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(Dix heures vingt-quatre minutes)
Le Président (M. Joly): II me fait plaisir de vous
accueillir à cette commission. La commission des affaires sociales est
réunie afin d'étudier les crédits budgétaires du
ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et
de la Formation professionnelle pour l'année financière
1993-1994. M. le secrétaire, avons-nous des remplacements?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Boucher-Bacon
(Bourget) est remplacée par M. Tremblay (Rimouski); M. Houde (Berthier)
est remplacé par M. Fradet (Vimont); M. Trudel (Rouyn-Noranda
Témiscamingue) est remplacé par Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve)
et M. Williams (Nelligan) est remplacé par M. Khelfa (Richelieu).
Le Président (M. Joly): Je vous remercie beaucoup, M. le
secrétaire.
Je vous rappelle que nous avons un bloc de 2 h 30 qui est mis à
notre disposition, et j'imagine que M. le ministre, autant que Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve, avez des remarques
préliminaires. Alors, M. le ministre, je vous reconnais.
Remarques préliminaires M. André Bourbeau
M. Bourbeau: Oui, M. le Président. Vous me permettrez de
présenter je ne présenterai pas tous les gens qui
m'accompagnent, mais qu'il me suffise de présenter à ma
droite, le président de la Société
québécoise de développement de la main-d'oeuvre, M.
Jean-Paul Arsenault, et, derrière lui, le vice-président, un des
vice-présidents, M. Duc Vu. Cet après-midi, je présenterai
les membres du ministère de la Main-d'oeuvre, étant donné
que, ce matin, si je comprends bien, on parle de la main-d'oeuvre.
Alors, M. le Président, pour peu que l'on veuille tirer
véritablement profit de l'étude des crédits d'un
ministère, l'exercice auquel nous nous livrons peut revêtir la
plus haute importance pour le fonctionnement des institutions
démocratiques. C'est en effet par l'étude des crédits que
l'on peut voir clairement les choix que le ministère a
arrêtés, les stratégies qui furent retenues, les
clientèles sur lesquelles l'intérêt premier se concentre,
les arbitrages que le gouvernement a exercés face à la hausse
presque illimitée des demandes, d'une part, et à la
raréfaction des ressources financières, d'autre part. Il s'agit
aussi d'un moment privilégié pour dresser un certain bilan de
l'année financière qui vient de s'écouler, pour
apprécier la performance relative des divers programmes et pour
évaluer la façon dont le ministère s'est acquitté
de sa mission et des projets qu'il avait annoncés l'an dernier. Enfin,
l'étude des crédits permet de discuter des orientations du
ministère, de porter un regard critique sur les moyens qu'il retient et
de s'interroger sur sa capacité d'agir sur les grands enjeux de notre
développement.
S'agissant d'un ministère à la vocation aussi large et
stratégique que celui de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité
du revenu et de la Formation professionnelle, l'exercice de l'étude des
crédits prend un relief singulier. Par-delà les choix
budgétaires et les modalités des programmes, c'est, en fait, une
bonne part de la mission sociale et économique du gouvernement que nous
interrogerons ici aujourd'hui, et possiblement demain. Nous allons en effet
aborder les questions cruciales de la pauvreté, du chômage, de la
sécurité du revenu, de l'accessibilité aux programmes et
activités qui facilitent l'intégration à l'emploi, de la
formation et du développement de la main-d'oeuvre, des normes du
travail, de la compétitivité des entreprises, et j'en passe.
Nous avons soigneusement préparé cet exercice, comme nous
le faisons depuis plusieurs années. La défense des crédits
du ministère mobilise pendant des semaines des dizaines de
professionnels et de gestionnaires de haut calibre et d'horizons professionnels
fort variés. Ces personnes préparent les synthèses
budgétaires, travaillent à la présentation didactique des
documents techniques qui sont souvent rébarbatifs aux
non-initiés, répondent aux nombreuses questions de l'Opposition
officielle et, pour certaines d'entre elles, nous accompagnent ici dans notre
démarche d'analyse des crédits budgétaires. Pour leur
persévérance, leur rigueur professionnelle et leur remarquable
disponibilité, je veux remercier très sincèrement les
employés du ministère de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle, qui ont
produit les documents préparatoires à la tenue de cette
commission. La quantité et la qualité de ce qu'ils ont produit au
cours des dernières semaines témoigne éloquemment de leurs
efforts. Merci encore.
En régime parlementaire, il y a, d'un côté, les gens
qui défendent leurs choix et leurs stratégies, et, de l'autre
côté, ceux qui dénoncent ces choix et prétendent
faire beaucoup mieux. Dans un bon western, le monde est tranché entre
les bons et les méchants; il n'y a guère de place pour la nuance.
Ici se confrontent pacifiquement, d'une part, les combattants qui, chaque jour,
affrontent la réalité sociale et économique du
Québec moderne et, d'autre part, les soldats d'estrade qui
suivent l'action d'un oeil critique. Nous composons aisément avec
ces règles du jeu. De ce côté-ci, nous souhaitons
simplement que cet exercice d'étude des crédits soit conduit avec
pertinence et promptitude. (10 h 30)
En 1993-1994, des crédits de 4 403 000 000 $ sont alloués
au ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu
et de la Formation professionnelle, en hause de 267 900 000 $ par rapport au
budget comparatif de l'an dernier. Cette augmentation est principalement
attribuable à l'accroissement prévisible du nombre de
ménages qui, dans les prochains mois, auront recours à la
sécurité du revenu, de même qu'à l'augmentation des
efforts budgétaires du gouvernement en faveur de l'intégration en
emploi et du développement de la main-d'oeuvre.
Quatre éléments accaparent l'essentiel de ce budget de 4
400 000 000 $. En premier lieu, le régime de la Sécurité
du revenu requiert à lui seul des crédits de 3 700 000 000 $,
soit 207 300 000 $ de plus que l'an dernier. J'y reviendrai. L'Administration,
la Gestion et les services aux diverses clientèles du ministère
nécessitent pour leur part un budget de 292 300 000 $, en hausse de 11
200 000 $ par rapport à l'an dernier. Cet accroissement de l'effort
budgétaire est essentiellement attribuable aux investissements que nous
réalisons dans la refonte des systèmes informatiques qui servent
presque exclusivement à faciliter la gestion du régime de la
sécurité du revenu.
Le troisième élément regroupe les services et
programmes de formation et de développement de la main-d'oeuvre pour
lesquels des crédits de 278 600 000 $ sont réservés cette
année, en hausse de 24 300 000 $. Ces budgets seront gérés
par la nouvelle Société québécoise de
développement de la main-d'oeuvre.
Enfin, le gouvernement consacrera 81 500 000 $, soit 24 600 000 $ de
plus que l'an dernier, au programme Développement de l'emploi et
intégration au marché du travail des clients de la
sécurité du revenu aptes au travail.
Lorsqu'on parle des crédits du ministère de la
Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation
professionnelle, on fait souvent abstraction de l'importante contribution du
gouvernement fédéral au budget du ministère. Nous assumons
la gestion de tous ces crédits, mais nous n'en sommes pas les seuls
pourvoyeurs. Sur les 4 400 000 000 $ mis à la disposition du
ministère pour le présent exercice financier, 2 000 000 000 $
proviennent du gouvernement fédéral. Il m'apparaît
important d'en parler brièvement.
En vertu du Régime d'assistance publique du Canada, le
gouvernement fédéral assume généralement 50 % des
coûts de la sécurité du revenu générés
dans les provinces. Nous recevons à ce titre 1 864 000 000 $ qui
comprennent les frais d'administration des programmes de la
Sécurité du revenu et de la Commission des affaires sociales.
À cela s'ajoute l'Accord sur l'amélioration des perspectives
d'emploi, qui permet aux deux niveaux de gouvernement d'injecter chacun 62 000
000 $ pour la participation des clients de la sécurité du revenu
aux programmes de formation professionnelle.
Le fédéral investit également 2 600 000 $ pour
favoriser la réadaptation professionnelle des personnes
handicapées. Seul le programme Aide aux parents pour leurs revenus de
travail, le programme APPORT, n'est pas partagé financièrement.
Nous le déplorons, d'ailleurs, parce que ce programme constitue pour
nous un complément indispensable du régime de la
sécurité du revenu. Le gouvernement fédéral, tout
en reconnaissant l'originalité et le bien-fondé du programme
APPORT, n'accepte pas encore de s'y associer au plan financier. Nous
revendiquons toujours un changement d'attitude de sa part. Le gouvernement
fédéral contribue, en outre, pour 141 000 000 $ au programme de
développement de la main-d'oeuvre, montant auquel il faudrait ajouter 24
700 000 $ qui sont versés au ministère de l'Éducation et
au ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science aux
fins de gestion des programmes de formation de la main-d'oeuvre.
Mais revenons au Québec. Il y a dans le budget de 4 400 000 000 $
du ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu
et de la Formation professionnelle un indéniable effet de conjoncture.
Les restructurations industrielles qui sont en cours au Québec et les
effets du ralentissement économique dont se ressentent tous les pays
industrialisés poussent des milliers de personnes au chômage et
freinent la reprise durable de l'emploi. Au cours du présent exercice
financier, nous prévoyons qu'il y aura en moyenne 454 000 ménages
inscrits à la Sécurité du revenu, une hausse de 5 % par
rapport à l'an dernier. Les contrecoups de la conjoncture et, dans une
moindre mesure, l'impact de la récente réforme de
l'assurance-chômage, expliquent l'augmentation de la clientèle
à la Sécurité du revenu. À l'instar de toutes les
autres sociétés industrielles, le Québec est
confronté à une augmentation du chômage. Les
dernières statistiques officielles de l'OCDE font état de la
présence, dans les 24 pays membres, d'un nombre total de 30 000 000 de
chômeurs. Même les pays Scandinaves, qui ont une tradition de plein
emploi, connaissent des taux records de chômage et même du
chômage de longue durée.
Il est généralement admis que l'augmentation de la
richesse nationale peut désormais se réaliser, pour un certain
temps du moins, sans une augmentation correspondante des emplois. Je dis
«pour un certain temps», parce qu'aucune société ne
peut aspirer au développement durable en excluant de l'activité
économique des milliers de personnes condamnées au chômage
et à la sécurité du revenu. Nous maintenons que cette
crise du chômage demeure temporaire. Le Québec a un potentiel de
développement qui lui permet de ramener le taux de chômage
à des niveaux nettement plus bas. C'est pourquoi il faut poursuivre nos
efforts pour préserver chez ceux qui se retrouvent sans emploi des
habitudes de travail, une capacité de s'adapter au marché du
travail et
aux changements qu'il introduit pour maintenir, en somme,
l'employabflite de ces personnes. Il faut également ne ménager
aucun effort pour former la main-d'oeuvre aux exigences de plus en plus
élevées des emplois d'aujourd'hui et de demain. Il serait
catastrophique de jeter la serviette, de condamner à une forme de
désespérance les milliers de personnes qui ont recours
temporairement à la sécurité du revenu.
Oui, notre économie conserve sa capacité de
générer des emplois. Depuis janvier dernier, il s'est
créé 15 000 emplois au Québec. Même si chaque
édition du «Téléjournal» apporte son
contingent de nouvelles relatives à des mises à pied, il se
crée, de façon moins spectaculaire, des milliers d'emplois.
L'espoir demeure. Et cet espoir est d'autant plus réaliste que les
personnes qui aspirent à ces emplois sont demeurées actives sur
le marché du travail ou ont participé à des
activités de formation dans les secteurs et les créneaux
professionnels porteurs d'avenir.
Cela m'amène à parler des programmes dits de
développement de l'employabilité. À l'intention des
clients de la Sécurité du revenu aptes au travail, le
gouvernement du Québec a mis en place, au fil des ans, des programmes de
formation, de recyclage, d'aide à l'emploi, de même que des stages
en milieu de travail et diverses activités comme la mesure EXTRA. Dans
la foulée de la réforme de l'aide sociale, le gouvernement a
incité davantage les prestataires à prendre part à ces
activités et il a conçu un programme de subventions salariales,
le programme Aide à l'intégration en emploi, le programme PAIE.
Toutes ces activités ne visent qu'un objectif: favoriser l'insertion en
emploi des personnes qui ont temporairement recours à la
sécurité du revenu pour subvenir à leurs besoins
essentiels, car, pour les personnes aptes au travail, l'emploi demeure la seule
façon de briser la dépendance.
On a récemment, dans certains journaux, mis en doute le
caractère humaniste de ces activités et leur utilité. Je
répète ici que ces programmes de développement de
l'employabilité sont à la fois honorables et fort utiles pour
réintégrer le marché du travail. Agir 20 heures par
semaine comme brigadier scolaire, aide aux personnes âgées
à domicile, bénévole pour un organisme qui prépare
des soupes populaires, secrétaire d'une oeuvre charitable,
aide-comptable pour un organisme de lutte contre les toxicomanies, toutes ces
tâches utiles à la collectivité et valorisantes pour les
personnes qui s'y engagent n'ont rien de dégradant, loin de là.
De plus, ces activités favorisent indiscutablement la réinsertion
en emploi.
Depuis quelques années, le ministre de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle effectue
des évaluations des programmes de développement de
l'employabilité. La dernière évaluation publiée en
février 1993 démontre une fois de plus la rentabilité des
efforts que consacre le gouvernement à ces programmes. (10 h 40)
Voici quelques résultats significatifs: 25 % des personnes qui
ont participé aux activités de développement de
l'employabilité ont eu au moins un emploi après leur
participation, mais seulement 13 % de ceux qui n'ont pas pris part à ces
activités ont décroché un emploi; deuxièmement,
sept mois après la fin de la participation à un programme de
développement de l'employabilité, 15 % des personnes sont
toujours en emploi contre 8 % chez ceux qui n'ont participé à
aucune mesure favorisant leur intégration au marché du travail.
ces résultats sont d'autant plus probants que les personnes
échantillonnées qui participent à ces activités
doivent, pour la plupart, surmonter des difficultés plus grandes que les
autres pour réintégrer le marché du travail. il s'agit de
personnes moins jeunes, qui ont recours à la sécurité du
revenu depuis plus longtemps et qui ont des enfants à charge.
Si l'on tient compte de ces facteurs, on se rend compte, à
l'évidence, que le fait de prendre part à un programme
d'intégration à l'emploi facilite la sortie de la
sécurité du revenu, l'indépendance par le travail. Je
déposerai tout à l'heure des copies de ces évaluations aux
membres de cette commission parlementaire. Vous serez à même de
juger de leur qualité professionnelle et de la crédibilité
des résultats auxquels elles concluent.
On a développé dans certains milieux le sentiment que,
lorsque l'État incite les prestataires de la sécurité du
revenu à déployer des efforts pour se sortir de la
dépendance financière, on les maltraite. Il s'agit d'une vision
tronquée d'une politique de sécurité du revenu, d'une
attitude paternaliste qui n'est guère flatteuse pour les clients de la
sécurité du revenu. Nous avons trop de respect pour ces personnes
pour nous contenter de leur émettre un chèque chaque mois sans
investir avec elles dans la reconquête du marché du travail. Ceux
qui voient dans nos efforts en faveur de l'intégration économique
des clients de la Sécurité du revenu une forme de
répression de l'État envers les plus démunis cultivent les
fleurs de rhétorique. L'aide la plus précieuse que nous pouvons
apporter aux personnes aptes au travail, c'est celle qui favorise le retour au
travail. «La meilleure façon de tuer un homme, chantait
Félix Leclerc, c'est de le payer pour être
chômeur».
Les personnes seules qui participent à ces programmes
reçoivent présentement 626 $ par mois. Celles qui ne manifestent
aucun intérêt pour ce genre d'activité perçoivent
des prestations de 510 $ par mois. Cette différence de 116 $
représente, bien entendu, une mesure incitative. Elle n'indique
aucunement la valeur réelle de la participation à des exercices
d'employabilité dont les effets concrets sont de maintenir des habitudes
de travail, de garder la personne assistée sociale en contact avec la
réalité du marché du travail, de favoriser la
participation à une oeuvre utile, de rendre service à la
communauté et de favoriser la transition vers le marché de
l'emploi.
Certains beaux esprits ont récemment échafaudé des
savants calculs pour déterminer le salaire des personnes qui participent
aux programmes de développement de l'employabilité. Ils ont
effectué leurs calculs en
mesurant l'écart entre le barème de participation et le
barème de disponibilité. Il est à la fois simpliste,
oiseux et profondément méprisant pour les personnes
concernées de comptabiliser de la sorte l'augmentation des prestations
qui résultent de la participation à ces activités, un peu
à la manière des riches qui calculent le rendement marginal d'un
placement.
Nous avons fait la démonstration de l'efficacité des
programmes de développement de l'employabilité. Nous demeurons
convaincus que la meilleure mesure de développement de
l'employabilité, c'est l'emploi. C'est pourquoi le budget 1993-1994 du
ministère consacre 67 800 000 $ au programme Aide à
l'intégration en emploi, le programme PAIE. Ce programme accorde une
subvention salariale aux employeurs privés municipaux et communautaires
qui embauchent un client de la Sécurité du revenu. À ce
jour, 36 925 personnes ont bénéficié du programme et ont
accédé à un véritable emploi. Plusieurs d'entre
elles ont quitté la sécurité du revenu.
L'évaluation du programme montre que sept mois après la fin de la
période de subvention salariale, 27 % des personnes qui ont
participé au programme PAIE sont toujours en emploi. Il s'agit d'un
remarquable taux d'intégration en emploi.
Qu'elles soient à la sécurité du revenu,
prestataires de l'assurance-chômage ou à l'emploi d'une entreprise
qui doit faire face à la concurrence internationale, toutes ces
personnes représentent, lorsqu'elles demeurent aptes au travail, la
main-d'oeuvre québécoise, une main-d'oeuvre qui aspire à
se faire valoir par le travail, dont l'intégration économique et
sociale passe, dans une large mesure, par un emploi.
Le défi de tendre vers un meilleur équilibre du
marché du travail, d'arrimer la formation et l'emploi, de
développer tout le potentiel de la main-d'oeuvre
québécoise, il échoit désormais à la
Société québécoise de développement de la
main-d'oeuvre. Le gouvernement n'esquive pas ses responsabilités
à l'égard de ces défis d'envergure; au contraire, il
décide de s'associer très étroitement à ses
partenaires patronaux, syndicaux et communautaires pour accroître sa
capacité d'agir sur le développement de la main-d'oeuvre et de
l'emploi. J'ai déjà eu de multiples occasions de préciser
les objectifs que nous poursuivons en créant la Société
québécoise de développement de la main-d'oeuvre. Je
rappellerai simplement ici que, pour rendre les interventions de l'État
efficaces dans ce domaine crucial pour l'économie du Québec, il
faut briser l'isolement dans lequel se sont plus ou moins cantonnés
jusqu'ici les patrons, les syndicats, les institutions d'enseignement et les
responsables gouvernementaux des programmes de main-d'oeuvre.
Le partenariat, sans constituer une panacée, devient, en
matière de main-d'oeuvre, une sorte de prémisse, de condition
préalable à tout déblocage significatif. Rien n'est jamais
vraiment acquis, mais si nous voulons améliorer significativement notre
chance de tirer notre épingle du jeu dans la turbulence
économique du monde moderne, c'est par le partenariat que nous y
parviendrons. Le gouvernement s'est minoré lui-même dans cette
société d'État. Nous voulons que les représentants
des milieux de travail exercent une influence déterminante sur le choix
des interventions pour développer la main-d'oeuvre et équilibrer
le marché de l'emploi. Nous croyons à l'efficacité de
l'action concertée dans ce domaine, dans ce domaine névralgique
pour l'avenir économique du Québec. Bien sûr, ce ne sera
pas toujours facile. Il faudra lutter contre des vieux réflexes
d'isolement ou des rivalités plus ou moins vives, mais, comme la
nécessité fait loi, nous y arriverons, et rapidement sans
doute.
La Société québécoise de
développement de la main-d'oeuvre est en place depuis le 1er avril
dernier. Dans les prochaines semaines, je rendrai publique la composition des
conseils régionaux qui orienteront l'action de chaque
Société de développement de la main-d'oeuvre en
région. Ainsi s'implante la structure de partenariat, tant à
l'échelle de tout le Québec que dans chaque région.
La Société québécoise de
développement de la main-d'oeuvre disposera d'un budget de 278 500 000
$. Elle définira les besoins de développement de la main-d'oeuvre
dans chaque région et dans les principaux secteurs de l'activité
économique du Québec. Elle établira elle-même les
priorités d'intervention, arrêtera les choix budgétaires,
procédera aux arbitrages difficiles entre les diverses demandes de
soutien financier à des activités de formation et de
développement de la main-d'oeuvre et de l'emploi, et offrira aux
entreprises et à la main-d'oeuvre québécoises les services
d'aide à la formation et à l'emploi. Les budgets octroyés
à la Société ne tiennent pas compte du crédit
d'impôt remboursable à la formation. On assiste, depuis
l'implantation de cette mesure fiscale, à un accroissement significatif
des activités de formation soutenues par les entreprises. De plus en
plus d'entreprises investissent dans le développement de leur
main-d'oeuvre au profit d'un nombre toujours croissant de travailleurs et pour
un nombre d'heures de plus en plus élevé chaque année. La
Société intègre d'ailleurs la stratégie du
crédit d'impôt remboursable à la formation dans l'ensemble
de sa démarche d'aide et de conseil aux entreprises en matière de
développement des ressources humaines.
La Société gérera les trois programmes qui ont fait
l'objet d'un regroupement et d'une simplification au cours des derniers mois.
Il s'agit du Programme de développement des ressources humaines en
entreprise, du Programme d'aide aux personnes licenciées et du Programme
d'aide aux individus. Cette tâche de simplification, le ministère
a voulu la mener à terme afin que la Société puisse
démarrer dans l'ordre de la gestion des interventions dans le domaine de
la main-d'oeuvre. La Société a maintenant la
responsabilité non seulement de gérer les programmes mais de les
concevoir. Je m'attends à ce qu'elle se prévale très
tôt de ses prérogatives et qu'elle apporte des modifications aux
programmes. (10 h 50)
Nous convenons tous que l'efficacité de l'action de la
Société serait grandement et considérablement
renforcée si on lui confiait également les budgets
fédéraux consacrés au développement de la
main-d'oeuvre. Il y aurait ainsi une seule série de programmes
conçus et administrés par les partenaires du marché du
travail. Nous voulons en effet confier aux partenaires québécois
du marché du travail réunis au sein de la Société
québécoise de développement de la main-d'oeuvre l'ensemble
des budgets provinciaux et fédéraux consacrés aux mesures
actives de main-d'oeuvre. Nous entendons par «mesures actives» les
programmes et services de formation, de recyclage, d'aide à l'emploi, de
soutien aux entreprises pour le développement de la main-d'oeuvre ainsi
que le placement. Si toutes ces activités étaient placées
sous la responsabilité des partenaires du marché du travail, il y
aurait une seule série de programmes, une seule structure
administrative, une seule série de formulaires, bref, un seul
réseau et un seul guichet. On gagnerait en efficacité et en
simplification.
Vous savez que cette conception du partage des responsabilités
entre le gouvernement du Québec et le gouvernement fédéral
dans le domaine de la main-d'oeuvre faisait partie de l'entente
constitutionnelle de Charlottetown. Depuis le référendum
d'octobre dernier, nous tentons de conclure une entente administrative avec le
gouvernement canadien sur les mêmes bases, parce que ce genre
d'arrangement ne requiert aucun amendement constitutionnel. Les discussions
continuent, mais nous sentons que le gouvernement fédéral se
hâte avec lenteur, à la manière de quelqu'un qui voudrait
référer la question à la prochaine administration, quelle
qu'elle soit. On aurait tort, cependant, d'arrêter toute action en
attendant que nos ententes soient satisfaites. La vie continue. Nous avons du
travail à faire et nous entendons nous y attaquer avec la plus grande
énergie, en recherchant la plus grande efficacité.
La mise en place de la Société québécoise de
développement de la main-d'oeuvre s'inscrit dans cette optique. Oui, il
serait plus efficace de regrouper les programmes fédéraux et les
programmes québécois mais, en attendant ce jour, qui viendra,
j'en suis sûr, nous allons rendre nos programmes les plus performants
possibles. Nous allons tirer le plus grand profit du partenariat que nous
développons avec les représentants du marché du travail et
de l'enseignement. En attendant, il faut aussi faire en sorte que les
revendications du Québec au chapitre de la main-d'oeuvre demeurent une
préoccupation de premier ordre de nos interlocuteurs
fédéraux. Ce sujet est trop important pour être
abordé de façon évasive ou imprécise à
l'occasion d'une course à la chefferie ou d'une élection
fédérale.
Personne ne peut ignorer l'extraordinaire consensus
québécois en faveur du guichet unique pour les services et les
programmes de développement de la main-d'oeuvre. Nous allons donc
profiter de la fébrilité électorale qui agite les hommes
et les femmes politiques oeuvrant sur la scène fédérale
pour faire en sorte qu'ils se mouillent dans ce dossier de la main-d'oeuvre,
qu'ils indiquent à quelle enseigne ils logent, parce qu'il ne peut pas y
avoir des positions mi-chair, mi-poisson. Ou bien on est en faveur d'une
gestion unifiée des programmes et des services de main-d'oeuvre,
conformément aux attentes du Québec, ou alors on favorise le
fonctionnement en parallèle de deux réseaux offrant, sur un
même territoire, des services comparables à une même
clientèle, avec les problèmes de lourdeur, de complexité
et d'inefficacité que cela entraîne.
M. le Président, nous aurons l'occasion de passer au crible les
crédits du ministère de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle
aujourd'hui, et possiblement demain. Au terme de cet exercice, j'espère
que nous pourrons mieux comprendre les choix du gouvernement, le contexte qui
préside à ces arbitrages complexes et que nous évaluerons
avec plus de justesse les orientations fondamentales du gouvernement en
matière de sécurité du revenu et de développement
de la main-d'oeuvre. Si tel est le cas, nous verrons que notre action se situe
dans la perspective du respect des personnes qui ont recours à la
sécurité du revenu et de notre foi au plein développement
de la personne apte au travail par l'emploi.
Je nous souhaite une période fructueuse et productive
d'étude des crédits du ministère de la Main-d'oeuvre, de
la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle. Je vous
remercie, M. le Président.
Le Président (M. Joly): Je vous remercie, M. le ministre.
Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve, s'il vous
plaît.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. Je comprends
donc que je pourrai bénéficier du même temps qui a
été imparti au ministre. Merci.
M. le Président, j'écoutais avec attention le ministre
nous indiquer que l'étude des crédits était un exercice
majeur pour le fonctionnement démocratique de notre Parlement, et
j'aurais souhaité l'entendre dire cela la semaine passée, quand
je réclamais d'obtenir les crédits pour, justement, pouvoir mener
convenablement cet exercice majeur. Je dois vous dire que je les ai
reçus à Montréal, par autobus, au terminus Voyageur, en
fin de soirée vendredi, et je ne crois pas que ce soit une façon
de faire, là, qui soit raisonnable. Je voulais vous l'indiquer, M. le
Président, parce que ce n'est pas évident. On en connaît la
complexité, je vous l'ai dit; j'étais encore ici à 2 h 30
pas hier après-midi mais dans la nuit.
Ceci dit, je comprends que le ministre a fait une ouverture sur
l'ensemble de ces crédits. Maintenant que j'ai la responsabilité
du dossier de l'Industrie et du Commerce, je me trouve à ne m'occuper
que du programme 7, celui du Développement de la main-d'oeuvre, et
j'apprécierais- pour le bénéfice de mon collègue,
le député de La Prairie, qui sera ici cet après-midi pour
les programmes relatifs à la Sécurité du revenu, que le
ministre puisse nous remettre copie de son discours pour qu'il puisse en
prendre connaissance avant cet après-midi.
Seulement quelque mots, M. le Président, sur la situation qui
prévaut actuellement pour les hommes et les femmes qui traversent une
période d'adversité en matière économique. Je
comprends que le ministre est optimiste. J'ai relu le discours qu'il
prononçait l'année dernière, et on y retrouvait le
même optimisme malgré que, entre temps, on ait atteint un record
inégalé du nombre de ménages à la
sécurité du revenu de même qu'un record historique du
nombre de bénéficiaires d'aide sociale.
Mais, au-delà de ça, je comprends surtout, une dimension
qui semble paradoxale au premier abord mais qui est maintenant incontournable
et qui sera certainement le plus important défi qu'on aura à
relever comme société, nous et toutes les sociétés
industrialisées, et qui est que la croissance économique se fait
dorénavant sans croissance de l'emploi. C'est quelque chose auquel on
n'était pas habitué. Jusqu'à maintenant, la reprise
économique voulait dire la reprise de l'emploi. Pourtant, depuis deux
mois que s'est faite l'annonce officielle de la fin de la récession, on
a constaté une diminution nette de 5000 emplois.
Les gens n'ont pas besoin de diplôme universitaire pour savoir
que, quand un investissement est annoncé, contrairement à ce qui
se passait auparavant, ça ne veut pas dire nécessairement plus
d'ouvrage mais, dans la plupart des cas, ça veut dire moins d'ouvrage
parce que les investissements se font essentiellement dans la
productivité pour améliorer le niveau de
compétitivité, et ça signifie moins d'emplois. Il n'est
pas nécessaire de citer un seul exemple; l'exemple du Lac-Saint-Jean
où l'Alcan, après avoir investi 1 000 000 000 $, a finalement vu
le nombre d'employés diminuer de 2800. Et dans le secteur que je connais
bien, qui est celui de l'est de Montréal, des investissements, il y a
deux ans, de l'ordre de 640 000 000 $, ont résulté en 340 emplois
de plus et en 2400 emplois de moins. Et, ça, malheureusement, le
gouvernement ne semble pas le comprendre. Et dans les propos que le ministre
tenait, je me rendais compte qu'il continue, de façon
désuète, à penser que les indicateurs de croissance
économique vont être garants d'une croissance de l'emploi. Je
l'inviterais à prendre connaissance des excellentes études que
produit son ministère, excellentes études sur les perspectives de
main-d'oeuvre jusqu'en 1996, qui prévoient qu'on ne sortira pas du
niveau de chômage dans lequel on est maintenant avant la fin de 1996.
Évidemment, faut-il s'attendre, à ce moment-là,
peut-être, étant donné que c'est cyclique, à une
nouvelle récession. (11 heures)
Cependant, M. le Président, comme le temps nous est compté
et que j'ai seulement 2 h 30 pour le programme 7 qui concerne la question
absolument stratégique du Développement de la main-d'oeuvre,
j'aimerais immédiatement débuter, M. le Président. Sur
l'ensemble des budgets qui nous sont présentés, je constate donc
que la Société québécoise de développement
de la main-d'oeuvre sera chargée d'administrer des budgets qui
totalisent 278 000 000 $, en hausse, nous a-t-on dit, par rapport aux
crédits de l'an dernier. Mais encore faut-il savoir que l'an dernier les
crédits votés, qui totalisaient 250 000 000 $, 254 000 000 $ pour
être plus précise, ces crédits n'ont occasionné des
dépenses probables que de 226 000 000 $. C'est donc presque 27 000 000 $
dans le domaine du développement de la main-d'oeuvre qui n'ont pas
été dépensés l'an dernier. Et on retrouve cela au
programme 7 dans les renseignements généraux qui nous ont
été transmis. C'est donc, sur ces 278 000 000 $, un total de 167
000 000 $ qui provient du gouvernement fédéral. Et plus de 60 %
des budgets administrés par la Société
québécoise de développement de la main-d'oeuvre
proviennent des fonds fédéraux, et ces fonds
fédéraux qui totalisent 167 000 000 $ sous la gouverne de la
SQDM, si on simplifie, s'ajoutent aux 900 000 000 $ que le gouvernement
fédéral dépensera cette année sur le territoire du
Québec en matière de formation de la main-d'oeuvre.
Et, évidemment, la question qu'on se pose, c'est qu'on ne peut
pas s'étonner de voir Québec assister, complètement
impuissant, à la décision du ministre Valcourt de reporter
jusqu'au 31 décembre prochain l'entente tant décriée en
matière de formation de la main-d'oeuvre. Je comprends que le ministre a
reçu, en date du 17 mars dernier, une lettre de son homologue
fédéral lui annonçant le report au 31 décembre
prochain, la reconduction jusqu'au 31 décembre prochain de l'entente
signée en 1986.
J'apprécierais beaucoup, M. le Président, pour la
transparence de nos échanges et l'intérêt, je crois, du
public, que le ministre dépose la correspondance qu'il a
échangée avec le ministre Valcourt. Je crois que c'est
plutôt lui qui lui a écrit le 17 mars et que le ministre Valcourt
lui répondait en date du 31, le jour d'échéance de
l'entente.
C'est donc, finalement, une sorte de constat d'impuissance puisque,
contrairement au discours tenu par le ministre l'an dernier et l'année
précédente, on assiste à une situation de paralysie,
d'immobilité, de léthargie, mais pas de statu quo. Contrairement,
d'ailleurs, aux propos que le ministre tient sur le statu quo, il n'y en a pas
de statu quo; le statu quo, ça n'existe pas dans une
société, on avance ou on recule. Et, en l'occurrence, on assiste
présentement à une politique de fait accompli de la part du
gouvernement fédéral qui met en place ses conseils sectoriels
chargés de l'application des stratégies de développement
des ressources humaines. On sait l'annonce faite dans le budget de M.
Mazankowski au mois de décembre dernier d'un budget de 250 000 000 $ au
cours des cinq prochaines années en vue de créer des conseils
sectoriels chargés d'établir des normes professionnelles en
fonction des besoins de l'industrie, en vue de favoriser la mobilité, le
perfectionnement professionnel et les possibilités d'emploi. Et on sait,
M. le Président, que cela va même au-delà de la
main-d'oeuvre proprement dite puisque le fédéral prévoit
que ces comités sectoriels pourront influer sur les services
dispensés par les réseaux d'enseignement. Et c'est donc une
politique de fait accompli dans le cadre des 55 comités
sectoriels, dans les secteurs les plus divers, ces comités qui se
mettent en place et dont la totalité est située en Ontario.
Québec dépense à peine 100 000 000 $. Plus
exactement, sur le budget de 278 000 000 $, quand on soustrait les 167 000
000$... On se comprend bien là, ces 167 000 000$, c'est les 141000 000$
plus les 24 000 000 $ qui vont au MEQ et puis au MESS. Quand on les diminue, la
part du fédéral, les 167 000 000 $ des 278 000 000$, il reste
111000 000$. Puis les 111 000 000 $ là, ça inclut même
PATA. Puis PATA, ce n'est pas pour du développement de la main-d'oeuvre,
c'est pour retirer des travailleurs âgés licenciés de la
main-d'oeuvre. Alors, il y a un gros 13 000 000 $ là-dedans, ce qui fait
que c'est à peine 90 000 000$ que Québec dépense
finalement en matière de formation de la main-d'oeuvre.
Et là, il ne faut pas s'étonner. Et moi, je suis assez...
Hum! je pèse les mots. Je n'aime pas la surenchère verbale, mais
je suis assez indignée de voir que le seul programme d'aide aux
individus, qui s'appelait auparavant Recyclage et perfectionnement, qui a
changé de nom, qui s'appelle Programme d'aide aux individus, c'est le
programme où on constate une diminution de budget: rien de moins que 7
000 000 $ en 1992-1993 par rapport à l'année d'avant, avec une
diminution de 17 000 participants en 1992-1993 par rapport à
l'année d'avant.
Je me suis fait un tableau de ce programme depuis cinq ans, 1987-1988
jusqu'à maintenant. On constate dans ce programme qu'en 1987-1988 il y
avait 196 740 participants pour un total de dépenses de 32 000 000 $. Je
regardais les chiffres fournis dans les renseignements généraux
par le ministère, on a maintenant 18 000 000 $ de budget et un total de
91 000 participants; c'est presque la moitié moins. Le seul programme
offert à l'ensemble des personnes qui veulent améliorer leur sort
professionnel dans notre société. Et on prévoit le pire,
d'une certaine façon, suite à l'entrevue que le président
de la Société, M. Arsenault, donnait au journal Le Soleil,
où il annonçait une tarification accrue dans ses programmes. On
aura l'occasion d'y revenir, bien évidemment.
C'est donc, pour le budget de la Société
québécoise de développement de la main-d'oeuvre, sur ces
278 000 000$, un total de 60 000 000$ qui seront affectés aux frais de
fonctionnement: les 53 500 000 $ qu'on votera avec les crédits, plus 7
000 000 $ de revenus autonomes avec les tarifs. C'est un budget de
fonctionnement de 60 000 000 $ au total, si on fait l'addition des deux:
revenus autonomes plus les crédits. 60 000 000 $ pour gérer des
programmes qui en totalisent 223 000 000 $, c'est pas mal cher du programme,
ça. Ça fait pas mal d'argent consacré à
l'administration. C'est un total de 223 000 000 $, c'est-à-dire 119 000
000$ du fédéral et le reste de Québec; ça s'appelle
les programmes de transfert à la Société
québécoise de développement de la main-d'oeuvre; et
ça, c'est presque 25 %. Il y aurait de quoi mettre le minis- tre
Gérald Tremblay là-dedans. Il doit y avoir un problème de
gestion quelconque. À moins...
Et c'est finalement la conclusion que je tire. Je ne crois pas que
ça soit lié aux personnes, je crois que les gestionnaires de la
main-d'oeuvre sont des gens très qualifiés, mais je crois
essentiellement que le gabarit de la Société
québécoise de développement de la main-d'oeuvre a
été conçu pour administrer des programmes de formation qui
totalisent 1 000 000 000 $ et il se retrouve à gérer les
programmes d'avant, sans changement, puisque la part du fédéral
dans les programmes de formation, la part qui passe par la gestion de la
Société québécoise de développement de la
main-d'oeuvre, elle, n'a pas bougé depuis 1986.
Alors, on assiste à quoi? Le fédéral dépense
plus d'argent, globalement, et depuis 1986, il n'en a pas dépensé
plus, il n'y a eu aucune indexation, donc, ça veut dire qu'il en a
dépensé moins. Ça veut dire exactement ceci: Tous les
programmes destinés aux prestataires de l'assurance-chômage ne
sont pas gérés par la Société
québécoise, les programmes destinés aux
bénéficiaires de l'aide sociale ne sont pas gérés
par la Société québécoise puisqu'ils le sont par
les centres Travail-Québec, et le reste, qui n'est ni programme pour
prestataires de l'assurance-chômage ni programme pour les personnes
assistées sociales, bien, sur le reste, c'est l'entente auxiliaire qui
n'est pas reconduite et qui est échue depuis le 31 mars dernier, et pour
laquelle Ottawa continue à débourser de l'argent sans indexation
depuis sept ans. Si le ministre trouve que ça va bien, je ne sais pas ce
qu'il lui faudrait pour qu'il commence à penser que ça va mal.
(11 h 10)
M. le Président, il y a un dossier qui, en plus de la
Société québécoise de développement de la
main-d'oeuvre, m'intéresse beaucoup, c'est celui du Crédit
d'impôt remboursable à la formation. C'est la première fois
que, enfin, depuis trois ans, on a un tableau de la situation. À chaque
année je relisais encore les crédits de l'an dernier
le ministre, encore l'an passé, me disait qu'il fallait attendre
les données fiscales, que c'était administré par le
ministère du Revenu et qu'il fallait attendre que les rapports
d'impôt aient été complétés, puis
traités par le ministère du Revenu.
Eh bien, maintenant, on a des chiffres inquiétants et je veux,
évidemment, parler des tableaux que l'on retrouve autant dans les
renseignements particuliers qui nous sont transmis que dans les
procès-verbaux de la Société québécoise de
développement de la main-d'oeuvre, en date du 8 avril dernier. Et
là, on se rend compte qu'après l'annonce faite par le ministre
des Finances dans le budget de 1990-1991, une annonce qui prévoyait un
impact financier pour le gouvernement du Québec... Je cite, à la
page 80 de l'annexe A du budget, les déclarations du ministre des
Finances aux mesures fiscales intitulées: Crédit d'impôt
remboursable à la formation; former, une main-d'oeuvre qualifiée.
On annonçait un impact financier de 67 000 000 $, la première
année, en 1990-1991, un impact financier de
100 000 000 $ en 71991-1992 et de 108 000 000 $ en 1992-1993. Ce sont
des chiffres que le ministre connaît. À chaque année, on
s'en est parlé. C'est donc un total de 275 000 000 $ d'impact financier,
de coûts, de coûts fiscaux et non pas de coûts de formation.
C'était ce que le gouvernement considérait qu'il allait devoir
assumer comme impact financier: 275 000 000 $ sur trois ans.
Eh bien, les données fournies à l'occasion de
l'étude des crédits nous révèlent que pour ces
trois années réunies... Et on retrouve ça dans
l'état de la situation, au programme Crédit d'impôt pour la
formation professionnelle, depuis 1989, page 54 des renseignements:
Crédit accordé et crédit moyen par entreprise. Même
en additionnant, pour l'année 1992, en tenant compte de
l'astérisque, là, puis en projetant cinq fois plus que le montant
qu'on y retrouve maintenant, c'est un gros total d'un maximum de 21 000 000 $
que le gouvernement aura à assumer comme coût fiscal sur les 275
000 000 $ annoncés.
Je me suis rendu compte, M. le Président, qu'il y avait eu une
sorte de confusion qui s'était installée dans les informations
qu'on nous avait transmises depuis deux ans. Et vous voyez ça
également dans les renseignements qui nous ont été fournis
où on nous signale, à la page 57, les coûts de formation
correspondant aux activités prévues au contrat. Ces coûts
de formation, ça n'a rien à voir avec le coût fiscal;
ça n'a rien à voir avec le crédit alloué.
D'ailleurs, on retrouve une note, en bas de page, à la page 57, qui le
dit en toutes lettres, là. On dit: II faut préciser que les
données que nous fournissons correspondent à des dépenses
de formation et non à des crédits alloués. Alors, il y a
eu des dépenses de formation, 8 500 000 $ la première
année; 32 000 000 $ la deuxième année et,
vraisemblablement, à peu près la même chose pour
l'année 1992-1993. Mais ça, ce sont des coûts de formation.
En tant que tel, ce que ça a coûté au gouvernement, ce
n'est pas ce qui est indiqué là, ça, ce sont des
coûts de formation pour l'entreprise. Pour le gouvernement, il faut aller
à la page 54 pour se rendre compte que, la première année,
ça lui a coûté un gros 1 600 000 $; la deuxième
année, un gros 9 900 000 $; puis, la troisième année,
vraisemblablement, avec les prévisions qui sont faites dans les
données qui nous sont fournies, à peu près 10 000
000$.
Ça veut donc dire que sur les 275 000 000 $ annoncés, les
coûts de formation... Parce que le ministre va sans doute nous parler des
225 000 travailleurs qui, à un titre ou l'autre, ont participé
à un exercice de formation. Mais ça, ça n'a rien à
voir avec le crédit d'impôt remboursable à la formation,
c'a à voir avec la formation que les entreprises offrent à leurs
travailleurs. Et il faut bien comprendre, à ce moment-là, que les
entreprises le faisaient, n'avaient pas attendu après l'exercice de
statistiques du gouvernement pour le faire, également. Puis il faut
comprendre, à ce moment-là, qu'il y a un problème avec le
crédit d'impôt remboursable à la formation. Il était
censé corriger le faible niveau d'investissement privé, il
était censé introduire la culture de la formation dans
l'entreprise. En tout cas, chose certaine, ça n'a pas coûté
cher au gouvernement en regard de ce qu'il avait projeté
dépenser. et ça veut dire quoi? pour la petite et moyenne
entreprise, là, elle a eu beau totaliser 83 % des contrats, elle n'a
obtenu que 35 % du peu de crédits accordés. c'est donc 65 % des
crédits alloués dans ce programme crédit d'impôt
remboursable à la formation; 65 % l'ont été à la
grande entreprise. d'ailleurs, on retrouve cette information-là dans le
procès-verbal, à la page 14, du conseil d'administration, en date
du 8 avril. j'en fais la lecture, m. le président. on y dit: par
ailleurs, les statistiques du ministère du revenu pour l'année
1991 révèlent que 83 % des entreprises qui se sont
prévalues du crédit étaient des pme, bien que les
crédits accordés à ces dernières n'atteignent que
35 %.
Donc, c'est la grande entreprise qui faisait déjà de la
formation qui se trouve, en fait, récompensée avec les
crédits d'impôt, qui va ramasser le gros du morceau. Et là
où on voulait que la formation débute où elle ne se
faisait pas puisque la PME fait une heure de formation pour sept heures dans la
grande entreprise on voit que, finalement, c'était une annonce
sur papier et que le gouvernement aurait intérêt, certainement,
à réviser ses mesures fiscales en période de
récession. On comprend que c'est totalement inapproprié, les
entreprises n'ont pas de liquidités, et c'est un problème de
liquidités qu'elles rencontrent, essentiellement. Est-ce que vous pensez
qu'elles vont débourser, effectuer la dépense sachant que
ça va prendre des mois avant de se faire rembourser?
Je me rappelle un document qui avait été
préparé pour le comité permanent d'adaptation de la
main-d'oeuvre, document préparé par le ministère, dans
lequel on disait qu'advenant l'échec de la mesure, le ministère
devait songer à repenser, à réexaminer, à
réviser sa manière de faire. Est-ce qu'il ne serait pas temps,
là, présentement, de réviser la manière de
faire?
Quoi qu'il en soit, dans les informations qui sont transmises, je
comprends qu'il y a un comité interministériel qui examine
présentement cette question du crédit d'impôt à la
formation. Il y a un comité interministériel qui étudie
des modifications qui pourraient faire l'objet du prochain discours sur le
budget; c'est à la page 12 du procès-verbal du 8 avril. Alors,
peut-on savoir où en est rendu ce comité interministériel?
Et est-ce qu'il y a une volonté, là? J'espère que le
ministre ne nous dira pas qu'il est content, parce que si ça le
satisfait, là, c'est assez inquiétant.
Et, M. le Président, quelques mots également sur l'annonce
faite l'an dernier. C'était le nouveau programme de l'an passé.
Quelques mots sur l'annonce faite, là, à l'égard du
programme SPRINT, c'est-à-dire le programme Subvention et prêt
individuels aux travailleurs et travailleuses. Je constate qu'une cinquantaine
de personnes se sont déjà inscrites au recours collectif
intenté contre le ministère. La requête pour permission
sera bientôt entendue, à moins qu'elle l'ait déjà
été et que le ministre ait de l'information sur ce dossier.
Là, il
faut comprendre que des 15 000 000 $ annoncés l'an dernier, il y
a 3 500 000 $ qui ont été dépensés.
Vraisemblablement, peut-être y en aura-t-il 3 000 000 $, parce que c'est
difficile de se retrouver dans les différents tableaux qui nous sont
remis. Mais, quoi qu'il en soit, au mieux, ça sera la moitié de
l'argent annoncé qui aura été dépensé et, au
pire, ça sera le quart, mais ça ne sera pas, évidemment,
les 15 000 000 $ projetés.
Alors, qu'on nous dise cette année qu'on va en dépenser 35
000 000 $ quand on n'a pas réussi à en dépenser la
moitié l'an dernier, là, évidemment, on va attendre de
connaître les correctifs qui ont été apportés,
lesquels sont... On nous en avait annoncés, on nous avait dit qu'en date
du 31 mars dernier, il y aurait un bilan des mesures correctives. Alors, on
souhaiterait que ça soit déposé à cette commission,
à la présente commission. (11 h 20)
En date du 19 mars, les informations que nous avons, qui nous viennent
de la SQDM, sont à l'effet que 223 participants avaient signé un
contrat de participation sur 988 personnes qui avaient reçu la
confirmation d'admissibilité. Donc, le 19 mars, c'est il y a à
peine un mois et demi. Il y a eu pour un total de 2796 personnes qui ont
déposé une demande d'adhésion. Ce n'est évidemment
pas vraiment performant.
Il va falloir faire le bilan de ce programme-là, étant
donné l'espoir qu'il avait suscité chez bien des gens qui avaient
cru, avec toute la publicité qui en a été faite, que
c'était, pour eux, une façon d'aller garantir leur niveau de
qualification. Nous y reviendrons.
