(Dix heures quarante-six minutes)
La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors,
à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de l'économie et du
travail ouverte. Alors, bonjour à tous et à toutes. Bonjour, M. le
ministre, ainsi que les membres de la commission et votre équipe, M. le
ministre, madame...
La commission est réunie afin de procéder à
l'étude du volet Travail des crédits budgétaires du portefeuille Travail,
Emploi et Solidarité sociale pour l'exercice financier 2022 et 2023. Une
période de 1 h 45 min a été allouée pour l'étude de ces crédits.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. M. Bélanger (Orford) est remplacé par M. Thouin
(Rousseau) et Mme Richard (Duplessis), par M. Gaudreault (Jonquière).
Travail
Discussion générale
La Présidente (Mme IsaBelle) : Nous
allons procéder à une discussion d'ordre général par blocs d'environ
20 minutes, incluant les questions et les réponses. La mise aux voix de
ces crédits sera effectuée à la fin du temps qui leur est alloué, soit vers
12 h 30.
Nous sommes
donc prêts à reconnaître le premier ou la première intervention de l'opposition
officielle pour un premier bloc d'échange. M. le député de Viau, le
porte-parole de... ou la parole est à vous, pardon. Alors, vous disposez de
18 min 12 s.
M. Benjamin : Merci. Merci, Mme
la Présidente. Bonjour.
Donc, mes salutations au ministre ainsi qu'aux
collègues de cette commission, donc, pour cette étude de crédits. Donc, je
salue, en passant, M. le ministre, toute l'équipe, toute l'équipe qui vous
accompagne. Ce que... Ce sont des échanges que nous allons avoir dans un
contexte où, il y a quelques jours à peine, c'était la fête du Travail, des
travailleuses et travailleurs, et nous avons vu qu'il y avait des milliers de
travailleuses et travailleurs dans la rue autour d'enjeux de salaire, d'équité
salariale, de discrimination en milieu de travail, de harcèlement en milieu de
travail, autant d'enjeux que nous aurons l'occasion, j'espère, de discuter,
d'aborder tout au long de ces échanges.
Ma première question, M. le ministre,
donc : Il y a quelques jours à peine, ma collègue la députée de Verdun,
porte-parole de l'opposition officielle en matière de condition féminine, a
demandé qu'une enquête soit tenue suite à la nomination du président
démissionnaire de la FTQ-Construction, et je vais citer ma collègue la députée
de Verdun pour bien situer, pour bien camper sa demande : «Alors qu'on
tente de convaincre les victimes d'agression sexuelle de porter plainte, alors
que le domaine de la construction peine à recruter et à conserver la
main-d'oeuvre féminine, il est primordial de faire la lumière sur les
circonstances qui ont pu mener à une telle situation.» Alors, ma question à M.
le ministre : Allez-vous donner suite à cette demande?
M. Boulet : Merci, Mme la
Présidente.
Dans un premier temps, j'aimerais saluer les
collègues des partis d'opposition, du parti gouvernemental, les membres de mon
cabinet, les membres de mon équipe ministérielle et dire à quel point j'ai été
outré des événements qui ont été rapportés par les médias. Il faut se rappeler
qu'il y a eu une décision de la Commission des lésions professionnelles en
2012, et, le harcèlement sexuel ou psychologique, les agressions sexuelles, on
sait tous que c'est intolérable. C'est vraiment tolérance zéro, surtout dans un
secteur qui est affecté par un taux d'abandon des femmes d'à peu près 55 %
depuis leur embauche. Et j'avais demandé, d'ailleurs, à la CCQ de faire un plan
de rétention. Il y a une problématique, particulièrement pour les femmes. Il y
a un plan d'accès à l'égalité hommes et femmes. Et que M. Grondin
démissionne, c'était la chose à faire. Maintenant, que la FTQ ait l'obligation
d'aller au fond des choses pour savoir ce qui s'est passé, qu'est-ce qui est
survenu, ça, moi, je vais m'en assurer. J'ai parlé, d'ailleurs, avec le
président de la FTQ, la semaine dernière, sur ce dossier-là, dès que ça a été
révélé par les médias, et je vais m'assurer qu'il y ait une enquête. On verra
la forme que ça va prendre. Je rappellerai que c'est un poste électif que
M. Grondin occupait, et donc la FTQ a une responsabilité. Merci, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci.
M. Benjamin : Merci. Merci, M.
le ministre. Nous avons eu l'opportunité, vous et moi, M. le ministre, de
travailler, entre autres, sur un projet de loi sur les stagiaires, où il a été
longuement question, lors de ces travaux-là, des enjeux
de harcèlement. Alors, ne croyez-vous pas, en fait, qu'il est nécessaire, aujourd'hui,
à titre de ministre du Travail, donc celui qui doit garantir les droits des
travailleuses et des travailleurs du Québec, que vous-même... que vous exigiez
cette enquête-là?
• (10 h 50) •
M. Boulet : En tant que
ministre, Mme la Présidente, oui, je suis investi d'une autorité de m'assurer
que les lois du Québec, particulièrement dans mon secteur d'activité, soient
complètement respectées. Je viens de le mentionner puis, bon, vous soulevez la
Loi sur la protection des stagiaires, qui a été une avancée fantastique pour
les 195 000 stagiaires au Québec, et une des ambitions que nous avions,
c'était de s'assurer que ces stagiaires-là, qui sont surtout des femmes, soient
protégés contre le harcèlement sexuel et psychologique. Je rappellerai aussi
que, dans la Loi sur les normes du travail, il y a une obligation de prévenir
et de corriger le tir quand le harcèlement est porté à notre connaissance.
Donc, j'assume que la FTQ a aussi des politiques de prévention pour s'assurer
que le harcèlement soit dénoncé, qu'il y ait un mécanisme de plainte, qu'il y
ait une enquête indépendante, qu'on aille au fond des choses et qu'on s'assure
que les droits des femmes et des hommes, le cas échéant, soient complètement
respectés et compatibles avec le libellé des articles pertinents de la Loi sur
les normes du travail et, bien sûr, la loi sur
les relations de travail dans l'industrie de la construction. Alors, je réponds
au collègue : Oui, je veux certainement m'assurer que la FTQ aille
au fond des choses et qu'il y ait une enquête.
M. Benjamin : Merci. En 2018,
Mme la Présidente, c'était lors d'un événement organisé par Force Jeunesse, le
premier ministre du Québec — en
fait, candidat, alors un futur premier ministre du Québec — s'était
engagé, s'était engagé à travailler à modifier la Loi sur les normes du travail
pour que l'ensemble des clauses de disparité de traitement basées sur la date d'embauche soient interdites dans les
régimes de traitement offerts par les employeurs. Or, quatre ans plus tard, nous constatons que rien n'a
été fait à ce sujet. Et, quand je dis «rien», à la lumière, Mme la
Présidente, des quelques articles que nous
avons pu lire, les jeunes travailleurs craignent d'être trahis, c'est
fort. Les jeunes travailleurs sont inquiets de l'attitude du
gouvernement, qui peut renforcer le cynisme des jeunes par rapport à la
politique.
Alors, la
question que j'ai le goût de poser au ministre, aujourd'hui : Est-ce que
le premier ministre a toujours l'intention de respecter sa promesse
d'abolir une fois pour toutes, comme il l'avait dit lui-même en 2018, toutes
les clauses de disparité de traitement dans les régimes de retraite?
M. Boulet : Absolument.
L'objectif de notre gouvernement est toujours de lutter contre l'iniquité
intergénérationnelle. C'est une valeur importante pour nous. Les jeunes
constituent la relève de demain, et les disparités de traitement, comme vous savez, cher collègue, sont prohibées
dans la Loi sur les normes du travail. La dernière qui a été amendée, et
qui est entrée en vigueur le 12 juin 2018,
interdit les disparités de traitement. Évidemment, on s'entend, c'est pour
des travailleurs qui font le même travail dans un établissement et ça
s'applique maintenant pour les régimes de retraite puis les avantages sociaux;
avant, ça s'appliquait à l'égard de toutes les normes qui sont contenues dans
la Loi sur les normes du travail.
Donc, le moyen pour y parvenir... Nous croyons
fermement au consensus, au paritarisme établi notamment au Comité consultatif
du travail et de la main-d'oeuvre — je salue son président, qui
est ici avec nous, François Lamoureux — et j'ai donné mandat très rapidement à ce
comité-là de faire une analyse avec les leaders syndicaux ainsi que les leaders patronaux et d'inclure Force Jeunesse
dans la discussion pour avoir la totale adhésion de tous les partenaires
impliqués dans l'élimination une fois pour
toutes des disparités de traitement, notamment dans les régimes de
retraite.
Et vous avez vu, si vous avez suivi l'actualité,
puis vous pourrez lire l'avis du Comité consultatif travail et main-d'oeuvre,
il y a un consensus, auquel adhère Force Jeunesse, et ce sera par la voie de la
négociation qu'on éliminera ces disparités de traitement là. Le comité va faire
un guide de pratiques. On a établi des normes de régimes équivalents pour
guider les parties dans l'élimination de ces régimes de retraite. Comme vous le
savez, les jeunes, souvent, bénéficient d'un régime de retraite à cotisation
déterminée et les plus anciens, à prestation déterminée.
Enfin, dernier commentaire, Mme la Présidente,
je vous rappellerai que mon collègue aux Finances a adopté, en
décembre 2020, la Loi sur les régimes de retraite à prestations cibles,
qui est d'ailleurs une excellente voie de compromis et qui a permis de dénouer
beaucoup cette impasse-là dans les milieux de travail où il demeure encore des
disparités.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci,
M. le ministre.
M. Benjamin : Mme la
Présidente, peut-être une demande tout amicale que je ferais au ministre, c'est
d'avoir des réponses plus courtes. J'essaie de maximiser ce temps que nous
avons ensemble, donc d'avoir des réponses beaucoup plus courtes, s'il vous
plaît.
M. Boulet : Oui.
M. Benjamin : Alors, vous
savez, cette promesse-là, Mme la Présidente, sur les clauses de disparité de
traitement, c'était une promesse de la CAQ, c'était une promesse du premier
ministre, et, il y a quelques jours à peine, donc, le premier ministre, lors
des crédits jeunesse, et je le cite, il a dit : «C'est toujours mon
intention d'abolir les clauses de disparité de traitement. Il nous reste cinq
mois à notre mandat, et c'est mon intention, c'est toujours mon intention.» Je
le cite toujours — c'est
le premier ministre qui parle : «J'espère que, dans les prochains jours,
prochains mois, avec les recommandations de mon comité, on va abolir ces
clauses-là.»
Or, deux jours après la
déclaration du premier ministre, c'est le ministre du Travail qui nous annonce
que c'est plutôt dans un délai de cinq ans. Alors, dois-je comprendre que cette
promesse qui a été faite aux jeunes du Québec, c'est une promesse qui a été
abandonnée, c'est-à-dire cette promesse qui était celle de faire... dans
l'actuel mandat, d'abolir les clauses de
disparité? Donc, vous êtes en train de nous dire, M. le ministre, que c'est une
promesse que vous ne pourrez pas tenir dans l'actuel mandat?
M. Boulet : Je pense que j'ai
été assez clair, c'est une promesse que nous respectons, que nous avons tenue,
et je vous réfère au communiqué de presse de Force Jeunesse, Clauses de
disparité de traitement relatives aux régimes de retraite, le titre : Une
avancée importante pour les jeunes sur le marché du travail, le
29 avril 2022, donc après l'étude de crédits du premier ministre,
puis je... Et, pour votre bénéfice : «Force Jeunesse se réjouit que les inquiétudes exprimées par la jeunesse aient été
entendues par le premier ministre du Québec, François Legault, qui
respecte aujourd'hui son engagement d'éliminer complètement les clauses de
disparité de traitement dans les régimes de retraite québécois. L'organisation
salue également le leadership du ministre du Travail [...] — bon,
etc. — qui
[a présenté] ce matin un plan d'action concret en vue de les abolir
définitivement d'ici 2027.» Donc, c'est Force Jeunesse, Mme la Présidente.
M. Benjamin : Et pourtant, Mme
la Présidente, encore aujourd'hui, au moment où nous nous parlons, il y a encore 15 000 jeunes Québécois qui sont
victimes, qui sont des victimes de cette discrimination par rapport aux
clauses de disparité de traitement. Or, la promesse qui avait été faite en
2018, c'était celle d'abolir ces clauses de disparité dans un premier mandat.
Maintenant,
parlant de Force Jeunesse, M. le ministre, justement, une question posée par
Force Jeunesse : Qu'est-ce qui se passe... qu'est-ce qui va se
passer si, dans les cinq ans, les parties ne s'entendent pas?
M. Boulet : Moi, j'ai une
croyance ferme que, d'ici cinq ans, les parties ont la marge de manoeuvre, vont
négocier. Puis on a dit cinq ans, puis on a convenu, avec cinq ans, que c'est
un délai raisonnable parce que ça respecte le cycle de renouvellement des conventions
collectives de travail. C'est une question qui est purement hypothétique, qui
nous interpellera le cas échéant.
