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(Dix heures quinze minutes)
Le Président (M. Doyon): La commission du budget et de
l'administration est réunie pour compléter l'étude des
crédits budgétaires du ministère du Revenu pour
l'année financière 1993-1994.
Je souhaite la bienvenue à M. le ministre, ainsi qu'aux gens qui
l'accompagnent, de même qu'à tous les collègues de
l'Assemblée nationale.
Mme la secrétaire, pouvez-vous nous indiquer s'il y a des
remplacements?
La Secrétaire: Oui, il y a un remplacement. M. Audet
(Beauce-Nord) est remplacé par M. Doyon (Louis-Hébert).
Organisation des travaux
Le Président (M. Doyon): Très bien, merci
beaucoup.
Alors, j'informe cette commission que, suite à un consentement,
une entente qu'il y a entre les parties, nous continuerons nos travaux
étant donné qu'il est déjà 10 h 15
jusqu'à 13 h 15 pour donner le temps, les 3 heures prévues et sur
lesquelles on s'était entendus.
J'indique aussi que, les remarques préliminaires ayant
été faites, je demande aux autres membres de la commission s'il y
a d'autres remarques préliminaires à faire; je constate qu'il n'y
en a pas.
Je suis aussi informé que cette commission va étudier les
crédits non pas programme par programme, même si nous allons
commencer avec un programme c'est ce que j'ai compris mais avec
des questions qui, parfois, pourront déborder d'autres programmes. Donc,
10 minutes avant la fin de nos travaux, le président je doute que
ce soit moi verra à demander aux membres de la commission s'ils
adoptent les 3 programmes qui sont étudiés pendant les 3 heures
que nous allons passer ensemble.
Maintenant que ces remarques sont faites, et que c'est l'entente qu'il y
a, ça fait l'affaire de tout le monde? M. le député,
oui?
M. Filion: Oui.
Le Président (M. Doyon): Très bien. Je permets donc
au député de Montmorency de poser des questions sur les
crédits, en commençant par le programme 1 pour que nous puissions
savoir où nous sommes rendus, quitte à déborder, si c'est
nécessaire.
M. le député.
Discussion générale
Crédits et effectifs consacrés à
la Vérification fiscale
M. Filion: Merci, M. le Président.
Nous allons, effectivement, regarder les crédits en fonction,
d'abord, du programme 1, Administration fiscale.
Je pense qu'il y a eu, comme dans tous les ministères... Le
ministère du Revenu a également eu une missive ou les
instructions de faire en sorte de rationaliser ses dépenses. Dans toutes
ces coupures, il y a un poste qui attire particulièrement mon attention
et que j'aimerais vraiment discuter, c'est le poste de la Vérification
fiscale. Ce poste a été réduit. Il y a des coupures
prévues, pour la prochaine année, de 1 594 600 $. J'aimerais
savoir pourquoi on a coupé à la Vérification et quel est
l'objectif visé par le ministère.
On est dans une période où le marché au noir
atteint des proportions incroyables. On devrait davantage investir dans la
Vérification fiscale. Pourquoi on a réduit, ne serait-ce que de 1
594 600 $...
Le Président (M. Doyon): M. le ministre.
M. Savoie: Oui. Lors du discours d'ouverture, au moment... jeudi,
jeudi après-midi, on a eu l'occasion de souligner certains
éléments. Il faut éviter de voir, dans le budget du
ministère, une coupure nette de 1 800 000 $. Il faut voir plutôt
que ça va dans l'ensemble des opérations du ministère. Il
y a des réaménagements qui se font. En conséquence, on
peut penser que les 1 800 000 $ ou 1 600 000 $ qui sont prévus, il n'y
aura pas de réduction effective du budget de vérification. Il va
y avoir des aménagements.
Il y a, bien sûr, des améliorations qui se font d'une
façon constante au niveau des systèmes, mais, d'une façon
générale, il ne faudrait pas voir une réduction de 1 800
000 $ au niveau de la Vérification. La Vérification sera
maintenue à peu près au même niveau qu'au cours des 4
dernières années.
M. Filion: Au niveau de la Vérification, on sait que
ça se divise en différentes sections. Vous avez la cotisation
immédiate, la vérification sur place, puis les enquêtes
spéciales, grosso modo. Les effectifs humains de chacune de ces
sections, est-ce qu'ils ont été modifiés ou est-ce qu'ils
vont être modifiés à la baisse? Est-ce qu'il va y avoir
moins de personnes à la vérification immédiate? Est-ce
qu'il va y avoir moins de personnes à la vérification sur place
des entreprises et moins de personnes aux enquêtes spéciales?
Comment ça va
s'organiser au cours de la prochaine année, l'effectif humain, au
niveau de la Vérification fiscale? (10 h 20)
M. Savoie: Au niveau de votre question, il y en a une partie qui
relève de la Direction générale des opérations et
non pas de la Vérification, d'une part. D'autre part, c'est que... Comme
l'ensemble des ministères, bien sûr, on a indiqué, dans
notre discours d'ouverture, qu'on allait travailler avec les orientations
générales du gouvernement, telles que stipulées par le
Conseil du trésor, le Conseil des ministres. Mais, d'une façon
générale, il n'y aura pas de réduction substantielle au
niveau de la Vérification.
M. Filion: Au moment où on se parle, vous avez combien de
personnes à la vérification immédiate, au
ministère?
M. Savoie: On va être obligés de vérifier.
(Consultation)
M. Savoie: Quand vous parlez de vérification
immédiate...
M. Filion: Cotisation immédiate. M. Savoie:
Cotisation immédiate.
M. Filion: Lorsque les gens produisent leurs déclarations
d'impôt.
M. Savoie: Ça, c'est la DGO. C'est la Direction
générale des opérations. Il y a des effectifs totaux de
2025 personnes. Au niveau de l'observance fiscale, Direction
générale de la vérification et de l'observance fiscale, on
parle de 1177.
M. Filion: Oui, 1177. Ça, ça inclut les
enquêtes spéciales?
M. Savoie: Oui, c'est ça. Ça ne comprend pas la
TVQ, TPS.
M. Filion: Ça, c'est à part. TVQ, TPS, vous en avez
combien?
(Consultation)
M. Savoie: Au niveau de la TVQ, TPS, il faut bien comprendre,
d'abord, qu'il y a un élément qui provient du
fédéral. On parle d'au-delà de 400 personnes et il y
avait... on parle de 12 000 qui étaient... et qui sont en place,
là, suite à la modification. Donc, on parle d'à peu
près 1600 personnes sur l'ensemble.
M. Filion: Vous avez 2500 à la DGO, 1117 à la
vérification d'entreprises, là...
M. Savoie: Oui, c'est ça.
M. Filion:... et 1600 à la TVQ, TPS. C'est ça?
M. Savoie: Bien, il y a un dédoublement, là, un peu dans
votre affaire. À la DGO, c'est qu'il n'y a pas un secteur
spécifique à la TVQ, TPS, qui fait l'ensemble des
opérations, c'est-à-dire que c'est éparpillé
à travers... et il y a ensuite un noyau qui fait ces
opérations-là.
M. Filion: Puis, les personnes qui sont à la
vérification sur place, qui sont affectées aux enquêtes
spéciales, il y en a combien?
M. Savoie: Vérification sur place? M. Filion: Oui,
vérification d'entreprises. M. Savoie: Pour les? M. Filion:
Enquêtes spéciales. M. Savoie: Les enquêtes
spéciales. (Consultation)
M. Savoie: On parle, pour votre information, au niveau de
l'encadrement... Avant de permettre à M. Robert de répondre
à vos questions spécifiques en ce qui concerne le personnel au
niveau de la Vérification, dans l'encadrement, on parle de 151
personnes; soutien technique et administratif, on parle de 308; et
Vérification, 1216. Pour un total de 1675 personnes au niveau de la
Direction générale de la vérification et de l'observance
fiscale. Votre question portait sur combien de personnes font de la
vérification sur place au ministère.
M. Filion: Mais particulièrement au niveau des
enquêtes spéciales.
M. Savoie: Au niveau des enquêtes spéciales: 101
personnes.
M. Filion: Cent une? M. Savoie: Cent une.
M. Filion: Est-ce que ce nombre de personnes a augmenté au
cours des dernières années?
M. Savoie: On peut peut-être demander à M. Robert
de...
Le Président (M. Doyon): M. Robert, voulez-vous vous
identifier, pour les fins de la transcription.
M. Robert (Marcel): C'est bien. Marcel Robert, sous-ministre
adjoint à la Vérification.
Ce nombre a augmenté en 1992, lorsqu'on a fait
l'intégration des gens qui viennent de Revenu Canada,
de Douanes et Accise RCDA, Revenu Canada, Douanes et Accise.
Disons que nous en avions à peu près 65 avant, et nous en avons
101 actuellement. Ça a augmenté de 36.
M. Filion: La police du tabac, elle se situe où, dans les
effectifs du ministère?
M. Robert: Ce sont des occasionnels qui ne sont pas compris dans
nos postes permanents. Nous avons actuellement une cinquantaine de
personnes.
M. Filion: Vous avez 50 personnes?
M. Robert: Cinquante personnes occasionnelles.
M. Filion: Leur mandat se termine quand?
M. Robert: Leur mandat était... Actuellement, on a
reporté leur mandat jusqu'au 31 mai. Naturellement, c'est en
discussion.
M. Filion: En moyenne, ces personnes-là gagnent
combien?
M. Robert: Alentour de 40 000 $ par année. M. Filion:
40 000 $ en moyenne? M. Robert: 40 000 $.
M. Filion: Quels étaient les critères
d'embauché de ces personnes-là?
M. Robert: Naturellement, c'est de l'ouvrage que nous
considérions... qui est très difficile. Il faut travailler aux
frontières. Bien souvent, il faut travailler sans l'aide de la
Sûreté du Québec, parce que, quand on arrive proche des
frontières, il y a moins de monde qui travaille pour la
Sûreté du Québec qu'il n'y en a dans les grands centres.
Or, il fallait des gens qui avaient de l'expérience. On a essayé
de prendre des personnes qui avaient l'expérience de la police, et nous
avons pris des gens qui étaient retraités de la
Sûreté du Québec. Je parle ici pour les gens qui
étaient sur le bord des frontières. On avait quelques postes
administratifs dans ça, peut-être 7 ou 8. Nous, on a pris des gens
qui étaient... suivant les listes du ministère du Revenu.
M. Filion: Est-ce que vous avez une idée, de
l'intérieur du ministère, du marché au noir, au moment
où on se parle? On sait qu'au niveau du tabac vous avez répondu
qu'on était rendu, en 1993, à 327 000 000 $, mais on est
conscient, également, au moment présent, qu'il y a
également les boissons alcoolisées qui constituent un
marché au noir. Avez-vous une idée de la proportion, à peu
près, de deniers publics que l'on perd avec les boissons
alcoolisées?
M. Savoie: II faut bien comprendre qu'au niveau de l'alcool
ça relève du ministre de l'Industrie et du Commerce.
M. Filion: Je comprends très bien, sauf que le
ministère du Revenu perçoit les taxes.
M. Savoie: Oui, c'est-à-dire que... Oui, effectivement, on
perçoit les taxes, mais il faut bien comprendre également que les
volumes, les données et tout ça relèvent de l'Industrie et
du Commerce.
Taxes non perçues en raison du marché
noir
M. Filion: Oui, ça, je comprends, mais moi... De
l'intérieur du ministère, vous êtes en mesure
d'évaluer les entrées de fonds publics concernant les taxes sur
les boissons alcoolisées. Alors, ces entrées de fonds... On sait
qu'actuellement le fléau s'étend aux boissons alcoolisées
concernant le marché au noir. Ma question est face au ministère
du Revenu, qui est vraiment le ministère qui contrôle les
effectifs pour s'assurer que les taxes sont perçues.
Alors, ma question est dans le sens: À combien on estime, au
moment où on se parle, les taxes qui seront perdues à cause du
marché au noir? (10 h 30)
M. Robert: Naturellement, nous avons fait une enquête, il y
a 2 ou 3 ans, pour savoir exactement si dans certains comtés de
la province de Québec, qui sont proches des lignes américaines
le problème de boisson ou de contrôle que nous faisions,
s'il y avait des baisses de revenus de taxes qui étaient visibles plus
facilement. Même dans les régions de la périphérie
des Cantons-de-1'Est, où on dit qu'il y a plus de personnes qui passent
par là qu'ailleurs, nous n'avons pas enregistré de baisse
majeure. Or, nous avons continué nos vérifications ordinaires, et
nous sommes entrés en contact avec la Société des alcools
du Québec. Dans le moment, on travaille avec cet organisme-là
pour essayer de trouver un moyen de contrôler plus, disons, l'importation
illégale de boissons alcooliques.
Vous dire quel montant on perd, je pense que le chiffre... je ne peux
pas vous donner un chiffre précis, parce qu'on ne le sait jamais, les
montants qu'on perd dans ces situations-là.
M. Filion: Mais vous avez quand même évalué
le tabac à 327 000 000 $. Vous avez sûrement des idées au
niveau des boissons alcoolisées aussi. Si vous évaluez le tabac
à 327 000 000$... On dit que le réseau de la contrebande du tabac
est le réseau officiellement utilisé pour importer et vendre les
boissons alcoolisées en territoire québécois. Vous devez
avoir une idée également. ..
M. Robert: Tous les gens que nous avons saisis à date
on n'a pas fait beaucoup de saisies chez ceux que nous avons
saisis, à date, nous avons trouvé très rarement des
boissons alcooliques en même temps que le tabac. Il y en a eu, mais en
pourcentage, je ne crois pas
que ça vaille la peine de s'étendre là-dessus,
parce qu'on ne peut pas dire que le marché s'en vient comme ça.
C'est un départ et, bien souvent, la boisson alcoolique qui a
été saisie provenait de l'Ontario. Elle entrait par l'Ontario,
provenait de l'Ontario, et pas des lignes américaines.
Or, naturellement, on ne peut pas vous donner de chiffres précis,
mais je pense que, dans notre esprit, c'est que c'est un début
seulement. Il va falloir commencer à regarder ça, mais il n'y a
pas de commerce très florissant pour des boissons alcooliques
actuellement. Les saisies sont très rares.
M. Filion: J'aimerais essayer de comprendre la politique du
ministère. Vous êtes d'accord avec moi pour dire que, normalement,
le contrôle fiscal du marché au noir est d'abord et avant tout
exercé par les enquêtes spéciales du ministère. Ce
sont les gens spécialisés pour faire des enquêtes
approfondies, constituer la preuve, et faire en sorte qu'on émette des
cotisations aux gens qui, à toutes fins pratiques, font le commerce
illégal ou le commerce au noir dans notre économie.
J'essaie de comprendre. Comment se fait-il que le ministère n'a
pas augmenté ses effectifs de façon plus marquée, compte
tenu de l'évolution dramatique que l'on vit depuis maintenant 3 ans,
avec le marché au noir au Québec? Pourquoi le ministère
garde-t-il un effectif à 101 personnes seulement? Pourquoi on n'augmente
pas? J'essaie de comprendre pourquoi, parce que c'est quand même la
section qui devrait, à toutes fins pratiques, avoir des effectifs
beaucoup plus nombreux. Le marché est tellement florissant.
M. Savoie: Regardez, là, pour votre information, et
peut-être pour éclaircir un peu davantage, M. Roy me transmet les
données du montant de la taxe cotisée par grands groupes
d'activités économiques. Pour l'industrie des boissons, on parle,
pour la période de 1991, de juillet à décembre 1991, on
arrive à environ 59 000 000 $. Alors, pour 1992, de juillet à
décembre 1992, toujours, on arrive à 69 000 000 $ de taxes
cotisées. Alors, vous voyez qu'il n'y a pas de baisse substantielle.
Évidemment, ces chiffres-là pourraient être
révisés en tenant compte de la consommation, des hausses de
taxes, des éléments de cette nature-là pour avoir une
idée plus précise. Mais ça vous donne une indication, tout
au moins, que, pour ces 2 périodes-là, et en particulier la
dernière période, qu'il n'y a pas de baisse dramatique. C'est
sûr que ça nous préoccupe grandement. C'est sûr qu'il
y a, comme l'a mentionné M. Robert, un peu de trafic au noir, comme il y
en a toujours eu au niveau des boissons alcooliques, mais ce n'est pas la
même situation que nous vivons au niveau du tabac ou autre. Est-ce que
ça vous permet de mieux situer...
M. Filion: Ça répond à la partie du
marché au noir des boissons alcoolisées. Moi, mes questions
allaient beaucoup plus au niveau des effectifs humains du ministère pour
les enquêtes spéciales. J'essaie de comprendre pourquoi il y a une
espèce de stagnation au niveau des effectifs de la vérification,
des enquêtes spéciales, quand on devrait renforcer davantage la
présence du ministère dans l'économie. J'essaie de savoir
pourquoi.
M. Savoie: II faut comprendre également que le
ministère... Il ne faut pas seulement voir ça en termes de
personnes-ressources. Il faut voir aussi, en même temps, qu'il y a une
amélioration constante au niveau du système, du traitement. Il y
a un affinement constant avec les refontes qui ont été mises en
place, une plus grande mécanisation des procédures. La
qualité des matériaux, des systèmes avec lesquels ont
traite est améliorée. Tout ça fait en sorte qu'il y a un
rendement amélioré. Il n'y a pas de réduction importante
au niveau du personnel, nonobstant la pression à la baisse, quoiqu'on
respecte les orientations du Conseil du trésor. Le tout fait en sorte
que, finalement, le ministère exécute son mandat, et cela, sans
que les chiffres au niveau, par exemple, des ETC ou au niveau des
montants perçus puissent présenter une évidente
lacune quelconque.
M. Filion: Moi, je comprends très bien la mécanique
de l'ensemble du ministère, mais quand on veut mettre une pression pour
restreindre le marché au noir, bien il faut mettre, à mon avis,
plus de vérificateurs à l'affût de l'information. Ces
informations-là, vous ne les recevez pas chez vous, il faut que vous
alliez les chercher sur le terrain. Il faut que vous alliez faire votre preuve,
constituer votre dossier, monter votre documentation, essayer d'identifier un
réseau, essayer d'identifier comment fonctionne le scénario
d'évasion fiscale. C'est très clair, au moment où on se
parle, que l'évasion fiscale est présente plus que jamais dans
notre système économique.
M. Savoie: Oui, mais ça, là...
M. Filion: Je n'arrive pas à comprendre comment on peut
penser mettre une pression dans le système économique en
demeurant stagnant au niveau des effectifs de la vérification, des
enquêtes spéciales.
M. Savoie:. Je comprends fort bien l'orientation que vous suivez,
mais elle est en quelque sorte fausse, puisque le problème de... Il faut
définir les termes d'abord et aller ensuite... si on veut avoir un
débat raisonnable et éclairé, bien comprendre la nature du
problème.
Vous confondez, par exemple, contrebande, travail au noir. Vous mettez
tout ça sous une intervention unique du ministère du Revenu. Le
ministère du Revenu, son rôle principal, c'est d'assurer le
respect des lois fiscales. On s'entend bien là-dessus, et ça, il
faut que ce soit bien clair que c'est notre mandat et qu'on entend
l'exécuter.
Mais ceci étant dit, c'est que, d'une part, au niveau de
l'économie souterraine, il y a évidemment les
activités d'ordre illégal, qui ne relèvent pas
uniquement du ministère du Revenu, qui relèvent également,
par exemple, des forces policières, qui relèvent d'un ensemble
d'intervenants. Il y a aussi, également, des conditions sociales.
M. Filion: Mais les forces policières travaillent de
concert avec les enquêtes spéciales.
M. Savoie: Bien oui. C'est bien évident qu'il y a une
collaboration et que la collaboration est bonne, que ce soit avec la
Sûreté du Québec, la Gendarmerie royale, les Douanes, les
douaniers aux frontières, les échanges. En tout cas, je n'ai
jamais eu de rapport à l'effet contraire. À date, je pense que ce
qu'on appelle communément la «police du tabac»
exécute bien son mandat, dans les limites que nous lui avons
imposées, c'est-à-dire que... bon, bien, effectivement, des
pouvoirs restreints. Ils sont sans arme. Ils font un travail de filature et ils
exécutent ceci, jusqu'à date en tout cas, sans bavure.
Il y a une pression constante, au niveau de la contrebande du tabac, de
la part du ministère. Il y a des vérifications qui se font chez
les détaillants. Il y a une bonne collaboration aussi qu'on cherche
à obtenir de la part des autres forces policières, comme je l'ai
mentionné. Il y a des échanges qui se font d'une façon
constante avec les provinces et les États américains qui nous
entourent. Tous ces éléments-là, je pense, constituent un
effort important pour, justement, réduire le niveau de contrebande.
Fonctionnement du réseau de contrebande du
tabac avec des États américains
M. Filion: À partir des effectifs que vous avez, vous avez
quand même pu identifier le fonctionnement du réseau de la
contrebande du tabac. Est-ce que vous avez pu identifier la mécanique
exacte? Comment ça se passe? Est-ce que vous avez des noms? Est-ce que
vous manquez de preuves pour émettre des cotisations? C'est quoi qui se
passe?
M. Savoie: Est-ce qu'on manque de noms? Il y a des
réseaux... Il faut bien comprendre que le ministère du Revenu
fait partie d'une équipe, au niveau de la contrebande, avec la
Sûreté du Québec, la Gendarmerie royale et les autres
forces policières ce que j'ai eu l'occasion de mentionner
tantôt, avec les autres intervenants et c'est ce qu'on cherche
à faire. C'est de déterminer les réseaux, faire des
descentes, arrêter, saisir. Il y a également une surveillance, une
présence constante pour ceux et celles qui traversent les lignes avec du
tabac, ou qui transportent, d'une façon illégale, le tabac au
Québec. Alors, oui, ça se fait, ces
éléments-là; ça se détermine au fur et
à mesure que les enquêtes procèdent.
M. Filion: Je comprends, mais vous savez combien et à qui
on vend le tabac aux États-Unis. Vous avez cette
information-là?
M. Savoie: À qui on vend le tabac aux
États-Unis?
M. Filion: Oui.
M. Savoie: À qui on vend le tabac aux
États-Unis?
M. Filion: Vous avez sûrement cette information-là
dans vos fichiers. Vous avez sûrement fait des vérifications chez
les fabricants. Vous avez sûrement des informations.
M. Savoie: Oui, mais c'est un petit peu plus complexe que
ça, à qui on vend le tabac aux Etats-Unis. Le tabac au
Québec, évidemment, entre surtout dans le triangle
Akwesasne-Montréal-Kahnawake et la frontière américaine.
Donc, au sud de Montréal plus précisément. Alors, c'est
sûr que, dans ce cercle-là, il y a un élément
important au niveau de la contrebande, probablement le plus important au
Québec. (10 h 40)
Maintenant, aux États-Unis, lorsqu'on transporte du tabac pour
vente au Canada, ce n'est pas illégal tant que ça n'a pas
traversé la frontière. Les financiers de ces
opérations-là, les manieurs d'argent, finalement, dans ces
opérations-là peuvent être aussi bien à
l'extérieur du Québec comme aux États-Unis.
M. Filion: Mais vous connaissez le nom des entreprises qui
achètent le tabac du Québec.
M. Savoie: Les entreprises qui achètent...
M. Filion: Aux États-Unis, qui achètent le tabac du
Québec. Vous connaissez le nom des entreprises?
M. Savoie: Bien, c'est-à-dire que, oui... Les
commerçants, les fabricants, plutôt, de tabac vendent, d'une
façon régulière, à des Américains, à
des entreprises américaines de tabac, oui.
M. Filion: Alors, ces noms-là, vous les connaissez.
M. Savoie: Us sont connaissables, oui.
M. Filion: Bon! Ces gens-là... Une fois que vous avez
identifié ces acheteurs-là, est-ce qu'il y a eu des
vérifications de la part des enquêtes spéciales pour faire
un suivi de dossier...
M. Savoie: Elles sont situées où...
M. Filion: ...monter une documentation?
M. Savoie: ...ces compagnies-là?
M. Filion: Bien, c'est ça que je vous pose comme
question.
M. Savoie: Elles sont situées aux États-Unis?
M. Filion: Je comprends qu'elles sont situées aux
États-Unis, mais les enquêtes spéciales...
M. Savoie: Bon! Alors...
M. Filion: Par rapport au suivi de documentation et
d'échange d'informations, est-ce qu'il y a eu un travail fait?
M. Savoie: Voulez-vous... Oui, mais pensez-vous...
M. Filion: C'est ce que je demande.
M. Savoie: ...qu'on est capable de vérifier des compagnies
aux États-Unis?
M. Filion: La question que je pose, c'est: Est-ce qu'il y a eu un
travail fait, de concert avec les États-Unis ou le
fédéral, pour obtenir de l'information sur ces acheteurs
américains?
M. Robert: Vous avez raison, on connaît les acheteurs
américains. On les connaît parce qu'en vérifiant les
manufacturiers canadiens on est capable d'avoir l'information sur leurs ventes,
à qui ils vendent leur marchandise en grande partie. On a
également l'augmentation des exportations, ça fait qu'on sait
exactement à qui ils vendent. Une fois que la marchandise a
été vendue aux États-Unis, du moment que l'acheteur
américain paie sa taxe à l'État américain, la taxe
de consommation sur les cigarettes canadiennes dans l'État
américain, elle devient légale. Par la suite, l'acheteur
américain n'a pas à nous rendre compte à qui, lui, il vend
ses propres cigarettes aux États-Unis. Là, il les vend à
des personnes qui les rapportent au Canada.
Dans les circonstances, la seule chose qu'on a pu faire à date,
c'est de signer des ententes avec l'État de New York, l'État du
Vermont et l'État du Maine pour essayer d'avoir de l'information. Mais
ces gens-là nous disent qu'ils ne peuvent pas faire de
vérification, ils ne peuvent pas nous donner d'information lorsque la
taxe est payée aux États-Unis. Les gens ne sont pas en
contrebande, eux autres, ils sont légaux du côté
américain. Ça fait que c'est pour ça que c'est plus
difficile pour nous autres. Ce qu'on a fait à date, c'est d'essayer de
boucher les frontières, de façon à diminuer
l'approvisionnement de ceux qui vendent des cigarettes en contrebande au
Canada. C'est pour ça qu'on s'est tenu aux frontières, pour
essayer d'empêcher les cigarettes de revenir. Autrement, par les
factures... On les connaît, les compagnies, mais...
Naturellement, on est une province. On n'est pas un pays, pour
commencer, on est une province. Tout ce qu'on peut faire, c'est de traiter les
gens qui travaillent dans notre province. Dans le pays, bien, ceux qui ont des
établissements au Québec, on peut aller les vérifier, mais
on est limité quand même dans nos opérations.
Tantôt, vous parliez des enquêtes spéciales. Les
enquêtes spéciales, très rarement, initient, disons, des
découvertes du travail. Les enquêtes spéciales,
ordinairement, continuent l'ouvrage de notre vérification. Or, quand
vous disiez, tantôt, qu'on est 100 personnes pour travailler contre le
travail au noir, ce n'est pas précis, parce que tout notre monde de
vérification... Nous sommes 1200 personnes qui travaillons en
vérification. Tout le monde travaille dans les taxes, tout le monde
travaille dans les impôts, tout le monde travaille contre le travail au
noir. Les enquêtes spéciales ou la partie d'observance fiscale
continue le travail de nos hommes de vérification. À l'exception
des dénonciations que nous recevons... On reçoit à peu
près 250 dénonciations par mois; sur les 250
dénonciations, il y en a 90 % qui retournent dans nos opérations,
et il y en a 10 %, à peu près, qui restent au niveau de
l'observance fiscale. Là, ils peuvent initier leurs propres
enquêtes. Mais, en général, ce sont nos travaux de
vérification qui font travailler notre observance fiscale.
M. Filion: Si vous émettiez une cotisation à une
compagnie américaine, est-ce que vous pourriez avoir le support des
États-Unis pour aider la perception des deniers fiscaux?
M. Robert: En impôt, on a une entente avec le gouvernement
américain. À chaque fois qu'ils imposent une compagnie
américaine qui a une succursale au Canada, il y a une entente entre le
gouvernement canadien et le gouvernement américain pour l'échange
d'informations. Puis, nous autres, on a une entente avec le gouvernement
canadien. Il nous donne l'information, puis on peut aller chercher notre partie
d'impôt. au sujet des taxes, ce n'est pas pareil. sur les taxes à
la consommation, ce n'est pas... si une personne viole la taxe de vente ou la
taxe sur le tabac, l'impôt sur le tabac au québec, elle ne viole
pas nécessairement la loi aux états-unis. alors, ce n'est pas
automatique. c'est 2 lois différentes, qui s'appliquent de 2
façons différentes. alors, pour avoir le support des
américains, il faut que leur loi soit violée en même temps.
naturellement, dans 95 % des cas, ce n'est pas pas ça, parce qu'ils
paient leurs taxes aux états américains. la taxe est tellement
petite, un petit montant, qu'ils la paient tout le temps dans les etats
américains. ça fait qu'on est seuls, après, pour se
défendre comme ça, excepté pour avoir des informations. si
un camion essaie de passer à la frontière ou autrement... puis,
de temps en temps, on a de l'information du gouvernement américain pour
suivre certaines personnes de plus près.
M. Filion: Si on remplaçait la police par un impôt
en main, remboursable, au lieu d'y aller carrément avec une police qui
suit des camions, comme on le fait pour l'impôt en main, remboursable, au
titre de dividendes, au niveau des compagnies fédérales. C'est
qu'on s'assure qu'effectivement la consommation est bel et bien
exécutée en territoire américain ou en réserve
autochto-
ne. Vous ne pensez pas que ce serait plus efficace comme suivi
fiscal?
M. Robert: Au sujet d'un impôt que nous pourrions imposer,
la province de Québec, qui serait remboursable, nos conseillers
légaux nous disent que c'est anticonstitutionnel que la province de
Québec impose une taxe sur l'exportation. Cette taxe peut
être...
M. Filion: Mais... il y a déjà une entente
actuellement avec les fabricants. C'est déjà anticonstitutionnel
de percevoir directement chez les fabricants. Vous avez déjà une
entente?
M. Robert: C'est-à-dire que... Vous dites que c'est
anticonstitutionnel, mais ça n'a jamais été débattu
directement devant les tribunaux.
M. Filion: Mais en principe, ça s'applique ainsi?
M. Robert: En principe, disons que... Là, actuellement,
c'est une entente qu'on fait avec les grossistes puis, certains
manfacturiers peuvent être des grossistes pour qu'ils collectent
la taxe pour nous autres, un montant égal à la taxe, qui n'est
pas la taxe. Quand on arrive au niveau de cette taxe-là, qui serait une
taxe sur l'exportation, on nous dit que ce serait difficile de l'imposer, parce
qu'en fin de compte c'est le gouvernement fédéral qui devrait
imposer une telle taxe. Elle est imposée actuellement. Puis, aussi, il y
a le fait que les manufacturiers nous disent qu'ils vont transporter leurs
pénates aux États-Unis, puis qu'ils vont produire des cigarettes
canadiennes aux États-Unis. Dans le moment, le ministère des
Finances, qui, lui-même, est responsable de la politique fiscale, est
après étudier la situation. Il hésite dans ça, du
fait que ça peut coûter plus cher au Québec, pour
l'ensemble de ses opérations, que de ne rien faire ou d'essayer de
trouver d'autres moyens pour collecter notre taxe.
M. Filion: Est-ce qu'on pourrait... et là, je vous pose
une question. Si on arrivait à... Supposons qu'on réduisait la
taxe à un prix concurrentiel, qui permettait de sortir ce qu'on appelle
la contrebande, puis qu'ils n'aient plus d'incitatifs de profit, et qu'on
mettait un changement de mécanique fiscale, style impôt en main,
remboursable, simultanément à la procédure. Donc, à
ce moment-là, ils n'auraient pas à quitter le pays, parce que...
Bon, la contrebande n'étant plus là, ils vont pouvoir produire
chez nous, en changeant la dynamique fiscale quand même, parce que je
pense qu'on ne peut pas laisser la dynamique actuelle, qui nous crée...
qui pourrait revenir pour nous créer des problèmes.
Vous ne pensez pas qu'au niveau des enquêtes spéciales, en
changeant la dynamique fiscale, on pourrait arriver à identifier
vraiment un réseau légal de consommation ou d'achat et de vente
de cigarettes, avec une dynamique comme celle-là, parce que je ne pense
pas qu'on puisse... Il n'y a plus personne qui va être
intéressé à acheter du tabac si ce n'est pas pour
être vendu aux États-Unis ou dans les réserves autochtones.
(10 h 50)
En changeant cette dynamique, vous pourriez, par la suite, projeter des
vérifications fiscales dans les années antérieures,
non?
M. Savoie: Je pense qu'on avait déjà abordé
cette question-là, il y a quelque temps, ensemble et je ne me
rappelle plus du contexte; je me demande si ce n'était pas lors des
audiences sur «Vivre selon nos moyens» on avait clairement
expliqué, à ce moment-là, que cette solution ne pouvait
être retenue.
M. Filion: Je ne pense pas que la solution ne peut être
retenue. M. Robert vient de nous expliquer que la solution pourrait être
retenue avec le fédéral, en percevant chez le fabricant. Bon,
avec l'entente fédérale, je pense que ça peut s'organiser.
Ça peut être retenu. Je ne pense pas que ça soit
anticonstitutionnel via le fédéral.
M. Savoie: Oui, mais on vous a indiqué, à ce
moment-là, que le problème n'est pas uniquement les fabricants
canadiens, c'est-à-dire ceux du Québec et de l'Ontario. Le
problème n'existe pas uniquement à ce niveau-là, il existe
également à d'autres niveaux. C'est-à-dire qu'on
s'installe et qu'on va fabriquer aux États-Unis des cigarettes
canadiennes pour, évidemment, exportation au Québec. Il y a
actuellement une partie de la contrebande qui est fabriquée, par
exemple, en Angleterre ou dans le Sud-Est asiatique.
M. Filion: Oui, oui, mais... Je suis d'accord avec vous. Moi, je
suis d'accord sur le principe que, pour retirer la contrebande, il faut enlever
l'incitatif de profit. On peut réduire la taxe à un niveau qu'on
jugera acceptable, mais, en même temps, changer la dynamique fiscale pour
qu'on puisse identifier un réseau légal de consommation. Une fois
qu'on a identifié un réseau légal de consommation, vous
pourriez penser de projeter dans les années antérieures ce qui
s'est passé de façon illégale. si vos ventes aux
états-unis sont réduites de 85 %, du jour au lendemain, parce que
vous changez la dynamique fiscale, vous ne pensez pas que ça commence
à être un indice de vérification sérieuse, pour
penser que les achats des années antérieures étaient,
à toutes fins pratiques, que 85 % des achats étaient, à
toutes fins pratiques, des achats pratiquement en marché noir ou en
marché illégal?
M. Savoie: Ce n'est qu'une solution à court terme.
M. Filion: Non, mais moi, c'est dans l'optique de la dynamique.
Si vous pensez à changer une dynamique, vous allez pouvoir
peut-être penser à établir des cotisations pour les
années antérieures. C'est la question que je posais à M.
Robert, ce qu'il pense d'une approche comme ça sur le plan de la
vérification des enquêtes spéciales?
M. Robert: C'est sûr que si... Dans le moment, nous
recevons beaucoup de lettres de nos grossistes, qui disent qu'ils ont
baissé énormément leur chiffre d'affaires, dû
à la contrebande. Or, c'était notre indicateur, ça. Si,
par exemple, c'est moins pire, ça veut dire que notre police, nos
patrouilleurs font un bon travail, ou que l'ensemble de nos équipes,
avec la Sûreté du Québec et la GRC, font un bon
travail.
Actuellement, on ne sent pas augmenter le chiffre d'affaires de nos
grossistes. Or, s'il y avait des indicateurs, s'il y avait les modifications
aux lois, que vous proposez, et que, par la suite, on s'apercevait que les
ventes domestiques se stabilisent et augmentent, c'est sûr qu'on ne va
pas aller cotiser ces grossistes-là, parce qu'en fin de compte ce sont
des gens... on pense qu'ils marchent honnêtement avec nous autres,
excepté qu'il faudrait essayer de voir pourquoi, à certains
endroits, c'était plus grave que d'autres. Là, avec nos
vérificateurs, d'abord, et peut-être notre observance fiscale,
ensuite, nous allons pouvoir peut-être émettre des
cotisations.
C'est possible, par la suite, qu'on soit capable d'émettre
certaines cotisations, et de revenir dans le passé, parce qu'il n'y a
pas de limite. On peut revenir plusieurs années dans le passé.
Mais là, il faudrait être capable de le faire.
Il ne faut pas oublier qu'on a 1216 vérificateurs, mais ce sont
des vérificateurs. Ce ne sont pas des policiers. Naturellement, on a
quelques personnes aux frontières qui font un peu le travail des
policiers, mais ce sont des vérificateurs d'abord. Ça fait qu'il
ne faut pas non plus demander plus à nos vérificateurs que
l'ouvrage de vérificateur pour lequel ils ont été
formés. Puis, naturellement, dans l'ensemble des dossiers dont nous
discutons actuellement et que nous regardons, bien, il faut penser qu'au niveau
des taxes surtout il y a bien souvent de la contrebande qui est plutôt un
travail policier qu'un travail de vérificateur du ministère du
Revenu.
On essaie bien de faire notre possible dans ce domaine-là, mais
il faut admettre que c'est un travail délicat, puis qu'il faut
être très prudent très prudent! parce qu'en
fin de compte on a fait des règles à nos gens aux
frontières. On leur a donné des règles à l'effet
qu'ils n'ont pas d'arme. Ce sont des, disons, policiers vérificateurs.
Mais il faut continuer de cette façon-là, on pense, parce qu'en
fin de compte il ne faut pas oublier que le mandat de la vérification,
c'est de vérifier, d'abord.
M. Filion: Je suis d'accord avec vous, parce que... Il est
évident que, si on pouvait laisser planer la possiblité de retour
en arrière, suite à un changement de dynamique fiscale,
peut-être qu'on mettrait une pression aussi au niveau des contrebandiers,
parce qu'ils ne se retrouveront pas à l'abri de cotisations
éventuelles. Il est évident... et si vous parlez avec tous les
fabricants canadiensj'en ai rencontré plusieurs; j'ai
rencontré beaucoup d'intervenants depuis quelques mois tout le
monde s'entend pour dire que des ventes aux États-
Unis, on n'en fait pas. On n'en fait pas, de ventes aux
États-Unis. La consommation américaine de la cigarette
canadienne, il n'y en a pas. C'est très clair. Si vous changez votre
dynamique fiscale en forçant les gens à s'identifier pour avoir
leur remboursement de taxes, vous allez voir que, chez les fabricants,
ça va tomber à peu près à zéro, les ventes
américaines. À partir de ce moment-là, tous les noms que
vous avez recueillis depuis maintenant... J'espère que vous l'avez fait.
C'est ce que je posais comme question, tout à l'heure. Tous les noms que
vous avez recueillis depuis 1 an, 2 ans, 3 ans, de ventes du fabricant canadien
aux États-Unis, ces noms-là deviennent des achats qui ont servi
à quoi? Si, du jour au lendemain, parce que vous changez la dynamique
fiscale, il n'y en a plus, bien, moi, je pense que vous avez un indice
sérieux de croire que les ventes n'ont jamais eu lieu pour consommation
américaine et...
M. Savoie: Vous pensez qu'on pourrait dire aux Américains:
Vous allez payer le plein montant d'un paquet de cigarettes, et vous allez
appliquer, par la suite, au gouvernement provincial pour avoir votre
remboursement d'impôt, de taxes.
M. Filion: Non, M. le ministre. Vous ne suivez pas ma
démarche. Vous réduisez vos taxes. Vous changez la dynamique
fiscale. Vous réduisez vos taxes. Vous changez la dynamique fiscale.
M. Savoie: C'est bien évident que si on réduit les
taxes, la contrebande, évidemment, va être réduite en
conséquence.
M. Filion: Bon! Vous réduisez vos taxes, vous changez la
dynamique fiscale. Là, vous dites: Dorénavant, toute vente aux
États-Unis...
M. Savoie: Que...
M. Filion: Que pour les ventes aux États-Unis, ils
demandent un remboursement de la taxe pour la consommation américaine.
Mais là, vous aurez réduit vos taxes. Vous n'aurez plus
d'incitatif de contrebande sur le marché québécois.
M. Savoie: Ah, bien là, je pense que vous rêvez en
couleur. Il y a... Un paquet de cigarettes, par exemple, au Vermont, se vend
combien... 2 $, 2,25 $?
M. Filion: Oui. M. Savoie: Bon!
M. Filion: Vous avez 4,60 $ de taxes, sur un paquet, chez
nous.
M. Savoie: Bon, 4,60 $ de taxes, ça équivaut
à l'ensemble des taxes du gouvernement fédéral et du
gouvernement provincial sur un paquet de cigarettes.
M. Filion: 6,50 $, 4,60 $, ça vous donne à peu
près...
M. Savoie: C'est ça, 2 $. M. Filion: ...2 $.
M. Savoie: C'est ça. Finalement, les Américains ont
très peu de taxes sur un paquet de cigarettes.
M. Filion: Bon! Alors, ce que je suis en train de vous dire, au
fond, c'est que si les taxes... C'est la même mécanique. C'est que
la personne qui veut vendre aux États-Unis va avoir son remboursement de
taxes, sauf que... au lieu d'être 4,60 $ de remboursement, ça va
peut-être être 1 $, 1,50 $.
M. Savoie: Les Américains ne sont pas du tout
intéressés par ce processus. Il vaut beaucoup mieux, par exemple,
ouvrir une usine aux États-Unis, fabriquer des cigarettes de type
canadien et les vendre directement.
M. Filion: vous avez des statistiques internes qui vous disent
qu'il n'y a pas plus que 15 % des ventes de tabac fabriqué au canada qui
vont aux états-unis. vous n'avez pas plus que ça. c'est les
statistiques qui le prouvent, ça. alors, à partir du moment
où vous avez maintenant 50 %... je ne sais pas, moi, où c'est
rendu... vous avez un pourcentage démesuré de ventes aux
états-unis, c'est clair. alors, à partir du moment où les
15 % sont identifiés, et qu'il y a des remboursements rapides, les
gens... je ne vois pas pourquoi que les gens s'empêcheraient de faire du
profit... parce qu'ils auront un remboursement de taxes dans l'espace de 30
jours. ce n'est pas ça, le problème.
M. Savoie: Alors là, finalement, c'est que vous imposez 2
mécanismes dans votre solution. C'est d'abord une réduction des
taxes...
M. Filion: Oui.
M. Savoie: ...et, deuxièmement, le remboursement aux
Américains.
M. Filion: Oui.
M. Savoie: Ce que je peux vous dire, c'est... Tout d'abord, s'il
y avait réduction de taxes, si on prenait cette orientation-là au
point de vue social, c'est que la contrebande... On n'aurait plus besoin de la
deuxième mesure.
M. Filion: Non, mais vous allez pouvoir identifier un
réseau illégal à partir de ce moment-là.
M. Savoie: Ah, bien là, le réseau illégal,
on va être capable de l'identifier. Au niveau de la contrebande,
ça va et ça vient. Une journée, c'est là; le
lendemain, ce n'est pas là. Ça dépend de...
M. Filion: Mais vous l'avez, l'information, actuellement, de
toutes les ventes aux États-Unis. Alors, ceux qui n'achèteront
plus, vous allez être en droit d'identifier une piste de
vérification pour voir pourquoi ils avaient acheté avant. (11
heures)
M. Savoie: C'est ça, là. C'est que vous voyez les
cigarettes qui reviennent sur le marché québécois,
canadien, comme étant des cigarettes fabriquées au Canada, en
Ontario, là, au Québec et en Ontario, et qui reviennent. Ce n'est
pas le cas. C'est ce qu'on a cherché à vous expliquer à
plusieurs reprises. C'est qu'il y en a une partie, oui, bien sûr, mais il
y en a une autre partie qui ne vient même pas du Canada, des cigarettes
canadiennes qui ne sont pas fabriquées au Canada. On peut très
bien fabriquer un paquet de cigarettes canadiennes aux États-Unis sans
aucune difficulté. On peut faire la même chose en Angleterre. On
peut faire la même chose au niveau du Proche-Orient... pas du
Proche-Orient, mais de l'Orient.
M. Filion: Je comprends, mais M. Robert, tout à l'heure,
disait qu'effectivement il y avait beaucoup de ventes qui se faisaient aux
États-Unis, mais qu'on ne pouvait pas les vérifier.
M. Savoie: Pardon?
M. Filion: II y a beaucoup de ventes qui se font aux
États-Unis, mais on ne peut pas les vérifier.
M. Savoie: ii y a beaucoup de ventes aux états-unis, mais
on ne peut pas les vérifier. c'est-à-dire que les
américains qui achètent, actuellement, ne... par exemple, les
américains qui achètent, on peut avoir le «listing».
les empêcher d'acheter ou exercer des contrôles sur les achats
relève du gouvernement fédéral. la taxe, finalement, qu'il
a introduite, de 8 %, qu'ils ont dû abolir parce que les compagnies ont
tout simplement décidé que si c'était maintenu, cette
orientation-là, qu'ils déménageaient aux
états-unis. c'est aussi simple que ça. en conséquence, la
taxe à l'exportation a dû être reconsidérée.
il faut voir également que les fabricants ne sont pas seulement au
québec; il en existe au québec, bien sûr, mais il en existe
également en ontario. finalement, les américains peuvent
très bien fabriquer une cigarette canadienne. un cigarette canadienne,
ce n'est pas un tabac canadien avec une recette magique, c'est tout simplement
du tabac traité d'une façon spécifique, qui, finalement,
n'est pas trempé dans une espèce de bouillon.
M. Filion: M. le ministre, je suis bien d'accord avec vous et je
pense que c'est très vrai. La seule façon, c'est de
réduire les taxes, vous n'avez pas le choix, mais il demeure un
fait...
M. Savoie: Bon. Bien là, quand...
M. Filion: ...et c'est là qu'étaient mes
questions
de départ. Je voulais voir jusqu'où on avait l'information
des ventes aux États-Unis. On m'a répondu qu'on faisait beaucoup
de ventes aux États-Unis, et que la problématique qu'on vivait
dans le scénario de la contrebande du tabac, c'est qu'on ne pouvait pas
faire la vérification des entreprises américaines parce qu'elles
étaient en règle, aux États-Unis, et qu'elles payaient
leur taxe à la consommation.
M. Savoie: C'est ça.
M. Filion: Mais vous reconnaîtrez avec moi qu'il y a
beaucoup de ventes qui se font aux États-Unis, et de façon
démesurée. Et ça, on en est conscient.
M. Savoie: D'accord.
M. Filion: Moi, quand j'arrive avec la réflexion dont je
vous parlais tout à l'heure, c'est qu'effectivement il y a beaucoup de
ventes démesurées qui se font aux États-Unis. Si jamais on
changeait la dynamique fiscale... Bien sûr, on va réduire les
taxes, on n'a pas le choix de les réduire si on veut désinciter
la contrebande à sortir... à moins que vous constituiez une
armée, mais ça, on en reparlera plus tard. Alors, à partir
du moment où vous réduisez vos taxes, vous changez la dynamique
fiscale. Vous forcez les gens à s'identifier pour avoir le remboursement
de taxes. Là, ces gens-là qui vont s'identifier, c'est vraiment
pour des ventes aux États-Unis. Vous allez avoir une différence
importante de ventes, et là vous allez vous rendre compte, au fond, que
toutes les ventes qui ont été faites dans le passé, de
façon démesurée, aux États-Unis, et que vous n'avez
jamais pu vérifier... Par rapport aux nouvelles ventes que vous faites
maintenant, avec la nouvelle dynamique fiscale, vous allez voir un monde de
différence. C'est là que vous venez en position de cotiser les
années antérieures, pour ces gens-là dont vous aurez fait
le «listing».
M. Savoie: On va cotiser des Américains? Est-ce que c'est
ça que vous êtes en train de me dire?
M. Filion: On va cotiser les noms qu'on a...
M. Savoie: On va cotiser... Le gouvernement du Québec, le
ministère du Revenu du Québec va aller aux États-Unis, et
va dire: Vous, là, vous avez vendu des cigarettes à d'autres
Américains, peut-on présumer, hein?
M. Filion: Oui. Vous n'avez pas payé vos taxes au
Québec.
M. Savoie: Et vous n'avez pas payé vos taxes au
Québec, parce que vous saviez que ce tabac-là allait
peut-être revenir au Québec.
M. Filion: Oui.
M. Savoie: Bon. Ça va bien, tes affaires, toi!
M. Filion: Bien, je ne sais pas. Mais écoutez, le
ministère du Revenu, il doit émettre des cotisations?
M. Savoie: Bien, voyons donc! Voyons donc! C'est
élémentaire. Retournez faire votre cours de comptabilité!
Faites quelque chose!
M. Filion: Non, mais écoutez, M. le ministre, soyez
sérieux, là. Vous êtes là pour émettre des
cotisations. Est-ce qu'il y a matière à cotisation? C'est ce que
j'ai posé comme question.
M. Savoie: Bien oui, mais voir si on peut arriver et commencer
à cotiser des Américains pour des transactions faites aux
États-Unis, à partir d'un achat qui a été fait au
Canada. Voyons donc!
M. Filion: Les taxes n'ont pas été perçues
au Québec, et nous, on cotise.
M. Savoie: Oui, mais ce n'était pas pour vente au
Québec. Donc, il n'y avait pas de taxe. Il y a des taxes au
Québec, lorsque le tabac est vendu au Québec, pour consommation
au Québec.
M. Filion: Mais, dans les faits, c'était pourquoi? C'est
ça que je vous pose comme question.
M. Savoie: Je comprends ce que vous voulez dire, et
là-dessus vous avez raison. Là-dessus, il faut bien s'entendre.
La seule nuance que je dois vous apporter, c'est que la seule façon
qu'on a de contrôler ce marché-là, c'est une taxe à
l'exportation. Or, le gouvernement fédéral a introduit une taxe
à l'exportation. Pendant quelques mois, ça a fonctionné.
On a senti une chute... Ils ont introduit une taxe de 8 % et, effectivement, on
a senti une baisse au niveau de la contrebande. Par contre, les compagnies,
à ce moment-là, qui étaient situées, par exemple,
au Québec ou en Ontario, ont dit, tout simplement: Bien, tout ce qu'on
va faire, c'est qu'on va déménager. On va aller aux
États-Unis, et là, on va exporter au Canada les cigarettes de
marque canadienne. Ou bien, tout simplement, il va y avoir une usine qui va
s'ouvrir aux États-Unis qui, elle, va fabriquer des cigarettes
légalement, pour vente, évidemment, sur les marchés
canadiens, sans taxe.
M. Filion: Je vous suis très bien, sauf que, tout à
l'heure, M. Robert a vraiment... D'ailleurs, les enquêtes
spéciales... Je le pense aussi, je suis d'accord avec lui, que les
enquêtes spéciales, à partir d'informations aussi
importantes que celle de dire: Du jour au lendemain, on n'en vend plus aux
États-Unis, parce que, effectivement, il n'y en a pas, de consommation
américaine. À partir du moment où vous avez de
l'information comme ça, vous êtes en mesure de commencer à
constituer un dossier et d'émettre des cotisations. Vous êtes le
ministre du Revenu.
M. Savoie: À qui émettre des cotisations? À
qui?
À qui on va émettre des cotisations? La liste des
acheteurs aux États-Unis?
M. Filion: Vous allez émettre des cotisations, la liste
des acheteurs aux États-Unis.
M. Savoie: Alors, O.K.
M. Filion: Pour avoir contrevenu à nos lois fiscales.
M. Savoie: Poursuivons votre raisonnement. Pour émettre
une cotisation...
M. Filion: Ou alors, vous allez pouvoir... Même,
peut-être, à la limite, si vous pouvez établir la
conspiration. ..
M. Savoie: Oui, mais arrêtez de changer le discours. On va
développer un peu de rigueur.
M. Filion: Allons-y.
M. Savoie: O.K.? Alors, une compagnie de fabrication de
cigarettes vend aux États-Unis. Par exemple, à un marchand
situé, je ne sais pas, moi... en Virginie. Elle va lui vendre 10 caisses
de tabac. Par exemple, lui, il va distribuer ça dans son réseau.
On peut présumer, à ce moment-ci, qu'il s'agit d'un réseau
légal. On va utiliser cet exemple, mais on reviendra avec un exemple de
contrebande. Il va distribuer 10 caisses dans son réseau, pour vente
dans les différentes tabagies aux États-Unis, en Virginie, de
cigarettes canadiennes. Lui, on va le cotiser?
M. Filion: Vous pourriez, à la limite, vérifier
chez le fabricant.
M. Savoie: Attends une seconde. On va rien que faire le
légal, et après ça, on fera l'illégal.
M. Filion: Vous pourriez cotiser, à mon avis... Je crois
effectivement... M. Robert pourrait répondre, mais je pense que vous
pourriez cotiser... Écoutez...
M. Savoie: Voyons! On ne peut pas le cotiser, il vend aux
États-Unis. Il est légal tout le long. Il achète 10
caisses de cigarettes, il paie les montants qu'il doit payer, il s'installe
chez lui, il les vend au prix qu'il les avait payées. Son
opération est légale.
M. Filion: II n'est pas légal. Il a
bénéficié d'une exemption.
M. Savoie: Comment, il a bénéficié d'une
exemption? De quelle exemption a-t-il bénéficié?
M. Filion: L'exemption de taxes, parce qu'il devait vendre aux
États-Unis.
M. Savoie: II faut bien s'entendre, là. C'est un type,
c'est un détaillant en Virginie, qui vend au détail, en Virginie,
10 caisses de cigarettes, d'une façon très légale. Il n'y
a pas de problème. Lui, ce type-là, on ne peut pas le cotiser. Il
a fait ce qu'il devait faire selon la loi. Il les a achetées à
l'usine à Montréal, et il les a amenées aux
États-Unis. Il les vend dans ses dépanneurs ou aux gens avec qui
il fait affaire, et c'est tout à fait «kosher», là.
