Journal des débats de la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles
Version préliminaire
42e législature, 1re session
(début : 27 novembre 2018)
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Le
mercredi 18 septembre 2019
-
Vol. 45 N° 8
Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 34, Loi visant à simplifier le processus d’établissement des tarifs de distribution d’électricité
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11 h 30 (version non révisée)
(Onze heures trente-six minutes)
Le Président (M. Lemay) :
Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la
séance de la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des
ressources naturelles ouverte. Je demande à toutes les personnes présentes dans
la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques,
et la commission aujourd'hui est réunie afin de procéder à des auditions
publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi
n° 34, la Loi visant à simplifier le processus d'établissement des tarifs
de distribution d'électricité. M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire
: Oui, M.
le Président. M. Thouin (Rousseau) remplace Mme Blais
(Abitibi-Ouest), Mme Ghazal (Mercier) remplace Mme Lessard-Therrien
(Rouyn-Noranda—Témiscamingue) et M. Gaudreault (Jonquière) remplace
M. Roy (Bonaventure).
Le Président (M. Lemay) :
Merci. Cet avant-midi, nous entendrons M. Sylvain Audette, membre associé de la
Chaire de recherche en gestion du secteur de l'énergie à HEC Montréal. Je vous
souhaite donc la bienvenue, M. Audette. Je vous rappelle que vous disposez
de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons avec la période d'échanges
avec les membres de la commission. Je vous invite donc à procéder à votre
exposé. La parole est à vous.
M. Audette (Sylvain M.) :
Merci. Donc, bonjour, je suis professeur à HEC Montréal, notamment responsable
des formations qui sont offertes par HEC et dans le monde aussi dans les enjeux
de gestion du secteur de l'énergie, notamment réglementation et tarification.
Le mémoire que vous avez devant vous, c'est le résultat d'une réflexion commune
avec Pierre-Olivier Pineault. Il s'excuse de ne pas être ici, il est pris à
Montréal, mais sinon il aurait été assis à côté de moi, c'est certain.
Ça fait... évidemment on a fondé la chaire
de recherche, ça fait depuis cinq ans pour ceux qui la connaissent plus ou
moins. Notre objectif à la chaire, on vise à développer une expertise quant au
secteur de l'énergie au Québec, comme les jeunes qui viennent chez nous
démystifier les enjeux puis contribuer activement au débat. Donc, c'est un peu
ce qu'on va essayer de faire ici dans la mesure du possible.
Donc, dans le mémoire, vous avez un résumé
du contexte de la loi 34. Je ne vais pas évidemment relire tout ce qu'il y
a là-dedans, mais vous pouvez trouver notre interprétation détaillée du
contexte particulier qui a guidé le dépôt du projet 34. Notons que la source
du problème qui nous amène ici réside en grande partie par l'utilisation du
terme commun dans le jargon réglementaire «trop-perçu» qui a peut-être été
galvaudé un peu trop souvent. Je vous dirais qu'Hydro-Québec l'a plus justement
nommé «écart de rendement» dans ses communiqués, un écart par rapport à un
rendement qui est jugé raisonnable, habituellement dans les textes de loi en
réglementation d'un monopole d'État qui est ici au Québec fixé à 8,2 % sur
l'avoir propre.
Aussi, en faisant abstraction de la
politique, établissons tout de suite qu'il y a trois chapeaux à porter
lorsqu'on évalue un peu la portée du projet de loi. Il y a d'abord celui
d'actionnaire investisseur, comme gouvernement, comme Québécois, comme
actionnaire investisseur, Hydro-Québec, celui du consommateur, celui du citoyen
aussi qui veut atteindre des objectifs plus larges au niveau de la société.
Donc, le dépôt du projet de loi n° 34
s'appuie sur des prémisses fortes qui sont assez populaires pour en avoir parlé
durant l'été avec ma famille. Une garantie de bas tarifs, simplifier le
processus qui sert à les fixer, remise accélérée de 500 millions, un gel
ou des économies de près d'un milliard, évidemment c'est alléchant et puis
autour d'un barbecue, c'est plus difficile d'expliquer en détail toutes ces
complexités-là.
Toutefois, dossier tarifaire prospectif
est assez simple. Une des prémisses principales c'est de dire que c'est très
compliqué de fixer des tarifs. En fait, c'est important que les membres de la
commission ici comprennent qu'en réalité, les tarifs, théoriquement, c'est
6 milliards en approvisionnement plus 3 milliards en transport puis
3 milliards en distribution. Les chiffres varient un peu, mais grosso
modo, c'est ça. La dernière fois que j'ai regardé, c'était... le revenu requis
d'Hydro-Québec, la décision cette année, c'était 12,2 milliards plus
97 millions, là, additionnels.
• (11 h 40) •
Donc, le 12 milliards que je vous
présente dans le mémoire est assez réaliste. Là, on prend ce
12 milliards-là puis on le divise par les ventes anticipées. Donc, les
ventes anticipées, plus de l'ordre de 170 TWh, j'ai mis 200 dans le
mémoire pour simplifier les calculs, parce que je ne voulais pas complexifier.
Ça donnerait des tarifs de 0,06 $. Donc si on part avec 0,06 $, selon
la théorie, cette méthode-là, c'est la méthode qu'on appelle la méthode du coût
de service...
M. Audette (Sylvain M.) :
...là, on prend ce 12 milliards-là puis on le divise par les ventes
anticipées, donc les ventes anticipées, plus de l'ordre de
170 térawattheures, j'ai mis 200 dans le mémoire pour simplifier les
calculs, parce que je ne voulais pas qu'on... ça donnerait des tarifs de
0,06 $. Donc, si on part avec 0,06 $, selon la théorie, cette
méthode-là, c'est la méthode qu'on appelle la méthode du coût de service, que
vous allez voir à la section 2 du mémoire. C'est une méthode qui n'est pas
nécessaire de refaire à chaque année lorsque l'équation fonctionne bien,
c'est-à-dire le 12 milliards divisé par le 180 ou 200 au prospectif ou au
réel. Cependant, comme il est illustré dans le mémoire à la page 8, même
si les sommes des coûts en achat d'électricité en transport et en distribution
se concrétisent parfaitement à 12 milliards, mettons que c'est vraiment ça
qui arrive, si, en réalité, les ventes sont plus élevées à coût constant, bien,
vous allez avoir un tarif qui va avoir été fixé trop élevé. Parce que quand on
fait cette division-là, c'est comme si on a fixé 0,06 $, alors qu'on
aurait dû être en bas de 0,06 $. Qu'est-ce que ça fait? Ça fait un écart
de rendement par rapport au rendement jugé raisonnable, ça fait ce qu'on a
qualifié de trop-perçu qui devrait plus être... bien, c'est un écart de
rendement par rapport au rendement qu'on a normalement. Alternativement, si
c'est le contraire, donc s'il y a moins de ventes que prévu, pour une raison x,
bien là c'est le contraire, le tarif va avoir été fixé trop bas, et là il va
avoir ce qu'on va appeler, dans le jargon, le contraire d'un trop-perçu, un
manque à gagner ou un écart de rendement négatif.
Donc, il a d'ailleurs été fixé trop haut
pendant les... depuis que la régie existe, parce qu'au niveau de l'inflation,
il y a toujours eu des écarts de rendement positifs, pas toujours, là, mais en
majorité, il y a eu des écarts de rendement positifs. Donc, le tarif fixé à
l'inflation, dans le passé, la régie ou pas qui l'a fixé, ce n'est pas
important, c'est... bien, il y a eu quand même ces écarts de rendement positifs
là plus souvent que normal, disons, dans les autres juridictions.
Donc, je vais parler un peu plus... Dans
le moment, on parle du tarif plafonné à l'inflation, aussi, dans la
section 2. Donc, même si certains pourraient être d'accord avec les quatre
prémisses populaires que j'ai mentionnées tout à l'heure, qui sont très
populaires autour d'un barbecue cet été, mais qui sont difficiles à expliquer,
en fait, ces bonnes pratiques de gestion des monopoles publics devraient se
résumer dans ce que vous voyez à l'article 5 de la loi actuelle. Donc, on
regarde les lois à travers le monde, ce qu'on voit, on voit essentiellement
l'article 5 partout. Dans l'exercice de ses fonctions, la régie assure la
conciliation entre l'intérêt public — le citoyen — la
protection des consommateurs — ceux qui paient les
tarifs — et un traitement équitable des investisseurs, de
distributeurs ici, puis nous, par le fait même. Et il y a le principe d'équité
aussi qui est très fort à la fin. Donc, cet article 5 là est très
important lorsqu'on revoit un texte de projet de loi.
Donc, ça veut dire que, l'article 5,
quand on le met avec l'article 49, on voit qu'il faut, en fait, que,
l'actionnaire qui investit pour développer un service public ait un tarif, il y
ait un rendement raisonnable, il faut que ça résulte en des tarifs qui sont
justes et raisonnables. Ça veut dire qu'il faut qu'il y ait une équité entre
les catégories de clientèle. Ce sont plutôt ces prémisses décrites dans
l'article 5 de la loi qu'il faut s'assurer de respecter. La
simplification, c'est souhaitable, même possible, on en parle dans notre
mémoire, mais ça ne doit assurément pas être au coeur de la justification de la
loi... du projet de loi n° 34.
Donc, je suis d'accord avec Hydro-Québec
qui disait en fait que le projet de loi n° 34, il ne
le dirait pas directement, mais il disait hier, là, qu'en fait, c'est quand
même un mécanisme de réglementation incitative de type tarif plafond. Par
contre, il a été reconnu que d'imposer un MRI, mécanisme de règlement incitatif
de type tarif plafond, comme le projet de loi essaie de le faire, c'est de plus
en plus abandonné dans le monde, parce que ça cause énormément de problèmes.
Donc, ce projet de loi vit des changements majeurs qui sont risqués et surtout
par le type de méthodes de fixation des tarifs qui est imposé. Il y a le
potentiel de créer des chocs tarifaires, on va y revenir, et puis ça risque de
ne pas faciliter la transition énergétique, si on veut investir davantage dans
certains moments.
Donc, tarifs plafonnés, pas l'idéal. La
productivité à l'inflation, c'est comme si on dit : Bien, Hydro-Québec,
dans le passé, a été aussi bonne que l'inflation, mais on voit en réalité
qu'ils ont toujours eu des productivités supérieures à l'inflation. Donc, ça
aussi, c'est un problème que, je suis sûr, les groupes intervenant vont vous le
souligner.
Ensuite, une des autres motivations qu'on
parle dans notre... c'est la section de notre mémoire, c'est qu'on parle des
enjeux de la régie. Et ça, là-dessus, on est assez qu'il y a des choses à
faire, dont 93 journées, 86 dossiers, là, vous pouvez voir les
chiffres dans... Hier, on a eu des discussions sur les chiffres où je suis allé
les chercher dans le rapport annuel, là, la semaine dernière. Donc, à ce sujet-là,
nos conclusions générales sont claires. Réduire la durée des dossiers, oui.
Réduire le nombre de dossiers, oui. Réduire les coûts au passage, oui.
Permettre à la régie de tenir compte de préoccupations décrites du gouvernement
sans que la solution finale soit imposée, oui aussi. Aborder le rôle de
validation et vérification de la régie, non. Et politiser le processus de
fixation des tarifs, non. Donc, je pense que notre position à ce niveau-là,
oui, on va connaître... il y a des problèmes avec la régie, mais il y a
certaines choses qu'il ne faudrait pas passer outre lorsqu'on regarde le projet
de loi.
Dans la section quatre, ce que vous avez,
c'est que vous avez une synthèse des problèmes de fond du projet de la loi n° 34. Donc, on l'a dit, le projet 34, c'est
l'équivalent théorique d'un...
M. Audette (Sylvain M.) : ...à
ce niveau-là, oui, on va connaître... il y a des problèmes avec la régie, mais il
y a certaines choses qu'il ne faudrait pas passer outre lorsqu'on regarde le projet
de loi.
Dans la section quatre, ce que vous avez,
c'est que vous avez une synthèse des problèmes de fond du projet de la loi n° 34. Donc, on l'a dit, le projet 34, c'est l'équivalent
théorique d'un tarif de plafond global, c'est-à-dire qui inclut tous les coûts
sur cinq ans, basé sur l'inflation, qui, à notre avis, est un peu trop rigide,
tel que présenté. Donc, il y a un affaiblissement des institutions nécessaire
plutôt que de chercher à améliorer, il y a un manque de... il va y avoir une
absence de... La connaissance va être diluée un peu, des contrecoups
inévitables qui vont être liés à cette utilisation de l'inflation pour cinq
ans, et ça va indigner des gens, impression de politiser davantage la gestion
du secteur électrique, retirer le processus annuel du domaine public, davantage
de marge de manoeuvre pour Hydro-Québec. Bref, une recette qui risque de
tourner au désavantage de tous, et pas dans l'intérêt public.
Dans nos conclusions, vous avez une série
de conclusions. D'abord, la plupart des conclusions reviennent à l'idée de
l'article 5 et de l'article 49, qui dit qu'il faudrait s'assurer que le
rendement est jugé raisonnable au niveau d'Hydro-Québec. Est-ce que, s'il est à
l'inflation puis, demain matin, au lieu de faire un rendement de
700 millions, ils font 1,4 milliard de rendement, est-ce que vous
pensez que c'est raisonnable? Donc, il faudrait ajuster cet élément-là pour
dire, bien, il y aurait des éléments déclencheurs qui feraient en sorte qu'on
va déclencher ça si jamais on voit que ça devient déraisonnable. Donc, dans nos
conclusions, on écrit aussi : «Il est faux de prétendre qu'il y aura plus
d'écart de rendement — on avait entendu ça — il sera
simplement caché ou invisible pendant cinq ans avec le projet de loi n° 34, mais seuls les écarts négatifs risquent de
déclencher des mécanismes de réouverture de la part d'Hydro-Québec pour ses
actionnaires.»
Le gel des tarifs un an semble présumer
qu'il va y avoir des intervenants qui vont survenir après moi, qui vont
dire : Bien, je pense que ça va présumer des trop perçus. L'objectif
ultime, souhaitable de simplification, oui, c'est possible en modifiant un
petit peu le projet de loi. La tenue d'audiences publiques pour le distributeur
n'a pas à être obligatoire sur une base annuelle, dans la mesure où il y a une
expertise indépendante de la régie pour valider les coûts et les revenus
présentés au réel en fin d'année, on en a parlé hier un peu. Mais ça prendrait
un rapport, là, qui serait public, qui serait rendu public. La validation des
coûts et revenus réels en fin d'année pourrait justifier automatiquement un
ajustement des tarifs, sans égard à l'inflation et le projet de loi n° 34, en évitant ainsi de laisser ce jugement-là au
gouvernement. On parle... Je vous lance des chiffres, je vous dis : On
parle de 100 millions, 500 millions, il faudrait... si on veut y
aller en chiffres absolus, il faudrait que ça soit entre 100 millions et
500 millions. Est-ce que ça serait à 200 millions? Par exemple, le
rendement actuel d'Hydro-Québec sur l'avoir propre, il est de
300 millions. Donc, si c'était de 300 millions, ce serait
qu'Hydro-Québec, pendant une année, n'aurait rien sur l'avoir propre, ce serait
seulement la dette qu'il paierait. Donc, entre 100 millions et
500 millions, ça représente entre 1 % et 4 % du 12 milliards
que je vous ai parlé tout à l'heure. Peut-être que ce serait ça, un élément
déclencheur qu'on pourrait mettre dans la loi, et avoir une cause tarifaire qui
serait obligatoire après trois ans.
Donc, à ce moment-là, on pourrait quand
même regarder les impacts négatifs, notamment sur l'interfinancement. Dans le
mémoire, on parle qu'il y a... l'inflation est utilisée, mais pas à 100 %
pour le tarif L, donc les grands clients industriels. Ça risque de détériorer
l'interfinancement, on ne sait pas trop qui va payer. On parle aussi, dans le
mémoire, sur le fait qu'il y a des coûts qui vont être alloués ou des revenus
qui vont être redistribués. À quelle catégorie? Est-ce que ça va faire que
l'équation que je vous ai montrée, tout à l'heure, globale, quand je la regarde
par catégorie tarifaire...
Le Président (M. Lemay) : M.
Audette.
M. Audette (Sylvain M.) :
...c'est qui qui va avoir les 500 millions? Bien, c'est ça, une des
questions qu'on a à voir.
Le Président (M. Lemay) : M.
Audette, je sais qu'il vous restait juste un petit point à mentionner, mais je
vais procéder quand même avec... la période de 10 minutes étant terminée,
je vais procéder avec la période d'échange avec M. le ministre. M. le ministre,
vous pouvez y aller, puis si jamais M. Audette, il veut rajouter son
commentaire, il pourra le faire après votre question.
M. Julien : J'aimerais ça, sur
mon temps, permettre une minute de plus pour qu'il conclue.
Le Président (M. Lemay) :
Parfait. Allez-y, M. Audette.
M. Audette (Sylvain M.) :
Merci beaucoup. Donc, de manière plus spécifique, un peu ce que je voudrais
plus vous dire, c'est que, si on va vraiment dans l'étude du projet de loi de
manière constructive, qu'on a recommandé cinq recommandations et suggestions
spécifiques, qui sont à la fin.
Donc, la première, ce serait amender le
projet de loi n° 34 pour demander à Hydro-Québec
Distribution de déposer systématiquement à la régie les chiffres réels en fin
d'année, au plus tard le 1er janvier, et être validés... donc, hier, on a dit
qu'on le ferait, mais il faudrait que ça soit validé; amender le projet de loi
de déposer à la régie des chiffres prospectifs allégés au plus tard le 1er
décembre. Donc, on ne parle pas de cause tarifaire, ici, on pourrait juste
déposer des chiffres allégés, ils pourraient le faire même cette année, au 1er
décembre; et amender le projet de loi pour obliger Hydro-Québec à déposer
automatiquement un dossier tarifaire complet après trois ans, et non pas cinq
ans, comme le projet l'exige. Ça se peut qu'on reste sur le tarif plafond, là,
mais seulement cinq ans; et conserver l'esprit de la loi 48.1...
Le Président (M. Lemay) :
Merci.
M. Audette (Sylvain M.) :
...parce que je pense qu'on n'a pas besoin vraiment de l'éliminer si on
considère que c'est un tarif plafond indexé à l'inflation. Merci.
Le Président (M. Lemay) :
C'est bon. Alors, merci, M. Audette, pour votre exposé. M. le ministre, la
parole est à vous.
• (11 h 50) •
M. Julien : Oui. Oui, merci,
M. Audette, et grand plaisir de vous rencontrer aujourd'hui pour avoir ces
discussions-là. Vous avez dit plusieurs choses, je vais en ramener... je veux
connaître un peu votre point de vue. Alors, vous parlez que l'inflation n'est probablement
pas la bonne mesure. Bon, je réitère, là, puis...
Le Président (M. Lemay) :
...Audette, pour votre exposé. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Julien : Oui, merci, M.
Audette, et grand plaisir de vous rencontrer aujourd'hui pour avoir ces
discussions-là. Vous avez dit plusieurs choses. Je vais en ramener... Je veux
connaître un peu votre point de vue. Alors, vous parlez que l'inflation, elle
n'est probablement pas la bonne mesure. Bon, je réitère, là, puis je le réitère,
sur base historique, tarification, 15 ans, supérieure à l'inflation, un écart
qui s'est créé, écart supérieur à la somme des écarts de rendement observés,
là, avec le mécanisme d'écart de rendement. Alors, ça, c'est une chose. On
retourne 50 ans derrière, la même chose. Naturellement, si on prend du ««cherry
picking», juste les deux, trois dernières années, ça ne révèle pas ça, mais sur
une longue période, la tarification par cause tarifaire a été supérieure à
l'inflation. Le gel, en fin de compte, de la première année, là, qui est
proposé au p.l. n° 34, vise justement une correction
de ce que... Également, qu'on l'a réfléchi. On a regardé des écarts de
rendement, le mécanisme d'écart de rendement, qui disait : 2018,
182 millions, 2017, 90 millions, 2016, 37 millions, 2015,
77 millions, 2014, 160 millions. Ça, c'est les cinq dernières années.
Là, on vient dire : Nous, là, si on
faisait un gel tarifaire l'an prochain, là, qui représente 195 millions,
selon l'évaluation la plus probable, c'est supérieur, ce gel-là, en termes
d'effet tarifaire, à chacune des années qu'on a observées dans les cinq
dernières années. Donc, c'est pour dire : On voit à répétition un écart de
rendement, qui est basé, comme vous l'avez mentionné, sur un rendement attendu
de 8,2 %. On dit «on gèle», on vient clarifier ça, puis après ça, on
s'en va à l'inflation. Historiquement, on a facturé plus qu'à l'inflation. Ça
donne de la prévisibilité à la clientèle. Mais naturellement, on vient
dire : Dans 60 mois, là, on retourne en processus de cause tarifaire pour
valider si on ne s'est pas écartés, en réalité, d'une nouvelle réalité qui ne
serait pas similaire à celle historiquement. Mais on donne plus d'imputabilité
à Hydro-Québec, on donne de la prévisibilité aux citoyens.
Alors, j'aimerais comprendre, vous,
au-delà des éléments que vous avez mentionnés, la répercussion négative que
vous voyez, là, de manière tangible, qui pourrait se produire dans cette
période.
M. Audette (Sylvain M.) :
Les... Quand on regarde... Bon, quand on regarde la croissance des tarifs sur
10 ans... 50 ans, je pense, on en convient, c'est une période un peu longue,
là. Habituellement, on a tendance à utiliser 10 ans. Donc, on voit que, dans
cette période de 10 ans là, il y a eu souvent des trop-perçus, alors que la
hausse des tarifs était très proche de l'inflation dans ce 10 ans là. Elle ne
l'était pas exactement. Elle était très proche. Donc, ce que je dis, c'est
qu'il y a un risque qu'il est inutile de prendre. Si on constate, à un moment
donné... Et ce qu'on recommande ici, ce n'est pas de faire des causes
tarifaires à chaque année, évidemment. On dit de faire un suivi, de regarder
les coûts détaillés, regarder les questions d'interfinancement entre les tarifs
aussi et puis de regarder si, oui ou non, il y aurait lieu de revoir ce taux de
croissance là des tarifs à la hausse ou à la baisse.
L'idée, ici, c'est de protéger autant le
chapeau investisseur, gouvernement, moi-même, comme investisseur, en tant que
citoyen québécois, mais aussi les clients. Parce que moi, le jour où, pour
raisons x, il y a moins de ventes, il y a plus de ventes, les tarifs ne seront
pas corrects. Ils vont être trop bas ou trop élevés, et là je vais avoir moins
de rendement que je devrais m'attendre. Donc, c'est pour ça que ce qu'on
recommande, c'est de dire : Écoutez, c'est un tarif plafond. C'est plus
risqué. Ça a été abandonné partout dans le monde. O.K., on peut l'essayer.
