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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le vendredi 18 avril 1997 - Vol. 35 N° 39

Étude des crédits du ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration


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Table des matières

Journal des débats


(Neuf heures onze minutes)

Le Président (M. Garon): À l'ordre! Comme nous avons le quorum, nous allons commencer nos travaux. Je rappelle le mandat de la commission pour cette séance, c'est de procéder à l'étude des crédits budgétaires des éléments 4 et 5 du programme 3 du ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration pour l'année financière 1997-1998: élément 4, Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse; élément 5, Commission d'accès à l'information.

M. le secrétaire, y a-t-il lieu d'annoncer des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Mulcair (Chomedey) remplace Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys) et M. Beaumier (Champlain) remplace M. Morin (Nicolet-Yamaska).

Le Président (M. Garon): Je vous rappelle que l'enveloppe de temps alloué est d'une heure, selon, je pense, ce qui a été convenu, pour l'étude du programme 3, élément 4, Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, et de deux heures pour l'étude de l'élément 5 du même programme, Commission d'accès à l'information.

Alors, comme nous commençons avec quelques minutes de retard, à moins que les députés décident de ne pas se prévaloir du temps, il faudra qu'on consente à dépasser pour finir à 12 h 10 à peu près, 12 h 12.

Alors, j'invite le ministre à faire sa déclaration d'ouverture. Je ne sais pas s'il doit y avoir deux déclarations d'ouverture ou une seule.

M. Boisclair: Je serai bref, M. le Président.

Le Président (M. Garon): Non, je veux dire, pour ne pas qu'on s'obstine par après, parce que, comme on va entendre les droits de la personne et, après ça, l'autre, est-ce que vous voulez faire des... il y aura des déclarations d'ouverture. Je veux vous entendre, si vous êtes d'accord pour dire: On fera une déclaration d'ouverture sur les droits de la personne et on en fera une autre tantôt.

M. Boisclair: Oui, c'est ça.

Le Président (M. Garon): M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Ça va.

Le Président (M. Garon): C'est comme ça? O.K. M. le ministre.


Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPDJ)


Remarques préliminaires


M. André Boisclair

M. Boisclair: Alors, M. le Président, MM. les membres de la commission, à titre de ministre responsable de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, j'ai le plaisir de procéder ce matin avec vous à l'étude des crédits pour l'année financière 1997-1998.

D'abord, M. le Président, vous me permettrez de vous présenter les personnes qui m'accompagnent. D'abord, à ma droite, Me Claude Filion, qui est président de la Commission, et, à mon extrême droite, M. Bernard Guilbert, qui est directeur des services administratifs. Vous aurez reconnu aussi, à ma gauche, M. André Bzdera, qui est attaché politique à mon cabinet.

Le livre des crédits indique que les crédits alloués à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse s'élèvent à 9 297 000 $. Le traitement et les salaires représentent 6 699 000 $ et le fonctionnement, 2 560 000 $. On se rappelle que l'an dernier, au moment où le gouvernement tentait par tous les moyens de réduire le déficit, la Commission avait pu bénéficier d'une augmentation de son budget de l'ordre de 1,5 %. Cette année, le gouvernement demande à la Commission de participer plus activement à la lutte contre le déficit gouvernemental en réduisant ses dépenses de 7,9 %. M. le Président, je dois rappeler que les employés de la Commission furent exclus l'an dernier du programme gouvernemental de départ assisté et que, par la même occasion, le ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration est venu en aide à la Commission afin d'alléger des compressions que le gouvernement avait initialement envisagées. C'est là un élément important. Nous pourrons revenir sur les efforts aussi que le ministère consacrera pour 1997-1998.

La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse vient donc de terminer sa première année depuis la fusion des deux anciennes commissions, soit la Commission des droits de la personne et la Commission de protection de la jeunesse. Cette fusion n'a aucunement porté atteinte à la présence de la nouvelle Commission dans toutes les régions du Québec. D'ailleurs, le président de la Commission, qui a commencé une tournée des bureaux régionaux l'automne dernier, a su attirer l'attention du public et des médias des régions sur la présence des bureaux régionaux de la nouvelle Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse.

La Commission, vous le savez, MM. les membres de la commission, a pour mission de veiller au respect des principes énoncés dans la Charte des droits et libertés de la personne et dans la Loi sur la protection de la jeunesse. Elle reçoit jusqu'à 35 000 demandes de toutes sortes chaque année et quelque 900 demandes donnent lieu à l'ouverture d'une enquête. La Commission consacre plus de la moitié de son budget dans les activités reliées au traitement des plaintes dont plus de la moitié portent sur le secteur du travail. Je remarque aussi que la Commission a l'obligation de favoriser un règlement à l'amiable et que le recours au Tribunal des droits de la personne ne devrait être envisagé que lorsqu'un règlement non judiciaire se révèle impossible.

La Commission est également mandatée par le gouvernement pour prêter assistance aux entreprises privées et aux organismes publics qui veulent établir un programme d'accès à l'égalité envers les femmes, les minorités visibles, les autochtones et les personnes handicapées. La Commission peut aussi émettre un avis en tout temps sur des questions touchant les droits inscrits dans la Charte ou dans la Loi sur la protection de la jeunesse. Dans les faits, cela veut dire que le personnel de la Commission vérifie toutes les lois, tous les règlements et tous les projets de loi pour s'assurer de leur conformité aux droits fondamentaux. La Commission a présenté l'an dernier plus de 25 avis et mémoires sur les projets gouvernementaux, et je peux vous confirmer que les avis de la Commission ont une grande influence sur les travaux des comités ministériels, ont une grande influence sur les décideurs du gouvernement.

J'aimerais maintenant aborder plus particulièrement la question des délais de traitement de plaintes déposées à la Commission. Au cours de la dernière année, sur quelque 900 dossiers traités, plus du quart des dossiers ont été fermés en moins de six mois et presque la moitié sont fermés en moins de 12 mois. Depuis plus d'un an, la Commission a fixé comme priorité la réduction du délai moyen et a consacré des énergies importantes à apporter des correctifs aux différentes étapes du processus de traitement de plaintes. Les résultats le démontrent clairement. J'aimerais souligner toutefois que le traitement d'un dossier inclut le temps consacré par les enquêteurs de la Commission à la recherche d'un règlement à l'amiable ainsi que le temps nécessaire pour porter le cas devant le Tribunal des droits de la personne. Dans d'autres affaires, la Commission a dû surseoir à son enquête en attendant que les procédures judiciaires soient terminées. Finalement, les dossiers de discrimination dans le logement sont toujours traités en priorité par le personnel de la Commission.

En terminant, et en tant que ministre responsable de la promotion des droits et libertés, j'aimerais aussi vous parler des programmes d'accès à l'égalité, car notre gouvernement tient à coeur de favoriser la représentation et la participation de tous et toutes dans les institutions de notre société. À l'occasion de la Journée internationale des femmes, le 8 mars dernier, la Commission soulignait que les femmes québécoises ont de plus en plus accès aux emplois offerts par les entreprises soumises au Programme d'obligation contractuelle. La Commission voulait aussi s'assurer, à juste titre, je le pense, que le Programme d'obligation contractuelle soit renouvelé. Ça a été là un avis rappelé par le président, c'était aussi dans le dernier rapport annuel de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse.

L'an passé, le gouvernement s'était engagé tout particulièrement en faveur de l'adoption d'une loi sur l'équité salariale visant à corriger les écarts salariaux dus à la discrimination systémique fondée sur le sexe. Ce faisant, le gouvernement répondait pour l'essentiel aux recommandations de la Commission des droits de la personne à l'effet qu'il faut s'attaquer à la discrimination salariale par des moyens qui répondent à la discrimination systémique mesurée. Le gouvernement a également demandé par voie législative à la Commission de la construction du Québec d'élaborer des mesures visant à favoriser l'accès, le maintien et l'augmentation du nombre de femmes dans cette industrie et, il y a quelques mois, une entente est intervenue entre la Commission et ses partenaires patronaux et syndicaux.

Par ailleurs, je peux vous dire, M. le Président, que le gouvernement n'a pas oublié les programmes d'accès à l'égalité et le Programme d'obligation contractuelle. Une équipe du ministère sous la direction du nouveau sous-ministre adjoint des relations civiques et sociales, M. Ernst Jouthe, qui est ici d'ailleurs, derrière moi, dans la salle, procède actuellement à l'évaluation de l'ensemble des programmes gouvernementaux d'accès à l'égalité. Je crois, par ailleurs, que le ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration est un lieu propice à une réflexion de cette nature et je compte sur l'expérience de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse pour nous aider à réviser nos programmes gouvernementaux.

J'ai indiqué au public à l'occasion d'une rencontre, le 21 mars dernier, qu'il était de l'intention du gouvernement de revoir à la fois l'ensemble des programmes d'accès à l'égalité et l'ensemble aussi du Programme d'obligation contractuelle. Je me suis aussi engagé à ce même moment, d'ici un an, donc d'ici le 21 mars prochain, à refaire le point avec les organismes partenaires qui s'intéressent à ces questions et à le faire de façon privilégiée aussi devant les membres de l'Assemblée nationale pour dire là où nous en sommes rendus. Il y a une volonté ferme, je me suis fixé une obligation de résultat et je pense que les propos du président de la Commission, les propos tenus, rapportés aussi dans le rapport annuel, doivent trouver écho dans le monde politique et dans l'univers de l'Assemblée nationale.

(9 h 20)

En terminant, j'aimerais aussi souligner le travail d'éducation et d'information accompli par la Commission. Les représentants de la Commission diffusent de nombreuses publications à travers le Québec, le plus souvent en réponse à des demandes d'information. La Commission a su développer des projets en collaboration avec d'autres intervenants, allant du ministère de l'Éducation aux réalisateurs d'émissions télévisées.

Alors, M. le Président, voilà donc les quelques mots d'introduction et je me rends disponible pour répondre aux questions des membres de la commission.

Le Président (M. Garon): M. le député de Chomedey.


M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Alors, je tiens à souhaiter la bienvenue à Me Filion et aux personnes qui l'accompagnent. Je dois dire, M. le Président, que Me Filion est en train de reprendre en main, comme il se devait, la Commission des droits de la personne et je le félicite pour l'excellent travail accompli jusqu'à date dans l'exécution de son mandat. La crédibilité de la Commission, la pertinence de ses interventions ont grandement augmenté depuis qu'il est arrivé et je pense que c'est un atout pour le Québec.

Je me permettrais de faire mes remarques d'ouverture avec une brève analyse de quelque chose qui, à mon sens, est un petit problème, à la première page des notes fournies à l'opposition et aux membres du gouvernement, qui est l'organigramme de la Commission des droits de la personne. Je serai bref, M. le Président, mais je pense que vous allez tout de suite comprendre pourquoi il y a une petite coquille là-dedans.

On nous présente la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. On nous présente le président, Me Claude Filion, les deux vice-présidentes, et le cadre-conseil, le secrétariat, le contentieux, la direction de ci, la direction de l'autre, le bureau de l'un, le bureau de l'autre. Et, avec un petit pointillé, dans un coin, en haut à gauche, on trouve une patente qui s'appelle l'Assemblée des commissaires. Or, M. le Président, si on regarde la loi, aux termes de laquelle la Commission existe, ça n'existe pas, l'Assemblée des commissaires. Il y a une commission. Il y a une Commission des droits de la personne, et cet organigramme trahit – et c'est dans le sens propre – une pensée administrative, bureaucratique, qui a tendance à imposer la manière de vivre ces choses-là à l'interne.

J'ai déjà eu l'occasion de le dire, notamment avec le Conseil du statut de la femme qui, jusqu'à récemment, nous présentait des avis en commission parlementaire, où c'était le travail d'Unetelle et Unetelle, et on expliquait au début que ça a été envoyé à l'Assemblée, justement, des conseillères, ou l'Assemblée des membres. Mais ce n'est pas l'Assemblée des membres, ça n'existe pas, l'Assemblée des membres du Conseil du statut de la femme. Il y a un Conseil du statut de la femme créé par l'État pour donner des avis sur un certain nombre de questions. Et je me permets de dire que, avec tous les compliments très sincèrement ressentis que je faisais à Me Filion tantôt, ça n'a rien à voir avec le fond de ces analyses que je viens de lui montrer là. Mais, comme personne ayant déjà eu à présider un organisme de ce gouvernement pendant six ans, quand je suis arrivé à l'Office des professions du Québec, M. le Président, j'avais un organigramme où il y avait le Conseil des membres de l'Office des professions du Québec. J'ai cherché en vain, dans la législation, où c'était, cette affaire-là, le Conseil des membres de l'Office des professions du Québec. Parce que c'est tout à fait naturel, les gens qui y travaillent se voient comme étant l'Office, le Conseil, la Commission, avec cette petite affaire là en haut à gauche, avec des pointillés, qui est là, mais qui n'est pas vraiment là parce que les lignes solides, ça, c'est entre le secrétariat de ci, la direction de l'autre, le bureau de l'un.

Je me permets juste de faire cette petite mise en garde, amicale et sans reproche, et surtout sans jugement, au président, parce que c'est la Commission qui est chargée non pas par un ministre ou le Conseil des ministres, mais bien par l'Assemblée nationale de faire un certain nombre de choses: il ne faut pas qu'il se laisse mettre en pointillé, en haut à gauche ou en haut à droite, selon le cas, mais, dans le cas qui nous occupe, c'est la manière dont c'est présenté.


Discussion générale


Fusion de la Commission des droits de la personne et de la Commission de protection des droits de la jeunesse

Ma première question pour le président de la Commission, M. le Président, concerne justement cette fusion. J'aimerais savoir ses impressions personnelles suite à son expérience, parce que c'est lui qui a eu à gérer ce changement-là pendant le plus de temps que c'était en vigueur. Depuis que ça a été fait, quels sont les problèmes, les défis auxquels on a eu à faire face, et qu'est-ce qui doit être fait pour les aider à surmonter ces défis-là?

M. Filion (Claude): Alors, je voudrais vous remercier, M. le député, de vos bons propos et sachez que nous allons continuer d'investir nos meilleures énergies en collaboration avec le personnel de la Commission, les cadres dont le dévouement est total à l'égard, vous le savez, des principes et des valeurs de la Charte des droits et libertés. Je le dis souvent, on a une mission qui est extrêmement noble. Les gens de la Commission sont fiers de participer à l'exécution de cette mission-là. Nous allons continuer dans le meilleur de nos capacités.

Sur l'organigramme, je prends bonne note des excellentes remarques du député. Je dois dire que c'est noté.

En ce qui concerne la fusion, M. le député, voici un peu mon diagnostic après quelques mois, plus d'un an. D'abord, c'est un mariage de raison au départ, mais c'est un mariage de raison qui avait été précédé d'un peu de fréquentation en région parce que, vous le savez, on avait certains bureaux régionaux où on partageait le secrétariat, où la Commission des droits de la personne partageait le secrétariat avec la Jeunesse. Donc, les deux organismes avaient appris à se connaître un peu, presque en cachette, en région. Et est arrivée la fusion qui a été rendue possible notamment à cause du fait que, la Commission des droits de la personne s'étant en quelque sorte délestée de son rôle judiciaire ou quasi judiciaire dans la réforme de la fin des années quatre-vingt... ça faisait en sorte que la fusion pouvait avoir lieu et elle a eu lieu. Alors, je peux vous dire ceci: c'est en train de devenir un mariage d'amour en ce sens que les deux missions, les deux mandats maintenant se vivent fort bien.

Alors, si on prend justement l'organigramme que vous aviez devant vous, on a demandé, par exemple, à la Direction des enquêtes de faire en sorte que les enquêteurs, bien que spécialisés évidemment – certains proviennent du secteur Jeunesse, d'autres du secteur Droits de la personne – que les enquêteurs puissent faire preuve de polyvalence. Donc, on demande aux enquêteurs Charte de faire des enquêtes Jeunesse et des enquêteurs Jeunesse de faire des enquêtes Charte, et ça va relativement bien, surtout en région. Mais, même à Montréal et à Québec, on peut dire que cette polyvalence-là, on est en train de la susciter. Je crois que c'est le premier point que je tiendrais à mentionner, c'est un effort à l'interne pour développer la polyvalence de notre personnel en ce qui concerne les droits de la personne et les droits de la jeunesse. On sait que c'est deux domaines tout à fait différents.

Dans l'exécution des mandats, une enquête Charte à une enquête Jeunesse ne se fait pas dans le même esprit. Et soutenus ou, je devrais dire, en soutien à cette exigence de polyvalence vis-à-vis en particulier nos enquêteurs, mais vis-à-vis l'ensemble du personnel, on met de l'avant de la formation. On a fait une première session de formation, mais je me suis rendu compte que c'était insuffisant. Donc, on est en train de susciter une deuxième vague de formation où on va un peu plus au fond des choses. Donc, pour les enquêteurs issus du milieu Charte, on va un peu plus au fond de la Loi sur la protection de la jeunesse et la Loi sur les jeunes contrevenants en ce qui concerne notamment l'identification des intervenants dans ce milieu du service social, vous savez, où il faut être très familier avec les sigles pour être capables d'opérer dans le milieu de la protection de la jeunesse et dans le milieu social en général.

Du côté des enquêteurs qui proviennent du secteur Jeunesse, il faut les familiariser davantage avec les principes et les valeurs de la Charte. Par exemple, il y a des notions extrêmement complexes, comme l'accommodement raisonnable. Vous le savez, dans les cas de religion, d'âge et de handicap, l'accommodement raisonnable est une notion peut-être facile à comprendre, mais sans contrainte excessive. Là-dessus, donc, on a initié une deuxième vague de formation. Donc, polyvalence, formation sont les deux clés.

Alors, au niveau structurel, je passe ça un peu à la fin peut-être, et je dois vous signaler une chose, et je profite de mon passage à l'Assemblée nationale pour le signaler, c'est que la fusion est bien réalisée, mais il y a juste un problème, c'est l'article 58.2 de la Charte qui continue à créer des distinctions entre justement les commissaires dont vous parliez tantôt, leur provenance. Il crée des distinctions selon leur provenance. Est-ce qu'ils sont issus du milieu Charte ou issus du milieu Jeunesse? Alors qu'on demande à notre personnel d'être parfaitement polyvalent et d'intégrer les deux fonctions, lorsque j'arrive en comité de plainte ou à l'Assemblée des commissaires, je suis soumis à une règle de double majorité, c'est-à-dire, je dois avoir une double majorité de commissaires puis, en plus de ça, une double majorité de commissaires du secteur d'où provient le type de problématique que nous sommes en train d'étudier.

(9 h 30)

Alors, avec votre permission et votre question, je profite donc de mon passage à l'Assemblée nationale pour vous signaler que ce serait un type de modification que nous apprécierions à un moment donné recevoir du législateur pour que, structurellement parlant, cette fusion, cette intégration puisse non pas uniquement se faire par en bas, mais se faire également par en haut. Et je dois vous dire honnêtement que les commissaires que vous avez nommés, à l'Assemblée nationale, sont tout à fait bien intégrés à leurs deux mandats et donc n'ont aucune espèce d'objection. Au contraire, ça a été discuté à l'Assemblée des commissaires et ils sont d'accord pour que, si l'Assemblée nationale l'agrée, on puisse modifier, donc, tout ce qui découle de cette double appartenance à l'un ou l'autre. Alors, ça, c'est sur le plan structurel.

Sur l'autre plan, dans le fond, aujourd'hui, dans le dernier plan peut-être, c'est sur le plan pratique, c'est qu'il faut comprendre que, à cause de l'époque que nous traversons où les ressources deviennent rares, on demande plus à notre personnel. C'est exigeant. Et ce n'est pas juste pour nous, hein, vous le savez à coeur de journée, c'est exigeant pour tout le personnel. Et notre personnel a besoin, comme tous les autres, il a besoin finalement, dans cette période un peu trouble, au niveau des gens qui servent des intérêts publics et qui font du service public, en quelque sorte, ils ont besoin tout simplement d'être reconnus un peu, d'être traités adéquatement. Sur le plan de la reconnaissance des services qu'ils rendent à la société, les gens chez nous ne regardent pas leurs heures, on travaille fort, puis, comme je le dis, on est imbus de notre mission.

Donc, c'est à peu près les trois aspects. On leur demande à eux d'être très polyvalents, on leur demande des efforts. En région, par exemple, dans le Bas-Saint-Laurent–Gaspésie, à cause du secteur un peu difficile sur le plan budgétaire, j'ai un professionnel, M. le député, qui couvre la région – vous allez saisir vite – du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie, un professionnel, il n'y a pas de secrétaire. Je ne peux pas actuellement... Mais il couvre le secteur Jeunesse et le secteur Charte, il doit connaître les deux systèmes de droit tout à fait bien et il est seul. Donc, il faxe son travail à la secrétaire de Sept-Îles qui le tape, ou à Québec, puis lui renvoie. Bref, on leur demande beaucoup à nos employés. Il faut les reconnaître adéquatement, il faut reconnaître cet effort qu'a requis la fusion. Alors, voilà.