Comme vous savez, le nombre de régimes de
retraite où il y a des disparités de traitement est en diminution constante,
année après année, et je me fie à la bonne foi des parties, qui a été exprimée,
je le répète, par le Conseil du patronat, les
Manufacturiers et exportateurs, la Fédération des chambres de commerce, la Fédération
canadienne de l'entreprise indépendante, la CSN, la FTQ, la CSQ, la CSD, tout
le monde, et Force Jeunesse adhère.
Donc, moi, je suis à un stade où je me
dis : Il ne faut pas avoir peur d'avoir peur, il faut faire confiance au
paritarisme. Et je suis convaincu que le consensus qui a été établi au CCTM va
donner les résultats que nous souhaitons, c'est-à-dire d'éliminer
définitivement les disparités de traitement, et Force Jeunesse le dit dans des
mots très clairs et précis dans son communiqué.
• (11 heures) •
M. Benjamin : Mme la
Présidente, je veux bien adhérer, mais, vous savez quoi, on ne peut pas adhérer
lorsqu'il y a autant de promesses non tenues, et là je parle d'une promesse qui
n'a pas été tenue. Et, pour moi, pour pouvoir y adhérer, ça prend des
mécanismes de reddition de comptes. Et ici, je reviens encore à Force Jeunesse,
et c'est une demande formulée par Force
Jeunesse : «Pour garantir l'efficacité de ce plan, il est essentiel qu'une
reddition de comptes annuelle soit réalisée par Retraite Québec, dont les
constats devaient être rendus publics et pour laquelle les parties impliquées
devaient rendre des comptes.» Comment le ministre entend assurer cette
reddition de comptes?
M. Boulet : Bien, premièrement,
vous posez une question dont vous connaissez la réponse. Ça fait partie des recommandations
du CCTM qu'il y ait des recommandations annuelles qui soient soumises à
l'attention de Retraite Québec. Donc, ce sera fait, et ça, c'était aussi à la
satisfaction de Force Jeunesse. Puis je réitère que Force Jeunesse a dit que la
promesse de la CAQ, et du premier ministre, et du ministre du Travail avait été
respectée.
M. Benjamin : Mme la
Présidente, un autre sujet qui me préoccupe énormément — la
semaine dernière, d'ailleurs, il en était question — c'est au sujet du
projet de loi n° 22, le projet de loi n° 22,
Mme la Présidente, qui apporte des ajustements au régime d'indemnisation des
victimes des accidents de la route, qui prolonge par règlement le versement de
l'indemnité de remplacement de revenu jusqu'au décès de la victime.
Or, aujourd'hui, ces ajustements qui ont été
apportés, tout justes qu'ils soient, viennent créer un sentiment d'iniquité,
voire d'injustice pour ce qui est des accidentés du milieu du travail, qui se
sentent... et le mot n'est pas de moi, Mme la Présidente, mais d'eux, de
plusieurs d'entre eux, qui se sentent trahis par ce gouvernement.
M. le ministre, j'aimerais savoir quelles sont
les actions que vous allez poser pour remédier à ce sentiment d'iniquité,
d'injustice que vivent aujourd'hui les accidentés du travail.
M. Boulet :
Merci pour la question, ça me permet de corriger la perception qui est
erronée à l'égard de ce que vous avancez. D'abord, c'est les bénéficiaires des
prestations de la SAAQ qui étaient victimes d'une iniquité parce qu'ils ne bénéficiaient,
ni en vertu de la loi sur la Régie des rentes du Québec ni en vertu de la loi
sur les accidents de travail, maladies professionnelles, d'une protection de
leur retraite, alors que les prestataires d'indemnité de la LATMP en
bénéficient. Quand tu es absent et que tu reçois une pleine indemnité de
remplacement de revenu versée par la CNESST, tu peux cotiser, et la CNESST
cotise à ton régime de retraite de l'employeur et la RRQ,
en vertu de la loi RRQ, cotise aussi. Donc, le bénéficiaire de prestations
d'indemnités de la CNESST, à 68 ans, sa retraite est protégée, ce qui n'était
pas le cas avec les prestataires des indemnités versées par la SAAQ. Cette
iniquité-là... mon collègue des Transports, avec le projet de loi n° 22, vient corriger cette iniquité-là.
Ceci dit, s'il y a
des angles morts, s'il y a des cas de figure où il y a des désavantages à
l'égard des prestataires d'indemnités de la CNESST, moi, je travaille en
collaboration avec le ministère des Finances, avec Retraite Québec, et on
s'assurera de prendre les décisions qui s'imposent et de faire les correctifs
qui sont requis, le cas échéant, mais il y avait une iniquité, elle a été
corrigée, et on va s'assurer de bien gérer les retombées.
M. Benjamin : Mais, pour le bénéfice
des gens qui nous regardent, qui nous écoutent, un fait demeure, Mme la
Présidente : aujourd'hui, les accidentés de la route pourront, jusqu'à
leur 68e anniversaire, recevoir des indemnités jusqu'à leur décès, ce n'est pas
le cas pour les accidentés du travail, c'est un fait, et c'est de cette
iniquité-là dont il est question. Alors, je comprends que M. le ministre puisse
nous dire qu'il y a eu une iniquité qui a été réparée, mais on ne répare pas
une iniquité en créant une autre iniquité. Et aujourd'hui ce que les accidentés
du travail vous disent, M. le ministre, c'est qu'aujourd'hui ils se retrouvent
dans une situation d'iniquité et que vous êtes la personne qui est capable de
donner le ton pour régler cette iniquité-là, comme ministre du Travail.
M. Boulet :
Comme je vous ai mentionné, c'est une perception qui ne m'apparaît pas
fondée sur la réalité légale. Les
prestataires d'indemnités de la CNESST ont une retraite... ont un revenu de
retraite protégé, tant en raison des cotisations
versées par la commission, conformément au régime de retraite de l'employeur,
qu'en vertu de la loi sur la Régie
des rentes du Québec. Donc, on a
corrigé cette iniquité-là qui défavorisait les prestataires d'indemnité de la
SAAQ.
Maintenant, je vous
l'ai mentionné, moi, je demeure en mode analyse, et, s'il y a des désavantages
qui sont engendrés par l'adoption du projet de loi n° 22,
on va y voir. Puis, ceci dit, il faut faire l'exercice de façon ordonnée et
rigoureuse avec le ministère des Finances puis Retraite Québec. Merci.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Merci. Alors, c'est tout pour ce premier bloc de
l'opposition officielle.
Nous poursuivons avec
le député indépendant de Bonaventure. Vous disposez de
1 min 45 s.
M. Roy :
Merci, Mme la Présidente.
On va être court et
touchant, M. le ministre. Il me semble qu'il existe une culture du délai dans
l'accueil des travailleurs étrangers. J'ai un cas très précis, un épicier qui
cherche des bouchers pour... bon, qui ont besoin d'un permis de travail de trois ans. Ils n'ont pas... il n'a pas de retour,
il n'a pas d'aide, il n'y a pas de suivi, puis c'est le retour au délai
initial quand il manque un document. Ça fait que cette culture du délai là fait
en sorte que lui, il n'aura pas de boucher pour son épicerie en Gaspésie l'été
prochain. Est-ce qu'on peut ou vous pouvez intervenir à ce niveau-là?
M. Boulet :
Bien, dans un premier temps, il n'y a pas de culture dilatoire au ministère
de l'Immigration. Je suis, en même temps, extrêmement conscient de l'importance
d'accueillir ces travailleurs étrangers temporaires là le plus rapidement
possible. Là, comme vous avez vu, on a fait une entente avec Ottawa qui fait
qu'il y a eu une augmentation considérable de travailleurs étrangers
temporaires, puis il y a eu un allongement des délais pour l'étude d'impact sur
le marché du travail. Là, on est en train de baisser ces délais-là, et c'est un
objectif qui me préoccupe quotidiennement, collègue de Bonaventure, puis je
sais que vous êtes extrêmement sensible à ces délais-là. Puis, oui, je vais
tout faire pour que les délais soient les plus rapides possibles et, en même
temps, mettre de la pression sur Ottawa pour que les délais d'émission des
permis de travail soient aussi rapides.
M. Roy :
La question, M. le ministre, c'est que, s'il manque un document, on informe
en retard l'individu qui a besoin de travailleurs étrangers, et ça, c'est ça,
la culture du délai que je vous dis. Ça prend deux mois à dire : Bon, il manquait le passeport, après ça, c'est
deux mois pour dire : Il manquait 400 $. Ça prend de
l'accompagnement, du vrai accompagnement. Voilà.
M. Boulet :
Et, si c'est le cas...
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Merci, M le ministre.
M. Boulet :
Puis, si vous avez un cas spécifique, n'hésitez pas à le partager avec moi,
parce que ça n'aurait pas d'allure.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Excellent. Alors, nous poursuivons, et j'ai cru
comprendre qu'on a le consentement pour le troisième groupe d'opposition de
faire parler en premier la députée de Joliette, c'est bien ça? Oui. À vous la
parole.
Mme Hivon :
Merci, Mme la Présidente.
Je veux, d'entrée de
jeu, remercier mon collègue de Jonquière, qui me cède quelques-unes de ses
précieuses minutes pour que je prenne la parole pour un enjeu très important à
titre de députée de Joliette, mais surtout pour les travailleurs et les
familles de Joliette.
Le ministre du Travail n'est pas sans savoir que
nous vivons, en ce moment, à Joliette, deux conflits de travail très
importants, de grande envergure. D'abord, celui à la cimenterie Ash Grove, ça
va faire un an, le 22 mai prochain, qu'il y a un
lock-out qui, d'abord, était illégal, et aussi celui du conflit de travail à la
coop de Lanaudière depuis plus de six mois. Avec de nouvelles pratiques de
briseurs de grève, notamment, on assiste à un déséquilibre complet dans les
forces en présence, entre le patronat et les travailleurs. Avec l'utilisation
de briseurs de grève en télétravail, ça a
conduit, comme le ministre le sait, à une jurisprudence innovante qui vient
élargir la notion d'établissement pour inclure le télétravail, pour
exclure, donc, ces pratiques inacceptables de briseurs de grève.
Par ailleurs, dans le cas de la cimenterie Ash
Grove, l'employeur en est rendu à une autre pratique totalement inacceptable,
c'est celle d'importer du clinker de Turquie et, plus récemment, de New York,
du clinker qui, normalement est produit à
l'intérieur de la cimenterie et qui, bien sûr, est utilisé comme élément pour
produire le ciment. Alors, une autre pratique qui nous apparaît
complètement disproportionnée... et venir complètement vicier le rapport de
force.
Deux questions pour le ministre. Est-ce qu'il
est d'accord avec moi que cette tactique de venir importer du clinker normalement produit à l'intérieur de la
cimenterie est tout à fait inacceptable et intolérable? Et,
deuxièmement, est-ce qu'il a l'intention de changer la loi pour élargir la
notion d'établissement plutôt que d'attendre que tout cela aille en appel et en
appel?
• (11 h 10) •
M. Boulet : Merci, Mme la
Présidente. Ça me donne l'occasion de souligner à quel point j'ai énormément
d'estime pour la collègue de Joliette, avec qui je pense avoir développé non
seulement une excellente collaboration, mais
beaucoup de respect. C'est quelqu'un en qui j'ai énormément confiance, et je
suis content de vous rencontrer ce matin.
Collègue, Ash Grove, la dernière fois qu'on a eu
l'opportunité d'en discuter, j'ai partagé votre préoccupation puis j'étais à
peu près certain qu'on était tout près d'une entente de principe qui allait
être soumise en assemblée générale des travailleurs, ce n'est pas le cas. Mon
équipe de conciliation, médiateurs est extrêmement active, dynamique, et là il
y a des nouvelles rencontres qui sont prévues le 12 et 13 mai. Il faut que
ça se règle.
Deux points. Le télétravail, je l'ai exprimé
publiquement, la notion d'établissement, il faut qu'elle soit modernisée et
actualisée et qu'elle s'applique aux télétravailleurs. On ne peut pas violer
les dispositions anti-briseurs de grève en utilisant des télétravailleurs. Pour
moi, ça ne fait pas de sens, puis ce n'est pas compatible avec le sens et l'esprit de 109.1 et suivants du Code du travail. La décision qui a été rendue par Me Morand, du Tribunal administratif du travail, dans Ash
Grove est tout à fait opportune. Les parties au Comité consultatif du travail
et de la main-d'oeuvre ne me recommandent pas d'amender parce que l'employeur
et le télétravailleur sont soumis à toutes les lois du travail, les lois
sociales, les lois en matière de santé-sécurité du travail, mais, s'il y avait
un dérapage, je pense qu'il faudrait que nous intervenions pour clarifier cette
notion-là. Je sais qu'il y a un recours en révision judiciaire dans le dossier
Ash Grove, et moi, à chaque fois qu'on me pose la question, je dis : On ne
peut pas interpréter la notion d'établissement en faisant abstraction du
télétravail.