Mais pourquoi pas, au lieu de faire une
cause tarifaire complète seulement après cinq ans, pourquoi pas le faire après
trois ans? Et puis à ce moment-là, on aurait des garde-fous. Et même, d'ici
trois ans, mettre un chiffre concret pour ne pas que ce soit vous, M. le
ministre, qui ait à dire : Bien, quand on commence à avoir un rendement
réel autour de 11,3 %, on devrait refaire une cause tarifaire. Et ou c'est
Hydro-Québec qui vous appelle, qui dit : Bien là, je pense qu'on
commence... quand on regarde nos chiffres réels, on commence à être un petit
peu trop loin d'un rendement raisonnable. Donc, ce n'est plus ça, notre
recommandation. On ne dit pas qu'on est contre l'utilisation d'un tarif à
l'inflation. On dit : Il faut mettre des garde-fous.
M. Julien : Je vais faire du
pouce sur ce que vous mentionnez, rendement raisonnable. On l'a regardé dans
cette perspective-là également, là. Bon, alors, il a été fixé à 8,2 %. On
a regardé des comparables, des 9,5 %, des 9,8 %. Le 8,2 %
n'était pas très, très audacieux dans la base de comparaison. Mais ce serait
quoi, pour vous, un rendement raisonnable du distributeur?
M. Audette (Sylvain M.) :
Bien, écoutez, vous savez que, lorsqu'on fixe un rendement raisonnable chez des
distributeurs, en général, il faut... moi-même avait été... avoir été impliqué
dans plusieurs de ces dossiers-là, c'est très long, c'est des longues clauses
tarifaires. Il y a beaucoup d'experts qui viennent et puis qui plaident, par
exemple. Après ça, on regarde le taux de risque, on regarde les taux sans
risque, on ajoute un bêta en fonction du risque puis on fixe un taux. Énergir,
au Québec, à...
M. Audette (Sylvain M.) :
...en général pour moi-même avoir été impliqué dans plusieurs de ces
dossiers-là, c'est très long, c'est des longues causes tarifaires, il y a beaucoup
d'experts qui viennent et puis qui plaident. Par exemple, après ça, on regarde
le taux de risque, on regarde les taux sans risque, on ajoute un bêta en
fonction du risque puis on fixe un taux.
Énergir au Québec à neuf virgule quelque
pour cent, Hydro-Québec à 8,2 %, il y a un écart de un pour cent parce
qu'on considère que Hydro a un peu moins de risques que Énernir. Donc, le
8,2 % est le résultat déjà d'un dossier tarifaire il y a quelques années
et je pense que ce chiffre-là est valable.
M. Julien : Donc, pour vous,
le 8,2 % est valable. Pourtant, ici, j'ai une annexe, là, de comparaison,
là, mission hydro 11,8 %, une autre ici, NStar Electric Co. exist... J'en
ai 17 comme ça. Dans le bas de la fourchette, c'est 8,2 %. Donc, on a fait
une cause tarifaire pour fixer un rendement qui était en fin de compte, selon
les analyses savantes de risques, etc., puis Hydro-Québec, il se trouve à être
en bas de la fourchette énergie. Nous autres, on avait 8,9 %. Ici, vous me
dites, c'est plus neuf point quelque. Mais alors, ça serait de refaire une
analyse qui arriverait à d'autres conclusions? Ou bien, pour vous, le
8,2 %, c'est le rendement raisonnable à tout égard?
M. Audette (Sylvain M.) :
Lorsqu'on assiste à des dossiers sur la fixation des taux de rendement à
travers le Canada ou aux États-Unis, on voit qu'un des gros débats, c'est
l'embauche des experts. Donc, par exemple, les experts d'Hydro-Québec vont toujours
embaucher des experts qui sont prodistributeurs, qui vont avoir tendance à
trouver des comparables comme la liste de comparables que vous avez, qui sont
favorables et qui ne sont pas nécessairement... et vous allez avoir de l'autre
côté, des groupes d'intervenants qui vont embaucher leurs propres experts ou la
régie puis là, les deux, je vous dirais que le groupe de l'autre côté, là, je
pourrais vous fournir des chiffres avec le même comparable qui dirait :
Bien, Hydro-Québec devrait descendre, ne devrait pas être à 8,2 %.
D'ailleurs, le dossier qui a été déposé à
la régie il y a quelques années, vous pouvez voir un peu le raisonnement que la
régie a eu pour dire : Écoutez, Hydro-Québec, ce n'est pas raisonnable ce
qu'ils demandent, les intervenants, ce n'est pas raisonnable, on le fixe à
8,2 % puis ils trouvent avec le milieu des vrais comparables réalistes et
valides.
M. Julien : Je pense qu'il y a
un de mes collègues qui a une question.
Le Président (M. Lemay) :
Juste avant ça, M. le ministre, c'est une question de l'opposition officielle
pour savoir si votre document des 17, vous seriez disposé à le déposer pour les
membres de la commission?
M. Julien : On va regarder ça
puis on verra par la suite.
Le Président (M. Lemay) :
Parfait. Vous me donnerez une réponse tout à l'heure. M. le député de Bourget,
la parole est à vous.
M. Campeau : Merci, M. le
Président. On veut aussi simplifier le processus par rapport à ça puis ce que
vous nous décrivez, c'est complexe. La façon de le regarder un peu partout,
j'imagine que quand un citoyen regarde ça, là, il se demande : D'où ça
vient, à quoi sert la régie? Ce n'est pas clair, ça. Puis vous le décrivez bien,
là, mais en même temps, c'est un processus complexe pour la plupart des gens.
Moi, c'est drôle, mais bien avant la venue
de la CAQ, je me disais toujours : Pourquoi faire une analyse aussi
compliquée pour se ramasser avec le taux d'inflation de toute façon? Puis je
m'étais toujours demandé : Mais est-ce qu'on ne s'amuse pas un peu à faire
des tas de rencontres pour en revenir au même? Je sais qu'il y a des bémols à
ça, là, mais en même temps, autour d'un barbecue, comme vous mentionniez, c'est
pas mal plus populaire comme commentaire, ça, ce genre de chose là.
Vous avez mentionné aussi le mot
«trop-perçu». Moi aussi, ça m'a toujours mis mal à l'aise parce qu'un
trop-perçu, ça sous-entend un peu comme si on a voulu en prendre et ce n'est
pas le cas. Puis deuxièmement, comment faire pour ne pas en avoir? Ne pas être
en haut, ne pas être en bas? Dans tous les budgets que j'ai faits dans
l'industrie, je n'ai jamais été sur le piton.
Mais, j'aimerais vous demander une
première question : Voyez-vous un avantage au niveau de la prévisibilité?
Exemple, je suis un investisseur, puis ça, j'ai vécu ça assez souvent, des gens
qui nous arrivent avec un projet puis qui nous disent : Je veux venir
investir ici. Ça va être quoi mes coûts? Moi, ce que je connais, ce sont les
pâtes et papiers. À ce moment-là, ils vont dire que le bois va nous coûter
combien? On a-tu de la prévisibilité là-dedans? Si on va faire... on utilise
beaucoup d'énergie, on va au moins pour une période de cinq ans savoir ce qui
arrive avec les tarifs d'électricité. Il me semble... ne croyez-vous pas qu'il
y a un énorme avantage à avoir cette prévisibilité-là pour le développement
économique?
Le Président (M. Lemay) : M.
Audette.
• (12 heures) •
M. Audette (Sylvain M.) : Les
mécanismes de réglementation incitative, qu'ils soient comme celui de la loi n° 34, le tarif plafond ou celui qui avait été décidé par
la régie de revenu plafond, permettent d'assurer une certaine prévisibilité sur
une longue période. Donc, on fixe soit les revenus, les coûts, là, le
12 milliards, on dit : Regarde, ton 12 milliards, là, il va
falloir que tu vives avec comme ça. Et sinon, le tarif.
Donc, c'est deux méthodes différentes. Ce
que je vous dis, c'est que la méthode du tarif a été reconnue comme étant plus
risquée, surtout du côté de l'investisseur...
12 h (version non révisée)
M. Audette (Sylvain M.) :
revenus plafond permettent d'assurer une certaine prévisibilité sur une longue
période. Donc, on fixe soit les revenus, les coûts, là, le 12 milliards,
on dit : Regarde, ton 12 milliards, là, il va falloir que tu vives
avec comme ça, et sinon le tarif.
Donc, c'est deux méthodes différentes. Ce
que je vous dis, c'est que la méthode du tarif a été reconnue comme étant plus
risquée, surtout du côté de l'investisseur ou du payeur. Parce que là, c'est
comme si tu fixes le tarif, bien, ça se peut, pour une raison x, quelque chose
qui est hors de notre contrôle, ça n'arrive pas. Donc, la prévisibilité, c'est quelque
chose qui était déjà là avec l'ancien régime. C'est quelque chose... Ce qui est
plus important, en réglementation, c'est s'assurer que les tarifs sont justes
et raisonnables pour chacun des clients. Vous étiez dans les pâtes et papiers,
vous étiez probablement au tarif L. Donc, le tarif L, est-ce qu'il est juste et
raisonnable à 0,035 $ et que le résidentiel, eux, ils paient 0,08 $,
on accepte un peu d'interfinancement, parfait. Et quand qu'on fait une cause
tarifaire complète, c'est ça qu'on regarde. On regarde si... Puis, dans le
projet de loi n° 34, vous voyez la complexité des tarifs. Il va avoir
quand même un élément de complexité qui va subsister en ce moment. Quand que
les gens ont dit : Ah! Il y a eu... Comment ils vont me rembourser ça?
On... Hier, on a dit que c'était pour être sur la consommation... bien, il y a
une partie fixe dans les tarifs. Donc, est-ce qu'on va le donner, vraiment, au
résidentiel, de la bonne façon? Est-ce que le fait qu'ils sont interfinancés,
on va tenir compte de ça?
C'est des choses qu'il faut faire de temps
en temps. Trois ans, ce n'est pas déraisonnable de le faire. Donc, je pense que
c'est un monopole public, l'objectif, c'est de contrôler le prix, s'assurer
qu'il y a un rendement raisonnable. Est-ce que, rendu à 11 %, ça commence
à être déraisonnable? Ça peut être la fourchette que l'expert d'Hydro-Québec a
donnée. Il dit : Bien, si ça dépasse le 11 %, là, il va falloir qu'on
déclenche automatiquement une cause tarifaire. Mais surtout, il faut aussi que
la résultante soit des tarifs justes et raisonnables. Les intervenants après
moi, je suis sûr qu'ils vont venir vous en parler davantage, ils vont
dire : Écoutez, il y a un risque d'injustice et de déraisonnabilité dans
les tarifs sont ont utilise l'inflation, et ils vont vous.... ils vont faire
les analyses, puis vous pourrez, bien, regarder les coûts, ils n'augmentent pas
de telle façon, des choses comme ça. Donc, c'est plus juste et raisonnable
que....
Le Président (M. Lemay) : M.
Audette, M. le ministre avait une nouvelle question.
M. Julien : Oui mais,
j'entends ce que vous dites, il y a deux choses, là, qui m'interpellent dans ce
que vous mentionnez, là, où je veux être certain de bien comprendre. Vous
dites, l'ancienne façon de faire était déjà prévisible. Mais c'est-à-dire qu'il
y a des années que c'est trois fois l'inflation puis il y a des années que ce
n'est presque rien. Tandis qu'ici, là, quand vous dites, là... j'essaie de
comprendre l'effet que vos mentionnez, là, l'effet pervers... vous n'avez pas
dit ça... le plafond, le plafond, là, le tarif, ici, vous l'avez.... où ce
qu'il est, le plafond? À tarif plafond.
Une voix
: ...
M. Julien : Alors,
expliquez-moi, là, la notion de tarif plafond pour que je la comprenne bien.
Le Président (M. Lemay) : M.
Audette, en vous rappelant qu'il vous reste 1 minutes.
M. Audette (Sylvain M.) :
C'est exactement le projet de loi que vous avez déposé. Ça, c'est un tarif
plafond.
M. Julien : Alors qu'est-ce
que... alors, quand vous dites plafond, c'est un tarif fixe, pour moi. Alors,
plafond...
M. Audette (Sylvain M.) : Il
est... Non, un tarif plafond, c'est un tarif qui est plafonné en fonction d'un
indicateur. Ici, vous avez utilisé l'inflation après un gel d'un an.
M. Julien : C'est-à-dire que
pour moi, plafond, je l'interpréterais comme : ça peut aller jusqu'à.
Mais, nous autres, c'est un tarif fixe. C'est à l'inflation. Ce n'est pas
peut-être... Non, c'est l'inflation. Ce n'est pas un plafond, c'est un tarif
fixe.
M. Audette (Sylvain M.) : Je
ne vais pas m'ostiner au niveau des termes, mais, dans les «textbooks», on
appelle ça un tarif plafond, mais c'est exactement ce que...
M. Julien : Mais c'est quoi un
tarif plancher? C'est le contraire du plafond.
M. Audette (Sylvain M.) :
Oui, c'est... Bien, là....
M. Julien : Mais, ici, c'est
un tarif fixe, c'est ni plafond ni plancher, c'est fixe.
M. Audette (Sylvain M.) : Ah!
Voyez, c'est... ça serait une option. C'est-à-dire, vous pourriez dire :
O.K., on va avoir un tarif plancher puis un tarif plafond.
M. Julien : Non, c'est un
tarif fixe, ce n'est pas : ça peut aller jusqu'à ou ça peut aller jusqu'à.
C'est ça.
M. Audette (Sylvain M.) : Un
tarif plafond, c'est un tarif qui est plafonné en fonction d'un indicateur.
M. Julien : O.K. Un tarif
plafonné.
M. Audette (Sylvain M.) :
Ici, c'est l'inflation.
M. Julien : O.K. Merci.
Le Président (M. Lemay) :
Merci pour cet échange. Donc, sur ce, je passe la parole au député de
l'opposition officielle, le député de Laval-des-Rapides. La parole est à vous.
M. Polo : Merci. Merci
beaucoup, M. le Président. En effet, vous avez mentionné... je vais prendre la
même phrase sur laquelle a accroché le ministre... vous avez mentionné la
prévisibilité, c'est quelque chose qui était déjà là avec l'ancien régime.
Vous... je vous cite, là. Expliquez-vous de quelle façon l'ancien régime
amenait quand même ou utilisait quand même un aspect de prévisibilité? Parce
que l'argument du ministre, à travers ce projet de loi là, c'est que le projet
de loi n° 34, nécessairement, est basé sur une prévisibilité, de coller ça
à l'inflation sur une base annuelle.
M. Audette (Sylvain M.) :
Bon, les soubresauts tarifaires qu'il y a eu de manière exceptionnelle, on sait
la raison, c'est en raison des appels d'offres éoliens qu'il y a eu, qui fait
que les coûts d'approvisionnement, le premier 6 milliards, que je vous
ai dit, le six plus trois plus trois, là, bien, c'est celui-là qui a explosé en
raison... Bon, je pense que c'est fini, ça, je pense que la CAQ... pas me
prononcer là-dessus, mais je pense que la CAQ a dit : Bien, on va remettre
ça en bémol pour le moment. Donc, il n'y a plus ce risque-là de créer cette
pression à la hausse là. Si on enlève cet élément-là, bien, on était toujours à
l'inflation ou sous l'inflation, quand on regardait l'historique 10 ans. Donc,
le processus actuel permettait de s'assurer...
M. Audette (Sylvain M.) :
...la CAQ est... Je ne veux pas me prononcer là-dessus, mais je pense que la
CAQ a dit : Bien, on va mettre ça en bémol pour le moment. Donc, il n'y a
plus ce risque-là de créer cette pression à la hausse là. Si on enlève cet
élément-là, bien, on était toujours à l'inflation ou sous l'inflation quand on
regardait l'historique 10 ans. Donc, le processus actuel permettait de
s'assurer que les tarifs étaient justes et raisonnables, que le distributeur
avait un rendement raisonnable et donc qu'ils étaient relativement prévisibles.
Sans être complètement stables à 100 %, sans être un tarif plafond,
c'étaient des revenus qui étaient plafonnés en fonction de discussions qu'il y
avait sur une base annuelle qui ne sont pas nécessaires sur une base annuelle,
je le répète.
Le Président (M. Lemay) : M.
le député de Laval-des-Rapides.
M. Polo : Merci. Vous avez
également parlé du risque d'appliquer le modèle présenté, là, à travers le
projet de loi n° 34. Pouvez-vous élaborer sur quels
sont les risques associés à l'application du modèle du projet de loi n° 34?
M. Audette (Sylvain M.) : Un
risque que les tarifs fixés ou plafonnés à l'inflation soient trop bas ou trop
élévés, en tout cas deux choses : c'est que les clients vont se trouver à
payer un tarif qui est trop bas parce que l'actionnaire a besoin de plus de
revenus, et puis à ce moment-là ça serait un problème pour l'actionnaire; ou le
contraire. Donc, le risque est autant pour l'investisseur que pour les clients.
Et comment on fait augmenter les tarifs? Bien, on investit davantage, on a un
rendement plus élevé sur une plus grande base de tarification. S'il n'y a pas
de ventes qui suivent puis qu'on fait de l'investissement, ça augmente les
tarifs. Donc, ce risque-là, moi, ici... Comprenez-moi bien, je ne veux pas dire
qu'il ne faut pas aller de l'avant avec le projet de loi n° 34,
ce n'est pas du tout ce que je recommande, je dis : Ce projet de loi n° 34 là, c'est un tarif plafond. C'est une solution qui a
déjà été essayée ailleurs. Pourquoi ne pas l'essayer au Québec? Mai
mettons-nous des balises pour s'assurer qu'on va rester... on va respecter
l'esprit de l'article 5 de la loi, qui dit qu'en bout de ligne il ne faudrait
pas que ça dépasse, mettons, 11 % de rendement ou 10 %, et dépolicer
ce débat-là pour dire : Bien, voici, dans ce temps-là ça va être
automatique.
M. Polo : Parfait. Merci. Vous
dites que ça a déjà été essayé ailleurs. Pourquoi ne pas l'essayer au Québec?
Où est-ce que... Pouvez-vous identifier d'autres juridictions où ça a été
essayé et peut-être élaborer sur l'applicabilité de ce processus-là?
M. Audette (Sylvain M.) :
Oui, c'est... Bon. En ce moment, c'est appliqué en Alberta, notamment. Ce type
de tarif plafond là a été essayé en premier... La réglementation, c'est né en
Grande-Bretagne dans les années 50, là, et puis ils ont commencé à dire :
Bien là, il y a du monde... il y a des monopoles qui abusent, puis on veut
avoir le service public. Il faut se rappeler que c'est un service public, tout
le monde paie indirectement cet élément-là. Donc, c'est là que ça a commencé.
Puis, à un moment donné, ils ont eu le
même débat qu'on a ici dans les années 60. Ils ont commencé à dire :
Écoutez, ça n'a pas de bon sens, là, ça fait ça, il y a des causes tarifaires.
Ce n'était même pas à chaque année, puis là : Aux trois ans, ça n'a pas de
bon sens. Ça fait qu'ils ont dit : Il faut trouver une solution qui va
alléger le processus réglementaire. Le premier réflexe qu'ils ont eu, c'est le
réflexe de la loi n° 34 qu'on a ici, c'est de
dire : On va plafonner les tarifs, parce que politiquement, c'est bien, ça
se vend bien.
Mais là, à l'usage, ils se sont rendu
compte que ça peut créer un incitatif pas recommandable pour un service public,
parce qu'on se rappelle que l'idée d'un service public, c'est d'offrir le
service public lorsqu'un client le demande, favoriser l'investissement; en
échange, on garantit un certain rendement à l'investisseur. 8,2 %, c'est
quand même bien — moi, je ne suis pas capable d'avoir
ça — et c'est pour ça que ça attire les capitaux, puis c'est ça, le
principe. Mais là, le tarif plafond, ils n'ont pas aimé ça, ça fait que là ils
ont inventé une autre technique qui est plus complexe, mais qui permet
davantage de flexibilité et d'ajustements, qui était le revenu plafond, mais
ils ont quand même utilisé une technique qui a fait un allégement réglementaire,
qui était dans la loi avant, mais qui a été retirée avec le projet de loi ici.
Le Président (M. Lemay) : M.
le député.
M. Polo : Vous parlez de
balises; vous faites référence à certaines balises, là, qu'o pourrait peut-être
appliquer, ou ajouter, ou amender... amener sous forme d'amendement au niveau
du projet de loi. Selon vous, quelle lecture vous faites de l'impact du décret
de préoccupations du gouvernement face à l'indépendance de la Régie de
l'énergie?
M. Audette (Sylvain M.) : Je
vais vous demander de préciser la question, le...
M. Polo : C'est que, si
Hydro-Québec, à l'intérieur d'une période...
M. Audette (Sylvain M.) : Ah!
O.K.
M. Polo : Vous avez compris,
là.
M. Audette (Sylvain M.) :
N'importe quel décret de préoccupations, pas un spécifiquement?
M. Polo : Parfait. Oui.
• (12 h 10) •
M. Audette (Sylvain M.) :
O.K. Un décret de préoccupations, bien, c'est écrit dans l'article 5 aussi «en
tenant compte des intérêts...» et tout ça. Bien, évidemment, c'est très bien,
un décret de préoccupations, ça dirige le débat. Mais, en même temps, il y a un
organisme externe qui regarde et dit : Bien, O.K., on prend le décret de
préoccupations, mais il ne faut pas que ce soit rédigé de manière rigide pour
qu'on balance toutes les bonnes pratiques ou les saines pratiques en
réglementation-tarification. Donc, un décret de... je pense que ça en prend,
des décrets de préoccupations, je pense que le gouvernement devrait en faire
davantage et je pense aussi que la régie devrait les écouter davantage. Bon.
Est-ce que le projet de loi peut s'assurer de ça? J'espère et je vous...
M. Audette (Sylvain M.) :
...on balance toutes les bonnes pratiques, ou les saines pratiques, en réglementation,
tarification. Donc, je pense que ça en prend, des décrets de préoccupation, je
pense que le gouvernement devrait en faire davantage et je pense aussi que la
régie devrait les écouter davantage.
Bon, est-ce que le projet de loi peut
s'assurer de ça? J'espère et je vous répète, il y a des problèmes à la régie,
là. Mais il ne faut pas... il y en a qui utilisaient le terme «jeter l'eau avec
le... l'eau avec le...
Des voix
: Le bébé avec
l'eau du bain.
M. Audette (Sylvain M.) :
...le bébé du bain». Moi, j'ai appelé ça «tuer des moustiques qui achalent un
peu Hydro-Québec avec un bazooka». Non, je pense qu'on peut avoir d'autres
techniques.
Le Président (M. Lemay) : M.
le député.
M. Polo : M. Audette, vous...
une des lectures qu'on fait au niveau de la problématique des trop-perçus au
cours des dernières années, c'est que la problématique a été créée elle-même
par Hydro-Québec, par la surévaluation de la croissance de ses coûts. Est-ce
que vous faites la même lecture?
