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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le jeudi 7 mai 1998 - Vol. 35 N° 107

Étude des crédits du ministère des Ressources naturelles


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Table des matières

Journal des débats


(Neuf heures trente-cinq minutes)


Volet mines

Le Président (M. Sirros): Si je peux rappeler les membres à l'ordre et constater qu'ayant quorum on pourrait débuter nos travaux. Alors, la commission de l'économie et du travail est réunie afin de procéder à l'étude des crédits budgétaires du ministère des Ressources naturelles, section mines, pour l'année financière 1998-1999.

Est-ce qu'il y a des remplacements, Mme la secrétaire?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Lefebvre (Frontenac) remplace M. Cherry (Saint-Laurent).

Le Président (M. Sirros): Merci. Alors, on vous rappelle que nous avons jusqu'à 12 h 30, moment auquel on adoptera l'ensemble des crédits du ministère des Ressources naturelles, si c'est le voeu des membres.


Remarques préliminaires

Et, avec ça, je pourrais donner la parole à la ministre.


Mme Denise Carrier-Perreault

Mme Carrier-Perreault: Oui. Je vous remercie, M. le Président. Alors, avant de faire mes remarques préliminaires, j'aimerais vous présenter les gens qui m'accompagnent pour l'étude des crédits. Il y a ici M. le sous-ministre associé au secteur mines, M. Duc Vu, Mme Cécile Saint-Pierre, du bureau du ministre, M. Pierre Thivierge, M. Yvon Laliberté, M. Louis-Gilles Picard, M. Réjean Boutet, et, bien sûr, les gens de mon cabinet, M. Christian Larivière et M. Alain Vézina.

Alors, M. le Président, comme vous le savez, le ministère des Ressources naturelles – et ça, je sais que vous êtes bien placé pour savoir tout ce que je vais vous dire, M. le Président – a la responsabilité de veiller à la mise en valeur des ressources minérales du Québec. Ce mandat comporte deux aspects tout aussi importants l'un que l'autre. D'un côté, le ministère appuie et favorise le développement d'une industrie minière innovatrice, concurrentielle et créatrice d'emplois, mais il a aussi la responsabilité d'encadrer certaines activités de l'industrie dans l'intérêt de la collectivité québécoise. Le défi est d'assurer un juste équilibre entre les deux éléments de notre mission.

Dans le but de moderniser notre régime minier, nous avons entrepris de modifier le régime de titres miniers en vigueur depuis une bonne centaine d'années. L'objectif que nous visons, c'est de doter le Québec d'un régime minier simple et efficace qui soit favorable au développement minier. La plus importante modification que nous proposons à la situation actuelle est le remplacement du jalonnement sur le terrain par le mode de désignation sur carte, ce qui aurait pour effet d'accroître la sécurité des titres et de réduire les coûts pour tout le monde. Nous proposons aussi l'instauration d'un seul titre d'exploration pour toutes les substances minérales du domaine public au lieu de cinq titres comme c'est le cas actuellement.

En fait, nous proposons divers changements visant à simplifier et à moderniser le régime minier. De tels changements sont de nature à favoriser l'exploration minière, une condition essentielle à la survie et au développement de l'industrie minière.

Le ministère a commencé, au cours de l'exercice 1996-1997, à travailler à l'élaboration de ce nouveau régime et à la préparation du projet de loi qui doit l'encadrer. Le projet de loi est actuellement à l'étude devant l'Assemblée nationale. Les propositions qu'il contient ont fait l'objet jusqu'à maintenant de plusieurs consultations auprès des entreprises et des organismes intéressés dont une commission parlementaire en mars dernier. Nous tenons à ce que ce projet de loi nous permette d'atteindre les objectifs que nous visons.

Tout au long des derniers mois, nous avons cherché à améliorer le service que nous offrons à la clientèle minière. C'est ainsi qu'après le Centre de recherche minérale du Québec l'an dernier la Direction de la géologie est devenue à son tour une unité autonome de services. Nous avons, par ailleurs, continué à accroître notre connaissance du potentiel minier du Québec et à rendre toujours plus accessibles les informations que nous recueillons. Par exemple, nous avons dépensé 7 800 000 $ pour réaliser 15 projets de levés géoscientifiques, notamment dans le Moyen et dans le Grand Nord. Ceci inclut un important levé géochimique des sédiments de fond, lacs, au nord du 55e parallèle qui a été réalisé en partenariat avec cinq compagnies minières. Les résultats de ce levé seront disponibles dès l'automne 1998.

(9 h 40)

Par ailleurs, les instituts universitaires de recherche ont participé à six projets géoscientifiques. Au total, tout près de 250 personnes ont travaillé durant l'été à la réalisation de levés et d'études diverses. Les résultats préliminaires des travaux d'exploration géologique ont été diffusés lors du séminaire d'information 1997 tenu à Québec à la fin de novembre. Quelque 900 personnes ont participé à ce séminaire dont plus de 300 représentants de l'industrie d'exploration.

Je voudrais également mentionner certaines actions que nous avons posées et que nous entendons poser pour rendre toujours mieux accessible toute l'information dont nous disposons sur la géologie du Québec et sur son potentiel minier. Non seulement avons-nous continué à travailler à alimenter le SIGEOM, mais nous avons entrepris d'y intégrer la base de données bibliographiques EXAMINE et nous avons aussi créé un site Web. De plus, nous avons réalisé un projet-pilote d'imagerie électronique pour faciliter l'accès aux documents et nous travaillons à rendre SIGEOM accessible à partir de l'interface Windows.

Ces efforts s'intègrent dans l'ensemble des efforts que nous consentons pour soutenir et pour stimuler l'exploration minière. Le Programme d'assistance à l'exploration minière du Québec a permis l'an dernier à quelque 200 prospecteurs de se partager une somme de 1 500 000 $ et de réaliser ainsi 203 projets d'exploration pendant qu'une somme d'égale importance permettait à 24 compagnies minières de réaliser 37 projets. Par ailleurs, 18 compagnies minières ont reçu dans le cadre du Programme d'exploration minière du Moyen-Nord 2 600 000 $ pour des projets situés au nord de la région de Chibougamau sur le territoire de la Baie-James ou sur la Basse-Côte-Nord.

Je tiens aussi à signaler que nous avons mis en place au cours du dernier exercice un programme de développement de l'entrepreneuriat minier autochtone dans les régions du Moyen et du Grand Nord, programme qui est doté d'un budget de 1 000 000 $. Une entente spécifique a déjà été conclue avec la communauté inuit et nous poursuivons nos discussions avec les Innuat et avec les Cris. Au cours du prochain exercice, nous entendons maintenir au même niveau notre engagement dans les activités géoscientifiques. Toutefois, une bonne partie du budget sera consacrée à la recherche géologique dans le Moyen Nord et le Grand Nord. Nous entendons réaliser quelque 30 projets de recherche géologique dont 14 projets de levés géologiques. Nous mettrons l'accent sur des territoires nouveaux pour tenir compte du fait que les entreprise d'exploration portent actuellement beaucoup plus d'intérêt à ces territoires peu explorés qui sont susceptibles de receler des gisements de classe mondiale.

Nous entendons aussi poursuivre nos efforts pour promouvoir l'exploration minière au Québec auprès des institutions financières et des grandes entreprises minières. Le ministère ne fait pas que se préoccuper d'exploration minière. Il assure en permanence un soutien à l'exploitation minière. Ce soutien peut prendre différentes formes. De l'aide financière a ainsi été octroyée à des entreprises dans le cadre de l'Entente auxiliaire Canada-Québec sur le développement minéral, entente qui a pris fin le 31 mars dernier et qui a permis de remettre 1 400 000 $ à une trentaine d'entreprises.

D'autres entreprises ont aussi reçu une aide financière dans le cadre des mesures pour le soutien de l'économie et la création d'emplois ou encore dans celui du Programme d'aide aux travaux de mise en valeur, introduit dans le budget de mars 1997. Dans le cadre de ces programmes, quelque 2 900 000 $ ont été accordés a huit entreprises.

Mais le soutien que le ministère apporte à l'industrie minière peut aussi prendre d'autres formes. C'est notamment le cas du soutien que nous apportons à l'industrie de l'amiante. Le ministère a élaboré un plan d'action en réponse à la décision du gouvernement français, en 1996, de bannir l'amiante. Ce plan a été mis en oeuvre au cours du dernier exercice. Ainsi, le ministère a dirigé des missions dans divers pays consommateurs d'amiante en Asie, en Amérique latine, notamment, afin de promouvoir la sécurité dans l'utilisation de l'amiante. Il a aussi participé à l'organisation de colloques scientifiques et de conférences sur le même sujet et confié à l'Institut de recherche en santé et sécurité au travail du Québec, l'IRSST, le mandat de collaborer avec des gouvernements étrangers pour la prévention des maladies pulmonaires liées à l'amiante.

Le ministère entend poursuivre ses efforts en 1998-1999. Nous voulons contribuer à ce que le public, au Québec comme en Europe, soit mieux informé sur l'importance de l'amiante et sur le fait qu'il est possible en prenant des précautions simples de l'utiliser de façon sécuritaire pour tout le monde. De plus, la récente recommandation du Conseil d'Europe visant à bannir l'amiante constitue une nouvelle illustration démontrant la justesse de la position du Québec et de ses partenaires, les syndicats, l'industrie et les communautés locales, à l'effet de porter la défense de l'amiante chrysotile devant l'OMC. Depuis février 1997, le gouvernement du Québec, appuyé par ses partenaires, a demandé à plusieurs reprises au gouvernement canadien d'intervenir auprès de l'OMC mais jusqu'à ce jour sans succès.

Dans un autre ordre d'idées, le ministère poursuit ses efforts de restauration des parcs à résidus miniers qui appartiennent à l'État québécois. En 1997-1998, il a consacré environ 2 000 000 $ à ces travaux, plus particulièrement dans les parcs East Sullivan, Wood Cadillac et Mines Madeleine. Les travaux non terminés se poursuivront au cours des prochains mois. Le ministère entend aussi s'occuper du parc Lorraine.

Le ministère est également présent dans le domaine de la recherche par le Centre de recherches minérales, le CRM. Le CRM travaille pour et avec les entreprises afin d'améliorer leur productivité, de réduire leur coût de production et d'améliorer leur performance environnementale. Il exerce ses activités sur une base contractuelle qui lui permet de recouvrer les frais des travaux exécutés pour sa clientèle.

Les crédits attribués au ministère en 1998-1999 pour la gestion et le développement des ressources minérales sont de 37 500 000 $ alors qu'ils étaient de 40 800 000 $ l'an dernier. Dans les faits, grâce à ses efforts de priorisation et de rationalisation, le ministère est en mesure de maintenir l'ensemble de ses programmes et activités destinés à la clientèle du secteur minier. Il maintiendra notamment ses activités de connaissance géoscientifique et ses programmes d'assistance tant pour l'exploration que pour le développement de l'industrie minière. Il cherchera aussi le plus possible à travailler en partenariat avec l'industrie.

Enfin, je crois important de rappeler que notre gouvernement a manifesté clairement son engagement à appuyer le développement de l'industrie minière. On a pu le constater l'an dernier lors du discours sur le budget, puisqu'il y a eu 21 000 000 $ alloués à ce moment-là au secteur minier pour de l'exploration suite au retrait du gouvernement fédéral. Et, encore une fois, cette année, nous avons pu constater lors du discours sur le budget que des crédits de 18 000 000 $ sur trois ans seront accordés au ministère pour soutenir des projets miniers. Alors, voilà, M. le Président, c'était l'essentiel des remarques que j'avais à faire. Je vous remercie.

Le Président (M. Sirros): Merci, Mme la ministre. M. le député, critique de l'opposition officielle.


M. Roger Lefebvre

M. Lefebvre: Merci, M. le Président. M. le Président, je voudrais saluer Mme la ministre, mes collègues ministériels et les collaborateurs et collaboratrices de Mme la ministre qui l'accompagnent pour cet exercice de ce matin qui va nous permettre de discuter de façon très large, quant à moi, de l'activité minière au Québec. Ça coïncide, M. le Président, avec la Semaine minière, qui se tiendra du 11 au 18 mai, donc à compter de mardi prochain, et le thème de la Semaine minière, cette année, c'est L'industrie minière, un moteur de développement durable . C'est vrai.

J'ai eu l'occasion, d'ailleurs, cette semaine de commenter devant la presse régionale l'activité minière. Je suis, vous le savez, un député qui vit dans une région minière. J'ai vécu les années prospères de l'industrie de l'amiante et c'était à cette époque, je parle des années 1975 à 1980, de 1970 à 1980 même, de très bonnes années de l'industrie de l'amiante. Mais les plus performantes, c'étaient 1979, 1980, 1981. Et le déclin a commencé plus ou moins en 1980 et 1981 et s'est accentué, et malheureusement ça se continue.

(9 h 50)

J'ai vécu effectivement la période d'or de l'industrie de l'amiante, et c'est une évidence que, lorsqu'une région a la chance d'avoir une industrie minière, si c'est le cas, prospère, ça a une répercussion absolument fantastique sur toute l'économie de la région. Le danger qui guette ces régions-là, M. le Président, c'est de faire de l'activité économique une activité économique monoindustrielle. C'est peut-être le piège dans lequel on est tombé au cours des 50 dernières années, mais on a réajusté le tir, chez nous, par la force des choses. On a développé, au cours des 12, 15 dernières années, un secteur manufacturier assez vigoureux, et plein de gens au Québec ne savent pas que les régions autant d'Asbestos que de Thetford Mines ne sont plus monoindustrielles.

Mais c'est encore vrai que l'industrie minière, je parle de l'industrie minière en général, particulièrement l'industrie de l'amiante, est encore le moteur économique de la région, chez nous à tout le moins. Même si c'est extrêmement fragile au moment où on se parle, il y a encore au-delà de 1 000 travailleurs dans le secteur primaire. J'en parlerai avec un petit peu plus de détails tout à l'heure avec Mme la ministre. On est extrêmement inquiets sur l'avenir de l'industrie, mais c'est encore, au moment où on se parle, important en termes de retombées économiques.

Et ce qu'on souhaite – je parle au nom de toute la population de chez nous autant que des citoyens de la grande région d'Asbestos – évidemment, c'est qu'il y ait un redressement. Ce n'est pas évident que ça va se produire à court terme, mais il y a une chose qui est certaine, c'est qu'il ne faut pas abandonner, il ne faut pas baisser les bras, pour une raison simple, M. le Président, Mme la ministre l'a dit tout à l'heure, c'est que l'amiante est une fibre naturelle irremplaçable, qui a subi des attaques de toutes sortes au cours des 20 dernières années, très injustifiées, et jamais techniquement, objectivement, rationnellement on n'a démontré que l'amiante était un produit dangereux et en tout temps dangereux. L'amiante mal utilisé, évidemment, c'est un produit qui peut être dangereux, mais utilisé – j'ai aimé l'expression de la ministre – avec des précautions minimales, c'est un produit irremplaçable.

Les produits de substitution, cependant, peuvent être, eux, extrêmement dangereux, les produits de fibre de verre, entre autres. La bataille pour sauver l'industrie, pour sauver l'amiante s'est déplacée, puis je considère, jusqu'à un certain point, que c'est une bonne stratégie, on est, dans certains cas, passé en offensive, on veut exiger la même évaluation serrée des produits de substitution que ce que l'amiante a subi comme tests au cours des dernières années.

J'ai l'intention de questionner la ministre sur d'autres sujets, M. le Président. Il y a eu, ça n'a pas levé beaucoup, mais j'ai vu le reportage à la télévision, la fréquence d'accidents dans le secteur minier. Évidemment, c'est la CSST qui suit de très, très près la fréquence de ces accidents, dans certains cas mortels, blessures graves souvent, blessures très, très graves. Et on pointait, M. le Président, la responsabilité autant de l'employeur que de l'employé: l'employé étant encore aujourd'hui, malheureusement, souvent imprudent, et l'employeur, pour toutes sortes de raisons, ne mettant pas en place toutes les mesures suggérées, dans certains cas imposées par la CSST.