Le clinker,
je ne connais pas assez les faits. Franchement, là, collègue de Joliette, ce
serait peut-être présomptueux de ma part de dire si je suis d'accord ou
non. Mais qu'il y ait de l'importation de matière... C'est sûr qu'il y a des personnes qui peuvent travailler, lors d'un
conflit, que ce soit un lock-out ou une grève. Les travailleurs qui ne sont
pas dans l'unité, qui sont des personnes représentantes des... de l'employeur,
des cadres qui ont été embauchés avant le début de la phase des négociations,
ils peuvent travailler, ça fait qu'ils peuvent maintenir un certain niveau
d'opération. Ça fait que le clinker s'inscrit peut-être dans le droit que la
compagnie a de continuer à opérer à un certain niveau.
Mme Hivon : J'invite vraiment
le ministre à s'y pencher. Je vais terminer là-dessus, mais c'est vraiment de l'importation de matière produite à l'intérieur de
la cimenterie. Je pense que ça vaut la peine qu'il se penche là-dessus.
Merci beaucoup à mon collègue.
M. Boulet : Est-ce que je peux
inviter ma collègue de Joliette? Je veux rester attentif à ce dossier-là, si
vous avez des propositions à me faire ou des interventions qu'on peut faire.
Évidemment, c'est un conflit privé, mais je tiens à redire que c'est important
que les parties règlent ce dossier-là pour les familles, pour les travailleurs
puis pour le bénéfice de toute la communauté de Joliette. Merci.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Alors, nous poursuivons, cette fois-ci, avec le député de Jonquière. Il
vous reste huit minutes.
M. Gaudreault : C'est bon.
Merci, Mme la Présidente. Moi aussi, je veux saluer le ministre et les équipes
qui l'accompagnent, les collègues sont ici également.
Je voudrais
revenir sur deux motions que nous avons adoptées, ici, à l'unanimité, le
6 octobre et le 9 décembre 2021, sur la transition juste.
Nous avons, par motion, adopté la création sans délai d'un groupe de travail
interministériel et paritaire entre travailleurs et employeurs sur la
transition juste. Je sais que le ministre a fait une annonce le 7 février,
avec un appel de projets pour le programme Ambition-Compétences pour la CPMT.
Ce n'est pas de ça que je parle. Alors, je le dis tout de suite, là, je ne veux
pas que le ministre me réponde ça. Je parle d'un... du groupe de travail qu'on
a annoncé par motion. Je veux savoir quand est-ce qu'il va se réunir et quelle
est l'ambition du ministre quant à ce groupe de travail très important.
M. Boulet :
Bien sincèrement, je ne connais pas les dates, mais on pourra vous
soumettre le calendrier de rencontres de ce comité-là. Puis je rappellerai à
mon collègue de Jonquière, que je salue aussi, en passant... puis j'ai des
commentaires tout à fait similaires à la collègue de Joliette, beaucoup
d'estime, beaucoup de respect, puis j'ai extrêmement
apprécié les échanges qu'on a eus, tant en commission parlementaire que sur un
plan plus personnel. Vous allez nous manquer, collègue.
Donc, vous connaissez
le comité sectoriel de main-d'oeuvre EnviroCompétences. Vous vous souvenez du vaste appel de projets que j'ai lancé,
Ambition-Compétences, pour des projets qui s'inscrivent dans la transition
juste, vous connaissez le contexte du Plan pour une économie verte, maintenant,
le comité interministériel, la P.D.G. de la Commission des partenaires du
marché du travail pilote ce comité-là. Comme elle n'est pas ici, je ne suis pas
en mesure de dire quand est la prochaine date de rencontre, mais je pourrai
m'assurer que votre équipe vous la transmet.
M. Gaudreault :
Oui, bien, en fait, ce serait plus les dates de première rencontre. Parce
que les informations que j'ai, de mon côté, c'est que ni le... du côté du
ministère du Travail et de l'Emploi ni du côté du ministère de l'Environnement
il n'y a eu des rencontres sur la transition juste sur ce groupe de travail.
Il faut quand même...
Deux éléments, là. Dans le plan de mise en oeuvre sur le plan sur l'économie
verte qui a été déposé jeudi dernier, il n'y a aucune mention, dans les 80
pages, de la transition juste, aucune. On l'a revérifié encore tantôt, avec les
outils qu'on a, informatiques, il n'y a rien sur la transition juste dans le
plan sur la main-d'oeuvre... sur la mise en oeuvre, pardon, du plan sur
l'économie verte, un.
Et, deux, je rappelle
au ministre qu'à la COP26, au mois de novembre, décembre dernier, à Glasgow, le
Québec a adhéré à la déclaration... la Déclaration pour une transition juste,
entre autres, qui a été initiée par l'Organisation internationale du travail,
et c'est beaucoup plus complexe que d'offrir des programmes de formation aux
entreprises. Il faut planifier ce qui s'en vient en termes de transition, il
faut financer, il faut mobiliser les populations locales, les travailleurs, les
patrons.
Alors, moi, je
voudrais avoir la garantie de la part du gouvernement qu'il y aura des
premières réunions interministérielles et paritaires travailleurs-patrons avant
la fin de ce mandat pour être capable de faire une reddition de comptes à la
prochaine COP. Là, le Québec s'est engagé. La prochaine COP, à l'automne, si le
Québec, peu importe le gouvernement qui sera là, arrive en disant : Bien,
on n'a rien fait, je ne pense pas que ça va être un beau bilan à présenter.
M. Boulet :
La première rencontre a déjà eu lieu le 25 mars dernier, puis il y a
d'autres rencontres qui ont été planifiées, puis, encore une fois, je vous
donnerai la date. Mais, je vous rappellerai, EnviroCompétences, là, le
27 octobre 2021, a organisé un événement qui s'appelait VERT — v-e-r-t — DEMAIN,
puis il y a eu une grande rencontre sur la transition verte, les changements
climatiques et leurs impacts sur l'emploi et la formation de la main-d'oeuvre,
puis, dans le cadre de cet événement-là, j'ai confié, le 27 octobre, à la
Commission des partenaires du marché du travail de piloter des travaux pour
identifier les compétences nécessaires qui vont être requises à
l'électrification des transports.
Donc, on a un espace
de concertation, il y a des échanges. On a un comité sectoriel qui est très
actif, qui relève de mon ministère. Donc, il se fait beaucoup de choses. Il
s'agira de partager le contenu puis de s'assurer qu'on soit en mesure, au
Québec, dans un marché de l'emploi qui est en constante mutation, de répondre
aux impératifs d'une économie qui est aussi verte.
M. Gaudreault :
...le comité dont... la réunion dont le ministre me parle, le 25 mars,
c'était-tu ça? 25 mars ou 25 avril? 25 mars.
M. Boulet :
25 mars, oui.
M. Gaudreault :
C'est la CPMT?
M. Boulet :
Oui.
M. Gaudreault :
Mais est-ce que, le ministre, dans son esprit, la rencontre de la CPMT, ça
couvre l'objectif d'un groupe de travail interministériel et paritaire? C'est
important qu'on le sache, parce que ce n'est pas les mêmes missions. Puis, dans
le groupe interministériel, il y a le ministère de l'Environnement, de la Lutte
contre les changements climatiques qui doit être présent, le ministère de
l'Économie. Donc, ce n'est pas de... la transition juste, il faut éviter de la
réduire, entre guillemets, sans dire que ce n'est pas important, la formation...
mais ce n'est pas qu'un enjeu de formation
de la main-d'oeuvre, c'est plus large que ça, c'est anticiper ce qui s'en
vient. On est en retard par rapport à ce qui se fait même dans le reste
du Canada, monsieur... Mme la Présidente. Alors, moi je parle d'un groupe de
travail interministériel, tel que la motion le disait, avec les autres
ministères et CPQ, Conseil du patronat, et les syndicats.
• (11 h 20) •
M. Boulet :
Mais d'abord mentionner que je partage l'opinion du collègue de Jonquière,
que la transition verte, ça fait partie des grands changements qui vont
nécessiter d'aller encore beaucoup plus loin que la formation puis le
développement des compétences de la main-d'oeuvre.
Des voix :
...
M. Boulet : ...où les travaux
sont pilotés par la Commission des partenaires du marché du travail, puis
qu'Audrey Murray, que vous connaissez, qui est P.D.G... les ministères sont
aussi représentés. Comme vous savez, cette commission-là,
elle regroupe des représentants de plusieurs ministères, et, pour ce groupe-là,
ils en font partie. Et il y aura d'autres rencontres à venir, mais je n'ai pas
les dates précises, collègue.
M. Gaudreault : Mais... O.K.
Pour terminer, Mme la Présidente, je veux vraiment qu'on s'entende à l'effet
que, la transition juste, il faut lever l'hélicoptère. Je dirais, oui, il y a
de la formation, mais il y a du dialogue social, il y a de la mobilisation avec
les milieux de travail, il y a la diversification de l'économie, il y a anticiper
ce qui s'en vient. Ça prend un mouvement beaucoup plus large, là. Est-ce que le
ministre est d'accord avec moi?
M. Boulet : Je suis totalement
d'accord que ça requiert un dialogue social. Il faut impliquer tous les acteurs
du marché de l'emploi qui reconnaissent les implications de la transition
verte. Puis, comme j'ai mentionné un peu plus
tôt, ça va beaucoup plus loin que la formation de la main-d'oeuvre, et, sur le
fond, je suis d'accord avec le collègue. Donc, le dialogue social, à mon
avis, c'est l'avenue à emprunter pour nous donner non seulement une vision,
mais un plan d'action qui est pratique.
La Présidente (Mme IsaBelle) : C'est
tout, c'est tout le temps que nous avons. Merci. Merci pour le bel échange avec
les députés de Joliette et de Jonquière.
Nous poursuivons avec le deuxième bloc que vous
avez, l'opposition officielle, avec le député de Viau. Vous disposez de
18 min 17 s.
M. Benjamin : Merci. Merci, Mme
la Présidente.
Donc, je vais tenter d'avoir des questions
courtes et en espérant des réponses courtes aussi. Je commencerais avec... pour
M. le ministre, un scénario, un quiz scénario, donc, pour lequel j'aimerais
avoir votre réponse. Supposons, M. le ministre, un beau matin, un beau lundi
matin, un camionneur est sur l'autoroute 40, il est en train de faire sa
livraison en direction de Québec et, bien, il passe par votre circonscription,
il s'arrête à Trois-Rivières. Pendant un bref moment d'inattention, ce dernier
traverse la voie circulable et où une auto se trouve à ce moment précis. Le
chauffeur de ce véhicule, surpris, apeuré, perd les pédales et se met à
harceler le camionneur et faire des manoeuvres dangereuses. Le camionneur perd
le contrôle de la route, prend le champ, frappe un arbre. Le camionneur se
retrouve gravement blessé, pire scénario, handicapé avec des séquelles qui
resteront pour le reste de ses jours. Quel régime, selon vous, s'appliquera, à
ce moment-là, M. le ministre?
M. Boulet : Bon, là, vous me
ramenez à la définition d'un accident de travail, c'est un événement imprévu et
soudain survenu par le fait ou à l'occasion du travail, donc ce sera une
démonstration à faire de la part de la personne qui réclame pour déterminer si
c'est effectivement un accident de travail et si elle peut bénéficier de la
présomption, c'est-à-dire s'il y a eu une blessure survenue alors qu'il était
au travail, pendant qu'il était au travail. Donc, c'est du factuel puis c'est
circonstanciel, là, ça fait que c'est une question qui requiert une analyse des
faits.
M. Benjamin : Bien, en fait, en
fait, c'est un accident de la route aussi, c'est un accident de la route aussi,
mais, vous voyez, le problème, en fait, que je... qui vous est illustré à
travers cet exemple, c'est si c'est le régime d'indemnisation, donc, des
accidents du travail qui se pose pour ce travailleur-là, qui gardera les
séquelles pour le reste de ses jours, donc, contrairement si c'était un
accidenté de la route, il pourra espérer avoir des indemnités jusqu'à son
décès.
17
899
M. Boulet : Je vais
répondre encore plus simplement : si c'est un accident de la route qui
survient par le fait ou à l'occasion du travail de la personne réclamante, elle
va recevoir des indemnités de la CNESST. Puis, dans le cas que vous soulevez,
probablement que la personne va conserver une atteinte permanente à son
intégrité physique ou psychique, elle va recevoir la pleine indemnité de
remplacement de revenu et elle va bénéficier de toutes les mesures de
protection de son régime de retraite. Je pense, c'est une réponse simple, puis
je ne veux pas que ce soit perçu comme une opinion...
17
909
M. Benjamin : Bien
non, en fait, je souhaitais une réponse spontanée du ministre. Donc, voilà,
c'est tout.
Une autre question, c'est un autre sujet, Mme la
Présidente... Est-ce que M. le ministre aurait un complément de réponse à nous
donner?