M. Audette (Sylvain M.) :
Non, je n'irais pas jusque là. Je dirais qu'Hydro-Québec se présente à chaque
année et déposait ses coûts. En coûts de service, c'est le problème du coût de
service, c'est qu'on... les distributeurs ont tendance à se présenter là en
surestimant leurs coûts puis en sous-estimant leurs ventes, pour essayer que la
résultante de la division que je vous ai expliquée tantôt soit la plus élevée
possible. Puis là, ils savent très bien que quand ils se présentent là, ce
n'est pas ça que la régie va décider. Ça fait que là, il y a ce jeu-là, qui
fait que c'est pour ça qu'on avait abandonné ces méthodes de coûts de service
là puis de faire une méthode de service à chaque année, ça n'a pas de bon sens,
là, tu sais, on s'entend. Mais c'est ça qu'il faut regarder à ce moment-là.
M. Polo : J'ai une question
pour vous très précise. Est-ce que vous croyez que, comme expert en réglementation,
que la façon dont s'y prend le gouvernement pourrait entacher sa réputation
auprès des marchés internationaux, notamment New York, et que certains
opposants se servent de cela pour taxer le gouvernement d'ingérence dans la
société d'État?
M. Audette (Sylvain M.) : Ma
réponse est claire : non. Je pense que c'est un distributeur qui a un
droit exclusif dans un territoire donné au Québec, en Ontario. Je veux dire,
les tarifs sont pour le territoire du Québec. Bon, est-ce que la loi de la
concurrence... bien là, ça crée des tarifs trop bas puis quelqu'un pourrait
s'en aller... Non, je pense... difficilement, disons. Ça serait vraiment par la
bande, mais légalement, je vois mal.
Le Président (M. Lemay) : M.
le député.
M. Polo : Dans ce cas-là,
comment vous expliquez le fait que si la société d'État, à l'intérieur de la
période de cinq ans, pour un événement exceptionnel ou autre, doit passer par
le gouvernement pour justifier une demande soit de hausse ou de rehaussement,
là, du tarif? Comment vous interprétez ça, le fait que le gouvernement se
place... que la société d'État doit demander, disons, permission de revenir
voir le gouvernement pour lui demander permission?
M. Audette (Sylvain M.) :
C'est le distributeur, hein, puis je pense, le projet de loi ne touche pas au
transporteur. Hier, il y a eu des débats, bon, la FERC, elle se mêle plus du
dossier de transporteur que de distributeur. Le distributeur, il s'en va à la
régie, il dit : Écoute, voici mes coûts d'approvisionnement, 6 milliards.
Voici la facture que je refile à... HQT me refile, 3 milliards puis le
3 milliards qui reste, c'est avec ça qu'on travaille. Ça fait que le tarif
qui sort de là, mettons qu'il y a des coûts de FERC... Non, ça, je ne vois pas
pourquoi ça pourrait affecter. À ce moment-là, le bloc patrimonial... c'est ce
qui se passe en ce moment. On a fixé, on n'a pas laissé le marché libre. Mais
c'est peut-être plus ça...
Bien, écoutez, si vous voulez complètement
déréglementer le marché, parce qu'on trouve que là, Hydro-Québec a une position
de force, tout ça, puis il utilise sa division non réglementée par la régie
pour... Ça, on l'a vu qu'il y a eu des accusations là-dessus, mais là, on est
ici pour fixer un tarif chez le distributeur. Je voix difficilement pourquoi ça
créé un problème.
M. Polo : Et vous avez parlé, peut-être
que la période de cinq ans était peut-être un peu trop longue. Vous êtes la
deuxième personne à l'évoquer ici. Hier soir, le Conseil du patronat a également
fait mention de cela. Peut-être élaborer sur, justement, pourquoi, selon vous,
elle serait trop longue... d'Hydro-Québec, de retourner auprès de la régie et peut-être
voir une période de trois ans.
Le Président (M. Lemay) : M.
Audette, en vous rappelant qu'il reste environ 40 secondes.
M. Audette (Sylvain M.) :
Bien, je ne sais pas... Vous m'avez coupé le sifflet, comme on dit. Cinq ans,
c'est que le risque de dérapage est plus élevé, plus la période est longue.
Donc, si on fixe pour trois ans pour essayer... pour l'essayer puis s'assurer
que ça fonctionne après trois ans, ça serait quand même quelque chose
d'acceptable pour l'ensemble puis on l'essaie, on regarde ce que ça donne.
Surtout, avec le trois ans, c'est de s'assurer qu'il y a un mécanisme de
déraillement, qu'on appelle dans le jargon, qui nous dit : Bien, si jamais
ça va trop haut, le rendement qu'Hydro-Québec donne, ou s'il est trop bas,
automatiquement on arrête après un an ou deux ans.
Le Président (M. Lemay) : Merci
beaucoup. Ceci complète ce bloc d'échange avec l'opposition officielle. Je cède
maintenant la parole à la députée de Mercier.
Mme Ghazal : Merci. Merci
beaucoup. J'ai 2 min 45 s, donc je vais aller rapidement. Merci, parce que vous
avez réussi à simplifier quelque chose de complexe, c'est vrai. Ça, c'est
une...
M. Audette (Sylvain M.) :
...qu'Hydro-Québec donne ou qui est trop bas, automatiquement on arrête après
un an ou deux ans.
Le Président (M. Lemay) :
Merci beaucoup. Ceci complète ce bloc d'échange avec l'opposition officielle. Je
cède maintenant la parole à la députée de Mercier.
Mme Ghazal : Merci. Merci
beaucoup. J'ai 2 min 45 s, donc je vais aller rapidement. Merci parce
que vous avez réussi à simplifier quelque chose de complexe. C'est vrai, ça,
c'est une meilleure simplification que le projet de loi parce que, dans le fond...
et vous reconnaissez, dans votre mémoire, que c'est légitime de vouloir
simplifier la vie, si on veut, à Hydro-Québec, et vous amenez aussi des suggestions,
mais que de jeter le bébé avec l'eau du bain, comme on a dit tantôt, ce n'est peut-être
pas la solution parce que l'objectif le plus important, c'est que oui Hydro-Québec
ait des rendements raisonnables, mais que les clients aussi paient le juste
prix pour ce bien commun.
Et j'aurais aimé ça vous parler plus du
risque de politiser le processus, mais je vais aller sur un aspect qui n'a pas
encore été abordé, toute la question de la transition énergétique. Vous dites,
dans votre mémoire, que le projet de loi n° 34 allait à l'encontre de
cette transition, et on sait qu'actuellement le gouvernement est en train de
faire des consultations pour l'électrification justement. Donc, je voulais vous
entendre plus là-dessus.
M. Audette (Sylvain M.) :
Je ne sais pas si on dit exactement qu'on va à l'encontre d'une transition, on
dit que ça risque de ralentir certaines décisions des'Hydro-Québec. Donc,
combien ça coûte installer des bornes de recharge, par exemple, quelque chose
de très, très... mais ça, c'est des coûts. Donc, s'il y a des clients, eux
autres, ils ont fait des analyses puis ils ont regardé s'il va y avoir des
revenus. Mais s'ils mettent plein de bornes de recharge, mais il n'y a pas de
revenus, qu'est-ce qui arrive? Moi, comme actionnaire, je ne serai pas content.
Aïe! je n'aurai pas les revenus, puis les tarifs vont être fixés, donc je vais
perdre. Je ne ferai pas 8,2, je vais faire 7. Je ne sais pas ce que je vais
faire. Donc, vous voyez, ça, on l'essaie, on y va puis, si jamais ça dérape,
bien, on revient. Ou le contraire, on en installe, c'est plus qu'on pensait.
Aïe! écoute, ça, ça part, ça après deux, trois ans, il y a plein de revenus qui
arrivent. Bien, ça aussi, ça pourrait être un élément qui fait en sorte que ça
peut détériorer tout le processus d'interfinancement entre les catégories de
clients. Ces revenus-là vont aller où, des bornes de recharge? Dans la
catégorie des clients résidentiels, les clients commerciaux. Qui va utiliser
ces bornes de recharge là? Ce débat-là doit avoir lieu quand même.
Mme Ghazal : Puis là, en
ce moment, moi, ce que je comprends, c'est que, dans le projet de loi, c'est
qu'après cinq ans, si les clients sont perdants, bien là, c'est là que ça va se
passer. Après cinq, ça va prendre cinq ans. Mais, par exemple, si
Hydro-Québec — je vais l'amener comme ça au lieu de dire positif ou
négatif — si Hydro-Québec ne fait pas assez d'argent, j'avais vu,
dans une des recommandations où vous dites qu'il va y avoir un mécanisme pour
qu'ils puissent... un mécanisme... déclencher un mécanisme de réouverture de la
part d'Hydro-Québec pour ses actionnaires, et ça, ça ne se fera pas après cinq
ans si je comprends bien.
M. Audette (Sylvain M.) :
Le problème qu'il y a dans ce projet de loi, c'est que c'est un mécanisme qui
est seulement si Hydro-Québec qui prend la décision d'écrire un rapport puis de
l'envoyer au ministre. Tu sais ce que je veux dire, si Hydro-Québec voit que ça
va bien, son affaire, puis que les revenus sont au rendez-vous, il ne va pas
faire le rapport. Le problème, c'est qu'après cinq ans, si on veut voir les
chiffres, on veut voir qu'est-ce qui se passe vraiment, bien, c'est que, là, il
faudrait avoir un autre mécanisme qui ferait en sorte qu'on pourrait regarder
cet élément-là. Et c'est là le risque politique, je ne sais pas qui va être au
pouvoir dans cinq ans, mais...
Le Président (M. Lemay) :
Merci beaucoup, M. Audet, c'est tout le temps qu'on avait avec la deuxième
opposition. Je cède maintenant la parole au député de Jonquière.
M. Gaudreault : Vous
finissez sur une belle question, mais on n'embarquera pas là-dedans. Moi, je
voudrais plus vous entendre sur... davantage sur votre évaluation, sur les 10
dernières années, quant à l'évolution des tarifs versus la courbe de l'inflation.
Donc, est-ce que, si on recule il y a 10 ans... on sait que le monde de
l'énergie change très rapidement et très fortement surtout présentement. Mais,
sur 10 ans, si on regarde la courbe de l'inflation versus la courbe des
tarifs par rapport à l'ensemble des clients, par rapport à l'ensemble des
consommateurs industriels, résidentiels, etc.
M. Audette (Sylvain M.) :
Bien, on l'a dit, sauf quelques années exceptionnelles, on a toujours respecté
l'inflation légèrement en bas, ce qui a occasionné des trop-perçus. Les années
exceptionnelles ont été causées par des décisions politiques, c'est-à-dire
qu'il y a eu... appel d'offres, souvent s'il y a de l'investissement, qui se
font. Donc, je pense que le processus actuel a quand même fait un travail qui était
raisonnable, puis, quand on regarde les résultats, on voit que les tarifs
bougent selon l'inflation. C'est sûr que c'est difficile...
M. Gaudreault : Est plus
bas, est plus bas que l'inflation, c'est ce que vous avez dit.
M. Audette (Sylvain M.) :
Pardon?
M. Gaudreault : Depuis
les 10 dernières années, toujours un peu plus bas que l'inflation.
M. Audette (Sylvain M.) :
Les tarifs?
M. Gaudreault : Oui. Les
10 dernières années, oui, parce que lorsque... bon, c'est sûr que, la complexité,
c'est, là, si vous enlevez l'approvisionnement, donc si on regarde juste la
distribution puis le transport, ça, ça a été plus pas que l'inflation. Donc, le
6 milliards a été plus bas que l'inflation et l'autre 6 milliards,
l'approvisionnement a été plus haut que l'inflation à cause des décisions
gouvernementales. Pourquoi ces deux éléments-là ont été plus bas que
l'inflation? Parce qu'ils ont réussi à faire de la productivité et de
l'efficience, et c'est ce qui a créé les trop-perçus.
M. Gaudreault : Donc, si
on avait été collés à l'inflation, ça aurait été plus élevé, les tarifs
auraient été plus élevés.
M. Audette (Sylvain M.) :
Oui.
• (12 h 20) •
M. Gaudreault : Et est-ce
que vous admettez que le projet de loi n° 34 retire, au fond, le processus
de remboursement des trop-perçus en étant...
M. Audette (Sylvain M.) : ...à
faire de la productivité, de l'efficience, et c'est ce qui a créé les
trop-perçus.
M. Gaudreault : Donc, si on
avait été collés à l'inflation, ça aurait été plus élevé, les tarifs auraient
été plus élevés.
M. Audette (Sylvain M.) :
Oui.
M. Gaudreault : Et est-ce que
vous admettez que le projet de loi n° 34 retire, au fond, le processus de remboursement
des trop-perçus en étant, c'est comme paradoxal, en étant collé à l'inflation,
comme veut le faire le ministre, il n'y aura plus de procédé, comme il existe à
l'heure actuelle, pour dire : Là, il y a eu des écarts de rendement qu'on
va réajuster après les plaidoiries d'Hydro-Québec devant la Régie de l'énergie.
Donc, on vient retirer ce qui est le prétexte, soi-disant, de ce projet de loi
qui était de rembourser les trop-perçus.
M. Audette (Sylvain M.) :
Oui, ce n'est pas en faisant... en fixant les tarifs avec un tarif plafond
qu'on va éliminer le concept de trop-perçu, que je n'aime pas, je vous l'ai
répété, c'est plus un écart par rapport à un rendement raisonnable, qu'on juge
à 8,2 %... Donc, je vous dirais que, si on a une fourchette, je ne sais
pas, moi, je suggère des chiffres dans le mémoire, entre 7 % et 10 %,
puis qu'on laisse Hydro-Québec là-dedans, sans faire de cause tarifaire, et la
population, on peut lui dire...
Le Président (M. Lemay) :
Merci, M. Audette...
M. Audette (Sylvain M.) :
...que c'est raisonnable.
Le Président (M. Lemay) :
...c'est ceci qui complète la période d'échange avec le troisième groupe
d'opposition. M. Audette, je vous remercie pour votre contribution. La
commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 21)
15 h (version non révisée)
(Reprise à 15 h 2)
Le Président (M. Lemay) :
Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de l'agriculture, des
pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles reprend ses travaux. Je
demande à toutes les personnes présentes dans la salle de bien vouloir éteindre
la sonnerie de leurs appareils électroniques. Et cet après-midi nous entendrons
Bitfarms, l'Union des consommateurs ainsi qu'Option Consommateurs. Donc, je
souhaite la bienvenue aux représentants de Bitfarms, ici présents. Je vous
rappelle que vous disposez de 10 minutes pour faire votre exposé. Puis
nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Vous
avez donc à vous présenter ainsi que les personnes qui vous accompagnent, ainsi
que vous pourrez procéder à votre exposé. La parole est à vous.
M. Quimper (Pierre-Luc) :
Donc, tout d'abord je voudrais vous remercier de nous donner la chance de
donner notre opinion sur le projet de loi. Donc, moi, mon nom, c'est Pierre-Luc
Quimper. Je suis fondateur et président de Bitfarms. Je suis aussi fondateur et
président de GloboTech, une compagnie qui était au tout début d'Internet, une
compagnie qui faisait des centres de données, qui est toujours en activité
aujourd'hui. Donc, on est ici aujourd'hui pour parler de Bitfarms. Donc...
Le Président (M. Lemay) :
...présenter les membres qui sont avec vous.
M. Quimper (Pierre-Luc) :
Pascal Cormier, qui est notre expert en énergie, puis Pierre-Olivier
Charbonneau qui...
M. Charlebois
(Pierre-Olivier) : Charlebois.
M. Quimper (Pierre-Luc) :
Charlebois, qui est notre avocat. Donc, c'est ça. Je vais présenter Bitfarms.
Ça fait à peine deux ans qu'on existe au Québec. On a une croissance assez
fulgurante, là, qu'on pourrait dire. On a investi au Québec 57 millions de
dollars en même pas deux ans dans nos infrastructures. En ce moment, on utilise
environ 41 mégawatts, qui est à peu près un tiers de notre projet qu'on
voit pour le Québec. On donne environ 1,2 million par mois à Hydro-Québec,
à Hydro-Sherbrooke, Hydro-Magog et en... On donne 1,2 million en énergie.
Ça, comme je vous dis, c'est seulement un tiers de notre projet. Aussi, on a
réussi à financer une étude avec l'ÉTS, une étude de recherche pour créer des
applications qui est reliée à la chaîne de blocs, pour 1 million de
dollars, qui est financée à 500 000 $ par Bitfarms et aussi
500 000 $ par le gouvernement fédéral.
Donc, quand on a décidé d'installer
Bitfarms au Québec, quand on a fait l'exploration, parce que notre industrie,
c'est une industrie émergente. C'est une nouvelle industrie. Donc, il faut
préparer bien le terrain. Donc, nous, ce qui est une de nos ressources
essentielles pour notre entreprise, c'est l'énergie, comme tous les centres de
données au Québec, comme Amazon et Google, ont besoin d'énergie. Donc,
Bitfarms, c'est la même réalité que tous les centres de données. Donc, quand on
a fait l'exploration à travers le Canada et à travers les États-Unis, le
Québec, on avait tous les ingrédients nécessaires pour développer cette
entreprise-là. Puis un des gros critères qu'on avait de besoin aussi, c'était
la stabilité sur le tarif énergétique. Puis ce tarif-là, nous, on avait
spécifié, puis on avait vu que le Régie de l'énergie était implantée, était
déjà là pour, justement, être le régulateur en cas où est-ce que, justement...
M. Quimper (Pierre-Luc) :
...c'était la stabilité sur le tarif énergétique. Puis ce tarif-là, nous, on
avait spécifié qu'on avait vu que la Régie de l'énergie était implantée...
était déjà là pour justement être le régulateur en cause que justement on est
dans une situation de monopole au Québec. Donc, nous on était confiants que la Régie
de l'énergie était là pour régulariser les prix et faire ses devoirs de
régulateur.
Donc, après ce moment-là, quand on a
décidé de s'installer au Québec, on a eu la chance de s'assire avec la haute direction
d'Hydro-Québec dès le départ. Parce qu'à ce moment-là notre industrie n'était
pas connue, donc on était plus en mode éducationnel. Hydro-Québec voulait
savoir exactement pourquoi on avait besoin d'énergie. Donc, on leur a expliqué
exactement que nous, on n'est pas plus différents qu'un centre de données. On
est des centres de calcul, que nous, on dit, un peu comme des centres... C'est
la même chose que des centres de données, là, c'est que...
Avec Hydro-Québec, nous, on voulait de
l'énergie. Donc, Hydro-Québec nous ont mentionné des endroits stratégiques au
Québec où c'est qu'il y avait déjà des infrastructures existantes, puis qu'ils
allaient pouvoir nous desservir nos consommations d'énergie qu'on aurait besoin
pour notre expansion au Québec. Donc, à ce moment-là, on a choisi des...
certaines régions.
Tout allait bien avec Hydro-Québec,
tout... Dans ces circonstances-là, ils sontaient contents de nous vendre de
l'énergie. Ils nous voyaient... Il y avait même un propre département qui était
consacré aux «data centers» pour justement approcher les Amazon puis les Google
de ce monde. Puis à ce moment-là il y avait des personnes exactement qui
étaient dans le même département pour parler de la «blockchain».
Donc, il y a eu une ouverture. On leur a
expliqué c'était quoi, notre modèle d'affaires. Ils ont compris qu'on était une
compagnie canadienne, qu'on est cotés en bourse, qu'on est sérieux, qu'on fait
nos devoirs, qu'on fait nos démarches, comme n'importe quelle entreprise qui
s'installe dans une région.
Après ça, on a installé nos premières
installations. Ça a bien été. Puis, l'année dernière, là, une de nos craintes,
bien, qu'on avait envisagée, justement, pourquoi on avait le Québec,
Hydro-Québec a fait une demande à la Régie de l'énergie pour augmenter...
essayer d'augmenter le tarif de 20 %, seulement spécifiquement pour notre
industrie.
Donc, c'est là qu'on a eu la chance
d'aller à la Régie de l'énergie, de faire des représentations pour justement,
lors... C'était plus un mode éducationnel à ce moment-là parce que, comme je
vous dis, personne ne comprenait c'était quoi, l'industrie. Donc, on a passé
quelques jours à la régie à défendre nos points puis à leur expliquer que c'est
une technologie émergente, c'est une technologie du futur, qu'il y a plein de
banques, qu'il y a plein d'industries... plein d'autres compagnies qui sont en
train de faire de la recherche puis de développer cette technologie-là qui va
être utilisée au quotidien dans le futur. Donc, la régie nous a donné raison
sur nos arguments. Donc, à partir de là, on s'est dit : O.K. On a le statu
quo sur le tarif.
Donc, c'est pour ça aujourd'hui, un peu...
En tant que président de Bitfarms, je suis un peu inquiet parce que, si un
problème comme ça a arrivé l'année dernière... puis avec le projet de loi
actuel, je ne pense pas que ça s'aurait passé comme ça.
Donc, je crois que c'est vraiment
important qu'un régulateur externe peuve justement vérifier les demandes
qu'Hydro-Québec peut faire ou les demandes que nous, on peut faire. Donc, je
crois que c'est vraiment important que la régie reste comme que c'est en ce
moment.
Puis, comme je vous dis, Bitfarms, on a
décidé de s'installer au Québec. Notre compagnie est cotée en bourse, toutes
nos opérations sont au Québec. On a seulement le tiers de notre installation
d'installée. On utilise 41 mégawatts, on donne 1,2 million à Hydro-Québec
par mois. C'est que, tu sais, en même pas deux ans, je trouve qu'on a démontré
qu'on est capables de faire beaucoup.
Donc, c'est pour ça qu'on veut... Notre
intention, c'est de rester au Québec. On veut développer au Québec, sauf qu'on
ne veut pas vivre avec une incertitude comme qu'on vit en ce moment puis
comme... une compagnie est cotée en bourse, ce n'est pas bon pour...
incertitude sur les marchés publics, ce n'est pas bon. Donc, c'est un peu ça
que je voulais dire aujourd'hui.
Le Président (M. Lemay) :
...c'est très bien...
M. Charlebois (Pierre-Olivier) :
Alors, je veux juste compléter...
Le Président (M. Lemay) : Oui,
allez-y.
• (15 h 10) •
M. Charlebois (Pierre-Olivier) :
Quelques points, de mon côté, au niveau du projet de loi n° 34
comme tel. Alors, M. le ministre, MM. et Mmes les députés, merci beaucoup de
nous donner l'opportunité de se présenter aujourd'hui.
Alors, je veux juste revenir sur quelques
points en particulier, là, sur le projet de loi n° 34
comme tel. Évidemment, il y a des modifications majeures qui sont proposées
dans ce projet de loi là, qui, comme M. Quimper l'a dit, inquiètent énormément
l'entreprise.