Pas de difficulté. Alors, on ne peut pas cotiser cet individu-là,
sans parler de l'absurde de cotiser un Américain qui travaille chez lui.
Alors, il n'est pas question...
On va prendre quelqu'un, maintenant le cas que vous imaginez
qui fait de la contrebande. Quelqu'un qui demeure également en
Virginie, qui achète 10 caisses, encore, de tabac, et qui les vend
à un autre Américain, parce que, lui, il est grossiste. Alors, il
va les vendre à un détaillant américain, en tout cas,
à un Américain. Nous autres, on va arriver, et on va dire: Ah,
ah, tu aurais dû savoir que, ça, c'était de la contrebande.
En conséquence, on te cotise. Aux États-Unis...
M. Filion: Je peux répliquer?
M. Savoie: Comment voulez-vous qu'on fasse des
vérifications? Comment voulez-vous qu'on obtienne une collaboration dans
ce dossier-là?
M. Filion: C'est là que je vous dis: À partir du
moment où vous vous identifiez au réseau légal, vous avez
des indices de croire que les ventes qui ont été achetées
aux États-Unis n'étaient pas pour la consommation
américaine. À partir du moment où vous pouvez commencer
à identifier une espèce de réseau illégal, de cette
façon-là, vous pouvez identifier également... parce que,
moi, j'ai vu souvent, dans ma pratique fiscale, poursuivre conjointement 2
personnes, qui avaient... Écoutez, là, ça s'est fait,
ça.
M. Savoie: ...ça que j'ai dit, j'ai dit: Bon!
M. Bélanger (Anjou): Vous pourriez poursuivre le fabricant
canadien et l'acheteur américain pour déterminer s'il y a eu
conspiration dans les transactions, jusqu'où c'est allé, la
mécanique fiscale. Vous pourriez cotiser conjointement, à partir
d'indices sérieux de croire que... Moi, je pense que ça se fait.
Maintenant, jusqu'où on peut aller? C'est là que je pose la
question, et c'est là que je veux voir comment on peut arriver à
trouver une solution pour remettre une pression où elle doit être
mise, la pression, parce que la contrebande du tabac est toujours très
présente. Vous pourriez certainement faire des cotisations conjointes,
parce que vous avez des doutes de croire qu'il y a eu conspiration de
scénarios d'évasion fiscale. Moi, je l'ai vu j'ai
même assisté à un procès et il fallait
déterminer à quel niveau on allait cotiser. Écoutez,
ça se fait, sauf qu'il faut se donner les outils pour le faire.
Ça, c'est l'autre débat. (11 h 10)
M. Savoie: Ha, ha, ha! Bon, bien, écoutez. Oui... Je ne
peux pas vous donner un cours de droit international, un cours sur les
règles de preuve, le contrôle du tabac, les transactions qu'ils
peuvent avoir, à quel moment ça devient légal, à
quel moment ça devient illégal, quand il n'y a pas de bris de loi
aux États-Unis. Alors, vous, ce dont vous parlez, c'est de «intent
to commit a crime», c'est-à-dire de transporter au Canada, pour
vente, des cigarettes qui ont été vendues pour consommation aux
États-Unis. C'est ça, votre raisonnement, là?
M. Filion: Non, moi, mon raisonnement, c'est d'essayer de se
donner des outils...
M. Savoie: Oui, bien...
M. Filion: ...pour identifier et faire des cotisations...
M. Savoie: Je peux vous assurer...
M. Filion: ...et que les gens payent leur impôt, c'est
tout.
M. Savoie: Écoutez, il faut bien comprendre qu'il n'y a
crime que lorsque ça retraverse la frontière, ça revient
au Québec. C'est à ce moment-là qu'effectivement il y a
contrebande. Le temps que ça circule aux États-Unis, il n'y a pas
de contrebande.
Bilan des opérations de la police du
tabac
M. Filion: J'aimerais avoir quelques petites statistiques sur la
police du tabac. On sait que la police du tabac... Bon, vous avez voulu mettre
une pression à la frontière, je comprends ça. Maintenant,
cette police-là, le résultat, en fin de compte... Je comprends
qu'ils ont dû faire quelques saisies, mais il ne faut quand même
pas oublier qu'en 1992 la contrebande a plus que doublé, malgré
cette instance de police là.
Est-ce que vous croyez que c'est toujours pertinent, et jusqu'où
ça peut vraiment mettre fin au fléau que l'on vit actuellement?
Est-ce que vous y croyez toujours?
M. Savoie: Lorsque le problème a débuté,
lorsqu'il y a eu augmentation de la contrebande... on revient donc au budget
fédéral d'il y a 3 ans, où on a introduit 0,75 $ sur un
paquet de cigarettes. C'est à ce moment-là qu'il y a eu un
développement certain du marché de la contrebande. Il fallait,
à ce moment-là, poser un certain nombre de gestes, qui ont
été posés par le ministère. On a
amélioré nos échanges d'information avec l'Ontario, avec
les fabricants. On est allé chercher leur collaboration. On a
posé des gestes de l'ordre de... Par exemple, la loi qui a
été adoptée à l'Assemblée nationale,
renforçant d'une façon substantielle les mesures pour servir de
désincitatif au niveau de la contrebande. On a introduit la peine
d'emprisonnement pour le tabac, il y a à peine 2 ans, à
l'Assemblée nationale. On a augmenté les amendes d'une
façon substantielle. On a également introduit des vignettes,
exercé des contrôles sur le transport, l'entreposage et la vente
de tabac au Québec.
Alors, il y a eu tout un ensemble de mesures qui ont été
posées, à cette époque-là. Donc, un tout, dans
lequel tout on a introduit des agents pour surveiller ces routes
frontalières qui donnent accès aux États-Unis et qui
étaient sans aucun contrôle. Sans aucun contrôle,
c'est-à-dire que, du côté américain, lorsqu'on entre
aux États-Unis, les Américains peuvent avoir ici et là
développé des sytèmes électroniques pour
déceler que quelqu'un voyageait sur cette route en partant du Canada et
en s'en venant vers les États-Unis, mais il n'y avait pas de
contrôle en partant des États-Unis et en montant vers le Canada.
On avait, à ce moment-là, je ne sais pas si vous vous rappelez,
par exemple, un poste frontalier, un village, où il y avait un
dépanneur là, et on voyait des gens arriver et repartir avec des
sacs à vidanges verts, en plastique, remplis de cartons de
cigarettes.
On avait, au ministère du Revenu, fait l'expérience en
1988 pour, par exemple, la contrebande, peut-on dire, de pétrole. Il y
avait eu une action exercée par un certain nombre d'agents pour
réduire cette contrebande de produits pétroliers. Aujourd'hui,
c'est-à-dire à ce moment-là, en 1992, lorsque nous avons
pensé à créer cette section spéciale,
c'était justement pour mettre une pression additionnelle, dire qu'on
n'acceptait pas la situation, qu'on n'acceptait pas la situation, et que nous
allions donc, au ministère du Revenu, faire tous les efforts possibles
et nécessaires pour, justement, réduire, exercer une surveillance
pour afficher notre mécontentement.
Alors, oui, effectivement, c'est une position, d'abord et avant tout...
50 agents, il ne faut pas se leurrer. On l'a bien décrit, à ce
moment-là, que 50 agents, ce n'est pas 50 agents sur la route tout le
temps, parce que ces gens-là, évidemment, ont des vacances. Ils
ne peuvent pas travailler 24 heures par jour, 7 jours par semaine, sans cesse.
Il y a des «shifts», donc, des rotations. Il faut mettre 1 ou 2
agents par voiture, tout au moins. Il faut patrouiller. Il y avait un service
d'information, de cueillette, de visite, de filature qui devait se faire en
collaborant avec les autres corps policiers au Québec. Ils ont fait un
travail, je pense, et fort bien, dans les limites de leur mandat. Les abolir,
à ce moment-ci, je me demande quelle sorte de message vont comprendre
les Québécois et les Québécoises, qui dit tout
simplement: Bien, cette force d'intervention, qui est présente, qui joue
un rôle... On parle de 345 immobilisations, 88 perquisitions, des
assistances. Là, évidemment, on parle de marchandises saisies qui
dépassent les 9 000 000 $. On parle de poursuites, on parle de 37
poursuites. Ça, c'est sans parler, évidemment, de leurs
tâches de filature, qu'ils doivent exercer et qu'ils exercent avec les
autres forces policières.
M. Filion: En deniers publics, ça a rapporté
combien?
M. Savoie: Bien, écoutez, en deniers publics, ce n'est pas
mesurable.
M. Filion: Ah non?
M. Savoie: Vous rapportez combien, vous, à l'État
québécois?
M. Filion: Vous le savez, vous, votre vérificateur fiscal,
combien il rapporte par...
M. Savoie: Oui, c'est ça, parce qu'un vérificateur
fiscal a une tâche spécifique. Maintenant, l'observateur fiscal...
Justement, on va prendre ton observateur fiscal. Le fait qu'il y a quelqu'un
qui fait de l'observance fiscale, qui fait de la vérification. Bien, ces
personnes-là exercent non seulement une tâche bien
spécifique qui rapporte x montant de dollars, mais qui a aussi une
valeur dissuasive, qui est difficile à évaluer. Alors, ce que je
peux vous dire, c'est que, pour la marchandise saisie, on parle
d'au-delà de 9 000 000 $. Marchandise saisie: 9 000 000 $. Alors, c'est
déjà une évaluation.
Ensuite, on peut parler, par exemple, de leur présence qui a
aussi une valeur dissuasive. Donc, comment est-ce qu'on évalue
ça? Je ne le sais pas.
M. Filion: Ce qui est faux, là.
M. Savoie: II faut penser en termes d'amendes. Des poursuites
seront intentées dans chacun des dossiers d'immobilisation et de
perquisition effectuée. Les amendes prévues
s'élèveraient à un minimum estimé de 850 000 $, en
plus de la valeur de la marchandise saisie.
Alors, je comprends très bien ce que vous voulez dire, dans le
sens... Est-ce qu'ils font leurs frais? C'est une question qu'on reçoit
assez régulièrement de la part de différents intervenants.
La réponse, c'est: Oui, ils font leurs frais.
M. Filion: Alors, pourquoi ne pas en engager 3000 s'ils font
leurs frais?
M. Savoie: Parce qu'il y a une limite à ça aussi.
Il y a une limite à ça. Il faut juger un peu... Il faut utiliser
un peu de discernement. Je ne pense pas qu'embaucher 3000 agents va
régler le problème.
M. Filion: Ah, bien...
M. Savoie: Je ne pense pas qu'embaucher 3000 agents va
régler le problème. Ce que nous vivons, finalement, c'est une
décision politique et fiscale au niveau, d'abord, du gouvernement
fédéral, qui dit qu'on maintient les taxes élevées,
puisqu'on ne veut pas encourager la consommation du tabac, puisqu'il y a un
impact direct et immédiat sur les coûts de la santé. C'est
nocif. Le tabagisme donne lieu à toutes sortes de maladies pulmonaires
et cardiaques. Tout le monde est d'accord là-dessus, et je pense que
leur orientation est à cet effet-là.
Deuxièmement, il y a une pression au niveau des États-Unis
pour augmenter également les taxes, puisqu'on sait que ça se
discute actuellement. Aux Etats-Unis, on est en train d'examiner
différentes options pour donner un meilleur service santé
à la population, et c'est sûr que les taxes sur le tabac vont
augmenter.
Troisièmement, au Québec, on a eu l'occasion d'expliquer
à plusieurs reprises que les coûts du tabagisme, les coûts
directs du tabagisme, c'est-à-dire quelqu'un qui fume, donc qui va
développer des grippes, des bronchites, des pneumonies, qui va
développer des problèmes cardiaques, des problèmes de
circulation, des problèmes de respiration va se rendre...
M. Filion: Bon, ça...
M. Savoie: Non, non, laissez-moi terminer. Au niveau des centres
hospitaliers, les visites au docteur, les rayons X, même une courte
période d'hospitalisation, liés directement au tabagisme
dépassent les 900 000 000$...
M. Filion: Oui, oui, mais c'est bien pire si la...
M. Savoie: ...ce qui est le double des taxes qu'on va chercher au
Québec en...
M. Filion: Non, non, mais, M. le ministre...
M. Savoie: Non, non, mais laissez-moi terminer, parce que c'est
significatif. Vous, vous ne les avez peut-être pas encore
rencontrés, mais il y a des pressions actuellement qui s'exercent par
ces groupes de santé. Ça fait que, oui, effectivement, il y a 2
discours.
M. Filion: Je les ai rencontrés.
M. Savoie: Effectivement, on peut décider de
réduire les taxes, et de les réduire d'une façon
substantielle, tout en maintenant un niveau de tabagisme élevé
dans notre société. Tabagisme, dans le sens de créateur
d'effets nocifs sur la santé. L'autre solution, évidemment, c'est
de maintenir un niveau de taxes élevé et d'attendre que les
États-Unis viennent nous rejoindre, parce que la minute que les
États-Unis vont nous rejoindre, c'est sûr que le niveau de
taxation va baisser au Québec... que le niveau de contrebande va baisser
au Québec. (11 h 20)
M. Filion: Moi, je pense que, de toute façon, tant que les
États-Unis ne nous auront pas rejoints, la contrebande est plus
néfaste, au moment où on se parle, que si on réduisait les
taxes.
M. Savoie: Écoutez...
M. Filion: Écoutez, laissez-moi...
M. Savoie: Oui, oui, allez-y.
M. Filion: Moi, je pense que, la contrebande, comme on la vit
présentement, le monde de la santé, qu'il arrête de croire
que la société n'est pas mal servie, elle est plus mal servie de
cette façon-là. Les jeunes y ont accès comme jamais, et on
ne contrôle strictement rien du système économique. Si, en
attendant que les États-Unis augmentent leurs taxes, vous y alliez
vraiment vers un changement, une réduction de taxes et un changement de
dynamique fiscale, vous pourriez maintenir un écart à la hausse,
mais en changeant la dynamique fiscale, ne pas garder ce que vous avez
actuellement. Vous pourriez maintenir un écart à la hausse et
reprendre le contrôle du marché économique d'une
façon temporaire, d'ici à ce que vous puissiez l'augmenter
davantage en fonction du suivi américain, mais pas de rester comme
ça. Vous entretenez un faux débat. De toute façon, vos
soins de santé vont être pires avec une contrebande comme on la
vit que si vous réduisiez ou changiez une dynamique fiscale, et que vous
gardiez un écart à la hausse, mais que vous identifiiez un
réseau légal, pas un réseau illégal, que vous y
alliez en augmentant. Mais mettre la pression vraiment entre les mains des
acheteurs...
En tout cas, écoutez... Moi, je pense que d'attendre, c'est
d'entretenir dans la population une société parce que... N'allez
pas croire que c'est que la contrebande du tabac qui fait mal à la
société, c'est tout le reste des gens qui, actuellement, plantent
le système, puis vous le savez. Il vous manque 460 000 000 $
d'impôt des sociétés, au 31 décembre, un manque
à gagner, juste pour l'année 1992. Après 9 mois, vous avez
un manque à gagner d'impôt des sociétés de 460 000
000 $ au Québec. Ecoutez, là! Le fédéral vient de
sortir avec plus de 9 000 000 000 $ de manque de recettes fiscales. Alors,
ça déteint sur le reste du fonctionnement. Arrêtez de
penser que c'est juste la contrebande du tabac. Ce n'est pas en restant inactif
que vous allez changer une dynamique de société et une dynamique
économique. Ce n'est pas vrai. Vous avez beau attendre après
Ottawa, mais je pense que ça nous fait beaucoup plus mal dans l'ensemble
de l'économie. Je pense que c'est dommage de sous-estimer ces
impacts-là. En tout cas, je pense qu'il va falloir quelque part qu'il y
ait des gens qui prennent des décisions.
Dans vos perquisitions, 88 perquisitions, combien ont été
faites en réserve autochtone?
M. Savoie: Sur les 88, je crois qu'aucune n'a été
faite sur une réserve. Ah bien! C'est-à-dire que s'il y en a qui
ont été faites sur la 132, qui traverse effectivement Kahnawake,
il pourrait y en avoir qui ont été faites sur une réserve
autochtone, oui... parce que ça fait partie de la réserve
autochtone.
M. Filion: Est-ce que c'est majeur ou c'est mineur?
M. Savoie: Je ne le sais pas. Je ne pense pas que... Je pense que
la majorité se sont faites là où il y a surveillance,
c'est-à-dire aux frontières ou près des
frontières.
M. Filion: Aux frontières. Rien en réserve
autochtone.
M. Savoie: Bien non! Ce n'est pas ce que je vous dis, là.
Je vous dis que si, effectivement... C'est parce que vous connaissez mal la
composition géographique d'une réserve. C'est qu'il y a une route
qui traverse la réserve, qui est sur la réserve. Donc, il
pourrait y avoir des arrestations, des perquisitions plutôt le long de
cette route-là qui traverse la réserve.
M. Filion: Dites-moi, vous avez un nouveau projet de loi, que
vous êtes censé déposer bientôt à
l'Assemblée nationale, qui, à toutes fins pratiques, va augmenter
les pénalités pour les consommateurs, transporteurs et vendeurs
illégaux de tabac. Comment vous voyez ça, ce projet-là?
Est-ce que vous croyez vraiment que ça va vous donner le mordant que
vous avez besoin?
M. Savoie: Ça va certainement encourager davantage les
gens à respecter la loi sur la taxe sur le tabac, oui.
M. Filion: Comment vous allez faire ça pour appliquer
ça au niveau du consommateur?
M. Savoie: Au niveau du consommateur, je pense qu'en mettant une
pression sur ceux qui font de la contrebande et ceux qui dirigent ces
réseaux-là, qui les transportent, évidemment, les
pénalités étant substantiellement augmentées,
ça risque d'être...
M. Filion: Mais qui va surveiller ça? M. Savoie:
...dissuasif.
M. Filion: C'est qui qui va s'occuper de vérifier s'il n'y
en a pas un ici, dans la salle, qui fume des cigarettes de contrebande?
M. Savoie: II y a quelqu'un dans cette salle qui fume...
M. Filion: Je ne le sais pas, non, mais je pose la question.
M. Savoie: ...de la contrebande...
M. Filion: Qui, dans votre mécanique d'application de la
loi, va être chargé de ça?
M. Savoie: Bien, qui? Ça va être
déterminé dans le projet de loi, c'est sûr.
M. Filion: Ça ne sera pas vos 50 policiers, vous n'en
aurez pas assez.
M. Savoie: Non, non, c'est sûr que ça ne sera pas
uniquement les 50 agents.
M. Filion: Parce que le projet, vous devez le connaître,
c'est pour le 15 mai...
M. Savoie: Bien oui, c'est ça. M. Filion: ...d'ici le 15
mai. M. Savoie: Ah oui, c'est ça, oui!
M. Filion: Alors, comment vous voyez... J'essaie de comprendre,
dans le processus de vérification fiscale que le ministère du
Revenu doit appliquer, comment il va faire pour gérer ce
programme-là assez particulier, merci. Comment vous allez faire
ça?
M. Savoie: On va faire ça comme il faut, mais comme il se
doit!
M. Filion: Je comprends là, M. le ministre!
M. Savoie: Oui, mais on n'est pas pour commencer à
débattre un projet de loi qui n'est pas encore déposé
à l'Assemblée nationale.
M. Filion: Non, ça, je comprends. Je comprends.
M. Savoie: Bon. Ça, si vous comprenez ça... Alors,
attendez là...
M. Filion: Je comprends très bien. C'est parce que c'est
dans la perspective de votre police du tabac, je veux voir si c'est elle qui va
être chargée de ça.
M. Savoie: Non, ce ne sera pas elle qui sera chargée de
cet élément-là.
M. Filion: Ce sera d'autres personnes.
M. Savoie: Oui, tu auras plusieurs intervenants.
M. Filion: Est-ce que vous avez prévu, dans vos
crédits, un montant d'argent spécifique pour ça?
M. Savoie: Les montants qui vont suivre, suite à la
déclaration du ministre des Finances, et les coûts de
gérance devraient, en partie, s'autofinancer, oui.
M. Filion: Vous allez avoir des crédits additionnels pour
cette opération-là?
M. Savoie: Tout ça est actuellement en discussion.
M. Filion: Mais le projet de loi... Écoutez, vous
êtes en train de me dire que vous ne savez pas si ça va être
les crédits qu'on étudie déjà ou si ça va en
être d'autres?
M. Savoie: Ha, ha, ha! D'une part, il y a le budget qui doit
être déposé sous peu...
M. Filion: Oui.
M. Savoie: ...où on pourrait s'attendre à des... Ce
n'est pas un problème majeur, ce n'est pas un problème qui
suscite beaucoup de difficultés à ce moment-ci.
M. Filion: Alors, si je comprends bien, on va attendre le
dépôt du projet, pour savoir comment ça va se passer.
M. Savoie: Je pense que ce serait plus à propos que de
commencer à discuter d'un projet qui est encore en discussion chez
nous.
M. Filion: C'est parce que je voulais finir l'idée des
effectifs.
M. Savoie: Pardon?
M. Filion: Je voulais finir l'idée des effectifs humains
pour la contrebande du tabac. Alors, comme il y avait de quoi dans l'air, j'ai
questionné en même temps. Mais, si vous ne voulez pas
répondre, on va attendre le projet de loi, on aura sûrement
l'occasion d'échanger aussi.
M. Savoie: Oui, c'est ça.
M. Filion: J'aimerais que vous m'expliquiez comment ça
s'est fait au ministère, parce que, dans le discours sur le budget
1992-1993...
M. Savoie: Dans le dernier budget?
M. Filion: Non, non, mais j'essaie de voir comment ça
s'est passé au niveau du ministère, puis de l'affectation des
crédits. À la page 7 du discours, on disait: «On trouvera
le détail de ces dispositions...» C'est qu'on fait le resserrement
de certaines lois fiscales. «Réduire le fardeau
général de la fiscalité, c'est aussi s'assurer que
l'esprit de la loi soit respecté et que tous contribuent
équitablement au trésor public. J'entends donc le ministre
des Finances apporter plusieurs mesures de resserrement des lois
fiscales applicables aux entreprises. «On trouvera le détail de
ces dispositions à l'Annexe sur les mesures fiscales et
budgétaires, qui fait partie intégrante du présent
discours. L'ensemble de ces mesures de resserrement fiscal permettra
d'augmenter les revenus de 36 000 000 $ sur une base annuelle.»
Alors, j'ai essayé de voir comment ça s'est traduit,
ça, chez vous, au ministère. Est-ce que ça s'est vraiment
réalisé, le resserrement de 36 000 000 $ ou... c'est quoi
exactement? Ou si c'était simplement un voeu pieux du ministre des
Finances?
M. Savoie: Non, ce n'est certainement pas un voeu pieux. Attendez
un peu. Alors, là, finalement, vous parlez du budget 1992-1993, à
la page 7 de son discours, parce qu'il faut avoir l'information pour qu'on
puisse vous répondre. Alors, je cherche... Ah, oui. «On trouvera
le détail de ces dispositions à l'Annexe sur les mesures fiscales
et budgétaires donc, ça a été
déposé, les dispositions qui étaient prévues
qui fait partie intégrante du présent discours. L'ensemble de ces
mesures de resserrement fiscal permettra d'augmenter les revenus de 36 000 000
$ sur une base annuelle.» C'est les revenus en ce qui concerne les
entreprises. «J'entends donc apporter plusieurs mesures de resserrement
des lois fiscales applicables aux entreprises.»
Donc, on parle de 36 000 000 $ de mesures additionnelles de resserrement
au niveau des entreprises. Puis, on va vous trouver, ensuite, les
éléments qui ont été présentés. Vous
avez affirmé, tout à l'heure, que les sociétés ont
vécu, finalement, une baisse de revenus, une baisse de revenus
imposables pour l'année 1992-1993. Effectivement, c'est le cas. Il y a
eu une baisse au niveau des revenus imposables des entreprises. (11 h 30)
II faut bien comprendre aussi que ça a été une
année qui se situe... qui résume l'année, par exemple,
1992 ou 1991-1992, donc, une année difficile. Il y a eu des pertes et il
y a eu des réductions de profits importantes. On est allé
chercher, évidemment, des pertes. On a un mécanisme très
encourageant pour les entreprises, au Québec, pour assurer notre
développement économique. En conséquence, dans des
périodes comme ça, il est normal que les compagnies, en
retournant en arrière, puissent réduire l'impôt qu'elles
ont à payer.
Je tiendrais à rappeler que les entreprises, au Québec,
paient très peu d'impôt. Il faut se le rappeler. Sur un budget...
par exemple, des revenus autonomes qui dépassent les 25 000 000 000 $,
les sociétés, les entreprises, en termes d'impôt, en paient
à peu près 1 800 000 000 $, donc, pas tout à fait 10 % des
revenus autonomes. Alors, ce n'est pas... Évidemment, avec les
règles d'amortissement, les règles qui permettent
d'étaler, d'aller chercher en arrière, de refaire, finalement,
ça génère, en période de récession, ces
baisses de revenus de la part des entreprises.
M. Filion: Est-ce que vous pourriez déposer une
ventilation de ce genre de résultats là? Des mesures qu'on puisse
suivre, si ça pouvait être ventilé. C'est beau de le dire
comme ça, mais si, nous, on veut suivre un peu, vous ne pourriez pas
déposer un tableau?
M. Savoie: Bien, sous réserve d'une vérification
auprès des Finances, parce que ces genres d'orientation là
relèvent de la politique fiscale, donc des orientations du
ministère des Finances. Sous réserve d'une vérification
auprès d'eux... oui, on pourrait déposer sur ce genre de document
là.
M. Filion: Excellent! C'est beau. On va le déposer. On va
déposer le document du tableau.
Le Président (M. Camden): Est-ce que M. le ministre...
M. Savoie: Voir non plus à...
Le Président (M. Camden): Est-ce que vous entendez
déposer le document?
M. Savoie: Pardon?
Le Président (M. Camden): Est-ce que vous entendez
déposer le document?
M. Savoie: C'est-à-dire que j'ai dit qu'on le ferait, mais
sous réserve de... il faut qu'il y ait une vérification.
Le Président (M. Camden): Suite à une
vérification.
M. Savoie: Auprès du ministère des Finances,
oui.
Je voudrais, M. le Président, pour l'information de la
commission, de même que pour l'information du député de
Montmorency, lire un petit paragraphe de 6 lignes, 7 lignes, qui est
tiré d'un document tout frais, qui date du 3 février 1993, The
United States General Accounting Office, qui s'appelle «Status of Tax
Systems, Modernization, Tax Delinquencies and the Tax Gap»; «tax
gap» étant la différence entre les revenus qui sont
budgétés pour le gouvernement américain versus ceux qui
rentrent effectivement. Comment peut-on expliquer ces différences en
parlant, justement, de «delinquencies» et de «tax gap»,
«tax gap» étant spécifiquement le travail, le
marché, l'économie souterraine, aux États-Unis.
Vous allez constater qu'aux États-Unis cette notion de «tax
gap» est considérable également, et que vis-à-vis le
Québec, le dossier du Québec est nettement meilleur, de
façon générale, que le dossier américain. «To
close the tax gap, 1RS (the Internal Revenue Service) needs to improve
voluntary compliance. Voluntary compliance! 1RS data show that voluntary
compliance for small corporations plummeted from 81 % in 1980 to 61 % in 1987
the latest year for which data are available while individual
compliance has stayed at about the mid 80 % level. In an attempt to reduce the
tax gap, 1RS recently announced the goal to increase individual voluntary
compliance to 94 % in 8 to 10 years.»
M. Filion: On va revenir chez nous, M. le ministre.
M. Savoie: Oui, c'est ça, mais je vous donne ça
à titre indicatif.
M. Filion: Oui, oui, c'est intéressant.
M. Savoie: C'est bien sûr, là, mais je vous
donne
ça à titre indicatif. C'est un document, quand même,
comme je l'ai mentionné, qui date du 3 février 1993. Ça
donne suite à des témoignages qui ont été
déposés au comité... «The Committee on Treasury,
Postal Service and General Government Committee on Appropriations»...
M. Filion: Merci.
M. Savoie: ...de la Chambre des représentants aux
États-Unis.
M. Filion: Merci.
M. Savoie: Ça vous donne une idée du
témoignage qui a été présenté et qui donne,
justement, cette notion de «tax gap», et le fait que, finalement,
au Québec et je présume, d'une façon
générale, au Canada les entreprises, comme les
particuliers, participent d'une façon nettement supérieure par
rapport à nos collègues des États-Unis.
Variation des effectifs du ministère
M. Filion: J'aimerais revenir, M. le ministre, toujours sur les
ressources humaines du ministère. Vous avez prévu, avec les
nouveaux crédits, réduire vos effectifs de 815 emplois au
ministère du Revenu.
M. Savoie: Oui, allez-y.
M. Filion: j'essaie de comprendre... pourquoi une décision
de réduction d'effectifs aussi importante? 815, ça
représente 13 % d'effectifs dans l'année qui s'en vient. c'est
quand même beaucoup. vous êtes un ministère rentable,
vous.
M. Savoie: On est un ministère essentiel au fonctionnement
du gouvernement.
M. Filion: Un ministère qui va chercher des deniers
publics, pas qui en dépense. Alors, pourquoi réduire vos
effectifs?
M. Savoie: On n'a pas réduit nos effectifs...
Écoutez, lors de mon discours d'ouverture, M. le Président, j'ai
eu l'occasion de commenter ça en détail, et j'ai eu l'occasion
d'indiquer, à ce moment-là... J'invite le député
à revoir le verbatim du discours d'ouverture de jeudi passé. On a
eu l'occasion d'indiquer à ce moment-là qu'entre les effectifs de
1992-1993 et 1993-1994, il y avait une perte indiquée... une variation
de 532 personnes.
M. Filion: M. le ministre, moi, j'aimerais ça que vous
revoyiez... parce que, moi, je me base sur le tableau...
M. Savoie: D'accord, je vous reviens. Non, non, mais je vais
continuer, parce que les 532... La réduction des dépenses,
l'implantation de la TVQ, de la TPS, on en attribue 191 à cette
réduction. Les 36 000 000 $ dont vous parliez, entre autres, qui
comprennent 191 personnes: Récupération des crédits
reliés aux gains de la refonte des systèmes et à des
projets spécifiques à échéance. Donc, la refonte
des systèmes qu'on a introduits, qui coûte assez cher, on va en
chercher... L'amélioration de nos systèmes, l'automatisation dont
on parle, les chaînes de montage automatisées, c'est sûr que
ça a un impact. On parle d'une réduction d'effectifs de 133
personnes. Ensuite, on a livré, en vertu des décisions du
gouvernement, les effectifs. La perte nette donc, suite à ces
compressions-là, est de l'ordre de 208 personnes, ce qui donne votre
total de 532, ce que je vous ai clairement indiqué à ce
moment-là.
M. Filion: Parce que, moi, ici, dans le tableau 18, qui se trouve
à être un peu les renseignements supplémentaires, quand on
fait la continuité, pour le ministère du Revenu, on parle de 815
emplois.
M. Savoie: Oui, c'est ça. Ce que vous faites, c'est que
vous ajoutez les compressions, à compter du 1er avril 1993, avec les
autres ajustements, à compter du 1er avril 1993, c'est-à-dire 687
plus les 128.
M. Filion: C'est ça. M. Savoie: C'est ça.
M. Filion: Alors, vous réduisez de 815.
M. Savoie: Oui, c'est ça. Ce qu'il faut faire, c'est de
regarder les effectifs prévus au livre des crédits, de 5 939, et
ensuite, de regarder le total prévu au livre des crédits pour
l'année 1993-1994, qui est de 5 407. Alors, si vous prenez 5 939 et que
vous soustrayez 5 407, vous arrivez donc à 532, qui est l'écart
réel. L'écart réel, comme je vous ai mentionné, ce
n'est pas votre 800, mais c'est bien 532. Donc, réduction des
dépenses au niveau de l'implantation... (11 h 40)
On est dans une deuxième année. La première
année est faite, donc, l'implantation étant terminée, on a
besoin de moins d'intervenants. Baisse, donc, de 191, quasiment 200. La
récupération, suite à la modernisation de nos
systèmes, 133, et la compression réelle, suite aux
décisions du gouvernement du Québec, est de 208. Donc, il y a une
perte, sur 6 000 personnes au ministère du Revenu, de 208, suite aux
orientations du Conseil du trésor, en plus du travail d'automatisation,
donc de 133. Pour terminer comme il faut, c'est que... étant dans notre
deuxième année de TVQ, TPS, il y a évidemment un besoin
moindre de personnes.
M. Filion: Comment justifier un besoin moindre? Les gens se
plaignent de plus en plus que les entreprises, elles n'ont pas assez
d'information TPS, TVQ. Les gens trouvent que le système,
effectivement, n'est pas assez accessible. Beaucoup de gens n'ont pas de
réponses. Beaucoup de gens n'ont pas l'information. Comment
pouvez-vous réduire au niveau de cette unification de ministères,
des effectifs, quand les gens demandent plus d'information parce qu'ils se
sentent mal desservis?
M. Savoie: Oui. Bien, vous voyez, là, 191, ça
traite surtout des mécanismes d'implantation. Ce sont des agents
spécifiques, par exemple, pour les chaînes de montage, le
développement des systèmes, qui, finalement, n'ont pas de
relation avec le public. Vous confondez 2 choses. Vous confondez, par exemple,
le service que nous donnons au public, soit par la téléphonie,
soit par les bulletins, soit pas d'autres sources, avec des gens qui sont
reliés spécifiquement à l'implantation du système
TVQ, TPS. Donc, la jonction des 2 gouvernements, le montage des lignes
spécifiques. Souvent, ces gens-là vont avoir une connaissance
très spécifique, très technique. Par exemple, au niveau
des ordinateurs, au niveau de services bien spécialisés,
organisation du travail et autres. Ça ne porte pas, d'une façon
générale, comme vous l'avez mentionné, sur le service au
personnel.
M. Filion: Mais vous ne semblez pas, non plus, augmenter les
effectifs, au niveau du remboursement aux entreprises. Pourtant, il y a des
délais de 4 mois, que ça prend, pour que les gens soient
remboursés.
M. Savoie: Écoutez, lorsque le système a
été introduit, il y avait, bien sûr, d'une façon
générale, un bon fonctionnement. Il y avait, par contre, ici et
là, des lacunes qu'il a fallu corriger en cours de route, ce qui a
été fait, et ça se corrige toujours. On a
simplifié, par exemple, les formules, tout dernièrement. On
continue à intervenir au niveau de l'amélioration constante de
notre téléphonie, des meilleures publications.
On est en train d'examiner la possibilité... Par exemple, au lieu
d'envoyer de l'information écrite à nos mandataires, qu'on puisse
avoir à leur disposition, moyennant un coût d'acquisition, un
vidéo, un VHS susceptible de répondre à leurs questions.
Comme vous le savez, il y a un phénomène social où les
gens, aujourd'hui, cherchent à avoir de l'information visuelle
plutôt qu'écrite. Ça a été constaté au
cours des derniers mois. Par exemple, j'ai été très
surpris d'apprendre qu'un commerçant, dans mon comté, a obtenu un
ordinateur très sophistiqué, plusieurs dizaines de milliers de
dollars je ne me rappelle plus, je me demande si ce n'était pas
90 000 $, le coût du système d'ordinateur. Le livre, le manuel
d'instruction, bien sûr, était là, mais on avait
également un VHS qui expliquait le fonctionnement, la réparation
et l'entretien de l'ordinateur. Le type en question ne s'est servi que du VHS.
Alors, on y voit, en tout cas, certainement, une source possible d'analyse,
chez nous, de dire: Bon. Est-ce qu'on est capable de créer, pour les
fins, d'abord de la TPS, TVQ, ou pour les petits commerces, un système
de VHS disponible, qu'ils puissent utiliser, et qui va les aider dans la
compréhension du système? Le visuel présente souvent des
avantages. Il y a également une possibilité de l'utiliser pour
d'autres services d'information, mais évidemment, compte tenu des
coûts relatifs, il pourrait y avoir un léger coût
attaché à ça.
Il y a une analyse qui va se faire, qui est en train de se faire, qui
est enclenchée, une réflexion qui va cheminer. On va voir comment
ça pourrait se structurer, se développer, pour ensuite être
remis à nos mandataires.
M. Filion: Est-ce que vous maintenez toujours la politique
à l'effet que toutes les demandes de 3 000 $ et plus sont
automatiquement mises en tablette? Il y a des gens qui se plaignent de
ça, actuellement.
M. Savoie: Non. Je ne sais pas de quoi vous parlez.
M. Filion: C'est que, moi, j'ai reçu des lettres de
citoyens qui me disent: Actuellement, le délai d'attente est d'environ 6
mois. De plus, toutes les demandes toujours le remboursement de la TPS,
TVQ de 3 000 $ et plus sont automatiquement mises en tablette pour
vérification, même si c'est une demande courante de
l'entreprise.
M. Savoie: L'information que vous avez est fausse. On pourrait
peut-être... Voulez-vous répondre? Oui. C'est ça.
M. Croteau (Bertrand): Actuellement, les dossiers de
remboursement...
M. Savoie: Voulez-vous vous nommer, d'abord, s'il vous
plaît.
M. Croteau: Bertrand Croteau, sous-ministre adjoint.
Le Président (M. Camden): C'est M. Robert?
M. Croteau: Pardon?
Le Président (M. Camden): C'est M. Robert?
M. Croteau: Bertrand Croteau.
Le Président (M. Camden): Alors, M. Croteau.
M. Croteau: Sous-ministre adjoint, développement TVQ,
TPS.
Le Président (M. Camden): C'est parce que c'est important
de s'identifier préalablement.
M. Croteau: Alors, les remboursements. Les politiques de
remboursement sont à l'effet qu'il y a un regard sur les remboursements
de 10 000 $ et plus. Après un regard sommaire, s'il y a des raisons,
soit des états de délinquance ou des états de comptes
à recevoir,
les dossiers sont portés à la vérification.
Autrement que ça, ils passent dans le processus régulier, et il
n'y a aucun délai additionnel qui est apporté.
M. Filion: Parce que les gens, en tout cas, les gens qui
semblaient... Ça peut peut-être répondre, je ne sais pas ce
qui se passe, mais en tout cas. C'est peut-être là le
problème de communication, parce qu'il y a des gens qui ont l'impression
qu'on ne s'occupe pas d'eux au ministère. Beaucoup de personnes nous
appellent pour dire: Ça n'a pas de bon sens, on n'a jamais la bonne
information. On ne nous répond jamais la bonne affaire. Il y a beaucoup
de gens qui ne sont pas encore informés au ministère du
détail technique à donner aux citoyens. Ces gens-là nous
écrivent et disent: Écoutez, ça ne fonctionne pas.
M. Savoie: Oui, mais ça ne veut pas dire que ce qu'on vous
écrit... une lettre, mais qu'une lettre...
M. Filion: Non, plusieurs... plusieurs lettres.
M. Savoie: Oui, oui. Bon, bien, 2, 3 lettres, d'abord...
M. Filion: II y a même des présidents. Des
présidents d'association, c'est quand même des gens...
M. Savoie: II faut vérifier. Le président de votre
association du Parti québécois, là?
M. Filion: Absolument pas. M. Savoie: Ah, bon. M.
Filion: Surtout pas.
M. Savoie: Bien non, mais je me demandais, là... le
président de votre association. Non, non, effectivement. Écoutez,
au début, et sans être, d'aucune façon...
M. Filion: Partisan.
M. Savoie: ...d'y voir un problème majeur. On a toujours
reconnu que c'était majeur comme réforme, que c'était
important, que ça a demandé énormément de travail,
qu'il y avait ici et là des problèmes qui pouvaient survenir.
Certaines gens ont été cotisées 2 fois. Lorsqu'on parle de
plus de 400 000 mandataires, et lorsqu'on parle de l'introduction d'un
système nouveau, compliqué, il y a eu au début, ici et
là, quelques anomalies, mais ça se corrige en cours de route. On
constate très rapidement une amélioration constante de la
situation.
Les histoires d'attendre 6 mois, 7 mois, écoutez, je ne peux pas
vous dire que ça n'arrivera jamais, que ça n'arrivera plus. On va
être vigilant, on va tâcher de corriger la situation de
façon constante. D'une façon générale, le service
est bon.
Gestion des sommes provenant des transferts
fédéraux
M. Filion: J'aimerais, M. le Président, aborder un sujet,
pour avoir de l'information. Concernant les transferts
fédéraux...
M. Savoie: Les transferts fédéraux.
M. Filion: Oui.
M. Savoie: Pour la gestion, là?
M. Filion: Comment ça fonctionne, au ministère du
Revenu, l'encaissement des transferts fédéraux, autant pour la
TPS que pour les transferts en général?
Le Président (M. Camden): Est-ce que vous voulez vous
identifier?
M. Croteau: Bertrand Croteau, sous-ministre adjoint au Bureau de
développement et de la refonte. Vous voulez dire, par transferts
fédéraux, l'argent qui nous est versé par le
fédéral ou les cotisations que nous devons faire sur la TPS?
M. Filion: L'argent qui est versé par le
fédéral.
M. Croteau: alors, on a une entente avec le fédéral
pour administrer la partie tps, laquelle entente prévoit le partage des
coûts entre le fédéral et le provincial,
c'est-à-dire qu'il couvre la moitié pour cent, 50 % des effectifs
qui travaillent à la perception des taxes, multiplié par un
facteur administratif de l'ordre de 1,75 %. alors, à partir du
comportement des effectifs canadiens, les effectifs qui travaillent au
québec, sur cette même base-là c'est-à-dire
que, l'année passée, c'était 2400 personnes nous
faisons une facture au gouvernement fédéral, qui la couvre selon
ces paramètres-là.
M. Filion: C'est fait mensuellement? Comment ça
fonctionne?
M. Croteau: La période. C'est-à-dire que nous avons
des facturations qui viennent par intervalles d'environ 3, 4 mois, et qui sont
couvertes lorsque produites. Il y a eu 3 paiements l'année
passée. L'année passée, on a reçu 69 000 000 $, et
les paiements ont été: 2 fois 5 000 000 $ et un paiement de 60
000 000 $, en fin d'année.
M. Filion: Pourquoi 60 000 000 $ en fin d'année? Il y a eu
une règle particulière? (11 h 50)
M. Croteau: Maintenant, nous en sommes... C'est parce qu'on
était au moment du rodage et de la définition ou de la
compilation des coûts. Maintenant, nous facturons sur une base
mensuelle.
M. Filion: La moyenne de facturation, c'est quoi?
M. Croteau: Cette année, on prévoit quelque 80 000
000 $. Alors, ça veut dire environ 7 000 000 $ par mois.
M. Filion: Ces 69 000 000 $, ce n'était pas une
année complète?
M. Croteau: Neuf mois. En 1992-1993, on a commencé
à administrer en juillet. Cette année, bien évidemment,
sur 12 mois, ce sera de l'ordre de 84 000 000 $ ou 85 000 000 $.
M. Filion: Combien coûte au trésor public
québécois le rapatriement des employés?
M. Savoie: Combien coûte le rapatriement?
M. Filion: Du fédéral, oui. Le rapatriement
fédéral des employés?
M. Savoie: Ça ne nous coûte rien, le rapatriement.
On ne comprend pas votre question, là.
M. Filion: La question est très simple.
M. Savoie: Bien non, la question n'est pas simple. Combien
coûte le rapatriement?
M. Filion: C'est que le ministère du Revenu a
fusionné 2 ministères, est allé chercher les
employés du fédéral.
M. Savoie: Oui.
M. Filion: Je veux savoir, ces employés-là, leur
nombre, et combien ça coûte au trésor public
québécois?
M. Savoie: Ça ne coûte rien.
M. Croteau: Le rapatriement n'a pas coûté...
aucunement. C'est-à-dire que, parmi les effectifs, il y avait 800
personnes qui travaillaient au gouvernement fédéral, le 1er
juillet dernier. De ces 800 personnes-là, 400 personnes avaient
été engagées par le Québec et prêtées
au fédéral pour la première année
d'opération, et 400 de ces personnes-là étaient des
fonctionnaires fédéraux. Alors, toute cette masse-là a
été intégrée aux 2400 personnes auxquelles je
référais tout à l'heure, et toute la partie qui est venue
du fédéral est absorbée à même la
compensation que nous verse le gouvernement fédéral.
M. Filion: Mais les 400 employés que vous avez
récupérés, ils coûtent combien au trésor
public?
M. Croteau: C'est-à-dire qu'ils sont payés par le
retour qui nous vient du fédéral. Donc, ils ne nous coûtent
pas d'argent précis.
M. Filion: Non, mais moi, je veux savoir... Je comprends
là, mais je veux savoir... le coûtant de l'employé, c'est
quoi?
M. Croteau: Le coût de ces 400 personnes-là
était de 22 700 000 $.
M. Filion: Ça, c'est la masse annuelle, la masse salariale
annuelle?
M. Croteau: La masse salariale, 16 800 000 $; 22 700 000 $ avec
le fonctionnement.
M. Filion: Qu'est-ce que vous voulez dire, le fonctionnement?
M. Croteau: C'est-à-dire les frais de transport, etc. Tout
ce qui vient avec les frais de bureau, les frais administratifs qui viennent en
plus des salaires.
M. Filion: Combien vous avez assumé pour le fonds de
pension? Combien est-ce que vous avez dû assumer par rapport au fonds de
pension? Comment ça fonctionne, à ce niveau-là? Est-ce que
le fédéral...
M. Savoie: II faudrait vous adresser au niveau du Conseil du
trésor pour répondre à ça. Ce n'est pas nous
autres, on ne gère pas ça, ces éléments-là,
et les systèmes ne sont pas faits chez nous. Comme me l'indique M.
Croteau, le fonds de pension a été négocié par la
CARRA, et non pas par le ministère du Revenu.
M. Filion: Ça a été négocié
par qui? Qui a négocié. ..
M. Savoie: La CARRA.
M. Filion: Le Conseil du trésor?
M. Croteau: La Commission administrative des régimes de
retraite.
M. Savoie: La CARRA, oui.
M. Filion: Les 400 employés
récupérés, est-ce qu'ils sont toujours à
l'emploi?
M. Savoie: Vous réalisez bien que ce sont des gens qui
sont sous la direction du ministère du Revenu, mais ça tombe dans
les montants que nous verse le gouvernement fédéral.
M. Filion: Non, non, ça je comprends, là. M.
Savoie: Oui, vous comprenez ça, là.
M. Filion: Mais moi, je veux savoir, des 400 personnes
récupérées, est-ce qu'elle sont toujours à l'emploi
du ministère?
M. Savoie: Écoutez, ce ne sont pas des agents
récupérés. Ce n'est pas du monde rapatrié;
ça donne une coloration que je n'accepte pas.
M. Filion: Non, mais, écoutez, là... les 400
personnes qui se sont jointes au ministère du Revenu...
M. Savoie: Bon, parfait!
M. Filion: ...si vous voulez changer les termes.
M. Savoie: Oui, qui se sont jointes.
M. Filion: Est-ce qu'elles sont toujours à l'emploi du
ministère du Revenu?
M. Savoie: Oui, je présume. Il peut y avoir ici et
là quelques départs, mais, d'une façon
générale, elles sont toujours chez nous.
M. Croteau: En fait, l'offre d'emploi avait été
acceptée. Au 1er juillet, il y avait 408 fonctionnaires
fédéraux qui avaient accepté l'offre d'emploi. Certains
ont accepté l'offre d'emploi, mais ne se sont pas
présentés, c'est-à-dire qu'ils ont trouvé du
travail au fédéral, etc. Actuellement, nous avons 367 personnes
de ces 408 qui avaient accepté la proposition, qui sont au travail.
M. Filion: Ils sont demeurés ou ils ont quitté la
fonction publique, c'est ça?
M. Savoie: On ne le sait pas.
M. Filion: Dans un sens plus large, au niveau transfert
fédéral, les fameux transferts qu'on reçoit, au
ministère du Revenu, comment ça fonctionne à ce
niveau-là?
M. Savoie: Les transferts?
M. Filion: Oui.
M. Savoie: Je ne comprends pas votre question.
M. Filion: Les transferts qui nous viennent d'Ottawa.
M. Savoie: Quels transferts?
M. Filion: Les transferts d'argent.
M. Savoie: Bon. Comment ça fonctionne?
M. Filion: Avec le ministère du Revenu.
M. Savoie: Ah! je ne le sais pas. Finalement, tu veux savoir
où entre le chèque.
M. Filion: Où entre le chèque? Comment ça
entre, le chèque, et basé sur quoi?
M. Savoie: Ça entre au ministère des Finances.
C'est tout.
M. Filion: Directement?
M. Savoie: II semble que oui.
M. Filion: Les calculs de points d'impôt, ces
choses-là, vous n'avez rien à voir dans ça?
M. Savoie: Les calculs? De quoi vous parlez? Est-ce que vous
parlez des montants de péréquation...
M. Filion: Oui.
M. Savoie: ...ou du montant qu'il nous verse pour
l'administration de la taxe de vente?
M. Filion: Les 2.
M. Savoie: Bien, les 2 sont gérés par le
ministère des Finances.
M. Filion: Toute la partie des transferts, c'est uniquement les
Finances qui gèrent ça?
M. Savoie: Toute la partie, le chèque que nous verse le
gouvernement fédéral pour notre gestion de la taxe de vente, la
TPS, va également, va immédiatement au ministère des
Finances. Tous les montants de péréquation vont tous au
ministère des Finances. Le ministère du Revenu est
préoccupé seulement par les revenus autonomes.
M. Filion: C'est ça qu'était ma question. M.
Savoie: Ça a pris du temps! M. Filion: Oui, M. le
Président.
Frais de gestion au ministère par rapport aux
sommes perçues
Le Président (M. Camden): J'aurais peut-être... Sans
doute l'information est-elle dans les documents, j'ai ce
questionnement-là. On sait qu'à une certaine époque
ça variait entre 1,25 $ et 1,75 $ pour réussir à obtenir
100 $ de revenus, au niveau de l'impôt. Est-ce que vous pouvez m'indiquer
le pourcentage ou, en dollar, par tranche de 100 $, le coût pour cet
argent? Également, pour chaque tranche de 100 $ ou de 1000 $ je
ne sais pas comment vous l'avez établi de votre côté
à l'égard de la TVQ et de la TPS?
M. Savoie: Ça va autour de 1,30 $.
Le Président (M. Camden): À l'égard de
l'impôt sur le revenu?
M. Savoie: Pour l'ensemble. Pour chaque 100 $
que le ministère du Revenu recueille, il y a un coût de
1,30$.
Le Président (M. Camden): Mais j'imagine que vous avez
sans doute des données à l'égard de la TVQ et à
l'égard de la TPS.
M. Savoie: Pas spécifiquement, mais ça serait
quelque chose qu'on pourrait peut-être établir d'une façon
générale.
Le Président (M. Camden): Vous savez, M. le ministre,
c'est parce que les gens dans le champ, évidemment, les contribuables,
ont un certain questionnement à cet égard. On doit
reconnaître aussi que c'est périodiquement nourri par les
médias d'information, dans lesquels on laisse croire, évidemment,
qu'il y a eu une embauche extraordinaire au niveau du ministère du
Revenu, que ça contribue... et que la majorité, voire un
pourcentage très élevé, des revenus des taxes de vente,
entre autres tant fédérale que provinciale passe
à la rémunération des fonctionnaires, des agents qui
doivent assumer le contrôle et la vérification.
M. Savoie: Oui. Comme vous l'avez bien souligné, M. le
Président, il s'agit là d'une perception souvent
transportée par des intervenants mal renseignés, mal
informés, ou qui ont carrément la volonté de
désinformer la population. D'une façon générale,
c'est que les coûts, au Québec, pour la perception de quelque taxe
que ce soit ou des impôts, sont très compétitifs lorsqu'on
nous compare, par exemple, avec d'autres gouvernements. il faut comprendre
qu'au québec, auparavant, il y avait tout le système de la taxe
de vente, taxe de vente qui, évidemment, ne brillait pas non plus par sa
simplicité. il y avait les secteurs inclus, les secteurs exclus. il y
avait des choses qui étaient taxées à 0 %, des choses
à 5 %, 6%, 7 %, 8 % et, évidemment, la complexité
nécessitait, là aussi, l'existence de plusieurs centaines de
fonctionnaires au ministère du revenu. (12 heures)
Lorsqu'on a transféré le système de la taxe de
vente, qui est un système qui est beaucoup plus étendu, qui doit
couvrir, comme vous le savez fort bien, les services et les immeubles, à
ce moment-là, avec la fusion que nous avons faite avec le gouvernement
fédéral, on pense que l'épargne nette, pour l'ensemble des
contribuables, est de plusieurs centaines de fonctionnaires. Évidemment,
si on avait 2 systèmes différents, comme, par exemple, en
Ontario, il y aurait dédoublement. Ici, il y a eu fusion, une
administration centrale. Donc, moins de gens nécessaires, donc un
coût moindre qu'ailleurs pour l'administration des 2 systèmes,
élément 1.
M. Filion: Combien moins?
M. Savoie: Ah! On peut parler... Je pense que, dans le temps, on
parlait de 500 personnes de moins.
Deuxièmement, c'est qu'on a évalué,
également, le coût pour les entreprises québécoises.
Au lieu de remplir 2 formulaires, comme on doit le faire actuellement en
Ontario, on n'en remplit qu'un, et on ne traite qu'avec un intervenant. Si ma
mémoire est fidèle, en 1991, lorsqu'on a commencé ce
débat, on avait parlé d'une épargne, pour les entreprises
québécoises, de l'ordre de 500 000 000 $. Alors, c'est
très élevé, et je ne voudrais pas... Je vous donne ce
chiffre sous réserve, sauf, toutefois, que je me rappelle d'avoir vu des
documents et des analyses sommaires qui expliquaient qu'il y avait une
épargne pour les entreprises québécoises, le fait qu'elles
ne traitaient qu'avec 1 intervenant, le fait que c'était tout,
finalement, sur le même formulaire.
