(Neuf heures deux minutes)
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Alors, bon matin à tous. Ayant
constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte. Je demande à toutes
les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de
leurs téléphones cellulaires.
La commission
est réunie afin de procéder à l'étude des crédits budgétaires du volet Charte
de la langue française, du portefeuille Culture et Communications pour
l'exercice financier 2014‑2015.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire : Non, Mme la
Présidente, il n'y a pas de remplacement.
Charte de la langue
française
La Présidente
(Mme Rotiroti) : Nous allons débuter par des remarques
préliminaires puis nous allons procéder à une discussion d'ordre général par blocs d'environ 20 minutes,
incluant les questions et les réponses. La mise aux voix des crédits de
ce volet sera effectuée à la fin de la séance.
Puisque nous
avons débuté nos travaux à 9 h 2 et qu'une période de quatre heures
doit être consacrée à l'étude de ce
volet ce matin, y a-t-il consentement pour poursuivre nos travaux au-delà de
l'heure prévue, soit jusqu'à 13 h 2? Y a-t-il consentement?
Des voix : ...
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Merci. En terminant, je vous
invite, aux fins de l'exercice de l'étude des crédits, à poser des courtes questions et incidemment de
fournir des réponses tout aussi brèves, de façon à favoriser le plus grand
nombre d'échanges possible.
Remarques préliminaires
Nous
débuterons sans plus tarder avec les remarques préliminaires. Mme la ministre,
vous disposez de 12 minutes pour vos remarques d'ouverture. La
parole est à vous.
Mme Hélène David
Mme David
(Outremont) : Mme la Présidente, permettez-moi tout d'abord de vous
présenter les collaborateurs qui
m'accompagnent pour cette étude des crédits et que je remercie infiniment, par
une journée aussi chaude et estivale, ainsi
que tous mes collègues, d'être présents. Donc, évidemment, la sous-ministre,
Mme Sylvie Barcelo; Mme Brigitte Jacques, qui l'accompagne, qui est directrice au
Secrétariat à la politique linguistique; Mme Lachance, du Conseil
supérieur de la langue française, qui nous fait la gentillesse d'être
avec nous quelques jours avant sa retraite; M. Robert Vézina, le relativement nouveau président de l'Office
québécois de la langue française, qui est derrière, ainsi que tous les gens qui
l'accompagnent. Alors, je tiens à remercier
ces gens vraiment du travail acharné, en si peu de temps, qu'ils ont accompli
pour nous aider, donc, à préparer cet important exercice.
Je suis donc fort heureuse que le premier
ministre ait pris la décision de placer à nouveau la protection et la promotion de la langue française sous l'égide de
mon ministère. Lors du discours inaugural, M. Couillard a même exprimé
qu'il s'agit, pour notre gouvernement, d'un devoir quotidien, et je m'en
réjouis.
À l'évidence, notre culture et notre identité
sont intimement liées à cette langue dont nous désirons assurer la pérennité. Aussi est-il nécessaire
d'insister sur le fait que je suis profondément
attachée à la protection et la promotion de cette langue. Ma riche expérience comme vice-rectrice aux relations
internationales, à la francophonie et aux partenariats institutionnels à l'Université de Montréal a
permis de mûrir ma conviction à cet égard. Je sais aussi que je peux accomplir
mon rôle en m'appuyant sur une valeur sûre,
soit l'expertise du Secrétariat à la politique linguistique et des organismes
de la charte, c'est-à-dire l'Office
québécois de la langue française, le Conseil supérieur de la langue française
et la Commission de toponymie.
Concrètement, la réintégration du Secrétariat à
la politique linguistique et des organismes de la charte au portefeuille ministériel de la Culture et des
Communications se fait sur la base d'un long historique de collaboration. De
cette façon, nous poursuivons avec les
grandes orientations que nous avions mises en place à compter de 2008,
notamment : de renforcer la
place du français dans les milieux de travail, les entreprises et dans les
services publics, de bonifier l'offre linguistique,
terminologique et toponymique, de documenter les connaissances sur la situation
linguistique, de mettre en valeur la
politique linguistique québécoise et célébrer la vitalité du français,
moderniser l'offre de services et accroître la
performance. Et, en filigrane de ces orientations, nous souhaitons accentuer la
valorisation des cas exemplaires et transmettre une image positive des avancées
en matière de langue française.
Même si le
français continue d'exiger beaucoup de responsabilisation de notre part, je
formule l'espoir que notre vigilance et notre fierté auront toujours
raison et je m'en fais l'ardente défenderesse. Cette langue française, c'est
une empreinte de notre essence comme peuple.
C'est notre façon d'être dans la relation à l'autre. Je compte donc assurer son
rayonnement dans la sphère publique et
mettre en valeur le fait français du Québec lors de mes représentations à
l'étranger.
Et
maintenant, Mme la Présidente, c'est avec plaisir que j'exposerai les
initiatives rendues possibles par les crédits qui nous ont été alloués
dans le cadre de l'exercice budgétaire 2014‑2015.
Tout d'abord,
le 40e anniversaire de la Loi sur la langue
officielle, donc l'année 2014 est pour nous une année charnière puisque notre fierté de parler français
pourra s'exprimer largement avec le 40e anniversaire de la proclamation
du français comme langue officielle du Québec par Robert Bourassa. Les
célébrations seront l'occasion de rappeler l'importance
de ce premier pas en matière de valorisation de la langue française, de même
que les mesures législatives, les politiques et les outils de promotion
du français qui en ont découlé.
Nous savons
que la Loi sur la langue officielle a conduit, trois ans plus tard, à
l'adoption de la Charte de la langue française
par le gouvernement de René Lévesque et que cette même charte a constitué la
pierre d'assise de la politique linguistique
québécoise. Aujourd'hui, notre gouvernement entend promouvoir de diverses
manières cette politique linguistique
qu'il a lui-même en partie développée au cours des années, en voici des exemples :
par le respect de la Charte de la
langue française par les organisations qui y sont assujetties, le soutien et
l'accompagnement de partenaires oeuvrant au sein de l'administration publique et dans le secteur privé, des
stratégies de promotion pour souligner les efforts et les avancées dans le domaine de la langue française et
des partenariats socioéconomiques gouvernementaux et avec le milieu des
affaires.
Permettez-moi
de réitérer que notre gouvernement a toujours reconnu la fragilité de la
situation de la langue et l'importance
de la protéger, et nous poursuivrons ce travail. Toutefois, il nous importe de
profiter de ce 40e anniversaire pour
valoriser la langue française et faire connaître les progrès accomplis que l'on
peut peut-être prendre un peu pour acquis avec le temps. Et, pour
bonifier notre approche à l'égard de la protection et de la promotion de la
langue française, le gouvernement pourra
s'inspirer de l'avis émis en mars 2013 par le Conseil supérieur de la langue
française, Redynamiser la politique linguistique du Québec. Cet avis
éclairé représente un regard actuel et dégage certaines pistes d'action et des
façons d'adapter la politique linguistique
du Québec afin de consolider la place
du français comme langue commune de l'espace public.
• (9 h 10) •
De plus, en 2014‑2015,
le Secrétariat à la politique linguistique et les organismes
de la charte, l'Office québécois
de la langue française, le Conseil
supérieur de la langue française et
la Commission de toponymie, continueront d'exercer leur mission avec rigueur, vigilance et ouverture d'esprit devant les défis qui se
posent en matière linguistique au Québec.
Pour le
prochain exercice financier, le Programme de
promotion du français lors d'activités culturelles pourra encore
soutenir à travers le Québec des projets qui présentent une stratégie axée sur
l'utilisation, la valorisation et la célébration
du français. Plus particulièrement, cette stratégie vise le jeune public et les
groupes dont le français n'est pas la langue maternelle et les
sensibilise à la richesse et à la vitalité de langue française ainsi qu'à
l'importance de bien la maîtriser. Pour
illustrer mon propos, voici quelques exemples : des activités de lecture
et d'écriture de textes poétiques, de
chansons en français qui se déroulent lors des cours de français des élèves de
secondaire III, IV et V, le tout culminant avec la présentation d'un spectacle au Festival international de la
chanson de Granby; mon autre exemple, appelé Rencontre théâtre-ados, consiste en des ateliers de lecture
de textes et de créations théâtrales adressés aux adolescents des communautés
immigrantes.
La
francisation des petites entreprises, communément appelée Stratégie commune
d'intervention du Grand Montréal 2013‑2015.
Parmi les principales actions envisagées en 2014‑2015, nous prévoyons la
poursuite de la Stratégie commune d'intervention
du Grand Montréal 2013‑2015. Cette stratégie, reconduite, d'ailleurs, par
l'ancien gouvernement, s'appuie sur
une concertation entre le gouvernement et le milieu des affaires, représenté
par la Chambre de commerce de Montréal métropolitain,
ainsi que sur un plan de mesures de formation, d'accompagnement, de promotion
et de sensibilisation du secteur
privé. En fait, ces mesures visent à consolider le français dans les entreprises
et les commerces de 11 à 49 personnes du Grand Montréal.
Cette
stratégie, mise de l'avant en 2008 et arrivée à son terme à l'automne 2013, a
été reconduite étant donné sa pertinence
et le bilan positif qui en a été fait. Dans son ensemble, ce modèle a ceci
d'innovateur qu'il prône la francisation sur une base volontaire et qu'il crée une réelle collaboration du
gouvernement avec le milieu des affaires. À la lumière du bilan dressé, il est évident que la stratégie a
fait ses preuves en réunissant le gouvernement et le secteur privé autour
d'une vision commune, en regroupant les
outils disponibles aux entreprises et en modulant nos approches respectives.
Enfin, j'aimerais mentionner que cette
stratégie, coordonnée par le Secrétariat à la politique linguistique, se
déploie entre autres par le soutien
précieux de partenaires de premier plan, soit l'Office québécois de la langue
française, le ministère de l'Immigration et de la Diversité et
Emploi-Québec.
Un autre
grand dossier qui retiendra l'attention en 2014‑2015 est la Politique
linguistique gouvernementale relative à l'emploi et à la qualité de langue française dans l'Administration.
Après 15 ans d'application, en 2011, cette politique dictait une révision compte tenu notamment de
l'évolution des technologies de l'information et des communications ainsi
que des défis posés par l'accroissement du
nombre de nouveaux arrivants. Ces constats auront donc mené à l'actualisation
de la politique approuvée par le Conseil des ministres en mars 2011.
Nous croyons résolument que l'administration
publique doit servir de phare par ses pratiques exemplaires en matière d'application de la charte et d'usage de
la langue française, en particulier dans ses relations avec les citoyens.
Dans la prochaine
année, je verrai à rencontrer des ministères et organismes afin de m'assurer
que mes collègues sont en mesure de disposer d'une politique
linguistique institutionnelle adaptée à leur réalité propre.
Avec
le déclenchement de la campagne électorale, les projets de planification
stratégique de l'Office québécois de la langue française, de la
Commission de toponymie et du Conseil supérieur de la langue française sont
demeurés en suspens. Le processus sera donc relancé en vue de déposer les
projets de plan à l'Assemblée nationale dès la rentrée parlementaire. Dans leur
ensemble, ces plans ont été réfléchis et conçus dans le respect de la mission
première de chaque organisme et dans une optique d'optimiser leurs pratiques.
Par ailleurs, l'office a entamé une
modernisation de ses processus — par exemple, la révision du processus de
plainte — de manière à se rapprocher du citoyen. Bien
entendu, l'office mise sur le partenariat avec le citoyen et l'engagement
de la société civile afin de mieux
s'acquitter de sa mission et de maintenir le cap sur son principal objectif,
qui consiste à faire du français
langue officielle la langue normale et habituelle de travail, des
communications, du commerce et des affaires.
La Présidente (Mme
Rotiroti) : En terminant, Mme la ministre.
Mme
David (Outremont) : Alors, écoutez... Le plan... En somme, depuis ma
nomination, en avril dernier, j'ai traité
avec beaucoup d'égards la portion du mandat en me dotant notamment d'un plan
d'action pour la prochaine année que j'aurai l'occasion de développer
pendant, je l'espère, la période d'échange avec mes collègues. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Merci, Mme la ministre. J'invite maintenant le
porte-parole de l'opposition officielle à
faire des remarques préliminaires pour un maximum de 7 minutes. M. le
député de Bourget, la parole est à vous.
M. Maka Kotto
M.
Kotto : Mme la Présidente, Mme la ministre, Mme la secrétaire
de la commission, Mmes, MM. les représentants du ministère, Mme la
directrice de cabinet, chers collègues, mes hommages.
La
langue ne peut en aucune mesure être sacrifiée sur l'autel de la partisanerie.
Si la ministre, gardienne de la Charte de la langue française au Québec,
s'emploie à protéger et à défendre celle-ci avec probité, je serai son allié.
Mais, si, d'aventure, cet enjeu fondamental
et vital pour la suite du Québec souffrait de négligence ou d'inconsidération
sous sa responsabilité, son mandat ne sera pas un fleuve tranquille et
je ne serai pas son allié.
Depuis
un bon bout de temps déjà, factuellement et historiquement, les libéraux ont
abandonné la protection et se sont
désintéressés à l'épanouissement du français. Ils se sont farouchement opposés
au projet de loi n° 14 et n'ont rien proposé de concret pour améliorer la situation du français au Québec.
Mme la Présidente, les libéraux, on ne le rappelle pas assez souvent, se sont fermement opposés à
l'adoption de la Charte de la langue française en 1977. Aujourd'hui, les
Québécois ne veulent pas revenir en arrière.
Cependant,
avec le gouvernement nouvellement élu, que peut-on s'attendre des libéraux en
matière linguistique? Et je cite le
premier ministre, lors de son discours inaugural, sur la question de la langue
française : «Nous serons vigilants quant à sa situation comme langue commune de l'espace public, [comme]
signe visible de la vitalité de notre peuple, et langue de travail.» Fin
de la citation. Sans doute, mais c'est au pied du mur qu'on voit le maçon, Mme
la Présidente.
Des
lapsus révélateurs dans le cadre du second débat de la dernière campagne minent
la crédibilité du nouveau gouvernement sur la question de la défense et
de la promotion de la langue française. Nous en avions également de forts indices lors des débats entourant le projet
de loi n° 14. Le PLQ a certes joué le jeu des consultations, mais le
projet ne s'est pas rendu à l'étude détaillée. D'ores et déjà, les
libéraux tournaient le dos à la défense de la langue française.
Sur
les arguments des libéraux, je me rappelle, à savoir : une loi trop
coercitive. Une loi, vous le savez, Mme la Présidente, comme toutes les autres, a évidemment par
définition un aspect coercitif qui prévoit de nouvelles obligations. C'était un
projet structurant, et nous avions
répété ad nauseam qu'il s'agissait d'une loi qui permettrait notamment le plus
d'accompagnement possible auprès des
entreprises et que nous avions à coeur de protéger les PME afin de ne pas les
ensevelir de paperasse avec les nouvelles
dispositions, etc. Il y avait beaucoup de souplesse. C'était dans l'ordre des
choses pour un projet de loi si
important et délicat, mais que les
libéraux ont dépeint comme un projet de loi partisan, politique, coercitif à
outrance.
• (9 h 20) •
Mme la Présidente,
protéger et promouvoir la langue française au Québec ne repose pas simplement
sur la vigilance, cela exige de la vision,
de l'audace et de la détermination, car le débat entourant la fragilité de la
langue française au Québec et
particulièrement à Montréal ne montre aucun signe d'essoufflement. Et, malgré
les progrès réalisés depuis l'adoption
de la charte voilà bientôt 40 ans, nous serons effectivement inconséquents de
prendre cet enjeu à la légère, car il s'impose comme la clé de voûte de
notre authenticité et de notre avenir en tant que peuple en Amérique.
La
loi 101 a remonté le cours du fleuve tel que l'avait anticipé le Dr Laurin. La
Charte de la langue française est aujourd'hui
le plus important symbole de notre affirmation. Et, comme il le disait
lui-même, et je cite, «nos enfants se rappelleront
toujours ce moment de mutation et de cristallisation où notre peuple s'est à la
fois retrouvé et transformé, où il a
repris possession de sa langue et de son pays, où il a vibré collectivement à
l'évocation d'un passé où il se racine et d'un avenir où il se
projette». Fin de la citation.
Mme la Présidente, en tant que membre de la grande famille québécoise, et je parle pour
nous tous, un impératif non
négociable s'impose toujours à nous, soit celui de protéger et de projeter vers
l'avenir avec la même détermination en
matière d'affirmation et de promotion du français. Cette détermination doit se
manifester, entre autres, par un renouvellement de la Charte de la langue française, notamment par le renforcement du
français comme langue de travail et d'intégration, l'intégration dans la charte québécoise des droits
et libertés du droit de vivre et de travailler en français ainsi que celui
des nouveaux arrivants de recevoir des services de francisation.
Comme je le disais plus tôt, lors du
dépôt du projet de loi n° 14, en 2012, pour la refonte de la Charte de la
langue française, nous avons proposé
de nouvelles mesures pour renforcer l'emploi du français dans les entreprises,
au travail, mais aussi à l'école, en plus d'assurer une meilleure
intégration des nouveaux arrivants. En matière d'immigration, la francisation, nous le savons, est la clé de voûte
d'une intégration réussie. Nous sommes fiers de voir chaque année plusieurs
dizaines de milliers de personnes choisir le
Québec afin d'y vivre et d'y travailler. Aussi, il est de notre responsabilité
de leur offrir les meilleures chances de
réussite. Le gouvernement du Parti
québécois avait mis en oeuvre des
mesures importantes dans le dessein de
faciliter la réussite de la francisation et de l'intégration en emploi des
immigrants nouvellement arrivés. La
Loi sur l'immigration au Québec déposée en février dernier voulait doter le
Québec d'un système d'immigration moderne axé sur la francisation et l'insertion
professionnelle.
Mme la Présidente, je m'arrêterai là pour l'instant parce qu'il ne me reste pas beaucoup
de temps et je reviendrai plus en détail sur ces remarques
préliminaires.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, M. le député de Bourget. J'invite maintenant la porte-parole du deuxième groupe
d'opposition à faire des remarques
préliminaires pour un maximum de cinq minutes. Mme la députée d'Iberville, la parole est à vous.
Mme Claire Samson
Mme
Samson : Merci, Mme la Présidente. Permettez-moi d'abord de saluer la ministre, députée d'Outremont, ainsi que son équipe
ministérielle et les collègues de l'aile parlementaire qui l'accompagnent
aujourd'hui, le député de Bourget également et la personne qui
l'accompagne, et mon collègue le député de Chambly.
Nous
sommes ici ce matin pour l'étude des crédits budgétaires de la Charte de la
langue française. Ce sera une occasion
pour nous de s'assurer de la gestion responsable des fonds publics. Il faut
aussi s'assurer de la pertinence des objectifs fixés et surtout de leur
atteinte.
La
langue française est le ciment de la nation québécoise, elle est d'une
importance capitale pour la prospérité du
Québec dans l'avenir. De tout temps, elle a marqué notre culture et façonné le
visage du Québec. L'usage du français est
une des grandes fiertés des Québécoises et des Québécois, qui ont su conserver
leur langue depuis des centaines d'années dans un environnement nord-américain anglophone. Cette spécificité est
une grande ressource, mais une ressource qui demeure fragile.
Aujourd'hui
plus que jamais, en 2014, la préservation et la pérennité de la langue
française au Québec comportent de nombreux défis. Je soulève ici
plusieurs enjeux qui m'apparaissent cruciaux.
Tout
d'abord, la qualité de la langue. Premièrement, la qualité du français parlé et
écrit est un enjeu de taille, en particulier
chez nos jeunes. À ce titre, l'actualité des trois derniers mois est
désolante : baisse des exigences aux examens du ministère en lecture et en français écrit,
nivellement par le bas et des enseignants qui affirment être angoissés ou gênés
lorsqu'ils doivent écrire au tableau parce
qu'ils maîtrisent mal leur français et ont peur de faire des fautes. Lors de la
dernière campagne électorale, le
Parti libéral a pris l'engagement d'accentuer la promotion de la qualité du
français dès l'école primaire. Nous
saluons l'objectif, mais il reste à savoir la façon dont cela se traduira dans
la réalité, et nous surveillerons ce dossier de près.
Deuxièmement,
perpétuer notre culture en français dans le contexte du numérique. Également,
la perpétuation de la langue
française passe en grande partie par la transmission de la culture québécoise
sous toutes ses formes, qu'on pense à
la littérature, au cinéma, aux émissions de télévision au Québec, au théâtre,
etc. Or, cette transmission de la culture québécoise est mise au défi à l'ère du numérique. La culture québécoise
doit être accessible sous forme numérique, car l'avenir de sa consommation en dépend. Les nouvelles technologies
diversifient l'accès aux arts et à la culture, on assiste à la multiplication des réseaux. Le numérique
amène également à repenser la proximité de l'artiste avec son public. Bref,
les défis liés à la transmission de notre
langue et notre culture sont immenses à l'ère du numérique, et le Québec a
encore du chemin à faire en la matière.
Troisièmement,
l'usage du français dans les milieux de travail. L'usage du français dans les
milieux de travail est également un
enjeu important. Même si, dans l'ensemble, le français en milieu de travail a progressé entre 1987 et 2010,
plusieurs préoccupations demeurent. Dans le secteur privé de la région
métropolitaine de Montréal, l'utilisation du français comme langue principale au travail a augmenté entre 1971 et 1989, mais
elle a diminué entre 1989 et 2010. Également, depuis 2010, on note un
recul sur l'accueil en français dans les commerces au centre-ville de Montréal.
Pour ce qui est de la langue et l'immigration, la démographie et l'immigration posent aussi
des défis de taille pour la pérennité
de la langue française. Avec le vieillissement de la population
et un taux de fécondité faible, les enjeux liés à l'immigration surgiront forcément. La réussite de
l'immigration passe par l'inclusion sociale et surtout par l'accès au monde
du travail. Or, les immigrants doivent être
appuyés dans leurs efforts pour maîtriser la langue française, et l'offre
de travail doit se faire en français.
C'est véritablement la possibilité de travailler en français et de vivre en français
qui incitera nos immigrants à
l'adopter comme langue d'usage. Des efforts importants devront être déployés
pour la francisation des immigrants.
Cela
étant dit, notre temps de parole étant limité, je voudrais, Mme la Présidente, pouvoir reporter les minutes restantes pour poser des questions
à la ministre. Je vous remercie.
Discussion générale
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Alors, merci, Mme la députée d'Iberville. Je suis maintenant prête à reconnaître une première intervention de l'opposition officielle pour une période... pour un bloc d'échange pour
environ 20 minutes. M. le député de Bourget, la parole est à vous.
M.
Kotto : Merci, Mme la Présidente. Vous me permettrez de rappeler les propos du premier ministre lors de son discours inaugural. Il disait, et je cite : «La protection et la promotion de la langue française sont proclamées dans le titre
de la ministre de la Culture et des
Communications. Ce sera pour notre gouvernement un devoir quotidien. La langue
française sera toujours sous pression au Québec. Nous serons vigilants
quant à sa situation comme langue commune de l'espace public, signe visible de la vitalité de
notre peuple, et langue de travail. Le français, c'est nous, c'est notre
manière d'être présents au monde. Ce
n'est pas une contrainte, c'est un atout extraordinaire, notamment
dans la perspective du libre-échange avec l'Europe. Nous sommes fiers de notre langue.
Nous saurons la célébrer, notamment dans le cadre des fêtes du 375e anniversaire de Montréal, la deuxième ville francophone du monde. L'occasion
d'affirmer notre fierté de parler
français se présentera d'ailleurs très bientôt.
Lors de notre fête nationale, bien sûr, mais aussi le 31 juillet prochain.
Ce sera alors le 40e anniversaire de la
proclamation du français comme langue officielle du Québec par Robert Bourassa,
moment clé de notre affirmation, suivie trois ans plus tard par l'adoption de
la Charte de la langue française par le gouvernement de René Lévesque.»
Ma question. Le premier ministre parle d'un
devoir quotidien, et nous ne voyons aucun engagement, aucune mesure, aucune proposition concrète mise sur la
table par le nouveau gouvernement pour assurer la protection de la langue
française. Quel est le plan d'action du gouvernement libéral pour protéger et
promouvoir la langue française?
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Mme la ministre.
• (9 h 30) •
Mme
David (Outremont) : Alors, écoutez, le nouveau gouvernement... Mon
collègue de Bourget dit bien «nouveau». Alors, permettez-nous d'être
encore relativement nouveaux pour un exercice qui va durer quatre ans et demi.
Donc, beaucoup de pain sur la planche,
beaucoup de vigilance, on est tout à fait d'accord. Et je dirais que je suis
tout à fait en accord avec la ligne introductive de mon collègue,
qui dit : La langue ne peut être sacrifiée sur l'autel de la partisanerie,
et je l'en remercie.
Maintenant,
je sais qu'il y aura une vigilance de tous, et pas seulement
des partis d'opposition, de tous les acteurs de la société.
Et nous la souhaitons, cette
vigilance, et nous souhaitons que tous et toutes, les citoyens
et citoyennes du Québec exercent la même vigilance, de quelque
langue maternelle qu'ils soient, par
rapport à l'importance de la langue française au Québec.
Et il est vraiment important de le souligner, et
mon collègue de Bourget l'a dit, le premier ministre a montré l'importance de cette vigilance en me nommant en responsabilité de la
protection et de la promotion de la langue
française. Alors, protection et promotion, au Québec, c'est
une question identitaire évidente, c'est une question
de survie d'un peuple qui a survécu
depuis fort longtemps en français et qui continue à le faire. Et, à ce sujet, nous
avons des résultats extrêmement
intéressants depuis 40 ans, très, très,
très certainement. J'aurai l'occasion
peut-être d'aller plus en détail, M. le député de Bourget, pour partager avec vous un certain nombre de statistiques.
Mais ce qui
est important, puisque votre question porte plus spécifiquement sur le plan
d'action, il y a déjà des choses quand même importantes que nous
voulons faire et que nous avons déjà faites. Par exemple, je parlais tout à l'heure...
Parce qu'on sait qu'il y a beaucoup
de vigilance à avoir du côté évidemment de la grande région de Montréal,
où il y a une immigration évidemment plus
importante et où il y a des efforts particuliers de mis, efforts, je dirais,
qui ont commencé quand même en 2008 de façon extrêmement systématique et
qui se poursuivent — je
veux rassurer mon collègue — qui
non seulement se poursuivent, mais c'est sur la rencontre des partenaires de la
stratégie commune d'intervention qui porte des fruits assez exceptionnels.
J'aurai l'occasion d'en reparler plus en détail.
Et il y aura
tenue d'une rencontre des partenaires de la stratégie commune dès l'automne, au
mois de septembre ou octobre, pour déjà se mettre au travail de façon
extrêmement rigoureuse et visionnaire, tel que le souhaite le collègue de Bourget, pour voir où on en est depuis 2008 et,
nous, où nous voulons aller à partir de 2015, puisque la stratégie a été
renouvelée à partir de 2013 jusqu'à 2015,
d'ailleurs renouvelée sous les auspices du précédent gouvernement. Donc, nous
allons travailler, et j'espère que mes
collègues de tous les partis confondus seront intéressés par ce renouvellement
et pourront donner leur avis.