Du point de vue des consommateurs, on n'y
voit essentiellement aucun avantage. Au contraire, il met en péril plus de 20
ans d'expérience de la Régie de l'énergie dans la régulation économique du
secteur de l'énergie, de l'électricité plus en particulier.
Dans un premier temps, il existe un risque
non négligeable que le gel tarifaire proposé jumelé à une baisse unitaire de
distribution fera en sorte d'augmenter les trop-perçus, ce qui serait contraire
justement à la justification présentée par le gouvernement pour le projet de
loi n° 34.
À ce titre, la demande déposée par
certains groupes de consommateurs dans le dossier 4100-2019 est très
révélatrice. Ce seul aspect devrait être suffisant pour justifier le
maintien...
M. Charlebois
(Pierre-Olivier) : ...jumelé à une baisse unitaire de distribution
ferait en sorte d'augmenter les trop-perçus, ce qui serait contraire justement
à la justification présentée par le gouvernement pour le projet de loi n° 34.
À ce titre, la demande déposée par certains groupes de consommateurs dans le
dossier 4100 2019 est très révélatrice. Ce seul aspect devrait être suffisant
pour justifier le maintien du statu quo tant et aussi longtemps que le dossier
sera étudié par la régie. D'ailleurs, la régie a reconvoqué les parties à une
conférence préparatoire le 23 septembre 2019 à ce sujet-là.
Ensuite, l'indexation des tarifs d'électricité
souffre d'une absence de lien causal entre l'indice de prix à la consommation
et les principaux éléments du coût du distributeur. Ce manque de relation
causale est contraire au principe réglementaire généralement appliqué dans la
régulation de monopoles naturels dans le secteur énergétique. L'absence de
contrôle par la régie sur plusieurs items composant le revenu requis du
distributeur pendant des périodes de quatre ans redonne au distributeur
l'avantage que lui procure sa situation monopolistique pour augmenter les
tarifs à un niveau qui pourrait ne pas être juste et raisonnable, pour
reprendre l'expression prévue à la loi sur la régie. Cette augmentation
injustifiée pourrait affecter directement la compétitivité des entreprises
québécoises et nuire au développement des secteurs émergents comme celui de la
chaîne de blocs.
Par ailleurs, en retirant à la juridiction
de la régie l'approbation des programmes commerciaux, le projet de loi n° 34
introduit un risque que le distributeur mette en place et adopte de nouveaux
programmes commerciaux qui seront non rentables et auront nécessairement un
impact à la hausse sur les tarifs. Et là-dessus un exemple assez évident est
celui du programme commercial pour le mazout, qui a été refusé, qui a été rejeté
par la régie. Et je trouvais important de juste mentionner deux ou trois paragraphes
de la décision rejetant le programme en question, qui disait : «En effet, lorsque
les coûts d'un programme commercial sont supérieurs aux revenus qu'il génère,
ce déficit se répercute par une hausse sur les tarifs d'électricité, supportée
par l'ensemble des consommateurs sans que ceux-ci bénéficient d'un avantage en
retour.»
Le Président (M. Lemay) :
M. Charlebois?
M. Charlebois
(Pierre-Olivier) : Oui.
Le Président (M. Lemay) :
On serait rendus à la partie d'échange avec les membres du gouvernement. Je
vais céder la parole au ministre. Assurément que, dans ses questions, vous
pourrez sûrement continuer à répondre. Mais, bref, la parole est maintenant rendue
à M. le ministre.
M. Julien : Oui, merci,
M. le Président. M. Quimper, grand plaisir de vous rencontrer ici aujourd'hui
avec les personnes qui vous accompagnent.
Petite question très rapide,
M. Charlebois, M. Cormier, vous participez à... vous avez déjà
participé à la cause tarifaire à la Régie de l'énergie?
M. Charlebois
(Pierre-Olivier) : Depuis les 15 dernières années, en ce qui me
concerne.
M. Julien : Merci.
M. Cormier (Pascal) :
Moi également, transporteur et distributeur.
M. Julien : Merci.
M. Quimper, premièrement, merci. Merci de vous présenter aujourd'hui, là,
pour... comme représentant, là, de Bitfarms. Très impressionné de voir ce que
vous faites au Québec, là, avec vos implantations à Farnham, Saint-Hyacinthe, Cowansville,
Sherbrooke, Magog, Bromont, Saint-Jean-sur-le-Richelieu. Donc, effectivement,
là, une implantation au Québec, donc, on est très heureux de savoir ça, puis probablement
que cette implantation-là découle naturellement également d'un avantage concurrentiel
par rapport à l'énergie renouvelable d'Hydro-Québec.
Tantôt... Une petite question rapide. Vous
avez mentionné tantôt que vous craignez une modification des tarifs. Mais, quand
même, ce que prévoit le p.l. n° 34, c'est qu'Hydro-Québec
ne peut pas modifier les tarifs. Hydro-Québec peut demander au gouvernement
l'autorisation d'aller à la régie pour... alors, le même processus, mais, en
plus, il faut qu'il ait l'autorisation préalable pour modifier un tarif.
C'est-à-dire que, par rapport à la situation
actuelle qui prévaut et celle préconisée dans le p.l. n° 34,
je ne vois pas le risque que vous avez énoncé. Pouvez-vous m'expliquer en quoi
vous observez ce qui est prévu dans le p.l. n° 34,
vous, M. Quimper, est-ce que ce risque-là est accentué?
Le Président (M. Lemay) :
M. Quimper.
M. Quimper (Pierre-Luc) :
La meilleure personne pour répondre, par exemple, ça va être M. Cormier.
M. Julien : O.K.
M. Cormier.
M. Cormier (Pascal) : À
votre compréhension, le projet de loi n° 34 inclut une modification de l'article 5
qui n'oblige pas la régie à avoir le même type d'examen tarifaire qui est fait présentement
avec une audience publique. Donc, la situation, selon notre compréhension, est
différente de ce qui a eu lieu lors de l'étude du dossier 4045, là, pour le
tarif spécifique à la cryptographie.
M. Charlebois
(Pierre-Olivier) : Et donc, si je peux juste compléter, effectivement,
lorsqu'on regarde le projet de loi n° 34, aux articles 48.3 et 48.4,
le processus que vous expliquez est effectivement présent, donc le distributeur
doit se présenter et demander la permission. Par ailleurs, à l'article 5,
il n'y a rien qui prévoit que dans ce cas-là la régie doit tenir une audience
publique, alors que le régime actuel prévoit qu'effectivement, lorsqu'on fixe
ou modifie des tarifs, une audience publique doit être tenue.
M. Julien : Parfait. Je
reviendrai sur M. Quimper pour la prochaine question encore. Comme
dirigeant d'entreprise, un gel tarifaire pour l'an prochain avec une hausse à
l'inflation pour les quatre prochaines années...
Une voix
: ...lorsqu'on
fixe, modifie les tarifs, une audience publique doit être tenue.
M. Julien : Parfait. Je
reviendrai sur M. Quimper pour la prochaine question encore. Comme dirigeant de
l'entreprise, un gel tarifaire pour l'an prochain, avec une hausse à
l'inflation pour les quatre prochaines années, qui est quelque chose de
prévisible, d'aucuns diront : Oui, mais l'inflation peut être plus ou
moins prévisibile, mais, à tout le moins, habituellement, la structure de
coûts, il y a une logique puis, comme je le réitère, là, dans la hausse
tarifaire des 15 dernières années, c'est reflété. Et, après ça, on a un
«rebasing», on a un équilibrage qui se fait sur la même méthode que la cause
tarifaire qu'on vit actuellement aux 12 mois. Vous, comme entrepreneur, c'est
quoi, le risque que vous voyez par rapport à cette prévisibilité-là?
M. Quimper (Pierre-Luc) :
Bien, moi, le risque que je vois, c'est que, pendant quatre ans, la régie n'a
pas eu un oeil sur les dépenses d'Hydro-Québec, donc peut-être que... ou
peut-être que les quatre prochaines années, oui, ça va être un gel tarifaire,
mais ça va être quoi dans la cinquième année? Donc, nous, c'est ça, notre
grande inquiétude.
M. Julien : Parfait. Naturellement,
il faut bien comprendre, M. Quimper, que le p.l. 34 prévoit, en réalité, un gel
dans la première année, à l'inflation, les quatre années suivantes. Donc, si
l'inflation était constante, sur la période de cinq ans, ce serait à peu près
80 % de l'inflation, la période, en inflation constante, là. Et, après ça,
on retourne à la régie avec une cause tarifaire, avec le même processus, pour
s'assurer qu'on ne s'est pas écarté de ce qu'aurait dû être autrement une
tarification basée sur cause tarifaire. Mais, quand vous dites en réalité, si
on observe... comme je réitère, là, il y a une corrélation presque parfaite
dans le passé, dans les 15 dernières années, par rapport à l'inflation, sauf
qu'il y a des soubresauts, là, ça a déjà été trois fois à peu près l'inflation
ou la moitié de l'inflation.
Vous, là, comme entrepreneur, là, est-ce que
c'est mieux, en fin de compte, d'avoir quelque chose qui est lissé ou quelque
chose qui fluctue, de manière momentanée, par rapport à vos prévisions, par
rapport à vos coûts?
M. Quimper (Pierre-Luc) :
Bien, moi, je serais plus à l'aise si ce serait justement mes experts qui
répondent à ça, c'est eux autres qui sont...
M. Julien : ...vos
préoccupations qui nous intéressent ici, hein?
M. Cormier (Pascal) : Oui,
juste pour répondre, étant... avoir rédigé le mémoire de Bitfarms, il est important
de comprendre qu'est-ce qui détermine les tarifs, les tarifs, c'est les coûts
de service aux distributeurs. Ces coûts de service là sont 50 % des
approvisionnements, 25 % des coûts de transport qui sont motivés, par
exemple, par la mise en place de la ligne Chamouchouane—Bout-de-l'Île. Au
moment de sa mise en place, sa mise en service, il y a un choc tarifaire, il y
a un ajout à la base de tarification qui a un impact sur les tarifs. Ça, ça n'a
rien à voir avec l'inflation, ça n'a rien à voir avec l'évolution des biens qui
compose l'indice des prix à la consommation, comme il y a dans le projet de
loi.
Selon nous, selon l'information qui a été
déposée à la régie pour l'année 2020... pour le 1er avril 2020, ce n'est pas un
gel tarifaire qu'on devrait avoir, s'il y a un examen complet à la régie, mais
bien une baisse tarifaire. Donc, pour Bitfarms, il y a définitivement un
avantage à avoir une baisse tarifaire versus un gel. Puis, pour ce qui est de
l'avenir, vous avez parlé de la corrélation entre l'inflation passée puis les
coûts de distribution, effectivement, depuis 15 ans, il faut avoir en tête que,
malgré l'ajout de 1,8 milliard de frais liés aux approvisionnements
postpatrimoniaux dans les dernières années, la régie a réussi à maintenir les
augmentations au taux d'inflation.
Donc, si on regarde dans le futur
maintenant, on n'anticipe pas avoir des approvisionnements postpatrimoniaux au
même titre... on est en surplus, tout le monde le sait. Donc, dans cette
situation-là, on anticipe que la hausse des tarifs, si elle est régie dans le
système statu quo actuel, va être inférieure à ce qu'on a vécu dans le passé,
donc inférieure à l'inflation.
M. Julien : Donc, M. Cormier,
je comprends que c'est une éventualité qui est plausible pour vous et, vous,
qui avez, en fin de compte, dans les 15 dernières années, participé aux causes
tarifaires à la régie. Je reviens quand même sur des préoccupations spécifiques,
parce qu'aujourd'hui on reçoit Bitfarms qui, en réalité, est une entreprise
avec un besoin en énergie important. Là, je vois que vous avez, en fin de
compte, bénéficié d'un tarif TDE, est-ce que les tarifs d'hydroélectricité au
Québec sont concurrentiels pour votre milieu d'affaires?
• (15 h 20) •
M. Quimper (Pierre-Luc) : Ils
sont concurrentiels, oui, mais vous avez mentionné le TDE, le TDE, on ne l'a
pas eu dans toutes nos installations. Comme je vous dis, on s'est assis avec la
haute direction d'Hydro-Québec. Au début, c'est comme si on avait le tapis
rouge, ils nous donnaient... on avait eu le TDE pour certaines installations,
on avait eu... tout allait bien dans ce temps-là, à ce moment-là. Nos nouvelles
installations ne sont plus au TDE. Oui, les tarifs d'Hydro-Québec sont
concurrentiels, mais le mot le dit, c'est concurrentiel, il y a d'autres
provinces ou il y a d'autres places en Amérique du Nord, que les tarifs sont beaucoup
moins chers que le Québec, mais...
M. Quimper (Pierre-Luc) :
...pour certaines installations, on avait eu tout, tu sais, tout allait bien
dans ce temps-là, à ce moment-là. Nos nouvelles installations ne sont plus TDE.
Oui, les tarifs au Québec sont concurrentiels, mais le mot le dit, c'est
concurrentiel, il y a d'autres provinces ou il y a d'autres places en Amérique
du Nord que les tarifs sont beaucoup moins chers que le Québec. Mais, oui,
c'est avantageux pour nous, mais on n'est pas le seul endroit qu'on aurait pu
aller s'installer. Une des grosses raisons pourquoi je vous dis qu'on s'est
installé ici, c'est que justement il y avait un régulateur qui vérifiait les
prix.
M. Julien : Donc, quand vous
dîtes une des bonnes raisons, puis ce ne sera pas long, après ça, mon collègue
va poser une question, mais... Une des bonnes raisons qui a fait que vous vous
êtes installé au Québec, pour vous c'est à cause de la présence du régulateur
qui faisait pour vous... Vous, là, qu'est-ce qu'il vous a permis, le
régulateur, au cours des dernières années pour s'assurer, là, que c'était une
bonne place, au Québec?
M. Quimper (Pierre-Luc) :
Bien, nous autres, on a vérifié l'historique, on a vérifié des augmentations
que la régie avait accordées à Hydro-Québec. Dans la plupart des cas, c'est en
bas de l'inflation, donc pour nous c'était un bon endroit pour s'installer,
donc oui, c'était favorable.
M. Julien : Nous sommes très
heureux que vous soyez installé au Québec. Mon collègue a une question.
Le Président (M. Lemay) :
O.K., parfait, M. le député de Bourget, la parole est à vous.
M. Campeau : La première des
choses, j'ai de la difficulté à comprendre. Vous semblez avoir peur que le prix
se mette à monter dans cinq ans. J'ai de la difficulté à voir ça, juste voir si
je comprends mal. Hydro-Québec, là, ce n'est pas comme si on ne les surveillait
plus. Je suis sûr que M. Martel se sent surveillé à tous les jours par...
de toutes sortes de façons, puis l'idée, c'est que par rapport au gouvernement
annuellement, on leur demande d'être efficaces pour redonner au gouvernement un
certain montant. Alors, ils sont surveillés, encadrés. Ils ont avantage à faire
attention à leurs schémas de prix et on vient de leur mettre un max en disant,
tu n'iras pas plus haut que ça. Puis même l'an prochain, un gel.
J'ai de la misère à voir, dans ces
conditions-là, comment ça pourrait déraper. Que ça ne puisse pas baisser, je
comprends, mais peut-être dans cinq ans, on va trouver qu'on a trop monté à
peine, puis on va vouloir le baisser légèrement. Mais l'idée que ce soit
prévisible, mon expérience comme... dans des industries, normalement pour les
entrepreneurs, c'est encore plus important des fois que le prix, la
prévisibilité. Je veux juste vous entendre là-dessus, s'il vous plaît.
M. Cormier (Pascal) : Pour
répondre à votre question, évidemment on y a beaucoup réfléchi dans les
dernières semaines, malgré le temps imparti qui était assez court avec la commission
qui a été annoncée dernièrement. Premièrement, il y a... il faut comprendre la
logique du projet de loi. C'est, à l'inflation pour toutes les années où le
revenu requis... où les revenus requis nécessaires nécessitent des tarifs qui
sont avec une hausse égale ou inférieure à l'inflation. Si toutefois, pour une
raison X, là, je ne sais pas, une crise du verglas, qu'on a besoin d'investir
davantage, un jugement qui dit que la ligne qui s'en va aux États-Unis doit
être souterraine, par exemple, comme il y a eu au New Hampshire. Ça, c'est un
choc qui peut arriver, puis uniquement une captation aux coûts de services peut
le capter. Puis, il faut comprendre que l'article 48.3 permet à la... à Hydro-Québec,
parce qu'Hydro-Québec doit respecter l'article 24 de la loi sur la... sur Hydro-Québec,
c'est-à-dire de couvrir ses coûts. Donc, s'il y a une année que l'augmentation
au taux d'inflation n'est pas suffisante pour couvrir les coûts, il va y avoir
une hausse qui est supérieure à l'inflation.
Donc, comme client, on n'est pas... ce
n'est pas «capé» à l'inflation si je peux m'exprimer en anglais, désolé, ce
n'est pas plafonné à l'inflation, mais c'est plafonné à l'inflation à toutes
les fois que le revenu requis est inférieur à ce qu'on de besoin pour
l'inflation, si je me fais bien comprendre. À chaque fois que le revenu requis
pour une raison qu'on ne contrôle pas augmente, nécessairement il va y avoir
une hausse tarifaire qui va passer par l'intermédiaire de l'article 48.3.
Le Président (M. Lemay) : M.
le ministre, allez-y.
M. Julien : Oui, mais
j'entends ce que vous me dîtes, mais je ne suis pas du tout d'accord avec votre
interprétation. C'est-à-dire qu'on réitère, là, notre volonté, nous ici dans le
p.l. 34 c'est de donner de l'imputabilité à la société d'État en lui
transférant le risque et sa performance. C'est-à-dire, dorénavant, là, ça va
ressembler à ça en réalité, là, vos revenus, c'est gel, inflation puis vous
performez. Contrairement à l'ancien système qui était 8,2 de rendement attendu,
puis quand on se dégage, mais on... un écart de rendement positif ou négatif,
le cas échéant. Mais ce que vous dîtes, là, c'est à toutes les fois qu'il
serait... que le besoin serait au-dessus de l'inflation, on va venir rétroagir
pour une donner une augmentation. Ce n'est pas du tout ça, la volonté.
La volonté, c'est dans des cas, en fin de
compte — quand vous avez mentionné la crise du verglas — où
on conviendrait tous qu'il y a une situation qui nécessite un geste, on veut
quand même se donner la possibilité de le faire. Mais de prétendre que ce
serait fait quand...
M. Julien : ...dans des cas, en
fin de compte — quand vous avez mentionné la crise du verglas — où
on conviendrait tous qu'il y a une situation qui nécessite un geste, on veut quand
même se donner la possibilité de le faire. Mais de prétendre que ce serait
fait... quand ce serait bon, on n'en dirait pas un mot, puis aussitôt que ça
serait un peu mauvais, on interviendrait, bien non, bien non, vous le savez
aussi bien que moi.
M. Cormier (Pascal) : La
mécanique, elle est là. S'il y a une possibilité...
M. Julien : La possibilité
de...
M. Cormier (Pascal) : ...de
demander au gouvernement...
M. Julien : Mais ce n'est pas
l'esprit qu'on en a, et ici, publiquement, je le dis, là, ce n'est pas l'esprit
qu'on en a. Ça, c'est faire accroire aux gens, là, des craintes qui n'existent
pas. Puis j'aime bien M. Quimper, parce qu'il est ici, en fin de compte, pour
nous donner des doléances par rapport à son industrie. Les doléances que
j'entends, moi, personnellement, là, c'est qu'Hydro-Québec ne lui a pas donné
certains tarifs puis qu'il aurait bien aimé les avoir. Puis j'entends bien ça.
Pour moi, c'est une préoccupation que, comme entrepreneur chez Bitfarms, je
dis : Bien oui, tabarnouche! Parce qu'il amène, en fin de compte, du développement
économique.
Mais aussitôt qu'on rentre dans les
détails techniques, c'est vous et votre acolyte qui, en fin de compte, nous
dites un peu ce qu'on a déjà entendu par d'autres groupes hyper spécialisés,
mais qui ne sont pas du tout entrés dans les préoccupations de M. Quimper. Je
trouve ça particulier.
M. Cormier (Pascal) : Je vous
répondrais rapidement par le fait que les interventions passées, les demandes, généralement,
qui ont été faites à la régie par Hydro-Québec, la régie joue un rôle
d'arbitrage. Il y a la position d'Hydro-Québec, il y a la position des intervenants,
les clients qui paient, Hydro-Québec qui offre un service à un prix x. La régie
arbitre entre les deux. Généralement, la hausse tarifaire est inférieure à ce
qui est demandé, parce que c'est basé sur une étude qui a été complexe, basé
sur le coût de service, qui n'est pas si simple que l'inflation. Je vais vous
donner un exemple, l'inflation... il y a une sécheresse en Californie, l'indice
des prix à l'inflation monte, il n'y a aucun contrôle, aucune causalité avec l'évolution
du coût d'Hydro-Québec.
M. Julien : Je comprends bien
ce que vous me dites, mais vous faites encore un parallèle qui n'est pas le
parallèle qu'on veut, en fin de compte, démontrer ici. La courbe supérieure,
qui est l'augmentation des tarifs sur 15 ans, qui donne 132,6 sur une période
de 15 ans pour 100 $ en 2003, versus l'inflation, à 128,4. Augmentation
tarifaire, inflation. Ça, ce n'est pas la demande qui a été faite par le
distributeur. Ça, c'est le tarif qui a été accordé par le processus de la
régie.
Alors, quand vous me dites : Le
distributeur demande toujours plus. Oui, mais ici, on compare puis on dit que
c'est supérieur à l'inflation, historiquement, puis on dit que la régie, aux
cinq ans, va revenir faire la cause tarifaire. Encore là, vous nous parlez des
demandes du distributeur. Ça, ici, ce n'est pas les demandes du distributeur,
c'est ce qui a été effectivement accordé par la régie suite à vos doléances
continues, année après année, au processus de cause tarifaire. Ça a été plus
fort que l'inflation.
M. Cormier (Pascal) : Comme
j'ai expliqué, c'est un historique, donc ça représente l'évolution du coût de
service effectif, réel pour desservir la population, la sécurisation du réseau,
ce qu'Hydro-Québec appelle la fiabilité. C'est des événements passés.
Là, nous, si on regarde par en avant, on
se rend compte qu'il n'y aura pas de choc tarifaire à la hausse lié aux
approvisionnements, on se rend compte que les investissements, par exemple,
pour réintégrer la Romaine... trois centrales sur quatre ont déjà été
intégrées. Donc, il y a beaucoup des gros investissements qui ont eu des
impacts à la hausse sur les tarifs, et malgré ces gros impacts là, la régie a
su maintenir et même aller en deçà des demandes d'Hydro-Québec.
M. Julien : ...
Le Président (M. Lemay) : Bon,
merci beaucoup, M. le ministre. M. le ministre, désolé, on est arrivé au temps
pour la partie gouvernementale. Je cède maintenant la parole à l'opposition
officielle. M. le député de Laval-des-Rapides, la parole est à vous.
