Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
(Quinze heures vingt-huit minutes)
Le Président (M. Doyon): C'est avec beaucoup de plaisir
que je déclare la séance de la commission de la culture ouverte.
Le mandat de notre commission est le suivant. Il s'agit de procéder
à l'étude des crédits budgétaires du
ministère des Communications et des organismes relevant du ministre
responsable de l'application de la Charte de la langue française, pour
l'année financière 1992-1993.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire: Non, M. le Président, il n'y a aucun
remplacement.
Le Président (M. Doyon): Très bien. Alors...
M. Cannon: Je m'excuse, M. le Président, mais on ne m'a
pas encore confié la responsabilité de la Charte de la langue
française.
Le Président (M. Doyon): Voyons, qu'est-ce que je dis?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Cannon: Je ne suis pas sûr que je voudrais l'avoir non
plus.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Doyon): Vous ne seriez pas capable,
d'ailleurs.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Doyon): Non, c'est parce que la
séance...
M. Cannon: La Régie des télécommunications
et la Commission...
Le Président (M. Doyon): non, mais la séance de ce
soir se poursuit avec la charte de la langue française. c'est la
même séance et, donc, c'est le même mandat qui se poursuit.
m. le ministre, j'espère que...
M. Bourdon: M. le Président, la suggestion d'ordre
pratique que je ferais, c'est qu'on file jusqu'à 19 h 30.
Le Président (M. Doyon): Très bien. Nous allons
donc, avec l'accord de tous les membres... C'était notre intention
d'ailleurs, selon l'indication qui a été donnée par le
leader. Nous com- mençons à 15 h 30, donc, jusqu'à 19 h
30. Nous disposons de quatre heures pour nous occuper du mandat en ce qui
concerne le ministère des Communications.
M. Cannon: M. le Président, si vous me permettez...
Le Président (M. Doyon): Oui.
M. Cannon: ...s'il y a consentement de la part des membres de la
commission... Évidemment, je vais me plier à la volonté de
la commission. Cependant, je vous rappellerai que le groupe ministériel
a un caucus à 18 h 30. Pour entrer dans les exigences de
l'Assemblée nationale, donc de la présidence, on doit
compléter quatre heures. Alors, somme toute, on serait peut-être
bien mieux de reprendre à 20 heures. À moins, évidemment,
que mes collègues ne veuillent sauter un caucus.
M. Bourdon: Oui, mais il y avait déjà... Une
voix: Pas celui-ci, M. le ministre. M. Cannon: Bon! Parfait!
Le Président (M. Doyon): II y a simplement un
élément d'information qui me manque dans le moment. Quel est
l'ordre de la Chambre qui a été donné tout à
l'heure par le leader? Je vais aller à l'information. Le
secrétaire va s'informer de ça. Il est possible que le leader ait
tenu compte du caucus ou en ait fait abstraction; je ne le sais pas. Je pense
que c'est un peu ça, hein? (15 h 30)
M. Cannon: On m'indique que c'est possible qu'il n'y ait pas de
caucus, M. le Président.
Le Président (M. Doyon): Oui, c'est ce que j'ai cru
comprendre, qu'on continuerait jusqu'à 19 h 30 sans interruption.
M. Cannon: O.K.
Le Président (M. Doyon): Donc, pas de remplacement. Le
mandat est indiqué. Je souhaite tout d'abord la bienvenue à M. le
ministre ainsi qu'aux fonctionnaires qui l'accompagnent, à son directeur
de cabinet ainsi qu'aux collègues députés et au critique
de l'Opposition officielle. Je leur indique, enfin je répète que
nous avons quatre heures pour nous acquitter de la partie qui porte sur le
ministère des Communications. Donc, à moins d'avis contraire et
de consentement de la commission, de quelque façon, nous
poursuivrons jusqu'à 19 h 30.
M. le ministre, vous pouvez faire des remarques préliminaires si
vous le désirez. Vous avez donc la parole à cet effet.
M. Bourdon: M. le Président.
Le Président (M. Doyon): Oui, M. le
député.
M. Bourdon: Je souhaiterais peut-être que le ministre nous
présente...
M. Cannon: Ça fait partie de...
Le Président (M. Doyon): Oui, je pense que c'est dans
l'ordre des choses. Ça va faire partie de-Remarques
préliminaires M. Lawrence Cannon
M. Cannon: M. le député, vous connaissez ma
politesse, ma gentillesse. Alors, à ma droite, M. Pierre Boisvert,
sous-ministre adjoint au ministère, responsable particulièrement
du secteur des technologies de l'information et qui assume l'intérim
pendant que mon sous-ministre, M. Roy, est en Europe à vaquer aux
préoccupations du MIP-TV de vendre les produits québécois
à l'étranger. Je vous présente donc, du secteur des
médias, Mme Marcelle Girard, qui est avec Communication-Québec;
François Reny, responsable des moyens de communication; Serge
Thibaudeau; secteur technologies de l'information, Monique Charbonneau;
Éric Martin, également du même secteur; Bernard Beauchemin
et André Duplessis; M. Raynald Brulotte, qui est le directeur de
l'administration, derrière moi; Mme Edith Bédard, qui est
secrétaire du ministère; M. Alain Dufour, qui est
vice-président administration à Radio-Québec; M.
Paul-André Comeau, qui est président de la Commission
d'accès à l'information, à l'autre bout, et M. Jean-Guy
Paquet, secrétaire de la Régie des
télécommunications, qui est avec nous. Simplement en vous
indiquant, M. le député, M. le Président et les autres
membres, que le président de la Régie des
télécommunications devrait se joindre à nous. Il est en
audiences cet après-midi.
M. Bourdon: M. le Président, si le ministre...
M. Cannon: Et mon chef de cabinet, M. Harrison.
M. Bourdon: Bonjour, M. Harrison. M. Harrison (Luc):
Bonjour.
M. Bourdon: Si le ministre me le permettait, je
présenterais également ma suite. Ça va être plus
court parce qu'elle est moins nombreuse.
M. Cannon: Je pense que j'ai avec moi les 1200 fonctionnaires du
ministère des Communications cet après-midi.
M. Bourdon: C'est ça. Il y a Cari Cloutier, qui est
recherchiste, Mme Jomphe, Laval Gagnon et Johanne Isabel, qui sont
respectivement de Montréal et du Saguenay-Lac-Saint-Jean et qui
représentent le Syndicat général des employés de
Radio-Québec.
M. Cannon: Parfait.
Le Président (M. Doyon): Ça va?
M. Bourdon: Ça va.
Le Président (M. Doyon): M. le ministre.
M. Cannon: Merci, M. le Président. J'ai, cette
année encore, le plaisir de présenter aux membres de cette
commission les crédits du ministère des Communications ainsi que
ceux des trois organismes publics désignés par le gouvernement
comme relevant de ma responsabilité, à savoir: la Régie
des télécommunications, la Commission d'accès à
l'information et la Société de radio-télévision du
Québec. Ces crédits seront utilisés au cours de l'exercice
1992-1993.
La place de plus en plus importante que prennent les communications dans
les sociétés développées ne surprend plus personne.
Au Québec, le secteur produit une activité économique
grandissante. Je voudrais, M. le Président, faire part aux membres de la
commission de la culture des défis qui se posent dans ce secteur des
communications devenu crucial pour l'avancement de notre société.
J'exposerai aussi le rôle qui incombe au ministère que je dirige
pour les relever.
L'importance des communications n'est plus à démontrer.
J'ai la conviction qu'aucune société d'avant-garde ne peut
aujourd'hui négliger ce secteur de l'activité économique
dont dépendent presque tous les autres. La concurrence
effrénée qui se livre partout pour la conquête des
marchés s'appuie en effet sur l'aptitude que nous avons d'être les
plus rapides, les plus productifs, donc les plus performants. La
conséquence étant que, sans une infrastructure de communication
à la fine pointe des dernières technologies, plus aucun pays ne
peut prétendre rester dans la course.
Au Québec, les entreprises de communication ont accru leur
chiffre d'affaires à un tel rythme qu'il devient nécessaire de
refaire le point chaque année. Ainsi, les dernières statistiques
disponibles nous révèlent que l'activité globale du
secteur des communications au Québec s'évalue à plus de 9
300 000 000 $ par année. De ce montant, 73 %, soit 6 800 000 000 $ sont
le
résultat des entreprises du secteur des technologies. Pour leur
part, les entreprises du secteur des médias sont présentes dans
l'activité économique pour plus de 2 500 000 000 $.
Dans ce contexte où les communications deviennent chaque jour un
peu plus un instrument indispensable de développement, je suis heureux
de constater que les grandes politiques et stratégies mises
récemment de l'avant par le gouvernement auront un effet stimulant pour
le secteur des communications. Le ministère que je dirige participera
activement aux suites qui seront données à ces initiatives. Je
souligne notamment l'initiative dans la région de Montréal qui
constitue, finalement, une locomotive, comme vous le savez, pour l'ensemble de
l'économie du Québec. Dans le secteur des communications, on y
retrouve près de 70 % de toute l'activité du Québec.
L'économie de cette région traverse présentement une
période difficile et c'est pourquoi, en décembre dernier, le
gouvernement a rendu publique une stratégie pour relancer
l'économie montréalaise. Le ministère est associé
aux travaux du Comité ministériel permanent de
développement du Grand Montréal et a élaboré un
plan d'action pour les communications dans ce secteur.
La vaste entreprise qu'est la politique du gouvernement sur le
développement de la main-d'oeuvre nous intéresse vivement. C'est
même avec enthousiasme que le ministère des Communications apporte
son concours à une démarche qui ne peut que contribuer à
enrichir notre capital humain et, nécessairement, le Québec tout
entier.
Enfin, dans la foulée de la politique du gouvernement en
matière d'affaires internationales, telle que définie en 1991 au
ministère des Affaires internationales, nous soutenons ces actions
positives que sont: TV5, la concertation franco-québécoise, la
concertation sur les grands dossiers économiques, la francophonie et la
réglementation internationale dans le domaine des communications.
J'aimerais maintenant, M. le Président, porter votre attention
sur le ministère. Le mandat qui est le nôtre n'est pas toujours
facile à cerner tant il est vaste. Dans ses points essentiels, la loi
constitutive du ministère nous indique que nous avons à susciter
d'abord des retombées positives au plan culturel, social et
économique. Nous devons élaborer et proposer au gouvernement des
politiques en matière de communications pour ensuite coordonner leur
mise en oeuvre. Au plan pratique, ce mandat implique que nous avons à
jouer un rôle pour faciliter au citoyen ses relations avec l'État,
pour favoriser le développement et le rayonnement des entreprises et
pour aider les ministères et organismes gouvernementaux à remplir
leurs fonctions de la façon la plus efficace possible.
Qu'il me soit permis, à ce stade-ci, d'attirer votre attention et
celle des membres de la com- mission sur quelques réalisations du
ministère qui se sont déroulées au cours de l'exercice
1991-1992. J'ai choisi, à dessein, quelques dossiers plus visibles, et
qui illustrent bien le mandat qui est le nôtre. Un portrait plus complet
se retrouve dans le document «Bilan et orientations». Je souligne,
en passant, le prolongement de nos compétences au plan international par
la présentation et l'organisation des Journées internationales
d'échanges sur le financement de l'audiovisuel, particulièrement
pour sensibiliser les décideurs français et
québécois des secteurs de l'audiovisuel et de la finance à
la nécessité d'alliances entre les entreprises. Les participants
ont jugé, effectivement, la rencontre suffisamment fructueuse pour
qu'ils conviennent d'y donner suite. De ce fait, les prochaines Journées
d'échanges auront lieu à Paris, à l'automne 1992.
Le ministère a aussi organisé le premier Séminaire
franco-québécois des technologies de l'information. Cet
événement avait pour objectif de développer des projets
concrets impliquant les gouvernements, les entreprises et les
universités; 200 délégués français et
québécois ont participé à l'événement
au cours duquel ils ont retenu 7 domaines privilégiés de
coopération, et vous pourrez les retrouver dans le texte des bilans.
L'Institut mondial de l'EDI. Il y a quelques jours, j'ai eu le plaisir
d'inaugurer, à Montréal, l'Institut mondial de l'échange
des documents informatisés. La création de cet institut doit
être saluée comme un événement marquant dans le
domaine des communications au Québec. Elle représente aussi une
reconnaissance de la vocation de Montréal dans le secteur des
technologies de l'avenir.
En terminant ce chapitre sur les réalisations, j'aimerais
m'attarder brièvement sur un volet particulièrement important du
mandat du ministère, soit l'offre de services en communications aux
autres ministères et organismes et plus précisément dans
le domaine des technologies. (15 h 40)
En 1991-1992, par les soins du Fonds des services informatiques, le
ministère a dispensé des services à 77 ministères
et organismes. Depuis le début de ses opérations en 1988, le
nombre d'opérations conduites par ce fonds a triplé tandis que le
nombre de terminaux reliés au réseau a doublé. Pourtant,
les tarifs n'ont jamais été haussés et ont même
été réduits au cours des deux dernières
années, tout en assurant l'autofinancement du Fonds et en maintenant
à jour les équipements dont il dispose.
Pour sa part, le Fonds des services de télécommunications
a fourni, au ministère et organismes gouvernementaux, des services de
télécommunications variés, notamment en
téléphonie, en communications informatiques, en communications
écrites, en communications radio, en plus d'apporter son
expertise-conseil.
Grâce à une rationalisation rigoureuse des coûts
pendant l'année qui vient de s'écouler, ce
Fonds sera en mesure, pour l'avenir, de diversifier encore ses services
et de moderniser ses infrastructures. Au cours du prochain exercice financier,
les ministères et organismes pourront bénéficier d'une
réduction moyenne de leurs tarifs de télécommunications de
0,66 %.
M. le Président, je crois maintenant opportun d'orienter mon
propos sur l'intérêt premier de cette séance, soit
l'étude des crédits. Le montant total requis pour l'année
1992-1993, pour la réalisation des mandats qui nous sont confiés,
est de l'ordre de 272 110 300 $. Cette somme doit provenir, d'une part, des
crédits votés à l'Assemblée nationale, et d'autre
part, des revenus autonomes réalisés par les quatre fonds
spéciaux dont dispose le ministère.
Au cours de l'année qui s'annonce, 48 015 900 $ devront
être réservés aux activités propres du
ministère des Communications et 69 011 800 $ seront mis à la
disposition des trois organismes sous l'autorité du ministre, pour un
total de 117 027 700 $ de crédits à voter.
La Régie des télécommunications disposera d'une
enveloppe de 1 950 200 $; la Commission d'accès à l'information
de 2 606 800 $; enfin, la Société de
radio-télévision du Québec de 64 454 800 $. À cet
égard, comme chaque année, les crédits de ces trois
organismes seront présentés indépendamment.
Je pense qu'il faut souligner que les crédits de
Radio-Québec comportent une augmentation de 423 900 $, soit une hausse
de 0,66 %. Dans le contexte de la situation économique que nous
subissons, Radio-Québec a dû faire des choix difficiles sans
altérer la qualité des émissions présentées
et le résultat, quant à moi, est très satisfaisant.
Au sujet des fonds spéciaux, le ministère, comme vous le
savez, gère quatre fonds spéciaux dont les crédits, qui ne
sont pas votés à l'Assemblée nationale, résultent
de la facturation pour services rendus aux ministères et organismes
gouvernementaux. Il est prévu que ces fonds, soit le Fonds des services
informatiques, le Fonds des services de télécommunications, le
Fonds des Publications du Québec et le Fonds des moyens de
communications, retireront des revenus de l'ordre de 155 082 600 $.
Qu'il me soit permis, maintenant, M. le Président, d'exposer, en
terminant, de quelle façon le ministère des Communications entend
utiliser les crédits qui sont demandés. Neuf grandes
priorités d'action ont été retenues par le
ministère pour l'exercice 1992-1993. Je m'attarderai un peu plus loin,
c'est-à-dire à l'occasion de l'échange que nous pourrons
avoir ensemble, M. le député, à parler de ces
priorités. Alors, ces neuf priorités sont donc,
premièrement, de doter le Québec d'une politique sur les
communications dont le but avoué est de permettre, à terme, aux
Québécois, d'orienter leur développement
économique, culturel, social et technologique dans ce secteur;
deuxièmement, d'im- planter, sur l'ensemble du territoire
québécois, un service d'urgence 9-1-1; troisièmement,
d'assujettir le secteur privé à des mesures de protection
relativement aux renseignements personnels qu'il détient sur les
individus; quatrièmement, de proposer une politique de commercialisation
des banques de données publiques qui concilie les impératifs de
protection des renseignements personnels avec ceux de l'accès et de la
diffusion gratuite et commerciale; cinquièmement, d'établir un
réseau intégré de communications informatique et
bureautique au service des ministères et organismes publics;
sixièmement, de proposer une stratégie et des projets en
communications pour le développement du Grand Montréal;
septièmement, de doter la région de Québec d'un plan de
développement des communications basé sur des projets concrets;
huitièmement, d'établir un réseau intégré en
radio mobile au service des ministères et organismes publics et, enfin,
de promouvoir l'utilisation du français en informatique au sein de
l'administration publique et de stimuler la production de logiciels en
français dans l'entreprise privée. Il me fera plaisir, M. le
Président, d'élaborer sur chacune de ces priorités
à la convenance des membres de la commission.
Par ces propos, M. le Président, j'ai voulu souligner aux membres
de la commission le rôle omniprésent que joue le secteur des
communications dans notre société. Parce que la communication,
dans ses manifestations, utilise le véhicule de la langue, elle est
aussi l'expression d'une culture. Or, cette culture francophone, minoritaire en
Amérique du Nord, ne saurait être défendue que par ceux qui
la ressentent plus profondément, par les femmes et les hommes de ce pays
qui l'ont acquise de leurs père et mère et qui, aujourd'hui, sont
en droit de compter sur les élus que nous sommes pour la
perpétuer.
Je crois maintenant, M. le Président, avoir utilisé une
bonne partie du temps qui m'était alloué, et je suis prêt
à procéder; d'abord, à écouter les commentaires de
mon collègue et, enfin, à répondre à toutes les
questions que les membres de la commission voudront bien me poser.
Le Président (M. Doyon): Merci, M. le ministre. M. le
député de Pointe-aux-Trembles.
M. Michel Bourdon
M. Bourdon: Alors, M. le Président, M. le ministre, chers
collègues de la commission, je pense qu'on ne peut que souscrire aux
propos que le ministre vient de tenir sur l'importance des communications au
Québec. Cette importance est énorme, puisqu'on est uniquement 7
000 000 sur un continent qui contient plusieurs centaines de millions
d'individus. Cependant, je trouve que j'aurais aimé que le ministre
parle plus longtemps des pouvoirs du Québec en ma-
tière de communications, puisque, on le sait, c'est un domaine
par excellence où le gouvernement fédéral a le haut du
pavé. Et j'en prends comme exemple symbolique Radio-Québec qui,
pour opérer, doit se plier à une demande d'obtention de licence
au gouvernement fédéral. C'est un signe parmi d'autres des
limites que la Constitution actuelle impose au Québec en matière
de radio, télévision et télécommunications.
À cet égard, j'aurais souhaité que le ministre soit
plus bavard sur la politique des communications qu'il a passé une partie
de l'été dernier à préparer, qu'on a cru lire dans
Le Devoir, mais qui a vécu le temps d'une rose, l'espace d'un
matin. Comme le message inaugural de son gouvernement annonçait
l'adoption d'une politique en matière de communications - et je
redeviens sérieux pour en parler - dans l'étude des
crédits, j'aurai l'occasion, j'espère, de questionner le ministre
sur la politique des communications qui, au sein de son gouvernement,
connaît une gestation pour le moins longue et laborieuse. Je ne pense pas
que ça dépende de la volonté politique du ministre, mais
je suis placé pour savoir qu'un des aléas de la politique, c'est
qu'on n'est pas tout seul et qu'il faut, un moment donné, aller chercher
des mandats dans l'instance dont on fait partie.
À cet égard, M. le Président, le ministre me
pardonnera de noter que le gouvernement dont il fait partie semble avoir une
politique non officielle en matière de communications, et, d'ailleurs,
politique qu'on peut voir s'appliquer à tous les domaines où le
Québec pourrait vouloir des pouvoirs supplémentaires. Je la
résumerais en ceci, M. le Président: Si tu ne veux pas avoir un
«non», ne demande rien. Alors, pour ne pas être en butte au
refus, on ne demande rien. C'est ainsi qu'alors qu'un temps on a cru que le
Québec demanderait des pouvoirs réels en matière de
radio-télévision, actuellement, le rapport Beaudoin-Dobbie est
sur la table, il y a un référendum peut-être pancanadien,
peut-être québécois qui s'en vient, mais ce gouvernement -
et je pense que ce n'est pas la faute du ministre - ne demande rien en
matière de radio-télévision et annonce plutôt qu'il
va avoir une politique qui va venir. J'espère qu'elle va venir avant que
le Québec soit devenu autre chose qu'une province, parce que,
actuellement, on ne peut pas dire qu'il y a une volonté politique
quelconque de la part du gouvernement dans son ensemble d'aller chercher des
pouvoirs en matière de radio-télévision. (15 h 50)
II y a une autre réalité, M. le Président, c'est
que communications et culture, on le dit, et M. le ministre le dit dans son
exposé préliminaire, sont intimement liées. Or, que dit le
rapport Beaudoin-Dobbie à cet égard? C'est assez magnifique, M.
le Président. Ça dit que les provinces vont avoir une
compétence exclusive en matière de culture. On lit ça, le
coeur nous bat, on se dit: Ça y est, les jeunes du Parti libéral
et M. Allaire ne se sont pas battus pour rien. Mais, après ça, il
y a la mauvaise nouvelle, c'est qu'on ne touchera pas au pouvoir de
dépenser du fédéral. Le ministre le sait, qu'en est-il en
matière de culture et de communications au Québec? En gros, je ne
parle pas des fonds que le ministère gère, où il a des
clients qui sont les autres ministères du gouvernement, et ce qui se
fait là n'est pas négligeable, mais je parle de budgets
réels du ministère. Quand on additionne les budgets, les
crédits du ministère québécois des Affaires
culturelles et du ministère québécois des Communications,
on arrive à un pouvoir de dépenser de 200 000 000 $. Et le
fédéral, de son côté, par Téléfilm
Canada, l'ONF et surtout la Société Radio-Canada, dépense
et, d'après Beaudoin-Dobbie, veut continuer à dépenser 500
000 000 $. Alors, c'est vraiment le cheval contre le lapin, M. le
Président. Un gouvernement qui dépense 200 000 000 $ et - on va
le voir plus tard - qui a l'intention de dépenser moins parce qu'il a
des ennuis financiers, et un gouvernement fédéral qui
dépense 500 000 000 $ et qui dit: On est prêt à se
départir de l'exclusivité en matière culturelle, mais on
va garder les 500 000 000 $ qu'on dépense au Québec en
matière de culture et de communications.
Donc, dans le contexte actuel, en communications, et ça ne juge
aucune des personnes ici présentes, et pas le ministre, la province a un
rôle mineur; et en radio-télévision et même en
téléphonie, on peut parler d'un rôle minable. Notre
Régie des télécommunications a la grosseur d'un CLSC en
gestation parce que la compagnie de téléphone, au Québec,
qui dessert 86 % des abonnés, soit Bell Canada, échappe à
la juridiction de la Régie. Et ce n'est dit en aucune manière
pour critiquer le travail de la Régie ou même le travail du
ministre. C'est qu'en matière de communications il faudrait, dans le
fond, trouver un moyen d'appliquer la strophe de L'Internationale où il
est dit: «Nous ne sommes rien. Soyons tout.» Mais, en attendant que
le pouvoir politique décide d'être tout, nous sommes peu de chose
puisque c'est le fédéral qui prend toutes les grandes
décisions.
À cet égard, M. le Président, je pense que le
ministre doit être indigné comme moi de voir le
fédéral, via le CRTC, en matière de
télévision, agir comme si le Québec francophone n'existait
pas. Et je pense à Newsworld. Ça fait maintenant quatre ans que
les Québécois francophones financent automatiquement, par un
prélèvement à la source à même leur
abonnement au câble, un réseau de télévision sur
câble d'information continue, un CNN canadien, dans le fond, qui n'est
disponible qu'en anglais. Alors, les francophones se voient nier le droit
à de l'information télévisée sur un canal
spécialisé comme celui-là dans leur langue, mais il y a un
droit qu'on leur reconnaît d'emblée, c'est celui de payer. Et,
à cet égard, M. le Président, on peut parler d'une
poli-
tique qui nie que le Québec soit ne serait-ce que la notion
timide d'une société distincte. Les Québécois
francophones, à Newsworld, n'existent pas et, au contraire, le ministre
est sans doute au courant que le 0,10 $ par mois qu'on prélève
aux abonnés du câble ne suffit pas pour financer le réseau
qui n'est pas disponible dans la langue que parlent 83 % des
Québécois, mais qu'on veut l'augmenter à 0,15 $, soit une
hausse de tarif minime de 50 %, pour un service qui n'est pas disponible
à eux. Et, sans aucune polémique, je pose la question au
ministre: Pense-t-il que, même à l'époque dorée du
«French power», le gouvernement fédéral canadien
aurait résisté trois mois en instaurant un réseau de
télévision continu au plan de l'information qui n'aurait
été disponible dans les 10 provinces qu'en français? Je
pense, M. le Président, que poser la question, c'est donner la
réponse et revenir aux réalités fondamentales, c'est qu'en
télévision le Québec est agressé.
Le Québec est agressé à tous égards,
même dans la télévision prise comme une industrie. Je
n'aime pas beaucoup, M. le Président, la généralisation
qu'on a faite du terme «industrie culturelle». Je pense que,
même si la formation à laquelle j'appartiens y a contribué
à l'époque, la culture comporte un élément
industriel, mais la culture, c'est la culture, ce n'est pas une industrie.
Mais prenons l'aspect industriel de l'activité de communication
qui est la radio et la télévision, et, à cet égard,
M. le Président, la télévision francophone du
Québec, par exemple, connaît une crise profonde qui est la
conséquence directe de décisions fédérales. Quelles
ont été ces décisions, M. le Président? C'est de
déréglementer l'offre de publicité
télévisée et d'augmenter les signaux
télévisuels à partir de deux réalités qui
sont celles du Canada anglais, M. le Président.
La Société Radio-Canada, au Québec, va chercher 40
% de l'écoute des Québécois francophones. CBC, au Canada
anglais, va chercher un gros 10 % de l'écoute. Alors, le poids politique
des deux réseaux n'est pas de même nature, dans le sens que les
députés d'arrière-banc conservateurs, en plus d'être
tout ce qui est public, ont offert à des électeurs qui ne
regardent juste pas la télévision publique à plus de 10 %,
ce qui n'est pas négligeable mais il n'y a rien de comparable avec le 40
% de l'écoute que le réseau français de Radio-Canada va
chercher et qui s'ajoute à la portion appréciable de
l'écoute que Radio-Québec va aussi chercher... C'est donc dire,
M. le Président, que le fédéral, à cet
égard, s'est dit: Au Canada anglais, on vit un problème
d'envahissement culturel américain, et, au Québec, on s'en
inquiète à l'occasion mais on ne connaît rien qui ait
l'ampleur du phénomène au Canada anglais puisque, au Canada
anglais, il n'y a pas la barrière de la langue.