Le président me fait signe qu'il me reste trois minutes, trois
minutes que je veux consacrer au programme d'aide aux travailleurs
âgés. En relisant les crédits, je me rends compte que, des
1116 licenciements qui sont survenus depuis le début du programme,
à peine 294 licenciements ont été jugés admissibles
au programme. C'est donc 802 licenciements qui ne l'ont pas été,
c'est-à-dire que ce programme PATA, c'est comme un mirage qui
s'évanouit quand les travailleurs âgés viennent pour
essayer d'en bénéficier. Puis, c'est pire à
Montréal; puis ça n'a pas de bon sens à
Montréal.
Moi, je reçois au moins une lettre par semaine. Vous allez me
dire: Ce n'est pas beaucoup une lettre. Si vous la lisiez, vous trouveriez
ça suffisamment pathétique pour trouver qu'il y a quelque chose
à faire, que ça n'a pas de bon sens. C'est complètement
aberrant de penser que le programme d'aide aux travailleurs, le PAT, avait
été mis sur pied pour le secteur mou (chaussures, textiles,
vêtements, meubles), puis ça s'est élargi à
l'amiante. Présentement, les travailleurs et travailleuses qui ne
peuvent pas en bénéficier sont justement ceux et celles pour qui
le programme avait été mis sur pied originairement. Ça
veut dire que dans les ateliers de couture où 90 % de ces ateliers
comptent de 30 à 40 employés, à Montréal, oubliez
ça, vous ne pouvez pas en bénéficier. Les gens trouvent
ça injuste, profondément injuste.
Il faudrait lire les lettres que je reçois. Je pense que si j'en
avais la possibilité, je vous en ferais la lecture de quelques-unes
d'ailleurs, ce matin, pour comprendre que ça ne peut pas durer.
Et là, l'inquiétude que j'ai c'est que, l'an passé,
le ministre a dit qu'il allait corriger ça. Il avait même
consacré, annoncé dans le budget 5 000 000 $, dans le budget du
Grand Montréal: le développement de la main-d'oeuvre, 5 000 000
$; sa part à lui en attendant celle d'Ottawa pour corriger ça.
Puis, évidemment, de ces 5 000 000 $ là, il n'y a pas un sou qui
a été dépensé, Ottawa a dit non au mois
d'août dernier. Le ministre a resigné pour trois ans une nouvelle
entente en janvier. Alors, qu'est-ce qui va arriver? Qu'est-ce qui va se
passer? Est-ce qu'on prétend que les choses vont en rester ainsi, avec
les bouleversements que connaissent ces secteurs du textile et du
vêtement en particulier, est-ce qu'on prétend que ça va
encore rester ainsi pour trois ans?
En matière de travailleurs licenciés, en plus des 5 000
000 $ annoncés qui n'ont pas été dépensés
pour PATA, le ministre avait aussi prévu un autre montant de 5 000 000 $
qui n'a pas été dépensé dans le fonds des
travailleurs licenciés; il y a à peine quelque 100 000 $ qui
l'ont été.
Qu'est-ce qui se passe avec le 9 000 000 $ pour le reclassement?
Ça n'apparaît plus dans le budget. C'était dans les
crédits du ministère de la Main-d'oeuvre et de la
Sécurité du revenu, on lit: Subvention au comité de
reclassement de la main-d'oeuvre, 1992-1993, 9 000 000 $; 1993-1994, pas un
sou. Où c'est passé ça? Ça devient quoi ces
comités de reclassement? Le 9 000 000 $ qui est là, on fait quoi
avec?
J'aimerais vérifier dans quelle mesure on ne le verra pas
réapparaître après avoir été retiré
des crédits, réapparaître sous une nouvelle appellation
dans le discours du budget du ministre Gérard D. Levesque; on nous a
habitués à transformer des noms de programmes. Vraisemblablement,
on créerait, nous dit-on, un fonds des travailleurs licenciés
dans lequel on recyclerait les 9 000 000 $ qu'on dépensait pour les
comités de reclassement, puis les 5 000 000 $ qu'on avait prévu
consacrer pour ce fonds-là l'an passé, qu'on n'a pas
dépensés, et puis on ajouterait ça à de l'argent
recyclé d'Ottawa, un montant de 83 000 000 $ qui était
déjà dépensé, l'article 26... des travailleurs qui
veulent aller en formation.
On a vu, l'an dernier, toutes les manifestations, pendant
l'été, des chômeurs qui réclamaient des budgets
parce qu'on leur avait dit non, étant donné qu'il n'y avait plus
assez d'argent...
Le Président (M. Joly): Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve, à moins que M. le ministre consente... Moi, je
n'ai pas d'objection à vous laisser aller...
Mme Harel: Alors, je termine, M. le Président.
Le Président (M. Joly): Non, non. On me fait signe que
vous avez tout le temps voulu.
Mme Harel: Je termine donc en vous disant, évidemment, que
c'est inquiétant de constater que ces 9 000 000 $ pour les
comités de reclassement n'apparaissent plus. Faut-il les prévoir
dans un autre programme, sous une autre appellation?
Ce n'est rien, évidemment, ce que j'ai pu en dire en comparaison
des questions que nous avons en matière de développement de la
main-d'oeuvre. Le ministre a écrit à son homologue
fédéral pour lui demander de consacrer aux mesures actives plus
d'argent qu'il n'en consacrait, étant donné qu'il a maintenu le
budget de l'an dernier au moment où le ministre québécois
avait pourtant annoncé que ça allait augmenter avec les
resserrements à l'assurance-chômage. Là-dessus aussi, on
aimerait avoir de l'information du ministre.
Le Président (M. Joly): Je vous remercie beaucoup, Mme la
députée.
Alors, maintenant que vous connaissez les règles
d'échanges, M. le ministre, si vous voulez peut-être, en
réplique...
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: Oui, M. le Président. Je voudrais bien tenter
de donner un peu d'information à la députée, mais elle a
couvert un très large champ et je ne pourrai pas entrer dans le
détail de chacun des points qu'elle a touchés, mais je me
contenterai de réponses un peu générales. quand j'entends
des critiques à l'égard du programme pata, où on nous dit
que c'était beaucoup mieux sous l'ancien programme pat, ça me
fait sourire un peu, m. le président, parce que sous l'ancien programme
pat le gouvernement du québec, du temps du parti
québécois, ne mettait aucun sou dans le programme. c'était
un programme à 100 % financé par le gouvernement du canada.
alors, on a beau dire que ça allait bien dans ce temps-là
québec faisait un travail extraordinaire, le gouvernement du
québec du temps gérait ce programme pat d'une façon
fantastique m. le président, ça ne coûte pas cher,
quand on investit zéro sou dans un programme, de se péter les
bretelles, entre guillemets je m'excuse pour la bonne performance
de ce programme-là qui était un programme à 100 %
fédéral. nous, lorsque nous sommes arrivés aux affaires en
1985-1986, le fédéral venait d'annuler le programme. il n'y avait
plus du tout de programme, c'était zéro. alors, on nous a dit:
bien, si vous voulez qu'on continue ce programme-là il va falloir que le
québec investisse. on a négocié. on voulait nous faire
investir 50 % du programme. finalement, on a conclu avec le
fédéral que, dorénavant, le québec investirait dans
30 % des coûts du programme pata, le nouveau programme. bien, quand on
investit 30 % dans un programme, m. le Président, on n'est pas le gros
actionnaire, comme dans une entreprise; on est un peu minoritaires et on ne
peut pas dicter nos vues dans une entreprise conjointe quand on est partenaires
à 30 %. Alors, nous avons fait des pressions auprès du
gouvernement fédéral pour modifier les normes du programme PATA,
le nouveau programme d'aide aux travailleurs âgés, de façon
à diminuer les normes en ce qui concerne le secteur de l'habillement
à Montréal.
Jusqu'à maintenant, nos discussions avec le fédéral
n'ont pas permis d'en venir à une diminution des normes en ce qui
concerne ce secteur-là pour Montréal, bien que les discussions se
poursuivent. La députée de Hochelaga-Maisonneuve sait fort bien
que je suis revenu à plusieurs reprises, j'ai tenté à
plusieurs reprises par des communications, une correspondance avec les
ministres fédéraux, tant le ministre de l'Emploi et de
l'Immigration que le ministre de l'Industrie, pour tenter...
Une voix: Le ministère des Finances.
M. Bourbeau: Oui, le ministère des Finances. ...pour
tenter de faire en sorte d'alléger cette norme-là pour la
région de Montréal, le ministère de l'Industrie, des
Sciences et de la Technologie, le ministère fédéral.
Jusqu'à maintenant, j'ose espérer que tous ces
ministères fédéraux qui sont impliqués pourront en
arriver à se concerter entre eux pour trouver une solution heureuse dans
le dossier, et tout ça, bien sûr, pour le plus grand bien des
travailleurs et des travailleuses du secteur de l'habillement à
Montréal.
J'aimerais quand même rappeler que...
Mme Harel: Seriez-vous prêt, dans le cadre de
l'élection fédérale, à faire une conférence
de presse avec moi pour leur réclamer?
M. Bourbeau: M. le Président, si la députée
de Hochelaga-Maisonneuve veut m'amener dans ses tractations politiques... La
meilleure façon, M. le Président, de ne pas avoir de
résultats, c'est de faire une conférence de presse conjointe avec
la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Là, on est certains
que le gouvernement fédéral va se braquer contre le
Québec. Alors, j'aime autant continuer mes discussions avec le
gouvernement fédéral, ça risque d'être plus
positif.
Mme Harel: Mais ça fait déjà deux ans
qu'elles sont commencées. Vous m'aviez annoncé ça il y a
deux ans. (11 h 30)
M. Bourbeau: M. le Président, le programme PATA, quoiqu'on
en dise, quoique la députée en dise, a quand même atteint
des résultats intéressants. Il y a quand même un bon nombre
de travailleurs québécois âgés qui ont
profité et qui vont profiter encore dans les mois et les années
à venir des bienfaits de ce programme-là. Ce n'est
peut-être pas encore aussi bon que ce que souhaiterait la
députée, mais c'a quand même
atteint des objectifs intéressants.
Je voudrais revenir, M. le Président, aux deux autres programmes
que la députée de Hochelaga-Maisonneuve écorche
allègrement: le crédit d'impôt remboursable à la
formation et le programme SPRINT. Je les prendrai ensemble tous les deux. Il
s'agit, M. le Président, de deux programmes que le gouvernement du
Québec a mis sur pied depuis trois ans, un il y a trois ans et l'autre
l'an dernier, pour tenter de convaincre les entreprises
québécoises et les individus, les travailleurs
québécois, d'augmenter leurs compétences, d'adapter leurs
compétences aux nouvelles réalités du marché du
travail. on se préoccupe beaucoup, un peu partout, dans tous les
milieux, du sort des chômeurs, du sort des personnes assistées
sociales, mais il ne faut quand même pas oublier que le plus grand nombre
des personnes sont en emploi. on a un taux de chômage de 12 % ou 13 %,
mais ça veut dire qu'il y a quand même 82 %, 83 %, 87 %
plutôt, 88 % des travailleurs qui sont en emploi, ceux qui ne sont pas en
chômage, et ces gens-là évoluent dans un milieu qui est en
constante mutation. il n'est pas absolument certain que si on reste immobile,
si on fait du surplace, on ne régressera pas. au contraire, les gens qui
font du surplace régressent. de sorte que quand on travaille, quand on a
une occupation et qu'on ne se préoccupe pas de ses compétences,
avec le temps, on devient plus ou moins incompétent. et un jour, on peut
être mis en disponibilité ou en chômage parce que la
technologie a évolué et le travailleur n'a pas
évolué. de sorte qu'aujourd'hui, il n'y a plus personne qui est
assuré de la permanence de son emploi si cette personne-là ne se
préoccupe pas d'adapter ses compétences aux changements
technologiques.
Le Québec a réalisé ce problème-là,
M. le Président, depuis quelques années et il a conçu deux
programmes: un pour les entreprises, pour adapter leur main-d'oeuvre aux
changements technologiques, et l'autre pour les travailleurs pris
individuellement. On prétend que ces programmes-là ne sont pas
aussi performants qu'ils auraient dû l'être, ou qu'on aurait
espéré qu'ils soient. Très bien, M. le Président,
ça démarre moins vite qu'on avait prévu. Mais je suis
allé, en janvier dernier, à une conférence
fédérale-provinciale des ministres canadiens de la Main-d'oeuvre,
de toutes les provinces canadiennes, et j'ai eu l'occasion d'expliquer à
mes collègues ces deux programmes-là.
M. le Président, je vous dirai que le Québec est la seule
province au Canada qui ait conçu des programmes d'adaptation de la
main-d'oeuvre. Il n'y en a aucune autre au Canada qui ait mis sur pied de tels
programmes et je vous dirai que ça fait l'admiration des autres
provinces canadiennes de réaliser que le Québec, en pleine
récession, a été capable de consacrer des fonds, des
millions de dollars à cette vocation qu'est l'adaptation de la
main-d'oeuvre.
On en parle beaucoup, de la nécessité d'inculquer à
nos entreprises une culture de la formation, mais très souvent ce sont
des paroles, on ne passe pas très sou- vent à l'acte. En fait,
comme je le disais tout à l'heure, il n'y a aucune autre province
canadienne qui, à date, a mis sur pied des programmes d'adaptation de la
main-d'oeuvre. Alors, qu'on nous dise que nos programmes ne sont pas aussi
performants qu'on aurait pensé, qu'on aurait souhaité, M. le
Président, le temps dira si oui ou non ces programmes-là
atteindront leur rythme de croisière.
Nous, du côté du gouvernement, on n'a rien à se
reprocher. On a identifié les problèmes, on a proposé des
solutions, on a annoncé des programmes, on a mis l'argent sur la table.
Maintenant, si les entreprises québécoises, pour toutes sortes de
raisons, n'y viennent pas avec autant d'enthousiasme qu'on aurait
souhaité, c'est malheureux. Je le déplore moi aussi. Mais, comme
je l'ai déjà dit dans le passé: Je peux conduire un cheval
jusqu'à l'abreuvoir mais je ne peux pas l'obliger à boire. Et une
fois que les fonds sont là et que les entreprises peuvent s'en servir,
le gouvernement ne peut quand même pas prendre les décisions
à la place des entreprises.
Il y a toutes sortes de raisons qui motivent cette réticence,
jusqu'à un certain point, de nos entreprises à en venir à
investir, à considérer les dépenses d'adaptation de la
main-d'oeuvre comme un investissement et pas nécessairement comme une
dépense. La conjoncture économique que nous avons vécue au
cours des deux ou trois dernières années a fait en sorte que dans
plusieurs entreprises, surtout dans les PME, on est réticents parfois
à investir dans l'adaptation de la main-d'oeuvre parce que, parfois, on
ne sait pas trop si on sera encore en affaires dans les mois qui viennent et on
se concentre sur l'art de survivre.
Il y a aussi toutes sortes d'autres problèmes qui peuvent
survenir à l'occasion et qui font qu'on puisse retarder des
dépenses d'investissement dans la main-d'oeuvre, mais il reste quand
même que les chiffres, même s'ils sont moins éloquents qu'on
souhaiterait, sont quand même intéressants.
Quand on regarde les tableaux, par exemple, on se rend compte que, pour
l'année 1992, on a signé deux fois plus de contrats de formation
que pour 1991; on a donc une progression géométrique assez
importante, du simple au double. Pour ce qui est du nombre de participants,
c'est la même chose, c'est à peu près le double. Le nombre
d'heures de formation, M. le Président, a quadruplé entre 1991 et
1992. Alors, quand on parle de multiplier par quatre et même plus que
quatre le nombre d'heures de formation, c'est donc dire que l'ascension est
spectaculaire.
Quand on regarde le nombre d'heures par participant, ça, c'est
très important aussi, non seulement on fait plus d'heures, mais beaucoup
plus d'heures par participant; donc, la formation est plus importante, est plus
profonde à l'égard de chacun des participants. Bon. On peut
regarder aussi les coûts de formation qui ont augmenté.
D'une façon générale, M. le Président, on
remarque qu'il y a une progression importante du nombre
d'heures de formation, du nombre de contrats de formation, de
travailleurs qui sont passés par la formation dans les entreprises
québécoises, et les statistiques indiquent que, quand on regarde
le nombre d'entreprises, bien, près de 83 % des entreprises qui se sont
prévalues du programme sont des PME; donc, la PME
québécoise, qui était celle qui, jusqu'à
maintenant, jusqu'à récemment, ne se préoccupait pas de la
formation, de l'adaptation de sa main-d'oeuvre, la PME québécoise
est en train de se mettre à l'heure de la formation, bien que, quand on
regarde les crédits accordés, ce soit plutôt la grosse
entreprise qui a pris la plus grande partie des crédits. Et c'est
normal, parce que la plus grande entreprise a des besoins de formation qui sont
souvent beaucoup plus profonds, beaucoup plus complexes aussi, étant
donné que la haute technologie est encore plus concentrée dans
les hautes entreprises, dans les grosses entreprises.
M. le Président, moi, je ne suis pas découragé,
contrairement à la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Il
faut dire que nos tempéraments ne sont pas les mêmes, bien
sûr. Moi, je suis plutôt de nature à regarder les choses
positivement, et ma collègue, bien sûr, soit par goût, soit
par déformation, soit parce qu'elle considère que c'est son
rôle, a tendance à souligner, imaginer même parfois des
aspects négatifs dans les statistiques que l'on peut présenter.
Moi, je pense, M. le Président, que même si le rythme de
développement de ces programmes-là n'est pas le même qu'on
aurait souhaité, on est sur la bonne voie, et c'est ce que, d'ailleurs,
pensent égalememt tous les observateurs le moindrement impartiaux.
J'exclus, bien sûr, l'Opposition officielle de ce groupe-là.
En ce qui concerne le programme SPRINT et je terminerai
là-dessus le programme SPRINT, qui est le deuxième
programme, celui-là vise à convaincre les travailleurs pris
individuellement d'aller parfaire leur formation.
M. le Président, je vous rappelle que, jusqu'à il n'y a
pas longtemps, un travailleur pouvait quitter l'école, l'école
d'arts et métiers, l'école de technologie ou, enfin, le
cégep maintenant, parce que ça fait partie des cégeps, et
espérer, et être raisonnablement certain qu'il était
compétent pour la vie. On avait un diplôme, une compétence,
on pouvait s'asseoir et travailler paisiblement jusqu'à la retraite; ce
n'est plus vrai. Aujourd'hui, on est compétent jusqu'à ce que
l'employeur change les équipements de l'industrie dans laquelle on est.
Quand on fait appel à de nouveaux équipements, à une
nouvelle technologie, la compétence vient d'en prendre un coup, et
peut-être même qu'elle n'est plus là. Alors, on est toujours
sujet à perdre son emploi si on n'adapte pas constamment sa
compétence aux changements technologiques.
Or, les employés pris individuellement, M. le Président,
peuvent constater, au fur et à mesure que passent les années, que
leur compétence diminue et qu'ils se rapprochent tranquillement de la
porte, si je peux parler ainsi. M. le Président, vous me le permet-
trez, puisque je suis le député de Laporte; alors, je peux en
parler en connaissance de cause. (11 h 40)
Alors, les travailleurs qui réalisent tout à coup que leur
compétence s'effrite peuvent maintenant décider eux-mêmes
d'aller augmenter cette compétence-là en participant au programme
SPRINT. C'est, à toutes fins pratiques, un programme de prêts et
bourses aux travailleurs en emploi qui décident de prendre une
année sabbatique pour aller chercher un diplôme en formation
professionnelle. Alors, on a décidé, ce programme-là, de
demander des soumissions publiques pour en confier la gestion à
l'entreprise privée, et c'est le Mouvement Desjardins qui a
été l'adjudicataire. Alors, nous avons donc confié la
gestion du programme SPRINT à la Confédération des caisses
populaires et d'économie Desjardins. Cette décision-là a
été prise afin de permettre une très grande
accessibilité au programme via les quelque 1600 caisses populaires, qui
sont réparties sur tout le territoire québécois.
La Confédération des caisses populaires Desjardins a
retenu les services d'une firme externe pour la partie qui est le traitement
administratif des demandes. Bien que nous devions prendre en
considération qu'il s'agisse d'un nouveau programme qui est en phase
d'implantation il a été annoncé au mois d'avril
dernier et on a commencé uniquement au mois de septembre et octobre 1992
à mettre ce programme en application le constat des retards qui
ont été imputés au traitement des dossiers, ce constat m'a
amené immédiatement à intervenir auprès des
autorités, des hautes autorités du Mouvement Desjardins pour
qu'elles prennent les mesures nécessaires afin que des correctifs
appropriés soient apportés à ce programme. Un plan
d'action est présentement en cours non seulement d'implantation, mais
d'exécution, visant à assurer la production des confirmations
d'admissibilité aux personnes inscrites dans le délai qui a
été prévu, c'est-à-dire de six à huit
semaines.
Les représentants du ministère de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle suivent de
très près la réalisation de ce plan d'action afin que
toutes les demandes reçues obtiennent une réponse dans les
meilleurs délais. Les informations de gestion disponibles me permettent
d'assurer à cette commission le respect de ce délai lorsque les
personnes inscrites feront parvenir, dès leur demande, les documents
requis des ministères et des organismes impliqués dans le
programme. Et je signale de plus, M. le Président, que la firme qui
était chargée du traitement informatique de ce programme, et qui
était une firme qui avait été retenue par le Mouvement
Desjardins, a depuis été remplacée; c'est donc dire que
des changements importants ont été apportés dans la
gestion du programme et comme le ministère a signé une
convention, une entente, un contrat clé en main avec le Mouvement
Desjardins et que j'ai confiance, M. le Président, dans le
sérieux du Mouvement Desjardins et sa compétence, je suis
raisonnablement convaincu que le Mouvement
Desjardins va faire tous les efforts qu'il faut pour donner suite
à ses engagements et s'assurer que le programme SPRINT rencontre les
objectifs recherchés.
Mme Harel: M. le Président...
M. Bourbeau: M. le Président, je voudrais seulement
terminer avec le programme SPRINT, si vous voulez. Alors, on avait
prévu, pour l'année courante je termine là-dessus,
M. le Président 2000 participants. La première
année d'opération, 2000 participants. J'ai dit tantôt que
le programme n'a pas démarré au printemps 1992, mais à
l'automne 1992. C'est donc dire que, évidemment, ayant
démarré à l'automne, il est difficile d'atteindre
l'objectif de 2000, mais les indications que j'ai, les dernières
indications sont, au moment où on se parle, enfin, à la fin du
mois d'avril, donc, il y a deux, trois jours: nous avions 2959 demandes
d'adhésion; il y avait eu 1294 confirmations d'admissibilité,
donc, un taux de 44 %, donc, presque 1300; et de ce nombre, environ 500
contrats avaient été signés; il y avait 285 demandes qui
étaient en étude de solvabilité et on avait refusé
869 demandes; il y avait eu 101 abandons, aussi.
Donc, on peut dire, de façon générale, que nous en
sommes à 1300 confirmations d'admissibilité à la fin de la
première année; les prévisions étaient de 2000.
C'est donc, M. le Président, raisonnablement satisfaisant, compte tenu
que le programme n'a pas démarré au printemps, mais à
l'automne 1992.
Le Président (M. Joly): Mme la députée, s'il
vous plaît.
Secteur main-d'oeuvre et emploi
Développement de la main-d'oeuvre
Crédit d'impôt à la
formation
Mme Harel: M. le Président, le ministre nous dit: Nos
programmes sont bons parce que les autres nous envient. Je ne crois pas que ce
soit là une démonstration très convaincante, étant
donné que ses collègues n'ont été informés
que des programmes sur papier et certainement pas de leur performance dans la
réalité.
Je reprends, M. le Président, ce que le ministre nous disait pour
le crédit d'impôt à la formation. Je constate encore une
fois qu'il continue à entretenir la confusion entre les contrats de
formation et l'aide allouée ou l'aide versée en crédit
d'impôt remboursable à la formation. Je comprends, avec
l'amélioration des contrats de formation... D'abord, il faut faire
attention, il faut faire très attention parce que c'est récent
qu'il y ait prise de statistiques. Étant donné qu'il y a à
peine trois ans, les entreprises de formation...
M. le Président, je voudrais qu'on parle un peu moins fort.
Le Président (M. Joly): Oui. MM. les
députés, s'il vous plaît! Monsieur, s'il vous plaît.
Merci.
Mme Harel: II y a trois ans, on ne prenait pas de statistiques,
on ne demandait pas l'enregistrement des entreprises de formation et on ne
tenait pas compte, de façon assidue, des contrats. Cependant, convenons
et espérons-le, qu'il y a amélioration dans l'entreprise. Mais il
faut convenir à ce moment-là aussi que c'est sans l'aide
gouvernementale puisque les chiffres intéressants que le ministre nous
transmet ce sont des chiffres qu'on retrouve, d'ailleurs, dans le
procès-verbal de la SQDM eh bien, ce sont des chiffres qui nous
permettent de constater que s'il y a eu pour un total de 65 000 000 $ ou 70 000
000 $ en dépenses de formation, c'est à peine quelques 20 000 000
$ qui ont pu se faire rembourser dans le crédit. une mesure qui ne
réussit pas à performer pour plus que 8 % de ce qui avait
été annoncé... parce qu'il a été
annoncé 275 000 000 $ durant ces trois années-là, et c'est
à peine 8 % qui ont été dépensés. alors, une
mesure qui fait à peine 8 %, quand on nous précise, d'ailleurs,
et je cite la sqdm: «ii est à penser qu'un nombre important
d'activités de formation données par les entreprises ne sont pas
admissibles à la mesure alors qu'elles sont, bien sûr,
déclarées dans une enquête.» alors, l'enquête
les révèle mais elles ne sont pas admissibles.
Le ministre dit: Ce n'est pas de ma faute, moi. Je ne peux pas obliger
les entreprises à utiliser ma mesure. Connaissez-vous beaucoup
d'entreprises, en connaissez-vous même cinq, là, qui ne sont pas
prêtes à utiliser de l'argent quand ça leur est offert
facilement? Moi, je n'en connais même pas une, même pas une! C'est
trop facile de s'en sortir comme ça, en s'en lavant les mains.
C'est la même réponse du ministre de l'Industrie et du
Commerce quand je lui pose la question: Comment il se fait que 45 000 000 $ de
moins ont été consacrés aux PME par la SDI l'an dernier?
Ce n'est pas rien, 45 000 000 $ de moins; c'est 60 % du budget de
l'année d'avant. On me dit: Bien, il n'y a pas de projets.
Et quand mon collège d'Abitibi-Ouest, François Gendron,
pose la question au ministre Picotte: Comment ça se fait qu'il y a
seulement le tiers de l'entente auxiliaire en matière de
développement régional qui a été
dépensé en cinq ans? Il répond: II n'y a pas de projets.
Ça serait possible? Le ministre vient de nous répondre ça:
Bien, les entreprises n'ont pas demandé de crédit d'impôt
remboursable à la formation. Pensez-vous que c'est raisonnable de penser
qu'une entreprise ne va pas demander ce à quoi elle a droit si elle le
sait et si c'est facile de l'obtenir?
Il y a peut-être des problèmes, et je ne comprends pas que
le ministre ne se pose pas la question: Est-ce que c'est la bonne mesure?
Est-ce que c'est la mesure appropriée? Est-ce que c'est celle qui
convient, présentement, avec le rattrapage qu'il faut faire dans
l'investissement? Première question.
D'autre part, je comprends aussi, M. le Président, que dans le
cas du programme SPRINT là, ce que le ministre nous annonce, c'est qu'il
y a 500 participants, actuellement. Donc, il y a finalement 25 % des 2000
participants jugés admissibles qui ont signé un contrat et qui
sont actifs. Les autres, ça reste encore toujours sur papier, tout
ça! Et c'est évidemment important.
Est-ce que le ministre et c'est une question qui m'apparaît
vraiment importante entend continuer à faire gérer des
programmes comme ceux-là à l'extérieur? Est-ce qu'il
considère que ça a. été improvisé? Comment
il entend réagir, là, au recours collectif? Est-ce qu'ils ont
préparé une défense, quelle est la défense, et
est-ce qu'ils ont le bilan des correctifs qui devaient être prêts
pour le 31 mars? Est-ce qu'il peut aussi nous préciser qu'est-ce qui a
été vraiment dépensé? Les dépenses
probables, à la page 61 du cahier explicatif, c'est 3 769 000 $ pour
SPRINT et, à la page 60, on nous parle de 7 000 000 $. Alors, peut-on
nous préciser, là, comment on peut passer du simple au double?
Ça reste toujours la moitié seulement des crédits qui ont
été annoncés l'an dernier et qui étaient de 15 000
000 $. (11 h 50)
M. Bourbeau: M. le Président, des questions...
Malheureusement, j'ai perdu ma sténographie depuis quelques
années, alors, j'ai de la difficulté à prendre en note
toutes les questions que pose la députée de
Hoche-laga-Maisonneuve à un rythme accéléré. Mais
j'ai pris quelques notes.
Je reviendrai à sa critique fondamentale sur sa déception
devant l'utilisation mitigée de la mesure du crédit d'impôt
à la formation. Elle nous dit que je lui ai fait les mêmes
réponses qu'elle a entendues de mon collègue le ministre de
l'Industrie, du Commerce et de la Technologie, et aussi peut-être de mon
collègue le ministre du Développement régional. Ça
prouve une chose, M. le Président, c'est que, dans ce gouvernement, on a
de la suite dans les idées, qu'on n'a pas autant de politiques
gouvernementales qu'il y a de ministres ou de ministères. Ça
procède d'une même philosophie qui n'est manifestement pas celle
de la députée de Hochelaga-Maisonneuve et de l'Opposition qui
voudraient que le gouvernement prenne par la main chaque individu, chaque
entreprise et que le «big brother» ou le grand frère vienne,
à toutes fins pratiques, se substituer à la place des individus
ou des entreprises et faire le travail pour eux.
La responsabilité je le dis, M. le Président, parce
que j'en suis intimement convaincu de la formation des individus est
prioritairement la leur. Chaque individu doit se rendre responsable
lui-même de sa formation, de son emploi. Ce n'est pas le gouvernement qui
est responsable des emplois des individus, et si un individu s'imagine que le
gouvernement a le devoir de le former, de le garder formé et de lui
donner un emploi jusqu'à la fin de ses jours, il risque de se
réveiller un bon matin, M. le Président, avec des lendemains qui
déchantent. Chaque individu doit être très conscient de
l'obligation qu'il a lui-même de voir à ce qu'il soit
continuellement bien formé et d'adapter ses connaissances. C'est vrai
pour tout le monde. C'est vrai pour le médecin, c'est vrai pour le
professionnel, c'est vrai pour le travailleur, c'est vrai pour le technicien,
et c'est vrai pour le politicien aussi, qui, s'il ne s'adapte pas
continuellement aux changements, va bientôt réaliser que ses
électeurs vont facilement se départir de lui.
Alors, moi, qu'on vienne me dire, M. le Président, qu'il faut que
le gouvernement prenne les entreprises par la main et leur donne plus d'argent
ou finance, à toutes fins pratiques, toute la formation, je ne suis pas
d'accord. Notre responsabilité à nous, c'est de tenter de
convaincre les entreprises de se pénétrer de l'importance de
l'adaptation de la main-d'oeuvre. De dire aux entreprises: Si vous voulez
être concurrentielles, compétitives, si vous voulez survivre, si
vous voulez être profitables, si vous voulez réussir dans le monde
dans lequel nous sommes entrés, qui est le monde des échanges
à l'échelle de la planète, la mondialisation des
marchés, vous devez faire en sorte que les produits que vous
manufacturez, que vous fabriquez, soient d'une qualité supérieure
à un coût le plus bas possible afin que vous puissiez les vendre
partout au monde.
M. le Président, si on veut être compétitifs, il
faut avoir une technologie qui permette d'être compétitifs et il
faut avoir une main-d'oeuvre qui soit capable de faire fonctionner cette
technologie-là; ça va ensemble. Il est inutile, pour une
entreprise, de se doter d'équipement technologique de haute pointe, si
elle n'est pas capable de faire fonctionner les équipements, si ses
travailleurs sont incapables de faire fonctionner les machines nouvelles.
Or, M. le Président, ce n'est pas à l'État de venir
payer pour la haute technologie des entreprises et ce n'est pas à lui
non plus d'aller payer pour adapter la main-d'oeuvre. Cependant, le
gouvernement peut très bien aider, venir en aide en supplément
aux entreprises pour les inciter, et c'est ce que nous faisons. Nous le faisons
et nous mettons à la disposition des entreprises tous les crédits
qu'il faut pour faire en sorte qu'elles soient incitées à
investir davantage dans l'adaptation de la main-d'oeuvre.
Qu'on nous dise que ce n'est pas suffisant, M. le Président,
bien, je pose la question: À quel point c'est suffisant? Est-ce qu'on va
devoir investir 100 % des coûts de formation? C'est sûr, la
députée dit que les entreprises ne refusent pas d'argent. C'est
bien évident, les individus non plus. Je suis convaincu que si on
offrait à tout le monde ici de doubler les salaires, il y en a plusieurs
qui hésiteraient avant de refuser; si on double les subventions, tout le
monde va les prendre.
Je vois que le président, lui, semble ne pas être
intéressé à voir son salaire doubler; le président
est très magnanime, bien sûr, et très modeste aussi, mais,
en général, la nature humaine étant ce qu'elle est,
personne ne refuse des subventions. Mais est-ce que c'est en augmentant les
subventions, en doublant, en triplant les subventions qu'on va faire avancer le
Québec? D'abord, on sait que le gouvernement n'a pas les moyens
d'aug-
menter ses subventions; au contraire, il va même falloir les
diminuer.
M. le Président, pourquoi est-ce qu'on considère que c'est
de la responsabilité d'une entreprise de payer pour la matière
première qu'elle utilise, par exemple, de payer pour ses frais de loyer,
d'électricité, enfin, toutes les dépenses qui entrent dans
la fabrication... Or, la main-d'oeuvre, ça fait partie intégrante
de la fabrication, c'est une composante essentielle du travail d'une
entreprise. Pourquoi, ça, ça ne serait pas de la
responsabilité de l'entreprise, l'adaptation de la main-d'oeuvre?
Pourquoi, quand on répare une machine, c'est la responsabilité de
l'entreprise, quand on adapte un équipement, quand on la modifie pour
l'adapter, et puis quand on veut adapter la main-d'oeuvre, ça, ce n'est
plus la responsabilité de l'entreprise? Moi, je pense que c'est beaucoup
plus la responsabilité de l'entreprise et de l'individu lui-même,
d'ailleurs, je dois le dire, que du gouvernement. Et moi, je suis tout à
fait à l'aise avec le programme qu'on a.
La députée de Hochelaga-Maisonneuve me semble de la
même philosophie que le critique de l'Opposition à Ottawa pour le
NPD, l'ex-critique des finances, Steven Langdon qui prétendait que le
gouvernement de Bob Rae, en Ontario, devait investir encore plus d'argent et
dépenser encore plus d'argent pour tenter de faire en sorte de faire
fonctionner la machine. Même les néodémocrates, M. le
Président, l'ont renié, même les socialistes l'ont
renié, disant que ce n'était pas la façon de
procéder. Alors, il me semble qu'on retarde un peu quand on vient nous
dire qu'il faut encore investir plus d'argent. La société a
évolué depuis quelques années, on reconnaît
aujourd'hui très bien, je pense, que le gouvernement doit être
là en support et non pas, M. le Président, en bailleur de fonds
de première ligne.
Le Président (M. Joly): Mme la députée, s'il
vous plaît.
Mme Harel: ce que j'ai de la difficulté à
comprendre, m. le président... là, je ne suis pas vraiment le
ministre. moi, ce sur quoi je l'interroge, c'est uniquement pourquoi votre
gouvernement, vous-même, vous n'avez pas dépensé l'argent
que vous aviez annoncé que vous alliez dépenser? vous avez
annoncé que vous alliez dépenser 275 000 000 $ en trois ans, et
puis vous en avez dépensé à peine 8 %.
Alors, moi, mon choix à moi, ce n'est pas le crédit
d'impôt remboursable à la formation, mon choix à moi, c'est
justement d'être conséquent, avec le discours que vous tenez, de
responsabiliser l'entreprise et de l'amener à consacrer 1 % de sa masse
salariale à la formation de la main-d'oeuvre, à défaut de
quoi elle aurait à le verser dans un fonds paritaire pour la formation
de la main-d'oeuvre.
Mais, ce n'est pas votre choix. Votre choix, vous, ça a
été de dire: Nous, on préfère les crédits
d'impôt, puis on va mettre le paquet: 67 000 000 $ la première
année, 100 000 000 $ la deuxième, 108 000 000 $ la
troisième. Puis, on voit que ça ne marche pas. Il y en a de la
formation, sans l'aide gouvernementale, puis on nous dit que les entreprises ne
sont pas admissibles à la mesure parce que le type d'activité ne
cadre pas avec vos critères. Vous dites: On va garder nos
critères, ça va bien comme ça, on n'a pas besoin de
dépenser l'argent qu'on a annoncé. C'est ça
finalement.
M. Bourbeau: Quand vous dites que ça ne marche pas, il
faut s'entendre là. Quand on dit qu'il y a eu quatre fois plus d'heures
de formation dans les entreprises l'an dernier que cette année...
Mme Harel: Sans aide gouvernementale. On s'entend bien.
M. Bourbeau: Elles ont toutes accès, ces
entreprises-là, à la mesure du crédit d'impôt
à la formation...
Mme Harel: Oui, mais elles ne l'ont pas utilisée.
M. Bourbeau: Je ne vois pas pourquoi elles n'y viendraient
pas.
Frais d'administration des programmes d'aide
Mme Harel: J'aimerais, M. le ministre, que vous répondiez
précisément à deux questions que je vous repose: SPRINT,
là, comment ça se fait que ça a coûté 2 500
000 $ de frais d'administration pour, finalement, verser 5 000 000 $ de
prestations? Ça fait cher pas mal, ça, le programme. On retrouve
ça au budget total, commissions de formation professionnelle,
année financière 1992-1993, pour l'ensemble des programmes.
Alors, vous avez chacun des programmes, les montants, et on voit pour SPRINT:
frais d'administration et prestations de formation. Alors, si ça va si
bien là, de votre côté, si le problème c'est juste
les autres là, comment ça se fait que ça coûte
presque 40 % pour gérer le programme SPRINT?
M. Bourbeau: M. le Président, je suis étonné
de cette question de la députée de Hochelaga-Maisonneuve. La
députée de Hochelaga-Maisonneuve sait que c'est un programme qui
démarre, qui vient de démarrer dans les douze derniers mois. On a
signé une entente avec le Mouvement Desjardins et il a fallu faire du
développement informatique important pour que le programme SPRINT puisse
être mis en place. (12 heures)
Seulement la composante informatique, ça a coûté
au-delà de 1 000 000 $. Ça, ce sont des dépenses qui sont
non récurrentes, les frais de développement, de démarrage
d'un programme. Si on veut que le programme soit bien organisé, bien
installé, il faut, au départ, dépenser des fonds. Alors,
c'est sûr que la première année, il y a des frais
d'administration qui sont plus importants parce que ce sont des frais de
démarrage
du programme, la mise en place de la structure informatique, etc. Alors,
je pense que, si la députée attend une autre année, elle
va se rendre compte que les frais d'administration vont être
singulièrement diminués par rapport aux frais de la
première année.
Comités de reclassement
Mme Harel: On verra. On verra, mais qu'est-ce qui arrive avec les
comités de reclassement? Comment se fait-il qu'on ne retrouve plus les 9
000 000 $ qui, jusqu'à maintenant, étaient alloués
à l'élément qui concernait les comités de
reclassement?
M. Bourbeau: M. le Président, d'après nos chiffres
à nous, l'an dernier, c'était 8 000 000 $ et non pas 9 000 000 $,
à moins qu'on ne regarde pas les mêmes chiffres, là. Il y
avait 4 700 000 $ au Fonds des travailleurs licenciés et 3 300 000 $ au
comité de main-d'oeuvre. Or, cette année, la somme est de 8 700
000 $, donc une augmentation d'environ 10 % par rapport à l'an dernier.
Le Fonds des travailleurs licenciés est de 5 400 000 $, et les autres,
les CAMO, adaptation de la main-d'oeuvre, reclassement, etc., ont le même
montant que l'an dernier, 3 300 000 $, pour un total de 8 700 000 $. Donc, pour
nous, il y a une progression normale.
Mme Harel: M. le Président, est-ce que je peux inviter le
ministre à prendre connaissance du Livre des crédits, à la
page 21-11, Sommaire des crédits de transfert, Main-d'oeuvre,
Sécurité du revenu et Formation professionnelle. Alors, on y
retrouve, pour 1992-1993, 1993-1994, par catégorie, soit Entreprises,
Institutions d'enseignement, Organismes sans but lucratif et Personnes. On
retrouve, à Personnes...
M. Bourbeau: Est-ce que la députée parle de la page
21?
Mme Harel: Du Livre des crédits.
M. Bourbeau: Le livre explicatif des crédits?
Mme Harel: Oui. Pas le cahier du ministère, le livre que
le président du Conseil du trésor nous a remis, à la page
21-11. Il y a, pour ce seul programme... Tous les autres sont budgetés,
mais celui de Subventions aux comités de reclassement de la
main-d'oeuvre, on y retrouve, pour 1993-1994, la mention «rien».
Pour 1992-1993, la mention 9 226 000 $.
M. Bourbeau: M. le Président, à la page... La
députée appelle des pages, 21-11. De quel poste parlez-vous,
là?
Mme Harel: Organismes... À la catégorie... M.
Bourbeau: Oui. Oui. Sans but lucratif.
Mme Harel: Subventions aux comités de reclassement de la
main-d'oeuvre. C'est le quatrième élément. Parce que c'est
le seul de tous les programmes du ministère qui n'est pas budgeté
par le Conseil du trésor.
M. Bourbeau: M. le Président, si la députée
veut attendre un petit peu, je vais faire vérifier, mais ma
réaction première, c'est qu'on parle d'un budget de l'an dernier,
1992. Le réel a été de 8 000 000 $, les dépenses
réellement dépensées. Cette année, on a une
augmentation de 10 % par rapport aux dépenses réellement
dépensées de l'an dernier, mais je vais vérifier. Je vous
donnerai la réponse définitive tout à l'heure.
Mme Harel: Alors, comme ça, vous avez retrouvé,
hein?
M. Bourbeau: Oui, oui. Discussions avec le gouvernement
fédéral
Mme Harel: Bon. M. le ministre, vous avez engagé une
correspondance je ne dirai pas intime mais fréquente avec
votre homologue fédéral. Vous lui avez écrit en date du 19
mars. Il vous a répondu, je crois, le 24, et puis vous lui avez encore
écrit le 31. Est-ce que vous n'auriez pas intérêt à
être transparent et à rendre publique votre correspondance?
M. Bourbeau: M. le Président, je pense que la transparence
n'est pas un problème en ce qui me concerne. J'essaie toujours de dire
les choses telles qu'elles sont, dans la mesure du possible. Le problème
qui se pose, c'est que cette correspondance-là, elle comporte deux
parties. Je ne suis pas le seul à être impliqué
là-dedans, et je veux bien en parler à mon homologue
fédéral. S'il veut accepter de rendre publique la correspondance,
moi, je n'ai aucune difficulté, d'autant plus que je sais que la
députée de Hochelaga-Maisonneuve a en main, déjà,
toutes les lettres. Mais disons que, par civilité, je vais
vérifier avec mon homologue et, s'il n'y a pas d'objection, je rendrai
la correspondance publique. Moi, M. le Président, ce que j'écris,
je l'écris toujours dans la perspective que ça devienne public un
jour, et je n'ai honte d'aucune des lignes ou des paragraphes qui sont dans mes
lettres.
Mme Harel: Je comprends que votre homologue fédéral
vous a informé de la prolongation de la situation actuelle jusqu'au 31
décembre 1993, et qu'il vous proposait, immédiatement
après le congé de Pâques, de débuter des
pourparlers, des discussions entre représentants que vous nous annonciez
pour l'année passée et qui devaient avoir lieu avant la
conférence de Toronto, mais qui seraient imminentes. Dois-je comprendre
que le sous-ministre de la Main-d'oeuvre participera à la
conférence des sous-ministres, les 3 et 4 juin prochains? Et quel sera
le mandat qui sera, à ce moment-là, remis au porte-parole?
Sera-t-il le sous-ministre ou le président de
la Société québécoise de
développement de la main-d'oeuvre?
Je voudrais faire référence à une entrevue que M.
Arsenault a donnée au Soleil le jeudi, 8 avril, et dans laquelle
il disait: «À titre de compromis ou d'accomode-ments en vue de
faire fléchir le ministre fédéral de l'Emploi et de
l'Immigration, Bernard Valcourt, le président de la nouvelle
Société [...] soumet que le transfert, dans un premier temps, du
seul volet "Formation" est vu comme une "priorité importante" pour aider
son organisme à prendre son envol plus rapidement.» Alors, faut-il
comprendre que, contrairement à ce que le ministre nous a
répété à l'Assemblée nationale au même
moment, le mandat du président de la SQDM est de trouver un terrain
d'accommodement en demandant le volet Formation seulement de la gestion de la
main-d'oeuvre?
M. Bourbeau: M. le Président, c'est le président de
la Société québécoise de développement de la
main-d'oeuvre qui représente le ministre dans les forums qui traitent de
la main-d'oeuvre. Je pense que les responsabilités sont maintenant assez
clairement établies. Disons que c'est exact que j'ai
échangé avec le ministre fédéral des propos verbaux
et écrits sur le sujet. Nous sommes toujours en discussions, l'objectif
étant de débuter le plus rapidement possible des discussions, des
négociations visant à faire en sorte que cessent les
dédoublements et les chevauchements de programmes au Québec.
Pour l'instant, il y a eu des rencontres au niveau administratif entre
le président de la SQDM et son homologue du gouvernement
fédéral. Les anciennes ententes n'ont pas été
abrogées; je n'ai signé aucune nouvelle entente non plus, mais on
continue à fonctionner comme auparavant.
Il est certain que la campagne à la chefferie du gouvernement
fédéral a eu pour effet de retarder quelque peu les discussions,
mon homologue étant plus occupé que normalement à d'autres
fonctions, peut-être, qu'uniquement à celles qui nous concernent.
J'ai l'impression qu'au cours des prochaines semaines la situation devrait
s'améliorer et que pourront reprendre rapidement, entre lui et moi, les
discussions qui permettront de faire débuter ces
négociations.
Je suis toujours convaincu de l'importance d'en venir à une
entente avec le gouvernement fédéral sur ce sujet-là. Le
Québec n'est d'ailleurs pas la seule province qui se plaint
amèrement de l'existence sur son territoire de ces chevauchements et de
ces dédoublements. Et je pense qu'au cours des prochains mois et
possiblement, j'espère, avant la prochaine campagne électorale,
on devrait voir un déblocage dans ce dossier, parce que je
perçois chez nos homologues fédéraux une volonté
d'en venir à une entente qui mettrait fin à ces
dédoublements et à ces chevauchements. C'est évident que
le gouvernement fédéral recherche aussi une solution. C'est
évident qu'il réalise qu'il n'a plus les moyens, lui non plus, de
se permettre ces coûteux chevauchements. On le voit, d'ailleurs, dans les
propos qui sont tenus par les diffé- rents candidats à la
chefferie du Parti conservateur; ils tiennent tous le même langage. (12 h
10)
Alors, il s'agit, M. le Président, de continuer à
étoffer notre dossier, nos prétentions à garder intact au
Québec le front commun, la solidarité qui unit tous les
partenaires du marché du travail. Et je suis convaincu que, ensemble,
avec le concours positif de l'Opposition officielle, nous pourrons un jour, M.
le Président, signer une entente avec le gouvernement
fédéral, qui mettra fin aux chevauchements et qui établira
au Québec un seul réseau de main-d'oeuvre, un guichet unique, et
tout cela dans le meilleur intérêt des travailleurs et des
entreprises québécoises.
Le Président (M. Joly): Mme la députée, s'il
vous plaît.
Mme Harel: M. le Président, est-ce que, malgré les
apparences, ce que le ministre appelait il y a quelques minutes... la
solidarité, mais ce n'est pas ce mot-là qu'il a utilisé,
je crois. Est-ce que ce n'est pas en train de s'effriter, de toute
façon? Est-ce que, avec l'avènement des conseils sectoriels...
