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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le mardi 23 avril 1991 - Vol. 31 N° 73

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits du ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle


Journal des débats

 

(Neuf heures quarante-quatre minutes)

Le Président (M. Joly): Bonjour tout le monde! Il me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue à cette commission. Je vous rappelle le mandat de la commission qui est, en fait, la commission des affaires sociales: elle est réunie afin d'étudier les crédits budgétaires du ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle pour l'année financière 1991-1992. Mme la secrétaire, est-ce que nous avons des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Marois (Taillon) sera remplacée par Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve).

Le Président (M. Joly): Alors, je vous rappelle que nous sommes réunis ensemble en commission pour une période de huit heures: trois heures ce matin, trois cet après-midi et deux ce soir et que, nécessairement, je vais respecter le temps de parole de chacun et toujours en dedans de notre règlement. Pour débuter, M. le ministre, vous avez sûrement des remarques préliminaires à nous faire, mais, avant de débuter, j'apprécierais savoir si vous avez quand même des copies de ces remarques préliminaires. Ça nous aide, si vous voulez, à suivre et à s'y intéresser davantage. Alors, si vous aviez ça, nous l'apprécierions au plus haut point comme membres de la commission. J'imagine que les membres de l'Opposition aussi apprécieraient recevoir cette...

M. Bourbeau: M. le Président, moi, je n'ai pas de copies. Peut-être qu'il y a des gens qui m'accompagnent qui en ont, mais je dois dire que c'est la première fois en 10 ans qu'on me demande de remettre d'avance la copie de mon allocution. Je présume que la députée de Maison-neuve, dans un cas semblable, ferait la même chose, et elle nous remettrait immédiatement copie des notes qu'elle entend...

Mme Harel: Oui, avec plaisir. Ce sont des données officielles du ministère.

M. Bourbeau: Ah bon!

Le Président (M. Joly): Alors, si possible, M. le ministre...

M. Bourbeau: Je n'en ai pas, M. le Président. Alors, je vous demanderais d'être attentif...

Le Président (M. Joly): Sûrement

M. Bourbeau: ...et je vais tenter de lire avec le plus...

Mme Harel: D'intérêt.

M. Bourbeau: ...de clarté possible.

Le Président (M. Joly): Comme toujours, d'ailleurs. Alors, à vous, M. le ministre, je vous reconnais.

Remarques préliminaires M. André Bourbeau

M. Bourbeau: M. le Président, nous abordons aujourd'hui, le 23 avril, avec une journée de retard sur l'anniversaire de naissance de la députée de Hochelaga-Maisonneuve à qui je souhaite, une journée en retard, un bon anniversaire de naissance et une bonne journée, d'ailleurs, dans la tranquillité... J'espère, M. le Président, qu'elle sera, aujourd'hui encore, dans l'euphorie de cet anniversaire et...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Joly): Mme la députée me confiait que la journée d'hier était le tremplin d'une merveilleuse année en avant d'elle.

M. Bourbeau: ...que nous en serons tous les bénéficiaires contents. Alors, nous entreprenons, dis-je, l'étude des crédits du ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle pour l'année 1991-1992. Cet exercice s'avère particulièrement important, compte tenu du contexte de l'économie qui commande d'accorder une importance toute particulière aux programmes d'aide à l'emploi de même qu'à l'adaptation et au perfectionnement de la main-d'oeuvre, tout en conservant aux plus démunis de notre société le soutien financier qui leur est si essentiel. Il faut donc maintenir et développer nos interventions en tenant compte d'une conjoncture budgétaire contraignante.

Pour notre part, nous souhaitons que les heures consacrées à l'étude des crédits budgétaires permettent une analyse rigoureuse des activités du ministère et des échanges construc-tifs sur les orientations et les plans d'action pour l'année à venir. Vous pouvez compter sur notre entière disponibilité en ce sens au cours de l'exercice qui débute. Les membres de la commission ont reçu du ministère une documentation détaillée préalablement à la présente séance d'étude. Vous me permettrez de résumer les

principaux éléments de cette revue des crédits, en insistant sur les aspects qui m'apparaissent d'intérêt majeur pour la bonne compréhension des orientations qu'elle annonce et des réalisations du ministère au cours de l'année écoulée. Je suis accompagné des principaux gestionnaires du ministère qui sont responsables de la planification et de la gestion quotidienne des activités et des budgets et qui m'aideront à répondre avec la plus grande précision aux questions des membres de la commission.

Le budget 1991-1992 pour le ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle prévoit des crédits de 3 419 000 000 $. Ce montant représente une augmentation apparente de 16,8 % par rapport aux crédits alloués pour 1990-1991, qui étaient de 2 927 000 000 $. En réalité, ces données ne tiennent pas compte de certains paiements anticipés aux programmes de la sécurité du revenu qui ont été versés à la fin de l'exercice 1989-1990. Si on ajoute à la dépense 1990-1991 ces paiements anticipés, on obtient, sur une base comparable réelle, une croissance du budget consenti, en 1991-1992, de l'ordre de 10,7 % par rapport à celui de l'an dernier.

Cette croissance est attribuable principalement à l'augmentation anticipée des clientèles à la sécurité du revenu. On prévoit, en effet, une clientèle moyenne de 371 000 ménages en 1991-1992, comparativement à 349 000 en 1990-1991. On prévoit aussi une augmentation correspondante des crédits aux programmes de développement de l'emploi et d'intégration au marché du travail afin de permettre à un plus grand nombre de clients de la sécurité du revenu de participer à des activités qui favorisent leur intégration au marché du travail. Ces nouveaux crédits permettront notamment de financer 10 800 nouveaux postes en 1991-1992 dans le cadre du programme de subventions salariales appelle PAIE.

Dans ces remarques d'introduction, je souhaite mettre en relief les réalisations de l'année 1990-1991 du ministère et présenter les principales activités pour l'année qui vient.

Le ministère a complété en 1990-1991 la mise en application intégrale de la Loi sur la sécurité du revenu, ce qui a mis fin à la période des droits acquis que nous avions reconnus pendant l'année de transition entre le régime d'aide sociale et celui de la sécurité du revenu. Malgré les appréhensions peut-être légitimes que d'aucuns n'ont pas manqué d'exploiter sur la place publique, cette opération s'est effectuée dans les délais prévus et dans le respect des besoins des clientèles visées. Je tiens à souligner l'excellent travail du personnel du ministère, particulièrement des personnes à l'emploi des Centres Travail-Québec qui. malgré les courtes échéances et les difficultés qu'engendre un tel changement, ont complété efficacement cette tâche.

On constate que la clientèle apte au travail représente 75 % de la clientèle totale de la sécurité du revenu, alors que les prestataires du programme Soutien financier représentent l'autre 25 %. Le classement systématique des clientèles en fonction de leur capacité d'occuper un emploi correspond donc sensiblement, statistiquement parlant, à l'évaluation que nous nous en faisions en vertu de l'ancienne loi do l'aide sociale

Sur une base comparable à celle de l'an dernier, l'augmentation des crédits affectés aux prestations de la clientèle apte est de 190 100 000 $, soit un accroissement de 10,9 %. Elle s'explique essentiellement par une hausse anticipée de la clientèle qui reflète la situation de l'emploi et par la mise en application de la nouvelle loi fédérale sur l'assurance-chômage. Même si on n'a pas encore ressenti tous les effets des nouvelles règles d'admissibilité à l'assurance-chômage, on sait qu'elles entraîneront une augmentation de la clientèle de la sécurité du revenu dans les prochains mois. Nous prévoyons qu'en moyenne, durant l'exercice financier 1991-1992, 277 700 ménages aptes au travail devraient avoir recours à la sécurité du revenu, soit une hausse de 3,6 % par rapport aux 268 000 ménages de 1990-1991. L'augmentation des crédits alloués reflète également des indexations des prestations, de 4,8 % et de 4,5 % au 1er janvier 1991 et 1992 respectivement, et l'introduction de la compensation pour la taxe de vente élargie du Québec.

Il m apparaît utile de comparer la réalité québécoise que je viens de décrire à l'évolution du nombre de ménages inscrits à l'aide sociale en Ontario pendant la même période. Selon le ministère des Services sociaux et communautaires de cette province, les 418 728 ménages inscrits à l'aide en décembre 1990 représentent une augmentation de 31 % par rapport aux 318 581 ménages recensés en décembre 1989. C'est donc dire, M. le Président, qu'en un an, de décembre 1989 à décembre 1990, la province d'Ontario a connu une augmentation de 100 000 ménages à l'aide sociale, c'est-à-dire 31 % d'augmentation. Au Québec, pendant la même période, on note une augmentation de 5,2 % du nombre de ménages prestataires de la sécurité du revenu, qui est passé de 333 000 à 351 000. Même si le ralentissement économique frappe beaucoup plus durement l'Ontario que le . Québec, il n'en demeure pas moins qu'une meilleure gestion de nos programmes, associée aux efforts déployés pour faciliter la réintégration en emploi de notre clientèle, explique sûrement qu'en cette période plus difficile au plan économique le Québec conserve malgré tout un taux d'augmentation relativement faible de la clientèle inscrite à la sécurité du revenu, ce dont il faut se réjouir.

La nouvelle politique de la sécurité du revenu a introduit de nouvelles mesures visant à tenir compte, de façon équitable, de la situation réelle des prestataires. J'avais affirmé à plusieurs reprises que le ministère serait très attentif aux

effets de l'application du régime de la sécurité du revenu et qu'il s'empresserait de corriger les effets inattendus des dispositions de la loi et du règlement. Il faut comprendre, M le Président, qu'à plusieurs égards nous administrons du droit nouveau et qu'en cette matière seule l'expérience nous permet d'en évaluer tous les raffinements. C'est ainsi qu'à la lumière de cette expérience et des recommandations qui lui ont été faites le gouvernement a décidé d'assouplir certains aspects de la loi et du règlement. Nous avons procédé, au cours de l'année écoulée, à certains ajustements qui tiennent mieux compte des besoins de notre clientèle. Je voudrais souligner notamment l'élargissement du barème de non-disponibilité pour inclure les personnes qui gardent à domicile des personnes à autonomie restreinte, l'introduction d'une prestation spéciale pour l'adulte hébergé qui participe à une mesure de développement de l'employabilité, la hausse de 1000 $ par année de possession de résidence de la valeur exclue de la résidence aux fins du calcul de la prestation pour les clients de Soutien financier, certains assouplissements concernant le partage du logement, en particulier dans le cas des familles d'accueil. Le gouvernement a également accepté de ne pas récupérer l'aide versée lorsqu'un client reçoit un héritage ou une compensation pour perte d'intégrité physique.

La volonté du ministère de mieux répondre aux besoins de ses clientèles s'est aussi traduite par la mise en place de la Commission consultative de la sécurité du revenu. Cette commission, présidée par le sous-ministre du ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle, rassemble les principaux organismes qui, à l'échelle de tout le Québec, défendent ou parlent au nom des prestataires de la sécurité du revenu. Cettte commission consultative se veut un lieu privilégié de dialogue entre le ministère et les principaux groupes qui véhiculent les besoins et les préoccupations de ceux qui dépendent de la sécurité du revenu pour assurer leur subsistance. Parallèlement à la création de cet organisme central, le ministère met aussi en place, sur le même modèle, une structure de consultation dans chaque région. Il espère ainsi être mieux à même d'identifier les besoins de ses clientèles. Il veut ainsi créer des lieux d'échanges productifs qui permettront une gestion plus efficace des programmes et des mesures du ministère et une amélioration sensible du service à la clientèle.

On ne doit pas oublier, toutefois - M. le Président, je m'adresse à vous, bien sûr - que l'un des objectifs majeurs de la Loi sur la sécurité du revenu est de mettre en place des mécanismes devant favoriser le retour au travail des prestataires de la sécurité du revenu capables d'occuper un emploi. Comme société, il nous faut rejeter cette idée un peu simpliste, que l'on semble avoir cultivée chez nous ces dernières années, voulant que, lorsqu'on incite un prestataire apte au travail à consentir des efforts pour réintégrer le marché de l'emploi, on le pénalise ou on l'oppresse. Il me semble que c'est tout le contraire. L'aide la plus précieuse que nous pouvons apporter aux prestataires de la sécurité du revenu aptes au travail, c'est celle qui leur permet de reconquérir leur autonomie le plus rapidement possible par la réinsertion à l'emploi. Il faut se garder d'une sorte de paternalisme de mauvais aloi à l'endroit des prestataires aptes au travail. Ces personnes méritent que l'on mette à leur disposition des mesures devant faciliter leur intégration au marché du travail. Un tel objectif requiert un effort concerté du gouvernement, de la société et du prestataire lui-même. C'est cette concertation que veulent encourager les programmes et les mesures de développement de l'employabilité du ministère.

Le ministère dispose maintenant d'études qui démontrent hors de tout doute l'efficacité de ces programmes. Nous avons effectué, depuis 1987, des études longitudinales qui nous permettent de suivre le cheminement des mêmes personnes. L'étude démontre que, sur un échantillon de 1228 personnes inscrites à la sécurité du revenu entre 1984 et 1986, 38 % d'entre elles dépendent toujours de la sécurité du revenu si elles n'ont pas participé à un programme favorisant leur intégration en emploi; mais, parmi les prestataires qui ont participé à Stages en milieu de travail, ce n'est pas 38 % qui sont encore à la sécurité du revenu en 1990, mais 20 % seulement, presque deux fois moins. (10 heures)

Ceux et celles qui ont participé à Travaux communautaires demeurent à 27 % à la sécurité du revenu; 24 % des participants à plus d'une mesure de développement de l'employabilité sont toujours à la sécurité du revenu en 1990. Comme on peut le constater, ces études démontrent que les prestataires de la sécurité du revenu qui prennent part à des activités visant à favoriser leur intégration en emploi quittent plus rapidement la sécurité du revenu et accèdent au marché du travail plus rapidement que les prestataires qui refusent de participer à ces activités préparatoires à l'emploi.

Voilà qui prouve abondamment, M. le Président, le bien-fondé des orientations fondamentales de la réforme de l'aide sociale que nous avons, conjointement, menée à terme. Forts de ces résultats, nous avons donc la ferme intention de poursuivre et d'intensifier nos démarches en vue de favoriser l'intégration en emploi des prestataires de la sécurité du revenu.

L'élément nouveau que je tiens à souligner pour l'exercice 1990-1991 tient à la mise en application du Programme d'aide à l'intégration en emploi, plus communément appelé le programme PAIE. Ce programme vise à favoriser l'accès à des emplois rémunérés aux taux du marché

pour des clients de la sécurité du revenu qui éprouvent des difficultés particulières à intégrer le marché du travail. Grâce au programme PAIE,9237 personnes ont pu accéder à un véritable emploi; 59, 1 % de ces emplois furent offerts par le secteur privé, 37, 6 % par des organismes communautaires et autres organismes à but non lucratif et 3, 3 % par le secteur municipal. Notons que, sur les 2374 participants qui ont complété à ce jour le programme, 1191 personnes étaient en emploi ou demeuraient en emploi à la fin de la période de subvention, soit 50, 2 %, ce qui m'apparaît être un indice convaincant du succès du programme.

La sécurité du revenu, bien qu'elle draine une bonne part des ressources du ministère, ne constitue qu'une des composantes de sa mission. L'autre volet, M. le Président, s'il justifie des budgets moins imposants, demeure crucial pour le développement social et économique du Québec. Je veux parler de l'adaptation et de la formation professionnelle de la main-d'oeuvre. Ces programmes, comme chacun sait, visent à favoriser l'adaptation, le développement et la formation professionnelle de la main-d'oeuvre afin de faciliter le développement et la préservation des emplois. Ils visent également à protéger la main-d'oeuvre contre certains effets des changements économiques et technologiques en facilitant le reclassement. La représentante de l'Opposition, la députée de Hochelaga-Maisonneuve, sera heureuse de constater que, pour l'exercice 1990-1991. les dépenses consacrées à la formation professionnelle et à l'adaptation de la main-d'oeuvre ont été de 168 800 000 $, soit une augmentation de 20 % par rapport aux 140 900 000 $ dépensés en 1989-1990, et cela, sans tenir compte des crédits d'impôt à la formation professionnelle. Pour l'année à venir, les crédits budgétaires accordés demeurent sensiblement les mêmes qu'en 1990-1991, soit 159 300 000 $. La réduction apparente par rapport au budget de l'an dernier est due au fait que le budget du programme d'aide aux travailleurs âgés n'est pas inclus dans le montant des crédits accordés. En effet, des discussions ont cours présentement au sein du gouvernement sur la reconduction des crédits alloués au programme PATA, et j'espère être en mesure d'annoncer bientôt, et même j'espère très bientôt, les modalités de reconduction de ce programme.

Un des éléments les plus significatifs de l'activité du ministère en matière de main-d'oeuvre au cours de l'année écoulée est sans contredit la mise en place de la Conférence permanente sur l'adaptation de la main-d'oeuvre, un organisme structuré de concertation entre le gouvernement du Québec, le patronat, les centrales syndicales et le secteur coopératif sur toutes les questions liées au développement et à l'adaptation de la main-d'oeuvre.

Créé en octobre 1990, cet organisme, dont j'assume la présidence, a pour objectif d'établir des consensus sur les orientations et les plans d'action en matière d'adaptation de la main-d'oeuvre et d'assurer la complémentarité des interventions gouvernementales en ce domaine avec celles des entreprises. Font partie de la Conférence permanente: les trois centrales syndicales - CSD, CSN et FTQ - qui représentent les travailleuses et travailleurs québécois; le Conseil du patronat, la Chambre de commerce du Québec et l'Association des manufacturiers du Québec, qui parlent au nom des entreprises du secteur privé; de même que la Confédération des caisses populaires et d'économie Desjardins, qui représente le secteur coopératif.

Même si la Conférence permanente sur l'adaptation de la main-d'oeuvre n'a pu se réunir qu'à trois occasions depuis sa création, elle a dégagé d'importants consensus, dont le plus important sans doute porte sur la nécessité pour le Québec de devenir le seul responsable des politiques d'adaptation de la main-d'oeuvre et de formation professionnelle sur son territoire, et de rapatrier en conséquence les budgets que le gouvernement fédéral alloue à ces programmes au Québec. Cette prise de position aura un impact significatif, j'en suis convaincu, sur les négociations à venir avec le gouvernement fédéral. Elle n'est pas étrangère non plus à l'entente que je viens de conclure avec la ministre, l'ex-ministre de l'Emploi et de l'Immigration du Canada, sur la reconduction des ententes fédérales-provinciales en matière de main-d'oeuvre. La poursuite des arrangements actuels, pour une période indéterminée, nous permet de préparer dans la sérénité les véritables négociations sur le rapatriement des pouvoirs et des budgets. Bien sûr, le rapatriement des responsabilités fédérales représente une orientation fondamentale qui nous permettra, lorsqu'elle sera complétée, de mettre enfin en place des programmes plus cohérents, plus complets et mieux adaptés à notre réalité et à nos besoins prioritaires. Mais, en attendant, la nécessité d'accroître la capacité d'adaptation de la main-d'oeuvre aux changements qui s'opèrent sur le marché du travail demeure et devient de plus en plus impérative. Il faut agir. La semaine dernière, j'ai saisi la Conférence permanente sur l'adaptation de la main-d'oeuvre d'un canevas de discussions sur une éventuelle politique d'ensemble en matière de main-d'oeuvre. Nous avons également convenu d'un échantillon de travail... D'un échéancier de travail, dis-je... M. le Président, vous me permettrez de reprendre ma phrase.

Le Président (M. Joly): Allez. M le ministre.

M. Bourbeau: Je disais donc, pour ceux qui m'écoutaient, que nous avons convenu d'un échéancier de travail pour les mois à venir, un échéancier que nous voulons élaborer. Cette politique également, nous voulons l'élaborer avec

le concours actif de nos partenaires et mettre en place dans le même esprit de concertation les instruments de cette politique d'adaptation de la main-d'oeuvre et d'harmonisation du marché du travail. En 1990-1991, d'importantes activités d'adaptation et de formation professionnelle ont été réalisées, et 204 205 personnes se sont prévalues de nos programmes. Nous avons l'intention de poursuivre ces activités. Nous sollicitons également une Implication accrue des entreprises dans la formation de leur personnel et dans l'identification et l'évaluation des compétences de la main-d'oeuvre. Ce qui permet d'appliquer aux interventions du ministère d'importants effets multiplicateurs.

Dans cette perspective d'encourager les entreprises à investir dans la formation de leur main-d'oeuvre, l'année 1990-1991 a aussi vu la mise en application du crédit d'impôt à la formation. Le crédit d'impôt est entré en vigueur le 27 avril 1990 pour les activités de formation données par les établissements de formation reconnus, et le 1er septembre 1990 pour les activités d'élaboration de plans de développement de ressources humaines et pour les activités de formation dispensées par les firmes privées de formation. En septembre prochain, après que le traitement des rapports d'impôt des entreprises aura été complété, nous connaîtrons alors l'utilisation du crédit d'impôt remboursable à la formation par les employeurs pour l'année 1990-1991. Si nous accordons des incitatifs fiscaux aux entreprises en matière de formation, c'est que nous tentons de développer une culture de la formation continue en entreprise. Cette culture se matérialisera graduellement à la suite des efforts de concertation entre le gouvernement, les représentants des travailleurs et les employeurs.

Une façon efficace de promouvoir la formation en milieu de travail, c'est de l'aborder en fonction des secteurs d'activité économique. Le ministère privilégie à cet égard l'approche des comités sectoriels d'adaptation de la main-d'oeuvre. Ces comités regroupent des représentants des employés, des entreprises et des deux ordres de gouvernement. Ils cherchent à établir un diagnostic du secteur, à préciser les besoins d'adaptation de la main-d'oeuvre et à chercher, par la voie de la concertation, les moyens concrets d'accroître, notamment par la formation, la capacité d'adaptation de la main-d'oeuvre. Aujourd'hui, des comités sectoriels ou des organismes s'y apparentant existent dans l'aérospatial, la mode, le meuble, la pétrochimie et la chimie connexe, le verre plat, les services automobiles, l'industrie ferroviaire, et plusieurs autres sont en préparation, M. le Président. Nous avons la ferme intention de poursuivre durant l'exercice 1991-1992 cette approche de concertation sectorielle.

Nous avons également mis sur pied des comités territoriaux d'adaptation de la main- d'oeuvre dans certains quartiers plus défavorisés de Montréal et dans la région Port-Cartier-Sept-îles, en raison des pénuries de main-d'oeuvre spécialisée qu'on y rencontre avec l'implantation du complexe industriel de l'aluminerie Alouette.

Pour la région de Montréal, le gouvernement a créé, le 20 juin 1990, un fonds de financement devant permettre de gérer les sommes destinées au relèvement socio-économique des quartiers de Montréal identifiés comme défavorisés. Ce fonds intègre trois volets d'intervention: l'est de Montréal, le sud-ouest de Montréal et celui du centre-sud, centre-nord et Rosemont. La Commission de formation professionnelle de la main-d'oeuvre de Montréal métropolitain, en collaboration avec les corporations de développement économique et communautaire impliquées, assume la gestion du fonds et la coordination des activités. Dans l'est de Montréal, le projet a été implanté en avril 1988. On prévoyait y consacrer 12 000 000 $ répartis sur cinq ans. Or, au 31 mars 1991, les dépenses totalisaient 8 600 000 $, dont 4 435 000 $ ont été dépensés en 1990-1991. On considère que le projet a atteint son rythme de croisière. Notons qu'environ 16 000 résidents de l'est de Montréal ont reçu des services d'aide personnelle et de formation professionnelle, alors que plus de 450 entreprises ont reçu une aide financière pour réaliser des activités de formation. Par ailleurs, dans le sud-ouest de Montréal, le projet est entré dans sa phase opérationnelle en 1990-1991. Plus de 432 résidents du quartier ont reçu des services devant faciliter leur réinsertion au marché du travail, et 52 entreprises ont reçu une aide financière pour réaliser des activités de formation. En 1991-1992, le budget prévu est de 1 500 000 $. Dans le centre-sud de Montréal, 46 entreprises ont bénéficié de services techniques dans le domaine de la gestion-conseil et de la formation des dirigeants d'entreprises depuis le 1er juillet 1990. Pour ce qui est du centre-nord de Montréal et du quartier Rosemont, on est à mettre en place des corporations de développement économique et communautaire. (10 h 15)

En conclusion, M. le Président, permettez-moi de rappeler que les défis à relever au cours des dix prochaines années interpellent la volonté de concertation et d'implication des entreprises, mais aussi des individus, en vue du développement et du maintien en emploi d'une main-d'oeuvre compétente. Ce sont aussi le développement de l'employabilité et l'acquisition de compétences qui permettront de donner aux personnes aptes au travail la possibilité d'occuper une place active dans le marché de l'emploi québécois et de diminuer les coûts sociaux liés à la sécurité du revenu. Nous aurons très certainement l'occasion d'approfondir ces sujets au cours de la journée.

Je termine donc cette allocution d'ouverture

et vous réitère ma disponibilité à répondre à toutes les questions qui ne manqueront pas de m'être adressées sur les différents aspects de cette étude des crédits du ministère de la main-d'oeuvre, de la sécurité du revenu et de la formation professionnelle. je vous remercie, m. le président.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Je vais maintenant reconnaître Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve, qui est porte-parole en matière de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle. Mme la députée.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. Je voudrais, évidemment, M. le Président, vous remercier et remercier le ministre pour ses voeux d'anniversaire, et je veux lui dire que ma fête aurait été plus sereine si je n'avais pas eu à la consacrer entièrement à l'étude des crédits que nous allons examiner aujourd'hui. Ça me permet de signaler au ministère que je n'ai reçu tous les cahiers que vendredi à Québec, donc tard dans la soirée à Montréal. Alors, heureusement que j'ai pu compter sur ma fidèle collaboratrice, Christine Lessard, que je vous présente, mais c'est jouer beaucoup à David contre Goliath que de se présenter après trois jours pour interroger le ministre sur des crédits qui totalisent près de 3 000 000 000 $.

M. le Président, je voudrais également saluer les personnes qui accompagnent le ministre et, évidemment, encore une fois, prendre toutes les précautions en rappelant que les propos que je tiendrai aujourd'hui n'engagent que la responsabilité du ministre et qu'évidemment le ministère, les personnes qui sont chargées de l'application des politiques n'ont pas à craindre les fureurs de la porte-parole de l'Opposition, étant donné qu'elles demeurent, malgré tout, assujetties aux décisions, aux choix politiques. J'aimerais signaler immédiatement, M. le Président, qu'une entente est intervenue pour faire en sorte que nous examinions les organismes relevant de la juridiction du ministère plutôt ce soir et que nous puissions consacrer l'essentiel de nos travaux d'aujourd'hui aux programmes relevant du ministère proprement dit.

Alors, immédiatement, j'aimerais aborder la question de la formation professionnelle, pour vous rappeler et rappeler aux membres de cette commission que, dans une entrevue qu'il accordait au journal Le Devoir au mois de mars dernier, le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle annonçait triomphalement que 1990 allait être l'année de la formation professionnelle au Québec. Avant, évidemment, d'avoir à lui rappeler à quel point le recul - et j'insiste sur l'usage des mots - phénoménal de la formation professionnelle qu'on a connu depuis un an, que j'illustrerai d'ailleurs par des chiffres assez éloquents... Juste avant, M. le Président, je voudrais vous lire ce que le ministre nous annonçait pour l'année 1990. Alors, je le cite: "L'année 1990 marque le début d'un temps nouveau au plan de la formation professionnelle. C'est, du moins, l'avis du ministre québécois de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle, André Bourbeau. "Nous sommes en train de prendre le virage. À la fin de 1990, nous devrions avoir mis en place tous les éléments requis. Plusieurs de nos programmes auront été révisés, d'autres seront lancés. Il ne restera plus que le polissage final à faire. Le rôlo des commissions de formation professionnelle sera révisé Un document de consultation sera révisé au printemps. Suivra, à l'automne, un sommet sur l'investissement dans les ressources humaines. À l'automne également, un projet de loi sera présenté pour adoption avant la fin de l'année." Et, évidemment, j'en passe. Il y en a une page, M. le Président. Rien de ce qui fut annoncé n'a été réalisé. Et l'examen des crédits que nous entreprenons aujourd'hui va nous permettre, évidemment, de comprendre pourquoi le sommet ne s'est pas tenu, étant donné que le document préparé à cette fin-là, qui mettait en cause une controverse avec le ministère de l'Éducation, a amené le gouvernement à préférer écarter, mettre sous le tapis, l'importante question de la concertation qui aurait pu avoir lieu au moment du sommet. La réforme des commissions de formation professionnelle, c'est-à-dire la modification à la loi, n'a pas été introduite; il n'y a pas de législations qui ont été adoptées avant la fin de l'année 1990 Et, dans les propos que le ministre vient de nous tenir, nous n'avons rien entendu sur ses intentions en 1991. Alors qu'arrh/era-t-il, M. le ministre, à l'égard de ce que vous annonciez en matière de modification du rôle des commissions de formation professionnelle, à l'égard du document de consultation qui devait être déposé sur l'investissement dans les ressources humaines, et à l'égard du projet de loi sur la qualification de la main-d'oeuvre que vous aviez annoncé?

Ce que nous constatons à la simple lecture des crédits - et j'ai encore, malheureusement, à le répéter - c'est un recul absolument phénoménal. Ce que les crédits nous révèlent, c'est une diminution de participants, en l'espace d'un an, dans l'ensemble des programmes de la formation professionnelle, diminution de l'ordre de 31 989 participants cette année en regard de l'an dernier. Pour les deux années qui viennent de s'écouler, c'est un total de 46 868 participants de moins dans l'ensemble des programmes de formation professionnelle. C'est là un tableau que nous retrouvons dans l'ensemble de ceux qui nous ont été transmis par le ministère. Et, sur ces 31 000, 20 000 participants en moins dans le programme intitulé Recyclage et perfectionne-

ment. Alors, on retrouve tous ces chiffres, malheureusement, M. le Président, dans un tableau fort éloquent, qui s'intitule Étude des crédits 1991-1992, Estimation du nombre de participants par région pour chacun des programmes de formation professionnelle. Alors, le total 1990-1991 est de 204 205 participants, et c'est au chapitre du programme Recyclage et perfectionnement que l'on constate la diminution la plus phénoménale: 20 756 participants de moins. Et quel est ce programme de Recyclage et de perfectionnement? C'est ce programme qui est offert aux personnes qui sont en recherche d'emploi, ou qui sont en emploi, en vue de leur permettre de s'adapter à des changements technologiques, de s'adapter aux changements du marché du travail et de répondre aux exigences du marché du travail.

M. le Président, il faut également constater une diminution extrêmement sensible des participants dans les programmes de formation offerts par les maisons d'enseignement, dans le cadre de ce qu'on appelle les achats directs. Alors, c'est là un tableau qui nous révèle qu'entre 1986-1987 et 1990-1991 la diminution a été de la moitié. Littéralement, des 19 581 participants que l'on comptait en 1986-1987, il n'en reste que 9263. Une diminution de moitié en termes de participation dans les programmes offerts là dans les maisons d'enseignement, programmes, évidemment, qui sont du ressort des ententes fédérales-provinciales.

Alors, comment imaginer que les choses vont bien, M. le Président, en matière de formation professionnelle, quand systématiquement les budgets eux-mêmes que le ministère consacre non seulement ne sont pas indexés, mais la réalité, c'est qu'en matière d'activités de formation professionnelle et en matière de fonctionnement des commissions de formation professionnelle... Et c'est à raison que je n'aborde que ces deux programmes. On reviendra sur la question du troisième programme, là, qui concerne la concertation, la protection et le reclassement. On y reviendra suffisamment dans le courant de la journée. Quant aux deux programmes qui concernent les activités de formation professionnelle proprement dites et le fonctionnement des commissions de formation professionnelle, ce qu'il faut constater, c'est qu'il y a un gel et une diminution des budgets. Sur les deux années qui viennent de s'écouler, c'est une diminution de 4 %, et ça, sans même calculer la non-indexation. Et si on calcule la non-indexation cumulative plus la diminution des budgets pour ces activités de formation professionnelle, c'est au-delà de 12 % de diminution en regard de 1988-1989, si on les compare avec 1990-1991.

C'est terriblement inquiétant de constater un recul systématique en termes de participation dans l'ensemble des programmes de formation professionnelle. Je n'ai cité que celui qui explique à lui seul les deux tiers de la diminution des 31 000 participants dans l'ensemble des programmes de formation, mais c'est tous les programmes de formation qui connaissent une baisse de participation au moment où, pourtant, le défi à relever en matière de formation professionnelle n'a jamais été aussi important. Je dirais même que c'est le défi majeur de la société québécoise, présentement, qui, à l'occasion de cette deuxième récession, se rend compte que chaque récession est une sorte de vague qui entraîne sur le rivage non pas du bois mort, mais des hommes et des femmes qui sont abandonnés à leur sort, qui, il y a à peine quelques années, auraient bien gagné leur vie et celle de leurs enfants, mais qui, récession après récession, perdent leur emploi et ne se trouvent plus en mesure de répondre aux exigences et aux qualifications que requièrent les nouveaux emplois.

La preuve de ça, M. le Président, c'est simplement de prendre connaissance de la brochure que le ministère a rendue publique pour vendre son programme PAIE, où on lit que 55 % des personnes sur l'aide sociale qui sont en recherche d'emploi sont des travailleurs et des travailleuses qui ont été victimes d'une fermeture de leur entreprise. Quand on examine des études réalisées notamment à l'Université Laval et portant sur des personnes sans emploi depuis la récession de 1982, ce dont on se rend compte, c'est qu'à peine 4 % d'entre elles se sont vu offrir une formation à temps plein.

Alors, on aura l'occasion de revenir, évidemment, dans le courant de la journée, mais, ça, M. le Président, c'est une catastrophe, une catastrophe sociale pour le Québec, que ce recul et cette absence complète d'une véritable politique d'ensemble en matière de formation professionnelle. Qu'il me suffise de constater la baisse du nombre de participants pour tout de suite et, évidemment, les diminutions de budgets, tant en matière d'activités qu'en matière de formation professionnelle. Évidemment, ai-je besoin de le rappeler, ce que le ministre a convenu avec son homologue du fédéral, c'est la reconduction du statu quo, et le statu quo, lui-même l'avait très sévèrement critiqué au moment de la publication de ce document intitulé "Partenaires pour l'avenir" en novembre 1989, mais aussi au moment de sa déclaration ministérielle suite à la décision prise en concertation à la Conférence permanente d'adaptation de la main-d'oeuvre de rapatrier les programmes en décembre 1990. Je ne pense pas que je puisse être plus éloquente que le ministre lui-même ait pu l'être en matière de critiques sévères du fouillis et de l'empiétement que la double structure de formation professionnelle crée pour les travailleurs et travailleuses ou pour les personnes sans emploi au Québec. Pourtant, ce qu'il vient de reconduire, c'est le statu quo, le statu quo qu'il critiquait sévèrement. Et ce n'est même pas un statu quo parce que, finalement, ce qu'Ottawa considère avoir reconduit, c'est des versements

temporaires, mensuels ou, au mieux, trimestriels. (10 h 30)

M. le Président, c'est extrêmement inquiétant que, dans cette période-ci où l'ensemble des États industrialisés consacrent des efforts inouïs au relèvement de la qualification de leur main-d'oeuvre, qu'au moment où il faut le faire, parce qu'on sait que c'est en période de récession qu'il est indiqué de le faire et non pas en période de croissance, qu'à ce moment même où il serait souhaitable qu'il y ait un effort sans précédent, bien, c'est à ce moment-ci que l'on constate une baisse de participation, que l'on constate que, finalement, c'est "business as usual". Au mieux et au pire, ça ne l'est même pas. On aura évidemment l'occasion de revenir sur cette importante question, M. le Président, et ce n'est certainement pas le programme PAIE qui peut, d'aucune façon, venir satisfaire le ministre en matière de réintégration à l'emploi. On y reviendra, mais le programme PAIE n'assure aucune formation. Au mieux, tout ce que ça maintient, c'est une certaine employabilité dans des "jobines" et, encore là, le ministre va devoir constater comme nous, avec les tableaux qu'il nous a remis, que le succès de PAIE dont il se réjouit, c'est qu'il y a 23 % des participants qui complètent le programme. Le ministre ne nous dit pas combien restent en emploi. Alors, ça veut donc dire qu'il y en a 77 % qui abandonnent en cours de route le programme puisque, finalement, les chiffres qu'il nous a soumis à l'égard de PAIE, et on aura l'occasion évidemment d'y revenir... Il y en a encore qui sont dans le programme, mais il reste que c'est... Le test pour évaluer le bien-fondé du programme, pour le ministre, ce n'est pas la réintégration à l'emploi, c'est le fait que les participants n'abandonnent pas le programme en cours de route. De toute façon, M. le Président, compte tenu du peu de temps qui est à ma disposition, je veux simplement insister sur le fait que... En terminant, l'accord Canada-Québec sur la formation en établissement, ce qu'il nous révèle, c'est une diminution constante du nombre de participants année après année, et on prévoit maintenant deux fois moins de cours et deux fois moins de places que c'était le cas il y a à peine quatre ans, et il y a... On y reviendra, mais la baisse est absolument dramatique en matière du secteur professionnel au secondaire. En regard de 1986-1987, c'est une baisse de 57,8 % du nombre de participants. En matière de langue aux immigrants, c'est une baisse de 36 % du nombre de participants en 1990-1991, en comparaison avec 1986-1987.

Ceci dit, M. le Président, un mot sur les crédits d'impôt. Un sondage qui a été transmis dans l'ensemble des documents qui nous ont été envoyés pour l'étude des crédits nous révèle que 86 % des entreprises consultées dans le cadre de ce sondage indiquent ne pas avoir l'intention de se prévaloir de cette mesure fiscale au cours de l'an prochain. Alors, il faudrait voir combien il y en a qui ont utilisé cette mesure au cours de la dernière année. Le ministre nous dtt qu'il n'y aura pas moyen d'avoir des chiffres avant septembre 1991, mais le sondage, lui, tout de suite, nous indique que 6 % des entreprises consultées répondent s'être prévalues de cette mesure fiscale. Alors, pour le crédit d'impôt, si le ministre attend comme c'est le cas pour APPORT - parce qu'on reviendra évidemment à l'échec lamentable du programme APPORT - s'il attend aussi longtemps pour le constater, évidemment, entre-temps, on va avoir manqué le bateau. Ce que les entreprises donnent comme principale raison pour laquelle elles n'entendent pas se prévaloir du crédit d'impôt, le principal motif, à 35 % des répondants, c'est qu'ils préfèrent embaucher du personnel déjà formé. Alors, si, ça, c'est un motif important, évidemment, c'est un motif qu'on savait devoir être invoqué, et, l'an dernier, je rappelle au ministre qu'on lui avait rappelé que les entreprises hésitent beaucoup à investir parce qu'elles ont peur de se faire débaucher par un concurrent le personnel qu'elles ont formé. Alors, on reviendra certainement au courant de la journée à cette question.

M. le Président, je voudrais maintenant aborder l'aspect de la sécurité du revenu, pour constater que si le ministre se réjouit des malheurs de l'Ontario... Il a l'air de nous offrir cette comparaison pour essayer de se consoler, j'imagine. Cependant, il doit lui aussi constater qu'avec 2 000 000 de population de plus l'Ontario a maintenant le même nombre de personnes assistées sociales. Alors, c'est finalement, en proportion, une situation qui n'est pas plus rosé ici que chez notre voisin. Chez nous, il faut constater, en l'espace d'un an, de mars 1990 à mars 1991, une augmentation de 42 293 personnes à l'aide sociale. Les chiffres qui nous sont transmis dans le cadre de l'examen des crédits nous parlent de ménages, mais, si on compare de mars à mars, c'est 42 293 personnes de plus.

Et ce sur quoi je veux surtout insister, M. le Président, c'est sur le fait que les mesures qui seront offertes aux personnes qui sont aptes et disponibles... Ces augmentations que le ministre prévoit dans le cadre de ses crédits sont bien en deçà de la demande. C'est quand même phénoménal de se rendre compte qu'au moment où on se parle il y a 23 000 personnes, 23 546 plus exactement, qui sont en attente d'une mesure. Évidemment, c'est phénoménal quand on compare avec l'an dernier, où il y avait 5959 prestataires de la sécurité du revenu qui étaient en attente d'une mesure. Imaginez-vous la progression des personnes qui disent: Je veux, je veux, qu'est-ce que vous m'offrez? et à qui le ministère n'offre rien. Alors, déjà, il y a 23 546 personnes en attente, et ça, c'est un tableau que le ministère nous a remis dans te cadre des demandes en suspens par programme, par région. Ce que le ministère offre dans les crédits, c'est une

augmentation du nombre de participants, qui passera de 33 373 à 37 376, une augmentation de 4003. Alors, c'est une augmentation de 10 %. Cependant, on doit constater qu'au même moment le ministère réduit les allocations de places disponibles: de 44 489 participants présentement à 35 713 l'an prochain, une diminution de 9186. Alors, qu'est-ce que c'est, le jeu, finalement? C'est qu'il va y avoir une augmentation de 4000 places dans la catégorie des participants et une diminution de 9186 dans la catégorie "disponibles". Alors, finalement, l'augmentation de participation est de 10 % et la diminution dans la catégorie "disponibles" est de 20 %. Ça, évidemment, on retrouve toutes ces données dans les explications du programme Développement de l'emploi et intégration au marché du travail, le programme 8. Alors, on retrouve tous ces chiffres, en moins en matière de la catégorie "disponibles" et en plus en matière de participants, mais la réalité derrière tout ça, laquelle est-elle? C'est qu'il y a une augmentation de près de 10 % de la clientèle. Déjà 23 000 personnes en attente de mesures.

Ce que le ministère offre, ça n'a rien à voir avec l'augmentation des mesures en regard des besoins. Si le ministère voulait sérieusement offrir des mesures aux personnes qui sont aptes, disponibles et prêtes à participer à ces mesures, c'est une hausse de 50 % des mesures qu'il aurait fallu prévoir. On n'en est pas là, M. le Président, bien au contraire. Si on exclut le programme PAIE qui, de toute façon, n'est pas une mesure d'employabilité, puis qui exclut les personnes de l'aide sociale, et si on calcule simplement la hausse des mesures, c'est à peine une progression de 10 %, bien en deçà de la progression de la clientèle, bien en deçà, évidemment, de la clientèle qui est déjà en attente de mesures. C'est évidemment décevant, parce que... Le ministre va avoir aujourd'hui à répondre a la question: Et une fois qu'un participant a pu bénéficier de toutes les mesures, que lui arrive-t-il? Une fois qu'il a passé à travers toutes les mesures et qu'il est toujours en recherche d'emploi, qu'est-ce qu'il lui arrive? Il ne faudrait pas oublier, M. le Président, le profil de la clientèle, un profil que le ministère connaît bien, parce que c'est lui-même qui, dans ses documents, constate que la durée de présence à la sécurité du revenu se prolonge pour une portion sans cesse croissante de la clientèle, et que, s'il y a à peine 10 ans la moitié des bénéficiaires pouvaient en sortir avant six mois, maintenant, c'est seulement le tiers, et que 74 % de la clientèle accumulent une présence de plus de deux ans, et que 52 % accumulent une présence de plus de cinq ans, et que les obstacles majeurs que rencontre la clientèle sont d'ordre, comme on l'appelle, structurel. C'est-à-dire que plus du tiers ont des problèmes de lecture et d'écriture, quatre personnes sur cinq n'ont pas complété leur secondaire, une bonne portion de la clientèle n'a pas d'expérience de travail ou est confrontée à des problèmes que le ministère connaît, qui sont des problèmes d'isolement socioculturel. Trois quarts des familles avec enfants sont dirigées par une personne seule.

Évidemment, l'ensemble de ces obstacles n'amène pas le ministère à nous proposer des stratégies d'intervention particulières, bien au contraire. Et je voudrais immédiatement, M. le Président, vous signaler que c'est désastreux de constater qu'une de ces stratégies particulières pour ces clientèles vulnérables et en difficulté, qui consistait à leur offrir un accompagnement plus soutenu dans le cadre des Services externes de main-d'oeuvre... Bien, c'est assez déplorable de constater que les Services externes de main-d'oeuvre connaissent une baisse constante des budgets qui leur sont consacrés. Pour 1990-1991, le budget était de 13 000 000 $ et, pour 1991-1992, il sera de 12 890 000 $; c'est une diminution qui est Importante, parce que, évidemment, il y a là une non-Indexation. Et si on la calcule, cette non-indexation, et compte tenu du taux d'inflation, c'est presque 6 % de budget de moins pour, finalement, une clientèle qui augmente. La clientèle des SEMO est pourtant passée de 9717 à 11 818; c'est donc une augmentation de 21 %, et on sait que c'est la clientèle la plus vulnérable. Cette clientèle est en progression, et au lieu d'offrir aux Services externes de main-d'oeuvre l'ensemble des moyens leur permettant de faire face à cette demande d'une clientèle qui est en attente, dans certains SEMO, depuis trois, quatre et cinq mois, ce que le ministère offre finalement aux SEMO, c'est une diminution de budget.

Et on aura l'occasion, M. le Président - et, pour nous, ce sera une priorité aujourd'hui - de revenir sur cet important dossier des Services externes de main-d'oeuvre. Alors donc, pas de stratégie particulière à l'égard d'une clientèle qui s'alourdit du fait que, soit qu'elle a été victime de fermetures d'entreprises et qu'elle ne correspond plus aux exigences des nouveaux emplois... Et cette clientèle, M. le Président, va aller alourdir le nombre des sans-emploi. Ce que le ministre gère, finalement, c'est le sous-emploi au Québec; il le gère systématiquement, par des mesures d'employabilité... Le Protecteur du citoyen - on aura l'occasion d'y revenir au cours de la journée - nous disait, dans un avis qu'il communiquait au ministre en novembre dernier, que ces mesures ne sont pas adaptées à la clientèle. (10 h 45)

Le Protecteur du citoyen écrivait à cet effet: "II y a lieu de constater que les mesures de relance qui avaient été conçues sous l'ancienne loi pour une clientèle de moins de 30 ans n'ont pas été adaptées aux exigences des clients particuliers." Là, le Protecteur du citoyen nous donne un bon nombre d'exemples, et il y en a un, M. le Président, que je ne peux pas passer

sous silence: c'est évidemment celui des personnes à la recherche d'emploi qui sont classées comme non participantes parce qu'elles ne participent pas à une mesure du ministère. Ce que le Protecteur du citoyen, à titre d'exemple, disait à cet effet, puis Je le cite: "Une personne voulant bénéficier de la sécurité du revenu indique à l'agent qu'elle se cherche de l'emploi. Elle est référée à l'agent d'employabilité qui, après lui avoir exposé les divers programmes, lui demande sa décision. Le client répond qu'il veut travailler et qu'à cette fin il veut continuer à se chercher de l'emploi. L'agent lui dit alors qu'il ne peut être reconnu comme disponible, mais comme non participant, avec un barème moindre." Et là le Protecteur demande: Est-ce qu'il n'aurait pas été juste et équitable d'indiquer clairement qu'il peut continuer à chercher du travail et à être à la fois disponible et que le CTQ est disposé à lui offrir une mesure?

