(Seize heures sept minutes)
Le Président (M. Beaumier): Alors, la commission de la culture se réunit, avec comme mandat, cet après-midi, d'entreprendre l'étude des crédits budgétaires du ministère de la Culture et des Communications, c'est-à-dire les programmes 1 et 2, pour l'année financière 2002-2003.
Avant de passer à l'étape des remarques préliminaires, j'aimerais une indication de votre part sur la façon de procéder à l'étude des crédits. Il y a trois possibilités, soit par programme et éléments selon le livre des crédits, soit par discussion générale avec vote à la fin, ou par thème, ou par organisme.
M. Bergeron: ...discussion générale et vote à la fin.
Le Président (M. Beaumier): Oui, il y aurait une suggestion du député d'Iberville. Ce serait agréé également par la députée? Bon. Alors, nous allons procéder de cette façon-là. Alors, j'invite Mme la ministre à...
Mme Beauchamp: ...
Le Président (M. Beaumier): Mme la députée, oui.
Mme Beauchamp: Merci. M. le Président, je voudrais juste... Avant qu'on commence, effectivement, dans le vif du sujet et qu'on entende la ministre, j'aimerais qu'on puisse discuter tout de suite de la reprise de l'heure qu'il nous manque en ce moment, là. Nous voyons que nous commençons avec 57 minutes de retard sur l'horaire prévu. Nous avons prévu, pour l'étude des crédits du ministère de la Culture, en tout cas, les volets qui nous concernent plus, six heures, et je me demandais si on pouvait dès maintenant exprimer l'accord que cette heure soit reprise dès demain, de 11 h 30 à midi trente.
Le Président (M. Beaumier): C'est-à-dire que, selon nos règlements, ce problème-là se résout avec la présidence de l'Assemblée et les deux leaders, de l'opposition et du gouvernement. Donc, on va leur...
Mme Beauchamp: Bon. Vous devez considérer mon intervention comme un souhait.
Le Président (M. Beaumier): C'est rendu, ça, c'est certain, déjà. Merci beaucoup.
Mme Beauchamp: Merci.
Remarques préliminaires
Le Président (M. Beaumier): Alors, en remarques préliminaires, Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme Diane Lemieux
Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Une indication: Est-ce que je dispose de 10 minutes ou 20 minutes pour les remarques?
Le Président (M. Beaumier): De 20 minutes.
Mme Lemieux: Vingt minutes, d'accord. Merci, M. le Président. Chers membres de cette commission, je voudrais d'abord saluer mes collaborateurs. Vous allez comprendre que je ne vais pas tous les nommer, ils sont fort nombreux, mais, immédiatement à ma droite, je vous indique la présence de Doris Girard, sous-ministre en titre du ministère de la Culture et des Communications, Mme Élisabeth Verge et M. Pierre-Denis Cantin, qui sont... Je ne m'enfargerai pas dans les titres, mais ils sont responsables des considérations financières de ce ministère. À ma gauche, mon directeur de cabinet, François Ferland, et, de mon cabinet, Virginie Cousineau, et évidemment des hommes et des femmes de l'ensemble de ce ministère qui ont contribué à réunir l'ensemble de l'information la plus pertinente, faisant en sorte que ces travaux soient efficaces et nous permettent de bien réaliser notre mandat comme membres de cette commission.
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(16 h 10)
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Je veux également les remercier. Je crois que tout le monde réalise à quel point c'est une tâche qui est minutieuse, qui demande beaucoup d'attention et de rigueur et je veux les remercier très chaleureusement de l'enthousiasme dans lequel ils ont exercé ces fonctions et de la rigueur également qu'ils ont prise pour faire en sorte que ces travaux soient efficaces.
Je suis très heureuse de faire état des réalisations du ministère de la Culture et des Communications pour l'année budgétaire qui vient de se terminer et je crois que nous allons constater ensemble que ça a été une année passablement mouvementée, dans le plus beau sens du terme. En ce sens, nous avons amorcé des travaux extrêmement importants, nous avons également résolu des problèmes qui étaient présents dans l'environnement de la culture depuis un certain temps. C'est donc une belle occasion de dresser un bilan de cette dernière année, qui correspond évidemment aux 12 mois pour lesquels je suis dans ces fonctions de ministre d'État à la Culture et aux Communications.
Et je ne peux passer sous le silence que, hier soir, je suis revenue d'une première mission culturelle, que nous avons appelée Mission Québec-Mexique culture.com. Je reviens extrêmement fatiguée mais extrêmement enthousiaste de cette intervention. En moins d'une semaine, avec mes collaborateurs, avec les quelque 65 organismes culturels québécois qui m'ont accompagnée et que j'ai également accompagnés, nous avons réalisé une première en sol étranger. Plus de 40 projets concrets ont été signés, entendus avec nos partenaires mexicains. Et je constate non seulement le succès en sol étranger, mais je constate également la synergie que nous avons eue entre les représentants gouvernementaux, entre les représentants des sociétés d'État et les organismes culturels. C'est une alliance québécoise pour la culture que nous avons exploitée en sol étranger, et j'en suis extrêmement fière, et je crois que c'est un grand signe de maturité de l'ensemble du milieu culturel québécois.
Et vous savez, par ailleurs, que non seulement nos artistes sont sur les scènes du monde entier, mais plusieurs de nos pays amis tiennent à être présents au Québec. Je pense à la France, qui a tenu, au cours de cette année, une saison culturelle extrêmement riche. Je pense au Royaume-Uni, qui, au cours de l'année actuelle, a développé une vitrine sur l'ensemble du territoire québécois. Alors, c'est un signe que le Québec, par sa culture, est en interaction avec d'autres peuples.
Maintenant, de manière un peu plus pointue, je voudrais signaler qu'au cours de cette année un certain nombre de législations ont été abordées par le ministère de la Culture et des Communications. Je ferai d'abord mention de l'adoption et de la mise en oeuvre de la loi relative à la nouvelle Bibliothèque nationale du Québec, qui a donné, donc, sa forme définitive à un des plus beaux projets culturels de la dernière décennie en regroupant sous le même toit et sous la même administration les mêmes destinées de la Bibliothèque nationale du Québec, la Grande Bibliothèque du Québec, qui elle-même intègre la Bibliothèque centrale de Montréal. Cette loi dote donc le Québec d'une institution phare qui va agir au coeur de notre grande métropole montréalaise comme un acteur dynamique, attentif et ouvert à chacun des membres du réseau des bibliothèques publiques de toutes les régions.
Je voudrais également noter, au chapitre de la législation, l'adoption et la mise en oeuvre de la Loi concernant le cadre juridique des technologies de l'information, la loi n° 161, qui est une opération extrêmement significative. Je crois que nous aurons probablement un peu plus l'occasion d'en parler avec notre autre collègue de La Pinière au moment des discussions des crédits au sujet de l'autoroute de l'information, mais je voudrais tout de même signaler que, grâce à l'adoption et la mise en oeuvre de cette loi, le Québec dispose maintenant d'une législation d'application générale unique au monde qui protège les internautes d'ici lorsqu'ils transigent au moyen de technologies de l'information, y compris sur Internet. Alors, c'est donc une loi qui se pose comme un élément majeur de notre approche en matière de transactions électroniques. Voilà, la sanction et la mise en oeuvre de cette loi est donc un moment charnière de notre participation à la nouvelle économie.
Au sujet, maintenant, des politiques qui guident les interventions du ministère de la Culture et du gouvernement du Québec, je dois dire que c'est vraiment à ce chapitre que nos actions ont été les plus intenses et les plus variées. Vous le savez, le Québec dispose d'une politique culturelle qui est appuyée et qui n'a de sens que parce qu'elle est appuyée par des politiques sectorielles. Le ministère... Alors, parlons-en, de quelques-unes de ces politiques sectorielles sur lesquelles il y a eu énormément de travail au cours des derniers mois.
Par exemple, un premier bilan de la politique de la lecture et du livre a été effectué, une politique qui reçoit l'adhésion très large des principaux acteurs du domaine du livre, de la lecture et de l'éducation, et c'est sur cette adhésion que j'ai misé en donnant rendez-vous à ces acteurs quelques années plus tard, après l'adoption de cette politique. Je leur ai donné rendez-vous au mois de mars dernier afin de partager avec ces acteurs les constats, de poser un diagnostic et d'échanger également sur les priorités à déterminer. Les résultats de ces consultations, eh bien, ils seront connus bientôt, puisque j'annoncerai des mesures concrètes qui vont découler de ces discussions, mesures qui sont assorties d'une enveloppe budgétaire de 21 millions de dollars, une enveloppe déjà annoncée dans le plan AGIR, en novembre dernier.
Au niveau de la politique touchant le secteur du cinéma et de la production audiovisuelle, il y a eu un travail de documentation des enjeux qui concernent notre production cinématographique et audiovisuelle extrêmement intense et sérieux de la part du ministère, de la part du Conseil des arts et des lettres, de la SODEC, de la Régie du cinéma, de Télé-Québec et de bien d'autres intervenants qui, autour d'un certain nombre de groupes de travail, ont essayé d'identifier les éléments de diagnostic, les éléments problématiques les plus importants de ce secteur. À partir de ce diagnostic, je m'engage d'ici peu dans un processus de consultation menant à l'adoption d'une politique renouvelée sur le secteur du cinéma et de la production audiovisuelle.
Nous avons également une politique importante en matière de l'autoroute de l'information, une politique qui arrive à maturité. On aura probablement l'occasion d'en échanger un peu plus tard dans l'étude de ces crédits. C'est une politique à maturité, pour laquelle nous avons besoin de faire le point. Des processus d'évaluation sont à la veille de s'amorcer. Alors, ça nous permettra donc de faire le point et surtout de nous aider à établir nos priorités pour l'avenir. Une particularité, par ailleurs, au sujet de l'autoroute de l'information, constitue... une particularité par le fait que nous avons amorcé des travaux, extrêmement complexes, d'ailleurs, dans le but de développer des infrastructures de télécommunications accessibles dans toutes les régions du Québec et dans tous les réseaux que nous appelons des télécommunications à large bande, ce qui nous a amenés à l'adoption d'un projet extrêmement stimulant, notamment pour les régions du Québec, à l'occasion du dernier budget de notre collègue vice-première ministre et ministre des Finances, ce programme s'appelant Villages branchés du Québec, pour lequel nous avons dégagé des investissements potentiels de 75 millions de dollars.
Au cours de la dernière année, également, le domaine de la muséologie a été particulièrement investi, d'abord financièrement, puisque des crédits supplémentaires à hauteur de 10 millions ont été distribués dans nos grandes institutions muséales sur l'ensemble du territoire québécois.
Nous avons également fait des avancées fort intéressantes dans le domaine du patrimoine, d'abord par ces gestes quotidiens que nous faisons lorsque nous procédons au classement de monuments historiques. Les exemples, ils sont nombreux, que ce soit le cinéma Le Château à Montréal, l'église et la sacristie de Sainte-Marie de Beauce, le site LeBer-Lemoyne à Lachine, la maison Louis-Bertrand à L'Isle-Verte, ou encore des édifices de la compagnie E.B. Eddy de Hull pour lesquels il y a eu d'ailleurs des travaux dans la communauté de Hull extrêmement importants. Se sont ajoutés à ça également ? et nous aurons certainement l'occasion d'en parler ? des démarches visant la protection et la mise en valeur du Mont-Royal, démarches d'ailleurs coordonnées avec les autorités de la ville de Montréal. Et peut-être l'aurez-vous remarqué, la Commission des biens culturelles a sollicité récemment dans les journaux des interventions dans le but de tenir des audiences publiques qui vont, je l'espère, nous permettre de faire des progrès et d'identifier des mesures concrètes de sauvegarde et de protection du Mont-Royal.
Nous avons également fait des efforts majeurs en ce qui concerne notre patrimoine religieux, et je signalerais à ce moment-ci la signature d'une entente avec les autorités religieuses de Montréal pour favoriser la conservation et la consolidation des lieux de culte d'intérêt patrimonial de la métropole. Je crois que vous le savez, il y a un grand parc immobilier d'églises à Montréal pour lequel l'avenir est particulièrement troublant. Nous nous sommes donné un processus de travail pour faire en sorte que ces édifices religieux à Montréal soient, dans certains cas, restaurés ou alors recyclés avec tout le respect qu'on doit accorder à ces infrastructures.
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(16 h 20)
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Nous nous sommes également donné un plan d'action qui jette les bases d'une politique du patrimoine, un plan d'action qui mise sur le partenariat. La gestion du patrimoine n'appartient pas qu'au gouvernement du Québec, c'est une responsabilité partagée et qui doit être coordonnée. Et nous nous sommes donné des éléments concrets de relance du dossier du patrimoine qui sont en voie d'être réalisés. Par exemple, nous faisons le point sur les inventaires, nous essayons de mieux identifier les monuments et les édifices historiques. C'est incroyable de réaliser à quel point ces édifices classés patrimoniaux, historiques ne sont pas connus du public. Nous nous sommes donné un mécanisme de concertation permanente avec le milieu municipal. Nous avons également formé un groupe de travail sur la question des archives nationales. Et nous avons également amorcé l'analyse des besoins de formation en matière de patrimoine pour les métiers du patrimoine avec le ministère de l'Éducation. Et nous nous sommes donné un lieu... En fait, nous avons revu la manière de gérer les dossiers concrets d'ordre patrimonial au sein de notre propre ministère.
L'autre élément que je me permettrai d'aborder à ce moment-ci concerne le fait que, il y a quelques mois, c'est-à-dire en novembre dernier, la vice-première ministre et ministre de l'Économie a posé des gestes importants pour essayer de consolider notre économie, pour faire en sorte que notre économie ne soit pas trop ébranlée par les secousses que nous avons connues, et, avec grand plaisir et grande satisfaction, j'ai convaincu ma collègue que le domaine de la culture était également un domaine sur lequel nous pouvions compter pour nous aider à contenir les soubresauts de l'économie, si bien que nous avons dégagé 120 millions de dollars dans le plan, donc, AGIR pour la culture et les communications ? nous aurons l'occasion certainement d'y revenir, parce que des résultats concrets se font sentir déjà depuis un bon nombre de semaines ? un plan, donc, qui entraîne des investissements dans nos lieux de culture, que ce soit pour les équipements culturels plus lourds, que ce soit pour notre patrimoine national, pour des équipements spécialisés, pour la politique de la lecture et du livre ou pour la présence d'expositions permanentes de grande qualité dans nos musées.