M. Polo : Merci. Merci
beaucoup, M. le Président. Je vais le dire ouvertement, ici, là : On
reçoit des invités, M. le ministre. Non, on reçoit des invités et on peut, on
peut, on va se parler correctement, là, on peut ne pas être d'accord, ou pas,
avec ce que nos invités... J'ai eu hier la même réaction que vous face à un
autre groupe, O.K., et vous avez été témoin. Mais dans ce cas-là, je me suis
adressé à la présidence. On a des invités, il faut avoir un minimum de respect,
il ne s'agit pas ici d'un tribunal.
M. Julien : M. le Président,
je ne pense pas avoir manqué de respect envers personne ici aujourd'hui.
Une voix
: ...quand
même...
Le Président (M. Lemay) :
Excusez-moi. Merci à tous. Le député de Laval-des-Rapides, je comprends votre
point, effectivement, on s'adresse à la présidence lorsqu'on discute dans les
travaux, et c'est comme ça qu'on va avoir des échanges respectueux envers
toutes les personnes qui sont ici, incluant nos témoins. Et c'est les attentes
que j'ai envers cette commission. M. le député de Laval-des-Rapides, si vous
voulez poursuivre avec une question envers nos témoins, il n'y a pas de
problème.
• (15 h 30) •
M. Polo : Merci. Merci
beaucoup. Merci, MM. Quimper, Charlebois et Cormier, merci pour vous être
déplacés et de nous avoir soumis votre mémoire. J'aimerais commencer par vous
relancer sur certains des sujets qui ont été évoqués par le ministre, là, dans
son temps de parole. Notamment, au début de la page 17, juste avant la
conclusion, la dernière phrase, où vous mentionnez que «sans le processus
d'audiences publiques et sans l'intervention de la régie dans la fixation des
prix des tarifs d'électricité, il existe un risque sérieux que les tarifs
soient établis à un niveau supérieur à celui du coût de service, introduisant
ainsi une...
15 h 30 (version non révisée)
M. Polo : ...au début de la
page 17, juste avant la conclusion, la dernière phrase où vous mentionnez que
sans le processus d'audience publique et sans l'intervention de la Régie dans
la fixation des prix... des tarifs d'électricité, il existe un risque sérieux que
les tarifs soient établis à un niveau supérieur à celui du coût de service,
introduisant ainsi une distorsion dans le marché, au détriment de l'ensemble
des consommateurs. Vous parlez de risques. Quels sont les risques que vous
anticipez? Là, on le comprend, là, que ça soit supérieur, mais de quelle façon
ça pourrait affecter, bien sûr, votre entreprise, votre secteur, votre
industrie, notamment? Et je commencerais par là.
M. Quimper (Pierre-Luc) :
Bien nous, c'est... comme je vous dis, je suis un entrepreneur, donc c'est
carrément ma rentabilité. Ma rentabilité, comme qu'on est dans une industrie
qui est dans l'émergence, c'est beaucoup d'investissements pour la recherche et
développement comme qu'on a fait avec l'ETS, c'est beaucoup d'investissement. On
est une start-up, donc tous les profits qu'on génère, on les réinvestit. Donc, s'il
y a à gruger dans cette partie-là, ça va être moins d'investissements, ça va
être moins d'installations au Québec, puis ça va être moins d'emplois qu'on va
créer ici.
M. Charlebois (Pierre-Olivier) :
Et, peut-être, si je peux compléter, je pense qu'un des bons exemples de risque
pour cette industrie-là est certainement le dossier R4045 2018 dans lequel nous
sommes toujours, actuellement, d'ailleurs, et dans lequel nous sommes depuis
les 18 derniers mois, où, essentiellement, le distributeur s'est attaqué de
front à ce secteur-là, au secteur de la chaîne de blocs, qui a tenté de lui
imposer une majoration, un encan tarifaire avec un majoration de un sous le
kilowattheure au-delà du tarif LG. Et donc on s'est attaqué directement à cette
industrie-là, on a tenté de maximiser des revenus du distributeur en utilisant
des outils tarifaires. On s'est présenté devant la Régie de l'énergie. Et la
Régie, après la tenue d'une audience publique complète lors de laquelle il y a
eu plusieurs intervenants qui se sont présentés, dont nous, évidemment, la
Régie est arrivée à la conclusion, a conclut que ce que demandais le
distributeur était discriminatoire, était à l'extérieur du cadre réglementaire,
ne respectait pas les principes réglementaires généralement reconnus et a donc
rejeté la proposition du distributeur. Donc, si on se retrouve dans un contexte
où on se laisse aller au bon vouloir du distributeur et on retire la
compétence, le juridiction de la Régie sur ce type de demande tarifaire là, on
va se retrouver dans un... devant un risque très, très important. Parce que si
la Régie n'avait pas eu ce contrôle-là, bien, essentiellement, l'industrie de
la chaîne de bloc se serait retrouvée à payer 20 % de plus qu'un
consommateur industriel ayant exactement le même profil de consommation.
Le Président (M. Lemay) :
Merci M. Charlebois. M. le député de Laval-des-Rapides.
M. Polo : Ce que vous dites,
c'est que vous n'auriez eu aucune forme d'appel suite à la décision du
distributeur à ce moment-là?
M. Charlebois (Pierre-Olivier) :
En fait, non, exactement, parce que nous n'aurions pas eu accès à la Régie dans
ce contexte-là.
M. Cormier (Pascal) : Et je
dois ajouter que la Régie a appliqué des règles qui sont appliquées dans toutes
les régies en Amérique du Nord, que ça soit la tarification des pipelines à
Calgary ou dans les autres provinces voisines. C'est-à-dire, c'est au coût de
service. Ils ont déterminé que la hausse tarifaire n'était pas justifiée par
rapport au coût de desservir ces clients particuliers là. Donc, c'est des
principes de base qui ont été appliqués malgré un décret gouvernemental. Donc,
il y avait une loi, ils ont respecté la loi, puis ça a démontré l'importance
d'avoir un organe indépendant pour pouvoir répondre aux besoins des
entreprises. Puis ça, ça envoie un bon signal aux investisseurs partout dans le
monde pour dire : au Québec, c'est indépendant et c'est stable. Et c'est
particulièrement vrai dans le cas où l'actionnaire principal du distributeur
est le gouvernement.
Le Président (M. Lemay) :
Merci, M. Cormier. M. le député de Laval-des-Rapides.
M. Polo : Depuis combien
d'années, Bitfarms, vos êtes installés au Québec? En quelle année?
M. Quimper (Pierre-Luc) : En
2017.
M. Polo : 2017, O.K.
M. Quimper (Pierre-Luc) :
2017, puis, pendant tout le processus de la Régie de l'énergie, là, on avait
mis le bouton sur pause, puis on ne développait plus rien au Québec. On
attendait de voir c'était quoi qui allait sortir de tout ça. Ça fait que si on
aurait eu ce moment-là, à mon avis, on aurait plus gros aujourd'hui.
M. Polo : Pendant une... lors
d'une des questions du ministre, il vous présentait son tableau, là, de la
corrélation entre l'inflation et l'augmentation des tarifs, là, au cours de 15
dernières années, là. Ceci dit, si le projet de loi n° 34 avait été mis en
place il y a quatre ans, disons, est-ce que Bitfarms aurait pris la décision de
s'installer au Québec?
M. Quimper (Pierre-Luc) :
Comme je vous dis, c'était un des gros critères de venir s'installer ici, à
cause qu'il y avait le régulateur qui vérifiait ça. Mais je ne peux pas
répondre, mais probablement, ça aurait été un gros facteur qu'on n'aurait
peut-être pas installé au Québec. On avait d'autres options, puis ça, c'était,
comme je vous dis, c'était un des gros facteurs parce qu'on se disait que c'est
un régulateur externe qui va justement être le «watch dog» pour nos industries,
pour les industriels au Québec. Donc, oui, c'était un des critères importants.
M. Polo : C'est drôle parce
qu'hier, effectivement, il y avait une association qui représente de la
transformation alimentaire, qui mentionnait, justement, le fait que
l'instabilité ou, si on peut dire, le manque de régulation générait, justement,
peut-être une insécurité ou repoussait des investissements étrangers. Et,
notamment, un des exposants donnait l'exemple d'une entreprise qui a considéré
longtemps le Québec, puis finalement a décidé d'aller...
M. Polo : ...l'instabilité ou,
si on peut dire, le manque de régulation générait justement peut-être une
insécurité ou repoussait des investissements étrangers. Et, notamment, un des
exposants donnait l'exemple d'une entreprise qui a considéré longtemps le Québec
puis finalement a décidé d'aller en Ontario, compte tenu qu'il y avait cet
élément-là qui était notamment un facteur. Et donc, voilà.
Plus loin, au début de votre conclusion,
vous dites... vous reparlez du risque, vous reparlez du R-4100-2019, mais vous
faites aussi, au paragraphe suivant, une référence au manque de relation
causale entre l'indice des prix de la consommation et les principaux éléments
du coût du distributeur. Peut-être élaborer sur ça, s'il vous plaît.
Le Président (M. Lemay) : M.
Cormier.
M. Cormier (Pascal) : Ce
qu'on voulait exprimer par ça, c'est que, comme je l'ai expliqué tantôt, ce qui
compose l'indice des prix à la consommation, c'est un panier de biens, que ce
soit le pétrole... là, il y a une crise en Arabie saoudite, là, qui commence à
se développer, on perçoit qu'il y a un petit peu d'instabilité, ça peut avoir
un impact à la hausse sur les prix du pétrole. Ça n'a rien à voir avec les
approvisionnements qui rentrent dans les livres d'Hydro-Québec. Donc, c'est à
ce niveau-là qu'on disait qu'il n'y avait pas de lien causal. Tandis qu'une
étude qui est faite devant une régie indépendante, c'est basé sur le coût de
service qui est un principe de base qui existe depuis... j'ai regardé, là, j'ai
été faire une formation en Afrique, le gaz naturel est réglementé de cette
façon-là depuis les années 30. C'est un monopole qui a l'avantage de ne pas
avoir de compétiteurs, mais le coût, c'est d'être réglementé pour essayer de
répliquer, protéger les consommateurs de cet avantage monopolistique là. Donc, c'est
pour ça que, d'aller à l'inflation, on déroge de la logique du coût de service.
Ça se peut qu'il y ait des baisses de tarifs, ce n'est pas nécessairement des
hausses à l'inflation, là. Donc, c'est dans ce...
M. Polo : Allons plus loin
dans votre argument : Quels sont, selon vous, là, les dangers ou les
dérapages possibles de ne plus assujettir un monopole à un contrôle comme la
régie, tel qu'on le constate actuellement, tel qu'on le vit depuis des années,
ça veut dire une révision annuelle? Quels seraient, selon vous, certains
dérapages soit pour vous, votre client ou votre industrie?
M. Cormier (Pascal) : Je vais
vous donner un exemple, on a... dans le mémoire, il y a un graphique avec les
prix industriels dans différentes juridictions historiques, puis on voit que le
tarif L a monté avec un taux de croissance similaire à ce qu'il y a au
Manitoba, qui était plus bas, en passant, que le Québec. Ce n'est pas juste le
Québec qui a des tarifs industriels bas. Il y a l'État de New York qu'on voit
une baisse importante. Ça fait que, toutes choses étant égales par ailleurs, si
on anticipe qu'aller à l'inflation, compte tenu de ce que je vous ai dit plus
tôt, à l'effet qu'il n'y a pas de nouveaux approvisionnements qui s'en
viennent, on anticipe des hausses tarifaires régulées qui seraient moins
importantes que dans le passé, compte tenu de ce fait-là, nous, on pense que la
situation concurrentielle des tarifs au Québec va être affectée négativement.
Parce que toutes choses étant égales par ailleurs, les autres vont continuer à
réglementer leurs tarifs de distribution à... pas à l'inflation, excusez-moi,
au coût de service, comme c'est fait dans toutes les régies en Occident, donc
c'est un risque important d'avoir... puis ça incite les... ça donne aussi un
mauvais signal aux entreprises de savoir qu'au Québec l'électricité est
réglementée à l'inflation. Les gens disent : Hum! C'est bizarre, c'est la
seule place que je vois que c'est comme ça.
M. Charlebois (Pierre-Olivier) :
Si je peux juste compléter sur ce sujet-là, un autre dérapage potentiel, on a
peu parlé des programmes commerciaux et des investissements aussi, donc on
retire de la juridiction de la régie l'adoption et l'approbation de ces
programmes-là. Et je voulais juste revenir sur la décision tantôt que je vous
citais, et le paragraphe 40 est intéressant, cette décision-là où la régie
rejetait le programme de conversion, disait : «Le législateur se soucie du
risque qu'un distributeur en situation de monopole profite de cette situation dans
son marché, et ce, à l'encontre des intérêts de ses consommateurs. Il est
d'ailleurs explicite à cet égard : en vertu de la l'article 74 de la loi,
la régie doit tenir compte de la rentabilité de ces programmes en considérant
leurs impacts sur les tarifs.» Et donc, si, littéralement, on retire...
Le Président (M. Lemay) : M.
Charlebois, simplement, il reste 30 secondes. M. le député de
Laval-des-Rapides, allez-y.
M. Polo : Ce matin, le premier
ministre disait en point de presse que, pour un homme d'affaires, c'est
important qu'il y ait un facteur de prévisibilité. Est-ce que vous pour... en
tant qu'entrepreneurs, le facteur de prévisibilité, tel que présenté dans le
projet de loi n° 34, est-ce que c'est un avantage ou est-ce que c'est un
risque?
M. Quimper (Pierre-Luc) : Si
on le prend globalement, pour nous, c'est un risque, comme j'ai expliqué.
M. Cormier (Pascal) : Juste
pour clarifier. Selon nous, la prévisibilité du revenu requis est pas mal plus
facile à établir, compte tenu de l'information disponible à la régie, que la
prévisibilité du taux d'inflation.
Le Président (M. Lemay) :
Merci beaucoup, M. Cormier. Donc, ceci complète la partie avec l'opposition
officielle. Je cède maintenant la parole au député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui. Alors, je
demande le consentement pour obtenir le temps laissé...
Le Président (M. Lemay) : ...
Des voix
:
Consentement.
• (15 h 40) •
Le Président (M. Lemay) :
Consentement. Allez-y, M. le député de Jonquière, la parole est à vous.
M. Gaudreault : Merci. Merci
beaucoup, M. le Président. Donc, si je résume votre pensée... D'abord, bonjour.
Merci. Merci d'être ici. Si je résume votre pensée, vous dites...
M. Gaudreault : ...le
consentement pour obtenir le temps laissé...
Le Président (M. Lemay) :
...de l'opposition?
Des voix
:
Consentement.
Le Président (M. Lemay) :
Consentement. Allez-y, M. le député de Jonquière, la parole est à vous.
M. Gaudreault : Merci. Merci
beaucoup, M. le Président. Donc, si je résume votre pensée... D'abord, bonjour.
Merci. Merci d'être ici. Si je résume votre pensée, vous dites : Hydro-Québec
a toujours de la difficulté ou plaide toujours difficilement devant la régie.
Souvent, elle perd dans ses demandes tarifaires ou pour vous permettre d'avoir
des tarifs qui permettent d'établir votre industrie. On pense à la
cause R-4045-2018, vous citez aussi la cause R-4100-2019. Donc, ils
ont trouvé le moyen de by-passer la régie par le projet de loi n° 34.
M. Cormier (Pascal) :
Les exemples que vous venez de mentionner sont des exemples du fonctionnement
d'une bonne régie. Il y a un monopole, lui, son travail, c'est d'amener des
revenus à son actionnaire, donc avec le moins de soucis possible, avec le moins
de difficultés, et la régie, comme je l'ai mentionné, est là pour... un marché,
s'assurer que les prix se rapprochent d'un prix un petit peu plus compétitif
qu'un monopole qui peut décider d'emblée quels tarifs imposer.
M. Gaudreault : Mais vous
dites quand même, en haut de la page 17 : «Sans le processus
d'audiences publiques et sans l'intervention de la régie dans la fixation des
tarifs, il existe un risque sérieux que les tarifs soient établis à un niveau
supérieur à celui du coût de service.»
Donc, il va avoir... Hydro-Québec va avoir
davantage champ libre, avec une adoption du projet de loi n° 34,
pour justement établir des niveaux supérieurs qui pourraient nuire à votre
industrie.
M. Cormier (Pascal) : Effectivement.
C'est particulièrement vrai dans une situation où on anticipe que le revenu
requis va croître de façon moins importante que dans le passé, tandis que,
l'inflation, on n'a aucune raison de penser que ça va être en moyenne
différent, et c'est très difficile à prévoir. Donc, on peut imaginer que ça
ressemble aux taux d'inflation qu'on a eus dans le passé.
M. Gaudreault : Votre
industrie est très présente, impliquée au niveau international. Ça doit être
assez féroce comme compétition. Selon votre expérience... peut-être
M. Quimper, qui peut nous renseigner là-dessus ou d'autres, est-ce que,
selon votre expérience, selon votre connaissance, il y a des systèmes
comparables à ce que veut implanter le ministre avec le projet de loi n° 34 ailleurs dans le monde?
M. Quimper (Pierre-Luc) :
Pas à ma connaissance, non.
M. Gaudreault : Il y a
toujours un régulateur à quelque part ou un système semblable à la Régie de
l'énergie.
M. Quimper (Pierre-Luc) :
Alors, ça...
M. Cormier (Pascal) : Je vais
vous donner un exemple. En Ontario, les causes tarifaires d'Hydro One sont
aux deux ans. Elles ne sont pas aux années comme au Québec. Toutefois, c'est
aux deux ans au coût de services. C'est une prévision du coût de service sur
les deux prochaines années. C'est la même logique, la même mécanique qui se
fait présentement au Québec, mais sur deux ans. Donc, oui, il y a des
différences, mais cinq ans...
M. Gaudreault : ...sur le
principe, il y a un régulateur.
M. Cormier (Pascal) : Non, je
n'ai jamais vu de... avec les recherches que j'ai faites, je n'ai jamais vu de
détermination de tarifs actuellement, là, dans ce qui se passe en ce moment,
qui est basée sur autre chose que le coût de services.
M. Gaudreault : Écoutez, je
lance une perche, vous me direz si je suis dans le champ. Concernant les
relations, par exemple, sur les marchés avec les Américains entre autres, on
sait que la FERC, du côté des États-Unis, est très puissante, a signé des
ententes avec le Québec, avec le Canada, entre autres sur la fiabilité du
système. Il y a eu des causes historiques, dans le passé, là, sur la question
de la fiabilité du système, entre autres après, j'allais dire, le déluge, là,
mais le verglas de 1998, bon, et ainsi de suite, les grandes... il y avait une
méga panne, là, de l'ensemble du Québec, je ne me souviens plus en quelle
année. Est-ce que... parce qu'on sait qu'en même temps
Hydro-Québec TransÉnergie est exclue du projet de loi n° 34, on pense
à Hydro-Québec Distribution, est-ce que néanmoins on peut penser que... ou
anticiper des interventions de la FERC du côté des États-Unis à la suite de
l'adoption d'un projet de loi n° 34 sur la base du
libre marché, par exemple, ou des règles?
M. Cormier (Pascal) : Il faut
remettre en contexte dans les... en 1996, dans la politique énergétique du
gouvernement, il était mention que le gouvernement avait l'intention de
demander à Hydro-Québec de demander un permis pour transiger aux États-Unis,
puis effectivement une des obligations entre autres c'est que son réseau de
transport soit accessible à tous, que c'est un «open access» en anglais, et
aussi qu'il y ait un marché de gros pour que les producteurs américains
puissent également vendre à des clients au Canada. Donc, ce qu'on appelle la
réciprocité, et ces conditions de réciprocité là doivent être... et la FERC a
reconnu le rôle de la régie, a mentionné les changements législatifs qui
avaient eu lieu en 1996, de mémoire, là, 1996 ou 1997, puis ils ont reconnu
l'indépendance de la régie qui, selon la FERC, avait pratiquement le même
pouvoir que la FERC elle-même. Donc, à notre avis, le projet de loi n° 34
fait en sorte que, par exemple, les approvisionnements du distributeur... En ce
moment, à chaque année, les approvisionnements du distributeur...
M. Cormier (Pascal) :
...puis ils ont reconnu l'indépendance de la régie qui, selon la FERC, avait
pratiquement le même pouvoir que la FERC elle-même. Donc, à notre avis, le projet
de loi n° 34 fait en sorte que, par exemple, les approvisionnements du
distributeur... En ce moment, à chaque année, les approvisionnements du
distributeur sont évalués à la régie. C'est public, tous les... on peut savoir
quel fournisseur a fourni quel contrat, puis il y a une dispense d'aller en
appel d'offres, puis cette dispense-là de la régie était particulièrement intéressée
à savoir est-ce que ça va tous à l'affilié, parce qu'on sait qu'Hydro-Québec,
c'est un des fournisseurs d'Hydro-Québec distribution, Hydro-Québec production.
Donc, là, il va y avoir un quatre ans de
boîte noire où on ne saura pas qu'est-ce qui se passe là-dedans.
Le Président (M. Lemay) :
Merci beaucoup, M. Cormier, M. Quimper, M. Charlebois, merci de
votre contribution aux travaux de la commission. Je suspends maintenant les
travaux quelques instants afin de permettre aux représentants de l'Union des
consommateurs de prendre place.
(Suspension de la séance à 15 h 46)
(Reprise à 15 h 48)
Le Président (M. Lemay) :
Alors, nous reprenons nos travaux. Je souhaite la bienvenue aux représentants
de l'Union des consommateurs, je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période
d'échanges avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous
présenter ainsi que les personnes qui vous accompagnent et ensuite procéder à
votre exposé. La parole est à vous.
M. Décary (François) : M. le
président de la commission, M. le ministre, messieurs, mesdames les députés,
mon nom est François Décary, je suis président de l'Union des consommateurs.
J'ai à ma droite Mme FranceLatreille, directrice de l'Union des consommateurs et Mme Viviane
de Tilly, analyste en énergie à l'Union des consommateurs. C'est vraiment un
plaisir d'être ici, puis merci de nous avoir invités.
L'UC est un regroupement d'associations de
consommateurs partout au Québec. On a 11 membres qui couvrent des régions
comme Laval, Chaudière-Appalaches, Bas-Saint-Laurent. En fait, nos associations
de consommateurs rencontrent des centaines de familles et d'individus aux
prises avec des problématiques de paiements, notamment avec Hydro-Québec, puis
on conclut des milliers d'ententes par année pour eux et avec eux. L'UC porte
un très grand intérêt, l'Union des consommateurs porte un très grand intérêt
aux enjeux énergétiques, notamment la fixation des prix, à l'interfinancement,
au traitement des plaintes et aux ententes de paiement. Évidemment, l'Union des
consommateurs travaille beaucoup avec des ménages qui ont des faibles revenus
puis qui ont des situations d'endettement préoccupantes.