M. le Président, c'est inimaginable de constater que de se chercher un emploi rend inéligible au barème de disponibilité. Et il y a évidemment bien d'autres exemples. L'exemple le plus paradoxal est celui des personnes qui sont actuellement prestataires d'assurance-chômage, qui ont des revenus moindres que ceux prévus dans les barèmes, qui font appel à l'aide sociale et qui sont considérées comme non participantes parce qu'elles sont activement à la recherche d'emploi, en conformité avec la Loi sur l'assurance-chômage. Il y a là un paradoxe qui nous explique bien les contradictions mêmes dans la prétention d'intégration au travail de la nouvelle Loi sur la sécurité du revenu.

Alors, M. le Président, vous me faites part, évidemment, que le temps qui m'est imparti est presque écoulé. Permettez-moi, cependant, de terminer avec deux programmes qui vont devoir retenir notre attention aujourd'hui, le Programme d'aide aux travailleurs âgés... Le ministre nous a signalé que c'était encore un programme en discussion. C'est quand même tellement inquiétant de constater que, depuis l'an passé, 3 700 000 $ ont été périmés pour la seule année 1990-1991. Si on fait le calcul depuis l'introduction du programme, en 1988, c'est 19 000 000 $ qui ont été périmés. Si, de ce montant, on additionne la contribution fédérale qui, elle, se chiffre à 70 % de ce que devait être la contribution du Québec, imaginez que c'est un total de 44 000 000 $ en moins dont n'ont pas bénéficié les... 63 000 000 $ en moins dont n'ont pas bénéficié les travailleurs licenciés de 55 ans et plus. Pour la seule année qui vient de s'écouler, si on calcule la partie périmée de Québec, 3 700 000 $, et si on additionne ce qu'aurait dû être la contribution d'Ottawa, c'est-à-dire 70 %, le total, c'est évidemment presque 12 000 000 $ dont n'ont pas bénéficié les travailleurs et travailleuses licenciés de 55 et plus. Pourtant, on constate, M. le Président, que c'est des milliers d'entre eux qui n'ont pas encore eu de réponse ou qui se sont fait écarter du programme. Quand on constate les critères discriminatoires d'application de ce programme, notamment la taille des municipalités... Pensez que, pour avoir accès au Programme d'aide aux travailleurs âgés, à Montréal ou sur l'îlede Montréal, il faut être victime d'une fermeture d'entreprise qui met à pied plus de 100 employés et que, dans le secteur du textile, par exemple, ou du vêtement, c'est 90 % des entreprises qui comptent 100 employés ou moins. Ça veut dire, en d'autres termes, qu'on introduit un critère qui fait qu'automatiquement, en l'appli-cant, les travailleurs âgés n'ont pas accès aux bénéfices qu'on leur fait miroiter.

Un mot simplement, M. le Président, sur le programme APPORT, pour rappeler que c'est la moitié des familles qui devaient en bénéficier qui ont été, finalement, l'objet dune réclamation de trop-payé par le ministère du Revenu, et qu'au niveau du programme APPORT c'est le quart du budget, 4 700 000 $, qui est réclamé aux familles à qui on l'avait accordé.

On aura l'occasion évidemment, en cours de journée, de revenir sur toutes ces questions. Je dois vous dire, M. le Président, que le bilan n'est pas réjouissant et que, si j'étais le ministre ou si j'étais son sous-ministre et les personnes qui ont à gérer tous ces programmes, je serais assez inquiète, très très inquiète des trajectoires dans lesquelles on est en train de s'enfoncer. Alors, je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Merci, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission intéressés à faire des remarques préliminaires? Merci. Alors, écoutez, ici, on me souligne qu'il y a une entente à savoir que ça sera un genre de discussion générale au lieu de procéder programme par programme. Est-ce que c'est exactement ce que j'ai à administrer comme formule? M. le ministre?

M. Bourbeau: Oui, M. le Président. Moi, je n'ai absolument aucune objection. On peut discuter programme par programme, on peut discuter dossier par dossier. Moi, j'ai dit tout à l'heure qu'on est ici pour répondre aux questions.

Le Président (M. Joly): Parfait!

M. Bourbeau: Je me demandais, M. le Président... Est-ce que j'ai un droit de réplique, ou si on passe immédiatement...

Le Président (M. Joly): En fait, je pense que c'est une discussion entièrement libre. Si, nécessairement...

M. Bourbeau: Oui, je voudrais...

Le Président (M. Joly): ..c'est ce que vous voulez. Parce qu'il n'y a pas de réplique comme

telle...

M. Bourbeau: Bon.

Le Président (M. Joly): ..sauf qu'à l'intérieur, disons, de la discussion, de par l'ouverture que vous manifestez, j'ai l'impression que vous allez pouvoir, en fait...

M. Bourbeau: Seulement trois minutes.

Le Président (M. Joly): ...étendre un peu votre sujet. Alors, est-ce que vous êtes d'accord, Mme la députée, à ce que ça soit cette formule?

Mme Harel: Ah oui! Tout à fait, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Oui. Donc, discussion générale au lieu de programme par programme. Parfait...

M. Bourbeau: Alors, seulement deux ou trois minutes.

Le Président (M. Joly): ...et nous approuverons les crédits à la fin.

M. Bourbeau: Deux ou trois minutes, M. le Président.

Le Président (M. Joly): M. le ministre. M. André Bourbeau (réplique)

M. Bourbeau: Dans ce genre de discussion, quand le ministre fait son allocution d'ouverture, il donne un résumé des activités du ministère au cours de la dernière année et un aperçu de ce qui s'en vient. En aucune façon il ne critique l'Opposition. Donc, la députée de l'Opposition, quand elle fait son allocution, n'a pas à répliquer à quelque accusation que ce soit ou à quelque fausseté que ce soit que le ministre aurait pu dire à son endroit, puisque le ministre n'attaque pas l'Opposition. Mais l'inverse n'est pas vrai. Et, dans les propos de la député de Hochelaga-Maisonneuve, je suis bien prêt, M. le Président, à accepter certains reproches, à admettre que certaines annonces que nous avions faites ne sont pas encore réalisées, mais il y a certains points que je dois relever, parce qu'ils m'appa-raissent inexacts. J'aimerais rapidement, M. le Président, en faire état, si vous voulez bien, non pas pour critiquer la députée de Hochelaga-Maisonneuve... Il est possible qu'elle n'ait pas eu toutes les informations en main, d'autant plus qu'elle nous a dit qu'elle avait reçu les documents un peu plus tard que prévu, tout en soulignant que, du temps où j'étais dans l'Opposition, M. le Président, on recevait tous les documents la veille et parfois même le matin même. Alors, ça s'est beaucoup amélioré depuis quelques années, peut-être pas autant que le souhaiterait la députée de Hochelaga-Maison-neuve.

M. le Président, entre autres, la députée parlait tout à l'heure du fait que j'avais annoncé, il y a un an environ, dans une entrevue à un journal, la stratégie gouvernementale visant l'adaptation de la main-d'oeuvre québécoise aux réalités nouvelles qui sont apparues sur le marché du travail. Elle nous disait que, finalement, ce que j'avais annoncé ne s'était pas matérialisé. J'aimerais simplement dire, M. le Président, que si on ne voit pas encore sortir de terre l'édifice que j'avais annoncé, ce n'est pas que l'édifice n'est pas en préparation, mais il y a des événements qui se sont produits au cours des derniers mois qui ont eu pour effet de retarder un peu l'implantation de notre stratégie. Vous l'avez deviné, c'est la décision du gouvernement de modifier le cap, de changer un peu notre façon de voir les choses et de demander au gouvernement fédéral de rapatrier au Québec la totalité des pouvoirs et des budgets en matière de main-d'oeuvre et, par vole de conséquence, de formation professionnelle. On comprendra que, dans cette perspective-là, tout change. Ce n'est pas la même chose que de proposer aux Québécois un plan d'action qui s'insérerait dans la tradition, c'est-à-dire dans un partage de responsabilités entre le gouvernement fédéral et le Québec, et proposer un plan d'action où le Québec serait le seul maître d'oeuvre. La Loi - dont j'ai annoncé la refonte - sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre et qui régit les CFP ne sera pas, dans un contexte où le Québec est le seul maître d'oeuvre, celle qu'elle aurait été si le Québec avait dû partager la responsabilité avec le gouvernement fédéral. On va donc mettre sur pied de nouvelles structures qui sont différentes. Et, à cet égard-là, j'ai été obligé de retarder la préparation du projet de loi, pour voir comment s'alignent, si je peux dire, les discussions avec le gouvernement fédéral. On avait l'intention d'apporter une réforme, mais ça aurait été un peu ridicule que de faire voter une loi par l'Assemblée nationale au printemps 1991 et de devoir l'amender au printemps 1992 parce que le Québec aurait hérité de tous les pouvoirs en matière de main-d'oeuvre. Donc, c'est la sagesse qui nous a commandé de mettre de côté temporairement la préparation de cette loi-là et de concentrer nos efforts sur le rapatriement des pouvoirs. Maintenant qu'on peut voir poindre à l'horizon une solution positive à ce dossier-là, nous avons repris les travaux visant la préparation d'un projet de loi. J'espère être en mesure de déposer le projet de loi à l'automne 1991, pour adoption possiblement à l'automne 1991 ou au printemps 1992, et ce sera un projet de loi différent de celui qu'on avait prévu originairement.

C'est la même chose, Mme la Présidente, en

ce qui concerne la publication d'un document d'orientation. Les orientations ne sont pas les mêmes non plus à partir du moment où on devient le seul maître d'oeuvre. Un document d'orientation, ça ne signifie rien si ce n'est pas accompagné d'un plan d'action. Or, le plan d'action va être différent. Alors, tout ça est décalé dans le temps, mais si ça déplaît à la députée de Hochelaga-Malsonneuve qu'on ait retardé; je sais que, par ailleurs, elle est très satisfaite et très heureuse de voir que le Québec, finalement, pourra rapatrier ou compte pouvoir rapatrier les pouvoirs en matière de main-d'oeuvre. C'est un espoir que même les députés les plus optimistes de l'Opposition n'avaient pas pu entretenir. Pour eux, c'était presque une utopie que de penser que, dans un régime fédéral, on pourrait y arriver. Alors, moi, je dis, Mme la Présidente, que nous allons au-delà de tous les espoirs de l'Opposition en espérant pouvoir rapatrier des pouvoirs en matière de main-d'oeuvre et, si on fait un pas en arrière ou, enfin, on fait du surplace au grand mécontentement de l'Opposition, c'est pour faire deux pas en avant dans un avenir que j'espère rapproché.

Il en va de même, Mme la Présidente, de tous les autres éléments de cette stratégie que j'avais annoncée. On peut, d'une façon générale, considérer qu'il s'agit d'un décalage dans le temps de six mois, au maximum un an, mais qui nous permettra, à la fin du compte, de se retrouver dans une situation beaucoup plus logique où il n'y aura qu'un seul maître d'oeuvre, une simplification des programmes, une seule porte d'entrée, un guichet unique - les CFP -des programmes simplifiés, des programmes regroupes, des fonds mieux ciblés. Et j'espère qu'à ce moment-là on sera en mesure de faire en sorte que le Québec devienne à l'avant-garde des provinces canadiennes et même des juridictions en Amérique du Nord en ce qui concerne l'adaptation de la main-d'oeuvre.

D'ailleurs, cet optimisme dont je fais état est partagé par bien des gens, si vous avez eu, comme moi, l'occasion de lire dans La Presse de vendredi dernier un article de la Presse Canadienne qui émanait d'Ottawa, donc un milieu neutre, si je peux m'exprimer ainsi, où on fait état d'une étude, d'une enquête du Conférence Board du Canada qui porte sur des entreprises canadiennes et les intentions qu'elles ont de dépenser des sommes d'argent en formation professionnelle au cours des prochaines années. L'enquête de l'institut de recherche indique que ce sont les firmes québécoises qui augmenteront le plus les dépenses destinées aux programmes de formation de la main-d'oeuvre. Et je cite l'article: "La plupart des entreprises canadiennes se rendent compte que la formation du personnel est l'une des clés de la réussite, mais ce sont les firmes québécoises qui semblent vouloir consentir les plus grands efforts dans cette direction", affirme l'un des auteurs de l'enquête, Peter

Larson, qu'on ne peut pas qualifier d'être à la solde du Québec, bien sûr. Un peu plus loin: "C'est au Québec que les entreprises prévoient la hausse moyenne la plus importante, soit 15,3 %, comparativement à 14,4 % pour celles de l'Ouest et de 8,3 % pour celles de l'Ontario " (11 heures)

C'est donc dire, Mme la Présidente, que le discours que nous tenons depuis quelques années, et plus particulièrement depuis quelques mois, et les actions que le gouvernement du Québec a entreprises, particulièrement en annonçant la mise sur pied du programme du crédit d'impôt remboursable à la formation, ces actions-là sont en train de porter fruit, en ce sens que les entreprises québécoises, semble-t-il, sont maintenant plus conscientes qu'auparavant de l'importance d'investir dans la formation et l'adaptation de leur main-d'oeuvre et qu'elles ont l'intention, avec bien sûr l'avantage que constitue le crédit d'impôt à la formation, de dépenser plus d'argent dans ce domaine-là que dans le passé et même plus d'argent que toutes les autres entreprises des autres provinces canadiennes. C'est donc un bon signe. C'est signe que le message que nous tentons de véhiculer est en train de passer, et ça, c'est une réussite déjà de voir que les mentalités sont en train d'évoluer plus rapidement au Québec qu'ailleurs. Quant à moi, Mme la Présidente, je suis très optimiste, et je pense qu'en y mettant le temps on va réussir à convaincre les entreprises québécoises que la formation de la main-d'oeuvre n'est pas une dépense, c'est un Investissement et un point de profit.

Maintenant, un dernier point, Mme la Présidente. Je voudrais revenir sur la comparaison qu'on a faite tout à l'heure avec l'Ontario. C'est important, je pense, également sur le plan psychologique, qu'on se rende compte que ça ne va pas si mal que ça au Québec - en tout cas, si ça ne va pas bien au Québec, il y a des endroits où ça va pire que chez nous - et également que la réforme de l'aide sociale a joué un rôle positif, je pense, dans la mentalité des gens, dans la façon d'entrevoir justement l'atteinte de l'autonomie pour ceux qui doivent recourir à la sécurité du revenu.

Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve citait des chiffres, tantôt. J'aimerais aussi citer des chiffres. Sûrement que ce sont les mêmes, à moins qu'on n'ait pas accès aux mêmes banques d'information, mais je vous dirai ceci: si vous prenez la période d'un an, les derniers chiffres que j'ai, c'est février 1991 par rapport à février 1990. alors, regardons ce qui en est. en février 1991, il y avait au québec 363 000 ménages et en ontario 457 000 ménages à l'aide sociale. un an auparavant, il y en avait au québec 342 000, c'est-à-dire 21 000 de moins, et en ontario 337 000, c'est-à-dire 120 000 de moins. c'est donc dire que, dans l'espace d'une année, le québec a vu le nombre d'assistés sociaux, de

ménages, augmenter de 21 000, et l'Ontario de 120 000. En termes de personnes, si vous voulez, on peut parler au Québec d'une augmentation de 37 000 et, en Ontario, de 210 000 personnes. En termes d'argent - tenez-vous bien, Mme la Présidente - ça veut dire que le budget du Québec a augmenté d'à peu près 150 000 000 $ en un an pour ces nouveaux arrivants, et celui de l'Ontario de 1 000 000 000 $ en un an. Ça donne une idée, un peu, de la façon dont le dossier évolue.

Maintenant, si vous voulez regarder depuis cinq ans, depuis que nous sommes arrivés aux affaires, en décembre 1985. Lorsque nous sommes arrivés, le Québec avait à l'aide sociale 230 000 personnes de moins - 239 000, selon les chiffres que j'ai ici. Aujourd'hui, l'Ontario en a 186 000 de plus. Ça veut dire qu'en l'espace d'à peine cinq ans, ou un peu plus de cinq ans, début 1986, début 1991, enfin, cinq ans exactement, la situation a évolué de telle façon que nous sommes passés de 239 000 en Ontario à + 186 000, un écart de 425 000 personnes.

Mme la Présidente, je ne me réjouis pas du malheur des autres, loin de là, mais je pense que la situation au Québec n'est pas si noire qu'on puisse le faire voir. En tous les cas, s'il y a moins de personnes qui entrent à l'aide sociale au Québec, il faut s'en réjouir. Je pense qu'il ne faut pas le déplorer. C'est donc que les gens au Québec réussissent à se trouver de l'emploi ou, enfin, ne sont pas aussi démunis qu'ils le seraient s'ils devaient arriver à l'aide sociale. Et vous savez qu'on ne refuse personne, à la sécurité du revenu. Dès qu'une personne se présente, elle a le bénéfice du doute et elle est admise presque automatiquement. On fait des vérifications, bien sûr, et on doit en faire, mais ça indique quand même que la situation est bien meilleure ici qu'en Ontario et que nous faisons une bonne gestion du programme. Il y a lieu de s'en réjouir, je crois.

Alors, Mme la Présidente, c'est les remarques que je voulais faire.

Une dernière remarque, une toute dernière. La députée de Hochelaga-Maisonneuve, tout à l'heure, se plaignait qu'il y a beaucoup plus de personnes cette année qui sont en attente d'une mesure d'employabilité que l'an dernier. La réponse que je pourrais lui donner, c'est: bien sûr, il y en avait beaucoup moins l'an dernier, mais l'an dernier on était dans la période des droits acquis. Alors, un grand nombre de clientes et de clients de la sécurité du revenu avaient le droit de se mettre à l'abri, si je peux m'exprimer ainsi, via les droits acquis et n'étaient pas obligés de s'inscrire au nouveau régime. Alors, il est très dangereux de comparer l'an dernier à cette année. L'an dernier, nous avions un grand nombre de personnes qui bénéficiaient de cette mesure des droits acquis et qui, donc, étaient dans l'anonymat de l'ancienne loi; aujourd'hui, elles se sont inscrites au barème de disponibilité.

On ne peut pas comparer les deux années, puisqu'elles ne sont pas comparables. Voilà, Mme la Présidente, ce que je voulais dire pour l'instant. Je suis tout à fait disposé à répondre aux questions.

La Présidente (Mme Loiselle): Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Discussion générale

Mme Harel: Merci, Mme la Présidente. Je pense qu'on pourrait tout de suite aborder la question, justement, des ententes fédérales-provinciales. Un mot simplement, par ailleurs, sur ce que le ministre vient de nous dire concernant la comparaison avec l'Ontario, pour lui rappeler que, s'il y a égalité dans la malchance, présentement, il n'y a pas égalité des chances, en tout cas en termes de taux d'activité, parce que le taux d'activité, c'est-à-dire le rapport entre les emplois puis la population, est malheureusement bien inférieur au Québec en comparaison avec l'Ontario. J'aurai les chiffres tantôt, mais ce qu'on peut constater, c'est que, finalement, on a, proportionnellement à la population, un pourcentage équivalent. Avec les 9 000 000 d'habitants en Ontario, les 450 000 ménages bénéficiaires d'aide sociale en Ontario correspondent, en proportion, pour une population moindre au Québec, à nos 363 000 ménages. C'est là, finalement, une situation qui est aussi déplorable là-bas comme ici, mais la différence... Ça, ce sont les chiffres sur le taux d'activité. La différence, c'est que le taux d'activité est de loin supérieur en Ontario par rapport au Québec. C'est-à-dire qu'au Québec II y a, finalement, beaucoup de personnes sans emploi découragées, qui ne sont ni inscrites à l'assurance-chômage ni inscrites à l'aide sociale. Et ces chiffres que nous citons ne sont pas aussi, finalement, ajustés à la réalité que ceux qui nous permettent de vérifier avec les taux d'activité. On vous les citera tantôt, alors, M. le Président.

Ceci dit, je voudrais également, peut-être, inviter le ministre à nuancer les chiffres qu'il nous transmettait concernant les résultats suite à la participation aux mesures. Encore faudrait-il pouvoir nous indiquer la provenance des clientèles pour mieux comprendre les explications qu'il nous donnait quant à la sortie de l'aide sociale pour les personnes qui ont bénéficié des mesures. Je veux inviter le ministre à prendre connaissance de ses propres documents qui ont été rédigés au ministère et qui nous permettent de constater que la participation aux mesures se fait essentiellement chez les personnes seules ou qui n'ont pas charge d'enfant à titre de chef de famille monoparentale. C'est évidemment, peut-être, les personnes les moins vulnérables qui participent aux mesures. Alors, il faut pondérer par le facteur et de l'âge et de la charge familiale les données qu'il nous a transmises sur

les résultats qu'il nous citait quant à la participation aux mesures. Ça ne dépend pas tant de la participation à la mesure; ça dépend souvent beaucoup plus du groupe d'âge ou de l'absence de responsabilités parentales qu'on a. C'est un facteur qui est souvent plus déterminant pour expliquer la sortie de l'aide sociale.

État des négociations des ententes Canada-Québec

On reviendra sur ces questions-là, mais l'aimerais bien aborder avec le ministre toute la question des ententes fédérales-provinciales. Il nous a dit tantôt... Je suis contente qu'il prévoie à nouveau le dépôt de la loi modifiant les commissions de formation professionnelle et celle concernant la qualification de la main-d'oeuvre pour l'automne prochain. Comment peut-il nous garantir qu'il peut espérer déposer a l'automne, compte tenu qu'il n'y a actuellement aucune négociation qui s'est enclenchée entre Québec et Ottawa sur le rapatriement? Le ministre, à une question que je lui posais en Chambre il y a à peine un mois, répondait: "La situation s'est présentée comme ceci. Mme McDougall m'a dit qu'elle n'avait pas de mandat pour négocier avec moi le rapatriement des pouvoirs - ce que je savais depuis longtemps. Je lui ai dit que, moi, je n'avais pas de mandat pour négocier une nouvelle entente comme elle l'a fait avec les autres provinces canadiennes. Nous avons donc convenu mutuellement que nous n'avions rien à négocier sinon de reconduire les anciennes ententes." Alors, si vous avez convenu que vous n'aviez rien à négocier, quand est-ce que vous prévoyez que vous allez pouvoir convenir de négocier le rapatriement, d'une part? Et, d'autre part, est-ce que le ministre n'est pas conscient qu'il doit donner actuellement des garanties, notamment aux membres de la Conférence permanente sur l'adaptation de la main-d'oeuvre, quant à la manière dont il entend gérer ces nouveaux pouvoirs qu'il souhaite obtenir? Est-ce que cette façon de donner des garanties ne serait pas, justement, de mettre sur la table clairement ce que Québec entend faire avec ces nouveaux pouvoirs? Ça Inquiète quand môme pas mal de monde, présentement, l'espèce de paralysie qu'il y a avec le ministère de l'Éducation et la confrontation avec le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science. Alors, qu'est-ce que ça va être, la politique de Québec en matière d'adaptation de la main-d'oeuvre? Est-ce qu'il ne serait pas mieux de le savoir avant qu'après le rapatriement? Est-ce que vous n'auriez pas des chances qu'il y ait plus d'appuis dans l'opinion publique québécoise? Parce qu'H y a des craintes, et vous les connaissez mieux que moi encore. Ces craintes légitimes, elles vous ont été exprimées. Alors, pourquoi ne pas envisager de déposer la politique que le gouvernement du Québec entend adopter en matière d'adaptation de la main- d'oeuvre et puis la faire largement appuyer par l'Assemblée nationale et par les partenaires? Est-ce que ça ne vous donnerait pas, finalement, encore plus d'Influence pour exiger le rapatriement? Là, vous exigez le rapatriement, mais personne ne sait, au Québec, ce que vous allez faire en l'obtenant. Alors, disons que c'est ma première question.

La deuxième: est-ce que vous ne croyez pas que, pendant qu'Ottawa vous dit ne pas avoir de pouvoir de négocier, il occupe le terrain pendant ce temps-là? Vous êtes sûrement au courant de tous ces changements qui sont survenus dans la réorganisation de l'emploi et de l'immigration. C'est une décentralisation qui se fait sur le terrain, et vous savez sûrement cette philosophie de consultation avec le milieu. Alors, vous avez une sorte de nouveau partenariat que les centres d'emploi et d'immigration du Canada installent directement sur le terrain. Je vous rappelle une déclaration qu'un éditorialiste faisait à cet effet. C'était Albert Juneau, dans Le Devoir du mois de novembre dernier, et je le cite: "Conformément à sa logique de partenariat, Ottawa éviterait le niveau provincial et s'appuierait uniquement sur les structures locales qui, elles, ont absolument besoin de subventions fédérales pour survivre." Alors, les apparences sont sauves, parce que la Conférence canadienne ne va pas s'appliquer au Québec. Il n'y aura pas de représentant. Les apparences sont sauves, mais la réalité sur le terrain, c'est qu'Ottawa multiplie les relations de partenariat. Pensez simplement au développement de toutes ces ententes en matière de collectivité locale. À ma connaissance, c'est 52 ententes signées sur le terrain qui reproduisent à l'échelle l'équivalent de ce que sont les commissions de formation professionnelle ou ce qu'on souhaiterait qu'elles deviennent et qui les reproduisent dans le cadre de subventions de financement direct d'Ottawa. Alors, est-ce que le ministre ne craint pas, d'une part, que son homologue n'ait jamais le mandat de négocier le rapatriement, qu'entre-temps la chicane fasse rage portes fermées et qu'on n'ait jamais une politique claire de ce que le Québec entend faire en matière d'adaptation de la main-d'oeuvre, et que, pendant ce temps-là, malgré les apparences, là, qui sont sauvées, Ottawa fasse ce qu'y veut sur le terrain en initiant des nouveaux programmes, notamment en matière de stratégie d'intervention locale? (11 h 15)

Le Président (M. Joly): M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, la députée de Hochelaga-Maisonneuve...

Le Président (M. Joly): Les trois questions.

M. Bourbeau: Pour la députée d'Hochelaga-Malsonneuve, c'est dans son habitude de tenter de nous décrire le scénario du pire, scénario

d'horreur, et je dirais presque que c'est une question plantée, parce que j'aurais souhaité qu'elle me pose cette question-là, M. le Président. Et c'est avec plaisir que je vais prendre la peine d'y répondre le plus fidèlement possible. D'une façon générale, je dirais, M. le Président, que le dossier se déroule très bien pour le Québec, en ce sens que nous battons la marche, présentement, plutôt que d'être à la remorque du gouvernement fédéral.

Parlons premièrement des négociations avec le fédéral. Bon, la députée de Hochelaga-Maison-neuve m'a cité, tantôt. Je réitère chacun des mots qu'elle a prononcés, c'est comme ça que ça s'est passé exactement. Moi, je retiens de ces discussions-là avec Mme McDougall, finalement, que les possibilités, les perspectives que le Québec puisse bientôt recouvrer la totalité des pouvoirs en matière de main-d'oeuvre, cette possibilité-là est très réelle, puisque le gouvernement fédéral a, à toutes fins pratiques, renoncé à tenter de convaincre le Québec de négocier de nouvelles ententes, nouvelles ententes que le gouvernement fédéral négocie présentement avec toutes les autres provinces canadiennes et qui vont dans le sens de mettre sur pied, au Canada, une société nationale de formation, dont on a changé le nom pour la société canadienne de main-d'oeuvre, je crois, bon, et à laquelle le Québec a refusé de participer. Et quand je dis que le Québec a refusé de participer à cette société canadienne de formation de main-d'oeuvre, ce n'est pas seulement le gouvernement du Québec qui a refusé, mais tous les partenaires sociaux du gouvernement du Québec qui ont refusé. Le patronat a refusé, les syndicats aussi, le mouvement coopératif; il n'y a pas un seul Québécois, à ma connaissance, qui siège sur ce comité canadien, pour bien indiquer que le Québec est uni et solidaire dans sa volonté de rapatrier tous les pouvoirs en matière de main-d'oeuvre. Il y a un consensus large et profond, au Québec, sur cette question-là, et le gouvernement fédéral le sait. C'est pour ça, je crois, que le gouvernement fédéral a renoncé à tenter d'imposer au Québec de nouvelles formules qui auraient fait en sorte de prolonger le statu quo et même d'augmenter, si je peux m'exprimer ainsi, l'ingérence du gouvernement fédéral dans le domaine de la main-d'oeuvre et de la formation professionnelle.

Maintenant, je ne veux pas critiquer les autres provinces canadiennes; il est possible, même probable, que plusieurs provinces canadiennes soient très satisfaites de voir le gouvernement fédéral envahir ce champ d'activité, parce que certaines d'entre elles ne sont tout simplement pas capables, étant trop petites, de s'occuper de cette question. Et, étant donné que les questions de formation et d'éducation ne rencontrent pas la même sensibilité chez les provinces anglophones, on peut très bien concevoir que certaines provinces plus petites soient très contentes de voir le gouvernement fédéral les libérer de ce problème. Mais, au Québec, ça ne se passe pas de la même façon, pour les raisons que l'on connaît. Alors, moi, je pense, M. le Président, que, finalement, le dossier évolue bien. Vous savez que ce n'est pas moi - et je réponds à cette question-là - qui aurai la responsabilité première du dossier des négociations fédérales-provinciales, les négociations constitutionnelles. Bien sûr, lorsqu'on parlera de main-d'oeuvre, je serai certainement interpellé, mais l'ensemble du dossier des négociations constitutionnelles relève de la responsabilité d'un autre de mes collègues. Alors, jusqu'à ce que s'amorcent ces négociations-là, nous allons maintenir le statu quo, et j'ai l'assurance du gouvernement fédéral que les mêmes fonds que nous avions auparavant vont nous parvenir de la même façon. Nous allons continuer à gérer les programmes comme on le faisait Jusqu'à maintenant, même sous l'ancien gouvernement. J'ai l'assurance de l'ancienne ministre que le fédéral n'implantera pas de nouvelles structures au Québec du genre de celles qu'on veut implanter avec la commission canadienne sur le développement de la main-d'oeuvre et qui aurait fait concurrence, je le reconnais, avec nos commissions de formation professionnelle. Mais, comme j'ai l'assurance que le fédéral ne le fera pas, j'en conclus donc qu'il n'y aura pas cette concurrence indue avec nos commissions de formation professionnelle.

Maintenant, ceci étant dit, pour le reste, quant à moi, j'ai saisi la Conférence permanente sur l'adaptation de la main-d'oeuvre d'une démarche, d'une proposition de démarche concernant les orientations que le gouvernement du Québec voudrait se donner et, enfin, je ne dirai pas "contrairement à ce qu'a dit la députée de Maisonneuve", mais, comme l'a dit la députée de Hochelaga-Maisonneuve, c'est bien ce que nous entendons faire: impliquer au plus haut chef nos partenaires sociaux. La réflexion que nous avons faite et les études que nous avons menées depuis quelques mois nous portent à conclure qu'il est essentiel qu'une réforme comme celle-là se fasse avec le concours des patrons, des syndicats, des travailleurs, et non pas en vase clos au gouvernement. Et j'ai déjà saisi la Conférence permanente de certaines propositions pour fins de discussion, un canevas d'étude sur ce que pourrait être éventuellement une politique gouvernementale et une politique québécoise en matière d'adaptation de la main-d'oeuvre. Nous devrons avoir encore d'autres discussions au cours des prochaines semaines. Je veux tester certaines choses avec nos partenaires sociaux, certaines idées, certaines propositions et, lorsque j'aurai acquis la certitude, M. le Président, que nous sommes dans la bonne voie, je saisirai le Conseil des ministres et le gouvernement et mes collègues d'un projet d'orientation gouvernementale, d'un plan d'action, et ce document-là, éventuellement, sera publié. J'ai l'intention de le

faire à l'automne. Bien sûr, c'est un retard par rapport à ce que j'avais annoncé l'an dernier, mais le retard est dû aux mêmes raisons que j'ai invoquées précédemment, et je peux dire que la Conférence permanente est saisie entièrement et totalement du dossier. On ne peut pas nous le reprocher, on ne peut pas nous dire que le gouvernement ne consulte pas. Il ne fait que consulter. Et, lorsque la politique du Québec sera connue, ce sera une politique qui ne sera pas seulement la politique du gouvernement, mais ce sera une politique de tous les milieux québécois, les mêmes milieux québécois qui se sont montrés solidaires du gouvernement lors de la demande de rapatriement des pouvoirs en matière de main-d'oeuvre, et c'est cette complémentarité, cette solidarité que je veux continuer à cultiver avec nos partenaires sociaux. Alors, j'en donne la garantie aux membres de la commission. Le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle va consulter, va travailler en harmonie avec les partenaires sociaux. C'est la seule façon d'en arriver à un consensus qui va permettre au Québec non seulement de rattraper le retard, mais de prendre l'avance sur les autres provinces canadiennes et même sur le continent nord-américain en matière de développement de la main-d'?uvre, et c'est ce que je souhaite le plus, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Mme la députée de Hochelaga-Malsonneuve, s'il vous plaît.

Mme Harel: En écoutant le ministre, on a l'impression qu'il donne, en tout cas, l'impression d'avoir tout son temps à lui, comme s'il avait paré au pire, là, et qu'il avait sauvé les meubles en obtenant ces versements mensuels des ententes qui sont déjà échues depuis trois ans, qui sont reconduites sans indexation, qui ont été reconduites sans indexation à trois reprises. C'est comme s'il avait, en fait, tout son temps à lui. Et la question que je pose au ministre, c'est: puisqu'il vient de nous dire "jusqu'à ce que s'amorcent les négociations", quand pense-t-il que ces négociations vont s'amorcer? Le ministre nous répond comme s'il n'y avait pas d'urgence en la demeure. Est-ce que, pour lui. c'est une question urgente? Est ce qu'il la fait partager à son collègue responsable des négociations? Quel est le calendrier de négociations? On est en avril 1991. La reconduction, évidemment, ne règle rien. Je n'ai pas besoin de rappeler ce que le ministre disait pas plus tard qu'en décembre dernier. Je le cite: "La présence de deux réseaux de main-d'oeuvre au Québec conduit à une sorte de fouillis auquel il faut mettre fin, sans quoi nous allons nous faire irrémédiablement devancer par les nations plus efficaces qui, elles, fournissent à leur main-d'oeuvre les instruments dynamiques d'adaptation au changement. " Il continuait sur le même ton: "On assiste à une remarquable unanimité sur l'urgence de mettre fin à ce désordre", etc. Ça, c'était il y a six mois. Alors, quand entend-il amorcer des négociations? Quand prévoit-il que son gouvernement amorcera les négociations? A-t-il tenté de faire indexer les ententes? Je vous rappelle, par exemple, l'entente en matière de formation en établissement, qui est de 139 000 000 $ et toujours de 139 000 000 $ depuis 1986, et la perte simplement en non-indexation, ça se chiffre, juste pour cette entente-là, à près de 100 000 000 $ pour les sans-emploi et les travailleurs et les travailleuses du Québec en demande de formation. Alors, est-ce que le ministre peut nous préciser quel est son calendrier?

M. Bourbeau: M.le Président...

Le Président (M. Joly): M. le ministre.

M. Bourbeau:... quand j'écoute la députée de Hochelaga-Maisonneuve, ça me fait penser à une fable de La Fontaine. Vous vous souvenez de la fable où on parlait de la mouche du coche. La députée de Hochelaga-Maisonneuve revient continuellement à la tâche et tente de faire avancer plus rapidement le coche, mais le coche, H avance, M. le Président. Il avance à un rythme qui est le rythme auquel avancent les gouvernements, bien sûr, et le gouvernement du Parti québécois n'avançait pas plus vite. En fait, il n'avançait pas du tout, puisqu'on n'a jamais rapatrié de pouvoirs en matière de main-d'?uvre sous l'ancien gouvernement non plus. Ce que j'ai dit tout à l'heure et ce qu'a cité la députée de Hochelaga-Maisonneuve, c'est encore exact. Je suis encore convaincu, comme elle d'ailleurs, qu'il y a un gouvernement de trop dans le secteur de la main-d'oeuvre et que ça nuit au développement de la main-d'oeuvre québécoise. Mais je ne fais pas seulement le dire, M. le Président, j'agis, aussi, et j'agis concrètement. Le rapatriement des pouvoirs, qui semblait illusoire et utopique il y a un an, il y a peut-être même six mois, aujourd'hui est une réalité qui semble être à notre portée.

Maintenant, la députée de Hochelaga-Maisonneuve me dit: Mais quel est votre agenda? Quand est-ce que vous allez commencer les négociations? Bien, mol, je la réfère au rapport de la commission Bélanger-Campeau. Un rapport unanime, si j'ai bien compris, où toutes les parties ont convenu que la date ultime serait l'automne 1992. Je pense que la formation politique de la députée de Hochelaga-Maisonneuve a consenti à ce rapport-là, aux conclusions du rapport. Dans ces conclusions-là, on parie non pas de demander quoi que ce soit au fédéral, mais on parle d'attendre des propositions. Et c'est même le Parti québécois qui exhortait le gouvernement à ne pas aller quémander quoi que ce soit, mais de s'asseoir tranquillement et

d'attendre que viennent les propositions. Donc, il y a une certaine contradiction entre les propos que tenait le chef du Parti québécois et ceux de la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Son chef nous dit: N'allez pas vous humilier et demander quoi que ce soit, attendez les propositions. La députée de Hochelaga-Maisonneuve nous dit ce matin: Qu'est-ce que vous attendez pour commencer à négocier? M. le Président, je ne sais pas, là. Il faudrait qu'on s'entende. Si la députée de Hochelaga-Maisonneuve veut que je prenne le téléphone et que j'appelle mon collègue, le ministre Valcourt - je peux le faire cet après-midi - pour lui demander de s'asseoir avec moi et de commencer à négocier... Mais je pense que ce n'est pas ça qu'on est censé faire. On est censé attendre les propositions, si j'ai bien compris. Alors, moi, que ce soit l'une des façons ou l'autre, je pense que, d'Ici un an, même moins qu'un an probablement, on aura une bonne idée de ce qui s'en vient du côté des propositions fédérales ou des pouvoirs qui pourraient être transférés au Québec. (11 h 30)

Quant à moi, je n'ai pas l'intention d'attendre la fin des négociations constitutionnelles pour mettre en place les structures qui vont permettre au Québec de devenir le seul maître d'oeuvre dans ce domaine-là. J'ai l'intention de proposer, dès l'automne, un projet de loi qui va proposer des structures, des structures capables de gérer les programmes de main-d'oeuvre, de permettre une meilleure gestion des programmes, parce que c'est une chose que de souhaiter le rapatriement, au Québec, de tous les pouvoirs en matière de main-d'oeuvre, et c'est une autre chose que de dire aux Québécois comment on va s'occuper de ces pouvoirs-là, de quelle façon on va les gérer. Ce serait assez ridicule d'importer des pouvoirs et de ne pas être organisé pour faire en sorte que le dossier de la main-d'oeuvre soit mieux géré qu'il ne l'était auparavant. Il faut donc s'assurer que le Québec a mis en place toutes les structures et tous les programmes qui vont lui permettre, avec le concours de ses partenaires sociaux, de prendre en charge tout le secteur de la main-d'oeuvre et de permettre aux travailleurs québécois de mieux relever le défi de la concurrence, de la productivité et de la qualité totale puisque c'est là, M. le Président, l'objectif recherché.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Mme la députée.

Mme Harel: Oui, une question au ministre. Quand il parle de son intention de légiférer dès l'automne prochain sur les structures, doit-on également comprendre qu'il s'agira de l'ensemble des structures qui comprennent la formation, la qualification professionnelle, la reconnaissance des compétences, l'apprentissage, le recyclage et les diverses formes d'aide à l'emploi: placement, reclassement? Est-ce que le ministre, par exemple, entend légiférer sur les questions de placement?

Le Président (M. Joly): M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Bourbeau: M. le Président, si nous rapatrions l'ensemble des pouvoirs, nous allons intervenir dans l'ensemble de ces secteurs-là et les structures que j'ai l'intention de mettre en place, dont j'ai l'intention de proposer la mise en place, seraient adéquates pour s'occuper de tous les dossiers dont vient de parler la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Le Président (M. Joly): Mme la députée.

Mme Harel: Mais on y reviendra, M. le Président, sur la question du placement, qui est absolument dramatique actuellement, je dirais, en particulier pour la classe ouvrière qui doit faire appel aux petites annonces classées du Journal de Montréal et payer maintenant pour travailler. Moi, c'est régulièrement que mes concitoyens viennent me voir en me disant: Est-ce que ça vaut la peine de débourser les 50 $ que l'on exige en contrepartie de quoi on me propose de me trouver un emploi dans la construction? C'est maintenant une foule de petites annonces de placement; la prolifération des agences privées de placement est, évidemment, extrêmement inquiétante, et on aura l'occasion de revenir là-dessus.

Diminution de la clientèle des programmes de formation professionnelle

Restons sur le terrain de la réalité des programmes en matière de formation professionnelle. Doit-on comprendre que les choses étant reconduites dans le statu quo, le fouillis, l'empiétement que le ministre a bien décrits, faut-il comprendre que le ministre n'entend pas agir cette année pour remédier à la situation qui prévaut dans le programme Achats directs? Peut-être qu'il pourrait prendre connaissance du tableau intitulé "Accord Canada-Québec sur la formation professionnelle de la main-d'oeuvre" et qui nous donne les réalisations pour 1986-1987 jusqu'à maintenant des différents programmes. J'invite peut-être ses adjoints à examiner les dernières pages du cahier explicatif en réponse aux demandes particulières de l'Opposition, les toutes dernières pages, je crois. Là, le ministre va retrouver un tableau assez inquiétant qui nous permet de constater qu'en 1990-1991 le nombre de places réalisées était de 9263 en comparaison de 19 581 en 1986-1987. Alors, il s'agit donc de programmes offerts à des personnes qui sont en situation de relèvement de leur qualification professionnelle, puisque ce sont des personnes qui vont retourner dans des institutions d'enseignement à plein temps, pour obtenir de corriger

les carences qu'elles peuvent avoir. Là, on constate que c'est, finalement, deux fois moins de places qui sont offertes qu'il y a à peine cinq ans, et c'est dans des programmes comme la formation professionnelle au secondaire. On nous donne la ventilation des diminutions; ce n'est pas compliqué, c'est 57 % de moins de places en 1990-1991, en regard de 1986-1987. Puis, ça se continue comme ça. Alors, qu'est-ce que le ministre entend faire, et son ministère, pour corriger cette situation-là? Est-ce que c'est une situation, cette diminution de moitié, qui leur apparaît raisonnable?

Le Président (M. Joly): M. le ministre.

M. Bourbeau: Vous comprendrez que l'avantage qu'a l'Opposition par rapport à nous, c'est que c'est elle qui lance les débats et on doit évidemment, ne sachant pas d'avance sur quel oiseau la députée va tirer, aller faire sortir les cages pour aller voir un peu partout où sont les oiseaux. Alors, la députée veut avoir des renseignements sur Achats directs, les diminutions de clientèles dans le programme Achats directs au ministère de l'Éducation. C'est ça?

Mme Harel: C'est-à-dire qu'on n'a malheureusement pas les données du ministère de l'Éducation. Les seules données que l'on a sont celles d'Achats directs effectués dans le cadre du ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle. Malheureusement...

M. Bourbeau: Oui, mais la formation se donne quand même dans le réseau de l'Éducation.

Mme Harel: ...le ministère nous dit qu'il n'est pas en mesure de nous fournir toutes les autres données concernant le ministère de l'Éducation, le ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration et le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science au niveau des budgets. C'est donc dire que ces ministères-là ne vous les fournissent pas si vous, vous n'êtes pas en mesure de les fournir à l'Opposition. C'est difficile pour vous d'avoir une vue d'ensemble de la situation si vous n'avez pas les budgets qui ont été dépensés par les autres ministères dans le cadre du programme Achats directs. Mais, pour ce qui concerne juste le vôtre, votre ministère, ce que ça nous indique, c'est qu'il y a une diminution de clientèles d'à peu près la moitié depuis cinq ans.

M. Bourbeau: M. le Président.

Le Président (M. Joly): M le ministre.

M. Bourbeau: C'est un secret pour personne que depuis trois, quatre, cinq ans, les budgets fédéraux qui sont accordés au Québec par le gouvernement fédéral dans ce dossier-là sont gelés à la somme de 139 000 000 $ par année Une partie de ces budgets-là va au ministère de l'Éducation pour soutenir la structure de l'éducation des adultes et l'éducation aux travailleurs qui transitent par nos programmes, et c'est évident qu'avec un budget qui ne bouge pas depuis cinq ans - depuis cinq ans exactement, oui - avec les coûts accrus de conventions collectives au ministère de l'Éducation, les fonctionnaires, etc., les coûts de formation, on ne peut pas en faire autant cinq ans après qu'on en faisait il y a cinq ans, de sorte que la clientèle, c'est bien évident, a baissé dans ces programmes-là.

Mais, parallèlement à ça, il y a d'autres développements qui se produisent et, si on a moins de cours de donnés dans certains programmes, il y en a d'autres qui se donnent ailleurs, comme, par exemple, le nouveau programme de crédits d'impôt à la formation qui va permettre la formation de nombreux travailleurs. La philosophie véhiculée par le gouvernement fédéral et à laquelle nous adhérons aussi de plus en plus fait en sorte de tenter de convaincre les entreprises de s'impliquer dans la formation de leur personnel plutôt que de laisser les individus à eux-mêmes, si je peux m'exprimer ainsi. Le fédéral fait un virage marqué du financement des structures publiques d'enseignement pour inciter les entreprises à voir à la formation de leur personnel et à dépenser des sommes d'argent, et le fédéral, évidemment, vient en aide aux entreprises. Nous, nous pensons aussi qu'il est important d'inciter les entreprises à le faire et nous le faisons. D'ailleurs, l'article que je citais tantôt de la Presse Canadienne indique que notre message passe bien. Les entreprises québécoises y viennent. Alors, quand on parie de formation de la main-d'oeuvre, il faut regarder ça dans un contexte global. On peut isoler un programme particulier où il y a un peu moins de clientèles, mais il faut regarder les autres aussi. Lorsque le Québec aura rapatrié la totalité des pouvoirs en matière de main-d'oeuvre, nous pourrons décider, à ce moment-là, combien d'argent va dans le réseau scolaire public, combien d'argent va dans le support aux entreprises, aux individus, etc.

Mme Harel: Cependant, il y a deux éléments que vous ne considérez pas dans la réponse que vous me faites, le premier étant que ce crédit d'impôt à la formation, que vous ne pouvez pas chiffrer, d'ailleurs - ce n'est que des supputations que vous faites qu'il pourrait être utilisé et servir a la formation - mais ce crédit d'impôt ne l'est que pour des travailleurs et travailleuses en emploi. D'autre part, quand vous nous dites que c'est là le virage que le fédéral a pris dans le cadre de sa réforme de l'assurance-chômage, alors, il faut voir que c'est pour des personnes déjà à l'emploi.

