L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission de la culture et de l’éducation

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission de la culture et de l’éducation

Version finale

39e législature, 2e session
(23 février 2011 au 1 août 2012)

Le mardi 12 avril 2011 - Vol. 42 N° 5

Étude des crédits budgétaires 2011-2012 du ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport, volet Enseignement supérieur, prêts et bourses


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Journal des débats

(Dix heures une minute)

Le Président (M. Marsan): À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

Enseignement supérieur et prêts et bourses

La commission est réunie afin de procéder à l'étude des crédits budgétaires du volet Enseignement supérieur, prêts et bourses, du portefeuille Éducation, Loisir et Sport pour l'année financière 2011-2012. Une enveloppe totale de six heures a été allouée pour l'étude de ces crédits, dont deux heures ce matin, trois heures cet après-midi et une heure en soirée.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Richard (Marguerite-D'Youville) est remplacée par Mme Malavoy (Taillon).

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie. Je vous informe que nous procéderons à une discussion d'ordre général par blocs d'environ 20 minutes maximum, incluant les questions et les réponses sur l'ensemble des crédits du volet Enseignement supérieur, prêts et bourses du portefeuille Éducation, Loisir et Sport, et de mettre aux voix ces crédits cinq minutes avant la fin de la période de six heures qui nous est allouée. Alors, nous avons commencé à l'heure, nous pouvons également terminer à l'heure.

Remarques préliminaires

Nous débuterons sans plus tarder avec les remarques préliminaires. Mme la ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport, vous disposez de 15 minutes pour vos remarques d'ouverture. Mme la ministre.

Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Merci beaucoup, M. le Président. Et je veux saluer mes collègues parlementaires, en particulier la députée de Taillon, porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enseignement supérieur, mes collègues également de la formation gouvernementale et toute l'équipe du ministère qui m'accompagne et que j'aurai l'occasion de vous présenter un peu plus tard. Donc, nous débutons plusieurs heures d'études de crédits consacrées au ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport.

Avant de vous parler plus spécifiquement des crédits en enseignement supérieur, j'aimerais tout de même, très rapidement, présenter la situation globale du ministère en termes de crédits budgétaires. Vous aurez remarqué, M. le Président, que, depuis 2003, les crédits réservés à l'Éducation suivent une constante progression, et, cette année, ils ont augmenté de plus de 500 millions de dollars, ce qui les porte à 15,5 milliards de dollars pour l'année 2011-2012. Cela représente une augmentation de 3,3 % par rapport à l'année dernière.

Il faut reconnaître que les besoins en éducation sont grands, et j'ai été à même de le constater depuis que je suis ministre de l'Éducation du Loisir et Sport. Par ailleurs, j'ai constaté que des efforts importants étaient réalisés dans l'ensemble du réseau de l'éducation pour assurer la réussite des jeunes et offrir des services éducatifs de qualité à tous les ordres d'enseignement. Et je tiens ici à remercier l'ensemble des partenaires du réseau de l'éducation pour leur dévouement et la qualité de leur travail.

L'année 2010-2011 a été marquée par plusieurs actions visant à renforcer les liens de collaboration entre le ministère et le réseau de l'éducation, particulièrement dans le but de soutenir la persévérance et la réussite scolaire. Bien sûr, nous avons réuni les partenaires pour, par exemple, discuter de l'intégration des élèves handicapés ou en difficulté d'adaptation et d'apprentissage. Et vous vous souviendrez qu'une deuxième grande rencontre, un deuxième grand rendez-vous portant sur le financement des universités a eu lieu en décembre dernier. Considérant l'importance de la question, nous sommes donc déjà passés à l'action, comme en témoignent les mesures annoncées dans le récent discours sur le budget du ministre des Finances.

Parlons maintenant un peu plus spécifiquement d'enseignement supérieur, le thème auquel nous allons consacrer cette journée d'étude de crédits. L'enseignement supérieur est sans contredit au coeur du développement économique, social et culturel du Québec. Dans toutes les régions du Québec, nos cégeps et nos universités contribuent à l'essor de la société québécoise et au développement de sa richesse. Au sein des diverses collectivités, nos établissements d'enseignement supérieur sont de véritables pôles de savoir, de recherche, d'innovation, d'où l'importance de les soutenir adéquatement. Pour l'année 2011-2012... En fait, je prends tout de suite le temps de vous dire, M. le Président, que, dans ces remarques préliminaires, je vais prendre le temps de vous parler un peu plus du réseau collégial. Je sais, à cause des décisions sur les droits de scolarité et le financement des universités, que sûrement nous allons consacrer plusieurs heures de discussion autour de ces thèmes, mais je veux profiter de l'occasion ici pour porter un peu notre attention sur le réseau collégial. Pour l'année 2011-2012, l'enveloppe budgétaire destinée au réseau collégial, donc au cégep, s'élève à près de 2 milliards de dollars. Cela représente une augmentation de 106,4 millions de dollars par rapport à l'année dernière. Je tiens à vous souligner que des efforts importants sont déployés pour soutenir les cégeps éloignés des grands centres qui font face, eux, à des baisses importantes de clientèle.

Aussi, nous accordons une attention particulière aux programmes de formation technique afin qu'ils répondent de façon optimale aux besoins des personnes et du marché du travail dans chacune des régions du Québec. Une série de rencontres sont prévues dans l'ensemble du Québec pour faire le point sur les problématiques des diverses régions en vue de poursuivre l'amélioration des moyens mis en place pour former une main-d'oeuvre compétente et qui répond aux besoins du marché du travail. Cette tournée, qui rassemble dans toutes les régions du Québec l'ensemble des partenaires concernés, cette tournée sera suivie en juin d'une rencontre nationale sur l'adéquation, formation et emploi qui s'inscrit dans le prolongement, dans la suite des deux premiers grands rendez-vous qui nous ont permis de faire avancer la question du financement des universités et celle de l'intégration des élèves en difficulté. Et je n'ai nul doute que cette rencontre nationale, qui sera coprésidée par ma collègue la ministre de l'Emploi, nous permettra également d'être dans un moment de décision pour la formation technique et l'adéquation entre le réseau de l'éducation et les besoins du marché du travail.

Il faut savoir que, chaque année, des investissements de plus de 1,5 milliard de dollars sont consentis en moyenne pour le développement de la formation professionnelle et technique. À elle seule, la formation technique a nécessité des investissements de 973,5 millions de dollars en 2009-2010, dont 103,6 millions essentiellement pour l'acquisition d'équipement et de maintien d'infrastructure. L'importance de ces sommes-là reflète bien l'ampleur de notre offre de formation dans nos collèges. En effet, nos 48 cégeps offrent plus de 732 parcours de formation technique sur l'ensemble du territoire. Nous parlons de 110 programmes d'études ministérielles qui sont revus, ajustés périodiquement avec la collaboration des spécialistes du milieu du travail. La recherche effectuée par les établissements d'enseignement collégial contribue également à la vitalité des régions, et nous allons continuer de l'appuyer.

Effectivement, M. le Président, il est important de souligner qu'il se fait également de la recherche au niveau collégial. Au cours des dernières années, le gouvernement a reconnu une quarantaine de centres collégiaux de transfert technologique, mieux connus encore sous l'anagramme, là, CCTT, dans diverses régions du Québec. Ces centres de transfert technologique apportent aux entreprises une expertise et un soutien des plus précieux. C'est notamment grâce à cette collaboration que peuvent se développer des créneaux d'excellence en région. En septembre dernier, le gouvernement a reconnu cinq nouveaux CCTT, dépassant du même coup son engagement de hausser à 45 leur nombre, là, au cours de son mandat.

En ce qui a trait à l'enseignement universitaire, le gouvernement a clairement indiqué son intention de soutenir les universités québécoises en augmentant leur financement au cours des cinq prochaines années afin d'accroître le nombre de diplômés universitaires et de favoriser l'excellence ainsi que la performance dans notre réseau universitaire. Les mesures ont été annoncées lors du dernier discours sur le budget. Pour 2011-2012, la somme allouée au réseau universitaire s'élève à près de 3 milliards de dollars, ce qui représente une augmentation de 86,3 millions de dollars par rapport à l'année dernière et de plus de 1 milliard de dollars comparativement à 2002-2003. Vous avez bien compris, M. le Président, depuis 2002-2003, les universités québécoises disposent de 1 milliard de dollars de plus.

**(10 h 10)**

L'effort consenti par le gouvernement du Québec pour financer la formation universitaire est donc très significatif, comme en témoignent ces crédits de même que les importants réinvestissements effectués au cours des dernières années. C'est d'ailleurs pourquoi nous avons jugé essentiel d'organiser la rencontre du 6 décembre dernier afin de discuter avec l'ensemble des partenaires de l'avenir de nos universités. Nous conviendrons tous de la nécessité de hausser le financement des universités afin d'assurer la qualité du diplôme universitaire québécois, afin de développer et d'améliorer l'offre de formation, afin de fournir aux étudiants et aux étudiantes des services de qualité et afin d'assurer la position concurrentielle de nos universités en Amérique du Nord. Le premier ministre l'a toutefois indiqué lors de son discours inaugural, tous devront participer au redressement financier du système universitaire: le gouvernement qui continuera à être là à bonne hauteur, le secteur privé doit être interpellé, de même que les étudiants et étudiantes à qui l'on demande de faire leur juste part.

Au cours de la prochaine année, j'entends conclure des ententes de partenariat avec chacune des universités afin que les revenus additionnels contribuent à offrir un meilleur enseignement, de meilleurs services aux étudiants, à améliorer l'environnement d'apprentissage et de recherche ainsi que la compétitivité des universités à l'échelle nationale et internationale, et, bien sûr, tout ça dans un contexte de maintien des équilibres budgétaires.

Même si la contribution des étudiants et des étudiantes s'avère de loin la plus faible au Canada, il est bien entendu que l'augmentation du financement des universités ne doit pas reposer uniquement sur la hausse des droits de scolarité. Le gouvernement a fait connaître sa volonté d'appliquer une hausse progressive des droits de scolarité à compter de 2012-2013, mais en instaurant des mesures préservant l'accessibilité aux études, et tout ça dans un contexte non pas de désengagement de l'État, mais dans un contexte continuel où le gouvernement, à même les impôts des contribuables, continuera lui aussi à investir dans les budgets des universités.

Parlons d'accessibilité aux études. Pour l'année 2011-2012, les crédits alloués pour l'aide financière aux études s'élèvent à 547,5 millions de dollars, soit une augmentation de 15,6 millions de dollars attribuable, bien sûr, à l'ajustement des frais de scolarité de 100 $ par année scolaire, mais aussi attribuable à l'indexation des paramètres pour le calcul de frais de subsistance. Une bonification a été apportée au programme de prêts et bourses afin de mieux soutenir les familles monoparentales. Ainsi, l'exemption des revenus de pensions alimentaires sera de 1 200 $ par année, par enfant, alors qu'elle est actuellement la même, peu importe le nombre d'enfants. Vous voyez que c'est une bonification importante qui se traduira par le versement de près de 1,4 millions de dollars en bourses additionnelles aux bénéficiaires ayant deux enfants et plus à leur charge à compter de l'année 2011-2012.

En conclusion, M. le Président, je ne pourrais terminer sans mentionner les efforts demandés au réseau de l'éducation ainsi qu'au ministère pour donner suite à l'objectif gouvernemental de retour à l'équilibre budgétaire d'ici 2013-2014. Je fais ici référence, bien sûr, à l'adoption de la loi n° 100, au respect de la loi n° 100, mais je fais aussi référence à une série de mesures à venir, d'efforts à faire que devront continuer à faire nos partenaires des réseaux de l'éducation, notamment le réseau collégial et le réseau universitaire. L'atteinte de l'équilibre budgétaire est une condition à mettre en place au Québec, dès 2013-2014, pour que toutes les générations de Québécois puissent profiter d'un environnement économique, social, éducatif et culturel favorable à leur épanouissement.

Il va sans dire que ces efforts budgétaires devront nous amener à faire les choses autrement, à lutter contre la bureaucratie, mais j'ai la ferme conviction que nous pouvons y arriver, notamment en continuant d'alléger de part et d'autre nos processus administratifs et en travaillant davantage en concertation, en regroupement, pour éviter de multiplier inutilement les interventions.

Je termine ici ce survol des actions ministérielles concernant l'enseignement supérieur, et je vous assure de ma plus entière collaboration tout au long de cette journée de l'étude des crédits et également de la collaboration du personnel du ministère qui est à la disposition des parlementaires de cette Chambre. Est-ce que j'ai le temps de les présenter dès maintenant, M. le Président?

Le Président (M. Marsan): Il vous reste...

Mme Beauchamp: Donc, permettez-moi de vous présenter, en terminant, le personnel du ministère de l'Éducation, du Loisir, du Sport qui nous accompagne pour cette étude de crédits. Permettez-moi de vous présenter la sous-ministre en fonction, Mme Louise Pagé, également la sous-ministre adjointe responsable du réseau universitaire, Mme Christiane Piché, Mme Brigitte Guay, qui est responsable... quel est votre titre exact?

Mme Guay (Brigitte): Service en soutien à l'admission et à l'aide financière aux études.

Mme Beauchamp: Donc, notamment pour la journée qui s'annonce, Mme Guay sera en soutien au niveau de l'aide financière aux études. Il y a également MM. Martin Dorion, Robert Poulin, Pierre Boutet, qui sont de l'équipe des affaires universitaires ou encore de l'équipe du financement et de l'équipement qui nous accompagne, Mme Kathleen Langlais, M. Daniel Desbiens, qui est le directeur Formation professionnelle et technique. Et nous avons également, de l'équipe de soutien, Mmes Joëlle Jobin, Jérôme Lapointe et Madeleine Poirier, et je tiens à vous assurer que toute cette équipe du ministère est à votre entière disposition pour répondre adéquatement aux questions des parlementaires. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie, Mme la ministre de l'Éducation, des Loisirs et du Sport. Nous poursuivons nos travaux, et j'inviterais Mme la porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enseignement supérieur, de prêts et bourses à prendre la parole pour ses remarques préliminaires pour une durée d'environ quinze minutes. Mme la députée de Taillon.

Mme Marie Malavoy

Mme Malavoy: Merci, M. le Président. C'est à mon tour de vous souhaiter... de nous souhaiter une bonne journée, assez intense, pour parler de l'enseignement supérieur.

Je vais commencer par la fin, parce que ça va aller très vite. Je vais vous présenter mon équipe à moi: Marie-Christine Fillion, qui est recherchiste en matière d'éducation, et Jean Bissonnette, qui est adjoint à mon bureau de comté. Et, voilà, j'ai fait le tour de ma grande équipe. Cela dit, je pense que nous allons vous faire la preuve que nous avons eu le temps de préparer, malgré tout, un bon questionnement en matière d'enseignement supérieur pour la journée, et je salue, bien évidemment, la ministre et les gens qui l'accompagnent, pour lesquels j'ai une très grande admiration, je dois dire. Je suis une convaincue de la qualité de notre fonction publique, particulièrement en matière d'éducation. Donc, je vous dis tout de suite, il se peut que certaines de mes remarques, de mes critiques aient l'air, à un certain moment donné, vigoureuses, mais ça n'est pas adressé aux personnes; éventuellement ce sera adressé à des choix qui sont faits et qui ne sont pas faits en matière d'enseignement supérieur.

J'aimerais dire d'abord que c'est un exercice, pour moi, qui est très important, que nous faisons annuellement et donc que nous commençons aujourd'hui. On est dans les premiers, là, je sais que ça a commencé hier, mais on est malgré tout dans les premiers à faire cet exercice de reddition de comptes, c'est-à-dire à essayer de voir à la fois comment a-t-on dépensé l'argent qui était alloué l'an dernier, mais surtout quels sont les choix que nous faisons pour la suite des choses. Parce que, vous en conviendrez avec moi, M. le Président, derrière les chiffres, il y a des choix, toujours. Les chiffres, ils indiquent quelles sont nos perspectives, pourquoi on met de l'argent là, pourquoi on en met moins, pourquoi on en met plus. Bien sûr, ces choix-là sont basés sur une réalité qui ne dépend pas uniquement de notre bon vouloir. On sait par exemple que le Québec n'est pas, de façon générale, dans une période de grande croissance économique, avec une abondance qui se reflète dans ses finances publiques. Mais, cela dit, avec les crédits dont nous disposons, il s'agit de voir ce que nous comptons en faire et surtout, quand il y a des choix, qui doit en assumer la responsabilité.

Alors, bien évidemment, la ministre s'en doutait, je crois bien, nous aborderons aujourd'hui, plus dans l'après-midi, la question, entre autres, des droits de scolarité pour les étudiants et tout ce qui est le financement des universités, la part que chacun doit faire. Et, là-dessus, j'aurai bien évidemment des remarques critiques parce que je ne suis pas en accord avec certains des choix qui sont faits, mais je pense que je ne vous étonne guère en vous disant cela.

J'aimerais toutefois bien recentrer que l'enseignement supérieur, pour le Québec comme pour toutes les sociétés, c'est vraiment le lieu d'un moteur de développement. Nous sommes un État de petite taille, si nous nous regardons dans l'ensemble du monde occidental et du monde entier encore plus, nous ne pouvons nous développer, conserver notre niveau de vie et même l'améliorer, combattre des inégalités sociales que si nous sommes capables de nous assurer que de plus en plus, dans la population, de personnes, de jeunes mais aussi d'adultes, acquièrent une formation de qualité et, en conséquence, deviennent des citoyens et des citoyennes mieux éclairés et également gagnent leur vie honorablement, mais aussi pour le bien de tous. Et donc c'est un choix qui est incontournable, investir dans l'enseignement supérieur. On ne pourrait pas imaginer le Québec de demain sans que de plus en plus de personnes soient formées dans nos cégeps et dans nos universités.

**(10 h 20)**

Je me souviens d'un sociologue français, qui est toujours vivant, mais qui est assez âgé, qui s'appelle Alain Touraine, que j'ai eu le bonheur de côtoyer à quelques reprises et qui disait... En fait, il nous posait la question: Quelle est la plus grande révolution dans le monde? Alors, on cherchait des révolutions historiques, une date qui indiquerait une révolution qui aurait changé la face du monde. Il y en a qui disaient la Révolution française ou des choses comme ça. Et il disait: Non, non, je ne cherche pas une date, je ne cherche pas une révolution dans l'histoire. La plus grande révolution de l'histoire, c'est l'éducation. C'est l'éducation qui a révolutionné l'histoire de l'humanité.

Et d'ailleurs c'est l'éducation qui permet de mesurer aussi les plus grands écarts malheureusement que nous avons entre nous, parmi les peuples de la terre, entre ceux et celles qui ont accès à une éducation de qualité -- je crois honnêtement que c'est notre cas au Québec -- et ceux et celles qui n'arrivent même pas, faute de moyens, à scolariser leurs petits enfants. Et là il y a une révolution à faire, bien évidemment, dans ces cas-là.

Pourquoi c'est une révolution? Parce que ça ouvre les clés de la connaissance, ça ouvre aussi non seulement le monde du savoir, mais ça ouvre, pour soi-même, tout un horizon de compréhension du monde et aussi de sentiment, à juste titre, que plus on en sait de choses, plus on se pense avoir un certain pouvoir sur le monde qui nous entoure.

Et donc je serai toujours très, très vigoureuse pour dire: S'il y a un endroit où il faut investir le plus et sur lequel il ne faut jamais faire d'économies, c'est bien dans le domaine de l'éducation au Québec. Je dis ça d'entrée de jeu parce que je reviendrai plus tard dans la journée sur la question de l'effort qu'on demande aux étudiants et aux étudiantes et je pense que, malheureusement, ce sera désincitatif par rapport à leur accès à l'université particulièrement, et je crois que c'est un mauvais choix, compte tenu des défis que je viens d'évoquer.

Il y a donc de grands enjeux dans le monde de l'éducation. Il y a, je le vois bien... Cette année plus peut-être qu'à d'autres moments, il y aura de grandes différences dans notre façon d'aborder les choses. C'est sûr que le choix du récent budget marque un changement de cap qu'on n'avait pas eu depuis des décennies au Québec. Que ce soit le gouvernement libéral ou que ce soit le gouvernement québécois, on s'était maintenus à peu près dans les mêmes choix. Que l'on parle du gel des droits de scolarité dont on a dit, c'est vrai, qu'il avait couru pendant 43 ans, ou que l'on parle de la hausse que le gouvernement libéral a décrétée pour les cinq dernières années, on reste quand même à peu près dans les mêmes paramètres.

À partir d'aujourd'hui, je pense qu'on change de paradigme et on en rejoint un autre qui existe chez nos voisins du Canada et qui existe bien évidemment chez nos voisins du Sud, les États-Unis, mais dont je souhaiterais qu'il ne soit pas le reflet des choix du Québec. On y reviendra.

Autre élément que j'aimerais peut-être aborder en remarques préliminaires, c'est que, dans nos choix, il faut aussi qu'on mobilise les acteurs, il faut qu'on donne envie aux gens de suivre le mouvement. Il faut que ce soit, je dirais, un élan qui soit imprimé aux acteurs dans le monde de l'éducation. Et je crois qu'il y a des mesures actuellement qui sont prises ou qui ne sont pas prises et qui sont plus démobilisatrices que mobilisatrices. Donc, ce sont des questions que je vais poser de façon plus pointue, bien sûr, à l'aide des documents qu'on nous a fait parvenir, mais je voulais quand même aborder ça un peu avec ma philosophie globale en commençant.

Et je vous dis simplement, en terminant ces remarques préliminaires, que, quant à moi, j'aborde ces échanges avec un esprit ouvert. Je pense qu'on peut être critique et qu'on peut être ouvert. Je pense qu'on peut être ferme, mais qu'on peut aussi être à l'écoute. Et je me fais donc un plaisir d'avoir plusieurs heures aujourd'hui pour aborder les crédits en enseignement supérieur. Je vous remercie.

Discussion générale

Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Taillon. Nous allons immédiatement entreprendre notre période d'échange, et je vais à nouveau vous céder la parole pour un maximum de 20 minutes. Mme la porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enseignement supérieur, de prêts et bourses, Mme la députée de Taillon, vous avez la parole.

Mme Malavoy: Merci, M. le Président. Donc, je voudrais aborder, pour commencer, le financement de l'enseignement supérieur dans sa globalité. Cet après-midi, j'irai de façon plus pointue sur la question des universités et des choix qui sont faits par rapport aux universités, mais j'aurais besoin qu'on me clarifie certaines choses.

Une chose qui est difficile à suivre, et je ne fais pas de reproche, mais je le constate, une chose qui est difficile à suivre, c'est, quand on a des plans sur plusieurs années, l'évolution réelle d'une année à l'autre. Alors, par exemple, il y avait jusqu'à maintenant des plans de réinvestissement de 2006-2007 à 2011-2012, et on essayait de suivre, nous, au fur et à mesure, chaque année, un peu le plan réel de réinvestissement en enseignement supérieur, et il y a des chiffres que j'aimerais bien pouvoir comprendre, particulièrement concernant le fameux milliard que le gouvernement s'était engagé à investir en enseignement supérieur d'ici 2012, donc d'ici peu de temps, là. On serait dans la dernière année de ce plan de réinvestissement avant de passer au réinvestissement dont on a parlé, jusqu'en 2017. Alors, vous me suivez par rapport à ça? Et je fais référence, entre autres... J'ai apporté avec moi, là, le budget 2008-2009, mais, de toute façon, comme je parle de données que vous avez certainement à l'esprit, parce que ce fameux milliard, on le retrouve partout... Donc, on s'engageait à 1 milliard.

L'an dernier -- puis je comprends que la ministre n'était pas en fonction, mais j'ai vraiment besoin de le clarifier, là, j'essaie de faire un lien pour comprendre où nous en sommes -- l'an dernier, j'avais questionné la prédécesseure de la ministre, et on comprenait que, dans ce plan de réinvestissement de 2006-2007 jusqu'à 2011-2012, il y avait comme des tranches de réinvestissement annuelles. Et, en faisant une étude un peu détaillée de ce que j'avais comme documentation l'an dernier, j'avais indiqué à la ministre qu'à mon avis la part que l'on devait réinvestir en 2010-2011 était insuffisante, et je l'avais chiffrée, avec les documents que j'avais en main, à 83 millions. C'était le total du programme 5 pour l'année 2010-2011. On indiquait 83 millions qui était le réel investissement.

Cette année, dans les tableaux qu'on me... Et puis je précise simplement qu'à l'époque la ministre de l'Éducation me disait qu'elle était d'accord et que, compte tenu des finances du Québec, on ne pouvait pas réinvestir plus que ça l'an dernier, et qu'il faudrait donc faire une part plus grande pour la dernière année du réinvestissement, O.K.? Elle disait: En 2010-2011, c'est vrai, c'est 83 millions, mais, en 2011-2010, si on veut atteindre le milliard, il faudra réinvestir plus.

Là, j'essaie donc... Je reviens au document de cette année qui est dans le plan de financement des universités, O.K.? Donc, dans le plan de cette année, on nous dit, à la page 19, que le réinvestissement du Québec de 1 milliard de dollars dans l'enseignement supérieur... Vous voyez le tableau. Et on va donc jusqu'en 2011-2012, comme prévu, puis on indique que le solde requis pour respecter l'engagement 2010-2011, c'est 350 millions, puis 2011-2012, 198 millions.

Moi, j'aimerais qu'on m'aide à ventiler ces sommes-là. Parce que, l'an dernier, il y avait comme un manque qui était reconnu, on n'arrivait pas à la part qu'on aurait souhaitée avoir. Puis, cette année, quand je regarde les tableaux qu'on me présente ici, à la page 19, donc, du plan de financement des universités, on a l'impression que tout va bien jusqu'à la fin, qu'on a toujours réinvesti ce qu'on devait réinvestir, qu'il n'y avait pas de trou l'an dernier puis qu'évidemment on arrivera jusqu'à la fin sans problème pour respecter l'engagement du 1 milliard de dollars. Honnêtement, j'aimerais comprendre ces chiffres-là parce que, d'une année à l'autre, je n'arrive pas à les comprendre.

Le Président (M. Marsan): Alors, merci. Mme la ministre de l'Éducation, des Loisirs et du Sport, vous avez la parole.

Mme Beauchamp: Est-ce que vous me donnez une minute? Je veux juste m'assurer que l'équipe soit capable de trouver un chiffre.

Le Président (M. Marsan): Oui.

**(10 h 30)**

Mme Beauchamp: Juste un instant.

(Consultation)

Le Président (M. Marsan): Ça va? Alors, Mme la ministre, la parole est à vous.

Mme Beauchamp: Merci beaucoup, M. le Président. C'est que je voulais juste être sûre que l'équipe du ministère pouvait se mettre à la recherche d'information plus pointue que je leur demandais.

D'entrée de jeu, là, je veux juste prendre vraiment quelques instants, très rapidement, pour commenter certaines déclarations de la députée de Taillon. Je tiens, à mon tour, à lui dire que je crois que ces discussions, durant la journée, pourront se faire dans un contexte respectueux -- je pourrais reprendre ses paroles -- à la fois ferme et respectueux. Et effectivement c'est le bon forum pour le faire. Nous sommes là pour cela.

Évidemment, nous ne pouvons pas partager la même vision sur tout. Mais je veux, à mon tour, l'assurer de ma plus grande collaboration, également lui dire que je suis d'accord pour dire que, derrière les chiffres, il y a des choix et que ces choix doivent être expliqués, assumés. Mais c'est intéressant d'entendre cette notion de choix de la part de la députée de Taillon. Mais je suis d'accord avec elle, il faut que, comme gouvernement ou comme formation politique, on soit capables d'expliquer nos choix, puis de les affirmer, et bien sûr de les porter, et d'être... d'avoir cet engagement derrière les choix de société que l'on représente.

Et je suis aussi d'accord avec elle sur cette notion que nos universités et, j'ajouterais, nos cégeps sont des moteurs de développement dans nos régions. Et ça, c'est vraiment à la base, effectivement, d'une vision que l'on a à l'échelle du Québec, là, d'assurer le développement de ce réseau universitaire et de ce réseau collégial. Et je suis d'accord avec elle. Et je lui rappellerai que, fondamentalement, comme peuple francophone d'Amérique, nous avons une très grande responsabilité d'assurer le développement et le rayonnement de notre réseau universitaire au Québec. Je pense qu'en grande partie on peut déjà en être fiers, mais on a vraiment une responsabilité historique, sociologique de soutenir ce réseau d'enseignement supérieur au Québec, et les choix que nous avons faits sont des choix importants, déterminants. Et c'est des choix, même, qui... En fait, c'est un peu une première, hein, que les universités disposent d'un contexte financier, d'un cadre financier, sur cinq ans, prévisible. Et juste là, juste le fait que nous avons offert ce cadre financier aux universités marque l'importance que l'on accorde au réseau universitaire québécois.

Quelques secondes, je veux juste confirmer un chiffre que je veux donner à la députée de Taillon.

Le Président (M. Marsan): Oui.

(Consultation)

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Je voulais juste être sûre, là, d'avoir le bon chiffre devant moi, et je pourrai vous le communiquer dans quelques instants.

Donc, je vais essayer, là, de faire le tour de la question de la députée de Taillon quant à la notion des investissements, le cadre financier qui était prévu depuis 2006-2007, et notamment l'engagement, à partir de 2007, là, d'ajouter 1 milliard de dollars, en sus des transferts fédéraux, dans le réseau de l'éducation.

Peut-être, la première chose à indiquer et à affirmer, c'est que, tel qu'on s'y était engagés... Ça, c'est la première chose à mettre, là, c'est... Tous les transferts fédéraux obtenus ont été, bien sûr, investis dans le réseau de l'éducation, c'est-à-dire retournés dans le réseau de l'éducation, dans les proportions entendues, à savoir 60 % vers les universités et 40 % vers le réseau collégial. Ça, c'est la première chose à affirmer puis à établir, c'est que, tel qu'on s'y était engagés, l'ensemble des transferts fédéraux sont bel et bien investis et retournés vers le réseau supérieur de l'éducation.

Maintenant, je veux rappeler à la députée de Taillon que, cette année, nous investissons, donc, 198 millions de dollars supplémentaires dans le réseau supérieur, soit 120 millions vers les universités et 78 millions vers le réseau collégial -- est-ce que je dis les bons chiffres? voilà -- donc ça nous permet... C'est bien ça?

Une voix: ...

Mme Beauchamp: Excusez-moi. Ce sera... c'est l'équivalent de ce qu'on aura à faire l'année prochaine. Pardonnez-moi. C'est pour ça que j'avais une hésitation.

Donc, je veux juste reprendre les éléments. Cette année, nous faisons des efforts, que je vous ai... dont je... que je vous ai nommés dans le discours, dans mes remarques préliminaires -- je peux-tu juste ravoir les chiffres? Donc, c'est 102 millions au niveau des cégeps et environ 85 millions au niveau des universités. Je dis les chiffres de mémoire. Je vous les ai présentés dans les remarques préliminaires et...

Mme Malavoy: ...

Le Président (M. Marsan): Oui. Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Quand la ministre dit «cette année», c'est l'année 2011-2012?

Mme Beauchamp: Oui.

Mme Malavoy: O.K. Parce que, dans 2011-2012... je veux juste qu'on suive bien, mais, dans 2011-2012, dans le tableau du plan de financement des universités, on voit effectivement Enseignement collégial, 78 millions, Enseignement universitaire, 120. C'est ça que j'ai, moi, 2011-2012, pour l'année nouvelle.

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme la ministre.

Mme Beauchamp: ...de voir. Donc, je le disais dans mes remarques préliminaires, les montants sont de 106... environ 106 millions de dollars au niveau collégial et 86 millions de dollars au niveau universitaire. Je reviendrai, là, pour essayer de voir comment concilier ça avec le document que la députée de Taillon a devant elle. Parce que je veux juste préciser la chose suivante, et je vais le faire en toute transparence: ça signifie que, par rapport à l'engagement de réinvestir 1 milliard de dollars en sus des transferts fédéraux, nous atteindrons cet engagement l'année prochaine.

Lorsque nous regardons dans le document, au niveau des universités, si vous prenez le document du plan universitaire en page 18, vous voyez ici, le plan, la contribution gouvernementale vers le réseau universitaire et vous voyez donc que les contributions additionnelles, pour l'année 2013-2014, vont atteindre... pardon, pour l'année 2012-2013, vont atteindre 117 millions de dollars. Je prends le temps, en toute transparence, d'indiquer, pour faire une histoire courte... Je vais juste faire une histoire courte: par rapport au milliard de dollars de réinvestissement avec les sommes investies, en 2011-2012, nous serons à 80 % de notre objectif et, pour l'année prochaine... Donc, ce sera en 2012-2013 que nous aurons atteint la totalité de cet engagement de réinvestissement, notamment dans le réseau universitaire, avec le 117 millions de dollars additionnels prévus, là -- c'est un engagement formel -- vers le milieu universitaire pour 2012-2013.

Donc, les engagements sont soutenus, sont là, et l'engagement sera atteint à 100 % dans l'année 2012-2013.

Mme Malavoy: M. le Président...

Le Président (M. Marsan): Oui, Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Moi, j'aimerais qu'on regarde la page 19 -- la ministre me parle de la page 18, mais vous comprendrez que ce n'est pas facile de suivre -- parce qu'à la page 19 on dit bien: «En 2007, le gouvernement a pris l'engagement d'allouer à l'enseignement supérieur 1 milliard de dollars additionnels en 2012[...], en plus des transferts [...] du gouvernement fédéral.» Là, on a clarifié cette question, les transferts du gouvernement fédéral, c'est en plus. Ensuite, on détaille un peu comment on a réinvesti cet argent et, en indiquant les crédits de 2011-2012 sur la même page, on en conclut ceci, juste avant le tableau: «Le gouvernement aura donc respecté l'engagement formulé en 2007 pour les universités. Réinvestissement du Québec de 1 milliard de dollars [pour] l'enseignement supérieur.» Et ça a l'air d'être fait en 2012. Puis là la ministre me dit: On l'aura respecté mais seulement en 2012-2013. Donc, est-ce que c'est respecté dans le budget actuel ou est-ce que ce sera respecté dans le budget suivant?

**(10 h 40)**

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Oui. Reprenons le tableau. Très clairement, et comme je viens de vous l'indiquer, ce sera respecté en 2012-2013. Donc, ici, le tableau, vous l'avez, la partie réalisée de l'engagement, nous sommes à 802 millions avec les investissements de cette année. Nous sommes à 802 millions avec les investissements de cette année. Le solde -- nous parlons bien de solde -- requis pour respecter l'engagement, c'est le 198 millions, le 200 millions dont je vous parlais un peu plus tôt, mais ce 200 millions sera respecté en 2012-2013. Et c'est pour ça que je la ramenais à la page 18, parce qu'à la page 18 elle peut voir que la portion pour le milieu universitaire, là, qui s'élève à pas tout à fait 120 millions, est bel et bien respectée en 2012-2013.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Je ne veux pas avoir l'air de m'entêter, mais je prends le tableau de la page 19, dernière colonne, dernière colonne, c'est 2011-2012: «Partie réalisée de l'engagement, 802 millions; Solde requis pour respecter l'engagement, 198.» Nulle part, il n'est indiqué que ce solde est reporté à l'année d'après. Ça donne l'impression -- en tout cas, nous, quand on l'a lu -- qu'il faut donc réinvestir 198 millions, détaillés entre le collégial et l'universitaire, pour arriver au fameux milliard. Là, ce que vous me dites... ce qu'on me dit, M. le Président, c'est que, ce 198, je dois l'extraire de la colonne 2011-2012 et me dire que c'est juste l'année d'après. C'est ça?

Mme Beauchamp: M. le Président...

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: ...si la députée de Taillon le voit, là, nous ne faisons pas un total, là. En fait, c'était par souci de transparence. Vraiment, la page qu'elle cite, il y a, derrière cette page, un souci de transparence qui montre que... Lisons chaque ligne, là, on prend la dernière colonne, 2011-2012, les mots ne peuvent pas être plus clairs: «Partie réalisée de l'engagement -- partie réalisée de l'engagement en 2011-2012 -- 802 millions de dollars; Solde requis pour respecter l'engagement...» Nous avons tout détaillé. Et nous ne faisons pas un total, là.

Nous avons mis ça, et, dans le fond, ça aurait pu être un autre tableau avec «Solde requis pour respecter l'engagement», mais on l'a mis... inscrit comme ça par souci de transparence. Mais, on le voit, là, il y a ici un total. Le total donne: «Partie réalisée de l'engagement, 802 millions», et là, ensuite, l'explication, le solde requis pour respecter l'engagement, au niveau de l'enseignement collégial, 78 millions, au niveau de l'enseignement universitaire, 120 millions. Et je lui indique donc: à pratiquement 99 %, 98 %, cet engagement sera bel et bien réalisé en 2012-2013, puisqu'à la page précédente elle voit qu'en 2012-2013, pour les universités, on y retrouve 117 millions, ce qui est pratiquement 100 % de l'engagement réalisé dans l'année 2012-2013.

Donc, je suis désolée si... Moi, honnêtement, je le dis aussi, là, très... Moi, je ne crois pas que ça porte à confusion parce que, si on lit chaque ligne, chaque ligne est très claire. Mais voilà: «Partie réalisée de l'engagement, 802 millions», il y a un solde, on le reconnaît, il y a un solde pour respecter l'engagement. Du point de vue universitaire, l'engagement est réalisé en 2012-2013.

Le Président (M. Marsan): Alors, ceci terminerait notre premier bloc de 20 minutes. Nous allons poursuivre, et le prochain bloc sera au parti ministériel, et je vais céder la parole au député de Charlesbourg, qui est aussi l'adjoint parlementaire à la ministre de l'Éducation, des Loisirs et du Sport. M. le député.

M. Pigeon: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, permettez-moi de saluer d'abord Mme la ministre, Mme la députée de Taillon, mes collègues, saluer aussi le personnel de l'Assemblée et, bien sûr, le personnel du ministère.

Sur la question des universités, je pense qu'il est important de souligner qu'il y a eu une rencontre des partenaires de l'éducation sur l'avenir des universités et leur contribution au développement du Québec. Cette réunion-là s'est tenue, comme vous le savez, M. le Président, le 6 décembre, si ma mémoire est exacte. Et, dans un document extrêmement étoffé, préparé par le ministère, on donne énormément d'information sur à la fois ce qu'est notre système d'éducation, je dirais, là, tout ce que... et universitaire, tout ce que les universités ont accompli depuis un grand nombre d'années, mais tous les défis aussi qu'il nous reste à relever.

J'aimerais... et vous ne serez pas surpris que j'aie envie de le dire, les universités québécoises ont accompli des progrès considérables depuis les années soixante. Et je me plais à rappeler que je suis entré à l'université en 1963 et, à part quelques petites périodes, j'en suis sorti finalement en 2008. J'ai donc pu voir, de toutes les façons, l'évolution du système universitaire. Et, dans le document que le ministère a préparé pour la réunion du 6 décembre, on parle des progrès considérables depuis la Révolution tranquille, et je trouve ça important de signaler que les progrès sont non seulement en nombre, on sait qu'il y a de plus en plus d'étudiants qui fréquentent l'université, et nous en sommes fort heureux...

J'aimerais parler de la qualité. Il y a eu des progrès considérables du point de vue qualité. Je pense que la qualité de nos diplômés sur... dans le monde, en fait, ne laisse personne indifférent.

J'aimerais parler de la recherche. Il y a eu des progrès absolument incroyables. Le Québec est devenu, je dirais, un des phares de la recherche dans de nombreux domaines, et en particulier dans la recherche biomédicale, et aussi dans beaucoup de domaines de sciences humaines, et donc, bien sûr, aussi, des progrès du point de vue réputation. Je pense qu'au plan international, quand on voit que, dans le Times Higher Education Supplement, il y a deux universités québécoises parmi les 200 meilleures sur à peu près 5 000 ou 10 000 universités dans le monde, je pense qu'on est quand même bien positionnés. Alors, on a donc un excellent système universitaire, et le document le dit très bien.

