qui va souvent à la salle de bain, qui va souvent au téléphone, qui sort souvent dehors, dont la qualité ou la quantité de travail se modifie. Il y a beaucoup d'indices comportementaux ou de symptômes qui permettent de détecter, hein? Puis, quand on parle de violence, ça va requérir ça, là, ce réflexe-là, là, d'être attentif puis d'aider la personne.

Mais ça va faire partie de la formation... là, je dévie un peu du sujet, là, de la formation des milieux de travail.

M. Leduc : Peut-être encore une petite dernière, Mme la Présidente. Tantôt, quand on a parlé des médiateurs ou des conciliateurs, je veux juste... certain qu'on a couvert tout le monde, parce que, si je ne me trompe pas, conciliateur, c'est au tribunal, puis médiateur, c'est à la CNESST.

M. Boulet : Exact.

M. Leduc : Tout ce beau monde là va avoir cette formation-là?

M. Boulet : Absolument.

M. Leduc : O.K. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci beaucoup, M. le député. Alors, nous allons suspendre les travaux. M. le député, je pense que vous êtes attendu au salon bleu bientôt. Sous entente des leaders, évidemment, nous allons pouvoir suspendre. Et, au retour, il y aura intervention de Mme la députée de La Pinière. Également, M. l'Acadie, vous aurez un amendement pour nous.

Alors, les travaux sont suspendus. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 15 h 54)


 
 

16 h (version non révisée)

(Reprise à 16 h 03)

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci à tous. Alors...

Des voix : ...

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci à tous. Nous reprenons les travaux sur le projet de loi n° 42. Donc, nous étions sur l'article 1 du Code du travail. Nous avions des interventions à venir. Donc, on commence avec la députée de l'Acadie...

Une voix : ...

La Présidente (Mme Boivin Roy) : La Pinière, excusez-moi, oui. C'est vrai, tout à fait.

Mme Caron : Merci, Mme la Présidente. Alors, je voudrais... j'aurais, en fait, deux questions pour le ministre. Tout à l'heure, mon collègue de l'Acadie s'interrogeait sur les conditions qui seront déterminées par le ministre pour la formation sur la violence à caractère sexuel, s'interrogeait pourquoi on ne mettait pas... on n'avait pas mis les conditions essentielles de cette formation-là dans cet article-là, alors que, pour la politique, on met... on met les conditions qu'on souhaite voir. J'ai cru comprendre, puis vous me corrigez si j'ai mal compris, que la formation était déjà existante et qu'elle était... qu'elle avait été conçue par le CCTM. Est-ce que c'est bien ça?

M. Boulet : Oui, en fait, on n'a pas les compétences, nous, pour déterminer ce que sera la formation. Quand on réfère aux conditions déterminées par le ministre, c'est, un, le contenu, deux, la durée, trois, les personnes ou organismes qui vont être autorisés à donner de la formation. Et, pour ça, ça prend des consultations. Et les consultations, c'est le Comité consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, qui s'est déjà engagé, puis j'ai déjà une lettre que je peux vous lire aussi, qui s'est déjà engagé à rendre la formation obligatoire dans la confection de la liste des membres qui sont des arbitres. Puis, évidemment, il y a la conférence des arbitres de griefs, qui regroupe tous les arbitres membres, qui a déjà de la formation pour les arbitres en matière de harcèlement psychologique, là, qui est plus large que la violence, parce que, comme je mentionnais tout à l'heure, souvent le harcèlement a une connotation... pas souvent, là, mais, dans des cas, là, une connotation sexuelle. Ça fait que c'est essentiellement ça, la formation. Il faut une consultation additionnelle puis il faut s'assurer que ceux qui sont membres soient bien formés, puis ça, c'est déjà fait.

Mme Caron : Et c'est pour... Là, on parle uniquement des arbitres pour les griefs.

M. Boulet : Des arbitres. Oui. Oui.

Mme Caron : Est-ce qu'on a quelque chose pour les autres...