J'aimerais que le ministre ou le président de la Société
nous disent où ils en sont, là, dans leur évaluation de la
mise en place de leurs propres comités sectoriels, compte tenu des
stratégies d'orientation retenues, et où est-ce qu'ils en sont,
étant donné la mise en place de comités sectoriels dans
les mêmes secteurs d'activité pancanadiens par le gouvernement
fédéral? Alors, où ils en sont?
J'ai cru comprendre qu'il y avait eu, par exemple, une tentative de mise
en place d'un comité sectoriel en matière d'électronique,
je crois, en matière de fabrication d'équipement
électrique et électronique, et qu'après une ou deux
rencontres les partenaires s'étaient entendus pour mettre fin au
comité québécois puisqu'ils participaient
déjà à un comité fédéral. Est-ce que,
là, il n'y a pas, au moment où le ministre va envoyer ses
fonctionnaires ou lui-même continuer des discussions qui
s'éternisent et s'éternisent et s'éternisent, est-ce qu'il
n'y a pas une situation de fait accompli sur le terrain? Il est en train de
déterminer des normes, des façons de faire dans lesquelles,
finalement, la main-d'oeuvre québécoise va être assujettie,
d'une part.
Coûts des chevauchements d'autre part, est-ce que le
ministre n'a pas été informé par son homologue de la
dénégation de ce dernier à l'égard des coûts
de chevauchement, évalués à 250 000 000 $, que pourrait
économiser un guichet unique? je suis informée que son homologue,
m. val-court, nie entièrement que c'est de cet ordre-là que
s'évaluent le dédoublement et le gaspillage. il aurait
écrit au ministre que 84 % des employés des bureaux
québécois d'emploi et immigration canada travaillent sur des
services qui ne sont pas offerts déjà par le québec.
alors, j'aimerais qu'il nous fasse le point sur cette
question-là. Est-ce qu'il maintient qu'il y a là un
coût de l'ordre de 250 000 000 $, ce qu'il avait transmis à ses
collègues dans le mémoire qu'il présentait au Conseil des
ministres et dans le document qui lui a servi de document préparatoire
pour la conférence de Toronto?
M. Bourbeau: Sur ce point-là, M. le Président, je
vais répondre, et peut-être que le Président pourra
compléter après, sur les autres points. Cette question des
chiffres, là, fait en sorte qu'il y a une divergence importante entre
les chiffres que nous avons avancés et ceux qui sont avancés par
le gouvernement fédéral. Mais nous ne parlons pas de la
même chose, donc il n'y a pas de contradiction entre le chiffre de 250
000 000 $ que nous avons avancé et le chiffre, beaucoup plus modeste,
qu'avance le gouvernement fédéral. Ce que le gouvernement
fédéral dit, c'est que, dans la situation actuelle, avec les deux
réseaux de main-d'oeuvre tels qu'ils existent, il y a certains secteurs
qui sont sous la responsabilité du fédéral, d'autres sous
la responsabilité du Québec, et d'autres secteurs où les
deux gouvernements, simultanément, s'activent sur le terrain. Et les
vrais chevauchements, selon eux, ne portent que sur une partie beaucoup plus
infime du dossier que ce qu'on pourrait penser, et, donc, il y a des
chevauchements de l'ordre de quelques dizaines de milllions de dollars
seulement et non pas de quelques centaines de millions de dollars.
Ce que, nous, nous disons, c'est qu'une analyse qui a été
faite des frais d'administration du marché du travail dans les 24 pays
de l'OCDE indique qu'en moyenne les 24 pays de l'OCDE dépensent, pour
les frais d'administration dans les programmes reliés au marché
du travail, un pourcentage de x évidemment, qui varie d'une
année à l'autre; ça dépend de quelle année
on parle. Quand on parle des dépenses du marché du travail, on
parle de l'assurance-chômage, des mesures actives de main-d'oeuvre et on
parle aussi de l'aide sociale, de la sécurité du revenu.
Quand on regarde tous ces grands programmes là et qu'on
considère les dépenses d'administration, en moyenne, dans les
pays de l'OCDE, on a un pourcentage de frais d'administration. Si on reportait
ce pourcentage-là sur les budgets québécois,
dépensés au Québec, tant par le fédéral que
par nous, dans les même secteurs, aide sociale, assurance-chômage,
mesures de main-d'oeuvre, etc., et si on appliquait le même pourcentage
de frais d'administration, le chiffre qu'on obtiendrait serait de 250 000 000 $
de plus au Québec que dans la moyenne des pays de l'OCDE. Donc, dans un
monde idéal où le Québec représenterait la moyenne
des 24 pays de l'OCDE, on pourrait, théoriquement, en venir à une
telle économie.
Nous n'avons jamais dit qu'on pourrait, du jour au lendemain, en arriver
à des chiffres semblables, d'autant plus qu'une partie importante de ces
dépenses-là, ce sont l'aide sociale et la sécurité
du revenu et que, ça, ce n'est pas présentement sur la table
quand on parle des discussions avec le fédéral. Il y a
déjà un partage de responsabilités dans le domaine de
l'aide sociale, et on ne remet pas ça en cause. Donc, on ne parle pas de
la même chose. Et, moi, je n'ai pas d'intérêt à
discuter de ces chiffres-là avec le fédéral, parce que
j'admets ses chiffres et il devrait admettre les miens; ce sont des chiffres
qui sont vérifiables, M. le Président, quand on regarde les
statistiques. On ne parle pas de la même chose.
Il reste quand même qu'il y a des dizaines de millions de dollars
de dépenses de chevauchement qui sont clairement identifiables. Et,
encore plus que ça, ce qu'on ne peut pas comptabiliser, c'est le temps
perdu par les employeurs québécois qui doivent errer d'un bureau
de main-d'oeuvre à l'autre, qui vont frapper au fédéral,
qui vont frapper à la porte du fédéral, qui viennent
frapper à la porte du gouvernement du Québec, qui retournent
parfois au fédéral. On a tous les jours des confidences
d'employeurs qui sont perdus ou parfois de travailleurs aussi, parce que
ça peut être des travailleurs pris individuellement et qui
perdent un temps considérable, non comptabilisé, bien sûr,
à se promener d'un bureau à l'autre.
Et on ne comptabilise pas non plus le temps que perdent les
fonctionnaires fédéraux à discuter avec leurs homologues
provinciaux pour tenter d'harmoniser les politiques des deux gouvernements ou
les programmes des deux gouvernements. Vous savez que, souvent, on va avoir une
annonce commune d'une aide où le fédéral investit une
partie, le gouvernement du Québec une autre partie. Les deux
gouvernements, ensemble, s'entendent pour former une aide à une
entreprise. Et combien d'heures ont porté sur des discussions entre les
fonctionnaires des deux ordres de gouvernement et, quand vient le temps des
annonces publiques entre les deux cabinets, les deux ministres ne savent pas
comment ça va se faire.
Alors, M. le Président, il y a là une perte importante de
temps et d'énergie, tant de la part des employés du gouvernement
que des entreprises québécoises ou des travailleurs qui n'est pas
comptabilisée et qui, probablement, ferait monter la facture beaucoup
plus. Maintenant, pour ce qui est du reste, peut-être que le
président-directeur général de la SQDM pourrait
compléter sur les autres aspects dont a parlé la
députée.
Le Président (M. Joly): M. Arsenault, s'il vous
plaît.
Dédoublement des comités
sectoriels
M. Arsenault (Jean-Paul): Je pense que la problématique
que vous avez soulevée à l'égard des comités
sectoriels, on la connaît bien. D'ailleurs, je l'ai abordée
à la dernière séance du conseil d'administration. Je pense
qu'il faut quand même se rappeler une chose. Au Québec, on a un
contexte assez particulier, qu'on ne retrouve pas dans d'autres provinces:
toute la politique des grappes industrielles, disons que c'est assez
particulier au Québec. La même chose pour la création
des
comités sectoriels. Ça a été une
démarche et une approche qui a été initiée au
Québec. Donc, on reconnaît qu'il existe, à ce moment-ci,
face aux visées, aux projets du gouvernement fédéral
d'implanter un certain nombre de comités sectoriels nationaux, un
certain dédoublement au Québec.
C'est d'ailleurs pour cette raison que j'ai rencontré, la semaine
dernière, le sous-ministre fédéral pour lui faire part de
cette préoccupation du conseil d'administration, et la nôtre, et
essayer de voir, de tenir compte, justement, de la situation
particulière qui est au Québec et d'éviter... Parce qu'il
faut comprendre aussi que le gouvernement fédéral est
impliqué et participe financièrement dans nos propres
comités sectoriels. Donc, lui-même se fait compétition par
un autre programme. Donc, là, on a dit: II y a un certain manque de
logique, un peu, dans tout ça. Et c'est notre intention, avec eux, de
nous assurer, je pense, de deux choses. Premièrement, que le
Québec obtienne sa juste part des fonds fédéraux, quel que
soit le canal qui sera pris. Et, si ce n'est pas le canal des comités
sectoriels nationaux nouveau genre, à ce moment-là, qu'on puisse
obtenir par d'autres canaux l'argent qui nous est dû.
Et la même chose pour les entreprises. On a rencontré,
encore la semaine dernière, vendredi, les gens du côté de
la sidérurgie qui étaient un peu impliqués dans ce
dossier-là, et ces gens-là sont d'accord avec nous qu'il est
important de trouver une réponse pratique au problème du
Québec, avec les outils dont on dispose actuellement ici, au
Québec. Donc, j'entrevois, à toutes fins pratiques, une
façon de collaborer avec les gens du fédéral. Je les ai
mis au fait de leurs propres contradictions.
Le Président (M. Joly): Mme la députée, s'il
vous plaît.
Mme Harel: Bien.
M. Bourbeau: M. le Président, je pourrais... (12 h 20)
Le Président (M. Joly): Oui, M. le ministre, s'il vous
plaît.
M. Bourbeau: ...compléter la réponse de tout
à l'heure. Au sujet des 9 200 000 $ dont parlait la
députée de Hochelaga-Maisonneuve, je peux concilier ces
chiffres-là.
Alors, 9 200 000 $ de 1992-1993, au chapitre des Subventions aux
comités de reclassement de la main-d'oeuvre, comprend... Cette
année, on a 8 000 000 $. Il y a également un montant de 1 400 000
$ pour l'intervention sectorielle. Cette somme est maintenue en 1993-1994, mais
elle se trouve à l'intérieur des Programmes de formation
professionnelle. Ça, c'est le programme, si la députée
regarde, toujours à «Organismes sans but lucratif», il y a
un poste qui est passé de 6 700 000 $ à 13 800 000 $, Programmes
de formation professionnelle. Alors, l'excédent est là, la
différence.
Pour ce qui est des 8 000 000 $, l'autre montant d'argent qui...
Là, je viens d'expliquer les 1 400 000 $. Ça, ça a
été porté au programme Entreprises, la deuxième
ligne en haut de la page 21: Programmes favorisant l'emploi. On m'a dit que ce
serait dans ce budget-là, qui est passé de 43 000 000 $ à
67 000 000 $.
Alors, les CAMO, les Comités d'adaptation de la main-d'oewre, et
les fonds des travailleurs licenciés, tout serait dans ce
programme-là.
Mme Harel: Alors, merci, M. le ministre. Si vous me permettez, je
poursuivrais avec le président de la SQDM.
Vous venez de nous signaler, M. Arsenault, que vous aviez porté
à la connaissance de vos vis-à-vis ce dédoublement dans
les comités sectoriels. Également, est-ce que vous maintenez
être à la recherche d'un compromis ou d'un accommodement en vue de
faire fléchir le ministre Valcourt, comme vous l'indiquiez au journal Le
Soleil? Est-ce que vous maintenez qu'il s'agirait, comme accommodement,
dans un premier temps, d'obtenir un transfert du seul volet Formation
plutôt que de celui de la Gestion de la main-d'oeuvre qui est
réclamé actuellement?
Le Président (M. Joly): M. Arsenault.
M. Arsenault: II serait peut-être important de
rétablir certains faits. Je pense que les journaux présentent une
version des faits. Je pense que, d'une part, je ne discute pas avec M.
Valcourt. Ce n'est pas mon rôle sur ce dossier-là. Au niveau des
fonctionnaires, les échanges que j'ai, c'est sur des questions
administratives. Et sur ce à quoi vous faites référence,
justement, à toutes fins pratiques, la position de la
Société et du conseil d'administration de la
Société est toujours la même: c'est qu'il nous
apparaît important d'avoir un guichet unique couvrant l'ensemble des
responsabilités. C'est la position de la Société. C'est la
mienne également.
Toutefois, faute de l'ensemble de ces mesures-là, il est
évident que toute amélioration par rapport au statu quo devient,
pour la Société, un élément additionnel pour lui
permettre de rencontrer davantage le mandat qui lui est confié à
l'égard des travailleurs et des entreprises du Québec. Donc, je
pense qu'il ne faut pas voir dans mes propos un élément de
négociation, à toutes fins pratiques, au moment où on se
parle. Sur le dossier global du transfert, il n'y en a pas, de
négociations entre les fonctionnaires fédéraux et
moi-même.
Mme Harel: Alors, il n'y en a pas présentement, de
négociations. C'est ça qu'il faut comprendre?
Tantôt, vous parliez de statu quo, mais il n'y a pas non plus de
statu quo. Il n'y a ni négociation ni statu quo, parce que ce n'est pas
parce qu'un problème est dit, celui, notamment, du dédoublement
des comités sectoriels, que, pour autant, il est résolu. Et dans
la
vraie vie, les comités sectoriels continuent au niveau d'Ottawa.
Il y a un budget que vous n'avez pas, un budget qui est quand même
consistant: 250 000 000 $ sur cinq ans, 50 000 000 $ par année, c'est
quand même pas mal d'argent. Et puis, il y a sûrement la tentation,
dans bien des milieux, de ne pas rester sur le quai de la gare et de regarder
passer le train d'entreprises qui, de toute façon, sont
sollicitées.
Et, moi, la connaissance que j'ai de cela, c'est que les porte-parole
patronaux ou syndicaux peuvent bien vouloir qu'il en soit autrement, mais, sur
le terrain, les entreprises elles-mêmes, quand elles sont
sollicitées pour participer à ces comités, elles
acceptent, elles s'y rendent et elles se trouvent à être dans la
dynamique du développement de la main-d'oeuvre avec les nonnes, les
critères pancanadiens. Ça, c'est la réalité des
entreprises, quoi qu'on en dise présentement.
Est-ce que, sur les frais de fonctionnement, les 60 000 000 $ qui sont
dévolus avec les revenus autonomes, vous n'avez pas l'impression
d'être à la tête d'un gros porteur avec pas mal moins de
passagers que vous ne l'aviez prévu?
Mise en place de la Société
québécoise de développement de la main-d'oeuvre
(SQDM)
Finalement, actuellement, si j'ai bien compris, les budgets sont
provisoires, les nominations sont intérimaires; je ne pense pas qu'il
n'y ait aucune nomination dans les cadres supérieurs qui ait
été confirmée. Contrairement à ce que le ministre
nous a dit l'an dernier, il n'y a aucune société régionale
qui est actuellement en opération; c'est les CFP, avec les directeurs
régionaux, qui sont reconduits. Est-ce que tout ça va durer
longtemps, ces nominations intérimaires? Vous les prévoyez pour
combien de temps?
M. Bourbeau: M. le Président, vous me permettrez de
répondre au nom du président, parce qu'il y a quand même
une certaine coloration politique dans les questions de la
députée. La Société est en place, elle a
commencé ses travaux et ça fonctionne très bien, et dans
l'enthousiasme. Les sociétés régionales sont en place
également. Les conseils d'administration n'ont pas tous
été nommés; en fait, aucun n'a été
nommé encore, mais ça ne saurait tarder. C'est l'ancienne
structure qui continue à fonctionner. Donc, il n'y a eu aucune
interruption dans le travail, dans la livraison des programmes. Les anciennes
CFP sont devenues les sociétés régionales de
développement de la main-d'oeuvre. Le personnel en place continue
jusqu'à ce qu'il y ait des remplacements, si tant est qu'il doive y en
avoir. À la société mère, il y a eu certaines
nominations, d'autres auront lieu éventuellement. C'est sûr que,
dans cette période de transition que nous vivons entre l'ère
ancienne et l'ère nouvelle que nous souhaitons, il y a un certain
flottement, mais ce flottement ne nous empêche pas de faire le travail
et, je crois, aussi de le faire très bien.
Dédoublement des comités sectoriels
(suite)
Maintenant, la participation du Québec aux activités
sectorielles, c'est sûr que ça peut présentement
créer un certain problème. Le fédéral a
annoncé des sommes d'argent importantes, 50 000 000 $ par année,
puisés à même le compte de l'assurance-chômage
ne l'oublions pas, toujours et c'est sûr que ça constitue
un hameçon important qu'on fait passer sous le nez des entreprises
québécoises. Mais, M. le Président, j'ai souvent dit dans
le passé que le Québec n'avait aucune objection à
participer à la conception et à l'élaboration d'objectifs
nationaux et de nonnes nationales.
Je n'ai pas peur, quant à moi, de dire aux entreprises
québécoises: Si vous voulez réussir sur le plan
international, si vous voulez être compétitives, vous devez avoir
de hauts standards, des standards élevés. Parce que, si on se
donne des standards minimes ou minimums, M. le Président, les produits
que nous allons fabriquer ne rencontreront pas l'adhésion des
consommateurs des autres pays du monde entier. Donc, il faut que nous nous
donnions des standards élevés, et les standards canadiens, M. le
Président, ne peuvent pas être supérieurs aux standards
québécois. Ce serait admettre dès le départ qu'on
est incapables de produire des produits de même qualité que les
travailleurs des autres provinces canadiennes.
Donc, le Québec n'a pas d'objection à participer à
l'élaboration de ces standards canadiens puisque, notre objectif, c'est
d'atteindre à la qualité sur le plan international. Nous
voudrions même établir les standards internationaux, qu'on
réfère au Québec comme l'endroit où les standards
sont les plus élevés. J'ai dit parfois que le maximum des
standards canadiens, ça devrait être le minimum des standards
québécois. Donc, ça ne nous énerve pas du tout de
participer à l'élaboration de ces standards-là et de
participer aux études sectorielles qui pourraient être faites un
peu partout à travers le Canada, d'autant plus que les entreprises
québécoises vont profiter de ces études sectorielles.
Cependant, il faut noter qu'au Québec aussi on en fait, des
études sectorielles. Et là, ce qui serait dommage, c'est que,
encore une fois avec des fonds puisés à même le compte de
l'assurance-chômage, on vienne dédoubler ce qui se fait
déjà. (12 h 30)
Si on est engagé au Québec dans des études dans un
secteur donné et qu'on reprend les études au plan canadien,
là, il y a encore dédoublement. Alors, il va falloir, rapidement,
qu'on s'entende avec le gouvernement fédéral pour régler
l'ensemble de ce dossier de la main-d'oeuvre; et le dossier sectoriel est une
partie intégrante de ce dossier global qu'est le dossier de la
main-d'oeuvre. C'est pour ça que, nous, nous estimons qu'on ne peut pas
régler ce dossier-là à la pièce, qu'il faut
régler la totalité du dossier ensemble, tant le dossier du
dédoublement dans la livraison des programmes au Québec le
guichet unique que la question des standards canadiens ou des objectifs
canadiens et la
question des études sectorielles. Tout ça fait partie d'un
tout, M. le Président, et on doit nécessairement régler
l'ensemble du problème.
Le Président (M. Joly): Mme la députée, s'il
vous plaît.
Mme Harel: Cependant, M. le ministre, l'approche sectorielle ne
se réduit pas à l'établissement de standards ou de normes
de fabrication, bien au contraire. Je lis, dans le communiqué
émis par le ministre Valcourt en décembre dernier, qu'en vertu de
cette initiative d'approche sectorielle l'industrie prend directement en main
la formation de sa main-d'oeuvre. Ça, ça passe pas mal par-dessus
la tête de la SQDM, ça, puis du ministère
québécois. Et on ajoute, et je cite, là: «Les
partenariats sectoriels serviront également à conseiller les
responsables du système officiel d'enseignement en ce qui concerne les
besoins de chaque secteur.»
Là, ce n'est pas rien. Ce sont les comités sectoriels
canadiens qui vont venir établir, pour les ministères de
l'Éducation, notamment celui du Québec, quels sont les besoins de
chaque secteur. Alors, c'est finalement pas mal plus que des standards de
fabrication. C'est pas mal plus que des standards de qualité. C'est un
glissement où on voit très bien que l'approche
fédérale n'a pas été de prendre de front, d'entrer
en collision avec Québec ou les provinces. L'approche
fédérale, ça a été de dire: On va continuer
de parler puis, dans la vraie vie, on va injecter de l'argent puis on va
distribuer le pouvoir de décider dans des comités où se
retrouveront majoritairement des patrons et des représentants de
travailleurs du Canada tout entier. Alors, les discussions peuvent
s'éterniser, là. Us vont sûrement accepter de vous causer
des mois de temps, sinon des années, parce que, à
côté, c'est là où s'établit, finalement, ce
que le ministre Valcourt appelle la prise en charge de la formation de la
main-d'oeuvre.
Répartition des fonds de
l'assurance-chômage non affectés
Vous lui avez écrit, d'ailleurs, au ministre, en date du 16
février dernier, pour lui demander, et je cite: «...de corriger
les prévisions de dépenses du compte de l'assurance-chômage
de manière à ce que les chômeurs du Québec puissent
bénéficier du même taux d'utilisation de F
assurance-chômage à des fins productives que les autres Canadiens
placés en pareille situation». Alors, je considère que
c'est assez différent de l'annonce que vous nous faisiez en
décembre passé où, devant les nouvelles mesures de
resserrement à l'assurance-chômage et je vous cite... en
tout cas, dans La Presse; c'est le journal La Presse, d'ailleurs
vous disiez: «En revanche, nous toucherons environ le tiers des 300 000
000 $ qui seront versés à la formation de la
main-d'oeuvre». Et c'était pour approuver les mesures
fédérales de resserrement de l'assurance-chômage. Vous nous
indiquiez, à ce moment-là, que si ça allait faire mal
à certains, ça allait bénéficier à
d'autres.
Est-ce qu'on doit comprendre que les budgets fédéraux
à des fins productives n'ont pas changé? Malgré les 300
000 000 $ que le Québec a en moins au niveau de
l'assurance-chômage, les budgets sont restés les mêmes: 587
000 000 $ l'an passé, puis 585 000 000 $ cette année?
Le Président (M. Joly): Excusez. M. le ministre, avant de
donner votre réponse, je demanderais aux membres de cette commission la
permission de déborder jusqu'à 12 h 50, compte tenu de l'ordre de
la Chambre qui nous a été donné d'arrêter à
12 h 30. Alors, j'imagine que nous avons le consentement. Merci. Alors, M. le
ministre, s'il vous plaît.
M. Bourbeau: M. le Président, à chaque
année, quand le gouvernement fédéral annonce ses
prévisions de dépenses, de répartition des fonds de
l'assurance-chômage utilisés à des fins productives, il y a
toujours, à la fin de cette annonce-là, un montant
résiduel qui est indiqué comme étant des fonds non
répartis. Et c'était la même chose l'an dernier.
L'année précédente, on avait écrit une lettre au
gouvernement fédéral pour lui souligner que la part du
Québec n'était pas suffisante par rapport aux besoins, etc., et
le gouvernement fédéral avait corrigé, l'année
suivante, de façon à ce que le Québec obtienne une
proportion des fonds fédéraux qui corresponde à ses
besoins. Et cette année, ça a été la même
chose. Il y avait 184 000 000 $ non répartis. Nous avons écrit la
même lettre que l'année précédente, nous avons fait
les mêmes démarches, et on a, M. le Président, espoir que
le gouvernement fédéral va répondre de la même
façon que l'année précédente et va corriger,
à même ses fonds non répartis, les proportions qui
devraient revenir au Québec.
Mme Harel: Par ailleurs, M. le ministre, vous savez certainement
que le gouvernement fédéral a décidé d'injecter la
totalité, je pense, de ses fonds non affectés principalement aux
pêcheurs de Terre-Neuve et, dernièrement, à ceux des
Maritimes. Alors, est-ce que je comprends que vous pensez encore pouvoir
obtenir une part de ces fonds non affectés?
M. Bourbeau: Bien, écoutez, je n'ai pas encore eu de
réponse à ma demande au gouvernement fédéral; je ne
peux pas répondre pour cette année. Tout ce que je peux dire,
c'est que, dans le passé, le Québec a toujours obtenu à
peu près les sommes d'argent qui lui revenaient, et je ne vois pas
pourquoi, cette année, ce serait différent. Mais je ne peux pas
répondre pour l'instant, je n'ai pas la réponse
définitive.
Mme Harel: Dans le cadre de l'Accord Canada-Québec, on
voit, cette année en regard de Fan dernier, une sorte de
déplacement qui se confirme: Ottawa, unilatéralement, diminue le
budget alloué aux achats directs, qui s'adressait à des
chômeurs de longue durée.
Ça passe de 58 000 000 $ à 45 000 000 $, donc une
diminution de 13 000 000 $. Et au niveau de Formation sur mesure en
établissement, il y a là une augmentation. Et surtout, la plus
importante, c'est pour le programme de formation pour les prestataires de
l'assurance-chômage, qui passe de 18 000 000 $ à 33 000 000 $,
c'est-à-dire une augmentation de 15 000 000 $. Alors, on voit
très bien se dessiner l'ingérence d'Ottawa, finalement, parce
que, achats directs, c'était la formation générale et
professionnelle à temps complet, et c'était décidé
annuellement et paritairement Québec-Canada, dans un comité.
C'est ça qui diminue, ce sur quoi Québec avait un mot à
dire. Tandis que ALFEPAC où, finalement, Québec n'a pas un mot
à dire, parce que c'est le programme des prestataires de
l'assurance-chômage qui leur est exclusivement réservé,
celui-là augmente en conséquence.
Place des femmes en matière de formation
professionnelle
Ça a amené le Conseil du statut de la femme à
réaliser un certain nombres d'études absolument
intéressantes sur la place des femmes en formation professionnelle, et
à conclure que celles qui n'étaient pas sur l'aide sociale parce
que leur conjoint avait un revenu, ou qui n'étaient pas sur
l'assurance-chômage, qui, en fait, avaient travaillé mais
voulaient retourner sur le marché du travail, c'étaient les plus
discriminées, finalement, parce que c'est celles pour lesquelles les
programmes s'amenuisent continuellement.
Et le CIAFT, qui est le Conseil d'intervention pour l'accès des
femmes au travail, me faisait part des ententes intervenues dans les
différents programmes qui sont gérés au niveau de:
Initiation aux métiers non traditionnels, Accès aux
carrières technologiques, Transition-Travail. Juste quelques chiffres,
par exemple, de l'entente fédérale-provinciale. Par exemple,
Initiation aux métiers non traditionnels va se donner dans 4 villes,
pour 60 places, aucune à Montréal; Accès aux
carrières technologiques se donne dans 7 villes, 15 places à
Montréal; l'Acquisition du diplôme d'études secondaires, 12
places à Drummondville pour l'ensemble du Québec;
Préformation, 15 places à Montréal ça, c'est
pour l'ensemble; Transition-Travail, 150 places à Montréal. Bon,
au total, là, c'est 200 places. Et on conclut en disant:
Évidemment, les femmes ne sont pas consultées en matière
de formation. On décide pour elles, on établit des
critères pour elles. Et, en dehors de l'éligibilité
à des programmes d'assistance, si les femmes n'en ont pas, elles n'ont
presque plus la capacité maintenant de se requalifier pour gagner le
marché du travail.
Est-ce que vous concevez qu'il y a là un problème qu'il va
falloir corriger?
M. Bourbeau: M. le Président...
Le Président (M. Joly): M. le ministre.
M. Bourbeau: ...je voudrais demander au président de la
Société de développement de la main-d'oeuvre, qui
brûle du désir de voir son nom dans le Journal des
débats...
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Joly): M. Arsenault, s'il vous
plaît.
M. Arsenault: Je pense que, quand même, la
préoccupation que vous évoquez, on l'a ici. Ça fait partie
également du problème général qui est relié
au rapatriement ou à l'intégration de toutes les
responsabilités. Il y a quand même certaines orientations,
certaines politiques fédérales qui visent quand même
à ce que les fonds fédéraux soient canalisés,
à toutes fins pratiques, exclusivement vers les
bénéficiaires de l'assurance-chômage, ce qui n'est pas
nécessairement notre approche ou notre politique. (12 h 40)
Par contre, dans le contexte actuel, nous ne pouvons pas imposer au
gouvernement fédéral ou à ses représentants des
stratégies ou des priorités qui seraient les nôtres. Tout
au plus, nous pouvons essayer de les convaincre de modifier leur propre
approche. Je pense que l'objectif fondamental étant de rapatrier,
à ce moment-là, il nous serait possible de canaliser les fonds,
la totalité des fonds vers les priorités.
En ce qui a trait aux femmes, aux problèmes pour les femmes, je
pense que j'ai rencontré, à quelques reprises déjà,
la présidente du Conseil du statut de la femme, et on est en voie
d'essayer, à la mesure de nos moyens, de donner davantage au niveau
d'une formation qui devrait être plus accessible pour les femmes.
Congé de formation
Mme Harel: Merci. M. le Président, le ministre accordait
une entrevue au magazine Avenir du mois de mars-avril 1993, dans lequel
il faisait la promotion du congé de formation. Et je le cite... en fait,
le magazine le cite: «II faut créer le plus tôt possible le
congé de formation. Ça s'impose, dit-il. Dans le contexte actuel
de développement économique du Québec, ce congé
viendrait compléter les nombreuses mesures contenues dans l'actuelle
politique de développement de la main-d'oeuvre».
Où est-ce qu'il en est sur le congé de formation, et pour
quand?
M. Bourbeau: M. le Président, la notion de congé de
formation est une notion qui est, à toutes fins pratiques, inconnue en
Amérique. À ma connaissance, il n'y a aucune province canadienne
ou aucun État américain ni aucun pays en Amérique qui
donne à ses travailleurs ce droit à un congé de formation.
Ça existe dans quelques pays européens. Quelques. Donc, il faut
manier ce concept-là avec beaucoup de délicatesse. C'est
un concept qui fait en sorte de prétendre qu'un travailleur a un
droit absolu de s'absenter de son travail pendant une période de temps.
Ça peut être quelques mois, ça peut être une
année ou peut-être même plus. Et, à la fin de ses
études, il a un droit strict de reprendre son emploi où il l'a
laissé, aux mêmes conditions. C'est nouveau. Ça n'existe
pas... Évidemment, ça n'existe pas dans notre législation
et, comme je le disais tout à l'heure, ça n'existe nulle part en
Amérique. Et, bien sûr, c'est susceptible de bouleverser un peu
les habitudes de nos entreprises et du marché du travail au
Québec.
J'aborde donc ce dossier-là avec beaucoup de circonspection, et
c'est pourquoi j'en ai saisi les membres de la Conférence permanente sur
l'adaptation de la main-d'oeuvre. Nous avions eu des discussions l'an dernier
à ce sujet-là. Nous avons eu des nouvelles discussions, il y a
quelques semaines à peine, et nous avons convenu qu'il ne serait pas
propice, à ce moment-ci, de légiférer en cette
matière, pour toutes sortes de raisons, la récession
économique que nous venons de traverser étant une d'entre elles,
bien sûr. Les entreprises ont déjà suffisamment de
problèmes présentement au Québec pour s'adapter au
contexte nouveau, sans devoir supporter, surtout les PME
québécoises, les contraintes que peuvent constituer le
départ subit d'un employé clé et la garantie de son retour
au travail.
Alors, nous avons convenu de confier à un comité
technique, qui est à l'oeuvre présentement, le soin
d'étudier d'autres formules moins lourdes, si je peux dire, moins
contraignantes et qui pourraient, ces formules-là, faire en sorte
d'inculquer à nos entreprises québécoises une culture
allant dans le sens de permettre aux travailleurs de s'absenter pour des fins
de formation.
Alors, nous en sommes là présentement, M. le
Président. Et, lors de la prochaine réunion de la
Conférence permanente, j'espère que nous pourrons faire avancer
de nouveau ce dossier.
Découpage du territoire du Grand
Montréal par la SQDM
Mme Harel: M. le Président, vous me faites signe qu'il
reste peu de temps pour nos travaux. Évidemment, encore bien d'autres
questions restent en suspens. Celle-là, évidemment... Je
souhaiterais une autre occasion pour revenir sur cette question absolument
névralgique du congé de formation. Le ministre avait aussi
annoncé une réforme de la loi sur la qualification
professionnelle de la main-d'oeuvre en ce qui concerne les avis de
licenciement. Je ne sais pas où il en est présentement.
D'autre part, récemment, la SQDM a décidé d'un
découpage du territoire du Grand Montréal, qui est
extrêmement critiqué et très controversé. Je
comprends que la région Laval n'aura pas sa propre société
québécoise, comme le ministre avait eu l'air de s'y engager lors
des travaux de la commission parlementaire l'année passée, mais
que, plutôt que de continuer à être desservi par le Grand
Montréal, puisque le bassin de main-d'oeuvre est montréalais...
Il faut voir les chiffres de destination chaque matin pour comprendre que la
majorité des résidents de Laval travaillent sur l'île de
Montréal. Et on comprend que, dorénavant, la formation de la
main-d'oeuvre va se faire en fonction d'un territoire tourné vers
Mont-Laurier et la Manouane puisque Laval est retirée de la gestion du
développement de la main-d'oeuvre du Grand Montréal pour
être maintenant fusionnée avec Laurentides et Lanaudière.
Et tout ça pour des motifs qui ont à voir avec des
équilibres budgétaires. On nous dit que, comme ça, bien,
en fusionnant Laval, Laurentides et Lanaudière, on va pouvoir avoir un
budget qui va équilibrer celui de la Montérégie.
Moi, j'ai rarement vu de justification plus technocratique que celle que
j'ai lue dans les procès-verbaux de la Société
québécoise de développement de la main-d'oeuvre. Ça
me semble comme du dépeçage, étant donné ce que
l'on sait, que le bassin de main-d'oeuvre... On dit, d'ailleurs, qu'il y a 126
000 emplois sur l'île de Laval, il y en a 1 100 000 sur l'île de
Montréal. Où, pensez-vous, travaillent les résidents de
Laval? À Saint-Jérôme peut-être, ou à
Mont-Laurier, ou à Berthier? Ceci dit, il y a quelque chose qui est
totalement incompréhensible. J'imagine que ça a plus à
voir avec d'autres raisons que des raisons raisonnables.
Le Président (M. Joly): M. le ministre, s'il vous
plaît.
M. Bourbeau: M. le Président, vous êtes
particulièrement concerné par les derniers propos que vient de
tenir la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Elle est probablement
la seule, M. le Président, sur tout le territoire concerné, tant
de Montréal que de Laval, qui préconise le maintien du territoire
de Laval à l'intérieur de la Société
québécoise de développement de la main-d'oeuvre de
Montréal. Nous avons procédé...
Mme Harel: Peut-être parce qu'il y a eu un vote à la
SQDM.
M. Bourbeau: Nous avons procédé à de...
Mme Harel: Serré.
M. Bourbeau: Le vote que je connais, c'est le dernier, M. le
Président, qui a fait en sorte de permettre de faire la scission entre
Laval et Montréal. Disons, M. le Président, que nous avons
procédé à de larges consultations avant que la
Société n'en vienne à cette décision-là, et
il semblait, tant du côté de Laval que du côté de
Montréal, qu'on estimait que de regrouper sous une seule administration
tous les besoins en main-d'oeuvre de la région de Montréal, de
toute l'île de Montréal et de Laval, ça faisait en sorte de
constituer une très, très grosse machine administrative qui
aurait été la Société québécoise de
développement de la main-d'oeuvre recouvrant tout ce
territoire-là, et que les besoins spécifi-
ques de Laval auraient été bien moins pris en
considération dans ce grand ensemble qu'est toute l'île de
Montréal que dans l'échelle d'un territoire qui est quand
même plus modeste, celui de Laval, Laurentides-Lanaudière.
Je n'ai jamais, M. le Président, à ma connaissance,
préconisé ou promis de mettre sur pied une société
québécoise de développement de la main-d'oeuvre pour le
seul territoire de la ville de Laval parce que, depuis le début, il a
été entendu que les budgets de la Société
québécoise de développement de la main-d'oeuvre
n'excéderaient pas les budgets qui étaient autrefois
conférés au ministère de la Main-d'oeuvre, section
main-d'oeuvre. Et on ne le dira jamais assez, M. le Président. Alors que
plusieurs se sont objectés, ont combattu la mise sur pied de la SQDM, la
SQDM fonctionne aujourd'hui avec essentiellement le même budget qu'avait
le ministère l'an dernier pour les mêmes fins, de sorte qu'on ne
peut pas dire que le gouvernement du Québec a augmenté les
dépenses administratives du gouvernement en mettant sur pied cette
société d'État. C'est le même budget qui
était consacré précédemment.
Bien entendu, ça veut dire qu'on ne peut pas mettre sur pied de
nouvelles sociétés régionales puisqu'on n'a pas les
budgets pour le faire. Alors, le problème de Laval, c'était donc
de rester fusionnée avec l'île de Montréal et les 1 800 000
de population que ça comporte, ou de fusionner avec
Laurentides-Lanaudière. Et là, je pense que Laval sera mieux
représentée. Par exemple, au conseil d'administration,
plutôt que d'avoir 2 représentants sur 18 ça aurait
probablement été le cas à Montréal il en
auront probablement le tiers. Donc, ils seront mieux représentés.
Et je pense qu'on aura l'occasion de s'occuper mieux des besoins
spécifiques de Laval dans un petit étang que dans un grand lac.
(12 h 50)
Maintenant, il y a quand même des... On me dit, M. le
Président, que quand la décision a été prise au
conseil d'administration de la SQDM sur l'opportunité ou non de scinder
Laval, sur les 18 membres du conseil, il y en a 13 qui étaient en faveur
et 5 qui étaient contre. Donc, il y a une grande majorité des
membres du conseil qui ont voté en faveur de faire en sorte que Laval
puisse se joindre à Laurentides-Lanaudière. Et je
répète que, à ma connaissance, je n'ai jamais promis une
société régionale autonome pour Laval, du moins pas dans
le contexte actuel. Tant que le Québec n'aura pas rapatrié les
fonds et les programmes fédéraux, nous n'avons pas l'intention
d'augmenter les dépenses administratives.
Le Président (M. Joly): D'ailleurs, M. le ministre, je
tiens à vous dire qu'on s'accommode très bien de ce premier pas.
Merci beaucoup.
M. Bourbeau: M. le Président, j'en suis fort aise. Le
Président (M. Joly): Alors, nous allons main- tenant procéder
à la mise aux voix du programme. Alors, concernant le ministère
de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation
professionnelle, est-ce que le programme 7, intitulé
Développement de la main-d'oeuvre, est adopté?
Mme Harel: Sur division.
Adoption des crédits
Le Président (M. Joly): Sur division. Maintenant, est-ce
que les crédits budgétaires relevant du ministère de la
Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation
professionnelle, toujours concernant le programme 7, pour l'année
financière 1993-1994 sont adoptés?
Mme Harel: Sur division.
Le Président (M. Joly): Sur division. Alors, la commission
ajourne ses travaux sine die.
(Suspension de la séance à 12 h 51)
(Reprise à 15 h 37)
Le Président (M. Joly): Bonjour! Ça me fait plaisir
de vous accueillir à cette commission. Bonjour, madame; bonjour, M. le
député. Ça me fait un grand, grand plaisir.
Secteurs administration et services et régimes
de sécurité du revenu
Alors, tel qu'on l'a déjà défini, nous sommes
à l'étude des crédits du ministère de la
Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation
professionnelle. Déjà, ce matin, nous avions adopté le
programme 7; il nous reste les programmes de 1 à 8, à l'exclusion
de 7, tel que déjà défini. Nous avons un bloc de cinq
heures en avant de nous pour échanger sur les différents sujets,
les différentes orientations.
M. le ministre, j'imagine que vous avez des remarques d'ouverture
à nous présenter, des remarques préliminaires.
M. Bourbeau: M. le Président, j'ai fait ce matin toutes
les remarques d'ouverture qui s'imposaient et je ne voudrais pas prendre
davantage le temps de cette commission. Quant à moi, je serais
disposé à commencer immédiatement l'étude des
crédits. Libre à l'Opposition de faire ce qu'elle veut.
Remarques préliminaires
M. Denis Lazure Le Président (M. Joly): Merci, M. le
ministre.
M. le député de La Prairie, est-ce que vous auriez
quelques remarques d'ouverture? Oui. Alors, je vous reconnais. S'il vous
plaît.
M. Lazure: Merci, M. le Président. J'ai pris connaissance
des remarques du ministre lors de ses interventions à l'ouverture de la
commission parlementaire ce matin, avec ma collègue de
Hochelaga-Maisonneuve, où il était question de
l'élément 7, notamment de la formation professionnelle. Alors,
cet après-midi et ce soir, nous allons traiter des autres
éléments de ce vaste programme et, si vous me permettez, quelques
remarques générales suivies d'un aperçu des principaux
thèmes où j'aurais des questions à poser au ministre,
quitte à suivre le plan général, mais en faisant preuve de
souplesse, de part et d'autre. Connaissant le ministre, voisin de
circonscription, pratiquement, en Montérégie, je sais qu'il peut
faire preuve de souplesse.
M. Bourbeau: Là, je me méfie, M. le
Président. Ha, ha, ha!
M. Lazure: m. le président, il s'agit d'un ensemble de
crédits impressionnant, 4 400 000 000 $, un peu plus que 10 % du budget
de l'ensemble des crédits du québec; c'est considérable.
le ministre a eu l'occasion, il y a quelque temps à l'assemblée
nationale, en réponse à une question que je lui posais, de faire
une déclaration où il faisait appel à la
compréhension des gens sur son rôle de ministre chargé de
la sécurité du revenu. tout le monde a droit à des
états d'âme de temps en temps, c'est de bonne guerre, je
sympathise avec lui, surtout qu'il est légèrement
handicapé de la vue depuis quelque temps, très
légèrement, mais on me dit que ça va mieux. (15 h 40)
Tout en sympathisant avec les difficultés qu'un ministre
responsable de la sécurité du revenu peut avoir, je dois avouer,
M. le Président, que je sympathise encore plus avec les personnes qui
sont obligées de toucher la sécurité du revenu. Quand on
parle de sécurité du revenu, on parle actuellement de plus de 700
000 individus au Québec, de plus de 450 000 ménages,
d'au-delà de 400 000 personnes adultes. Et, qui dit
sécurité du revenu, aide sociale, dit pauvreté. On sait
que le Québec, actuellement... Je vois devant moi une coupure du journal
Le Devoir du 1er décembre 1992: Le Québec, champion de la
pauvreté au Canada. C'est un triste titre, M. le Président,
surtout quand on se rend compte que les gouvernements, comme c'est dit dans un
autre titre, cette fois-ci dans Le Soleil, plus récemment, le 23
avril: Les gouvernements sont indifférents devant la
pauvreté.
Par conséquent, mes sympathies vont beaucoup plus du
côté des prestataires de l'aide sociale qui, à toutes fins
pratiques, ont beaucoup de difficulté à joindre les deux bouts.
La critique qu'on peut faire, que plusieurs, non seulement les gens de
l'Opposition, ont formulée à l'égard du ministre de la
Sécurité du revenu depuis quelque temps et de son gouvernement,
le gouvernement de son parti, la critique qu'on peut faire, c'est qu'il y a une
préoccupation qui va non pas vers la compassion, mais qui va vers la
délation, la dénonciation d'un petit nombre, d'un très
petit nombre de personnes qui touchent la sécurité du revenu et
qui peuvent en abuser, comme c'est le cas dans toutes les catégories de
citoyens et citoyennes de la société où il y a un petit
nombre d'individus qui peuvent abuser du système.
Et, M. le Président, d'entrée de jeu, je voudrais formuler
cette critique générale avec bien d'autres, qu'au moment
où nos personnes qui touchent l'aide sociale au Québec sont de
plus en plus mal prises, principalement parce qu'il y a pénurie
d'emploi, ce n'est pas le temps d'entreprendre des campagnes qui ont comme
effet peut-être pas comme objectif premier, je donne le
crédit, la bonne foi au ministre d'amoindrir toute fierté
chez ces gens-là, de créer, pour ainsi dire, une seconde classe
de citoyens et de citoyennes, des gens qui, au départ, sont
soupçonnés de fraude. Et ce gouvernement qui est en face de nous,
M. le Président, il a adopté une loi qui s'appelle la loi 37 et
qui contient plusieurs dispositions qui ont amené cette espèce de
climat malsain qui existe actuellement entre les prestataires de l'aide sociale
et le gouvernement, et en particulier le ministre de la Sécurité
du revenu.
Le ministre a annoncé récemment qu'il avait demandé
de cesser les visites à domicile, se conformant ainsi à la
demande de l'Assemblée des évêques. Je lui rappellerais que
l'Assemblée des évêques rejette en bloc la loi 37 et
l'Assemblée des évêques a rejeté aussi, continue de
dénoncer la vérification qui est faite par environ 250 personnes
actuellement auprès des tiers. Comme on le sait, la loi 37 et les
règlements qui en découlent donnent au ministère et
à ses agents vérificateurs le pouvoir d'aller questionner des
tiers: gérants de caisses populaires, voisins, dépanneurs, peu
importe, et ça s'appliquait aussi aux membres du clergé.
L'Assemblée des évêques a pris position nettement
là-dessus, déclarant, de façon bien catégorique:
Plutôt la prison que la délation.
J'espère que le ministre, en plus d'écouter les
évêques quand il s'agit des visites à domicile, qui avaient
une allure de persécution pour l'ensemble des
bénéficiaires de l'aide sociale, j'espère qu'il va les
écouter aussi quand il s'agit des agents vérificateurs.
M. le Président, la récession que nous connaissons a
amené un nombre épouvantable de fermetures d'emplois, si bien que
depuis quelque temps, à l'aide sociale, un adulte sur deux vient
à l'aide sociale parce que son chômage est terminé, son
assurance-chômage est terminée et que cette personne-là a
perdu son emploi. Dans les 400 000 adultes aptes au travail qui sont à
l'aide sociale, il y en a au moins 250 000, M. le Président, donc un
quart de million de personnes qui sont des chômeurs et des
chômeuses, à toutes fins pratiques.
Il me semble que le gouvernement et le ministre, au lieu de s'acharner
à vouloir faire certaines économies très modestes sur le
dos des personnes assistées sociales,
devraient plutôt s'acharner à la création d'emplois.
La plaie, ce n'est pas les quelques personnes qui peuvent frauder à
l'aide sociale, comme le prétend le ministre, mais la plaie, c'est le
manque d'emplois. La plaie et le malheur, c'est que ce gouvernement-ci ne
s'attaque pas de façon vigoureuse à la création d'emplois.
Il faut qu'il y ait une volonté politique. je voyais dans les remarques
préliminaires du ministre ce matin qu'il disait: même dans les
pays scandinaves, ils ont à faire face à un problème de
chômage sérieux. je lui rappellerais qu'aux dernières
vérifications, dans les pays scandinaves, justement, où il y a
une certaine récession aussi, comme ici, le pourcentage de la
main-d'oeuvre en chômage ne dépasse pas 4 % ou 5 %, alors qu'ici,
c'est 12 %, c'est 13 %. le ministre a pris l'habitude, depuis quelque temps,
d'invoquer certaines situations qui, d'après lui, existent en
suède ou dans les pays scandinaves pour dire: eh bien, vous voyez,
même dans les social-démocraties ça va aussi mal que
ça, donc on n'est pas si pires que ça.
Il coupe les coins ronds pas mal parce que, dans bien des cas, ces
informations sont incomplètes, pour ne pas dire carrément
erronées. C'a été le cas quand il y a eu la discussion sur
le projet de loi C-113 à la Chambre des communes, le projet de son
collègue Valcourt qu'il a appuyé, que notre ministre de la
Sécurité du revenu a appuyé, cette loi C-113 qui a
été dénoncée par à peu près tout le
monde au Québec et qui va amener plusieurs dizaines de milliers de
personnes de plus à l'aide sociale chaque année.