Ce plan et ces investissements magiques ont permis de relancer et de réaliser des rêves, des rêves de créateurs, d'artistes mais des rêves des communautés également, la réponse à des besoins exprimés par les citoyens. Je pense notamment aux bibliothèques. Nous avons pu relancer l'efficacité de ce réseau des bibliothèques qui répondent à des besoins très concrets de milliers et de milliers de personnes chaque jour. Nous avons permis la réalisation de rêves très quotidiens. Je pense au Théâtre de la Bordée, à Québec, qui s'est relocalisé alors que ce projet était dans l'ordre du rêve depuis fort longtemps. Que je pense au moulin du Portage, à Lotbinière, la salle de spectacle de Rivière-du-Loup, le Théâtre du Vieux-Terrebonne, L'Agora de la danse, à Montréal, les exemples, ils sont nombreux.
Et ça a été une chance extraordinaire, ce dernier budget, pour faire un rattrapage sans précédent dans la construction, l'aménagement des bibliothèques publiques également, de nos centres régionaux de services aux bibliothèques publiques qui desservent particulièrement les bibliothèques de plus petite taille. Alors, que ce soit de Cap-Chat, en Gaspésie, à Châteauguay, en Montérégie, de Plessisville ou de... à Saint-Gabriel-de-Valcartier, nous avons un réseau de bibliothèques qui est déjà mieux équipé qu'il ne l'était il y a quelques mois.
Nous avons aussi pris des décisions importantes. Je pense notamment à la relocalisation du Conservatoire du Québec à Montréal qui aura sa résidence permanente tout près et en grande complicité avec l'Orchestre symphonique de Montréal. Je crois que c'est une décision qui était attendue depuis fort longtemps. Nous sommes en train de travailler sur un projet de même nature pour la capitale nationale qui devrait être connu d'ici quelques semaines.
Nous avons également fait des efforts particuliers sur le développement régional. Tout le monde sait que, lorsque des municipalités, des MRC adoptent des politiques culturelles, ils investissent davantage et mieux dans le domaine culturel. Nous avons donc accentué ? et nous allons le faire encore au cours des prochains mois ? des ententes avec le niveau régional municipal pour voir au développement culturel des territoires, en complicité avec les partenaires les plus concernés. C'est une priorité. D'ailleurs, j'aurai peut-être l'occasion d'en reparler, mais on a une restructuration importante au niveau des programmes et au niveau de l'organisation du ministère. Cette restructuration est guidée par le fait que nous devons travailler mieux et plus avec les partenaires régionaux pour faire en sorte que la culture se développe dans les meilleures conditions possible dans l'ensemble du territoire québécois.
Je terminerais peut-être, parce que je présume que le temps file un peu... Comment...
Le Président (M. Beaumier): Trois minutes encore.
Mme Lemieux: Trois, bien, ça va bien, ça. Eh bien, trois minutes pour une conclusion, c'est extraordinaire. Je conclurais, sachant que c'est un survol très rapide que je viens de faire, je conclurais sur le fait que le ministère de la Culture dispose de 508 millions de dollars pour l'année financière 2002-2003, ce qui est une augmentation de 23 millions de dollars par rapport à l'année dernière, qu'évidemment l'intervention la plus significative en matière culturelle provient du ministère de la Culture, mais, lorsqu'on y regarde de plus près, on se rend compte ? et ça, c'est un bonheur de le constater ? à quel point il y a d'autres ministères qui font également des interventions en matière de culture et qui font en sorte que l'investissement global du gouvernement du Québec en matière culturelle, il est beaucoup plus significatif que ce qu'on peut constater dans des États équivalents à nous.
Sur ces 508 millions, 83 % se rattachent aux objectifs prioritaires inscrits à notre plan stratégique. La plus importante partie des crédits, bien entendu, soit près de 286 millions, ira à la démocratisation de la culture et au service de communications. Une somme de plus de 100 millions de dollars est dirigée essentiellement dans le soutien à la création et au développement des marchés tant intérieurs qu'internationaux. Plus de 25 millions sont consacrés à la création et à la consolidation de l'emploi en culture et en communications, parce que c'est aussi un domaine d'activité où il y a des emplois dont il faut prendre soin. Alors, je crois que nous avons un plan stratégique qui mise résolument sur la créativité, l'innovation.
Également, comme je vous le disais, cette année a été une année très intense dans les travaux préparatoires à des grands virages. Ce sont de véritables grands virages au sein du ministère de la Culture, que ce soit dans sa manière de concevoir les programmes, de desservir les clientèles, si bien que je crois que nous avons les outils qu'il faut pour poursuivre le développement de la culture au Québec avec passion, dynamisme, pertinence et rigueur. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Beaumier): Merci, Mme la ministre. Alors, toujours en remarques préliminaires, la porte-parole de l'opposition officielle en matière de culture et communications, Mme la députée de Sauvé.
Mme Line Beauchamp
Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. M. le Président, d'entrée de jeu, je veux saluer également Mme la ministre et l'ensemble de ses collaborateurs et différents, je pense, artisans, travailleurs du milieu de la culture, particulièrement, bien sûr, de notre appareil gouvernemental, qui vont nous accompagner, j'en suis certaine, tout au long de ces travaux.
M. le Président, je tiens à vous faire remarquer que, dans cet exposé que la ministre vient de nous faire, il y a beaucoup de chantiers, il y a beaucoup de choses d'entreprises mais assez peu de choses, finalement, réalisées. Et, d'entrée de jeu, je voudrais vous rappeler cet article publié au mois d'octobre 2001, sous la signature de la journaliste Julie Lemieux, dans le journal Le Soleil, et je cite Mme Lemieux, qui disait: «La ministre devra bientôt cesser de penser et poser des gestes concrets pour prouver qu'elle ne fait pas que réfléchir tout haut. Elle met beaucoup de temps à prendre de réelles décisions.» Et elle termine en disant: «Il faudra bientôt qu'elle passe à l'action si elle ne veut pas avoir l'air de donner des coups d'épée dans l'eau.» Et je crois effectivement, M. le Président, qu'il faut souligner jusqu'à quel point, en ce moment, dans le milieu de la culture et des communications, au Québec, jusqu'à quel point le gouvernement du Parti québécois a suscité des attentes. On peut même dire qu'il a suscité des espoirs. Il a suscité des attentes qui, malheureusement, la plupart du temps, ne sont pas remplies. On ne réussit pas à prendre la décision puis on ne réussit pas à livrer la marchandise.
n(16 h 30)n Donc, je pense qu'il faut faire le lien, par exemple, avec les résultats de lundi dernier, lorsque, de nouveau, dans des élections partielles qui se sont déroulées au Québec, le gouvernement en place, la formation politique, le Parti québécois représentant le gouvernement en place, très clairement, a reçu une gifle, a reçu cette expression populaire, l'expression démocratique de citoyens et citoyennes du Québec qui disent qu'ils sont extrêmement déçus.
Et on peut faire cette démonstration également dans le secteur de la culture et des communications, où plusieurs attentes ont été créées et où se vivent de très nombreuses déceptions, et je vais tenter de vous le démontrer par plusieurs exemples. J'en ai plus d'une dizaine, d'exemples majeurs où la marchandise n'a pas été livrée. Le premier exemple, c'est sûrement, par exemple, la politique du patrimoine. J'ai ici, avec moi, certains articles de journaux qui remontent même jusqu'en 1996, alors que l'ancienne titulaire du ministère de la Culture, la titulaire en 1996 de ce ministère écrivait, dans une lettre ouverte au journal Le Devoir, que «nous mettrons tout en oeuvre pour réussir enfin une politique du patrimoine qui sache sensibiliser les citoyens à notre passé et à l'histoire qui se bâtit au jour le jour».
Lors de la toute première étude des crédits après la dernière élection de 1998, l'autre titulaire du ministère de la Culture ? parce qu'il y en a eu beaucoup, de ministres de la Culture, là, depuis 1994, avec ce gouvernement du Parti québécois, ça s'est succédé vraiment très rapidement; mais c'est l'actuelle députée de Taschereau ? a également abordé d'emblée le fait qu'il y avait une volonté d'aller de l'avant avec une politique du patrimoine. Elle l'a dit haut et fort. Puis d'ailleurs il y avait eu un peu un imbroglio. Ça, c'était moins clair si c'était une politique qui devrait ou pas comprendre tout l'aspect de la protection, par exemple, du paysage au Québec. Elle s'était dédiée avec la personne qui allait devenir responsable d'un comité de travail, qui est M. Roland Arpin. Donc, il y a eu un comité de travail mis en place qui a donné un rapport qu'on a baptisé familièrement le rapport Arpin, qui a été déposé en novembre 2000 et qui contient toute une série de recommandations. Parce que je crois qu'il faut souligner que ce rapport-là a créé beaucoup d'attente dans le milieu de la protection du patrimoine au Québec, et je tiens à vous citer un extrait du rapport Arpin.
Lorsqu'on aborde, en chapitre III, l'aspect des recommandations, on dit ceci. Juste d'emblée, il dit qu'il y a beaucoup d'enjeux qui ont été abordés par son comité de travail et il dit que les ressources financières ont également fait l'objet de ses préoccupations. Et là je le cite: «Ramener le tout à un nombre raisonnable de recommandations est contraignant. C'est le choix que nous avons fait afin d'éviter la division et l'éparpillement.» Et les membres de ce comité terminent en disant: «Tout ce travail aurait une portée assez réduite s'il n'était pas suivi rapidement de la préparation d'un plan d'action.» Or, ça, c'était en novembre 2000, nous sommes un an et demi plus tard, et on s'aperçoit que, de toutes les orientations et recommandations du rapport Arpin, il y a un très, très petit nombre de recommandations sur lesquelles on a entrepris des pistes d'action. Et il y avait des recommandations fondamentales qui ont créé de l'espoir pour le milieu du patrimoine au Québec. L'idée, là, d'avoir une loi, d'avoir une loi sur le patrimoine au Québec, ce n'est quand même banal, et je m'aperçois que, dans les propos de la ministre, aujourd'hui, un an et demi après le dépôt du rapport Arpin, il n'y a eu aucune allusion sur le dépôt d'une loi sur le patrimoine. La constitution d'une commission du patrimoine, hein, une commission des biens culturels repensée, réévaluée, dotée de nouveaux mandats modernes, pas un mot de la ministre là-dessus. Il y a plein de recommandations, on pourrait y revenir en détail, mais il y a plein de recommandations qui ont été laissées en plan. Et, lorsque le rapport Arpin dit que tout ce travail-là aura une portée assez réduite s'il n'était pas suivi rapidement de la préparation d'un plan d'action, je pense qu'on en a malheureusement la preuve que maintenant ce travail-là, à cause de la gouverne du gouvernement du Parti québécois, ça peut avoir une portée, maintenant, très réduite.
Deuxième exemple, la politique sur le cinéma. Ça aussi, sa prédécesseure nous en a parlé pratiquement à chaque étude des crédits. Moi, ça va être ma quatrième étude des crédits du ministère de la Culture et des Communications, j'ai des collègues qui m'accompagnent depuis ce temps-là, à chaque année ? vous le savez comme moi, vous avez été témoins, à chaque année ? à chaque année, on a abordé cette question: On va revoir la politique du cinéma. Et là je m'attendais à beaucoup parce que, lors de la dernière composition du dernier Conseil des ministres, le premier ministre du Québec a identifié une mission pour la ministre de la Culture. Lorsqu'il l'a présentée devant tout le monde, il a dit que la mission qu'il lui confiait: «...enfin, le développement...» Je le cite, là, le premier ministre du Québec: «...le développement des arts visuels québécois en révisant la politique du cinéma et de la production audiovisuelle pour l'adapter aux besoins d'aujourd'hui. Alors, voilà votre mission.» Par rapport au milieu de la culture, là. Parce qu'il a parlé, bien sûr, de la Charte de la langue française et puis de la responsabilité de l'autoroute de l'information, mais, pour le secteur de la culture et des communications, c'était la mission confiée par le premier ministre du Québec à l'actuelle ministre de la Culture et des Communications.
À notre connaissance, il y a eu un comité de fonctionnaires mis en place, il y a eu des sous-comités qui ont rédigé des rapports. Ils ont travaillé, ils ont rédigé des rapports. Et tout ça, maintenant, c'est rendu où? Là, on ne le sait plus. Là, on ne le sait plus. Les rapports sont déposés, c'est en quelque part, sur le bureau de la ministre, j'imagine. Mais c'est rendu où? Quelles sont les actions entreprises? Puis là, je vous le dis, ça fait depuis la dernière élection qu'on parle de ça, là, la révision de la loi sur la politique du cinéma. Il s'est passé plein de problèmes dans ce milieu-là. Il y avait des attentes à ce qu'on intervienne rapidement pour donner un nouveau souffle à ce secteur-là. La ministre a donné des contrats de travail, on l'a vu dans les crédits, il y a des contrats confiés, entre autres, à M. Houle pour l'assister dans la préparation de ça. Mais qu'est-ce que ça donne en termes d'actions en ce moment, là? Zéro action. Il ne s'est rien passé de neuf qui change la donne pour le milieu du cinéma au Québec, et, en ce moment, il y a des attentes et des espoirs qui, malheureusement, ne sont pas rencontrés.