Le document, bien sûr, parle de financement. Mme la ministre a eu l'occasion de le dire, mais c'est clair que, depuis 2003, un effort considérable a été fait par le gouvernement pour améliorer le financement. Le document parle de contribution des étudiants. Et je pense que, là aussi, on pourra y revenir, mais il y a des chiffres extrêmement importants. On parle aussi de l'accroissement souhaitable des dons provenant des particuliers et des entreprises, donc un autre élément extrêmement fondamental pour le financement des universités.

On parle, bien sûr aussi, dans le document, d'accessibilité financière aux études. Et je pense que, dans ce domaine-là, le Québec fait très bien. Et on parle finalement de gestion universitaire, de la performance des universités.

Donc... et je m'excuse pour ce long préambule, mais donc on a, dans cette journée du 6 décembre, vraiment fait le tour de toute la question, évoqué à peu près tous les aspects de la performance des universités, du financement, de la qualité, de l'accessibilité, et tout ça. Et donc j'aimerais que Mme la ministre prenne un instant pour nous parler des suites qui ont été données à cette journée du 6 décembre. Je pense que c'est important de voir que... Après avoir réuni un grand nombre de partenaires alentour de la table, avoir bien discuté, avoir préparé les documents, et ainsi de suite, il est intéressant que Mme la ministre nous explique les suites qui ont été données à cette rencontre des partenaires de l'éducation dans le domaine universitaire.

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme la ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport, vous avez la parole.

**(10 h 50)**

Mme Beauchamp: Merci beaucoup, M. le Président. Je veux remercier le député de Charlesbourg pour sa question puis lui témoigner aussi ma reconnaissance. Le député de Charlesbourg est mon adjoint parlementaire. Puis vous comprenez que je suis en poste depuis maintenant un peu plus de sept mois comme ministre de l'Éducation, mais avoir comme adjoint parlementaire une personne qui participe à mes réunions d'équipe, mais qui a lui-même été recteur d'une très importante université au Québec, l'Université Laval, et qui participe, et qui m'aide dans le choix des décisions, mais avec toute la sensibilité et la perspective que lui donne maintenant sa carrière de député, sa carrière de député, sa carrière de député de Charlesbourg, ici, dans la Capitale-Nationale, c'est un atout extrêmement précieux. Et je tiens ici à dire aux électeurs, électrices, aux citoyens du comté de Charlesbourg qu'ils sont chanceux de pouvoir compter sur un député qui a toute cette sensibilité et cette perspective, cette vision sur le développement de la société québécoise et sur la place que prend de façon névralgique le réseau de l'éducation. Je ne suis pas étonnée que le député ait choisi de me poser cette première question sur le thème des universités; je sais que c'est un enjeu de société qui lui tient vraiment très, très à coeur. Et je sais également qu'il endosse complètement la proposition... enfin, la décision du ministre des Finances, du gouvernement, sur ce plan de réinvestissement dans le réseau universitaire.

Je pense que la rencontre du 6 décembre dernier, à laquelle a participé le député de Charlesbourg, c'est une rencontre qui a été extrêmement importante. Et j'insiste sur le fait que cette rencontre-là, elle a été divisée en trois blocs, trois moments de discussion qui sont... qui ont été trois thèmes, dans cette journée, sur l'avenir et l'efficacité des universités, trois thèmes qui étaient d'égale importance. Et ça m'importe de le dire, M. le Président, parce que, bien sûr, et je peux comprendre pourquoi, là, historiquement, au Québec, le débat sur: Est-ce qu'on doit ou pas hausser les droits de scolarité?, c'est un débat qui aura marqué plusieurs générations de Québécois.

Et je comprends ça, là, et je respecte, là, c'est sain et c'est bon, dans notre société, qu'il y ait ce genre de débat de société. Mais la question de la hausse des droits de scolarité, toute aussi importante soit-elle et bien qu'elle mérite des débats dans notre société, cette question-là ne doit pas occulter le fait que, comme gouvernement, nous avons voulu tenir ce grand rendez-vous sur l'avenir des universités en mettant en parallèle et de façon concomitante et toute aussi importante non seulement le thème du financement des universités et la question de la hausse des droits de scolarité, mais, de façon toute aussi importante, la question de l'accessibilité aux études, notamment par les bonifications nécessaires au régime d'aide financière aux études, régime le plus généreux à l'échelle du Canada, à l'échelle de l'Amérique du Nord, dont on est fiers, qui fait partie du modèle de société qu'on voulait. Mais également, également, la journée, autant de temps a été consacré à la question de la performance des universités et ce qu'on était en droit d'exiger des universités, ce dont on pouvait s'attendre des universités. Et ça m'importe, donc, de vous dire que les discussions ont porté sur ces trois enjeux concernant l'avenir des universités, et on y a consacré tout autant de temps à la question du financement, la question de l'accessibilité et la question de la performance des universités.

Vous n'êtes pas sans savoir -- et on doit respecter ça, ça fait partie des choix dans notre société démocratique -- qu'un certain nombre de partenaires ont décidé de quitter la rencontre. Je veux juste souligner que, par ailleurs, ces personnes -- et heureusement et j'en suis contente -- ont participé à des discussions en atelier le matin, et on a pu avoir leur éclairage, et leurs opinions, et leurs prises de position durant ces ateliers du matin. Et ils ont décidé -- et ce choix leur appartient -- de quitter la rencontre pour marquer, je dirais, là, leur désaccord avec la question de la hausse des droits de scolarité. On se doit de respecter cela, bien que je considère toujours... Dans mon univers politique à moi, de choisir de laisser une chaise vide, c'est sûr que je peux juste le déplorer. Je respecte ce choix, mais je peux juste le déplorer, parce qu'honnêtement -- prenons l'exemple sur la question de la performance des universités, donc ce qu'on doit exiger des universités -- la contribution, l'éclairage, notamment des associations étudiantes, aurait été plus que précieux.

Néanmoins, la journée du 6 décembre a quand même permis des échanges qui ont été extrêmement importants. Je pense qu'il y a un élément qui... Malgré des désaccords ou des oppositions, même, sur le chemin pour y arriver, sur les moyens à mettre en place pour y arriver, je pense que je peux prétendre, là, que je n'ai entendu personne dire qu'il fallait que le budget des universités soit maintenu comme un statu quo ou encore, même, qu'il y avait trop d'argent dans les universités puis qu'il fallait baisser leur budget. Honnêtement, il n'y a personne qui est venu présenter une telle prise de position.

Je comprends et j'ai compris lors de la rencontre du 6 décembre qu'il y avait donc une volonté, une reconnaissance de ce qu'un peu plus tôt la députée de Taillon disait: les universités comme un moteur de développement, comme des institutions essentielles au développement de notre peuple, et qu'il fallait trouver les moyens d'appuyer le développement de ces universités dans un contexte où on connaît l'évolution des budgets des universités ailleurs en Amérique du Nord, bien sûr des universités américaines aux États-Unis, mais même l'évolution des budgets des universités canadiennes, par exemple.

Et la plupart des intervenants ont insisté pour dire que, oui, il y avait des choix de société qui ont été faits au Québec, puis des choix d'ailleurs que nous continuons à respecter. Il y a eu des choix de société qui ont voulu qu'au Québec, par exemple, à même les impôts des contribuables, et peu importent leurs revenus, là, tous les paliers d'impôt des contribuables contribuent au financement des universités. Et c'est même, en fait, au Québec, indéniablement, que c'est à partir des impôts des contribuables, peu importe qu'eux-mêmes soient diplômés universitaires ou pas... mais donc c'est à partir des impôts des contribuables qu'on finance le plus les universités.

Et vous savez quoi? C'est quelque chose qui va être maintenu. Même avec le plan sur cinq ans et la hausse prévue des droits de scolarité, toujours, au Québec, on sera l'endroit où c'est à même les impôts des contribuables qu'on va plus financer les universités. Pourquoi? Parce que le gouvernement prend l'engagement de continuer d'investir. L'idée ici, c'est de dire: Tout le monde fait sa part et tout le monde fait l'effort. Donc, oui, c'est un modèle où l'ensemble des contribuables québécois vont continuer à faire le plus gros de l'effort pour maintenir des institutions vraiment qui sont des fers de lance dans le développement éducatif, social, économique du Québec.

Un autre élément qui fait partie des choix de société historiques au Québec, c'est d'avoir les droits de scolarité, donc -- parce que c'est un peu une conséquence que nous assumons -- c'est de dire que... Si le financement provient majoritairement des impôts des contribuables québécois, un peu une conséquence de ça, c'est que ça nous permet de dire que les droits de scolarité sont les plus faibles à l'échelle canadienne.

Vous savez quoi, M. le Président? À la fin du cinq ans de réinvestissement dans les universités, ce sera toujours vrai. En fait, en 2016-2017, les droits de scolarité n'auront pas atteint la moyenne canadienne actuelle de 2010-2011. Donc, on voit que c'est un modèle qui reste là, un modèle qu'on assume, un modèle de société, mais un modèle qui reste vrai: les plus faibles droits de scolarité à l'échelle du Canada.

L'accessibilité aux études. Nous avons... Historiquement, on s'est donné un modèle où nous voulons garantir l'accessibilité aux études universitaires pour quelqu'un qui a le talent, qui a la volonté, qui a le rêve, l'ambition d'obtenir son diplôme universitaire. On a eu un choix de société où on a dit: Il faut à tout prix que tout Québécois puisse aller obtenir son diplôme universitaire, peu importe sa situation socioéconomique. Et, pour cela, historiquement, on s'est donné le régime d'aide financière aux études le plus généreux à l'échelle du Canada, indéniablement, on pourra en reparler, mais indéniablement. Vous savez quoi? Ça va rester vrai, le même modèle, en 2016-2017, indéniablement, le régime d'aide financière le plus généreux en Amérique du Nord, parce qu'on a choisi...

Si on parle de réinvestir dans les universités, par le gouvernement, par le secteur privé, par les étudiants, tout le monde était d'accord pour dire: Il y a une condition de succès, il y a une condition de succès, c'est qu'on soit capables de parler de façon convaincante et vraie de la bonification du régime d'aide financière aux études. Indéniablement. Et ça, c'est ressorti de la rencontre du 6 décembre. Les recteurs d'université nous demandaient d'assurer l'accessibilité aux études, les partenaires autour de la table. Et nous avons démontré cette écoute. Et on est parfaitement d'accord avec cette lecture que hausser les droits de scolarité sans toucher au Programme de prêts et bourses, ça, c'est contrevenir à l'accessibilité aux études. Mais hausser les droits de scolarité, hausser le budget des universités et bonifier le régime d'aide financière, là les études montrent qu'on ne contrevient pas à l'accessibilité aux études, et même on est capables de la maintenir et de la garantir.

**(11 heures)**

Troisième élément de la rencontre du 6 décembre qui est extrêmement important, c'est la question de la performance des universités. Et il y a eu trop de situations où on est... on peut ensemble déplorer certaines dépenses dans le milieu universitaire. Et je pense que la rencontre du 6 décembre nous a permis d'avoir l'adhésion du monde universitaire, qui a reconnu qu'il fallait qu'il s'engage. Oui, il y a une question d'autonomie dans le monde universitaire, c'est des gestions autonomes, mais, lorsque la grande part de son budget provient des argents des contribuables québécois, les contribuables québécois sont à même, à travers leur gouvernement, d'exiger de savoir où va l'argent.

Et on a entendu les recteurs, à ce moment-là, accepter et reconnaître que, si de l'argent supplémentaire leur était dédié, ils devaient prendre des engagements fermes et clairs pour parler, par exemple, de la hausse de la qualité de l'enseignement, de l'embauche de professeurs réguliers supplémentaires, de meilleurs services aux étudiants, une meilleure reddition de comptes, plus de clarté, et ce qui a amené, M. le Président, vous le reconnaîtrez, ensuite, peu de temps après, lors du budget, ce grand plan qui se tient à même trois blocs de la rencontre du 6 décembre, un plan où on a été capable non seulement de parler du réinvestissement dans les universités, non seulement être capable de parler clairement de la bonification du régime d'aide financière et de l'accessibilité aux études, mais être capable de parler -- et, comme ministre de l'Éducation, c'est extrêmement important, pour moi -- d'ententes de performance, de partenariats avec le monde universitaire, où on a établi des indicateurs précis.

Nous savons où doit aller l'argent. Et les universités doivent s'engager à mettre l'argent dans ces postes budgétaires, assurer des services aux étudiants, assurer la qualité de l'enseignement, assurer la qualité de la recherche et leur compétitivité au niveau international et respecter également des règles budgétaires imposées par le gouvernement, dont, par exemple, respecter les cadres salariaux, la politique salariale du gouvernement. Et, je tiens à le préciser, si les universités devaient s'écarter, s'éloigner du respect des indicateurs imposés, nous nous donnons le droit d'imposer des pénalités au milieu universitaire. C'est un effort de tous qui est demandé. C'est un effort demandé aux contribuables québécois, un effort demandé au secteur privé, un effort demandé aux étudiants. Nous sommes en droit d'exiger de savoir exactement où va l'argent, de s'assurer de ce à quoi il sert. Et ça, c'est extrêmement important.

Vous avez compris, M. le Président, que la rencontre du 6 décembre a été un événement important. Ça a été un grand rendez-vous, permettant de partager une même lecture, grâce à un document -- qui d'ailleurs est toujours disponible sur le site Internet du gouvernement -- qui dresse un portrait complet, vraiment complet de la situation. D'ailleurs, le document a été très peu critiqué, et je pense que les données provenant du ministère de l'Éducation et du ministère des Finances ont rapidement obtenu l'adhésion.

Donc, ça a été un événement qui a permis d'obtenir, je dirais... de faire en sorte qu'on partage une même lecture de la situation, une même volonté de parler de l'importance de réinvestir dans les universités, qui a permis d'établir sans aucun doute l'importance d'assurer l'accessibilité aux études et la bonification du régime d'aide financière, et l'adhésion des universités, malgré une réticence, on peut bien le dire, là, je dirais, une réticence un peu historique, là... Les universités sont jalouses -- parce que c'est historique -- sont jalouses de cette autonomie qu'on leur reconnaît. Mais, malgré le respect de leur autonomie, je pense que tous s'entendaient à dire: C'est un effort tellement important demandé... Parce que, là, ce n'est pas rien, là, on leur garantit d'ici cinq ans 850 millions supplémentaires de budget par année, récurrents, et ça leur donne un cadre prévisible dans lequel elles sont capables d'évoluer.

Donc, ça a été un moment vraiment important, cette rencontre du 6 décembre dernier, et ça a vraiment mis la base aux prises de décisions que vous avez reconnues dans le dernier budget de notre collègue ministre des Finances.

Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie, Mme la ministre. Et nous allons poursuivre nos échanges. Et je vais céder la parole à Mme la porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enseignement supérieur, de prêts et bourses, Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Merci, M. le Président. C'est sûr que les derniers propos de la ministre m'inspireraient des réactions immédiates, mais je veux prendre beaucoup de temps cet après-midi pour parler de la question du financement des universités, et donc je reviendrai sur ces questions-là.

Pour l'instant, j'aimerais aborder, parce qu'ils font partie également de l'enseignement supérieur, certains aspects touchant les cégeps. Et, je tiens à insister là-dessus, on a la chance d'avoir au Québec un modèle unique, qui, à certaines périodes, a été questionné. Je pense que maintenant l'accalmie est revenue. Et donc les collèges, qui ont à la fois une formation générale menant à l'université ou une formation technique menant à des emplois, à des métiers, c'est un modèle dont on peut être fier, et ils font bel et bien partie de l'enseignement supérieur. Et on sait en plus, vous me permettrez d'ajouter, que, dans les défis de renouvellement de la main-d'oeuvre que nous aurons ces prochaines années, il faudra puiser très largement, bien plus qu'on ne le fait actuellement, dans une jeunesse, là, qui se forme dans nos cégeps.

J'aborderai peut-être une première question d'ordre financier, mais, rassurez-vous, c'est plus simple que tout à l'heure. C'est sur la question des crédits que le fédéral, donc, a alloués aux cégeps. Et on a bien compris, et je crois que tout le monde était heureux de ça, que la proportion de 40 % de ces transferts est allée aux collèges, 60 % aux universités. Toutefois, il y a une chose qui reste, je crois, pas claire ou en tout cas pas à notre satisfaction, c'est que ce montant, donc, de 75 millions pour les collèges, il revient dans les budgets, mais il n'est pas indexé. Or, le gouvernement fédéral, pensons-nous, indexe cette somme quand il la transfère au Québec, mais le Québec choisit, le gouvernement du Québec choisit de ne pas verser l'indexation aux collèges, et donc de garder la même somme qui effectivement est transférée d'une année à l'autre.

J'aimerais savoir: Pourquoi ce choix de ne pas leur donner l'indexation, puisqu'on sait bien que, dans les collèges comme ailleurs, leurs coûts pour maintenir simplement en état les services qu'ils offrent nécessitent un peu plus d'argent chaque année?

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Je vais juste mettre en perspective la réponse que je vais donner, parce que la vraie perspective qu'il faut se donner, c'est que, du côté et des universités mais et des cégeps, le gouvernement du Québec, par la hausse de 100... Je suis toujours mêlée dans mes chiffres: 102 millions, 103? 102 ou 103 millions donnés aux cégeps cette année?

Une voix: ...

**(11 h 10)**

Mme Beauchamp: ...102 -- bon, je vais le retenir, là, je vais laisser faire les virgules -- 102 millions cette année couvre ce qu'on appelle familièrement les coûts de système. Donc, la notion de coûts de système, donc l'indexation des coûts de la vie, les salaires, les frais considérés comme devant être indexés, chauffage, entretien, vous savez, tous ces coûts fixes qui sont indexés, le budget consacré aux cégeps permet, là, d'affirmer que ce qu'on appelle familièrement... Et peut-être d'ailleurs que, derrière ce vocabulaire, il y a trop de réalités différentes, comprises différemment par plusieurs acteurs, là, mais, derrière ce qu'on appelle très familièrement les coûts de système, donc ces coûts sur... C'est ce qui est inévitable et incontournable si on veut qu'il y ait des étudiants dans des classes puis des professeurs pour enseigner à ces étudiants, c'est ces coûts-là, là. Donc, ça prend un prof, ça prend de l'équipement, ça prend du chauffage, un bâtiment, etc. Tous ces coûts, qui augmentent à chaque année à cause de l'inflation, ces coûts-là sont couverts par l'augmentation des budgets aux cégeps. Et donc ça, c'est le vrai bon contexte à décrire.

Par rapport à l'indexation des transferts du fédéral, effectivement, le ministère a choisi, comme l'année dernière, de ne pas transférer ces indexations, dans le contexte budgétaire que l'on connaît au gouvernement. Donc, ça fait partie de l'effort budgétaire qu'on assume, qu'on doit assumer pour l'équilibre budgétaire du gouvernement. Mais c'est pour cela, M. le Président, que ça m'importait de décrire le grand contexte. Je ne suis pas dans un contexte où ça veut dire qu'il manque de l'argent aux universités pour couvrir l'indexation de leurs frais fixes, là. Les coûts de système, au niveau des cégeps, sont couverts. Mais il est vrai, là, techniquement, je dirais, techniquement, que l'indexation des sommes des transferts fédéraux ne sont pas transférées, mais c'est dans un contexte, comme on le sait, où chacun doit faire son effort dans la poursuite de l'équilibre budgétaire du gouvernement.

Je rappelle gentiment, parce que c'est leur rôle, là, à la députée de l'opposition, que maintes et maintes fois de ses collègues se lèvent pour nous demander de faire cet effort de retour à l'équilibre budgétaire. Nous allons le faire. Nous sommes en très, très bonne voie de le faire. Nous remplissons nos engagements pour cette année. On devra continuer à le faire en 2013-2014.

Donc, je pense que le vrai message à retenir et l'élément qu'il faut confirmer et affirmer par rapport aux cégeps, c'est que tout ce qui est lié à l'indexation de leurs coûts de gestion à eux sont couverts par l'augmentation des crédits octroyés dans le dernier budget.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: M. le Président, une première chose, d'abord. Je veux voir si je comprends bien. Dans le cahier explicatif des crédits, le programme 5, Enseignement supérieur, l'élément 1, Cégeps -- c'est à la page 34 de ce cahier explicatif des crédits 2011-2012 -- je vois que...

Mme Beauchamp: ...juste répéter dans quel document vous êtes, s'il vous plaît, pour qu'on soit capables de vous suivre?

Mme Malavoy: Je suis dans le cahier explicatif des crédits 2011-2012. Ça fait partie de nos documents de base, et c'est le programme 5 -- ça se retrouve peut-être ailleurs, là -- mais programme 5, Enseignement supérieur, mais élément 01 pour les cégeps. Parce que, dans ce cahier, donc, on nous indique qu'au total la variation entre le budget des dépenses de l'an dernier et celui de cette année, c'est de 52... 52 761 000 $, plutôt, O.K.? Ça, ce serait donc ce qui est bel et bien réinvesti. Et, dans l'explication de la variation, on parle des «ajustements salariaux et autres coûts de rémunération». Donc, on comprend qu'il y a là, pour une part, la question de l'indexation.

Mais ce que les collèges disent, puis j'aimerais que la ministre m'éclaire là-dessus, les collèges disent qu'effectivement les ajouts permettent de couvrir les coûts de système quant à la rémunération, mais eux prétendent que ça ne permet pas de couvrir les coûts de système liés à d'autres coûts, comme par exemple les dépenses non salariales. Autrement dit, ça couvre la rémunération, ça couvre la hausse de clientèle aussi, je dois ajouter donc ce qui est à la deuxième ligne, là, «Variation [de] clientèles», mais ça ne couvre pas les autres coûts. Les autres coûts, c'est évidemment tout l'entretien de leurs équipements. Alors ça, c'est... J'aimerais qu'on me le précise, parce que c'est ce que la Fédération des cégeps prétend, et j'ai lieu de croire qu'ils ont fait leurs calculs. Donc, il y aurait une part de l'ajout qui couvre les coûts de système, mais une part qui serait manquante, d'où ma question de tout à l'heure. Est-ce qu'on n'aurait pas pu leur donner justement la pleine indexation de la somme versée par le gouvernement fédéral de 75 millions?

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: M. le Président, je pense qu'on est dans un contexte, au Québec, où, après avoir traversé la plus importante crise économique depuis la grande crise des années 1930, là, dans l'autre siècle, là, on est dans des années où tout le monde est appelé à faire sa part et à faire son effort pour l'atteinte de l'équilibre budgétaire. Donc, les crédits du ministère de l'Éducation, y compris les crédits pour le réseau collégial, sont des crédits qui augmentent de 3,3 % pour cette année. Les crédits, du point de vue du réseau collégial, augmentent... C'est bien le chiffre de 3,4 % cette année. C'est un effort fait dans un contexte de retour à l'équilibre budgétaire. C'est un effort extrêmement important.

Et, je dois le rappeler, là, et je ne veux pas changer le ton de nos échanges, mais indéniablement, dans un même contexte, le gouvernement précédent avait fait d'autres choix puis qu'il faut... Vous disiez tantôt qu'il faut faire des choix, puis on pourra en reparler, mais, dans des années de retour à l'équilibre budgétaire, dans la fin des années quatre-vingt-dix, les choix faits étaient de tomber dans des crédits négatifs, là. On ne parlait même pas de croissance, là, il y avait moins d'argent, littéralement moins d'argent, moins de services. Ça fait qu'ici on parle d'une croissance, effectivement, d'une croissance qui permet effectivement d'assurer la rencontre de ce qu'on appelle les coûts de système vraiment les plus importants.

Et est-ce qu'il y a un effort demandé, pas juste de la part du gouvernement, est-ce qu'il y a un effort demandé de la part des contribuables québécois pour que la gestion de nos réseaux soit faite de façon plus performante? Est-ce qu'il y a un effort attendu et souhaité des contribuables québécois pour que, par exemple, dans le réseau collégial comme ailleurs, on soit capable, je vous dirais, on soit amené à regarder des façons différentes de gérer, à favoriser au maximum des regroupements d'achats, des regroupements de services, etc.? La présidente du Conseil du trésor a déjà présenté ces efforts attendus, l'automne dernier, on l'a répété lors du dernier budget, la réponse, c'est oui. Je pense sincèrement que, dans un contexte où on demande un effort à tous, hein, on a dit... on demandait un effort aux contribuables québécois puis on demande un effort au gouvernement du Québec, bien l'effort demandé au gouvernement du Québec concerne aussi les réseaux de l'éducation, et, oui, il y a un effort demandé. Et je vous dirais par ailleurs que cet effort-là, il est juste, il est raisonnable, il est réalisable et en aucun temps il ne compromet les services aux étudiants, la qualité de l'enseignement. En aucun temps.

Autrement dit, on demande aux réseaux de l'éducation, dont le réseau collégial, ce sera le réseau des commissions scolaires, le réseau universitaire, on leur demande de participer à cet effort en allant chercher plus d'efficacité puis plus d'efficience dans leur gestion. Vous savez quoi, M. le Président, moi, je crois que c'est possible. Moi, je crois que c'est tout à fait possible de le faire, de le réaliser.

Et, par ailleurs, la député, à juste titre, montre bien que les plus importants coûts de système, en dehors de la gestion des bâtiments, etc., les plus importants coûts de système liés à la hausse des clientèles, liés aux hausses salariales sont totalement endossés par le gouvernement du Québec.

Le Président (M. Marsan): Merci. Mme la députée de Taillon.

**(11 h 20)**

Mme Malavoy: Oui. Je comprends donc qu'effectivement les coûts de système couvrent la question des salaires mais ne couvrent pas d'autres coûts. Parce que tout à l'heure la ministre semblait me dire que ça couvrait tout. Bon, on a clarifié ce que cela couvrait.

Ça me permet aussi de préciser que, dans le 3,4 %, effectivement, d'augmentation, il y a une bonne part qui est attribuée non pas à une augmentation de dépenses de quoi que ce soit, mais simplement à la variation de clientèle, c'est-à-dire que, sur le 52 millions qu'on ajoute, il y en a 26... un peu plus de 26 millions qui viennent de variations de clientèle. Donc, ça, c'est juste, parce que -- tant mieux -- les cégeps se développent, et il y a plus de clientèle.

Et ça m'amène à aborder une question qui est liée à la clientèle, d'une certaine façon, mais qui est liée à ce qu'on appelle, même si honnêtement, M. le Président, je n'aime pas le mot, les clientèles émergentes. Je n'aime pas le mot parce que je ne peux pas dire que, quand on dit à des gens qui ne savent pas de quoi il s'agit... quand on parle de clientèle émergente, on n'a pas l'impression tout de suite, là, sans le savoir, qu'on parle de clientèles qu'on appelle, dans le réseau primaire et secondaire, les EHDAA, les élèves handicapés ou en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage. Il y a donc dans nos collèges, et on peut très bien le comprendre, une augmentation mais vraiment très importante d'élèves qui ont des difficultés d'apprentissage ou des handicaps. On en avait... En 2006-2007, on en avait 866 qui étaient identifiés et on est rendu maintenant, semble-t-il, à plus de 3 000. Et donc ça a augmenté énormément.

Ce sont des élèves qui ont des difficultés aussi variées qu'un handicap ou de la dyslexie, mais avec une incidence plus grande de ceux qui justement ont bel et bien des difficultés d'apprentissage ou encore des problèmes liés à une maladie mentale. Les collèges prétendent que, pour répondre aux besoins d'encadrement de ces élèves-là... Parce qu'on comprend que, tout en ayant leurs difficultés, ils ont en même temps des talents à développer et des capacités de faire des études supérieures de niveau collégial. Donc, tout en reconnaissant qu'on a besoin d'eux et qu'ils aillent au bout de leurs études, les cégeps disent: On a besoin de sommes additionnelles.

Dans les crédits que nous voyons cette année -- je réfère toujours à mon 52 millions de tout à l'heure -- on indique une somme de 2 millions de dollars, dans les engagements 2011-2012, pour ces clientèles émergentes et puis un petit peu d'argent pour des soins infirmiers. Les collèges disent: On aurait besoin de 13 millions. C'est un chiffre qu'ils ont fait circuler il y a déjà un certain temps. Ils disent: Si on voulait vraiment leur répondre, on aurait besoins de 13 millions.

Donc, j'aimerais que la ministre me dise comment elle voit les choses. Est-ce qu'il n'y aurait pas eu moyen de mettre des sommes additionnelles? Parce qu'on comprend que, pour ces étudiants-là, les besoins sont très spécifiques, et donc ça demande des ressources particulières, ça demande des ressources spécifiques. C'est excellent qu'on leur permette d'arriver au cégep, mais il faut leur permettre également d'en sortir avec un diplôme en main. J'aimerais que la ministre me fasse le point, donc, sur les élèves qui ont des difficultés d'apprentissage ou des handicaps au cégep.

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Oui. Merci, M. le Président. Je suis très contente de la question de la députée de Taillon, parce qu'elle met en lumière le fait que nous avons décidé de bouger, de reconnaître cet élément-là et ajouter, dans un contexte budgétaire où tout le monde doit faire des efforts partout au gouvernement, et tout, et tout... On a, dans un tel contexte, décidé néanmoins d'ajouter des sommes pour ce qu'on appelle les clientèles émergentes au niveau collégial.

Peut-être juste un premier élément de contexte, c'est que la députée de Taillon avait raison de souligner que ce sont des enjeux importants au niveau de l'enseignement supérieur, qui reflètent par ailleurs l'évolution des choses au Québec par rapport au fait que ces jeunes Québécois handicapés ou vivant avec des problèmes d'apprentissage ou d'adaptation... mais que ces jeunes Québécois réussissent maintenant en plus grand nombre à accéder à l'enseignement supérieur. Donc, ça veut dire -- premier élément de contexte -- que nous réussissons à en diplômer davantage, parce que vous avez vu comme moi qu'au niveau des chiffres, au niveau secondaire, le taux de diplomation, même avant 20 ans, s'améliore depuis 2003 au Québec, puis on diplôme plus de garçons puis un peu plus de filles. Et, dans ce lot, certainement qu'il y a des enfants qu'on considérait donc handicapés ou avec des difficultés d'apprentissage qui réussissent, qui sont plus à même de réussir leurs études secondaires et de réaliser leurs aspirations personnelles, professionnelles en accédant à des études supérieures.

La première mise en contexte que je veux faire, c'est du point de vue universitaire. Je voulais juste tout de suite indiquer que, dans le budget de cette année, j'avais le souci, comme ministre de l'Éducation, de couvrir cette réalité et d'être capable de dire qu'il y aura une augmentation de services pour ces jeunes qui ont besoin de ressources professionnelles supplémentaires, qui peuvent avoir besoin carrément de personnel de soutien -- vous savez, l'exemple qui vient souvent en tête, c'est, par exemple pour une personne souffrant de dyslexie, d'avoir un soutien avec un preneur de notes ou une preneuse de notes en accompagnement lors de ses études supérieures -- carrément, aussi, des services, là, mis en place, de soutien à ces étudiants-là dans les universités, dans les cégeps.

Donc, du côté universitaire, dans les indicateurs, dans les éléments où nous... j'ai envie de dire, là, carrément, où nous forçons les universités à prendre des engagements sur l'utilisation des sommes supplémentaires, vous retrouverez, dans ces indicateurs, le fait que maintenant nous disons aux universités: Vous avez 850 millions de dollars de plus d'ici cinq ans, bien, vous devez couvrir les besoins pour ces clientèles émergentes au niveau universitaire. Et ça vient un peu, je dirais... Il faut absolument qu'avec les sommes supplémentaires les universités répondent aux besoins des clientèles émergentes.

Du côté collégial, la base budgétaire qu'il y avait jusqu'à ce moment s'élevait à 10 750 000 $. Nous ajoutons 2 millions de dollars dans le budget de cette année. Est-ce qu'il peut encore y avoir des besoins? La réponse, c'est oui. Est-ce qu'on va être attentifs, sensibles? Dans la capacité de payer des Québécois, on va démontrer toute la sensibilité puis la volonté d'accompagnement de ces étudiants dans l'avenir.

Mais vous avez raison de souligner que, même dans un contexte budgétaire difficile, nous avons choisi, là, de nommément augmenter les budgets dédiés à l'accompagnement et au soutien des Québécois et des Québécoises qui ont des handicaps, des difficultés d'adaptation, d'apprentissage dans les réseaux supérieurs d'éducation. Mais, en soi, ça, c'est une bonne nouvelle et c'est très porteur, pour l'ensemble de la société québécoise, de voir qu'on s'assure de la réussite, au niveau supérieur, de l'enseignement supérieur, de ces jeunes Québécois et Québécoises.

Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie. Nous allons poursuivre notre période d'échange. Et je vais céder la parole à l'adjoint parlementaire à la présidente du Conseil du trésor, M. le député de Vanier. M. le député.

M. Huot: Merci beaucoup, M. le Président. Salutations à tous mes collègues, Mme la ministre, à mes collègues députés, l'équipe de la ministre. Salutations à la porte-parole de l'opposition officielle. On est ensemble pour plusieurs heures, voire plusieurs jours, sur les dossiers Éducation. Ça me fait plaisir. Comme nouveau membre, je rejoins cette équipe. J'ai été là, j'ai été sur la Commission de l'éducation en début de mandat. C'est un retour pour moi à la Commission de l'éducation, donc ça me fait plaisir de vous retrouver, M. le Président, sur la commission, maintenant, culture et éducation.

Moi, d'entrée de jeu, pour cette étude des crédits en éducation, j'aimerais aborder le sujet des frais institutionnels obligatoires. Mon député de... collègue de Charlesbourg disait que, lui, il rentrait à l'université dans les années soixante. Moi, je me fais toujours un plaisir de répondre à mes collègues dans ce temps-là: Moi, je n'étais même pas né à cette époque-là. Donc, moi, mon université, c'est quand même... c'est récent aussi. J'ai terminé l'université en 2002. Et on parlait déjà d'encadrer ce type de frais là à cette époque-là. Il y a eu toutes sortes de démarches, il y a eu des négociations, mais, depuis 2008, les frais institutionnels obligatoires sont encadrés par les règles budgétaires des universités. Mais l'objectif de ça, c'est mettre les étudiants à l'abri de hausses importantes de frais afférents, qui sont variables d'une université à l'autre et même d'une faculté à l'autre.

Mais les frais institutionnels obligatoires, c'est quoi? Bien, c'est les frais généraux, comme l'administration, les frais d'administration, d'inscription, de stage, les frais reliés aux technologies, à l'acquisition d'équipements technologiques, les frais de services aux étudiants, les contributions... des frais de contribution à la vie étudiante, pour des services de sport, de loisirs par exemple, puis, comme je disais, ça varie d'un établissement à l'autre, même à l'intérieur d'une faculté. Et ça, dès qu'on veut modifier ces frais-là, il faut une entente entre l'université et l'association étudiante reconnue qui... Donc, on ne parle pas de l'association étudiante de l'université, mais bien de l'association... Ça peut être départemental, facultaire. C'est variable d'un établissement à l'autre. Donc, on doit avoir une entente avec la faculté. Par exemple, la faculté peut faire un choix, dire: Nous, on veut investir dans certains équipements de pointe. Pour une faculté d'ingénierie, par exemple, qui veut investir pour les étudiants, ils veulent mettre l'accent sur certains équipements, bien on peut avoir une entente entre l'établissement et la faculté pour avoir... pour encadrer, mieux encadrer, augmenter, par exemple, une certaine portion des frais institutionnels obligatoires puis qui vont être dédiés spécifiquement à des équipements.

En 2007, l'ancienne ministre de l'Éducation avait entamé des consultations avec le milieu universitaire pour bien encadrer ça, et c'est en 2008 qu'on a, pour trois ans... qu'on est arrivé avec une entente pour bien encadrer les frais institutionnels obligatoires. La ministre a récemment annoncé que ça allait être reconduit d'un an. Parce que ça se terminait à l'hiver 2011. Elle a annoncé que ça allait être reconduit d'un an, cette entente-là. Donc, j'aimerais entendre la ministre sur cette question-là. Oui, il y a une reconduction. Je pense que ça fait l'affaire du milieu universitaire. Mais, par la suite, il faut arriver à une nouvelle entente, il faut arriver à une nouvelle étape, donc, je présume, de nouvelles consultations. Donc, j'aimerais entendre la ministre sur cette question-là, s'il vous plaît.

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme la ministre de l'Éducation, des Loisirs et du Sport.

Mme Beauchamp: Merci. M. le Président, le député de Vanier a dévoilé son âge en disant qu'il avait terminé son université en 2002. Puis vous avez fait vos études de façon concomitante à vos études collégiales et...

M. Huot: Est-ce que je dois répondre? J'ai fait ce que je recommande à tout étudiant après le cégep: arrêter un an pour voyager et travailler, donc... et par la suite entrer à l'université, donc bac et maîtrise, je dois dire «un deuxième cycle», donc ce qui fait qu'on a poursuivi l'université un peu. De 1996 à 2002, Mme la ministre.

**(11 h 30)**

Mme Beauchamp: O.K. Bien, je lui demandais ces précisions parce que je vais à mon tour, moi, dévoiler mon âge en vous disant que j'ai obtenu mon baccalauréat en quatre-vingt... Ah! il ne faut pas que je me mêle, là. Enfin, je commençais des études de maîtrise en 1985. Je voulais juste apporter cet éclairage pour dire que la question des frais institutionnels obligatoires, c'est une question qui a pris, je dirais, un peu de l'ampleur et qui a connu des développements, je dirais, là... qui a connu, je dirais même, là, je pourrais même dire, qui avait connu un certain emballement du côté universitaire. Et c'est à juste titre que ma prédécesseure, la députée de Fabre, a décidé, en 2008, d'encadrer cette question des frais institutionnels obligatoires.

Puis je veux ici prendre le temps de reconnaître que les associations étudiantes universitaires avaient fait des représentations, et qu'elles avaient raison, et qu'il fallait prendre le temps d'encadrer ces frais institutionnels obligatoires. Et, encore là, je le dis avec un sourire, mais c'est une décision qui, à l'époque, a pu faire grincer des dents certains conseils d'administration d'universités au nom de l'autonomie universitaire. Mais voilà un geste posé qui a, je pense, assuré, là, qu'il y avait des démarches respectueuses puis d'équité, je dirais, vis-à-vis les étudiants.

Vous avez... Le député de Vanier donc a pris le temps de décrire le fait que... Ce que fait le règlement, la règle budgétaire plutôt, ça vient dire qu'il doit y avoir entente entre les étudiants et l'établissement si on veut venir bouger la question des FIO. S'il n'y a pas d'entente -- je veux juste prendre le temps de commencer comme ça -- les augmentations permises sont limitées à 50 $ par année pour les universités qui ont facturé moins de 555 $ durant l'année universitaire précédente; 25 $ pour celles qui ont facturé entre 555 $ et 699 $; et 15 $ pour celles qui ont facturé plus de 699 $.

Par ailleurs, c'est important de mentionner -- puis c'est bon signe pour la vitalité, je dirais, de certains processus démocratiques dans nos universités -- qu'il peut y avoir entente entre une association étudiante et un établissement universitaire pour aller au-delà des augmentations prescrites par la règle budgétaire, s'il y a entente.

Mais on peut peut-être donner un bon exemple de cela, parce que, je dirais, c'est un exemple, là, qui était quand même assez important. Prenons l'exemple de la Faculté de médecine dentaire de l'Université de Montréal où on a conclu une entente avec l'association étudiante pour augmenter de façon assez significative les frais institutionnels obligatoires. Mais il y a eu entente parce que les étudiants ont accepté, ont reconnu, ont dit que c'était favorable à leur apprentissage et à leurs besoins pour avoir un diplôme de qualité, ont accepté une hausse des frais institutionnels obligatoires pour leur permettre d'être dotés d'équipements modernes dans leur Faculté de médecine dentaire. Je voulais juste prendre le temps de dire, donc, qu'on voit bien ici que, dans certaines facultés, des étudiants acceptent, mais après discussion puis après, je dirais, négociations et entente, de voir une augmentation de leurs frais, parce qu'ils y trouvent leur compte. Ils y trouvent un bénéfice, un service supplémentaire, un élément supplémentaire favorable à leur apprentissage.