M. Mulcair: Je suis content pour cette réponse détaillée et la recommandation qu'elle contient, parce que je pense que, si cette double majorité a été requise, c'est qu'il y avait énormément d'appréhensions lors de la fusion. Et je pense que ce que vous étiez en train de nous dire, c'est que c'est assez rodé maintenant qu'on peut s'attendre à la même polyvalence, puis j'ai tendance intuitivement à être d'accord avec vous.

Je tiens juste à dire aussi que, de notre côté, le fait qu'il y a de plus en plus de signalements auprès de la Direction de la protection de la jeunesse, la liste d'attente augmente, notamment en Montérégie, la pauvreté augmente – ça, on le sait aussi – et les problématiques sociales qui sous-tendent tout ça sont de plus en plus graves, violence conjugale, mais on a moins de ressources... Je pense qu'il faut dans cette fusion, donc, faire extrêmement attention, parce que je constate que vous avez juste deux recommandations qui ont été faites au cours de l'année dans le secteur Jeunesse. Alors, peut-être un peu plus d'activités là-dedans nous permettrait de regarder plus attentivement.


Intervention de Mme Nicole Duplé en commission parlementaire

Mais je vois que le temps avance, puis il y a un bon nombre de sujets que je voulais couvrir avec vous, et un que je vais couper très court. Tout simplement vous référer aux débats de l'Assemblée nationale en commission des institutions, 24 septembre 1996, pages 15 et 16, juste vous référer à un échange – je vous laisserai le temps, en dehors de la commission, de prendre connaissance de cet échange-là avec un membre de la Commission, Mme Nicole Duplé – et vous dire, un peu à la suite de ma première constatation concernant la manière de concevoir l'organisation, qu'il serait intéressant, à mon point de vue, que la Commission elle-même regarde avant que quelqu'un vienne faire une présentation. Et je constate que c'est vous qui faites vos présentations et je suis sûr que vous consultez bien la Commission. Par le passé, selon l'organisme, parfois c'était un membre, souvent un membre des affaires juridiques – le droit mène à bien des choses, y compris le droit de prendre parole au nom d'un organisme nommé par le gouvernement. Et je vous invite à la plus grande caution lorsque quelqu'un vient parler au nom de la Commission. Parce que, dans cet échange-là, vous constaterez une bonne chicane d'avocats, mais quand même un problème, à mon sens, de fond où quelqu'un, issu d'un certain milieu, dit: Oui, mais, pour les principes de la Charte, il ne faut quand même pas, pour des problèmes hypothétiques, disait-elle, compromettre une belle réforme du droit administratif, parce que, nous, les profs de droit administratif, ça fait bien longtemps qu'on a hâte d'avoir une réforme du droit administratif.

Je suis sûr que, si ça avait été débattu par les membres de la Commission, la manière de le présenter aurait été un petit peu plus nuancée et peut-être aurait donné préséance à certaines préoccupations. En anglais, on dirait «not to dismiss them up», de ne pas les rejeter trop simplement en disant: Ouf! vous savez, ouais... En tout cas, la manière de voir la notion que la Charte, c'est la loi des lois, je vous avoue que c'est très continental comme manière de voir et ça ne correspond pas à notre notion d'une charte qui est constitutionnelle, qui est imbriquée, même si c'est quasi constitutionnel ici, dans le cas du Québec.

Je vous permets de prendre le temps de parcourir ça. Je ne commencerai pas une longue discussion là-dessus ce matin. Je tenais à vous le signaler. Comme membre de cette commission, ça me préoccupe des fois de voir que la manière d'une personne de présenter peut être perçue comme ayant fait l'objet de quelque chose qui a été débattu, et ce n'était pas le cas ici.


Voyages hors Québec

Une des choses, et ça tombe bien avec un de vos propos... Je voudrais vous demander de m'expliquer quelque chose qui est contenu dans vos crédits, dans votre budget, c'est la liste des voyages hors du Québec. S'il vous plaît, si vous pourriez vous référer à cette page-là. Vous venez de nous dire, à très juste titre, M. le président, que les ressources sont rares et qu'on demande plus à notre personnel. Je suis totalement d'accord avec vous. Vous vous êtes sans doute préparé pour la question parce que c'est assez flagrant. Avec une coupure de 7,9 % à la Commission, on a ici une augmentation de 69 %, d'une année à l'autre, dans les voyages hors du Québec. Je vous avoue que ça m'étonne un peu. Puis, si on regarde vers le milieu de la liste, c'est le sixième item, le numéro, c'est 477359, Mme Alberte Ledoyen est partie à Athènes, Grèce, du 13 au 18 octobre 1996, en stage de formation, pour un total de 2 500 $, plus ou moins. Je ne reproche à personne son droit d'aller faire de la formation à l'Association d'éducation comparée en Europe, mais je vous avoue qu'avec ce que vous venez de m'expliquer, dans le Bas-du-Fleuve, une seule personne qui doit couvrir tant de choses, puis ça, c'est chez nous, puis c'est en plein coeur de votre mandat... Qu'est-ce qu'on a eu pour nos 2 500 $ en envoyant Alberte Ledoyen à Athènes, M. le président?

M. Boisclair: M. le Président, je laisserai le soin au président de répondre, mais je voudrais juste qu'on se comprenne bien sur les efforts importants qu'on a faits au ministère pour sauvegarder les organismes de défense de droits. Je voudrais juste être le plus transparent possible et donner au député et aux membres de la commission toute l'information sur les budgets.

Les crédits initiaux de 1996-1997 étaient de 10 097 000 $. En cours d'année, il y a eu une compression de 78 000 $, ce qui fait des crédits révisés de 1996-1997 de 10 018 000 $. Donc, c'est de là qu'on part en cours d'année. Le Trésor nous demandait des compressions de 10 %, ce qui aurait fait 978 000 $. Ce que l'organisme, uniquement sur le 978 000 $, va absorber dans les faits, c'est 331 000 $. Le solde de 647 000 $ va être absorbé par l'ensemble du portefeuille du ministère. Je voudrais juste être sûr que les gens me comprennent bien là-dessus parce que c'est important. On fait vraiment des gros efforts pour éviter qu'il y ait des compressions. Sur le 331 000 $ que l'organisme absorbe, nous finançons 225 000 $ sur un programme de départs assistés. Donc, il y a des efforts importants qui sont faits pour sauvegarder le budget de la Commission. Et, à ces chiffres, s'ajoute la compression de 6 % demandée pour l'ensemble des partenaires des secteurs public et parapublic, ce qui fait 393 000 $. Donc, le 7,9 %, dans les faits, il est beaucoup moins élevé que ça. J'ai donné comme orientation ministérielle, dans la préparation des budgets et des crédits... j'ai demandé à ce que les organismes de défense de droits soient véritablement protégés le plus possible. Alors, le 7,9 %, M. le député, dans les faits, ne se traduit pas tout à fait de la même façon, sur la foi des chiffres que je vous ai présentés.

Pour la question précise...

(9 h 40)

M. Mulcair: M. le Président, je veux juste demander au ministre, par votre entremise, s'il est en train de nous dire que, selon lui, le fait d'avoir fait certaines compressions en cours d'année par rapport au budget initial fait en sorte qu'entre deux budgets la réduction est moins importante. Ce avec quoi on a commencé l'année dernière et ce avec quoi on commence cette année, il y a une réduction de 7,9 %. C'est ça, notre propos. Qu'il y ait eu d'autres compressions en cours d'année qui ont fait que, vis-à-vis de la compression, c'est-à-dire le budget renouvelé en cours d'année, la différence soit moindre que 7,9 % par rapport au budget qu'on a devant nous aujourd'hui, soit. Mais ce qu'il faut faire comme point de comparaison, c'est l'un à l'autre. Parce que, si sa manière de faire les choses devait exister, le 5 700 000 000 $ dont on nous parle tout le temps va être révisé drastiquement parce que c'est en cours d'année que ça a été modifié, le budget.

M. Boisclair: Là-dessus, j'apprécie beaucoup le ton du député puis je veux vraiment donner les chiffres que j'ai. En cours d'année, M. le député, il y a eu 78 000 $ de compressions, en cours de l'année 1996-1997. Ce sont des compressions qui nous ont été demandées en cours d'année par le Trésor. Donc, somme toute, là, c'est minimum, c'est 10 018 000 $ en début d'année 1997-1998 que la Commission avait à sa disposition. Maintenant, le Trésor nous demande des compressions de 10 %. Si j'avais agi de façon bête et de façon paramétrique, c'est 978 000 $, ce n'est pas loin de 1 000 000 $ que j'aurais dû enlever au budget de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, si j'avais agi de façon paramétrique. Sauf que, sachant les efforts qui avaient été faits à la Commission, sachant aussi les dispositions qui sont celles de la Charte, sachant aussi les conditions particulières auxquelles sont soumis les employés de la Commission qui ne sont pas membres de la fonction publique comme vous le savez, ce qu'on a décidé de faire, c'est d'absorber une partie importante dans l'ensemble du portefeuille de ces compressions. Du 978 000 $, nous avons absorbé 647 000 $, et nous avons, en plus de ça, absorbé 225 000 $ de dépenses, puisque nous finançons – et c'est intéressant, M. le Président – à même les crédits du ministère, un programme de départs assistés pour aider la Commission pour la soutenir dans ses efforts de gestion du personnel. Je tiens tout simplement à rappeler ça.

M. Mulcair: M. le Président, je tiens juste à dire au ministre qu'il est en train de... D'abord, le 7,9 %, il est bel et bien là, on se comprend. Mais, effectivement, et j'ai eu l'occasion de le dire à son collègue, je veux être correct et complet et lui dire que lui, l'actuel ministre, avait bien raison lorsqu'il dit que et l'Office de la protection du consommateur et les organismes comme la Commission des droits sont mieux protégés dans ses mains qu'ils avaient été auparavant, puis il n'y a pas de problème avec ça. C'est sûr qu'une coupure «across the board» de 10 % aurait fait plus de mal à la Commission des droits de la personne qu'à d'autres, mais quand même, 7,9 %, c'est important.

Puis ma question était quand même de savoir: Comment justifier une augmentation de 69 % dans les voyages hors du Québec? Et je voulais savoir: Qu'est-ce qu'on avait eu... Moi, je n'ai rien contre, là, comprenez-moi bien. Ça existe des conférences, des colloques où, et de un, on plante le drapeau puis on fait des contacts puis on peut expliquer notre système et apprendre le système de l'autre, et de deux, très souvent, sur le plan purement technique, et là je fais référence à ce qui existe dans le domaine des professions... il y a un truc qui s'appelle Council on Licensure, Enforcement and Regulation qui fait un travail superbe pour faire de la formation des enquêteurs en matière d'inconduite professionnelle. C'est la seule place au monde qui fait ça. Ils donnent des cours, c'est extrêmement bien. De plus en plus de professions d'ici en envoient là-bas, parce qu'on a eu des échanges. Ça existe. Donc, on peut apprendre. Mais je vous avoue, là, je m'appelle bien Thomas, je me demande: C'est quoi que j'ai eu pour 2 500 $ en Grèce au mois d'octobre pour l'éducation comparée? Qu'est-ce que ça a donné concrètement pour l'application de nos lois et de notre Charte des droits? Qu'est-ce que Mme Alberte Ledoyen a ramené au Québec? Qu'est-ce que ça nous a apporté?

M. Filion (Claude): Rapidement, sur les voyages hors Québec. Évidemment, la préparation nécessaire pour venir ici ce matin, et quotidiennement à la Commission, je dois dire que chaque cenne, on la regarde à la Commission. Mais j'ai fait faire – peut-être qu'on peut le distribuer, je ne sais pas – une espèce d'état des voyages hors Québec depuis 1993. Rapidement. En 1993-1994, 31 500 $; en 1994-1995, 18 100 $; en 1995-1996 – c'est l'année la plus basse – 13 000 $; en 1996-1997, 21 000 $. Alors, bref, ça varie, mais on a une diminution de 50 % par rapport à 1993. Et les voyages hors Québec, évidemment je leur ai expliqué, les gens le savent, tous les membres de la Commission le savent qu'on a des limites budgétaires importantes, de sorte que c'est pour ça que ça a diminué de 50 %, puis on surveille ça très attentivement.

Maintenant, il y a une petite chose... D'abord, il faut que je respecte un peu la tradition de la Commission; 31 000 $ puis, avant ça, c'était encore plus fort. Parce que le problème, c'est qu'en droits de la personne, comme vous avez mentionné si bien de votre expérience au niveau de l'Office des professions, c'est un peu la même chose, en droits de la personne au Québec, là, on échange hebdomadairement avec la Ligue des droits et libertés, avec des intervenants dans les universités, etc., on organise des colloques. Mais notre formation, il faut aller en partie la chercher à l'extérieur, en partie seulement, pas exclusivement, mais en partie. Primo.

Secundo, la Charte nous fait obligation à l'article 71.9 – comme vous le savez, dans notre mandat, c'est le dernier alinéa, mais, heureusement, au niveau du budget, ce n'est pas grand-chose – mais nous donne obligation, nous fait obligation de coopérer avec l'extérieur. Puis je dois dire une chose avec beaucoup de fierté, c'est que la Commission des droits est en train de développer une expertise internationalement reconnue en matière d'éducation aux droits, la preuve étant que cette année, à Strasbourg, à l'Institut international des droits de l'homme, nous serons maintenant reconnus comme étant les formateurs aux droits, donc nous donnons, pour la deuxième année, un séminaire de formation aux éducateurs des droits de la personne qui viennent d'Afrique, d'Asie et d'Europe. Donc, la Commission est en train de se développer un petit créneau en matière internationale, non pas dans tous les secteurs des droits de la personne, parce que ce n'est pas possible, mais au niveau de l'éducation aux droits. Et dans ce cas-ci comme dans l'ensemble, une partie en tout cas, on essaie de développer. Dans certains cas, comme vous le savez, il y a plusieurs dépenses et on peut parfois trouver un financement; notamment par l'ACDI, ça peut arriver; les Affaires internationales, ça peut arriver également. Bref, on essaie de se trouver un financement. Dans ce cas-ci...

M. Mulcair: M. le Président, le temps file, et je remercie le président de la Commission de cette longue explication, mais je suis toujours sans réponse pour atteindre Grèce.

M. Filion (Claude): Alors, dans le cas de Mme Ledoyen...

M. Mulcair: Non, ce que je veux demander, M. le Président, vu qu'il nous reste très peu de temps, je demanderais au président de la Commission de bien vouloir nous écrire, nous expliquer. Je suis sûr que ça va être plus simple comme ça, de nous écrire pour nous dire ce qu'on a eu pour notre argent pour le voyage de Mme Ledoyen.

M. Filion (Claude): D'accord.

M. Mulcair: Mais, avec toute cette éducation, je me permets de vous dire que vos connaissances en matière de géographie font un peu défaut parce qu'à l'item 477354 vous placez Dublin dans l'Irlande du Nord, puis je vous demande de bien vouloir le corriger.

M. Filion (Claude): D'accord.

Le Président (M. Gaulin): Vous voulez peut-être déposer le document dont vous parliez.

M. Filion (Claude): Au secrétariat sur... Alors, on ne corrigera pas la mappemonde, mais on va expliquer 477359. C'est bien. Au secrétariat de la commission.

Le Président (M. Gaulin): Merci.


Protection de la vie privée

M. Mulcair: Maintenant, un des sujets qu'on voulait aborder, et on profite des dernières minutes pour l'aborder avec vous parce que ça va se poursuivre avec le prochain groupe qui va accompagner le ministre. Au cours des derniers mois, on a eu des discussions fort intéressantes en commission parlementaire sur une idée qui existait, d'avoir une carte d'identité universelle, et je vous avoue que c'est Le Devoir , dans un éditorial, qui, à mon sens, a vraiment cloué l'affaire en disant que c'est une réponse à un problème qui n'existe pas, pour ce qui est de cette carte d'identité. Mais, au cours de notre travail en commission sur la question, il y a eu des échanges très, très intéressants au cours desquels on a évoqué la solution qui avait été trouvée pour résoudre un problème vraiment vexant en matière des droits de la personne. Et le problème, c'était que, dans sa version, dans son incarnation antérieure, on avait une Commission des droits de la personne qui tantôt faisait des enquêtes, tantôt faisait des poursuites, puis tantôt entendait des causes, puis tout était dans un bloc, puis, pour résoudre ce problème d'intérêts en conflit perpétuel – on a maintenant un Tribunal des droits de la personne – on a vous devant nous avec le mandat que l'on connaît.

Au cours de nos conversations, des intervenants de part et d'autre, y compris le président lorsque c'était le député de Lévis qui était à la présidence, on a commencé à analyser ça à l'égard de la Commission d'accès à l'information et de protection de la vie privée. Parce que, si on pouvait dire que c'était bicéphale, on peut presque, dans le cas de la Commission qui va vous suivre ici ce matin, dire que c'est bicéphale et schizophrène parce que non seulement il y a les deux mandats, enquête et entendre des causes, mais la moitié de son mandat consiste à cacher de l'information pour protéger la vie privée et l'autre consiste à aller la chercher, accès à l'information gouvernementale. Je vais vous dire qu'ils vivent aujourd'hui, et c'est de plus en plus évident avec les analyses qui sont faites par des gens qui regardent ça objectivement, qui n'ont pas un parti pris nécessairement idéologique, mais des gens regardent ça de plus en plus... même si on peut se taper les bretelles et dire: Le modèle québécois, ci puis ça, il y a quelque chose de fondamentalement brisé dans cette manière de faire.

(9 h 50)

Et la question que j'ai pour vous ce matin arrive à brûle-pourpoint, et je ne vous en tiendrai pas rigueur si vous ne pouvez pas donner une réponse détaillée, mais je vous demanderais de commencer à réfléchir à ça, parce que, comme je vous dis, c'est de part et d'autre, ici à l'Assemblée nationale, qu'on réfléchit à ça: Est-ce que vous pensez qu'il serait temps qu'on commence à étudier la possibilité d'élargir votre mandat une nouvelle fois? Et je m'explique.

Vous savez qu'est-ce qui nous a amenés le plus là-dessus? C'est le titre boiteux de votre Commission, qui a déjà été signalé par moi-même et par d'autres en commission parlementaire, voilà deux ans, quand on était en train de regarder cette fusion-là. Parce que ça fait quand même curieux de dire qu'on a une Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, comme si la jeunesse, ce n'étaient pas des personnes, ou comme si les deux droits ne marchaient pas ensemble. Je connais la raison politique qui a prévalu lors de la confection de ce titre-là. Les uns se préoccupaient que les droits jusqu'alors garantis par un organisme distinct, les droits de la jeunesse, devaient être identifiés clairement dans le titre. Mais montrez ça à quelqu'un dans un colloque sur l'éducation comparative en Grèce: La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, c'est quoi, cette bebelle-là? Ça fait vraiment curieux, hein! Alors, tant qu'à être là-dedans, je soumets à votre réflexion une chose qui a été soulevée dans les termes, comme j'ai dit, les plus neutres possible ici.

Est-ce que l'aspect protection de la vie privée qui, à mon sens, est un droit du citoyen... La protection de la vie privée, c'est de plus en plus dans les nouvelles; tout le bon débat qui entourait la question d'une loi antigang, les uns disant: «Pitchons» par-dessus bord la Charte des droits, on va aller enquêter sur tout le monde, on va décider qui est membre d'une gang, on va écouter tout le monde. C'est facile, hein, quand il y a un truc qui trouble la population, la première chose qu'on a tendance à jeter par-dessus bord, c'est les droits. Mais les droits sont vraiment, sans faire de la philosophie de bas étage, c'est vraiment le fondement de notre société de droit. Alors, est-ce que ce droit de la vie privée est quelque chose, pour ce qui est de l'aspect enquête et tout ça, qui pourrait, à votre sens, théoriquement, se greffer ou faire un amalgame avec ce que vous avez déjà comme mandat? Peut-être que le ministre peut aussi répondre là-dessus, ou vous, comme président de la Commission. C'est vraiment ouvert comme question.

M. Boisclair: Alors, écoutez, M. le Président, mon point de départ n'est pas celui du député de Chomedey, mais il va m'amener à faire une réflexion sur la question qu'il soulève. Lorsque j'ai eu la responsabilité de la Commission, et de la Commission d'accès à l'information aussi, rapidement nous nous sommes retrouvés... ma première expérience comme ministre, lorsque je siège à des comités ministériels... Vous savez que les projets de loi, avant d'aller au Conseil des ministres, passent devant un comité ministériel et, à ce moment, nous discutons et nous débattons des avis. À plusieurs reprises, par exemple, nous avons reçu des avis qui nous venaient soit de la Commission des droits de la personne, de la Commission d'accès à l'information, de la curatelle publique, du Protecteur du citoyen, et là, à un moment donné, bien, il faut faire un arbitrage.