Le phénomène de la concentration de la presse. La commission de la culture... Parce que l'ancien premier ministre du Québec, Lucien Bouchard, a, un jour, dit: Il faut vraiment se pencher sur ce phénomène-là ? suite, bien sûr, à différentes transactions, certaines plus célèbres que d'autres, qui se sont déroulées dans le milieu des médias et particulièrement des média écrits. Ça, c'est à l'image de ce gouvernement-là: il ne s'est plus rien passé. Le premier ministre dit ça? Aucun signal, il ne se passe rien, tellement que c'est les membres de la commission de la culture qui se sont dit: Bon, bien, on va se donner un mandat d'initiative, puisque l'Exécutif ne fait rien. Le Conseil des ministres ne fait rien, les membres de la commission de la culture se donnent le mandat d'étudier le phénomène de la concentration des médias, déposent un rapport qui contient différentes recommandations qui peuvent être évaluées à leur mérite.
Au mois de décembre dernier, à mon initiative, on adopte une motion conjointe concernant ce qui s'est passé au journal la Gazette et l'attitude de la compagnie CanWest, et la ministre nous dit, au mois de décembre: Dans quelques semaines ? puis ça, elle l'a dit sur d'autres choses, là, dans ses remarques préliminaires, mais c'était encore la même expression ? dans quelques semaines, je vais proposer des choses à la population du Québec dans le domaine de la concentration des médias. Quelques semaines, hein? Puis il y avait une notion presque d'urgence dans le discours qu'elle faisait. Et là on est quelques semaines plus tard, puis il n'y a aucune piste d'action d'entreprise.
D'autre sujets. Le boycott des activités culturelles dans nos écoles. Qu'est-ce que fait ce gouvernement et qu'est-ce que fait en particulier la ministre de la Culture et des Communications pour tenter d'apporter des solutions à un conflit qui a un impact direct sur la survie d'institutions culturelles dans plusieurs régions du Québec? Elle dit: Je fais des coups de téléphone, je ne peux pas vous dévoiler mes stratégies parce qu'elles ne marcheraient plus. Elle nous a dit ça l'automne dernier. Parce qu'on lui a posé des questions. On était au mois de septembre, on lui a annoncé, là, que le boycott recommençait. Elle a tenté de minimiser la chose, elle a dit: Là, c'est très localisé, puis je fais des coups de téléphone, puis je ne veux pas en dire plus parce que, si je dévoile mes stratégies, elles ne fonctionneront pas. Bien, je pense qu'aujourd'hui la ministre de la Culture, elle est mieux de dévoiler ses stratégies parce que ses stratégies secrètes, elles ne fonctionnent pas. Ça fait que ça serait bien mieux de nous dire qu'est-ce qui se passe, quelles sont les interventions qu'elle fait, quelles sont les discussions qu'elle a avec son collègue le ministre de l'Éducation dans un secteur qui concerne directement des institutions culturelles auxquelles elle doit veiller à conserver la mission et l'existence au Québec.
Vous voulez sûrement d'autres exemples d'enjeux dont on discute maintenant depuis la dernière élection, depuis quatre ans, sur lesquels ça n'avance pas. Les suites de la politique de la diffusion des arts de la scène et la situation de nos diffuseurs régionaux. Qu'est-ce qu'il y aura, maintenant que la politique de diffusion des arts de la scène a connu sa fin, les trois années avec des budgets pour tenter d'améliorer la diffusion au niveau des arts de la scène dans toutes les régions du Québec, c'est maintenant terminé? Les diffuseurs régionaux se sont posé des questions. Ils ont eu droit à une évaluation dite nationale. Là aussi, il y a des contrats qui ont été donnés pour faire une évaluation de la situation des diffuseurs régionaux. Mais quelles sont les actions? Qu'est-ce qu'on fait vraiment pour faire en sorte que, dans vos régions, là ? puis on est tous ici en train de représenter des régions du Québec ? que, dans nos régions, nos diffuseurs régionaux aient des moyens de prendre des risques, d'attirer dans leur milieu des spectacles qui... Ce n'est pas évident que, comme corporations, ils peuvent risquer ces enjeux-là, ces sommes financières là. Il y avait une politique de diffusion des arts de la scène; maintenant, plus de réponse. L'évaluation dite nationale des diffuseurs régionaux n'a pas été rendue publique et on ne sait toujours pas où ce gouvernement-là s'en va avec ce dossier qui a pourtant fait l'objet d'une politique sectorielle.
n(16 h 40)n Politique muséale. Politique muséale, ça, c'est intéressant. On a mis en place, effectivement, un système d'accréditation mais sans le financement qui va avec. Et d'ailleurs on doit aussi remarquer que... On pourra en discuter plus en détail, mais, si on regarde les lignes budgétaires, là, le financement reste complètement stable. Ça fait que, là, si je comprends bien, c'est une politique muséale où, à travers des crédits additionnels, une fois, on a tenté de dire qu'on mettait de l'argent supplémentaire, mais, depuis ce temps-là, il n'y a rien qui s'est vraiment passé au niveau des musées. Ou, en tout cas, chose certaine, ce n'est pas l'ensemble des recommandations de la politique muséale qui est mis de l'avant. Vous-mêmes, vous dites, dans votre plan d'action, dans vos priorités, que c'est maintenant, cette année, après que la politique a été déposée en mai 2000, c'est un an et demi plus tard qu'on va tenter de mettre en branle le volet I et le volet II de la politique muséale.
D'autres exemples. Le plan pour le livre et la lecture. La ministre a dû reconnaître qu'après une évaluation faite de la politique de la lecture et du livre ? et je ne me souviens plus du chiffre exact, on pourra en reparler ? mais vraiment avec un effort très important de fait pour la lecture et le livre, que, malheureusement, les résultats n'étaient pas là en termes d'amélioration de la lecture chez les Québécois et les Québécoises. On prend acte. Tout comme vous, on prend acte de la situation. Mais, maintenant, là, vous faites une rencontre. Bien, ça, ça fait penser au discours du ministre de la Santé aussi. On fait des comités, on fait des rencontres, mais où est la décision, où est l'action?
Là, on nous dit qu'on a 21 millions à investir, on ne sait toujours pas quelles sont les pistes d'action que la ministre prendra, les nouvelles pistes d'action que la ministre prendra pour ce faire. Et, en passant, c'est 21 millions en immobilisations, donc, entre autres... Hein, c'est 21 millions en immobilisations, ça doit servir à des collections. Donc, ça veut dire, par exemple, que des pistes d'action qui amèneraient peut-être à améliorer le fait qu'on retrouve plus de bibliothécaires professionnels dans nos bibliothèques en région... Il y a des études qui démontrent le lien direct entre la présence de bibliothécaires professionnels dans les bibliothèques et la sortie des livres des tablettes de nos bibliothèques. Quand on a un bibliothécaire professionnel dans une bibliothèque publique, il y a de l'animation, il y a des recommandations, il y a toute une série d'activités mises en branle pour favoriser la lecture. Mais on n'a pas les sous pour faire ça. Mais on ne sait surtout pas où est-ce que le gouvernement s'en va suite à, malheureusement, ce qu'il faut appeler ? et je dis malheureusement ? l'échec de la politique de la lecture et du livre.
Lorsque nous l'avons rencontrée, également, en septembre dernier, pour discuter des suites du rapport du CALQ et de la SODEC, la ministre a dit également qu'elle voulait mettre en branle, qu'elle allait travailler sur un aspect qu'on appelle ? c'était comme ça qu'on l'appelait dans le rapport de la commission de la culture ? un filet de sécurité sociale pour les artistes, artisans et créateurs québécois. La ministre nous a annoncé qu'il y avait des discussions, un chantier avec la CSST. Ça, c'était l'automne dernier; on est six mois plus tard. Six mois plus tard, toujours aucune indication de la volonté ministérielle de procéder ou de son succès à avoir certaines ententes dans ce dossier-là.
Tourisme culturel. La ministre, encore l'automne dernier, a dit dans ce micro: Je vais me faire très, très, très, très amie avec le ministre du Tourisme. Elle l'a dit avec un beau sourire. On a compris, elle voulait s'asseoir avec le ministre du Tourisme et parler de tourisme culturel. Six mois plus tard, est-ce qu'il s'est passé quelque chose dans le domaine du tourisme culturel? Est-ce qu'il y a eu l'ombre d'une pointe d'une piste d'action entreprise dans ce secteur-là? Rien du tout.
Je vais vous donner des exemples encore plus... peut-être que certains qualifieront de plus mineurs. Je vais vous donner un exemple: pas de décision de prise. On annonce une nouvelle salle pour l'OSM. La ministre a une décision à prendre. C'est une décision, c'est un aspect de la question qui a entraîné le départ de l'ancien ministre de la Culture d'un gouvernement du Parti québécois, M. Clément Richard, de la présidence du conseil d'administration de la Place des Arts. Il était outré parce qu'un des aspects de ce projet-là... C'est qu'il voulait savoir qui allait gérer le nouvel équipement. Qui va gérer la salle de l'OSM? C'est une très bonne question. La ministre, elle a une décision à prendre. Elle construit, elle fait un investissement important, elle dote Montréal d'un nouvel équipement, pas de décision, pas d'action, pas capable de prendre une décision sur qui va gérer la salle. C'est quand même un aspect, là, il me semble... Il me semble que, depuis le moment où l'annonce a été faite, là, je me serais attendu à ce qu'on ait un élément de réponse. Qui va gérer la salle de l'OSM? Il me semble que c'est une décision qu'elle aurait pu prendre depuis ce temps-là.
Vous voulez d'autres exemples? Un dernier, par exemple, le financement du Conseil des arts et des lettres du Québec. La ministre... Et je le lui ai souligné, puis elle en a entendu parler. Selon nous, selon plusieurs organisations professionnelles du milieu des arts et des lettres, en ce moment, cette année, au Conseil des arts et des lettres, il manque un 5 millions, si on compare au budget de l'année dernière, le budget comprenant des crédits additionnels. Donc, on avait beau faire un beau discours, la réalité de tous les jours sur l'argent disponible dans le milieu de la culture, c'était une baisse du budget de 5 millions. Il y a eu une rencontre, il y a eu une rencontre avec la ministre, où... Parce que là le milieu a décrié ça. Sur le site Internet du Conseil québécois du théâtre, on a dit: C'est effrayant, la ministre Lemieux, malgré les assurances qu'elle nous a données à l'automne, elle ne livre pas la marchandise. Puis il y a eu une rencontre, puis eux ont compris que là vous alliez livrer la marchandise. Ça ressemble un peu à l'histoire de l'année passée, là, sur le fait qu'il en manque toujours un petit peu puis finalement on en trouve, parce que là il y a un mémo en circulation qui dit: «La ministre Lemieux trouve les 5 millions manquants pour le CALQ.» Il y a un mémo en circulation provenant de l'organisme le Mouvement pour les arts et les lettres à toutes les associations professionnelles membres du Mouvement pour les arts et les lettres.
Moi, je ne demande pas mieux que d'accueillir avec joie la nouvelle. Je suis très étonnée que la ministre est restée silencieuse. Il y a des mémos qui circulent, la ministre reste silencieuse sur le fait de nous dire si les crédits dont on va discuter aujourd'hui comprennent 5 millions de plus ou pas. Donc, on s'attend à une réponse là-dessus. Mais, chose certaine, c'est assez étonnant que, alors qu'elle leur a dit de vive voix qu'elle leur confirmait qu'il y aurait les 5 millions manquants au CALQ dès cette année, qu'il n'y ait toujours pas d'annonce, j'ai envie de dire de décision de prise, publique, sur cette question-là. J'ai l'impression qu'il faut qu'un dossier fasse la une du Journal de Montréal pour qu'on voie... comme dans le cas des objets faisant partie du patrimoine de Maurice Richard, pour que, tout d'un coup, la ministre dise: Oui, oui, oui, je m'occupe de ce dossier-là.
Je pense que je viens de faire, M. le Président, la panoplie des dossiers qui n'avancent pas en ce moment, le manque d'action. J'ai le goût de prendre les mots de la journaliste Lesage, qui disait: Il va falloir qu'on arrête de réfléchir, il va falloir qu'on arrête de discuter en comité, il va falloir qu'on gouverne, il va falloir qu'on prenne des décisions. Et ça, c'est pour le bien du milieu de la culture et des communications au Québec, M. le Président. Je vous remercie.
Discussion générale
Le Président (M. Beaumier): Merci, Mme la députée de Sauvé. Est-ce qu'il y aurait d'autres interventions dans le domaine des remarques préliminaires? Bon. Alors, nous procéderions à l'étude comme telle des crédits. Alors, la parole est à la députée de Sauvé.
Budget du Conseil des arts
et des lettres du Québec
Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Ma première question, elle est très simple: Est-ce que la ministre, aujourd'hui, lors de ces premières minutes consacrées à l'étude des crédits du ministère de la Culture et des Communications, est en mesure de nous dire si ces crédits... si on doit comprendre, suite à la rencontre qu'elle a eue avec les organismes professionnels représentant les artistes, créateurs et artisans du milieu de la culture au Québec, si ces crédits comptent 5 millions de plus destinés au budget du Conseil des arts et des lettres du Québec ou si encore, par les propos qu'elle a tenus avec eux et qui font l'objet de ce mémo en circulation en ce moment, qui dit qu'elle a trouvé les 5 millions manquants pour le CALQ, il faut comprendre qu'il y aura des changements dans l'allocation des différents crédits présentés aujourd'hui et que c'est à l'intérieur même de son ministère qu'elle trouvera les 5 millions manquants pour les confier au CALQ, ou encore elle a donné de mauvaises informations lors de la rencontre qui a eu lieu à ces représentants du milieu de la culture, qui ont pourtant vraiment compris, en toutes lettres, que les 5 millions s'en venaient?
Le Président (M. Beaumier): Mme la ministre.