La règle budgétaire se terminait après trois ans, et j'ai bien entendu les représentations des associations étudiantes qui demandaient qu'on ne laisse pas de flou artistique, là, autour de l'application de cette règle budgétaire, bien que ces mêmes associations étudiantes puissent également nous demander de regarder certaines modifications ou changements qui pourraient être apportés à la règle. Donc, en réponse au député de Vanier, je veux juste donc confirmer, effectivement, que, pour la prochaine année universitaire, nous avons annoncé à toutes les universités que nous allons maintenir la règle budgétaire actuelle et nous avons demandé à toutes les universités d'en informer leurs associations étudiantes. Mais, au cours des prochains mois, nous allons mener, je dirais, des consultations auprès des universités puis auprès aussi, bien sûr, des partenaires que sont les associations étudiantes pour évaluer si la règle budgétaire fonctionne comme on le souhaitait lors de sa mise en place en 2008, pour voir si ce mode d'encadrement là est performant. Est-ce qu'il y a eu des problèmes qu'on pourrait qualifier un peu des problèmes systémiques, là, dans le système, qui nous amèneraient à vouloir apporter certains changements? Moi, je dois vous dire, M. le Président, que je pense que le principe de l'encadrement des frais institutionnels obligatoires, c'est un principe qui est maintenant établi et qui doit se poursuivre. Je l'annonce d'emblée, je pense que ça doit se poursuivre.

Maintenant, je veux aussi, donc vous avez compris, là, bel et bien indiquer que je serai en mode écoute et que la porte est ouverte pour qu'on puisse parler d'ajustement ou de modification au bénéfice de la communauté universitaire dans l'encadrement de ces frais. Mais, une fois que j'ai dit cela, je prends le temps de le dire, là, une fois que j'ai dit qu'on était prêts à aller discuter, ce n'est pas pour qu'on me demande de revenir sur l'encadrement des frais institutionnels obligatoires. Je veux dire, je ne m'en vais pas remettre en question l'existence ou l'application de règles budgétaires pour les encadrer. Je veux que ça soit très bien compris de la part de tous.

Nous allons maintenir cet encadrement. Est-ce qu'il peut être modifié, bonifié? On va vraiment se mettre en mode écoute et regarder s'il y a des irritants, s'il y a des inconvénients qui auraient été, je dirais, dévoilés, là, avec l'application de cette règle budgétaire depuis trois ans. On est prêts à écouter, à les regarder puis à regarder les solutions possibles. Donc, le ministère sera au travail pour mener cette consultation, et ça nous permettra, par la suite bien sûr, de poser les gestes administratifs en conséquence, au cours des prochains mois, si on doit apporter des modifications à cette règle budgétaire d'encadrement des frais institutionnels obligatoires.

Le principe est là, il va rester. Est-ce qu'on peut améliorer les choses pour que ce soit encore plus au bénéfice -- je dis bien «au bénéfice» -- de l'ensemble de la communauté universitaire, là? On a trouvé un règlement qui oblige les gens à se parler. Franchement, c'est un règlement qui, maintenant, s'applique assez bien dans l'ensemble de la communauté universitaire. Mais est-ce qu'on doit apporter des changements au bénéfice de l'ensemble de la communauté universitaire? On le fera, mais on le fera après avoir mené nous-mêmes nos propres consultations auprès des établissements universitaires et auprès des associations étudiantes.

Le Président (M. Marsan): M. le député de Vanier... Excusez. M. le député de Charlesbourg.

M. Pigeon: Oui. Merci, M. le Président. Comme il nous reste un tout petit peu de temps, j'aimerais, M. le Président, revenir brièvement sur la question du financement des universités. Alors, on a indiqué un peu, là, les suites qui avaient été données à la rencontre du 6 décembre dernier. On a parlé d'investissements supplémentaires dans les universités, mais, de façon plus précise, dans le discours du budget, on dit que les universités vont pouvoir disposer de revenus additionnels qui atteindront 850 millions en 2016-2017.

Je pense qu'il serait intéressant que Mme la ministre puisse indiquer exactement, là, quel sera le partage de ce 850 millions, comment le gouvernement entend, là, répartir le fardeau également... ou enfin de la façon la plus juste possible entre les contribuables, les étudiants et aussi, là, toute la question des dons qui sont faits aux universités. Alors, voilà le sens de ma question, M. le Président.

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: M. le Président, peut-être juste avant de répondre directement à la question du député de Charlesbourg, on m'indique ici... puis je tiens à vous présenter mes excuses, là. Tantôt, je vous ai parlé des clientèles émergentes et je disais... j'ai présenté le 10,75 comme étant une base budgétaire auquel s'ajoutaient 2 millions. Et on me précise ici, et je le reconnais, et je vais tout de suite corriger l'information, que le 2 millions donne un total de 10,75 millions de dollars consacrés à la question des services pour les clientèles avec des handicaps ou des difficultés d'apprentissage. Donc, dans le 10,75 millions, ça comprenait le 2 millions, ce n'est donc pas un ajout. Il ne faudrait pas comprendre, dans l'affirmation que j'ai faite un peu plus tôt, que ça donnerait un total de 12 millions, là. Ce n'est pas le cas, c'est 10,75 millions. Je tiens à m'excuser de l'impair que j'ai fait en lisant la note devant moi.

**(11 h 40)**

Maintenant, M. le Président, je vais répondre à la question du député de Charlesbourg. M. le député de Charlesbourg me permet ici de faire la démonstration que nous parlons ici d'un effort demandé à tous pour le financement des universités. C'est important de le rappeler, parce que je pense qu'à chaque fois qu'il y a eu un débat, par exemple, sur la hausse des droits de scolarité, à juste titre, à juste titre, des députés de notre formation, de la formation politique formant l'opposition, les étudiants disaient: Bien là, on n'est pas pour vivre une hausse des droits de scolarité pendant que le gouvernement, lui, se désengage, hein?

Il y avait cette crainte, à juste titre, qu'une hausse des droits de scolarité veuille dire un abandon, un désengagement de l'État. Et je pense qu'il y a ici en fait une notion vraiment d'un pacte pour l'avenir des universités parce que ce qui a toujours été dit, au budget de 2010, lors de la rencontre du 6 décembre, et là maintenant confirmé par décision dans le dernier budget, c'est qu'on est loin, mais alors là loin de parler d'un retrait ou d'un désengagement de l'État. Le pacte, c'est de dire: Tout le monde met l'épaule à la roue. Et, M. le Président, je pense qu'il faut vraiment qu'on retienne, là, que, dans le 850 millions de dollars d'investissements supplémentaires atteints en 2016-2017 pour le monde universitaire, qui seront des sommes récurrentes, la moitié de l'effort, 51 % de l'effort, est fait à partir des impôts des contribuables québécois, à un point tel que certains pourraient nous le reprocher.

Mais 51 % de l'effort est fait toujours à partir de l'impôt des contribuables québécois, ce qui fait que le modèle que nous connaissons historiquement au Québec, qui fait en sorte qu'à l'échelle canadienne le Québec est l'endroit où les contribuables québécois, à même leurs impôts, font le plus gros effort dans le financement des universités, ça demeure vrai. C'est un autre modèle. Ailleurs au Canada, ce n'est pas le même modèle, et l'effort demandé aux contribuables n'est pas le même parce que les droits de scolarité sont plus hauts, donc c'est moins à partir de l'impôt de tous les Québécois.

Mais, nous, on a un modèle et on continue à dire que le gouvernement du Québec, à même les impôts des contribuables, va faire 51 % de l'effort, ce qui équivaut, là... Sur le 850 millions de dollars supplémentaire pour les universités, à même les impôts des contribuables, ce sera 530 millions de dollars consacrés aux universités sur les cinq prochaines années.

Il y a aussi un effort demandé du côté du secteur privé puis un effort demandé aux universités pour aller chercher encore plus de revenus autonomes. Et, si je vous dessine un peu la tarte, là, tu sais, vous savez, les pointes de la tarte de l'effort de 850 millions de dollars, bien, il y a 51 % qui est du côté du gouvernement, à même les impôts des contribuables, et c'est environ 18 % de l'effort qui est demandé où on doit aller chercher les revenus du côté du secteur privé. Et je dis «le secteur privé»... il y a le secteur privé, mais il y a aussi, il faut le dire, la notion de grand donateur ou de legs où, là, on parle aussi d'individus qui peuvent être prêts à faire des legs au réseau universitaire.

D'ailleurs, entre vous et moi, ça, c'est un modèle, c'est une... Il y a des traditions, je dirais, bien implantées effectivement aux États-unis, du côté du Canada, des autres provinces canadiennes. Au Québec même, il faut le reconnaître, il y a des traditions plus implantées de legs et de dons vers les universités anglophones. Mais indéniablement, indéniablement, comme société québécoise, nous sommes capables d'améliorer cette culture de la philanthropie, du don et du legs vers les universités québécoises. Et je pourrais en reparler cet après-midi, mais nous mettons en place, donc, un programme, Placements Universités, pour améliorer cette contribution philanthropique vers les universités québécoises. Mais il n'y a pas uniquement ça. On demande aussi aux universités d'améliorer leurs revenus au niveau de la recherche, de d'autres frais, de d'autres services d'appoint qui sont capables d'améliorer leur autofinancement sur ces secteurs.

Et finalement la contribution demandée aux étudiants équivaut à 31 % de l'effort global, mais, à la fin, là, quand je regarde la partie... quand je regarde le financement des universités puis que je compare la part dévolue aux étudiants entre le modèle qui existe ailleurs au Canada puis au Québec, ce n'est pas comparable, là. Les étudiants, à la fin, assumeront environ 18 % du financement des universités, alors que le total est pas mal plus élevé que ça ailleurs au Canada.

Mais ça vous illustre que le statu quo n'est pas possible. Il faut absolument avoir des universités performantes puis que le diplôme universitaire québécois garde sa valeur. Il faut parler de réinvestissement dans les universités, mais les principes du modèle qu'on s'est donné comme société, le projet de société qu'on s'est donné, même lors de la Révolution tranquille, qui fait qu'on veut garder les droits de scolarité les plus bas possible, avoir le régime d'aide financière le plus généreux possible et faire en sorte que nos universités sont principalement financées par les impôts des contribuables québécois, c'est un modèle qui sera toujours vrai, toujours en place en 2016-2017.

Le Président (M. Marsan): Alors, merci, Mme la ministre. Et nous poursuivons nos échanges, et je vais céder la parole à la porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enseignement supérieur, de prêts et bourses, Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Merci, M. le Président. Je vois qu'il ne nous reste pas un bloc plein d'ici midi, je le comprends bien. Si c'est possible, j'aimerais qu'on essaie d'alterner plus rapidement nos échanges pour que j'aie le temps de faire le tour de quelques questions.

Nous parlions, un peu plus tôt, des clientèles émergentes. Il y a aussi un autre type de clientèle qui a des besoins particuliers. Une décision du gouvernement permet dorénavant à des jeunes qui n'ont pas complété leur secondaire... de cours, d'accéder au cégep. Et on s'est rendu compte que, bon, on est allé de l'avant, malgré certaines réticences et inquiétudes d'un certain nombre de gens du milieu collégial... On est allé de l'avant et on s'est rendu compte que, malheureusement, un grand nombre de ces étudiants échouent après une session. Or, les spécialistes disent: La première session, elle est déterminante. Puis on peut le comprendre: c'est un âge où on accède à l'enseignement supérieur, c'est le passage du secondaire au collégial. On comprend bien que les jeunes qui échouent cette première session et qui ne se retrouvent pas, donc, en deuxième session au cégep sont marqués par ça. Bon, ils peuvent éventuellement se reprendre plus tard, mais ils sont quand même marqués par ça. Normalement, la réussite pour un jeune du collégial à la première session, c'est de 80 % à 85 %. Or, les données que nous avons pour les jeunes qui entrent au cégep sous condition de terminer des cours du collégial, c'est, ma foi, presque un sur deux qui ne continue pas. On était à un peu plus de 50 % dans les derniers chiffres que nous avons.

Alors, là encore, les collèges disent: C'est une clientèle particulière, c'est une décision du gouvernement, on veut bien, nous, les accueillir, mais, si on les accueille, on a besoin de ressources pour les encadrer. Puis j'aimerais que la ministre me fasse état de ses réflexions sur cette clientèle, donc, qui sont les jeunes qui arrivent au collégial sans avoir terminé leur secondaire.

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme la ministre.

Mme Beauchamp: M. le Président, je veux juste, peut-être, demander à la députée... Parce que je vais... L'équipe ici est à la recherche, là, de certaines informations pour compléter, là, l'intervention de la députée. Si elle veut passer immédiatement à une autre question. Peut-être que je pourrai répondre en bloc à ses deux interventions, juste le temps qu'on trouve certaines informations sur l'accompagnement offert au cégep par rapport à la clientèle, là, des élèves admis sous condition, qu'elle vient de décrire. Si c'est possible.

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme la députée de Taillon.

**(11 h 50)**

Mme Malavoy: Certainement. Une autre question que j'ai, c'est une question, je dirais, éternelle, mais néanmoins importante. C'est celle des étudiants qui fréquentent les cégeps en région. C'est une problématique qui est là depuis de nombreuses années. On sait parfaitement qu'il y a actuellement un déséquilibre, si je peux dire, entre des cégeps de milieux métropolitains et qui attirent beaucoup de monde, et qui sont même pleins à pleine capacité... Je pense au collège Édouard-Montpetit, qui est dans le comté de Taillon, qui est un magnifique cégep, mais qui déborde de nouvelle clientèle. Mais je pense, par ailleurs, au collège, par exemple, de Gaspésie--Les Îles qui, lui, souffre d'une baisse de clientèle qui est liée très, très largement à la baisse démographique de cette région du Québec. Donc, ce n'est pas un problème nouveau, c'est un problème qui est important.

Dans le document de réflexion que la ministre a envoyé aux cégeps pour leur demander de réfléchir à toutes les questions de rattachement entre... de liens, plutôt, entre la formation de la main-d'oeuvre et l'enseignement supérieur, Document d'appui à la réflexion -- L'amélioration de l'adéquation entre la formation et les besoins du marché du travail, dans ce document, nous avons trouvé une seule phrase, un seul constat qui parle de cette difficulté des cégeps à survivre en région. Je mets aussi dans ma question le fait que le ministère avait commandé un rapport, le rapport Boudreau, qui faisait des recommandations et qui, entre autres recommandations, disait: Il faut élargir l'offre de programmes exclusifs pour des cégeps et il faut également qu'on offre des bourses -- il chiffrait ça à 6 000 $ -- pour que des étudiants soient incités à rester dans leurs régions pour étudier.

Alors, j'aimerais là encore savoir l'état de la réflexion de la ministre sur la problématique des cégeps en région et les mesures qu'elle entend prendre, dans la foulée du rapport Boudreau, pour faciliter le choix des étudiants de rester étudier dans leurs régions.

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Peut-être... Donc, pour revenir à la première question concernant la réussite des élèves admis sous condition, les chiffres qu'a mentionnés la députée de Taillon, à savoir des résultats après... le taux de réussite global après un premier trimestre à environ 55 %, 58 %, sont des chiffres... c'est les derniers disponibles, là, qui datent de 2009. Peut-être vous dire qu'à l'année scolaire 2008-2009 une somme de tout près de 45 millions de dollars a été allouée aux cégeps publics et privés comme une mesure de soutien à la réussite. Et aussi, au niveau de se doter, là, des plans de réussite et donc des mesures... la mesure Soutien à la réussite et des plans institutionnels de réussite, la première équivalait à 5 millions de dollars, la deuxième à 39,6 millions de dollars.

Donc, ce que je veux ici indiquer, c'est que je pense que, dans cette décision, en 2008-2009 -- et je prends juste le temps de dire que ces sommes-là sont toujours là, sont toujours au rendez-vous -- donc, dans les sommes dédiées depuis 2008-2009 à la réussite, je pense qu'il y avait là, de façon transparente, une reconnaissance du besoin de mieux accompagner la réussite au niveau collégial, et notamment pour ces élèves admis sous condition. Les argents sont toujours là. Moi, je pense qu'on va devoir se donner un peu de temps pour évaluer le succès ou pas, parce que, moi, je n'ai aucun problème à nommer ce qui ne marche pas et ce qui mérite... ou, avec les partenaires, on réussisse à faire des ajustements. Mais, compte tenu que les chiffres que nous avons sont de 2008-2009 et que cette mesure-là de tout près de 45 millions a été introduite en 2008, je pense qu'on va devoir, avec les partenaires des collèges, là, juste prendre le temps de voir si cette mesure-là donne les effets escomptés pour assurer la réussite des élèves dont on parle.

Peut-être juste aussi terminer en disant: Moi, j'ai rencontré à plus d'un occasion, depuis sept mois puis encore récemment avec la nomination du nouveau P.D.G de la Fédération des cégeps, M. Beauchesne... je les ai rencontrés et je tiens vraiment à mentionner la grande ouverture et le grand souci, je dirais, d'efficacité et de résultat qu'ont les membres de la Fédération des cégeps. Je pense qu'ils réalisent qu'ils ont un gouvernement derrière eux, qui croit en eux, qui a réussi à bonifier leurs budgets de façon récurrente, mais j'ai apprécié vraiment... et c'était vrai aussi sous l'ancien P.D.G. bien sûr, mais j'ai apprécié la grande lucidité et la grande ouverture de la Fédération des cégeps.

Parce que, si on peut parler du résultat, le succès, après un trimestre, je veux juste vous... je ne veux pas jouer moi-même à porter des lunettes noires, là, mais là où les cégeps eux-mêmes reconnaissent qu'ils seront interpellés... on doit les interpeller, c'est sur, par exemple, le niveau de diplomation dans la formation technique. Puis là on ne parle pas uniquement des élèves admis sous condition passant du secondaire vers le collégial, on parle carrément du succès de la diplomation chez les inscrits au niveau technique dans nos collèges, où la députée de Taillon sait sûrement comme moi qu'on atteint, après trois ans, dans les délais prescrits, environ un tiers de diplomation puis, après cinq ans, 50 % de diplomation.

Et je nomme ça et je suis en mesure de le nommer parce que ce que j'apprécie, c'est que la Fédération des cégeps, elle est totalement ouverte à dire: Oui, on doit collaborer pour améliorer ce taux de diplomation, la persévérance et le taux de diplomation pas seulement chez ses élèves admis sous condition, mais aussi chez d'autres élèves comme ceux inscrits dans les profils techniques.

Le Président (M. Marsan): Oui, Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Je suis contente d'avoir posé mes deux questions en même temps. Mais, avant qu'on passe à la seconde, je voudrais juste quand même qu'on précise une chose. C'est vrai qu'il y a des crédits qui ont été accordés par le ministère de l'Éducation pour la réussite au collège. Le problème, c'est qu'en cours de route cette décision d'accueillir des élèves qui n'avaient pas complété leur secondaire a augmenté les problèmes, et les sommes n'ont pas été augmentées. C'est à même les mêmes enveloppes de soutien à la réussite qu'on demande aux cégeps, d'après ce que je comprends, d'inclure maintenant ces jeunes en difficulté. Et j'apprécie toutefois que la ministre dise: Bien, écoutez, il faudra peut-être, un moment donné, évaluer si cette mesure est appropriée. Parce qu'ouvrir les portes des cégeps à des jeunes, c'est excellent, mais, si on leur ouvre des portes vers l'échec, évidemment, ce n'est pas une bonne solution. Donc, je n'ai pas compris, moi, qu'il y avait des crédits additionnels depuis cette décision. Je pense qu'on est dans la même enveloppe de soutien à la réussite depuis que le ministère a doté les cégeps d'une telle enveloppe.

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Je prends beaucoup de temps de consulter le personnel qui m'accompagne, les hauts fonctionnaires qui m'accompagnent parce que je suis là... je suis nouvellement aussi en poste au ministère de l'Éducation, mais je veux juste dire que, moi, ici, on me confirme que ce sont des nouvelles sommes depuis 2008-2009. C'est du nouvel argent en place. Le 45 millions dont je vous ai parlé...

Une voix: Il a été donné en...

Mme Beauchamp: Pour que... Est-ce que c'est ça que j'ai compris? C'est ça qu'on peut dire? Bon. Bon, bien, on... Je vais reprendre le temps de demander à quelqu'un de me le confirmer, mais ça se présentait comme ça il y a quelques instants.

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Nous avons demandé un certain nombre de questions. Dans les réponses qui nous sont arrivées -- là, O.K., on a l'habitude de poser des questions, donc, qui arrivent par écrit -- on cherchait à comprendre quelles étaient les sommes accordées dans le cas de mesures de soutien à la réussite, parce que c'est ça dont la ministre me parlait, et, depuis 2004-2005, on a ajouté des sommes, et on dit ici 5 millions par année. Je n'ai pas vu de sommes précises pour les clientèles dont je parle précisément, c'est-à-dire celles qui n'ont pas terminé leurs études secondaires et qui arrivent au collégial. Je dis ça parce que ce que les cégeps nous font comme représentation, et je les comprends, c'est: Si vous prenez une décision d'accueillir plus de clientèle en difficulté, bien, nous, on aimerait que les crédits suivent. Si on nous demande de réaménager les choses à même les enveloppes de soutien à la réussite qui vont pour tout le monde, vous nous demandez de faire un effort qui est trop grand pour nos moyens.

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie, Mme la députée de Taillon. Nous allons, à ce stade-ci, suspendre. La commission...

Une voix: ...

Le Président (M. Marsan): Oui.

Mme Beauchamp: ...pause, au lunch, pour apporter une réponse...

Le Président (M. Marsan): C'est exact.

Mme Beauchamp: ...définitive, avec le soutien de nos hauts fonctionnaires, sur la question posée sur les sommes pour la réussite au niveau collégial.

Le Président (M. Marsan): Alors, merci de cette précision.

La commission suspend ses travaux jusqu'après les affaires courantes où elle reprendra l'étude des crédits budgétaires du volet Enseignement supérieur, prêts et bourses du portefeuille Éducation, Loisir et Sport. Merci et bon appétit.

(Suspension de la séance à 11 h 59)

 

(Reprise à 15 h 18)

Le Président (M. Marsan): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

La commission est réunie afin de procéder à l'étude des crédits budgétaires du volet Enseignement supérieur, prêts et bourses, du portefeuille Éducation, Loisir et du Sport pour l'année financière 2011-2012.

Puisque nous avons débuté nos travaux à 15 h 20, nous les terminerons à 18 h 20. Alors, je vous invite, aux fins de l'exercice des crédits, à poser de courtes questions et incidemment à fournir des réponses tout aussi brèves, de façon à favoriser le plus grand nombre possible d'échanges.

Nous allons redonner la parole à Mme la députée de Taillon, qui est la porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enseignement supérieur, prêts et bourses. Et, Mme la députée, vous poursuivez cet échange de 20 minutes, et il vous reste environ... un peu moins de huit minutes.

Mme Malavoy: Merci, monsieur...

Le Président (M. Marsan): Mme la députée.

**(15 h 20)**

Mme Malavoy: Je vous remercie, M. le Président. Écoutez, on avait déjà, je crois, pris le temps de poser certaines questions avant l'ajournement de nos travaux. Donc, je vais simplement resituer la ministre, parce que j'avais posé des questions sur les cégeps en région, et, entre autres, les suites d'un rapport commandé par le ministère, qui s'appelle le rapport Boudreau, et qui suggérait un certain nombre de mesures pour faciliter la rétention d'étudiants dans les cégeps de régions éloignées, et particulièrement dans celui de Gaspésie--Les Îles. Et je croyais comprendre que la ministre, elle aurait été prête à me répondre, là, si on n'avait pas dû ajourner tout à l'heure. Donc, je lui laisserais un temps de réponse tout de suite là-dessus.

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme la ministre de l'Éducation, des Loisirs et du Sport.

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. On conviendra qu'il y a deux aspects à la question, c'est-à-dire qu'il y a l'aspect des cégeps qui vivent une... qui sont en situation où, dans leurs régions, on s'attend à une croissance démographique et qui... les prévisions indiquent qu'ils auront à subir cette décroissance démographique, puis, ensuite, il y a la situation du cégep de la Gaspésie qui... avec les travaux de M. Boudreau et le rapport Boudreau.

Peut-être, donc, de façon plus générale, vous dire que le ministère a des actions pour atténuer, je dirais, l'impact de la baisse des effectifs dans les cégeps en région. Il y a une série d'actions mises en place qui, jusqu'à un certain point... je vais dire ça comme ça, là, parce que je pense qu'il y a d'autre chose qui peut être fait, mais qui, jusqu'à un certain point, fonctionnent.

Ça fait que, juste à titre de rappel, là, vous indiquer, par exemple, qu'il y a des mesures qui s'élèvent à 5,5 millions, des mesures... pardon, mesure sur la baisse de clientèle qui est à 4,6 millions, qui est en place. Il y a des mesures pour soutenir les programmes techniques dans les clients... dans les cégeps qui ont des baisses d'effectif. Ça, ça s'élève à 4,6 millions de dollars. Il y a, bien sûr, et ce n'est pas à négliger, tout l'appui donné aux centres collégiaux de transfert technologique, aux CCTT, qui permettent, bien sûr, à plusieurs cégeps de devenir très attractifs en développant cette spécialité, et en offrant ces services aux PME dans leurs régions, et en étant identifiés à un créneau d'excellence.

Donc, il y a une série de mesures pour les cégeps en région qui connaissent des baisses d'effectif. Ce sont des mesures qui totalisent... Par exemple, pour cette année, ça sera 13,3 millions de dollars. Mais, peut-être, pour donner un ordre de grandeur, là, entre 2003 et aujourd'hui, 2010, il y aura eu plus de 100 millions -- en fait, c'est 109 millions -- de dollars attribués directement, là, au soutien des cégeps qui connaissent des baisses d'effectif dans leurs régions. Et vous voyez donc que, cette année, on sera à hauteur environ de 13,3 millions de dollars. Mais ça donne environ cette moyenne-là d'injection d'argent en mesures vraiment directes de soutien à ces cégeps.

Toujours d'un point de vue plus global, je dirais que... Et vous avez fait référence à la rencontre nationale qui se déroulera les 13 et 14 juin prochain sur la question de l'adéquation entre la formation... l'offre de formation au Québec et les besoins du marché du travail. Moi, je pense... Et j'ai déjà eu des échanges, notamment, par exemple... de brefs échanges, mais, lors d'une rencontre, j'ai eu des échanges avec des partenaires syndicaux comme la CSQ, j'ai eu des échanges avec la Fédération des collèges sur le fait que nous allons devoir aborder la question des collaborations -- je dirais d'une meilleure collaboration -- dans l'ensemble de l'offre de services en éducation dans certains territoires.

D'ailleurs, là, si je reprends l'exemple du rapport Boudreau, qui nous donnait un portrait au niveau de la Gaspésie, dans le rapport Boudreau, on retrouve nommée, là, cette obligation, je dirais, de collaboration, notamment entre les niveaux relevant de commissions scolaires et le niveau collégial. Si j'avais à...

Une voix: ...

Mme Beauchamp: Pardon?

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon souhaiterait poser une autre question.

Mme Beauchamp: Bien, la question elle était large...

Le Président (M. Marsan): C'est exact.

Mme Beauchamp: ...et elle était importante, là, mais... Je voulais juste, donc, mentionner que les interventions sont des interventions qui peuvent prendre la forme d'appuis ponctuels, mais récurrents, là, mais d'appuis pour soutenir des cégeps en région, comme les sommes d'argent servent, par exemple -- reprenons l'exemple de la Gaspésie -- à des maintiens de plus petites cohortes que ce qui est habituellement accepté ou autorisé par les règles budgétaires. Donc, il y a des mesures de soutien.

Mais je pense qu'indéniablement l'enjeu est plus important et plus large que l'application de ces mesures de soutien. Et il y aura des mesures à prendre dans certaines régions pour, notamment... Et, sans vouloir dresser un tableau noir de la situation, mais il y a, dans certaines régions, le fait que plusieurs acteurs du milieu éducatif et du milieu de l'emploi vont vous dire qu'il y a parfois, parfois, des compétitions malsaines sur un même territoire donné pour une même offre de formation aux niveaux professionnel et technique. Donc, on doit aussi se pencher là-dessus, favoriser la création de groupes, que les groupes se forment, qu'ils se forment au bon endroit, qu'on ait l'appui, parfois, d'Emploi-Québec pour le faire, qu'on soit capables de parler de l'attraction des étudiants étrangers dans nos régions.

Mais il va falloir que tout le monde travaille ensemble. Je pense qu'ici tout le monde souhaite l'appui et le maintien de nos collèges en région. Tout sera fait pour le maintien des collèges en région, ça, c'est à l'évidence même.

Le Président (M. Marsan): Merci. Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: J'aurais aimé, en très peu de temps, je le sais, mais que la ministre me partage un peu sa vision globale. Parce que, je sais, depuis 2006, on parle d'adéquation... Non, la ministre me dit: On veut une adéquation. Ce que j'aimerais savoir, c'est: Est-ce qu'il y a vraiment une offensive pour que les cégeps en région vivent et se développent? Et est-ce qu'on prendra tous les moyens pour ce faire, y compris, par exemple, leur octroyer des programmes exclusifs? C'est ça que je voudrais entendre.

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: M. le Président, je le dis gentiment, j'avais vraiment l'impression que c'est ça que j'essayais de faire, de donner ma vision, ma vision globale, là. Et je croyais au contraire qu'on me demandait de parler plus spécifiquement du collège de la Gaspésie, alors que je voulais prendre le temps de présenter cette vision plus globale.

Je veux juste dire ceci: La rencontre nationale du mois de juin, c'est une rencontre qui doit être un moment de décision, et, dans ce sens-là, je pense que la députée de Taillon va me comprendre que je ne peux pas et je ne veux pas prendre des décisions à l'avance sur une série de rencontres qui se déroulent, au moment où on se parle, dans toutes les régions du Québec, qui se fait d'ailleurs sous l'observation, le regard observateur de la Commission des partenaires du marché du travail.

Mais ce que je veux indiquer à la députée, c'est qu'il y a des choses qui devront bouger, et c'est un moment de décision. Et, au Québec, compte tenu qu'on a 740 000 emplois à combler en trois ans, il faut absolument, cégeps compris, et cégeps en région compris, qu'on soit capables de répondre à cette demande. Moi, je conçois que des choses doivent bouger, et j'ajouterais même un critère qui est le critère de la vitesse. Je ne peux pas éternellement être dans des débats de structures. Donc, il y a aussi un caractère de vitesse.

Dernier élément, c'est important à mes yeux, vraiment dernier élément, moi, je ne crois pas à du mur-à-mur. Je crois que, dans certaines régions données, il y aurait des exemples à donner, comme l'Estrie, par exemple. Il y a des degrés de collaboration qui permettent vraiment de très belles collaborations entre commissions scolaires et cégeps et qui peuvent présenter déjà des clés, là, de solution au maintien des cégeps dans certaines régions. Moi, je vais être très ouverte à des initiatives où on nous permet un peu des bancs d'essai pour nous permettre de trouver les meilleures solutions possible. Mais, à l'évidence même, les réalités ne sont pas les mêmes dans chaque région, et je vais être très ouverte à de la souplesse, mais je vais exiger de la vitesse d'exécution. Honnêtement, il y a une situation où on doit rapidement, tout le monde ensemble, répondre à ces besoins de main-d'oeuvre.

Le Président (M. Marsan): Alors, merci, Mme la ministre. Et ceci termine nos échanges avec l'opposition officielle. Nous poursuivons avec le parti ministériel, et je vais céder la parole à Mme l'adjointe parlementaire à la ministre de la Famille, Mme la députée des Mille-Îles.

Mme Charbonneau: Merci, M. le Président. C'est toujours gentil de donner le titre qu'on obtient quand on est adjointe parlementaire, puisque ça donne une plus grande ouverture sur les sujets qu'on pourrait aborder, mais vous ne serez pas surpris, puisque ça fait quelques années qu'on se fréquente maintenant, que j'aie une passion pour l'éducation, comme la plupart des gens qui font de la politique. L'éducation est un monde extraordinaire et méconnu. C'est une grande, grande famille et, comme dans chaque famille, il y a des plus jeunes et des plus vieux, bien, des fois, il y a des sujets qui sont tout à fait particuliers.

La ministre a mentionné, un peu plus tôt, quand on a eu l'étude des crédits ce matin, différents éléments qui, je pense, sont forts importants, entre autres la responsabilité de chacun ou la responsabilité de tous par rapport au financement de nos universités. Et j'ai apprécié le fait qu'elle a pu dire... puis je m'amuse toujours à dire aux 700 000 auditeurs qui nous écoutent, un peu, la responsabilité, elle se calcule comment. Entre autres, 51 % appartient au gouvernement. Ce qui appartient au gouvernement, c'est aussi ce qui appartient à la population.

Dans le discours du budget, le gouvernement a annoncé ces ententes, ces ententes qui peuvent sembler, pour plusieurs personnes, un peu nébuleuses, mais des ententes qui pourraient être... qui vont être conclues entre le ministère et les universités. Pour avoir siégé sur le projet de loi n° 38 et n° 44, je vous dirais que, quand on demande aux cégeps et aux universités de regarder un peu sur leurs principes de gouvernance puis comment ils font, c'est toujours un peu chatouilleux. C'est chatouilleux parce que les gens considèrent qu'ils sont autonomes, puis ils ont le droit de faire les choses comme ils le veulent. Et on a eu de très, très belles représentations des regroupements étudiants qui sont venus nous dire et qui sont venus nous sensibiliser à la place qu'ils veulent avoir à ces tables de concertation au niveau des cégeps et des universités. Et, nous, comme les deux partis de l'opposition, on s'est un peu prononcés aussi sur la gouvernance de nos universités et de nos cégeps.

Moi, j'aimerais bien que la ministre puisse nous parler en quoi que vont consister ces ententes de partenariat avec nos universités, vers quoi on va tendre non seulement sur la durée, mais sur ce que ça va donner à la fin. Parce que je pense qu'on peut parler beaucoup de ce qu'on aimerait, mais l'objectif de la ministre, c'est d'avoir et d'obtenir un résultat concluant à la fin. Donc, j'aimerais bien entendre la ministre sur le sujet.

**(15 h 30)**

Le Président (M. Marsan): Merci, Mme la députée. Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Merci beaucoup. Je tiens à remercier la députée de Mille-Îles pour sa question puis aussi pour sa passion pour le monde de l'éducation. Et je sais que, comme nous tous, là, elle souhaite un monde de l'éducation où les argents sont bien investis puis au bénéfice avant tout, là, de la qualité de l'enseignement puis, quand on parle du monde universitaire, bien sûr, de la recherche.

Je la remercie aussi de poser cette question-là parce que ça permet de donner les contrepoids nécessaires, là, à tout le débat qui a lieu sur la question des droits de scolarité. Parce que, oui, on augmente les droits de scolarité, on le fait, selon nous, en faisant en sorte que les étudiants font leur juste part. Mais je vous disais, là, que, de façon équivalente et concomitante, le gouvernement va mettre plus d'argent et, de façon importante et concomitante, on bonifie le programme d'aide financière et donc l'accessibilité aux études.

C'est un effort important. C'est un effort de 855... 850 millions à terme, qui deviendront des sommes récurrentes. C'est des efforts nécessaires pour assurer le maintien de la qualité, là, de la valeur du diplôme universitaire québécois. Parce que, M. le Président -- je sais que vous le savez, vous m'en avez déjà parlé -- là, le monde bouge autour de nous, et ailleurs il y a vraiment un accent extrêmement important mis sur le financement des universités. Puis on doit s'assurer que nos étudiants qu'on est en train, là, de former... Les futurs médecins, les futurs enseignants, les futurs avocats, les futurs ingénieurs, les futurs géographes, j'ai absolument besoin que ces personnes-là soient formées dans les meilleures conditions possible, avec les meilleurs professeurs possible, dédiés, avec les meilleurs outils et équipements possible. Et c'est ça, le défi qui est devant nous.

Mais je disais donc qu'il y a trois morceaux. On augmente le financement. On augmente l'offre, bonifie l'aide financière aux études. Mais le troisième morceau, c'est très important, il ne peut pas être occulté, c'est la question des exigences imposées au monde universitaire puis de la performance souhaitée de la part du monde universitaire. Puis je rappelais ce matin que, lors de la rencontre du 6 décembre, la journée était divisée en trois blocs d'égale importance, parce que ce... on ne peut pas avancer avec juste un morceau. C'est un puzzle, les trois morceaux sont imbriqués, interdépendants.

Il y a comme une forme de contrat là-dedans face à tout le monde. Et le monde universitaire, donc, vont se voir... j'allais dire imposer, mais je crois qu'honnêtement, après la rencontre du 6 décembre, ils ont convenu de la nécessité de procéder à la signature de telles ententes. Donc, le monde universitaire sera appelé à signer des ententes de partenariat avec le gouvernement du Québec. Quel est l'esprit de ces ententes de partenariat? C'est le fait que nous disons: Les 850 millions de dollars additionnels qu'on vous octroie, vous devez vous engager, de façon écrite, à nous dire où ça s'en va. Mais c'est plus que ça, l'encadrement est encore plus imposé que ça. Ce n'est pas: Informez-nous où vous allez mettre l'argent. C'est: Vous allez signer avec nous des ententes, et, nous, au nom de nos concitoyens québécois, on vous dit là où on veut que l'argent aille.

Et je vous ramène à la page 55 du document en appui au budget, qui est le Plan de financement des universités, où vous... Ça ne peut pas, je pense, être plus clair, mais c'est le fait qu'on liste la série d'indicateurs qui seront imposés dans les ententes de partenariat, et, plus que ça, non seulement la série d'indicateurs, on indique même le pourcentage des investissements des argents additionnels qui devront être consacrés à chacun des blocs. Je vais résumer ça rapidement, mais je vais vous le résumer.

Le premier bloc, ce pour lequel on veut que 50 % à 60 % des argents supplémentaires soient consacrés, donc là, c'est: plus de la moitié des argents devront être consacrés à la qualité de l'enseignement, les services aux étudiants puis la qualité de la recherche... pardon, la qualité de l'enseignement et services aux étudiants. Ce qu'on retrouve -- et je vais tout de suite passer aux indicateurs, là -- par exemple, comme indicateurs qu'on veut retrouver, c'est le taux d'encadrement des étudiants par des professeurs réguliers. Donc, ça, ça signifie: augmenter l'embauche ou l'offre de contrats de professeurs réguliers pour mieux encadrer les étudiants.

C'est des notions aussi du taux de persévérance à l'université. Et c'est un point important pour moi, et je vais le commenter sous la forme d'un témoignage, puis c'est un témoignage personnel, mais juste pour vous raconter mon histoire. Moi, j'étais une bonne étudiante. J'ai fait des études universitaires, je performais très bien. Je me suis engagée dans mes études de deuxième cycle de niveau maîtrise. J'ai commencé à travailler. J'ai commencé à faire du bénévolat dans une radio communautaire et j'ai commencé à travailler pour une association de protection des consommateurs dans le domaine des psychothérapies. J'ai étudié en psychologie. Mon histoire à moi -- j'espère qu'elle ne s'est pas répétée trop souvent -- c'est que j'étais une bonne étudiante, j'étais inscrite aux études supérieures, j'ai fait toute ma scolarité, j'ai fait mes stages en psychologie, il me restait à déposer mon mémoire de recherche. Et je veux juste vous dire que, moi, personnellement -- on est au milieu des années quatre-vingt -- je n'ai jamais reçu aucun coup de téléphone de mon université parce que je n'ai pas déposé mon mémoire de recherche. Plus que ça, je le dis gentiment, je n'ai même jamais reçu un coup de téléphone de la personne qui dirigeait ma thèse. C'est mon histoire à moi, mais je peux le jurer sur la Bible, ça s'est passé comme ça pour moi.