Je vous indique que la première grande différence entre la Commission d'accès à l'information et la Commission des droits de la personne, c'est que la Commission des droits de la personne intervient uniquement en commission parlementaire. La Commission des droits de la personne, à ma connaissance, n'est jamais intervenue en amont du processus législatif, donc en amont d'une décision à venir du Conseil des ministres, contrairement à la Commission d'accès à l'information qui, elle, a accès à un certain nombre de mémoires par le biais du Conseil exécutif et qui est capable d'intervenir, par exemple, entre le moment où une décision est prise au Conseil des ministres et, ensuite, prise par le Comité de législation, parce que vous savez que, du Conseil des ministres, on va au Comité de législation. Donc, c'est là qu'il m'est apparu une grande, une différence importante entre les deux commissions.

Et pour ajouter à ce que le député a appelé la schizophrénie, la Commission d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels se retrouve souvent dans une situation où elle donne des avis au gouvernement au moment où se prennent des décisions et se confectionnent des décisions, avant la décision du Conseil des ministres, entre la décision du Conseil des ministres et le Comité de législation, et, parfois, le gouvernement se retrouve dans une situation où il invoque même une recommandation de la Commission d'accès à l'information pour défendre un geste qui a été posé.

Je vous rappelle tout le débat qu'il y a eu avec le ministère du Revenu. Vous vous souvenez, tout récemment...

M. Mulcair: L'arrêt...

M. Boisclair: Vous vous souvenez des débats et, finalement, on a pu arriver à une solution qui était acceptable à la Commission d'accès à l'information.

M. Mulcair: Mais, là-dessus, M. le Président, je trouve que le ministre est en train de soulever un bon point. Puis, quand je disais tantôt, dans le cadre de la discussion entourant une éventuelle loi antigang, que la première chose à être «pitchée» par-dessus bord, c'est ces notions-là, parce qu'on dit: Hou! on a peur, il y a des bombes qui éclatent, faites quelque chose... Mais, à mon sens, puis je regarde la liste qui a été confectionnée par la Commission des droits, aucune mention d'un avis sur le projet du ministre de la Justice pour une loi antigang. Donc, ou ils n'ont pas pris l'initiative pour le faire ou le ministre ne l'a pas demandé, et ça, à mon sens...

Je reprends l'exemple du ministre. Le ministre est en train de nous parler du ministère du Revenu. Ce n'est pas lui qui a dit ça, je vais lui citer une anecdote très informelle. On sortait de commission parlementaire et je parlais avec l'actuel ministre du Revenu, l'ancien président de l'Assemblée, M. Bertrand, je lui dis: Je trouve ça regrettable votre manière de voir les choses; vous dites que c'est normal de vouloir aller fouiller dans toutes ces choses-là; je trouve que vous y allez un peu, vous ratissez un peu large. Vous savez ce qu'il m'a répondu? J'ai trouvé ça révélateur. Il a dit: Si on n'a rien à se cacher, on ne devrait pas être inquiet si on vient regarder dans tous ces documents-là, dans tous ces éléments-là. Et c'est le même raisonnement qui peut être utilisé pour une loi antigang où on dirait l'appartenance à un gang, puis tout ça. Mais: Oui, si on n'a rien à se cacher, on ne devrait pas avoir peur si on élimine des droits. Mais on doit toujours avoir peur de perdre des droits, que ce soit dans le domaine de l'accès à l'information ou dans le domaine d'une loi antigang qui viendrait brimer, théoriquement du moins, des droits fondamentaux. C'est un peu à ça qu'on pense. Parce que je trouve l'existence d'un organisme comme le vôtre... maintenant, je trouve la manière de faire beaucoup plus saine que ce qui existait auparavant, où je connais... j'avais beaucoup de monde dans ce milieu-là, des amis qui étaient commissaires à l'époque. Mais c'était cette manière d'essayer de garder une main dans la partie enquête, une autre dans la partie application, une autre dans la partie audition des causes. Ça ne marchait pas.

M. Boisclair: Et il y a le fameux arrêt – je suis entouré de juristes, là – mais le fameux arrêt resto-bar, l'histoire de la Régie des alcools qui, à la fois...

M. Mulcair: Oui, tout à fait.

M. Boisclair: ...qui a amené même la Commission d'accès à l'information... comment elle s'appelle? La Petite Maison?

M. Mulcair: Oui, oui, c'est ça.

M. Boisclair: Le bistro, resto-bar. Je ne sais trop.

M. Mulcair: À Saint-Jérôme.

M. Boisclair: C'est ça.

M. Mulcair: C'est une décision récente de la Cour suprême.

M. Boisclair: ...a amené la Commission d'accès à l'information – on pourra en parler tout à l'heure – à repenser même un peu son organisation interne.

M. Mulcair: Oui, tout à fait. Bien, chose que, nous, on réclamait depuis longtemps d'ailleurs.

M. Boisclair: C'est ça. Donc, la question est de savoir maintenant comment faire en sorte qu'il y ait des institutions à l'extérieur du gouvernement qui puissent voir correctement et de façon efficace à la défense des droits. Mais l'autre question aussi, c'est comment faire en sorte que le législateur puisse prendre des décisions de façon avisée et de façon éclairée. Parce que l'expertise sur la défense des droits, l'expertise sur la protection des renseignements personnels, elle existe dans des commissions indépendantes nommées à l'Assemblée nationale. Mais, dans l'appareil d'État, il y a très peu d'expertises qui existent. Il y en a au secrétariat du Comité de législation où il y a des gens, véritablement, qui ont des sensibilités sur ces questions. Mais, à part de ça, le gouvernement qui, lui, est pris à faire des arbitrages...

Prenez tout l'exemple de l'obligation des grands-parents à l'endroit des petits-enfants. Il a fallu prendre une décision, contrairement à certaines recommandations de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. Mais il aurait été bien que, dans le processus qui a mené à l'adoption de cette loi-là, davantage de voix puissent se faire entendre. Parce que la Commission, cette fois-ci, je pense qu'on lui avait sollicité un avis, ou le débat était tellement public que l'avis de la Commission, cette fois-ci, avait été connu, avait été rendu public par le président de la Commission avant le dépôt du projet de loi à l'Assemblée nationale. Mais on est toujours dans ce dilemme où, à un moment donné, il y a des organismes qui sont indépendants. Jusqu'à quel point les amenons-nous à contribuer pour les aider à bonifier nos projets de loi, pour faire en sorte qu'ils soient respectueux des chartes et de la loi d'accès et de protection des renseignements personnels? Elle est là, la difficulté, de la façon dont je la vis.

(10 heures)

Je termine en disant qu'il est clair que ce genre de question devra être soulevé. On discutera de la Commission d'accès tout à l'heure. J'ai déjà entrepris des travaux au ministère, sous la responsabilité de M. Jouthe, sur ces questions et il est possible qu'on revienne ici, en commission, pour refaire le point sur ces questions.

M. Mulcair: Bien, on est très contents de l'entendre de notre côté, M. le Président, parce que c'est une chance qui arrive dans un contexte particulier. Tout en politique ou en législation se fait dans un contexte, c'est le contexte, c'est l'existence même de ce nouveau ministère, ce qui permet de dire: Bon, tout ça, c'est sur la table. On regarde ce que font les uns et les autres, où est l'expertise dans quoi et où est-ce qu'on peut mieux servir le public avec les ressources dont on dispose. Finalement, c'est ça. Et c'est une idée, je crois, qui est mûre pour une bonne réflexion parce que, si la réflexion a déjà été entamée ici, ça va se poursuivre, puis, évidemment, ça vient à un bon moment parce qu'on fait la transition avec le prochain groupe qui va être là pour les crédits.

Puis je tiens à rappeler au ministre, M. le Président, que, quand il était critique, au mois de mai 1991, il était en train de parler d'une affaire qui concernait Scotia McLeod et, à ce moment-là, quand il était assis ici, il soutenait ces principes-là. Il mentionnait que ça contrevenait à un principe fondamental de droit, que la justice doit être publique, et je le réfère encore... Le temps dont on disposait ce matin ne nous a pas permis de l'étudier, mais je le réfère...

M. Boisclair: Ah oui! je me souviens bien.

M. Mulcair: ...à ce qui était dans le Journal des débats avec Mme Duplé et je lui demande de garder ce même idéal là parce que c'est très important, et le dossier du ministère du Revenu était fort inquiétant, fort inquiétant par cette attitude-là qui disait: Bien, si on n'a rien à se reprocher.... Ce n'est pas ça, les droits. Les droits, c'est un droit. C'est de dire: J'ai le droit à ma vie privée, j'ai le droit au respect du fait que je dois être considéré égal dans notre société, j'ai le droit à un certain nombre de choses. Et vous devez le défendre et non pas dire: Bien, si tu n'as rien à cacher, je peux faire tomber ces barrières-là.

C'est à nous tous comme parlementaires évidemment – et c'est un bon exemple parce que vous êtes nommés par l'ensemble de l'Assemblée – mais c'est surtout votre devoir. Je vous félicite en terminant encore, M. le président de la Commission, pour le bon travail accompli jusqu'à date dans votre mandat. Continuez et vous pouvez compter sur notre appui.

Le Président (M. Garon): M. le député de Champlain.

M. Beaumier: Oui, merci beaucoup, M. le Président. Juste une remarque et, après ça, une question. La remarque, c'est que j'ai bien écouté les propos du président de la Commission et j'apprécie beaucoup cette dimension qui est que, dans le cadre des échanges avec l'étranger, on ne doit pas regarder que ce qui nous rapporte à nous, mais il faut être très sensibles aussi à ce que nous pouvons apporter aux autres. Et cette dimension-là de générosité, de compétence aussi qu'on peut apporter devrait faire toujours l'objet d'une évaluation positive, à mon point de vue, de la part de la Commission et c'est dans le patrimoine québécois d'avoir toujours été à la fois ouvert par rapport aux gens et aux idées qui arrivaient et en même temps extrêmement aussi généreux quant aux choses qu'on peut apporter aux autres. Donc, on devrait avoir une lecture double: ce que ça peut nous apporter et aussi ce que ça peut apporter aux autres. Et j'aimerais que ce soit inscrit et ancré, et, comme c'est déjà inscrit, j'encouragerais beaucoup cette dimension-là. C'est l'aspect patrimonial, historique, de la part du Québec envers le monde.


Fondement des plaintes

Deuxième chose et ça s'adresserait au ministre. Dans vos notes préliminaires, M. le ministre, quant à l'application ou le respect des principes, tant en ce qui concerne la Charte des droits et libertés de la personne et la Loi sur la protection de la jeunesse, il y a de cité, en termes quantitatifs bien sûr, que 35 000 demandes de toutes sortes arrivent, dont 900 demandes donnent lieu à l'ouverture d'une enquête. Ce que j'aimerais savoir, M. le ministre, c'est quel genre de demandes ou dans quels secteurs – je sais qu'il y a un secteur du travail plus précisément qui est noté ici... Mais, si on voulait avoir une espèce d'inventaire des différents... Parce que les demandes et les plaintes réfèrent à des choses vécues par notre population et ça nous permet de voir qu'est-ce que notre population a comme attente, qu'est-ce qu'elle a aussi comme demandes et qu'est-ce qu'on pourrait améliorer dans le cadre de ces contacts que font nos concitoyens et nos concitoyennes auprès de la Commission. Alors, j'aimerais savoir qualitativement quel est le travail fondamental en ce qui concerne le type de demande qui est fait par nos citoyens et citoyennes à la Commission?

M. Boisclair: Alors, à chaque année, M. le Président, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse publie, dans son rapport annuel, les différents motifs pour lesquels il y aurait un recours devant la Commission, donc ce qui serait les secteurs d'atteinte aux droits, et je les rappelle en ordre d'importance: 18,2 % des demandes ont trait à un handicap; 17,9 % au sexe; 16,8 % à la race, la couleur, l'origine ethnique ou nationale; 11,9 % à l'âge; 11,1 % à la condition sociale; 5,4 % à l'état civil; 3,9 % à l'orientation sexuelle; 3,9 % aux antécédents judiciaires; 2,9 % à la grossesse; 2,3 % à la langue; 2 % à l'exploitation des personnes âgées; 1,8 % aux religions; 1 % aux autres; et puis 0,9 % aux convictions politiques. Donc, ce sont les principaux motifs pour lesquels les gens qui s'estiment victimes de discrimination s'adressent et se présentent à la Commission. Donc, partant de là, vous avez une bonne idée des motifs de discrimination invoqués par les gens.

Pour la seconde partie de votre question, rappelez-moi... De quelle façon on peut agir?

M. Beaumier: Oui.

M. Boisclair: Alors, toute la question, c'est que, d'abord, la Commission a une responsabilité qui est celle de... Bien sûr, elle a un mandat. Il y a une direction des communications, il y a des gens qui s'occupent d'éducation, qui font de la sensibilisation, et ainsi de suite. Mais il faut aussi que l'État, de façon plus large, au-delà du travail qui est celui de la Commission, soit capable de porter un message qui est rassembleur, un message d'ouverture, un message de tolérance. Et c'est là toute l'idée de création du ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration qui a une responsabilité devant la loi de voir à la promotion et à la défense des droits et libertés des personnes et, à cet égard, nous le faisons sous l'angle de l'intégration au sens large, pas uniquement sous l'angle de l'intégration des minorités nationales ou des immigrants à la société québécoise, mais bien sous l'angle de l'intégration de l'ensemble des citoyennes et des citoyens à la société québécoise. Et l'intégration, pour moi, ça se traduit par la capacité qu'ont des gens de participer au devenir de la société. Ça veut dire autant des gens qui, à cause d'un handicap ou à cause d'une difficulté ou une autre, ont de la difficulté à avoir accès au marché du travail ou ont de la difficulté, finalement, à donner ce qu'ils ont de meilleur à la société québécoise.

Donc, le ministère est à travailler, chez nous, en plus du travail de la Commission, à un énoncé de politique en matière de relations civiques et sociales qui va incorporer des grandes préoccupations qui se trouvent dans la Charte québécoise des droits, qui va incorporer les principes sur lesquels s'appuie la Charte québécoise des droits et libertés. Et je souhaite, à même le contenu de la Charte, financer des organismes qui vont s'intéresser à la question de la défense des droits, faire de l'éducation auprès des écoles, dans les écoles. Je vous rappelle que, déjà, notre collègue Pauline Marois, dans sa réforme de l'éducation, nous propose un cours, une formation en éducation civique et sociale. C'est déjà une base importante, c'est quelque chose de significatif. Donc, l'Éducation agit; moi, je souhaite agir aussi; la Commission aussi fait son travail, et je pense que c'est de cette façon que nous avons comme parlementaires la responsabilité d'agir de façon responsable.

M. Beaumier: Dernière question. Dans le départage des types de demandes qui sont faites, est-ce que ça réfère aux demandes ou ça réfère aux demandes qui ont donné suite à des enquêtes?

M. Boisclair: Enquêtes, des motifs d'ouverture d'enquêtes.

M. Beaumier: D'accord.

M. Boisclair: Des motifs d'ouverture d'enquêtes.

M. Beaumier: Et si on regardait d'une façon diachronique, depuis quelques années, est-ce qu'il y a un déplacement? Vers quels problèmes, on pourrait dire, ou quels symptômes, parce que c'est des symptômes de problèmes qui existent, ou d'indices?

M. Filion (Claude): D'accord. On ne tient pas de thermomètre...

M. Beaumier: Non, je comprends.

M. Filion (Claude): ...de croissance des motifs de discrimination. Cependant, avec nos rapports annuels, vous allez pouvoir figurer un petit peu une tendance que j'ai notée puis que je pense que les chiffres sont en train de confirmer. Il me semble que la discrimination basée sur l'âge augmente un petit peu, que la discrimination basée sur le handicap augmente, que la discrimination basée sur le sexe diminue, en importance toujours par rapport au 100 %, et, en ce qui concerne la race, la couleur, l'origine ethnique, ça se maintient. Il y a la condition sociale aussi qui augmente un peu. Bref, c'est difficile de tenir des... Disons, si on prend nos chiffres... Dans notre prochain rapport annuel, on va pouvoir comparer un petit peu ces tendances-là.

(10 h 10)

M. Boisclair: Mais je veux aussi rajouter, rapidement, après le président, que le nombre d'enquêtes ouvertes et le nombre de plaintes reçues, ce n'est pas nécessairement un baromètre de ce qui se passe. Parce que nous savons aussi qu'il y a bien des gens qui ne portent pas, pour une raison ou une autre, plainte devant la Commission des droits de la personne. Donc, ces données, il faut les traiter avec extrêmement de prudence et faire bien attention avant de tirer des conclusions hâtives. Nous voyons dans nos bureaux de comté bien des gens qui ne veulent pas aller s'adresser à la Commission des droits de la personne. L'enquête que je viens de faire sur les jeunes et le marché de l'emploi, qui nous fait la démonstration claire de l'importance de nombreux préjugés qui existent, ils nous disent, ces mêmes jeunes, qu'ils n'ont pas le réflexe d'aller à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. Donc, faisons bien attention, ce sont des gens qui portent plainte, et je ne sais pas jusqu'à quel point il faut accorder un caractère scientifique pour évaluer un état de situation de la société québécoise, se servir du nombre de dossiers ouverts. Quant à moi, le nombre d'enquêtes et le nombre de plaintes formulées ne constituent d'aucune façon un thermomètre ou un reflet de ce qui est. On peut peut-être y déceler certaines tendances, y déceler des préoccupations, mais faisons attention aux conclusions hâtives qu'on pourrait tirer.

M. Filion (Claude): Tout à fait, d'autant plus qu'on règle, M. le député, 90 % de nos dossiers, plus de 90 %. Même, une fois que l'action a été intentée, on en règle à peu près 60 %. Donc, il y a beaucoup de règlements après, mais il y en a, maintenant, avant. Dans beaucoup de secteurs, dans le fond, les gens, ensemble, règlent leurs problèmes, et c'est toujours ce qu'il y a de mieux.

M. Beaumier: Une dernière remarque. Moi, mon intention n'était pas d'en faire une analyse scientifique ou d'en conclure quoi que ce soit. Mais, dans le sens de la prévention...

M. Filion (Claude): Oui, d'accord.

M. Beaumier: ...ou des actions que vous devez poser, ou qu'on pourrait poser, s'il y a une indication là, bien, ce serait tant mieux, ou prenons-la ailleurs. Mais c'était dans l'optique de la prévention des choses. Merci.

Le Président (M. Garon): M. le député de Taschereau, mais brièvement, parce que le temps est écoulé.

M. Gaulin: Très, très sommairement. Vous dites que la discrimination fondée sur le sexe a diminué, dans vos statistiques. Évidemment, il y a des mesures...

M. Boisclair: Mais ce n'est pas ça... Faisons bien attention, ce n'est pas la discrimination...

M. Gaulin: Ou enfin les plaintes.

M. Boisclair: Ce n'est pas la discrimination qui a diminué, c'est le nombre de plaintes ou le nombre d'enquêtes.

M. Filion (Claude): Le nombre d'enquêtes.

M. Gaulin: O.K., fondées sur le sexe. Moi, ce que je veux...

M. Filion (Claude): Le nombre d'enquêtes même. Parfois, ce n'est pas nécessairement le nombre de plaintes non plus, le nombre d'enquêtes.

M. Gaulin: Ça va, fondées sur le sexe, ça a diminué, c'est ce que vous avez dit. Moi, j'aimerais savoir... C'est sûr qu'il y a des mesures positives qui ont été faites, entre autres, équité salariale et tout. Qu'est-ce que vous voulez dire par «fondées sur le sexe»? Sur la discrimination sexuelle – moi, je viens d'un comté où cette population-là est très importante, Taschereau – fondées sur la discrimination sexuelle, est-ce que vous avez des données à part et est-ce que, si vous n'en avez pas, ou si vous n'en avez pas maintenant, vous pourriez, comme le député de Chomedey vous l'avait demandé, m'envoyer un mot là-dessus?

M. Filion (Claude): D'abord, «fondées sur le sexe» exclut le harcèlement sexuel.

M. Gaulin: Non, mais, moi, je parle de discrimination...

M. Filion (Claude): D'orientation sexuelle?

M. Gaulin: ...enfin, de plaintes fondées sur l'orientation sexuelle.

M. Filion (Claude): Ah! sur l'orientation sexuelle. Bon. Sur l'orientation sexuelle, le pourcentage, cette année, ce que vous allez voir, va être autour de 3,9 % et, l'an passé, c'était autour de 2,9 %. Donc, c'est à peu près passé de 3 % à 4 %; ce n'est pas significatif. Donc, au niveau de l'orientation sexuelle, on ne peut pas dire...