17
939
La Présidente
(Mme IsaBelle) : ...vous vouliez ajouter quelque chose?
17
899
M. Boulet : Non.
17
939
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Non. Parfait.
17
909
M. Benjamin : D'accord.
Nous savons tous, Mme la Présidente, que le premier ministre du Québec, tout
comme tous les autres collègues ici, dans... à l'Assemblée nationale, qui ont
été atteints de la COVID, lorsqu'ils ont été atteints de la COVID, ils n'ont pas
eu à justifier ni à démontrer où ils ont contracté le virus. Nous savons tous
aussi que le premier ministre, tout comme les autres collègues de l'Assemblée
nationale de toutes les formations politiques confondues n'ont pas eu à être
indemnisés par la CNESST. Nous savons très bien aussi que tous les collègues de l'Assemblée nationale, ici, qui ont été
atteints de la COVID ont continué à recevoir leur salaire, peu importe... peu
importe où ils avaient contracté le virus de la COVID-19.
M. le ministre, aujourd'hui il y a des employés
dans le domaine de la santé et de l'éducation qui affirment avoir développé des
séquelles de la COVID-19 après avoir été infectés au travail, qui sont sans
revenu depuis des mois parce que la CNESST refuse de les indemniser. Comment
vous expliquez cette situation?
17
899
M. Boulet : J'ai
répondu déjà à cette question-là antérieurement. La grande majorité des
réclamations pour recevoir des indemnités de remplacement de revenu suite à un
test positif ont été acceptées par la CNESST sans appliquer de présomption. Si
on travaillait, par exemple, dans un milieu de santé, où on a des contacts
physiques avec des personnes à risque, la réclamation était presque
automatiquement acceptée. Il y a dans d'autres milieux où la personne réclamante
ne bénéficiait pas d'une voie rapide, mais son cas était analysé rapidement. La
majorité des réclamations avaient été
acceptées. Entre le 9 mars 2020 puis le 3 avril 2022, on a d'ailleurs
accepté 89 264 réclamations en lien avec la COVID.
Donc, je ne
sais pas à quoi vous référez, là, mais, si, une personne, il y a un lien de
causalité entre sa contagion ou son infection et son environnement de
travail, normalement, il bénéficie d'une indemnité de la CNESST. Ceci dit, à
défaut d'avoir l'indemnité de la CNESST, tu peux bénéficier d'indemnités
d'assurance salaire. Si une personne est contrainte de s'absenter en raison
d'une maladie, même si c'est la COVID, même si ce n'est pas lié au travail,
parce qu'on sait que le taux de contagion était beaucoup plus important dans
les communautés que dans les milieux de travail, elle bénéficie de prestations
d'assurance salaire. Ça fait que le cas que vous soulevez... encore une fois,
il peut y avoir des cas, mais il faudrait vraiment bien connaître les
circonstances puis les faits de ce ou de ces cas-là.
17
909
M. Benjamin : Ce
sont des situations, Mme la Présidente, qui nous ont été soumises par
différents groupes que nous avions rencontrés. Maintenant, M. le ministre, vous
avancez le chiffre de 89 000 qui ont été acceptées. Pouvez-vous nous dire
combien ont été refusées?
17
899
M. Boulet : Il
y en a 89 000 qui ont été inscrites, attendez-moi...
Des voix : ...
M. Boulet : ...pour les lésions, refusées... puis le
89 000, ça comprend le programme de maternité sans danger, des
refusées, il y en a 1 791.
M. Benjamin : Donc, 1 791
cas en lien avec la COVID, c'est bien ça?
M. Boulet : En lien avec?
M. Benjamin : La COVID.
M. Boulet : Oui, tout à fait.
M. Benjamin : 1 791.
Donc...
M. Boulet : Reconnaissez que
c'est un pourcentage qui est minime, hein?
M. Benjamin : Mais, écoutez,
vous savez, pour chaque personne, pour chaque citoyenne ou chaque citoyen, ça vaut la peine, M. le ministre, que je puisse
vous sensibiliser à la réalité de ces personnes-là. Et 1 791, c'est
peut-être... si vous le regardez en
termes de proportion, mais nous regardons ces êtres humains là comme des
personnes qui contribuent à notre développement économique, et qui se
retrouvent atteints de la COVID, et qui ont de la difficulté à se faire
reconnaître la situation. Apparemment, M. le
ministre... Question pour vous : Apparemment — j'ai bien dit «apparemment» — si
un travailleur contracte le virus pendant son heure de dîner, il ne sera pas
indemnisé, est-ce que c'est vrai?
• (11 h 30) •
M. Boulet : Ce n'est pas porté
à ma connaissance. Ceci dit, je comprends l'esprit d'humanité qui a constamment
guidé la CNESST quand elle recevait des réclamations liées à la COVID. Puis,
indépendamment du secteur d'activité, les Québécois, Québécoises ont fait ce qui
s'imposait pour respecter les mesures sanitaires. Il y a eu un nombre important de personnes qui ont été
infectées, et je pense que, pour l'application du régime d'indemnisation
de la santé-sécurité, on a été extrêmement
ouverts. D'ailleurs, on a amorcé un dialogue, avec mes collègues de la
Santé puis du Trésor, avec tous les
syndicats du milieu de la santé, et la santé et sécurité était au coeur de
leurs préoccupations. Est-ce qu'il y a des cas où on a dit : Vous
n'êtes pas indemnisable ou vous ne recevrez pas l'indemnité de remplacement de
revenu parce que ça a été contracté pendant l'heure de lunch? Mais,
sincèrement, ce n'est pas porté à ma connaissance si c'est le cas.
M. Benjamin : On a des
représentants de la CNESST qui sont avec nous. Moi, je veux bien leur accorder une minute ou deux pour qu'ils puissent nous
répondre, parce que je pense que c'est une question vachement
importante, à savoir est-ce...
La Présidente
(Mme IsaBelle) : ...qu'on a un consentement du ministre. M. le
ministre, est-ce qu'on a votre consentement? Et est-ce qu'on a le consentement
des autres, aussi?
M. Boulet : Oui, puis je vais
donner un complément de réponse. Quand j'ai référé au concept «par le fait ou à
l'occasion du travail», quand tu es sur ton heure de lunch, à la cafétéria de
ton institution hospitalière, tu es au travail. Puis, je veux dire, ça
m'apparaît, honnêtement, là... Puis je n'ai pas de problème à ce que
Mme Oudar réponde succinctement, mais ça m'apparaît un peu
invraisemblable. Et, si vous avez un cas comme ça, comme je l'ai mentionné au
collègue de Bonaventure, n'hésitez pas. D'ailleurs, vous me soumettez des cas
particuliers. Mais qu'on ait écrit, dans une décision de la CNESST : Non,
ta réclamation est refusée parce que c'était à l'heure de lunch, ça m'apparaît
invraisemblable, et je recommanderais à la personne de faire une demande de
révision et d'aller à la direction de la révision administrative, parce que
cette décision-là ne m'apparaîtrait pas bien fondée, simplement sur les faits que
vous me présentez.
M. Benjamin : Effectivement.
Donc, je suis très heureux que nous soyons sur la même longueur d'onde.
M. Boulet : Ah! absolument.
M. Benjamin : Tout comme vous,
je considère ça injuste et invraisemblable, d'où, quand j'ai commencé ma
question, j'ai dit «apparemment». Donc, alors, si vous... Tant mieux. Là, vous
me rassurez, M. le ministre. Donc, pour
les gens qui nous ont confié ces genres de questions, donc, on leur dira,
effectivement : Allez en révision par rapport à votre dossier.
Un autre enjeu, M. le ministre, un autre sujet,
c'est sur la prime aux employés dans le système de santé. M. le ministre, il y a toujours un nombre important de
travailleurs ou personnels qui attendent des primes promises. Je parle
ici des employés de soutien en santé. Je
parle aussi des assistants techniciens en pharmacie, les employés
paratechniques. Vous vous êtes occupé enfin des infirmières en mars dernier.
Est-ce que vous pourriez nous indiquer, au micro, aujourd'hui, M. le ministre,
quand exactement vous entendez payer ces travailleurs?
M. Boulet : Bien, dans un
premier temps, heureux que notre échange ait contribué à vous rassurer, en
matière d'indemnisation santé et sécurité, pour les personnes qui ont pu être
infectées pendant l'heure de lunch.
Deuxièmement, quand on a amorcé le dialogue, mes
collègues Santé, Trésor et moi, avec les syndicats, c'était un enjeu qui était
discuté, que les primes soient versées de manière diligente. Comme ça ne relève
pas de moi mais que ça relève du Conseil du trésor, je ne serais pas en mesure
de vous donner une réponse précise, donc je ne suis pas... je ne le sais pas.
M. Benjamin : ...M.
le ministre, ce sont des questions qui ont été posées par des travailleuses et
des travailleurs, et vous, comme ministre du Travail au sein de votre
gouvernement, il me semble que vous avez l'opportunité, sur une base
quotidienne, d'échanger avec votre collègue du Trésor. Alors, c'est ces
questions que posent les travailleurs, des syndiqués. Donc, elles m'ont
demandé... ces questions m'ont été demandées de vous les poser à vous, au
ministre du Travail. Alors, au nom de votre gouvernement, M. le ministre,
alors, est-ce que vous pouvez nous dire dans quel horizon que le gouvernement
entend payer ces travailleuses et ces travailleurs?
M. Boulet : Bon, ça me donne
l'occasion encore de dire à quel point j'ai des sentiments profonds pour,
notamment, les travailleurs et travailleuses du réseau de la santé, qui ont
assumé un fardeau important. Une prime, ça vise
essentiellement à compenser un inconvénient, et les personnes du réseau de la
santé ont vécu cet inconvénient-là, et je
partage leur volonté d'être récipiendaires de cette prime-là le plus rapidement
possible, et ça fait partie, évidemment, de la rémunération globale. Ça
ne relève véritablement pas de mon ministère, mais, si je peux rassurer le
collègue de Viau, je vais certainement avoir un échange avec l'équipe du Trésor
pour les informer que vous étiez l'intermédiaire au nom d'un certain nombre de
travailleurs et travailleuses de la santé qui veulent... qui revendiquent que
cette prime-là soit payée dans les meilleurs délais. Donc, on va s'assurer de
faire un suivi, collègue.
M. Benjamin : Merci.
Je vous l'avais dit, M. le ministre, il y a beaucoup de sujets qu'on veut
aborder avec vous aujourd'hui, et on ne pouvait pas aborder ces crédits
budgétaires sans parler du télétravail, qui, depuis 2020, a eu des impacts certains dans la vie de milliers de
Québécoises et de Québécois. À titre d'information, M. le ministre, est-ce
que vous pouvez nous indiquer le nombre de
plaintes reçues à la CNESST concernant les abus au télétravail? Et j'aurais
aimé avoir ces informations-là pour 2020‑2021,
et, si vous avez des chiffres pour début de 2022, j'aurais aimé les avoir
aussi.
M. Boulet : Bon, le
télétravail, comme vous le savez, il y avait à peu près 15 % des
travailleurs québécois qui utilisaient ce mode-là avant la pandémie, et c'est
monté à 40 %, 45 %, 50 %, dépendamment des secteurs. C'était
l'organisation la plus sanitaire dans le contexte de pandémie. Et la CNESST,
via ses enquêteurs... Moi, je me suis assuré qu'on puisse intervenir là où il y
avait des enjeux, des personnes qui voulaient, des employeurs qui ne voulaient
pas, puis m'assurer qu'il y ait un dialogue, puis qu'on influence, et qu'on
convainque, le cas échéant, les parties de permettre à des personnes de
télétravailler. Le nombre de plaintes ou le nombre de...
Une voix : ...
M. Boulet : On
n'a pas le nombre précis, mais on...
Une voix : ...
M. Boulet : Mais il y a eu
beaucoup d'outils pédagogiques qui ont été préparés par la CNESST. On a fait
une politique en matière de télétravail, qu'on a partagée. L'Ordre des
conseillers en ressources humaines agréés du Québec en a fait une. Je vous
dirais, puis là la présidente le confirmerait, au début de la pandémie, il y a
eu un certain nombre d'interventions de la part des parties, mais ça s'est
atténué graduellement. Si vous voulez avoir le nombre précis de demandes
d'intervention, parce que ce n'est pas des plaintes, c'est des demandes
d'accompagnement de la part des parties, ça, je pourrai vous les fournir, mais
on ne les a pas, actuellement.
M. Benjamin : Il me reste
combien de temps, madame?
La Présidente (Mme IsaBelle) : Il
vous reste deux minutes.
M. Benjamin : Deux minutes.
Mme la Présidente, il y a un enjeu qui
m'intéresse beaucoup — je
vais commencer dans ce bloc-ci, nous allons le poursuivre dans le prochain bloc — c'est
la pénurie de main-d'oeuvre, M. le ministre, en lien avec la situation des
personnes vivant avec un handicap. Malgré votre annonce au dernier budget, M.
le ministre, le collectif d'organismes pour la défense des droits des personnes
en situation de handicap affirme que le budget actuel permet seulement de
maintenir le nombre de CIT présentement en circulation. Que leur répondez-vous?