Et si on revient aux éléments que vous

nous mentionniez dans votre discours d'ouverture, à l'ensemble de ces personnes qui sont maintenant sur l'aide sociale, .qui est une sorte d'assistance-chômage, après avoir épuisé leur assurance-chômage, qu'est-ce que vous leur offrez comme relèvement de leur niveau professionnel? Alors, vous nous dites: Ces programmes-là diminuent constamment parce que, finalement, le virage, c'est de consacrer le plus d'argent possible à la formation aux personnes en emploi. Est-ce que ça veut dire qu'on abandonne à leur sort celles qui, à cause des changements, des bouleversements du marché du travail, ont perdu leur emploi et, au moment même où elles sont de plus en plus en nombre grandissant, les programmes qui leur sont offerts sont, finalement, c'est ce qu'on peut constater, en réduction?

Vous aviez fait un discours devant l'Association des CFP où vous énonciez, au mois d'octobre, l'an dernier, le plan d'action pour les prochains mois, à l'intérieur duquel... Ah, c'était un discours au ministère? Excusez-moi. C'était un discours au ministère dans lequel vous disiez ceci: "L'Accord Canada-Québec sur la formation en établissement a été reconduit jusqu'au 31 mars, mais l'engagement du gouvernement fédéral est lié à certaines conditions assez problématiques. Ainsi, il veut clairement se désengager de ce genre d'entente d'ici 1994-1995. Pour ce faire, il a l'intention de réduire progressivement les achats de cours aux établissements publics à compter du 31 mars prochain." Ça, c'était le 31 mars passé. Qu'est-ce qui en est présentement? Pouvez-vous nous donner l'heure juste en matière de désengagement du gouvernement fédéral à l'égard du programme de formation en établissement? La formation en établissement, c'est les cours de formation professionnelle ou de langue, par exemple des cours de français, qui se dispensent à des personnes en recherche d'emploi dans les cégeps ou dans les écoles secondaires.

M. Bourbeau: M. le Président, je suis content de voir que la députée de Maisonneuve lit attentivement tous les discours que je prononce et qu'elle se tient au courant de l'évolution de la pensée ministérielle. Je pourrais peut-être la consulter, à l'avenir, dans la préparation de mes prochains discours. Ça éviterait, évidemment, de trop longues discussions lors de l'étude des crédits. On serait en parfaite harmonie. (11 h 45)

Pour revenir à ce dont vient de parler la députée de Hochelaga-Maisonneuve, c'est sûr, je l'ai dit précédemment, que le gouvernement fédéral veut faire un virage dans sa façon de subventionner - enfin, je parle pour les autres provinces canadiennes parce que, au Québec, ça ne devrait plus s'appliquer à partir de l'an prochain, j'espère - mais veut cesser pratiquement de subventionner Achats directs pour aller vers formation sur mesure en entreprise, et veut donc faire un virage vers l'entreprise plutôt que vers les réseaux traditionnels d'éducation. Le gouvernement fédéral, sa politique nouvelle vise à responsabiliser les individus et les entreprises et à les préparer davantage aux réalités du marché du travail plutôt que de subventionner des réseaux publics d'éducation qui, dans son esprit peut-être, ne prépareraient pas aussi bien au marché du travail que pourrait le faire l'autre façon de faire les choses. C'est pour ça qu'année après année le gouvernement fédéral modifie la répartition de ses sommes d'argent et que les 139 000 000 $, par exemple, qui, il y a cinq ans, allaient en totalité au programme Achats directs, pour les achats directs sont maintenant partagés entre Achats directs et formation sur mesure, de sorte qu'il y a un retrait progressif du gouvernement fédérai du dossier Achats directs pour aller vers le financement de la formation sur mesure. Et cette tendance, elle est inexorable en ce qui concerne le gouvernement fédéral. Et je dois dire que, personnellement, je partage la philosophie du gouvernement fédéral de tenter de s'assurer que c'est les impératifs du marché du travail qui doivent être pris en compte beaucoup plus qu'auparavant quand on parle du recyclage de la main-d'oeuvre en emploi ou de la main-d'oeuvre québécoise. Je suis tout à fait d'accord avec cette philosophie-là, non pas qu'il faille négliger en aucune façon la formation générale, la formation de base, c'est extrêmement important aussi, mais je pense qu'il faut bien faire la distinction entre la formation de base, la formation initiale des jeunes et le recyclage, le relèvement des compétences d'une main-d'oeuvre qui est déjà en emploi depuis souvent très longtemps et qui, parfois, est menacée de perdre son emploi.

Mme Harel: Qu'est-ce que vous allez offrir aux sans-emploi, parce que là, M. le ministre, vous nous dites que vous, personnellement, êtes favorable? Doit-on comprendre que ce n'est pas encore une politique de votre gouvernement?

M. Bourbeau: Je m'excuse, M. le Président. Est-ce que la députée pourrait reprendre sa question?

Le Président (M. Joly): S'il vous plaît!

Mme Harel: Oui, certainement. Deux simples questions. Vous, personnellement, vous y êtes favorable à ce virage, dites-vous, à fa formation en entreprise, donc à des travailleurs et travailleuses en emploi, plutôt qu'à une formation dans les établissements scolaires pour des personnes, soit en emploi ou soit sans emploi, qui vont y chercher la formation professionnelle. Si vous, vous y êtes favorable personnellement, est-ce là l'opinion de votre gouvernement et est-ce à dire que c'est là la politique que votre gouvernement entend mettre de l'avant, d'une part? Et, d'autre part, si c'était le cas, le virage que vous enten-

dez prendre pour des travailleurs en emploi, qu'est-ce que vous allez offrir aux sans-emploi?

M. Bourbeau: M. le Président, je ne peux pas répondre mieux à la députée de Hochelaga-Maisonneuve que de la référer au programme de crédit d'impôt à l'entreprise, le crédit d'impôt remboursable aux entreprises que le ministre des Finances a annoncé dans le budget de l'an dernier. Pour la première fois, je pense, dans l'histoire du Québec, le ministre des Finances a annoncé un programme qui laisse le choix aux entreprises en ce qui concerne le formateur. Jamais auparavant, le gouvernement n'avait subventionné des programmes qui disaient, par exemple, aux clients, à la clientèle, l'entreprise ou l'individu: Allez donc voir le formateur de votre choix et nous allons vous rembourser les dépenses de formation. Jusqu'à maintenant, je pense que la politique du gouvernement du Québec était assez fermée à ce sujet-là. Aujourd'hui, c'est une politique d'ouverture vers les entreprises et je pense que ça augure bien pour l'avenir, non pas qu'il faille négliger le réseau de l'éducation du Québec. Le réseau d'éducation du Québec est et demeure la principale source de formation professionnelle tant pour les jeunes que pour les adultes. Mais je pense que ce qui importe, c'est de s'assurer qu'en ce qui concerne les travailleurs québécois ils auront accès aux meilleurs formateurs possible, aux meilleurs formateurs disponibles. Et si le meilleur formateur, c'est le réseau public d'éducation, tant mieux, nous en serons, tout le monde, collectivement très ravis. Mais s'il advient, dans certains cas, que le réseau public ne peut pas fournir une formation de qualité et que le réseau privé d'éducation puisse le faire ou encore que le réseau privé privé, que les éducateurs, les formateurs privés non subventionnés puissent le faire mieux, je pense que nous avons un devoir de s'assurer que nos travailleurs seront formés par les meilleurs formateurs disponibles.

Mme Harel: Je pense, M. le ministre, que vous n'avez pas compris ma question. Vous me parlez des formateurs et, moi, je vous parle des élèves. D'abord, reprenons la réponse que vous me faites. Le crédit d'impôt à la formation, vous n'en savez rien et moi non plus, parce qu'on n'en saura rien avant septembre prochain. Si ça vaut comme réponse dans les crédits, ça vaut autant pour les bénéfices que vous en escomptez que pour ce que je peux en constater comme faiblesse de participation, mais on verra à l'usage. Ce qu'on sait, en tout cas, en général, c'est que tout ce qui est conçu au ministère des Finances en matière de main-d'oeuvre, ce n'est pas, en général, très performant; on l'a vu avec le programme APPORT et. malheureusement, j'ai l'impression que ça va être à peu près la même chose avec le programme de crédit d'impôt à la formation, et ça, on verra. Et vous êtes comme

Thomas, là, il vous faut vous mettre les doigts dans les plaies bien comme il faut pour accepter ce que je vous dis, mais j'ai peur que ce que je vous dis devienne réalité dans à peine quelques mois.

Cependant, moi, la question que je vous pose, c'est celle des gens sans emploi. Vous me dites: Le virage, là, c'est mettre l'argent de la formation là où il y a des entreprises qui peuvent aller chercher des crédits d'impôt pour qualifier leur main-d'oeuvre en emploi. Moi, je vous parle de la main-d'oeuvre sans emploi. Je constate simplement qu'il y a moitié moins d'offres de places maintenant qu'il y a cinq ans dans les établissements. Vous me dites: Ce n'est pas grave, il va y en avoir plus en emploi. Mais celle qui ne travaille pas, où va-t-elle aller chercher sa formation? C'est ça ma question.

M. Bourbeau: M. le Président, la députée de Hochelaga-Maisonneuve porte un jugement sévère à l'endroit du ministère des Finances du Québec.

Mme Harel: Sévère, mais juste.

M. Bourbeau: Moi, je ne suis pas, évidemment, dans le secret des dieux comme semble l'être la députée de Hochelaga-Maisonneuve en ce qui concerne l'avenir; elle semble nous annoncer d'avance un nouveau programme dans le budget du Québec, programme qui, selon elle, aurait des failles avant même qu'il soit annoncé. Alors...

Mme Harel: Non, non, non. Je vous parle du crédit d'impôt à la formation dont on ne saura rien avant les relevés qu'on nous dit ne pas être disponibles avant septembre prochain.

M. Bourbeau: Ah bon! Je m'excuse. Je croyais que la députée de Hochelaga-Maisonneuve avait une prémonition concernant le prochain budget. Ce que je dirais, M. le Président, c'est qu'il est trop tôt pour porter un jugement sur l'efficacité ou la non-efficacité du programme de crédit d'impôt à la formation en entreprise, non pas parce que le programme n'est pas bon, mais c'est un programme qui est axé sur la fiscalité. Et on sait que, pour pouvoir avoir des statistiques, il faut attendre que l'année soit terminée, que le ministère du Revenu ait analysé les rapports d'impôt et que le ministère du Revenu ait constaté combien d'entreprises se sont prévalues du programme et combien ont réclamé les déductions. On saura à ce moment-là quel est le volume de formation qui a été effectué et quel est son coût? Quant à moi, j'espère que ça va être un coût astronomique pour faire en sorte que beaucoup de travailleurs québécois auront eu l'occasion d'en bénéficier, tout en ne me leurrant pas sur la performance d'un nouveau programme. On sait qu'un nouveau programme qui démarre, dans quelque gouvernement que ce soit, ce n'est

en général pas la première année qu'il est le plus performant. Il y a une inertie qui fait en sorte qu'en général il faut attendre la deuxième année avant d'atteindre un certain rythme de croisière. On l'a vu avec des programmes comme PAT A, par exemple, qui a atteint son rythme de croisière, à toutes fins pratiques, la troisième année. Alors, on verra, M. le Président, mais je pense qu'il faut donner le temps au programme de s'implanter.

Pour ce qui est de la réponse à la dernière question de la députée de Hochelaga-Maison-neuve, les travailleurs sans emploi, qu'est-ce qu'on peut faire pour eux? Bien, dans le système actuel, ils peuvent bénéficier du programme Recyclage et perfectionnement de la main-d'oeuvre et, également, du programme Transition-Travail pour les femmes. Donc, il y a déjà un programme qui existe. Et pour l'avenir, nous avons l'intention d'avoir un programme spécifique à l'intention des individus, un programme qui ne s'adressera qu'aux individus, un programme général, un programme-cadre, là, et qui fera en sorte que, quand un individu se présentera chez nous, on le recevra à un guichet spécifique pour les individus. Il y aura aussi un programme pour les entreprises. On va simplifier le nombre de programmes; on a l'intention d'avoir quatre programmes seulement, éventuellement. Alors, imaginez-vous, quand on additionne le nombre de programmes que le fédéral a présentement et que nous avons, notre intention est de n'avoir que quatre programmes éventuellement: un pour les entreprises, un pour les particuliers, un pour les travailleurs licenciés et un qui se préoccuperait du problème des CAMO sectoriels, ou territoriaux, si vous voulez, des comités d'adaptation de la main-d'oeuvre. Alors, je pense que, pour l'avenir, on a une bonne idée de ce qu'on veut faire et, pour le présent, j'ai donné les explications requises.

Mme Harel: M. le Président, c'est intéressant que le ministre me renvoie, pour le présent, au programme Recyclage et perfectionnement. Je voudrais vérifier avec lui les chiffres qui nous ont été soumis pour l'examen des crédits. Ce sont ceux qui s'intitulent "Étude des crédits 1991-1992, nombre de participants par région pour chacun des programmes de formation et de qualification professionnelles, année financière 1989-1990". Vous avez ensuite, "Estimation du nombre de participants par région pour chacun des programmes de formation professionnelle, année financière 1990-1991". Ça, ce que ça laisse entrevoir, c'est qu'il y a eu une baisse encore plus importante du nombre de participants dans les programmes de formation financés par Québec. Par exemple, le programme Recyclage et perfectionnement, c'est une diminution de 20 756 participants, et c'est justement ce programme que le ministre me cite comme pouvant remédier à la baisse de participation dans les programmes qui relèvent des ententes fédérales-provinciales, qu'on appelle Achats directs dans les établissements d'enseignement.

Alors, ou bien les chiffres qui m'ont été fournis ne sont pas complets, je pourrais le comprendre là; alors, tout de suite, s'il pouvait me les corriger, sinon, ce que moi, je dois constater, c'est qu'en regard des programmes du ministère proprement dits, donc sans qu'on puisse invoquer les empiétements ou les fouillis de juridiction, en regard des programmes du ministère, en tout cas sans qu'on puisse invoquer les empiétements ou les fouillis avec l'autre palier de gouvernement, mais on peut peut-être invoquer des empiétements ou le fouillis à l'intérieur du gouvernement du Québec entre ministères, c'est peut-être ça l'autre problème... Mais les chiffres qui nous ont été remis de la Direction générale de la main-d'oeuvre et de la formation professionnelle, en tout cas, nous obligent à constater une diminution nette pour tous les programmes qui sont mentionnés, soit Formation générale et professionnelle à temps complet, Soutien à la formation en entreprise, Stages en milieu de travail, Recyclage et perfectionnement, formation sur mesure à l'emploi, formation sur mesure (employabilité), Planification de l'emploi, Transition-Travail. Donc, pour tous ces programmes qui sont, si vous voulez, à la fois des programmes québécois pour certains d'entre eux ou des programmes partagés pour d'autres, pour le total, c'est une diminution de 31 889 participants, et le programme qui, à lui seul, explique les deux tiers de la réduction de participants pour une année, c'est Recyclage et perfectionnement, celui-là même que le ministre vient d'invoquer. Puis Recyclage et perfectionnement, c'est justement un programme qui s'adresse aux personnes en emploi et en recherche d'emploi, qui veulent s'adapter aux changements technologiques, qui veulent s'adapter aux changements du marché, et c'est justement le programme qui s'adresse aux besoins de formation des petites entreprises.

Alors, comment pouvez-vous expliquer une réduction comme celle-là? À moins que les chiffres que vous m'avez fournis ne soient pas les bons. Mais, en comparaison avec les autres années, comment vous l'expliquez cette réduction-là, de 31 000 pour le total des programmes, puis de 20 000 pour le programme Recyclage et perfectionnement? Au niveau du Québec, ça veut dire des personnes qui, en un an, ne participent plus à des programmes de formation professionnelle.

M. Bourbeau: M. le Président, j'ai déjà donné la réponse à la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Il est sûr qu'à partir du moment où les fonds requis pour la formation sont les mêmes, ne sont pas indexés - je parlais tantôt de la somme de 139 000 000 $ qui nous parvient du gouvernement fédéral et qui est la même

depuis cinq ans, et encore là iI y a une politique fédérale visant à réduire la partie de ces fonds-là qui va dans Achats directs au profit de formation sur mesure - c'est bien évident que plus le temps passe et plus les fonds sont les mêmes, ou même en diminution, moins on peut former de gens, parce que les coûts de formation augmentent, les coûts de conventions collectives... (12 heures)

Mme Harel: Je comprends cette réponse et je comprends que vous me la refaisiez, mais ce n'est pas possible que vous invoquiez cet argument-là en regard du programme Recyclage et perfectionnement de la main-d'?uvre. C'est un programme uniquement financé par Québec et qui est offert par le ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle. Alors, vous ne pouvez pas me servir l'argument de la diminution des fonds fédéraux et de leur non-indexation, ce que vous avez invoqué pour expliquer la moitié de la participation dans Achats directs. Là, c'est un programme où il y a une réduction de 20 000 participants et c'est exclusivement un programme québécois.

M. Bourbeau: M. le Président, la députée de Maisonneuve a le choix des questions et, moi, je pense avoir le choix des réponses et je veux bien, lorsque je fais une réponse, pouvoir la mettre en perspective. Alors, je veux bien arriver à répondre à la question de la députée de Maisonneuve, mais en soulignant que le phénomène dont elle parte n'est pas un phénomène exclusivement québécois. C'est un phénomène canadien, si je peux m'exprimer ainsi, où les coûts de formation augmentent de plus en plus année après année, de sorte qu'avec les mêmes fonds, bien, on ne peut pas faire autant de formation une année après l'autre. Et c'est pour ça, M. le Président, que nous réclamons instamment du gouvernement fédéral le rapatriement au Québec de tous les pouvoirs en matière de main-d'oeuvre parce que trop d'argent se gaspille inutilement en dédoublement, en structures qui se superposent, qui se concurrencent et qui font en sorte que, finalement, on n'a pas autant d'argent pour la formation professionnelle qu'on pourrait en avoir s'il n'y avait qu'une seule structure et s'il n'y avait pas continuellement ce dédoublement, ce chevauchement, cette compétition inutile, parfois cette contradiction entre les programmes. Et, M. le Président, je déplore, quant à moi, la situation présente et, dès que j'ai eu fini de faire le tour de ces dossiers-là, le constat que j'ai fait, justement, c'est qu'on n'en avait pas pour notre argent en matière de formation de la main-d'oeuvre ou de programmes de main-d'oeuvre, en ce sens qu'il y a trop d'argent qui est dépensé pour des structures et pas assez pour les programmes, et c'est pour ça que le Québec a demandé, étant en ce domaine-là appuyé d'une façon totale et absolue par ses partenaires sociaux, a demandé de mettre fin a ce régime de duplication de sorte qu'il n'y ait dorénavant qu'un seul gestionnaire des programmes de main-d'oeuvre au Québec, permettant ainsi de dégager un maximum de sommes d'argent pour les programmes comme, par exemple, le programme Recyclage et perfectionnement.

Mme Harel: Mais, M. le ministre, vous êtes le seul gestionnaire du programme Recyclage et perfectionnement. Et quand vous nous dites qu'il y a des programmes qui se superposent et se concurrencent, dans le cas de Recyclage et perfectionnement et des programmes québécois, bien, ça ne peut être qu'entre ministères du même gouvernement. C'est là une évidence. Il y a une diminution pour ce programme-là. Je ne parle même pas des autres programmes qui sont financés par des fonds fédéraux. Celui-là, il est géré par Québec, financé par Québec, offert par Québec et, là, il y a une réduction. Or, vous dites que cette réduction, elle est due à l'augmentation des coûts. Mais ça supposerait que s'il y avait un vrai effort en matière de formation professionnelle vous augmenteriez les budgets. S'il y a augmentation des coûts, c'est que vos collègues de l'Éducation ou de l'Enseignement supérieur et de la Science font valoir qu'il y a des budgets qui sont plus importants. Comment expliquer que, dans les crédits en matière d'activités de formation et en matière de financement du fonctionnement des commissions de formation professionnelle, il y ait, finalement, non-indexation et, en plus, réduction? Une non-indexation depuis trois ans et une réduction - vous allez me dire: Elle est légère, c'est 0, 4 %. Mais ça veut dire qu'il n'y a pas d'augmentation au moment où, pourtant, on parie d'efforts inégalés qu'il faut consentir pour relever le niveau de qualification et compétition-ner avec les nations concurrentes qui, elles, investissent majoritairement. Comment vous pouvez soutenir votre discours?

M. Bourbeau: Sans aucune difficulté, M. le Président. Je viens, tout à l'heure, de donner une des raisons qui font qu'en matière de formation de la main-d'oeuvre on n'en a pas pour notre argent à cause de la duplication des structures Je ne reviens pas là-dessus. Je crois avoir convaincu la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mais, M. le Président, quand la députée de Hochelaga-Maisonneuve prend sa loupe, elle regarde un seul programme et elle dit: Ah! Vous n'augmentez pas vos crédits dans ce programme-là, donc vous n'avez pas la volonté de mettre les efforts qu'il faut pour s'assurer que la main-d'oeuvre québécoise obtienne les mesures d'adaptation dont elle a besoin. Mais il faut regarder l'ensemble des efforts gouvernementaux. C'est possible que dans un programme il n'y ait pas d'augmentation une année donnée, mais si on

regarde l'ensemble des programmes on voit que le gouvernement du Québec fait des efforts considérables, beaucoup plus considérables que par le passé. Je reviens encore à la mesure du crédit d'impôt à la formation annoncé l'an dernier, où on a débloqué 100 000 000 $ d'un seul coup. Mais c'est énorme en matière d'effort gouvernemental. Il faut prendre ce programme-là aussi en perspective quand on parle du programme Recyclage et perfectionnement. Le gouvernement du Québec a des priorités. Il y en a pour les individus, il y en a pour les entreprises, mais je l'ai dit tantôt, nous voulons mettre l'accent sur les entreprises, inciter fortement les entreprises québécoises à s'impliquer dans la formation de leur personnel et, justement, le gouvernement québécois n'a pas hésité à mettre, comme on dit, son argent où les maux sont - je ne sais pas quelle est la traduction française de ça, M. le Président; peut-être que vous, qui êtes un linguiste, pourriez nous le dire. Mais nous n'avons pas hésité à faire les efforts financiers que notre discours sous-tendait, de sorte que, si on fait le total, on se rendra compte que le gouvernement du Québec a augmenté et va augmenter singulièrement son effort monétaire et financier en matière de formation de la main-d'oeuvre au cours de l'année présente, par exemple, par rapport à l'année dernière. Rien ne nous dit, M. le Président, qu'on ne peut pas espérer que dans les semaines et les mois qui viennent le gouvernement du Québec ne décidera pas encore d'autres mesures. Continuons d'espérer. La députée de Hochelaga-Maisonneuve peut bien isoler un programme en particulier, mais si elle regarde l'ensemble du tableau - je pense que les faits sont là pour le prouver - le gouvernement du Québec augmente d'une façon considérable ses efforts en matière de formation et d'adaptation de la main-d'oeuvre.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Je vais reconnaître maintenant M. le député de Verdun, s'il vous plaît.

M. Gautrin: M. le Président, j'aurais, dans un programme tout à fait particulier, une question à vous poser, M. le ministre. Ça touche le sud-ouest de Montréal. Dans vos remarques préliminaires - vous savez qu'il y a un programme particulier pour la réinsertion de la main-d'oeuvre dans le sud-ouest et la formation - vous avez signalé que 432 personnes avaient pu bénéficier de ce programme, que 52 entreprises avaient mis sur pied des activités de formation. Dans le livre des crédits, vous identifiez pour ce programme 1 500 000 $ pour l'année qui va venir. Est-ce que vous pouvez nous donner des idées? Qu'est-ce que ça signifie en termes de personnes? C'est-à-dire le montant d'argent que vous allez... Qu'est-ce qu'on peut estimer en termes de personnes qui vont être touchées par ce programme-là? Le montant de 1 500 000 $ correspond à quoi dans vos estimés pour les résidents du sud-ouest et les entreprises qui peuvent être touchées?

Le Président (M. Joly): M. le ministre.

M. Bourbeau: Je veux bien comprendre la question du député, vous pariez du budget de 1 500 000 $ affecté au sud-ouest.

M. Gautrin: C'est ça.

M. Bourbeau: Vous voulez savoir quel va être le nombre d'entreprises et d'individus...

M. Gautrin: C'est-à-dire, dans votre estimé, dans le livre des crédits, compte tenu des réalisations que vous avez déjà faites l'année passée, ce montant d'argent que vous donnez aux crédits, qu'est-ce que vous estimez comme réalisations potentielles en termes d'individus touchés et d'entreprises pouvant bénéficier d'un tel programme?

Mme Harel: M. le Président, peut-être peut-on suggérer que le ministre prenne avis de la question?

Le Président (M. Joly): M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, je ne sais pas si on ne pourrait pas convenir que quand les députés, de quelque formation qu'ils soient, veulent poser des questions précises, si on avait un préavis de quelques minutes, ça permettrait de sortir les dossiers.

Le Président (M. Joly): Oui, mais je pense que c'est...

M. Bourbeau: On a des caisses de documents, mais, évidemment...

Le Président (M. Joly): C'est normal.

M. Bourbeau: J'ai des statistiques un peu plus précises. Le sud-ouest de Montréal, c'est très important, c'est évident, mais il faut quand même y arriver là. Alors, au cours de l'année qui se termine en ce qui concerne le sud-ouest de Montréal, l'année qui s'est terminée le 31 mars, j'ai les statistiques à la fin de février. Je commence par donner l'année précédente. Alors, dans les programmes réguliers, on a traité, enfin, on s'est occupé de 2856 personnes qui ont participé à nos activités; des candidats en formation dans le sud-ouest, dans les programmes réguliers, 2856. J'ai ici la ventilation par programmes. Par exemple, je peux dire que, dans le programme Recyclage et perfectionnement professionnel de la main-d'oeuvre, on a eu 672 personnes qui ont participé; en ce qui concerne Achats directs, 563 personnes, donc, c'est des

chiffres quand même intéressants; et les besoins ponctuels de Recyclage et perfectionnement de la main-d'oeuvre, 947 personnes. En ce qui concerne tes organismes, nous avons contacté 27 nouveaux organismes; nous avons fait l'estimation de besoins auprès de 65 organismes et le nombre d'organismes bénéficiant de formation des programmes réguliers spécifiques est de 52.

Maintenant, pour ce qui est du programme spécial annoncé en cours d'année, nous avions un budget de 700 000 $. À la fin de février, nous avions 527 000 $ de dépensés et des engagements à venir qui nous permettaient de penser que le budget aura probablement été dépensé à peu près en totalité. Ce budget qui était de 700 000 $ pour l'année dernière va être porté à 1 500 000 $ au cours de l'année qui vient.

M. Gautrin: Ça veut dire que vous allez doubler, probablement, les activités.

M. Bourbeau: On va plus que doubler le budget spécial, mais on va quand même maintenir notre budget régulier qui, comme vous le savez, est d'à peu près aussi 600 000 $ pour le sud-ouest. Alors, vous avez une petite idée du nombre de personnes.

Maintenant, pour le budget spécial dont je vous disais, tout à l'heure, que nous avions dépensé, à fin de février, 527 000 $: les bénéficiaires de services d'aide personnelle, par exemple, par le réseau, 239 personnes; la CFP, 39 personnes; les établissements d'enseignement, 24, pour un total de 302. Les candidats en formation dans les programmes spéciaux: le nombre, dans les cours à plein temps, était de 58; les lettres de gratuité, 3; cours sur mesure pour entreprises, 36; les autres projets d'initiative locale, 33, pour un total de 130. Alors, ça, c'est le tableau pour l'année dernière et, pour ce qui est de l'année qui vient, bien, vous pouvez peut-être multiplier ces chiffres-là par deux et on aura une idée du nombre de personnes.

M. Gautrin: Merci.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve. (12 h 15)

Mme Harel: Oui, merci, M. le Préskient. Alors, je voudrais reprendre là où la réponse du ministre nous laissait tantôt. Je pense qu'il a bien tort de me reprocher d'évoquer le programme Recyclage et perfectionnement. C'est le programme qui explique à lui seul la perte de 20 000 participants et 30 000 places en formation professionnelle au Québec. Alors, si ce n'est pas suffisant pour attirer son attention, je me demande ce qu'H lui faut. Moi, je dois vous dire que ça m'inquiéterait joliment si je me rendais compte qu'un programme administré, géré et offert par Québec, en une seule année, est réduit de 20 000 participants. J'essaierais de voir ce que je dois faire pour corriger la situation. Le ministre ne peut pas invoquer d'avoir débloqué sur papier des fonds en matière de crédit d'impôt à la formation. Pour tout de suite on ne sait rien de ce qui sera dépensé Les 100 000 000 $ qu'il invoque, pour tout de suite c'est 100 000 000 $ sur papier. On n'en sait rien, là, de ce qui sera dans la réalité, dans cette pério de, dans l'année de récession que l'on termine, de ce qui aura été utHisé par les entreprises, et par quelles entreprises? Est-ce que c'étaient celles qui faisaient déjà de la formation et qui vont se trouver à être récompensées en se faisant rembourser ce qu'elles consacraient, de toute façon, auparavant? On verra. Mais, justement, à ce sujet-là du crédit d'impôt, j'aimerais savoir du ministre quand a eu lieu le sondage dont on a les résultats dans les crédits, ce sondage qui nous permet de constater que 86 % des entreprises interrogées n'ont pas l'intention de se prévaloir du crédit d'impôt et que 6 % des entreprises interrogées disent s'en être prévalues. Alors, quand est-ce qu'il a eu lieu exactement le sondage?

M. Bourbeau: M. le Président, pour répondre à la première partie de la question de ta députée de Hochelaga-Maisonneuve qui dit qu'il y a eu une diminution de la clientèle dans le programme Recyclage et perfectionnement, il faut bien comprendre que c'est une formation qui se donne dans les institutions publiques, au secondaire ou au cégep. Je pense que c'est une tendance dans les pays industrialisés, de plus en plus tenter de faire en sorte que la formation se donne sur les lieux de travail, la formation pratique en tout cas, plutôt que dans des institutions d'enseignement. On le voit, par exemple, dans un pays comme l'Allemagne qui a un taux de décrochage inférieur à 10 % et qui a des résultats très spectaculaires avec sa formation professionnelle et où l'enseignement se donne essentiellement dans les entreprises, avec un complément, bien sûr, de formation théorique en institution, mais une alternance entreprise-institution, avec l'accent mis spécialement sur la formation en entreprise.

Au Québec, traditionnellement, on avait toujours connu une seule forme de formation, c'est-à-dire la formation dans les maisons d'enseignement, de sorte qu'on a toujours tenté de transposer dans la maison d'enseignement la situation d'une entreprise. On veut recréer, si vous voulez, dans une atmosphère d'une école un lieu de travail, alors que la tendance dans bien des pays qui ont du succès, c'est de faire l'inverse, c'est de transporter les étudiants dans le milieu de travail, ce qui leur permet non seulement d'acquérir une formation concrète dans un milieu de travail, mais aussi une espèce de culture de l'entreprise. Ces deux écoles de pensée qui ne sont pas nécessairement partagées par tout le monde, je m'associe plus facilement à

la dernière qu'à la première, tout en reconnaissant qu'on peut quand même former des étudiants dans un milieu d'enseignement. On peut tenter de recréer artificiellement un milieu de travail en école; on peut le faire avec plus ou moins de succès à l'occasion. Et s'il y a une diminution dans le programme Recyclage et perfectionnement où, justement, la formation se donne en milieu institutionnel, par contre, il y aura augmentation spectaculaire, j'espère, de la formation en entreprise grâce surtout au nouveau programme, le crédit d'impôt à la formation en entreprise, où on se propose de mettre à la disposition des entreprises une somme de 100 000 000 $. Je pense que les travailleurs québécois ne devraient pas y perdre au change, parce qu'il y aura plus d'argent de disponible avec le nouveau programme de crédit d'impôt et, deuxièmement, la formation se fera en entreprise essentiellement.

Maintenant, la deuxième question de la députée portait sur un sondage qui a été effectué en décembre 1990 auprès des entreprises sur une mesure fiscale d'incitation à la formation de la main-d'oeuvre, le crédit d'impôt remboursable à la formation. J'aimerais dire, M. le Président, que ce sondage-là a été fait à peine trois mois après l'entrée en vigueur du programme pour les maisons de formation privées. J'ai dit tout à l'heure que le programme était entré en vigueur le 1er septembre dernier pour les maisons de formation privées. Donc, le sondage a été fait trois mois après. Moi, je ne suis pas surpris...

Mme Harel: Quand exactement? M. Bourbeau: Décembre 1990. Mme Harel: Merci.

M. Bourbeau: Je ne suis pas surpris de constater qu'à cette époque-là les entreprises québécoises n'étaient pas encore très éveillées et probablement qu'aujourd'hui elles le sont moins encore qu'on voudrait, mais je pense qu'avec le temps, plus le temps passe, à chaque mois, à chaque semaine, on réalise que les entreprises sont de plus en plus conscientes de l'Importance d'investir dans le développement des ressources humaines. Je pense que cette culture de la formation, elle entre tranquillement chez nous et, si on faisait un sondage aujourd'hui, les chiffres indiqueraient un plus grand intérêt. D'ailleurs, le rapport du Conférence Board dont je faisais état tout à l'heure indiquait qu'au Québec, l'étude indiquait que, je crois, 15 %, 15,5 %, si ma mémoire est fidèle, des entreprises avaient l'intention d'augmenter les crédits à la formation. Je répète ce que j'ai dit tantôt, c'est au Québec que les entreprises prévoient la hausse moyenne la plus importante, soit 15,3 %, comparativement à 8,3 % pour l'Ontario, dans les dépenses des entreprises qui sont dirigées vers la formation de la main-d'oeuvre. Donc, déjà, on peut voir que les chiffres du Conférence Board sont plus optimistes que le sondage que nous avions fait et je suis convaincu que, plus le temps va passer, plus on va être en mesure de constater que les entreprises québécoises vont y venir.

Mme Harel: m. le président, est-ce qu'on peut demander au ministre de déposer l'article du conférence board qu'il cite là, qu'il a cité à quelques reprises?

M. Bourbeau: Oui, je peux vous le déposer, mais je peux vous référer au journal La Presse du vendredi 19 avril, vendredi dernier.

Mme Harel: Ce serait encore plus simple, pour le bénéfice de l'ensemble des membres, si on pouvait le transmettre au Secrétariat.

M. Bourbeau: Oui. Le seul problème, c'est que la photocopie que j'ai ici a des parties qui sont rayées avec une encre... Je ne crois pas que la photocopie...

Mme Harel: C'est les parties rayées qui m'intéressent.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: Oui, mais, justement, elles ne sortiront pas. C'est exactement celles qui ne sortiront pas à la photocopie. Mais je vais tenter d'en faire parvenir une copie vierge à la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Le Président (M. Joly): Madame, je pense que vos voeux vont être exaucés.

Conférence permanente sur l'adaptation de la main-d'oeuvre

Mme Harel: D'accord. Est-ce qu'on doit comprendre que la présence du ministre de l'Éducation est maintenant confirmée à la Conférence permanente sur l'adaptation de la main-d'oeuvre, ainsi que celle de la Centrale de l'enseignement du Québec? Est-ce que c'est bien le cas?

M. Bourbeau: La Conférence permanente sur l'adaptation de la main-d'oeuvre comprend huit participants. Elle est présidée par le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle. Elle comprend trois présidents de trois centrales syndicales, la FTQ, la CSN et la CSD, et les présidents de trois organismes patronaux, le Conseil du patronat, la Chambre de commerce du Québec et l'Association des manufacturiers du Québec, de même que le président du Mouvement Desjardins. Pour l'instant, M. le Président, il n'y a pas d'autres participants. Il y a des observateurs, cependant. Et le ministère de l'Éducation délègue toujours

un représentant à chaque séance.

Mme Harel: Parce que le ministre de l'Éducation annonçait, en janvier dernier: ..accéder aussi à la Conférence permanente de la main-d'oeuvre... "M. Bourbeau m'a invité" - en italique, en fait, entre guillemets, c'est une déclaration du ministre Pagé. Est-ce que vous l'avez invité?

M. Bourbeau: M. le Président, je dois dire que j'ai invité quelques-uns de mes collègues à venir rencontrer les membres de la Conférence au cours des prochains mois. Nous avions le plaisir, cette semaine, de recevoir le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie, et j'ai l'intention, au cours des prochaines semaines ou des prochains mois, d'inviter mon collègue, le ministre de l'Éducation. J'ai indiqué également qu'à chaque fois que nous traiterions de problèmes spécifiques de formation les gens qui s'occupent de formation professionnelle, les représentants du ministère et même les représentants de la CEQ pourraient être invités aux travaux soit de la commission ou soit aussi surtout des comités techniques qui travaillent ces dossiers-là.

Mme Harel: Le ministre de l'Éducation annonçait également qu'il entendait discuter avec vous la présence de la Centrale de l'enseignement du Québec à la Conférence permanente. Quelle est, finalement, la conclusion de cette discussion que vous avez dû avoir avec votre collègue?

M. Bourbeau: La question de la présence de la CEQ à la Conférence a été discutée à quelques reprises, mais nous sommes tombés d'accord qu'il était préférable de limiter le nombre de participants à ceux qui sont là présentement. Étant donné que les intérêts de la CEQ ne sont pas les mêmes que les intérêts des autres centrales syndicales, la CEQ étant principalement concernée par les problèmes d'éducation et le mandat de la Conférence est beaucoup plus large que le simple dossier de l'éducation - on peut parler de mesures de main-d'oeuvre, de reclassement, de placement, de normes du travail, etc. - nous avons limité la participation aux centrales syndicales qui jouent un rôle moteur dans le développement économique, la CEQ, comme vous le savez, représentant en majorité des enseignants qui sont des fournisseurs de services essentiellement dans le domaine de la formation.

Mme Harel: mais mes informations sont à l'effet que les centrales syndicales qui siègent à la conférence permanente auraient souhaité la présence de la ceq. est-ce que c'est le cas?

M. Bourbeau: Disons qu'il en a été question au début, légèrement. Mais, lors des dernières discussions que nous avons eues sur le sujet, ma compréhension était que les centrales présentes étaient parfaitement satisfaites de la constitution présente de la Conférence. Je dois dire qu'on nn m'en a pas reparlé depuis ce temps-là.

Mme Harel: Qu'avez-vous répondu à la Fédération des commissions scolaires du Québec, au Conseil du patronat et à d'autres organismes qui ont réclamé à tour de rôle, cet hiver, la tenue d'un Sommet sur l'investissement dans les ressources humaines?

M. Bourbeau: Je voudrais simplement terminer sur la question précédente. Je dois dire à la députée de Hochelaga-Maisonneuve que la CEQ n'est pas le seul organisme qui a demandé de faire partie de la Conférence. Un grand nombre d'organismes l'ont demandé également. l'Union des producteurs agricoles, les groupes de femmes et plusieurs autres organismes, les commissions scolaires. Nous avons eu plusieurs organismes qui ont demandé de participer aux travaux de la Conférence et, pour les raisons que j'ai invoquées tout à l'heure, nous avons préféré limiter la participation aux membres qui sont présentement désignés.

En ce qui concerne le Sommet sur l'investissement dans les ressources humaines, nous n'avons pas, récemment, traité de cette question, mais ça fait toujours partie des projets du gouvernement puisque ça a été annoncé il y a une couple d'années. Et j'ai l'intention, éventuellement, dans les discussions que j'aurai avec mes collègues et avec les membres de la Conférence, de revenir sur cette question

Mme Harel: C'est-à-dire que vous envisagez la tenue du sommet que vous aviez annoncé H y a déjà un an et demi, je crois?

M. Bourbeau: J'ai l'intention d'en discuter bientôt avec nos partenaires pour voir dans quelle mesure la tenue d'un tel sommet rencontre les souhaits de nos partenaires.

Mme Harel: Et vous, vous en feriez la recommandation. C'est ça qu'on doit comprendre?

M. Bourbeau: Moi, en principe, je suis assez favorable à la tenue d'un tel sommet et si je décèle une volonté collective de tenir un tel sommet, eh bien, bien sûr, ça aidera beaucoup à faire cheminer ma réflexion.

Mme Harel: avez-vous l'intention d'y associer l'opposition, si tant est qu'il avait lieu, comme le fait votre collègue, le ministre de la justice, qui a formé un comité orlenteur qui prépare le sommet sur la justice qui devra avoir lieu en février 1992 et qui a invité la porte-parole de l'opposition officielle à faire partie du comité aviseur?

M. Bourbeau: M. le Président, je suis toujours intéressé à associer l'Opposition officielle à toute démarche positive dans l'intérêt du Québec. Ce que je ferai probablement, c'est que je regarderai comment l'Opposition officielle a fait lorsqu'elle était au gouvernement et on traitera l'Opposition avec autant d'équité.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Alors, ça présage mal pour vous dans deux, trois ans.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Merci, Mme la députée. Nous ajournons nos travaux sine die.

Une voix: Sine die? (Suspension de la séance à 12 h 29)

(Reprise à 16 h 5)

Le Président (M. Gautrin): Compte tenu de l'arrivée des gens, on va constater un quorum virtuel.

La commission des affaires sociales est réunie ici pour étudier les crédits du ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle. Je pense qu'on avait convenu d'un mode d'étude programme par programme et alors...

Mme Harel: Dossier.

Le Président (M. Gautrin): Dossier par dossier, c'est ça, et c'était ce soir qu'on étudiait les organismes qui dépendaient du ministère. Alors, vous n'avez plus de déclaration d'ouverture à faire, j'imagine.

Des voix: Non.

Le Président (M. Gautrin): Merci. On va reprendre où on avait laissé. Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve, vous avez peut-être quelques questions.

Mme Harel: M. le Président, je n'ai qu'une inquiétude, c'est de ne pas passer à travers toutes les questions que j'ai préparées pour le ministre. Alors, il va falloir, évidemment, accélérer un peu lo rythme de notre échange. Je souhaiterais qu'on puisse tout de suite examiner la question des SEMO, si le ministre, évidemment, veut obtenir le dossier de la part de ses collaborateurs.

Le Président (M. Gautrin): Alors, nous étudions les SEMO. Vous êtes prêts?

M. Bourbeau: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): Alors, nous partons sur les SEMO. Mme la députée.

SEMO

Mme Harel: M. le Président, je l'ai signalé très rapidement, trop rapidement, ce matin, le budget des SEMO, des services externes de main-d'oeuvre, c'est-à-dire des services qui sont offerts à la clientèle la plus fragile, la plus vulnérable qui est en demande de programmes d'employabilité à l'aide sociale. C'est, finalement, une clientèle qui est très souvent référée aux SEMO. Le budget a diminué de 1 % par rapport à l'année dernière, mais la diminution réelle est, évidemment, beaucoup plus importante compte tenu du taux d'inflation. Pour être strictement maintenu au niveau de l'année dernière, le budget des SEMO aurait dû être de 13 802 000 $; pourtant, il n'est cette année que de 12 890 000 $. Dès le départ, on voit bien qu'il y a 1 000 000 $ qui manquent, simplement pour maintenir le niveau des services. C'est évidemment extrêmement prudent parce que, ce niveau de services ayant augmenté, il faudrait, en conséquence, prévoir une augmentation des budgets. La clientèle des SEMO, je le signalais, est passée de 9717 à 11 818, de 1989 à 1990, c'est une augmentation de 21,6 % et, je le signale encore, le budget, malgré cette augmentation de clientèle, est resté stationnaire.

M. le Président, évidemment, je rappelle au ministre - ce qu'il sait déjà, mais c'est un élément important - que les dépenses qui sont effectuées en vue de financer le programme de ces Services externes de main-d'oeuvre sont partagées dans l'accord-cadre Québec-Canada. Donc, ça n'est qu'une partie de ces sommes qui relève du fonds consolidé et du budget du ministère parce que le ministère va quérir 50 % des sommes qui sont allouées aux SEMO.

Évidemment, j'aimerais que le ministre retienne que la rentabilité des SEMO n'est plus à démontrer. Uniquement en termes de placement de la clientèle prestataire de la sécurité du revenu - les services d'évaluation et de statistiques du ministère connaissent bien ces chiffres que, d'ailleurs, j'ai retrouvés dans les productions du ministère - il y a 2116 bénéficiaires de la sécurité du revenu qui ont obtenu un placement permanent suite à des références et interventions du programme en 1989-1990. C'est évident que, si vous multipliez ces 2116 personnes simplement par l'équivalent de la prestation moyenne mensuelle et que vous annualisez sur 12 mois, alors vous obtenez un montant qui est l'équivalent de ce que coûte l'ensemble du programme SEMO au ministère, c'est-à-dire un peu plus de 12 000 000 $. Évidemment, ce sont là des chiffres assez éloquents parce que ce dont ils témoignent, c'est qu'il ne s'agit pas d'une

dépense qui est effectuée dans le programme SEMO, il s'agit d'un investissement, puis cet investissement rapporte, finalement, au ministère, puisqu'il peut se chiffrer en diminution de la clientèle d'aide sociale qui, grâce au soutien dont elle a pu bénéficier, peut obtenir un placement permanent.

M. le Président, j'ai déjà eu l'occasion l'an passé de le dire, mais je vais le répéter à ce moment-ci, je trouve ça extrêmement dangereux - je le dis non pas simplement pour le bénéfice du ministre, mais aussi pour le bénéfice de tous ses collaborateurs - d'assujettir un programme de cette nature qui est issu de l'initiative des milieux et qui est venu, finalement, répondre à un besoin qui ne l'était pas adéquatement par les services institutionnels... Je trouve ça extrêmement inquiétant qu'on essaie d'encadrer, d'enrégimenter presque, de corseter, si vous me permettez l'expression, les activités des SEMO de façon à les faire entièrement cadrer comme si c'était un sous-contractant du ministère. On va finir par éteindre la capacité d'innovation, la capacité de concertation de ces organismes issus des milieux à force de vouloir les bureaucratiser, de vouloir les enrégimenter. J'en veux, évidemment, pour preuve le fait que dans les ententes-cadres qui, obligatoirement maintenant, sont imposées aux SEMO - on leur impose de servir une clientèle composée à 75 % de bénéficiaires d'aide sociale... Par ailleurs, on ne reconnaît pas, aux fins de l'évaluation des SEMO, plus que 10 % de placements de cette clientèle à 75 % à l'aide sociale, on ne leur reconnaît pas dans le cadre de l'évaluation plus de 10 % de placements dans des mesures.