Maintenant, l'harmonisation ne s'est pas faite aussi parfaitement qu'on
l'aurait voulu. Il y a eu des différences. Donc, le coût risque
d'être moins que les 500 000 000 $ prévus, mais ça vous
donne quand même un ordre de grandeur du montant. Même si vous le
mettez à 250 000 000 $, de moitié, ce qui serait, selon mon
évaluation, très bas, il y a là quand même une
épargne considérable pour l'ensemble, pour les 6 000 000 de
Québécois, par année récurrents. Alors,
à ce moment-là, donc, la fusion TVQ-TPS présente des
avantages dans le sens où il y a moins de fonctionnaires
fédéraux-provinciaux qui oeuvrent pour la gérance de la
taxe et, deuxièmement, évidemment, un coût moindre pour les
entreprises qui ne doivent travailler qu'avec 1 intervenant. On sait que le
gouvernement, par exemple, de l'Ontario le conçoit facilement.
Le Président (M. Camden): M. le ministre, pour bien
établir, je pense... Enfin, pour identifier les coûts, d'une part,
et savoir si on est performant, j'imagine que vous devez avoir sûrement
des données à l'égard de la perception de la TVQ. En tout
cas, je pense que ce serait à propos de le faire, de façon qu'on
puisse en identifier les coûts réels.
M. Savoie: On a des indications là-dessus, M. le
Président, qui vont peut-être vous intéresser. Notre
structure, l'approche générale du ministère était
de fusionner l'ensemble des fonctions sous un chapeau de taxes et
d'impôts. Au niveau du gouvernement fédéral, ça se
faisait toujours sous 2 ministères, c'est-à-dire qu'il y avait 1
ministre, mais il y avait vraiment 2 organisations indépendantes:
Douanes et Accise et Revenu. Là, ils se sont fusionnés. Donc, ils
nous laissent croire qu'on était, au point de vue organisational, en
tout cas, dans les grands paramètres, structurés de la bonne
façon.
L'autre façon, c'est de se comparer, de voir ce qui se passe
ailleurs. Par exemple, le niveau de participation des entreprises et des
particuliers, dans notre système fiscal, est plus élevé
qu'ailleurs. Les demandes de renseignements, d'information sont
particulièrement élevées chez nous. Ça veut dire
qu'il y a donc un échange constant avec le public, qui nous indique
qu'au point de vue réception ça fonctionne bien. Ensuite, on
cherche à évaluer les coûts. Lorsqu'on évalue les
coûts
par 100 $, il y a plusieurs façons de le faire. Il y a tels
coûts dont on peut ou dont on ne peut pas tenir compte. Donc, ça
varie énormément. D'une façon générale, les
échos et les informations que nous avons, provenant d'autres provinces,
d'autres paliers de gouvernement je pense au gouvernement
fédéral c'est que ça fonctionne bien chez nous et
que les coûts ne sont pas surélevés.
Le Président (M. Camden): M. le ministre, vous ne croyez
pas qu'il serait approprié, peut-être, d'au moins émettre
certaines informations aux médias, de façon à corriger
cette impression dans la population, du coût énorme de la gestion
des taxes de vente, de façon à rétablir les faits?
Evidemment, c'est largement répandu dans la population.
M. Savoie: Oui. Effectivement, c'est largement répandu.
Vous avez bien raison que, peut-être, une sensibilisation additionnelle
au niveau de la presse serait à propos.
Perception rétroactive de taxes auprès
d'organismes à but non lucratif
Le Président (M. Camden): II y a un certain nombre
d'organismes sans but lucratif qui font appel, évidemment, à
nous, dans nos bureaux de comté, puisqu'ils reçoivent, entre
guillemets, je pense, des avis de réclamation, de cotisation à
l'égard d'activités qu'ils auraient tenues et sur lesquelles des
taxes n'auraient pas été versées, et ce, d'une
façon rétroactive et d'une façon assez rétroactive,
je dois le reconnaître, sur plusieurs années. Je dois vous dire
que, chez eux, ça les ébranle considérablement, puisqu'il
ne s'agit pas, en soi, de concurrencer les commerces locaux d'une façon
déloyale, mais dans leur esprit, de générer de l'argent
qui, par le fait même, leur permet d'assumer des responsabilités,
et parfois, également, des responsabilités, soit de contribuer
financièrement à la réalisation de certains projets dans
le milieu, suite à un désengagement soit de l'Etat
fédéral ou de l'État provincial ou même de la
localité, de la municipalité. Ça permet, bien des fois, de
suppléer et de réaliser des projets sur une base
bénévole, qui sont importants pour le milieu et qui contribuent
d'une façon importante à l'évolution du milieu et à
sa progression.
Je dois vous dire que ça ébranle ces groupes d'une
façon importante. Il y en a même qui nous disent: On va fermer les
livres. On va s'en remettre... et l'État assumera ses
responsabilités. Alors, c'est manifestement inquiétant comme
attitude. Je ne pense pas que le mouvement se généralise à
cet égard, mais il se pourrait très bien qu'un bon nombre de
gens, par désabusement, laissent la responsabilité à
d'autres paliers.
M. Savoie: Vous avez bien raison.
Le Président (M. Camden): C'est systématique. J'ai
d'ailleurs transmis, chez vous, des demandes, mais j'ai constaté,
récemment encore, qu'il y avait d'autres groupes qui avaient
été visés par de telles mesures.
M. Savoie: Effectivement, oui, pour les organismes à but
non lucratif qui, pour les fins d'une activité de financement, vont
intervenir d'une façon financière auprès du grand public,
vont constater qu'ils ont oublié certains éléments, qu'ils
n'ont pas taxé là où ils auraient dû taxer. Lors
d'une révision, ils se font expliquer les normes comme il se doit, et
ils constatent effectivement qu'ils doivent un montant additionnel. Ça
peut être particulièrement irritant. Toutefois, on a des services
de renseignements, et il existe, au niveau du public, plusieurs
spécialistes qui peuvent les aider dans ces
démarches-là.
Le Président (M. Camden): Je dois vous dire que, dans
l'information qui est transmise, on ne pèche pas par excès
d'information. C'est vague, c'est imprécis, et on doit reconnaître
aussi une chose. Ces gens-là sont des bénévoles. Ils ne
font pas ça sur une base régulière, ils ne sont pas plus
rémunérés, et quand ils reçoivent ça, on dit
qu'ils passent le dossier au suivant. Puis, le suivant, des fois, il passe
ça au député. On se ramasse avec le dossier. On aimerait
ça qu'il soit un petit peu plus précis, l'objet. Ça nous
oblige, d'une part, à écrire à votre cabinet pour nous
faire préciser l'objet de la réclamation, et on espère
bien qu'on nous le précise.
M. Savoie: Écoutez, je suis député
également. Je vis également la même situation. Il m'est
arrivé déjà, à 2 ou 3 reprises, que des organismes
à but non lucratif se présentent au bureau de comté, et
viennent nous voir pour des explications additionnelles sur des points
très précis, parce qu'ils ont de la difficulté à
saisir.
Il faut bien comprendre que le système, tel que nous le
connaissons, n'existe que depuis 9 mois: 260 jours, 270 jours, ce n'est pas
énorme, d'une part. D'autre part, c'est qu'ils avaient souvent une
méthode de fonctionnement qui tenait compte de l'ancienne
réalité, et la nouvelle réalité, au niveau des
taxes, les prend par surprise. Des fois, on ne va même pas à
l'information. Alors, c'est sûr que nous voulons desservir mieux les
organismes à but non lucratif pas de doute là-dessus. Pas
de doute non plus qu'on va tâcher de les rejoindre davantage, parce qu'on
ne veut pas punir ces gens-là qui, comme vous l'avez mentionné,
font ça à des fins charitables. Alors, si on oublie de consulter
un spécialiste de la question, si on oublie d'entrer en communication,
de prendre contact avec le ministère du Revenu pour obtenir des
informations, à ce moment-là, effectivement, il risque d'y avoir
des surprises. (12 h 10)
Le Président (M. Camden): Vous savez, lorsqu'ils
reçoivent ça, évidemment, ils se sentent, manifestement,
très agressés.
M. Savoie: Oui.
Le Président (M. Camden): Également, peu
appréciés pour leur bénévolat. Remarquez que
ce n'est probablement pas le rôle du ministère du Revenu de faire
des appréciations en matière de bénévolat, mais on
doit reconnaître que c'est très agressant à bien des
égards et que, sans doute, peut-être avant de se lancer dans une
vaste opération pour recueillir des fonds, on aurait peut-être
intérêt à les sensibiliser, à les informer
préalablement et, par la suite, peut-être, procéder.
Mais au moment où on se parle, je dois vous dire qu'on a vu des
choses... Bon, reculez vous me dites que ça fait 9 mois en
tout cas, on recule dans le temps, et ces gens-là disent: Bien, nous,
sans doute qu'on passe à la caisse, mais est-ce que tous les groupes
sans but lucratif du milieu vont également passer à la caisse?
Ça crée un mouvement un peu particulier. Ils ont un sentiment, un
peu, d'injustice, entre guillemets.
M. Savoie: Oui, c'est ça. On a introduit un ensemble de
mesures visant à renseigner davantage les gens au niveau local. On a
équipé des gens pour leur permettre de faire une tournée,
par exemple, des chambres de commerce.
Alors, on avait, par exemple, avec la Chambre de commerce du
Québec, établi un mécanisme de rencontre avec les
différentes chambres de commerce. Lors de ces rencontres avec les
différentes chambres de commerce, on invite les présidents des
organismes à but non lucratif à se présenter, et je pense
que ça se fait au niveau de la chambre de commerce locale, qui prend
contact avec ces différents présidents-là pour les
renseigner. Il y a des mesures qui se font sur le terrain, concrètes,
directes, pour rejoindre les présidents de ces organismes.
Je suis très sensible à votre critique parce que, comme je
vous l'ai mentionné tout à l'heure, je fais, moi aussi, du bureau
de comté régulièrement. Effectivement, on a l'occasion
d'échanger de temps à autre avec le représentant d'un
organisme à but non lucratif.
Maintenant, il en revient au président et à l'organisme de
se renseigner au niveau de la taxe de vente, et d'obtenir les informations
là où elles sont disponibles et elles sont disponibles. Ce
n'est pas une question de cacher l'information. Bien, on va de l'avant, et on
transmet de l'information de façon constante.
Le Président (M. Camden): En tout cas, si je pouvais,
à tout le moins, M. le ministre, vous indiquer qu'il y a
évidemment des circonscriptions, dont la mienne, où on n'a pas de
chambre de commerce. Évidemment, il y a d'autres groupes, tels les
fédérations. Prenons la fédération des cercles des
fermières. Il y a aussi le regroupement au niveau des clubs que
ce soit Optimiste, Lion, Richelieu. Enfin, on peut passer en revue, d'une
façon assez large, l'ensemble de ces organismes. Il y a les conseils
régionaux de loisirs qui pourraient... Je ne sais pas, peut-être y
a-t-il eu aussi de l'information qui leur a été transmise... mais
de façon à la diffuser d'une manière plus large. Je ne
pense pas que je vous soumettrai nécessairement une liste d'organismes,
pour que vous puissiez procéder à une cotisation ou à une
vérification exhaustive auprès de l'ensemble de ces groupes, mais
si, à tout le moins, on procédait auprès des
fédérations, fédérations des clubs de l'âge
d'or... Sans doute, y aura-t-il des clubs de l'âge d'or qui seront
également cotisés pour certaines activités. Je pense que
ça permettrait à tout le moins de préparer les esprits
à cet égard-là et, peut-être, de s'ajuster à
la réalité.
M. Savoie: Oui, oui, c'est sûr que c'est une piste
intéressante, et on en prend bonne note.
Il y avait des mécanismes établis. Par exemple, lorsque
vous faites la demande pour un permis, un organisme à but non lucratif
qui fait une démarche auprès du gouvernement et qui demande un
permis de boisson pour une activité. Sur le retour de cette demande
d'information, l'accusé de réception, on lui transmet
également des informations au niveau de la taxe de vente. Il y a des
interventions qui se font; il y a des choses qui se font sur le territoire.
Maintenant, le sens de votre commentaire, c'est d'en faire plus,
peut-être de rejoindre les fédérations pour s'assurer
que... pour qu'on puisse avoir de l'information à transmettre aux
différents chapitres. C'est retenu comme intervention.
Le Président (M. Camden): Je vous remercie.
Frais de gestion liés aux nouveaux avis de
cotisation
M. Filion: Moi, j'aurais une question. J'aimerais savoir quel est
le... Il y a toujours des ratios qui existent, tant au niveau de la
vérification... La cotisation immédiate là, une personne
qui cotise, quand elle reçoit la déclaration d'impôt, c'est
quoi le rendement de correction fiscale par rapport à son salaire, les
perceptions additionnelles qu'elle va aller chercher si elle n'avait pas fait
le travail, par exemple. Avez-vous une idée de ça?
M. Savoie: Allez-y, M. Croteau.
M. Croteau: Bertrand Croteau, sous-ministre adjoint.
Le Président (M. Camden): Oui, M. Croteau.
M. Croteau: De façon générale, sur les
opérations de vérification, quand on prend une strate très
déterminée, c'est-à-dire une opération
circonscrite, on peut dire que les rendements, sur des cibles données,
comme en cotisation immédiate, sont de l'ordre de si on prend les
traitements rapportent 6 à 7 fois le coût du
traitement.
M. Filion: Mais le coût du traitement, ça inclut le
matériel, etc.
M. Croteau: Traitement et fonctionnement seulement. Pas tout
l'appareillage gouvernemental, mais ce
qu'on avait tout à l'heure, peut-être... traitement plus un
facteur de 20 % à 25 %.
M. Filion: Quel est le pourcentage de déclarations que
vous vérifiez? À la cotisation immédiate, vous ne
vérifiez pas toutes les déclarations.
M. Savoie: C'est selon les règles de l'art. On ne veut pas
divulguer ces données-là.
M. Filion: Vous ne pouvez pas les divulguer? M. Savoie: On
ne veut pas les divulguer. M. Filion: Pourquoi? M. Savoie: Parce
que c'est confidentiel.
M. Filion: Oui, mais on est en commission parlementaire. On peut
poser des questions d'ordre général.
M. Savoie: On a beau être en commission parlementaire.
..
M. Filion: Vous n'êtes pas en train de donner des noms. Je
vous demande un pourcentage.
M. Savoie: Oui, mais ce n'est pas un procès non plus. Ce
que je suis en train de vous dire, c'est qu'on connaît le chiffre. Le
chiffre nous apparaît raisonnable. Si on compare avec ce qui se fait
ailleurs, ça se fait selon les normes.
M. Filion: Mais c'est quoi, le chiffre? Il n'y a rien de secret
dans ça.
M. Savoie: C'est ça. On veut exiger un peu de prudence, et
on va examiner la question plus en détail, pour voir si ça va
créer préjudice à nos opérations de
vérification. Si ça ne crée pas de préjudice...
M. Filion: Si ça va créer préjudice...
M. Savoie: ...on va le rendre public. Si ça crée
préjudice, on va le garder pour nous.
M. Filion: Pourquoi ça créerait
préjudice?
M. Savoie: Bien, parce que... Si on commence à
étaler nos mécanismes de vérification, il va être
facile de contourner le ministère.
M. Filion: Je ne vous demande pas d'expliquer comment vous
faites, je vous demande combien vous en vérifiez?
M. Savoie: Bien oui, mais c'est ça. On commence avec
ça.
M. Filion: Non, non, mais le pourcentage.
M. Savoie: Oui, mais je ne suis pas obligé de vous
répondre, M. le député. Je ne suis pas obligé de
vous donner l'information...
M. Filion: Vous n'êtes pas obligé de me
répondre, mais...
M. Savoie: ...que vous demandez. Là, je pense que vous
nous demandez combien de personnes sont vérifiées.
M. Filion: À la cotisation immédiate. M. Savoie:
À la cotisation immédiate.
M. Filion: Même si vous vouliez dire que vous les
vérifiez toutes, on le sait que ce n'est pas possible.
M. Savoie: Alors, ça, à ce moment-ci, on va
vérifier avant de vous répondre, pour être sûr, pour
savoir exactement si l'information qu'on vous donne pourrait porter des torts
à nos méthodes de fonctionnement.
Le Président (M. Camden): Si vous permettez. Parmi les
déclarations où vous procédez à une
vérification, quel est le pourcentage de celles-là qui font
l'objet d'un nouvel avis de cotisation?
M. Savoie: ça, on est capable de vous donner ça en
pourcentage. on est capable de faire ça. une nouvelle cotisation...
celles qui sont révisées et qui font l'objet d'une nouvelle
cotisation, en pourcentage, on parle de 10 %.
Le Président (M. Camden): 10 %?
M. Savoie: Une modification à la cotisation. En tout cas,
on se comprend.
M. Filion: C'est 10 % de combien? Des voix: Ha, ha,
ha!
Le Président (M. Camden): C'est 10 % de 100 %.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Savoie: Écoutez, ce n'est pas parce que je veux retenir
des informations, mais avant, on va utiliser un peu de prudence. On va
vérifier ça chez nous. Si ça ne porte pas
préjudice, si ça a déjà été
dévoilé, des choses comme ça, on va vous transmettre
l'information. Mais là, c'est parce qu'on ne veut pas à ce
moment-ci.
M. Filion: Moi, j'ai... Oui...
Le Président (M. Camden): Je m'excuse. De ces 10 %, quelle
est la rentabilité de l'opération? Est-ce que
ça couvre la totalité des frais?
M. Savoie: La rentabilité... Regardez, on va chercher
beaucoup d'argent, bien sûr.
Le Président (M. Camden): Oui, on s'en rend compte, oui.
(12 h 20)
M. Savoie: Par contre, c'est comme je vous dis... C'est que
lorsqu'on parle des coûts, on n'est pas en train de vendre, par exemple,
des bouteilles de bière. C'est parce que ça a un impact aussi au
niveau de l'observance. S'il n'y avait pas de vérification, il n'y
aurait pas d'observance. C'est aussi simple que ça.
Le Président (m. camden): je conviens de ça, fort
bien, m. le ministre, mais ce que je voulais savoir, c'est: de ce 10 % qui font
l'objet d'un nouvel avis de cotisation j'imagine que ces nouveaux avis
de cotisation sont généralement pour... non des remises de la
part de l'état à l'égard du contribuable, mais
plutôt l'inverse c'est quoi, la rentabilité? est-ce qu'on
couvre les frais ou on ne les couvre pas? je n'exclus pas le fait que ça
doit être contraignant, que ça invite au respect de la loi et
à l'application des règlements. je ne remets pas ça en
cause... seulement pour...
M. Savoie: Alors, on m'avise que, pour le gouvernement du
Québec, il y a une source de revenu intéressante.
Le Président (M. Camden): Est-ce que vous ne pourriez pas
faire en sorte que ces vérifications soient plus largement
étendues, et qu'elles aient une application plus large?
M. Savoie: Elles sont déjà assez étendues au
Québec, à cause, évidemment, au niveau des particuliers,
des 2 systèmes d'imposition. C'est-à-dire que le gouvernement
fédéral fait son travail, fait ses vérifications, et il
nous avise. Nous, de notre côté, nous faisons la même chose,
et on avise le gouvernement fédéral. Donc, il y a, au niveau du
territoire québécois, un petit peu plus de vérification
qui se fait pour l'ensemble de la population et elle est un petit peu plus
intense qu'ailleurs à cause, justement, des 2 systèmes.
Le Président (M. Camden): Est-ce que, pour les
vérifications qui sont faites, l'on procède d'une façon
arbitraire, sur une base mathématique de tirage ou d'une façon
très sélective? Est-ce qu'on vise particulièrement
à vérifier davantage les rapports qui sont produits par les
individus, par les bureaux comptables ou par les firmes
spécialisées?
M. Savoie: Peut-être que M. Robert pourrait vous
répondre, sans vous donner toutefois des chiffres ni divulguer nos
méthodes spécifiques.
Le Président (M. Camden): M. Robert.
M. Robert: Marcel Robert, sous-ministre adjoint à la
vérification.
Notre programmation est faite au début de chaque année, le
nombre de dossiers que nous allons vérifier. Tous ces dossiers-là
sont choisis par ordinateur, d'une façon très scientifique. Ce
sont nos chefs de service immédiats qui, parmi ces dossiers-là,
vont choisir le nombre de dossiers que nous avons à vérifier,
mais le premier tri des dossiers est fait de façon scientifique. Disons
qu'on peut en sortir, par exemple, par unité, 200, et ils vont en
choisir 50 parmi ces 200, mais c'est fait scientifiquement.
M. Filion: Ça, c'est la vérification qui suit la
cotisation immédiate?
M. Robert: Non. C'est la vérification ordinaire.
M. Filion: Mais, quand la déclaration arrive, vous ne
faites pas un tri par ordinateur?
M. Robert: Non, non. Là, c'est la Direction
générale des opérations qui se trouve à faire son
travail de cette façon-là. Je pense qu'ils ont leur
méthode. Moi, je parle de la vérification qu'on fait, chaque
année...
M. Filion: Durant l'année. M. Robert: ...de nos...
M. Filion: Durant l'année. M. Robert: C'est ça.
M. Filion: Le fédéral, semble-t-il, révise
environ 2 % des déclarations annuelles produites. Est-ce que ça a
du bon sens, selon vous?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Savoie: II faudrait en parler avec le fédéral,
je ne suis pas au courant. Je ne sais pas si quelqu'un connaît ça,
mais il faudrait peut-être vérifier avec M. Jelinek ou M.
Gravel.
M. Filion: Non, mais, des fois... vu que vous marchez
souvent...
M. Savoie: Ou votre député...
M. Filion: ...main dans la main, vous pourriez peut-être
avoir une entente similaire.
M. Savoie: ...fédéral. Pardon?
M. Filion: Vu que vous marchez souvent main dans la main, vous
pourriez avoir une entente similaire.
M. Savoie: On marche main dans la main, effectivement, au niveau
de la taxe de vente, de la TPS, et
également, comme vous le savez, au niveau des lois fiscales,
d'une façon générale. Maintenant, nos modes de
fonctionnement, à l'interne, sont propres à...
Variation des effectifs à la Direction
générale des opérations
M. Filion: Tout à l'heure, je posais la question: Quel est
le rendement d'un vérificateur à la cotisation immédiate,
lorsque la déclaration est produite? Il y a des gens qui, cette
année, n'ont pas été réembauchés, chez vous,
à la cotisation immédiate, parce que vous avez coupé vos
effectifs. Alors, je cherchais à comprendre pourquoi vous avez
coupé vos effectifs.
M. Savoie: II y a un problème de vocabulaire. Depuis le
début de la journée, vous parlez toujours d'une
vérification immédiate. Je pense que vous faites
référence à la Direction générale des
opérations, c'est-à-dire celle qui reçoit les rapports
d'impôt, qui fait une vérification sommaire et qui, par exemple,
peut émettre des avis, les cotisations nécessaires suite à
la première présentation. Il ne faudrait pas confondre ça
avec la vérification et l'observance fiscale, qui relèvent de M.
Robert. Donc, au niveau de la DGO, dont vous parlez, vous dites que, cette
année, au niveau de la Direction générale des
opérations, vous avez quelqu'un que vous connaissez, qui n'a pas
été embauché chez nous, qui était embauché
auparavant.
M. Filion: Moi, j'ai une pétition de quelques personnes
ici.
M. Savoie: Ah! Bon! Bien là, on le sait. Il faudrait
être clair. Oui effectivement, j'ai vu cette pétition-là.
Je l'ai reçue moi aussi. Je pense que ça a été
signé par 16 personnes, qui étaient au ministère du
Revenu, c'est ça?
M. Filion: Oui, oui, c'est ça.
M. Savoie: C'est ça. Ah, oui, c'est ça.
M. Filion: Alors, pourquoi, ces gens-là, qui avaient une
expertise et une expérience, qui étaient embauchés
d'année en année, qui, en principe, ont un rendement au
ministère, qui rapportent quand même des sous, pourquoi le
ministère a-t-il coupé ces effectifs? Quand même, vous ne
vérifiez pas toutes les déclarations.
M. Savoie: Vous parlez, finalement, d'un secteur, si ma
mémoire est fidèle, où on a 2000 personnes. Vous parlez
également d'un secteur où on en embauche à peu près
1000 pour les fins, habituellement, des rapports d'impôt, à temps
partiel. Là, vous me parlez des occasionnels. Il y a 16 personnes qui
n'ont pas été embauchées. Ça ne veut pas dire que
le travail ne se fait pas. Ça veut dire qu'il se fait
différemment. Il peut se faire d'une autre façon. Il ne faut pas
oublier non plus qu'au ministère il y a une pression constante au niveau
de la mécanisation, au niveau de l'automatisation. Donc, il y a une
pression à la baisse constante au niveau du nombre d'employés
qu'on embauche, soit d'une façon occasionnelle ou même au niveau
des permanents.
On a eu l'occasion de vous démontrer, par exemple, qu'au cours de
1992-1993, 1993-1994, il y a eu une baisse de 133 emplois, suite à la
mécanisation et à l'automatisation, pour réduire justement
le coût du fonctionnement du ministère, donner un meilleur
traitement, plus rapide. C'est sûr que ça implique des pertes
lorsqu'on s'embarque dans la refonte des systèmes et des
mécanismes de cette nature-là. Donc, je suis très au
courant de la lettre que vous avez reçue. J'en ai reçu copie
également. J'en avais discuté, à ce moment-là, avec
le sous-ministre, qui m'a fourni les informations, les explications que j'ai
jugées suffisantes.
M. Filion: Ils ont été remplacés par des
machines. C'est ça que vous dites?
M. Savoie: Non, pas nécessairement. Non, mais pas
nécessairement eux, parce que je ne sais pas spécifiquement ce
que ces gens-là faisaient, de façon constante, mais il faut
comprendre que, sur une masse de 2000 quelques personnes à plein temps
et 1000 occasionnels, lorsqu'il y a une réduction quelque part,
ça va apparaître en descendant quelque part aussi. Alors, j'ai
reçu copie du document, là. Finalement, c'est une espèce
de pétition, où on dit: Bon, on a été
traités d'une façon qui n'est pas dans l'intérêt du
gouvernement du Québec, parce qu'en nous réduisant, on
réduit, finalement, le travail du ministère du Revenu, qui est de
faire des vérifications, qui est de faire, au niveau de la DGO... Or,
vérification faite de leurs allégations, les informations
obtenues dans le rapport du sous-ministre, j'ai constaté que
l'information qu'ils présentaient, en disant: Si vous coupez du monde,
vous allez avoir moins de revenus... était peut-être vraie, en
partie, mais on doit également tenir compte des phénomènes
comme l'automatisation, la robotisation, la mécanisation, de nouvelles
façons de faire.
On peut, par exemple, prendre une ligne de traitement, qui est en
fonction chez nous, trouver un mécanisme plus simple d'opérer
cette ligne, en réduisant le nombre de personnes qui y travaillent, une
amélioration. On va réduire le nombre de personnes qui y
travaillent, mais on va augmenter le service et le traitement en
conséquence. Ce n'est pas parce qu'on réduit d'un employé
que, tout de suite, on baisse d'une coche, et qu'on donne un employé de
moins de service. Ce n'est pas ça du tout.
M. Filion: Non, écoutez, si, effectivement, vous aviez un
pourcentage important de vérifications à la Direction
générale des opérations, je pourrais comprendre. Mais,
étant donné que c'est tellement minime, le pourcentage que vous
vérifiez, pourquoi réduire les effectifs à ce
niveau-là? C'est des gens qui vont chercher des deniers publics.
M. Savoie: II n'y a pas de réduction au niveau de ce
secteur-là.
M. Filion: Vous n'avez pas eu de réduction? M. Savoie:
Non.
M. Filion: Vous avez remplacé ces gens-là par
d'autres?
M. Savoie: C'est-à-dire que... Vous regardez ça
à la pièce, vous. Il faut regarder l'ensemble. L'ensemble, c'est
qu'il y en ait tant vérifiées, qu'il y en ait tant
cotisées, que le tout combine à donner un bon rendement au niveau
du fonctionnement du ministère. Alors, c'est sûr, là, que
sur une structure qui comprend 6000 personnes à temps complet, sans
parler des temps occasionnels, qu'il y a des fluctuations constantes.
M. Filion: Non. Je vous suis, M. le ministre, mais il reste quand
même que de la cotisation immédiate, ça reste de la
cotisation immédiate, même si vous ajustez vos machines,
là. Je veux dire, ça ne change pas ça. La cotisation
immédiate...
M. Savoie: Quand la cotisation immédiate... (12 h 30)
M. Filion: La cotisation immédiate, il faut
vérifier les données financières.
M. Savoie: Oui, oui, mais ce n'est pas parce qu'il y a 16
personnes, 16 occasionnels qui étaient là et qui ne sont plus
là, que, finalement on donne un service moindre. Il est très
concevable que, même en réduisant de 100 fonctionnaires, on puisse
donner un meilleur service, parce que tout ce qu'on a à faire, c'est de
réo-garniser les méthodes de travail, introduire, par exemple, de
l'équipement sophistiqué, et on va augmenter notre rendement.
Alors, il n'y a pas de relation nécessaire entre les 2, quoiqu'il faille
être vigilant. Je comprends, et c'est le sens de votre question. Vous
nous demandez... et on vous a répondu. Après vérification
obtenue, la réponse c'est: Non, il n'y a pas de réduction au
niveau de...
M. Filion: Vous admettrez avec nous que ça devient
inquiétant, parce que, de l'extérieur, on s'aperçoit que
les recettes sont moindres au ministère, au niveau de l'impôt des
sociétés. Au niveau des particuliers, on va le voir, le budget va
sortir. Les particuliers, ça se contrôle mieux, mais au niveau des
sociétés et au niveau des petites entreprises, les revenus de
location, les revenus d'entreprises, tout ce qui s'appelle information
autonome, ça demande des vérifications de base, même
à la cotisation immédiate. Puis, il y a beaucoup de
réclamations des crédits, etc.
Moi, je suis un peu sceptique parce que, quand on reçoit une
lettre comme ça, ça donne quand même l'impression, de
l'extérieur, qu'au ministère du Revenu on ne met pas l'accent sur
une vérification qui, normale- ment, devrait être même
accrue le plus possible. C'est des deniers publics qu'on va chercher. Et
là, il y a 16 personnes qui ne retrouvent pas d'emploi et qui auraient
pu être réaffectées certainement à la cotisation
immédiate, peu importe le changement de machines que vous avez fait,
pour faire peut-être plus de déclarations, réviser plus de
déclarations produites, tout simplement, et aller chercher un certain
rendement au ministère.
C'est dans cet esprit-là qu'on perçoit, de
l'extérieur, mal ce genre de situation-là, peu importent les
raisons pourquoi ces gens-là n'ont pas été
réembauchés. Mais il demeure quand même un fait: vos
déclarations, vous ne les vérifiez pas toutes; c'est très
minime, votre pourcentage. Je comprends que vous ne vouliez pas le donner
ça, je peux comprendre mais il demeure que c'est
très, très, très, très minime. C'est en bas de 10
%, j'en suis presque sûr. il demeure un fait, c'est que ces
gens-là auraient pu être réutilisés à
l'intérieur du ministère, créer de l'emploi, et rapporter
des deniers publics à l'état. c'est là que je pense que,
vu de l'extérieur, on comprend mal.
Vous avez beau tenir le langage général de la
réorganisation du ministère, sur la cotisation immédiate,
à la Direction générale des opérations, des gens
qui reprennent la déclaration d'impôt, qui la regardent... Ce
n'est pas des machines qui vont regarder ça, c'est des personnes. Ces
personnes-là peuvent faire des examens sommaires de départ pour
identifier effectivement des anomalies. C'est là que je trouve ça
bizarre, comme situation. C'est pour ça que je n'arrive pas à
comprendre. Ces gens-là, non plus, ne comprennent pas. Quand ils
prennent le soin de nous écrire, bien, c'est que je suppose que, quelque
part, il se passe des choses au ministère, où on se dit: Comment
se fait-il qu'on n'augmente pas les effectifs à ces niveaux-là,
plutôt que de les réduire? C'était dans ce sens-là
qu'était ma question.
M. Savoie: Évidemment, on partage les inquiétudes.
C'est sûr qu'il y a une masse critique qui est absolument
nécessaire pour exécuter le mandat du ministère du Revenu.
Il est certain, également, que le ministère du Revenu ne fait pas
l'objet d'une évaluation, dans le style qui nous accorde beaucoup de
gras dans nos structures. C'est une machine qui, finalement, performe, performe
bien. Les gens travaillent au ministère du Revenu. Je pense que sa
réputation est faite en ce sens, hein? Oui, 11 y a des ministères
où ça travaille très peu, parce que c'est dans la nature
de leurs fonctions. alors, au ministère du revenu, les gens qui sont
chez nous travaillent, ils pédalent. de façon
générale, c'est reconnu comme ça. on est très
sensible à des réductions de personnel qui, finalement,
porteraient atteinte à l'exécution de notre mandat. d'ailleurs,
au point où on va refuser toute réduction, bien sûr, qui
impliquerait une menace à l'exécution de notre mandat.
Ceci étant dit, il y a, dans le cours normal des
opérations du ministère, des opérations d'ajustement. Ce
que vous avez sous la main, c'est une lettre, comme j'ai reçue, comme je
vous l'ai dit, qui fait tout simplement état d'un ajustement qui a
été fait auprès de certains
occasionnels, et qui, évidemment, se sont défendus, comme
il se doit. Ils nous ont écrit une lettre. Ils nous ont dit: Aïe!
Pas correct. On pense que ce n'est pas dans votre intérêt. Alors,
j'ai pris la lettre, et on s'est renseigné auprès du bureau du
sous-ministre pour avoir les informations qui pouvaient expliquer la nature de
cette lettre et les allégations qui y sont contenues. Les
réponses qui ont été fournies ont été
jugées suffisantes. En conséquence, il n'y a pas eu de suite
donnée à la lettre.
M. Filion: Alors, ça ne dérangeait pas le mandat du
ministère que d'avoir remercié ces gens-là tout
simplement. C'est ça que vous dites?
M. Savoie: D'aucune façon, M. le député.
Économies découlant de l'administration
unifiée de la TPS et de la TVQ
M. Filion: J'aurais une autre question concernant toujours...
Tout à l'heure, vous avez lancé un chiffre, le nombre de
personnes de moins suite à l'unification des 2 taxes la TPS et la
taxe de vente du Québec. Vous avez lancé le chiffre que ça
faisait sauver 500 années-personnes.
M. Savoie: Je pense que c'était... On parlait d'une
économie... Excusez-moi, j'ai dit 500, je me suis trompé. C'est
une économie d'environ 600 personnes au début.
M. Filion: Le fait d'unifier les 2 structures, on sauve 600
personnes. C'est ça?
M. Savoie: Oui. On disait, par exemple... Lorsqu'on avait
examiné ça, on avait dit que s'il y avait une gestion
séparée pour administrer les 2 taxes, on parlait d'un minimum de
3000 personnes. S'il y avait une gestion intégrée, on parlait de
2400.
M. Filion: Ces 600 personnes, par rapport à vos standards,
ça représente... L'espace de bureau, etc., c'est combien de
millions de dollars, ça?
M. Savoie: On parle de 30 000 000 $ par année. M.
Filion: Pour 600 personnes? M. Savoie: Oui.
M. Filion: Tout à l'heure, vous aviez 400 personnes que
vous aviez recrutées, puis ça vous coûtait 80 000 000
$.
M. Savoie: Non, non, non. Vous êtes mêlé dans
vos chiffres, là. Les 60 personnes...
M. Filion: Je ne suis pas mêlé dans mes chiffres, M.
le ministre. Regardez les chiffres qu'on a reçus.
M. Savoie: Pour les 60 personnes, on parlait... Je pense que
c'était 22 000 000 $ en tout et partout.
M. Filion: Écoutez, tout à l'heure, on m'a dit que
vous aviez pris 408 personnes...
M. Savoie: On parle de tout à l'heure, là, et je
vous le dis. Pour les personnes, c'était 22 000 000 $ pour les 60
employés. Vous lirez les...
M. Filion: Non, non. M. le ministre, vous ne me suivez pas.
M. Savoie: Ha, ha, ha! O.K.
M. Filion: Laissez-moi terminer, vous allez comprendre.
M. Savoie: D'accord. Ça marche.
M. Filion: Tout à l'heure, on parlait de 408 personnes de
la fonction publique fédérale, qui se sont jointes au
Québec. Bon an, mal an, vous allez facturer pour ces gens-là,
cette année, 80 000 000 $.
M. Savoie: Non.
M. Filion: Non? Ce n'est pas ça?
M. Savoie: Non.
M. Filion: Les 80 000 000 $ que vous avez facturés, c'est
pour quoi? La gestion fédérale...
(Consultation)
M. Savoie: C'est les lois, c'est ça, c'est tout. C'est le
tout.
M. Croteau: c'est-à-dire que c'est 50 % des 2400 effectifs
auxquels on a fait référence, ajustés d'un facteur
administratif que le fédéral doit verser, qui est de 1,75.
M. Filion: C'est ça, mais si vous appliquez un facteur
administratif à mes 600 personnes, ça fait quoi?
M. Savoie: Oui, mais, M. le député, M. Croteau a
également dit que le coût par employé du gouvernement
fédéral était à peu près de 40 000 $. Prenez
40 000 $, multipliez-le par 400.
M. Filion: Mais il faut multiplier par 1,75. M. Croteau:
C'est ça.
M. Filion: Puis, quand vous arrivez à 80 000 000$, vous
autres ici, pourquoi on arrive... parce que le facteur de 1,75 ne donne pas 80
000 000 $.
(Consultation)
M. Roy (Onil): Onil Roy. 2400 effectifs, si vous le calculez
très grossièrement, à 40 000 $, vous arrivez à 96
000 000 $. Vous le majorez du facteur 1,75, et vous appliquez le 50 %, qui est
le remboursement du fédéral. Vous êtes à peu
près sur les chiffres.
Le Président (M. Camden): Pour le bénéfice
du Journal des débats, il s'agit de M. Onil Roy.
M. Roy: Sous-ministre adjoint.
M. Filion: C'est sur les effectifs totaux, votre 50 %?
M. Roy: C'est ça. C'est le coût des effectifs
totaux, majoré du facteur 1,75 ou 1,74 plus exactement 50
% de ça, qui est le remboursement fédéral.
Économies découlant de la fusion de
l'ensemble des opérations en matière de fiscalité
M. Filion: De l'intérieur, avez-vous déjà
fait le calcul sûrement que vous avez fait le calcul que si
on arrivait à fusionner les autres opérations en matière
de fiscalité, c'est-à-dire l'impôt des corporations,
l'impôt des individus, ça pourrait être quoi,
l'échelle d'économies?
M. Savoie: Ha, ha, ha! On est encore sur une autre marotte du
député de Montmorency, qui dit que le gouvernement du
Québec devrait percevoir également l'impôt sur le revenu du
gouvernement fédéral.
M. Filion: Ce n'est pas ma question, M. le ministre. (12 h
40)
M. Savoie: Ah! c'est votre question, monsieur.
M. Filion: Ce n'est pas ma question.
M. Savoie: Ah oui, c'est exactement votre question, et pour voir
si on a examiné, effectivement, ce procédé. N'importe qui
peut s'asseoir et faire ces calculs.
M. Filion: Mais...
M. Savoie: N'importe qui peut s'asseoir et faire ces calculs.
M. Filion: Personne de mieux que le ministre du Revenu.
M. Savoie: L'avantage que cela peut procurer, au niveau du
gouvernement du Québec, puis au niveau, également, de la
population, est contrecarré par une autre orientation, qui est celle
d'une certaine liberté fiscale. C'est ça qu'il faut peser. Il ne
faut pas peser des dollars et des sous, en bon comptable que vous êtes,
mais plutôt baisser, évaluer les coûts que cela peut avoir
sur, par exemple, une indépendance au niveau des politiques fiscales.
Apporter des taux différents... Imaginez-vous que des modifications
de...
M. Filion: Non, mais on l'a...
M. Savoie: Tout simplement, une petite chose comme indexer ou ne
pas indexer la déduction de base. Indexer ou ne pas indexer, des
éléments comme ça, là... Enfin, on se ramasserait
avec un formulaire fort compliqué.
M. Filion: Non, non, mais peu importe. Il reste que vous avez
fait une entente fédéral-Québec sur des taux
différents en matière de taxation.
M. Savoie: Sur laquelle il y a une volonté ferme de
s'harmoniser, sur laquelle il y a une volonté
déclarée...
M. Filion: Mais il y en a une volonté ferme.
M. Savoie: ...de s'harmoniser, mais pas au niveau des revenus des
particuliers, M. le député.
M. Filion: Oui, mais ma question...
M. Savoie: Et il y a une politique générale...
M. Filion: Ma question n'est pas sur le débat
politique.
M. Savoie: II y a une politique...
M. Filion: Ma question n'est pas sur le débat politique.
Ça, ça va faire partie...
M. Savoie: Oui, mais au niveau du revenu, il y a une politique
générale d'harmonisation, je veux bien, mais par contre, chaque
année, le ministre des Finances annonce des particularités qui
vont s'appliquer au Québec, plus ou moins importantes, plus ou moins
substantielles. On pense, par exemple... Au niveau des actions
accréditées, par exemple, au Québec, on est rendu à
175...
M. Filion: Non, non. Ça, je comprends, M. le ministre.
Mais ma question n'est pas là, puis...
M. Savoie: ...et à Ottawa, à 100.
M. Filion: Ma question est simple. C'est que si vous avez
réussi à quantifier des chiffres de 30 000 000$ ou 50 000 000$,
60 000 000$ pour la taxe de vente, à ce moment-là, vous pouvez
sûrement quantifier, également, des chiffres pour les autres
sections du ministère du Revenu, quand même. Il y a des
économies d'échelle importantes. C'est simplement une
question d'information...
M. Savoie: La réponse, c'est que...
M. Filion: ...pour qu'on puisse comprendre.
M. Savoie: La réponse, c'est: Non, cet exercice n'a jamais
eu lieu au ministère du Revenu.
M. Filion: II n'a jamais eu lieu.
M. Savoie: Ça fait que s'il devait avoir lieu, ça
se ferait certainement au niveau des Finances, mais pas au Revenu.
M. Filion: Alors, ce n'est pas vous qui allez faire
ça.
M. Savoie: Non. Je pense que je peux le faire comme
député, comme ministre, comme citoyen, comme n'importe qui peut
le faire. Mais savoir si cet exercice a été fait au
ministère du Revenu, la réponse est: Non. Normalement, s'il
devait se faire, il devrait se faire au niveau des Finances.
M. Filion: À la commission Bélanger-Campeau... M.
Savoie: Oui.
M. Filion: ...on a lancé un chiffre de 300 000 000 $.
Est-ce que c'est raisonnable?
M. Savoie: Je n'ai aucune idée, M. le
député.
M. Filion: Aucune idée.
M. Savoie: Aucune idée. Aucune idée...
M. Filion: Mais vous êtes d'accord avec moi qu'il y aurait
plusieurs centaines de millions économisés.
M. Savoie: Bien, ça dépend ce qu'on évalue
comme étant une épargne pour le citoyen, pour le
gouvernement.
M. Filion: Non...
M. Savoie: Est-ce que c'est les mêmes critères qu'au
niveau de la taxe de vente et de la TPS? Est-ce qu'on doit compter des choses
comme le temps qu'épargne le contribuable à remplir 2 formulaires
au lieu... plutôt, 1 formulaire au lieu de 2? Est-ce que c'est... des
choses de cette nature-là. Je ne sais pas, là.
M. Filion: À la commission sur les finances publiques, en
février, ça ne fait pas longtemps, ça fait à peine
une couple de mois, l'Ordre des comptables agréés a
mentionné, lors de la commission, qu'il s'était
déjà adressé au gouvernement du Québec pour
demander qu'on aille plus loin dans l'harmonisation et qu'on aille
jusqu'à harmoniser les 2 ministères, sur une base d'entente style
TPS, TVQ, strictement dans un but de meilleur fonctionnement. Est-ce que cette
demande-là... vous avez répondu à ça?
Effectivement, ils l'ont faite. Ils l'ont dit: Ça fait plusieurs fois
qu'on s'adresse... L'Ordre des comptables agréés du Québec
s'est adressé à maintes reprises au gouvernement pour demander
qu'on aille dans ce sens-là. C'est resté lettre morte? Vous
n'avez pas répondu à ça?
M. Savoie: Non, ce n'est pas resté lettre morte.
Toutefois, on m'avise que, lors de la même commission, les gradués
de l'École des hautes études commerciales, HEC, ont
carrément indiqué que ça s'avérait quasiment
impossible de s'harmoniser au niveau du revenu, mais que le gouvernement du
Québec, et je cite, au niveau de la TPS, TVQ, le fait que ce sera
géré par le Québec: C'est un coup, d'ailleurs, fort
brillant que le Québec a réussi.
Alors, vous voyez qu'il ne faut pas mélanger des pommes et des
bananes à ce moment-ci. On l'a fait au niveau de la TVQ, TPS. Un petit
peu de modération de votre part pour constater que, le revenu, c'est une
autre paire de manches, qui doit être abordée à une autre
époque.
M. Filion: Ce n'est pas une question de modération, M. le
ministre. Écoutez, c'est simplement une question de quantifier les
économies d'échelle. Que vous refusiez, vous avez le droit, je
pense que c'est votre droit. Mais, qu'il y ait vraiment des gens...
M. Savoie: Mais je n'ai pas à refuser ou à
accepter, c'est une décision des Finances, ça. Ce n'est pas une
décision du ministère du Revenu, ni du ministre du Revenu. C'est
une décision des Finances. C'est une orientation politique majeure qui
doit être décidée également par le Conseil
des ministres avec l'acceptation, là aussi, majeure politique au
niveau du gouvernement fédéral. Alors, finalement, à ce
moment-ci, c'est de la spéculation gratuite.
M. Filion: Ha, ha, ha!
M. Savoie: Mais c'est ça, hein, c'est ça,
là.
M. Filion: Écoutez. Moi, c'est simplement des questions,
M. le ministre, à titre d'information. Je ne veux pas que vous pensiez
que je fais de la spéculation.
M. Savoie: Bien oui, mais...
M. Filion: Je veux simplement m'informer, mais si vous n'avez pas
de réponse, écoutez, ce n'est pas plus grave que ça. Je
vais passer à d'autres questions. Ce n'est pas grave, il ne faut pas
paniquer avec ça.
M. Savoie: Bien, c'est-à-dire que vous avez dé-
claré à plusieurs reprises qu'il serait plus
intéressant pour le Québec de recueillir en même temps les
montants d'impôt personnel sur le même rapport d'impôt,
ramasser et Ottawa et Québec. Or, je pense que la moindre
réflexion sommaire va vous indiquer ce rapport-là devrait avoir
plusieurs dizaines de pages de long. Que, deuxièmement, il
nécessiterait l'approbation du gouvernement fédéral avant
d'être envoyé, qu'il nécessiterait un mariage important
avec le gouvernement fédéral. Troisièmement, et je pense
que c'est également significatif, l'intérêt pour le
gouvernement fédéral, qui fait la perception au niveau des 2
paliers de gouvernement dans 9 provinces. Il serait considérablement
intéressé à ce projet-là, mais dans l'autre
sens.
Mais que le Québec, pour des raisons... parce que, auparavant,
ça se faisait, Ottawa faisait la cueillette des 2... Alors, je crois
qu'à un moment donné on a décidé qu'on voulait en
quelque sorte prendre en main nos propres orientations fiscales au niveau du
revenu. On a décidé donc de se séparer de ces
mécanismes-là, sous Duplessis, si ma mémoire est
fidèle. C'est ça, là. Alors, revenir avec un formulaire
unique, je pense, pose beaucoup de problèmes à ce moment-ci. Je
ne dis pas que ça ne se fera pas dans 15 ans, ce n'est pas ça que
je suis en train de vous dire. Ce que je suis en train de dire, c'est qu'au
moment où on se parle, ça me semble hautement spéculatif
et, finalement, un discours déraisonnable. Au moment où on se
parle.
M. Filion: Non, non, ce n'était pas dans un but de
spéculer. C'était simplement pour avoir de l'information, M. le
ministre. Ce n'est pas plus compliqué que ça.
M. Savoie: Peut-être qu'à ce moment-là vous
pourriez vous adresser au ministre des Finances. Peut-être qu'eux ont des
informations, qu'ils ont fait une réflexion là-dessus. Je suis
certain que, s'ils ont ces informations, ils vont certainement vous faire part
de l'état de la question chez eux.
Le Président (M. Camden): M. le ministre, j'aurais
peut-être une question à cet effet. On connaît,
évidemment, la préoccupation du député de
Montmorency à l'égard du ministère du Revenu. L'actuel
député de Montmorency souhaite que l'impôt
fédéral soit géré par le ministère du Revenu
du Québec. Le prédécesseur de l'actuel
député de Montmorency, et votre prédécesseur dans
le fauteuil du ministre du Revenu, lui, souhaitait l'inverse, malgré,
dit-on, son nationalisme.
Considérant qu'il souhaitait voir un seul ministère du
Revenu mais lui, à l'inverse, il souhaitait que ce soit le
gouvernement fédéral est-ce qu'il avait fait
préparer, lors de son passage comme ministre du Revenu, des documents
à cet effet ou une étude ou des études à l'effet de
transférer la responsabilité au gouvernement
fédéral? Ou encore une étude comparative...
M. Savoie: Non, je ne crois pas, monsieur. D'ailleurs, si je me
souviens bien de l'histoire, c'est arrivé pendant la campagne
électorale, en 1985, où il avait mentionné qu'il n'avait
pas d'objection à ce poste, mais... Alors, ça c'est dit comme
ça. De toute façon...
Le Président (M. Camden): Bon, j'avais l'impression, moi,
pour l'avoir entendu...
M. Savoie: Oui.
Le Président (M. Camden): ...que ce n'était pas
nécessairement une intention, mais que ça avait l'air
plutôt de le préoccuper. Il en faisait une question, même un
objectif, un but à atteindre.
M. Savoie: Je pense que c'est pour voir qu'il y a le même
défaut, chez l'ensemble des députés de Montmorency, M. le
Président! Ha, ha, ha!
Le Président (M. Camden): Mais il aurait été
intéressant... Comme ça, on doit comprendre que l'idée a
été lancée en l'air, qu'il n'y a pas eu de
vérification préalable par votre... de quelque nature, même
élémentaire. (12 h 50)
M. Savoie: Non, je ne crois pas, non. Je pense que c'est
arrivé bien avant les élections. C'est arrivé pendant la
période électorale. C'étaient tout simplement des
commentaires généraux en période électorale. C'est
comme je vous le dis, évidemment, on a dû reculer, comme doit
reculer maintenant l'actuel député. Ce ne sont pas des positions
d'actualité, qui suivent un raisonnement très serré.
Le Président (M. Camden): Alors, on doit donc comprendre
que le ballon qui avait été lancé, on lui a coupé
la corde et on l'a laissé s'envoler?
M. Savoie: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Camden): J'imagine que,
préalablement, avant de s'engager, peut-être pas à
l'intérieur, il doit y avoir un mémoire déposé au
Conseil des ministres pour fins de discussion.
M. Savoie: Je pense que ce qu'il faut, c'est une espèce de
conjoncture de plusieurs éléments, qui n'existe pas à ce
moment-ci, ce qui fait en sorte que la spéculation n'est que
spéculation. Les éléments conjoncturels pour cette
démarche n'existent pas et ne semblent pas exister dans un avenir
immédiat. Alors, ce que ça demande, finalement, c'est une
volonté ferme du gouvernement fédéral et du gouvernement
provincial de s'harmoniser parfaitement au niveau du revenu.
Or, ça n'existe pas. Le Québec, par exemple, veut
développer, dans plusieurs secteurs économique, social,
familial des orientations qui reflètent mieux la situation de
l'ensemble des Québécois et des Québécoises. Le
gouvernement fédéral préfère avoir, lui aussi, ses
orientations, qui tiennent compte de l'ensemble du
territoire canadien, donc, de plusieurs régions. En
conséquence, c'est sûr que, tant qu'il n'y aura pas cette
orientation d'harmoniser parfaitement et d'unifier le rapport d'impôt, je
pense qu'on est loin. On est, finalement, dans un monde très
spéculatif à ce moment-ci.
Je pense que ce que fait le député de Montmorency, lors de
cette commission, en disant qu'on ne peut pas examiner combien ça
coûterait... Mais ce que je suis en train de lui dire, c'est que ce n'est
pas la tâche du ministère du Revenu, c'est la tâche des
Finances. C'est à eux autres à faire cette analyse-là,
c'est à eux autres à déterminer et à faire ces
coûts, parce que... C'est ça, là. Alors, il faut
comprendre...
M. Filion: Je comprends ce que vous dites. C'est parce que vous
aviez déjà énoncé un chiffre au niveau de la TPS et
de la TVQ. Alors, j'ai supposé que, probablement, étant
donné que vous aviez déjà fait l'exercice pour une partie
de votre ministère, vous auriez pu aller plus loin dans votre
réflexion, de façon globale.
M. Savoie: Non, non. Oui. Le gouvernement fédéral
on va se rappeler le débat TVQ-TPS offrait, a mis sur la
table, aux provinces la possibilité, pour l'ensemble des provinces
canadiennes, de gérer, elles, la TPS au Canada.
M. Filion: Vous pouvez susciter le débat aussi. Vous
n'êtes pas obligé d'attendre.
M. Savoie: Plusieurs provinces, au début, quand ça
se discutait, en 1990-1991, ont dit: Non. Si on embarque dans le programme de
TPS, il faut que ce soit géré par le gouvernement
fédéral; on ne veut pas en faire la gestion. Le Québec,
lui, a examiné ça et est arrivé à la conclusion
qu'on acceptait de s'impliquer dans le programme, mais en autant que, nous, on
en avait la gestion.
Le gouvernement fédéral avait une volonté et nous,
de notre côté, on avait la volonté de s'harmoniser d'aussi
près que possible de l'harmonisation qu'on pourrait appeler, entre
guillemets, parfaite. C'était ça, l'orientation. L'orientation
politique était là, il y avait la volonté de le faire. Le
terrain était prêt, il était mûr. C'était le
temps de faire des calculs, de compter et de spéculer d'une façon
précise sur certaines implications.
