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Version finale

34e législature, 3e session
(17 mars 1994 au 17 juin 1994)

Le mercredi 20 avril 1994 - Vol. 33 N° 9

Étude des crédits du ministère des Ressources naturelles


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Table des matières

Journal des débats


(Neuf heures cinquante-deux minutes)

Le Président (M. Audet): Je déclare la séance de la commission de l'économie et du travail ouverte. Je vous rappelle le mandat de la commission. Nous sommes réunis afin de procéder à l'étude des crédits budgétaires du ministère des Ressources naturelles pour l'année financière 1994-1995. Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Gauvin (Montmagny-L'Islet) remplace M. Elkas (Robert-Baldwin); Mme Cardinal (Châteauguay) remplace M. Fradet (Vimont); M. Bergeron (Deux-Montagnes) remplace M. Joly (Fabre); Mme Loiselle (Saint-Henri) remplace M. Lafrenière (Gatineau); M. Messier (Saint-Hyacinthe) remplace M. Lemire (Saint-Maurice) et M. MacMillan (Papineau) remplace M. Poulin (Chauveau).

Le Président (M. Audet): Merci. Alors, au niveau des interventions, je crois qu'il y a une espèce d'entente à l'effet qu'on va faire une discussion d'ordre général et, ce soir, vers la fin de la séance, soit vers 17 h 45, nous pourrons procéder à l'adoption des crédits. Ça va?

M. Chevrette: Il y a deux programmes, excusez. Les forêts sont demain...

Le Président (M. Audet): Oui, c'est ça.

M. Chevrette: ...et les mines sont... je ne sais pas quand...

Le Président (M. Audet): C'est ça, 1, 6, 7. C'est ça?

M. Chevrette: C'est ça.

Le Président (M. Audet): Alors, j'invite immédiatement M. le ministre à faire ses remarques préliminaires. M. le ministre.


Déclarations d'ouverture


M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. En m'excusant tout d'abord auprès des membres de la commission pour mon retard inattendu ce matin. J'étais pris, malheureusement, dans un comité ministériel qui m'a obligé... de m'excuser auprès de vous. J'aimerais peut-être, tout d'abord, vous présenter les personnes qui m'accompagnent et qui vont m'assister au cours des heures qui vont suivre, soit: le sous-ministre en titre, M. François Geoffrion; M. Denis L'Homme, sous-ministre associé à l'énergie; M. Maurice Turgeon, sous-ministre adjoint aux services à la gestion; M. Louis-Gilles Picard, directeur des ressources financières, ainsi que M. Jean Giroux, président de la Régie du gaz naturel.

Récemment, le premier ministre m'a confié la responsabilité du ministère des Ressources naturelles, un nouveau ministère qui comprend l'énergie, les mines, les forêts et le territoire, en plus de ma responsabilité que j'ai conservée en tant que ministre délégué aux Affaires autochtones. Dans l'esprit du premier ministre et dans le mien, ce regroupement est beaucoup plus qu'une rationalisation administrative. Au-delà de l'économie des moyens, il démontre une volonté de considérer différemment les ressources naturelles, de les aborder de façon plus globale, de les intégrer dans la recherche d'un développement harmonieux et bénéfique pour toutes les composantes de la société québécoise.

Ce regroupement manifeste aussi une détermination de s'assurer que la force que représente pour nous ce secteur d'activité soit encore mieux utilisée et qu'elle serve tout autant les Québécois de demain que ceux d'aujourd'hui. Il ne faut pas oublier que les ressources naturelles représentent globalement plus de 10 % de l'ensemble du produit intérieur brut du Québec et fournissent quelque 185 000 emplois. Je ne parle ici, bien sûr, que des emplois directs, qui se traduisent, de plus, par un nombre additionnel d'emplois indirects ou d'emplois induits. Par ailleurs, les ressources naturelles représentaient, en 1992, des exportations de plus de 11 000 000 000 $, en réalité notre principal groupe d'exportations, et des investissements de près de 8 000 000 000 $. Une telle réalité justifie qu'on consacre des soins attentifs à la gestion des ressources naturelles du Québec.

De fait, l'intégration, en janvier dernier, du ministère de l'Énergie et des Ressources et du ministère des Forêts doit insuffler dans la gestion des ressources naturelles du Québec une dynamique nouvelle. Dans notre histoire, les ressources naturelles ont été un des pivots de notre développement. La création du ministère des Ressources naturelles doit donner le coup de barre nécessaire pour que cela continue d'être vrai dans l'avenir, grâce à une gestion optimale des ressources énergétiques, forestières, minières et territoriales. Un tel développement durable est certes exigeant, mais c'est la meilleure façon de contribuer au mieux-être de la population québécoise d'aujourd'hui comme de demain.

Évidemment, des coûts sont rattachés à cette intégration, mais ils pèsent peu en regard des économies d'échelle et des gains dans l'efficacité de la gestion. De fait, les coûts impliqués sont ponctuels et se concentrent presque exclusivement dans le déménagement à l'Atrium de certaines personnes qui travaillaient dans les unités centrales de l'ancien ministère des Forêts. Ces coûts sont évalués à 200 000 $ et engendreront, suite à l'effort de rationalisation au cours des deux prochaines années, une économie récurrente de 6 000 000 $.

Par ailleurs, l'intégration des deux ministères ajoute à la rationalisation du travail déjà entreprise dans le cadre de l'opération gouvernementale de réalignement, qui se réalise en gardant toujours à l'esprit que nous devons assurer à nos clientèles le meilleur service qui soit. Incidemment, des étapes importantes ont été franchies dans ce sens-là au ministère des Ressources naturelles. Je pense, par exemple, aux modifications à la structure administrative qui ont pour effet, en diminuant le nombre de cadres, de rapprocher ceux qui décident de ceux qui font le travail et de favoriser une plus grande participation de tous. Je pense aussi à la remise en question de certains produits et services offerts traditionnellement. Après examen, certains d'entre eux ont pu être diminués, voire abandonnés, parce qu'ils en étaient venus à moins bien cadrer avec la mission propre du ministère et que leur maintien ou, du moins, leur maintien au même niveau se faisait au détriment des activités les plus pertinentes pour nos clients. Je pense enfin à ce qu'on appelle dans le jargon administratif la «réingénierie des processus», c'est-à-dire cette réflexion sur les façons de faire qui débouche sur une simplification des procédures et une plus grande efficacité du travail et qui se traduit par une diminution des coûts. Une telle réflexion est en cours pour l'ensemble de nos processus. À titre d'exemple, le nouveau processus d'acquisition des biens et services permettra des économies récurrentes de l'ordre de 40 %. On peut aussi signaler que l'allégement de certains procédés administratifs a permis, par ailleurs, d'améliorer les services rendus aux industriels forestiers tout en diminuant les coûts de façon substantielle.

L'exercice mené jusqu'à maintenant a été très utile. Le ministère des Ressources naturelles s'est vu allouer des crédits inférieurs de 4,3 % à ce qu'ils étaient l'an dernier. Il a vu, par ailleurs, son effectif diminuer dans des proportions similaires. Mais une telle diminution ne compromet pas l'efficacité avec laquelle il s'acquittera de sa mission à l'égard de la gestion des richesses naturelles et du territoire public. Incidemment, je voudrais rappeler que l'action du ministère des Ressources naturelles est complétée par celle de six sociétés d'État et une régie, soit: Hydro-Québec, la Société de développement de la Baie James, la Société de récupération, d'exploitation et de développement forestiers du Québec, mieux connue sous le nom de REXFOR, la Société nationale de l'amiante, la SNA, la Société québécoise d'exploration minière, SOQUEM, la Société québécoise d'initiatives pétrolières, SOQUIP, et la Régie du gaz naturel.

En 1994-1995, le ministère des Ressources naturelles se voit attribuer des crédits totaux de 391 900 000 $ ainsi qu'un effectif total de 4044 emplois à temps complet, dont un effectif régulier de 3218 ETC. Ces diverses activités devraient par ailleurs assurer au gouvernement des revenus de près de 128 700 000 $, en hausse de 1,5 %. Il ne sera pas possible, dans le cadre de cette commission parlementaire, de faire le tour exhaustif de tous les dossiers sur lesquels s'est penché le ministère au cours de l'année qui vient de s'écouler, ni même de vous présenter tout ce qui fera l'objet de ses soins en 1994-1995. Je m'attarderai donc à vous présenter les activités qui me semblent les plus significatives de l'action du ministère dans chacun de ses grands secteurs d'activité au cours des derniers mois, comme dans un proche avenir.

(10 heures)

Dans le secteur des terres, le mandat du ministère touche principalement la connaissance du territoire et la gestion des terres du domaine public. Est-il besoin de rappeler que le domaine public québécois couvre plus de 1 400 000 km², soit 90 % du territoire, et qu'il recèle d'importantes ressources minières, forestières, fauniques et hydroélectriques? De plus, les réserves d'eau douce du Québec comptent parmi les plus importantes au monde, et le potentiel récréotouristique de son territoire est exceptionnel. L'exploitation des terres publiques et des ressources qu'elles renferment continue de jouer un rôle clé dans Québec et de ses régions.

Dans ce très vaste domaine d'intervention, j'aimerais attirer tout particulièrement votre attention sur trois grands dossiers qui ont fait l'objet de préoccupations de la part du ministère au cours de la dernière année et qui le feront encore dans les prochains mois. Je veux parler de la relance de la réforme cadastrale, du plan géomatique gouvernemental et de la politique de villégiature.

Ce n'est pas la première fois que vous entendez parler de ce dossier de la réforme cadastrale, et ce ne sera pas la dernière non plus, j'en suis sûr, parce qu'il s'agit là d'une opération exceptionnelle par son ampleur, par sa durée et par sa portée. Il s'agit en effet de moderniser et d'informatiser le cadastre québécois. Par exemple, on évalue le morcellement foncier actuel à quelque 3 300 000 immeubles, mais le cadastre officiel est demeuré, en bonne partie, le cadastre initial du XIXe siècle, qui ne comprenait que 700 000 lots originaires représentés sur les 1448 plans cadastraux. Depuis lors, 330 000 plans parcellaires de subdivision n'ont jamais été intégrés aux plans de cadastre officiels. Or, certaines dispositions du nouveau Code civil ne peuvent être appliquées sans une modernisation du cadastre, car le cadastre a comme rôle d'établir dans un registre public l'assiette de chacune des propriétés foncières contre laquelle doivent être enregistrés des droits immobiliers.

La rénovation cadastrale avait été lancée en 1985, mais les moyens déployés étaient nettement insuffisants. La réforme a été relancée sur le plan législatif au cours de 1992-1993, de même que sur le plan financier, mais il fallait aussi s'assurer que seraient mis en place des système aptes à recueillir, contrôler, valider et intégrer les nouvelles données cadastrales. C'est ce que le ministère s'est appliqué à faire au cours de l'année 1993-1994. De plus, l'Assemblée nationale a adopté, en décembre dernier, la Loi modifiant diverses dispositions législatives relatives au cadastre afin d'harmoniser de façon exhaustive les lois concernant le cadastre avec la terminologie et les nouveaux concepts retenus par le Code civil du Québec et d'accorder la prédominance à la version informatique des plans cadastraux lorsque cette version constitue l'original du plan. Au cours des prochains mois, les contrats de rénovation seront accordés pour les huit municipalités qui bénéficieront de la rénovation en 1994-1995. Il s'agit des municipalités suivantes: Anjou, Charlesbourg, Granby, Lac-Saint-Jean, Québec, Saint-Léonard, Sherbrooke et Trois-Rivières. J'aimerais signaler, par ailleurs, que le programme de réforme cadastrale, évalué à plus de 500 000 000 $, s'autofinance désormais par le biais du Fonds de la réforme du cadastre québécois.

Au niveau du plan géomatique gouvernemental, le ministère des Ressources naturelles a été un pionnier des technologies géomatiques, notamment avec son programme de cartographie numérique de base. C'est tout naturellement qu'il se retrouve membre du comité directeur du plan géomatique gouvernemental, dont le rôle est d'orienter et de coordonner l'action des intervenants gouvernementaux et de travailler sur plusieurs dossiers horizontaux liés à la mise en oeuvre du plan. Au cours des prochaines années, le marché de la géomatique fournira des occasions d'affaires très intéressantes à l'échelle mondiale, notamment en matière d'intégration de systèmes et de numérisation de données géographiques et foncières. On fera appel à des technologies de pointe telles que le positionnement satellitaire, la télédétection, la cartographie numérique et le traitement d'images. Avec les projets d'investissements de près de 100 000 000 $ qu'une douzaine de ministères et organismes publics comptent réaliser d'ici cinq ans, le gouvernement du Québec sera en mesure de stimuler le développement de l'industrie de la géomatique et de contribuer ainsi à la création d'emplois de haut niveau.

Au niveau de la villégiature sur les terres publiques, au cours du dernier exercice, le ministère a fait adopter 10 plans régionaux de développement de la villégiature, qui couvrent les principales régions du Québec. Il a par ailleurs achevé la consultation qu'il menait depuis 1991, autant à l'intérieur qu'à l'extérieur du gouvernement, sur le guide de développement de la villégiature sur les terres du domaine public. L'adoption d'une attitude rigoureuse en matière de villégiature et une fermeté de bon aloi dans le dossier des occupants sans droits nous permettent d'envisager avec optimisme le développement d'une approche plus harmonieuse, qui concilie conservation et utilisation du territoire dans le respect des partenaires du ministère.

Dans le secteur des forêts, le ministère a mis l'accent sur la création d'emplois et sur la viabilité de l'industrie forestière. Il a eu, de plus, le souci constant de mettre en place les meilleures pratiques de gestion forestière, dans une perspective de développement durable et de respect de la biodiversité. Ces attitudes auront un effet bénéfique pour le maintien et le développement de nos marchés extérieurs. En effet, à l'heure de la mondialisation des marchés, les préoccupations environnementales sans cesse croissantes des consommateurs d'ici et de l'étranger influencent le commerce international. Diverses modifications à la Loi sur les forêts ont été adoptées en décembre dernier. Elles permettent de tenir compte davantage des particularités régionales. Elles répondent aussi au désir de la population d'être plus présente dans la gestion des forêts. Elles ouvrent la porte à l'aménagement des forêts publiques à d'autres que les seuls propriétaires d'usines. Par ailleurs, les modifications touchent principalement les normes de protection des ressources du milieu forestier ainsi que l'application de certaines mesures relatives aux contrats d'approvisionnement et d'aménagement forestier, les CAAF, et à certains permis. Elles permettent d'assurer une meilleure protection des ressources et d'alléger le processus administratif relié à la gestion des forêts.

Je m'apprête à rendre publique, très prochainement, une stratégie gouvernementale de protection des forêts qui introduira des modifications majeures en matière d'aménagement forestier. Notre objectif est de mettre de l'avant des mesures préventives pour minimiser l'utilisation des pesticides, maintenir le rendement soutenu des forêts, favoriser le développement harmonieux de l'ensemble des ressources de la forêt et permettre de respecter les composantes biophysiques du milieu tout en assurant le maintien des approvisionnements des usines en matière ligneuse. Le ministère procédera tout naturellement, par la suite, à la révision du Règlement sur les modalités d'intervention en forêt pour tenir compte de cette stratégie et pour la mettre en application.

Il serait important de souligner, par ailleurs, que l'important effort de recherche du ministère dans le domaine forestier se poursuivra, en accordant une priorité à l'acquisition des connaissances requises par la stratégie. Il est aussi bon de rappeler que le ministère confie la responsabilité de protéger les forêts du Québec contre le feu à un organisme sans but lucratif qui regroupe les principaux utilisateurs forestiers. C'est la Société de protection des forêts contre le feu, ou SOPFEU. Il confie aussi la lutte contre les insectes et les maladies à la Société de protection des forêts contre les insectes et les maladies, la SOPFIM, tout en se réservant les activités de prévention et de détection dans ce dernier domaine.

L'exercice financier 1993-1994 a été marqué par la restructuration du système québécois de protection des forêts contre le feu. Avec la fusion des organismes responsables, il n'y a plus désormais qu'un seul centre de coordination, ce qui permettra de déployer les ressources de façon optimale en cas de crise. Le nombre d'incendies et les superficies ravagées ont été inférieurs à la moyenne, en 1993-1994. De plus, aucun programme de lutte contre la tordeuse des bourgeons de l'épinette n'a été nécessaire dans l'Est du Québec à l'été 1993. Il en sera de même en 1994. Après qu'elle eut longtemps menacé, l'épidémie semble terminée.

Le gouvernement entend continuer à appuyer, au niveau de la forêt privée, les propriétaires de boisés privés afin qu'ils puissent maintenir, à long terme, leur contribution à l'approvisionnement des usines de transformation et à l'économie locale en région. C'est pourquoi, comme je l'ai indiqué récemment à l'Assemblée nationale, j'ai demandé aux administrateurs de mon ministère de prendre les dispositions pour protéger l'enveloppe budgétaire destinée à la forêt privée. J'ai, de plus, annoncé mon intention de participer à un sommet de la forêt privée afin de définir avec l'ensemble des partenaires de ce secteur d'activité les orientations qui devront être privilégiées dans l'avenir.

Je tiens à profiter de notre débat pour vous rappeler à quel point la conjoncture est actuellement favorable à notre industrie forestière. Les effets cumulés d'une reprise économique substantielle aux États-Unis et la baisse récente du dollar canadien sont éminemment propices à l'exportation du bois d'oeuvre et des produits du papier. Dans ce contexte, il y a lieu d'être optimiste, parce que nous serons à la fois en mesure d'être concurrentiels et d'ajuster nos techniques de production pour accroître notre productivité et mieux prendre en compte les contraintes environnementales.

(10 h 10)

L'année qui vient de se terminer a été très active dans le secteur de l'énergie également. Parmi tous les dossiers qui ont marqué l'année, je voudrais insister plus particulièrement sur les suivants. L'année 1993-1994 a été la première année, au niveau de l'efficacité énergétique, de la mise en oeuvre du plan d'action de la stratégie d'efficacité énergétique. Elle a vu l'Observatoire de l'efficacité énergétique commencer officiellement ses activités. Constitué à la toute fin de l'exercice financier précédent, cet organisme doit évaluer l'évolution de l'efficacité énergétique, quantifier les économies réalisées et déterminer les potentiels virtuels d'économie. La formule retenue est très intéressante, ne serait-ce que parce qu'elle repose sur un partenariat actif et qu'elle permet l'établissement de liens fonctionnels et productifs entre tous ceux qui travaillent au Québec à l'amélioration de l'efficacité énergétique.

L'Observatoire, dont le secrétariat relève du ministère des Ressources naturelles, a produit, au tout début de l'exercice 1994-1995, un premier rapport sur l'état de l'efficacité énergétique au Québec. Ce rapport dresse un bilan historique de l'efficacité énergétique au Québec jusqu'en 1992. Il met en place la méthodologie qui servira ultérieurement à évaluer les résultats de la stratégie québécoise d'efficacité énergétique.

Avec votre permission, M. le Président, j'aimerais peut-être vous déposer le premier rapport annuel sur l'état de l'efficacité énergétique au Québec et aux membres de la commission.


Document déposé

Le Président (M. Audet): D'accord. Merci.

M. Sirros: En matière de recherche et développement, une attention particulière a été portée à l'efficacité énergétique et aux nouvelles sources d'énergie ainsi qu'au développement des technologies énergétiques nouvelles. Les projets de développement et de démonstration supportés dans le cadre du Programme d'aide au développement des technologies de l'énergie, qui s'échelonnent sur deux ou trois ans, représentent au total des mises de fonds de 35 200 000 $, dont 8 600 000 $ en subventions.

L'année a par ailleurs vu le début officiel de la deuxième phase du projet Euro-Québec Hydro-Hydrogène. Il s'agit de démontrer que les principaux éléments d'un système énergétique basé sur l'hydrogène sont réalisables et sécuritaires et qu'il y a moyen d'abaisser les coûts de façon significative. Au total, une vingtaine d'entreprises québécoises et une cinquantaine d'entreprises européennes sont associées à la réalisation du projet-pilote Euro-Québec Hydro-Hydrogène, qui doit se poursuivre au cours du présent exercice.

À l'occasion de la tenue, en mars 1993, de la première commission parlementaire élargie sur le premier plan triennal de développement d'Hydro-Québec, le ministère a procédé à l'analyse des mémoires et des témoignages entendus par la commission. Pour faire face aux prévisions de la demande, on sait que le gouvernement a approuvé ce plan, qui prévoyait notamment les projets du complexe Sainte-Marguerite 3 et de la ligne Lévis-des Cantons, deux projets importants dont la réalisation a été annoncée récemment.

Il serait à propos de rappeler que les grands projets énergétiques que le plan de développement d'Hydro-Québec prévoit pour les 10 prochaines années représentent, d'ici 1996 seulement, des investissements totaux de l'ordre de 10 000 000 000 $ et des emplois évalués, pour la durée des travaux, à 34 500 années-personnes. La réalisation de ces projets dépendra de l'équilibre énergétique envisagé. Hydro-Québec est, de fait, un acteur important dans le paysage économique du Québec.

Le ministère a continué d'assurer le suivi de l'application du Règlement sur les produits pétroliers, entré en vigueur en juillet 1991. Il a notamment vu à l'accréditation des maîtres installateurs avant juillet 1993. Actuellement, le ministère procède à l'enregistrement de tous les réservoirs non commerciaux d'ici juillet prochain. Le ministère se prépare à modifier le Règlement sur les produits pétroliers afin de mieux adapter ses prescriptions à ses différents contextes d'application et à éliminer un certain nombre d'irritants qui affectent les nouvelles catégories d'utilisateurs d'équipement pétrolier. Les modifications permettraient ainsi de réduire l'impact financier des exigences réglementaires tout en préservant les mêmes objectifs de sécurité.

Le ministère a par ailleurs réalisé, au cours de la dernière année, une réflexion importante sur l'application au Québec du concept de la planification intégrée des ressources énergétiques. Cette réflexion a permis l'élaboration d'un document qui devrait être soumis à une consultation publique, comme le premier ministre l'a annoncé dans son discours inaugural. Comme vous le savez, la planification intégrée des ressources énergétiques, qui est appliquée par un grand nombre d'organismes nord-américains responsables du développement énergétique, est un outil...

Le Président (M. Audet): M. le ministre, je m'excuse, votre temps de parole, pour vos remarques préliminaires, est terminé.

M. Sirros: Ah!

Le Président (M. Audet): Je ne sais pas si voulez conclure ou continuer parce que... Je vois que vous faites d'autres secteurs. Vous aurez à...

M. Chevrette: Est-ce que vous me permettez? Si j'ai bien compris, le ministre touche à tous les programmes, y compris les forêts, les mines. À ce moment-là, ce n'est pas le même porte-parole, du côté de l'Opposition.

M. Sirros: Je comprends.

M. Chevrette: Donc, demain, je suppose que le ministre ne reprendra pas ses notes de départ. En ce qui me concerne, vous en avez encore pour quatre ou cinq minutes, je suppose?

M. Sirros: À peu près cinq minutes.

M. Chevrette: Moi, je donne le consentement.

Une voix: C'est beau.

Le Président (M. Audet): Alors, à ce moment-là, demain, lorsque vous reprendrez, vous n'aurez pas de remarques préliminaires.

M. Sirros: Effectivement. On entrera directement dans le...

Le Président (M. Audet): D'accord. Alors...

M. Chevrette: Ni vendredi, pour les mines, avec mon collègue. C'est correct?

Le Président (M. Audet): Exact. D'accord. M. le député de Drummond.

M. St-Roch: Oui, je suis d'accord avec ça, M. le Président, mais je garderai les remarques préliminaires, pour chacun des secteurs, demain et vendredi.

M. Chevrette: Ça ne ferait pas de problème.

M. St-Roch: Concernant...

M. Chevrette: Étant donné que le ministre a un texte de base qui circule... Si le représentant des forêts, chez nous, demain, veut relever certaines choses, pas de problème.

M. Sirros: Il pourra le lire.

M. Chevrette: Il entreprendra les échanges. Moi, en ce qui me concerne, ça me va.

Le Président (M. Audet): D'accord. Alors, poursuivez.

M. Sirros: Merci, M. le Président. Alors, comme vous le savez, comme je disais, au niveau de la planification intégrée des ressources, c'est appliqué par un grand nombre d'organismes nord-américains responsables du développement énergétique. C'est l'outil qui permettrait de tenir compte de toutes les possibilités offertes pour réaliser l'équilibre entre l'offre et la demande, sans négliger l'amélioration des moyens de production et l'efficacité énergétique. Je crois que cette approche de planification devrait toucher toutes les formes d'énergie et s'appliquer dans le cadre géographique le plus large.

En effet, une planification intégrée des ressources qui s'appliquerait à l'échelle de cette partie de l'Amérique du Nord permettrait de mieux prendre en compte les avantages réels de l'hydroélectricité, notamment sur le plan de l'environnement, et de choisir la forme d'énergie la mieux appropriée aux besoins à combler. Comme j'ai eu l'occasion de l'évoquer il y a quelques jours devant le responsable de l'énergie du nord-est du Canada et des États-Unis, il y aurait des gains fort importants, sur le plan de l'efficacité énergétique et du contrôle de la pollution atmosphérique, si les 41 000 000 000 kWh qui sont produits actuellement en Nouvelle-Angleterre par des centrales thermiques utilisant des combustibles fossiles étaient produits par des centrales hydrauliques. En gain d'efficacité, cela correspondrait à économiser le quart de la consommation actuelle de pétrole dans cette même partie des États-Unis.