Maintenant, il y avait une autre dimension. Vous savez qu'on a fait une enquête importante, hein...

M. Gaulin: Bien, moi, je pense que, dans la mesure où, dans nos sociétés, la tolérance devient une vertu de citoyen importante, peut-être que les plaintes fondées sur l'orientation sexuelle risquent d'augmenter, parce que, autrefois, c'était un non-dit. Alors, je trouve ça important.

M. Filion (Claude): Oui, il y a des mouvements. Nous, on est en contact avec les groupes de gais et lesbiennes. Bon, écoutez, la culture de la société québécoise évolue. Maintenant, placer un thermomètre dans un milieu, dans un motif de discrimination, puis dire: Oups! ça vient d'augmenter ou de descendre... Il faut faire attention, c'est extrêmement dangereux, ça dépend beaucoup des perceptions, et nous, ce qu'on fait, c'est un travail de prévention.

Au sujet de l'orientation sexuelle, le gros du travail a été fait dans l'enquête qu'a menée la Commission il y a environ deux ans et demi, au pifomètre, et qui a donné le rapport de la Commission sur les gais et lesbiennes qui portait surtout sur l'aspect de la vie des homosexuels au Québec. Par exemple, au niveau de la prestation des services sociaux, etc., qui les affecte; on peut penser aux problèmes spécifiques du sida; les relations entre les corps de police et les minorités d'orientation sexuelle qui, comme vous le savez, ont été à l'origine de l'enquête qu'on a menée. Bref, ce à quoi on croit dans tous les secteurs, c'est l'éducation, l'information, essayer de régler nos dossiers le plus possible, parce qu'à ce moment-là on fait de l'éducation quand on réussit à obtenir un règlement et on continue dans ce sens-là.

Le Président (M. Garon): Alors, je vous remercie...

M. Filion (Claude): C'est moi qui vous remercie.

Le Président (M. Garon): ...puisque le temps dévolu à l'élément 4, Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, est dépassé, selon l'ordre de la Chambre que nous avons eu.

Maintenant, je vais inviter les représentants de la Commission d'accès à l'information à s'approcher de la table de la commission pour enclencher l'étude de l'élément 5, Commission d'accès à l'information.

(Consultation)

Le Président (M. Garon): Alors, nous avons deux heures. S'il y a un consentement pour dépasser 12 h 10... 12 h 12, je pense... Bon, puisqu'il y a des membres qui sont absents, on va suspendre les travaux de la commission pendant deux, trois minutes, le temps pour chacun de...

(Suspension de la séance à 10 h 17)

(Reprise à 10 h 21)

Le Président (M. Garon): La commission reprend ses travaux, si nous ne voulons pas déborder trop. M. le ministre, pour vos remarques préliminaires.


Commission d'accès à l'information (CAI)


Remarques préliminaires


M. André Boisclair

M. Boisclair: Oui. Alors, M. le Président, à titre de ministre responsable de l'application de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels et de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, j'ai le plaisir de procéder aujourd'hui avec vous à l'étude des crédits de la Commission d'accès à l'information pour l'année financière 1997-1998.

Je voudrais d'abord vous présenter M. Paul-André Comeau qui m'accompagne, qui est le président de la Commission d'accès à l'information, que vous connaissez tous. M. Comeau est aussi accompagné, derrière, d'un certain nombre de ses collègues dont Mme Dion, qui est l'adjointe au président, M. Ouimet, qui est directeur des services juridiques, et d'autres de ses collègues de la Commission aussi.

M. le Président, c'est la deuxième fois que j'ai le plaisir de procéder à l'étude des crédits de la Commission d'accès à l'information. Cette fois, il s'agit d'une année budgétaire très importante, puisqu'elle verra le déclenchement de la révision quinquennale des deux lois, soit la Loi sur l'accès et la loi sur le secteur privé.

Selon le livre des crédits de cette année, les crédits de la Commission d'accès à l'information s'établissent à 3 032 000 $, soit une diminution de 5,7 % par rapport aux crédits de 3 215 000 $ de l'année précédente. Mais je crois qu'il faut se rappeler que la Commission, comme dépenses probables, aura établi pour 1996-1997 une somme à peine supérieure de 3 100 000 $ suite à l'adoption par le gouvernement de mesures additionnelles pour lutter contre le déficit. Évidemment, la Commission d'accès cherche toujours des moyens de réduire ses dépenses de fonctionnement et elle attend de connaître les modalités du nouveau programme de départs assistés. De plus, M. le Président, le MRCI a pu lui venir en aide l'an dernier et je vais de nouveau faire tout ce qui nous est possible de faire afin d'alléger l'impact des compressions budgétaires sur la Commission d'accès.

Des crédits, donc, de 3 032 000 $ permettront à la Commission de réaliser les mandats que lui a confiés le législateur. L'effectif autorisé s'établit à 47 ETC dont les cinq commissaires. Les dépenses en salaires de la Commission s'élèvent à 2 339 000 $ cette année. Les dépenses de fonctionnement passent, elles, de 766 000 $ en 1996-1997 à 680 000 $ cette année, soit une réduction importante de 11 %.

Comme Québécois, donc, nous pouvons être fiers, M. le Président, de la législation adoptée par l'Assemblée nationale depuis 1982 dans le but de doter le Québec d'un régime complet d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels. Je vous rappelle les grandes lignes en guise d'introduction.

La Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels adoptée en 1982 reconnaît quatre droits fondamentaux: le droit d'avoir accès aux documents détenus par les organismes publics, le droit d'avoir accès à nos propres renseignements personnels, le droit à la confidentialité des renseignements qui nous concernent et le droit de faire rectifier ces renseignements au besoin.

Près de 3 700 – 3 700, M. le Président – organismes publics sont assujettis à cette loi dans presque tous les secteurs de l'administration publique: des organismes gouvernementaux, municipaux, scolaires ou du secteur de la santé et des services sociaux. La Loi sur l'accès leur impose l'obligation de répondre aux citoyens dans des délais précis, de constituer une liste de classement de leurs documents, de déclarer ces fichiers de renseignements personnels et d'en préserver la confidentialité. Ce qu'il importe de souligner, c'est qu'une personne qui se voit refuser par un organisme l'accès à un document, l'accès à un renseignement personnel la concernant ou la rectification d'un tel renseignement peut s'adresser à la Commission d'accès à l'information afin de faire réviser la décision de l'organisme fautif. Les décisions de la Commission peuvent être révisées par la Cour du Québec.

Pour compléter le régime d'accès et de protection, le législateur québécois adoptait, en 1993, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Cette loi sur le secteur privé a pour objet d'établir, à l'égard des renseignements personnels qui sont recueillis, détenus, utilisés ou communiqués à des tiers par une entreprise, des règles particulières. Cette loi prévoit notamment l'obligation pour l'entreprise qui recueille des renseignements afin de constituer un dossier sur autrui de ne recueillir que les renseignements nécessaires à l'objet du dossier. La loi impose aussi aux entreprises présentes au Québec l'obligation d'assurer la confidentialité des renseignements personnels qu'elles détiennent, recueillent, utilisent ou communiquent. Elle interdit, entre autres, la communication de ces renseignements à des tiers sans le consentement de la personne concernée, sauf dans certains cas prévus expressément. Comme pour le secteur public avec la Loi sur l'accès, la loi qui couvre le secteur privé établit les conditions et les modalités régissant l'accès et la rectification pour les personnes concernées des dossiers constitués à leur sujet par une entreprise. La loi prévoit également des règles particulières à l'égard des agents de renseignements personnels, c'est-à-dire des personnes qui font le commerce de constituer des dossiers sur autrui et de préparer et de communiquer à des tiers des rapports de crédit.

La Commission d'accès à l'information a également pour fonctions de surveiller l'application de la Loi sur l'accès et de la loi du secteur privé et de faire enquête sur son fonctionnement et sur son observation.

La Commission, donc, a trois grandes fonctions ou mandats. D'abord, une fonction d'adjudication; ensuite, une fonction de surveillance et de contrôle; et, finalement, elle exerce une fonction de consultation. La Commission donne, bien sûr, aussi son avis au gouvernement sur les projets de loi et de règlement lorsque ceux-ci ont des incidences sur l'accès aux documents ou sur la protection des renseignements personnels.

Je me suis donc permis, M. le Président, au sujet de la révision quinquennale, de rappeler ici, devant cette commission, les dispositions les plus importantes de la législation québécoise sur l'accès à l'information et sur la protection des renseignements personnels afin d'illustrer la nature et la complexité du régime que nous nous sommes donné en matière d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels et de mesurer l'ampleur du travail qui nous attend en cette année de révision législative. Le législateur a prévu en effet que l'Assemblée nationale procède tous les cinq ans à la révision de la Loi sur l'accès et de la loi sur le secteur privé. La Commission d'accès amorce le processus de révision des deux lois en déposant un rapport devant faire l'objet d'une consultation publique en commission parlementaire. À plusieurs égards, j'estime que la révision qui s'annonce sera une opération majeure.

Tout d'abord, il y a deux lois à réviser plutôt qu'une seule et ces deux lois sont prépondérantes comme la Charte des droits et libertés et de la personne. C'est donc dire qu'elles ont des ramifications dans beaucoup d'autres lois et des effets dans de nombreuses sphères d'activité. Par ailleurs, la révision précédente, qui ne concernait que la loi sur l'accès couvrant le secteur public, n'a pas abouti pour diverses raisons. Les attentes sont donc grandes pour nombre d'intervenants qui ont enfin l'occasion de revenir à la charge. Quant à la loi sur le secteur privé, il s'agit d'une loi unique qui n'a pas de pendant sur le continent américain. Comme il s'agit de droit nouveau, cette loi est susceptible d'être remise en question aussi par certains intervenants.

Enfin, M. le Président, il ne faut pas négliger l'effet de nombreux débats qui ont mis en perspective la préoccupation des citoyens en ce qui concerne la protection de leur vie privée. Je me permets de rappeler ici deux des plus importants.

D'abord, sur les échanges de renseignements personnels entre les organismes du secteur public. Dans son rapport annuel pour l'année 1995-1996, le Vérificateur général s'est penché sur la question des échanges de renseignements personnels entre les organismes du secteur public. Son constat incite nécessairement à revoir les façons de faire dans ce secteur et à évaluer le cadre actuel des échanges de renseignements personnels. Nous savons tous que le rapport du Vérificateur général a suscité des réactions des ministères concernés, de la Commission d'accès ainsi que des députés de la commission du budget et de l'administration lors de l'étude du rapport du Vérificateur général en février dernier. Sans vouloir anticiper ni sur le contenu du rapport quinquennal de la Commission ni sur la nature des consultations publiques qui seront organisées par votre commission, il me semble que les questions soulevées par le Vérificateur général seront et devront être à l'ordre du jour.

Deuxièmement, la consultation publique sur les cartes d'identité est un autre point qui reviendra sans doute au moment de la révision. D'abord, je souhaiterais vous féliciter, M. le Président, ainsi que tous les membres de cette commission, pour vous être donnés le mandat d'initiative portant sur les cartes d'identité et la protection de la vie privée. Comme nous l'avons vu, c'est un débat nécessaire, un débat courageux dont nous sortirons tous enrichis, j'en suis convaincu. Mais, de toute évidence, un tel débat soulève de nombreuses questions quant à certains aspects de la législation en matière d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels. Les allégations aussi qui ont été portées à l'attention des membres de la commission de la culture quant à un possible marché noir des renseignements personnels, c'est l'un des aspects controversés qui ont été soulevés à l'occasion des audiences publiques. Je rappelle que le gouvernement du Québec a d'ailleurs pris très au sérieux ces allégations et tout le dossier a été remis à la Sûreté du Québec pour évaluation. Maintenant, j'apprends aussi que la Sûreté du Québec est à procéder à une enquête.

Finalement, la cueillette et l'utilisation – et le député de Chomedey sera certainement intéressé par ces questions – la cueillette et l'utilisation du numéro d'assurance sociale par Hydro-Québec, ça a soulevé bien des interrogations. Je comprends les inquiétudes des citoyens à cet égard et je suis convaincu que plusieurs saisiront l'occasion de la révision quinquennale pour remettre de nouveau en question cette pratique. Tous ces débats et bien d'autres, couverts abondamment par les médias, ajoutent à la complexité du dossier et rejailliront sans doute tout au long du processus de révision.

(10 h 30)

En terminant, j'aimerais revenir à la Commission d'accès à l'information pour vous parler brièvement des orientations qu'elle s'est données pour 1997-1998. Évidemment, l'une des priorités de la Commission d'accès à l'information pour la révision quinquennale est la préparation du rapport sur la mise en oeuvre des lois sur l'accès à l'information et la protection des renseignements personnels. Le président...

M. Mulcair: M. le Président, pour les fins de décorum, est-ce que vous auriez l'amabilité de demander aux gens qui ont des téléphones cellulaires ou de les éteindre ou de rester à l'extérieur de la salle. Ça fait deux fois en quelques minutes qu'on se fait interrompre et ce n'est pas normal.

Le Président (M. Garon): Je pense qu'il va falloir demander un droit de saisie sur les téléphones cellulaires dans les commissions parlementaires.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Garon): Ça va régler le problème une fois pour toutes.

M. Mulcair: Vous allez être secondé par l'opposition officielle, M. le Président.

M. Boisclair: Et par le ministre.

Le Président (M. Garon): Continuez.

M. Boisclair: Alors, j'indique donc qu'il y a eu une discussion récente avec le président de la Commission d'accès à l'information, mais c'est à croire que nous pourrons déposer le rapport quinquennal à l'Assemblée nationale au cours du mois de juin. C'est donc dire que, si nous déposons le rapport quinquennal au mois de juin, nous pourrons tenir des consultations à l'automne et, dépendant de l'ampleur des débats et des discussions, il serait possible de croire qu'avant le mois de décembre l'Assemblée nationale pourrait avoir revu un certain nombre de dispositions de la loi. Si le débat est d'une ampleur telle qu'il nous faut faire davantage de recherches et davantage de travaux, cette révision de la loi serait reportée à la session du printemps pour débat à l'Assemblée nationale. Donc juin, j'espère être capable de déposer, lorsque le président me l'aura remis, le rapport quinquennal sur les deux lois.

Quant à la carte d'identité, cette question, vous le savez, M. le Président, c'est la Commission d'accès qui a rédigé le principal document sur lequel reposent vos consultations publiques. La Commission, bien sûr, suit avec intérêt tout le débat public à ce sujet.

Au chapitre aussi de l'autoroute de l'information, les priorités de la Commission se situent à deux niveaux. De nombreux projets de mise en place de tronçons de l'autoroute de l'information ont été annoncés ou ont déjà démarré. Plusieurs impliquent la collecte de renseignements personnels et un questionnement sur la façon d'assurer leur sécurité. Évidemment, la Commission se doit de répondre aux interrogations qui nous parviennent au-delà de l'affirmation des principes formulés dans les lois. C'est en s'engageant dans l'évaluation de certaines technologies, comme elle l'a fait dans le projet de carte-santé à microprocesseur mené dans la région de Rimouski, qu'elle espère acquérir l'expertise nécessaire pour mieux jouer son rôle-conseil.

À un autre niveau, la Commission compte lancer son propre site Internet et diffuser ses lois, décisions et rapports d'enquête, répondant ainsi aux attentes de nombreux citoyens et organismes et entreprises. Elle a d'ailleurs trouvé un moyen très intéressant pour financer la construction de son site Internet à frais modiques, ce sera un stagiaire qui sera engagé au cours de l'été.

Au cours des prochains mois, M. le Président, la Commission s'est fixé comme autre orientation de parfaire son processus d'enquête sur plaintes. Ses objectifs: traiter les dossiers avec plus de célérité, mieux assurer le respect des règles de justice naturelle, informer les citoyens du cheminement de leur dossier de plainte.

Finalement, on remarque que l'expertise de la Commission, un peu comme celle de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse du Québec, s'est également étoffée à la faveur de sa participation à divers projets internationaux de recherche, notamment sur un projet de carte-santé lancé par les pays de l'Union européenne. M. Comeau m'informe qu'un rapport final sera publié sous peu.

La Commission entend poursuivre ses projets de recherche conjoints dont celui parrainé par un groupe de travail du G 7 dans le secteur névralgique des cartes-santé. Ce faisant, la Commission acquiert une compétence et un savoir-faire uniques en Amérique du Nord et contribue ainsi à promouvoir à l'extérieur du Québec une vision québécoise de la vie privée. Par ses innovations en matière d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels, le Québec est devenu un modèle, un des lieux de savoir-faire en la matière.

Finalement, la Commission appuie la tenue de la Conférence internationale sur la vie privée à Montréal cet automne. L'objectif premier de cette conférence est d'apporter des réponses aux questions soulevées par le volet extérieur de la directive européenne sur la protection des données personnelles qui entrera en vigueur en janvier prochain. Le comité organisateur de la conférence a invité plus de 80 conférenciers provenant du Canada, des États-Unis, d'Europe, d'Asie et représentant l'ensemble des groupes préoccupés par le respect de la vie privée: législateurs, juges, dirigeants d'entreprises, commissaires à la vie privée, avocats, médecins, universitaires, policiers, chercheurs, consommateurs, journalistes, et j'en passe. Ils viendront partager leur point de vue sur les problématiques de la vie privée, à Montréal, du 23 au 26 septembre 1997.

M. le Président, j'espère que cet exposé vous aura convaincu du travail bien fait par la Commission, de la pertinence de l'utilisation des fonds publics, mais aussi, M. le Président, qu'il vous aura convaincu qu'à la vitesse où j'ai fait cette présentation j'ai surtout l'intention de discuter avec vous et avec les membres de la commission.

Le Président (M. Garon): Je peux vous dire tout de suite que j'ai l'intention, en voyant le projet de conférence du 23 au 26 septembre, à Montréal, de demander les crédits pour que tous les membres de la commission qui veulent y assister puissent y assister, parce que c'est sûrement la préoccupation la plus importante des 20, 30, 40, 50, 100 prochaines années, la protection de la vie privée.

M. le député de Chomedey.


M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Merci, M. le Président et député de Lévis. Je remercie le ministre pour sa présentation. Pour ce qui est de sa remarque tantôt, que ça m'intéressait, la question du numéro d'assurance sociale et Hydro-Québec, la raison que ça m'intéresse, mais ça l'intéressait aussi lorsqu'il était seulement le député de Gouin et non pas le ministre responsable des Relations avec les citoyens...

M. Boisclair: ...de la FTQ.

M. Mulcair: J'espère que sa préoccupation va se poursuivre.

On a écouté attentivement l'explication du ministre et on était très content d'entendre dire qu'il compte cette fois-ci, pour la révision quinquennale, faire en sorte que ce soit une révision en profondeur. On a déjà un peu annoncé nos couleurs, tantôt, lorsqu'on parlait avec la Commission des droits de la personne, et je suis là, aujourd'hui, pour lui dire que, de notre côté, il peut compter sur la collaboration entière de l'opposition officielle en cette matière. C'est au-delà des débats partisans, ça doit le demeurer, et j'aime bien sa manière d'entrevoir les choses.

Et j'aurai l'occasion de l'aborder avec le président de la Commission tantôt, mais je pense qu'il faut faire attention entre deux choses. Le travail et l'utilisation des fonds publics, c'est une chose, mais, sur le fond, les décisions qui sont rendues, le résultat pour le public, il y a une excellente analyse par Scott MacDonald, de The Gazette , lundi de cette semaine, si ma mémoire est bonne, qui démontre le préjugé inhérent contre ceux qui font des demandes, lorsqu'on se rend devant les tribunaux, et c'est intéressant. Mais c'est une des choses qui nous a poussés à s'offusquer lorsqu'on avait vu qu'il y avait une commandite d'Hydro puis une relation qui était, à notre point de vue, beaucoup trop proche entre la Commission elle-même et l'organisation de ce congrès de l'automne. Et le président Comeau a pris soin de faire attention de diviser, de tenter de mettre certaines barrières, certains murs entre sa Commission et une autre.

Mais, autant on peut se réjouir et être content que le modèle québécois, comme le ministre l'appelle et l'a appelé dans un article, cet été, où il a tenté de se défendre, dans le journal La Presse , à l'égard des critiques sévères qui avaient été lancées, notamment à l'égard du ministère du Revenu et de sa loi du printemps dernier... autant, s'il existe un modèle québécois, ce n'est pas parce que les législateurs ont adopté une loi... Le modèle ne vient pas d'une loi, le modèle vient de son application, c'est vraiment ça. Ça vient de la philosophie et de la vision qu'on est capable d'insuffler dans une loi et, finalement, c'est juste des mots sur un bout de papier. On peut avoir la plus belle Charte des droits de la personne du monde, et l'Union Soviétique en avait une des plus belles pendant des décennies, puis ça ne valait pas le papier sur lequel c'était écrit. Alors, toutes ces questions-là sont intéressantes, mais encore faut-il avoir le courage, la détermination et la volonté de les appliquer.