Ici, au niveau du revenu, le seul qui en parle, à ma
connaissance, c'est le député de Montmorency, qui dit: Le
Québec pourrait faire les 2. Ceci étant dit, il ne dit rien,
parce que le gouvernement fédéral n'a pas du tout l'intention
et il n'a jamais laissé entrevoir l'intention de laisser
le revenu dû au gouvernement du Québec gérer par un
gouvernement provincial, premièrement. Deuxièmement, le
gouvernement du Québec, lui non plus, n'a jamais démontré
un intérêt pour cet élément-là, en disant que
la complexité... et le fait qu'on ne veut pas prendre l'orientation
d'une harmonisation, entre guillemets, parfaite. On veut maintenir nos propres
incitatifs, nos propres orientations, créer des programmes. Il y a
beaucoup de programmes qui ont été créés au cours
des 20 dernières années, et qui, tout simplement, n'existaient
pas à Ottawa et vice versa.
Travail au noir dans le domaine de la
construction
M. Filion: J'aimerais aborder un autre sujet, M. le
Président. J'ai commencé avec le marché au noir, et
j'aimerais un peu terminer la commission avec le marché au noir aussi.
Cette fois-ci, j'aimerais qu'on parle un peu du domaine de la construction,
pour qu'on essaie de comprendre aussi. On sait qu'actuellement on est en
débat social au niveau de la construction, et on lance des chiffres
à gauche et à droite. Vous nous avez donné d'ailleurs des
chiffres, ici, qu'on apprécie, parce qu'on les demande souvent... mais
on ne les a pas souvent. Mais, en tout cas, là, cette fois-ci, vous avez
transmis des chiffres au niveau du tabac. Vous dites qu'en 1992-1993 il va
manquer 327 400 000 $ pour le tabac. Le marché au noir, dans la
construction, au moment où on se parle, vous l'estimez à
combien?
M. Savoie: Le marché au noir au niveau de la construction,
construction légitime...
M. Filion: Légitime, illégitime, c'est du
marché...
M. Savoie: Je vais vous dire, j'ai eu l'occasion
d'échanger, par exemple, avec le président de la FIPOE, M.
Lavallée, qui m'a fait part que les proportions, actuellement, au niveau
du travail au noir dans l'industrie de la construction, pourraient
s'établir autour de 30 %.
M. Filion: combien? M. Savoie: 30 %. M. Filion: de
quoi?
M. Savoie: 30 % du marché qui était disponible pour
les membres de la fipoe.
M. Filion: Mais c'est combien, ça, 30 %?
M. Savoie: c'est-à-dire 30 % du travail effectué se
faisait au noir.
M. Filion: Et ça représente combien, en millions de
dollars, 30 %?
M. Savoie: Ah! ça, je ne sais pas. Je ne pourrais pas vous
le dire.
M. Filion: non, mais vous avez 30 % de quelque chose,
là.
M. Savoie: Oui, oui, mais on ne parle que de la FIPOE. Je ne sais
pas combien gagnent l'ensemble des membres de la FIPOE.
M. Filion: Vous n'avez aucune donnée là-dessus? M.
Savoie: Oui, oui, on a des données là-dessus.
M. Filion: Mais alors, ça représente quoi? C'est
ça qu'on veut savoir.
M. Savoie: Bien, je vous donne un ordre de grandeur, parce que ce
sont des évaluations que nous faisons. On n'a pas des chiffres à
peu près. Les gens n'enregistrent pas les heures au noir, chez nous,
là.
M. Filion: Je comprends, mais vous avez sûrement
quantifié...
M. Savoie: On est obligé de faire une évaluation,
et ce que je vous fais...
M. Filion: Vous avez extrapolé les 30 % certain. Vous
n'avez pas dit...
M. Savoie: Pardon?
M. Filion: Vous avez extrapolé les 30 %. C'est
combien?
M. Savoie: bien, c'est ça. ça peut être un
élément, oui, 30 %.
M. Filion: Mais ça donne quoi?
M. Savoie: Comme chiffre?
M. Filion: Oui.
M. Savoie: Pour l'ensemble de l'industrie?
M. Filion: Oui.
M. Savoie: Ça donne à peu près 800 000 000
$.
M. Filion: 800 000 000 $...
M. Savoie: Oui.
M. Filion: ...de transactions au noir.
M. Savoie: De revenus. De transactions, si vous voulez, oui, au
noir.
M. Filion: Alors, à ça, il faut appliquer un taux
effectif c'est ça? de taxation ou si c'est la taxe, 800
000 000 $?
M. Savoie: Non, non. On parle des revenus des transactions.
Alors, vous, ce que vous voulez savoir, c'est combien d'argent on peut
perdre...
M. Filion: Oui. M. Savoie: ...avec... M. Filion: En
taxes.
M. Savoie: En taxes? Vous comprenez que la discussion pour vous
donner la réponse la plus précise porte sur les
éléments... Quelqu'un qui travaille sur la construction peut
prendre...
On va retourner, là, à notre membre de la FIPOE, qui
travaille, qui a des revenus sur une base annuelle, dont une partie du temps
qu'il a travaillé n'est pas déclarée, et doit s'ajouter
à ses revenus. Le taux d'imposition de cette partie-là, dans son
cas, va être, peut-être, je ne sais pas, 15 %, 22 % ou plus. Pour
d'autres qui ont beaucoup moins d'heures, beaucoup moins d'heures, donc les 30
% vont s'ajouter à leurs revenus. Us ne feraient peut-être pas
l'objet d'imposition, puisqu'ils sont dans les 24 000 $ et moins, qui ne sont
pas imposables.
M. Filion: Les 800 000 $ que vous disiez tout à l'heure,
c'était...
M. Savoie: Les 800 000 000 $.
M. Filion: 800 000 000 $, oui. Les 800 000 000 $ que vous disiez
tout à l'heure, c'était le marché au noir de la
construction. Ce n'étaient pas les taxes non perçues.
M. Savoie: Non, non. Ce n'est pas les taxes non
perçues.
M. Filion: Le marché au noir.
M. Savoie: On parle du marché au noir, c'est-à-dire
du travail non déclaré au niveau du secteur de la
construction.
M. Filion: Au niveau du ministère du Revenu, est-ce qu'il
y a des mécanismes particuliers...
M. Gautrin: M. le Président, faites le partage de temps.
Moi, j'avais des questions à poser aussi. Je voudrais savoir comment on
partage le temps, s'il vous plaît.
Le Président (M. Forget): Juste une minute, on va finir
les questions. Pardon, M. le député de Verdun. ..
M. Filion: Oui, oui. Je termine. Ce ne sera pas très long,
M. le député.
Le Président (M. Forget): ...on va juste finir
avec le député de Montmorency, et je reviens
immédiatement.
M. Gautrin: Très bien, très bien, mais je voudrais
quand même qu'on n'oublie pas que c'est un partage équitable entre
les députés ministériels et les députés de
l'Opposition.
M. Filion: Oui, oui, M. Gautrin.
Le Président (M. Forget): Merci, monsieur.
M. Gautrin: Je vous remercie, M. le Président.
M. Filion: Alors, j'aimerais terminer, M. le Président.
(13 heures)
J'aimerais savoir, de la part du ministère du Revenu, au moment
où on se parle, quels sont les procédés de
vérification que l'on utilise pour contrer également ce
fléau, qui est quand même important, du marché au noir dans
l'économie, chez nous? Qu'est-ce qu'on fait, au ministère du
Revenu? Est-ce qu'on ne fait rien? Qu'est-ce qu'on fait? J'essaie de comprendre
comment on organise la vérification fiscale pour essayer de percevoir
ces dus.
M. Robert: Au niveau de la Vérification, nous avons nos
procédés réguliers de vérification. Dans le domaine
de la construction, il y a le contracteur, qui est ordinairement une
corporation. Il y a ses employés, qui sont des employés de la
corporation, et il y a aussi tous les autonomes, qui font de la construction
à leur compte, qui ont des employés ou qui n'en ont pas. Alors,
naturellement, on procède, à chaque année, avec un nombre
de compagnies de construction qu'on vérifie. Chaque année, on la
vérifie en taxes et on la vérifie également en
impôt. Naturellement, on a des unités, à l'intérieur
de la Vérification, qui vérifient plus particulièrement
les déductions à la source. Or, en vérifiant les
déductions à la source, on voit à ce que tous les gens qui
travaillent pour une entreprise soient déclarés. D'abord, pour
qu'on collecte la Régie des rentes et la RAMQ. Naturellement, on
vérifie au complet chacune des corporations. Alors, ça veut dire
que ça nous donne une chance de vérifier la grande partie des
employeurs.
Au sujet des employés. Bien, c'est entendu que, s'ils travaillent
pour un employeur, ils paient tous leurs impôts, au moins pour cette
partie de revenus qu'ils ont actuellement. S'ils ont des revenus additionnels,
bien, naturellement, on marche plutôt par dénonciation. On en
fait, disons... Si on dit qu'on a 250 dénonciations par mois, 3000 par
année, ça veut dire qu'on peut en avoir 10 % de ce genre
d'employés. Ça fait qu'on en fait régulièrement. On
ne les fait pas tous, ceux pour qui on reçoit des dénonciations,
mais on en fait un bon pourcentage, pour essayer d'être présent
dans cette industrie-là.
Au sujet des autonomes, on fait la même chose.
Au point de vue de l'impôt, on essaie de déterminer leur
revenu par les vérifications bancaires, comme on fait pour tous les
autres autonomes, ceux qui font de la construction comme autonomes. Ça
veut dire que ces gens-là même nos employés qui
travaillent sans déductions à la source travaillent
également quand ils ont des employés, comme si c'était des
corporations. Ça fait que...
M. Filion: Pourquoi vous ne les faites pas tous? Vous avez dit,
tout à l'heure, que vous ne les faisiez pas tous. Pourquoi vous ne les
faites pas tous, quand...
M. Robert: Bien, voici...
M. Filion: ...il y a une dénonciation?
M. Robert: On ne les fait pas tous, parce que si on reçoit
3000 dénonciations par année, naturellement... S'il y en a 10 %
qui sont des employés de la construction, bien, on regarde... Il faut,
dans le fond, avoir nos critères à l'esprit. Or, notre premier
critère, c'est que ce soit rentable. Il faut voir exactement ce qui en
est, et par une dénonciation, on voit si ça vaut la peine ou si
ça ne vaut pas la peine. Ça fait que c'est pour ça qu'on
ne les fait pas tous.
M. Filion: Mais...
M. Robert: L'autre critère, c'est la présence. Du
moment qu'on est présent, même si ce n'est pas rentable, ça
peut arriver qu'on le fasse quand même, parce qu'il faut être
présent dans tous les domaines. Or, dans ce domaine-là, si on
n'en avait pas assez dans une année, on en ferait pareil, pour
être présent dans l'industrie.
M. Filion: Mais la dénonciation, s'il y en a 3000 par
année, vous ne pensez pas que ça devrait faire l'objet d'une
vérification systématique, à raison ou à tort? Il
reste que c'est une dénonciation. Quelqu'un a dit qu'une telle personne
avait travaillé au noir. Il me semble qu'on devrait faire un minimum de
vérifications.
M. Robert: Vous savez, il y a toutes sortes de
dénonciations. Moi, je me fie, en tout cas, au jugement de mes gens qui
travaillent dans ça et, naturellement, je pense qu'il y en a, des
dénonciations, qui n'ont pas grand bon sens. Je les lis toutes ou
à peu près. Naturellement, c'est bien normal qu'il y ait un
pourcentage dont on ne s'occupe pas. Mais, en général, on s'en
occupe.
M. Filion: Combien vous avez de personnes qui s'occupent de cette
partie-là?
M. Gautrin: Le député de Montmorency parle
toujours, comme s'il avait toujours la parole. Est-ce qu'il n'y a pas une
règle d'alternance? Est-ce qu'il n'a pas utilisé son temps?
M. Filion: C'est terminé. Dernière question.
M. Gautrin: Merci. Vous m'avez dit ça tout à
l'heure, déjà!
M. Filion: Dernière question, M. le Président,
ça ne sera pas très long.
M. Gautrin: Oui, dernière.
Le Président (M. Camden): Très brève, M. le
député de Montmorency.
M. Filion: Combien vous avez de personnes qui s'occupent de la
section des dénonciations?
M. Robert: C'est-à-dire que les dénonciations sont
faites au directeur de l'observance fiscale, et lui-même, par la suite,
en retransmet 90 % aux gens qui sont à la vérification. Ce n'est
pas, des fois, des cas assez flagrants pour justifier la présence de
l'observance fiscale. Les autres 10 % sont gardés par ses
employés, et sont faites par ses employés réguliers. Il
n'y a personne affecté nécessairement à ces
dénonciations-là, excepté, par exemple, pour les
distribuer. On n'a personne affecté à des domaines
particuliers.
Le Président (M. Camden): M. le député de
Verdun.
M. Filion: Alors, allez, M. le député de
Verdun.
Plan de réduction des effectifs du
ministère, conformément aux objectifs du projet de loi
198
M. Gautrin: Merci, M. le Président.
Alors, M. le ministre, vous n'êtes pas sans savoir que cette
Chambre risque d'adopter, dans un avenir assez court, un projet de loi
appelé projet de loi 198, qui a été, d'ailleurs,
étudié article par article par cette commission. Ce projet de loi
a des effets de compression de personnel, tant sur le personnel cadre que sur
le personnel régulier de votre ministère, sur un horizon de 3
ans.
Le ministère du Revenu est, non pas le plus gros employeur,
disons, dans la fonction publique, mais le deuxième plus gros employeur.
Vous êtes battu d'un cheveu par le ministère de la
Sécurité publique. Ce que je voudrais voir avec vous, parce que
vous nous avez donné les effectifs autorisés, c'est quelles
compressions vous avez déjà pu faire à l'intérieur
de votre ministère, en termes d'effectifs, élément par
élément. Vous avez déposé ça sur les
éléments 1, 2, 3 et sur la partie TVQ, TPS. Est-ce qu'il y aurait
possibilité d'avoir une idée des compressions, ou est-ce que les
postes inactifs correspondent aux compressions que vous avez l'intention de
faire ou que vous avez faites? Je fais référence au document:
«Prévisions détaillées des crédits 1993-1994,
ministère du Revenu».
M. Savoie: Alors, au niveau du personnel, il y a un écart
cette année, comparativement à l'année passée, de
532 emplois, au ministère du Revenu. On a eu l'occasion de remarquer que
les 532 s'expliquent par une compression d'effectifs de 208. En sus des 208, il
y en a eu 133, qui sont des récupérations de crédits
reliées aux gains de la refonte des systèmes. Donc, 133 postes
suite à l'automatisation, aux mesures de modernisation.
Évidemment, il y en a 191, ou presque 200, qui ne sont plus
nécessaires suite à l'implantation du système de TVQ, TPS,
donc, qui avaient été embauchés pour assurer
l'implantation des systèmes.
M. Gautrin: En termes de rapport entre le personnel cadre et le
personnel régulier, comment se fait... pour... les compressions?
M. Savoie: Oui, ça, ça progresse, et au cours de
1993-1994, on va y donner suite davantage. Il faut comprendre, toutefois, qu'au
niveau du ministère du Revenu il y a évidemment place à de
la compression, mais que cela a ses limites.
M. Gautrin: O.K. Souvent, des ministres ou des ministères
qui ont participé, qui ont témoigné devant cette
commission ont été capables de déposer une
évolution, peut-être pas tout de suite, mais une évolution
des compressions qu'ils comptaient faire dans leur ministère. Je ne sais
pas si vous pourriez, dans quelques jours, la déposer à la
commission? Est-ce que vous accepteriez de le faire à la commission?
M. Savoie: Oui, certainement. On pourrait déposer
ça.
M. Gautrin: Je vous remercie. À ce moment-là, vous
pouvez nous le transmettre aussi, dès que ce sera déposé
à la commission.
M. le Président, ça termine les questions que je voulais
poser, comme toujours, sur l'évolution du personnel, au ministre.
Le Président (M. Camden): Alors, vous n'avez plus de
questions, M. le député de Verdun?
M. Gautrin: J'en ai beaucoup, mais je suis prêt à
adopter les crédits.
Le Président (M. Camden): Alors, il reste encore 3 minutes
avant l'adoption des crédits.
M. Gautrin: Mais si vous voulez aller manger, il serait
peut-être bon d'adopter les crédits.
Le Président (M. Camden): Nous, nous sommes nourris par
les propos du ministre du Revenu.
M. Savoie: Et vous mangez bien, M. le Président. Vous
mangez bien.
Le Président (M. Camden): Je vous remercie, M. le
député et M. le ministre.
M. Gautrin: II faut se rappeler, bien sûr, qu'on veut
adopter les crédits.
Le Président (M. Camden): II n'y a plus de questions?
Est-ce que, M. le député de Montmorency, vous avez d'autres
questions?
Taxes non perçues en raison du travail au noir
dans l'industrie de la construction
M. Filion: C'est ma dernière question. C'est parce que
j'ai posé de façon séparée mes questions tout
à l'heure. Mais le marché au noir, en général, au
Québec, tout ce que vous pouvez estimer, combien est-ce qu'on peut
perdre en taxes? Avez-vous une idée ou bien si vous ne l'avez pas fait
non plus?
M. Savoie: Oui, écoutez. Il y a eu plusieurs études
qui ont porté sur cette question au cours de la dernière
décennie. Évidemment, les chiffres... Quand vous parlez de tout,
tout, tout, il faudrait chercher à circonscrire, parce qu'il faut
être bien sûr qu'on parle des opérations légales, qui
sont faites sans déclaration.
M. Filion: Et illégales.
M. Savoie: Bon. Légales et illégales, il faut bien
s'entendre. Illégales veut dire, par exemple, quelqu'un qui, au niveau
de la construction on va dire, domiciliaire construit sans
permis, sans autorisation, et bien sûr, sans déclarer. Ça,
c'est une activité illégale. Il faut comprendre, par
activité légale, quelqu'un qui a ses permis, qui a ses
autorisations, mais qui construit sans charger le tarif qu'on doit charger,
c'est-à-dire en se faisant payer au noir. Ça c'est une autre
paire de manches. (13 h 10)
M. Filion: Mais combien ça donne?
M. Savoie: Bon, bien là, ce que nous avons, d'une
façon globale, c'est ce qu'on vous a dit: de l'ordre de 30 %, pour la
FIPOE, par exemple. M. Lavallée m'a transmis ces informations-là
d'une façon générale, à titre indicatif, comme
étant existantes au sein de l'ensemble de l'industrie. Alors, c'est un
à-peu-près qui, d'après moi, en tout cas...
M. Filion: C'est parce que vous êtes loin des chiffres
qu'on énonce.
M. Savoie: ...est valable.
M. Filion: On parle de 1 500 000 000 $, on parle de... Vous
autres, vous arrivez à la moitié, c'est assez spécial.
Pourtant, vous êtes les gens qui devriez avoir l'information assez juste,
puis vous êtes à 50 % de ce qu'on évalue sur le
marché.
M. Savoie: Oui, mais ça dépend. C'est comme je vous
dis, là, il faudrait... Ce débat-là, qui me
préoccupe depuis 2 ans, 3 ans, dépend beaucoup de la
définition que nous donnons aux mots. Alors, c'est ça que je vous
dis. C'est ça qu'il faudrait bien comprendre, et c'est ce qui
explique... Ce n'est pas parce qu'il y en a un qui dit 800 000 000 $, puis que
l'autre dit le double, que les 2 ont tort.
M. Filion: Oui, mais, il y en a un qui a tort certain.
M. Savoie: II faut voir. C'est de savoir comment ils ont fait
pour définir le travail au noir. Est-ce que le travail au noir c'est,
par exemple, un travailleur de la construction, avec ses cartes de
compétence, qui va, une fin de semaine il est en règle, en
ordre travailler pour quelqu'un d'autre en chargeant moins, ou le
même montant que le tarif régulier, mais en se faisant payer
en-dessous de la table? Est-ce que c'est, par exemple, n'importe qui?
M. Filion: Tous ceux qui ne déclarent pas le revenu qu'ils
devraient déclarer, pour moi, c'est des gens qui travaillent au
noir.
M. Savoie: Bon. Alors, là, vous parlez...
M. Filion: Appelez-le travail parallèle, souterrain, au
noir, c'est des gens qui ne déclarent pas le revenu qui est taxable.
M. Savoie: Bon. O.K. Vous parlez... Oui, c'est ça.
M. Filion: Combien?
M. Savoie: Des activités au noir et des activités
illégales.
M. Filion: Combien?
M. Savoie: Moi, il faudrait que je reste, à ce
moment-là, avec un travail qui est quand même assez
sérieux, qui date de 1991, et qui évalue le montant des revenus
non déclarés pour l'année 1991, comme étant de
l'ordre de 800 000 000 $.
M. Filion: Avec le vidéopoker, lui, combien vous avez
perdu?
M. Savoie: Ça, le vidéopoker, M. le
député, vous mélangez...
M. Filion: Non, non, oublions le permis, là. M. Savoie:
...des pommes puis des oranges.
M. Filion: L'opération non déclarée des
recettes dans les petites machines?
M. Savoie: Je n'ai aucune idée, je ne suis plus
responsable. Il faudrait que vous en parliez avec le ministre de la
Sécurité publique. Il faut bien comprendre que ces
montants-là, qui nous manquaient, échappaient également...
À compter de 1982... Ça a été institué en
1979... Le système a plus ou moins fonctionné pendant 2 ans,
parce qu'il était naissant, puis là, on est allé tout de
suite devant les tribunaux. Les tribunaux ont dit que la réorganisation
qui a été faite en 1979 était erronée, qu'elle
n'était pas légale. En conséquence, c'est allé,
ça, tout de suite, au niveau... Non, non... Il ne faut pas penser non
plus que c'est un problème naissant, qui a pris naissance
dernièrement.
M. Filion: Le but, ce n'est pas qu'il soit naissant, le but,
c'est de savoir combien? Naissant ou pas, ce n'est pas important. On essaie
d'évaluer le fléau.
M. Savoie: II faut aller, à ce moment-là... Si vous
parlez de tous les montants qui échappent au fisc, il faut regarder les
chiffres d'ordre international. Les chiffres varient entre 4 % et 10 % de votre
PIB. Alors, vous avez un ordre de grandeur. Déterminez le PIB au
Québec, faites une fourchette entre 4 % et 10 %, et vous êtes
à peu près certain de tomber dedans. Aux États-Unis, on
l'évalue à 8 %.
Adoption de l'ensemble des crédits
Le Président (M. Camden): En considérant qu'il
reste, s'il vous plaît, 2 minutes du temps qui avait été
accordé, nous allons donc procéder à l'adoption des
crédits budgétaires du ministère du Revenu.
Est-ce que les crédits du programme 1, Administration fiscale,
sont adoptés?
Des voix: Adopté.
Une voix: Sur division.
M. Gautrin: Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Camden): Adopté sur division.
Est-ce que les crédits du programme 2, Aide aux parents pour leurs
revenus de travail, sont adoptés?
M. Gautrin: Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Camden): Adopté sur division.
Est-ce que l'ensemble des crédits budgétaires du
ministère du Revenu, pour l'année financière 1993-1994,
sont adoptés?
M. Gautrin: Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Camden): Adopté sur division. M.
le député de Montmorency, un bref commentaire. ..
M. Savoie: De 30 secondes.
Remarques finales M. Jean Filion
M. Filion: Très rapidement, j'aimerais remercier de leur
collaboration, bien sûr, tous les représentants du
ministère, qui nous a permis d'en savoir un peu plus et d'essayer de
mieux comprendre ce ministère qui, quand même, représente,
pour la majorité des contribuables, quelque chose de mystérieux.
Mais je pense que ça a été très intéressant,
et j'espère qu'à une prochaine on en saura davantage. Alors, je
les remercie de leur collaboration, ainsi que le ministre, M. le
Président.
Le Président (M. Camden): M. le ministre, est-ce que vous
avez des commentaires?
M. Raymond Savoie
M. Savoie: Oui, tout simplement, à mon tour, je voudrais
remercier ceux et celles qui nous ont accompagnés devant cette
commission pour ces travaux. J'aimerais dire que les informations que nous
avons pris l'engagement d'examiner et de transmettre à la commission,
nous allons faire un suivi très sérieux là-dessus, d'une
part. D'autre part, les informations, en ce qui concerne les opérations
du ministère du Revenu, ses budgets et ses modes de fonctionnement, sont
toujours disponibles pour les membres de la commission, dans la mesure
où faire se peut. En tout temps, il nous fait toujours plaisir de
rencontrer les membres de la commission, et nous réitérons notre
invitation aux membres de la commission de se rendre au ministère du
Revenu pour constater de visu, d'une façon très directe,
l'étendue de nos opérations et des équipements que nous
avons à notre disposition.
Le Président (M. Camden): M. le ministre, je vous remercie
de vos commentaires.
Je remercie évidemment les collaborateurs qui vous accompagnent
ainsi que les membres de la commission.
Considérant que la commission du budget et de l'administration a
accompli son mandat, j'ajourne donc les travaux de cette commission sine
die.
(Fin de la séance à 13 h 16)
(Quinze heures vingt et une minutes)
Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous
plaît! À l'ordre! La commission du budget et de l'administration
entreprend cet après-midi une consultation générale et des
auditions publiques sur le document intitulé «L'appui au secteur
financier: des dividendes pour le Québec. Propositions de politiques
pour le secteur financier du Québec». Mme la secrétaire,
est-ce qu'il y a des remplacements?
La Secrétaire: II n'y a aucun remplacement.
Le Président (M. Lemieux): Vous avez tous reçu
l'ordre du jour, qui se lit comme suit: Déclarations d'ouverture, 15
heures. Regroupement des cabinets de courtage d'assurance du Québec, 15
h 40. Trust Prêt et Revenu, 16 h 40. Suspension à 17 h 40. Nous
reprenons nos travaux à 20 heures avec le Bureau d'assurance du Canada,
et, à 21 heures, avec l'Association canadienne des compagnies
d'assurances de personnes inc. L'ajournement est à 22 heures. Est-ce que
l'ordre du jour est adopté?
M. Gautrin: Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Adopté. Je vous
remercie.
Permettez-moi de vous rappeler brièvement les règles de
l'audition, telles que convenues entre les groupes parlementaires. La
période des déclarations d'ouverture durera 40 minutes,
réparties de la façon suivante: 20 minutes pour Mme la ministre
déléguée aux Finances, et 20 minutes pour le porte-parole
de l'Opposition officielle concernant les institutions financières, M.
Holden, député de Westmount. La durée totale de l'audition
des organismes entendus aujourd'hui sera répartie de la façon
suivante: 1 heure, soit 20 minutes pour l'exposé du mémoire et 40
minutes pour les échanges avec les parlementaires; donc, 20 minutes pour
le groupe parlementaire formant le parti ministériel et 20 minutes pour
l'Opposition. Le temps de parole des députés sera de 10 minutes,
en respectant les règles de l'alternance dans les interventions.
J'inviterais maintenant Mme la ministre...
M. Gautrin: M. le Président. Le Président (M.
Lemieux): Oui.
M. Gautrin: Est-ce que ça veut dire que les
députés ministériels ne peuvent pas faire de remarques
préliminaires? Est-ce qu'on est tenu par cette entente? Je pense qu'il y
avait un jugement de votre part, qui était...
Le Président (M. Lemieux): II a été convenu
entre les groupes parlementaires qu'effectivement il y aurait un temps de
parole de 20 minutes qui serait consacré... La commission est autonome.
Effectivement, nous ne sommes pas liés, M. le député de
Verdun, par cette entente entre les leaders. La commission est maîtresse
de ses travaux, et, si vous m'en faites la demande, M. le député
de Verdun, je n'hésiterai pas à vous céder la parole pour
une déclaration d'ouverture...
M. Gautrin: Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): ...considérant les
droits des parlementaires, de part et d'autre. Alors, nous allons maintenant
entendre Mme la ministre pour sa déclaration d'ouverture, pour une
durée de 20 minutes.
Déclarations d'ouverture Mme Louise
Robic
Mme Robic: Alors, je vous remercie, M. le Président.
M. le Président, il nous fait grand plaisir de prononcer
aujourd'hui quelques mots à l'occasion de l'ouverture de la commission
parlementaire sur l'énoncé de politique intitulé
«L'appui au secteur financier: des dividendes pour le
Québec», que j'ai rendu public le 11 mars dernier. Je suis
d'autant plus satisfaite, M. le Président, de voir que l'industrie va
activement participer à compléter le processus déjà
entamé, à savoir le réalignement de l'environnement dans
lequel oeuvrent nos institutions financières.
Le taux élevé de participation, soit par la voie de
mémoires ou par la voie d'une présentation orale, et le fait que
tous les acteurs du secteur financier soient représentés,
démontre que ces institutions ont la volonté de s'outiller
adéquatement à l'aube d'une ère nouvelle, qui en sera une
de prospérité si nous choisissons ensemble les bonnes avenues. Il
s'agit d'un projet de longue haleine, dont les retombées
bénéficieront au public consommateur de produits financiers et
à l'industrie elle-même.
Dans le cadre du débat sur le discours d'ouverture de la
deuxième session de la trente-deuxième législature, il y a
un an maintenant, j'ai mentionné que les réformes en cours, tant
au Canada qu'à l'étranger, les traités internationaux qui
touchent les services financiers, la
globalisation des marchés, de même que la conjoncture
économique allaient immanquablement influencer le développement
de nos propres institutions. J'ai également souligné que ces
phénomènes contemporains nous forceraient à adapter nos
politiques touchant le développement de nos institutions, leur
surveillance et contrôle ainsi que tout autre volet de protection de
l'épargne.
La protection de l'épargne n'étant pas un objectif
statique, il nous faut sans cesse revoir notre politique, la remettre en
question et l'ajuster aux conditions du marché. Cette protection n'est
pas, non plus, un objectif désincarné, car elle est
étroitement liée au développement de nos institutions et
au bien-être économique de nos concitoyens et concitoyennes. C'est
dans cet esprit que j'ai entrepris, à titre de ministre
déléguée aux Finances, de concert avec l'industrie et
toutes les parties intéressées, une réévaluation de
nos politiques, et c'est ceci qui a donné lieu à mon
énoncé.
Cet énoncé vise essentiellement à améliorer
l'efficacité, la stabilité et la croissance du secteur financier
québécois, tout en amorçant le début d'un nouveau
cycle de développement de notre industrie des services financiers. Au
chapitre de l'efficacité, les mesures que nous privilégions
portent sur l'harmonisation des lois régissant les institutions
financières au Canada, l'accès des institutions
québécoises au réseau de la Caisse canadienne de
dépôt de valeurs, la cohérence intersectorielle et la
diminution des coûts inhérents au respect de cette
réglementation.
En ce qui a trait à l'harmonisation des lois régissant les
institutions financières au Canada, il faut noter qu'au fil des ans les
gouvernements fédéral et provinciaux ont adopté des lois
concernant le secteur financier. Ainsi, durant la dernière
décennie, des différences importantes au niveau des approches
retenues et des normes mises en place sont apparues, plaçant du
même coup les institutions extraprovinciales face à des
réalités difficilement conciliables.
Ces institutions sont également confrontées à des
situations de double emploi et de chevauchement de réglementations. Le
gouvernement fédéral prétend s'autoriser à
réglementer les activités de ces institutions dans les provinces,
une compétence qui est pourtant sauve dans le cas des banques de
compétence provinciale. Les différences qui existent au niveau
des approches et des normes introduites au Canada se sont traduites par des
contraintes majeures qui entravent la compétitivité et
l'efficacité des institutions financières et du système
financier canadien dans son ensemble. En 1988, un processus intergouvernemental
d'harmonisation des lois régissant les institutions financières a
été amorcé pour améliorer la cohérence
normative entre les divers secteurs, tout en simplifiant et rationalisant le
cadre de réglementation et de surveillance des institutions actives dans
plusieurs provinces.
Il est important de rappeler que l'harmonisation recherchée, qui
vise à assurer une meilleure compatibilité des cadres de
réglementation au Canada n'est pas synonyme d'uniformisation. À
cet effet, chaque législateur doit pouvoir continuer à tenir
compte des spécifici- tés et des objectifs
socio-économiques qui lui sont propres, tout en demeurant conscient
cependant des avantages inhérents au respect de normes minimales
généralement reconnues aux plans national et international.
Comme le signale l'énoncé de politique, les propositions
que nous mettons de l'avant veulent éviter d'entraver l'innovation en
matière de règles et d'initiatives de surveillance et
épargner aux sociétés extraprovinciales les coûts
reliés à la superposition de ces règles initiatives, tout
en mettant en place un régime globalement compatible, dans le cadre
duquel chaque réglementation est substantiellement reconnue par les
autres juridictions. Voilà l'objectif ultime que devrait permettre
d'atteindre un exercice d'harmonisation des lois régissant les
institutions financières agissant au Canada.
Je tiens à signaler que ces discussions intergouvernementales ont
permis d'obtenir certains résultats très tangibles. En
témoigne éloquemment une entente d'échange d'information
entre le ministre responsable des institutions financières ainsi que la
conclusion, en 1991, d'une première entente interprovinciale
d'harmonisation. Depuis lors, la participation du gouvernement
fédéral a ajouté à la complexité du
processus d'harmonisation, notamment à cause des dédoublements
auxquels j'ai fait allusion tantôt, et qui empiètent sur les
compétences provinciales. (15 h 30)
Si le gouvernement du Québec a décidé
d'élaborer activement une approche simplifiée à la
réglementation et à la surveillance des institutions
financières, il n'en demeure pas moins préoccupé par la
protection de sa compétence sur toutes les institutions présentes
sur son territoire. C'est donc avec beaucoup d'enthousiasme et d'optimisme que
nous avons développé une hypothèse de travail sur la mise
en place d'un espace financier canadien efficace et fonctionnel. Cette
hypothèse est d'autant plus réaliste qu'elle tient compte des
différentes juridictions provinciales et elle intègre la
participation du gouvernement fédéral, dont la compétence
constitutionnelle se limite, bien entendu, aux banques et à
l'incorporation de compagnies ayant des objets autres que provinciaux.
Ce que nous proposons est fort simple: une véritable
méthode de rationalisation et d'encadrement des institutions
financières au Canada, en nous inspirant de l'expérience
vécue à l'égard des sociétés de fiducie et
des sociétés de prêts, et en nous appuyant sur le concept
d'institutions extraprovinciales. Les caractéristiques essentielles de
notre proposition consistent à définir les termes de
réglementation qui devraient être communs, harmonisés ou
traités de façon distincte, puis à prévoir ceux qui
devraient faire l'objet d'une approche concertée quant à
l'exécution des tâches de contrôle et de surveillance. En
assurant une réduction sensible des chevauchements, et par
conséquent, des coûts y afférents supportés par les
gouvernements et les institutions, ce départage des tâches
améliorerait grandement l'efficacité du système.
Comme notre proposition d'espace financier canadien découle d'une
indéfectible volonté de réduire la
complexité de la réglementation et de la surveillance des
institutions, nous entendons la promouvoir activement dans les discutions
d'harmonisation à venir. La fonction de la Caisse canadienne de
dépôt de valeurs ayant connu un développement
phénoménal au cours des dernières années, nous
croyons qu'il est impératif que l'accès soit accordé
à nos institutions québécoises, afin d'assurer
l'efficacité du secteur.
Actuellement, la possibilité, pour une institution
financière, de réaliser des transactions de valeurs au sein d'un
réseau efficace de compensation devient de plus en plus un
prérequis à sa capacité de desservir économiquement
et concurrentiellement sa clientèle. Les conséquences
immédiates seraient alors des gains appréciables en termes
d'efficacité et une réduction des coûts de transaction.
Pour ce faire, nous aurons à régler le problème des
garanties qui doivent être consenties sur les éléments
d'actif, car nos règles ne permettent pas actuellement à nos
institutions de nantir de tels éléments pour obtenir un statut
d'adhérent auprès de la CCDV. Nous aurons également
à nous assurer que la CCDV soit dotée d'un régime de
surveillance mieux coordonné à travers le Canada.
Il nous semble important d'améliorer la cohérence
intersectorielle en ce qui concerne les normes de capital et les transactions
intéressées. Il nous semble primordial que toute norme de capital
place les institutions sur le même pied, dans une mesure compatible avec
leurs natures respectives, car elles jouent un rôle important dans la
réglementation des institutions financières et dans leur
évaluation par les marchés financiers. C'est pour cette raison
que nous entendons faire preuve d'une cohérence rigoureuse dans
l'adoption de normes de capital à l'intention des sociétés
de fiducie, des sociétés d'épargne, des assureurs, des
assureurs de personnes et de dommages, ainsi que des caisses d'épargne
et de crédit faisant affaire sur notre territoire.
Il va sans dire que ces normes s'inspireront de principes
internationalement reconnus en matière d'exigences, de composition et de
suffisance de capital pour les institutions de dépôt. Nous avons
également l'intention de faire en sorte que les principes de
réglementation des transactions intéressées soient communs
à tous les secteurs.
Comme vous le savez déjà, probablement, la
législation québécoise prévoit présentement
trois régimes de contrôle des transactions
intéressées: un premier qui s'applique aux caisses
d'épargne et de crédit; un deuxième, aux
sociétés de fiducie et sociétés d'épargne;
et un troisième, aux assureurs. Cette situation fait en sorte qu'au sein
des groupes de conglomérats financiers, dont font partie une importante
proportion du secteur financier québécois, on retrouve des
institutions soumises à des régimes fort différents. Le
gouvernement entend donc élaborer un ensemble de principes, au sein
duquel le concept de personne intéressée sera uniformisé
dans toute la mesure du possible, afin de pouvoir être utilisé
dans chaque secteur avec un minimum d'adaptation. Il devrait en être de
même pour les conglomérats à contrôle
québécois, qui regroupent à la fois des institu- tions
financières québécoises et des institutions
fédérales, qui doivent pouvoir transiger efficacement entre
elles.
Je tiens à préciser que ces règles seront
établies de manière à ne pas affecter inutilement les
relations entre institutions au sein des groupes financiers, et, par
conséquent, nous privilégierons des dispositions
spécifiques pour contrôler ces relations plutôt que de les
interdire généralement.
Il est difficile, voire impossible, de traiter de l'efficacité de
notre secteur financier sans aborder l'épineuse question de la
diminution des coûts inhérents au respect de la
réglementation. Le gouvernement est fermement résolu à
contribuer aux efforts déployés par le milieu en vue de diminuer
ses coûts d'opération. Cette contribution, qui s'effectuera au
niveau des politiques et des normes, consistera, dans un premier temps,
à harmoniser nos règles concernant les institutions
financières. Comme je l'ai indiqué à maintes reprises, la
protection du public est la préoccupation centrale du gouvernement dans
l'élaboration de ses politiques à l'égard du secteur
financier. L'intérêt du consommateur, qu'il soit déposant,
assuré, investisseur ou prestataire de services financiers est donc la
pierre angulaire de toute la démarche que nous avons entreprise.
Or, dans le secteur financier, le bon fonctionnement, la
crédibilité et l'attrait d'un système de surveillance et
d'indemnisation reposent sur quatre facteurs essentiels: des normes
transparentes et accessibles; des agents administratifs, publics ou
privés, dont le cadre d'intervention est clair, complémentaire et
synergique; l'octroi à ces agents de pouvoirs suffisants pour
prévenir et régler les situations problématiques en
perturbant le moins possible le cours normal des affaires; des communications
efficaces entre les composantes du système.
C'est pour toutes ces raisons, au chapitre de la stabilité, que
nous entendons faire porter nos efforts sur une nouvelle approche
réglementaire, l'octroi de nouveaux moyens d'intervention et de
supervision de l'Inspecteur général des institutions
financières, une révision des responsabilités
administratives, la réévaluation des régimes
d'indemnisation et des mesures de protection du public.
Au niveau de la nouvelle approche réglementaire, force nous est
de constater que l'évolution rapide du secteur financier appelle la mise
en place de mécanismes propres à susciter l'autodiscipline des
institutions. En contrepartie d'un élargissement de leur liberté
d'action, le gouvernement exigera, notamment, le maintien par les institutions
d'un montant adéquat de capital dans leurs entreprises pour faire face
aux pertes qui pourraient être occasionnées par la
réalisation de risques considérés normaux.
Le Québec entend donc inscrire ses actions dans la tendance de
normes de capital qui soient en fonction des risques associés aux
activités de l'institution, et apporter une attention
particulière à la qualité de ses éléments
d'actif et non seulement la quantité. Il est important de noter que
l'allégement des exigences visant certains éléments
d'actif précis en raison de l'application d'une
norme de capital ne constitue pas un relâchement de la
réglementation. Dans les faits, il s'agirait plutôt de la
contrepartie du transfert, du gouvernement aux gestionnaires d'institutions, de
la responsabilité d'exercer un jugement empreint de prudence et d'agir
avec diligence. En effet, ces gestionnaires devront respecter le principe du
gestionnaire prudent édicté par la législation et
s'imposer eux-mêmes des balises et des mesures de contrôle quant
à la gestion de l'actif et au maintien de sa qualité. En
revanche, l'autorité de surveillance aura la capacité
d'intervenir rapidement et efficacement dans les situations où ce
jugement n'aurait pas été convenablement exercé.
De plus, les normes de capitalisation auxquelles sont assujetties les
sociétés de fiducie et les sociétés de prêts,
les caisses d'épargne et de crédit et les assureurs de dommages
seront réévaluées en fonction de trois objectifs
principaux: le premier est d'élargir le rôle joué par le
capital dans la réglementation des institutions; de combler le besoin de
cohérence intersectorielle constaté au Québec; et
d'assurer la cohérence des normes du Québec avec celles en
vigueur dans le reste du pays, dans la mesure où ces dernières
respectent les usages et tendances prévalant dans les principaux pays
industrialisés.
Nous nous apprêtons à introduire des normes de capital
à l'intention des assureurs de personnes, conformément à
ce que j'avais annoncé dans le rapport quinquennal sur l'application de
la Loi sur les assurances, que j'ai rendu public au mois de juin 1990, sous
réserve d'une compatibilité de normes en vigueur au Canada. Il va
cependant de soi que les assureurs de personnes bénéficieront
d'une période de transition pour respecter ces normes.
Par ailleurs, les principes qui seront utilisés pour
définir les normes de capital visant les assureurs de personnes seront
appliqués mutadis mutandis aux autres types d'institutions régies
par les loi du Québec. Comme pour les assureurs, nous entendons tenir
compte des risques afférents aux éléments d'actif dans
l'établissement du niveau de capital à maintenir. Quant à
la composition du capital disponible, c'est l'équité entre les
différents types d'institutions et la cohérence des règles
qui détermineront nos choix. De façon générale, ce
sont les tendances et pratiques constatées au niveau international qui
serviront de guide dans l'élaboration de ces normes, de façon
à assurer une compétitivité optimale de nos institutions
financières. (15 h 40)
II en découle la nécessité de faire évoluer
les moyens d'intervention et de supervision au même rythme que la
réglementation des institutions en ce qui concerne l'octroi de nouveaux
moyens d'intervention et de supervision à l'Inspecteur
général des institutions financières. Concrètement,
l'Inspecteur général disposerait du pouvoir d'établir des
lignes directrices à l'intention des institutions autorisées
à exercer certaines activités au Québec. Ces nouveaux
moyens d'intervention lui permettraient d'annoncer à l'avance les
paramètres, balises et procédures en fonction desquelles il
exercera son pouvoir discrétionnaire. L'émission de telles lignes
lui donnerait la possibilité de simplifier et d'augmenter la
transparence de l'encadrement au bénéfice des institutions
faisant affaire au Québec.
Nous envisageons également de doter l'Inspecteur
général des institutions financières de pouvoirs
d'application générale, qui lui permettraient d'imposer un plan
de redressement comportant des mesures, qui, selon lui, devraient être
prises pour éviter qu'une institution québécoise ne
devienne insolvable, et de contester, selon une nouvelle procédure, la
valeur des éléments d'actif et de passif d'une institution.
À l'instar de la Commission des valeurs mobilières du
Québec, l'Inspecteur pourrait aussi se voir confier le pouvoir de
recommander au ministre responsable, en certaines circonstances, la
déchéance d'un membre du conseil d'administration d'une
institution québécoise qu'il surveille ou son inhabilité
à exercer de telles fonctions. L'énoncé de politique
propose également que l'Inspecteur publie un bulletin, qui aurait pour
but de rendre plus prévisible le cadre réglementaire. Vous
n'êtes pas sans savoir que la réforme fédérale de
1987 avait posé, comme condition d'accès à l'assurance
offerte par la Société d'assurance-dépôts du Canada,
le respect par ses membres d'une obligation de conformité à des
normes de pratiques commerciales et financières saines qui seraient
fixées par cet organisme.
Tout en souscrivant à cet objectif fort louable de maintenir
à un niveau supérieur la qualité des pratiques des
institutions de dépôt et des assureurs, nous ne croyons pas que
c'est l'organisme d'indemnisation lui-même qui doit être titulaire
du pouvoir d'établir des normes régissant ces pratiques. Afin
d'améliorer l'efficacité et la souplesse du régime
québécois d'assurance-dépôts, je proposerai des
ajustements à la Loi sur les assurances, à la Loi sur les caisses
d'épargne et de crédit ainsi qu'à la Loi sur les
sociétés de fiducie et les sociétés
d'épargne, afin d'investir l'Inspecteur d'un pouvoir d'initier la mise
en place de normes de pratiques commerciales et financières saines
à l'intention des institutions de dépôts autorisées
à poursuivre des activités au Québec.
La révision des responsabilités administratives fera en
sorte que le gouvernement sera ultimement responsable de l'adoption des normes
et règles applicables aux institutions. De son côté,
l'Inspecteur général des institutions financières verra
son rôle de surveillance renforcé. Quant au rôle des
différents organismes d'indemnisation privés ou publics, il sera
recentré, tandis que celui de la Régie de
l'assurance-dépôts du Québec verra le sien limité
à l'indemnisation. Nous sommes convaincus que cette nouvelle
répartition des responsabilités générera des
bénéfices substantiels.
En ce qui concerne les régimes d'indemnisation, tant dans le
secteur de l'assurance que dans celui des institutions de dépôt,
ils seront réévalués afin de répondre à un
certain nombre de préoccupations, comme leur coût, la
définition de leurs responsabilités et le besoin de
cohérence intersectorielle. À cet égard,
l'énoncé formulé pose certaines questions qui seront
examinées lors de la
consultation qui sera tenue par cette commission parlementaire, à
compter d'aujourd'hui.
En ce qui concerne les mesures de protection du public, elles
consisteront à promouvoir le recours à l'arbitrage comme mode de
règlement des litiges entre les courtiers en valeurs mobilières
et leurs clients, et en outre, entre les courtiers eux-mêmes; à
accorder à l'individu non averti, qui a réalisé un
investissement régi par la Loi sur les valeurs mobilières, le
bénéfice de la procédure sommaire devant la division des
petites créances de la Cour du Québec; et à permettre le
développement des boutiques institutionnelles, sous réserve de
certaines exigences inhérentes à la stabilité du
marché, à la confiance du public et à un juste
équilibre concurrentiel parmi les opérateurs du marché des
valeurs.
Le Président (M. Lemieux): II vous reste deux minutes, Mme
la ministre.
Mme Robic: Oh... M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Alors, environ. Et sur
consentement du...
Mme Robic: Au chapitre... Ça va, monsieur...
Le Président (M. Lemieux): Pas de Problème? Pas de
problème, M. le député? Vous pouvez continuer, madame.
Mme Robic: Ça va, M. le Président, je vais tenter
de...
Au chapitre de la croissance, nous nous empresserons de bâtir sur
les acquis, tout en créant un véhicule de capitalisation et en
favorisant l'accès au capital étranger. En premier lieu, nous
appliquerons certaines recommandations du groupe de travail sur la
capitalisation des assureurs des personnes, dont celle de maintenir les
pouvoirs actuels, qui sont ceux d'investir en filiale. En second lieu, nous
analyserons les retombées générées à ce jour
par le programme des centres financiers internationaux à
Montréal. Le cas échéant, nous étudierons la
pertinence d'élargir ce programme aux activités de
réassurance et de courtage en assurance de dommages.
Le gouvernement a aussi l'intention de mettre sur pied un
véhicule de capitalisation, qui permettra assurément de
répondre aux objectifs globaux du gouvernement, de voir le secteur
financier se stabiliser et amorcer une nouvelle période de croissance,
après avoir consolidé ses bases financières et
adapté sa structure pour faire face au défi des marchés
publics de capitaux d'ici quelques années. La mission de ce
véhicule sera de contribuer à la poursuite du
développement d'un secteur financier à contrôle
québécois et de maximiser son impact bénéfique sur
l'économie du Québec.
Finalement, notre vision de l'avenir inclut une injection de capital
étranger dans la stratégie de capitalisation des institutions
québécoises. C'est dans cette optique que l'énoncé
propose un relâchement de la règle de propriété
étrangère pour les institutions à capital- actions. Si nos
institutions doivent rencontrer les objectifs de capitalisation,
l'investissement étranger doit être encouragé, et ceci peut
être accompli sans perdre le contrôle du secteur financier
québécois.
Telles sont les propositions que le gouvernement entend mettre de
l'avant, M. le Président, pour aider nos institutions financières
à consolider leurs acquis et à entrer dans le prochain
millénaire sur des bases solides. Avec ce plan d'action bien
intégré, le gouvernement veut concilier ses actions avec les
tendances et les phénomènes qui s'expriment au Québec, au
Canada et à l'échelle mondiale. La voie étant maintenant
tracée, il nous incombe de relever, à l'enseigne de la
concertation, un défi d'avenir de première importance, celui de
créer ici, chez nous, une masse critique capable d'affronter une
concurrence mondiale de plus en plus vive. C'est alors que nous croyons que les
Québécois et les Québécoises seront en mesure de
tirer pleinement profit de leur extraordinaire potentiel. Je vous remercie, M.
le Président.
Le Président (M. Lemieux): Merci, Mme la ministre. M. le
député de Westmount, la parole est à vous. On aura la
même liberté, la même largesse d'esprit que pour Mme la
ministre, à votre égard, eu égard au temps de parole, M.
le député de Westmount.
M. Richard B. Holden
M. Holden: Merci, M. le Président. J'ai lu avec beaucoup
d'intérêt les engagements et les documents sur les propositions de
politiques pour le secteur financier du Québec, et je dois remercier la
ministre, son équipe et tous ceux et celles qui ont conçu le
document.
Certaines orientations sont adéquates, pas toutes, mais il n'en
demeure pas moins que c'est un document instructif, malgré que j'aie
trouvé bien des voeux pieux parmi des suggestions plus substantielles.
C'est un document qui sollicite des questions et qui suggère des
orientations. Bref, un document qui aligne bien les travaux de cette
commission, qui a comme tâche, comme but, de s'informer, d'informer
toutes les personnes concernées, afin de permettre, lors de la prochaine
étape, des analyses scientifiques sérieuses des différents
éléments du projet, analyses devant servir de substrat aux lois
qui en découleront.
M. le Président, à l'occasion de l'étude des
crédits de la Commission des valeurs mobilières et de
l'Inspecteur général, je me suis interrogé sur le peu de
groupes qui avaient annoncé leur participation à cette
consultation, et je constate à nouveau qu'au cours des prochains jours
nous n'entendrons que 13 témoignages. Ça m'ap-paraît peu,
compte tenu de l'importance des institutions financières.
Je ne crois pas que la ministre puisse tirer beaucoup profit des appuis
qu'elle pourrait recueillir cette semaine, dans le cadre de cette consultation.
À vrai dire, le contraire serait inquiétant, puisque son document
est, pour l'essentiel, un énoncé de voeux pieux et
d'éléments qui vont de soi. Comme on le dit souvent:
Comment pourrait-on avoir l'âme assez basse pour être contre
la vertu?
Je note également que, pour l'essentiel, le document reste vague
et imprécis. Je comprends qu'il s'agit d'un énoncé de
politique et non de mesures concrètes, mais je comprends aussi que, pour
les organismes qui ont eu à préparer des mémoires, il n'a
pas dû être facile d'apprécier les vraies intentions du
gouvernement. Cela explique peut-être le pourquoi du peu de
témoignages que nous entendrons dans les prochains jours.
Chose certaine, M. le Président, les organismes auraient sans
doute eu plus de facilité à mesurer de façon
concrète les effets des intentions de la ministre si elle avait
présenté un projet de loi ou un avant-projet de loi. Je ne
connais pas de façon précise les intentions de la ministre
à cet égard, ni le calendrier qu'elle compte respecter.
Peut-être aura-t-elle l'occasion de nous donner plus d'indications dans
le cadre de cette consultation, ou à l'occasion de ses remarques de
clôture, qu'on attend avec impatience! (15 h 50)
Les propositions de politiques pour le secteur financier du
Québec découlent d'une longue démarche articulée
depuis les années soixante. Déjà, en 1969, le rapport
Parizeau regroupait les éléments fondamentaux de ce qui est
devenu par la suite la politique québécoise en matière
d'institutions financières, politique qui a créé un
réseau public d'entreprises financières et a permis la croissance
du plus important réseau pancanadien d'entreprises financières du
secteur privé. C'est ça, une vision à long terme. C'est
aussi une belle démonstration de développement économique
et social. Depuis ce temps, des milliers d'emplois furent créés,
comme s'est créée une communauté de solidarité,
dont les avantages et les services bénéficient à toute la
société. Mais des difficultés assaillent nos entreprises,
conséquence des circonstances économiques, bien sûr, mais
aussi, conséquence de nos faiblesses et de nos erreurs. Ne le taisons
pas. Au contraire, diagnostiquons nos maux et corrigeons-les. C'est d'abord
ça, la manifestation des gestionnaires compétents et
avisés.