Il y aura
aussi, et je l'ai dit rapidement en ouverture, et le gouvernement précédent n'a
fait qu'une seule rencontre par
rapport à cette tournée ministérielle... J'ai l'intention d'aller rencontrer
tous les ministères, tous les ministères qui... parce que nous avons, et de tout temps, là, bien avant qu'on arrive...
Mais, vous savez, c'est une chose que d'avoir des politiques, c'en est une autre que de mettre en pratique
cette politique. Et donc je l'ai moi-même vécu beaucoup, j'aurai l'occasion de vous en reparler parce que j'ai des
exemples très concrets. Quand on a une politique linguistique — et j'en étais responsable dans ma précédente
fonction universitaire — il s'agit de s'asseoir, de la regarder et de l'appliquer.
Donc, je suis toujours dans le plan
d'action, en réponse à qu'est-ce que mon collègue s'attend à... Enfin, il était
curieux de savoir ce qu'on allait
faire. Donc, cette tournée ministérielle va débuter à partir du mois de
septembre. Nous allons créer aussi un réseau
de mandataires à cette politique linguistique gouvernementale dans chacun des
ministères. Et j'aurai certainement l'occasion, Mme la Présidente, de
poursuivre sur d'autres actions dans les prochaines heures.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Merci. M. le député de Bourget.
M. Kotto :
Mme la Présidente, sans fâcher ma collègue Mme la ministre, je noterais que les
actions concrètes, pour le moment,
réalisées par le gouvernement, le nouveau gouvernement, en matière de langue,
ont été pour faire l'apologie du
bilinguisme. Je rappelle en cela le retour de l'anglais intensif au primaire.
Je ne sais pas si ma collègue a été consultée là-dessus. Le discours du ministre des Finances en bilingue, rien pour le renforcement du français, même pire, on parle plutôt
d'une baisse des exigences du ministère
de l'Éducation pour la correction des
examens finaux de français. Si ces mesures, si ces
actions sont posées, elles ont été posées hors cadre d'un plan d'action qui n'aurait pas impliqué la ministre
malheureusement. Est-ce
qu'on devrait considérer par ce biais
un genre d'improvisation ou tout
simplement une négligence du
facteur linguistique, en l'occurrence la défense et la promotion de la langue
française au plan québécois?
Je passerai à une autre question. Le gouvernement
veut célébrer le 40e anniversaire de la proclamation du français comme langue
officielle du Québec. C'est parfait. C'est très bien.
Le français étant donc la langue officielle de l'État
du Québec, le ministre
des Finances, je le disais il y a
quelques secondes, ne devait-il pas respecter l'esprit de cette loi faisant du français la langue privilégiée
de communication du gouvernement?
Je veux savoir ce que la ministre pense du discours bilingue prononcé par son collègue, qui n'a même pas fait
l'effort de traduire ses passages en anglais vers le français. Je veux également savoir de quelle façon
la ministre compte souligner le 40e anniversaire de la proclamation du
français le 31 juillet.
Une autre question. Je les donne en rafale,
parce que la ministre répondra avec le temps qui lui est imparti. Montréal s'anglicise. Et le Parti libéral a fait de
l'obstruction volontaire sur le projet de loi n° 14 l'an dernier, nous empêchant
de mettre en place des mesures pour renforcer le français à Montréal. C'est
bien de célébrer le français à Montréal, Mme
la Présidente, mais c'est mieux d'agir pour le protéger et le renforcer. Je
veux savoir ce que compte faire concrètement, de façon tangible, je
dirais, la ministre là-dessus.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Bon. Vous avez plusieurs questions
dans votre intervention, M. le député de Bourget. Alors, Mme la
ministre, la parole est à vous.
Mme David (Outremont) : Que dois-je
conclure sur le temps que j'ai à ma disposition?
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Vous avez à peu près 10 minutes... 11 minutes, oui.
Mme David (Outremont) : J'ai 10
minutes, sans que vous m'interrompiez, pour répondre à tout ça?
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Bien, écoutez, ça va dépendre... au député de Bourget... M. le député de...
Mme David (Outremont) : Ça va me
faire plaisir.
M. Kotto : ...quand j'aurai
ma réponse, je pourrai faire ça.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Oui. Allez-y. Alors, si vous
répondez tout de suite... on va vous couper la parole, Mme la ministre.
• (9 h 40) •
Mme David
(Outremont) : O.K. Puis, écoutez, le collègue de Bourget, si jamais
j'en oublie, vous me rappellerez certainement...
vous me rafraîchirez la mémoire. Alors, écoutez, il est tout à fait permis,
d'une part, mais il est tout à fait accepté qu'il puisse y avoir
quelques mots d'anglais lors d'un discours à l'Assemblée nationale. Et je pense
que mon collègue le ministre des Finances
n'a certainement pas fait ce qu'on pourrait qualifier d'un discours bilingue.
Je pense que ce serait fortement,
mais alors fortement exagérer la présence de l'anglais dans ce discours-là.
Qu'il ait eu quelques propos en
anglais et l'immense majorité du temps en français, je pense que c'est tout à
fait acceptable et que l'immense majorité de son discours était de
langue française.
La question,
donc, de la loi 22, le 40 ans que nous célébrons, et qui a marqué vraiment...
Et là je ne prendrai pas tout mon 10
minutes pour répondre aux progrès qui sont faits depuis 40 ans. Mais on aura
sûrement l'occasion de montrer les
immenses progrès faits depuis 40 ans, et c'est ça que nous voulons célébrer. Et
nous ne voulons pas seulement célébrer le
passé, l'actuel, mais nous voulons aussi réfléchir au futur. Donc, il y aura
dévoilement, le 25 juillet, de ce plan d'action ou ce plan de célébrations, je dirais, qui se fera pendant toute
l'année, donc, pour célébrer les 40 ans de cette loi et de la déclaration
du français comme langue officielle du Québec. Alors, je demande à mon collègue
de patienter encore quelques semaines pour
que nous puissions, donc, donner des détails sur le plan des différentes
activités et célébrations.
Pour ce qui est de l'anglicisation de Montréal,
écoutez, j'aimerais ça donner quelques exemples, sans parler nécessairement 10 minutes, parce qu'on aura l'occasion d'y revenir, c'est sûr. Est-ce que
je pourrais préciser que, quand on
dit — et
là ça rejoint évidemment, je dirais, a contrario, le projet de loi n° 14 — que
les allophones qui fréquentent le
cégep français étaient de 15,6 % en 1981, et les cégeps existaient depuis bien plus longtemps que
ça évidemment, et qu'en 2010, en
2010, on retrouve 53 % d'allophones qui choisissent... Parce que le cégep,
inutile de préciser, et là j'aurai beaucoup de plaisir à approfondir
cette question au cours des prochaines heures... les cégeps font partie de ce
qu'on appelle — et même d'un ministère — le réseau de l'enseignement supérieur. Et le
précédent gouvernement a tellement trouvé
important de qualifier et de reconnaître l'ordre collégial — parce qu'on appelle ça des ordres, en
enseignement, primaire, secondaire,
collégial, universitaire — qu'ils ont effectivement créé un ministère de l'Enseignement
supérieur séparé du ministère de
l'Éducation. Et donc, d'avoir dans un... d'une façon volontaire, 53 %
d'allophones qui choisissent le cégep français, c'est quand même assez
extraordinaire.
Et j'aimerais
donner un autre chiffre qui est extrêmement significatif. C'est que vous savez
que la loi 101 permet aux anglophones de fréquenter, quand ils répondent
à un certain nombre de règles évidemment, l'école primaire et secondaire en
anglais. Et, entre 1971 et 2010, c'est passé, de 9 % d'anglophones qui
fréquentaient l'école française, primaire et
secondaire, c'est passé à 25 %, pour être plus précis, 24,5 %. Donc,
je pense que la question de l'importance pour les allophones et les anglophones non seulement d'être bilingues,
mais de même fréquenter les écoles françaises, c'est une vraie question et c'est une réalité
extrêmement intéressante que l'on doit même amplifier si c'est possible. Mais,
quand on parle d'enseignement supérieur, je
le répète, on parle d'enseignement qui est un enseignement où les jeunes,
les étudiants choisissent de fréquenter non
pas nécessairement pour la langue, mais pour la qualité des programmes aussi.
Alors, le Montréal qui s'anglicise, on pourra
discuter beaucoup plus à fond de cette question-là. Nous avons évidemment, et j'y reviendrai, la stratégie
commune d'intervention de Montréal. Quand on dit «commune», ça veut dire
«partenariat», et, quand on dit
«partenariat», ça veut dire que des partenaires, de façon volontaire, se sont
mis ensemble pour dire : Est-ce
que nous pourrions aider les petites entreprises qui ne sont pas soumises à la
loi, la loi 101, donc à la charte,
est-ce que nous pouvons les accompagner pour leur permettre de mieux intégrer
le français, les outils technologiques? Donc, nous ne voulons pas aller du côté de la coercition, nous voulons
aller du côté des mesures de volontariat. Et je vous dirai plus tard à quel point cette mesure a
fonctionné et continuera à fonctionner. Et j'ai bien l'intention, par les
rencontres de l'automne, d'amplifier l'aide que nous allons apporter aux
petites entreprises.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Merci, Mme la ministre. M. le député de Bourget.
M. Kotto :
Merci, Mme la Présidente. Je voulais juste revenir sur le discours du budget.
Je veux bien comprendre que les
collègues qui représentent des circonscriptions à forte concentration
anglophone s'adressent à leurs commettants dans la langue qu'ils pratiquent le plus souvent. Cela dit, plusieurs
organismes ont déploré que le ministre des Finances — une
première depuis 50 ans, semble-t-il — ait procédé à la lecture du
budget en français et en anglais.
Membre de la
coalition des Partenaires pour un Québec français, le Syndicat de la fonction
publique et parapublique du Québec,
par la voie de sa présidente, Mme Lucie Martineau, disait, le 5 juin dernier,
et je cite : «Quel signal les élus de ce gouvernement envoient-ils à la population québécoise si les
événements les plus importants et significatifs de la vie parlementaire ne se déroulent pas intégralement en
français? Quel message le premier ministre et ses ministres envoient-ils
aux nouveaux arrivants à qui nous répétons
jour après jour qu'ils doivent
maîtriser le français pour se donner toutes les chances de s'intégrer à la société
québécoise si [ceux-ci] qui occupent
les plus hautes fonctions du gouvernement ne donnent pas l'exemple?» Est-ce que Mme
la ministre peut répondre à ces questions pertinentes?
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Mme la ministre, vous avez à peu près 3 min 30 s pour répondre.
Mme David
(Outremont) : Alors, écoutez,
j'aimerais souligner, disons, une absence ou un trait que mon collègue de
Bourget n'a pas soulevé, c'est qu'il ne reproche pas du tout au ministre des Finances — et, semble-t-il, les sources qu'il cite non plus — d'avoir donné une phrase ou deux phrases, je
ne me souviens plus exactement, en portugais, à la fin. Et donc, ça,
c'est drôle, ça n'a pas l'air d'une catastrophe nationale qu'il ait parlé
quelques mots en portugais à la fin. Est-ce
qu'on doit rappeler, et le premier ministre l'a souligné, que c'est la première
fois dans l'histoire du Québec que nous avons un ministre des Finances
issu de l'immigration, et donc ce ministre de...
M. Kotto : Je ne veux pas
être mal interprété...
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Non, je pense que la ministre voulait dire que... Oui, allez-y.
M. Kotto :
Non, parce que le ministre des Finances a traduit sa citation en français,
contrairement à ce qu'il a fait en anglais. Voilà, c'était juste ça.
Mme David
(Outremont) : Alors, écoutez, je pense que nous devons nous
enorgueillir et nous devons être fiers qu'un
ministre des Finances soit évidemment rendu où il est rendu dans... à partir du
moment où il est arrivé au Québec et
qu'il s'exprime dans un excellent français. Et je pense que c'est tout à
l'honneur du ministre des Finances de s'exprimer dans ce français... aussi bien intégré... d'être aussi intégré à la
société et d'avoir gravi les échelons de la société de façon aussi exemplaire. Alors, ceci dit, je pense que
nous devons vraiment regarder cette chose avec une sorte, je dirais, de réalité
qui fait que l'immense majorité du discours
de notre ministre des Finances était en langue française, et nous l'apprécions
beaucoup.
La Présidente
(Mme Rotiroti) : Vous avez quelque chose secondes, M. le député
de Bourget. Souhaitez-vous...
M. Kotto : Je vais les
reporter sur mon prochain bloc. Merci, Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Oui? Excellent. Alors, on va passer
la parole au côté ministériel. Je cède la parole au député de
Sherbrooke.
• (9 h 50) •
M. Fortin
(Sherbrooke) : Oui, merci beaucoup, Mme la Présidente. Tout d'abord,
permettez-moi de vous saluer, de saluer la ministre, les gens qui
l'accompagnent, les collègues du parti ministériel, collègues des oppositions.
Avant
d'interpeller la ministre, Mme la Présidente, je voudrais tout simplement
revenir sur quelques remarques qui
ont été effectuées par notre collègue député de Bourget, un petit peu comme l'a
fait la ministre. J'aimerais remettre les choses en perspective, là.
Le député de Bourget nous a parlé d'un discours
bilingue de la part du ministre des Finances. Ce n'est pas un discours bilingue qui a été livré ici, à
l'Assemblée nationale. J'étais assis dans la même enceinte que lui, et, moi, ce
n'est pas un
discours bilingue auquel j'ai assisté, c'était un discours dans lequel il y
avait quelques passages en anglais, et la très, très, très grande majorité de ce discours-là s'est déroulé en français.
Je pense, pour le bénéfice des gens qui nous écoutent, là, c'est
important de remettre les choses en perspective et de dire les choses telles
qu'elles se sont déroulées.
D'autre
part, je voudrais aussi revenir sur les remarques préliminaires qu'a faites le
député de Bourget. Le député de Bourget a fait... a relevé des pans de
l'histoire de la législation en matière linguistique au Québec, il est remonté jusqu'aux années 70, mais, quand même, un volet
important qui a été oublié par le député de Bourget, c'est que c'est la loi
sur les langues officielles qui a été
adoptée par un gouvernement libéral et dont l'entrée en vigueur s'est faite le
31 mai 1974, ça fera 40 ans
cette année. Et ça, c'est une réalisation d'un gouvernement libéral, le gouvernement
libéral de Robert Bourassa. Le projet de loi avait été piloté par le
ministre de l'époque, M. Cloutier. Et c'est la première fois... c'était la
première législation qui faisait du français la langue officielle au Québec.
C'est un élément très important dans notre histoire linguistique au Québec, et
je ne pense pas qu'on peut passer ça sous silence, Mme la Présidente.
Évidemment,
depuis 40 ans, il y a beaucoup de progrès qui ont été effectués, beaucoup
de chemin qui a été parcouru, la ministre l'a évoqué, mais maintenant
évidemment il y a des défis auxquels la langue est confrontée, et la députée d'Iberville les a mentionnés un petit peu
tantôt, notamment au niveau de la qualité de la langue. Et maintenant particulièrement les jeunes sont exposés à toutes
sortes de sources d'information, notamment sur Internet. Et, au
Québec, on ne contrôle pas évidemment tout le contenu francophone qu'il
y a sur Internet, et parfois la qualité peut également laisser à désirer. Il y a toute la mode, si je peux dire, du langage
codé, par les textos, et qui est un petit peu... les messages textes,
qui est un petit peu préoccupante. Et également on vit dans un monde
où la rapidité, l'instantanéité est un
petit peu une vertu, notamment même
dans le monde des médias, où est-ce
que les journalistes ont beaucoup, beaucoup de pression pour sortir des textes rapidement, puis tout ça,
parfois c'est la qualité du français qui en écope.
Mais,
malgré tout ça, Mme la Présidente, on a des progrès qui ont été effectués, et la
loi sur les langues officielles demeure
aujourd'hui une pièce législative très importante. Et, il faut juste le rappeler, à l'époque
elle avait légiféré sur plusieurs
volets, comme le domaine de la justice, l'administration publique, les
entreprises d'utilité publique, les professions, la langue des affaires, la langue du travail, la langue de
l'enseignement. Donc, à l'approche de son 40e anniversaire, comme je le disais, c'est toujours une pièce législative
importante qui fait partie... qui a toujours fait partie d'un élément
fondamental de la politique
linguistique au Québec. Et j'aimerais justement que la ministre puisse informer
les membres de la commission sur les différents fondements, les
différents jalons de cette politique linguistique au Québec.
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Merci. Mme la ministre.
Mme David
(Outremont) : Merci beaucoup, cher collègue. Je pense qu'en effet il
faut se souvenir, il faut vraiment se souvenir d'où on vient pour comprendre où
nous allons. Et c'est dans le souvenir d'où on vient qu'il y a souvent les meilleures inspirations pour réfléchir
à où nous allons. Et il est évident que, dans le «où nous allons», il y a
toute l'intervention... Et je pense que tous les collègues sont d'accord, parce
qu'ils y ont fait référence, là, la collègue aussi
d'Iberville, le numérique est entré, donc, en action, je dirais, et toute la
question... Depuis 40 ans, là, on sait où nous étions, c'est-à-dire dans des statistiques et dans un environnement qui
étaient complètement, complètement différents de là où nous sommes
maintenant. Je ne dis pas qu'il n'y a pas d'enjeux maintenant, mais les enjeux
sont extrêmement différents. Et l'arrivée du
numérique et de la mondialisation vont, évidemment, évidemment, exiger de nous,
au Québec, d'avoir une vigilance particulière à ce sujet.
Et
je citerai, donc, même la candidate à l'Organisation internationale de la
Francophonie, Michaëlle Jean, qui dit que
l'avenir de la francophonie mondiale se jouera à travers un échiquier
économique aussi. Et un échiquier économique ça veut dire que les pays d'Afrique... Et là on est obligés de regarder
la mondialisation aussi de la francophonie. Ça va se jouer énormément en Afrique. On est peut-être huit
millions au Québec, mais il y aura 715 millions de locuteurs francophones d'ici quelques années. Et il sera
aussi important d'avoir une économie et des outils en français partout sur la
planète où il y a des locuteurs francophones
parce que, même s'il y a des locuteurs francophones mais que tous les outils
sont en anglais, la langue française ne
pourra donc pas être protégée autant qu'on le voudrait, même si le Québec est
tout à fait remarquable et exemplaire en matière de protection de la
langue française, si on regarde à l'échelle planétaire.
Donc,
ce 40e anniversaire souligne évidemment l'héritage de l'adoption de la loi sur
les langues officielles. Et nous
avons, à partir de ce moment, je pense, tout mis en oeuvre pour assurer la
qualité et le rayonnement de notre langue officielle. Pour la première fois, bon, c'est peut-être une occasion de
parler de ce mandat à la langue, qui n'est pas qu'un mandat de
coercition et de surveillance : Est-ce que les immigrants parlent bien
français? Est-ce que les immigrants veulent
parler français?, etc. Je pense que le fait de ramener la question de la langue
française au ministère ou sous ma responsabilité,
en nommant ça Protection et Promotion de la langue française, c'est un mandat
beaucoup, beaucoup plus large que le
mandat de simplement surveiller ou de faire des constats d'infraction. Je pense
que c'est beaucoup plus large. Et la responsabilité est d'autant plus
grande que le mandat est plus large.
Donc,
je voudrais rappeler que, dès 1961 — j'ai
eu l'occasion d'en parler du côté de la Culture — est
arrivé, donc, un peu les jalons de la
Révolution tranquille, l'article 1, qui était la création du ministère de la Culture. Et, à cette occasion, la loi a institué... — à l'occasion de la Loi du ministère des Affaires
culturelles, je tiens à le souligner — a
institué, donc, l'Office de la langue
française. Donc, on remonte à 1961 pour l'Office de la
langue française, qui avait comme mandat de veiller à la correction et à l'enrichissement
du français à l'oral comme à l'écrit. Et, vous voyez, 1961,
on est quand même plusieurs
années plus tard, et quels sont nos propos aujourd'hui, sur lesquels, je pense,
nous sommes tous d'accord? C'est la
correction et l'enrichissement du français à l'oral comme à l'écrit. Sauf qu'à l'époque il
n'existait pas Internet, il
n'existait pas l'accès à l'éducation supérieure comme il existe maintenant.
En 1961, rappelons-nous, pas de collège public et, vraiment, pas d'université en région, pas de réseau de
d'universités du Québec. Donc, on a fait beaucoup, beaucoup de chemin,
mais le français, à l'oral comme à l'écrit, demeure une priorité
qui devra faire l'objet de beaucoup de vigilance.
Et, en 1969, on élargit le mandat de
l'office, et qui a vraiment un rôle-conseil auprès du gouvernement en matière de langue
de travail et d'affichage public. Et arrive le 31 juillet — je
fais juste une petite correction pour les fins de l'enregistrement, cher collègue, vous avez dit le 31 mai, mais on sait
que vous vouliez dire le 31 juillet 1974 — loi sur les langues officielles qui marque
le début véritable de quoi?, de l'intervention de l'État québécois dans le
domaine linguistique — et
ça, c'est important de le dire comme ça — le début de l'intervention de l'État québécois,
donc, dans la langue de travail et d'affichage. Et donc cette loi
consacre... — et
ça a l'air tellement évident quand on regarde ça 40 ans après — ça
consacre le français comme langue officielle du Québec.
Mais
on se dit : Est-ce qu'on a pu vivre, avant 1974, sans cette question
de consacrer le français comme langue officielle? Et le préambule qui déclare que «la langue française
constitue un patrimoine national que l'État québécois a le devoir
de préserver et qu'il incombe au gouvernement
[...] de tout mettre en oeuvre pour
en assurer la prééminence et pour en
favoriser l'épanouissement...» Il est évident que nous travaillons, je dirais,
tous partis confondus. La preuve en est qu'en 1977 arrive, donc, le Parti
québécois, et la loi 101, et la charte
qui réaffirme le statut de langue officielle. Et cette charte a été complétée évidemment
année après année de règlements, donc, pour être bien balisée. Et il y a
eu des actions gouvernementales quand
même intéressantes. Parce que
l'administration publique est une administration qui doit, en
cette matière, être absolument
exemplaire. Et c'est en ce sens que nous allons non seulement faire une
tournée, mais s'assurer, dans tous les ministères, de l'exemplarité de
la qualité du français. On en parle beaucoup, de cette qualité du français.
Nous
allons aussi demander un avis au Conseil supérieur de la langue française.
Je n'ai pas eu le temps de le dire tout à l'heure, Mme la Présidente,
alors j'en profite. Nous allons demander un avis, dès cet automne, sur la
qualité du français dans l'espace public québécois
et particulièrement en ce qui a trait aux médias sociaux. Nous le
savons, regardez votre quantité
d'écriture dans une journée et vous seriez probablement obligé de vous
dire ou de le dire publiquement... Je
n'ai jamais fait l'exercice concrètement, mais je sais que l'immense, immense
majorité de mon temps à écrire l'est sur une tablette électronique, ou un ordinateur, ou un téléphone
intelligent. Donc, nous écrivons à travers les médias sociaux, nous écrivons à travers l'électronique. Oui, nous
avons des correcteurs automatiques, ça peut donner des choses un petit peu particulières, il faut se relire des fois,
mais nous avons une obligation de vigilance dans les espaces publics aussi et
dans les espaces numériques.
Alors,
dans les actions gouvernementales posées depuis plusieurs années, il y en a
une évidemment qui est très intéressante — et
on voit le chemin parcouru, je répète, depuis 40 ans — c'est
le Programme de promotion du français lors d'activités culturelles. C'est un programme
qui a énormément de succès, où il y a beaucoup, beaucoup de demandes, à ce point que
nous n'arrivons pas à satisfaire évidemment toute la demande. Et, dans ce programme-là, un
accent particulier est mis sur la
valorisation et la célébration du français lors d'activités culturelles, et il y a beaucoup
de demandes du côté du soutien et de
l'appui aux clientèles de l'immigration récente, où je disais tout à l'heure enfants, adolescents, milieu primaire,
secondaire, etc., pour qu'ils
réfléchissent, créent et fassent de la culture en langue française. Pour le
reste, écoutez, on aura l'occasion de
revenir à l'ensemble, donc, des mesures que nous allons continuer à exercer et
à appliquer dans les prochaines années.
• (10 heures) •
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Merci, Mme la ministre. M. le député d'Ungava, la
parole est à vous.
M.
Boucher : Bonjour, Mme la Présidente. Bonjour, Mme la ministre. Cher
personnel qui vous accompagne ce matin, je vous salue.
Mme la ministre,
premièrement, je vais commencer par peut-être vous mettre mal à l'aise un petit
peu. La semaine dernière, nous étions en
commission parlementaire ensemble sur la culture. Puis il y a beaucoup de gens
qui me suivent sur Facebook.
Or, depuis cette date-là, ça ne tarit pas d'éloges à votre égard. Beaucoup ont
souligné la chance que j'avais
d'avoir l'opportunité de côtoyer une personne telle que vous, puis je pense
qu'ils ont bien raison. Donc, c'était la petite partie pour vous faire
rougir un petit peu.
Mme
la ministre, le 13 septembre 1759, à peu près vers cette heure-ci, se
jouait le sort de l'Amérique à deux minutes à pied d'ici à peu près. Cette journée-là, bon, l'Amérique a pris une
tournure qui nous a conduits jusqu'à aujourd'hui. Je pense qu'on s'est
peut-être tous pris à rêver à un moment donné ou l'autre à savoir qu'est-ce que
serait devenu notre quotidien si cette
bataille-là avait été gagnée par les forces françaises plutôt que les forces
anglaises. Mais, malgré tout, ça fait bientôt 255 ans de ça, et on parle
toujours français au Québec, et la langue officielle du Québec est toujours le français. Alors, je pense que ça, c'est un tour de
force à coup de petits miracles et de persévérance, de courage et de ténacité,
puis ça, il faut le souligner. On regarde
souvent, bon, ce qu'on n'a pas, ce qu'on pourrait avoir, mais on oublie de
regarder ce qu'on a aussi, puis ça, il faut s'en féliciter.
On
parle, bon, de la qualité du français qui se détériore, etc. Écoutez, je ne
veux pas dire que je suis vieux, mais je
suis quand même d'un âge qui commence à être... un petit peu moins jeune. Comme
je dis souvent, je suis un adolescent avec
beaucoup d'expérience. Il y a quelques années, on parlait des «tires» de mon
char, le «windshield» puis mes «wipers»; aujourd'hui, on parle plutôt des pneus, des essuie-glaces, du
pare-brise, du système d'échappement. Et puis je pense que... autant allez au garage du coin, je suis convaincu
que votre mécanicien va vous dire : Bien là, regardez, là, votre
échappement commence à être usé et ça
cherche à percer. Ce que vous n'auriez jamais vu il y a 20 ans de ça, puis je
pense que, ça aussi, il faut le souligner.
On parlait tantôt,
bon, du discours du budget de M. le ministre des Finances, dans lequel il y
avait eu certains passages anglais. J'étais assis dans la salle. De mémoire,
c'est sûr que je n'ai pas tout en note devant moi, mais je me souviens de deux
ou trois passages d'à peu près quatre ou cinq lignes chacun en anglais sur un
discours d'à peu près 1 h 15 min,
1 h 30 min. Ça fait que, parler d'un discours bilingue, je pense
que c'est peut-être un petit peu exagérer les choses.