Et je sais, et je le redis, je l'ai dit pour la Commission des droits tantôt, le ministre actuel est en train de faire... Et c'est un sentier nouveau. Personne n'a jamais été avec ces outils-là dans un ministère. Personne n'a jamais eu un ministère où on a dit: C'est les relations avec les citoyens puis ces éléments-là sont mis sur la table; maintenant, on construit quelque chose. C'est nouveau, et ça tombe à point nommé parce qu'on a la révision quinquennale.

Alors, je suis content d'entendre le ministre dire ça. On le suit, on va l'appuyer. Dans la mesure où tout ça se fait dans l'intérêt d'une application correcte, courageuse, constante, avec une bonne vision de l'intérêt de la protection du public dans ces questions-là, il peut compter sur l'appui de l'opposition là-dedans.

M. Boisclair: Est-ce que je peux ajouter un petit commentaire, très rapidement? Juste pour vous donner un exemple, M. le député, de la situation dans laquelle je me trouve comme ministre, et comme membre du gouvernement, et membre de l'Exécutif donc. On s'en va en révision quinquennale de la loi et, moi, je cherche à avoir une expertise. Mais l'expertise, elle se situe où? À la Commission d'accès à l'information. Donc, je suis obligé de développer, avec M. Jouthe, qui a ces nouvelles responsabilités dans le ministère... Déjà, il y a des gens qui travaillent dans son entourage. Nous-mêmes sommes à faire une lecture critique, autant une étude de droit comparée, une étude de l'évolution récente de la jurisprudence, de différents modèles aussi qui pourraient nous inspirer. Nous faisons une réflexion un peu dans le sens où nous en avons discuté, il y a quelques instants, avec le président de la Commission des droits de la personne. Donc, je suis à constituer une équipe qui va me permettre, comme membre de l'Exécutif mais aussi comme législateur, d'arriver en commission parlementaire préparé et d'être capable d'apprécier les recommandations qui me viennent de la Commission d'accès. Parce qu'il nous fallait corriger ce défaut où la Commission d'accès a un pouvoir qui est important, qui est le pouvoir d'initier le débat. Elle le voit sous l'angle qui est le sien, mais il nous faut, nous aussi, comme législateurs, être capables – la Commission d'accès, dont le président est nommé par l'Assemblée nationale et, donc, par les parlementaires – il nous faut, nous aussi, avoir une expertise et se conserver un pouvoir, je dirais, d'initiative, un pouvoir critique, développer une perspective plus large de la défense des droits, et c'est ce à quoi nous travaillons.


Discussion générale


Conférence internationale sur la vie privée

M. Mulcair: J'aimerais, M. le Président, aller un petit peu plus à fond sur la question de la conférence, qui est devenue la conférence de Montréal. Ça, je l'avais entendu, mais c'est la première fois que c'est confirmé. Depuis quand la conférence, qui devait être de Québec, est devenue la conférence de Montréal? Originellement, la conférence devait se tenir à Québec.

(10 h 40)

M. Boisclair: Là, il faut d'abord comprendre que je ne suis d'aucune façon associé à la conférence, si ce n'est que j'ai souhaité qu'elle se tienne – je l'ai, je pense, souhaité par écrit aussi, puisque c'est là un impact important pour le rayonnement de l'expertise québécoise... Si ma compréhension est juste, il n'y a pas de crédits du ministère qui, d'aucune façon, sont allés appuyer la conférence. Et il y a, autre qu'un comité technique... le président pourrait lui-même préciser les liens qui l'unissent à la Commission, mais le président n'est pas membre du comité organisateur, mais je sais cependant qu'il pourra compléter ma phrase.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Comeau (Paul-André): Je vais tenter de répondre, mais, comme je ne fais pas partie du comité organisateur, je ne sais pas à quel moment la décision a été prise de transférer la conférence de Québec à Montréal. Ça a été fait, semble-t-il, pour des raisons de logistique. Mais je ne sais vraiment pas. C'est probablement à l'automne dernier, M. le député, mais je n'en suis pas sûr.

M. Mulcair: O.K. Je constate, M. le Président, qu'au mois de mai 1995 le député alors, de Gouin, mentionnait que le déplacement de Montréal à Québec de la résidence du juge en chef de la Cour du Québec et le Conseil de la magistrature ne faisait pas l'unanimité. Et son propre comté avait voté contre ce déménagement. Alors, peut-être qu'à défaut d'avoir les juges on a la Conférence. Mais, si c'est des raisons de logistique, c'est intéressant. Mais très sérieusement, pour les membres de cette Assemblée nationale, c'est important de savoir les raisons, puis peut-être avec son comité de coordination, le président de la Commission pourrait nous les faire parvenir par après par écrit. La raison est la suivante, c'est que l'information dont, nous, on dispose, c'est à l'effet que la conférence a dû être mutée de Québec à Montréal parce que le nouveau palais des congrès ici, à Québec, voulait prendre plusieurs fois plus cher pour tenir la conférence. Alors, ce n'est pas juste dans le domaine de l'accès à l'information que ça risque d'être intéressant. Mais, si on se préoccupe du rayonnement de nos lois et tout ça, il faut aussi regarder si on n'a pas un empêchement structurel ici, à Québec. Alors, si le président peut demander aux gens qui ont l'information de nous la faire parvenir, ça nous aiderait de savoir ce qui a prévalu à cette décision-là de changement de lieu.

M. Boisclair: Là, M. le Président, moi, je veux être bien clair. Moi, je ne suis pas, et pas plus que le président, nous ne sommes, nous, imputables des décisions qui sont celles de la Société de la Conférence internationale. Je pense que si les membres de la commission ont des questions à poser... Dans un contexte où il n'y a pas de deniers publics qui sont impliqués, moi, j'ai signifié mon appui à cette conférence, mon collègue Serge Ménard aussi l'a fait, le vice-premier ministre a appuyé cette initiative. Mais nous ne sommes pas imputables des décisions qui sont prises et des orientations du choix des conférenciers, de l'organisation logistique. Alors, moi, j'inviterais plutôt les membres de la commission, s'ils ont des questions, à s'adresser à M. Doray, qui est le président de la Société de la Conférence internationale sur la vie privée de 1997.

M. Mulcair: On peut, M. le Président, s'adresser à la personne que vient d'indiquer le ministre ou encore à Hydro-Québec, où il va y avoir de l'argent public, parce que l'argent d'Hydro-Québec, qu'on ne se leurre pas, c'est de l'argent public, qui va être dépensé pour cette conférence-là. Mais je tiens à rassurer le ministre, ce n'était pas pour rendre qui que ce soit imputable de la décision de la tenir à Montréal ou à Québec. C'était vraiment pour savoir s'il n'y avait pas un problème structurel. Parce que l'information dont on disposait, c'est que, à reculons et à regret, les organisateurs du congrès étaient en train de se faire une idée de le déménager de Québec à Montréal parce qu'ils n'avaient pas le choix, ça coûtait beaucoup, beaucoup, beaucoup plus cher, le nouveau palais des congrès ici, à Québec, que par rapport à des installations semblables à Montréal. C'est toujours délicat en politique de se mettre l'engrenage entre la capitale et la métropole; cependant, c'est de l'information dont on a besoin de part et d'autre de cette table. Et si c'est le cas, j'aimerais bien juste le savoir. Il n'y avait rien de plus compliqué que ça dans la question, M. le Président.

M. Boisclair: On va demander à M. Doray de vous appeler.


Dépenses de publicité et loyers

M. Mulcair: M. le Président, notre première question en ce qui regarde les crédits se retrouve dans le document à l'item G.7 et c'est Ventilation par type de média pour les dépenses de publicité et articles promotionnels . Ça fait une couple d'années de suite que la Commission publie une liste qu'elle doit obligatoirement publier, dans Le Devoir . Même si on ne peut jamais reprocher à un média de vouloir avoir de la publicité et d'utiliser à bon escient les contrats du gouvernement, la question peut légitimement se poser, à savoir si un journal à tirage si restreint que Le Devoir est vraiment le meilleur véhicule pour communiquer cette liste-là. Je sais que ça s'est déjà fait par le passé, mais, vraiment, dans le domaine de l'accès à l'information, est-ce qu'il n'y a pas lieu de chercher la meilleure manière de rendre l'information accessible et d'utiliser un journal à plus grand tirage pour faire cette publicité-là?

M. Boisclair: C'est le meilleur marché, M. le Président, c'est la seule raison.

M. Mulcair: Mais, M. le Président, on peut changer la taille de la parution, faire une demi-page dans un autre journal. Vous savez, quand je pratiquais le droit à Montréal et qu'on était obligé de faire paraître des annonces dans un journal, si on voulait que ça ait très peu de chances d'être vu, on publiait dans Le Devoir .

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Mulcair: On rencontrait notre obligation, mais c'était notre but, que ça ait le moins de chances possible d'être vu. Ça arrive, des fois, ça. Ici, le but, c'est que ça soit vu par le plus grand nombre de personnes possible. Je pense que le ministre a intérêt peut-être à prendre avis avec ses proches collaborateurs et à se demander si c'est vraiment la meilleure manière de rendre ça accessible au plus grand nombre de personnes possible.

M. Boisclair: M. le Président, c'est une des façons qui est retenue par la Commission pour faire la publicité des agents de renseignements personnels. Je vous rappelle qu'à chaque année la Commission publie son guide dans lequel on retrouve pour chacun des organismes le nom des agents responsables, pour chacun des ministères et organismes concernés. C'est, entre autres, un des moyens qui est utilisé, mais il y en a d'autres qui sont utilisés par la Commission, dont la publicité, l'impression et la distribution du guide.

M. Mulcair: M. le Président, la prochaine question qu'on a à poser...

Le Président (M. Garon): M. le député de Chomedey, ce que j'aimerais voir publier dans Le Devoir , moi, c'est la liste de ses souscripteurs...

M. Mulcair: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Garon): ...parce qu'il me semble qu'on connaît les souscripteurs d'un député et c'est, maximum, 3 000. J'aimerais beaucoup voir la liste des souscripteurs du Devoir , moi.

M. Mulcair: Je vous rejoins à nouveau là-dessus, M. le Président.

Le Président (M. Garon): Pardon?

M. Mulcair: Je vous rejoins à nouveau là-dessus, M. le Président.

La question que je veux poser au président de la Commission, maintenant, M. le Président, concerne les loyers. Pour les bureaux de la Commission à Montréal, sauf erreur, il y a une augmentation de 32 %. Je connais bien les locaux de la Commission à Montréal et je dois dire que je connais aussi très bien le marché immobilier dans la grande région de Montréal. Qu'est-ce qui a pu justifier une augmentation de 32 % du loyer sur René-Lévesque Est, au troisième étage? Ça, là, «you've got me». Moi, j'attends juste de savoir.

M. Boisclair: Je veux juste, avant que le président réponde... Ma compréhension des choses, là, c'est qu'on s'en va vers une rétrocession d'un certain nombre d'espaces qui va nous faire économiser 120 000 $, parce que les gens au ministère ont regardé cette question-là, puis c'est l'information qu'on peut donner. M. Comeau pourrait ajouter...

M. Comeau (Paul-André): Alors, M. le député, le loyer qui nous avait été attribué par la SIQ nous a été fixé à un prix précis, à l'époque, qui était le prix de l'an dernier, et nous avons reçu une augmentation de la SIQ et nous avons dû acquitter la note sans avoir un mètre supplémentaire de plus. Et devant la hausse vertigineuse qui nous a été imposée par la SIQ, nous avons décidé de réduire notre espace pour faire l'économie dont vient de parler M. le ministre. Nous n'avons aucun contrôle sur le prix.

(10 h 50)

M. Mulcair: J'apprécie, M. le Président, la réponse du président de la Commission, et on prend bonne note, avec mes collègues qui vont faire l'étude de crédits semblables avec la Société immobilière du Québec, on va y aller avec un bat. O.K. On vient de se comprendre.

Par contre, juste une autre question. L'édifice en question, le 900, est-ce que ça appartient à la SIQ ou si c'est privé? Parce que je comprends bien que la SIQ contrôle les loyers et négocie avec les propriétaires, mais ce n'est pas l'organisme lui-même. Est-ce que quelqu'un peut nous instruire là-dessus?

M. Boisclair: Alors, je vais vérifier.

M. Mulcair: O.K.

M. Boisclair: Je vais vérifier, M. le Président, et on répondra...

M. Mulcair: J'apprécie parce que...

M. Boisclair: À première vue, ce n'est pas une propriété, mais je vais vous le confirmer par écrit.

M. Mulcair: J'attends ça avec impatience et je remercie le ministre pour sa réponse. Parce que, vraiment, qu'on se comprenne bien, il n'y a rien dans le marché immobilier à Montréal qui justifie une augmentation de 32 % dans le marché actuel. S'il y a 32 % de changement, c'est dans l'autre sens, hein, on se comprend bien, là. Et si vous avez vraiment des problèmes à trouver un endroit, venez me voir à Laval, on a de la place, puis ce n'est pas cher, puis c'est beau, puis c'est facile d'accès.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Boisclair: On vous a déjà envoyé certains fonctionnaires du Revenu. Vous nous permettrez de...

M. Mulcair: C'est ça, puis on l'a apprécié. La Commission d'accès, pas de problème, on a de la place en masse.

Le Président (M. Garon): Vous savez, c'est encore moins cher à Lévis.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Mulcair: Ha, ha, ha! Et ils peuvent louer des locaux dans l'université de Lévis, peut-être, hein, des locaux dans le sous-sol de l'université.

Le Président (M. Garon): Nous autres, c'est parce que des fois, c'est... J'aime autant ne pas faire de commentaires avec ça.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Boisclair: M. le Président, on m'indique que c'est une location à la compagnie Trizec.

M. Mulcair: Trizec. Alors, je me permets de dire qu'il y a quelqu'un qui dort sur la «switch» à la SIQ parce que ça n'a pas de rapport avec la réalité, une augmentation de 32 % dans le marché actuel.

M. Boisclair: Mais est-ce que je peux juste souligner au député qu'il faut voir le problème de façon plus globale. La SIQ a à gérer un parc immobilier. Ce que je comprends, c'est qu'ils font payer aux locataires le poids du fardeau des espaces non loués, et c'est ce qui explique ce genre d'aberration.

M. Mulcair: Je veux bien, M. le Président...

M. Boisclair: Et qu'il y a bien des choses... Tous nos collègues, on est pris avec cette réalité, et c'est une politique que nous avons... Je dois vous dire que j'ai personnellement des discussions fréquentes avec les gens de la Société immobilière du Québec.

M. Mulcair: Je n'ai aucun doute. Mais, M. le Président, si on regarde, on est rendu à 245 $ de loyer par mètre carré. On n'est pas, là, sur la rue McGill College et Sainte-Catherine, on est sur René-Lévesque Est. C'est un des avantages lorsqu'on a besoin d'avoir de l'espace dans le gouvernement... vu que les échanges, ce n'est pas de bureau à bureau, et on n'a pas besoin vraiment d'être dans le plein centre de Montréal. On est dans un secteur correct, on a un bon accès, il y a des métros à côté, c'est bon pour les gens qui y travaillent. Mais on n'est pas en plein centre de la ville de Montréal. C'est complètement, complètement, complètement en dehors du cadran, ce chiffre-là.

M. Boisclair: Le complexe Desjardins.

M. Mulcair: Non, le 900?

M. Boisclair: Oui, oui.

M. Comeau (Paul-André): Le 900, c'est à Québec, monsieur.

M. Mulcair: Ah! pardon.

M. Comeau (Paul-André): Il y a une confusion de René-Lévesque, là.

Une voix: Il y a deux René-Lévesque.

M. Comeau (Paul-André): C'est parce que nous sommes déménagés, à Québec, au boulevard René-Lévesque, et nous sommes à Montréal aussi sur Sainte-Catherine et sur René-Lévesque.

M. Mulcair: O.K. Excusez-moi. C'est mon erreur. Mais l'augmentation à Québec est donc de 32 % et l'augmentation à Montréal est de 9 %. C'est ça à peu près?

(Consultation)

M. Comeau (Paul-André): Alors, je me fais rappe-ler par notre expert en administration les circonstances pour Québec, le 900, boulevard René-Lévesque Est.

M. Mulcair: O.K. Allez-y.

M. Comeau (Paul-André): Nous avons été, entre guillemets, expulsés du local que nous avions depuis des années sur la rue Saint-Jean et nous avons été relogés aux frais de la SIQ, mais à leurs conditions.

M. Mulcair: Évidemment.

M. Comeau (Paul-André): Alors, nous n'avons pas eu de choix non plus. Nous, nous aurions préféré là, mais la SIQ voulait réduire son parc locatif à Québec. Et c'est les raisons.

M. Mulcair: O.K.

M. Comeau (Paul-André): La seule chose, par contre, j'ai réussi au moins à obtenir cela, c'est que le déménagement et les frais d'aménagement qui nous étaient imposés ne nous ont pas été imputés.

M. Mulcair: Ça, c'est bien. C'est quand même la même poche du même contribuable à un moment donné.

Mais, pour ce qui est de l'imputation à votre budget, c'est correct. Mais, pour le 150, Sainte-Catherine Ouest, à Montréal, qui est effectivement Desjardins, on a une augmentation de 9 % au cours de l'année, et on est rendu à 373 $ du mètre carré. Ça, je vous soumets respectueusement qu'on peut mieux faire que ça. Je pense que Place Desjardins, c'est la Société générale de financement qui est là-dedans, mais ça n'appartient pas à la SIQ.

M. Boisclair: Non, ça n'appartient pas à la Société immobilière du Québec.

M. Mulcair: Ça n'appartient pas à la SIQ.

M. Boisclair: Non.

M. Mulcair: En tout cas. Je comprends la situation d'un dirigeant d'organisme qui n'a pas la capacité de faire ces négociations-là pour lui-même. Je veux juste terminer...

M. Boisclair: ...d'un ministre qui tente de se développer une marge de manoeuvre.

M. Mulcair: Eh oui! Mais le 900, René-Lévesque Est, à Québec, je comprends que c'est bien Trizec aussi?

M. Boisclair: Oui.

M. Mulcair: Merci. J'apprécie cette confirmation.

M. le Président, vous tournez maintenant à l'item 49, les réponses qu'on a reçues pour le bureau du président: le nombre de rencontres, de soupers, etc. J'essaie juste de comprendre. Est-ce que c'est une erreur? Le 10 juillet 1996, quand on dit...

M. Boisclair: Voulez-vous m'indiquer la page?

M. Mulcair: Oh! pardon. Ce n'est pas paginé. C'est le livre des réponses et c'est la réponse n° 49.

M. Boisclair: 49, parfait.

M. Mulcair: Le 10 juillet 1996, est-ce que c'est une faute de frappe ou est-ce que c'est bien «Mme Paul-André Comeau» qu'il faut lire là?

M. Comeau (Paul-André): C'est M. Yves Poullet et son épouse, moi-même et mon épouse, oui.

M. Mulcair: Ah oui! D'accord. Est-ce que vous pourriez nous entretenir... Est-ce que le président, M. le Président, peut nous expliquer un petit peu plus c'est quoi la Coopération universitaire de Namur-CAI...

M. Boisclair: Commission d'accès à l'information.

M. Mulcair: Oui, avec la CAI, la rencontre... C'est quoi la Coopération universitaire de Namur?

M. Comeau (Paul-André): Très bien. Vous me permettez, M. le ministre?

M. Boisclair: Oui, oui.

M. Comeau (Paul-André): Alors, M. Yves Poullet, qui était jusqu'en septembre dernier doyen de la Faculté de droit de Namur, a été avec moi le codirecteur du groupe de travail institué par l'Union européenne dans le cadre de la Coopération Canada-Québec–Union européenne sur la carte-santé, et nous avons, pendant deux ans, travaillé ensemble pour produire le rapport que je pourrai vous déposer s'il vous intéresse et qui sera publié par l'Union européenne dans les mois à venir, c'est-à-dire à l'occasion d'un colloque scientifique sur la question qui aura lieu à Amsterdam en novembre. Alors, M. Poullet a été – pour employer le jargon européen – mon «coconvener» et c'était une façon de le remercier de cette collaboration soutenue, intéressante et très utile.