Le ministère, finalement, fait une évaluation qui a deux poids, deux mesures, parce que la façon dont il évalue ses propres services dans les CTQ est différente de la façon dont il évalue les services qu'offrent les SEMO. S'il fallait qu'on évalue les services des CTQ en fonction du nombre de placements autres que 10 % dans les mesures, évidemment, ce serait assez surprenant ce qu'on pourrait obtenir, mais c'est ce qu'on impose aux SEMO. On leur impose une clientèle composée à 75 % de bénéficiaires d'aide sociale, mais on leur dit que, dans l'évaluation qui sera faite par le ministère de leur rentabilité, on ne tiendra pas compte s'il y a plus que 10 % des bénéficiaires qui vont aller dans des mesures comme Retour aux études pour compléter leur secondaire, comme Stages en entreprise, comme Travaux communautaires, le programme EXTRA, etc. Pourtant, la clientèle - c'est les chiffres mêmes du ministère - est de plus en plus lourde: 52 % des bénéficiaires actuels ont une durée de plus de cinq ans à l'aide sociale - c'est bien ça? - et 72 %, de mémoire, ont une rétention de plus de deux ans. Alors, c'est une clientèle de plus en plus lourde qui est référée et, malgré cette réalité d'une clientèle qui a non seulement des problèmes d'intégration à l'emploi, mais des problèmes d'employabilité tout court, j'aimerais ça vous citer ce qu'en disait le Protecteur du citoyen, mais on y reviendra.

Alors, je voudrais comprendre pourquoi les SEMO sont les mal-aimés du ministère Pourquoi le ministre et son personnel... Est-ce dû au fait que les SEMO ne peuvent pas être, malgré qu'ils soient enrégimentés, entièrement contrôlés par le ministère? Est-ce qu'on peut penser que, s'ils l'étaient, ils pourraient bénéficier à peu près des mêmes augmentations que les CTQ obtiennent? Pourquoi ne pas ajuster les budgets des SEMO à ceux des services du ministère? Voilà ma question.

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre, pour ces mal-aimés.

M. Bourbeau: M. le Président, à écouter la députée de Hochelaga-Maisonneuve, toutes les catégories de clientèles du ministère sont des mal-aimées puisqu'elle nous blâme de ne pas s'occuper suffisamment de toutes les clientèles dont on a charge. Ce matin, c'étaient les travailleurs en voie de recyclage qui étaient des mal-aimés, maintenant ce sont les SEMO. Tout ce que je pourrais dire, c'est que la députée de Hochelaga-Maisonneuve, elle, est une bien-aimée du ministère parce qu'on lui donne absolument tout ce qu'elle veut avoir, M. le Président. Tous les renseignements qu'elle demande, elle les obtient et rapidement, y compris les réponses du ministre.

D'abord, M. le Président, rectifions les faits. Parce qu'on peut diverger d'opinions sur des principes, mais sur les faits, en général, c'est assez difficile de diverger d'opinions. Le budget des SEMO, cette année, est sensiblement le même que l'an dernier. À 119 000 $ près sur 12 436 000 $, le budget de l'an dernier, c'est un petit peu moins que 1 % de différence. Maintenant, la députée de Hochelaga-Maisonneuve disait que c'est partagé avec le fédéral à 50-50; ce n'est pas exact. Le fédéral ne rembourse pas 50 % des frais. On me dit que c'est à peu près 25 % des coûts des SEMO qui sont remboursés par le gouvernement fédéral.

La députée de Hochelaga-Maisonneuve nous fait un grief de tenter de standardiser un peu les procédures dans ce dossier. Il faut comprendre que les SEMO, c'est un réseau qui a été formé spontanément, qui s'est formé spontanément hors le ministère au cours des 10, 12 dernières années. C'était à l'époque où le gouvernement fédéral nous faisait la faveur de venir chez nous encourager la prolifération d'organismes communautaires pour se retirer gentiment par la suite et laisser le Québec avec le bébé sur les bras. Ces bébés-là, il y en avait partout au Québec et ils étaient différents les uns des autres. J'aimerais simplement vous rappeler, M. le Président, par exemple, qu'en 1981-1982 le coût des SEMO pour le ministère

était de 1 196 000 $ et il y en avait un peu partout au Québec. Et ces SEMO ne faisaient pas tous la même chose; certains s'occupaient des personnes handicapées, d'autres des femmes en difficulté, d'autres des jeunes et des clientèles particulièrement difficiles à réinsérer en emploi, et il n'y avait aucune espèce de lien ou de commune mesure entre ces organismes-là. Ils avaient chacun leurs propres règles de fonctionnement et le ministère les subventionnait comme ça, un peu à la pièce. Or, le budget a augmenté sensiblement, M. le Président. Je vous signale que, lors de la dernière année complète du règne du Parti québécois, le budget était de 6 200 000 $; aujourd'hui, il est de 12 300 000 $, donc le budget a doublé depuis notre arrivée, et avec ça l'obligation pour le gouvernement de s'assurer qu'il y a une certaine cohésion dans tout ce secteur-là et qu'on en a pour notre argent.

Alors, je pense, M. le Président, que non seulement le gouvernement n'a pas tort de vouloir réglementer ce secteur-là, mais a l'obligation de le faire. Puisque nous avons 12 500 000 $ de fonds publics consacrés à ce réseau, on doit s'assurer de l'efficience de ce réseau-là et que les fonds investis rapportent les dividendes escomptés. Nous avons donc cru essentiel de nous assurer que nous avons un cadre normatif, des procédures mises en place, des critères qui vont faire en sorte que nous pourrons évaluer la performance du réseau et de chacun des SEMO pour s'assurer que les objectifs que nous nous sommes fixés sont atteints. C'est une question d'opinion, M. le Président, mais je pense que, quand on administre des fonds publics, on ne peut pas se permettre de le faire sans un certain contrôle de l'efficacité du réseau.

Maintenant, nous avons rencontré, enfin pas moi personnellement, mais mon attaché politique en charge du dossier a rencontré les dirigeants du réseau ou les représentants du réseau. On a discuté de certains sujets et on a bien indiqué aux gens du réseau des SEMO que nous sommes intéressés et disposés à discuter avec le réseau de modifications possibles; par exemple, discuter du financement. Comment le financement devra-t-il être réparti? Parce que, au moment où on se parle, on connaît le budget; par contre, la répartition n'est pas faite. Quel pourrait être le cadre normatif amendé, s'il y a lieu? Il n'y avait pas d'objection à regarder ça non plus et, enfin, nous sommes également disposés a discuter de tout autre sujet d'intérêt qui pourrait faire en sorte d'améliorer la performance du réseau des SEMO.

Je peux dire, M. le Président, que, quant à nous, nous n'avons pas l'intention de faire disparaître le réseau des SEMO; au contraire, si c'était le cas, j'aurais accepté des coupures de 25 %, comme on m'en a proposé, M. le Président, et j'ai résisté à une telle demande pour sauve- garder l'essentiel, c'est-à-dire le budget intégral des SEMO. Mais vous connaissez la situation des finances publiques au Québec, M. le Président, et, dans l'état actuel des choses, je peux dire que nous avons sauvegardé l'essentiel. Le budget, bien sûr, subit un gel cette année. Ce n'est pas le seul domaine, M. le Président, où on subit un gel, mais j'espère que l'an prochain, et pour les années à venir, on pourra continuer à indexer la subvention aux SEMO et, le cas échéant, améliorer son rendement.

Le Président (M. Gautrin): Merci, M. le ministre. Mme la députée de Hochelaga-Maison-neuve, quelques questions supplémentaires.

Mme Harel: C'est-à-dire, M. le Président, qu'il serait heureux que le ministre puisse continuer à indexer, mais, malheureusement, les budgets des SEMO n'ont pas été indexés l'an passé et ils ne le sont pas cette année. Ce que je constate, c'est que les SEMO ont, avec le ministère, un contrat de services, dont j'ai ici copie et, en passant, si, finalement, je peux bénéficier de tant d'informations, c'est que nous avons posé les bonnes questions au ministère. Ce n'est pas dans les cahiers qui nous étaient venus du ministère que nous pouvons retrouver, finalement, toutes ces informations, mais dans ceux que le ministère nous a constitués suite aux questions que nous avons posées.

Dans ce contrat, ce qu'on nous dit, c'est donc que les SEMO desservent des personnes qui sont aux prises avec des difficultés particulières, qui sont privées d'autonomie suffisante pour prendre seules en charge leur démarche de retour vers le marché du travail. Ce dont on parle, ce sont des clientèles, notamment les personnes handicapées, des femmes en difficulté qui ont été absentes du marché du travail pendant une longue période, des jeunes en difficulté et d'autres personnes ayant vécu des situations particulièrement difficiles, exemple: ex-détenus, ex-toxicomanes, ex-alcooliques, etc. Ce qu'on nous dit, et je cite le contrat: "Ces personnes requièrent des services spécialisés et adaptés que le réseau Travail-Québec ne peut leur offrir." C'est comme une sorte d'admission que le réseau Travail-Québec fait et cette admission le conduit à confier la clientèle particulièrement vulnérable, fragile, en difficulté, aux Services externes de main-d'oeuvre qui ont un caractère plus communautaire. À partir de là, ce qui est difficile à comprendre, c'est qu'il ne viendrait pas à l'idée du ministère de couper ses propres services dans les centres Travail-Québec, et comment ' peut-il ne pas indexer, non pas couper... Je me réjouis que le ministre ait résisté à la suggestion qui lui était faite de couper dans les budgets, mais je constate qu'il n'y a pas indexation.

J'avais un certain nombre de lettres - le ministre doit les recevoir autant que je peux les recevoir - une, par exemple, d'Abitibi-

Témiscamingue, qui vient du SEMO des femmes de l'Abitibi-Témiscamingue, et dans laquelle on peut lire: "II faut disposer de crédits supplémentaires afin d'assumer les frais de fonctionnement qui deviennent irréalistes avec les hausses actuelles de location de locaux, d'équipement, des frais de téléphone et autres, etc. " S'il n'y a pas d'indexation, comme c'est le cas dans les crédits que nous étudions, ça veut donc dire qu'il y a des frais, par ailleurs, évidemment, supplémentaires avec non seulement le coût de la vie, mais la TPS. Il faut savoir ce que ça peut coûter en frais de téléphone, en frais de chauffage et d'électricité supplémentaires. C'est donc dire qu'ils vont devoir baisser les services à la clientèle. Baisser les services à la clientèle, c'est, finalement, les réduire pour la clientèle - je le répète, c'est, finalement, les documents officiels du ministère qui le disent - c'est baisser les services à la clientèle la plus vulnérable, la plus fragile, la plus en difficulté, et celle pour laquelle, encore une fois, le réseau Travail-Québec ne peut offrir un service adéquat. C'est ça, finalement, qu'il faut bien envisager.

Je ne veux pas faire grief au ministre, mais le financement du programme SEMO, tel qu'il me l'a indiqué dans les documents qui m'ont été envoyés et qui s'intitulent "Ventilation détaillée des transferts du gouvernement fédéral en 1990-1991 dans le cadre de divers programmes à frais partagés"... Je regarde celui concernant l'accord visant à améliorer les perspectives d'emploi des bénéficiaires de la sécurité du revenu. En le regardant, je me rends compte qu'évidemment ça explique pourquoi le ministère - ça explique, mais ça ne justifie pas - exige que 75 % des bénéficiaires que desservent les SEMO, à qui les SEMO, plutôt, offrent des services, soient des bénéficiaires d'aide sociale. C'est une façon pour le ministère de se faire rembourser. On comprend à ce moment-là que la rationalité, ce n'est pas, comme le dit le ministre, seulement une rationalité de saine gestion. C'est ce que j'appelle, mol, la rationalité de quêteux, c'est-à-dire comment assujettir nos programmes pour qu'on puisse aller quêter l'argent du fédéral qui est déterminé selon des critères que l'on ne contrôle pas. Alors, c'est cette mentalité de quêteux qui fait qu'on ajuste nos programmes; même si ce n'est pas nécessairement souhaitable pour la clientèle, on ajuste les programmes et je pense que SEMO en est un bon exemple, parce qu'on y lit que le programme SEMO, sauf ceux partagés par la Loi sur la réadaptation professionnelle des invalides et par le Régime d'assistance publique du Canada, relève, donc, de l'accord visant à améliorer les perspectives d'emploi des bénéficiaires de la sécurité du revenu. Alors, plus les SEMO peuvent voir des personnes bénéficiaires de la sécurité du revenu, j'imagine, plus le ministère peut se faire rembourser, dans le cadre de cet accord-là, les frais encourus pour financer les SEMO. Et on nous indique que c'est, finalement, à frais partagés, que le Québec et le Canada ont donc convenu de partager le financement de certains programmes et de favoriser une participation plus stable des clients de la sécurité du revenu au marché du travail, que le Canada et le Québec se sont engagés à contribuer chacun jusqu'à 62 000 000 $ aux fins de financer de façon paritaire leurs programmes respectifs, et ainsi de suite. Si le ministre nous dit que dans le cas de SEMO ce n'est pas paritaire, mais ce serait seulement à 25 % et pas à 50 %, j'aimerais ça avoir la documentation qui me permettrait de le comprendre et, évidemment, de le justifier.

D'autre part, la question reste posée: Est-ce qu'il est justifié qu'un service qui est offert à une clientèle vulnérable, une clientèle à laquelle ne peut répondre adéquatement le réseau, est-ce qu'il est justifié de ne pas indexer? Donc, à toutes fins utiles, ça veut dire réduire les services qui peuvent être offerts par un tel programme.

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre. (16 h 30)

M. Bourbeau: D'abord, M. le Président, rectifions les faits encore. La députée de Mai-sonneuve a affirmé qu'il n'y avait pas eu d'indexation l'an dernier, si j'ai bien compris. L'an dernier, l'indexation a été de 5, 4 %. Les dépenses réelles 1989-1990 avaient été de 11 796 000 $ et les dépenses probables 1990-1991, l'année étant terminée, de 12 436 000 $.

Mme Harel: M. le ministre...

M. Bourbeau: La différence, M. le Président, fait qu'il y a eu une augmentation de 5, 4 % l'an dernier. Cette année...

Mme Harel: Est-ce que le ministre peut me permettre immédiatement de lui signaler que cette augmentation a été consacrée à des programmes concernant les autochtones?

M. Bourbeau: Non, on me dit que ça n'a rien à voir, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): Bon.

M. Bourbeau: Non, c'est une augmentation de 5, 4 %...

Le Président (M. Gautrin): Alors, laissons terminer le ministre.

M. Bourbeau:... dans le budget de l'année dernière par rapport à l'année précédente. Cette année, je reconnais cependant qu'il n'y a pas d'indexation. Ça, c'est sûr. Il y a eu une compression paramétrique de 5 % d'appliquée. Après ça, on a appliqué une indexation de 4, 3 %, ce qui laisse un manque à gagner de 119 000 $.

Maintenant, pour ce qui est du fait que le

fédéral ne rembourse pas la moitié des coûts comme, par exemple, dans le programme d'aide sociale ou de sécurité du revenu, c'est assez facile à comprendre, parce que le fédéral ne rembourse pas les dépenses de main-d'oeuvre. Exemple, on n'a jamais réussi encore à faire rembourser le programme APPORT parce que c'est un programme considéré par le fédéral comme main-d'oeuvre. Le fédéral rembourse cependant les dépenses de sécurité du revenu. Alors, dans la mesure où les SEMO travaillent avec une clientèle qui est prestataire de la sécurité du revenu, ça tombe sous l'empire du Régime d'assistance publique du Canada et c'est remboursable par le fédéral. Mais, quand on travaille avec une clientèle qui n'est pas couverte par le Régime d'assistance publique du Canada ou un autre régime à frais partagés, à ce moment-là c'est les fonds québécois seulement qui sont en cause. Et on me dit que, tout ça étant pris en considération, le fédéral rembourse à peu près 25 % des coûts totaux.

Maintenant, si nous insistons pour que les SEMO aient un nombre minimum de cas provenant de la sécurité du revenu, enfin, si on leur impose un quota d'assistés sociaux, c'est parce que c'est la vocation première du ministère de s'occuper de cette clientèle-là. Ce serait un peu paradoxal... et je donnerais un exemple un peu farfelu, là, où un SEMO déciderait de ne s'occuper que des personnes handicapées gagnant plus de 50 000 $ par année ou des femmes en difficulté dont les revenus excèdent 50 000 $. Ce serait intéressant quand même de tenter de réinsérer un emploi à tous ces gens-là, mais la vocation première du ministère, c'est de s'occuper des pauvres, de ceux qui sont... enfin, le volet du ministère qui porte sur la sécurité du revenu.

Nous disons donc aux SEMO: Occupez-vous des clientèles en difficulté, des handicapés, des femmes victimes de violence ou des jeunes en difficulté, oui, mais de préférence ceux parmi ces gens-là qui sont pauvres, qui sont assistés sociaux. Et ça fait en sorte que nous insistons pour qu'il y ait un quota de cette clientèle-là qui est de 75 %.

Le Président (M. Gautrin): Merci, M. le ministre. Mme la députée.

Mme Harel: M. le ministre, on peut être pauvre et travailler - selon les indicateurs les plus fidèles, 60 % des personnes au salaire minimum sont pauvres - et on peut être pauvre et ne pas être sur l'aide sociale. On peut être pauvre et ne pas avoir de revenus et ne pas avoir de conjoint qui vous donne de revenus; on peut être pauvre et être jeune et ne pas avoir accès à l'aide sociale à cause de la contribution parentale. Il y a, évidemment, bien des facteurs. Confondre pauvreté et aide sociale est bien loin de la réalité québécoise. Les pauvres du Québec sont en nombre bien plus imposant que les bénéficiaires d'aide sociale.

Et le problème que ça présente, c'est: Pourquoi obliger les SEMO à du placement auquel les CTQ ne s'obligent pas eux-mêmes? De ces 75 % de clientèle bénéficiaire d'aide sociale auxquels on astreint les SEMO, on ne reconnaît aux fins de l'évaluation de leur travail qu'un maximum de 10 % d'utilisation des mesures d'employabilité et on sait pourtant que la clientèle qui est référée est de plus en plus lourde.

Moi, je voudrais vous donner l'exemple des personnes handicapées. Vous avez certainement, M. le ministre, entendu parler du SEMO L'Étape, et je vous ai écrit d'ailleurs à ce sujet-là il y a quelques semaines pour vous faire part d'une demande de rencontre que ce SEMO, spécialisé en particulier auprès des personnes handicapées auditives, vous avait déjà, à maintes occasions, formulée. Et ce que je constate, d'abord, c'est que ce SEMO L'Étape a signé une entente avec le réseau Travail-Québec de la ville de Montréal dans laquelle la ville de Montréal s'engage à référer toutes les personnes qui ont ce type de handicap, presque en exclusivité, la ville ne considérant pas avoir les ressources adéquates dans les centres Travail-Québec pour donner un service à ces personnes handicapées. Et malgré, finalement, cette entente de services, bien, ce SEMO L'Étape n'a toujours pas d'augmentation de personnel. Pourtant, l'ajout de postes de conseillers se justifie d'autant plus qu'il y a une liste absolument impressionnante de personnes handicapées qui sont en attente. Voyez, la liste des personnes en attente était de 248 en 1989 et elle est maintenant de 410, et cette progression est vertigineuse. Alors, ça m'apparaît inquiétant d'une certaine façon que le réseau ne se considère pas comme pouvant offrir adéquatement les services, qu'il réfère systématiquement à un organisme parapublic, mais, en conséquence, il faudrait que le ministère assure cet organisme d'un financement adéquat, sinon c'est une sorte de discrimination envers la clientèle qui ne peut pas recevoir son service dans le réseau et qui, finalement, est discriminée dans le réseau des SEMO parce qu'ils n'ont pas les ressources adéquates.

Présentement, le délai d'attente des personnes handicapées à l'aide sociale, qui sont pourtant priorisées, est de huit mois avant d'obtenir un service dans un SEMO. Alors, c'est un délai qui est encore meilleur que celui des personnes handicapées qui font appel aux services de main-d'oeuvre de L'Étape qui, elles, doivent attendre 20 mois en moyenne. Je donne cet exemple, mais on pourrait, évidemment, parler de tous les SEMO qui s'adressent à une clientèle de personnes handicapées, pour laquelle le réseau Travail-Québec ne se considère pas comme pourvu de ressources suffisantes. J'ai copie ici de l'entente qui a été signée avec la ville de Montréal et ce

qu'on y dit à l'article 3.3.1, c'est que le réseau référera tout client et toute cliente de la sécurité du revenu pour qui la mesure a été établie. Or, le réseau réfère dans les faits automatiquement toutes les personnes qui entrent dans la catégorie "clientèle cible" lorsqu'il s'agit d'intégration au travail. Je dois vous dire que, dans le cas de ce SEMO-là, il y a près de 50 organismes qui ont accepté d'appuyer sa demande de conseillers de main-d'oeuvre supplémentaires. Alors, peut-être pour le bénéfice des membres de la commission, je pourrais vous faire connaître le cheminement de leur dossier depuis deux ans, à moins que le ministre soit prêt à répondre maintenant.

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, la députée de Maisonneuve me parle d'un SEMO en particulier, le SEMO L'Étape. J'ai ici le budget des trois dernières années pour le SEMO L'Étape, celui qu'on appelle La Bourgade inc. C'est le même, ça, Mme la députée?

Mme Harel: Je pense que La Bourgade est le nom de la corporation.

M. Bourbeau: C'est ça. Donc, c'est le même SEMO, hein?

Mme Harel: Je ne suis pas sûre que ce soit le même.

M. Bourbeau: C'est à Montréal, 822, Sherbrooke est, l'adresse?

Mme Harel: Oui, c'est sur la rue Sherbrooke.

M. Bourbeau: Bon. Et ce n'est pas dans le comté de Hochelaga-Maisonneuve, ça? Malheureusement, non, hein?

Mme Harel: Non, malheureusement pas. C'est dans le comté du collègue du député de Laporte, le député de Saint-Louis.

M. Bourbeau: Alors, ce SEMO-là avait un budget de 248 000 $ en 1988 et, en 1990, la dernière année, 1990-1991, il avait un budget de 295 000 $. C'est donc une augmentation de 19 % de budget en deux ans, sur les deux années. Ce n'est quand même pas si mauvais compte tenu de l'évolution de l'économie québécoise depuis deux ans. On est passé de 248 000 $ à 295 000 $ en deux ans. Bien sûr, cette année, théoriquement, il ne devrait pas y avoir d'augmentation de budget. J'ai signalé plus tôt que nous n'avions pas encore fait l'allocation des ressources pour l'année courante. Il n'ost pas impossible que dans cette allocation-là il y ait certains SEMO qui voient leur allocation augmentée et d'autres diminuée. Maintenant, je note que ce SEMO-là, l'an dernier, a effectué 111 placements, dont 53 étaient des prestataires de la sécurité du revenu, c'est-à-dire à peu près 50 %, ce qui est nettement Inférieur à la norme de 75 %. Alors, bien sûr, on insiste pour que les SEMO placent, dans la mesure du possible, un nombre de prestataires de la sécurité du revenu plus important par rapport aux autres clientèles.

Tout à l'heure, la députée de Maisonneuve m'a fait une homélie sur la pauvreté en me disant qu'il n'y a pas que les assistés sociaux qui sont pauvres. Je lui dirai que je le sais. Ce que je voulais dire, et tout le monde a compris, c'est que ceux qui ont de l'aide sociale sont les plus pauvres parmi les pauvres, et nous insistons pour que les SEMO donnent la priorité à cette clientèle-là de l'aide sociale, parce que ce sont justement, parmi les pauvres, ceux qui sont les plus démunis. Alors, les plus démunis parmi les pauvres, on peut s'entendre sur cette définition-là peut-être, pour la clientèle de la sécurité du revenu.

Mme Harel: M. le Président, j'aimerais bien que le ministre...

M. Bourbeau: Je voudrais simplement... Mme Harel: Parfait.

M. Bourbeau: Tantôt, j'ai donné les statistiques pour le SEMO La Bourgade ou L'Étape en ce qui concernait les placements. J'ai aussi les statistiques pour les admissions. Pour la même année, la dernière année 1990, il y a eu 162 prestataires de la sécurité du revenu à l'admission, sur un total de 276, ce qui, non plus, sauf erreur, vous allez voir, je ne crois pas que ça fasse 75 %, non plus. Enfin, on pourrait peut-être le calculer. C'est à peu près tout ce que j'ai à dire là-dessus, M. le Président, à moins que la députée de Maisonneuve veuille en savoir plus long. (16 h 45)

Mme Harel: D'abord, M. le Président, je voudrais que le ministre me confirme que, dans le cas des SEMO qui offrent des services aux personnes handicapées, ces SEMO sont couverts par une autre entente que celle à laquelle je faisais référence tantôt. Il s'agit plutôt, dans ce cas-ci, de l'entente signée en novembre 1990, d'une durée de deux ans, soit du 1er avril 1990 jusqu'au 31 mars 1993 - en fait, c'est une durée de trois ans - et par laquelle le gouvernement fédéral contribuera, au cours de chaque année financière, à 50 % des frais encourus par Québec pour la mise en oeuvre d'un programme complet de réadaptation professionnelle des invalides, c'est-à-dire la Loi sur la réadaptation professionnelle des invalides. Alors, l'aimerais bien que le ministre, d'abord, me confirme que, dans le cas des programmes de Services externes de la

main-d'oeuvre offrant des services aux personnes handicapées, ces programmes sont couverts par la Loi sur la réadaptation professionnelle des invalides et que c'est des frais admissibles au partage à 50 %; ces frais comprennent la rémunération du personnel, les avantages sociaux, les frais de déplacement, etc.

Ceci étant admis, puisque 50 % de ce financement vient d'Ottawa et puisqu'il s'agit d'une sorte de loi-cadre qui concerne la réadaptation professionnelle des invalides, je comprends difficilement que le ministre chicane le fait que ces organismes de main-d'oeuvre ne remplissent pas le critère magique des 75 % de bénéficiaires qui sont sur l'aide sociale. Sinon, je rappellerais au ministre que, s'il continue de tenir le discours qu'il tient, le message qu'il transmet, c'est que: Si vous voulez être aidés dans la société québécoise, mettez-vous sur l'aide sociale; si vous n'êtes pas sur l'aide sociale, bien, c'est bien de valeur; à ce moment-là, si vous n'êtes pas sur l'aide sociale, vous ne pourrez pas finir votre secondaire avec une allocation... J'ai eu, moi, à mon bureau de comté, puis je ne pourrai jamais l'oublier, parce que c'est dans le milieu ouvrier, en général, qu'on retrouve des gens qui ne veulent pas que leurs enfants aillent sur l'aide sociale... Je me rappelle entre autres, une mère de famille est venue me voir en me disant qu'elle trouvait ça injuste que son fils soit finalement voisin d'un jeune du même âge qui avait accès à l'aide sociale, tandis que le sien y avait théoriquement accès, mais les parents ne voulaient pas qu'il ait déjà, en commençant, cette idée de demander ou de solliciter de l'aide sociale. Et c'est très dangereux, et c'est pour ça qu'il faut transformer complètement la façon de voir les choses. C'est pour ça que j'appuie le projet de prêts-bourses au secondaire; il faudrait pouvoir offrir des prêts et bourses au secondaire pour compléter son secondaire, comme on en offre au niveau collégial ou universitaire, mais, évidemment, en pensant d'abord à une bourse, parce que les gens ne vont pas s'endetter interminablement. Mais pourquoi ne le fait-on pas? Parce que ce n'est pas couvert, ce ne serait pas remboursé, parce que tout ce qui n'est pas au-delà du secondaire n'est pas a frais partagés et parce que Québec assumerait à 100 %. C'est toujours cette mentalité de quêteux qui consiste à ajuster nos programmes, nos politiques sociales, à ce qui est possible de faire rembourser par Ottawa.

Alors, je reviens aux SEMO et je reviens à la question des personnes handicapées, je pense à celles qui ont un handicap auditif, et je me dis que le message que vous leur transmettez aujourd'hui, c'est: Allez sur l'aide sociale et, après, vous allez avoir bien plus de services, parce que si, pour toutes sortes de raisons, vos parents vous gardent à la maison, votre conjoint paie pour vous, à ce moment-là, vous allez être pénalisés. Je ne vois pas l'intérêt, surtout dans des ressources, comme les SEMO, qui ne sont pas institutionnelles. Si tant est qu'elles avaient été institutionnelles, elles n'auraient pas innové auprès de ces clientèles, elles n'auraient pas développé l'expertise qu'on leur reconnaît maintenant.

M. Bourbeau: M. le Président, en ce qui concerne les SEMO, je suis bien d'accord avec la députée de Hochelaga-Maisonneuve qu'il faut faire le maximum pour tenter d'intégrer à l'emploi le plus grand nombre possible de personnes handicapées ou des personnes qui souffrent de problèmes de toutes sortes, de difficultés d'insertion. Il s'agit de savoir où on met les priorités. On sait que les fonds publics sont limités. Alors, nous tentons de mettre un peu d'ordre là-dedans et de prioriser les budgets en fonction des clientèles les plus démunies. Ces clientèles-là sont doublement pénalisées, premièrement, parce qu'elles ont des handicaps et, deuxièmement, parce que, souvent, elles sont démunies, surtout lorsqu'elles sont à la sécurité du revenu. Loin de moi l'idée d'attirer à la sécurité du revenu qui que ce soit; au contraire, je pense que toute la réforme de l'aide sociale a été placée sous le sceau de l'incitation à retourner au travail. Si on devait résumer en une phrase la réforme de l'aide sociale, c'est ça, la volonté d'instaurer une nouvelle culture dans le domaine de la sécurité du revenu, de changer la mentalité pour faire en sorte que, dorénavant, on soit d'avis qu'il est plus payant de faire des efforts pour s'en sortir que de s'asseoir passivement chez soi en attendant son chèque mensuel.

J'ai dit, ce matin, que je n'étais pas d'accord avec ce paternalisme de mauvais aloi qui fait en sorte que, chaque fois qu'on incite un assisté social à faire des efforts, on nous accuse de terroriser des gens ou de les exploiter. Je pense qu'au contraire c'est rendre service à la clientèle que d'insister pour que des efforts soient faits. Ces efforts-là sont doublement méritoires quand la clientèle souffre de handicap. C'est pour ça que nous avons Insisté pour qu'on s'occupe, par préséance et en majorité, en tout cas dans la clientèle des SEMO, de ceux qui sont assistés sociaux.

Maintenant, la députée de Hochelaga-Maisonneuve, tantôt, avec un brin de mesquinerie, traitait le gouvernement de mentalité de quêteux. Je lui rappellerai que, s'il y a un gouvernement qui s'est spécialisé dans l'art de refiler des factures au fédéral et qui a poussé cette subtilité jusqu'à son point culminant, c'est bien le Parti québécois qui s'était fait le champion des programmes de 20 semaines à la sécurité du revenu, programmes qui se terminaient le jour même où les clients devenaient éligibles à l'assurance-chômage. Je peux citer plusieurs programmes au ministère où les prestations se terminaient le jour où commençait l'assurance-chômage et on refilait la clientèle dans la cour du gouvernement fédéral. Donc, là-dessus, je

pense qu'on n'a pas de leçon à recevoir du Parti québécois qui a tracé la voie, disons, dans ce domaine-là. Je ne pense pas qu'on puisse dire que nous tentons de les imiter. Quand le Parti québécois a fait des bonnes choses, nous tentons de les imiter, mais certainement pas dans les mauvaises.

Mme Harel: Le ministre est mal placé pour parler de ça, lui qui augmente de 70 % le seul programme qui a pour effet de renvoyer des gens à l'assurance-chômage. C'est le programme PAIE qui dure 24 semaines et qui, évidemment, ne dure que le moment pour rendre admissible au programme d'assurance-chômage.

Alors, ceci dit, M. le ministre, il y a un élément sur lequel je voudrais échanger avec vous avant de terminer le dossier des SEMO, c'est la philosophie qui préside maintenant à la gestion par le ministère du programme SEMO. J'ai malheureusement manqué de temps ce matin pour échanger avec vous sur la question du placement; on en avait parlé les années antérieures. Il ne se fait plus de placement public dans notre société. Auparavant, on prétendait qu'il y avait duplication et dédoublement parce qu'il y avait du placement de main-d'oeuvre dans les CTQ et du placement de main-d'?uvre dans les centres d'emploi fédéraux. Il ne s'en fait plus dans les CTQ de placement de main-d'?uvre et il ne s'en fait plus, non plus, dans les centres d'emploi fédéraux. Ce qui se fait, c'est de l'affichage - on a déjà eu l'occasion de s'en parler - sur des babillards, comme à l'entrée des grandes épiceries. C'est ça qui se fait comme placement. La prolifération des agences privées de placement, la prolifération des annonces de placement dans les petites annonces des journaux, c'est dû au fait qu'il ne se fait plus de placement.

Les SEMO, c'est un changement de philosophie que vous leur imposez. Ce que les SEMO faisaient, c'était offrir du placement à des sans-emploi. C'était ça, essentiellement, qu'on reconnaissait comme étant l'innovation de cette ressource SEMO, parce que le placement qui se faisait - qui ne se fait plus, là - dans les CTQ à ce moment-là, au moment où les SEMO sont arrivés, il y en avait du placement dans les CTQ et il y en avait dans les centres d'emploi; il n'y en a plus maintenant, mais il y en avait. Pourtant, même s'il y en avait, on reconnaissait qu'il y avait des clientèles qui étaient particulièrement vulnérables, comme les clientèles de personnes handicapées ou celles qui représentaient des femmes voulant réintégrer le marché du travail ou des jeunes à qui il fallait offrir un service de placement pour des sans-emploi. Là, vous avez glissé imperceptiblement, année après année, vers autre chose. Là, présentement, ce n'est plus des sans-emploi, mais des bénéficiaires d'aide sociale, comme s'il n'y avait pas encore des sans-emploi.

M. le ministre, vous allez me permettre de vous citer parce que, ce matin, vous aviez l'air tellement de vous réjouir du son" de l'Ontario, mais on peut déplorer le fait qu'au Québec le taux d'activité de la population - c'est ça qui est, évidemment, la statistique la plus significative - c'est 63, 6 % et, au même moment, en Ontario, c'est 68, 2 %. Alors, c'est là un taux d'activité, évidemment, qui permet de voir qu'il y a pas mal de gens sans emploi. Il y a pas mal plus de gens sans emploi, même s'ils ne sont pas sur l'aide sociale, au Québec qu'en Ontario, en février 1991 tout au moins. Et je n'ai pas besoin de vous parler des taux de chômage et je n'ai pas besoin de vous dire qu'avec les resserrements de l'admissibilité à l'assurance-chômage il y a encore pas mal de gens qui n'ont pas droit à l'aide sociale parce que leur conjoint travaille. Ils ne sont pas pour mettre leur conjoint sur l'aide sociale pour pouvoir avoir des services qu'offre l'aide sociale. Mais si ça continue, si tous les services d'adaptation de main-d'?uvre, de plus en plus, sont centrés vers des clientèles d'aide sociale... Ça m'arrive, à moi, de recevoir des gens qui me disent: Je ne suis quand même pas pour demander à ma femme d'arrêter de travailler pour pouvoir compléter mon secondaire. Mais c'est ça qui leur est offert finalement, parce que, sinon, ils n'ont pas le droit avec l'aide sociale.

Et, M. le ministre, encore une fois, je reviens sur la phiosophie de base. Ce n'est plus du placement de sans emploi; c'est maintenant des bénéficiaires d'aide sociale. C'était d'ailleurs là l'évaluation que vous faisiez pour l'exemple du SEMO que je vous apportais. Tout de suite, vous m'avez sorti les chiffres concernant les bénéficiaires qui sont inscrits dans ce SEMO et qui sont ou pas à l'aide sociale, comme si c'était le test, le test étant celui de la main-d'oeuvre parce que le ministère, normalement, a une fonction de main-d'oeuvre, pas simplement une vocation à l'égard de la sécurité du revenu. Et, malheureusement, il semble l'oublier cette fonction de main-d'oeuvre. Et moi je dois reconnaître que, non seulement les sans-emploi sont devenus des bénéficiaires d'aide sociale, mais c'est l'employabilité qui était la vocation, l'orientation des SEMO, et c'est devenu du placement. C'est la dernière question que je vous pose: Mais comment il se fait que vous imposez aux SEMO d'être évalués sur un taux de placement dans des mesures de moins de 10 % avec une clientèle, pourtant, qui s'alourdit? Alors, les SEMO sont piégés. S'ils ont un trop grand nombre de personnes à qui ils rendent les services, qui retournent aux études, par exemple, pour compléter leur secondaire ou qui participent à une des mesures d'empioyabilité, ils sont pénalisés.

M. Bourbeau: M. le Président, on discute présentement, dans les SEMO, sur les critères qui vont présider dorénavant au remboursement,

enfin au financement des SEMO. Le dossier va évoluer au cours des prochains mois et on tient compte de tous les points de vue.

Maintenant, je voudrais revenir sur la question du placement. C'est vrai que le Québec, il y a quelques années, faisait du placement, du placement pour toutes les catégories de travailleurs, et, depuis 1986, nous avons abandonné le placement général, si je peux dire, laissant le fédéral s'occuper de ça, et nous faisons maintenant du placement pour les clientèles de dernier recours. Le programme SEMO en est un; le programme PAIE en est un autre. Et je voudrais simplement signifier à la députée de Hochelaga-Maisonneuve qu'elle dit: Vous ne faites plus du placement pour les travailleurs, vous en faites seulement pour les assistés sociaux - pour les sans-emploi, qu'elle dit plutôt, mais seulement pour les assistés sociaux. Mais les assistés sociaux aussi, ce sont des sans-emploi au même titre que les autres. Ce n'est pas une catégorie différente de sans-emploi. Vu de cet angle-là, ce sont tous des gens sans emploi. Mais nous avons décidé de nous occuper d'une façon prioritaire de ces clientèles-là. (17 heures)

Cela étant dit, M. le Président, j'aimerais dire qu'aussitôt que nous aurons rapatrié les pouvoirs de main-d'oeuvre du gouvernement fédéral, si cela peut se produire - j'espère que ça va se produire - j'ai fermement l'intention, j'aimerais bien mettre sur pied un programme universel de placement au Québec. Lors de certains voyages d'étude que nous avons effectués, nous avons été à même de constater, dans certains pays, des systèmes de placement qui, à cause de l'informatique, par exemple, fonctionnent extrêmement bien; entre autres, en Suède - la députée de Hochelaga-Maisonneuve a certainement vu ce système-là - et aussi dans l'État du Massachusetts, par exemple, où j'ai vu des systèmes un peu semblables qui nous permettraient certainement, si nous pouvons finir par mettre la main sur ce pouvoir-là, de doter le Québec, à des coûts, je pense, relativement raisonnables, d'un système intégré de placement qui permettrait à chaque citoyen du Québec, dans son village, d'avoir accès à une banque universelle d'emplois qui lui permettrait certainement de se placer beaucoup plus rapidement. Ça serait certainement l'un des projets que je mettrai de l'avant un jour, lorsque nous rapatrierons les pouvoirs et si je suis encore en charge de ce ministère.

Maintenant, pour ce qui est de l'Ontario... La députée est revenue là-dessus. C'est sûr que le taux d'activité en Ontario a toujours été supérieur à celui du Québec; quand on regarde les statistiques, aussi longtemps en arrière qu'on retourne, il y a toujours eu un décalage de 5 % à 6 % entre l'Ontario et le Québec. Ce décalage-là existe encore. Ça veut dire que, traditionnellement, il y a plus de personnes en Ontario qui travaillent ou qui sont à la recherche d'un emploi qu'au Québec. Ça tient essentiellement au fait que, je pense, la main-d'oeuvre féminine est plus élevée en Ontario et a toujours été traditionnellement plus élevée en Ontario qu'au Québec. Cela étant dit, puisque le taux n'a pas varié sensiblement depuis un an ou deux et même depuis plusieurs années, les statistiques que j'ai données ce matin sont parfaitement valables, puisque ces paramètres-là n'ont pas varié. Quant au taux de chômage, on sait que la différence entre le taux de chômage ontarien et le taux de chômage québécois s'amenuise considérablement, depuis quelques mois: elle n'est plus qu'à à peu près 2 %, 2,4 %, je crois, le mois dernier, alors qu'il a été un temps où la différence entre les deux était de 4 % et plus. Donc, la situation économique s'est certainement améliorée à l'avantage du Québec.

Mme Harel: Oui, M. le Président, c'est une façon de voir les choses. Si on considère qu'un taux de chômage de 12,4 % le mois passé, ça améliore la situation au Québec... Le taux de chômage en Ontario était de 9,5 %, c'est-à-dire à peu près un écart de trois points. Je ne sais pas si le ministre peut se consoler, mais le taux de chômage que le Québec a connu le mois passé était Inégalé depuis 1984.

Alors, je vais terminer ici le programme SEMO...

Le Président (M. Gautrin): Bien.

Mme Harel: ...non pas faute de questions, mais faute de temps, parce que j'aimerais bien aborder avec le ministre le programme PATA.

Le Président (M. Gautrin): Ah! Bon, alors, sur le programme PATA...

M. Bourbeau: Simplement pour encore rectifier les faits sur le chômage, puisque la députée de Hochelaga-Maisonneuve a souvent des trous de mémoire. Le taux de chômage en Ontario était de 9,9 % le mois dernier et au Québec il était de 12,5 %. L'Ontario avait 9,9 % et non pas 9,5 %, ce qui fait que le décalage est de 2,6 % entre le Québec et l'Ontario. Au mois de janvier, c'était 3,6 %, donc une amélioration de 1 % en deux mois. Je ne dis pas, M. le Président, que c'est souhaitable qu'on ait 12 % de chômage; je dis simplement que nous perfor-mons mieux qu'en Ontario, c'est tout, ou moins mal ou moins pire.

Le Président (M. Gautrin): Avant d'aborder le programme PATA, je pense que le député de Matapédia avait une question sur le programme SEMO.

M. Paradis (Matapédia): Oui, une courte question. M. le ministre, vous avez dit que les

SEMO ne seraient pas amputés de leur budget, pour un, et, deux, j'aimerais savoir si, dans les critères que vous allez discuter effectivement avec les SEMO, vous allez tenir compte, entre autres, de l'étendue du territoire. Chez nous, j'ai un SEMO de personnes handicapées, mais le territoire à couvrir est excessivement grand, de telle sorte qu'au-delà des critères de performance ou de nombre II y a aussi des problèmes de territoire. Voilà.

M. Bourbeau: M. le Président, en ce qui concerne te budget des SEMO, j'ai dit tout à l'heure que les budgets pour l'année qui vient seraient sensiblement les mêmes que l'an dernier. Donc, on peut parler d'un gel du budget pour l'année qui vient.

En ce qui concerne la distribution des budgets entre les 57 SEMO, il y a présentement différents scénarios qui sont à l'étude, mais aucune décision n'a encore été prise. Mais je peux vous assurer que nous allons nous assurer de distribuer équitablement les sommes disponibles auprès de ces organismes-là, qui effectuent un travail remarquable auprès des clientèles les plus démunies.

Le Président (M. Gautrin): Est-ce que ça répond à votre question, M. le député?

M. Paradis (Matapédia): Oui, mais, plus précisément, est-ce que vous allez tenir compte, au-delà des critères de quantité de personnes qui... Est-ce que vous allez tenir compte de la qualité et de l'étendue du territoire à couvrir?

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, il y a divers critères qui entrent en considération quand on détermine les budgets des SEMO. L'étendue du territoire est un des critères dont on tient compte, je peux vous l'assurer. Par contre, je dois aussi dire que certains frais sont moins dispendieux, si on peut employer l'expression, dans certaines régions, par exemple à Montréal, où tes frais de location de locaux, de logements, de bureaux sont moins dispendieux. Il peut y avoir des facteurs qui contrebalancent. Mais on tient compte de tous ces facteurs-tà dans l'établissement des budgets.

Le Président (M. Gautrin): Merci, M. le ministre. Est-ce que ça répond à votre question?

M. Paradis (Matapédia): Très bien.

Le Président (M. Gautrin): Merci. Est-ce qu'on peut maintenant aborder le programme PATA?

M. Bourbeau: Avec plaisir, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): alors, abordons le programme pata. est-ce que, mme la députée de hochelaga-maisonneuve, vous avez quelques questions à poser sur ce programme?

PATA

Mme Harel: Simplement quelques chiffres, M. le Président. Mais d'abord, j'aimerais entendre le ministre nous confirmer que le programme d'aide aux travailleurs âgés est reconduit, puisque les crédits que nous examinons et que nous adopterons en fin de journée ne contiennent aucune provision pour le programme PATA.

M. Bourbeau: M. le Président, est-ce que je peux prendre avis de la question? J'y répondrai dans deux jours.

Le Président (M. Gautrin): Alors, le ministre prend avis de la question. Et vous y répondrez quand? Je n'ai pas bien compris.

M. Bourbeau: J'espère pouvoir y répondre dans 48 heures, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): Ah bon!

Mme Harel: Bon. Qu'est-ce que ça signifie? Je ne pense pas que le ministre peut nous faire de cachettes. S'il veut qu'on adopte ses crédits, il faut qu'il nous dise ce qu'il entend faire avec les 16 000 000 $ qui, l'an dernier, étaient octroyés au programme PATA. Alors, cette année, on ne retrouve aucune provision pour le programme PATA.

M. Bourbeau: Ne cherchez pas, il n'y en a pas.

Mme Harel: II n'y en a pas. Alors, c'est le programme 7, je pense. Ce qui fait qu'au programme PATA, en 1990-1991, on retrouvait 19 747 000 $ et, cette année, on retrouve 3 973 000 $, une coupure de 80 %. Le ministre peut-il nous indiquer quelle est l'intention de son gouvernement à l'égard du programme d'aide aux travailleurs âgés?

M. Bourbeau: M. le Président, la députée de Hochelaga-Maisonneuve sait que je dis toujours la vérité, toute la vérité et seulement la vérité.

Le Président (M. Gautrin):...

M. Bourbeau: Je ne peux pas lui dire qu'il y a des crédits dans le budget pour te programme PATA, M. le Président. Il n'y en a pas. Je l'ai dit ce matin, d'ailleurs. Je peux peut-être reprendre ce que j'ai dit. Je lui ai dit que des discussions ont cours présentement au sein du gouvernement sur la reconduction des crédits alloués au programme PATA, et que j'espère être

en mesure d'annoncer bientôt les modalités de reconduction de ce programme.

Mais comme le programme venait à échéance le 31 mars 1991, c'est-à-dire il y a trois semaines, forcément, il ne pouvait pas y avoir de reconduction automatique de budget dans les budgets du ministère, puisqu'il y avait une clause "crépusculaire", si je peux m'exprimer ainsi, en ce qui concerne les aspects monétaires de ce programme. Alors, il fallait donc faire une nouvelle demande de reconduction des crédits. Cette demande-là chemine dans l'appareil gouvernemental depuis un certain temps et, M. le Président, c'est le gouvernement qui décidera, bientôt je l'espère, du sort que connaîtra le programme PATA.