Je
soulignerais aussi que... Bon, c'est sûr que, mon discours de réplique au
discours d'ouverture de M. le premier ministre
n'a aucune commune mesure en importance avec le discours du budget de M. le
ministre des Finances, bon, c'était ma petite allocution de 10, 12 minutes personnelle
qui ne passera sûrement pas à l'histoire, mais je vous soulignerais que mon discours, je l'ai fait en quatre langues, en
français, en anglais, en cri, en inuktitut, sans jamais retraduire des passages
dans une autre langue. Puis ça, le message
que ça envoie, selon moi, c'est un message d'accueil, un message de respect,
un message de dire : Regardez, ce n'est
pas le gouvernement du Québec des francophones, ce n'est pas le gouvernement
des pure laine, c'est le gouvernement de tout le monde, c'est le gouvernement
des communautés culturelles, c'est le gouvernement
même de ceux qui ne parlent pas le français, parce qu'il y en a qui ne parlent
toujours pas le français au Québec.
Donc, moi, je vois ça plus comme un message d'accueil qu'un message de
non-importance de la langue française au Québec.
On sait que la
Politique gouvernementale relative à l'emploi et à la qualité de la langue
française dans l'Administration
confiait aux ministères puis organismes gouvernementaux un rôle moteur et
exemplaire à jouer dans la langue française. Elle guide aussi dans les
pratiques linguistiques et dans la mise en oeuvre de leurs politiques
linguistiques institutionnelles, de même qu'à l'égard des redditions de comptes
auxquelles ils sont assujettis en cette matière.
Alors, en 2011, le gouvernement a actualisé la politique gouvernementale
relativement à l'emploi et à la qualité de la langue française dans l'Administration adoptée depuis 1996. Elle
vise à faire en sorte que l'administration publique québécoise joue pleinement son rôle exemplaire et
moteur dans l'application de la langue française et de la charte, bien
entendu. Alors, j'aimerais savoir, Mme la ministre, de votre part, quel est
l'état de la situation présentement.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Mme la ministre, vous avez à peu près trois minutes.
Mme David (Outremont) : Oh! trois
minutes, bon...
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Vous pouvez revenir, là, à l'autre bloc, si vous voulez.
Mme David
(Outremont) : Écoutez, on parle effectivement de... J'aime beaucoup la
fin de vos propos. On sait que votre
comté représente deux fois et demie la France, je l'ai dit lors des crédits de
la Culture. Nous savons que... J'étais à votre discours, et effectivement je n'aurais pas pu répéter ce que vous
avez dit dans toutes les langues. Évidemment que vous êtes responsable d'un immense comté où il y a beaucoup, beaucoup de
cultures autochtones, et il est absolument exemplaire que vous puissiez vous adresser à eux dans leurs langues, et
c'est vraiment tout à votre honneur. Et ce sont des citoyens du Québec. Alors, je ne veux pas revenir non plus sur cette
question qui vraiment me désole un peu, en parlant de notre ministre des Finances, qui a accédé à un
poste aussi important en étant de l'immigration. C'est la première fois
de l'histoire du Québec et c'est tout à son honneur.
Vous me parlez de la tournée gouvernementale, de
la tournée ministérielle, et je veux revenir à ça. Écoutez, si nous travaillons au gouvernement et que nous
sommes un employé du gouvernement, nous représentons l'État. Et, en termes de représentation, je pense que les
fonctionnaires, les gens qui travaillent dans les ministères, dans les
organisations et nous-mêmes, nous,
les représentants élus par nos concitoyens, nous avons un devoir absolu
d'exemplarité sur la qualité du
français. Nous allons tous faire des erreurs. Vous comme moi, à certains
moments, nous allons faire des erreurs. Mais ce qu'il faut absolument, absolument regarder de près, c'est que les
gens prennent conscience du rôle qu'ils ont à jouer, de la responsabilité qu'ils ont par rapport à la
langue française. Et ça, on ne peut pas avoir un policier tout le temps qui les
regarde écrire, c'est d'avoir cette fierté d'une écriture sans faille.
Il n'y a
aucune raison, en 2014, de faire des fautes d'orthographe, avec tous les outils
technologiques que nous avons. Il y a des raisons, oui, d'inattention,
on est pressés, tout va vite, mais j'ai trop souvent observé une espèce de laisser-aller ou une sorte de négligence.
Évidemment, nos adolescents écrivent même... Je ne comprends pas quand...
«lol», je ne m'en souviens toujours
pas, qu'est-ce que ça veut dire, et je demande toujours. Et ils écrivent en
termes, là... Tu sais, «c'est quoi,
ça?», ça va être «ckc», etc. Je pense que nous devons inculquer à nos enfants,
à nos adolescents, à nos collègues... nous
devons tous avoir cette responsabilité. Ça ne veut pas dire que l'État se
désengage. L'État ne se désengage pas, et je ne me désengagerai pas. Demandez à mes collègues, je surveille
attentivement les anglicismes qui peuvent être dits ici et là, et, croyez-moi, on en dit tous, pas seulement
d'un côté ou l'autre de la Chambre, nous en disons tous. Et nous devons
toujours avoir ce souci...
Et le Québec est reconnu pour avoir vraiment un
souci particulier de francisation des termes. Je me souviens avoir été... J'étais sur un conseil
d'administration d'une organisation internationale qui s'appelle l'Agence
universitaire de la Francophonie. Et
je ne sais pas si vous connaissez la tendance actuelle, en enseignement
supérieur, de mettre des cours
gratuits sur Internet, et ça s'appelle les MOOCs, «Massive Open Online
Courses». Et je suis arrivée à Paris, Place de la Sorbonne. S'il y a un endroit où on devrait
promouvoir le français sur la planète, c'est bien à la Sorbonne. Et ils
parlaient toujours de MOOCs, et de MOOCs, et de MOOCs. Et j'ai
dit : Nous allons appeler ça «les cours en ligne ouverts et massifs». Et ils ont adopté une traduction
française, en disant : Encore le Québec qui fait attention à la
protection, et on vous admire
beaucoup, mais... bon, bon, bon. Alors, c'est devenu... Et je pense que
l'office fait un travail exemplaire et que tous les employés gouvernementaux et nous-mêmes devons avoir un effort
particulier pour l'utilisation et la qualité du français.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, Mme la ministre. Alors, on
va passer du côté du deuxième groupe de l'opposition. Mme la députée
d'Iberville, la parole est à vous pour une période de 21 minutes.
• (10 h 10) •
Mme
Samson : Merci beaucoup. En vertu du chapitre II de la loi 101, l'office
surveille l'évolution de la situation linguistique au Québec et en fait
rapport au moins tous les cinq ans au ministre, notamment en ce qui a trait à
l'usage et au statut
de la langue française ainsi qu'aux comportements et attitudes des
différents groupes linguistiques. Or, le dernier rapport remonte à 2008.
Depuis, aucun portrait d'ensemble n'a été dressé au Québec sur l'état de la langue
française.
Interpellé sur cette question en avril dernier
par le président d'Impératif Français, l'office a rétorqué que le bilan de 2008 avait fait l'objet de critiques en
raison de sa lourdeur et de l'absence de conclusions claires. L'office a donc
choisi de publier, depuis, des documents
et études de façon ponctuelle. Depuis 2010, l'organisme a publié une
quinzaine de documents et d'études, de faits saillants.
Au bout du
compte, nous avons des études sectorielles, mais le portrait d'ensemble n'est
plus là. Et, pendant ce temps, il est
important de souligner que l'office ne se soumet pas à la loi. Mme la Présidente, j'aimerais savoir si la ministre
compte exiger de l'office qu'il produise,
comme la loi l'exige, son bilan complet sur l'état de la situation
linguistique du Québec.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Mme la ministre.
Mme David
(Outremont) : Écoutez,
l'Office québécois de la langue
française a un nouveau président,
dont je souligne la présence, M.
Vézina. Effectivement, il y a eu 14 études entre septembre 2011 et août 2013,
donc : cinq sur le portrait
démolinguistique; cinq sur la langue d'accueil, service d'affichage et langue
utilisée sur Internet — très
important — en
juin 2012; 27 novembre, langue de travail, il y a eu trois études; et une
sur les trajectoires linguistiques le 23
août 2013. Alors, il y aura un
programme de recherche évidemment qui va être établi, et j'aurai l'occasion
d'en parler évidemment avec les
membres de l'office. Et les études se continuent et, je pense, sont tout à fait
en ligne directe avec l'importance de
donner à tous les cinq ans... Bon, l'usage de la langue française, on est tous
d'accord, le mandat est inscrit dans la Charte de la langue française.
Alors,
écoutez, est-ce qu'on va en faire un tout aggloméré — je pense, c'est le sens de votre
question — ou des
portraits qui sont spécifiques? Je pense que
les études spécifiques sont extrêmement importantes. Est-ce qu'on voudra — et peut-être que je laisserai... je
ne sais pas si l'office a une position là-dessus — mettre ça de façon
agglomérée? Mais j'inviterais donc tout le
monde, tous les députés, les gens intéressés par les questions, de lire toutes
ces études qui sont, ma foi, extrêmement instructives. Alors, si vous
permettez, M. Vézina pourrait compléter ma réponse.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Est-ce que ça vous convient? Oui?
Allez-y. Juste lui faire la place, ici, en avant auprès d'un micro, s'il
vous plaît. Juste vous identifier pour l'enregistrement, s'il vous plaît, M.
Vézina.
M. Vézina
(Robert) : Oui. Bon, Robert Vézina, président-directeur général de
l'Office québécois de la langue française.
Alors, pour répondre à la question, Mme la Présidente, en effet, comme la
ministre vient de l'indiquer, au cours des
dernières années, l'office s'est acquitté de son obligation de faire le suivi
de la situation linguistique et d'en faire rapport au moins tous les cinq ans au ministre. Ça s'est
fait, la dernière fois, par le dépôt d'à peu près 14 études de 2011 à 2013.
La dernière a été déposée l'été dernier, en
2013. Pour chaque étude, des résumés et des faits saillants ont été produits.
Cela dit, il
est vrai que, lors de cet ensemble de dépôts d'études sectorielles, il n'y a
aucune, vraiment, synthèse globale
qui a été produite. Il y en a une qui a été produite par le Conseil supérieur
de la langue française dans son avis paru
en mars 2013 qui s'intitule Redynamiser la politique linguistique du Québec.
Il y a vraiment une sorte de synthèse et un effort de résumer tout l'ensemble des études qui étaient à la
disposition du conseil à cette époque, dont les études de l'office.
Lors du
prochain programme... pour le prochain programme de recherche qui va être
établi dès cette année, il est maintenant
prévu qu'une synthèse globale sera produite, qui reprendra l'ensemble des
constats qui seront dégagés dans les
études sectorielles parce qu'effectivement, moi le premier, je considère ça
très utile, pas seulement pour les parlementaires mais l'ensemble du public, utile d'avoir accès à
une synthèse, là, qui permet à tout un chacun de se faire une idée assez
rapide de la situation selon certains
enjeux, là, qui interpellent tout le monde. Donc, effectivement, ce sera fait
pour la prochaine fois.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Merci, M. Vézina. Mme la députée d'Iberville.
Mme
Samson : Mme la Présidente, peut-être que M. Vézina peut rester là. Je
sens qu'il va être appelé à contribuer à nouveau.
J'aimerais maintenant aborder la question des
ressources déployées par l'Office québécois de la langue française
pour faire respecter la loi sur le terrain. Notre question
n° 11, dans les renseignements particuliers — je
vous réfère à la page RP-7 — concernait
le nombre d'inspecteurs depuis 2011. On nous répond qu'au
1er avril 2013 il y avait
huit inspecteurs, au 31 mars 2014, on en a cinq, une baisse de près
de 50 %.
Parallèlement
à ces données, à la question 18, à la page RP-16, on nous dit qu'au 31 mars 2014
une équipe de 14 agents de
francisation a été mise en place. Ces agents, nous dit-on, se rendent sur le
terrain et agissent comme relayeurs afin de sensibiliser les
propriétaires de commerces et entreprises à offrir des services en français. Dans
le budget des dépenses 2014‑2015, à la page
43, on nous indique que le budget des dépenses est en hausse de
1,7 million par rapport à la
dépense probable de 2013‑2014 pour assurer, entre autres, de donner un nouveau
souffle à la francisation des entreprises.
Bien que l'ajout de cette équipe d'agents de
francisation me paraît être une idée intéressante au chapitre de la prévention, j'aimerais savoir pourquoi on a moins
d'inspecteurs. Et est-ce qu'on prévoit augmenter le nombre d'inspecteurs
avec cette hausse de dépenses de 1,7 million pour 2014‑2015?
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Mme la ministre.
Mme David (Outremont) :
Alors, écoutez, je pense qu'effectivement, comme dit ma collègue députée
d'Iberville, je laisserais le
président de l'office répondre à ces questions assez importantes, mais
pointues, en termes de nombre de personnes.
La Présidente (Mme
Rotiroti) : M. Vézina.
M.
Vézina (Robert) : Mme la Présidente, en ce qui concerne le nombre
d'inspecteurs, actuellement tout ce qui s'appelle organisation du
travail à la Direction des enquêtes est en examen, est en réévaluation.
Actuellement, il y a cinq inspecteurs. Il n'est pas prévu dans l'immédiat d'en
ajouter parce qu'ils comblent tous nos besoins actuels.
L'ajout de 1,5 million,
il faut tenir compte que, l'ensemble des ressources humaines de l'office, là,
la masse salariale augmente d'une année à l'autre parce qu'il y a des
avancements d'échelon. Donc, juste... Et donc il y a une croissance, là, normale d'une année à l'autre, là.
Donc, est-ce que j'ai répondu à votre question, là? Peut-être que j'en
ai échappé une partie.
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Mme la députée.
Mme
Samson : Bien, je vous dirais, là, ce que vous me dites, c'est que le
1,7 million supplémentaire va vraisemblablement rencontrer les
obligations salariales du service ou de votre...
M. Vézina
(Robert) : En fait, de l'ensemble de l'office.
Mme Samson :
De l'ensemble de l'office.
M. Vézina
(Robert) : Oui, oui.
Mme
Samson : C'est juste que
c'est un peu surprenant parce que les ressources ont baissé partout et tout le monde doit assumer... d'autres composantes du ministère doivent assumer les augmentations salariales prévues aux conventions collectives à même leur
budget d'opération sans avoir d'augmentation.
M.
Vézina (Robert) : L'office a
quand même connu, là, des compressions, lors du dernier
budget, là, de l'ordre de 350 000 $, donc, en rémunération et
en fonctionnement également. Donc, l'office fait un effort comme les autres
organismes et ministères sur ce plan-là.
Mme
Samson : Est-ce que l'office est la seule composante du ministère qui
voit son budget accru pour rencontrer les
obligations d'augmentations salariales convenues dans les conventions
collectives ou dans l'avancement du personnel? Ma question s'adresse à
la...
La Présidente (Mme
Rotiroti) : M. Vézina, allez-y. Ah! Mme la ministre.
Mme
David (Outremont) : Alors, l'augmentation de 1,7 million est par
rapport au dépenses de 2013‑2014
et non pas par rapport aux crédits. Ce qu'il est important de mentionner, c'est que, oui, il y a
eu une coupure de 350 000 $.
Nous voulions absolument que l'office fasse
son effort, comme nous avons demandé à toutes les composantes, je dirais,
du ministère de la Culture. Cependant, qu'il
y ait plus d'agents de francisation, nous ne pouvons que nous réjouir parce
qu'une des choses... un des constats auquel
nous arrivons, c'est qu'entre autres, dans la stratégie commune de Montréal,
là où se passent beaucoup, beaucoup... et
doivent se passer les efforts pour accompagner les petites entreprises, comme
on le sait, de moins de 50 employés,
la stratégie est à ce point, j'oserais dire, populaire qu'il y a eu pas loin de
500 entreprises qui ont eu des
attestations de francisation — ce n'est pas le certificat, parce que ça,
c'est encadré légalement par la loi 101, on appelle ça une attestation
de francisation — et
qu'il y en a pas loin de 450 qui sont en processus de francisation, accompagnés par l'Office québécois de la langue
française. Ça prend donc des gens
pour accompagner, aider et arriver à près de 1 000 petites
entreprises qui auront leur attestation de francisation.
• (10 h 20) •
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Mme la députée d'Iberville.
Mme
Samson : Oui. Merci. J'ai une question. Ça va? M. Vézina, vous pouvez
rester là, j'imagine. Ma prochaine question
concerne certaines dépenses en formation qu'a encourues l'Office de la langue
française. À la page RG 27, on trouve
une formation pour laquelle l'office a dépensé 17 786 $ dans le
but — et je
cite — de faire
des ateliers destinés au personnel de
l'office pour qu'il s'exprime et partage, «dans un climat neutre, une réflexion
sur les moteurs de mobilisation et d'engagement envers l'organisation
dans le cadre de la modernisation».
En
tant que deuxième groupe d'opposition, on est peu mal à l'aise à voir des
formations de cette nature payées par
les fonds publics, qui nous apparaissent davantage — passez-moi l'expression — des thérapies de groupe. Est-ce que la
ministre peut s'engager à revoir les
formations données par l'office et veiller à ce que les formations soient
véritablement pertinentes pour les fonctionnaires de l'office dans
l'exercice de leurs fonctions pour veiller au bien-être de la langue française
au Québec et atteindre leur mission?
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Mme la ministre.
Mme
David (Outremont) : Alors, je remercie la vigilance... On parle
beaucoup de vigilance, ce matin, par rapport à la langue française. C'est la vigilance par rapport au... Il n'y a pas
de... comme on dit, il n'y a pas de petites dépenses; il faut qu'il y ait des dépenses justifiées.
Est-ce que c'est le titre... Je ne le sais pas. Est-ce que c'est le titre de
cette formation qui donne à penser à ma collègue que ça serait de la
thérapie de groupe? Est-ce que c'est vraiment un échange? Et là peut-être que M. Vézina pourra répondre. Mais je
ne serais pas prête tout de suite à conclure, comme ma collègue, de parler
de psychothérapie de groupe. D'abord, c'est
un acte réservé et protégé. Alors, j'invite à la prudence par rapport
l'expression «psychothérapie».
La Présidente (Mme Rotiroti) :
M. Vézina.
M. Vézina
(Robert) : Alors, Robert Vézina, P.D.G. de l'Office québécois de la
langue française. Alors, en effet, nous
sommes très stricts, là, lorsqu'il est question de décider si nous allons payer
pour des formations destinées au personnel, nous faisons ça avec beaucoup de rigueur. Cette formation-là était très
importante. Elle survient... elle est survenue quelques mois après ce que vous connaissez tous, ce qu'on a
appelé le «pastagate», qui est un événement qui a été très déstabilisant
pour l'ensemble du personnel. Et le P.D.G.
de l'époque a demandé, à la suite de plusieurs représentations que plusieurs
personnes du personnel lui ont faites, qu'il
y ait une sorte de formation effectivement, là, qui était destinée à l'ensemble
du personnel — donc, c'est à peu près 240 personnes — pour justement passer par-dessus cette
épreuve, donc pour que les gens
puissent exprimer ce qu'ils voyaient par rapport à l'avenir de l'organisation,
ce qu'ils en pensaient, comment ils croyaient qu'on en était arrivé à
vivre une telle crise. Et ça a donné lieu à plusieurs échanges très
enrichissants et production d'un rapport qui
a servi par la suite à améliorer le climat de travail. Donc, ce type de
formation là est plutôt rare, ça
arrive vraiment dans des cas extrêmes, mais ça a été très salvateur pour le
climat de travail et la rétention de personnel.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Merci, M. Vézina. Mme la députée d'Iberville, il vous reste sept minutes.
Mme
Samson : Très bien. Alors, je poursuis. On se souvient toutes et tous
de l'épisode maintenant surnommé affectueusement
le «pastagate», quand des inspecteurs de l'office avaient ordonné de retirer le
mot «pasta» du menu d'un restaurant italien.
L'Office
québécois de la langue française a annoncé, en octobre dernier, qu'il mettrait
en place un système de tri des
plaintes reçues par l'organisme, de deux catégories : une première pour
les doléances qui relèvent de l'intérêt direct et personnel et une seconde regroupant un intérêt collectif et général.
J'aimerais simplement être rassurée pour éviter qu'un deuxième «pastagate» ne se reproduise. Est-ce que
cette mesure est entièrement implantée à l'office? Et quel bilan l'office
dresse-t-il de l'épisode «pastagate» et de l'implantation des nouvelles
mesures?
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Mme la ministre. Vous avez hâte de répondre. Allez-y.
Des voix : Ha, ha, ha!
Mme David
(Outremont) : Bien, écoutez, je pense que, la réponse, tout à l'heure,
de mon collègue sur la question de
cette réunion, ils ont fait le bilan. Comme je dis, ils auraient pu appeler ça
autrement, ça aurait pu être : bilan, effectivement, et perspectives d'avenir. Je pense que, quand il arrive
des choses, d'ailleurs, sur lesquelles ma collègue d'Iberville insiste, c'est donc qu'il y a eu
vraiment un événement à un point tel qu'elle dit : Est-ce que ça risque de
réapparaître? Donc, ça donne une mesure.
Je voudrais aussi rappeler que tout ça est
arrivé sous le précédent gouvernement et donc que ces dépenses-là ont été dans des crédits où nous n'étions pas là.
Donc, elle pourrait des fois peut-être adresser ses questions... Évidemment,
à une étude de crédits, on ne sait plus si
officiellement c'est 2013‑2014, et puis on parle beaucoup de 2014‑2015, donc
des fois peut-être que ça
s'adresserait plus au précédent gouvernement, donc. Et M. Vézina, en plus,
n'était pas président à ce moment-là. Je commence un peu à répondre à sa
place, mais il pourra compléter.
La présence même d'un nouveau
directeur-président de l'Office québécois de la langue française est un signe important d'un changement qui a été apporté dans
les pratiques, et ce n'est que le début. M. Vézina pourra répondre à quel
point il est en train de regarder la
gouvernance. Et moi, je répète, sur la question de la gouvernance, je l'ai dit
en Culture, il y a 38 postes à combler dans les différents
organismes, où nous devons nommer des gens. Il n'y a rien qui a été fait sous
le précédent gouvernement. Et encore
ici il y a beaucoup de postes à combler dans des comités, entre autres le
Comité de suivi de la situation linguistique. Et j'ai l'intention de m'y mettre
très, très, très activement parce que ces comités-là, ce sont des comités fort importants, et, quand il y a
des fins de mandats, on doit remplacer les gens, on doit moderniser, on doit trouver des gens qui sont, donc, plus
pertinents pour une vision d'avenir. Alors, mon collègue peut répondre
peut-être à ce qui se passe depuis le «pastagate».
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Mme la députée d'Iberville, voulez-vous que...
Mme Samson : Juste raffiner la
question un peu. On va la rendre plus simple.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Oui, allez-y.
Mme Samson : Est-ce que le système
des tris des plaintes est présentement en place dans l'organisation?
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Vous adressez la question à la ministre, Mme la
députée?
Mme Samson : Mme la ministre ou M.
Vézina.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
M. Vézina?
Mme Samson : M. Vézina va répondre.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Allez-y, M. Vézina.
M. Vézina
(Robert) : Mme la Présidente, oui le système de tri des plaintes est
en place, en ce sens que les plaintes... Je veux dire, il y a un traitement différencié entre les plaintes qui concernent
une situation d'intérêt direct et personnel par rapport aux plaignants
et les sujets d'intérêt collectif et général. Donc, il y a un traitement
différencié là-dessus.
Ce qui est
actuellement en voie d'implantation — les réflexions ont été faites et les
premiers rapports internes ont été
produits — c'est
les critères de priorité de traitement des plaintes. Auparavant, les plaintes
étaient traitées au fur et à mesure
qu'elles arrivaient, donc c'était un ordre séquentiel. Ce qui va être implanté
au cours de l'année qui vient de commencer,
c'est un traitement selon l'indice d'importance de la plainte. Par exemple, un
des critères qui est retenu, c'est la
santé et la sécurité du public. Une plainte qui concerne la sécurité du public
est plus urgente à traiter qu'une plainte qui concerne une affiche, là, de muffin, là, où la nette prédominance du
français n'est pas claire. Ça, c'est un exemple. Et ça, ça va être
implanté au cours de l'année.
Si je veux
revenir un peu sur la question que vous avez posée tout à l'heure : Est-ce
que le «pastagate» est bel et bien derrière nous?, en partie oui, je
dirais. Je dis «en partie» parce qu'on ne sera jamais à l'abri d'une autre
crise médiatique, puisque le sujet, là, de
la langue au Québec est éminemment émotif. Mais quand même ce que ça a eu de
bon, le «pastagate», après vraiment
le... — ça a été
un tremblement de terre, là, dans l'organisation — c'est que ça a vraiment enclenché une volonté très engagée de moderniser
l'organisme, et c'est ce à quoi moi et mon équipe allons nous employer,
au cours des prochaines années, c'est un travail de longue haleine.
Donc, je
viens de vous parler de la mise en place de critères de priorité de traitement
des plaintes, mais il y a toutes sortes de choses en plus qui sont en voie,
là, de réalisation. Par exemple, le remodelage de toutes les lettres qui sont
envoyées, d'une part, aux plaignants et, d'autre part, aux entreprises qui font
parfois l'objet de plaintes, ces lettres-là n'avaient pas été réécrites depuis
de nombreuses années. Hein, on donnait un exemple, là. Dès le premier envoi,
une entreprise qui était considérée comme
contrevenante, on mentionnait tout de suite, dès la première lettre, la
possibilité d'une mise en demeure qui
pourrait conduire après ça à des poursuites. Donc, ça, ça a été... ça n'existe
plus. On est en train de compléter un remodelage complet et réécriture
complète de l'ensemble des lettres types envoyées aux entreprises et aux
citoyens, des lettres beaucoup plus actuelles et beaucoup plus proches de la
communication moderne.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Merci, M. Vézina. Il vous reste une minute, Mme la députée d'Iberville.
Mme Samson : Je peux la reporter à
l'autre bloc, s'il vous plaît?
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Oui, si vous voulez. Oui. Oui.
Alors, on va passer sur le côté ministériel. Je vais céder la parole au
député d'Ungava.
• (10 h 30) •
M. Boucher : Alors, rebonjour. Comme
je vous disais tout à l'heure, bon, le français puis la préservation du français, c'est un effort de tous les instants. Ce n'est pas quelque
chose qu'on peut dire : Bon, bien, voici, maintenant, en 2014, on est arrivés, puis on peut relâcher la
vigilance, et puis tout ça va bien. Mais, en même temps, comme je vous disais tout
à l'heure dans mon intervention
précédente, selon moi, bon, c'est un heureux mélange peut-être
de mesures de répression, mais surtout de mesures d'accueil et de...
c'est ça, d'accueil envers d'autres langues. On parle souvent d'affichage dans les petits commerces. Un petit
commerçant qui s'ouvre un café ou qui se met à vendre des muffins le matin peut commettre des erreurs de bonne foi ou
des erreurs basées sur une philosophie quelconque. Et puis arriver tout de
suite avec des menaces d'amende, etc.
Donc, ce que M. Vézina nous disait voilà quelques secondes, pour moi, c'est quelque
chose que j'accueille favorablement et puis avec lequel je me sens tout à fait
confortable.