Au Québec, les Québécois francophones re- gardent,
grosso modo, la télévision francophone privée et publique,
mais en proportion de la population, alors qu'au Canada anglais - et la
multiplication des signaux, par la câblodistribu-tion, notamment, a rendu
le problème dramatique et la transmission d'émissions de
télévision par satellite a rendu le problème encore plus
vaste - le CRTC s'est dit: Au Canada anglais, il faut multiplier les signaux
télévisuels.
En plus, puisqu'on parle de l'aspect industriel de la
télévision, M. le Président, il faut bien voir l'ampleur
des marchés en cause. Le marché québécois, 7 000
000 $; le marché au Canada anglais, 21 000 000 $. Donc, une
capacité très dissemblable, une capacité d'absorption de
nouveaux signaux télévisuels et d'une offre plus grande de
publicité télévisée beaucoup plus
considérable au Canada anglais. Et, M. le Président, qu'est-ce
qu'on a pu voir au Sommet de la télévision auquel le ministre a
eu la bonne idée de ne pas assister, puisqu'on lui avait
réservé, si je ne me trompe pas, un siège d'observateur,
où il a délégué des fonctionnaires, et je pense
qu'il a bien fait? Qu'est-ce qui en ressort, du sommet de la
télévision tenu à Montréal, M. le Président?
C'est que les politiques qu'on a élaborées ont fait multiplier,
entre autres sur le câble, les réseaux dits
spécialisés, réseau de sport, réseau de musique et
d'autres, puis qu'on a vu une multiplication effrénée de l'offre
de publicité télévisée: le réseau
Quatre-Saisons, à qui on a accordé une licence, et les
télévisions spécialisées, à qui on a permis,
et c'est un comble, M. le Président, de vendre de la publicité
tout en étant une télévision à péage,
c'est-à-dire que les gens qui sont abonnés au câble doivent
payer pour recevoir la plupart de ces canaux.
Donc, M. le Président, et Télé-Métropole le
constatait récemment dans son mémoire au CRTC, l'offre de
publicité télévisée au Québec, à la
télévision francophone, est passée de 21 minutes à
l'heure, en 1987, à 70 minutes à l'heure. Alors, qu'est-ce qui
arrive avec ça, M. le Président? Il y a peut-être
quelqu'un, au fédéral, qui a pensé que le marché
peut s'agrandir par décret, mais ça, même les Russes ont
découvert que le marché ne se décrète pas. Et,
comme il y a un marché de publicité
télévisée au Québec, M. le Président, de 300
000 000 $ environ par année, il ne s'est pas accru. Il y a eu une guerre
des tarifs entre toutes les télévisions. Le résultat de la
guerre de tarifs, M. le Président, c'est que la quantité de
publicité qui coûte 100 $ à Toronto en coûte 50 $
à Montréal. C'est une drôle de façon d'être
une société distincte. Les consommateurs québécois
francophones coûtent deux fois moins cher à rejoindre par de la
publicité télévisée que les
téléspectateurs anglophones du Canada. Et donc, M. le
Président, la conséquence de ça - là, je parle de
la télévision privée - c'est qu'une machine à
profit comme Télé-Métropole est devenue une machine
à déficit: 50 000 000 $ de déficit en trois ans, et la
remontée récente est juste
conjoncturelle. La direction de Télé-Métropole
n'est pas certaine de pouvoir passer à travers. Je ne dis pas, M. le
Président, que le ministre n'est pas conscient de ce problème, je
dis que son gouvernement n'accepte pas qu'il demande des pouvoirs pour pouvoir
réglementer la publicité télévisée. (16
heures)
M. le Président, j'ai parlé de la télévision
privée. La télévision publique se porte tout aussi mal
puisque le fédéral, en même temps qu'il
déréglementait la publicité
télévisée, a coupé considérablement les
budgets de Radio-Canada. En conséquence, on a dit à Radio-Canada:
Vendez plus de publicité parce qu'on ne veut plus vous donner des
crédits. Ça a contribué à l'accroissement
phénoménal d'offres de publicité
télévisée. Et qu'a fait le gouvernement du Québec
dans la même période? Comme pour la TPS, il a fait la même
maudite chose que le gouvernement fédéral. Il a dit à
Radio-Québec: On vous gèle vos budgets. Vendez plus de
publicité. Et où le parallèle entre les deux gouvernements
va-t-il plus loin, M. le Président? C'est que Radio-Canada a
fermé trois stations de télévision régionales:
Matane, Rimouski et Sept-îles; le gouvernement du Québec, lui, a
fermé cinq des neuf régions de Radio-Québec. Là
aussi le mimétisme a joué. Faisons la TPS ensemble et coupons la
télévision dans les régions ensemble. Je ne dis pas qu'il
y a eu complot à cet égard, mais le Québec a eu la
même politique que le fédéral à cet
égard-là.
La ville de Québec a eu raison de se mobiliser contre la
diminution dramatique de la programmation télévisée qui
s'effectue et qui s'accentue avec la demande du réseau TVA de
réduire sa programmation à Québec. Mais c'est la
conséquence directe de deux phénomènes: la
déréglementation de la publicité au niveau
fédéral et, de la part des deux niveaux de gouvernement, une
inadéquation des budgets de la télévision publique.
Je vais finir avec les crédits, M. le Président, parce
qu'on en est dans les crédits. C'est un gouvernement qui ne demande rien
en matière de télécommunications et, pour prendre un
expression québécoise, c'est un gouvernement qui a
décidé de se contenter d'un petit pain. Vous connaissez
l'expression «On est ne pour un petit pain». Notre propre pain, on
le diminue. Les crédits budgétaires du ministère sont
diminués, cette année, de 118 300 000 $ à 117 000 000 $.
C'est donc dire, M. le Président, compte tenu que, pour la
période qu'on vient de vivre, il y a eu une inflation de 3,6 %, que le
budget réel du ministère, les crédits sont
diminués. Quant à Radio-Québec, l'augmentation du budget
est très minime; ça équivaut, en pratique, à un
gel. On sait qu'un gel, compte tenu de l'inflation, ça veut dire une
coupure réelle. Et on leur tient toujours le même discours: Allez
augmenter vos revenus autonomes parce que, quant à nous, ça ne
nous intéresse pas de mettre plus dans notre télévision.
C'est donc dire, M. le Président, que l'avenir est assez sombre parce
qu'on a un gouvernement qui n'est pas décidé à bouger.
En matière de télécommunications, il y a deux
choses récentes que le ministre sait: d'une part, un jugement de la Cour
Suprême à l'endroit d'un gouvernement provincial qui dit: Les
provinces en téléphonie, ça n'a pas d'affaire là,
et ça met en cause, d'une certaine manière, notre Régie
des télécommunications, et le projet de loi C-62 par lequel le
fédéral veut aller encore plus loin et s'arroger plus de pouvoirs
en télécommunications. À cet égard, M. le
Président, le ministre me permettra de le citer, lui qui a
formulé publiquement, d'une part, sa protestation vigoureuse - je ne
veux pas que le ministre pense qu'on n'a pas perçu, du côté
de l'Opposition officielle, qu'il a défendu les droits du Québec
avec énergie - et, d'autre part, son hypothèse, à mon avis
très vraisemblable, que le fédéral, par C-62, veut aller
chercher plus de pouvoirs en télécommunications pour pouvoir
négocier notre sort dans le marché commun
Canada-État-Unis-Mexique. C'est donc dire qu'on va se retrouver avec des
décisions avec lesquelles on n'est pas nécessairement
d'accord.
En terminant, M. le Président, je voudrais dire que, dans
l'étude des crédits, nous allons accorder une importance toute
particulière à la partie du message inaugural où le
gouvernement annonce une loi sur la protection de la vie privée dans le
secteur privé. Nous allons également questionner le ministre sur
la révision quinquennale de la loi d'accès à l'information
parce qu'on pense que c'est une démarche qui est importante, mais qui ne
doit pas nuire aux autres législations annoncées par le
gouvernement, et je m'explique, dans le sens que l'un et l'autre peuvent se
faire concurremment, même si la question de la fonction de la Commission
d'accès à l'égard de l'administration d'une loi sur la
protection de la vie privée dans le privé doit se poser, je
pense, aux différentes tables, tant quand on regardera le projet de loi
du gouvernement que dans l'étude quinquennale, la révision
quinquennale de la loi d'accès à l'information.
Un dernier point, M. le Président. Sur le 9-1-1, nous allons
poser des questions parce qu'il y a un assez gros consensus pour que ce
service-là soit étendu à l'ensemble des
Québécois, M. le Président. Actuellement, c'est surtout la
région de Montréal qui en bénéficie. À cet
égard, il y a eu un sondage à Québec, il y a quelques
mois, qui révélait que la tarification relativement minime qui
serait nécessaire pour l'installer, sans faire sursauter le
président du Conseil du trésor, est assez acceptée dans la
population étant donnée la pertinence du service dont on
parle.
Organisation des travaux
En terminant, M. le Président, je suggé-
rerais au ministre, s'il acceptait, étant donné les liens
entre les programmes, qu'on essaie de voir les programmes en trois blocs
distincts: le premier étant les programmes 1 et 5; le deuxième,
les programmes 2 et 6; le troisième, les programmes 3 et 4. Alors, M. le
Président, ce n'est pas pour chambarder l'ordre pour le plaisir de la
chose, c'est parce que 1 et 5, c'est des sujets interreliés, même
chose pour 2 et 6, et, finalement, 3 et 4 ne sont pas interreliés, mais
on pourrait terminer par le milieu, au lieu de terminer par la fin.
Le Président (M. Doyon): C'est une proposition qui
agrée à tout le monde. M. le ministre?
M. Cannon: Moi, je n'ai pas à intervenir.
M. Bourdon: d'accord. les programmes 3 et 4 sont
interreliés, m. le président, parce que 3 c'est les politiques du
ministère et 4 c'est la régie qui exécute ces politiques.
en tout cas, je souhaiterais qu'on le fasse en trois blocs.
Le Président (M. Doyon): En tout cas, on va commencer par
1.
M. Cannon: Écoutez, si c'est la volonté, M. le
Président, des membres de la commission de procéder ainsi, je ne
vois pas nécessairement les interrelations, mais si c'est pour faciliter
la tâche de M. le député de l'Opposition, je suis bien
prêt à me prêter à cet exercice. On est ici pour
fournir des informations. On peut commencer avec 1.
Le Président (M. Doyon): C'est une bonne idée.
M. Cannon: C'est une bonne idée? Le Président
(M. Doyon): Je la partage.
M. Bourdon: M. le Président, un exemple pour expliquer ma
pensée à M. le ministre. Dans le programme 1, on a la loi
d'accès à l'information, pour donner cet exemple-là. Dans
le programme 5, c'est le financement de la Commission d'accès. Donc, la
loi et son application, c'est le genre de parallèle. Mais je n'ai aucune
objection qu'on commence par 1 et qu'on dispose de 1, M. le Président.
C'est juste que je souhaiterais qu'au plan séquentiel on fasse 1-5, 2-6,
3-4, pour qu'on ne quitte pas les sujets qui sont interreliés.
M. Cannon: Mais je ne vois pas la relation entre le 1 et le
5.
M. Bourdon: Oui. C'est parce que, dans le 1, il y a la loi
d'accès à l'information qu'on veut discuter et, dans le 5, il y a
la Commission.
M. Cannon: C'est-à-dire non, ce n'est pas tout à
fait la même chose. La loi d'accès à l'information, c'est
un groupe qui se retrouve à l'intérieur du ministère.
Celui qui préside et qui dirige le groupe est connu par les journaux ces
derniers temps puisqu'il était à ITIe Enchanteresse, mais, blague
à part, la loi, c'est simplement le secteur qui veille à ce que
l'ensemble des ministères applique, si vous voulez, des directives, ou
qui coordonne des actions. Alors, ce n'est pas interrelié avec la
Commission d'accès.
Le travail que fait M. Comeau est tout à fait indépendant
et relève du ministre des Communications. Alors, son programme est tout
à fait à part du programme 1 du ministère. Mais je...
M. Bourdon: M. le Président, c'est incontestable. C'est
juste que ce qu'on dit, nous, c'est qu'il y a une direction sur l'accès
à l'information au ministère qui n'est, d'aucune façon,
à confondre avec la Commission d'accès.
M. Cannon: Voilà. Non, c'est parce que... (16 h 10)
M. Bourdon: Ce que je souhaiterais, M. le Président, c'est
juste que, comme, quand on parle de la Commission d'accès à
l'information, il y a des liens, on fasse l'étude des programmes dans
cette séquence pour ne pas quitter le même sujet.
M Cannon: Moi, je n'ai pas d'objection à répondre
à toutes les questions.
M. Bourdon: O.K.
M. Cannon: Puis, à la fin, on peut approuver les
crédits dans leur ensemble. Plutôt que d'y aller par pièces
détachées, on va y aller dans son ensemble. Si vous êtes
d'accord avec ça, moi, je suis d'accord avec ça.
Le Président (M. Doyon): Oui, en fait, on prendra
l'habitude qui a été la nôtre jusqu'à maintenant
d'appouver les programmes un par un quand on aura terminé et,
après ça, on approuvera l'ensemble. Autrement, on vient qu'on ne
sait plus trop où on est rendu.
Donc, nous allons commencer avec le programme 1. Est-ce qu'il y a
d'autres remarques préliminaires de la part des autres
députés? Je constate que non. Alors, donc, nous abordons le
programme 1. M. le député de Pointe-aux-Trembles, est-ce que vous
avez des renseignements à obtenir sur ce programmme?
Discussion générale Politique des
communications
M. Bourdon: Là-dessus, M. le Président, lors de
l'étude des crédits du ministère l'an dernier,
le ministre promettait de saisir son gouvernement d'une politique des
communications vers la fin de l'été. Or, on se souvient que, le 6
septembre, le journal Le Devoir a relevé les grandes lignes d'un
document préparé par le ministère et intitulé
«Pour une politique québécoise des communications: d'abord
récupérer les pouvoirs» dont le journal avait obtenu copie.
La préface du document, sous la signature du ministre, disait ce qui
suit, et je cite: «L'intention du Québec est claire. Parce qu'il
est en mesure d'assurer son développement culturel, économique et
social, le Québec entend maîtriser les leviers politiques,
juridiques, financiers et réglementaires pour favoriser le
développement et le rayonnement des communications. En fait, le
Québec - c'est toujours le ministre qui parlait - ne peut, à
l'heure actuelle, se donner une véritable politique des communications
sans, au préalable, posséder la pleine juridiction en ce
domaine.» Fin de la citation.
Ce projet de politique prônait, en outre, le rapatriement des
services français de Radio-Canada, que les activités de
télécommunications, de télédistribution et de radio
sur le territoire québécois soient entièrement
réglementées par le gouvernement du Québec. Afin
d'atténuer la portée et le retentissement de cette publication,
le ministre a révélé par la suite que le document
n'était qu'une copie préliminaire de travail rassemblant de
simples hypothèses. Un projet définitif, a-t-il dit à
l'époque, serait soumis à l'automne 1991 aux autorités
gouvernementales pour étude et analyse.
L'automne est passé, les feuilles sont tombées et l'hiver,
on le sait, M. le Président, dure depuis lors. À Toronto, en
octobre 1991, le ministre poursuivait en déclarant que Québec
souhaitait jouer sur son territoire un rôle prépondérant en
matière de radiodiffusion, mais qu'il voulait aussi avoir son mot
à dire sur le secteur français de Radio-Canada.
Alors, la question que je poserais au ministre: Où en sont ses
efforts pour doter le Québec d'une politique en matière de
communications?
M. Cannon: Le document, comme vous l'avez mentionné tout
à l'heure, M. le député, est présenté
actuellement au Conseil exécutif. Il a franchi le premier comité
qui est celui du secrétariat aux affaires constitutionnelles. Il doit
évidemment franchir les autres comités qui s'intéressent
nécessairement à ce dossier, incluant le COMPACS, probablement le
CMPDE et, à la suite de cela, il se rendra au Conseil des ministres.
C'est au moment de l'accord du Conseil des ministres que cette politique
sera rendue publique, au moment le plus approprié, en tenant surtout
compte - je pense que vous allez être d'accord avec ça,
étant un ancien syndicaliste vous-même - de l'évolution du
dossier constitu- tionnel et surtout de la présentation
éventuelle d'offres de la part du gouvernement fédéral.
Alors, c'est à ce moment-là et lorsque le premier ministre jugera
opportun de lancer cette politique...
M. Bourdon: M. le Président, à cet égard, le
ministre me permettra une question: S'attend-il à ce que l'offre
fédérale prévoie plus que Beau-doin-Dobbie ou plus que le
document de septembre 1991 en matière de communications?
M. Cannon: C'est une question, bien sûr, très
hypothétique, mais je crois que le gouvernement fédéral ne
peut pas faire preuve de naïveté dans ce dossier-là puisque
les gouvernements qui se sont succédé et les ministres des
Communications qui se sont succédé, peu importe la partisanerie
politique et peu importe l'allégeance politique de la formation
politique d'où est issu le ministre... Une chose est claire, le
Québec a toujours réclamé beaucoup plus de pouvoirs dans
le secteur des communications. Pourquoi? Pour plusieurs raisons, bien
sûr. De l'époque de Jean-Paul L'Allier, on parlait des raisons
culturelles; de l'époque du document de Jean-François Bertrand,
il y avait d'autres raisons qui étaient évoquées;
aujourd'hui, on peut parler amplement non seulement du caractère
distinct du Québec, mais on peut aussi parler d'outils
nécessaires au développement économique, pas simplement
dans le secteur des radios, de la radiodiffusion, mais aussi dans le secteur
des télécommunications, comme le projet de loi C-62. Mais je vois
que vous avez plein de questions, alors je vais vous laisser aller.
M. Bourdon: Oui, M. le Président...
M. Cannon: Je voudrais avoir un échange avec vous
puisque...
M. Bourdon: C'est ça.
M. Cannon: ...je pense que, ouvertement, M. le Président,
le député de Pointe-aux-Trembles et moi-même, nous nous
entendons sur plusieurs questions, notamment celle de faire battre en retraite
la loi C-62 et de faire tout ce qui est possible pour que le gouvernement
fédéral retire ce projet de loi et reconnaisse une fois pour
toutes la juridiction du Québec dans le secteur des
télécommunications. Je pense que, là-dessus, il y a non
seulement une convergence mais une unanimité de pensée dans ce
dossier.
M. Bourdon: M. le Président, il y a quelque chose qui
n'est pas évident au plan de la logique et c'est peut-être parce
que je ne suis pas très logique, mais...
M. Cannon: «Filibuste»-toi pas tout seul,
là.
M. Bourdon: Non, non. Mais on nous dit, M. le Président,
avant de faire des demandes de pouvoirs en matière de communications,
qu'on va attendre pour voir si le fédéral va nous proposer
quelque chose. Il me semble qu'on ne parle pas des mêmes choses, M. le
Président...
M. Cannon: Je pense que... M. Bourdon: ...et je
m'explique. M. Cannon: O.K.
M. Bourdon: Ce que je veux dire, c'est: Est-ce qu'ils vont nous
offrir quelque chose si on ne demande rien? Ça se peut, si on ne demande
rien, qu'il ne nous offre rien. Et, si la politique québécoise
des communications nous était déposée... Je n'en suis pas
à dire: Est-ce qu'on va faire une demande formelle au gouvernement
fédéral dans le cadre de la ronde Canada qui s'achemine
peut-être vers un référendum pancanadien? Mais ça,
c'était le gadget d'il y a une semaine. Là, on n'en parle plus,
ce matin, il va se trouver autre chose. Mais, M. le Président, le
ministre a raison de rappeler qu'il y a des positions traditionnelles du
Québec, notamment en matière de communications. Ce que je
voudrais savoir, c'est, indépendamment de l'enjeu de l'offre que le
gouvernement fédéral s'apprête à faire ou à
ne pas faire, on ne le sait pas - oublions ça un instant, on va
peut-être être moins moroses - quand le gouvernement va-t-il en
venir, et par quels moyens, à soumettre une politique
intégrée des communications? Autrement dit, M. le
Président, on pourrait laisser comme entre parenthèses: Est-ce
qu'on va oser demander ça au gouvernement fédéral? Bon.
Laissons ça de côté. De quels pouvoirs le Québec
aurait-il besoin et par quelles démarches le ministre va-t-il passer?
Est-ce qu'un comité s'occupe de ça? Qu'est-ce que va donner
l'énoncé du message inaugural qui parie d'une politique du
Québec en matière de communications? Est-ce que ça sera un
livre blanc, un livre vert, un plan d'action, un plan d'orientation, un
énoncé de politique, un avant-projet de loi? C'est ça,
dans le fond, que j'essaie de savoir. Je veux que le ministre me croie, M. le
Président, que je mets ça indépendamment des grandes
manoeuvres constitutionnelles qui sont dans l'état qu'on sait, avec un
gadget nouveau à toutes les deux semaines. Vous avez dû remarquer,
on ne parle plus de référendum là, ça va être
autre chose. La nouvelle, c'est que John Major a passé, malgré
les sondages.
Une voix: Ha, ha, ha!
M. Bourdon: C'est une grosse nouvelle, M. le Président. En
passant, je comprends l'hilarité des vis-à-vis parce que, si
ça rassérène à ce point-là M. Mulroney,
pourquoi ne précipite-t-il pas une élection pour profiter de la
vague conservatrice qui déferlerait de la Grande-Bretagne?
M. Cannon: Vous demanderez à M. Chevrette d'aller poser la
question à son grand «chum», Brian. (16 h 20)
M. Bourdon: C'est ça. Donc, je reviens à ça,
M. le Président. Est-ce qu'on peut avoir une idée de
l'échéancier et des moyens que le ministre se donne pour en venir
à déposer un projet de politique des communications? Puis, dans
le fond, je lui demande quelle forme ça va prendre. Un
énoncé de politique, un avant-projet de loi? Quelle forme
ça prendra?
M. Cannon: D'abord, c'est un bon document. Je dois vous dire
ça, là.
M. Bourdon: Est-ce qu'on peut l'avoir, M. le
Président?
M. Cannon: Vous parlez de logique au niveau de la
stratégie constitutionnelle. Je ne veux pas faire ici de remontrances
à qui que ce soit autour de la table, parce que vous n'y étiez
pas, mais je crois que, depuis les dernières années, au fait,
lorsque votre formation politique était au gouvernement, il y a eu,
à la suite du référendum, un certain affaiblissement du
Québec, affaiblissement tant sur le plan constitutionnel que sur le plan
économique, ce qui vous a amenés à proposer un beau
risque. Et, dans le beau risque, fort malheureusement, je devrais dire, le chef
du gouvernement de l'époque a décidé que, sur les 21
priorités que vous aviez, il y en avait quelques-unes qui étaient
plus prioritaires que d'autres, ce qui a fait en sorte que les pouvoirs que
réclamait le Québec au moment de la réforme
constitutionnelle qui était proposée se sont vite envolés
et que la stratégie du beau risque n'a jamais fonctionné
visiblement.
Et je pense que c'est important de faire des cours d'histoire comme
ça pour pouvoir rappeler que la stratégie que déploient
actuellement le gouvernement et son chef, M. Bourassa, est une stratégie
qui, à mon avis, est excellente. Nous avons la loi 150 et il faut
toujours se rappeler que ce que nous sommes en train de faire ici, dans le
dossier constitutionnel, c'est de réparer les pots cassés de
1982. Évidemment, on ne peut pas passer sous silence le fait que c'est
la formation politique que vous représentez, le Parti
québécois, qui était au pouvoir à ce
moment-là. Alors, «habiles négociateurs», j'ai
beaucoup de doutes. Vous comprendrez que je ne voudrais pas prendre, de la part
du Parti québécois, des suggestions en ce qui concerne la
stratégie que le gouvernement doit déployer pour en arriver
à une conclusion heureuse puisque je pense que, dans le domaine de la
stratégie constitutionnelle,
vous n'avez pas de leçon à servir à qui que ce
soit.
Je conclus en disant que oui, effectivement, lorsque le moment sera
approprié, tout en tenant compte de l'évolution du dossier
constitutionnel et de la présentation des offres, il appartiendra au
chef du gouvernement et au gouvernement de déposer la politique des
communications. D'ici là, comme vous l'avez très bien
mentionné, les positions historiques du Québec sont amplement
connues par les autorités du gouvernement fédéral. Alors,
lorsque vous dites que, si on n'en parle pas, c'est comme si nous allions
passer ça sous le tapis, je ne crois pas que les gens qui s'occupent,
notamment, du dossier constitutionnel, mais particulièrement ceux et
celles, dans les provinces, que j'ai pu rencontrer la semaine dernière,
et je me réfère notamment à Mme Carson, la ministre des
Communications de la Saskatchewan, qui m'a dit qu'elle verrait à faire
en sorte, avec ses collègues d'autres provinces, notamment la Colombie
canadienne, le Manitoba et d'autres collègues, que ce dossier soit
inscrit à l'agenda constitutionnel...
M. Bourdon: M. le Président, sur la période
1980-1982, je n'ai pas l'intention de parler longtemps, juste de dire, que si
on a perdu en 1980, c'est aussi parce que M. Chrétien, M. Ryan et M.
Trudeau, singulièrement, nous l'ont fait perdre, le
référendum au Québec. L'affaiblissement qui a suivi
ça, je pense qu'il a été réel et que M. Trudeau a
imposé sa réforme constitutionnelle de 1982 qui satisfaisait chez
lui un vieux fantasme, c'est-à-dire de faire comme si le Québec
n'existait pas et d'imposer des règles du jeu. Mais mon propos,
aujourd'hui, n'est pas de revenir là-dessus dans le sens, M. le
Président, qu'ici, en commission, on ne peut pas changer ça. Le
référendum a été perdu et la Constitution du Canada
a été modifiée en 1982 sans le consentement du
Québec. À partir de là...
M. Cannon: Sans oublier qu'on a perdu le droit de veto aussi.
M. Bourdon: M. le Président, sur le droit de veto, vous me
permettrez de souligner qu'on ne peut pas avoir perdu un pouvoir qu'on n'a
jamais eu parce que la Cour suprême - j'ai lu le jugement de mes propres
yeux - a décidé que, par tradition, on n'avait jamais
modifié la Constitution du Canada avant 1982 sans l'accord du
Québec, mais que le Québec n'a jamais eu, au sens juridique, un
droit de veto. De toute façon, M. le Président, on ne s'entendra
pas là-dessus, malheureusement.
M. Cannon: De facto. M. Bourdon: De facto... M. Cannon:
Pas de jure.
M. Bourdon: Et ce que le premier ministre dit, de plus en plus en
Chambre, c'est que les libéraux ont affaibli le Québec en faisant
battre le référendum de 1980, et il semble indiquer qu'ils vont
essayer de refaire la même chose au prochain. On verra. Mais
revenons...
M. Cannon: Mais vous êtes d'accord avec moi qu'en termes de
stratégie vous êtes mal placés pour me parler de
stratégie?
M. Bourdon: Ah! M. le Président, si on avait gagné
le référendum, je suppose qu'on nous trouverait des
stratèges géniaux. Mais la vôtre, de stratégie, M.
le ministre, elle n'est pas évidente.
M. Cannon: Bien, on va voir, hein. Ça, ça me fait
penser un peu...
M. Bourdon: C'est ça.
M. Cannon: ...à Claude Morin, qui disait l'autre jour,
pompeusement - vous savez comment il est un peu pompeux, M. Morin, professeur
à l'ENAP... Évidemment, chaque fois qu'il a l'opportunité
de pouvoir parler contre quelqu'un, il s'attaque à M. Bourassa.