Je voudrais également questionner la ministre sur le projet de loi, parce que c'est encore un projet de loi, ce n'est pas encore adopté, le projet de loi n° 182, sur le jalonnement, savoir où on en est. Lors de notre débat en commission parlementaire, en mars dernier, sauf erreur, je sais que ça s'est fait à tout le moins en partie, la ministre s'était engagée à continuer la discussion avec les opposants, avec ceux qui avaient des réserves, sans être en opposition totale, avec 182. Il y a eu, sauf erreur, formation comme prévue de groupes de travail, je veux savoir où on en est.


Discussion générale


Santé et sécurité du travail dans le secteur minier

Je vais tout de suite commencer avec la CSST, M. le Président. Est-ce que la ministre a pris connaissance de ce court reportage de la CSST? Et je pourrais poser la question de façon peut-être plus globale: Quelle est, au moment où on se parle... Et peut-être qu'elle pourra me citer des statistiques. Est-ce que la fréquence des accidents dans le secteur minier diminue, est en croissance? Des accidents mortels, est-ce qu'il y en a eu moins en 1997 qu'en 1996? Et qu'est-ce que la ministre pense de la préoccupation de la CSST de rappeler aux employeurs et de rappeler également aux employés qu'il y a des mesures de sécurité qui doivent être en tout temps respectées et utilisées, en rappelant justement à ces employés qu'il s'agit là évidemment de leur propre sécurité? Alors, je voudrais entendre la ministre sur ce volet-là de notre questionnement, M. le Président, dans un premier temps.

Mme Carrier-Perreault: Écoutez, moi, M. le Président, j'ai des chiffres ici, en fait des chiffres qui nous démontrent qu'il y a eu effectivement une certaine... Il a été une époque où il y avait beaucoup d'accidents dans le secteur minier, des accidents qui étaient dramatiques. Il y a eu une certaine amélioration. Moi, je peux vous donner quand même quelques chiffres. Les chiffres que je vais vous donner proviennent du rapport de l'Association paritaire en santé et sécurité du secteur minier. On se rend compte que les résultats qui ont été obtenus en 1997, en prévention des accidents, nous montrent une amélioration qui a été remarquable. Comme je vous le disais, il y a des fois des fluctuations.

Il y avait eu une nette amélioration qui se traduisait par une fréquence d'accidents qui était passée de 11,5 % à 9,9 %. En 1997, on compte 1 197 accidentés dans le secteur minier sur une population de 12 131 travailleurs. Donc, on peut voir qu'il y a une fréquence de 9,9 %. Cette fréquence-là était de 11,5 % en 1996, soit 1 381 accidentés sur 11 983 travailleurs. Sur les 1 197 travailleurs accidentés en 1997, il y en a 390 qui ont été indemnisés par la CSST – 3,2 % des travailleurs miniers comparé à 4,4 % en 1996 – alors que les 807 autres ont été assignés à des tâches temporaires, donc ça a été du replacement.

Quatre accidents mortels, cependant, qu'on peut déplorer, en 1997, et ça, ça veut dire qu'il y a eu deux accidents mortels de plus qu'en 1996, mais, quand même, huit de moins par rapport aux années précédentes. Donc, ces chiffres-là nous démontrent que ce n'est pas stable. On se rend compte qu'il y avait une nette amélioration et que, malheureusement, il y a eu des accidents mortels qui, effectivement, je pense, justifient que la CSST refasse des recommandations, refasse penser aux gens du secteur minier de prendre tous les moyens nécessaires pour travailler de façon sécuritaire. Je pense que c'est normal de faire des rappels comme ceux-là.

Par ailleurs, pour les derniers accidents, et tout ça, vous comprendrez que, nous, au ministère des Ressources naturelles, ce n'est pas nous qui faisons les enquêtes dans ce domaine-là. Comme le député de Frontenac le disait, c'est vraiment la CSST qui est responsable du secteur. Alors, nous ne pouvons faire autrement finalement que d'appuyer la CSST dans ses démarches pour qu'on évite ce genre d'accidents et des pertes de vie à toutes fins pratiques.

Mais je pense que de toute façon, dans le secteur minier, il y a eu une nette amélioration à cause de plusieurs efforts qui ont été apportés. Je pense que l'Association minière du Québec a fait aussi beaucoup d'efforts en ce sens-là. C'est un des objectifs que poursuit, justement, l'Association, que ce travail-là se fasse de bonne façon et de plus en plus sécuritairement.

M. Lefebvre: M. le Président, est-ce que la ministre pourrait me dire si, en cours d'année ou à la fin d'une année, lorsque la CSST fait le bilan du respect de ses recommandations – comme la ministre vient d'y faire référence – dans le milieu de l'activité minière, la CSST est en communication avec son ministère pour faire le point, pour faire des réajustements et également requérir des suggestions auprès des fonctionnaires de son ministère ou l'inverse, donner aux fonctionnaires du ministère et à la direction du ministère, y compris peut-être à l'entourage immédiat de Mme la ministre... Est-ce qu'il y a une collaboration étroite, régulière et systématique de la CSST avec le ministère?

Mme Carrier-Perreault: Oui, par le biais de l'Association paritaire – parce que les chiffres que je vous donnais tout à l'heure sont fournis par l'Association paritaire dans la santé et sécurité du secteur minier – par rapport aux échanges qui se produisent entre la CSST et le ministère, ces échanges-là se produisent de façon assez régulière, justement, par le biais de ce groupe-là, où les gens travaillent en collaboration.


Projet de loi n° 182

M. Lefebvre: M. le Président, je voudrais aborder avec Mme la ministre – j'y ai fait référence tout à l'heure – le projet de loi n° 182. Je veux savoir où on en est en faisant remarquer à la ministre qu'on a des échos du côté de l'opposition qu'il y a un questionnement. Remarquez bien que ça peut sembler paradoxal que l'opposition indique à la ministre qu'il y a une hâte à adopter, semble-t-il, du côté de la ministre, ce projet de loi n° 182 qui n'est pas, pour plusieurs, compris dans le milieu des prospecteurs.

(10 heures)

On se demande pour quelle raison – et j'imagine que la ministre est au courant de ce questionnement-là de certains intervenants – on semble vouloir précipiter les choses pour adopter 182? J'imagine que ce qu'on donne comme réponse, c'est qu'on veut s'ajuster à ce qui se fait ailleurs, en dehors du Québec. On veut moderniser le processus de jalonnement.

Mais ma première question: Est-ce que la ministre est informée qu'il y a un questionnement sur l'urgence qu'on semble démontrer à vouloir à tout prix adopter 182? Ce n'est pas nécessairement la position de l'opposition. Ce n'est pas nécessairement ce que, nous, on avance, M. le Président.

Mme Carrier-Perreault: D'abord, ça me fait...

M. Lefebvre: Moi, je n'ai aucune objection à ce qu'on adopte 182 dans les plus brefs délais, en autant que c'est bien fait, parce que c'est un projet de loi qui touche un activité professionnelle technique. Si le milieu est d'accord... Puis je leur ai dit – la ministre s'en souviendra – au moment où les groupes ont comparu devant nous, à chaque groupe, j'ai toujours conclu en disant: Indiquez-nous si vous êtes ou pas d'accord avec la volonté exprimée par le gouvernement dans ce projet de loi là, et l'opposition ne fera pas de problème à la ministre et à son gouvernement.

Alors, ma question à la ministre: Est-ce qu'elle est informée? Est-ce qu'on l'a questionnée sur l'attitude démontrée à date de vouloir à tout prix et rapidement, et pour certains trop vite, adopter 182?

Mme Carrier-Perreault: Écoutez, ça me fait un petit peu... M. le Président, vous comprendrez que ça m'étonne toujours un petit peu à chaque fois – parce que ce n'est pas la majorité des groupes qui peuvent évoquer cette urgence, entre guillemets – d'entendre ça parce que finalement ça fait quand même un certain temps. Ça fait au moins cinq ans que ces mesures-là sont demandées par une bonne partie des intervenants surtout de l'industrie minière, aussi. Et je dois vous dire que le ministère travaille depuis deux ans, il y a eu énormément de consultations, parce que, justement, on veut faire attention, on veut que les choses soient faites correctement. Tout en voyant le bien-fondé de ce changement-là, on veut s'assurer qu'on arrive avec un projet de loi qui n'a pas de problème, qui ne cause pas de problème non plus.

Donc, on essaie de le faire le mieux possible. Alors, quand on me dit qu'il y a urgence, je vais vous dire que ce n'est pas tout à fait l'image de l'urgence. En tout cas, on ne démontre pas nécessairement qu'il y a urgence dans ce projet de loi là, puisque les intervenants sont consultés depuis au moins deux ans sur ce projet de loi là. Il y a des échanges, il y a des discussions. On a fait une commission parlementaire élargie sur le projet de loi, sauf qu'à un moment donné je pense qu'il faut finir par procéder.

Après cinq ans de réflexion, deux ans de travaux, de consultations et d'échanges, bien, là, si vraiment on considère que le gouvernement est en train de passer un projet de loi à toute vapeur, je vous avouerai que j'ai de la misère avec cette argumentation-là.

Pour le reste, effectivement, M. le député s'en souviendra, même si lui avait des doutes à ce moment-là, il m'avait exprimé ses doutes, le comité de travail a été mis en place. Les gens travaillent sérieusement. Il y a eu évidemment une réflexion de leur part, des propositions. Il y a des rencontres qui ont été effectuées. Moi, les commentaires que j'ai, c'est que les travaux vont bon train, de ce côté-là.

Bien sûr, je vous dirai qu'il y a un groupe qui n'est pas satisfait. Je pense que ce n'est pas un secret. Il nous l'avait démontré très clairement lors de la commission parlementaire. Ce groupe-là, pour ne pas le nommer, c'est le groupe de l'Association des prospecteurs du Nord-Ouest québécois, qui était totalement contre le projet et qui est toujours, je pense, totalement contre le projet. Finalement, le groupe a assisté à la première rencontre effectivement parce qu'il a été invité à s'asseoir et à travailler avec les autres, mais malheureusement le groupe s'est retiré en cours de route, ne voulant pas participer à travailler sur l'amélioration du projet de loi, préférant conserver sa position de rester contre ce projet de loi là.

Alors, voilà, c'est à peu près là où on en est, et le projet de loi suit son cours. Je pense qu'il suit le processus normal et je pense qu'on y met tout le temps nécessaire pour vraiment en faire un projet de loi qui soit le plus équilibré, le plus correct possible pour l'ensemble du secteur minier.

Le Président (M. Sirros): Ça va. Alors, M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: Oui, juste pour une précision, M. le Président. J'ai pris la peine, avec beaucoup de prudence – bien de la prudence – pour ne pas qu'il y ait de confusion, j'ai pris la peine de dire à la ministre qu'on nous avait indiqué, du côté de l'opposition, qu'on ne comprenait pas l'urgence. Même si la ministre me dit qu'on en parle depuis cinq ans, ça, ça reste à voir. Ce n'est pas vrai, M. le Président, que depuis cinq ans... parlons de septembre 1994, qu'on s'est mis au travail en arrivant au gouvernement, à partir de septembre 1994. On parle d'une démarche qui aurait été enclenchée il y a plus ou moins deux ans.

J'ai pris la peine de dire à la ministre que ce n'était pas un questionnement surtout de l'opposition; l'opposition questionne certains volets du projet de loi n° 182. On sent du côté des intervenants concernés une espèce d'indifférence à 182, c'est ça qui me préoccupe. L'Association des prospecteurs du Québec, entre autres, ne l'écrira pas, mais nous indique qu'on est à peu près indifférent. Ça me surprend, M. le Président. Je ne dis pas que ces commentaires-là sont fondés. Je veux vérifier avec la ministre si elle est certaine que l'objectif visé par 182 a été bien saisi, a été bien compris, bien divulgué. Je n'ai pas l'impression que c'est le cas, M. le Président.

Dans un premier temps, c'est ça que je veux questionner avec la ministre. Après ça, évidemment, s'il y a d'autres collègues... mais je voudrais revenir sur des détails plus précis.

Le Président (M. Sirros): Mais, M. le député, je vous ferais remarquer que votre temps étant pas mal écoulé, il y a un député ministériel qui veut poser des questions également. Peut-être qu'à ce moment-ci on pourrait passer au député de Drummond, et, quand il aura terminé son temps ou liquidé ses questions, on pourra revenir pour que vous poursuiviez. M. le député de Drummond.

M. Jutras: Oui, merci, M. le Président. D'autant plus que les questions que je veux poser ont justement trait au projet de loi n° 182, qu'on a étudié ici, en commission parlementaire, à la commission de l'économie et du travail, il y a quelques semaines. Je me souviens de la formation de ce groupe de travail suite à la commission parlementaire comme telle. J'aimerais peut-être avoir plus de détails là-dessus, Mme la ministre.

Premièrement, vous parlez d'un groupe qui s'est retiré. Effectivement, on en a entendu parler, mais, en fait, le mandat de ce comité-là, quel est-il exactement? Je ne pense pas que ça soit, là encore, de tout réviser les dispositions de la loi. Je me rappelle qu'il avait été question de ce qu'on craignait, comme les acquisitions monopolistiques. Alors, je voudrais que vous nous disiez ce qu'il en est effectivement de ce mandat-là plus précisément et quand on peut s'attendre à voir l'aboutissement de ces travaux-là pour finalement en venir à l'étape finale du projet de loi.

Mme Carrier-Perreault: Alors, d'abord, M. le Président, je voudrais, avant de répondre au député de Drummond, rétablir quelques points des échanges de mon collègue de Frontenac. Quand on dit que le projet de loi... Je n'ai pas dit qu'il était en consultations depuis cinq ans. J'ai dit qu'il est demandé par des intervenants auprès des gens du ministère depuis au moins cinq ans. Ça, je pense que, même à ça, ça nous a été confirmé. Ça fait longtemps que c'est demandé par les différentes associations qui sont impliquées. Entre autres, l'AMQ et l'APQ le demandaient aussi.

Ce que j'ai dit, par ailleurs, c'est que ce projet de loi est en consultations depuis deux ans. Il y a eu des tournées régionales où les gens ont été rencontrés; le ministère s'est déplacé. Il y a eu une consultation sur le territoire pour justement faire en sorte que le plus de monde possible puisse s'exprimer sur ce dossier-là. Alors, je pense que, comme tournée, vous admettrez avec moi qu'on ne voit pas souvent, dans l'ensemble des projets de loi qu'on fait ici, des tournées aussi exhaustives, aussi importantes.

Alors, les gens ont été consultés. Il y a eu une tournée régionale, il y a eu un sondage que le ministère a effectué auprès des clientèles avec l'aide d'une firme spécialisée dans le domaine pour être sûr que c'était fait selon les règles. On a eu le dépôt du projet de loi. On l'a déposé en décembre. On est arrivé avec une proposition d'une commission parlementaire. On a invité les groupes à s'exprimer sur le projet de loi. Donc, écoutez, moi, je trouve que, s'il y a un projet de loi qui suit son cours, qui suit un cheminement qui devrait être suivi probablement dans les différents projets de loi qui ont des impacts aussi importants, c'est bien celui-là.

Alors, moi, dans ce sens-là, je vous dirai que ce n'est pas qu'il y a une urgence, sauf que, à un moment donné, après tout le temps et après la réflexion qu'on s'est donnés, je pense qu'on peut en arriver un jour ou l'autre à prendre des décisions. On ne veut bousculer personne. Comme je vous dis, il y a eu énormément de consultations, et je pense que le travail, de ce côté-là, a été fort bien fait.