Il faut continuer, il faut faire plus et il faut faire mieux. Il faut
mettre fin à l'ingérence régressive du
fédéral. Il faut augmenter la part du marché
québécois par les entreprises québécoises. Il faut
augmenter la part du marché canadien et étranger par les
entreprises québécoises. Il faut augmenter le savoir par la
recherche et l'activité industrielle. Il faut augmenter la
solvabilité et la rentabilité de nos entreprises, et
réorganiser les autorités de surveillance. Il faut concevoir des
principes et directives d'éthique et de devoir pour les autorités
de surveillance. Il faut diminuer et réaménager la
fiscalité. Il faut revoir les règles applicables au secteur
public, en matière de structure financière. Il faut voir au
maintien et à la sauvegarde de nos entreprises, surtout les
coopératives. Il faut concevoir de sains principes financiers,
actuariels, comptables, juridiques, et à cet effet, y impliquer les
corps professionnels concernés. Il faut concevoir des systèmes
d'analyse financière individuelle et collective, ainsi qu'un
système d'analyse et de comptabi- lité économiques. En
somme, comme le souhaitent beaucoup d'intervenants, un plan global d'analyse et
d'action.
À cette fin de recherche et de planification, nous
suggérons la formation d'une équipe de travail comprenant
notamment des représentants du notariat, du Barreau, de l'actuariat, de
la comptabilité financière, de l'administration et des secteurs
financiers public et privé, pour aider le gouvernement à
articuler le dispositif législatif.
Alors, M. le Président, comme la ministre nous a fait une revue
des documents, les trois principaux axes de l'énoncé de politique
d'orientation de la ministre tournent autour des trois éléments
qui constituent autant de grands chapitres, soit: améliorer
l'efficacité, renforcer la stabilité et favoriser la croissance.
On ne peut pas être contre cela. Quant à l'efficacité, il
est peu probable que le premier chapitre donne lieu à des articles de
loi dans un proche avenir. Ce chapitre relève davantage de voeux pieux
que d'autre chose. En effet, les suites que l'on pourrait donner à ce
chapitre supposent qu'il y ait eu entente entre le Québec, le
gouvernement fédéral et les autres provinces. Les
Québécois, qui ont une longue expérience des débats
constitutionnels, comprendront rapidement de quoi je parle.
Quant à la question constitutionnelle, M. le Président, le
palier fédéral finalisait sa réforme de la
réglementation des institutions financières en adoptant, en
décembre 1991, quatre projets de loi, soit la Loi sur les
sociétés de fiducie et de prêt, la Loi sur les banques, la
Loi sur les sociétés d'assurances et la Loi sur les associations
coopératives de crédit. Ces lois confèrent notamment aux
institutions financières à charte fédérale la
capacité d'acquérir des filiales dans tous les secteurs de
services financiers, calquant en cela le modèle québécois,
à quelques détails près. Les filiales peuvent être
à charte fédérale ou à charte provinciale. On ferme
donc la boucle entamée en 1987, alors que le Parlement
fédéral habilitait les institutions financières à
charte fédérale à faire l'acquisition des maisons de
courtage en valeurs mobilières.
Force est de constater, M. le Président, et de déplorer
que le palier fédéral s'est servi de la réforme de la
réglementation des institutions financières pour étendre
la portée de son pouvoir réglementaire au détriment des
provinces canadiennes. À ce titre, les réformes
fédérales viennent confirmer des velléités qui
s'étaient exprimées à plusieurs reprises au cours des 30
dernières années. Le rapport Porter en 1964, le rapport Anisman
en 1979, le livre vert de Mme McDougall en 1985, le rapport du Comité
permanent des finances, du commerce et des questions économiques en
1985, le rapport du Comité sénatorial permanent des banques et du
commerce de 1986, les réformes de Thomas Hockin de 1987, ou
l'étude du gouvernement fédéral de 1989, intitulée
«Federal Involvement in the Canadian Securities Industry». Tous ces
rapports, propositions ou lois préconisent, à des degrés
divers, l'accroissement des pouvoirs du gouvernement central en ce qui concerne
la réglementation des institutions financières et la
réglementa-
tion du commerce des services financiers.
À ce dernier chapitre, le gouvernement fédéral
souhaite particulièrement avoir la mainmise sur le domaine des valeurs
mobilières, une matière relevant, de manière non
équivoque, de la compétence provinciale, tel qu'en font foi des
initiatives répétées ayant cette finalité. La
réforme fédérale est donc venue accentuer le chevauchement
des réglementations québécoise et fédérale
en ce qui a trait aux institutions financières. Elle constitue, de plus,
une menace pour la compétence du Québec dans les domaines
reliés au commerce des services financiers, notamment les valeurs
mobilières.
Mme la ministre elle-même le reconnaît, d'ailleurs, sans
détour, dans son document «L'appui au secteur financier»,
alors qu'à la page 4 le document affirme, et je cite: «Quant aux
doubles emplois, on en retrouve des exemples dans les récentes lois
adoptées par le gouvernement fédéral. Par l'introduction
d'une approche qui regroupe une série de pouvoirs réglementaires
relatifs à un grand nombre d'activités des institutions
financières fédérales, le gouvernement canadien s'autorise
à réglementer les activités de ces institutions dans les
provinces. Or, sauf dans le cas des banques, cette compétence est
provinciale. À cette tendance sont venus se greffer des
dédoublements reliés à d'autres aspects de la
réglementation fédérale.» Et je continue la
citation: «Ces différences d'approches ou de normes mises en place
au Canada par les différentes législations ont
généré des contraintes importantes qui nuisent à la
compétitivité et à l'efficacité des institutions
financières et du système financier canadien dans son
ensemble.» Fin de la citation. (16 heures)
L'empiétement du gouvernement fédéral sur des
compétences provinciales exclusives est particulièrement
préoccupant à deux égards. Premièrement, l'approche
consolidée, qui se trouve systématisée dans les
récentes lois fédérales. Dans l'encadrement normatif mis
en place par les nouvelles lois fédérales, une approche
consolidée est favorisée. Cela signifie que l'encadrement
normatif se rapporte à une institution à charte
fédérale et à l'ensemble de ses sociétés
affiliées, comme s'il s'agissait d'une seule et même
entité. Dans les faits, le gouvernement fédéral se donne
donc le pouvoir de réglementer une institution ayant une charte
québécoise affiliée à une institution
financière fédérale. Il étend ainsi ses pouvoirs de
réglementation au détriment des provinces, et de plus, le
chevauchement réglementaire qui en résulte accroît
inutilement les coûts assumés par l'industrie et nuit ainsi
à sa compétitivité.
Deuxièmement, l'empiétement du gouvernement
fédéral. Le fédéral se dote de pouvoirs
réglementaires visant des activités qui sont pourtant des
compétences provinciales exclusives. L'envahissement par le gouvernement
fédéral des compétences du Québec en matière
de réglementation des institutions financières et des services
financiers, et l'enchevêtrement réglementaire qui en
résulte, démontrent une fois de plus le non-sens du
système fédéral actuel. L'Opposition officielle ne
tolérera pas l'amoindrissement des pouvoirs du Québec en ce qui a
trait à la réglementation des institutions financières et
des services financiers. L'affaiblissement de ces pouvoirs marquerait un recul
considérable pour le Québec et mettrait en péril sa
capacité de mettre en oeuvre une stratégie économique qui
soit à son image et à la mesure de ses besoins et de ses
priorités et objectifs. L'Opposition officielle dénonce aussi le
gaspillage et les coûts inutiles imputables à ces chevauchements
qui réduisent l'efficacité, nuisent à la croissance de nos
institutions financières sans pour autant rehausser la protection de
l'épargnant ou la stabilité du système financier.
En ce qui concerne le volet harmonisation, dans les propositions de la
ministre, l'Opposition officielle souscrit au principe sous-jacent à la
démarche d'harmonisation proposée par le document
ministériel. Il faut cependant retenir, à notre avis, qu'une
entreprise d'harmonisation ne conduit pas à l'uniformisation.
L'État québécois se doit de conserver la marge de
manoeuvre nécessaire pour aménager un cadre qui tienne compte de
la spécificité de l'organisation du secteur financier
québécois et de ses institutions: en particulier, la
spécificité du mouvement coopératif
québécois.
Nous croyons aussi qu'il faut orienter l'effort d'harmonisation vers les
normes internationales qui se dessinent. L'Opposition officielle est donc
favorable au maintien d'un espace financier Québec-Canada fonctionnel,
étant entendu que cela ne signifie pas le renforcement du pouvoir
central. Cet espace financier peut se réaliser par l'entremise d'un
processus d'harmonisation des normes. À ce titre, le système du
passeport unique, adopté par les pays de la Communauté
économique européenne, constitue un exemple probant qu'un espace
financier peut se réaliser par l'harmonisation des règles de la
coopération. Je dois dire en passant que nous étions d'accord
avec les remarques de la ministre, telles que rapportées aujourd'hui,
quand elle a exhorté l'Ontario à moderniser sa
réglementation.
Il m'est difficile, aujourd'hui, de voir autre chose, dans le chapitre
sur l'efficacité, qu'un nombre de voeux pieux. Prenons, par exemple, le
sujet de l'harmonisation. Quand le document dit, et je cite:
«Éviter d'entraver l'innovation en matière de règles
et d'initiatives de surveillance et épargner aux sociétés
extraprovinciales les coûts reliés à la superposition de
ces règles et initiatives, tout en mettant en place un régime
globalement compatible dans le cadre duquel chaque réglementation est
substantiellement reconnue par les autres juridictions, voilà l'objectif
ultime que devrait permettre d'atteindre un exercice d'harmonisation des lois
régissant les institutions financières au Canada»,
ça serait difficile d'être contre un tel énoncé
tellement général. Mais on semble en être loin, puisque,
quelques paragraphes plus loin, la ministre accuse Ottawa, comme j'ai
déjà dit, d'avoir généré d'importants effets
de dédoublement avec sa réforme.
Parfois, le document gouvernemental apparaît imprécis.
Ainsi, au sujet des transactions intéressées, la ministre indique
qu'elle élaborera un ensemble de principes de réglementation des
transactions intéressées qui
soient communs à tous les secteurs. À moins d'être
devin, on ne voit pas très bien de quoi il s'agit. M. le
Président, on ne peut pas être contre une meilleure
définition du rôle de chacun, une plus grande clarification de la
compétence de tous. La ministre a fait une proposition en ce sens, mais
on devine que cela donnera lieu à des négociations impliquant les
provinces et le fédéral. Partant de là, nous ne pouvons
qu'attendre pour voir.
Quant à la stabilité, il sera sans doute question au cours
des prochains jours des nouveaux pouvoirs que la ministre
déléguée aux Finances compte donner à l'Inspecteur
général. Ici, je dois avouer que l'Opposition officielle
s'interroge sur la pertinence de la volonté de la ministre et sur les
motifs qui l'animent. L'IGIF a-t-il véritablement besoin des pouvoirs
que certains jugent exorbitants? N'y a-t-il pas une volonté d'expliquer
aussi les déboires des Coopérants? Ces déboires
auraient-ils pu être évités si l'Inspecteur
général avait eu les pouvoirs dont la ministre parle dans son
énoncé de politique? N'y a-t-il pas là la négation
de l'autonomie de gestion du conseil d'administration des institutions
financières?
L'Opposition officielle ne nie pas les responsabilités qui
reviennent à l'État et à l'Inspecteur
général, en matière de surveillance. Ce n'est pas pour
rien qu'avant de faire adopter la loi 75, en 1984, laquelle ouvrait la porte au
décloisonnement, le gouvernement avait créé le poste
d'Inspecteur général.
Par ailleurs, en ce qui a trait aux normes de pratiques commerciales et
financières saines, j'ai été surpris de lire que
l'Inspecteur général devrait faire rapport à la
Régie de l'assurance-dépôts du Québec relativement
à toute institution qui ferait défaut de se conformer aux
règles que l'Inspecteur général aurait
déterminées. Je rappelle que l'Inspecteur général
est aussi le président de la Régie. Il se fera rapport, donc,
à lui-même. Indi-que-t-on, par là, la volonté
d'enlever de l'Inspecteur général la responsabilité de la
Régie de l'assurance-dépôts? On se le demande.
Puisqu'on aborde la question de l'indemnisation des épargnants,
je dois souligner que l'énoncé de politique ne propose rien de
précis. La lecture du document suggère que le gouvernement ne
sait pas sur quel pied danser. Il se contente d'interroger cela se
comprend dans un contexte de consultation mais je fais aimablement
remarquer à la ministre qu'elle a affirmé que son
énoncé était le fruit de nombreuses consultations
privées. Je rappellerai que c'est elle qui indique, sur la page
couverture de son document, qu'il s'agit de propositions de politiques. Force
nous est de constater qu'il n'y a pas de propositions directes et
concrètes.
En ce qui concerne la croissance, je dois dire que ce chapitre est un
peu décevant. Il y a déjà plusieurs années qu'on
parle de la possibilité de favoriser la capitalisation de nos
institutions, et en particulier, de nos mutuelles d'assurance-vie. Alors, on va
certainement suivre les discussions avec intérêt, M. le
Président.
Je vais terminer mes remarques. Je souhaite que cet exercice donne lieu
à des échanges constructifs, et on verra, par la suite, comment
la ministre y donnera suite dans ses projets de loi. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Camden): Merci. Est-ce qu'il y a d'autres
remarques préliminaires?
Mme Louise Robic
Mme Robic: Quelques petites remarques, M. le Président.
Tout d'abord, j'aimerais remercier le député de Westmount de ses
bons mots. Quand on parle d'un document d'orientation adéquat, d'un
document instructif, qui enligne bien les travaux de la commission, et
très informatif, je pense que ce sont tous des compliments. Alors, je
remercie le député de Westmount de réaliser l'importance
de ce document et du contenu de ce document. (16 h 10)
M. le Président, vous comprendrez que le député de
Westmount me fait un peu sourire quand il met en question la possibilité
de créer un espace économique canadien. D'ailleurs, est-ce que ce
n'est pas là un terme que vous avez adopté vous-même, au
Parti québécois? C'est un terme qu'on retrouve dans votre
document «Le Québec dans le monde». Alors, est-ce que vous
êtes en train de me dire qu'il faut détruire un pays pour pouvoir
le reconstruire de la même façon, que vous, vous ayez du
succès, et moi, croyant au fédéralisme participatif, je ne
pourrais pas arriver à atteindre les mêmes objectifs? Eh bien,
laissez-moi douter de votre façon de faire et préférer la
mienne. La preuve en est que la mienne n'est pas si mauvaise, mon approche,
puisque j'ai déjà signé des ententes avec les provinces,
des ententes de...
Le Président (M. Camden): Mme la ministre, est-ce que je
peux vous inviter à conclure en quelques mots, considérant que
nous avons déjà quelque 30 minutes de retard?
Mme Robic: Oui... d'accord. Alors, M. le Président, tout
simplement pour dire au député de Westmount, si vous me le
permettez, que j'espère qu'il va faire plus qu'écouter à
cette commission, et qu'il va pouvoir participer et nous aider tous à
trouver les solutions, afin que, de ce document-là, sortent des projets
de loi qui pourront faire renforcir notre secteur financier
québécois.
Auditions
Le Président (M. Lemieux): Merci, Mme la ministre.
J'inviterais immédiatement les gens du Regroupement des cabinets de
courtage d'assurance du Québec à bien vouloir prendre place ici,
en face de moi, à la table des témoins, s'il vous
plaît.
Je demanderais au porte-parole de l'organisme, dans un premier temps, de
bien vouloir s'identifier, de nous présenter les gens qui
l'accompagnent, et je vous ferai état du déroulement des
procédures par la suite.
Regroupement des cabinets de courtage d'assurance du
Québec (RCCAQ)
M. Young (Pierre): Merci, M. le Président. Mon nom est
Pierre Young. Je suis le président du Regroupement des cabinets de
courtage d'assurance du Québec. Je suis accompagné de notre
directeur général, M. Jean-Marie Derome, à ma droite, et
de notre aviseur légal, Me André Bois, à ma gauche.
Le Président (M. Lemieux): Merci. Vous disposez d'une
période de 20 minutes pour l'exposé de votre mémoire.
Suivra un échange entre les deux formations politiques le parti
ministériel et le parti de l'Opposition pour une durée
totale de 40 minutes: 20 minutes pour le parti ministériel et 20 minutes
pour l'Opposition officielle, représentée ici par le
député de Westmount.
Alors, sans plus tarder, nous sommes prêts, monsieur, à
écouter l'exposé de votre mémoire.
M. Young: Alors, M. le Président, Mme la ministre, Mmes et
MM. les députés, nous vous remercions de votre invitation. Il
nous fait plaisir de vous faire part de nos idées sur votre document,
aujourd'hui.
Comme vous le savez, le Regroupement des cabinets de courtage est un
syndicat professionnel dont la mission est la défense et la promotion
des intérêts économiques de ses membres. Nous
représentons environ deux tiers des courtiers d'assurances de la
province, étant donné que l'adhésion au Regroupement est
volontaire.
Votre document fait part, dès le départ, d'une distinction
entre le secteur de production et de distribution. Nous croyons donc opportun
de vous faire part de nos idées, étant donné que nous
représentons un réseau de distribution dans le secteur des
assurances. Étant donné que vous avez consulté notre
document, j'aimerais attirer votre attention sur nos recommandations.
J'essaierai d'être un peu plus explicite à l'aide de certains
extraits de notre document ou à l'aide de mes propres paroles.
Alors, notre première recommandation dit: «Que le
Québec exerce pleinement sa juridiction exclusive dans le domaine de la
protection de la vie privée ainsi que dans le domaine de la
réglementation des ententes de réseau et de la prestation de
conseil financier.» En effet, selon nous, ces matières
relèvent du domaine de la distribution des produits financiers, de sorte
que leur réglementation affecte directement le réseau des
intermédiaires de marché financier. Voilà pourquoi le
RCCAQ est préoccupé par cette question.
Les articles 16 et 49 à 57 de la Loi sur les
intermédiaires de marché témoignent de la volonté
du gouvernement québécois de promouvoir des mesures
législatives contrôlant l'intégrité et
l'indépendance du réseau de distribution de produits financiers
au Québec. À cet égard, il convient de rappeler que
l'article 16 de la loi précitée édicté ce qui suit:
«Sous réserve des règlements du gouvernement, un
intermédiaire de marché en assurance ne peut à la fois
exercer des activités à ce titre et être à l'emploi
d'une institution financière qui n'est pas un assureur.»
Notre deuxième recommandation dit: «Que le Québec
favorise la stabilité du secteur de l'assurance par les moyens suivants:
le contrôle de la tarification, un encadrement des agents
généraux et une surveillance de la mise en oeuvre des ententes de
réseau.» Nous préconisons, tout d'abord, un contrôle
de la tarification. En effet, comme il se produit actuellement dans certains
États américains, les assureurs d'assurances
générales doivent soumettre aux instances gouvernementales leur
tarification, afin d'observer une saine gestion des opérations, et non
pas uniquement une rentabilité des placements. Nous aimerions voir
mettre en application ce principe. Deuxièmement, un encadrement des
agents généraux. Comme il est actuellement
préconisé, nous sommes d'avis que, lors de la révision en
Ontario, les agents généraux devraient obtenir un permis
d'opération et être supervisés, pour éviter des
transferts de profit de l'assureur vers l'agent général. Comme
nous l'avons déjà connu dans notre province, certains agents
généraux ont mis en péril la solvabilité de
l'assureur. Alors, l'émission d'un permis et un contrôle
viendraient vérifier le tout. Troisièmement, nous demandons une
surveillance de la mise en oeuvre des ententes de réseau.
Notre troisième recommandation: «Que le rôle de la
Régie de l'assurance-dépôts du Québec soit
limité à l'indemnisation des déposants.» Comme vous
le préconisez dans votre document, le RCCAQ appuie une telle
proposition, pour le motif suivant. Le modèle de cantonnement à
la seule fonction d'indemnisation existe déjà dans la Loi sur les
intermédiaires de marché, où les fonds d'indemnisation
exercent une fonction limitée à la seule indemnisation. La
réglementation des conditions d'indemnisation relève des
conseils. La cohérence intersectorielle exigera donc que ce
modèle soit suivi et appliqué dans tout le domaine des
institutions financières.
Quatrièmement: «Que l'Inspecteur général des
institutions financières soit chargé de la surveillance des
conseillers financiers, incluant les courtiers en valeurs mobilières, et
que PIGIF soit investi du pouvoir de recommander la destitution d'un
administrateur d'une institution financière à charte
québécoise.» Nous voyons cette recommandation sous un
concept global. En effet, les différents conseillers financiers
que ce soit un courtier en assurance générale, en assurance IARD,
un planificateur financier devraient être contrôlés
et supervisés par la même instance, et nous préconisons que
ce soit par l'Inspecteur général des institutions
financières. Nous conseillons de mettre sur pied une nouvelle mutuelle
de sécurité, englobant trois directions, soit, comme je viens de
le mentionner, la protection des dépôts, les assurances de
personnes et les assurances de dommages.
Notre cinquième recommandation: «Que l'on rationalise le
système d'indemnisation des personnes transigeant avec des institutions
financières en décloisonnant un tel service et en le confiant
à un organisme
public contrôlé par le Québec.» Nous voulons
décloisonner les institutions; alors, pourquoi ne pas
décloisonner les fonds d'indemnisation? (16 h 20)
Notre sixième recommandation: «Que les assurés
puissent avoir la faculté de contraindre un assureur à
régler par voie d'arbitrage un différend fondé sur un
contrat d'assurance.» Tout comme vous le préconisez dans votre
document pour les courtiers en valeurs mobilières, pourquoi, dans le
domaine de l'assurance générale, nous n'aurions pas recours,
également, à un système d'arbitrage? Lorsqu'un client a un
problème avec un assureur lors d'une réclamation, pourquoi ne
pourrait-il pas faire appel à un arbitre avant d'attendre un
délai de quelques années pour comparaître, en vertu du Code
civil, afin d'accélérer le processus et l'image de
l'industrie?
Notre septième recommandation: «Que les mesures de
protection des renseignements personnels recueillis par les institutions
financières soient contenues dans une loi à portée
générale plutôt que dans une loi relative aux institutions
financières, soit une loi sectorielle. Nous sommes d'avis que le
Québec devrait avoir pleine juridiction et instituer une loi de
protection sur les renseignements personnels, une loi qui soit aussi
importante, par exemple, que la charte québécoise. Nous voulons
éviter que des institutions à charte fédérale,
comme des banques, qui opèrent également dans la province de
Québec, puissent dire qu'elles ne sont pas assujetties à cette
loi. Ils doivent être tous dans le même encadrement.
Finalement, notre dernière recommandation: «Que le
Québec stimule la croissance de l'activité
d'intermé-diation financière par une voie alternative: le recours
aux conseillers financiers.» Nous sommes d'avis qu'il faudrait aussi
accroître l'intermédiation financière par de nouveaux
moyens. En bref, le capital étranger ou le nouveau capital peut
transiter non seulement par les banques ou les institutions financières
traditionnelles, mais également par les banquiers invisibles que sont
des intermédiaires de marché, qui seraient
réglementés par les provinces et qui agiraient, notamment, comme
courtiers en financement.
Nous vivons de plus en plus, dans nos cabinets, avec la nouvelle Loi sur
les intermédiaires de marché, un nouveau phénomène.
Que ce soit un courtier en assurance de dommages, un courtier en assurance de
personnes, un courtier en valeurs mobilières ou un planificateur
financier, nous avons de plus en plus à mettre sur pied une
planification de stratégie financière pour nos clients. Alors,
nous sommes d'avis que tous ces conseillers devraient être régis
par la nouvelle loi. C'est pourquoi nous préconisons de stimuler
l'émergence d'une profession de conseiller et de planificateur
financier, titre et activité réservés, dont les fonctions
seraient encadrées selon le modèle de la Loi sur les
intermédiaires de marché.
Alors, voilà, en bref, les éclaircissements sur les huit
recommandations que comporte notre rapport. Je vous remercie de votre
attention.
Le Président (M. Lemieux): Mme la ministre, est-ce que
vous avez des commentaires?
Mme Robic: Oui, merci, M. le Président. D'abord,
j'aimerais saluer M. Young, M. Bois et M. Derome à cette table.
Bienvenue, messieurs. Vous avez dit, tout à l'heure, dans le
début de votre présentation, que vous représentez les deux
tiers des courtiers en assurance de dommages. C'est combien, ça, les
deux tiers? Ça représente combien?
M. Young: Environ 1700 courtiers, actuellement.
Mme Robic: II y en a 1700. Alors, M. le député de
Westmount, on commence très bien avec une représentation de 1700
courtiers en assurance de dommages. C'est tout de même important, cette
représentation-là!
Je vous remercie de votre mémoire, mais votre mémoire
soulève quelques questions. La première... Voulez-vous
m'éclairer, s'il vous plaît, et me dire ce que c'est que des
agents généraux?
M. Young: Un agent général, en fait, peut
être considéré premièrement comme un distributeur ou
un grossiste. Il fait affaire, la plupart du temps, avec un seul assureur et il
peut distribuer les produits d'un assureur auprès de différents
coutiers d'assurances générales. Le problème que nous
soulevons, c'est qu'il y a une relation apparentée entre certains
assureurs et certains agents généraux. Nous avons noté un
échange de profits entre l'agent général et l'assureur en
question. Alors, l'agent général peut empocher une partie
peut-être un peu trop grosse des profits, du fait que l'assureur
se ramasse avec une certaine partie des réclamations très
importante ce qui affecte la solvabilité des opérations de
l'assureur et le met en péril.
Mme Robic: Un «middleman». C'est un
«middleman» entre la compagnie d'assurances puis les courtiers?
M. Young: Oui, si on peut dire. Légalement, j'aimerais
peut-être... Si notre aviseur légal a des points plus
précis...
M. Bois (André): L'agent général dont on
parle, c'est l'équivalent de ce qu'on désigne en anglais comme le
«general managing agent», qui ne traite qu'avec un assureur, et
qui, présentement, n'est pas assujetti à la Loi sur les
intermédiaires de marché, parce qu'il offre des produits
d'assurance à d'autres courtiers, mais pour le compte d'un seul
assureur.
Mme Robic: À d'autres courtiers, pour le compte de?
M. Bois: D'un seul assureur d'accord? parce qu'un
agent général qui offre des produits d'assurance pour plusieurs
assureurs à d'autres courtiers est régi par la Loi sur les
intermédiaires de marché. Mais
un agent exclusif, qui s'occupe de toute la gestion d'un assureur et qui
offre des produits aux courtiers, actuellement, n'est pas régi par la
loi. Ce qui se produit, c'est que l'agent général se prend une
cote très importante lors de la distribution du produit.
Alors, un exemple bien concret. L'agent général a
discrétion pour établir les primes. Il va établir la prime
de l'assureur. Disons que, sur une dépense totale de 1000 $, il va
établir la prime à 300 $, et lui va se réserver des frais
de gestion de 400 $. Alors, pardonnez l'expression, il
«crème» le marché. L'assureur se retrouve avec une
prime nettement adéquate et les véritables profits de
l'opération de souscription se retrouvent chez l'agent
général. Ou on retrouve parfois, comme par hasard, chez l'agent
général, des actionnaires qui viennent du holding de la compagnie
d'assurances. Alors, on enrichit l'agent général et,
graduellement, on appauvrit la compagnie d'assurances. Ce
phénomène-là s'est produit au Québec, il y a
quelques années, mais dans un contexte différent, avec un certain
courtier que je ne veux pas nommer, qui représentait un assureur en
particulier. L'assureur a fait faillite, et c'est le courtier très
important qui, comme agent général, se gardait tous les profits.
Alors, l'assureur n'avait même pas une prime adéquate.
Dans le rapport ontarien, il est proposé, et ça correspond
à votre souci d'harmonisation interprovinciale... M. Charlton recommande
que ce type d'intermédiaire-là soit au moins licencié pour
que les autorités de surveillance voient s'il y a du «transfer
pricing» ou du transfert de profit.
Mme Robic: II doit y avoir quelque chose que je ne comprends pas,
parce que... Quels sont les avantages, pour une compagnie d'assurances, de
faire affaire avec un agent général?
M. Bois: Les compagnies d'assurances utilisent l'agent
général pour effectuer des opérations que l'assureur
ferait habituellement lui-même: par exemple, imprimer les polices,
inspecter les risques sur le site. Alors, elle confie à l'agent
général une partie des tâches administratives qu'elle
accomplirait habituellement elle-même. Mais ce faisant, elle
surrémunère l'agent général, volontairement, pour
faire en sorte que tous les profits de l'opération d'assurance se
retrouvent chez l'agent général au lieu de se retrouver, au moins
pour une part équitable, chez l'assureur.
Alors, ça donne lieu également à d'autres pratiques
un peu étranges, et dont j'ai été moi-même
témoin. L'agent général émet une police d'assurance
je pourrai le nommer à l'Inspecteur général en
privé, j'ai vu ça dans un contexte judiciaire la
première page de la police indique une prime de 1000 $, et la
deuxième page indique une prime de 800 $. Ça, ça se
produit dans notre province. Alors, c'est un agent général
lié à l'assureur et lié au holding de l'assureur, ce qui
fait en sorte que l'assureur, lui, court des risques, et l'agent
général ne court pas de risques. Dans un souci, je suppose, de
solvabilité et de stabilité des institutions finan-
cières, bien, il faudrait éviter ce
phénomène-là. Ce n'est pas seulement que ça se
produit, ça a été observé en Ontario.
Mme Robic: Je vous avoue que, pour moi, c'est tout à fait
nouveau. J'ai quelque problème à voir l'utilité et les
avantages, pour une compagnie, de s'affaiblir en faveur de son agent
général. Peut-être qu'il y a des choses que je ne saisis
pas. Je viens de me faire donner une leçon, mais enfin, je pense qu'il
faudra regarder ça de plus près. C'est la première fois
que j'entends parler d'un agent général. Oui, M. Young. (16 h
30)
M. Young: Mme la ministre, si je peux ajouter, c'est que,
souvent, ces assureurs présentent des produits spéciaux pour un
marché difficile. Comme ils n'ont pas de réseau de distribution,
c'est pourquoi ils s'adressent à un grossiste. Ça peut être
des assureurs qui viennent de l'extérieur on en a connu à
Montréal. C'est un grossiste connu, à Montréal, qui, lui,
a un certain réseau de courtiers d'assurances générales.
Ça lui permet d'entrer dans le marché.
Mme Robic: Alors, il s'agira de regarder ça de plus
près, d'aller obtenir plus d'information, et de voir la pertinence de
les assujettir, comme on a voulu assujettir toutes les personnes qui
évoluaient dans un domaine, aux mêmes règles de formation,
si vous voulez, aux mêmes règles déontologiques. Il serait
intéressant de voir si ces gens-là doivent faire partie du groupe
spécifique des intermédiaires de marché et avoir à
rencontrer, eux aussi, certaines normes pour pouvoir agir.
Contrôle de la tarification. Qu'est-ce que vous faites des forces
du marché, vous autres? Vous voulez que ce soit nous qui
établissions la tarification?
M. Young: Pas les établir, mais les vérifier.
Mme Robic: Pas...
M. Young: On ne demande pas de les établir, mais de les
vérifier ou de les accepter. Nous voulons faire un parallèle
entre les profits... entre une saine gestion d'opération et une
solvabilité de placement. Il est connu que certains assureurs ont
présenté, pendant plusieurs années, des déficits
d'opération et ont dû cesser leurs opérations à un
moment donné. Tout ce temps-là, il y avait des profits de
placement. Alors, comme il se produit dans certains États importants,
aux États-Unis, les assureurs doivent présenter leur table de
tarification aux instances gouvernementales afin d'assurer une saine gestion
d'opération. Tout ça pour éviter, justement, une
compétition sur le marché, qui est moins saine que plus saine. Si
les assureurs doivent présenter des profits d'opération, on va
arrêter de connaître une compétition qui est souvent
illégale ou moins juste. Alors, on demande ça pour éviter
certaines faillites qu'on a connues dans notre domaine, dans les
dernières années. Je pense que M. Derome aurait peut-être
quelque chose à ajouter là-dessus.
M. Derome (Jean-Marie): L'idée, dans ça, ce n'est
pas de réglementer et de déterminer la prime que les assureurs
doivent charger, sauf que c'est d'éviter qu'une compagnie, année
après année, indique des profits, des rendements de placement, et
que, dans ses opérations, année après année, elle
fasse des déficits, des pertes techniques, ce qui fait que le rapport
primes-pertes n'est pas justifié. On continue à subir des pertes
dans le rapport primes-pertes, ce qui fait que, pour combler les pertes, on va
venir chercher une partie des bénéfices de rendement de
placement, ce qui peut grandement affecter le rendement de la compagnie. Donc,
d'utiliser, en fait, de l'argent qui pourrait servir de capitalisation à
la compagnie et de l'envoyer dans des pertes inutiles.
Mme Robic: Ce n'est pas ce qu'on peut appeler de la bonne
gestion, ça. Ça fait partie de la responsabilisation des
administrateurs de nos entreprises, qui doivent prendre leurs
responsabilités, et s'assurer que les décisions qu'ils prennent
sont des décisions qui assurent la bonne santé de leur
entreprise.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Westmount... Je vais peut-être revenir tout à l'heure, à la
page 15 de votre mémoire, sur les CMS, ce qui semble assez
intéressant, et sur l'arbitrage en matière de valeurs
mobilières, mais préalablement, je vais vous passer la parole, M.
le député de Westmount, pour respecter la règle de
l'alternance.
M. Holden: merci, m. le président. je veux aussi dire un
mot de bienvenue au regroupement des cabinets de courtage d'assurance. vous
avez dit, je crois, que vous représentez 60 % des cabinets de
courtiers?
M. Young: En fait, l'adhésion au regroupement, sur une
base volontaire... Nous sommes composés d'environ 770 cabinets,
actuellement, soit environ deux tiers des courtiers de la province.
M. Holden: Sur les grandes lignes de l'énoncé de
politique de Mme la ministre. Actuellement, qu'est-ce que vous pensez du
contrôle en général sur vos gens, sur les courtiers en
assurance? Quel est le système de contrôle et qu'est-ce que vous
en pensez? Est-ce que c'est trop onéreux, est-ce que c'est trop lourd,
ou est-ce que ça va bien? Quelle est votre attitude
là-dessus?
M. Young: Nous sommes présentement régis par la
nouvelle Loi sur les intermédiaires de marchés, la loi 134, qui
est entrée en vigueur en septembre 1991, comme vous le savez. Le
Regroupement des cabinets de courtage a été officiellement
accrédité, avec deux sièges au sein du Conseil des
assurances de dommages. Ce Conseil des assurances de dommages représente
une table de réflexion de l'industrie. On y retrouve des
représentants des courtiers d'assurances, des assureurs, du public, de
tous les intervenants, des experts en sinistres. Nous sommes en faveur, nous
travaillons très ardemment de concert avec le Conseil des assurances de
dommages, car nous sommes maintenant, tous les intermédiaires de notre
domaine, régis pas un même organisme.
M. Holden: Alors, ça va bien actuellement?
M. Young: Oui. L'évolution avec le Conseil des assurances
de dommages va très bien. C'est une très bonne table de
concertation pour l'évolution de notre profession.
M. Holden: Dans les propositions de la ministre, il y en a une
où il est question d'étudier la pertinence d'élargir le
programme des centres financiers internationaux, notamment, aux
activités de courtage d'assurance de dommages. Je me demande si vous
avez pris connaissance de cette proposition. Quelle est votre
réaction?
M. Young: J'aimerais passer la parole à notre aviseur
légal, étant donné qu'il a étudié plus en
détail que moi le document.
M. Bois: On s'est interrogé sur la signification de la
proposition et on n'a pas osé avancer de commentaire, vu qu'on ignorait
l'ampleur de la proposition. On souhaiterait...
M. Holden: Qu'est-ce que vous comprenez, vous autres, de cette
proposition?
M. Bois: Ce qu'on en comprend, à une première
lecture, c'est qu'il y aurait un système parallèle de courtage,
ce qui serait peut-être à déplorer si ça introduit
un encadrement parallèle. Mais c'est impossible, à notre point de
vue, pour le moment, de détecter l'orientation de cette proposition. On
préférerait le voir dans un texte normatif avant de se
prononcer.
M. Holden: Actuellement, comment fonctionne... Quelle est la
situation actuelle pour le marché international?
M. Young: Nous ne nous sommes pas penchés sur cette
question du tout.
M. Holden: Non?
M. Young: Non. Nous avons étudié les implications
de ce document face à notre réseau, à l'intérieur
de la province de Québec, car nous représentons...
M. Holden: Vous êtes surtout concernés par le
marché à l'intérieur du Québec.
M. Young: Oui, parce que le Regroupement des cabinets de courtage
représente surtout les petits et moyens cabinets de la province qui
opèrent à l'intérieur de la province de Québec. (16
h 40)
M. Holden: À la page 14 de votre mémoire, vous
parlez de la création d'un régime québécois
d'indemnisation. Vous décrivez des régimes privés non
québécois. Je cite votre mémoire: «les conditions
que ces régimes imposent à leurs adhérents ont tendance
à se modeler à des politiques qui ne sont pas
nécessairement en harmonie avec celles prônées par le
Québec». Est-ce que vous pourriez nous donner un exemple pour
illustrer votre pensée?
M. Young: Je céderai la parole à notre directeur
général, M. Derome.
M. Derome: Quand on dit de confier un fonds d'indemnisation
à un régime public, et qu'on dit dans un même temps que ce
fonds d'indemnisation-là devrait être limité à payer
les indemnisations, et non pas à réglementer le fonds
d'indemnisation lui-même... S'il y a un fonds d'indemnisation qui est
créé, privé, dans n'importe quel secteur et qu'on lui
permet de réglementer ce secteur-là, les règlements du
fonds même pourraient venir contrevenir aux lois du Québec ou aux
lois de capitalisation du Québec. On pourrait empêcher une
compagnie de participer au fonds parce que les règles de capitalisation
privée ne sont pas les mêmes que celles que le gouvernement exige
de ses propres compagnies, des compagnies opérant au Québec.
Alors, s'il y avait un fonds d'indemnisation qui était
créé, public, surveillé par le gouvernement, qui n'avait
d'autre but que d'indemniser les personnes, il y aurait moins, peut-être,
de danger d'ingérence des fonds privés d'indemnisation dans la
détermination de la capitalisation des compagnies.
M. Holden: La ministre vous a posé une question au sujet
de vos idées sur la tarification et elle a demandé la même
question que je me posais. Les tarifs, actuellement, sont fixés par le
jeu du marché? Est-ce que c'est comme ça qu'on fixe les tarifs
d'une police d'assurance, actuellement?
M. Young: Effectivement, par la libre compétition.
M. Holden: Votre idée de faire accepter vos tarifs par, je
ne sais pas... l'Inspecteur général, ou je ne sais pas qui...
À qui vous demandez de vérifier vos tarifs, là?
M. Bois: Oui, la mécanique, là, est la suivante. Il
n'est pas demandé à l'Inspecteur général de
ratifier les tarifs, mais il est demandé plutôt de soumettre des
tarifs à l'Inspecteur général, qui, dans des cas
d'imprudence notoire dans la fixation du prix, pourrait intervenir et dire
à la compagnie d'assurances: Vous êtes nettement en bas du
coût technique du risque, ça fait 4 ans que vous faites
ça... À titre d'exemple, Les Coopérants. Pendant au moins
sept ans, Les Coopérants (générale) sept
années continues ont affiché des pertes techniques
on n'a pas remonté en arrière des pertes techniques en
assurance générale. Alors, ce système-là existe
dans un pays éminemment capitaliste, aux États-Unis, dans
plusieurs États américains, où pour l'assurance des
particuliers, on ne parle pas de l'assurance commerciale; les tarifs sont
soumis au «Insurance Commissioner» et il a 60 jours pour refuser ou
pour faire des remarques au sujet du tarif. Évidemment, dans l'esprit de
libre concurrence, ce n'est que dans des circonstances très
particulière que les autorité de surveillance vont intervenir. Un
système comme ça, selon nous, serait tout à fait
compatible avec la législation existante, puisque, dans la Loi sur les
assurances, telle qu'elle est actuellement, on dit que l'Inspecteur
général délivre le permis si la compagnie a des pratiques
commerciales saines. Les pratiques commerciales, ce n'est pas seulement dans le
placement, c'est dans l'opération.
Pour citer un grand auteur américain, ou deux auteurs, Cooper and
Fraser, dont l'ouvrage est intitulé «Banking Deregulation and the
New Competition in the Financial Services Industry», le paradoxe des
institutions financières, c'est qu'elles doivent être à la
fois compétitives et ne pas faire faillite. Or, il est de l'essence de
la compétition, ultimement, d'être éliminé.
L'équilibre fragile dans la surveillance des institutions
financières, c'est à la fois d'encourager la compétition,
mais également d'empêcher le résultat de la
compétition. Alors, le mécanisme qui existe déjà,
pas dans tous les États américains qui est très
critiqué, soit dit en passant mais dans certains États,
c'est au moins d'avoir une intervention ad hoc lorsqu'il y a abus. Intervention
tout aussi musclée, dans le cas, par exemple, de la destitution d'un
administrateur, où il y a un pouvoir d'ingérence, avec lequel
nous sommes d'accord.
Alors, voilà le système. Je le répète, il ne
s'agit pas de ratifier les tarifs, mais de donner, dans les cas extrêmes,
un pouvoir d'intervention pour noter qu'il y a pratique commerciale
malsaine.
M. Holden: En d'autres termes, il y aurait quelqu'un, un expert,
disons, dans le bureau de l'Inspecteur général, qui remarquerait
si un tarif est en dehors des normes et s'il y a risque de faillite ou...
M. Bois: Oui, mais c'est très facile. Quand vous voyez
qu'une compagnie et ces rapports-là sont
publicsdépense 1,10$, alors qu'elle perçoit 1 $ de prime,
ou dépense 1,30 $, et que ça fait 10 ans qu'elle fait ça,
à un moment donné...
M. Holden: Mais je ne comprends pas pourquoi...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Westmount.
M. Holden: .. .une compagnie ferait de la sorte. M. Bois:
Ah non? Bien, c'est la compétition. M. Holden: Juste pour
avoir les primes...
M. Bois: Oui, bien sûr.
Le Président (M. Lemieux): Alors, Mme la ministre, la
parole est à vous.
Mme Robic: Oui, M. le Président, je vous remercie. Je
viens à la conclusion que vous êtes tout à fait satisfaits
de l'énoncé dans le document, qui départage les pouvoirs
des organismes: la réglementation au gouvernement; l'application de ces
règlements-là, réservée à l'Inspecteur
général des institutions financières; et l'indemnisation,
à l'organisme d'indemnisation. Vous êtes d'accord avec ce
concept-là, que nous avons élaboré dans notre
document.
M. Bois: En effet.
Mme Robic: J'aimerais également, pendant qu'on est dans le
rôle de chacun, que vous nous parliez des pouvoirs de l'Inspecteur
général. Vous sembliez être assez satisfaits, là
également, de nos suggestions, du document. Comment est-ce que vous
voyez ça, vous? À quel niveau est-ce qu'il doit intervenir? Vous
lui donnez beaucoup de pouvoirs, quand on parle même d'examiner la
tarification. Je peux m'imaginer la difficulté de l'opération.
Peut-être que vous la simplifiez, vous, quand vous dites: Bien, ça
coûte tant, une police. Il y a tant de commissions payées, et
c'est plus que ce que la prime vaut. Mais vous savez fort bien que ces
primes-là, il y a un équilibre qui se fait après tant
d'années. Alors, je vois mal comment un organisme peut
réglementer, faire la surveillance de ça. Ce n'est pas si simple
que ça. Moi, j'aimerais vous entendre, cependant, sur les pouvoirs de
l'IGIF. Qu'est-ce que vous aimeriez que l'on donne comme pouvoirs à
l'IGIF?
M. Young: Actuellement, nous sommes...
Mme Robic: Je m'excuse. Non seulement les pouvoirs, quand il y a
un problème qui arrive, là, mais tout au long du processus,
même quand il n'y a pas nécessairement une évidence de
problème. Est-ce qu'il doit être très présent?
Comment est-ce que vous voyez ça?
M. Young: Tout d'abord, au niveau philosophique, nous
préconisons un cadre-contrôle identique pour tous les
intermédiaires de marché. C'est pour ça qu'à deux
ou trois reprises, dans notre document, nous apportons des pouvoirs
additionnels aux pouvoirs actuels de M. l'Inspecteur. Comme je vous le disais,
nous vivons de plus en plus concrètement, dans nos cabinets, une
nouvelle façon d'opérer. Nous devons de plus en plus mettre sur
pied une planification de stratégie financière pour nos clients,
que nous soyons courtiers d'assurances générales, que nous ayons
à l'intérieur de nos bureaux un planificateur financier ou un
assureur-vie. Alors, il y a un «mix» qui se fait entre ces
intermédiaires, maintenant, depuis que la loi 134 nous le permet. Nous
préconisons qu'une autorité, soit l'Inspecteur, encadre ces
différentes disciplines.
Quant à l'application et au suivi, soit la dernière partie
de votre question, j'aimerais céder la parole à M. Bois ou M.
Derome, s'ils ont des informations à rajouter. (16 h 50)
M. Bois: La remarque la plus judicieuse que nous ayons vue
là-dessus, c'est le pouvoir d'intervention de l'Inspecteur pour remettre
en cause l'évaluation des actifs portés aux livres de certains
assureurs. Je pense à un certain assureur qui avait acheté
massivement des bureaux de courtiers à des prix inflationnistes et tout
à fait exagérés, et il les représentait au bilan
à ce prix irréaliste. Alors, nous avons cru déceler, dans
le document, que l'Inspecteur général, qui n'avait pas ce pouvoir
très clair avant, aurait le pouvoir clair, en certains cas, de remettre
en cause les valeurs représentées aux états financiers des
assureurs. Alors, c'est une mesure non pas d'ingérence, mais de
prévention, dans la philosophie qu'on indiquait tout à l'heure de
ce fameux équilibre entre la compétition puis le souci de ne pas
laisser faillir le compétiteur. C'est la mesure la plus remarquable qui
puisse être contenue là-dedans, une mesure de prudence, de
prévention.
Mme Robic: Est-ce que vous iriez aussi loin que ce que l'on
retrouve dans la loi fédérale C-48, par exemple, la
possibilité pour l'Inspecteur général, au bout de
l'opération, de se substituer aux actionnaires pour forcer une
transaction à se faire, si une compagnie était en condition
d'insolvabilité, par exemple?
M. Bois: Vous parlez de forcer des fusions, forcer...
Mme Robic: Forcer une fusion, forcer une acquisition. ..
M. Bois: Forcer... Mme Robic: ...d'accepter... Une
voix: Une vente. Mme Robic: ...une vente.
M. Bois: Ça existe déjà dans d'autres
secteurs de l'économie, des pouvoirs. On voit, dans plusieurs lois du
gouvernement du Québec, qu'il y a des pouvoirs de consolidation, pour
certaines industries, qui peuvent être impulsés par des
autorités de surveillance, mais le Regroupement ne s'est pas
penché là-dessus. Je ne voudrais pas m'avancer, alors que les
élus ne se sont pas penchés là-dessus.
Mme Robic: Vous semblez avoir apprécié le chapitre
sur l'arbitrage au niveau des valeurs mobilières et vous nous dites
qu'on devrait peut-être tenter de l'appliquer, également, dans
votre domaine. Comment est-ce que vous verriez... Je ne vois pas les
mêmes
problèmes, nécessairement, chez vous que pour le petit
investisseur. Il me semble qu'il y a des recours, chez vous, qui sont plus
faciles pour un porteur de police que pour un petit investisseur.
M. Young: En effet, nous sommes d'accord avec ce que vous
préconisez quant aux courtiers en valeurs mobilières, mais nous
aimerions que vous alliez plus loin, et que vous fassiez la même chose
pour notre domaine. Un exemple concret: un client subit une perte à sa
résidence, et la perte est litigieuse. Alors, l'assureur peut tout
simplement refuser de payer pour le moment et demander au client d'aller
éclaircir le cas devant la cour. On sait tous qu'il y a un délai
minimum de deux ans. Alors, le client, premièrement, attend avant de
savoir s'il va être indemnisé ou non, et deuxièmement,
ça peut créer une certaine réputation douteuse dans
l'industrie. C'est ce que nous voulons prévenir. Un accès plus
rapide auprès d'un arbitre, qui pourra trancher immédiatement si
l'assureur doit ou non indemniser.
Mme Robic: Est-ce que vous verriez également cela comme un
bon moyen de régler des litiges entre des courtiers? Est-ce que c'est
quelque chose qui arrive chez vous, dans votre domaine, des litiges entre
courtiers? Non?
M. Young: Des litiges entre courtiers?
Mme Robic: Oui, entre deux courtiers.
M. Young: Non.
Mme Robic: Non?
M. Young: Non, du tout.
Mme Robic: Alors, allez, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Merci, Mme la ministre. Il y a
un élément intéressant, qui va sûrement
intéresser mon collègue, le député de Verdun, et le
député de Lotbinière. À la page 16 de votre
mémoire, vous parlez de mesures de protection du public et, tout
particulièrement, vous faites état... Vous nous dites que... En
gros, je vais résumer votre page. Ça se résumerait
à ceci: que les assurés devraient avoir le pouvoir de contraindre
un assureur à régler, par voie d'arbitrage, un différend
fondé sur un contrat d'assurance. Je parle, ici, de pouvoir de
contrainte; vous parlez davantage d'option de choisir entre ça et le
recours judiciaire.
Ce qui m'intéresse dans cette optique-là... Est-ce que
ça se fait ailleurs, ça?
M. Young: Vous voulez dire le choix?
Le Président (M. Lemieux): Oui. Est-ce que ça
existe ailleurs, ou si c'est de votre cru, de votre esprit, de votre
imagination?
M. Bois: À notre connaissance, ça existe
déjà pour arbitrer l'évaluation des dommages quand
l'assureur et l'assuré ne s'entendent pas sur le montant même du
dommage. Ça existe déjà dans notre système de droit
au Québec, mais quand il s'agit de couverture ou de
non-couverture...
Le Président (M. Lemieux): Oui.
M. Bois: ...parce que l'assureur prétend, par exemple,
qu'il y a une exclusion...
Le Président (M. Lemieux): Oui.
M. Bois: ...ça n'existe pas au Québec. Mais je dois
vous dire que, dans le cadre du marché commun, on se penche très
sérieusement, actuellement, sur des méthodes alternatives de
résolution des différends entre les assureurs et les
assurés, en commençant, d'abord, par la conciliation...
Le Président (M. Lemieux): Oui.
M. Bois: ...et, ensuite, l'arbitrage. Ce n'est pas à
l'état de directives, mais c'est étudié de très,
très près.
Le Président (M. Lemieux): Ce serait souhaitable et au
bénéfice du grand public, nécessairement, eu égard
aux délais et ainsi de suite.
M. Bois: Oui, pas parce que l'arbitre serait
nécessairement plus sage qu'un juge, c'est le problème... Et
ça les courtiers le vivent. C'est que, surtout dans les cas d'incendie,
vous avez un créancier hypothécaire, vous avez des gens qui se
demandent s'ils auront de l'argent pour reconstruire leur maison. Ils veulent
savoir tout de suite... L'assureur peut avoir des motifs très valables
pour refuser de payer, et la cause n'est pas réglée. Alors, les
deux parties en bénéficieraient. D'une part, l'assureur n'aurait
pas des réserves en suspens. D'autre part, l'assuré saurait
à quoi s'en tenir plus vite. C'est une question de délais. Mais
pour répondre précisément à votre question: Est-ce
que ça a été implanté ailleurs? Pas à notre
connaissance.
Le Président (M. Lemieux): Mais c'est une suggestion qui
vous apparaît valable?
M. Bois: Oui.
Le Président (M. Lemieux): À la page 15,
rapidement, les CMS, les caisses mutuelles de sécurité. Encore
une fois: Est-ce que ça existe ailleurs, un tel système? Vous le
définissez à la page 15 de votre mémoire, dans le
deuxième paragraphe.
M. Bois: Oui.
Le Président (M. Lemieux): Vous dites ceci: «Le
système pourrait consister en une caisse mutuelle de
sécurité...» Vous définissez,
brièvement peut-être, le type de financement et, peut-être,
l'administration. Mais la composition, le rôle d'un tel organisme, sa
composition principalement, son financement; ce qui m'intéresse c'est
davantage son financement. Comment ce financement se ferait?
M. Young: Premièrement, la première partie de votre
question. À notre connaissance, ce principe-là n'existe pas. Nous
l'avons imaginé...
Le Président (M. Lemieux): Ça, c'est de votre
imagination?
M. Young: Oui, totalement. Faire un peu de concert, si vous
voulez, avec une table de concertation, style Conseil des assurances de
dommages, à laquelle nous retrouvons plusieurs intervenants de
l'industrie. Nous avons pensé à ce principe-là.
Le Président (M. Lemieux): Le financement se ferait tel
qu'il est défini au troisième paragraphe: «La cotisation au
fonds serait calculée selon le chiffre d'affaires des institutions
financières...»?
M. Young: Exact. Oui, au prorata.
Le Président (M, Lemieux): O.K. Ça va. Je n'ai pas
d'autres questions. M. le député, ça va? On me dit que je
n'ai plus de temps. Alors, nous vous remercions pour votre participation
à cette commission parlementaire.
Je m'excuse, M. le député de Westmount, il vous reste du
temps. J'ai failli vous priver de votre temps, involontairement. On m'a
ramené à l'ordre. Allez-y, M. le député de
Westmount.
M. Holden: Ah! J'ai quelques petites questions, M. le
Président. À un moment donné, dans votre mémoire,
vous parlez de créer une nouvelle profession. Ce n'est pas parmi vos
recommandations, mais c'est à la page 20, je crois.
M. Young: En fait, c'est notre dernière recommandation, la
huitième: «Que le Québec stimule la croissance de
l'activité d'intermédiation financière par une voie
alternative: le recours aux conseillers financiers.»
M. Holden: C'est quoi exactement, un conseiller financier et un
courtier du crédit? Comment ça marche?