• (15 h 50) •
L'Union des consommateurs a de sérieuses
réserves par rapport au p.l. 34, le projet de loi n° 34. On note
aussi que l'ensemble des associations de consommateurs émettent des réserves
puis sont craintives, que ce soit Option Consommateurs qui va présenter après
nous, puis la Coalition des associations de consommateurs également. L'Union
des consommateurs croit fondamentalement que les mécanismes qui favorisent
l'indépendance et la transparence sont garants d'une meilleure gouvernance et
de choix plus réfléchis. On va en faire des exemples plus précis...
M. Décary (François) :
...des réserves, qu'ils sont craintifs, que ce soit Option Consommateurs
qui va présenter après nous, puis la Coalition des associations de
consommateurs également.
L'Union des consommateurs croit fondamentalement
que les mécanismes qui favorisent l'indépendance et la transparence sont
garants d'une meilleure gouvernance et de choix plus réfléchis. On va en faire
des exemples plus précis. D'ailleurs, c'est ce qu'on voit partout aussi quand
on parle de bonnes pratiques de gouvernance que ce soit la responsabilité
sociale des entreprises, on invite les entreprises à mieux divulguer, à plus
divulguer, puis à mettre en place des mécanismes qui vont permettre une plus
grande transparence avec des indicateurs qui sont normés.
L'Union des consommateurs n'est pas
convaincue que le projet de loi n° 34 sera plus avantageux pour les
consommateurs résidentiels que le statu quo. Puis enfin, l'union des... c'est
facile de dire que l'Union des consommateurs a des grandes réserves puis est
craintive par rapport au projet de loi n° 34, mais on souhaite aussi vous
proposer des mesures alternatives. Ça fait qu'on va faire preuve de pragmatisme
aussi, puis je pense que le gouvernement actuel aussi a fait preuve de
pragmatisme dans sa façon de gouverner depuis son élection, ça fait que, nous
aussi, on voulait vous proposer des mesures qui pourraient atténuer certains
des défauts qu'on a notés par rapport à au projet de loi n° 34.
Ça fait que merci de nous recevoir, et je
vais laisser la parole à Mme France Latreille.
Mme Latreille (France) :
Bonjour. La Régie de l'énergie a été instaurée, en 1996, par l'adoption du
projet de loi n° 50. Ce projet de loi répondait aux attentes des
participants du débat public sur l'énergie en donnant à la régie pleins
pouvoirs pour réglementer la production, le transport et la distribution de
l'électricité dans une perspective de développement durable. Le vaste débat
d'idées de l'époque avait permis de poser un regard très critique et très sain
sur le conflit d'intérêts dans lequel se trouvait le gouvernement dans son rôle
d'actionnaire d'Hydro-Québec.
On peut lire, dans le rapport de la Table
de consultation du débat public sur l'énergie au Québec, que l'on reprochait au
processus qui était en place de ne pas permettre un véritable examen des
demandes de modifications tarifaires déposées par Hydro-Québec, de ne pas
autoriser une authentique participation du public, et surtout de placer le
gouvernement en conflit d'intérêts potentiel puisque l'État défenseur de la
collectivité peut être tenté, dans ses décisions, de privilégier les intérêts
de l'État actionnaire ou même d'y introduire des considérations purement politiques.
Or, depuis 1996, les gouvernements qui se
sont succédé à l'Assemblée nationale, tous partis confondus, ont lentement mais
sûrement érodé les compétences et champs d'action de la régie et introduit des
considérations purement politiques. La régie n'est désormais plus qu'un pâle
reflet de ce qu'elle était auparavant. À la page 7 de notre mémoire, vous
pouvez voir les six lois qui, au fil des années, ont réduit les pouvoirs de la
régie traduisant des interventions directes du gouvernement ou contrecarrant l'opposition
d'intervenants qui soutenaient les intérêts des consommateurs québécois. Force
est de constater que la régie de 2019 n'a déjà plus rien à voir avec celle de
1996. Avec le projet de loi n° 34 qui soustrait à l'analyse, par la régie,
les projets d'investissement, les programmes commerciaux et les hausses
tarifaires, le gouvernement met non seulement toute sa confiance en Hydro-Québec,
mais renonce à un exercice de validation des propositions d'Hydro-Québec
alimenté d'une variété de points de vue reflétant l'intérêt public.
Notre organisme... selon notre organisme,
le projet de loi n° 34 contredit la raison d'être de la régie qui assurait
la fin des interventions du gouvernement dans la gestion d'Hydro-Québec. C'est
la raison pour laquelle nous recommandons au gouvernement de ne pas adopter le
projet de loi n° 34, mais plutôt de redonner à la régie les compétences
que lui conférait la loi votée en 1996. Si le projet de loi n° 34 était
adopté par le gouvernement, les tarifs d'électricité de l'année 2019‑2020
auront été les derniers à être fixés par la régie à la lumière d'une analyse
des revenus et dépenses d'Hydro-Québec Distribution incluant les projets
d'investissement et les programmes commerciaux.
En outre, le projet de loi n° 34
anéantit des années de travaux réglementaires, d'audiences, de réflexion et
d'implantation de mécanismes de rendement incitatif et sonne le glas du
mécanisme de traitement des écarts alors que tous deux venaient à peine d'être
implantés. En fait, le projet de loi n° 34 a toutes les apparences d'un
pied de nez à la régie et aux intervenants. Ni le gouvernement ni
Hydro-Québec Distribution n'auront désormais à dévoiler ni partager les
surplus de rendement. Désormais...
Depuis 2017, le mécanisme de traitement
des écarts de rendement s'applique aux résultats d'Hydro-Québec Distribution.
Si le taux de rendement excède celui autorisé par la régie, les excédents
seront partagés entre les clients et Hydro-Québec lors de l'établissement des
tarifs des années subséquentes. Un écart de rendement de 36 millions
a été constaté à l'issue de l'année 2017. En vertu de ce mécanisme,
Hydro-Québec a remis une partie de cette somme à sa clientèle en réduisant de
18 millions les revenus requis de l'année 2019‑2020. Soulignons que
c'est parce qu'un tel mécanisme n'existait pas auparavant qu'Hydro-Québec
Distribution a pu réaliser et conserver ces surplus...
Mme Latreille (France) :
...a remis une partie de cette somme à sa clientèle en réduisant de 18 millions
les revenus requis de l'année 2019‑2020. Soulignons que c'est parce qu'un
tel mécanisme n'existait pas auparavant qu'Hydro-Québec Distribution a pu
réaliser et conserver ces surplus.
Je vais passer à un autre sujet. Le
quatrième l'alinéa de l'article 52.1 de la Loi sur le Régie de l'énergie
stipule que la régie ne peut modifier le tarif de la catégorie consommateur
afin d'atténuer l'interfinancement entre les tarifs applicables à des catégories
de consommateur. Rappelons que ce sont les clients résidentiels qui bénéficient
de l'interfinancement en générant moins de revenu qu'il n'en faut pour assurer
leur coût de service de l'électricité. L'interfinancement est sous-jacent au
pacte social à la source la nationalisation de l'électricité. En 2006 que la
régie établissait la balise de référence de l'interfinancement des tarifs
d'électricité des clients domestiques à 81 %. Or, depuis 2006,
l'interfinancement des tarifs des clients résidentiels s'amenuise graduellement
et s'établit maintenant à 88 %.
L'interfinancement des tarifs
d'électricité est un sujet d'intérêt public, et chaque dossier tarifaire était
l'occasion unique d'en faire le suivi. Or, la disparition des dossiers
tarifaires annuels d'Hydro-Québec Distribution mettra l'indice
d'interfinancement à l'abri des regards intéressés, ce qui desservira l'intérêt
public. Ce n'est qu'au terme des cycles de cinq ans, où les informations sur
les coûts et les revenus seront rendues disponibles, que nous pourrons juger de
l'érosion de l'interfinancement. Donc, si le gouvernement devait adopter le
projet de loi n° 34, ce qu'on ne recommande pas, nous lui recommandons
d'en modifier préalablement l'article 17 afin d'ajouter à la liste des
informations à transmettre par Hydro-Québec à la régie, un suivi de
l'interfinancement entre les tarifs d'électricité.
L'Union des consommateurs, comme mon
collègue le disait tantôt, on est un regroupement national d'associations de
consommateurs résidentiels qui intervient à la régie. L'organisme a
particulièrement à coeur les intérêts des ménages les plus pauvres. Ses
interventions visent à maintenir les factures d'électricité les plus basses
possible, mais également à ce que les conditions de service, particulièrement
en matière de recouvrement, tiennent compte de la vulnérabilité des moins bien
nantis. Année après année, la régie a balayé du revers de la main et de façon
presque systématique toutes nos recommandations, tant en ce qui concerne les
ententes de paiement qu'en ce qui touche la stratégie tarifaire. Or, au
printemps dernier, la Vérificatrice générale du Québec a déposé à l'Assemblée
nationale un audit de performance sur le soutien aux ménages à faible revenu et
le service à la clientèle résidentielle d'Hydro-Québec qui reprenait nombre de
nos constats.
L'Union des consommateurs a maintenant en
main les informations, analyses et conclusions objectives et inestimables pour
faire contrepoids aux prétentions d'Hydro-Québec Distribution et réclamer, dans
le cadre des dossiers tarifaires, des mesures plus justes et efficaces pour les
ménages à faible revenu. Or, si le projet de loi n° 34 est adopté, ce
n'est que dans cinq ans que les groupes de défense des droits des consommateurs
pourront espérer obtenir des correctifs aux mesures de support aux ménages à
faible revenu proposées par Hydro-Québec Distribution à moins d'initier
eux-mêmes à la régie des demandes relatives aux conditions de service
d'Hydro-Québec.
Le Président (M. Lemay) :
Mme Latreille, en conclusion, peut-être 15 secondes. Je vois que vous
n'avez pas encore terminé votre mémoire, mais...
Mme Latreille (France) :
Je n'ai pas encore terminé. Je vais faire le plus vite possible. Donc, ce qu'on
demande, c'est... J'en ai pour deux minutes encore. Si le gouvernement devait
adopter le projet de loi n° 34, nous...
Le Président (M. Lemay) :
Mme Latreille, en fait, à ce stade-ci, nous allons procéder avec la
période d'échange avec les membres du gouvernement. Et si c'est possible, vous
toujours revenir, mais bref, pour le moment, la parole au ministre. M. le
ministre, la parole est à vous.
Mme Latreille (France) :
Très bien.
M. Julien : Oui. Puis
loin de moi de ne pas vous laisser conclure l'idée, mais c'est qu'on aura
l'occasion d'échanger. Puis je vais vous laisser bien du temps pour parler.
Soyez-en assurée.
Mme Latreille (France) :
...
• (16 heures) •
M. Julien : Je suis très
heureux de vous rencontrer aujourd'hui, puisque vous représentez des
consommateurs. Donc, on parle beaucoup en fin de compte de renseignements, là,
par rapport aux pouvoirs de la régie. Bon. Moi, mon impression, puis plus que
mon impression, là, notre volonté, c'est oui à tout le processus de cause
tarifaire, sur lequel vous m'amenez des précisions qui effectivement me
laissent un peu songeur, puis que, comme ça, je vais les regarder plus avant,
mais on change la périodicité, mais sur certains aspects qui n'étaient pas
nécessairement la tarification, mais tout en fin de compte, la notion... Parce que
tu sais, pour nous, le projet de loi ne vient pas jouer sur l'interfinancement.
D'un autre côté, il y a la notion de connaître comment se comporte
l'interfinancement, de ce que j'en conçois. Donc, vous avez en annexe II,
sans tous les nommer quand même, annuellement, beaucoup d'informations vont
continuer de passer par la régie. Puis comme j'ai la liste de toutes les
responsabilités et pouvoirs de la régie, en tout cas j'ai fait faire des
colonnes, statu quo, changement, on voit que...
16 h (version non révisée)
M. Julien : ...comment se
comporte l'interfinancement, de ce que j'en conçois. Donc, je voulais... En
annexe II, sans tous les nommer quand même, annuellement, beaucoup d'informations
vont continuer de passer par la régie, puis quand... j'ai la liste de toutes
les responsabilités et pouvoirs de la régie, en tout cas j'ai fait faire des
colonnes, statu quo, changement, on voit que, les changements, c'est beaucoup
par rapport... en tout cas, notre objectif, par rapport à la cause tarifaire
sur une base annualisée.
Au-delà de tout ce que vous allez nous
dire par rapport aux enjeux, moi, il y a un enjeu sur lequel je veux avoir
votre réflexion, puisqu'effectivement, ce matin, il y avait quelqu'un qui
parlait de quand on croise du monde au barbecue, puis moi, j'ai croisé du monde
tout l'été au barbecue, puis il y a du monde qui m'en ont parlé beaucoup,
spécifiquement, parce que je suis dans le dossier, les gens étaient contents
par rapport à la prévisibilité. Puis ils disaient : O.K., c'est un gel
tarifaire, puis après ça à l'inflation. Les gens sont satisfaits de cette
prévisibilité-là. De l'autre côté, a contrario, quand j'entends certains
groupes, ils nous disent : Oui, mais vous avez regardé l'inflation des
15 dernières années par rapport au tarif, mais ce n'est pas ce que ça
représente dans le futur. Mais sur cette base-là, tout ce que j'entends
actuellement, c'est... parce qu'il y en a qui vont parler du choc tarifaire, dans
cinq ans, mais tous les intervenants qui nous parlent de la clause à
l'inflation nous disent : C'est trop élevé par rapport à ce que ça devrait
être réellement, selon ce qu'on voit. Est-ce que c'est-à-dire, en fin de
compte, que si les consommateurs, les gens que je croise qui me disent :
Nous autres, on aime ça un gel, puis à l'inflation pour les quatre prochaines
années, et si tous ceux qui mentionnent que c'est trop élevé par rapport au
réel, par rapport au système, quand il y aura un «rebasing» dans cinq ans, ça
veut dire que les gens sont satisfaits, puis, au pire, ça sera mieux dans cinq
ans?
Alors, les consommateurs, qu'est-ce qu'ils
ont à craindre par rapport à la tarification dans les cinq prochaines années,
selon vous?
Le Président (M. Lemay) :
Alors, Mme Latreille, ou M. Décary?
Mme de Tilly (Viviane) :
Mme de Tilly.
Le Président (M. Lemay) :
Comment? Mme de Tilly? Allez-y, Mme de Tilly.
Mme de Tilly (Viviane) : En
fait, ce qu'ils ont à craindre, c'est que, les tarifs qu'ils vont payer...
Une voix
: ...
Mme de Tilly (Viviane) : Il
n'était pas ouvert. O.K. Ce que les consommateurs ont à craindre, c'est que les
tarifs qu'ils vont payer au cours des cinq prochaines années soient plus élevés
que ceux qu'ils auraient eus s'il y avait eu vraiment audience et examen d'un
dossier tarifaire à la régie.
Alors, vous parlez de prévisibilité.
Alors, je l'ai entendu beaucoup ce mot-là depuis le mois de juin,
«prévisibilité». Je vous dirais que ce n'est pas un concept de base en tarification.
On parle souvent de stabilité des prix, mais pas de prévisibilité, parce qu'à
quoi ça nous amène de dire : Oh! je prévois que ça va être à l'inflation
ou bien je prévois que ça va être à 3 % par année. Quelle importance si ce
n'est pas le juste prix? Et le consommateur, lui, a intérêt à payer le juste
prix.
Maintenant, on a parlé des risques d'un
impact tarifaire dans cinq ans. Effectivement, ce risque-là existe, entre
autres, Hydro-Québec, ses projets d'investissement. Hydro-Québec Distribution
aura des projets d'investissement, aura des programmes commerciaux qui ne
seront plus examinés par la régie. On ne pourra plus savoir si ça a été
prudemment acquis, si ça ne répond pas nécessairement à des demandes du
gouvernement. Bref, dans cinq ans, on pourra arriver avec des revenus requis,
vraiment supérieurs, qui auront connu une croissance inhabituelle, parce
qu'Hydro-Québec aura eu les coudées franches pour faire un peu les programmes
d'investissement qu'elle voulait. Alors, oui, il y a un risque de choc
tarifaire dans cinq ans.
M. Julien : O.K., mais juste
pour être certain de bien vous suivre, Mme de Tilly, puis je sais que vous
avez de très bonnes connaissances par rapport à ce domaine-là, donc vous allez
peut-être m'éclairer, mais, quand même, dans ce qui est déposé sur base
annuelle, tout suivi des investissements est déposé, là, sur base annuelle,
c'est ce qui est prévu, en fin de compte, dans l'annexe, donc quand vous
dites... parce que... Tu sais, j'essaie toujours, en réalité, a contrario d'une
information, j'ai l'autre information. Alors, les gens, depuis les deux
dernières journées, se pointent beaucoup ici en disant : À l'inflation,
là, il y en a même qui ont pris des termes un peu hasardeux, là, mais c'est
trop élevé par rapport à ce qu'on devrait s'attendre dans les prochaines
années. Puis en même temps, vous nous dites : Oui, mais il pourrait avoir
un choc tarifaire après cinq ans, parce que les besoins ne seraient pas
suffisants. Mais nous, tout ce qu'on souhaite faire, c'est allonger la
périodicité. Parce qu'on trouve, en réalité qu'aux 12 mois, c'est
peut-être trop rapide. Et je vous le réitère, là, vous représentez des
consommateurs que je croise à tous les jours, puis eux, ils nous disent que, si
vous n'aimez pas la qualifier de prévisibilité, c'est : On aime bien
savoir que, dans les prochaines années, le tarif hydroélectrique va être à
l'inflation après avoir eu une période de gel d'un an.
Donc, qu'est-ce qui, dans l'information,
ici, ne nous permettrait pas de...
M. Julien : ...si vous n'aimez
pas la qualifier de prévisibilité, c'est... On aime bien savoir que dans les
prochaines années, notre tarif hydroélectrique va être à l'inflation, après
avoir eu une période de gel d'un an. Donc, qu'est-ce qui, dans l'information,
ici, ne nous permettrait pas de capter, selon vous, comme information,
qu'est-ce qui sera déposé, sur base annuelle d'Hydro-Québec, les éventualités
que vous mentionnez?
Le Président (M. Lemay) : Mme
de Tilly.
Mme de Tilly (Viviane) : Oui,
en fait, vous avez raison. Hydro-Québec Distribution va déposer à la régie,
dans son rapport annuel, le suivi de ses investissements. C'est de
l'information, ce n'est pas une décision. La régie n'examinera pas la
pertinence et le caractère prudemment acquis de ces investissements-là. Ça va
être de l'information comme Hydro-Québec, présentement, dépose, de
l'information dans son rapport annuel. Mais, si...
M. Julien : Mais juste un
instant. Mais je comprends qu'on nous a beaucoup dit que le volet transparence
était important, mais vous, vous nous dites : C'est le volet... pas
transparent, c'est le volet contraignance.
Mme de Tilly (Viviane) :
Examens, analyses, puis de reconnaître le caractère prudemment acquis. Dans le
mémoire, on parle, par exemple, du programme de... du projet d'installation de
bornes de recharge pour véhicules électriques. Alors, la décision n'a pas été
rendue. Cependant, la plupart des intervenants réguliers à la régie mettaient
en doute le caractère réaliste des hypothèses. Alors, ce genre d'exercice là ne
se fera plus, et donc Hydro-Québec pourra faire... que ce soit avec un
gouvernement ou un autre, mais pourra traduire les intentions d'un gouvernement
dans ses projets d'investissements ou dans ses programmes commerciaux, comme la
conversion du chauffage des clients au commercial et à l'institutionnel.
C'était très avantageux pour le gouvernement qu'Hydro-Québec fasse payer la
conversion par ses clients...
M. Julien : Avant de passer la
parole à mes collègues, qui ont des questions, Mme de Tilly, d'un autre côté,
quand je vois toute l'information... Puis on s'y est bien attardés, là, quand
on a développé le projet de loi. On s'est dit : Aïe! on veut qu'il y ait
de l'information suffisante pour... en réalité, les intervenants puissent faire
des observations et des constats et, à la limite, faire des interventions, qui
ne seraient pas sur la base d'une cause tarifaire, mais qui reviendraient sur
une base de cinq ans.
Alors, avec les informations qui sont
déposées sur base annuelle, prévue au p.l. n° 34,
vous, là, comme personne qui connaissez ça, allez-vous être en mesure, au-delà
du fait que vous ne pourrez pas vous asseoir dans une cause tarifaire à la
régie, d'interpréter les informations qui sont déposées et de faire votre
évaluation de ce qui se passe?
Le Président (M. Lemay) : Mme
de Tilly.
Mme de Tilly (Viviane) : Non,
je ne crois pas que c'est suffisant. Je vous dis : Ces informations-là
sont déjà déposées. Et c'est... Il n'y a pas de questionnement par les
intervenants. Il y a... Contrairement à Énergir. Quand Énergir dépose ses
informations sur une base annuelle, il y a quand même un questionnement, il y a
des... il y a une procédure réglementaire. Pour l'instant, il n'y en a pas avec
le rapport annuel d'Hydro-Québec Distribution. Et je pourrais vous dire :
Mais qu'est-ce que je fais, moi, avec cette information-là si j'apprends
qu'Hydro-Québec a amorcé un programme d'investissement ou un programme
commercial? Il est parti, là, le train est parti. Qu'est-ce que je fais, comme
intervenant, si je trouve que ça n'a pas de bon sens? D'autant plus que je ne
pourrai même pas, comme intervenant, l'analyser, parce que je n'aurai pas
l'analyse de rentabilité, parce que je n'aurai pas la justification, parce que
je n'aurai rien. C'est uniquement...
M. Julien : Alors, juste un
dernier petit point là-dessus, puisque je sais que mes collègues... De l'autre
côté, quand... Ce qu'on trouve bien du p.l. n° 34,
c'est de transférer le risque à Hydro-Québec pour qu'il gère sa performance.
C'est-à-dire qu'on vient dire : Les revenus, c'est ça, puis on s'attend de
vous que vous soyez performants. Quelle serait la volonté d'Hydro-Québec,
justement, de ne pas démontrer cette performance-là ou faire des investissements
qui seraient hasardeux en termes, en fin de compte, de rendement, on va dire ça
comme ça? Vous mentionnez certains aspects, là, de programmes, etc., là.
• (16 h 10) •
Mme de Tilly (Viviane) : En
fait, Hydro-Québec, lorsqu'il va se présenter dans cinq ans pour faire changer
son tarif, aura déjà accumulé... Il va amener son passé, là, il va amener son
cinq ans d'investissements. Il va se présenter devant la régie, puis c'est très
simple, si ses revenus requis ont augmenté, il va obtenir la hausse tarifaire dont
il a besoin pour rencontrer ses revenus requis là. Alors, son risque, je crois
qu'il y en a peu. D'autant plus qu'encore une fois, les tarifs vont augmenter à
l'inflation, alors que, comme disait M. Cormier, de... sur le banc précédent...