(10 h 10)

Par rapport à votre question, M. le député de Drummond, vous me parliez du comité qui a été mis en place. Vous vous rappellerez que, lors des travaux, lors de la commission parlementaire, quand on a rencontré les groupes, la majorité des groupes était tout à fait en faveur, on s'en rappelle. Mais, là où il y avait des inquiétudes – et je pense que plusieurs les partageaient – c'était sur la façon de contrer l'acquisition monopolistique et la façon de contrer l'occupation abusive du territoire. Les propositions que nous avions dans le projet de loi semblaient être questionnées et disons qu'on avait chacun... Autrement dit, si tout le monde partageait l'inquiétude, l'ensemble ne partageait pas les solutions. Alors, c'est ce mandat-là. Le comité, on l'a mis en place pour que les gens réussissent à faire des consensus autour de mesures qui permettent de contrer ces deux difficultés et qui rejoignent le plus grand consensus possible. Alors, c'est ça, le mandat du comité.

M. Jutras: O.K. Et j'avais une autre question, aussi, c'était de savoir quand on peut s'attendre que les travaux de ce comité-là vont se terminer. Est-ce qu'ils ont, comme on dit, un «deadline», ou on attend?

Mme Carrier-Perreault: Normalement, nous, on espère pouvoir étudier le projet de loi article par article lors de cette session-ci. Oui, il y a un «deadline», dans le sens qu'on ne peut pas non plus recommencer à réfléchir pendant cinq ans, et je pense que ce n'est pas l'intention des gens qui travaillent sérieusement aux travaux du comité. On a quand même, je pense, très bientôt, très rapidement, même... parce que les dernières nouvelles que j'en ai eues, on commençait vraiment à voir le consensus, et tout ça.

Quand vous me dites que l'APQ ne m'écrira jamais, qu'ils ne sont pas d'accord ou qu'ils ne sont pas pressés, ou tout ça, moi, je suis assez étonnée de ce genre de commentaire. Parce que, encore hier soir, je rencontrais les gens. À Montréal, il y avait un immense congrès, il y avait trois congrès, finalement, en même temps – le Miga, le 100e anniversaire d'ICM et aussi la rencontre du CCMI. Donc, des intervenants miniers, il y en avait plusieurs qui étaient là, hier soir. J'ai pu échanger avec plusieurs d'entre eux, et ce n'est pas du tout le commentaire que j'ai des gens qui sont impliqués dans ce dossier-là. Alors, on me dit plutôt le contraire, que ça va bien et que normalement on devrait en arriver à finaliser les travaux pour faire en sorte qu'on adopte le projet de loi le plus rapidement possible.

Le Président (M. Sirros): Ça va, M. le député de Drummond?

M. Jutras: Oui.

Le Président (M. Sirros): M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: M. le Président, la ministre fait semblant de ne pas comprendre ce que je dis. Ce que j'ai dit, puis je vais le répéter pour une troisième fois, c'est que certains groupes – puis je ne parle pas de l'Association des prospecteurs du Nord-Ouest, je vais y arriver à ceux-là – indiquent qu'ils ne comprennent pas – ils ne disent pas être en désaccord avec l'objectif – pour l'essentiel, ils ne comprennent pas... Puis encore une fois ce n'est pas notre position, là, ça nous amène à questionner le processus, ça nous amène à questionner l'attitude du ministère, peut-être de la ministre, à l'égard des groupes, ça nous amène à nous demander si vraiment l'objectif a été bien saisi et bien compris. C'est ça qu'on dit, M. le Président.

Que certains groupes – et je me répète – disent: Pourquoi aller si vite? j'ai même dit, tout à l'heure, que ça peut sembler paradoxal que l'opposition dise au gouvernement: Vous allez trop vite, dans quelque chose d'aussi technique, mais il y a une logique là-dedans parce que, justement, c'est à ce point technique, ce sont les intervenants qui vont guider l'opposition, puis j'espère que ce sont également les groupes directement concernés qui vont guider la ministre – pas ses intérêts personnels, on est bien d'accord là-dessus, M. le Président. Ce n'est pas un projet de loi n° 182 dont on parle dans le métro de Montréal à matin, là, hein! Ça concerne des groupes très précis. Puis il semble, si la ministre dit: Il n'y a pas de problèmes puis l'opposition s'inquiète pour rien, que certains volets du projet de loi n'ont pas été bien saisis. Bah! C'est notre perception.

Le député de Drummond a questionné, entre autres, sur les acquisitions monopolistiques. Il y a autre chose, aussi, qui était questionné, au moment de la consultation: la responsabilité des propriétaires successifs. Il y a eu des rencontres. Sauf erreur, le groupe de travail formé suite à cette consultation-là aurait rencontré les intervenants, particulièrement ceux qui avaient des réserves, sauf erreur, à deux reprises – 17 avril et 1er mai. C'est exact, ça, Mme la ministre?

Mme Carrier-Perreault: Pardon? Excusez, M. le Président, j'ai...

M. Lefebvre: Il y aurait eu deux rencontres, une le 17 avril puis une dernière, toute récente, le 1er mai dernier.

(Consultation)

M. Lefebvre: Qu'est-ce que vous avez réglé à l'occasion de ces deux rencontres-là? Quels sont les éléments qui faisaient problème qui sont maintenant réglés? Quels sont les éléments du projet de loi n° 182 qui font encore problème? Je ne parle pas de M. Frigon. Lui, il est carrément contre tout le projet de loi. Mais, pour des groupes qui, pour plusieurs, étaient assez favorables à 182, mais qui voyaient certains éléments à être corrigés, qu'est-ce qui, au moment où on se parle, a été réglé et qu'est-ce qui fait encore problème?

Mme Carrier-Perreault: Écoutez, moi, je pense que, par rapport aux propos, M. le Président, du député, c'est clair que, lors de la commission parlementaire, le but de l'opération, c'était d'entendre les groupes puis d'avoir les commentaires des groupes en vue, évidemment, de pouvoir améliorer, encore une fois, le projet de loi.

Alors, c'est sûr que, même si le comité n'avait pas le mandat d'examiner tout l'ensemble des demandes qui avaient été faites, vous comprendrez qu'il y a eu des discussions même autour des autres irritants, je dirais, par rapport au projet de loi. Et, bien sûr, j'ai toujours dit, et je le disais lors de la commission parlementaire, que, pour moi, c'est un exercice sérieux, qu'on tiendrait compte des commentaires dans la mesure du possible, quand on peut vraiment justifier tout ça. Je pense qu'on a eu des commentaires fort intéressants.

Je ne déposerai pas les papillons du projet de loi, ce matin, M. le Président, là, on se comprend. Parce que, d'abord, on va attendre, en temps et lieu, lors de la commission, l'étude article par article, et tout ça. Mais, si le député de Frontenac veut savoir s'il y a eu des aménagements ou s'il y aura des corrections, c'est évident qu'il y aura des aménagements, qu'il y aura des corrections, et le but de l'opération étant, comme je le dis, de faire en sorte que ce soit le plus efficace possible, puis le plus facilitant possible pour l'ensemble du secteur minier. Mais ce matin je n'ai pas l'intention de déposer les papillons au projet de loi n° 182.

M. Lefebvre: Bien, non. Vous voudriez, Mme la ministre, puis vous ne pourriez même pas. On n'est pas ici pour ça, ce matin, là.

Mme Carrier-Perreault: C'est ça.

M. Lefebvre: On n'est pas ici pour 182. Il y avait beaucoup de questionnements sur les pouvoirs de la ministre. Entre autres, l'Association minière du Québec, INCO ltée, la position des groupes était à peu près unanime sur le point suivant: la loi donne déjà, avant les modifications apportées par 182, des pouvoirs discrétionnaires au ministre ou à la ministre peut-être trop gros, trop de pouvoirs discrétionnaires, et 182 en ajoute.

Est-ce que, M. le Président, on en a parlé à l'occasion de ces deux rencontres du 17 avril et du 1er mai, de ce point-là, précisément?

Mme Carrier-Perreault: Comme je vous le disais, même si le mandat du comité était quand même très précis, les gens en ont profité, bien sûr, pour échanger sur les différents éléments qui soulevaient des interrogations ou qui avaient amené des commentaires lors de la commission. Alors, c'est sûr qu'il y a eu des échanges et c'est tout à fait normal qu'il y en ait eu. On avait regroupé, à toutes fins pratiques, les intervenants les plus intéressés, l'ensemble des intervenants du secteur minier. Alors, c'est sûr que les travaux, bien sûr, de ce comité-là se poursuivent présentement. Mais ce que j'ai comme information, c'est que le comité a beaucoup avancé et les travaux vont bon train. D'ailleurs, les gens que je rencontre sont très satisfaits, comme je vous le disais tout à l'heure.

M. Lefebvre: La ministre prend de l'expérience, M. le Président. Je pose une question précise, puis je n'essaie pas de savoir s'il y a eu deux rencontres; je le sais.

Mme Carrier-Perreault: Oui, mais j'ai...

M. Lefebvre: Je n'essaie pas de savoir si on a parlé de toutes sortes de choses, je le sais. Je veux vérifier avec la ministre si on a parlé du point très précis, soulevé par plusieurs groupes, à l'effet que le pouvoir discrétionnaire de la ministre était trop considérable. C'est ça, ma question. Est-ce qu'on en a parlé, de ce point-là précis? Vous pouvez vérifier avec vos collaborateurs. Est-ce qu'on l'a réglé? Moi, j'ai dit aux groupes que ce qui allait guider l'attitude de l'opposition, c'était justement ces travaux effectués avec le comité formé par la ministre. Si on débloque les irritants, 182 va être adopté, j'imagine, assez rapidement. Alors, le pouvoir discrétionnaire de la ministre, est-ce qu'on en a parlé? Est-ce qu'on en parle? Puis est-ce qu'on va le régler?

(10 h 20)

Mme Carrier-Perreault: M. le Président, je vous ai dit tout à l'heure qu'on en a parlé, puis j'ai dit au député de Frontenac – je pense que c'est la troisième fois – que bien sûr que les gens ont discuté de l'ensemble des irritants du projet de loi. C'est sûr qu'ils en ont parlé.

Mais, par ailleurs, ce que je dis au député aussi, c'est qu'on n'est pas ici pour discuter du projet de loi n° 182, ce matin. Et, comme je le disais tantôt, je n'ai pas les amendements, d'une part, et je n'ai pas l'intention d'aller plus loin tant et aussi longtemps que les discussions se poursuivent avec le comité. Et il y a des propositions, d'ailleurs, pour tenir compte de beaucoup de points qui font des irritants, même par rapport à l'autre association. Bref, il y a beaucoup de choses intéressantes qui se passent au niveau du comité. Si vous voulez des détails un petit peu plus précis, un petit peu plus techniques par rapport aux gens qui travaillent au comité, qui assistent aux rencontres, je pourrais demander à M. Vu de vous donner certaines précisions, mais jusqu'à un certain point, comme je vous le dis, M. le Président, les travaux ne sont pas terminés.

M. Lefebvre: Ils ne sont pas complétés, vous dites?

Mme Carrier-Perreault: Non, les gens continuent de travailler sur le dossier.

Le Président (M. Sirros): Est-ce que ça va, M. le député?

M. Lefebvre: Bien, j'aimerais entendre monsieur. Il a des choses à nous dire et puis ça m'intéresse.

Le Président (M. Sirros): Alors, vous pouvez d'abord peut-être vous identifier juste pour le Journal des débats , avec le titre, même si la plupart vous connaissent.

M. Vu (Duc): Alors, c'est Duc Vu, du secteur des mines. Alors, effectivement, il y a eu, je pense que c'est trois rencontres jusqu'à maintenant. Des rencontres qui durent une journée, jusqu'à une journée, et qui pouvaient même... je pense que la dernière réunion s'est prolongée jusqu'au lendemain.

Les gens participent de façon très active aux travaux. Tous les représentants de l'industrie qui étaient concernés par les recommandations au cours de la commission parlementaire, principalement l'APQ, l'Association des géologues et des géophysiciens, de même que l'Association minière, étaient présents. Nous avions même des entreprises qui étaient venues aussi assister à ces discussions-là. Et les questions que vous soulevez, notamment concernant le pouvoir discrétionnaire, ont été abordées. Maintenant, présentement, il y a de part et d'autre des échanges. Nous n'avons pas encore tout à fait terminé ces discussions-là.

Évidemment, ces discussions-là vont amener des ajustements éventuels dans certains cas, et, auquel cas, présentement, alors, on n'est pas rendu à cette étape-là encore.

M. Lefebvre: L'Association des prospecteurs du Québec nous a indiqué lors de la consultation du 17 mars 1998 qu'ils étaient, à moins qu'il y ait des changements, entre autres justement sur les pouvoirs monopolistiques, les pouvoirs discrétionnaires de la ministre, particulièrement ces deux éléments-là, à moins qu'il y ait des changements... Maintenant, ça n'empêchera pas le gouvernement d'adopter le projet de loi si on veut le faire. Ils allaient continuer à s'opposer.

Est-ce que l'Association... Puis là je ne veux pas que la ministre pense que j'essaie d'interpréter puis pour l'embêter. J'essaie d'être le plus précis possible tout en étant extrêmement prudent. Je ne veux pas faire parler l'Association des prospecteurs. J'ai noté en résumé ce qu'ils nous avaient dit en mars et les raisons pour lesquelles ils avaient... les points sur lesquels ils avaient des réserves. Et les représentants de l'Association, la ministre vérifiera ses notes, lors de cette consultation de mars, 17 mars, nous avaient indiqué qu'ils souhaitaient et qu'ils exigeaient, entre guillemets, des changements pour donner leur appui au projet de loi n° 182.

Est-ce que l'Association des prospecteurs du Québec, la ministre y a fait référence tout à l'heure... Est-ce que la ministre et ses conseillers peuvent nous confirmer que l'Association des prospecteurs est rassurée?

Mme Carrier-Perreault: Bien, écoutez, moi, comme je vous disais, j'ai rencontré encore hier... Pas plus tard qu'hier soir, je discutais, j'échangeais avec le président de l'Association des prospecteurs qui me disait qu'il était très satisfait du déroulement des travaux et que ça allait bien et qu'il était très enthousiaste. Donc, je n'ai pas de raison de croire que l'Association des prospecteurs a des difficultés présentement.

Et, moi, je voudrais quand même préciser, M. le Président, écoutez, que ce n'est pas le projet de loi du ministère, ce n'est pas le projet de loi de la ministre. C'est un projet de loi pour faciliter les choses au niveau du secteur minier. C'est évident qu'on essaie le plus possible de travailler avec les intervenants du milieu. C'est évident qu'on essaie de voir... Comme je parlais tout à l'heure tantôt, dans mon intervention, il faut quand même garantir un équilibre. Il y a des préoccupations gouvernementales par rapport à l'ensemble de la collectivité, puis il y a des préoccupations du côté de l'industrie. Donc il faut garantir un équilibre. Là-dessus, je pense qu'on est capable d'échanger, de discuter, et le but de l'opération, c'est de faire en sorte qu'on apporte vraiment une amélioration, qu'on est aidant et qu'on est facilitant.

Écoutez. C'est bien évident à ce moment-là qu'il faut tenir compte des inquiétudes. Il faut aussi pouvoir faire en sorte que les gens soient conscients aussi de l'équilibre qu'on doit maintenir, des exigences que l'on a de maintenir cet équilibre-là entre ce qui se passe au niveau de la collectivité, maintenir les... – je perds mes mots ce matin. Je pense qu'il faut échanger, il faut continuer de se parler. C'est ce qu'on fait. Et, moi, j'ai tout lieu de croire que ces discussions-là vont bon train, puisque c'est ce qu'on me dit. Et, quand je rencontre les intervenants qui sont assis à la table, ils me disent la même chose. Alors, voilà, M. le Président.

M. Lefebvre: M. le Président, la ministre semble irritée que je lui parle de la loi n° 182 et, tout à l'heure, elle m'indiquait aussi que le but de l'exercice, ce matin, n'est pas la loi n° 182. Le but de l'exercice ce matin, c'est de parler de tout ce qui touche l'activité minière, M. le Président, en autant qu'on reste dans la pertinence. Évidemment, on n'est pas dans la loi n° 182, je suis bien conscient de ça.