Il faut qu'il y ait un incitatif au niveau universitaire. Il faut qu'il y ait un accent mis sur la question de la persévérance. C'est très, très, très bien qu'une université puisse se vanter, à juste titre, qu'elle a augmenté ses inscriptions, mais honnêtement on s'intéresse aussi à la persévérance et à la diplomation. Donc, parmi les indicateurs, ce à quoi l'université va devoir nous démontrer qu'elle consacre des efforts financiers, il y a la question de la persévérance au niveau des études universitaires et la question, bien sûr, du taux de diplomation. Il faut que ça compte à quelque part, cette question du taux de diplomation.

Il y a également, je le mentionnais ce matin, mais comme indicateur, une obligation de nous dire les sommes consacrées au nombre de postes ajoutés dédiés au soutien des clientèles émergentes, des étudiants handicapés ou présentant des difficultés d'adaptation ou d'apprentissage au niveau universitaire. Donc, on déplorait le fait que ces étudiants n'avaient peut-être pas assez de soutien. Il y a une obligation d'y consacrer des sommes.

Ensuite, je vais y aller rapidement, mais la qualité de la recherche, 15 % à 25 % des sommes supplémentaires doivent être consacrées à la question de l'amélioration de la qualité de la recherche. Là, c'est les ressources allouées aux infrastructures de recherche, aux infrastructures complémentaires à la formation, les bibliothèques, les technologies de l'information, et également le nombre de... et les montants de subvention et des contrats de recherche obtenus du secteur privé et des fonds de recherche fédéraux, donc, bien sûr, qu'il y ait des incitatifs à ce qu'on soit toujours en train de bonifier les résultats de recherche de fonds au niveau de la fonction recherche dans nos universités. Donc, on comprend que le message lancé est de dire: Vous disposez de 850 millions supplémentaires, il faut que 15 % à 25 % de ces sommes-là soient consacrées à ce qu'on augmente, on intensifie encore les activités de recherche dans nos universités.

Il y a la question, ensuite, du positionnement concurrentiel de nos universités sur la scène canadienne et internationale; 10 % à 20 % des sommes doivent y être consacrées. Là, c'est le nombre de professeurs ou de chercheurs de calibre international recrutés, le nombre d'étudiants étrangers, le nombre... le nombre d'étudiants étrangers recrutés et le nombre et l'importance des projets réalisés avec des collaborations, avec d'autres institutions, au point de vue national ou international.

**(15 h 40)**

Et finalement, puis ce n'est pas le moindre, il y a le volet de l'administration et de la gestion, et là 5 % à 15 % des sommes doivent y être consacrées. Mais permettez-moi de vous donner l'exemple ici des cibles annuelles de revenus provenant des dons amassés dans le cadre des campagnes de financement, mais un qui est très important à mes yeux, c'est le taux de croissance de la rémunération globale en comparaison avec la politique salariale du gouvernement.

Donc, vous avez compris que, dans ces ententes de partenariat qui auront une durée de cinq ans, les universités devront nous démontrer qu'elles s'arriment avec les politiques salariales du gouvernement. C'est un encadrement, cet encadrement global... Le fait qu'on a choisi, là, d'identifier les indicateurs précis de ce à quoi doit servir l'argent, honnêtement c'est une première. C'est la première fois que c'est autant encadré. Mais je pense que c'était nécessaire. Tout le monde fait un effort additionnel, y compris les étudiants, je pense que c'était nécessaire d'être capables de dire aux Québécois: Voici ce à quoi l'argent sera consacré.

Maintenant, il y a un autre élément à ces contrats signés sur cinq ans, c'est qu'à mi-chemin, à mi-parcours... Bien, à chaque année, les universités devront faire une reddition de comptes transparente, à l'évidence même, mais, à mi-parcours, il y aura vraiment, je vous dirais, un moment charnière, un moment charnière où, si une université s'est trop éloignée de ces indicateurs, soit que ce n'est pas les bons pourcentages d'argent investi au bon endroit ou soit qu'il y a des indicateurs où on s'est éloignés de façon inconvenante de la cible fixée par le contrat, le gouvernement s'est donné le droit d'imposer des pénalités, en fait, dans un premier temps, bien sûr, bien sûr, offrir le temps qu'il y ait un plan de redressement de la situation, mais, si une université se voulait, et je le dis sans vouloir imputer de motif à quiconque, mais j'allais dire délinquante ou hors normes, il y a là la capacité, pour le gouvernement, d'imposer des pénalités.

Nous ne l'avons pas fait dès... pas après la première année ou... Parce qu'honnêtement, à sa face même, quand on parle de recruter des professeurs étrangers, d'augmenter le nombre d'étudiants au niveau étranger, d'augmenter les fonds de recherche, ce n'est pas après un an que je peux décider si une université s'est écartée de sa cible ou pas, mais, à mi-parcours, j'y crois. À mi-parcours, je crois qu'on est capables de déceler, de voir si une université est enlignée sur ce qu'exige le contrat qu'elle a signé ou si elle est en train de s'éloigner de ce contrat-là. Et, à ce moment-là, on a la capacité d'imposer des pénalités financières à une université.

C'est important parce que... Moi, je conçois très bien... Je suis une contribuable comme mes concitoyens. Il y a un effort demandé, 51 % de l'effort provient des contribuables québécois, je pense qu'il fallait savoir où va l'argent, puis il fallait imposer cela tout en étant conscients de la volonté du monde universitaire de rappeler leur autonomie. Et, pour moi, il n'y a pas de contradiction ici entre le respect de l'autonomie universitaire et le fait qu'un gouvernement qui demande à ses contribuables de faire autant d'efforts soit à même d'exiger les endroits où doit être investi l'argent.

Je dis ça parce que, je vais vous dire, j'ai un respect pour la question de l'autonomie des universités. Je lisais un ouvrage historique qui nous rappelait que, dans notre monde, je dirais, pratiquement depuis le Moyen Âge qu'on connaît la notion d'université, les universités ont résisté au temps, à l'histoire puis à tout régime politique. Et ça, c'est à travers le monde que les universités ont réussi à résister à bien, bien des aléas, je vais dire ça comme ça, de l'humanité, et ce n'est pas pour rien -- et c'est correct -- c'est parce que les universités avaient... ont toujours eu... défendu précieusement une autonomie universitaire, et je conçois ça et je comprends cela. Mais, je le répète, là, pour moi, il n'y a pas ici de contradiction entre un respect d'une autonomie universitaire dans ses choix de développement et le fait de dire: Bien, il y a un effort demandé de la part de contribuables et, ces argents-là... Là, on parle bel et bien ici des indicateurs des argents supplémentaires octroyés. Mais ces argents-là, nous devons obtenir les garanties que c'est pour, notamment à plus de 50 %, la bonification, là, l'amélioration de l'offre d'enseignement. Ça, je pense que c'était important de pouvoir l'affirmer, de pouvoir le contrôler.

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme la députée de Mille-Îles.

Mme Charbonneau: Il me reste combien de temps, monsieur?

Le Président (M. Marsan): Quatre minutes.

Mme Charbonneau: Quatre minutes, alors je ferai vite. Mais c'est un sujet sur lequel la ministre pourra peut-être revenir par après. On est dans l'autonomie des universités, puis il faut comprendre que, quand la ministre s'engage et dit: «Je respecte», il faut croire aux mots, parce que, quand Mme Beauchamp... quand la ministre de l'Éducation s'annonce, habituellement ce n'est pas pour rien. Par contre, on a vu, dans les médias, pendant quelque temps, une université qui s'est prononcée sur un programme particulier, le M.B.A. de McGill, un sujet un peu fragile, mais, en même temps, je pense que la ministre qui arrivait...

Parce qu'elle nous l'a rappelé ce matin, puis il faut se le rappeler aussi, la ministre, elle est avec nous, en Éducation, depuis peu. Et on pourrait croire que ça fait très longtemps, puisqu'elle connaît très bien son sujet, mais elle est arrivée au moment où McGill annonçait son programme de M.B.A. Alors, le gouvernement a affirmé qu'il ne tolérait pas cette augmentation, puis qu'il y avait des règles, puis que nous devions les respecter. Et je pense que la ministre a bien mentionné les choses. Mais sur quelles bases le ministère a décidé de la pénalité ou de pénaliser McGill pour son M.B.A.? Comment on a fait cette approche-là?

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Oui, M. le Président. Et sûrement qu'on aura l'occasion d'y revenir, mais effectivement nous avons vécu ce qui est un différend important avec l'Université McGill, qui a décidé d'aller de l'avant avec une offre d'un M.B.A. considéré comme un M.B.A. régulier, où on a annoncé des droits de scolarité qui atteignaient environ 30 000 $ par année. C'est un différend important parce qu'on est conscients, là... On sait que, dans la vision de McGill, ils disaient: Écoutez, c'est formidable, on ne demande pas d'argent au gouvernement, on ne vous demande... on va demander ces taux-là, puis, vous savez quoi, on est capables de remplir nos groupes, puis c'est ça qui se fait ailleurs. Même si on peut être à l'écoute de tels arguments, il n'en est pas moins qu'au Québec on a un régime qui prévoit que, comme société, on veut en tout temps s'assurer de l'accessibilité aux études. Et là, vraiment, on vivait un choc des idées, parce que, pour nous, l'accessibilité aux études pouvait être compromise pour un étudiant qui voulait aller s'inscrire à McGill dans un M.B.A. régulier mais qui voyait ce niveau de droit de scolarité, alors que le régime de prêts et bourses n'est, bien sûr, pas conçu en conséquence. Il est conçu pour les droits de scolarité prévus dans les programmes réguliers.

Mais, par ailleurs, puis je tiens à le dire parce que ça rend le dossier plus complexe, au Québec, le ministère permet qu'il y ait des programmes dits spécialisés, où là une université -- puis il y en a quelques-uns à l'échelle du Québec -- peut amener des droits de scolarité à 30 000 $, et peut-être même plus. Il y a des M.B.A., avec les HEC par exemple, pour cadres, ce qu'on appelle pour «executive», là, mais pour cadres, il y a des E.M.B.A., qu'on appelle, puis dans d'autres secteurs également. Pourquoi on dit: C'est spécialisé? Souvent, c'est parce que la cohorte qui est formée dans le groupe présente des caractéristiques très particulières, et la formation donnée est spécialisée par rapport à ce qu'on retrouve habituellement dans le M.B.A. régulier.

Donc, nous avons pris la décision de dire à McGill: Ce n'est pas acceptable, selon nous. Et, bien sûr, je pense qu'il fallait réagir de façon importante et, oui, j'ai annoncé, il y a quelque temps -- c'était le 11 mars -- une pénalité à l'Université McGill d'un peu plus de 2 millions. On l'a fait sur la base, justement, de la problématique de l'accessibilité. C'est-à-dire qu'habituellement une année de formation est, habituellement, de l'équivalent de 200 étudiants, à peu près 135 équivalents temps plein. Or, lorsqu'ils ont imposé les droits à 30 000 $, on est tombés à 57 étudiants, 48 équivalents temps plein. Ça fait que le calcul de la pénalité a été sur la base de tous ceux dont on a privé d'une inscription à un M.B.A. au tarif habituel. Ça a été le principe qu'on a appliqué, c'est de pénaliser McGill sur une approche d'«ils ont privé des gens d'une accessibilité à un programme régulier». Et ça a été la base de nos calculs pour en arriver à cette pénalité de 2 millions imposée à McGill, avec qui, par ailleurs... O.K. Bien, j'y reviendrai, on va... sur la suite des choses.

Le Président (M. Marsan): Merci beaucoup, Mme la ministre. Nous allons poursuivre nos périodes d'échange, et il me fait plaisir de reconnaître la députée de Lotbinière, qui est aussi la porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière Affaires sociales et de Sécurité publique. Mme la députée, vous avez la parole.

**(15 h 50)**

Mme Roy: Merci, M. le Président. Il y a deux mots que j'ai bien entendus puis que j'aime vraiment, c'est que la ministre ne privilégie pas les solutions mur à mur, et je pense que tout le monde s'entend qu'il y a une discussion à y avoir sur le financement des universités. Il y a une idée qui a commencé à naître, à se discuter dans notre parti -- on ne sait pas... notre décision n'est pas arrêtée, mais on en a discuté -- sur le financement modulaire, les frais de scolarité modulaires mais en fonction de la faculté.

La première prémisse qui sous-tendait notre réflexion, c'était que, si un étudiant sortait avec un revenu vraiment, vraiment bon comparé à la moyenne des Québécois, puisque 51 % du système est financé par les Québécois, il devrait peut-être contribuer plus au niveau des frais de scolarité. Il nous semblait que ce raisonnement-là manquait peut-être encore de... Il manquait une autre prémisse, je pense. Puis c'est avec les discussions avec M. Zizian, de la CREPUQ, qui a mis une deuxième... Un deuxième critère, puis que je trouve intéressant, c'est: si le revenu est intéressant et si la formation est exigeante de façon financière pour l'université.

Et, dans leur document, ils citent des exemples. Par exemple, pour les programmes de premier cycle en médecine, médecine dentaire, c'est extrêmement onéreux pour les universités. Médecine vétérinaire, ça aussi, on en manque, des vétérinaires au Québec, puis je pense qu'on devrait en former plus puis que, si on dotait les universités de meilleurs frais de scolarité lorsqu'ils forment des vétérinaires, bien, ce serait un encouragement à en former plus; des pharmaciens également. C'est, il me semble, une piste de réflexion qu'il faut avancer. Je vous... Mais, dans ma deuxième question, on va parler après des... Après ça, ça va être le service des prêts et bourses qu'il va falloir aussi modifier, je pense, en fonction de ça. On va commencer par le premier aspect.

Le Président (M. Marsan): Alors, merci. Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Merci beaucoup, M. le Président. J'ai envie de dire, sur le ton de la taquinerie: Est-ce que vous me demandez de vous aider d'élaborer votre programme?

Mme Roy: Bien, est-ce que je peux...

Mme Beauchamp: Mais je peux partager avec vous, ça me fait plaisir.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée... Juste un instant.

Mme Roy: Non, je vais répondre.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée.

Mme Roy: Ce que je peux dire, c'est qu'on a souvent avancé des idées qui ont été reprises par le gouvernement. Peut-être que là on pourra la faire ensemble cette fois-ci.

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Peut-être. Donc, j'allais dire: Ça me fait plaisir de partager avec vous, parce que, bien sûr, lorsqu'on a regardé la question du financement des universités, assurément c'est un élément qu'on a examiné. Et je prends le temps de vous dire... Puisque vous avez cité... enfin, parlé de M. Zizian, je prends le temps de vous dire qu'autour de la table de la CREPUQ il n'y a pas de position unanime sur cette question de la modulation selon les facultés.

Mais je vais faire une histoire courte. Je vous le disais, là, on a regardé... Vous avez raison de mentionner médecine, médecine vétérinaire. Il y a pharmacie, puis il y en avait d'autres, là, qu'on a... il y avait cinq, six... médecine dentaire, vétérinaire, pharmacie. Deux éléments, très, très rapidement, puis vous avez mis le doigt dessus, je... Le premier élément, il est plus complexe qu'on ne le pense, c'est la question d'assurer l'accessibilité par le bon programme d'aide financière, pour accompagner des droits de scolarité qui seraient encore plus élevés pour ces facultés où, à la fois, ça coûte plus cher pour former puis, à la fois, on sait que les finissants, les diplômés gagnent un revenu supérieur. Et c'est là que je ramenais un peu le fait de dire qu'il y a eu des choix de société faits au Québec, qu'on continue à endosser, et la question de l'accessibilité aux études, c'est un choix de société qu'on fait au Québec, qui est indéniable, et cette accessibilité aux études, c'est par le bon programme d'aide financière.

Je vous fais remarquer qu'au moment où on se parle, déjà, sans modulation, avec des droits de scolarité qui auraient atteint... On le sait, là, des comparaisons avec ailleurs, c'est des 15 000 $, 25 000 $, 30 000 $, pour reprendre l'exemple du M.B.A. de McGill, par exemple. Bien, si je veux assurer l'accessibilité aux études, ce serait, là, un régime d'aide financière assez complexe. Puis je voulais juste vous faire remarquer qu'au moment où on a choisi de ne pas aller vers cette route et de ne pas amener des frais différenciés selon les familles disciplinaires, déjà, de l'augmentation prévue des droits de scolarité, 35 % est réinjecté dans le programme d'aide financière pour bonifier le programme et s'assurer de l'accès à l'université pour quelqu'un qui n'aurait pas les moyens financiers d'aller à l'université. Donc, imaginez si on augmente encore plus les droits pour certaines familles disciplinaires, c'est un impact financier important qui nous aurait fait dépasser cette notion de 35 %. Et, franchement, au-delà de ça, bien là, ça... on commence à se poser la question si ça vaut la peine de faire une telle hausse de droits. Tu sais, il y a... Vous avez mis le doigt dessus, c'est vrai qu'il y a des enjeux autour de comment j'assure l'accessibilité aux études si je module certaines familles disciplinaires avec des droits de scolarité plus élevés.

Par ailleurs, donc, le deuxième point à considérer, c'est ce que je vous disais, au moment où on se parle, il n'y a pas de position claire ou, je dirais... c'est ça, unanime, là, chez les membres de la CREPUQ. Et il y a notamment, je vous dirais, cette sensibilité qu'ont les universités qui ne présentent pas les spécialités qu'on vient de nommer... et souvent ça représente... On parle des universités du Québec, les universités du Québec en région, qui ont une sensibilité pour qu'avec le temps on ne soit pas devant un réseau universitaire québécois où on aurait établi, notamment par de telles actions, une notion presque, là, pour imaginer, là, une notion quasiment d'un réseau à deux vitesses avec des universités qu'on qualifierait des grandes universités, avec ses facultés avec des droits de scolarité très élevés, puis, ensuite, bien, l'autre vitesse, avec un réseau d'universités en région qui n'ont pas cela et qui seraient perçues comme n'étant pas dans la même... je dirais, comme dans le même réseau universitaire.

Et je pense qu'il faut être sensibles à cette question. Je sais, là, je sais comme vous, qu'à l'échelle du Canada on est le seul ou un des seuls endroits où on ne module pas selon les familles disciplinaires. On est conscients de ça, on s'est posé les questions. Mais, en même temps, on a un modèle qui est un modèle des universités du Québec en région, puis je pense qu'il faut être sensibles à cette question-là.

Je termine en disant tout simplement: Vous convenez avec moi qu'avec le débat que ça peut susciter, et tout ça, on a pris une bonne bouchée, on a pris une bonne bouchée en annonçant quelque chose qui est assez historique, la hausse des droits de scolarité. On a un programme complet puis, je vais vous le dire bien honnêtement et clairement, on considérait que la bouchée était déjà importante, elle va déjà être efficiente. Et ce sera, après les cinq prochaines années, peut-être un nouveau sujet de débat, mais, pour le moment, on trouvait que la bouchée était assez importante, assez grosse et convenait... Et je ne dis pas, loin de là, qu'il y a unanimité, puisque je connais l'opposition, par exemple, de certaines associations étudiantes, mais, du côté des recteurs d'université, il y a franchement un appui sans équivoque au plan d'ensemble déposé par le gouvernement.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Lotbinière.

Mme Roy: M. le Président, nous, c'était dans notre programme, cette hausse de frais de scolarité, depuis toujours. J'étais -- je me souviens -- toujours la seule, dans les débats, à me faire huer par les associations étudiantes. Par contre, je peux vous dire que, si on le salue... Le problème, c'est que c'est une bouchée mur à mur. Je pense qu'on a augmenté tous les frais de scolarité de façon égale. Je pense qu'il y a des choses que l'on confond dans le discours québécois: l'égalité des chances puis l'égalité de traitement, ce n'est pas la même chose. L'égalité des chances pour chacun des Québécois, franchement ça passe vraiment par le système d'éducation. Mais ça ne veut pas dire qu'on doit tous les traiter de la même façon. Il faut qu'ils aient la même égalité des chances. C'est un...

Il y a un autre, aussi, mythe qu'on doit combattre, c'est le fait que payer nos études, c'est une dépense. Ce n'est pas une dépense, c'est un investissement et c'est un actif que d'avoir un diplôme. Puis certains diplômes donnent accès à des professions qui sont beaucoup plus... mieux payées que d'autres. Est-ce que c'est aux Québécois, qui gagnent souvent beaucoup moins cher, à financer l'acquisition de cet actif-là pour un professionnel qui va gagner un salaire énorme? C'est une question, je pense, qui est une question de société.

Mais, l'autre question, vous avez fait rapport à votre expérience personnelle, je peux vous faire part aussi de mon expérience professionnelle. En tant qu'avocate, je défendais souvent des étudiants qui avaient fait faillite. Puis là on voit que la faillite, il y en a de plus en plus, d'année en année, pour les étudiants qui ne sont pas capables de rembourser leurs prêts étudiants. On est passés, en 2007, de 1 453... non, ceux qui vont au seuil maximal d'endettement, on est passés de 1 453 à 2 261, puis on est aussi passés à plusieurs faillites, beaucoup plus de faillites maintenant qu'avant. Et puis, je me souviens, quand j'allais... Parce que, systématiquement, le ministère de l'Éducation demande que l'étudiant ne soit pas libéré de sa créance envers les prêts et bourses, puis ça, je le comprends parce que c'est la société qui l'a supporté. Mais ce qu'on reprochait aux étudiants à l'époque, c'est: Vous avez choisi d'aller dans une faculté ou d'obtenir un diplôme qui ne vous offrait pas suffisamment de choix sur le marché de l'emploi. Franchement, on disait: Bien, vous avez choisi d'aller dans telle profession -- que je ne nommerai pas -- puis vous saviez qu'il n'y avait pas d'emploi, ne venez pas nous reprocher de ne pas avoir les revenus pour rembourser maintenant.

En Ontario, pour faire une correction à ce niveau-là, ils modulent la façon de rembourser en fonction des revenus de l'étudiant qui a terminé, du finissant, du diplômé, parce qu'il... et ces remboursements de prêt ne peuvent aller plus que 20 % des revenus familiaux. Je pense que ça permettrait, premièrement, à ce que la ministre voie moins de faillites, perde moins de créances, permette de plus... puis permette aux étudiants de s'acquitter de leurs créances, parce, pour un professionnel de la santé, faire les remboursements de prêts et bourses, ce n'est vraiment pas la même difficulté que dans d'autres professions.

Est-ce que vous avez étudié, bien, cette proposition-là des recteurs puis ce que l'Ontario a annoncé comme étant une mesure qu'ils mettraient en place, un modèle qu'ils vont établir?

**(16 heures)**

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Parce que j'ai... Je veux juste porter à l'attention de la députée que... et c'est peut-être trop méconnu, mais il existe en ce moment, au gouvernement du Québec, un programme de soutien, qu'on appelle le Programme de remboursement différé des prêts et bourses, qui tient compte de si quelqu'un a de la difficulté ou pas à rembourser ses prêts et bourses et qui tient compte du niveau de revenus dont il dispose.

Et, avant de vous parler de la bonification à ce programme, je voulais juste voir si on pouvait me remettre une petite fiche où je pouvais vous décrire comment il fonctionne actuellement. Parce que, dans l'annonce que nous avons faite, je prends juste le temps de vous dire qu'on bonifie cette notion de remboursement différé. Et, vous vous souvenez avec moi, dans le débat sur la hausse des droits de scolarité, très souvent, on a entendu la notion de remboursement proportionnel aux revenus. Il y a un élément qui existe déjà, qui est très, très proche de cette notion, qui est le fait que, si quelqu'un se retrouve dans une strate de revenus qui ne lui permet pas de rencontrer les exigences, les remboursements auprès de son institution financière, le gouvernement intervient et le gouvernement est en appui à cette personne-là. Donc, c'est une forme de programme de soutien selon le revenu de la personne, où on intervient selon le revenu de la personne.

On a sorti les bonnes fiches pour moi. Je voulais juste pouvoir vous le décrire plus précisément.

Le Président (M. Marsan): ...question, Mme la députée de Lotbinière?

Mme Roy: C'est parce que j'ai seulement un groupe de 15 minutes.

Le Président (M. Marsan): Oui. O.K., Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Bien, écoutez, on pourra vous faire parvenir l'information. Ce que je voulais vous dire, c'est que ça, ça existe déjà. Et, dans le discours sur le budget, nous avons décidé de... franchement de bonifier cette mesure-là et d'assez bonne façon. Donc, je vais vous donner un exemple. La bonification qu'on propose, là, c'est une prolongation de la période actuelle d'admissibilité, qui est de 24 mois. Je le dis de mémoire. En ce moment, là, on est en soutien à quelqu'un qui a un niveau plus bas, qui ne lui permet pas de faire ses remboursements. En ce moment, la période de soutien du gouvernement, qui paie ses intérêts, les intérêts du prêt, à la place de l'étudiant, c'est sur 24 mois. La décision qu'on a apportée, concomitante à l'annonce de la hausse des droits de scolarité, c'est que l'accompagnement sera dorénavant sur 60 mois, sur cinq ans, pour tenir compte, justement, de l'individu qui, après avoir terminé ses études universitaires, n'a pas le niveau de revenus qu'il souhaitait et ne serait... aurait plus de difficultés à rembourser ses prêts et bourses.

Donc, je voulais juste prendre le temps de vous dire: Un programme de remboursement différé, mais qui tient compte, donc... qui réagit selon la proportion de revenus du finissant universitaire, ça existe déjà. Et une des mesures importantes annoncées dans le dernier budget, c'est le fait qu'on le bonifiait, passant de deux ans à cinq ans de soutien, de la part du gouvernement, pour le remboursement des prêts.

Le Président (M. Marsan): Alors, ceci termine la période d'échange avec le deuxième groupe d'opposition. Nous allons poursuivre avec le parti ministériel. Et je vais céder la parole à notre députée de Trois-Rivières, qui est aussi la whip adjointe du gouvernement. Mme la députée.

Mme St-Amand: Alors, merci beaucoup, M. le Président. Comme c'est la première fois que je prends la parole à cette commission, vous me permettrez de vous saluer puis saluer le personnel qui vous entoure, évidemment saluer ma collègue ministre, le personnel du ministère qui l'accompagne aussi, ainsi que son personnel de cabinet, mes collègues du gouvernement ainsi que les députés de l'opposition. Évidemment, M. le Président, vous me permettrez de saluer les gens à la maison, qui nous regardent via Internet ou via la télévision.

Alors, M. le Président, l'aide financière et l'accessibilité aux études sont une priorité pour notre gouvernement. S'assurer du maintien de la qualité de la formation qui se donne dans nos universités et de l'excellence, particulièrement, sont vraiment importants pour nous. C'est pourquoi, dans le dernier budget, le ministre des Finances a proposé aux Québécois un plan équilibré pour financer nos universités.

À cet égard-là, M. le Président, on s'est donné les moyens de l'excellence. Grâce à ce plan, les universités du Québec ont accès... auront accès annuellement à des revenus additionnels qui atteindront 850 millions de dollars en 2016-2017. C'est un budget qui sera augmenté de 320 millions de dollars pour maintenir le financement réel par étudiant, c'est-à-dire pour tenir compte de l'inflation. 530 millions de dollars s'y ajouteront pour financer l'excellence de nos universités. Ainsi, au total, c'est près de 25 %, au cours des six prochaines années, du budget qui sera destiné à l'enseignement et à la recherche.

C'est un plan qui permettra d'atteindre quatre objectifs, soit répondre aux besoins de financement des universités, de répartir équitablement la contribution de chacun, et de maintenir l'accessibilité du système universitaire aux étudiants québécois à faibles revenus, et de conduire... de conclure avec les universités des ententes de partenariat.

Évidemment, M. le Président, je ne peux pas passer sous le silence qu'à Trois-Rivières nous avons une université, l'UQTR. C'est un privilège d'avoir cette université-là, qui est une université performante, décloisonnée, ouverte sur sa communauté, qui a innové dans ses programmes au cours des dernières années. Elle a connu un développement franchement exceptionnel. Vous me permettrez de saluer le recteur, M. Ghislain Bourque, et toute son équipe, qui font vraiment un travail colossal. Et ce sont des partenaires de choix dans notre milieu. Je suis graduée de cette institution-là, M. le Président, mes enfants y ont étudié aussi, alors vous comprenez que c'est une très, très grande fierté pour nous, à Trois-Rivières.

Le budget mentionne aussi que les étudiants devront faire leur juste part. Le ministre a souligné que les étudiants sont appelés à assumer leur juste part du plan de financement. Il a précisé qu'au milieu des années soixante, les droits de scolarité payés par les étudiants représentaient 26 % des revenus globaux des universités québécoises. En 2008-2009, cette proportion était deux fois moindre.

Évidemment, pour nous, l'accessibilité, elle est importante. D'ailleurs, à cet égard-là, il serait vraiment... nous attendons toujours que l'opposition officielle nous parle de sa position quant au financement et de ce qu'ils veulent faire. En 2007 -- je regardais dans mes documents, M. le Président -- alors qu'on était quand même assez loin d'un congrès national, la chef de l'opposition s'était dite favorable à une hausse des droits de scolarité, à condition que cela ne conduise pas à un désengagement de l'État dans le financement des universités. M. le Président, l'État est bien loin de se désengager. Au contraire, je vous l'ai dit tout à l'heure, c'est des revenus additionnels de 850 millions de dollars que nous viendrons apporter.

J'aimerais bien demander à notre ministre... Ma question, en fait, serait que... Bonifier le programme d'aide financière aux études était une condition à l'augmentation des droits de scolarité pour plusieurs partenaires de l'éducation. J'aurais deux questions pour Mme la ministre. D'abord, j'aimerais l'entendre sur quel moyen le gouvernement prendra pour mettre en oeuvre l'accessibilité aux études et éviter d'alourdir l'endettement des étudiants universitaires au Québec. Et je voudrais aussi savoir que fera le ministère pour les familles à revenus considérés dans la classe moyenne.

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme la ministre.

**(16 h 10)**

Mme Beauchamp: M. le Président, je veux saluer la députée de Trois-Rivières, la remercier pour sa question et en profiter, là, pour dire que, juste avant de répondre précisément à ses deux questions, juste se remettre dans le bon contexte des actions menées et faites au cours des dernières années, la bonne perspective à avoir, puis c'est important de le rappeler, là, c'est que, depuis 2003, depuis qu'on forme le gouvernement, le budget de l'aide financière aux études a augmenté de 96 %, 95,8 %. C'est tout près de 270 millions de dollars de plus au niveau de l'aide financière aux études. Et ça continue.

Donc, juste avant de vous parler des bonifications que l'on fait dans le cadre du plan sur cinq ans, entre 2012 et 2017, pour les universités, je veux juste prendre le temps de vous dire que vous... la députée de Trois-Rivières peut dire à ses concitoyens que, cette année encore, il y a une hausse des budgets dans l'aide financière aux études. La hausse de cette année sera de 13,4 millions de dollars. La hausse, c'est quelque chose qui est demandé par les étudiants, c'est l'indexation des paramètres de calcul. Ça n'a pas toujours été le cas. Je vous laisse deviner en quelle année. Mais c'est l'indexation des paramètres de calcul.

Et l'autre élément que je veux souligner, qui sera en cours au cours de la prochaine année -- et ça avait été annoncé lors de l'annonce du plan de lutte -- le deuxième volet, là, la deuxième vague, je vais dire ça comme ça, du plan de lutte contre le pauvreté, c'est le fait qu'on avait accepté -- puis à juste titre, c'était la bonne décision -- que nous acceptions l'exemption des revenus de pension alimentaire pour les... donc les... quelqu'un en charge d'une famille monoparentale. Donc, au moment où je vous parle, c'est 1 200 $ par année, peu importe le nombre d'enfants dans la famille, et on a accepté, donc -- je dis «on a accepté», mais je devrais dire «on a pris cet engagement» -- oui, on a accepté de dire que l'exemption sera dorénavant de 1 200 $ par enfant dans la famille monoparentale. Et c'est une bonification, là, qu'on évalue de façon récurrente à 1,4 million de dollars par année mais qui va faire une différence assurément, là, dans la vie de personnes, hommes ou femmes, en charge d'une famille monoparentale qui souhaitent retourner aux études.

Donc, premier élément, les budgets ont toujours augmenté puis augmentent encore cette année, notamment parce qu'on accepte l'indexation des paramètres et qu'on ajoute des mesures comme celle-là touchant les personnes en charge de familles monoparentales. Maintenant, vous avez raison de dire, là, qu'on a un engagement... La députée a raison de dire qu'on a un engagement sérieux vis-à-vis, là, l'avenir de nos universités. Mais il a toujours été clair pour nous, toujours, que, si on parle de l'augmentation des budgets des universités, ça voulait dire un effort de tout le monde, que ce ne serait jamais dans un contexte de désengagement de l'État, que ça voulait dire que l'État continuait d'être là -- puis, quand on parle de l'État, là, il faut appeler un chat un chat, c'est... les contribuables québécois, à même leurs impôts, vont continuer de soutenir les universités -- et que, oui, nous devions, au Québec, parler de l'augmentation des droits de scolarité.

Donc, il y a des principes qui nous étaient chers: parler que c'était un engagement de tous, puis l'autre principe, tout aussi important, au même niveau, c'était la question de la préservation de l'accessibilité aux études universitaires. Et la proposition, j'allais dire, la décision qu'il y a, ce... Pourquoi j'ai juste le mot anglais, très laid, de «package»? Il doit y avoir une autre expression. La... C'est pour ça que je disais «la proposition», là, mais le... Parce que ce n'est quand même pas un paquet, hein, ce...

Une voix: ...

Mme Beauchamp: L'ensemble -- merci -- l'ensemble des mesures comprend cette bonification de l'aide financière aux études. C'est 35 % de la hausse des droits de scolarité qui est mis dans la question du programme d'aide financière aux études. Ça équivaut à 118 millions de dollars qui seront injectés dans le programme d'aide financière aux études, et, de ce 118 millions de dollars là, 112 millions seront versés en bourses. Donc, ça, ça veut dire -- je veux juste qu'on prenne note, là -- zéro endettement de plus chez les Québécois et les Québécoises qui ont droit à des bourses dans notre régime. Qui a droit à des bourses? Ceux qui sont considérés comme ayant le moins de moyens, qui ne sont vraiment pas capables d'accéder aux études universitaires, on leur offre des bourses. Ces étudiants-là... Toute la hausse des droits de scolarité est octroyée sous forme de bourses à ces étudiants-là. Et ça veut donc dire, chez les boursiers, zéro endettement de plus.

C'est un effort important, c'est un effort juste, parce que ça nous permet de continuer à dire qu'au Québec c'est l'État qui fait le plus gros de l'effort. Ça, c'est un modèle à nous, puis il va continuer à être vrai. À l'encontre de ce qui se passe ailleurs, au Québec, c'est le gouvernement, à même les impôts des contribuables, qui fait le plus gros de l'effort dans le financement des universités. Et aussi, puis c'est un modèle qui nous est cher, c'est au Québec qu'on continuera à avoir les droits de scolarité les moins élevés et le programme d'aide financière le plus généreux. Indéniablement, le plus généreux. Puis, quand je dis «généreux», je ne veux pas avoir un ton paternaliste, là, mais, je veux dire, c'est au Québec qu'on fait le plus gros de l'effort pour permettre, assurer l'accessibilité aux études universitaires.

Je le disais, là, dans la bonification du programme d'aide financière aux études -- j'en parlais un peu plus tôt, mais c'est important -- il y a cette bonification du Programme de remboursement différé. Donc, en ce moment, c'est une clientèle qui gagne le salaire minimum, qui est admissible à ce programme de soutien pour le remboursement différé. Non seulement on dit: Ça passe de deux ans à cinq ans, mais des gens qui auraient des revenus au-dessus du salaire minimum vont aussi, dorénavant, avoir droit à ce régime de soutien à un remboursement différé si certaines personnes se retrouvaient à avoir des difficultés de rembourser leurs prêts étudiants. Donc, c'est une bonification, là aussi, importante.

Puis finalement il y a aussi la prise en compte... Et ça, c'était une revendication, je pense, qu'on peut dire qu'on a entendue, c'est une revendication un peu historique, mais c'était qu'on revoie la question de la contribution demandée aux parents ou au conjoint. Et ça, on a accepté de regarder ça. Et, oui, à partir de 2012-2013, il y aura une réduction de la contribution demandée aux parents. Ça va toucher au moins 27 000 boursiers. C'est ce qu'on évalue. Et d'ici... En fait, ça va toucher 27 000 boursiers dès la première année d'entrée en vigueur, puis on estime qu'en 2016-2017 on sera rendu à 35 000 boursiers pour qui ça aura fait une différence, cette révision de la contribution demandée aux parents. Donc, vous avez compris... et il existe un tableau qui a été distribué lors du budget, puis on pourrait y faire référence un peu plus tard, mais que, si, au moment où je vous parle, on demande une contribution à une famille qui gagne 30 000 $, en 2016, si la famille gagne 40 000 $, il n'y aura pas, de contribution demandée. Donc, c'est un soutien de plus, je dirais, à la classe moyenne, où on reconnaît cette... où on veut, dans le fond, soulager d'un certain effort cette classe moyenne qui est dans cette catégorie de revenu familial.

Finalement, je veux aussi vous dire, là, que c'est quelque chose dont on ne parle pas beaucoup mais qui existe. Puis je vais en profiter pour le dire sur le ton de l'information, c'est important de dire que, dans tout l'aspect de l'aide financière aux études, les deux paliers de gouvernement prévoient des crédits d'impôt non remboursables de 20 % pour l'année. Et ce crédit d'impôt, si ce n'est pas l'étudiant qui s'en prévaut sur ses droits de scolarité, c'est un crédit d'impôt transférable à ses parents. Je le dis parce que, lorsqu'on fait tous les calculs, je peux vous affirmer, donc, que, notamment votre préoccupation pour les gens de la classe moyenne, que vous représentez, je peux vous dire qu'il y a là une panoplie de mesures où on est en mesure, là, d'affirmer que... en fait, qu'on a pris avec attention et, je vous dirais, avec sensibilité des moyens pour franchement diminuer le poids, là, sur la classe moyenne de cette question du paiement des études universitaires des enfants.

Donc, augmentation du programme d'aide financière, principalement 112 millions sur 118, c'est sous la forme de bourses en totalité, zéro endettement pour les étudiants boursiers qu'on sait qu'ils font partie de la classe plus défavorisée ou même de la classe moyenne, allégement de la contribution demandée aux familles, notamment, bien sûr, ça touche la classe moyenne, plus le crédit d'impôt disponible. Je disais: Je le donne sur le ton de l'information, parce que je ne suis pas certaine que c'est tout le monde qui s'en prévaut. Puis, je veux juste le dire, il y a un crédit d'impôt disponible pour tous les étudiants universitaires et leurs familles, puis il faut aller le chercher.

Le Président (M. Marsan): C'est ça. Merci.

Mme Beauchamp: Ça fait partie des outils mis en place en appui à l'accès aux études universitaires.

**(16 h 20)**

Le Président (M. Marsan): Alors, merci, Mme la ministre. Nous poursuivons notre période d'échange avec la porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enseignement supérieur, de prêts et bourses, Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Merci, M. le Président. Bon, j'ai un certain nombre de questions, mais je vais commencer sur le financement des universités puis les récents choix du gouvernement. Je vais commencer, je dirais, assez largement par faire un lien entre ce que le premier ministre disait lors du discours inaugural et ce qu'on voit dans le budget. Le discours inaugural disait ceci... D'abord, vous vous souviendrez, M. le Président, qu'à ce moment-là le premier ministre mettait l'éducation comme priorité numéro un au Québec. Parmi cinq priorités, c'était la priorité des priorités. Et il disait, en parlant de l'investissement dans les universités, il disait: «...le gouvernement y contribuera encore davantage, le secteur privé y contribuera davantage, et les étudiants feront leur juste part.» On reviendra aux étudiants tout à l'heure, mais «le gouvernement y contribuera encore davantage».