Mme Lemieux: Merci, M. le Président. M. le Président, je crois que je vais profiter de cette période d'étude des crédits pour mettre à jour un certain nombre de dossiers avec la députée de Sauvé parce que je constate... En fait, elle a émis l'hypothèse, là, à partir de la liste de dossiers qu'elle a identifiés, que rien ne s'était fait. Ce n'est pas parce qu'on ne sait pas ce qui s'est fait que rien ne s'est fait. Et je suis très malheureuse ? on pourra trouver une manière de communiquer peut-être l'information sur l'évolution des dossiers au fur et à mesure à la députée de Sauvé ? je suis malheureuse de constater que sa source la plus fiable est les journaux. Bon. Il y a, des fois, de l'information qu'on peut avoir dans les médias, mais je voudrais bien préciser que ce n'est pas parce qu'on a l'hypothèse que rien ne s'est fait qu'on doit en conclure que rien ne s'est fait et qu'il faut distinguer les situations qu'on ne connaît pas de l'inaction. Et, dans ce cas-ci, je dois constater que l'hypothèse de la députée de Sauvé est tout à fait erronée et que, malheureusement, elle ne le sait pas. Mais on va remettre à jour l'information, c'est à ça que doit servir une étude des crédits, une période d'étude des crédits.
n(16 h 50)n Je voudrais peut-être reprendre un certain nombre d'éléments qui ont été avancés par la députée de Sauvé, d'abord, un élément qui est extrêmement important, qui est tout le suivi du plan d'accélération des investissements publics. On a les données au 31 mars dernier. Vous savez que le budget de Mme Marois a été annoncé en novembre, qu'à ce moment-là évidemment on avait donné déjà des indications à notre collègue sur le type de projets et les montants qui pourraient être requis pour réaliser un certain nombre de projets dans le sens de ce plan d'accélération des investissements publics. Mais donc, ce budget il a été adopté en novembre, et, quelques mois plus tard, donc au 31 mars 2002, nous avons posé les gestes qu'il fallait, faisant en sorte qu'au 31 mars 2002 ? ça ne fait pas si longtemps ? il y a 348 projets qui ont été retenus pour un montant de 79 millions de dollars et qui sont en train de se réaliser.
Est-ce que vous vous imaginez qu'est-ce que ça veut dire de traiter 348 projets, que ce soit de rénovation d'une bibliothèque, d'agrandissement d'une bibliothèque, de rénovation ou de construction d'une nouvelle salle de spectacle ou alors d'un théâtre, que ce soit de l'achat d'équipement? On a eu des demandes pour plusieurs millions de dollars dans certaines de nos grandes institutions. Est-ce que vous pensez qu'on peut prendre ces décisions-là en escamotant les étapes les plus essentielles, c'est-à-dire de faire en sorte que nous soyons pertinents, que nous dépensions correctement l'argent que les Québécois et les Québécoises nous confient? Alors, en quelques mois, il a fallu mettre les bouchées doubles. Mais il y a actuellement 348 projets d'infrastructures culturelles, d'équipements culturels qui ont été autorisés et qui sont en voie d'être réalisés, et nous l'avons fait avec de la rigueur.
Qu'est-ce que la rigueur? Définition: «Exactitude, précision, logique[...]. Rigueur du jugement, de l'esprit», ce qui n'est certainement pas, quand j'entends la députée de Sauvé lister les dossiers et en parler de toutes sortes de manières, la caractéristique de la députée de Sauvé dans ses interventions d'introduction à cet exercice d'étude des crédits. Moi, je veux m'y prêter le plus ouvertement possible, mais je veux m'y prêter avec rigueur. Et les réalisations que nous avons pu mettre de l'avant, notamment dans le cadre des investissements publics... Vous savez, de décider de construire une bibliothèque quelque part, là, il faut y penser correctement, il faut que les dossiers soient bien documentés, il faut que les besoins soient bien identifiés, il faut que le montage financier soit correct et solide parce qu'on met des centaines de milliers de dollars, dans certains cas, des millions et des milliers de dollars, et nous avons la responsabilité des impôts de Québécois, et nous devons le faire avec rigueur. Nous l'avons fait avec rigueur, mais on a dû avoir des processus accélérés, parce que piloter 348 projets en quelques mois sans que rien ne retrousse, il fallait y arriver.
Alors, allons-y dans le détail. Nous avons 61 projets à hauteur de 50 millions de dollars dans 16 régions du Québec, que nous avons mis en branle. Donc, en matière d'équipements culturels, j'en nomme quelques-uns: la salle de spectacle de Rimouski; le Centre d'interprétation intégré au complexe patrimonial du secteur Isle-Maligne, à Alma; le Palais Montcalm, à Québec, dont nous ferons part des modalités au cours des prochaines semaines; le Musée des arts et traditions populaires, à Trois-Rivières, dossier que les libéraux n'ont jamais résolu, d'ailleurs; Musée de la nature et des sciences de Sherbrooke; le Centre commémoratif de l'Holocauste; le Musée d'arts de Saint-Laurent, à Montréal; le Centre régional de danse, de musique et d'histoire de l'Outaouais; la salle de spectacle de La Sarre; les bibliothèques de Charny, de Le Gardeur, de Châteauguay; le Musée des Abénakis, dans la région du Centre-du-Québec. Alors, nous avons donc ? je ne les nomme pas tous ? 61 projets en équipements culturels lourds qui sont actuellement en marche.
Pensez-vous qu'on décide tout d'un coup de construire une salle de spectacle? Savez-vous ce que c'est de mettre à jour ces dossiers-là, dont les gens, les citoyens, les créateurs, les élus municipaux rêvaient depuis des années? Pensez-vous qu'on pèse sur un piton puis que ça sort d'un seul coup? Est-ce que c'est ça que la députée voudrait qu'on ait comme manière de fonctionner? Quand je l'entends lister les dossiers, donc... Elle l'a fait de manière très nonchalante, comme si c'était simple, comme si on n'était pas dans un environnement complexe.
Je vais revenir sur certains dossiers. Politique du cinéma. Pensez-vous que le cinéma, c'est simple à résoudre? Pensez-vous que les questions à l'exportation de notre cinéma, on écrit deux, trois petits paragraphes puis on règle ça? Alors, nous avons travaillé avec rigueur, notamment dans la plan d'accélération des investissements publics et dans tous les dossiers qui ont été identifiés.
Nous avons également mis en route 189 projets d'acquisition d'équipements culturels spécialisés, des investissements de tout près de 8 millions de dollars. Ça, c'est des sommes qui ont permis, par exemple, dans le réseau de nos conservatoires, de nos archives, d'organismes qui oeuvrent pour la diffusion, dans nos écoles de métiers d'art, de régler des problèmes d'équipements qui faisaient en sorte que les conditions dans lesquelles les gens travaillaient, et notamment les artistes, n'étaient pas des conditions adéquates.
Nous avons injecté 15 millions dans 70 projets de restauration des biens patrimoniaux. Il faut du temps, il faut de la méthode, il faut documenter, il faut parler aux gens, il faut travailler avec les régions pour les identifier, ces 70 projets. Nous l'avons fait et, à hauteur de 75 millions, nous avons restauré, donc, des biens patrimoniaux.
Nous avons travaillé, par exemple, au renouvellement des expositions permanentes. On est à 28 projets répartis dans 10 régions. Il a fallu identifier les projets, il a fallu s'assurer que les projets étaient pertinents. Donc, ça, ce sont des gestes concrets qui ont été posés ces derniers mois.
Maintenant, prenons, par exemple, la question du patrimoine. La députée de Sauvé a abordé cette période d'échange sur le dossier du patrimoine. Elle a dit, si je me rappelle, de mémoire: Pourquoi ne pas revoir la vision, la manière d'entrevoir la mission de la Commission des biens culturels? Ça ne se fait pas sur le bord d'une table, ça, M. le Président, c'est complexe. Le milieu patrimonial est un milieu fragmenté et complexe, et il y a plusieurs dimensions. Et, bien sûr, le rapport Arpin a documenté plusieurs de ces dimensions, mais, quand on arrive à cette étape importante que j'appelle souvent le test de la réalité, quand on doit agencer beaucoup de considérations dans un tout cohérent, ça ne se fait pas sur le bord d'une table d'une cuisine, M. le Président.
Par ailleurs, les gestes en milieu patrimonial... Non, nous n'avons pas une politique du patrimoine, je le reconnais. Et je ne me sens pas coupable parce qu'on a posé les gestes pour en avoir une. Et, par exemple, dans les développements les plus récents et intéressants qui nous mènent justement dans le dossier du patrimoine... Et, même, je vais vous expliquer autre chose, parallèlement à des travaux qu'on mène pour élaborer une politique, il se passe des choses dans l'actualité, par exemple tous les travaux qu'on a faits avec le ministère des Affaires municipales, avec la nouvelle ville, sur la question du Mont-Royal. Alors, entre deux dossiers bien intenses, là, il y a des fois qu'il arrive des urgences, puis le dossier du Mont-Royal nous a mobilisés, et d'autant plus qu'on a eu une certaine période de vide, puisque, durant toute la période électorale municipale, on n'avait pas d'interlocuteur. Alors, il a fallu préparer le terrain, mais dégager des propositions pour lesquelles on pouvait discuter dans les meilleurs délais avec le maire de la ville de Montréal.
Alors, oui, il y a eu des travaux pour poser des gestes faisant en sorte que nous ayons dans les meilleurs délais une politique du patrimoine, mais, entre-temps, on a des dossiers de nature patrimoniale, bien, on ne va pas attendre d'avoir une politique du patrimoine pour régler des dossiers qui sont dans notre actualité et qui sont très présents pour les citoyens. Alors, il y a aussi des parenthèses, à des moments donnés, qu'il nous faut résoudre, et ça, on a fait un travail très intense et on a surtout réussi à avoir une communication fluide, claire, cohérente et beaucoup mieux agencée avec les autorités de la ville de Montréal.
En matière patrimoniale, non, on n'a pas de politique du patrimoine, mais ça ne nous a pas empêchés de signer une entente avec les autorités religieuses de Montréal pour voir avec ces autorités comment on aborderait cette grande question du fait qu'il y a des centaines d'églises à Montréal, que certaines vont être délestées. Ça crée du remous, il faut avoir des processus pour gérer ça correctement. Ça ne nous a pas empêchés de faire ça.
Et, justement, dans le but d'avoir une politique du patrimoine dans les meilleurs délais, on a posé des gestes, parce que c'est de l'information dont on a besoin pour avoir une politique du patrimoine intelligente. On s'est remis à la... On a relancé la question des inventaires. C'est-à-dire qu'il y a des inventaires, il y a des listes des biens patrimoniaux dans toutes sortes de ramifications de nos organisations municipales et gouvernementales, mais on n'a pas la photographie de notre patrimoine au Québec, l'information n'est pas mise encore ensemble. On a relancé ça.
n(17 heures)n On s'est donné des priorités, vous le savez, en matière de patrimoine religieux. D'ailleurs, la députée de Sauvé n'en a pas beaucoup parlé. Le dossier du patrimoine religieux est un dossier qui va extrêmement bien. On s'est donné un lieu permanent de concertation avec le milieu municipal. Pensez-vous qu'on peut faire une politique du patrimoine sans avoir un lieu, des dossiers communs, une manière d'aborder, respectueuse du niveau municipal, sans leur parler? Pensez-vous qu'on va concevoir une politique du patrimoine en dehors des municipalités? On s'est donné un lieu qui est fonctionnel. Je l'ai dit tout à l'heure, on a revu notre façon de faire pour gérer le patrimoine, au ministère de la Culture. On s'est donné ce qu'on a appelé dans notre jargon une adresse patrimoniale pour avoir un peu plus de cohésion dans nos interventions. Alors, non, on n'a pas une politique du patrimoine, je le reconnais. Y a-tu un drame? Parce qu'on a posé des gestes, il n'y en a pas, de drame. Et on pose les gestes qu'il faut, qui vont nous mener à une politique du patrimoine qui sera crédible.
Autre exemple, le cinéma et la production audiovisuelle. Oui, il y a eu cinq groupes de travail, ça a mobilisé beaucoup de monde. L'état de situation qu'ils m'ont déposé, 400 pages, pensez-vous qu'on traite ça comme ça? On va faire une politique du cinéma, chaque page est exemplaire, on va mettre le sceau du gouvernement du Québec, on a pris les impôts des Québécois, on ne contre-vérifie pas, on ne confronte pas les hypothèses qui ont été amenées par ces groupes de travail. 400 pages, pensez-vous qu'on donne un sens à ces 400 pages là en deux semaines et trois jours? Non, M. le Président.
Et il a même fallu non seulement bien aborder tout le matériel extrêmement riche qui a été fourni par ces groupes de travail, mais il a fallu creuser d'autres questions qui n'étaient pas creusées à ma satisfaction. Toute la question de l'exportation, toute la question de... On a refait faire des travaux sur les crédits d'impôt. Vous savez qu'une des grandes parties du soutien du gouvernement du Québec au cinéma passe par les crédits d'impôt. Il y a de l'information supplémentaire qu'on a besoin de colliger pour prendre les décisions les plus judicieuses. On a exploré toutes sortes de pistes comme la question de la formation. On essaie de faire une jonction avec la formation professionnelle, par exemple, l'utilisation des mécanismes de la loi du 1 %. Alors, non, ça ne se fait pas en criant ciseau, mais on a avancé.
Et je l'ai dit dans mes remarques d'introduction, ce printemps, je m'en vais en consultation avec un projet de politique. Je ne vais tout de même pas, 19 ans plus tard, m'engager dans une nouvelle politique du cinéma sans aller retester un certain nombre de choses avec le milieu. D'abord, le milieu me le reprocherait, à juste titre, d'ailleurs. Alors, oui, il y a une évolution très significative dans ce dossier du cinéma et de la production audiovisuelle.
On a fait une allusion tout à l'heure à la politique de la lecture et du livre, bon. D'abord, je ferais une remarque. La députée a l'air de dire que 21 millions, une possibilité de 21 millions d'achat de livres, ça pourrait être autre chose. Vous irez dire ça aux municipalités que 21 millions d'achat de livres, ce n'est rien, ça. C'est majeur. Sauf que, étant gardienne des impôts des Québécois et des Québécoises, je crois qu'il était sage, quatre ans plus tard, de faire un bilan de la politique de la lecture et du livre et de faire en sorte que ces investissements dans les collections de nos bibliothèques publiques soient basés sur des éléments factuels, quantitatifs et qualitatifs de cette politique de la lecture et du livre.