M. Young: Conseiller financier et...
M. Holden: Vous mentionnez qu'un courtier en assurance place les
risques de sa clientèle, qu'un conseiller financier peut exercer
l'activité du courtier pour le compte d'un prêteur et pour le
compte d'un emprunteur. Alors, ce serait un conseiller... Quel serait le titre
de ce nouvel élément de votre profession?
M. Young: En fait, la philosophie derrière ce nouveau
concept, comme je vous le disais, c'est que, de plus en plus, nous devons
mettre sur pied une planification de stratégie financière
personnelle pour nos clients. À l'aide de cette stratégie
financière, on peut conseiller à notre client, soit une
assurance-vie avec ou sans valeur de rachat, lui conseiller un REER, lui
conseiller des placements à court terme, à long terme. Alors,
c'est pour ça que nous préconisons une nouvelle vocation par
laquelle il n'y aurait pas que les banques qui puissent faire appel à
des capitaux, soit intérieurs ou étrangers. Également, le
conseiller financier pourrait faire appel à certains capitaux pour le
bien de son client.
M. Holden: Ça existe déjà des...
M. Young: Je pense que Me Bois aurait quelque chose à
ajouter là-dessus.
M. Bois: Ce qui sous-tend cette suggestion-là, c'est ce
qui suit: les institutions financières fédérales viennent
de se voir accorder le pouvoir d'agir comme conseiller financier. L'article
409, paragraphe 2 de la Loi sur les banques, accorde expressément ce
pouvoir aux banques. Vous avez l'équivalent dans les lois
fédérales sur les assurances et les compagnies de fiducie. On
accorde également, à l'article 468 de la Loi sur les banques, le
pouvoir d'une banque d'incorporer des sociétés de conseillers
financiers. On appelle ça des conseillers en investissements. Mais on
sait très bien qu'au ministère des Finances, à Ottawa, on
considère que ces gens-là vont pouvoir conseiller sur à
peu près toutes sortes de produits financiers, incluant l'assurance-vie.
(17 heures)
Nous croyons qu'il serait opportun que le Québec intervienne pour
réglementer cette activité professionnelle que les institutions
fédérales ont maintenant le pouvoir d'exercer, et que les
courtiers d'assurances exercent déjà. M. le président,
Young fait état que, sans être trop précis... Mais il y a
des courtiers, déjà, qui négocient des financements pour
leurs clients. Ils font donc une forme d'intermédiation
financière. C'est peut-être souhaitable pour activer
l'intermédiation, mais si ce n'est pas encadré, ça
pourrait être préjudiciable pour le consommateur. Alors, cette
activité-là est encore marginale pour les courtiers d'assurances
générales, mais elle ne l'est pas pour les banques. Demain, par
exemple, la Banque de Nouvelle-Ecosse pourrait incorporer Scotia Consultants,
qui va faire une planification financière complète, se disant
conseiller en investissements, et recommander à quelqu'un d'abandonner
sa police dans La Survivance, parce que les valeurs de rachat qui se trouvent
là seraient bien mieux placées avec Scotia Bank, et que Scotia
Life, elle, prendrait avantageusement charge, n'est-ce pas, de
l'assurance-vie.
Alors, ça n'a pas été très
élaboré, mais c'est un peu dans la ligne de préoccupation
du document ministériel, qui propose que le Québec exerce ses
compétences dans l'harmonisation, évidemment, mais ses
compéten-
ces. Si on laisse le champ libre aux institutions
fédérales, elles vont exercer des activités qui devraient
normalement être réglementées par les provinces.
Nous ne sommes pas les seuls à nous préoccuper de
ça. Le président de la Commission des valeurs mobilières
de l'Ontario, il y a environ huit mois on ne peut pas le taxer
d'excès d'autonomisme en matière d'excès de juridiction
a déploré un vide réglementaire dans ce
domaine-là.
M. Holden: Vous pouvez vous imaginer que nous déplorons
toute ingérence du fédéral dans des domaines exclusivement
québécois.
Des voix: C'est nouveau! C'est nouveau! M. Holden: J'ai
dit «nous».
Le Président (M. Lemieux): C'est dans une autre commission
parlementaire, ce genre de débat.
M. Holden: Dans votre conclusion, vous mentionnez la question des
renseignements personnels et vous formulez le voeu que ce soit une loi qui
gouverne la question, parce que, actuellement... Et la ministre nous a fait une
explication très claire de toutes les différentes lois sur la
protection des renseignements personnels, à la page 32 des
propositions.
Alors, pourriez-vous juste expliciter un peu comment vous voyez une loi
qui pourrait résoudre tous les problèmes, à tous les
niveaux et tous les différents aspects de cette question des
renseignements personnels?
M. Young: Nous avons récemment présenté un
mémoire à la commission de la culture, dans le cadre du projet de
loi 68, et nous préconisions une loi globale quant à la
protection des renseignements personnels au lieu de légiférer
sectoriellement, pour éviter que certaines institutions
financières à charte fédérale puissent supposer le
fait qu'elles ne sont pas régies par les lois sectorielles de la
province de Québec. C'est pour ça que nous préconisons une
loi globale aussi importante, par exemple, que peut l'être le Code
civil.
M. Bois: Ce qu'on peut ajouter là-dessus, c'est que vous
avez déjà un exemple. Il y a, pour examen au Sénat, un
règlement sur la protection des renseignements personnels recueillis par
les institutions financières. Il est sous examen actuellement, et ce
règlement, dans sa version actuelle, prévoit qu'il s'applique aux
filiales des institutions financières fédérales, sans
égard à leur lieu de constitution. Alors, le problème de
chevauchement qu'on y voit, c'est le suivant. Reprenons encore Scotia Bank. Si
Scotia Bank contrôle Scotia Realty, une compagnie de courtage en immeuble
qui serait filiale de cette compagnie-là, en vertu de ce
règlement fédéral, c'est le règlement
fédéral qui contrôlerait l'activité de cueillette
des renseignements personnels, par la filiale de la banque, alors que,
lorsqu'on a une loi plus générale, il me semble que les
débats constitutionnels, dont tout le monde est las, je suppose, peuvent
au moins être évités, si on a une loi de portée
générale, qui réglemente tout le secteur de la vie
privée. C'est ce que nous avons proposé à la commission de
la culture, parce que ce qui va se produire, c'est que, si vous avez une loi
sur la protection des renseignements personnels uniquement dans le secteur
financier, la première réponse que vous allez avoir, c'est que
les banques à charte vont dire: Nous, nous ne sommes pas régies
par ça. Même si elles cueillent leurs renseignements personnels
dans des nouveaux secteurs d'activité, qui n'étaient pas
dévolus aux banques autrefois, je ne sais pas, moi, pour la vente de
tickets d'autobus, je ne pense pas, même si elles ont le droit de les
vendre, que ça relève du «banking», au sens de la
Constitution. Par contre, les banques n'ont jamais prétendu qu'elles
n'étaient pas assujetties aux lois générales que le
Québec adopte dans sa sphère de compétence. Notre
appréhension... Et je dois vous souligner également que
l'Association des courtiers d'assurance du Canada, la Insurance Brokers
Association of Canada, a déjà représenté au
fédéral qu'elle appréhendait ces conflits de juridiction
en matière de protection des renseignements personnels. Alors,
voilà le pourquoi d'une loi non pas sectorielle, mais d'une loi
générale protégeant les renseignements personnels.
Le Président (M. Lemieux): Alors, je vous remercie de
votre participation à cette commission parlementaire, et j'inviterais
les représentants... Je vais suspendre environ une minute pour permettre
aux représentants de Trust Prêt et Revenu de bien vouloir prendre
place à la table des témoins.
(Suspension de la séance à 17 h 6)
(Reprise à 17 h 10)
Le Président (M. Lemieux): La commission du budget et de
l'administration reprend ses travaux pour entendre les représentants de
Trust Prêt et Revenu. Dans un premier temps, je demanderais au
porte-parole de l'organisme de bien vouloir s'identifier et de nous
présenter les gens qui l'accompagnent. Dans un deuxième temps, je
vais faire état de la procédure parlementaire.
Groupe Prêt et Revenu
M. Tardif (Paul): Alors, M. le Président, mon nom est Paul
Tardif. Je suis président et chef de la direction de Trust Prêt et
Revenu. À ma droite, M. Jean Tardif, qui est président et chef de
la direction de La St-Maurice, compagnie d'assurances; et Me Robert Archer, qui
est vice-président, affaires juridiques, chez Trust Prêt et
Revenu.
Le Président (M. Lemieux): Alors, la procédure
parlementaire fonctionne de la façon suivante. Nous disposons,
globalement, d'une heure. Vous disposez de 20 minutes pour l'exposé de
votre mémoire. Suivra un
échange parlementaire entre les deux formations politiques: 20
minutes pour le parti ministériel, et 20 minutes pour le parti de
l'Opposition, en respectant la règle de l'alternance. Alors, nous sommes
prêts à vous écouter immédiatement pour
l'exposé de votre mémoire.
M. Tardif (Paul): Je vous remercie, M. le Président.
Alors, permettez-nous tout d'abord de vous remercier de l'occasion qui nous est
donnée de présenter notre point de vue à la commission.
Nous apprécions certes tout le travail que représente votre
mémoire, et nous vous en félicitons.
Notre intervention, aujourd'hui, n'a pas pour objet de reprendre les
commentaires contenus dans le mémoire préparé par les
associations dont les compagnies membres de notre groupe financier font
respectivement partie. Mentionnons que, sur l'ordre du jour, c'est Trust
Prêt et Revenu qui est mentionné. Notre mémoire est
présenté au nom du Groupe Prêt et Revenu, dont les origines
remontent à 1928, et qui est composé du Trust Prêt et
Revenu, de Aeterna-Vie, compagnie d'assurance, dont le siège social est
à Montréal, et de La St-Maurice, une compagnie d'assurances
générales.
Alors, notre mémoire se veut plutôt le fruit de notre
réflexion sur le rôle de la réglementation gouvernementale
dans un contexte de globalisation des marchés, sur la priorité
à accorder à la vocation locale de nos institutions par rapport
à leur vocation internationale, et sur les mesures de soutien à
la croissance des institutions financières qui sont prévues au
chapitre 3 du document déposé par le gouvernement.
Alors, le rôle de la réglementation versus la globalisation
des marchés. Dans le cadre de la réévaluation des
politiques générales du gouvernement du Québec à
l'égard du secteur des institutions financières, nous croyons
à propos de prendre un certain recul par rapport au
décloisonnement des institutions, que nous connaissons, au Canada,
depuis le début des années quatre-vingt. Sous l'influence des
tendances américaines de l'époque, et avec pour objectif de
permettre aux institutions de prendre de l'expansion, il a été
décidé d'abattre progressivement les barrières qui
existaient entre les quatre piliers traditionnels. Cette décision a
donné lieu, non pas à ce qu'on a souvent qualifié,
à tort, de déréglementation du secteur financier, mais
plutôt à l'adoption d'une multitude de nouvelles mesures
législatives afin que les différents types d'institutions
deviennent de plus en plus semblables. Ces nouvelles règles du jeu ont
eu plusieurs effets négatifs sur nos institutions financières.
Parmi celles-ci, mentionnons un accroissement de la compétition entre
les institutions et, pour la majorité, des effets sur leur
rentabilité.
À l'exemple du décloisonnement dans plusieurs industries
réglementées, celui dans le secteur financier s'est fait en
essayant d'envahir le champ d'action du voisin, sur une base de coûts
marginaux, c'est-à-dire en croyant que les marges de profit avec
lesquelles fonctionnent une compagnie ne seront pas affectées par le
décloisonnement et suffiront pour amortir les coûts fixes de
l'entreprise, et qu'alors, on peut se satisfaire d'une marge moins grande dans
les activités que l'on peut ajouter. Comme le concurrent adopte une
stratégie identique, le résultat final est que toutes les
compagnies voient leur marge de profit diminuée ou même
disparaître.
Une réduction importante du nombre d'institutions
financières canadiennes. Enfin, la disparition, au Québec, d'un
certain nombre d'institutions financières sous juridiction provinciale.
Les récentes transactions impliquant des institutions financières
québécoises vont également entraîner de nombreuses
pertes d'emploi et la disparition, dans certains cas, des
sociétés acquises.
Nous connaissons présentement la libéralisation et la
globalisation du commerce des services financiers. À notre avis, si une
des principales conséquences de ce phénomène est
d'accroître la compétition à laquelle doivent faire face
les institutions financières québécoises, il est
primordial que la réaction gouvernementale, tant au niveau
réglementaire qu'au niveau taxation, n'ait pas pour effet d'augmenter
cette compétition, et pour corollaire, de diminuer la rentabilité
de ces institutions.
Les institutions financières jouent un rôle important
d'intermédiaire financier, donc d'agent économique. Elles peuvent
être des collaborateurs utiles et importants dans la réalisation
d'un plan de développement économique pour une
société. Il nous semble donc important que les institutions
financières locales soient à la fois bien encadrées,
profitables, près de leur marché afin d'en connaître les
besoins, et en assez grand nombre, afin d'assurer une vitalité au milieu
financier, le développement et la pérennité du
savoir-faire et d'une expertise en la matière.
À la lumière de l'exemple de certains pays, la
réglementation gouvernementale se doit d'être un instrument pour
assurer la solidité et la rentabilité des institutions
québécoises et autres qui opèrent au Québec. Ces
deux objectifs ne contredisent en aucune façon les objectifs
décrits dans le document de consultation et se concilient très
bien avec la priorité accordée à la protection du
public.
L'attitude gouvernementale face à la mondialisation des
marchés financiers doit, à notre avis, s'apparenter aux autres
mesures gouvernementales lorsqu'il s'agit de réglementer d'autres
secteurs de l'économie. Tout en respectant les accords signés
dans le cadre du libre-échange nord-américain, nous croyons que
le gouvernement peut, tout comme les autres pays signataires de ces accords,
légiférer de telle sorte qu'il existe, sous sa juridiction et
dans l'espace géographique qu'il contrôle, un cadre juridique et
réglementaire qui assure que les institutions qui y oeuvrent soient en
santé et rentables. Nos institutions locales seront ainsi capables
d'assurer leur développement et de contribuer par leurs activités
au développement économique de la société au sein
de laquelle elles opèrent.
Il faut bien comprendre qu'agir de la sorte ne constitue pas du
protectionnisme ou un refus du fait que nous vivons dans une ère de
globalisation du commerce des services financiers. Au contraire, adopter une
telle attitude, c'est faire preuve de réalisme par rapport aux
mesures mises de l'avant par d'autres juridictions pour protéger
leurs institutions, et c'est également jouer la partie comme elle doit
maintenant être jouée. Il faut mettre en place un cadre
réglementaire, fiscal et d'affaires, qui assurera que nos institutions
locales seront saines. Un tel cadre s'appliquera également à tous
ceux qui viendront faire affaire ici.
Vocation internationale versus vocation locale. Nous croyons à
propos, pour le gouvernement du Québec, de poursuivre le processus
d'harmonisation de ses lois régissant ses institutions
financières avec celles des autres juridictions afin de leur permettre
de s'implanter efficacement à travers le Canada. De même,
l'élaboration de nonnes cohérentes de composition et de
suffisance de capital sont nécessaires pour renforcer la
stabilité du secteur financier et pour permettre éventuellement
à un nombre restreint d'institutions financières relevant de la
juridiction du Québec d'accéder aux marchés
extérieurs.
Ces préoccupations, dont le document de travail fait état,
ne doivent certainement pas nous faire perdre de vue les besoins de notre
marché local. À cet égard, nous avons certaines
interrogations. À quoi servira-t-il d'avoir 1/20 de 1 % du marché
mondial des institutions financières détenu par des institutions
financières du Québec si, d'autre part, chaque année, nos
institutions financières locales perdent une partie de plus en plus
importante de leur marché au Québec?
L'expérience internationale de la majorité des
institutions financières canadiennes sur le marché international
est révélatrice et, pour la plupart, les a amenées
à un repli sur le marché local. Désirons-nous conserver au
Québec un nombre suffisant d'institutions financières ayant leur
siège social au Québec pour assurer le développement d'une
expertise dans le domaine et des débouchés à nos
gradués universitaires désireux de travailler dans le secteur
financier?
Les besoins de la société québécoise pour
des services financiers seront-ils mieux satisfaits dans un environnement
financier où se retrouveront uniquement des institutions
financières de grande taille? Désirons-nous permettre aux petites
institutions dynamiques, qui ont su démontrer leur efficacité et
leur expertise en passant au travers des soubresauts du secteur financier
durant la dernière décennie, de continuer à servir le
public et à se développer?
Nous croyons qu'il y a encore de la place dans le marché actuel
pour les institutions financières de petite taille par rapport aux
géants de l'industrie financière. Ces petites institutions
fournissent généralement des services plus personnalisés
par rapport aux géants de l'industrie qui sont orientés vers un
marché de masse. L'exploitation efficace de services
spécialisés, recherchés par une certaine clientèle,
mais mal adaptés au mode d'opération des grandes institutions
peut assurer le succès des petites institutions.
Tout cela est sous réserve que le cadre réglementaire et
opérationnel continue d'offrir des possibilités
intéressantes aux petites institutions. Au niveau réglementaire,
les mesures mises de l'avant doivent continuer d'offrir aux petites
institutions la souplesse requise pour survivre et soutenir la concurrence.
Quant au cadre opérationnel, le gouvernement se doit de suivre de
près certaines situations afin de s'assurer que l'environnement
financier demeure équitable pour toutes les institutions
financières. À titre d'exemple, le contrôle exercé
par les grandes banques sur le système canadien des paiements doit
être surveillé. La mainmise par un groupe restreint d'institutions
sur les systèmes modernes de paiement, tels Interac (paiements
électroniques et cartes de débit) et CDS ou CCDV (système
de compensation et de dépôt pour les valeurs mobilières)
leur donne le pouvoir de décider qui peut être admis à
participer, quels produits sont offerts et à quel prix, et du même
coup, de réduire ou d'exercer un contrôle sur la concurrence. Ici,
il faut bien comprendre, par exemple, que, dans CDS, il est facile qui
est dominé et contrôlé pas les plus grandes institutions,
les grandes banques et leurs filiales de maisons de valeurs mobilières
ils peuvent facilement contrôler l'accès, tout simplement
par la tarification. Alors, c'est très facile que la tarification ne
soit pas faite sur le volume, mais plutôt sur l'utilisation, et ça
devient presque des barrières à l'entrée.
De la même façon, actuellement, je veux attirer votre
attention. Il y a un débat sur l'assurance-dépôts, la
Société d'assurance-dépôts du Canada, au niveau
fédéral, où on parle davantage de coassurance.
Évidemment, les grandes banques poussent cet aspect, parce qu'elles
considèrent que ça ferait monter le prix du coût
d'acquisition des dépôts pour les autres, les plus petites
institutions, et ça pourrait ainsi les tasser de la compétition.
De même, lorsqu'on souligne ici le contrôle qu'elles ont sur les
systèmes Interac et les systèmes de débit ou les chambres
de compensation, encore là, par une tarification, on peut facilement
exclure ou arriver à charger plus cher aux autres institutions et tasser
la compétition petit à petit.
Les grands marchés de compensation, les grands systèmes de
compensation, par exemple aux États-Unis, ne sont pas
contrôlés par les plus grandes institutions. Alors, je pense
qu'ici aussi les gouvernements, tant au niveau fédéral que
provincial, doivent veiller à ce que six banques ou sept banques ne
contrôlent pas totalement les systèmes de compensation ou les
systèmes de valeurs. Puis, actuellement, je pense qu'il y a une partie
qui est en train de se jouer et qui est très importante. Sur ça,
il est important que le gouvernement provincial intervienne pour
protéger ses institutions. (17 h 20)
Les mesures de soutien à la croissance des institutions
financières. La lecture de plusieurs propositions contenues dans le
document de consultation nous permet de croire que le Québec
désire mettre de l'avant des mesures efficaces pour répondre aux
besoins exprimés par l'industrie tout en protégeant le public.
Nous trouvons particulièrement à propos le premier paragraphe du
chapitre 1, intitulé «Mesures d'amélioration de
l'efficacité», à l'effet que: «L'industrie des
services financiers doit aspirer à l'efficacité et il lui
appartient de définir les
stratégies qui lui permettront d'en augmenter le niveau à
l'intérieur de ses activités. Le gouvernement peut toutefois lui
faciliter cette tâche.» Pour nous, il est évident qu'il
revient à chaque institution de définir elle-même les
moyens qui lui permettront de maintenir sa capacité concurrentielle et
d'assurer son développement.
Le rôle du gouvernement est de mettre en place des mesures pour
lui faciliter cette tâche. Sur les mesures essentielles que le
gouvernement doit adopter pour remplir sont rôle, nous estimons que
celles relatives au soutien à la croissance qui se retrouvent au
chapitre 3 du document de consultation sont d'une importance vitale pour que
plusieurs institutions financières québécoises puissent
poursuivre leur progression à long terme. Au rythme où
évoluent les choses dans le secteur financier, nous croyons qu'il y a
lieu d'adopter rapidement des mesures qui facilitent la capitalisation des
petites et moyennes institutions. Dans un milieu en constante évolution,
l'adoption à court terme de mesures appropriées, même si
elles ne sont pas parfaites, serait à notre avis une meilleure
réponse aux attentes de l'industrie que de longues études sur le
sujet. De toute manière, les mesures adoptées peuvent être
modifiées ultérieurement suite à des études
à plus long terme ou en fonction de l'évolution du
marché.
Si le gouvernement désire légiférer et
réglementer de manière à protéger à la fois
le public et favoriser l'expansion de ses institutions financières, il
doit non seulement adopter des normes de santé financière
appropriées et des mesures de contrôle efficaces, mais,
simultanément, mettre en place des mécanismes pour favoriser la
transition.
L'adoption unilatérale de mesures plus contraignantes, sans qu'en
contrepartie soient adoptées d'autres mesures pour adoucir la
transition, aurait des conséquences néfastes sur les objectifs
déclarés du gouvernement de voir le secteur financier sous son
contrôle se stabiliser et amorcer une nouvelle période de
croissance.
Nous accueillons donc favorablement la proposition portant sur la mise
sur pied d'un véhicule de capitalisation. Nous croyons primordial qu'il
soit accordé autant d'importance à cette mesure qu'aux autres
annoncées dans le document de consultation. Dans ce domaine, nous
croyons que le gouvernement devrait contribuer aux efforts de certaines de ses
institutions financières pour augmenter la capitalisation dont elles ont
besoin, pour rencontrer les nouvelles normes édictées et
permettre leur croissance. À notre avis, l'intervention du gouvernement
en ce domaine est tout à fait justifiée, compte tenu qu'il a
déjà favorisé, par des mesures fiscales, le
développement d'institutions financières et de certains secteurs
tels que l'exploration minière ou la production de films.
Nous nous posons certaines questions lorsque le document de consultation
aborde, au paragraphe 3.2 du chapitre 3, la capitalisation des institutions
financières québécoises. On y mentionne que le
gouvernement désire répondre à la situation en
contribuant, si nécessaire, aux efforts de ces institutions vers le
capital externe, «mais d'une façon et dans une mesure qui devront
à la fois répondre à d'autres éléments de
problématique.» Nos interrogations portent principalement sur les
deux premiers éléments de problématique. Ainsi, lorsqu'on
mentionne le besoin des institutions de créer des alliances avec
d'autres organisations plus importantes afin de pouvoir accéder à
de nouveaux marchés, cela peut être justifié pour certaines
institutions, alors que pour d'autres, les moyens qui leur permettront de
maintenir leur capacité concurrentielle et d'assurer leur
développement peuvent être tout autres. Nous espérons donc
que cet élément mis de l'avant ne devienne pas un critère
à la contribution du gouvernement aux efforts de capitalisation des
petites sociétés.
Lorsqu'on parle, par exemple, d'alliance stratégique ou de
fusion, je dois mentionner que, à deux reprises que j'ai en tête,
on nous a parlé justement, dans notre cas, au Trust, de nous fusionner.
Même, des tiers sont intervenus pour dire que ça pourrait
être approprié de le faire. Si on avait fait ça, je peux
dire que, dans les deux cas, aujourd'hui, on serait en faillite! Alors, ce qui
peut être bon pour certaines organisations ne l'est pas automatiquement
pour d'autres; ça dépend de la stratégie de
développement de ces institutions.
Quant à la pénétration des marchés
étrangers qui est citée comme second élément de
problématique, est-il à propos que la majorité de nos
institutions penchent dans cette direction, à la lumière de
l'expérience de nos institutions canadiennes sur les marchés
étrangers? Pour la majorité de nos institutions
financières locales, leur succès dans les années futures
repose en grande partie sur leur capacité à maintenir et à
augmenter leur part de marché au Québec. Le contrôle du
marché local par nos institutions aura des effets positifs sur la
création d'emplois situés au Québec et sur le
développement de notre expertise en matière d'institutions
financières. Nous souhaitons donc que la pénétration de
marchés étrangers ne devienne pas un critère de l'aide
à la capitalisation que pourrait accorder le gouvernement.
Encore là, une façon de regarder froidement cet aspect
d'investissement à l'étranger, ça serait peut-être
de regarder de l'extérieur si on voit... Si on regarde, par exemple,
l'État de la Géorgie, de l'Alabama ou de l'Ohio... Si les
compagnies qui sont là qui sont peut-être de taille moins
grande décidaient, tout d'un coup, si elles étaient
très importantes, d'avoir une vocation internationale, la
réaction, vue de loin, ça serait peut-être de dire qu'il
serait plutôt très important de se solidifier et d'avoir une forte
mainmise sur les marchés financiers de leur État, et de laisser
les institutions, à New York, s'attaquer au marché international.
C'est un peu, peut-être, la même réaction qu'on a ici, au
Québec, où on a tellement à concentrer nos efforts pour
dominer davantage notre marché. Puis, la connaissance des marchés
financiers, lorsqu'on veut aller du côté international, en fait,
c'est toujours une connaissance locale, c'est-à-dire que, pour aller
faire du «banking» ou de l'assurance internationale, il faut
connaître les règles locales, là où on fait affaire.
Alors, ça prend de la capitalisation, une taille d'entreprise et un
«know how» toujours local, alors que très peu d'institutions
peuvent
se le permettre, au Canada.
Quant au véhicule de capitalisation le plus approprié pour
répondre aux besoins de capitalisation des institutions
financières québécoises, nous avons déjà,
lors de rencontres avec la ministre et certains hauts fonctionnaires,
présenté des projets. Dans le but de trouver une réponse
rapide et adéquate aux besoins de capitalisation, il serait
peut-être à propos d'examiner les véhicules
déjà disponibles afin de vérifier si l'adoption de
certaines modifications aux règles de ces régimes ne serait pas
une réponse appropriée aux besoins des institutions locales.
Cette façon de procéder aurait l'avantage de ne pas avoir
à adopter un nouveau cadre législatif avec tous les délais
que cela implique. Pour notre part, nous sommes toujours disposés
à collaborer avec le gouvernement pour trouver une solution
appropriée.
Nous accueillons avec satisfaction les propositions relatives à
l'accès au capital étranger, prévues au paragraphe 3.3 du
chapitre 3. Nous croyons toutefois que, dans le cas des compagnies d'assurances
IARD, il ne devrait pas y avoir de limite. À cet égard, le
gouvernement devrait harmoniser sa position avec celle des autorités
fédérales. La situation des compagnies d'assurances
générales est différente de celle des
sociétés de fiducie et des compagnies d'assurance-vie, car elles
ne contrôlent pas de l'épargne. À titre de compagnies de
services, les compagnies d'assurances générales devraient, en
regard de l'accès au capital étranger, être traitées
de la même manière que toutes les autres compagnies offrant des
services.
On doit également tenir compte du contexte canadien des
compagnies d'assurances générales qui, pour la très grande
majorité, sont contrôlées par des intérêts
étrangers. Le fait de limiter les investissements étrangers dans
ces compagnies peut amener la perte d'emplois au Québec et la
disparition de sièges sociaux. Je vous remercie.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. Tardif. Mme la
ministre.
Mme Robic: Merci, M. Tardif. Je pense que vous avez
déposé un mémoire fort intéressant, et vous faites
d'excellents points, d'ailleurs. Je ne voudrais pas que vous partiez avec
l'impression que, pour nous, la seule priorité, c'est les grosses
compagnies ou les groupes, et que nous avons l'intention d'abandonner les
petites compagnies. Je crois qu'il y a de l'espace, au Québec, pour tout
genre d'entreprise. Bien sûr, à travers le monde, il y a de ces
grands groupes qui sont déjà organisés depuis longtemps.
Si nous avons modernisé nos lois, c'était pour pouvoir mieux
positionner nos compagnies, pour faire face à ces groupes
étrangers qui viennent faire affaire chez nous, même qui
investissent sur nos marchés. Donc, il faut s'assurer que nos
entreprises à nous soient de taille à faire face à cette
compétition.
Maintenant, on réalise, également, que ce qu'on appelle
nos grosses compagnies sont souvent de petites compagnies, quand on se compare
au marché international. C'est là où il devient fort
important de pouvoir créer des alliances stratégiques avec ces
compagnies-là, pour pouvoir, justement, aller sur les marchés
étrangers, non pas seules comme entreprises, mais avec des partenaires
étrangers qui connaissent très bien le marché de leur
pays. C'est essentiel. Il y a bien des compagnies qui sont allées
à l'étranger seules et qui ont été obligées
de faire marche arrière parce que, comme vous l'avez très bien
dit, elles se sont rendues compte que, ne connaissant pas la culture du pays,
ne connaissant pas les personnes avec qui faire affaire, elles se trouvaient
à être défavorisées. (17 h 30)
Donc, de là le discours que l'on tient, l'importance de
créer ces alliances si une compagnie veut pouvoir profiter d'un
marché plus large que le marché québécois. Mais, en
même temps, il est important de se rappeler qu'il y a de la place pour
des compagnies qui ne veulent faire affaire qu'au Québec, qui veulent se
choisir des niches bien spécifiques, exceller dans ces niches et
être des experts dans les produits que ces compagnies veulent bien
offrir. Et ça, bien sûr, elles représentent pour nous un
apport important au niveau des services, mais au niveau, également, de
la création d'emplois, souvent, dans toutes les régions du
Québec. Alors, il n'est pas question pour nous d'abandonner ces
compagnies-là, bien au contraire. On veut traiter nos compagnies
à un niveau égal, d'ailleurs. Je pense qu'on le dit, dans le
document, assez clairement là-dessus. D'ailleurs, on dit même,
dans le document si ma mémoire est bonne, c'est à la page
6 ou 7 où on fait la différence, quand on parle de normes,
d'harmonisation, on fait bien la différence entre une compagnie qui veut
faire affaire au niveau national versus une compagnie qui veut s'en tenir
à faire affaire seulement dans une province. On ne voudrait pas forcer
cette compagnie-là à rencontrer des normes nationales qu'elle
n'aurait pas à rencontrer puisqu'elle agit seulement sur un terrain
particulier où on peut très bien suivre ses activités,
où l'Inspecteur peut très bien suivre ses activités.
Alors, on fait la différence là. On ne veut certainement pas
forcer ces compagnies à rencontrer des normes qui pourraient leur causer
plus de dommages que de bien. On tente de faire la distinction.
Dans le début de votre énoncé, vous faites un peu
un retour en arrière, et vous faites l'analyse des conséquences
du décloisonnement. J'aimerais que vous élaboriez un peu
là-dessus, parce que ça a été, bien sûr, des
années où on a vu ça comme étant très
dynamique, comme étant nécessaire pour nos entreprises, de
prendre une certaine ampleur. Vous semblez mettre ça en doute, un peu.
Vous vous questionnez sur la pertinence de cette ouverture. J'aimerais vous
entendre, peut-être que vous pourriez élaborer plus à fond
sur ça. N'est-il pas vrai, par exemple, que ce n'est pas
nécessairement la structure qu'on a permise qui a créé les
problèmes? Il y a eu des décisions de gestionnaires. Il y a eu un
contexte économique. II y a des décisions qui, quand elles ont
été prises, semblaient être les bonnes décisions,
mais s'en est suivi un contexte économique. Ça peut
dépendre également d'une gestion plus ou moins serrée des
entre-
prises. Alors, en tenant compte de tout ça, j'aimerais vous
entendre.
M. Tardif (Paul): Voici. Effectivement, ça dépend
toujours, évidemment, en bout de ligne, peut-être, d'une
décision administrative fautive. J'essaie de comprendre... de faire
valoir, et la même chose dans notre mémoire. C'est que ça
dépend toujours des règles du jeu qui sont établies. Ici,
par exemple, actuellement, si on parle de s'harmoniser avec le reste du Canada
ou avec le monde entier, dans le fond, nous... ma perception, comment on doit
jouer la partie, ça, ça nous est imposé. On n'a pas le
choix, ça nous est imposé. Nous, là où on a le
choix et ce qu'il faut décider, c'est comment on va jouer cette partie.
Quand est arrivé... Si je remonte, par exemple, à 1980 ou
à la fin des années soixante-dix, quand on a adopté des
règles de décloisonnement pour donner plus de possibilités
aux organisations, on a changé les règles du jeu. Lorsqu'on
changeait les règles du jeu, évidemment, on ne savait pas, dans
ce temps-là, ce qu'on sait aujourd'hui. Mais en changeant les
règles du jeu, à ce moment-là, c'était en se
disant: Si, nous, on est plus fins et plus vite, peut-être qu'on va
arriver à gagner des choses. Puis là, c'était par rapport,
disons, à d'autres organisations internationales ou par rapport aux
banques, les organisations québécoises par rapport aux banques.
Mais ce que ça fait, dans les faits, c'est que, en
déréglementation ou en décloisonnement, ça permet
à l'un, par exemple à l'assureur, d'aller faire du
dépôt. Chacune entre dans les affaires de l'autre. Il arrive
exactement la même chose que dans l'aviation. En plus de ça,
stratégiquement parlant, au fil du temps, si on regarde en
arrière, ce n'est jamais à l'avantage du plus petit de faire du
décloisonnement; c'est toujours à l'avantage du plus gros.
Évidemment, si vous êtes les États-Unis ou le Japon,
vous allez prôner le libre-échange et le décloisonnement;
c'est normal de le faire. Là, vous établissez les règles
parce que vous êtes capables de dominer le marché. De toute
façon, en plus de ça, quand il arrivera quelque chose qui vous
déplaira dans le marché, vous mettrez n'importe quelle sorte de
règle et vous serez capable d'arrêter l'évolution pendant
assez de temps, devant n'importe quel tribunal. On le voit, par exemple... Je
peux vous donner des exemples avec l'acier, le bois d'oeuvre, le papier...
Quand les États-Unis... si la règle... ou dans l'agriculture,
vis-à-vis de la France... Quand la règle ne fait pas leur
affaire, ou ils changent la règle, ou ils mettent un stop pour un temps,
ou ils négocient et l'interprètent autrement. Alors, c'est la
même chose. Eux, ils vont toujours prôner le
décloisonnement, parce que c'est la loi du plus fort dans le
décloisonnement.
Nous, ce qu'on a fait ici, au Québec, à ce
moment-là, on a fait des règles de décloisonnement. On
pensait aller plus vite ou gagner des choses. Mais ce qui est arrivé
avec le temps, c'est que, dans des décloisonnements, l'un entre dans les
affaires de l'autre, comme je le dis dans mon texte, et il le fait sur une base
de coûts marginaux. Le faire sur une base de coûts margi- naux,
ça veut dire... Par exemple, moi, j'opère une compagnie
d'assurance-vie. Alors, je me dis: Je fais de l'argent avec ma compagnie
d'assurance-vie, je fais une rentabilité normale. Si j'allais faire de
la business que lui fait, par exemple, en dépôts, la compagnie
voisine, qui est soit une banque ou un trust, je n'aurai pas besoin de faire
autant d'argent que lui parce que, moi, mon «computer» est
déjà payé. Je n'aurai pas besoin de plus de personnel, je
n'aurai pas besoin de plus de locaux. Alors, je n'ai pas besoin d'amortir mes
coûts fixes. Je vais y aller... J'ai juste besoin de faire un petit peu
plus d'argent, puis ça va être de la crème sur le
gâteau. C'est intéressant. Le gars dit: Je vais faire ça,
une compagnie d'assurance-vie, les opérations vont continuer de la
même manière. Par contre, si le gars qui est courtier en valeurs
immobilières, lui, il dit: Moi, tous mes coûts sont payés
par mes transactions de valeurs immobilières. Alors, je vais faire des
régimes d'épargne-retraite, des choses... si je veux rentrer dans
la business de l'autre sur un base de coûts marginaux. Moi, je ne
chargerai rien pour la garde de valeurs ou pour agir comme fiduciaire,
zéro! Évidemment... Alors, l'autre, qui est dans la compagnie de
fiducie, lui, il dit: Bien moi, je vais entrer dans l'assurance-vie, puis je
vais entrer dans le commerce des valeurs immobilières, ça aussi,
sur une base de coûts marginaux. alors, qu'est-ce qui arrive? c'est que
tout le monde descend ses marges de rentabilité. là, ça
devient aussi une question, justement... le temps de dire: ii me faut
croître. alors, acheter du marché. si les gens se mettent à
acheter du marché en essayant d'aller avec d'autres gens dans le
marché du voisin, ils font encore ça sur une base de coûts
marginaux. alors, toutes les rentabilités de tout le monde baissent.
là, quand vous êtes sous la règle du plus fort, qu'est-ce
qui arrive? il arrive que, pour assurer la croissance, pour assurer la
rentabilité, vous allez peut-être avoir 10 %, 20 % ou 30 % des
organisations qui vont dire: je ne change pas mes règles de placements,
je ne change pas... tu continues de la même manière. d'autres
organisations ont absolument besoin, pour soutenir leur croissance, de changer
leurs règles de placements. alors, elles entrent, disons, dans le
prêt commercial, ou elles entrent dans de la deuxième
hypothèque. elles entrent dans quelque chose qu'elles ne connaissaient
pas avant, où elles n'ont pas l'expertise. à court terme, de
toute façon, elles en ont besoin pour montrer les chiffres et pour
assurer leur survie. alors, étant donné qu'on a mis des
règles qui font en sorte que les gens changent leurs méthodes de
placement, on aboutit, quelques années après, avec des graves
problèmes. (17 h 40)
C'est sûr qu'il y a des mauvaises décisions administratives
qui sont prises. Mais, qu'est-ce que vous voulez, le cadre d'opération
et les règles du jeu faisaient en sorte qu'il fallait qu'il y ait des
risques qui soient pris. Puis, lorsque vous analysez, par exemple je ne
veux pas donner de noms les institutions aujourd'hui. Ce n'est pas
qu'elles ont des problèmes, ce n'est pas automatiquement les plus
petites... C'est celles qui, pour
attaquer une business, faire des affaires et un marché qu'elles
n'avaient pas auparavant, ont été obligées de prendre des
risques et de faire des choses différentes. À un moment
donné, elles avaient besoin de ça, avaient besoin du volume
à cause des nouvelles marges, pour être capables de survivre.
Alors, je pourrais vous le mettre dans le sport. Si vous changez... si
vous prenez le hockey, par exemple, puis que vous faites jouer les joueurs sur
une patinoire de 50 pieds moins longue, puis 25 pieds ou 30 pieds moins large,
probablement qu'ils vont se cogner plus souvent. Puis, si vous les faites jouer
sur une patinoire deux fois plus longue, puis deux fois plus large,
probablement qu'ils vont se cogner moins souvent. Alors, selon la grandeur de
la patinoire, puis les règles qui existent, bien, il arrive des choses
comme il arrive. C'est la même chose avec l'aviation. Ça a
été la même chose avec le changement de
réglementation aux États-Unis sur les «savings and
loans», puis dans n'importe quelle sorte de business.
Lorsque je mentionne qu'ici, au Québec, on doit envisager le
décloisonnement et l'harmonisation non pas... On s'est fait imposer ces
règles-là, mais, nous autres, on doit apprendre à jouer
avec ça. Bien, je peux donner un exemple... bien, je peux vous en donner
plusieurs. Mais, disons, en France.
La France dans les banques fait en sorte que vous n'avez
pas le droit de payer de l'intérêt sur un compte en banque. Alors,
peut-être que ce n'est pas bon pour le gars qui a son compte de
chèques, il n'a pas d'intérêt, mais c'est bon pour le
système financier français. Alors, ils ont décidé
que le cadre d'affaires en France ferait en sorte que les banques, bien, elles
vont être solides. puis, à l'automne, lorsque j'étais
là, la barclay's, qui est une banque anglaise, a décidé
que... elle, elle est arrivée avec un produit. elle a dit: je vais payer
de l'intérêt, moi, sur les comptes en banque. alors, il y a eu
tellement de pression que le ministre français a dit: en france, on ne
paie pas d'intérêt. il est intervenu, il a bloqué le
produit de la barclay's, puis, en répondant bien honnêtement:
écoutez, monsieur, c'est juste. vous non plus, la barclay's, quand vous
faites affaire en france, vous ne payez pas d'intérêt sur les
comptes en banque. alors, évidemment, c'est extraordinaire, parce que la
barclay's, qui fait affaire en angleterre, bien, elle paie probablement de
l'intérêt sur 90 % de ses comptes en banque. puis, si elle a 3 %
en france, il y a 3 % sur lesquels elle ne paie pas d'intérêt.
mais la banque nationale de paris, la société
générale ou le crédit agricole, bien, ils ont 90 % de
leurs comptes en banque sur lesquels ils ne paient pas d'intérêt.
puis, quand ils font affaire en angleterre, il y a peut-être 4 % sur
lesquels ils paient de l'intérêt. ça fait que, quand ils
sont rendus qu'ils font affaire en angleterre ou ailleurs en europe, bien, ils
sont peut-être capables de payer un quart de plus, parce qu'il y a 90 %
de leurs affaires sur lesquelles ils n'en paient pas. d'accord?
Bien, je vais vous dire, c'est la même chose à l'envers,
ici. si on fait un programme comme «mon taux, mon toit», puis qu'on
nous oblige à prêter à 0,25 % de moins que le taux du
marché, ou «corvée habitation». on dit: vous allez
prêter à 0,25 % de moins que le taux du marché. bien,
qu'est-ce qui arrive? si la majorité de nos affaires sont au
québec, on est bien plus influencé, puis que notre marge de
rentabilité théorique est peut-être de 1,25 %, on vient de
perdre 20 % de notre marge de profitabilité. si j'ai 90 % de mes
affaires au québec, 80 %, bien, je suis affecté. mais si, par
exemple, je fais affaire beaucoup en ontario, et que j'ai 4 % de mes affaires
au québec, je peux même ignorer totalement le programme, puis, ce
n'est pas grave.
Alors, c'est ça le cadre d'affaires, le cadre
réglementaire où il faut, dans notre stratégie, nous
assurer que... C'est la même chose avec la taxe sur les salaires. On peut
dire que la taxe sur les salaires, c'est égal pour tout le monde, parce
que ça remplace la TVQ, ou que c'est égal pour tout le monde,
parce que, si vous êtes au Québec par rapport... La Banque Royale
fait affaire au Québec ou un autre fait affaire au Québec, bien,
ça baisse. Ils sont traités de la même façon. Us
sont peut-être traités de la même façon, mais ils
sont traités de la même façon sur 20 % de leurs affaires,
puis, nous autres, sur 90 %. Si c'est désavantageux sur 90 %, les
sociétés québécoises sont beaucoup plus
affectées.
Alors, c'est le message qu'on veut un peu livrer ici. Il faut être
certains qu'au Québec, notre cadre d'affaires le cadre
réglementaire, puis le cadre d'environnement dans lequel on agit
fait en sorte que les sociétés qui y oeuvrent peuvent agir de
manière normale et être en santé et profitables.
Le Président (M. Lemieux): Merci. Alors, je vous remercie,
Mme la ministre. Est-ce que vous me permettez, M. le député de
Westmount? J'aurais peut-être... Il y a certains éléments
de ce rapport-là qui me fatiguent un petit peu là. On va rester
peut-être dans le hockey. Je dis ceci: Si je conserve Pierre Pagé
comme instructeur des Nordiques de Québec, il n'y a pas de
problème. Mais, si je pose la question: Est-ce que je dois conserver
Pierre Pagé? Ça sous-entend une foule de choses;
À la page 3 de votre mémoire, vous posez des questions
très, très substantielles: «À quoi servira-t-il
d'avoir 1/20 de 1 % du marché mondial des institutions
financières détenu par des institutions financières du
Québec si, d'autre part, chaque année, nos institutions
financières locales perdent une partie de plus en plus importante de
leur marché...?» La deuxième: «Désirons-nous
conserver au Québec un nombre suffisant d'institutions
financières ayant leur siège social au Québec pour assurer
le développement d'une expertise...?»
Les questions que vous posez... Il y a des réponses qui se
cachent derrière ces questions-là réponses, j'en
suis certain, que vous connaissez. Il me semble avoir vu un semblant de
réponse à la page 5, dans le deuxième paragraphe:
«Dans ce domaine, nous croyons que le gouvernement devrait contribuer
aux
efforts...», ainsi de suite. Mais, à part ça,
croyez-vous que, d'une certaine façon, les petites institutions sont
victimes d'une forme de discrimination, ou quoi? Qu'est-ce qui se cache
derrière toutes ces questions-là? Entre vous et moi, là,
il n'y a personne, on est tous les deux.
M. Tardif (Paul): C'est ça. Bien, en fait, je
répéterais un peu les choses que je viens de dire. On l'a vu, au
cours des dernières années, la manière dont les
règles de la partie ont été faites. On a juste à
regarder les faits.
Le Président (M. Lemieux): À titre d'exemple,
j'imagine, les dépôts bancaires du gouvernement du
Québec.
M. Tardif (Paul): Oui, mais au Canada... Au Québec, on a
perdu de nos institutions qui sont disparues. Les étrangers sont
intervenus et en ont pris. On a fait pour bien faire dans les règles de
décloisonnement et tout ça, sauf que, si ça n'a pas
joué en faveur de nos institutions domestiques
québécoises, à un moment donné, on ne doit pas
avoir, il me semble, comme stratégie, de dire: Visons pour avoir 1/20 du
marché international et avoir 3 000 000 $ d'affaires à
Londres.
Le Président (M. Lemieux): Si ça a comme
conséquence la disparition...
M. Tardif (Paul): Ce qui est important, il me semble, pour nous,
c'est, au Québec, d'avoir un contrôle fort sur l'assurance-vie,
par exemple, par des sociétés d'assurance-vie
québécoises. La même chose dans les dépôts,
dans les trusts. C'est important, il me semble, de bien contrôler nos
biens financiers et de conserver l'expertise ici. S'il reste au Québec
juste un trust ou deux trusts, s'il reste juste une banque ou deux, une
compagnie d'assurances ou deux, comment vous allez faire le renouveau? Les gens
qui vont sortir des universités, ils vont aller travailler pour qui, au
juste? Comment allez-vous conserver votre expertise?
Aux États-Unis, il y a 6000 banques. On dit qu'il va y avoir une
rationalisation, ça va peut-être baisser à 4000. Ça
en fait pas mal. En Suisse, c'est gros comme le Québec, ils ont 300
banques, des banques privées. Partout où vous avez des
institutions financières, vous voulez avoir du «know how»,
vous voulez avoir de la vivacité. Moi, je dis que c'est important, au
Québec, de garder de la vitalité dans ce milieu-là et de
s'assurer que les institutions qui y sont vivent dans un cadre d'affaires
où elles vont pouvoir survivre. Alors, le cadre réglementaire
je reviens sur ça le cadre réglementaire et
d'affaires doit être là pour assurer que ces compagnies-là
survivent. Ce cadre-là, d'affaires, va faire en sorte que si les autres
compagnies étrangères veulent venir faire affaire ici, elles
peuvent venir faire affaire. Elles viennent depuis tout temps. Elles peuvent
venir faire affaire, mais elles adopteront ces règles-là et on se
sera assuré que ces règles-là font en sorte que nos com-
pagnies québécoises peuvent continuer d'exister sainement et en
santé.
Le Président (M. Lemieux): M. Tardif, si on inverse les
rôles, vous êtes assis dans la chaise de Mme la ministre, la
première mesure que vous prendriez serait laquelle?
M. Tardif (Paul): Ah! Mon Dieu! D'abord, actuellement, au point
de vue de la capitalisation, il faudrait favoriser la capitalisation. Alors, on
a proposé des mesures. Et il y a «first year», «second
year», dans les institutions. Au niveau de «first year», du
point de vue fiscal, je favoriserais les investissements dans les
sociétés. Alors, soit, comme ça a été
favorisé, par exemple, par les Lloyds, il y a des avantages fiscaux
à le faire, soit que ça a été fait en modifiant le
REA pour favoriser que les gens investissent. Je me dis comme vous
dites, entre vous et moi que, quand je vois l'argent qui est investi
dans les films, probablement que les institutions financières... Quand
je regarde le recul qu'on a depuis plusieurs années, il me semble que
ça vaut la peine de faire un effort pour contrôler, avoir la
mainmise et le «know-how» pour assurer la vitalité de nos
institutions financières. Je n'irais pas vers une
déréglementation, moi, comme... Juste, O.K. «Second
year», ça veut dire deuxième, c'est de la dette. On
pourrait favoriser facilement, sans aucun coût pour le gouvernement...
Ça, le ministre des Finances va être heureux, qu'on puisse
émettre de la dette en achetant de l'assurance, comme, par exemple, la
SDI offre à d'autres. Ça, ça serait très facile.
Mon «feeling» à moi, c'est que ça serait ma
perception très facile à faire. Ça aiderait la
capitalisation des institutions financières. Par exemple, si j'ai besoin
d'émettre 5 000 000 $, 10 000 000 $ de billets en sous-ordre, je
paierais une assurance, comme on paie à la Société
canadienne d'hypothèques, comme des compagnies peuvent payer à la
SDI, pour émettre de mon papier. (17 h 50)
Comme, actuellement, on a une période de transition, comme il est
parfaitement expliqué ici, où il y a une reréglementation
et une harmonisation et que ces règles-là font en sorte qu'elles
affectent les sociétés québécoises, si on pouvait
au moins émettre ce papier-là, ça ferait passer cette
période de transition, et ça aiderait les compagnies
québécoises à faire un pas en avant. Alors, ça,
c'est deux choses importantes.
Au niveau de la réglementation, moi, je n'aurais pas tendance
à aller dans le sens du décloisonnement. Moi, je pense que
ça prend une bonne réglementation. J'aime mieux, parce que c'est
juste les grandes règles... Comme on est un plus petit marché
avec des plus petites institutions, c'est utopique de penser que moins de
réglementation va nous servir. Ça prend, au contraire,
probablement, un cadre plus strict pour s'assurer que, dans ce cadre-là,
les institutions qui font affaire au Québec vont être saines, vont
croître, vont être solides. Si on se met à contrôler
de plus en plus notre marché, on va grossir, et on va devenir de plus en
plus gros.
Dans le fond, étudiez les stratégies du Japon, de la
France, de la Suisse, vous allez voir que c'est ça qu'ils font. C'est
impénétrable leur marché. Ils ont leurs règles,
puis c'est sévère. Alors, ils protègent leurs
institutions. Ils peuvent toujours dire à un autre: Vous pouvez venir
faire affaire ici, mais vous allez adopter les règles du pays. Ça
c'est correct. Mais les règles du pays, ça assure que
l'institution continue à survivre, puis qu'elle est forte. De
façon générale, si les compagnies peuvent survivre, elles
parviennent assez bien à servir leurs concitoyens. Alors, il s'agit de
s'assurer qu'on ait un cadre pour que nos compagnies puissent survivre.
Le Président (M. Lemieux): Merci. Vous voulez
compléter, Mme la ministre? Je crois que vous vouliez
compléter.
Mme Robic: Oui, M. le Président. J'écoutais,
c'était assez intéressant. Dans le fond, je pense que je vais
prendre votre analogie, M. le Président, quand vous parlez d'un joueur
de hockey. Moi, je vais vous parler de la glace, de la grandeur de la glace.
Vous aimeriez ça qu'on reste, chez nous, sur notre patinoire. Mais,
malheureusement, la réalité est tout autre. Il y a beaucoup de
monde qui sont sur notre patinoire. Si on était restés tout seuls
sur notre patinoire, peut-être... Même pas sûr, parce que
notre clientèle est bien petite, finalement. Mais il y a bien des gens
qui nous arrivent sur notre patinoire.
Alors, il faut que nos compagnies soient bien équipées
pour pouvoir «compétitionner» ces gens-là, qui
existent depuis longtemps, et qui arrivent avec leurs grosses compagnies, leurs
machines, si vous voulez, pour venir vendre des produits, offrir des produits.
Ces compagnies-là, ce n'est pas... il ne faut pas les voir comme
étant... Comment je dirais? Ce sont des adversaires en affaires, mais ce
n'est pas mauvais qu'elles soient là. Elles stimulent le marché,
elles font travailler des gens. Il n'y a pas seulement les compagnies à
charte du Québec qui donnent des emplois au Québec, il y a des
compagnies étrangères qui donnent des emplois également.
Alors, ce n'est pas seulement néfaste. Il y a des bons
côtés à tout ça. Mais il y a, sur la patinoire,
beaucoup plus de joueurs, et quand ces joueurs ont commencé à
arriver ici au Québec, on s'est rendu compte que, peut-être, nos
joueurs étaient mal équipés face à cette nouvelle
compétition, et qu'il fallait bien les équiper. Sans oublier pour
autant qu'il y a des joueurs qui ont décidé de jouer, de rester
sur une plus petite patinoire, et de jouer d'une façon très
spécialisée. Il ne faut pas oublier que ce n'est pas... il y a
différents joueurs et il faut les reconnaître ceux-là. Je
pense que ce serait une erreur de penser qu'on peut rester seuls sur notre
patinoire. C'est là où on serait en danger de
disparaître.