M. Mulcair: O.K. Je remercie beaucoup le président pour cette information.


Double mandat de la Commission

Maintenant, M. le Président, je ne sais pas si le président de la Commission était ici pour cette partie de notre discussion avec le groupe antérieur, qui était la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. Je vais lui résumer brièvement. Dans le cadre de notre rencontre ici, en commission parlementaire, étudiant toute la question d'une carte d'identité où, à notre point de vue, le dernier mot était allé... Et, là-dessus, ils avaient raison, Le Devoir a vraiment fait un bon résumé qui, je peux dire, était à peu près ceci: C'est une excellente solution à un problème inexistant, l'idée d'une carte d'identité universelle. Je vous avoue que les travaux ici, en commission, étaient très fructueux, ça a permis un débat d'idées très intéressant et ça valait vraiment la peine de le tenir. Et ça a permis aussi de constater comment, sur ces questions de droits fondamentaux, il y a très peu qui sépare les deux côtés, ce qui est bien, parce que, si c'est dans ces domaines-là que c'est l'Assemblée qui nomme les membres et les dirigeants, bien, c'est tant mieux qu'on partage un peu la même vision. Il reste que c'est toujours plus difficile, lorsqu'on doit l'appliquer, du côté gouvernemental que dans l'opposition. Je me faisais un plaisir de lire certaines des interventions du ministre lorsqu'il était critique de l'opposition dans ces matières-là et je soupçonne que c'est un constat auquel personne n'échappe lorsqu'on change de chaise dans ces affaires-là.

(11 heures)

Cependant, ça nous a conduits, en commission parlementaire, à une bonne discussion sur le rôle de la Commission d'accès à l'information. Le constat a été fait que la Commission a deux fois un double mandat. C'est vrai qu'elle a un double mandat d'enquêter, d'analyser, mais aussi d'entendre. Mais, par ailleurs, elle a un double mandat de garder de l'information cachée, de protéger la vie privée, et un autre mandat qui est d'ouvrir.

M. Boisclair: C'est la schizophrénie.

M. Mulcair: C'est ça. Il y a l'aspect bicéphale de la schizophrénie mais il me manque des termes. Il y a un autre problème, c'est qu'à travers ça il y a aussi le public et le privé. On va appeler ça la dialectique, pour rester avec des termes... Tout ça, ça devient assez compliqué. Et ça vient à un moment intéressant, parce qu'on a expérimenté pendant quelques années l'aspect de la protection de l'information obtenue par le domaine privé. On commence à avoir une certaine expertise là-dedans. Mais, l'exemple de ce qui a été fait avec la Commission des droits de la personne qui, rappelons-le, a jadis eu cette double fonction-là – enquêtes, conseils, auditions des plaintes, aspects tribunal décisionnel – ça a été scindé par le législateur et, à mon sens, le législateur avait raison là-dessus.

J'aimerais que le président de la Commission partage avec nous son propre cheminement ou ses propres réflexions, s'il en est, à cet égard-là, en vue d'alimenter notre propre réflexion en vue de la révision quinquennale. Est-ce qu'il a déjà commencé à débattre, discuter formellement ou informellement de ça avec ses collègues ou avec d'autres et s'il peut nous donner quelques éléments de réflexion?

M. Comeau (Paul-André): Alors, je réponds factuellement à partie de votre question. Oui, les travaux pour le rapport quinquennal sont engagés. Nous sortons d'ailleurs de deux journées intensives, hier et avant-hier, sur le sujet pour respecter l'échéance de déposer le rapport en juin. Tout n'est pas arrêté.

Pour revenir maintenant à votre question de fond, j'y répondrai de façon également factuelle parce que mes positions ne sont pas définitivement arrêtées. Je ne veux pas non plus lier mes collègues par mes positions sur le moment, étant donné que dans ce domaine-là nous agissons de façon collégiale.

Je regarde simplement ce qui s'est fait au Canada et à travers le monde depuis la mise en place de notre institution à laquelle je n'ai aucunement contribué; donc, je n'ai aucun mérite ni aucun crédit à avoir à cet égard. Je me rends compte que les provinces canadiennes, nommément l'Ontario, l'Alberta, la Colombie-Britannique, ont toutes suivi le modèle québécois dont parlait M. le ministre tout à l'heure, c'est-à-dire ce bicéphalisme, et elles l'ont suivi malgré la décision prise au même moment par le gouvernement fédéral canadien de scinder accès à l'information et vie privée et de scinder également les fonctions. Les autres provinces canadiennes, dont la dernière en date est l'Alberta, après avoir étudié les deux modèles considèrent que le modèle québécois est préférable.

Je regarde également dans d'autres pays. La République de Hongrie, qui a d'autres modèles européens à côté, a adopté le modèle québécois également. Alors, il y a sur le simple plan pratique un jugement qui a été posé de l'extérieur sur ce qui a été fait par cette Assemblée nationale dont il faut tenir compte. Mais, quant à l'appréciation que nous faisons, vous admettrez, M. le ministre, qu'on va attendre au dépôt du rapport pour aller plus loin. M. le député, pardon. Excusez-moi.

M. Mulcair: O.K. Non. Ça va. C'est anticipé, c'est pour dans un an et demi.

Une voix: Oh!

M. Mulcair: Aussitôt qu'ils déclenchent les élections. Ça peut être plus tôt. On va les faire traverser de bord. Ha, ha, ha! Ça aurait été au mois de juin.

M. Boisclair: M. le député, on m'a toujours dit que la meilleure façon de ne pas être ministre, c'est de dire qu'on voulait l'être.

M. Mulcair: Ha, ha, ha! Mais c'est pour ça que vous n'avez pas été nommé ministre au début du mandat avec M. Parizeau, sans doute. Ha, ha, ha!

M. Boisclair: Mais j'ai appris. J'ai appris! Ha, ha, ha!

M. Mulcair: Elle est bonne. Malgré le fait que le président de la Commission nous dit qu'on doit attendre le mois de juin, je lui demande de commencer à discuter avec les membres de cette commission, aujourd'hui, parce qu'il a sans doute un peu de réflexion là-dessus. J'ai déjà entendu par le passé sa référence au fait qu'il y en a d'autres qui ont étudié le modèle québécois, comme il l'a dit, mais il y en a d'autres qui ne l'ont pas. Alors, ce n'est pas le fait qu'on a le même système que d'autres et que d'autres sont venus après nous que ça fait en sorte qu'on n'a pas le droit de regarder notre façon de faire les choses.

Notre point avec le ministre ce matin, à plusieurs reprises, c'était de dire à quel point c'était intéressant conjoncturellement d'avoir un ministère qui regarde ces questions-là en même temps, parce qu'il n'y a même pas de chicane de clocher maintenant entre deux ministres qui vont essayer de protéger leur bifteck, c'est le même ministre qui a tous ces éléments sur la table. Lui, il est libre, il jouit d'une liberté que rarement un ministre aurait eue pour regarder ces choses-là avec une certaine sérénité et dire: O.K., dans l'intérêt du public et l'intérêt de la dépense de l'argent du public – parce que ça commence à nous influencer à juste titre de plus en plus dans tout ce qu'on fait – je mets quel bout avec quel bout?

Puis même si on peut comprendre que si c'était juste de ça, de commencer à scinder et privé et public et les fonctions, et accès et protection, ça serait difficile, mais, on en a parlé ce matin avec la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. Ce drôle de nom de cette Commission vient du fait qu'on a fusionné – protection des droits de la jeunesse – au cours des dernières deux années. Et maintenant la question est de savoir: Avec tout ça, est-ce qu'on peut commencer à regarder les différentes fonctions et voir où est-ce que ça peut aller le mieux? Vous savez, on a mentionné tantôt – le Vérificateur général, dans un tout autre contexte – le fait que le Vérificateur général avait des choses très sévères à dire en ce qui concerne la protection de la vie privée. On est tous sensibilisé à ça puis ça fait du bien que ça vienne aussi du Vérificateur général. Mais, le leadership là-dedans, ça doit être la Commission d'accès.

Et je vous avoue que j'étais, pour vous, M. le président de la Commission, par votre entremise, gêné de voir que le leadership apparent, public, là-dedans venait du Vérificateur général. Et, pour avoir été dirigeant d'organisme pendant longtemps, personne n'aime ça. Nous, on l'a eu à un moment donné avec le Protecteur du citoyen qui commençait à dire qu'il n'y avait personne qui domptait certains ordres professionnels puis il fallait que, nous, on soit un peu plus toffes. On n'aime pas recevoir cette information-là, parce qu'on est toujours persuadé de faire le mieux qu'on peut avec les ressources dont on dispose. Prenez-le positivement, mais c'est une admonition néanmoins. C'est: Aïe! faites attention, là, il y a des choses qui se passent qui n'ont pas d'allure.


Pouvoir d'enquête de la Commission

Et c'est là-dessus que je voulais vous entretenir, entretenir le président de la Commission, c'était de savoir... Si on reste avec l'idée du Vérificateur général, en anglais, on dit «audit»; les Français disent aussi audit. Est-ce que vous étudiez également la possibilité d'exiger un audit informationnel à l'intérieur des ministères, de vérifier... Tout comme un vérificateur suit les règles comptables généralement reconnues, est-ce qu'il y a moyen d'établir une sorte de norme ISO 9000 pour la protection de l'information et, si oui, est-ce que vous travaillez là-dessus?

M. Comeau (Paul-André): Vous avez parfaitement raison. Je ne vous dirai pas que j'étais très heureux, moi non plus, lorsque le Vérificateur général a publié son rapport. Je n'irai pas au fond là-dessus, mais je vais vous dire ce que nous envisageons effectivement. D'abord, il faut bien se rendre compte d'une chose, c'est que pour les renseignements personnels, les ministères, les organismes ont exactement la même responsabilité qu'ils ont pour la gestion des fonds publics. Ils ne doivent pas attendre que le Vérificateur général arrive pour mettre en place des contrôles et exercer ces contrôles, c'est assez logique. Et, dans le domaine de la protection des renseignements personnels, les ministères et les organismes se sont dotés au fil des ans d'un certain nombre de mécanismes pour précisément vérifier cela.

Et, si le Vérificateur général a pu sortir les chiffres – entre autres, disons 700 consultations intempestives par des fonctionnaires du dossier d'une personne du monde artistique – c'est que le ministère avait déjà ces chiffres par la journalisation qui est faite. Alors, le problème... Et c'est là la deuxième étape, et ça rejoint exactement la ligne de pensée qui est la vôtre, la deuxième étape est d'inciter les ministères et les organismes à utiliser eux-mêmes et immédiatement les propres instruments dont ils disposent pour faire cette vérification. Et là – nous l'avons promis à la commission du budget et de l'administration – nous sommes en train de faire une vérification dont le résultat devrait être connu d'ici quelques semaines tout au plus et transmis à cette commission pour voir comment les organismes utilisent les instruments de contrôle qu'ils ont à leur disposition.

Nous voulons aussi – là, je peux vous le dire parce qu'on s'est entendu là-dessus hier – demander dans la révision de notre loi que les organismes, du moins ceux qui détiennent ce que le Vérificateur général appelle des mégafichiers, soient obligés de publier dans leur rapport annuel l'audit annuel de leur propre gestion des renseignements personnels, comme ils le font pour leurs finances également.

(11 h 10)

M. Mulcair: Est-ce que le président de la Commission peut nous informer si, avec les ressources quand même limitées dont il dispose, il teste les défenses de différents ministères et organismes à l'occasion? Et je réfère évidemment aux révélations inquiétantes que lui et un de ses proches collaborateurs ont eu le courage de faire au cours du printemps; enfin, c'était vers la fin de l'hiver.

Est-ce que vous utilisez vos propres moyens, non pas pour faire un audit, non pas pour regarder les journalisations, non pas pour voir comment on peut les inciter à utiliser leurs instruments, mais vraiment prendre d'assaut les barricades d'un ministère ou d'un organisme, payer un enquêteur privé pour voir si vous êtes littéralement physiquement capable de sortir le dossier de quelqu'un, pour voir si ce qui est peut-être très joli en théorie marche réellement? Est-ce que vous faites ça à l'occasion, comme les ordres professionnels doivent le faire avec les praticiens, ou dans les hôpitaux, ou dans le secteur de la santé, ou dans leurs bureaux privés? C'est ça qu'ils doivent faire, ils font des inspections de cette nature-là. Est-ce que vous testez la solidité du cadenas?

M. Comeau (Paul-André): Nous ne nous lançons pas dans des opérations anti... comme vous l'imaginez, mais, ce que nous faisons, nous le testons à l'occasion des plaintes. Chaque année, depuis le début de la Commission, nous recevons et nous faisons enquête sur 300 plaintes précises, dont à peu près la moitié et peut-être un petit peu plus proviennent précisément ou visent, en tout cas, le secteur public. Et, à l'occasion de ces plaintes, à ce moment-là, nous sommes capables d'aller vérifier et d'aboutir au résultat qui est le but de votre démarche générale. Mais, de là à lancer des démarches et d'avoir recours à des experts extérieurs pour le faire, non, nous ne l'avons jamais fait. Ça dépasse nos moyens.

M. Mulcair: Prochaine question, M. le Président, concernant un sujet de préoccupation pour plusieurs citoyens qui nous ont contactés depuis deux ans. J'ignore si la question a déjà fait l'objet d'un regard du côté de la Commission, le président va sans doute pouvoir nous aider. Ça concerne le plumitif. C'est à cheval entre la Commission qui était ici auparavant et la Commission d'accès.

Le plumitif dans les palais de justice contient un certain nombre d'informations. Cette information est une cible de prédilection notamment pour les agences de crédit. Que vous traitiez avec Ultramar pour l'achat du mazout pour votre fournaise, que vous soyez en chicane avec eux autres et que ça se ramasse en Cour des petites créances, un petit coup de clavier puis pfft! Équifax a ça dans votre dossier, puis bonne chance! Ça, c'est des choses qui coûtent extrêmement cher en termes de cote de crédit.

Mais le plumitif des palais de justice contient plus que les causes civiles, ça contient aussi les causes criminelles. Il existe effectivement une loi qui exige qu'un certain nombre de choses soient disponibles pour le bien du public, et c'est pour ça qu'on a certaines lois qui permettent d'éponger ce qui est là. Mais il y a une anomalie dans le système qui est géré par le ministère de la Justice du Québec, et je l'explique. Si vous êtes condamné pour un crime, votre nom reste là. Si vous obtenez pardon, le nom disparaît et on n'a même pas le droit de l'utiliser. Mais si vous avez été accusé, même faussement, et que vous subissez votre procès quand même et que vous êtes acquitté complètement – j'hésite toujours à utiliser la terminologie – puis êtes trouvé non coupable – parce que vous êtes non coupable, vous devriez être trouvé coupable, votre nom demeure dans le plumitif. C'est une aberration. On a tenté de le soulever à plusieurs reprises avec le ministre de la Justice qui a tenté, à son tour, de se réfugier derrière une soi-disant loi fédérale qui, selon lui, exigeait qu'il garde ça dans les dossiers.

Le Protecteur du citoyen, le 22 janvier 1997, a dénoncé cette situation. À la page 39 des débats de la commission des institutions, on peut lire ceci. M. Jacoby a dit: «Oui, je peux vous dire maintenant que ce dossier de l'information contenue dans les plumitifs dans les palais de justice sur acquittement, nous l'avons traité conjointement avec la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. Il arrive à l'occasion que nous joignons nos efforts pour ne pas faire de dédoublement. Et je peux vous dire également qu'à ce stade-ci nous sommes arrivés à la conclusion qu'il fallait donner le libre choix aux personnes de faire enlever l'information au plumitif ou, dans certains cas, de la laisser parce qu'on a découvert que certaines personnes veulent que l'acquittement demeure là. Donc, c'est leur choix.»

M. Jacoby continue: «Non, mais il y a des personnes qui disent: Moi, je veux que ce soit connu que j'ai été acquitté. D'autres disent: Moi, c'est tellement injuste que je ne veux pas qu'on en entende parler. Alors, on est rendu là. Actuellement, au moment où on se parle, je sais qu'on a invoqué la loi fédérale, et ainsi de suite.» Il parle de la référence du ministère de la Justice à une loi fédérale. «Mes collaborateurs, dans mon bureau, et les collaborateurs de la Commission des droits n'ont pas été impressionnés par l'argumentation des fonctionnaires.» Et moi, j'ai dit que moi non plus, je n'avais pas été très impressionné par ce raisonnement.

Et M. Jacoby a continué: «Je n'ai pas été impressionné par leur argumentation sur la barrière systématique à cause d'une loi fédérale. Je pense qu'il n'y a aucun problème. Je pense que les questions sont beaucoup plus administratives et, là-dessus, je peux vous dire que je suis en discussion avec le sous-ministre associé au ministère de la Justice, responsable des services judiciaires, pour voir quels sont les obstacles matériels ou administratifs – une bonne manière de dire que c'est les fonctionnaires qui aiment bien leur façon de faire puis qu'ils n'entendent pas la changer – qui pourraient empêcher la mise en oeuvre d'une telle recommandation.» Bon.

Alors, on a le Protecteur du citoyen qui dit qu'il travaille avec la Commission des droits de la personne là-dessus. Mais, avec tout le respect qu'on doit à la Commission d'accès et de protection de la vie privée, ils sont où dans ce dossier-là? C'est où l'intervention de la Commission là-dessus?

M. Comeau (Paul-André): On n'a aucune juridiction, M. le député, en ce qui concerne l'administration du système de la justice. On n'a aucune juridiction.

M. Mulcair: M. le président, il n'en demeure pas moins que la Commission, même si elle ne peut pas entendre une cause, s'il y a quelqu'un qui dit «mon nom est dans le plumitif», peut quand même utiliser son autorité morale. Et sa juridiction matérielle, ratione personae, devant sa Commission, est une chose, mais ce que j'essaie de faire comprendre au président de la Commission, c'est que s'il ne veut pas se faire dédoubler, à gauche, par le Vérificateur général qui dit: Ça commence à bien faire, là, je mets ça dans mon rapport annuel, ça ne marche pas. Et, à droite, par le Protecteur du citoyen et la Commission des droits, il faut qu'il comprenne que son mandat est large et vise à protéger des pans entiers de l'intérêt du public. Il ne faut pas se cantonner à une interprétation restrictive parce qu'un bout de notre mandat dit qu'on n'entend pas ces causes-là. Ça ne nous empêche pas de voir et d'entendre.

Ça me rappelle des conversations que j'ai eues avec le coroner en chef de la province de Québec qui disait: «Vous savez, notre mandat, c'est seulement quand il y a eu décès.» Il nous a même donné l'exemple. Il a dit: «Si je vois qu'il y a un balcon qui est à la veille de tomber avec des gens dessus, je n'ai pas de mandat là-dessus; ça, c'est les bâtiments, c'est le ci puis le ça.» Je dis: «Come on!», si vous savez que quelque chose peut être cause, vous n'avez pas le droit de venir... Il a dit: «Non, notre mandat, c'est écrit, là, est d'enquêter sur les causes et les circonstances d'un décès et de faire des recommandations.» N'attendez pas d'avoir un décès informationnel avant d'agir. On a la chance d'avoir une Commission qui a tous les outils nécessaires, agissez! Ne laissez pas les autres... C'est un signe de frustration.

M. Boisclair: Ne faites pas juste dénoncer, agissez!

M. Mulcair: Bien oui, c'est ça! Je suis d'accord avec le ministre là-dessus. Et apportez-le ici, si vous trouvez que c'est une carence ou une faille dans votre loi ou votre compétence. Mais c'est préoccupant et même frustrant pour nous, comme membres de cette commission, d'assister à ce que je perçois, des fois, comme étant une trop grande réticence d'agir à l'intérieur d'un champ.

Ce n'est pas juste la loi qui est votre champ d'intervention, c'est un domaine. Et ce n'est pas un petit organisme aux termes d'une petite loi, c'est quelque chose considéré comme fondamental. Le député de Lévis l'a dit tantôt: Dans la société dans laquelle on vit, c'est archi-important de concevoir notre mandat d'une manière large et, oserais-je dire, libérale.

Le Président (M. Garon): Au sens noble du terme.

M. Mulcair: Au sens le plus noble du terme.

Des voix: Ha, ha, ha!

(11 h 20)

M. Comeau (Paul-André): Si vous permettez, je pourrais vous donner quand même les éléments d'information suivants. Peu de temps après mon entrée en fonction, j'ai été saisi de ce dossier des relations entre le plumitif et la société Équifax. Nous sommes intervenus de façon non officieuse à l'époque pour faire en sorte que le contrat qui a été conclu en 1991 ou 1992 – je ne sais plus où en est le contrat maintenant – ne permette à Équifax d'aller chercher dans le plumitif à Montréal que les renseignements des causes qui impliquaient des questions financières. Le contrat qui a été conclu à ce moment-là se limitait à cela. Alors, depuis, j'avoue ne pas savoir ce qui en est. Mais nous sommes intervenus à ce moment-là et nous avons pu, dans ce premier contrat, faire comprendre au ministère de la Justice que les règlements criminels, qui n'avaient rien à voir avec les transactions financières, ne devaient pas être repris par Équifax et ça faisait partie du contrat qui a été négocié en 1991 ou 1992.