Malheureusement, M. Morin, à ce que je sache, qui était
responsable de cette stratégie de l'époque, n'a pas réussi
à faire des miracles non plus. M. Morin doit constater qu'aujourd'hui,
lorsque les provinces sont assemblées à la même table avec
le gouvernement fédéral et que celles-ci consentent à
faire des offres au Québec, c'est quand même quelque chose qu'il
doit regretter beaucoup, puisqu'il doit reconnaître enfin qu'il y a
là une bonne stratégie de la part du premier ministre actuel.
M. Bourdon: Mais là-dessus, M. le Président, il y a
une affaire qui est sûre: le gouvernement du Parti
québécois a demandé, en 1980, à la population du
Québec, le mandat de négocier la souveraineté-association.
Le mandat lui a été refusé. Ça, c'est un fait
historique incontestable. Maintenant, le gouvernement actuel ne demande rien.
Alors...
M. Cannon: Et dire que vous avez voté contre la loi
150.
M. Bourdon: Oui, M. le Président. On pensait qu'il y
avait, là-dedans, un certain nombre de choses qu'on va nous invoquer
sans doute en quelque part pour justifier de ne pas tenir le
référendum. Écoutez, il y a à peine une semaine,
vous savez ce qui est...
M. Cannon: Votre chef a voulu retarder de deux ans le
référendum.
M. Bourdon: Bon.
M. Cannon: O.K. Continuons.
M. Bourdon: M. le Président, on ne peut pas faire ici les
débats qui vont se faire en Chambre...
M. Cannon: Ah! c'est vrai, ça. O.K.
M. Bourdon: ...on priverait la période de questions de
toute sa substance. M. le Président, moi, ce que je voudrais savoir, en
clair, c'est: La politique des communications qui a existé 24 heures en
septembre dernier...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bourdon: ...quand allons-nous la ravoir devant nous et quelle
forme va-t-elle prendre? Est-ce qu'à cet égard-là le
ministre a l'intention de faire une consultation et un débat public sur
la politique des communications? Ce que j'entends par là, c'est que...
Écoutez, oublions le contexte constitutionnel parce que ça va se
faire ailleurs, ça va se faire pareil. Il y a des problèmes en
radio-télévision au Québec, il y a des problèmes en
communications. Il y a une industrie qui est inquiète, qui est morose,
qui ne sait pas où elle va et il y a des attentes du public en
matière de télévision publique, par exemple, où il
y a aussi une sorte d'impasse dans le développement de notre
télévision publique. En tout cas, je ne veux pas mentionner tout
ce qu'on a mentionné, le ministre et moi, de part et d'autre, dans les
exposés préliminaires. Ça serait utile, voire urgent
d'avoir un document où le gouvernement ferait valoir ses objectifs en
matière de télécommunications. Il y a une partie de
ça qui devra nécessairement toucher l'équilibre des
pouvoirs entre le fédéral et le Québec, puisqu'en
matière de radio-télévision, pour l'essentiel, le
fédéral a tous les pouvoirs. Mais, même sans que ça
soit réglé par le document, je repose la question au ministre:
Est-ce qu'il ne serait pas utile de nous donner une idée à savoir
selon quel calendrier un document va être soumis à la discussion,
et le ministre aurait-il l'intention, une fois qu'on saura à peu
près à quel mois il va être rendu disponible, de consulter
largement sur le contenu du document avant que ça aille plus loin? (16 h
30)
M. Cannon: Je crois que vous avez un certain nombre de questions
qui sont sur la table. C'est clair que, lorsqu'on regarde tout le dossier
constitutionnel et lorsqu'on regarde le volet des communications, pour pouvoir
être maîtres d'oeuvre sur notre territoire, il est essentiel que
nous récupérions des pouvoirs. Je pense que là-dessus,
vous et moi, on est tout à fait d'accord. Alors, la politique des
communications va donc proposer, à l'intérieur de ses pages, une
façon de procéder. Mais la politique des communications, ce n'est
pas simplement de récupérer des pouvoirs et d'essayer de
régler le contentieux entre Ottawa et Québec. La politique des
Communications vise justement à ce que les Québécois
prennent conscience de l'importance des communications, non seulement
aujourd'hui mais pour l'avenir, d'abord comme secteur économiquement
important où il y a un taux de croissance phénoménal,
où la concurrence mondiale joue de plus en plus, mais aussi comme
société qui, sur le continent nord-américain, est en
minorité par rapport aux autres parlant anglais. De ce fait, ça
pose plusieurs questions. On peut soulever la question des médias, donc
la concentration de la propriété des entreprises de presse, par
exemple. Ça, c'est des choses qu'il va falloir que nous, comme
société, puissions débattre. Alors, vous me demandez si,
effectivement, il s'agit d'un document vert, d'un document rose, d'un document
blanc, d'un document pour consultation. Oui, je peux vous dire qu'il y a des
éléments qui sont dans ce dossier-là, dans cette
politique-là qui vont exiger, voire susciter un débat public - je
le souhaite - pour que tout le monde puisse en prendre conscience et
connaissance.
M. Bourdon: M. le Président, je voudrais maintenant
aborder un autre sujet, mais, avant de le faire, je voudrais souligner que, ce
que les intervenants en communications réclament de plus en plus, c'est
de savoir où va le gouvernement. Je suis parfaitement d'accord avec le
ministre que tout n'est pas constitutionnel dans cette question-là, bien
qu'en radiotélévision ce soit difficile d'éviter de
discuter puis de parler de la question des pouvoirs parce que le Québec
n'en a pas. Mais, est-ce que le ministre peut nous donner une idée, non
pas la date, mais à peu près le temps de l'année où
cette politique-là... Autrement dit, elle a été
annoncée dans le message inaugural avant la Saint-Jean ou bien non avant
Noël?
M. Cannon: Encore une fois, c'est la stratégie de
négociation. Je vous en ai parlé tout à l'heure et je
reviens avec la même réponse. Je comprends qu'en matière de
radio-diffusion, en matière de télévision, ça peut
créer des problèmes. Vous et moi, nous sommes
particulièrement d'accord sur l'analyse, sur le diagnostic qui a
été fait de la situation de l'industrie
télévisuelle au Québec. C'est sûr qu'on pourrait
facilement dire: Si, en 1982-1983, le CRTC et les autorités à
Ottawa avaient écouté la position du gouvernement du
Québec, c'est bien évident que TQS n'existerait pas. On n'aurait
pas autorisé sa licence. C'est bien évident qu'il y a un certain
nombre de canaux spécialisés qui n'existeraient pas. Alors, de
là l'urgence - et, là-dessus, je souscris entièrement aux
propos du député - d'avoir cette capacité de faire en
sorte qu'à Ottawa, au CRTC mais aussi au ministre à Ottawa, ils
puissent comprendre que le marché télévisuel
québécois
n'est pas du tout semblable au marché canadien. Vous l'avez
mentionné tout à l'heure avec les cotes d'écoute, les
Québécois produisent ce qu'ils consomment. Vous l'avez dit d'une
façon fort éloquente et vous vous êtes servi exactement des
mêmes chiffres dont, moi, je m'inspire lorsque je fais mes
déclarations et lorsque je prononce des discours sur ce sujet.
Alors, je pense que la démonstration n'est pas à faire, la
démonstration que le Québec constitue, de par ses parlant
français, une société distincte dans le décor
télévisuel canadien et que, par conséquent, la
façon de traiter les problèmes que nous voyons ici n'a pas
nécessairement racine de la même façon qu'on peut le faire
dans la balance du Canada; de là la nécessité d'aller
chercher des pouvoirs qui vont nous permettre de le faire et de faire en sorte
que nos entreprises... Vous avez fait référence plus tôt
aux difficultés financières de
Télé-Métropole. Vous avez absolument raison. C'est ces
hommes et ces femmes qui y travaillent. Je sais que, tantôt, on reviendra
pour parler du dossier télévisuel, notamment celui de
Radio-Québec. Je serai en mesure de répondre à ce
moment-là des actions du gouvernement, particulièrement dans ce
secteur.
Je complète avec la politique des Communications en vous disant
que c'est essentiel que nous, comme responsables de la télévision
publique au Québec mais aussi comme mandataires de la population en ce
qui concerne leurs taxes, puissions avoir un mandat clair pour bien
définir la fonction de Radio-Canada, sa mission, ce qu'elle fait,
comment elle le fait et aussi, par la même occasion, regarder
Radio-Québec avec la même loupe et avec les mêmes
critères d'évaluation. Ça, ça m'apparaît
essentiel.
Alors, je complète ma réponse en vous disant que,
ça aussi, ça constitue des éléments de
réflexion. Je ne suis pas sûr que Radio-Canada ait continuellement
la responsabilité de compé-titionner directement nos
télédiffuseurs privés. Je pense que, là-dessus,
vous êtes tout à fait d'accord avec moi puisque ça fait
longtemps que nous - vous et moi - disons la même chose.
Révision quinquennale de la Loi sur
l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des
renseignements personnels
M. Bourdon: M. le Président, je pense qu'on a
épuisé le sujet. Je suggérerais qu'on passe à la
question de la révision quinquennale de la loi sur l'accès
à l'information. Dans le fond, un peu pour défricher le terrain,
je voudrais tenter de savoir du ministre et du président de la
Commission dans quel ordre et de quelle manière on entend traiter les
ordres de préoccupations qui sont vécus à cet
égard-là. Ce que je veux dire, c'est: Quel serait, grosso modo,
l'échéancier de la révision quinquennale de la loi sur
l'accès à l'information? Ça, c'est une chose, et...
Le Président (M. Bradet): Alors, M. le
député, si je comprends bien, nous en sommes au programme 5.
M. Bourdon: Oui, mais, écoutez, le ministre
suggérait qu'on prenne ça sujet par sujet...
Le Président (M. Bradet): D'accord.
M. Bourdon: ...puis qu'on se garde du temps, à la fin,
pour adopter chacun des programmes. Donc, il y a cette question de la
révision quinquennale de la loi sur l'accès à
l'information, mais il y a aussi comme sujet la question de la
commercialisation des données informatiques dans le secteur public.
Alors, comment entend-on faire évoluer ce dossier-là? Le ministre
nous a écrit à cet égard-là; il y a des projets
précis qui circulent. Comment va-t-on en disposer?
Finalement, et ce n'est pas mince, il y a la question de la protection
de la vie privée dans le Code civil; ça, c'est
réglé, mais pas promulgué; ça va l'être, je
suppose, en même temps que le reste. Mais la question très
importante de la loi d'application, qui a fait l'objet d'audiences publiques et
où le ministre s'est engagé à légiférer...
Autrement dit, M. le Président, pour un peu débroussailler le
terrain, j'aimerais savoir du ministre et du président de la Commission
comment ces trois ordres de préoccupations vont se traduire
concrètement.
M. Cannon: D'abord, pour ce qui est de la révision de la
loi sur l'accès à l'information, comme vous le savez, ça
fait évidemment partie de la loi; on doit procéder, à tous
les cinq ans, à la révision d'une composante de cette loi, compte
tenu de l'évolution de la société, de la dynamique dans la
société, de l'acceptabilité, si je peux employer cette
expression-là, de certaines choses, alors qu'il y a quelques
années ce n'était pas accepté, et de l'évolution
très rapide au niveau des technologies de l'information. Je vais laisser
M. Comeau compléter là-dessus, mais, avant de lui céder la
parole, simplement pour vous rassurer que ce mandat-là, cette
responsabilité-là est déjà programmée. Nous
avons affecté, donc, des ressources au ministère pour
compléter et pour travailler là-dessus.
La deuxième chose, c'est cette question de la loi d'application
dans le secteur privé. Là aussi, déjà les
fonctionnaires du ministère s'affairent à travailler sur un
avant-projet de loi que je souhaite compléter quelque part autour du
mois de juin afin de le soumettre au cabinet pour approbation, après
quoi le dépôt et, évidemment, toute la schématique
ou, enfin, le schéma d'organisation législatif que vous et moi
connaissons. Vous avez bien mentionné, je m'en rappelle très
bien, en commission parlementaire que vous aviez des doutes sur notre
capacité de faire quelque chose au niveau du Code civil, mais mon
collègue, le ministre de la Justice, vous a sans
doute épaté et il en a épaté beaucoup avec
l'adoption de l'article 37 de la loi qui vient confirmer cette finalité
combien importante au niveau de l'accès à l'information, surtout
dans le secteur privé. Mais je ferme la parenthèse...
M. Bourdon: M. le Président, si le ministre me le
permet...
M. Cannon: ...pour compléter ma réponse... (16 h
40)
M. Bourdon: ...il faut en remercier la députée de
Hochelaga-Maisonneuve et la députée de Terrebonne aussi, vu
qu'elles ont contribué, je pense...
M. Cannon: Bien, en complétant ma réponse, j'allais
le faire, M. le député, puisque vous me l'avez déjà
mentionné, je pense que tout le monde a bien travaillé. C'est de
là, quand je vous parle de consensus et de convergence, vous et moi, on
est d'accord pour y aller de ce côté-là. Il s'agit
maintenant de mesurer les modalités. Alors, je vous dis que cette
trajectoire-là est bien enclenchée, les pistes d'action sont en
place, les effectifs pour pouvoir travailler là-dessus y sont. Je peux
vous dire qu'à ce jour le comité sur lequel siègent quatre
ou cinq personnes travaille très activement.
Bon. Je crois que la dernière observation que vous avez faite
concerne particulièrement cette question de la politique de
commercialisation des banques de données, si je ne m'abuse. Je peux vous
dire que, dès ce matin, j'ai signé le document pour que ce
décret puisse franchir chacune des étapes à
l'intérieur du Conseil exécutif. J'espère que, si nous
n'avons pas de difficultés, nous allons pouvoir aller en
prépublication, en publication de la Gazette d'ici un mois ou
deux. C'est bien ça, d'ici un mois ou deux, nous allons pouvoir
procéder.
Là, je laisse à M. Comeau le soin de répondre
à cette question de révision quinquennale.
Le Président (M. Bradet): M. Comeau.
M. Comeau (Paul-André): M. le Président, M. le
député, nous avons, nous aussi, entrepris des travaux
conformément à l'obligation que nous fait la loi de le faire tous
les cinq ans. Nous espérons soumettre au ministre, qui le
déposera au Parlement, conformément à la loi, un rapport
au tout début de l'automne, septembre ou quelque chose du genre.
Déjà, je peux vous dire qu'il y a évidemment des
aménagements techniques qu'il faut refaire à la lumière de
l'expérience des dernières années. Il y a quand même
des aspects qui doivent être corrigés, mais c'est surtout
technique. Nous nous penchons également davantage sur le problème
du respect de la confidentialité des renseignements personnels dans le
secteur public. Là aussi, il y a un certain nombre de
développements importants. Mais disons que, pour le moment, je ne peux
pas vous faire de grandes révélations, étant donné
que c'est en chantier. Ça devrait être complété, au
plus tard, à la fin août, pour être soumis à M. le
ministre dans les jours qui suivront.
Je pense qu'il n'y a pas de grandes questions, le ministre l'a
souligné, quant à l'acceptabilité de la loi. D'ailleurs,
il y a une étude qui a été menée par une
société québécoise pour le compte du
ministère. Donc, quand même, je voudrais citer deux chiffres.
À la suite d'une révision de la méthodologie
utilisée pour étudier les demandes des Québécois et
des Québécoises faites en vertu de la loi de l'accès, on a
maintenant chiffré à 310 000 le nombre de requêtes faites
l'an dernier où on a fait une référence explicite à
la loi, ce qui est quand même important, mais ce qui laisse croire que
c'est beaucoup plus; étant donné que beaucoup de gens maintenant
demandent des documents, c'est devenu un automatisme sans faire
référence à la loi.
Mais ce qu'il est important de comprendre - et ça va rejoindre le
deuxième volet de votre question - c'est que, de ce nombre, tout
près de 80 % des requêtes avaient trait à des demandes au
sujet de renseignements personnels, donc dans l'administration publique,
c'est-à-dire que les Québécois sont
préoccupés ou sont curieux et veulent savoir ce qui se passe. De
là la logique, je pense, inhérente à la démarche a
l'égard du secteur privé. Je ne sais pas si je réponds
à votre question, M. le député.
M. Bourdon: Oui. M. le Président, ça répond
très bien à ma question, en ce sens que les citoyennes et les
citoyens sont plus préoccupés que jamais des renseignements qu'on
détient sur elles ou sur eux quant à ce qui leur est
privé. La Commission, on va reprendre et rediscuter sa loi constitutive
comme on doit le faire chaque cinq ans, et, en juin, je comprends que le
ministre dit que le projet de loi sur la protection de la vie privée
dans le privé devrait être rendu au Conseil des ministres. Donc,
à l'automne, on pourra concurremment faire les deux exercices: la
révision de la loi d'accès et prendre connaissance, possiblement,
d'un projet de loi sur la protection de la vie privée.
M. Cannon: Ce n'est pas ex cathedra, mais c'est la direction et
piste d'action que je souhaite réaliser.
M. Bourdon: Ça va.
M. Cannon: Est-ce que, M. le député, vous avez
terminé avec M. Comeau, puisque je pourrais le libérer...
M. Bourdon: Oui.
M. Cannon: ...s'il n'y a pas d'autre ques-
tion? Équifax? Non.
M. Bourdon: Peut-être, dans nos demandes de renseignements,
on n'a pas eu les réponses à nos demandes là, 8, 9, 10,
11, 12, 13, 14, jusqu'à 17, oui.
M. Cannon: Sur la Commission d'accès? M. Bourdon:
Oui.
M. Cannon: Voulez-vous me rappeler les questions, M. le
député, s'il vous plaît?
M. Bourdon: Oui, de 8 à 17.
M. Harrison: Les questions générales.
M. Bourdon: Je n'ai aucune objection, M. le Président,
à ce que les réponses nous parviennent à un autre moment.
Je veux juste, pour mémoire, souligner...
M. Harrison: Vous avez dit 8?
M. Bourdon: De 8 à 17.
M. Harrison: 8, il n'y a rien; 9, il n'y a rien; 10, il n'y a
rien; le personnel, la réponse est là.
M. Cannon: Alors, à 8, vous demandez, pour l'exercice
financier, la ventilation des sommes versées en application d'une loi,
d'un programme, d'un décret, d'un contrat ou versées de
façon discrétionnaire à des communautés autochtones
ou inuit. C'est bien ça?
M. Bourdon: Oui.
M. Cannon: La Commission d'accès à l'information
n'a pas de ces budgets, n'est-ce pas? À 9, le nombre de points-bonis, il
n'y en a pas.
M. Bourdon: M. le Président, non, non, mais
simplement...
M. Cannon: Non, mais c'est parce qu'il n'y en a pas
là.
M. Harrison: Ce n'est pas parce qu'ils n'ont pas répondu,
c'est parce que ça ne s'applique pas à la Commission
d'accès.
M. Cannon: Ça ne s'applique pas à la
Commission.
M. Bourdon: O.K.
Le Président (M. Bradet): Est-ce que ça va?
M. Bourdon: Et de 10 à 17?
M. Harrison: C'est la même chose. Il n'y a pas de clubs
privés.
M. Cannon: Vous ne faites pas partie de clubs privés, M.
Comeau?
M. Comeau: J'aimerais bien. M. Cannon: C'est
l'inquisition, là. Des voix: Ha, ha, ha!
M. Harrison: La répartition du personnel, je pense que
c'est indiqué.
M. Bourdon: O.K.
M. Harrison: La liste des firmes autres que la
Société immobilière, il n'y en a pas. La liste des
contrats attribués à des firmes dans le domaine de
l'informatique, ils sont indiqués...
M. Cannon: II n'y en a pas.
M. Harrison: II n'y en a pas?
M. Cannon: Bien, je ne sais pas là, 13.
M. Harrison: Je pense qu'ils sont indiqués là, pour
l'avoir lu.
M. Cannon: Oui, oui, ils sont là.
M. Harrison: II y a quelques petits contrats. Des firmes de
communication ou de relations publiques, je pense qu'il n'y en a pas. Des
tarifs, des droits et permis en vigueur pour l'exercice financier 1991-1992, il
n'y en a pas. Ventilation des employés selon statut, catégorie,
lieu de travail, c'est indiqué. Et, liste des règlements qui
n'ont pas fait l'objet d'une prépublication dans la Gazette
officielle du Québec, il n'y en a pas.
M. Bourdon: O.K.
M. Cannon: Ça va?
Projet d'extension du réseau de diffusion de
TV5
M. Bourdon: Oui. Je voudrais maintenant aborder, M. le
Président, la question de TV5. La rencontre des ministres responsables
de cette télévision francophone internationale à Berne, en
avril 1991, a porté sur l'extension de la diffusion de cette
chaîne internationale en Europe, en Amérique et en Afrique. En
septembre 1991, un groupe de travail a été créé
pour définir les étapes de la progression de TV5 au continent
africain, ainsi que les conditions techniques et financières de
réalisation de ce projet.
Le ministre avait annoncé, suite à ces rencontres, qu'il
désirait enrichir le contenu de
certaines émissions produites au Québec - à cet
égard-là, le contenu québécois de TV5 varie de 11 %
à 20 % - afin de le rendre accessible au public européen. Est-ce
que le ministre peut nous indiquer les montants qui seront alloués pour
atteindre cet objectif? Est-ce que le ministre peut aussi nous informer des
implications financières et des modalités de la participation du
Québec dans le projet d'extension du réseau, suite à la
création du groupe de travail? (16 h 50)
M. Cannon: Si vous me permettez, M. le député, de
chercher les réponses à ces questions... Alors, sur la question
du financement, simplement pour vous rappeler que, depuis 1986, le total des
montants qui sont alloués à la fois par le ministère des
Communications et le ministère des Affaires internationales - puisque
vous savez que, conjointement, nous y sommes tous les deux - est de 6 360 060 $
qui sont alloués à l'opération de TV5 par le gouvernement
du Québec. Si vous voulez le détail par année, je suis en
mesure de vous fournir cette information-là. Mais, pour vous donner un
peu les renseignements concernant la toile de fond, je vais demander à
Serge Thibaudeau, qui s'occupe plus particulièrement de ce dossier
à la Direction générale des médias, de nous fournir
ces renseignements. Alors, avec le consentement des membres de la commission,
M. le Président? Merci.
M. Thibaudeau (Serge): Bonjour...
M. Cannon: Juste la toile de fond, puis ce qui s'est passé
à Berne.
Le Président (M. Bradet): Est-ce que vous pouvez vous
identifier, s'il vous plaît, juste pour les besoins des
débats?
M. Thibaudeau: Serge Thibaudeau, directeur général
des médias. D'abord, déjà par rapport... Tantôt, on
disait 6 000 000 $. Le Québec paie 40 %, le Canada paie 60 % de la
facture qui vient des gouvernements, ici. La contribution Québec-Canada
ensemble, c'est 1/9 de ce que ça coûte en général.
La France paie 6/9, la Suisse et la Belgique, 1/9 chacune. C'est une grosse,
grosse aventure. C'est assez complexe. Ça comprend cinq gouvernements
et, évidemment, des télévisions privées et
publiques des deux côtés de l'Atlantique. L'évolution,
c'est d'avoir mis beaucoup d'ordre de chaque côté pour se
comprendre parce que personne ne connaissait ça, une
télévision comme ça. Par rapport au monde anglophone,
ça n'existe pas que l'«anglo-phonie» internationale se donne
une télévision comme telle. Donc, les règles n'ont pas
été faciles, ça a évolué beaucoup dans le
temps. Maintenant, ça a été organisé beaucoup du
côté Europe, du côté Québec-Canada, avec des
règles acceptables de part et d'autre. TV5 se développe
considérablement. Dans les pays de l'Est, c'est reçu de plus en
plus du côté de l'Europe. Au Sommet francophone, les pays
africains ont demandé que TV5 soit là et il y a des efforts qui
sont faits ici, du côté des États-Unis, pour voir qu'est-ce
qu'on peut faire et, éventuellement, du côté de
l'Amérique du Sud.
M. Bourdon: Maintenant, M. le Président, je me pose une
question que d'autres personnes se posent, ici. Comme TV5 est disponible par
câble et que - on me pardonnera l'anglicisme - le Québec est
très câblé, mais que la France est très peu
câblée, est-ce qu'on a une idée de l'auditoire qui est
rejoint en France par TV5, puis est-ce qu'il est en progression? Est-ce qu'on
peut s'attendre à ce que cet auditoire-là aille en
s'élargissant?
M. Cannon: Ce qu'il est important de retenir ici, comme
information, M. le député, c'est que le gouvernement du
Québec, à l'occasion du Sommet de la francophonie... Lorsque les
chefs des pays francophones ont décidé d'aller de l'avant,
justement c'était pour une télévision qui s'adressait
à l'ensemble de la francophonie. Il est sûr que le gouvernement du
Québec a des visées afin de permettre à nos producteurs et
productrices du Québec d'avoir accès à un plus large
marché et, par conséquent, de faire reconnaître le travail
qu'ils font à un marché, encore une fois, plus grand. C'est le
problème particulier du câblage en France qui a soulevé des
inquiétudes, inquiétudes puisque la pénétration
n'est probablement pas ce que nous souhaitons. Par ailleurs, il faut dire que,
dans des pays de l'Est, déjà là, il y a aussi des efforts
qui sont faits. Mais, précisément, à ce que l'on me dit,
et M. Thibaudeau pourra compléter la réponse, il y a
présentement en France beaucoup plus d'ouverture à câbler
les résidences qu'il n'y en avait. Cependant, la juridiction
réglementaire, avec plusieurs niveaux de règlement ou
d'approbation, est extrêmement complexe et très compliquée,
ce qui fait que c'est un processus qui est relativement lent. Mais le
gouvernement du Québec a toujours l'intention de poursuivre non
seulement sa participation au financement de TV5, mais également sa
présence politique et sa présence morale, je dirais, pour que
nous puissions donner à des gens d'ici une part du marché
beaucoup plus importante. Mais, spécifiquement sur cette question de
câblage, je laisse la parole à Serge.
M. Thibaudeau: En fait, ça évolue presque à
chaque jour. Aux dernières nouvelles, je pense qu'il y avait
certainement au moins 100 000 Français de câblés.
Évidemment, c'est très lent par rapport à ce qui avait
déjà été proposé, mais, ce qui est certain,
c'est qu'on est très positionné. Chaque fois que le câble
se développe, chaque fois qu'une maison française s'abonne au
câble, elle a accès à TV5. Les pourparlers qu'on a eus avec
les autorités
françaises vont dans le sens qu'ils vont tout faire pour que TV5
soit là à chaque fois que le câble va évoluer.
Évidemment, c'est un petit problème, TV5, dans le gros
problème du câblage de la France.
Canal d'information continue en
français
M. Bourdon: M. le Président, une autre question qui me
vient à l'esprit: Est-ce qu'il est question de l'éventuelle mise
sur pied d'un canal d'information continue pour la francophonie, en plus de
TV5? Est-ce que ce projet-là est juste embryonnaire ou si les
discussions avancent à cet égard-là?
M. Cannon: Écoutez, il y a eu des discussions à ce
sujet-là lorsque la réunion d'Ottawa conviait les ministres
responsables à la session de l'automne passé. Néanmoins,
cette question a été évacuée pour discussion au
sommet de Chaillot. Par ailleurs, il y a eu une initiative des Belges qui
visait à mettre sur pied une radio francophone à travers les pays
qui sont touchés. Peut-être que M. Thibaudeau peut
compléter au sujet précisément de votre question sur
l'espèce de «All News» français à travers la
francophonie.