Le Président (M. Gautrin): Mais, dans les crédits actuels, il n'y a rien pour le programme PATA.

M. Bourbeau: Non. Je viens de le dire.

Le Président (M. Gautrin): Merci. Donc, est-ce que ça répond à votre question?

Mme Harel: Alors, est-ce qu'on doit s'inquiéter, M. le ministre?

M. Bourbeau: Écoutez, on peut s'inquiéter modérément, dans ce sens que la décision n'est pas encore prise, ni dans un sens ni dans l'autre. La députée a fait partie d'un gouvernement avant moi. Elle sait qu'il ne faut jamais rien prendre pour acquis. Mais je crois déceler de part et d'autre de la Chambre, ou, enfin, de part et d'autre de cette assemblée et aussi de cette séance, de cette pièce, chez les députés, un désir de voir le programme PATA être reconduit. Maintenant, le gouvernement décidera bientôt, j'espère, quel sort le programme PATA connaîtra. Quant à moi, je compte sur l'appui de tous ceux que le programme intéresse.

Le Président (M. Gautrin): Merci.

Mme Harel: M. le Président, PATA n'est pourtant pas sans défaut, évidemment, et c'est à l'occasion de cette reconduction que le ministre doit certainement envisager des modifications. Qu'est-ce qu'il entend apporter comme modifications à la demande qu'il a faite quant au programme PATA?

M. Bourbeau: M. le Président, essentiellement, ce qui a été reproché au programme PATA, surtout dans la région de Montréal, ou je dirais même sur l'île de Montréal, c'est le fait qu'un des critères d'admission à PATA était à l'effet qu'une entreprise, pour pouvoir être qualifiée, devait comporter un nombre minimum de travailleurs licenciés collectivement. Ce nombre-là est fonction de la population de la localité où se situe l'entreprise. Plus la localité est petite, plus le nombre est bas.

Et, quand on arrive à Montréal, le nombre est assez élevé. Le nombre de Montréal est de 100. C'est donc dire que, si une entreprise ferme ses portes à Montréal et qu'elle a un nombre d'employés licenciés collectivement de moins de 100, l'entreprise ne peut pas être admissible. Si elle ferme ses portes dans une localité de 10 000 de population, là, à ce moment-là, s'il y a 20 personnes licenciées, l'entreprise peut être admissible. Donc, le nombre d'employés licenciés minimum pour admettre le licenciement varie avec la taille de fa localité. et on peut argumenter qu'un licenciement collectif, je ne sais pas, moi, qui verrait 75 personnes ou 85 personnes licenciées à montréal pourrait avoir un effet aussi dévastateur dans la collectivité que peut-être un licenciement de 20 personnes dans une petite localité. enfin, c'est sujet à discussion. nous avons proposé au gouvernement fédéral une formule pour adoucir ce critère-ià. bon, jusqu'à maintenant, il n'a pas été possible d'en venir à une entente définitive, mais je sais, je peux dire que le ministre responsable, enfin, l'ancien ministre responsable - parce que je crois que, dans le remaniement ministériel fédéral, le ministre a changé - m'avait signifié par écrit son ouverture à des modifications au programme pata allant dans le sens de ce que nous avions proposé.

Je n'ai pas encore pris contact avec mon nouveau collègue fédéral qui est le ministre responsable de la Montérégie auprès du gouvernement fédéral. On devrait donc bien s'entendre. J'espère le convaincre qu'il pourra apporter certains adoucissements au programme PATA qui permettraient un peu plus de flexibilité en ce qui concerne l'admissibilité des employés ou des entreprises dont les travailleurs seraient licenciés collectivement à Montréal.

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre, est-ce qu'il serait possible, sans divulguer les secrets des dieux, de savoir quelle était la proposition que vous avez faite à ce moment-là?

M. Bourbeau: M. le Président, c'est une proposition un peu compliquée sur la base mathématique, mais qui permettrait, en gros, de faire en sorte d'admettre des travailleurs dans des entreprises à Montréal qui auraient moins de 100 personnes licenciées.

Le Président (M. Gautrin): Ça, je comprends, mais...

Mme Harel: M. le ministre, je dois vous dire que le président est un mathématicien notoirement connu et réputé, et chevronné aussi.

Le Président (M. Gautrin): Mais la borne... Vous arrivez à quoi, comme borne inférieure,

avec votre formule? (17 h 15)

M. Bourbeau: Écoutez, M. le Président, moi... M. le Président, je ne pense pas que je devrais, à ce moment-ci, rendre publics les détails des propositions...

Le Président (M. Gautrin): D'accord.

M. Bourbeau: ...que j'ai faites au gouvernement fédéral, parce que ça pourrait susciter des espoirs qui pourraient être déçus subséquemment. Je préfère continuer les négociations et, quand on en sera venus à une entente avec le fédéral, je pourrai rendre publics...

Mme Harel: Ce n'est pas parce que la formule mathématique est si complexe que notre président ne peut pas nous l'interpréter...

M. Bourbeau: Non, je sais que le président...

Mme Harel: ...c'est parce que, politiquement, vous ne voulez pas la dévoiler.

M. Bourbeau: M. le Président, je sais toute votre compétence en matière de chiffres. Je vous prie de croire que le ministre n'est pas mauvais non plus.

Le Président (M. Gautrin): Je n'ai jamais dit le contraire.

M. Bourbeau: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Mais revenons à PATA, tel qu'il s'est appliqué depuis les trois dernières années. Le ministre peut-il m'expliquer comment il a été possible de périmer 3 700 000 $ cette année au programme PATA, c'est-à-dire pour 1990-1991? 3 700 000 $, c'est donc l'équivalent de 30 % des coûts assumés par Québec. Si on additionne la contribution qu'Ottawa aurait investie, soit 70 %, c'est un total de 12 600 000 $ qui ont échappé aux travailleurs et travailleuses licenciés âgées de 55 ans et plus, seulement pour l'année 1990-1991: la part de Québec périmée, 3 700 000 $, la part d'Ottawa périmée et le total, finalement, de l'ensemble de ce que les deux gouvernements devaient consacrer, 12 000 000 $ l'an passé. Si on fait simplement le calcul à partir des chiffres des crédits de 1989-1990, et 1988-1989, depuis la mise en place du programme, on se rend compte qu'il y a eu au total 19 000 000 $ de périmés, simplement la part de Québec, ce que Québec avait budgété sur papier et qu'il n'a pas dépensé. C'est donc 30 % de sa contribution au programme. 19 000 000 $, ça signifie qu'Ottawa n'a pas dépensé 44 000 000 $. C'était supposé être une contribution de 70 %. Le total des deux, c'est 63 000 000 $ de moins dans les poches des travailleurs et travailleuses licenciés de 55 ans et plus, et quand on constate que c'est finalement le seul, l'unique programme qui s'adresse à des travailleurs âgés... Dans la foulée de l'entente sur le libre-échange, c'était recommandé par la commission de Grandpré comme mesure d'adaptation de la main-d'oeuvre. Et, finalement, c'est la seule mesure qui a été mise en place dans le cadre des mesures d'adaptation de la main-d'?uvre recommandées par de Grandpré Ça a été annoncé en pleine campagne électorale fédérale, en octobre 1988. Aucune autre nouvelle mesure d'adaptation de la main-d'oeuvre n'a été mise en place par le gouvernement fédéral ou par le gouvernement du Québec. Il n'y en a eu aucune. Entre-temps, l'Ontario légiférait pour indemniser les travailleurs et travailleuses victimes de fermetures. Le Québec laissait passer la situation, et c'est ce qui nous amène à constater qu'il y a maintenant des fermetures à rabais, parce que ça coûte moins cher de fermer au Québec qu'en Ontario. Et la seule mesure d'indemnisation en est une qui a bénéficié, finalement, à 1060 travailleurs, mais ils étaient plus de 7000.

Alors, par exempte, M. le ministre, moi, j'ai un dossier qui, évidemment, m'inquiète beaucoup: c'est celui des ex-travailleurs de la Vickers, des travailleurs qui étaient l'aristocratie de la classe ouvrière. Ceux auxquels je pense, ils sont un groupe de 18 qui travaillaient dans le département des têtes nucléaires. Sur ces 18, il y en a actuellement 3 qui reçoivent de l'aide sociale et il y en 13 qui vont en recevoir incessamment, parce que leurs prestations de chômage se terminent. Ils ont fait, depuis deux ans, une demande d'admission à PATA. Ils correspondent à tous les critères. Tous les tests, même les plus discriminatoires, ont été appliqués. Dans leur cas, ils ne peuvent pas être écartés, comme c'est le cas, par exemple, dans le textile, la chaussure, le vêtement, pour le motif que 90 % des entreprises du vêtement, 86 % des entreprises du textile comptent moins de 100 employés. Alors, dès qu'ils appliquent le critère à Montréal, c'est évident, comme ils l'appliquent rigoureusement, que tous ces travailleurs se trouvent exclus du bénéfice du programme d'aide aux travailleurs âgés.

Mais, dans le cas de la vickers, 1s y avaient droit. Ils attendent depuis deux ans. C'est-à-dire que, d'abord, on leur a dit d'épuiser leur indemnité de départ, ensuite, d'épuiser leur "chômage"; certains ont pu travailler, entretemps. Là, ce qu'on leur indique, c'est qu'il faut que tout le monde ait terminé ses prestations de chômage. C'est ça, le nouveau motif qu'on invoque. Il faut que tout le monde arrive en même temps au programme. Et puisqu'il y en a certains d'entre eux qui avaient pu se trouver des emplois, qui ont pu retarder d'aller chercher leurs prestations de chômage, là, ce sont les autres qui sont pénalisés et qui sont sur l'aide sociale.

On leur avait dit, à Ottawa et à Québec.

qu'ils auraient une réponse en avril. On est fin avril et, aux dernières informations, vérification faite, on leur dit qu'on ne pourra même pas encore leur donner de réponse en mai, parce que tous les dossiers sont retardés, à cause de Québec, nous dit-on à Ottawa.

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre.

M. Bourbeau: Je vais retourner sur la première homélie de la députée de Maisonneuve, avant Vickers, tout à l'heure, sur PATA. Il faut bien comprendre que la première année de PATA, quand nous avons annoncé le programme, le gouvernement fédéral ne pouvait pas commencer à s'occuper de PATA avant d'avoir amendé sa propre loi, et ça a pris pratiquement un an avant que la loi fédérale soit amendée. Elle a été amendée à l'été 1988, je crois. De sorte que la première année, à toutes fins pratiques, on n'a eu aucun dossier, parce qu'une fois que la loi fédérale a été amendée, qu'on a pu démarrer, avant que les dossiers aient été montés, les compagnies aient été acceptées, les licenciements aient été validés, les travailleurs certifiés, on était dans la deuxième année du programme. La deuxième année, on a dépensé 5 600 000 $ au Québec. Et l'année dernière, l'année qui se termine le 31 mars 1991, on estime qu'on aura dépensé au-delà de 12 000 000 $. Le programme a donc atteint son rythme de croisière au cours de la dernière année. J'aimerais simplement dire que, nonobstant le fait que le programme ait démarré lentement, le Québec a obtenu, au cours de la période, 66,5 % des licenciements acceptés à travers tout le Canada. Donc, les deux tiers des licenciements acceptés ont été au Québec. En ce qui concerne les travailleurs âgés concernés par ces licenciements-là, le programme a admis 58,6 % des travailleurs québécois, sur tous les travailleurs canadiens admis au programme PATA. Je vous rappelle que le fédéral en paie 70 % et, en plus de ça, 58,6 % des travailleurs âgés admis étaient du Québec. En ce qui concerne les fonds dépensés, les coûts d'achat des rentes, on me dit que c'est 60,3 %. Alors, le Québec a eu une part importante des fonds fédéraux dépensés dans le programme PATA.

Pour ce qui est de la Vickers... La députée de Maisonneuve a posé une question sur Vickers... Il s'agit d'un licenciement qui aurait eu lieu à la fin de décembre 1989, si j'ai bien compris, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): Est-ce qu'on s'entend sur la date du licenciement?

M. Bourbeau: Le 31 décembre 1989, je crois?

Mme Harel: C'est-à-dire que le licenciement a eu lieu l'année qui a précédé décembre 1989. Ça a été la fermeture définitive en décembre 1989. Le licenciement a débuté avant. D'ailleurs, c'est un des problèmes dans l'application de PATA. Comme les licenciements n'ont pas toujours lieu au même moment, à la même date et qu'il y a des dates différentes pour fermer des départements, ça a été invoqué parfois pour refuser l'admission a PATA, sous prétexte que le nombre magique n'était pas atteint.

M. Bourbeau: M. le Président, il n'y a pas de problème avec ça. La députée de Hochelaga-Maisonneuve ne devrait pas soulever plus de problèmes qu'il n'y en a, parce qu'on me dit que le licenciement est acceptable. Le dossier est acceptable, parce que la rétroactivité va au 1er janvier 1988, à moins que je ne m'abuse. Donc, le licenciement a eu lieu après cette date-là. Sur un total de 482 travailleurs licenciés, il y en aurait eu 53, c'est-à-dire 11 %, qui auraient plus de 55 ans, de sorte que le dossier serait de l'ordre de ceux qui pourraient être acceptés. La décision finale n'a pas été prise. La recommandation est assez positive. Je pense que, si le programme est reconduit, il y a de bonnes chances que ce licenciement-là puisse être admis. Voilà où nous en sommes.

Le Président (M. Gautrin): Mme la députée, ça vous satisfait?

Mme Harel: Oui. M. le Président, vous allez me permettre...

Le Président (M. Gautrin): Bien sûr! Bien sûr!

Mme Harel: ...de faire lecture d'une lettre que j'ai reçue d'un travailleur. Il n'est pas de ma circonscription, il n'est pas de l'est de Montréal. Il n'est pas du bas de la ville non plus.

Le Président (M. Gautrin): II est du sud-ouest?

Mme Harel: Je l'ai rencontré par la suite, pour mieux connaître les événements qu'il relate dans sa lettre. Ça va être extrêmement éloquent, je pense, cette lettre-là qui est écrite par un travailleur qui a été pendant 30 ans à l'emploi de la même entreprise, donc une personne très stable, qui a finalement une sorte de permanence dans la société et qui était aux Chaussures Rosita, à la compagnie de Chaussures Rosita, bien connue pour la qualité de ses chaussures, mais qui a fermé ses portes. Il m'a écrit ceci, M. le ministre, il y a à peine un mois de ça: "Vous trouverez ci-joint en détail les différentes étapes réalisées jusqu'à maintenant. "Début de 1990: Nous avions été informés qu'il existait un programme d'adaptation pour les travailleurs âgés. "Mi-avril 1990: Un premier appel fut fait au ministère de la Sécurité du revenu du Québec,

1-800... poste 2092. On m'informe que c'est Travail-Canada qui s'occupe de ces dossiers, et d'appeler au 1-800-567-1916, ce qui fut fait le jour même. On me confirme que c'est effectivement Travail-Canada qui étudie les dossiers de fermeture d'usines et d'aide aux travailleurs âgés mis à pied suite à ces fermetures "Le 23 avril 1990: Mme Frappier recommande d'écrire en donnant le plus de détails possible, ce que je fais le 23 avril 1990, et me dit que le dossier est déjà à l'étude à la demande de M. Gagliano, député fédéral, mais que nous n'aurions probablement pas de nouvelles avant novembre 1990, puisqu'il fallait que l'usine soit fermée depuis un an, et de communiquer de nouveau avec elle en octobre 1990 - on est en avril. "En mai 1990: Mme Frappier, de Travail-Canada, confirme par écrit la réception de notre lettre du 23 avril et dit que le comité PATA Québec-Ottawa étudie le dossier et qu'on nous avisera dès que possible. "Le 31 octobre 1990: Appel fait à Travail-Canada 1-800... Mme Sylvie Robitaille m'informe que le dossier de Chaussures Rosita est complété, qu'il est sur le bureau du ministre pour approbation, qu'il a été transféré au ministère du Revenu à Québec et que c'est ce ministère qui communiquera avec nous. Elle me conseille d'appeler M. Raynald Dubé, à Québec, 1-418-646... car c'est lui qui s'occupe des cas des employés. M. Dubé me réfère à un certain Daniel Leduc qui, lui, ne semble pas très au courant de ce dossier, puisque, dit-il, il vient tout juste de commencer. Mais, après vérification avec son surveillant, il confirme que le dossier des exemployés de Chaussures Rosita est toujours à l'étude, qu'il devrait être déposé sur le bureau du ministre en janvier 1991, et de rappeler au début de janvier. "Le 8 janvier 1991: Appel fait à Mme Frappier, de Travail-Canada, au 1-800... Elle confirme que le projet a été approuvé par Ottawa depuis novembre 1990, que tout est entre les mains du ministère de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu, à Québec, et me donne le nom de M. Raynald Dubé, 1-418... qui, lui, me réfère à M. Marcel Champoux. M. Champoux dit que le dossier n'est pas encore terminé. Au début, il me dit que le tout devrait être déposé sur le bureau du ministre d'ici quelques jours, puis, au cours de la conversation, mentionne qu'il a écrit à la secrétaire de Chaussures Rosita pour obtenir la liste complète des employés ayant 55 ans et plus licenciés au cours de l'année 1989 - la fermeture a eu lieu en 1989 - et qu'il n'a pas encore obtenu ce renseignement, que le projet serait déposé sur le bureau du ministre vers la fin de février, début mars 1991, et que les personnes admissibles seront contactées après, ce qui donnerait possiblement juin 1991. (17 h 30) "Le 6 mars 1991: appel fait à M. Raynald

Dubé. Il ne se rappelle pas avoir vu le dossier de Rosita. Il doit vérifier et me rappeler. Le 9 mars 1991, rappel de M. Dubé; le dossier n'est pas encore complété. Il est présentement à la phase 8, mis de côté; il n'a pas encore été présenté au ministre faute d'argent. Il ne sera sûrement pas présenté avant quelques mois. Par la suite, ils contacteront les employés de plus de 55 ans qui ont été mis à pied, mais il ne sait pas quand. "Là, la question qui m'était posée, c'est: Qu'advient-il des personnes qui ne reçoivent plus de prestations d'assurance-chômage depuis le début de décembre 1990? C'est le cas de mon mari puisqu'il ne reçoit aucune autre forme de revenus, parce que, vous savez, la chaussure n'a pas toujours très bien fait vivre son monde. Heureusement que moi, j'ai encore un emploi, autrement qu'arriverait-il? Demander l'aide sociale? Sûrement pas avant d'avoir examiné toutes les autres issues, " etc.

Moi, M. le ministre, je ne sais pas si les membres de la commission réagissent comme moi, mais, quand je lis une lettre comme ça, je trouve ça, je vous dis, simplement écoeurant. Je trouve ça épouvantable de mettre des gens qui ont travaillé pendant 30 ans dans une situation comme celle-là, de quémander pendant deux ans. La fermeture est intervenue en 1989, là on est en avril 1991, ce n'est toujours pas réglé et ils sont admissibles.

Le Président (M. Gautrin): M.le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, moi aussi, lorsque je prends connaissance de cas où un citoyen doit se promener d'un ministère à l'autre, d'un gouvernement à l'autre, d'un fonctionnaire à l'autre - il arrive parfois qu'on est mis au courant de dossiers comme ça - ça me fait bouillir le sang dans les veines.

Cependant, il faut faire des distinctions. Dans le cas présent, je pense qu'il faudrait regarder comment fonctionne le programme PATA avant de lancer des anathèmes à gauche et à droite. Le programme PATA, c'est un programme qui s'adresse à certains travailleurs âgés licenciés collectivement dans certaines circonstances. Ce n'est pas un programme universel. C'est un programme à budget fermé, premièrement, c'est-à-dire que ce n'est pas un programme comme l'aide sociale où tout le monde peut y venir, quel que soit le nombre. Il y a un budget fermé et, chaque année, on tente de dépenser le budget.

Il faut, premièrement, qu'il y ait un licenciement collectif; ça veut dire, ça, qu'il doit y avoir un grand nombre de travailleurs mis à pied dans une localité. Le but du programme, enfin, l'idée sous-jacente, c'est que, quand un grand nombre de personnes sont licenciées collectivement dans une localité, c'est beaucoup plus difficile pour elles de se replacer que si une personne est mise à pied, ou deux, ou trois. Si vous avez, disons, 50 personnes dans une ville

québécoise de taille moyenne qui sont mises à pied en même temps, c'est pas mal plus compliqué pour elles de se replacer que s'il n'y en a que deux ou trois, premièrement. Deuxièmement, le programme prend pour acquis aussi que c'est plus difficile de se replacer quand on a 55 ans et plus. S'il y a, je ne sais pas, moi, 30 personnes de 55 ans et plus qui sont mises à pied en même temps, c'est encore plus difficile pour elles de se replacer que si elles avaient 30 ans, disons, ou 25 ans. Vous savez comme moi que c'est vrai.

Il y a donc deux critères en cause. Il doit y avoir un grand nombre de personnes licenciées collectivement et, deuxièmement, il doit y avoir, parmi ces personnes-là, un bon nombre de personnes de 55 ans et plus pour que le dossier soit reconnu admissible et pour que les travailleurs le soient aussi. Maintenant, vous savez que quelqu'un qui est licencié... Il y a d'autres critères dans le programme aussi. Il faut que les travailleurs, pour être admissibles, aient travaillé 15 années au cours des 20 dernières années. C'est donc des gens, en général, qui sont admissibles à l'assurance-chômage.

Alors, quand une personne est licenciée, elle doit, en premier lieu, épuiser ses prestations d'assurance-chômage - c'est pour ça que, d'une façon générale, il se passe une année, enfin le nombre de mois; c'était plus auparavant, ce sera moins dorénavant - avant que le dossier puisse revenir à la surface. Donc, quand la députée nous dit que ça fait un an et demi que ça dure ou un an et quelques mois, oubliez pratiquement tout de suite la première année, parce que c'était le temps où les travailleurs épuisaient leurs prestations d'assurance-chômage. On espère que, pendant cette période de temps là, ils vont se trouver un emploi. Ça arrive fréquemment. Il y a des statistiques qu'on a qui disent qu'il y a un pourcentage x de travailleurs licenciés qui se replacent dans la première année, même parmi les 55 ans et plus. Il y en a un certain nombre qui réussissent à se replacer. Au bout d'un an, lorsqu'on a épuisé les prestations d'assurance-chômage et que les personnes ne se sont pas replacées, si le dossier est admissible en vertu des critères de la population, de la qualité, si le dossier est admissible en vertu du nombre de personnes âgées de 55 ans et plus, là, le dossier peut être admis. Et comme nous sommes deux gouvernements dans le dossier, le fédéral et nous, on se partage les dossiers. Certains licenciements deviennent, par entente entre nous, la responsabilité du fédéral et d'autres du provincial, non pas qu'on ne collabore pas, mais certains sont traités par l'équipe du fédéral, d'autres par l'équipe du Québec. On collabore comme ça ensemble.

Il semble que le dossier de Chaussures Rosita a été traité par... C'est le Québec qui a traité le dossier PATA-Rosita, celui que j'ai devant moi, en tous les cas, 1989, Chaussures

Rosita, 4875, boulevard Couture à Saint-Léonard. C'est de ça qu'on parle, bon. Alors, si la personne a appelé au fédéral, probablement qu'on l'a renvoyée au Québec à tous coups, parce que c'est le Québec qui avait la charge de ce dossier-là. Le licenciement a eu lieu en novembre 1989, c'est donc dire qu'au bout d'un an, en novembre 1990, le dossier est devenu beaucoup plus actif. On a débuté l'analyse du dossier au mois de mars 1990, évidemment avant que l'année soit expirée, et l'analyse s'est terminée à la fin de janvier 1991, après l'expiration de l'année d'assurance-chômage. Une fois que le dossier a été traité au Québec, il faut aussi que le fédéral soit mis dans le coup. Évidemment, on prend l'initiative du traitement, mais, à une étape ultime ou ultérieure, ça se fait conjointement. Quelles sont les statistiques depuis le début, pour bien comprendre...

Mme Harel: M. le Président, juste pour terminer sur Rosita...

M. Bourbeau: J'y suis encore... Mme Harel: Vous étiez bien parti. M. Bourbeau: J'y suis encore. Mme Harel: Bon!

M. Bourbeau: J'y suis encore. Est-ce que je peux terminer?

Mme Harel: Oui.

M. Bourbeau: Bon, je vais terminer, puis, après ça, si ce n'est pas complet, vous me le direz. Alors, en général, M. le Président, lorsque toutes ces analyses-là sont terminées et que tout est positif, le dossier est mis sur la pile et on les accepte au fur et à mesure que les fonds sont disponibles. Maintenant, il y a les fonds québécois et il y a les fonds fédéraux. Il faut bien penser que nous, on a des fonds pour le Québec, on met 30 %. Mais le fédéral en met beaucoup, aussi, et le fédéral n'a pas que le Québec. Le fédéral en a en Ontario, il en a dans les autres provinces et lui aussi a un budget maximum, de sorte que, dans la plupart des cas, ce n'est pas le budget du Québec qui nous arrête, c'est l'enveloppe fédérale qui devient épuisée avant la nôtre. C'était le cas l'an dernier, et on va dépenser au-delà de 12 000 000 $ cette année, le fédéral à peu près 37 000 000 $ au Québec, et c'est le maximum qu'il peut mettre, l'enveloppe étant épuisée, me dit-on.

Maintenant, je veux quand même dire ceci, c'est que sur 4296 travailleurs âgés de 55 ans et plus qui étaient visés dans les licenciements qui ont été reconnus, un nombre de 57 %, finalement, ont été acceptés, certifiés. C'est donc un

pourcentage assez intéressant. Évidemment, c'est parce qu'il y en a certains qui sont éliminés en cours de route, soit ceux qui se sont trouvé un emploi en cours de route ou qui se sont déqualifiés, ordinairement parce qu'ils se sont trouvé un emploi, à la fin...

Mme Harel: Rosita, c'est pour quand?

M. Bourbeau: Alors, actuellement, depuis le début du programme, on a accepté sept groupes, au Québec, de travailleurs, sept phases, si vous voulez, depuis le début, la prochaine est la phase 8, et Rosita, les travailleurs de Rosita font partie du groupe qui pourrait être admis dans la phase 8, c'est-à-dire la prochaine phase.

Le Président (M. Gautrin): Merci. M. le ministre. Mme la députée.

Mme Harel: M. le Président, ce qui m'inquiète, c'est que le ministre a l'air de justifier ça. C'est un mauvais programme) Ce n'est pas un bon programme!

M. Bourbeau: Alors, voulez-vous qu'on l'annule?

Mme Harel: II faut le corriger, il faut le repenser si c'est un programme qui empêche Québec de dépenser. Imaginez, le ministre dit: L'enveloppe fédérale était fermée et puis il n'y avait plus de fonds dedans, alors on n'a pas pu dépenser. Bien, ça fait trois ans qu'il ne dépense pas 19 000 000 $ à cause de ça. Ça ne peut pas se continuer comme ça. 3 700 000 $ non dépensés cette année, puis le total des années antérieures, ça fait 19 000 000 $ non dépensés parce que Ottawa ne mettait pas d'argent dans le programme. Bien, un programme où on budgète de dépenser puis où on ne le fait pas parce que l'autre ne le fait pas, bien, on dit à l'autre: C'est bien de valeur mais on va changer les critères parce que ça ne va pas continuer comme ça. Imaginez!

Les exemples que j'ai apportés, Rosita, Vickers, ce sont des licenciements qui ont eu lieu il y a deux ans et ce sont des travailleurs qui sont admissibles et qui sont en attente. Mais j'ai bien d'autres lettres, notamment une de l'Union internationale des ouvrières et ouvriers du vêtement pour dames dans laquelle on dit ceci: Vous trouverez ci-joint une liste des 39 ateliers qui ont été fermés depuis 1986 et dont les employés étaient membres de l'Union internationale des ouvrières et ouvriers du vêtement pour dames. Officiellement, ces fermetures ont provoqué la perte de 1118 emplois syndiqués. Cette donnée ne reflète cependant pas la réalité car la majorité de ces fermetures ont été précédées de mises à pied progressives qui ne sont pas prises en considération pour établir la statistique officielle. Nous estimons au double le nombre de pertes d'emploi provoquées par ces fermetures. Seulement 2 de ces 39 ateliers ont pu se prévaloir du programme d adaptation pour les travailleurs et travailleuses âgés, en l'occurrence Créations Américana et Jocardi Suits & Coats. Les 37 autres ateliers ont vu leur demande d'assistance demeurer sans réponse, ou être mise à l'étude, ou être carrément rejetée. En effet, ces critères d'admissibilité d'un atelier, au moment de la fermeture, représentaient un nombre de 100 emplois ou plus.

J'ai rencontré le représentant syndical de l'Union internationale des ouvrières et ouvriers du vêtement pour dames qui m'a donné plusieurs exemples où les mises à pied avaient été progressives et où, dans l'application du programme, on a refusé d'additionner les mises à pied effectuées dans l'année pour ne prendre en compte que les emplois au moment de la fermeture. Et il dit ceci: Les critères d'admissibilité ont un effet discriminatoire systématique sur les travailleurs et travailleuses de l'industrie du vêtement, car, dans cette industrie, le nombre moyen d'employés par entreprise se situe entre 30 et 40. En fait, au Québec, 90 % des entreprises du secteur du vêtement comptent moins de 100 employés. Et tantôt j'écoutais le ministre dire que, finalement, il y avait des personnes de 55 ans et plus qui retrouvaient un emploi, que ce n'était pas un programme universel. Mais j'avais en tête la lettre des ex-travailleuses du textile de Lanaudière qui m'écrivaient pour me dire ceci: II faut tenir compte de l'ensemble des réalités particulières au domaine du textile et de l'improbabilité quasi absolue pour nous, ex-travailleuses, de retourner sur le marché de l'emploi.

Le ministre peut bien dire qu'il peut toujours y avoir de l'ouvrage ailleurs, mais des personnes qui travaillent parfois depuis 30 ans dans le même secteur ont des difficultés bien plus grandes, l'obstacle est encore bien plus grand à changer de secteur. Ce n'est pas du tout évident que le nouvel employeur est intéressé à les prendre dû au fait qu'il peut, de toute façon, embaucher une main-d'oeuvre plus jeune, mais aussi parce que ce n'est pas nécessairement une main-d'oeuvre qui est mobile, qui est nécessairement capable d'apprentissage nouveau, d'une certaine façon oui, mais ce n'est pas évident. Quand on pense que le tiers des travailleuses du textile et du vêtement à Montréal ont moins d'une huitième année de scolarité, en ce qui concerne la quasi-improbabilité pour elles de se trouver du travail dans leur propre secteur, je pense qu'elles ont raison. Quand on pense que, depuis deux ans, le secteur manufacturier a perdu 111 000 emplois au Québec... Évidemment, ce n'est pas que des emplois du textile ou du vêtement, mais, à Montréal, on compte une diminution de 37 000 emplois dans le secteur du textile et du vêtement et ça comprend Laval, évidemment. Dans des conditions comme celles-là, je ne comprends pas que le ministre ne soit pas

en train d'essayer de réviser son programme. (17 h 45)

M. Bourbeau: M. le Président, je n'ai jamais prétendu que le programme PATA était un programme parfait, mais il est autrement plus parfait que le programme semblable qu'avait le Parti québécois, puisqu'il n'en avait pas. On aura dépensé un peu moins de 20 000 000 $ en deux ans dans le programme PATA. C'est 20 000 000 $ de plus que ce qu'on aurait dépensé s'il n'y avait pas eu de programme du tout. Et c'est facile...

Mme Harel: Mais le ministre va accepter, parce que je sais que, lui aussi, il souhaite la véracité, de reconnaître qu'il y avait, à l'époque, un programme qui s'appelait PAT, Programme d'aide au travail, que le Parti québécois avait négocié et qui était entièrement financé par le fédéral...

M. Bourbeau: Oui.

Mme Harel: ...mais que le Québec avait obtenu pour lui seul et qui permettait de couvrir entièrement les travailleurs mis à pied dans l'amiante...

M. Bourbeau: Oui.

Mme Harel: ...dans la chaussure, dans le textile, dans le meuble, dans le vêtement. C'est le contraire qui se passe maintenant.

M. Bourbeau: Oui. M. le Président, c'est vrai qu'il y avait un programme payé à 100 % par le gouvernement fédéral.

Mme Harel: On savait comment faire les choses.

M. Bourbeau: Mais le gouvernement du Parti québécois ne faisait pas de gros efforts dans son propre budget, là, c'était payé à 100 % par le fédéral. Nous, nous aurons déboursé un peu moins de 20 000 000 $ en deux ans. C'est donc mieux que rien. Ce n'est peut-être pas suffisant aux yeux de la députée de Hochelaga-Maison-neuve, mais c'est quand même un bon début.

Pour ce qui est des modifications, je suis disposé à apporter des modifications et j'en ai suggéré quelques-unes. J'ai parlé, tout à l'heure, d'une modification pour Montréal. Il y a aussi une modification pour les femmes que nous envisageons et que nous comptons discuter avec lo gouvernomotu fédéral. Les statistiques que nous avons sont à l'effet qu'en général les femmes ont moins d'ancienneté sur le marché du travail que les hommes, statistiquement parlant. Nous avons suggéré au fédéral de faire en sorte que la norme présente, qui veut qu'un travailleur, pour être éligible, doit avoir travaillé au moins 15 des 20 dernières années, soit abaissée, dans le cas des femmes, à 13 pour, justement, rencontrer les statistiques d'ancienneté sur le marché du travail. C'est donc encore un autre critère que nous aimerions voir assouplir et ça fera l'objet des discussions que nous aurons avec le gouvernement fédéral, lorsque nous débuterons ces négociations-là, pour la reconduction du programme.

Le Président (M. Gautrin): Merci. Autre question?

Mme Harel: Je veux juste renchérir là-dessus, M. le Président, parce que j'ai encore en tête, là, une dame que j'ai rencontrée, qui a 63 ans, qui a complété 14 des 20 dernières années sur le marché du travail, qui est entrée sur le marché du travail à 49 ans, après avoir élevé toute sa famille et qui trouve extrêmement injuste d'être la seule, finalement, de son atelier à ne pas pouvoir bénéficier du programme PATA, après 14 années de travail.

M. Bourbeau: C'est le problème, M. le Président, de tous les programmes qui ont des critères. À un moment donné, il y a une ligne de démarcation et certains sont admissibles et d'autres pas. C'est très malheureux.

Le Président (M. Gautrin): Est-ce qu'on va passer à un autre programme?

Mme Harel: Au programme APPORT.

Le Président (M. Gautrin): Est-ce que vous avez des questions du côté ministériel? Non? Alors, passons au programme APPORT. Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: On n'en fera pas notre dessert, ça, M. le Président...

Le Président (M. Gautrin): Ah! Mme Harel: ...soyez-en convaincu.

Le Président (M. Gautrin): Bon, je comprends.

APPORT

Mme Harel: Alors, ce qu'il faut constater, c'est que le programme APPORT n'a pas atteint la vitesse de croisière que le ministre lui réservait, annonçait. J'aurais souhaité, M. le Président, pouvoir citer l'éloquence que le ministre a eue, lors d'études de crédits des années antérieures, en critiquant les interventions que l'on faisait sur le programme APPORT et en demandant de la patience, du temps et en faisant valoir que les années allaient amener ce programme à performer et à atteindre sa vitesse de croisière. Je vous rappelle qu'à l'origine il devait rejoindre 44 000 ménages. Le programme, main-

tenant, rejoint 15 000 familles et un peu plus de 8000 d'entre elles, plus exactement 8817, ont eu la désagréable surprise de recevoir un avis de remboursement du ministère du Revenu pour un trop-payé moyen équivalant à 534 $, pour un total de 4 700 000 $. C'est donc à la moitié des familles qu'on a demandé un remboursement l'an passé pour, finalement, le quart du budget qui avait été versé, c'est-à-dire 4 700 000 $, le budget étant d'environ 22 000 000 $. Est-ce que ça va continuer longtemps comme ça? Est-ce que vous pensez qu'à ce rythme-là les familles québécoises vont continuer à faire confiance à un programme où le ciel finit par leur tomber sur la tète en cours d'année?

M. Bourbeau: M. le Président, d'abord, je voudrais apporter certaines corrections, rectifications en ce qui concerne certains propos. Le programme APPORT n'est pas un programme qui a été dessiné et proposé par le ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle, c'est un programme qui a été annoncé, lors du budget 1987, par le ministre des Finances. M. le Président, je ne veux pas me désolidariser de mon collègue, mais il faut bien que les paternités soient logées là où elles doivent aller. Disons que c'est un enfant du ministère, mais un enfant adoptif, M. le Président.

Les concepteurs du programme avaient estimé une clientèle d'au-delà de 40 000 et jamais on n'a pu atteindre cette clientèle-là. La raison principale, c'est qu'il y a beaucoup de chemin ou de distance entre la théorie et la pratique. On sait, par exemple, que, quand on dessine un programme, lorsqu'un fonctionnaire dessine un programme sur sa table de travail, il va interroger son ordinateur pour savoir quelle est la clientèle potentielle. L'ordinateur va lui donner un chiffre, mais on sait, pour ceux qui sont sur le terrain - les fonctionnaires chez nous sont sur le terrain - qu'en réalité ces clientèles potentielles là ne sont jamais atteintes parce qu'il y a des gens dans la société qui, pour toutes sortes de raisons, ne peuvent pas ou ne veulent pas s'adresser au gouvernement pour des programmes gouvernementaux. On a la même expérience au programme Logirente où on connaît la clientèle potentielle, mais où on n'a jamais atteint la clientèle potentielle. Ceux qui ont conçu le programme APPORT n'ont probablement pas réalisé qu'il y a une nuance entre la clientèle potentielle et la clientèle réelle de sorte qu'aujourd'hui nous avons atteint la clientèle réelle qui ne sera jamais la clientèle potentielle.

Maintenant, le système. Est-ce que APPORT est un bon programme? M. le Président, je répondrais que oui. C, est un programme quiinjecte 25 000 000 $ par année chez les travailleurs à bas revenus. Dans ce sens-là, on peut dire que c'est un pas en avant parce que, si le programme n'existait pas, ce seraient 25 000 000 $ de moins dans les poches des travailleurs à faibles revenus. Ce programme-là a remplacé un autre programme qui s'appelait SUPRET qui était un programme du même type, du même ordre, qui avait été mis de l'avant par l'ancien gouvernement et qui s'appliquait non seulement aux familles à faibles revenus, mais aux individus aussi. Si on regarde la partie du programme SUPRET qui s'adressait aux familles, on peut dire qu'on atteint à peu près le même nombre de clientèle pour des budgets - si on actualisait les budgets - à peu près identiques. Mais la différence entre les deux est importante: c'est que l'objet de ce programme-là, c'est l'incitation, l'incitation pour un travailleur à faibles revenus de ne pas succomber à l'attrait de l'aide sociale. Le programme, essentiellement, dit à un travailleur à faibles revenus: Même si ça pourrait être aussi payant de te laisser aller à l'aide sociale, ne te laisses pas aller et on va te supporter. Le programme vient ajouter des sommes d'argent de sorte qu'il est toujours plus payant et plus rentable pour un travailleur de travailler, même au salaire minimum, que d'être attiré à la sécurité du revenu. Le programme dit aussi à une famille qui serait à la sécurité du revenu: Quittez la sécurité du revenu et ça va être plus rentable si vous allez travailler, même au salaire minimum, à cause du fait que le programme APPORT va venir supplémenter vos revenus de travail. C'est très important parce que...

Vous vous souvenez, M. le Président, qu'au cours des années quatre-vingt, au début des années quatre-vingt, le gouvernement du Parti québécois n'avait pas indexé le salaire minimum pendant quatre ans de suite, sinon cinq, et, par contre, indexait à tour de bras les prestations d'aide sociale. Même, à une certaine époque, on les indexait à tous les trois mois. Ce qui s'est produit, c'est que, pour les familles - les personnes seules, le problème ne se posait pas - avec le temps, il est devenu plus payant de rester à l'aide sociale sans travailler que d'aller travailler au salaire minimum parce que le salaire minimum était toujours gelé à 4 $ l'heure, alors qu'on indexait continuellement les prestations des familles. Quand on regarde les courbes - je pourrais apporter le tableau ici - on voit qu'à un certain moment, autour de l'année quatre-vingt-quatre, je crois, il est devenu effectivement plus payant de rester chez soi sans travailler que d'aller travailler au salaire minimum. C'est pour ça qu'on a été obligé, l'ancien gouvernement et nous aussi, d'instaurer un programme de "supplémentation" pour les familles - l'ancien gouvernement avait jugé bon de l'instaurer pour les personnes seules aussi, même si le phénomène ne se produisait pas pour les personnes seules - de façon à ne pas attirer littéralement à l'aide sociale les familles à faibles revenus.

La différence entre l'ancien programme SUPRET du Parti québécois et le nôtre, c'est que le nôtre est beaucoup plus incitatif, en ce sens que les prestations sont payées chaque mois, alors que, sous l'ancien programme, il n'y a pas de prestations mensuelles. À la fin complètement de l'année de travail, le prestataire potentiel déposait son rapport d'impôt et, là, il pouvait recevoir du ministère du Revenu une prestation et, parfois, c'était un an et môme un an et trois mois après avoir travaillé. Vous comprenez que l'incitation d'aller travailler était pas mal diminuée quand le prestataire disait: Bon, je vais aller travailler parce que, dans un an à compter d'aujourd'hui ou dans un an et trois mois, je recevrai une prestation. Ce n'était pas très incitatif. Le nouveau programme a cet avantage-là. Si je devais dire que le nouveau programme est préférable à l'ancien, je n'aurais que ça à dire. Le nouveau programme verse des prestations mensuelles, en ce sens qu'on dit à quelqu'un: Si tu vas travailler ce mois-ci, tu auras une prestation ce mois-ci; si tu ne veux pas travailler le mois prochain, il n'y aura pas de prestation le mois prochain. Donc, c'est une incitation mensuelle, mois après mois, à aller travailler ou à demeurer sur le marché du travail. Ça, c'est important. C'est le gros avantage du programme APPORT par rapport à l'ancien programme SUPRET qui, lui, versait des prestations un an après avoir travaillé.

Pour le reste, je suis prêt à admettre que ce programme-là souffre d'un vice important, c'est-à-dire qu'il devient presque impossible de planifier d'avance les revenus mensuels. Au début, quand un travailleur se présente au programme APPORT, il donne aux fonctionnaires un aperçu de ce que seront ses revenus mensuels. On fait des calculs et on projette que si, effectivement, M. Untel va travailler à tel revenu au cours des prochains mois, ça veut dire qu'il aura droit à une prestation x et on lui verse la prestation chaque mois où II va travailler.

Le problème qui se pose, M. le Président, c'est que, si, en cours de route, les revenus de l'individu varient à la hausse ou à la baisse, il est censé nous aviser immédiatement pour que nous puissions corriger le dossier et lui verser des prestations APPORT corrigées en plus ou en moins. Si l'individu refuse ou néglige de nous aviser, nos fonctionnaires n'ont pas d'autre choix que de prendre pour acquis que les revenus continuent d'être les mêmes que ceux qui ont été indiqués. Sans ça, M. le Président, ça prendrait une armée de fonctionnaires pour retourner tous les mois revérifier les revenus de chaque prestataire du programme APPORT. Ça fonctionne donc comme ça. On commence avec des revenus déclarés par le prestataire et ces revenus-là sont présumés être les mêmes, à moins qu'on nous avise. Chaque mois, il y a une formule, si je ne m'abuse, qui incite, qui dit: Si vos revenus ont changé...

Mme Levesque (Suzanne): II y a une formule, mais elle est facultative, dans le moment. La différence, c'est que, maintenant, elle va être rendue obligatoire deux fois par année.

M. Bourbeau: Actuellement, il y a une formule-Le Président (M. Gautrin): Pour les fins de l'enregistrement, est-ce que vous pourriez vous identifier, madame?

Mme Levesque: Oui, Suzanne Levesque, agente de recheche au ministère.

Le Président (M. Gautrin): Merci. (18 heures)

M. Bourbeau: M. le Président, je disais donc qu'il y a une formule qui, tous les mois, est envoyée aux prestataires et ces prestataires-là sont censés - on dit facultatif, ça veut dit dire qu'ils sont censés, c'est ça le règlement du programme - nous aviser s'il y a des modifications. Maintenant, dans bien des cas, ils ne le font pas et nous continuons à payer sur une base qui n'est pas la base exacte, avec le résultat qu'à la fin de l'année, si le prestataire a gagné plus qu'il ne nous l'avait dit, enfin, si les montants ne sont pas les mêmes que ceux qui avaient été prévus et que nous avons payé plus que prévu, en conséquence, il y a donc un trop-payé. Et le trop-payé, ce n'est pas la faute du ministère, ce n'est même pas la faute du programme. C'est le fait que la personne en question a négligé de nous aviser de ses changements de revenu. Bon. Moi, je ne veux pas en faire une calamité, ni un drame et blâmer sévèrement ces personnes-là. Peut-être qu'elles n'y pensent pas, qu'elles oublient de nous aviser, mais il reste quand même que cet oubli-là induit le ministère en erreur et que nous déboursons des sommes d'argent en trop, avec le résultat qu'à la fin de l'année la loi nous oblige à récupérer les trop-payés.

Maintenant, la loi étant ce qu'elle est, on n'a pas le choix, cette loi-là, on doit la respecter. Mais ce que nous faisons, M. le Président, c'est que nous avons convenu avec le ministère du Revenu d'un mode de perception le plus humanisé possible, le plus doux possible, en ce sens que nous regardons les clientèles. Si ce sont des clientèles qui sont encore au programme APPORT, nous leur disons... Je peux peut-être vous donner un petit peu, M. le Président, exactement là, ce qui a été fait. Alors, en ce qui concerne les prestataires du programme d'aide sociale - commençons par ça - il n'y a aucune mesure de perception qui va être entreprise à l'égard des prestataires du programme d'aide sociale, tant qu'ils seront à l'aide sociale, bien

sûr. Pour les prestataires qui recevront à nouveau des acomptes du programme APPORT, le ministère effectuera des retenues sur les versements futurs à raison de 1/3, 33 %, afin d'acquitter leur dette APPORT sur une période de temps et ce, sans intérêt, je souligne sans intérêt. Maintenant, pour les autres prestataires qui ne seraient plus à APPORT et qui ne seraient même plus à la Sécurité du revenu, donc ceux qui seraient sortis par le haut, si je peux m'exprimer ainsi, c'est-à-dire qui sont donc des travailleurs, maintenant, n'ayant pas droit à APPORT, donc qui gagnent quand même un certain montant d'argent, à ce moment-là, aucune charge d'intérêt ne s'appliquera aux dettes d'APPORT avant le 1er août 1991. Et vous savez, M. le Président, que, quand quelqu'un doit des sommes d'argent à l'impôt, il a toujours moyen de faire des arrangements pour rembourser sur une certaine période de temps. Donc, ce que je peux dire, c'est que nous allons mener l'opération de remboursement avec compréhension et bon sens à l'endroit de toutes les clientèles visées.