Et, avant de conclure sur la question des crédits, je dirais à la députée de Sauvé qu'il y a un certain nombre de dossiers qu'elle n'a pas abordés et pour lesquels des succès sont extraordinaires. Le patrimoine religieux, ça, j'avoue que c'est un silence qui est assez éloquent. Nous avons développé un nouveau cadre budgétaire pour trois ans pour tous les conseils régionaux de la culture ? ça, c'est un geste concret qui a été posé ? avec un réinvestissement de 400 000 $, des critères qui ont été développés avec les conseils régionaux de la culture sur l'ensemble du territoire québécois. Nous avons conclu de multiples ententes avec les villes et les municipalités, la députée de Sauvé n'en parle pas. Nous avons mis en route plusieurs mesures d'amélioration de déductions des droits d'auteur, de clarification des déductions d'impôt pour certaines catégories d'artistes, qui ont été clarifiées. On a donc bonifié, amélioré la situation des conditions de vie des artistes, la députée de Sauvé n'en parle pas. Les équipements culturels, évidemment, je vous en ai parlé. Nous avons adopté, comme gouvernement, la loi n° 181, qui clarifie la présence des artistes sur les chantiers de construction, on n'en parle pas. Nous avons conclu une entente au sujet d'Artimage avec le réseau des artistes en arts visuels, qui respecte les droits d'auteur. Nous avons mis en branle ce merveilleux programme qui s'appelle Villes et villages d'art et de patrimoine. Nous avons amélioré les crédits d'impôt dans certaines disciplines, comme je le signifiais tout à l'heure. Nous avons mis en chantier la Cité des arts et du cirque. Nous avons fait des avancées internationales importantes sur le dossier de la diversité culturelle. Bon, écoutez, je pourrais...
Nous avons également fait des investissements dans les médias communautaires. Nous avons fait des avancées formidables au sujet de la stratégie québécoise de développement des ressources humaines en culture. Nous avons fait aussi des avancées sur le positionnement de l'économie sociale dans le ministère de la Culture et dans nos approches en matière de culture. Nous avons renouvelé notre approche en matière de culture scientifique, notamment le programme Étalez votre science.
Nous avons créé l'Observatoire de la culture. Ça, c'est formidable. C'est un lieu de documentation du dossier de la culture qui nous permet d'avoir et des chiffres... Comme je le disais, l'importance de quantifier et de qualifier correctement la réalité pour faire en sorte de guider les interventions gouvernementales. Alors, ça fait partie des dossiers sur lesquels il y a beaucoup de réalisations et que, comme par hasard, la députée de Sauvé n'a pas mentionnés.
Je voudrais revenir sur la question des crédits. La députée de Sauvé devrait savoir qu'il y a plusieurs manières, au gouvernement, de résoudre des besoins du point de vue budgétaire. La députée de Sauvé aura remarqué que le dernier énoncé budgétaire comprenait très peu de mesures spécifiques ? sauf en ce qui a trait à la lutte à la pauvreté ? de mesures spécifiques dans le ministère, qu'il y a toutes sortes d'autres manières de pouvoir combler des besoins budgétaires. Ils n'apparaissaient pas à l'énoncé budgétaire, ça ne veut pas dire qu'ils n'existent pas. Et, pour ce qui est du budget du Conseil des arts et des lettres, ce que je dis, c'est que le niveau du budget du Conseil des arts et des lettres de 2001-2002 sera le même, c'est-à-dire à plus de 62 millions. Il est fort possible qu'on soit peut-être même à 64 millions pour l'année 2002-2003.
Le Président (M. Beaumier): Merci, Mme la ministre. Alors, en alternance, nous irions à la députée de Mille-Îles.
Critères retenus dans le choix
des projets d'investissement
en matière d'équipements culturels
Mme Leduc: Je vous remercie, M. le Président. Alors, je pense, Mme la ministre, que l'énumération des réalisations que vous avez faites démontre bien qu'il n'y a pas eu d'inactivité, comme on voulait le laisser entendre, au ministère de la Culture et des Communications. Et je voudrais quand même rappeler à la députée de Sauvé que, quelquefois, le mieux est l'ennemi du bien. En voulant embrasser trop large et ne penser que de grande culture, on oublie les gens qui sont sur le terrain, et les énoncés que vous nous avez faits nous démontrent que vous avez bien travaillé avec les gens sur le terrain. Et, d'ailleurs, nous en avons vu les résultats parce qu'on a tous, chacun d'entre nous, dans nos comtés, des équipements culturels ? soit bibliothèques, musées, théâtres, centres de formation ou tout autre équipement culturel ? qui sont très importants pour les gens.
Alors, vous nous avez donné des exemples d'investissements, vous nous avez donné des chiffres. Moi, je voudrais savoir si vous pouvez expliciter un peu mieux quelle est la grille d'analyse quand vous examinez ces projets-là, les projets qui vous sont soumis. C'est sûr que j'ai peut-être un intérêt particulier pour quand j'aurai un projet à vous présenter qui concernera soit mon comté, soit ma région. Mais comment vous fonctionnez pour faire les choix et examiner les projets, les centaines de projets, j'imagine, qui vous ont été soumis? Compte tenu qu'il y avait eu un moratoire sur les équipements culturels qui a été levé en 2001, alors j'imagine qu'il y avait beaucoup de gens qui étaient en attente et qui vous ont présenté des projets.
Le Président (M. Beaumier): Mme la ministre.
Mme Lemieux: Merci, M. le Président. La question des équipements culturels et surtout de la manière, la méthode, les critères qu'on s'est donnés est une question importante. Et je vais vous dire très honnêtement, quand on a confirmé cette somme de... millions, plus le fait qu'il y avait une certaine partie... on était en cours d'année, donc, on a pu recycler 20 millions, on avait donc une base de... millions, une fois qu'on a confirmé ces montants, c'est sûr que la première chose que j'ai demandée à mes gens de m'aider à faire ? aux gens du ministère, aux gens de mon cabinet ? c'est de se donner une méthode de travail, pour plusieurs raisons.
D'abord, ceux qui me connaissent savent que j'utilise souvent le mot «équité». Alors, je devais m'assurer que le processus soit équitable. Deuxièmement, je devais considérer aussi le fait que, dans le domaine de la culture, parce que le gouvernement du Parti québécois a dû poser des gestes pour qu'on se sorte de la spirale du déficit... Je fais partie de cette génération qui était heurtée par le fait que les gouvernements, dans la passé, n'ont pas toujours été prudents et, donc, je fais partie de cette génération qui espérerait, lorsqu'elle aura 60 ans, pouvoir bénéficier de ressources équivalentes à ce que mes prédécesseurs auront bénéficié.
n(17 h 10)n Donc, vous le savez, il y a eu une opération courageuse qui a été menée par le gouvernement du Parti québécois pour faire en sorte que le budget du Québec soit un budget équilibré et qu'on n'emprunte pas pour payer nos dépenses courantes, un peu comme notre budget personnel doit être tout aussi équilibré. Ça a eu des effets pas juste au ministère de la Culture, ça a eu des effets, ces années fort difficiles, sur les projets d'équipements, que ce soit en culture, en éducation ou ailleurs. Ça a ralenti un peu. Tout le monde avait des plans d'investissement, de construction, de mise aux normes de bâtiments, etc., qui ont été considérablement ralentis. Dans le domaine de la culture, ça a été jusqu'à ce qu'on a appelé un moratoire.
Alors, j'étais consciente qu'au moment où ces 120 millions étaient disponibles pour le domaine culturel il fallait se donner une méthode parce qu'il y avait tellement de projets magnifiques, intéressants, pertinents qu'il fallait avoir une grille pour ne pas se perdre. Donc, dans les critères qui ont été mis de l'avant, un des critères importants était le degré d'avancement du projet. La priorité a été donnée au projet pour lequel le programme de besoins, les plans et devis préliminaires étaient complétés ou alors à toutes fins pratiques complété. Et je crois que c'est important. L'idée n'était pas de faire monter un certain nombre de nouveaux projets. L'idée était de répondre à des besoins qui avaient été déjà identifiés. Alors ça, c'était un élément qui était important.
L'autre élément qu'il nous a fallu considérer, c'est l'incidence sur les coûts de fonctionnement. Si un projet avait pour objet de doubler l'espace ? pour une salle de spectacle, peu importe ? mais de doubler également les frais de fonctionnement, il y avait une problématique parce que, les frais de fonctionnement étant des sommes récurrentes, il fallait être attentif sur notre capacité, et à l'organisme qui avait un projet d'équipements culturels et au ministère, de faire face à la musique pour les années futures.
Autre élément considéré, c'est l'ancienneté. C'est bien évident que, parmi les priorités, j'ai essayé de considérer les programmes, dépendamment du temps où ils étaient inscrits comme projets à considérer. La qualité du montage financier également était considérée. Vous savez, il y a les plans et devis, il y a la technique, et le montage financier, c'est presque aussi important, alors: Quelle était la contribution du milieu, de la municipalité ou enfin de la communauté pour faire en sorte de s'assurer du succès du projet?
Et j'ai été attentive aussi à la répartition régionale. En fait, je me suis fixée une enveloppe fictive en fonction d'un certain nombre de critères, favorisant des critères qui, avec les données que nous avions, étaient moins bien favorisés en termes d'équipements culturels. En d'autres mots, là où il y avait des besoins plus grands, on a mis plus de sous. Même si ça paraissait une enveloppe disproportionnée par rapport à d'autres régions, je trouvais que c'était une occasion merveilleuse que nous avions de faire du rattrapage de manière un petit peu plus rapide dans certaines régions.
Donc, à ce jour, pour la construction et rénovation, nous avons 13 salles de spectacle, 26 bibliothèques ou Conseil régional de services aux bibliothèques publics, 10 musées ou centres d'interprétation et 12 centres de formation de production. C'est donc 61 projets dans 16 régions. Et, comme je le mentionnais tout à l'heure, on a aussi réservé une enveloppe modeste mais qui a fait des heureux, incroyablement, une enveloppe pour les équipements spécialisés. Alors ça, c'est des systèmes de son, des systèmes d'éclairage, des planchers, des toits qui coulent, enfin, un tas de problèmes, des fois, dans certains cas, pour des montants relativement modestes mais qu'un organisme n'était souvent pas en mesure d'absorber à même ses frais de fonctionnement habituels. Alors, on a réglé, à hauteur à peu près de 8 millions, 189 projets modestes mais qui changent la vie des gens dans le quotidien. Il faut ajouter à ça, bien sûr, le projet important de la Grande Bibliothèque du Québec, là, les démarches... Vous allez m'excuser, quelquefois, je bute. Je suis un petit peu... J'ai des problèmes de...
Une voix: D'espagnol.
Mme Lemieux: D'espagnol. C'est ça. Ha, ha, ha! Donc, la Grande Bibliothèque, là, tout le monde sait que la construction est bien entamée, les choses se déroulent bien, mais c'est un projet tout de même à hauteur de 90 millions de dollars. Et j'ajouterais que nous avons également d'autres projets qui n'étaient pas spécifiquement dans ce 120 millions de dollars là, c'étaient des sommes qui étaient identifiées ailleurs. Je rappelle: 10 millions de dollars pour le chapiteau des arts et le pavillon d'accueil dans la future Cité des arts du cirque. Vous savez que, dans un article...
Lorsque je suis allée au Mexique, les Mexicains ont fait plusieurs articles sur nous, notre culture, nos infrastructures, etc., et ils ont identifié la Cité des arts du cirque comme étant l'élément qui fera de Montréal la capitale mondiale du cirque, et je crois qu'ils ont raison. Et on a eu cette sagesse et cette rapidité de bien structurer la formation dans le domaine des arts du cirque, et c'est pour ça qu'en à peine une décennie on nous identifie comme étant le lieu, le Québec étant le lieu le plus significatif dans le monde dans ce domaine-là.
Évidemment, il y a eu tout le travail autour de l'Orchestre symphonique de Montréal, des sommes qui ont été également dégagées dans le cadre du plan d'accélération des investissements publics. Alors, voilà donc les critères, si bien que dans chacune des régions il y a toutes sortes de projets à toutes sortes de niveaux qui répondent, je crois, à des besoins réels qui étaient identifiés depuis un certain temps.
Je me permettrais d'ajouter quelque chose. Je suis sûre que vous ne m'en tiendrez pas rigueur, mais, puisque je suis dans la question des équipements culturels, je voudrais revenir ? parce que je l'ai identifié aussi comme étant un projet sur lequel le gouvernement a porté beaucoup d'attention et a pris des décisions importantes ? sur le projet de la Maison de l'OSM, de l'îlot Balmoral. Je vous rappelle que, ce projet, on l'a appelé d'ailleurs le complexe administratif et culturel. Il y a trois grandes composantes. D'abord, un complexe administratif, une tour à bureaux, c'est un projet qui est pertinent, mais disons qu'il n'y a pas de description tellement colorée à faire d'un édifice à bureaux. Les deux autres composantes, c'est la relocalisation du Conservatoire d'art dramatique et de musique de Montréal et c'est la Maison de l'OSM.
La députée de Sauvé tout à l'heure a dit que la ministre de la Culture avait une seule décision à prendre: Qui serait gérant, propriétaire de cette salle? Je pense qu'elle pense que c'est bien simple puis qu'on peut décider ça, je ne sais pas où, dans son bureau, là, entre 5 heures et 5 heures et quart, puis qu'on n'a pas besoin de considérer un certain nombre de choses. Alors, ce n'est pas la manière dont je travaille. Peut-être que ça déplaît à la députée de Sauvé. Peut-être qu'elle n'a pas les réponses aussi vite qu'elle les voudrait. Mais, quand les décisions sont prises, elles sont appuyées. Puis on a travaillé avec les gens puis on s'est entouré des compétences et des experts pour pouvoir statuer sur ces questions-là. Si la réponse avait été simple, je l'aurais donnée. Pourquoi je me ferais reprocher aujourd'hui de ne pas répondre à cette question-là? Je ne suis pas masochiste, je suis ministre. Ce n'est pas pareil. Si ça avait été simple... Oui, peut-être que je le suis un peu, mais ça, c'est un autre sujet. Si ça avait été simple, je l'aurais donnée. À chaque fois que c'est simple, on la donne, la réponse.