M. Mulcair: Il n'en demeure pas moins, M. le Président, que j'ai, depuis des années maintenant, des cas sur mon bureau, très frustrants, de personnes qui ne peuvent pas trouver d'emploi. J'en ai un, là, un comptable qui a été faussement accusé par un client qui, de toute évidence, pour le dire correctement, avait certains problèmes de perception de la réalité. Il se fait traîner devant les tribunaux, blanchi sur toute la ligne, mais il travaille dans le domaine financier, comptable. Les accusations avaient rapport avec l'escroquerie puis des choses comme ça; il n'est pas capable de trouver de job. Il est formé correctement, un gars compétent.

La première chose que tout employeur fait quand il fait sa demande d'emploi, c'est demander son dossier à Équifax, puis ça apparaît, son acquittement, tout le temps. Le fait qu'il ait été accusé, ça apparaît. C'est ça le problème. C'est une chose comme parlementaire, comme représentant de l'Exécutif, comme représentant du côté administratif, c'est une chose, pour nous, d'échanger: la loi dit ci, on fait un colloque sur ça, et patati, et patata. Mais, au bout du compte, c'est du vrai monde qui est affecté par ça et il ne faut jamais perdre ça de vue.

M. Boisclair: D'ailleurs, on prend bonne note de ces propos. Et ce qui est assez étrange dans notre société, c'est que finalement, alors que c'est moi qui doit défendre les crédits, la majorité des questions de l'opposition – ce n'est pas un reproche du tout, mais c'est une constatation – s'adressent au président de la Commission qui n'est pas celui qui est élu. Lui, au nom des membres de l'Assemblée nationale, a la responsabilité de la présidence de la Commission et de l'application de la loi. Sauf que, ces questions, en termes de vision, en termes d'orientation et de correctifs – je comprends que le président, bien sûr, il peut exercer un rôle de leadership, mais il répond en fonction des compétences qui sont les siennes – il nous appartient à nous, comme parlementaires, de voir s'il y a lieu de modifier les dispositions de la loi. Et je dois vous dire, M. le député, que je prends bonne note de l'interrogation que vous soulevez.

M. Mulcair: M. le Président, j'apprécie le propos du ministre. Puis effectivement, dans ces domaines-là, le domaine de la protection des droits de la personne, le domaine de l'accès à l'information et de la protection de la vie privée, plus que dans d'autres, c'est une préoccupation de tous les députés parce que c'est vraiment l'Assemblée qui fait les nominations. Si c'est effectivement le cas, que le ministre est là pour regarder les questions proprement budgétaires, je trouve que les sujets qui sont sur la table sont trop importants pour qu'on passe trop de temps à savoir pourquoi, alors que l'année dernière on n'avait pas d'eau de source à la Commission des droits de la personne, cette année, on a dépensé plusieurs centaines de dollars pour de l'eau de source, même si les députés doivent boire de l'eau du robinet, avec tout le «flotsom et jetsom» qu'il peut y avoir là-dedans. Pourquoi ça coûte 1 500 $ et plus pour s'occuper des plantes, à la Commission d'accès à l'information alors que peut-être quelqu'un de l'interne pourrait le faire?

Il y a des questions de bon aloi, puis je n'ai même pas besoin de savoir comment ça se fait que vous avez dépensé 100 $ cette année pour les valises. Ça, je vous avoue que c'est le genre de préoccupations qui, dans une saine administration, nous dépassent. Les choses grosses, là-dedans, comme le budget qu'on a regardé tantôt pour les loyers, vous avez raison de dire que ce n'est ni le président de la Commission ni vous-même, M. le ministre, qui êtes en contrôle de ça, c'est quelqu'un d'autre.

Alors, il ne reste que la question plus large. Nous, comme députés, de part et d'autre, on est en train de regarder ce que le député de Lévis, à très juste titre a dit tantôt, va être un des sujets de préoccupation pour toute personne qui réfléchit un peu à l'avenir de notre société, c'est des choses sur lesquelles on est obligés de réfléchir aujourd'hui. Alors, je préfère autant profiter de la présence du président de la Commission aujourd'hui pour essayer de le sonder sur sa vision de l'avenir, pour essayer de savoir sa réaction dans une année où on perçoit que l'envergure de sa Commission est en train de ratatiner et des gens de différents organismes et ministères sont en train de dire: «Hey, is there a pilot in the plane?»

Le Vérificateur général dit: Moi, le bout que je veux aller... Je suis désolé. Bang! Je tire là-dessus. Le Protecteur du citoyen: Bang! Il y a quelque chose qui ne marche pas. La Commission des droits de la personne: On apprend, on regarde ces choses-là de plus en plus. J'apprécie le fait que le président de la Commission nous dise qu'il veut déposer un rapport pour le mois de juin, mais je trouve décevant de ne pas avoir la moindre indication de sa philosophie personnelle aujourd'hui, en avril 1997. C'est quoi qu'il pense, lui? C'est une chose d'avoir l'avis formel de la Commission, on va tous pouvoir l'étudier, mais qu'est-ce qu'il pense, lui, de tout ça? Ce sont des questions importantes qui sont sur la table.

M. Boisclair: M. le Président, d'aucune façon je tiens rigueur au député de Chomedey de vouloir faire porter le débat sur des enjeux plus larges que ceux qu'il a évoqués tout à l'heure. Je pense que c'est dans cet esprit de collaboration que nous cherchons à créer que je pense qu'il est important qu'on puisse faire ce genre d'échanges. Mais, la question de fond qu'il soulève – et c'est ça qui est intéressant et je voudrais peut-être prendre le temps d'échanger avec le député, ici ou à un autre moment – mais c'est la responsabilité que les gens de la Commission conçoivent à l'endroit de leur responsabilité et leur pouvoir d'enquête. La Commission a l'ensemble des moyens pour faire des enquêtes. L'immunité est prévue. Elle a les outils. Ce qui serait intéressant, à un moment donné, il faudra aller plus à fond sur cette question.

Vous comprenez que, moi, les deux bras m'ont tombé, M. le Président, lorsque j'ai lu les propos de M. White, de la Commission, dans les journaux, faire le point sur... Vous vouliez... En tout cas, les deux bras m'ont...

Le Président (M. Garon): Je voulais aviser le député de Chomedey que le député de Taschereau voulait poser des questions.

M. Gaulin: Allez-y, M. le ministre.

Le Président (M. Garon): Non, non, vous étiez en train de parler.

M. Gaulin: Non, non, allez-y.

M. Boisclair: Je termine en disant que la Commission a elle-même un pouvoir d'enquête. Elle-même a un pouvoir d'enquête. Je pense que la réflexion de fond plus large à faire, c'est sur la façon dont la Commission et les gens qui ont des responsabilités conçoivent la façon dont ils doivent utiliser les pouvoirs d'enquête. Parce que là, ce n'est pas tout: alors qu'on a des pouvoirs donnés par la loi de voir des gens qui viennent alerter les membres de la Commission et lever un drapeau rouge, alors que la Commission et les gens ont les pouvoirs pour corriger ce genre de situation.

Le Président (M. Garon): M. le député de Taschereau.


Marché noir des renseignements personnels

M. Gaulin: Bien, c'était à ce sujet-là que je voulais interroger ou poser des questions au ministre dans le cadre des crédits, au président de la Commission de l'accès à l'information éventuellement. Tout à l'heure, M. le ministre nous disait que la nouvelle loi qui complète celle adoptée plus tôt en 1982, la nouvelle loi sur le secteur privé, le ministre nous disait ceci: «Cette loi impose aussi – et le mot «aussi» est très important – aux entreprises présentes au Québec l'obligation d'assurer la confidentialité des renseignements personnels qu'elles détiennent, recueillent, utilisent ou communiquent. Elle interdit la communication de ces renseignements à des tiers sans le consentement de la personne concernée, sauf dans certains cas prévus expressément. Par ailleurs, la loi de 1982, entre autres choses, donne le droit à la confidentialité des renseignements qui nous concernent.»

(11 h 30)

Alors, dans le cas qui est ici, c'est que les citoyens sont peut-être un peu inquiets quand, dans le cadre – ce à quoi faisait allusion le ministre à mots couverts – du mandat d'initiative de la commission de la culture sur la carte d'identité, on apprend qu'il y a un marché noir des renseignements personnels. C'est M. Clarence White qui l'a souligné ici. C'était incidemment et, évidemment, ç'a été relevé, il y a eu des questions. Il en a été fait état dans les journaux. Alors, on est un petit peu inquiets de voir, comme citoyens, que des renseignements personnels sur la vie privée des citoyens et citoyennes pourraient être l'objet de marché noir, c'est-à-dire que la vénalité de certains fonctionnaires ferait – ou, enfin, on peut l'appeler autrement aussi – qu'il y a communication pour de l'argent de renseignements concernant les citoyennes et les citoyens.

Alors, moi, j'aimerais savoir, d'une part, si le ministre avait été informé de cet état de chose ou si ce n'était pas encore assez sûr pour qu'on l'en informe et, par ailleurs, si le président lui-même le savait et s'il va utiliser son pouvoir d'enquête, dont vient de faire état le ministre, pour enquêter là-dessus, parce que c'est une nouvelle qui a quand même une portée grave, surtout qu'on est en train de regarder comment on pourrait avoir une carte d'identité et que les citoyens sont déjà suspicieux par rapport à ce qui se passe déjà. Alors, ça pourrait avoir des interférences sur cette carte de citoyen dont il a été fait état.

M. Boisclair: Alors, M. le Président, MM. les membres de la commission, à la question posée par le député de Taschereau, je n'ai jamais été informé sous une forme ou sous une autre, ni moi ni mon personnel n'avons été informés des allégations qui ont été portées, rendues publiques par M. White. Je rencontre le président de la Commission d'accès à l'information sur une base régulière, jamais ne m'a-t-il non plus fait état de ce genre d'allégations. Quant au président, il lui appartient de...

M. Gaulin: Oui, M. Comeau, si M. le Président veut vous permettre de répondre, j'aimerais ça savoir votre point de vue.

M. Comeau (Paul-André): Très bien. Alors, je vais malheureusement devoir répéter un certain nombre de choses que j'ai dites devant la commission du budget et de l'administration, au lendemain de la déclaration faite par le directeur, l'analyse d'évaluation de la Commission. À cette occasion, le directeur a clairement déclaré qu'il venait d'apprendre avant d'entrer ici, en cette salle, l'existence de ce marché. Et c'est exactement à cette occasion-là que je l'ai appris également, moi aussi. Alors, depuis, à la demande du ministre et du gouvernement, il y a eu une enquête enclenchée par le Sûreté du Québec, la Direction des crimes économiques, à laquelle la Direction en question a collaboré et fourni les documents, que je n'ai jamais vus de ma vie puisqu'ils étaient parvenus, semble-t-il, quelques heures ou quelques minutes même, avant.

Alors, je n'ai pas jugé, dans les circonstances, d'entreprendre une enquête parallèle à celle de la Direction des crimes économiques pour ne pas faire interroger tout le même monde deux fois et pour ne pas nuire aux chances de succès de l'enquête. Parce que, comme vous l'avez dit, il s'agit d'une matière grave et inquiétante, et je pense que c'était plus sage, de ma part, de laisser la Sûreté mener à bien l'enquête en lui offrant toute notre collaboration, ce que nous avons fait.

Dans les circonstances, vous avez raison de soulever la question de l'utilisation par la Commission de ces pouvoirs d'enquête qui lui sont reconnus dans les deux lois. Alors, je vais élargir un petit peu, si vous le permettez, pour bien comprendre comment nous utilisons ces pouvoirs et de quelle façon nous les voyons. D'abord, ces pouvoirs sont utilisés de façon régulière et constante, en fonction des plaintes qui nous sont transmises: 300 enquêtes par année, à peu près, avec un peu plus de plaintes. Ces plaintes sont traitées par une direction, et nous essayons de suivre les indications qui ont été données par la Cour suprême et qui ont été confirmées récemment dans le jugement La Petite Maison contre la Régie des alcools, donc, une certaine étanchéité jusqu'au processus de décision finale. Nous intervenons aussi devant des demandes précises. À l'occasion, des ministères, des organismes nous demandent de les aider.

Mais à l'égard de ce problème de la protection des renseignements personnels détenus par les organismes et les ministères, depuis 15 ans, donc depuis l'entrée en fonction de mes prédécesseurs, tous ont privilégié une démarche préventive. Je vais vous donner un exemple précis. Quand je suis entré en fonction, nous avons engagé des travaux de recherche et ensuite de consultation pour proposer aux CLSC, aux centres hospitaliers, enfin au monde de la santé, des lignes directrices sur l'informatisation des dossiers médicaux, ce qui était le début de l'opération. En 1990-1991, c'était la tendance dans tous ces mouvements-là. Et là nous avons dit: Il est important de prendre des précautions précises pour minimiser la fuite, le voyeurisme, la fraude dès le départ. Et les systèmes vont être bâtis en fonction de cela.

Ce que nous faisons, en fonction de ces lignes directrices que nous avons promulguées avec l'appui du milieu, nous faisons – pour employer une expression de grec moderne – des «spot check» régulièrement auprès des hôpitaux, pour voir comment ces lignes directrices permettent ou non de réduire les problèmes.

Alors, dans cette perspective nous tentons de fonctionner avec les ministères et les organismes pour la mise en place de cette gestion dont ils sont au départ les premiers responsables et, je le répète, au même titre qu'ils ont la responsabilité de gérer les deniers publics. Et c'est là où nous essayons avec eux de proposer des instruments, des techniques qui vont leur permettre de vérifier s'il y a effectivement des écarts, s'il y a exactement des problèmes. Et je répète que c'est grâce à ces instruments que le Vérificateur général a pu dénoncer la situation en question. Le problème, il est important et il permet, je pense, de bien situer la place de la fraude et de la tricherie.

Hier soir, en songeant à notre rencontre, j'ai relu des pages importantes du rapport Krever – Krever de l'Ontario, et non pas le rapport actuel – de la fin des années soixante-dix, qui avait étudié précisément le problème en Ontario du commerce des dossiers médicaux. Et on s'était rendu compte – c'était avant la généralisation de l'informatique – que la fraude s'était installée dans le domaine médical en Ontario. Et on vendait des dossiers papier; on ne vendait pas des dossiers informatiques. Alors, il y a une tendance actuellement à lier la fraude, à lier le non-respect de la confidentialité à l'informatique. C'est un problème beaucoup plus important, beaucoup plus lié, en définitive, à la condition humaine qu'à la technologie.

C'est évident que la technologie facilite des choses et qu'il faut intervenir. Et c'est là notre rôle d'essayer, avec les organismes, de bâtir des instruments qui vont leur permettre de repérer les problèmes. Parce qu'on aura beau faire un audit un an après ou deux ans après, selon une certaine rotation, les problèmes auront été causés, à ce moment-là, les organismes seront responsables, il y a aura eu des bris de confidentialité.

Alors, nous voulons faire des «spot check» en fonction des plaintes ou de façon purement aléatoire, mais nous voulons aussi que les organismes jouent leurs responsabilités. Et les organismes disposent des instruments, mais il s'installe une certaine, pas torpeur, mais une certaine habitude. C'est-à-dire qu'on dispose des retombées de la journalisation.

Tous les ministères qui ont des fichiers majeurs savent fort bien, parce que c'est relevé, qui a consulté tel dossier, à tel moment. Alors, là, il s'agit d'aller plus loin que ça, et certains l'ont fait, notamment la RAMQ, la SAAQ, etc., d'avoir des avertisseurs. Lorsque l'ordinateur enregistre ces consultations-là et qu'il découvre par exemple que, dans une journée, un employé a consulté 200 dossiers, alors que la norme c'est 20, il faut qu'il y ait un clignotant rouge qui s'allume et que le ministère intervienne. Parce que, si la Commission instituait un genre de police, et allait voir une fois par année, les dégâts auront été commis, et les problèmes sont beaucoup plus graves. Alors, c'est ce jeu. En informatique, on ne peut pas se contenter de faire la police a posteriori, il faut bâtir des instruments et tenir compte également des petits penchants de la nature humaine.

Parce qu'il faut se rendre compte aussi que ce n'est pas seulement de la fraude et de la tricherie. Il y a des gens qui vont aller dans des dossiers où ils n'ont pas affaire par curiosité, le voyeurisme, mais aussi pour faire plaisir à un copain, pour donner un renseignement à un autre sans aucune contrepartie, sans aucun échange. On l'a vu, M. le député, dans votre circonscription, à Laval, avec la police, où des gens du corps de police allaient consulter le CRPQ pour donner un renseignement sans aucune contrepartie à un individu qui voulait ouvrir un bar. Il voulait ouvrir un bar et il voulait savoir si le personnel qu'il recrutait était fiable ou non. Alors, les policiers rendaient service. C'était une banalisation du respect du devoir de confidentialité des policiers.

(11 h 40)

Alors, là, il y a toute une démarche à faire pour éviter cette pente. On n'y pense pas, ce n'est pas important, ce n'est pas grave, etc., mais c'est aussi sérieux que d'autres – comment dire? – indiscrétions. Alors, nous voulons arriver à cela. Et l'un des éléments, ce sera donc que nous allons vous proposer d'obliger les ministères à rendre compte dans leurs rapports annuels de l'utilisation qu'ils font eux-mêmes des propres instruments de contrôle et de vérification et, bien sûr, des résultats qu'ils auront. Parce que, même si la Commission voulait jouer le rôle de policier, avec l'ensemble des fichiers informatiques au Québec, c'est impensable. Il faut être réaliste. Alors, vaut mieux prévenir, intervenir et, lorsqu'il y a des problèmes, aussi, à ce moment-là, tenter des corrections.

L'objectif, c'est de limiter les dégâts dès le départ, comme on l'a fait avec les hôpitaux. Et je dois vous dire que nous avons vérifié peut-être huit ou 10 hôpitaux majeurs au Québec en fonction de ça, et on se rend compte que les problèmes que nous appréhendions ont été presque partout évités. Je ne dis pas qu'il n'y en a pas d'autres. C'est pourquoi il faut toujours reprendre sur le métier, grâce aux progrès de la technologie, les instruments en question.

Le Président (M. Garon): Mais je pense aussi qu'il y a une autre lacune, au Québec.

M. Comeau (Paul-André): Une autre lacune?

Le Président (M. Garon): Oui. C'est qu'on comprend très mal le devoir de divulgation. C'est la société la plus secrète qu'il y a, où les establishments se protègent d'une façon éhontée, incluant nos journaux. Et, quand aux États-Unis on a compris que certains organismes, certains dirigeants d'entreprises inscrites à la bourse ont des devoirs de divulgation... Au Québec, on se comporte comme si on était au Moyen Âge, là-dedans. Quand un recteur d'université s'insurge que son salaire soit connu puis ses avantages... On n'est plus dans la société de droit divin, on est dans la société de droit démocratique. Aujourd'hui, il y a des choses qui devraient être comprises. Si les gens qui sont à la direction des universités ne comprennent même pas ça, eux, imaginez-vous comme on est loin.

Alors, on n'a pas défini, au Québec, le devoir de divulgation, qui est très bien défini aux États-Unis. Il y a beaucoup d'organismes qui ont le droit de rendre des comptes, et chacun peut regarder les rapports annuels puis il voit des renseignements qu'il est en droit de savoir. Alors, au Québec, comme on n'a pas défini le devoir de divulgation à peu près aucunement, on sent le droit d'aller «poutiner» dans la vie privée des gens, alors qu'on ne sent pas de devoir, d'obligation de ceux qui devraient divulguer de façon naturelle sans même être obligés. Et je pense qu'on a un gros débat à faire, au Québec, parce que, si on avait circonscrit le devoir de divulgation, on comprendrait mieux ce qui intéresse la vie privée. Et, tant qu'on n'a pas défini ce qu'on doit divulguer, on ne sait plus ce qu'on doit protéger.

Moi, je n'en reviens pas. Tantôt, je vous donnais comme exemple les souscripteurs du Devoir . Ça m'intéresserait de savoir. Je saurais si le coeur penche du côté du portefeuille. En tout cas, je pourrais me faire une idée. Je vois des gens, comprenez-vous, qui ne voient pas la poutre dans leur oeil, mais qui voient la paille dans ceux des autres. Je pense qu'il faut se poser des questions par rapport à ces choses-là. Et, moi, je pense que ça va être un des principaux sujets de notre commission puis du gouvernement de se demander: Qu'est-ce qui doit être divulgué, qu'est-ce qui va être divulgué de façon obligatoire qui est normal d'être connu? Et, après ça, on va mieux comprendre ce qui ne doit pas l'être. Comprenez-vous? M. le député de Taschereau puis M. le député de Chomedey.