Moi, j'aimerais vous amener à la page 37 du plan de financement des universités pour montrer une chose qui confirme exactement nos craintes. On peut regarder l'investissement de l'État, comme on a fait ce matin, simplement en chiffres. D'ailleurs, ce matin, je reviens sur un élément, on a bien vu que le milliard que le gouvernement veut investir jusqu'en 2012, on a compris, ce matin, que ça lui prenait au moins une année de plus pour y arriver, hein? Il y a un solde, là, qui ne rentre pas dans l'année financière de 2011-2012.

Mais ce qui m'inquiète, c'est ce que je vois à cette page 37, donc, du plan de financement des universités et qui montre que la part du gouvernement du Québec en 2008-2009, pour ce qui est des revenus globaux des universités, était de 54 %. Et en 2016-2017 cette part sera de 51,4 %. Et cela confirme exactement certaines craintes que nous avons et certaines craintes aussi qu'ont suscitées des modifications à travers le monde, c'est-à-dire qu'au moment où on demande aux étudiants d'absorber une plus grande part des besoins en matière de financement des universités, au même moment, l'État ne s'engage pas plus, il se désengage. Il n'y a rien de plus parlant qu'un pourcentage. Un pourcentage, ça veut dire quelle est la part de notre effort. C'est une tarte. Quelle est la part de notre effort? Et, dans la part d'effort qu'on me met là, sous les yeux, je vois bien que l'État du Québec, jusqu'en 2017, va se désengager.

Et, pour avoir discuté avec des gens de ce qui se passe ailleurs dans le monde, c'est précisément ce que l'on craint: que, dans les sociétés où on demande de plus en plus aux étudiants, l'État finalement en met de moins en moins, pas en chiffres absolus, puisqu'évidemment les coûts de système font que ça grimpe d'année en année, mais en pourcentage; c'est très révélateur. Ça fait que j'aimerais que la ministre commence par me commenter ce tableau qui montre que la part de l'État, avec tout ce qu'elle est en train de nous expliquer, va bel et bien baisser. C'est une tendance à la baisse qui s'observe actuellement.

Le Président (M. Marsan): Merci, Mme la députée. Alors, Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Vraiment, M. le Président, je veux réagir parce que vraiment je suis en complet désaccord avec la lecture que fait la députée de Taillon. Dans la vraie vie, là, quand on parle à un contribuable, là, un désengagement, c'est mettre moins d'argent. Ça, c'est un désengagement de l'État. Ça, c'est: au net, là, l'État met moins d'argent.

Puis, M. le Président, je dois rappeler à la députée que ça, c'est une histoire connue. On l'a connue. Un vrai désengagement de l'État, c'est quand un État met moins d'argent, puis ça, on l'a vécu dans les années 1996 à 1998, sous le gouvernement du Parti québécois, qui, voulant atteindre l'équilibre budgétaire, a décidé d'être... Il faut le rappeler, là. Ça, c'était du vrai désengagement, là, on était dans du négatif. Les budgets des années précédentes n'étaient pas maintenus.

Je n'étais pas dans un gel. Bien sûr, je n'étais pas dans une indexation aux coûts de système. Je n'avais pas des nouveaux...

Une voix: ...

Mme Beauchamp: Bien, oui, on a un débat sur c'est quoi, la notion de désengagement de l'État. La députée de Taillon, elle affirme que l'État se désengage. Je suis en train d'avoir un débat sur la notion de désengagement et je lui fais part de ma définition à moi de ce que c'est qu'un désengagement de l'État. Un désengagement de l'État, c'est comme en 1996, quand j'avais des crédits négatifs, moins 4 %, ou en 1997-1998, moins 5,9 %. Je pense qu'on peut s'entendre que, dans la vraie vie, là, un contribuable, ça, il appelle ça un désengagement de l'État. On peut avoir un débat sur c'était-u la bonne façon de faire, c'était-u nécessaire, etc., mais ça, c'est un désengagement de l'État. Quand un gouvernement...

Mme Malavoy: Alors, je demande à la ministre...

Mme Beauchamp: Quand un gouvernement met plus d'argent, on ne peut pas appeler ça un désengagement de l'État. Quand, dans un plan sur cinq ans, sur une enveloppe de 850 millions de dollars, le gouvernement, les contribuables font 51 % de l'effort, on ne peut pas appeler ça un désengagement. C'est plus d'argent puis plus d'effort fait à partir des impôts des contribuables qu'à partir de n'importe quelle source de revenus.

Sincèrement, là, je réagis en disant: Bien, ça ne se peut pas. Ça ne se peut pas que la conclusion, ça soit: Ah! il y a plus d'argent, puis les contribuables font plus d'effort que les étudiants universitaires puis le secteur privé, puis ça, la conclusion, c'est un désengagement.

Le Président (M. Marsan): Je voudrais...

Mme Beauchamp: C'est impossible qu'on en arrive à cette conclusion quand il y a plus d'argent puis que c'est le gouvernement qui fait 51 % de l'effort, du réinvestissement.

Le Président (M. Marsan): Merci.

Mme Malavoy: Alors...

Mme Beauchamp: On n'est pas dans un désengagement.

Le Président (M. Marsan): Merci, Mme la ministre.

Mme Beauchamp: On réinvestit dans les universités 850 millions.

Mme Malavoy: Alors...

Le Président (M. Marsan): Oui. Je voudrais, juste avant de vous laisser la parole, Mme la députée de Taillon, simplement rappeler la règle de pertinence pendant les crédits: «Tout discours doit porter sur le sujet en discussion.» Mais la décision 211/2: «Lors de l'étude des crédits budgétaires, la règle de pertinence doit être appliquée avec moins de sévérité que lors de l'étude détaillée des projets de loi. La jurisprudence indique qu'elle doit être appliquée d'une façon très large. Ainsi, les interventions des membres peuvent se rapporter à l'ensemble des activités d'un ministère, pour autant que ces interventions aient un lien avec [les éléments du] programme.» Alors, je vous cède la parole, Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Oui. Mais vous me permettrez respectueusement, M. le Président, de dire: Je ne questionne pas la pertinence. Je questionne parfois la longueur des réponses. Et, dans un cas comme celui-là, je veux revenir à la charge, parce que j'aimerais que la ministre m'explique, quand le gouvernement passe d'une part de 54 % de contribution au financement des universités à 51,4 % comment elle appelle cela. Ça s'appelle comment, cette baisse? Ça s'appelle comment, dans son vocabulaire?

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Ça s'appelle le fait que chacun fait sa part et sa juste part. Parce que je veux juste bien comprendre. Parce que peut-être que j'assiste à une nouvelle nouvelle aujourd'hui, là, de la part de la députée de Taillon. Est-ce que la députée de Taillon, elle est en train de me dire et de me confirmer que sa position personnelle et que la position du Parti québécois, c'est le gel complet des situations?

Une voix: ...

Mme Beauchamp: Non, mais parce que je veux savoir quelle conclusion on peut tirer. Sa question, c'est comme si elle prétendait que la part de financement des universités devait toujours et pour toujours être à 54 % parce qu'elle n'admet pas qu'il pourrait y avoir des variations. Donc, je suis en train de me dire, là, la conclusion, c'est qu'elle me dit... C'est le gel qu'elle propose? Parce que vous savez, M. le Président, que c'est très, très, très difficile de suivre les membres du caucus du Parti québécois sur la question notamment de la hausse des droits de scolarité. Ça fait que, si elle ne veut pas toucher à la hausse des droits de... si elle ne veut pas toucher à la part du gouvernement, c'est parce qu'elle est en train de m'annoncer que finalement elle va voter, ce week-end, pour le gel des droits de scolarité, parce...

Mme Malavoy: Non, ça n'a rien à voir.

Mme Beauchamp: Bien, ça a tout à voir. On ne peut pas être favorable à ce qu'elle a déjà dit. On est le 14 mars dernier. La députée de Taillon...

Mme Malavoy: M. le Président.

Le Président (M. Marsan): Oui.

Mme Beauchamp: ...contredisant le député de Rousseau...

Mme Malavoy: ...posée.

Mme Beauchamp: Bien, écoutez, on est en train de discuter de la contribution de chacun.

Mme Malavoy: ...sérieuse.

Le Président (M. Marsan): J'aimerais... J'aimerais...

Mme Beauchamp: Si elle me demande que la part du gouvernement reste stable ad vitam aeternam, c'est parce que les autres parts doivent être gelées aussi. C'est la seule conclusion possible.

Le Président (M. Marsan): O.K. Bon. J'aimerais faire un commentaire, madame...

Mme Beauchamp: Moi, j'ai compris...

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre, un instant, s'il vous plaît. J'aimerais faire un commentaire. Jusqu'ici, on a eu des travaux, je pense, exemplaires. On se vante assez régulièrement, avec beaucoup de modestie, qu'on est une des commissions parmi lesquelles il y a moins de partisanerie. Je suis certain qu'avec la collaboration de chacun on peut poursuivre dans le même sens. Alors, je vais demander à Mme la ministre de terminer sa réponse et je vous cède la parole ensuite, tout en vous disant qu'aux fins de l'exercice de l'étude des crédits on vous incite à poser de brèves questions et à fournir de brèves réponses. Mme la ministre.

**(16 h 30)**

Mme Beauchamp: Je conclus en disant que, si la députée de Taillon, par sa question, elle prétend que la part du gouvernement ne doit pas bouger, c'est parce qu'elle prétend que les autres parts ne doivent pas bouger. Donc, je comprends qu'elle est en train aujourd'hui -- ça change sa position dans le passé -- de dire que, selon elle, on doit parler d'un gel partout, évidemment aussi également de la contribution des étudiants. Sinon, elle ne peut pas parler, comme le 14 mars dernier, d'une hausse d'une contribution... d'un programme de contribution des étudiants et ne pas souhaiter que les autres... la part du gouvernement ne bouge pas...

Le Président (M. Marsan): O.K., merci. Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Mais je vais essayer, de façon très sereine, de reformuler ma question. Ce pourquoi je la pose maintenant, M. le Président, c'est parce que, depuis ce matin et encore récemment par une collègue de la ministre, j'entends dire que le gouvernement hausse sa contribution. Il y a deux façons de regarder ça. On peut regarder ça en chiffres absolus, en montants d'argent, et là, bien évidemment, étant donné que, ne serait-ce que par les coûts de système, il faut en mettre de plus en plus chaque année, ça devient un montant supérieur à celui de l'année dernière. Je ne conteste pas ça.

Il y a une autre façon de regarder, à mon avis, qui est la plus pertinente, c'est en proportion. On aurait très bien pu -- par exemple, pour me faire comprendre -- du côté du gouvernement, même si je suis en désaccord avec cela, on aurait pu dire: On fait une hausse de frais de scolarité comme on le fait, mais, en proportion, l'État va continuer d'investir autant. Vous comprenez? On pourrait avoir une contribution étudiante qui soit de 14 % et une contribution de l'État, du gouvernement du Québec, qui soit de 54 %. C'est un choix, les proportions, et c'est pour ça que je voudrais que la ministre m'explique ce choix d'avoir baissé la proportion du gouvernement du Québec. C'est toujours un rapport entre deux choses, un pourcentage, et là, il y a un choix qui aurait pu être autrement. On aurait pu dire: Les étudiants vont payer plus, mais l'État va continuer à assumer au moins 54 % de sa part de responsabilité.

Le Président (M. Marsan): Alors, ça va, Mme la députée?

Mme Malavoy: Oui, oui. Mais, enfin, j'espère.

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie. Mme la ministre de l'Éducation, des Loisirs et du Sport, la parole est à vous.

Mme Beauchamp: Bien, je veux juste prendre le temps d'indiquer à la députée que, clairement, on a répondu à cette question-là en parlant, dans notre choix, de la hausse des droits de scolarité, en ramenant la comparaison avec l'équité intergénérationnelle et la notion de ce qui a déjà prévalu dans le passé au Québec et notamment les comparaisons avec 1968. Et...

Une voix: ...

Mme Beauchamp: On va retrouver le chiffre. Donc, je veux juste ramener... parce que le débat est intéressant, parce que le débat fait en sorte -- et c'est sur ça que je voulais insister -- que la députée de Taillon semble vouloir prendre la photo de 2008-2009 puis dire... bien, présenter ça comme si ça, c'était un peu comme le contrat social au Québec et qui disait: Le gouvernement est à 54 %, puis c'est comme ça, puis c'est gelé, puis c'est ça, puis... Mais je veux juste vous dire, là, ça n'a pas toujours été cela. Qu'est-ce qui explique que le pourcentage du gouvernement est le plus haut à l'échelle du Canada puis qu'on est loin devant à 54 % en 2008-2009? C'est parce que les droits de scolarité ont été gelés pendant 33 des 43 dernières années. C'est pour cela qu'inexorablement c'est les contribuables québécois qui ont, bien sûr, plus contribué à même leurs impôts que les autres sources de revenu.

Mais prenons le point de comparaison que plusieurs comprennent, et vous le retrouvez à la page 22 du document budgétaire. Le point de comparaison, c'est le fait qu'en 1964-1965, la part des étudiants dans le financement du budget total des universités s'élevait à 26,4 %, et, au moment où on se parle, on est à 12,7 % puis, en 2016-2017, on sera à 16,9 %. Sincèrement, là, quand elle me dit qu'on se désengage, les étudiants, dans le financement des universités, ne seront pas au même niveau qu'en... lors de la Révolution tranquille en 1964-1965. Et il est où, le chiffre? Il est où, le chiffre qui établit que le contrat social au Québec, ça disait 54 % puis c'est gelé là? Bien non, c'est... On a atteint ce niveau-là parce que les droits de scolarité ont été gelés pendant 33 des 43 dernières années, tout le temps sous le règne du Parti québécois, tout le temps. Et ça, ça a amené le reste des familles québécoises à, à même les impôts, financer maintenant à hauteur de 54 %. Mais j'ai envie de demander à la députée de Taillon: Pour elle, c'est figé dans le temps, ça? Pour elle, c'est... En 2008-2009, là, après 33 années de gel pendant les 43 dernières années, avant qu'on commence à augmenter de 50 $ par session, ça, c'était le modèle idéal?

Ça n'a pas toujours été ça au Québec. Et honnêtement, donc... Bien, je veux juste ramener ça dans son contexte. Je ne peux pas croire qu'elle me présente ça aujourd'hui comme si ça, là, ça, c'était le modèle idéal, puis c'est figé dans le temps. Ça ne peut pas être figé dans le temps. Et, oui, il y a une notion, puis on a toujours appelé ça comme ça, puis c'est la bonne notion, il y a une notion de juste part. Et on estime qu'en faisant la moitié de l'effort nous amenant au réinvestissement dans les universités les contribuables québécois font leur large part. Puis les étudiants vont être appelés à faire leur juste part.

Le Président (M. Marsan): Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Je n'ai aucun problème à ce que la ministre argumente et défende sa position. Je n'ai aucun problème avec ça. Et je ne veux pas que l'on parle d'un réengagement de l'État, parce que ça n'est pas le cas. C'est un rééquilibrage des proportions qu'on va aller chercher, entre autres, chez les étudiants. Et j'ajoute -- puis, après, je veux passer bien évidemment à la question de la hausse des frais de scolarité avec laquelle on est en désaccord -- simplement que, dans le même tableau, il y a aussi un 2 % de moins du gouvernement fédéral. Ça veut dire que, les deux gouvernements confondus, c'est 5,5 %, je crois, de moins de financement de l'État. Le gouvernement fédéral, c'est aussi notre argent. Donc, il y a 5,5 % de moins de financé par l'État et il y a un pourcentage plus important financé par les étudiants.

Puis je serais intéressée, je le ferai plus tard, mais à faire une courbe, parce que j'ai un souvenir qu'il n'y a pas si longtemps l'État québécois finançait à 60 % et que, là, on serait rendus à 54 %, et ça va en baissant. La ministre dit: Les étudiants doivent faire leur juste part. Le premier ministre disait ça également dans son discours inaugural. Vous le savez, M. le Président, la ministre le sait également, nous sommes totalement en désaccord avec ce rattrapage et cette hausse faramineuse des droits de scolarité. On peut bien remonter 43 ans en arrière puis dire: Si on avait indexé pendant 43 ans, on serait rendus là aujourd'hui. Mais les pauvres qui sont rendus là aujourd'hui, ils paient pour les décisions, tous gouvernements confondus, qui ont été faites avant eux. Nous, on trouve que c'est indécent de leur faire payer tout à coup ce rattrapage.

D'autre part, quand on parle des étudiants et des étudiantes du Québec, on parle de nous. On parle du fait que, chez nous, il y a 40 % d'étudiants, et ça va jusqu'à 70 % dans certaines régions, qui sont des étudiants de première génération, dont les parents n'ont pas été à l'université. Nous avons fait un rattrapage, en éducation, extraordinaire au Québec depuis le Révolution tranquille, mais il y a encore beaucoup de chemin à faire. Et, vous le savez, M. le Président, la ministre le sait, bien des gens craignent un impact extrêmement négatif de cette hausse auprès particulièrement de la classe moyenne dont elle nous a dit tout à l'heure: On a toutes sortes de mesures pour les accompagner.

Le premier problème face à la classe moyenne, ce sera de se dire: Est-ce qu'on va investir autant dans un avenir qu'on ne connaît pas bien parce que c'est la première fois que nos enfants vont à l'université? Est-ce qu'on va investir autant? Est-ce qu'on va sortir avec une dette d'études de 30 000 $, comme c'est le cas en Nouvelle-Écosse, que la ministre cite abondamment parce que les frais de scolarité sont très élevés? Pourquoi fait-on ces choix-là au gouvernement du Québec? Nous pensons qu'on est sur la mauvaise piste. Je sais qu'on a peu de temps, mais j'y reviendrai après. La ministre peut me dire quelques mots, puis j'y reviendrai tout à l'heure.

Le Président (M. Marsan): Il reste un petit peu plus de 30 secondes, Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Bien, la réponse, elle est simple. Parce que la députée conteste nos choix. Mais est-ce qu'on pourrait finalement et ultimement connaître le choix du Parti québécois qui, franchement, danse la valse et le tango, là, dépendamment à qui on... qui on écoute du côté du Parti québécois? Vous avez dit, ce matin, dans vos remarques préliminaires, que, derrière les chiffres, il y a des choix. Vous êtes incapables d'expliquer aux Québécois les choix défendus par votre formation politique. Ça fait six ans que vous n'avez pas eu de congrès des membres. On est à quatre jours du prochain congrès des membres. Toujours pas de position claire, limpide, assumée du côté du Parti québécois. Vous pouvez contester nos choix. On pourrait-u au moins connaître le vôtre?

**(16 h 40)**

Le Président (M. Marsan): Alors, merci. Ceci termine notre période d'échange. Nous poursuivons avec le parti ministériel, et je vais céder la parole à M. le député de Charlesbourg, l'adjoint parlementaire à la ministre de l'Éducation, des Loisirs et des Sports. M. le député.

M. Pigeon: Merci, M. le Président. M. le Président, puisqu'on est sur le partage du financement et qu'il y a des graphiques qui ont été cités, là, il y a un élément important -- je pense ce n'est pas inclus dans le graphique parce que ça exclut les fonds de dotation -- du refinancement qui est le fait que nous souhaitons accentuer la philanthropie. Et je veux en parler un petit peu parce que, souvent, les gens ne comprennent pas trop exactement comment sont utilisées ces sommes qui sont versées par des donateurs. Et on parle souvent de façon, je dirais, un peu négative de la place du privé, entre guillemets, à l'université.

Je vais donner quelques exemples de dons qui m'apparaissent intéressants et qui permettent que l'université élargisse, je dirais, la palette de ses interventions dans toutes sortes de domaines. Alors, j'ai eu l'occasion récemment d'assister, à l'Université Laval, à une brève cérémonie pour souligner un don exceptionnel d'un donateur qui voulait favoriser les études sur l'enseignement des mathématiques à la Faculté des sciences de l'éducation. Alors, un exemple parmi tant d'autres d'un étudiant qui, rendu à l'âge de 60 ans, a bien réussi dans la vie et dit: Ma foi -- il parle à son épouse, il parle à sa famille -- on va faire un don. Et il croit à l'importance de l'enseignement des mathématiques, s'adresse à l'université et fait un don substantiel.

Je soulignerais aussi, parce que ça, c'est un cas assez exceptionnel, la chaire sur La philosophie dans le monde actuel. Je parle de l'Université Laval qui est un milieu que je connais bien. Alors, un don exceptionnel d'une personnalité québécoise pour favoriser le développement du rayonnement de la philosophie. Pour beaucoup de gens, la philosophie, là, c'est extrêmement universitaire et restreint dans son champ d'application. Grâce à ce don, je dirais, on peut faire rayonner la philosophie.

Je pense à un autre programme qui s'appelle Managers sans frontières et où on donne de l'argent à des étudiants qui sont en administration pour qu'ils puissent s'orienter un peu plus vers le monde communautaire, et donc on favorise des stages à l'étranger, dans des organismes de bienfaisance. Je pense que ça, c'est intéressant aussi. Je pourrais parler aussi d'études sur la paralysie cérébrale. Je connais quelqu'un qui a... dont la famille a fait des dons substantiels pour l'étude sur cette maladie-là. Peut-être aussi souligner la formation d'un institut, l'Institut Hydro-Québec en environnement, développement et société. Et je pense que, quand on met ensemble le mot «environnement», le mot «développement», le mot «société», c'est qu'on veut vraiment avoir une vision large. Et je soulignerais aussi que, lorsque l'on parle d'argent des fondations et qui sont donnés à l'université, il s'agit très souvent de bourses à des étudiants. Et, ça aussi, ce n'est pas souvent expliqué.

Mais donc de nombreuses personnes qui souhaitent aider l'université, en fait, encouragent des étudiants à étudier et leur donnent des bourses. Alors, on se retrouve avec une palette d'interventions large qui permettent aux universités d'offrir de plus grands services. Et, moi, je pense que c'est extrêmement intéressant que le gouvernement ait fait le choix, je dirais, d'encourager la philanthropie le plus possible. Et je demanderais à Mme la ministre de nous parler du programme Placements Universités. Et je sais, Mme la ministre, qu'elle a... Mme la ministre a travaillé sur un projet similaire en culture, je pense, le projet Placements Culture, qui a eu beaucoup de succès. Et là on revient avec Placements Universités. Ça me semble une bonne idée, et je pense que ça serait intéressant que Mme la ministre puisse expliquer comment le programme Placements Universités va pouvoir aider la philanthropie, aider les universités, aider les étudiants puis aider la société québécoise.

Le Président (M. Marsan): Alors, merci, M. le député de Charlesbourg. Mme la ministre de l'Éducation, des Loisirs et du Sport... des Sports, la parole est à vous.

Mme Beauchamp: Oui, merci beaucoup, M. le Président. Peut-être, d'entrée de jeu, je veux indiquer, et le député se souviendra... le député de Charlesbourg se souviendra que, lorsque nous avons parlé des contrats de performance qui seront signés avec les universités, nommément, dans les indicateurs, il doit y avoir cette performance au niveau de l'augmentation des revenus provenant de la philanthropie: dons, legs. Je le dis parce que c'est du sérieux, là. Je veux dire, c'est... il y a là un plan consistant, complet pour augmenter la question de la philanthropie.

Vous avez raison de dire qu'il y a des volontés au Québec. Je pense qu'il y a nombre de gens qui ont ce souhait-là, cette volonté-là, mais je pense qu'il y a quand même moyen d'améliorer les choses. D'autant d'ailleurs qu'on va se retrouver avec une génération de Québécois, là, prenant leur retraite et disposant de certains revenus. Mais je ne veux pas avoir l'air, je dirais, pessimiste quand je dis ça, mais il y a un bon nombre de Québécois qui, en prenant leur retraite puis en avançant dans leur vie... Même si la durée active de la vie s'est allongée indéniablement au cours des 100 dernières années, c'est une étape de la vie où on prévoit un peu plus, hein? Qu'est-ce qui va se passer? Qu'est-ce que je laisse? C'est quoi, mon legs à ma famille? C'est quoi, mon legs à ma société? Donc, il va y avoir encore un plus grand nombre de Québécois, dans toutes les régions du Québec, qui vont, au cours des prochaines années, se poser cette question-là: Quel est mon legs? Et il peut y avoir plusieurs gestes de posés en termes de philanthropie.

Il y a des chiffres qui sont assez saisissants. Dans les universités québécoises, on est assez performants au niveau, par exemple, des revenus de recherche. Mais, il faut le dire, il y a bon nombre d'universités au Québec où on est moins performants qu'ailleurs sur la question d'obtenir des dons, des legs de la part de philanthropes. Juste pour vous donner une comparaison, selon une source, qui est l'Association canadienne du personnel administratif universitaire, les revenus des universités provenant de dons et legs ont représenté, au Québec, 223 millions de dollars en 2008-2009. On peut se dire que c'est beau, mais, tout d'un coup, on se compare à l'Ontario, et, en Ontario, ça s'élevait à 486 millions de dollars; à l'échelle du Canada, 1,15 milliards de dollars. Pour vous donner des comparaisons dans le budget de fonctionnement des universités au Québec, le rôle, là, la part des dons et legs est à 1,3 %; dans l'ensemble du Canada, sans le Québec, on est à 2,8 %.

Moi, je prétends qu'il y a de l'argent disponible pour les universités au Québec. C'est la prétention que j'ai, et je pense qu'on doit se donner les bons mécanismes pour enclencher, hein, c'est une question de développement d'une certaine culture, la culture philanthropique, et pour déclencher ce mouvement vers le monde universitaire. Donc, ce qu'on propose, c'est de mettre en place Placements Universités, qui sera une mesure beaucoup plus substantielle que la mesure qui existait jusqu'à maintenant.

Puis -- peut-être un autre élément dans le portrait que je veux vous décrire -- il faut nommer, il faut féliciter les universités McGill, Concordia, Bishop's, il faut les féliciter, elles vont chercher une bonne part de leur financement par de la philanthropie. Mais vous avez compris, une fois que j'ai nommé ces trois universités, qu'on voit ici qu'il y a une différence entre ces universités anglophones au Québec et les universités francophones au Québec. Et sûrement, et je ne me transformerai pas en sociologue, là, mais sûrement, on le sait, qu'il y a, bien sûr, cette différence de culture à la base dans les communautés anglophone et francophone. Mais ça me fait dire que, si les universités au Québec sont capables d'aller chercher de meilleurs résultats, on est sûrement capables de mettre les bons mécanismes pour que ce soit vrai pour un plus grand nombre d'universités au Québec.

Je vous disais qu'il existe, au moment où je vous parle, une somme de 10 millions de dollars par année qui sert à de l'appariement de dons. C'est bien, mais ce sera mieux. Parce que, dans le plan du gouvernement, dans le plan de réinvestissement dans les universités, on a annoncé qu'on allait dorénavant ajouter un 30 millions à ça, donc qu'on allait disposer d'une somme de 40 millions de dollars qui sera mis, là, dans le nouveau fonds qui sera créé, qui disposera également de d'autres argents -- on pourra y revenir -- mais qui s'appelle le Fonds pour l'excellence et la performance des universités. Donc, il y aura une somme de 40 millions de dollars qui servira donc à de l'appariement des dons.

**(16 h 50)**

Vous disiez, et c'est vrai, que j'ai travaillé avec l'équipe du ministère de la Culture pour mettre en place, à une époque, en collaboration... C'était un travail étroit, vraiment, avec des membres du milieu de la culture au Québec et vraiment avec l'appui du ministre des Finances. Un travail vraiment admirable de la part des fonctionnaires au ministère de l'Éducation. Nous avons mis en place Placements Culture. Placements Culture a bénéficié de sommes importantes, mais surtout, pour faire une histoire courte -- j'en suis fière, c'est un grand succès, vraiment -- alors qu'au point de départ le milieu culturel y voyait une menace de désengagement de l'État ça m'a fait très plaisir quand, quelques années plus tard, ils plaidaient pour augmenter les budgets de Placements Culture.

Ce qu'on a assisté, c'est... et plusieurs le nomment, plusieurs institutions culturelles ou organismes culturels le nomment, on a assisté, en fait, à une forme de changement de culture avec, premièrement, la présence, sur le conseil d'administration, de plus de représentants venant de secteurs qui pouvaient participer à la recherche de dons, mais surtout à une très grande efficacité. Il ne faut pas oublier que ça a permis de consolider des organismes culturels, parce qu'ils possèdent maintenant des fonds dédiés qui sont comme un peu comme un coussin financier dont ils disposent au moins sur 10 ans.

Pour faire une histoire courte du succès de Placements Culture, au moment où je vous parle, à Montréal, on m'a dit que, dans le fonds communautaire du Grand Montréal, qui est le fonds qui recueille les argents de Placements Culture, parce qu'on a voulu éviter que chaque organisme culturel doive se doter d'une fondation, bien, les apports de Placements Culture, au cours des dernières années, ont été plus importants que les apports de Centraide. Juste pour vous donner une échelle de grandeur du succès et du déclenchement de la philanthropie vers le monde culturel, grâce à un programme d'appariement qui, au moment où on se parle, indéniablement, là, a été vraiment efficace.

Le programme Placements Culture, il avait été modulé pour éviter que les plus gros viennent chercher tout l'argent. Et, dès le départ, quand j'ai demandé aux gens du ministère avec ceux des Finances de travailler un modèle de changement de culture et d'augmentation de la philanthropie pour les universités, j'ai tout de suite dit: Écoutez, il faut faire attention pour que ça ne soit pas les plus grosses universités, déjà performantes, avec des équipes en place, etc., qui viennent chercher le gros de l'argent.

Et là je veux souligner ici vraiment, je le dis très sincèrement, je veux vraiment souligner la grande qualité du travail de l'équipe du ministère de l'Éducation et de l'équipe du ministère des Finances pour monter le modèle de Placements Universités, parce que la... vous l'avez à la page 32 du document d'appui au budget. Et ça me fait sourire, parce que la page 32, elle peut être compliquée à comprendre, mais l'histoire est simple. L'histoire que vous avez derrière la page 32 qui... Quelle est l'histoire derrière cette page-là? C'est l'histoire de la souplesse. C'est exactement une histoire qui peut... ça peut se résumer, ce portrait-là, avec un mot clé: c'est de la souplesse, de la souplesse puis de l'exigence aussi.

Donc, quand je vous disais qu'on a voulu moduler le programme pour que ça ne soit pas les plus gros qui viennent chercher le gros de l'argent, je veux juste, donc, vous faire remarquer qu'un peu sur le modèle de Placements Culture, qui s'est révélé efficace, on module la répartition de la subvention de contrepartie du gouvernement en fonction de la taille des universités. Donc, pour les universités qu'on considère de plus petite taille, soit de moins de 15 000 équivalents temps plein à l'université, la contrepartie du gouvernement, pour chaque don fait, sera de 1 $: on recueille un don de 1 $, je mets 1 $. Pour les universités de grande taille qui ont plus de 15 000 équivalents temps plein, là, la contrepartie est de 0,50 $ pour 1 $. Ça permet, comme je vous le disais, vraiment, là, de faire... de protéger, je vais dire ça ainsi, de protéger une partie de l'enveloppe de Placements Universités, de la protéger pour les universités de plus petite taille. Puis, encore là, hein, on parle nommément du réseau des universités du Québec puis les universités en région.

En passant, Placements Culture nous a appris quelque chose de fantastique. En région, ça a très, très bien fonctionné, alors que les gens, d'un point de vue initial, avaient peur que ça soit les institutions montréalaises qui viennent chercher l'argent. Très grand succès en région. Je m'attends à la même chose pour les universités du Québec en région. Donc, pour les plus petites universités, je devrais dire de petite taille, 1 $ pour 1 $. Puis ensuite la question que... le portrait que vous avez à la page 32, c'est un portrait de la souplesse, dans le sens que, premièrement, l'université doit se fixer un objectif qui est au-delà que ce qu'elle ramasse déjà. Si elle n'atteint pas son objectif, la somme qu'on lui avait réservée, je vais m'exprimer ainsi, hein, la somme qu'on lui avait réservée, c'est une somme qui est toujours là pour cette université-là, et c'est une somme qui peut être disponible l'année suivante. Et c'est là où je vous disais que... on parle ici d'une souplesse, d'une reconnaissance que, si je fais une excellente campagne de financement, avec une très bonne présidente d'honneur ou un très bon président d'honneur, il se peut que ça soit en 12 mois, que j'aie même dépassé mes objectifs de beaucoup, bien là aussi, on montre de la souplesse, puis l'université ne sera pas pénalisée. Si ça a été une campagne intense sur 12 mois puis qu'on a excédé les fonds, bien les fonds pourront être répartis sur l'autre année pour ne pas que l'université soit indûment pénalisée parce que sa campagne de philanthropie aurait eu un très, très, très grand succès. Donc, vous voyez, deux mécanismes de souplesse. Si je n'ai pas atteint mon objectif, l'argent est quand même là, disponible pour moi, je peux me reprendre, mais, si je l'ai dépassé, je ne suis pas pénalisée et je peux répartir les revenus additionnels que j'ai sur les autres années également.

Je voulais prendre le temps d'expliquer ça en étant... Bien, premièrement, donc, je veux redire, puis je le dis, là, en regardant les personnes concernées: je veux vraiment remercier les experts et le personnel dédié du ministère de l'Éducation et du ministère des Finances, parce que, moi, j'avais une idée en tête de ce que je voulais, puis, très franchement, honnêtement, l'histoire, c'est que la première version que j'ai reçu de Placements Universités, ça répondait entièrement à nos attentes, et les réactions sont très favorables, au moment où on se parle, dans le réseau universitaire. On atteint un objectif d'augmentation des budgets, augmentation de la philanthropie, mais avec les bons mécanismes de souplesse qu'il doit y avoir lorsqu'on parle de ce secteur-là au Québec.

Donc, vous avez compris, M. le Président, que, moi, je suis convaincue qu'à terme les argents supplémentaires mis dans Placements Universités vont nous permettre d'avoir augmenté la contribution liée aux dons et legs partout au Québec, que les incitatifs sont là, avec le fait que, pour les plus petites universités, c'est du un pour un, alors que, pour les grosses, c'est du 0,50 $ pour 1 $. On a les bons incitatifs pour que ça soit des université francophones, en région, qui soient gagnantes, qui viennent chercher le maximum d'argent. Et on a un programme vraiment modulé pour présenter toute la souplesse requise, là, pour que personne ne soit pénalisé pour un revers subi une certaine année ou pour un mégasuccès vécu une autre année. Le programme est fait en sorte que les contributions peuvent être réparties sur un ensemble d'années. Moi, j'appelle ça de la souplesse, ne pas pénaliser l'effort, et je pense que c'est un excellent programme.

Ça fait que ce qu'on doit se souhaiter ensemble, c'est que ça connaisse le même niveau de succès de Placements Culture, mais je n'ai aucun doute. Et c'est une façon, vraiment, de déclencher la roue, je l'appelle vraiment comme ça, parce que c'est ce qu'on remarque au niveau culturel en ce moment au Québec, c'est que ça a permis de déclencher la roue. Et l'action que fait le gouvernement sur les cinq prochaines années, c'est nettement une action structurante pour changer la culture de la philanthropie au Québec, et ce, au bénéfice des universités québécoises.

Ça fait que c'était souhaité, ça avait été identifié lors du rendez-vous du 6 décembre dernier, on avait nommé cela, que ça prenait le bon effort à cet endroit-là. Mais je pense vraiment que le design du programme répond en totalité aux attentes des universités, notamment des universités francophones, aux régions, puis répond vraiment, franchement, aux objectifs que l'on poursuivait en mettant en place un tel programme.

Le Président (M. Marsan): En terminant, M. le député de Charlesbourg, il reste une minute.

M. Pigeon: Mais, s'il reste une minute, je voudrais remercier la ministre de son intervention que je trouve extrêmement intéressante. Pour avoir travaillé moi-même beaucoup au développement de la philanthropie dans l'université où j'ai travaillé, je pense que... je reconnais qu'elle a un programme qui m'apparaît extrêmement intéressant et je souhaite évidemment que ça fonctionne très bien. J'aurais d'autres questions sur le plan quinquennal des investissements, mais je pense qu'on pourra revenir au prochain bloc. Merci, M. le Président.

**(17 heures)**

Le Président (M. Marsan): Merci. Nous allons poursuivre nos discussions avec l'opposition. Et, cette fois, je vais céder la parole à M. le député de Mercier. M. le député.

M. Khadir: Merci, M. le Président. Le député de Charlevoix a parlé de philanthropie, et Mme la ministre...

Une voix: Charlesbourg.

M. Khadir: Excusez-moi. C'est vrai que la députée de Charlevoix se trouve ailleurs et pas ici, en tout cas. Donc, le député de Charlesbourg -- excusez-moi, M. l'ex-recteur -- nous a parlé de philanthropie. La philanthropie, c'est la charité. Nos sociétés, avant d'être démocratiquement et économiquement évoluées, reposaient beaucoup sur la charité, charité des individus, charité des entreprises. Jusqu'à ce qu'à la fin du XIXe siècle... au début du XIXe siècle, à cause de l'évolution des démocraties, de la notion d'État, d'accord, on s'est aperçu que mille charités ne valaient pas une politique bien structurante, une politique publique qui vienne, de manière structurelle, faire en sorte que les efforts soient concertés, encadrés, stimulés, d'accord? Ce n'est pas moi qui ai inventé ça, mille charités ne valent pas une bonne politique, malheureusement, je ne me souviens pas c'est qui. Mais ça fait longtemps qu'on a compris ça.

C'est vrai qu'il y a eu une régression dans la pensée démocratique avec le néolibéralisme, le néoconservatisme, le retour du privé en force. Ceux qui ne veulent pas payer leur juste part d'impôt, ils ont intérêt à quoi? À baisser leur part, leur juste part, ce qui fait en sorte qu'il y a toutes sortes de baisses d'impôt qu'on a consenties, qui fait en sorte qu'on a de la difficulté avec le financement de notre éducation, ce qui fait en sorte que, comme la députée de Taillon le dit -- ça, il faut que la ministre le reconnaisse, sans ça, le reste de son argumentaire perd de sa crédibilité -- l'État se désengage. C'est clair. Vous étiez à 54 % du financement, vous êtes rendus à 51 %. Mais c'est vrai que ce n'est pas vous qui l'avez commencé, c'est vrai que c'est le Parti québécois, ça fait partie de la même régression démocratique, de la même pauvreté de la pensée politique, économique et surtout sociale, que des gouvernements successifs, depuis 20 ans... de laquelle ils sont affectés, qui fait en sorte que, plutôt que d'avoir des projets qui fassent rêver la société, d'avoir une vision de l'avenir, ils sont obligés de gérer la misère, contrairement aux libéraux des années soixante-dix.

Je vous ai fait distribuer un article de Montréal-Matin, je crois, qui parlait du Parti libéral, son 19e congrès, en 1976. Et, dans l'article, qui parle du ministre Hardy, on voit bien que les militants de la Commission-Jeunesse du Parti libéral ont fait du principe de la gratuité scolaire au niveau de l'université un incessant cheval de bataille. Ça, c'était la belle époque. Ça, c'était la belle époque où les politiques avaient une vision de l'avenir de la société. Ils voulaient s'engager pour contribuer à l'émancipation économique et sociale de leur peuple.

Mme la ministre ne pourra pas faire le même procédé, un peu démagogique, de mettre l'opposition officielle devant ses contradictions. Nous, c'est clair, nous, on est pour la gratuité scolaire, comme les jeunes libéraux de 1976, comme les jeunes libéraux de 1976. Nous, on est pour la gratuité scolaire, comme d'autres peuples excessivement bien développés sur le plan démocratique, des peuples qui ne sont pas plus forts que nous sur le plan des moyens, des petits pays, avec un faible nombre démographique 4, 5, 6 millions, 10 millions d'habitants. Je parle du Danemark, je parle de la Finlande, je parle de la Norvège, je parle de la Suède. Je ne parle même pas de la Pologne, de l'Irlande, de la Hongrie, de la Grèce. Partout, dans ces pays-là, c'est la gratuité à l'université. Ils sont capables de se le payer parce qu'ils considèrent que la contribution des étudiants, là...