Vous avez raison quand vous dites: C'est dangereux, quand vous avez des
programmes que, nous, comme compagnie québécoise, on met de
l'avant, qui nous coûtent il y a un coût au bout de ce
programme-là et que les compagnies étrangères
peuvent même ignorer le programme. Si elles l'adoptent, ce
programme-là, dans la partie qui est investie au Québec, c'est si
petit que, dans leurs livres, ça ne dérange pas beaucoup. Mais
c'est pour ça également qu'il faut qu'on ait des compagnies qui
aillent ailleurs, pour pouvoir équilibrer, justement, diversifier les
risques, pour ne pas que les risques soient tous au même endroit. Donc,
c'est une protection, ça aussi, la diversification des risques.
En conclusion, j'aurais voulu qu'on élabore sur le
véhicule de capitalisation. C'était un point essentiel de leur
présentation, et ils nous ont dit que c'était, d'ailleurs, ce
qu'ils calculaient de plus important. Alors, j'aurais aimé ça
s'ils avaient eu le temps un peu d'élaborer sur le véhicule de
capitalisation. Comment est-ce que vous voyez ça, vous, ce
véhicule-là?
M. Holden: M. le Président...
Le Président (M. Lemieux): Mme la ministre, M. le
député... Alors, M. le député de Westmount,
allez-y.
Mme Robic: Je m'excuse, M. le député.
Le Président (M. Lemieux): Oui, allez-y. Nous allons vous
donner tout votre temps. Vous avez été très
«collaboratif».
M. Holden: J'ai été très heureux de partager
avec vous, M. le Président, mais la ministre a amplement le temps de
faire valoir ses vues. Peut-être que le mémoire de Trust
Prêt et Revenu ne plaît pas à la ministre, je ne sais pas.
Moi, je suis très sensible à votre argumentation, et j'aimerais
demander... Quand vous parlez de... En tout cas, vous êtes un trust qui
n'est pas de l'envergure de Trust Royal ou...
M. Tardif (Paul): Non. Seulement...
M. Holden: Est-ce qu'il y a des chiffres que vous pourriez
me...
M. Tardif (Paul): Oui. Les compagnies membres du groupe Trust
Prêt et Revenu, qui a son siège social ici, à
Québec, qui fait affaire partout en province, qui a un bureau à
Ottawa, a des actifs de 675 000 000 $, des biens sous garde, sous gestion,
d'à peu près 6 000 000 000 $. La compagnie Aeterna-Vie, compagnie
d'assurance-vie dont le siège social est à Montréal, a des
actifs d'environ 225 000 000 $. La St-Maurice, compagnie d'assurances IARD, qui
a son siège social ici, à Québec, écrit pour
à peu près 35 000 000 $ de primes annuellement. Alors, ce sont
les trois compagnies qui forment notre groupe financier.
M. Holden: Est-ce que vous verriez deux vitesses ou deux niveaux
de réglementation, ou est-ce que ça se ferait par exception, pour
les compagnies qui font affaire plus localement? Comment vous envisagez
ça?
M. Tardif (Paul): En fait, non. Je pense qu'il y a un
système de réglementation. Est-ce qu'il peut y avoir certaines
exceptions pour les compagnies qui font localement? Honnêtement, ce ne
sont pas des choses auxquelles nous nous sommes attardés. Nous avons
concentré notre mémoire sur seulement quelques points. Puis, pour
la réglementation, nous, c'est un système, un cadre d'ensemble.
Mais, justement, notre approche sur la réglementation, au Québec,
c'est de faire en sorte qu'elle assure, que ce soit un mode d'opération
qui assure la survie, puis la santé de nos institutions
financières. Il ne faut pas qu'il soit surcompétitif ou... Puis,
là, on est dans une période de transition. Alors, il faut
s'assurer qu'on franchit bien cette période de transition. Un des points
les plus importants, à ce moment-là, c'est la capitalisation.
M. Holden: Vous avez prôné même une
réglementation assez sévère. Vous avez mentionné le
Japon. Est-ce que vous iriez jusqu'à dire que l'Inspecteur
général devrait avoir le pouvoir d'aller réorganiser les
compagnies, tel qu'explicité un peu dans les propositions de la
ministre? (18 heures)
M. Tardif (Paul): Pour nous, c'est une autre chose. Notre
approche sur la réglementation... J'ai de la difficulté,
probablement, à faire valoir ce point-là. Lorsque Mme la ministre
parlait de la globalisation... La globalisation, pour nous, on n'est pas contre
ça. On ne peut pas fermer le Québec. On sait bien que... D'abord,
les compagnies d'assurances étrangères, elles sont ici depuis 100
ans. Alors, ce n'est pas... Ça, on sait ça. Ce qu'on dit, c'est
qu'il faut une réglementation, au Québec, qui, justement, dans la
partie... Ce n'est pas une partie de hockey, mais la partie de mondialisation
qui se joue actuellement, nous, il faut la jouer de telle façon, en
mettant des règles qui font en sorte que nos compagnies locales peuvent
survivre, étant donné qu'on sait qu'il va y avoir des compagnies
de partout qui viendront faire affaire ici et qui adopteront des règles.
Qu'on impose des règles qui font en sorte que ça assure au moins
que nos compagnies vont survivre.
Votre question sur la réglementation. Alors, on pense, à
ce moment-là, que le cadre réglementaire et le cadre d'affaires
doivent être importants et doivent être assez
sévères. On aime davantage un cadre réglementaire plus
explicite qu'un cadre réglementaire moins explicite, et, à ce
moment-là, sur une base qui peut être plus subjective, plus
aléatoire, prévoir des interventions, soit du bureau de
l'Inspecteur général ou du ministre. Il me semble que ce serait
mieux d'avoir un cadre réglementaire plus explicite et, à ce
moment-là, avoir des pouvoirs pour l'Inspecteur général
qui, oui, se doivent d'être importants. Ils doivent être aussi
explicites. Dans ça, l'approche, comme on parle d'autres pays, doit
être aussi un entre les institutions financières et
le bureau de l'Inspecteur, qu'il y ait davantage de partenariat. On est
là pour bâtir des institutions financières ici, et de
collaboration.
M. Holden: Je suis impressionné par... Quand vous parlez
de la prédominance des grandes banques, je suis d'accord avec vous. Vous
dites que le pouvoir des banques sur le système canadien des paiements
leur donne ça, ça vient de votre mémoire le
pouvoir de décider qui peut être admis à participer, quels
produits sont offerts, et à quel prix, et, du même coup, de
réduire ou d'exercer un contrôle sur la concurrence. Je vois que,
parmi vous trois, il y en a deux qui sont avocats ou peut-être notaires,
je ne sais pas.
M. Tardif (Paul): Avocats, oui.
M. Holden: Au sujet de la compétence constitutionnelle,
est-ce que vous avez des commentaires à faire sur cette ingérence
par les banques dans les domaines de juridiction exclusive des provinces?
M. Tardif (Paul): Honnêtement, au point de vue
constitutionnel, on ne s'est pas mis à étudier ça, on ne
s'est pas attardés véritablement. Ce n'est pas sur ce point de
vue qu'on s'est attardés. Nous, notre préoccupation, c'est
davantage au point de vue affaires. Les banques, ce qu'on veut... Au Canada, on
va avoir six, sept banques et c'est tout qui vont
contrôler, si ça continue, tous les trusts, les compagnies de
valeurs mobilières. Puis, peut-être, dans 10 ans, toutes les
compagnies d'assurances... Est-ce que c'est ça qu'on veut? On va trouver
que ça ne fait pas un marché où il y a beaucoup de
vitalité. D'ailleurs, déjà, je ne suis pas certain que,
dans les banques, il y a la vitalité et le nombre qu'il devrait. Alors,
c'est surtout à ce point de vue là. On s'en va vers un oligopole
pour contrôler tout.
Puis, dans des règles de décloisonnement...
inévitablement, à un moment donné, à la longue,
ça va être l'exception qui va vivre en dehors de ça, parce
que les grandes banques vont être de plus en plus grosses. Quand vous
pouvez vous payer des erreurs de 200 000 000 $, 300 000 000 $, bien, ça
aide, même plus.
M. Holden: De 6 000 000 000 $ avec la famille Reichmann. Je
pourrais même vous suggérer quelque chose que vous n'êtes
pas obligé de commenter, mais ça se peut qu'un Québec
souverain serait mieux adapté pour protéger les petits trusts
contre les grosses banques que le système actuel. Mais je ne vous
demanderai pas de commenter.
Le Président (M. Lemieux): S'il vous plaît!
M. Chagnon: M. le Président, si vous vouliez dire à
votre député qu'il prend de l'âge.
Le Président (M. Lemieux): Sur ce, est-ce que vous
avez...
M. Holden: Non. J'ai suggéré ça à nos
visiteurs, et j'ai dit qu'ils n'étaient pas obligés de
commenter... et vous non plus!
Le Président (M. Lemieux): Non, je m'excuse. M. le
député de Saint-Louis, la parole... Mme la ministre, la parole
est à... M. le député de Verdun, la parole était
à M. le député de Westmount. Alors, il avait raison de
dire que vous n'aviez pas de commentaires à apporter à sa
question.
Maintenant, je vous remercie, M. le député de Westmount.
Je remercie les membres de cette commission parlementaire. Je vous remercie
d'avoir présenté votre mémoire, et nous suspendons nos
travaux jusqu'à 20 heures, pour entendre Mme la
secrétaire, s'il vous plaît le Bureau d'assurance du
Canada.
M. Gautrin: Est-ce qu'on va laisser nos...
Le Président (M. Lemieux): C'est à votre
discrétion, M. le député de Verdun.
(Suspension de la séance à 18 h 5)
(Reprise à 20 h 7)
Le Président (M. Chagnon): Je demanderais aux membres du
Bureau d'assurance du Canada de bien vouloir prendre place. Nous allons
commencer immédiatement.
Messieurs, est-ce que vous auriez l'obligeance de vous présenter,
s'il vous plaît.
Bureau d'assurance du Canada (BAC)
M. Medza (Raymond): Merci, M. le Président. Mon nom est
Raymond Medza. Je suis le directeur général du Bureau d'assurance
du Canada au Québec. Je suis accompagné de M. Réal
Circé, qui est le président et chef de la direction de La
Capitale, compagnie d'assurances générales; de M. Jean Tardif,
qui est le président de La St-Maurice, compagnie d'assurances; et de M.
Jean Bouchard, qui est le président du conseil de La Laurentienne
générale, compagnie d'assurance inc.
C'est ce dernier, d'ailleurs, qui était chargé du groupe
de travail sur l'analyse des propositions de politiques pour le secteur
financier du Québec. C'est lui-même qui vous présentera
tout à l'heure les commentaires du BAC, au nom des assureurs à
charte du Québec.
Juste avant, M. le Président, quelques mots pour vous rappeler
que le Bureau d'assurance du Canada est l'organisme qui représente la
majorité des assureurs de dommages opérant au Canada. Au
Québec, les orientations sont déterminées par le
comité BAC-Québec qui regroupe les chefs de la direction des
compagnies d'assurances de dommages parmi les plus importantes au
Québec.
Quoique fondamentalement en accord avec plusieurs des propositions de la
ministre, le BAC souhaite vous faire ses commentaires et certaines
recommandations qui, d'ailleurs, s'inscrivent tout à fait dans la ligne
de pensée que le BAC a déjà tracée lors de
l'analyse de différents projets de loi ou de documents de consultation
présentés ici, au gouvernement du Québec.
J'inviterais donc M. Bouchard à poursuivre, si vous me le
permettez, M. le Président.
Le Président (M. Chagnon): Absolument. Je voudrais tout
simplement souligner que vous avez 20 minutes pour faire votre
présentation. Suite à cela, les membres de la commission, de
l'Opposition et du parti ministériel vous poseront des questions comme
il se doit.
M. Bouchard (Jean): Merci, M. le Président. Comme vient de
le mentionner M. Medza, le BAC est fondamentalement d'accord avec plusieurs des
propositions de la ministre. Toutefois, nous désirons rappeler les
besoins particuliers des assureurs de dommages du Québec, afin de
favoriser leur croissance et ce, même si le secteur des assurances de
dommages n'est mentionné que très peu dans le document de
consultation.
C'est pourquoi, d'entrée de jeu, nous désirons
énoncer ce que nous qualifions d'environnement favorisant la croissance
de l'assurance de dommages au Québec. Nous souhaitons donc, et je ne
répéterai pas l'ensemble du mémoire que nous avons soumis,
mais je tâcherai simplement de donner les grandes lignes pour... On
pourrait peut-être prendre plus de temps pour la discussion, s'il y a
lieu. (20 h 10)
Alors, nous souhaitons particulièrement que... D'abord, un
encadrement qui reconnaît les spécificités du secteur de
l'assurance de dommages, qui sont différentes du secteur de l'assurance
de personnes; 2° un encadrement législatif et réglementaire
amélioré qui favorise une plus grande efficacité de nos
sociétés; 3° des règles qui assurent la
stabilité financière des institutions tout en respectant les
acquis que nous avons eus au cours des années passées; et enfin,
un environnement propice au développement, c'est-à-dire où
l'État n'agit pas comme concurrent de l'entreprise privée,
où le régime fiscal ne pénalise pas les institutions, un
régime qui favorise des investissements pouvant supporter son
développement et qui favorise l'accès au financement.
Comme nous partageons des objectifs qui sous-tendent le document
ministériel, nos commentaires porteront sur ces grands objectifs,
à savoir l'efficacité, la stabilité du système et
sa croissance.
D'abord, ce que nous entendons par un environnement efficace. Il est,
à notre sens, conditionné par les quatre éléments
suivants.
La cohérence entre les diverses législations. La
cohérence doit se retrouver à l'intérieur d'un même
secteur, mais pas nécessairement à l'échelle
intersectorielle, puisque chaque secteur d'activité doit comprendre ses
propres spécificités.
En deuxième lieu, et ce qui nous apparaît très
important, c'est la reconnaissance mutuelle des juridictions au Canada. Dans
l'environnement actuel qui évolue et s'internationalise, il y a urgence
de s'entendre sur la reconnaissance mutuelle des juridictions, tout comme sur
l'harmonisation, au moins sur des éléments fonda-
mentaux. En ce sens, le modèle de licence unique de la
Communauté économique européenne est intéressant en
ce que la juridiction d'incorporation est mandatée pour effectuer la
surveillance et le contrôle et fournir l'information aux autres
juridictions dans lesquelles l'assureur opère.
Également, des normes minimales de solvabilité. Nous
convenons que l'établissement de normes minimales de composition et de
suffisance de capital applicables aux assureurs de dommages est une condition
essentielle à l'harmonisation des normes et la reconnaissance d'une
juridiction, d'autant plus que ces normes sont nécessaires
également pour la crédibilité financière de notre
industrie. Nous soumettons toutefois que ces normes doivent être
basées sur des principes internationalement reconnus. Nous discuterons
d'ailleurs un peu plus tard de cet aspect.
Nous souhaitons également l'allégement des lourdeurs
administratives. Nous croyons que la bureaucratisation exagérée
des organismes de contrôle est contre-productive, autant au niveau de
l'appareil gouvernemental qu'au niveau des entreprises qui sont sous
contrôle.
Nous recommandons d'abord de créer un environnement
législatif et réglementaire qui s'apparente de plus près
aux normes et pratiques reconnues internationalement. Deuxièmement,
d'évaluer l'impact de toute nouvelle loi, et n'implanter aucune mesure
qui nécessiterait des ressources additionnelles dans l'appareil
gouvernemental. Une analyse d'impact devrait de plus tenir compte du fardeau
additionnel aux entreprises et mesurer les conséquences en termes de
coûts et de pertes d'énergie sur la compétitivité
des assureurs.
Ce que nous entendons par un environnement stable. Nous sommes d'accord
que la stabilité du secteur d'assurance de dommages repose sur les trois
éléments suivants: d'une part, des normes de solvabilité;
un pouvoir de contrôle et de surveillance et un régime
d'indemnisation. L'application des normes de solvabilité doit être
établie selon les principes suivants. Les normes devraient être
définies selon des critères propres au secteur d'assurance des
dommages. Ce devrait être des règles qui s'inspirent de normes et
pratiques reconnues internationalement. La reconnaissance de ces règles
devrait se faire par l'ensemble des juridictions canadiennes, de façon
à ne pas pénaliser particulièrement les entreprises sous
juridiction québécoise. Nous recommandons donc de créer un
comité d'étude composé de représentants de
l'industrie et du gouvernement, mandaté pour l'analyse des règles
actuelles et l'identification des alternatives en matière de
solvabilité, capitalisation, financement et placements.
L'exercice du pouvoir de surveillance et de contrôle des
autorités réglementaires. Nous sommes d'accord pour qu'une
surveillance raisonnable soit exercée par l'Inspecteur
général des institutions financières. Dans notre rapport,
les remarques que nous faisons ne visent aucunement les individus en place,
mais simplement un cadre de politique et un cadre d'opération qui soient
acceptables, tant au niveau gouvernemental qu'au niveau des opérations
du secteur. À notre avis, le seul rôle de l'Inspecteur
général devrait être de s'assurer de la santé
financière des assureurs et son action devrait se limiter à ce
qui est nécessaire à cette fin. Souventefois, les rapports
demandés sont coûteux, autant pour le gouvernement qui doit en
faire l'analyse, que pour l'industrie des assurances, qui doit les
préparer. À notre avis, certaines de ces demandes
dépassent les besoins de renseignements utiles pour s'assurer de la
santé financière des institutions. À titre d'exemple, nous
ne croyons pas que nous ayons besoin ou que l'Inspecteur
général ait besoin de s'enquérir des tarifs des
assureurs en vue de protéger l'assuré. Dans un contexte aussi
concurrentiel que celui de l'assurance des dommages, il nous apparaît que
c'est un rôle superflu.
Un autre exemple. Après avoir reçu les états
financiers contenant le rapport des vérificateurs, après avoir
reçu la certification actuarielle, et suite à
l'établissement d'un fonds d'indemnisation, serait-il nécessaire
que l'Inspecteur collige l'information pour la traiter lui-même dans ses
propres systèmes pour se satisfaire de la situation financière
d'un assureur? Nous ajoutons qu'on ne peut pas tenir les administrateurs et
dirigeants responsables des résultats s'ils ne sont pas, en même
temps, maîtres des décisions qu'ils prennent.
Nous recommandons donc fortement de revoir les pouvoirs accordés
aux autorités de surveillance et de contrôle et de les
redéfinir selon des paramètres raisonnables reflétant les
réalités du secteur et les réalités
économiques. Nous souhaitons également un régime
d'indemnisation qui protège les assurés selon les limites
prévues. Chaque secteur d'activité financière
présente des différences fondamentales au niveau de la nature du
risque, de l'ampleur et de l'impact d'une mauvaise situation
financière.
En assurance de dommages, le BAC considère que le régime
mis en place répond bien aux besoins. La Société
d'indemnisation en matière d'assurance IARD a été
créée en 1988, avec l'accord de tous les assureurs de dommages au
Canada et leur adhésion individuelle. C'est une mécanique qui a
été également acceptée par l'ensemble des
autorités de contrôle au Canada. Un mécanisme
d'indemnisation existait déjà même avant la création
de la Société. Il était administré par le Bureau
d'assurance du Canada et subventionné par les assureurs. En 1988, la
Société prenait en charge les dossiers de liquidation,
particulièrement de sociétés à charte autre que du
Québec, qui étaient alors en cours, et en a continué la
gestion depuis.
Nous croyons que le système d'indemnisation au niveau de
l'assurance IARD fonctionne bien, semble efficace, et le tout, à des
coûts raisonnables. Compte tenu de ces éléments, il ne nous
apparaît pas utile de le remettre en question à ce moment-ci.
Cependant, s'il s'avérait que des modifications de fonctionnement
devaient être discutées, nous serions quand même ouverts
à le faire.
Un environnement propice à la croissance. En dernier lieu, nous
désirons vous faire connaître nos vues sur ce que constitue un
environnement propice à la
croissance, vers lequel doit tendre toute proposition concernant notre
industrie. Nous déplorons d'abord l'intervention continuelle et
quotidienne du gouvernement dans les marchés et un protectionnisme qui
ne devrait plus avoir cours dans l'économie actuelle.
Cet interventionnisme comporte des conséquences négatives,
soit d'enlever à l'entreprise privée des parts importantes d'un
marché déjà restreint, et d'augmenter les impôts et
les taxes prélevés, qui ont déjà atteint un niveau
inacceptable et qui créent des déficits successifs de plus en
plus élevés contribuant à un endettement national
critique.
Dans ce contexte, nous sommes d'avis que, parmi les conditions
essentielles à un environnement propice à la croissance, nous
retrouvions au moins les suivantes, qui constituent nos quatre dernières
recommandations.
Que le gouvernement n'envahisse plus les champs qui peuvent être
gérés par l'entreprise privée, et qu'il libère...
qu'il trouve une façon de libérer les champs d'activité
déjà occupés à titre d'assureur.
Que soit revue la taxation des assureurs de dommages, et donner à
notre industrie les allégements fiscaux requis pour lui donner au moins
une position de chance égale, ou de «level playing field»,
pour employer l'expression anglaise, par rapport aux autres institutions
financières et par rapport aux institutions financières
également sous d'autres juridictions.
Donner aux assureurs de dommages l'accès aux capitaux nationaux
ou étrangers sur le plan de la propriété. Faciliter
l'accès au financement, soit par des emprunts ou des placements qui sont
permis dans d'autres secteurs financiers.
En conclusion, pour employer les mêmes termes que le rapport
ministériel, nous souhaitons la création d'un espace financier
invitant et approprié au secteur de l'assurance de dommages. La
réflexion, quant à notre secteur, doit tenir compte de
l'environnement économique global mais également du contexte
particulier de notre industrie.
Alors, c'étaient mes remarques préliminaires, M. le
Président.
Le Président (M. Chagnon): Je vous remercie beaucoup, M.
Bouchard. J'inviterais maintenant Mme la ministre à commenter votre
mémoire.
Mme Robic: Merci, M. le Président. Bonsoir, messieurs, M.
Bouchard, M. Circé, M. Medza, oui, et vous êtes accompagnés
de M. Tardif, cet après-midi. M. Bouchard, est-ce que je peux vous
demander, avant même de débuter, combien de membres vous
représentez à cette table? (20 h 20)
M. Bouchard: En termes de nombre exact, nous
représentons... Le Bureau d'assurance du Canada représente
environ, je dirais, en termes de primes souscrites, 85 % des primes souscrites
au Canada. En termes de nombre d'assureurs, ça représente la
très grande majorité du nombre d'assureurs, mais je n'ai pas le
nombre exact 184 groupes d'assureurs, qui représentent au-
delà de 80 % des assureurs qui souscrivent de l'assurance au canada.
Mme Robic: Merci. Je vous remercie de votre présentation.
Je ne crois pas me tromper en disant que le mémoire... Notre
énoncé de politique, finalement, semble rejoindre vos
préoccupations, pour la majeure partie, ou j'ai mal compris votre
intervention. Il semblait que vous nous suiviez au niveau de l'harmonisation,
de la création d'un espace financier canadien. Vous sembliez être
d'accord avec nous. Quand nous présentons cet espace financier canadien,
on fait une suggestion dans le document, à la page 8, si je ne me trompe
pas. J'aimerais peut-être que vous puissiez commenter ce modèle
que l'on a mis de l'avant.
Également, j'aimerais... Voulez-vous commenter tout de suite?
M. Bouchard: Si vous voulez. Enfin, à votre
goût.
Mme Robic: Allez! Allez! Ça va.
M. Bouchard: Nous sommes, en effet, d'accord sur... Enfin, votre
document présente un ensemble de principes. Je pense que vous avez
entièrement raison. Nous sommes d'accord sur un ensemble de principes,
particulièrement au niveau de l'espace financier canadien. Je pense que
nous avons fait référence nous-mêmes, et je crois que...
Même, dans un discours que vous prononciez hier, Mme la ministre, je
pense qu'on faisait rapport... Enfin, on était tous les deux à
des tribunes différentes, et on faisait, les deux,
référence à la reconnaissance des règles
d'application au niveau de la Communauté économique
européenne. Je pense que l'approche prise à la page 8 de
votre document de politiques est quelque chose qui s'apparente d'assez
près à ce qui se passe au niveau de la Communauté
économique européenne.
Là où, quand même, nous avons des
inquiétudes, c'est que, pour employer une expression un peu populaire,
disons pour avoir ce tango avec d'autres partenaires, il faut que les deux
veuillent danser. Il nous apparaît que... Au niveau d'autres
juridictions, je ne sens pas nécessairement la même ouverture, et
je pense que c'est revenu à différentes reprises dans les
représentations que nous avons faites dans le passé.
On parle d'harmonisation, oui, mais on parle beaucoup aussi... et je
pense qu'on a toujours mis l'insistance sur la reconnaissance des juridictions
respectives au niveau canadien. C'est, je pense, à ce niveau-là
que le débat politique doit se faire. Il m'apparaît que c'est
urgent de le faire. Tant que nous avons des sociétés
enfin, si on parle de sociétés à charte
québécoiseà charte québécoise, je
pense que c'est important que le débat se fasse à ce
niveau-là, parce que... et cela a été souligné
à différentes reprises. Si vous reculez, par exemple, d'une
vingtaine d'années, l'harmonisation était à peu
près parfaite au Canada parce que c'étaient des
sociétés fédérales et que l'harmonisation se
faisait au
niveau fédéral. Les sociétés qui
étaient québécoises à ce moment-là
n'opéraient qu'au Québec. Dès que nous voulons sortir du
Québec avec des sociétés à charte
québécoise, si nous ne rencontrons pas les normes
fédérales, nous avons d'énormes problèmes. Je pense
que je ne vous révèle rien en disant ça. Donc, sur le plan
des principes, je suis d'accord avec vous.
Sur le plan de la réalisation, si le gouvernement
fédéral et les gouvernements des autres provinces ne sont pas
prêts à débattre, disons, des normes minimales
d'harmonisation... On ne parle pas de s'harmoniser sur l'ensemble de ce qui
encadre toutes les institutions financières, mais, au moins, de normes
minimales qui permettent à nos sociétés d'opérer
à la grandeur du Canada.
Mme Robic: Je suis plus optimiste que vous. Ce ne sont pas des
exercices qui sont souvent faciles, mais je pense qu'avec de la bonne
volonté et le vouloir politique, il y a une façon d'arriver
à des ententes.
Vous avez touché aux pouvoirs de l'Inspecteur
général, des organismes de surveillance je pense que c'est
important également. Dans notre document, nous avons tenté
d'équilibrer en donnant plus de responsabilités aux entreprises,
aux compagnies, en leur donnant plus de pouvoirs au niveau de leurs placements
et en établissant des normes de solvabilité qui sont
basées sur la qualité des actifs, sauf que là, nous vous
donnons beaucoup plus de latitude. Mais, en contrepartie, cependant, nous
regardons la possibilité de donner plus de pouvoirs à
l'Inspecteur général. J'aimerais, peut-être, que vous nous
donniez vos impressions sur cette politique, et jusqu'où... ou comment
voyez-vous... Quand vous me dites que l'Inspecteur général doit
jouer son rôle, quel est son rôle, et où doit-il le jouer,
ce rôle-là? Jusqu'à quel point est-ce qu'il doit le jouer,
son rôle?
M. Bouchard: D'accord. Je pense que nos remarques se font... Je
pense qu'on a essayé de cerner de façon aussi précise que
possible, mais c'est un document, quand même, qui laissait beaucoup de
latitude quant aux commentaires que nous pouvions faire. Comme industrie, nous
avons à coeur d'avoir toute la crédibilité dont nous avons
besoin pour opérer dans les marchés. Donc, pour tout ce qui
touche la solvabilité des entreprises, je pense que nous partageons les
mêmes objectifs. Ça, il y a une question de degré, à
un certain moment donné. Si je regarde... Par exemple, quand on regarde
la solvabilité des entreprises, nous avons déjà la
certification des réserves qui a été établie par la
Loi sur les assurances, depuis déjà 1984. Même ici, au
Québec, je pense qu'on avait été un peu plus catholiques,
parce que plusieurs des institutions avaient déjà, avant que la
loi ne le force, étaient déjà forcées par leurs
propres conseils d'administration d'avoir des certifications actuarielles de
leurs réserves. Bon. Alors, ça existe. Donc, nous partageons cet
objectif-là. Peut-être devrions-nous aller... Disons, s'il y a des
préoccupations... C'est ce que nous avions de la difficulté
à percevoir, parce que votre document semblait s'adresser à
l'ensemble des institutions financières. Alors, on ne pouvait pas
percevoir exactement ce qui s'adressait au secteur des assurances de dommages
par rapport au secteur des assurances de personnes, par rapport aux banques,
institutions de dépôt, sociétés de fiducie, etc.
Alors, en ce qui touche les sociétés d'assurances de
dommages, s'il y a des préoccupations par rapport aux nombres actuels,
on aimerait les comprendre, parce que, pour l'instant, on a quand même
tout un encadrement, avec les normes requises au niveau du capital, la
certification des réserves par nos actuaires, la certification des
primes non acquises. On a également tout le pouvoir d'inspection que
l'Inspecteur général a déjà. On s'est doté,
comme industrie, quand même, d'un filet de sécurité, au cas
où les choses tourneraient mal pour certaines institutions. Alors, on se
dit: On est d'accord pour regarder s'il y a un problème, pour voir si on
doit être plus contraignants que nous le sommes présentement au
niveau de la solvabilité.
Ce qu'on ne voudrait pas, quand même, c'est que vous créiez
ici, au Québec, un environnement qui soit plus contraignant que ce qui
existe sur le plan international. On sait, quand même... Je regarde...
Strictement, par exemple, au niveau de la reconnaissance des placements dans
les filiales, dans les institutions internationales. Je pense que si certaines
des grandes compagnies internationales ne pouvaient pas reconnaître, sur
une base d'équité, sur une base qu'on appelle l'«equity
accounting», leurs filiales dans leurs actifs, je pense qu'il y aurait un
certain problème. Je ne sais pas comment certaines compagnies auraient
fait pour faire des acquisitions aux États-Unis, de la façon dont
elles l'ont fait, sans avoir cette possibilité-là. Donc, je me
dis qu'il ne faut pas non plus être plus contraignants à
l'intérieur de notre propre territoire que les entreprises avec qui on
va être portés à être en concurrence. Il
m'apparaît que le Québec a été, je pense, quand
même, un endroit, un environnement où il y a eu quand même
une bonne solvabilité de nos entreprises en assurance de dommages.
Je me dis que, s'il y a un problème appréhendé, on
aimerait s'asseoir avec vous autres pour en discuter avant que vous arriviez
avec des règles plus contraignantes que ce que nous avons
présentement. Donc, on veut préserver certains acquis. Autrement,
il y a risque que les sociétés disent: Bien, écoutez, si
on n'a pas ce genre d'environnement-là, que pour opérer sur le
plan fédéral, dans les autres provinces, il faut avoir une charte
fédérale... La tendance, pour un homme d'affaires, pourrait
être forte de dire: Bien, coudon, je pense que si on a plus de
désavantages à certains endroits, on est peut-être mieux de
considérer les choses différemment.
Mme Robic: Mais je pense qu'à travers le document
souvent, vous me l'avez vous-même entendu dire pour nous,
l'essentiel, c'est d'avoir des normes qui font en sorte qu'on s'assure de la
bonne santé de nos institutions financières, sans pour autant
vous empêcher de pouvoir vous développer. Encore une fois, je
pense
que, si nous avons pris le temps nécessaire pour arrêter
ces normes, c'est qu'on a voulu justement consulter, voir ce qui se faisait
ailleurs, pour être bien sûrs qu'on ne mettrait pas plus de
pression sur nos institutions à nous qu'ailleurs.
Cependant, c'est bien sûr que les règles du jeu changent
chez nous, mais elles changent également ailleurs. On se rend compte que
les normes, qu'elles soient au niveau du BRI ou de la Communauté
économique européenne, deviennent plus serrées
également. Alors, ce que l'on tente, nous, c'est d'être le plus
compatible possible sans, encore une fois, vous mettre des pressions indues et
vous forcer à rencontrer des normes qui seraient en deçà
de tout ce que l'on voit. Ça, c'est bien sûr. Ça ne serait
pas dans notre intérêt non plus. Sur la page... (20 h 30)
Le Président (M. Chagnon): Je vous remercie, Mme la
ministre, et vous m'excuserez de vous interrompre. La règle du jeu de
notre commission c'est, évidemment, de répartir le temps de la
façon la plus équitable possible, ce qui implique des temps de 10
minutes qui sont impartis à chacune des formations politiques.
J'inviterais donc maintenant le critique de l'Opposition officielle en
matière d'institutions financières et député de
Westmount à prendre la parole...
M. Holden: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Chagnon): ...et je reviendrai à
votre tour, madame.
M. Holden: C'est un mémoire étoffé que vous
avez présenté, messieurs. Je vous en félicite. Un de vos
éléments ou vos lignes directrices semblent être la
taxation que vous subissez. Je sais que vous prônez un traitement... pas
spécial, mais un traitement pour votre industrie par opposition à
l'assurance-vie.
Je regarde votre mémoire, l'Annexe III, mémoire
prébudgétaire, à la page 2, et il semble y avoir un
tableau qui illustre le rendement des capitaux propres, assurances
multirisques. Ça me semble pas mal irrégulier et un peu faible,
si je peux m'exprimer. Si on augmente le montant des capitaux minimum requis,
est-ce qu'on risque d'être incapable de rémunérer
convenablement les capitaux dans votre industrie? Avez-vous un commentaire sur
cette observation?
M. Bouchard: II y a deux aspects à votre question, M.
Holden. Le premier, c'est sur l'irrégularité des résultats
des sociétés d'assurances de dommages. Je pense que vous avez
entièrement raison de noter cette chose-là. Nous sommes une
industrie qui est extrêmement cyclique, et dont... traditionnellement,
même. Vous pourriez reculer sur 50 ans, et vous verriez toujours cette
irrégularité-là qui se manifeste. C'est un domaine,
particulièrement ici au Canada ce serait vrai également
dans d'autres parties du monde peut-être à des
degrés divers, selon les régions, mais nous sommes, en assurance
de dommages, dans un secteur qui est très capitalisé au Canada.
C'est un secteur qui est présentement dominé par... qui l'a
été, enfin, depuis le début de la colonie, je dirais, ou
au début de l'assurance des dommages par des sociétés
étrangères, et où il y a eu toujours amplement de capitaux
disponibles pour assurer les risques. Donc, c'est un endroit où la
concurrence est très forte, ce qui a provoqué ce genre de
réaction-là où, par exemple, les primes baissent
considérablement à certains moments donnés. Les
résultats des assureurs se détériorent. Donc, le retour
sur équité se détériore considérablement. Il
y a réaction et surréaction, et il y a également d'autres
phénomènes comme des phénomènes cycliques au niveau
atmosphérique, par exemple, qui viennent affecter les assureurs.
Alors, il y a définitivement irrégularité au niveau
du retour sur équité. Quand on le regarde... Par exemple, si on
essaie de faire une moyenne sur une période d'années, les
compagnies d'assurances de dommages ont eu un retour sur équité
qui était un peu inférieur à celui, par exemple, de
l'industrie bancaire. Ce n'est pas faramineux. Ceci, non pas en tenant compte
uniquement des revenus qui proviennent de la tarification, mais qui proviennent
également des revenus de placements, ce à quoi vous faites
référence avec la deuxième partie de votre question.
On peut dire que, essentiellement je dirais depuis les 10
dernières années les profits des sociétés
d'assurances de dommages l'ont été à partir des revenus de
placements qu'elles font et non pas à partir des revenus
d'opération.
Maintenant, si vous me demandez: Quelle est la proportion qui provient
des capitaux propres des entreprises? On ne l'a pas. Je ne peux pas vous la
donner. On pourrait la retrouver, mais je ne l'ai pas pour vous la donner
immédiatement. Mais la profitabilité ou le profit qui est
retiré par les actionnaires dans les compagnies d'assurances de dommages
vient essentiellement des revenus de placements qu'elles ont et non pas des
revenus d'opération.
M. Holden: La page suivante indique l'impact fiscal sur
l'industrie de votre mode d'assurance, l'assurance de dommages. Dans votre
mémoire, vous mentionnez à plusieurs endroits cet impact fiscal
à la page 3, à la page 14, où il est question
d'impact. Moi, ce que je vous demande: Est-ce que les revenus constitutifs des
surplus minima sont taxés ou imposés?
M. Bouchard: Tous nos revenus, quels qu'ils soient, sont
taxables, sont sujets à l'impôt sur le revenu. Tous nos revenus,
même les revenus que nous faisons pour constituer des réserves,
quelles qu'elles soient. Enfin, on n'a absolument aucune façon de se
constituer des réserves libres d'impôt. Ça n'existe pas
dans notre secteur.
M. Holden: Est-ce que vous auriez des recommandations ou est-ce
que ça devrait être exonéré, ces...
M. Bouchard: Écoutez, pour certains aspects,
c'est sûr. Enfin, je n'ai pas fait un mémoire qui touche
strictement à toute la réforme de la fiscalité qui
pourrait être permise. Mais on a fait quand même... Lors de
présentations que nous avons faites pour certains types de risques, par
exemple, au niveau de la couverture de risques catastrophiques, ils ont fait
certaines suggestions déjà à l'effet qu'il y aurait
peut-être avantage à constituer des réserves libres
d'impôt pour prévoir les sinistres de nature catastrophique, tels
que les tremblements de terre ou des choses de cette nature-là. Mais,
pour l'instant, ce n'est pas une chose que nous avons présentement. Mais
il est clair que, enfin, c'est une... Avoir des nivellements, par exemple,
trouver des façons de niveler les résultats des assureurs pour
prévoir les grands risques pourrait être une façon, ce
pourrait être une approche possible, mais notre mémoire n'a pas
porté sur ces éléments-là.
M. Holden: Merci. À la page 5 de votre mémoire,
vous faites une déclaration qui me fait chaud au coeur. Vous demandez
que le fédéral cesse l'envahissement des autres juridictions.
Alors, peut-être que vous pourriez nous suggérer un moyen
d'empêcher définitivement le fédéral de nuire
à la croissance, notamment, des institutions d'assurance de
dommages.
M. Bouchard: Je ne voudrais pas entrer dans des débats
politiques, ce n'est pas mon rôle...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bouchard: ...mais ce qui se passe, en réalité,
c'est que, nous, ce que nous suggérons, en tant que représentants
des institutions constituées ici au Québec parce que c'est
quand même une partie importante des sociétés qui font
partie du Bureau d'assurance du Canada ce que nous disons, c'est que
nous voudrions, enfin, ce que nous souhaitons le plus ardemment, c'est que les
juridictions qui ont été accordées aux différents
niveaux, comme au niveau des provinces, soient respectées par le
gouvernement fédéral. Maintenant, il y a toujours un argument
là-dessus et les débats constitutionnels, je pense, peuvent
être très longs. Mais ce sont des débats politiques, il n'y
a pas nécessairement unanimité, et ce que nous disons n'est pas
toujours, non plus, nécessairement l'Évangile.
Il reste que, pour nous, comme hommes d'affaires, nous croyons que si
nous avons... Par exemple, si nous pouvons nous constituer en entités
corporatives à l'intérieur d'une juridiction qui a le pouvoir de
nous donner, de nous faire opérer, de nous laisser opérer, ces
pouvoirs-là devraient être respectés par les
différents autres niveaux de gouvernement, que ce soit le
fédéral ou que ce soit le provincial. Chaque fois qu'il y a
empiétement, pour nous, ça devient une difficulté
additionnelle d'opérer sur le territoire canadien. C'est surtout cet
aspect-là que nous touchons. C'est un aspect opérationnel pour
nous et non pas... On ne veut pas se lancer dans l'aspect politique du
débat. (20 h 40)
M. Holden: Mais ça ajoute à vos coûts
aussi.
M. Bouchard: Toute duplication de contrôle, enfin, toute
complexité qui est ajoutée à l'opération d'une
entreprise ajoute aux coûts, paralyse son développement ou nuit
à son développement. Ça a cet impact-là.
Évidemment, il y a un coût à l'assuré parce que,
nous, enfin, on passe ce coût-là aux assurés,
éventuellement.
M. Holden: Sur un thème plus général, si on
revient aux propositions de politiques de la ministre, il est question de
transactions intéressées. On en parle assez longuement et c'est
très intéressant. Ce que je trouve là-dedans, c'est qu'on
propose de les contrôler plutôt que de les abolir. Est-ce qu'il y a
un danger dans l'approche du document sur les propositions de politiques?
Est-ce qu'il y a des possibilités de situations chroniques de conflit
d'intérêt?
M. Bouchard: Écoutez, à mon sens, pas dans la
proposition, pas dans le document que nous avons vu. Je pense qu'en principe,
lorsqu'on parle de transactions entre parties liées, il nous
apparaît normal... D'ailleurs, jusqu'à un certain point,
même ici au Québec, l'autoré-glementation a fait que les
entreprises se sont donné elles-mêmes des codes d'éthique
pour que, lorsque vous faites des transactions... Par exemple, dans un groupe
corporatif, disons, où vous avez une société de
portefeuille qui détient différentes entités, si nous nous
vendons des actifs l'un à l'autre, on ne peut pas prohiber ça. Je
pense qu'il faut s'assurer, lorsque ça se passe, que le tout se fait
à un prix acceptable, à un niveau, à un prix de
marché acceptable pour ne pas agir au détriment ou trop à
l'avantage de l'une ou l'autre des sociétés. Je pense donc que
ça prend des normes ou un mode de fonctionnement qui nous assure que ces
transactions-là vont se faire à un niveau de marché
acceptable. D'ailleurs, je pense que ce qui est prévu actuellement avec
les comités de déontologie ou comités de transactions
entre parties liées par la composition de ces comités-là,
qui existent déjà, qui sont prévus par la loi et la
réglementation, où vous devez avoir des administrateurs
indépendants qui siègent sur ces comités-là, qui
voient à ce que les transactions se passent bien. Il m'apparaît
normal, au sens de l'éthique même des entreprises, que ces
choses-là se passent de cette façon-là.
Ce que nous voulons éviter, c'est qu'on nous ajoute une trop
grande réglementation. Je pense qu'il faut qu'il y ait une
conscientisation. Je pense qu'il faut que cette préoccupation existe de
par la loi, et je pense que... il y a des choses qui se passent
présentement ici, qui sont déjà très contraignantes
au niveau... Je regarde, par exemple, ce qui touche les compagnies d'assurances
de dommages.
M. Holden: Juste une dernière question. Vous parlez, dans
votre mémoire, de l'État qui fait concurrence et qui, souvent,
prend la place des gens de votre industrie. Pourriez-vous nous donner un
exemple de cette situation?
M. Bouchard: Oui. Il me fera plaisir de le faire, d'ailleurs.
Évidemment, on est ici au Bureau d'assurance du Canada. C'est un
débat qui date quand même de quelques années. Par exemple,
pour plusieurs ou pour certains, vous vous souviendrez du débat sur
l'assurance automobile qui a eu cours dans les années soixante-dix
où, suite à ce qui s'est appelé le rapport Gauvin, il y a
eu une analyse assez exhaustive qui a été faite de tout le
système, de tout le régime d'assurance automobile au
Québec. Le Bureau d'assurance du Canada, à ce moment-là, a
été très actif dans le débat. Nous avions
proposé des solutions.
M. Holden: Le Barreau aussi.
M. Bouchard: Le Barreau, d'ailleurs. Vous avez entièrement
raison. Je vois que vous étiez présent dans ce
débat-là. Mais ce qui s'est produit et ce que nous disons, c'est
qu'un régime peut être changé. Le régime, en
réalité, change l'environnement dans lequel vous devez
opérer. Il aurait été très possible, lorsque ce qui
s'appelle maintenant la Société de l'assurance automobile du
Québec a été créée, d'avoir le même
régime, mais administré par des sociétés
privées et non pas une société d'État. C'est
là-dessus que nous disons, nous, quand il y a intervention, lorsque ce
sont des choses qui peuvent être faites efficacement par l'entreprise
privée, pourquoi avoir l'intervention gouvernementale? C'est un peu
là où... enfin, c'est un peu à ça que nous faisons
référence, à un débat de cette nature-là. On
sait qu'il y a d'autres domaines aussi, probablement, qui mériteraient
d'être réexaminés, où peut-être on a des
critiques à certains niveaux. Par exemple, je pense que ce n'est une
révélation pour personne, quand on regarde ce qui se passe au
niveau de la Commission de la santé et de la sécurité du
travail, on sait qu'il y a des critiques énormes qui sont faites par de
nombreux intervenants, et je pense que personne n'est totalement satisfait de
voir des déficits de l'ordre de ceux qu'on voit présentement. Je
ne dis pas que l'industrie privée pourrait administrer un tel
régime à profit. Au contraire, je pense que le régime qui
produit ces résultats-là est un régime qui, probablement,
pourrait être corrigé. Je pense que, dans un régime
corrigé, il est possible que les sociétés d'assurances
privées aient un rôle à jouer. C'est un peu dans ce
sens-là que nous faisons nos remarques.
M. Holden: Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Chagnon): Merci, M. le
député de Westmount. Nous avons le député de
Jacques-Cartier qui a manifesté son intention de poser des questions.
Comme le prévoit notre règlement, le député de
Jacques-Cartier n'étant pas membre de cette commission, ça me
prendrait un consentement. Est-ce qu'il m'est accordé?
M. Cameron: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Chagnon): Le député de
Jacques-Cartier parle sur le temps imparti à l'Opposition,
évidemment. Allez, M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Cameron: Pourrais-je parler en anglais?
M. Bouchard: Absolument, il n'y a pas de problème.
M. Cameron: Merci. I would like to ask...
M. Bouchard: Si M. le Président le veut. Écoutez,
je n'ai pas à vous donner la permission.
Le Président (M. Chagnon): Oui. M. le
député de Jacques-Cartier, je ne vous entends pas.
M. Cameron: I would like to ask just a few very brief questions
for information. First of all, is your brief one that covers the concerns of
the reinsurance business as well, or is this really speaking only for property
and casualty? Is there a separate set of concerns from the reinsurers? Maybe I
should just run through the questions. You can think that over for a
minute.
Secondly, I would be interested in knowing exactly what relationship
your companies have with the actuaries. Does each property and casualty firm
deal with the Mercer Towers Perrin, or whatever, much like it would with an
accountant, where you undertake a fixed business relationship, but then he
provides you with a certificate or a bill of health, so to speak, or is there
some general standard practice that applies for actuarial risk and if so, is
this something the Inspector General of Financial Institutions knows about? In
other words, do the actuaries base their rules on what the Inspector General
wants or do they base it on just a set of understood rules in the business?
And finally, it is quite clear from your whole memorandum, as others
have observed, that you have lots of things to complain about in Canada and in
Québec, in terms of competing jurisdictions and costs and so on. Do you
actually have much hope that very many of these things can be changed, that
is... I can see what kind of problems you are talking about. But if you talk
about conflicting jurisdictions, for example, for financial institutions, even
for all the talk today about... you know, deregulation and so on, and some of
this is something like about a century of Canadian history after all. I mean,
you know, the multiple ways of chartering things and so on.
Do you conceive of a real possibility of effective action, either by the
Government of Québec or by the federal authorities, that could improve
the situation, or are you asking rather hopefully but without much conviction
for fairly modest changes? And finally, does the tax cost represent your main
problem? Does the tax cost represent your main problem? That is it.
M. Bouchard: Actually, the Reinsurance Research Council is a
member of the... There is a body which is called the Reinsurance Research
Council of Canada, it is a member of IBC. Now, when we talk
about Québec chartered companies, there are not any reinsurers
with a Québec charter. So, I am not saying that we are not taking the
concern of the reinsurers, I am just saying that we have not addressed that
aspect specifically. Now, I am not sure that it would have changed much of our
report if we had, but we have not, to answer to your question.
With respect to actuaries. Actually, actuaries... Our reserves have to
be certified by certified actuaries and those actuaries have to report
according to rules and regulations which are given by the Inspector General.
They have to be certified actuaries. Now, they have their own bodies which also
govern how they have to do their things, and they have to do their own
examinations.
So they do not do it on our behalf, as an insurance company. They have
to abide by rules which are specified by the Inspector General, and they report
to the Inspector General, not to us. Even though they would be staff actuaries,
even though the Mercer or Tillinghast or whatever, even though they would be on
our payroll, for this type of report, they report to the Inspector General,
according to his rules.
With respect to conflict of jurisdictions. All we are saying is that
conflict of jurisdictions is costly. That is what we are saying. We hope and we
wish all the best to the Minister who wants to solve it, and we believe that
what she is proposing in her paper would set a good pace of understanding. I
think that we would support her and try to do whatever we can to help to
resolve the problem.
But, as business people, I think we have to manage businesses and maybe
some of us operate only on the Québec territory, but some others also
operate outside the Province of Québec, and this is where the problems
arise. So we hope that it is going to be resolved. If you were asking me: On a
scale of 1 to 10, is it 5 or 8 or 3? I do not know. I think that you have heard
the Minister earlier, and we certainly are going to be very supportive to
whatever she does to resolve the problem. (20 h 50)
As to the tax cost. It is not the major burden but it is a burden. And
what is worse... For example, for companies located here or having their head
office here in the Province of Québec, our tax burden could... you know,
the payroll tax affects us. The more employees you have the more taxes you pay.
So if you have your businesses outside, then... If you have a head office in
Ontario, for example, and you have more of your work done outside the Province
of Québec, you are in a better position.
M. Cameron: O.K. Merci.
Le Président (M. Chagnon): ...Mr. Member. Maintenant, Mme
la ministre.
Mme Robic: Oui, M. le Président. C'est assez
intéressant de voir comment le député de Westmount semble,
à mesure que l'on avance dans nos discussions, être tout à
fait d'accord avec mon énoncé de politiques. Il ne veut pas
l'admettre, mais c'est évident, dans certaines des choses qu'il...
M. Holden: Je comprends que ça se voit dans mon
visage!
Mme Robic: Oui, ça va... Plus que ça, vos paroles,
c'est assez intéressant, d'ailleurs. Mais je voudrais également
lui faire remarquer, M. le Président, que c'est vrai que vivre dans une
fédération, ça amène, des fois, des discussions qui
sont longues. Des fois, ce n'est pas évident que ces
discussions-là vont aboutir. Mais, avec les années, on s'est
rendu compte que, oui, il y a des choses qui se passent. D'ailleurs, c'est
assez intéressant de voir que, dans cette fédération, le
Québec a pu développer le système financier le plus
important au Canada après le gouvernement fédéral. Alors,
c'est intéressant de voir qu'on peut faire des choses, qu'on peut
créer des institutions financières à qui on donne des
rôles très spécifiques, et qui se sont
développées d'une façon différente,
peut-être, que d'autres. C'est magnifique de pouvoir considérer
ça.
Pour revenir à votre mémoire, vous nous dites que...
Excusez-moi, à la page 12, vous semblez dire qu'il y a peut-être
trop de rapports demandés et que, finalement, c'est bien coûteux
tous ces rapports-là, et peut-être pas aussi nécessaire
pour suivre l'évolution des compagnies d'assurances et nous assurer que
ces compagnies-là sont en bonne santé. Alors, vous pourriez nous
citer certaines choses où vous voyez qu'il y a peut-être, sans
parler d'abus, des exagérations, en essayant toujours de vous mettre
dans la chaise de l'Inspecteur général qui, lui, a un rôle
que je qualifierais, à des moments, d'assez ingrat. Alors, si vous
étiez l'Inspecteur général, là, qu'est-ce que vous
voudriez avoir comme...
Le Président (M. Chagnon): Si je comprends bien, Mme la
ministre, ce n'est pas là le premier choix de M. Bouchard!
Mme Robic: Ha, ha, ha!
M. Bouchard: M. le Président, je me sens très
indigne de prendre la chaise de l'Inspecteur général, mais il y a
quand même... Je pense que nous sommes tombés d'accord sur le fait
qu'il doit avoir les pouvoirs nécessaires pour surveiller la
solvabilité des entreprises. J'ai fait référence, tout
à l'heure, je pense, lors de la présentation ou enfin... Je
prends, par exemple, enfin, un rapport qui est très... Enfin,
peut-être qu'on ne devrait pas critiquer parce que, de façon
générale, il est flatteur pour les sociétés
d'assurances qui opèrent au Québec, mais c'est le rapport sur la
tarification en assurance automobile que nous recevons à chaque
année. Enfin, c'est un pouvoir, c'est même un devoir, je pense,
pour l'Inspecteur général de le faire parce que la loi demande
qu'il le fasse la Loi sur l'assurance automo-
bile du Québec demande qu'il le fasse. Mais, de telle sorte qu'il
puisse se prononcer sur l'ensemble de la tarification des
sociétés d'assurances au Québec, il faut que nous lui
fassions des rapports sur notre tarification. Chaque manuel de tarifs doit lui
être soumis. À l'occasion, nous devons soumettre, par exemple, des
rapports additionnels sur certaines cellules de tarification, parce qu'à
un moment donné il peut arriver... On est dans un marché
extrêmement concurrentiel, je pense que vous le savez. Bon, d'autres
intervenants ont peut-être eu l'occasion de vous le dire. Il arrive que,
même le manuel que nous avons tablé, à un moment
donné, qu'on a envoyé... Ce n'est pas une permission qu'on
demande lorsqu'on envoie notre manuel à l'Inspecteur
général, c'est pour lui dire: Voici, ce sont les tarifs que nous
voulons utiliser. Il arrive, à un moment donné, qu'il puisse y
avoir des déviations qui sont faites par... pour différentes
raisons.
Alors, pour être en mesure... pour que l'Inspecteur
général soit en mesure de faire son analyse de tarification, il
faut que nous lui soumettions des rapports additionnels. Il faut qu'il nous en
demande, etc. C'est un des exemples. Enfin, je n'en ai pas
préparé une série, mais il y a des choses comme ça.