M. Boulet : ...oui, autant, il y a une équipe spécialisée qui est formée. C'est des juges, des conciliateurs, des assesseurs puis des intervenants. Ils ont déjà eu la formation sur les... stéréotypes, qui a été dispensée par une avocate du ministère de la Justice. Et ça va être une équipe spécialisée qui va mettre en place les paravents, l'aide au témoignage, la conférence préparatoire individuelle, la possibilité de mettre fin, on va le voir plus loin, à la médiation, quand elle ne donne pas de résultats. Puis l'autre bout, en amont, avec la CNESST, il y a 90 % des recommandations administratives qui ont déjà été mises en application. Donc, la formation est déjà dispensée aux agents d'indemnisation, aux conseillers en réadaptation, ceux qui ont à décider en révision administrative. En fait, tous les... puis, je pense, je vais te répondre, en partie, aussi au collègue d'Hochelaga-Maisonneuve, tous ceux qui sont saisis de dossiers de harcèlement sont formés... Et ça va être une formation continue, parce qu'on me disait : Est-ce que ça va être mis à jour? On appelle ça, de la formation continue, donc, adaptée aux besoins. Mais oui, tout est déployé, collègue, je vous rassure, la formation, si on veut que notre projet de loi donne des résultats, ça passe, un, par la prévention puis, deux, c'est la formation.

Mme Caron : Et, pour faire de la prévention, il faut être formé aussi...

M. Boulet : Totalement...

Mme Caron : ...c'est-à-dire que l'un...

M. Boulet : ...totalement. Puis l'autre affaire, collègue, la politique qu'on a, là, avec le contenu minimal dans la loi, ça, c'est les milieux de travail, parce que ce n'est pas le législateur qui va tout faire, puis ce n'est pas les juges, puis les conciliateurs, puis les intervenants, en santé, sécurité, c'est... le principe de base, c'est que c'est les milieux de travail qui se prennent en charge. Qui est le mieux placé pour identifier un risque psychosocial? L'employeur, les travailleurs, les travailleuses puis les syndicats, quand il y a des syndicats. Ça fait que c'est pour ça que le contenu minimal a été raffermi considérablement dans notre projet de loi pour s'assurer que les milieux de travail se prennent bien en charge.

Mme Caron : D'accord. Puis, quand vous avez fait allusion à 90 % des recommandations qui avaient été mises en place, est-ce que...

M. Boulet : Oui, les recommandations qui interpellaient la CNESST, on a annoncé, à Montréal, que 90 % avait été mis en place et on est allé au-delà de ça, parce que je n'irai pas... puis je ne sais pas si, moi, je trouve, en fait, s'ils nous écoutent,  moi, je trouve qu'ils font un travail remarquable d'accompagnement, notamment des personnes victimes qui sont marginalisées, des personnes qui n'ont pas eu les moyens, puis je dis les moyens financiers, d'autres moyens de se représenter, de se défendre. Donc, ça augmente considérablement les risques de victimisation secondaire chez ces personnes-là qui sont seules, qui sont souvent exclues, exclues du marché. Ça fait que Juripop va les accompagner, puis ils ont des personnes, des avocats, des avocates, surtout des avocates, mais ils vont accompagner, aider, à travers tout le processus, là, parce qu'il y a des dédales, mais, pour leur permettre que leurs torts subis soient réparés de la façon la plus humaine possible. Puis moi je suis fier de ce partenariat-là puis je vais continuer de le répéter. Puis vous avez vu que le deuxième groupe qui est venu devant nous, c'était Juripop, dans ce projet de loi là, il joue un rôle qui est vraiment fondamental... pas que dans ce projet de loi là, mais tout ce qui concerne la santé, sécurité, intégrité physique et psychique des travailleurs, travailleuses d'un organisme qui, selon moi, est vraiment distinctif au Québec.