Elle a fait une allusion à Maurice Richard, tout à l'heure. On pourrait en reparler. Pensez-vous... M. le Président, j'étais supposée être en vacances ? je ne veux pas parler de ma vie personnelle ? si j'avais eu la réponse la première journée que le dossier s'est présenté, je me serais empressée de la donner, ça m'aurait fait plaisir, j'aurais pu avoir trois petites journées de repos. Je n'ai pas massacré mes vacances pour le plaisir. C'est parce que la réponse, elle n'était pas simple. Puis, à partir du moment où on a identifié cette piste de faire en sorte que certains biens appartenant à Maurice Richard pouvaient être des biens culturels, on s'est mis au travail. Mais on s'est rendu compte qu'on n'avait pas fait ça souvent dans notre histoire, faire une liste de ce type de biens là. Classer un tableau, classer un monument, classer un édifice, classer une maison, ça, là, on a le livre de recettes, on l'ouvre, on y va, ça marche, on a l'expérience. On en a fait des centaines, des centaines et des centaines, ça va. Mais là, un instant, on ne l'avait pas, la réponse. Alors, toutes les réponses que la députée de Sauvé me reproche de pas avoir, elle peut se dire: Il y a deux possibilités, ou bien, c'est parce qu'elle ne sait pas comment on a évolué dans un dossier, ou bien, c'est parce que ce n'était pas simple.
n(17 h 20)n Alors, je reviens donc à la Maison de l'OSM. Si la question à savoir qui va être le... quel sera le mode de gestion de la salle de l'OSM pouvait se régler simplement, ça m'aurait fait plaisir de le faire. Puis, quand on s'est mis à explorer ce dossier-là, d'abord, on s'est rendu compte qu'il n'y avait pas juste la question de la gestion qu'il fallait examiner. Il fallait voir, bien sûr, la gestion, il fallait voir la question du cadre budgétaire, il fallait voir l'effet de cette décision-là sur l'ensemble du réseau des salles de spectacles de Montréal.
Alors, qu'est-ce qu'on a fait? On a mis ensemble les meilleures compétences. On a mis en branle une étude d'implantation de la Maison de l'OSM dont j'aurai les résultats au cours du mois de juin. On a demandé à quelqu'un complètement en dehors de ça, réputé pour sa compétence et sa rigueur, M. Colbert, professeur titulaire à l'École des hautes études commerciales, directeur et fondateur de la Chaire de gestion des arts. C'est bien, hein, d'aller prendre quelqu'un qui a ce profil-là pour nous aider, pour nous guider, pour nous accompagner dans ce type de décision. On a demandé, on a désigné un représentant de la Place des Arts, un représentant de l'Orchestre symphonique de Montréal plus un représentant de la ministre sur ce comité pour pouvoir aborder trois choses. Parce que je n'étais quand même pas pour décider de ces questions-là sans parler aux gens, sans donner une chance aux gens de se confronter entre eux dans les meilleures conditions possibles.
Alors, on a donné trois mandats qui vont être explorés, donc, qui sont en train, là. J'ai vu les premiers rapports, les travaux vont bien, les gens se parlent ouvertement. Imaginez, il y a un représentant de la Place des Arts, un représentant de l'OSM, là, qui sont à la même table, mais, les gens, ils ont beaucoup d'honnêteté dans cette démarche-là.
Premier élément, d'examiner donc le cadre, la responsabilité de gestion, incluant la propriété et les politiques à développer, accessibilité, etc. Donc, cette étude va explorer les principaux scénarios relatifs à ces questions, que va valoir leur impact sur l'organisation de l'OSM et leur impact sur l'organisation de la Place des Arts. L'approche tiendra compte des différentes composantes de gestion, direction artistique, gestion des services scéniques, gestion de la billetterie, gestion des espaces commerciaux, gestion de l'immeuble. Écoutez, c'est impossible de trouver une réponse à ça sans s'asseoir, se donner une méthode puis un processus, puis mettre les bonnes personnes autour de ça. On ne peut pas régler ça en deux semaines et trois jours.
Deuxième élément, sur la question de l'évaluation, donc, des scénarios qui concernent le cadre budgétaire, les coûts d'exploitation, etc., et, troisième élément, de faire le tour, de la manière la plus rigoureuse possible, de l'impact de la décision de ce mode de gestion là sur le circuit de ce type de salle dans le centre-ville de Montréal. C'est ça qu'on a fait. Il y a déjà eu au moins une rencontre, peut-être deux. Parce que j'ai lu un premier... Il y en a eu deux. J'ai lu le premier compte rendu, je n'ai pas vu le deuxième encore. Les travaux vont bien, et je vais recevoir ce rapport à la fin du mois de juin. Alors, voilà comment on a travaillé ces dossiers.
Le Président (M. Beaumier): Merci, Mme la ministre. Est-ce que...
Mme Leduc: J'ai terminé.
Le Président (M. Beaumier): Oui? Alors, Mme la députée de Sauvé.
Budget du Conseil des arts
et des lettres du Québec (suite)
Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Je vais avoir quelques commentaires avant de céder la parole à ma collègue députée de Mercier qui aura également des sujets à soulever auprès de la ministre de la Culture et des Communications. D'entrée de jeu, je voudrais indiquer à la ministre que ce qu'elle a appelé, là, la liste, la longue liste que j'ai soulevée avec désinvolture ? c'est son expression, si je ne me trompe pas ? je veux juste lui rappeler que ce n'est pas moi qui amène ces enjeux-là, c'est son gouvernement, c'est ses prédécesseurs, c'est parfois elle-même... qui avez amené ça comme étant parfois des priorités, des volontés d'actions, etc. Vous ne pouvez pas me reprocher d'avoir lancé une liste de projets. Ce que je dis, là, c'est que, dans tout ça, tout ce que vous avez exprimé, il n'y a pas de décisions de prises.
Et vous avez clairement... À tout le moins, Mme la ministre, quand vous me reprochez que je ne connais peut-être pas les dossiers, après quatre ans comme porte-parole en culture et communications, si je ne connais pas à fond les dossiers, j'ai l'impression ? puis je le dis avec humilité ? j'ai l'impression de pouvoir au moins dire qu'on a un peu le pouls de ce qui se passe dans le milieu. Puis je peux vous dire, Mme la ministre, c'est un conseil que je vous donne parce que vous avez un problème de perception, tout comme votre gouvernement, actuellement... Ce n'est pas pour rien, les résultats de lundi, là, quand vous arrivez troisièmes, bons derniers. Hein, 23 % des votes, l'élection partielle de lundi? Vous avez un problème de perception. Si vous êtes si bons que ça... Vous avez un problème de perception. Pour qu'un journaliste écrive que vous devez passer à l'action puis que vous devez arrêter de donner des coups d'épée dans l'eau, vous avez au moins un problème de perception.
Mais je ne pense que ça soit juste ça, moi. Moi, je pense qu'il y a un problème de mise en action. Je vais reprendre l'exemple, le dernier exemple de l'OSM. Parce que, sur tous les sujets où il n'y a pas eu d'action ou encore ? puis ça, c'est le plus grave, là ? de décision, vous avez toujours employé les mêmes mots, que c'était compliqué, que c'était complexe, que ce n'était pas facile à régler. Prenons le dernier exemple que vous avez amené, la salle de l'OSM. Vous avez dit: Ça ne se règle pas en deux semaines et trois jours, qui va gérer la salle de l'OSM. Tout le monde l'a reconnu, tout le monde sait que ça fait 20 ans qu'on parle de ça au Québec.
En juin dernier, l'ancien président du Conseil du trésor, lorsqu'on lui a parlé de la situation des conservatoires, a dit: J'ai une annonce à faire dans quelques jours qui va réjouir les conservatoires. Ça concernait la salle de l'OSM, les conservatoires s'en vont avec la salle de l'OSM. On était en juin, ça fait pratiquement un an. C'était censé être attaché. Oups! ce n'est pas attaché. On pose des questions à la ministre des Finances, qui, elle reconnaît que, oui, c'est vrai, il y a des choses qui restent à attacher. Mais, quand vous l'avez annoncé, là, le projet, là, ça ne tombait pas du ciel tout d'un coup, puis là, dire: Ah! puis là, après... Parce que, moi, ce qui me fait tomber en bas de ma chaise, c'est que vous me dites: Ça fait 20 ans qu'on en parle.
Au mois de juin, le président du Conseil du trésor disait: M. Chouinard, Normand Chouinard, directeur général du Conservatoire d'art dramatique, il peut partir dans l'honneur parce que nous aurons le plaisir de faire une annonce dans quelques semaines. C'est ça qu'il a dit. Ça ne marche pas, ça ne marche pas. On revient. La ministre des Finances nous avoue que, oui, il reste des fils à attacher. On parlait même de partenaires privés, à l'époque. Ça ne marche toujours pas.
Là, finalement, on a l'annonce, et là la ministre nous annonce que, là, il y a une étude d'implantation. Je me dis: Ciel! ah oui, effectivement, si on travaille comme ça au gouvernement du Québec, ça peut bien être compliqué! Là, c'est maintenant, là. Ça fait plus d'un an que c'est pratiquement dans l'air puis qu'on fait patienter les gens de semaine en semaine. C'est ça, susciter de l'espoir, puis c'est ça, créer des déceptions auprès de la population du Québec. Là, maintenant, vous êtes en train de faire l'étude d'implantation puis d'asseoir l'OSM puis la Place des Arts ensemble. Wow! Superfaçon de travailler, franchement!
La ministre nous a toujours répété que c'était compliqué, que c'était complexe, puis là, elle nous... L'exemple de la politique du cinéma, 400 pages. Wow! Moi, je veux juste faire remarquer à la ministre de la Culture et des Communications qu'elle a choisi de donner à l'opposition officielle tous ces cahiers-là, là, 400 pages, c'est peut-être même plus... On les a eus hier. On les a lus. Capable de tirer des questions de ça, capable de prendre des décisions à partir de ça sur quelles questions je vais vous poser aujourd'hui. Donc, franchement, là, soyons un peu sérieux. Puis, vraiment, je dois me dire, sincèrement, j'écoute tout ça, je me dis, c'est tellement complexe, c'est tellement compliqué, ce n'est tellement pas la première fois que la ministre de la Culture et des Communications nous répond ça, c'est complexe, c'est compliqué, que ça me donne vraiment l'impression que c'est trop complexe et c'est trop compliqué pour elle.
Ce que j'ai compris aussi... Et ça, si c'est bel et bien ça, la réponse de la ministre, ça, je trouve ça vraiment, vraiment grave, parce que ce que je lui dis avant tout, là, je lui dis qu'elle crée des attentes puis qu'elle suscite des déceptions. Et, si sa réponse sur les crédits qu'elle me confirme bel et bien aujourd'hui que le budget est, tel qu'inscrit au livre des crédits, de 62 millions, ça signifie que, lorsqu'elle a rencontré les artistes récemment puis qu'elle a... Eux ont compris, là, ils ont tellement... Ce qu'ils ont compris, ils ont compris, là, quelque chose qui leur a fait écrire à tout leur monde que «la ministre Lemieux trouve les 5 millions manquants pour le CALQ» puis ils vous félicitent. Bien, ça, ça veut dire qu'il y a quelque part où, là, vraiment, vous êtes en train de créer de très grandes déceptions. Parce que, quand vous dites que c'est le même budget que l'année passé, bien, il manque toujours 5 millions. Quand on dit qu'il manque 5 millions, c'est à la base des crédits supplémentaires de l'année 2000-2001. Et, vous-même, l'année passée, lors de l'étude des crédits, vous m'avez dit: Ces crédits-là supplémentaires de 2000-2001... Vous m'avez convaincue, vous avez dit: Les effets se font évidemment sentir au cours de la présente année financière, parlant de l'année dernière.
Donc, ce qu'on dit, c'est que les vraies bases qu'il faut regarder, c'est le budget total avec les crédits supplémentaires de l'année 2000-2001, qui étaient à 60 934 000. Ce à quoi s'attendaient les gens, ce qu'ils vous demandaient, c'était de dire que le 7 millions supplémentaire de cette année s'additionnait sur cette base budgétaire là. Ils voulaient 67 millions à paraître aux crédits du Conseil des arts et des lettres du Québec. Et c'est ça qu'ils ont compris. Et ils ont compris récemment que c'est ça que vous leur donniez, assez pour qu'ils écrivent à leurs membres que vous le leur donniez, ils se réjouissaient. Et, si vraiment, à la suite de cette rencontre, aujourd'hui, publiquement, vous me dites que le budget du Conseil des arts et des lettres est toujours à 62 millions, je pense que vous ne devez pas vous étonner d'avoir les résultats électoraux que vous avez.
n(17 h 30)n Et, sur ça... C'est moi qui pose la question. Vous avez pris votre 20 minutes pour répondre. Nous, nous sommes dans notre période où nous pouvons vous poser des questions. Donc, M. le Président, maintenant ? et c'est en lien avec ce que je viens de dire ? j'aimerais laisser la parole à la députée de Mercier.
Le Président (M. Beaumier): Un instant. Juste pour bien qu'on se comprenne, là, c'est que, normalement, on y allait par alternance des députés.
Mme Beauchamp: C'est notre bloc de 20 minutes.
Le Président (M. Beaumier): Donc, vous suggérez qu'on y aille par alternance de bloc de 20 minutes.
Mme Beauchamp: Oui.
Le Président (M. Beaumier): D'accord. Ce sera la même chose qu'on permettra aux députés ministériels. Alors, Mme la députée de Mercier.
Mme Rochefort: Merci, M. le Président. J'ai le plaisir de représenter à l'Assemblée nationale...
M. Boulianne: ...
Le Président (M. Beaumier): Oui, M. le député de Frontenac.