Maintenant, c'est un projet de loi qui n'est pas si simple que la ministre semble le croire ou vouloir nous l'indiquer. On a parlé de deux ans de consultations, on a parlé d'une tournée à la grandeur du Québec, on a parlé de sondages, de commissions parlementaires où on a consulté des groupes, obligation de former des groupes de travail. Il y a quelque chose qui est plus complexe qu'on semble vouloir le croire ou tenter de nous le faire croire, entre guillemets, en toute bonne foi. Et je n'en fais pas reproche à la ministre. C'est assez exceptionnel, toute cette démarche pour arriver à éclairer les groupes directement concernés. Et il y a encore une résistance absolument farouche et même agressive de l'Association des prospecteurs du Nord-Ouest québécois.

Ma dernière question sur ce volet-là, M. le Président, c'est: Comment expliquer, justement, l'attitude de l'Association des prospecteurs du Nord-Ouest? Et, encore une fois, M. le Président, je cite ce que j'ai sous les yeux qui parle de tripotage, qui parle presque de favoritisme. C'est dans La Presse du 4 mai dernier. C'est tout récent. «Un système de jalonnement sur quatre profite à certains privilégiés.» Ce sont des propos qui ont été exprimés par Me Frigon le 17 mars et repris tout récemment, le 4 mai, après, justement – et c'est ça qui m'inquiète – que des groupes de travail ont été formés pour rassurer tous ceux qui sont concernés par ce projet de loi, y compris les prospecteurs du Nord-Ouest québécois. Je voudrais que la ministre, M. le Président, me rassure, me dise: M. Frigon est dans l'erreur pour telle, telle ou telle raison, et après ça on va passer à autre chose.

Mme Carrier-Perreault: M. le Président, je veux juste expliquer que ce n'est pas que ça m'irrite de parler du projet de loi n° 182. C'est que j'aimerais quand même que le député tienne compte des réponses que je lui donne. Je pense qu'on donne des réponses. On essaie d'en donner aux clientèles. On essaie d'aménager. Je pense que c'est un souci, au fond, d'avoir un projet de loi qui soit facilitant et qui soit bien fait. Je pense que c'est bien d'avoir ce souci-là. Et je vais vous dire que je suis assez étonnée de me faire dire que ça a l'air tellement compliqué qu'on travaille depuis deux ans, qu'on travaille encore et qu'on met un comité. Je pense que ça démontre plutôt une bonne volonté de travailler en collaboration avec les intervenants. C'est nos partenaires aussi. Et il faut faire en sorte que ce projet de loi sorte le plus correctement possible.


Acquisition de propriétés minières dans le Grand Nord

Quant aux allégations auxquelles le député fait référence, il dit que Me Frigon parle de tripotage, etc., je pense que vous faites référence à l'article qui est sorti dans le journal La Presse , si ma mémoire est fidèle, sous la plume de M. Girard. Je vous ferais remarquer tout simplement que le M. Frigon en question, quand il parlait de tripotage, ne faisait pas référence nécessairement à la loi n° 182. Il faisait référence à un autre dossier. On parle du levé géochimique qui a eu lieu sur 350 000 km² dans le Nord, etc. Il parle de la procédure.

(10 h 30)

Je pourrais en parler. C'est évident que Me Frigon et les gens de l'APNOQ, M. Saint-Pierre, qui sont venus témoigner à la commission nous ont clairement exprimé leur refus total de changer. En fait, sur le principe, ils ne sont pas d'accord avec le principe. On parle de jalonneurs, bien sûr, de prospecteurs. On sait les effets que le projet de loi aura s'il est adopté avec les aménagements, bien sûr, qui sont nécessaires. Évidemment, dans un temps indéterminé, parce qu'il y aura une période de transition, on s'en va vers la désignation sur cartes. Donc, oui à la prospection, pas... Puis ça sera terminé pour le jalonnement.

Alors, c'est bien évident que des gens qui sont des jalonneurs, les gens vont défendre cette façon de procéder de toutes leurs forces, je présume. Mais ce qu'il faut doser aussi, c'est: Est-ce qu'il faut ne plus évoluer ou essayer de stagner? Parce que, en quelque part, il y a eu du progrès. On a des moyens maintenant qui nous permettent de faire cette désignation sur cartes puis de sécuriser les titres aussi.

Alors, je comprends que les jalonneurs veulent se battre jusqu'à la dernière limite de leurs forces pour contrer le projet de loi. Ce que j'essaie de leur dire puis ce que j'essaie d'expliquer aux intervenants de ce milieu-là, c'est que, nous, ce que nous voulons, au fond, c'est qu'il y ait plus de travaux de prospection, qu'il y ait plus de recherche qui se fasse et qu'on passe à autre chose pour ce qui est de réserver les claims. Plutôt que d'aller poser des piquets sur le territoire, peut-être qu'il y a d'autres moyens aujourd'hui. On le sait, ça existe. On le fait même au Québec. Mais ça n'empêche pas la prospection.

Donc, je comprends très bien pourquoi ils sont contre. Je comprends leur position, mais, pour ce qui est de ce à quoi le député faisait référence, concernant le tripotage, je continue de mentionner que dans l'article il semble très clair qu'on s'adressait à un autre dossier.

M. Lefebvre: M. le Président, le texte que j'ai sous les yeux ici fait référence à ce qui a pu se passer – ça, c'est l'interprétation de Me Frigon – aux conséquences du jalonnement sur cartes qui existe déjà sur une partie de territoire du Québec. C'est ça qu'il dit, là. Il met en garde le gouvernement puis la ministre puis le ministre des Ressources naturelles, le député de Joliette. Alors, c'est carrément l'acquisition par jalonnement sur cartes à laquelle fait référence Me Frigon.

Puis je vais donner lecture d'une partie du texte que j'ai sous les yeux. Je me répète, M. le Président, c'est La Presse du lundi 4 mai: «Son président, M. Frigon, vient d'alerter les bonzes de l'Assemblée nationale contre les conséquences présumément négatives de l'acquisition de claims miniers par le jalonnement sur cartes[...]. "Le système de jalonnement sur cartes profite à certains privilégiés."» C'est ce qu'a dit Me Frigon.

«Rappelons – c'est lui-même qui parle toujours – que cinq compagnies [...] ont pu mettre la main, par jalonnement sur cartes, sur un grand nombre de propriétés minières du Grand Nord. Elles ont acquis ce "droit" après avoir défrayé une partie des coûts du gigantesque levé géochimique que le ministère des Richesses naturelles a effectué dans ce vaste territoire québécois.»

Dernier paragraphe: «Tout ceci s'est fait par jalonnement sur cartes si bien que "ces privilégiés" – c'est Frigon qui parle – se sont appropriés la crème du territoire visé par le relevé (du ministère), sans que personne ne puisse nuire à leurs acquisitions monopolistiques.»

On voudra bien, M. le Président, dire de Me Frigon qu'il est explosif puis qu'il utilise un langage non parlementaire, mais il fait référence à des faits très précis de situations passées. Il dénonce des acquisitions qu'il dit, lui, être privilégiées à l'occasion du processus de jalonnement sur cartes. C'est ça qu'a dit Me Frigon, M. le Président. Ce n'est pas le député de Frontenac qui avance ça.

Alors, au-delà du fait qu'on soit agacé par la position de l'Association des prospecteurs du Nord-Ouest québécois, il y a des faits soulevés par Me Frigon qui doivent être expliqués, puis je voudrais entendre la ministre là-dessus. À moins... Qui doivent être... Elle peut décider de ne pas me répondre, M. le Président, en prétextant que Me Frigon dit des balivernes. Moi, je suis obligé, j'ai la responsabilité de rappeler ces dénonciations qui sont faites par quelqu'un, quand même, qui n'est pas un novice dans le métier, c'est l'Association des prospecteurs du Nord-Ouest québécois. Puis je me souviens très bien d'avoir entendu Me Frigon en commission de consultations, le 17 mars. Il était accompagné d'associés qui semblaient savoir de quoi ils parlaient, un petit peu.

Le Président (M. Sirros): Mme la ministre.

Mme Carrier-Perreault: C'est parce que, dans l'article, ce que dénonce monsieur... Il dénonce à peu près... Il dénonce deux choses, finalement. Il dénonce la procédure qui a été utilisée par le ministère, qui n'a rien à voir, en soi, avec le jalonnement sur cartes. Ça, c'est une chose, c'est très clair. M. Frigon dénonce cette procédure-là parce que, en fait, il dit qu'il y a cinq privilégiés qui ont pu en bénéficier.

Là, je vais vous dire une chose, c'est qu'il y a eu quand même une procédure rigoureuse qui a été appliquée. Il n'y a pas cinq compagnies qui ont été invitées à participer financièrement, là. Il y a eu des annonces de faites, il y a eu des invitations qui ont été lancées, tous ceux qui pouvaient participer financièrement et aider à aller chercher le plus d'indices possible sur un territoire de 350 000 km² auraient pu participer à ce levé. Évidemment, ça donnait des privilèges, c'était reconnu, c'était clair. Les gens qui participaient financièrement avaient le privilège d'obtenir les renseignements en premier. Alors, si c'est ce que M. Frigon... M. Frigon dénonce ce système-là, et ça, ce n'est pas à cause du jalonnement sur cartes. C'est la procédure, qu'il dénonce.

M. Lefebvre: Bien, ce n'est pas ce qu'il dit, lui. Je m'excuse, là, ce n'est pas ce qu'il dit. Il associe ça précisément au jalonnement sur cartes. Il peut avoir tort, M. le Président, je ne prétends pas qu'il a... Ce n'est pas à moi à arbitrer ça. Je rappelle à la ministre les prétentions de Me Frigon, que ces privilèges supposément accordés à cinq entreprises, à cinq compagnies minières, seraient la conséquence du jalonnement sur cartes. C'est ce qu'il dit.

Mme Carrier-Perreault: Moi, je peux vous dire que... Je vais expliquer, aussi, en même temps, parce qu'on fait référence à cet article-là, je pense qu'il y a des explications à donner. On ne peut pas dire non plus n'importe quoi, hein. Quand on dit qu'il y a des gens qui sont privilégiés, on laisse entendre que le ministère est allé chercher, comme ça, quelques copains pour... Je trouve ça gros, quand même. Je pense qu'il y a des choses à mentionner, il faut rectifier.

Moi, je peux vous dire que ç'a été fait par invitation publique, par l'envoi d'un communiqué de presse diffusé en français et en anglais. Les avis publics ont été publiés dans des médias écrits. Le projet a été inscrit dans le système électronique d'appel d'offres en fonction à travers le Canada. Donc, ça n'a pas été un secret, ça n'a pas été organisé pour quelques entreprises; ç'a été diffusé, il y a eu des avis publics. Les avis publics ont été publiés dans Le Devoir – je vais vous donner les... – The Northern Miner et Les Échos Abitibiens parce qu'on sait qu'il y a un intérêt pour le secteur minier majeur dans cette région-là du Québec. Alors, c'est un appel qui a été publié en annonce dans différents médias. Donc, les entreprises, l'ensemble, qui sont intéressées par le secteur minier pouvaient, à toutes fins pratiques, participer.

Alors, tant dans la vie publique que dans le communiqué de presse, le ministère à ce moment-là précisait qu'il était à la recherche de partenaires pour la réalisation de ce vaste levé géochimique de sédiments de lacs. Le ministère indiquait aussi, dans les avis publics, que les entreprises qui participeraient au projet pourraient bénéficier d'une période de confidentialité sur les données qui allaient être recueillies par rapport à ce levé-là. Les entreprises qui étaient intéressées étaient invitées à une rencontre d'information, et, à cette rencontre d'information là, il y en a huit, entreprises, qui ont participé.

Alors, au terme de ce tout ce processus, qui a été mis en place pour aviser qu'on avait l'intention de faire ce levé, de les inviter à y participer, il y a cinq entreprises qui ont accepté de contribuer financièrement à la réalisation du projet. Donc, c'est pour ça que les cinq entreprises sont là et c'est comme ça que les cinq entreprises ont participé à la réalisation de ce projet-là. Donc, ce n'est pas du tripotage, comme on peut essayer de le faire croire. C'est très clair que ça s'est passé de façon très transparente, qu'il y a eu des appels à tous et qu'il était possible pour chacun d'y participer.

Et je pense qu'à partir du moment où les entreprises participent volontairement, mettent des sous dans un levé comme celui-là, je pense que c'est tout à fait normal. Et, comme ils étaient tous informés que ça arriverait, ils ont été informés des résultats avant les autres. Le reste des résultats va être connu pour l'ensemble, comme je le disais tout à l'heure, à l'automne 1998.

Alors, moi, je peux vous dire que, quand on parle de tripotage puis qu'on fait référence à un processus comme celui-là, je vous avouerai que ça me laisse assez amère.

(10 h 40)

Le Président (M. Sirros): Ça va, M. le député? Oui, M. le député de Johnson.


Défense et promotion de l'amiante

M. Boucher: Alors, Merci, M. le Président. J'aimerais, Mme la ministre, vous parler d'un dossier qui est important dans la région de l'Estrie et dans d'autres régions du Québec – notamment celle du critique de l'opposition officielle: l'amiante.

Vous avez rencontré, d'ailleurs, plus tôt cette semaine, le secrétaire d'État français à la santé, M. Bernard Kouchner, dans le cadre du dossier de l'amiante. Voulez-vous nous expliquer qu'est-ce qui est ressorti de ces discussions? Avec les informations que vous possédez, croyez-vous que le gouvernement fédéral, dont c'est la responsabilité, ira finalement à l'OMC, l'Organisation mondiale du commerce?

Enfin, le gouvernement du Québec a multiplié les démarches, je sais, à l'extérieur du Québec comme au Québec, pour faire la promotion de l'amiante ou sécuriser la population du Québec par rapport à l'amiante. J'aimerais que vous nous parliez de ça. Il y a certainement des dépenses qui ont été occasionnées par ces voyages, par ces rencontres de toutes sortes, et je pense que c'est important que vous nous disiez qu'est-ce que vous faites pour l'amiante au Québec, ce que vous faites pour la promotion de l'amiante. Notamment, vous connaissez les difficultés de la mine JM Asbestos actuellement, j'aimerais que vous en parliez aussi. Je sais que ma question est très vaste, mais elle est très importante.

Mme Carrier-Perreault: Oui, M. le Président. Là, j'essaie juste de trouver par où je commence. Cette semaine, effectivement, on a rencontré, on a eu la visite de M. Kouchner, le ministre, en fait, le secrétaire d'État à la santé. M. Got était venu. Il avait envoyé son émissaire, à toutes fins pratiques, parce que le professeur Got était de passage il y a quelques semaines ici pour faire une analyse par rapport à certains points précis. Il voulait avoir une bonne idée pour faire un rapport, finalement, à M. Kouchner.

Alors, dimanche dernier, à Montréal, j'ai eu l'occasion aussi de rencontrer mon homologue fédéral, M. Goodale. On a échangé justement sur la toute récente décision, la dernière recommandation plutôt – je devrais plutôt m'exprimer de cette façon-là parce que le Conseil de l'Europe n'a pas de pouvoir décisionnel mais un pouvoir de recommandation – du Conseil de l'Europe et sur, encore une fois, le coût qu'on pouvait donner sur la perception de l'amiante, sur le public en fait. Chaque fois qu'il y a des décisions dans ce sens-là qui sont prises, c'est évident que le public perçoit de plus en plus mal le produit. Alors, ça contribue finalement à salir la réputation du produit davantage.

Alors, on a échangé un peu là-dessus, et M. Goodale rencontrait lui aussi M. Kouchner. Il le rencontrait mardi; moi, je le rencontrais... C'est le contraire, M. Goodale le rencontrait lundi, et, moi, je le rencontrais mardi. Et on s'est entendu à l'effet qu'on ferait le point sur le suivi, sur la suite de perception, chacun de notre côté, sur cette rencontre-là.