M. Boulet : Mon
Dieu! Nos chiffres sont quand même assez éloquents. Rappelez-vous la vaste
stratégie nationale pour l'intégration et le maintien des personnes en
situation de handicap, au montant de 238 millions, qu'on a annoncée en
2019, il y a eu une augmentation, année après année, du nombre de contrats
d'intégration au travail. Donc, c'est des personnes en situation de handicap
qui intègrent le marché de l'emploi et qui bénéficient... les employeurs
bénéficient d'une subvention salariale. Le montant des subventions accordées
aux entreprises adaptées est en augmentation constante, et ça, ça fait partie
du budget du MTESS. Les entreprises adaptées sont celles qui ont plus de
60 % des travailleurs qui sont en situation de handicap. On a le duo... il
y a beaucoup d'initiatives, là, mais le DuoEmploi, qui nous a permis de
mobiliser tout le réseau du Conseil du patronat du Québec, en collaboration
avec le regroupement des organismes en employabilité pour les personnes
handicapées, on fait un stage exploratoire, on a commencé l'année passée, on
s'est inspiré de ce qui se faisait en Europe, et hier j'ai rencontré
M. Tremblay, qui est président de TAQ, au gala de la Fédération des
chambres de commerce du Québec, à Montréal, qui me disait à quel point il était
heureux de l'accompagnement puis de l'aide financière.
Les personnes en situation de handicap, je le
répète dans toutes mes allocutions, c'est la clientèle que nous devons
constamment considérer. Il faut constamment viser un meilleur taux d'emploi des
personnes en situation de handicap. J'ai tellement rencontré de trisomiques, de
personnes autistes qui travaillaient dans des environnements de travail
hyperautomatisés. C'est une main-d'oeuvre qui est absolument compétente,
dédiée, loyale et bénéfique pour tous les employeurs qui ont des problématiques
de recrutement.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci, M. le ministre. Je veux juste m'assurer, le nombre de plaintes à la
CNESST, vous allez l'acheminer via la...
• (11 h 40) •
M. Boulet : Et le nombre de
demandes d'intervention, là, dans le contexte du télétravail.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Oui, vous allez nous l'acheminer à la CET, au secrétariat?
M. Boulet : Bien sûr, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Parfait. Alors, nous poursuivons.
Nous poursuivons, donc, avec le porte-parole du
deuxième groupe d'opposition en matière de travail, avec le député d'Hochelaga-Maisonneuve.
Vous disposez de 13 min 48 s.
M. Leduc : Merci, Mme la
Présidente.
Peut-être M. le ministre pourrait commencer par
m'indiquer qui représente la CCQ aujourd'hui.
M. Boulet : La CCQ, c'est moi
qui représente la CCQ.
M. Leduc : C'est vous? Bon. Je
vais poser mes questions à vous, alors, M. le ministre. Ça aurait été
intéressant d'avoir Mme Lemieux, mais, bon, on va aller avec vous, vous
êtes un bon prix de consolation.
M. le ministre, la maison est en désordre, à la Commission
de la construction du Québec. En bon québécois, la chicane est pognée. Il y a
plusieurs conflits, plusieurs conflits qui touchent la question des frais de
gestion du régime d'assurance, la question du régime de retraite, on parle de
mises en demeure qui sont envoyées de part et d'autre. Et récemment il y a une
décision assez importante... donc, en voulant défendre leurs membres, les
syndicats qui siègent, donc, à la CCQ, ont déposé
différents recours alentour, là, si j'ai bien compris, du motif de pouvoir
faire des griefs, de pouvoir bien gérer la question du régime de retraite, et,
en conséquence de ça, la CCQ, via sa présidente, a voulu expulser d'un comité
de vérification différents représentants, notamment... c'était surtout, là, la
FTQ-Construction et l'Inter, de leur rôle, donc, de participants à la CCQ.
Et je me réfère en particulier au jugement qui
est tout frais, là, je sais que vous l'avez sûrement lu, celui du 21 avril
dernier, sous la présidence de l'honorable Marc St-Pierre, de la Cour
supérieure. Je vous lis trois petits paragraphes, à 43 : «[Les fonctions
de] demandeurs au C.A. et aux comités sont indissociables de leur fonction dans
l'organisation syndicale : c'est le législateur, par la composition du
C.A. et des comités, et le gouvernement, par la nomination des demandeurs au
C.A., qui l'ont voulu ainsi.
«Il n'est pas question ici de [...] faute grave;
tel que mentionné à l'audience, il n'y a pas péril en la demeure.
«Dans les circonstances, la cour est d'avis que
la décision de suspendre les demandeurs de leur comité respectif attaquée en
l'instance doit être déclarée nulle.»
J'aimerais d'abord avoir votre opinion, M. le
ministre. Je sais que vous aimez ça commenter des jugements, vous l'avez fait
récemment sur le dossier de la notion d'établissement dans le droit de grève.
Qu'avez-vous pensé de ce jugement qui est sorti, là, il y a quelques jours à peine?
M. Boulet : Bien, j'aimerais
d'abord saluer le collègue d'Hochelaga-Maisonneuve, content de vous revoir. Et
en fait la présidente de la CCQ n'est pas ici parce que les partis d'opposition
ne l'ont pas demandé.
Vous connaissez mon intérêt pour les bons
climats de relations de travail. Indépendamment de l'instance à laquelle nous
référons, ça m'apparaît fondamental pour assurer l'atteinte des objectifs
institutionnels, notamment de la Commission de la construction du Québec. Il y
a des procédures qui sont extrêmement préoccupantes. J'ai lu la décision du
juge Marc St-Pierre, de la Cour supérieure de Montréal, et... qui annule
la décision qui avait été prise de retirer les deux personnes, là, la
FTQ-Construction et l'Inter, là, sans les nommer. Et je ne me prononcerai pas
sur le mérite de la décision, c'est délicat pour moi, parce qu'il y a peut-être
une inscription en appel. Je ne sais pas quelle est la prochaine étape, mais
c'est superimportant pour moi qu'on fasse le ménage à la CCQ. Quand il y a des
relations tendues, il y a des processus alternatifs de résolution de ces
tensions-là, et moi, je serai toujours un partisan de ces avenues-là pour
éliminer les tensions puis pour s'assurer que tout le monde considère que la
communauté d'intérêts est beaucoup plus importante que la divergence
d'opinions.
Dernier point, collègue, si vous me permettez,
mon collègue aux Finances pilote un projet de loi n° 4
sur l'amélioration de la gouvernance des sociétés d'État, et, comme vous savez,
ce qui est anticipé, c'est qu'il y ait une scission du poste de P.D.G. et de
P.C.A., président du conseil d'administration, qu'il y ait un paritarisme,
qu'il y ait une forme d'indépendance, que
les... nous visions l'égalité entre les hommes et les femmes et qu'il y ait une
personne en bas de 35 ans. Mais, bon,
vous connaissez ce projet de loi là. Je pense que ce sera un des éléments qui
pourra contribuer à l'amélioration du climat à la CCQ, que je souhaite
ardemment, comme vous.
M. Leduc : Pour votre information,
M. le ministre, c'est un privilège de l'opposition officielle de demander qui
va vous accompagner à l'étude des crédits. Si c'était de moi, j'aurais bien
aimé avoir Mme Lemieux, comme je vous l'ai mentionné.
Essayons de conclure sur ce dossier-là, parce
qu'il est important. Vous le savez, il y a plusieurs formes de plaintes, il a
fallu que les syndicats déposent une requête pour pouvoir avoir accès à la
gestion du régime de retraite. À ce jour, ils sont toujours incapables d'avoir
une ventilation des dépenses d'administration du régime de retraite. Ça pose
problème. On ne tolérerait ça dans à peu près aucun autre... aucun autre
endroit syndiqué. Et, face à cette requête-là, donc, qui a été faite de la part
des syndicats, c'est là qu'il y a eu la réaction de Mme Lemieux et du
conseil d'administration, de dire : Bien là, on va les expulser du comité
de vérification en représailles.
Je sais que vous êtes un partisan de la
cogestion, de la concertation. Ma question, elle est un peu crue, M. le
ministre, mais elle va de soi : Est-ce qu'au regard de tous ces
problèmes-là... Puis, ah mon Dieu! j'ai oublié celui... le fait que la Commission
des droits de la personne, hein, est en chicane aussi avec la CCQ sur le
programme d'accès à l'égalité des femmes, qui n'est pas à la hauteur, selon la
Commission des droits de la personne. Face à cette désorganisation-là de la
CCQ, est-ce que Mme Lemieux a toujours votre confiance? Est-ce qu'elle est
toujours la femme de la situation?
M. Boulet : Mme Lemieux
est toujours la personne en qui j'ai confiance à la Commission de la
construction du Québec. Tout est évolutif. On s'attend à ce que des objectifs
soient rencontrés dans une perspective de saine gouvernance, d'éthique et de
transparence. Puis je vous rappellerai que le jugement de la Cour supérieure ne
disait pas que ce n'était pas fondé, mais il disait qu'il aurait pu y avoir
matière à ce que ces personnes-là soient retirées de discussions ou de comités,
mais que ce n'était pas opportun dans le cas présent. Mais, vous savez, la
réponse que je vous donne, elle est toujours la personne en qui j'ai confiance.
M. Leduc : Malgré,
là, la chicane avec la commission, malgré la chicane avec l'ensemble des
syndicats — parce
qu'au début c'était juste deux syndicats sur cinq, et là c'est les cinq
syndicats, maintenant — elle
a réussi à fédérer les syndicats, qui ne s'aiment pas beaucoup, hein, dans le
milieu de la construction, c'est bien connu, elle a réussi à les fédérer, ils
se sont joints ensemble dans la requête sur la question des griefs et sur la
question du régime de retraite. Chapeau, en quelque sorte, mais ce n'est pas le
genre de gestion qu'on s'attend d'un organisme qui est supposé de maintenir la
paix dans une industrie qui en a bien besoin.
Alors, je suis triste
d'apprendre que vous renouvelez la confiance envers Mme Lemieux. Il me
semble qu'il y aurait eu un petit signal un peu plus fort que vous auriez pu
lui envoyer pour qu'elle change de direction. J'espère qu'elle ne portera pas appel de ce jugement-là, qui me semble assez
clair. Vous avez laissé entendre que vous adhériez, en tout cas, peut-être, aux conclusions. Bien sûr,
c'est un organisme de l'État, ils ont le loisir de prendre leur
décision, mais, franchement, M. le ministre, ce n'est pas le style de gestion
qui vous ressemble, je trouve. Parce que ça fait plusieurs projets de loi qu'on
travaille ensemble, je le sais, que vous êtes un partisan de la concertation.
Ce n'est pas ça que je vois, moi, à la CCQ en ce moment, et j'apprécierais un
changement de cap dans les prochaines années.
Je vous amènerais ailleurs, M. le ministre, sur
la question, évidemment, de la SST, hein? On a passé 193 heures, Mme la
Présidente, ensemble sur le projet de loi n° 59. J'en
suis bien fier, bien sûr, c'est un projet de loi intéressant. Si vous me
permettez, je pourrais peut-être poser une question à Mme Oudar, de la
CNESST. Dans le régime... dans le projet de
loi, pardon, on a institué un régime intérimaire par rapport aux normes
temporaires, hein, en attendant que
le C.A. discute de normes permanentes. Ma question est comme double,
finalement. Le régime intérimaire, il est entré en fonction il y a
quelques semaines à peine. Est-ce qu'il y a eu ou est-ce qu'il y a de prévu une
forme de publicité pour que l'ensemble des milieux de travail qui ont
maintenant accès à ce régime de prévention puissent être conscients de cette
réalité-là? C'est quand même fondamental. Et, deuxième question qui vient avec,
comment ont commencé les travaux? Est-ce que l'objectif de trois ans vous
semble toujours réaliste?
M. Boulet : Le régime
intérimaire, il est entré en vigueur le 6 avril dernier, régime
intérimaire dont vous connaissez très bien les paramètres. Il y a eu beaucoup
d'outils et de pédagogie, beaucoup de webinaires avec les associations
patronales, avec les syndicats, avec tous les membres du C.A. de la CNESST.
Puis ça me fait plaisir, parce qu'on n'a
peut-être pas eu l'échange... on n'a peut-être pas eu d'échange à cet effet-là,
de souligner la nomination de Mme Louise Otis à la présidence
du C.A., puis j'ai eu des commentaires élogieux la concernant de la part tant
des syndicats que des patrons.
Donc, le processus va bien. Les délais d'entrée
en vigueur qui sont prévus dans la Loi modernisant le régime de santé et
sécurité sont encore tout à fait opportuns. On est en ligne. Il y a un comité
d'application de cette nouvelle loi là qui est extrêmement active, qui est très
tentaculaire, et je pense que ça va bien, ça se déroule de manière harmonieuse.