Mme Caron : Puis, finalement, dans ses recommandations qui ont été retenues, mises en œuvre, est-ce qu'il y avait celle sur la durée, comme, que la formation soit d'au moins 4 heures, que ce soit offert en présentiel, comme... comme le recommandait le rapport...

M. Boulet : Non, c'est plus de consulter puis de s'assurer que les intervenants... Moi, je ne dirais pas : Le conseiller en réadaptation X, il devrait suivre... tu sais, on va le déterminer pour les arbitres de grief, parce que ça, c'est dans notre périmètre d'action, mais ce n'est pas moi qui vais dire... d'ailleurs, puis les mythes et stéréotypes, là, la formation donnée aux juges, conciliateurs et assesseurs du Tribunal administratif du travail, le législateur ne pourra pas s'immiscer dans tous les processus administratifs. Ce qui est important pour moi, c'est que partout où il y a des personnes qui ont à côtoyer ou à gérer des dossiers de harcèlement, violence à caractère sexuel... soient dument formés pour ne pas que...

M. Boulet : ...tu sais, il y a tellement de préjugés en cette matière et puis il y a tellement de mythes, puis il y a tellement de... de pensées qui ne sont pas compatibles avec la réalité vécue par la personne victime. ÇA fait que oui.

• (16 h 10) •

Mme Caron : Et ça va... ça va comprendre aussi les tout petits employeurs?

M. Boulet : Ah! tout à fait.

Mme Caron : Tout le monde va avoir accès?

M. Boulet : Mais les tout petits employeurs, c'est intéressant puis, dans la... la Loi modernisant le régime de santé-sécurité, quand ils ont moins de 20 employés, au lieu d'avoir un gros programme de prévention, ils ont ce qu'on appelle un plan d'action qui est simplifié. Mais ils doivent, dans ces milieux de travail là, identifier les risques pour mieux les contrôler et les éliminer. Mais ça s'applique à tout le monde, oui, tout à fait. Puis il y a des violences à caractère sexuel dans tous les secteurs d'activité économique. Il y en a plus dans certains secteurs, puis je ne vais pas les identifier. Puis parfois il y a huit personnes, puis c'est... Il y a des risques et il faut faire de la prévention, puis il faut former, puis ça... ça fait que... Mais il faut que ça soit adapté à la réalité du milieu de travail. Si on va dans une entreprise manufacturière où il y a 600 travailleurs, puis il y a plusieurs départements, la réalité n'est pas la même qu'un petit atelier où les huit travailleurs sont ensemble. Donc, il faut que ce soit adapté.

Mme Caron : Oui, tout à fait. Puis il peut y avoir... il peut avoir un... un très petit milieu de travail, une microentreprise où il y a le patron et il y a deux employés aussi qui... et là et là ils sont... ils sont... ils doivent être formés également.

M. Boulet : Aie! mon Dieu.

Mme Caron : Et ça m'amène à... au point que j'ai soulevé dans les remarques préliminaires : Qu'en est-il des responsabilités des personnes qui reçoivent... qui profitent du programme chèque emploi-service qui sont considérés légalement comme l'employeur? Qu'est-ce que...

M. Boulet : On peut... on pourra en parler, collègue. J'ai demandé à mon équipe de fouiller ce point-là.

Mme Caron : D'accord.