Sauf qu'on a vu aussi les propos de M. Kouchner. Je vous dirais que ça allait un peu dans le sens où je croyais que ça irait. En fait, je pense que je n'avais pas tellement d'attentes, c'est ce que je disais à M. Goodale, je n'avais pas nécessairement une attente très grande de cette rencontre avec M. Kouchner. Et je pense, des propos de M. Kouchner eux-mêmes, qui ont été repris dans les médias – on a vu d'ailleurs une entrevue de M. Kouchner à la station RDI – que, très clairement, il n'y a pas nécessairement de volonté de retour ou de recul sur la décision française, ça a été très clair. En tout cas, à mon avis, ça a été très clair.

Il nous explique qu'il veut peut-être continuer les discussions sur les produits de substitution. Ça, bref, on en convient, je pense qu'on n'a pas le choix. Les produits de substitution, on le sait, n'ont pas la même durée de vie, ça ne fait pas aussi longtemps qu'on utilise les produits de substitution. On utilise l'amiante depuis beaucoup plus longtemps, donc la réputation et toutes les études qui avaient à être faites sur l'amiante ont été faites alors que, pour ce qui est des produits de substitution, c'est un petit peu plus compliqué parce qu'on ne peut pas avoir d'études très longues qui peuvent découler de ça.

Donc, pour ce qui est des propos avec M. Kouchner, je pense que c'est clair, la France n'a pas l'intention de revenir sur sa décision. Il veut bien continuer de discuter, effectivement. Et, dans ce sens-là, moi, comme on l'a déjà demandé, je pense que la solution, si on veut arrêter cette hémorragie du côté de l'Europe, je pense que c'est le dépôt de la plainte à l'OMC. Je pense que tout le monde au Québec s'est prononcé en faveur du dépôt de cette plainte-là. D'ailleurs, je dois dire que le député de Frontenac comme le député de Richmond, les députés aussi de l'opposition ont fait la même demande. Je recevais encore cette semaine la copie de la correspondance que le député de Frontenac avait envoyée au fédéral. Alors, on essaie. Je pense que, pour la plupart, on est convaincu qu'il faut qu'il se passe quelque chose pour qu'il y ait une décision qui se prenne de façon rigoureuse.

L'OMC, finalement, serait obligée de faire une analyse de ce dossier-là et serait obligée de s'appuyer sur des analyses d'experts, contrairement au Conseil de l'Europe, finalement, qui est parti du rapport de M. Cox pour en arriver à la recommandation que l'on connaît. On sait qu'à la DG 24 encore récemment il y a eu une analyse qui a été faite par des experts de la DG 24 au niveau de la Commission européenne qui allait dans le même sens en disant que les fibres de substitution n'avaient pas fait non plus, encore, la preuve de leur innocuité.

Donc, la seule façon de vraiment passer à travers ce dossier-là par rapport à l'Europe, c'est qu'il y ait une décision qui se prenne de façon rigoureuse, qui s'appuie sur des experts puis des rapports scientifiques vraiment très bien étoffés, parce que, tant et aussi longtemps qu'on laisse circuler et qu'on panique, finalement, à toutes fins pratiques, il y a beaucoup de démagogie, en fait, qui peut se faire autour de ça.

Alors, pour ce qui est des actions que nous poursuivons, bien, vous comprendrez qu'il y a beaucoup d'échanges qui se font encore avec les pays de l'Afrique du Nord, par exemple. Récemment, j'étais en mission évidemment avec les prospecteurs. C'était une mission plutôt commerciale, mais on est allé rencontrer les gens aussi. On a profité de cette mission-là pour aller signer une entente dans le domaine minier avec le Maroc et en même temps discuter, rencontrer les nouveaux ministres responsables de ce dossier-là au Maroc pour faire avancer les choses au niveau d'une entente possible sur le dossier amiante.

Comme je le disais aussi, on a l'IRSST qui a une formation sur les pneumoconioses et qui est prête à aller donner cette formation-là aux endroits où on adoptera des normes qui ressemblent, bien sûr, aux nôtres et où on prendra la décision de poursuivre avec l'utilisation sécuritaire de l'amiante. Bref, on continue les démarches auprès des différents pays pour les encourager à poursuivre dans ce sens-là.

Il faut comprendre que nous essayons de passer le message dans l'ensemble des pays qui sont utilisateurs d'amiante. Comme gouvernement, on n'est pas les vendeurs d'amiante, on ne vend pas d'amiante. Nous, nous vendons une façon de faire. On fait la promotion de l'utilisation sécuritaire d'un produit, bien sûr, qu'on a chez nous. Alors, c'est pour ça qu'on a quand même des résultats intéressants.

L'an dernier, on était allé au Viêt-nam et en Malaisie. On avait rencontré les différentes autorités. Les gens du Viêt-nam étaient venus ici, on était allé au Viêt-nam et les gens se posaient des questions. Il y avait même un projet de bannissement ou d'une réglementation fort sévère qui avait à peu près le même effet que le bannissement. Et, suite à leur visite, à nos échanges, même si le Québec, comme tel, on ne vend pas nécessairement, au moment où on se parle, d'amiante au Viêt-nam, il n'en reste pas moins que le fait qu'on ait pu échanger et qu'ils aient pu venir constater ici la façon dont on travaille avec ça, on a eu une réponse – il n'y a pas longtemps, assez récemment – du gouvernement vietnamien, du ministre vietnamien à l'effet qu'il s'alignait, justement, sur la même façon de faire que chez nous, qu'il décidait de continuer d'utiliser l'amiante et de l'utiliser de façon sécuritaire.

Bref, dans les pays où il n'y a pas eu de décision, il faut continuer à prêcher la bonne parole, à prêcher la bonne nouvelle, à expliquer les choses et à contrer toute cette démagogie qui peut être diffusée par des groupes antiamiante ou encore qui peut se créer suite à des décisions comme il y en a eu en France et dans d'autres pays européens.

Est-ce que vous voulez des précisions? Parce que là je ne sais plus au juste...

(10 h 50)

M. Boucher: ...

Mme Carrier-Perreault: Je pense que c'est au niveau de l'argent, oui, c'est vrai, excusez.

Alors, à ce jour, pour le dossier, pour le plan d'action amiante, au total, on a pour 1 002 000 $ de dépensés sur les plans d'action et les échanges au niveau de l'amiante. Je peux vous donner quand même certains détails.

Le colloque scientifique Amiante chrysotile, effets sur la santé, qui a eu lieu à Montréal, en septembre 1997 – ça, c'est pour l'année 1997 – alors, on parle de 130 000 $. Le contrat qui a été donné à l'IRSST, en vue de faire de la coopération internationale, prévention des maladies pulmonaires, les pneumoconioses, dont je vous parlais, a coûté 374 000 $. Les missions spécifiques pour l'amiante effectuées dans cinq pays: la Colombie, le Pérou, le Mexique, la Malaisie, le Viêt-nam ont coûté 62 000 $. Analyse du rapport scientifique ERM et du rapport Cox, ça a coûté, ça, 18 000 $.

Au niveau de la documentation et des communications, on a 31 000 $. On a accueilli une mission du Viêt-nam, comme je vous le disais et on a accueilli aussi des journalistes étrangers. Ça a coûté 4 000 $, et la contribution à l'Institut de l'amiante, 350 000 $. On a pour 33 000 $ de divers. Alors, ce qui fait un total de 1 000 000 $ pour l'année 1997.


Projet Magnola

M. Boucher: Merci, Mme la ministre. M. le Président, j'aurais une autre question...

Le Président (M. Sirros): Oui, M. le député de Johnson.

M. Boucher: ...dans le filon de l'amiante, mais là dans la question...

Le Président (M. Sirros): Suivons le filon.

M. Boucher: D'accord. Il y a, évidemment, un projet d'investissement majeur qui aura lieu dans la région de l'Estrie, plus particulièrement dans la région d'Asbestos, vous le savez: 700 000 000 $, 350 emplois directs. Le gouvernement du Québec, par le biais, je pense, de la Société générale de financement... Enfin, j'aimerais que vous me parliez du montage financier et de notre contribution dans ce projet-là, et aussi, peut-être, là, de ce qui reste à attacher autour du projet, je pense aux infrastructures routières, aux infrastructures d'assainissement des eaux.

Mme Carrier-Perreault: Pour ce qui est du montage financier, je pense que je vais demander à M. Vu de vous donner les précisions. Pour le reste, bien, c'est sûr que, par rapport au dossier, comme tel, d'infrastructures et d'assainissement, je pense que c'est un dossier qui est discuté présentement aux Affaires municipales, parce que ça relève plus du secteur des Affaires municipales. Alors, là-dessus, je pense que les échanges se poursuivent et ça suit son cours. Pour ce qui est de votre question, si vous me permettez, M. le Président, je demanderais à M. Vu de donner certains des détails du montage.

Le Président (M. Sirros): M. Vu.

M. Vu (Duc): M. le Président, effectivement, au niveau du financement ou de la participation, comme telle, des autres partenaires dans le projet, initialement il y avait trois partenaires. Il y avait, évidemment, Noranda, comme telle, il y avait la Société générale de financement et une entreprise japonaise. La compagnie Magnola, qui est une propriété de Noranda, a tellement cru au projet que, déjà, dès le début, elle avait déclaré que, nonobstant, éventuellement, la décision des autres partenaires d'y participer ou pas, elle y allait quand même, dans le projet. Si bien que, lors du, je pense, montage final du projet, la SGF est demeurée avec le projet. Si bien que, présentement, la SGF détient quelque chose comme 20 % d'intérêts dans le projet Magnola, et le reste, évidemment, ça appartient à Noranda et Magnola à part entière.

Quant aux infrastructures, bien sûr, il existe des programmes publics, que ce soit au niveau municipal, au niveau des municipalités, au niveau du ministère des Affaires municipales, qui permettraient, éventuellement, là, comme tout autre projet, de faire participer l'effort public dans le cadre du développement de ce projet-là.

J'aimerais souligner également que, évidemment, l'origine du développement de ce projet-là a quand même été une initiative du Centre de recherches minérales qui, par la suite, comme tel, le ministère a contribué également aux travaux de recherches pour des montants substantiels qui ont permis d'arriver, effectivement, à mettre au point le processus comme tel. Ça répond?

M. Boucher: Oui. Ça répond à ma question. J'aimerais vous souligner, en tout cas, pour ce qui concerne le dossier des infrastructures, je reviens sur ça, je pense que ce serait intéressant, Mme la ministre, que vous – M. le Président, excusez – ...

Le Président (M. Sirros): D'accord, M. le député de Johnson.

M. Boucher: ...fassiez des pressions auprès de notre collègue ministre des Affaires municipales pour que les dossiers débloquent rapidement. La ville d'Asbestos est en attente de décisions à ce sujet-là.

Ceci étant dit, j'aimerais vous parler de... et vous demander d'intervenir... pas d'intervenir, mais de commenter. Vous savez que, la semaine passée, le ministre d'État des Ressources naturelles, M. Chevrette, a annoncé une subvention de 70 000 $ à un groupe de travail qui s'appelle COMAX et dont l'objectif est de maximiser les retombées économiques de ce projet-là au niveau de la région de l'Estrie, mais la région plus large qui pourrait inclure notamment la région de notre collègue le député de Frontenac... Pardon?

Mme Carrier-Perreault: Qui se trouve être la mienne en même temps.

M. Boucher: Oui. Alors, je ne sais pas si vous êtes au courant. On a remis la semaine passée de l'argent, un chèque de 70 000 $ à M. Mario Pellerin, qui est le promoteur de ce Comité-là. Vous êtes au courant de ça, j'imagine? Vous avez été comme impliquée dans ça. Parce que votre intérêt, il me semble, a déjà été dans le sens de maximiser la transformation du produit, de la matière première chez nous, dans l'Estrie, mais ailleurs au Québec.

Mme Carrier-Perreault: Oui. Disons qu'on n'a pas été impliqué nécessairement dans ce dossier-là. Je pense que l'aide est venue du ministre au développement régional.

M. Boucher: Oui. C'était dans son fonds conjoncturel que le ministre d'État...

Mme Carrier-Perreault: Oui, mais je dois vous dire que je trouve que c'est des initiatives fort louables et je pense que c'est vrai que c'est important. On a la matière première. Il faut penser à faire la transformation aussi. Tout à l'heure, le député de Frontenac parlait de difficultés de villes ou d'endroits qui deviennent monoindustriels. Bien, c'est des façons aussi de faire en sorte de maximiser les retombées de cette ressource-là qu'on a à portée de main, à toutes fins pratiques. Donc, moi, je trouve que c'est des initiatives qui doivent être répétées. Je suis contente de voir que ça se passe comme ça, parce que c'était une des préoccupations, finalement.

À partir du moment où on a le magnésium, peut-être qu'il faudrait faire en sorte qu'on fasse aussi de la transformation, qu'on fasse des produits, qu'on fasse une production. C'est un petit peu la difficulté qu'on a aussi quand on regarde au niveau de l'amiante. Il y a une difficulté là aussi, c'est qu'on aurait pu en utiliser davantage. On aurait pu peut-être faire de la recherche davantage. Et c'est ça, les gens se disent aujourd'hui peut-être qu'il y aurait eu moyen nous aussi de transformer, de faire chez nous, d'utiliser davantage de produits.

M. Boucher: Il n'y a pas quelque chose qui est en train de se faire dans ce sens-là au Saguenay–Lac-Saint-Jean? Il n'y a pas une volonté du milieu de transformer sur place davantage l'aluminium?

Mme Carrier-Perreault: Oui. Mais disons que, pour l'amiante, il y a quand même quelque chose qui se passe. Il y a un groupe en recherche et développement des produits. Le MRN participe, il travaille avec SpolTech et l'université de Trois-Rivières pour essayer, justement, de trouver des utilisations. Au niveau de l'aluminium, je sais que de plus en plus il y a des préoccupations aussi. C'est peut-être un petit peu moins du domaine du ministère, mais il n'en reste pas moins qu'on se rend compte qu'il y a des efforts qui se font et qu'il y aura de plus en plus de transformation et de fabrication, d'utilisation aussi, dans la région de Chicoutimi, je pense, qu'on parle, justement, près de la ressource, comme telle.

Il y a l'Institut du magnésium aussi qui s'est transformé, donc, qui va accentuer la recherche aussi. Il y a une transformation. Vous savez que maintenant ils sont avec la Caisse de dépôt, la SGF et le Fonds de solidarité de la FTQ, pour bonifier, faire en sorte que les liens se fassent plus rapidement pour en arriver à déboucher sur des projets concrets.

(11 heures)

Pour ce qui est de mon intervention auprès du ministre des Affaires municipales, bien, écoutez, j'ai ouï dire que le député de Johnson était très actif auprès du ministre des Affaires municipales dans ce dossier. Non, je pense que c'est tout à fait normal, mais je pense aussi que c'est un dossier qui devrait cheminer correctement compte tenu justement de l'importance du projet. C'est sûr qu'on peut échanger avec le ministre des Affaires municipales. Je peux vous garantir tout de suite qu'il est très conscient de l'importance de ce projet-là. On en a discuté aussi déjà assez longuement. Alors, là-dessus, je pense que vous avez tout mon appui.

M. Boucher: Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Jutras): Alors, M. le député de Frontenac.


Défense et promotion de l'amiante (suite)

M. Lefebvre: M. le Président, si, en 1979, 1980, Jacques Parizeau avait écouté les conseils des adversaires de la nationalisation de l'amiante, si le gouvernement du temps n'en avait pas fait une question politique, on n'aurait pas fait l'erreur absolument magistrale de nationaliser les mines d'amiante chez nous avec toutes les conséquences que ça a provoquées dans l'industrie comme telle.

Lorsqu'on a nationalisé General Dynamics, on a fait une erreur. On a amené l'État à intervenir dans un secteur d'activité qui était très bien géré par l'entreprise privée. Ça a été une erreur. C'est reconnu par à peu près tous les observateurs objectifs aujourd'hui. Il aurait fallu à l'époque... on parle beaucoup plus de resserrer l'exploitation des mines d'amiante plutôt que de viser à en devenir propriétaire. Là, je ne parle pas évidemment des coûts directs qu'absorbe encore le gouvernement du Québec. L'amiante, c'est une aventure qui aura coûté plus ou moins la somme absolument astronomique de 700 000 000 $, plus ou moins 700 000 000 $, avec des milliers de pertes d'emplois, comme conséquences du geste du gouvernement du Québec du temps.