Le Québec d'aujourd'hui n'est pas et ne sera plus le Québec d'autrefois. Je vais vous donner à titre
d'exemple mon neveu, par exemple, qui a marié une jeune femme qui nous vient de la Chine, de Galian, en
Chine. Au moment où elle est arrivée
au Canada avec un statut d'étudiante en maîtrise en
informatique, elle ne parlait que peu ou pas le français; l'anglais et le mandarin. Maintenant,
bon, peut-être 10 ans plus tard, elle est trilingue, français,
anglais, mandarin. Ils ont un petit bonhomme ensemble qui est à peu près
haut comme la table, qui parle en mandarin à sa mère et en français à son
père. Donc, c'est presque surréaliste quand
on voit ça. Mais je pense que ça, c'est un bel exemple du Québec
de demain, de ce qui nous attend : des gens qui ne parlent pas une,
mais plutôt deux, voire même trois langues.
Si on fait un
parallèle avec la situation qui se vit dans mon comté autant chez les Cris
que chez les Inuits, pour ces
gens-là, la langue maternelle est soit le cri soit l'inuktitut, la langue secondaire
a été depuis longtemps l'anglais et la troisième
langue est le français. En certains endroits, le français peut être presqu'une
langue étrangère jusqu'à un certain point.
Et puis on sait très bien que, dans la Convention de la Baie James,
il y a des exceptions quant à l'application de la Charte de la langue française dans les régions
conventionnées par la Baie James. Encore une fois, bon, des politiques
d'accueil et puis d'ouverture
face à ces gens-là qui ne parlent que peu ou pas le français, selon moi, ont beaucoup
plus d'avenir que des politiques
visant sur l'obligation, la construction de murs, de renforts, etc. à ce point de vue là. De plus en plus, il n'est
pas rare de voir soit de jeunes Cris ou de jeunes Inuits qui ne sont pas
bilingues, mais trilingues, français,
anglais et inuktitut. L'avenir est là.
Lorsque je
travaillais, bon, au Nunavik, souvent on avait le réflexe, qui était peut-être
le mauvais réflexe, j'en conviens, mais de
produire seulement des documents en anglais et en inuktitut parce qu'il y a
tellement peu de gens qui parlent le
français que, par souci d'économie de temps et d'argent, on escamotait le
français. Un jour, un Inuit m'appelle puis
me dit : Bon, bien, Jean, tel document que tu nous as envoyé, ce n'est pas
en français. Ça fait que moi, je lui réplique : Bien voyons, Peter, tu ne parles pas le français
puis tu me reproches de... tu ne parles pas français, Peter. Il dit : Non,
mais mes enfants parlent français, tu
pénalises mes enfants, ils apprennent le français finalement pour rien parce
qu'ils n'ont pas l'occasion de le
pratiquer après. Puis c'est à ce moment-là que, bon, s'est produit comme un
déclic. Oui, c'est vrai, cet
individu-là avait raison. Puis maintenant, bon, il y a beaucoup plus d'efforts
qui sont faits, puis on prend le temps de produire tous les documents en trois langues, même si toujours mon
inuktitut, c'est une langue qui n'est pas facile et puis qui... On
demande des re-re-revérifications.
Alors,
vous parliez tantôt, Mme la ministre, de la promotion du français lors
d'activités culturelles. Le Programme de promotion du français lors
d'activités culturelles apporte un soutien financier à des projets : qui
mettent un accent particulier sur
l'utilisation, la valorisation, la célébration du français lors d'activités
culturelles existantes ou nouvellement créées;
qui visent précisément à sensibiliser le public — notamment les jeunes et les groupes dont le
français n'est pas la langue
maternelle — à la
richesse et à la vitalité de la langue française ainsi qu'à l'importance de
bien la maîtriser. Ainsi, pour qu'un
projet soit admissible à un financement, il faut qu'il comporte une stratégie
précise qui dépasse le seul fait que l'activité ou la manifestation
culturelle proposée se déroule en français.
On
a des critères d'admissibilité qui ont comme mission principale : d'offrir
des activités culturelles, en tant que diffuseur
culturel, service culturel d'une municipalité ou établissement d'enseignement
postsecondaire, que ce soit en saison
régulière ou d'un festival culturel; de promouvoir la langue française,
notamment par la tenue d'activités culturelles; ou encore de promouvoir
un mode d'expression culturel particulier dont la dimension linguistique est
essentielle.
Un
organisme admissible peut demander un soutien financier pour la tenue d'une ou
plusieurs activités culturelles, à condition
que celles-ci : fassent appel à un mode d'expression fondé sur la langue
française, tel que la poésie, la chanson, le théâtre, la littérature ou
le cinéma; soit axées sur la promotion de la langue française; ciblent un
public particulier, clairement désigné, auprès duquel la promotion du français
est jugé pertinente; et finalement soient réalisées avant le 31 janvier 2015.
Il
y a cinq ans, le Programme de promotion du français lors d'activités
culturelles a été mis en place pour favoriser le français lors d'activités culturelles au Québec. Jugez-vous, Mme la
ministre, que ce programme a atteint ses objectifs?
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Merci. Mme la ministre.
• (10 h 40) •
Mme
David (Outremont) : Alors, écoutez, merci de la question qui me permet
de revenir aussi en mettant le chapeau
culture. Alors, il est évident qu'il y a un côté vraiment indissociable entre
culture, identité, langue. Et je vous remercie
aussi de votre introduction qui place, je pense, très, très bien... Vous qui
êtes député d'Ungava, donc, avec des communautés
autochtones et qui parlez d'une Chinoise qui est trilingue et qui a un enfant
qui est déjà complètement au moins
bilingue, si ce n'est pas trilingue, parler à la fois le mandarin, dont on dit
que c'est probablement une langue aussi importante, éventuellement, maîtrisée par nos enfants que l'anglais, et
le français... Donc, c'est ça, le Québec de demain, c'est l'ouverture, c'est la mondialisation, je
dirais, le rapprochement des peuples. Et je pense que de mettre à la fois
culture autochtone, culture chinoise,
culture francophone et tout ça en une génération, imaginez comment non
seulement on a parcouru un chemin
exceptionnel au Québec dans notre ouverture à l'international et aussi dans
notre ouverture, je dirais, et nos rapprochements des peuples autochtones.
Donc, je vous remercie beaucoup de cette question qui allie à la fois
langue et culture.
Écoutez,
pour rester dans ce domaine de l'international, j'écoutais une émission très,
très importante sur la langue avec
Marie-Éva de Villers, qui est évidemment une immense linguiste qui a fait le Multidictionnaire
de la langue française, et il y avait des invités extrêmement
intéressants, dont Michaëlle Jean aussi, qui quand même se présente à la
plus grande institution de la francophonie
au monde. Et ça serait évidemment tout à notre honneur, au Québec, que d'avoir
une ancienne journaliste de Radio-Canada qui
parle cinq langues et qui serait une représentante assez exceptionnelle. Et,
dans cette émission, il était question,
donc, de plusieurs éléments extraordinaires, et on disait que, dans les
dernières années, il y a eu cinq prix Goncourt qui ont été attribués,
pas à des gens dont la langue maternelle est le français à l'origine, à cinq
prix Goncourt qui sont de différentes cultures et dont la langue maternelle
n'est pas le français, y compris très récemment
un Américain. Alors, c'est dire comment le français est une langue, d'abord, de
grande culture, une langue de mots
riches, diversifiée, extraordinaire et que, donc, le plus grand concours, je
dirais, de littérature française, d'avoir des non-francophones de langue
maternelle, de souche, c'est quand même extraordinaire.
Nous
avons, en lien avec la culture... J'étais à l'ouverture du Sommet de la
Francophonie, et nous sommes vraiment des
leaders mondiaux en termes de francophonie, nous ne voulons pas perdre ce
titre-là, le Sommet de la Francophonie qui
a donc eu lieu... le sommet mondial de la langue française, excusez, le sommet
mondial de la langue française qui a eu
lieu à Québec il n'y a pas longtemps
et qui... C'est là que j'ai découvert quelqu'un qui est absolument extraordinaire, qui
s'appelle David Goudreault, qui habite Sherbrooke et qui est né à Trois-Rivières. Alors, mon collègue de Sherbrooke, vous
avez quelqu'un de formidable, et qui a gagné rien de moins que
le concours international de poésie, David
Goudreault. Il fait des... Et il est un... Il fait du slam, il
fait du rap, il fait tout ça en français et dans un français
exceptionnel. Et, quand on dit qu'un
jeune qui est né à Trois-Rivières, et qui maintenant habite Sherbrooke, et qui gagne le concours international de
poésie en français, ça nous donne une idée du chemin, là aussi, qu'on a
parcouru.
Et,
il y avait aussi un jeune rapeur qui s'appelle Webster et
qui disait justement : Moi, je faisais du rap en anglais avant, et le rap en anglais, bien c'est comme la
langue, on s'imagine que c'est la langue naturelle pour faire du rap. Et il
dit : Je me suis aperçu que la langue française
était une langue formidable aussi pour faire ce genre de geste, je dirais,
musical et culturel. Et ce qu'il disait,
c'est que, si on veut intéresser les jeunes, si on veut intéresser toute une...
évidemment, l'avenir de la langue française, ça passe à travers nos enfants, éventuellement, nos petits enfants, il faut le faire
de façon très actualisée, très urbaine. Et il trouvait que, dans la question
du rap en français, il se promène des les écoles et il vante la culture française
à partir d'un médium qui est extraordinaire pour des gens qui sont évidemment
dans la musique et la chanson, mais sous une forme peut-être que nous,
nous pratiquons moins à nos âges vénérables.
Alors, dans
ce programme, justement, que je
trouve extrêmement intéressant, d'intégration de la promotion du français lors d'activités
culturelles, je le disais en introduction, ce ne sont pas que pour des
programmes, justement, de culture
pour des Québécois dits de souche, ça s'adresse beaucoup
aussi pour des jeunes issus de l'immigration. Et on peut donner quand
même des montants assez substantiels, qui peuvent aller jusqu'à 25 000 $,
donc c'est quand même intéressant. Et,
depuis cinq ans, on a quand même consacré 1,6 million $ à ce
programme-là, on a financé 116 projets et, en 2013‑2014, on a pu
financer, donc, 25 projets.
L'envers,
évidemment, de ce succès, et on le voit aussi pour la Stratégie commune
d'intervention à Montréal, c'est qu'il
y a de plus en plus de candidatures, et donc, ayant plus de candidatures, 74
candidatures, on se trouve à faire plusieurs heureux et plusieurs malheureux parce qu'il n'y a pas assez d'argent
pour l'ensemble de soutien de ça. Alors, ce qu'il faut quand même souligner,
et je veux rassurer les gens là-dessus, c'est qu'il y a un processus, un comité
externe très sérieux, un jury très sérieux
qui regarde avec rigueur, donc, l'analyse de toutes les demandes. Ça a été
fait, donc, cette année, pour les 74
projets. Et, comme je dirais, ce que moi, j'ai beaucoup connu dans le milieu
universitaire, on regarde la qualité
du projet, la pertinence, les retombées, Il faut que ça soit beaucoup auprès
des jeunes... un public non francophone pour les sensibiliser à la culture francophone; des prévisions réalistes
budgétaires, on veut quand même que ça soit des demandes sérieuses. Il faut qu'il y ait une diversité de sources de
financement. Il faut que l'équipe soit compétente, et je pense que c'est extrêmement important à dire, et
qu'il y ait des partenaires très engagés dans le projet, donc que nous ne
soyons pas les seuls avec notre subvention, donc, à aider ce projet-là.
Et nous
suivons ça de très, très près. Et ça a permis évidemment à des projets très
intéressants... Par exemple, les compagnons du patrimoine vivant de
Trois-Pistoles, ça s'adressait, justement, à des jeunes du primaire, secondaire
et des étudiants allophones en
apprentissage du français langue seconde; alors, c'est intéressant. Il y a eu
une dictée du Salon du livre à
Trois-Rivières pour des jeunes du quatrième et cinquième secondaire. On sait
que d'habitude les jeunes n'aiment pas beaucoup la dictée, hein, alors
ça, ça permet de rendre ça de façon beaucoup plus intéressante. Alors, des
vidéos poèmes québécois — ça, c'est vraiment moderne — accessibles à l'aide de téléphones
intelligents. Il y a eu du soutien à
des musiciens québécois issus de différentes cultures dans
Ahuntsic-Cartierville. Alors, il y a poésie et slam au Festiblues international
de Montréal. Alors, vous voyez qu'ils ont eu l'occasion de présenter un
spectacle sur la grande scène du festival.
Alors, toutes sortes de projets, finalement, sur lesquels, je dirais, nous
n'avons pas coupé de... il n'y a pas eu de coupures budgétaires, c'est-à-dire, que nous maintenons parce que nous pensons que c'est très, très
important... et de garder, donc, 350 000 $ par année, qui est maintenu en
2014‑2015, parce que nous pensons que c'est une façon, dans la coopération,
j'oserais dire la bonne humeur et la culture,
d'intégrer tous les jeunes ensemble, qu'ils soient francophones de souche ou
francophones non de souche. Et, à travers la
culture, on sait qu'on peut faire des miracles pour intéresser les jeunes, que
ça soit la chanson, la poésie, même la
dictée. Alors, nous sommes très heureux de pouvoir poursuivre ce programme-là.
Et évidemment nous serons encore peut-être victimes de notre succès, et il y
aura quelques malheureux, mais, que voulez-vous, on met l'argent maximum que
nous pouvons mettre dans ce projet.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
M. le député d'Ungava, il vous reste deux minutes.
M.
Boucher : O.K. Peut-être une petite question complémentaire, Mme la
ministre. On sait que, bon, les allophones représentent souvent le défi, là, quant à la langue française, des gens
qui viennent d'un autre pays, d'un autre monde, d'une autre culture, qui viennent ici, bon, dans un
bassin, une mer anglophone, l'Amérique du Nord. Mais on sait aussi que de
plus en plus d'allophones, bon, connaissent
le français à leur arrivée au Québec. On parlait, en 2002, d'à peu près
49 % des nouveaux arrivants qui
connaissaient le français, versus, en 2011, on parle plus de 64 %. Malgré
tout, il y a des gens, là, qui ne maîtrisent pas le français.
Comme je
parlais plus tôt, bon, bien, c'est sûr qu'on peut mettre des conditions légales
avec des paramètres précis, des tests
quant à la connaissance du français pour avoir accès aux emplois, ce genre de
choses là. Mais, comme je vous disais
tout à l'heure, une politique d'accueil et d'ouverture face à l'autre me
semble, pour moi, en tout cas, beaucoup plus prometteuse.
Il y avait un
événement... bon, c'est toujours un petit peu gênant de nommer le titre, mais
l'événement J'aime ma langue dans ta
bouche, qui va vers les communautés culturelles et donne des spectacles en
français face aux communautés culturelles.
J'aimerais, Mme la ministre, avoir vos commentaires un petit peu par rapport à
ça puis savoir quelles sont vos vues.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Dans 1 min 30 s, Mme la ministre.
Mme David (Outremont) : Excusez, je
n'ai pas compris...
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Vous avez 1 min 30 s.
Mme
David (Outremont) : 1 min 30 s. Écoutez, on rigole un
petit peu, c'est la preuve que ça a un bon impact médiatique, ce spectacle dans Côte-des-Neiges, au
parc Kent, qui s'appelle J'aime ma langue dans ta bouche. Ça dit ce que
ça dit au sens littéral du terme, c'est-à-dire... ou littéraire, enfin. Les
gens qui étaient là, il y avait, je répète, des Québécois, donc, de souche,
Yann Perreau, Catherine Major, Luc Picard qui animait, le président de la
Société Saint-Jean-Baptiste. Et donc c'était un événement qui s'était déplacé, je
le dis bien, par le Mouvement Montréal français et accompagné de la Société Saint-Jean-Baptiste, là où il y a énormément,
justement, d'immigrants récemment... de nouveaux arrivants.
Et donc c'est dans mon comté. Il y a beaucoup,
beaucoup de gens, de nouveaux arrivants qui parlent près de 160 langues différentes. Et, de les voir réunis
dans ce parc avec des musiciens aussi qui n'étaient pas des musiciens nés
au Québec et qui pouvaient autant venir, par
exemple, de Centrafrique... Il y avait une femme, magnifique, d'ailleurs, qui
venait, et on a discuté ensemble de la
situation évidemment catastrophique en Centrafrique, mais qui donc était très,
très, très heureuse de pouvoir venir partager sa culture, sa langue et
son amour de la musique. Et il y avait un musicien péruvien. Et c'est ça, quand on dit : D'une façon non coercitive
mais dans le plaisir et dans la fierté d'être tous ensemble en français,
c'est ça qu'on veut dire.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, Mme la ministre. Alors, on
va passer à l'opposition officielle pour une période de 23 minutes.
• (10 h 50) •
M. Kotto : Merci, Mme la
Présidente. Je veux revenir sur la situation linguistique générale au Québec.
Les récentes données dévoilées par
Statistique Canada indiquent clairement un recul de la place du français au
Québec depuis une dizaine d'années.
Cette tendance est d'autant plus préoccupante qu'elle se manifeste aussi au
niveau de la langue de travail. Au
Québec, entre 2006 et 2011, la proportion de la population de langue maternelle
française a ainsi diminué, 79,6 %
contre 78,9 %, alors que celle de la population de langues maternelles non
officielles, au Canada, a connu une hausse,
passant de 12,3 % comparativement à 12,8 %. Toujours entre 2006 et
2011, le pourcentage d'individus qui parlaient le plus souvent le français à la maison a diminué, passant de
81,8 % contre 81,2 % au profit de l'usage des langues non
officielles au Canada, 7,6 % en 2006 et 8,1 % en 2011.
Selon l'avis du CSLF, le Conseil supérieur de la
langue française, Redynamiser la politique linguistique du Québec — Avis à la ministre responsable de la
Charte de la langue française, le pourcentagede la main-d'oeuvre
des entreprises privées travaillant en français a chuté depuis 1989.
Dans l'ensemble du Québec, c'est moins 11 points de pourcentage, dans la région, moins six points de pourcentage et, sur
l'île de Montréal, moins 13 points de pourcentage.
Mais c'est au
travail que l'avenir du français se joue principalement. La langue du travail
est celle que l'on adopte également
dans d'autres aspects de la vie sociale. C'est la langue vers laquelle se
tournent les nouveaux arrivants. Une étude
réalisée en 2008 pour le compte de l'Office québécois de la langue française
révélait que les entreprises de l'île de Montréal sont de plus en plus portées à exiger systématiquement
l'anglais à l'embauche. 40 % d'entre elles l'avaient fait pour tous
les postes à pourvoir, comparativement à 19 % pour les entreprises de
l'ensemble du Québec.
Les études de
l'OQLF publiées à l'automne 2012 démontraient également que le bilinguisme au
travail a augmenté au Québec. Selon
ces études, 63 % des travailleurs québécois ont recours à l'anglais à un
degré ou à un autre dans le cadre de
leurs fonctions. Cette situation est davantage répandue sur l'île de Montréal
qu'ailleurs au Québec. C'est principalement dans le secteur des services professionnels scientifiques et techniques
et le secteur de l'hébergement et des services de restauration que les
travailleurs utilisent le moins le français.
Une étude de
l'OQLF sur la langue du commerce et des affaires, juin 2012, nous démontre
donc qu'en 2012 82 % des
commerces étudiés affichent un nom d'entreprise conforme aux dispositions de la
Charte de la langue française au centre-ville
de Montréal; 18 % d'entre eux ne respectent donc pas la charte. En 2010,
ces taux étaient respectivement de 77 %
et 23 %. En 2012, toujours dans le centre-ville de Montréal, ce sont
principalement dans les centres commerciaux que l'on retrouve le plus de commerces fautifs puisque 27 % d'entre
eux ne respectent pas la loi, contre 15 % dans les commerces sur
rue.
Pour
l'ensemble de l'île de Montréal, en 2010, 72 % des commerces étaient
totalement conformes à la charte. En d'autres
termes, leur message, nom d'entreprise et autres messages respectaient la loi;
28 % ne la respectaient donc pas. En
2010, l'accueil se fait en français seulement dans 84 % des commerces de
l'île de Montréal. Pour ce qui est du centre-ville
de Montréal, ce taux est passé de 89 % en 2010, à 74 % en 2012, soit
un recul de 15 % en deux ans. C'est l'accueil bilingue français et anglais, qui n'est pas interdit par la
charte, qui a connu la plus forte augmentation, passant de 1 % à
13 % en deux ans.
Des mesures
efficaces pour améliorer la situation linguistique au Québec, Mme la
Présidente, il faut en prendre. Et
c'est pourquoi le gouvernement sortant, le gouvernement du PQ, a agi en
déposant le projet de loi n° 14, projet de loi modifiant la Charte de la langue française, la
Charte des droits et libertés de la personne et d'autres dispositions
législatives, donc, déposé, donc, le 5 décembre 2012.
Suite à une
vaste consultation générale en commission parlementaire, ce projet de loi
prévoyait des propositions notamment à l'effet : de renforcer le
français comme langue de travail en assujettissant notamment les entreprises de
26 à 49 employés à la charte selon une formule allégée compte tenu de leur
taille; d'intégrer les droits de vivre et de travailler
en français dans la charte québécoise des droits et libertés de la personne,
ainsi que le droit pour les nouveaux arrivants de recevoir des services
de francisation; de permettre le retrait du statut bilingue d'une municipalité
si cette municipalité compte moins de
50 % d'anglophones et qu'un comité intégrant des partenaires municipaux le
juge approprié; d'accroître la qualité du français dans les cégeps
anglophones sur une base obligatoire et de l'anglais dans les cégeps
francophones sur une base optionnelle; de permettre aux cégeps anglophones
d'accorder la priorité aux ayants droit anglophones,
permettant ainsi de mettre fin à la croissance du réseau collégial anglophone
sans priver, sans priver les diplômés
anglophones de l'accès à leurs cégeps; d'abolir la clause permettant aux
enfants de militaires québécois ainsi que leur fratrie et leur
descendance d'avoir accès à l'école anglaise.
Par ailleurs, la Stratégie commune
d'intervention pour Montréal 2008‑2013 dont parlait la ministre est une initiative commune du secteur public et du secteur
privé qui vise à consolider la place du français dans les petites entreprises
montréalaises employant moins de
50 personnes après un constat sur la détérioration... sur l'utilisation du
français à Montréal dans les commerces
du centre-ville. Après cinq ans d'activité, la stratégie commune a permis de
faire des gains en francisation même
si la situation est encore préoccupante. C'est pourquoi le gouvernement du
Parti québécois a continué à agir
dans ce domaine, la ministre l'a rappelé. À la suite du bilan effectué en juin
2013, la ministre d'alors responsable de l'application de la Charte de
la langue française a décidé de prolonger la stratégie jusqu'en octobre 2015.
Mes premières questions : Quel est le plan
d'action de la ministre pour Montréal? Qu'est-il prévu quant au renouvellement de la Stratégie commune
d'intervention pour Montréal au-delà de 2015? Je lui tends une perche, je sais
qu'elle y travaille. Le projet de loi
n° 14 prévoyait plusieurs dispositions pour favoriser le renforcement du
français, à Montréal notamment, en
matière de langue de travail, en matière de langue d'affichage, en matière de
langue du commerce et des affaires,
en matière de droits linguistiques fondamentaux. J'aimerais savoir, Mme la
Présidente, ce que compte faire la ministre dans chacun de ces domaines.
Voilà mes trois premières questions.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Je fais juste remarquer que vous
avez pris 10 minutes de votre temps pour la question. Alors, Mme la
ministre?
• (11 heures) •
Mme David
(Outremont) : Oui, effectivement, je pense qu'on pourrait prolonger
certainement jusqu'à la fin de
l'étude des crédits pour répondre à l'ensemble des chiffres dans lesquels
évidemment on peut tellement, tellement noyer toutes sortes de réalités. Je vais essayer d'organiser ma réponse de
façon très rationnelle, et je vais commencer par le «eux» et le «nous» parce que, là, vraiment, il a touché
un point qui est très sensible pour moi, qui viens du milieu de l'enseignement
supérieur. Quand le député de Bourget parle de leurs cégeps et de nos cégeps,
je suis profondément attristée de cette expression, «ils ont leurs cégeps».
J'étais
responsable des partenariats avec les collèges. J'ai été sous-ministre adjointe
à l'Enseignement supérieur, donc
responsable de tout le réseau collégial. À l'université, j'étais responsable
des partenariats avec les collèges. J'avais beaucoup de liens avec le collège Dawson, et ils étaient évidemment
catastrophés par le projet de loi n° 14. Et je vais vous expliquer pourquoi. C'est très, très simple.
D'abord, on entre à Dawson... Je ne sais pas si mon collègue de Bourget est
déjà entré dans ce collège, ça a énormément changé depuis plusieurs
années. Et autant... Je citais tout à
l'heure la réalité des allophones, plus de la moitié, alors qu'on était
à 15 % en 1981, on est à
53 % en 2010, et il n'y a aucune raison de penser que ça a diminué depuis ce temps-là. Autant les allophones
fréquentent autant le cégep anglophone que francophone, je dirais, autant il y a une présence
effectivement d'employés... et je tiens à le dire au député de Bourget,
d'employés qui parlent français au cégep Dawson, il y a des étudiants,
il y a des employés.
Pourquoi je
prends le cégep Dawson? C'est simple, c'est le plus gros cégep de la province.
Et c'est un magnifique cégep qui a
des programmes extraordinaires, comme beaucoup, beaucoup de cégeps. Et, je
dirais, tous les cégeps, le réseau de
l'enseignement collégial, on a vraiment... Je suis très sensible à ce qu'il a
dit quand il a dit «c'est leurs cégeps» parce que... Pourquoi ils étaient catastrophés? Parce qu'ils allaient perdre
de facto, avec le projet de loi n° 14, cet environnement francophone dont ils sont si fiers. «Environnement
francophone», ça veut dire entendre du français dans la cafétéria, dans les corridors, chez les employés. Le directeur
général, on l'aura remarqué, est un francophone pure laine lui-même, qui
dirige un cégep anglophone. Je ne crois pas que c'était le cas en 1969, ou
1972, ou 1974.
Pourquoi ils
étaient catastrophés? Je vais vous donner un exemple bien précis. Il y a un
programme formidable, les cégeps
développent des programmes... Je répète, nous sommes en enseignement supérieur,
et les critères d'admission doivent
être la qualité des dossiers. Il n'y a pas tellement d'endroits sur la planète
où les critères d'admission sont des critères
de langue; ce sont des critères de qualité en enseignement supérieur. Alors,
les critères de qualité en enseignement supérieur, c'est évidemment de pouvoir parler la langue d'enseignement
ou la comprendre pour ne pas éventuellement couler ton cours, c'est évident. Mais, de là à interdire, sur la base de
la langue, à des francophones de fréquenter cet exemple que je veux donner, d'un cours en cinéma où il y
avait pas loin de 500 demandes, et le projet de loi n° 14 faisait en sorte
que, comme ils n'en acceptent que 60
et qu'ils devaient obligatoirement prioriser les étudiants de langue anglaise
ou qui avaient fréquenté le réseau
anglais, ça donnait donc un programme, c'est évident, qu'il y aurait eu des
anglophones uniquement dans le
programme, puisqu'il y avait beaucoup, beaucoup plus de demande que d'offre de
classes disponibles... Et pourquoi ils
étaient extrêmement tristes? C'est qu'on perdait évidemment le visage
multilingue, le visage francophone dans un cégep qui offre un très, très bon programme. Et moi, je trouvais ça absolument
désolant parce qu'en enseignement supérieur, s'il y a quelque chose qui doit être absolument
prioritaire, et c'est partout comme ça sur la planète, c'est la qualité des programmes et l'admission sur la base de la
qualité des dossiers académiques. Donc, évidemment, ce projet-là m'a beaucoup,
beaucoup attristée par rapport à ça.