Quand il y a eu ce débat, le ministre de la
Sécurité a laissé entendre que la Suède avait
adopté des mesures aussi sévères vis-à-vis des gens
qui quittaient leur emploi que celles que le gouvernement canadien a
adoptées récemment; ce qui était absolument inexact, comme
on lui a démontré plus tard.
M. le Président, avec la pauvreté accrue, avec le
chômage accru, il me semble qu'on devrait s'attendre à ce qu'il y
ait, de la part du gouvernement, plus d'efforts de fait pour créer un
peu partout au Québec, dans l'ensemble des régions, par des
mesures de stimulation économique, créer plus d'emplois.
Le ministre nous dit: On a des mesures d'em-ployabilité dans
notre ministère. Effectivement, nous allons en parler et j'aurai
plusieurs questions à poser là-dessus, mais, au départ, je
voudrais lui rappeler que même le Comité permanent de la jeunesse
a dénoncé, il n'y a pas si longtemps, en termes très
clairs, les mesures d'employabilité. Je veux simplement citer quelques
paragraphes d'un document qui émane de ce Comité permanent de la
jeunesse, un comité gouvernemental. (15 h 50)
À la page 9 de ce document, on dit: «II faut remarquer
qu'en août 1992, le nombre de personnes inscrites au programme APTE, et
qui participent à une mesure, est plus faible que le nombre de personnes
aptes qui sont disponibles à participer, mais qui ne peuvent le faire
faute de place, 40 000 par rapport à 49 000. C'est donc dire qu'une
personne assistée sociale prête à répondre aux
exigences fixées par le ministère peut ne pas recevoir la
prestation maximale en raison d'une non-offre par ce même
ministère.
Et je continue la citation à la page 12: «Le manque de
débouchés sur des emplois réels constitue l'une des
principales causes de leur insuccès (l'insuccès des mesures
d'employabilité). D'autre part, il est important de souligner le
développement du travail non payé et hors normes encouragé
par des programmes tels que Stage en milieu de travail et EXTRA, de même
que le fait que ces stages s'effectuent dans des secteurs où les
possibilités de création d'emplois sont actuellement
inexistantes.»
Alors, on pourra passer certains programmes en détail, M. le
Président, puisqu'il y a eu des études d'évaluation du
rendement de ces programmes-là, et j'aurai des questions à poser.
Avant de terminer, je me réfère au Journal des
débats, lors de la commission parlementaire du 6 mai 1992, pour,
en quelque sorte, faire un suivi de certaines réponses que le ministre
avait fournies à l'époque à ma collègue de
Hochelaga-Maison-neuve. Et c'est comme un préavis que je donne,
j'aimerais bien qu'on puisse avoir des suites de ces
réponses-là.
Premièrement, les licenciements collectifs. Lors du débat
en commission, le ministre avait dit, et je le cite: «Nous avons
l'intention d'apporter des modifications aux licenciements collectifs au cours
des prochains mois. Idéalement, je voudrais déposer un projet de
loi à l'automne.» C'était en 1992. Qu'en est-il?
Les mesures d'employabilité. J'ai vu qu'il y avait une
évaluation du programme PAIE. Est-ce qu'il y a eu évaluation
d'autres programmes? Si oui, est-ce qu'on pourrait nous communiquer ces
évaluations?
La question du logement. Il y avait eu discussion avec ma
collègue et le ministre sur la possibilité d'augmenter les
allocations au logement des personnes responsables d'enfants, et aussi la
possibilité de revoir la règle actuelle qui veut que lorsqu'il y
a partage de logement, il y a réduction de la prestation.
Et, finalement, ça concerne la Commission des affaires sociales.
Nous pourrons en parler ce soir. J'ai noté que les délais,
à l'époque, étaient d'environ sept, huit mois pour les
problèmes, les appels concernant l'aide sociale. Est-ce que ces
délais sont différents cette année?
M. le Président, je voudrais maintenant qu'on aborde les
éléments un par un.
Le Président (M. Joly): Moi, je n'ai pas d'objection, en
autant...
M. Lazure: Ou si le ministre veut réagir...
Le Président (M. Joly): ...qu'il y ait entente entre M. le
ministre et vous-même. Moi, je vais administrer ce que vous aurez
décidé. Alors, comme je l'expliquais tantôt, nous en sommes
au programme 1, à moins que vous décidiez autrement.
M. Bourbeau: M. le Président, je suis à la
complète disposition de la commission parlementaire. Je suis prêt
à agir programme par programme, élément par
élément, dans l'ordre ou dans le désordre, pourvu qu'on
prenne le vote à la fin de la séance.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. M. le
député, vous avez quoi comme orientation? Vous voulez que
j'appelle quoi comme programme?
M. Lazure: Bon. Gestion et services aux clientèles.
Le Président (M. Joly): Alors, programme 1.
M. Bourbeau: M. le Président, peut-être que je
pourrais simplement faire quelques remarques en réponse à...
Le Président (M. Joly): En réplique à ce qui
a été dit. Je n'ai pas d'objection, M. le ministre, je vous
reconnais.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: D'une façon très courte, là.
C'est vrai que la tâche du ministre de la Sécurité du
revenu n'est pas de tout repos, M. le Président. Je dois concilier deux
objectifs qui sont parfois difficiles à concilier, c'est-à-dire
accueillir à la Sécurité du revenu tous ces hommes et ces
femmes qui, à cause de circonstances indépendantes de leur
volonté, ont besoin d'une aide financière pour pouvoir traverser
les aléas de la vie. M. le Président, nous le faisons avec
ouverture, avec compréhension, et avec un grand respect pour ces
personnes-là.
D'autre part, je dois aussi gérer un budget de 3 700 000 000 $
qui provient essentiellement des impôts qui sont payés par tous
les travailleurs, y compris même les travailleurs à faibles
revenus, et ces travailleurs-là, quels qu'ils soient, exigent du
gouvernement qu'une gestion rigoureuse soit faite de ces fonds
considérables qui sont consacrés au soutien de leurs
concitoyens.
Alors, M. le Président, j'essaie de me tenir à mi-chemin
entre ces deux objectifs, accueillant avec la plus grande compréhension
possible, la plus grande compassion possible tous ceux qui ont droit à
la sécurité du revenu, et en tentant d'écarter de la
sécurité du revenu ceux qui n'y ont pas droit. Et pour ce faire,
M. le Président, j'exerce les pouvoirs que la loi me confère
dont, entre autres, le devoir que j'ai de vérifier
l'admissibilité de tous ceux qui font une demande à la
sécurité du revenu. Et la loi est très claire à ce
sujet-là, M. le Président, l'article 62 de la loi dit: «Le
ministre doit, et avec diligence s'il vous plaît le «s'il
vous plaît» est de moi, M. le Président, il n'est pas dans
la loi procéder à la vérification d'une demande et
rendre sa décision.» «Procéder à la
vérification», ça veut dire ce que ça veut dire. On
doit faire ce qu'il faut, M. le Président, pour s'assurer que ces
personnes-là ont droit à la sécurité du revenu. Et
pour ce faire, on a prévu dans la loi des mécanismes.
Jusqu'à récemment on avait des agents visiteurs qui
faisaient beaucoup plus de bruit que de mal et qui avaient pour mission de
rendre visite à toute la clientèle une fois par deux ans,
essentiellement. C'est exact qu'on a mis fin à ces visites
systématiques de toute la clientèle. On m'a
représenté que le fait de visiter systématiquement toute
la clientèle, ça équivalait à une
présomption générale de culpabilité à
l'égard de toute la clientèle. Moi, je n'ai jamais pensé
qu'il en était ainsi, mais certaines personnes l'ont pensé et
l'ont dit, et des personnes qui sont assez crédibles aussi, de sorte
que, finalement, on a décidé de procéder autrement et de
mettre en vigueur les articles 70 et suivants de la loi qui prévoient la
fonction de vérification. Par la même occasion, nous avons mis fin
à la fonction de visiteur à domicile. Alors, nous avons
procédé. Et je le dis, M. le Président, parce que c'est
à la suggestion des évêques que je l'ai fait lors de ma
dernière rencontre. On m'a dit: Pourquoi vous ne faites pas comme
l'impôt sur le revenu? Pourquoi vous allez au-delà de ce que fait
l'impôt sur le revenu? On s'attendrait à ce que vous traitiez les
personnes assistées sociales comme les autres citoyens.
M. le Président, j'ai retenu ce conseil-là et,
dorénavant, on fait à l'égard des personnes
assistées sociales comme pour les autres citoyens. On a des agents
vérificateurs qui font des enquêtes ou qui font des études
de cas, et on procède maintenant d'une façon plus scientifique,
si je peux m'exprimer ainsi, en ce sens qu'on tente de déterminer parmi
nos clientèles quelles sont les clientèles qui sont les plus
à risque, et on concentre nos efforts sur ces clientèles pour
tenter de mettre fin aux abus, si tant est qu'il y en a. Et nos
vérifications nous indiquent qu'il y en a. Alors, possiblement que cette
façon de procéder va être plus respectueuse de notre
clientèle et sûrement aussi beaucoup plus rentable pour le
gouvernement, parce que, en concentrant nos efforts où il semble y avoir
plus d'erreurs ou de fraudes, on risque de débusquer plus facilement
ceux qui ne se conforment pas à la loi.
Autre point, M. le Président. Le député de La
Prairie a fait mention des programmes de développement de
l'employabilité en mettant en doute, tout à l'heure, leur
rentabilité à la suite de certains groupes qui se permettent, par
les temps qui courent, de critiquer nos programmes de développement de
l'employabilité, leur bien-fondé. (16 heures)
M. le Président, nous avons effectué, au cours des
derniers mois, au cours de la dernière année, une enquête
importante auprès des prestataires de la Sécurité du
revenu qui ont participé à un programme de développement
de l'employabilité ou d'intégration en emploi. C'est une
enquête, je disais, importante, parce qu'elle a porté sur un grand
nombre de prestataires. On a effectué cette enquête-là au
printemps 1991, auprès de 4710
personnes qui ont participé à des programmes de
développement de l'employabilité. En même temps, on a
étudié la situation d'un groupe témoin de 3354 personnes
qui n'ont pas participé aux programmes de développement de
l'employabilité. Donc, ce sont deux groupes de personnes
assistées sociales dont le premier a participé aux mesures de
développement de l'employabilité et le second, non.
C'est-à-dire que ces personnes étaient non participantes.
Et la conclusion, M. le Président, c'est que les programmes de
développement de l'employabilité et d'intégration en
emploi ont certainement un impact très positif sur l'intégration
en emploi des prestataires. En effet, l'étude qui date de février
1993 démontre, sans aucun doute, l'efficacité des programmes. En
effet, les prestataires qui participent aux programmes s'intègrent
davantage en emploi, comparativement aux prestataires qui ne participent pas
aux programmes et qui ont des caractéristiques semblables. Cette
efficacité, cet impact varient selon les programmes. parmi les personnes
qui ont participé, le pourcentage de personnes qui se sont trouvé
un emploi sur une période de sept mois en moyenne est le suivant. et
là, on remarque, m. le président, qu'il y a des programmes qui
ont un meilleur effet que d'autres pour favoriser l'intégration à
un emploi. alors, le rattrapage scolaire: il y a 20 % de personnes
participantes qui se sont trouvé un emploi. dans le groupe de personnes
qui n'ont pas participé, le pourcentage est de 15 %. donc,
l'écart est de 5 %. c'est probablement le programme c'est assez
étonnant qui est le moins performant en termes
d'intégration en emploi.
Le retour aux études post-secondaires pour les chefs de familles
monoparentales: 22 % de ceux qui ont participé se sont trouvé un
emploi, par rapport à 10 % pour ceux qui n'ont pas participé.
Donc, on voit un écart important. la mesure extra, que certains ont
dénigré récemment dans les journaux, l'expérience
de travail qu'on appelait autrefois «travaux communautaires»: 23 %
des personnes qui ont participé ont trouvé un emploi sur une
période de sept mois, en moyenne, après la mesure, alors que dans
le groupe de ceux qui n'ont pas participé, seulement 13 % se sont
trouvé un emploi. alors, ça, ça vient clouer le bec
à tous ceux qui attaquent cette mesure-là par les temps qui
courent.
Le programme SEMO: 21 % se sont trouvé un emploi, par rapport
à 13 % pour les clientèles qui n'ont pas participé aux
mesures.
Le stage en milieu de travail: 30 % se sont trouvé un emploi,
contre 14 % chez ceux qui n'ont pas participé.
Et le champion des champions, M. le Président, vous vous en
doutez sûrement, c'est le programme PAIE, le Programme d'aide à
l'intégration en emploi, où 40 % des personnes qui ont
participé se sont trouvé un emploi sur une période de sept
mois, en moyenne, après le programme, alors que chez les
non-participants, seulement 14 % se sont trouvé un emploi.
Et si on regarde l'ensemble de tous ces programmes-là, la
conclusion, c'est que 25 % des personnes qui ont participé se sont
trouvé un emploi sur une période de sept mois en moyenne, contre
13 % pour ceux qui n'ont pas participé. On conclut donc que l'impact des
programmes de développement de l'employabilité et
d'intégration en emploi est plus grand lorsque les personnes
complètent leur participation à un programme.
M. le Président, je pense que ce sont des chiffres absolument
intéressants et qui ont pour effet de faire taire ceux qui
dénigrent les programmes de développement de
l'employabilité. L'étude en est venue à d'autres
conclusions aussi. Je donnerai seulement les conclusions comme telles. La
participation à un programme permet davantage de se trouver un emploi et
de quitter la sécurité du revenu. Et nous avons toute une
série de statistiques qui le prouvent également. On peut dire
également que les programmes aident à intégrer davantage
des personnes qui présentent de plus grandes barrières à
l'emploi, telle une longue durée de présence à l'aide
sociale, le fait d'être plus âgé, un faible niveau de
scolarité ainsi que la présence d'enfants à charge. Tous
ces facteurs, quand ils sont présents, font en sorte que les programmes
aident davantage à intégrer ces personnes-là.
Également, on a constaté que la très grande
majorité des personnes participant aux programmes se disent satisfaites
des emplois qu'elles ont occupés dans une proportion de 89 %. Là
encore, M. le Président, ça vient clore le bec à ceux qui
prétendent que, quand on sort de l'aide sociale, c'est toujours pour
occuper des emplois peu valorisants, etc. 89 % des gens se sont
déclaré satisfaits des emplois qu'ils ont occupés. La
majorité des personnes participant aux programmes jugent
«très utile» ou «utile» la formation ou
l'expérience reçue dans le programme pour obtenir l'emploi
occupé. Et, finalement, les emplois occupés par les personnes
participant au programme sont principalement des emplois permanents, dans une
proportion de 59 %; des emplois de jour, dans une proportion de 69 %; des
emplois à temps plein, de 32,44 à 36,36 heures par semaine. Ce ne
sont certainement pas des heures de député, ça, M. le
Président.
Alors, en gros, je pense que c'est là un document
extrêmement important et j'ai déposé le document ce matin.
Je ne sais pas si le député de La Prairie a eu l'occasion d'en
prendre connaissance; sinon, on peut lui en faire parvenir une copie, de
même que les autres membres de la commission.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. M. le
député de La Prairie, s'il vous plaît.
Discussion générale Étude sur
l'efficacité des mesures d'employabilité
M. Lazure: Sur ce point précis, M. le Président, on
va en reparler plus en détail, mais je ne peux pas
laisser passer une énormité comme ça, parce qu'on
peut faire dire n'importe quoi aux chiffres. Qu'il soit bien clair au
départ que toutes les mesures rationnelles et efficaces de
préparation au monde du travail qui pourront être mises sur pied
vont avoir notre appui total, mais quand le ministre nous donne des chiffres
superoptimistes, il oublie de dire certaines choses.
Par exemple, l'étude qu'il mentionne, elle est viciée
fondamentalement parce qu'on met des pommes avec des oranges.
C'est-à-dire que, d'une part, dans le groupe qui fait l'objet de
l'étude, il s'agit de personnes assistées sociales qui sont des
participants, évidemment, et à côté, dans le groupe
témoin, on a mis des non-participants qui n'ont pas du tout les
mêmes aptitudes physiques et psychologiques et la même
préparation. Alors, on mélange les choses. deuxième
remarque. sur le programme paie, j'ai le document qui vient du ministre;
là aussi on a fait un petit tour de passe-passe. il a parlé de 40
% et, ici, on dit 37 %. mais son 37 %, dans l'étude, dans
l'évaluation, il est curieusement atteint ce 37 %. on part avec 50 % de
l'échantillonnage total qui est de 1400. on en a 50 % qui sont des
participants dont la participation a été menée à
terme. o.k.? l'autre 50 %, les participants sont tombés, que ce soit
dès le début, au milieu ou à la fin, peu importe, ils ne
sont pas allés à terme. encore une fois, il s'agit d'un programme
de six mois, le programme paie. alors, dans la moitié où ils sont
allés à terme, le pourcentage des gens qui avaient un emploi
quelques mois plus tard, c'est 19 %, les chiffres mêmes du ministre. et
dans l'autre colonne, il prend l'échantillonnage «participation
interrompue avant terme»: 18 % ont trouvé un emploi. et là,
il additionne 18 % et 19 %, il dit: ça fait 37 %, presque 40 %.
autrement dit, les 18 %, ils peuvent n'avoir fait qu'une semaine dans le
programme paie, ou un mois, ou deux mois, peu importe, et ce n'est pas leur
appartenance au programme paie qui fait que ces 18 % ont eu un emploi. alors,
je mets le ministre au défi de me dire le contraire. et ce qui est assez
intéressant, c'est qu'on a le même pourcentage, à peu
près: 18 % d'un côté, pour ceux qui ne se sont pas rendus
à terme dans leur participation de six mois, et 19 % pour ceux qui se
sont rendus à terme. ce qui fait dire à beaucoup de gens que le
pourcentage d'insertion véritable dans un emploi, suite à une
expérience dans ces mesures d'employabilité, il est le même
que pour l'ensemble des assistés sociaux, si bien que, actuellement,
ici, les chiffres du ministère démontrent qu'une personne
assistée sociale sur quatre, exactement 25,4 %, sort de l'aide sociale
en cours d'année; d'octobre 1991 à septembre 1992, 25 %. mais,
là-dessus, il faut bien savoir qu'il y a 50 % des adultes, ou à
peu près, qui ne sont pas aptes, ce qui nous laisse avec une statistique
d'une personne sur deux. une personne assistée sociale adulte sur deux
qui sont aptes au travail s'intègre au marché du travail, mesure
d'employabilité ou pas. (16 h 10)
Alors, il faut faire attention quand on vient nous faire croire que
ça va très bien ces mesures-là. Tous les gens qui ont fait
des études... Et quand je vois la conclusion du fonctionnaire ou de la
fonctionnaire qui a rédigé le rapport sur le programme PAIE,
l'évaluation à la page 8, elle conclut, l'étude conclut en
disant qu'il s'agit... À la page 10 plutôt, l'étude permet
de constater, je cite: «Que l'intégration postparticipation en
emploi à court terme est satisfaisante.»
«Satisfaisante». Quand une personne à l'emploi du
ministère utilise cette expression-là,
«satisfaisante», qui est très peu élogieuse pour un
programme, ça veut quasiment dire que c'est un fiasco, à toutes
fins pratiques.
M. le Président, qu'il soit bien clair, encore une fois, que nous
sommes fortement en faveur des véritables mesures d'employabilité
ou de préparation au monde du travail, que ce soit par le retour aux
études ou que ce soit par une forme d'apprentissage. À cet
égard, ce matin, il y a eu discussion sur les programmes de formation
professionnelle. Et c'est assez curieux, on constate que les personnes
assistées sociales sont bien mal servies quand il s'agit de programmes
sur mesure pour la formation professionnelle: à peine 1200 personnes
assistées sociales sur 140 000 ont participé à ce
programme-là. Alors, il faut reconnaître que les personnes
assistées sociales n'ont que les miettes quand il s'agit de
véritables programmes qui mènent à un emploi
régulier, un emploi sérieux.
Recours à des tiers par les agents
vérificateurs
La deuxième remarque et dernière, c'est sur la question
des agents vérificateurs. Contrairement à ce que le ministre
vient de dire encore une fois et j'ai devant moi la coupure du journal,
c'est le 19 mars 1993, c'est récent le président du
Comité des affaires sociales de l'Assemblée des
évêques du Québec, Mgr Morrissette, juge inacceptable
l'utilisation que veut faire le gouvernement des presbytères dans sa
chasse aux fraudeurs de l'aide sociale. Mgr Morrissette, qui est aussi
évêque de Baie-Comeau, déplore que la récente
réforme du ministre de la Sécurité du revenu vienne donner
l'impression que les prestataires de l'aide sociale soient, dès le
départ, des fraudeurs. Et Mgr Morrissette dit: «L'an dernier, nous
avons demandé au premier ministre Bourassa de faire en sorte que les
agents de l'aide sociale n'utilisent plus les tiers dans leur
enquête.» Sa requête a été refusée,
c'est clair.
Ce n'est pas exact, comme le ministre vient de le laisser entendre, que
les évêques sont d'accord avec le recours aux tiers. Ils ne sont
pas d'accord, ils ont dénoncé ça, ils ont demandé
au premier ministre de le faire cesser. Le premier ministre n'a pas agi, et le
ministre continue de le faire. Il le fait de la même façon qu'il
avait fait la première opération «boubous macoutes no
1»; l'opération actuelle, elle est connue sous le nom de
«super boubous macoutes».
Maintenant, il faut vraiment qu'on s'entende sur la valeur de ces
programmes. Autant nous allons dire
bravo! quand il s'agit de véritables programmes, que ce soit pour
un retour aux études ou par des stages en formation, autant nous allons
dire: n'essayons pas de donner des vertus à ces mesures qui n'en ont
pas.
Le Président (M. Joly): M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, je vais reprendre certains
des points, parce que c'est un peu gros. Le député y va à
la hache, si je puis dire. Pour ce qui est des presbytères, il y a eu
une méprise; c'est évident qu'il y a eu une méprise
à l'égard du président du Comité des affaires
sociales, Mgr Morrissette. On s'est imaginé que les fonctionnaires du
ministère avaient le droit ou avaient mission d'aller voir les
prêtres et leur arracher le secret de la confession. C'est à peu
près ce que j'ai cru comprendre de la réaction de certains
curés. J'ai affirmé aux évêques, lorsque je les ai
rencontrés, que l'objectif recherché était essentiellement
d'obtenir les certificats des registres de l'état civil dont les
prêtres sont les dépositaires dans les presbytères.
Il faut comprendre que quand un de nos enquêteurs, de nos
vérificateurs veut établir une preuve, parfois il a besoin d'une
preuve écrite; or, ces documents-là ne se retrouvent qu'à
un seul endroit pendant l'année, une année donnée, dans
les presbytères. Il y a un double des registres de l'état civil
qui est fabriqué et qui est déposé au palais de justice,
à la Cour, mais ça, ce double-là, il n'est fait
qu'à la fin de l'année. On dépose le registre, et
là, il y a une copie qui est faite et le duplicata demeure chez le
protonotaire, et le curé ou le presbytère conserve la copie ou le
duplicata; ce sont deux originaux. Et ces gens-là deviennent, tant les
gens du protonotaire que les curés, des fonctionnaires de l'État
civil. Les prêtres et les ministres du culte agissent alors à
titre de fonctionnaires publics. Us sont tenus, en vertu du Code civil, de
délivrer à qui en fait la demande des copies authentiques d'un
acte de naissance, un acte de décès ou un acte de mariage. Cette
procédure est d'ailleurs entièrement compatible avec la Loi sur
l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des
renseignements personnels. Et, M. le Président, c'est à cette
fonction civile des prêtres et à cette fonction seule que les
agents de la sécurité du revenu s'adressent. En aucun cas on a
l'intention d'interroger les prêtres sur des secrets ou des situations
personnelles qu'ils auraient pu connaître dans leurs fonctions de
curés.
Je l'ai dit aux évêques et on a convenu avec eux que je
préciserais encore davantage, par une directive administrative, ces
choses-là et c'a été fait. Donc, je déplore qu'on
ait interprété autrement la directive qui ne se voulait
certainement pas de permettre à des agents d'aide sociale d'aller
demander aux prêtres de leur livrer des secrets qu'ils peuvent obtenir
dans le cadre de l'exercice de leurs fonctions.
Pour ce qui est des évêques, M. le Président, le
député de La Prairie y va allègrement en me disant que je
n'ai pas dit la vérité. Moi, je sais ce que j'ai dit, ce que j'ai
entendu lors de ma rencontre avec les évêques. Et ce que j'ai dit
tout à l'heure est l'exacte vérité de ce qui a
été dit. Alors, le député de La Prairie pourra dire
ce qu'il veut, il pourra consulter les évêques que j'ai
rencontrés, ça m'étonnerait qu'il y ait deux versions.
Étude sur l'efficacité des mesures
d'employabilité (suite)
Finalement, M. le Président, ce qu'il y a de plus grave dans les
propos du député de La Prairie, c'est qu'il a tout à
l'heure affirmé que les fonctionnaires du ministère, dans les
études qu'ils ont faites, dans le rapport qu'ils ont fait, ont
procédé d'une façon... Je pense que le mot était
«vicié», que l'on a vicié c'est le mot qui a
été employé la procédure ou la façon
de procéder pour faire l'analyse des programmes de développement
de l'employabilité, de sorte que la procédure étant
viciée, forcément, les conclusions sont erronées. C'est
grave, M. le Président, très grave comme accusation.
Moi, j'ai des fonctionnaires qui travaillent au ministère depuis
de nombreuses années, qui ont fait carrière, et qui sont
payés des salaires assez importants parfois, presque autant que des
députés, même plus à l'occasion, et qui sont
sensés faire un travail correct, honorable, compétent. Et
là, M. le Président, je ne peux pas accepter...
Enfin, moi, je ne sais pas si le député a raison ou non.
Mais s'il a raison, je vais avoir de sérieuses questions à poser
à ceux qui m'entourent. Si c'est vrai qu'on me remet des enquêtes
bidon, des rapports bidon qui sont viciés, bien là, je veux le
savoir. Je pense qu'on a le devoir de demander au sous-ministre qui est en
charge des politiques et des programmes du ministère de venir nous
expliquer en quoi son rapport est exact ou ne l'est pas. Et, s'il ne l'est pas,
pourquoi il ne l'est pas?
Alors, je demanderais, M. le Président, si vous voulez, qu'on
laisse la parole à M. Pierre Fontaine, qui est le sous-ministre
responsable des politiques et des programmes.
Le Président (M. Philibert): M. Pierre Fontaine, vous avez
la parole.
M. Fontaine (Pierre): M. le Président, l'importante
étude qui a été déposée ce matin à la
commission parlementaire, qui est une relance auprès des prestataires de
la sécurité du revenu et dont le ministre a fait état des
grandes conclusions il y a quelques minutes, est une étude qui est tout
à fait scientifique et faite à partir de critères
très précis pour en assurer, justement, la qualité et
l'exactitude des résultats.
On n'a pas comparé des pommes et des oranges dans cette
étude-là, on a comparé des personnes, des groupes de
personnes qui ont des caractéristiques analogues justement pour
éliminer les biais qui sont introduits parfois dans un certain nombre
d'études où on pourrait comparer des personnes qui ont des
caractéristiques qui les rendent plus aptes à des situations
données par rap-
port à d'autres qui n'en ont pas. (16 h 20)
Ce qu'on a fait dans ce cas-ci, c'est qu'on a fait un échantillon
représentatif et scientifique de personnes qui ont participé
à chacune des mesures. Par exemple, la mesure de rattrapage scolaire, la
mesure PAIE, la mesure Stages en milieu de travail, etc. On a tiré un
échantillon aléatoire représentatif des personnes qui ont
participé à cette mesure-là et on a comparé avec un
groupe qui, lui, n'avait pas participé mais qui était à
l'aide sociale. Et pour éliminer les biais possibles dans ce genre
d'enquête, on a fait l'effort de comparer les personnes
échantillonnées au niveau de l'enquête pour les
participants avec des caractéristiques analogues chez le groupe des
non-participants. Par exemple, si, dans le groupe, il y avait des gens qui
avaient une durée de présence à l'aide sociale plus
longue, on avait, dans notre groupe témoin, une caractéristique
comparable.
On a, en fait, comparé au niveau du sexe, au niveau de la
présence cumulative à la sécurité du revenu, au
niveau de la scolarité atteinte par les individus, au niveau de la
répartition régionale, et au niveau de la présence
d'enfants à charge. Ce sont des caractéristiques qui viennent
influencer la possibilité d'intégrer le marché du travail.
On a donc voulu que les caractéristiques soient parfaitement comparables
entre le groupe témoin et le groupe qui a quitté la participation
au marché du travail. Les résultats qui sont produits là
ont été jugés satisfaisants; s'ils avaient
été jugés non satisfaisants, nous l'aurions tout aussi
bien dit au ministre parce que, ce qui est intéressant ici, c'est de
trouver des formules qui permettent aux personnes qui sont à la
sécurité du revenu de réintégrer le marché
du travail, et non pas de cacher des réalités. Je vous remercie,
M. le Président.
M. Bourbeau: M. le Président, j'aimerais...
Le Président (M. Philibert): Merci. M. le ministre.
M. Bourbeau: ...conclure. J'espère que le
député de La Prairie, M. le Président, ne poursuivra pas
dans cette voie-là. Je ne lui en veux pas, là, ça lui a
peut-être échappé. Mais il faut bien réaliser que
les fonctionnaires qui ont fait l'étude sont des professionnels, des
gens dont c'est le métier, et même plus que leur métier,
c'est leur vie de faire des études semblables, des statistiques, des
analyses, et je m'en voudrais de laisser l'impression, M. le Président,
que cette étude-là pourrait être biaisée.
J'espère que le député de La Prairie, ou bien va poser
d'autres questions, pour se satisfaire qu'il a raison, ou bien va admettre que
ses mots, ses paroles ont dépassé sa pensée.
M. Lazure: M. le Président...
Le Président (M. Philibert): M. le député de
La Prairie.
M. Lazure: ...je vais demeurer maître de ce que je dis,
là, et ce n'est pas le député de Laporte qui va
m'influencer dans ce que je dis. D'abord, il ne faut pas qu'il laisse entendre
que j'ai parlé de trucages vicieux. J'ai dit «vicié»
dans le sens qu'il y avait une erreur, à mon avis, dans la technique
même de la recherche. on essaie de prouver l'efficacité d'une
mesure d'employabilité. je répète ce que j'ai dit
tantôt. et c'est le tableau du ministère, ce n'est pas mon
tableau, ça; c'est le tableau de la recherche qui prend la moitié
des sujets ayant participé durant les six mois à la mesure, qui
arrive à 19 % qui ont accroché un emploi, et qui prend un autre
50 % qui n'ont pas participé à la mesure, et qui, eux, ont
accroché, 18 %, de l'emploi. ensuite, là où ça
devient vicié, où ça devient tendancieux, nonobstant les
bonnes intentions du fonctionnaire ou de la fonctionnaire que je ne mets pas en
cause, là où ça devient tendancieux, c'est qu'on prend le
18 % d'intégration en emploi de ceux qui ne sont pas restés
à la mesure d'employabilité plus qu'une semaine ou un mois, on ne
le sait pas, et on additionne ça aux 19 % de ceux qui ont fait les six
mois et qui ont accroché un emploi. on ne fait pas des choses comme
ça.
Je vais vous faire une comparaison, M. le Président: C'est un peu
comme si on faisait l'essai d'un médicament pendant six mois pour
démontrer que le médicament est efficace. On va prendre 100
personnes qui vont le prendre pendant six mois, on va arriver à un
pourcentage de ces gens-là qui ont été guéris; on
va prendre 100 autres personnes qui l'ont laissé en cours de route, sans
qu'on dise s'ils l'ont laissé après un jour, une semaine ou un
mois, et on va additionner les deux pourcentages. Ce n'est pas sérieux!
C'est ça que j'ai voulu dire, M. le Président, et je maintiens ce
que j'ai dit: Ça ne fait pas une étude sérieuse.
Il y a une deuxième étude, un an plus tard parce
que celle qu'on discute actuellement, c'est 1991 dont je vais vous citer
la source, c'est Monique Tremblay, Direction de l'évaluation, avril
1992, qui dit justement, au sujet du programme PAIE, que 51,6 % des emplois
où est allée une personne assistée sociale sous une mesure
PAIE, que 51 % de ces emplois-là auraient été
créés de toute façon; de toute façon.
Autrement dit, là, il ne faut pas essayer de nous faire prendre
des vessies pour des lanternes. Encore une fois, on peut tenter
d'améliorer ces programmes-là, mais il ne faut pas leur faire
dire qu'ils sont superefficaces, parce qu'ils ne le sont pas.
Alors, moi, je suis prêt à commencer, M. le
Président, le programme...
Le Président (M. Philibert): M. le ministre.
M. Bourbeau: J'aimerais laisser la parole à M. Fontaine
pour un petit mot, M. le Président, si vous voulez.
Le Président (M. Philibert): M. Fontaine.
M. Fontaine: M. le Président.
M. Lazure: C'est vous qui voulez le prolonger, le débat?
On va le prolonger.
M. Bourbeau: Non, non, écoutez, quand même, vous
avez des faits que vous avez avancés.
M. Lazure: Bien oui.
Le Président (M. Philibert): S'il vous plaît, s'il
vous plaît! Les commentaires de M. Fontaine.
M. Fontaine: M. le Président, les commentaires que je
passais tout à l'heure étaient pertinents vis-à-vis de
l'étude qui a été déposée ce matin.
L'étude dont il vient d'être fait mention est une étude qui
a été produite antérieurement, il y a environ un an, si ma
mémoire est bonne. Je ne l'ai pas avec moi, mais je peux quand
même vous la commenter puisque j'en ai un souvenir assez précis,
l'ayant examinée de très près.
La question posée était la suivante: Lorsque des personnes
quittent le programme PAIE et lorsqu'on regarde la situation de ces
personnes-là trois mois après la fin de l'étude,
qu'arrive-t-il en ce qui a trait à leur intégration au
marché du travail? Il y a un certain nombre de personnes qui ont
quitté PAIE avant la fin du programme. Bien sûr, il y en a une
partie qui l'ont quitté justement parce qu'elles avaient trouvé
un emploi plus permanent. L'étude précise très clairement
qu'il y a un certain nombre de personnes, effectivement, qui n'ont pas
terminé le programme. lorsqu'on mentionne les chiffres de 18 % et 19 %,
ce n'est pas exactement de 18 % et 19 %, de mémoire, dont il est
question, mais bien de 18 personnes sur 50 personnes et 19 personnes sur 50
personnes, puisqu'il y a environ la moitié des personnes qui ont
quitté le programme avant la fin et la moitié des personnes qui
ont quitté à la fin du programme. donc, c'était 50 % d'un
côté et 50 % de l'autre. et pour les 50 personnes qui avaient
quitté avant la fin du programme, le taux d'intégration
était de l'ordre de 17 %, 18 % vous l'avez sous les yeux, je ne
l'ai pas, mais c'est autour de ça et l'intégration, pour
les autres, était à peu près du même ordre. donc,
c'était... c'était, pardon, 18 personnes sur 50 et 17 personnes
sur 50 dans les deux cas, ce qui faisait un taux d'intégration au
marché du travail de l'ordre de 37 %, si ma mémoire est bonne.
à ce moment-là, ce taux d'intégration au marché du
travail, après trois mois, était très élevé
en période de conjoncture comme celle que nous connaissions.
L'étude que nous apportons aujourd'hui est plus nuancée
que celle-là en ce sens qu'elle permet même de comparer par
rapport à des personnes qui ont été à la
sécurité du revenu et qui ne sont pas passées à
travers le programme. Donc, on a un effet net du programme dans l'étude
qui a été déposée aujourd'hui et c'est une suite
qui est très intéressante, et l'évaluation qui a
été faite aujourd'hui va se continuer pour qu'on sache, qu'on
connaisse la situation des personnes plus tard, soit un an et demi après
leur sortie du programme.
M. Lazure: m. le président, moi, j'ai le tableau venant du
ministère devant moi. il s'agit bien de 19 % pour les participants qui
sont restés à la mesure d'em-ployabilité et, dans l'autre
moitié, de 18 %; je lis très bien 18 %. et, entre
parenthèses, 255; l'autre, c'est 268 personnes. 18 % dans les cas
où les gens ne sont pas restés à la mesure
d'employabilité.
Je termine aussi en posant une question au ministre: Comment se fait-il
que, ce matin, ça ait été déposé, ça,
la recherche de 1991, et qu'il y a une recherche de 1992 qu'on n'a pas
déposée ce matin? On l'a eue d'une certaine façon mais...
Oui, vendredi, on l'a eue. Celle que je viens de citer, les deux tableaux,
c'est vendredi qu'on l'a eue.
M. Bourbeau: Le document...
Le Président (M. Philibert): M. le ministre.
M. Bourbeau: Le dernier document dont vous avez parlé,
c'est une étude de 1992. Celle que j'ai déposée ce matin,
c'est une étude datée de février 1993. Elle vient de
sortir, il y a un mois, deux mois plutôt, et c'est la raison pour
laquelle elle n'était pas disponible l'an dernier. maintenant, m. le
président, j'aimerais quand même porter à votre attention
un fait. quand une personne décide de participer au programme paie,
disons que c'est une personne qui est à la sécurité du
revenu depuis deux ans ou plus et qu'on la convainc d'accepter un emploi, elle
accepte l'emploi, elle sort de la sécurité du revenu. souvent,
cette personne-là, ou bien n'a jamais travaillé de sa vie, dans
40 % des cas, ou bien elle n'a pas travaillé depuis très
longtemps, elle a perdu ses habitudes de travail, elle est insecure, manque un
peu de confiance en elle, etc. et puis là, elle commence à
travailler dans un milieu de travail. elle a une aide, mais ses compagnons de
travail ne le savent pas, ordinairement. cette personne-là
intègre le marché du travail dans un vrai milieu de travail et
prend des habitudes de travail. (16 h 30)
II arrive parfois, après deux ou trois mois, que cette
personne-là se dise: Maintenant que j'ai recommencé à
travailler, je n'ai plus le goût de retourner à la
sécurité du revenu et je suis dans un programme temporaire de six
mois. Et, là, cette personne peut regarder autour d'elle et trouver un
emploi. Et, là, elle se trouve un véritable emploi. Donc, elle
abandonne la mesure PAIE, le programme PAIE, et elle se trouve un autre emploi.
On ne peut pas nier le fait que, parce qu'elle avait intégré le
marché du travail via le programme PAIE, ça lui a donné un
élan qui, après ça, lui a permis, avec la confiance accrue
qu'elle a reprise en elle, de se trouver un emploi. Et on ne peut pas nier
que
cette personne-là a repris le chemin du travail parce qu'elle a
transité par le programme PAIE.
Donc, quand on fait des évaluations, éventuellement, de la
rentabilité du programme PAIE, on tient compte de ceux qui ont
intégré le marché du travail tant de mois après la
fin du programme. Que la personne ait complété le programme ou
qu'elle ait quitté en cours de programme, si elle a quitté parce
qu'elle s'est trouvé un emploi, c'est une personne qui est sortie de la
sécurité du revenu, qui a quitté l'aide sociale et qui n'y
est plus. Donc, on peut considérer que le programme PAIE a joué
son rôle d'intrégrer en emploi cette personne-là. Et c'est
pourquoi je pense qu'il est tout à fait correct de considérer
aussi les gens qui ont intégré le marché du travail
après une participation partielle au programme PAIE.
Secteur administration et services Gestion et services
aux clientèles
M. Lazure: M. le Président, les effectifs qui semblent,
d'après les chiffres qu'on a...
Le Président (M. Philibert): C'est dans le programme 1 qui
a été appelé antérieurement?
M. Lazure: Oui, c'est ça.
Le Président (M. Philibert): Alors, nous revenons au
programme 1. M. le député de La Prairie.
(Consultation)
Baisse des effectifs au ministère
M. Lazure: Dans le livre des crédits, M. le
Président, on note que la colonne des effectifs 1993-1994, le total est
de 4562 alors que, l'an dernier, 1992-1993, il y avait un total de 4782, donc
une différence de 220. Et la question que je pose au ministre: Est-ce
qu'il s'agit d'une baisse réelle d'effectifs ou d'un transfert
d'effectifs à la société de la main-d'oeuvre?
M. Bourbeau: M. le Président, vous permettrez que je
suspende, pas que je suspende...
Le Président (M. Philibert): M. le ministre.
M. Bourbeau: ...mais prenne quelques secondes pour
répondre, parce que c'est la première fois, en cinq ans que je
fais des études de crédits, qu'on me pose une question sur les
crédits. Alors, je suis un peu pris de court.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bourbeau: Je ne suis pas habitué, M. le
Président, à avoir des questions sur les crédits, parce
que ça n'a jamais été l'habitude de la
députée qui tenait le rôle de critique. Mais, là, je
vais me munir des documents, M. le Président. Ce n'est pas parce que je
ne suis pas intéressé aux chiffres, M. le Président, mais
disons que ce n'était pas dans les coutumes du
prédécesseur du député de La Prairie. Alors,
là, vous êtes au programme 1. Est-ce que vous pourriez reposer la
question?
M. Lazure: Oui. L'ensemble des effectifs du ministère,
l'an passé, au Livre des crédits, c'était 4782. Cette
année, on voit le chiffre 4562, ce qui fait une baisse de 220. Où
sont allés ces 220 postes?
M. Bourbeau: Quel chiffre avez-vous pour l'an dernier, M. le
député?
M. Lazure: 4782.
M. Bourbeau: II va falloir réconcilier vos chiffres avec
les miens; ce n'est pas ce que j'ai.
M. Lazure: C'est dans les livres de crédits, les livres
officiels.
M. Bourbeau: On a à peu près tout ici, M. le
Président, sauf le livre des crédits.
(Consultation)
M. Bourbeau: M. le Président, essentiellement, ce sont les
fonctionnaires qui ont quitté le ministère pour aller travailler
pour la Société québécoise de développement
de la main-d'oeuvre, autour de 250 personnes.
M. Lazure: Est-ce qu'il y a des projets pour réduire le
nombre d'employés pour la balance de l'année 1993-1994?
M. Bourbeau: Oui, on a reçu une commande du Conseil du
trésor, comme tous les autres ministères, d'effectuer des
compressions. La compression qui est demandée au ministère, sur
la période de 5 ans, est de 708 postes à abolir. Et, pour
l'année courante, nous allons abolir en tout 236 postes au
ministère lui-même et à la ville de Montréal, parce
que vous savez que nous avons un sous-contrat avec la ville de Montréal,
un autre total de 33 postes à la ville de Montréal. Total, donc,
pour l'année courante, de 269 postes.
M. Lazure: Bon, alors...
M. Bourbeau: Et il y en aura l'an prochain et les années
suivantes.
Centralisation à Montréal de l'aide
à l'hébergement et aux services de garde
M. Lazure: Le deuxième sujet, dans cette rubri-
que, là, ça concerne l'administration de l'aide en
services de garde et hébergement, le projet qui est déjà
commencé, je crois, de rapatrier à Montréal environ 150
personnes qui travaillaient dans les différentes régions du
Québec sur ces 2 programmes du ministère, à savoir les
programmes d'aide financière pour l'hébergement et d'aide
financière pour les services de garde. Alors, je voudrais que le
ministre nous fasse l'état de la question.
M. Bourbeau: Oui. La centralisation de la gestion administrative
du programme vise un ensemble d'objectifs dont le plus essentiel est
l'amélioration des services à la clientèle. Nous avons
d'ailleurs constaté que la très grande proportion des contacts se
faisaient par courrier et par voie téléphonique, jusqu'à
maintenant. La nouvelle réglementation facilitera et simplifiera les
relations avec les services de garde. De plus, nous prévoyons
spécialiser une unité chargée des services à la
clientèle. Cette unité, elle sera supportée par des lignes
d'accès de type 1-800.
Par ailleurs, la Direction générale du réseau
Travail-Québec entend conserver dans chaque région un point de
chute pour faciliter de bonnes communications et fournir de l'information
générale. Des améliorations seront également
apportées à l'organisation du travail. L'unité centrale
sera dotée d'une meilleure plate-forme technologique,
c'est-à-dire micro-informatique. La création d'un manuel
d'interprétation, de procédures et d'outils de travail
simplifiés permettra de supporter la nouvelle réglementation pour
livrer efficacement les bénéfices escomptés pour les
parents et les enfants.
Par ailleurs, les délais de traitement seront réduits par
une utilisation efficiente des nouveaux processus de travail. Par
surcroît, les services de garde seront en mesure d'obtenir des
traitements plus rapides. Les services de garde recevront de la formation, et
un guide sera mis à leur disposition. Il va de soi que ce changement
sera effectué dans le respect des ressources humaines. Tous les
effectifs permaments conserveront leur emploi et auront une priorité de
dotation dans leur région. La Direction générale du
réseau Travail-Québec s'est engagée auprès des
autorités de l'Office des services de garde à rencontrer les
associations ou les regroupements de services de garde intéressés
à recevoir de l'information. Ces rencontres serviront à expliquer
clairement les avantages de la réorganisation administrative et notre
préoccupation de maintenir des services de qualité.
Maintenant, en gros, là, quelles sont les raisons principales de
la centralisation? Donc, une amélioration des services à la
clientèle et une diminution des coûts administratifs. Les
avantages: un traitement plus rapide des dossiers, une réduction des
délais, une meilleure communication, la mise en place d'une unité
spécialisée chargée des services à la
clientèle, la ligne 1-800, et permettre aux agents d'accomplir des
tâches de soutien professionnel adaptées aux besoins de la
clientèle.
M. Lazure: M. le Président, je pense que le ministre n'a
pas réussi à vous convaincre, vous non plus. Même en lisant
un texte savant pendant 10 minutes, il ne convaincra personne qu'on
démantibule, on défait un système qui avait
été établi sur des bases régionales pour donner un
service plus près de la population, on le centralise à
Montréal et qu'on fait tout ça pour améliorer le service
à la clientèle. Ce n'est pas très convaincant. La vraie
raison, c'est il l'a dit à la toute fin, là pour
diminuer les coûts. Bon, je comprends que le gouvernement doit faire des
efforts pour diminuer les coûts, mais à quel prix on fait
ça? Au prix de sacrifier la qualité du service à la
clientèle.
Je voudrais demander au ministre s'il a fait une étude avant de
procéder à cette centralisation à Montréal? Parce
que son gouvernement parle beaucoup de régionalisation; c'est un service
qui était régionalisé, ça. Mais, avant de faire
cette centralisation à Montréal, est-ce qu'il a fait un sondage,
une étude pour constater, si tel est le cas, que la population en
région ne voulait plus le service et voulait que ce service soit
à Montréal?
M. Bourbeau: M. le Président, le député de
La Prairie, là, n'a pas une bonne compréhension de ce que nous
faisons. Nous ne sommes pas le ministère de la Santé et des
Services sociaux qui administre l'hébergement, là. Nous, on n'a
pas de contact avec la clientèle. On n'est pas l'Office des services de
garde qui administre les services de garderie. On ne fait que gérer
admi-nistrativement ces programmes-là.
M. Lazure: Oui, je sais.
M. Bourbeau: Les gens n'ont pas de contact avec nous dans les
régions. On ne fait que gérer administrati-vement, pour d'autres
ministères, un programme: pour l'Office des services de garde, pour le
ministère de la Santé en ce qui concerne l'hébergement.
Alors, ça n'a aucune importance en ce qui concerne le service à
la clientèle. Qu'on soit situé dans un bureau à Chicoutimi
ou ailleurs, ou à Montréal, il n'y a aucun problème sur le
plan administratif. Les gens ne nous voient pas; on ne fait que de
l'administration. On paye des comptes. Alors...
M. Lazure: Quelle somme...
M. Bourbeau: Bon. Alors, M. le Président, d'avoir
centralisé ça à Montréal, ça fait
effectivement en sorte qu'on va être plus efficaces, mieux
organisés, plus rapides aussi. Et puis c'est vrai qu'on va sauver de
l'argent. On va sauver 13 500 000 $ en garderies, puis 16 500 000 $ en
hébergement. Ça fait 30 000 000 $, ça.
M. Lazure: C'est ça qui est l'objectif.
M. Bourbeau: M. le Président, ce n'est pas peu de
chose.