Il dit qu'il n'y avait absolument rien qui expliquait ou qui justifiait que les
dépenses augmentent à l'inflation dans les prochaines années.
Vous aviez votre graphique, là, avec les
hausses tarifaires depuis 15 ans. Le contexte a beaucoup changé depuis 15 ans.
Entre autres, depuis 2007, il n'y a à peu près plus...
Mme de Tilly (Viviane) :
...sur le banc précédent. Il me dit qu'il n'y avait absolument rien qui
expliquait ou qui justifiait que les dépenses augmentent à l'inflation dans les
prochaines années.
Vous aviez votre graphique, là, avec les
hausses tarifaires depuis 15 ans. Le contexte a beaucoup changé depuis
15 ans. Entre autres, depuis 2007, il n'y a à peu près plus de croissance
de la demande. Et donc les prochains approvisionnements qui seront utilisés, ça
va être vraiment du patrimonial qui ne coûte pas cher. Il n'y a pas de gros programmes
d'investissement pour le réseau. Alors, en principe...
M. Julien : C'était l'occasion
quand même d'étirer la période de 12 mois parce que, quand même, on ne
s'en va pas aux calendes grecques, là, on s'en va dans cinq ans, mais pour
vous, tu sais... parce que sinon... Pourquoi la période de 12 mois pour
vous est essentielle? Pourquoi on ne peut pas augmenter la périodicité?
Mme de Tilly (Viviane) :
...non, mais je crois qu'il doit y avoir une logique. La période de
12 mois, c'est qu'on couvre un hiver, hein, parce qu'Hydro-Québec, ne
serait-ce qu'en approvisionnement ou en demandes ou en revenus, c'est souvent
les hivers qui déterminent... qui sont des gros facteurs explicatifs des
revenus et des chances...
M. Julien : Excusez-moi.
Vous voudriez laisser la période... Je comprends que, sur une base annuelle,
c'est quatre saisons...
Le Président (M. Lemay) :
Excellent. Donc, à ce moment-ci, je vais céder la parole à la députée de
Laviolette—Saint-Maurice. La parole est à vous.
Mme Tardif : Merci, M. le
Président. Merci beaucoup. Merci pour votre travail aussi. C'est important dans
la société que vous soyez présents.
J'entends, par contre, avec souci et
crainte ce que vous nous apportez. J'ai entendu que vous avez de sérieuses
réserves, que vous aimeriez des choix plus réfléchis, plus de transparence, et
c'est ce que je croyais que le gouvernement avait fait parce que si ce projet de
loi là est sur pied, c'était justement pour être plus équitable et pour
redonner de l'argent dans les poches des citoyens et citoyennes, et je n'ai pas
entendu de vous ce volet-là.
Je comprends que la régie telle qu'elle
était en 1996 était l'entité qui était logiquement constituée et qui vous
plaisait le plus. Il y a eu six ou sept modifications de loi depuis ce
temps-là. Et vous semblez dire que les consommateurs ont perdu à chaque fois
que la régie a été modifiée. Et vous craignez...
Là, il y a deux volets. Il y a le volet de
maintenant où, nous, on se dit que l'argent va être remis dans les poches des
contribuables et que l'indice du coût de la vie va être inférieur à ce qu'il a
été au cours des x dernières années. Il y a ce volet-là et il y a de volet de
dans... Dans cinq ans, là, vous semblez trouver que c'est trop loin, mais vous
semblez craindre aussi à des choses qui pourraient de passer dans cinq ans.
Donc, placez-moi un peu par rapport à la régie. Est-ce que vous voulez qu'on
revienne à ce qui était en 1996 par rapport aux pouvoirs, à ce qui était...
M. Décary (François) :
...un élément de réponse...
Le Président (M. Lemay) :
M. Décary, allez-y.
M. Décary (François) :
Merci beaucoup, M. le Président. Juste un élément de réponse. Je suis loin
d'être un spécialiste comme Mme de Tilly. Mon travail à moi, je... Nos
bureaux sont à Thetford Mines, on a des points de service à Saint-Georges,
Sainte-Marie, ça fait qu'on est en Beauce. On accompagne les consommateurs dans
une base quotidienne. Ça fait que cette mécanique-là, je ne la comprends pas
aussi bien que les illustres présentateurs qui étaient là, puis vous
certainement.
Mais c'est sûr qu'on ne déplore pas tout
ce qui a été fait dans ces années-là. On déplore certaines pertes à chaque
processus législatif. Mais, par exemple, tu sais, le mécanisme de rendement
incitatif puis les deux mécanismes qu'on nommait à la section III, c'est
des corrections qui, pour nous, pouvaient corriger notamment la question des
surplus qui étaient accumulés puis qui finalement s'en allaient auprès de
l'actionnaire principal puis Hydro-Québec. C'était quasiment un incitatif de
cacher les surplus, là. Puis je ne veux pas être... mais... Ça fait qu'on voit
qu'il y a eu des peaufinements qui ont été aussi positifs. Ceci étant dit, on a
vu certainement un affaiblissement.
Puis l'autre chose que je voudrais
apporter aussi, les causes tarifaires sont des opportunités pour nous aussi
d'avancer des enjeux qui concernent les consommateurs de tous les jours, puis
les consommateurs, notamment ceux qui ont des difficultés de paiement. Ça fait
que pour nous ça a tout le temps été une opportunité aussi pour poser des
questions aux...
Le Président (M. Lemay) :
Merci, M. Décary. À ce moment-ci, je vais retourner la parole à M. le
ministre, qui a une nouvelle question.
M. Julien : Une... Dans
vos conclusions, là, la dernière recommandation : «De limiter les risques
financiers des organismes qui initient des demandes devant la régie en
modifiant l'article 2 du Règlement sur les frais payables à la régie afin
que les organismes reconnus comme intervenants réguliers à la régie qui
initient des demandes soient soustraits de payer des frais d'accompagnement à
la présentation de leur demande.»
Le lien avec le p.l. n° 34,
je ne comprends pas. Qu'est-ce que ça vient faire dans le p.l. n° 34,
sur le débat?
Mme de Tilly (Viviane) :
C'est... Oui, je vais répondre. C'est qu'à plusieurs reprises au cours des
dossiers tarifaires nous pouvions aborder des sujets qui concernaient les
conditions de service. Les conditions de service sont également régies par la
régie et le projet de loi n° 34 n'enlève pas ce pouvoir-là, n'enlève pas
ces compétences-là à la régie. Enfin, c'est comme ça qu'on l'interprète.
Cependant, les conditions de service sont regardées par Hydro... je crois que
les autorités ont été regardées en...
Mme de Tilly (Viviane) : ...des
conditions de service. Les conditions de service sont également régies par la
régie, et le projet de loi n° 34 n'enlève pas ce
pouvoir-là, n'enlève pas ces compétences-là à la régie. Enfin, c'est comme ça
qu'on l'interprète. Cependant, les conditions de service sont regardées par
Hydro... Je crois qu'elles ont été regardées en 2000 et en 2016... un dossier
global sur les conditions de service. De temps en temps, dans les dossiers
tarifaires, on pouvait arriver avec des sujets qui touchaient des conditions de
service comme les ententes de paiement. Il n'y en aura plus, de dossiers
tarifaires, ou il va y en avoir aux cinq ans. Alors, si, comme organisme, on
voulait initier un dossier sur les conditions de service, ça représenterait
pour nous un gros risque financier, parce qu'on doit payer. Si on veut initier,
on paie. Alors, ce qu'on recommande, c'est changer peut-être un petit peu la
loi, de l'alléger...
Le Président (M. Lemay) : Merci,
Mme de Tilly. Je dois vous arrêter à ce moment-ci. Avant de céder la parole à
l'opposition officielle, j'ai une question pour M. le ministre. Tout à l'heure,
nous avions Sylvain Audette, de la Chaire de gestion du secteur de l'énergie de
HEC Montréal, on avait eu une demande d'un... si vous acceptiez de faire un
dépôt d'un document que vous aviez présenté. J'aimerais vous poser la
question : Est-ce que vous avez la réponse?
M. Julien : Oui, j'ai la
réponse, c'est non. C'est des notes, en fin de compte, internes, mais je pense
que les tarifications sont connues, en fin de compte, dans l'ensemble. Donc,
une petite recherche permettrait en réalité de voir les tarifications et les
taux de rendement exigés par les entreprises.
Le Président (M. Lemay) :
Merci beaucoup, M. le ministre. Maintenant, je cède la parole au député de
D'Arcy-McGee pour cette période d'échange.
M. Birnbaum : Merci, M. le
Président. M. Décary, Mmes Latreille et de Tilly, merci beaucoup de votre
exposé et de votre présence. Évidemment, vous parlez au nom d'un site et de
messieurs, mesdames québécois, québécoises touchés par cette loi, ce projet de
loi. Alors, évidemment, vos interventions sont très pertinentes et assez
détaillées. Nous sommes devant un projet de loi, et je trouve que des fois on
oublie de se rappeler qu'à ce point-ci il y a plusieurs options, dont l'option
de ne pas légiférer sur un sujet spécifique comme tel. J'imagine que, dans
votre rôle, vous aurez eu à témoigner devant la régie ponctuellement au nom des
consommateurs. Alors, je vous invite de nous parler un petit peu... Et je
comprends que vous avez bien énuméré quelques changements que... au fil des
années qui, de votre lecture, auraient limité la marge de manoeuvre, les
pouvoirs de la régie, mais en même temps vous êtes en train de dire, et c'est
la lecture de plusieurs devant nous, qu'on parle de compromettre le rôle de la
régie davantage et de façon sérieuse avec le projet de loi devant nous. Alors,
j'aimerais vous inviter à parler un petit peu de l'état actuel, et peut-être
pouvez-vous nous parler un petit peu de comment ça marche au nom des
consommateurs et consommatrices actuellement, avec l'échéancier annuel, avec
toute la transparence qui est exigée d'Hydro-Québec dans le régime actuel et
qu'est-ce qu'on est à risque de perdre avec le projet de loi devant nous?
Le Président (M. Lemay) : M.
Décary.
M. Décary (François) : Je
vais laisser vraiment la parole à Me de Tilly, c'est vraiment elle qui porte
ces dossiers-là à la régie.
Le Président (M. Lemay) : Mme
de Tilly.
Mme de Tilly (Viviane) : Si je
comprends bien, vous voulez savoir comment l'Union des consommateurs intervient
à la régie. O.K. L'Union des consommateurs, comme disait M. Décary, c'est un regroupement
d'associations, et nous avons un comité énergie. Et, au comité énergie, on
discute des enjeux des dossiers tarifaires. Lorsque la demande d'Hydro-Québec
arrive, en général, au mois d'août, on analyse le tout puis on choisit des
sujets sur lesquels on va intervenir. Évidemment, ça touche beaucoup les
conditions de service et, comme on le disait, les ententes de paiement ou les
structures tarifaires et leur impact sur les ménages à faibles revenus. On pose
des questions à Hydro-Québec qui répond assez bien, oui, il y a tout un
processus de demandes de renseignements, et on rédige nos mémoires et, ensuite,
on témoigne. Et, lorsque nous témoignons à la régie, l'Union des consommateurs
est souvent représentée par moi, mais souvent par un intervenant sur le
terrain, un conseiller budgétaire qui vient témoigner des réalités des ménages
à faibles revenus.
Alors, c'est un peu comme ça que ça se
passe, je ne sais pas si ça répond à votre question, mais...
• (16 h 20) •
M. Birnbaum : Mais j'essaie de
vraiment avoir vos précisions sur ce qui était à risque, spécifiquement dans le
processus qu'on propose de changer de façon radicale.
Mme de Tilly (Viviane) : Oui,
ce qui est le plus à risque, c'est de ne plus pouvoir... c'est notre perte de
parole et de ne plus pouvoir exprimer les difficultés des ménages à faibles
revenus, je parle au-delà, au-delà des hausses tarifaires...
M. Birnbaum : ...dans le
processus qu'on propose de changer de façon radicale.
Mme de Tilly (Viviane) : Ce
qui est le plus à risque, c'est de ne plus pouvoir, c'est notre perte de parole
et de ne plus pouvoir exprimer les difficultés des ménages à faible revenu.
Je... au-delà des hausses tarifaires sur lesquelles on ne pourra plus
intervenir et qu'on ne pourra plus remettre en question. Le travail à la régie,
c'est, dans cause tarifaire pour un intervenant, c'est de soulever les pierres
une par une et de chercher. Et de chercher comment on peut réduire les coûts,
de chercher si Hydro-Québec est efficace, de chercher si les prévisions sont
bonnes et... autant au niveau des revenus que des coûts. Et tout ça faisant que
les hausses tarifaires seront les plus basses possible.
Alors, maintenant, ça ne se passera plus
comme ça, hein? On devra prendre, on devra accepter une hausse qui est celle à
l'inflation sans savoir si elle représente vraiment la hausse nécessaire pour
donner un rendement suffisant à Hydro-Québec. Alors, ça, c'est vraiment un
risque.
Le Président (M. Lemay) : M.
Décary, vous voulez ajouter quelque chose?
M. Décary (François) : Oui,
brève intervention, si je peux me permettre en fait, la régie questionne Hydro-Québec
puis aussi lui soumet des recommandations qui vont favoriser une certaine
innovation sociale qu'on constate, puis justement plusieurs des ententes de
paiements, tu sais, des mécanismes qui ont été mis en place, c'est les
régisseurs qui ont... qui ont demandé à Hydro-Québec d'évaluer une façon de
formuler des ententes pour les ménages à faible revenu. Donc, il y a comme
un... cet aller-retour-là est intéressant aussi puis crée des opportunités
d'innovation sociale qu'on trouve intéressantes puis qu'on a un petit peu peur
de perdre, là.
Le Président (M. Lemay) : M.
le député de Laval-des-Rapides... excusez-moi, D'Arcy-McGee, allez-y.
M. Birnbaum : Merci, M. le
Président. Évidemment, nous avons un intérêt collectif, une responsabilité
d'État fiduciaire de retourner les trop-perçus et c'est une promesse du
gouvernement actuel. Selon vous, est-ce que ce projet de loi répond de façon
adéquate à cet engagement?
Le Président (M. Lemay) : M.
Décary.
M. Décary (François) : Bien
en fait, je ne suis pas économiste, puis évidemment c'est éminemment complexe
puis vous avez une équipe, puis donc... C'est difficile, mais on n'a pas été
convaincus au complet qu'en fait le projet de loi n° 34 permettait de
retourner les trop-perçus d'Hydro-Québec dans les dernières années, là, puis on
déplorait la situation des trop-perçus à l'origine, mais on n'est pas
convaincus absolument. Mais évidemment, là-dedans, on peut nous sortir presque
tous les chiffres, mais Viviane... Mme de Tilly...
Le Président (M. Lemay) : ...
Mme de Tilly (Viviane) : On
n'est pas convaincus que les trop-perçus sont retournés aux clients. Et, en
fait, si le projet de loi n° 34 s'était contenté d'aborder... si on
pouvait le saucissonner, puis, s'il s'était contenté d'aborder cette question
du retour des trop-perçus, ça aurait peut-être été plus supportable comme situation,
mais là, c'est vraiment d'enlever des pouvoirs à la régie et ça, c'est... je
crois que ce n'était pas nécessaire d'aller si loin...
Le Président (M. Lemay) :
Parfait, merci, Mme de Tilly. Donc, maintenant le député de Laval-des-Rapides
pour votre question.
M. Polo : Merci. Donc, écoutez,
là, depuis hier, le ministre ou, enfin, vous avez dit : depuis le mois de
juin, le terme prévisibilité, vous l'entendez en récurrence, mais, moi,
j'utilise le terme illusion hier parce qu'effectivement, ce projet de loi là
donne l'illusion aux consommateurs que les trop-perçus vont leur être
remboursés et vous venez de dire que, selon vous, ce n'est pas clair que les
trop-perçus vont leur être remboursés. Est-ce que j'ai bien compris?
M. Décary (François) : Vous
avez bien compris.
M. Polo : Parfait. Selon vous,
est-ce qu'un chèque en bonne et due forme auprès de tous les consommateurs
aurait été un meilleur mécanisme pour rembourser les trop-perçus auprès de la
population?
M. Décary (François) : Je ne
pense pas que l'Union des consommateurs a à s'immiscer dans les mécanismes de
redistribution des trop-perçus. Nous, c'est sûr qu'on va toujours favoriser les
mesures qui vont favoriser la justice sociale. Ça fait qu'en fait, des mesures
qui... puis évidemment qu'on se... lutte contre les hausses de tarifs, on lutte
contre des mesures qui sont régressives, là, tu sais. Par chez nous, à
Thetford-Mines, le... je m'excuse de parler de chez nous, mais l'état du
logement est en piètre état. Tu sais, c'est une ville qui a été minière qui est
en dévitalisation, puis on a des... Nous, on rencontre des familles qui paient
des 200 $ d'électricité, 300 $ d'électricité pour des très, très,
très petits appartements. On appelle ça des passoires, désolé.
Ça fait que, pour nous, diminuer au
maximum les tarifs d'électricité, c'est des mesures de justice sociale puis, en
fait, c'est pour ça aussi qu'on s'oppose à l'utilisation d'Hydro-Québec comme
levier de développement économique, comme, tu sais, la politisation d'Hydro-Québec,
pour nous, c'est quelque chose qui nous fait peur parce qu'en fait on côtoie
des familles à tous les jours qui peinent à payer leur électricité. Puis dans
la vie de quelqu'un c'est des catastrophes, là...
M. Décary (François) : ...d'Hydro-Québec
comme levier de développement économique, comme... Tu sais, la politisation d'Hydro-Québec,
pour nous, c'est quelque chose qui nous fait peur parce qu'en fait on côtoie
des familles à tous les jours, qui peinent à payer leur électricité, puis, dans
la vie de quelqu'un, c'est des catastrophes, là, humaines, là.
Ça fait qu'on n'a pas à se prononcer tant
que ça, mais c'est sûr que minimiser la hausse des tarifs, pour nous, c'est un
mécanisme qui est intéressant.
Le Président (M. Lemay) : M.
le député de Laval-des-Rapides.
M. Polo : Non, non, allez-y,
allez-y, madame.
Le Président (M. Lemay) : Ah!
Mme de Tilly, allez-y.
Mme de Tilly (Viviane) : Oui.
J'ajouterais brièvement que, bon, les surplus, on ne s'est jamais prononcés, on
n'a jamais demandé à ce qu'ils soient retournés aux consommateurs. Ce qu'on a
demandé surtout, c'est qu'on ait une régie efficace, et que, des surplus, il
n'y en ait plus. Et on regardait plus vers l'avant que vers l'arrière.
Et là, quelle tristesse, il y avait un
mécanisme de redistribution des écarts de rendement, qui commençait, là, à être
utilisé, et oups! oups! il n'y en a plus. Alors, les surplus, s'il y en a, ils
vont être séquestrés par Hydro-Québec, et on ne saura même pas à combien ils s'élèvent,
ces surplus-là.
Le Président (M. Lemay) : M.
le député.
M. Polo : Et c'est exactement
ma dernière question. Ce que vous êtes en train de dire, c'est que vous trouvez
qu'avec le nouveau mécanisme présenté au niveau du projet de loi n° 34
il sera très difficile, pour ne pas dire impossible, de déterminer quels seront
les écarts de rendement, quels seront les trop-perçus. Est-ce que c'est ce que
vous dites?
Mme de Tilly (Viviane) : Oui,
tout à fait.
Le Président (M. Lemay) :
Merci beaucoup. Donc, est-ce qu'il y a consentement pour que le temps non
utilisé par la deuxième opposition soit distribué au groupe de troisième
opposition?
Une voix
: ...
Le Président (M. Lemay) :
Parfait. M. le député de Jonquière, la parole est à vous.
M. Gaudreault : Ça va me
coûter cher, M. le Président. ...l'impression que je vais avoir des trop-perçus
à rembourser...
Une voix
: Des écarts
de rendement.
M. Gaudreault : À QS, en tout
cas... des écarts de rendement, oui. Tant que je ne suis pas mal perçu, ça,
c'est... c'est ça qui est le plus important.
Merci. Merci d'être ici. Je vous écoute,
puis je lis votre mémoire, puis j'ai l'impression que vous avez une relation d'amour-haine
avec la Régie de l'énergie parce que vous dites, à la page 15, que «la régie a
balayé du revers de la main de façon presque systématique toutes nos
recommandations», mais là, en même temps, vous dites : Oups! Le projet de
loi n° 34 est en train de réduire nos plus grands
espoirs d'avoir une régie réellement efficace.
C'est comme si vous étiez critiques envers
la régie, vous auriez espéré un projet de loi qui le réforme dans le sens
d'avoir un juste prix, mais là finalement on recule dans les côtes, là.
Mme de Tilly (Viviane) : Oui,
tout à fait, tout à fait. Une relation, oui, amour-haine parce que la régie est
nécessaire, mais on n'a pas l'impression d'être écoutés souvent par la régie
puis on l'a dit, hein, on parle du rapport de la Vérificatrice générale qui
nous donne raison et...
Parce qu'on s'entend, il y a une asymétrie
dans la possession de l'information. Hydro-Québec se présente et fait des
affirmations, puis la régie ne peut que croire Hydro-Québec. Elle ne peut pas
remettre en question ce qu'Hydro-Québec dit. Alors que nous, on arrive sans
preuve, sinon notre expérience terrain, et dans... entre les deux lots de
témoignages, la régie va croire Hydro avant nous parce qu'Hydro, en principe,
ne ment pas.
Alors, c'est... Nous, tout ce qu'on
souhaitait, c'était une régie de plus en plus performante, de plus en plus
humaniste, de... évidemment, c'est des... mais qui réponde vraiment aux
objectifs initiaux que le gouvernement avait fixés en 1996.
Alors, bon, je disais : Vaut mieux
une mauvaise régie que pas de régie, puis on m'a dit de ne jamais écrire ça,
qu'il fallait une bonne régie, point. Et c'est ça.
M. Gaudreault : Mais là ce que
je comprends, c'est qu'on ne s'en va pas vers ça. C'est assez fascinant de voir
que, dans un projet de loi, d'un côté, les... par exemple les grands
industriels, pour qui j'ai énormément de respect puis... je veux dire, dans les
régions, c'est des créateurs d'emplois, mais ils sont davantage du côté du
monde des affaires. Même le Conseil du patronat, hier,
était très mitigé. Puis, de l'autre bord, il y a... et vous êtes alliés
objectifs, parce que les défenseurs des consommateurs, les défenseurs des gens
les plus démunis, vous dites aussi que ça n'a pas de bon sens.
Donc, on a là un projet de loi qui fait
quasiment l'unanimité de tous bords tous côtés de la clôture contre lui. Alors,
moi, c'est ce que je sens.
• (16 h 30) •
Mme de Tilly (Viviane) : Oui.
Mais, en fait, je me souviens, au printemps, quand le premier ministre a
demandé à Hydro-Québec d'être imaginative puis de trouver une façon de redonner
les surplus. Je crois qu'Hydro-Québec a vu la porte ouverte et est rentrée
dedans, là, puis a proposé ça, là, et c'est ça qui s'est passé.