Et le député de Johnson – je ne lui en fais pas reproche, là, il parle du dossier de l'amiante avec ses connaissances d'aujourd'hui; il n'a pas évidemment vécu les événements auxquels je fais référence – il parlait tout à l'heure de promotion. Au moment où on se parle et depuis des années, on ne fait pas la promotion de l'amiante. Toutes les énergies des intervenants dans ce dossier sont consacrées à défendre l'amiante, pas à en faire la promotion. Ce n'est pas pareil, ça. Alors, on ne peut pas, M. le Président, mettre des efforts à promouvoir le produit. On est engagé dans une bataille dont on ne verra peut-être jamais la fin. On est engagé à faire une bataille, à peu près partout en Europe et maintenant ça se déplace sur les marchés asiatiques, strictement encore malheureusement aujourd'hui de défense. On se bat contre des décisions politiques.

Ce que je trouve absolument malheureux, M. le Président, c'est que, jusqu'à juillet 1996, on a vécu des périodes extrêmement difficiles, mais, à quelque part en juillet 1996... La ministre sait très bien que je vais commenter la décision du gouvernement français, en juillet 1996, de bannir l'amiante sur son territoire. À ce moment-là, dans les mois qui ont précédé, du début de l'année 1996 jusqu'à la décision du gouvernement français, les marchés d'amiante étaient stables, relativement stables.

La ministre me regarde et elle sourit. Les marchés de l'amiante sont partis de 1979, 1980, 1981, ça a été les années les plus grosses, et cette production est allée en décroissant jusqu'à une certaine stabilité à quelque part autour des années 1995, 1996. La décision malheureuse du gouvernement français de bannir l'amiante sur son territoire, décision qui a été prise au début de l'année 1996 mais annoncée en juillet 1996, a relancé tout le débat. La progression de la diminution des achats partout en Europe, pour les pays qui en consomment – ils sont peu nombreux – aurait commencé avec la décision du gouvernement français. La ministre le sait très bien. Et ça a été suivi, tout récemment, malheureusement, de la Grande-Bretagne, qui n'en est pas encore à une décision de bannir, il y a des recommandations de groupes d'experts.

J'ai toujours reproché le silence de M. le député de Jonquière et premier ministre, M. Bouchard, à l'époque, en juillet 1996, et dans les mois qui ont suivi. La décision de bannir l'amiante en France en juillet 1996 était une décision politique basée sur des éléments qui n'ont rien à voir avec l'analyse rationnelle, l'analyse scientifique, on s'entend là-dessus. À une décision politique, il faut qu'il y ait une intervention politique, ce qu'a toujours refusé de faire le premier ministre du Québec, contrairement au premier ministre du Canada, Jean Chrétien, qui n'a pas hésité, partout, à la Chambre des communes, en France – et je me souviens très bien, il y a à peine sept ou huit mois en conférence de presse, assis tout juste à côté du premier ministre du temps, M. Juppé – évidemment avec délicatesse, à reprocher cette décision du gouvernement français de bannir l'amiante.

Jamais le premier ministre du Québec n'a condamné la décision du gouvernement français, jamais, sur aucune tribune, y compris ici, à l'Assemblée nationale, au moment où mon collègue de Richmond et moi-même lui avions donné l'occasion de le faire. Pour quelle raison? Parce que le premier ministre du Québec a décidé lui aussi de faire de la politique dans le dossier de l'amiante. Je n'hésite pas à dire que le premier ministre aurait été, je pense – j'en suis convaincu – beaucoup plus actif si la décision de bannir l'amiante avait été prise par un autre pays que le pays allié qu'est la France. C'est toujours ce que j'ai prétendu. Ça, c'est un choix du gouvernement de M. Bouchard, le premier ministre.

La ministre va me répondre: On a fait des choses. Oui, je le reconnais. Je reconnais que la ministre déléguée aux Mines a posé des gestes. Elle a tenté de sensibiliser les adversaires. Elle a tenté de sensibiliser les consommateurs qui s'apprêtaient ou qui s'apprêtent à acheter un produit substitut de l'amiante plutôt que l'amiante. Oui, la ministre a posé des gestes, mais ce qu'il aurait fallu, ça aurait été – la ministre le sait, je le lui ai répété à plusieurs reprises – un engagement ferme, une défense, parce que c'est une décision politique, ce que le premier ministre du Québec n'a jamais voulu faire. Et je mets la ministre au défi de me faire la preuve d'une déclaration ferme du premier ministre du Québec protégeant l'amiante au même titre que les déclarations qui ont été faites par le premier ministre du Canada, M. Jean Chrétien – je me répète – à plusieurs occasions.

Alors, ça a eu la conséquence que l'on connaît, l'effet d'entraînement appréhendé de cette décision du gouvernement français s'est malheureusement produit. On est présentement, M. le Président, dans une crise sans précédent quant à l'avenir de l'industrie. La ministre a fait référence tout à l'heure à la décision toute récente du Conseil de l'Europe. C'était ça, l'inquiétude. L'effet appréhendé, c'était que la décision du gouvernement français soit imitée par d'autres pays d'Europe et éventuellement par un regroupement quelconque des pays européens, et c'est ce qui est arrivé avec le Conseil de l'Europe. Ç'a été la Communauté économique européenne, c'est le Conseil de l'Europe. Le Conseil de l'Europe, ce sont des parlementaires avec un pouvoir – la ministre a raison de le dire – non décisionnel mais de recommandation, si je comprends bien toute la plomberie qui tourne autour de tout le débat qui se fait actuellement en Europe quant à l'avenir de l'amiante.

(11 h 10)

Est-ce que, M. le Président, l'Organisation mondiale du commerce peut amener un ralentissement du processus? Pas en France, c'est chose faite. Au moment où on se parle, la France a banni et il n'y a plus une tonne d'amiante qui se vend en France actuellement. L'Organisation mondiale du commerce, qui est une espèce de tribunal international économique, si elle était saisie d'une plainte en bonne et due forme, je considère que ça aurait l'effet suivant. Ça pourrait éventuellement – pas à court terme, avant qu'on ait passé à travers le processus, ce n'est pas une question de semaines ou de mois – amener la France à devoir réviser sa décision, mais ça, je n'y compte pas. D'ailleurs, la France n'est pas un gros consommateur. Mais je pense qu'effectivement ça aurait comme conséquence d'arrêter le processus d'analyse quant au bannissement dans d'autres pays européens. Au Conseil de l'Europe, je pense que ça aurait un effet positif, et aussi ça pourrait protéger le marché utilisateur qu'est, entre autres, l'Asie. Le marché asiatique, M. le Président, c'est le plus gros marché au moment où on se parle.

Est-ce que le premier ministre du Québec a lui-même demandé au gouvernement fédéral de déposer cette plainte devant l'Organisation mondiale du commerce? Je ne crois pas. La ministre l'a fait. Mais la ministre déléguée aux Mines, tout comme son collègue ministre des Ressources naturelles, ce n'est pas le premier ministre du Québec. Ce n'est pas le premier ministre du Québec. Je souhaiterais que le premier ministre du Québec – et il ne sera jamais trop tard pour le faire, M. le Président – mette tout son poids dans la défense de l'amiante. Je souhaiterais que le premier ministre du Québec joigne ses efforts aux ministres fédéraux que sont MM. Sergio Marchi et M. Goodale qui, au moment où on se parle, depuis quelques jours, continuent à faire des démarches auprès du Conseil de l'Europe pour tenter de freiner le processus de bannissement.

Il y a eu des rencontres avec le ministre délégué à la santé français, autant du côté fédéral que du côté du gouvernement du Québec, y compris avec le premier ministre canadien, avec le ministre de la Santé canadien, M. Alan Rock. Mais le premier ministre du Québec, il n'est jamais là, lui. Le premier ministre du Québec n'est jamais là pour défendre l'amiante. C'est son choix, M. le Président. C'est son choix, mais j'aimerais au moins qu'il le dise. L'absence, c'est souvent plus condamnable qu'une position peut-être désagréable à entendre mais ferme. On saurait à quoi s'en tenir. J'aimerais savoir ce que pense le premier ministre du Québec. Puis, moi, je ne le questionne pas. Lorsqu'il a à rendre compte des activités de son ministère, l'Exécutif, bien, je ne pense pas que ce soit approprié d'aller aborder une question comme celle-là. J'aimerais que le premier ministre du Québec s'exprime clairement, prenne la défense de l'amiante, même s'il est minuit moins cinq.

La ministre, je comprends, va me répéter ce qu'elle m'a toujours dit: On fait des choses, on fait des choses. Je le sais. J'ai la liste ici des dépenses effectuées dont elle a donné le détail au député de Johnson, M. le Président. Mais ce n'est pas suffisant. Moins de ces démarches-là mais une seule démarche nécessaire: une prise de position ferme du premier ministre du Québec. Je le sais que – jamais la ministre ne l'avouera – elle a probablement tenté de convaincre son premier ministre d'être plus actif dans la défense de l'amiante.

On parle de milliers de travailleurs. Ici, dans le bilan de l'industrie minière du Québec 1997, lorsqu'on dit ceci: «Par ailleurs, l'entreprise a suspendu pour une période indéterminée l'exploitation de la mine BC», bien, il faudrait mettre les notes à date, ce n'est pas une suspension pour une période indéfinie, c'est une fermeture totale et définitive, BC. On parle de 300 travailleurs, 300 travailleurs de la mine BC qui sont présentement, M. le Président, en chômage. Dans quelques mois, ces travailleurs-là ne recevront plus de prestations de chômage. On fait un débat présentement, autant avec la ministre de l'Emploi au Québec qu'avec le ministre Pettigrew, pour essayer de mettre en place un programme d'aide à ces travailleurs qui, pour plusieurs, une centaine de ces travailleurs-là, sont âgés de 55 ans et plus. Ils n'ont pas nécessairement l'instruction capable de leur permettre de se recycler. La mine BC est définitivement fermée, pas pour une période indéterminée. Je demanderais aux collaborateurs de la ministre de mettre leurs notes à date. Le rapport que j'ai sous les yeux, l'activité minière de juillet 1997, ça a été rédigé probablement au cours des derniers mois. BC est fermée depuis janvier dernier.

Ça, c'est la conséquence, la fermeture de la BC, de la chute des marchés européens, entre autres de la décision du gouvernement français qui veut accompagner le Québec dans sa démarche vers la souveraineté, M. le Président. C'est ça, la décision du gouvernement français. C'est ça, la conséquence du gouvernement français pour des gens de chez nous, pour des travailleurs du comté de Richmond. La ministre le sait que JM Asbestos a des difficultés énormes également. Il y a aussi – et je conclus là-dessus – l'activité économique asiatique qui est en difficulté, qui explique, semble-t-il, une partie de la diminution de la consommation.

Question très précise. J'imagine que la ministre va commenter l'ensemble de mon propos. Lorsqu'on parle de promotion, est-ce que l'amiante-asphalte fait encore partie des projets de son collègue ministre des Transports? Est-ce que l'utilisation de l'amiante-asphalte est encore un procédé évalué pour la saison qui vient sur certaines routes du Québec, évidemment les routes de juridiction du gouvernement provincial? On sait, M. le Président, qu'au cours des dernières années ce procédé-là a été testé, qu'il s'est avéré comme étant positif lorsqu'on met en parallèle les coûts par rapport à la durabilité du procédé.

Alors, au-delà de tout ce que la ministre voudrait me commenter, l'attitude du premier ministre, qu'est-ce qu'elle va faire au cours des prochaines semaines? Est-ce qu'elle va accompagner la démarche du fédéral qui continue à faire des démarches diplomatiques auprès du Conseil de l'Europe pour bloquer le processus? Est-ce que le Québec s'associe à cette démarche-là? Et aussi, dernière question, M. le Président, la contribution de l'Institut de l'amiante à 350 000 $. Je voudrais savoir quel est le budget global de l'Institut de l'amiante, si ces chiffres-là sont disponibles. Quelle est la contribution des partenaires respectifs? Il n'y a pas que le Québec qui finance l'Institut de l'amiante, sauf erreur. Je voudrais savoir si la ministre a les chiffres ici.

Mme Carrier-Perreault: M. le Président, je vais répondre rapidement à une couple de ces questions qui n'ont rien à voir avec le discours-fleuve que le député m'a tenu depuis à peu près 10 minutes. Je vais revenir sur mes commentaires...

M. Lefebvre: Il doit y avoir quelques éléments pertinents là-dedans.

Mme Carrier-Perreault: Je m'excuse. C'est mon tour, là.

Le Président (M. Sirros): M. le député.

Mme Carrier-Perreault: J'aurais des commentaires à faire sur le discours du député. Pour ce qui est de l'asphalte-amiante, un, l'asphalte-amiante, je peux vous dire qu'on a utilisé davantage d'amiante cette année dans les revêtements, au niveau de l'asphalte, et que le processus se continue. Il y a des décisions, bien sûr, qui sont prises dans les différentes régions. C'est plus cher, mais on a la conviction que c'est plus efficace, plus durable en tout cas. C'est moins dommageable et c'est recommandé sur les routes, aux endroits où il y a beaucoup de circulation ou encore du transport routier lourd. Alors, voilà pour l'asphalte-amiante. Ça se continue et ça se poursuit.

M. Lefebvre: Est-ce que Mme la ministre peut nous donner le tonnage? Est-ce que ces données-là sont disponibles ce matin, cette année par rapport à l'an passé?

Mme Carrier-Perreault: En 1996, on dit que 65 000 tonnes d'asphalte-amiante ont été utilisées, dont 1 200 tonnes d'amiante qui sont mélangées à l'asphalte. C'est-à-dire que c'est 1,3 %.

M. Lefebvre: Ça va.

Mme Carrier-Perreault: Vous me demandiez des données précises, alors j'essaie de vous les donner. En 1997, on est passé à 71 640 tonnes d'asphalte-amiante utilisées, dont 989 tonnes d'amiante.

M. Lefebvre: Et vous n'avez pas les prévisions pour 1998, pour l'année en cours?

Mme Carrier-Perreault: Non. Pour l'année en cours, on ne peut pas donner de prévisions. On sait qu'il y a une recommandation pour des endroits particuliers et que les décisions appartiennent aux directions régionales.

Le budget de l'Institut de l'amiante, autre petite précision. Disons que le budget de l'Institut de l'amiante, c'est environ 1 200 000 $ en 1997, dont 350 000 $ provenaient du ministère des Ressources naturelles. Les deux producteurs sont les deux autres contributeurs à l'Institut de l'amiante pour 600 000 $, et il y avait des surplus antérieurs à l'Institut pour 250 000 $. Ça, c'était le budget de 1997 de l'Institut de l'amiante. Donc, vous comprendrez qu'on parle de deux producteurs et du gouvernement du Québec.

(11 h 20)

Moi, je vais vous dire. J'ai écouté le député nous parler, nous faire un long discours sur ce qui se fait, sur ce qui ne se fait pas, sur ce que les uns disent, sur ce que les autres ne disent pas. Moi, je vais vous dire que, par rapport à ce que j'entends, je vois qu'il y a des gens qui préfèrent beaucoup parler mais qu'on préférerait à certains égards de l'action. C'est vrai qu'il y a des échanges qui se font avec le premier ministre Chrétien, qu'on parle avec le Conseil de l'Europe.

Ça fait au-delà d'un an que, nous, au Québec, on demande au gouvernement fédéral de poser un geste, un simple geste, tout le monde s'entend au Québec. Et c'est clair, autant les partenaires, autant les locaux, autant les syndicats et même les députés qui représentent les régions du Québec font la même demande. C'est vrai que celle des députés est peut-être plus récente, vient d'arriver auprès du gouvernement fédéral, mais je peux vous dire...