M. Lazure: Non.
(16 h 40)
M. Bourbeau: Sauver... Mais ce n'est pas... «C'est-u»
des millions, ça?
M. Lazure: Mais qu'on le dise carrément: On veut sauver 19
000 000 $, donc on centralise à Montréal.
M. Bourbeau: M. le Président, j'ai fait une petite erreur,
là. Ce n'est pas 13 500 000 $, c'est 13,5 personnes. Parce que ça
faisait un peu de millions, là. Alors, on va en tout sauver 30
personnes...
M. Lazure: Bon. Alors, on a voulu faire une coupure de 13
personnes...
M. Bourbeau: Oui, 13 personnes en garderies et, M. le
député, en plus de ça, 16,5 personnes en
hébergement. On coupe 30 postes, monsieur.
M. Lazure: Trente postes.
M. Bourbeau: Et le député, tantôt, me
demandait si j'étais pour couper des postes. Il semblait un peu
l'exiger. Voilà un endroit où, si on réussit, par une
meilleure coordination, à sauver 30 postes, ce n'est pas peu de choses,
M. le Président. Il y en a qui ajoutent 30 postes; nous, on coupe 30
postes. Et l'économie réelle, si le député veut le
savoir, qui est escomptée pour l'année qui vient, c'est de 563
000 $; pour la deuxième année, 728 000 $; pour la
troisième année, 1 020 000 $. Ce n'est pas peu de chose. C'est
récurrent.
M. Lazure: Bon. Alors, j'ai ma réponse. L'objet, le but de
cette opération, c'est de sauver 1 000 000 $ par année. Bon.
Alors...
M. Bourbeau: Ce n'est pas ce que j'ai dit, M. le
Président. Le député, là, n'est pas correct. J'ai
dit, premièrement, un meilleur service à la clientèle.
M. Lazure: Voyons donc!
M. Bourbeau: Oui.
M. Lazure: Voyons donc!
M. Bourbeau: Oui. Meilleur service à meilleur
coût.
M. Lazure: Voyons donc!
M. Bourbeau: Vous n'y croyez pas, hein?
M. Lazure: Non. Non.
M. Bourbeau: C'est pour ça que vous êtes dans
l'Opposition, aussi.
M. Lazure: Non.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Joly): M. le député, s'il
vous plaît.
Baisse des effectifs au ministère
(suite)
M. Lazure: La deuxième question. Le ministre nous a dit
tantôt que, pour l'ensemble du ministère, y compris
Montréal, il y aura réduction de 269 postes. Dans le moment, les
agents d'aide sociale, si je comprends bien les données qu'on nous a
fournies, chaque agent a, en moyenne, 330 personnes, 330. Est-ce que, en
réduisant le personnel, le ministre peut nous dire combien de dossiers
seront traités, en moyenne, par personne? Et, deuxièmement,
est-ce qu'il ne pense pas que, déjà, ces agents sont
surchargés avec l'augmentation du nombre de bénéficiaires
de l'aide sociale?
M. Bourbeau: M. le Président, la norme, c'est à peu
près 330 clients par agent d'aide sociale. Et la norme, elle ne varie
pas, quelle que soit la conjoncture. Alors, quand notre clientèle,
à la Sécurité du revenu, augmente, nous avons une entente
avec le Conseil du trésor que le nombre de fonctionnaires augmente de
façon à ce que nos fonctionnaires aient toujours environ 330
personnes dont ils s'occupent, chacun. Et quand la clientèle diminue, on
rend automatiquement des postes pour toujours garder la moyenne de 330,
à peu près autour de 330. Alors, dans les bonnes années,
M. le Président, où la clientèle de la
Sécurité du revenu diminuait pour nous, c'étaient
des bonnes années; je ne sais pas si c'étaient des bonnes
années pour l'Opposition, mais c'étaient des bonnes années
le personnel du ministère diminuait. Depuis qu'on a subi une
augmentation de la clientèle à la Sécurité du
revenu, on augmente le nombre de fonctionnaires, et c'est une augmentation
automatique.
M. Lazure: Alors, je suis prêt à passer au programme
4.
Le Président (M. Joly): Le programme 4. Alors, le
programme 4 est appelé.
Secteur régimes de sécurité du
revenu
Sécurité du revenu Changements aux
barèmes d'aide sociale
M. Lazure: Bon. Peut-être quelques questions d'ordre
général au ministre. Il nous a fait part tantôt du nombre
de postes qui allaient être coupés dans son ministère, 269
incluant Montréal, au cours de l'année. Est-ce qu'il pourrait
nous faire part maintenant, avec la même transparence, des coupures dans
les barèmes d'aide sociale qu'il envisage de faire d'ici quelque
temps?
M. Bourbeau: M. le Président, avec plaisir. Sauf que je
n'aime pas la partie de phrase où le député dit
«avec la même transparence», laissant entendre que, parfois,
je suis moins transparent que d'autres.
M. Lazure: C'est vrai. Oui, oui.
M. Bourbeau: M. le Président, je suis toujours
transparent. C'est...
M. Lazure: Ha, ha, ha!
M. Bourbeau: ...un de mes défauts, peut-être une de
mes qualités, mais j'essaie toujours de dire les choses telles qu'elles
sont. Alors, ceci étant dit, je ne pourrai pas en dire très long
au député sur les barèmes. Ha, ha, ha!
M. Lazure: Ha, ha, ha!
M. Bourbeau: Ce n'est pas parce que je ne veux pas être
transparent, M. le Président, mais, pour affirmer des choses, il faut
que je sois capable de les affirmer. Présentement, on est en train,
effectivement, de rééquilibrer les barèmes de la
Sécurité du revenu. On s'est rendus compte à l'usage, avec
le temps, pour toutes sortes de raisons, y compris les indexations
différenciées entre les aptes et les inaptes, qu'on en est rendus
à une situation un peu étonnante où certaines
catégories de prestataires reçoivent des prestations plus
élevées que d'autres alors qu'ils devraient recevoir moins.
À titre d'exemple, les prestataires qui sont dans le programme
Soutien financier. Vous savez, M. le Président, vous qui êtes un
expert dans le domaine de la sécurité du revenu, que Soutien
financier, c'est ceux qui doivent recevoir, en principe, les barèmes les
plus élevés. Alors, dans certaines catégories, les aptes
participants reçoivent des prestations plus élevées que
Soutien financier ...si je peux avoir accès aux barèmes, M. le
Président, je vais pouvoir les donner. Exemple, M. le Président:
une personne qui est un apte participant, disons une famille biparentale avec
deux enfants, reçoit 1246 $; ça peut varier, 1248 $. Si on a
Soutien financier, c'est 1169$. Donc, la personne qui est apte au travail
reçoit plus d'argent que la personne qui est à Soutien financier.
Il y a même une catégorie d'aptes non disponibles, des couples
sans enfant, qui reçoivent 969 $ s'ils participent; et s'ils sont
à Soutien financier, ils reçoivent 967 $.
Donc, même des gens qui sont non disponibles, des couples sans
enfant, reçoivent plus d'argent, non disponibles, que s'ils sont des
soutiens financiers qui, eux, sont des non disponibles beaucoup moins
disponibles encore parce qu'ils sont inaptes. Alors, ce n'est évidemment
pas très régulier. Ce n'est pas très souhaitable d'avoir,
comme ça, des barèmes qui sont aussi différents.
Il y a aussi le problème du barème de disponibili-
té. alors, m. le président, vous savez que, quand une personne
arrive à la sécurité du revenu, elle a droit à un
barème de base. si elle participe, elle a droit à une prime. la
prime, pour une personne seule, est de 116 $. or, il arrive qu'il y ait des
personnes qui souhaitent participer, mais on n'a pas de mesure à leur
proposer et on leur verse un acompte, ce qui est le barème de
disponibilité. par exemple, pour une personne seule, on verse 70 $ de
plus si la personne se déclare disponible. or, à l'usage, on
s'est rendus compte que quand, effectivement, on propose une mesure, ça
prend trois personnes disponibles pour en trouver une qui, effectivement,
accepte éventuellement de participer. c'est donc dire qu'il y a un
certain nombre de personnes qui s'étaient déclarées
disponibles et qui ne l'étaient vraiment pas puisqu'elles refusent;
c'est au-delà de 50 %, la moyenne, je crois; autour de 50 % refusent.
alors, on s'est dit: ii serait peut-être préférable de
rendre le barème de disponibilité un peu moins
généreux et d'augmenter le montant de la prime qui est
payée lorsque la personne participe réellement. et c'est pour
ça qu'on va probablement réduire les barèmes de
disponibilité, les montants du barème des aptes et de
disponibilité de façon à conserver une plus grosse somme
d'argent à ajouter à la prestation lorsque les gens participeront
réellement.
On veut aussi tenter d'améliorer un tant soit peu la situation
des familles monoparentales. Également, on veut creuser l'écart
entre ceux qui participent et ceux qui ne participent pas. Bon. Ça,
c'est un des objectifs. (16 h 50)
Dans ce rééquilibrage-là, évidemment, il y
aura des prestataires qui recevront plus, il y en a qui recevront moins. Et on
verra, lorsque les décisions finales seront prises, quels sont ceux qui
recevront plus et ceux qui recevront moins, mais on va tenter de faire
ça, M. le Président, de telle façon qu'il y ait un minimum
de personnes qui verraient leur chèque coupé, sinon aucune. On va
tenter de respecter autant que possible ce qu'on pourrait appeler les droits
acquis, enfin, les habitudes de ceux qui ont déjà un
chèque, en tentant de faire en sorte que ces personnes-là ne
voient pas leur chèque diminué, et tenter de faire en sorte que
le temps puisse arranger les choses.
Alors, en gros, M. le Président, c'est ce que nous pouvons faire.
Je n'ai pas de renseignements précis à apporter autres que ceux
là. Les décisions finales ne sont pas prises. Je dois
présenter le dossier, sous peu, dans les comités
ministériels, au Conseil des ministres, et après, on rendra
publiques ces décisions.
Le Président (M. Joly): M. le député, s'il
vous plaît.
M. Lazure: Oui, M. le Président, le ministre nous...
M. Bourbeau: En toute transparence. M. Lazure: Pardon?
M. Bourbeau: En toute transparence.
M. Lazure: Oui. Il nous fait part de ses orientations. En
réponse à nos questions, il avait répondu ça,
à peu près, ou son attaché de presse avait répondu
quelque chose de semblable il n'y a pas longtemps. Est-ce que ça veut
dire que le statut de disponible, la catégorie «disponible»,
vous voulez la faire disparaître, éventuellement? Et, pour
ça, est-ce que vous allez amender la loi?
M. Bourbeau: Non, pas du tout, M. le Président, notre
intention n'est pas de la faire disparaître mais de
rééquilibrer le barème pour faire en sorte qu'il y ait une
grosse différence entre les montants d'argent qui sont payés
à ceux qui sont disponibles et à ceux qui sont non disponibles,
par exemple. Parce que, présentement, c'est très
rapproché. Prenez, par exemple, une personne seule qui est disponible,
elle reçoit 580 $ par mois; si elle est non disponible, elle
reçoit 611 $ par mois. C'est 31 $ de différence. Par contre, si
elle est non participante, elle reçoit 510 $; donc, il y a 70 $ de
différence entre les non-participantes et les disponibles donc
une grosse différence et très peu entre les disponibles et
les non-disponibles. Il y a comme une espèce de disproportion dans les
barèmes, et l'écart est trop grand entre les non-participants et
les disponibles par rapport aux disponibles et aux non-disponibles pour
ceux qui sont familiers avec ces termes-là.
Alors, on veut simplement faire en sorte que les écarts soient
plus réguliers, disons.
Incidence de l'efficacité des mesures
d'employabilité
M. Lazure: M. le Président, si les programmes, que ce soit
de retour aux études, que ce soient des mesures d'employabilité,
étaient plus efficaces, plus performants et plus réalistes en
termes de préparation au monde du travail, il y aurait beaucoup plus de
gens qui accepteraient.
M. Bourbeau: M. le Président...
M. Lazure: Deuxièmement, on l'a vu tantôt, j'ai
cité des chiffres, pour 45 000 personnes disponibles, à un moment
donné, on sait qu'au total, à une date donnée, il y avait
seulement 40 000 offres de mesures. Autrement dit, le ministre veut diminuer le
nombre de personnes disponibles, mais la meilleure façon de le faire,
c'est d'offrir plus de mesures d'employabilité intéressantes et
qui mènent à des vrais emplois, ou des mesures de retour aux
études. Au lieu de ça, il va se contenter de baisser la
prestation de la personne qui est disponible, qui utilise son droit de se dire
disponible.
M. Bourbeau: M. le Président, je suis un peu
étonné de la déclaration que vient de faire le
député de La Prairie, où il dit: Si les programmes de
développement de l'employabilité étaient plus efficaces...
Et, donc, il met clairement en cause l'efficacité de ces
programmes-là.
M. Lazure: Oui.
M. Bourbeau: Ça m'étonne, parce que ce sont des
programmes qui ont été inventés par le Parti
québécois. Rattrapage scolaire, c'est un programme qui a
été inventé sous le Parti québécois; le
Retour aux études postsecondaires, c'est le bébé de Mme
Marois. M. le Président, Mme Pauline Marois était très
fière de ce programme-là, qu'elle avait; EXTRA aussi. Travaux
communautaires, ça a été inventé sous le Parti
québécois aussi. Et vous les avez maintenus jusqu'à votre
départ en 1985. Alors, s'ils étaient si inefficaces que
ça, pourquoi ne les avez-vous pas abolis vous-mêmes?
M. Lazure: Rattrapage scolaire, Mme la Présidente... Tout
le monde sait que, lorsque le ministère offre des programmes de
rattrapage scolaire, il y a toujours plus de candidats et de candidates qu'il
n'y a de programmes offerts. Autrement dit, la demande pour ces
programmes-là est toujours très forte. Ils sont toujours bien
reçus. Le ministre le sait, ça. C'est justement un des programmes
les plus performants, le Retour aux études, et c'est sur ces
programmes-là que le ministère lésine, c'est sur ce
programme-là que le ministère devrait faire porter ses
efforts.
M. Bourbeau: le député n'a pas répondu
à mon objection de tantôt. tantôt, le député a
balayé du revers de la main tous les programmes de développement
de l'employabilité, et il n'est pas revenu sur son affirmation à
l'effet qu'ils étaient inefficaces. disons que rattrapage scolaire,
c'est la mesure qui, d'après nos études, la dernière
étude, est la moins performante. quand on constate les personnes qui
participent à rattrapage scolaire et celles qui ne participent à
aucune mesure, on constate que la différence n'est que de 5. autrement
dit, 15 % intègrent le marché du travail s'ils n'ont
participé à aucune mesure, et 20 % s'ils ont participé
à rattrapage scolaire.
Donc, disons que cette mesure-là ne semble pas donner les
résultats escomptés. Pourquoi? On est en train de fouiller
ça davantage, mais il est possible qu'on n'ait pas fait, disons, une
étude assez poussée de la clientèle qui participe à
ce programme-là. Il y a peut-être des gens là-dedans qui
participent et qui ne devraient pas participer, ou qui ne sont pas
intéressés à participer et qui n'y vont que pour des
raisons économiques.
Alors, on est en train de regarder davantage la composition de la
clientèle qui participe à ce programme-là, de façon
à être plus sélectif dans le choix des personnes qui vont
participer à Rattrapage scolaire, pour s'assurer que les personnes qui
vont participer à Rattrapage scolaire sont vraiment celles qui sont
intéressées à y participer, et qui ont des chances de
réussir. Et je ne pense pas qu'on va nuire à la clientèle
en faisant ça. On va plutôt, je pense, être plus efficace et
plus sélectif dans le choix de la clientèle.
M. Lazure: M. le Président, puisqu'on est revenu aux
mesures, je veux donner des chiffres plus précis. Tantôt, j'ai
évoqué le fait que les personnes assistées sociales sont
vraiment les laissés-pour-compte quand il s'agit de recyclage et de
formation professionnelle. Et j'ai le tableau qui vient de la Direction
générale de la main-d'oeuvre et de la formation professionnelle
ici, «Étude des crédits 1993-1994». Pour un grand
total de 136 375 personnes qui bénéficient de différentes
formes de stages en milieu de travail, de recyclage, de perfectionnement, de
planification de l'emploi, de formation générale, etc., il y en a
seulement 1200 qui sont des personnes assistées sociales. Je pense que
le ministre va admettre que ces chiffres-là sont corrects, sont exacts.
Et on ne peut pas s'empêcher de faire la comparaison entre des programmes
qui semblent répondre aux demandes des chômeurs ou des personnes
assistées sociales qui, en fait, sont à l'aide sociale parce
qu'elles ont été chômeuses un an et qu'il n'y a pas
d'emploi pour elles. À toutes fins pratiques, ce sont des chômeurs
et des chômeuses déguisés. Et la question que je pose au
ministre: Pourquoi ces chômeurs, ces chômeuses ne sont pas aussi
avantagés du fait qu'ils ont le statut d'assistés sociaux.
Pourquoi?
M. Bourbeau: M. le Président, je vais prendre avis de la
question. Je vais me faire donner la copie du document. Le
député, lui, choisit des documents comme il veut, mais, moi, je
voudrais bien avoir une copie du document avant. Je n'ai pas eu préavis
de la question.
M. Lazure: Page 45 des renseignements particuliers que vous nous
avez fournis vendredi soir.
M. Bourbeau: On vous en a tellement fournis, M. le
Président, que nous aussi on a de la misère à s'y
retrouver, parfois.
(Consultation)
M. Bourbeau: Page 45 ou 46?
M. Lazure: Page 46, le tableau 46, par régions, on a 2, 4,
6... on a une dizaine de programmes qui mènent au monde du travail et
qui touchent 136 000 personnes si je lis bien; ce n'est pas tout
à fait clair 136 000 ou 126 000. Et, là-dessus, il y en a
seulement 1200 qui sont des bénéficiaires de l'aide sociale.
M. Perrino (Pietro): Le chiffre de 1200, vous prenez ça
où? (17 heures)
M. Lazure: Formation sur mesure, employabilité, la
septième ligne.
(Consultation)
M. Bourbeau: Bon, M. le Président, en tous les cas, disons
que, dès le départ, là, Stages en milieu de travail, c'est
une mesure d'employabilité, ça. C'est quand même 4946
participants, là.
M. Lazure: Mais, là, je parle de Formation sur mesure.
Formation sur mesure, là, la ligne précédente, on en a 19
222 pour des gens qui ne sont pas à l'aide sociale.
M. Bourbeau: Oui, oui. Planification de l'emploi, ça,
d'accord. Mais, écoutez, là, il y a des programmes,
là-dedans, qui sont des programmes pour des chômeurs, d'autres qui
sont pour des travailleurs, d'autres qui sont pour des assistés sociaux.
Là, il faudrait faire la différence. On va...
M. le Président, je vais demander... Si vous voulez, on va
demander à M. Jean Mercier, qui est sous-ministre adjoint à
l'administration, de nous donner quelques commentaires sur ce tableau. C'est un
document, disons, auquel on aurait répondu plus facilement ce matin; les
gens de la Main-d'oeuvre étaient ici. Mais M. Mercier...
M. Lazure: Je ne veux pas aller dans les détails, mais je
veux juste savoir: Est-ce que les bénéficiaires de l'aide sociale
sont contingentés quand il s'agit de ces programmes-là? Est-ce
qu'il y a un nombre maximum de candidats ou de candidates venant de l'aide
sociale qui peuvent entrer dans ces programmes-là?
M. Mercier (Jean): Alors, par rapport à ces
différents programmes, vous en avez qui sont presque exclusivement
réservés à des prestataires. Je prends, à titre
d'exemple, Stages en milieu de travail, où tous les participants sont
des prestataires. Vous avez également des prestataires qui
bénéficient de certains programmes qui sont soit des programmes
fédéraux ou des programmes québécois, qu'on
retrouve dans l'ensemble de ces programmes où on retrouve un ensemble
d'environ 100 000 participants. Donc, il n'y a pas de contingentement, sauf
qu'il y a des programmes, en vertu des critères d'admissibilité,
qui s'adressent exclusivement aux prestataires, ou d'autres qui s'adressent
à des travailleurs en emploi, ou d'autres qui s'adressent autant
à des chômeurs qu'à des travailleurs et à des
prestataires.
M. Lazure: Alors, je dois comprendre que, s'il n'y a pas plus de
bénéficiaires de l'aide sociale qui sont inscrits 1250
à la Formation sur mesure en vue de l'employabilité, c'est
parce qu'il n'y a pas plus de candidats. Est-ce que c'est ça qu'il faut
comprendre?
M. Mercier: Par rapport aux programmes fédéraux, je
pense notamment à la formation sur mesure en emploi et à la
formation sur mesure en employabilité, ici, ça dépend des
crédits disponibles mis à la disposition du Québec pour
favoriser le développement de cette main-d'oeuvre. Mais je dirais,
à titre d'exemple: Soutien à la formation en entreprise, vous
avez quelque
14 900 participants, alors qu'on sait que, par définition, ce
programme-là s'adresse exclusivement à la PME du Québec,
à des entreprises de moins de 200 employés. Et les
bénéficiaires, ce sont tous des gens en emploi, ce qui n'est pas
le cas au programme suivant, Stages en milieu de travail, où les 4900
participants sont tous des prestataires de la Sécurité du
revenu.
Mesure de partage du logement
M. Lazure: Bon. Ça va, M. le Président. On peut
passer à un autre sujet, peut-être le partage du logement. L'an
passé, dans la discussion en commission parlementaire, le ministre avait
laissé entendre qu'il y aurait peut-être une révision de la
règle actuelle qui fait que, lorsqu'il y a partage du logement entre 2
adultes qui sont à l'aide sociale, il y a diminution de la prestation.
Alors, est-ce qu'il y a du nouveau de ce côté-là?
M. Bourbeau: M. le Président, essentiellement, on n'a pas
de projet pour mettre fin à la mesure de partage du logement. Cependant,
comme on est constamment sollicité par certains groupes, dont, entre
autres, la Commission des droits de la personne, pour modifier la mesure, pour
l'annuler, même, j'ai demandé aux gens de mon ministère de
regarder encore ce problème pour voir s'il n'y a pas des modifications
qu'ils pourraient apporter ou s'il n'y a pas des faits nouveaux qui,
portés à notre attention, nous inciteraient à modifier la
mesure. Alors, pour l'instant, il n'y a pas de changement, mais je dois faire
le point, dans les prochaines semaines, avec les gens de recherche, politiques
et programmes au ministère, sur cette question-là, mais je
n'anticipe pas des gros changements, là, à la Loi sur l'aide
sociale, ou le règlement, aussi, en ce qui concerne le partage du
logement.
M. Lazure: Alors, M. le Président, je pense que la mesure
qui existe est toujours à rejeter, parce qu'il y a des situations
où 2 adultes bénéficiaires de l'aide sociale ont besoin de
ce minimum de solidarité pour mieux arriver à joindre les 2
bouts, et ne devraient pas être pénalisés par une
réduction de leur prestation mensuelle dans ces cas-là.
Perception à la source des loyers des
prestataires d'aide sociale
Sur un autre sujet qui touche les logements, j'ai eu l'occasion, il y a
quelque temps, de poser une question à l'Assemblée nationale, au
ministre, suite à des articles de journaux où il semblait
très sensible aux demandes de propriétaires qui souhaitaient que
le ministère perçoive le loyer des bénéficiaires de
l'aide sociale. Et le ministre n'a pas répondu catégoriquement.
Alors, je lui demande aujourd'hui: Est-ce qu'il va nous dire, aujourd'hui, une
fois pour toutes: II n'est pas question de faire un régime
spécial pour les personnes assistées sociales. De toute
façon, on sait que, chez les soi-disant mauvais payeurs de loyers, les
personnes assistées sociales représentent une minorité,
une petite minorité. Et s'il fallait qu'on applique cette
règle-là, de percevoir à la source le montant du loyer et
l'envoyer au propriétaire, il faudrait l'appliquer à bien
d'autres groupes dans la société. Alors, quelles sont ses
intentions?
M. Bourbeau: M. le Président, j'ai fait connaître ma
réaction par les journaux, là. À l'éditorial que
brandissait, avec manifestement beaucoup de plaisir, le député de
La Prairie lorsqu'il a posé sa question en Chambre, je présume
que le député a lu ma réponse aussi. Sinon, je pourrais
lui en envoyer une copie. Oui, il l'a eue? Bon.
M. le Président, il n'a jamais été dans notre
intention et vous le savez très bien, M. le Président;
vous êtes certainement aussi au courant du dossier que moi
d'amputer les chèques des assistés sociaux, comme ça, du
jour au lendemain, et de faire parvenir ces montants-là aux
propriétaires. On n'en est pas là, loin de là. Ce que nous
avons fait, M. le Président, nous avons pris connaissance des demandes
qui nous ont été acheminées par des députés
et non pas par des groupes de propriétaires des
députés des 2 côtés de la Chambre. Et le
député de La Prairie, qui n'est pas un de ces
députés-là, connaît peut-être certains de ses
collègues qui ont communiqué avec moi et qui m'ont demandé
instamment de m'occuper de ce problème-là. Je pourrais donner des
noms, mais ça ne donnerait rien, M. le Président. Le
député, je suis sûr, prend ma parole, puisqu'il sait que je
dis toujours la vérité. Et il y a des députés du
parti gouvernemental, aussi.
Alors, ce sont des propriétaires, souvent de jeunes personnes,
des couples ou des personnes qui, au cours des années, ont
accumulé une somme d'argent et se sont acheté un immeuble
ça peut être un tout petit immeuble de 2 logements et qui,
étant en présence de loyers non payés, subissent un
préjudice parfois très grave, et même, qui peut mettre en
péril l'économie de plusieurs années de leur vie, et qui
vont voir les députés et se plaignent d'une situation qui leur
crée un fort préjudice. Devant ces nombreuses demandes et
elles ont été nombreuses j'ai décidé de
consulter, et de consulter des députés ministériels de
façon à ce que, ensemble, on puisse tenter d'évaluer
l'importance du problème.
M. le Président, moi, j'ai bien confiance au jugement des
députés. Je sais qu'ils sont ceux qui sont les antennes du
gouvernement dans les régions. Ce sont eux qui vont chercher le pouls de
la population, qui savent quels sont les vrais problèmes. Et
l'expérience m'a appris, M. le Président, qu'il vaut mieux
consulter les députés avant qu'après. Souvent, c'est plus
efficace comme façon de procéder. Je vois que vous opinez du
bonnet, M. le Président, alors, on est du même avis.
Alors, le comité en question s'est réuni et a
décidé, avant d'aller plus loin, de faire faire une étude
par des experts afin de mesurer l'importance du phénomène ou du
problème. (17 h 10)
Et voilà à quoi se sont bornés nos travaux, M. le
Président: à demander à ceux qui ont la possibilité
de le faire d'enquêter, ou enfin, d'étudier le
phénomène. Et j'espère qu'au cours des prochaines semaines
j'aurai le résultat de ces études-là. On va savoir enfin
si c'est vrai, ce que prétendent certains, à l'effet que les
assistés sociaux sont de moins bons payeurs que les autres. Moi, je ne
le sais pas, je n'ai aucune idée préconçue
là-dessus. Et, étant un esprit rationnel, M. le Président,
avant de commencer à vouloir régler des problèmes, je veux
savoir s'il y a de vrais problèmes. Alors, on le saura et, s'il y a de
vrais problèmes, là, la phase 2, ça sera de voir si ces
problèmes-là sont suffisamment importants pour qu'on tente d'y
trouver des solutions. Pour l'instant, on n'en est pas là.
M. Lazure: Alors, M. le Président, je pense que le
ministre, par cette réponse-là, vient de nous montrer ses
couleurs. Parce qu'il reçoit des pressions tous les jours non
seulement des propriétaires mais il en reçoit aussi de ses
bénéficiaires de l'aide sociale pour ne pas accorder
crédit à une telle thèse. Mais il y accorde suffisamment
de crédit pour dire qu'il va faire faire une enquête.
Programme de construction de logements sociaux
Pourquoi n'accorde-t-il pas autant de crédit aux pressions des
bénéficiaires de l'aide sociale qui lui disent: Écoutez,
si vous voulez régler le problème d'un certain nombre de
bénéficiaires de l'aide sociale qui ne payent pas leur loyer,
augmentez donc un peu les prestations, d'une part, mais aussi, construisez des
logements sociaux, construisez des logements sociaux. Il en est où,
votre programme de construction de logements sociaux, pour les trois prochaines
années? Qu'est-ce que vous planifiez?
M. Bourbeau: Justement, M. le Président, la plus grosse
plainte qu'on a eue, après les députés, c'est la plainte
des organismes qui gèrent les logements sociaux. J'ai reçu
à mon bureau, encore la semaine dernière, les dirigeants de
l'Office municipal d'habitation de Montréal et ceux de Longueuil qui
m'ont fait état d'un pourcentage assez important de personnes qui n'ont
pas payé leur loyer, qui ne paient pas leur loyer. Et, dans le cas des
logements sociaux pour familles, la très, très grande
majorité sont des personnes assistées sociales. Alors, ils m'ont
déposé un dossier que j'ai acheminé au comité
d'étude, bien sûr.
Mais c'est justement, M. le député, vous mettez le doigt
sur un point, là. C'est que, dans ce domaine-là, des logements
sociaux, le phénomène semble également très
répandu. Alors, je ne crois pas que multiplier les logements sociaux,
ça va faire en sorte que les loyers vont être plus payés,
parce que les dirigeants des logements sociaux se plaignent d'un non-paiement
de loyers là-aussi. Alors, je pense que...
M. Lazure: Est-ce que le ministre pourrait déposer ce
document-là, qui lui vient des Offices municipaux d'habitation?
M. Bourbeau: Oui, mais...
M. Lazure: Parce que, ce faisant, par ces remarques-là, il
en dit juste assez pour laisser planer des doutes sur l'intégrité
des assistés sociaux et, en même temps, pas tout à fait
assez pour qu'on puisse évaluer l'ampleur du problème.
M. Bourbeau: M. le Président, on va communiquer avec les
dirigeants de l'Office municipal d'habitation de Montréal et de
Longueuil et... Le rapport leur appartient, et s'ils veulent qu'on le rende
public, moi, je n'ai pas d'objection. On le fera.
Définition de la notion de
«conjoint»
M. Lazure: Bon, sur un autre sujet, le ministre a reçu
copie d'une lettre qui avait été envoyée à son
collègue de la Justice, le 13 février 1993, et ça
concernait les femmes bénéficiaires de l'aide sociale qui
étaient condamnées pour fraude et qui, depuis quelque temps, au
lieu d'être condamnées à des travaux communautaires comme
ça avait été un peu la coutume, étaient
condamnées à des peines franches de prison de x mois. Et il a
reçu copie de la lettre qu'un groupement a envoyée à son
collègue de la Justice. Est-ce qu'il peut faire état de la
question? Il y a des coupures de presse, là, en février et en
mars, des personnes condamnées à 6 mois de prison, surtout dans
la région de Trois-Rivières. La tradition avait été
un peu que les juges utilisent une certaine discrétion et condamnent
plutôt les personnes à des travaux communautaires. Et, depuis
quelque temps, c'est à tel point que les personnes assistées
sociales se demandent s'il y a eu une espèce de directive transmise aux
tribunaux ou aux procureurs de la couronne pour qu'ils demandent des peines
franches de prison.
Le problème, M. le Président, c'est le cas de femmes qui,
étant légalement séparées ou étant
divorcées, vivent avec un conjoint et ne déclarent pas de revenus
venant de ce conjoint, qui peut en avoir un, disons, revenu. Et les
enquêtes révèlent que la personne la femme
bénéficiaire de l'aide sociale est présumée
avoir fait une fausse déclaration si elle n'a pas fait état des
revenus de son nouveau conjoint. Alors, c'est toute la question de la
définition de «conjoint» qui est en cause, et bien d'autres
choses. Je ne veux pas aller dans les détails de cette question
complexe, mais je voulais voir si le ministre de la Sécurité du
revenu était sensibilisé à cette question, et quelle
était sa position.
M. Bourbeau: M. le Président, j'ai pris connaissance de
ces jugements récents des cours qui ont condamné à des
peines de prison des personnes qui ont été reconnues coupables de
fraude à l'aide sociale. Je ne
crois pas que le ministère de la Justice ou le ministre de la
Justice ou moi-même soyons justifiés d'intervenir de quelque
façon que ce soit auprès des tribunaux pour tenter de leur
indiquer par voie de directive, comme le disait tantôt le
député, comment rendre les jugements. La loi est là. Elle
existe. Les juges sont tout à fait qualifiés pour
apprécier la gravité des cas qui leur sont soumis et pour rendre
un jugement selon la loi et aussi selon leur appréciation de la loi. Et
quand il y a des cas où on condamne à des travaux communautaires,
je présume qu'il y a des circonstances atténuantes. Dans d'autres
cas, les tribunaux ont semblé trouver qu'il n'y avait pas de
circonstances atténuantes, et on condamnait à la prison. Moi, je
ne crois pas qu'il y ait des petites fraudes et de grosses fraudes, M. le
Président. À partir du moment où le tribunal estime qu'il
y a une fraude, et que cette fraude-là est suffisamment importante et
qu'il prononce une peine de prison, moi, je ne peux qu'accepter la loi, M. le
Président, avec ses conséquences. Et je n'ai certainement pas
l'intention d'intervenir dans la gestion des tribunaux.
M. Lazure: M. le Président, le ministre répond
à cette partie de la question, mais ce n'était pas tellement...
Je ne souhaitais pas qu'il intervienne auprès des tribunaux. Ce n'est
pas ça qui est le problème. Le problème, c'est sur la
définition des conjoints. Et, là-dessus, il peut intervenir avec
son collègue de la Justice pour tirer au clair, une fois pour toutes,
qui devient, au sens de la loi de l'aide sociale, un conjoint.
M. Bourbeau: M. le Président, cette
définition-là a fait l'objet de discussions à ne plus
finir lorsque nous avons adopté la Loi sur la sécurité du
revenu. On a modifié, dans la nouvelle loi, la définition de
«conjoint» par rapport à l'ancienne loi et, en ce
sens-là, il m'appa-raît que la nouvelle définition est plus
équitable, moins arbitraire que la définition qui existait sous
l'ancienne loi. Sous l'ancienne loi, on estimait que des gens étaient
conjoints à partir du moment où ils vivaient ensemble et
où on pouvait faire la preuve du soutien, du secours mutuel. Sous la
nouvelle loi, on a établi un critère plus objectif. Il doit y
avoir cette cohabitation minimum de 12 mois.
Donc, je pense que, sous la nouvelle loi, on a une définition qui
porte moins à appréciation, ou à une appréciation
plus subjective. Les agents ou les gens qui vérifient au
ministère doivent s'assurer qu'il y a cette cohabitation de 12 mois et,
ça, c'est un fait qui est facile à démontrer ou à
observer. Alors, moi, je trouve que la définition de
«conjoint», telle qu'on l'a dans la nouvelle loi, est une
définition qui est plus objective que dans l'ancienne loi. Et s'il y a
les deux facteurs, le secours mutuel et la cohabitation de 12 mois, on en
conclut que ce sont des conjoints au sens de la loi et on leur applique le
même régime que les conjoints, les autres conjoints qui, eux, se
déclarent comme tels et sont reconnus comme tels, de façon
à ce qu'il n'y ait pas deux poids, deux mesures.
M. Lazure: Mais, justement, c'est dans le concept du soutien
mutuel, M. le Président, qui semble être pris pour acquis mais qui
peut ne pas toujours être là. Alors, ce que le Front commun
demandait aux deux ministres, c'était d'adopter, et je cite un extrait
de la lettre: «Un règlement destiné à permettre la
vérification de l'apport réel des présumés
conjoints de ces femmes bénéficiaires de la
sécurité du revenu». (17 h 20) .
Autrement dit, actuellement, il n'est pas obligatoire de faire la
vérification que ce présumé conjoint apporte vraiment un
secours financier, une assistance financière. Ce n'est pas obligatoire.
Et ce que les gens demandent, c'est que, par règlement ou autrement, on
permette la vérification de l'apport réel des
présumés conjoints au ménage des femmes
bénéficiaires de l'aide sociale. C'est ça, la demande
précise. Parce qu'il semble, du simple fait qu'il y ait un nouveau
conjoint dans le ménage, qu'on prenne pour acquis qu'il apporte un
soutien financier. Ça peut être le cas, comme ça peut ne
pas être le cas.
M. Bourbeau: M. le Président, j'ai de la difficulté
à comprendre l'objection du député parce que, pour qu'il y
ait...
M. Lazure: Ce n'est pas l'objection du député, je
cite une lettre du Front commun des personnes assistées sociales.
M. Bourbeau: Ah, bien là! M. le Président, si c'est
une lettre du Front commun, on peut s'en distancer un peu. Parce qu'il y a deux
conditions pour qu'un couple soit reconnu comme conjoints: la cohabitation de
12 mois et le secours mutuel. On doit s'assurer et faire la preuve qu'il y a
secours mutuel. Si deux personnes vivent ensemble, M. le Président, et
sont frère et soeur, qu'il n'y a pas de secours mutuel... Enfin, il y a
des cas où le secours mutuel n'existe pas, et on ne peut pas prouver que
c'est des conjoints. Mais, quand on peut prouver que c'est des conjoints,
là, on leur applique la loi.
M. Lazure: II semble bien, M. le Président, d'après
les personnes concernées, les personnes assistées sociales, que,
quand il y a un nouveau conjoint, on présume qu'il y a soutien financier
et on en tient compte de cette façon-là, sans faire la
vérification, autrement dit sans faire la preuve qu'il y a une
véritable contribution financière du nouveau conjoint.
M. Bourbeau: Écoutez, ces personnes-là, qui sont
lésées, peuvent en appeler immédiatement en
révision administrative au ministère. Elles peuvent aussi en
appeler devant la Commission des affaires sociales et, à ce
moment-là, c'est à nous de faire la preuve. Alors, la preuve, si
on ne l'a pas, ces gens-là ne seront pas lésés. Mais, en
général, quand on prend des décisions, c'est qu'on a la
preuve.
M. Lazure: Est-ce que je peux demander au ministre d'intervenir
auprès de son collègue pour qu'il réponde à la
lettre du 13 février?
M. Bourbeau: La lettre du Front commun des...
M. Lazure: La lettre du Front commun des personnes
assistées sociales, du 13 février.
M. Bourbeau: Si vous voulez m'en faire parvenir une copie, je
pourrai la lui remettre de main à main lors de la période de
questions, ou au Conseil des ministres, si vous voulez.
M. Lazure: On va faire ça. Merci. Juste un dernier point
là-dessus...
M. Bourbeau: Remarquez que je ne suis pas payé pour
être postier, mais ça me fait plaisir de vous rendre ce
service.
M. Lazure: Non, mais vous avez reçu copie de cette lettre,
M. le ministre.
M. Bourbeau: Ça me fait plaisir de vous rendre ce
service-là, M. le député.
M. Lazure: II semble qu'auparavant, jusqu'en 1990-1991, ces
cas-là, on les traitait par poursuite sommaire et que, maintenant, ils
sont traités au criminel. Est-ce que c'est vrai, ça? Est-ce qu'il
y a eu changement?
M. Bourbeau: M. le Président, je crains de décevoir
le député, mais c'est une question qui devrait être
posée au ministre de la Justice. Nous, quand on a des cas
problèmes, on les réfère au ministère de la
Justice, et c'est eux qui prennent les procédures. Ils les prennent
selon la loi et selon les procédures en vigueur. On n'a rien à
voir, nous, avec la façon dont procède le ministère de la
Justice.
M. Lazure: O.K. Merci.
Le Président (M. Joly): On est toujours sur le programme
4, M. le député?
(Consultation)
Réduction des crédits du programme
Rattrapage scolaire
M. Lazure: Juste une dernière question sur les programmes,
et notamment le programme de Rattrapage scolaire. Dans les crédits
1993-1994, on voit la somme de 35 000 000 $; l'an passé, c'était
50 900 000 $. Juste une explication: Pourquoi cette réduction?
(Consultation)
M. Bourbeau: M. le Président, je peux répondre ceci
au député: Effectivement, on s'est rendus compte que ce programme
Rattrapage scolaire est un de ceux qui, d'après l'étude dont j'ai
parlé tantôt, semble donner de moins bons résultats en ce
qui concerne l'intégration à l'emploi, de tous les programmes de
développement de l'employabilité. rattrapage scolaire. je donne
les chiffres, pour mémoire, là. dans l'échantillonnage
dont j'ai parlé tantôt, de 4710 personnes qui ont participé
à des programmes de développement de l'employabilité
versus le groupe-témoin de 3354, 20 % qui ont participé ont
intégré le marché du travail contre 15 % pour le
groupe-témoin. c'est un programme qui coûte très cher au
gouvernement. c'est évident qu'envoyer quelqu'un sur des bancs
d'école, là, c'est un programme qui est assez dispendieux, et le
taux d'abandon est très élevé, au delà de 50 %. on
a donc décidé de mieux cibler dorénavant la
clientèle qui va participer au programme rattrapage scolaire de
façon à s'assurer que la clientèle qu'on va envoyer sur
cette mesure-là est une clientèle qui est plus susceptible d'en
bénéficier et de passer à travers la mesure, de se rendre
jusqu'au bout du rattrapage scolaire et, éventuellement, de mieux
intégrer le marché de l'emploi.
Voilà la raison pour laquelle, M. le Président, dans les
crédits qu'on a devant nous, les sommes d'argent qui sont
mentionnées sont inférieures à celles qui existaient pour
l'année précédente. Par contre, vous noterez que, dans
d'autres mesures, on a augmenté les crédits, comme, par exemple,
la mesure EXTRA qui, elle, se révèle une mesure qui est plus
performante en ce qui concerne l'intégration en emploi.
M. Lazure: m. le président, je remercie le ministre de sa
réponse, mais vous me permettrez de m'éton-ner. il nous dit: le
rattrapage scolaire, on l'a diminué parce que ça ne marche pas
bien; ça ne prépare pas bien aux emplois. on a eu seulement 20 %
des sujets qui avaient fait le rattrapage scolaire qui ont trouvé un
emploi, 20 %. tantôt, il s'est vanté, au programme paie, parce
qu'il y avait eu 19 %.
M. Bourbeau: 40 %.
M. Lazure: 19 % plus 18 % de ceux qui n'avaient pas
participé pour la durée.
M. Bourbeau: Mais regardez donc l'étude! On vous l'a
envoyée. C'est 40 %, PAIE, là.
M. Lazure: Je l'ai citée, votre étude,
tantôt.. (17 h 30)
M. Bourbeau: Oui, mais vous l'avez, et je l'ai devant moi,
ici.
M. Lazure: m. le président, s'il n'y a pas plus que 20 %
des personnes bénéficiaires d'aide sociale ayant passé par
rattrapage scolaire qui ont pu trouver
un emploi, ça ne veut pas dire nécessairement que c'est
Rattrapage scolaire qui est fautif. Peut-être bien que c'est parce qu'il
n'y a pas assez d'emplois actuellement sur le marché, Rattrapage
scolaire ou pas Rattrapage scolaire. Moi, je trouve assez suave la logique du
ministre, qui nous dit: On va couper de plusieurs millions de dollars parce
qu'on a seulement 20 % de rendement sur ce programme-là. Alors qu'il
fait l'éloge d'un autre programme où il y a seulement 19 %. Sur
un autre sujet, les...
M. Bourbeau: ce que j'ai dit, m. le président, pour
terminer là-dessus, je n'ai pas dit que ce n'est pas intéressant,
20 %, mais ceux qui ne participent à aucune mesure et qui ont les
mêmes caractéristiques intègrent le marché du
travail dans une proportion de 15 %. donc, toute la mesure de rattrapage
scolaire ne génère que 5 % de plus d'intégration à
l'emploi, alors que d'autres mesures, comme extra, intègrent dans une
proportion de 10 % de plus. l'effet net, l'impact net est de 10 % de plus.
retour aux études post-secondaires, 12 %. finalement, le programme paie,
lui, l'impact net est de 26 %. donc, l'impact net de paie est de cinq fois plus
grand que le programme rattrapage scolaire; c'est ça que l'étude
dit.
Déduction des pensions alimentaires des
prestations d'aide sociale
M. Lazure: Sur la question des pensions alimentaires, M. le
Président. La situation actuelle, la situation qui prévaut, c'est
que la mère ou l'ex-épouse qui reçoit de l'aide sociale
voit sa prestation diminuer du montant que lui verserait son ex-mari; c'est la
situation actuelle. Il y a eu des discussions depuis un certain temps, et le
ministre, l'an passé, avait laissé entendre qu'il ferait
peut-être une révision de cette règle-là et qu'il
exempterait peut-être les premiers 60 $ d'une coupure automatique. La
coupure se fait dès le premier dollar, actuellement. Alors, je voulais
savoir du ministre s'il envisageait de changer la règle actuelle qui est
assez raide, assez sévère, assez injuste. Ce sont souvent des
familles monoparentales, des femmes soutiens de famille qui se voient couper
automatiquement, dollar pour dollar, si elles reçoivent 50 $ par mois,
ou 100 $ par mois, de leur ex-mari.
M. Bourbeau: Oui, M. le Président. Effectivement, j'ai dit
que nous étudions cette mesure-là, ce problème-là.
Vous savez que nous avons toute une série de propositions qui sont sur
la table, continuellement d'ailleurs, et que nous étudions
régulièrement des propositions d'amélioration du
régime de la sécurité du revenu. Pas seulement des
propositions de coupures, nous avons aussi des propositions
d'amélioration. C'en est une que nous étudions; nous n'en sommes
pas encore venus à une conclusion positive à ce sujet-là.
J'espère qu'on va pouvoir y arriver.
Il y a toujours des contraintes qui existent. Il faut faire attention
à toute une série de choses comme, par exemple, l'harmonisation
avec la fiscalité et des choses comme ça. Dans le cas
présent, on n'en est pas encore arrivés à une conclusion
définitive, mais la mesure est toujours à l'étude.
M. Lazure: Bon. Je voulais simplement souligner au ministre que,
pour les 13 200 ménages qui sont impliqués dans cette
situation-là, il serait urgent de faire un changement qui apporterait
plus d'équité à ces femmes-là.
M. Bourbeau: Je prends note des souhaits du député,
M. le Président. On va accélérer encore davantage.
Attente obligatoire de six mois avant de participer
à des mesures d'employabilité
M. Lazure: Une autre question. Dans les projets de coupures
parce que les projets de coupures vont plus rapidement que les projets
de bonification de ce temps-ci il y en a une qui paraît
particulièrement difficile à avaler, c'est celle où les
prestataires, même s'ils veulent se rendre disponibles ou participants,
devraient attendre 6 mois; lorsqu'ils entrent à l'aide sociale, ils ne
pourraient pas bénéficier du barème
«disponibilité», par exemple, avant 6 mois, ou même,
«participation». Alors, qu'en est-il de ce projet?
M. Bourbeau: Bien, c'est une mesure parmi d'autres, là,
qui sont présentement à l'étude; il n'y a pas eu de
décision encore de prise. On a constaté que quand les personnes,
les gens arrivent à la sécurité du revenu, en
général, elles se trouvent un emploi beaucoup plus facilement
dans les 6 premiers mois qui suivent l'arrivée à la
sécurité du revenu. Le taux d'intégration en emploi est
beaucoup plus élevé pendant les 6 premiers mois que
subséquemment, et on a estimé qu'il serait
préférable, pendant les 6 premiers mois, que ces
personnes-là se concentrent sur la recherche d'emploi plutôt que
de se concentrer sur des mesures de développement de
l'em-ployabilité.
C'est pour ça que, dans le programme PAIE, par exemple, on a fait
en sorte que les gens qui sont admis à l'aide sociale ne soient pas
admissibles au programme PAIE pendant les 6 premiers mois, à l'exception
des familles monoparentales et des personnes de 45 ans et plus. Alors, il est
possible, si jamais on retient cette mesure-là, qu'on exempte
également les deux mêmes catégories de prestataires dont je
viens de parler.
Recours à des firmes privées pour
effectuer des contrôles
M. Lazure: Dans les autres mesures envisagées par le
ministre, il y en a un certain nombre qui touchent les contrôles et on
entend dire qu'il y aurait un projet-pilote par lequel le ministère
confierait à une firme privée des activités
d'enquêtes.