Le Président (M. Gautrin): Merci, M. le ministre. Mme la députée, vous avez quelques questions supplémentaires?

Mme Harel: Oui, quelques questions, là, M. le ministre. L'an dernier, les crédits étaient de 22 400 000 $. Faut-il comprendre que le remboursement réclamé de 4 700 000 $ vient réduire les crédits, c'est-à-dire de 1989? Parce que là il faut aussi comprendre que ce n'est qu'en février 1991 que le ministère du Revenu a envoyé un avis de réclamation pour des trop-payés pour l'année fiscale de 1989 à des personnes qui, très souvent, avaient complètement changé de situation, d'emploi, ou qui n'avaient plus d'emploi, ou qui avaient changé leur situation maritale ou conjugale, ou n'importe. C'est un an et demi après qu'on leur envoie un avis de remboursement, d'une part.

D'autre part, M. le ministre, tantôt, vous avez fait état de SUPRET. Je voudrais vous rappeler que SUPRET a bénéficié à 18 266 familles et à 9616 personnes seules, pour un total de près de 27 000 ménages. Mais si on prend simplement les familles à qui ça bénéficiait, elles sont encore plus nombreuses que celles qui, actuellement, bénéficient du programme APPORT. Mais, en vous écoutant, je me suis dit: Comment se fait-il qu'avec de si gros avantages - c'est vous-même qui avez utilisé le terme "gros avantages" et vous disiez même plus incitatifs que cela ne paraît - avec tous ces avantages, toutes ces incitations, là, il y ait seulement 15 000 familles que vous projetez comme allant être admissibles à APPORT? Moi, avec ce qui s'est passé cette année, j'ai hâte de voir ce que ça va avoir comme conséquence. Je ne suis pas du tout convaincue que les 15 000 familles d'il y a deux ans vont se maintenir sur le programme. Parce que ça a fait des ravages, ça, que la moitié d'entre elles reçoivent un avis de réclamation du ministère du Revenu, surtout que, pour l'année 1988, vous l'aviez aboli, finalement. Pour l'année 1988, vous aviez, par décret, décidé qu'il n'y aurait pas de remboursement. Alors, moi, je vous sais trop intelligent pour continuer à plaider ici que ce programme-là doit continuer tel quel. Ça ne m'intéresse pas. Ça fait déjà trois ans, je m'excuse, que ce mauvais jeu là dure. Est-ce que vous avez l'intention de le maintenir tel quel encore une autre année, sans modification autre que celle de remplir un formulaire à tous les mois? Il n'est même pas question d'un APPORT 2?

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre.

Mme Harel: Un nouveau projet dont votre ministère aurait l'entière paternité?

M. Bourbeau: M. le Président, je connais les failIes du programme APPORT, elles sont importantes. Il n'a pas que des venus, il a des vices aussi. J'en ai parlé tantôt, c'est un programme qui, à cause de sa complexité et de son architecture propre génère des trop-payés très difficiles à enrayer. J'ai soumis des recommandations visant à corriger le programme APPORT. Ces recommandations-là sont à l'étude présentement dans la machine gouvernementale. Comme vous, je souhaite qu'un bon jour Dieu le Père écoutera nos exhortations et que nous aurons collectivement le plaisir de voir naître, un peu comme est né le programme APPORT il y a quatre ans, un nouvel enfant, qui sera peut-être plus en santé que l'ancien.

Le Président (M. Gautrin): C'est un problème de conception. Ça vous satisfait, Mme la députée?

Mme Harel: Évidemment, il y a toujours la question de la péremption des crédits. Si on nous indique un budget de 22 400 000 $ en 1990-1991. faut-il soustraire les 4 700 000 $ de remboursement actuellement réclamés aux familles bénéficiaires du programme?

M. Bourbeau: Je voudrais, M. le Président, avant de répondre à la question, souligner que nous avons apporté quand même des modifications, au cours des dernières années, au programme APPORT tel qu'il était apparu en 1987 et que ces modifications-là ont pour effet d'améliorer un peu les trop-payés. Je peux dire qu'un échantillonnage que nous avons fait récemment indiquerait que, pour l'année 1990, par exemple, les trop-payés baisseraient de 12 % par rapport à l'année 1989. Ce n'est pas encore la situation idéale, mais, au moins, il semble qu'il y ait une certaine résorption des trop-payés, quoique le

pourcentage de trop-payés demeure encore très élevé et même trop élevé.

Pour ce qui est de la question précise de la députée, je lui souligne que les 4 700 000 $ viennent en réduction de la somme totale qui est déboursée par le ministère du Revenu.

Le Président (M. Gautrin): Merci, M. le ministre.

Mme Harel: Je n'ai pas bien compris, M. le Président, la réponse.

M. Bourbeau: La question, c'était quoi?

Mme Harel: La question, c'est: Est-ce que les 4 700 000 $ qui sont actuellement réclamés doivent être soustraits du budget que vous projetiez dépenser en 1990-1991? Vous nous donnez comme...

M. Bourbeau: non, mais c'est une somme... non, non, pas du tout, pas du tout! c'est une somme d'argent qui est en réduction du budget de l'année 1989.

Mme Harel: De l'année 1989?

M. Bourbeau: Bien oui, c'est pour l'année 1989.

Mme Harel: Bon. Ça va donc s'ajouter aux périmés de l'année 1989, les 4 700 000 $.

M. Bourbeau: Sur le plan...

Mme Harel: En 1989, on comptait déjà 25 000 000 $ de périmés. Parce que c'est ça, aussi, l'odieux de la réclamation. Si c'était un programme qui était utilisé au maximum, je pourrais toujours comprendre. Mais en 1988-1989, il y a eu 25 000 000 $ de périmés puis, en 1989-1990, il y en a eu 11 000 000 $. Alors, là, ça va venir s'additionner, ces 4 700 000 $, pour faire un total de 15 800 000 $ de ce qui aurait été budgété et qui n'aurait pas été dépensé pour les familles bénéficiaires.

Le Président (M. Gautrin): Y a-t-il accord?

M. Bourbeau: Ce que je pourrais dire, c'est que cette somme-là, ça devient des comptes à recevoir pour le ministère du Revenu, comme tous les impôts des individus, des particuliers. Ça n'a rien à voir avec le budget du ministère chez nous et ce n'est pas déduit du budget 1991 du programme APPORT.

Mme Harel: Non, mais ce qu'il faut comprendre, c'est que du budget 1989-1990 du programme APPORT, qui nous indiquait qu'un montant avait été dépensé pour les familles, de ce montant, on doit retrancher les 4 700 000 $ qui leur sont actuellement réclamés et, évidemment, que, sur l'ensemble de ce qui était budgété, cet argent-là ne sera pas dépensé pour le programme APPORT.

M. Bourbeau: Pour l'année 1989.

Mme Harel: C'est ça. Tantôt, vous pariiez des modifications que vous aviez apportées et qui avaient pu bonifier, d'une certaine façon, en réduisant les trop-payés réclamés. Moi, j'ai pris en note, en lisant les documents que vous nous avez fait parvenir en réponse aux questions que nous vous avons posées, qu'après modifications et avant modifications... c'est finalement 450 familles qui ont bénéficié des modifications sur 9267, parce qu'il nous reste 8817 familles qui reçoivent une réclamation de remboursement. Alors, ça fart porter le trop-payé moyen à rembourser de 552 $ à 534 $ et c'est un gros 18 $ de bonification que permet la modification administrative que vous avez apportée. Alors, je comprends que 18 $, c'est 18 $, mais, sur un trop-payé moyen de 552 $ qui diminue à 534 $, je trouve que vous n'êtes pas bien, bien généreux.

M. Bourbeau: M. le Président, j'aimerais simplement dire...

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre.

M. Bourbeau: ...qu'à la suite des modifications que nous avons apportées en 1990, au mois de juin 1990 je crois, il y avait des modifications qui s'appliquaient forcément à l'année 1989. Le ministère du Revenu a fait certaines conciliations mais n'a pas terminé les conciliations pour l'année 1989. Il ne les terminera qu'incessamment, plus tard, de sorte qu'il y a encore des prestataires du programme APPORT qui recevront éventuellement des surplus, des ristournes du ministère du Revenu à la suite de la conciliation qui sera faite plus tard pour l'année 1989.

Le Président (M. Gautrin): Merci, M. le ministre.

Mme Harel: Vous voulez dire l'inverse d'une réclamation...

M. Bourbeau: Oui, absolument. Mme Harel: ...d'une diminution?

M. Bourbeau: Oui, parce que nous avons apporté des modifications au mois de juin qui vont dans le sens de corriger certains problèmes dans le programme et de faire en sorte que des sommes d'argent plus importantes soient remboursées. Ça n'a pas été fait dans tous les cas parce que le ministère du Revenu n'a pas terminé encore les conciliations. Donc, quand il les aura

terminées, il y a des citoyens, des prestataires d'APPORT qui recevront des chèques du ministère du Revenu pour l'année 1989. La députée de Maisonneuve, j'espère, en fera l'annonce dans son comté bientôt.

Mme Harel: Est-ce qu'on peut, évidemment, compter sur vous pour nous remettre la liste?

M. Bourbeau: Je pense que la liste, présentement, on ne l'a pas.

Mme Harel: Pas des personnes évidemment. M. Bourbeau: C'est...

Mme Harel: C'est des renseignements nominatifs.

M. Bourbeau: ...une liste au ministère du Revenu.

Mme Harel: Mais au moins du nombre de dossiers, de ménages, de familles qui pourront en bénéficier.

M. Bourbeau: Oui, on pourrait avoir le nombre de ménages qui sera...

Mme Harel: Qu'on attende pour se réjouir de voir si ça va, effectivement, réduire les trop-perçus qui sont réclamés.

Le Président (M. Gautrin): Ça vous satisfait, Mme la députée?

Mme Harel: Alors, ce qui me satisfait, c'est que le ministre nous annonce qu'il va déposer au Conseil des ministres, au courant de l'année, une modification substantielle à la nature même du programme. C'est ça que je dois comprendre?

M. Bourbeau: C'a déjà été fait, M. le Président.

Mme Harel: Est-ce que c'a été refusé? M. Bourbeau: Non.

Mme Harel: Alors, est-ce que c'a été accepté?

M. Bourbeau: Pas encore.

Le Président (M. Gautrin): C'est à l'étude.

Mme Harel: Est-ce que ce sera annoncé dans le discours sur le budget?

M. Bourbeau: Je l'ignore. Ce n'est pas moi qui le rédige.

Mme Harel: J'espère que vous ne nous annoncerez pas, comme une grande nouvelle, le programme PATA, hein? C'est une façon de faire des fois qui consiste à ne pas l'annoncer dans les crédits et à l'annoncer, pour se faire applaudir, lors du discours sur le budget, ou encore à retirer du règlement l'indexation automatique de l'aide sociale et à le faire annoncer par Gérard D. Levesque, comme si c'était un cadeau qui était fait, ou encore à annoncer un nouveau programme APPORT. J'imagine. Je vois ça un peu venir.

M. Bourbeau: m. le président, je dirai simplement à la députée de maisonneuve que je ne vois pas pourquoi on attendrait le budget pour annoncer le programme apport parce que, de toute façon, les applaudissements, ce n'est pas moi qui les recevrais. donc, je n'ai pas d'intérêt à retarder.

Mme Harel: Est-ce que...

Le Président (M. Gautrin): Vous êtes à la recherche d'applaudissements?

Mme Harel: ...vous voulez me dire que c'est encore votre collègue qui serait le parrain des modifications au programme APPORT?

M. Bourbeau: Non, je m'excuse. Je voulais dire, le programme PATA là.

Mme Harel: Ah! D'accord.

M. Bourbeau: Parce que APPORT, évidemment, comme vous le savez, c'est un programme qui est le fruit de l'imagination des fonctionnaires du ministère des Finances, alors que PATA a trouvé son origine plutôt au ministre de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu. Alors...

Mme Harel: J'espère que vous n'attendez pas de compliments pour PATA.

M. Bourbeau: Je crois que les quelques milliers de travailleurs âgés qui en ont profité ne s'en plaignent pas.

Le Président (M. Gautrin): Est-ce que vous avez d'autres programmes, Mme la députée?

Mme Harel: Oui.

Le Président (M. Gautrin): Bon.

Protection de l'emploi et reclassement

Mme Harel: Alors, M. le Président, si vous voulez, on va terminer...

Le Président (M. Gautrin): Oui

(18 h 15)

Mme Harel: ...sur la question des transferts des programmes relatifs à la protection de l'emploi et au reclassement dans les CFP.

Le Président (M. Gautrin): Bon. Est-ce que vous identifiez le programme en question, M. le ministre?

M. Bourbeau: Tranquillement, on y vient là.

Le Président (M. Gautrin): Alors, identifions. On est prêts à partir? C'est un départ, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: D'abord, M. le Président, il faudrait que le ministère modifie l'organigramme qu'il nous a fait parvenir parce qu'on retrouve toujours le nom de Clara Chicoine comme responsable des programmes de protection de l'emploi et de reclassement et je crois comprendre que Mme Chicoine a été remerciée de ses services par ses supérieurs.

Je voudrais aborder avec le ministre, même si c'est le sous-ministre qui écrit en réponse aux lettres qui sont envoyées au ministre sur cette question... D'ailleurs, j'ai ici copie de la réponse du sous-ministre, M. Pronovost, à la lettre que lui faisait parvenir le représentant syndical du Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec, M. Mario Théroux. C'est une lettre qui est datée du 10 avril 1991, dans laquelle le sous-ministre, M. Pronovost, indique que les discussions ne sont pas terminées, que le ministre n'a pas encore pris position, que tout est encore en état d'élaboration. Ça, c'est évidemment en première page de la lettre, mais, si on poursuit la lecture de la lettre, on se rend compte un peu plus loin qu'il s'agit d'un réquisitoire en faveur de la décision prise, je pense, au sein d'un comité directeur de l'implantation des programmes de main-d'oeuvre.

Le Président (M. Gautrin): Alors, quelle est votre question?

Mme Harel: Alors, j'aimerais m'adresser au ministre cette fois-ci. Ma question est la suivante: Est-ce que ça a été une des questions qui ont été abordées lors de la rencontre de la Conférence permanente sur l'adaptation de la main-d'oeuvre hier, puisque, dans la lettre, le sous-ministre faisait mention que cette question serait abordée, en fait? Les membres de la Conférence, disait-il, n'en ont pas discuté et le ministre n'a pas encore pris position.

De quoi s'agit-il essentiellement, M. le Président? Il s'agit du transfert d'un des services qui performait, je pense, au ministère, et qui est celui de la protection de l'emploi et du reclassement. C'est un service qui intervenait dans les 48 heures dans des entreprises en difficulté. Ce programme de protection de l'emploi sera jumelé avec un autre programme beaucoup moins performant qui s'appelle: Soutien à la formation en entreprise. Ce n'est pas 48 heures de délai que ça nécessite pour intervenir, comme pour la protection de l'emploi, au SFE, comme le veut le jargon du milieu, mais 18 mois, parce que, finalement, il s'agit tout à fait d'une autre philosophie, étant donné que c'est un programme qui s'adresse à des entreprises qui ont les moyens de se payer une planification de leur main-d'oeuvre et qui veulent restructurer leurs ressources humaines. Alors, là, on va jumeler un programme de protection de l'emploi, qui intervenait pour des entreprises en très grande difficulté, avec un programme qui s'adressait plus à des entreprises qui voulaient restructurer leurs ressources humaines et on va jumeler ces programmes sous prétexte de les simplifier.

Je sais que le ministère est bien au courant de toute la problématique qui a été développée dans un mémoire préparé par le président du Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec et qui demande un moratoire sur le regroupement des programmes de main-d'oeuvre et leur transfert dans les 11 commissions de formation professionnelle. La problématique qui y est développée c'est que le regroupement n'apporte aucune solution à la duplication et à la juxtaposition des programmes existants et que, finalement, ça va simplement permettre au ministère de se désengager par rapport à un des programmes qui lui restaient, qui n'en était pas un, comme tel, de main-d'oeuvre au sens de la formation parce que ce programme-là examinait l'entreprise en difficulté dans toute son intégralité ou dans l'ensemble de ses éléments, pas simplement l'élément main-d'oeuvre, mais les professionnels qui étaient affectés au dossier examinaient l'ensemble de la situation de l'entreprise en difficulté.

Donc, le danger c'est qu'on les transfère dans les CFP, sans adopter de modifications législatives parce que les CFP ne relèvent pas, comme telles, dans leur gestion du ministère autrement que par la loi qui ne prévoit pas aux CFP une telle responsabilité. Le ministre a déjà envisagé de modifier la loi, mais ce n'est pas fait présentement et, tant que ça ne le sera pas, évidemment, les CFP ne peuvent pas être comme tels des mandataires de la responsabilité main-d'oeuvre du ministère. Et là il y a évidemment bien d'autres raisons qui sont invoquées, notamment le fait que, dorénavant, en regroupant les programmes de reclassement et en les modifiant en programmes d'aide aux travailleurs licenciés collectivement, c'est l'accessibilité des services de reclassement qui va être mise en cause parce que c'était, jusqu'à maintenant, le ministère qui offrait ces services, mais, là, ça deviendrait des services à frais partagés avec les employeurs.

La question, évidemment, c'est: Pourquoi est-ce que l'employeur se sentirait tenu de mettre en place de tels services de reclassement

ou d'assurer des coûts reliés à la formation de la main-d'?uvre licenciée? Parce qu'en fait ce sont des personnes qui ne travaillent plus pour la compagnie.

Alors, il y a là, finalement, un grand nombre de questions pertinentes qui sont posées. Je n'ai pas trouvé réponse, dans la lettre qui était signée par le sous-ministre, aux diverses questions qui étaient développées dans le texte du président du Syndicat de professionnels du gouvernement. J'imagine que le ministre en avait pris connaissance. Alors, j'aimerais l'entendre là-dessus.

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, il s'agit d'un litige concernant certains fonctionnaires du ministère, me dit-on, qui ne sont pas satisfaits de certaines décisions administratives qui auraient pu être prises pas la haute direction du ministère et qui se sont plaints à leur syndicat. Ils se sont plaints non seulement au syndicat mais, semble-t-il à bien du monde dont l'Opposition officielle et ils ont alerté les membres de la Conférence permanente de ces changements anticipés au ministère. Mais il faut bien penser, M. le Président, que, quand on fait des réformes, on change des choses. Ça serait bien plus facile peut-être de laisser la situation telle qu'elle est, mais, si on a des problèmes au Québec présentement, c'est peut-être parce qu'U y a des choses qui auraient dû changer et qui n'ont pas changé. Le ministère aussi doit changer. On doit ajuster nos structures à la conjoncture, aux nouvelles façons de faire que nous envisageons et, quant à moi, comme ministre, je ne participe pas personnellement à toutes les opérations journalières d'administration du ministère. Je décide avec mes collaborateurs des grandes orientations du ministère, des stratégies de développement pour l'avenir, mais l'implantation de ces décisions-là se fait par l'équipe administrative, dirigée par le sous-ministre. Dans ce sens-là, je ne pourrais pas dire que je connais chacun des détails de l'affaire en question. En gros, je sais ce dont H s'agit, mais, puisque la lettre était signée par le sous-ministre, je pense qu'il conviendrait, M. le Président, de lui céder la parole pour qu'il puisse éclairer davantage les membres de la commission, avec votre consentement.

Le Président (M. Gautrin): M. le sous-ministre, brièvement, quelques commentaires.

M. Pronovost (Jean): Très rapidement, si on peut résumer une histoire qui a été quand même assez longue. Le gouvernement a annoncé son intention de regrouper dans les CFP les différents programmes de main-d'oeuvre qu'il offrait, soit dans les CFP, soit au ministère môme, soit dans le réseau Travail-Québec II a voulu faire ça pour la commodité des clients, pour qu'ils trouvent tous les programmes et tous les fonctionnaires à la même place, et 1 a aussi voulu faire ça parce que ces programmes-là doivent communiquer entre eux pour le mieux-être des clients. Par exemple, quand on fait du reclassement de la main-d'oeuvre suite à un licenciement collectif, c'est de bonne guerre de pouvoir utiliser les programmes de formation pour les recycler, s'ils en ont besoin, et de situer les fonctionnaires qui gèrent les programmes de formation à côté des fonctionnaires qui gèrent les programmes de reclassement, ça avait du sens.

On a déjà posé deux des gestes concrets dans ce sens-là. Nos programmes sont actuellement physiquement regroupés. Nos fonctionnaires travaillent à côté des gens de la CFP, dans leurs locaux. On voudrait aller, dans le cadre des réformes législatives auxquelles le ministre faisait allusion plus tôt ce matin, plus loin et regrouper ça. non pas seulement physiquement, mais organisationnellement et légalement, sous l'égide des CFP, dans un futur auquel on tra-vaBle. Évidemment, on discute toutes sortes de projets qui vont dans ce sens-là au ministère. Ces projets-là sont des projets. O.K.? Le ministre ne les connaît pas tous. On a annoncé des intentions à la Conférence permanente, qui doit urtlmement en être saisie, le ministre le lui a garanti, mais c'est encore des projets qui n'ont pas encore cheminé au ministère.

Or, voilà qu'un groupe de professionnels chez nous, n'étant pas d'accord avec certains aspects de ces projets - ce n'est pas encore des décisions du ministère - veulent aller sur la place publique pour en discuter et faire valoir leur point de vue, ce qui, en soi, est à la fois prématuré et contraire à l'éthique. D'où ma lettre qui leur rappelle qu'Us peuvent débattre tant qu'Hs veulent à l'interne, mais que des orientations du ministère, ça ne se débat pas à l'externe, pas par des fonctionnaires du ministère. Et on les rassure parce qu'il y avait aussi des craintes légitimes qu'Os nous véhiculaient. Ils disaient: Nos conventions collectives. Alors, on les rassure en disant: Vos conventions collectives vont être respectées à la lettre. D'où la lettre à laquelle Mme Harel fait allusion. En gros, c'est l'histoire, simplement racontée, d'une lettre adressée par un fonctionnaire à d'autres fonctionnaires.

Le Président (M. Gautrin): Merci.

Mme Harel: Quant à la question de l'opportunité, est-ce que c'est opportun de faire ces changements, ces transformations, là-dessus j'aimerais aussi vous entendre. M. Giroux, je pense - comment s'appelle-t-H, le président du Syndicat de professionnels? - oui. c'est ça, M. Giroux écrit: Nous appuyons à 100 % la volonté de simplifier et de mettre fin à la lourdeur et à la complexité des programmes de formation

professionnelle. Remarquez pourtant que ce ne sont pas les programmes de reclassement, de protection de l'emploi qui souffrent de lourdeur, au contraire ces programmes sont reconnus pour leur souplesse, leur rapidité d'intervention, leur méthodologie Actuellement, le ministère peut intervenir activement dans les entreprises à l'intérieur d'un délai de cinq Jours. Ce n'est donc pas là que se situe le problème. Notre pratique nous apprend que les problèmes résident principalement dans la complexité des normes des programmes de formation gérés par les CFP. En quoi un regroupement de programmes efficaces avec d'autres programmes plus lourds simplifie-t-il vraiment la situation? On sent que la souplesse qui a fait de ces programmes une formule gagnante est sur le point de se faire encadrer par un train de nouvelles normes, de nouveaux critères à l'intérieur d'un appareil plus lourd et onéreux que le système actuel.

Qu'est-ce que c'est les garanties que vous avez qu'avec un regroupement... Vous savez, moi, je suis un peu Thomas. J'ai besoin d'être convaincue autrement que sur papier. Moi, les choses sur papier m'inquiètent tout le temps parce que ça, quand on ne l'a pas vérifié dans les faits, des fois, comment on dit, c'est l'enfer qui est pavé de bonnes intentions, puis on finit par obtenir exactement l'effet inverse de celui qu'on recherchait. Alors, comment pouvez-vous, dans le contexte actuel, où vous n'avez aucune garantie sur la gestion de ces programmes dans les CFP, vous n'en avez aucune... Ça, est-ce que vous pouvez me le confirmer? Au moment où il y a des pertes... Dans le document, on parle de la formule du "deux par char", c'est-à-dire qu'il y a un fonctionnaire de Québec et un fonctionnaire du fédéral qui suivent tous les travaux des comités de main-d'oeuvre de A à Z et, dit-on, on perpétue les plus beaux exemples de la sous-utilisation des ressources humaines entraînée par les chevauchements de structures. Mais, ceci dit, il n'y a rien de changé dans les CFP, c'est le statu quo. Alors comment vous avez des garanties que ces programmes qui étaient performants vont avoir les mêmes conditions de réalisation, quand vous les regroupez avec des programmes qui, eux, l'étaient beaucoup moins?

Le Président (M. Gautrin): II est 18 h 30, alors est-ce qu'on va suspendre nos travaux? Vous avez compris la question?

Mme Harel: On pourrait entendre la réponse.

Le Président (M. Gautrin): La réponse, est-ce que vous pouvez donner une réponse brève et, après, on suspendra?

M. Bourbeau: Oui. Peut-être que le sous-ministre peut répondre, si vous voulez.

Le Président (M. Gautrin): Oui, alors brièvement.

M. Pronovost: Là-dessus, tout ce que je peux répondre, c'est que ces changements qu'on discute - c'est toujours, comme je le disais tantôt, au niveau d'un document de travail - doivent, pour réaliser leur objectif, donner tout ce qu'ils doivent donner, être vus comme une partie d'un tout. Évidemment, la loi qui donne au ministre des pouvoirs sur les CFP fait partie de ce tout-là et puis il faudra que le ministre, dans un premier temps, et ceux auxquels il aura à rendre compte de ses gestes, dans un deuxième temps, pèsent les différents éléments du tout. Mais c'est prématuré de spéculer à ce moment-ci sur l'un ou l'autre des éléments du tout, parce qu'il n'est pas encore élaboré.

Mme Harel: Juste une toute petite question. C'est donc dire...

Le Président (M. Gautrin): Toute petite, une micro-question.

Mme Harel: c'était prévu pour le 1er avril, puis reporté au 1er septembre. dois-je comprendre, avec la réponse que vous nous faite, que c'est maintenant à une date indéterminée?

M. Pronovost: Les dates qui ont été avancées n'étaient que des dates utiles pour fins de planification interne. Elles n'ont jamais fait l'objet d'une décision du ministre ou du gouvernement.

Le Président (M. Gautrin): On a dépassé d'une minute. Je pense qu'on va suspendre nos travaux pour revenir. On recommencera à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 33)

(Reprise à 20 h 10)

Le Président (M. Gautrin): À l'ordre, s'il vous plaît! On serait prêt à commencer. Donc, la commission des affaires sociales reprend ses travaux pour poursuivre l'étude des crédits du ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle. Compte tenu de l'entente qu'on avait eue, je pense qu'on devait discuter ce soir des organismes. Est-ce bien exact, Mme la députée et M. le ministre?

Mme Harel: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): Alors, avec quel organisme voulez-vous commencer?

Mme Harel: Cependant, nous n'avons malheureusement pas pu examiner le programme relatif à la sécurité du revenu. Alors, nous ne pensons pas pouvoir terminer nos travaux, évidemment, sans l'aborder. Mais ce que je vous proposerais, étant donné que nous avons promis à nos amis présidents des organismes de les libérer pour qu'ils puissent vaquer à leurs très importantes responsabilités, alors ce serait peut-être de commencer par la Commission des normes du travail.

Le Président (M. Gautrin): Ça serait une excellente idée. Alors, commençons par la Commission des normes du travail.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Est-ce qu'il y en a qui ont des avions à prendre?

Le Président (M. Gautrin): Alors, écoutez. Techniquement, auprès des présidents des organismes, est-ce qu'il y a des gens qui ont des contraintes quant aux avions et qui voudraient qu'on les interroge avant?

M. Bourbeau: Ils s'en retournent tous à pied, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): Ils s'en retournent tous à pied.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Le budget de voyages est fini.

Le Président (M. Gautrin): Bon. Le budget de voyages a été coupé, comme vous le dites, avec raison. C'est un gouvernement qui est responsable actuellement.

Mme Harel: écoutez, m. le président, le championnat cette année, dans les crédits du ministère de la main-d'oeuvre, de la sécurité du revenu et de la formation professionnelle, ce n'est pas en crédits périmés, c'est en frais de voyage.

M. Bourbeau: Ah oui!

Mme Harel: C'est absolument exceptionnel. J'espère qu'on aura le temps d'examiner...

M. Bourbeau: Je ne demande pas mieux. Mme Harel: ...tous ces importants voyages. M. Bourbeau: Je ne demande pas mieux.

Mme Harel: Ce que je souhaite c'est qu'il y ait surtout des bons rapports de missions...

M. Bourbeau: On dit que ça forme la jeunesse.

Mme Harel: ...notamment de la part de l'adjoint du ministre, le député de Salaberry...

Le Président (M. Gautrin): Soulanges.

Mme Harel: ...Soulanges, qui a, comme ça, pu faire un stage sur l'environnement...

M. Bourbeau: On pourra peut-être demander à la députée de Hochelaga-Maisonneuve...

Mme Harel: ...mais c'était en Allemagne.

M. Bourbeau: de nous parler de son voyage en Suède aussi.

Mme Harel: Oui, avec plaisir, certainement. Le Président (M. Gautrin): Bon...

Mme Harel: C'était en Allemagne sur l'environnement. Mais il y a aussi, je pense, votre adjoint qui est allé à Tokyo, au Japon, mais c'était sur la main-d'oeuvre, sécurité du revenu, M. Labelle.

M. Bourbeau: Oui, bon.

Le Président (M. Gautrin): Est-ce qu'on pourrait aborder cette question plus tard? Commençons donc par les normes du travail.

Mme Harel: Ça. c'était simplement, M. le Président...

Le Président (M. Gautrin): Une entrée en matière.

Mme Harel: ...une entrée en matière, mais aussi pour répondre à sa remarque désobligeante à l'égard des présidents d'organismes, quand il leur laissait entendre qu'il faudrait qu'ls retournent à pied.

Le Président (M. Gautrin): C'était de l'humour bien habituel de la part du ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, là, ça ne se voulait pas désobligeant. C'était pour signaler les efforts importants que font les présidents des sociétés pour comprimer les dépenses au gouvernement. Je suis sûr qu'ils vont donner l'exemple dans tous les domaines, non seulement dans celui des frais de voyage. C'est tout.

Le Président (M. Gautrin): Merci. Alors, si on commençait sur les normes du travail.

Mme Harel: Merci. M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): Allons-y.

Commission des normes du travail

Mme Harel: d'abord, bienvenue à cette commission. est-ce que vous préférez, m. le ministre, avoir toutes les questions d'un bloc et y répondre...

Le Président (M. Gautrin): En bloc. Mme Harel: ...en bloc?

M. Bourbeau: Bien, ce serait peut-être préférable de les donner une à une, ça va éviter d'avoir à prendre...

Le Président (M. Gautrin): Des notes.

M. Bourbeau: ...toute une série de notes avant.

Le Président (M. Gautrin): O.K. Alors, une à une.

Mme Harel: Bon. D'abord, sur les commissaires...

M. Bourbeau: Ça va être plus vivant aussi.

Mme Harel: ...du travail. Le transfert, selon la nouvelle loi, est prévu pour le 1er juin, je crois. C'est donc le transfert de la compétence pour l'étude des plaintes de congédiement sans cause juste et suffisante. Est-ce que le transfert aura lieu tel que prévu et quelles sont les modalités mises en place pour en assurer la réalisation?

M. Bourbeau: M. le Président, étant donné que les questions semblent assez pointues en ce qui concerne l'administration de la Commission des normes, je suggérerais qu'on laisse la parole au président de la Commission des normes du travail, M. Paul-Émile Bergeron.

Le Président (M. Gautrin): M. le président, vous avez la parole.

M. Bergeron (Paul-Émile): Merci. Alors, dans le cas du transfert des recours en matière de congédiement sans cause juste et suffisante au commissaire du travail, c'est toujours prévu être transféré le 1er juin, c'est-à-dire qu'on s'attend qu'effectivement les congédiements qui auront effet après le 1er juin soient transférés à un commissaire du travail. Il semble que le commissaire général du travail sera prêt à ce moment-là; il a recruté des commissaires qui sont en formation et on est en relation avec eux pour établir les modalités administratives. Chez nous, ça ne change pas beaucoup. Au lieu de choisir un arbitre, on référera le dossier au commissaire du travail.

Mme Harel: à votre connaissance, les crédits au ministère du travail n'ont pas été augmentés en conséquence. alors, comment a pu se faire ce recrutement de commissaires du travail? combien sont-ils là?

M. Bergeron (Paul-Émile): Je vous donne une information selon ce que j'en sais, je n'ai pas vérifié exactement. Ce qu'on m'a dit, c'est qu'il y avait sept nouveaux commissaires du travail qui avaient été accordés et je pense que le recrutement est à peu près terminé. Comme vous dites, c'est exact, je pense qu'on leur a demandé de prendre des crédits à même leur budget actuel autofinancé, contribution à la compression des dépenses.

Mme Harel: Ah bon, bon, bon! Et la nouvelle réglementation, pour quand peut-on attendre la réglementation, notamment en matière de congé de maternité? Je vous rappelle que le gouvernement peut fixer, par règlement, notamment la durée du congé, sa durée supplémentaire, le moment où il peut être pris, les avis qui doivent être donnés, les autres conditions applicables dans les cas visés par l'article 81.7 - c'est encore récent dans notre mémoire, l'adoption de la loi - et les avantages dont un salarié peut bénéficier pendant le congé de maternité ou le congé parental.

Il n'y a eu, à notre connaissance, à ce jour, aucune nouvelle réglementation, en fait, tout au moins publiée dans la Gazette officielle. Est-ce qu'il y en a une qui est en préparation? Le Conseil des ministres l'a-t-il examinée? Quand pensez-vous, évidemment, pouvoir introduire cette nouvelle réglementation plus conforme aux nouvelles dispositions de la loi?

M. Bourbeau: M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre.

M. Bourbeau: Au sujet de la réglementation sur les normes du travail, je rappelle que la loi 97 a laissé au gouvernement le pouvoir de réglementer et de préciser certaines normes sur le congé de maternité ainsi que sur le congé parental. La loi a aussi donné un caractère temporaire à certaines exclusions en permettant au gouvernement d'y mettre fin ou, encore, de déterminer les normes particulières applicables notamment au secteur agricole, comme, par exemple, les petites fermes, aux personnes chargées exclusivement de la garde d'un enfant, d'un malade ou d'une personne âgée dans son logement, de même qu'aux colonies de vacances, par exemple, les étudiants. Ce pouvoir porte principalement sur le salaire minimum ainsi que sur la durée du travail.

En vertu de la nouvelle loi, le gouvernement peut aussi, en matière de préavis de mise à pied ou de cessation d'emploi, déterminer des normes particulières applicables aux occasionnels de la fonction publique. Enfin, le gouvernement s'est aussi vu accorder un pouvoir réglementaire sur les modalités de mise en vigueur des deux nouveaux articles, 41.1 et 74.1, visant des emplois à temps partiel. Ces modifications réglementaires ne seront pas effectuées en un seul temps.

Relativement aux travaux en cours, la consultation est déjà amorcée avec, notamment, l'Association de la distribution alimentaire du Québec. Une rencontre aura aussi lieu prochainement avec l'Union des producteurs agricoles, l'UPA. Nous nous proposons également de rencontrer d'autres groupes du côté des travailleurs et des travailleuses afin d'alimenter la réflexion du gouvernement à la lumière de leur propre point de vue. Somme toute, les travaux se déroulent selon les prévisions. Nous espérons, tel que ce fut le cas pour le projet de loi 97, que les propositions à venir feront l'objet d'un large consensus par les milieux intéressés.

En ce qui concerne le calendrier, là, l'ordre prévu est le suivant. On se propose, enfin, on espère pouvoir arriver avec l'ajustement des salaires minima dans à peu près un mois; le congé de maternité, le congé parental, l'avis de cessation d'emploi ou de mise à pied et les mentions obligatoires sur le bulletin de paie à peu près la même date, au moment où on sera prêt. Ça ne veut pas dire que le règlement va être en vigueur à ce moment-là parce qu'il faudra suivre les procédures. Quant à la mise en vigueur des articles 41.1 et 74.1 pour les personnes à temps partiel, on vise le mois d'août 1991. En ce qui concerne les exclusions totales ou partielles des normes du travail applicables en particulier aux personnes salariées dans les petites fermes, aux étudiants et étudiantes dans les colonies de vacances ainsi qu'aux gardiennes dans les logements, il n'y a présentement aucune échéance de fixée.

Le Président (M. Gautrin): Merci. D'autres questions.

Mme Harel: Oui, M. le Président. Une question qui préoccupe beaucoup les intervenants en matière de défense des non syndiqués, c'est toute la restructuration du travail des inspecteurs-enquêteurs. Déjà au printemps dernier, des inquiétudes s'étaient manifestées chez un certain nombre d'entre eux et je dois vous dire, M. le Président, que j'avais eu l'occasion de procéder à une rencontre où je prenais connaissance de directives qui avaient été émises par le bureau régional do Montréal aux inspecteurs enquêteurs. Je ne sais |>as si, pour le bénéfice des membres de la commission...

Le Président (M. Gautrin): Vous voulez déposer ce document.

Mme Harel: Oui, peut-être Je vais juste enlever l'origine.

Le Président (M. Gautrin): Alors, vous cachez l'origine.

Mme Harel: C'est ça. Ce que cette directive...

M. Bourbeau: Si c'est un fonctionnaire de la Commission des normes du travail, le président aimerait savoir son nom.

Le Président (M. Gautrin): Non, mais attendez. Je vais vous passer mon petit couteau, vous pourrez le couper.

Mme Harel: Très bien, très bien. Mais ce que cette directive signifiait aux inspecteurs-enquêteurs, c'était, d'une part, une sorte de procédure nouvelle à adopter en matière de plaintes. Alors, il s'agissait de finaliser en moyenne 7,5 dossiers d'enquêtes par semaine, au téléphone. On y signalait que le taux de finalisation des dossiers d'enquêtes sur plaintes au téléphone devrait atteindre 90 %. On y indiquait également qu'il fallait finaliser en moyenne 10 dossiers d'intervention préventive sur litige par semaine; limiter - et c'est ça qui m'inquiétait le plus, M. le ministre, et c'est là-dessus que j'attire votre attention - à 5 % les demandes d'information supplémentaire par les différents intervenants lors du traitement du dossier après enquête et, finalement, finaliser 80 % des dossiers d'enquêtes sur plaintes au téléphone dans un délai de 30 jours et 98 %, dans un délai de 60 jours.

Ça, je peux comprendre qu'il y ait, pour des raisons d'efficacité, des procédures administratives qui soient mises en place pour faire en sorte qu'il y ait un bon rythme dans le travail. Mais, là où ça a soulevé mon inquiétude, c'est qu'on puisse vouloir limiter à 5 % les demandes d'information supplémentaire des différents intervenants lors du traitement du dossier après enquête, quand on sait que, dans les milieux du travail, souvent autant les employeurs que les travailleurs et travailleuses ne sont pas au courant des diverses dispositions contenues dans les normes. D'ailleurs, un sondage qui avait été effectué et qui a été publié dans le mémoire soumis au Conseil des ministres rappelait que le tiers des bas salariés ignoraient les protections dont ils pouvaient jouir avec la loi des normes.

Le Président (M. Gautrin): Vous allez déposer le document.

Mme Harel: Oui.

Le Président (M. Gautrin): Merci, madame. Vous me rendrez mon couteau.

Mme Harel: Alors, merci. Donc, cette question-ià préoccupe, d'autant plus que le nombre...

Le Président (M. Gautrin): Merci. Alors, ce document est dépose pour en faire des photocopies et les donner...

Une voix: Combien?

Le Président (M. Gautrin): Un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit, neuf, dix, onze, douze; une quinzaine.

Mme Harel: Je poursuis. Le nombre d'inspecteurs-enquêteurs a diminué de 75 à 66. Ce sont les informations que j'ai là; si tant est qu'elles sont inexactes, je voudrais que vous les infirmiez. D'avril 1990 à mars 1991, soit une baisse de 12 %, le pourcentage des inspecteurs-enquêteurs sur la route est passé de 77 % à 55 %, le pourcentage des inspecteurs-enquêteurs au bureau est passé de 23 % à 45 %, alors on voit un peu le déplacement. Des inspecteurs-enquêteurs qui allaient sur le terrain, dans les lieux de travail et qui pouvaient se rendre compte et rendre compte, à l'occasion de ces visites, peut-être d'une foule d'infractions qui n'étaient pas nécessairement signalées du fait qu'elles n'étaient pas à la connaissance des intervenants. Et là on voit que le travail se déplace vers les bureaux. On me donnait, entre autres, la statistique du bureau de Sherbrooke où le pourcentage de temps passé au bureau par rapport au pourcentage de temps passé sur la route s'est littéralement inversé: 80 % du temps sur la route auparavant et, maintenant, on est passé à 80 % du temps au bureau. Alors, M. le ministre, qu'est-ce que vous poursuivez comme objectif en récupérant les inspecteurs-enquêteurs qui, à la connaissance des milieux intervenant en faveur des salariés non syndiqués, le faisaient en performant? Quel est le rationnel qui motive tous ces bouleversements?

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, la députée de Maisonneuve, qui a été ministre dans un gouvernement avant moi, sait fort bien que ce n'est pas le ministre qui donne ces directives-là dans une société d'État et je suis sûr qu'elle n'a pas d'objection à ce qu'on demande à M. Bergeron de répondre à cette question.

Le Président (M. Gautrin): M. Bergeron, vous êtes le bienvenu.

M. Bergeron (Paul-Émile): Je pense qu'au départ il faut rappeler le mandat que nous donne la loi et comment est structurée la loi. Il faut bien se rappeler que la loi donne les droits au salarié, donne au salarié lui-même les pouvoirs d'exercer ces droits et donne le mandat à la Commission de poursuivre pour le salarié, lorsque celui-ci ne le fait pas lui-même. Alors, dans le cadre d'une utilisation optimale des ressources, il est à peu près inutile, pour nous autres, de monter des dossiers de réclamations quand on n'a pas la certitude que le salarié va accepter de venir témoigner en cour contre son employeur pour faire la preuve de sa réclamation. L'expérience qu'on a eue dans le passé, c'est que, si on monte des dossiers sans le consentement du salarié, sans une plainte du salarié, il ne se présente pas devant les tribunaux et on a travaillé pour rien. Alors, ça, c'est la partie qui justifie la position de la Commission de traiter les plaintes des plaignants.

D'autre part, comme tout organisme qui a des objectifs d'utilisation optimale des ressources, on essaie d'affecter nos inspecteurs de façon à ce qu'ils règlent le plus de problèmes dans le moins de temps possible, c'est-à-dire le plus de plaintes, à la satisfaction de la clientèle. Et on sait qu'actuellement, avec le rythme des affaires et notre clientèle, de façon particulière, qui est composée généralement d'employeurs de PME, leur temps est très compté et ils trouvent très intéressant de pouvoir régler les problèmes au téléphone et de ne pas avoir à accorder une entrevue qui peut durer, des fois, indûment.

D'autre part, avec les nouvelles technologies tel, entre autres, pour nous autres, le télécopieur, on peut avoir les preuves documentaires qu'on allait antérieurement chercher chez l'employeur. Alors, c'est une orientation définitive de la Commission, dans un cadre d'utilisation optimal des ressources, de faire travailler les inspecteurs au bureau le plus possible et le plus possible par téléphone, en ayant toujours l'opportunité d'aller compléter une enquête sur place, si besoin est et même si un des clients le désire. À l'heure actuelle, de tous les commentaires qu'on a eus de la part de la clientèle, on n'a eu aucune indication que c'était insatisfaisant pour eux. C'est évident que, pour nos gens, pour les inspecteurs qui étaient habitués à travailler sur la route, ça a changé énormément leur environnement. Ça a diminué beaucoup leur autonomie d'organisation du travail. Mais la preuve a été faite, et je pense que. même s'ils ne le déclarent pas officiellement, la majorité nous dit qu'elle est d'accord, en principe, avec cette intervention-là.

Mme Harel: Est-ce qu'il y a une diminution du nombre d'inspecteurs, depuis un an? (20 h 30)

M. Bergeron (Paul-Émile): Je ne peux pas dire. Il peut y avoir une diminution du nombre d'inspecteurs, mais il faut bien tenir compte qu'on a des préposés aux renseignements aussi,

entre autres au bureau de Montréal, et les préposés aux renseignements, c'est un nombre significatif. On avait 18 préposés aux renseignements, on en a maintenant 33 parce qu'on a pris 15 inspecteurs temporairement pour répondre aux besoins des demandes téléphoniques. Il faut bien voir que, l'an passé, à pareille date, on devait répondre à peu près à entre 600 et 700 demandes de renseignements téléphoniques par jour, à Montréal et, à l'heure actuelle, on répond à entre 1300 et 1700 demandes par jour. Alors, comme il y a des nouvelles prescriptions dans la loi, c'est bien important que la clientèle reçoive l'information. Et comme on considère que les différentes modalités de la loi sont relativement complexes, c'est difficile de passer dans de l'information toute l'information détaillée. Ce qu'on vise principalement, c'est à bien faire connaître l'existence de la loi, l'existence de la Commission et les principaux sujets qui sont couverts par la loi en incitant les gens à nous appeler pour des détails, lorsqu'ils ont des décisions à prendre. C'est ce qui fait qu'on a beaucoup de demandes téléphoniques.

Je vais faire un commentaire, je ne voudrais pas laisser la question des 5 % sans réponse. Il faut bien voir qu'à l'Intérieur de ça, quand on a un groupe, il faut se donner certains indicateurs. C'est une question d'équité un peu pour partager la charge de travail dans l'ensemble des inspecteurs. Chacun est payé le même salaire et on essaie d'avoir une charge de travail à peu près équitable. Alors, on se donne des objectifs administratifs. L'objectif de limiter les demandes d'information, on peut l'interpréter de deux façons. Nous autres, notre objectif, c'était d'informer les inspecteurs qui devaient, dès les premières Interventions, fournir toute l'information aux parties pour ne pas qu'ils aient à revenir. C'est un objectif qu'on se donnait, de ne pas avoir plus de 5 % des employeurs ou des salariés dans un cas d'enquête qui reviennent pour demander de l'information, parce qu'on considérait, à ce moment-là, que c'est une charge additionnelle de travail qu'on se donne compte tenu qu'on n'a pas fait, la première fois, le travail comme il faut. C'est dans ce cadre-là qu'il faut l'interpréter.

Le Président (M. Gautrin): Merci. Mme la députée.

Mme Harel: Oui. Est-il exact qu'il y a une sorte de recrudescence des plaintes qui sont portées en vertu des articles 122, je pense, et 124, et que la Commission serait un peu submergée par les plaintes qui sont récemment déposées?