M. Lefebvre: Non, non, je m'excuse...

Le Président (M. Sirros): M. le député, non. M. le député, soit... Non, M. le député, soit c'est une question de règlement ou...

M. Lefebvre: C'est une question de règlement.

Le Président (M. Sirros): Alors, allez-y sur une question de règlement, M. le député.

M. Lefebvre: Question de règlement. Quand la ministre dit que c'est une intervention récente, elle devrait prendre le temps de lire sa correspondance.

Le Président (M. Sirros): Non, M. le député, là...

M. Lefebvre: Question de règlement, fausseté.

Le Président (M. Sirros): Lequel? Vous rectifiez un fait, là?

M. Lefebvre: Quand la ministre dit que c'est une question...

Le Président (M. Sirros): Vous rectifiez un fait?

M. Lefebvre: ...que c'est une intervention...

Le Président (M. Sirros): Écoutez, on a jusqu'ici, M. le député...

Une voix: Une question de règlement, c'est une question de règlement.

Le Président (M. Sirros): Non, non, je m'excuse là. Jusqu'ici, on a eu...

M. Lefebvre: Non, non, M. le Président, on n'a pas besoin d'être aussi agressif, il doit y avoir moyen de se comprendre. Si je suis hors d'ordre, vous me le dites. Je dis que...

Le Président (M. Sirros): M. le député, là, permettez-moi.

M. Lefebvre: Oui.

Le Président (M. Sirros): Jusqu'ici, on a eu le loisir, de part et d'autre, de prendre tout le temps nécessaire pour qu'on puisse écouter et puis faire un débat où tout le monde peut mettre de l'avant ses points de vue. Vous avez tout à coup bénéficié, tantôt, du 20 minutes que le règlement vous prévoit pour faire votre présentation. La ministre est en train de donner une réplique à ce que vous avez dit. Si vous voulez soulever une question de règlement pour rectifier un fait...

M. Lefebvre: C'est ça.

Le Président (M. Sirros): Alors, faites-le rapidement par rapport au règlement, M. le député, sans entamer un débat.

M. Lefebvre: Quand la ministre dit que l'intervention, elle est récente, en parlant de moi, à l'égard du premier ministre et de l'OMC, de l'Organisation, c'est faux, ce n'est pas récent. La ministre devrait lire sa correspondance, M. le Président, ça recule jusqu'à septembre 1997.

Le Président (M. Sirros): Merci, M. le député, le point est fait.

Mme Carrier-Perreault: Sauf que c'est justement ce que je dis, M. le Président, c'est que le gouvernement du Québec, par la voix de Bernard Landry, a fait cette demande-là en février 1997. On a réitéré, avec les intervenants, les différents intervenants, au mois d'octobre 1997. Le premier ministre a rencontré aussi les intervenants du milieu, a eu des échanges, et, par rapport aux propos du député de Frontenac, je pense qu'il est le seul à penser ce qu'il dit, que le premier ministre du Québec ne défend pas l'amiante. Les intervenants dans le dossier sont très conscients que le premier ministre défend le dossier de l'amiante et a pris des décisions, n'a pas fait juste du parlementage, il a pris des décisions.

La dernière demande est arrivée du gouvernement du Québec auprès du gouvernement fédéral parce qu'on a pris la décision au Conseil des ministres. C'est une décision gouvernementale qui est arrivée par la voix de mon collègue Jacques Brassard, qui est le ministre aux Affaires intergouvernementales canadiennes. C'était la décision gouvernementale, ce n'est pas juste la demande d'un ministre par-ci par-là.

Alors, ça, là, je voudrais qu'on fasse le point là-dessus. Je pense que la position, elle est très claire, elle a été exprimée, et les intervenants du milieu sont tous conscients de la position du gouvernement du Québec. Et je pense qu'ils l'apprécient aussi. Ils savent qu'on se tient debout dans ce dossier-là et ils sont très conscients aussi qu'on n'a pas la possibilité présentement de déposer cette plainte-là nous-mêmes auprès de l'OMC parce qu'il faut être un pays pour déposer cette plainte-là. Donc, on est obligé de faire appel au gouvernement canadien et on attend la décision du gouvernement canadien.

Par rapport au silence, si on en revenait au silence, il y a une difficulté dont on n'a pas souvent parlé dans ce dossier-là. On a beaucoup parlé de la décision de la France, en juillet 1996. Ça, ça a fait les manchettes. C'est vrai que c'était une décision brutale, qui nous a vraiment surpris, pris de court puis qui nous fait du tort, j'en conviens. Sauf que ce qu'il faut comprendre, c'est que, pendant plusieurs années, il y a plusieurs pays qui ont banni l'amiante aussi, et c'est assez étonnant parce qu'on n'en a pas entendu parler.

Moi, j'aimerais juste vous en mentionner quelques-uns, c'est une difficulté majeure. Quand on parle de faire des représentations au Conseil de l'Europe et qu'on sait qu'il y a à peu près 13 pays européens qui ont banni l'amiante, je «peux-tu» vous dire que la commande... la marche est haute, comme on dit chez nous. Alors, entre 1986 et 1994, six pays d'Europe ont banni l'amiante. On n'en a pas beaucoup entendu parler. Et, que je sache, ce n'était pas le premier ministre qui était là à ce moment-là. Il y a eu des silences qui nous coûtent cher aujourd'hui. Je pense qu'on aurait dû défendre ce dossier-là dès le départ quand on a vu que ça commençait à débouler du côté de l'Europe.

Moi, je peux vous dire que les pays qui ont banni l'amiante, en tout ou en partie... Parce que, vous savez, M. le Président, on peut faire indirectement ce qu'on ne veut pas faire directement, hein, c'est bien connu – et les présidents sont bien placés pour connaître ce genre de choses – ayant le même résultat, finalement, le même effet. On parle des Pays-Bas qui ont banni l'amiante en 1993, la Suède en 1986. Avez-vous entendu parler de ces bannissements? On n'en a pas vraiment entendu parler. Alors, ça veut dire que la réplique n'a pas dû être trop cinglante, M. le Président. La Norvège en 1986, le Danemark en 1986, l'Allemagne en 1980, la Finlande en 1993, l'Autriche en 1988, tous ces pays-là, durant ces années-là, qui ont banni l'amiante, se retrouvent aujourd'hui au Conseil de l'Europe. Donc, on se rend bien compte jusqu'où ça a dégénéré, le dossier, avant qu'on réussisse à essayer de le prendre en main et de faire changer une décision.

Alors, moi, quant à moi, je trouve qu'effectivement il y a eu des silences coupables, à une certaine époque. On aurait dû, effectivement, réagir bien avant et faire les démarches que nous sommes obligés de faire présentement, on aurait dû commencer bien avant, aussi, M. le Président.

Quand on me dit que c'est le bannissement qui fait en sorte que tout dégénère et que le marché de l'amiante descend, effectivement, il y a un impact, je ne m'en cache pas. On sait très bien, cependant, que les pays qui bannissent l'amiante, ce sont les pays qui, à toutes fins pratiques, n'en utilisent à peu près plus. Ils en ont peut-être beaucoup dans leurs sous-sols, on sait qu'il y a beaucoup d'infrastructures, les tuyaux en amiante-ciment pullulent, il y en a un peu partout. On a fini les infrastructures. Mais le bannissement survient après, justement, le développement. Alors, c'est sûr que ce n'est pas les pays qui sont les plus grands utilisateurs qui bannissent. Ce qui est inquiétant, c'est l'impact, l'effet des décisions de ces pays-là sur les pays qui sont des utilisateurs ou qui sont en voie de développement et qui ont besoin du produit.

Au moment où on se parle, il y a eu une descente, il y a eu effectivement une baisse au niveau de l'exportation, de la vente. Une grosse partie, cependant – et le député y a fait référence, un petit peu, en fin d'intervention – de cette chute au niveau de l'amiante découle – je pense, en tout cas, selon nos vérifications, selon ce qu'on peut en déduire – peut-être davantage de la crise asiatique. Parce que, on le sait, nos clients les plus importants sont en Asie, hein. On parle des pays asiatiques qui achètent pour 53 % de notre production. C'est bien évident que l'amiante, c'est un produit de base, c'est un produit qui sert à la construction. Et, à partir du moment où il y a une crise économique, on le sait, ça commence par là, on commence à baisser au niveau de la construction. Comme les producteurs d'amiante me disent eux-mêmes, la bonne nouvelle, au fond, c'est que, quand ça va reprendre, c'est probablement par là aussi que ça devrait recommencer, parce que c'est à peu près la voie normale, c'est par là que ça remonte, que ça commence à remonter.

C'est sûr que c'est contextuel. Je conçois très bien que c'est difficile, que ça peut être très difficile à certains égards. Mais je pense qu'il faut quand même assumer tout ça, essayer de passer à travers. Je pense qu'on l'a déjà fait et on est habitué de se battre; on va continuer de le faire. Mais j'aimerais beaucoup, moi, de mon côté, qu'on arrête à un moment donné de parlementer puis qu'on réussisse à prendre des décisions.

Le Président (M. Sirros): Merci, Mme la ministre. M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: M. le Président, quand la ministre fait référence à des bannissements, autour des années 1985, 1986, 1987, elle a raison, c'était justement la conséquence de la décision du gouvernement... pas du gouvernement, pas du gouvernement; la conséquence de l'organisme – dont j'oublie le nom – au États-Unis qui faisait une recommandation au gouvernement, un organisme de protection de l'environnement...

Mme Carrier-Perreault: L'EPA.

(11 h 30)

M. Lefebvre: L'EPA. Ce n'était pas une décision politique, c'était la recommandation d'un organisme ayant comme responsabilité de protéger la santé publique et l'environnement, de bannir l'amiante. Et la ministre le sait très bien, elle ne peut quand même pas nier les faits historiques, une bataille absolument fantastique a été engagée contre la décision de l'organisme américain, puis on a gagné cette bataille-là. On a fait reculer l'EPA parce qu'on pouvait faire la bataille devant les tribunaux étant donné que ce n'était pas une décision politique d'un gouvernement.

M. le Président, on ne peut pas attaquer une décision politique devant un tribunal, sauf des tribunaux à caractère international. Au moment où les États-Unis bannissaient, justement, ça a eu la répercussion jusqu'en Europe, l'Allemagne, la Suède. Mais il faut choisir une stratégie dans un dossier comme celui-là, on ne peut pas faire la bataille sur tous les plans. Il faut attaquer les décisions devant les tribunaux lorsque c'est possible. On l'a fait.

Robert Bourassa a toujours été un défenseur extraordinaire de l'amiante. Jamais M. Bourassa n'a hésité à prendre la défense de l'amiante haut et fort, lui personnellement, dans des déclarations politiques comme premier ministre du Québec et par le biais d'actions concertées de son gouvernement. Il y avait un ministre délégué aux Mines sous le gouvernement de Robert Bourassa, c'était le député d'Abitibi-Ouest, M. Raymond Savoie, qui a fait un excellent travail en collaboration avec le fédéral. Daniel Johnson a été au pouvoir pendant une dizaine de mois. À plusieurs reprises, Daniel Johnson, comme premier ministre du Québec, s'est exprimé haut et fort comme étant un défenseur de l'amiante.

Jamais le premier ministre du Québec actuel ne l'a fait. C'est ce que je reproche au gouvernement. Pas au gouvernement, au premier ministre. Et la ministre le sait très bien, que j'ai toujours reconnu qu'elle faisait des efforts. Je l'ai toujours reconnu, M. le Président, mais ce n'est pas suffisant. Je me répète, c'est un dossier politique. Ça exige donc une prise de position politique du numéro un du gouvernement, qui est le premier ministre – c'est incontournable – au moins pour que les défenseurs sachent que le premier ministre se situe du côté de la défense de l'amiante, lui personnellement.

Jean Chrétien l'a fait. Robert Bourassa l'a fait. Daniel Johnson l'a fait. Brian Mulroney l'a fait, en même temps qu'il le demandait à Marcel Masse, qui était un bon défenseur de l'amiante jusqu'à ce qu'il soit délégué du Québec à Paris. Là, il s'est endormi un petit peu et il n'a pas vu venir le coup – la ministre le sait – de la décision de bannissement du gouvernement français. Je l'ai côtoyé pendant huit ans, moi, Marcel Masse, comme ministre des Richesses naturelles du gouvernement canadien. Ça a été un bon défenseur de l'amiante du temps où il a été ministre avec l'appui de son premier ministre.

Ça prend une stratégie. Dans ce sens-là, je considère, M. le Président, que la stratégie a été déficiente. On aurait dû attaquer la décision du gouvernement français. Je comprends, on retourne en arrière. Ça ne corrige pas la situation actuelle, on a la conséquence de la décision du gouvernement français. Je la vis chez moi. À tous les jours, je rencontre des travailleurs de l'amiante qui désespèrent de voir qu'il va y avoir un retournement de la situation. Bon. Ce n'est pas la faute de la ministre, ça. Je ne blâme pas la ministre, moi. Je blâme son premier ministre, qui, lui, n'a jamais voulu prendre position haut et fort. Je l'ai dit tout à l'heure. J'ai mis la ministre au défi de me citer une seule déclaration du premier ministre, publique, reprochant au gouvernement français sa décision. Ça n'existe pas.

M. le Président, j'ai posé la question à Mme la ministre: Est-ce qu'elle va accompagner le fédéral dans sa démarche auprès du Conseil de l'Europe? Une démarche ultime, quant à moi, et je n'hésite pas à le dire. La ministre a en main une correspondance signée par moi et signée, j'imagine, par mon collègue de Richmond, c'est public. Je considère que le gouvernement canadien devrait, en même temps qu'il continue ses démarches d'ordre diplomatique auprès du Conseil de l'Europe, attaquer la décision du gouvernement français devant l'OMC. L'un n'empêche pas l'autre, selon moi.

Je rappelle à la ministre que ce n'est pas récent pour moi, cette position-là, ça fait au moins une dizaine de mois. La ministre se souviendra que, jusqu'en février dernier, l'industrie, et Lab Chrysotile et JM Asbestos, considérait qu'il n'y avait pas encore urgence. La ministre le sait. Jean Dupéré, entre autres, indiquait que, en février dernier, il était encore d'accord pour continuer la démarche diplomatique.

Maintenant, et Jean Dupéré et M. Coulombe, les syndicats, les deux députés sont d'accord. Effectivement, on en est rendu, je pense, à la plainte devant l'OMC mais qui n'élimine pas – et c'est ça, ma question – la démarche d'ordre diplomatique, politique, auprès du Conseil de l'Europe qui est présentement en cours du côté du gouvernement fédéral. Est-ce que le Québec est dans le coup? Strictement au niveau de cette démarche-là, moi, j'ai un communiqué de presse, en date du 28 avril, où on indique que le gouvernement fédéral continue ses démarches auprès du Conseil de l'Europe. Est-ce que le Québec est associé au gouvernement fédéral dans cette démarche très précise auprès du Conseil de l'Europe pour bloquer le processus qui est la conséquence de la décision du gouvernement français? L'effet d'entraînement, bien, on le vit, là. Est-ce que Québec est là, auprès du gouvernement fédéral, pour influencer le Conseil de l'Europe dans le bon sens?

Mme Carrier-Perreault: Moi, je peux vous dire, M. le Président, et le député de Frontenac est sûrement au courant, que le siège d'observateur au Conseil de l'Europe, c'est le Canada qui l'a, ils sont là. Il y a des députés du Bloc québécois qui font partie de ce groupe de parlementaires qui assistent aux délibérations. Alors, c'est sûr que les gens sont au fait. La question que je me pose, c'est qu'ils n'ont pas vu venir... Il y a eu une difficulté certainement, puisque la décision est tombée. On sait que M. Cox est venu au Québec, il y a très peu de temps. Il est venu à Ottawa aussi. Il y avait eu des rencontres entre parlementaires. Alors, il y a eu des échanges entre les parlementaires. On a des parlementaires du Québec qui ont échangé avec M. Cox. Il y a eu des échanges qui ont été faits avant la décision du fédéral de s'impliquer. Ça, c'est très clair, M. le Président.