M. le Président, encore là, il serait urgent que le
ministre mette fin à ces rumeurs en se prononçant soit dans un
sens ou dans l'autre, en disant: Oui, c'est vrai, on s'en va vers ça.
Ou: Non, on a nos propres enquêteurs. Je pense que ça serait
vraiment inacceptable qu'en plus des 250 agents vérificateurs que le
ministère a actuellement on procède à l'embauche de firmes
privées pour faire des contrôles. Alors, qu'en est-il de cette
rumeur de recours à une agence privée?
M. Bourbeau: Pour l'instant, M. le Président, c'est encore
des rumeurs. On n'a procédé à l'engagement d'aucune firme
privée pour faire des enquêtes à la Sécurité
du revenu. Je ne dis pas qu'on ne le fera pas, on est en train d'évaluer
la possibilité de le faire éventuellement, dans certains cas
spécifiques, là, et aucune décision n'a été
prise. Je ne saurais, à ce moment-ci, aller plus loin que ça,
là. Il ne faudrait pas penser que ce n'est qu'une rumeur qui ne verra
jamais le jour, mais il ne faudrait pas penser non plus que ça va voir
le jour. C'est neutre. On évalue la possibilité de le faire et
quelle serait la rentabilité d'une telle mesure. Éventuellement,
on verra si oui ou non c'est intéressant pour le ministère
d'avoir recours occasionnellement, dans des cas particuliers, précis,
là, à des enquêteurs privés. Mais, quant à
moi, ça ne me scandaliserait pas plus que ça. S'il y a du travail
à faire et qu'on ne suffit pas à la tâche, et qu'il y a une
certaine rentabilité à le faire, je ne vois pourquoi on ne
pourrait pas avoir recours à des firmes privées. À ce que
je sache...
M. Lazure: Vous n'avez pas suffisamment d'agents
vérificateurs, actuellement?
M. Bourbeau: Ah! Remarquez qu'on a 150 enquêteurs
présentement et 150 vérificateurs; ils sont tous occupés
à plein temps. Nos agents enquêteurs font des enquêtes du
matin au soir, 5 jours par semaine, 52 semaines par année, et si on
avait plus d'enquêteurs, on ferait plus d'enquêtes. Alors,
là dessus, c'est illimité, les perspectives de travail, mais il
faut quand même s'arrêter quelque part. Si jamais on avait recours
à des enquêteurs privés, je crois que ce serait dans des
situations assez particulières, là où on aurait besoin
d'un surcroît d'aide pendant un certain temps.
M. Lazure: Mais, M. le Président, il me semble que le
ministre n'est pas assez sensible au fait que ces rumeurs-là
créent beaucoup d'inquiétude chez les bénéficiaires
de l'aide sociale. Et son attitude mi-chair, mi-poisson, peut-être que
oui, peut-être que non, ça augmente aussi l'espèce d'image
de non-confiance du ministre à l'égard des
bénéficiaires de l'aide sociale. C'est une classe de la
société qui devrait, au contraire, trouver en lui un protecteur
de par ses fonctions, et il semble que chaque fois qu'il en a l'occasion, il
laisse percer une certaine tendance à dire: Oui, il faut les surveiller
mieux que ça. Oui, il faut peut-être enquêter avec des
agences privées.
Et ça amène aussi toute la question du rôle des
agences privées à l'intérieur même du gouvernement
et des relations qui sont parfois ambiguës entre des agences
privées de renseignements et la fonction publique. Parce que le jour
où on commence à faire entrer des agences privées de
contrôle, de surveillance dans l'appareil gouvernemental, quelle garantie
a-t-on qu'il y aura confidentialité, qu'il y aura respect de la
confidentialité? (17 h 40)
Alors, moi, je veux simplement mettre le ministre en garde contre une
espèce de laxisme à cet égard. On a l'impression qu'il ne
se rend pas compte que ça crée beaucoup de remous auprès
des 700 000 personnes qui sont obligées de toucher l'aide sociale. Je
voudrais lui demander, en terminant, s'il peut arrêter une date
approximative où ses décisions seront rendues publiques
concernant les différentes coupures, pour qu'on cesse d'alimenter le
moulin à rumeurs.
M. Bourbeau: M. le Président, je ne vois pas pourquoi les
gens s'en feraient avec ça. Les gens qui respectent la loi n'ont pas
à s'en faire du tout. On n'a pas à craindre la visite d'un
inspecteur quand on respecte la loi. Ceux qui pourraient s'en faire, et avoir
de l'anxiété, ce seraient les personnes qui seraient en situation
d'irrégularité. Les autres, je leur dis: Vous pouvez dormir sur
vos deux oreilles, il n'y a pas de problème.
Maintenant, moi, je ne tiens pas à créer de
l'anxiété chez la clientèle du tout. Cependant, je sais
que, bon an mal an, il y a 14 % des dossiers qui comportent des
irrégularités, selon les enquêtes, les études de
conformité qu'on a faites. Donc, sur les 450 000 ménages
assistés sociaux, il y en a au-dessus de 60 000 qui, normalement,
devraient être en irrégularité. On estime l'impact de cette
mesure autour de 275 000 000 $ probablement, en 1993-1994. Alors, c'est non
négligeable, et je pense qu'on a l'obligation de faire ce qu'il faut
pour s'assurer que les sommes d'argent qui nous sont dues nous sont
payées, ou que nous ne déboursons pas inutilement des sommes
d'argent à des gens qui n'y ont pas droit.
Je répète toujours que les gens qui paient pour les
prestations d'aide sociale, ce sont les travailleurs, et les travailleurs de
tout ordre: les grands travailleurs, ceux qui gagnent des gros salaires, comme
ceux qui gagnent des petits salaires. Et ces gens-là, les
salariés, qu'ils soient gros ou petits, s'attendent à ce que les
sommes d'argent qu'ils paient en impôt et qui sont éventuellement
versées, en partie, en prestations d'aide sociale, soient
gérées avec rigueur. Et c'est pour ça que nous
procédons de cette façon-là.
Le régime d'aide sociale est un régime qui est ouvert,
c'est un des rares programmes du gouvernement qui n'a pas d'enveloppe
fermée; l'enveloppe est ouverte bon an mal an, «rain or
shine». Même quand on est au creux de la récession, M. le
Président, alors que le gouvernement cherche ses fonds de tiroirs, s'il
y a des besoins additionnels en aide sociale, on en trouve des sommes d'argent.
On a obtenu des crédits additionnels
en 1991, en 1992, alors que le gouvernement avait des sérieux
problèmes à boucler son budget, et on n'a jamais
lésiné sur cette enveloppe-là, qui est une enveloppe
ouverte. La contrepartie, c'est qu'on doit gérer avec beaucoup de
rigueur ces sommes d'argent là qui sont très importantes. Je dois
faire tous les efforts qu'il faut pour m'assurer qu'on fait une bonne gestion
de ces fonds-là, et cette bonne gestion-là, ça passe par
une série de gestes et de mesures que je dois prendre à
l'occasion, que les fonctionnaires doivent prendre avec moi pour s'assurer que
notre crédibilité est toujours là.
Évaluation du programme APPORT
M. Lazure: Sur un autre programme, M. le Président, le
programme APPORT, Aide aux parents pour leurs revenus de travail, c'est un
programme qui n'est pas tellement connu, qui touche, je crois, en 1992-1993,
environ 20 000 ménages avec des prestations mensuelles, des
suppléments financiers de 111 $. C'a augmenté par rapport
à... L'année précédente, c'était 15 000, et
l'autre année avant, c'était 15 000 aussi. Ces 111 $, ça
inclut l'allocation-logement, si je comprends bien, aussi. L'allocation moyenne
de 111 $ dans le programme APPORT, cette allocation moyenne inclut
l'allocation-logement aussi? Je pose la question.
M. Bourbeau: Non. La réponse est non.
M. Lazure: Non? Parce que, sur une des feuilles que vous nous
avez fournies, là, c'est marqué que ça l'inclut.
M. Bourbeau: Laquelle des feuilles?
M. Lazure: 00024B. C'est 6, plutôt; 246. Il y a un tableau,
puis il y a un renvoi en bas de la page qui dit que la prestation inclut les
montants versés pour l'allocation-logement.
(Consultation)
M. Bourbeau: m. le président, je dois apporter une
correction à ce que j'ai dit tantôt, on avait mal compris. en
regardant la fiche, les montants de 111 $ et de 88 $ par mois, qui est
l'acompte mensuel, comprend effectivement l'allocation-logement. mais ce n'est
pas le montant final que recevra la prestataire, parce que ça, en
principe, ça correspond à 75 % du montant qui est payé.
vous savez que le dernier 25 % est payé en fin d'année par le
ministère du revenu.
Donc, la réponse: Oui. Le 111 $ comprend l'allocation-logement,
mais, par contre, il y a une somme d'argent additionnelle qui va être
déboursée éventuellement par le ministère du
Revenu.
M. Lazure: Est-ce que le ministre peut nous expliquer pourquoi ce
programme-là semble moins connu, puis pas très populaire, il n'a
pas l'air à attirer beaucoup de monde, les montants ne sont pas
très élevés. Même si on ajoute le 25 % à la
fin de l'année, ça fait un total de 150 $.
M. Bourbeau: Bien, M. le Président, «les montants ne
sont pas très élevés». Si le député
appelle 37 000 000 $ une somme pas très élevée, tout est
relatif.
M. Lazure: Oui, par rapport à 4 000 000 000 $, à 3
700 000 000 $, ce n'est pas très élevé.
M. Bourbeau: Je me souviens, lorsque j'étais jeune, il y
avait un ministre fédéral qui avait dit: «What is a
million?» À ce moment-là, ça avait fait scandale au
Canada.
M. Lazure: C'était un ministre libéral aussi.
M. Bourbeau: On trouvait que ce n'était pas beaucoup 1 000
000 $.
M. Lazure: CD. Howe.
M. Bourbeau: Oui, CD. Howe. Aujourd'hui, parodiant CD. Howe, le
député de La Prairie dit: «What's 37 000000 $?» Ce
n'est rien du tout.
M. Lazure: ...150 $ par mois...
M. Bourbeau: Oui. Disons que c'est un programme...
M. Lazure: ...aux ménages.
M. Bourbeau: ...qui joue un rôle extrêmement
important. Depuis quelques années, on s'est rendus compte qu'avec le
temps les prestations qui sont versées par la Sécurité du
revenu aux familles sont plus importantes que les sommes d'argent que peut
retirer une famille en travaillant au salaire minimum. De sorte que si on
n'avait pas introduit le programme APPORT, les travailleurs à faibles
revenus ou qui travaillent autour du salaire minimum en seraient venus à
la conclusion, avec le temps, en regardant les montants d'argent, que
c'était plus payant d'être à l'aide sociale, quand on est
père de famille avec des enfants, que de travailler au salaire
minimum.
Bien sûr, le programme APPORT vient combler cette lacune et vient
dire aux personnes qui travaillent au salaire minimum ou autour du salaire
minimum, avec des enfants: Ne vous laissez pas attirer par l'aide sociale, on
va vous remettre une prestation, une subvention qui va faire en sorte que cette
subvention, additionnée à votre salaire, va faire en sorte que
vos revenus vont être supérieurs en travaillant, à ce que
vous pourriez retirer en étant à la sécurité du
revenu.
Le progamme, M. le Président, augmente; les coûts du
programme augmentent année après année. On
est passés de 18 000 000 $, en 1988, à 37 000 000 $
estimés pour l'année 1992, et on estime que pour l'année
prochaine, l'année 1993, on dépensera environ 40 000 000 $. Donc,
il y a une progression normale. Voyez-vous, la progression de 1990 à
1991 a été de 10 000 000 $; on est passés de 23 000 000 $
à 33 000 000$; l'année dernière, 4 000 000 $ de plus,
c'est donc plus de 10 % d'augmentation; cette année, encore 10 %
d'augmentation à peu près. Le programme augmente année
après année d'au moins 10 %, autour de 10 %.
M. Lazure: Si je comprends bien, ce programme-là n'est pas
à frais partagés avec le fédéral? (17 h 50)
M. Bourbeau: Non. J'en ai parlé justement ce matin dans
mes notes introductives, le gouvernement fédéral n'a pas encore
accepté de partager les coûts du programme APPORT. Nous n'avons
pas cessé nos discussions avec eux, cependant. On aura une
réunion des ministres de la Sécurité du revenu au
début de juin, à Regina, et j'ai l'impression que le gouvernement
fédéral va peut-être, éventuellement,
reconsidérer sa décision parce que des programmes comme le
programme APPORT devraient connaître, je crois, un surcroît de
popularité dans les mois et les années à venir,
étant donné qu'il faut travailler de plus en plus sur cette
incitation à l'égard des personnes assistées sociales
à intégrer le marché du travail. Et c'est un programme,
ça, qui est très incitatif à rester en emploi ou à
sortir de l'aide sociale.
Allocations de maternité Évaluation du
programme PRALMA
M. Lazure: Bon. Sur un autre programme, le programme 5, M. le
Président, les allocations de maternité. Les allocations de
maternité pour le délai de carence de deux semaines.
(Consultation)
M. Lazure: La question n'est pas technique, M. le
Président, le ministre peut y répondre, j'en suis sûr.
Est-ce que, oui ou non, c'est sérieux, encore une fois, ce qu'on entend
dire, que ce programme-là serait discontinué, l'allocation de
deux semaines, c'est-à-dire 360 $, 180 $ par semaine pour la femme
enceinte qui veut prendre un congé de maternité?
M. Bourbeau: Je n'ai aucune connaissance, M. le Président,
qu'on veuille abandonner ce programme-là. Voilà.
M. Lazure: Donc, le programme va continuer?
M. Bourbeau: Je ne suis pas le seul qui décide dans ce
gouvernement, mais, à ma connaissance, il n'y a présentement pas
de projet visant à abolir le programme PRALMA. Mais ce n'est pas moi qui
écris les budgets ou qui prends les décisions au nom du Conseil
des ministres. Je le répète, je n'ai aucune connaissance.
M. Lazure: Le ministre de la Sécurité du revenu,
lui, est-ce qu'il est d'avis que ça devrait rester, M. le
Président?
M. Bourbeau: Ah! ça, c'est autre chose. Ça, c'est
autre chose, M. le Président.
M. Lazure: C'est la question qui est posée au
ministre.
M. Bourbeau: Disons que le programme PRALMA est un programme qui
verse, comme vous le savez autant que moi, une subvention aux femmes qui
quittent leur emploi pour raison de maternité et a pour objet de faire
le pont entre la fin du travail et le début des prestations
d'assurance-chômage.
Quand on considère le programme objectivement, on doit se rendre
compte que le programme n'atteint pas ses objectifs en ce sens que
l'architecture du programme fait en sorte qu'il est impossible que les femmes
reçoivent leur chèque avant que débutent les prestations
d'assurance-chômage. Donc, on peut affirmer qu'il n'y a aucune femme, qui
quitte son emploi et qui perçoit l'assurance-chômage, qui ne
reçoit son chèque de PRALMA pendant les deux semaines où
elle est censée le recevoir. Donc, l'objectif, qui est de lui permettre
de recevoir une somme d'argent pour passer les deux semaines qui
précèdent l'assurance-chômage, cet objectif-là n'est
pas atteint. Voilà, M. le Président, ce que j'avais à dire
sur la question.
M. Lazure: Bon. Je souhaiterais, M. le Président, que le
ministre soit plus affirmatif, plus catégorique dans ses prises de
position, mais il faut croire qu'il aime bien l'ambiguïté.
Une autre question. Ça nous ramène au projet de coupures
du ministre.
M. Bourbeau: C'est le cardinal... M. le Président, qui
disait qu'on ne sort pas impunément de l'ambiguïté.
Sécurité du revenu (suite)
Imposition d'un ticket modérateur sur l'achat
de médicaments
M. Lazure: II y en a qui n'en sortent jamais de leur vie, les
pauvres! Enfin.
Dans le train de mesures de réduction qui étaient
exposées, élaborées dans un mémoire au Conseil des
ministres, le ministre de la Sécurité du revenu laissait planer
la possibilité d'instaurer un ticket modérateur de 2 $ sur les
médicaments pour les personnes assistées
sociales. Il y a le 2 $ de Marc-Yvan; il y aurait le 2 $ de M. Bourbeau,
maintenant. Alors, je voudrais savoir si le ministre est sérieux. Est-ce
qu'il a l'intention de rivaliser avec son collègue de la Santé et
instaurer un 2 $ de ticket modérateur pour les personnes
assistées sociales?
M. Bourbeau: Je note, M. le Président, que le
député de La Prairie est plus familier avec le ministre de la
Santé qu'avec le ministre de la Main-d'oeuvre, parce qu'il nomme le
ministre de la Santé par son prénom et, moi, il m'appelle
monsieur. Alors...
M. Lazure: C'est plus respectueux. Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bourbeau: Peut-être qu'avec le temps on en viendra
à se connaître mieux.
Nous avons étudié plusieurs possibilités, M. le
Président, pour tenter de restreindre l'explosion absolument
phénoménale des coûts du programme de médicaments
à l'aide sociale. Ce programme-là connaît un rythme de
croissance absolument prodigieux, et je ne vous cacherai pas que j'aimerais
beaucoup trouver une façon de contrer ou de limiter l'augmentation des
dépenses du programme de médicaments à la
Sécurité du revenu.
Nous avons considéré toute une série de
possibilités, y compris un genre de ticket modérateur ou de
ticket orienteur ou un autre... Pour l'instant, nous n'avons retenu aucune
formule encore, mais il n'y a pas de doute qu'on va continuer à tenter
d'étudier des formules qui nous permettront, j'espère, de
pourvoir contrer les augmentations, même de réduire les
coûts de ce programme de médicaments, lesquels coûts, je
l'ai dit tantôt, sont devenus astronomiques.
De mémoire, je peux vous dire que ces coûts-là ont
évolué, M. le Président, disons de 221 000 000 $, en.
1991-1992, à des dépenses probables d'environ 260 000 000$ en
1992-1993, une augmentation de 17,4 % dans une seule année; et pour l'an
prochain, on estime que les coûts devront augmenter encore de pas loin de
10 %, 283 000 000 $. C'est donc, M. le Président, des augmentations
très importantes que les coûts de ces programmes. Mais ça,
ça ne comprend pas seulement les médicaments, ça comprend
tous les programmes de ce qu'on appelle les prestations spéciales. Les
médicaments sont de loin la mesure la plus importante; je dirais que
c'est une mesure qui est à peu près les deux tiers du coût
du programme, l'autre mesure la plus importante étant les services
dentaires aux enfants de 10 ans et plus.
M. Lazure: M. le Président, le ministre fait état
des augmentations des dépenses pour les médicaments, et
l'explication principale, il ne la donne pas. Ce n'est pas parce que les gens
en abusent, c'est parce que le nombre de personnes assistées sociales a
grimpé de façon vertigineuse depuis deux ou trois ans. C'est
ça la principale raison. Ce n'est pas parce que les personnes
assistées sociales consomment plus de médicaments qu'avant. Il
parle d'une augmentation de 7 % ou de 10 %, 12 %, peu importe; ça serait
intéressant de mettre ça en parallèle avec l'augmentation
du nombre de prestataires de l'aide sociale depuis deux, trois ans.
M. Bourbeau: m. le président, même dans les
années précédentes, depuis 1987, les coûts de ce
programme-là ont toujours augmenté à un rythme beaucoup
supérieur à l'inflation. prenez, par exemple, dans les
années 1987, 1988, 1989, alors que la clientèle de l'aide sociale
diminuait d'environ 5 % ou 6 % par année, les coûts du programme
augmentaient: 1987, de 8,7 %; 1988, 8,6 %; 1989, 7,3 %; et ça, c'est des
années où la clientèle diminuait de 5 % à 6 % par
année. inutile de vous dire que dans les années suivantes, les
augmentations ont été encore plus spectaculaires: 13,6 % en 1990;
17,5 en 1991. de sorte qu'on peut dire que les coûts du programme ont
augmenté beaucoup plus rapidement que la clientèle à
l'aide sociale et que l'inflation. (18 heures)
M. Lazure: On sait aussi que le coût du médicament a
augmenté de façon importante au Québec; et aussi, on sait
que les personnes qui sont les plus pauvres dans n'importe quelle
société sont les plus aptes à être malades, ont
évidemment plus de soins médicaux, de soins chirurgicaux et,
évidemment aussi, doivent se faire prescrire plus de médicaments.
Je pense que, là aussi, il serait urgent que le ministre nous dise
clairement quelles sont ses intentions et est-ce qu'il y a une date
approximative à laquelle on va savoir à quoi s'en tenir sur
toutes ces propositions de coupures.
Le Président (M. Joly): Est-ce que je peux
suggérer, autant...
M. Lazure: C'est ma dernière question au ministre avant
qu'on ajourne, M. le Président. Est-ce qu'il y a une date
approximative?
M. Joly: S'il vous plaît, M. le ministre,
brièvement.
M. Bourbeau: disons, m. le président, une réponse
double, là. il y a quand même un fait qui demeure et qui, lui, n'a
rien à voir avec la récession, c'est que le nombre d'ordonnances
par personne admissible est passé de 10,5 à 12,3 en cinq ans.
donc, là, il n'est pas question de coût, il n'est pas question de
nombre, la moyenne par personne. alors, ça veut dire que les
médecins ont prescrit 20 % de plus d'ordonnances, de médicaments
à chacun de leurs clients. le député, qui est
médecin, doit comprendre ce que ça veut dire. si chaque
prestataire voit son nombre d'ordonnances augmenter de 2 sur 10,
c'est-à-dire de 20 %, c'est considérable, et, ça,
ça fait augmenter les coûts aussi.
Maintenant, je ne pense pas qu'on prenne quelque
décision que ce soit sur la possibilité ou non d'imposer
un frein avant l'année prochaine. Je dirais que s'il y avait une
décision qui devait être prise là-dedans, ce ne serait pas
avant l'automne et même la fin de l'automne 1993.
M. Lazure: 1993. Cette année, donc. Parce que vous dites
«l'année prochaine».
M. Bourbeau: Si jamais on devait en venir à une
décision...
M. Lazure: Non, mais, c'est parce qu'il vient de dire «pas
avant l'année prochaine».
M. Bourbeau: Ça serait dans le cadre du budget
préparatoire à l'an prochain.
M. Lazure: L'année prochaine. Merci.
M. Joly: Nous venons de paver l'ouverture qui se fera à 20
heures.
Donc, la commission suspend ses travaux à 20 heures ce soir, dans
cette même salle. Merci.
(Suspension de la séance à 18 h 2)
(Reprise à 20 h 7)
Organisation des travaux
Le Président (M. Joly): Bonsoir! La commission reprend ses
travaux.
Je crois qu'il y a eu entente pour qu'on devance un programme, M. le
député de La Prairie?
M. Lazure: Oui. L'entente, c'est de commencer par quelques
questions qui touchent l'ensemble du ministère, la
Sécurité du revenu; ce ne sera pas très long, une
vingtaine de minutes peut-être. Ensuite, passer à la Commission
des affaires sociales, si les représentants sont ici. La Commission des
affaires sociales, la Régie des rentes et la Commission des normes.
M. Bourbeau: II y a même l'Office de la
sécurité du revenu des chasseurs et piégeurs cris, dont la
représentante aimerait bien ça que vous lui posiez au moins une
question.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lazure: Si elle est ici, on va lui poser plus qu'une
question.
M. Bourbeau: C'est parce qu'elle a été
questionnée une fois en 15 ans, dit-elle.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lazure: On va la questionner avec plaisir. Avec plaisir.
M. Bourbeau: Elle aimerait bien avoir son nom dans le Journal
des débats.
Des voix: Ha, ha, ha!
Sécurité du revenu (suite)
Le Président (M. Joly): Nous appelons le programme 3, de
façon à ce que vous puissiez libérer les gens.
Corporations intermédiaires de travail
M. Lazure: Oui. Alors, ça touche, M. le Président,
le programme PAIE et les corporations intermédiaires de travail. Dans un
premier temps, avant de faire des commentaires, je voudrais poser la question
générale au ministre, de nous faire un exposé de la
situation. Il semble qu'il y ait le développement, depuis un an, un an
et demi, deux ans, peut-être, ou même une question de mois
plutôt, d'un certain nombre de corporations intermédiaires de
travail qui, comme le nom le dit, agissent comme un corps intermédiaire
avec le bénéficiaire de l'aide sociale qui est disponible et qui
veut occuper un emploi dans le cadre du programme PAIE au lieu d'être
embauché directement par une entreprise, une PME, une
municipalité ou peu importe, ou un groupe bénévole. Cette
nouvelle formule veut que le ou la bénéficiaire soit
embauché par une corporation intermédiaire. Est-ce que le
ministre pourrait nous exposer un peu quelle est la situation, dans l'ensemble
du Québec, sur cette question?
M. Bourbeau: Je le pourrais, M. le Président, mais, mieux
que moi, M. Pierre-Paul Sénéchal, qui est à ma droite,
pourrait le faire avec encore plus...
M. Lazure: Monsieur qui?
M. Bourbeau: M. Pierre-Paul Sénéchal. J'aimerais,
si vous n'avez pas d'objection, lui céder la parole. (20 h 10)
M. Sénéchal (Pierre-Paul): Bon. Si j'ai bien
compris, vous voulez qu'on vous apporte un peu l'origine de la mise en marche,
de la mise en place des corporations. La première fois qu'on en a
entendu parler, à part de chez nous, ça a été dans
le «Plan stratégique du Grand Montréal», dans le
cadre des actions que le gouvernement du Québec a mises en place pour
faciliter l'insertion, dans le Grand Montréal, des chômeurs de
longue durée. On a mis en place une nouvelle formule qui visait à
faire en sorte qu'on puisse favoriser le développement de postes de
travail dans des entreprises, soit qui faisaient de la gestion de main-d'oeuvre
ou dans le cadre de plateaux de travail bien définis. Ces corporations
se sont vu octroyer un avantage que les organismes
sans but lucratif, dans le cadre de PAIE, n'ont pas, c'est-à-dire
la possibilité de voir leurs postes de travail subventionnés sur
une base continue, sans que ce soient des postes nouveaux
nécessairement.
L'origine de la formule comme telle nous vient d'une expérience
qu'on avait démarrée une année plus tôt, au nord de
Montréal, dans le secteur agricole où des producteurs, dans le
secteur maraîcher, avaient de la difficulté, justement, à
recruter de la main-d'oeuvre parce que les offres de travail étaient
trop courtes. Et, individuellement, les producteurs, aussi, n'étaient
pas admissibles au programme PAIE parce que les perspectives de travail
étaient insuffisamment longues. Donc, ce qu'on a fait, c'est qu'on a
regroupé ces producteurs-là d'un côté et on a
regroupé, d'un autre côté, la main-d'oeuvre au sein d'une
corporation qui est devenue, en fait, une corporation sans but lucratif qui
avait à affecter cette main-d'oeuvre dans différents plateaux de
travail. Depuis cette période-là, la formule s'étend
graduellement, particulièrement sur le secteur de Montréal.
Le Président (M. Joly): M. le député, s'il
vous plaît.
M. Lazure: Oui. Avec cette formule, si je comprends bien, on
n'oblige plus l'employeur à transformer les postes temporaires en
emplois permanents?
M. Sénéchal: C'est-à-dire que, en principe,
pour le programme PAIE, si on se fie au cadre normatif, tout poste de travail
doit avoir un caractère de permanence. Et justement, parce que dans
certains secteurs on a de la difficulté chez certains employeurs
à offrir ce caractère de permanence, on a créé une
corporation qui, elle, a pour objectif, justement, de trouver un gisement
d'emplois chez plusieurs employeurs et d'offrir un caractère de
permanence à ces travailleurs qui vont oeuvrer au sein de la
corporation.
M. Lazure: Mais là, est-ce qu'on n'est pas en train de
développer un programme où il y aura deux séries de
règles différentes, des règles qui vont s'appliquer aux
PME, au secteur privé, qui vont continuer d'avoir recours au programme
PAIE, avec des règles assez strictes, et, à côté de
ça, des corporations intermédiaires qui vont regrouper des
organismes communautaires ou autres qui n'auront pas les mêmes
règles du jeu que la PME?
M. Sénéchal: En fait, ce n'est pas un programme
nouveau.
M. Lazure: Non, non. Je ne dis pas...
M. Sénéchal: Le seul programme qui existe, c'est le
programme PAIE. C'est uniquement une façon de gérer une
activité de travail de façon un peu plus souple pour certains
organismes qui ne réussiraient pas, justement, certains organismes sans
but lucratif qui ne peu- vent offrir une perspective de travail trop longue,
suffisamment longue, justement, pour qu'on puisse reconnaître le
poste.
Je vais vous donner un exemple. Dans le secteur des services
communautaires, au nord de Montréal, on a une corporation qui s'appelle
«Défi autonomie». C'est dans le service de soutien à
domicile. On a un ensemble de familles qui accueillent des personnes
handicapées ou ¦ des personnes âgées. Chacune de ces
familles-là, bien entendu, ne peut pas être admissible au
programme PAIE, parce qu'elles utilisent une ressource une journée, deux
journées ou trois jours par semaine. Donc, la corporation, qui est
l'employeur réel dans le coin, a la responsabilité, justement, de
trouver un gisement d'emplois suffisamment large pour offrir, sur une base plus
permanente, des emplois aux gens de la sécurité du revenu qui
vont travailler en son sein.
M. Lazure: C'est-à-dire que ce qui est permanent, ce n'est
pas l'emploi pour l'ex-bénéficiaire de l'aide sociale. Ce qui est
permanent, c'est la somme versée à la corporation
intermédiaire qui, elle, cette somme-là, est permanente, à
l'année longue. Entendons-nous bien, là.
M. Sénéchal: C'est-à-dire...
M. Lazure: Si vous me permettez. Tandis que l'allocation ou le
salaire qui est versé par le programme PAIE au
bénéficiaire, ça ce n'est pas permanent, ce n'est pas
régulier. C'est pour 6 mois, hein?
M. Sénéchal: C'est 6 mois. M. Lazure: Oui,
oui.
M. Sénéchal: Ce sont les mêmes règles
qui s'appliquent.
M. Lazure: Alors, il ne faut pas parler d'emploi permanent, M. le
Président, c'est ça qui porte à confusion. C'est un
versement permanent régulier pour l'employeur ou la corporation, mais
pour le bénéficiaire de l'aide sociale qui veut
véritablement retourner dans le monde du travail... Au fond, la critique
qu'on a vis-à-vis de ce programme-là, c'est la même que
vis-à-vis du programme PAIE ou d'autres programmes qui sont, un,
temporaires, 6 mois; deuxièmement, qui ne donnent pas d'espoir de
déboucher sur un véritable emploi régulier. Les seuls
emplois réguliers qu'il pourrait y avoir, par exemple, pour rester dans
votre exemple de l'aide à domicile, ce serait dans les CLSC, et on sait
que le gouvernement, pour toutes sortes de raisons, préfère
prendre le biais d'un ex-bénéficiaire de l'aide sociale pour
aller faire de l'aide à domicile à des salaires autour de 6 $,
autour du salaire minimum, plutôt que d'embaucher des nouvelles personnes
dans le CLSC.
Au fond, c'est ça, là, qui est leur jeu. Faisons-
nous pas d'illusions. Si on décide qu'on va faire travailler les
bénéficiaires de l'aide sociale dans l'aide à domicile,
parce que l'État n'a pas assez d'argent pour engager 10 nouvelles
personnes ou cinq au CLSC de telle ou telle place, disons-le comme ça,
mais ne venons pas prétendre qu'on encourage et on offre aux
bénéficiaires de l'aide sociale un tremplin pour sauter vers un
poste régulier. Ce n'est pas exact,
M. Sénéchal: Je vais continuer avec l'exemple des
services de soutien à domicile. Il y a une enveloppe de 25 000 000 $ qui
est générée par le ministère de la Santé et
des Services sociaux justement pour couvrir les allocations directes,
là, soit aux personnes handicapées ou aux personnes plus
âgées qui ont des carences en termes d'autonomie. Il n'est pas
exclu, et c'est ce qui est visé dans ces corporations-là, de
faire en sorte que les personnes qui vont entrer au service de la corporation
continuent, à partir des ressources ou des revenus qui vont être
générés par la corporation, de demeurer comme
employés au service de cette corporation-là. Une des exigences
maintenant connue pour reconnaître cette corporation, c'est qu'elle soit
capable de générer des revenus suffisamment intéressants
pour garder à l'emploi de l'organisme des personnes qui y entrent,
contrairement à certains organismes, OSBL, dans le cadre du programme
PAIE, qui n'ont pas cette obligation-là.
M. Lazure: Vous voulez dire que...
M. Sénéchal: II faut que des revenus soient...
M. Lazure: ...la corporation intermédiaire a
l'obligation...
M. Sénéchal: Doit générer des
revenus.
M. Lazure: Non, non, soyons concrets; pas théoriquement,
là. Si vous allez travailler pour la corporation intermédiaire,
vous êtes bénéficiaire de l'aide sociale, vous devenez un
employé, vous voulez dire que vous allez avoir la chance de rester comme
employé régulier après vos 6 mois? Est-ce que c'est
ça que vous voulez dire?
M. Sénéchal: Oui.
M. Lazure: Vous, vous allez rester employé
régulier?
M. Sénéchal: C'est ce qui est demandé
à la corporation, de générer...
M. Lazure: Est-ce que ça se fait actuellement?
M. Sénéchal: Oui. C'est-à-dire que
là, la plupart n'ont pas 6 mois de vie, là, mais le
critère, un des critères premiers de reconnaissance, ça a
été justement la capacité de l'organisme de
générer des revenus pro- pres en vue d'assurer une certaine
rétention d'emplois d'une partie de la clientèle de la
sécurité du revenu qui y entrait.
M. Lazure: Si je comprends bien, les premiers projets ont
commencé en août 1992.
M. Sénéchal: C'est ça. Ça a
été le premier, celui que vous avez sur la liste, Défi
Antoine-Labelle.
M. Lazure: Le service aux handicapés? M.
Sénéchal: Oui.
M. Lazure: Bon. Ça, c'est plus que six mois. M.
Sénéchal: Et les autres...
M. Lazure: Vos chiffres, là, qu'est-ce que ça
donne?
M. Sénéchal: C'est-à-dire...
M. Lazure: Combien d'ex-bénéfïciaires de
l'aide sociale ont été embauchés? Prenons le premier
projet, là, «gérontologie et service aux
handicapés». Combien ont été embauchés, dans
le programme PAIE, par cette corporation intermédiaire et combien ont
été gardés ensuite comme employés
réguliers?
M. Sénéchal: C'est-à-dire que la date que
vous avez en bas, soit la date de la reconnaissance, ça ne veut pas dire
que les activités ont nécessairement démarré
à ce moment-là. La plus ancienne, Défi-autonomie
d'Antoine-Labelle, a commencé à peu près vers cette
date-là. Une quinzaine de personnes y oeuvrent actuellement et elles
sont payées autour de 7,75 $ de l'heure, contrairement à certains
organismes, OSBL, qui assurent pour la plupart le salaire minimum, en partie,
justement, à cause des revenus qui sont générés par
la corporation. (20 h 20)
M. Lazure: Cette quinzaine de personnes, elles sont à
l'emploi depuis combien de mois?
M. Sénéchal: C'est-à-dire qu'il y en a
certains qui sont entrés probablement vers cette
période-là; une certaine partie a évolué
probablement vers d'autres emplois; certains ont commencé comme EXTRA et
ont évolué vers le programme PAIE au cours des mois
d'activités de la corporation, tandis que les autres ont
été reconnus plus récemment et ont démarré
surtout dans le cadre du «Plan stratégique de
Montréal», dans le cadre du FAIN, du Fonds d'aide à
l'innovation.
M. Lazure: L'Entretien ménager l'Entre-gens, votre
deuxième projet commencé en septembre...
M. Sénéchal: Ça c'est dans Rosemont.
Là aussi, c'est une espèce d'entreprise qui n'emploie que des
gens
de la sécurité du revenu et qui va décrocher des
contrats d'entretien, soit dans des toutes petites entreprises, des petites
PME, ou bien chez des particuliers, et qui s'assurent des revenus par les
contrats qu'ils négocient avec les bailleurs d'ouvrage, et qui
bénéficient de PAIE en même temps. L'organisme a comme
obligation, soit de garder à son emploi les personnes ou bien de faire
une démarche un peu en prolongement de ce que le Réseau
Travail-Québec fait actuellement, une démarche d'insertion
auprès d'autres employeurs.
Le Président (M. Joly): M. le député de
Rimouski, vous vouliez intervenir?
M. Tremblay (Rimouski): Oui. Si vous me donnez la permission,
monsieur.
M. Lazure: Certainement.
Évaluation du programme PAIE
M. Tremblay (Rimouski): je voudrais savoir. est-ce que le taux de
rétention de 30 %, au programme paie, c'est toujours un pourcentage qui
est réalisé présentement?
M. Sénéchal: C'est 38 %.
M. Tremblay (Rimouski): C'est 38 %? Ah! je m'excuse.
M. Sénéchal: oui, 38 % dans l'analyse qu'on a
faite trois mois après, l'analyse dont on parlait, de 1991.
M. Tremblay (Rimouski): alors, si je comprends bien, en tout cas,
entre 30 % et 40 % de ces gens-là rejoignent le marché du
travail...
Une voix: Non.
M. Tremblay (Rimouski): bien, je ne le sais pas, il faudrait
s'entendre, là! moi, ce que j'ai compris... je regarde dans ma
région. il y avait 90 participants dans ma région, à un
certain moment, je pense que c'est autour de la fin de décembre 1992, et
on me dit que ces gens-là, pour la plupart, conservaient leur emploi.
c'est-à-dire qu'à un moment donné ils débarquaient
du bien-être social et ils se trouvaient un emploi. je ne peux pas
dire... peut-être pas à 90 %, mais au moins dans la proportion que
vous dites, entre 30 % et 40 %, ce qui est très intéressant,
parce que, déjà, on initie les gens à travailler, d'une
part, à se trouver un emploi et à conserver cet emploi-là.
si c'est ça la démarche et si c'est ça les buts
visés par le programme paie, bien, chapeau!
Et si dans la province... Je ne sais pas, je n'ai pas les statistiques,
malheureusement, je n'ai pas les papiers devant moi, mais au moment où
j'avais fait ma petite enquête, il y en avait 13 000 dans la province qui
étaient admis au programme PAIE...
M. Sénéchal: Oui, 13 000 contrats.
M. Tremblay (Rimouski): ...et là-dessus, il y en avait 30
%, entre 30 % et 38 %, qui retournaient sur le marché du travail et
définitivement, qui débarquaient. C'est ça, c'est
ça qu'on doit comprendre?
M. Bourbeau: en fait, les statistiques qu'on a, m. le
président, c'est que, depuis le début du programme, ça
fait trois ans, on arrive à peu près à 40 000 participants
bientôt. il y en a toujours, comme le dit le député, 8000,
9000, 10 000 qui sont dans le programme. parce que le programme dure six mois.
les statistiques qu'on a ça fait deux fois qu'on fait des
évaluations de programme c'est que trois mois après la fin
des six mois, il y en a à peu près 40 %, entre 37 % et 40 % qui
sont encore en emploi trois mois après la fin du programme: soit qu'ils
ont conservé l'emploi pour lequel ils avaient été sur le
programme paie ou soit qu'ils aient trouvé un autre emploi après
la participation au programme paie, ou pendant la participation au programme
paie, qu'ils aient quitté leur emploi pour un autre emploi. ils sont
toujours en emploi, soit là, soit ailleurs, trois mois après la
fin du programme. je pense que cette constatation-là se vérifie
depuis deux ans d'une façon assez constante.
M. Lazure: M. le Président, je ne voudrais pas reprendre
toute la discussion qu'on a eue aujourd'hui, le député de
Rimouski n'y était pas, mais je veux rétablir les faits. Toujours
selon le tableau fourni par le ministre, vendredi soir, sur
l'échantillonnage de personnes qui sont restées au programme PAIE
durant les six mois, il y en a 19 % après trois mois qui ont un emploi
régulier, un vrai emploi régulier; sur les 500 autres qui ne sont
pas restées au programme PAIE, au bout de trois mois, il y en a 18 % qui
ont un emploi régulier. Alors, que vous restiez à PAIE ou pas,
selon les tableaux mêmes fournis par le ministre, c'est kif-kif, c'est
l'équivalent.
M. Bourbeau: Ah, non! Je regrette. Je regrette, ce n'est pas
ça le problème.
M. Lazure: Absolument. Absolument.
M. Bourbeau: Je regrette, ce n'est pas ça, le
problème.
M. Lazure: Bon. Écoutez, moi, je...
M. Bourbeau: Les autres 18 % là, dont vous parlez, ils se
sont trouvé un emploi parce qu'ils étaient sur PAIE.
M. Lazure: Non. Ils peuvent avoir laissé PAIE au
bout d'une semaine, M. le Président.
M. Bourbeau: Oui, mais ils étaient sur... M. Lazure:
Ça, votre recherche ne le dit pas... M. Bourbeau: Bien oui,
mais, M. le député... M. Lazure: ...quand est-ce qu'ils
ont quitté.
M. Bourbeau: ...allez donc voir comment ça se passe dans
le champ.
M. Lazure: Oui.
M. Bourbeau: Moi, je suis allé les voir, les gens,
là.
M. Lazure: Oui, oui.
M. Bourbeau: Moi, je fais le tour, là, et je parle aux
gens qui vont sur le programme PAIE.
M. Lazure: Oui. Est-ce que le ministre pourrait
déposer...
M. Bourbeau: II y a beaucoup de gens...
M. Lazure: Est-ce que le ministre pourrait déposer...
M. Bourbeau: ...qui n'ont jamais travaillé, qui n'ont pas
d'expérience de travail...
M. Lazure: ...des témoignages?
Le Président (M. Joly): S'il vous plaît!
M. Bourbeau: M. le Président, j'ai la parole, je
pense.
Le Président (M. Joly): Si vous voulez qu'on s'entende,
là... Moi, j'ai beaucoup, beaucoup de difficulté à
administrer cette formule. J'aime ça une formule quand un pose une
question et que l'autre, nécessairement, répond, et vice versa.
Si vous voulez faire un échange comme ça, soyez assurés
que je vais suspendre; on va prendre des ententes à l'extérieur
et on va voir comment on va fonctionner.
M. Bourbeau: Bien, M. le Président...
Le Président (M. Joly): Moi, je veux que ça se
fasse dans le décorum. Alors, M. le ministre, je vous reconnais la
parole, là, sur l'explication que vous étiez à donner et,
par après, je reconnaîtrai M. le député de La
Prairie.
M. Bourbeau: Bien oui. Moi, M. le Président, je ne
m'objecte pas à la contradiction, mais chacun son tour pour parler,
là. Quand j'aurai fini, vous me contredirez. moi, ce que je peux dire,
là, c'est que les évaluations de programmes faites par nos
experts et ce sont des gens sérieux c'est à l'effet
que le programme paie... c'est un constat qu'on fait: trois mois après
la fin des six mois, donc les six mois du programme, il y a 37 % de ces
personnes-là qui sont encore en emploi, et c'est des gens qui
étaient à l'aide sociale avant. donc, des faits: ces
gens-là étaient assistés sociaux, ils se sont
engagés dans le programme paie; certains ont quitté pendant le
programme paie pour se trouver un emploi ailleurs; d'autres ont terminé
le programme et ont conservé l'emploi de paie; d'autres ont
terminé le programme et se sont trouvé un autre emploi; d'autres
sont revenus à la sécurité du revenu. mais, en gros, 37 %
et c'est maintenant rendu à 40 % là des gens qui se
sont engagés dans le programme paie sont encore en emploi trois mois
après la fin du programme. on ne peut pas contester ça, c'est des
faits.
Maintenant, pourquoi est-ce qu'ils sont encore en emploi? On peut
inventer toutes sortes de raisons, mais la vraie raison, c'est qu'ils se sont
trouvé un emploi. Alors, c'est ça qui compte. Est-ce que le
programme PAIE a été important dans cette recherche d'emploi et
le fait qu'ils ont trouvé un emploi? Moi, je pense que oui, parce que,
souvent, une personne qui participe à PAIE, c'est une personne qui
manquait de confiance en elle, qui manquait d'expérience et elle s'est
engagée dans une réinsertion en emploi via le programme PAIE. Une
fois rendues sur le marché du travail, certaines de ces
personnes-là se disent: Bon, maintenant que je suis rendue dans le
travail, ça va, j'aime ça. Je ne veux pas me retrouver au bout de
6 mois sans emploi. Si elles ont la chance de retrouver un autre emploi pendant
qu'elles sont sur le programme PAIE, elles le prennent, l'autre emploi. Mais on
a atteint notre but quand même: ces personnes-là ont trouvé
un emploi. C'est ça qu'est l'objectif.
Maintenant, moi, je ne veux pas prétendre qu'elles ne se seraient
pas trouvé d'emploi sans ça, je ne le sais pas. Tout ce que je
peux dire, c'est un constat: Elles sont en emploi trois mois après la
fin de PAIE et elles n'étaient pas en emploi avant PAIE, elles
étaient à l'aide sociale. Ça, c'est des faits.
Le Président (M. Joly): M. le député de La
Prairie, s'il vous plaît.
M. Lazure: bon. je veux juste rétablir les faits une
dernière fois: 19 % se retrouvent dans un emploi régulier trois
mois après avoir fait les six mois de paie, 19 %; 18 % de ceux qui ne
sont pas restés dans paie se sont trouvé un emploi, paie ou pas
paie. pour les programmes comme paie, si au moins il y avait une formation, une
formation potable qui amènerait ces gens-là à se diriger
ensuite vers des emplois réguliers, mais ça n'est pas le cas.
dans la plupart des
cas des programmes de PAIE, que ce soit l'entreprise privée ou
l'organisme communautaire qui, directement, embauchent la personne pour six
mois, ou que ce soit les nouvelles corporations intermédiaires qui
constituent une espèce de réserve et qui distribuent la
main-d'oeuvre ici et là, dans la plupart de ces cas-là, il n'y en
a pas de formation, c'est de l'occupation, en général, à
une moyenne de 5,90 $ l'heure, légèrement en haut du salaire
minimum. C'est une occupation forcée, d'autre part; forcée, parce
que si le bénéficiaire de l'aide sociale refuse, il y a une
diminution de sa prestation, comme chacun le sait, d'environ 100 $. (20 h
30)
Le commun des mortels va dire: Bien oui, mais il faut qu'il travaille;
c'est correct de lui enlever 100 $ s'il refuse. Mais, M. le Président,
ce que l'on ne dit pas, c'est que, dans bien des cas, c'est un cul-de-sac, ce
sont des occupations... Qu'il s'agisse d'entretien ménager, qu'il
s'agisse d'aide à domicile... Je ne dis pas que ça ne rend pas de
services, ça rend des services aux bénéficiaires, aux PME
qui en bénéficient, qui bénéficient de
l'allocation, mais ça rend très peu de services aux
bénéficiaires de l'aide sociale qui, après ces 6 mois,
s'en vont à l'assurance-chômage, ensuite retombent à l'aide
sociale, recommencent un nouveau PAIE ou recommencent un nouveau programme
équivalent.
M. le Président, ce sont les deux aspects que nous critiquons.
Nous sommes favorables à ce qu'il y ait des programmes,
véritablement de préparation au monde du travail
formation, apprentissage, peu importe qui vont déboucher sur
quelque chose de réel. Mais il ne s'agit pas de ça dans le cas de
ces programmes-ci; il s'agit de rendre des services qui sont peut-être
valables, mais où on force des individus à accepter des
tâches en les menaçant de leur enlever une partie de leurs revenus
s'ils n'acceptent pas, et en leur disant: Bien, ça, au bout de six mois,
tu vas être obligé de le laisser. La subvention à
l'entrepreneur, elle, va continuer au bout de six mois. Et c'est un des
avantages de ces corporations de maintenir le flot régulier d'argent aux
patrons, que ce soient des entreprises à but lucratif ou non lucratif,
mais le flot de revenu régulier, il n'est pas maintenu pour le
bénéficiaire; il dure six mois puis, après six mois, il
faut qu'il fasse autre chose.