M. Thibaudeau: En fait, c'est discuté. Le bassin de TV5 et
certainement les organisateurs de TV5 sont certainement bien placés pour
penser à une formule comme celle-là. Sauf que c'est
extrêmement dispendieux, un CNN francophone à travers le monde.
Quand il y a des grosses crises, CNN fait de l'argent, mais autrement c'est
assez coûteux d'imaginer un système comme celui-là à
travers la planète pour 52 semaines par année,
régulièrement. TV5, ils ont réfléchi à
ça, ils continuent de réfléchir à ça, en
fait les professionnels de TV5, dont les gens des télévisions. La
question est sur la table. Elle se pose régulièrement. Je pense
que, si c'est financièrement possible, ça va sans doute voir le
jour, mais ce n'est pas facile.
M. Bourdon: M. le Président, je sais que ce n'est pas
simple d'amener ce gouvernement à demander quoi que ce soit. Mais est-ce
que le ministre serait prêt à envisager de demander au chef de ce
gouvernement de demander au gouvernement fédéral canadien, non
pas une grande demande dans le cadre des débats constitutionnels...
Est-ce qu'on ne pourrait pas rapatrier les sommes que les
Québécois versent pour News-world pour financer une participation
à des activités comme TV5? Autrement dit, est-ce que le ministre
serait au moins d'accord pour dire qu'on pourrait - excusez l'anglicisme - au
moins faire du «opting out» pour le financement qui vient
directement des abonnés du câble du Québec, pour des
émissions d'information qui ne leur sont pas destinées, qui ne
sont pas disponibles en français?
M. Cannon: Ça, c'est un autre dossier. Là. vous
mettez plusieurs choses ensemble. Sur cette question précisément
d'un réseau de nouvelles à travers le monde francophone, vous
devez savoir qu'il y a d'autres participants. Il y a la Suisse qui y participe.
Il y a la Belgique qui y participe. Il y a nous, bien sûr. Il y a le
Canada qui y participe. Il y a la France qui y participe. Alors, les
partenaires autour de la table, comme ça vous a été
mentionné, ont identifié les coûts inhérents
à la mise sur pied de ce système-là et ont
décidé, à la toute fin, précisément, de ne
pas nécessairement aller de l'avant avec ce projet-là. Ça,
c'est la première chose.
La deuxième chose, lorsque vous me parlez des revenus provenant
du câble et de voir si nous ne pourrions pas toucher un pourcentage de
ces revenus-là, qui sont générés par le «Ail
News» au Québec, afin de les canaliser ailleurs, c'est sûr
que, si nous commencions à segmenter le marché de cette
façon, nous pourrions, bien sûr, travailler jusqu'à
l'infini, puisque, si on enclenche cette chose-là, ça devient
extrêmement complexe. On pourrait faire de même pour d'autres
émissions qui sont ailleurs dans le Canada. (17 heures)
Chose certaine, je me réjouis du fait que Ted Rogers, qui est
propriétaire de la compagnie Rogers Cable TV, lui, ait opté pour
retransmettre les émissions de TV5 sur son réseau, ce qui, bien
sûr, va procurer une source additionnelle de financement au réseau
ou, enfin, au consortium Québec-Canada de TV5. Alors, c'est
déjà un signe encourageant. Il faut croire que les gens sont
très heureux de la programmation qui s'y retrouve. Comme dernier
complément d'information, on me dit qu'au CRTC on ira à nouveau
présenter une demande afin d'élargir le bassin, enfin
d'élargir l'auditoire, si vous voulez, de répondants ou...
Une voix: D'abonnés.
M. Cannon: ...d'abonnés, pardon, au réseau.
Ça devrait normalement aussi procurer des montants
supplémentaires. Ce n'est pas évident que, demain matin, on va
aller dans un système «toutes nouvelles» parce que, si vous
créez une chose semblable, vous et moi qui sommes très
préoccupés de ce qui se passe au Québec au niveau de nos
industries télévisuelles, vous allez créer des pressions
supplémentaires et additionnelles sur l'entreprise privée avec
cette introduction-là. En tout cas, je vous mets en garde et je vous
demande de réfléchir un peu à cette chose-là.
Ça peut créer des problèmes.
M. Bourdon: M. le Président, je prends bonne note de
l'avertissement du ministre et je le préviens que, pour ce qui est des
sommes que les Québécois versent pour Newsworld, je reviendrai
avec une autre suggestion d'utilisation. Écoutez, la question est assez
simple. On se rappelle de
tout ce qui s'est passé au Canada sur les chèques
bilingues, il y a 20 ans. Mais, là, c'est un recul considérable,
de se retrouver avec un service que les gens sont tenus de payer puis qui n'est
pas disponible dans leur langue. Alors, je cherche. J'ai une autre suggestion
d'ordre pratique à faire au ministre. Je sais que l'information
continue, c'est un projet qui a des implications considérables en termes
financiers et je suis d'accord. CNN, qui est la plus grosse organisation du
genre, a eu des déficits plusieurs années d'affilée,
même s'ils sont dans le marché le plus considérable au
monde pour ce qui est de l'usage. Mais, au-delà de ça, je
voudrais que le ministre retienne une chose: les Québécois
versent des sommes très considérables pour un service qui ne leur
est pas offert. Quand on ne l'offre pas en français, on ne leur offre
pas, en pratique. Point. Le ministre sait très bien qu'à cet
égard-là l'écoute de Newsworld, au Québec, doit
être négligeable parce que ce n'est juste pas disponible. Le
ministre est sans doute au courant de la dernière farce plate qui
consiste...
M. Cannon: Non.
M. Bourdon: Dans un premier temps, on a dit: Quatre heures par
jour en traduction simultanée. Écoutez, à la rigueur, une
conférence fédérale-provinciale en traduction
simultanée, pour ceux qui appartiennent à la minorité que
ça intéresse, ça s'endure, mais de l'information vivante
en traduction simultanée, c'est ridicule. Bon. Comme il y a eu un
tollé - parce que Newsworld est aux Québécois francophones
ce que l'Hôtel-Dieu est aux Montréalais - on est
arrivé...
M. Cannon: Posez-la, la question. J'étais prêt en
Chambre, aujourd'hui, à y répondre.
M. Bourdon: On en est venu à ceci, M. le Président,
qui est du plus haut baroque. Newsworld dit: On va prendre une sélection
d'émissions d'affaires publiques de la télévision
francophone puis on va traduire ça à Newsworld. Est-ce que vous
connaissez quelqu'un qui n'a pas de magnétoscope qui voudrait regarder
«Le Point» en anglais à Newsworld s'il l'a manqué en
français?
M. Cannon: Non. Je pense que, si on veut aborder le dossier, il
faut l'aborder d'une façon peut-être sérieuse au
départ. Radio-Québec touche un certain nombre de redevances. Ce
n'est pas fort, mais elle touche des redevances quand même. La
majorité des télédiffuseurs touchent des redevances en
périphérie du Québec, là où se trouvent
d'autres câblodistribu-teurs. Alors, si vous me dites qu'on va commencer
à balkaniser le Québec puis à dire: Les montants qui sont
versés là, on va les garder pour faire autre chose, là,
vous ne me convain- quez pas par l'argument que vous avancez. Je suis
très satisfait et je ne pense pas, je ne pense pas, là... Je suis
très satisfait du service et des nouvelles qui sont offerts aux
Québécois d'une façon générale. Je ne crois
pas que et Radio-Canada, et nos chaînes privées, et tous les
autres qui en font soient déficients de ce côté-là.
C'est bien évident que vous pourrez me dire: Oui, mais, en
région, ils n'ont pas de nouvelles. Vous avez absolument raison. Et
ça, ça nous apporte un autre débat. De là à
troquer un «Ail News» canadien pour un autre au Québec, qui
aurait peut-être une forme semblable, ou pour pouvoir le faire sur le
plan international, je ne suis pas convaincu de la chose. Je pense que
ça mérite beaucoup de réflexion, mais je vous ai
donné, sommairement, ma réflexion au départ. Je crois que
ça créerait peut-être plus de complications. Je suis bien
prêt à m'asseoir avec vous afin d'examiner très
attentivement ce qui pourrait être fart si on devait, un jour, songer
à cette orientation et si, un jour, souhaitons-le, nous pouvions
récupérer davantage de pouvoirs dans ce secteur.
M. Bourdon: M. le Président, je pense que le ministre ne
comprend pas bien ma proposition. Elle vient du fait suivant: Newsworld n'est
pas disponible pour les Québécois francophones, mais ils paient
pour pareil.
M. Cannon: Comment, il n'est pas disponible pour les
Québécois francophones?
M. Bourdon: Dans leur langue. Les Québécois
francophones...
M. Cannon: Ah! bon!
M. Bourdon: ...n'ont pas le service en français.
j'espère, m. le président, que le ministre ne nous dira pas
qu'ils ont juste à le regarder en anglais. voyons donc!
M. Cannon: j'ai bien compris. non, je ne dirai pas qu'ils ont
juste à le regarder en anglais. ce n'est pas ça que j'ai voulu
signifier par ma réponse.
M. Bourdon: Non, non, mais ce que je veux dire, M. le
Président...
M. Cannon: Vous dites qu'il n'est pas disponible.
M. Bourdon: ...c'est que Newsworld...
M. Cannon: II est disponible, mais il n'est pas disponible en
français.
M. Bourdon: ...est disponible au Québec, mais pas dans la
langue de 83 % de la population du Québec
M. Cannon: Oui, c'est ça.
M. Bourdon: Comme ça, il y a des chances que ça ne
change pas de sitôt, même si le président de Radio-Canada
est un Québécois francophone. C'est un Québécois
francophone qui a soumis sa demande de renouvellement de la licence de
Newsworld exclusivement en anglais, au CRTC à Toronto. Qu'il vive en
anglais, ça n'a pas d'importance, quant à moi. Ce que j'essaie de
dire, c'est ceci: Pourquoi les Québécois paieraient-ils - et ils
ignorent, pour la plupart, qu'ils le paient - 0,15 $ par mois pour un service
qui n'est pas disponible en français?
Là, j'en viens à ma proposition, M. le Président.
Je sais que ça ne fera rien parce qu'il ne faut jamais rien demander.
Ça a l'air que ce gouvernement-là dit: II ne faut pas demander,
ils vont nous dire non. Mais ça ne coûterait rien de demander - je
vous donne cette hypothèse - que les 0,15 $ par mois que tous les
abonnés au câble au Québec paieront, si la demande de
Newsworld est acceptée de passer la tarification de 0,10 $ à 0,15
$ par mois... Est-ce que ce serait si exorbitant, est-ce que ça
menacerait le Canada, est-ce que ça nous isolerait
économiquement, est-ce que ça nous ramènerait à
l'âge de pierre de demander que la somme soit versée à
Radio-Québec, parce que Radio-Québec diffuse beaucoup
d'émissions en français pour les francophones du Québec?
C'est juste ça que je veux dire, M. le Président.
D'une certaine façon, il y a vol de dire qu'on dit à une
personne dont le produit télévisuel n'est pas accessible dans sa
langue, qui est dans une province française du Canada, à 83 %...
Au lieu de payer pour des émissions qu'ils ne veulent pas regarder parce
qu'elles ne sont pas faites dans une des deux langues officielles du Canada, le
français, qui est supposé être encore une des deux langues
officielles du Canada, est-ce qu'on ne pourrait pas récupérer ces
sommes à d'autres fins? Une fin que je vois et qui serait simple, claire
et directe, ce serait de les remettre à Radio-Québec pour sa
mission éducative, culturelle et, qui sait, pour une mission
régionale que Radio-Québec pourrait peut-être reprendre
à même ces revenus. C'est juste ça.
M. Cannon: Et probablement que quelque part, ailleurs dans le
pays, il y a un membre du Reform Party qui est en train de poser la même
question, en disant: Pourquoi les anglophones sont-ils obligés de payer
pour la télévision francophone? Dans un Québec qui sera
totalement indépendant, j'espère que vous allez supporter la
minorité anglophone avec ses moyens de communication aussi.
M. Bourdon: M. le Président...
M. Cannon: Non, mais je vous pose la question.
M. Bourdon: ...le ministre déplace la question.
M. Cannon: Non, je ne déplace pas la question, c'est
ça.
M. Bourdon: L'émission «Le Point» coûte
3 000 000 $ par année à Radio-Canada, l'émission
«The Journal» coûte 8 000 000 $ par année à
Radio-Canada...
M. Cannon: Vous faites de la démagogie, mon cher M. le
député...
M. Bourdon: ...à CBC.
M. Cannon: ...puisque vous savez très bien...
M. Bourdon: Non.
M. Cannon: ...que les chiffres que vous avancez sont des chiffres
que nous possédons tous les deux et que j'ai fait exactement ce
discours-là. N'essayez pas de blinder ce que vous dites en faisant...
Que l'émission «Le Point» coûte 16 000 $ à
produire l'heure et que «The Journal» coûte 32 000 $
l'heure... Le problème du sous-financement de la Société
Radio-Canada, c'est un problème réel. J'en conviens, je l'ai
dénoncé à plusieurs égards, mais ce que je vous
dis, c'est que, vous, vous demandez, demain matin, de balkaniser le
Québec, de faire en sorte que les sous qui sont dépensés
au Québec soient exclusivement utilisés au Québec. Je vous
dis que le même raisonnement pourrait être fait demain matin par un
membre du Reform Party, en Ontario ou dans l'Ouest canadien, qui pourrait
prétendre exactement la même chose. Alors, je ne déplace
pas le problème. (17 h 10)
Moi, je vous dis que, si vous êtes prêt à travailler
à une solution qui est un petit peu différente mais qui ne va pas
taxer ces choses, il y a peut-être moyen de faire quelque chose.
M. Bourdon: M. le Président, je suis un peu abasourdi de
la réaction du ministre. Il y a des limites à ne pas voir la
réalité et à être colonisé, M. le
Président. C'est assez simple. Les Québécois francophones
payent pour Newsworld qui n'est pas disponible en français. Une fois
qu'on a dit ça, M. le Président, je ne sais pas qu'est-ce que le
ministre a à dire que le Reform Party pourrait se plaindre que les
citoyens des neuf autres provinces canadiennes paient pour le réseau
français de Radio-Canada. Quelle est la différence? Newsworld est
diffusé sur le câble et, sur le câble, quand on est
abonné, on paie pour, on paie directement pour. M. le Président,
c'est quoi, cette histoire que je mets en cause? Je ne mets pas en cause autre
chose qu'une chose, c'est que voilà un service que le
fédéral a le culot de ne rendre disponible qu'en anglais au
Canada, au Québec et ailleurs au Canada.
M. Cannon: Mais il n'est même pas disponible...
M. Bourdon: Et je dis au ministre, ça sert...
M. Cannon: II n'est même pas disponible à
Québec.
M. Bourdon: Bien oui!
M. Cannon: II faut payer pour.
M. Bourdon: Bien, les gens paient pour, alors.
M. Cannon: C'est ça, il faut payer pour, à
Québec. Saviez-vous ça?
M. Bourdon: Bien oui! Mais, M. le Président, pourquoi le
ministre dit-il qu'il y aurait quelque chose de sacrilège à dire:
Comme c'est un service dont le signal n'est même pas disponible dans
certaines régions du Québec, et là où il est
disponible il n'est pas disponible en français, étant
donné que 83 % des Québécois sont des parlant
français, pourquoi cet argent qu'ils donnent pour un service qu'ils
n'ont pas... Ils ne paient pas des impôts pour l'avoir, ils le paient en
même temps que leur facture de câble chaque mois. Ce n'est pas une
taxe, ça. On ne tombe pas dans la logique à savoir combien
coûte un téléspectateur du réseau français de
Radio-Canada par rapport au réseau anglais. Ce n'est pas ça.
C'est qu'il se fait de la vente à domicile sous de fausses
représentations sans l'accord du consommateur. On dit: Aime ça ou
n'aime pas ça, tu donnes 0,10 $. Et le ministre m'apprend qu'à
Québec, en plus, même quelqu'un qui voudrait se servir de
Newsworld pour apprendre l'anglais - ce serait légitime - il ne le
pourrait même pas.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bourdon: II ne le pourrait même pas. Alors, cela dit, il
ne faut rien demander. Comme ça, on ne se fait pas refuser.
M. Cannon: C'est regrettable que vous soyez abasourdi, M. le
député, mais vous ne saviez même pas que, dans la
région de Québec, on était obligé de payer pour
Newsworld. Alors, allez donc aux informations avant.
M. Bourdon: M. le Président, on va en venir à un
sujet plus contentieux encore: la subvention à Radio-Québec. Je
regarde les chiffres et, encore une fois - ce n'est pas la première
année - le budget de Radio-Québec est gelé. Alors,
j'aimerais ça...
Projet d'extension du réseau de diffusion de
TV5 (suite)
M. Messier: Juste un autre sujet sur TV5. Je pensais qu'on
était encore avec TV5, mais je vois le monsieur qui est parti.
Une voix: Ça va.
M. Messier: Sur TV5, oui. Sans connaître tellement les
tenants et les aboutissants, i! doit y avoir, d'après moi, deux
perspectives, une première étant la production
québécoise ici et, l'autre, la diffusion à
l'étranger de nos productions. Il a dû y avoir des études
de faisabilité au départ, tout ça, et des objectifs
quantifiés, donc. Est-ce qu'on a atteint, en 1992, les objectifs de
départ suite au Sommet francophone sur TV5? Parce que ça
découle du Sommet francophone. Et je voudrais savoir le nombre de
productions, qui ont été faites ici, qui ont été
diffusées à l'étranger, soit en Suisse, en France et dans
les pays qui sont membres de TV5 tel quel?
M. Thibaudeau: En fait, je n'ai pas le nombre, mais on pourrait
le donner. C'est sûr que ça a dépassé largement ce
qui était prévu au départ. Ça s'est
développé beaucoup, comme on le disait tantôt, partout en
Europe. Il y a 40 pays maintenant qui sont atteints par TV5 et ça
dépasse donc largement ce qui était prévu. Il faut
comprendre que ce n'est pas tout à fait le même genre
d'écoute qu'on peut avoir ici, quand on écoute
Télé-Métropole ou Radio-Canada. Quand des Bulgares
écoutent les émissions qui viennent du Québec, ils en
comprennent un bout et tout ça, mais c'est une diffusion qui a
dépassé largement les objectifs prévus. Pour les
diffuseurs d'ici, pour les producteurs d'ici, pour les acteurs d'ici, pour les
interprètes, et tout ça, c'est une notoriété
très importante. Ça ne rapporte pas tout de suite demain matin
des contrats, mais ça permet d'avoir été vu par des gens
au Maroc, d'avoir été vu par des gens en Hongrie, d'avoir
été vu par des gens...
M. Messier: II y a une relation de cause à effet entre
faire une production québécoise et l'exporter via TV5 pour
être retransmise sur l'ensemble des chaînes. Vous dites la
chaîne TV5, mais, en France, c'est partout, il y a des
répercussions positives.
M. Thibaudeau: Absolument, très intéressantes.
M. Messier: Oui, et vous avez des feedback par rapport à
ça.
M. Thibaudeau: Oui, et on a des feedback aussi par rapport
à l'écoute des émissions québécoises qui est
faite là-bas. Il y a des
sondages qui sont faits et qui disent que les émissions
québécoises sont particulièrement appréciées
par les gens qui écoutent TV5.
M. Messier: Quel est le montant d'argent, en termes de
production, qui a été investi ici, au Québec, pour la
chaîne TV5?
M. Thibaudeau: Tantôt, on disait 6 000 000 $.
M. Messier: 6 000 000 $?
M. Thibaudeau: Ça, c'est pour l'ensemble des cinq
dernières années. Mais ce n'est pas de l'argent investi en
production. C'est de l'argent investi pour l'ensemble.
M. Messier: J'aimerais ça l'avoir... C'est-à-dire
qu'il a dû y avoir une répercussion. Ça nous coûte
quoi ici, au Québec?
M. Thibaudeau: Ça coûte 6 000 000 $ au Québec
pour les cinq...
M. Messier: 6 000 000 $ par année. Le gouvernement
canadien, combien?
Une voix: Pour les cinq dernières années.
M. Thibaudeau: Pour les cinq dernières années.
M. Messier: Ah! O.K.
M. Thibaudeau: Et le gouvernement canadien... Ça,
ça correspond à 40 %. Le gouvernement canadien paie 60 %.
M. Messier: 60 %. Donc, il y a une autre portion.
M. Thibaudeau: C'est ça.
M. Messier: La portion canadienne, au total, étant de
13... Québec?
M. Thibaudeau: 6 000 000 $, c'est 40 % et puis...
M. Messier: Ça, c'est 40 %. O.K.
M. Thibaudeau: C'est ça.
M. Messier: 12... 16...
M. Thibaudeau: 9 000 000 $ pour le... 15 000 000 $ en tout,
Québec et Canada.
M. Messier: O.K. Et vous dites: Les coûts de
production...
M. Thibaudeau: C'est ça. Ça, ce n'est pas pour la
production...
M. Messier: Non, non. Ça, c'est notre quote-part. Il faut
payer, là.
M. Thibaudeau: La plupart du temps, c'est... C'est ça.
Ça, c'est de...
M. Messier: Je vous pose la question, à savoir: Nos
producteurs ont investi combien de dollars pour embarquer sur la chaîne
TV5, pour produire des émissions qui sont retransmises sur la
chaîne TV5?
M. Thibaudeau: Les producteurs ne paient pas.
M. Messier: Non, non, mais j'imagine qu'on a dû produire
ici des émissions. Non?
M. Thibaudeau: La plupart du temps, on a acheté des
émissions qui étaient déjà faites...
M. Messier: Oui.
M. Thibaudeau: ...qui ont été montrées
à TV5. Donc, c'est plutôt un budget d'acquisition. Maintenant, on
essaie quelquefois d'ajouter un pourcentage dans un budget.
M. Messier: Oui.
M. Thibaudeau: À peu près personne ne fait une
production juste pour TV5. Mais TV5, maintenant, a un budget qui permet de
compléter les productions pour dire: Nous, on va compléter et on
va acheter, par ce fait même, votre production pour la montrer sur
TV5.
M. Messier: O.K. Sur la grille horaire de TV5, quel est le
pourcentage de la production québécoise où on parle du
Québec tel quel?
M. Thibaudeau: 10 %à20 %.
M. Messier: 10 %à20 %.
M. Thibaudeau: Oui.
M. Messier: O.K.
Le Président (M. Bradet): M. le député de
Richelieu, vous aviez une question?
M. Khelfa: Oui, M. le Président. Toujours pour TV5. Au
niveau de la publicité de TV5, il y avait un grand débat sur la
publicité à TV5. Quelle est l'orientation? Quelle est
notre...
Le Président (M. Bradet): M. Thibaudeau.
M. Thibaudeau: C'est plutôt de la publicité
sociétale. C'est plutôt de faire une publicité... Il
n'y a pas de publicité comme à Radio-Canada ou à
Télé-Métropole pour vendre des objets ou... Comme
ça s'adresse à des...
M. Khelfa: Mais c'était supposé être une
source de financement.
M. Thibaudeau: C'est-à-dire que c'était
supposé être une source complémentaire de financement.
M. Khelfa: Complémentaire de financement.
M. Thibaudeau: Éventuellement, ça pourrait
être intéressant aussi quand on pense à 40 pays. On
pourrait penser à de grosses compagnies québécoises ou
canadiennes qui seraient intéressées à mettre de la
publicité là-dessus. Mais, pour le moment, l'effort est
plutôt fait pour avoir des câblodistributeurs qui le distribuent et
des spectateurs qui l'écoutent. Il y a...
M. Khelfa: Puis la répartition de la facture aux
partenaires.
M. Thibaudeau: Oui. Comme on disait tantôt,
Québec-Canada représente 1/9 de la facture totale.
M. Khelfa: Si jamais on arrive avec de la publicité,
est-ce qu'on va arriver avec 1/9...
M. Thibaudeau: On devrait... Bien, la publicité va aller
probablement...
M. Khelfa: ...de production et de recettes?
M. Thibaudeau: ...devrait aller au prorata des participants.
M. Khelfa: Ça veut dire que c'est un sujet qui est en
suspens pour le moment.
M. Thibaudeau: Bien, qui est en suspens... L'idée est
là. Maintenant, il n'y a pas eu foule aux portes, pour le moment, pour
mettre de la publicité. Alors, l'idée reste là. Si
ça se développe...
M. Khelfa: L'année dernière, il y a eu un
débat, un grand débat sur la publicité à TV5.
Ça n'a pas...
M. Thibaudeau: Je n'ai pas saisi...
M. Khelfa: Ça n'a pas abouti.
M. Thibaudeau: Non.
M. Khelfa: D'accord. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bradet): Est-ce qu'il y a d'autres
questions? M. le député de Saint-Hya- cinthe.
M. Messier: À combien de milliers ou de millions de
personnes la population rejointe par TV5 s'évalue-t-elle?
M. Thibaudeau: Là, je n'ai plus mon cahier. M. Messier:
On l'a dans le cahier? M. Thibaudeau: Oui, je l'avais.
M. Messier: Donnez-moi la référence, ça va
être parfait.
M. Thibaudeau: En fait, plus de 20 000 000 de
téléspectateurs abonnés au câble ont accès
à TV5.
M. Messier: Merci.
Le Président (M. Bradet): Ça va?
M. Messier: 20 000 000, ça inclut le Québec et le
Canada?
M. Thibaudeau: Oui. C'est-à-dire TV5 Europe, pardon.
M. Messier: TV5 Europe. O.K. M. Thibaudeau: Oui.
M. Messier: Et Québec? Il y a combien de
câblés?
M. Thibaudeau: Québec, c'est tout le monde.
M. Messier: C'est tout le monde qui est câblé.
M. Thibaudeau: Oui. Tout le monde est câblé.
M. Messier: Parfait. Merci.
Le Président (M. Bradet): O.K. Alors, nous allons
suspendre nos travaux pour quelques minutes.
(Suspension de la séance à 17 h 19)
(Reprise à 17 h 28)
Le Président (M. Bradet): La commission reprend ses
travaux. M. le député de Pointe-aux-Trembles.
Budget de Radio-Québec
M. Bourdon: M. le Président, sur Radio-Québec, deux
brèves questions, en espérant avoir
de brèves réponses. comment radio-québec
s'ar-range-t-elle pour vivre avec un budget qui, en pratique, n'est pas
augmenté depuis quelques années? deuxième question: qu'en
est-il du bloc de production qui avait été annoncé et qui
devrait doter radio-québec de studios suffisants pour sa mission?
M. Cannon: Sur la question «Comment fonctionne
Radio-Québec?», à la page 18 de votre document, partie I,
bilan et orientations, j'attire votre attention sur les propos suivants:
«L'aspect qualitatif de la programmation est difficilement mesurable.
Cependant, les prix décernés au cours de l'année
représentent une reconnaissance du travail exceptionnel des
artisans.» Voici donc les prix décernés à
Radio-Québec au cours de la dernière année. C'est
exhaustif, ça peut peut-être être long parce que,
effectivement, ils ont bien «performé». Prix Gémeaux.
«Avec un grand A», meilleure réalisation, émission
dramatique, Pierre Gagnon; meilleure dramatique, «L'Amour qui tue»;
meilleur texte, émission dramatique, «L'Amour qui tue»,
Janette Bertrand; prix du multiculturalisme. «Beau et Chaud»,
meilleure série de variétés; meilleur son d'ensemble,
toutes catégories d'émissions humoristiques ou de
variétés, Robert Vermette. (17 h 30) «Le Club des 100
watts», meilleure émission ou série jeunesse,
variétés et information, avec Marc-André Coallier;
meilleur texte, émission ou série jeunesse toutes
catégories, Manon Barbeau; meilleure réalisation, émission
ou série jeunesse toutes catégories, Martin Barry, etc.,
meilleure interprétation, émission ou série jeunesse
dramatique, Jessica Barker. «Lumières», coproduction Pixart;
«Passe-Partout», meilleure émission ou série
jeunesse; «Téléservice», meilleur magazine de
services.