La conjoncture économique que j'ai évoquée il y a quelques instants devrait jouer globalement en faveur aussi du secteur des mines. C'est ce qu'on peut déduire de la hausse des dépenses d'exploration constatée l'an dernier ou des perspectives sur les différents marchés des produits minéraux. L'augmentation du niveau d'activité sur la scène mondiale sera en effet favorable à une augmentation graduelle du prix des métaux et de la consommation des minéraux. L'industrie minérale québécoise devrait donc connaître une hausse de ses activités en 1994.

Dans ce contexte général, plusieurs dossiers qui ont attiré particulièrement l'attention du ministère au cours de la dernière année seront, cette année encore, au centre de ses préoccupations. Ainsi, on a constaté que le régime de droits miniers actuellement en vigueur au Québec a un rendement négatif depuis plusieurs années. Une étude a été entreprise au cours de l'automne 1993 pour réviser en profondeur le régime fiscal applicable à l'exploration minière. Les réformes souhaitées devraient amener le régime à ne plus être déficitaire, tout en demeurant favorable au développement de cette industrie. On n'envisage pas de modifier le taux de redevances. Le ministère devrait faire une proposition sous peu, de façon à ce que la loi puisse être modifiée avant la fin de l'année.

Lors du budget de mai 1993, le ministre des Finances a annoncé qu'il prolongeait jusqu'au 31 décembre 1995 les bonifications apportées en 1992 au régime des actions accréditives. Une première modification augmente la déduction pour l'exploration de surface de 166,6 % à 175 % et réduit la déduction associée à l'exploration souterraine de 133 % à 125 %. Une seconde modification s'adresse aux investisseurs ayant épuisé leur exonération à vie de 100 000 $ sur les gains en capital; elle leur permet de n'être imposés que sur la différence entre le prix de revente et le prix d'acquisition des actions accréditives. La partie du produit de la revente comprise entre zéro et le prix d'acquisition n'est donc plus imposable. De telles conditions ne sont sûrement pas étrangères au fait que les investissements en exploration ont connu une augmentation en 1993 par rapport à 1992.

(10 h 20)

Le plan de relance prévoit consacrer, au total, 50 000 000 $ à des projets miniers. De ce montant, 30 000 000 $ seront consacrés, au cours des deux années qui viennent, à des projets de développement minier rendant possibles des investissements de plus de 800 000 000 $ ainsi que la création de près de 3300 emplois permanents et de plus de 7500 emplois temporaires. Une autre somme de 20 000 000 $ sera par ailleurs affectée à des projets d'environnement minier, dont des travaux de restauration de parcs à résidus miniers. Dans ce dernier cas, l'investissement gouvernemental, qui sera réparti de 1995 à 1997, devrait susciter des investissements totaux de près de 30 000 000 $ et générer des emplois équivalant à 150 personnes-année.

Même si la Loi sur les mines a été modifiée en 1991 pour inclure des dispositions sur le réaménagement et la restauration des terrains affectés par des activités minières, ces dispositions ne peuvent s'appliquer aussi longtemps qu'elles n'auront pas été précisées par voie de règlement. Le ministère travaille à la préparation d'un tel règlement en étroite collaboration avec les associations minières et le ministère de l'Environnement et de la Faune. Un projet de règlement a été publié dans la Gazette officielle du 22 septembre dernier, et nous travaillons actuellement à préparer la version définitive du règlement, suite aux remarques et commentaires qui nous ont été faits à cette occasion. Le ministère a reçu pas moins de 12 mémoires de commentaires provenant de l'industrie, d'organismes régionaux intéressés et d'associations minières. On prévoit que le règlement et les dispositions législatives concernant la restauration des sites miniers pourront entrer en vigueur au cours de l'été 1994.

En terminant, M. le Président, je crois qu'il est important, avant que les députés de l'Assemblée nationale ne soient appelés à voter les crédits de 1994-1995, de souligner l'effort consenti pour mettre en valeur nos ressources naturelles. Je tiens d'ailleurs à souligner que le gouvernement a pu réaffecter des sommes significatives à la relance économique et à la création d'emplois parce que les ministères ont fait des efforts importants de rationalisation de leurs dépenses. Au ministère des Ressources naturelles, l'effet net de ces compressions atteint 24 500 000 $. Le ministère des Ressources naturelles contribuera, d'une part, à la réalisation des politiques gouvernementales qui concernent les ressources naturelles et, d'autre part, à des projets spécifiques aux ressources naturelles.

Les orientations gouvernementales qui nécessitent l'appui du ministère sont nombreuses: plan de relance de l'emploi, déréglementation, développement régional, libéralisation des échanges, etc. Trois mesures du plan de relance de l'emploi annoncées en novembre 1993 sont gérées par le ministère: création d'emplois en forêt, investissements miniers et environnement minier. Un montant de 90 000 000 $ est alloué à ces mesures sur une période de trois ans débutant en 1994-1995. Ces mesures devraient amener l'industrie à investir plusieurs centaines de millions de dollars et la création de milliers d'emplois dans la région, dont certains dans les prochains mois.

Ainsi, en prenant en compte les crédits de 18 400 000 $ attribués en 1994-1995 au Conseil exécutif pour les secteurs forestier et minier dans le cadre du plan de relance, les montants totalisant 23 000 000 $, soit une augmentation de 5 500 000 $, prévus dans les comptes à fin déterminée pour la part fédérale du financement de l'Entente auxiliaire Canada-Québec sur le développement minéral et de l'Entente auxiliaire Canada-Québec sur le développement forestier, ainsi que les crédits prévus au Fonds de développement technologique et dans d'autres fonds, et qui seront transférés au ministère des Ressources naturelles en cours d'exercice, le budget total consacré au secteur des ressources naturelles passera de 443 000 000 $, en 1993-1994, à 446 800 000 $, soit une augmentation de 3 800 000 $. Dans le contexte budgétaire actuel, il s'agit là d'un effort significatif qui montre bien la priorité que le gouvernement accorde au développement économique et à l'emploi dans les régions du Québec. Merci pour votre attention, M. le Président.

Le Président (M. Audet): Merci, M. le ministre. Je vais maintenant reconnaître M. le député de Joliette.


Secteurs terres et énergie


Remarques préliminaires


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je vous remercie. Vous me permettrez, tout d'abord, de dire qu'on se limitera aux programmes 1...

Une voix: 6 et 7.

M. Chevrette: ...6 et 7, aujourd'hui, plus particulièrement les terres, sur la fin de l'après-midi, pour les fins des fonctionnaires qui doivent se déplacer. Permettez-moi d'abord de saluer le personnel du ministère des Ressources naturelles et des organismes relevant de sa compétence qui sont ici aujourd'hui pour nous aider. Sans leur apport, nous serions plutôt démunis pour tenir l'exercice que nous tenons ce matin. D'ailleurs, trop souvent, on oublie de souligner la contribution inestimable des employés de la fonction publique québécoise au développement du Québec, et je voulais absolument prendre quelques instants pour le mentionner.

Nous en sommes aujourd'hui à la neuvième étude des crédits du ministère des Ressources naturelles du gouvernement libéral, auparavant ministère qu'on appelait Énergie et Ressources. Il s'agit d'ailleurs, M. le Président, du plus long mandat, depuis la Seconde Guerre mondiale, pour un gouvernement du Québec. Depuis le 3 avril dernier, c'est le plus long mandat depuis la Seconde Guerre mondiale. Personnellement, j'aurais cru que le gouvernement ne tenait pas à battre ce record, mais il apparaît de plus en plus évident que ce gouvernement a l'intention de s'accrocher le plus longtemps possible, même si la population en a ras le bol.

Le ministère des Ressources naturelles a subi quelques transformations au cours de la dernière année. En plus de changer de nom, le ministère des Ressources naturelles a renoué avec ses anciennes amours, les Forêts. La séparation, en 1991, puis la réintégration des Forêts au sein du ministère des Ressources naturelles, en 1994, a coûté la modique somme de 30 000 000 $ aux contribuables québécois. 30 000 000 $ pour satisfaire les caprices de l'ex-député de Rivière-du-Loup, c'est pas mal trop cher, à notre point de vue. D'ailleurs, on se demande bien comment l'ancien président du Conseil du trésor et aujourd'hui premier ministre du Québec a pu autoriser un tel gaspillage des fonds publics. Avec de pareilles aberrations, on comprend pourquoi la population a hâte d'en découdre avec le gouvernement libéral actuel.

À chaque année, lors de l'étude des crédits, il est de coutume de dresser un bilan des activités de chaque ministère. Au chapitre des ressources naturelles, mis à part la réintégration du ministère des Forêts au sein du ministère des Ressources naturelles, l'année financière 1993-1994 fut relativement tranquille. En fait, c'est encore en périphérie du ministère des Ressources naturelles, soit à Hydro-Québec, qu'il s'est passé le plus de choses. Même si les crédits d'Hydro-Québec ne sont pas étudiés par l'Assemblée nationale, il n'en demeure pas moins que la société d'État relève de la responsabilité du ministre des Ressources naturelles et que ce dernier est redevable devant l'Assemblée nationale. En conséquence, il ne faudrait pas que le ministre soit surpris si plusieurs de mes questions portent sur Hydro-Québec. De fait, l'étude des crédits constitue la seule occasion, à l'exception de la période des questions à l'Assemblée nationale, pour les députés de questionner le ministre responsable d'Hydro-Québec sur les activités de cette dernière.

L'étude du plan de développement et le suivi au plan de développement permettent aux députés de questionner les représentants de la société d'État, mais pas le ministre responsable. Cette année encore, les fameux contrats à partage de risques ont défrayé les manchettes des journaux et des bulletins de nouvelles. Comment pourrait-il en être autrement quand les Québécois constatent à chaque jour l'immense gouffre dans lequel s'enfonce Hydro-Québec, avec les contrats secrets? Rappelons quelque peu l'ampleur du désastre. En 1993, les pertes ont été de 324 000 000 $. À l'horizon de l'an 2010, deux scénarios: l'un qui est admis par Hydro-Québec, prévoyant des pertes de 1 500 000 000 $, et l'autre, émanant d'Hydro-Québec aussi mais non confirmé et que l'on dit plus proche de la réalité cependant, mais qui n'a pas été confirmé, comme je le disais antérieurement, anticipe des pertes de 2 900 000 000 $.

Quoi qu'il en soit, il s'agit d'une catastrophe imputable en tout premier lieu au gouvernement libéral, qui a forcé Hydro-Québec à signer ces contrats secrets. Le même constat peut être fait dans le dossier de la production privée d'électricité par l'entremise de la cogénération. Tous savent qu'Hydro-Québec avait de sérieuses réticences à s'embarquer dans la cogénération, mais le gouvernement a insisté et Hydro-Québec a signé de nombreux contrats. Aujourd'hui, la réalité économique a rattrapé Hydro-Québec, et les besoins sont moins élevés que prévu. Résultat: l'objectif d'achat d'électricité provenant de la filière de la cogénération a été réduit de 760 MW à 500 MW, ce qui obligera la société d'État à annuler plusieurs contrats. De plus, des indemnités variant de 40 000 000 $ à 50 000 000 $ devront être versées aux producteurs lésés. Ça, c'est ce qu'on appelle jeter son argent par les fenêtres. Le problème, c'est que l'argent d'Hydro-Québec, c'est l'argent de vous et de moi, de tous les Québécois. Toutefois, dans le dossier de la cogénération, rien n'est acquis, puisque le premier ministre du Québec a indiqué que c'est lui qui déciderait de l'objectif, et non pas Hydro-Québec. Même si cette dernière soutient ne plus avoir besoin de toute cette électricité, le gouvernement libéral, c'est évident, se garde le droit d'utiliser la cogénération à des fins électorales.

(10 h 30)

Hydro-Québec a également, il faut bien le dire, connu des déboires quant à ses exportations d'électricité. Le contrat de 800 MW, d'une valeur de 5 000 000 000 $, avec l'État de New York a été annulé, tandis que le contrat en négociations avec Edison est loin d'être conclu. Enfin, Hydro-Québec, qui occupe une place majeure dans l'économie québécoise, soutiendra 11 900 emplois de moins que prévu au cours des prochaines années. Sur ces 11 900 emplois de moins, 6000 sont directement imputables aux contraintes imposées par le gouvernement libéral, qui, d'un côté de la bouche, prétend créer des centaines de milliers d'emplois et, de l'autre côté, contribue à soutenir 6000 emplois de moins.

L'année 1993-1994 fut aussi l'année du départ de l'ex-ministre des Ressources naturelles, qui avait souhaité avant de partir que son gouvernement consente à la mise sur pied d'une régie de l'énergie. Malheureusement pour elle, le Conseil des ministres lui a exprimé une fin de non-recevoir. Pourtant, la proposition était passablement intéressante. En effet, la situation énergétique au Québec, comme ailleurs dans l'ensemble du monde contemporain, commande l'adoption de nouvelles approches, mieux adaptées à la complexité croissante de multiples exigences environnementales, sociales, économiques et techniques qui s'imposent dans ce domaine.

Les choix énergétiques doivent tendre vers un optimum à la fois économique, social et environnemental. Cela revient à considérer toutes les sources énergétiques disponibles, y compris, et en premier lieu, l'accroissement de l'efficacité énergétique. De plus, ces choix énergétiques doivent être transparents, c'est-à-dire soumis à un débat démocratique ouvert, articulé et permanent. Pour atteindre cet optimum, il faut se doter d'institutions indépendantes et passer à la planification intégrée des ressources, que l'Opposition privilégie depuis plusieurs années, contrairement au gouvernement actuel, qui semble avoir découvert ce concept il y a quelques semaines, sans doute en raison de l'imminence d'une joute électorale.

La création d'un organisme indépendant, que l'on peut appeler une régie ou une commission de l'énergie, permettrait au gouvernement d'effectuer des choix éclairés et libres de toute attache. Cet organisme pourrait faire contrepoids à Hydro-Québec, qui occupe actuellement tout le terrain. En effet, ces plans de développement pèsent d'un poids déterminant sur la réalité des politiques actuelles. Ces attitudes à l'égard des sources et des technologies alternatives conditionnent les attitudes gouvernementales, et, à cet égard, l'ampleur des ressources qu'elle peut consacrer à ses propres activités de recherche et de développement est sans commune mesure avec les autres ressources correspondantes, qu'il s'agisse de ressources gouvernementales ou privées. Qui plus est, les relations qu'Hydro-Québec entretient avec le gouvernement font en sorte que le contrôle démocratique ne peut pas toujours s'exercer normalement. En contrepartie, la société d'État n'est pas à l'abri d'ingérence politique, comme nous avons pu le constater depuis quelques années, avec le gouvernement actuel. Un organisme indépendant entre Hydro-Québec et le gouvernement, comme cela existe ailleurs au Canada et aux États-Unis, éviterait à tout le monde les situations de conflit d'intérêts et les situations où Hydro-Québec est à la fois juge et partie. Bien entendu, cet organisme engloberait les activités de la Régie du gaz naturel et aurait compétence sur l'ensemble des filières énergétiques. Hydro-Québec pourrait ainsi davantage se concentrer sur son mandat premier, soit de produire et de distribuer l'électricité.

Toutefois, avant de procéder à ces changements, il conviendrait – et j'invite, encore une fois, le gouvernement à le faire – de tenir un vaste débat public sur les choix énergétiques du Québec. Cet exercice est essentiel à l'élaboration d'une politique énergétique sensée. De notre côté, il est clair que nous avons fait le choix d'agir de façon ouverte et transparente. Je constate, avec regret, que le gouvernement a, pour sa part, fait le choix de fonctionner en vase clos.

M. le Président, compte tenu du temps mis à notre disposition, je suis prêt à débuter immédiatement, en informant le ministre qu'il y a plusieurs dossiers, outre ceux auxquels j'ai fait référence, dont j'aimerais discuter. Je vous les nomme rapidement: la stratégie québécoise d'efficacité énergétique, les filières énergétiques éolienne et solaire, SM 3, les tarifs d'électricité, les petites centrales hydroélectriques, la Régie du gaz naturel, le développement des villégiatures, l'extension du réseau gazier, Soligaz, la réforme du cadastre, le rapport du Vérificateur général et quelques autres dossiers.

Voilà un peu l'ensemble. Je toucherai, de façon plutôt informelle, et comme on a pris l'engagement, à 17 h 45 ou vers 17 h 45, 18 heures c'est-à-dire, 17 h 45, nous adopterons en bloc les trois programmes sur lesquels je suis critique. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Audet): Merci, M. le député de Joliette. Je vais maintenant reconnaître M. le député de Drummond.


M. Jean-Guy St-Roch

M. St-Roch: Merci, M. le Président. Je n'ai pas l'intention de refaire l'exposé de M. le ministre ainsi que celui du député de Joliette, mais lorsqu'on avait fait la commission parlementaire sur le développement énergétique d'Hydro-Québec, voilà bientôt un an passé, j'avais formulé des recommandations. C'est à partir de ces recommandations que je m'attacherai à faire le point, avec M. le ministre ainsi que son personnel, sur les avancements de différents dossiers.

Une politique énergétique, M. le Président, avait été une des recommandations que j'avais formulées à ce moment-là, et elle devait être soumise à une consultation publique. Alors, j'aimerais échanger avec M. le ministre: où est-on est rendus. Durant ses remarques préliminaires, M. le ministre a touché la planification intégrée. Alors, j'aimerais qu'on aille davantage et qu'on approfondisse, à partir des recommandations que le groupe- conseil en énergie vous avait faites, concernant spécifiquement quatre dossiers, qui étaient: le chauffage, la biénergie, la cogénération et le transport. D'utiliser ces quatre volets pour faire en sorte que le ministère se donne une politique intégrée. Et j'ajouterai: en considérant toutes les externalités.

J'avais mentionné aussi, lors de cette commission parlementaire, qu'il était de plus en plus difficile d'avoir des grands consensus sociaux, surtout dans un secteur du gouvernement qui est toutes les ressources naturelles, où on touche, à ce moment-là, autant le volet économique que le volet environnemental et le volet social. Et qu'on s'apercevait de plus en plus – d'ailleurs, une étude de Charles Taylor nous l'avait clairement démontré – qu'il était difficile, devant cette fragmentation des consensus, d'établir de grands modèles. Alors, j'avais suggéré que, devant l'évolution de ces valeurs sociales, un programme de recherche soit mis en place. Enfin, qu'on soit capable de déterminer les grands déterminateurs qui feront en sorte que, dans les années futures, on soit capable d'établir des modèles qui nous permettraient de dégager ces consensus-là en tenant compte des trois paramètres que j'ai énumérés.

Un autre volet, aussi, que M. le ministre a complètement évacué de son exposé, mais sur lequel j'aimerais revenir, M. le Président, c'est toute la consécration et la volonté, suite à une table ministérielle qui a été mise en place, sur la sauvegarde de rivières dites patrimoniales, que je me plais à appeler «rivières sauvages». Qu'on puisse laisser aux générations futures des rivières qui ne seront pas harnachées; qu'on puisse dire: Voici la beauté du Québec des années quatre-vingt-dix. Tout particulièrement, il y avait une rivière, je pense, qui avait toutes ces caractéristiques-là, qui était l'Ashuapmushuan, et une partie, aussi, de la Moisie, et qu'on retouchera avec le développement de la Saint-Maurice. Alors, j'aimerais qu'on ait la chance d'élaborer davantage: où on est rendu, au niveau du ministère de l'Énergie, sur la sauvegarde de ces rivières patrimoniales pour les générations futures.

Un autre sujet que j'aimerais qu'on touche et qu'on regarde... C'est beau de parler de politique énergétique, c'est beau de parler qu'on a mis un office en place, qu'on a fait le point. Il y avait deux grands volets qui nous étaient apparus, à un moment donné, lors de ces consultations publiques. C'était toute la révision des normes et des bâtiments au niveau de l'efficacité énergétique. Alors, j'aimerais échanger avec M. le ministre et ses collaborateurs sur la situation du ministère. Où on est rendu, et quelles recommandations on fera au niveau de l'amélioration de ces codes de bâtiment?

Il y a une autre chose qui nous était apparue claire et évidente: Qu'il y ait des mesures qui coûtent très peu et qui se passent au niveau de la révision des plans d'urbanisme, où on peut utiliser le salaire passif, entre autres, pour faire en sorte qu'on puisse maximiser davantage, en réalisant pleinement que ce volet-là touche aussi le monde municipal et qu'il se devait d'y avoir des échanges autant avec le milieu municipal qu'avec le milieu des ressources naturelles.

Finalement, M. le Président, M. le ministre y a touché au niveau de la réforme cadastrale. Il y a un volet sur lequel j'aimerais échanger avec M. le ministre, et c'est dans la foulée de cette maladie de privatisation qui semble nous avoir attaqué. Ça semble être un virus incurable, pour le moment, où on parle de plus en plus de privatiser l'informatique. Alors, lorsque je regarde, moi, un volet comme la réforme cadastrale – et vous l'avez souligné avec justesse – qui va impliquer des sommes fantastiques, qu'il faut faire... qu'il faut actualiser. Elle repose, cette réforme cadastrale, sur l'informatique. Alors, j'aimerais échanger avec M. le ministre. Est-ce que cette réforme, qui est en train de s'amorcer, qu'on est en train de poursuivre... Est-ce que l'informatique va faire partie de cette privatisation-là? Et les dossiers qui sont regardés à l'heure actuelle par le ministère des Finances...

Alors, sur ceci, M. le Président, je conclurai en disant que je vais aborder les travaux avec la même ouverture d'esprit que j'ai toujours manifestée, en vous rappelant que le mandat du député de Drummond est d'être le porte-parole et le mandataire de ses citoyens et citoyennes et d'être celui qui pourra avoir des réponses pour leur retransmettre lorsqu'il reviendra. Je n'ai pas touché les petites centrales parce que mon collègue de Joliette a manifesté l'intention d'y revenir; j'aurai des interventions aussi à faire à ce sujet-là. Sur ceci, je conclus et je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Audet): Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres remarques avant que nous puissions débuter l'étude ou les discussions? Ça va? M. le ministre, avez-vous des... Ça va?

M. Sirros: Ça va.

(10 h 40)

Le Président (M. Audet): Alors, je reconnais M. le député de Joliette.


Discussion générale


Contrats à partage de risques

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Le premier thème que je voudrais toucher, M. le ministre, ce sont les contrats à partage de risques, dont on a parlé beaucoup, y compris avec Hydro, mais on n'a pas pu questionner directement le ministre. C'était Hydro-Québec qu'on questionnait.

Même s'il s'est posé beaucoup de questions, je voudrais personnellement demander au ministre s'il a été mis au courant des divers scénarios qu'a présentés Hydro-Québec quant aux pertes par rapport au tarif L. Est-ce que vous avez eu sous les yeux, comme ministre responsable ou ministre de tutelle d'Hydro-Québec, l'ensemble des scénarios préparés par Hydro-Québec sur les pertes éventuelles à la fin de l'échéance des contrats secrets?

M. Sirros: Il faudrait peut-être que le député précise un peu le sens de sa question. On a eu beaucoup d'échanges et de discussions avec Hydro-Québec sur les contrats à partage de risques.

M. Chevrette: Non, mais par rapport à ce que j'affirmais dans mon texte de départ, c'est qu'Hydro-Québec a reconnu un scénario où il y avait perte de 1 500 000 000 $ ou 1 700 000 000 $. 1 500 000 000 $. Mais je sais qu'il y a des scénarios à l'interne qui vont jusqu'à 2 900 000 000 $, et même, d'autres, un peu plus. Est-ce que vous avez pu voir l'ensemble des scénarios, comme ministre responsable? Est-ce que vous les avez demandés?

M. Sirros: M. le Président, une petite correction, d'abord. Il ne faut pas parler de perte. C'est autre chose, un manque à gagner. Une perte, c'est autre chose.

Il y a effectivement des scénarios de manque à gagner qui peuvent circuler. C'est facile à comprendre qu'il peut y avoir toutes sortes de scénarios, dépendant des hypothèses qui circulent. Donc, je ne peux pas affirmer que j'ai vu tous les scénarios possibles qui, possiblement, circulent à l'intérieur d'Hydro-Québec par différentes personnes qui peuvent en faire, mais j'en ai amplement discuté avec les dirigeants de l'entreprise, avec les responsables pour les décisions qui sont prises par la société d'État au niveau de ça, pour être convaincu qu'on s'assure, à l'intérieur des contrats qu'on a signés, qu'on doit respecter, qu'on prend toutes les dispositions nécessaires pour tirer le maximum d'avantages des contrats signés.

M. Chevrette: Mais est-ce que le ministre, qui fait la distinction – tout à fait correcte – entre perte et manque à gagner, a été mis au courant, par exemple, de scénarios où les pertes pourraient être jusqu'à 2 000 000 000 $ et plus, et que le manque à gagner pourrait être de près de 5 000 000 000 $?

M. Sirros: Non, M. le Président.

M. Chevrette: Est-ce que le ministre, qui, tout comme moi, a eu, pour la première fois, lors de la dernière commission sur l'énergie... On a appris, de la bouche du président d'Hydro-Québec, qu'il y avait une clause de réouverture. Ça fait un an et demi qu'on en parlait. Il y a une réouverture possible des contrats ou une clause de révision de certains contrats, en tout cas, sans dire lesquels, sans dire si c'étaient tous ou un certain nombre seulement... On a appris, de la bouche de M. Drouin, qu'il y avait une possibilité d'une clause de réouverture située vers l'année 1995, si j'ai bien compris ou si on a bien entendu à la télé ou lu dans les journaux, et même ce que... Il y en a qui ont parlé de 1995, de l'an 2000. Est-ce qu'il y a une date précise de clause de réouverture?