Si les étudiants doivent faire leur effort, comme le premier ministre le demande, le seul effort qu'il faut véritablement demander aux étudiants, c'est de se consacrer entièrement à leurs études, pour pouvoir se consacrer entièrement à l'avenir du Québec, pour redonner au double, au triple, au quintuple ce qu'on investit dans leur avenir, c'est-à-dire dans... -- on m'invite à parler moins fort, d'accord, je vais parler moins fort -- pour qu'ils fassent ce qu'on s'attend véritablement de nos étudiants dans les universités, c'est-à-dire étudier, hein, pas s'endetter, pas passer 20, 30 heures par semaine à travailler pour des salaires de gagne-misère.

Maintenant, j'aimerais demander à la ministre sur quelle étude elle s'est basée pour décider qu'il n'y avait aucun risque, aucun problème d'accès à l'université pour les étudiants en dégelant les frais de scolarité, en les haussant. Parce que, regardez, là, actuellement, ce qui arrive au Québec, le Québec ici se trouve actuellement, en 2009-2010, en termes de frais, juste un peu en bas du Royaume-Uni, du reste du Canada, et je n'ai même pas mis le pire élève de la classe, c'est-à-dire les cancres, les États-Unis, en matière d'inaccessibilité et de système injuste, différencié, très inégalitaire d'accès à l'université. Puis, si le budget actuel s'applique jusqu'en 2016-2017, on sera tout juste... après le reste du Canada et le Royaume-Uni, ça va être le Québec, c'est-à-dire avec les cancres de la classe, au lieu d'être avec les meilleurs. Et je pense que la ministre ne peut pas raisonnablement prétendre que, dans les pays de l'Europe du Nord, les pays scandinaves, la valeur d'un diplôme est moins grande que la valeur du diplôme au Québec.

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme la ministre...

M. Khadir: ...basée pour augmenter les frais sans craindre une baisse de la fréquentation universitaire?

Le Président (M. Marsan): ...ministre de l'Éducation...

M. Khadir: Et j'espère qu'elle sera plus indulgente avec moi qu'avec son...

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre de l'Éducation, des Loisirs et des Sports.

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Il y a plusieurs études qui démontrent ce qui... ce que semblent être les principaux facteurs déterminant l'accessibilité aux études, M. le Président. Je vais en citer quelques-unes, mais je vais résumer globalement les conclusions -- je dis bien «globalement», là -- les conclusions des études. Si le député le souhaite, on pourra lui donner les références des études dont je vais faire part. Mais, je dirais, globalement, ce que les études disent, c'est qu'il y a plusieurs facteurs, et la question des droits de scolarité n'est pas un facteur déterminant si c'est accompagné des bonnes mesures de soutien à l'accessibilité aux études. Donc, des fois, on peut lire des études, et il peut y avoir un passage qui dit: Si on augmente les droits, il peut y avoir un impact sur l'accessibilité, mais peu de temps après vous verrez dans l'étude qu'on dit: Par contre, si c'est accompagné des bonnes mesures de soutien à l'accessibilité aux études -- et notamment on parle de l'aide financière aux études -- l'impact se révèle en tout cas moins important que d'autres éléments.

Prenons l'étude qui est souvent citée, l'étude du Conseil des ministres de l'Éducation du Canada. C'est une étude qui date de 2007, là, qui a fait une importante recension de la littérature pour déterminer les principaux facteurs ayant un impact sur l'accessibilité. Les principaux facteurs identifiés sont: le milieu socioéconomique, donc la question de la scolarité des parents, le revenu familial, les étudiants de première génération, l'éloignement, etc.; les caractéristiques personnelles, donc l'âge, le sexe, le statut; le coût des études, comme je le mentionnais; ensuite, le rendement des études, donc le rendement personnel des études, donc est-ce que ça m'amène vers un meilleur salaire, les taux d'emploi liés au diplôme, la question de l'amélioration de sa qualité de vie; là, l'autre facteur, comme je vous disais, le régime d'aide financière aux études, donc s'il y a le bon régime, être accepté aux prêts et bourses, la proportion de l'aide donnée sous forme de bourse, etc.; et les perceptions, qui peuvent être différentes de la réalité, donc la perception du coût des études, la perception de l'aide offerte, etc.

Il y a aussi une étude, en 2007, de Marc Frenette, qui utilise des données tirées de l'Enquête auprès des jeunes en transition, qui s'appelle E-J-E-T, EJET, qui en arrive à la conclusion que les obstacles liés au rendement scolaire, à l'influence des parents, à la qualité de l'école expliquent 84 % de l'écart de participation aux études universitaires entre les jeunes de familles à faibles revenus et ceux de familles aisées.

Je vais reprendre un exemple qui a été donné lors de la rencontre du 6 décembre dernier par le recteur de l'Université de Montréal, le recteur Breton, qui a fait des statistiques sur la proportion d'étudiants provenant des milieux dits aisés, là, selon les codes postaux, de milieux plus défavorisés, les inscriptions à la Faculté de médecine. Et il l'a dit publiquement, ça fait que je me permets de le répéter, il disait: Dans un contexte où le Québec en ce moment a les droits de scolarité les plus faibles au Canada et le régime d'aide financière aux études le plus généreux, on pourrait conclure que ça devrait être un endroit où on retrouve plus de jeunes provenant de milieux plus démunis inscrits à la Faculté de médecine. La réponse, c'est non. Même dans un contexte où c'est les droits de scolarité les plus faibles et le régime d'aide financière le plus généreux, ça ne semble pas être déterminant. La question des droits de scolarité n'a pas semblé être déterminante sur la question de l'accessibilité aux études d'une frange de la population dite plus démunie.

**(17 h 10)**

Il y a aussi une étude réalisée par David Johnson, publiée en juin 2008, qui conclut que la différence entre les niveaux des droits de scolarité n'a pas d'impact négatif sur l'accès aux études. Mais, par contre -- et c'est intéressant, je le disais tantôt, la question des perceptions -- Johnson constate une plus grande sensibilité aux droits de scolarité chez les jeunes Québécois dont les parents n'ont pas fait d'études universitaires. Donc, ça montre qu'il y a une question de perception qui joue et qui influence cette question-là. Et ça nous apparaît donc qu'on a notre travail à faire pour bien parler de la question de l'aide financière aux études et de son accessibilité.

Prenons l'exemple de la hausse des droits de scolarité de 50 $ par session, de 100 $ par année depuis 2007. Si je reprends les chiffres de la CREPUQ, donc, on peut parler d'une hausse des droits de scolarité. Or, la CREPUQ observe -- et ça, c'est vraiment empirique, ça se passe en ce moment -- que les inscriptions sont à la hausse à chaque année, au Québec, même si on parle d'une hausse des droits de scolarité depuis 2007, au Québec.

Finalement, peut-être aussi vous parler d'un étude du conseil de la qualité de l'enseignement supérieur de l'Ontario, qui nous apprend que c'est en Ontario qu'on retrouve les frais de scolarité les plus élevés pour des études de premier cycle. Et c'est aussi la province avec le plus haut taux de participation aux études universitaires.

Donc, c'est... Il y en a quelques autres, mais je veux juste finir en disant ceci. Moi, je comprends... je comprendrais une contestation d'une hausse de droits de scolarité s'il y avait deux éléments manquants. Si on était en train de parler d'une hausse de droits de scolarité avec... le gouvernement du Québec diminue sa contribution, baisse les budgets, qu'on est dans le négatif, là, qu'il y avait tant de crédits, tant d'argent, puis je les diminue, parce que, là, je dis: C'est aux étudiants à payer, parce que, moi, il faut que je mette l'argent ailleurs, je comprendrais. Ce n'est pas le cas. Honnêtement, le gouvernement ajoute de l'argent en demandant au secteur privé et aux étudiants de faire leur part puis qu'on ajoute de l'argent.

S'il y avait un hausse des droits de scolarité sans aucune bonification de l'aide financière aux études, je comprendrais qu'il y ait une contestation, parce que, là, dans un tel contexte, là, indéniablement il y aurait une problématique d'accès aux études.

Or, on voit... Puis je pense, en tout respect des positions de chacun... mais je pense qu'au Québec les gens ont reconnu que, lorsqu'on prend 35 % de l'enveloppe, et qu'on la met dans l'aide financière aux études, et que, sur le 118 millions supplémentaire, 112 millions s'en va en bourses carrément, et qu'on voit qu'on diminue la contribution demandée aux parents, qu'on améliore, qu'on bonifie le Programme de remboursement différé, si quelqu'un a de la difficulté à rembourser son prêt et bourse, je pense qu'on voit qu'on a mis en place les conditions qui sont identifiées par les différentes études pour qu'il n'y ait pas d'impact sur l'accessibilité qui accompagne la hausse des droits de scolarité.

Donc, les études disent, là, je le reprends, généralement que, s'il y a le bon programme, les bonnes mesures d'aide financière aux études, ça ne contrevient pas à l'accessibilité aux études si on parle d'une hausse des droits de scolarité.

Le Président (M. Marsan): Merci, Mme la ministre. M. le député de Mercier.

M. Khadir: Merci. Mme la ministre parle de l'augmentation des inscriptions à la fois en... au Québec, malgré le fait qu'il y a eu, en tout cas en termes des frais affairants, une hausse des frais de scolarité, quand même, au cours des dernières années, là, sur l'ensemble, disons, des 10, 15 dernières années... d'un plus grand taux d'inscription aux universités en Ontario et au Québec. Elle doit connaître les analyses qui accompagnent ces données. Il y a un tas de phénomènes sociologiques, économiques qui sont en jeu, qui ne contredisent pas réellement le fait que, pour des personnes, pour une population donnée à... dans un contexte où on contrôle les facteurs...

Par exemple, en Ontario, il y a une forte présence de population immigrante, pour laquelle la seule possibilité d'adaptation, d'intégration et par la suite d'ascension économique, c'est de pousser sur leurs enfants pour poursuivre des études le plus haut possible, y compris des études universitaires, quels que soient les coûts à court terme. Et les coûts à court terme, pour beaucoup de ces familles-là...

Parce que ce que vous devez dire, c'est qu'en même temps que les inscriptions ont augmenté le taux d'endettement de ces étudiants et de ces familles également ont augmenté. Et les preuves sont là, dans plusieurs études, que ça soit le Journal of Higher Education, que ça soit des études qui ont été faites ici même par... une étude globale par l'IRIS, l'Institut de recherche et d'informations socioéconomiques, qui est indépendant. Tu sais, là, ce n'est pas un institut qui est lié à des recteurs d'université, qui a un biais parce que, dans un temps de disette économique, il n'a pas d'autre choix qu'essayer de trouver des arguments pour aller chercher l'argent. Puis, puisque le gouvernement ne veut pas augmenter le financement direct, bien, les plus faibles à se défendre là-dedans, bien, c'est les étudiants et les classes moyennes. On fait reposer tout le poids de ce manque à gagner sur les classes moyennes et sur les étudiants. Les preuves sont là. Chaque tranche de 1 000 $ de frais de scolarité supplémentaire réduit la proportion d'étudiants les moins nantis et des classes moyennes de 19 %. C'est les données les plus, je dirais, robustes disponibles dans la littérature contemporaine.

Donc, dans ce contexte-là, vous avez parlé de l'effort... Et ça, je comprends, dans le cadre de la logique d'un gouvernement libéral, avec à sa tête un premier ministre qui vient quand même de la pensée conservatrice, c'est-à-dire recul de l'État, diminution de l'impôt des plus riches et des entreprises, diminution de l'action du gouvernement pour l'émancipation sociale, intellectuelle, culturelle, ça, c'est... Je comprends, dans ce cadre-là, ce que vous faites actuellement en tentant de s'assurer que ceux qui... les étudiants et les familles au bas de l'échelle économique, ceux qui actuellement bénéficient de l'aide financière, continuent à bénéficier de l'aide financière et n'écopent pas de ces augmentations. Ça, je le comprends. C'est un geste louable, je suis capable de le reconnaître.

Mais il n'y a rien, dans les mesures que vous annoncez, qui nous assure que, pour les classes moyennes, pour les familles et les enfants issus de ces familles qui, disons, qui ne se qualifient pas pour les prêts et bourses... Ils vont écoper, c'est évident. Il va y avoir des frais de scolarité qui vont augmenter et, suivant les lois, les lois de l'offre et de la demande... Vous êtes pour... en faveur d'une économie de marché. Comment ça se fait que les lois de l'offre et la demande ne fonctionneraient plus tout d'un coup? Qu'on augmente le coût d'accès à un service ou à un produit, puis il y aurait une augmentation ou un maintien de... Non, ça ne marche pas. À moins, à moins que les gens n'aient pas d'autre choix. Pour certaines denrées de base, dans n'importe quelle économie -- ou quand on est dans une situation de monopole comme avec l'essence -- bien, on paie, même si ça augmente sans cesse. Mais autrement, si on a le choix entre aller à l'école ou ne pas aller à l'école, s'endetter ou ne pas s'endetter, c'est évident que, si vous augmentez les coûts d'accès à l'éducation, ça va avoir un impact négatif sur l'accès.

Alors, comment répondre, à ce moment-là, à cet impératif que vous prétendez maintenir que, dans le fond, ça va contribuer... alors qu'on a 700 000 emplois à combler dans les 10, 15 prochaines années? Le meilleur effort qu'on peut demander à nos étudiants, à nos jeunes, c'est de se consacrer entièrement et le plus possible, avec le plus d'appui possible de la société, de l'État, de leurs parents, aux études pour être les meilleurs. Briller parmi les meilleurs, ça ne vient pas de vous? Comment on peut briller parmi les meilleurs en s'endettant, en étant obligé de travailler à... Bon, voilà.

Le Président (M. Marsan): Alors, vous avez deux minutes pour compléter la réponse, Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Bien, en fait, M. le Président, et je respecte l'opinion du député de Mercier, mais, dans le fond, avec beaucoup de clarté, il indique qu'il -- et je comprends, et c'est la position de sa formation politique -- remet en cause le système économique que nous connaissons, le capitalisme. Fondamentalement, la remise en question qu'il porte est sur l'ensemble de la société nord-américaine, cette société-là. Et, une fois qu'il a dit cela...

M. Khadir: ...

Mme Beauchamp: Bien, vous... Moi, je me souviens que, l'année passée, lorsque j'étais ministre de l'Environnement, vous avez également... vous m'avez demandé: Comment faites-vous, comme ministre de l'Environnement, pour continuer d'appuyer le système capitaliste? C'était votre dernière question à l'étude des crédits. Ça fait que je ne pense pas l'avoir inventée.

M. Khadir: ...

Mme Beauchamp: Ah! d'accord!

M. Khadir: ...incroyables. Non, vous avez raison.

Mme Beauchamp: O.K. Non, c'est parce que...

Le Président (M. Marsan): Vous avez la parole.

Mme Beauchamp: Non, c'est parce qu'il avait réagi puis il a dit hors micro, mais il a dit: Vous me donnez des prétentions incroyables. Puis après ça, là, il dit que j'ai raison. Mais donc...

M. Khadir: ...un questionnement de le...

Le Président (M. Marsan): M. le député.

M. Khadir: C'est le questionner, se donner le droit de dire: Peut-être que ça ne marche pas si bien que ça.

Le Président (M. Marsan): Alors, en terminant, Mme la ministre. Il reste quelques secondes.

**(17 h 20)**

Mme Beauchamp: Bien, je termine en disant que, le député de Mercier, donc, sa position... Lui, il a l'avantage, je le reconnais, que sa position, elle est claire. À mes yeux, elle n'est pas réaliste puis elle n'est pas souhaitable, mais sa position est claire. Il prône pour la gratuité des études universitaires. Et je rappelle donc qu'honnêtement... que je suis dans un contexte nord-américain puis avec un système économique que, moi, j'endosse, mais dans un contexte nord-américain qui fait en sorte qu'il y a des droits de scolarité -- c'est vrai partout en Amérique du Nord -- et qu'au Québec en ce moment c'est les plus bas à l'échelle de l'Amérique du Nord. Et, dans cinq ans, après la hausse des droits de scolarité, il y a une réalité qui sera toujours là, c'est qu'au Québec ce sera les droits de scolarité les plus bas. En fait, dans cinq ans, je n'aurai pas atteint la moyenne canadienne d'aujourd'hui. D'aujourd'hui. Dans cinq ans.

Le Président (M. Marsan): Merci, madame...

Mme Beauchamp: Puis il y aura une autre réalité: le régime d'aide financière aux études, toujours le plus généreux en Amérique du Nord. Je pense qu'on a un bon modèle. Je pense qu'on a un bon modèle puis que les actions prises sont des actions justes, appropriées, équilibrées, et que de parler de gratuité au niveau du monde universitaire, ce n'est pas réaliste dans le monde dans lequel on vit.

Le Président (M. Marsan): Alors, merci, Mme la ministre. Nous allons poursuivre avec le parti ministériel. Et je vais céder la parole à l'adjoint parlementaire à Mme la ministre de l'Éducation, des Loisirs et du Sport, M. le député de Charlesbourg.

M. Pigeon: Merci, M. le Président. Et, puisque le député de Mercier a bien voulu évoquer mes propos, je voudrais simplement, très rapidement, le rassurer. Avant d'avoir été recteur, j'ai aussi été professeur de très longues années. J'ai été chercheur. Et j'ai même été aussi représentant des professeurs au conseil. Alors, je pense que je connais bien l'université sous tous ses aspects. J'ai aussi été étudiant, bien sûr. Et, moi, il me vient à l'esprit un élément que j'aimerais rappeler, avant de poser une question à la ministre, et c'est de dire que, dans un pays, le Canada, et dans une province, le Québec, où finalement, quand on se compare aux États-Unis -- M. le député de Mercier a voulu nous comparer aux États-Unis -- on cherche à améliorer la philanthropie -- et Mme la ministre a cité des chiffres de 1,3 %, on parle de peut-être monter à 2 %, 2,5 % -- alors, j'ai de la difficulté de voir que nous serions de sombres néolibéraux. Bien, en fait, c'est l'opinion du député de Mercier, je pense.

Et, pour moi, quand on parle des lois du marché -- il faudrait qu'il y ait moins de gens qui achètent un produit parce qu'il est plus cher -- on n'achète pas un produit quand on va à l'université, on fait beaucoup plus large que ça, on va se former. C'est un investissement, Ça a été dit. Si on veut le tourner d'une façon un peu, là, économique, on peut dire que c'est un investissement, et à ce moment-là ce qu'on regarde, ce n'est pas le prix d'achat, ce n'est pas ça, la question, c'est ce que rapporte l'investissement. Et, autant du point de vue social, culturel qu'économique, c'est un excellent investissement.

Ceci dit, et ça aussi je l'ai bien vécu et je n'étais pas recteur à l'époque, mais le Parti québécois a sous-financé pendant de nombreuses années le maintien des actifs des réseaux de l'éducation, ce qui évidemment a malheureusement causé la dégradation de notre parc immobilier. Et ça, je peux vous dire que je l'ai vraiment, vraiment vécu. Et je suis très satisfait que, depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement libéral, il y a eu un investissement d'à peu près, je pense, plus de 3,6 milliards en maintien des actifs. Et donc, je crois, notre gouvernement a pris ses responsabilités et a posé des gestes concrets pour que l'éducation se fasse dans un environnement adéquat.

Et, Mme la ministre, j'aimerais que vous preniez un petit peu de votre temps pour nous dire quels sont les éléments majeurs, là, contenus dans le programme quinquennal des investissements, là, concernant les universités pour la période 2009-2014?

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Je remercie le député pour sa question. Puis, avec son chapeau de député de Charlesbourg, je pense qu'il... à juste titre, il porte attention, au nom de ses concitoyens, à la question, donc, des infrastructures. Et Dieu sait qu'au Québec on avait un rattrapage à faire. C'est un rattrapage que, nous, on a accepté de nommer, hein? On l'a dit, là, il y a eu trop longtemps, franchement, un désinvestissement de l'État au niveau des infrastructures publiques, et ça concernait aussi les réseaux de l'éducation. Et donc, dans le grand programme quinquennal d'investissement, il y a eu des sommes pour les réseaux de l'éducation, mais je vais vous parler des sommes pour le monde universitaire.

Mais, avec votre ancien chapeau de recteur d'université, vous reconnaîtrez avec moi... le député reconnaîtra avec moi qu'on a assisté à des premières, au Québec, qui sont des premières importantes. C'était la première fois qu'un gouvernement mettait en place des sommes prévisibles pour ce qu'on appelle du maintien d'actif, c'est-à-dire... Et, dans la vraie vie, M. le Président, là, du maintien d'actif, là, c'est carrément des travaux d'entretien et de réparation des infrastructures. Les exemples les plus courants, là, c'est d'être capable de parler de remplacement de toitures, de fenêtres, d'installation de systèmes d'efficacité énergétique. C'est le maintien du parc immobilier, notamment du parc immobilier. Ça n'existait pas avant.

Et là on a reconnu -- et c'était sous l'égide de Monique Jérôme-Forget, à l'époque présidente du Conseil du trésor, ministre des Finances -- qu'on allait octroyer l'équivalent de 2 %. Selon un savant calcul, il faut se le dire, là, mais un peu de la valeur du parc immobilier des réseaux, dont des universités, l'équivalent de 2 % allait leur être attribué pour ce qu'on appelle du maintien d'actif. Et c'est des sommes que nous avons confirmées aujourd'hui, M. le Président, au monde universitaire québécois pour l'année... C'est des nouvelles sommes qui succèdent aux dernières annoncées, là. Parce que c'est des sommes qui sont annoncées à chaque année depuis l'adoption du PQI, du Plan quinquennal d'investissements, en 2007, et de ce grand programme d'infrastructures. Donc, il y a des sommes de 233 millions de dollars qui sont confirmées aux universités au Québec.

Je vous disais: Il y a des premières. Je veux juste y revenir. Donc, il y a cette notion de maintien d'actif, qui est le fait de dire qu'à chaque année on doit investir pour maintenir en bon état nos actifs, mais il y a plus que ça. L'autre première... Et ça, c'était un geste courageux, nécessaire. Mais l'autre première, c'est que, pour la première fois, on a accepté de parler de la résorption d'un déficit d'entretien. C'est-à-dire qu'en même temps qu'on disait: Bon, bien, à partir de maintenant, là, on va essayer d'oublier les tristes années où il n'y avait pas de budget pour ça, on vous donne des budgets, c'est bien beau, mais il fallait quand même tenir compte qu'il y avait eu un impact, là, du manque d'investissement dans ces actifs-là au cours des années.

Donc, il y a deux volets. Il y a un volet où on dit: On va vous aider à résorber les déficits d'entretien, il y a des enveloppes dédiées à ça, où on reconnaît... On s'est donné une période de 15 ans pour faire du rattrapage, donner au réseau, nos universités, l'équivalent de qu'est-ce qu'elles auraient dû avoir, là, alors que ça a été des années à zéro. Donc, la résorption du déficit d'entretien. Et ensuite le fameux 2 % pour le maintien des actifs. Ça donne un total de 233 millions de dollars pour les universités québécoises.

Il y a des exemples que je peux vous donner. Il y a là-dedans, par exemple, 14 millions de dollars prévus pour l'informatique. Parce qu'il y a aussi une question d'immobilisations derrière les réseaux informatiques. Donc, on couvre les réseaux informatiques, les travaux de rénovation, des travaux de réaménagement. C'est principalement ça.

Ça fait que, si je peux juste rapidement décortiquer l'enveloppe, vous avez une somme de 43,7 millions de dollars, qui est l'équivalent du 2 %, là, qu'on calcule de la valeur des immeubles, qui est pour le maintien des actifs, et vous avez une somme de... une autre bonification des enveloppes récurrentes du maintien d'actif, qui s'élève à 15,3 millions de dollars, au chapitre, là, au titre de la... de ce qu'on appelle de la rénovation, et finalement la résorption du déficit des universités, qui est une enveloppe octroyée, pour cette année, en fait pour la... suite à la dernière enveloppe annoncée, une enveloppe de tout près de 70 millions de dollars au niveau de la résorption des déficits d'entretien.

Ça, c'est vrai. Ça veut dire que chaque université a sa part, chaque université a droit à ces sommes. J'ai envie de vous dire, là, ce n'est pas... on n'est pas dans la même logique que nécessairement, là, quand on avait des budgets en immobilisations puis on distribuait tous les budgets pour des initiatives nouvelles. Là, le gouvernement, dans le programme québécois des infrastructures, a reconnu qu'il fallait parler de l'entretien, du maintien des actifs. Donc, c'est des sommes que les universités -- comment je dirais ça? -- peuvent... Elles n'ont pas à déposer des projets, là, elles n'ont pas... Elles peuvent compter, elles peuvent prévoir ces investissements-là année après année.

Puis ça change la façon de travailler. Puis vous avez été... le député a été recteur puis il pourrait mieux l'expliquer, encore, que nous, mais la prévisibilité, le fait de savoir qu'on a les sommes sur 15 ans, ça nous permet de dépenser des argents utilement, efficacement pour se faire un programme d'entretien et, là aussi, être capables de faire les bons choix, par exemple dans l'installation des systèmes d'efficacité énergétique, changer les choix au niveau du type de... quelle sorte d'énergie j'utilise pour le chauffage des bâtiments, etc. Mais je suis capable de prévoir les coûts et de prévoir les budgets sur une bonne période de temps. Honnêtement, je pense que ça change complètement la donne sur les choix qu'ont à faire les conseils d'administration pour l'entretien de leurs bâtiments, le maintien des actifs.

C'est des sommes qui sont précieuses et c'est des sommes, vraiment, carrément, qui permettent carrément d'avoir des bâtiments en meilleurs états. Moi, je n'ai pas d'université dans mon comté, je connais plus la réalité au niveau des réseaux primaires, secondaires, mais littéralement, là, littéralement, on parle de changer des fenêtres, réparer des toits, avoir un système énergétique plus efficace, repeindre des locaux. C'est vraiment des éléments que tout citoyen qui a un actif, là, il sait qu'il faut qu'il l'entretienne. Bien là, on est capables de dire aux concitoyens Québécois: Bien, vos actifs publics, vous avez payé pour ces bâtiments, bien, ces actifs publics là, oui, on va en prendre soin puis, oui, on va investir pour leur maintien et leur rénovation. C'est vraiment le message envoyé. Et aujourd'hui les universités ont appris qu'il y avait des investissements, donc, de 233 millions de dollars qui sont maintenant à leur disposition pour ces... leurs immobilisations.

**(17 h 30)**

Le Président (M. Marsan): M. le député de Charlesbourg.

M. Pigeon: M. le Président, j'aimerais remercier la ministre de sa réponse et lui dire que, quand elle a parlé de prévisibilité, j'étais particulièrement heureux. Je pense qu'une des choses que les universités réclament depuis longtemps, hein, c'est qu'on puisse savoir ce qui va arriver. Donc, tout le plan du gouvernement, qui est un plan sur cinq ans, tant pour les étudiants que pour les universités, moi, je trouve ça extrêmement bien, parce que ça donne justement cette prévisibilité, et donc on peut s'adapter aux changements qui surviennent. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Marsan): Alors, ça me fait plaisir de céder la parole à Mme la députée des Mille-Îles. Mme la députée.

Mme Charbonneau: Merci, monsieur. Merci, M. le Président. Je vous disais plus tôt que je venais du monde de l'éducation, et la ministre a bien souligné le principe de la persévérance, alors j'y reviens. On avait commencé un début de réponse par rapport au M.B.A. qui était... ou qui a voulu être mis en place par l'Université de McGill, et la ministre avait commencé à faire son approche par rapport à comment on avait regardé la problématique mais en même temps les règles du jeu entre la reddition de comptes puis ce qu'on met en place. Donc, je me demandais si la ministre pouvait compléter au niveau de ce petit imbroglio qu'on a vécu pendant quelque temps dans les médias, parce que, malheureusement, souvent ça se passe beaucoup plus dans les médias que dans la vraie vie, donc peut-être que la ministre pourrait revenir un petit peu sur le principe même du M.B.A. à l'Université McGill.

Le Président (M. Marsan): Oui, merci, Mme la députée des Mille-Îles.

Mme Beauchamp: Est-ce que je peux avoir 10 secondes?

Le Président (M. Marsan): Oui.

Mme Beauchamp: Ça ne sera pas tellement long, je vous assure.

(Consultation)

Le Président (M. Marsan): Alors, ça va? Alors, Mme la ministre, la parole est à vous.

Mme Beauchamp: Merci beaucoup, M. le Président. Pour compléter, donc, la réponse concernant l'Université McGill, je veux juste qu'on se remette dans le bon contexte, là, c'est un contexte où le gouvernement du Québec... Et on m'a dit que c'était la première fois que ça se faisait, là, que le gouvernement a appliqué une pénalité à une université. Je pense que c'est un contexte où... En fait, bien honnêtement, ça ne réjouissait personne, là. Vous savez que ça a même suscité des réactions dans une certaine presse internationale. Mais le contexte québécois nous amenait à prendre cette décision puis à appliquer ce choix, parce que, je le répète, puis c'est important, puis c'est une valeur chez nous, il y avait cette question du maintien de l'accessibilité. Et on ne peut pas permettre à une université de choisir, de façon complètement autonome, son niveau des droits de scolarité en se fiant sur le fait que, bien, d'autres universités, elles, allaient poursuivre à offrir un programme à tel coût. On ne peut pas présumer de ça. Puis ce n'est pas pour rien qu'il y a des règles budgétaires puis qu'elles doivent être appliquées.

Donc, nous avons appliqué cette pénalité. Je vous l'expliquais, là, elle était... elle a été appliquée selon un mode de calcul où on a voulu, je veux dire, appliquer une pénalité sur le principe de l'accessibilité. Donc, on n'a pas fait un calcul en disant: Quelle est la différence entre les droits de scolarité prévus, ceux appliqués, tout ça? L'idée était de dire: Les groupes ont été diminués, et on a restreint l'accessibilité à un M.B.A. régulier offert aux droits de scolarité que l'on connaît. Donc, on a fait ce calcul sur les équivalents temps plein, et c'est sur la base du nombre d'étudiants dont on a... que, nous, on prétend qu'on les a privés d'un accès à un programme de formation M.B.A. régulier qu'on est arrivés à ce calcul, qui dépasse à peine, là, les 2 millions de dollars.

Je vous dirai, là, je le dis en toute transparence, que, du côté des membres du conseil d'administration de l'Université McGill, du côté de certains membres de la communauté montréalaise, c'est une décision qui n'est pas encore comprise, mais que nous tentons d'expliquer et de réexpliquer. La discussion avec l'Université McGill nous amène à lui dire que, si l'Université McGill, je dirais, là, affirme que le M.B.A. qu'elle offre est un M.B.A. qui doit s'offrir à hauteur de droits de scolarité de 30 000 $, bien, au Québec, les conditions veulent qu'elle doit le faire dans un contexte où ce programme devra correspondre aux critères pour le reconnaître comme un programme spécialisé. Ça veut donc dire que ça ne peut pas être un M.B.A. régulier.

Si l'Université McGill, comme ça existe déjà et comme ça existe aux HEC, si l'Université McGill nous fait la démonstration... et, pour ce faire, elle devra procéder à des modifications de son offre actuelle, mais, si l'Université McGill, comme ça été le cas dans le passé, nous démontre que ça correspond à la définition d'un programme spécialisé, donc qu'on rejoint une cohorte précise, présentant certaines caractéristiques, et que la formation offerte n'est pas du même niveau que celle offerte dans un M.B.A. régulier, comme on l'a fait par le passé pour l'E.M.B.A., comme on l'a fait pour le M.B.A. pour cadres, comme on l'a fait pour les HEC, l'Université McGill pourra offrir un programme spécialisé. Elle doit en faire la demande au ministère, mais rien n'empêche une université d'offrir un programme spécialisé pour une cohorte bien définie.

Et l'Université McGill a, je dirais, certainement voulu montrer, là, sa collaboration, sa recherche de collaboration en proposant de revoir son offre de formation. Nous avons... Donc, l'Université McGill a soumis, le 11 mars dernier, donc ça fait maintenant un mois, une demande qui... c'est une demande où elle modifie son offre de formation. Je trouve ça important de le dire, là, je ne suis pas devant le même programme qu'on nous demande de faire reconnaître comme un programme spécialisé. Elle a dû apporter des changements et elle nous demande maintenant de reconnaître un nouveau projet déposé comme un M.B.A. spécialisé. Les analyses sont en train d'être faites du côté de l'équipe du ministère, et McGill, à juste titre, demandait au ministère de procéder de façon diligente. J'ai envie de dire avec un sourire: On essaie toujours de procéder de façon diligente. Mais je veux juste ici confirmer que le ministère entend rendre sa décision pour environ la fin du mois d'avril. Donc, d'ici environ deux à trois semaines, nous serons en mesure de confirmer à l'Université McGill si le programme modifié que l'université a déposé correspond aux critères du ministère comme un programme spécialisé.

Donc, c'est l'histoire, mais je pense qu'on peut se dire qu'au Québec, même si le débat a été... était vigoureux, on peut se dire qu'on a posé les gestes qui sont des gestes d'affirmation qu'il y a des droits de scolarité au Québec pour les programmes réguliers, ils doivent être respectés, puis qu'on doit respecter ces notions d'accessibilité. Depuis tantôt qu'on prêche pour dire que, s'il y a une hausse des droits, il faut que ce soit accompagné du bon programme d'aide financière, et tout. Bien, c'est exactement la logique qui nous a guidés dans les prises de décision concernant l'Université McGill.

**(17 h 40)**

Le Président (M. Marsan): Merci, Mme la ministre. Et nous poursuivons, et je vais céder la parole à la porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enseignement supérieur, de prêts et bourses, Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Merci, M. le Président. J'avais hâte de revenir, je trouvais que ça faisait une longue période sans participer à nos discussions. Mais j'ai bien écouté tout ce qui s'est dit, j'ai écouté aussi la ministre répondre à d'autres questions. Et, moi, vous comprendrez que je veuille revenir quand même un certain temps sur, malgré tout, cette mesure du budget qui a marqué beaucoup le plus récent budget du gouvernement, qui concerne la hausse des frais de scolarité.

Et vous me permettrez de citer une autre étude, qui n'était pas, je crois, dans la liste de la ministre, ou tout au moins je ne l'ai pas entendue, mais juste un extrait, mais c'est une mini... une étude commandée par le ministère en 2007, signée de Mme Valérie Vierstraete, et qui dit ceci, j'en cite simplement un extrait: «Cette étude nous a montré qu'en prenant en compte l'aide financière aux études, selon [les] paramètres actuels, et les outils fiscaux, une hausse des droits de scolarité au Québec pour parvenir à la moyenne observée dans le reste du Canada aurait des effets sur l'accessibilité, c'est-à-dire une baisse de la fréquentation, du même ordre que lors de la hausse des droits qu'a connue le Québec au début des années quatre-vingt-dix.»

Ce que ça veut dire, c'est qu'au début des années quatre-vingt-dix on a connu une hausse des droits, on a noté un impact de baisse sur l'accessibilité. Là, bien sûr, la hausse du gouvernement, je le vois très bien, ne nous ramène pas tout de go à la moyenne canadienne, mais elle est quand même extrêmement substantielle. Alors, je tiens à citer ça en commençant.

Je tiens aussi à indiquer que, tout de même, dans beaucoup de commentaires qui ont été faits, on a fait des références à ce qui se fait ailleurs, mais on a noté... Je pense à un éditorial de Marie-Andrée Chouinard, dans Le Devoir, qui dit: L'Alberta récemment a rejeté des demandes de hausse de droits de scolarité. La Nouvelle-Écosse -- qu'on cite souvent parce que leurs droits sont effectivement très élevés -- a entériné une quatrième baisse consécutive des droits de scolarité. Parce qu'ils pensent qu'ils ont été trop loin. En Ontario, 64 % des bacheliers -- des étudiants au baccalauréat -- ont une dette moyenne de 26 000 $. Pas au doctorat, au baccalauréat.

Alors, je repose ma question à la ministre: Comment peut-elle croire que la hausse qu'elle a récemment décrétée et qui nous amènera, en 2017, à des frais de scolarité de 3 793 $, comment peut-elle penser que cela n'aura pas d'impact sur l'accessibilité aux études supérieures au Québec, compte tenu de notre histoire, de notre culture, de nos caractéristiques qu'on a évoquées tout à l'heure? Et là, bien sûr, je ne fais même pas mention de la question des frais afférents, mais qui s'ajoutent à la facture pour les étudiants.

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Je veux juste redire à la députée de Taillon, et c'est vrai aussi pour l'étude qu'elle cite, qu'à chaque fois les études ajoutent qu'«on peut s'apercevoir que l'effet sur l'accessibilité -- notamment, l'étude qu'elle a citée, je veux juste lui en lire un autre extrait -- ne devrait pas toucher les bénéficiaires actuels de bourses de l'aide financière aux études, qui verraient leurs bourses augmenter du même montant que la hausse des droits». C'est exactement le scénario devant lequel nous sommes. Je...

Le Président (M. Marsan): Oui, Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: ...j'apprécierais qu'on ait de temps en temps un échange plus précis: effectivement, pour les actuels bénéficiaires de bourses. La question, c'est sur les gens qui ne bénéficient pas de prêts et bourses, qui ne sont pas dans les catégories admissibles. J'ai le même extrait que vous et j'aurais pu continuer de le lire, je n'ai pas de problème avec ça. Bien sûr, si on ajoute en conséquence des bourses -- puis le premier ministre l'a dit plusieurs fois -- ceux qui sont bénéficiaires de bourses, ils ne verront pas la différence, ils auront des bourses augmentées en conséquence. Mais ceux qui n'ont pas accès, eux, ils vont payer toute la facture. Et on reviendra plus tard à des questions d'aide financière aux études et de contribution parentale, et tout ça. Mais, eux, ça va être plus important pour eux, l'impact.

Le Président (M. Marsan): M. la ministre.

Mme Beauchamp: Bien, M. le Président, je vais répondre, puis, après ça... Je dois quand même commenter les questions de la députée de Taillon dans le contexte où ça serait important de savoir ce qu'elle défend.

Donc, je veux juste reprendre en disant: Indéniablement, indéniablement, le projet qui est sur la table, indéniablement, c'est un projet qui ferait en sorte que, même à la fin, en 2016-2017, les droits de scolarité au Québec seront les plus faibles au Canada. Parce que, même quand je compare aux droits de scolarité actuels, les droits de scolarité au Québec n'auront pas rejoint la moyenne canadienne actuelle. Et on voit que, dans d'autres provinces canadiennes... Toutes les autres provinces canadiennes ont des droits de scolarité plus élevés. La question de l'accessibilité aux études, leurs chiffres sont comparables ou parfois plus élevés. Puis leur taux de diplomation, dans la population adulte, est aussi plus élevé.

C'est qu'il y a un certain nombre de nos concitoyens, à l'échelle canadienne, qui font le calcul qu'il y a, dans le fait d'aller à l'université, de payer des droits de scolarité, s'il le faut... Bien sûr, tant mieux, les plus... Ceux qui ont les moins grands revenus ont droit à l'aide financière aux études. Certains -- et ça a été vrai de tout temps, là -- doivent aller faire des emprunts. Ça a toujours été vrai, ça, dans le modèle québécois, il y a toujours du monde qui ont dû aller faire des emprunts pour faire des études universitaires. Quand je vois le contexte canadien, ça m'amène à dire que c'est parce que des gens font le calcul qu'il y a un retour, hein, il y a un retour, il y a une rentabilité sociale, mais il y a une rentabilité personnelle à mener des études universitaires.