C'est des distinctions quand même, comment ils se tirent
d'affaire. Autres prix: Prix Molson de journalisme en loisir, catégorie
télévision, à Stéphane Pilon,
«Consommation» ; Félix du microsillon de l'année
décerné par l'ADISQ, «Le Club des 100 watts», volume
II; «Les Défis d'Aristide», «Nord-Sud»,
émission gagnante du concours d'émissions francophones
d'information organisé par la Communauté des
télévisions francophones - CTF; Prix Colombe
décerné au «Club des 100 watts» par le Comité
régional intersyndical de Montréal - CRIM - à
l'émission qui a le plus contribué à la non-violence
à l'écran.
Alors, si vous demandez comment ils ont performé: Très
bien, merci.
M. Bourdon: M. le Président, le ministre a dit des choses
très intéressantes, mais qui n'ont aucune pertinence par rapport
à ma question. À cet égard-là, je le
réfère à la transcription du Journal des débats
le lendemain de la remise des prix Gémeaux et, pour l'essentiel,
quand j'ai parlé sur une motion non annoncée, ce qu'il vient de
dire, je l'ai tout dit. Alors, je ne parle pas de la qualité des
émissions de Radio-Québec, elle est évidente et les
nombreux prix remportés l'illustrent. Le problème, c'est la
qualité de l'appui du gouvernement et la qualité du financement.
Alors, je reprends ma question, M. le Président: Comment
Radio-Québec peut-elle croître, se développer et avoir
notamment une présence significative en région avec un budget
qu'on lui coupe? Ce que je veux dire, M. le Président, en bien clair...
Radio-Québec remporte de nombreux prix de toutes sortes d'organismes. Le
seul qui n'a pas l'air de reconnaître son mérite, c'est le
gouvernement du Québec parce que, en pratique, on lui coupe ses budgets;
quand on ne les indexe pas, les ressources en viennent à diminuer.
Alors, je reprends ma question au ministre. J'espère qu'elle va
être claire: Pourquoi, au lieu des prix, le gouvernement donne-t-il des
baffes à Radio-Québec en gelant systématiquement son
budget de fonctionnement? Alors, je ne veux pas savoir si Radio-Québec
fait des émissions de qualité, elles sont d'une très
grande qualité. Le problème, c'est la qualité de l'appui
et du financement du gouvernement du Québec. Et pendant combien de temps
encore Radio-Québec devra-t-elle se contenter d'un budget non
indexé? En passant, M. le Président, c'est depuis que le Parti
libéral est au pouvoir que cinq des neuf régions de
Radio-Québec ont été abolies. Alors, ça, ce n'est
pas la faute des artisans de Radio-Québec, leur mérite est
évident. Pourquoi le gouvernement du Québec est-il le dernier
à reconnaître le mérite de Radio-Québec?
Le Président (M. Doyon): M. le ministre.
M. Cannon: Encore une fois, ce serait fort intéressant si
le député de Pointe-aux-Trembles était capable, dans une
certaine logique, d'identifier cause et effet. C'est évident que, si le
gouvernement du Québec n'avait mis aucune ressource, le
député n'aurait pas, au lendemain de ces nombreux prix
accordés à Radio-Québec, vanté le mérite de
sa programmation exceptionnelle et du travail exceptionnel de ses artisans.
Alors, à partir du moment où le député est
prêt à reconnaître cette notion causale entre ce qui est
donné, en termes de ressources financières, et la qualité
exceptionnelle de sa programmation, je pense que notre débat n'ira nulle
part. Ce que je dis au député, c'est que, compte tenu des
difficultés dans lesquelles se trouve non seulement Radio-Québec,
mais l'ensemble du gouvernement, ce qui est, effectivement, M. le
Président, il ne faut pas se le cacher, le legs, l'héritage que
nous a laissé le Parti québécois après avoir
passé neuf ans au pouvoir, de 1976 à 1985, au 2 décembre,
notamment, avec le déficit qu'ils nous ont laissé... Ai-je besoin
de rappeler ici au député ce déficit formidable, cet
endettement auquel vous avez convié les Québécois? Et qui
nous l'a fait? C'est le père fondateur de
l'endettement, votre chef, qui nous a laissé ça. Alors, je
n'ai pas besoin de refaire ça.
Nous avons procédé à une réévaluation
de Radio-Québec. Nous avons procédé à une
réallocation budgétaire de Radio-Québec, et le
résultat - je pense que je vous l'ai dit, c'est à la page 18 du
document - c'est qu'en dépit, évidemment, de l'ensemble des
mesures, oui, difficiles, mais combien importantes, puisque les hommes et les
femmes qui sont à Radio-Québec ont souscrit entièrement
à cet objectif de mieux rationaliser et d'en faire plus avec moins, ils
ont réussi à le faire.
Pour ce qui est des régions, ce débat est amené
à chaque occasion que l'Opposition a, au niveau des crédits, de
discuter du plan que Richard French, mon prédécesseur, avait mis
en application. Nous avons sauvé des centaines de milliers de dollars
aux contribuables québécois et aujourd'hui, vous voudriez que
nous puissions à nouveau nous désister de cet objectif combien
important, non seulement pour les Québécois, mais pour les
enfants et la génération qui suit. Je comprends que la
philosophie de votre parti, c'est de dire: Continuons à dépenser,
continuons à investir là-dedans, continuons à s'endetter.
Mais ce que je vous dis, c'est que Radio-Québec se comporte et se porte
très bien, merci beaucoup, financièrement parlant.
Pour ce qui est des régions, oui, effectivement, on a
apporté des corrections en région. Mais on a apporté des
corrections, on a dit: C'est fini, on n'investit plus dans le béton.
Mais, dans l'humain, on a continué d'investir. Et force est de constater
qu'effectivement il y a des régions qui sont toujours opérantes.
Il y a des régions qui fonctionnent très bien. Il y a des
régions qui contribuent à des émissions au niveau du
réseau, et ce n'est pas celui qui vous parie qui, demain matin, va
changer cette ligne de pensée. Si vous avez pris connaissance du bilan
que Radio-Québec a déposé après avoir
complété la période quinquennale qui lui avait
été confiée par le gouvernement, je pense qu'en toute
honnêteté vous devez non seulement constater qu'ils ont fait une
bonne affaire, mais vous devez envier le gouvernement qui, à ce
moment-là, plutôt que de garrocher des milliers de dollars par la
fenêtre, a décidé d'ouvrir la fenêtre, de regarder
dehors, qui a vu que nous vivions dans une récession économique,
que nous étions les héritiers d'un lourd fardeau qui nous avait
été confié par l'Opposition et que oui, malgré
tout, Radio-Québec résiste, passe très bien à
travers la tempête, parce qu'il y des hommes et des artisans, des hommes
et des femmes exceptionnels qui y travaillent. Voilà ma
réponse.
M. Bourdon: Je trouve que le ministre a une attitude arrogante et
méprisante à l'endroit d'une question assez fondamentale que je
lui avais posée, M. le Président, qui est la suivante:
Pourquoi gèie-t-on, depuis plusieurs années, ie budget de
Radio-Québec? Et là, de partir dans une cassette... La plupart
des ministres libéraux sont spécialistes là-dedans.
Ça fait juste six ans, presque sept ans qu'ils sont au pouvoir et tous
les problèmes, disent-ils, leur viennent du gouvernement d'avant. M. le
Président, c'est bien simple, la régionalisation de
Radio-Québec a été réalisée sous un
gouvernement du Parti québécois. Le ministre parle d'un
héritage. Oui, on avait laissé neuf régions qui
commençaient à s'implanter et à s'organiser. Les
Québécois sont mal traités au point de vue de la
télévision. La dimension régionale n'y est pas. Et
Radio-Québec était un plus. Qu'est-ce qu'ils ont fait de
l'héritage? Ils ont aboli cinq régions sur neuf, M. le
Président, incluant la région de Québec dont le ministre
est lui-même un député. Alors? Et la région de
Québec qui se plaint amèrement de la diminution de la
programmation projetée par TVA, du peu de programmation locale par
Télévision Quatre-Saisons et du peu de programmation locale de
Radio-Canada. Et, M. le Président, au lieu de ça, on entend des
sornettes. Parce que, si le ministre veut parler d'héritage, je vais en
parler d'un, moi. Quand le Parti québécois a pris le pouvoir en
1976 - quant à retourner, retournons - on a hérité d'un
stade de 1 000 000 000 $ que le gouvernement précédent avait
laissé se construire. Alors, ça, en matière
d'héritage... Pour l'information du ministre...
M. Cannon:...
M. Bourdon: ...les fumeurs de cigarettes et les
propriétaires fonciers de l'île de Montréal paient encore
pour le Stade. On doit encore 500 000 000 $ dessus. Sauf qu'il y en a qui ont
fait une moyenne passe avec le Stade. Et il y en a qui se préparent
à faire une moyenne passe avec l'hôpital l'Hôtel-Dieu.
Alors, qu'il ne vienne pas nous achaler avec les sornettes qu'il nous sort.
M. le Président, je pose une question assez
élémentaire. Le ministre dit que Radio-Québec s'est
mérité de nombreux prix par le travail et la qualité du
travail de ses artisans. Oui, je n'en disconviens pas. Je pose la question:
Combien de temps encore le gouvernement entend-il punir Radio-Québec en
gelant ses budgets, tout en disant, la main sur le coeur, qu'elle a une
excellente performance et que c'est un milieu de grande
créativité dans la télévision
québécoise? Le ministre a foi en Radio-Québec. Je lui pose
la question: Où sont les oeuvres? Les oeuvres, c'est, entre autres, les
moyens. Et j'ai posé une question précise sur un moyen. Je ne
désespère pas de le savoir. En télévision, les
studios ont une grande importance. Je vais dire ça au ministre. C'est
très important les studios, en télévision. Il y a un
projet qui a été annoncé d'un bloc de production.
Ça, peut-on avoir une
réponse à part de parler de la préhistoire du
gouvernement actuel? Est-ce que le bloc de production va être construit?
Et, s'il est construit, comment sera-t-il financé, si ce n'est pas
impertinent de demander ça au ministre? (17 h 40)
M. Cannon: Bon, alors, visiblement, le député
manque de renseignements, là...
M. Bourdon: M. le Président...
M. Cannon: ...et ça va me faire plaisir...
M. Bourdon: ...on est ici pour en avoir. Alors, si...
M. Cannon: ...et ça va me faire plaisir...
M. Bourdon: ...je pose une question, c'est que je n'ai pas la
réponse.
M. Cannon: C'est ça que je dis, là. C'est ça
que je dis, ça va me faire plaisir de vous les fournir pour ne pas que
vous ayez une mauvaise impression et pour que vous n'alliez pas dire des choses
qui ne sont pas justes. Alors, la production en région, M. le
député, membres de la commission, pour l'année
budgétaire 1990-1991, 89 heures ont été consacrées
en régions à la production, donc à la programmation de
Radio-Québec. En 1991-1992, 102 heures et cette année, 1992-1993,
nous prévoyons 112 heures. Radio-Québec produisait, simplement
à titre d'information, en 1991 et en 1992, 26,5 heures par son
équipe de Québec - juste la région de Québec parce
que vous m'avez parlé de Québec - alimentant ainsi les
émissions «L'observateur», «Québec en
affaires», «Feu vert», «La route des vacances»,
«Québec en images», de même que «Images de
l'abbé Proulx», «Rideau» et «Les groupes
parlementaires». Vous connaissez les groupes parlementaires. Nous
prévoyons maintenir ce nombre d'heures pour l'année 1992-1993.
C'est dans la région de Québec, ça. Ça, c'est dans
la région de Québec et c'est supérieur à ce que TVA
fait, c'est supérieur à Radio-Canada et c'est supérieur
à TQS.
Vous parlez du projet de Radio-Québec. Effectivement, j'ai
été saisi du projet de Radio-Québec et, M. le
député, j'ai le plaisir de vous annoncer aujourd'hui, de
même qu'à ceux qui nous écoutent, que ce matin même
j'ai signé ce C.T. qui vise l'agrandissement des unités de
production et le regroupement, à Radio-Québec, d'un certain
nombre d'infrastructures. Vous avez laissé, pendant des années,
dépérir Radio-Québec; aujourd'hui, on va le corriger.
M. Bourdon: Alors, M. le Président, j'en reviens à
ma sous-question. Pour ce qui est du bloc de production, est-ce qu'on peut
savoir comment Radio-Québec va financer ces
immobilisations-là?
M. Cannon: À même le montant actuel du bail. Mais,
lorsqu'on annoncera le projet, lorsqu'il sera entériné - je vous
ai dit que j'ai signé le document ce matin - ça va me faire
plaisir de vous inviter à la conférence de presse.
M. Bourdon: M. le Président, il y a une autre question que
pose l'insuffisance du financement de Radio-Québec, c'est son
indépendance et son autonomie quand il est question d'émissions
d'information. On en a eu, il y a quelques mois, un exemple concret quand on a
appris - j'ai posé une question en Chambre au ministre à cet
égard - que la ministre fédérale avait obtenu d'enlever un
bout d'émission parce qu'on lui avait présenté le projet
d'émission. C'était une émission qui portait sur la
francophonie et la ministre fédérale avait accordé une
subvention à Radio-Québec à même les budgets de
l'ACDI. Alors, est-ce que le ministre est assuré qu'une telle chose ne
se reproduira pas parce que, comme je lui disais en Chambre, à
l'époque... Le ministre venait de dire à Toronto qu'il souhaitait
que le gouvernement du Québec ait son mot à dire à
Radio-Canada. Je lui avais dit en Chambre qu'en attendant que le Québec
ait son mot à dire à Radio-Canada il y avait une ministre
fédérale qui avait son mot à dire à
Radio-Québec. Alors, est-ce qu'on peut avoir, de la direction de
Radio-Québec, si c'est possible, si le ministre l'autorise, une
explication de cette ingérence que Mme Monique Landry, la ministre
fédérale, avait faite dans la programmation de
Radio-Québec?
M. Cannon: J'ai, M. le Président, fourni en Chambre tous
les renseignements qui m'avaient été demandés par le chef
de l'Opposition à l'occasion d'une intervention qui avait
été faite par les autorités du fédéral,
c'est-à-dire une intervention financière dans un programme de
Radio-Québec. Il faut dire, là, en passant, que
Radio-Québec autofinance ses budgets à peu près à
20 %, si les informations qui me sont communiquées sont précises.
Encore une fois, je rappellerai au député ce que je rappelais,
qu'il y a un code d'éthique qui est utilisé à
Radio-Québec, que ce code d'éthique a été,
m'assure-ton de la haute direction du conseil d'administration, respecté
à tout point de vue et que l'ingérence anticipée ou
appréhendée de la part du chef du Parti québécois
et du chef de l'Opposition n'a pas existé.
M. Bourdon: M. le Président, je voudrais...
M. Cannon: Mais je veux simplement rassurer que, oui, on va
veiller au grain. Il faut être sûr que rien comme ça ne se
produise.
M. Bourdon: Mais le code d'éthique, M. le
Président, je voudrais rappeler les pratiques de Radio-Canada, entre
autres, où on ne permet à
aucune personne extérieure à la société
d'État de s'ingérer, avant une émission, dans le contenu
de l'émission. Et je connais le code d'éthique de
Radio-Québec, M. le Président. La question qui s'est posée
est assez simple. La ministre fédérale accordait un financement
à une émission en préparation par Radio-Québec, une
émission relative à la francophonie. La direction de
Radio-Québec a eu la faiblesse de soumettre à la ministre, avant
l'émission, le projet d'émission avec la liste des invités
et la ministre fédérale a demandé et obtenu qu'on retire
un invité de l'émission.
Pour l'information du ministre, Radio-Canada a déjà eu des
plaintes d'hommes politiques, suite à une émission d'information,
mais, à ma connaissance, Radio-Canada n'a jamais permis qu'une personne
de l'extérieur, et encore moins un ou une ministre, parce que ça
représente le pouvoir politique... C'est une grande faiblesse, c'est un
manque à l'éthique élémentaire en information de
soumettre à une personne du monde politique, sous prétexte que
cette personne contribue au financement d'une émission, le projet
d'émission et que la personne réussisse à faire enlever un
invite de l'émission. Ça, ça illustre le danger qu'il y a
à avoir un financement insuffisant à Radio-Québec qui
force Radio-Québec à aller chercher d'autres sources de
financement.
M. le Président, le ministre peut en rire, mais la
Fédération professionnelle des journalistes, qui compte 1200
membres, avait dénoncé ça avec raison. Je ne le fais pas
ici pour faire le procès de Radio-Québec. C'est un
précédent dangereux qui a été posé.
Espérons, si c'est la première fois, que ce sera, en tout cas, la
dernière fois parce qu'il n'y a pas un artisan journaliste qui n'a pas
senti ça comme une entorse grave au principe élémentaire
qui concerne la fabrication d'une émission d'information, de permettre
à une femme politique de prendre connaissance d'avance d'un projet
d'émission d'information et de permettre à cette
personne-là de dire: Tel invité doit être enlevé. En
pratique, on a enlevé l'invité que la ministre ne voulait pas
voir à l'émission.
M. Cannon: À la suite de la question qui avait
été posée, je suis allé au fait. J'ai
personnellement parlé avec les autorités de Radio-Québec
et, à Radio-Québec, on m'assure que non, l'ingérence
politique n'a pas eu lieu. Alors, ce que je retiens des propos du
député de Pointe-aux-Trembles, c'est qu'il accuse la haute
direction de Radio-Québec, premièrement, de ne pas respecter son
code d'éthique et, deuxièmement, d'avoir subi des pressions, bref
d'avoir accepté de subir des pressions politiques et de
l'ingérence. C'est ce que je tiens comme propos de la part du
député de Pointe-aux-Trembles.
M. Bourdon: M. le Président...
M. Cannon: Est-ce que c'est bien ce que vous me dites?
M. Bourdon: M. le Président, si le ministre me pose une
question, il va me laisser le temps d'y répondre. La direction de
Radio-Québec a soumis un projet d'émission d'avance à une
ministre. La ministre a marqué son insatisfaction que le chef du Bloc
québécois soit prévu dans l'émission en sa
qualité d'ancien ambassadeur du Canada en France et, suite à
ça, Radio-Québec a retiré cet invité de
l'émission. Oui, je dis qu'une chaîne de télévision
ne doit soumettre à aucun personnage politique d'avance, fût-elle
une ministre fédérale qui contribue au financement de
l'émission, le plan de l'émission. Et j'affirme que Radio-Canada
ne l'a jamais fait et qu'il n'y a pas une télévision nationale
qui se respecte qui ie ferait.
Cela dit, M. le Président, ce qui m'intéresse, moi, c'est
l'avenir. Le fait a été fait. Le ministre nous dit, comme en
Chambre: Radio-Québec nous informe qu'elle n'a pas contrevenu à
son code d'éthique. Je diverge d'opinion avec Radio-Québec. Je
pense que ce n'était pas... Il n'aurait pas dû y avoir de
communication à la ministre d'un plan d'émission d'une
émission qu'elle finance. J'ajoute que Radio-Canada ne le fait pas pour
un commanditaire ordinaire d'émission non plus. À «Jamais
deux sans toi», on ne demande pas à un des annonceurs, à un
des commanditaires de l'émission ce qu'il pense du scénario de
l'émission. Bon. (17 h 50)
Le ministre dit: On n'a pas fait ça parce que la direction de
Radio-Québec m'a dit qu'on n'a pas fait ça. Moi, je reviens, dans
le fond, à la phrase de saint Thomas d'Aquin, que le ministre a
sûrement déjà lue et méditée:
«L'exercice de la vertu suppose un minimum de confort.» Est-ce
qu'au plan du budget de Radio-Québec le ministre peut nous dire si,
à un moment donné, le gouvernement va recommencer à
l'indexer afin que Radio-Québec ne soit pas réduite - la
société - à faire des choses pour avoir du
financement?
M. Cannon: Sur cette question d'intégrité de ceux
et celles qui représentent les intérêts du Québec et
qui sont obligés de suivre un code, je retiens, M. le
député, que vous persistez à maintenir que la haute
direction de Radio-Québec a subi des pressions politiques et s'est
donnée littéralement aux pressions politiques. C'est un
pétard mouillé, comme le pétard mouillé que vous
avez avancé dans le cas du rapport Bernard - je me souviens très
bien - comme vous avez avancé dans le cas du rapport Brière,
comme vous avez avancé dans le dossier de Mistassini. Ce sont là
des flèches qui sont lancées à tout hasard par
l'Opposition sur l'intégrité du gouvernement. Comme au baseball,
vous avez actuellement trois prises au bâton. Alors, je vous demande
de
retourner non seulement aux douches, mais peut-être dans les
ligues mineures où vous allez pouvoir vous recycler. Ça ne colle
pas, ces insinuations-là. Comme les insinuations que vous avez
aujourd'hui dénoncées ou, semble-t-il, que vous avez
portées sur la place publique à l'égard de l'hôpital
l'Hôtel-Dieu, un investissement de 260 000 000 $ dans l'est de
Montréal...
M. Bourdon: M. le Président, est-ce que je peux vous
demander si...
M. Cannon: Vous avez ouvert, M. le député, cette
canne-là tout à l'heure quand vous avez
référé à ça...
Le Président (M. Doyon): Le ministre a la parole, M. le
député.
M. Bourdon: Je sais bien, mais...
M. Cannon: ...et je réponds à votre question.
Le Président (M. Doyon): Je regrette, M. le
député. M. le ministre.
M. Cannon: Je réponds à votre question.
M. Bourdon: M. le Président, est-ce qu'il y a un doute qui
vous traverse sur la pertinence?
Le Président (M. Doyon): II me traverse des deux
côtés. Je laisse aller le débat sachant qu'au bout de
quatre heures ce sera fini et que je laisserai tomber la guillotine. Alors, M.
le député, que vous remontiez au déluge et que M. le
ministre vous réponde dans la même veine, moi, ça
m'indiffère totalement, étant donné qu'au bout de quatre
heures on arrête les débats et on passe à autre chose.
Alors, si c'est le débat que vous voulez faire, le ministre vous
répond. Vous avez ouvert la porte, alors la porte est ouverte et il est
entré dedans.
M. Bourdon: Mais, M. le Président, est-ce qu'on peut
convenir qu'on est à l'étude des crédits...
Le Président (M. Doyon): On en convient très
facilement.
M. Bourdon: ...et que, là, il est question de
Radio-Québec. C'est parce que le ministre a tendance à patiner en
dehors de la patinoire. Moi, je n'ai pas d'objection.
Le Président (M. Doyon): Mais je vous rappellerai qu'on
était un peu loin des communications avec le Stade olympique, tout
à l'heure.
M. Bourdon: Je vous rappellerai, M. le Président, que le
Stade olympique, c'est après une longue digression du ministre sur
l'état des finances publiques au Québec, au moment où le
Parti libéral fut choisi par la population pour diriger la province en
1985...
Le Président (M. Doyon): Une digression, M. le
député, en amenant une autre...
M. Bourdon: ...et que le lien entre ça et l'avenir...
Le Président (M. Doyon): Un instant, M. le
député. Une digression en amenant une autre, vous comprendrez que
le rôle de la présidence n'est pas de peser au gramme près
les Interventions. Si vous voulez que la présidence... Vous faites un
appel à la présidence sur la pertinence. Je dois vous dire qu'en
l'occurrence vous avez raison. Je demanderai au ministre de s'en tenir aux
crédits et je signalerai que cette décision-là sera
semblable s'il y a des appels à la présidence sur un sujet
semblable en d'autres occasions. M. le ministre, vous avez la parole.
M. Cannon: Simplement. M. le Président, pour rappeler la
situation budgétaire du gouvernement, il me semble que c'est tout
à fait normal que nous fassions l'historique et, si j'ai répondu
avec autant d'agressivité et autant de force aux propos du
député... C'est lui qui a parlé de l'Hôtel-Dieu de
Montréal. Alors, moi, je me sens tout à fait à l'aise de
parler de l'Hôtel-Dieu. J'attendais ses questions en Chambre, cet
après-midi, sachant très bien que c'est moi qui représente
aujourd'hui le ministre de la Santé. Alors, je souhaite que, demain, il
puisse poser ses questions. Mais revenons aux crédits, vous avez
raison.
Le Président (M. Doyon): Alors, les crédits,
allons-y.
M. Bourdon: Alors, M. le Président, je repose la question
que j'ai essayée à quelques reprises, et qui est la suivante:
Est-ce que le gel des crédits, des subventions du ministère
à Radio-Québec va durer encore longtemps? J'ose espérer,
M. le Président, qu'on finisse par répondre à la question.
Voilà une chaîne de télévision
québécoise, du secteur public, dont les budgets sont gelés
depuis un certain nombre d'années. J'aimerais savoir, vu qu'on est
à l'étude des crédits, si le ministre pense que c'est une
situation qui peut perdurer? Est-ce que c'est faisable que Radio-Québec
puisse s'acquitter de sa mission avec un budget qui n'augmente pas? Vous savez,
M. le Président, et je reviens à vos observations sages de tout
à l'heure, il y a l'adage qui dit qu'il n'est pas nécessaire
d'espérer pour entreprendre ni de réussir pour
persévérer. Mais je pense ma question pertinente. Je dis: Pour
que Radio-Québec ne soit pas forcée à
certaines compromissions, surtout quand il s'agit d'information, est-ce
qu'on ne pourrait pas envisager de commencer à indexer le budget de
Radio-Québec?
M. Cannon: Je pense qu'ici, si le député veut que
je réponde à des questions pour les trois, quatre ou cinq
prochaines années... On est ici pour défendre les crédits
de 1992-1993. Vous reviendrez l'an prochain pour voir ce que le gouvernement
proposera à ce moment-là.
Mais j'attire simplement votre attention, M. le député,
sur le tableau de bord de Radio-Québec, au niveau du budget, pour vous
indiquer que les revenus réels de Radio-Québec ont
progressé, depuis 1987-1988, alors qu'ils étaient de 72 500 000
$, jusqu'à 80 500 000 $ pour l'année financière 1991-1992
et que, là-dessus, il y a une part appréciable - 17 %,
près de 20 % maintenant, alors que c'était 15 % à
l'époque - de revenus autonomes, donc de revenus d'autofinancement. Et
j'ai demandé justement aux gens de Radio-Québec de regarder cette
possibilité d'augmenter leur part d'autofinancement. Alors, voilà
pour ma réponse.
M. Bourdon: M. le Président, dans les autres questions,
les demandes additionnelles qu'on a fait parvenir, on n'a pas eu de
réponse à chacun des points.
M. Cannon: On peut avoir les points?
M. Bourdon: Oui, oui, M. le Président. Ça s'en
vient. Notre président n'écoute pas. Alors...
M. Cannon: Non, mais dis-les, Michel. C'est quoi? Lesquels?
M. Bourdon: Alors, on demandait de quel club privé la
présidente de Radio-Québec était membre. Et je dis tout de
suite, M. le Président, que ça ne la vise pas nommément.
On pose la question pour tous les dirigeants de tous les organismes parce qu'on
veut se faire un portrait à savoir de combien de clubs privés on
est membres.