M. Sirros: Je dois dire, M. le Président, que lors de la dernière commission parlementaire, je ne peux pas dire que c'était la première fois que j'entendais parler d'une réouverture possible, ni que c'était la première fois que j'en faisais mention. J'en avais fait mention bien avant ça. C'est pour ça que j'étais un peu confus par rapport à certains titres qui ont circulé à cette époque.

En 1995, il n'y a pas de réouverture possible. Il y a un ajustement automatique à la hausse d'un des contrats. Les dates où on peut réviser les contrats au niveau de ce qu'ils appellent en anglais «hardship clauses», des clauses qui nous permettraient peut-être de revoir l'application de ces contrats, dépendant de la situation particulière, varient pour les contrats. C'est des clauses qui nous permettent de parler d'iniquité, 2002, 2008, 2009, dépendant des contrats. Avant ça, il n'y a aucune possibilité de réouverture.

M. Chevrette: Mais, 1995, vous disiez...

M. Sirros: 1995, c'est au niveau d'un des contrats...

M. Chevrette: Un seul contrat?

M. Sirros: Deux contrats.

M. Chevrette: Deux?

M. Sirros: Trois... Mais c'est des redressements automatiques, mécaniques, je dirais. Ce n'est pas une réouverture des contrats. Ce n'est pas un réexamen pour cause d'iniquité.

M. Chevrette: Et, pour cause d'iniquité, ça commence en 2002?

M. Sirros: 2002.

M. Chevrette: Jusqu'en 2009.

M. Sirros: C'est ça.

M. Chevrette: Et les contrats sont valides jusqu'en quelle année?

M. Sirros: Ça varie. C'est pour 25 ans; dépendamment quand ils ont été signés. Peut-être que M. L'Homme pourrait donner des détails.

M. L'Homme (Denis): C'est exact, M. le Président. Je n'ai pas le détail du début des contrats, mais, effectivement, les contrats sont de 20, 25 ans. Alors, ça s'échelonne jusqu'en l'an 2015, 2020, si on fait les calculs.

M. Chevrette: Est-ce que c'est possible que le dernier finisse en 2016?

M. L'Homme (Denis): Ça se peut. Il y en a un, effectivement, qui se terminerait en 2016, M. le Président, et en...

M. Sirros: 2014.

M. L'Homme (Denis): ...2014. Il y en a deux en 2014. 2012. Il y en a deux en 2016.

M. Chevrette: À l'oeil – vous l'avez peut-être aussi, la réponse précise – la clause de révision pour iniquité se situe à combien d'années de la fin de l'échéance? Si vous prenez, par exemple, celui de 2002, l'échéance doit être beaucoup plus proche que 2016. C'est à cinq ans de la fin? C'est à 10 ans de la fin? C'est quoi?

M. L'Homme (Denis): 2002... 2002, ce serait à 12 ans de la fin, puisqu'il y en a un, ici, qui se termine... Celui qui a le 2002 se terminerait en 2014.

M. Chevrette: Lui, c'était 12 ans. Ah! ce n'est pas automatique. Ce n'est pas la même...

M. L'Homme (Denis): Non.

M. Chevrette: Ce n'est pas nécessairement la même date avant l'échéance que la clause d'iniquité s'applique.

M. L'Homme (Denis): Ça ne semble pas être constant, là. Je n'ai pas fait la comparaison cas par cas. Il y en a plusieurs, mais il me semble que celui-là, celui que j'ai, qui se termine en 2002, le contrat se termine en 2014.

M. Chevrette: Et celui qui finit en 2016, par exemple, pourriez-vous me dire quelle est l'échéance de la clause d'iniquité?

M. L'Homme (Denis): 2016? Oui. C'est 2002, celui-là. Celui-là aussi, c'est 2002.

M. Chevrette: Et est-ce qu'il y en a qui ont des échéances beaucoup plus proches de la fin?

M. L'Homme (Denis): Où la réouverture serait plus proche de la fin du contrat?

M. Chevrette: Oui.

M. L'Homme (Denis): Il semble que non, parce que, ici, c'est tout du 2002; iniquité: 2002, 2002, et moi, je vois, ici, c'est 2016, 2014, 2000...

M. Chevrette: Qui a le fardeau de la preuve pour prouver l'iniquité?

M. L'Homme (Denis): Il faudrait voir à l'intérieur des contrats. Ma compréhension, M. le Président, c'est que chacune des parties peut invoquer cette clause. Hydro, par exemple, pourrait, si jamais le prix de l'aluminium fait en sorte que – ou le prix du produit en cause; ce n'est pas toujours l'aluminium – était beaucoup trop loin du tarif L, Hydro pourrait invoquer cette clause-là, comme l'entreprise, si jamais le tarif L était beaucoup plus bas que le prix qu'ils paient, pourrait invoquer la clause. C'est ma compréhension.

M. Chevrette: Les deux parties pourraient...

M. L'Homme (Denis): Les deux parties peuvent l'invoquer.

M. Chevrette: Est-ce que le ministère avait été consulté – ma question s'adresse peut-être plus au sous-ministre, là; je pense que le ministre comprendra – est-ce que vous aviez été consulté, comme ministère, sur les critères à mettre, ou les balises à mettre dans un tel contrat à partage de risques? À votre connaissance, là. Je comprends qu'il y a des nouvelles figures; je peux comprendre ça, là.

M. Sirros: Disons que, moi, je n'ai pas été consulté à l'époque; je n'étais pas dans le dossier. Alors, ma souvenance de la façon dont ça fonctionne, c'est qu'il y a des échanges nécessaires entre... Oui, le sous-ministre pourrait peut-être y aller.

M. Geoffrion (François): Comme chaque contrat est approuvé par décret sur recommandation du ministre responsable de l'énergie ou d'Hydro-Québec, la coutume, au ministère, est habituellement de faire à tout le moins une évaluation et une opinion technique pour le ministre avant qu'il prenne la décision de recommander ou pas l'approbation d'un contrat. Je n'ai pas été là toute cette période-là, mais j'ai eu connaissance d'une ou deux études de ce genre-là, à l'époque, et je suis certain que, probablement pour la majorité, il a dû y avoir opinion du ministère.

(10 h 50)

M. Chevrette: Si je pose la question, c'est qu'en 1984, 1983, 1985, jusqu'en 1985, il y a effectivement eu des ententes non pas secrètes, mais qui ont même été discutées ici, autour de cette table, en commission parlementaire, avec Pechiney, Reynolds, par exemple, où vous aviez des contrats à partage de risques, non pas cachés, mais connus publiquement, non pas secrets, et sous lesquels vous aviez au moins trois balises, c'est-à-dire que la détermination du coût de l'électricité pour les grandes compagnies énergivores était basée sur, d'abord, le tiers de l'augmentation du tarif L – si le tarif L augmentait de 6, c'était 2 – le tiers de l'augmentation de l'inflation américaine et le tiers de l'augmentation du métal. Vous ne pouviez pas perdre sur les trois points en même temps. Alors, pour que j'interprète bien – et là, ma question peut s'adresser à M. L'Homme, qui semble avoir une connaissance des contrats – est-ce qu'il est exact que, présentement, le seul critère du coût d'électricité pour les alumineries est basé sur le coût du métal?

M. L'Homme (Denis): M. le Président, contrairement à ce que suggère le député, je n'ai pas une connaissance détaillée des contrats; les balises, là... J'avais des tableaux qui donnent des échéances, des quantités d'énergie, enfin, ce qui est connu d'une façon générale, ainsi que ceux qui bénéficient de ces contrats-là. Ma compréhension de la formule, c'est que c'est beaucoup plus compliqué que strictement le prix du métal. Il y a toute une formule qui est différente dans divers contrats, qui fait évoluer le prix de l'électricité en fonction du prix du métal, bien sûr, mais d'autres facteurs également.

M. Chevrette: Comment vous pouvez m'expliquer ça, M. L'Homme? Si Hydro-Québec est capable de chiffrer ces manques à gagner ou ces pertes, comment vous pouvez me dire que ce n'est pas le prix de l'aluminium, alors que toutes leurs données et leurs références sont basées sur le 0,82 $ US la livre de l'aluminium et que c'est en raison du prix du métal qu'ils peuvent facilement faire les projections? C'est quoi, la grande complexité? Ça a l'air simple, simple pour eux autres, puis très, très complexe pour vous autres.

M. Sirros: M. le Président, avant de passer la parole à un des sous-ministres, j'aimerais juste faire remarquer au député que ce sont des contrats, au niveau de leur détail, au niveau de leur fonctionnement, qui relèvent d'Hydro-Québec, au niveau des gens qui ont signé ces contrats-là, et qu'on avait l'occasion justement, avec le président d'Hydro-Québec, de poser des questions spécifiques vis-à-vis du fonctionnement des contrats quand le président était ici, parce que c'est normal que ce soient les dirigeants d'entreprises qui doivent répondre vis-à-vis de l'administration de ces contrats-là. On va faire tous les efforts qu'on peut pour fournir au député les informations qu'on peut avoir, mais je ne voudrais pas non plus que ce soit interprété, que les sous-ministres se substituent aux dirigeants d'entreprises au niveau de la défense et de l'explication des détails de ces contrats. M. Geoffrion voudrait peut-être reprendre...

M. Chevrette: Oui, mais, M. le ministre, suite à votre remarque, je vous ferai remarquer que vous avez un sous-ministre qui siège au conseil d'administration d'Hydro-Québec, et s'il est le moindrement rigoureux, il doit savoir ce qu'Hydro-Québec prend comme décisions.

M. Sirros: C'est pour ça que je vais lui demander de répondre, mais c'est une différence entre un membre du conseil d'administration puis un président-directeur général d'une entreprise, quand même.

M. Chevrette: Oui. Surtout quand le type est à la fois sous-ministre de tutelle, avec son ministre, j'avoue que... Ce n'est pas moi que vous allez endormir ici ce matin.

M. Sirros: Une mise en garde...

M. Chevrette: Oui, oui, je comprends. C'est habile de votre part, mais, moi, vous ne m'empêcherez pas d'avoir l'habileté de continuer mon questionnement.

M. Sirros: Je n'en ai jamais douté.

M. Geoffrion (François): Je pense que, M. le Président, le député a raison quand il dit que l'intention de base du contrat et ce qu'elle fait, c'est de lier le prix de l'électricité au prix de l'aluminium, l'évolution du prix de l'électricité, et c'était l'idée fondamentale qu'il y avait en dessous du contrat. Mais le contrat ne se limite pas à ça. Ça, c'est l'objectif principal, puis chaque partie a rajouté – on parlait de «hardship clause» – des balises pour se protéger, ou baliser ce risque-là que ça représentait de se lier à l'électricité. Et ces balises-là ne sont pas nécessairement exprimées en fonction du prix de l'aluminium. Elles peuvent être exprimées, par exemple, en fonction d'où est rendu le tarif L au Québec à un moment dans le temps. Donc, en ce sens-là, il n'y a pas seulement le prix de l'aluminium qui va ultimement déterminer le prix de l'électricité; dans certains scénarios, ça pourrait être autre chose que le prix de l'aluminium. Si le prix de l'aluminium devenait excessivement haut ou beaucoup trop bas, ça va être d'autres indicateurs qui vont fixer le prix de l'électricité, possiblement, dans certains contrats. Ils ne sont pas tous identiques.

M. Chevrette: Mais, si j'ai bien compris les explications à la fois de vous et les quelques petites informations arrachées à la pièce à Hydro-Québec, jusqu'à 0,82 $, c'est bien clair que c'est le prix de l'aluminium. Ils font ça avec une facilité déconcertante: si ça monte à 0,53 $, ils le savent tout de suite; si ça monte à 0,54 $, ils le savent tout de suite; si ça monte à 0,60 $, on le sait tout de suite. Donc, je comprends qu'il peut y avoir d'autres balises, je le comprends, mais, pour le contrat de base allant jusqu'à 0,82 $ US, si j'ai bien compris, c'est le coût du métal. Moi, ma question, si je veux pousser un peu plus loin... Je comprends que c'est difficile, parce que vous n'étiez pas là; le ministre n'était pas là, et je pense que M. L'Homme n'y était pas non plus, à ce moment-là. Mais le ministère de l'Énergie et des Ressources, avec toute la compétence qu'on lui connaît, ne pourrait pas avoir conseillé au gouvernement de signer un tel contrat.

M. Geoffrion (François): Il faut rappeler que c'est un contrat à partage de risques et bénéfices...

M. Chevrette: Oui, mais partage de risques, c'est risques sur les deux bords, pas seulement sur un. Là, on a tout pris le pot, on n'a plus rien. On perd 324 000 000 $ par année, ça n'a pas d'allure, ça.

M. Geoffrion (François): Je voudrais juste souligner que, quand on... L'évaluation technique d'un dossier de cette nature-là, habituellement, on va essayer d'évaluer le risque pour les deux parties, mais aussi le bénéfice. On va espérer que le rendement escompté est à la mesure du risque qu'on prend. Comme dans n'importe quel investissement, plus il est risqué, plus on espère avoir un rendement élevé. L'évaluation, à l'époque... Je voudrais juste souligner que, à l'époque, les perspectives ou les anticipations de croissance du prix de l'aluminium étaient quand même assez élevées. Il n'est pas déraisonnable que des gens, à cette époque-là... Devant une opinion technique qui est assez reconnue mondialement, qui prévoyait de la croissance dans le marché puis dans le prix de l'aluminium, à l'époque, ce n'est pas inimaginable et déraisonnable de penser que des gens de bonne foi, qui ont une connaissance technique correcte, arrivent à la conclusion qu'un contrat de cette nature-là est un bon risque, qu'il y a une bonne récompense au bout, compte tenu du niveau de risque.

M. Chevrette: ... que votre propre société d'État dit que ce sera 1 500 000 000 $ de manque à gagner – manque à gagner, le ministre m'a habitué à faire la nuance entre les deux – mais que les scénarios dus au dumping russe, les vrais scénarios qui circulent à l'interne, c'est 2 900 000 000 $ de pertes et 4 900 000 000 $ de manque à gagner, si vous regardez les scénarios suite au dumping russe.

M. Geoffrion (François): Mais c'est juste ce que je voulais souligner, M. le député. C'est que, à l'époque, les perspectives ne prévoyaient pas, je dirais, ce genre d'événement politique qui a amené le dumping qu'on a aujourd'hui, ne prévoyaient probablement pas une récession aussi longue qu'ont connue les États-Unis, ce qui a affecté beaucoup le marché de l'aluminium. Ce que je vous dis simplement, c'est que des gens de bonne foi, avec la bonne expérience technique à l'époque, qui voyaient devant eux des prévisions partagées à peu près par tous les experts sur cette planète, sur l'évolution du prix de l'aluminium, peuvent arriver à recommander à un gouvernement de prendre un risque qui semble raisonnable et intéressant.

(11 heures)

M. Chevrette: Oui. Si je suivais votre raisonnement, ça veut dire que les experts qui vous conseillent devraient normalement vous dire: Ne prends pas de chance, parce qu'il y a des impondérables, il y a des cycles économiques. Vous parlez de récession. On le sait qu'il y a des cycles économiques. Vous avez eu 1982, récession; 1990, récession. Il y a un cycle de six ou sept ans. Je m'aperçois que même votre vision pour cause d'iniquité est aux 12 ou 14 ans. Ce n'est pas des farces! Ça, il me semble que n'importe quel expert, M. le sous-ministre, s'en remet au moins aux cycles économiques, premièrement. Deuxièmement, il ne met pas tous ses oeufs dans le même panier à partir d'un seul critère, pour baser les prix. Il peut tenir compte de l'augmentation des coûts ici, des tarifs d'ici; il peut tenir compte aussi du marché américain, quand on parlait du tiers. Pourquoi avoir changé au moins ces trois balises que nous retrouvions dans les contrats à partage de risques qui ont été signés en 1983-1984, où on mettait trois facteurs pour déterminer les prix, de sorte que tu ne pouvais jamais être perdant à tout prix? Là, on est perdant sur tous les bords. Partage de risques, ordinairement, on en partage un bout avec l'autre, on ne partage pas tous les risques. Le mot le dit: partage de risques. Ce n'est pas un contrat à risques assurés pour le gouvernement ou pour Hydro-Québec. On signe un contrat à partage de risques, ils doivent en partager un bout, puis, nous autres, l'autre bout. Sur le coût du métal, je comprends que, si c'était la troisième balise pour fixer les tarifs aux alumineries, il n'y aurait rien à payer en ce qui regarde le tiers qui serait basé sur le coût du métal, mais il y aurait au moins l'augmentation... Hydro-Québec retirerait au moins le tiers de l'augmentation du tarif L et retirerait au moins le tiers de l'inflation américaine, même si elle n'est pas forte. Mais on n'aurait pas de manque à gagner et de perte aussi évidente que celle qu'on a là.

M. Sirros: On parle de manque à gagner et de perte à la fois...

M. Chevrette: Et j'ai dit les deux, délibérément les deux.

M. Sirros: Oui, vous avez utilisé les deux, mais, si ma mémoire est bonne, il me semble que le président d'Hydro-Québec, à la commission parlementaire, lui, il disait qu'à terme, même avec ce qu'on a actuellement au niveau d'un rendement, il y aurait toujours un rendement beaucoup moins que prévu, mais un rendement pareil. Donc, je pense que ça m'amène à inciter le député à rayer le mot «perte» de son vocabulaire, de se retenir au niveau du manque à gagner. Par rapport à un tarif L, oui, il y a un manque à gagner. Avec les prix de l'aluminium tels qu'on les a connus, avec des facteurs complètement imprévisibles, tel le dumping qui a été fait suite à l'effondrement de l'URSS, effectivement, mais je ferais remarquer au député et aux membres de la commission qu'aucune aluminerie ne se serait installée ici, à partir du tarif L et que, de tous les temps, il y a eu des ajustements et des négociations et différents types de contrats – datant du début du siècle, si ma mémoire est bonne – qui ont été signés par différents gouvernements, avec l'Alcan en particulier, et que le député, dans son analyse de ces contrats, centre strictement au niveau de l'impact, comment je peux dire, juste la question du rendement que ça peut représenter pour Hydro-Québec. Il faut aussi, et je pense que c'est un peu notre rôle ici, surtout au niveau du ministère des Ressources naturelles, du gouvernement, d'évaluer la pertinence au niveau des retombées un peu plus globales pour l'ensemble de la société de la venue des alumineries ici, le positionnement que ça peut représenter pour nous pour l'avenir, les emplois créés, l'argent généré, etc.

Alors, je sais qu'on a fait ce débat souvent, même depuis les deux mois et demi, trois mois que je suis au ministère, je pense que ça fait au moins trois, quatre fois qu'on en parle. Je suis sûr que ce n'est pas la dernière fois qu'on va en parler. Ha, ha, ha!

M. Chevrette: C'est évident, d'autant plus....

M. Sirros: Mais je me dois de rappeler l'ensemble de la situation au député, et lui, il se doit de se concentrer strictement sur une question plus étroite.

M. Chevrette: Ce n'est pas «plus étroite», M. le ministre. Il y a des alumineries qui sont venues s'implanter au Québec, en 1984-1985, avec des contrats à partage de risques, où les risques n'étaient pas dans un seul camp. Ne venez pas me dire... On n'est pas obligés de leur donner la lune. Un quartier aurait peut-être suffi. Il y a des limites, c'est ça que je veux dire. Puis, Reynolds, Pechiney, quand on a signé en 1985, publiquement ici, on a discuté de ça. C'était M. Ciaccia, je crois, qui était critique de l'énergie à l'époque. On a discuté carrément des contrats à partage de risques. Le gouvernement libéral nous avait vilipendés pendant je ne sais pas combien de temps pour dire: «c'est-u» effrayant de signer avec des balises, le tiers de l'inflation américaine – le tiers. «C'est-u» épouvantable de prendre des risques de même!

Vous êtes au pouvoir, vous prenez tous les risques, rien que sur le taux du métal. Voyons! Il faut vous le rappeler un petit peu.

M. Sirros: Pour être franc et correct, je pense qu'on a dit tout à l'heure que ce n'est pas aussi simple que ça et que ce n'est pas strictement cette considération qui doit être prise en compte; le fait que c'est effectivement plus compliqué doit être pris en compte.

M. Chevrette: Est-ce que vous pourriez déposer, M. le ministre, non pas les contrats – je comprends que vous allez me refuser, ça ne me sert à rien de m'obstiner pendant quatre heures – mais les compagnies, avec les dates de révision sur la clause d'iniquité et la date de l'échéance du contrat? C'est parce que, depuis le début, tout le monde parle des contrats; on n'a pas la date du début, on n'a pas la date de la clause d'iniquité ou de révision, appelons-la comme on voudra, puis la date de l'échéance.

M. Sirros: D'accord. On fera un jumelage des deux tableaux qui sont à ma disposition au niveau de la fin des contrats et les dates d'ouverture ou d'iniquité, etc., et on fournira ça aux membres de la commission le plus tôt possible.

Le Président (M. Messier): M. le député de Joliette, il y a le député de Drummond qui voudrait intervenir.

M. St-Roch: Oui, juste une brève question, M. le Président. M. le ministre, est-ce que vous pouvez nous indiquer le dernier contrat qui a été signé, en quelle année c'était, et avec qui?

M. Sirros: Je m'excuse, M. le Président, j'ai été... Le dernier contrat signé?

M. St-Roch: Le dernier contrat à partage de risques qui a été signé, au niveau des alumineries, c'était en quelle année et avec qui?

M. L'Homme (Denis): C'est le 20 décembre 1990.

Le Président (M. Messier): Juste pour les fins du Journal des débats , est-ce que vous voulez vous identifier, s'il vous plaît?

M. L'Homme (Denis): Oui, Denis L'Homme, sous-ministre associé à l'énergie. Le contrat, c'est le 20 décembre 1990, le dernier qui a été signé.

M. St-Roch: Avec quelle compagnie, M. le sous-ministre?

M. L'Homme (Denis): Avec Reynolds, les métaux Reynolds, à Baie-Comeau.

M. St-Roch: Merci.

M. Sirros: Je m'excuse, j'ai regardé à travers la fenêtre et j'ai vu la neige. Je suis désespéré!

M. Chevrette: Vous n'êtes pas le seul.

M. St-Roch: C'est une richesse naturelle, M. le ministre.

M. Chevrette: Là-dessus, on est d'accord.

M. Sirros: C'est bon pour Hydro, mais franchement!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Messier): Hydro ne manquera pas d'eau cette année.

M. Chevrette: C'est un partage de risques.

Le Président (M. Messier): Est-ce qu'il y a d'autres interventions?


Filiales d'Hydro-Québec

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Moi, j'en ai. Le deuxième thème que je voudrais aborder, ce sont les filiales d'Hydro-Québec. Moi, je voudrais savoir si le ministre est constamment – première question, d'abord – mis au courant des filiales qui se créent à Hydro-Québec. Est-ce qu'il le sait, à chaque fois qu'il se crée une filiale d'Hydro-Québec? Est-ce qu'il est averti? Est-ce qu'il connaît les administrateurs? Est-ce que c'est lui qui procède à la nomination des administrateurs ou si c'est Hydro-Québec elle-même? Je suppose que c'est Hydro, en vertu de sa charte, qui crée ses filiales. Est-ce qu'il est avisé des actions, par exemple, qu'Hydro-Québec met dedans, comment elle entend s'en départir? Est-ce qu'il est tenu au courant constamment de cela?

M. Sirros: C'est ça. Effectivement, non, on n'est pas nécessairement au courant de toutes les décisions qui sont prises au niveau des opérations d'Hydro pour la création de filiales qui... on m'a dit qu'on le suit... De toute façon, je ne pense pas qu'il y en a eu, depuis mon arrivée, qui ont été créées. Hydro n'est pas tenue d'avoir des approbations avant de procéder à des gestes qui relèvent des affaires courantes au niveau de la gestion de l'entreprise. Dans ce sens-là, il y a, par contre, des discussions constantes et des relations que je qualifie de correctes avec les dirigeants d'Hydro. Donc, on échange beaucoup d'information, puis ils sont toujours très prêts à fournir les informations sur les demandes qu'on fait.

M. Chevrette: Oui. M. le Président, là-dessus, on avait demandé à M. Drouin de déposer les rapports annuels des filiales et de Nouveler, et on ne les a jamais eus, à la commission, lors de l'étude des crédits. Je pense que le ministre était ici quand il avait pris l'engagement. Est-ce que le ministre pourrait prendre l'engagement de nous faire parvenir ces rapports annuels?

M. Sirros: Oui. D'ailleurs, en prévision, un peu, de ces questions-là, on avait vérifié où se trouvait le cheminement des réponses aux questions qu'avait faites la commission. Et, effectivement, c'est en voie d'arriver. Ça devrait bientôt être acheminé aux députés et aux autres membres de la commission.

M. Chevrette: O.K. Sur les filiales – je reviens, par exemple, sur Nouveler. Nouveler crée, je ne sais pas, une filiale qui pourrait s'appeler SMI. Est-ce que le ministre est consulté pour savoir si, par exemple, la deuxième année, Hydro-Québec se départit de ses actions au profit d'actions publiques ou encore donne des actions à des particuliers?

M. Sirros: Non. Pas officiellement, par voie de règlement ou d'entente officielle. Comme je disais, c'est des décisions d'affaires que l'entreprise est libre de prendre. Il y a, par contre, des discussions constantes entre le ministre responsable d'Hydro-Québec... pas responsable d'Hydro-Québec – de toute façon, vous comprenez ce que je veux dire – et le président d'Hydro.