M. Boulet : Mais je vais revenir à l'employeur avec deux... ça peut-être un homme qui a deux employés qui travaillent... deux femmes qui travaillent pour lui. C'est important de — et on va le voir plus loin, puis c'est le fun, les premiers articles d'un projet de loi, parce que souvent on... on finit par traiter de tous les articles qui suivent, puis ça va beaucoup plus vite après — mais de développer, au Québec, une culture de signalement, parce que les gens... Vous avez vu le sondage Léger qui a été commandé par la Commission de la construction du Québec, 79 % des personnes qui sont témoins ou qui... ou qui subissent menaces, intimidation, discrimination ne signalent pas. Pourquoi? Parce qu'ils ont peur à des représailles ou ils ont peur de perdre leur emploi. Il y a un article dans notre projet de loi, j'espère qu'on va tous y adhérer rapidement, mais qui protège les personnes qui signalent ou les personnes qui collaborent à un signalement, parce que ma voisine peut signaler, puis moi je collabore pour témoigner ou... Mais il faut protéger les travailleurs et travailleuses puis il faut que les personnes signalent parce que, quand on ne signale pas, c'est là que les risques de victimisation secondaire s'accroissent, et que les dommages et les effets corrosifs sont les plus importants. Ça fait que donc ça, c'est important pour moi de le signaler, là. Puis le chèque emploi-service, je suis assez sensible à  ces... Je comprends que c'est prioritaire puis je vous ai entendue au salon bleu, je vais faire fouiller ça, puis je ne vous dis pas que... mais je veux voir, comprendre, là, comment on pourrait appliquer ça, là, pour protéger le mieux possible.

Mme Caron : Parfait. Merci.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Alors, M. le député de l'Acadie.

M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Alors, écoutez, à ce stade-ci, pour, je vous dirais, encadrer un peu la... la discrétion du ministre, et puis pour reconnaître aussi l'importance de ce type de formation-là, je comprends ici qu'on parle particulièrement des arbitres, j'aurais un amendement à soumettre. Donc, je pense que vous l'avez reçu, Mme, sur Greffier. Alors, si on peut l'afficher, je pourrais le lire.

Donc, dans le cadre du projet de loi n° 42, l'article 100.0.0.1, tel que proposé par l'article 1 du projet de loi, est modifié :

1° par l'insertion, à la fin de la phrase suivante «le ministre doit consulter des organismes ou....

M. Morin : ...professionnels compétents et dûment reconnus dans l'élaboration des conditions de la formation; et

2° par l'insertion, à la fin, de l'alinéa suivant :

«Cette formation est délivrée par des organismes aux professionnels compétents et dûment reconnus.»

L'article modifié se lirait comme suit : 100.0.0.1. L'arbitre qui procède à l'arbitrage d'un grief relatif à une conduite de harcèlement psychologique au sens de la Loi sur les normes du travail (chapitre N-1.1) doit avoir suivi une formation sur la violence à caractère sexuel dont les conditions sont déterminées par le ministre. Le ministre doit consulter des organismes ou professionnels compétents et dûment reconnus dans l'élaboration des conditions de la formation. Cette formation est délivrée par des organismes ou professionnels compétents et dûment reconnus.

Et cette modification-là est proposée, compte tenu de l'importance de la formation, mais effectivement parce que l'arbitre devra être formé, parce qu'il aura à décider et trancher des litiges qui impliquent évidemment du harcèlement psychologique ou même sur la violence à caractère sexuel, donc de s'assurer que ce sont effectivement des professionnels dûment reconnus qui pourront aider, finalement, le ministre dans l'élaboration de la formation, puisque la formation ou les conditions de formation seront déterminées par le ministre, qui ne sont pas dans la loi, ils sont donc probablement inclus par règlement ou par décret, et qu'effectivement cette formation sera donnée par des organismes ou des professionnels compétents et reconnus, compte tenu de l'importance du sujet, s'assurer que ce sont des personnes dûment compétentes qui vont être capables de donner cette formation-là. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci, M. le député. Alors, est-ce qu'il y a des interventions sur l'amendement?

M. Boulet : Est-ce qu'on peut suspendre quelques minutes, s'il vous plaît, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Tout à fait, M. le ministre. Oui. Alors, nous suspendons.

(Suspension de la séance à 16 h 17)

(Reprise à 16 h 19)

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Vous pouvez y aller.