M. Cannon: M. Dufour peut répondre à ça. M.
Dufour est vice-président finances et administration.
Une voix: Annexe 10. M. Cannon: Annexe 10. Une voix:
C'est à l'annexe 10.
M. Dufour (Alain): Alors, vous avez pour 865 $ de cotisations
à des associations, incluant le club Saint-Denis.
M. Cannon: II est inclus. C'est dedans.
M. Bourdon: Alors, M. le Président, quelle est la
politique de Radio-Québec à l'égard de l'adhésion
à des clubs privés? Le club Saint-Denis, je n'ai rien pour, je
n'ai rien contre, là.
M. Dufour (Alain): Pardon?
M. Cannon: La question du député est de savoir
quelle est la politique de Radio-Québec à l'égard de
l'adhésion.
M. Dufour (Alain): II n'y a pas de politique parce qu'on paie
seulement une cotisation pour la présidente-directrice
générale. C'est prévu à l'intérieur de son
contrat. Et les autres associations, pour compléter le montant, sont
dues à des activités culturelles, comme le Théâtre
du Nouveau Monde, l'Opéra de Montréal, des choses du genre.
M. Bourdon: Donc, il y a un seul membre de club privé.
Vous dites que c'est la seule personne à Radio-Québec.
M. Dufour (Alain): C'est la seule personne qui se voit
défrayer les frais de cotisation.
M. Bourdon: Ça fait le tour, M. le Président.
Le Président (M. Doyon): Bon. Très bien. Alors,
ça termine le programme 5?
M. Bourdon: Oui, oui. C'est fini.
Le Président (M. Doyon): Ça termine le programme
5... 6, pardon, en ce qui concerne la Société de
radio-télévision du Québec. Nous allons maintenant passer
au programme suivant. Ce sera quel programme, M. le député de
Pointe-aux-Trembles? Quel programme voulez-vous aborder, M. le
député?
M. Bourdon: M. le Président, dans le programme 2,
Médias et information...
Le Président (M. Doyon): Oui.
M. Bourdon: ...j'aurais une question sur l'aide au
développement des communications.
Le Président (M. Doyon): Alors, programme 2, donc. M. le
ministre. (18 heures)
Aide au développement des entreprises de
communication
M. Bourdon: Alors, M. le Président, c'est un programme qui
m'apparaît important parce qu'il y a de l'aide aux entreprises de
communication de prévue. Les crédits qu'on nous propose, il y a
une réduction de 40 %. Est-ce qu'on pourrait
nous expliquer cette baisse-là et nous dire aussi si ça
indique que, pour le ministère, ce n'est plus une priorité
d'aider au développement des entreprises de communication?
M. Cannon: Effectivement, les transferts du ministère sont
diminués de 1 000 000 $ cette année, donc une diminution de 25
%.
Une voix: Pour répondre à la question, à
savoir où on a pris le... c'était pris dans le livre des
crédits...
Le Président (M. Doyon): Un instant. La personne qui
intervient... À moins qu'il y ait une permission, ce n'est pas
l'habitude. M. le député de Pointe-aux-Trembles, vous avez la
parole, si vous voulez bien.
M. Cannon: Juste pour compléter là-dessus.
Effectivement, c'est une diminution, à la suite, évidemment, des
compressions budgétaires, de 1 000 000 $ dans nos programmes de
transferts.
M. Bourdon: Maintenant, est-ce que le ministère a fait une
évaluation des conséquences que ça pourrait avoir, cette
diminution-là qui est radicale des transferts?
M. Cannon: Si vous permettez, M. le député, je vais
demander à M. Brulotte de compléter la réponse parce
qu'à l'intérieur de ça il y a des programmes qui se
terminent, notamment le programme EDER.
Le Président (M. Doyon): M. Brulotte, voulez-vous vous
identifier pour les fins du Journal des débats, s'il vous
plaît?
M. Brulotte (Raynald): Oui. Raynald Brulotte, directeur
général de l'administration du ministère des
Communications. Effectivement, le programme qui s'appelle EDER, Ententes de
développement économique et régional, s'est terminé
le 31 mars de l'an dernier. Il y avait, cette année, au cours de
l'exercice 1991-1992, une queue de programmes, c'est-à-dire des projets
qui avaient été subventionnés, autorisés par le
secrétariat conjoint et qui se sont terminés en cours
d'année. L'an prochain, à nos crédits, comme le ministre
l'a dit, réduits de 5 000 000 $ à 4 000 000 $, il y a uniquement
une somme de 264 000 $ qui est prévue à l'intérieur de ces
4 000 000 $ pour trois projets qui demeurent et qui avaient été
autorisés dans le cadre de l'EDER. Ces trois projets-là, je peux
vous les donner, c'est CINARS, Bellevue Pathé et Spectel
Vidéo.
M. Bourdon: M. le Président, comme l'entente de
développement économique et régional Québec-Ottawa
n'a pas été renouvelée à cet
égard-là, est-ce que le ministère a fait un relevé
des besoins, en région, qui peuvent exister? Autrement dit, est-ce que
la fin de ce programme-là, ça ne veut pas dire qu'il y a des
entreprises qui pourraient se former, des entreprises de communication en
région, qui vont être privées d'un financement dont elles
auraient besoin?
M. Cannon: Je serais fort surpris que ce soit le cas, puisqu'il
reste aussi... Vous savez, on intervient beaucoup en région par
l'entremise du programme PARC, l'aide à la radio communautaire. Il y a
toujours le programme PADEC qui est présent et il y a des interventions
spontanées qui sont faites sur le territoire. Alors, non, on a pris bien
soin de s'assurer, je devrais dire, à part le programme EDER, que nos
initiatives en région demeurent et, au contraire, puissent prendre de
l'expansion.
M. Bourdon: M. le Président, j'ai de la difficulté
à comprendre comment, par exemple, le Programme d'aide à la radio
communautaire pourrait suppléer, à la fin de l'entente
fédérale-provinciale, dans le sens que lui aussi est
diminué dans les crédits. On parle de 1 150 000 $. Les deux
années précédentes, ça avait été 1
200 000 $. Alors, je ne réussis pas à comprendre comment
compenser la disparition d'un programme à même un autre programme
qui, lui-même, diminue, pas de beaucoup, mais qui diminue quand
même de 50 000 $.
M. Cannon: Je vais demander à M. Brulotte de vous
répondre.
Le Président (M. Doyon): M. Brulotte.
M. Brulotte: Raynald Brulotte, directeur général de
l'administration. Effectivement, M. le député, vous faites
allusion au Programme d'aide à la radio communautaire, PARC, qui
diminue, qui passe de 1 200 000 $ à 1 158 000 $, alors que nous faisions
allusion, tout à l'heure, dans notre réponse, au PADEC, le
Programme d'aide au développement des entreprises de communication, qui,
en quelque sorte, peut prendre la relève pour des projets mobilisateurs
ou structurants dans le domaine des communications.
M. Bourdon: Mais le Programme d'aide au développement des
entreprises de communication, est-ce que je peux savoir de combien il s'est
accru dans les crédits qui sont devant nous, par rapport aux
crédits de l'année précédente?
M. Cannon: Ça va prendre quelques instants. On
calcule.
Le Président (M. Doyon): M. Brulotte.
M. Brulotte: Oui. Raynald Brulotte, directeur
général à l'administration. Alors, effectivement, dans les
4 000 000 $ d'aide financière totale du
ministère des Communications, l'an prochain, ce qui va être
affecté au PADEC, le Programme d'aide au développement des
entreprises de communication, ça va être de l'ordre de 1 800 000
$.
M. Bourdon: M. le Président, ça se compare comment,
aux crédits de l'année précédente?
M. Brulotte: C'était 1 500 000 $ en 1991-1992.
M. Bourdon: Donc, M. le Président, si je me fie à
ces chiffres-là, il y aurait 300 000 $ de plus. Sauf qu'à tous
les autres items il y a une diminution. Par exemple, on diminue le financement
de la radio communautaire. Il y a disparition de l'entente de
développement économique et régional.
M. Cannon: C'est le plus gros morceau, M. le
député, ça.
M. Bourdon: Oui. Et, par ailleurs, les journaux communautaires,
d'après la correspondance que j'ai... Pour ce qui est des journaux
communautaires... Parce que la radio communautaire perd un certain financement
qui est plus important, M. le Président, que ce que le chiffre laisse
entendre parce qu'on passe de 1 200 000 $ à 1 150 000 $, mais, comme il
n'y a pas indexation, pour garder la valeur du 1 200 000 $, il aurait fallu
passer à 1 250 000 $. Et, au lieu de ça, on se retrouve avec 1
158 000 $, comme M. Brulotte disait. Donc, la radio communautaire, une baisse
réelle de financement de 100 000 $. Est-ce que je peux avoir une
idée de ce que les crédits prévoient comme baisse dans les
subventions aux journaux communautaires? Parce qu'il y a un programme aussi qui
s'applique aux journaux.
M. Cannon: Ce programme-là, au niveau des journaux
communautaires, M. le député, est abandonné depuis deux
ans, me dit-on. On va financer l'association que l'on supporte. Pour revenir au
programme PARC, maintenant, il faut dire que - ça, ce sont des radios
communautaires, PARC - c'est passé de 1 200 000 $ à 1 150 000 $
cette année. Depuis maintenant deux ans, les gens de cette association
sont avisés que nous tendons de plus en plus à l'autofinancement.
Et, cette année, nous nous sommes entendus pour réserver un
montant d'argent à l'intérieur de ce budget afin de regarder les
possibilités d'autofinancement de cette association et, par le fait
même, évidemment, des propriétaires de radios
communautaires. Il y a un autre volet de ce montant qui va être
réservé à la formation. Au même titre, par exemple,
qu'on a fourni de l'argent pour la formation à la
Fédération professionnelle des journalistes, on fait la
même chose avec l'association des réseaux des radios
communautaires. (18 h 10)
Alors, tout le monde est avisé. Ce n'est pas comme si nous
l'avions fait sous la couverture du silence. C'est des partenaires et des
collaborateurs de tout instant. Je dois dire que le réseau de radios
communautaires, à travers le Québec, est très puissant.
C'est unique en Amérique du Nord. Et je pense que, lorsque,
mondialement, il y a des pays qui s'intéressent à cette
chose-là, ils viennent prendre connaissance de l'expérience
québécoise qui dure depuis maintenant plusieurs années et
qui a réussi à passer à travers plusieurs, plusieurs
tempêtes.
M. Bourdon: À cet égard-là, M. le
Président, j'en conviens avec le ministre, mais est-ce qu'il n'y aurait
pas moyen de dégager plus de ressources pour les radios communautaires?
Il y a quelques exemples que je connais, de connaissance personnelle,
là. Je pense, à Montréal, à Radio Centre Ville et
à CIBL qui jouent un rôle important et qui font un type de radio
que la radio traditionnelle ne fait pas. Il y a CKRL, à Laval, qui fait
aussi un travail que je trouve imposant. Puis, je vais vous dire, à cet
égard-là, il me semble que voilà un des volets des
crédits du ministère où le Québec peut jouer un
rôle en matière de radio.
Autrement dit, ce qui n'est pas interdit au gouvernement de faire, c'est
d'aider ces formules originales, qui font l'envie de plusieurs pays, en leur
procurant un financement. Et, dans le fond, je pose la même question pour
l'association des journaux communautaires, parce qu'ils vivent des
problèmes très considérables. Le marché est encore
plus difficile pour des journaux alternatifs, comparé à une radio
alternative. M. le Président, il y a des questions de marché en
cause, dans le sens que, dans la métropole et la capitale, des radios
alternatives réussissent à s'implanter sur une niche à
cause de la population considérable qui est impliquée. Les deux
radios communautaires de l'île de Montréal, plus celle de la
Rive-Sud, réussissent à tirer leur épingle du jeu, mais le
marché est très considérable.
À l'autre extrême, M. le Président, la radio
communautaire de Charlevoix, et pour celle de Fermont c'est la même
réalité, c'est des marchés différents dans le sens
que la radio communautaire c'est, en même temps, la seule radio locale ou
régionale. Donc, c'est une formule qui a ses mérites. Je ne veux
d'aucune façon dire qu'il y a des bonnes et des mauvaises radios
communautaires. Dans le cas de Fermont, c'est une radio proprement locale. Dans
le cas de Charlevoix, Cl HO est la seule radio régionale au sens que
d'autres stations de radio font de l'information sur Charlevoix là, je
n'en disconviens pas, mais que la seule qui est propriété de
Charlevoix, de personnes de Charlevoix, et qui diffuse à partir de
Charlevoix, c'est CIHO.
Alors, je repose donc la question qui est double. Est-ce qu'il serait
envisageable de recommencer à faire progresser la subvention aux radios
communautaires? Et, pour ce qui est de l'association des journaux
communautaires, est-ce que je pourrais avoir le détail de ce qui est
prévu dans les crédits, comme subvention, et comment ça se
compare à celle de l'année précédente?
M. Cannon: Au niveau des buts, je crois que vous et moi on est
d'accord. C'est au niveau du financement. Moi, je vous dis que le gouvernement
n'a pas nécessairement la capacité, par les temps qui courent, de
financer au même titre que vous voudriez que nous financions ces
organismes-là. Oui, il est vrai que nous reconnaissons le mérite
et le travail exceptionnel d'un certain nombre, ou enfin de l'ensemble des
radios communautaires. Le rôle essentiel qu'elles jouent, par exemple
celles de la région de Montréal, auprès des
communautés culturelles pour refléter réellement cette
réalité multiethnique qu'est la société
québécoise. Les communautés culturelles
représentent 14 % de la société québécoise.
C'est donc un volet extrêmement important. Et, à
l'intérieur de la grille d'analyse, nous primons, nous primons les
radios communautaires qui font de la production destinée aux
communautés culturelles. Et, dans ce sens-là, comme vous l'avez
mentionné, je crois que c'est assez original comme formule.
Plus tard, dans d'autres régions, nous mettons l'accent sur la
nécessité d'avoir... Et nous le faisons également pour les
autochtones puisque, dans les budgets, vous avez probablement pu le percevoir,
c'est un premier service à bon nombre de Québécois qui
sont dans des régions éloignées et qui méritent,
justement, que nous puissions leur fournir ce service-là.
Aussi curieux que ça puisse paraître et même
ça peut peut-être vous déplaire que je vous le dise, mais
cette association est tout à fait consentante à ce que nous
procédions ainsi. D'ailleurs, c'est elle qui nous a proposé de
trouver des méthodes et des mécanismes d'autofinancement. C'est
donc dire que non seulement le gouvernement a réussi à passer son
message de sobriété dans les dépenses publiques, mais
également que la majeure partie des intervenants sont aussi d'accord
avec cette façon de faire puisqu'ils ne veulent pas que les
générations à venir soient hypothéquées. Et
je crois qu'il y a moyen d'arrimer les objectifs avec les instruments qui sont
mis à notre disposition, dans le but, précisément, de
soutenir et de conserver ce qui est bon. Ce n'est pas la disparition que nous
annonçons, c'est une façon de procéder et d'essayer de
trouver de nouvelles façons de financer. Alors, loin de nous
l'idée de vouloir tuer une initiative - je ne devrais même pas
employer le terme «tuer» - de réduire ou d'anéantir
cette chose-là. Au contraire, nous la supportons et nous la supportons
à raison de 1 150 000 $ par année.
M. Bourdon: M. le Président, il y a une question sur
laquelle je reviens mais...
M. Cannon: Oui, je m'excuse, monsieur... Oui, O.K. C'est
ça.
M. Bourdon: ...j'ai cru comprendre que M. Brulotte n'avait
peut-être pas le chiffre.
M. Cannon: Je l'ai.
M. Bourdon: O.K.
M. Cannon: À l'Association, c'est 65 000 $, pour
l'année 1991-1992.
M. Bourdon: Et l'année d'avant, ça avait
été combien?
M. Cannon: Je présume que c'est la même chose.
M. Bourdon: O.K. Alors, ça fait le tour du sujet, M. le
Président.
Le Président (M. Doyon): Très bien, M. le
député.
M. Messier: M. le Président.
Le Président (M. Doyon): Oui, M. le député
de Saint-Hyacinthe.
Fonds des moyens de communication, service de
traduction
M. Messier: Sur le Fonds des moyens de communication, au niveau
de l'activité traduction...
M. Cannon: Oui.
M. Messier: ...qui est peut-être une source de fonds pour
le Fonds des moyens de communication... C'est ça? O.K. Je vois aux pages
136, 137 et suivantes: Contrat global pour effectuer différents travaux
de traduction.
M. Cannon: Campeau-Bélanger. M. Messier: C'est
ça? M. Cannon: C'est ça.
M. Messier: Pourquoi le Fonds ne l'a pas fait?
M. Cannon: Comment?
Une voix: On l'a donné en sous-contrat.
M. Cannon: On l'a donné en sous-contrat parce que...
M. Messier: Vous l'avez donné à sous-contrat? Il y
avait trop de travail à faire, vous l'avez donné à
sous-contrat? O.K. C'est les seuls cas, sinon c'est le Fonds... Pas le Fonds,
mais c'est la Direction de la traduction qui fait l'ensemble des traductions de
l'ensemble des ministères et des organismes gouvernementaux.
M. Cannon: C'est à l'intérieur du Fonds. Et on
m'indique qu'à ce moment précis là je crois que tous les
traducteurs du Québec ont été engagés.
M. Messier: Parfait. Des retombées positives. Parfait.
Merci.
Sur un autre sujet, toujours au niveau de la traduction, la
publicité, et tout ça, est-ce que c'est l'ensemble des
ministères et organismes gouvernementaux qui font affaire avec le Fonds
des moyens de communication pour émettre comme la traduction? Je sais
que, moi-même, j'ai déjà fait affaire avec le Fonds pour
une lettre en allemand que j'ai fait traduire en français. Mais est-ce
qu'il y a de la publicité de faite pour l'ensemble des ministères
et organismes? C'est une obligation ou c'est juste un voeu pieux de dire:
Faites donc affaire avec le Fonds?
M. Cannon: Je vais peut-être faire un commentaire au
début et je vais demander à M. Brulotte de compléter. Le
Fonds des moyens de communication, c'est un service gouvernemental qui n'a pas
peur de se frotter à l'entreprise privée. C'est un service qui
est disponible pour l'ensemble des ministères et qui, quant à
moi, fonctionne très bien. Il s'autofinance à raison de quoi? 86
%ou88 %...
Une voix: 86,4 %.
M. Cannon: ...de ses activités et, à cet
égard-là, pourrait en faire davantage s'il y avait obligation
pour, d'abord et avant tout, non pas aller fournir le contrat, mais, au moins,
s'assurer que le Fonds des moyens de communication puisse concurrencer. Je vais
laisser à M. Brulotte le soin de terminer la réponse puisqu'il
est plus familier avec ce que le Fonds fait depuis des années. Il a,
heureusement, l'expérience de quelques années derrière la
cravate pour ça.
Le Président (M. Doyon): M. Brulotte. (18 h 20)
M. Brulotte: Raynald Brulotte, directeur général de
l'administration. Oui, effectivement, vous savez, M. le député,
que le Fonds des moyens de communication a été créé
au cours de l'exercice, c'est-à-dire pour l'exercice 1990-1991. Donc, on
peut dire qu'à la fin de 1991-1992 c'est un Fonds qui n'a quand
même que deux années d'existence. Je pense qu'il faut se
réjouir du fait que ce fonds-là puisse, aujourd'hui, après
même pas deux années d'existence, dans un marché, si on
peut s'exprimer ainsi, qui est plutôt volatile, atteindre jusqu'à
86 % d'autofinancement. C'est, je pense, une performance intéressante.
Mais le ministère des Communications n'entend pas s'arrêter
là et, dès l'exercice 1992-1993, entend mettre en oeuvre un
certain nombre de mesures quant à la rationalisation des dépenses
de ce fonds-là et aussi adopter, je dirais, une politique de marketing
un peu plus agressive pour la vente des services auprès de cette
clientèle qui, effectivement, n'est pas captive. C'est une
préoccupation que j'ai cru comprendre de la question du
député. La clientèle du Fonds des moyens de communication,
comme de nos autres fonds de services, d'ailleurs, au ministère des
Communications, n'est pas captive et il doit se coitailler, si je peux me
permettre, avec l'entreprise privée, pour offrir des services à
des prix compétitifs. Voilà!
M. Messier: Je vais prendre un exemple. Le ministère de
l'Éducation qui veut faire une brochure, va préparer,
peut-être, des plans et devis. Est-ce qu'il faut en faire avec vous ou,
disons, au départ, est-ce que ça peut être fait à
l'interne? L'autre question, peut-être, ma pensée: Est-ce que vous
êtes appelés à soumissionner sur des contrats au niveau des
ministères? Je veux dire, l'entreprise privée et vous, le Fonds,
êtes-vous capables de soumissionner au niveau des ministères?
M. Brulotte: Oui, ça arrive effectivement que, dans le cas
du Fonds des moyens de communication, on puisse avoir l'occasion de
déposer une offre de service. À ce moment-là, le
ministère de l'Éducation, en l'occurrence, a toute liberté
pour comparer l'offre de service du Fonds des moyens de communication avec ce
qu'il pourrait obtenir de l'entreprise privée. Mais, effectivement, il y
a un autre aspect qu'il ne faut pas oublier dans ce portrait-là, c'est
qu'il peut arriver également que le ministère en question soit
déjà doté de ressources en effectifs et en budget pour
produire en régie ce type de service là, pour fournir ce genre de
produit là. À ce moment-là, évidemment, le Fonds
des moyens de communication est hors circuit, parce que, par définition,
il va être plus cher.
M. Messier: Parce que l'autre est produit à l'interne.
M. Brulotte: Bien oui! M. Messier: Donc, fait partie...
Le Président (M. Doyon): Ça va?
M. Messier: Ça va.
Le Président (M. Doyon): M. le député de
Pointe-aux-Trembles.
Projet de loi C-62
M. Bourdon: m. le président. une question rapide.
où en est le projet de loi c-62? et est-ce que le ministre est
autorisé à se battre contre?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Cannon: J'espère que le député ne
m'impute pas la responsabilité de C-62, où elle en est.
M. Bourdon: Non, non.
M. Cannon: Elle est toujours à la même place qu'elle
était.
M. Bourdon: M. le Président, je veux juste savoir...
M. Cannon: Elle est à Ottawa, M. le député,
vous le savez.
M. Bourdon: Ça, je sais. Mais est-ce que le projet de loi
va être appelé bientôt? Et est-ce que vous avez quelques
appuis dans les autres provinces pour y faire la lutte?
M. Cannon: Comme vous le savez, M. le député, j'ai
effectué une tournée très rapide des provinces qui avaient
manifesté, tout au moins, soit une indifférence ou un rejet
complet du projet de loi. Dans le cas de la Saskatchewan, je pense que c'est
peut-être bon de se le rappeler, elle s'oppose catégoriquement
à un autre palier d'intervention. En termes d'illustration, j'ai
déjà eu l'opportunité d'employer l'illustration suivante.
C'est comme si le gouvernement fédéral, demain matin,
décidait que les tarifs d'Hydro-Québec allaient relever de sa
juridiction, ce qui serait carrément, je pense, une insulte pour
l'ensemble des Québécois. Et les gens de la Saskatchewan
considèrent cette ingérence à peu près dans des
termes semblables.
J'ai eu l'opportunité de vous indiquer, plus tôt, que la
Saskatchewan avait l'intention et a fait les démarches
nécessaires pour que soit inscrite, à toutes fins pratiques, aux
forums des premiers ministres, celui qui était à Halifax - je ne
sais où se trouve l'autre - la question des communications. Elle est
appuyée dans sa décision ou dans sa démarche par la
Colombie-Britannique, par l'Alberta et aussi, je crois, par l'Ontario, quoique
je n'ai pas cette confirmation-là. On m'a laissé présager
que ça pourrait se faire.
En Ontario, c'est l'indifférence à l'égard du
projet de loi. Il y a eu des représentations qui ont été
faites à la ministre et elle m'a indiqué qu'ils ont l'intention
d'analyser l'ensemble du dossier. Elle a, pour ces fins pratiques,
constitué un comité de travail pour la guider, l'orienter, lui
indiquer des pistes. Bref, elle s'attend à déposer une politique
des communications, je ne dirais pas prochainement, mais, enfin, ce
comité travaille actuellement sur une position pour l'Ontario dans le
débat des communications.
J'ai pris sur moi de saisir l'ensemble des députés
québécois à la Chambre des communes, d'alerter aussi les
sénateurs et les sénatrices conservateurs du parti au pouvoir, de
ce projet de loi. La plus récente communication remonte à
avant-hier, alors que mon chef de cabinet a eu l'opportunité de parler
avec un attaché politique du cabinet de M. Beatty, m'indiquant que -
comme vous le savez, le Sénat devait appeler ce projet de loi cette
semaine - non, le Sénat n'appellera pas ce projet de loi.
J'ai rencontré d'autres membres élus à Ottawa pour
leur faire part de notre position commune, la vôtre, la mienne, de
même que celle des autres provinces, et j'ai bon espoir que ce projet de
loi soit, au-delà d'être retardé, complètement remis
en question et, souhaitons-le, mis sur les tablettes et au rancart.
Peut-être comme dernier complément d'information, vous vous
rappellerez qu'il y a quelques semaines, à l'occasion d'un
témoignage public d'une association qui s'oppose à la
libéralisation des échanges trilatéraux, on a fait
état que les communications, maintenant, ou les
télécommunications étaient de nature beaucoup plus
importante, donc que le cadre de référence ou le cadre
général était différent de celui initialement
prévu. Très rapidement, ça veut dire quoi? Ça veut
dire qu'au tout début on a indiqué que nous négocierions
selon l'accord de libéralisation des échanges entre le Canada et
les États-Unis, donc qu'on toucherait les services à valeur
ajoutée. Par conséquent, en annexe, on retrouverait les sections
qui, nommément, seraient libéralisées. Après le
Dallas Composite du mois de février dernier, on vient de changer cette
orientation pour dire qu'en annexe on va retrouver les articles d'exception.
Alors, le gouvernement du Québec a indiqué très
formellement au gouvernement fédéral que non, il n'était
pas question de changer le cadre de référence, mais plutôt
de revenir à celui que nous avions auparavant, alors que nos entreprises
se sentent à l'aise de pouvoir concurrencer, et de tenir ferme cette
position-là.
Je continue de soupçonner même si on voudrait me dire qu'il
n'y a pas de coordination, que ce n'était pas le cas, que c'était
une erreur stratégique, etc., que c'est intimement lié à
la négociation trilatérale et que le coup de force est
relié directement à cette nécessité, pour le
gouvernement fédéral, d'avoir l'ensemble des pouvoirs
réglementaires pour livrer une entente ou, enfin,
présumément une entente avec les autres partenaires commerciaux
du Canada. Alors,
ça fait le tour...
M. Bourdon: Oui. M. Cannon: ...de cette
question-là. M. Bourdon: Ça dispose du sujet. Le
Président (M. Doyon): Très bien. Régie des
télécommunications
M. Bourdon: M. le Président, j'aurais une question,
également au ministre, au sujet de la Régie des
télécommunications.
M. Cannon: Oui. Le président est ici. M. Demers
arrive.
M. Bourdon: Bon. Alors, la question toute simple, c'est: la
Régie est allée en appel de la décision du juge Allard qui
statue qu'elle n'a aucune juridiction sur aucune entreprise de
téléphone au Québec. C'est suite à un jugement de
la Cour supérieure dans le cas de Téléphone
Guèvremont inc., qui est une petite entreprise qui dessert environ 5500
clients dans la région de Saint-Hyacinthe. Alors, c'est pour savoir, M.
le Président, si la Régie perd en appel, est-ce dire qu'elle perd
sa raison d'être?