M. Boulianne: M. le Président, vous savez qu'à chaque intervention la ministre a le droit de répondre, par exemple, à la députée de Sauvé, avant de donner la parole, même, à la députée de Mercier. Selon nos règlements, la ministre peut intervenir à chaque intervention.
Le Président (M. Beaumier): Chaque fois que la ministre le désire, c'est tout à fait vrai. Mme la ministre.
Mme Lemieux: Alors, M. le Président, j'aimerais apporter une clarification parce que la députée de Sauvé a introduit un élément qui va créer... qui va faire en sorte que de fausses informations vont circuler, une mauvaise interprétation des crédits. M. le Président, il est vrai que le total qui apparaît au livre des crédits, programme 2, élément 7, est de 62 millions de dollars, 62 938 000 $, mais ça, ça comprend 57 millions en programmes d'aide et 5 millions en fonctionnement. C'est ça qui donne 62 millions.
Alors, la députée de Sauvé laisse entendre que j'aurais dit au milieu: Vous allez avoir la même hauteur que l'an passé, et laisse entendre, donc, que c'est ce qui apparaissait de toute manière aux crédits. Mais là c'est là que je distingue. Il y a 57 millions qui sont prévus pour le transfert. Et, quand je dis que le niveau d'aide apporté via les programmes du CALQ va être le même niveau que l'an passé, je parle des programmes d'aide. Je veux qu'on soit bien clair, là. Et, s'il y aura des ajouts, ce sera dans les programmes d'aide, si bien que, en fin d'année, ce ne sera pas 62 millions y compris programmes d'aide et fonctionnement. Je veux qu'on soit bien clair, là.
Le Président (M. Beaumier): Mme la députée de Sauvé.
Mme Beauchamp: M. le Président, avant de céder la parole à ma collègue, soyons bien clairs, ce que vous demande le milieu des artistes, les clients ? je vais les appeler ainsi ? nos artistes, artisans, ce qu'ils vous demandent par rapport au budget du CALQ, c'est que ? je vais appeler ça comme ça ? la base budgétaire, l'argent, que vous-même vous avez dit qu'elle aurait effet dans l'année, là, que le comparable, c'est l'année 2000-2001, où il y a eu des crédits supplémentaires.
Mme Lemieux: Exactement.
Mme Beauchamp: Donc, lorsque vous me répondez que la base, que ce que ça donne, c'est exactement la même chose que l'année passée, ce que je comprends, comme on l'a déjà expliqué, c'est qu'il manque 5 millions, parce que, en 2000-2001, il y avait eu des crédits supplémentaires, mais vous m'avez convaincue que les crédits supplémentaires adoptés la dernière journée de l'année financière 2000-2001 ont pris effet. Vous avez dit: Ils ont été mis à la disposition du ministre de la Culture durant l'année 2001-2002. On a eu un débat de fin de séance là-dessus. On a dit: Ça a été mis à la disposition, ça a eu son impact économique, ça a eu son impact culturel durant l'année 2001-2002.
Donc, ma question, j'espère qu'elle est claire, c'est... Quand vous me dites que c'est comparable, c'est la même base que l'année dernière, quand je regarde le livre des crédits de l'année dernière, de l'année 2001-2002, bien sûr, ils ne sont pas là, les crédits supplémentaires qui ont été adoptés la dernière journée de l'année 2000-2001. Mais, pour les artistes ? et je les comprends ? ce n'est pas leur problème, eux, les questions d'année budgétaire puis quand paraissent les chiffres dans... Ce qu'ils savent, c'est que, durant l'année passée, il y a eu des crédits supplémentaires adoptés la dernière journée de l'année budgétaire du gouvernement, vous nous avez dit qu'ils prenaient effet durant l'autre année, et eux, ils se disent: Bien, cette année, il manque 5 millions. Si votre comparable, c'est le chiffre que je retrouve pour l'année 2001-2002, il manque 5 millions parce qu'à la fin de l'année 2000-2001 vous avez mis des crédits supplémentaires dans le CALQ.
Donc, j'espère que je suis claire. Je demande une réponse claire. Quelle est vraiment votre comparable? Si c'est celle de l'année passée, ça veut dire qu'il manque 5 millions par rapport à l'argent qui a été mis à la disposition du milieu de la culture, des clients du CALQ au cours de la dernière année.
Le Président (M. Beaumier): Mme la ministre.
Mme Lemieux: M. le Président, pour moi, le comparable, c'est le fait qu'il y ait eu, l'an passé, des crédits additionnels ajoutés au CALQ de manière récurrente et de manière non récurrente. On se comprend? Il y avait 50 millions...
Mme Beauchamp: ...
Mme Lemieux: Oui, oui. Est-ce que je peux finir, là? Je peux-tu finir? L'année passée, il y a eu des sommes récurrentes, 7 millions de dollars d'ajoutés de manière récurrente, et il y a eu 12 millions de dollars de manière non récurrente, pour un total de 62 millions. Je vous dis que, moi, mon comparable, je vais faire en sorte ? et, de toute façon, les gestes sont posés, là ? que le niveau de budget de transfert du CALQ soit identique ? et même je pense qu'on va être capable d'avoir un petit jeu, là ? à 2001-2002, crédits récurrents et non récurrents. Le niveau de budget de transfert du CALQ, actuellement, ce qui est écrit au livre des crédits, c'est 57 millions. Mais il y a des gestes qui vont être posés rapidement. La base budgétaire du CALQ sera de 62 millions de dollars, le programme d'aide, là, j'entends. Le fonctionnement, c'est une autre affaire. Donc, ce que vous avez appelé la problématique du 5 millions, j'en suis très consciente, et c'est ce 5 millions là qui va être résolu autrement que par les crédits que nous allons adopter aujourd'hui.
Le Président (M. Beaumier): Bien. Alors, Mme la députée de Mercier.
Mme Rochefort: Merci, M. le Président. Donc, j'ai le plaisir de représenter à l'Assemblée nationale des citoyens du comté de Mercier, citoyens du comté de Mercier qui sont très représentatifs de toutes les diversités culturelles et artistiques du Québec. On retrouve, sur le Plateau, des artistes de renommée internationale et de grand talent. Et j'ai eu le plaisir de recevoir plusieurs lettres de leur part, suite, justement, aux énoncés budgétaires et je vais me faire un plaisir de vous les lire. Parce que vous les avez reçues aussi, Mme la ministre. Donc:
«Le budget alloué au CALQ a chuté de 62 à 57 % lors du dernier énoncé, et ce, même si les propres chiffres du gouvernement révèlent que l'organisme aurait, en fait, besoin de 90 millions pour répondre aux besoins minimaux du milieu. Minimaux, je dis bien, on ne parle ici que d'un train de vie décent.
«Contrairement aux apparences, la grande majorité des artistes font, en effet, partie de la tranche la plus défavorisée de la population, leurs revenus moyens se situant en dessous du 15 000 $ par année. Couper 5 millions, dans de telles circonstances, a eu l'effet d'une gifle. Et pourtant, même si mon revenu, celui de tant de mes collègues, se situe sous le seuil de la pauvreté, j'hésite à me plaindre. Je suis un des rares qui arrivent malgré tout à vivre de leur création en dépit des contrats de plus en plus abusifs auxquels recourent les maisons de diffusion, malgré le boycottage des rencontres littéraires en milieu scolaire et sans exercer un second métier pour joindre les deux bouts. J'ai même gagné quelques honneurs qui, à défaut de me nourrir adéquatement, confirment la légitimité de mon choix de carrière. Bref, je devrais m'estimer chanceux.
«Mais ça n'affecte en rien ma colère. Une province qui dépend autant de ses choix culturels ne devrait pas aliéner les gens qui génèrent chaque année 3,8 milliards de dollars dans ce domaine économique, autant que les secteurs de l'agriculture, des forêts, des mines et des pêches réunis. Nous produisons beaucoup avec pas grand-chose. Il y a de quoi se décourager quand c'est ainsi qu'on nous traite en retour, alors que, dans l'ensemble, le budget gouvernemental, lui, n'accuse aucun déficit.» Le signataire de cette première lettre, Mme la ministre, est M. Charles Montpetit, Prix du gouverneur général, prix du Signet d'or, prix international White Raven, membre du conseil d'administration de l'Union des écrivaines et écrivains québécois et artiste crève-faim.
La deuxième lettre est signée, elle aussi, d'une citoyenne de mon comté. Elle reprend en substance les mêmes propos que celle de M. Montpetit mais avec quelques lignes de plus: «Les préoccupations qui gouvernent le gouvernement du Québec, intitulées Agir en culture, ne permettent pas d'améliorer les conditions de création des artisans de notre culture. La plupart d'entre nous vivons sous le seuil de la pauvreté et sommes des travailleurs autonomes. Nous n'avons donc accès à aucune forme d'avantages sociaux. Dans de pareilles conditions, avouez qu'il nous faut plus que la foi pour vivre, sans parler de créer et d'apporter beauté, lumière et transcendance à nos citoyens.»n(17 h 40)n Mme Catherine Caron, l'artiste en question, conclut en demandant à votre gouvernement, Mme la ministre, que le budget récurrent du Conseil des arts et des lettres du Québec soit augmenté. Elle conclut en demandant la mise en place d'un filet de sécurité sociale, l'étalement des revenus fiscaux sur plusieurs années lors de la vente de leurs créations, que le budget pour la diffusion des oeuvres soit augmenté et que la Loi sur le statut de l'artiste soit bonifiée, à l'instar de la loi n° 90, en rendant obligatoire le regroupement des producteurs.
Mme la ministre, que répondez-vous aux artistes du Québec et à ces deux artistes en particulier qui ont pris la peine de m'écrire mais aussi de vous écrire et qui n'ont pas eu de réponse?
Le Président (M. Beaumier): Mme la ministre.
Mme Lemieux: M. le Président, je réponds ce que j'ai répondu à votre collègue mais dans des mots différents à la collègue la députée de Mercier: Il n'y aura pas de coupure de 5 millions, puisque les gestes seront posés. Ce sont des gestes qui évidemment n'apparaissent pas dans le livre des crédits. Mais il y a toutes sortes d'affaires qui se passent au gouvernement, il y a toutes sortes de moyens de résoudre des problèmes. Par exemple, l'an passé, pour bonifier un certain nombre de projets, on a utilisé ce qu'on appelle le Fonds de suppléance. Alors, je le répète, il n'y aura pas de coupure de 5 millions. Le niveau de programme d'aide du Conseil des arts et des lettres de 2002-2003 sera équivalent au niveau de 2001-2002, budget récurrent et non récurrent. Donc, on est dans les environs de 62 millions.
Je dirais également, M. le Président, que je veux bien que la députée de Mercier se réclame d'une grande préoccupation pour la culture, mais j'espère que le parti dans lequel elle est présentement est un parti qui saura la satisfaire parce que, honnêtement, ça fait une année que j'ai la responsabilité extraordinaire de ce ministère de la Culture et des Communications, je cherche la vision du Parti libéral en matière de culture, je n'ai pas trouvé grand-chose. D'abord, le chef n'en parle pas, je n'ai aucune idée de ce que pense le chef de l'opposition sur la culture. Je crois qu'il n'a jamais posé une question, d'ailleurs, à ce sujet-là. O.K.? Ce n'est pas toujours le critère, mais c'est quand même un indice qui parle. Il n'a jamais abordé le sujet de la culture lors de ses interventions à l'Assemblée nationale. J'ai regardé le programme du Parti libéral de 1998 sur la culture, je vais vous dire qu'on est dans le vague. Alors, la pensée du Parti libéral en matière de culture, honnêtement, elle est un peu mince.
Et je comprends très bien la députée de Mercier de vouloir... entre autres de se sentir porte-parole de gens qui ont pris la peine de lui écrire. Il y a plusieurs de ces lettres, d'ailleurs, que j'ai lues, mais, je vais vous dire, je vais être bien honnête, je n'ai pas eu besoin de les avoir pour agir. Je savais très bien qu'on avait une problématique budgétaire. Et c'est pour ça que je peux dire clairement aujourd'hui qu'on va être au même niveau d'aide. Alors, moi, je veux bien que la députée de Mercier accueille des témoignages de ce genre-là, mais, je vais vous dire bien honnêtement, je ne sais pas si elle va être capable de trouver des réponses dans son parti.
Je voudrais aussi rappeler que je suis très heureuse de dire qu'on n'a pas juste travaillé sur la question du financement ou de la dotation du budget... des programmes d'aide du Conseil des arts et des lettres, il y a d'autres questions, des questions qui sont présentes depuis un certain temps, d'autres depuis moins longtemps. On a fait des efforts et on a eu des résultats, par exemple sur des questions en périphérie mais qui ont leur importance aussi pour les artistes, toute la question des droits d'auteurs, l'entente qu'on a faite, qui est une entente exemplaire qu'on a faite à l'occasion de la création du site Artimage, le fait qu'on a travaillé sur la mise en place... et on est en train de travailler sur la question de la fiscalité.
Il y a des questions assez... La députée de Sauvé n'aime pas ce mot, mais je vais l'utiliser quand même parce que je crois à l'intelligence des gens, mais, sur la question de la fiscalité, il y a des questions extrêmement complexes qu'il faut aborder. Plusieurs nous ont dit: Il faut regarder toute la question de l'étalement du revenu, étant donné qu'il arrive, dans certains cas, que le revenu des artistes est en dents de scie. Est-ce qu'il y aurait moyen d'étaler ça? Donc, on a mis les intervenants les plus compétents sur ces questions-là. L'admissibilité de certaines dépenses, il y a peut-être des ouvertures qu'on peut faire de ce côté-là, mais ça, il faut travailler avec le Revenu, il faut travailler avec les artistes, tu sais, il faut se donner un plan de travail. Alors, il y a bien sûr les programmes d'aide au CALQ, mais il y a d'autres questions en périphérie qui ont aussi de l'importance. Voilà.