Puis on est beaucoup plus en mode accompagnement et fourniture d'outils
permettant aux parties de bien respecter les nouvelles dispositions, puis je
suis assez fier de ça. Puis je sais que vous avez contribué avec énormément
d'intensité et de détermination à ce qu'on aboutisse à cette loi-là, même si
vous aviez des désaccords à certains niveaux, vous aviez aussi des accords à
l'égard de d'autres...
• (11 h 50) •
M. Leduc : Bien sûr, mais, M.
le ministre, ma question était sur la campagne d'information. Moi, je ne suis pas omniscient, bien sûr, mais je n'ai vu aucune
publicité à la radio, ou à la télé, ou des panneaux publicitaires. Il y
en a peut-être eu, là, je n'ai pas tout vu
passer. Pouvez-vous me confirmer ce qui a été fait en matière de publicité
alentour du nouveau régime?
M. Boulet : Bien, il y a eu
11 000 participants, là, à des webinaires sur le régime intérimaire,
les associations syndicales, les associations patronales en font. Les
associations sectorielles paritaires sont très actives, et il y a des comités,
là, vous...
M. Leduc : ...ma
question : Les gens dans la rue, où est-ce qu'ils peuvent entendre
parler qu'il y a un nouveau régime qui s'applique à eux, qui n'avaient
aucun recours avant?
M. Boulet : Bien, par les
médias sociaux. Peut-être, Manuelle, il y a peut-être un complément à donner,
là, moi, je n'ai pas...
La Présidente (Mme IsaBelle) : On
a le consentement pour laisser la parole à madame?
M. Boulet : Oui.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Je
vous inviterais à bien vous présenter avant de répondre à la question.
Mme Oudar (Manuelle) : Bonjour.
Merci. Manuelle Oudar, P.D.G. de la CNESST.
Merci pour la question, puis j'en profite aussi
pour remercier les parlementaires pour les longs travaux ayant mené — merci,
M. le ministre, aussi — à
la modernisation de la loi sur le régime de santé et sécurité du travail.
Le régime intérimaire, comme le ministre l'a
mentionné, est entré en vigueur le 6 avril dernier. Effectivement, c'est une bonne question que vous
posez, parce que ça a été important de rejoindre tous les milieux. On a
eu des webinaires avec des experts de la commission qui étaient disponibles,
aussi, après les webinaires pour répondre à toutes les questions. On a eu plus
de 10 000 inscriptions. Ce n'est pas 10 000 personnes, là,
c'est 10 000 inscriptions, donc, un employeur peut représenter aussi
plus de... plusieurs personnes. On continue à faire cette publicité-là sur les
médias sociaux. On a fait aussi un rappel, là, de publicité à grand déploiement
aussi pour aller inviter les gens à aller sur notre site Internet et aussi les
partenaires syndicaux, patronaux aussi, également.
Et je vous ai
entendus, en commission parlementaire aussi, sur les délais. Pour nous, c'était
important d'arriver avant le
6 avril, donc dès le mois de février, donc deux mois avant l'entrée en
vigueur du régime que... les parlementaires avaient
choisi la date dans le projet de loi, pour que les milieux de travail soient
prêts à la date d'entrée en vigueur. On a initié toutes ces formations-là et on
continue de le faire, hein? Notre conseil d'administration nous a demandé de
continuer à diffuser ces webinaires et ces capsules, donc on continue à
accompagner les milieux. On a une bonne réception des milieux de travail.
M. Leduc : Combien de temps,
Mme la Présidente?
La Présidente (Mme IsaBelle) : Il
vous reste 1 min 35 s.
M. Leduc : Une minute. Merci
pour la réponse.
Dernière question sur la CNESST, soit vous, soit
M. le ministre, évidemment : La réforme, elle a entraîné un nouveau
déploiement, beaucoup de nouveaux domaines qu'on allait toucher, donc on avait
tous un consensus à l'idée d'avoir des nouvelles ressources humaines à la
commission. Est-ce que vous pouvez me dire spécifiquement combien d'inspecteurs
ont été ajoutés? Quel est le ratio actuel d'inspecteurs-entreprises au Québec?
Et quelle est l'évolution prévue de ce ratio? Merci.
M. Boulet : Bien, ce qui est
anticipé et ce qui se fait, c'est qu'on a prévu embaucher 162 personnes,
dont 79 à la prévention, pour rencontrer tous les objectifs de la Loi
modernisant le régime de santé et sécurité. Et je voulais rajouter, pour le
bénéfice du collègue d'Hochelaga-Maisonneuve, il ne faut pas négliger aussi les
outils en ligne puis les mutuelles de prévention, puis il y a des placements
radio aussi. Je pense qu'il y a... sans inonder, là, le marché de l'emploi du
Québec, mais tout ce qui requiert l'attention des travailleurs, des syndicats
puis des employeurs, on veut contribuer, là, à faire connaître le plus possible
les nouvelles obligations. Si on veut assurer leur sanction, le cas échéant, il
faut le faire, puis vous avez raison de le souligner. Puis je me souviens que,
lors de l'étude détaillée, c'est une préoccupation que vous aviez aussi, là.
M. Leduc : Vous pourriez
peut-être me le faire communiquer plus tard, mais j'aimerais bien avoir le
ratio actuel inspecteurs-entreprises. Je sais que le temps est écoulé, Mme la
Présidente. Ce serait peut-être une donnée que vous pourrez me transmettre,
là...
M. Boulet : Oui, oui, bien,
tout à fait, mais c'est 79 à la prévention. On en a actuellement...
M. Leduc : ...ratio
actuel au Québec entre le nombre d'entreprises puis le nombre d'inspecteurs à
la CNESST.
M. Boulet : Ah! O.K. Ça, on
pourra vous donner l'information. O.K.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Vous
vous engagez à transmettre le tout à la CET?
M. Boulet : Oui, tout à fait.
Merci, madame.
La
Présidente (Mme IsaBelle) :
Parfait. Eh bien, merci au député
d'Hochelaga-Maisonneuve, effectivement, bel échange.
Nous poursuivons avec le dernier bloc de
l'opposition officielle avec le député de Viau. Vous disposez de
18 min 20 s.
M. Benjamin : Merci, Mme la
Présidente.
Donc, je continue sur mon intervention par
rapport aux personnes qui vivent avec des contraintes sévères à l'emploi. M. le
ministre, il y a actuellement 300 000 personnes en situation de handicap
aptes au travail au Québec. Ne croyez-vous pas qu'un financement digne pourrait
contribuer à combler la pénurie de main-d'oeuvre?
M. Boulet : Ah mon Dieu!
J'essaie souvent de faire des comparaisons avec les autres provinces au Canada
sur le taux d'emploi des personnes en situation de handicap, et c'est tellement
variable parce que la définition de handicap varie d'une province à l'autre,
mais ici, avec l'office de la protection des personnes handicapées, on a une
définition dans la loi. Il y a des définitions qui varient, mais, comme vous
savez, il y a des bénéficiaires de prestations de solidarité sociale à notre
aide financière de dernier recours. 300 000, je n'ai pas ce... ça dépend
de la définition de handicap. Mais, comme je vous ai dit, on a un plan
d'action, on a une stratégie pour les intégrer et pour répondre aux besoins,
surtout en contexte de pénurie de main-d'oeuvre. Puis il y en a qui font de la
réception, de l'expédition, de l'emballage un peu partout dans les entreprises,
et j'ai senti que le DuoEmploi, auquel je faisais référence tout à l'heure,
nous permet de faire la promotion de la valeur de ces personnes-là pour le
marché de l'emploi. Vous voulez que je raccourcisse. Merci.
M. Benjamin : Merci. Merci, M.
le ministre.
Donc, je reviens encore, je fais un saut sur le
projet de loi n° 59, comme l'a fait mon collègue tout à l'heure. J'ai une
question pour vous, M. le ministre. Afin de réussir le déploiement des
nouvelles dispositions en santé psychologique reliées à la loi, combien
d'inspecteurs seront formés et dédiés à la santé psychologique?
M. Boulet : Est-ce
que vous me permettez de donner un complément de réponse pour les personnes en
situation de handicap?
M. Benjamin : Oui, allez-y.
M. Boulet : La participation
des personnes handicapées aux services publics d'emploi a crû de 57,5 %,
passant de 19 000 participants à 30 000 participants en 2020‑2021,
puis les investissements, bien, ont crû, là, en proportion équivalente, là,
jusqu'à 244 millions en 2021‑2022.
Donc, santé psychologique. Évidemment, pour les
entreprises de plus de 20 et en bas de 20, il faut identifier les risques dans le programme de prévention ou
dans le plan d'action, incluant les risques psychosociaux. La question,
vous voulez savoir combien d'inspecteurs de plus?
M. Benjamin : Sont formés et
dédiés à la santé psychologique.
M. Boulet : Mon Dieu! Il y a
des personnes de formation tellement... On a posé la question, puis je pourrai
vous donner la réponse, là, mais on a des conseillers en réadaptation, on a des
agents d'indemnisation, on a des personnes, à la CNESST, qui ont des bagages en
psychoéducation, en travail social, en psychologie. Et donc, pour répondre à
l'importance d'identifier pour éliminer les risques psychosociaux, on aura les
ressources, et il y aura des ressources spécialisées qui vont être ajoutées
spécifiquement pour la santé psychologique.
M. Benjamin : Sachant que la
loi prévoit la séparation des postes du président du conseil d'administration
et de P.D.G. pour faciliter la gouvernance de l'organisation, quand sera nommé
ce nouveau président ou présidente, cette nouvelle présidente?
M. Boulet : Elle a été nommée,
ça a été entériné par le Conseil des ministres la semaine dernière, mercredi la
semaine dernière. Et je suis véritablement content de cette nomination-là,
c'est une personne transcendante qui a des mandats à l'échelle internationale,
qui a été pendant 15 ans juge à la Cour d'appel du Québec, qui est le plus
haut tribunal du Québec. C'est une nomination fantastique pour le Québec.
M. Benjamin : Alors, j'ai hâte
de la rencontrer, donc, cette personne-là.
M. Boulet : Ah! puis vous allez
l'estimer d'emblée, vous allez véritablement l'apprécier. Et c'était important
d'avoir quelqu'un qui transcendait les intérêts spécifiques des associations
patronales et des syndicats. Et c'est la personne qui est la meilleure
chercheuse de solutions, qui a l'autorité pour amener les parties vers des
remèdes, des solutions qui vont vraiment permettre d'améliorer le bilan
lésionnel au Québec, c'est-à-dire de diminuer la fréquence et la gravité des
accidents de travail puis des maladies professionnelles.
• (12 heures) •
La Présidente (Mme IsaBelle) : Nous
comprenons qu'on ne peut pas divulguer de nom, c'est bien ça?
M. Boulet : C'est public,
maintenant.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Ah!
c'est public?
M. Boulet : C'est
Louise Otis, de Montréal.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait.
Merci.
M. Benjamin : Merci, M. le
ministre.
Un enjeu qui touche toutes les circonscriptions
du Québec, incluant la vôtre, M. le ministre, c'est celui de la pénurie de
main-d'oeuvre en matière de transport scolaire. Et ça... et, quand je parle de
pénurie de main-d'oeuvre pour le transport scolaire, on parle de nos enfants,
on parle de nos familles. Au-delà du programme PAFCAS qui existe, l'enjeu du transport scolaire est un enjeu
prioritaire qui mérite d'être adressé immédiatement, comme le mentionne
très bien la CSN dans un mémorandum. Quelle est votre position? Quelle est la
stratégie de votre gouvernement, concrètement, pour contrer cette grave pénurie
de main-d'oeuvre dans ce secteur en particulier, M. le ministre?
M. Boulet : Oui,
bien, comme vous savez, le 24 mai prochain, on va ajouter des nouveaux
métiers, professions à ce qu'on
appelle le traitement simplifié du Programme des travailleurs étrangers
temporaires, et donc c'est 67 nouveaux, ce qui fait que nous aurons au Québec 287 métiers, professions où ça
va être beaucoup plus facile d'accéder à des travailleurs étrangers temporaires. L'EIMT, là, l'étude
d'impact sur le marché du travail, va permettre d'avoir un permis de
travail d'une durée de trois ans au lieu
d'un an, ce qui va nous donner un accès plus facile. Il n'y aura pas d'exigence
d'afficher dans le marché local et il n'y
aura pas de limite quant au nombre de travailleurs, et les conducteurs... il y
a beaucoup d'emplois qui sont là-dedans, et les conducteurs d'autobus
dans le réseau du transport scolaire, si je ne m'abuse, en font partie.
L'autre avenue qu'il faut explorer plus, puis là
ça ne relève pas que de mon ministère, là, mais il va falloir envisager des programmes de formation en
alternance travail-études pour valoriser ce travail-là de conducteur
d'autobus scolaire, s'assurer que les personnes puissent
travailler, puissent compléter des formations, probablement dans des centres de
formation professionnelle, tout en étant rémunérés, et donc d'augmenter, de
valoriser cet emploi-là pour augmenter l'attrait et aussi avoir un impact sur
le taux de rétention.