M. le Président, moi, je dirais, en terminant, sur la question
des programmes: en plus des recherches qui sont faites par les fonctionnaires,
de très bonne foi, j'aimerais ça que le ministre nous
dépose des témoignages de bénéficiaires d'aide
sociale ou d'associations de personnes assistées sociales qui vont
louanger autant que lui ces programmes. J'aimerais ça qu'il le fasse.
Moi, je pourrais lui déposer des lettres d'individus qui critiquent le
programme vertement et, malheureusement, M. le Président, je n'ai pas
encore vu de lettres qui font l'éloge de ces programmes.
M. Bourbeau: Alors, si vous lisez les journaux dans les prochains
jours, vous allez en voir une lettre, parce que, moi, j'en ai écrit une
aux journaux
Le Devoir et La Presse, justement, pour,..
M. Lazure: Vous n'êtes pas bénéficiaire de
l'aide sociale, que je sache.
M. Bourbeau: Non, non. Bien non, mais pour répondre
à certaines des lettres que vous avez vues récemment.
M. le Président, j'aimerais répondre à la question
du député. Est-ce que nos prestataires sont satisfaits des
emplois qu'ils occupent, ces emplois dont le député dit qu'ils
sont indignes peut-être pas ces mots-là, mais ça
tournait autour de ça. J'aimerais donner une réponse objective,
M. le Président, qui serait dépourvue de partisanerie. Alors,
vous me permettrez de citer le sondage qu'on a fait, tu sais, le sondage dont
je parlais ce matin, qui a été fait auprès de 8000
prestataires. Le député disait de lui déposer des lettres
de prestataires. Nos experts, ici, ont fait justement cette enquête
pas un sondage, une enquête auprès de 4710 personnes
qui ont participé à nos programmes et ont fait la comparaison
avec les 3354 qui n'ont pas participé. Alors, la conclusion je
pense que c'est quand même scientifiquement observé c'est
que la très grande majorité des personnes participant aux
programmes se disent satisfaites des emplois occupés, dans une
proportion de 89 % des emplois. Puis, ça, c'est une réponse, je
pense, à la question que vient de poser le député. On me
dit, d'ailleurs, M. le Président, on me souffle que l'enquête a
été faite par la firme de sondage Léger &
Léger...
M. Lazure: Je vous voyais venir.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bourbeau: ...en laquelle je suis convaincu...
M. Lazure: Je vous voyais venir.
M. Bourbeau: ...que le député a une confiance
absolue.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bourbeau: alors, la firme léger & léger,
dont on ne peut pas dire, m. le président, qu'elle soit
nécessairement favorable au gouvernement moi, je ne pense pas
qu'elle soit défavorable non plus elle est au-dessus de tout
soupçon, hein, on peut se le dire, là. elle a constaté que
89 % des personnes qui ont obtenu un emploi à cause des programmes
d'employabilité se sont dites satisfaites des emplois occupés.
alors, je pense que, ça, c'est une réponse éloquente
à la question que vient de poser le député de la
prairie.
Et, pour ce qui est des emplois, M. le Président, ces
emplois-là, dont le député dit qu'ils ne sont pas
très valorisants, c'est les mêmes emplois qu'occupent les autres
travailleurs à faibles revenus de la société
québécoise. Ce n'est pas tous des professeurs
d'université
qu'on a, dans la société québécoise, ou des
mathématiciens. Il y a un grand nombre de personnes qui occupent des
emplois à des niveaux très près du salaire minimum. Ce
sont des tâches, M. le Président, qui sont essentielles et
importantes et qu'on ne doit pas dévaloriser, même si ce ne sont
pas nécessairement des tâches de cols blancs.
M. Lazure: Le...
Le Président (M. Joly): Je vais reconnaître M. le
député de La Prairie, pour après reconnaître M. le
député de Rimouski.
M. Lazure: Oui.
Une voix: ...
Le Président (M. Joly): Après. Après.
M. Lazure: Le ministre vient de citer son sondage sur la
satisfaction des gens. Bon. J'accepte son sondage, mais on sait très
bien que les réponses dépendent beaucoup des questions. Mais je
lui parlais, moi, de témoignages personnels de
bénéficiaires de l'aide sociale ou d'un regroupement
d'assistés sociaux qui, non pas à l'intérieur d'un
sondage, de façon anonyme, mais de façon très personnelle,
vont venir témoigner que ces programmes-là sont très bons.
Mais j'ajouterais que, dans le document qu'il nous a remis vendredi soir, le
ministre, toujours en rapport avec ces programmes-là, à la fin de
la recherche, dans le document 30, à la page 8, les principales
suggestions des participants pour améliorer le programme PAIE le
ministre n'en parle pas, là; je vais en parler sont:
premièrement, offrir des emplois dont les salaires sont plus
élevés. Au lieu de 5,90$... Et ce n'est exact quand le ministre
dit que l'aide à domicile, par exemple, c'est rempli par des gens au
salaire minimum. C'est faux, M. le Président. La plupart de ces
emplois-là sont remplis par des employés des CLSC...
M. Tremblay (Rimouski): Oui, à 12 $ l'heure.
M. Lazure: ...à 12 $ l'heure, et non pas au salaire
minimum.
M. Tremblay (Rimouski): ...
M. Lazure: Deuxième remarque...
Le Président (M. Joly): S'il vous plaît!
M. Lazure: Merci, M. le député de Rimouski.
M. Tremblay (Rimouski): II y en a d'autres.
M. Lazure: Deuxième remarque des participants: assurer un
meilleur suivi durant le programme. C'est la formation dont je parlais
tantôt. Les gens se plaignent qu'ils n'ont pas de formation, que ce n'est
pas un bon entraînement à une job ultérieure. Et la
troisième remarque, c'était d'allonger la durée du
programme, parce que le programme finit au bout de six mois, mais la subvention
à l'employeur, elle, ne finit pas, encore une fois. La subvention, elle,
est permanente, mais l'emploi, pour le bénéficiaire d'aide
sociale, il est de six mois seulement. Et ça permet au gouvernement de
dire: Nous avons créé tant de milliers d'emplois de plus ce
mois-ci. Mais ce sont des emplois précaires, temporaires par
définition, très mal payés, et où l'individu est
forcé d'aller occuper cet emploi-là, qu'il aime ça ou
qu'il n'aime pas ça.
M. Bourbeau: M. le Président, c'est bien évident
qu'on ne peut pas tous avoir des emplois de psychiatre. Tu sais, à un
moment donné, là, il y a toutes sortes d'emplois qu'on doit
considérer. Chacun n'a pas la formation qu'il faut pour occuper des
emplois payés à un salaire de député. Il faut
commencer quelque part, et la société est pleine de gens qui ont
commencé au bas de l'échelle et qui, progressivement, à
partir d'emplois plutôt humbles, ont fini par se trouver des situations
qui sont plus intéressantes.
Moi, je ne dis pas que c'est souhaitable d'avoir des emplois au salaire
minimum. Je souhaiterais bien que tout le monde soit payé à 15 $
l'heure, mais, soyons réalistes. Dans la société, il y a
un certain nombre d'emplois qui sont à des salaires plus bas et, quand
il n'y a pas autre chose, on peut commencer par ça, quitte, après
ça, à se chercher autre chose. Il y a des gens qui commencent
à des salaires plus bas et qui, tranquillement, se cherchent autre
chose, et, à force de se faire connaître, réussissent
à s'en sortir. Moi, je pense que ce qui est important, c'est de
commencer quelque part, de se sortir de la sécurité du revenu, de
cet état de dépendance, et d'amorcer une sortie, une
reconquête de l'autonomie par l'emploi.
Maintenant, la société aura toujours besoin de gens qui
doivent remplir des travaux plus humbles, que ce soient des
préposés auprès des bénéficiaires ou
auprès des personnes âgées, etc. et on ne pourra jamais se
dispenser du travail de ces gens-là.
Le Président (M. Joly): M. le député de
Rimouski.
M. Tremblay (Rimouski): Oui, j'écoute le critique de
l'Opposition, et je pense qu'il devrait un peu s'inspirer d'une de ses idoles,
peut-être, Félix Leclerc, qui a déjà dit que le
meilleur moyen de tuer un homme c'est de le garder à ne rien faire. Ce
qu'on essaie de faire avec le programme PAIE, à mon sens, c'est de faire
intégrer le plus de monde possible, et qui sont sur l'assistance
sociale, à des emplois. Je comprends que ce ne sont peut-être pas
les emplois les mieux rémunérés, mais enfin, ça les
fait intégrer et ça les incite à intégrer le
marché du travail.
Il reproche, il dit: Ce n'est pas un programme de
formation. Bien sûr que ce n'est pas un programme de formation;
ça n'a pas été fait pour ça. Par contre, il y a une
acquisition de connaissances par le travail accompli. Des programmes de
formation, il y en a. Il y en a d'autres sortes, et ces gens-là
pourraient, à la rigueur, y aller, mais ils ne veulent pas y aller, pour
toutes sortes de raisons qu'on respecte. Sauf qu'ils veulent, à mon
sens, travailler, puis ils veulent se sortir du bien-être social avec les
moyens puis avec les connaissances qu'ils ont. Et, ce faisant,
nécessairement, ils se disent: O.K., on va aller essayer le programme,
puis si on est capables de faire un travail utile,
rémunérateur... vous l'avez dit vous-même que
c'était profitable pour le bénéficiaire, profitable pour
celui qui l'emploie, donc profitable, forcément, pour la
société. Et, par conséquent, je trouve que le programme
PAIE, avec tous les inconvénients qu'il peut avoir, au moins, il a le
mérite d'offrir à cette clientèle une offre de service ou
une offre d'emploi. Et je pense que, à ce hiveau-là, il
mérite, en tout cas, d'être apprécié à sa
juste valeur. (20 h 40) et, moi, pour le questionnement que je fais dans ma
région et je dois vous dire que je le fais assez
régulièrement ce qu'on me dit, c'est que le programme
paie, à l'heure actuelle, est relativement satisfaisant pour ceux et
celles qui y adhèrent, d'une part; il est satisfaisant pour l'employeur,
satisfaisant pour les bénéficiaires. et ceux qui l'administrent
me disent: c'est vraiment intéressant, parce qu'on a quelque chose
à offrir à notre clientèle. et, de ce
côté-là, je pense qu'il est un bon programme, et les
statistiques viennent le prouver. s'il y en a au-delà de 40 % qui, pour
toutes sortes de raisons, réintègrent le marché du travail
avec ce programme-là, bien, chapeau! et bien plus, le ministre vient de
nous dire qu'il y a eu un sondage auprès de 8000 personnes; la
totalité de ces gens-là nous disent qu'ils sont satisfaits du
programme. bien, chapeau! bravo! très bien!
Quant à des lettres de gens qui ne sont pas satisfaits... Des
gens, il y en a toujours dans la société qui, pour toutes sortes
de raisons, ne sont pas satisfaits. Si vous en avez, M. le critique de
l'Opposition, déposez-les, on va les regarder. Mais on pourra
peut-être en déposer d'une autre manière aussi.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le député
de Rimouski. M. le député de La Prairie, s'il vous
plaît.
M. Lazure: Le député de Rimouski me force, encore
une fois, à corriger la statistique qu'il met sur la table, de 40 %. Je
répète: C'est 19 % pour ceux qui ont participé et c'est 18
% pour ceux qui n'ont pas participé. Alors, c'est bonnet blanc, blanc
bonnet. Et c'est ça, la principale critique qu'on a de ce programme PAIE
et d'autres programmes semblables, c'est qu'il ne semble pas que le choix des
occupations et l'apprentissage, l'entraînement, la formation qui
accompagnent ça, il ne semble pas que ça apporte
véritablement une expérience valable pour que la personne
intègre le vrai marché régulier du travail par la suite.
C'est ça qui est notre critique. La critique, ce n'est pas qu'ils soient
payés seulement 6 $ l'heure, ce n'est pas qu'ils occupent un emploi
modeste; ce n'est pas ça qui est la critique. La critique, c'est que
c'est précaire, c'est instable, c'est toujours à recommencer et
ça ne débouche pas sur un emploi régulier.
Pendant ce temps-là, on se crée l'illusion de créer
des emplois alors qu'en réalité on n'en crée pas. Et,
nous, ce que nous disons au gouvernement: Au lieu de vendre ces
programmes-là, mettez autant d'énergie que vous le faites
à les vendre à créer des emplois. Et je pense que
l'ensemble de la société est d'accord avec les paroles de
Félix Leclerc, et moi le premier; je suis d'accord avec les paroles de
Félix Leclerc, mais, encore une fois, créons un emploi qui va
être régulier, permanent et non pas un emploi de travail
forcé qui va durer six mois et qui va amener ensuite le
bénéficiaire à recommencer le cycle infernal:
l'assurance-chômage, aide sociale, emploi de six mois,
assurance-chômage, aide sociale, emploi de six mois. Et c'est ça,
la grande critique que nous formulons.
Subvention pour l'achat de lait
maternisé
M. le Président, moi, j'ai terminé sur l'ensemble de ces
programmes-là. J'ai une autre question au ministre en ce qui concerne
l'ensemble du ministère, avant de passer à la Commission des
affaires sociales: on nous dit que le ministère de la Main-d'oeuvre
envisage la formation d'un nouveau programme de préparation pour
nourrissons à l'intention des familles nécessiteuses. Le
gouvernement du Québec rembourserait aux mères
nécessiteuses la différence du coût entre l'alimentation au
lait de vache vous voyez que je change complètement de sujet
et...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lazure: ...celle du lait maternisé, de la naissance
jusqu'à six mois. Il y aurait actuellement un projet au
ministère, qu'on me dit, où le ministère paierait la
différence entre le lait qui est sur le marché, le lait de vache
ordinaire, et un lait qu'on appelle maternisé. Alors, je voulais voir ce
qui en était de cette proposition-là.
M. Bourbeau: J'aimerais savoir ce qu'en pense le
député, M. le Président. Est-ce que ce serait souhaitable,
selon lui, qu'on s'adonne à un programme semblable? Est-ce que le fait
d'exposer les nourrissons ou les jeunes bébés à du lait de
vache, ça peut être nuisible pour la santé? Est-ce que je
peux demander une expertise professionnelle au député de
l'Opposition?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lazure: Je suis en congé d'exercice.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lazure: J'exerce mon autre métier, ce soir. Non, mais
sérieusement, on nous dit qu'il y a même une compagnie qui a fait
une proposition au gouvernement pour devenir le distributeur exclusif de lait
maternisé dans le cadre de ce programme-là. Est-ce qu'il y a un
projet sérieux d'un tel programme?
M. Bourbeau: Bien, disons qu'on étudie, M. le
Président, certaines hypothèses, présentement, qui
permettraient peut-être de couvrir comme un besoin spécial ces
besoins-là. Mais, disons que, pour l'instant, il n'y a aucune
décision qui a été prise.
M. Lazure: Merci. Alors, M. le Président, je serais
prêt à passer...
Le Président (M. Joly): Alors, le programme 3 est
déjà terminé.
M. Lazure: En remerciant les collègues du ministre pour
leur présence. On pourrait peut-être commencer par le...
Piégeurs cris. M. le Président?
Le Président (M. Joly): Oui, M. le
député.
M. Lazure: On pourrait commencer par la Sécurité du
revenu des chasseurs et piégeurs cris? Ça ne sera pas très
long.
Le Président (M. Joly): Alors, nous appelons le programme
6.
(Consultation)
Le Président (M. Joly): M. le ministre, s'il vous
plaît.
M. Bourbeau: Est-ce que vous me permettriez de remercier les
hauts fonctionnaires du ministère de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle qui vont
nous quitter puisque le député de La Prairie nous a
indiqué qu'il n'avait plus besoin de leur présence? J'aimerais
les remercier pour leur contribution à l'étude de ces
crédits.
Le Président (M. Joly): M. le député.
M. Lazure: Je voudrais ajouter mes remerciements, moi aussi, et
leur souhaiter une bonne soirée.
Sécurité du revenu des chasseurs et
piégeurs cris
M. Bourbeau: Et en même temps, M. le Président,
j'aimerais vous présenter Me Monique Garon, qui est la secrétaire
de l'Office de la sécurité du revenu des chasseurs et
piégeurs cris.
Le Président (M. Joly): M. le député, la
parole est à vous.
Évaluation du programme
M. Lazure: Oui. M. le Président, pour avoir eu la
responsabilité de ce programme-là il y a plusieurs années,
je sais de quoi il s'agit. Mais j'aimerais peut-être que Mme Caron nous
mette au fait de révolution, depuis une couple d'années, du
programme. D'abord, dans l'ensemble, est-ce que le programme fonctionne bien?
Quel pourcentage de personnes il touche actuellement dans la communauté
crie?
Le Président (M. Joly): Mme Caron.
Mme Caron (Monique): dans l'ensemble, le programme fonctionne
bien. il touche environ 30% de la population résidente,
c'est-à-dire adultes et enfants. c'est environ 1225 familles qui sont
actuellement, cette année, inscrites au programme.
M. Lazure: 1225 familles sur combien de familles.
Mme Caron (Monique): En nombre de familles, je ne le sais pas,
mais en pourcentage de population.,,
M. Lazure: 3000?
Mme Caron (Monique):.. totale, c'est environ 30 % de la
population.
M. Lazure: 30 %. Est-ce qu'il y a eu des changements au programme depuis
quelques années moi, je vous avoue que j'ai perdu de vue le
programme depuis plusieurs années ou est-ce que c'est
essentiellement la même chose qu'il y a 15 ans?
Mme Caron (Monique): Le concept est demeuré le même.
Il y a eu des amendements en 1988. Le ministère et l'Administration
régionale crie ont signé une convention complémentaire
à la Convention de la Baie James qui a modifié le programme.
C'est des règles de calcul. Certaines dispositions ont été
modifiées qui tenaient compte surtout de l'évolution au cours des
années.
M. Lazure: Est-ce que le nombre de jours où le
piégeage a été exercé est le même
qu'autrefois?
Mme Caron (Monique): La limite autorisée est rendue
à 350 000. À l'origine., c'était, je pense, 286 000,
à l'époque.
M. Lazure: Non. Mais on ne parle pas de la même chose.
Mme Caron (Monique): Ah!
M. Lazure: Ma question portait sur le nombre de jours où
la personne a exercé l'activité de piégeage ou de
chasse.
Mme Caron (Monique): Ah! Vous voulez dire comme condition
d'admissibilité?
M. Lazure: Oui.
Mme Caron (Monique): Non, c'est demeuré le même: 120
jours.
M. Lazure: Cent vingt jours. Mme Caron (Monique): Oui.
M. Lazure: Est-ce que la communauté crie a des critiques
à faire au programme, ou des propositions? (20 h 50)
Mme Caron (Monique): La communauté a souvent des
propositions à faire. On consulte régulièrement les
trappeurs. Les trappeurs ont souvent des commentaires. La majorité des
amendements de 1988 sont le résultat de commentaires des trappeurs, des
chasseurs eux-mêmes. Alors, je pense que c'est en évolution
continuelle.
M. Lazure: C'était quoi, les effets principaux de ces
amendements-là?
Mme Caron (Monique): Entre autres, il y a une façon de
calculer les jours, qui a été modifiée pour que le
conjoint ne disqualifie plus les jours... C'est technique. Les jours du
chèque, c'était assez important. Les chèques, maintenant,
sont séparés entre hommes et femmes. Avant, c'était le
chef qui recevait le chèque, alors que maintenant ça peut,
à la demande, être séparé. Les trop-payés
sont récupérés sur deux ans au lieu d'une année,
des choses comme ça.
M. Lazure: C'est tout, M. le Président. Merci, madame.
Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, M. le
député, Mme Caron. Vous aimeriez que j'appelle ou que je revienne
au programme 3, peut-être?
M. Lazure: Attendez un petit peu, là.
Secteur administration et services (suite)
Direction et gestion de la Commission des affaires
sociales
Le Président (M. Joly): Est-ce que vous souhaiteriez, M.
le député, que nous revenions au programme 3?
M. Lazure: Commission des affaires sociales.
Le Président (M. Joly): Commission des affaires
sociales?
M. Lazure: Oui.
Le Président (M. Joly): C'est ça. M. le
ministre.
M. Lazure: Commission des affaires sociales.
M. Bourbeau: Oui. Elle s'en vient, la Commission, là. M.
le Président, M. le juge Louis Rémillard, qui est le
président de la Commission des affaires sociales, est avec nous. Il est
prêt à répondre aux questions.
Le Président (M. Joly): Bonsoir, M. le juge. M. le
député, s'il vous plaît.
Délais d'audition des causes .
M. Lazure: Oui. La première question touche les
délais. L'an passé, en lisant le Journal des débats,
on voit que la Commission faisait état de délais de sept,
huit mois, comme moyenne pour les cas d'aide sociale, les auditions. J'ai pris
ça dans le Journal des débats.
M. Rémillard (Louis): C'est possible, M. le
député.
M. Lazure: Oui; Mais, en tout cas, peu importe ce que
c'était l'an passé, c'est quoi, actuellement, le
délai?
M. Rémillard (Louis): Actuellement, si vous me permettez
une réponse générale concernant les délais de la
Commission, les délais moyens, toutes divisions confondues, les six
divisions confondues, c'est une dizaine de mois, et ça s'étale
sur... c'est entre 6 et 12 mois. Dans la division sur laquelle vous
m'interrogez, je vous dirais que les délais moyens sont de l'ordre de 10
à 12 mois actuellement. Les causes dans cette division sont de plus en
plus complexes. Les causes sont de plus en plus longues. Évidemment, la
conjoncture qu'on connaît y est pour quelque chose. C'est une division
où, on le voit, de plus en plus la Charte des droits et libertés
est invoquée. C'est presque rendu quotidien. Alors, c'est une division,
pour terminer, dans laquelle nous avons dû réduire quelque peu le
nombre de causes fixées pour audiences par jour.
Maintenant, je suis fier de vous dire que mes collègues, les huit
assesseurs qui siègent uniquement dans cette division, ont rendu
à eux seuls au-delà de 1700 décisions l'an dernier, sans
compter quelque 240 décisions sur des requêtes d'urgence. Comme
vous le savez, l'article 22 de notre loi constitutive permet à un
appelant de demander à la Commission de se prononcer lorsqu'il croit que
son cas est urgent. Alors, nous avons eu quelque 240 requêtes de ce genre
qui ont presque toutes été logées dans cette division.
Quelques unités ont été logées dans d'autres, mais
le gros des décisions ont
été rendues en aide sociale.
M. Lazure: II y a combien de commissaires actuellement?
M. Rémillard (Louis): Actuellement, il y a 27 membres qui
sont des avocats, et il y a 12 médecins à plein temps. Il y a
huit assesseurs sociaux à plein temps, et il y a un certain nombre de
psychiatres; il y a six médecins psychiatres. Et nous avons aussi un
certain nombre de médecins contractuels à temps partiel,
médecins à qui nous pouvons faire appel pour donner un coup de
main.
M. Lazure: Mais si on revient à la Division de l'aide et
des allocations sociales, dans cette division-là, vous avez combien de
personnes?
M. Rémillard (Louis): Dans cette division, nous avons huit
assesseurs sociaux qui, avec les avocats, parce qu'ils siègent toujours
à deux, sont les seuls qui sont autorisés par la loi à
entendre ces causes, sauf certaines causes qui peuvent être
adressées à des médecins lorsqu'il est question
d'incapacité.
M. Lazure: Est-ce qu'il y a eu des ajouts d'assesseurs sociaux ou
d'avocats depuis quelques années, à la division aide sociale,
toujours?
M. Rémillard (Louis): Non, monsieur. M. Lazure:
Non.
M. Rémillard (Louis): Mais il faut savoir que les membres
siègent dans toutes les divisions. Alors, ils siègent
indifféremment dans celle-ci comme dans les cinq autres.
M. Lazure: Est-ce qu'il est exact qu'il y aura réduction
d'effectif de six employés...
M. Rémillard (Louis): Ah, c'est fait, monsieur. M.
Lazure: ...en 1993-1994?
M. Rémillard (Louis): C'est fait, mais ça ne
touchait pas les membres et les assesseurs. Il n'y a pas eu de telles
réductions chez les membres et les assesseurs.
M. Lazure: Le...
M. Rémillard (Louis): Le personnel de la Commission a
été réduit. Il était de 136; il est maintenant de
126.
M. Lazure: C'est le personnel clérical,
essentiellement...
M. Rémillard (Louis): Justement, monsieur.
M. Lazure: ...qui est touché? M. Rémillard
(Louis): Justement.
M. Lazure: II semble qu'en 1991-1992 il y avait eu un montant
périmé assez important: 796...
M. Rémillard (Louis): C'est par mégarde. On m'avait
posé la question, et j'avais dit que j'ignorais de quoi on me parlait.
C'est que c'était la première année que la Commission
avait son fonds, fonds qui avait été créé par une
loi à la fin de décembre 1990, et le ministère avait
prévu le montant d'une subvention, ignorant, à ce
moment-là, quels seraient précisément les besoins de la
Commission; il s'est révélé que les besoins de la
Commission avaient été moindres puisqu'il y a trois autres
organismes qui participent à ce fonds. Alors, le montant requis de la
subvention nous a bien été versé; l'excédent a
été utilisé à bonne fin, j'imagine.
M. Lazure: Bon. Si on revient aux délais, M. le
Président je pourrais donner la citation dans le Journal des
débatsje l'avais cet après-midi, mais je ne retrouve
pas le Journal des débats de l'an passé mais
c'était au mois de mai, avec la députée de
Hochelaga-Maisonneuve, et la réponse, j'en suis sûr,
c'était sept ou huit mois; donc, M. le juge Rémillard nous dit
que c'est maintenant 10 à 12 mois, à l'aide sociale.
M. Rémillard (Louis): C'est exact. Et je reconnais qu'il y
a une augmentation, comme il y a une augmentation assez importante du nombre de
déclarations d'appel dans cette division, et, évidemment, un
nombre peut-être un peu moindre de décisions rendues. Mais il faut
être conscient qu'aujourd'hui la Commission ne peut pas faire beaucoup
plus dans cette division. Elle est au maximum de ses capacités.
(Consultation)
M. Lazure: Je veux rester sur cette question, là, des
délais. L'an passé, donc, c'était sept, huit mois. Il y a
trois ans, les chiffres, toujours selon le Journal des débats,
c'était trois à cinq mois.
M. Rémillard (Louis): Trois à cinq mois?
M. Lazure: Trois à cinq mois. Alors, il y a une
progression inquiétante, je pense, si on se place du point de vue du
service à la clientèle, là, du service aux
bénéficiaires. Et je pose la question au ministre et, en
même temps, au président de la Commission: Quelles sont les
actions qu'on entend prendre pour contrer cette tendance qui est très
nette, depuis trois ans: trois à cinq mois; ensuite, sept, huit mois; et
là c'est 10, 12 mois?
M. Rémillard (Louis): Évidemment, je ne peux pas
vous dire; il y a trois ou cinq ans, je n'y étais pas. Ça me
semble je prends, évidemment, ce que vous
me dites ça me semble un peu extraordinaire que les
délais aient été aussi courts à ce
moment-là, alors que les délais moyens étaient de l'ordre
de trois ans pour l'ensemble de la Commission. Mais je reconnais que, l'an
dernier, ils étaient quelque peu plus courts qu'ils le sont cette
année, parce que, comme je vous le disais, il y a, à cause de la
conjoncture, augmentation des appels, et que les causes que nous entendons sont
beaucoup plus longues qu'elles l'étaient autrefois. Et il n'est pas
rare, aujourd'hui, d'avoir des causes qui durent toute la journée.
Alors, forcément, par voie de conséquence, on ne peut pas en
mettre plus qu'on en met actuellement.
Reconduction des décisions des employeurs par
les fonctionnaires
M. Lazure: Dans le rapport annuel 1991-1992... Je comprends que
c'était peut-être votre prédécesseur, ou est-ce que
c'est vous qui avez...
M. Rémillard (Louis): Non, c'était...
J'étais là, à ce moment-là.
M. Lazure: C'est votre rapport annuel. Bon. Le chapitre Division
de l'aide et des allocations sociales, c'est 8.1.
M. Rémillard (Louis): Est-ce que nous sommes à la
page 16, M. le député?
M. Lazure: Je n'ai pas la pagination, malheureusement.
M. Rémillard (Louis): Ah, bon. Ici, j'ai, à la page
16, la Division...
M. Lazure: C'est le...
M. Rémillard (Louis): ...de l'aide et des allocations
sociales.
M. Lazure: ...8.1.
M. Rémillard (Louis): J'ai 2.1, mais enfin...
M. Lazure: Chapitre 8, Observations et recommandations.
M. Rémillard (Louis): Ah, oui!
M. Lazure: Alors, au bas de la page, vous dites: «Dans de
telles circonstances, la Commission note fréquemment que les
fonctionnaires du ministère reconduisent presque automatiquement les
décisions de l'employeur, et le prestataire, reconnu avoir refusé
un emploi, se voit alors imposer une réduction de ses
prestations.» Est-ce que vous pourriez élaborer un peu
là-dessus? (21 heures)
M. Rémillard (Louis): Nous avons constaté, dans
certains cas... Certains de mes collègues ont constaté que,
justement, dans certains cas, les fonctionnaires étaient portés,
d'après nous, à plutôt se fonder sur les décisions
de l'employeur. Nous avons cru devoir porter à la connaissance du
ministre ces constatations. Maintenant, il ne s'agissait pas là d'un
problème généralisé. Évidemment, ces
recommandations sont faites pour améliorer, s'il y a lieu, ce qui se
fait au ministère, et c'est dans cet esprit que ça a
été fait. Nous n'avons pas constaté un problème
majeur, il ne faut pas croire ça.
M. Lazure: Sauf que vous disiez que, fréquemment, des
fonctionnaires se rangeaient à la décision de l'employeur. Est-ce
que je peux demander au ministre comment il réagit à cette
observation?
M. Bourbeau: Oui. Les directives administratives sont très
explicites sur la façon de traiter ce genre de dossier. L'agent doit,
dans les cas de refus ou d'abandon d'emploi, faire preuve de discernement. Les
agents doivent considérer les explications du prestataire, les
difficultés que ce dernier peut éprouver pour intégrer un
emploi et le sérieux du motif invoqué avant d'imposer une
pénalité. D'ailleurs, à la suite du rapport de la
Commission, j'ai fait un rappel à ce sujet, ou le ministère a
fait un rappel à tout le personnel concerné.
M. Lazure: Mais, dans le moment, si la décision est
contestée par le bénéficiaire de l'aide sociale, son
recours, c'est la Commission.
M. Rémillard (Louis): Oui, monsieur.
M. Bourbeau: Avant ça, il y a une révision...
M. Lazure: II y a la révision...
M. Bourbeau: ...administrative...
M. Lazure: ...administrative.
M. Bourbeau: ...qui est faite au ministère, et si la
décision est maintenue, le prestataire peut toujours, s'il le juge
à propos, en appeler à la Commission des affaires sociales.
Le Président (M. Joly): M. le député de
Rimouski, s'il vous plaît.
M. Tremblay (Rimouski): Moi, je voudrais savoir, étant
donné que vous avez fait allusion aux droits et libertés de la
personne: Ceux qui vont en appel font plutôt référence aux
droits et libertés de la personne en fonction des chartes, mais est-ce
que les décisions sont rendues en fonction des chartes ou bien en
fonction de la loi? Est-ce qu'on tient compte des deux dimensions?
M. Rémillard (Louis): Oui, absolument, M. le
député. La Commission non seulement peut mais doit se
prononcer sur les questions de chartes lorsqu'elles sont plaidées devant
nous, et nous devons nous prononcer. C'est ce qui fait que les causes sont fort
complexes à entendre, et encore plus complexes à trancher. Les
problèmes de droit ne sont pas faciles, je ne vous le cache pas. Et
c'est suite à des décisions des tribunaux supérieurs,
notamment de la Cour suprême du Canada, que, maintenant, on invoque
devant les tribunaux administratifs et, je vais dire, surtout devant la
Commission des affaires sociales, la Charte des droits et libertés
tant fédérale que provinciale, d'ailleurs.
M. Tremblay (Rimouski): Au niveau des statistiques que vous nous
avez données au début, vous avez 1700 décisions rendues.
Est-ce que, dans les 1700, les 257, plus ou moins...
M. Rémillard (Louis): Non, monsieur, ce n'est pas
compris.
M. Tremblay (Rimouski): Ce n'est pas compris.
M. Rémillard (Louis): Ce sont des décisions au
fond.
M. Tremblay (Rimouski): Au fond.
M. Rémillard (Louis): Les 1700 décisions sont des
décisions au mérite, qui tranchent définitivement le
litige, alors que les quelque 200 décisions dont je vous parlais sont
des décisions interlocutoires sur une requête pour...
M. Tremblay (Rimouski): Ah, pour...
M. Rémillard (Louis): ...d'urgence, si vous voulez.
M. Tremblay (Rimouski): D'urgence. Ça va.
M. Rémillard (Louis): Lesquelles sont accueillies,
d'ailleurs, soit dit en passant, dans une proportion d'environ 50 %,
peut-être un peu plus.
M. Tremblay (Rimouski): Très bien, merci.
Le Président (M. Joly): Merci. M. le député,
s'il vous plaît.
M. Lazure: M. le Président, si vous permettez, je vais
revenir sur l'observation de la Commission dans son rapport annuel,
l'observation dont on parlait tantôt, que les fonctionnaires,
fréquemment, reconduisaient automatiquement les décisions de
l'employeur. Je pose la question au ministre: Le bénéficiaire de
l'aide sociale qui refuse une mesure d'employabilité qui lui est
proposée... Ou je vais changer l'exemple, plutôt. Il est au
travail, dans un programme PAIE, disons, dont on parlait tantôt. Il est
dans un programme PAIE et, au bout d'un certain temps, au bout de trois mois,
il quitte son programme PAIE pour des raisons qu'il juge valables. Et,
là, l'employeur dit au ministère: II a quitté son emploi
sans raison valable. Et je pense que c'est ça que la Commission des
affaires sociales veut dire quand elle note que, fréquemment, les
fonctionnaires du ministère acceptent la version patronale. Dans
l'exemple que je vous donne, cet ex-bénéficiaire de l'aide
sociale qui quitte l'emploi et qui retourne à l'aide sociale à ce
moment-là, est-ce qu'il a un recours quelconque au moment où son
patron dit au ministère: II a quitté sans raison valable?
M. Bourbeau: Absolument, absolument. Il n'y a pas de
problème. Les directives sont claires. Je l'ai dit tantôt, l'agent
d'aide sociale qui voit arriver, à l'aide ou à la
sécurité du revenu, quelqu'un qui était en emploi et qui a
abandonné son emploi, doit, s'il a abandonné l'emploi sans raison
valable, appliquer une pénalité de 100 $; c'est-à-dire
qu'en arrivant à l'aide de dernier recours, le barème peut
être amputé de 100 $ si l'agent en vient à la conclusion
qu'il a abandonné sans raison valable je ne sais pas si le
député est intéressé à la réponse,
oui? bon mais l'agent, avant de prendre sa décision, doit faire
preuve de discernement. Les directives sont claires. Il doit considérer
les explications du prestataire. Donc, il ne doit pas se fier uniquement
à la déclaration de l'employeur, il doit considérer les
explications du prestataire, les difficultés que ce dernier peut
éprouver pour intégrer un emploi et le sérieux du motif
invoqué avant d'imposer une pénalité. Et il le fait.
À ma connaissance, il le fait. Il doit le faire et il le fait.
C'est pour ça, d'ailleurs, que je n'étais pas très
d'accord avec la recommandation, peut-être pas la recommandation mais
l'observation de la Commission. De toute façon, on a fait un rappel
à tout notre personnel pour bien leur rappeler que c'est ce qu'ils
doivent faire à ce moment-là. Et, ce faisant, nous ne faisons, M.
le Président, que suivre la recommandation du député de
L'Assomption, chef de l'Opposition, M. Jacques Pari-zeau, qui lui-même
réclamait à l'Assemblée nationale il y a un certain temps
qu'on mette en application ces pénalités qui existent dans la Loi
sur l'aide sociale à l'effet que quelqu'un qui abandonne un emploi doit
recevoir une pénalité. Alors, on est d'accord avec le chef de
l'Opposition.
M. Lazure: M. le Président, ça, c'est du moins bon
cru du ministre de la Sécurité du revenu de mettre un petit fion
comme ça, très partisan. C'est sûr qu'on est d'accord pour
que la personne qui, sans raison valable, refuse, cette personne-là soit
pénalisée, comme le chef de l'Opposition l'a dit. Ce n'est pas
là-dessus que porte la question.
La question qui est soumise au ministre, ça découle de
l'observation de la Commission des affaires sociales, commission qui
relève de lui. La Commission note que ses fonctionnaires sont
portés à écouter plus la
version de l'employeur que celle de l'employé. C'est une
commission responsable qui dit ça, ce n'est pas l'Opposition qui dit
ça. Et le ministre essaie de farfiner en répondant à la
question, mais je lui dis, encore une fois...
Une voix: Une troisième fois.
M. Lazure: Je vais changer d'exemple. La mesure EXTRA, par
exemple, prenons la mesure EXTRA. Si l'ex-bénéficiaire quitte sa
mesure EXTRA, il passe du statut de participant à non-participant. Il
est pénalisé, 100 $ par mois. Ma question: Au cas où elle
aurait eu des motifs valables, est-ce que cette personne-là peut aller
en appel? Oui ou non? Puis il semble que non. Il semble que non. Il semble que
l'article 76 de votre loi, M. le ministre... En vertu de 76, un prestataire ne
peut pas en appeler d'une décision du ministre ou du fonctionnaire.
M. Bourbeau: Mais, là, il n'y a pas de
pénalité qui s'applique, M. le Président. C'est ça,
la différence. C'est que...
M. Lazure: Oui, il y a une perte de 100 $ par mois.
M. Bourbeau: Pas de pénalité. Non, pas du tout. Il
n'y a pas de pénalité.
M. Lazure: II passe de participant à non-participant.
M. Bourbeau: Oui, mais une personne qui est non participante,
elle a le barème de non-participante. Une personne qui est participante
a le barème de participante. (21 h 10)
M. Lazure: Oui, mais c'est une pénalité,
ça.
M. Bourbeau: Mais non, la personne a le barème dans lequel
elle s'inscrit. Si une personne dit: Moi, je suis non participante, on lui
donne le barème non participante; ce n'est pas une
pénalité que de recevoir le barème auquel on a droit. Si
la personne, étant participante, décide de ne plus l'être
et qu'elle déclare qu'elle n'est plus participante, bien, on lui donne
le barème non-participante, sans la pénaliser en aucune
façon. Je ne comprends pas, là. On ne peut pas être non
participant et recevoir le barème de participation. Ce ne serait pas
logique.
M. Lazure: Est-ce que le président de la Commission des
affaires sociales peut nous expliquer les conséquences qui pourraient
découler de ce phénomène où, dans les termes de
votre rapport, les fonctionnaires du ministère reconduisent presque
automatiquement les décisions de l'employeur: «...se voit alors
imposer une réduction de ses prestations.» Ça n'a pas
été fait à la légère, cette
observation-là.
M. Rémillard (Louis): Évidemment, avec l'exemple
que vous me donnez, M. le député, je ne suis pas capable de
répondre à cette question-là. Il faudrait que
j'étudie la question; je n'ai pas de réponse à cette
question. Mais...
M. Lazure: Oui, parce que, de toute évidence, M. le
Président, la Commission a jugé qu'il y avait quelque chose
d'inéquitable si la Commission a jugé bon de faire cette
remarque.
M. Rémillard (Louis): C'est ça. Nous avons
recommandé que les fonctionnaires soient davantage régis. Nous
leur avons dit: Soyez vigilants, faites attention. C'était le sens de la
recommandation. Nous n'avons pas vu là un problème majeur; nous
avons cru devoir signaler cette question au ministre et recommander que ses
fonctionnaires soient plus vigilants, et M. le ministre nous répond
qu'il a pris des mesures.
M. Lazure: Alors, on va attendre le rapport de l'an prochain.
Le Président (M. Joly): M. le député de
Rimouski avait une question.
M. Lazure: Oui.
M. Tremblay (Rimouski): Bien, moi, je pense que l'observation de
la Commission au sujet des décisions qui sont rendues plutôt
favorables aux employeurs, c'est une observation faite par une commission qui
est responsable, mais j'espère que le critique de l'Opposition ne veut
pas mettre en doute la crédibilité et la valeur des jugements qui
sont rendus là. Ils sont rendus en fonction de la preuve qu'on a faite
devant eux, et je pense, moi... En tout cas, je ne voudrais pas remettre en
cause les assesseurs et, en même temps, les commissaires qui entendent la
preuve. Si c'est là votre propos, bien, il faudrait peut-être le
dire.
M. Lazure: Non, M. le Président, vous avez compris que ce
n'était pas du tout mon propos, que mon propos, c'était de voir
un peu les implications de la tendance qu'ont les fonctionnaires à
accepter la version du patron, et quelles étaient les implications de
ça pour les prestataires de l'aide sociale. C'est ça qui
était mes propos, et M. le ministre l'a très bien compris,
d'ailleurs.
M. Tremblay (Rimouski): Je ne l'avais pas compris de
même.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le député.
M. Lazure: Merci.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Rémillard. M.
Rémillard (Louis): Merci, M. le Président. Le
Président (M. Joly): II reste deux programmes.
M. Bourbeau: m. le président, le député n'a
pas réussi à semer la zizanie.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lazure: Ce n'était pas mon but du tout, M. le
Président; je voulais être éclairé.
M. Bourbeau: Alors, quel est le choix de l'Opposition pour la
prochaine victime, M. le Président?
Administration déléguée de
programmes en sécurité du revenu
Régie des rentes du Québec
M. Lazure: J'ai vu le président de la Régie des
rentes; il est non pas une victime mais un collègue de travail.
Le Président (M. Joly): Bonsoir, M. Legault. Il nous fait
plaisir à nouveau de vous accueillir un siège que vous
connaissez bien. Alors, nous appelons le programme 2, Administration
déléguée de programmes en sécurité du
revenu.
M. Bourbeau: M. le Président, on pourrait vous
présenter M. Claude Legault, qui est le président de la
Régie des rentes du Québec. Il est accompagné d'un
personnage au nom célèbre, M. Benoît Morin, qui...
Le Président (M. Joly): M. Morin.
M. Bourbeau: M. Morin, l'autre Benoît Morin. Alors, M. le
député de La Prairie, je vous les livre en pâture.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Joly): Alors, M. le député,
la parole est à vous.
Nouvelle structure administrative
M. Lazure: Oui, alors je salue le président et ses
collègues de la Régie. Peut-être que, en commençant,
le président pourrait nous faire un état de la situation sur la
nouvelle structure administrative qui a été mise en place il y a
un an, six mois, je ne sais pas.
M. Legault (Claude): Au cours de la présente année,
l'année financière qui se termine, nous avons modifié la
structure de la Régie afin d'accéder à ce qu'il est
convenu d'appeler une structure administrative à trois niveaux. Par
cette démarche, nous avons donc éliminé un niveau de
gestion, c'est-à-dire qu'il n'y a maintenant que trois niveaux de
gestion, soit la haute direction le président et ses
vice-présidents les directeurs, les chefs de service, et ensuite
les personnes qui sont directement en relation avec la clientèle. Dans
le but également de mieux faire sentir le but de cette démarche
qui est de rapprocher l'administration de la clientèle,
c'est-à-dire de sa vraie raison d'être, ce qui était
antérieurement la vice-présidence aux opérations est
devenue maintenant la vice-présidence aux relations avec la
clientèle.
Alors, en agissant ainsi, nous avons fait en sorte que le nombre de
cadres de la Régie a été modifié, passant de 77
à 54, pour un ratio qui, antérieurement, était de 1 cadre
sur 12 employés, et qui est passé à 1 sur 17, soit une
diminution du niveau d'encadrement de 30 %. Alors, donc, cette nouvelle
structure a eu pour effet d'amener une satisfaction beaucoup plus grande
à notre personnel. Celui qui est directement en relation avec les
clients se sent davantage appuyé en sachant qu'il est maître de
ses décisions sur le plan quotidien et qu'il n'y a plus cette
nécessité qui, selon moi, est dépassée dans
le temps de se sentir constamment surveillé par un patron qui est
juste présent pour vérifier vos actes quotidiens. Alors, nous
croyons que les employés savent effectuer leur travail et sont à
même, ainsi, de rendre de meilleurs services à la
clientèle.
M. Lazure: Bon. Je pense qu'il faut se réjouir, M. le
Président, d'une mesure qui est de nature à aider le service
à la clientèle et à alléger les structures
administratives.
Sur un autre sujet, le taux actuel, c'est 5,6 %?
M. Legault: Le taux est de 5 % actuellement.
M. Lazure: 5 %.
M. Legault: Le taux de cotisation?
M. Lazure: Oui.
M. Legault: C'est bien ça, oui.
M. Lazure: 5 %. Et l'augmentation est toujours 0,2 %?
M. Legault: 0,2 % pour encore trois années à venir;
5 %, 5,2 % au 1er janvier prochain, 5,4 % et 5,6 %. et, après, un
nouveau taux devra être déterminé par l'assemblée
nationale. et, actuellement, nous sommes à terminer une
évaluation actuarielle du régime, qui sera déposée
au cours des mois à venir à l'assemblée nationale par le
ministre responsable de la régie.
Régimes complémentaires de retraite M. Lazure: Bon.
Les régimes complémentaires
de retraite. On a vu, dans L'actualité, le cas malheureux
des travailleurs du vêtement, il n'y a pas longtemps. J'ai eu l'occasion
de poser une question en Chambre au ministre responsable de la Régie. On
a appris, à ce moment-là, que la Régie venait de mettre en
tutelle, à toutes fins pratiques, ce fonds, cette caisse. Est-ce que le
président ou le ministre peuvent nous donner des renseignements de
dernière heure sur l'évolution de ce fonds, de cette caisse? (21
h 20)
M. Legault: II n'y a pas beaucoup d'évolution de
dernière heure, sinon que la personne qui a été
désignée, qui est la maison Price Waterhouse, a été
choisie par un appel d'offres pour agir à titre d'administrateur en lieu
et place du comité de retraite. Comme vous avez pu en prendre
connaissance par les journaux ainsi que par les réponses fournies
à vos questions en Chambre, le comité de retraite avait
délégué ses pouvoirs et ses responsabilités
à une personne, et cette délégation était
complète. Alors, la personne à qui ça avait
été délégué était un M. Hotte, et
c'est au mois de novembre que nous avons appris la situation du régime.
Et au mois de décembre, soit quelques jours à peine après,
en prenant contact avec cet individu, immédiatement, cette
personne-là a remis sa démission et a été
remplacée par une autre personne. Cette deuxième personne, qui
était responsable de l'administration, devant, probablement je ne
sais trop mais devant l'ampleur de la tâche, probablement, n'a pas
accepté de continuer le mandat, et c'est une troisième personne
qui est venue pour administrer, au jour le jour, cette caisse. Devant cette
situation, nous avions déjà saisi la Sûreté du
Québec d'une demande de faire enquête à l'intérieur
de cette caisse de retraite. Cette enquête est toujours en cours, et nous
n'avons aucun développement pour l'instant. Et nous croyons qu'avec la
nouvelle personne qui a été désignée à la
Sûreté du Québec, nous l'espérons, pourra progresser
rapidement dans son enquête.
Donc, c'était toujours le comité de retraite qui avait
cette responsabilité, mais constatant, à la lecture des documents
qu'on avait en main, que les documents contenaient non pas des erreurs mais des
faussetés, des mensonges, nous avons cru que nous étions dans
notre droit d'imposer une tutelle, une administration provisoire. Le principal
point était qu'on nous mentionnait, au cours des deux dernières
années, dans la déclaration annuelle que doit nous faire parvenir
l'administration d'un régime, que la politique de placement avait
été revue en nous indiquant les dates de la dernière
révision. Donc, l'année suivante, 1991, on nous fournissait
encore des informations semblables, nous indiquant à quelle date on
avait, encore une fois, revu cette politique-là. La première
question qu'on a demandée au nouvel administrateur, avant celui qui
exerce la tutelle, a été de nous faire parvenir cette politique
de placement. Et, à la surprise de tous, on a constaté qu'il n'y
avait pas de politique de placement. Alors, sachant qu'il n'y avait aucune
politique de placement, la décision a été rapidement
prise: entrer à l'intérieur et se saisir de l'administration.