M. Bergeron (Paul-Émile): Ce n'est pas récent. C'est vrai que le niveau de plaintes a augmenté depuis 1987 de 30 %. Nous autres, on a absorbé, en grande partie, ce surplus-là en attendant la confirmation que cette augmentation-là était permanente, parce qu'on a déjà eu des augmentations qui n'ont pas duré. Alors, ce qu'on a fait, c'est qu'on a ralenti des activités qui n'étaient pas nécessairement essentielles à un moment donne, c'étaient nos activités de prévention et nos activités d'enquêtes relatives aux prélèvements, pour mettre toutes nos ressources à traiter les plaintes. Malgré tout ça, on ne réussit pas à traiter toutes les plaintes qui rentrent. Il y a eu une augmentation majeure et...

Mme Harel: Comment vous la chiffrez?

M. Bergeron (Paul-Émile):... les types de plaintes qui ont augmenté le plus sont en vertu des articles 122 et 124.

Mme Harel: Comment vous chiffrez la progression? Elle est de quel ordre par rapport à l'an dernier?

M. Bergeron (Paul-Émile): Elle est environ, je pense, de 12 % à 14 %.

Mme Harel: 12 % à 14 %.

M. Bergeron (Paul-Émile): On a 30 % d'augmentation depuis 1987.

Mme Harel: Dans les crédits, je ne vois pas, de ce qu'on nous avait remis... Est-ce que vous envisagez, en matière de publicité de la nouvelle loi, des dispositions, des délais... Qu'est-ce que vous envisagez comme campagne d'information? Est-ce qu'il y a des budgets? On ne les a pas, hein?

M. Bergeron (Paul-Émile): Le budget? Je ne pense pas que vous l'ayez détaillé dans le budget, mais notre programme d'information... On a publié, dès le début de janvier, une série de dépliants qui résumaient l'ensemble des nouvelles dispositions de la loi.

Mme Harel: Les avez-vous fait parvenir aux députés de l'Assemblée nationale?

M. Bergeron (Paul-Émile): Oui, dès le mois de janvier.

Mme Harel: Oui, d'accord.

M. Bergeron (Paul-Émile): Dans le mois de janvier; ils étaient disponibles vers, je pense, le 8 janvier. On a eu, ensuite de ça, des messages à La minute juridique; on a eu quatre semaines où on a eu des messages sur tout le réseau de La minute juridique. On a eu des émissions de télévision sur le câble. On a actuellement une série d'émissions sur le câble qui passent le dimanche matin, une émission d'une demi-heure

qui nous permet de donner beaucoup de détails. On a prévu, possiblement au début de mai, un supplément qu'on va insérer dans les hebdos régionaux pour couvrir l'ensemble de la province et qui devrait rentrer dans environ 2 600 000 foyers ou adresses d'affaires, qui est un résumé des modalités de la loi et des services qu'offre la Commission avec les numéros de téléphone, de référence.

Mme Harel: Vous n'oubliez pas les hebdos métropolitains. C'est souvent une erreur qui est faite là.

M. Bergeron (Paul-Émile): On a l'ensemble de la province parce qu'on ne va pas dans les quotidiens. On va dans les hebdos parce que la durée de vie des hebdos est plus longue et ils sont consultés par plus de personnes.

Mme Harel: Tout à fait. Et c'est plus la clientèle susceptible...

M. Bergeron (Paul-Émile): C'est plus notre clientèle.

Mme Harel: ...d'être couverte par la Loi sur les normes. Et quand, M. le ministre, entendez-vous modifier, compléter la composition de la Commission des normes? Par quel mécanisme entendez-vous consulter pour procéder à ces nominations?

M. Bourbeau: Alors, on a jusqu'au 1er juillet pour former la Commission.

Mme Harel: Allez-vous engager SECOR pour vous trouver...

M. Bourbeau: Non, je ne crois pas, M. le Président. Je pense qu'on peut très bien se débrouiller sans une firme de conseillers spécialisée. Pour l'instant, j'ai entrepris des consultations avec un certain nombre de groupes, les groupes de femmes, la famille, par exemple, les communautés culturelles, etc., et en écrivant à mes collègues, ministres responsables de ces secteurs-là, pour qu'eux fassent les consultations parmi leur clientèle. J'attends des résultats de ce côté-là et, pour le reste, nous en sommes encore, je dois dire, au début de la consultation. Je n'ai pas considéré qu'il y avait une urgence en la matière. Nous avons encore quand môme trois, quatre mois devant nous. Mais nous allons nous y mettre bientôt et toute personne qui voudrait soumettre des candidatures, y compris la députée de Hochelaga-Maisonneuve, peut le faire.

Mme Harel: Ça ne nuira pas à la personne que je pourrais recommander?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: Est-ce que sous votre administration ça nuisait?

Mme Harel: Pas du tout, vous le savez très bien. Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: Alors, on vous traitera avec la même équité.

Mme Harel: Je vous remercie beaucoup, M. Bergeron.

Le Président (M. Gautrin): M. Bergeron, la commission vous remercie pour vos explications très claires. Quel est le prochain programme?

Mme Harel: M. le Président...

M. Bourbeau: On est à la merci de l'Opposition, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): Bien oui, mais on fait ça avec tellement de grâce.

Mme Harel: La Commission des affaires sociales.

Le Président (M. Gautrin): La Commission des affaires sociales.

Mme Harel: On garde M. Legault pour le dessert.

M. Bourbeau: Est-ce que je dois comprendre que la députée de Hochelaga-Maisonneuve procède par ordre...

Mme Harel: Chronologique.

M. Bourbeau: ...de ceux qu'elle préfère ou de ceux qu'elle ne préfère pas?

Mme Harel: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Gautrin): M. Rémillard, vous êtes le bienvenu.

Mme Harel: C'est au choix. Je vous laisse choisir.

Commission des affaires sociales

M. Bourbeau: M. le Président, vous connaissez le président de la Commission des affaires sociales, M. le juge Louis Rémillard, nouvellement nommé, qui en est à ses premières armes. J'allais dire: Je demanderais la clémence du tribunal.

Mme Harel: De la cour.

M. Bourbeau: Mais je pense qu'il n'en a pas besoin. Il peut très bien se défendre lui-même.

Le Président (M. Gautrin): Mme la députée, quelques questions.

Mme Harel: Oui. Est-ce qu'il faut dire M. le juge Rémillard ou Me Rémillard?

Le Président (M. Gautrin): Sa Seigneurie.

M. Rémillard (Louis): M. le président, madame, je suis ici en tant que président de l'organisme.

Mme Harel: Ah! Voilà. Tout à fait. Merci. Alors, M. le Président de notre commission...

Le Président (M. Gautrin): Merci.

Mme Harel: ...je vois que M. le président de la Commission des affaires sociales a été choisi suite à une étude des candidatures menée par la firme SECOR et je voulais simplement le signaler. Évidemment, je ne sais pas si c'est une pratique habituelle, M. le ministre, d'utiliser la firme SECOR. Enfin, je vois aussi que dans la même année il y a eu une autre étude menée par SECOR, non pas pour choisir à ce moment-là quelqu'un pour siéger, mais pour identifier les causes des retards qui sont accumulés dans le traitement des causes portées devant la Commission des affaires sociales, particulièrement en matière d'accidents de travail, et de proposer des avenues de solutions. Alors, c'est une étude qui a coûté 9950 $. Est-ce que c'est vous-même, M. le président de la Commission des affaires sociales, qui avez demandé cette étude ou si elle était déjà réalisée avant votre arrivée?

M. Rémillard (Louis): Elle était déjà réalisée, madame.

Mme Harel: Est-ce que, M. le ministre, il serait possible de rendre disponible cette étude?

M. Bourbeau: Écoutez, je dois dire que je ne suis pas au courant de la première des deux études dont vous parlez. Il est possible qu'elle ait été commandée par l'ancien président. Je vais m'informer. Probablement que le président va en prendre note ici, je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas vous la remettre. En ce qui concerne le travail qu'on a confié à SECOR pour analyser des candidatures, c'était, je pense, dans un but d'objectivité totale et absolue. Il est toujours difficile de porter un jugement quand on connaît certains des individus par rapport à d'autres. Alors, voulant exercer un choix qui était absolument dénué...

Mme Harel: Hors de tout doute raisonnable, vous avez choisi SECOR.

M. Bourbeau: ...hors de tout doute raisonnable, nous avons pris une firme dont la com- pétence est reconnue et à laquelle, d'ailleurs, l'ancien gouvernement péquiste avait souvent recours pour des dossiers semblables et, donc, apolitique par définition. je dois dire que la recommandation que nous avons reçue au sujet du président actuel était tout à fait unanime, totale et absolue.

Mme Harel: M. le ministre, le caractère apolitique de la firme SECOR ne fait de doute que pour vous-même, je pense, en tout cas. Mais ceci dit, c'est une pratique, j'imagine, qui est assez courante et elle a donné de bons résultats, M. le président de la Commission des affaires sociales. C'est peut-être le résultat qui compte. Est-ce que vous nous promettez de nous rendre disponible l'étude qui a été menée par SECOR, avec des fonds publics, en fait?

M. Bourbeau: M. le Président, je vais répondre à la députée comme je l'ai fait dans le passé. Moi, je ne suis pas au courant de cette étude-là. Je crois, je présume qu'elle a été commandée par l'ancien président. Sujet à ce qu'on puisse la regarder pour être sûr qu'il n'y a rien là-dedans qui est de nature confidentielle ou qui pourrait mettre en danger la sécurité de l'État, je serais disposé à la rendre publique.

Mme Harel: C'est ça. En fait, l'étude identifie les causes des retards et propose des avenues de solutions. Alors, si tant est qu'elle a été conduite pour le coût de 9950 $, il serait peut-être intéressant qu'on puisse savoir quel impact elle a eu. Je crois comprendre que, si vous n'êtes pas au courant, M. le président de la Commission des affaires sociales, c'est que, ou bien elle a été appliquée ou elle a été écartée.

M. Rémillard (Louis): Je suis au courant, madame, de l'existence de...

Mme Harel: Ah!

M. Rémillard (Louis): Elle a été commandée avant que je n'arrive, mais j'en ai pris connaissance...

Mme Harel: Ah!

M. Rémillard (Louis): ...et j'en ai fait mon profit. J'ai aussi fait profit d'un autre travail, disons, plus en profondeur, qui a été confié à un comité que j'avais mis sur pied dès mon entrée en fonction, qui m'a remis un rapport au début de décembre, fort complet, qui me fait quelque 130 recommandations, lesquelles j'ai commencé à appliquer en début d'année et qui, je crois, commencent déjà à porter certains fruits.

Mme Harel: S'agissait-il d'un comité interne de la Commission...

M. Rémillard (Louis): Oui, madame.

Mme Harel: ...de personnes qui sont à l'emploi de la Commission?

M. Rémillard (Louis): Tout à fait, madame...

Mme Harel: C'est ça.

M. Rémillard (Louis): ...mes collègues.

Le Président (M. Gautrin): Merci.

Mme Harel: Qu'en est-il au niveau des délais? Les informations que nous avions en date d'avril 1991, du début d'avril 1991, étaient à l'effet que les délais étaient de 15 mois en ce qui concernait les accidents d'automobile, de 15 à 20 mois pour les accidents du travail survenus avant le 19 août 1985, de 4 mois en matière d'aide sociale et de 12 mois à l'égard de la Régie des rentes. Est-ce que ce sont là, finalement, des chiffres qui sont conformes à la réalité?

M. Rémillard (Louis): Si vous me permettez, je vais vous répondre a partir des chiffres qui m'ont été fournis par les directeurs des bureaux de Québec et de Montréal. Je comprends que vous voulez une réponse quant aux délais d'audition et non au sujet des délais de rédaction. Les délais de rédaction, je dois vous le souligner, sont très courts, au point où nous rendons près de 70 % de nos décisions dans un délai de moins de 60 jours et 80 % dans un délai de 90 jours. Il s'est fait un effort particulier par les membres et les assesseurs de la Commission dans ce domaine. Et, aujourd'hui, sur près de 5000 décisions que nous avons entendues au cours des 12 derniers mois, il y en a à peine une soixantaine qui sont à plus de six mois et ce, pour des raisons que vous pouvez facilement imaginer, lorsque nous avons des avocats qui représentent les parties. (20 h 45)

Si nous passons maintenant aux délais d'audition, je vous dirai, Mme la députée, que dans les six divisions il y a deux divisions dans lesquelles il y a un problème. En aide sociale, le délai moyen est de cinq à huit mois. En services de santé, les délais sont très variables; ce sont des appels de médecins qui sont représentés par avocat, il y a des évocations devant les tribunaux judiciaires. Les délais sont très variables. En Régime de rentes, le délai moyen est de neuf mois. En protection du malade mental, il n'y a aucun délai.

Ceci nous amène aux accidents du travail et à l'assurance automobile. En assurance automobile, aujourd'hui, le délai est de 12 mois, mais je dois vous dire que nous avons mis sur pied, sur une base expérimentale, depuis quelques mois, un certificat d'état de cause, ce qu'on appelle plutôt une demande d'audition et, avec la collaboration de la SAAQ, déjà ce nouveau système produit des résultats intéressants, de sorte que les causes qui ont été inscrites ou les appels qui sont logés depuis le mois de février dans certaines régions, certains d'entre eux vont être entendus dès le mois de juin de cette année. Mais je vous indique que le délai moyen actuellement en assurance automobile est de 12 mois.

Dans la division des accidents du travail, il est actuellement de 24 mois et moins. Par contre, dans cette division, je vous signale que le nombre de dossiers a diminué de plus de 1700 en un an. L'an dernier, le total était de 5200. Aujourd'hui, au 1er avril, il est de 3503. Maintenant, comme nous cessons de recevoir ou nous recevons très peu de nouveaux appels dans cette division et que nous maintenons notre rythme d'audition, on peut conclure que, l'an prochain, il en restera à peine 1500 et, dans deux ans, il n'en restera plus. Mais je dois vous signaler aussi que tous les dossiers, sans exception, auront tous été fixés au moins une fois pour audition d'ici le mois de février prochain.

Mme Harel: Vous voulez dire les 3503 dossiers restants?

M. Rémillard (Louis): Oui. Parce que, des 3503, certains ont déjà été fixés et ont été remis pour diverses raisons, les remises étant, disons, un fléau auquel nous nous attaquons; notre première priorité, c'est évidemment de réduire les délais et les remises.

Mme Harel: Alors, quand vous nous dites qu'il y aura, d'ici le 1er février prochain, une date d'audition pour tous les dossiers dans la division des accidents du travail, il faut comprendre que cette date d'audition pourra avoir lieu après le 1er février prochain. C'est bien le cas?

M. Rémillard (louis): ils auront été fixés pour audition d'ici le mois de février prochain. alors, ils seront entendus d'ici le mois de février.

Mme Harel: Ils seront entendus?

M. Rémillard (Louis): On enverra... Bion, excusez, peut-être que je m'emballe un peu. Disons que les avis d'audition auront été envoyés au plus tard en février, ce qui veut dire que d'ici un an tous les dossiers auront été au moins fixés une fois pour audition.

Mme Harel: Oui. Mais l'audition n'aura pas nécessairement lieu avant le 1er février. C'est bien ça qu'il faut comprendre?

M. Rémillard (Louis): II faudrait que je vérifie mes données, mais j'avais compris qu'ils

seraient tous fixés d'ici le mois de février.

Mme Harel: Et, dans le cas des rechutes pour ces accidents survenus avant 1985, quelle est l'augmentation des dossiers qui sont dus, finalement, à des rechutes et, donc, des retours devant la Commission?

M. Rémillard (Louis): Minime, madame. Cette année, il n'y a eu que 321 déclarations qui ont été reçues à la Commission.

Mme Harel: Ça veut dire que, dès que vous pouvez espérer compléter les dossiers qui s'étaient accumulés, par la suite le rythme sera suffisamment lent pour qu'il n'y ait plus aucun problème de délai. C'est ça qu'il faut comprendre?

M. Rémillard (Louis): Tout à fait, madame. L'an prochain, H n'y aura plus de problème de délai dans cette division-là, à moins que les parties, pour une raison ou une autre, n'aient pu procéder. Mais toutes les causes auront été fixées.

Mme Harel: Et pourquoi y a-t-il augmentation des délais en matière d'aide sociale? Parce que la connaissance que j'ai, moi, le délai était beaucoup plus court. Il était de quatre mois il y a quelques semaines ou quelques mois.

M. Rémillard (Louis): Légère augmentation. Bien, le délai n'est pas considérable, de cinq à huit mois. Il faut tenir compte que nous devons recevoir... Mais on compte les délais...

Mme Harel: Qu'est-ce que vous trouvez qui n'est pas considérable?

M. Rémillard (Louis): ...dès la réception...

Mme Harel: Vous savez que, maintenant, avec les jugements de la Cour suprême, l'arrêt Askov, quelque chose comme ça, un délai déraisonnable, c'est un délai de huit mois, justement.

M. Rémillard (Louis): Mais nous devons tenir compte du fait que nous devons recevoir du ministère le dossier, en faire des exemplaires, l'acheminer à l'appelant, lui envoyer un avis de trois mois, de 90 jours, et déjà vous avez quatre ou cinq mois d'écoulés. C'est sûr que ça peut sembler énorme, mais, dans les faits, c'est impossible de réduire beaucoup plus que ça.

Mme Harel: Le cinq à huit mois, vous nous dites qu'il est le délai à partir duquel il y a eu do la part d'un bénéficiaire, par exemple, une donuitKlo do révision.

M. Rémillard (Louis): Oui, madame.

Mme Harel: Mais quand ça vient du ministère...

M. Rémillard (Louis): II n'y a pas d'appel du ministère.

Mme Harel: ...le ministère peut aller, j'imagine, en révision, non?

M. Rémillard (Louis): Pas que je sache.

Mme Harel: Non.

M. Rémillard (Louis): Non.

Mme Harel: Alors, tous les appels viennent d'un bénéficiaire.

M. Rémillard (Louis): Oui, madame.

Mme Harel: Et, à ce moment-là, vous nous dites qu'à partir du moment où la procédure de la demande de révision est donc déposée devant la Commission vous communiquez avec le ministère pour faire venir le dossier.

M. Rémillard (Louis): C'est ça. Mme Harel: Et quel est le délai, là?

M. Rémillard (Louis): C'est assez court Je vous dirais que c'est peut-être quelques semaines avant que nous recevions le dossier.

Mme Harel: Quelques semaines, c'est quatre ou huit semaines, ou douze semaines?

M. Rémillard (Louis): Ça varie parce que ça vient de toutes les parties de la province, mais je vous dirais... Je ne sais pas moi, je n'ai pas de délai précis, je ne peux pas vous répondre précisément.

Mme Harel: Votre prédécesseur, tantôt, nous faisait justement comprendre qu'avec les méthodes modernes de communication H n'y avait plus de raisons qu'il y ait des délais même sur tout le territoire. Est-ce que vous êtes équipés de fax?

M. Rémillard (Louis): S'il fallait qu'on nous taxe 5000 dossiers par année, madame, ce serait incroyable. On ne serait jamais...

Mme Harel: Est-ce qu'H y a 5000 dossiers à la division d'aide sociale?

M. Rémillard (Louis): Non, H n'y en a pas 5000 dans l'aide sociale, mais c'est un délai...

Mme Harel: II y en a combien à l'aide sociale?

M. Rémillard (Louis): Si vous voulez me

donner un Instant, je vais... Il faut que je fasse un total parce que vous avez l'aide sociale et la sécurité du revenu. Mais, actuellement...

Mme Harel: Je ne sache pas que ce soit là... M. Rémillard (Louis): Pardon?

Mme Harel: Je ne sache pas que ce soit là deux dossiers différents.

M. Rémillard (Louis): Non, c'est une seule division...

Mme Harel: C'est ça.

M. Rémillard (Louis): ...mais nous avons...

M. Bourbeau: L'ancienne loi et la nouvelle loi.

M. Rémillard (Louis): Actuellement, les dossiers en cours, en aide sociale et sécurité du revenu, nous en avons 2425. Et nous avons reçu, cette année, des déclarations dans ces deux divisions. Nous avons 2425 dossiers.

Mme Harel: 2425, ça, c'est en date de..

M. Rémillard (Louis): En date du 31 mars cette année.

Mme Harel: D'accord.

M. Rémillard (Louis): C'est une augmentation d'environ 448 dossiers sur l'année précédente.

Mme Harel: 448.

M. Rémillard (Louis): Oui.

Mme Harel: Et cette augmentation est-elle la même dans les autres divisions?

M. Rémillard (Louis): Non.

Mme Harel: Est-ce que vous connaissez...

M. Rémillard (louis): non, madame. oui, je connais les augmentations. en accidents d'automobile, les chiffres sont constants. il y a une diminution d'environ 200 dossiers.

Mme Harel: Pour faire un total de combien?

M. Rémillard (Louis): Cette année, nous avons, en dossiers en cours, au 31 mars - je vous parle au total de la Commission - 10 289 dossiers. Nous en avions l'an dernier 11 599, ce qui fait une réduction de 1300 dossiers. En assurance automobile, il y en avait 3300 l'an dernier; il y en a 3176 cette année. En aide sociale et en sécurité du revenu, il y en avait 1977 l'an dernier, à pareille date, et, cette année, il y en a 2425, pour une augmentation de 448. En accidents du travail...

Mme Harel: C'est une augmentation quand même considérable. C'est presque 20 % en regard de l'an dernier.

M. Rémillard (Louis): C'est à cause de la réforme, je crois, madame, et nous avons perçu, à ce moment-là, une augmentation importante des déclarations d'appel. Mais j'ai vu au fil du temps qu'il y a eu une diminution, si vous voulez, alors ça se stabilise. Je ne crois pas qu'il y ait lieu de s'inquiéter. On surveille l'affaire de près, mais je ne crois pas qu'il y ait lieu de s'inquiéter.

En accidents du travail, comme je vous ai dit précédemment, il y a eu une diminution de 1722 dossiers. En protection du malade mental, ça n'a pas d'intérêt parce que les causes sont entendues au fur et à mesure; il y en avait 46 l'année dernière; il y en a 23; il peut y en avoir 30 la semaine prochaine, ou 10 la suivante. En Régime de rentes, le même nombre, 984 contre 966 cette année. En services de santé, il y a une augmentation qui peut sembler importante parce qu'on est parti de 54 à 196, mais dans un seul hôpital nous avons eu près de 70 appels. Alors, c'est ce qui fait cet écart important tout à coup.

Mme Harel: Des appels pour...

M. Rémillard (Louis): Ce sont des médecins qui, en bloc, ont fait des appels.

Mme Harel: À Louis-Hippolyte-LaFontaine?

M. Rémillard (Louis): C'est ça justement, madame.

Mme Harel: D'accord.

M. Rémillard (Louis): 61, je crois, plus précisément.

Le Président (M. Gautrin): Avez-vous d'autres questions?

Mme Harel: Alors, M. le Président, c'est peut-être une question qui s'adresse plus au ministre, ça concerne la réglementation pour établir les modalités, les versements des sommes au fonds de la Commission, en provenance des organismes contributeurs. Alors, quand est-ce que ces modalités vont être arrêtées et déterminées par le gouvernement?

M. Bourbeau: M. le Président, j'aimerais référer...

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre.

M. Bourbeau: ...au décret du gouvernement en date du 27 mars 1991, décret 434-91, où, justement, H est ordonné que pour l'exercice financier 1990-1991 les organismes suivants versent, au plus tard...

Mme Harel: Excusez-moi. Vous dites le 27 mars 1991.

M. Bourbeau: Oui, c'est ça, oui. Mme Harel: D'accord.

M. Bourbeau: On a fixé les sommes payables pour l'année 1991, en fait le solde pour l'année 1991 qui était dans la partie de l'année 1991 qui faisait partie de l'exercice financier 1990-1991, ainsi que pour l'année 1991-1992. Alors, bien sûr, il s'agit de la contribution de la Société de l'assurance automobile du Québec, de la Régie des rentes du Québec et de la Commission de la santé et de la sécurité du travail.

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre, est-ce que vous seriez assez gentil de transmettre à la commission copie du décret et qu'on puisse en faire quelques photocopies?

M. Bourbeau: Oui, je n'ai pas d'objection du tout si...

Le Président (M. Gautrin): Je pense que ça satisferait les membres de la commission si on pouvait en faire une petite quinzaine de photocopies comme tout à l'heure. Merci, M. le ministre.

Mme Harel: Alors, H faut donc comprendre que vos budgets ne sont pas sensiblement augmentés, je pense, M. le président.

M. Rémillard (Louis): À peine, madame.

Mme Harel: À peine. Est-ce qu'ils sont indexés?

M. Rémillard (Louis): Ah! quelques pour-cent, mais...

Mme Harel: Mais au coût de la vie, l'augmentation du coût de la vie?

M. Rémillard (Louis): À peu près là, je n'ai pas les chiffres précis, je regrette, mais augmentation fort modeste.

Mme Harel: La variation est quand même de 6,1 %. C'est du fort modeste que d'autres auraient apprécié.

M. Bourbeau: M. le Président, vous me permettrez de diverger d'opinions avec le président. Par les temps qui courent, une augmentation de 6,1 %, M. le Président, c'est même très généreux. Et je me demande même s'il n'y aurait pas lieu de revoir ça un peu.

Mme Harel: En fait, c'est l'augmentation du coût de la vie.

Le Président (M. Gautrin): ...un effort particulier du gouvernement.

Mme Harel: Alors, ça va peut-être me permettre de demander au ministre, de lui poser la question que j'ai oublié tantôt de lui poser quand M. Bergeron était à ses côtés. Entend-il indexer le salaire minimum au coût de la vie, comme il nous l'annonce à chaque année au moment de l'étude des crédits de son ministère?

M. Bourbeau: M. le Président, la politique du gouvernement relativement au salaire minimum, on la connaît. À chaque année, depuis six ans maintenant, cinq ans, nous annonçons la décision gouvernementale autour du mois de mai. Alors, nous sommes présentement à faire des consultations, les consultations que nous faisons toujours, étudier les paramètres économiques, la situation telle qu'elle se présente, la situation du Québec comparée aux autres juridictions, tant américaine que canadienne, et, en temps et lieu, nous ferons connaître la décision gouvernementale, étant bien entendu entre nous que le gouvernement du Parti libéral a indexé pas mal plus souvent le salaire minimum que sous le Parti québécois. La députée de Maisonneuve me permettra ce retour en arrière.

Mme Harel: Est-ce que le ministre entend encore procéder par voie de déclaration ministérielle pour que nous entamions réciproquement nos couplets annuels?

M. Bourbeau: On sortira, M. le Président, les copies des discours des années précédentes.

Le Président (M. Gautrin): De part et d'autre.

Mme Harel: Merci, M. le juge Robillard.

Le Président (M. Gautrin): Attendez. Il y a peut-être Mme la députée de Chicoutimi ou d'autres parlementaires qui auraient quelques questions.

Mme Blackburn: Ce n'était pas vraiment une question. Une toute petite question davantage reliée à la gestion du réseau des centres Travail-Québec et au projet de fusion du ministre, à moins que la question soit abordée demain.

Mme Harel: Non. Je ne le sais pas, mais là on va tout de suite examiner les crédits de la Régie des rentes. (21 heures)

Mme Blackburn: Parce que c'est l'affaire de quelques minutes et j'avais l'intention de prendre...

Mme Harel: Alors, peut-être immédiatement après, quand on va aborder la sécurité du revenu. C'est dans la sécurité du revenu; on ne l'a pas abordée encore.

Le Président (M. Gautrin): Est-ce qu'il y a d'autres parlementaires qui voudraient poser une question?

Régie des rentes du Québec

Alors, la Régie des rentes du Québec. Il me fait plaisir de vous revoir.

M. Bourbeau: M. le Président, vous connaissez M. Claude Legault, président de la Régie des rentes du Québec, qui a vu son mandat renouvelé récemment pour cinq ans.

Une voix: Ils vont penser que... deux, trois fois par année.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Gautrin): Voulez-vous qu'on suspende une ou deux minutes pour que vous régliez vos différends? Vous êtes prêts ou si on suspend? Ça va?

Mme Harel: Ça va.

Le Président (M. Gautrin): Alors, la Régie des rentes. On y va. Mme la députée.

Mme Harel: Oui, M. le Président. Peut-être une première question sur le dépôt direct des allocations d'aide aux familles. D'abord, vous allez me permettre de saluer M. Legault, puis de lui demander s'il est satisfait du dépôt volontaire qui est actuellement en cours, s'il a d'autres idées derrière la tête ou s'il continue de poursuivre la promotion du dépôt direct.

M. Legault (Claude): M. le Président, il me fait plaisir de répondre à Mme la députée qu'entre être satisfait et pouvoir expliquer les chiffres il y a une marge. On aurait préféré que l'adhésion se fasse plus rapidement, mais lorsque l'on compare avec les données que l'on a connues, la progression au Régime de rentes du Québec, on se rend compte que le dépôt direct a été lancé pour le Régime de rentes en avril 1982 et qu'au mois de juin, donc deux mois plus tard, il était de 29 %, alors que si on regarde le dépôt direct pour les allocations d'aide à la famille, après quelques mois, nous sommes à 32,29 %. Donc, il y a tout lieu de croire que la progression se fait sensiblement de la même façon qu'elle le fut au Régime de rentes. Donc, nous avons encore plusieurs éléments de promotion et l'on croit que l'on pourra, au fil du temps, on espère atteindre les mêmes pourcentages, c'est-à-dire près de 75 % d'adhésion au régime de rentes actuellement.

Mme Harel: les économies générées en 1991-1992, en fait projetées, sont de l'ordre de 1 621 600 $. ça, c'est, j'imagine, à partir de la prévision de participation au dépôt direct de 32 % ou 33 % des familles ou si vous projetez ce revenu à partir d'un nombre plus important de familles que c'est le cas présentement?

M. Legault: Ce montant-là est sur une base de 50 %, que l'on espère atteindre assez rapidement.

Mme Harel: Ça suppose, à ce moment-là, que vous fassiez peut-être... Comment pensez-vous procéder pour faire cette promotion?

M. Legault: Nous avons d'abord des rappels avec l'émission des chèques. À compter du mois prochain ou du mois suivant, je ne pourrais pas trop vous dire, nous aurons une promotion qui se fera à même un talon de chèque. Donc, les gens ne peuvent pas...

Mme Harel: Ignorer.

M. Legault: ...laisser tomber sans y toucher. Alors, c'est une façon qui avait porté fruit au Régime de rentes. Également, nous avons une promotion que nous voulons faire par tous les journaux internes au gouvernement ainsi que dans le réseau. Presque chaque ministère et organisme a ses revues et ses journaux internes. Donc, on peut rejoindre une grande clientèle par ce biais-là. Il y a tout un programme de communication qui est élaboré et on doit le suivre par étapes. Autrement, on va brûler les étapes et perdre des effets.

Mme Harel: Un peu toujours dans le même ordre d'idées, mais ça concerne plus l'indice de fécondité. Entre 1989 et 1990, l'indice est passé de 1,5 à 1,6.

M. Legault: Oui.

Mme Harel: Est-ce qu'il y a des prévisions pour 1991?

M. Legault: Non, il n'y a aucune prévision actuarielle qui a été préparée quant à cet indice, sinon d'espérer qu'il continue à croître de façon continue, comme on l'a vu au cours des deux dernières années.

Mme Harel: Quand allez-vous en avoir une idée exacte pour l'année, évidemment, simplement... Ha, ha, ha! On est en cours d'année.

M. Legault: Vous me forcerez à répondre après.

Mme Harel: Ha, ha, ha! Je vois, je vois. D'autre part, revenons, à ce moment-là, à la Régie des rentes proprement dite, en matière de régimes complémentaires de retraite. Je ne sais pas si j'ai les chiffres qui sont représentatifs de la situation, mais je trouve assez inquiétant de constater que le nombre de régimes actifs a baissé. Les chiffres que j'ai sont à l'effet qu'en date du 31 mars 1990 on comptait 4163 régimes actifs, puis 3587 un an plus tard, en date du 31 mars 1991. C'est donc une baisse de régimes actifs de 13,8 % on un an. Est-ce qu'il y a une explication à cette diminution?

M. Legault: II y a une explication que l'on peut apporter. De là à vous garantir que c'est la seule raison, je ne saurais le dire. C'est que, suite à la réforme fiscale au fédéral, il y a donc énormément de compagnies pour lesquelles c'est devenu très fastidieux de suivre toutes les exigences contenues dans ces mesures fiscales. Je suis convaincu que, lorsqu'on aura pu cumuler les statistiques, on se rendra compte et on espère que le nombre d'adhérents à des régimes enregistrés d'épargne-retraite ira grandissant en même temps. Il y a beaucoup de compagnies qui mettent fin aux régimes pour mettre sur pied, de façon collective, des régimes d'épargne. C'est la principale raison.

Mme Harel: Qui ne sont pas de véritables régimes d'épargne-retraite, qui sont, comme vous le dites, des régimes d'épargne, mais qui n'offrent pas la garantie de protection à la retraite qu'offrent les régimes de retraite. C'est ça?

M. Legault: Absolument. C'est une lacune que l'on voit à la grandeur du Canada. Dans toutes les provinces, c'est pareil. On espère qu'un jour ces régimes privés, individuels pourront au moins mieux répondre aux besoins de retraite.

Mme Harel: Est-ce qu'il vous semble que cette baisse de 13,8 %, qui est quand même importante, va se poursuivre ou si vous l'expliquez par l'introduction des mesures fiscales et vous pensez que ça va se stopper, cette érosion?

M. Legault: De là à dire que ça va se stopper, je ne dirais pas, parce qu'il y a encore un peu d'élimination que je pourrais presque calculer d'élimination naturelle. Il y avait, à l'intérieur de ces régimes, des régimes qui étaient de piètre qualité et les exigences des lois font prendre connaissance davantage des bénéfices et des conséquences des régimes pauvres, et les travailleurs exigent de meilleurs régimes ou préfèrent prendre d'autres moyens d'épargner. Donc, II y a peut-être une stabilité saine, en quelque sorte, qui pourrait s'établir à travers ça.

Mme Harel: on prend en note également dans les crédits, m. le ministre, que les frais exigés aux entreprises sont assez importants; en fait, c'est une augmentation assez considérable, elle est de l'ordre de 1 444 228 $ en 1990-1991. ça, ce sont les frais qui sont exigés par la régie pour la gestion des dossiers. l'an prochain, en 1991-1992, les droits exigibles totalisent 2 216 800 $. c'est donc dire que c'est là une sorte de tarification; c'est une tarification, il faut bien le comprendre comme ça. c'était quoi? c'est venu dans le cadre des compressions? c'a été demandé par le conseil du trésor? comment c'est venu, cette idée, de tarifer la gestion des dossiers des régimes de rentes?

M. Bourbeau: M. le Président, à l'occasion de la passation de la nouvelle loi, nous avons prévu une réglementation qui fait en sorte d'actualiser les honoraires qui sont chargés par la Régie et ces honoraires-là, ces coûts-là correspondent aux coûts réels encourus par la Régie pour ces opérations-là. Alors, évidemment, comme les coûts étaient plus importants que ce que nous chargions auparavant pour les mêmes services, les montants que la Régie retirera dorénavant sont plus élevés qu'auparavant.

Mme Harel: Est-ce que la loi constitutive de la Régie permet de prélever une telle tarification?

M. Legault: Oui, absolument. D'ailleurs, même dans la loi antérieure, qui était la Loi sur les régimes supplémentaires, il y avait une disposition qui permettait ces honoraires. Mais avec le temps, les honoraires ont été basculés et, au départ, 60 % ou 65 % des sommes provenaient des honoraires, alors qu'à la fin ce n'était que 30 % ou 35 %. Donc, dans chacune des provinces actuellement, lorsqu'il y a une modification à leur loi, on arrive avec de nouveaux chiffres pour être capable de faire en sorte que les régimes paient le coût de la surveillance qui doit être effectuée par la Régie.

Mme Harel: Mais les dispositions législatives prévoient qu'il s'agit d'autofinancement. Vous ne pourriez pas charger, par exemple, au-delà des coûts afférents à l'administration des régimes pour financer d'autres activités.

M. Legault: À l'article 244, 14°. ça dit: "prescrire les droits exigibles pour le financement des frais engagés par la Régie pour l'application de la présente loi." Alors, donc...

Mme Harel: D'accord. C'est une sorte de protection, parce que vous savez que, lorsqu'il y

a un tarif, le gouvernement a plutôt tendance à en profiter pour d'autres fins. Je pense à l'immatriculation; je pense à l'assurance automobile, enfin...

M. Bourbeau: De quel gouvernement vous parlez? Du gouvernement du Parti québécois ou du gouvernement du Parti libéral?

Mme Harel: Le ministre sait très bien duquel je parle.

M. Bourbeau: M. le Président, dans le fond, le principe est simple. La Régie doit autofinancer ses dépenses. Elle doit charger des droits qui ne sont pas supérieurs ni inférieurs à ses coûts réels, sans quoi c'est le gouvernement qui aurait dû, qui devrait, qui devait auparavant, d'ailleurs, combler les déficits. Aujourd'hui, ces dépenses-là s'autofinancent. (21 h 15)

Mme Harel: Une dernière question sur le dossier des excédents d'actifs. M. le ministre, vous avez annoncé que vous vous accordiez un temps de réflexion et que vous aviez demandé à la Régie des rentes de faire des études additionnelles sur un certain nombre de points portés à votre attention durant la commission parlementaire. Quelles sont ces études que vous avez requises de la Régie?

M. Bourbeau: M. le Président, je réfléchis toujours et la Régie étudie toujours aussi. Je veux dire par ça que j'ai demandé à la Régie de poursuivre des études complémentaires sur un certain nombre de pistes, ce qui se fait présentement. Il y a déjà un rapport préliminaire qui m'a été soumis, j'ai demandé encore un complément d'information et je n'ai pas encore pris de décision sur la suite à donner à ce dossier. Tant que je n'aurai pas fait le tour de ces nouvelles informations, je ne prendrai pas de décision.

Mme Harel: Pendant ce temps-là, évidemment, les congés de cotisation peuvent être pris par les employeurs. Et je l'ai déjà dit souvent, finalement, la caisse est barrée à double tour, mais il n'y a pas de fonds. Alors, il y a une sorte d'érosion permanente. Ne pas décider, c'est aussi une façon de choisir en matière de disposition des excédents des caisses de retraite.

J'aimerais, M. le ministre, que vous m'indiquiez, ou M. le président de la Régie, combien - puisque toutes les demandes, je pense, de congé de cotisation doivent être acheminées à la Régie qui les permet aussi, ces congés de cotisation - peuvent automatiquement, sans même la permission de la Régie, être permis par les dispositions du régime, dépendamment des régimes.

M. Bourbeau: M. le Président, quand on parle de congé de cotisation, en fait, ça n'existe pas des congés de cotisation. Ce n'est pas comme ça que les régimes de retraite sont structurés. Un régime de retraite, c'est un contrat qui unit un employeur et ses travailleurs - quand on parle d'un régime à prestations déterminées là, on s'entend .- et lequel contrat fait en sorte que l'employeur s'engage, non pas à faire des cotisations a tous les mois, mais à s'assurer qu'à la retraite chaque travailleur aura droit à une prestation qui est déterminée d'avance dans le contrat. Cela peut être le salaire moyen de la carrière d'un employé, ça peut être le salaire moyen, 70 % ou un pourcentage du salaire final des trois, des cinq dernières années. En général, c'est un pourcentage multiplié par le nombre d'années de travail, etc. L'employé s'engage à faire une cotisation régulière, à tous les mois, un pourcentage de son salaire, mais l'employeur ne s'engage pas à faire des versements mensuels. Il s'engage à faire autre chose. Il s'engage à s'assurer qu'en tout temps le régime est suffisamment capitalisé ou solvable pour garantir qu'à la fin il pourra livrer la marchandise promise dans le contrat. De sorte qu'on ne peut pas parler de congé de cotisation au sens propre puisqu'il n'y a pas d'obligation de faire de cotisations régulières. Il y a plus que ça; il y a l'obligation d'avoir un régime solvable et de mettre les fonds qu'il faut. Ces cotisations-là peuvent se faire une fois par année, en général c'est ce qui se fait, je présume, ou quand le régime est déficitaire, quand le régime n'est pas solvable. Mais, si le régime est en excédent, l'employeur ne doit pas faire de cotisations, même que la fiscalité l'interdit. Ça serait trop facile pour un employeur qui ferait des profits un peu trop élevés à son goût, là, de venir stocker des profits dans un régime de retraite à l'abri de la fiscalité, sans avoir à payer d'impôt, en se disant: Je vais mettre ça là pour les mauvais jours. Bah! il y a probablement des employeurs qui l'ont fait à l'occasion, alors que ce n'est pas toujours très facile de savoir si le régime est en déficit ou en surplus. Il faut quand même faire des évaluations qu'on ne fait pas à chaque mois et il est possible qu'un employeur, dans une bonne année, décide de faire une cotisation additionnelle pour ne pas avoir à en faire dans des années plus difficiles.

Alors, je serais bien mal à l'aise de tenter de passer une loi ou un règlement interdisant des congés de cotisation alors que j'aurais de la difficulté à expliquer c'est quoi un congé de cotisation et en vertu de quoi un employeur peut être obligé de faire des cotisations à tous les mois, par exemple. Ça ne veut pas dire que je ne suis pas sensible à l'argument que développe la députée de Hochelaga-Maisonneuve à l'effet qu'il est possible, et il serait possible théoriquement, que les surplus diminuent au cours des années si on n'en vient pas à un règlement équitable de la disposition des surplus d'actifs. Et, là-dessus, je dirais ceci, c'est qu'il serait

bien préférable, avouons-le, si les parties pouvaient s'entendre entre elles et que le gouvernement n'ait pas à venir trancher par une formule, que ce soit celle que nous avons déposée ou une autre, la question du partage entre les employeurs et les travailleurs, les cotisants. On a vu dans le passé certains dossiers où les parties se sont entendues et ça a réglé ces dossiers-là, bien sûr. Quant à moi, je préférerais de beaucoup que les parties puissent s'entendre et règlent sur une base de cas par cas la question des surplus d'actifs, auquel cas, bien sûr, on serait tout à fait disposé à lever le moratoire au fur et à mesure que ces règlements-là se feraient.

Maintenant, pour l'instant, comme je l'ai dit tout à l'heure, je n'ai pas pris de décision encore sur la suite à donner au dossier. La Régie des rentes continue à faire les vérifications que je lui ai demandées et nous réfléchissons en espérant pouvoir prendre une décision le plus tôt possible. Mais certains faits nouveaux ont été portés à mon attention et j'investigue par les temps qui courent.

Le Président (M. Gautrin): Merci, M le ministre.

Mme Harel: Alors, on va remercier M. Legault pour sa prestation.

Le Président (M. Gautrin): M. Legault, je vous remercie. Avant que vous partiez, est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission qui voudraient vous poser quelques questions? M. Legault, nous vous remercions, au nom de la commission, pour vos explications claires.

Mme Harel: Je pense que le ministre a un dernier organisme.

Le Président (M. Gautrin): II y a un dernier organisme. .

Mme Harel: Le Conseil d'arbitrage.

Le Président (M. Gautrin): ...le Conseil d'arbitrage. M. le ministre, est-ce que l'organisme qui s'appelle le Conseil d'arbitrage...

Mme Harel: M. Lévesque est-il là? Non? Le Président (M. Gautrin): II n'est pas là.

M. Bourbeau: Est-ce que le comité d'arbitrage est ici?

Mme Harel: Bon, alors, ce sera pour l'an prochain.

M. Bourbeau: Là, je dois avouer, M le Président, que vous me prenez un peu de court. Est-ce qu'on l'avait convoqué?

Le Président (M. Gautrin): Non, non, écoutez... C'est simplement une demande de la part de notre amie, la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

M. Bourbeau: On m'avise que le Conseil d'arbitrage était ici cet après-midi.

Le Président (M. Gautrin): Ah!

M. Bourbeau: Vous avez dit que vous vouliez voir les présidents des organismes; il ne s'est probablement pas considéré comme un président d'organisme.

Le Président (M. Gautrin): Sachez que je suis...

M. Bourbeau: Ce n'est pas un organisme, un conseil; alors, voyez-vous, il y a toute la nuance.

Le Président (M. Gautrin): Aux yeux de l'Opposition, il a été promu comme président, c'est une promotion. Alors, si je comprends bien, on a terminé avec les organismes.

Mme Harel: Oui.

Le Président (M. Gautrin): II nous restait encore un peu de temps pour parler sur la sécurité du revenu. C'est ça que vous voulez faire?

Mme Harel: C'est-à-dire qu'il nous reste encore, M. le Président, 30 minutes, 35 minutes plus exactement.

Le Président (M. Gautrin): C'est exact.

Mme Harel: Alors, il y a, évidemment, le réseau Travail-Québec. Donc, j'invite l'examen du programme 4, je crois, hein?

Le Président (M. Gautrin): Oui, c'est ça. Oui, Sécurité du revenu, le programme 4, M. le ministre, si vous permettez. Le programme 4, Sécurité du revenu. Ça va?

Mme Harel: Oui, juste une petite seconde.

Le Président (M. Gautrin): Tout le monde est en piste? Programme 4, 4e course.

M. Bourbeau: M. le Président... Le Président (M. Gautrin): Oui. M. Bourbeau: ...on vous écoute.

Le Président (M. Gautrin): Alors, nous sommes prêts C'est un départ. Le programme 4.

M. Bourbeau: Quant à moi, je n'ai pas de

questions, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): Vous n'avez pas de questions.

Mme Harel: Attendez.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Vous attendez rien...

Le Président (M. Gautrin): Seriez-vous prêt à recevoir...

M. Bourbeau: Ah oui, toujours.

Le Président (M. Gautrin): Bon. Mme la députée.

Mme Harel: Voilà. Alors, il s'agit donc du programme, Sécurité du revenu. Également, on pourra examiner sa gestion par le réseau Travail-Québec et je crois qu'il s'agit, pour ce qui concerne la gestion et les services aux clientèles, du programme 1.

Assistance-maladie

D'abord, M. le Président, une intervention pour signaler au ministre, dans le cadre du programme 4, une augmentation absolument phénoménale des coûts du programme d'assistance-maladie. C'est une augmentation de 18 179 000 $ et, pour avoir un peu examiné la question, on se rend compte que ce n'est pas le nombre de demandes de médicaments qui varie; c'est finalement à peu près l'équivalent des demandes de 1991-1992 qu'on retrouve en 1990-1991, 6 783 443 demandes de médications en 1990-1991 et 6 800 000 en 1991-1992. Alors, on est à peu près dans le même ordre de grandeur. Ce qui est phénoménal, c'est la hausse du coût moyen, c'est-à-dire des honoraires professionnels. C'est absolument phénoménal, une hausse de 11 %; ça, c'est évidemment les honoraires professionnels qui sont versés autant aux dentistes, j'imagine, qu'aux médecins, qu'aux pharmaciens. Et j'ai vérifié, M. le Président, les années antérieures et je me suis rendu compte qu'il n'y a à peu près personne qui surveille de près ces hausses-là, mais ça devient extrêmement inquiétant. Je voudrais bien voir un autre programme, moi, du ministère qui aurait connu une hausse de 11 %. C'est presque deux fois l'indice du coût de la vie.