M. Boulet : Merci, Mme la Présidente. En fait, je reçois bien l'objet de l'amendement et je suis d'accord avec l'objectif. En même temps, je ne veux pas limiter le pouvoir du ministre, qui est moi ou quelqu'un d'autre, de déterminer la durée, le contenu, les personnes ou organismes autorisés à donner cette formation. Mais je ne veux pas être le seul. Je veux... La consultation implique aussi que ce n'est pas que le ministre, là. Le CCTM, la conférence des arbitres ont un rôle à jouer. Le CCTM s'occupe de la réinscription, mais d'abord et avant tout de l'admission des arbitres, et de me les recommander, puis la conférence des arbitres s'assure de dispenser des services de formation aux arbitres. Ça fait que je ne veux pas comme me limiter ou dire «doit consulter des organismes ou professionnels compétents et dûment reconnus». Dans le fond, le CCTM va en identifier, des organismes ou des personnes compétentes. Et la conférence des arbitres, il y a beaucoup d'arbitres qui ont des spécialisations, qui ont fait des études au Québec et à l'étranger et qui font des ateliers de formation pour le bénéfice des arbitres. Ça fait que je veux simplement vous rassurer qu'il n'y a rien qui ne se...

M. Boulet : ...ne se fera sans consultation, mais, d'abord et avant tout, avec la collaboration du comité consultatif travail et main-d'oeuvre. Puis bon, les leaders, vous savez que le CPQ, la FCEI, les MEQ et la FCCQ sont là, la CSN, la CSQ, la FTQ puis la CSD sont là et d'autres des acteurs patronaux et syndicaux. C'est le forum où s'exerce le dialogue social au Québec. Et je veux que ça évolue, puis je veux que, l'obligation de consultation, bien, dans ses fonctions inhérentes, le ministre consulte. Ce n'est pas... c'est... Selon moi, la chose parle par elle-même. Mais je vais m'asseoir beaucoup sur ces organismes-là, qui vont déterminer la compétence, puis le jeu, puis la capacité, puis les habiletés des personnes qui vont dispenser la formation. Mais je comprends très bien. Puis, si vous voulez me le faire dire, bien, je l'ai dit, c'est certain qu'il y aura de la consultation et c'est certain que la formation va être dispensée par les bonnes personnes.

M. Morin : Alors, en fait, si vous... en fait, si vous permettez, c'est ça, c'est... je reprends un peu la balle au bond, et l'amendement a été quand même rédigé dans un esprit assez large qui vous donne ou qui donne au ministre une... en fait, une marge de manœuvre, mais qui rappelle l'importance de cette formation-là. Donc, au fond, si vous nous dites, M. le ministre, que vous consultez, que ça fait partie de votre travail, et je le conçois très bien, donc, qu'on puisse l'ajouter dans la loi ne fait au fond que venir exprimer l'intention du législateur, de l'importance et démontrer l'importance de la consultation, ce qui ne devrait pas, normalement, vous limiter dans vos actions en tant que ministre.

M. Boulet : Est-ce qu'on peut ajourner une minute? Moi, j'aimerais parler avec les collègues.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : On va suspendre, M. le ministre. On va ajourner dans huit minutes, mais, pour l'instant, on va suspendre.

(Suspension de la séance à 16 h 22)

(Reprise à 16 h 29)

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Alors, nous reprenons nos travaux. M. le député de l'Acadie, donc, on vous cède la parole rapidement.

M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Alors, pendant la pause, j'ai eu la possibilité de discuter avec mes collègues parlementaires et, suite aux discussions, et il reste très peu de temps pour nos travaux aujourd'hui, donc, je vais retirer mon amendement et j'en présenterai un autre lors de notre prochaine séance de travail.

La Présidente (Mme Boivin Roy) : Très bien. Alors, est-ce qu'il y a consentement pour le retrait de l'amendement proposé par le collègue de l'Acadie? Il y a consentement? Très bien. Donc, l'amendement est retiré. On attendra la prochaine fois votre prochain amendement. Mais pour l'instant...

Une voix : ...

La Présidente (Mme Boivin Roy) : C'est ça. Il est 16 h 30, chers collègues. Alors, nous devons ajourner les travaux de la commission sine die. Merci.

(Fin de la séance à 16 h 30)


 
 

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