M. Chevrette: Est-ce que le conseil d'administration sur lequel siège un de vos sous-ministres est avisé, par exemple, de la dilution des actions d'Hydro-Québec dans une filiale?

M. Sirros: On peut peut-être demander à celui qui siège sur le conseil d'administration de vous répondre, au niveau du fonctionnement du conseil d'administration. C'est M. François Geoffrion, pour les fins du Journal des débats ; il est sous-ministre.

(11 h 10)

M. Geoffrion (François): Pas nécessairement, parce qu'il y a un comité exécutif, aussi. Mais il est d'usage à Hydro, et les règles du conseil prévoient que les mouvements importants du capital d'Hydro sont supervisés, doivent être présentés, dans certains cas, au conseil d'administration. Quand, par exemple, récemment, Nouveler a été restructurée, dans la dernière année, ça a été présenté au conseil d'administration et approuvé par le conseil.

M. Chevrette: ...dépose les rapports des filiales? Les rapports financiers du rendement des filiales, de l'argent d'Hydro-Québec, à toutes fins pratiques?

M. Geoffrion (François): Je ne suis pas certain qu'on dépose au conseil tous les rapports financiers de toutes les filiales, parce qu'il y a plusieurs niveaux sous Nouveler, à l'occasion.

M. Chevrette: Mais, si je le soulève, M. le ministre, c'est pour m'assurer que le gouvernement – je suis convaincu qu'il n'est pas avisé; j'en ai la conviction. Ce n'est pas déposé, à cause de l'exécutif. Les rapports, vous avez vu? On a demandé des rapports. On n'était pas sûrs qu'ils existaient. Ils ne savaient pas s'ils existaient. Ils existaient sans doute. Ils devraient exister et on ne les a pas encore reçus. Donc, je ne suis pas loin de croire qu'on est tous un peu ignorant de la chose.

Ceci dit, d'autre part, quand on regarde le rendement de certaines filiales, c'est assez intéressant de constater qu'il y a une belle piastre, une très belle piastre qui se fait, comme on dit en bon québécois, dans certaines filiales, et, quand c'est rentable, on voit Hydro-Québec se retirer de cette rentabilité au profit ou d'individus, ou d'autres compagnies.

Moi, je pense que l'État, surtout le ministre de la tutelle, a toutes les raisons au monde d'exiger d'être très bien au fait de cela. Parce que ça peut être un choix politique de garder une filiale qui est rentable, plutôt que de s'en départir. Et, en temps et lieu, je déposerai quelque chose qui prouve bien ce que j'avance. Je n'ai pas peur de ça; j'ai les documents en main, M. le ministre. Mais ce n'est pas la place ici, parce qu'on est à l'étude de vos crédits.

Je voulais savoir si le ministre était mis au courant de cela, parce qu'il y a des décisions importantes. Une société d'État qui pourrait faire une belle piastre. Par exemple, les actions sont passées de 10 $ à 585 $, et la dilution va se faire à 1000 $ de l'action dans à peu près une couple de mois, deux mois, trois mois, au maximum, c'est une piastre à faire, ça. Il y a peut-être même des individus qui peuvent faire la passe avec ça.

Moi, je veux savoir si vous êtes au moins mis au courant. Je pensais au conseil d'administration, mais, sinon, c'est non. Je prends votre parole.

M. Sirros: Des fois, la piastre à faire est faite justement parce que l'initiative de l'entreprise privée peut, éventuellement, générer des choses intéressantes. Ce n'est pas sûr et certain qu'une société d'État doive nécessairement toujours maintenir sa présence dans tous les secteurs. Justement, une des perspectives, s'il y a possibilité de créer des technologies qui trouvent preneur et qui peuvent produire des emplois et générer de l'activité économique, en autant que ce soit fait de façon équitable et correcte, c'est une activité qui ne doit pas être vue d'un mauvais oeil.

M. Chevrette: Non, je comprends...

M. Sirros: Mais je regarderai avec intérêt un des multiples documents que le député pourrait avoir, en l'incitant, en même temps, d'en déposer d'autres s'il en a.

M. Chevrette: Y compris la convention d'actionnaires, qui est secrète. Ceci dit... Vas-y, j'y reviendrai.

M. St-Roch: Oui, un complément sur le même sujet, M. le Président.

Le Président (M. Messier): Allez-y, M. le député de Drummond.

M. St-Roch: C'est un commentaire que j'avais fait à l'étude des crédits du ministère de l'Industrie et du Commerce, et je vais vous faire la suggestion aussi, M. le ministre. Je pense, moi, que le gouvernement du Québec perd une belle opportunité d'impliquer les Québécois et les Québécoises au niveau du développement économique du Québec. Ce que mon collègue de Joliette souligne en est un exemple typique. On l'a souligné d'ailleurs au ministre de l'Industrie et du Commerce en ce qui concerne la privatisation de la SAQ ou de certains secteurs.

Moi, je ne peux pas comprendre que, lorsqu'on crée des belles réalisations comme ça, il y a une manière qu'on peut faire, de dire: oui, je suis d'accord que le gouvernement ou une société d'État ne puisse pas être impliqué dans tout. À un moment donné, elle se doit d'être un moteur et elle se doit de délester et de laisser voler ses enfants de leurs propres ailes. Il y a une manière qui pourrait être faite et qui pourrait profiter à l'ensemble de la collectivité québécoise, c'est celle de privatiser et de rendre ces sociétés publiques en utilisant le volet de la Bourse, où une société d'État ou un ministère pourrait garder un certain nombre d'actions pendant une période d'accompagnement. Et, après que la période soit faite et que cette compagnie soit devenue privée, à ce moment-là, on vend le résiduel de notre capital-actions. On a fait un accompagnement et on a donné la chance aussi à des Québécois et des Québécoises d'investir dans un levier économique important et donné aussi la chance aux fonds de gestion d'investir. Parce que, à l'heure actuelle, un des grands drames, à partir de la Caisse de dépôt, l'économie québécoise est tellement faible dans certains secteurs, au niveau du capital-actions, qu'on est obligé d'aller investir à l'extérieur du Québec. Et on sait que chaque fois qu'on va investir 1 $ à l'extérieur du Québec, bien, c'est un emploi qu'on va aller créer dans une autre économie qui n'est pas la nôtre, à partir de nos épargnes.

M. Sirros: Je prends note de ce que dit le député et je lui fais remarquer que cette approche a été utilisée, par exemple, dans des secteurs qui conviennent. On a fait exactement ça dans Cambior, par exemple. C'est SOQUEM qui a mis ça au monde. On a privatisé par la Bourse, on a détenu une certaine part d'actions dans Cambior, qu'on utilise pour poursuivre les explorations dans d'autres domaines. Alors, je me demande s'il y a quelque chose qui peut s'appliquer de façon uniforme à tous les secteurs, mais la démarche ou l'orientation, elle est bien prise en compte par le gouvernement.

M. St-Roch: Je ne dirais pas «uniforme à tous les domaines», parce que c'est un domaine où il faut avoir une masse critique avant d'être capables d'aller évoluer sur les marchés. Mais il y a beaucoup de domaines – vous avez raison de souligner Cambior – où il semble qu'on a découvert une recette heureuse puis, en cours de route, pour toutes sortes de raisons, on la met sur la tablette puis on la laisse s'empoussiérer au lieu de poursuivre cette expertise-là. Puis on a les leviers économiques, à partir de la Société générale de financement, la Caisse de dépôt. On a l'expertise aussi, à partir du ministère des Finances, on a les expertises nécessaires pour utiliser ce levier-là qui est beaucoup plus, quant à moi, développeur et créateur d'avenir et d'emplois pour les jeunes et pour l'économie du Québec.

M. Sirros: Je sais que mon sous-ministre a été impliqué un peu dans toutes ces opérations-là, et il pourrait peut-être juste donner quelques informations supplémentaires au député au niveau de l'applicabilité de cette façon.

M. Geoffrion (François): Je pense que le député a raison. Il est toujours intéressant de pouvoir mettre une compagnie publique, parce que, en un sens, ça discipline un peu plus la gestion, d'avoir plusieurs actionnaires, et aussi, ça ouvre une porte d'accès au capital futur sur le marché, si jamais ils ont besoin de liquidités additionnelles. Cependant, ce n'est pas toujours une avenue qui est disponible ou souhaitable pour certaines entreprises. Si vous êtes, par exemple, dans une production où le marché de débouchés est incertain, vous allez parfois vouloir avoir un actionnaire principal qui est acheteur de votre produit ou qui vous amène le débouché. Vous allez vouloir soit vous associer avec un distributeur ou... Ça fait qu'à l'occasion, la survie de l'entreprise passe par des alliances au niveau du capital-actions. On l'a vu et on l'a fait dans le mouvement de privatisation qu'il y a eu au gouvernement du Québec. Dans certains cas, plutôt que d'aller public, on est allés chercher des acquéreurs parfois étrangers qui ouvraient leur marché mondial à des entreprises d'ici, et c'est comme ça qu'on les consolidait le mieux. En haute technologie, souvent, c'est des petites entreprises. On fait face à un nouveau phénomène qui, là aussi, va influencer la manière dont on va lever le capital. C'est la nécessité de maintenir certaines expertises internes, ce qui peut vous amener à intéresser ou à être obligés de le faire d'une manière qui va intéresser une partie de vos employés aussi pour être sûrs qu'ils ne vous quitteront pas. Ça, ça s'adresse surtout à de la haute technologie, petite entreprise. Mais c'est juste pour dire que je reconnais les bienfaits. Et, le député a raison, c'est une méthode intéressante qui a beaucoup de bienfaits, mais, à l'occasion, il faut y renoncer ou la compléter par des formules différentes.

M. St-Roch: Et je vais conclure M. le Président, en disant aussi qu'on manque, à l'occasion, de belles possibilités d'innover en utilisant le volet coopératif aussi pour la rétention des employés qui peuvent détenir du capital-actions, avoir l'expertise pour aller chercher cette masse critique là, puis la privatisation sous forme d'actions qui va vous donner le résiduel. Et ça, c'est des volets qu'on met de côté, trop souvent, j'ai l'impression. On aura la chance d'y revenir M. le Président.

Le Président (M. Messier): Merci M. le député de Drummond. Mme la députée de Matane a demandé la parole.

Mme Hovington: Oui, M. le Président, est-ce que je serais hors d'ordre si je posais une question sur le prix de l'essence en région?

M. Chevrette: Sur...

Le Président (M. Messier): Le prix de l'essence en région.

Mme Hovington: ...à Matane.

M. Chevrette: Ce serait mieux après-midi, c'est du gaz naturel. On le prendra et on le videra.

Mme Hovington: C'est parce que je ne suis peut-être pas sûre d'être ici après-midi.

M. Chevrette: Moi, pour vous rendre service madame, je suis prêt à tout compromis.

Mme Hovington: C'est là où je vois votre grand coeur, mon cher collègue.

Le Président (M. Messier): Je vais vous donner votre consentement aussi madame.

M. Chevrette: J'espère que vous allez le reconnaître, madame.

Mme Hovington: Ah, j'ai une bonne mémoire, inquiétez-vous pas.

M. Chevrette: Je vais vous crier moins en Chambre, quand je parlerai.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Hovington: Merci beaucoup. Alors M. le ministre...

Le Président (M. Messier): Bien, peut-être, avant, M. le ministre, si on parle du prix du gaz, est-ce que vous avez les représentants avec vous, ou si...

Mme Hovington: Ah, je suis sûre que le ministre va avoir la réponse.

Le Président (M. Messier): Il a déjà la réponse? C'est une question plantée?

Des voix: Ha, ha, ha!


Prix de l'essence dans les régions

Mme Hovington: Ce n'est pas une question plantée, mais je l'ai déjà sensibilisé. Je pense qu'il est au courant de ce qui se passe en région. On sait qu'au cours des derniers mois, il y a plusieurs intervenants, que ce soit de la Chambre de commerce de Rimouski, que ce soient des gens de Matane, qui sont venus même à mon bureau et qui m'ont sensibilisée, et moi-même je le constate, que les prix de l'essence seraient beaucoup plus élevés dans notre région que les prix affichés dans d'autres régions du Québec. Et on sait que c'est notre gouvernement, le gouvernement libéral, quand même, dans le premier mandat, qui avait fait en sorte que le prix de l'essence en région soit moins élevé; alors, on avait baissé les taxes, la taxation était moins grande en région, dans les budgets de M. Levesque. Alors, on perd le rabais de taxe accordé par le ministère des Finances du Québec par le fait que les pétrolières haussent les prix.

(11 h 20)

Est-ce que vous vous êtes assuré que vous avez trouvé la ventilation, d'où ça provenait, cette hausse du prix d'essence en région, qui est injuste pour les consommateurs de la grande région Rimouski-Matane, dans ce coin-là?

M. Sirros: M. le Président, je remercie la députée pour sa question. J'ai eu l'occasion, la semaine passée, d'en parler avec d'autres intervenants dans la région de Rimouski et de Gaspésie–Bas-Saint-Laurent, où j'étais avec la députée et le député aussi de Bonaventure, sur une autre question. Effectivement, ça fait maintenant, je dirais, tout près d'un mois et demi que je suis saisi d'une problématique tout à fait particulière sur la région dont parle la députée. J'avais demandé au Bureau d'inspection du prix de l'essence, le BIPE, d'examiner la question et la situation et de me faire rapport. Suite à ce rapport que j'ai reçu – ça doit faire maintenant quatre semaines – j'ai écrit à chacune des pétrolières dans la région pour leur demander des explications quant au différentiel de prix que le Bureau souligne comme étant quelque chose, je dirais, d'anormal.

Je viens de recevoir – ça fait une semaine et demie, à peu près, deux semaines – les réponses de chacune des pétrolières. À première vue, les explications fournies par les pétrolières ne suffisent pas – je dis bien «à première vue», parce que j'ai demandé aussi aux officiers du ministère de faire une analyse plus approfondie de ces explications-là – pour expliquer le différentiel du prix. Donc, il y a effectivement une possibilité que les épargnes qui devraient normalement aller aux consommateurs ne vont pas aux consommateurs, elles vont aux pétrolières. Si c'est le cas qui est confirmé suite à l'analyse que je vais faire, j'entends récidiver dans le sens où je réécrirai aux pétrolières et je leur demanderai de s'assurer que la situation soit corrigée, sinon, je serai dans l'obligation de décréter, si nécessaire. Je ne souhaite pas en arriver là, mais il est sûr et certain que, au niveau de la région, on n'entend pas laisser perdurer une situation qui fait en sorte que les baisses des taxes qui auraient dû, en quelque sorte, être traduites en baisse de prix pour l'essence se traduisent par autre chose. Alors, sous réserve, à première vue, le dossier est actif.

Mme Hovington: D'accord. Et, M. le ministre, votre ministère procédait à un bulletin qui s'appelait le BIPE, qu'on envoyait dans toutes les régions du Québec, et ce bulletin-là faisait la ventilation de la taxe, de la part des profits des pétrolières, des détaillants. Et ce bulletin était bon parce qu'il exerçait une pression morale, si vous voulez, ce n'était pas coercitif, là, mais ça exerçait une pression morale sur les pétrolières et les détaillants qui avaient envie justement de se prendre une marge de profit peut-être trop grande. Ça fait longtemps, là, que je n'ai pas vu ce feuillet. Qu'est-ce qui en est arrivé?

M. Sirros: Effectivement, avec le temps, on a constaté que le bulletin avait peut-être moins d'utilité comme telle parce qu'on s'éloignait de la situation initiale. Et c'est une des choses qu'on a remises en question dans toute la question de la révision de nos services, etc. Par contre, on s'est gardé des possibilités d'intervention, comme je viens de dire, parce que les problèmes sont vraiment des problèmes très spécifiques à des régions données, où on peut intervenir de façon plus ciblée tout en permettant de faire des économies intéressantes dans le programme de compression, de réajustement de nos dépenses et révision de nos services à la clientèle. Donc, ce bulletin, on ne le publie plus. Par contre, on maintient l'équipe du BIPE qui fait les analyses et les enquêtes. On a le pouvoir d'enquête, qui, par contre, reste sans le bulletin comme tel.

Mme Hovington: Je trouve un petit peu dommage qu'on soit privé de ce bulletin, parce que, comme je vous dis, ça exerçait, à mon avis, une pression morale sur les détaillants, les pétrolières. Enfin...

M. Sirros: Croyez-moi – comment je peux dire – le pouvoir d'enquête est ce qui compte et, dans ce sens-là, le pouvoir réel existe aussi au niveau d'une intervention du ministre, à un moment donné, pour s'assurer, suite aux résultats des enquêtes, que les gens des régions soient traités équitablement par les pétrolières.

Mme Hovington: D'accord, merci.

Le Président (M. Messier): M. le député de Bonaventure et M. le député de Papineau, par la suite.

M. Landry: M. le ministre, dans la foulée de ce que la députée de Matane soulevait, le fait que le bulletin fut accessible aux groupes d'intérêts publics, il y avait quand même cet effet levier là-dessus. L'autre élément que j'aimerais porter à votre attention, vivant près d'une région frontalière, près du Nouveau-Brunswick, on constate quand même, même dans le territoire de la Gaspésie limitrophe au Nouveau-Brunswick, des écarts de prix qui vont jusqu'à 0,13 $, 0,14 $. Or, ce n'est pas par la vertu des taxes que ça s'explique. À 60 kilomètres, 70 kilomètres de distance, je prends, par exemple, des coins comme New Richmond et Campbelton ou Carleton et Campbelton, on a constaté cet hiver des écarts aussi importants que ça. Ça ne peut s'expliquer non plus par le profit du détaillant. Alors, il y a quelque part le rajustement qui devait être fait qui, selon toute apparence, n'a pas été fait dans nos régions. Alors, c'est peut-être important aussi d'avoir ces données comparatives là, et on me dit que c'est la même situation aussi dans le coin entre Edmunston et le haut du Bas-Saint-Laurent.

Mme Hovington: Dans l'Outaouais aussi, avec...

M. MacMillan: Je peux rajouter à ça, M. le Président, si vous me permettez.

Le Président (M. Messier): M. le député de Papineau.

M. MacMillan: M. le ministre, chez nous, dans l'Outaouais, on a le même problème, avec un écart, souvent à cause de l'Ontario et le Québec, mais, en 1983, suite à une détaxation de 0,06 $ qui avait été mise sur le gaz par M. Parizeau, avec une limite de 20 km des frontières – j'imagine que c'est la même chose chez vous, en Gaspésie. Mais les pétrolières se servent de ça pour compétitionner pas juste dans l'Outaouais, même dans nos propres régions. Il y a des gens qui vont acheter du gaz dans des régions éloignés, qui paient moins cher, puis, à la pompe ils le vendent au même prix, puis là, on blâme le gouvernement. Je veux dire que, carrément, c'est la détaxation de 0,06 $, de 0,04 $ et de 0,02 $, et puis on ne peut pas compétitionner. Chez nous, à 12 km, même à 14 km de chez moi, de ma résidence, le gaz est à 0,48 $, et, chez nous, on le vendait à 0,58 $. Il y avait 0,10 $ de différence du litre à un intervalle de 10 km. Alors, il y a un problème majeur.

J'ai fait des interventions; depuis quatre ans qu'on fait des interventions, avec nos gens de notre région, au ministre des Finances, M. le ministre, là-dessus, sur la détaxation. Il y a un problème majeur, parce que les compagnies se servent de ça pour faire des profits, puis elles disent que c'est la faute du gouvernement, puis les détaillants, eux autres, ne vendent plus de gaz. Chez nous, à Buckingham, exemple, pour aller à Ottawa, pour prendre le gaz à Gatineau, qui est à 12 km, les gens vont arrêter, vont mettre 5 $ de gaz et, après, ils vont remplir à Gatineau, à 10 minutes de là, à 0,49 $, où il y a 0,07 $, 0,08 $ de différence. Alors là, il y a une guerre de prix qui s'est établie dans l'Outaouais, mais qui n'est pas suivie, puis ce sont les pétrolières qui blâment tout le monde, à part de regarder dans leur cour, M. le ministre. Moi, j'ai toujours dit que ce sont elles qui font du chantage aux détaillants en leur disant que c'est la faute du gouvernement, à cause de la détaxation, dépendant du milieu où on est. Alors, il y aurait un genre de vérification ou je ne sais pas quoi là, mais on se fait jouer un tour, puis le gouvernement perd de l'argent aussi dans tout ça. Parce que je peux vous dire – je me répète – qu'il y a des gens qui vont acheter le gaz ailleurs pour le remplir chez eux parce que ça coûte moins cher et ils font plus de profits quand ils le vendent à leur compte. Alors, il y a du magouillage qui se fait par les compagnies. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Messier): M. le ministre, des solutions à ces députés des régions...

M. Sirros: M. le Président, peut-être deux commentaires au niveau du député de la Gaspésie, par exemple. L'année passée, on a effectivement fait une enquête sur le prix de l'essence en Gaspésie. Le résultat de l'enquête a été que, effectivement, la situation était correcte, il n'y avait pas de surexploitation au niveau du prix, et ça reflétait certains coûts inhérents aux régions éloignées: le transport, entre autres, la faible densité de la population, qui fait en sorte que les détaillants doivent se garder une plus grande marge de profits, si vous voulez, pour rester rentables, etc. La conclusion à laquelle le BIPE est arrivé l'année passée, c'était, dans le cas de la Gaspésie, ce n'est pas exactement la même situation qu'on retrouve maintenant.

(11 h 30)

Dans le cas de Rimouski, à l'heure actuelle, les indications que j'ai du BIPE, c'est que, effectivement, il y a une situation anormale qui ne reflète pas la réalité de la région. Et c'est sur ça que je me suis basé pour écrire aux pétrolières, leur demandant des explications. C'est ces explications-là qui me semblent insuffisantes à l'heure actuelle, qui pourraient amener une intervention au niveau d'un autre avis ou peut-être même une intervention allant jusqu'au décret, s'il le faut.

Dans le cas des régions frontalières, la problématique que décrit le député, c'est toute la problématique de la grandeur des zones tampons, si je peux parler ainsi. En fait, ce que dit le député, c'est que la zone tampon n'est pas assez grande; ça permet quand même aux gens de prendre 5 $ d'essence et d'aller plus loin pour... Mais j'ai tenu compte du fait qu'il en a parlé au ministre des Finances, qui l'écoute sûrement attentivement, et... qui sait?

M. MacMillan: Attentivement, oui, peut-être, mais le ministre des Finances...

Une voix: Il écoute.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. MacMillan: ...il est nouveau, on verra au budget.

Une voix: ...

M. MacMillan: Mais, un point dans les zones tampons, c'est la bataille des fonctionnaires, les zones tampons. Ils disent que, s'ils règlent le cas chez nous, dans l'Outaouais, ça ne réglera pas le problème en Gaspésie. Alors, c'est un problème majeur. Mais il faut regarder aussi les limites qu'il y a autour des zones tampons, quand Saint-Jovite, qui touche ton comté, à trois, quatre kilomètres, qui fait le tour, qui devient un peu une zone tampon, et les gens ont 0,07 $, 0,08 $ de différence, ce n'est pas juste pour ces gens-là qu'il y ait du trafic qui passe là, qui s'en aille là-bas. Alors, les zones tampons, j'ai eu de bonnes discussions avec les fonctionnaires là-dessus, mais je n'ai pas réussi à les convaincre.

Le Président (M. Messier): Un jour, M. le député de Papineau, possiblement, sait-on jamais. M. le député de Joliette.


Organigrammes corporatifs de Nouveler et d'Hydro Québec International

M. Chevrette: C'est correct? Je peux continuer? Merci. M. le Président, j'aimerais ça demander au ministre qu'il nous dépose l'organigramme corporatif de Nouveler et toutes ses filiales. Vous l'avez sans doute, parce qu'il existe en date du 29 mars 1994. Donc, pour le bénéfice des gens de la commission, ce serait intéressant qu'on l'ait. Également, Hydro-Québec International, on n'en a jamais parlé ou peu parlé, il serait intéressant qu'on ait l'organigramme et des dirigeants d'Hydro-Québec International. Je pense que ce serait intéressant pour l'ensemble des membres de cette commission...

Le Président (M. Messier): ...accorder le dépôt, monsieur le...

M. Chevrette: Si possible, le ministre pourrait, d'ici la fin de la commission, nous faire avoir cela.

M. Sirros: On prendra soin de le déposer, on est en train de vérifier si ça n'a pas déjà été fait sous mes crédits, au niveau du rapport d'Hydro-Québec. Mais je prends l'engagement de m'assurer que les membres vont avoir l'organigramme d'Hydro-Québec International et de Nouveler.

Le Président (M. Messier): Vous êtes bien gentil. Vous ne l'avez pas entre les mains? Ça viendra par la suite? Merci.

M. Sirros: On ne l'a pas entre les mains, avec nous.

Le Président (M. Messier): Mme la secrétaire le prend en note, que ça suivra.


Projet SM 3

M. Chevrette: Je voudrais aborder un nouveau chapitre, qui est le fameux dossier de SM 3. Sans faire toute l'histoire de SM 3, M. le ministre, on pourrait se rappeler qu'il y a eu des audiences du BAPE, et tout, et que le gouvernement a annoncé que SM 3 devra se faire, ce avec quoi, je pense, l'ensemble des intervenants du milieu, en particulier les intervenants de la Côte-Nord, bien sûr, veulent voir se réaliser ce projet.