Et, moi, je dis, j'affirme que... Et plusieurs de vos collègues l'ont mentionné, je pourrais vous citer plusieurs de vos collègues, y compris la chef de l'opposition, qui ont dit: On peut augmenter les droits de scolarité si le programme d'aide financière est bonifié et si on continue de parler d'un engagement de l'État à financer les universités. C'est exactement cela.

Et pourquoi, M. le Président, je dis que je m'interroge? Parce que je m'interroge vraiment... puis, vous le savez, vraiment, même dans les médias, c'est commenté, on s'interroge sur la position... Parce qu'à travers les questions de la députée, à travers ses questions, je me dis: Elle est en train de dire que toute hausse des droits de scolarité, même accompagnée d'une bonification de l'aide financière comme celle que l'on propose en ce moment, qui est indéniable et qui fait en sorte qu'un boursier a zéro endettement de plus... Donc, ceux qu'on considère aujourd'hui comme ceux qui ont le plus besoin d'aide, eux, c'est zéro endettement de plus, on diminue la contribution parentale. Malgré cela, elle semble nous dire: Toute hausse de droits de scolarité a un impact sur l'accessibilité aux études, et on ne devrait pas le faire. Moi, c'est ça que je comprends dans sa position.

Mais je veux juste vous rappeler, M. le Président, qu'à travers le temps il y a eu différentes positions au niveau du Parti québécois. Et permettez-moi, par exemple, juste de citer le député qui... dans la région de Sorel, le député de Richelieu qui disait, le 11 juin 2006: «Le maintien du gel, c'est le sous-financement à perpétuité», ou encore la chef de l'opposition, la députée de Taillon, qui, en 2007, disait: «Ce que j'ai souhaité, c'est que, oui, on aille vers une avenue comme celle-là, la hausse des frais, et donc que toute somme puisse immédiatement être réinvestie, mais pas pour que l'État se désengage.» Bien là, c'est exactement ce que l'on fait.

Le Président (M. Marsan): Alors, merci, Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Non, mais je repose la question. Parce que je peux bien répondre à des questions, mais il faudrait que ça soit plus clair, la thèse que défend la députée de Taillon. Et je pourrais vous enligner une série de citations où c'est des positions tout le temps contradictoires. Puis on l'a encore vécu récemment entre le député de Rousseau, la députée de Taillon, la porte-parole des jeunes péquistes.

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie.

Mme Beauchamp: On n'est plus capables de suivre.

Le Président (M. Marsan): Merci, Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Donc, il faudrait qu'on soit capables de suivre, ça améliorerait la qualité de notre débat aujourd'hui.

Le Président (M. Marsan): Merci. Mme la députée de Taillon.

**(17 h 50)**

Mme Malavoy: Oui. On va préciser une chose tout de suite. Mais je tiens à garder le but de l'exercice, qui est de questionner le gouvernement sur ses choix. Si on était au gouvernement, on ferait des choix, puis on en rendrait compte. Mais je précise une chose tout de suite. C'est vrai que, chez nous, il y a des débats. Ma foi, je trouve que c'est un signe de santé d'un parti politique. Si la ministre veut avoir une passe d'observatrice à notre prochain congrès, je l'invite certainement à la commission qui traitera des questions d'éducation. Mais je peux dire, cela dit, sans vouloir trancher ce qui sera discuté en fin de semaine: Il est sûr que toutes les positions que nous avons sont extrêmement loin de celles du gouvernement. Il n'y a rien dans ce qui a été dit récemment dans les positions de mes collègues ou de moi qui s'approche ne serait-ce que de près de ce qui est dit ici. Et donc c'est pourquoi je me permets de questionner le choix qu'a fait le gouvernement. Et je vais relancer la question peut-être avec d'autres éléments.

60 % des étudiants et des étudiantes du Québec n'ont pas accès aux prêts et bourses, et c'est tout à fait compréhensible. Moi, j'ai fait mes études sans avoir accès aux prêts et bourses, compte tenu des revenus de mes parents. Certains, par contre, n'ont pas accès parce qu'on calcule que leurs parents devraient financer, et ça n'est pas le cas. Donc, il y en a donc 60 % pour lesquels il ne faut pas dire: On bonifie les prêts et bourses, ça va compenser, ils n'y ont pas accès.

Il y en a ensuite 40 % qui n'ont pas de contribution parentale. On peut dire... Puis, moi, je fais partie des gens qui souhaitent, oui, que les parents du Québec aient une sensibilité grande à inviter leurs enfants à faire des études. Mais on n'est pas encore rendus, dans notre culture collective, et je le regrette, à accorder autant d'importance aux études supérieures que ça peut être le cas dans certains de... chez certains de nos voisins.

81 % des étudiants ont un emploi en plus d'étudier à plein temps, et beaucoup ont un emploi qui les occupe à peu près au moins, au moins, 15 heures-semaine. Et les revenus des étudiants sont extrêmement bas. Il y en a la moitié qui gagne seulement 12 000 $ par année. Ça, c'est la situation actuelle.

Moi, j'essaie de comprendre quelle sera la situation si on la projette, compte tenu de la hausse que le gouvernement vient de décréter, quelle sera cette situation dans quelques années. On peut dire aux gens: Vous allez investir dans votre avenir, mais, moi, je prétends, M. le Président, qu'actuellement cette mesure va être désincitative, va faire que des jeunes qui se demandaient: Est-ce que j'y vais ou est-ce que je n'y vais pas? ne voudront pas y aller, et en plus s'ils tombent dans la catégorie de ceux qui n'ont pas accès aux prêts et bourses. Et là-dessus, là, vous pouvez être certaine que vous avez l'unanimité du Parti québécois derrière moi pour dire que, cette hausse, nous concevons qu'elle est dangereuse par rapport à l'accessibilité. J'aimerais, là-dessus, vous entendre, entendre la ministre sur ses choix. C'est les choix de son gouvernement, ce n'est pas nos choix à nous, et on est tout à fait légitimés, je crois, de les questionner.

Le Président (M. Marsan): Merci. Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Bien, on disait qu'on est dans un lieu qui est un lieu de débats, je pense, la députée de Taillon l'a décrit elle-même comme cela un peu plus tôt dans la journée, et c'est pour cela qu'on doit aussi se poser des questions sur les positions de la députée de Taillon. Parce que, je le dis gentiment, là, mais franchement ça me fait sourire, ce qu'elle vient d'admettre un peu plus tôt, vous avez reconnu la formulation, c'est: «toutes les positions que nous avons sont loin de celles du gouvernement». Et j'ai trouvé ça mignon comme formulation: «toutes les positions que nous avons», je pense qu'elle venait, ici, de confirmer qu'il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup de positions au sein du Parti québécois sur la question de la hausse des droits de scolarité. Donc, «toutes les positions», ça, ça veut dire qu'il n'y en a pas une, qu'il y en a plusieurs, et que les Québécois sont en droit de s'attendre à plus de clarté.

Non, franchement, là, dans le dossier des droits de scolarité, là, tout est écrit. Il y a un document, tout est disponible, tout est là, ça ne peut pas être plus clair. Je vais même dire que l'Action démocratique du Québec est venue témoigner de son appui. Le député de Mercier, au nom de Québec solidaire, a dit avec beaucoup de clarté ce qu'était sa position, je ne la partage pas, mais... beaucoup, beaucoup de clarté quelle était sa position. Puis on a un devoir auprès des concitoyens du Québec, c'est d'exprimer cette clarté.

M. le Président, parce que je continue à dire que, derrière les propos de la députée de Taillon aujourd'hui, c'est comme si toute hausse de droits de scolarité restreignait ou était une attaque à l'accessibilité aux études. Je repose la question donc... Donc, c'est une position sur le gel des droits de scolarité, mais c'est très difficile à décoder, parce qu'hier matin encore, hier matin encore, dans Le Devoir du 11 avril, donc, on pouvait lire une porte-parole des jeunes du Parti québécois, Christine Normandin, qui disait, bien: «"Le gel en tant que tel, ce n'est pas une mesure." Elle soutient que les jeunes péquistes ne prônent plus le gel ad vitam aeternam. Mais ils ne se disent pas pour autant favorables à un "dégel".» Ça, c'est dans la même phrase, là. M. le Président, ça me fait penser, tu sais, à un bonhomme de neige qui se demande: Est-ce que je gèle ou je dégèle?, là, puis qui dit: Bien, je ne suis ni pour le gel ni pour le dégel. Mais, tu sais, tu es un bonhomme de neige, tu serais mieux de te brancher, là, sur qu'est-ce que tu veux, là, pour ton avenir.

Moi, je suis là puis je dis juste: On peut bien critiquer notre position, elle a l'avantage d'être saine, d'être équilibrée, d'assurer la qualité du diplôme universitaire. Puis, franchement, là, il y a un grand avantage, c'est qu'elle est connue, elle est chiffrée, elle est publique. Puis on l'assume, puis on va la défendre, puis elle est bonne. Mais on ne peut pas ici se présenter aujourd'hui, me poser des questions, prétendre que nous n'avons pas la bonne formule puis être incapable de faire une proposition.

D'ailleurs, ça me frappe parce qu'aujourd'hui son ancien collègue François Legault est sorti, puis François Legault, avec sa coalition...

Une voix: ...de sujet.

Mme Beauchamp: Oui. On est tout à fait dans le sujet. Parce que mentionnons que François Legault, qui, lui-même, a dit qu'il avait quitté les rangs du Parti québécois parce que le leader de l'opposition puis la chef de l'opposition...

Le Président (M. Marsan): Madame...

Mme Malavoy: ...défendre ses positions.

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre. Excusez-moi...

Mme Malavoy: La ministre est incapable, M. le Président...

Le Président (M. Marsan): Excusez-moi.

Mme Beauchamp: Non, mais vous avez beau m'interrompre parce que ça ne fait pas votre affaire, il y a une réalité.

Le Président (M. Marsan): Excusez. Mme la ministre, juste un instant. Un instant, s'il vous plaît.

Une voix: ...

Le Président (M. Marsan): Juste un instant, s'il vous plaît. Des questions sont posées dans la règle, les réponses doivent être données dans la règle.

Je constate aussi qu'on approche la date... l'heure de terminaison. Je voudrais vous informer qu'il y a eu entente entre les formations politiques pour qu'on termine à 6 heures et qu'on reprenne le 20 minutes qui était accumulé au retard, dû aux affaires courantes, à la fin de nos travaux ce soir. Alors, je vous demanderais, rapidement, en terminant, il reste deux minutes à nos travaux, si vous voulez faire une courte conclusion, séparer une minute, une minute. Alors, Mme la députée de Taillon, en terminant.

Mme Malavoy: Je vais continuer le reste de la journée, M. le Président, à concevoir que l'exercice que nous faisons, c'est de demander au gouvernement, qui a fait des choix, de nous les expliquer et de nous en expliquer l'impact. Je suis inquiète réellement quant à l'impact de ces mesures sur l'accessibilité aux études, qui est un des principes qui nous est cher. Et j'aimerais que la ministre m'explique dans ses mots en quoi elle est certaine de ne pas faire d'erreur, de ne pas contribuer à un endettement étudiant beaucoup trop grand, de ne pas nuire à l'accessibilité. Je lui demande de me justifier ses choix, c'est juste ça. Je ne veux pas qu'elle me renvoie d'autre chose.

Le Président (M. Marsan): Vous avez posé la question. Mme la ministre, vous avez une minute pour répondre à cette question.

Mme Beauchamp: On n'a pas la même conception de nos responsabilités et de nos rôles lorsqu'on forme cette Assemblée nationale. Une opposition a une responsabilité, c'est de faire des propositions. Et je veux juste rappeler que François Legault, qui a exprimé son appui au plan budgétaire déposé concernant les universités, a rappelé qu'il a quitté le Parti québécois parce qu'on lui interdisait de faire des propositions. Déjà, une proposition, ce serait bien, puis d'éviter les contradictions entre les propositions puis les positions, ce serait mieux. Mais je suis en complet désaccord, on ne peut pas prétendre ici, dans cette assemblée, que l'ensemble des formations politiques n'ont pas la responsabilité de présenter aux Québécois des propositions. Et on a un échange, c'est un débat sur les principes que l'on défend, mais on veut connaître quels sont les principes défendus par le Parti québécois. Ça fait six ans qu'ils ont le temps de débattre de ça, M. le Président, il faut qu'on connaisse leur position.

Le Président (M. Marsan): Alors, c'est terminé.

La commission suspend ses travaux jusqu'à 19 h 30, où elle reprendra l'étude des crédits budgétaires du volet Enseignement supérieur, prêts et bourses, du portefeuille Éducation, Loisir et Sport. La commission se réunira dans cette même salle. Merci, et bon appétit.

(Suspension de la séance à 17 h 59)

 

(Reprise à 19 h 33)

Le Président (M. Marsan): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

La commission est réunie afin de procéder à l'étude des crédits budgétaires du volet Enseignement supérieur, prêts et bourses, du portefeuille Éducation, Loisir et du Sport pour l'année financière 2011-2012.

Alors, j'aimerais poursuivre immédiatement nos échanges. Et je vais reconnaître M. le député d'Orford. La parole est à vous.

M. Reid: Merci, M. le Président. Moi, j'aimerais aborder la question des centres collégiaux de transfert de technologie. Et on en parle beaucoup dans certains milieux, peut-être pas assez dans l'ensemble du Québec, parce que c'est quelque chose d'assez exceptionnel au niveau québécois.

Moi, j'ai oeuvré personnellement longtemps dans le monde universitaire, comme mon voisin ici, d'ailleurs, où nous avons, chacun de notre côté -- on parle de l'Université Laval et de l'Université de Sherbrooke, bien sûr -- chacun de notre côté, nous avons beaucoup travaillé à faire en sorte que les découvertes de nos chercheurs puissent se transformer en produits, en industries et en économie, en création d'emplois, dans nos milieux respectifs et pour le Québec en général, et je pense qu'on a assez bien réussi d'une façon générale, et par la suite il y en a d'autres qui ont pris le relais et qui ont fait peut-être encore mieux.

Je pense que le Québec se développe bien, dans ce sens-là, au niveau des universités, mais ce qu'on ignore souvent ailleurs, c'est qu'étant donné que nous avons, nous, une particularité qui s'appelle le cégep il y a également quelque chose qui accompagne le cégep, c'est-à-dire qu'on n'a pas oublié, quand on parle de cégep, notre société québécoise n'a pas oublié de s'assurer que les cégeps pouvaient jouer pleinement leur rôle dans le développement technologique, dans le transfert de technologie. Et, ce qui plus est, ce rôle-là est un rôle qui occupe une niche... En fait, les cégeps occupent une niche qui n'est pas occupée par les universités, sauf peut-être quelques petits recoupements, qui n'est pas occupée non plus par le niveau secondaire, même le niveau professionnel, parce qu'il y a des centres de formation importants, mais il ne se fait pas vraiment de transfert technologique à ce niveau-là, et c'est une niche qui est extrêmement importante parce qu'elle s'adresse à l'industrie pour un domaine de technologie qui est très appliqué et qui est très proche, effectivement, de la formation professionnelle et la formation technique.

C'est donc un soutien à l'industrie dont on parle ici, dans un domaine pour lequel l'université ne joue généralement pas... n'occupe généralement pas cette niche-là, et c'est un soutien, donc, au développement de l'industrie mais aux industries existantes aussi. Ce qui plus est, c'est le fait que les centres de transfert technologique se situent en région et couvrent l'ensemble du territoire, ce qui est d'autant plus intéressant que le Québec a un très grand territoire. Mais pourquoi on a autant de succès à couvrir le territoire? C'est parce qu'on a quelques universités, mais on a beaucoup de cégeps, beaucoup de centres collégiaux, et donc on a graduellement augmenté le nombre de transferts... de centres de transfert, de CCTT, et donc on couvre une large partie du territoire.

Oui, mais, on me dira, chaque centre de transfert se spécialise. Bien, il le faut, bien sûr, sinon on n'arrivera pas à faire de la découverte technologique et du transfert. Et, si je regarde la liste, par exemple, juste pour en nommer quelques-uns, on a des spécialités en environnement, en imprimerie, en agriculture, en transport, en foresterie, en productique. Je n'ai pas besoin de vous nommer les places, parce qu'il y a peut-être des endroits où on a deux, trois spécialités, mais généralement il s'agit tous de... il s'agit, dans tous les cas, de villes différentes.

Je pense à Jonquière, par exemple, ma ville natale, en productique, où un de mes neveux a... un de mes cousins, en fait, a travaillé longuement, et maintenant il est devenu, parce qu'il a appris, là, à travailler dans ce domaine-là, un expert international pour des entreprises internationales à base québécoise. On parle, à Jonquière également, de santé-éducation et on parle de bioproduits, technique physique, on parle de chimie, productique, encore une fois, on parle d'habillement, orthèses et prothèses, toutes les questions maritimes. Je pourrais tous les nommer, là, il y en a encore peut-être quelques-uns qui sont intéressants: minéraux, télécommunications, agriculture.

En fait, oui, les CCTT sont des centres spécialisés et donc il permettent d'aider à développer, à la manière un peu de minigrappes industrielles, si on veut, à un niveau qui n'est généralement pas reconnu comme grappe industrielle, parce que, grappe industrielle, on parle souvent d'universités qui sont associées à des entreprises, mais, à un niveau plus régional, les CCTT participent, à la grandeur du Québec, à créer cette espèce de dynamique de grappes industrielles à petite échelle.

Mais il y a plus encore, parce que, dans la volonté exprimée dès le départ au niveau de la création des CCTT et par ce qui a été fait depuis des années, c'est que le CCTT, dans sa région, parce qu'il développe une crédibilité auprès des entreprises, devient aussi un guichet dans sa région pour aller chercher l'expertise dans d'autres CCTT au Québec. Autrement dit, on n'a pas juste des CCTT qui sont éparpillés un peu partout, on a des CCTT qui représentent un réseau, un réseau d'information, un réseau de consultation technologique, et donc, dans ce sens-là, on a au Québec quelque chose qui est unique, probablement, au monde. On n'a rien de semblable ailleurs, probablement parce qu'il n'y a personne au monde qui a des cégeps, il faut bien le dire. Mais on a réussi à tirer avantage de ce réseau extraordinaire, qui est le réseau des cégeps, et on a un réseau de CCTT qui va chercher une capacité, qui occupe une niche qui n'est pas occupée par d'autres éléments et même pas par le privé non plus, sauf quelques exceptions, et donc on a quelque chose dont, à mon avis -- et c'était le début... le premier énoncé que j'ai fait -- on ne parle pas suffisamment. Mais on en parle quand même parce qu'il se passe des choses.

Et, moi, Mme la ministre, la question que je voudrais vous poser, c'est, d'une part, de... que vous nous parliez un petit peu des éléments plus récents associés aux CCTT, des développements récents. Et, si j'ai bien compris, il y a des développements récents qui vont dans le sens d'un transfert technologique mais en fait plus proche du social, c'est-à-dire un centre de pratiques sociales novatrices, qui est donc de l'innovation, mais l'innovation qui n'est pas uniquement limitée à la technologie ou au commerce, qui est également, là, beaucoup plus centrée en pratiques sociales. Alors, j'aimerais peut-être que vous nous parliez un petit peu de ce développement-là.

Et, dans le contexte, évidemment, des crédits, j'aimerais... Dans le contexte des crédits, j'aimerais aussi que vous puissiez, Mme la ministre, nous parler du contexte... de la contribution effectivement du ministère de l'Éducation, Loisir et Sport, parce que, si ma mémoire est bonne, il y a plus qu'un ministère impliqué dans les CCTT, et peut-être l'implication du ministère en termes financiers en général. Mais, en particulier, est-ce qu'il y a des choses spéciales dans la création de ces centres de pratiques sociales? Et également, dans les opérations du ministère et les stratégies du ministère, est-ce qu'il y a une implication particulière par rapport aux CCTT?

Le Président (M. Marsan): Merci, M. le député. Mme le ministre de l'Éducation, des Loisirs et du Sport.

**(19 h 40)**

Mme Beauchamp: Merci beaucoup, M. le Président. Je veux remercier le député d'Orford qui franchement vient de faire un plaidoyer assez convaincant en faveur des centres collégiaux de transfert technologique. Et, vous avez raison, je... M. le Président, je tiens à dire au député d'Orford que je considère qu'il a tout à fait raison de dire qu'on n'en parle pas assez, alors que c'est un actif important dans plusieurs régions du Québec.

Ce n'est pas banal, là. Autour d'une institution de savoir, d'enseignement supérieur qu'est un cégep, qu'on a dans chacune des régions du Québec, dans plusieurs... plusieurs par région du Québec, on a greffé à cela une fonction de recherche et de recherche appliquée, au bénéfice notamment de PME. Et non seulement c'est très... c'est plein de retombées que d'avoir une fonction de recherche et de recherche appliquée, c'est des retombées économiques importantes, mais en plus c'est un lien direct avec l'établissement de ce qui devient des créneaux d'excellence dans des régions. C'est l'identification d'une région et d'un cégep à une spécialité, à un créneau d'excellence qui fait sa renommée ensuite et qui aide aussi ce cégep, ce collège, par exemple -- prenons l'exemple de cégeps en région -- qui peut l'aider à attirer une nouvelle clientèle et même à attirer des étudiants provenant de l'étranger. Ça participe à un peu la mise en place qu'on pourrait qualifier d'une grappe, hein, avec l'institution du savoir qu'est le cégep, son centre de transfert technologique, les PME partenaires, et souvent il y a d'autres partenaires dans la région qui appuient, se greffent à cela.

Ça fait que je suis d'accord avec vous que c'est une dimension importante, et c'est pour cela que le gouvernement avait pris l'engagement d'augmenter le nombre de centres collégiaux de transfert technologique sur le territoire, puis c'est avez plaisir, là, que je peux vous confirmer que non seulement l'objectif est atteint, mais il est dépassé. Parce que finalement la décision a été prise, l'automne dernier, d'ajouter un centre de transfert technologique à la liste qui était prévue initialement. Donc, nous sommes à 46 centres de transfert technologique, alors qu'on avait pris l'engagement d'en faire 45.

Je prends le temps de vous dire que l'automne dernier, à la liste des centres qui sont déjà en place, puis je pourrais, par exemple, parler du Centre de production intégrée du Québec, au cégep de Sherbrooke, qui est... dont la spécialité est la productique, il y a eu les annonces, cet automne, c'était au mois de septembre dernier, de cinq nouveaux centres de transfert technologique au niveau collégial. Il y en a trois en pratiques sociales novatrices, et je vais les nommer rapidement. C'est le Centre de recherche sur l'inclusion scolaire et professionnelle des étudiants en situation de handicap du collègue Dawson et du cégep du Vieux Montréal, le Centre d'initiation à la recherche et d'aide au développement durable du cégep de la Gaspésie et des Îles, et le Centre d'étude en responsabilité sociale et écocitoyenneté du cégep de Rosemont. Il y a là, puis vous l'avez souligné... Le député d'Orford l'a souligné, M. le Président, il y a maintenant six centres collégiaux de transfert technologique qu'on a identifiés non pas à des domaines, je dirais, plus purement technologiques ou de production manufacturière, ou industrielle, ou liée à des procédés, mais bel et bien des centres d'expertise et de recherche appliquée au niveau de pratiques sociales.

Puis permettez-moi de donner l'exemple, encore plus précisément, du Centre de recherche sur l'inclusion scolaire et professionnelle des étudiants en situation de handicap. On en a parlé plus tôt dans la journée. On a parlé de ce soutien nécessaire à des situations... pardon, à des étudiants vivant des handicaps ou des difficultés d'apprentissage, cette notion d'inclusion aux niveaux collégial et universitaire. Or, ça fait environ presque une vingtaine d'années que les cégeps, et c'est intéressant de noter, là, la collaboration... Le cégep Dawson, le cégep du Vieux Montréal avaient développé déjà une collaboration active depuis 20 ans sur cette question-là, et là vous avez ici deux institutions collégiales qui, au niveau de la recherche, vont pouvoir travailler ensemble mais pour offrir ensuite, bien sûr, parce qu'on parle de pratiques sociales novatrices, des données précieuses sur la question de comment, aux niveaux universitaire et collégial, je dois travailler et réussir la question de l'intégration des étudiants vivant des situations de handicap.

Et je considère vraiment qu'il y a là un soutien à un centre de transfert technologique qui est tout à fait pertinent, puisque, comme on l'a mentionné ici, la députée de Taillon y faisait référence en début de journée, cette question de donner leur place et d'assurer la réussite des enfants... pardon, des enfants... je devrais dire des étudiants présentant des handicaps ou des difficultés d'apprentissage sera... prendra de plus en plus de place dans le monde collégial et dans le monde universitaire. Donc, voilà une notion de pratique sociale, et d'être en appui, et d'être capable, bien sûr, de transférer les connaissances qui seront acquises grâce aux activités de recherche qui seront menées là, dans ces deux cégeps.

Je veux aussi, bien sûr, parler du centre au niveau de la recherche et de l'aide au développement durable du cégep de la Gaspésie et des Îles. On a parlé un peu plus tôt de ce cégep mais trop rapidement, assurément. Mais c'est avec beaucoup de fierté pour les gens de la Gaspésie et des Îles que je veux confirmer que c'est... le cégep de la Gaspésie sera le seul cégep, à ma connaissance, je ne crois pas me tromper, je le répète... non, il y a Maisonneuve, mais un des seuls cégeps à avoir trois CCTT à son actif. Et je pense qu'il le méritait bien. Notamment, il y a toutes sortes de projets au niveau des Îles. La question du développement durable et de la protection du territoire, au niveau des Îles-de-la-Madeleine, prend beaucoup de place, et le cégep a obtenu ce CCTT.

Puis finalement le cégep de Rosemont était... est largement connu pour ses actions au niveau de la protection de l'environnement, de l'écocitoyenneté. Et vous vous souviendrez peut-être, là, je le dis en toute transparence, que, lors de la dernière ronde d'octroi de CCTT faite par la ministre précédente, la députée de Fabre, le cégep de Rosemont avait eu des doléances parce qu'un cégep au niveau de l'agriculture avait été un choix qui avait été... qui avait précédé, là, le choix du cégep de Rosemont. Et, moi, en toute équité et par souci vraiment, justement, d'équité et de transparence, j'ai choisi en fait de régler cette situation en faisant en sorte qu'il y ait un 46e CCTT et d'ajouter l'octroi d'un CCTT, remarquant la qualité du projet soumis, là, par le cégep de Rosemont, ce qu'avait fait aussi la députée de Fabre avant moi, là. Elle avait bien expliqué la situation à la députée de Rosemont, à l'époque, mais voilà que ce projet de CCTT est bel et bien confirmé.

Dans le domaine des technologies, il y a deux nouveaux cégeps qui se sont vu, donc, donner des CCTT. Il y a celui dans le secteur... un qui me... Hé! Je n'ai pas le cégep à qui va le centre de solutions technologiques en orthèses et prothèses.

Une voix: ...

Mme Beauchamp: Le cégep Mérici? O.K. Pardonnez-moi, il n'était pas identifié sur ma fiche. Donc, le cégep Mérici, avec un centre de solutions technologiques en orthèses et prothèses.

Et permettez-moi de vous parler de celui octroyé au cégep Marie-Victorin. C'est un cégep qui est en partie sur le territoire de mon comté. Il est à cheval sur les comtés de Bourassa-Sauvé et de LaFontaine, mais c'est surtout le fait que j'étais très fière de voir que ce CCTT était en haut de la liste, là, faisait partie de la liste que le jury avait établie. Parce que notons que tous ces octrois sont entièrement fidèles à la sélection faite par un jury indépendant. Mais j'en étais fière parce que, moi, j'ai suivi de longue date, depuis mon engagement en développement régional dans l'Est de l'île de Montréal, l'évolution du cégep Marie-Victorin dans le domaine de l'habillement et de la mode. J'ai assisté à plusieurs reprises au gala des finissants de ceux qui sont en techniques de mode au cégep Marie-Victorin, qui a développé, comme cégep offrant cela, déjà des collaborations tout à fait spéciales, par exemple dans le domaine de la fourrure, avec des pays nordiques, où les étudiants de Marie-Victorin peuvent aller suivre des stages au niveau de la technique de fourrure, et tout ça.

Et il y a aussi beaucoup d'entreprises qui étaient très intéressées à collaborer avec Marie-Victorin au niveau, par exemple, de l'essai, de tests de nouvelles matières. Parce qu'au Canada et au Québec, malgré l'image qu'on peut avoir, le secteur du vêtement demeure un secteur, je dirais, qui est en... qui a su tirer son épingle du jeu, en travaillant vraiment au niveau de la valeur ajoutée. Et parfois ça veut dire développer des spécialités, mais des fois ça a voulu dire carrément proposer de travailler avec des nouvelles matières, qu'on ne retrouve pas dans les fameux pays émergents, où on peut produire certains vêtements, mais... Et donc il y a plusieurs compagnies intéressées à travailler au niveau, justement, de la notion de la recherche, au niveau de la conception de nouveaux produits, avec des nouvelles matières, au niveau d'avoir un appui pour implanter, hein, les technologies reliées au traitement ou au travail de nouvelles matières. Donc, c'était... ça a fait partie des projets octroyés, et, moi, un projet dont j'étais très fière de voir que tout le travail d'investissement du cégep Marie-Victorin depuis au moins 20 ans lui donnait maintenant ce... lui permettait d'obtenir finalement ce statut de créer un centre de transfert technologique dans le domaine de la mode.

Donc, je pense, on peut se le dire, là, le député d'Orford, je sais, il est d'accord avec moi, mais, en terminant, je pense qu'on voit toutes les retombées franchement bénéfiques pour les régions, pour les PME des régions, pour les étudiants, pour, également, je dirais, l'accomplissement, également, des professeurs concernés qui travaillent dans ces CCTT. Il y a là des professeurs, je dirais, émérites, qui connaissent un vrai sentiment d'accomplissement professionnel complet, en étant et des professeurs et des chercheurs en recherche appliquée. Donc, je pense qu'on rejoint plusieurs des objectifs qu'on poursuit, avec l'annonce de ces nouveaux CCTT.

**(19 h 50)**

Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie, Mme la ministre. Ceci termine le premier échange, ce soir, avec la partie ministérielle. Nous allons poursuivre. Et je vais céder la parole à la porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enseignement supérieur, prêts et bourses, Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Rebonjour, M. le Président. Donc, on a encore un petit moment pour aborder cette étude de crédits, qui, je le rappelle, est une occasion de comprendre les orientations du gouvernement, et les points de vue, et les perspectives. J'aurais d'autres questions concernant, entre autres, l'aide financière aux études, mais je vais attendre de voir s'il me reste du temps, parce que je veux aborder aussi d'autres sujets qui sont en lien avec les perspectives des universités mais de façon assez large. Et je pense à un dossier qui a été discuté l'été dernier.

Je rappelle, pour qu'on sache de quoi on parle, vous étiez là, M. le Président, on a eu pendant deux semaines les universités, qui sont venues à tour de rôle, dans un exercice de reddition de comptes, nous faire part, donc, de leur utilisation de l'argent qu'on leur confie mais aussi de leurs perspectives et de leurs problèmes. Il y a... Une des questions qui a été abordée là et qui l'a été aussi dans les années antérieures, c'est ce qu'on appelle la délocalisation des universités, ce que certains appellent, avec un mot peut-être qui a l'air plus positif, redéploiement. Je pense que c'est le mot que j'ai retenu l'été dernier, «redéploiement».

Il y a eu à ce sujet, donc, déjà un certain nombre de démarches qui ont été faites. La ministre qui précédait la ministre actuelle avait demandé à la CREPUQ de se pencher sur la question, avait indiqué aussi qu'il fallait qu'un certain nombre de principes guident la délocalisation, disait entre autres: Il faut s'assurer que ça correspond à des besoins des milieux, qu'il n'y ait pas de compétition entre les universités, qu'elles soient complémentaires, etc. Et on sait par ailleurs que, même si ça ne touche pas un nombre impressionnant d'étudiants -- ça touche à peu près 5 % des étudiants à temps plein qui sont, donc, hors campus -- il reste que c'est une préoccupation. Et, pour avoir été hier dans le cadre d'une activité sur le campus de l'Université de Sherbrooke à Longueuil, je sais que ces lieux-là, que ce soit à Longueuil, à Laval, que ce soit dans les Laurentides... enfin, il y a un développement des universités hors campus principal.

J'aimerais savoir où on en est, où on en est dans l'évaluation de l'impact que cela a et où on en est aussi quant aux balises que le ministère voudrait éventuellement donner à ce phénomène qui prend de l'ampleur. Je ne le dis pas d'une façon forcément négative, parce que je pense que d'avoir des clientèles qui voient se rapprocher des services universitaires, ce n'est pas forcément mauvais, mais il reste que, certains étant critiques par rapport à cela, je me sens quand même dans l'obligation de poser la question et de faire le point sur ce qu'on appelle -- je vais employer encore le terme plus commun -- la délocalisation des universités.

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme la ministre.

Mme Beauchamp: M. le Président, peut-être vous indiquer que le ministère de l'Éducation -- puis on va sûrement me remettre quelque chose, là, sous peu -- a par deux fois établi des règles où dorénavant les universités doivent venir chercher l'autorisation du ministère de l'Éducation avant de pouvoir procéder à des projets d'investissement de ce type-là.

Donc, la première est: depuis 2009, pour tout montant de 1 million de dollars et plus, l'université qui a un projet -- je ne sais pas si j'ai la bonne formulation en disant «un projet immobilier» -- mais qui un projet d'investissement de plus de 1 million de dollars doit venir chercher, obtenir, je dirais, l'autorisation du ministère de l'Éducation avant de procéder à des projets, donc, d'investissement à l'extérieur... sur son campus ou à l'extérieur de son campus, bien entendu. Auparavant, le montant était un peu plus élevé. Auparavant, il était de... Avant d'être 1 million, c'était de... Je l'ai lu encore hier. Donc, je crois que c'était de... Enfin, auparavant, il y avait un montant plus élevé. Depuis 2009, c'est maintenant établi à 1 million de dollars, où l'université doit venir chercher son autorisation.

À ce moment-là, le ministère procède à des évaluations, comme elle l'a mentionné, au niveau des analyses au niveau de la disponibilité, je dirais, d'espace, donc de pieds carrés, je vais dire ça comme ça, par rapport à la fonction qu'on identifie pour le campus, les notions de besoins, les notions, également, si l'université a le bon montage financier pour être capable de réaliser son projet. Ces dimensions-là sont prises en compte avant que le ministère donne son autorisation pour qu'il y ait des projets d'investissement. Donc...

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Oui, bien, en fait, je veux juste bien préciser ce dont je parle. Ce dont la ministre me parle, ça fait référence à une loi qui a été passée après le désastre de l'îlot Voyageur et qui nécessitait une autorisation pour faire, donc, un développement immobilier.

Ce dont je parle, je vais le reprendre peut-être en donnant bien les exemples. Actuellement, l'Université de Montréal a des campus régionaux à Terrebonne, Laval, Longueuil, Québec. L'UQAM a quatre centres à différents endroits. L'Université de Sherbrooke a un campus à Longueuil. L'Université du Québec en Outaouais est en train de construire un campus à Saint-Jérôme, etc., là.

Donc, les universités ont, ces dernières années, répondu à des besoins de clientèle. Au départ, ils se déplaçaient pour donner des cours du soir à des clientèles étudiantes. Et puis, petit à petit, ils se sont mis à construire des édifices. L'Université de Sherbrooke à Longueuil en est un bon exemple. Et ce que fait actuellement l'Université du Québec en Outaouais, un campus à Saint-Jérôme, ça, ça a été autorisé sous la ministre précédente, la députée de Fabre, et dans la foulée, donc, d'une expansion. Ce n'est pas la construction d'un édifice sur son campus, c'est le... Et le problème n'est pas l'autorisation ou non du montant d'argent, c'est que, derrière ça, il y a des universités qui ont critiqué le fait qu'on aille se concurrencer, sur un même territoire, des clientèles. Et ça a été, bon, assez dans l'actualité pour que, petit à petit, on en vienne à dire: Il faudrait que ce soit balisé.

Et la CREPUQ, donc, devait normalement... Au début du mois de juin, normalement, un comité du ministère et de la CREPUQ devait remettre des recommandations là-dessus. Ça, c'est lors de l'étude des crédits l'an dernier. Le problème, il date de... ou, le problème... la problématique date de plus longtemps, mais on évoquait un comité de travail CREPUQ-ministère devant remettre des recommandations. Et c'est un phénomène qui prend de l'ampleur. Puis je ne dis pas que je le critique, mais c'est différent, par exemple, d'aller sur place donner un cours en louant une salle que de se construire. Là, ce qu'on fait, ces années-ci, on se construit des campus à l'extérieur.

Par exemple, l'Université du Québec à Rimouski, c'est reconnu, a maintenant plus d'étudiants à Lévis qu'elle n'en a à Rimouski. Plus de la moitié de leur clientèle est en dehors de leur campus. Il y a des raisons à ça, mais il reste que ça pose quand même certaines questions, et je voulais savoir si la ministre savait où on en était et vers quoi on s'en allait, dans les prochains mois ou les prochaines années, par rapport à ce dossier-là.

Le Président (M. Marsan): Madame...

Mme Malavoy: ...pour éviter un développement anarchique, pour éviter donc un développement qui va dans tous les sens et qui ne soit pas balisé.

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme la ministre.

**(20 heures)**

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Je voulais juste dire que, je pense, j'avais bien compris la question de la députée. Puis il y avait quand même un lien avec ma réponse dans le sens suivant: Elle reconnaît elle-même que ça prend très souvent la forme d'investissements dans des projets immobiliers, que ce soit sur un campus, mais aussi, bien sûr, à l'extérieur d'un campus. Et je voulais quand même dire que, face à ce qu'elle appelait... en tout cas, d'un point de vue de la perception, pourrait ressembler à un développement... je ne sais plus quel terme vous avez utilisé, je ne veux pas vous mettre de...

Une voix: ...

Mme Beauchamp: Anarchique? Échevelé? En tout cas, disons...

Mme Malavoy: Oui, anarchique.

Mme Beauchamp: Anarchique. Je voulais quand même indiquer que la situation avait changé entre il y a quelques années... puis que, s'il y a un projet de construction, peu importe où est-ce qu'il est, l'université doit venir chercher une autorisation du côté du ministère, qui peut à tout le moins poser des questions sur la pertinence du projet, son besoin, sa nécessité, le mode de financement et peut dire non. Je prends juste le temps de dire: Ça veut dire qu'on peut dire non à un projet.

Maintenant, je suis consciente du portrait que dessine la députée de Taillon, à un point tel qu'elle se souviendra qu'à la rencontre du 6 décembre dernier j'ai voulu... Parmi les questions posées, lors de la rencontre sur l'avenir et la performance des universités, l'une des dernières questions était sur: Est-ce qu'on doit mettre en place ou pas une forme de coordination du côté du monde universitaire? Je veux juste lui rappeler la question, là. C'était: Que devrait-on mettre en place pour assurer la coordination des efforts de tous les partenaires afin que les universités québécoises répondent aux standards internationaux? Derrière cette question, il y avait notamment le fait que certains intervenants -- je parle... je pense à certaines associations étudiantes et d'autres intervenants -- qui donnent l'exemple du développement de campus... enfin, le développement de pôles universitaires en dehors des campus principaux comme étant un élément sur lequel ils disent: Bien, il faudrait qu'on trouve la bonne instance pour être capables de parler d'une coordination des efforts universitaires dans ce domaine-là.