En ce qui a
trait maintenant à la question de l'anglicisation ou qu'est-ce qu'on va faire
avec la stratégie commune de Montréal, je dois dire que cette stratégie
a beaucoup, beaucoup de partenaires, et ce n'est pas seulement avec les chambres de commerce, c'est aussi, je le dirais et
j'insiste, avec les syndicats. Les trois syndicats sont très impliqués dans
la stratégie de Montréal, et ils sont très
importants. La participation des syndicats, c'est la participation
effectivement des gens qui sont au plus près souvent de ceux qui
travaillent dans les petites entreprises, puisqu'on parle de la stratégie commune, 50 et moins employés. Alors, il y a
énormément, énormément de partenaires, oui, des chambres de commerce, mais Société de développement du boulevard
Saint-Laurent, Société de développement commercial, les gens évidemment des différents syndicats,
confédérations, CSN, commissions scolaires, etc. Donc, tous ces partenaires ont
signé depuis 2008. Et j'ai annoncé
tout à l'heure que nous allions faire une rencontre importante à l'automne pour
justement regarder comment, à la lumière des cinq dernières années, il y
a eu suffisamment d'avancement ou pas suffisamment.
Et je vais
donc revenir sur un aspect qui sera touché fort probablement en priorité, vous
le dites. Vous avez parlé de
l'anglicisation, de l'accueil, par exemple sur la rue Sainte-Catherine. C'est
intéressant, cette question-là, parce que ça va me ramener à l'enseignement supérieur. Peut-être que vous ne voyez
pas encore le lien, mais je vais vous l'expliquer, quel lien il peut y
avoir.
C'est que,
quand on parle de petites entreprises,
dans des commerces de détail, par
exemple, il est évident que ce sont souvent des jeunes employés. On a tous eu
des enfants qui sont passés à vendre qui des chaussures, d'autres des
cafés, d'autres des vêtements. Et il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup de
commerces sur la rue Sainte-Catherine où effectivement ce n'est pas toujours un accueil qui se
fait dans la langue que nous voudrions, c'est-à-dire en français. Et
on pense que c'est extrêmement important de prioriser cette question-là. Très souvent, ces jeunes, qui
sont, donc, engagés, parce que
ce sont des heures fracturées, coupées où on les appelle souvent à la dernière
minute, ce sont des jeunes qui habitent tout près. Or, quelles sont les deux universités
où il y a un bassin de jeunes qui viennent déposer leur
curriculum vitae? Ce sont Concordia et McGill.
Et je pense
qu'il va falloir regarder comment aider, parce que souvent ce sont des
jeunes qui sont des étudiants internationaux.
Et là j'entre dans un autre aspect que j'ai beaucoup, beaucoup travaillé,
la question de l'accueil-intégration des
étudiants internationaux. Et je déplore que le précédent gouvernement ne nous aidait pas beaucoup, dans les universités, à donner les cours gratuits de francisation. Ils
n'étaient pas gratuits, ça coûtait 3 000 $
pour trois crédits de cours. Ce n'est pas exactement ce que
j'appellerais une aide à l'intégration pour des étudiants internationaux de
haut savoir que nous voulons garder au Québec, parce que c'est du très, très
haut savoir.
Donc, ces jeunes-là qui viennent travailler 10
heures, 15 heures, parce que maintenant... Avant, ces jeunes-là n'avaient pas le droit de travailler hors campus.
Ils ont maintenant le droit de travailler hors campus. Mais ils ont
un cours, ils viennent travailler
deux heures, ils retournent à leurs cours. Donc, il faut que ça soit dans un
périmètre géographique très rapproché.
Et donc souvent ce sont des jeunes qui ont besoin de sous, mais qui ne parlent
pas suffisamment le français, et donc il peut y avoir malheureusement,
des fois, des accueils en anglais, et ce que nous déplorons.
Ce à quoi
nous allons réfléchir dans cette stratégie commune, c'est comment essayer,
d'une part, d'aller chercher peut-être
des étudiants qui déjà sont... qui sont capables de parler français et qui
peuvent accueillir en français, et, d'autre
part... Et là on touche, cher collègue, une question beaucoup plus large, qui
est la question de l'accueil-intégration et soutien
des étudiants internationaux. Parce
qu'il faut être conscient que nous
aurons un immense besoin de ces étudiants de haut savoir. Et, si on leur donne des cours de français, s'ils
peuvent travailler hors campus, donc gagner leur vie, et qu'en plus on leur dit : Écoutez, il va y
avoir des cours de français très accessibles, et le ministère
de... le MIDI, qu'on appelle maintenant,
offre ces cours-là pour les étudiants internationaux, mais encore faut-il qu'ils soient accessibles et
dans leur périmètre géographique. Non
seulement ils apprennent le français, deuxièmement, ils s'intègrent en
travaillant, ils gagnent leur vie. Et
peut-être que, quand on leur offrira un emploi à l'université, dans un
laboratoire de biochimie, dans une haute technologie numérique, dans les
jeux vidéo, etc. nous aurons donc quelqu'un de très haut niveau, doctorat,
postdoctorat. Vous savez qu'il y a des milliers d'étudiants en postdoctorat
dans la région de Montréal. C'est ça, de la main-d'oeuvre de haut savoir qu'il
faut accueillir, mais intégrer et franciser.
Alors, soyez
sûr, cher collègue de Bourget, que cette stratégie pour laquelle vous me posez
des questions, stratégie commune, je
dirais, phase III devra absolument se pencher sur cette question... pas
seulement de la rue Sainte-Catherine. J'ai
pris un peu de temps, je m'en excuse, pour expliquer plus précisément la
question des employés à temps partiel, d'où ils viennent, quels sont
leurs besoins de francisation, mais quels seront les résultats bien, bien
au-delà de l'accueil en français dans les
commerces, c'est-à-dire des résultats de garder, maintenir et soutenir les
étudiants internationaux de haut savoir
pour combler les centaines de milliers de postes qui seront à combler pour
avoir un Québec prospère qui répond à toute la demande pour les
compagnies qui sont en demande de ces étudiants de très, très haut niveau.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Merci, Mme la ministre. Il vous reste 4 min 30 s, M. le député
de Bourget.
• (11 h 10) •
M. Kotto :
O.K. Dans la même perspective, lors de la présentation du plan d'immigration
2014, la ministre d'alors, Diane
De Courcy, a annoncé un investissement, pour les trois prochaines années,
de 57 millions de dollars, dont 13,5 millions en financement supplémentaire pour la francisation
des personnes immigrantes. Ce montant permettrait d'accroître et de diversifier les services en francisation offerts
aux personnes immigrantes à l'étranger et au Québec. Il s'agit d'une des
24 mesures du plan d'action Un Québec fort de son immigration qui vise à
maximiser l'apport de l'immigration au développement
économique, culturel et social du Québec.
Or, on nous annonce aujourd'hui des coupes de 3 millions en francisation et de 800 000 $ en intégration. N'y a-t-il pas là
une incohérence en tout respect de la loi instaurée par M. Bourassa?
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Mme la ministre.
Mme David
(Outremont) : Écoutez, je vais un peu me faire la porte-parole de la
ministre du MIDI, du ministère de
l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, parce qu'effectivement il y a
eu 3 millions... 8,7 % du budget, dont 3 millions au chapitre de la francisation et de l'intégration ou
2,7 % des sommes qui y sont consacrées. C'était très clair, la ministre l'a d'ailleurs dit en Chambre... C'était,
si je me souviens bien, M. le député de Bourget, je pense, la toute, toute,
toute dernière question qui a été posée
avant que nous... le dernier jour des périodes de questions. Et elle a répondu
qu'il n'y aurait aucun impact sur les
services parce que — pourquoi? — la demande est plus faible parce que
justement il y a un
accueil d'un moins grand nombre de réfugiés du fait que davantage d'immigrants
récents se retrouvent sur le marché du
travail. Elle avait répondu aussi qu'il y a beaucoup plus de francophones,
donc, qui sont dans les nouveaux arrivants, et «francophone» égale le
fait d'avoir moins besoin évidemment de soutien à la francisation.
Ceci dit,
nous répétons que la question de la francisation est une question primordiale.
Le Parti libéral l'a bien dit, non seulement il faut aider à la
francisation — comme
j'en ai parlé tout à l'heure — de toutes les catégories de nouveaux arrivants qui ne parlent pas
nécessairement un excellent français mais qui peuvent être un apport absolument
inouï au Québec de demain... Et là je parle
de Chinois, dont parlait mon collègue, ou de Sud-Américains, ou d'Indiens, ou
de Pakistanais, ou de gens de partout dans
le monde et qui, je les ai vus beaucoup à l'université, nous demandaient des
cours de français, et c'était nous qui
avions la, des fois, difficile réalité de ne pas être capables de les soutenir
financièrement.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, Mme la ministre. Alors, on
va passer du côté ministériel. Et je cède la parole au député de
D'Arcy-McGee.
M.
Birnbaum : Merci, Mme la Présidente. Chers collègues du côté
ministériel, collègues de l'opposition, Mme la ministre, dont j'ai eu le plaisir de collaborer durant la campagne en
étant membre tous les deux du trio éducation de notre formation. Je suis très convaincu que notre
premier ministre l'a bien choisie, et on a une ministre qui va illustrer la...
qui va avoir la détermination, la
passion, l'expertise ainsi que la sagesse de faire rayonner notre langue commune
à travers le Québec et le monde et de le faire dans un esprit d'harmonie
et de collaboration.
D'assurer
l'avenir de la langue française est l'affaire de nous tous, une réalité dont je
suis particulièrement sensible. Pour
avoir oeuvré pour plus que 30 ans au sein des regroupements des communautés
minoritaires, j'ai eu très fréquemment à réconcilier les objectifs de la
Charte de la langue française avec les préoccupations, l'histoire et les
capacités de ces communautés.
Lorsqu'il
écrivait sur la question de la langue, Gérald LeBlanc, ancien chroniqueur de La
Presse, entre autres, parlait, durant les années 80, du triumvirat
maléfique de la communauté anglophone du Québec, dont les complices qu'il
identifiait étaient l'ancienne Commission des écoles protestantes du Grand
Montréal, le journal The Gazette et Alliance
Québec. Bon, votre humble serviteur de D'Arcy-McGee s'adresse à vous en étant
le seul et unique homme au monde qui
a oeuvré au sein de chacun de ces trois organismes. Pire encore, je suis
l'ancien directeur général de l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec, donc peut-être un
quatrième axe du mal que M. LeBlanc aurait ciblé.
Mais, là où
M. LeBlanc voyait des complots, il me semble — et j'ai
dédié ma vie professionnelle à cette profonde conviction — que, non, il n'y en avait pas, de complot,
il n'y en a pas, il n'y en avait pas. Et il y en a... de plus en plus
maintenant, il y en a des alliés, des partenaires qui se joindraient au défi de
faire rayonner et renforcer notre langue française
au Québec. Je vois cette volonté chaque jour et je suis fier de constater que
la ministre, le premier ministre et notre
gouvernement vont l'exploiter au profit du Québec. Vous me permettrez de ne
citer que trois exemples de cette volonté qui m'ont touché particulièrement.
En tant que directeur général du Congrès juif canadien, région du Québec — j'espère, pas un cinquième axe du mal — j'ai
appris de la belle contribution à notre patrimoine collectif de M. Sam
Steinberg, qui a fondé la chaîne d'épiceries
bien connue. C'était un des seuls entrepreneurs non francophones avant la
Révolution tranquille qui a embauché avec
grande fierté les gérants et les comptables québécois francophones, de plus,
dans un temps où beaucoup de commerçants
à l'alimentation, francophones entre
autres, se prévalaient des grossistes
hors Québec pour acheter leurs légumes à prix escompté, dans le temps, M. Steinberg insistait qu'il
fallait acheter chez nous de nos propres agriculteurs.
Durant mon séjour de quelque 10 ans à Alliance
Québec, dans un temps où on pouvait être fier de l'être, oui, nous étions vigilants et déterminés à protéger les
droits des anglophones à Montréal et en région, partout au Québec.
Parmi les revendications se trouvait toujours la demande de l'appui et
de l'accompagnement pour bonifier et reconnaître l'apprentissage du français
langue seconde.
Mme la Présidente, plus récemment, j'ai été bien placé pour témoigner du grand progrès
qui se fait à ce sujet de la maîtrise
du français par les non-francophones. À la fin de chacune de
mes 10 années scolaires que j'ai vues comme directeur général de l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec, je me réjouissais de
constater le nombre croissant
d'élèves anglophones au secondaire IV qui affichaient des notes de réussite à
l'examen ministériel du français langue maternelle qui
dépassaient souvent la moyenne de leurs pairs francophones.
Mme la Présidente, je m'excuse peut-être de ce
préambule prolongé, mais je me le permettais parce que je trouve ça important. Là où le gouvernement qui nous a précédés avait tendance... — et, je m'excuse, avec tout respect, je vois que ça se poursuit aujourd'hui — tendance
à chercher des adversaires, à privilégier des stratégies coercitives, à
encadrer la défense de notre langue commune de façon
quasi militaire, j'ai la profonde conviction, Mme la Présidente, que la ministre
va aborder ces questions d'importance capitale avec une approche plutôt
positive et inclusive. À juste titre, je sais que notre gouvernement va renforcer les efforts des entreprises
dans la poursuite de la francisation, dont j'aimerais en aborder un
petit peu.
On va se
rappeler que la Charte de la langue
française vise à faire du français
langue officielle du Québec la langue de l'administration et de la loi ainsi que la langue normale et
habituelle du travail, de l'enseignement, des communications, du
commerce et des affaires. Pour permettre la réalisation de cet objectif,
l'OQLF ne s'en tient pas à une approche coercitive, comme on a dit. Au contraire, son personnel
travaille de concert avec les entreprises établies au Québec pour les amener
à faire des choix qui favorisent la généralisation du français dans l'espace
public québécois.
De nombreuses entreprises ont en cette matière
une attitude exemplaire qu'il faut souligner. En effet, bon nombre de celles qui s'établissent au Québec
tiennent compte de la spécificité de la société québécoise
et, avant de faire des affaires au Québec,
elles se renseignent sur les lois et règlements en
vigueur afin de s'y conformer et,
désireuses de répondre
aux besoins de leur clientèle francophone de façon exemplaire, elles
vont au-delà de ce qui est exigé par la loi. Donc, tout ça qui m'amène, Mme la Présidente, à inviter la ministre de nous parler de bonnes actions de quelques-unes de ces entreprises
exemplaires.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Merci, M. le député. Mme la ministre.
• (11 h 20) •
Mme David
(Outremont) : Alors,
quelques réactions à ce qu'il dit, l'axe du mal et le long préambule. D'abord, je
voudrais féliciter le député de D'Arcy-McGee non
seulement d'être intégré à la communauté
québécoise... Et je le sais, qu'il l'est parce qu'il...
Vous savez, le dernier endroit où je l'ai vu publiquement, c'était à La
symphonie rapaillée, avec l'orchestre
symphonique, poème de Gaston Miron. Alors, le député de D'Arcy-McGee était là,
sûrement avec son épouse, qui est
Québécoise francophone de souche, pure laine, dont leur fille fréquente le
cégep Saint-Laurent, a fréquenté avec, d'ailleurs,
mon fils, je dois dire. Et donc ça s'appelle de l'intégration, ça, complète à
la réalité francophone-anglophone.
Parce que je ne suis pas sûre que, Gaston Miron, nous aurions pu imaginer qu'un
député de D'Arcy-McGee qui a eu probablement un vote à 95 %, je crois, libéral et de gens de langue maternelle beaucoup plus
anglophone que francophone se retrouverait, donc, parmi cette foule et
ce concert absolument extraordinaire.
Je voudrais
apporter une autre précision sur cette question de l'anglais-français pour
rassurer mon collègue de Bourget que,
lors du budget présenté par le ministre des Finances, sur 10 308 mots
prononcés pendant ce budget, il n'y en a eu que 293 en français, ce qui constitue un pourcentage de 2,8 % de
mots prononcés en français. On ne peut pas exactement parler d'un discours bilingue 50-50, nous sommes à
moins de 3 % de mots prononcés en anglais. Je suis bien contente d'avoir eu la confirmation de notre affirmation à
tous que c'était loin d'être un discours bilingue, quand on est à 2,8 % de
mots prononcés en anglais.
Maintenant, toujours dans cette idée d'efforts
de rapprochement et de réelle volonté de grandes entreprises à vouloir être exemplaires, écoutez, je vais citer
deux exemples... trois exemples quand même, je suis sûre, d'entreprises que probablement l'immense majorité d'entre nous,
en avant, en arrière, avez fréquentées et qui sont exemplaires par rapport
à leur volonté d'afficher une image francophone, la première étant le magasin
Target, qui, bien avant son ouverture, l'ouverture
de ses premiers magasins donc au Québec, Target a pris le temps de se
renseigner et de rencontrer les représentants
de l'Office québécois de la langue française pour bien cerner leurs obligations
liées à l'application de la charte.
Et Target a pris des décisions dans le plus grand respect de la charte, par
exemple, en adoptant rapidement, avant même
l'ouverture, le slogan français Trouvez mieux. Payez moins. qui
accompagne la bannière dans les communications commerciales. Donc, on a
ce slogan sur l'enseigne extérieure de tous les établissements.
Et, un an et
demi avant l'ouverture des premiers magasins, l'entreprise n'a pas hésité — et, je l'ai dit, ça se passe beaucoup à travers le numérique, cette question de
la francisation — ils ont
mis en ligne une version française du site Web. Et on sait que ça coûte cher, on sait que ça demande des efforts. Et ça
avait été fait un an et demi avant l'ouverture. En plus, sur Facebook et Twitter, il
n'y a aucune hésitation à s'adresser en français à la clientèle québécoise. Ils
ont donc consacré beaucoup d'argent, beaucoup d'efforts à la traduction
des outils de communication et à l'élaboration d'une terminologie française propre à la réalité de cette entreprise. Et, je
rajouterais, dans chacun des 25 magasins de la chaîne au Québec, il y a un employé, une personne qui est
responsable des questions et des écarts linguistiques. C'est quand même
assez remarquable.
Il y a les Café
Starbucks. Je suis convaincue que chacun ici a peut-être déjà été s'acheter un
café dans cette chaîne mondialement
connue. Elle est présente dans 61 pays et territoires. Et elle a tenu compte
des lois et règlements linguistiques, quand
elle s'est établie au Québec, en modifiant le nom de ses cafés, qui, au départ,
portaient le nom Starbucks Coffee, et c'est
devenu rapidement... Ils ont ajouté le générique Café Starbucks Coffee pour
finalement dire : Après tout, pourquoi pas... Café Starbucks, en novembre 2013, est devenu l'appellation
officielle. Donc, c'est un exemple qui a l'air banal, mais qui est énorme quand on pense que ce n'est
pas nécessairement le cas en France ou ce n'est pas le cas dans les grands
pays de la francophonie. Ça montre que nous
avons une spécificité, nous avons une vigilance et nous avons un réel intérêt,
senti par ces compagnies, donc, de s'afficher dans un français dont nous sommes
si fiers.
Et l'autre
exemple formidable que vous fréquentez tous au mois d'août, ça s'appelle Bureau
en Gros, quand les enfants retournent
à l'école, et qui s'appelait Staples. Et, quand elle s'est établie au Québec,
tout de suite elle a modifié la
raison sociale, c'est devenu Bureau en Gros, et, à partir de ça, toute une
série de réalisations qui ont démontré la très ferme volonté de servir
adéquatement la clientèle.
Et un exemple
que je trouve très intéressant, qui, je pense, est une nouvelle mode au Québec...
enfin, une nouvelle journée un peu
particulière qui s'appelle partout sur la planète le «Black Friday»— les Français diraient peut-être : Le
blaque frèdi. Et Bureau en Gros a demandé,
de son propre chef, à l'Office québécois de la langue française : Comment
pourrions-nous franciser cette
expression-là? Et ils ont donc travaillé pour appeler ça Vendredi fou, en ce
qui concerne, donc, Bureau en Gros,
et ça a été même intégré au grand dictionnaire terminologique, donc, le
Vendredi fou. Et il y a eu beaucoup,
beaucoup d'adeptes, donc plusieurs commerces québécois ont utilisé, donc, une
francisation de cette expression. Et
ça, c'est à l'honneur du Québec, qui est probablement la province qui demande
le plus au monde de brevets de francisation d'expressions.
Donc, quand je dis que nous avons un rôle
mondial à jouer dans la protection... Et nous sommes absolument exemplaires. Je sais que mes collègues vont
peut-être trouver qu'on ne fait pas assez, qu'on ne fait pas assez rapidement,
qu'on n'est pas assez vigilants. Moi, je
pense qu'au contraire c'est tout à l'honneur du Québec sur la scène mondiale de
la francophonie. À preuve de ça,
c'est l'OQLF qui est demandé, dans des forums internationaux, d'envoyer des
experts du Québec parce qu'ils sont
reconnus mondialement. M. Vézina pourra en dire quelques mots si l'occasion se
présente. Mais pour montrer à quel
point nous avons une terminologie qui est extraordinairement développée, nous
avons des experts en linguistique. Et, qu'un petit mot mondialement connu qui s'appelle le
«Black Friday», qu'on le traduise par Vendredi fou au Québec, bien ça va faire école, un peu comme je
parlais des MOOCs, tout à l'heure, des «Massive Open Online Courses».
Et
il y a eu évidemment la Francofête, qui, chaque année, au mois de mars... dont
j'étais moi-même responsable dans mon univers universitaire, où justement
il y a des soirées de mérite et de Prix Francopub. Et il y a vraiment eu beaucoup, beaucoup, donc, de compagnies qui ont eu
des prix, dont Bureau en Gros, Ivanhoé Cambridge, Target Canada, Banque Nationale du Canada, KebekAmuse, Service de
la culture de la Ville de Québec, Maestria Management. Ce sont des
entreprises qui ont fait des efforts très, très, très particuliers.
Et
je finirai avec quelqu'un qui est absolument remarquable et qui est notre
fierté nationale, je dirais, 2013‑2014, c'est notre nouveau écrivain entré à l'Académie française, qui est Dany
Laferrière. Et est-ce qu'on peut avoir un meilleur exemple d'intégration de quelqu'un qui n'est pas
né au Québec, mais qui a fait sa vie au Québec depuis 30 ans et qui écrit
dans un français tellement, tellement remarquable? C'est quelqu'un que nous
avons accueilli au Québec, qui se sent complètement
Québécois, qui évidemment vient aussi d'Haïti, qui a écrit des livres comme L'énigme
du retour, qui est absolument
fascinant pour cette question d'intégration. Donc, quel honneur pour nous — et, comme ministre de la Culture, je le répète — d'avoir cet exemple-là non seulement de
compagnies, mais aussi d'individus qui font leur marque. Écoutez, à l'Académie française, ce n'est pas rien, alors,
quand on sait à côté de quels immenses auteurs francophones il siège. On
devrait vraiment lui en faire une fête nationale tellement on est fiers de lui.
Alors, voici les exemples que je voulais apporter et que vous m'avez permis de
donner grâce à votre question.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : M. le député de D'Arcy-McGee, il
vous reste trois minutes, si vous voulez... Une petite question?
M. Birnbaum :
Est-ce que je peux?
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Oui, une petite question. Allez-y, oui.
M. Birnbaum :
Merci, Mme la Présidente. Oui... complémentaire. Merci, Mme la ministre, pour
la réponse. Dans chacune de mes fonctions
antérieures, j'avais — vous ne serez pas contente avec moi, je n'ai pas le terme,
là — sur
mon «speed dial», l'Office québécois de la
langue française, surtout pour cet appui sur le lexique, comment faire, et tout
ça. Et il me semble de mise de parler d'un
esprit d'équipe, si on veut, vraiment à faire... à exploiter cette volonté de
participer dans la francisation du Québec plutôt que d'ordonner.
Je
comprends très bien la place et je respecte beaucoup la place... de légiférer
quand il faut et pour encadrer nos efforts, mais il me semble que, Mme la
Présidente, si on venait ici, avec notre langue maternelle... le goût
d'apprendre le français ou, dans la
plupart des cas, une majorité de cas maintenant, la capacité au moins de
s'exprimer en français, perfectionner
notre français, on veut compter... on veut apprendre surtout que notre gouvernement et toutes ses instances sont là pour nous
appuyer. Ce qui m'emmène tout
simplement à demander à la ministre
ou peut-être à M. Vézina de nous dire si l'orientation très claire qui est propagée au sein de toute
l'équipe de l'office, c'est d'être là, de faire une offre active, de
publiciser le rôle de l'office comme accompagnateur aux entreprises.
• (11 h 30) •
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Mme la ministre, dans une minute et demie.
Mme
David (Outremont) : Écoutez,
je veux prendre cette minute et demie d'abord pour féliciter les travaux... depuis quelques mois, l'arrivée du président, qui travaille
d'arrache-pied à modifier la gouvernance de l'office. Il ne l'a pas dit, mais je tiens à le mentionner, la création
d'un poste de commissaire aux plaintes ou... C'est comme ça qu'on
l'appelle, je crois?
M. Vézina
(Robert) : ...à la qualité des services.
Mme David
(Outremont) : Qualité des services, excusez, hein, la qualité des
services, mais la présence de quelqu'un qui peut recevoir justement toute forme de commentaire et de plainte, et c'est très important. La gouvernance est revue entièrement. Et je
pense que les gens doivent travailler
effectivement beaucoup en équipe, comme vous le dites, et avec la fierté de protéger cette langue française
et cette harmonie que l'on
recherche — je pense
que l'office partage tout à fait ces
objectifs-là — et pas
dans l'esprit de tout de suite être dans les mises en demeure, les
contraventions, les poursuites
pénales et criminelles. Je pense que, si on veut continuer à motiver et à
accompagner... Parce que c'est bien beau
dire «motiver tous les nouveaux arrivants», mais encore faut-il aussi les
accompagner, qu'ils puissent suivre ces cours de français, qu'ils puissent être dans un environnement culturel dans
lequel ils se sentent invités, et ça, c'est très important.
Et
je reviens à «eux» et «nous». Il n'y a pas de «eux» et de «nous», nous sommes
tous des citoyens du Québec qui avons
à coeur la qualité et la promotion de la langue française. Et, quand Michaëlle
Jean dit que la francophonie, la francophilie
doit aussi être dans un espace économique prospère, ça veut dire aussi qu'on
passe par le numérique. Et le numérique
est extrêmement important parce que tu as beau vouloir parler français, si tu
n'as pas les outils numériques en français, bien tu ne peux pas
nécessairement te faire valoir sur l'ensemble de la planète. Alors, c'est cet
équilibre harmonieux que nous voulons
absolument rechercher, et l'office travaille, l'Office québécois de la langue
française travaille exactement dans ce sens.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, Mme la ministre. Nous allons
passer au prochain bloc. Pour le deuxième groupe de l'opposition
officielle, alors la parole est à vous, Mme la députée d'Iberville.