Le point d'accrochage ou de divergence majeure, c'est le détournement de la Carheil et de la rivière aux Pékans. Mais sur le projet comme tel, au-delà de cette dérivation de deux rivières, je pense qu'il y a unanimité, au niveau du Québec, pour ce qui est de ce projet. On a appris également que les Montagnais avaient signé dernièrement l'entente avec Hydro. Ce serait peut-être intéressant qu'on connaisse le détail de l'entente avec les Montagnais, dans un premier temps, pour voir combien de millions sur combien d'années, parce qu'il y a des chiffres qui sont sortis à l'effet que ce soit 66 000 000 $, oui, sur 50 ans. C'est vrai? C'est précis?

Après cela... Je vais peut-être laisser... On va y aller par petites questions, si ça ne vous dérange pas.

M. Sirros: Au niveau des montants d'argent, on parle de 20 900 000 $, en dollars de 1994, étalés sur 50 ans, qui devraient donner 66 000 000 $ sur les 50 ans.

M. Chevrette: O.K. Et c'est un versement annuel?

M. Sirros: C'est un versement forfaitaire initial avec un versement annuel par la suite, oui.

M. Chevrette: Et le forfaitaire initial est de combien?

M. Sirros: De mémoire, c'est un premier versement de 6 000 000 $.

M. Chevrette: 6 000 000 $.

M. Sirros: 6 000 000 $.

M. Chevrette: Et le forfaitaire annuel après, ce sera de?

M. Sirros: Ce que je pourrai peut-être faire, c'est de vous fournir un détail écrit...

M. Chevrette: O.K.

M. Sirros: ...d'ici la fin de la journée.

M. Chevrette: C'est bien. Revenons maintenant au projet lui-même. On sait qu'il y a eu certains imbroglios quant au début des travaux par rapport aux permis et aux autorisations du gouvernement fédéral. On nous a dit qu'il y avait eu des communiqués de presse, etc. Vous vous rappelez de l'imbroglio de la commission parlementaire qu'on avait eue. Au moment où on se parle, est-ce qu'Hydro-Québec a reçu toutes ses autorisations et ses permis?

M. Sirros: Il y a, en fait, un permis qui doit être émis par le fédéral. À l'heure où on se parle, Hydro-Québec a déposé les plans et devis de l'ensemble des travaux. Il y a une procédure qui fait en sorte que les plans et devis doivent être publics pendant une trentaine de jours, et les permis sont émis par la suite. L'engagement du gouvernement fédéral, sur la base des informations fournies par Hydro-Québec, c'est que le projet est autorisé. Il reste à voir, passer à travers cette période de consultation, si vous voulez, ou de rendre publics les plans et devis pendant 30 jours.

M. Chevrette: Mais, M. le ministre, vous êtes en train de me dire que le permis global, il ne l'a pas avant 30 jours. C'est bien ça?

M. Sirros: Le permis du gouvernement fédéral n'a pas encore été émis. Il le sera suite à cette échéance.

M. Chevrette: O.K. Quand est-ce qu'Hydro-Québec a déposé ses plans et devis? L'information que j'ai, c'est que Hydro-Québec n'avait pas encore déposé, la semaine dernière, ses plans et devis. Est-ce que c'est exact?

M. Sirros: Je pense que les plans et devis auraient dû être déposés la semaine dernière, effectivement.

M. Chevrette: La semaine dernière.

M. Sirros: Oui.

M. Chevrette: Est-il exact qu'en vertu de l'article de Loi sur la protection des eaux navigables, l'article 9, paragraphe 3°, Hydro-Québec ne peut en aucun temps commencer des travaux qui pourraient toucher de quelque manière que ce soit à la rivière elle-même, elle ne pourrait les entreprendre sans les autorisations préalables, sans un permis bien précis du gouvernement fédéral, qui est responsable des eaux navigables précisément?

M. Sirros: C'est effectivement vrai que le fédéral a une juridiction sur les eaux navigables, dont les permis, pour qu'un projet soit conforme quand ça touche les eaux navigables, doivent être émis au préalable. Les travaux en cours qui ont commencé, comme vous le savez, ne touchent pas les eaux navigables ou quoi que ce soit de cette nature.

M. Chevrette: Quant aux oiseaux, aux inventaires des types d'oiseaux, est-il exact que le fédéral a changé son point de vue et qu'ils vont permettre que... au lieu d'être préalable à l'émission du permis, ça pourra être concurrent aux les travaux, en autant que ça se fasse? Est-ce que c'est ça? Est-ce que c'est vrai?

M. Sirros: Comme on n'a pas encore l'ensemble des conditions finales du gouvernement fédéral, je ne peux pas confirmer c'est quoi, la condition finale. Mais, suite à une rencontre entre Hydro-Québec et le gouvernement fédéral, qui date d'une dizaine de jours à peu près, Hydro-Québec s'est dit totalement satisfait des explications du fédéral quant aux conditions qu'ils entendaient retenir.

M. Chevrette: Est-ce que c'est un document public, les conditions qui seront posées par le fédéral?

M. Sirros: Je ne sais vraiment pas si c'est public, du côté du fédéral.

M. Chevrette: Est-ce que le ministre pourrait prendre l'information pour voir si... Parce que, autant on peut avoir le décret... Par exemple, le décret québécois, lorsque vous décidez d'un projet hydroélectrique, vous avez une trentaine, une quarantaine de conditions: suite à l'étude de, appliquez l'étude de, les résultats de l'étude de, etc. Il y en a une série, et ça, c'est public. C'est ce qu'on appelle la décision d'ordre public. Est-ce que le fédéral, dans l'émission de son permis, ça devient la même chose? Est-ce que c'est un document d'ordre public et est-ce que le ministre, à ce compte-là, pourrait nous faire parvenir, lorsqu'il l'aura, bien sûr, ce document de base?

(11 h 40)

M. Sirros: Oui. Je suis sûr, même, que, du côté fédéral, étant donné que ça va être un permis qui est émis pour construire un projet, les permis sont publics, les conditions rattachées au permis sont publiques. Je ne peux pas m'engager, au nom du gouvernement fédéral, à le fournir pour eux, mais je peux m'engager, au nom du gouvernement du Québec, à fournir ce qu'on va recevoir à ce moment-là.

M. Chevrette: Est-ce que le gouvernement fédéral, selon la connaissance que le ministère a, est appelé à se prononcer sur le détournement des rivières, dans l'émission de son permis, ou s'il pourra passer un décret autorisant exactement dans le sens de la décision gouvernementale, qui est de commencer les travaux sans se brancher nécessairement sur le projet global et final?

M. Sirros: Le député comprendra qu'il me demande d'interpréter les capacités qu'a le gouvernement fédéral...

M. Chevrette: Non, non, mais...sinon... Ce n'est pas ça que je vous demande. Est-ce que le permis qui est émis par le fédéral peut aller jusqu'à se prononcer quant au projet global présenté en audience ou s'il peut et s'il sera appelé à se prononcer exclusivement sur la décision du gouvernement du Québec, à savoir que le projet sera possiblement scindé en phases?

M. Sirros: Dans la mesure où ça affecte les juridictions qui relèvent du gouvernement fédéral, j'imagine que le fédéral peut émettre des permis avec les conditions qu'il jugera à propos. Donc, dans ce sens-là, il pourrait agencer ou conditionner ou envisager ses permis de telle ou telle façon.

M. Chevrette: Mais est-ce que la demande de permis pour Hydro, par Hydro-Québec... Remarquez bien que je vous la pose; ce serait mieux si Hydro était ici pour nous répondre, mais... Si la demande de permis d'Hydro-Québec est une demande inscrite dans le sens de la décision gouvernementale, à savoir qu'il n'y a pas de détournement, pour l'instant...

M. Sirros: C'est ça.

M. Chevrette: C'est dans ce sens là?

M. Sirros: C'est dans ce sens-là, effectivement. Et, dans ce sens-là, le permis fédéral envisagé, c'est un permis pour la première phase, avec des études qui sont prévues, par la suite, conjointes pour la deuxième phase.

M. Chevrette: Les obligations d'étude sur le saumon, par exemple, je suppose?

M. Sirros: C'est ça.

M. Chevrette: O.K. Est-ce que qu'Hydro-Québec, qui a accepté de débuter les travaux conformément à la décision du gouvernement, pourrait être appelée à réviser, par exemple, ses plans et devis, dans la mesure où on décide de faire 550 MW au lieu de 800 et quelques mégawatts, ou 524 MW au lieu de 800 MW?

M. Sirros: Si Hydro-Québec pourrait être amenée à réviser ses plans et devis, advenant...

M. Chevrette: Quant au barrage. Un barrage d'une capacité de 800 et quelques mégawatts n'est peut-être pas nécessairement... on ne le fait pas nécessairement de la même taille que pour 500 MW... capacité de...

M. Sirros: C'est une décision qui doit être prise d'ici deux ans. Au niveau de l'étalement des travaux, c'est d'ici deux ans qu'Hydro-Québec serait appelée, à ce moment-là, à prendre cette décision-là. Peut-être que M. L'Homme, au niveau de la confection technique des barrages, des turbines impliquées, etc., pourrait juste donner quelques détails supplémentaires.

M. L'Homme (Denis): Oui, on comprend que les travaux qu'Hydro fait présentement ou envisage de faire dans les deux prochaines années sont des travaux d'infrastructures qui ne conditionnent pas, si on veut, le dimensionnement des centrales. Ça, effectivement, on a le temps de laisser... le temps que prendra le comité fédéral-provincial sur les questions en cause arrivera avec ses conclusions, et ces décisions-là seront prises à ce moment-là.

Par rapport à la question plus précise que vous posiez: Est-ce qu'Hydro serait appelée à modifier, possiblement, ses plans? Si je comprends bien, les plans qui viennent d'être déposés au fédéral, ma compréhension c'est que Hydro-Québec a écrit au fédéral en transmettant ses plans et en se soumettant à cette période de 30 jours de consultation, étant entendu qu'Hydro comprenait – ça a été écrit dans une lettre du président d'Hydro au responsable fédéral – que ceci n'entraînerait pas de nouvelles conditions aux permis fédéraux dont on comprend qu'ils seront délivrés dans 30 jours.

Alors, normalement, selon la compréhension d'Hydro-Québec, ils peuvent commencer les travaux, et rien ne devrait amener de changements, là, suite au dépôt des documents pour la période de 30 jours en question.

M. Chevrette: Je comprends. Pour commencer l'aménagement d'un site, défricher, faire une voie d'évitement de la rivière, le temps que tu fais ton barrage, je comprends tout ça. Mais est-ce qu'on a besoin d'un barrage aussi d'envergure pour 500 MW qu'on en aurait besoin pour 800 MW? C'est ça qui est la différence.

M. L'Homme (Denis): C'est ça. On n'a pas besoin de décider ça maintenant.

M. Chevrette: Vous n'avez pas besoin de décider. C'est dans le sens de la réponse du ministre: D'ici deux ans.

M. L'Homme (Denis): C'est ça. On n'a pas besoin de décider ça maintenant.

M. Chevrette: O.K. Mais j'ai bien compris... Est-ce que j'interprète bien, M. le ministre, que le fédéral n'émettra pas un permis ou une autorisation, appelons ça comme on voudra, avec détournement. Ça va être une autorisation du harnachement de la Sainte-Marguerite, sans détournement?

M. Sirros: Ils émettront un permis pour la phase 1...

M. Chevrette: O.K.

M. Sirros: ...avec décision ultérieure sur un possible détournement, basée sur le résultat d'études.

M. Chevrette: D'accord. Moi, sur le sujet, s'il y en a qui veulent questionner sur Sainte-Marguerite, j'aurais terminé. Je passerais à un autre sujet.

Le Président (M. Audet): Merci. M. le député de Drummond.


Rivières patrimoniales

M. St-Roch: Je voudrais faire le point, M. le Président, avec ce qui a été indiqué tout à l'heure, au début de notre commission, sur les remarques préliminaires. Ce projet-là sous-entend aussi le détournement de la Moisie. Or, on avait recommandé... On avait fait les premiers plans de développement d'Hydro-Québec en 1990. J'avais recommandé, avec plusieurs de mes collègues aussi, qu'on regarde la Moisie comme une rivière patrimoniale, à réserve pour les générations futures. J'ai souligné ça aussi, lorsqu'on a fait mars 1993, le plan de développement d'Hydro-Québec.

Depuis ce temps-là, Mme la ministre, votre prédécesseure, nous avait annoncé qu'il y avait une table ministérielle qui avait été mise en place pour regarder les grands paramètres à l'établissement d'une politique de réserves patrimoniales à conserver. J'aimerais savoir ce qui arrive avec la Moisie. Où êtes-vous rendus avec cette table? Est-ce que la Moisie en fait partie? Est-ce que l'Ashuapmushuan en fait partie aussi?

M. Sirros: La Moisie... Je pense que vous vous référez aux tables interministérielles sur l'aménagement intégré des rivières. La Moisie ne fait pas partie de ce groupe de rivières qui est étudié. Par contre, la sensibilité que nous avons vis-à-vis de toute la question de la Moisie et du saumon a amené, comme on vient de le voir, une décision qui fait en sorte de poursuivre les études sur l'éventuel impact avant de prendre une décision quelconque vis-à-vis de la Moisie.

Au niveau des autres rivières, c'est un groupe de travail qui examine les possibilités qui s'offrent au niveau des aménagements intégrés, c'est-à-dire de s'assurer... quelle est l'utilisation optimale selon chacune des différentes utilisations qui peuvent être faites de ces rivières. Ça ne veut pas dire qu'ils sont gelés à tout jamais, au niveau du développement. Ça pourrait être une des conclusions pour une ou plusieurs des rivières. Les rivières qui sont étudiées là-dedans... L'Ashuapmushuan, pour répondre à votre question, est là-dedans; la Péribonka est là-dedans, et quelques autres autour, au niveau du bassin.

M. St-Roch: Mais la Moisie n'est pas incluse dans ce projet-là, de conserver cette rivière-là intacte.

M. Sirros: Non.

M. Chevrette: Là-dessus, en fait, ce n'est pas la Moisie comme telle qui serait détournée, mais le fait que tu détournes deux affluents de la Moisie, ça peut avoir une incidence sur la Moisie et, en particulier, sur la faune aquatique. C'est là qu'est tout le dilemme dans le milieu, dans le fond.

M. Sirros: Je voudrais dire tout simplement que la Moisie ou ses affluents ne font pas partie de l'étude qui est faite au niveau du...

M. Chevrette: Non.

M. Sirros: ...groupe interministériel sur l'aménagement intégré des rivières. Ça fait partie d'une attention particulière au niveau des impacts quant au développement hydroélectrique.

(11 h 50)

M. St-Roch: ...avec une conclusion de ces dossiers, de dire: Oui, au Québec, on va conserver au moins une rivière à l'état naturel, on va arrêter une rivière, on ne fera pas les castors. On va dire à nos petits-enfants: C'est de ça que ça avait l'air, une rivière naturelle, au Québec, avant que plusieurs lunes passent et avant qu'on ait ce syndrome. Oui au développement hydroélectrique, mais, bon Dieu, vous ne me ferez pas accroire qu'on n'est pas capable de garder une rivière, ici, à l'état sauvage. Si oui, dans cette gestion intégrée de conservation du patrimoine... Parce qu'il n'y a pas juste les dollars hydroélectriques. Il peut y avoir beaucoup d'autres dollars aussi d'associés à ces rivières. Quand est-ce qu'on peut arriver à une conclusion, de dire: Par tel échéancier, on devrait être capable d'annoncer ici, au Québec: Voici une politique intégrée. Voici la rivière qui a été sélectionnée.

M. Sirros: J'en prends note, M. le député. Certainement, on partage tous, je pense, cette sensibilité au niveau de l'opportunité et la valeur de garder autant que possible le patrimoine physique, géophysique intact, tout en s'assurant qu'on puisse en bénéficier au niveau du développement comme tel. Dans un premier temps, il y a la question qui est étudiée sous l'angle développement intégré des rivières, comme je le disais. Peut-être que ça conclura que l'utilisation optimale d'une de ces rivières-là serait d'axer tout le développement sur l'aspect récréotouristique, mais, même ça, ce n'est pas à l'état sauvage. Est-ce que le député parle, je ne sais pas, moi, de garder une zone sans intrusion humaine ou...

M. St-Roch: Oui, je pense qu'il est possible, M. le ministre, si je prends l'Ashuapmushuan, de garder cette rivière-là la plus naturelle possible tout en en jouissant. Ce n'est pas la nature au service de l'homme, ni l'homme au service de la nature, mais un heureux mariage. Au moins, qu'on n'arrive pas sur une rivière et qu'on arrive face à un barrage, et dire: De quoi elle avait l'air, cette rivière-là, sans barrage? Alors, on peut garder une rivière à l'état naturel et faire des aménagements en bordure sans interruption majeure du paysage, pour le garder le plus naturel possible. Ce qui est inquiétant, c'est que pendant que ce comité-là siège ici, la même commission, on est de l'autre côté et on voit encore, dans les documents qu'on a vus tout dernièrement, des sommes d'argent dépensées sur ces rivières-là. Alors, dans un contexte aussi économique, si on fait des études, et dire: On va peut-être harnacher... Mais, d'un autre côté, on dit: On va peut-être les garder naturelles, il y a peut-être un contexte d'économie, aussi, qui est important, en plus de cet aspect patrimonial là.

M. Sirros: Je tiens tout au moins à assurer le député qu'Hydro ne fait aucune étude à l'heure actuelle sur l'Ashuapmushuan ni sur la Péribonka, sur les réserves, là. Donc... Et le travail de ce groupe de travail aura le temps d'arriver bien avant que quelques travaux que ce soient soient entrepris.

M. St-Roch: Voyez-vous, M. le ministre, un des premiers principes d'une gestion intégrée, en règle générale, c'est de baliser un cheminement critique et un échéancier, de dire: Bien, mes travaux vont débuter à telle date, et, à telle date, je devrais arriver avec une conclusion. Alors, je répète ma question: Dans l'établissement de cette gestion intégrée, quel est le cheminement critique qui a été établi pour arriver avec une décision de dire: Oui, on devrait en mesure de communiquer les résultats de telle étude telle date et telle année?

M. Sirros: M. L'Homme, qui suit le travail de ce comité, pourrait vous donner un peu plus de détails.

M. L'Homme (Denis): Merci. M. le Président, effectivement, dans la foulée de la commission parlementaire sur le plan de développement d'Hydro-Québec de mars 1993, où la question de l'Ashuapmushuan avait été amenée, tant pour le développement que pour la conservation, le Conseil des ministres a donné un mandat à deux ministères, le ministère des Ressources naturelles, maintenant, et le ministère de l'Environnement et de la Faune, de former un comité de travail avec les principaux secteurs de ces ministères-là, donc: forêts, terres, et, pour ce qui est de la faune, bien sûr, l'environnement et la faune, les deux secteurs, pour développer une méthodologie qui nous permettrait, ou qui permettrait au gouvernement de trancher ce type de questions, c'est-à-dire de voir comment on peut arriver à faire un choix optimal compte tenu des multiples usages, souvent contradictoires, mais certainement, à certains égards, conflictuels, de rivières au Québec. Le mandat n'est pas limité à l'Ashuapmushuan, mais le Conseil des ministres a demandé de mettre en application le concept en utilisant l'Ashuapmushuan et la Péribonka en priorité, en considérant la Péribonka et l'Ashuapmushuan en priorité, pour des raisons bien évidentes, parce qu'il y a effectivement une multiplicité d'usages dans ces deux rivières-là, qui se prêtent bien à l'application du concept.

Le Conseil des ministres n'a pas fixé d'échéancier au groupe de travail. Cependant, le groupe de travail s'en est fixé un et on voudrait, nous... On doit remettre un rapport d'étape d'ici quelques semaines et, dans ce rapport d'étape, on fera état des diverses méthodologies possibles. Il s'agit bien de développer des méthodologies; il ne s'agit pas, encore une fois, d'arriver et de dire: On a trouvé la solution, et voici comment une ou les deux rivières en question pourraient être aménagées d'une façon optimale. Pour une raison bien évidente. C'est que, dans ce type d'étude là, que ce soit l'approche multicritères ou d'autres, mais l'approche multicritères semble être une qui se prête bien à ça, la population locale doit faire part de ses propres priorités. C'est la seule façon d'arriver avec un optimum, dans le type d'aménagement, entre le récréotouristique, le faunique, le forestier, l'hydroélectrique et d'autres usages, la conservation pure et simple.

Donc, nous, ce que l'on proposerait, le comité de travail, au gouvernement, éventuellement, ce serait une méthodologie d'approche et une implication des gens de la région. Et ça, on se donnerait, après ce rapport d'étape, certainement une année pour aller en région, pour recueillir, pour valider, pour pondérer nos divers critères et, après ça, bien, voir à quel type de conclusion on peut parvenir. À ce stade-ci – et le député a tout à fait raison de le mentionner – toutes les options sont ouvertes: une option toute conservation à l'état sauvage ou un aménagement strictement faunique ou un aménagement strictement hydroélectrique – ce serait surprenant, là – Mais toutes les options sont ouvertes. C'est ça. C'est ce que l'approche multicritères nous permet de faire. On se donnerait donc, après ça, une bonne année pour arriver avec des approches de solutions qui pourraient être mises en oeuvre. Pour répondre à une autre des questions que le député avait, effectivement, Hydro-Québec, après avoir terminé la phase 1 de ces études d'avant-projet sur l'Ashuapmushuan, où ils ont dépensé un montant de l'ordre d'une trentaine de millions de dollars sur plusieurs années, ils ont mis en veilleuse la phase 2, donc ils ne font plus d'étude sur l'Ashuapmushuan. Ils attendent le résultat des travaux du comité dont je fais état, ils y participent, à notre demande, ils ont une très grande expertise là-dedans. Pour ce qui est de la Péribonka, je crois qu'Hydro-Québec fait des études conjointement avec Alcan sur certains aménagements. Je n'ai pas de détails là-dessus, mais il y a effectivement des travaux qui se feraient sur la Péribonka.

M. St-Roch: Dernière question, M. le Président. Est-ce que...

Le Président (M. Audet): Un instant. Sur le même sujet?

M. St-Roch: Oui, oui.

Le Président (M. Audet): M. le député de Joliette voulait intervenir. Allez-y.

M. St-Roch: Juste pour terminer. Est-ce que ce rapport-là, qui sera rendu public, peut être mis à la disposition des membres de la commission parlementaire pour nous assurer le suivi adéquat après considération de la procédure bureaucratique normale et nécessaire?

M. Sirros: Comme on va consulter la population sur ça, il me semble que ce serait quelque chose qu'on pourrait faire vis-à-vis des membres de la commission aussi.

M. St-Roch: Merci, M. le ministre.

Le Président (M. Audet): Merci. M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Oui. Je veux me raccrocher à ce qui a été posé comme question. Est-ce que ce mandat-là pourrait conduire, par exemple, à une décision, si j'ai bien compris M. L'Homme, de décréter qu'une rivière pourrait être conservée à l'état sauvage complet ou à l'état naturel le plus complet? Pourquoi alors ne pas procéder dans le sens suivant: prendre une décision politique de créer des rivières patrimoniales et, par la suite, établir les critères pour voir lesquelles, et non pas seulement l'Ashuapmushuan? Ça pourrait, par exemple, être la Moisie également. On en a peu, de cours d'eau. On le sait. Puis, Hydro-Québec, on ne peut pas les blâmer, le mandat qu'ils ont, c'est d'harnacher tout ce qui est «harnachable». Ce n'est pas eux autres qui vont décider qu'il va y avoir des rivières patrimoniales. C'est évident, ça. Eux autres, ils vont harnacher tout ce qui bouge, tout ce qui a un peu de courant puis qui a un peu de débit. C'est dans leur esprit, ça. Mais, comme gouvernement, comme État, on pourrait avoir une politique de conservation, au moins, de quelques rivières. Ça m'apparaîtrait une expression d'opinion beaucoup plus large que même une région, ça, parce que ça pourrait être une politique nationale de conservation de certains cours d'eau à l'état naturel. Est-ce que vous avez réfléchi à cet aspect-là?

M. Sirros: Je réfléchis à cet aspect-là.

M. Chevrette: Ce n'est pas exclu?

M. Sirros: Écoutez, moi, je pense que, comme je disais au député, on a tous une sensibilité à pouvoir s'assurer qu'on maintienne un patrimoine dont on peut jouir pendant des générations. C'est une perspective de développement durable qu'on envisage. Il y a deux mots, là-dedans: «développement» et «durable». Ça n'exclut pas la possibilité d'avoir un concept de rivière patrimoniale, mais je ne peux pas dire que ma réflexion est terminée sur ce sujet-là.

(12 heures)

M. Chevrette: Il y a beaucoup de gens qui se demandent comment il se fait, par exemple, qu'Hydro-Québec ne travaille pas en fonction du harnachement de rivières déjà harnachées. Par exemple, la Péribonka l'est déjà. Par exemple, la Sainte-Marguerite, on pourrait améliorer SM 1 puis SM 2. La Saint-Maurice est déjà harnachée, puis il y a du potentiel à aller chercher plusieurs mégawatts. Plutôt que de se tirer, dépenser des millions et des millions sur des rivières qui représentent... D'abord, on sait que l'Ashuapmushuan, c'est la pouponnière de la ouananiche, et que c'est une richesse. Les frayères sont toutes dans l'Ashuapmushuan. Et, comme la rivière Moisie est probablement la plus belle rivière à saumon, non seulement au Québec, mais dans très grand, je dirais pratiquement, au monde... Donc, il y a des choses, de même, qui se discutent, et il me semble, on n'a pas le temps, d'abord, premièrement, on n'a pas l'occasion de le faire, mais ça pourrait être une discussion qui satisferait un grand nombre de citoyens qui espèrent, un jour ou l'autre, avoir non pas à combattre à chaque projet, mais avoir une politique et une vision d'ensemble pour le devenir québécois. Et c'est ça, je suis content de voir, au moins, que la réflexion est en marche, même si elle n'est pas terminée, parce que, déjà, il y a de plus en plus de citoyens qui s'interrogent là-dessus.