Moi, c'est ce que j'ai voulu... notamment, là, c'est ce que j'ai voulu nommer. On retrouvera, dans le document du 6 décembre donc, cette notion. Il y a même des comparaisons avec des structures mises en place en Ontario ou ailleurs sur des commissions d'évaluation de la performance des universités ou des notions de coordination du monde universitaire. Et, moi, je pense encore que c'est un sujet qui mérite d'être creusé. La rencontre du 6 décembre n'a pas permis d'en arriver à une conclusion. Je dirais même, je le dis en toute transparence, que ma lecture de la situation, c'est que les recteurs d'université qui étaient présents autour de la table n'ont pas montré un grand appétit pour ça. Je le conçois, mais ça n'arrête pas ma réflexion au niveau de la nécessité d'établir ce palier de coordination au niveau du monde universitaire. Je dis cela parce qu'à l'évidence même on assiste à un phénomène où certains vont déplorer même un phénomène de compétition, que je pourrais qualifier à mon tour, pour utiliser des mots qui sont forts, là, mais, si on a utilisé «anarchique», je vais dire «compétition malsaine» entre des universités sur un territoire donné. Et la question se pose: Est-ce que c'est la CREPUQ, donc les recteurs entre eux qui peuvent trancher ces questions, ou si on a besoin de mettre en place une structure de coordination du milieu universitaire qui nous aiderait à se donner le bon portrait, la bonne analyse pour répondre efficacement à ces questions?

Donc, je tiens aussi à dire, et j'en suis consciente, là, que, dans des régions du Québec, on accueille l'établissement de cette offre de services universitaires très positivement. Ma région natale, Valleyfield, a maintenant une offre de services universitaires, puis vous connaissez comme moi... je suis sûre que la députée connaît comme moi les projets de pôles régionaux universitaires, là, qui... Que ce soit dans la région des Laurentides, dans la région d'Arthabaska-Bois-Francs, il y en a plusieurs. Et, dans une volonté d'assurer une meilleure coordination, il ne faudrait pas entendre par là qu'on voudrait tuer dans l'oeuf des volontés régionales exprimées où on dit: Bien, est-ce qu'on peut rapprocher une offre de formation de ma population? Prenons tout le défi du Plan Nord, de la Côte-Nord. Et je veux juste être bien comprise: je pense qu'il faudrait assurer une meilleure coordination, mais ça ne veut pas dire que c'est au prix de sacrifier, je vais dire ça comme ça, des volontés dans des régions données d'essayer d'avoir cette offre de formation universitaire. Et je ne voudrais pas non plus, je dirais, un peu tuer ces élans-là. Je pense qu'il faut le permettre là où c'est approprié.

Mais, est-ce qu'on pourrait avoir une coordination améliorée de cela? Je trouve le sujet extrêmement intéressant. J'ai voulu nommer ça, pas juste pour cet enjeu-là, mais j'ai voulu nommer la nécessité ou en tout cas la question à poser sur un effort de coordination au niveau du monde universitaire. J'ai compris que les membres actuels de la CREPUQ n'avaient pas un superappétit, mais ça ne me ralentit pas dans ma réflexion. Je pense que la question se pose.

Je veux juste, en terminant, confirmer à la députée qu'il y a eu un comité de travail -- auquel elle faisait référence, là -- et on m'indique que le rapport a été déposé il y a peu, il y a quelques mois maintenant, et que j'aurai des recommandations sous peu issues de ce rapport d'un groupe de travail entre le ministère de l'Éducation et la CREPUQ, qui a été mis sur pied, donc, à l'automne 2009. Et le rapport a été déposé peu de temps avant Noël.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Oui, bien, ce sera intéressant d'en avoir les conclusions, parce que, moi, je suis tout à fait d'accord que l'on rapproche des services en enseignement supérieur des populations. Mais on est passés d'une étape où, au Québec, on offrait des services -- les pôles régionaux, d'ailleurs, sont ça, on offre des services -- à une étape où carrément des universités se construisent des campus hors campus. Et c'est pour ça que ça vaut la peine de baliser ce développement. Je ne dis pas qu'il faut y mettre fin, mais je pense qu'il faut le baliser et s'assurer que les différents éléments soient complémentaires.

Je vais changer de sujet, parce que je sais qu'on ne passera pas toute la nuit ensemble malgré tout. Plus tôt dans la journée, je ne sais plus à quelle occasion, je ne sais plus à quelle occasion...

Une voix: ...

Mme Malavoy: Pardon?

Mme Beauchamp: Il y a des gens déçus.

Mme Malavoy: Il y a des gens déçus, oui. Oh, ça nous arrive à l'école... à l'occasion de passer du temps ici.

Mme Beauchamp: À l'école.

Mme Malavoy: À l'occasion... J'ai souvenir d'une nuit sur les écoles passerelles, M. le Président. Je n'étais pas loin d'ici et j'ai bien passé la nuit sur les banquettes.

Mais je voulais aborder un autre sujet. La ministre, tout à l'heure, a parlé des contrats... des ententes de partenariat avec les universités et donc d'une obligation de performance avec un certain nombre de critères qui seraient regardés de façon précise pour qu'elles aient leur part de financement liée à l'excellence. Là-dedans, il y a un pourcentage, si je me souviens bien, qui pouvait aller jusqu'à 15 %, je crois, concernant la gestion, hein, concernant la rigueur de la gestion des universités. Et ça me permet d'introduire qu'honnêtement cette année, là, la ministre le sait, j'ai eu l'occasion de poser des questions à quelques reprises en Chambre, on a eu droit à toutes sortes de choses. Et je n'en fais pas une attaque personnelle à qui que ce soit, là, mais, si on met bout à bout les primes de départ dans des contextes quand même très, très critiques, si on ajoute à ça les récents développements à l'Université Concordia avec le fameux achat de ce condo pour le recteur par intérim, on se rend compte qu'il y a, dans la gestion universitaire, des excroissances, là, qui posent des questions.

Ce que j'aimerais savoir de la ministre, puis, si on n'a pas le temps d'épuiser le sujet tout de suite, on y reviendra tout à l'heure, mais est-ce que, dans sa façon de concevoir, donc, les plans de rigueur des universités, elle pense s'attaquer à ces choses-là? Tout en sachant que les universités ont leur propre conseil d'administration, mais ils sont financés en très grande partie par l'État québécois. Donc, est-ce que la ministre compte s'attaquer à ces éléments qui ont des allures parfois un peu scandaleuses ou, tout au moins, très questionnables? Est-ce que c'est des éléments qui devraient être revus dans une entente entre les universités et le ministère?

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

**(20 h 10)**

Mme Beauchamp: En fait, je pense que l'esprit même des ententes de partenariat avec les indicateurs précis et les cibles d'investissement qui y sont associées vont dans l'esprit de vouloir resserrer les choses autour de la gestion des universités. Et ça me permet de dire les éléments suivants. Il y a des... Je prends... Je vais y aller, par exemple, par... en donnant des exemples. La question de certaines primes accordées ou certains bonis accordés, on le sait, là, qu'avec l'adoption de la loi n° 100 c'est une situation qui ne peut plus se reproduire. Mais notons que la loi n° 100 va jusqu'en 2013... elle était sur deux ans, si je ne me trompe pas, pour les bonis, ou jusqu'en 2013-2014, parce que je le dis de mémoire, c'est ça, 2013-2014. Les ententes de partenariat qu'on va signer avec le monde universitaire vont commencer en 2012. Et, en 2012 donc, prenons cet exemple-là, dans les indicateurs de performance associés au monde universitaire, on a carrément la notion de... je vais appeler ça comme ça, mais du contrôle de la croissance de la rémunération en respect des politiques salariales du gouvernement. Donc, ça, c'est un exemple donné. D'autres situations problématiques au niveau des investissements immobiliers, bien on vient de décrire le fait qu'il y a maintenant une règle qui fait en sorte qu'une université doit venir voir le ministère de l'Éducation avant de procéder à des investissements au-delà de 1 million de dollars.

Donc, ça me permet de dire, là, ça me permet d'affirmer, quand la députée me demande: Est-ce que vous avez l'intention... Parce que vous savez comme moi, là, la députée sait comme moi que, souvent, on a comme réponse, de la part du monde universitaire, que c'est lié à leur autonomie de gestion, à leur autonomie, mais je pense très nettement, je le disais un peu plus tôt, qu'il n'y a pas d'attaque à l'autonomie des universités lorsqu'on leur dit: Vous aurez des argents supplémentaires, mais voici où vous devez les mettre, puis il y a des notions de pénalités s'il y a un écart trop important avec ces indicateurs. Je pense que ça va vraiment dans l'esprit demandé de s'assurer, au nom des contribuables québécois, où l'argent est mis, où l'argent est dépensé.

Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie. Ceci termine notre période d'échange avec l'opposition officielle. Nous revenons avec le parti ministériel, et je vais céder la parole à M. le député d'Orford.

M. Reid: Merci, M. le Président. Je vais continuer un petit peu dans la ligne de tantôt, mais, cette fois-ci, avec un élément qui implique plus les universités que les cégeps. Juste avant, j'aimerais peut-être indiquer une curiosité: la délocalisation des universités dont faisait part la collègue de Taillon, bien, puisqu'elle n'écoute pas, je...

Bien, je voulais souligner tantôt une curiosité par rapport à ce que vous disiez, Mme la collègue de Taillon, la délocalisation des universités. Si on recule 22 ans en arrière, Mme la députée de Taillon était doyenne à l'Université de Sherbrooke, j'étais, pour ma part, directeur de programme, et, à ce moment-là, il y a eu le premier programme délocalisé, entre guillemets, qui a été fait à Longueuil, et en particulier avec la bénédiction de la députée de Taillon de l'époque, qui est maintenant la chef du parti. Alors, autrement dit, on est peut-être un petit peu coupables d'avoir démarré cet élément-là, et c'est intéressant maintenant de penser à peut-être baliser ce type de développement qui, par ailleurs, avait des bonnes raisons d'exister.

La question que je voudrais poser, c'est concernant un projet récent qui touche effectivement, encore une fois, le transfert technologique, mais qui implique beaucoup plus les universités et qui implique aussi d'ailleurs la commission scolaire de Montréal. Il s'agit ici du lancement du Laboratoire d'enseignement des systèmes intégrés en aérospatiale du Québec, le LESIAQ. Alors, récemment, ça a été annoncé d'ailleurs par Mme la ministre en compagnie du premier ministre, si ma mémoire est bonne, et ce projet a été inauguré. Et, en fait, c'est intéressant parce qu'on implique là-dedans beaucoup d'universités. Et ce que, moi, j'en ai compris, mais ça serait peut-être intéressant si elle pouvait y ajouter quelque chose, c'est qu'il y a là une réponse à un besoin systématique très important au Québec de formation d'ingénieurs. On forme beaucoup d'ingénieurs, mais l'aérospatiale a un besoin extrêmement important d'ingénieurs. C'est une industrie qui est, là, une de nos industries de force, au Québec. Et ma compréhension, c'est qu'on essaie de répondre à ce besoin-là, parce que, dans chaque université, on ne peut pas avoir un avion à monter, à démonter, dans lequel on peut jouer. Au prix que ça coûte, là, c'est... On peut peut-être le faire dans des centres de transfert pour le secondaire, les centres de formation professionnelle, j'ai vu des beaux camions Volvo, des choses comme ça, mais, bon, ça ne coûte pas cher à côté d'un Challenger, ou d'un avion comme ça, ou d'un hélicoptère. Et donc, là, on a trouvé une façon de pouvoir permettre d'augmenter de façon significative la quantité d'ingénieurs de haute qualité qui seraient disponibles. Parce que nos jeunes Québécois, nos jeunes Québécoises sont très intelligents, c'est des bons ingénieurs, des bonnes ingénieures, et ma compréhension, c'est que, là, on a trouvé une façon de pouvoir donner un coup d'adrénaline à cette formation-là pour remplir nos besoins et permettre à nos entreprises de croître, permettre à nos entreprises dans l'aérospatiale qui sont nombreuses, et là, on parle vraiment de grappe industrielle de grande envergure, on ne parle pas de...

Tout à l'heure, on parlait de grappe industrielle plutôt régions... pour une grande part en tout cas, régions et PME, mais on parle d'une grappe industrielle d'envergure qui est une des majeures au Québec. Et là-dessus il me semble que c'est un élément fort de création, enfin de réponse à ce besoin-là.

Est-ce qu'on pourrait avoir un peu de détails sur ce que c'est effectivement, ce que ça donne, et aussi, sur le plan des crédits, qu'est-ce que ça implique? Je voudrais juste souligner l'importance d'avoir des centres comme ça, qui sont en lien avec les entreprises. Parce que, dans mon coin, à l'Université de Sherbrooke, on a créé, il y a quelques années, avec BRP, un centre de recherche université-entreprise, et on a eu récemment une nouvelle qui est parue là. Ce centre-là a eu des contrats pour préparer un «rover» qui va aller sur Mars d'ici quelques années. Donc, on a vraiment des grappes industrielles qui sont de niveau international, c'est ça qui est extraordinaire. Et mon impression, c'est que c'est là-dedans qu'on est allés avec le LESIAQ. Et j'aimerais avoir peut-être quelques détails sur les éléments financiers peut-être qui se rapportent à ce type d'aide ou de ce type de centre de transfert technologique et de formation.

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Puis là je reconnais bien, encore une fois, le député d'Orford avec ses intérêts autour du monde universitaire, la collaboration entre le monde universitaire et les autres acteurs en enseignement, et en plus, bien sûr, son intérêt au niveau de la formation, au niveau génie. Il ne bat pas le député de Charlesbourg pour son intérêt au niveau de la formation en génie, mais il s'en approche, je tiens juste à le souligner.

Le député d'Orford a bien campé l'enjeu qui, à travers l'exemple qu'on peut donner au niveau de l'aérospatiale, là, est un enjeu qui va se représenter à nous dans plusieurs autres secteurs de notre monde économique, de notre monde industriel et manufacturier. Parce que l'annonce qui a été faite est une annonce, moi, que j'aime beaucoup. J'étais très fière d'ailleurs, je tiens à le dire, de voir que les gens du ministère de l'Éducation avaient trouvé la bonne façon d'appuyer un projet qui est un projet vraiment innovateur, là. Autrement dit, je suis en train de vous dire qu'on a trouvé la façon d'appuyer un projet qui ne rentrait pas dans une case, mais, il ne rentre pas dans une case, c'est la beauté du projet. C'est parce qu'il ne rentre pas dans une case qu'il est d'autant plus intéressant. Et le ministère a fait son travail pour permettre la réalisation de ce projet-là avec un appui financier.

Puis pourquoi c'est important pour moi de contribuer à raconter l'histoire? C'est parce que, lorsqu'on rappelle, là, puis j'ai déjà dit publiquement que ça donnait le vertige, mais lorsqu'on rappelle qu'il y a 740 000 emplois à combler au Québec d'ici trois ans, il y a de très nombreux emplois dans différents secteurs où vraiment les gens du secteur économique -- ils nous l'ont raconté à Lévis en janvier 2010 et ils avaient raison -- vraiment disent: Écoutez, on doit être capables, au Québec, de fournir cette main-d'oeuvre de qualité formée, parce que j'en ai besoin.

Et vous avez raison de dire que, dans le secteur de l'aérospatiale, honnêtement, c'est un fleuron de l'économie québécoise. Et, moi, j'ai pu rencontrer le président de Bombardier aérospatiale, j'ai pu rencontrer également les gens de Bell Helicopter, et ils nous envoient des signaux positifs, mais, quand même, qui peuvent se transformer vite en signaux d'alarme, là, et en disant: On est prêts à travailler avec vous pour qu'on ait une main-d'oeuvre disponible, bien formée. Et le projet, là, LESIAQ, là, qui a été mis en place, c'est exactement pour répondre à ça, pour être capables de répondre à ça.

**(20 h 20)**

C'est quoi, l'histoire? C'est vraiment une belle histoire. C'est cinq universités, Polytechnique de Montréal, École -- l'ETS -- de technologie supérieure, Condordia, McGill, Université de Montréal, j'en oubliais une, pardonnez-moi, l'Université Laval, donc c'est plutôt six universités qui forment un consortium, qui se sont regroupées pour créer le LESIAQ. Et qu'est-ce que c'est? C'est le fait que deux entreprises privées, donc Bombardier aérospatiale et Bell Helicopter, ont accepté de donner, c'est littéralement de donner, des prototypes, des plateformes de type prototype, là, des plateformes d'essai en aérospatiale qui seront logées, et c'est là la beauté de l'histoire, qui seront logées dans les locaux de l'École des métiers de l'aérospatiale relevant d'une commission scolaire, de la commission scolaire de Montréal, et qui fait en sorte que les étudiants de niveau secondaire qui font un diplôme d'études professionnelles vont pouvoir voir à l'oeuvre des gens qui sont en formation en génie sur lesdites plateformes, vont pouvoir le voir parce que là c'est carrément les plateformes, telles qu'on les retrouve en entreprise, vraiment telles qu'on les retrouve en entreprise. Et il y a aussi la collaboration avec le centre collégial au niveau de l'aérospatiale, qui est sur la Rive-Sud, qui pourra aussi bénéficier de ces plateformes d'essai.

La contribution du gouvernement, elle est importante. Premièrement, la contribution du secteur privé est importante. La plateforme donnée par Bombardier, c'est une valeur de 20 millions de dollars. La plateforme donnée par Bell Helicopter, c'est une valeur de 250 000 $. Et la contribution du gouvernement, pour permettre, là, le fait que ces plateformes vont se retrouver dans un lieu d'enseignement de type secondaire, collégial et universitaire, c'est de 5,5 millions de dollars. Pourquoi? Bon, parce qu'on fournit l'argent nécessaire au fonctionnement sur un certain nombre d'années. Mais je vais vous dire bien honnêtement qu'il y a un peu plus de la moitié de ce montant qui est consacré au fait qu'il faut démonter les plateformes, il faut remonter les plateformes, puis il faut assurer la formation des professeurs et des intervenants qui auront à utiliser ces plateformes dans l'enseignement.

Je dis ça, parce que ce n'est pas banal, là. Dans le monde de l'aéronautique, ces plateformes-là, elle ne sont pas faites, là -- je le dis en riant, là, pour être un peu réductrice -- mais ce n'est pas des meubles IKEA, là. Ce n'est pas fait pour être monté puis démonté. Habituellement, là, c'est monté. Puis, quand c'est fini, quand c'est dépassé d'un point de vue technologique, c'est remisé, démantelé et... Mais là j'ai le défi de démonter et de remonter des plateformes technologiques qui n'étaient pas conçues pour être remontées. Et on a été, je dirais, clairvoyants et raisonnables en disant: il faut mettre les sommes nécessaires pour assurer le succès de ça, et le transfert, donc, de ces plateformes technologiques.

Pourquoi aussi c'est un beau projet? C'est parce que, pour ces entreprises-là, ce qu'elles nous disent, c'est, même si elles sont satisfaites... et elles le disent, elles sont satisfaites de la formation, par exemple, au niveau du génie de nos universités québécoises, mais elles admettent que, lorsqu'un finissant arrive dans leurs installations, il y a une formation, une mise à jour sur les bonnes plateformes à faire. Et, pour les entreprises qui ont fait ces dons importants, elles y trouvent leur compte. Et c'est parfait, hein? C'est des partenariats gagnant-gagnant, parce qu'elles estiment qu'elles vont réduire leurs coûts de formation de base, je dirais, dans l'entreprise puis qu'elles vont pouvoir récupérer ces coûts, soit pour les réinvestir dans d'autres types de formation encore plus de pointe ou soit carrément pour pouvoir réinvestir en recherche et développement et dans d'autres enjeux de l'entreprise.

Donc, je pense qu'on peut vraiment affirmer et confirmer que c'est un très beau projet qu'on est parvenus à appuyer. Je pense que c'est au bénéfice... Premièrement, c'est au bénéfice des jeunes qui vont en bénéficier, et notamment des jeunes... je dis des jeunes et moins jeunes ingénieurs qui seront en formation dans nos universités, et qu'on doit encourager à aller vers la spécialité de l'aérospatiale, parce que c'est un fleuron effectivement de l'économie québécoise. Il y a des besoins. Il y aura des besoins.

Permettez-moi peut-être même en terminant de vous dire: que cette annonce-là, et les gens de l'industrie le nommait, le concevait, doit même être vue dans un contexte où on a un besoin encore plus important d'attirer des gens dans le métier de l'ingénieur et des procédés dans le domaine de l'aérospatiale; que le Québec, dans sa stratégie québécoise de l'innovation, s'est donné un projet de soutenir le développement d'un avion écologique au Québec. Ce dont on parle, quand on parle du développement d'un avion écologique, c'est carrément des systèmes intégrés en aérospatiale. C'est de ça, dont on parle. C'est de revoir les systèmes intégrés dans les avions. Or, les plateformes qu'on a annoncées, le projet LESIAQ, là, son nom au long, ça veut justement dire les systèmes intégrés en aérospatiale, c'est à ça que c'est dédié.

Donc, les gens reconnaissaient qu'en plus, par rapport au projet de société que nous avons dans tout le domaine des transports écologiques -- on vient de faire des annonces importantes dans le domaine du transport électrique -- mais, dans tout le grand domaine du transport écologique, de notre lutte aux gaz à effet de serre, etc., ça sera très, très, très gagnant de disposer de ce nouveau laboratoire d'enseignement dans les systèmes intégrés en aérospatiale. Ça sera bénéfique à court terme pour les entreprises, pour les étudiants, mais, à moyen terme, ça va aussi nous aider à accomplir notre projet de société, qui est le développement de cet avion écologique, qui n'est pas une utopie. Ce n'est pas une utopie. Et le Québec est l'endroit le mieux placé pour réaliser un tel projet de société que ce projet d'avion écologique.

Le Président (M. Marsan): Merci, Mme la ministre. Nous poursuivons avec la porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enseignement supérieur, de prêts et bourses, Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Merci, M. le Président. Je me permets de faire simplement une petite remarque sur ce dont on vient de parler, parce que, dans le comté de Taillon, il y a le cégep Édouard-Montpetit, dans le comté de ma collègue de Vachon, il y a l'École nationale d'aérotechnique, donc c'est un pôle de développement important aussi, pour la Rive-Sud et pour le Québec tout entier, et donc on mérite bien d'encourager ce développement.

Mais je vous amène, M. le Président, sur un autre sujet, puisque je crois qu'il reste peu de temps. C'est un sujet qui me préoccupe depuis toujours mais m'a préoccupée d'autant plus que c'est revenu à l'avant-scène il y a quelque temps. Ça concerne les politiques linguistiques des universités.

Récemment, donc, on a appris, et ça a comme ravivé cette question-là, que l'Université Laval offrait une quinzaine de cours en administration en anglais. On sait que l'Université de Montréal offre des cours en anglais, on sait que, bien entendu, HEC offre des cours et même des programmes en anglais. Et j'ai posé la question d'ailleurs à la ministre de l'Éducation précédente. Elle sait que c'était pour moi et pour ma formation politique une préoccupation. Et la députée de Fabre, elle disait à l'époque: Bon, ce n'est pas vraiment une menace d'avoir quelques cours en anglais dans une université francophone. Mais en même temps elle disait: Il faut peut-être qu'on donne un petit coup de barre.

Et nous avions remarqué que, dans le projet de loi n° 103, qui est mort au feuilleton, hein -- on a gardé un certain nombre d'éléments mais pas du projet de loi... c'est-à-dire pas cet élément-là du projet de loi n° 103 -- dans le projet de loi n° 103, on demandait aux universités de faire un effort de révision de leur politique linguistique. Et on avait à l'esprit qu'il fallait surtout éviter une pente qui pourrait ne pas avoir l'air dangereuse pour un cours ou deux mais avoir l'air dangereuse peut-être si on regardait ça sur le plus long terme. Et donc on demandait aux universités de faire un examen de conscience, bon.

Le projet de loi n° 103, il est mort au feuilleton et cet aspect-là n'est pas revenu dans le décor. Mais, moi, j'aimerais que la ministre me dise... D'abord, j'aimerais savoir si c'est une préoccupation qu'elle partage, si elle pense d'une manière ou d'une autre revenir à la charge avec soit un projet de loi ou une demande un peu claire pour que les universités réfléchissent à cette question-là, que je trouve préoccupante, moi, pour l'avenir des universités francophones au Québec.

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Bien honnêtement, M. le Président, je pense que je suis plus dans le camp de la ministre précédente que dans le camp de la députée de Taillon. Je pense honnêtement qu'au moment où on se parle je ne crois pas que ça soit un sujet de préoccupation, dans le sens suivant: le projet de loi n° 103, qui, à l'époque, donc prévoyait différents éléments d'intervention au niveau de la langue française, y compris par exemple dans la charte, des politiques linguistiques au niveau du monde municipal et du monde universitaire, c'étaient des articles que, bien sûr, j'ai endossés puisque je suis membre de l'équipe gouvernementale qui l'a proposé et qui l'a inscrit tel quel dans la loi. C'est des articles qui n'ont pas été conservés parce qu'on se souviendra, là, les articles touchant... faisant suite au jugement de la Cour suprême dans le cas des écoles passerelles ont dû être adoptés in extremis, avant la date limite imposée par la Cour suprême, sous forme de bâillon. Et, puisque les articles subséquents à ceux qui concernaient le phénomène des écoles passerelles notamment prenaient assise sur des modifications à la charte des droits, on n'a pas voulu procéder par bâillon à ce moment-là en touchant la charte des droits, ça méritait un autre espace de débat.

**(20 h 30)**

Il n'y a pas de contradiction entre le fait que je juge que la situation n'est pas nécessairement alarmante et le fait d'être en accord avec le fait de demander aux universités d'avoir... d'adopter des politiques linguistiques, dans le sens suivant: pour moi, adopter une politique linguistique n'amènerait pas nécessairement un refus de voir une université francophone pouvoir proposer quelques cours en anglais. Et je ne crois pas que le phénomène est un phénomène exponentiel se développant. Ce qu'on m'indique ici, c'est qu'au niveau des programmes offerts partiellement ou en totalité en anglais dans des universités francophones, il y en a deux, soit un programme E.M.B.A. offert par -- j'en parlais un peu plus tôt -- McGill et HEC Montréal, qui est offert partiellement en anglais, et le programme de l'Université Laval, je ne sais pas si c'est à celui-là qu'elle faisait allusion, mais qui s'appelle Master in Chain Supply Management.

Et donc je termine en disant que je suis favorable au fait qu'on puisse parler d'adoption de politiques linguistiques dans le monde universitaire, ça, ça veut dire assurer l'utilisation du français, sa prédominance, etc., sur les campus, mais ça ne veut pas dire que ça irait, là... la conclusion, serait une... je dirais un empêchement ou une interdiction, pour une université francophone, d'offrir des cours en anglais. Et honnêtement je sais qu'il est tard et je ne veux pas que mon ton semble indûment partisan, mais je reconnais là-dedans, et je respecte ça, là, il y a comme une hypersensibilité des gens du Parti québécois par rapport à ces enjeux-là. On l'a vu avec le débat sur l'obligation d'assujettir les cégeps à la loi n° 101; c'est le même genre de débat. Et, moi, je pense qu'on peut être des farouches partisans de la protection de la langue française sans appliquer des mesures qui sont des mesures radicales à des phénomènes qui restent des phénomènes que je dirais marginaux ou vraiment... où le nombre de ces phénomènes-là se calcule en quelques points de pourcentage, donc...

Prenons l'exemple des cégeps en français. On sait que 95 % des francophones ayant étudié en français continuent dans un cégep en français. On voit bien ici qu'on n'est pas devant la nécessité d'imposer une telle mesure, comme l'a d'ailleurs reconnu le Conseil du statut de la langue française. Mais voilà un peu ma position sur cette question.

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Bien, moi, je voudrais tout de même insister sur le fait que la députée de Fabre reconnaissait, je l'ai dit en introduction, qu'il y avait un autre petit coup de barre à donner, et ce n'est pas pour rien que ça avait été mis dans le projet de loi n° 103.

C'est vrai que je suis d'une formation politique qui a une grande sensibilité à ça, c'est vrai. Mais je dois dire que notre impression, c'est qu'il n'y a pas grand-chose, même si les universités sont sensées avoir des politiques linguistiques, il n'y a pas grand-chose qui balise cela. Quand j'entends, par exemple, le recteur de Laval, pour qui j'ai bien du respect, mais dire: «On est là pour répondre à des besoins, on est là pour répondre à des demandes, si on ne veut pas que les étudiants aillent étudier ailleurs parce qu'on n'a aucune formation en anglais, il faut donc leur offrir des services», moi, je pense qu'on a raison d'avoir une grande sensibilité, que les universités doivent savoir que, quand elles prennent des mesures d'offrir une activité en anglais, elles doivent en mesurer l'impact, et que, là encore, si, de fil en aiguille, on est laxistes et qu'on dit: Répondons aux demandes, sachant aussi qu'on essaie d'attirer des étudiants étrangers -- pourquoi, M. le Président? parce qu'ils rapportent beaucoup plus que des étudiants réguliers -- il y a là quelque chose qui mérite d'être regardé.

Et, moi, je me réjouissais que ce soit dans le projet de loi n° 103, puis je me désole un peu qu'il n'y ait plus de législation qui vienne reprendre cette question-là. Je crois que ça mériterait honnêtement d'être revu, et il ne faudrait pas attendre 10 ans pour se réveiller avec des difficultés. On aura toujours, toujours, au Québec, à prendre des mesures particulières et être extrêmement vigilants, parce que la tendance naturelle, bien sûr, sera, pour des raisons de facilité que je peux comprendre, mais de s'ouvrir à la langue anglaise plus qu'à toute autre langue. Je comprends bien que je ne questionne pas des cours dans d'autres langues, mais l'anglais, c'est autre chose, des parties de programmes en anglais, c'est autre chose. Et, moi, j'aimerais que les universités aient des comptes à rendre là-dessus régulièrement.

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre, en terminant.

Mme Beauchamp: Bien, écoutez, je pense que c'est la... je pourrais dire que c'est la teneur ou l'intensité qu'on y met qui définit peut-être plus la différence entre la députée de Taillon et notre formation politique puisque, comme je vous l'indiquais... Et on est d'accord là-dessus, là. Ce n'est pas pour rien que, dans le projet de loi n° 103, on avait inscrit nommément l'obligation de l'adoption de politiques linguistiques dans les universités. Donc, il y a un partage de vues, là, on a un point de vue commun sur cela. À ce moment-là, comme... J'ai expliqué pourquoi le projet de loi n'a pas été adopté tel que déposé, je pense qu'on nous en aurait fait le très lourd reproche. Mais je prends bonne note de l'appui et de l'accord de la députée de Taillon avec cet article de la loi qui avait été déposé devant... à l'Assemblée nationale du Québec. J'en prends bonne note tout en précisant ce que je voulais préciser un peu plus tôt, c'est-à-dire que, pour moi, l'adoption de politiques linguistiques dans les universités, l'obligation d'adopter des politiques linguistiques n'est pas synonyme d'interdiction d'offrir certains cours en anglais sur des campus d'universités francophones. Je voulais juste préciser cela. Mais, bien sûr, ça peut être une forme de... il peut y avoir des balises, une forme d'encadrement, comme le proposait l'adoption de ces politiques linguistiques.

Parce que là où, moi, j'ai une sensibilité qui est différente de celle de la députée de Taillon, c'est que je ne suis pas à l'aise avec le fait que l'on présente toujours l'anglais comme une menace. Dans le sens...

Une voix: ...

Mme Beauchamp: Bien, parce que vous... Tantôt, j'ai cru comprendre, je ne veux pas défaire vos paroles, mais c'est comme si vous aviez dit: Bien, d'autres langues... Comme, si c'était l'espagnol, il n'y a pas de problème, mais l'anglais, ça, non. Et, moi, honnêtement, je pense et je suis d'accord à dire que le gouvernement québécois, peu importe la formation politique qui le dirige, aura toujours une responsabilité historique et incontournable d'assurer la promotion, la prospérité, l'utilisation de la langue française. Mais ça ne va pas jusqu'à ressentir, là, toujours, une notion de menace si on parle d'un fait anglais qui demeure toujours assez marginal dans des situations comme celle qui est décrite en ce moment dans les universités. C'est pour ça que je disais que, sur la finalité, je pense qu'on est à la même place; c'est l'intensité qu'on y met qui est un peu, je pense, différente entre les deux formations politiques.

Le Président (M. Marsan): Merci, Mme la ministre. Nous allons poursuivre avec le parti ministériel. Et je vais céder la parole au député de Charlesbourg. M. le député.

M. Pigeon: Merci, M. le Président. Avant de poser, donc, une dernière question, j'aimerais remercier la ministre de ses remarques et de sa réflexion sur tout le sujet de la coordination des activités des universités. Pour employer une expression familière, j'ai déjà joué dans ce film et je pense que l'exemple qui a été donné par le collègue d'Orford concernant le LESIAQ, là, montre que, lorsque les conditions sont réunies, quand c'est bien fait, les universités travaillent ensemble, et c'est extrêmement profitable. Et donc c'est mon souhait et je pense que c'est le souhait aussi des recteurs de faire en sorte qu'il y ait une façon de gérer la coordination pour que tout le monde en profite et que les université soient incitées à collaborer entre elles, donc, comme elles le font si bien, là, dans le cas du LESIAQ.

Maintenant, ma question va porter, M. le Président, sur, encore une fois, la question des infrastructures. J'ai eu le plaisir d'assister à l'inauguration, là, d'un certain projet d'infrastructure à l'UQAM au mois de janvier et je vous indique de quoi il s'agit, parce que ça va montrer un peu le sens de ma question.

Alors, il y avait quatre items. Le premier, c'était la mise à niveau de l'infrastructure supportant les serveurs de recherche du Pavillon Président-Kennedy, vous allez voir que c'est relativement terre à terre; ensuite, le réaménagement du département de kinanthropologie, au complexe des sciences Pierre-Dansereau; le remplacement des transformateurs -- eh oui, de temps en temps, il faut remplacer des transformateurs, je crois même qu'il y avait des BPC, mais bon -- le remplacement des transformateurs des Pavillons Hubert-Aquin et Judith-Jasmin. Et, finalement, l'ajout de salles de cours au Pavillon Président-Kennedy. Donc, ça donne une bonne idée des besoins des universités.

Et, le gouvernement actuel, je pense, craint moins la collaboration avec le gouvernement fédéral que le gouvernement précédent. Et donc il y a eu toutes sortes d'ententes qui ont été faites avec le gouvernement du Canada, entre autres dans le Programme d'infrastructure du savoir. Et donc, comme je viens de l'illustrer, là, ça peut permettre de faire avancer les choses et d'aider les universités dans beaucoup de domaines. Mais j'aimerais, là, Mme la ministre, que vous donniez un petit peu d'information aux gens qui nous regardent, entre autres. Quels sont les projets, là, du Programme d'infrastructure du savoir financé, donc, en partie par le ministère et financé par le fédéral, qui ont été inaugurés récemment ou au cours de la dernière année?

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

**(20 h 40)**

Mme Beauchamp: Oui, merci beaucoup, M. le Président. Effectivement, on doit se dire que ces projets d'infrastructure, et notamment le Programme d'infrastructure du savoir, ont pris place, il faut se rappeler le contexte, là, dans un contexte où, à l'échelle de la planète, puis ça a été vrai notamment au Canada et au Québec, suite à la grande... suite à la crise économique et financière de la fin de l'année 2008, les gouvernements se sont résolus à participer activement à des projets d'infrastructure, notamment parce qu'il fallait stimuler l'économie. Et je voulais juste refaire ce grand contexte en insistant pour dire jusqu'à quel point on ne s'est pas trompé, puisque l'économie québécoise a été particulièrement robuste. Puis là, il faut se le répéter, puis il faut s'en féliciter puis féliciter tous les acteurs du développement économique au Québec, les travailleurs québécois, les entreprises québécoises, puis, mon Dieu, nommer aussi le rôle du gouvernement là-dedans, l'économie québécoise est l'une de celles qui s'en est le mieux sorti à travers le monde.

Je voulais mettre cette mise en contexte parce que je vais vous parler d'infrastructures. Et j'ai écouté, hier, l'étude des crédits, l'échange entre la chef de l'opposition et le premier ministre du Québec, et j'ai réalisé que la chef de l'opposition reprochait au gouvernement du Québec son niveau d'endettement. Mais je me disais: Mon Dieu, il faut juste réaliser qu'à l'échelle du monde les gouvernements, et heureusement on n'a pas eu à faire ça au Canada puis au Québec de la même façon qu'ailleurs... Il y a des gouvernements, dont le gouvernement américain, d'autres gouvernements européens, qui ont dû sortir des argents et augmenter leur dette en rapport à leur PIB de façon bien plus importante que le Québec, puis notamment parce que, mon Dieu, il fallait réagir dans un contexte de crise économique. Donc, cette augmentation de la dette, là, ce n'est pas juste au Québec qu'on a vécu ça. Puis il faut se le redire, qu'en proportion du PIB on est très bien placé, au niveau de la dette québécoise.

Donc, dans ce qui explique le fait que la dette augmente, il y a des projets comme ça. Puis je suis certaine, là, je suis certaine que, si je posais la question à l'ensemble des 125 députés de l'Assemblée nationale, il n'y en a pas un seul qui me dirait: Ah, celui-là, là, on n'aurait pas dû le faire, puis ça ne valait pas la peine, là, de mettre des argents dans ce projet-là. Je suis sûre et certaine.

Je vais juste vous donner l'exemple des projets inaugurés. Là, ici, on parle d'un programme d'infrastructure, le développement des infrastructures du savoir où les coûts sont partagés avec le gouvernement fédéral. Pour vous donner un exemple, au niveau des cégeps, universités, collèges privés, la subvention du côté du gouvernement fédéral a totalisé, pour l'ensemble des 295 projets, des engagements d'un peu plus de 458 millions de dollars, et du côté du gouvernement du Québec et de ses partenaires, ça s'est élevé à tout près de 621 millions de dollars.

Mais la beauté de la chose, c'est qu'il y avait des dates de réalisation, hein, c'était vraiment pour stimuler l'économie canadienne et québécoise. Et on a donc des projets qui sont déjà inaugurés, qui sont déjà en place. Vous avez fait part de celui de l'Université du Québec à Montréal que vous avez décrit. Permettez-moi de vous citer ceux qui sont inaugurés, là, au cours de l'année 2010-2011: le cégep Marie-Victorin qui a eu une contribution, un projet total de tout près de 1 million de dollars pour la restauration de laboratoires de sciences; le cégep de Sherbrooke, pour le réaménagement de l'église du Très-Saint-Sacrement, un peu plus de 1,8 million de dollars; le cégep de la Gaspésie et des Îles, pour le Centre québécois de formation en maintenance d'éoliennes; le cégep de Jonquière... ça, c'était 2 millions; le cégep de Jonquière, pour la mise aux normes des laboratoires de chimie, 2,5 millions; le cégep Montmorency, pour un projet d'agrandissement, pour 16,2 millions de dollars; le cégep de Drummondville, pour un projet de un demi-million de dollars; et l'Université Bishop's, pour le réaménagement et la modernisation des laboratoires, pour 4,4, tout près de 4,5 millions de dollars.

Ça fait que je vais juste vous faire un bilan en vous disant que c'est 295 projets qui ont été approuvés; il y en a 127 qui sont terminés, dont ceux qu'on a pu inaugurer au cours des derniers mois; il y en a 146 qui sont en cours de réalisation. Il faut noter qu'il y a 15 projets qui ont été abandonnés, mais franchement, quand on regarde la proportion sur le nombre de projets autorisés... le nombre de projets approuvés, on a une très belle proportion de projets réalisés ou en cours de réalisation qui a stimulé l'économie, mais au bénéfice de nos institutions du savoir.

Adoption des crédits

Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie, Mme la ministre. Et nous arrivons à la fin de nos travaux. Le temps alloué à l'étude des crédits du volet Enseignement supérieur, prêts et bourses du portefeuille Éducation, Loisir et Sport étant presque écoulé, nous allons mettre aux voix le programme 3. Le programme 3, intitulé Aide financière aux études, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Président (M. Marsan): Sur division. Adopté sur division.

Alors, ceci fait que nous terminons nos travaux. Je vous remercie, tous ceux qui ont participé de près ou de loin à cette journée. Merci et bon retour.

(Fin de la séance à 20 h 46)

Document(s) associé(s) à la séance