Je pense qu'il y aurait lieu... Vous savez, il y a des choses qui sont faites,
probablement, qui originent peut-être depuis un certain nombre
d'années. Il y aurait lieu, à notre sens, un peu comme nous le
faisons dans l'entreprise privée, de temps à autre, de revoir ces
choses-là. Est-ce que c'est encore tellement utile ou nécessaire,
à notre époque, à une époque où tout le
monde tâche d'être le plus efficace possible, sans nuire au
rôle premier... On dit au rôle premier, ce qui est quasiment le
rôle essentiel de l'Inspecteur général, qui est de voir
à la solvabilité des entreprises... Est-ce que c'est
nécessaire d'avoir l'ensemble de ces choses-là sous sa
juridiction ou d'être obligé de contrôler ça pour
faire des rapports qui peuvent être très intéressants sur
le plan intellectuel, mais qui, sur le plan pratique... Je ne pense pas que le
fait de nous dire qu'on a une tarification change grand chose sur le plan de la
concurrence ou de la solvabilité des entreprises. C'est agréable
à entendre, mais...
Mme Robic: Cependant, il y a un groupe que l'on a entendu cet
après-midi qui, lui, voyait certains avantages à faire
connaître la tarification à l'Inspecteur, parce que lui voyait
qu'à des moments donnés il y a des abus à ce
niveau-là, où peut-être on ne charge pas le coût
réel de la police. Là, il y a des pertes, donc un affaiblissement
pour l'entreprise. Il nous disait que c'était peut-être un des
éléments qui devraient être suivis de plus près par
l'Inspecteur général, pour la protection de l'entreprise et,
également, bien sûr, du consommateur.
M. Bouchard: Je ne partage pas du tout cet avis. Je pense que le
contrôle sur la solvabilité des entreprises est une chose. La
façon dont on opère, par exemple... Si, par exemple, dans un
territoire, qu'on appellera territoire 4, mon collègue et concurrent, M.
Circé, veut charger une certaine prime et que, moi, je veux charger une
telle autre prime, est-ce que ça fait que sa société ou la
mienne sont plus ou moins rentables? Je ne pense pas que ce soit ça qui
soit le problème. Je pense que c'est un problème... Ce qu'on veut
regarder, c'est le problème de s'assurer que les entreprises sont
solvables.
Je pense que la concurrence, elle-même, voit à ce que les
primes chargées soient au meilleur coût pour le consommateur. Je
pense que l'environnement concurrentiel dans lequel nous vivons est une des
meilleures protections comme quoi il n'y a pas abus du public. Quand vous voyez
la diversité des assureurs, la diversité des mécanismes de
distribution, la concurrence qui existe sur le marché, je ne pense pas
qu'il puisse y avoir risque d'abus du public.
Par ailleurs, au niveau de la solvabilité, je ne pense pas que ce
soit au niveau de la tarification qu'on la juge. Si nos tarifs sont à un
niveau un peu plus bas et qu'on fait des pertes d'exploitation, il reste que
les sociétés, même si elles ne sont pas des banques et
qu'on ne gère pas les actifs comme des banques ou comme des
sociétés d'assurances de personnes, les profits des assureurs
proviennent, en grande partie, de leurs revenus de placements.
Donc, il y a un ensemble de moyens qui peuvent justifier ou qui peuvent
permettre à l'Inspecteur général de juger de la
solvabilité des entreprises. Le niveau de réserves qu'elles
gardent: s'assurer que les primes non acquises ou que l'ensemble des
réserves que nous avons pour primes non acquises ou sinistres sont
correctes. S'assurer que nos placements sont bien faits: qu'il y ait
adéquation, par exemple, entre les actifs et les passifs. S'assurer que
nous avons les bonnes liquidités pour que, réellement, quand
surviennent des sinistres, nous ayons les actifs pour y pourvoir. Je pense que
c'est cet ensemble de mesures là qui font que l'Inspecteur
général est en mesure de juger de notre solvabilité.
Le Président (M. Chagnon): ...Mme la ministre. Au
député de Westmount, s'il a encore une question, et lui permettre
en même temps de remercier nos invités s'il en a l'intention,
comme je le présume.
M. Holden: J'avais juste une petite question, s'il y a... Combien
de temps?
Le Président (M. Chagnon): Allez-y. M. Holden: Dans
les propositions...
Le Président (M. Chagnon): Une petite question et une
petite réponse.
M. Holden: Oui, oui. Dans les propositions de Mme la ministre, on
parle de normes internationales de capital. Alors, avez-vous des commentaires?
Je vais juste vous mentionner quelques points que j'ai soulevés.
L'industrie québécoise serait-elle défavorisée par
ce principe? Si les normes internationales sont insuffisantes, doit-on y
suppléer? Qui devrait établir ces normes?
M. Bouchard: À notre sens, lorsqu'on fait
référence à des normes internationales, c'est que nous
sommes quand même une industrie qui est à portée
internationale. Donc, on se dit que nous n'avons pas... Je pense qu'on a
à s'assurer que nos entreprises sont solva-bles, oui, mais on n'a pas,
non plus, à aller à l'extrême et à les rendre
tellement solvables qu'on va rendre l'atmosphère irrespirable en
étant trop purs.
Il ne m'apparaît pas que les sociétés
québécoises seraient désavantagées si les normes
internationales étaient appliquées. L'exemple que je donnais tout
à l'heure, par exemple, au niveau de la reconnaissance des actifs des
sociétés ou de leurs placements, des filiales. Je pense que c'est
une chose qui est reconnue sur une base internationale. C'est une chose que
nous avons déjà, mais qui est très contestée au
niveau fédéral et au niveau d'autres juridictions provinciales.
C'est un peu à ça que nous faisons référence. Si on
veut totalement enlever la reconnaissance des filiales dans les placements,
à notre sens, on serait défavorisés. Mais les normes
internationales, à notre connaissance, ne font pas ça. Elles
acceptent le principe de l'«equity accounting», mais elles ne
reconnaissent pas nécessairement le «goodwill».
Enfin, des achalandages basés sur des profits futurs, je pense,
ne sont pas accordés, mais elles acceptent quand même
1'«equity accounting». À ce moment-là, nous serions,
quand même, je pense... Les normes québécoises
m'apparaissent être des normes satisfaisantes, celles que nous avons
présentement. (21 heures)
Le Président (M. Chagnon): Mot de la fin, peut-être,
monsieur...
M. Holden: Merci beaucoup de nous avoir fait cette
présentation magistrale.
Le Président (M. Chagnon): Mme la ministre.
Mme Robic: Merci infiniment. C'est toujours un plaisir de vous
recevoir.
Le Président (M. Chagnon): Alors, MM. Bouchard,
Circé, Tardif et Medza, je me permettrai aussi de vous remercier, au nom
de tous les membres de cette commission. J'ajournerai nos travaux pour deux
minutes, afin de permettre à l'Association canadienne des compagnies
d'assurances de personnes inc. de prendre place à l'avant.
(Suspension de la séance à 21 h 1)
(Reprise à 21 h 3)
Association canadienne des compagnies d'assurances de
personnes (ACCAP)
Le Président (M. Chagnon): Nous avons l'Association
canadienne des compagnies d'assurances de personnes inc. Oui, nous avons
l'Association canadienne.
Est-ce que vous auriez l'obligeance de vous présenter, s'il vous
plaît.
M. Millette (Yves): Bonsoir. Je suis Yves Millet-te,
vice-président principal, Affaires québécoises, de
l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes.
M'accompagnent ce soir, à ma gauche, M. Claude Ferron, président
de Canassurance, compagnie d'assurances sur la vie...
Le Président (M. Chagnon): Votre gauche?
M. Millette: À ma gauche à moi, oui. Et M.
Gaétan Gagné, président et chef de la direction de
L'Entraide assurance-vie, société de secours mutuels. Ce sont
deux compagnies membres de l'ACCAP. Devait être présent, M.
Jacques Labrecque, président et directeur général de la
Mutuelle des fonctionnaires, mais qui est probablement retenu par une
réunion qui s'étire, réunion de la SIAP, en passant.
Le Président (M. Chagnon): Je vous rappelle les
règles du jeu de la commission, c'est-à-dire que vous avez 20
minutes pour présenter votre mémoire. Le temps,
évidemment, qui restera aux fins de la commission pourra permettre aux
membres de cette dernière de vous questionner sur votre
mémoire.
M. Millette: Parfait! M. le président de la commission,
Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, l'Association
canadienne des compagnies d'assurances de personnes, l'ACCAP, regroupe quelque
102 compagnies d'assurance-vie faisant affaire au Canada. De ce nombre, quelque
20 membres à charte du Québec, ou y ayant leur siège
social, forment le Comité permanent des affaires
québécoises. Ils forment une forte présence
régionale et sont le fer de lance du dynamisme économique et
social de toute l'industrie.
Les dernières années ont mis à rude épreuve
le secteur financier canadien, notamment celui des assurances de personnes.
L'ACCAP profite donc de la présente consultation pour amorcer une
réflexion importante pour son avenir.
Dès le départ, nous réitérons que
l'industrie des assurances de personnes au Québec n'est pas une
industrie malade, comme voudrait le laisser croire une certaine presse.
L'industrie est généralement en bonne santé et prête
à relever les défis qui se posent à elle.
L'industrie des assurances de personnes a pris ses
responsabilités face aux difficultés d'un de ses membres, Les
Coopérants, et a fait face à la tempête
générée par cette première faillite des temps
modernes de l'industrie. La Société canadienne d'indemnisation
pour les assurances de personnes protège les consommateurs et elle
entend continuer de le faire. La SIAP soumettra un mémoire devant cette
commission. Toutefois, nous désirons vous rappeler que l'industrie
partage les vues qui y sont exprimées, et qu'elle est ouverte aux
discus-
sions avec les autorités gouvernementales et, au premier chef,
avec le gouvernement du Québec.
Une matière urgente doit retenir notre attention maintenant, et
c'est celle de la capitalisation des compagnies d'assurances de personnes. Le
législateur a changé d'orientation en matière de double
comptage de capital et d'achalandage depuis l'amorce du décloisonnement
des institutions financières et le marché s'est
transformé. Si le gouvernement du Québec tient à une
industrie régionale des assurances de personnes, il doit se pencher en
priorité sur sa capitalisation et son financement, sinon elle sera
absorbée par des entreprises de l'extérieur ou elle
disparaîtra.
Dans les propositions de politiques pour le secteur financier du
Québec, le gouvernement propose de contribuer de trois façons
à l'atteinte des objectifs qu'il s'est fixés. Il propose que ce
soit l'industrie québécoise de l'assurance de personnes qui doive
faire les choix qui s'imposent. Les politiques gouvernementales, me dit-on,
respecteront ces choix. Ces choix sont la libéralisation de
l'accès au capital d'origine étrangère, mais en
s'assu-rant que le contrôle du secteur financier demeure au
Québec. L'ACCAP a toujours été d'accord avec la position
du gouvernement du Québec, qui a été inscrite dans la Loi
sur les assurances, en 1990, et a toujours favorisé la liberté
d'investissement. Au même titre que, dans l'Accord de
libre-échange, on trouve une liberté d'investissement entre le
Canada et les États-Unis, l'ACCAP a toujours cru que cette
liberté devait aussi s'étendre à d'autres pays à
travers le monde.
La consolidation des acquis collectifs de manière à
accroître les retombées potentielles d'initiatives en cours et de
programmes existants. Encore là, l'ACCAP trouve intéressant de
constater que le gouvernement du Québec veut étendre, dans la
mesure du possible, les programmes d'aide à l'entreprise aux
institutions financières.
Finalement, la mise sur pied d'un véhicule de capitalisation des
institutions financières pour soutenir leur croissance. Le
véhicule de capitalisation proposé constituerait un portefeuille
diversifié, et ce nouveau véhicule pourrait recevoir, au besoin,
un appui concret de la part du gouvernement, dont la forme et l'ampleur restent
à définir.
En fait, ces propositions de politiques résument 10 années
de mémoires, de recommandations faites par des groupes de travail ou
d'amendements législatifs, mais l'industrie québécoise de
l'assurance de personnes constate que, tout au long de cette période, il
n'y a eu aucun avantage fiscal dessiné pour l'industrie de l'assurance
de personnes, de façon particulière.
Le gouvernement, nous croyons, aujourd'hui, doit apporter un appui
concret à ce véhicule de capitalisation qu'il propose, sous la
forme d'une garantie minimum de rendement ou sous la forme d'une garantie quant
à la sécurité de l'investissement. Un fonds
d'indemnisation qui, soit dit en passant, n'est pas la SIAP, la
Société canadienne d'indemnisation pour les assurances de
personnes, mais un fonds qui pourrait s'apparenter, par exemple, à ce
qui existe en matière de valeurs mobilières ou un autre fonds du
même genre.
À défaut, nous croyons que le gouvernement devrait
permettre à l'industrie québécoise de l'assurance de
personnes d'obtenir des capitaux de ses assurés. On pourrait facilement
imaginer un produit de rentes qui serait admissible pour les REER, où
une proportion de 10 % à 15 % de l'épargne pourrait être
canalisée dans les capitaux de l'assureur.
L'utilisation du réseau de distribution des compagnies
d'assurances de personnes pourrait entraîner un problème de
juridiction avec la Commission des valeurs mobilières du Québec,
mais nous croyons que l'industrie et le gouvernement du Québec
pourraient rechercher des accommodements, comme cela a été
possible dans le cas du Fonds de solidarité, par exemple. (21 h 10)
Par ailleurs, l'industrie québécoise de l'assurance de
personnes estime que le gouvernement doit mettre sur pied le véhicule de
capitalisation qu'il propose. Évidemment, notre accord ne peut valoir
que pour l'industrie de l'assurance de personnes, que nous
représentons.
Cependant, nous ne croyons pas que cette proposition gouvernementale
devrait être jumelée à d'autres éléments de
la politique gouvernementale comme l'alliance avec des organisations plus
importantes ou dotées d'une expertise de pointe, la
pénétration des marchés étrangers, le maintien d'un
secteur financier contrôlé par des intérêts
québécois. Ces éléments de politique sont
très louables, mais nous croyons que si une compagnie peut
démontrer à l'investisseur qu'elle est capable de s'adapter aux
exigences des marchés de capitaux en ce qui concerne la
compétitivité, la rentabilité et la bonne gestion, elle ne
devrait pas être empêchée de faire une proposition de
financement au fonds de capitalisation.
Autrement dit, les politiques gouvernementales, qui sont très
louables en soi, de consolidation d'industries et autres ne devraient pas
s'appliquer a priori mais a fortiori, après que le véhicule de
capitalisation ait conditionné son investissement dans une compagnie
d'assurances à la réalisation de certains objectifs qui ne se
seraient pas réalisés. La rencontre de ces objectifs, ou le
défaut de rencontre de ces objectifs pourrait comporter la
transformation du titre de prêt en titre de contrôle comportant des
droits de vote plus ou moins nombreux selon le manquement de la compagnie.
C'est le véhicule de capitalisation qui devrait déterminer les
objectifs à atteindre, dans chaque cas, en accord avec la compagnie
elle-même.
Nous proposons également que la mise en place et la gestion du
fonds soient confiées à la Caisse de dépôt et
placement du Québec. Il y a déjà presque 10 ans que
l'industrie québécoise de l'assurance de personnes tente d'amener
le gouvernement à mettre en place les outils de financement qui lui sont
nécessaires. Nous sommes prêts à entreprendre des
discussions pour la mise en place de véhicules de financement pour les
assureurs de personnes opérant au Québec. Nous croyons que le
gouvernement doit agir maintenant dans ce domaine.
Il est aussi urgent de finaliser des règles harmonisées
sur le capital et surplus minimum requis pour opé-
rer une compagnie d'assurances de personnes. Il en va autant de
l'efficacité des compagnies qui veulent bien connaître les normes
qui vont s'appliquer à elles, que de la protection des consommateurs. Le
changement d'orientation de la politique québécoise en
matière de double comptage de capital et d'achalandage doit être
stabilisé le plus tôt possible pour permettre aux entreprises de
s'ajuster par une capitalisation adéquate.
Dans sa livraison de mars 1993, le bulletin financier de Standard &
Poor's évaluait que l'industrie des assurances de personnes au Canada a
suffisamment de ressources pour faire face à la crise actuelle, mais,
à moyen terme, la perspective est moins favorable que par le
passé. La raison principale en serait que l'industrie a
déplacé son centre d'activités vers les produits
d'accumulation de l'épargne où les marges
bénéficiaires sont faibles. De plus, selon Standard & Poor's,
bien peu de compagnies canadiennes pourront prétendre à une
stratégie internationale de développement.
En conséquence, la stratégie gouvernementale devrait
être de favoriser le maintien d'une industrie régionale forte, en
promulguant une politique favorisant un renforcement de la base en capital de
ces compagnies, et en élaborant une stratégie de concertation
avec l'industrie pour développer une gamme de produits qui pourraient
s'allier à la question des soins de santé, par exemple. Une telle
stratégie de concertation permettrait d'améliorer la
«profitabilité» des compagnies tout en favorisant une
stabilisation du coût des services de santé dispensés par
les régimes publics.
Mais «profitabilité» veut dire aussi réduire
les coûts indirects et la bureaucratie. À notre avis, les pouvoirs
de l'Inspecteur général des institutions financières ne
devraient pas être étendus avant que la Loi sur les assurances ait
fait l'objet d'une refonte complète. Cette législation doit
être repensée pour tenir compte du coût en argent et en
perte d'énergie qu'elle impose aux compagnies. Le gouvernement pourrait
apporter cette contribution pour améliorer la
compétitivité des assureurs opérant au Québec.
Par ailleurs, le fardeau de la fiscalité indirecte au
Québec est particulièrement lourd à supporter pour les
compagnies qui ont la majeure partie de leurs affaires au Québec. Les
taxes indirectes payées au Québec représentent 40 % du
total payé au Canada. Ceci constitue un handicap à la
compétitivité de ses assureurs. En passant, vous allez remarquer,
au tableau de la page 14, que les taxes surprises dont on parle sont
plutôt des taxes sur primes.
L'harmonisation des règles avec les autres juridictions
canadiennes doit être accélérée. L'industrie
constate que, par le passé, il existait un forum important
d'échanges qui a disparu: la réunion des surintendants des
assurances. Le forum des ministres des Institutions financières pourrait
être adapté pour accommoder les possibilités
d'échanges, car il constitue un environnement propice à rajuster
le tir, de telle sorte que l'objectif visé de l'harmonisation soit
atteint plus rapidement et au meilleur coût possible.
Par ailleurs, la cohérence intersectorielle ne de- vrait pas se
limiter aux organismes de surveillance et de contrôle. En effet,
l'industrie des assurances de personnes est complémentaire aux
activités de régies comme la Régie de l'assurance-maladie
du Québec, la Régie des rentes ou la CSST. Il serait important de
créer des comités intersectoriels qui seraient chargés de
proposer des moyens d'accélérer la synergie entre ces organismes
et l'entreprise privée, maximiser l'utilisation des impôts, et
favoriser un véritable partenariat dans le meilleur intérêt
des consommateurs.
Le gouvernement doit veiller à neutraliser l'effet de sa taxation
pour toutes les entreprises en situation de concurrence,
particulièrement en matière d'indemnisation et en matière
de capitalisation et d'avantages fiscaux. En matière d'indemnisation,
l'industrie des assurances de personnes a mis sur pied la SIAP, qui a offert
aux assurés des Coopérants une protection complète, dont
le coût est estimé à plus de 140 000 000 $. La SIAP n'est
pas, comme la Société d'assurance-dépôts du Canada
ou la Régie de l'assurance-dépôts du Québec, une
société d'État financée par des emprunts garantis
par le gouvernement. Le coût de cette indemnisation doit être
assumé par l'industrie.
Les gouvernements doivent participer au financement et à
l'absorption des coûts découlant d'une liquidation qui
excéderait les ressources de la SIAP. C'est une question de «level
playing field» avec les autres institutions financières au
Canada.
L'une des principales conséquences de la faillite des
Coopérants aura été de faire apparaître que, faute
d'autres possibilités, la SIAP pourrait bien être un instrument de
consolidation de l'industrie, un peu comme ce qu'on a vu avec la
Société d'assurance-dépôts du Canada et les grands
dossiers qu'elle a eu à traiter au cours de la dernière
année. La SIAP n'a pas été constituée à
cette fin.
Le temps est venu de considérer la situation qui est faite
à l'industrie des assurances des personnes dans ce domaine. Les
institutions de dépôt ont joui, au cours des 10 dernières
années ou plus, d'avantages fiscaux directs et de subventions
gouvernementales à la Société
d'assurance-dépôts ou à la Régie de
l'assurance-dépôts du Québec. À moins d'un parti
pris des gouvernements, l'industrie des assurances de personnes devrait
profiter d'un traitement comparable pour lui permettre de se faire
connaître sur les marchés financiers et de se capitaliser
adéquatement.
Nous insistons, encore une fois, sur l'urgence d'agir. Tant que ce volet
de la réforme de 1984 n'aura pas été
complété, l'industrie des assurances de personnes au
Québec sera désavantagée par rapport aux autres
institutions financières. Merci.
Le Président (M. Chagnon): Je vous remercie beaucoup, M.
Millette. J'inviterais maintenant Mme la ministre des Institutions
financières à vous répondre ou à vous
questionner.
Mme Robic: C'est un mémoire, M. le Président, qui
demande beaucoup de réflexion. C'est un mémoire
qui fait, je pense, une très bonne analyse de la situation. Je
suis heureuse de voir que vous rétablissez les faits également en
nous disant, d'entrée de jeu, que l'industrie de l'assurance de
personnes au Canada est en bonne santé et que les analyses qui en sont
faites sont positives.
Cependant, on ne peut pas cacher le fait que, dans votre industrie comme
dans d'autres, on a vécu des épisodes assez troublants. Vous
mentionnez les Coopérants, je vais vous mentionner La Souveraine. Il ne
faut pas oublier non plus que c'est arrivé ailleurs, pas seulement chez
nous. (21 h 20)
Je voudrais peut-être que vous reveniez, qu'on parle un peu plus
de ce fameux véhicule avec lequel vous êtes d'accord, bien
sûr, mais il y a certaines remarques que vous avez faites. Vous sembliez
croire qu'on attachait ce véhicule à d'autres
considérations, et là, j'avais de la difficulté à
vous suivre. Je ne sais pas si j'ai simplement mal compris, là. Pour
nous, le véhicule, c'est une chose. Comment il doit s'articuler,
ça, je suis intéressée d'entendre vos remarques
là-dessus. Quant à la possibilité d'investisseurs
étrangers qui viendraient investir dans nos entreprises, c'est une autre
chose. Ce n'est pas lié là. Est-ce que j'ai mal compris? Vous
sembliez... peut-être qu'on liait l'un et l'autre... ou j'ai tout
simplement mal compris votre intervention?
M. Millette: C'est probablement notre compréhension, fort
probablement et nous la souhaitons erronée de certains
passages du document, de l'énoncé de politiques qui a
peut-être fait peur à un certain nombre de compagnies plus
petites.
Mme Robic: Est-ce qu'on peut peut-être, là,
très ouvertement en parler, parce que je pense qu'il y a une
incompréhension, un malentendu ici. On va tenter de le dissiper.
M. Millette: Nous serions fort heureux de comprendre qu'il s'agit
d'un malentendu. Je peux peut-être laisser un ou l'autre des autres
présidents élaborer là-dessus.
Le Président (M. Chagnon): M. Ferron, M. Gagné?
Oui, c'est un témoignage éloquent!
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Robic: Ça allait bien, M. Millette.
M. Millette: C'est parce que s'il s'agit d'un malentendu,
effectivement, on va se dépêcher de le corriger. Je sais
qu'à la dernière réunion du comité des affaires
publiques de l'ACCAP, du Comité permanent des affaires
québécoises de l'ACCAP, il s'agissait d'une préoccupation
majeure des membres, qui se disaient que la consolidation de l'industrie peut
être une bonne chose, mais qu'elle ne devrait pas se faire d'une
façon forcée, et qu'elle devrait être laissée aux
compagnies qui la choisissent. La même chose pour les capitaux
étrangers ou les investissements étrangers.
Les compagnies qui veulent choisir cette route-là, comme je l'ai
dit tantôt, doivent être les bienvenues de le faire.
Mme Robic: Alors, c'est réellement un malentendu. Jamais
il n'est question dans ce document de forcer quoi que ce soit. Je pense que
tout ce qu'on tente de faire avec le document, c'est de réellement
réorienter l'industrie pour dire que nous passons à la
deuxième phase, à une deuxième phase, une phase
d'efficacité, de stabilité et de croissance. Au niveau de la
croissance, on développe certains... on pense que vous avez... La
croissance ne se fera pas nécessairement par acquisitions, comme elle
s'est faite dans les années quatre-vingt, mais plus par des alliances.
Ça peut se faire à travers des alliances stratégiques et
par, également, une meilleure capitalisation.
C'est là où on suggère la création d'un
véhicule quelconque pour aider nos institutions financières
à investir les marchés de capitaux. Également, une autre
façon de capitaliser nos institutions financières, c'est à
travers des investissements qui viendraient de l'étranger et qui
pourraient non seulement fournir à nos compagnies d'assurances ou
d'autres, à nos institutions financières, des capitaux, mais
également souvent une expertise et la possibilité de créer
des liens importants dans un marché qui s'internationalise. Mais un
n'est pas rattaché à l'autre. C'est des moyens là,
ça, hein?
M. Millette: Souhaitons qu'il en soit ainsi, et nous sommes
heureux de constater qu'il en est ainsi, parce que, effectivement, les
compagnies... La réforme de 1984 a mis beaucoup d'efforts la Loi
sur les assurances et sur le décloisonnement sur la
capitalisation des compagnies d'assurances. Ces véhicules-là ont
donné des résultats plus ou moins concluants et on s'est rendu
compte qu'un des grands problèmes était justement de passer d'une
forme mutuelle à une forme de compagnie pouvant se financer sur les
marchés de capitaux normaux.
Dans ce sens-là, je pense que l'industrie trouvait
intéressante la question du véhicule de capitalisation, mais elle
ne voulait pas que cela devienne prétexte à forcer des fusions.
Les compagnies comprennent très bien qu'elles doivent améliorer
leur rentabilité, et que, pour continuer à se développer,
elles ont besoin de capitaux. Mais ce processus doit, comme je le disais dans
mon exposé, se faire a posteriori et non pas a fortiori.
Mme Robic: Cependant, personne ne sera forcé,
là.
M. Millette: C'est ça.
Mme Robic: Cependant, elles auront elles-mêmes à
faire l'analyse de leurs compagnies, à voir quels seront les meilleurs
moyens pour elles de se capitaliser.
Peut-être que ça ne sera même pas... Peut-être
qu'il y en aura qui choisiront de ne pas aller vers un véhicule de
capitalisation, mais plutôt vers l'extérieur pour aller chercher
le capital requis. Mais est-ce que les compagnies, devant un genre de
véhicule comme celui-là... D'ailleurs, vous le dites
vous-même, vous le suggérez vous-même, qu'il doit être
non gouvernemental. Donc, ces compagnies-là devront faire face aux
forces du marché. C'est les forces du marché qui vont
s'opérer, là.
M. Millette: Effectivement. Il est évident que des
compagnies qui ont toujours été sous forme mutuelle, qui devront
s'adapter, ou qui doivent s'adapter depuis déjà une dizaine
d'années, à la présence de capitaux et des exigences que
cela comporte, vont devoir s'y conformer et appliquer les règles
je vais appeler ça les règles du capitalisme, là
des marchés de capitaux. Ça, tout le monde est d'accord et je
pense que tout le monde est conscient que s'ils faillissent à la
tâche, il est normal que l'investisseur exige des comptes. Mais on ne
voudrait pas qu'il les exige a priori.
Le Président (M. Chagnon): Je vous remercie, Mme la
ministre.
Mme Robic: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Chagnon): M. le député de
Westmount.
M. Holden: Oui, M. le Président. C'est un plaisir
d'échanger avec vous autres comme avec les autres intervenants. Est-ce
que je me trompe ou est-ce que la SIAP a sauvé les meubles dans la
malheureuse aventure des Coopérants?
M. Millette: Non. La SIAP a indemnisé les
assurés.
M. Holden: Oui, oui, je sais, mais si... Ce n'était pas
exactement la raison d'être de la SIAP, au fond, de venir sauver une
faillite de cette envergure. Est-ce que je me trompe?
M. Millette: Bien, comme je l'ai mentionné tantôt,
la SIAP n'est pas là pour... n'a jamais été pensée,
jusqu'à aujourd'hui je parle toujours jusqu'à aujourd'hui
pour être un instrument de consolidation de l'industrie, mais bien
comme un instrument d'indemnisation d'éventuelles victimes. La SIAP a
joué ce rôle d'indemnisation des victimes, à venir
jusqu'à maintenant, avec succès. On souhaite, on prend tous les
moyens pour qu'il continue d'en être ainsi. Mais nous devrons dans...
D'ailleurs, il y a un groupe de travail qui a été formé
à ce sujet-là, à l'intérieur de l'industrie. La
SIAP devra s'adapter à l'environnement actuel. Elle ne souhaite pas
devenir un organisme de consolidation de l'industrie, mais à
défaut d'autres mécanismes, elle pourrait être
forcée de le faire, ce qui poserait des pro- blèmes majeurs
à l'industrie qui n'est pas subventionnée de quelque façon
que ce soit pour le faire.
M. Holden: Dites-moi si je résume bien les lignes
directrices de votre mémoire. D'abord, si le Québec tient
à une industrie régionale forte, il doit s'occuper de la
capitalisation et du financement de ses entreprises d'assurance de personnes.
Est-ce que ça résume un peu votre...
M. Millette: C'est essentiellement notre argumentation. C'est le
seul volet, pourrions-nous dire, de la loi, de toutes les législations
en matière d'assurance au Québec depuis les 20
dernières années, je dirais qui n'a pas connu un
succès complet, parce qu'il exigeait un changement assez important dans
le fonctionnement ou dans la philosophie des compagnies, qui sont
passées de compagnies mutuelles sans attache avec les marchés de
capitaux à des compagnies qui ont besoin de trouver, sur les
marchés, pour toutes sortes de raisons dont j'ai parlé dans le
mémoire, les capitaux nécessaires pour continuer à se
développer. Cette capitalisation-là est devenue quelque chose de
très important.
M. Holden: Est-ce que vous croyez toujours au concept de
mutualisation, du mutuel? Est-ce que ça doit être repensé?
(21 h 30)
M. Millette: Je pense qu'une compagnie qui est mutuelle et qui
veut le rester peut en faire le choix. Elle est absolument libre de le faire.
Mais une compagnie mutuelle qui veut continuer de se développer dans un
marché aussi concurrentiel que celui d'aujourd'hui doit
nécessairement repenser ses stratégies, et peut trouver, dans des
lignes d'affaires plus profitables ou dans d'autres moyens internes, les
capitaux nécessaires. Cependant, elle devra trouver les capitaux
nécessaires à son développement, même si elle
choisit la forme mutuelle.
M. Holden: Maintenant, dites-moi si, encore, je résume
bien votre pensée. Le gouvernement du Québec doit favoriser la
capitalisation des assureurs de personnes présents au Québec en
favorisant la création d'un véhicule collectif de financement.
C'est une autre de vos préoccupations?
M. Millette: C'est une préoccupation, je pense bien, de
l'énoncé de politiques. Je pense bien que ce sont les termes de
l'énoncé de politiques.
Mais oui, nous souscrivons tout à fait que ce soient ou
non les termes de l'énoncé de politique à la
nécessité d'avoir au Québec une industrie forte. S'il y a
des véhicules de placement, s'il y a des véhicules qui sont
permis comme cela avait été le cas avec les REA, dans le
cas des banques je pense que ces véhicules-là ne doivent
pas exclure a priori une entreprise qui fait affaire chez nous.
M. Holden: Vous préconisez, comme bien d'autres, le
«level playing field»?
M. Millette: Si on veut parler d'internationalisation des
marchés, de concurrence avec l'étranger, je pense qu'on doit
parler de «level playing field». Je pense que c'est la base de
toute compétition. Autrement, l'industrie qui serait avantagée ou
la partie d'industrie qui serait avantagée délogerait assez
rapidement les autres, dans un milieu aussi concurrentiel que celui des
institutions financières, en 1993.
M. Holden: Maintenant, dans les propositions de Mme la ministre,
il est question de confier à l'Inspecteur général la
tâche de concevoir et de superviser l'application de normes de pratiques
commerciales et financières saines. J'aimerais avoir votre
réaction. Est-ce que vous acceptez le concept? Quelle est votre
réaction?
M. Millette: Notre réaction est... La loi sur les
assurances du Québec encore là, je me limite à la
Loi sur les assurances ou à l'industrie de l'assurance de personnes
a été le résultat d'une consolidation, pour la
dernière fois, dans les années soixante-dix, en 1974. La loi a
été amendée, je ne sais pas, peut-être 15 fois, au
moins 7 ou 8 fois depuis cette époque-là, sans compter les
amendements au règlement. On a changé les bases comptables, on a
changé les états financiers. On a ou on veut introduire des
nouvelles normes de capitalisation, de surplus minimum requis. On a
donné à chaque amendement... Chaque fois qu'on donnait des
pouvoirs supplémentaires aux compagnies, on donnait des pouvoirs
supplémentaires à l'Inspecteur général.
À un moment donné, je pense que, sans s'opposer à
quelque nouveau pouvoir que ce soit, on devrait commencer par rationaliser tout
ce qu'il y a dans la législation, la Loi sur les assurances. Il y a
énormément de pouvoirs qui ont été
conférés au cours des années à l'Inspecteur
général. Je ne veux pas parler pour lui, mais moi,
personnellement, je finirais par me sentir mal à l'aise d'avoir
énormément de pouvoirs et de ne pas toujours être certain
de pouvoir les appliquer.
Je vais en prendre juste un au hasard, comme ça: celui qui permet
à l'Inspecteur général de refuser un placement d'une
compagnie d'assurances. C'est un pouvoir qu'il a depuis fort longtemps dans la
législation sur les assurances. S'il avait exercé un tel pouvoir,
je ne sais pas, il y a cinq ou six ans, et qu'il avait décidé de
déclasser des placements immobiliers dans Bramalea, Olympia & York
ou autres, je pense qu'il aurait été mal vu de le faire, alors
qu'aujourd'hui il y en aurait peut-être qui seraient tentés de lui
reprocher de ne pas l'avoir fait. Il y a toutes sortes de pouvoirs comme
ça qui, éventuellement, sont discrétionnaires et qui
peuvent être difficiles à exercer quand on est quotidiennement
dans un véhicule.
Je pense que tout ça devrait être repensé et
rationalisé pour un meilleur contrôle, une meilleure surveillance,
contrôle et surveillance de l'industrie des assurances de personnes. Je
pense que l'occasion est bien choisie de le faire.
M. Holden: Mme la ministre a demandé à M.
Bouchard de se mettre à la place de l'Inspecteur...
Le Président (M. Chagnon): ...de M. Bouchard. M.
Holden: ...Bouchard.
Le Président (M. Chagnon): Elle a demandé à
M. Bouchard de se mettre à la place de M. Bouchard!
M. Holden: ...de se mettre à la place de l'Inspecteur
général. Mais je vois que, vous, vous n'avez pas de
problème, parce que vous seriez mal à l'aise, à la place
de l'Inspecteur général.
M. Millette: Mais je ne suis pas l'Inspecteur
général, remarquez.
M. Holden: Non, mais...
M. Millette: C'est plus facile d'en parler. Ha, ha, ha!
M. Holden: Ha, ha, ha! Dans bien des mémoires, on parle de
l'empiétement du gouvernement fédéral dans le champ
provincial de l'État du Québec. Est-ce que vous avez des
réactions similaires là-dessus?
M. Millette: Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il y a un
besoin d'harmonisation des législations au Canada. Ça, c'est
certain. Comme le Québec est une juridiction, je dirais, un peu
spéciale, parce qu'elle est une des seules au Canada à avoir un
aussi grand nombre d'institutions financières sous sa charge, moi, je
pense bien qu'il faut en tenir compte.
M. Holden: Je crois que le député de
Jacques-Cartier voulait demander une question sur le temps de l'Opposition; ce
serait peut-être le moment de le faire, M. le Président.
Le Président (M. Chagnon): J'ai bien observé cela,
M. le député de Westmount, et...
M. Holden: J'ai vu les signaux qui se passaient entre vous...
Une voix: Un lien de solidarité.
Le Président (M. Chagnon): J'attendais que vous ayez
fini.
M. Holden: Mon ancien collègue, je veux bien...
Le Président (M. Chagnon): J'attendais que vous ayez fini
votre intervention pour lui céder la parole.
M. Holden: On aurait une autre... Je pense qu'on va revenir?
Le Président (M. Chagnon): Oui, oui, je vais
vous permettre de revenir, absolument. M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Cameron: Merci. I will be very brief. I would just like to ask
a couple of things. I wonder if you could possibly tell me just in
ballpark figures, not exactly what percentage of the investment
portfolio of the insurance companies is in commercial real estate, compared to,
say, stocks and bonds. Not exactly, I just mean like in the general kind of
area. Are we talking about 5 %, or 10 %, or a third? And secondly, whether you
can do that or not, is the value of commercial real estate held, charged at the
cost, at the time of purchase, or at the current market price, when measuring
the assets of the insurance company?
M. Millette: Well, your first question, I have no figures here
tonight, and I cannot answer your question, personally. For the other one, you
will know that the accounting rules have changed over the years and they have
gone to strict cost account, book value, at the beginning. There has been an
evolution, and this evolution has not been necessarily the same in
Québec and with the federal government. For example, Québec has
never followed the if I remember well federal government with
that increase in the value of real estate, which may be increased by a certain
percentage with a surplus, with some provision to the surplus for that, which
is done for shares and other things. So, I do not know if Québec has
made that, but I am not sure. I think they never went with that until a recent
date. There have been different situations, and at this time, I do not think
there is any similarity within the Québec companies and the federal
companies as to the accounting principle concerning real estate and
mortgages.
M. Cameron: Do you think it can raise any problems for the
insurance companies?
M. Millette: Well, a certain number of companies have made
adjustments to their annual statement, but I have not seen any particular
problems, except maybe with Sovereign Life, which failed last year. But it is
the only one that was, at that stage, with real estate, as far as I can
see.
M. Cameron: So... thank you. (21 h 40)
Le Président (M. Chagnon): Do you have more questions, Mr.
Member?
M. Cameron: Non, c'est tout. Merci.
Le Président (M. Chagnon): Thank you very much. Mme la
ministre, s'il vous plaît.
Mme Robic: Oui. M. le Président, je voudrais
peut-être parler des organismes d'autoréglementation, deux
minutes. On n'ira pas dans le détail parce que la SIAP va
présenter un mémoire, et je pense qu'on va vous revoir avec la
SIAP. On pourra aller plus en détail.
C'est bien sûr que ces organismes d'indemnisation, c'est des
organismes qui... C'est sécurisant pour le consommateur, c'est une
protection pour le consommateur, et je ne pense pas qu'on tienne à
remettre ça en cause. Cependant, ça enlève
également une responsabilité au consommateur vis-à-vis de
l'institution financière qu'il choisit. Il n'a pas à
s'inquiéter aujourd'hui, à savoir s'il va à l'institution
financière A, B ou C. Le consommateur se dit: De toute façon, mon
dépôt est protégé, ma police d'assurance est
protégée, mes rentes sont protégées parce qu'il y a
maintenant des fonds d'indemnisation qui sont là s'il arrivait qu'une
compagnie soit en danger.
Également, au niveau des compagnies, de l'industrie, je dirais,
le même phénomène se produit en disant: On a
peut-être moins d'efforts à faire pour sauver une compagnie parce
que, de toute façon, la clientèle de cette compagnie va
être protégée. Là, je me dis que, peut-être,
on manque notre coup, et qu'on ne joue pas tout à fait notre rôle,
tous et chacun, dans ce domaine-là. Je crois qu'il faudrait
peut-être regarder de plus près comment on peut s'assurer que
chacun joue son rôle, que chacun est responsable de ses choix et ne s'en
remet pas tout simplement aux organismes d'indemnisation, en disant: Bien, de
toute façon, il y a quelqu'un qui va payer au bout de la ligne; alors,
on n'a pas besoin de s'inquiéter. Je vous avoue que ça
m'embête et ça m'ennuie. C'est toujours facile de dire que c'est
la faute du gouvernement et que le gouvernement va payer, mais on arrive
à un point où on dit: Notre gouvernement n'est plus capable de
payer, de toute façon, parce qu'il n'a plus les moyens.
Mais pour revenir à la responsabilité des personnes et des
groupes, il y a des personnes, il y a des gens qui suggèrent que le
consommateur devrait assumer une partie de responsabilité au moment
d'une faillite, et que, peut-être, qu'un certain montant... Avant
même que la Société d'indemnisation indemnise, il pourrait
peut-être y avoir un montant qui resterait la responsabilité du
consommateur. Est-ce que vous seriez d'accord avec ce genre de...
M. Millette: Je peux vous dire que nous avons formé, dans
l'industrie, un groupe de travail conjoint, ACCAP-SIAP, pour étudier un
certain nombre de propositions, et cette proposition-là est sur la
table. Mais je peux vous dire aussi que je ne pense pas que la SIAP, pas plus
que la Société d'assurance-dépôts du Canada ou la
Régie de l'assurance-dépôts du Québec, veuille
être la première à imposer une telle mesure. Je pense bien
que, s'il devait y avoir une telle mesure, elle devrait être
généralisée à l'ensemble des institutions
financières ou à l'ensemble des fonds d'indemnisation. Autrement,
la première industrie qui imposerait une telle limite à la
protection de ses clients verrait des problèmes de concurrence assez
importants. Donc, théoriquement, je pense que, oui, tout le monde est
conscient que les gouvernements ont atteint des limites, que l'industrie
qui
cherche de la capitalisation n'a sûrement pas 0,5 % de ses volumes
de primes à investir dans les faillites de compagnies bien, bien
longtemps ou éternellement. Effectivement, il faut trouver des
solutions. Mais, comme je vous dis, et selon la fameuse notion de «level
playing field», je ne pense pas qu'on veuille être les premiers
à instaurer une telle mesure.
Mme Robic: Et les compagnies, elles? Vous dites que la SIAP n'a
pas le mandat de faire des sauvetages de biens, de payer, d'indemniser au
moment d'une faillite. Pourtant, avant que la SIAP existe, vous n'avez jamais
laissé une de vos compagnies faire faillite.
M. Millette: Exact.
Mme Robic: L'industrie faisait des sauvetages. Pourquoi ce
changement? Parce que, maintenant, il y a un fonds d'indemnisation, pourquoi ce
changement de philosophie, qui est d'abord très coûteux pour
l'industrie, en premier lieu, et qui affecte votre
crédibilité?
M. Millette: je pourrais vous répondre que je ne
sais pas dans le temps, il y avait la corvée. aujourd'hui, il y a
les compagnies d'assurances pour payer les dégâts. mais la siap
est peut-être un filet de sécurité qui a fait en sorte que
des gens ont pu se sentir libérés. deuxièmement, et en
plus, je pense qu'il y a une question de saturation du marché aussi, qui
n'existait pas avant, et peut-être qu'on parlait des normes de
capitalisation. si vous devez, pour bien paraître dans les normes de
capitalisation ou pour bien figurer auprès de standard & poor's ou
de n'importe quel autre organisme de cotation, si vous devez maintenir 125 %,
130 %, 140 %, 150 % de surplus pour bien paraître dans les états
financiers, ça devient excessivement onéreux de faire des
acquisitions, parce que vous êtes obligés, en plus de faire
l'acquisition, d'augmenter votre capitalisation pour rencontrer les nouvelles
normes.
Donc, de plus en plus, les entreprises considèrent que c'est plus
difficile. Comme la capitalisation, on en parle depuis tantôt, n'est pas
facile à aller chercher, ça peut être un autre frein. Il y
a plusieurs raisons, et je dois vous avouer qu'on n'a pas fait le tour des
raisons, mais, nous aussi, c'est une question qui nous préoccupe parce
que, effectivement, il y a eu des problèmes avant et il y en a encore
dans le dossier de La Souveraine. On ne trouve pas facilement un
acquéreur dans le dossier. Il n'y a pas une lignée de 20 ou 30
assureurs prêts à prendre le dossier. Il y en a, mais il n'y a pas
foule aux portes. Donc, oui, effectivement, il y a un problème.
M. Gagné (Gaétan): Moi, je dirais que, finalement,
il y a beaucoup de pompiers volontaires. À un moment donné, il y
a peut-être...
Le Président (M. Chagnon): Est-ce que vous pourriez vous
nommer pour les fins de notre...
M. Gagné: Gaétan Gagné, président de
L'Entraide.
Le Président (M. Chagnon): Merci.
M. Gagné: Pour répondre à l'interrogation de
Mme Robic. Évidemment, il faut voir que, lorsqu'il y avait des
entreprises qui étaient en mauvaise position financière, n'ayant
pas de mécanismes, ça se réglait souvent à
l'amiable entre deux exécutifs. À partir du moment où il y
a un mécanisme, il y a tout le processus d'appel d'offres. Toute la
partie qui est impliquée pour négocier un transfert de
portefeuille va vouloir le faire selon des règles bien précises
pour éviter d'être critiquée par d'autres membres de
l'industrie. C'est le processus qui veut ça. En ayant une
sécurité d'un côté, évidemment, on doit
s'assurer de passer par certaines procédures qui font en sorte que c'est
peut-être moins intéressant pour des gens de bâtir, de voir
à essayer d'obtenir une entreprise sur le principe de
négociations en tête-à-tête.
M. Ferron (Claude): Moi, j'aurais quelques commentaires sur le
fonds d'indemnisation. Il ne faut pas oublier quelque chose. C'est qu'au bout
de la ligne, finalement, c'est le consommateur qui paie. Que ce soit
Passurance-dépôts ou que ce soit Les Coopérants, le
coût, actuellement, est astronomique pour les compagnies d'assurances du
Québec, à court terme je parle pour mon organisation. On
s'aperçoit que, finalement, autrefois, comme vous dites, il y a eu
plusieurs fusions, il y a eu plusieurs organisations qui ont réussi
à s'arranger. On a l'impression maintenant qu'avec la SIAP c'est comme
si ça devait être la SIAP qui règle tout et c'est
peut-être là l'erreur fondamentale plutôt que
d'essayer de trouver d'autres mécanismes.
Moi, j'ai une conviction assez grande, c'est qu'une compagnie
d'assurance-vie, pour vraiment tomber en faillite, même Les
Coopérants, il faudrait que ce soit non seulement désastreux,
mais... même là, encore... parce que ce qui peut manquer, à
un moment donné, c'est la partie capital. Il restait quand même
qu'il y avait des portefeuilles d'assurances, je pense Les
Coopérants qui étaient encore très sains, il n'y a
aucun doute, sauf que c'était peut-être la question des actifs,
que ce soient immobiliers ou autres. (21 h 50) alors, moi, je me questionne
beaucoup, parce qu'on s'aperçoit que ce mécanisme-là,
actuellement, de la façon qu'il fonctionne, peut être très
coûteux à court terme. il peut même déranger notre
rentabilité. un demi de 1 %, ça c'est le maximum, et là,
on parle de monter à 1 %. je peux vous dire que c'est beaucoup. alors,
disons que c'est les considérations que j'ai actuellement. il faut
penser que les américains, aux états-unis, ils ont aussi des
fonds de garantie. ils ont trouvé en fait, je crois qu'il y a
seulement trois états qui n'ont pas de fonds de garantie des
mécanismes qui sont propres à leurs juridictions, partout. des
fois, c'est un peu comme on a avec l'assurance-dépôts, il y a des
primes qui sont
payées d'avance. Dans d'autres cas, c'est un peu comme pour la
SIAP, et dans d'autres cas, il y a des mécanismes aussi qui sont
associés à des crédits de taxe de primes. Il faut penser
que, nous, les compagnies d'assurance-vie, nous payons 2,15 % de taxe de
primes. Je peux vous dire que c'est des montants très importants, si
vous regardez toutes les primes qui sont souscrites. Moi, je pense aussi que,
lorsqu'il y a quelque chose comme ça, disons Les Coopérants ou
une autre, il faudrait trouver des mécanismes aussi dans le temps et non
pas à très court terme. Si on pouvait avoir un mécanisme
sur 5 ou 10 ans, même si on doit tout le payer, ça nous donnerait
vraiment la chance de pouvoir retomber sur nos pieds plus rapidement et
peut-être de faire plus attention aussi.
Le Président (M. Chagnon): Je vous remercie, M. Ferron.
Mme la ministre.
Mme Robic: Merci.
Le Président (M. Chagnon): M. le député de
Westmount, peut-être avez-vous d'autres questions et un mot de la
fin.
M. Holden: Juste peut-être deux questions. D'abord, dans
votre mémoire, il est question de stratégie internationale de
développement. Alors, est-ce que vous pourriez me dire quelle doit
être la stratégie, la priorité de l'industrie
québécoise? Est-ce que c'est le développement
international ou le développement québécois?
M. Millette: Oui, évidemment, quand on parle... M.
Holden: Ou les deux?
M. Millette: On ne peut pas ignorer la mondialisation de
l'économie. Les entreprises québécoises, avant de se
lancer à la conquête du monde, je pense qu'elles doivent avoir une
base régionale forte. Et ça, je pense qu'il est essentiel
qu'elles commencent d'abord par se capitaliser et développer un ensemble
de produits rentables avant de songer à se lancer au plan international.
Je suis bien d'accord que les compagnies québécoises pourraient
et devraient rechercher des ententes avec des partenaires étrangers,
soit pour du financement ou une participation, soit pour développer un
«know how». Ça, c'est certain. Mais de là à
dire d'avoir une stratégie internationale de développement, je
pense bien que Standard & Poor's dit bien qu'il n'y a pas tellement de
chance. Je lisais The Economist, il y a quelques semaines, qui parlait
de la mondialisation et qui donnait une liste de 80 ou 100 compagnies à
travers le monde qui détiennent 60 % des marchés internationaux.
Il n'y avait aucune entreprise canadienne dedans. Donc...
M. Holden: La charité bien ordonnée commence chez
nous.
M. Millette: Je pense qu'il est nécessaire d'avoir...
Même s'il y a mondialisation de l'industrie, je pense qu'il y aura
toujours place pour une industrie régionale forte. Quand je parle de
«régionale», je ne parle pas juste de
québécoise, je parle de canadienne, parce que, au plan
international, le Canada est une petite région.
M. Holden: Vous mentionnez aussi dans votre mémoire, et je
vous cite... À la page 10, vous proposez au gouvernement
d'élaborer une stratégie de concertation avec l'industrie afin de
stabiliser les coûts des services de santé dispensés par
les régimes publics. Peut-être que vous pourriez expliciter un peu
plus cet énoncé.
M. Millette: Oui, je pourrais expliciter un peu et je pense que
M. Ferron pourrait en parler encore plus.
M. Holden: M. Ferron est avec la Croix Bleue, je crois.
M. Millette: La Croix Bleue. Il y a énormément
d'expériences qui se font aux États-Unis depuis le milieu des
années 80, où on peut commencer à offrir des programmes
à long terme qui peuvent être jumelés à d'autres
contrats, soit d'assurance, soit de rentes en capitalisation, des rentes en
accumulation, et qui peuvent s'appliquer, par exemple, à certaines
maladies spécifiques comme des maladies débilitantes ou qui font
perdre l'autonomie d'une personne. Ce sont des programmes qui, accumulés
au cours d'une période de temps certains de ces
programmes-là peuvent être pris aussi tôt que l'âge de
50 ans, par exemple peuvent permettre à cette personne-là
d'être indépendante financièrement advenant son placement
dans une maison, parce qu'elle est en perte d'autonomie. Donc, des choses comme
ça peuvent, si elles sont bien gérées et bien
montées, être intéressantes pour l'industrie de
l'assurance, et peuvent aussi être intéressantes pour les
gouvernements. Mais je suis certain...
M. Holden: Est-ce que M. Ferron a été appelé
par Mme Clinton pour donner ses avis?
M. Ferron: non, non, mais je pense qu'ils vont assez bien
régler leurs problèmes, parce que... lorsqu'on regarde un peu
aussi ce qui se fait aux états-unis, on s'aperçoit que c'est vrai
que ça coûte très cher. ils sont rendus à 14 % du
pib. nous, on est rendus à 10 %. on s'aperçoit que, dans les
années qui s'en viennent, je pense bien que les compagnies d'assurances
vont pouvoir jouer un rôle important. on s'aperçoit que, depuis
quelques années, pas seulement au québec, mais un peu à
travers le canada, les gouvernements désassu-rent un peu les
régimes. ce sont les assureurs privés qui prennent la
relève, sauf qu'actuellement je vous rappellerai qu'en assurance
collective on a une taxe de 9 % qui s'ajoute lorsqu'on vient ajouter des
bénéfices comme ça. ça, je trouve ça
extrêmement difficile, pour nos assurés d'abord, et aussi, je
pense bien, pour l'industrie
qui, comme telle, avant de donner quelque bénéfice, elle
doit payer 9 %. Je pense qu'il y a une petite anomalie, disons, de ce
côté-là.
Pour le restant, moi, j'ai bien confiance que si on regarde un peu ce
qui se passe aux États-Unis, si on regarde ce qui se passe au Canada...
C'est vrai que les États-Unis ont un problème avec 35 000 000
d'assurés, mais je pense bien, avec ce qui s'en vient, soit le
«pay or play», les approches qui vont être faites, qu'ils
vont réussir à couvrir ça. Ce qui est plus important,
peut-être, c'est ce qu'ils ont commencé à mettre de
l'avant, ce qu'ils appellent le «managed care». Ça, c'est
appelé à prendre énormément d'ampleur, et ça
va permettre probablement aussi de mieux contrôler les coûts de
santé. Nous, on l'expérimente actuellement avec Florida Blue
Cross, pour les gens qui voyagent hors Canada. On s'est aperçu qu'il y
avait des retombées extrêmement importantes sur le plan des
coûts, sur la qualité aussi.
M. Holden: Je vous remercie, messieurs, de votre
présentation. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Chagnon): Merci, M. le
député. Mme la ministre.
Mme Robic: Merci infiniment. C'était intéressant.
Merci, M. le député, de votre participation.
M. Millette: Merci beaucoup.
Le Président (M. Chagnon): Je tiens à vous
remercier, MM. Millette, Ferron et Gagné. Nous allons ajourner nos
travaux à demain matin, 10 heures. Merci.
(Fin de la séance à 21 h 58)