M. Cannon: M. Demers, M. le Président.
Le Président (M. Doyon): Oui, M. Demers, voule2-vous vous
identifier s'il vous plaît? (18 h 30)
M. Demers (Jean-Marc): Jean-Marc Demers, président de la
Régie des télécommunications. C'est une question
importante. Alors, actuellement, comme vous dites, le Procureur
général en a appelé à la Cour d'appel et,
là, la chose se poursuit. Il y a même une requête qui est
actuellement pendante devant la Cour suprême, qui est une requête
incidente. Alors, c'est bien difficile de parler à savoir si nous
perdions. Si nous perdions, nous irions en Cour suprême.
Évidemment, ce n'est pas à moi à prendre la
décision, ce serait évidemment au Procureur général
du Québec. L'idée, là-dedans, évidemment, est de ne
pas aller et de ne pas perdre. La Régie fait...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Cannon: Mais peut-être pour vous rassurer de ce
côté-là, je pense que la volonté est très
claire, la volonté est ferme que, lorsque nous avons
décidé d'aller en appel dans ce cas-là précis,
premièrement, nous ne voulions pas perdre et, deuxièmement, s'il
le faut, nous irons jusqu'au bout dans ce dossier-là. C'est clair,
ça.
M. Bourdon: Mais. M. le ministre, vous vous rappelez sans doute
de Maurice Duplessis, que... M. Cannon: Oui.
M. Bourdon: ...comme la tour de Pise, la Cour suprême
penche toujours du même côté.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Cannon: Je ne sais pas. J'étais trop jeune, Michel,
dans ce temps-là. Mais je me rends à l'histoire.
M. Bourdon: On le lit. M. Cannon: O.K.
M. Bourdon: Alors, ça fait le tour, M. le
Président.
Le Président (M. Doyon): Très bien. Merci, M. le
président.
M. Bourdon: J'aurais, en terminant, une question brève au
ministre...
M. Cannon: Est-ce que c'est complété pour la
Régie des télécommunications?
M. Bourdon: Oui.
Une voix: Merci, M. le député.
Implantation d'un service téléphonique
d'urgence 9-1-1 au Québec
M. Bourdon: Pour ce qui est du 9-1-1. quand va-t-on faire le
nécessaire pour que ça soit accessible, pas seulement à 36
% de la population du Québec, surtout dans la région de
Montréal, mais à l'ensemble des Québécoises et des
Québécois?
Le Président (M. Doyon): M. le ministre.
M. Cannon: Alors, l'implantation d'un service
téléphonique d'urgence 9-1-1 sur l'ensemble du territoire fait
toujours partie des priorités que le ministère place en haut de
sa liste, comme je l'ai indiqué auparavant. Nous n'avons plus
aujourd'hui à convaincre qui que ce soit et quiconque de la
nécessité de mettre ce service sur pied, qui place la technologie
au service de tout. D'ailleurs, c'est sans équivoque que les
Québécois se sont exprimés à l'occasion du sondage
que vous avez cité plus tôt, et il y a un grand nombre d'entre eux
qui sont favorables à l'implantation d'un tel système. C'est dans
le respect des sensibilités des citoyens du Québec et des
attentes des municipalités que le ministère fait progresser ce
dossier. Actuellement, des scénarios et des coûts sont bien
évalués. Alors, un projet de mémoire au Conseil des
ministres
devrait être déposé dans les semaines à venir
afin de préparer l'encadrement législatif qui dort en
découler. Et j'ajouterai simplement que j'ai aussi entamé,
auprès d'un certain nombre d'intervenants, une consultation sur les
modalités d'application et cette consultation-là est maintenant
dans sa phase finale. D'ailleurs, une des raisons pour lesquelles nous avons
voulu tenir cette commission parlementaire - et, merci de votre consentement
là-dessus - c'est que ça va me permettre de continuer les
consultations, d'ici la fin du mois, auprès des autorités, soit
de la Communauté urbaine de Québec, ou de l'union
régionale de comté, ou de la Communauté urbaine de
Montréal. Alors, c'est ça.
M. Bourdon: M. le Président, à cet
égard-là, j'ai une sous-question. Est-ce qu'on est assuré
que le CRTC va permettre à Bell, entre autres, de facturer les usagers
pour ce service-là?
M. Cannon: Oui. Il n'est pas...
M. Bourdon: Ça ne fait pas problème.
M. Cannon: Dans les hypothèses de travail, non, il n'y a
pas de problème de ce côté-là.
M. Bourdon: Maintenant, Bell a déjà dit que
l'implantation du système prendrait de 12 à 24 mois. Est-ce qu'il
y a des données plus récentes sur le temps que ça
prendrait pour le mettre en vigueur?
M. Cannon: Je pense que Bell s'en tient toujours à ces
chiffres, et c'est évidemment à cause de la technologie qui est
employée. Ça dépend des équipements qui sont en
région. Je dirais, très fièrement, que probablement que,
dans le réseau de Québec-Téléphone, on peut le
faire très rapidement parce qu'ils ont des équipements
très modernes.
M. Bourdon: Mais qu'est-ce qu'on peut répondre à la
question dans le public: Quand ça va s'appliquer?
M. Cannon: Lorsque j'aurai l'opportunité de
dévoiler cette chose-là, M. le député, vous allez
sans doute être le premier à le savoir.
M. Bourdon: Je vais être invité, mais...
M. Cannon: Être invité? Ah! Vous voulez être
invité en plus? Bon, O.K.
M. Bourdon: ii y a des régions, comme l'outaouais,
sainte-foy, sherbrooke, qui implantent leur propre système 9-1-1.
comment ça va se...
M. Cannon: Dans la région de l'Outaouais, oui, le projet
est enclenché et, comme vous avez mentionné, 38 % de la
population du Québec dispose déjà de ce service 9-1-1.
Dans la région de Sainte-Foy ou dans la ville de Sainte-Foy,
malgré l'intention de la mairesse de Sainte-Foy, je crois qu'elle n'a
pas encore débuté le processus, bien qu'il n'y ait rien qui
empêche qui que ce soit d'implanter le système. L'avantage
économique, M. le député, que nous pouvons avoir en
réussissant à amener tout le monde autour de la même table,
c'est définitivement des avantages au niveau d'abord de l'achat
d'équipement, mais aussi du loyer que ça va représenter
pour l'ensemble des Québécois et des Québécoises,
sans dire que l'universalité du système va faire en sorte que le
voisin, de l'autre côté de la rue, même s'il n'appartient
pas à la ville de l'Outaouais ou à une autre ville qui ne l'a
pas. il l'aura. Je pense que, dans ce sens-là, peut-être que la
prudence exige que nous attendions les quelques temps qui restent pour faire le
tour du dossier avant que les autres municipalités s'embarquent.
M. Bourdon: M. le Président, ça fait le tour des
crédits. Si vous mettez aux voix chaque programme, j'aimerais qu'on dise
que c'est sur division, pour la raison suivante. C'est qu'on n'est pas d'accord
avec la diminution des crédits qui est proposée cette
année.
Le Président (M. Doyon): Je vais juste suspendre un
instant. Il y a un député qui est au téléphone et
je vais lui permettre de finir son appel pour que nous puissions avoir quorum
et voter immédiatement. Suspension, donc.
(Suspension de la séance à 18 h 36)
(Reprise à 18 h 37)
Le Président (M. Doyon): Alors, nous allons
procéder au...
Des voix:...
Adoption des crédits
Le Président (M. Doyon): À l'ordre, s'il vous
plaît! Est-ce que le programme 1 est adopté?
M. Bourdon: Sur division, M. le Président.
Le Président (M. Doyon): Adopté. Est-ce que le
programme 2 est adopté?
M. Bourdon: Sur division, M. le Président.
Le Président (M. Doyon): Adopté. Le programme 3
est-il adopté?
M. Bourdon: Sur division. M. le Président.
Le Président (M. Doyon): Le programme 4 est-il
adopté?
M. Bourdon: Sur division, M. le Président.
Le Président (M. Doyon): Adopté. Le programme 5
est-il adopté? Le programme...
M. Bourdon: M. le Président, pas sur division. On est
d'accord avec le programme 5.
Le Président (M. Doyon): Vous êtes d'accord avec le
programme 5. Le programme 6 est-il adopté?
M. Bourdon: Non, M. le Président, sur division.
Le Président (M. Doyon): Alors, est-ce que l'ensemble des
programmes est adopté?
M. Bourdon: Sur division.
Le Président (M. Doyon): Très bien. Ceci met fin,
pour le moment, à nos travaux. Nous suspendons nos travaux
jusqu'à 21 heures, ce soir, pour les reprendre dans la même salle.
Non, nous allons dans la salle Papineau, me dit-on.
M. Cannon: Je voudrais simplement remercier tout le monde, M. le
Président.
Le Président (M. Doyon): Très bien. (Fin de la
séance à 18 h 38)
(Vingt et une heures quatre minutes)
Le Président (M. Gobé): Veuillez prendre place. La
commission de la culture va maintenant entamer ses travaux. Mesdames et
messieurs, s'il vous plaît, les huissiers ferment les portes. À
l'ordre! Alors, les parlementaires étant présents et le quorum
étant établi, je déclare la commission ouverte. Je vous
rappellerai brièvement le mandat de notre commission, ce soir, qui est
de procéder à l'étude des crédits
budgétaires du ministère des Communications - c'a
été fait cet après-midi - et des organismes relevant du
ministre responsable de l'application de la Charte de la langue
française pour l'année financière 1992-1993 - ça va
être ce soir. Nous avons donc une heure, de 21 heures à 22 heures,
et trois heures à partir de demain matin. M. le secrétaire, les
remplacements ont été faits cet après-midi. C'est donc les
mêmes personnes. Je demanderai maintenant à M. le ministre
responsable de l'application de la Charte de la langue française de bien
vouloir faire des remarques préliminaires, s'il y a lieu.
Est-ce qu'on pourrait fermer la porte en arrière, s'il vous
plaît? Alors, M. le ministre, vous avez la parole.
M. Ryan: M. le Président...
Le Président (M. Gobé): M. le ministre.
M. Ryan: ...selon l'habitude, j'ai préparé un
message qui fait le tour du sujet.
Le Président (M. Gobé): Parlant de message, vous
vous êtes entouré de personnes.
M. Ryan: Pardon?
Le Président (M. Gobé): Est-ce que vous pourriez
présenter, pour les membres de la commission, les personnes qui vous
entourent?
M. Ryan: oui. je suis entouré... je vais commencer
à ma gauche, mme la présidente de la commission de protection de
la langue française, mme de fougerolles.
Le Président (M. Gobé): Bonjour, madame.
M. Ryan: À droite, M. Jean-Claude Rondeau,
président-directeur général de l'Office de la langue
française; à la droite de M. Rondeau, M. Pierre-Etienne Laporte,
président du Conseil de la langue française; juste en
arrière, M. Rémi Mayrand, président de la Commission de
topony- mie. Je voudrais présenter également le responsable du
Secrétariat à la politique linguistique, M. Guy Dumas.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. le ministre.
M. Ryan: Selon les usages, M. le Président, je vais donner
communication...
Le Président (M. Gobé): Vous avez un certain nombre
de temps pour faire vos remarques préliminaires et nous sommes
prêts à vous écouter maintenant.
M. Ryan: Merci. J'apprécie.
Le Président (M. Gobé): Oui, Mme la
députée.
Mme Blackburn: Est-ce qu'on établit un mode de
fonctionnement qui nous permettra de connaître un peu à l'avance
combien le ministre prendra de minutes pour son exposé?
Le Président (M. Gobé): Oui. Je pense que,
généralement...
Mme Blackburn: II va nous le dire, j'imagine.
M. Ryan: C'est à peu près entre 30 et 40
minutes.
Mme Blackburn: Ça veut dire le temps de finir la
soirée.
Le Président (M. Gobé): Je pense, Mme la
députée, que c'est à la présidence qu'il appartient
de répartir le temps.
Mme Blackburn: Je n'ai pas d'objection.
Le Président (M. Gobé): Si M. le ministre
m'indique qu'il a 40 minutes, c'est évident que vous aurez, vous aussi,
le même temps pour faire... Le temps est partagé à peu
près 50-50, traditionnellement, dans les commissions.
Mme Blackburn: M. le Président, vous n'avez pas compris
les règles du jeu. Lui, il a intérêt à parler
longtemps et, moi, à questionner souvent.
Le Président (M. Gobé): Mme la
députée, la présidence n'a pas à ne pas comprendre,
mais plutôt à appliquer les règles. Je pense que la
tradition est qu'en général c'est 50-50 entre les deux
formations politiques. Si M. le ministre responsable de l'application de la
Charte de la langue française décide ou juge opportun de prendre
40 minutes de son temps pour nous faire part de son message, je pense que nous
allons l'écouter. Par la suite, le même temps vous sera imparti,
jusqu'à épuisement total de l'enveloppe. M. le ministre. (21 h
10)
M. Holden: Et les indépendants, M. le
Président?
Le Président (M. Gobé): Soyez assuré, M. le
député de Westmount, que les droits des indépendants
seront, eux aussi, respectés. Avec le consentement des membres de cette
commission...
M. Holden: On n'a pas besoin de consentement, M. le
Président.
Le Président (M. Gobé): ...nous verrons, M. le
député...
M. Holden: On a des droits aussi.
Le Président (M. Gobé): M. le député
de Richelieu... Nous verrons à respecter vos droits et à vous
donner les droits de parole qui seront nécessaires à l'expression
de vos opinions et de vos idées. M. le ministre responsable de
l'application de la Charte de la langue française, vous avez maintenant
la parole.
Remarques préliminaires M. Claude Ryan
M. Ryan: Merci, M. le Président. Alors, l'année
1991-1992 fut relativement paisible sur le plan linguistique. La publication,
au début de l'année, de la première édition
annuelle des indicateurs de la situation linguistique au Québec permit
d'entrevoir d'une manière plus sereine les tendances récentes et
les perspectives d'avenir de la situation linguistique. Les données
réunies dans les indicateurs démontraient clairement:
premièrement, une nette consolidation de la position relative des
francophones dans la population québécoise, et ce, tant sous
l'angle de la langue maternelle que de la langue d'usage; deuxièmement,
une progression significative du français comme langue connue et
parlée par les citoyens de langue anglaise et les citoyens allophones;
troisièmement, un net renforcement des inscriptions dans les
écoles primaires et secondaires de langue française;
quatrièmement, une préférence croissante des
étudiants allophones de niveaux collégial et universitaire pour
des établissements francophones, cinquièmement, une nette
montée des francophones dans la propriété des entreprises
et dans les postes de commande au sein des entreprises; sixièmement, une
augmentation significative de la part des revenus de travail obtenue par les
francophones; septièmement, une augmentation de la proportion des noms
de lieux en langue française sur le territoire québécois
et, huitièmement, un net accroissement de la place du français
dans les entreprises, principalement attribuable aux programmes mis en oeuvre
par l'Office de la langue française.
D'autres données également contenues dans les indicateurs
interdisaient, certes, toute complaisance. C'était le cas, notamment,
des statistiques relatives au déclin de la fécondité chez
les francophones et à la faiblesse relative du pouvoir
intégrateur de la communauté francophone à l'endroit des
immigrants. Tout compte fait, le tableau était néanmoins
très encourageant. Il invitait surtout à poursuivre, dans un
esprit de continuité, le travail patient mais essentiel
d'édification entrepris depuis quelques années.
De nouveau, en 1991-1992, l'action du gouvernement en matière
linguistique s'est surtout déployée à travers les
organismes institués à cette fin par le législateur, soit
l'Office de la langue française, la Commission de protection de la
langue française, la Commission de toponymie et le Conseil de la langue
française. Assistés et soutenus par le Secrétariat
à la politique linguistique, ces organismes ont accompli, en 1991-1992,
un excellent travail. Chacun a soumis pour 1992-1993 des perspectives d'action
qui s'inscrivent sous le signe de la continuité. Nous verrons
brièvement, pour chaque organisme, les faits saillants de la
dernière année et les principaux objectifs entrevus pour
1992-1993.
Parmi les organismes créés en vertu de la Charte, l'Office
de la langue française est celui qui se voit attribuer la part la plus
importante des crédits annuels. Les crédits accordés au
titre de la Charte sont de 28 460 000 $ pour 1992-1993, soit une augmentation
de 5,5 % par rapport aux dépenses probables de 1991-1992. De ce montant,
une somme de 19 503 000 $, soit 68,5 % du budget total, est
réservée à l'Office. Ces chiffres confirment l'importance
que le gouvernement attache au rôle majeur de maître d'oeuvre de la
politique linguistique que s'est vu confier l'Office. Selon la Charte, l'Office
a été institué «pour définir et conduire la
politique québécoise en matière de recherche linguistique
et de terminologie et pour veiller à ce que le français devienne
le plus tôt possible la langue des communications, du travail, du
commerce et des affaires dans l'administration et les entreprises.» Ce
mandat confère à l'Office, dans la famille des organismes
gouvernementaux à vocation linguistique, une prééminence
incontestée au plan de l'action. L'action de l'Office s'exerce
principalement autour de deux objectifs majeurs, soit la francisation des
entreprises et des milieux de travail et la promotion d'usages terminologiques
conformes aux meilleures normes en la matière.
Au plan de la francisation des entreprises, l'action de l'Office se
déploie à l'aide de divers programmes dont certains remontent aux
débuts de l'Office et dont d'autres sont plus récents. Les
programmes les plus connus de l'Office ont trait à la francisation des
entreprises. Suivant la Charte, toutes les entreprises employant 50 personnes
ou plus doivent normalement posséder un certificat de l'Office attestant
qu'elles appliquent un programme de francisation approuvé par celui-ci
ou que le français y possède le statut que les programmes de
francisation ont pour objet d'assurer. À défaut d'un tel
certificat, l'entreprise doit se doter d'un programme de francisation
également soumis à l'approbation de l'Office.
Au cours de l'année 1991-1992, l'Office a délivré
253 certificats de francisation, soit 9 de plus que l'année
précédente. Au 31 mars 1992, sur 4276 entreprises employant plus
de 50 personnes, 3237, soit 75 %, étaient munies d'un certificat de
francisation, contre 73,5 % l'année précédente. Le taux de
certification est plus élevé dans les petites et moyennes
entreprises comptant entre 50 et 99 employés, taux de 82.3 %, que dans
les entreprises comptant plus de 100 employés où le taux de
certification est de 66.4 %. en outre, le taux de certification est très
élevé dans certains secteurs, notamment les assurances, le
bâtiment et les travaux publics, l'industrie du bois, les services
personnels, l'ameublement et la bonneterie, et plus faible dans d'autres
secteurs, notamment le matériel électrique, le matériel et
les équipements de transport, les produits métalliques, les
produits en matière plastique, les produits chimiques, l'habillement, la
transformation des métaux. à la lumière de ces
données, on comprendra facilement l'attention que l'office entend
apporter au cours de la prochaine année aux secteurs où la
certification bat de l'aile. une importance spéciale sera
accordée au secteur du matériel électrique et à
celui de l'aéronautique.
Au 31 mars 1992, 623 entreprises avaient en cours d'application un
programme de francisation visant à les qualifier en vue du certificat.
Grâce à des instruments de mesure mis au point ces
dernières années, l'Office peut désormais évaluer
le rythme de progression de ces programmes. Même si le taux d'avancement
des programmes a été relativement élevé au cours de
la dernière année, 80,6 % dans les grandes entreprises et 83,6 %
dans les petites et moyennes entreprises, l'Office vise à faire
augmenter ce rythme de 5 % à 10 % dans les secteurs prioritaires au
cours de la prochaine année.
Jusqu'en 1988, l'Office décernait des certificats de francisation
aux entreprises mais n'était guère équipé pour
assurer le suivi de l'action. Depuis 1988, un programme de reprise de contact
avec les entreprises munies d'un certificat de francisation a été
institué. Dans le cadre de ce programme, plus de 400 rencontres ont eu
lieu au cours de la dernière année avec des entreprises. Ces
rencontres ont permis d'établir que, de manière
générale, la situation du français s'est maintenue, voire
souvent améliorée dans les entreprises visitées. Les
visiteurs de l'Office ont toutefois constaté que, dans un certain nombre
d'entreprises, il y a eu relâchement au chapitre de l'informatique et du
fonctionnement des comités de francisation.
Depuis le début du programme, environ 80 % des 1182 entreprises
certifiées comptant plus de 100 employés ont été
visitées; environ 40 % des 2055 entreprises comptant entre 50 et 99
personnes ont également été rencontrées. L'Office
compte prendre contact avec quelque 500 entreprises additionnelles en
1992-1993. La priorité sera accordée aux entreprises oeuvrant
dans les secteurs où la francisation s'avère la plus ardue et aux
entreprises dont le certificat fut octroyé il y a plus de trois ans.
Dans la même veine, un programme de visites a été
conçu à l'intention des quelque 18 500 entreprises employant de
10 à 49 personnes que l'on trouve au Québec. Depuis le
début du programme en 1989, plus de 2200 entreprises de cette
catégorie ont été visitées. L'Office compte que
plus de 700 entreprises additionnelles seront rencontrées en 1992-1993.
Les visites des représentants de l'Office ont permis d'apporter des
améliorations dans les raisons sociales, l'affichage, les
systèmes informatiques, etc. La réaction des entreprises
visitées a été très généralement
favorable. À l'intention des entreprises employant moins de 50
personnes, il convient de rappeler que, si elles ne sont pas tenues de
requérir le certificat de francisation, elles doivent néanmoins
observer les exigences de la Charte concernant la langue du commerce, la langue
des affaires et la langue du travail. En matière de francisation des
organismes de l'administration, 113 certificats de conformité ont
été émis; en conséquence, 3635 des 3766 organismes
que compte l'administration publique sont désormais certifiés,
soit un pourcentage de 96,5 %. (21 h 20)
Au chapitre de la francisation des entreprises et des milieux de
travail, mentionnons, parmi les autres initiatives de l'Office: le Programme de
soutien financier à la promotion du français dans les
entreprises, qui a de nouveau produit des résultats intéressants
l'an dernier et qui sera reconduit en 1992-1993; le Programme de soutien
à l'action des centrales syndicales en matière linguistique,
lequel a été reconduit pour l'année 1992-1993, et diverses
rencontres et démarches visant à promouvoir des initiatives de
francisation, tantôt à l'échelle d'un secteur
spécialisé de l'économie, tantôt à
l'échelle d'une région.
Conformément au mandat que lui a confié le
législateur, l'Office assume également, depuis sa fondation, un
rôle de leadership majeur au plan
de la terminologie. L'Office s'est doté d'une banque de
terminologie dont l'objet est de centraliser et de diffuser la terminologie
nécessaire à la francisation de l'ensemble des secteurs
d'activité au Québec. Ce système d'information prend la
forme d'un vaste fichier informatisé de termes français et
anglais, lequel compte plus de 2 000 000 de termes et plus de 45 000
références à des ouvrages technologiques. La banque est
utilisée par 609 abonnés provenant de l'administration publique,
des cabinets privés de traduction, de l'entreprise privée et des
établissements d'enseignement. L'Office a enregistré une
augmentation importante des demandes d'assistance en 1991-1992. Il
prévoit une hausse sensible du nombre d'abonnés en 1992-1993. En
1991-1992, la banque de terminologie s'est enrichie de 10 000 nouvelles fiches
linguistiques et terminologiques et de 2100 nouvelles fiches documentaires. En
outre, 45 000 fiches terminologiques existantes ont été mises
à jour. De nouveaux enrichissements sont prévus dans plus de 30
domaines différents en 1992-1993.
En guise de soutien au travail de francisation dans les entreprises,
l'Office offre des services de production d'instruments d'implantation
terminologique dans les divers secteurs de l'activité économique.
En 1991-1992, 19 jeux d'outils d'implantation ont été
réalisés dans les secteurs suivants: mécanisme des
fluides, organes d'assemblage, robinetterie industrielle, plastique, textile,
fruiterie, légumes et français administratif. Des manuscrits
embrassant 16 autres secteurs ont été déposés pour
publication. Au cours du présent exercice, de nouveaux outils
d'implantation terminologique seront préparés dans les domaines
suivants: industrie du plastique, mécanique des fluides,
véhicules du transport routier, chariot élévateur, outils
d'assemblage, mécatroni-que automobile. En plus, 12 nouveaux projets de
lexiques, vocabulaires ou guides seront mis en chantier dans les secteurs de la
sécurité informatique, de la micro-informatique, du dessin
assisté par ordinateur, du génie mécanique, des pompes et
notions essentielles, des convoyeurs, des engins de levage, de la
réfrigération, des conventions collectives et du français
au bureau. L'Office offre enfin aux entreprises, aux organes de
l'administration publique et aux milieux intéressés un service de
consultations linguistiques et terminologiques auquel sont affectés en
permanence une quinzaine de terminologues. Au cours de la dernière
année, ce service a donné lieu à quelque 103 000
consultations, auxquelles sont venues s'ajouter quelque 100 000 consultations
additionnelles directement adressées au service
téléphonique et d'information entièrement
informatisé, accessible 24 heures par jour, qui a été
installé à Montréal, d'abord, en 1991, implanté
ensuite à Québec en mars 1992 et qui sera rendu disponible dans
toutes les régions à compter de la présente
année.
Parmi les autres sujets qui relèvent de la compétence de
l'Office, on ne saurait omettre ceux qui se rattachent à l'article 113f
de la Charte. Cet article permet à l'Office de reconnaître
certains organismes publics et parapublics, dans les secteurs de la
santé, de l'éducation et des affaires municipales, dont les
services sont offerts à une clientèle parlant majoritairement une
langue autre que le français. Sans conférer à ces
organismes un statut officiellement bilingue, la reconnaissance prévue
à l'article 113f leur permet de se doter d'une dénomination
bilingue, d'afficher à la fois en français et dans une autre
langue, sujet à la prédominance de l'affichage en
français, et d'utiliser à la fois le français et une autre
langue dans leurs communications internes et dans leurs communications avec
d'autres organismes jouissant du même statut d'exception. Ces organismes
doivent, en retour de cette reconnaissance, mettre au point un programme
garantissant la disponibilité de leurs services dans la langue
officielle. Ce programme est sujet à l'approbation de l'Office. Au 31
mars 1992, 228 organismes détenaient une reconnaissance de l'Office en
vertu de l'article 113f. Parmi ces organismes, on dénombrait 108
municipalités, 90 organismes du secteur de la santé et des
affaires sociales et 30 organismes scolaires. À la même date, 91 %
de ces organismes avaient soumis un plan de services dans la langue officielle
approuvé par l'Office. Deux organismes de l'administration ont
été reconnus par l'Office en vertu de l'article 113f en
1991-1992. Il s'agit de l'école Saint-Victor de la commission scolaire
Les Écores et du CLSC Côte-des-Neiges.
La Commission de protection de la langue française.
Instituée pour traiter des questions se rapportant au défaut de
respect de la Charte, la Commission de protection de la langue française
s'est surtout fait connaître par les dossiers dont elle a
été saisie au cours des dernières années en
matière d'affichage public. De fait, ces dossiers représentent
plus des deux tiers des plaintes dont est saisie la Commission. Mais la
Commission est également saisie de plaintes concernant les droits
linguistiques fondamentaux, la langue de l'administration, la langue des
catalogues et dépliants, la langue des raisons sociales, des contrats,
des factures et reçus, etc.