Mme
Samson : Merci, Mme la Présidente. Alors, comme on est ici pour faire
l'étude des crédits, je vous avouerai qu'il
y a un fond de comptable qui s'anime en moi quand on regarde... quand on parle
de crédit et de débit, là, bon. Alors, j'aimerais qu'on aborde un peu...
Je vais poser une question, mais je voudrais plutôt formuler une demande.
Alors, je vous donne un exemple. On a jeté un
coup d'oeil aux réponses qui ont été apportées aux questions concernant les voyages. J'ai quelques
interrogations et quelques sourcillements. Je peux vous référer aux pages RG 3
à RG 9 du cahier de réponses aux
questions des crédits. Il y a des différences importantes entre les montants
réclamés pour des voyages de même
nature et de durée semblable. Par exemple, pour deux voyages à Paris d'une
durée d'environ une semaine, il en
coûte 367 $ ou 9 069 $, c'est une différence importante. Est-ce
que je dois comprendre qu'il y a des gens qui ont payé eux-mêmes leur
voyage ou non?
Je vous donne
un autre exemple. À la page RG 3, on constate que deux personnes ont été
déployées pour participer à l'assemblée
générale et à la journée scientifique du Réseau panlatin de terminologie, à
Paris, en octobre dernier. Le voyage a coûté
9 069 $ aux contribuables, entre les 12 et 20 octobre. Or,
l'événement ne durait que deux jours, soit les 16 et 17 octobre.
Je vous donne
un autre exemple. Si vous allez à la page RG 27 des réponses aux questions
des crédits, la liste des contrats
qui ont été octroyés par l'Office de la langue française, on constate un consultant
de la firme CRIA qui a reçu une somme
de 24 500 $ pour seconder le P.D.G. par intérim dans la coordination
et la mise en oeuvre des processus de modernisation.
Or, si on consulte le système d'appel d'offres du gouvernement du Québec, on
voit que le même consultant, pour la
même mission, a reçu 84 000 $ en contrat de gré à gré à l'Office
québécois de la langue française. Ce contrat a été conclu le 15 octobre dernier. Nous en avons des
copies, si c'était nécessaire. Est-ce qu'il s'agit... Lequel des montants
est bon? Est-ce que c'est 24 500 $
ou 84 000 $? Est-ce qu'il y a eu plus d'un mandat? Comment ça s'est
fait? On aimerait comprendre un peu davantage.
Le Président (M. Kotto) : Mme
la ministre... Non?
Mme Samson : Est-ce que je peux
terminer ma question, M. le Président?
Le Président (M. Kotto) :
Allez-y. Je pensais que vous aviez terminé.
Mme Samson : En terminant. En
terminant. Il y a une question qui a été posée sur le nombre de consultants externes intégrés ou oeuvrant au sein du
ministère, et la réponse qu'on nous a donnée était que l'information demandée
n'est pas pertinente à l'exercice de l'étude
des crédits. Vous me permettrez d'être en désaccord. Et on remarque souvent
qu'il y a des frais de déplacement, entre
autres, ceux d'une firme qui s'appelle Didactica qui a accompagné nos
fonctionnaires à la réunion du réseau
OPALE, à Bruxelles, en Belgique. Or, ces frais de déplacement là et de séjour
n'apparaissent pas dans les dépenses liées aux voyages, en page
RG 3. Alors, est-ce qu'on peut nous éclaircir un peu les montants? Et, deuxièmement, est-ce que pour des fins d'analyse,
puisque nous referons cet exercice l'an prochain, n'y aurait-il pas lieu
de présenter les dépenses encourues par les activités de l'office de façon plus
claire et plus transparente?
Le Président (M. Kotto) : Mme
la ministre.
Mme David
(Outremont) : Alors, j'apprécie le... — vous avez dit quoi? — le côté comptable ou le... parce qu'on
est en étude des crédits, hein? Alors,
évidemment que probablement que mon collègue de l'office pourrait apporter un
certain nombre de précisions très, très,
très concrètes. Je vous remercie de votre vigilance. Nous serons dans la
transparence. Je vous rappelle
évidemment que nous défendons les crédits d'un précédent gouvernement. Alors,
peut-être que des fois on pourrait
poser la question du côté de votre droite que du côté de votre gauche. Mais
nous allons, en toute transparence et
vigilance, essayer d'apporter le plus de détails possible. Et soyez sûre d'une
chose, c'est qu'effectivement nous surveillerons
attentivement, dans la prochaine année, avec le nouveau président de l'office,
tout ce qui concerne les dépenses de
ce genre-là, et les contrats, et les... Mais je pense qu'il y a un certain
nombre de réponses qui vont vous être données, je m'empresse donc de
donner la parole à mon collègue.
M. Vézina (Robert) : Alors, Mme la
Présidente, oui, en effet, les frais de déplacement pour les voyages hors
Québec, à l'occasion, sont défrayés par... sont remboursés par le ministère des
Relations internationales. Comme par exemple
la mission du 25 octobre au 2 novembre 2013, qui a finalement
coûté 367 $ à l'office, là, a été en grande partie payée par le ministère des Relations
internationales, alors que l'autre mission à Paris de deux personnes de
l'office, c'est l'office qui a
complètement assumé l'ensemble des dépenses. Donc, ça fait... ça explique la
différence entre les montants des
différentes missions. Il faut s'entendre aussi que, lorsque, mettons, il y a
des rencontres sur deux jours à Paris, bien les personnes n'arrivent pas la journée même, ils peuvent arriver la veille,
ils peuvent repartir le lendemain de la rencontre, et des fois les voyages sont plus ou moins longs
selon les avions, là, qu'on a réussi à réserver. Donc, c'est assez standard,
on est très rigoureux là-dessus à l'office.
Pour ce qui
est de la question du consultant, alors c'est une demande qui avait été faite
par le ministère du Conseil exécutif,
l'an dernier, qu'il y ait une personne pour soutenir le P.D.G. de l'époque, là,
dans ses fonctions, là, de P.D.G. par intérim
de l'Office québécois de la langue française. Donc, il y a eu deux mandats,
donc ça a occasionné deux contrats effectivement.
Et, pour ce
qui est de Didactica, en fait, ça, c'est une dépense du Conseil supérieur de la
langue française, là, c'est dans le
cadre d'une participation de l'ensemble des organismes linguistiques au réseau
OPALE. C'est une rencontre annuelle qui,
cette année-là, se déroulait en... c'était à Bruxelles, donc, en Belgique,
mais, en 2012, c'était à Montréal, donc il y a toujours une... ça alterne, là, le pays hôte
change d'une année à l'autre. Et c'était pour pouvoir participer à un colloque
où l'expertise québécoise était demandée pour parler d'un certain sujet pour
lequel il n'y avait aucun employé, ni du conseil,
ni de l'office, qui pouvait participer. Donc, cette personne-là, qui est une
professeure de l'Université Laval qui est
enregistrée sous le nom de Didactica, là, a participé, là... elle a reçu un
contrat de services de la part du Conseil supérieur, et c'est elle qui est allée faire cette
présentation-là pour justement mettre en valeur l'expertise québécoise en
matière de didactique du français.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Merci, M. Vézina.
Mme
Samson : Alors, vous comprendrez qu'on peut sourciller alors que les
frais, en particulier de Didactica, n'apparaissent pas dans les frais de
voyage. Il faut...
M. Vézina
(Robert) : ...c'est elle qui a assumé... avec le montant qu'elle a
reçu, c'est elle qui s'est occupée de s'occuper de son voyage et de
payer son déplacement.
• (11 h 40) •
Mme
Samson : Son déplacement. D'accord. Je vous avouerai toutefois que je
comprends qu'un colloque qui dure deux
jours à Bruxelles on peut vouloir arriver une journée et demie avant, question
d'assumer le décalage, et tout ça, mais là c'est quand même une semaine
de déplacement pour deux jours de colloque, là, je...
M. Vézina
(Robert) : ...en général, lorsque... Là, on parle d'un autre colloque.
Celui à Paris, là, en général, là, on
en profite pour aller rencontrer nos partenaires de la Délégation générale à la
langue française et aux langues de France avec laquelle l'office entretient, là, plusieurs relations de
coopération pour des projets précis. Donc, on fait toujours d'une pierre
deux coups. On ne va pas uniquement à Paris pour participer à un colloque, par
exemple.
Mme Samson : O.K.
Mme David (Outremont) : Je voudrais...
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Allez-y, Mme la ministre.
Mme David
(Outremont) : Excusez. De
fois, je lève la main comme à l'école. Et je voudrais juste ajouter comme
précision, parce que l'office est modeste
dans ses réalisations et dans son impact, j'oserais dire, mondial, mais M.
Vézina pourra apporter plus de commentaires, lors de ce réseau palantin, je crois — mais je ne veux pas me tromper — où
il y a eu une demande d'un
expert...
Une voix : Panlatin.
Mme David
(Outremont) : ... — panlatin,
plutôt que palantin, panlatin, latin probablement, voulant dire la langue romane — donc,
où il y a eu une demande pour aller aider le Burundi.
Alors, vous pouvez peut-être apporter quelques détails. Mais ça montre
l'importance... Parce que, quand on dit que la Francophonie mondiale est
fragile, ce n'est pas seulement au Québec qu'il faut être vigilant. Vous savez que le
Rwanda est passé maintenant à la langue officielle anglaise. Rwanda,
Burundi, c'est vraiment un à côté de l'autre. Et, si tous ces pays qui sont majoritairement
francophones décident d'utiliser l'anglais,
nous avons un problème mondial de permanence et de... Alors, quand on dit que
le français est fragile et que
l'avenir du français se joue beaucoup en termes de nombre, en tout cas, et de
démographie en Afrique, il faut donc
multiplier les liens avec nos partenaires africains. Et, en ce sens, que l'OQLF
soit demandé pour envoyer un expert
là-bas, c'est tout à l'honneur du Québec. L'honneur rejaillit sur l'ensemble du
Québec d'avoir de tels experts pour soutenir la Francophonie
internationale.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Merci, Mme la ministre. Mme la députée d'Iberville.
Mme
Samson : Oui. Si vous me le permettez. Je suis d'accord que c'est tout
à l'honneur du Québec d'être appelé à
contribuer que ce soit en Afrique, ou ailleurs, ou à d'autres ateliers ou
instances à travers le monde. Il n'en demeure pas moins que ça n'est pas
fondamentalement le mandat de l'office.
Je vais
maintenant vous poser une question qui concerne à la fois la culture et la
promotion de la langue française, car
ça concerne notre littérature en français, notre littérature québécoise. Notre
langue se perpétue d'abord et avant tout par notre littérature. Le journal Le Canada Français, un journal de
Saint-Jean-sur-Richelieu, publiait, la semaine dernière, un article au sujet de la littérature québécoise
disponible dans nos bibliothèques publiques. L'article faisait état d'une étude
réalisée cette année par Appui-Livres, un organisme sans but lucratif visant à
promouvoir la littérature québécoise.
En consultant
l'étude en question, on se rend compte que le livre québécois compte pour 31 % du volume de livres disponibles dans les bibliothèques publiques du
Québec. Présentement, le gouvernement n'impose aucune contrainte ou objectif précis aux 3 500 bibliothèques
québécoises quant au développement de leurs collections de livres québécois.
Les lecteurs demandent nécessairement
les romans qu'ils connaissent, donc ceux qui bénéficient des grands renforts publicitaires. On le sait tous, les éditeurs
québécois n'ont pas nécessairement les moyens de donner aux auteurs et à leurs
oeuvres la visibilité nécessaire pour susciter la demande populaire. Aussi,
aucun des indicateurs de performance des bibliothèques n'est lié aux fonds de livres
québécois qu'ils rendent disponibles à la population. Mme la Présidente, est-ce
que la ministre serait disposée à considérer donner des objectifs à nos
bibliothèques publiques en termes d'achat de littérature québécoise?
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Mme la ministre.
Mme David
(Outremont) : Alors, pendant que vous posez la question, pour laquelle
je vous remercie vivement de cette
question... Mais je vais vous apporter une petite précision sur le Burundi, si
vous permettez. D'abord, l'expert québécois
n'était pas membre de l'OQLF. Et sa mission était payée par l'Organisation
internationale de la Francophonie. Donc, en plus, non seulement on
rayonnait, mais ce n'est pas payé par nous. Donc, alléluia!
Pour votre
question, pour laquelle je suis ravie de la question parce qu'on pourrait dire
que c'est une vraie question, là, la
question de l'accessibilité aux livres en français dans les bibliothèques, ça
va toucher plusieurs choses en même temps, mais ça touche évidemment la réflexion que mon collègue député de
Sherbrooke va entreprendre par rapport à toute la question du livre, la question donc des librairies
indépendantes agréées, mais ça va aussi poser la question de la présence
forcément dans les bibliothèques. Et il a beau y avoir des accès comme ruedeslibraires.com
ou des accès aux livres numériques, je pense
que, dans les bibliothèques, là où il y a justement du personnel pour suggérer,
pour... On sait le succès, on en a parlé beaucoup la semaine dernière,
de la Grande Bibliothèque. C'est sûr que la BANQ avec ses réseaux de
bibliothèques...
Il faudrait qu'il y ait plus de livres québécois francophones, je suis entièrement d'accord avec vous qu'il y ait plus de livres québécois francophones. Et est-ce que ça ira vers une politique
du livre qui insérera — et
on sera contents de vous entendre, on
a dit qu'on serait ouverts à toutes les suggestions — un
minimum qui serait plus que ce que vous avez justement découvert? Nous
serions... moi, en tout cas, personnellement, et on partagera avec les différentes opinions
qui nous serons émises, on sera
ouverts à toutes propositions. Mais je
pense qu'il devrait y avoir un
minimum obligatoire de livres québécois
francophones. Parce que, vous avez raison, peut-être que le premier
réflexe des gens, c'est : Ah! Je veux le dernier policier pour l'été traduit en français — ou pas traduit, d'ailleurs — qui est très,
très demandé. Évidemment,
on ne peut pas empêcher les gens d'avoir le
goût de lire le dernier John Grisham ou le dernier Michael Connelly, mais
peut-être que, s'ils savaient, et si on en parlait, et si on en faisait une
meilleure promotion...
Et là on
tombe dans mon autre... Évidemment,
vous me voyez venir. Dans la stratégie culturelle numérique, ce que ça veut dire... C'est qu'il faut toujours bien
les connaître, les livres pour avoir le goût de les lire. Donc, ça veut dire en
faire la promotion dans tous les outils
numériques qu'on va développer, qu'ils apparaissent rapidement... je ne sais
pas comment on appelle ça, là, en
termes numériques, là, mais, quand on fait une recherche, que ça soit les
livres en français qui apparaissent.
Ça, ça prend des sous, ça prend une stratégie numérique pour ça. Et votre
question tombe exactement à point dans
les questions qu'on se pose par rapport à l'accessibilité des livres québécois
francophones que ça soit en bibliothèque, que ça soit en numérique, que ça soit en librairie. Et on met quand même
des sous et on aide les bibliothèques à acheter des livres, on met quand
même pas mal d'argent là-dedans, mais on pourrait en profiter effectivement
pour avoir des montants... pas des montants, mais des quotas ou des
pourcentages plus élevés de livres francophones.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Mme la députée d'Iberville.
Mme Samson : Oui. Il me reste
combien de temps, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Ah! 9 minutes.
Mme
Samson : O.K. Alors,
je vais poser ma prochaine question. Elle rejoint un peu une question
que mon collègue de Bourget a posée plus tôt, mais c'est une réelle
préoccupation. En vertu d'un rapport de l'Office québécois de la langue française
publié en mai 2012, sur l'état de langue du commerce et des affaires, la situation
s'est détériorée quant à la langue d'accueil
dans les commerces du centre-ville de Montréal. En 2010, l'accueil se faisait en français
dans 89 % des commerces visités; en 2012, le pourcentage a chuté
à 74 %, ce qui est énorme. C'est très préoccupant. Et, même si Montréal
est une métropole, il n'en demeure pas moins
que les gens devraient être accueillis d'abord en français dans la mesure où
nous vivons au Québec. J'aimerais que la ministre puisse nous entretenir
davantage sur ce qu'elle compte faire pour remédier à la situation et freiner
cette chute.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Mme la ministre.
• (11 h 50) •
Mme
David (Outremont) : Alors, effectivement, heureusement ou
malheureusement... moi, je dirais, heureusement, ça va nous permettre de reparler un peu de cette question-là ensemble.
Écoutez, c'est sûr qu'on est encore dans la question de... dans un certain nombre de questions qui se
rejoignent les unes les autres, c'est la question de la stratégie commune
de Montréal, la question de la francisation, la question d'être accueilli en
français.
On comprend,
et on est d'accord, qu'on est accueilli en français dans l'immense majorité des
commerces de la région... on appelle
ça RMR, la région de recensement de Montréal. Alors, ça, c'est quand même très,
très grand comme région. Qu'il y ait
certains endroits qui soient plus problématiques, où les gens se font
dire : Bonjour! «Hi!» plutôt que... ou «Hi!» plutôt
que : Bonjour, est-ce que je peux vous aider?, il y a une double
responsabilité. Je pense qu'on a une responsabilité comme gouvernement, comme
Office québécois de la langue française, comme stratégie commune de Montréal
pour dire : On accueille en français, point à la ligne. Ce n'est pas très
compliqué d'apprendre à dire bonjour en français; ça, c'est le minimum. Ça donne une
image, ça donne une fierté, ça donne : Oui, O.K., à Montréal, on parle
français.
Une fois
qu'on a dit ça, bien il faut toujours bien pouvoir aller un petit peu plus
loin. Et là on touche à la question de :
Quel est le plan d'action pour les prochains mois, les prochaines années? Et je
pense que la responsabilité qui nous incombe
et que nous devons absolument assumer, c'est la responsabilité du visage
français le plus important de Montréal. Alors, il y a des causes dont on ne parle pas, elles sont en cour
actuellement, qui sont en appel, etc., qui sont très importantes pour le visage
de Montréal, mais il y
a aussi dans la vie quotidienne. Et
la vie quotidienne, comme vous le dites si bien, c'est d'entrer dans des commerces et se faire servir en français.
C'est d'avoir, donc, des employés qui soient capables de parler en français.
Et, des fois, maintenant,
on trouve des employés qui parlent espagnol, qui parlent portugais, qui parlent
créole, qui parlent le mandarin, mais avant tout nous devons pouvoir nous faire
servir en français.
Et, dans
cette optique-là, effectivement, nous allons faire un... nous allons avoir un
souci particulier pour les petits commerces...
nous l'avons à 49 employés et moins, mais les petits commerces dont j'ai
longuement parlé tout à l'heure,
qui ont souvent, très souvent, dans des endroits beaucoup plus, disons,
commerciaux du centre-ville de Montréal, des employés
à temps très, très, très fracturé, partiel. Et ces employés-là viennent
qui d'une université X ou Y où ils étudient dans une langue qui souvent
est une langue déjà seconde pour eux, leur première langue étant souvent une
langue asiatique ou d'Amérique centrale ou du Sud.
Donc, on va
travailler très, très fort. Et cette rencontre de l'automne va
prioriser certainement cette question-là pour
la stratégie — ça passe vite, le temps — déjà, de... 1915! de 2015 et des années à
venir. Et je pense qu'à travers ce qu'on entend, à travers les
différentes études, à travers les préoccupations des deux groupes d'opposition
et les nôtres également... Je reviens à ce que le député de Bourget a dit, il
n'y a pas de question de partisanerie pour ce qui est de privilégier le français. Nous allons donc
travailler très fort dès l'automne à regarder comment vraiment pouvoir résoudre,
améliorer cette situation-là.
Je répéterai,
par contre, qu'il y a quand même une responsabilité, aussi, citoyenne, de dire...
Parce qu'il y a quand même plus de la
moitié des gens, quand on les accueille dans une langue autre que le français
et, pour ne pas la nommer, le plus souvent, c'est l'anglais, mais
peut-être pas que ça, qui vont accepter de passer tout de suite à l'anglais
avec la personne qui les reçoit. Alors, je
pense qu'il y a une responsabilité aussi puis un souci de pouvoir s'exprimer,
avoir un échange dans la langue française.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, Mme la ministre. Il vous
reste 2 min 30 s, Mme la députée d'Iberville.
Mme
Samson : Merci. D'une façon plus philosophique ou stratégique, Mme la
Présidente, le portefeuille de la Charte
de la langue française est passé récemment du ministère de l'Immigration à
celui de la Culture et des Commnications. Est-ce que la ministre peut nous dire quels sont les éléments qui ont
pesé dans la balance pour que le portefeuille de la charte réintègre le
ministère de la Culture et des Communications?
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Mme la ministre.
Mme David
(Outremont) : Question fort, fort intéressante. Écoutez, ce que le...
Écoutez, vous savez comment ça se
fait, un Conseil des ministres. C'est le premier ministre dont c'est l'absolue
prérogative. Et ce qu'il en a dit, c'est... Bon, évidemment, le premier ministre est très, très... il a mis de
l'avant la vision d'un Québec fier, en transition. Sa belle et forte
identité est définie notamment par notre langue commune, notre culture qui
rayonne tant, nos valeurs sociales distinctes,
etc. Et, pour le premier ministre, quand il a pensé à ça, et Dieu sait que
c'est une responsabilité qui lui incombe à lui seul, il a réfléchi en termes — et je l'ai dit dès l'ouverture — de promotion et de protection de la langue
française qui va bien au-delà d'un
exercice de travailler avec l'Immigration... Le ministère de l'Immigration,
Diversité et Inclusion, c'est
évidemment un ministère qui est dédié à un objectif, qui est de bien accueillir
les immigrants, d'en fixer, bon, toutes sortes de paramètres. Et, pour notre gouvernement, ce n'est pas
seulement que cet aspect-là, cet aspect-là est fort important, mais c'est aussi l'aspect de l'identité, de la
culture et que la question de la promotion et de la protection de la langue
française est une question qui concerne tous les citoyens et citoyennes
du Québec, et pas seulement les nouveaux arrivants.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Merci, Mme la ministre. Vous avez quelques secondes.
Mme Samson : Ça va aller.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Ça va aller?
Mme Samson : Je vous remercie, Mme
la Présidente.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Merci. Alors, on va passer du côté gouvernemental. Et je passe la parole au
député de Sainte-Rose.
M.
Habel : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je salue la ministre. Je
salue la banquette gouvernementale, la première opposition, la deuxième
opposition et les gens de la fonction publique.
D'entrée de
jeu, j'aimerais dire que je suis fier de la langue française. Le premier
ministre disait que personne n'a le
monopole des bonnes idées. La ministre de la Réadaptation disait que personne
n'a le monopole de la compassion. Eh bien, je peux vous dire que personne n'a le
monopole de la fierté de la langue française.
Et l'OQLF la défend, mais il convient pour les gens qui nous écoutent de
décrire un peu ce qu'est l'OQLF, soit l'Office québécois de la langue française.
La
Charte de la langue française, adoptée par l'Assemblée nationale du Québec
en 1977 et modifiée le 12 juin 2002, a conféré à l'Office québécois
de la langue française la mission
suivante : «De définir et de conduire la politique québécoise en matière d'officialisation linguistique, de
terminologie ainsi que de francisation de l'Administration et des entreprises;
de veiller à ce que le français soit la
langue habituelle et normale du travail, des communications, du commerce et des
affaires dans l'Administration et les
entreprises; d'aider à définir et à élaborer les programmes de francisation
prévus par la loi et en suivre l'application; de surveiller l'évolution
de la situation linguistique au Québec et d'en faire rapport tous les cinq ans au ministre; d'assurer le respect de la
Charte de la langue française, agissant d'office ou à la suite de la réception
de plaintes; [et] d'établir les programmes
de recherche nécessaires à l'application de la loi pour effectuer ou faire
effectuer les études prévues par ces programmes.»
Mme la Présidente, nous avons tous su et pu assister au fait que l'OQLF a fait les
manchettes depuis quelques mois
concernant ses activités de surveillance et ses réponses aux citoyens, comme le
«pastagate». Le «pastagate» s'inscrit dans
la diversité linguistique, et la diversité linguistique, Mme la Présidente, le député de Bourget doit bien la connaître. Le Cameroun, son pays d'origine, est dans le top
10 mondial au niveau des dialectes. On en recense plus de 200 langages. C'est pourquoi je me demande pourquoi il s'insurge
devant quelques phrases en anglais et en portugais dans un discours
essentiellement francophone, moins de 3 % en anglais.
C'est
ce que je reproche toujours à l'opposition officielle, et l'exemple du discours
en fait foi, c'est de toujours utiliser la langue comme vecteur de leur
chauvinisme, alors qu'il faut avoir l'esprit de la promouvoir, cette langue française. La définition des deux mots diffère, et
j'encourage le député à utiliser le mot «promouvoir». Dans la définition
du Larousse — parce qu'on est dans la Charte de la langue
française — on
décrit le chauvinisme comme «le patriotisme ou un nationalisme exclusif, dénigrant systématiquement tout ce qui est
étranger au profit d'une admiration inconditionnelle pour ce qui est national». Comme je le disais
précédemment, personne n'a le monopole de la fierté de la langue française.
Moi, je vois la langue française avec
l'esprit de la promouvoir. La définition du Larousse décrit très bien
«promouvoir» : «Mettre quelque
chose en avant, préconiser quelque chose en essayant de la faire adopter, en
favoriser le développement.» L'OQLF
en favorise le développement, mais qu'en est-il des services concrets que
l'OQLF déploie pour la population?
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Merci. Mme la ministre.
• (12 heures) •
Mme
David (Outremont) : Alors,
merci beaucoup de cette question-là. Parce que je pense qu'on doit
effectivement mentionner que l'OQLF
est dans une période, le président l'a dit, de réflexion, de transition, de
modernisation, et c'est extrêmement
important parce que c'est l'organisme, comme j'ai dit tout à l'heure, créé en
1961, donc, à l'occasion de la création du ministère des Affaires culturelles,
donc c'est vraiment un organisme qui a une longue vie, qui a été transformé
après pour la Régie de la langue française,
qui avait un aspect aussi plus coercitif de pouvoir vraiment donner des
constats d'infraction et qui est
revenu avec, je dirais, une sorte d'équilibre, toujours délicat effectivement, entre
la protection dans une atmosphère, je dirais, d'accompagnement et la protection
dans une atmosphère un peu chauviniste, comme vous dites, ou paranoïde, qui est une atmosphère que
l'autre n'est pas gentil, pas bon et puis que tout ce qu'il fait, c'est
évidemment à bannir et à proscrire.
Donc, on essaie, je
pense, avec notre gouvernement et notre approche — et l'OQLF en est, de
ça — de
faire vraiment des efforts considérables
pour apporter des formations et des informations aussi, qui sont extraordinaires,
j'en donnerai quelques exemples.