Pour ce qui est de la démarche à l'OMC, c'est que ça fait longtemps qu'on le demande. Oui – j'en ai parlé tantôt, je n'ai pas l'intention de répéter les dates – ça fait longtemps qu'on l'exige parce qu'on est conscients que, pour nous, c'est probablement la seule façon d'arrêter l'hémorragie, à toutes fins pratiques. Là-dessus, il y a eu beaucoup d'échanges avec l'industrie. Les gens de l'industrie en ont parlé longtemps. Ce n'est pas pour rien qu'on l'avait demandé unanimement au mois de septembre lors des colloques, enfin au début de l'automne. Les syndicats sont conscients aussi. C'est clair. Pour nous autres, ça fait partie de la stratégie. Au niveau de l'Europe, on pense qu'on est rendu là, et ça fait longtemps qu'on pense qu'on est rendu là.

Pour ce qui est des difficultés, je pense que l'industrie a fait des demandes auprès du gouvernement fédéral au même titre qu'on en a fait et a essayé encore une fois d'entrer dans le jeu des négociations. En attendant, qu'est-ce qu'on fait? Comme on ne peut pas la déposer, la plainte, qu'est-ce qu'on fait ou qu'est-ce qu'on peut faire d'autre? On est obligé de continuer les pourparlers, sauf que, moi, ce que je dis et ce que je continue de répéter, c'est qu'il faudrait passer à l'action le plus rapidement possible parce que, entre le temps où on a demandé au fédéral de déposer cette plainte-là à l'OMC et aujourd'hui, déjà il y a un autre pays qui a banni l'amiante, c'est la Belgique. Et ça se poursuit, là, M. le Président. Alors, si on avait déposé cette plainte-là quand le Québec l'a demandé, peut-être qu'on aurait pu en éviter quelques autres.

Moi, disons que là-dessus je continue toujours de demander la même chose, parce qu'il y a eu des échanges, il y a eu des pourparlers. On a commencé par, nous aussi, avoir des échanges et des pourparlers. Je pense que c'est important. Vous savez, déposer une plainte à l'OMC, ce n'est pas une déclaration de guerre à un pays. L'OMC, c'est un organisme qui existe justement pour régler des différends. Il y a d'autres pays qui s'en servent. La France elle-même s'en sert quand, à l'occasion, elle a un problème au niveau d'une interprétation où il y a un différend qui se produit. Alors, nous, de notre côté, je peux vous assurer qu'on était tout à fait opposés aux valses-hésitations que le fédéral nous fait depuis le mois de février 1997.

Le Président (M. Sirros): Merci. Mme la députée de Marie-Victorin.

(11 h 40)

Mme Vermette: Oui, M. le Président. Hier, j'étais aux crédits de l'Industrie et du Commerce et c'est un sujet que nous avons discuté aussi et abordé, notamment par le porteur du dossier pour l'opposition officielle qui est le député de Mont-Royal, M. Ciaccia. Lui, en fait, considérait que le gouvernement fédéral semblait être bien au fait du dossier, puisque depuis 1992 il travaillait très fort dans ce dossier-là en tant que, à l'époque, ministre. Il semble que ça traîne énormément, que le fédéral traîne ses pieds depuis un bon bout de temps dans le dossier, que ça avance très lentement. En fait, c'est la politique des petits pas. On est pour, bien au contraire, mais.

D'autre part, ce qu'affirmait ce critique, c'est qu'il considérait que, si le porteur du dossier pour notre gouvernement était l'Industrie et Commerce, ça aurait beaucoup plus de rebondissements ou, en tout cas, ça accélérerait davantage, au niveau de l'ensemble de la Communauté européenne, le dossier, puisque ceux-ci pourraient faire valoir certaines ventes qu'ils ont faites à l'extérieur.

Est-ce que vous pensez... Parce que j'écoutais le critique, ici, en matière des mines qui nous dit que, bon, en fait, ça ne revient qu'au premier ministre, alors que l'autre critique considère que, si c'était l'Industrie et Commerce, ça serait beaucoup mieux. Même, il nous en faisait un conseil, et on devrait le suivre, ce conseil-là. Donc, j'ai de la misère à me retrouver. Est-ce que vous pourriez nous dire, en fin de compte, si vous assumez bien votre leadership à l'intérieur de votre ministère? Parce que...

Une voix: La réponse est non. Je ne m'attends pas à ce qu'elle dise non.

Mme Vermette: Non, bien, en fait, elle est assez critique. Depuis tantôt, je l'ai entendue, elle est capable d'apporter une critique constructive par rapport à ce qu'il faut pour faire avancer le dossier. Donc, ou bien elle est capable de nous dire quels sont, en fin de compte, les échanges qu'il peut y avoir entre les différents ministères... Parce que, quant à nous, on a dit... Beaucoup de gens, en fin de compte, de notre côté, qui ont l'air de vouloir s'impliquer dans le dossier de l'amiante via le ministre responsable et porteur du dossier. Il semblerait que, au niveau, en tout cas, de l'Industrie et du Commerce, ils sont impliqués, puis le premier ministre aussi, il est impliqué. Donc, il y en a plusieurs qui mettent la main à la roue.

Le Président (M. Sirros): Mme la ministre, allez-y.

Mme Carrier-Perreault: Dans les faits, M. le Président, je pense qu'il faut comprendre. C'est vrai que le dossier... On est peut-être les plus intéressés par le dossier parce qu'il s'agit d'un dossier minier. C'est un produit minier, on le sait. Mais il faut comprendre que toutes les actions qui sont posées en matière de défense de l'amiante ne sont pas prises en vase clos au ministère des Ressources naturelles. Il y a un comité interministériel qui travaille, et déjà tous ces ministères-là sont impliqués de très près, que ce soit au niveau de l'Industrie et Commerce, au niveau des Relations internationales, le ministère de la Santé publique et les gens du Travail, CSST et IRSST, et, bien sûr, il y a nous.

Alors, je pense que le leadership, on l'a, au niveau du ministère, parce que c'est dans le secteur minier, c'est un produit des mines. Mais il faut comprendre que toutes les décisions qui sont prises dans ce dossier-là, à toutes fins pratiques, découlent d'échanges entre différents ministères et, à certains égards, sont des décisions du Conseil des ministres. Quand M. Brassard et porte-parole écrit au gouvernement fédéral pour demander de déposer la plainte à l'OMC, il faut comprendre qu'il écrit en tant que ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes et pas en son nom personnel, mais au nom du gouvernement, parce que c'est une décision qui a été prise aussi au Conseil des ministres.

Alors, je pense qu'on essaie de ne pas improviser, on consulte nos partenaires des différents ministères. Plus on est nombreux à échanger et à discuter, peut-être plus on a des idées et on essaie de trouver les meilleures solutions possible. On n'est pas seuls dans ce dossier-là, on travaille en collaboration avec les autres.

Mme Vermette: Vous m'avez pas mal éclairée, dans le fond. À la lumière de la recommandation que nous avait faite le critique, c'est peut-être pour ça qu'ils n'ont pas pu régler le dossier au moment où ils étaient en poste, probablement. Alors, j'espère qu'avec cette collaboration que vous avez on va y arriver un peu plus rapidement, en fin de compte, avec l'implication du fédéral.

Mme Carrier-Perreault: Comme je le disais, M. le Président, ce n'est pas un dossier facile. Toutes les décisions qui ont été prises au niveau européen depuis plusieurs années font en sorte que la marche est haute, la pente est difficile à remonter. Je pense qu'on peut travailler à deux niveaux. Je pense qu'il faut continuer de le faire.

Le député de Frontenac disait tantôt: On ne peut pas tout faire. On a ciblé sur l'affaire de l'EPA, puis on a travaillé de ce côté-là. On a travaillé du côté des États-Unis, puis on a oublié ce qui se passait ailleurs, quoi. Là, je suis consciente – avant qu'il ne vous pose une question de règlement – que je caricature un peu les propos du député de Frontenac, mais avouez que ça ressemble un peu à ça. Ce que le député de Frontenac me dit, c'est que les efforts ont porté du côté de la défense, devant les Américains, de la plainte de l'EPA, soit.

Mais, moi, je pense qu'il faut travailler plus largement que ça. Ce qu'on essaie de faire, on essaie, d'une part, de faire cesser l'hémorragie. Comme je vous le dis, si on pouvait le faire par nous-mêmes, ce serait drôlement plus intéressant, parce que ce serait fait en déposant la plainte à l'OMC pour faire cesser ce qui se passe du côté de l'Union européenne et, par ailleurs, essayer de faire de la prévention, aller discuter de la position du Québec, par rapport à l'utilisation sécuritaire de l'amiante, chez les pays qui sont nos clients, les pays qui sont consommateurs pour essayer de sécuriser notre marché aussi de ce côté-là. Alors, je pense qu'on peut travailler aussi à deux niveaux à la fois, plus que sur juste un niveau.

Le Président (M. Sirros): Merci, Mme la ministre. M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: M. le Président, j'ai fait allusion, tout à l'heure, non pas à de la stratégie, j'ai décrit les stratégies passées, les stratégies actuelles – les stratégies, ce n'est jamais parfait – et je vais questionner la ministre, quant à moi, sur une autre stratégie qui devrait être mise en place. Je l'ai effleurée tout à l'heure, au tout début de nos échanges, à 9 h 45. M. le Président, j'ai dit qu'il faut, quant à moi, démontrer que les produits de substitution, les autres fibres que la fibre d'amiante qui est une fibre naturelle, les autres fibres, entre autres les fibres de verre, sont plus dangereuses, plus dommageables – ça a été fait, cette démonstration – que l'amiante.

Cette démonstration-là, technique, scientifique, a été faite, mais pas suffisamment expliquée, pas suffisamment publiée et aussi pas nécessairement continuée dans le temps, parce qu'il y a toujours des nouveaux produits, M. le Président, qui arrivent sur le marché. Et la difficulté que vit l'industrie de l'amiante, elle est attribuable à plusieurs facteurs. Premièrement, l'intérêt qu'ont les groupes, les entreprises à bannir l'amiante justement pour passer le produit de substitution.

Deuxième difficulté que vit l'amiante, M. le Président, c'est l'attaque démesurée à laquelle l'amiante a fait face, l'attaque par des groupes de protection de l'environnement, que ce soit en Europe ou ailleurs dans le monde. Ça, c'est carrément, dans certains cas, de la démarche au coin de l'émotion puis de la psychose. Ça, c'est la difficulté qu'a vécue l'amiante depuis des années et des années.

Question très précise: Est-ce que, au moment où on se parle, au gouvernement du Québec, il y a une stratégie d'attaque contre les produits de substitution? Est-ce qu'il y a une stratégie bien orchestrée pour démontrer à ceux et celles qui n'ont pas encore compris... Puis c'est beaucoup de monde, ça, là, pays consommateurs, entre autres, là, qui sont présentement sur le point de se faire convaincre qu'on doit abandonner l'amiante. Est-ce qu'il y a une stratégie au gouvernement du Québec, semblable à celle qu'on a connue dans le temps avec la complicité de l'Université de Sherbrooke, sur l'évaluation des produits de substitution, et, subséquemment, qu'est-ce qu'on fait de ces évaluations, de ces conclusions, de ces études?

Le Président (M. Sirros): Mme la ministre?

Mme Carrier-Perreault: Le problème qu'on a avec les produits de substitution et je pense que c'est un peu le même problème que l'ensemble des experts peuvent avoir ailleurs dans le monde, là, parce que, comme j'y faisais référence un peu, le comité d'experts mandaté par la DG 24, la commission européenne, les experts qui proviennent quand même d'institutions reconnues en Europe, semble-t-il, on est en Europe, hein, et eux autres bannissent... En tout cas, il y en a plusieurs qui ont déjà banni l'amiante. Mais même ce comité d'experts, finalement, a conclu qu'il n'y a pas de données suffisantes, au moment où on se parle, pour conclure à l'innocuité des fibres de substitution. C'est sûr. Ça fait moins longtemps qu'on les utilise.

Alors, qu'est-ce que vous voulez? On ne peut pas en inventer. On a cependant des éléments qui sont discutés, mais des preuves qui démontrent à tout crin qu'il y a des dangers de x, y, un peu comme on a fait avec l'amiante, c'est plus difficile parce que, bien souvent, on le sait, au niveau de l'amiante aussi c'est le problème. C'est que, quand on a découvert qu'il y avait des difficultés avec la fibre comme telle, c'était longtemps après l'utilisation. Les gens ont découvert ces maladies ou ces symptômes longtemps après avoir été en présence, si on veut. C'est des maladies qui se déclarent 20 ou 30 ans après. Alors, c'est sûr que l'utilisation des produits de substitution est quand même relativement jeune. On ne peut pas avoir exactement... Et ça, il y a eu beaucoup d'échanges, il y a beaucoup de discussions, et les experts peuvent en parler ensemble. Mais la difficulté, c'est qu'on n'a pas les mêmes possibilités de comparaison, si on veut.

(11 h 50)

On a, comme je vous dis, des inquiétudes et des craintes. Il y a des choses qui ont été démontrées. On parle de la fibre de céramique. Récemment, la fibre de céramique a été déclarée aussi cancérigène. Mais ça nous arrive au fur et à mesure, au fil du temps, avec l'utilisation. On voit les reportages, vous les voyez comme moi, par rapport au PVC, par exemple. On sait qu'il y a des groupes écologistes en Europe qui réclament le retrait des jouets en PVC, etc., vous avez vu ça récemment. Donc, au fur et à mesure que les gens se rendent compte qu'il y a des difficultés ou qu'il y a des risques à utiliser certains produits, ils sont en demande et tout ça, c'est sûr qu'on voit à ce moment-là qu'il y a des pressions qui se font. C'est sûr qu'on continue de suivre.

Vous savez, au Québec, et c'est ce qu'on dit aussi, d'ailleurs, on est convaincu qu'il y a d'autres produits qui peuvent entraîner le même genre de risques. On a des normes, par ailleurs, au niveau du travail, au niveau de la santé et de la sécurité au travail, quand on est au contact des fibres. On a des normes, au Québec, sur l'ensemble de ces produits-là.

Alors, nous, on essaie de dire: Dans le doute... C'est pour ça que je vous dis que, puisque l'utilisation est plutôt récente, on ne peut pas faire le même genre de démonstration que celle que l'on fait avec l'amiante qui est utilisé depuis le début des temps. C'est évident qu'on n'est pas au même niveau, au niveau des études. Mais ce qu'on essaie de faire comprendre aux gens, c'est qu'il faut prendre les moyens de protéger notre monde plutôt que d'apprendre après coup qu'il y avait vraiment énormément de dangers et d'avoir manqué le bateau, à toutes fins pratiques. Alors, c'est pour ça qu'on essaie d'expliquer la façon qu'on a, nous, de travailler et de faire travailler nos gens de façon sécuritaire quand il y a utilisation de ces fibres-là. Mais les gens continuent à travailler sur ce dossier-là, et c'est moins facile à démontrer parce que l'utilisation est plus récente.

Le Président (M. Sirros): Ça va, M. le député de Frontenac?

M. Lefebvre: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Sirros): Avez-vous d'autres questions?

M. Lefebvre: Moi, M. le Président, j'ai à peu près fait le tour des questions que j'avais identifiées en début d'exercice avec Mme la ministre.


Adoption des crédits

Le Président (M. Sirros): Est-ce qu'on serait prêt à passer à l'adoption des crédits touchant le programme 4, Gestion et développement de la ressource minière? Est-ce que ces crédits sont adoptés?

M. Lefebvre: Sur division, M. le Président.


Adoption de l'ensemble des crédits

Le Président (M. Sirros): Sur division. Est-ce que l'ensemble des crédits budgétaires du ministère des Ressources naturelles pour l'année financière 1998-1999 sont adoptés?

M. Lefebvre: Sur division, M. le Président.

Le Président (M. Sirros): Adopté sur division. Alors, la commission ayant accompli son mandat, nous ajournons nos travaux sine die.

(Fin de la séance à 11 h 54)


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