Sur les 3380 demandes d'enquête reçues en 1991-1992, 590
furent jugées irrecevables, 28 furent rejetées parce qu'elles
émanaient de sources anonymes et 115 donnèrent lieu à une
préenquête. Il restait ainsi 2647 demandes d'enquête qu'on
peut qualifier de réelles, lesquelles ont donné lieu à
l'ouverture de 2475 dossiers d'enquête, 172 autres demandes se rattachant
à des dossiers déjà ouverts. Sur les 2475 dossiers ainsi
ouverts, 1607 ont été résolus et fermés pendant
l'année, c'est-à-dire les deux tiers; 868 étaient toujours
en traitement à la fin du dernier exercice budgétaire; à
ce nombre venaient s'ajouter 240 dossiers en provenance
d'années antérieures et toujours en traitement, pour un
total de 1160 dossiers actifs à la clôture de l'exercice. Au cours
de la dernière année, la Commission de protection a transmis au
Procureur général 16 dossiers portant sur des violations de la
Charte relatives à l'affichage. Il y a eu 14 poursuites pénales;
2 dossiers demeurent à l'étude. Treize sentences pénales
ont été rendues en 1991-1992, dont 12 sentences assorties
d'amende.
En matière d'affichage commercial, la Commission de protection a
effectué, au début de février 1992, un relevé de la
langue des affiches commerciales sur les artères suivantes de la
région métropolitaine: rue Sainte-Catherine ouest, boulevard
Saint-Jean - ça, c'est du côté de West Island - chemin
Chambly sur la rive sud du Saint-Laurent, avenue Sherbrooke ouest, boulevard
Taschereau, boulevard des Laurentides, avenue Monkland, rue Saint-Hubert et
avenue Jean-Talon ouest.
Ce relevé, comprenant 22 683 affiches réparties dans 3924
établissements de la région métropolitaine, a permis de
constater un taux de conformité de 96,05 % dans les affiches permanentes
et de 96,2 % dans les affiches temporaires. Un relevé semblable a
été effectué dans quatre autres secteurs urbains du
Québec, soit à Chicoutimi, parce qu'on voulait assurer la paix
d'âme de la députée de Chicoutimi...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Ryan: ...à Hull, à Trois-Rivières et
à Québec. Ce relevé de 10 401 affiches rencontrées
dans 1921 établissements a permis de constater des taux de
conformité allant de 97,3 % à Hull à 100 % à
Chicoutimi dans ces centres.
Mme Blackburn: II y en a une! Ha, ha, ha!
Une voix:...
M. Ryan: Depuis quelques années, la Commission... Par
conséquent, si vous faites des dépenses de déplacement de
ce côté-là, Mme la Présidente, on vous
réprimandera.
La Présidente (Mme Hovington): C'est ça.
M. Ryan: Depuis quelques années, la Commission de
protection met l'accent, dans son travail, sur le soutien éducatif. La
direction de la Commission insiste auprès de son personnel pour qu'il
adopte une approche constructive plutôt que rigidement légaliste.
Cette méthode a permis d'éviter, dans de nombreux cas, des
affrontements stériles et coûteux. Elle a également permis
de régler de façon civilisée des situations non conformes
à la loi.
(21 h 30)
Toujours au chapitre de l'affichage, une décision devra
être prise d'ici décembre 1993 concernant le renouvellement de la
clause de dérogation inscrite dans la loi 178 adoptée en
décembre 1988 par l'Assemblée nationale. Le gouvernement
préparera ce rendez-vous en procédant à diverses
consultations et études sur l'impact de la législation
adoptée en 1988. Le Conseil de la langue française sera
invité, au cours des prochains mois, à soumettre un avis à
ce sujet. Le gouvernement sera à l'écoute de tous les avis qu'on
voudra lui soumettre en cette matière.
La Commission de toponymie. Ainsi que le soulignait le président
de la Commission dans une allocution récente, «la nomenclature
géographique d'un pays est, en somme, un grand livre d'histoire et
d'aventures» pour celui qui veut partir à la découverte...
Les noms de lieux sont bien davantage que des points de repère sur des
cartes géographiques. Ils sont des moyens de communication, des
éléments de patrimoine qui, avec le temps, s'inscrivent au plus
profond de la mémoire collective».
Le rôle de la Commission de toponymie consiste à
inventorier les normes géographiques en usage sur le territoire du
Québec et à les officialiser. En date du 31 mars 1992, la
Commission avait inventorié et officialisé 154 713 noms de lieux,
dont 120 000 en langue française, 16 865 en langue anglaise, 8160 en
langues amérindiennes, 2492 en langue inuktitut et 7139 en d'autres
langues ou sans identification linguistique. Au cours de la dernière
année, la Commission de toponymie a officialisé 5532 noms de
lieux, dont 1558 toponymes et 3934 odonymes. Les décisions ont surtout
porté sur des noms de lacs, de ponts, de parcs municipaux,
d'équipements d'Hydro-Québec. Des dossiers municipaux importants
ont été résolus à Saint-Jérôme,
Sherbrooke, Gatineau et La Prairie.
Dans le plan d'action qu'elle a soumis pour 1992-1993, la Commission de
toponymie entend poursuivre l'examen des quelque 85 000 toponymes et des
quelque 30 000 odonymes qui n'ont pas encore été traités,
tandis que des centaines de milliers de lieux restent innomés. La
Commission sera appelée à étudier de nombreux dossiers
concernant les voies de communication, HydroQuébec, des immeubles
classés comme biens culturels, des ponts, des lacs, etc. Elle sera
également appelée à identifier des lieux dépourvus
de nom et à constituer à cette fin une banque de noms. Les noms
de voies municipales et de lieux dans les pourvoiries seront l'objet d'une
attention particulière. La Commission de toponymie entend
également poursuivre, en 1992-1993, son projet de publication d'un
dictionnaire illustré des noms de lieux du Québec. Ce projet est
très avancé, la presque totalité des quelque 6000
rubriques que contiendra le dictionnaire étant maintenant
complétée. La publication du dictionnaire sera assurée par
Les Publications du Québec. Elle est souhaitée pour juin
1993.
Le Conseil de la langue française a livré,
en 1991-1992, un avis important sur la place du français dans
l'activité scientifique et technique, lequel a eu le mérite de
présenter, dans une perspective réaliste, les données
relatives à ce dossier. Il a aussi livré deux avis sur des
projets de règlement de l'Office traitant de la langue du commerce et
des affaires et de la francisation des entreprises. Nonobstant la pertinence de
ces deux derniers avis, lesquels favorisaient l'implantation des
règlements projetés, le gouvernement a décidé de
reporter sa décision à plus tard concernant ces dossiers. Il a
été jugé que le gouvernement sera mieux en mesure d'agir
sur ces dossiers lorsque aura été prise la décision
attendue en 1993 concernant l'avenir de la clause dérogatoire inscrite
dans la loi 178.
Au cours de la prochaine année, plusieurs travaux de recherche
entrepris sous la responsabilité du Conseil de la langue
française devraient donner lieu à des publications. La liste des
projets en cours de réalisation compte des projets sur les comportements
linguistiques des immigrants, sur les jeunes anglophones et le fait
français, sur le français langue de travail, sur la
mobilité linguistique au Québec, sur l'aspect linguistique de la
mondialisation des échanges économiques, sur l'usage du
français dans l'informatique.
Le Conseil s'est en outre entouré de deux comités
chargés de mandats spéciaux en vue du présent exercice. Un
premier comité se penchera sur le phénomène de
l'immigration examiné dans ses implications pour l'avenir culturel et
linguistique du Québec. Un second comité étudiera la
politique et les responsabilités du Québec à l'endroit des
communautés francophones et aca-diennes du Canada. Ce dernier
comité aura pour mandat: a) d'étudier les liens que le
Québec a entretenus et entretient avec la francophonie des autres
provinces et territoires canadiens; b) d'étudier l'impact des
initiatives québécoises sur la vitalité du
français; c) de proposer des actions à mettre en oeuvre pour
promouvoir la vitalité du français au Québec et dans les
communautés francophones.
En plus de l'avis que je compte demander au Conseil sur l'avenir de la
clause dérogatoire contenue dans la loi 178, j'ai indiqué au
Conseil qu'il m'intéresserait de recevoir un avis sur l'apprentissage du
français langue seconde au Québec et, de manière plus
large, sur l'apport du Québec au progrès des connaissances en
matière d'apprentissage des langues secondes.
Le Secrétariat à la politique linguistique.
Créé pour seconder le ministre dans son action auprès des
organismes chargés de l'application de la Charte, le Secrétariat
à la politique linguistique s'inscrit nettement dans un rôle de
soutien et de coordination auprès des organismes. Il assure avec
souplesse et doigté la liaison entre les organismes et le ministre,
d'une part, et entre les organismes et l'administration gouver- nementale,
d'autre part.
Le Secrétariat dispose d'un modeste budget pour assurer la
promotion linguistique dans divers secteurs de la vie collective. Au cours de
la dernière année, les ressources du Secrétariat ont servi
à: favoriser des achats d'équipements informatiques à
l'OLF, à la Commission de toponymie et au Conseil de la langue
française; favoriser la réalisation d'événements
consacrés à la promotion du français; implanter un
programme de perfectionnement du français à l'intention des
membres des communautés culturelles oeuvrant au sein de la fonction
publique; faciliter la participation des organismes de la langue à la
réalisation de projets reliés au plan d'action gouvernemental en
matière d'immigration et d'intégration des immigrants et, enfin,
coordonner la préparation des indicateurs de la situation linguistique
au Québec.
Le ministre s'était vu attribuer, en 1989-1990, des
crédits additionnels récurrents de 10 000 000 $ pour la promotion
de la langue française. De ce budget, la plus grande partie, soit 9 000
000 $, fut transférée en permanence au ministère de
l'Éducation et au ministère de l'Enseignement supérieur et
de la Science pour la réalisation de projets jugés prioritaires
en matière de formation linguistique. Le ministre disposait ainsi, l'an
dernier, d'un solde de 1 000 000 $ à même ce budget pour fins de
promotion. Il s'est vu attribuer le même budget en 1992-1993. Au cours de
la dernière année, les projets suivants ont été
financés à l'aide de ce budget: ministère de la
Santé et des Services sociaux, Programme de perfectionnement en
français pour le personnel allophone du réseau, 150 000 $; Office
de la langue française, Programme de soutien financier à la
promotion du français dans les entreprises, 415 000 $, et divers
ministères pour des centres d'aide en français à
l'intention du personnel, 21 748 $.
En conclusion, le gouvernement a choisi d'agir en matière
linguistique suivant une méthode qui met foncièrement l'accent
sur l'action constructive et le respect des mandats confiés par le
législateur aux organismes responsables de l'application de la Charte.
Les résultats de cette méthode parlent par eux-mêmes. Nous
possédons de plus en plus une connaissance plus précise des faits
relatifs à notre situation linguistique, et ce, grâce aux
données abondantes que colligent les organismes dans l'exercice de leur
mandat. Cette connaissance plus approfondie des faits invite à une
action plus critique, plus réaliste, mieux ciblée. Elle permet
d'éviter les débats qui tournent à vide. De l'approche de
la rhétorique, nous passons graduellement à l'approche de
l'édification, c'est-à-dire à l'approche qui consiste
à construire jour après jour, à l'aide d'actions
précises et concrètes, le type de société que nous
voulons nous donner.
Dans chaque grand secteur de l'activité, qu'il s'agisse de la vie
des entreprises, de
l'administration publique, des corps municipaux et scolaires ou du
réseau des établissements de santé et de services sociaux,
nous disposons désormais d'orientations et de programmes concrets qui
entraînent jour après jour des applications pratiques
vérrfiables. (21 h 40)
À tous les paliers d'intervention, nous mettons de plus en plus
l'accent sur l'information objective et impartiale, sur l'incitation à
la participation libre et responsable de chacun à l'édification
d'un Québec où le français sera de plus en plus la langue
commune de tout le monde, mais ce, dans un climat de compréhension et
d'acceptation réciproque et suivant des aménagements qui
assureront également la reconnaissance raisonnable des droits
linguistiques minoritaires.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. le ministre. Nous
allons maintenant demander à Mme la députée de Chicoutimi,
pour une vingtaine de minutes encore de temps disponible, si elle a des
remarques préliminaires.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Gobé): En vous rappelant que nous
devrons terminer à 22 heures.
Mme Jeanne L. Blackburn
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. À la lecture
des premières pages du texte de l'allocution du ministre responsable de
l'application de la Charte de la langue française, on serait
porté à se demander qu'est-ce qu'on fait ici. Ça va bien,
il y a une consolidation, il y a une progression significative, il y a un net
renforcement des inscriptions, il y a une préférence croissante
des étudiants, une nette montée des francophones dans la
propriété des entreprises, une augmentation significative de la
part des revenus de travail chez les francophones, une augmentation de la
proportion des noms et lieux de langue française, un net accroissement
de la place du français. Bref, tout va pour le mieux dans le meilleur
des mondes. Messieurs Dames, avec le rapport Poulin, on va commencer à
questionner votre utilité.
Vous vous rappellerez que le rapport Poulin demandait de
dégraisser l'appareil d'État et un peu de libérer les
postes qui s'avéraient inutiles dans la société
québécoise.
Le Président (M. Gobé): M. le député
de Richelieu, s'il vous plaît. Madame a la parole.
Mme Blackburn: Trêve de plaisanterie, je pense que, bien
qu'il y ait eu des progrès remarquables, les choses ne sont pas aussi
nettes et aussi claires, je dois le dire en même temps pour le
déplorer.
M. le Président, l'étude des crédits
budgétaires, c'est, en fait, l'un des moments forts de notre vie de
parlementaires, car il permet aux députés, tant des deux
côtés de la Chambre, et je le dis parce que même les
députés ministériels le savent, d'apprendre des choses
intéressantes et d'être un peu plus au fait des décisions
qui sont prises par les ministres. Ça nous permet de passer en revue
l'activité des ministères. Ça permet également de
questionner les choix et priorités du gouvernement.
Ce travail, d'une importance majeure pour la vitalité de nos
institutions, demande une étude sérieuse des documents qui nous
sont fournis par les autorités ministérielles. Je dois avouer
qu'il arrive, et j'ai eu l'occasion de le constater, que cette étude
soit parfois laborieuse, surtout dû à la piètre
qualité des informations qui sont remises aux parlementaires. Dans
d'autres cas, notre tâche est facilitée parce que les documents
à notre disposition sont généralement d'une bonne
qualité. C'est le cas de ceux que nous a fait parvenir le ministre
responsable de l'application de la Charte de la langue française.
Je veux féliciter le ministre parce que, il faut le dire, et je
le dis tant pour la langue que ça a été vrai
également pour les dossiers de l'Éducation et de l'Enseignement
supérieur, les documents sont généralement bien
préparés, bien montés. Ils nous cachent peut-être
des choses, mais il faut chercher longtemps parce que,
généralement, ils sont assez limpides.
J'aimerais pouvoir en dire autant en ce qui concerne l'activité
et le leadership gouvernemental pour les dossiers de la langue, mais je ne peux
malheureusement le faire. Une bien faible augmentation des crédits pour
les organismes de la Charte de la langue française. Globalement, cette
année, les crédits alloués aux organismes de la Charte
connaissent une croissance de 2,1 %. Cette majoration des crédits ne
parvient cependant pas à couvrir l'indice des prix à la
consommation qui était de 2,4 pour la période de février
1991 à février 1992. Ça s'explique peut-être par
l'enthousiasme que met le ministre à faire état des
progrès réalisés en matière linguistique. On peut
donc conclure de cette situation que chacun des organismes se consacrera
à des activités régulières. On ne dort donc pas
espérer d'initiatives pour la prochaine année, même si ce
n'est pas le travail qui manque. Les exemples sont nombreux, en
commençant par la francisation des entreprises. Le ministre est au fait
de ma position sur ce dossier, mais je crois qu'à force de le lui
répéter il finira par se rendre à mes arguments.
D'ailleurs, certaines données que l'on retrouve dans les indicateurs de
la situation linguistique, publiés par le Conseil de la langue
française en avril 1991, viennent confirmer mes
appréhensions.
Voyons d'abord le pourcentage de l'ensemble des grandes entreprises qui
ont obtenu leur certificat. Entre 1979 et 1990, le résultat est
d'environ 64 %, après plus de 10 ans d'application de la loi. Il
me semble qu'on devrait avoir de meilleurs résultats, et ce, même
s'il s'ajoute quelques entreprises chaque année. Il faudrait, de plus,
multiplier les efforts dans le secteur manufacturier qui est largement en
retard sur les autres secteurs avec un pourcentage de certification de 53 %.
Plus sérieux encore, les entreprises dans ce secteur qui utilisent
fortement la technologie ne sont certifiées qu'à 32,4 %, les
secteurs les plus prometteurs. Quand on sait que ce sont les entreprises les
plus performantes au niveau technologique qui ont les meilleures chances de
passer à travers la crise économique actuelle, on doit
s'inquiéter de ces chiffres et se donner les moyens d'intervenir plus
fortement et plus fermement auprès d'elles.
En ce qui a trait aux entreprises de taille moyenne de 50 à 99
personnes, on doit dire que le travail est bien amorcé. Il faut
cependant ajouter que la faible croissance de la certification par rapport
à l'année dernière, soit environ 3 %, est plutôt
inquiétante parce qu'il y a risque de stagnation, voire de recul en ce
domaine. Ici encore, les fortes utilisatrices de technologie, en parlant des
entreprises, sont les moins certifiées.
Malheureusement, on ne peut se prononcer sur les entreprises de 50
employés et moins car le ministre s'entête à ne pas s'en
occuper ou à s'en occuper de façon insuffisante. Les chiffres
qu'il nous a livrés tout à l'heure nous montrent qu'une
entreprise sur six a été l'objet d'intervention de la part de
l'Office. C'est fort peu parce que ces entreprises à elles seules
représentent une partie, un pourcentage très élevé
de la population de travailleurs au Québec. Il ne se contente encore que
de mesures incitatives. Bien qu'elles puissent avoir un certain impact,
ça ne permet pas d'espérer une réelle francisation.
Rappelons ici que, selon des données du Conseil de la langue
française, 21 % seulement du secteur privé est touché par
les programmes de francisation, en partie parce que les entreprises de 50
employés et moins ne sont pas visées par les mesures de
francisation, par les dispositions à l'intérieur de la loi. Ce
choix a des effets importants sur la situation réelle du français
au travail. C'est d'ailleurs ce que l'on constate lorsqu'on consulte le rapport
du Conseil de la langue française sur le français langue de
travail. Parmi les données rapportées, plusieurs méritent
d'être une fois de plus répétées au ministre. Entre
1979 et 1989, le pourcentage des francophones qui travaillent
généralement en français dans la région de
Montréal - on parle ici des entreprises privées - est
demeuré le même; 62 % en 1979, 63 % en 1989. On a une croissance
de 1 %.
En ce qui concerne les communications avec un supérieur
anglophone, en 1979 ce sont 57 % des travailleurs qui les faisaient
fréquemment en anglais et, en 1989, ils étaient 59 %. Là,
on voit qu'il y a un recul. De plus, il faut rappeler que l'usage du
français diminue avec la profession-nalisation des emplois. Alors que 66
% des ouvriers travaillent généralement en français, le
pourcentage chute à 37 % quand il s'agit des professionnels et à
36 % quand il s'agit des administrateurs. On remarque, à regret, que la
réussite professionnelle au Québec, pour deux professionnels sur
trois, passe par l'utilisation de l'anglais.
Comme on le constate donc, le français au travail n'est pas
encore une réalité pour une part importante des
Québécois et des Québécoises. Les crédits
accordés à l'Office de la langue française ne nous
permettent pas d'espérer une nette amélioration. Le ministre
devra nous convaincre que les choix budgétaires sont, à cer
égard, justifiés. Pour le moment, nous sommes sceptiques et nous
ne nous contenterons pas de quelques statistiques. Il faudra démontrer
clairement qu'il y a une progression telle que le signale le ministre dans son
texte, ce qui n'est manifestement pas le cas si l'on tient compte des
données disponibles, particulièrement, je le rappelle, dans les
entreprises privées. (21 h 50) le cas de rosemère. nous ne
saurions passer à travers les crédits alloués à
l'application de la charte de la langue française sans discuter du
dossier chaud d'actualité qu'est le cas de rosemère. bien que le
ministre ait déjà déclaré que ce cas soulève
l'importante question des critères qui doivent présider au
retrait d'une reconnaissance déjà accordée en vertu de
l'article 113f de la charte de la langue française, il me semble que
nous devons aller un peu plus loin. à cet égard, j'ai bien
l'intention de m'en-quérir de l'état d'avancement de la
réflexion du ministre. devrons-nous procéder par
référendum dans toutes les municipalités? a-t-il
l'intention de tenir compte des statistiques sur la langue maternelle des
citoyens ou encore a-t-il l'intention d'utiliser les critères de la
langue d'usage? autant de questions qu'il me semble important de soulever dans
l'état actuel du débat car si, comme le suggère la
déclaration du ministre faite à la presse aujourd'hui, le retrait
du statut de ville bilingue peut reposer sur un pourcentage moins
élevé de résidents anglophones, jusqu'où est-il
prêt à aller pour maintenir le statut de ville bilingue?
rosemère, c'est 24 % d'anglophones. ira-t-il à 20 %, 10 %, 5 %?
je pense que la question se pose.
Sur cette base des droits acquis qu'invoquait le ministre aujourd'hui,
comment pourra-t-on refuser le statut de ville bilingue à toutes celles
qui en font la demande? Le ministre a certainement été saisi de
demandes qui nous sont venues de différentes municipalités,
particulièrement en Estrie et dans les villes du comté de Johnson
de Mme Juneau.
Alors, particulièrement dans ces deux comtés, celui du
député Paré et de Mme Johnson, il
y a eu plusieurs demandes. Comment le ministre-Dans le cas de
Rosemère, le jugement a été rendu il y aura bientôt
deux ans. Au moment où on examinait les crédits, à peu
près à la même date l'an passé, on attendait un
règlement de l'Office permettant de réviser le statut de la ville
de Rosemère. Vous savez, il en est de cette question comme dans toute
autre question. Lorsque les décisions traînent, elles risquent de
s'envenimer. On peut poser sérieusement deux questions à cet
égard. Comment l'Office n'a-t-il pas réussi à
procéder dans les délais qu'il s'était lui-même
donnés, c'est-à-dire l'automne dernier? Est-ce que, par hasard,
le fait que le ministre soit aussi responsable des affaires municipales, il n'y
a pas eu une invitation faite à cette municipalité de tenir un
référendum? Est-ce qu'il y aura référendum dans
toutes les municipalités? Mais, plus sérieusement et plus
fondamentalement, la déclaration du ministre cet après-midi, en
Chambre, invitant l'Office de la langue à faire preuve à la fois
de générosité et de souplesse, ce avec quoi on pourrait
être d'accord si ça était il y a quelques mois que la
décision avait été prise, mais, deux ans plus tard,
ça m'apparaît un peu long.
L'impression que ça laisse en regard de cette question,
c'est-à-dire le statut des villes bilingues qui devrait être
révisé compte tenu de la composition démo-linguistique de
ces villes, c'est que l'Office est en tutelle du ministre. Le message
était clair cet après-midi: Je leur ai dit de faire preuve de
souplesse et de générosité et, généralement,
ils entendent bien le message. À bon entendeur, salut. Si vous n'avez
pas compris, il faudrait peut-être venir me voir. Je trouve ça
plutôt inélégant et plutôt discourtois à
l'endroit d'un organisme dont le ministre a par ailleurs fait longuement
l'éloge tout à l'heure.
D'autre part, la loi 101 fait l'objet d'attaques incessantes. Les
tenants du libre choix ou du bilinguisme n'auront de cesse que cette loi soit
réduite à un symbole. Le ministre reste silencieux. Les
adversaires, parce qu'il en existe encore, du Québec distinct par sa
langue, par sa culture, par ses aspirations, distinct parce que peuple,
agiteront encore le squelette de la loi 101 pour discréditer le
Québec. Le ministre n'intervient pas souvent, même lorsque les
discours sont particulièrement... non pas disgracieux,
complètement démagogiques à certains égards. Je
trouve ça infiniment déplorable, compte tenu des
responsabilités qu'il a.
Tous les prétextes sont bons pour discréditer la loi et,
surtout, pour demander des assouplissements. On invoque aussi bien les droits
individuels que collectifs. Quand ça fait son affaire, ce sont les
droits individuels et, quand ça fait l'affaire, on invoque aussi les
droits collectifs. La Charte des droits, on invoque l'économie, parler
anglais aux touristes, comme si le français était une langue
vernaculaire parlée par quelques nostalgiques. Le français est
une langue internationale et une langue véhiculaire. Alors, quand on
invoque l'utilité ou le développement économique pour
exiger, par exemple, qu'à Montréal on affiche et on parle
anglais, curieusement, je relisais le rapport de M. Scowen, qui a
été déposé en 1986, sur la
déréglementation, qui réaffirmait que la loi 101 avait eu
peu d'effets sur la compétitivité des entreprises.
Alors, j'aimerais que le ministre responsable de la langue, responsable
de se porter à la défense de la langue et du français au
Québec puisse, à l'occasion, remettre les choses dans leur
perspective. À cet égard, j'aimerais aborder avec le ministre les
récentes déclarations du maire de Montréal sur un
éventuel assouplissement à la loi 178. Par la même
occasion, nous discuterons des propos de M. Scowen. Curieusement, entre 1986 et
1992, il me semble qu'il y a une évolution dans son discours qui a de
quoi inquiéter, d'autant qu'on sait que cette personne est pressentie
comme un futur représentant du Québec à New York. Bref,
nous nous demanderons s'il est opportun de faire de Montréal une enclave
linguistique au Québec.
Je veux enfin dire au ministre que j'aborderai également la
question de l'affichage commercial et des enquêtes de la Commission de
protection de la langue. Cette année, le nombre de plaintes est
très important, au total 3380. Pourtant, plusieurs d'entre elles, 590,
ont été jugées irrecevables. Je crois qu'il y a là
matière à réflexion. Les Québécois et les
Québécoises sont très préoccupés par le
respect de la Charte de la langue française, mais il semble plus
qu'évident qu'ils sont très mal informés quant aux
modalités de son application puisque les plaintes qu'ils font pour
s'assurer de son respect ne sont pas recevables. Et, là, il me semble
qu'il y a un manque d'information sur les critères. Il faudra, certes,
analyser de très près cette situation.
Voilà, M. le Président, en quelques mots, quelques-uns des
dossiers que j'ai l'intention d'aborder avec le ministre tout au long des
quelques heures que nous avons à notre disposition pour discuter de
l'important dossier de la langue. Je vous remercie.
Le Président (M. Gobé): Merci beaucoup, Mme la
députée de Chicoutimi. Étant donné l'heure tardive,
je vais ajourner les travaux à demain matin, en vous rappelant que,
demain, M. le député de Westmount, vous aurez droit, comme tout
membre de cette commission, à des remarques n'excédant pas 20
minutes dans votre cas, ainsi que les autres membres de la commission, vous
aurez droit aussi à 20 minutes chacun de remarques préliminaires,
si vous le jugez opportun et utile.
Ceci étant dit, je tiens à remercier les membres de cette
commission, ainsi que les gens qui accompagnent M. le ministre en
arrière,
pour leur présence ce soir. Je vais donc ajourner les travaux
à demain matin, 9 h 30, en cette salle. La commission est maintenant
ajournée.
(Fin de la séance à 21 h 58)