M. Sirros: Je prends bonne note des commentaires du député et aussi de ceux d'un grand nombre de citoyens. Je dois juste ajouter que, dans le cas des rivières qui sont déjà harnachées, je pense que, effectivement, là où il y a un potentiel supplémentaire à aller chercher, au niveau de Hydro-Québec, c'est quelque chose qu'ils examinent. Les projets sont quand même priorisés en fonction d'un certain nombre de critères qui conviennent à l'entreprise, comme je le faisais remarquer, surtout au niveau économique. C'est pour ça aussi que tout le débat et l'ouverture sur la planification intégrée des ressources, ce qui nous permet d'inclure les externalités dans le calcul des choix énergétiques qu'on doit faire, me semble quelque chose qui va dans le sens souhaité, je pense, par tout le monde et qui va dans le bon sens.

M. Chevrette: M. le Président, étant donné que mon collègue a une question un peu spécifique, un peu comme Mme Hovington, tantôt, de Matane, et pour lui permettre de se libérer, il y aurait une petite question, et je suggérerais deux minutes d'arrêt, après sa question, parce qu'on doit filer jusqu'à 13 h 30.

Le Président (M. Audet): D'accord. M. le député de Bonaventure.


Tarifs d'électricité des stations d'épuration des eaux

M. Landry: Merci, M. le Président. Alors, ma question porte sur la tarification d'Hydro-Québec sur les stations d'épuration des eaux, puisque, à compter du 30 avril, la tarification S, qui s'appliquait jusqu'au 30 avril, va être remplacée par une tarification institutionnelle, tarification G, ce qui s'avère être une tarification plus élevée. Est-ce que ce problème a été porté à l'attention du ministre par d'autres municipalités que celles de mon coin, à date?

M. Sirros: Oui. Bien, enfin, remarquez, on me fait un rappel du dossier. Effectivement, je suis aussi bien, peut-être, de laisser M. L'Homme vous donner tous les détails. Allez-y.

M. L'Homme (Denis): Oui, enfin, le programme de tarifs spéciaux pour les stations d'épuration, c'est un programme qui a été mis en place dans les années quatre-vingt, en même temps qu'il y avait des contrats spéciaux donnés à des entreprises pour favoriser l'investissement. Hydro était, à cette époque, on s'en souvient bien, dans une période de surplus énergétique, et contribuait, de cette façon-là, à la relance de l'économie, et aussi, aidait les municipalités avec cette tarification-là. Il a été prévu dès le départ que ce programme était d'une durée limitée, que, à la fin, le nombre d'années... Effectivement, la période se terminait le 31 décembre 1991, et, à ce moment-là, les tarifs devaient normalement retrouver leur niveau régulier, c'est-à-dire le tarif L, à toutes fins pratiques, pour ces stations, ou le tarif régulier applicable à chacune des ces catégories-là. Évidemment, la marche était haute à monter. Si ma mémoire est bonne, il y aurait eu une augmentation, du jour au lendemain, de 33 % ou 30 % des tarifs d'électricité.

Le ministère, de concert avec Hydro-Québec et en acceptant l'argumentation des municipalités qui se voyaient prises avec une hausse comme ça, a accepté d'étaler la hausse sur une période de trois ans pour faciliter, et ça, c'était de concert avec les municipalités. Et, là, en 1994, bien, c'est la fin de la période de rattrapage et donc, les tarifs réguliers reviennent. Je pense qu'il faut bien reconnaître que c'est un programme qui était d'une durée limitée. Il y a eu – appelons ça – une concession de faite pour faciliter le rattrapage au tarif régulier, et maintenant, c'est fini.

M. Sirros: Le temps est arrivé.

Une voix: Merci.

M. Landry: Mais est-ce qu'il n'y aurait pas lieu, dans le contexte actuel et dans le contexte de beaucoup de municipalités, justement, d'étaler dans le temps?

Une voix: Bien, étaler l'étalement, c'est dur!

M. Sirros: Ha, ha, ha! C'est ça, oui. Il me semble que c'est ce qu'on a fait. Donc, là, vous demandez d'étaler l'étalement, ce qui me semble assez difficile, au niveau de l'équité aussi vis-à-vis de l'ensemble des municipalités.

M. Chevrette: On «pourrait-u» leur mettre une clause d'iniquité?

M. Sirros: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Non, mais, blague à part, étant donné qu'ils ont eu des augmentations, comme a dit M. Dunn... L'Homme? Moi, je l'appelle Dunn, et c'est L'Homme? L-u-m-b?

M. L'Homme (Denis): L' H-o-m-m-e, comme un homme, monsieur...

M. Chevrette: Ah! L'Homme.

M. L'Homme (Denis): Avec un apostrophe et un «h» majuscule, s'il vous plaît.

M. Chevrette: Excusez, moi, monsieur.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: J'ai failli en pousser une plate.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. L'Homme (Denis): Vous ne vous retenez pas d'habitude, M. le député.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Le climat est assez bon ce matin.

M. Sirros: Non, non, non, encouragez-le pas!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Je vous en prie, votre ministre ne voudrait pas que vous me provoquiez, sans doute.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Sirros: Non, sans doute.

M. Chevrette: Ces gens-là ont quand même fait des efforts depuis quelques années, mais, dans la conjoncture actuelle, il reste à peine un mois avant d'aller chercher la dernière tranche de l'augmentation prévue. Est-ce que ce ne serait pas l'occasion pour, je ne sais pas, l'étaler sur deux ans au lieu d'un et démontrer aux municipalités que... Parce que c'est des coûts importants pour les municipalités, ça. Et, en passant, est-ce que c'est le tarif L ou G?

Une voix: G.

M. Chevrette: Il me semblait que c'était G institutionnel et non pas L.

M. L'Homme (Denis): Oui, je pense que vous avez raison, ce serait mon erreur.

M. Chevrette: C'est parce qu'on était habitué au...

M. L'Homme (Denis): C'est G et M, ce sont les deux tarifs intermédiaires dans le commercial.

M. Chevrette: C'est parce que vous êtes habitué aux contrats secrets, vous, là, mais là, c'est un contrat public.

M. L'Homme (Denis): J'en entends parler souvent.

M. Chevrette: Ce n'était pas tarif L, c'était G.

M. L'Homme (Denis): Oui, c'est G et M, vous avez raison.

M. Sirros: Mais il faut comprendre aussi que c'est un étalement qui a été fait sur trois ans, c'est la troisième année qui arrive. Ça a été fait de concert avec les municipalités, puis, honnêtement, on n'a pas eu de demandes de quelque nature que ce soit de la part des municipalités pour changer ça. Alors, c'est pour ça que je disais: le temps est arrivé, en quelque sorte.

M. Chevrette: Suspension de deux minutes.

Le Président (M. Audet): Oui, nous allons suspendre nos travaux quelques minutes.

(Suspension de la séance à 12 h 7)

(Reprise à 12 h 16)

Le Président (M. Audet): Veuillez prendre place s'il vous plaît, nous allons poursuivre nos travaux. S'il vous plaît! Alors la commission de l'économie et du travail reprend ses travaux. Je vous rappelle que nous sommes à l'étude des crédits budgétaires du ministère des Ressources naturelles pour l'année financière 1994-1995. Nous avons discuté de développement énergétique. Je vais maintenant reconnaître M. le député de Joliette, possiblement sur le gaz naturel, je ne sais pas, en fait.

M. Chevrette: Non je vais prendre la cogénération M. le ministre.

Le Président (M. Audet): D'accord, allez-y.

M. Chevrette: Bien, un petit peu de gaz naturel, automatiquement, excusez, là. C'est parce que...

M. Sirros: Sans vouloir orienter le choix des sujets, je vais juste faire remarquer qu'il y a aussi les représentants de la Régie du gaz naturel qui sont ici. Si on pouvait peut-être, avant la fin de la matinée – l'audition du matin – aborder cette question-là, ça les libérerait pour l'après-midi. Sinon, si c'est dans le plan des députés de le faire dans l'après-midi, ça aussi, ils sont disposés à rester tout le temps nécessaire, M. le Président, mais je voulais juste l'indiquer aux députés.

Le Président (M. Audet): Merci.

M. Chevrette: Un instant. Oui, on pourrait effectivement, avant la fin de cet avant-midi, être aussi compréhensifs envers vos représentants qu'on l'a été envers les députés, pas de problème. Un poids, une mesure.

Des voix: Ha, ha, ha!


Projets de cogénération

M. Chevrette: Cogénération, tout d'abord. On se rappellera au départ qu'Hydro a fait un appel; il y a eu une cueillette inattendue de 8000 MW, pour retenir 760 MW – nous disait-on à l'époque – d'électricité provenant de la filière de la cogénération. Ce 760 est devenu à ce jour 500, nous dit-on toujours, dont 250 au niveau de la biomasse et 250 au niveau du gaz naturel. Jusque là, ça «ressemble-tu» à ça? Non, mais j'aimerais mieux que vous me rectifiez tout de suite. Je ne veux pas...

M. Sirros: Le 500, c'est vrai; le 250, c'est du renouvelable, non pas juste de la biomasse.

M. Chevrette: Ah, renouvelable O.K. Et cette situation-là, vous savez qu'actuellement ça a l'air un petit peu fou. Hydro avait annoncé au mois de février qu'il mettait un cran d'arrêt immédiat. On a vu, d'autre part, le premier ministre dire: écoute, ce n'est pas toi qui vas faire la sélection, c'est nous autres, comme premier ministre et comme représentants du gouvernement. Et il y a de plus en plus de rumeurs à l'interne, à Hydro-Québec – on ne l'invente pas là, on est plusieurs, de sources différentes, mais plusieurs à apprendre de toutes parts et tous côtés – qu'Hydro, à toutes fins pratiques, ne choisirait pas de projets avant un bon nombre de mois.

(12 h 20)

Alors que le BAPE a déjà fait des audiences sur plusieurs projets – je sais que ça s'est fait à Hull, c'est en train de se faire, ou c'est terminé même à Montréal- Est, ça s'est fait à Bécancour–Trois-Rivières, ça s'est fait à Québec, avec le projet Polsky, c'est de l'argent, ça, qui est dépensé. Quand on fait des audiences publiques, il y a des groupes qui se préparent, qui viennent donner leur opinion. Est-ce que le ministre a réussi à faire le point avec Hydro-Québec sur le dossier cogénération? Est-ce qu'il a fait le point, et où en est la situation à ce jour?

M. Sirros: Je pense que le député la décrit assez bien la situation à ce jour. Effectivement, Hydro-Québec, comme ils ont pu aussi en discuter avec nous ici, en commission parlementaire, a repoussé pour 1997 la mise en service des projets de cogénération, a réduit de 750 à 500 la production privée, dont les 250 renouvelables ont été maintenus, et, en quelque sorte, donc, les projets de cogénération à gaz se tournent autour de 250 MW.

Petite correction, le premier ministre n'a pas dit qu'on se substituerait à Hydro-Québec pour choisir. On a dit qu'on choisirait les meilleurs projets possibles pour l'avenir du Québec, pour l'économie québécoise. Il faut aussi s'assurer qu'on puisse tirer les avantages qu'il faut bien tirer des choix qu'on fait au niveau énergétique, et ça a toujours été un élément dans la prise de décision, dans toutes sortes de projets d'ailleurs, et sous tous les gouvernements également.

Alors, le point, comme tel, sur la cogénération, à l'heure actuelle, il y a huit projets possibles. Ils disposent tous de contrats de «opting out», de résiliation, et on les invite à se garder dans les possibilités, selon leur volonté, en vue d'un éventuel choix vis-à-vis d'une mise en service en 1997.

M. Chevrette: Mais, si j'ai avancé ça sur le premier ministre, c'est parce que, en date du 24 février 1994, il est dit ceci – la production privée, et c'est Martin Geoffroy, attaché de presse du premier ministre qui est la personne ressource: Le premier ministre a également réagi aux intentions d'Hydro-Québec de réduire l'objectif d'achat d'énergie de la filière de la production privée de 760 à 500. Plutôt que de s'attacher à un objectif précis d'achat, M. Johnson considère que le gouvernement doit analyser avec Hydro-Québec chaque projet de cogénération au mérite. Ça veut dire: indépendamment du quantum. Pour le premier ministre, ce n'est pas un quantum de 500 ou de 250. Il dit: Moi, chaque projet doit être étudié au mérite entre le gouvernement et Hydro-Québec.

Et il continue: Pour le premier ministre, il faut examiner chaque projet de façon globale, en évaluant l'effet sur l'emploi, en même temps que les dimensions énergétiques et environnementales. Dans ce contexte, le chiffre de 760 ou de 500 est appelé à être ajusté. Donc, à toutes fins pratiques, c'est de l'interprétation que vous allez me dire qu'on fait, mais, à mon point de vue, le premier ministre vient de dire: Écoutez, au lieu d'annoncer des réductions ou au lieu de faire quoi que ce soit, étudions chaque projet au mérite. Ça veut dire que ça peut être plus de 250, ce n'est pas immuable, ça. C'est dans ce sens-là que je l'ai interprétée, moi, en tout cas, la déclaration du premier ministre.

M. Sirros: Le fait que ce ne soit pas immuable, je pense que la preuve, le député l'a fournie tout à l'heure. Il y a deux mois, on parlait de 750; Hydro a revu les données dont elle dispose vis-à-vis des besoins énergétiques, a réduit ça. Le premier ministre a bien dit qu'on tiendrait compte aussi des aspects énergétiques et environnementaux. C'est sûr, que chaque projet puisse être évalué à son mérite... Un des mérites de chaque projet, une des données qui doit être mise en compte dans l'étude au mérite, c'est aussi les données énergétiques, et, si les données changent, il y a des choses qui peuvent changer au niveau du quantum comme tel, effectivement. Et je pense qu'Hydro-Québec elle-même vient de faire la démonstration que ce n'est pas immuable, et ça dépend d'un certain nombre de facteurs que ni le gouvernement ni Hydro-Québec ne contrôlent, si ce n'est que la reprise économique, les différents besoins qu'on peut sentir au niveau de la production d'électricité, etc.

C'est pour ça que tout ce que je veux faire, c'est de nuancer un peu l'interprétation que fait le député. Oui, on va en discuter avec Hydro-Québec, des choix qui doivent être faits vis-à-vis des projets en particulier, parce que chacun a des impacts différents sur le niveau de structuration, si vous voulez, que ça donne à l'industrie, le niveau de création d'emplois, son positionnement vis-à-vis de l'avenir, au niveau de l'industrie concernée, le pourcentage de production d'électricité versus vapeur. Il ne faut pas que ce soient des projets qui sont en quelque sorte des centrales thermiques classiques...

M. Chevrette: Déguisées.

M. Sirros: Exact, qui ne produisent pas assez de vapeur pour justifier un projet de cogénération. Alors, oui, on va regarder tout ça, et c'est dans ce sens-là que le premier ministre intervenait.

M. Chevrette: Oui, sauf que, dans cela, M. le Président, le ministre est bien conscient qu'il peut lui en coûter entre 40 000 000 $ et 50 000 000 $ d'abord s'ils choisissent l'«opting out» après avoir signé des contrats en bonne et due forme. Et le ministre dit: je vous incite à rester dans la filière; on pourrait peut-être aller vous chercher... Mais pensez-vous que les contrats d'approvisionnement qui sont signés... Ça ne dure pas ad vitam aeternam ça. On les force quasi à sortir de cela, parce que les contrats sont limités. Ils n'ont pas des clauses à «perpet», comme disent les Français, quand ils signent un contrat d'approvisionnement. Est-ce que vous êtes conscient de cela? Moi, j'ai rencontré beaucoup de compagnies qui ont des projets, puis elles ne nous trouvent plus sérieux. Elles disent: vous vous en allez où? Vous signez des ententes, vous avez... Bien sûr, on a... Puis, d'ailleurs, elles n'ont pas toutes la clause d'«opting out», si j'ai bien compris. Il y a certaines compagnies qui ont une clause d'«opting out» qui peuvent s'en sortir et elles sont compensées, mais il y a d'autres compagnies qui n'ont pas pris la précaution de signer l'«opting out», de sorte que, si elles ont un contrat d'approvisionnement pour quelques années seulement, anticipé quelques années, elles peuvent être mal prises en mosus. Elles ne peuvent pas sortir, elles ne sont pas compensées, puis elles n'ont plus la garantie d'approvisionnement.

M. Sirros: Il me semble que... En tout cas, à ma connaissance, elles ont toutes maintenant le contrat de l'«opting out», y inclus Indeck-Hull.

M. Chevrette: Bien, moi, en tout cas, je vous dirai lequel. Je n'ai pas mes notes sur chacun des dossiers, mais on m'a indiqué... il y en a un qui est venu me dire, entre autres, je ne me souviens pas à quel endroit, qu'il n'avait pas cette clause d'«opting out» et qu'il était pris, d'autre part, avec un contrat limité quant à l'offre d'approvisionnement. Si c'est deux ans et plus... Si tu signes un contrat d'approvisionnement aux quatre ans ou cinq ans, je ne sais pas, à tant de sous du litre, mettons, et que tu n'es pas choisi avant cinq ans, tu es fini. Le contrat d'approvisionnement... Et tous les calculs sont basés souvent sur les premiers contrats d'approvisionnement.

M. Sirros: Oui, ça, j'en conviens mais, au niveau du.. je vais me référer au contrat d'annulation...

M. Chevrette: D'annulation.

M. Sirros: ... si vous voulez. Ils ont tous cette clause dans les contrats, maintenant.

M. Chevrette: Entre Hydro et les projets déposés.

(12 h 30)

M. Sirros: Entre Hydro et le promoteur. Ils ont tous, à l'heure actuelle, des clauses d'«opting out», que Hydro peut se retirer avec compensation à la compagnie concernée pour la compenser justement pour les études puis les choses que la compagnie aurait faites, que nous, on n'a pas faites. Et ça tient compte, on me fait remarquer aussi, des contrats de gaz que la compagnie peut avoir, parce que, si elles sont déjà rendues au stade où elles ont un contrat de gaz de convenu, à ce moment-là, les compensations d'Hydro sont plus élevées. Et c'est pour ça que, dans les chiffres qu'on avance, on parle d'une variation entre 25 000 000 $ et 50 000 000 $, dépendant à quel moment la clause de retrait a été utilisée et selon le point dans le cheminement du projet où se trouve le promoteur en question. Donc, si le projet a franchi toutes les étapes, a même ses permis, etc., puis qu'Hydro se retire, la compensation est plus élevée qu'un projet duquel se retirerait Hydro, qui se trouverait au tout début du processus. C'est pour ça qu'il y a cette variation-là, et c'est pour ça qu'on tient compte justement de ces aspects-là, et c'est pour ça que ces clauses ont été négociées. C'est l'équivalent, en quelque sorte, des études que fait Hydro, de préfaisabilité ou de faisabilité quant aux rivières ou aux sources hydrauliques. Au lieu que ce soit Hydro qui fasse ces études-là, c'est le promoteur privé qui le fait; Hydro, si jamais elle ne les utilise pas, bien, elle compensera pour les travaux effectués par le promoteur.

M. Chevrette: Quelle est la politique du gouvernement en matière de cogénération? Quelle est la grande ligne directrice?

M. Sirros: C'est une filière d'appoint. On l'envisage comme une police d'assurance, si vous voulez. C'est quelque chose qui peut entrer en service rapidement. On parle d'un an et demi, deux ans pour produire de l'électricité à partir de la cogénération, comparé à sept à 10 ans pour des projets de barrage hydroélectrique. Donc, on l'envisage comme une filière d'appoint qui sert de police d'assurance pour les moments où on pourrait avoir besoin rapidement d'électricité. Et on tient compte, évidemment, de la question des impacts environnementaux; le BAPE y est. C'est ça. «Énergétiquement», il faut que ce soit efficace. Il ne faut pas que ce soit, comme je disais tout à l'heure, des centrales thermiques cachées. Et c'est dans ce sens-là aussi que les bénéfices ou les retombées intéressantes pour les industries en question sont pris en compte.

Le Président (M. Audet): Il y a M. le député de Drummond qui voulait intervenir là-dessus.

M. Sirros: J'ai cru lire quelque part, aussi, que le député partage un peu cette façon de voir les choses.

M. Chevrette: Il y a des différences entre les politiques. Nous, on partage sûrement votre point de vue en ce qui regarde le thermique déguisé. On n'est pas d'accord avec du thermique déguisé. On est d'accord avec le principe d'une cogénération, oui. On est d'accord aussi que la dimension environnementale... D'ailleurs, la cogénération ne doit pas venir changer la vocation première d'une entreprise. Si c'est de faire du papier, ce n'est pas de vendre de l'électricité. Il ne faut pas que l'octroi d'un contrat de cogénération fasse de cette entreprise ou de ce promoteur non plus un fabricant de papier, mais qu'il devienne un vendeur d'électricité parce que c'est plus payant. Ce serait fausser l'optique de la cogénération, et, bien sûr, la dimension environnementale y est pour beaucoup.

Il y a également la question, je pense, où on pourrait discuter longuement, c'est sur l'octroi du nombre de mégawatts par rapport aux besoins mêmes des projets. Ça, c'est un peu fatigant, parce qu'on se rend bien compte que, dans plusieurs projets, on gonfle le nombre de mégawatts par rapport aux besoins, précisément pour rentabiliser davantage le projet. Et ça, on peut comprendre, c'est tout à fait humain, ce qu'une compagnie peut faire. C'est normal qu'elle ne veuille pas faire un projet à perte. Moi, je comprends ça, mais, d'autre part, on ne peut pas indûment gonfler les projets par rapport aux besoins réels, non plus. Et ça, il y aurait une très belle discussion à faire sur la cogénération, effectivement, au Québec, parce qu'il y a beaucoup de gens qui mêlent cogénération et qui craignent tout de suite que ce soit automatiquement thermique, alors qu'il y a une question de plus, environnementale, aussi, dans plusieurs projets. Quelqu'un qui produit déjà son énergie au mazout et qui le convertit au gaz naturel, je m'excuse, mais, à mon point de vue, c'est un plus environnemental. Et il y a des gens qui ne le comprennent pas. On doit faire une discussion intelligente, à mon point de vue, sur le sujet au lieu de tirer tous azimuts dans toutes les directions.

Je suis porté à croire, d'autre part, M. le ministre, que ça aurait été intéressant d'avoir une audience générique, comme il y avait eu un engagement de le faire de votre gouvernement, parce que ça aurait permis de créer les balises nécessaires. Au niveau environnement en particulier, on aurait pu voir, au lieu de se garrocher projet après projet et regarder les mêmes groupes déambuler dans chacun des projets, si on avait eu des audiences génériques, ça nous aurait permis, je pense, à tout le monde, d'avoir une idée plus juste de la situation.

M. Sirros: Je constate que, grosso modo, et je dirais, grosso, grosso modo, on est sur la même ligne, on a la même orientation. Je constate que les préoccupations du député rejoignent les miennes, et qui ont été exprimées, particulièrement la question, entre autres, de s'assurer que ce n'est pas des projets qui deviennent des projets de production d'électricité plus qu'autre chose. Et l'ensemble des autres facteurs, la substitution du mazout par le gaz, évidemment, c'est un plus environnemental et ce serait intéressant que les gens puissent le saisir et le comprendre. Et c'est dans ce sens-là aussi que les audiences du BAPE aident dans ce sens-là. J'y reviendrai tout à l'heure.

Mais, sur la question de l'étude générique, je sais que, il y a un certain temps, ça avait été discuté à un moment donné. Suite à une réévaluation, si vous voulez, de l'affaire, on a constaté, semble-t-il, que les impacts étaient vraiment des impacts locaux et que ça servirait les mêmes phases éducatives d'avoir des audiences publiques, mais, au niveau des projets locaux, c'est le choix qui a été retenu à un moment donné, et c'est une situation de fait.

Je me demande si le député ne serait pas intéressé à ce que je permette à M. L'Homme de vous expliquer un peu aussi le processus qu'on a utilisé, les critères qu'on a élaborés pour se protéger justement contre des projets qui deviennent des productions d'électricité, et qui nous ont servi aussi, avec Hydro-Québec, à éliminer un certain nombre de projets qui, suite à cette analyse, faisaient en sorte que c'était évident que ça ne convenait pas véritablement à ce qu'on comprend, nous, par «cogénération».