Évidemment que, vous allez dire, ça a l'air des petits détails, mais bien des
gens ne savent pas ce que veut dire
le mot «épicène». Alors, quand on dit ce mot, «en valeur épicène», ça veut dire
que ça inclut le masculin et le
féminin, par exemple. Mais, pour inclure le masculin et le féminin, on appelle
ça une rédaction épicène, et ils ont eu...
l'OQLF a, donc, fait un plan d'action 2011‑2015
pour tenir plusieurs séances. En 2013‑2014, il y a eu huit séances de formation à la rédaction épicène. Et, ça a
vraiment l'air des fois un peu simple, simpliste, mais de toujours dire «les
Québécoises et les Québécois», «les citoyens
et les citoyennes», «les hommes et les femmes», les... etc. Il y a des gens
qui réfléchissent à ça, qui sont éminemment
scolarisés, cultivés et qui peuvent, donc, aider beaucoup, beaucoup. Et il y a
22 ministères et organismes qui ont
participé à des formations comme ça pour pouvoir être à l'avant-scène et, je
dirais, être encore une fois, au
niveau de la Francophonie mondiale, un moteur de propositions qui, après ça,
font école à travers l'ensemble de la Francophonie.
Il y a un service de
consultation terminologique qui est extrêmement important. Parce que la
consultation terminologique, ça veut dire beaucoup,
beaucoup de choses, quelle expression employer, et un des succès de ça, c'est
la version, entre autres, mobile du Grand
dictionnaire terminologique de l'Office québécois de la langue française, qui a été, donc, lancée — vous voyez, on est vraiment dans les applications
sur la toile et sur le numérique — le 24 février 2014. Et ce sont donc
des outils vraiment adaptés aux réalités technologiques actuelles.
Je
vais revenir à mon «Black Friday» qui est devenu Vendredi fou. Bien, il y a eu
une campagne du Vendredi fou, et vraiment maintenant ça a été intégré au
Grand dictionnaire terminologique. Mais, pour ça, ça veut dire qu'il
faut vraiment faire des communiqués, faire
des... Les médias sont très intéressés à ça quand on crée une nouvelle
terminologie française. C'est nous
qui avons inventé, je le répète — «nous» étant peut-être l'office, là, je ne
sais pas, dans le temps j'étais une simple citoyenne — le
mot «courriel»...
Une voix :
Non.
Mme David (Outremont) : Non? Ce
n'est pas l'office, ça?
Une
voix : C'est un Québécois, mais...
Mme
David (Outremont) : Ah! mais c'est un Québécois. C'est ça que j'ai
entendu dire, c'est que ça venait du Québec.
Et, quand je dis que c'est la responsabilité partagée de tous les citoyens,
bien, que ça soit un Québécois qui ait... Maintenant, on dit «un courriel». Et même, quand on va en France, vous
le faites sûrement, les gens s'excusent, parce qu'ils disent toujours : Ah! bien, je t'envoie un e-mail, je
t'envoie un e-mail. Mais ils disent : Ah! excusez, on parle à un
Québécois, on va dire «un courriel». Bon.
Alors,
il y a eu une campagne pour le Vendredi fou. Et Costco, Bell, H&M, Les
Ailes de la Mode, Pharmaprix, Ogilvy,
Holt Renfrew ont tous adopté cette campagne et ont inventé toutes sortes de
noms. Il y a eu Vendredi en folie, La folie du vendredi, Vendredi
exceptionnel, Vendredi sensationnel, Grand solde du vendredi, etc.
Autre
exemple que je trouve extrêmement important sur la scène mondiale, et peut-être
parce que j'ai une sensibilité particulière
à la question du rôle du Québec sur la scène francophone mondiale : la
terminologie aux sports d'hiver des Jeux
olympiques de Sotchi. Alors, l'office a proposé des vocabulaires liés à
plusieurs disciplines olympiques, que ça soit la planche à neige, le ski, le curling, le hockey sur glace, le patinage
artistique, le patinage de vitesse. Alors, c'est encore une façon de prendre notre place et d'avoir notre
médaille olympique, je dirais, de francophonie. Et il y a un journaliste,
un immense journaliste sportif qui s'appelait René Lecavalier, qui pourrait
être extrêmement fier de ça. Même, on a participé beaucoup à la francisation
pour les Jeux paralympiques. Alors, je pense que faire une... L'office a fait
des promotions Twitter, a fait des promotions Facebook, et ça eu
énormément de succès.
Et
il y a eu d'autres... il y a eu le vocabulaire panlatin de la nanotechnologie.
Écoutez, ça, c'est vraiment extrêmement sophistiqué, la nanotechnologie. Vous savez qu'est-ce que c'est, c'est
l'avenir de la recherche scientifique dans tous les domaines de façon très, très, très microscopique.
C'est très récent, 2013, publication récente. Et on a besoin de la langue
française et, je dirais, on a besoin du
Québec maintenant pour pouvoir développer des terminologies qui font honneur à
l'ensemble du Québec sur la scène de la Francophonie mondiale.
Et,
pour ce qui est, bon, des autres exemples, je pense que mon collègue en a
parlé : la fonction de commissaire à la qualité, le délai maximal de 20 jours pour prendre contact avec un
citoyen suite au dépôt d'une plainte. Ils ont mis en ligne un formulaire de plainte interactif. C'est
important d'être, justement, en ligne. Il y a la version mobile du Grand
dictionnaire, le remodelage de la correspondance, dont M. Vézina a parlé. Et ils vont proposer bientôt un
dépliant informatif qui détaillera le processus de traitement des
plaintes. Et la révision des examens de français pour les ordres professionnels,
ça aussi, c'est un sujet de grande, grande
importance qui comprendra un volet communication qui simplifiera, donc, les
échanges entre l'office, les ordres
professionnels et les citoyens. On a évidemment parlé beaucoup, beaucoup des
étudiants internationaux, mais il y a
aussi toute cette question de l'accueil de professionnels grâce aux accords,
entre autres, France-Québec, mais à toute la question aussi de l'ALENA
et des récents accords Canada-Union européenne.
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Sainte-Rose.
M.
Habel : Oui. Vous parliez d'Olympiques tantôt. Je tiens à dire que la
langue officielle olympique est le français grâce à M. de Coubertin. J'ai une petite question : Pour les gens
qui ne connaissent pas bien l'OQLF, pouvez-vous me décrire ses pouvoirs?
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Allez-y, Mme la ministre.
Mme
David (Outremont) : Alors, Mme la Présidente, je vais demander à mon
collègue M. Vézina de nous faire état
des pouvoirs dont il dispose ou dont son office dispose. C'est clair qu'il a
des pouvoirs de certainement faire enquête et d'accompagner, mais dans les deux grands... et de faire aussi tout ce
dont j'ai parlé par rapport à la terminologie. Donc, M. Vézina.
La Présidente (Mme
Rotiroti) : M. Vézina, allez-y.
M.
Vézina (Robert) : Mme la Présidente, oui, les pouvoirs de l'office
sont quand même... couvrent une palette assez large. Je répondrai quand même relativement brièvement, là, parce
que, dans le fond, les pouvoirs de l'office sont ceux que lui confère la Charte de la langue française. Comme par
exemple, si je prends l'article 162 : «L'office peut assister et informer l'Administration, les organismes
parapublics, les entreprises, les associations diverses et les personnes
physiques en ce qui concerne la correction et l'enrichissement de la
langue française parlée et écrite au Québec.»
Un autre
pouvoir : «Il peut également recevoir leurs observations et suggestions
sur la qualité de la langue française ainsi que sur les difficultés d'application
de la présente loi et en faire rapport au ministre.
«163.
L'office établit les programmes de recherche nécessaires à l'application de la
présente loi. Il peut effecteur ou faire effectuer des études prévues à
ces programmes.
«164.
L'office peut conclure des ententes ou participer à des projets communs avec
toute personne ou [organisation].»
«161.
L'office veille [enfin] à ce que le français [évidemment] soit la langue
normale et habituelle du travail et des
communications[...]. [Donc] il peut notamment prendre toute mesure appropriée
pour assurer la promotion du français.
«Il
aide à définir et à élaborer les programmes de francisation prévus par la
[Charte de la langue française]...» Ça, ce sont des exemples
fondamentaux des pouvoirs de l'office.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, M. Vézina. Monsieur? Ça va?
Oui. Alors, on passe la parole au député de Papineau.
• (12 h 10) •
M. Iracà :
Oui. Merci, Mme la Présidente. Je profite de l'occasion pour saluer la ministre
et tous les fonctionnaires qui l'accompagnent aujourd'hui, à la veille
de la fête du Canada, et je salue également tous mes collègues. Ça me fait plaisir d'intervenir aujourd'hui dans cette
commission à titre de libéral ouvert sur le monde, fils d'immigrant, d'un père
qui est arrivé par bateau après la Deuxième
Guerre mondiale, un père qui ne parlait pas un mot français lorsqu'il est
arrivé. Il fallait qu'il fasse des
signes aux douaniers pour dire dans quel pays qu'il arrivait, puis quelle
langue qu'il parlait, puis qu'est-ce qu'il faisait dans la vie. Et ils
l'ont laissé passer, Mme la Présidente.
Et,
savez-vous quoi, en plus de ça, il a appris le français. Il n'a pas été fouetté,
là. Il n'y avait pas de loi, il n'y avait surtout pas de projet de loi n° 14 que le Parti québécois a voulu
instaurer, et heureusement c'est un projet de loi qui n'a pas passé ici, à l'Assemblée nationale parce qu'on
s'y est objecté farouchement, avec raison. C'était un projet de loi qui était rétrograde, qui faisait en sorte que le
Québec reculait, projet de loi très coercitif. Donc, malgré qu'il n'y avait pas
ce projet de loi là, il n'y avait pas de loi
semblable heureusement, mais il n'y avait pas de police de la langue non plus
qui donnait des infractions aux méchants qui
parlaient deux langues ou aux méchants qui parlaient anglais ou d'autres
langues ici, au Québec. Malgré tous ces
faits-là, mon père a appris le français et surtout, surtout il a fait en sorte
que ses enfants apprennent le
français. Donc, comment? Par la sensibilité des gens qui étaient là, par le
fait qu'il voulait absolument s'intégrer ici, au Québec. Et ça s'est
fait tout en douceur, tout en douceur, là, dans les années... fin des années
40.
Alors, c'est pour ça, moi, je vous dis que je
suis très, très heureux d'être issu d'un grand parti, le parti qui est
d'ailleurs le plus vieux parti ici, à l'Assemblée nationale, qui existe au
Québec, qui a fait beaucoup, beaucoup pour l'avancement
du français au Québec. Si le français est au niveau auquel on le connaît
aujourd'hui, si on parle français au Québec, bien je pense que ça
revient, entre autres, notamment en grande partie aux femmes et aux hommes
libéraux, «libéral» dans le grand sens du
terme, dans le sens du parti, mais aussi dans le sens d'ouverture sur le monde,
qui a fait en sorte qu'on a tout fait
pour promouvoir la langue française et que nous continuerons à tout faire pour
promouvoir la langue française.
Mme la Présidente, nous aimons les langues,
puis, je l'ai souvent dit, ce n'est pas une maladie de parler plus qu'une langue, c'est une richesse. Je vous
garantis, vous faites un sondage au Québec, de tous les parents :
Voulez-vous que vos enfants
apprennent plus qu'une langue?, à part peut-être mon collègue de Bourget, mais
je vous dirais qu'à 99,9 %, les
parents vont dire : Je veux que mes enfants... s'il vous plaît, je veux
que mes enfants apprennent plus qu'une langue. Tout en protégeant le français au Québec parce qu'on est dans la belle
nation du Québec, il faut que les gens parlent français, travaillent en français, mais pas en dénigrant
ceux qui parlent deux langues ou ceux qui apprennent une deuxième langue.
Alors ça,
c'était mon commentaire éditorial, mais je vais y aller plus précisément avec
ma question à la ministre en lien
avec la protection et la promotion de la langue française, qui demeurent des
enjeux centraux au Québec. Sachant que
le français est au coeur de l'identité québécoise, sachant que tous les acteurs
de la société ont un rôle à jouer dans l'émancipation de la langue
française, la langue officielle, considérant que le défi du français soit
particulièrement préoccupant à Montréal sans
toutefois être alarmant, constatant que l'approche coercitive et limitative de
droits ne doit pas être l'approche à
privilégier pour l'adhésion collective au noyau culturel du Québec — alors, je fais référence à ce que je mentionnais plus tôt — le Parti libéral a de tout temps été un
acteur de premier plan quant à l'épanouissement du français.
Dès 1961, le
gouvernement libéral de Jean Lesage créa l'Office de la langue française. En
1974, avec le projet de loi 22, Robert Bourassa, ça a été mentionné
tantôt... C'est important de se rappeler ce qui a été fait dans le passé. Comme la ministre l'a bien mentionné précédemment,
pour savoir où on va dans la vie, il faut regarder d'où l'on vient, alors, ce qui s'est fait, ce que l'on a fait.
Alors, en 1974, je me répète, avec le projet de loi 22, Robert Bourassa fit du
français la langue officielle du
Québec, un très grand pas qui avait été franchi à ce moment-là, tout en jetant
les bases de ce qui sera par la suite les principaux chapitres de
l'actuelle Charte de la langue française.
En 1993, toujours dans l'optique d'obtenir un
équilibre, Robert Bourassa fit adopter le projet de loi 86, qui consacra la nette prédominance du français dans
l'affichage public et la publicité commerciale. Des choses qui ont été faites, il y a encore des choses à faire, pas tout
est parfait, mais quand même ça prenait une loi, et nous, on l'a faite en 1993.
C'est cette recherche d'équilibre entre l'objectif collectif et les libertés
individuelles que nous devons poursuivre.
Alors, Mme la
ministre, comment comptez-vous présenter aux Québécois une approche nouvelle
pour positionner le Québec comme un
meneur, un acteur déterminant et innovateur au sein de toute la Francophonie?
Comment pouvez-vous — en deuxième question — positionner le gouvernement du Québec en
bougie d'allumage pour démontrer toute l'importance que vous accorderez
à l'épanouissement du français?
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Merci. Mme la ministre, je vous
fais recommandation, vu qu'il reste à peu près une minute dans ce bloc-ci, est-ce que vous voulez reporter la minute puis
commencer avec la question dans le prochain bloc?
Mme David (Outremont) : Oui.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Ça vous conviendrait?
Mme David (Outremont) : La question
est trop importante pour que j'y réponde en une minute.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : C'est ça que je me suis dit. Alors,
on va passer à l'opposition officielle. M. le député de Bourget, la
parole est à vous.
M. Kotto :
(S'exprime en douala). Vous voyez, à l'évidence, il y a moins de 2,8 % de
mots que j'ai utilisés relativement au flot
de mots que j'utilise depuis ce matin, 9 heures. Et il est certain que la
ministre n'a pas compris un iota de
ce que j'ai exprimé ici. Par ailleurs, ce n'est pas parce que Barack Obama
prononce son adresse à la nation en anglais qu'il veut dire : Fermeture aux hispaniques. Il y en a beaucoup,
aux États-Unis. Aux États-Unis, ça se passe en anglais. Au Japon, ça se
passe en japonais. En Allemagne, ça se passe en allemand. De quoi se plaint-on
quand ça se passe en français au Québec? La question se pose.
Ce que je
mets en lumière ici, sur une base critique bien évidemment, c'est le
bilinguisme institutionnel, qui n'a rien
à voir avec le bilinguisme individuel, rien du tout. Aussi, la défense et la
promotion de la langue française, ce n'est pas du chauvinisme, c'est un enjeu d'affirmation nationale et de
cohésion sociale. J'espère que le député de Sainte-Rose ne réduit pas
les actions des gouvernements successifs en cette matière à du simple
chauvinisme.
Au député de Papineau,
correction : je parle plusieurs langues, minimalement cinq, mais à titre
individuel, et je ne fais pas la
promotion d'une deuxième langue institutionnelle au Québec vu que votre parti,
comme vous l'avez rappelé, a initié
la démarche afin d'imposer une langue officielle commune au Québec, renforcée
en cela par René Lévesque, qui avait suivi M. Bourassa, qui en
était l'auteur.
Enfin, bref,
Mme la Présidente, ma question maintenant à Mme la ministre. À moins de deux
semaines d'avis, le festival L'Outaouais
en fête a appris que sa subvention de 30 000 $ de Tourisme Québec
était annulée alors que tous les
contrats étaient bouclés. Motif : pas assez d'achalandage. L'étude
d'achalandage a été faite l'an dernier, alors que la météo n'était clairement pas en faveur du
festival. À moins d'une semaine d'avis, les organisateurs du même festival ont
appris que leur subvention,
20 000 $ depuis plusieurs années, du Secrétariat à la politique
linguistique allait être coupée de moitié.
Motif : trop de demandes et pas assez de budget dans le Programme de la
promotion du français dans les activités culturelles.
Impératif
Français est mandaté pour organiser le festival L'Outaouais en fête. Impératif
Français a, lui aussi, subi une coupe
de 10 000 $ pour l'organisation de la Francofête. Cette coupe a été
annoncée après que l'événement ait eu lieu. Coupe totale de 50 000 $, car c'est Impératif Français qui
doit absorber le déficit de 40 000 $ du festival L'Outaouais en
fête. Habituellement, près de 10 000 $ étaient reçus en
discrétionnaires divers; rien cette année et aucun retour de la majorité des députés de l'Outaouais et ministres
sollicités. Le seul ayant répondu est l'attaché parlementaire de la ministre.
Il disait chercher des solutions alternatives. Or, aucune réponse depuis.
L'Outaouais a un besoin criant de promotion du
français. Sa frontière avec l'Ontario la rend vulnérable à l'attractivité de l'anglais. La survie du festival
est menacée. Alors, comment la ministre explique-t-elle cette décision? Et que compte-t-elle faire pour assurer la survie
du festival? Peut-elle, si possible — elle peut différer cela — déposer la ventilation de tous les
projets financés par le Programme de promotion du français lors d'activités
culturelles?
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Alors, vous demandez le dépôt du document, M. le député de Bourget?
M. Kotto : Oui, s'il vous
plaît.
Document déposé
La Présidente (Mme Rotiroti) :
O.K. Juste peut-être redire qu'est-ce que vous voulez pour la ministre.
M. Kotto : C'est la ventilation de tous les projets financés
par le Programme de promotion du français lors des activités
culturelles.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Parfait. Alors, Mme la ministre?
• (12 h 20) •
Mme David
(Outremont) : Alors, écoutez,
la réponse sera exhaustive, puisqu'on parle, et je l'ai dit plusieurs fois... Ça me donne l'occasion de
revenir sur ce merveilleux Programme de promotion du français lors d'activités
culturelles. C'est à ce point important que, sur les 75 projets, ça fait
l'objet... Un projet qui a été financé à hauteur de 20 400 $ fait
l'objet d'une question à l'étude des crédits. Alors, ça va me donner l'occasion...
Je dis bien «un» projet sur les 75. En fait, c'est deux projets qui ont
eu chacun 10 200 $, multipliés par deux, ça fait 20 400 $.
Alors,
Impératif Français, Promotion du français, volet II, mener les deux campagnes
promotionnelles Moi, je parle
français et Travailler en
français, reçoit par ailleurs 75 000 $ cette année, en 2014‑2015,
de l'OQLF. Il faudrait quand même
voir qu'il y a un peu d'argent de ce côté-là. Et je répète que ce programme est
victime de son succès, et que c'est formidable, et que non seulement
c'est formidable qu'il y ait autant d'organismes et d'activités culturelles qui
veuillent apporter ce volet francophone
qu'il y a eu effectivement 74 demandes. Alors, j'en ai donné quelques exemples.
Et ça peut être...
Le député de
Bourget pourrait me demander, lui qui aime beaucoup la poésie, pourquoi la
poésie de Montréal, par exemple, n'a
peut-être pas eu l'entièreté du montant qu'il a demandé. Ou il y a le
FestiBlues International, le service d'aide
et de liaison La Maisonnée, la Rencontre Théâtre ados, Lis avec moi, le Théâtre
Le Clou, Village en chanson de Petite-Vallée,
la Corporation du bedeau. Enfin, ce sont l'ensemble des demandes, et il y a
beaucoup, beaucoup, beaucoup plus effectivement que pour le budget que
nous avons à la disposition.
Et j'ai
expliqué, je pense, de façon assez précise et exhaustive comment ce comité est
fait d'experts. C'est un jury indépendant
avec des critères de pertinence, de qualité, d'accompagnement, que la
subvention soit accompagnée aussi par
d'autres engagements financiers. Alors, ce jury-là est un jury de qualité, il
regarde l'ensemble, et nous voulons, et nous nous attendons que, de ces demandes de
subvention, que ça soit en recherche scientifique, que ça soit en programme
comme celui-là, il y ait une évaluation neutre, objective et une évaluation par
des experts.
Alors, quand
on a 74 demandes et qu'on n'a pas l'argent pour l'ensemble des demandes, il est
évident qu'il y a des choix
difficiles à faire et des choix à partir de critères bien établis. Donc, les
critères ont été établis, les critères ont été regardés pour chacun des projets. Et ils ont reçu 50 % de ce
qu'ils avaient demandé. Et ils ont sélectionné le projet sans pouvoir effectivement, à cause des
contraintes budgétaires dont je parle, exaucer complètement la demande de cet
organisme-là.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Merci. M. le député de Bourget.
M. Kotto :
Au budget 2014‑2015, on voit des coupures de 726 000 $ pour
l'application de la Charte de la langue française, dont environ 350 000 $ de moins à l'OQLF, 125 000 $
de moins au Conseil supérieur de la langue française, 150 000 $ de moins à la réalisation
d'activités de promotion de la langue française, 100 000 $ de moins à
la coordination de la politique
linguistique. Quels sont les programmes qui seront directement affectés par ces
coupures? Et où se feront précisément les coupes à l'OQLF?
Affecteront-elles les inspections et le traitement des plaintes, ces coupures?
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Mme la ministre.
Mme David
(Outremont) : Alors, je tiens à préciser qu'il n'y aura aucune coupure
dans les services. Ce qu'il peut y avoir, c'est effectivement des
coupures dans les rémunérations, mais il n'y a aucun impact sur les travaux et sur les différents mandats de l'Office québécois de
la langue française. Le 350 000 $ est de l'argent qui est investi
surtout en différentes rémunérations. Le député de Bourget a décliné, ventilé
les différents montants. Et on doit dire qu'année après année, étant donné les
différentes coupures qui ont eu lieu, y compris évidemment sous le précédent gouvernement, il y avait de gens qui ne pouvaient
pas être engagés comme peut-être l'OQLF aurait voulu, ou le Conseil supérieur. Donc, il y a des études qui ne se font
pas, donc ce qu'on appelle en langage de fonctionnaire ministériel des crédits périmés. Donc, il y a beaucoup plus
d'argent en crédits périmés que cette coupure de 350 000 $. C'est
pour ça qu'on ne s'inquiète pas du
tout qu'il n'y ait aucun effet sur la question des services donnés par l'Office
québécois de la langue française. Si
mon collègue, M. Vézina, veut apporter d'autres précisions sur les coupures...
Mais je pense que ça répond à la question.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
O.K., ça va? M. le député de Bourget.
M. Kotto : Donc, Mme
la Présidente, nous avons, à l'aune
de ce que j'entends de la ministre, l'assurance que ces coupures
n'affecteront pas les services, notamment les services en lien avec le
traitement des plaintes.
Vous permettrez mon étonnement d'apprendre, par
ailleurs, que le poste de sous-ministre associé à la langue française est vacant depuis plus d'un mois
maintenant. Est-ce que c'est parce qu'il n'y a pas de personne de qualifiée au
sein de l'appareil gouvernemental pour remplir ce poste ou c'est parce que le
gouvernement envisage son abolition?
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Mme la ministre.
Mme David
(Outremont) : Alors, écoutez, je remercie mon collègue... je le
remercie souvent ce matin, mais je le remercie
aussi de me poser cette question. Parce qu'effectivement, dès l'entrée au
pouvoir du gouvernement actuel, bon, le sous-ministre associé à la
langue a démissionné, donc est retourné enseigner à l'UQAM, je pense, et nous
avons... nous sommes effectivement à la
recherche d'un sous-ministre adjoint de
qualité. Il y a eu tout le transfert des... de l'OQLF, du Secrétariat à la politique linguistique, le
Conseil supérieur, tout ça revient donc au ministère de la Culture. Et il
est très, très, très
important, prioritaire de trouver un... un ou une — ça n'a
pas valeur épicène — donc, un
ou une sous-ministre adjoint.
Et il y a
effectivement non seulement ce poste de sous-ministre associé — il ne faut pas dire «adjoint», là, dans
ce cas-ci, je m'excuse, c'est
«associé» — mais il
y a beaucoup d'autres postes qui n'avaient pas été renouvelés, dont les mandats étaient échus sous le précédent
gouvernement, dans les différentes composantes, que ça soient des membres de
l'OQLF, que ça soit le Comité de suivi de la
situation linguistique, Comité d'officialisation linguistique — et on continue comme ça — Conseil
supérieur de la langue française. Alors, je pense qu'il est très, très
important...
Et là vous comprendrez que la gouvernance, pour
moi, est quelque chose d'extrêmement précieux, qui nous assure d'un fonctionnement adéquat. Et non seulement je veux avoir un
sous-ministre associé qui soit de grande compétence et qui puisse exercer ses fonctions de façon
extrêmement rigoureuse, mais je m'assurerai aussi, tout comme
à la Culture, où il y a énormément, donc, de postes vacants, non comblés par le précédent gouvernement, 38 postes... je les comblerai, et ce, le plus, plus rapidement possible. Nous devons préciser aussi
qu'à l'Office québécois de la langue
française, sous le précédent gouvernement, le P.D.G. était
par intérim pendant presque un an, sous le PQ. Donc, là, on est très, très
contents d'avoir un P.D.G. qui exerce ses fonctions de façon officielle.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Merci. M. le député de Bourget.
M. Kotto : Mme la
Présidente, je reviens sur les coupes
dans le budget de l'office. Pour ma part, c'est un signal... pris dans
l'absolu, comme ça, c'est un signal qui ne rend pas service à la langue
française, où on est dans le domaine de la
perception. Le message que ces coupes envoient à la population
demeure négatif. Encore faudrait-il — et le temps nous le démontrera — que les impacts n'affectent pas la mission
de l'office ultérieurement. Je veux, par extension, entendre de la bouche de la ministre la vision qu'elle se
fait du rôle de l'Office de la langue française et les moyens et ressources
qu'elle mettra à disposition pour la défense et la promotion de la langue
française.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Mme la ministre.
• (12 h 30) •
Mme David
(Outremont) : Alors, on voit les signaux qu'on veut, cher collègue.
Les signaux, vous savez, c'est un
peu, des fois, comme ça, ça peut être dans le ciel, ça peut être... On voit un
signal pour lequel une immense latitude est donnée dans les différentes interprétations. Donc, les signaux... Je
pense que vous vous inquiétez peut-être
à tort. Alors, vous dormirez peut-être
mieux la nuit prochaine de savoir que le 350 000 $, qui est un budget dont j'ai parlé tout à l'heure,
qui est facilement non utilisable puisque
non utilisé sous le précédent gouvernement, c'est-à-dire
1 645 000 $ de périmés par
le gouvernement du Parti québécois... Alors, je pense que, tant qu'à ne pas
l'utiliser, 1 645 000 $, bien, si on en coupe 350 000 $, c'est que ça n'aurait été
probablement pas utilisé étant donné que, même sous le précédent gouvernement,
il n'y avait pas d'utilisation puisque ce n'était pas possible et puis il y
avait, année après année, donc, un certain montant périmé.