M. Lazure: Sur les 4000 régimes complémentaires,
est-ce qu'il y en a d'autres qui sont en tutelle actuellement?
M. Legault: En tutelle, oui. Ily en a, je crois, 13 actuellement.
Les tutelles dans les régimes de retraite, j'en ai
régulièrement, mais il s'agit toujours de compagnies qui ont fait
faillite. Et lorsqu'on exerce ces pouvoirs de tutelle, c'est bien pour liquider
le régime, donc faire l'acquisition des rentes auprès d'une
compagnie d'assurances. Donc, il s'agit de démarches administratives que
je qualifierais de normales. Alors, des situations alarmantes qui nous
amènent à agir par le biais de la tutelle, il n'y en a pas
actuellement, et je n'ai pas eu connaissance qu'il y en ait eu depuis que je
suis là.
M. Lazure: C'est vraiment un précédent? M.
Legault: Ah! C'est un précédent.
M. Lazure: Bon, sur l'ensemble des régimes
complémentaires, c'est évident que la Régie ne peut pas
exercer une surveillance, là, étroite sur chacun des 4000
régimes, mais est-ce que vous pouvez nous expliquer un peu la sorte de
surveillance qui se fait? Est-ce que c'est par échantillonnage? Est-ce
que c'est par rotation des entreprises, un programme de vérification
sommaire, à chaque année, pour un certain nombre de
régimes? Qu'est-ce que vous faites, comme exercice de surveillance?
M. Legault: D'abord et avant tout, le principal but de la
surveillance des régimes complémentaires, c'est de surveiller la
capitalisation et la solvabilité des régimes, donc de s'assurer
que les sommes d'argent nécessaires sont versées, d'année
en année; également de s'assurer que les sommes d'argent qui
doivent être versées le sont régulièrement. Donc, en
recevant les déclarations annuelles, on est à même de
constater que s'il y a eu une grande variation dans les cotisations qui
devaient entrer, ordinairement et c'est ce qui est arrivé avec le
régime présentement il s'agit d'une situation où il
y a une terminaison partielle. Il y a eu vente d'une partie d'entreprise ou il
y a eu mise à pied massive, et c'est comme ça qu'on en est
informé. et si on remonte aussi loin qu'à la naissance de la loi
sur les régimes supplémentaires de rentes, dans le discours en
deuxième lecture de m. jean lesage, il était dit qu'il fallait
s'assurer que l'argent était dorénavant dans les régimes
de retraite, alors qu'antérieurement les régimes étaient
capitalisés, c'est-à-dire que l'argent était
accumulé à environ 30 %, 35 %. donc, tout ça a pris des
proportions, a franchi des étapes et, aujourd'hui, on est dans des
situations confortables où plusieurs régimes sont même en
situation d'excédent. donc, il y a une garantie. le premier but est donc
celui-là.
Deuxièmement, avec les modifications apportées par la loi
en 1990 en même temps que les modifications aux règles fiscales
édictées par Ottawa, tous les régimes
ont dû nous soumettre de nouveaux textes pour que l'on puisse
enregistrer les modifications. Donc, par ce fait-là, on était
à même d'avoir tous les renseignements et de faire une analyse,
sur papier, vous me direz, mais une analyse de la situation des
régimes.
Il y a également l'analyse qui est faite de l'évaluation
actuarielle, laquelle est signée par un professionnel, un actuaire
«fellow», et également par la mise sur pied des
comités de retraite. Depuis 1990, ce n'est plus l'employeur qui
administre les caisses de retraite mais bien un comité de retraite sur
lequel siègent des employés et des retraités. Donc, c'est
eux qui sont saisis de l'administration.
Alors, je pense que ceci devrait être une garantie. Si chacun a
déjà un REER, par exemple, bien, on peut être assuré
qu'il va faire attention à son bien puisqu'il est le premier
intéressé. Donc, par le fait même, il y a
déjà une garantie additionnelle qui s'exerce par le comité
de retraite et par l'obligation de rendre compte lors de l'assemblée
annuelle. Mais, bien entendu, comme dans le cas qui nous occupe, si quelqu'un
ne respecte pas la loi et vous fournit des rapports truqués, eh bien, il
est très difficile, tant qu'il n'arrive pas un événement
déclencheur, de savoir la situation exacte du régime. Et je vous
dirai même que si, par hasard, on était allé sur place,
sauf pour ce qui est de la politique de placement qu'on n'aurait pas pu trouver
dans les filières, pour ce qui est des placements comme tels, si on me
dit qu'il y a un placement sur une valeur immobilière, un prêt
hypothécaire, même si je le vois dans les livres, il faudrait donc
que je fasse faire une évaluation par une firme de professionnels afin
de savoir si la valeur inscrite aux livres, sur laquelle on a
prêté, est bien celle qui correspond à la valeur de
l'immeuble. (21 h 30)
Donc, ça veut dire qu'il faudrait aller administrer à la
place des comités de retraite, ce qui est, à toutes fins
pratiques, impossible.
Le Président (M. Joly): M. le député, s'il
vous plaît.
M. Lazure: Oui. Quelles sont les chances que ces
travailleurs-là... C'est 1200 personnes à peu près?
M. Legault: À peu près, oui.
M. Lazure: Quelles sont les chances qu'elles reçoivent une
compensation quelconque? Est-ce qu'il y a un mécanisme de prévu?
Parce qu'elles ont perdu, là, à toutes fins pratiques, leur fonds
de pension, ces personnes-là.
M. Legault: À toutes fins pratiques, on peut dire qu'elles
ont perdu... Bien que ce soit aussi dramatique, il est nécessaire de
savoir que c'était un régime non contributif; donc, les sommes
d'argent qui étaient déposées étaient des sommes
déposées par l'employeur. Alors, ça ne veut pas dire pour
autant qu'ils n'y avaient pas droit et qu'ils ne devaient pas y compter. Si on
prend la valeur de l'actif, de la présumée valeur de l'actif et
qu'on la divise par le nombre de participants, ça nous donne une image
qui est trompeuse parce qu'on a l'impression qu'il y a des montants assez
importants. Mais les montants importants étaient pour un petit groupe
d'individus, au nombre de peut-être entre 10 et 20. Tous les autres, il
s'agit de petits, petits montants; on n'a pas encore reçu la situation
de chacun, mais on parlera probablement de valeurs alentour de 2000 $.
M. Lazure: II y a un mécanisme de prévu pour les
compenser dans une telle situation?
M. Legault: Le seul mécanisme qui aurait pu être
prévu, et ce n'est pas le cas dans ce régime-là, c'est si
la caisse de retraite avait souscrit une assurance-responsabilité, comme
plusieurs caisses de retraite ont déjà; dans le cas
présent, ce n'est pas le cas.
M. Lazure: Est-ce que ça serait une bonne idée que
la Régie des rentes exige une telle assurance de la part des
régimes complémentaires de retraite?
M. Legault: D'inciter, c'est déjà fait. Mais si on
se rend compte que... D'ailleurs, ça va nous éveiller, cette
situation-là, dramatique, ça va quand même nous
éveiller à essayer de trouver des meilleures solutions que celles
que l'on croyait suffisantes; dans la recherche de solutions, il n'y en a
aucune qui est laissée de côté. On devra regarder tout
l'éventail possible de moyens.
M. Lazure: Parce que le fait de dire que c'était une
caisse de retraite qui était alimentée seulement par l'employeur,
ça ne minimise pas...
M. Legault: Ah non, absolument pas.
M. Lazure: ...ça ne diminue pas le dommage qui est fait.
Même si c'était juste l'employeur, comme ça arrive dans
certains régimes de retraite complémentaires, qui cotisait, cette
part de l'employeur, ils en tenaient compte, les employés en tenaient
compte au moment des négociations, des ententes salariales.
M. Legault: Je suis tout à fait d'accord avec vous que
ça ne change rien, mais je voulais quand même vous le
préciser pour votre propre information.
Le Président (M. Joly): Excusez, M. le
député. Est-ce que je peux me permettre, dans la même
veine, moi aussi de poser une question qui, à mon sens, est assez
importante? Vous avez souligné que c'était non contributif. Si
c'eut été contributif, est-ce que, à ce moment-là,
le droit de regard sur les résultats aurait été
différent? Vous avez quand même soulevé une
parenthèse en faisant la référence à quelqu'un qui
détient un REER, en soulevant que, nécessairement, on ne peut pas
être plus intéressé que l'intéressé
lui-même. Je pense
que c'est important à souligner. Mais le fait que c'est non
contributif, est-ce que ça crée des distances pour la
vérification? Ça, c'est ma première question.
Deuxième question. Si on est pour imposer à tous ceux qui
détiennent la gestion, disons, d'un tel portefeuille,
l'assurance-responsabilité comme telle, à ce moment-là,
j'imagine que la compagnie qui va prendre la responsabilité va exiger un
bilan des activités et de regarder où sont placées les
sommes d'argent et puis, à ce moment-là, on ira vérifier
l'authenticité des résultats. Alors, à ce
moment-là, si simplement le fait d'exiger une garantie d'assurance donne
la quiétude et la tranquillité d'esprit à tout le monde,
je pense que c'est un «must». C'est, à mon sens, un besoin
absolu que de s'en aller dans cette direction-là et que de l'exiger.
Parce que si petits soient les montants, le principe est le même et,
à mon sens, on ne peut pas fermer les yeux sur un tel résultat
qui amène à faire en sorte qu'on brime les ambitions, les espoirs
et le futur d'une quantité de gens qui ont misé sur
ça.
C'est sûr que ça ne semble pas beaucoup, quand on parle de
10 à 20 personnes qui détenaient le gros du porte-feuille et que
la balance détenait un petit montant, mais le résultat est le
même et on traite avec les mêmes individus, avec des aspirations
qui sont communes et que, à mon sens, nous n'avons pas le droit de
laisser aller, et ceci au nom du principe et de l'équité.
M. Legault: M. le Président, je répondrai à
votre première question que, non, ça ne changerait rien quant aux
méthodes de vérification.
Avant de passer au deuxième volet, vous dites: Est-ce que le fait
qu'ils ne contribuaient pas les éloignait de la gestion, en quelque
sorte, et est-ce qu'ils auraient été plus près s'ils
avaient participé par une cotisation directe? Je vous dirai qu'ils ne
pouvaient pas être plus près de la gestion que dans ce
régime-là puisque, contrairement à tout ce que l'on
connaît ailleurs, à quelques exceptions près, ce
régime était administré par un comité de retraite
exclusivement composé de travailleurs. Il n'y avait aucun employeur qui
était au comité de retraite. Les gens provenaient de la
Fédération nationale des travailleurs de l'industrie du
vêtement et c'est eux qui désignaient l'administrateur qui avait
l'administration déléguée, et c'est eux également
qui désignaient les autres représentants syndicaux
représentant les gens de différentes régions.
Alors, ça, c'est un grand malheur de voir un cas où il
s'agit des travailleurs eux-mêmes et qui se sont fait organiser, en
quelque sorte je ne vois pas de meilleur mot que ça par
leurs pairs.
Le Président (M. Joly): Juste en réaction à
ce que vous dites, M. le président. Si c'était un comité
de retraite, j'imagine qu'on ne peut pas imaginer qu'il y avait de la haute
compétence sur ce comité de retraite. À ce
moment-là, eux-mêmes, à moins qu'il y ait eu des
connivences en quelque part pour se fermer les yeux sur certaines choses,
ça a dû faire l'affaire peut-être de certains. J'aimerais
savoir, moi, quel est le pourcentage, en fait, du rendement ça pourrait
coûter d'avoir une assurance-responsabilité comme telle, et est-ce
que c'est préférable de sacrifier 0,05 % ou 1 % en ayant la
garantie que l'argent sera fidèle au rendez-vous et que ça
rencontrera les aspirations de tout le monde?
M. Legault: J'y arrive, M. le Président. Je pense que
ça serait très audacieux de ma part de vouloir, surtout à
vous, expliquer comment ça pourrait fonctionner, le domaine de
l'assurance. Mais je vous dirai ceci. Actuellement, à la demande du
ministre, on est en train de regarder combien ça coûterait,
comment on pourrait le faire, avec quelles structures d'assurances, parce qu'il
y a toujours l'assurance qu'on appelle, entre nous, le «bond», et,
en plus, l'assurance pour couvrir les erreurs de gestion. Alors, pour s'assurer
de faire les choses comme il faut, il faudrait donc que le tout soit pris
auprès d'une même compagnie pour ne pas qu'ils se disputent entre
eux «c'est de la fraude», «non, c'est de la mauvaise
gestion», et qu'on se retrouve toujours assis entre deux chaises.
Actuellement, ce dossier-là est en train de passer à la
recherche pour trouver les meilleures façons législatives de
donner les pouvoirs au gouvernement pour être capable d'établir,
par règlement, le fonctionnement exact, et tout ça est
actuellement sur la planche à dessin.
Le Président (M. Joly): Merci beaucoup. M. le
député de La Prairie, s'il vous plaît.
M. Bourbeau: M. le Président, est-ce que je pourrais
ajouter un mot?
Le Président (M. Joly): Oui, M. le ministre.
M. Bourbeau: Avec la collaboration de l'Opposition officielle,
j'ai l'intention de proposer un projet de loi dans les prochains jours, les
prochaines semaines, pour tenter d'apporter des correctifs à ce
problème-là. J'espère qu'on pourra déposer le
projet de loi avant le 15 mai. Sinon, je prends pour acquis que l'Opposition
officielle a l'air déjà de nous ouvrir la porte à une
collaboration. (21 h 40)
Implantation d'un nouveau régime
complémentaire
M. Lazure: Oui, si c'est de nature à protéger les
intérêts des travailleurs et des travailleuses; bien sûr,
bien sûr.
Un dernier point sur un autre sujet, M. le président, les
régimes supplémentaires simplifiés.
M. Legault: Oui.
M. Lazure: Le ministre a annoncé, en janvier dernier,
qu'il allait lancer un nouveau régime complémentaire qui pourrait
toucher au-delà de 1 000 000 de
salariés, et que ça pourrait entrer en vigueur au mois de
juillet. On nous avait dit qu'il y aurait consultations, où est-ce que
c'en est? Est-ce que les consultations sont terminées? Est-ce que
l'Opposition va être consultée?
M. Legault: Si vous me permettez de vous demander de retenir la
fin de votre question, je répondrai à la première partie,
laissant la deuxième au ministre.
Pour ce qui est de la consultation, j'ai mené des consultations,
à la demande du ministre, auprès des employeurs, auprès
des travailleurs, ainsi qu'auprès des institutions financières.
Après avoir fait le tour de ces trois grands groupes, nous avons
réuni tout ce monde-là alentour d'une même table afin
qu'ils puissent se parler en vis-à-vis et non pas que chacun parle
isolément dans son coin. Et ça, également, ça a
été fait, et on doit rencontrer ces gens encore le 29 de ce mois,
lors de la réunion du comité permanent d'adaptation de la
main-d'oeuvre. J'ai toujours de la misère avec celui-là.
M. Bourbeau: La Commission permanente.
M. Legault: La Commission permanente. C'est comme ça que
ça va mieux de l'appeler. On doit donc, encore là, aller faire le
dernier tour de piste. Moi, ce que j'ai eu comme mandat, la consultation que je
devais faire sera à toutes fins pratiques terminée, et je peux
simplement vous dire que c'est relativement bien accueilli. Bien sûr que
chacun des groupes a toujours des demandes particulières, mais
là, on tombe dans les détails. Pour ce qui est de l'intention du
ministre, elle est bien accueillie; tant les centrales syndicales que les
groupes d'employeurs, tout le monde se montre favorable à
l'idée.
Le Président (M. JoF*|: M. le député.
M. Lazure: Est-ce que les centrales syndicales ne vous ont pas
fait remarquer qu'il serait peut-être plus avantageux de réformer
en profondeur le régime public, le Régime de rentes du
Québec, de façon à améliorer substantiellement les
prestations les cotisations, les prestations, tout s'ensuit
plutôt que d'instaurer un nouveau régime?
M. Legault: Vous savez, je vous dirai que tout le monde avait des
suggestions à nous proposer au lieu et place du sujet que l'on voulait
débattre, tant les centrales syndicales que les employeurs, mais ne vous
surprenez pas, ce n'étaient pas les mêmes demandes. Les employeurs
disaient que c'est toute la Loi sur les régimes complémentaires
qui était de trop, alors que les institutions financières avaient
pour leur dire: Donnez-nous donc vos épargnes, on va s'en occuper; c'est
votre bien que l'on veut et on va l'avoir.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Legault: Donc, finalement, chacun avait sa petite demande,
mais quand on les obligeait à se centrer sur le sujet même, tout
le monde revenait d'accord, en disant: Mais, on aurait
préféré... Tout le monde aurait
préféré autre chose, mais, finalement, ils s'entendent
là-dessus, en disant que ça ne peut pas être mauvais, que
c'est mieux que... Alors, c'est la démarche et les résultats que
l'on obtient.
M. Lazure: C'est mieux que rien. C'est comme l'accord de
Charlottetown ça, c'est mieux que rien.
Le ministre peut-il nous dire s'il compte toujours implanter ça
en juillet?
M. Bourbeau: M. le Président, dans les meilleurs
délais possibles. Je crois que juillet, c'est toujours une date qui est
possible; ça peut être un peu serré là, disons,
parce qu'il faut promulguer des règlements, mais, enfin, disons vers la
fin de l'été, on devrait être en mesure de mettre en
vigueur le régime.
M. Lazure: Vous n'aurez pas besoin de modifications
législatives?
M. Bourbeau: Non.
M. Lazure: Par réglementation seulement. Alors, il y aura
un projet de règlement de prépublié?
M. Legault: Sûrement.
M. Bourbeau: Oui, oui, on va suivre la filière
normale.
M. Lazure: Bon. M. le Président, je pense que ça
complète les questions que j'avais pour la Régie des rentes.
Merci beaucoup.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Legaut; merci, M. Morin.
Au plaisir.
M. Legault: Merci, M. le député, M. le
Président.
Le Président (M. Joly): J'appelle maintenant le dernier
programme, le programme 8.
(Consultation)
Secteur main-d'oeuvre et emploi (suite)
Développement de l'emploi et intégration
au marché du travail
Le Président (M. Joly): Alors, le programme 8 est
appelé.
M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Bourbeau: M. le Président, vous me permettrez de vous
présenter, à ma droite, le président de la
Commission des normes du travail, M. Jean Rivard, qui est
accompagné de M. Aurélien D'Allaire, qui est le directeur
général du service à la clientèle de la Commission
des normes du travail.
Le Président (M. Joly): M. le député.
Commission des nonnes du travail
Orientations contenues dans le Plan stratégique
1993-1996
M. Lazure: Oui. Merci, M. le Président. Je salue le
président et ses collègues de travail. J'aimerais traiter de deux
ou trois sujets. Pour aborder le premier sujet, que j'appellerais
«orientation de la Commission», je me permettrais de citer des
extraits d'une lettre que j'ai reçue récemment.
C'est-à-dire que j'ai reçu copie d'une lettre qui avait
été adressée au ministre responsable. C'est une lettre en
date du 14 avril, signée par M. Michel Gagnon: «Orientation de la
Commission des normes du travail». Je suis sûr que le ministre a
fraîche à la mémoire cette communication-là.
Ça dit, en somme, pour les membres de la Commission: «Je
vous transmets, M. le ministre, copie d'un document que j'ai
déposé lors de la dernière séance du conseil
d'administration de la Commission des normes du travail. Ce document fait
état de mes préoccupations concernant l'orientation qu'entend se
donner la Commission dans ses relations avec les non-syndiqués.
«En tant que représentant des travailleuses et travailleurs non
syndiqués, je m'inquiète d'un tel revirement dans le mandat de la
Commission. À cet effet, je vous ferai parvenir dans les semaines qui
viennent un document plus exhaustif démontrant les effets
néfastes qu'aura cette orientation pour les
non-syndiqués.»
En bref, M. le Président, comme je comprends le document de M.
Gagnon, il prétend que la Commission des normes du travail a pris,
depuis quelque temps, une orientation un peu spéciale. Au lieu de se
voir comme étant principalement chargée d'un rôle de
surveillance et d'application de la loi auprès des travailleurs et des
travailleuses, il semble que la Commission se verrait plutôt
chargée d'amener des relations harmonieuses entre patrons et
employés. Bon, remarquez que les deux ne s'opposent pas l'un à
l'autre nécessairement, mais si je respecte l'esprit de la lettre de M.
Michel Gagnon, je respecte aussi l'inquiétude qu'il exprime, là.
Lui, il a l'air de dire que cette nouvelle préoccupation de la
Commission, pour se faire un peu le médiateur entre employeurs et
employés, ça peut se faire au détriment du premier mandat
que la loi lui donne, à la Commission, à savoir, l'article 5:
Surveiller la mise en oeuvre et l'application de la Loi sur les normes du
travail et de ses règlements. C'est ça qui est le mandat premier
de la Commission. (21 h 50)
M. le Président, je demanderais au ministre responsable, puisque
la lettre lui a été adressée... Je suis sûr que le
président de la Commission aura des remarques à faire
là-dessus, aussi.
M. Bourbeau: M. le Président, le député de
l'Opposition, le député de La Prairie, vient de faire lecture
d'une lettre de M. Michel Gagnon, qui est un membre du conseil d'administration
de la Commission des normes. J'ai répondu à M. Gagnon. Je peux
peut-être vous citer un extrait de la lettre que je lui ai fait parvenir;
donc, ça va vous donner un peu la teneur de ma réponse. Je lui ai
dit avoir pris connaissance avec intérêt de sa lettre du 14 avril
dernier, concernant l'orientation de la Commission des normes du travail
énoncée dans son "Plan stratégique 1993-1996". «J'ai
immédiatement demandé au président-directeur
général, M. Jean Rivard, de me faire part de
l'interprétation donnée à la mission de la Commission et
à son "Plan stratégique 1993-1996", adopté lors de la
séance du 4 décembre 1992. «La Commission des normes du
travail, comme l'indique l'article 5 de sa loi constituante, se doit de
surveiller la mise en oeuvre et l'application de la Loi sur les normes du
travail, de ses règlements, et de la Loi sur la fête nationale. Le
"Plan stratégique 1993-1996" en fait mention à la page 1 en
reprenant intégralement ces notions de surveillance de l'application de
la loi. «Vous semblez, de plus, émettre des réserves quant
à certaines méthodes de travail qu'entend favoriser et
privilégier la Commission, soit la médiation et la conciliation
en cas de congédiement, d'une part, et la tentative de régler les
mésententes entre les employeurs et les salariés dans les
plaintes monétaires, d'autre part. «À l'occasion d'une
plainte pour congédiement pour pratique interdite, ou dans des cas sans
cause juste et suffisante, la Commission, conformément aux articles
123.3 et 125 de la Loi, entend favoriser des règlements à la
satisfaction des parties, tel que stipulé dans ces articles.»
Et je vous les cite: L'article 123.3 dit: «La Commission peut,
avec l'accord des parties, nommer une personne qui tente de régler la
plainte à la satisfaction des parties.»
L'article 125, quant à lui, dit: «Sur réception de
la plainte, la Commission peut, avec l'accord des parties, nommer une personne
qui tente de régler la plainte à la satisfaction des
intéressés. Les deuxième et troisième
alinéas de l'article 123.3 s'appliquent aux fins du présent
article.» «Le législateur a donc indiqué dans sa loi
qu'il accorde à la Commission des normes du travail le pouvoir de tenter
de régler ses conflits par le biais d'une entente à l'amiable. La
Commission pourrait être blâmée de ne pas exercer ce
pouvoir, et on m'indique que le "Plan stratégique 1993-1996" comporte
tous les éléments nécessaires à la mise en oeuvre
de ces dispositions. Il est important de savoir que l'application des
dispositions de la loi dont on vient de faire mention a permis, au cours des
deux dernières années, d'obtenir
des règlements à la satisfaction des parties, et
d'éviter ainsi l'audition, devant le commissaire du travail, de 50 % des
plaintes déposées à la Commission à cet effet.
«En ce qui concerne la tentative de la Commission de régler les
mésententes entre les employeurs et les salariés au sujet des
plaintes monétaires, c'est l'article 5 de la loi qui émet ce
principe.»
L'article 5: «La Commission surveille la mise en oeuvre et
l'application des normes du travail. Elle exerce en particulier les fonctions
suivantes: «5° tenter d'amener les employeurs et les salariés
à s'entendre quant à leurs mésententes relatives à
l'application de la présente loi et des règlements.»
«L'application de cette disposition législative permet, dans la
très grande majorité des plaintes, d'obtenir les sommes dues aux
salariés rapidement et sans confrontation. Il est donc primordial de
favoriser les méthodes de travail qui permettent d'atteindre un
degré d'efficacité très élevé afin de faire
bénéficier les salariés des avantages que leur
confère la Loi sur les nonnes du travail le plus rapidement possible.
Selon le président de la Commission, le "Plan stratégique" ne
doit, en aucun cas, être interprété dans le sens d'une
orientation pouvant permettre des règlements à rabais,
c'est-à-dire des règlements en-deçà des normes
édictées dans la loi. «Pour ma part, je crois qu'il s'agit
d'améliorations importantes dans les méthodes de travail de la
Commission, dont les avantages seront bénéfiques pour les
salariés et l'ensemble du monde du travail. Je considère d'une
grande importance que le souci du maintien des relations harmonieuses entre les
salariés et les employeurs fasse partie intégrante de la mission
et du "Plan stratégique" de la Commission des normes du
travail.»
Et je terminais, M. le Président, en disant: «Je tiens
à vous remercier de votre contribution à l'amélioration
des conditions des travailleurs et des travailleuses. Soyez assuré que
je me préoccupe grandement de leur bien-être et de la
qualité des services qu'ils reçoivent à la Commission des
normes du travail.»
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. M. le
député, s'il vous plaît.
M. Lazure: oui. j'ajouterais, pour continuer un peu dans la
même veine des préoccupations qu'exprimait m. gagnon, dans un
sondage fait par crop sur l'évaluation de la satisfaction des usagers
des services de la commission des normes du travail, à la page 59, on
dit que 61 % des salariés, ayant déposé à la
commission une plainte pour pratique interdite ou congédiement injuste,
ont senti que l'inspecteur de la commission tenait absolument à obtenir
une entente à l'amiable avec l'employeur: plaintes pour pratique
interdite, 68 %; plaintes pour congédiement injuste, 57 %. alors, 61 %
trouvaient que le représentant de la commission faisait beaucoup,
beaucoup de pression pour avoir absolument une entente à l'amiable,
alors que 20 % étaient d'avis contraire et 15 % ne savaient pas. dans
les faits, 59 % des répondants disent ne pas avoir obtenu une entente
à l'amiable avec leur employeur.
Et, finalement, toujours sur ce même sujet-là, j'ai devant
moi le «Plan stratégique 1993-1996» de la Commission des
normes du travail, document du 2 décembre 1992, à la page 7. Et
ça c'est un document du président de la Commission, je
suppose...
M. Rivard (Jean G.): U a été modifié depuis,
à quelques reprises, mais pas de façon substantielle.
Incidence des déficits anticipés
M. Lazure: Bon. Les paragraphes pertinents sont les suivants: La
Commission s'est vue accroître son champ d'action depuis quelques
années. D'une part, la portée de la loi a été
élargie pour y inclure, notamment, les pratiques interdites, les
congés parentaux et la représentation obligatoire des
salariés devant le commissaire du travail. D'autre part, la
clientèle potentielle s'est accrue, surtout par l'assujettissement de
l'État et de ses agents. «Par ailleurs, la Commission a de plus en
plus de difficulté à faire face à ses obligations
financières causées par le plafonnement du taux de
prélèvement. Ainsi, les déficits anticipés selon le
taux de prélèvement sont de 6 900 000$ en 1992-1993, 6 200 000$
en 1993-1994 et 6 100 000 $ en 1994-1995.»
Alors, ça débouche sur un autre problème, la
situation financière. Juste un petit moment!
(Consultation)
M. Lazure: Ces problèmes de financement qui sont
exposés ici, à la page 7 du document de la Commission je
le pose sous forme de question est-ce que ça peut amener la
Commission à devoir réduire le nombre de ses enquêteurs,
d'une part? Je pense que c'est le cas, le nombre des enquêteurs a
été diminué. Et, d'autre part, en révisant le
nombre des enquêteurs, à miser surtout sur cette fonction qui, aux
yeux des travailleurs, apparaît un peu comme nouvelle dans l'accent qui
est mis sur cette fonction de médiation.
Autrement dit, M. le Président, dans la mesure où la
Commission, à cause de difficultés financières, se voit
obligée d'avoir moins de monde pour enquêter sur, disons, des
allégations des travailleurs à l'égard des employeurs,
dans la même mesure, est-ce qu'il est possible que la Commission
décide d'orienter son action vers cette fonction de médiation
plutôt qu'une fonction d'enquête?
M. Rivard (Jean G.): Si vous me permettez, d'abord réponse
à votre question au sujet du sondage. Vous indiquez, à la page 59
du sondage, que 61 % des salariés qui avaient déposé des
plaintes en 122 et en 124 ont senti que l'inspecteur tenait absolument à
obtenir une enquête. Si on va à la page 61... (22 heures)
M. Bourbeau: Pas une enquête, une entente.
M. Rivard (Jean G.): obtenir une entente, je m'excuse. à
la page suivante, on voit que 93 % des salariés qui ont obtenu,
justement, une entente estiment que le rôle joué par l'inspecteur
enquêteur a été très ou assez important dans la
conclusion de cette entente.
Rôle de la Commission
Mais si vous me permettez, M. le Président, j'aimerais d'abord
revenir un peu en arrière sur le rôle de la Commission. La CNT, la
Commission des normes du travail, traite deux types de plaintes en vertu de la
loi. D'abord, il y a les plaintes dites pécuniaires, c'est environ 23
000 plaintes de ce type que nous recevons par année, et c'est dans ce
rôle, c'est dans ce type de plaintes que la Commission,
véritablement, fait enquête, joiie son rôle
d'enquêteur. 74% environ des 23 000 plaintes de type pécuniaire
sont réglées avant la poursuite et 26 % sont
déférées pour poursuite devant le Commissaire du
travail.
La Commission a aussi un autre rôle qui lui a été
donné par le législateur en 1991, qui est un rôle de
médiateur, c'est dans les cas de pratiques interdites et de
congédiement sans cause juste et suffisante, donc l'article 124.
Là, véritablement, la Commission doit jouer un rôle de
médiateur. La Commission ne fait pas enquête dans ces
causes-là, ce n'est pas son mandat. Il s'agit des 6000 plaintes environ
qui ont été déposées l'an dernier, en 122 et 124,
pour pratiques interdites et pour congédiement sans juste cause. La
plainte, dans ces deux cas, appartient au Commissaire général du
travail, et c'est le mandat de la Commission vous l'avez à
l'article 123 le mandat et l'obligation de la Commission d'offrir ses
services de médiation et de faire de la médiation dans tous ces
cas-là puisque, la jurisprudence le reconnaît maintenant, c'est
l'article 123.3: «La Commission peut, avec l'accord des parties, nommer
une personne qui tente de régler la plainte à la satisfaction des
parties.»
Les légistes de la Commission nous indiquent que le
«peut», dans ce cas-ci, doit s'interpréter
«doit», et la jurisprudence est venue confirmer cette obligation
qu'a la Commission d'offrir ses services de médiateur puisque, sans
ça, la plainte pourrait tout simplement être rejetée
lorsqu'elle aboutit devant le Commissaire général du travail. La
jurisprudence est claire à ce sujet-là. Donc, dans ces
cas-là, donc les cas de 122 et 124, vous me permettrez de les appeler
comme ça, la CNT ne fait pas enquête, la CNT offre ses services de
médiation aux parties et le mandat du médiateur est celui que les
parties lui donnent. Il peut, avec l'accord des parties, nommer une personne
qui tente de régler la plainte à la satisfaction des parties.
Nous n'imposons donc pas de règlements; le rôle du
médiateur est celui d'une personne neutre qui est soumis à la
confidentialité et qui ne peut agir à aucun autre titre dans le
même dossier. Il ne fait pas enquête dans ces cas-là.
Vous aviez une autre question qui traitait des conséquences
financières. Voulez-vous que je vous réponde à ça
immédiatement ou voulez-vous plutôt...
M. Lazure: Oui, si vous voulez.
Incidence des déficits anticipés
(suite)
M. Rivard (Jean G.): Bon. Vous avez, en citant la page 7 du
«Plan stragégique», fait part des conséquences ou des
difficultés financières de la Commission. Je suis entré en
fonction depuis novembre 1992. Depuis ce moment-là, nous avons
considérablement réduit les dépenses, environ 10 %, par
rapport au budget directeur de 1992-1993 et compte tenu de l'inflation. Nous
avons aussi, conformément aux règles édictées par
le Conseil du trésor, procédé à des
réductions de personnel. Oui, il y a eu des réductions du nombre
d'inspecteurs enquêteurs; cependant, le nombre précis
d'inspecteurs enquêteurs qui ont été, si vous voulez, mis
à pied correspondait au nombre d'inspecteurs enquêteurs qui, en
1991, avaient été prêtés ou nommés ou
faisaient partie d'un projet spécial autorisé par le Conseil du
trésor à la Commission des normes du travail pour faire face
à une demande de services subite. Les amendements à la loi et la
publicité qui en avait été faite avaient fait passer les
plaintes à la Commission des normes du travail d'environ 22 000 à
30 000 tout d'un coup. Donc, le Conseil du trésor avait autorisé
la création de 25 postes d'occasionnels environ pour faire face à
cette demande subite.
Et ce que je peux vous indiquer, c'est que l'ensemble des autres
coupures qui ont été effectuées, ont été
effectuées dans les services administratifs à la Commission et
dans les services de support un peu à travers tout le réseau,
mais le nombre d'inspecteurs enquêteurs permanents réguliers, lui,
a augmenté.
Effets des orientations sur les travailleurs non
syndiqués
M. Lazure: Bon. Toujours sur cette question-là, dans le
même document, décembre 1992, le «Plan
stratégique», à la page 8, l'avant-dernier paragraphe en
bas. On dit: Le développement et le maintien de relations harmonieuses
entre employeurs et employés sont donc le rôle ultime de la
commission. «Sont donc le rôle ultime de la commission.» La
conciliation et la médiation des litiges, tout comme la concertation des
milieux concernés sont des interventions à
privilégier.
M. le Président, c'est assez sérieux, au point où
ça inquiète les travailleurs non syndiqués. Il s'agit des
travailleurs les plus précaires dans leur situation d'emploi, qui sont
le plus facilement victimes de décisions des employeurs, et la
thèse de M. Gagnon qui les représente, c'est à l'effet que
la commission, en s'alignant principalement vers cette fonction-là, se
trouve à négliger le mandat principal que la loi lui donne. Et
là, je m'adresse au ministre. Est-ce que le ministre ne considère
pas que le mandat principal de la Commission c'est, d'abord et avant tout, de
surveiller la mise en oeuvre et l'application de la loi?
Je dirais même que dans l'esprit de cette loi, qui a
été adoptée, je pense, en 1980 ou en 1981, dans son
esprit, c'était une loi qui devait, d'abord et avant tout,
protéger ces travailleurs non syndiqués. Et dans ce
sens-là, je pense que les travailleurs ont raison de s'inquiéter,
parce que si la Commission... Parce qu'elle met ça dans le contexte de
la globalisation des entreprises québécoises. Je pense
qu'à vouloir s'internationaliser on peut perdre de vue le mandat premier
que la loi lui donnait, c'était de surveiller les intérêts
des travailleurs. Je pose la question au ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, on sait que la Loi sur les
normes du travail est entrée en vigueur en avril 1980 et qu'elle a
entraîné la constitution de la Commission des normes du travail
qui, elle, a été investie des pouvoirs et des mandats que lui
confère la loi.
Alors, selon l'article 5 de la loi, le député le sait
autant que moi, la Commission doit exercer certaines fonctions. Alors, il y en
a quelques-unes. On peut les prendre dans l'ordre, dans le désordre. Une
de ces fonctions-là, c'est de tenter d'amener les employeurs et les
salariés à s'entendre quant à leurs mésententes
relatives à l'application de la présente loi et des
règlements. C'est une des fonctions de la Commission.
Il y a aussi, bien sûr, informer, renseigner la population,
surveiller l'application des normes du travail, transmettre ses recommandations
au ministre, recevoir les plaintes des salariés, les indemniser dans la
mesure prévue par la loi, dédommager les salariés à
la suite de la faillite d'un employeur. Mais, M. le Président, une de
ses fonctions, c'est d'amener les employeurs et les salariés à
s'entendre quant à leurs mésententes, et je ne vois pas pourquoi
la Commission ne pourrait pas aller également dans ce
sens-là.
M. Lazure: Bon. Pour clore là-dessus, encore une fois,
moi, je répète...
M. Bourbeau: Est-ce que le président voudrait ajouter
quelque chose? Vous permettez?
M. Lazure: Oui, oui.
Le Président (M. Joly): Ça va. Allez, M. le
ministre.
M. Rivard: M. le Président, lorsqu'on parle de
développer des relations harmonieuses entre employeurs et
employés, il ne s'agit pas du tout d'une nouvelle apparition, il s'agit
de quelque chose qui est au «Plan stratégique» et au
défi, au deuxième défi de la Commission, donc très
clairement inscrit dans tous les mandats bien identifiés au conseil
d'administration et à la direction générale depuis 1988.
Il n'y a rien de nouveau là-dedans, il s'agit tout simplement d'une
continuité.
Par ailleurs, j'aimerais attirer l'attention de la commission sur la
mission de la Commission telle que nous l'avons, cette fois-ci,
condensée. Je parle de la page 10 du «Plan
stratégique». Puisque le député n'a pas le
même livre que moi, c'est le chapitre 4.0, «L'orientation
stratégique», où, au premier chapitre, au premier
paragraphe de la mission, nous disons que la mission de la Commission des
normes est d'assurer, en collaboration avec ses partenaires, la mise en oeuvre
d'un régime universel des conditions de travail au Québec, plus
particulièrement pour les employeurs et les employés sans
convention collective. (22 h 10)
Donc, nous reprenons là, encore une fois, les grands
thèmes de ce qui a toujours été le plan stratégique
depuis qu'il y en a un à la Commission.
M. Lazure: Oui. Juste le mot de la fin là-dessus, quant
à moi. Je pense qu'il faut bien se rappeler que l'inquiétude est
exprimée par M. Michel Gagnon, qui est membre du conseil
d'administration de la Commission des normes du travail, qui est une personne
qui représente l'ensemble des travailleurs et des travailleuses non
syndiqués, personne qui a beaucoup de crédibilité, et je
pense qu'il faut que le ministre s'arrête et prenne très au
sérieux cette inquiétude-là.
On ne dit pas, nous, de ce côté-ci, que la Commission ne
doit pas jouer un rôle de médiateur. Tant mieux si elle le fait
avec succès, mais on lui dit que son rôle primordial, c'est de
voir au respect de la loi et des règlements.
Bureaux de louage de main-d'oeuvre
Sur un autre sujet, M. le Président, et le dernier quant à
moi: les agences de placement, les agences de louage, les bureaux...
Techniquement, ce sont des bureaux de louage de main-d'oeuvre. Il y a eu une
correspondance récemment et des rencontres entre un M. Cousin, qui est
vice-président au Syndicat des travailleurs chez Zellers à
Montréal, et des représentants du ministère de la
Main-d'oeuvre.
En deux mots, il semble que par le biais des bureaux de louage de
main-d'oeuvre, les travailleurs sont moins protégés que lorsqu'il
y a un seul employeur bien identifié. Il y a une confusion actuellement,
il semble, entre la responsabilité du bureau de louage et celle de
l'employeur immédiat. Et ça touche notamment l'article 41,
l'application de cet article-là sur les personnes qui sont
salariées à temps partiel au centre de distribution de Zellers,
à Montréal.
Il semblerait, selon les fonctionnaires du ministère de la
Main-d'oeuvre, qu'il y aurait lieu d'amender l'article 41.1 en
spécifiant dans le libellé de cet article que les personnes
salariées provenant des bureaux de louage soient réputées
être des salariés de l'entreprise cliente. Je pense que le
ministre me suit bien, est au courant, et le président aussi. Alors, je
voudrais savoir du ministre de la Main-d'oeuvre où il en est dans ses
réflexions et qu'est-ce qu'il entend faire pour corriger cette
situation.
Le Président (M. Joly): M. le ministre, s'il vous
plaît.
M. Bourbeau: M. le Président, je ne reviendrai pas sur
toute la définition de ce que c'est qu'un bureau de louage, non plus sur
le cas de Zellers, qui a fait l'objet d'une certaine publicité. On se
souvient que la compagnie Zellers aurait tenté de contourner
l'application de l'article 41.1 de la loi en recourant aux services d'une
agence de louage de main-d'oeuvre. La compagnie aurait, semble-t-il,
congédié des personnes travaillant à temps partiel dont le
nombre pouvait dépasser 250 dans les périodes de surcroît
de travail.
Nous avons effectivement eu des rencontres au ministère avec les
représentants de cette compagnie. Il semble que ce
phénomène de bureaux de louage de main-d'oeuvre soit un
phénomène qui prend une certaine ampleur. Bien que les personnes
engagées dans ces bureaux occupent des emplois précaires, on doit
reconnaître que la présence des bureaux de louage de main-d'oeuvre
répond à un besoin du marché du travail, que plusieurs
entreprises semblent trouver avantage à recourir à leurs
services.
Dans un contexte de haut taux de chômage, où plusieurs
employeurs hésitent à embaucher du personnel sur une base
permanente, le recours aux bureaux de louage de main-d'oeuvre pourrait
présenter une solution à un besoin donné de main-d'oeuvre.
Selon toute vraisemblance, ces bureaux couvrent une diversité de
situations, ce qui rend d'autant plus délicate une intervention
législative ou encore réglementaire. Ainsi, on pourrait associer
aux activités de bureaux de louage de main-d'oeuvre celles qui sont
conduites par les agences offrant divers services: les firmes privées,
divers consultants.
La présence d'un bureau de louage de main-d'oeuvre agissant comme
intermédiaire entre une personne salariée et une entreprise
cliente introduit une relation d'emploi d'un type particulier. En effet, la
relation traditionnelle bilatérale employeur-personne salariée
est remplacée par une relation triangulaire où la personne
salariée reçoit son salaire du bureau de louage tout en
effectuant des tâches sous la supervision et le contrôle de
l'entreprise cliente. La détermination de l'identité de
l'employeur pose alors un problème.
M. le Président, la vraie question qui se pose est de savoir si
les lois et la réglementation actuelles tiennent compte
adéquatement de cette nouvelle réalité que constituent les
bureaux de louage de main-d'oeuvre. Pour bien répondre à cette
question, il faut connaître très bien ce que sont les bureaux de
louage de mâin-d'oeuvre, il faut connaître l'évolution de
leur chiffre d'affaires, par exemple, leurs pratiques, leur clientèle,
les conditions de travail de leur personnel et celles de leurs clients, ainsi
que la nature des besoins que ces bureaux-là veulent satisfaire.
Le ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du
revenu et de la Formation professionnelle a entrepris des travaux sur toutes
ces questions, nous sommes présentement à justement
étudier tout ce problème. Pour l'instant, je n'ai pas de
conclusion à offrir. Avant de pouvoir en discourir, il va falloir qu'on
ait fait le tour de la question, et c'est ce qu'on est en train de faire
présentement.
M. Lazure: Mais, en clair, est-ce que le ministre veut amender
l'article 41.1 ou pas, si, selon ses fonctionnaires, ça demande un
amendement?
M. Bourbeau: M. le Président, la question est
prématurée. Je ne peux pas dire si on va amender l'article, il
faut d'abord avoir une bonne connaissance du problème et de la solution
que constituent les bureaux de louage de main-d'oeuvre. Quand on aura fait
l'étude exhaustive de ce dossier-là, on sera en mesure de pouvoir
prendre une décision sur l'opportunité ou non d'amender
l'article. Je crois que, présentement, il serait dangereux pour moi de
m'avancer de quelque façon que ce soit, je préfère
attendre le résultat des études qui sont présentement en
cours. Un peu plus tard, je pourrai faire connaître mon point de vue sur
la question.
M. Lazure: Merci.
M. Joly: Merci, M. le député. Merci, M. le
ministre.
Adoption de l'ensemble des crédits
Nous allons maintenant procéder à la mise aux voix des
programmes. Est-ce que le programme 1, intitulé Gestion et services aux
clientèles, est adopté?
M. Lazure: Sur division.
Le Président (M. Joly): Sur division.
Est-ce que le programme 2, intitulé Administration
déléguée de programmes en sécurité du
revenu, est adopté?
M. Lazure: Sur division.
Le Président (M. Joly): Sur division.
Est-ce que le programme 3, intitulé Direction et gestion de la
Commission des affaires sociales, est adopté?
M. Lazure: Sur division.
Le Président (M. Joly): Sur division. Est-ce que le
programme 4, intitulé Sécurité du revenu, est
adopté?
M. Lazure: Sur division.
Le Président (M. Joly): Est-ce que le programme 5,
intitulé Allocations de maternité, est adopté?
M. Lazure: Sur division.
Le Président (M. Joly): Sur division.
Est-ce que le programme 6, intitulé Sécurité du
revenu des chasseurs et piégeurs cris, est adopté?
M. Lazure: Sur division.
Le Président (M. Joly): Sur division.
Est-ce que le programme 8, intitulé Développement de
l'emploi et intégration au marché du travail, est
adopté?
M. Lazure: Sur division.
Le Président (M. Joly): Sur division.
Est-ce que les crédits budgétaires du ministère de
la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation
professionnelle pour l'année financière 1993-1994 sont
adoptés?
M. Lazure: Sur division.
Le Président (M. Joly): Sur division. Est-ce qu'il y
aurait d'autres personnes qui aimeraient faire des remarques finales? M. le
député.
M. Lazure: Oui, M. le Président, deux secondes. Je veux
simplement remercier le ministre et son équipe, tous les fonctionnaires
du ministère et les représentants des différentes
commissions et régies pour leur collaboration à cet exercice.
Pour moi, c'était le premier dans mes nouvelles fonctions. Je promets au
ministre que, s'il se maintient en poste jusqu'au prochain exercice des
crédits, nous aurons une séance encore plus intense et
productive. Alors...
Une voix: Des promesses!
M. Lazure: Non, des engagements! Merci.
Mais je voudrais faire remarquer au ministre, cependant, qu'il y a eu un
peu de négligence, je ne sais pas si c'est de sa part ou de quelqu'un
d'autre, mais les réponses aux questions que l'Opposition avait
posées nous sont parvenues seulement vendredi après-midi,
c'est-à-dire trois jours avant la commission parlementaire.
M. Bourbeau: M. le Président, si les réponses vous
sont parvenues trois jours avant, ce n'était pas l'intention,
l'intention c'était de les faire parvenir avant; il y a peut-être
eu des petits problèmes de préparation. On me dit que le nombre
de questions, les demandes étaient tellement exhaustives que ça a
pris un temps très important à les préparer. De toute
façon, c'est quand même mieux que quand, moi, j'étais dans
l'Opposition, je les recevais la veille; alors, j'avais une soirée pour
me préparer.
M. Lazure: Vendredi soir, c'est à toutes fins pratiques la
veille.
M. Bourbeau: Oui, bon.
M. le Président, moi aussi, je tiens à remercier les
membres de la commission et tous ceux qui nous accompagnent pour leur
participation intensive aux travaux de cette commission. Je remercie le
député de La Prairie pour son travail important et, si le
député nous dit qu'il estime pouvoir faire mieux l'an prochain,
alors, je ne sais pas ce que ça va être, M. le Président,
parce que ça a déjà été facile cette fois-ci
et je dirais que, pour un coup d'essai, ça a été un coup
de maître de sa part. Alors, si je suis là l'an prochain,
ça me fera plaisir, M. le Président, de croiser de nouveau le fer
avec lui, toujours, bien sûr, avec la camaraderie et la
coopération qui nous caractérisent.
Et, finalement, vous-même, M. le Président, je tiens
à vous remercier de votre grande compréhension, collaboration
et...
M. Lazure: C'est un bon président. M. Bourbeau:
Oui, absolument.
Le Président (M. Joly): Merci beaucoup. Merci. Alors, la
commission ayant rempli son mandat, j'ajourne les travaux sine die.
(Fin de la séance à 22 h 20)