M. Chevrette: Juste 30 secondes, avant. C'est parce que, quand il n'y a pas de génériques, M. le ministre, on se retrouve dans des situations très aberrantes. Les gens du milieu local, ou bien ils sont carrément pour – comme dans certains cas, prenez Québec, ici, les gens du milieu ont été assez fortement favorables, la même chose à Trois-Rivières, la même chose à Windsor, tout le monde était pour, un front commun épouvantable, puis tu te ramasses avec des gens... Puis vous avez parlé d'impact local, mais, quand on permet continuellement des audiences pour chaque projet, on permet aux mêmes groupes d'aller se présenter à peu près partout. Et, moi, je disais: si on faisait des génériques en faisant certaines balises, là, il n'aurait pu rester seulement que les impacts locaux. Si c'est en plein coeur de ville, il faut comprendre que des citoyens soient contre, d'autres pour, etc. Mais, tant qu'on ne fera pas de générique, on va toujours conduire ces gens-là. Moi, je vous avoue que ç'aurait été un avantage majeur de faire des génériques, puis peut-être l'occasion de le vider, le sujet, une fois pour toutes. Parce que, actuellement, moi, j'ai lu les mémoires de Indeck à Hull, j'ai lu les mémoires de Montréal, j'ai lu ceux de Québec. Je n'ai pas lu ceux de Trois-Rivières encore. Mais je peux vous dire que c'est sensiblement les mêmes, avec le même type d'argumentation. Et je pense qu'à ce moment-là, même, il se développe une agressivité au lieu d'une compréhension, parce que les gens qui se créent des fronts communs chez eux, et la conjoncture économique, vous le savez, aidant, il y en a qui se balancent un peu trop des valeurs environnementales, en pleine crise économique. Et, ça aussi, c'est humain puis c'est normal. Ce que tu ne ferais pas si c'étaient des génériques, parce que tu t'en tiendrais à la discussion de fond. Mais, là, quand tu arrives localement, tu viens mêler l'émotion du besoin d'emploi contre des valeurs que tu as, qui peuvent être environnementales aussi. C'est dans le sens-là que je suggérerais des génériques pour...

M. Sirros: Je suis sensible aux arguments du député, et je dois constater quand même qu'à un moment donné il y avait des décisions qui avaient été prises et qui étaient en marche. Par contre, je fais remarquer au député que je préconise qu'on puisse se mettre sur le chemin de la planification intégrée des ressources énergétiques ici, et un des éléments qui font partie de cette démarche, c'est justement la cogénération. Et, dans le processus de planification intégrée des ressources énergétiques, je pense qu'il est tout à fait approprié de voir la notion de cogénération, sa définition, et l'établissement d'un certain nombre de critères ou de balises à partir desquelles on pourra calculer les externalités, etc. Alors, ce débat, au niveau génériques, entre guillemets, pourra se faire au niveau de la planification intégrée des ressources énergétiques, et devrait se faire, même, je dirais. Et, peut-être, M. L'Homme, juste pour...

(12 h 40)

M. L'Homme (Denis): Tout simplement, ce qu'on a fait au Québec pour éviter justement qu'on se ramasse avec des projets qui n'étaient que des centrales thermiques déguisées, et dans les 8000 MW auxquels le député faisait allusion tout à l'heure, la première série de projets proposés dans le cadre de l'APR 91, la demande de projets de la part d'Hydro-Québec, il y avait beaucoup de ces projets-là qui n'étaient que des centrales thermiques déguisées, où on ne faisait que 5 % ou 10 % de vapeur, le reste étant de l'électricité. Puis c'est ça, effectivement, qui est rentable. Ce qu'on a introduit, de concert avec Hydro-Québec pour discriminer les projets les moins performants des autres, c'est l'indice de performance globale, qui est tout simplement un ratio énergétique entre de qui rentre et ce qui sort, mais en prenant en compte vraiment tout: la vapeur, l'électricité puis le gaz naturel, la biomasse, s'il y a de la biomasse. Ce qui fait en sorte qu'on a écrémé les meilleurs projets et que, dans les projets de cogénération qui sont ceux qu'Hydro-Québec a finalement signés, on retrouve des taux de rendement de 45 %, 50 %, 60 %, ce qu'on ne retrouve pas aux États-Unis. Aux États-Unis, on trouve des projets de centrales qui sont peut-être de 30 %, 40 %, puis même des fois inférieurs à ça. On se rend même jusqu'à 70 % dans certains projets.

M. Chevrette: Bien, je le sais. Il y en a un qui va se rendre à 80 %, tout près. On les a regardés pas mal. C'est d'ailleurs ce qui inquiète un peu les promoteurs présentement, avec tout ce qui se dit, tout ce qui se fait. Est-il exact qu'il ne se prendra pas de décision avant six, sept mois? Êtes-vous au courant de ça?

M. Sirros: Qu'il ne se prendra pas de...

M. Chevrette: De décision quant aux projets de... Il n'y aura pas d'attribution à aucun projet avant six, sept mois.

M. Sirros: Effectivement, le besoin de prise de décision n'est pas là; la mise en service la plus rapprochée qu'on envisage, c'est 1997. Le temps de construction et de préparation est d'un an et demi, deux ans. Alors, ce n'est pas dans le laps de temps de six mois auquel fait référence le député.

M. Chevrette: Parce que Drouin, ici, Richard de son prénom, nous a dit: pas avant les élections.

M. Sirros: Oui, mais il ne peut pas y avoir de projet réalisé avant les élections puis il ne peut pas y avoir de décision... Ça prend un an et demi, deux ans à construire. La mise en service est prévue pour 1997. Je pense que Drouin, Richard de son prénom, faisait un genre de déduction logique...

M. Chevrette: Non, pas dans ce sens-là.

M. Sirros: O.K.

M. Chevrette: Interprétation pour interprétation, la mienne peut valoir à toutes fins que de droit. Et je dois vous dire que j'avais plutôt compris que c'était, compte tenu du nombre de projets... Et surtout, réduits à 250 MW, dès que tu en prends un gros, il n'y a plus de place pour un deuxième gros, c'est évident; donc, c'est un petit, un gros ou bien deux moyens, puis ça en écartait un bon paquet. Et, automatiquement, vous le savez très bien, nos députés des deux côtés de la Chambre, M. le ministre, vous savez, ce n'est pas pour rien que je voulais des génériques, ce n'est pas seulement en fonction de... Nos députés, des deux côtés de la Chambre, au moment où ils sont appelés à aller se prononcer, dans leur propre comté ou dans leur propre région, sont littéralement envahis par un lobby très puissant de gens du milieu. Et puis, comme il n'y a pas eu de génériques pour essayer de se fixer des balises claires au départ, ces gens-là sont mal pris. On n'aide pas nos politiciens, dans le sens qu'ils sont obligés de répondre à des lobbies au lieu... S'il y avait eu des critères ou des balises de base, ça m'apparaîtrait qu'on aurait aidé les hommes et les femmes politiques à faire des choix à partir de critères établis... Devant un organisme dont la mission et la vocation est ça, c'est le BAPE. C'est dans ce sens-là que je le donnais.

M. Sirros: Au niveau des génériques, je pense que j'ai répondu un peu à la question, tantôt.

M. Chevrette: Ça me laisse perplexe. Parce que ça continue à tous les jours, ils nous en déclenchent un autre, puis un autre. Comme ça, pas de choix avant six mois, confirmé ce matin.

M. Sirros: M. le député, juste pour compléter, les choix seront faits en fonction des besoins qu'on aura au moment opportun avec tout ce dont on a tenu compte tout à l'heure au niveau des impacts, etc. Et la mise en service prévue, c'est 1997.

M. Chevrette: Oui, mais ce que M. Drouin a dit, c'est: pas de choix de projets avant les élections.

M. Sirros: Oui, mais pourquoi choisir quelque chose dans l'immédiat. Et je pense...

M. Chevrette: Bien, je vous donne un exemple. Domtar, par exemple, Indeck à Montréal-Est. Ces gens-là ont eu des audiences, ils ont des projets, il y a tant de mégawatts, ils attendent, eux autres là. Est-ce que Hydro, à partir de ce qu'elle a entendu, pourrait faire un choix, par exemple, puis dire: je choisis Indeck de Montréal puis Windsor. Et les deux combinés donnent 250. Aux autres, là, vous profitez de la clause de l'«opting out» ou bien vous demeurez en selle au cas où j'aurais d'autres projets.

M. Sirros: Dabord, je pense que le processus de Montréal-Est en particulier n'est même pas encore terminé au niveau du BAPE. Les chiffres...

M. Chevrette: Moi, je donne un exemple théorique M. le ministre.

M. Sirros: Oui, mais c'est pour ça que je disais tout à l'heure que M. Drouin a probablement fait une déduction logique en termes des possibilités d'annoncer les...

M. Chevrette: Non, pas très logique, très politique. Puis je vais vous expliquer pourquoi. Parce qu'il y a même des projets dont l'échéance vient en juin en ce qui regarde les contrats d'approvisionnement. Puis, s'il n'y a pas de décision qui se prend d'ici juin, par exemple, ça change les données de base. C'est du moins ce qu'on nous donne comme information. Ça change le coût.

M. Sirros: L'ensemble des huit projets a, à l'heure actuelle, des clauses de retrait. Ils peuvent se prévaloir, eux aussi, des clauses de retrait selon ce qui convient vis-à-vis de leur planification à eux.

Les projets, la mise en service est prévue pour 1997. Le temps le plus tôt. Le temps de construction, c'est deux ans au maximum; donc, on parle de la nécessité de décider quelque chose vers la fin 1994-1995. Il me semble que ça, c'est après les élections. Alors, ça va?

M. Chevrette: On va passer monsieur, au gaz naturel. On va l'appeler à la barre.

Le Président (M. Audet): M. le député de Drummond, vous avez une question, là-dessus? Oui? Allez-y.

M. Chevrette: Oui, oui, vas-y.

M. St-Roch: Peut-être plus qu'une dernière, M. le Président. Dans mes remarques préliminaires, j'avais aussi fait une relation avec les recommandations du groupe-conseil en énergie, puis, un des sujets qu'il avait donnés... il avait donné le chauffage, la biénergie, la cogénération, d'appliquer un concept intégré. J'ai écouté vos interventions, M. le ministre. Est-ce que c'est correct de présumer, à ce moment-ci, que vous allez appliquer le principe de gestion intégrée en considérant toutes les externalités à la cogénération, pour rester dans le sujet qui est abordé présentement?

M. Sirros: C'est ce qui est prévu dans la planification intégrée des ressources qu'on mettra sur pied.

M. St-Roch: Et, pour poursuivre, dans la foulée de la commission parlementaire que nous avons eue sur Hydro-Québec il y a quelques semaines déjà, dans les remarques de la conclusion, j'avais suggéré, M. le ministre, dans la considération, aussi, des externalités. Un des projets que je pense, moi, qu'il est important de considérer, c'est que la société québécoise – puis, à ce moment-ci, je vais me faire le porte-parole de mes citoyens en tant qu'actionnaires de la Caisse de dépôt, en tant qu'actionnaires, aussi, de la Société générale de financement et en tant qu'actionnaires, aussi, de la SDI. Lorsque je regarde, moi, les externalités, à ce moment-là, la majorité du capital-actions est détenue par des Québécois et des Québécoises. Puis, lorsqu'on parle de survie, lorsqu'on parle de sécuriser nos investissements, je pense qu'il est tout naturel, lorsqu'on a à prendre un processus, puis que c'est les mêmes personnes, finalement, qui sont impliquées, qu'on protège nos actifs avant d'aller protéger ceux des autres.

Alors est-ce que le fait que cette société, pour ne pas la nommer, qui est Domtar, qui n'est pas nommée, qui a un projet à Windsor... Lorsque je regarde ces externalités-là, est-ce qu'elles vont être considérées dans la prise de décision? Et, si oui, est-ce qu'on a l'intention d'annoncer, dans les plus brefs délais, cette décision-là?

M. Sirros: Bien, je pense que le député, donc, est d'accord avec la déclaration que faisait le premier ministre à l'effet qu'il faut tenir compte d'un ensemble de facteurs, y inclus la question énergétique, mais d'autres facteurs également, dans le choix des projets, en collaboration avec Hydro-Québec. Puis, au niveau de la réponse à la première partie de la question, il est évident que ces considérations-là sont prises en compte dans le processus de décision éventuelle. Et, au niveau de la deuxième partie, qui est à savoir quand on choisira, je pense qu'on vient de parler de ça avec le député de Joliette. Le projet de Windsor est parmi les huit projets qui, à l'heure actuelle, cheminent. D'ici le mois de juin, ça se peut que quelques uns se prévalent de leur clause de retraite. Je doute que ça va être le cas de Windsor, mais on verra. Mais les décisions comme telles devraient normalement venir quelque part en 1995 ou fin 1994, au niveau du choix ultime des projets.

M. St-Roch: Sur le même sujet, M. le Président, dû au fait particulier qu'Hydro-Québec est dans une situation de seul distributeur d'électricité au Québec – que se soit au niveau résidentiel, commercial et institutionnel – est-ce que vous avez regardé le danger d'aller... Parce qu'un des dangers d'aller dans la cogénération, à un moment donné, c'est qu'un bon jour, quelque part, quelqu'un décide que c'est plus rentable, au lieu de vendre à Hydro-Québec, de vendre à un secteur particulier d'une industrie, puis de faire la bagarre, d'utiliser les lignes d'Hydro-Québec pour transporter son énergie. Puis là, vous pouvez voir venir la question, au même titre qu'on a vu, dans les télécommunications, à un moment donné où on a fait une bataille pour utiliser un véhicule transporteur d'un concurrent pour acheminer un produit. Est-ce que cette perspective-là a été envisagée par le ministère? De dire, un jour, si on n'est pas minutieux dans la cogénération, Hydro-Québec pourrait être forcée de transporter x mégawatts produits par une centrale pour livrer à un client. Puis, le danger que je vois, moi, à long terme, c'est qu'à ce moment-là il serait facile d'imaginer qu'on va chercher les secteurs les plus rentables d'Hydro-Québec, puis, indirectement, ça nous amènera, nous, les consommateurs, à défrayer les coûts et à avoir des augmentations de charges.

(12 h 50)

M. Sirros: Bien, il y a deux aspects. Le député soulève toute la question du «wheeling» et de la déréglementation. À l'intérieur des frontières du Québec, c'est le gouvernement qui devrait prendre une décision à l'effet de permettre à quelqu'un d'utiliser les lignes d'Hydro-Québec, de vendre à un client à l'intérieur du Québec. Donc, il me semble que c'est certainement quelque chose qu'on examinerait très attentivement. Il se peut, éventuellement, que le contexte de libre-échange, de l'ALENA, le marché interprovincial libéralisé, etc., et tout l'aspect de la déréglementation nous amènent, à un moment donné, à faire du «wheeling», ou permettre du «wheeling» pour des clients hors-Québec en passant par les lignes et les interconnexions qui existent. Je souligne tout simplement que Hydro-Québec, à ce moment-là, est aussi en position de faire la même chose; c'est une saine concurrence qui devrait se faire valoir, et cette perspective, elle est regardée et elle est évaluée.

M. St-Roch: Incluant l'hydroélectricité? Parce que le même...

M. Sirros: Oui.

M. St-Roch: ...contexte pourrait s'appliquer à une autre province qui pourrait vouloir utiliser les corridors ou les lignes d'Hydro-Québec pour acheminer, en utilisant l'ALENA ou le libre-échange comme prétexte...

M. Sirros: Exact. Effectivement, le «wheeling» devient possible au niveau de la déréglementation dans la mesure où les «utilités» sont d'accord, selon les contrats qu'ils vont avoir, et on verra.

M. St-Roch: «Wheeling and dealing», ça veut dire, bien sûr, une entente de «gentleman agreement».

M. Sirros: Oui.

M. St-Roch: Mais, est-ce que...

M. Sirros: Non.

M. St-Roch: ...ça pourrait être imposé?

M. Sirros: «Wheeling», ça veut dire d'utiliser les lignes de quelqu'un d'autre pour se rendre ailleurs, à travers les lignes de quelqu'un.

M. St-Roch: Il y a une veille expression aussi, une affaire qui dit «wheeling and dealing», hein?

M. Sirros: Oui.

M. St-Roch: Ça, c'est sur une base volontaire.

M. Sirros: C'est autre chose.

M. St-Roch: Mais, est-ce que ça pourrait être imposé, M. le ministre? Un exemple: est-ce que Terre-Neuve pourrait imposer le transport de Churchill Falls, dans l'exemple d'un accroissement de production de Churchill Falls?

M. Sirros: Non. Terre-Neuve...

M. St-Roch: Parce qu'il y aurait eu un contrat, un exemple, de négocié avec un autre État?

M. Sirros: Terre-Neuve ne pourrait pas imposer ça.

M. Chevrette: De passer sur les lignes?

M. Sirros: Non. Terre-Neuve ne pourrait pas imposer qu'on soit obligés d'utiliser le réseau d'Hydro-Québec pour vendre à quelqu'un d'autre.

M. Chevrette: Bien, non. D'ailleurs, le pipeline Iroquois est un bel exemple, dans une autre source d'énergie. Quand l'Office national de l'énergie a décidé que le gazoduc Iroquois passait à travers le Québec, ça a pris l'approbation du gouvernement du Québec. J'espère qu'on n'est pas rendus dépendants au point d'être esclaves. On doit rester maîtres de nos décisions sur notre territoire; il me semble que ça va de soi.

M. St-Roch: J'ai les mêmes espérances que vous, M. le député.

M. Sirros: Dans la mesure où on tient compte du fait qu'on vit avec des voisins et dans un contexte qui nous oblige à partager les bénéfices avec les contraintes, aussi.

M. Chevrette: Non, non, je comprends...

M. Sirros: Il y en a qui veulent autre chose, mais...

M. Chevrette: Non, quand on parle d'ententes, c'est correct.

M. Sirros: Oui.

M. Chevrette: Mais forcer, là, le mot «forcer», à mon point de vue, ne doit pas être utilisé, même dans la conjoncture où l'intégrité du territoire serait en cause. Tu as beau avoir la libre circulation des biens et des personnes, il ne peut pas y avoir utilisation de tes biens sans entente ou sans contrat. C'est dans ce sens-là. Tu as beau avoir les traités que tu voudras. Demain matin, quelqu'un ne peut pas se brancher chez nous de même, là. J'espère, en tout cas, parce que, si c'était ça, ça serait même... ça n'irait même pas dans le sens du libre-échange et du traité de l'ALENA, à mon point de vue, là. Il me semble que c'est forcer la note en mosus.

M. Sirros: Terre-Neuve n'a pas ce genre de pouvoir, de toute façon. Mais je disais que, dans le sens du libre-échange ou la libéralisation des marchés, l'électricité, à un moment donné, pourrait être quelque chose libéralisé.

M. Chevrette: Oui, mais, encore là, M. le ministre, si je suivais votre raisonnement, il n'y a rien qui empêche Hydro-Québec de vendre ses mégawatts là où elle veut, sauf qu'elle doit respecter l'intégrité des territoires qu'elle doit traverser, par exemple.

M. Sirros: Je ne suis pas sûr de ce que ça veut dire, respecter l'intégrité des territoires en utilisant les lignes.

M. Chevrette: Bien, qu'Hydro-Québec n'aurait pas l'autorisation; par exemple, si Hydro-Québec voulait traverser, je ne sais pas, l'Ontario, pour aller livrer son énergie, il faudrait qu'elle ait au préalable l'autorisation du gouvernement de l'Ontario. Elle serait soumise aux lois de l'Ontario quant à l'établissement d'une ligne. Est-ce qu'il y a un BAPE là-bas? Je reprends l'exemple du gazoduc Iroquois. L'Office national de l'énergie a décidé que, oui, ils pouvaient transporter leur gaz. Mais le gouvernement fédéral et l'Office ont dû avoir l'aval du gouvernement Bourassa, à l'époque. Si le gouvernement Bourassa avait dit non, le gazoduc Iroquois n'aurait pas pu passer à travers le Québec pour aller livrer son gaz dans les États de Nouvelle-Angleterre.

M. Sirros: Non, je pense que... J'hésite, parce qu'il y a un aspect dans ce débat qui... On me faisait remarquer, par exemple, que, dans le cas du pipeline dont il est fait mention, techniquement, le fédéral a le pouvoir d'exproprier.

M. Chevrette: Ah, oui.

M. Sirros: Bon. Ils auraient pu, à ce moment-là, exproprier pour passer le pipeline.

M. Chevrette: Ça, je comprends.

M. Sirros: Alors, je disais qu'on vit dans un système et avec des partenaires avec lesquels on accepte de partager les contraintes avec les bénéfices d'un système fédéral, dans ce cas-ci. Et c'est pour ça que, dépendamment de la perspective dans laquelle on se place sur le plan politique, au niveau de l'avenir de cette Fédération, ça peut nous amener à avoir des positions et des points de vue très différents. Je pense que, dans ce genre de perspective, il y a, comme je le disais, des contraintes et des bénéfices. Alors, quand on parle d'intégrité du territoire dans le sens que l'entend le député en parlant comme si on avait tous les pouvoirs en tout temps, ce n'est plus vrai dans le monde moderne. Alors, même dans l'exemple que donne le député, oui, il aurait pu y avoir expropriation pour construire le pipeline, indépendamment de la volonté du gouvernement du temps.

Et, dans un contexte de mondialisation des marchés, de libéralisation des échanges, je disais et je dis que l'électricité, à ce moment-là, devient aussi une commodité qui se vend et qui s'échange, qui ouvre toute la question du «wheeling», à un moment donné, selon les normes et les critères qu'on doit négocier et qui devraient convenir à tout le monde, en mettant tout le monde sur un pied d'équité afin de concurrencer comme il faut. Et, dans ce sens-là, Hydro-Québec est bien placée pour jouer ce jeu-là, parce que, effectivement, nous avons un réseau qui est efficace, un réseau qui est capable de livrer de l'énergie, et à bon prix. Alors, dans ce sens-là, nous, on accepte un système plus large dans lequel on veut évoluer en jouant selon les règles du jeu, avec les contraintes, oui, mais avec les avantages, aussi, que ça confère. Alors...

M. Chevrette: Le ministre fait un débat théorique, parce qu'il faudrait que le traité de l'ALENA ou le traité de libre-échange ait des clauses qui permettraient – et que les gouvernements accepteraient de le signer – l'expropriation d'un autre palier de gouvernement. Mais je suis loin d'être certain, moi, qu'il y ait un gouvernement brillant qui permettrait, par exemple, de donner un pouvoir aux États-Unis d'exproprier le Québec. Moi, je ne pense pas que ça arrive, ça. C'est un débat théorique.

(13 heures)

Quand on arrive sur le plan pratique – prenez un exemple concret, encore – quand l'Office national de l'énergie a décidé que, dorénavant... C'est la Cour suprême, je pense, pas l'Office national de l'énergie, c'est la Cour suprême du Canada qui a décidé que, dorénavant, le Québec, s'il voulait vendre un mégawatt à New York, il devrait avoir l'aval de l'Office national de l'énergie. C'est la Cour suprême, c'est un jugement. Je vous avoue que le Québec a lutté jusqu'à la Cour suprême, hein, parce qu'il n'acceptait pas ça. C'est l'interprétation de nos législations actuelles. Moi, je pense qu'il y a une différence fondamentale entre la capacité d'échange de commerce et l'appropriation du fonds de terre par un autre pour fins commerciales. Je m'excuse, mais je pense qu'on déplace le débat. C'est assez différent, ça, l'expropriation du fonds de terre pour fins commerciales par rapport à des échanges où tu n'as pas de barrières tarifaires, où tu n'as pas de douanes, où tu permets à des produits sans taxe d'accise de passer; c'est assez différent comme débat. Je pense qu'on mêle les deux présentement, parce que, moi, je ne verrais pas le Québec, et même pas le Canada, donner, dans un traité de libre-échange commercial, un pouvoir d'expropriation pour fins ou de commerce ou fins d'autres, si ce n'est que par contrat, par traité ou par entente ou par convention. Ça, je comprendrais plus ça.

Le Président (M. Audet): Un instant. Avant de poursuivre, j'ai besoin du consentement des membres de la commission, étant donné que l'ordre de la Chambre...

M. Chevrette: Oui, oui, c'est correct.

Le Président (M. Audet): ...terminait nos travaux à 13 heures. Alors, puisque nous devons terminer à 13 h 30, ça va?

M. Chevrette: Oui.

Le Président (M. Audet): Consentement. Merci. M. le ministre.

M. Sirros: M. le Président, sur la plus haute partie de ce que disait le député au niveau de l'ALENA et les États-Unis, au niveau de leur pouvoir d'expropriation, je pense qu'on est d'accord. Je pense qu'il faut faire une clarification vis-à-vis de l'affirmation qu'a faite le député quant à la portée de jugement de la Cour suprême. L'Office national de l'énergie avait toujours le droit d'approuver les exportations. Ce que le jugement a fait, c'est que ça assujettit aussi les études environnementales pour... Les contrats d'exportation y sont associés. Alors, ce n'est pas comme si, tout d'un coup, on était assujetti à quelque chose qui est tout à fait nouveau. C'est un autre volet qui vient de s'ajouter à ça. Mais je pense que ça soulève la possibilité de faire tout un débat très intéressant, dépendant, comme je vous disais tout à l'heure, de la perspective politique dans laquelle on se place. On a deux perspectives politiques très différentes: une qui parle d'une séparation ou d'une souveraineté ou de l'indépendance pour créer un pays indépendant qui devrait, à ce moment-là, revoir l'ensemble de ses relations avec ses partenaires, y compris le partenaire canadien, dans tous les secteurs énergétiques en particulier et tous les autres secteurs, et une autre perspective qui dit: On a une Fédération qui n'est pas parfaite, mais qui fonctionne, dans laquelle on évolue et dans laquelle on peut jouer du coude s'il le faut, puis on peut envisager notre avenir énergétique en se basant aussi sur des ressources qui existent à l'intérieur de cette Fédération.

Alors, je pense que c'est peut-être un débat qu'on pourrait faire à un autre moment, de façon pas trop lointaine, j'imagine, non plus.