Dans le document que j'ai sur le profil de consommation et de dispensation des services de santé au Québec, 1983-1987, un document réalisé par la Régie de l'assurance-maladie du Québec, avec présentation de statistiques, on nous fait part du profil de consommation des bénéficiaires de l'aide sociale et, notamment, de la progression des ordonnances pour les enfants, particulière- ment pour les enfants de moins d'un an. Et, en prenant connaissance de ces statistiques, je me suis dit qu'il s'agissait sans doute là de la façon dont les milieux psychosociaux médicaux ont réagi à l'absence de lait maternlsé pour les enfants de famille assistée sociale, à moins d'avoir une prescription. Alors, j'imaginais les coûts que ça doit encourir, le fait que le lait maternisé est extrêmement coûteux et que les mères assistées sociales de jeunes enfants doivent aller obtenir une prescription pour obtenir gratuitement ce lait maternisé. Je ne sais pas si le ministre a pris connaissance de ces chiffres-là, mais c'est quand même phénoménal, l'augmentation des coûts pour les enfants de moins d'un an.

D'autre part, on est donc toujours en attente de décision quant à la possibilité de faire ajouter le lait maternisé sur la liste des médicaments admissibles et moi, j'aimerais bien qu'il y ait une enquête, une évaluation des coûts qui comparerait ce que ça peut coûter actuellement, compte tenu des honoraires médicaux qui sont impliqués et des honoraires, aussi, pharmaceutiques, et ce que ça pourrait coûter si ça se retrouvait sur la carte-médicaments des femmes mères de jeunes enfants assistées sociales. (21 h 30)

D'autre part, pour les années antérieures, j'avais les chiffres sur l'évolution du coût des programmes, une évolution depuis 1983, et je constatais que l'accroissement - je cite la Régie - résulte de la hausse des honoraires consentis aux médecins durant cette période conjuguée à un accroissement du nombre de dispensateurs et de celui de services dispensés à la population. Et là, le danger, c'est qu'on diminue les services parce que le coût des dispensateurs augmente, quand vous pensez que c'est 18 000 000 $ de plus pour une demande qui est restée la même. Alors, c'était ma première remarque. Je ne sais pas si j'attire l'attention du ministre, je ne sais pas si le ministère entend faire valoir sa réaction auprès du ministère de la Santé et des Services sociaux.

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre, vous êtes interpellé.

M. Bourbeau: M. le Président, un des dossiers qui a attiré mon attention depuis deux ans, je dois dire, depuis mon arrivée au ministère, depuis plus de deux ans, bientôt trois ans, c'est la question du coût du programme d'assistance-maladie. La députée de Maisonneuve a raison de dire que les coûts non seulement des médicaments, mais de la totalité du programme d'assistance-maladie augmentent dans une proportion assez inquiétante. Je peux donner des statistiques, si vous voulez. Les dépenses dans les trois, quatre dernières années: 1987-1988, 142 000 000 $, pour la totalité du programme; l'année suivante, 147 000 000 $, ça c'est pas si

pire; l'année suivante, 156 000 000 $; après ça, 175 000 000 $ à 188 000 000 $. Et, si on regarde les médicaments, alors là c'est 91 000 000 $ ou 92 000 000 $ en 1987-1988; 99 000 000 $, 106 000 000 $. 120 000 000 $ et 128 000 000 $ probables.

Je me suis intéressé très activement à la question des médicaments. Vous vous souvenez qu'il y a un an et demi j'avais fait faire une enquête au ministère et à la Régie de l'assurance-maladie du Québec, la RAMQ, sur les abus de consommation des médicaments par certaines clientèles, par certains prestataires de la sécurité du revenu, et on a mis sur pied un système pour contrôler ceux qui abusent, et vous connaissez le système. Quand on a raison de croire que des personnes abusent, après avoir soumis le dossier à un comité médical, on met sous contrôle des assistés sociaux qui ont carrément abusé et c'est fait en faisant en sorte de déposer la carte-médicaments chez un seul pharmacien, un pharmacien choisi par le prestataire, je dois le dire - d'ailleurs, on respecte son choix - et, à partir de ce moment-la, seul ce pharmacien-là peut vendre des médicaments à ce client-là.

Mme Harel: Est-ce que ce sont les professionnels qui abusent?

M. Bourbeau: Dans le cas dont je vous parle... Je vais vous donner des cas où il y en avait des centaines. Par exemple, je me souviens d'un cas d'un prestataire qui, dans une même année, avait vu 106 médecins et 75 pharmaciens, un seul prestataire; des sommes d'argent dépensées, jusqu'à 3000 $ à 4000 $ par mois de médicaments. Je pourrais vous donner une consommation pour un individu - peut-être que le député de Matapédia pourrait m'aider plus...

M. Paradis (Matapédia): Le diazépam, tous les anxiolytiques, les benzodiazépines.

M. Bourbeau: Les benzodiazépines, des prestataires qui, dans une seule année, se procuraient des médicaments dont la consommation normale aurait duré 20 ans. Je peux vous en donner comme ça, à la pelletée, des cas. D'ailleurs, une enquête est en cours présentement depuis plusieurs mois par la Sûreté du Québec. On a viré carrément à la Sûreté du Québec des douzaines, plus que des douzaines même de cas, de dossiers, et il y a quelques procédures qui ont été prises, quelques accusations, mais je pense que les dossiers sont encore sous enquête. Et pour tous ces cas-là de gens qui sont présumés avoir abusé, on a mis sur pied une grille d'analyse avec le concours de l'Ordre des médecins du Québec et de la Corporation des pharmaciens du Québec, on a confectionné une grille et on a fait passer à travers la grille la clientèle, et ceux qui restaient accrochés dans le filet, ce sont ceux qui manifestement consommaient plus que nor- malement on peut consommer et ces cas-là ont été mis sous contrôle.

Bon, c'a donné, enfin, on ne peut pas m'accuser de ne pas avoir fait d'efforts parce que, au moins, c'a fait en sorte que les gros abuseurs, ceux qui consommaient des médicaments ou, enfin, qui se procuraient des médicaments, je dois dire, en quantité Industrielle, ont tous été stoppés. Et, dorénavant, ceux qui se procurent des médicaments, ou tentent de se procurer des médicaments, disons, à un rythme trop important se retrouvent dans ce système où ils peuvent se procurer des médicaments auprès d'un seul pharmacien. M. le Président, des...

Mme Harel: Est-ce qu'ils ont été soignés? M. Bourbeau: Oui, la...

Mme Harel: Parce que j'imagine qu'il devait y avoir des gros problèmes de latence là, si tant est que ces personnes étaient des consommateurs de médicaments. Dans le fond, si elles avaient connu une surmédication, H ne devait pas être possible de les en priver comme ça du jour au lendemain. Non?

M. Bourbeau: M. le Président, ce qui s'est passé, c'est que...

Mme Harel: C'est un problème comme l'alcoolisme, non? la toxicomanie? C'est un problème de toxicomanie, là, dont vous nous pariez.

M. Bourbeau: Mais, dans la plupart des cas dont je parle là, c'étaient des cas de fraude, de trafic, parce que la consommation était tellement, pas la consommation, mais on se procurait des médicaments dans une quantité tellement importante que les plus grands toxicomanes n'auraient jamais pu survivre à de telles doses. Mais pour ne pas prendre de chance, avant de mettre sous contrôle chacun de ces cas-là, le dossier individuel a été étudié par un comité de médecins spécialistes à la Régie de l'assurance-maladie, qui a étudié chaque dossier, un par un. et, quand il y avait le moindre soupçon de toxicomanie, le dossier était référé à un médecin traitant, et on faisait en sorte de prévoir une procédure de sevrage pour éviter qu'il y ait des problèmes.

Alors, M. le Président, j'étais..

Le Président (M. Gautrin): M. le député de...

M. Bourbeau: Je voudrais terminer, M. le Président. Alors, voici l'intérêt que j'ai porté à ce dossier-là dès le début. Maintenant, je dois dire que, récemment, j'ai repris, avec mon collègue du ministère de la Santé et des Services sociaux, l'étude globale du dossier de la consom-

mation des médicaments pour la clientèle de la sécurité du revenu et que nous sommes en train de poursuivre avec la Régie de l'assurance-maladie du Québec une étude encore plus exhaustive du dossier de façon à s'assurer qu'il n'y a pas d'abus, d'abord, dans la consommation, dans les coûts des médicaments, dans le coût également des services professionnels. Et je pense que, d'ici quelques mois, nous serons en mesure de prendre des décisions qui vont nous permettre de faire le ménage une fois pour toutes dans ces dossiers-là, parce qu'à mon avis, effectivement, il y a des abus, non pas seulement de la part des consommateurs, mais aussi de la part des prescripteurs et des fournisseurs.

Le Président (M. Gautrin): Merci, M. le ministre. Est-ce que, Mme la députée de Chicou-timi, vous avez quelques questions?

Rationalisation du réseau Travail-Québec

Mme Blackburn: Oui, une question...

Le Président (M. Gautrin): Une question.

Mme Blackburn: ...au sujet d'un projet de rationalisation. Dans une perspective de rationalisation, le ministre a invité les directeurs généraux des centres Travail-Québec Sague-nay-Lac-Saint-Jean-Chibougamau et celui de la Côte-Nord à examiner des hypothèses de fusion. Les deux directeurs généraux ont examiné trois scénarios. Le premier, c'est la fusion intégrale, c'est-à-dire les 33 personnes de la direction du Saguenay avec les 19 de la Côte-Nord; ça économisait cinq postes, mais, compte tenu des frais additionnels encourus en raison de la distance, ça se traduisait par une perte de 300 000 $. La deuxième hypothèse qui a été examinée, c'était le partage des services; les services de première ligne et la révision des dossiers restaient sur place, et les autres services étaient centralisés au Saguenay: par exemple, la formation, la gestion, le support aux agents, l'interprétation de la réglementation et la gestion de personnel. Selon l'étude réalisée, l'économie était nulle, parce qu'il faut comprendre qu'il y a 350 milles, pas des kilomètres là - je ne pense pas trop me tromper - entre Sept-lles et Chicoutimi; alors, ça entraîne des coûts de fonctionnement extrêmement élevés.

Une consultation qui a été faite auprès du collègue du ministre, le député de Saguenay, est contre tout projet de fusion des deux bureaux régionaux parce qu'il n'y a pas d'économie réelle, en raison des distances. Alors, est-ce que le ministre, qui a en main le rapport depuis déjà quelques semaines, a l'intention de suivre les recommandations des directeurs généraux, y compris celles de son collègue, le député de Saguenay, et de laisser les choses telles qu'elles sont, compte tenu de l'absence d'économie réalisée par une fusion des directions régionales? Le Président (M. Gautrin): M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, je dirai que la députée de Saguenay en sait beaucoup plus long que moi.

Le Président (M. Gautrin): De Chicoutimi.

M. Bourbeau: De Chicoutimi, oui, en sait beaucoup plus long que moi sur ce dossier parce que je n'ai aucun rapport encore qui m'a été soumis. Donc, je ne l'ai pas lu puisqu'on ne m'en a pas soumis encore. Le dossier n'est pas sur mon bureau.

Je rappellerai ceci, et je pense que les membres de la commission vont apprécier ce que je vais dire, c'est qu'avant d'enclencher ce dossier-là j'ai avisé les députés des deux côtés de la Chambre de l'intention du gouvernement de procéder à une étude en vue de la rationalisation du réseau Travail-Québec. Avec les mois, on s'était rendu compte que la clientèle avait beaucoup diminué à l'aide sociale; elle a légèrement augmenté depuis ce temps-là, mais elle a quand même beaucoup diminué par rapport à il y a cinq ans. Il a été un temps où on avait au-delà de 700 000 personnes à l'aide sociale au Québec et, aujourd'hui, on en a un peu en bas de... à peu près 590 000. Il y a eu, donc, une baisse importante de la clientèle. Elle était encore plus importante l'été dernier, mais ça va certainement redescendre éventuellement.

À l'occasion de cette baisse de clientèle, il y a aussi eu une diminution du nombre de fonctionnaires affectés au réseau en vertu des ententes que nous avons avec le Conseil du trésor, ententes qui veulent qu'on nous alloue un nombre de postes qui est proportionnel au nombre de clients à la sécurité du revenu. Quand la clientèle augmente, on ajoute des postes et, quand elle diminue, la clientèle, on diminue le nombre de postes aussi, mais le nombre de postes qui est diminué, en général, ce sont des postes de première ligne. Bref, on coupe les indiens, mais on a gardé pas mal trop de chefs pour le nombre d'indiens.

Alors, l'objectif du travail, c'était de faire en sorte de réduire le nombre de bureaux régionaux pour dégager des postes, enfin, des personnes qui pourraient être affectées aux services de première ligne. Étant donné que nous avons, M. le Président, des bureaux locaux dans à peu près toutes les villes du Québec, nos bureaux régionaux ont beaucoup moins d'importance que pour un autre ministère qui n'aurait que des bureaux régionaux. Chez nous, la clientèle ne se présente pas très souvent au bureau régional; elle se présente au bureau local, au CTQ local. Donc, ça n'a pas d'importance d'avoir 15 bureaux régionaux plutôt que 10, plutôt que 5. En fait, on pourrait réduire le nombre peut-être

pas à 5, mais on pourrait réduire le nombre d'une façon importante puisque ce n'est pas l'endroit où se présente la clientèle. Donc, c'est dans cet esprit-là que nous avons conçu de tenter de réduire le nombre de bureaux régionaux et, également, de tenter de voir si, au niveau local, on ne pouvait pas remplacer, parfois, un bureau local par un point de service, surtout quand le nombre de dossiers traités était très peu important. Exemple, si on a un bureau qui traite, je ne sais pas, 10 000 dossiers, ça justifie un état-major un peu plus important, mais, si le bureau traite 1000 dossiers, est-ce que ça justifie un directeur, un assistant directeur, un sous-fifre, etc.? Peut-être que non.

Alors, dans le but de mieux servir notre clientèle, nous avons décidé d'enclencher cette étude et de le faire non pas en vase clos, mais en consultant, bien sûr, nos fonctionnaires, mais aussi en consultant les députés. Alors, la procédure prévoit qu'au départ de la consultation le député est consulté par nos gens sur le terrain, enfin pour ceux qui font l'étude. Après ça, une fois que les consultations ont eu lieu, un rapport est fait au ministère et discuté, discuté éventuellement avec le ministre, et on établit, à ce moment-là, des consensus. Alors, je peux vous donner la procédure. Les étapes à franchir sont les suivantes. Le ministre informe le député concerné du projet de réorganisation touchant un ou des centres Travail-Québec sur son territoire. Le directeur général du réseau Travail-Québec requiert des directeurs régionaux une proposition de réorganisation. Là, je parle des centres Travail-Québec locaux.

Vous me parlez du régional, alors je vais changer. C'ost la môme chose pour la direction régionale. Le ministre informe les députés. Le directeur du réseau Travail-Québec requiert des directeurs régionaux concernés une proposition de regroupement d'activités pouvant déboucher sur une fusion. Le projet d'étude s'effectue selon un cadre de référence assurant un examen de tous les éléments pertinents. Le bureau du ministre consultera au besoin les députés en cours d'élaboration des projets. Suite à l'acceptation du rapport par le directeur général du réseau, ce dernier adresse ses recommandations aux autorités du ministère. Après accord de principe, le ministre consulte les députés concernés avant de prendre la décision finale. Et le ministre informe les députés concernés des décisions finales. (21 h 45)

Vous voyez, M. le Président, qu'à au moins deux, sinon trois étapes de la procédure il est prévu de consulter les députés. Alors, là, vous nous parlez de la première étape où on est en train de faire l'étude préliminaire et où je présume qu'un directeur régional a, par inadvertance, fait voir à la députée de Chicoutimi un projet de rapport que moi, je n'ai pas encore vu. Je trouve ça un peu étonnant que la députée de

Chicoutimi ait déjà entre ses mains un rapport que mol, je n'ai pas vu. Mais, quand je le verrai, je pourrai voir si, oui ou non, la proposition a du bon sens ou si le rapport est bien fait ou non. Mais, sachant qu'il est déjà entre les mains de l'Opposition, je me demande, M. le Président, si le rapport a été bien confectionné. Ça m'étonne un peu de voir qu'on donne la préférence à un député de l'Opposition plutôt qu'au ministre. Mais, enfin, ce sont des choses qui arrivent.

Mme Blackburn: M. le Président...

Le Président (M. Gautrin): ...des raisons informelles.

Mme Blackburn: Non, non. Écoutez, je ne veux pas laisser planer de doute quant à l'intégrité du directeur régional du Saguenay-Lac-Saint-Jean, du centre Travail-Québec. La même consultation a été menée auprès du député de Saguenay.

M. Bourbeau: Je lui dirai la même chose.

Mme Blackburn: D'accord. C'est une consultation. La conclusion à laquelle ils en arrivent, c'est qu'il n'y a pas d'économie d'échelle à réaliser. Qui plus est, moi, je devrais m'en réjouir, M. le ministre, parce que ça s'en viendrait dans ma région. Mais je n'ai jamais favorisé qu'on vide les...

M. Bourbeau: Qu'est-ce qui viendrait dans votre région?

Mme Blackburn: Le bureau régional. J'imagine qu'il ne serait pas à Sept-îles. Le projet, c'était davantage d'amener les activités au Saguenay.

M. Bourbeau: Ah oui? Mme Blackburn: Bien...

M. Bourbeau: Je ne le sais pas, moi. Moi, j'ai un projet de fusion entre deux bureaux régionaux.

Mme Blackburn: Alors, soyons drôles...

M. Bourbeau: II n'y avait pas de conclusion...

Mme Blackburn: ...et disons qu'on va le mettre à Havre-Saint-Pierre, mais ça m'éton-neratt.

M. Bourbeau: À moins que les conclusions aient été tirées d'avance, là. Je n'ai jamais pensé que les conclusions étaient tirées d'avance.

Mme Blackburn: Écoutez, il ne faudrait pas

se niaiser, là. j'imagine que vous n'irez pas l'installer à havre-saint-pierre, vous êtes en train de fermer le poste de havre-saint-pierre. ce que je veux dire...

M. Bourbeau: Est-ce que Chicoutimi est la seule ville importante de la région?

Mme Blackburn: La seule chose que je voudrais savoir, dans le fond...

Le Président (M. Gautrin): Non, mais c'est le pôle culturel.

Mme Blackburn: S'il s'avère qu'il n'y a pas d'économie d'échelle... Parce que je pense qu'entre réduire le nombre de postes à la direction régionale et faire disparaître complètement une direction régionale, que ce soit celle du Saguenay ou celle de Sept-îles, s'il n'y a pas d'économie d'échelle, compte tenu des distances - c'est plus loin partir de Chicoutimi pour aller à Sept-îles que partir de Chicoutimi pour aller à Montréal - alors, est-ce que le ministre va persévérer dans cette voie?

M. Bourbeau: M. le Président, je n'ai pas vu le rapport. Je suis incapable d'en discuter. Je ne peux même pas présumer des conclusions de ce rapport-là, on ne me l'a pas présenté; le sous-ministre non plus, il me dit qu'il ne l'a pas vu. Alors, en ce qui me concerne, M. le Président, c'est du cacassage. On peut faire tout ce qu'on veut de suppositions, tant que je n'aurai pas vu le rapport, tant qu'il ne m'aura pas été présenté, je ne peux pas en discuter.

Mme Blackburn: Merci pour le cacassage. Quand est-ce que vous allez faire la seconde consultation?

Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie de part et d'autre.

Mme Blackburn: Non...

M. Bourbeau: M. le Président, si jamais on en vient à la conclusion, en voyant le rapport, qu'il n'y a aucun intérêt à fusionner les deux bureaux régionaux, je ne consulterai personne. J'aviserai la députée que le projet est tombé à l'eau, c'est tout.

Le Président (M. Gautrin): Merci. M. le député de Matapédia a une brève, petite question à poser.

M. Paradis (Matapédia): Enfin, oui, quelques brèves questions, à la suite des cas de comté de Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Ce n'est pas un cas de comté, ça.

M. Paradis (Matapédia): Bien oui, je sais bien, mais enfin... Ceci étant dit, j'aimerais revenir au dossier médicaments. On évoque, de temps à autre, que, possiblement, ce soit la faute des honoraires professionnels si les coûts des médicaments augmentent. Je me sens un petit peu interpellé lorsque vient le temps que l'on discute de ce genre de chose là, étant moi-même pharmacien, de telle sorte que ce n'est pas évident. Il n'y a pas présentement de statistiques importantes à savoir que les honoraires professionnels augmentent autant que le prix des médicaments. C'est cette rectification-là que j'aimerais bien apporter.

Le gouvernement du Québec, depuis de nombreuses années, a effectué, je pense, une politique d'aide aux compagnies pharmaceutiques de telle sorte qu'elles puissent s'implanter au Québec, surtout suite à la loi C-22 où on invitait les compagnies à s'établir, ou à les protéger sur les brevets. La Régie de l'assurance-maladie aussi s'oblige, jusqu'à un certain point, à payer un prix de médicament plus élevé sur les compagnies novatrices, de telle sorte qu'on peut avoir un nouveau médicament dans un traitement donné, avec une équivalence thérapeutique, qui peut être discutable, jusqu'à un certain point, mais on peut se retrouver avec des écarts aussi importants que d'avoir des médicaments par traitement mensuel qui pouvaient coûter, à une certaine époque, 5 $ ou 6 $, et se retrouver facilement jusqu'à des écarts de 150 $.

Moi, je suis bien prêt à considérer que les pharmaciens peuvent, jusqu'à un certain point, avoir des honoraires supplémentaires, compte tenu qu'il peut y avoir des différentiels au niveau du taux d'augmentation des gens sur la sécurité du revenu et dépendant des cycles économiques. Il peut y avoir aussi des gens qui peuvent avoir, jusqu'à un certain point, abusé de •ce système, mais il y a aussi en cause, à ce moment-ci, des équivalences thérapeutiques qui sont aussi discutables au niveau des professionnels dont je suis. C'est vrai aussi, c'est bien difficile au niveau du médecin ou du pharmacien de vérifier ce genre de chose là.

Mais avec la réforme de la santé, dois-je dire à la décharge du gouvernement, il y a quand même des choses intéressantes où on reconnaîtra - je souhaite que ça puisse se faire le plus rapidement possible - j'espère qu'on pourra reconnaître l'avantage d'avoir ou de mettre à contribution des professionnels, comme les pharmaciens, pour donner leur opinion pharmaceutique sur des dossiers donnés. À cet égard, on pourrait sauver beaucoup - je le répète - beaucoup d'argent, si on avait un suivi un petit peu plus serré. On les connaît, plusieurs de mes collègues, pharmaciens tout comme moi, comme l'équipe qui travaille avec moi, on a régulièrement à communiquer des renseignements, soit avec la Régie de l'assurance-maladie, pour dénoncer, jusqu'à un certain point, des cas

d'abus. Je souligne, d'ailleurs, l'initiative du ministère là-dedans, du ministère de la Sécurité du revenu, parce que, effectivement, on peut parler de drogues illégales, mais on peut aussi parler de drogues licites et de drogues illicites. Et, dans ce cadre-là, je pense que toutes les ordonnances peuvent être, jusqu'à un certain point, contrôlées.

Enfin, j'espère qu'on aura l'occasion d'en reparler. Mais lorsque l'on parle de coût et d'augmentation de coût du médicament, moi, je pense qu'on doit faire un examen de conscience, non seulement au niveau des patients, mais au niveau gouvernemental: Jusqu'où on est prêts à aller? Jusqu'à un certain point donner davantage à certaines compagnies que l'on dit, entre guillemets, innovatrices ou avoir le meilleur prix pour un médicament? Parce qu'on sait très bien qu'un médicament fabriqué par une compagnie ou une autre, il peut y avoir des différences aussi exceptionnelles que de 1 à 10, alors, de 10 $ à 100 $. Alors, ça m'apparaît important de dire ces choses avant d'avancer que c'est possiblement les professionnels, soit les médecins par la visite, la castonguette, ou bien le pharmacien aussi qui délivre un médicament et qui, par ses honoraires professionnels, peut avoir, à un moment donné, le bénéfice de tout ça. Et j'espère qu'avec la réforme de la santé et avec une collaboration de tous les instants du ministère de la Sécurité du revenu on arrivera à un contrôle un petit peu plus serré et ça m'apparaît des plus importants que la main droite et la main gauche sachent ce qu'elles font.

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre, vous voulez réagir?

M. Bourbeau: M. le Président, on n'est pas assez avancés pour porter des jugements, mais j'ai nettement l'impression que c'est plutôt le coût des médicaments qui augmente d'une façon disproportionnée que le coût des honoraires professionnels. Mais j'aime autant arrêter ici parce que je n'ai pas encore de certitude absolue et quand on en aura, M. le Président, on le fera savoir.

Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie. Écoutez, je voudrais maintenant m'adresser aux membres de la commission. Il est 21 h 55. L'ordre de la Chambre nous faisait arrêter à 22 heures. Normalement, l'étude des crédits... On a encore à peu près une heure de disponible pour l'étude des crédits, mais on n'est pas obligés de la prendre, par exemple. Est-ce que vous pensez, si on pouvait avoir un consentement unanime pour terminer l'étude des crédits ce soir, qu'on pourrait l'avoir? Je m'adresserais particulièrement à la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Vous pensez avoir besoin de combien de temps pour terminer l'étude des crédits?

Mme Harel: Mon Dieu, sûrement encore 15 à 20 minutes.

Le Président (M. Gautrin): Est-ce qu'on pourrait avoir un consentement unanime pour poursuivre l'étude des crédits, disons jusqu'à 22 h 20? Est-ce que ça... Vous ne pouvez pas.

M. Bourbeau: M. le Président, la députée demande 15 minutes. N'en donnez pas plus que le client en demande, hein?

Mme Harel: Ha, ha, ha! M. Bourbeau: Franchement!

Le Président (M. Gautrin): 15 à 20 minutes, elle m'a dit.

Mme Harel: Et quart, et quart. 15 à 20 minutes.

Le Président (M. Gautrin): Alors, excusez-moi. C'est simplement une question de...

Mme Harel: Moi, j'ai besoin de 15 minutes, mais le président en a besoin de cinq pour faire adopter ses programmes.

M. Paradis (Matapédia): M. le Président, compte tenu que nous avons été très collaborateurs de la part du côté ministériel pour laisser tout le temps voulu à la députée de Hochelaga-Maisonneuve - on sait qu'on pourrait, à la limite, utiliser au moins 50 % du temps... Je ne voudrais pas demander le temps qui a été employé par les ministériels, mais bref, je pense que nous avons été très collaborateurs de telle sorte qu'on peut, à la limite, accorder quelques minutes supplémentaires à la députée de Hochelaga-Maisonneuve pour terminer son inquisition ou presque. Mais je n'aimerais pas que ça déborde largement, sinon...

Mme Harel: Sinon on revient.

M. Paradis (Matapédia): ...on devra revenir.

Mme Harel: C'est ça, on va revenir. Moi, ça m'est égal.

Le Président (M. Gautrin): Moi, j'avais compté cinq minutes de plus, parce qu'il ne faut oublier qu'on doit prendre des votes pour adopter chacun des programmes. Alors, écoutez, si on s'entendait. Il est 21 h 55, si on terminait à 22 h 15; mais, à 22 h 12 ou 22 h 13, moi, je vais suspendre les questions pour pouvoir faire adopter les programmes. Ça va pour vous?

Mme Harel: À 22 h 13.

Le Président (M. Gautrin): À 22 h 13, et là on aura à adopter les programmes parce que, ici, notre travail, c'est d'adopter les programmes. Donc, il y a consentement pour poursuivre jusqu'à 22 h 15 et, à 22 h 13, on commence l'adoption des programmes. Ça marche?

Une voix: Ça va.

Le Président (M. Gautrin): II y a consentement?

Mme Harel: Oui.

Le Président (M. Gautrin): Alors, consentement unanime. Malgré l'ordre de la Chambre, on poursuit jusqu'à 22 h 15. Mme la députée.

Soutien financier

Mme Harel: Sur le dossier de Soutien financier, dans les documents qui nous ont été fournis par le ministère, on constate qu'il est possible qu'un agent soutien financier - SAF, je pense, est l'appellation de l'agent qui s'occupe des soutiens financiers... Est-ce que c'est... Non? C'est le jargon.

Une voix: C'est le Service d'aide financière.

Mme Harel: De toute façon, il peut avoir à administrer 700 à 800 dossiers. Il y a passablement d'inquiétude sur la concentration de la gestion des dossiers Soutien financier. J'ai eu des communications avec des personnes de Montréal-Nord, et du sud-ouest de Montréal aussi, qui craignent que les dossiers Soutien financier soient, d'une certaine façon, sous-régionalisés dans quelques grands bureaux et que ça oblige ces personnes à des déplacements qui soient plus onéreux, non pas seulement en termes de coût, mais en termes de temps aussi. Qu'est-ce que ce sera la politique du ministère à l'égard de la gestion des dossiers Soutien financier et comment vous expliquez la progression vertigineuse au programme Soutien financier?

M. Bourbeau: La progression de quoi?

Mme Harel: La progression vertigineuse au programme Soutien financier...

M. Bourbeau: Vous voulez dire du nombre de prestataires?

Mme Harel: Oui, du nombre de prestataires, particulièrement dans ce programme-là. Je pense ne pas me tromper en disant qu'elle est de l'ordre de 28,7 %. Ça, c'est dans le document officiel, le document bleu que le ministère nous a remis. Ça, c'est le montant des crédits, 28,7 %. Quant à l'augmentation des participants, on la retrouve, toujours dans ce document officiel du ministère; on nous parle d'une augmentation sur une base comparable, une augmentation très très substantielle de la clientèle, soit 15,1 %, sur une base comparable de 1991-1992 en regard de 1990-1991. On nous dit: "La clientèle du programme est évaluée à 93 200 ménages en 1991-1992 par rapport à 81 000 ménages en 1990-1991, soit une augmentation, de 15,1 %." C'est des crédits supérieurs de 100 000 000 $ par rapport à ceux de 1990-1991 qui vont être affectés à ce programme Soutien financier. C'est quand même une augmentation de 18,5 %.

M. Bourbeau: M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre. (22 heures)

M. Bourbeau: Ici, il y a une confusion. Est-ce que la députée pose une question sur la clientèle du programme Soutien financier ou sur le nombre de dossiers qu'ont à traiter les fonctionnaires?

Mme Harel: Les deux.

Le Président (M. Gautrin): Sur les deux. Sur le nombre de dossiers et sur la clientèle.

M. Bourbeau: o.k. alors, pour ce qui est de la clientèle... m. le président, la clientèle tourne autour de 25 %. la députée avait le chiffre de 28 % tout à l'heure. je vais faire vérifier exactement.

Mme Harel: Non. Ça, c'est les crédits, c'est le budget. L'augmentation par rapport à l'an passé.

M. Bourbeau: Oui. O.K. Mais la clientèle tourne autour de 25 % de la clientèle totale de l'aide sociale et ce n'est pas supérieur à ce qui était prévu. Si je me souviens bien, lorsque nous avons amorcé la réforme, on parlait plutôt de 28 % d'inaptes, alors qu'aujourd'hui ça se situerait autour de 25 %. C'est donc la clientèle qui avait été prévue depuis toujours. Et, si on n'était pas à ce chiffre-là avant, c'est qu'on était dans la période d'étude des dossiers par le comité multidisciplinaire.

Mme Harel: O.K. Et concernant la concentration de la gestion des dossiers Soutien financier?

M. Bourbeau: O.K. Là-dessus, je pourrais répondre à la députée de Maisonneuve, mais je crois que le sous-ministre a quand même un dossier assez technique. Le sous-ministre pourrait probablement répondre dans des termes beaucoup mieux choisis que les miens.

Le Président (M. Gautrin): M. le sous-ministre, vous avez quelques commentaires.

M. Pronovost: À la fois pour des raisons qui tiennent au service à la clientèle et des raisons qui tiennent à une augmentation qu'on recherche de productivité, on a expérimenté cette année, dans le réseau, divers modèles d'organisation du travail. O.K.? C'est réellement une expérimentation qui a pris différentes formes, dans différents centres Travail-Québec. Notre but, c'est d'élaborer un modèle de base qu'on pourra ensuite multiplier dans le réseau et qui pourra souffrir, d'ailleurs, des variantes régionales qui lui permettraient d'être mieux adapté. Dans le cadre de cette expérimentation, certains directeurs de CTQ ont choisi de spécialiser leurs agents, certains n'ayant à leur charge que des cas de Soutien financier. Or, les cas de Soutien financier sont, pour l'ensemble ou en moyenne, plus faciles à traiter parce qu'il n'y a pas la dimension développement de l'employabilité. Le développement de l'employabilité, c'est ce processus qui fait qu'un agent, avec le client, convient dune démarche de qualification, de formation, de recherche d'emploi. Avec les gens de Soutien financier, par définition, on a très peu ce genre de chose à faire. À ce moment-là, l'agent spécialisé dans le Soutien financier peut connaître quand même une charge comparable à celle de son voisin qui s'occupe des cas de clients aptes au travail, peut se retrouver avec plusieurs centaines de cas de plus que l'autre. Premièrement.

Mme Harel: Mais est-ce que ça peut provoquer un déplacement des personnes qui ont besoin de se rendre au bureau?

M. Pronovost: Ça se fait, ça, dans un seul et même CTQ, c'est-à-dire avec la clientèle qui est déjà cliente au bureau. Donc, ça n'implique, pour le client, pas de déplacement additionnel.

Mme Harel: Mais, à Montréal, H y a eu, je pense, une concentration dans certains CTQ?

M. Pronovost: O.K. On me dit que, oui, il y a une place où on a expérimenté ce genre de chose là.

Mme Harel: J'ai appelé moi-même, d'ailleurs.

M. Pronovost: Mais H ne faut pas présumer des intentions du ministère à cause de cette expérimentation-là. O.K.?

Mme Harel: D'accord.

M. Pronovost: Parce qu'un des objectifs qu'on poursuit à travers tout ça aussi, c'est d'établir une relation plus personnalisée et plus étroite avec le client. Et quand je dis "personnalisée", c'est "à chaque client son agent".

Le Président (M. Gautrin): Merci, M. te sous-mlnistre. Mme la députée, quelques questions supplémentaires.

Mme Harel: M. le Président, sur la question du règlement concernant le barème des besoins. Je pense que le ministre doit être maintenant Informé que, dans la rédaction de ce règlement, il y a eu, finalement, un règlement qui, dans son application, donne le résultat inverse de celui que le ministère recherchait et a appliqué. Le règlement a prévu à l'article 16.2: Le barème des besoins prévu aux articles 13 et 14.1 est majoré des montants suivants - bon, suivent les montants, et le ministère n'applique pas ces augmentations de barème selon les besoins, tel que rédigé. Alors, est-ce que le ministre entend modifier le barème et entend-il compenser, puisque, légalement, l'application... Nul n'est censé ignorer le règlement ou la loi, alors le ministère est lui-même tenu, assujetti à l'application du règlement.

M. Bourbeau: M. le Président, est-ce que la députée de Maisonneuve fait allusion, là, à la majoration de 4 $ par mois de compensation pour la taxe de vente du Québec?

Mme Harel: C'est ça. Que c'est bien dit

M. Bourbeau: Alors, je dirai, M. le Président qu'à la suite de la modification du règlement de décembre dernier qui était relative à l'indexation des barèmes pour 1991 une erreur de formulation a fait en sorte que certains prestataires admis au programme Soutien financier n'ont pas reçu la majoration de 4 $ par mois en compensation de la taxe de vente du Québec. Je dirai donc, pour être très transparent, que 27 761 ménages ont été privés de ces 4 $ pendant quatre mois, ce qui représente une somme à verser de 444 176 $. J'ai l'Intention d'acheminer dans les prochains jours au Conseil des ministres un décret qui vise à rétablir la situation dès le mois de mal ou, si les délais ne le permettent pas, dès le mois de juin, de façon à ce que ces prestataires soient remboursés. Et j'ai même devant moi un projet de décret qui m'a été soumis et que j'ai l'intention de lire peut-être ce soir ou demain matin. Et, si est conforme, je vais l'acheminer.

Mme Harel: Alors, I faut donc comprendre que dans ce projet de décret il y aurait modification de ce règlement. D'autre part, est-ce qu'il y aurait remboursement pour les quatre mois à ces 27 000 familles qui ont été privées d'un montant qui leur était attribué selon le règlement?

M. Bourbeau: Oui, c'est ce que je viens de dire là.

Mme Harel: et, finalement, est-ce que le ministère va récupérer de celles qui l'auraient reçu, compte tenu de l'application que le ministère faisait?

M. Bourbeau: Non, M. le Président, c'est une erreur administrative qui fait en sorte que la loi nous interdit de récupérer.

Mme Harel: Bon, très bien, parfait. Merci.

Le Président (M. Gautrin): Merci, M. le ministre.

Mme Harel: Une question qu'il faut absolument éclaircir avant de terminer, c'est celle des prévisions du ministère à l'égard des personnes qui seront déclarées "disponibles". Alors, de mémoire, les prévisions sont de 4000 places de plus pour les participants et de 9000 de moins dans la catégorie "disponibles". J'aimerais savoir comment vous pouvez justifier qu'il y ait... Je veux bien croire là qu'il peut y avoir des vases communicants entre les catégories "disponibles" et "participants", mais pas le double. Il va y avoir une réduction de 9000 places dans la catégorie "disponibles", puis une simple augmentation de 4000 chez les participants, avec 23 000 bénéficiaires actuels qui sont déjà en attente de mesures. Alors, comment vous justifiez la prévision, la diminution de prévision de 9000 places dans la catégorie "disponibles"?

M. Bourbeau: M. le Président, ce n'est pas le ministre lui-même qui fait les prévisions, ce sont les fonctionnaires. Alors, je vais demander au sous-ministre adjoint au réseau, au directeur général du réseau Travail-Québec, M. Lemieux, de répondre, avec la permission de la commission.

Le Président (M. Gautrin): M. le sous-ministre, vous avez la parole.

Une voix: Adjoint.

Le Président (M. Gautrin): M. le sous-ministre adjoint. Je prévoyais votre promotion...

M. Lemieux (Julien): Merci. Nos prévisions de clientèles sur le barème de disponibilité tiennent compte du délai de traitement des dossiers. On travaille actuellement pour accélérer le traitement des dossiers des clientèles sur le barème de manière à réduire le nombre de gens sur le barème, en leur offrant plus rapidement des mesures. Notre volume global de mesures dont on va disposer, qui va monter environ de 4000 pour l'ensemble de l'année, ça veut dire qu'on a en moyenne 45 000 à 48 000 mesures disponibles sur lesquelles les clientèles roulent de façon permanente. Il y a des mesures sur lesquelles les gens peuvent durer, peuvent avoir une présence de quatre mois, cinq mois, d'autres un peu plus longues. Ce qui fait que les gens tournent en moyenne 2,5 %, c'est-à-dire un poste est disponible, peut générer en moyenne 2,5 clients présents sur la mesure. Ce qui fait qu'on peut accélérer...

Mme Harel: Mais là vos prévisions de mesures de participation, c'est 37 000. Ça passerait de 33 000 à 37 000.

M. Lemieux (Julien): Exact.

Mme Harel: Et là vous dites que sur ce nombre... Ça, c'est des places, c'est ça? Il faut le multiplier par 2,5.

M. Lemieux (Julien): Les places dont on dispose, en général, donnent environ 2,5 présences par année. Alors, si on ajoute à ça également le programme PAIE, où on a également des personnes qui vont participer à PAIE sur une base rotative, c'est six mois en moyenne par participation quand les gens se rendent à terme, ce qui fait qu'on a autant de places disponibles dans l'année sur une base permanente pour y ajouter des gens qui viennent du barème de disponibilité, ce qui fait que le barème en soi peut baisser, mais sans pour autant être en soi une mauvaise nouvelle. Au contraire, je pense que c'est une bonne nouvelle, c'est-à-dire qu'on traite les clientèles plus rapidement, on leur offre des mesures plus rapidement, soit pour aller sur des mesures de formation ou encore aller sur des mesures d'expérience de travail, ou encore un PSMT.

Mme Harel: Mais, à ce moment-là, M. le ministre, il faut constater que la mauvaise nouvelle, s'il y en a une bonne, la mauvaise c'est que ce roulement-là est possible à cause du taux faramineux d'abandon des mesures. C'est quoi, 43 %, 44 %, dépendamment de la mesure, 45 %, le taux d'abandon. Si vous pouvez faire ce facteur 2,5, c'est parce qu'il y a un taux d'abandon absolument incroyable.

M. Lemieux (Julien): Le facteur est dû au fait que, règle générale, les projets, d'abord, ont une durée qui est limitée dans le temps; ce ne sont pas des projets qui durent généralement 12 mois, c'est plus vers 4 mois, un projet normal, que 12 mois; exemple, sur EXTRA ou encore sur PSMT. Deuxièmement, bien sûr aussi, il y a des abandons qui se produisent sur les programmes, abandons qui, des fois, sont des abandons quand même positifs. Des fois, les personnes vont laisser un programme parce qu'elles se sont trouvé un emploi.

Mme Harel: Juste une toute dernière. Le Président (M. Gautrin): Bien sûr.

Mme Harel: Vous avez eu entre les mains l'analyse du bureau du Protecteur du citoyen, qui est datée du 22 novembre 1990. Je ne sais pas s'il y a eu une réponse écrite à toutes ses recommandations, notamment celles concernant les mesures de relance et les clientèles particulières. Alors, je n'ai pas vu, moi, la réponse écrite au bureau du Protecteur du citoyen. Il y a trop peu de temps à notre disposition, on se reprendra dans des engagements financiers, on en a quelques-uns en retard, mais, finalement, c'est assez sévère le jugement qui est porté, particulièrement à l'égard des personnes en recherche d'emploi qui sont pénalisées et qui sont renvoyées dans la catégorie "non-participants" parce qu'elles recherchent un emploi. C'est le cas, je crois comprendre, des personnes qui sont sur l'assurance-chômage et qui font appel à l'aide sociale pour compléter le revenu étant donné que leur assurance-chômage est moins que ce que le barème pourrait leur accorder. Et on me dit que ces personnes qui sont sur l'assuran-ce-chômage se font automatiquement, obligatoirement, mettre dans la catégorie "non-participants" pour le motif quelles ne participent pas à une mesure. Mais elles sont, en vertu de la Loi sur l'assurance-chômage, obligées de faire une recherche active d'emploi. Il y a là une sorte de contradiction.

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre, pouvez-vous résoudre cette contradiction ou informer la députée?

M. Bourbeau: M. le Président, on a reçu la lettre du Protecteur du citoyen. On est en train de réfléchir sur cette question-là et de préparer une réponse. Mais, comme pour toutes les autres demandes du Protecteur du citoyen, M. le Président, ces demandes-là sont prises très au sérieux. On étudie chaque problème, un par un, dès qu'ils sont portés à notre attention, non seulement ceux qui viennent du Protecteur du citoyen, mais de quelque autre source que ce soit. Et, lorsque le point nous apparaît valable, nous mettons en chantier un dossier pour tenter de trouver une solution acceptable au problème soulevé.

Le Président (M. Gautrin): Merci, M. le ministre.

M. Bourbeau: Ce sera la même chose pour ce problème-là.

Mme Harel: Vous avez l'intention de procoder à un sondage, je pense, sur les services que le ministère offre à la population?

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre.

Mme Harel: On m'a parlé d'un très important sondage.

M. Bourbeau: M. le Président, je ne suis pas au courant. Moi, je n'ai pas l'intention de faire de sondage, mais peut-être que mes fonctionnaires ont l'intention de m'en proposer un bientôt ou d'en faire faire un sans que je le sache.

Adoption des crédits

Le Président (M. Gautrin): Compte tenu de l'entente qu'on a eue tout à l'heure, je vais mettre aux voix chacun des programmes. Est-ce que le programme 1, Gestion et services aux clientèles, est adopté?

Des voix: Adopté. Mme Harel: Sur division.

Le Président (M. Gautrin): Adopté sur division. Est-ce que le programme 2, Administration déléguée de programmes en sécurité du revenu, est adopté?

Des voix: Adopté. Mme Harel: Sur division.

Le Président (M. Gautrin): Adopté sur division. Le programme 3, Direction et gestion de la Commission des affaires sociales, est-il adopté?

Des voix: Adopté. Mme Harel: Sur division.

Le Président (M. Gautrin): Sur division. Le programme 4, Sécurité du revenu, est-il adopté?

Des voix: Adopté. Mme Harel: Sur division.

Le Président (M. Gautrin): Sur division. Le programme 5, Allocations de maternité, est-i adopté?

Des voix: Adopté. Mme Harel: Adopté.

Le Président (M. Gautrin): Adopté, pas sur division. Le programme 6, Sécurité du revenu des chasseurs et piégeurs cris?

Mme Harel: Adopté. Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gautrin): Adopté à l'unanimité. Le programme 7, Adaptation et formation professionnelle de la main-d'oeuvre?

Mme Harel: Sur division.

Le Président (M. Gautrin): Adopté sur division. Le programme 8, Développement de l'emploi et intégration au marché du travail?

Mme Harel: Surdivision.

Le Président (M. Gautrin): Adopté sur division. Dans ce cas, je mets aux voix les crédits du ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle pour l'année financière 1991-1992. Sont-ils adoptés?

Mme Harel: Sur division.

Le Président (M. Gautrin): Adopté sur division.

Mme Harel: M. le Président, avant qu'on termine, je voudrais juste remercier. Je veux remercier...

Le Président (M. Gautrin): Tous et chacun.

Mme Harel: Oui, et vraiment remercier particulièrement les membres de la commission parlementaire parce que je sais qu'ils ont suivi attentivement et je me mets à leur place en sachant ce que ça représente pour eux...

Le Président (M. Gautrin): De ne pas poser de questions.

Mme Harel:... ce silence actif. Oui, disons-le, parce que ce sont là certainement des gens aussi préoccupés que je peux l'être, mais qui comprennent que c'est là le rôle de l'Opposition et qui le lui laissent jouer et je vous en remercie.

Le Président (M. Gautrin): De rien. Au nom de la commission, nous voulons remercier le ministre et l'ensemble de ses collaborateurs et fonctionnaires pour toute l'information qu'ils ont bien voulu donner à cette commission.

M. Bourbeau: Ces remerciements sont réciproques, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): Merci. Alors, la commission ayant terminé son travail, elle ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 22 h 17)

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