Ce que moi, je veux, par exemple, m'assurer, et
je rassure mon collègue de Bourget, c'est qu'effectivement, l'office continue à
donner les nombreux services qu'il donne. Et ce ne sont pas, comme peut-être
aurait préconisé la loi no 14,
là, des services très, très coercitifs, avec beaucoup, beaucoup de paperasserie
pour les petites, petites entreprises. C'est
beaucoup d'accompagnement, beaucoup de mesures dont on a parlé en long et en
large, sur la terminologie, sur le soutien
aux petites entreprises, la stratégie de Montréal, les agents de francisation,
la gouvernance de l'office, la création d'un commissaire à la qualité, toute la réorganisation de l'office, de
mettre des choses en ligne, de mettre tous les formulaires de plainte,
d'avoir un délai très court, d'avoir une très bonne qualité de collaboration
avec les citoyens.
Donc, il y a
un très beau modèle de gouvernance qui s'en vient. Et je rappellerai que le
budget du mois de juin déposé par
notre gouvernement est un budget, effectivement, que nous qualifions de
responsable. C'est un budget qui est très,
très important, étant donné le mea culpa qu'a fait le député de Rousseau,
justement, sur le fait qu'il s'était trompé dans ses prévisions. Alors, le député de Bourget faisait partie de ce
gouvernement. Et il a été dit noir sur blanc, de façon très, très claire
qu'il allait y avoir un déficit, qu'il allait être important, et nous avons
trouvé un déficit encore plus important même que ce à quoi on s'attendait.
Donc, au
contraire, je pourrais dire que je suis très fière de pouvoir dire que, dans
cette conjoncture de rigueur, de
sérieux budgétaire, nous pouvons continuer, avec l'Office québécois de la
langue française, de maintenir des services de première qualité pour protéger cette langue et pour accompagner les
entreprises dans ce qu'elles veulent faire. Et je répète que nous avons toujours au-dessus de 400
entreprises de moins de 50 employés qui sont en processus d'attestation,
de certification de la langue française et
nous voulons les accompagner dans leurs outils technologiques, parce que ça se
passe pour la langue, mais ça se passe aussi
dans les outils technologiques et qu'il y en a plus de 400 qui ont obtenu cette
attestation. Donc, je n'ai aucune inquiétude
que l'office québécois, avec son président, qui est d'une très grande
motivation, donc, à exercer son rôle
d'un très, très bon leadership, va continuer à l'exercer et avec les avis du
Conseil supérieur de la langue
française, où, là, je répéterai qu'il y a aussi des gens à nommer dans
différents postes à pourvoir, de comités et autres, que nous allons regarder rapidement... va continuer à faire un
travail exemplaire dans le domaine de la surveillance et des différentes
études.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, Mme la ministre. M. le
député de Bourget, il vous reste quatre minutes... bien, 3 min 30 s, là.
M. Kotto :
Mme la Présidente, le 8 mars 2013, la ministre responsable de la Charte de la
langue française d'alors, Diane de
Courcy, dévoilait les faits saillants du rapport d'étape sur le processus de
traitement des plaintes de l'OQLF. Ce
rapport faisait état, pour l'OQLF, de se recentrer sur sa mission et d'adopter
une approche ferme au regard des objectifs à atteindre. Il s'agit notamment de moderniser le processus de plainte et
de le rendre plus efficace en éliminant notamment les irritants. Quelle
suite va donner la ministre à ce rapport?
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Mme la ministre, en deux minutes, s'il vous plaît.
Mme David
(Outremont) : Bien, excusez-moi. C'est parce qu'on riait parce qu'on a
eu la même idée en même temps, que je
pense que, là, c'est tout à fait une question qui devrait être... répondue...
je n'aime pas l'expression, excusez-moi, mais à laquelle le président devrait
répondre.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
M. Vézina.
M. Vézina (Robert) : Alors, Mme la
Présidente, en effet, le rapport d'étape a été rendu public en mars 2013. Chacune des recommandations figurant dans ce
rapport d'étape ont été examinées par l'office et ont donné lieu à des actions rapides
qui sont soient terminées ou toujours en cours. Par exemple, la création du
poste de commissaire à la qualité des services
était une des recommandations importantes de ce rapport d'étape là. On avait constaté à
l'époque que l'office, là, n'avait
pas de ce qu'on peut appeler... d'ombudsman, donc de personne vers qui le
public, les citoyens ou les entreprises pouvaient
se tourner lorsqu'ils avaient des plaintes à formuler à propos de la
qualité des services. Donc, ça, c'était une lacune tout à fait importante qu'il fallait combler. Donc, l'office l'a fait
dès l'été 2013. Donc, la personne est en poste depuis ce temps et elle reçoit un certain nombre
de plaintes, là, sur une base continuelle, et on les analyse, et ça donne
lieu à d'autres recommandations.
Il y avait plusieurs recommandations,
par exemple considérer l'entreprise visée par une possible infraction comme un client engagé dans une démarche de
conformité à la charte et non pas comme un possible contrevenant. Bien, cette approche-là a été déjà adoptée à l'office, là, mais on a mis encore plus
l'accent sur cet aspect-là, de partenariat, de communication et d'accompagnement auprès des entreprises notamment. Et
on a parlé, tout à l'heure, là, du remodelage de l'ensemble des lettres qui sont transmises aux entreprises et aux
plaignants. C'est un processus qui est toujours en cours. Il y avait aussi, par exemple, la recommandation
d'établir des étapes systématiques de communication qui correspondent à
celles du processus de traitement. Donc, le projet est en cours, ça aussi;
donc, ça, ça va prendre un peu plus de temps.
D'ailleurs,
ça me permet de vous dire que tout ce rapport d'étape là a provoqué une remise
en question importante au sein de
l'organisation, qui a mené finalement au lancement du projet qu'on appelle la
modernisation de l'office. Et là on donne des exemples depuis tout à
l'heure, là...
La Présidente (Mme
Rotiroti) : En terminant, M. Vézina.
M.
Vézina (Robert) : ...bon,
création d'un comité... par exemple, un comité de direction pour la gouvernance de l'office, qui n'existait pas
auparavant. On a le commissaire aux plaintes. Mais, plus que ça, on s'est aperçus
que l'ensemble des systèmes d'information de
l'office étaient complètements désuets, des systèmes importants qui servent,
par exemple, à la gestion des dossiers
d'entreprises, les entreprises sous gestion, donc les entreprises qui ont à se
franciser, qui ont soit obtenu déjà
leur certificat de francisation, soit qu'elles sont en voie de l'obtenir. Ce
système-là ne répond plus du tout aux besoins de l'office. Il date de
plus de 17 ans.
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Merci, M. Vézina.
M. Vézina (Robert) :
D'accord.
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Désolée, il ne reste plus de temps. Mais je vais
céder la parole au député de Bourget, qui va vous demander de déposer...
M.
Kotto : S'il vous plaît, M. Vézina, dans la mesure du possible,
serait-il pensable que vous nous envoyiez, aux membres de la commission,
l'information relative à cette question par écrit?
M. Vézina
(Robert) : Oui.
M. Kotto :
Ultérieurement, bien sûr...
M. Vézina
(Robert) : Oui, oui, absolument. Donc, pour répondre au rapport de...
M. Kotto :
Merci.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Alors, vous pouvez le déposer ici, à la commission, et on va s'assurer
que tous les membres de la commission
reçoivent une copie. Alors, on va passer, pour le dernier bloc, au côté
ministériel. Si, le député de Papineau, vous voulez juste reprendre vos questions
pour que la ministre ait du temps pour vous répondre.
M. Iracà :
Oui. Bien, succinctement, je vais reprendre, là, la fin de la question. Mais,
juste avant, j'aimerais mentionner que je
suis très heureux que le député de Bourget se préoccupe du français en Outaouais. Je le
remercie de sa question
de tout à l'heure. Je
pense que c'est important
de se préoccuper du français partout au Québec, mais notamment en
Outaouais. Je me sens un petit peu interpellé, Mme la Présidente, puisque je
suis député de l'Outaouais.
Juste pour vous rassurer, les médias
français ont fait un bond incommensurable cette année par les cotes BBM, là. La
radio parlée en Outaouais, là, a
bondi de manière exponentielle, c'est fantastique. Il y en a de plus en
plus : télé, radio, journaux. Le journal Le Droit, le
siège social est à Ottawa.
Il y a des gens à
Ottawa qui parlent français, imaginez-vous. Et ce qui est fantastique, pour
aller à Ottawa, chez nous, de l'Outaouais,
il n'y a pas de douane, là. C'est le même pays, c'est le Canada, on fait juste
traverser le pont à pied. On va
manger dans les restaurants. Puis ce qu'on constate, à Ottawa, ce qui est
fantastique, c'est qu'on se fait servir en français; pas dans tous les restaurants, il y a encore du chemin à
faire. Mais c'est de plus en plus agréable parce qu'on fait des petits puis on se passe le mot. Puis il y
a des médias francophones en Outaouais qui ont fait des bonds incroyables,
et ça a des répercussions dans la capitale,
notre capitale du Canada, et ça a des effets extrêmement positifs. Mon chef,
moi, le député de Roberval, est venu cinq
fois en un an en Outaouais, il a pu constater les effets positifs et l'amélioration du français en Outaouais. Alors, j'invite les
députés du Parti québécois — parce que c'est rare qu'on les voit — de venir en Outaouais, notamment...
• (12 h 40) •
Une voix :
...
M. Iracà : Ah! bien... Alors, je l'invite à
venir et revenir plus souvent. J'invite M. le député de Bourget à inviter
ses collègues à venir en Outaouais, son
ancienne chef, qui n'est malheureusement pas venue une fois en campagne électorale, elle l'aurait
constaté, Mme la Présidente. Alors, j'invite les gens à venir visiter la belle
région de l'Outaouais et à venir
constater comment le français s'est amélioré. Il y a encore du chemin à faire,
ce n'est pas 100 %, mais je peux rassurer
le député de Bourget que les cinq députés libéraux veillent au grain en
Outaouais. On va s'assurer que le français s'améliore de jour en jour.
Alors, merci beaucoup pour la question du député de Bourget.
Alors, je vais revenir avec ma première question
initiale pour la ministre, mais je verrais... Succinctement, là, parce que je ne ferai pas tout le préambule que
j'ai fait tout à l'heure. Alors, comment comptez-vous, Mme la ministre, présenter aux Québécois une approche nouvelle pour
positionner le Québec comme un meneur, un acteur déterminant et innovateur au sein de toute la francophonie?
Comment pouvez-vous positionner le gouvernement du Québec en bougie
d'allumage pour démontrer toute l'importance que vous accordez à
l'épanouissement du français?
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Mme la ministre.
Mme David
(Outremont) : Alors, écoutez, je vais revenir à ce qui m'a frappée
aussi de l'intervention du député, dans
sa première intervention, qui était très touchante, parce que moi aussi, j'ai une
histoire extrêmement personnelle, avec
cet après-guerre d'immigrants qui arrivent, qui ne parlent pas... à peu près ni
anglais ni français, qui parlent soit italien, portugais, etc., et qui
disent : On va aller en Amérique parce que, l'Amérique, tu traverses
l'océan...
J'ai une
nounou qui m'a connue à cinq jours, et qui est encore la marraine de mon fils,
la femme que j'aime le plus au monde
actuellement, et qui, il y a de cela au moins 50 ans, arrivait seule dans la
troisième soute du... en dessous, en
dessous, en dessous d'un bateau parce qu'elle n'avait pas un sou évidemment,
c'est après la guerre. Et elle habitait à Viano, puis, à Viano, c'était le lieu où passaient tous les avions
militaires. Et, pendant des années, elle marchait un kilomètre pour aller à son école, et c'était toujours sous
le bruit des bombes, des avions. On n'a pas idée le privilège qu'on a, au
Québec, quand on regarde ces immigrants qui
ont vécu ça à 10 ans, à 15 ans, à 16 ans, qui se promènent entre l'Italie et la
France sous les bombardements, etc., et qui
décident, à 19 ans, à 19 ans... On a des enfants de cet âge-là puis on se
dit : Oh! mon Dieu! est-ce qu'il
va avoir de quoi à manger demain, et puis est-ce que sa chemise est bien
pressée?, etc. Pendant ce temps-là,
des gens, en 1945, se posaient autrement d'autres questions, avec les millions
de morts, et, à 19 ans, ils se demandaient :
Où est-ce que je veux aller faire ma vie dans un endroit pour lequel je peux
espérer un avenir pour moi, d'abord, et, après ça, éventuellement, mes
enfants, etc.?
Donc, le
fameux Pier 21 d'Halifax, qui est un endroit encore exceptionnellement touchant
à visiter, où arrivaient tous ces
immigrants de l'après-guerre qui venaient de partout au monde. Pourquoi? Pour
essayer d'avoir un avenir beaucoup plus...
de l'espoir, je dirais, en Amérique. Et c'était l'Amérique. Et là, quand tu
avais un train qui arrivait au Pier 21, ce quai-là, c'était absolument inouï, ces histoires-là. Parce que tout le
monde a son histoire. Et c'était le train, et certains allaient à Toronto, d'autres à Boston. Et cette personne
dont je parle, elle s'est trouvée sur un train qui venait à Montréal, mais
elle aurait pu se retrouver sur un train
pour New York ou pour Toronto... et donc qui arrivent sans aucun sou, et puis,
etc., enfin, des histoires incroyables.
Et, quand on
regarde maintenant ce que sont devenus... autant pour vous, qui parlez un
excellent français, mais votre père
ne parlait pas français. Et donc, en une génération, on regarde ce qui a été
fait de toutes ces générations, donc, d'immigrants
qui sont maintenant des citoyens vraiment complètement, complètement adaptés et
on peut parler évidemment du Québec
comme d'une immense terre d'accueil. Et, s'il y a quelque chose, pour moi, qui
est important et que je valorise énormément, c'est cet accueil-là. Et
l'accueil, dans une société, ça se veut le plus possible...
Dans le mot
«accueil», d'habitude, on ne pense pas à coercition. Quand on accueille
chez nous, qu'il y a des invités à souper, d'habitude on ne leur donne pas un contrat à signer qu'ils
vont se comporter de telle et telle façon. L'accueil est supposé être justement dans la générosité,
il est supposé être dans la fierté et dans la reconnaissance. Et, dans ce
sens-là, ce qui est extrêmement important pour moi comme ministre mais aussi pour notre
gouvernement, c'est que l'accueil se fasse justement
dans l'harmonie. On n'a pas besoin de créer des divisions.
J'ai référé tout à l'heure au «eux» et au «nous», c'est quelque
chose qui... S'il y a
quelque chose qui m'a amené en politique, c'est bien
cette question de ne plus être dans le «eux» et dans le «nous». Nous sommes Québécois,
nous sommes tous fiers de l'être, et nous
aurons, et nous avons tous à coeur cette importance de ce qui nous a
construits. Ce qui nous a construits,
c'est beaucoup la langue, c'est beaucoup la culture, c'est beaucoup
l'immigration, ça sera encore beaucoup
l'immigration parce que nous aurons besoin d'être une terre d'accueil.
Pour ceux — et il y en a de plus en plus — évidemment qui voyagent beaucoup, beaucoup,
comment ne pas être fiers et se
sentir d'un privilège absolu... Et, vous savez, sur terre, on ne choisit pas la
famille où on naît, on ne choisit pas de quelle culture nous naissons, mais on choisit certainement ce qu'on veut
devenir. Et il y a tellement de gens sur la terre, d'êtres humains qui envient un endroit privilégié
comme le Québec, qui envient un endroit privilégié comme le Canada. Alors, nous devons protéger qui nous sommes et
nous avons un devoir absolu d'intégrer de façon socialement responsable,
dans le contexte du développement durable,
dans le contexte de notre langue qui fait notre fierté... Donc, nous devons
accueillir, et je pense que nous le faisons
depuis au moins 50 ans — on va fêter 40 ans de la loi 22, mais
on parlait de 1961 aussi — des gens qui viennent de partout dans le
monde et qui vont aller à l'école en langue française, qui vont avoir des
cours de français de la meilleure qualité
possible, qui pourront apprendre l'anglais, oui, parce qu'il y a 91 % des
anglophones qui sont parfaitement bilingues puis il y en a autour de
62 % pour les francophones.
Je pense que,
si on veut que nos enfants, nos petits enfants aient aussi un avenir sur cette
planète, c'est sûr que de parler
plusieurs langues, ça ne nuit pas. Maintenant, ça ne veut pas dire qu'on ne
protège pas la langue française. Et c'est extrêmement important qu'avec le ministère de l'Éducation nous
travaillions très, très fort pour garder la qualité de la langue, de l'apprentissage de la lecture, de
l'écriture. Et ça demande des efforts, oui, mais ça demande des efforts de tous
les instants. Et ça demande des efforts pour les ordres professionnels, on en a
parlé tout à l'heure aussi. Et donc, dans les médias, ça demande des efforts, ça demande...
parce qu'il faut, dans nos courriels, dans toutes nos interactions, parler
un français dont nous sommes collectivement
fiers. Et il ne faut jamais avoir de... il ne faut jamais se relâcher, je
dirais, sur cette question-là.
Ce qu'on
propose aujourd'hui, c'est évident, c'est d'accentuer la promotion de la
qualité du français dès l'école primaire.
On veut intensifier l'usage du français au travail, nous allons le voir dès la
rencontre du mois de... de l'automne sur la stratégie de promotion de
Montréal. On veut faciliter la francisation des immigrants dans toutes les
régions du Québec, et ça, notre premier
ministre l'a dit très clairement. Il y a de plus en plus, et nous en sommes
très, très heureux, des nouveaux
arrivants qui s'installent un peu partout au Québec, et c'est vraiment
extrêmement intéressant ce que ça peut
donner comme occasion de faire du métissage culturel absolument fascinant. Le
Québec, c'est toutes les régions, et le Québec accueille des immigrants
de toutes les régions.
Et on veut
évidemment promouvoir, et ça sera primordial dans les prochains mois, les
prochaines années, la qualité du
français à l'ère numérique notamment dans les médias sociaux. Et c'est pour ça
que, dans tout ce qu'on veut annoncer... Et on me demandait quelles sont mes priorités et plans d'action. C'est
clair que nous voulons tenir très rapidement, donc, une rencontre de partenaires de la stratégie
commune dès le mois de septembre, octobre afin de réunir tous les gens de
la grande région métropolitaine de Montréal
pour réfléchir aux grandes questions que, je dirais, nous avons eu le plaisir
de... dont nous avons eu le plaisir de
discuter pendant les dernières quatre heures qui nous ont réunis parce que
nous...
• (12 h 50) •
Et je répéterai ce que le député de Bourget dit,
il n'y a pas de partisanerie dans cette question de langue. Il peut y avoir des
aménagements, il peut y avoir des critiques, on fait trop de ci, pas assez de
ça. Et nous devons être à l'écoute de tous
les collègues qui ont des bonnes idées sur l'avenir des choses
parce que l'avenir du Québec, au niveau de
la langue, c'est une responsabilité — je
regarde le député de Bourget — une
responsabilité collective. Nous l'avons construit ensemble, ce Québec-là.
Ça a été le Québec de la loi 22, ça a été le Québec
de la loi 101, c'est le Québec que nous voulons, ouvert sur
l'immigration, accueillant, tolérant et fier de sa langue française.
Je ne la
dirai jamais assez, cette fierté, et je le disais pour mon
plus petit univers qui était l'Université
de Montréal à l'époque. J'avais la responsabilité de la francophonie. On dit souvent : Oui, mais qu'est-ce qui se passe, est-ce que tout le
monde parle anglais? C'est faux. Les gens ne parlent pas anglais. Nous avons...
J'étais responsable... en tant que responsable de la francophonie, c'était la seule université au Québec,
au Canada, en Amérique
du Nord qui avait un vice-rectorat à
la Francophonie. Donc, on était très
fiers de ça. On a parti un bureau de valorisation de la langue française. Et pourquoi c'est important? C'est pour montrer à
l'ensemble de la planète — et
Dieu sait que, dans une université, c'est ouvert sur la planète — que
le français est un atout, ce n'est pas un handicap. Le français
n'est pas un handicap. Et, dans cet univers dont... Justement, je suis un peu jalouse du député de
Bourget. S'il dit qu'il parle quatre ou cinq langues, je n'en parle pas autant que lui qui, donc, parle tout à fait de façon remarquable le français et qui en a fait même
un métier, je dirais, à travers un métier d'acteur, de comédien.
C'est extrêmement important, cette langue-là. Donc, dans toutes les sphères de la société,
le français doit être un atout et nous devons en être très fiers. Pour ça, il y a
des exigences. C'est facile à dire : Oui, oui, oui, le français,
c'est très important pour nous. Il faut l'écrire, le parler, il faut
enrichir notre vocabulaire, enrichir notre grammaire, notre phraséologie, et ça, c'est une responsabilité des médias, des journalistes, des enseignants. On disait qu'il y a
des... Je pense que c'est le député de
Bourget qui disait : Il y a des professeurs de français, qu'il disait, qui
n'osent plus écrire au tableau, etc. J'ai
siégé sur des comités de faculté des sciences de l'éducation — c'est
peut-être la députée d'Iberville, je ne sais plus, excusez-moi — et
vous...
Une voix : ...
Mme David
(Outremont) : Non, mais vous avez raison de dire que cette question-là
est d'une extrême importance, que,
quand on est professeur et qu'on est un modèle pour des jeunes enfants,
primaire, secondaire, la question du français est extrêmement importante. Et j'étais sur une table
qui réfléchissait, avec les doyens et doyennes de facultés de sciences de
l'éducation, à ces fameux tests de français
pour les étudiants, qui sont devenus à la fois un atout et une angoisse
terrible pour les étudiants en
sciences de l'éducation, en profil formation des maîtres parce que ce sont des
examens, ma foi, assez exigeants, qui
demandent des... Je ne suis pas sûre qu'autour de la table ici, on passerait si
facilement ces examens-là. Et donc
c'est exigeant. Et on dit : Il faut que les professeurs en primaire,
secondaire parlent bien français. On en est tous de ça, mais encore faut-il qu'ils arrivent à l'université, à partir du
primaire, du secondaire, du collégial, en ayant déjà une assez bonne maîtrise de cette langue. Donc, quand
on dit que la responsabilité est importante à tous, tous, tous les niveaux,
c'est vraiment... C'est vraiment une priorité, et ça sera pour moi une
priorité.
C'est sûr
que, dans mon plan d'action — excusez, je fais quelques digressions — la rencontre des partenaires, la tournée ministérielle sera très, très
importante pour moi, d'aller rencontrer les élus dans les ministères qui ont
charge de grands, grands, grands
réseaux, que ça soit la santé, l'éducation, mettre des mandataires à la
politique linguistique dans chacun
des ministères, demander l'avis au Conseil supérieur de la langue française sur
la maîtrise de la langue française par
les Québécois et particulièrement dans l'univers numérique. L'accompagnement de
l'OQLF dans son processus de modernisation est une priorité aussi.
L'actualisation
de la gouvernance des divers comités relevant de la responsabilité
ministérielle. J'ai dit souvent, je le répète,
que nous ne voulons pas de mandat périmé ou de chaise vide. Donc, c'est très
important aussi d'avoir du renouveau dans
le domaine de la langue, dans le domaine des études sur la langue. Oui, il y a
des gens qui se sont donnés corps et âme
avec toute leur expertise depuis 30 ans, 40 ans. Il y a une relève
extraordinaire dans les universités, les ministères, les organismes.
Nous sommes à la recherche de cette relève qui façonnera la qualité de la
langue française pour les 30, 40, 50 prochaines années. Et, à travers la gouvernance, ça n'a l'air
de rien, mais, ces gens qui siègent autour d'une table à façonner des
études, des réflexions, nous avons besoin de relève, nous avons besoin de ces
jeunes doctorants, postdoctorants en
littérature, en grammaire. Il y a maintenant
des spécialistes extraordinaires dans ces domaines-là. Et nous voulons aussi mettre en valeur nos meneurs,
nos champions, nos amoureux de la langue française, donc, pour renforcer
de façon très positive les bons coups, l'exemplarité pour un impact positif et
durable sur la considération de la langue dans la population.
Et évidemment nous aurons cette année de célébration de la
loi 22, qui faisait du français une langue officielle.
Alors, je
vois le temps passer, Mme la
Présidente, je voudrais prendre vraiment
le temps, d'une part, de féliciter, bon, le travail... l'excellent
travail de tous les collègues autour de la commission parlementaire pour avoir
regardé attentivement, je dirais, l'étude des crédits. Alors, il y a eu des questions plus pointues, des questions
plus larges. Le français, c'est
normal, il faut regarder avec une vision. Et il faut
regarder aussi peut-être avec une approche, des fois, qu'on dit un peu de
façon négative, mais, pour moi, ce n'est, au contraire, pas négatif, la plus
pointue des dépenses. Et je regarde ma collègue
d'Iberville qui, je pense, va pouvoir nous aider à regarder de façon précieuse
si les dépenses... si l'argent est bien dépensé.
Par ailleurs,
je veux remercier aussi énormément, donc, mes collègues du gouvernement, qui
vraiment se sont donnés, je dirais... — c'est plutôt masculin, comme représentation — qui se sont vraiment donnés au maximum à une
réflexion autant personnelle, si je vois les interventions de chacun, des
réflexions qui vont bien au-delà d'une simple question,
un engagement personnel, et évidemment tous mes collègues, à côté et derrière,
qui ont travaillé d'arrache-pied, que
ça soit la sous-ministre, qui est revenue quand même depuis pas très longtemps
au ministère de la Culture et qui nous a
aidés beaucoup aussi pour la langue, évidemment le président de l'office
québécois, qui, lui aussi, n'est pas là depuis très longtemps et qui
fait un travail absolument remarquable avec toute son équipe.
Nous
soulignons le départ à la retraite dans quatre jours de Mme Lachance, qui
est la présidente du Conseil supérieur de
la langue française par intérim. Et donc, là aussi, autre poste à combler, sur
lequel nous travaillons très activement. Et toutes les autres personnes.
Évidemment Mme Jacques, qui a travaillé aussi très, très fort en
l'absence, comme l'a souligné M. le député
de Bourget, d'un sous-ministre associé à la langue. Donc, il y a eu un travail
remarquable des gens qui vraiment,
là, sont... que ça soit aussi les attachés politiques et évidemment la
directrice de cabinet et tout le personnel. Donc, je ne sais pas si je... Ça va? Alors, puis je remercie notre
présidente, qui nous a tenus vraiment, vraiment d'une main de maître.
Alors, merci beaucoup.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, Mme la ministre. Alors, à
mon tour de remercier tous les collègues pour le ton cordial, pour des
échanges constructifs. Je vous souhaite une bonne retraite, Mme Lachance.
Adoption des crédits
Et, le temps
alloué à l'étude du volet Culture et Communications étant écoulé, nous allons
maintenant procéder à la mise aux voix. Ainsi, le programme 3, intitulé
Charte la langue française, est-il adopté?
Des voix : ...
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Sur division. L'ensemble des
crédits du portefeuille Culture et Communications est-il adopté?
Des voix : ...
Documents déposés
La Présidente
(Mme Rotiroti) : Sur division. En terminant, je dépose les
réponses aux demandes de renseignement de l'opposition.
Alors, la
commission ajourne ses travaux au mercredi 2 juillet 2014, à
9 h 30, où nous entreprendrons des études du volet
Enseignement supérieur. Merci, bonne journée à tous.
(Fin de la séance à 12
h 59)