M. Gaulin: Rapidement. Je vous remercie des informations que vous donnez, M. le président Comeau. Vous dites donc que vous avez appris ça un peu avant la commission, ici même. Mais pourquoi, à ce moment-là, vous en avez fait état sans faire de vérification? Est-ce que vous aviez quand même eu une sorte de puce à l'oreille? C'est sûr que les journalistes ont couru à la nouvelle là-dessus, mais il y a quand même eu des informations, alors que le fondé n'était pas nécessairement exact. Vous auriez pu utiliser votre pouvoir d'enquête, peut-être, avant de le révéler au public parce que, si ce n'est pas nécessairement vrai, aussi, ça a des conséquences pour, disons, la réputation des fonctionnaires eux-mêmes.

Parce que, moi, j'ai parlé de vénalité et, à ce moment-là, c'est déjà un procès d'intention. Ça peut être vrai dans certains cas. Mais, par ailleurs, puisque vous parliez aussi de la banalisation du devoir de confidentialité des fonctionnaires, je pense que la citoyenneté fait qu'on doit peut-être rappeler aux fonctionnaires qu'il y a des choses qui apparaissent banales, mais qui sont quand même importantes. Au départ, on peut vous demander, par exemple, le nom des personnes de 25 à 30 ans. Vous dites: C'est sans conséquence que je donne ça. Ensuite, on vous demande le nom des gens qui seraient notaires, avocats ou médecins: Bon, quel rapport ça a? C'est sûr que quelqu'un ne doit jamais donner ces informations-là. En troisième lieu, à la RAMQ, on peut vous demander le nom de gens qui ont des maladies entraînant des frais de 15 000 $ et plus, surtout dans le cas où les médicaments n'étaient pas assumés par l'assurance qu'on a maintenant, l'assurance-médicaments.

Alors, il y a deux questions dans ce que je viens de dire. D'une part, pourquoi vous en avez fait état devant la commission assez rapidement, sans vérification? Et, d'autre part – mon autre question s'adresse plus au ministre – est-ce qu'il n'y a pas lieu de rappeler aux fonctionnaires, même s'ils le savent et que ça fait partie de leur vie, que c'est vraiment sérieux, pour aucune sorte de raison on ne doit communiquer des informations, même si ça paraît anodin ou inoffensif? Voilà. Point d'interrogation.

M. Comeau (Paul-André): Alors, je vais répondre à la première question, M. le député, et, là-dessus, je vais répéter exactement ce qui s'est passé à la commission de l'administration et à la commission de la culture, parce que ça s'est joué en deux temps. Le directeur de l'analyse de l'évaluation a lui-même révélé – au sens fort du terme – ici ce qu'il venait d'apprendre un peu plus tôt. Je l'ai appris en même temps que mes collègues. Donc, je ne pouvais pas donner l'ordre d'enclencher une enquête sur quelque chose que j'apprenais au moment même. Quant à la suite, je pense vous avoir expliqué les raisons pour lesquelles nous collaborons avec la Sûreté, mais sans vouloir marcher dans leur sillon, pour le moment.

Le Président (M. Garon): M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Je tiens, par votre entremise, M. le Président, à réitérer une chose qui est sans doute évidente pour le ministre. Dans ce dossier des révélations qui ont été faites, je pense que le ministre a sans doute noté qu'il y a eu très peu d'interventions qu'on pourrait qualifier de partisanes, de notre côté. C'est trop grave, ça va bien au-delà de l'intérêt partisan. Mais, cartes sur table, je veux aller plus loin et dire qu'il n'y a aucun intérêt à jouer à la partisanerie là-dedans, parce que le problème existe depuis bien plus longtemps que votre gouvernement est au pouvoir. On se comprend très bien là-dessus.

Il y a une chose qui est rafraîchissante dans la candeur avec laquelle le président de la Commission d'accès à l'information explique les choses: il apprenait ça à ce moment même. C'est un mot que j'hésite à employer, mais c'est presque empreint de naïveté, parce que ça se sait depuis longtemps. Dans les milieux juridiques, à Montréal, si vous êtes en train de poursuivre un médecin et qu'il est défendu par tel bureau, avec accès à telles ressources – devinez quoi? – vous savez tout de suite ce qu'on appelle en anglais «the forensic abilities». Vous jouez avec la présomption qu'ils ont déjà par la RAMQ tout sur votre client. C'est comme ça qu'il faut commencer. Et ça, ça ne date pas d'hier. Ça a toujours été ça.

Alors, c'est pour ça qu'on a posé la question, tantôt: Qu'est-ce que vous faites pour tester les défenses? On a un système de défense, en Amérique du Nord, on a des lignes de défense. Pour savoir si toutes ces belles choses qui existent sur papier fonctionnent dans la vraie vie, on teste les défenses, on envoie un avion, on essaie de voir si ça allume vraiment l'alarme et on essaie de voir. On a de la difficulté à comprendre le raisonnement du président de la Commission, qui tend à dire que le rôle de la police, a posteriori, ce n'est pas ça; il faut essayer de faire de la prévention. C'est une belle théorie, tout ça, mais la police existe bel et bien pour réprimer l'inconduite après le fait.

Et un des nombreux rôles – et on commence à constater qu'il y en a de nombreux – de la Commission, c'est justement, à notre point de vue, de constamment avoir les outils, les moyens, la perspicacité, la prévision nécessaire pour se dire: Bon, on a une fonction qu'on doit remplir, qu'est-ce qu'on fait pour vérifier? Moi, je vous avoue bien simplement, M. le Président, je me permettrai de suggérer par votre entremise au ministre que la meilleure chose à faire pour tester ces défenses-là: faites le test, donnez 500 $ par un budget qu'on trouverait ou à la Sûreté, ou à la commission, ou ailleurs...

M. Boisclair: Disons que je préférerais que ça soit un budget de la commission parlementaire.

(11 h 50)

M. Mulcair: Non, mais c'est comme ça qu'on fait du travail de cette nature-là, on teste la viabilité des défenses. Parce que ce n'est pas avec des colloques, ce n'est pas avec des commissions parlementaires, c'est avec aucune de ces choses-là que la vraie vie privée des citoyens, qui est de plus en plus contenue dans les ordinateurs du gouvernement, va vraiment pouvoir être protégée. Alors, on offre notre collaboration au ministre là-dessus. Et j'ai commencé mon intervention, à l'instant, en rappelant au ministre qu'il n'y a pas eu un scandale partisan là-dedans, et ce, avec raison, ça dépasse le débat partisan, c'est trop grave. Que la Sûreté du Québec soit maintenant mêlée à ça après le coup est une autre indication de ce qu'on disait tantôt. Le Vérificateur général, la Sûreté du Québec, il y a quelque chose qui ne ment pas là-dedans, et c'est vraiment «the pointy end». Le fer de lance, le bout de l'arme doit être vraiment aiguisé pour pouvoir pénétrer. C'est ça, notre point, M. le Président.

M. Boisclair: Je voudrais, M. le Président, rappeler pourquoi j'ai recommandé le jour même au Conseil des ministres de procéder, de demander à la Sûreté du Québec de rencontrer M. White, M. Comeau, pour que la Sûreté puisse évaluer les choses. D'abord, je ne suis pas avocat, mais j'ai bien des amis qui le sont et j'ai entendu des gens, effectivement, des collègues avocats qui disent: Si je peux avoir un dossier, ça me coûte tant, et... Bon, j'ai entendu ce genre de choses là. Mais de là à supposer un marché organisé, ça, c'était une autre paire de manches. Et surtout, entre autres, lorsque la question du secret fiscal a été invoquée, il a quand même des choses qui sont...

On n'est pas une république de bananes, au Québec. Et il y a des dispositions, entre autres, sur la question dans la Loi sur le ministère du Revenu. En plus des infractions pénales contenues à la Loi sur l'accès à l'information pour des gens qui ne respecteraient pas les prescriptions de la loi, il y a aussi des dispositions pénales qui sont incluses à la Loi sur le ministère du Revenu, s'il y a des employés, dans le cadre de l'exercice de leurs fonctions, qui rendraient publics des renseignements.

Donc, qu'il y ait véritablement un marché noir et l'existence d'un marché, là, le Conseil des ministres, parce que ces allégations étaient graves, on dit... Pour moi, le respect de la confidentialité, le respect de la vie privée prévu à la Charte, prévu à la Loi sur l'accès, prévu dans certaines dispositions du Code civil aussi est quelque chose de fondamental, donc on s'est dit: On souhaite faire toute la lumière là-dessus. Puis, là, la Sûreté du Québec a rencontré des gens et, sur la foi, je présume – parce que, moi, je n'ai pas de contact avec la Sûreté du Québec – des informations qui ont été communiquées, la Sûreté a décidé de faire enquête. Et les collègues savent que la Sûreté remettra un rapport d'enquête au Procureur général qui, lui, décidera de quelle façon se comporter sur la base du rapport qu'on lui aura remis.

Mais la question que je me pose, c'est: Comment il se fait, alors que la Commission a le pouvoir d'enquête, qu'on se contente comme ça de faire des allégations sans qu'on ait agi sur ces allégations? Et c'est là que je pose la question, et je pense que c'est là où la Commission a une réflexion à faire et c'est là où nous aurons une réflexion à faire: Comment la Commission, dans son esprit, doit utiliser son pouvoir d'enquête? Parce que, alors que c'est cet organisme qui a la responsabilité de la protection des renseignements personnels, la Commission ne peut pas tout simplement lever le drapeau rouge puis dire: Il y a un problème. Ils ont le pouvoir de régler le problème, ils ont le pouvoir de faire les enquêtes.

Et c'est là où, moi, devant ça, alors que je vois un organisme chargé de faire l'application, de voir au respect, à la protection des renseignements personnels faire des allégations sans, au contraire, nous arriver avec une enquête et des poursuites, je me dis: Un instant, la Sûreté du Québec va prendre les choses en main. Parce qu'il peut y avoir plusieurs autres infractions à des lois qui ne sont pas de la responsabilité de la Commission d'accès, lois de marché qui sont, comme vous le savez, dans d'autres domaines. Et c'est là la question de fond, moi, que j'ai à me poser.

Je comprends bien l'interrogation du député, parce que ce qui compte pour les citoyens, c'est le résultat. Le citoyen, il regarde ce qui entre, puis ce qui l'intéresse, c'est ce qui sort. Ce qui se passe dans la boîte noire, entre les deux, à la limite – puis, moi, comme ministre aussi, je vous dirai, d'une certaine façon – ce n'est pas ça, c'est ce qui sort de la boîte noire et c'est le résultat. Et ce dont je m'aperçois, c'est que le résultat n'est peut-être pas à la hauteur des attentes des Québécois et des Québécoises et que, là, sur la base de la demande d'enquête, sur la base de la révision du rapport quinquennal...

Je pense qu'ensemble nous aurons un travail important à faire sur la révision quinquennale. Moi, je prends les moyens pour développer une expertise, au ministère, sur ces questions. Je souhaite la partager le plus largement possible dans des forums que nous pourrons nous donner aussi. Je souhaite discuter avec le président de la Commission, avec le député de Chomedey et voir, lorsqu'on aura ce rapport quinquennal, s'il ne serait pas important que la Commission déjà même entreprenne une réflexion, fasse sa propre lecture des choses. Vous comprenez que ces travaux, si c'était là le souhait des membres de la commission, doivent être entrepris maintenant.

Vous savez aussi que, l'échéance électorale étant ce qu'elle est, le mandat de cinq ans, moi, je ne veux pas prendre une chance, je voudrais régler les choses. Je ne voudrais pas être pris, qu'il y ait une élection à un moment donné qui fasse en sorte qu'on doive reporter les choses, comme ça a été le cas la dernière fois. C'est ça qui est arrivé. Alors, c'est pour ça que je pousse beaucoup sur le rapport au mois de juin. Et j'espère être capable de déposer quelque chose à l'Assemblée nationale de septembre à décembre, sinon au plus tard de mars à mai. Peut-être que le gouvernement décidera de faire un autre budget. «Time is off the essence».

M. Mulcair: Oui. Je réitère ce que j'ai dit au ministre tantôt. Il a toute notre collaboration là-dessus puis, même s'il veut revenir siéger au mois d'août, on n'a pas de problème avec ça. S'il veut commencer à analyser ça, ça nous fera plaisir. Et j'apprécie aussi son ouverture et sa candeur, c'est très constructif et ça augure bien pour le travail de révision. Je partage entièrement son analyse, je la partage entièrement, sur le rôle, sur les problèmes, sur ce qu'on a constaté dans ce dossier-là. Et pas besoin d'aller plus loin là-dessus, je suis très sensibilisé à la préoccupation du ministre et je la partage là-dessus. Nous aussi, on a ce malaise, et c'est tout à fait ça, il y a quelque chose qui ne marche pas.


Autres sujets

Alors, sur un côté qui n'a rien à voir avec notre analyse des crédits, mais ça a sans doute coûté des sous, sujet sur lequel je reviens parfois, M. le Président, ici, je dois juste dire que je n'ai que des éloges pour la qualité de la traduction de l'avis relatif au projet-pilote de la carte-santé mené dans la région de Rimouski, pour avoir souvent mangé de la traduction et enseigné ce sujet même à l'université. Je n'ai aucune idée si ça a été fait en régie, c'est-à-dire «in house», à l'intérieur de la maison, ou si ça a été donné à l'intérieur du gouvernement ou à un contrat extérieur, mais gardez bien le nom de la personne ou des personnes qui ont fait cette traduction-là parce que c'est un des rares documents émanant d'un gouvernement qui ne se lit pas comme une traduction. Vous savez, quand vous achetez quelque chose fait au Japon, vous essayez de comprendre ce qui est dessus en français; c'est comme ça que ça se lit, souvent, les choses qui sont traduites. Et ça, c'est vraiment excellent. Vraiment, ça mérite d'être souligné parce que c'est rafraîchissant de voir un document de cette importance sortir avec une qualité de traduction telle.

M. Boisclair: Bien. Je croyais que c'était Les publications du Québec qui avait fait la traduction. C'est ce qu'on m'indique. Je dois vous dire que j'ai aussi la responsabilité de l'information gouvernementale, dont la Direction générale de l'information gouvernementale, et nous offrons un service de traduction. Et je sensibilise tous mes collègues à la qualité du service qui est donné par la DGIG et par les différents services. Effectivement, l'expertise développée à cette direction et la qualité des services est appréciée de tous. Et je m'assurerai que vos propos soient rapportés à nos collègues.

M. Mulcair: Une dernière petite, petite question, M. le Président, il ne nous reste que deux minutes. Je voulais juste demander au ministre s'il avait eu l'occasion de noter que, sur le site Internet du gouvernement... Une des choses qui, pour moi, est le plus fondamental dans une société démocratique, c'est les lois. Montesquieu enseignait que l'accès aux lois représente une garantie pour la liberté des citoyens, puis, en temps moderne, on a tendance à résumer: nul n'est sensé ignorer la loi. Le site Internet offre plein de choses gratuitement, y compris la promotion de l'option du gouvernement en matière constitutionnelle. Mais, dorénavant, sur le site Internet du gouvernement du Québec, ça va coûter ou 5 $ ou 10 $ pour avoir accès à une loi. Est-ce que le ministre a porté sa propre réflexion là-dessus?

M. Boisclair: Le ministre tente de... Oui, oui. Ma réflexion, c'est que ça devrait être disponible gratuitement, je le dis en toute candeur.

M. Mulcair: On est sur la même longueur d'onde.

(12 heures)

M. Boisclair: Les technologies sont là, sont disponibles, sauf qu'il y a une question de piastres et de cennes qui fait en sorte que tout ça est financé par un fonds d'information gouvernemental qui cherche à s'autofinancer. Mais les nouvelles technologies doivent nous amener à pousser plus loin l'expérience démocratique. Puis les nouvelles technologies doivent non pas être uniquement vues sous l'angle qui nous inquiète et qui retient le plus souvent l'attention, qui est celui de la protection des renseignements personnels, mais c'est aussi peut-être une occasion, les nouvelles technologies, de pousser plus loin, comme je le disais tout à l'heure, l'expérience démocratique. Et tant mieux si on peut se servir de cet outil pour faire en sorte que les gens connaissent mieux nos institutions, soient plus à même de porter un jugement critique sur la société et sur ce qui les entoure. Et ce qui est à la base de ce contrat social, c'est la connaissance de ce contrat.

Moi, en termes d'orientation, je souhaite que ces documents soient disponibles gratuitement. On me dit qu'au fédéral, ils sont disponibles gratuitement, que dans les provinces il faut payer. Moi, je vais vous dire, je souhaite... On m'a préparé des réponses, parce qu'on avait anticipé une question du député de Chomedey. Dans mon cahier de la période des questions, j'ai une belle réponse toute faite. Mais je dois vous dire que j'ai un malaise avec ça et je dois en reparler avec mes collègues. Le député de Chomedey est cependant lui aussi, sensible à la réalité, au contexte financier. Et c'est à travers tout ça que je vais essayer de naviguer au cours des prochaines semaines.

M. Mulcair: Excellent. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Garon): Moi, je veux simplement dire – j'étais absent quelques instants – que le ministre avait manifesté l'intention de nous rencontrer pour la révision quinquennale de la loi sur l'accès à l'information. Ça serait bon de se rencontrer le plus rapidement possible, parce que comme, après le dépôt, je pense que la commission a légalement un an pour faire sa consultation et, si le ministre veut procéder rapidement, il faudrait s'entendre... Je ne sais pas quand va être déposé le rapport quinquennal.

M. Boisclair: Juin.

Le Président (M. Garon): Juin?

M. Boisclair: Oui.

Le Président (M. Garon): Alors, on pourrait faire une rencontre pour regarder...

M. Boisclair: Tout à fait.

Le Président (M. Garon): ...ce qu'il est possible de faire. Si on est capable de faire les rencontres plus rapidement, mais en donnant un délai aux gens, parce qu'ils doivent produire des mémoires... Et on me dit que, théoriquement, on peut s'attendre à 70 à 100 mémoires.

M. Boisclair: Oui.

Le Président (M. Garon): Ça veut dire qu'il faudrait aussi que vous parliez au leader du gouvernement, parce que la commission de la culture manque souvent de temps.

M. Boisclair: Mais, ce qu'il nous faut regarder, M. le Président – c'est parce que je vous prends au bond, là – ma compréhension, parce que j'ai déjà fait cet exercice-là, et ce qu'il faut faire, c'est que la commission doit étudier...

«La commission de l'Assemblée nationale désigne dans les meilleurs délais la commission pour faire étude du rapport de la mise en oeuvre de la loi. Dans l'année qui suit le rapport de l'Assemblée nationale, la commission désignée doit étudier l'opportunité de maintenir en vigueur ou, le cas échéant, de modifier la présente loi et entendre à ce sujet – ah oui – les représentations des personnes et organismes...»

Le Président (M. Garon): C'est ça.

M. Boisclair: Alors, il faut faire des consultations. Moi, je le dis tout de suite, M. le Président, ce que je souhaiterais, compte tenu du calendrier – pas gouvernemental, mais, en tout cas – des échéances que l'on sait... J'ai demandé à M. Comeau de tout faire pour déposer au mois de juin – parce que, originalement, il devait déposer au mois de septembre – donc, laisser suffisamment de temps... Automne: commission, consultations parlementaires et, à tout le moins, j'aimerais être capable de déposer un projet de loi au cours de la session octobre à décembre, quitte à le faire adopter à l'autre session, mais il y aura déjà... On pourra peut-être commencer des auditions particulières...

Le Président (M. Garon): Mais, ce que je veux souligner... Si le rapport est déposé à la fin de juin, on ne peut pas demander aux gens de réagir en juillet.

M. Boisclair: Non, non. Septembre?

Le Président (M. Garon): Ça dépend. Si c'est déposé tôt en juin, on peut parler du mois d'août peut-être, avec la collaboration de l'opposition, et dire: Écoutez, là...

M. Mulcair: On l'a dit tantôt, on est prêt à venir au mois d'août.

Le Président (M. Garon): Alors, c'est pour ça, il y a des délais. Normalement, la commission a toujours essayé de coopérer avec les ministères. Il y a aussi qu'il faut finir notre rapport sur l'autoroute de l'information, finir des auditions sur les cartes d'identité et produire le rapport. Alors, c'est pour ça qu'on a besoin d'un peu de temps du leader du gouvernement, et j'aimerais ça que vous nous aidiez à ce qu'il nous en donne.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Garon): Alors, le mandat de la commission étant terminé, j'ajourne les travaux de la commission de la culture sine die.

(Fin de la séance à 12 h 5)


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