Ça fait que c'est sûr que c'est un enjeu qui
nous préoccupe, particulièrement mon collègue à l'Éducation, qui, comme vous le
savez, se fait souvent interpeler. Et la réponse qu'on vient de me donner,
c'est, oui, on aura, pour ce métier-là, accès au traitement simplifié. Donc,
j'anticipe, là, qu'on puisse augmenter le nombre de conducteurs d'autobus
scolaire dans les meilleurs délais possibles.
M. Benjamin : Alors, vous avez
parlé de programme pour les travailleurs étrangers temporaires et vous avez
parlé de salaire aussi, les conditions salariales aussi, est-ce que c'est bien
ça? Parce que c'est un enjeu aussi, les conditions salariales, pour créer une
attraction par rapport à ce métier-là.
M. Boulet : Sincèrement, ce
n'est pas dans le périmètre de mon ministère, les conditions de travail qui
sont dans les conventions concernant les
conducteurs d'autobus scolaire. Ça fait que, encore une fois, ce serait
présomptueux de ma part de m'exprimer, là, sur leur salaire ou leurs avantages
sociaux.
M. Benjamin : On compte sur
votre influence, M. le ministre, donc, pour en parler avec votre collègue, pour
faire avancer ce dossier-là. C'est important pour nos enfants, c'est important
pour les familles de savoir qu'en matière de transport scolaire la sécurité de
leurs enfants soit assurée et qu'il puisse y avoir du personnel compétent à ce
niveau-là.
J'ai beaucoup de questions, M. le ministre, je
vous l'ai dit. Cette fois-ci, je vous amène sur le terrain des chiropraticiens.
Est-ce que vous prévoyez, M. le ministre... Parce qu'un des enjeux qui
nous a été soumis par rapport aux chiropraticiens, c'est le délai d'attente,
pour beaucoup de travailleurs, de pouvoir voir un chiropraticien...
Prévoyez-vous, avec votre collègue le ministre de la Santé, intervenir afin de
conférer aux chiropraticiens le statut requis pour qu'ils puissent traiter les
accidentés du travail sans prescription médicale préalable?
M. Boulet : Bon, on m'a déjà
interpelé, Mme la Présidente, mais il y a un certain temps, sur cet enjeu-là
pour les chiropraticiens. Ça me donne l'occasion de dire que, même pour le
Bureau d'évaluation médicale, même pour les médecins qui travaillent à la CNESST,
on est confrontés à une pénurie, puis on travaille beaucoup avec le CCTM pour
faire du recrutement puis pour s'assurer qu'on ait les ressources médicales
appropriées pour rencontrer les impératifs légaux de la Loi modernisant le
régime de santé et sécurité.
Maintenant, que les chiropraticiens aient accès
à une accréditation, vous dites, particulière pour pouvoir s'occuper des
accidentés du travail, permettez-moi d'analyser ça puis de demander à mon
équipe de me faire un examen de situation, puis je vais voir comment je peux
donner un suivi à ça, là, parce qu'on m'a déjà interpelé, mais il n'y a jamais
personne qui a insisté sur cette possibilité-là qu'auraient les chiropraticiens
de rendre des services ou d'avoir des frais remboursés par la CNESST, donc
c'est à analyser, là, je vais être bien franc avec vous, là.
M. Benjamin : Bien, je suis
très, très heureux qu'au moins vous puissiez l'analyser, et j'espère que vous
allez partager avec nous les fruits de vos réflexions, M. le ministre, parce que,
vous savez, il y a deux enjeux qui nous ont été soumis par l'Association des
chiropraticiens du Québec, qui nous semblent importants : il y a le délai,
évidemment, de prise en charge, qui peut être raccourci, donc, par rapport à un
accidenté du travail, ça, c'est un aspect important dans la santé de la
personne, et aussi il y a une évaluation... une analyse par rapport à une
évaluation potentielle de l'économie qui peut être réalisée aussi en permettant
cet accès direct là. Donc, l'analyse, effectivement, donc on a hâte de voir les
résultats de cette réflexion, de cette analyse.
Autre question, M. le ministre. Pour nous aussi,
donc, on a réalisé une tournée qui nous a permis de rencontrer plusieurs
groupes, notamment des organismes en matière de défense des droits sociaux, qui
sont pour le moins mécontents par rapport à l'état de financement des
organismes de défense des droits sociaux. Est-ce que vous comptez répondre? On
a rencontré, notamment, des membres de cette coalition des organismes de droits
sociaux qui nous ont parlé de leur grand
mécontentement par rapport à la non-reconnaissance et le sous-financement des
organismes de droits sociaux. Qu'est-ce que vous comptez... Qu'est-ce que vous
répondez à ces organismes aujourd'hui?
M. Boulet : O.K., deux choses.
Le délai de prise en charge, là, vous avez totalement raison, parce que plus vite on prend en charge, moins il y a de risque de
chronicisation de la lésion professionnelle du travailleur, moins il y a
de risque d'augmentation de coûts et moins il y a de risques qu'on additionne
ce qu'on appelle les laissés-pour-compte dans le marché de l'emploi au Québec,
et particulièrement en contexte de pénurie de main-d'oeuvre.
Pour les
organismes qui s'intéressent à la défense des droits sociaux, bon, je fais des
rencontres épisodiques — là,
on revient à la Solidarité sociale — on en a discuté la semaine
dernière. Je salue mon collègue aux Finances, qui a annoncé 1,1 milliard sur les cinq prochaines années en augmentation
de montants d'argent pour financer les organismes communautaires, c'est un montant sans précédent.
Dans les trois dernières années, on aura augmenté de 50 % le financement
à la mission, Mme la Présidente. Ça, c'est un engagement que nous avions des
organismes communautaires. Il nous reste maintenant à annoncer le plan d'action
gouvernemental en action communautaire autonome, que nous n'avons pas depuis
2007. Et les organismes qui militent en faveur de la défense des droits sociaux
font partie de ce qu'on appelle le PAGAC, et
on aura la déclinaison des montants par ministère, par mission des organismes
gouvernementaux lors de l'annonce qui devrait être faite dans les prochaines
semaines par nous. Merci.
M. Benjamin :
En fait... Merci, Mme la Présidente. En fait, merci au ministre pour les
réponses pour ce qui est des organismes communautaires, mais je parlais des
organismes de défense des droits sociaux, c'est-à-dire qui sont... ces
organismes-là, par exemple, qui défendent les travailleurs. Je prends l'exemple
d'un organisme qu'on a rencontré, qui s'appelle Illusion-Emploi, par exemple,
qui est dans la région de l'Estrie, ce sont ces organismes-là qui sont dans la
défense des droits sociaux. Est-ce que vous vous engagez aujourd'hui, M. le
ministre, à revoir et à recommander une augmentation de leur financement afin
qu'ils puissent répondre adéquatement aux besoins du terrain? Parce que ces organismes là, contrairement aux autres
organismes communautaires, ils se retrouvent aujourd'hui devant un vide
par rapport à la matière du financement.
• (12 h 10) •
M. Boulet : Oui,
mais Illusion-Emploi, là, je ne les connais pas, mais, dans le PAGAC, il y aura
des montants d'argent qui seront destinés aux nouveaux organismes aussi,
en tenant compte de leur mission. Pour le réseau des organismes qui s'intéressent à l'employabilité des personnes plus
éloignées du marché de l'emploi, s'ils font partie des ressources
externes, il y a eu un financement qui a été consenti, il y a eu une indexation
l'année dernière puis il y a eu la mise en place d'un mécanisme d'indexation.
Ceci dit, c'est sûr que le taux d'emploi au Québec est rendu à 77,6 % des
personnes de 15 à 64 ans. Comme j'ai dit la semaine dernière, c'est le
témoignage le plus éloquent de l'efficacité de nos services publics d'emploi.
On est les premiers au Canada, encore une fois, 2 % de plus que le Canada,
3 % de plus que l'Ontario.
Pourquoi je reviens là-dessus? C'est pour dire
qu'il y a de moins en moins de personnes plus éloignées du marché de l'emploi.
Ça change la dynamique dans la prestation des services externes des organismes,
notamment en employabilité. Puis on a lancé un chantier de réflexion avec ces
organismes-là, qui va s'amorcer au mois de juin, pour redéfinir les façons de
faire puis les manières de ces organismes-là d'intervenir auprès notamment des
personnes en situation de handicap, les personnes judiciarisées, issues des
Premières Nations et toutes les autres clientèles,
là, que nous devons intégrer dans le marché de l'emploi, mais il y en a de
moins en moins. Il y a les personnes qui sont sans emploi, il y a les personnes expérimentées, il y a les jeunes,
il y a ces clientèles-là qui demeurent encore vraiment névralgiques, là,
pour nous assurer de lutter le plus efficacement possible contre la pénurie de
main-d'oeuvre.
M. Benjamin : Pour ce qui est
des accidentés du travail, M. le ministre, lors de cette tournée-là qui nous a
permis de rencontrer plusieurs organismes, certains nous ont fait part d'une
augmentation fulgurante du délai de traitement des dossiers en matière
d'accidents du travail. Est-ce que les représentants de la CNESST peuvent nous
dire quel est le délai, quels sont les délais de traitement des dossiers,
actuellement?
M. Boulet : Oui, tout à fait.
Donc, le délai moyen de décision d'admissibilité rendue et suite à la réception
de documents requis pour le traitement d'une réclamation pour AT, là, accident
de travail, c'est 35 jours, la cible, c'est 15; pour les maladies professionnelles,
c'est 147 jours, la cible, c'est 60.
M. Benjamin : Et qu'est-ce qui
explique cette augmentation des délais?
M. Boulet : Attendez. Pour le
délai moyen, en date du 31 décembre 2021, pour les accidents de travail,
c'est 29, la cible, c'est 15; pour les maladies professionnelles, on avait
88 jours en 2020, 124 en 2021. Il y a la pandémie qui a expliqué l'augmentation des délais. Puis, bon, j'ai d'autres
délais ici, là... Donc, il y a la pandémie, mais il y a une stratégie, il y a un plan d'action qui est mis en
oeuvre, à la CNESST. Les délais... c'est une une quasi-obsession, que
les délais soient les plus courts possible
et les délais moyens... Il faut le dire, quand la CNESST est efficace. Laissez-moi
un instant, collègue de Viau. Le délai moyen d'autorisation du premier
versement de l'indemnité — parce
que c'est ça qui est le plus important,
qu'on verse l'indemnité de remplacement de revenu, pour ne pas que la personne
soit laissée sans ressources
financières — 11,7 jours
en 2021, 7,4 jours en 2020, et cette année 6,7 jours, alors que la
cible est 10 jours. C'est, je le dis, phénoménal, c'est
remarquable. Mais, les délais d'admissibilité, on a encore du travail à faire,
et Mme Oudar en est totalement consciente.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Je vais quand même vous laisser quelques...
M. Boulet : Puis il y a eu... à
cause de la COVID, collègue, il y a eu 53 727 lésions qui se sont
ajoutées au dossier puis 35 535 pour le programme de maternité sans
danger. Ça fait que ce n'était pas anticipé, ce n'était pas prévisible. Cet
accroissement-là a eu un impact sur les délais d'admissibilité, mais là on est
en train de revenir dans un entonnoir qui va nous permettre d'avoir des délais
beaucoup plus rapides.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Le
temps est écoulé, mais je vais quand même vous laisser le temps de donner une
dernière parole, là, au ministre.
M. Benjamin : Bien, absolument.
En fait, merci, Mme la Présidente.
Donc, sachant que les délais, ce sont des
indicateurs importants par rapport à la qualité de service, donc, nous osons
espérer que, lors des prochaines rencontres des crédits budgétaires, donc, le
ministre nous présentera de meilleurs chiffres pour ce qui a trait aux délais
de traitement, notamment les délais d'admissibilité.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Très
bien. Alors, merci.
M. Boulet : ...prochaine
étude de crédits, oui.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors,
merci pour le bel échange. Merci.
Votre bloc étant terminé, nous continuons
maintenant avec le bloc du gouvernement. Vous disposez de 13 minutes, et
nous y allons avec la députée de Jean-Talon.
Mme Boutin : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. M. le ministre, toujours un plaisir d'intervenir, que ce
soit pour les projets de loi, l'évolution des projets de loi, pour l'étude des
crédits également.