M. Chevrette: J'espère. Avant qu'on fasse un deuxième Mirabel. M. du gaz naturel.

Le Président (M. Audet): Merci, M. L'Homme.

M. Chevrette: C'est lui qui remplace M. L'Homme. Voilà l'homme!


Régie du gaz naturel

Une voix: Jean Giroux, président de la Régie du gaz naturel.

Le Président (M. Audet): Merci. M. le député de Joliette.


Bilan des décisions rendues en 1993

M. Chevrette: Oui. M. le Président, je n'ai pas beaucoup de questions, mais je voudrais savoir, dans un premier temps... Peut-être que M. Giroux pourrait nous dresser un peu un tableau des grandes décisions qui ont été prises au cours de 1993, qui s'est terminée...

M. Giroux (Jean): Oui.

M. Chevrette: Le nombre de décisions. Un peu un compte rendu ou un aspect de bilan. On le demande rarement. Ce serait peut-être intéressant, parce qu'on consacre toujours peu de temps...

M. Giroux (Jean): Laissez-moi trouver. Les grandes décisions qu'on a rendues au cours du dernier exercice financier, je vais procéder de mémoire, à reculons, les plus récentes. D'abord, juste un point de clarification, pour le bénéfice des membres de la commission, vous parliez tantôt du processus d'audiences relativement aux demandes de cogénération devant le BAPE, il serait utile de savoir aussi qu'on vient de conclure, nous, une audience d'une demande de tarif spécial de distribution pour les projets de cogénération, et la Régie verra à rendre une décision incessamment là-dessus. Alors, ça s'est fait devant nous aussi.

Dans les autres décisions, on a rendu récemment une décision concernant la demande de fixation d'un tarif d'entreposage de gaz naturel à Saint-Flavien, à la demande de SOQUIP et de Gaz Métropolitain. Ça, ça a été accordé. Vous êtes au courant aussi des décisions qui sont connexes à ça relativement à la traversée sur la rive sud de Québec. La Régie a accueilli des demandes pour étendre le réseau sur la rive sud. Il reste à décider, parmi les parties concernées, de savoir qui va procéder à la traversée du fleuve entre Saint-Augustin et Bernières. Ça, ça a été une décision importante. Il y a eu des décisions tarifaires, évidemment, en matière de gaz.

Il y a une cause qui est pendante, qui est importante et sur laquelle on travaille présentement, qui est relative à la politique d'approvisionnement gazier de Gaz Métropolitain. Là-dessus, la Régie aura à décider de principes importants qui gouverneront le marché de la distribution du gaz au Québec pour plusieurs années.

En tout, on a rendu environ 69 décisions, au cours de l'exercice financier, qui sont tant de nature de décisions de fond, comme celles dont je viens de vous parler, ou de nature procédurale, c'est-à-dire que, généralement, quand les dossiers nous sont soumis, les régisseurs qui sont assignés au dossier se penchent, dans un premier temps, sur le dossier et décident, à la lumière de la loi, évidemment, s'il y a une nécessité ou pas d'audience publique et, à ce moment-là, dans une décision, peuvent fixer les conditions ou les sujets qui seront traités de façon particulière dans l'audience. Le gros des activités de la Régie est centré, chaque année, sur des causes tarifaires des deux distributeurs. Il y a deux distributeurs au Québec. Ce n'est pas toujours connu. Il y a Gaz Métropolitain, qui représente, évidemment, le plus gros distributeur, mais il y a aussi Gazifère de Hull, qui opère dans la région de Hull, comme son nom l'indique. Alors, chaque année, il y a ces deux causes-là qui viennent. Elles sont entendues, en général, en août et début septembre. Elles sont aussi suivies de causes de fermeture de livres qui résultent d'une disposition de notre loi, qui permet à la Régie d'ordonner le remboursement d'un trop-perçu. C'est à l'occasion des causes de fermeture de livres.

Au cours de la dernière année, on a eu aussi une décision sur la politique d'octroi de frais par la Régie aux parties qui viennent participer au débat devant nous. La décision a été rendue récemment aussi, et c'est en vertu des dispositions de l'article 32 de la loi, qui permet à la loi d'octroyer des frais aux parties qui viennent devant nous. Ça n'existe pas, cette disposition-là, en passant, pour un organisme comme l'Office national de l'énergie. Alors, c'est particulier à nous. En Ontario, eux, ils ont un «funding» qui est préalable au début d'audience; nous autres, c'est après. Alors, chacun ses particularités.

Alors, ça fait un peu le tour des grandes décisions. On a eu aussi, en décembre dernier, des causes où on a discuté des... certaines pratiques de vente de Gaz Métropolitain, et la Régie a rendu une décision là-dessus aussi. On est actuellement saisi de demandes d'extension de franchises qui devraient être entendues à compter de lundi prochain. Alors, on a été assez occupé et on prévoit l'être encore davantage pour les semaines qui viennent. Entre autres, on peut raisonnablement s'attendre à ce que le sujet du service de livraison et de l'accès au réseau de Gaz Métropolitain, entre autres, soit discuté dans le cours de l'année qui vient. Alors, cette décision-là sera fixée après la décision de la Régie sur la politique globale d'approvisionnement. Alors, ça fait un peu le tour de la question.

Il y a eu des décisions aussi sur des litiges entre des clients et les distributeurs, et ça, ça a été... On l'a constaté, probablement que ça correspond aux périodes de difficultés économiques qu'on connaît: plus les périodes sont difficiles, plus les gens sont conscients de mieux contrôler leurs coûts fixes, et, à ce moment-là, il y a une hausse assez importante des demandes. Alors, dans notre loi, on a une possibilité d'entendre les litiges. Comme on l'a dit dans notre rapport annuel l'année passée, et on l'a répété publiquement aussi, on ne privilégie pas une judiciarisation du processus. On essaie plutôt d'adopter une attitude préliminaire de conciliation où les gens s'adressent à nous. On agit un peu comme intermédiaires avec le distributeur pour tenter de solutionner les problèmes. Quand vraiment le tour de la question a été fait et qu'il n'y a pas moyen de s'entendre, à ce moment-là, le dossier est fixé au rôle de la Régie et un régisseur entend les parties et décide du litige. Alors, grosso modo, ça fait le tour des activités quasi judiciaires au cours de la dernière année.


Renseignements sur certains membres du personnel

M. Chevrette: Quels sont vos effectifs, présentement?

M. Giroux (Jean): Pour l'instant, on en a 23... 29, pardon. On en aura 33 pour l'année prochaine.

M. Chevrette: Ça signifie combien de régisseurs, puis combien...

M. Giroux (Jean): Actuellement, aujourd'hui, comme on se parle, on est cinq régisseurs. Il y a moi puis il y en a quatre.

(13 h 10)

M. Chevrette: Avec un contentieux de combien?

M. Giroux (Jean): Ah! c'est très petit, c'est deux avocats. C'est deux avocats, et ces avocats-là, évidemment, relèvent de moi, comme président. C'est la structure que j'ai privilégiée, vu ma formation juridique. À ce moment-là, c'est moi qui leur assigne les dossiers. Les procureurs ont mandat de ne pas agir en forme de débat contradictoire face aux parties. Le personnel et les procureurs, d'ailleurs, ont le mandat de soulever et de faire ressortir tous les points nécessaires pour permettre au régisseur d'avoir une vue plus éclairée du dossier et de mieux rendre une décision. Autrement dit, le staff et les procureurs ne prennent pas position pour ou contre un dossier en audience. C'est un peu la particularité de ce processus. Ça existe un peu partout en Amérique du Nord. Par contre, encore là, si on prend l'exemple du Ontario Energy Board, le staff prend position, au Ontario Energy Board. Je n'ai pas privilégié cette approche-là. Alors, c'est comme ça.

M. Chevrette: Parlant de règlement de litige, le litige interne est-il réglé, en ce qui regarde une dame qui a été en procès, même, contre l'État?

M. Giroux (Jean): Là-dessus, M. le député, vous êtes parfaitement au courant que, d'après notre loi, c'est le gouvernement qui procède à la nomination. Alors, à ce moment-là, je pense que je vais demander aux autorités de vous entretenir de ce dossier.

M. Chevrette: Je l'ai su, mais il fallait que je lui adresse ma question.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Sirros: Effectivement, le litige auquel vous faites allusion, je pense, a été réglé. C'est un règlement hors cour qui...

M. Chevrette: Est-ce que c'est récent?

M. Sirros: Le 5 avril.

M. Chevrette: Et la madame en question a quitté le ministère?

M. Sirros: La madame en question a quitté la Régie. Elle a été nommée au Conseil des services essentiels en tant que commissaire à temps partiel.

M. Chevrette: Est-ce que le contrat ou l'entente hors cour est l'objet d'un document public, semi-public ou privé?

M. Sirros: Ça fait l'objet d'un document confidentiel.

M. Chevrette: Confidentiel, y compris sur les compensations monétaires?

M. Sirros: Je laisserais peut-être les détails au sous-ministre.

M. Chevrette: Moi, tout ce que je veux, c'est l'information, de la bouche de qui que ce soit.

M. Sirros: D'ailleurs, je dois faire remarquer que je ne sais même pas si c'est vraiment le bon endroit pour en parler, dans le sens que la nomination a été faite et l'entente est intervenue entre le ministère du Conseil exécutif et la personne en question. On n'a pas été...

M. Chevrette: Non, non. Chaque année, on en a parlé ici.

M. Sirros: Pardon?

M. Chevrette: Ça traîne depuis quelques années, ça.

M. Sirros: Oui, au niveau...

M. Chevrette: Et, chaque année, on en a parlé ici. Demandez à vos...

M. Sirros: Oui, oui. Mais je...

M. Chevrette: Les gens qui vous entourent, ils ont tous le fou rire de me voir aller.

M. Sirros: Ha, ha, ha! Je sais qu'on en a parlé souvent et j'ai été saisi très rapidement des tenants et aboutissants du dossier dès mon arrivée. Mais je tiens juste à faire remarquer que les conditions comme telles ont été négociées et convenues entre le ministère du Conseil exécutif, ses avocats et les avocats de la personne concernée. La nomination à laquelle je fais référence, j'y fais référence parce que c'est une nomination publique. Ça a été fait par le ministère du Conseil exécutif. Donc, techniquement parlant, le ministère n'est pas impliqué au niveau du règlement auquel on fait allusion. Cela étant dit...

M. Chevrette: Mais, pratiquement parlant, vous y avez été mêlé.

M. Sirros: Cela étant dit, je demanderais à M. Geoffrion de vous donner les renseignements supplémentaires.

M. Geoffrion (François): Seulement pour vous dire que j'ai été informé par un représentant du Procureur général qui, justement, négocie ce genre d'entente quand on est en cour. Une entente est intervenue, dont le contenu, particulièrement quant aux clauses pécuniaires, était confidentiel, à la demande des personnes en cause.

M. Chevrette: À la demande des deux parties. Elles ont conclu une clause de confidentialité.

M. Geoffrion (François): Tout à fait.

M. Chevrette: C'est plus secret qu'une prime de séparation, ça!

M. Geoffrion (François): J'aime mieux ne pas commenter.

M. Chevrette: Qu'est-ce que vous avez dit?

M. Geoffrion (François): J'ai dit: J'aime mieux ne pas commenter.

M. Chevrette: «J'aime mieux ne pas commenter», ça veut tout dire, ça. Si vous m'aviez dit: Je préfère ne pas... c'est-à-dire, pas «je préfère», mais «je ne peux pas commenter.» Mais, là, «je préfère ne pas commenter», il y a une connotation assez différente.

M. Geoffrion (François): Je veux rester sur le terrain qui est le mien, soit celui qui est administratif.

M. Chevrette: Non, non. C'est un jugement de valeur – «je préfère ne pas...» – que vous portez. Vous dites que c'est une clause de confidentialité.

M. Geoffrion (François): Les parties ont convenu que les détails de l'entente hors cour resteraient confidentiels, et je comprends. C'est ce dont on m'a informé, que...

M. Chevrette: Est-ce que ça fait partie de l'entente...

M. Geoffrion (François): Oui.

M. Chevrette: ...cette clause de confidentialité?

M. Geoffrion (François): Oui, c'est ce qu'on m'a expliqué.

M. Chevrette: En tout cas, c'est des deniers publics, ça.

M. Sirros: J'allais dire que s'il y a des questions spécifiques par rapport aux clauses ou à l'entente convenue, il faudrait vraiment les poser au ministère de la Justice lors de l'étude des crédits ou, s'il faut, au ministère du Conseil exécutif.

M. Chevrette: C'est une bonne idée, parce qu'hier... Il a confirmé l'affaire Verreault, hier. Il pourrait nous confirmer ça, effectivement. On pourrait aller le questionner, effectivement.

M. Sirros: Je pense que ce serait l'endroit approprié.

M. Chevrette: Je vous comprends, M. le ministre. Je vous comprends d'être mal à l'aise dans ça.

M. Sirros: Ce n'est pas une question d'être mal à l'aise. Je pense que l'endroit approprié n'est pas ici. On n'a pas été... On vous fait part de ce qu'on connaît par d'autres intermédiaires. Le Parlement est là pour que les gens directement impliqués répondent. C'est dans ce sens-là que je vous indique que ce serait un de ces deux endroits.

M. Chevrette: Est-ce que le vice-président de la Régie du gaz est toujours M. Guy Leclerc?

M. Giroux (Jean): Oui.

M. Chevrette: Selon nos informations, il y avait beaucoup de problèmes de fonctionnement avec ce vice-président. Est-ce que c'est rentré dans l'ordre?

M. Giroux (Jean): Disons que, un peu comme je vous le disais l'année passée, vous aviez abordé cette question-là aussi...

M. Chevrette: Vous référez-vous à la page du procès-verbal? Ha, ha, ha!

M. Giroux (Jean): Oui, vous avez dit ça, attendez un peu, à CET-2943.

M. Chevrette: Répétez-moi-le pareil.

M. Giroux (Jean): Alors, je vais vous répéter ça. Vous avez entrepris ça... J'imagine que c'est là que je me suis approché de la tribune: Est-ce que M. Guy Leclerc est toujours à l'emploi de la société de la Régie du gaz naturel?

M. Chevrette: J'ai commencé un petit peu d'une façon différente.

M. Giroux (Jean): Oui, c'est ça. Alors, vous avez répété: «Il est aux mêmes fonctions que...». M. Chevrette: «O.K. Est-ce qu'il a fait l'objet d'une évaluation quelconque sur son rendement depuis qu'il est là?» Réponse: M. Giroux: «Depuis qu'il est là...» M. Chevrette: «Ça, ça ne doit pas être sous procès, là. Non?»

Alors, là, je vous explique qu'à ce moment-là, l'an passé, je n'avais pas fait d'évaluation. Cette année, je peux vous dire que j'en ai fait une, et, ça aussi, c'est une information que je considère, moi, privilégiée. Ce n'est pas que je craigne de dire...

M. Chevrette: On est parti pour ne pas savoir grand-chose.

M. Giroux (Jean): ...les cotes que je mets aux gens. Non. Mais je pense que c'est propre à chacun des individus. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire que les cotes d'évaluation soient mises sur la place publique.

Vous allez plus loin et vous vous inquiétiez de ceci: «Est-il exact qu'il y a de nombreuses personnes qui se plaignent de son assiduité au travail, entre autres?» Ma réponse était celle-ci: «Depuis que je suis là, M. Leclerc a rempli les mandats que je lui ai confiés et il est présent au travail. Il a eu des absences pour cause de maladie, grippe, des choses comme ça, mais ce n'est rien de différent ou de spécial. Ça peut arriver à tout le monde.»

Alors, la réponse 1994, c'est: Idem.

M. Chevrette: Sauf qu'il y a eu une évaluation.

M. Giroux (Jean): Il y a eu une évaluation.

M. Chevrette: Et quelqu'un devra tenir compte de cette évaluation.

M. Giroux (Jean): Oui. Malheureusement pour tous les membres et dirigeants de cette société d'État, le Secrétariat à la réforme administrative et aux emplois supérieurs nous a avisés qu'il tenait à ce qu'on procède aux évaluations, mais que, malheureusement pour cette année, personne n'en verrait une incidence sur son salaire, puisqu'il n'y avait aucune augmentation de salaire accordée aux membres des organismes d'État.

M. Chevrette: Encore moins une diminution.

M. Giroux (Jean): Pardon?

M. Chevrette: Encore moins de diminution.

M. Giroux (Jean): Encore moins de diffusion... Mais, effectivement, ça, c'est connu, par exemple, qu'il n'y en a pas eu, d'augmentation.

M. Chevrette: Non, ce n'est pas dans ce sens-là.

Une voix: De diminution.

M. Giroux (Jean): Ah! de diminution. O.K. Pardon.

M. Chevrette: M. Giroux, ce que je veux dire, c'est que si vous avez pris la peine, cette année, d'évaluer...

M. Giroux (Jean): Oui.

M. Chevrette: ...je suppose que le rapport d'évaluation a été envoyé aux autorités compétentes...

M. Giroux (Jean): Oui, ça a été fait.

M. Chevrette: ...et que les autorités...

M. Giroux (Jean): Excusez-moi. Il faut que vous vous rappeliez que, moi, je suis arrivé en septembre 1992, et là, l'année passée, l'évaluation, c'était pour la période antérieure à celle où je suis arrivé. C'est pour ça que je vous disais que, moi, je n'avais pas fait d'évaluation. Cette année, c'est différent.

M. Chevrette: Non, je ne vous reproche pas d'avoir fait une évaluation. C'est dans les semaines qui suivront, je suppose, et les mois... si jamais l'évaluation que vous avez faite, elle est négative ou positive, on verra ce que ça donnera comme résultat ultérieur.

(13 h 20)

M. Giroux (Jean): Oui, mais, financièrement parlant...

M. Chevrette: Non, ça ne changera rien...

M. Giroux (Jean): ...le résultat va rester zéro.

M. Chevrette: ...surtout qu'on ne connaît pas les clauses de séparation des individus. C'est confidentiel, comme les annotations sont confidentielles. C'est ça. Ce qui n'est pas confidentiel, c'est tout ce qu'on apprend, ce qui se passe dans les faits.

M. Giroux (Jean): Ce qui se passe à la Régie?

M. Chevrette: Ce qui se passe dans les faits, oui, puis que les gens de la Régie nous disent. Ça, ce n'est pas confidentiel. C'est pour ça que je me permets de vous poser quelques questions sur certaines personnes.

M. Giroux (Jean): Mais, moi, ce que j'entends, c'est qu'on fonctionne, qu'on remplit notre mandat et que les parties qui s'adressent à nous se considèrent traitées correctement, en fonction du mandat qui nous est dévolu.


Voyages hors Québec

M. Chevrette: D'accord. Ça voyage un petit peu, à la Régie?

M. Giroux (Jean): Oui.

M. Chevrette: Il y en a qui vont en Floride, puis à Hollywood.

M. Giroux (Jean): Oui. On peut...

M. Chevrette: C'est Hollywood en Floride, je suppose.

M. Giroux (Jean): Un instant.

M. Chevrette: Ce n'est pas loin de...

M. Giroux (Jean): Oui. Floride et Hollywood, M. Chevrette, si ma...

M. Chevrette: C'est Hollywood en Floride, je suppose.

M. Giroux (Jean): Oui. Oui. Mais, si ma mémoire est fidèle, avec respect, je pense que vous êtes en dehors... Là-dessus, vous êtes en dehors de l'exercice budgétaire actuel.

M. Chevrette: Bien oui.

M. Giroux (Jean): C'est un dossier auquel on a référé dans le cadre des procédures de...

M. Chevrette: Je ne fais que me rattraper.

M. Giroux (Jean): ...qui ont été réglées, et c'était avant que je sois là.

M. Chevrette: Non, mais ce n'est pas vous que je vise, moi.

M. Giroux (Jean): Non.

M. Chevrette: Je veux savoir ce qui s'est passé.

M. Giroux (Jean): Mais l'information que j'ai eue est à l'effet que c'était un congrès en réglementation et auquel les gens ont participé. C'était...

M. Chevrette: Est-ce que ça avait été autorisé par le Trésor?

M. Giroux (Jean): Oui, et par ma prédécesseure. Comme n'importe qui, ça a été signé par le dirigeant de l'organisme.

M. Chevrette: Donc, autorisé par Mme Sinclair, puis M. Johnson.

M. Giroux (Jean): Oui, oui. Bien, là, je...

M. Sirros: Je ne suis pas certain que ça va...

M. Giroux (Jean): Je ne suis pas sûr que c'est le Trésor, là, mais... Je peux vous faire un détail de ce qui s'est fait au cours de l'année budgétaire, par exemple. Alors... À moins que vous vouliez d'autres explications.

M. Chevrette: ...le ministre des Affaires internationales, c'est...

M. Giroux (Jean): Bien là, il y a des...

M. Chevrette: C'est hors Québec, là, c'est ça?

M. Giroux (Jean): Oui. Il y a des politiques, là.

M. Chevrette: Oui.

M. Sirros: C'est le ministère des Affaires internationales.

M. Chevrette: C'est international?

M. Giroux (Jean): C'est ça.

M. Chevrette: Avez-vous de quoi à ajouter?

M. Giroux (Jean): Non, non. Ça va.

Une voix: Ça va.

M. Chevrette: Parce que...

M. Giroux (Jean): Je peux vous parler des voyages qui ont eu lieu au cours de l'année budgétaire.

M. Chevrette: Oui, ce serait le fun.

M. Giroux (Jean): Alors, il y a un régisseur, M. Jean-Paul Théoret, qui est allé à San Francisco, à un congrès qui s'appelle «Utility Finance and Accounting». J'ai ici avec moi la programmation qui était là. C'étaient des experts en la matière. Une des constatations que j'ai faites quand je suis arrivé, c'était que, sur l'aspect perfectionnement des gens, il y avait une lacune. En matière de gaz naturel, vous êtes parfaitement au courant que les principaux bassins sédimentaires sont dans l'Ouest du Canada, dans le Midwest américain et au golfe du Mexique, de sorte que les congrès de cette nature, où les experts se rendent habituellement, sont dans les régions de l'Ouest: Banff, Calgary, la Californie. Ça sonne bien, la Californie, mais quand les experts se rendent là pour donner leur conférence et permettre à d'autres de bénéficier de leur expertise... Si on veut avoir un organisme qui se tient, avec des gens qui comprennent ce qu'ils ont à traiter et rendent des décisions éclairées, je pense qu'on ne peut pas s'emmurer.

Malheureusement, l'expertise n'existe pas uniquement au Québec. Quand il y a des congrès au Québec... Il y en a un qui vient, le 27 mai, à Montréal; on va participer à ça. Ça, c'est évident. Mais quand il y a des choses qui se présentent à l'extérieur, je pense qu'il est normal que les gens puissent participer à ça. Ça leur permet d'établir des contacts aussi et d'être au courant des tendances réglementaires en la matière. Notre organisme est semblable à ce qui existe dans des dizaines d'États américains. On fait partie, comme Régie, de l'organisme qui s'appelle NARUC, qui est un organisme nord-américain. On fait partie aussi de l'organisme CANPUT, qui est le pendant canadien de ça. Je pense que si on veut avoir un certain rayonnement et avoir une certaine crédibilité – vous parliez de crédibilité tantôt – il faut se montrer la face. On ne peut pas rester encabanés chez nous. C'est un des moyens qu'on a pour, un peu, se faire connaître et, aussi, comprendre ce qui se passe ailleurs et utiliser ce qui se fait de bien ailleurs.

M. Chevrette: Mais je ne vous ai pas reproché de voyager, là.

M. Giroux (Jean): Non, non. Mais je vous explique...

M. Chevrette: Vous êtes en train de faire un brillant plaidoyer en faveur des voyages, alors que je pensais que vous étiez pour m'informer sur la nature des voyages que vous avez faits.

M. Giroux (Jean): Oui. Alors, l'année passée, il y a eu ça à San Francisco; il y a eu M. Chauvelo, qui est allé à Banff, en Alberta. Il y a moi, qui suis allé à Jasper. C'était la première occasion que j'avais de renouer avec les gens de Canadian Gas Association. C'est tous les dirigeants des principaux pipelines au Canada. Dans le contexte où je suis arrivé en place, je pense qu'il était utile qu'on aille rencontrer ces gens-là pour démontrer que la Régie était entre bonnes mains – en tout cas, moi, je pense qu'elle est entre bonnes mains – et que les gens sachent qui est à la barre de l'organisme. Pour les mêmes raisons, j'ai participé à un congrès à Toronto avec l'Association des consommateurs de gaz industriel. J'ai envoyé trois analystes... Un à Banff, en Alberta, l'an dernier, à un congrès qui s'appelait «Price Regulation of Public Utilities». Et j'ai envoyé récemment un procureur et un analyste à la Nouvelle-Orléans, à un congrès dont le thème était «Fundamental of Utility Finance and Utility Regulation and Rights Design». C'était carrément au coeur de l'activité. C'étaient deux jeunes personnes qui sont à la Régie depuis pas tellement longtemps et qui avaient un besoin de perfectionnement.

M. Chevrette: Merci beaucoup.

M. Giroux (Jean): Merci.

Le Président (M. Audet): Merci beaucoup, M. Giroux.

M. Chevrette: On pourrait ajourner.

Le Président (M. Audet): Ça va? Alors, compte tenu de l'heure, nous allons ajourner nos travaux. Je vous invite à porter attention à l'ordre de la Chambre, cet après-midi, après la période des questions, parce que nous devrions, normalement, reprendre nos travaux en après-midi. Alors, la commission est ajournée.

(Fin de la séance à 13 h 27)


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