Alors, je terminerais peut-être en disant que le Conseil des arts et des lettres existe depuis une bonne dizaine d'années, il fait partie des suites importantes de l'adoption de la politique culturelle. Mais je rappellerais ? puis j'inviterais peut-être la députée de Mercier à faire quelques recherches ? que le gouvernement libéral a complété le travail d'adoption de la politique culturelle, je le lui reconnais, un travail qui avait été tout de même amorcé depuis un certain nombre d'années, mais il l'a complété, ce travail-là, mais il y a un geste que le Parti libéral n'a jamais fait, c'est de donner des budgets adéquats au Conseil des arts et des lettres, et ça, ça s'est fait par le gouvernement du Parti québécois. Alors, voilà.
Le Président (M. Beaumier): Merci, Mme la ministre. Alors, M. le député d'Iberville, formation ministérielle... Non, c'était complété. C'était complété, oui. Alors, M. le député d'Iberville
Crédits consacrés à la politique muséale
M. Bergeron: Oui, merci, M. le Président. Alors, Mme la ministre, j'aimerais qu'on parle de notre mémoire collective et qu'on parle de musées et de politique muséale. L'énoncé de politique muséale date du printemps 2000. Il y a eu des crédits annoncés au budget de 2001 et aussi dans le dernier budget de Mme Marois, le budget qui portait le vocable intéressant AGIR. J'aimerais savoir... Et j'ai toujours en tête les musées régionaux, parce qu'il y en a un dans ma région qui ne roule pas nécessairement sur l'or. Mais, de toute façon, en existe-t-il qui roulent sur l'or? Mais de quelle façon ont été alloués les crédits pour cette politique muséale, dans un premier temps?
Le Président (M. Beaumier): Mme la ministre.
Mme Lemieux: Merci, M. le Président. D'abord, je rappellerais que le gouvernement du Parti québécois s'est donné une politique muséale québécoise, adoptée au printemps 2000, qui s'appelait Vivre autrement la ligne du temps, une politique qui a pour objectif, donc, qui avait à ce moment-là pour objectif la relance du réseau muséal. À ce moment-là, notamment pour l'année 2000-2001, il y a des crédits particuliers qui avaient été affectés à cette politique et il y a toujours des crédits récurrents évidemment affectés à la politique muséale, et on a eu la chance d'avoir des crédits supplémentaires dans une période où il y avait des ressources budgétaires supplémentaires. Cette année, tout le monde le sait, c'est un petit peu plus juste. On avait quelques centaines de millions de dollars de surplus mais qui ont été complètement avalés par des difficultés avec la péréquation. Donc, la petite marge de manoeuvre budgétaire qu'on avait, on ne l'a pas. Mais, tout de même, lorsqu'il y a eu des crédits supplémentaires, il y a eu des sommes aussi qui ont été affectées.
Un des grands atouts de cette politique muséale, c'est d'avoir mis en place un système de reconnaissance et d'accréditation de nos musées. Il s'est mis en branle, ces dernières années, un processus d'évaluation des musées avec un certain nombre de critères où alors... Et, d'ailleurs, c'est le milieu qui avait demandé qu'on puisse arriver à regrouper les musées ou classer, pas au sens du patrimoine, là, mais classer les musées selon des critères de qualité, de performance, du fait que les musées rencontrent les standards qu'on doit avoir dans des musées ou dans des centres d'interprétation. Donc, le milieu, en 2000, dans la foulée de cette adoption de la politique, avait demandé une démarche d'attribution d'un statut de reconnaissance, et, depuis, il y a 70 musées qui ont donc été visités, carrément, évalués par des pairs, faisant en sorte que, lorsqu'on finance et on reconnaît un musée, on sait que ces musées remplissent les standards auxquels on doit s'attendre d'une institution muséale. C'est donc 70 établissements. C'est donc une assurance de qualité qui certifie que l'établissement satisfait certains standards, et les statuts de reconnaissance ouvrent une porte au soutien du ministère pour la réalisation de certains projets.
n(17 h 50)n Maintenant, des musées et des centres d'interprétation, il y en a sur tout le territoire québécois. Évidemment, dans un monde idéal, j'aimerais ça qu'on puisse en soutenir plus, etc., mais il y a des fois qu'on n'a pas toujours les ressources, comme gouvernement, pour pouvoir appuyer tout ce qu'on voudrait appuyer. Il y a quelques millions qui traînent du côté de nos amis d'Ottawa, puis on ne sait pas trop comment on va être capables de récupérer ces sommes-là. Alors, c'est le premier filtre, il faut avoir ce sceau de qualité pour pouvoir être financé par le ministère.
Il y a aussi toute une mécanique de classification des musées, les musées, par exemple, qui ont des vocations nationales, par rapport à d'autres qui ont une vocation régionale, tout n'est pas au même niveau. Il ne suffit pas d'être nécessairement dans la capitale ou dans la métropole pour être identifié musée national, mais il faut avoir une vocation nationale. Ça aussi, ça fait partie des critères, dépendamment de la mission et de la vocation. Voilà.
Globalement, il y a une bonne centaine d'institutions qui sont soutenues au fonctionnement. Quand on n'a pas nécessairement les moyens de soutenir au fonctionnement, que ce sont des musées reconnus, on essaie tout de même de leur donner accès à des projets. Par exemple, il peut arriver qu'un musée ne soit pas soutenu au fonctionnement mais soit admissible à nos projets, par exemple, de renouvellement d'exposition. Alors, ça, on essaie d'appuyer au maximum l'ensemble du réseau à partir des ressources que nous avons.
Peut-être que je terminerais, en disant qu'en gros l'investissement, par exemple, en 2001-2002, c'est plus de 10 millions de dollars. Il y a eu des sommes identifiées pour l'acquisition d'oeuvres, dont le Musée du Québec et le Musée des beaux-arts ? le Musée du Québec, notamment, une oeuvre de Riopelle, je pense que ça a été une décision, avec le recul, extrêmement judicieuse ? 2,8 millions qui ont été dirigés vers des musées dans des régions. Il y a une somme qui a été réservée pour des institutions muséales en région qui éprouvaient des problèmes particuliers financiers... des problèmes financiers particuliers. Et il y a eu 1 million de dollars à peu près pour des cas très exceptionnels, exemple: Musée d'art de Saint-Laurent, une problématique autour d'une exposition; le Musée, évidemment, d'arts et de traditions populaires, à Trois-Rivières, qu'on a fini par régler. Un peu de soutien à la Société des musées québécois.
On a évidemment accordé tout près de 2 millions de dollars sur le renouvellement des expositions permanentes, et ça, ce n'est pas banal parce qu'il arrive que, dans nos musées, il y ait des collections qui soient intéressantes, qui soient mises en valeur d'une telle manière ? vous savez, quand on entre dans les musées, il y a une manière de mettre en lumière des oeuvres et des pièces ? mais qui ont la même mise en valeur de cette collection depuis huit ans et quart. Alors, à un moment donné, si on veut avoir des gens qui viennent dans notre musée, il faut renouveler la manière de présenter notre matériel. Alors, ça, c'est un effort de 2 millions de dollars, c'est un coup de barre. Puis ça, on avait du rattrapage à faire, et là on est en train de rattraper un peu cette question-là d'avoir des expositions permanentes qui soient attrayantes, et, pour ça, bien, il faut les renouveler.
On a fait aussi des efforts sur l'exposition internationale. Ça aussi, il arrive qu'on a des projets de coproduction d'expositions qui sont conçus à Montréal, Montréal-Paris, Montréal-Londres, et là on a des projets Montréal-Mexique. Ce sont des expositions qui peuvent, après, tourner dans le circuit mondial des institutions muséales.
Le Président (M. Beaumier): Merci, Mme la ministre. M. le député d'Iberville.
M. Bergeron: Oui. Vous parlez de Montréal-Paris, ainsi de suite. Je pense, sans vouloir faire d'hérésie, que, en quelque sorte, les grands musées nationaux sont quand même dans une situation privilégiée. Et, par rapport aux musées régionaux, tantôt, quand vous avez fait l'énumération des crédits, vous avez dit: À peu près 2,8 millions aux musées régionaux, et, si le statut de reconnaissance ne donne pas accès à un programme de financement pour le soutien au fonctionnement, il peut donner accès à des projets.
C'est que la situation des musées régionaux est souvent très difficile. Est-ce qu'on peut penser que, pour les musées régionaux... Et je vous demanderais votre vision d'avenir pour les musées régionaux. Est-ce qu'elle est conditionnelle seulement à un ajout d'argent, un financement supplémentaire, ou il peut y avoir de nouvelles façons de faire pour que ces musées régionaux... Parce que, moi, j'ai toujours en tête le Musée du Haut-Richelieu, à Saint-Jean-sur-Richelieu. En québécois, ce musée-là, il tire le diable par la queue. De quelle façon des gens qui sont aux commandes des musées régionaux comme celui-là peuvent entrevoir l'avenir? Et de quelle façon la ministre de la Culture et des Communications entrevoit, disons, l'avenir de ce genre d'institutions là?
Le Président (M. Beaumier): Mme la ministre.
Mme Lemieux: Oui. Merci, M. le Président. C'est une question qui appelle à certaines remarques. La première, c'est que ce qui me guide par rapport à l'avenir, c'est le fait que les musées, et heureusement, puis je pense qu'on se compare... Quand on se compare, on réalise que le réseau des institutions muséales au Québec se positionne assez bien. Ce qui me guide, c'est le fait que les musées ne doivent pas être que quatre murs et un toit où on entrepose des objets. Ça doit être un lieu vivant, un peu comme les bibliothèques ne peuvent plus être strictement un lieu où on dépose des livres, ça doit être des lieux vivants, ça doit être une valeur ajoutée pour une communauté, pour une ville, pour une région, pour une métropole ou pour une capitale nationale, ça doit être interactif.
Il y a des projets extraordinaires qui se sont développés, ces dernières années, par exemple utiliser l'expertise des musées pour développer du matériel pour aborder des problématiques sociales. Le Musée de la civilisation, à Québec, a développé des trousses, des kits, des petites expositions itinérantes sur la toxicomanie. C'est vachement plus intéressant qu'à l'époque où, à l'école, un policier de la SQ venait nous faire une session sur la toxico. On se comprend? Alors, ça devient aussi de la... Les musées deviennent aussi une ressource pour aborder des questions d'intégration sociale, de problématiques sociales.
Deuxièmement, ce que je constate... Et je suis honnête et transparente lorsque je vous donne cette réponse. On s'est donné un processus d'évaluation des musées et d'accréditation des musées. Ça, là, c'est un grand progrès pour l'humanité parce que c'est équitable. C'est clair pour tout le monde, les standards auxquels on doit répondre. Mais ce que je constate... Donc, ça, c'est excellent. Et le geste qu'il nous reste à poser, c'est de bien accoler le niveau de financement à la performance ? oui, parlons d'un mot, de «performance» ? d'un musée. Et le problème qu'on a, comme c'est vrai aussi dans d'autres secteurs, c'est que souvent on a une base de financement historique qui ne tient pas compte de ces critères rigoureux d'évaluation, et là il y a des distorsions dans le système. Dit en d'autres mots, il y a des musées qui sont évalués comme n'étant vraiment pas performants selon les standards qu'on doit avoir et qui ont un financement plus élevé qu'ils devraient avoir selon leur niveau d'évaluation. Et, à l'inverse ? et c'est là qu'est la partie triste de la chose ? il y a des musées qui sont extraordinaires, qui remplissent tous les standards auxquels on peut s'attendre mais qui sont sous-financés eu égard à l'évaluation qu'ils ont.
n(18 heures)n Alors, la prochaine étape, c'est de régler ces distorsions-là. Et ça pourra vouloir dire de faire des choix aussi d'ajouts de ressources. J'espère être capable de le faire dans les meilleurs délais. Mais ça peut vouloir dire ça. Mais c'est ça, le progrès qu'il faut faire. Et puis c'est une démarche logique. Je crois qu'il fallait d'abord doter le milieu d'outils d'évaluation qui sont crédibles par le milieu. On n'évalue pas un musée si les gens ne sont pas d'accord avec les critères. Mais le milieu, il était prêt à ça. La démarche a été faite avec le milieu, on a la méthode, on a les critères, il faut ajuster le financement, maintenant, en fonction de ces critères objectifs d'évaluation.
Je terminerais peut-être tout de même en disant que, lorsqu'on regarde le soutien région par région, je ne voudrais pas que les gens aient l'impression qu'il n'y en a que pour Montréal et Québec. C'est bien évident que des grands musées comme le Musée d'art contemporain, à Montréal, le Musée des beaux-arts, le Musée du Québec, à Québec, le Musée de la civilisation, ce sont des gros morceaux qui ont vraiment des vocations nationales. Ceci étant dit, quand je regarde la liste des musées et des centres d'interprétation qui sont soutenus, région par région, il y en a, et, je dirais, pour toutes les régions, il y en a plus qu'un. Alors, je ne veux pas nécessairement reprendre l'ensemble des chiffres, mais, par exemple, le soutien au fonctionnement pour les musées dits en région, on parle d'à hauteur de 4,2 millions par année. La région de la Capitale-Nationale, il n'y a pas que des grands musées, par exemple, il y a aussi des initiatives un petit peu plus modestes mais qui sont fort intéressantes également. Alors, ça, c'est peut-être de l'information que je pourrais fournir sur les budgets de fonctionnement que je n'ai pas... Est-ce que c'était le fonctionnement, le 4,2?
Une voix: Oui.
Mme Lemieux: O.K. Le fonctionnement, d'accord. Alors, c'est l'information que je peux fournir. Mais tout ne va pas à Montréal et Québec, on se comprend. En tout cas, j'espère que j'ai été assez claire sur les chantiers qu'on a devant nous pour l'avenir, là, quand je disais de bien accoler les processus d'évaluation avec le niveau de financement.
Le Président (M. Beaumier): Merci, Mme la ministre. Alors, étant donné l'heure, on est 18 heures exactement, nous allons ajourner nos travaux à demain matin, 9 h 30, à la salle Papineau, alors que nous procéderons à l'étude des crédits consacrés à l'autoroute de l'information. Merci et bon retour, madame.
(Fin de la séance à 18 h 3)