J'ai pu vous accompagner, vu que je fais partie
de la commission depuis quelque temps, pour le p.l. n° 59,
pour la réforme du RQAP également. Et là j'aimerais vous parler du p.l. n° 14, la réforme, là, pour améliorer la protection des
stagiaires. Puis je trouve ça superintéressant parce que... Puis là ce n'est
pas pour miner un peu ce que vous faites, parce qu'au contraire, là, vous
faites beaucoup d'avancées en termes de normes du travail, protection des
travailleurs, et souvent ce n'est pas quelque chose qui est très sexy,
politiquement, au niveau médiatique, là, on s'entend, là. À RDI, c'est rare
qu'on fait de grandes envolées lyriques sur ça, mais je trouve que c'est
fondamental dans une société comme la nôtre
puis je trouve ça très bien. Puis même le ton de la commission, je tiens encore
à le dire, parce que je fais plusieurs commissions, puis c'est la commission
où est-ce que je trouve qu'il y a la plus grande collaboration. Le ton est
toujours cordial, puis autant le gouvernement que les oppositions ont vraiment,
là, un ton pertinent, et c'est très constructif, puis j'apprécie ça vraiment beaucoup.
J'aimerais vous amener sur le p.l. n° 14, sur la protection des stagiaires, parce que c'est un
projet de loi qui m'a touchée
personnellement. Vous savez, dans ma circonscription, j'ai l'Université Laval,
j'ai le cégep de Sainte-Foy, j'ai beaucoup d'étudiants, beaucoup
d'étudiants qui font des stages, notamment, et puis les associations étudiantes
nous ont interpelés, moi, mais vous,
également, sur plusieurs enjeux qui concernaient la protection, justement, des
stagiaires en milieu de travail.
Brièvement,
là, les enjeux qui ont été soulevés, c'était, bon, le manque de protection
comparé aux travailleurs réguliers, le fait que les stagiaires n'avaient
pas vraiment de droit à des congés, qu'il y avait peu de ressources lors d'abus
et de violence psychologique, notamment, ou de harcèlement. Puis, moi, ça me
touchait, parce qu'on le sait puis on l'a entendu un petit peu en consultations
particulières, c'est beaucoup des femmes qui sont touchées par ça, quand on
parle de harcèlement sexuel, notamment, mais aussi la violence psychologique,
là. Il y a des jeunes, tu sais, même des
jeunes hommes qui vivent ça, puis ils ont peu de recours... bien, ils avaient
peu de recours, peu d'information. Puis souvent, quand on commence notre
carrière, on a peur, justement, on a peur de dénoncer, on ne sait pas par où
passer. Donc, je trouve ça superintéressant. Puis il y avait également des
enjeux au niveau du manque de clarté quant à la relation entre le stagiaire,
l'établissement d'enseignement, l'employeur, tout l'encadrement de ces
stages-là.
Donc, je sais que le projet de loi a touché
trois volets, notamment l'octroi de congés de courte durée, la protection en
matière de harcèlement psychologique et sexuel, mais aussi tous les recours qui
entourent ça. Ma première question toucherait les consultations particulières,
parce que je trouve que c'étaient des consultations particulières très
constructives, puis il y a des faits qui sont ressortis, qui faisaient
consensus. Puis je ne sais pas si vous avez... je pense que vous avez une bonne
mémoire, là, M. le ministre, j'aimerais ça vous entendre sur, à votre avis,
qu'est-ce qui est ressorti de ces consultations particulières là.
M. Boulet : Bien, d'abord,
merci à la collègue de Jean-Talon, puis je vais profiter de l'occasion pour lui
rendre hommage, parce qu'elle est souvent à la Commission de l'économie et du
travail, puis c'est une collaboratrice hors pair puis qui a un intérêt profond,
là, pour les sujets qui font l'objet de nos études détaillées puis de nos
consultations particulières, puis c'est quelqu'un qui me donne souvent de
l'information, qui m'écrit, qui me texte : Puis, Jean, puis ci...
J'apprécie beaucoup la relation qu'on a pu développer ensemble. Puis qu'elle
nous aborde sur les stagiaires, c'est tellement crucial, il y en a 195 000
au Québec, puis c'est majoritairement des filles qui sont dans le secteur de la
santé puis l'éducation.
Puis ce projet de loi là, c'est le fruit d'une
immense collaboration avec Santé, Éducation, Trésor. Le Conseil
interprofessionnel du Québec, qui est venu nous interpeler lors des
consultations particulières sur la façon notamment
dont on devait traiter les personnes qui étaient victimes de harcèlement
pendant les sessions académiques, moi, j'ai trouvé que c'était tellement
bénéfique pour notre réflexion, puis on a fait les amendements qui s'imposent
pour inciter aussi les collèges puis les universités à accommoder, puis ça, on
l'a intégré dans la loi, une espèce de devoir d'accommodement des institutions
d'enseignement qui sont confrontées à des stagiaires victimes de harcèlement sexuel ou psychologique. Pour moi, là, ça a été
fantastique, ce projet de loi là, parce que les consultations
particulières ont donné des véritables résultats.
L'autre élément qui me revient, souvenez-vous, collègues,
c'est les congés, on voulait se limiter aux congés de courte durée, et là on a intégré des congés de plus longue durée,
dans la mesure où c'était compatible avec la nature du stage. On a
trouvé des libellés qui nous permettaient de mettre dans la loi des solutions
humaines, respectueuses des droits des stagiaires et compatibles avec la
mission des institutions d'enseignement. Ça fait que je pense que... puis vous
partagez probablement d'autres souvenirs, mais ça a été... et, souvenez-vous,
le Conseil du patronat du Québec qui est venu faire un message d'ouverture puis
de flexibilité de la part... au nom des employeurs du Québec. C'est le fruit
d'un beau consensus puis d'un beau paritarisme, ce projet de loi là.
• (12 h 20) •
Mme Boutin : Bien, vous venez de
mentionner les accommodements que... les demandes d'accommodement qui ont été faites envers les établissements quand
il est question de harcèlement, puis le volet qui m'intéresse beaucoup, c'est justement qu'est-ce
que les... comment les stagiaires, comment les stagiaires... quels droits
gagnent les stagiaires en matière de harcèlement... bien, ce n'est pas
juste sexuel, là, ça peut être psychologique, en matière de harcèlement puis qu'est-ce qui a été recommandé de mettre en
place, parce que, là, vous venez de mentionner les accommodements dans
les établissements puis j'aimerais ça mieux comprendre.
M. Boulet :
Bon. Avant cette loi-là, tu pouvais... puis, bon, l'UEQ et la FECQ, que je
rencontrais de façon épisodique, souvent, me racontaient le cas de jeunes
stagiaires victimes de harcèlement, dont le lien d'emploi a été rompu, qui étaient congédiés, puis qui perdaient
leur avenir personnel et professionnel, puis qui n'étaient pas capables
d'avoir leur diplôme. Ces personnes-là, maintenant, il faut faire la promotion
des droits qui leur sont conférés par cette loi-là : ils ont droit à des
politiques en matière de prévention, ils ont droit à des mécanismes de plainte,
ils ont droit à ce qu'un enquêteur fasse le travail de manière confidentielle,
ils ont droit à la protection de leur lien d'emploi, donc à ne pas être
victimes de mesures discriminatoires, de représailles ou de sanctions, peu
importe sa nature, en raison de l'exercice de droit, et ils ont finalement des
recours. En vertu de l'article 122 de la Loi sur les normes du travail, si
elles exercent un droit, si elles sont victimes de harcèlement, elles pourront
intenter un recours qui va être entendu ultimement par le Tribunal
administratif du travail pour corriger la situation, pour taper sur les doigts
de l'employeur puis pour s'assurer qu'elles ne soient pas préjudiciées de
quelque manière que ce soit. Puis, s'il faut prolonger son stage en
collaboration avec l'institution d'enseignement à un moment ultérieur, tout
sera mis en place pour la rassurer. Et maintenant le Québec s'occupe de ses
stagiaires, et le harcèlement, c'était une de nos motivations centrales, puis,
vous le dites bien, que le harcèlement soit de nature sexuelle ou
psychologique.
Mme Boutin : Mais, justement, là, par rapport au mécanisme de plainte, concrètement
parlant, mettons que moi, je suis une
stagiaire puis que je vis du harcèlement psychologique de la part de mon
employeur, à qui je dois m'adresser?
M. Boulet :
Ça, il y a beaucoup de formations, puis il faut en faire la promotion, tu fais
une plainte à la CNESST. Dès qu'il y a une violation, dès que tu crois que tes
droits ne sont pas respectés, tu peux faire une plainte. Puis il n'y a pas de
formulaire, là, tu peux écrire. Le moyen de communication aussi, il n'y a pas
de limitation, mais tu fais une plainte à la CNESST, puis la CNESST va suivre
le processus, va faire enquête, le cas échéant, va s'assurer, dans les cas
spécifiques qui le permettent, qu'il y ait la possibilité d'avoir quelqu'un qui
accompagne le stagiaire, parce que c'est ça qui était au coeur de leurs
préoccupations. À la CNESST, on n'est pas là pour punir, on est là d'abord pour
accompagner, pour s'assurer que la personne est respectée et que ses droits
sont sanctionnés, le cas échéant, puis qu'elle soit entendue.
Mme Boutin :
J'ai deux petites questions par rapport à ça. Est-ce que quelqu'un qui porte
plainte peut garder l'anonymat pour que... justement, être protégé, justement?
Parce que souvent les gens ont peur de porter plainte, ils ont peur que leur
réputation soit affectée en début de carrière. Est-ce qu'ils peuvent garder
l'anonymat?
M. Boulet : Oui, c'est une plainte individuelle. Puis, même quand il y a un
syndicat... mais quoique les stagiaires ne sont généralement pas
couverts par les conventions collectives de travail. Mais, à votre question, je
dis : Oui, c'est des plaintes qui sont de nature confidentielle.
Mme Boutin :
Et est-ce qu'il y a aussi des initiatives de sensibilisation auprès des
employeurs, actuellement, justement pour que
les employeurs, tu sais, connaissent leurs responsabilités, je dirais, et les
conséquences potentielles au niveau du harcèlement?
M. Boulet : Oui, puis, si vous avez des idées additionnelles, n'hésitez pas à les
partager avec nous, mais il y a des outils pédagogiques, il y a des
webinaires. Au C.A. de la CNESST, on s'assure que ça soit bien diffusé au sein
des réseaux des associations patronales puis des syndicats, on en fait la
promotion. Il y aura aussi de la publicité à la radio, il y aura des
infographies. Mais la CNESST est très, très omniprésente, là, dans le marché de
l'emploi pour s'assurer que ce soit connu partout.
Puis, il faut le
dire, c'est une loi qui constitue une avancée importante au Québec, on est à
l'avant-garde. Donc, il faut faire la promotion des droits de tous les
stagiaires du Québec, indépendamment du secteur, et même les stagiaires
d'observation. Souvenez-vous, dans notre Loi modernisant le régime de
santé-sécurité, tu sais, c'est des personnes qui ne font pas les tâches.
Souvent, c'est des stagiaires de second ordre, considérés comme étant de second
ordre. Ces stagiaires-là sont protégés en vertu du régime de santé et sécurité
et sont protégés aussi par la loi... le projet de loi n° 14,
donc dans la Loi sur les normes du travail.
Mme Boutin :
Bon. J'ai le temps pour une dernière miniquestion, puis ça va être dur...
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Brièvement.
Mme Boutin :
Oui, oui, brièvement. Le projet de loi n° 14 permet
aussi de mieux encadrer la relation tripartite entre employeur, stagiaire et
établissement. De quelle manière?
M. Boulet : Par l'intervention
de la CNESST puis par la reconnaissance — il y a un article, je pense,
c'est l'article 5 — d'une
responsabilité tripartite de s'assurer que les conditions d'exécution du stage
soient respectées et soient compatibles avec toutes les
prescriptions de ce projet de loi là. Donc, en ayant un libellé spécifique qui
fait en sorte que ces trois parties-là soient tenues responsables, je pense que
ça assure un stage qui est compatible puis qui est respectueux de la dignité
humaine puis des droits fondamentaux de tous nos stagiaires au Québec.
Mme Boutin : Merci, M. le
ministre. Merci.
M. Boulet : Merci.
Adoption des crédits
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci beaucoup.
Alors, le temps alloué à l'étude du volet Travail
des crédits budgétaires du portefeuille Travail, Emploi et Solidarité sociale
étant presque terminé, nous allons maintenant procéder à la mise aux voix des
crédits.
Alors, le programme I, intitulé Gouvernance,
administration et services à la clientèle, est-il adopté?
Des voix : Sur division.
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Adopté sur division. Merci.
Adoption de l'ensemble
des crédits
Finalement, l'ensemble des crédits budgétaires
du portefeuille Travail, Emploi et Solidarité sociale pour l'exercice
financier 2022‑2023 est-il adopté?
Des voix : Adopté.
Des voix : Sur division.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Adopté sur division.
Documents déposés
En terminant, je dépose les réponses aux
demandes de renseignements des oppositions.
Merci pour les échanges pertinents et cordiaux
entre vous tous, chers membres et M. le ministre.
Compte tenu de l'heure, la commission ajourne
ses travaux au mercredi 4 mai, où elle entreprendra l'étude du volet
Investissement Québec des crédits budgétaires du portefeuille Économie et
Innovation.
Alors, je vous souhaite à tous et à toutes une
bonne fin de journée. Merci. Au revoir.
(Fin de la séance à 12 h 30)