M. Gaudreault : C'est clair.
Bien oui! Tantôt, vous avez dit : Ah! on aimerait ça saucissonner le...
16 h 30 (version non révisée)
Mme de Tilly (Viviane) :
...d'être imaginatif puis de trouver une façon de redonner les surplus, je
crois qu'Hydro-Québec a vu la porte ouverte et est rentré, là, puis a proposé
ça, là.
M. Gaudreault : C'est clair.
Mme de Tilly (Viviane) : Et
c'est ça qui s'est passé.
M. Gaudreault : Bien oui.
Tantôt, vous avez dit : Ah, on aimerait ça, saucissonner le projet de loi.
Vous savez que ça existe, hein? C'est possible. Alors, si on avait la possibilité
de le saucissonner, ce que, nous, on appelle dans notre jargon une scission,
quel morceau vous aimeriez garder?
Mme de Tilly (Viviane) : Oh
là! Bien, en fait, nous, on disait de... C'est évident qu'il pourrait y avoir
une... en fait, évident...
M. Gaudreault : Parce qu'il y
avait la question du remboursement comme tel.
Mme de Tilly (Viviane) : Oui,
c'est ça.
M. Gaudreault : Oui.
Mme de Tilly (Viviane) : Le remboursement
pourrait être fait d'une façon différente, mais on pourrait se limiter à ce
volet-là.
M. Gaudreault : À ça, O.K. Il
faudrait être capable de bien cibler les morceaux du projet de loi qui disent
que ça. On pourrait peut-être faire une motion à l'Assemblée nationale juste
pour le couper, le saucissonner pour... ça serait la motion de Tilly, puis on
l'appellerait... on saucissonnerait le projet de loi puis on pourrait peut-être
avoir juste ce bout-là.
Mme de Tilly (Viviane) : Oui.
Et je ne dis pas que l'idée de geler l'an prochain et à l'inflation les quatre
années suivantes est la bonne façon de saucissonner, mais de trouver une façon
de régler cette histoire-là du remboursement de façon... sans risque pour la
clientèle.
M. Gaudreault : O.K. Puis, si
vous avez des idées d'article, là, vous pourrez nous renvoyer ça plus tard, là.
Vous regarderez quel article on pourrait mettre ensemble juste pour le
saucissonner.
Je suis sûr que l'Union des consommateurs
est extrêmement préoccupée par la crise climatique, la transition énergétique.
Vous êtes assez critiques sur les demandes d'Hydro-Québec concernant la
transition, là, du mazout à l'énergie puis les bornes de recharge... en fait,
plus critiques envers la régie puis Hydro-Québec aussi pour les bornes de
recharge rapide. Écoutez, il reste quelques secondes, comment on pourrait
s'assurer de respecter, évidemment, les personnes les plus démunies, leur
donner le plus de chances possible, mais aussi soutenir cette transition énergétique
pour avoir des logements à Thetford Mines qui sont beaucoup plus efficaces
énergétiquement?
Le Président (M. Lemay) : En
10 secondes.
Mme de Tilly (Viviane) : Oui.
C'est que le gouvernement paie et que le financement de ces mesures-là ne passe
pas par les tarifs d'électricité.
Une voix
: Tout
simplement.
Le Président (M. Lemay) :
Voilà. Bien, merci beaucoup. M. Décary, Mme Latreille, Mme de Tilly, je vous
remercie pour votre contribution aux travaux de la commission.
Je suspends les travaux quelques instants
afin de permettre aux représentants de l'Option Consommateurs de prendre place.
(Suspension de la séance à 16 h 32)
(Reprise à 16 h 35)
Le Président (M. Lemay) :
Parfait. Donc, nous reprenons les travaux. Je souhaite la bienvenue aux représentants
d'Option Consommateurs. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les
membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter, ainsi que les
personnes qui vous accompagnent. Ensuite, vous allez pouvoir procéder à votre
exposé. La parole est à vous.
M. Corbeil (Christian) : M.
le Président. Christian Corbeil, directeur général d'Option Consommateurs,
accompagné de mon collègue, Jules Bélanger, économiste, et Sylvie De
Bellefeuille, avocate. M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les
députés, je vous remercie de nous donner l'occasion de vous présenter nos observations
aujourd'hui.
Depuis 1997, Option Consommateurs
intervient régulièrement auprès de la Régie de l'énergie afin de défendre les intérêts
des consommateurs résidentiels d'électricité du Québec. Elle intervient régulièrement
auprès distributeurs d'énergie pour faciliter la conclusion d'ententes
relatives au règlement de comptes en souffrance de clients. Elle offre aussi un
service d'information aux consommateurs qui désirent déposer une plainte auprès
des entreprises de services publics.
Le projet de loi n° 34,
tel que rédigé, viendrait restreindre de manière importante les pouvoirs et le
rôle de la Régie de l'énergie et elle priverait les consommateurs d'électricité
du Québec d'un forum public et transparent d'une grande utilité. Je vais donc
laisser mes collègues les experts continuer.
M. Bélanger (Jules) : Bon
après-midi à tous. Le projet de loi n° 34 retire d'importants
pouvoirs à la Régie de l'énergie, ses pouvoirs en matière de fixation des
tarifs, d'approbation des projets d'investissement et de programmes
commerciaux. Le projet de loi n° 34 met également fin
au mécanisme de réglementation incitative et supprime la possibilité pour toute
personne intéressée de faire une demande de modification des tarifs d'électricité,
des changements majeurs qui visent à simplifier le cadre réglementaire actuel
de la Régie de l'énergie. Mais ces changements sont-ils à l'avantage des
consommateurs québécois? Nous sommes d'avis que non. Nous croyons que les
ménages québécois sont mieux servis par un organisme neutre et indépendant, un
organisme qui concilie les intérêts publics et privés et qui fixe, à la suite
d'un processus objectif et rigoureux, les tarifs du distributeur.
Voici pourquoi. D'abord, le projet de loi n° 34 créerait un précédent unique. La fixation des tarifs
et conditions par un tribunal administratif, c'est la solution retenue par les
législateurs des provinces canadiennes pour encadrer les monopoles. Tous les
distributeurs d'électricité au Canada doivent faire approuver leurs tarifs par
des commissions d'énergie indépendantes. Au Québec, c'est la voie que nous
avons choisi, collectivement, d'emprunter pour fixer les tarifs et conditions
depuis un peu plus de 20 ans. Et en se dotant d'une institution telle que la
Régie de l'énergie, le gouvernement du Québec souhaitait pouvoir réaliser un
examen rigoureux des demandes tarifaires d'Hydro-Québec, s'assurer de choix
d'investissements qui soient prudents, pouvoir compter sur un organisme
crédible et limiter les recours juridiques possibles suite à la fixation des
tarifs d'électricité. Mais surtout, le gouvernement du Québec souhaitait faire
du processus de fixation des tarifs un exercice démocratique et transparent qui
permette une participation du public forte. S'il est adopté, non seulement le
Québec deviendrait-il un des rares endroits en Amérique du Nord où les tarifs
ne sont pas réglementés par un organisme indépendant, mais ce serait la fin
d'un exercice qui permet de débattre de manière rigoureuse et en toute
transparence des tarifs et des enjeux connexes. À notre avis, cela est
susceptible de miner la confiance des consommateurs résidentiels et des
entreprises dans le processus de fixation des tarifs d'électricité.
Ensuite, selon nous, le cadre
réglementaire a montré ses preuves. Depuix 10 ans, la régie a constamment
ralenti les ardeurs du distributeur en accordant des hausses moins grandes que
celles demandées par Hydro-Québec, des ajustements à la baisse des tarifs qui
totalisent plus de 900 millions de dollars, un montant considérable que les
consommateurs d'électricité du Québec n'ont pas eu à assumer sur leur facture.
Ces ajustements n'ont été possibles qu'à la suite d'examens minutieux des
demandes du distributeur et des contre-expertises offertes par les
intervenants. Cet aspect est important, la rigueur du processus et la
transparence des débats qui sont menés devant la Régie de l'énergie permettent
d'éviter la politisation du débat tarifaire et sont une solution au cynisme de
la population envers le processus de fixation des tarifs d'Hydro-Québec.
• (16 h 40) •
Au-delà des discussions entourant la
fixation des tarifs d'électricité, les dossiers tarifaires annuels du
distributeur constituent un forum unique pour y débattre d'enjeux importants
pour la clientèle résidentielle. C'est l'occasion pour le distributeur de
présenter à la Régie de l'énergie et aux intervenants les projets qu'il compte
mettre en place en amont de leur déploiement à l'ensemble de le clientèle, ce
qui permet au distributeur d'affiner les composantes de ses projets au bénéfice
de tous. C'est important également, puisqu'Hydro-Québec doit y rendre des
comptes. Le distributeur doit, par exemple, justifier son niveau de déficience
ou encore l'évolution de la qualité de son service. Finalement, les dossiers
tarifaires et le processus d'audiences publiques constituent un garde-fou
crucial, puisqu'ils permettent d'éviter la mise en place de certains projets du
distributeur qui ne sont pas dans l'intérêt des consommateurs québécois.
En résumé, toutes ces raisons démontrent
que le processus actuel est...
M. Bélanger (Jules) : ...des
comptes. Le distributeur doit par exemple justifier son niveau d'efficience ou
encore l'évolution de la qualité de son service.
Finalement, le dossier et le processus
d'audiences publiques constituent un garde-fou crucial puisqu'il permet
d'éviter la mise en place de certains projets du distributeur qui ne sont pas
dans l'intérêt des consommateurs québécois.
En résumé, toutes ces raisons démontrent
que le processus actuel est utile et que la participation du public est au
bénéfice de l'ensemble de la clientèle du distributeur.
Nous avons également des doutes à savoir
si l'indexation des tarifs d'électricité au prix à la consommation est bénéfique
au consommateur québécois. D'abord, a priori, rien ne justifie que l'évolution
des tarifs d'électricité doit suivre absolument celle des prix à la
consommation. Les deux baisses de tarif accordées par la Régie aux
distributeurs au début des années 2010 en sont des exemples. Dans le domaine du
gaz naturel, la Régie de.... l'entreprise Énergir demande cette année à la
Régie une diminution des tarifs de 14 %. Bref, la relation entre les
tarifs d'électricité et les prix moyens à la consommation est loin d'être
naturelle. L'évolution des tarifs d'électricité dépend plutôt de contextes
d'affaires économiques, politiques qui sont propres aux distributeurs. Au
contraire, indexer les prix de l'électricité à l'inflation ferait en sorte de
les rendre sensibles aux variations de composantes volatiles loin de la réalité
du marché de l'électricité, comme les variations du prix du pétrole. On peut
avoir de longs débats sur l'historique. Est-ce que les tarifs d'électricité ont
suivi l'évolution des prix à la consommation? Ça dépend des années de base
qu'on retient ou des indices de prix qu'on choisit.
Pour mieux évaluer l'impact du projet de
loi n° 34, il faut plutôt se projeter vers le futur. On le sait, ces
dernières années, le facteur, là, de croissance le plus important des coûts
d'Hydro-Québec, ce sont les approvisionnements, particulièrement l'augmentation
des approvisionnements post-patrimoniaux, mais également l'indexation, depuis
2014, du bloc patrimonial. On a juste à regarder les deux derniers taux du dossier
tarifaire d'Hydro-Québec. Sans l'augmentation du coût des approvisionnements,
la Régie aurait procédé à des diminutions de tarifs. Et, selon les dernières
prévisions d'Hydro-Québec, d'un, les approvisionnements post-patrimoniaux sont
prévus stables pour les prochaines années, on va donc commencer à écouler des
surplus qui coûtent moins cher, et, deuxièmement, Hydro-Québec prévoit une
croissance de ses ventes jusqu'en 2024. Bref, étant donné ces facteurs, nous
estimons qu'il est loin d'être acquis qu'une indexation des tarifs
d'électricité serait au bénéfice des consommateurs.
Finalement, l'allègement du processus de
fixation des tarifs visés par le projet de loi n° 34 est un objectif
louable. D'ailleurs, plusieurs gestes posés par la Régie dans ces dernières
années vont dans ce sens. Selon nous, il est préférable de privilégier cette
avenue plutôt que de retirer des pouvoirs à la Régie de l'énergie. L'évolution
la plus importante du contexte réglementaire ces dernières années est sans
contredit l'instauration récente d'un mécanisme de réglementation incitative,
une méthode retenue pour fixer les tarifs du distributeur. Après quatre années
de débats entre le distributeur et les intervenants, la Régie a complété, plus
tôt cette année, la fixation des principaux paramètres du mécanisme. Donc, ce
type de mécanisme est vu par plusieurs experts comme une amélioration
importante par rapport à la méthode traditionnelle de fixation des tarifs dite
«par coût de service».
Plus concrètement, en ce qui concerne la
simplification du processus, ce mécanisme évite au distributeur de présenter à
chaque année l'analyse complète et détaillée des coûts nécessaires à la
livraison de l'électricité. Cela constitue un pas majeur vers l'allègement du
fardeau réglementaire puisque cela circonscrit considérablement la portée des
débats qui sont portés devant la Régie de l'énergie.
Il y a d'autres initiatives. Des
commentaires intervenants apportés avant le dépôt de l'épreuve du distributeur,
des processus de consultation avec les intervenants à l'extérieur du cadre de
la Régie, et l'augmentation toute récente des seuils pour faire autoriser les
projets d'investissement. Donc, selon nous, ce sont tous des changements qui
sont susceptibles de limiter les interventions et le nombre de demandes qui
sont déposées à la Régie de l'énergie.
La Régie de l'énergie est donc un
organisme qui cherche à se moderniser, elle est engagée vers un allègement de
ses procédures sans toutefois renier le rôle qu'elle y joue en matière de
protection des consommateurs. Il faut permettre à la Régie de poursuivre cette
transformation, qui, selon nous, permettra de concilier le cadre réglementaire
actuel avec l'objectif qui est recherché par le projet de loi n° 34.
En conclusion, en souhaitant simplifier le
processus de fixation des tarifs d'électricité, le législateur propose de
dépouiller de la Régie de l'énergie des pouvoirs qui sont au coeur de sa
mission et qui sont au bénéfice de l'ensemble de la clientèle d'Hydro-Québec.
Le projet de loi n° 34 illumine un exercice qui se démarque par sa
rigueur, sa transparence, et où la participation du public est assurée. Il met
de côté un organisme crédible et politise inutilement le processus de fixation
des tarifs d'électricité. Il créerait également un précédent au Canada, où les
provinces ont généralement recours aux commissions d'énergie indépendante pour
fixer les tarifs de distribution d'énergie. Il est également loin de garantir
aux consommateurs des tarifs qui seraient inférieurs aux tarifs déterminés dans
le cadre actuel. Pour toutes ces raisons, Option Consommateurs estime qu'il est
préférable de conserver la juridiction de la Régie en matière de fixation des
tarifs, d'investissements et de programmes commerciaux. Il faut plutôt miser
sur la poursuite des initiatives récentes menées par la Régie de l'énergie afin
d'alléger le processus réglementaire. Option Consommateurs demande donc le
rejet de l'ensemble des articles contenus au projet de loi n° 34.
Merci.
Le Président (M. Lemay) :
Merci. Donc, nous allons procéder à la période d'échanges avec la partie du
gouvernement. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Julien : Oui. Oui, merci,
M. le Président. Merci de votre présence, c'est très apprécié. Vous participez,
à chaque année, au processus de cause tarifaire?
M. Bélanger (Jules) : Depuis
15 ans, oui.
M. Julien : Parfait.
L'objectif de votre participation, par rapport à votre clientèle, est lequel...
M. Julien : ...oui, oui, merci,
M. le Président. Merci de votre présence. C'est très apprécié. Vous participez
à chaque année au processus de cause tarifiaire.
M. Bélanger (Jules) : Depuis
15 ans, oui.
M. Julien : Parfait. L'objectif
de votre participation par rapport à votre clientèle est lequel?
M. Bélanger (Jules) : De
défendre les intérêts des consommateurs résidentiels.
M. Julien : Puis pour défendre
ces intérêts-là, par rapport à la tarification, qu'est-ce que vous souhaitez?
M. Bélanger (Jules) : Vous
voulez dire lorsqu'on se présente à la Régie de l'énergie?
M. Julien : Oui.
M. Bélanger (Jules) : Donc, à
chaque année, évidemment, on sait les enjeux qui sont pertinents. Donc, comme
vous le savez, il y a la fixation des tarifs. Donc, dans ce temps-là, c'est de
s'assurer que les consommateurs paient un tarif qui soit juste et raisonnable.
Évidemment, ça demande une analyse des différents projets qui peuvent être mis
de l'avant par le distribuer. Donc, on s'assure que les programmes soient
rentables et dans l'intérêt des consommateurs résidentiels. Puis il y a toute
une série d'enjeux connexes dans ces dossiers-là qui peuvent toucher, par
exemple, les conditions de service. Encore là, on s'assure que leurs droits, par
exemple, sont respectés.
M. Julien : Parfait. En 2014,
quand l'indice des prix à la consommation... qu'on prend comme mesure, là, de
comparaison était à 1 % et qu'une augmentation des tarifs généraux a été
de 4,3 %, quelle a été votre réaction lors du processus de cause tarifaire
qui a amené à une augmentation quatre fois, presque et demie, à celle de
l'inflation?
M. Bélanger (Jules) : Alors,
je devrais aller relire, là, exactement quelle était notre augmentation...
M. Julien : Mais,
instinctivement, vous devez vous rappeler quand même...
M. Bélanger (Jules) : Mais,
instinctivement, bien, c'est un processus qui se ressemble à chaque année. Probablement,
que cette augmentation-là 2014 était causée par une grande augmentation des approvisionnements
postpatrimoniaux. Dans ce cas-là, les pouvoirs qu'on a, comme intervenants, les
pouvoirs qu'a la régie sont limités, donc... Mais il faudrait que je revienne,
mais il est fort possible qu'on a fait des représentations pour... on a scruté
les dépenses d'Hydro-Québec et on a demandé des réductions de dépenses à
certains endroits. On a étudié, on a analysé là où on pouvait le faire en
quelque sorte.
M. Julien : Il n'y a pas de
piège dans mes questions, là...
M. Bélanger (Jules) : Non,
non.
M. Julien : ...je vous dis
juste que, soudainement, cette année-là, 4,3 % d'augmentation, l'année
suivante, l'inflation est à 1,1 %, 2,9 % d'augmentation. Mais, après
ça, bien, c'est vrai, quand on prend, en fin de compte, puis on focalise, sur
les années suivantes, 1,1 %, 0,7 %, un peu en dessous. La proposition
qu'on a faite, parce que vous dites, déréglementer, on ne veut pas
déréglementer la tarification, mais qu'est-ce qu'on vient faire, c'est, cause
tarifaire annuelle, je le réitère, là, tu sais, on veut chercher de
l'efficience puis de l'allègement puis j'ai entendu : Jeter le bébé avec
l'eau du bain, mais non, on ne veut pas jeter le bébé avec l'eau du bain, parce
que l'ensemble des responsabilités de la régie sont conservées, mais on vient
modifier, en réalité, une périodicité d'évaluation puis on vient dire : Je
sais, là, ce n'est pas parfait, puis on ne dit pas que c'est parfait, on vient
dire que le corollaire de tout ça, c'est quand on regarde dans les 15, les 50
dernières années, bon, il y a une corrélation avec l'inflation. Donc, on vient
dire : On va utiliser l'inflation puis, quand on va revenir dans cinq ans,
on va refaire une cause tarifaire avec les mêmes objectifs toujours, en
réalité, de trouver le bon facteur, mais à la place que ce soit aux 12 mois, ce
soit aux 60 mois. Et, encore là, je le mentionne parce qu'on nous dit, ça
pourrait être mieux, on nous dit, ça pourrait être mieux, puis d'autres nous
disent : Ça pourrait être mieux, mais ça pourrait être pire. Ça
fait : Ils disent, ça pourrait être mieux, puis on risque d'avoir un choc
tarifaire dans cinq ans. Ça fait que là, c'est comme : Ça pourrait être
mieux, risque, et ça pourrait être pire, risque, plutôt que de dire :
Bien, mais ça pourrait être correct. Tu sais, ça pourrait être juste correct.
Puis l'avantage que ça a, puis là je vous le dis, là, je réitère, là, parce que
vous représentez des consommateurs.
Alors, moi, je croise des consommateurs
dans mon quotidien, puis l'autre trouve que l'idée n'est pas bête. Ils n'ont
peut-être pas capté tout ce que vous avez capté comme risque, mais nous, ils
disent : Moi, un gel l'an prochain, puis à l'inflation, les quatre
suivantes, là, on trouve ça pas pire. Ça, c'est le consommateur, mais peut-être
qu'il est biaisé parce qu'il me parle à moi, puis il veut être poli, alors...
mais j'essaie d'avoir le risque que ça l'entraîne de venir corriger aux cinq
ans plutôt qu'aux 12 mois dans cette perspective-là. Mettons que c'est cinq
années où les consommateurs ne peuvent pas, possiblement ne pas bénéficier de
baisse de tarifs ou d'augmentation de tarifs qui seraient inférieurs à
l'inflation. Mais si on présente le deal aux consommateurs comme, oui, c'est
prévisible, mais, en retour, vous allez peut-être payer un petit peu plus cher,
je ne suis pas certain qu'ils vont être d'accord avec ça.
• (16 h 50) •
M. Julien : ...un peu moins
cher, parce que l'historique nous dit : Si on présente juste sombrement,
c'est sûr que, si je dis à quelqu'un : Ça va être prévisible, mais ça va
être plus cher que ce que tu devrais payer. Mais ça, c'est présumé quelque
chose qui, historiquement, n'est pas démontré...
M. Bélanger (Jules) :
...certains qui vont être d'accord avec ça, puis...
M. Julien : Un peu plus
cher ou un peu moins cher, parce que l'historique nous dit... Savez-vous, si on
le présente juste sombrement... C'est sûr que si je dis à quelqu'un : Tu
va être... ça va être prévisible, mais ça va être plus cher que qu'est-ce que
tu aurais payé... Mais ça, c'est présumer quelque chose qui historiquement
n'est pas démontré.
M. Bélanger (Jules) :
Notre présomption à cet égard... et on n'est pas devins, mais notre présomption
est à l'effet que les prochaines hausses de tarifs seraient relativement
basses, étant donné, comme je vous l'ai dit, par exemple, que les
approvisionnements postpatrimoniaux sont prévus comme stables par Hydro-Québec
pour les prochaines années. C'est... Il y a une croissance des ventes qui est
prévue par Hydro-Québec. Ça, c'est des éléments qui militent vers une diminution
ou une stabilité, là, dans les tarifs. Donc, c'est... Notre opposition au
projet de loi n° 34 est également en fonction de cette présomption-là.
M. Julien : Mais le
groupe qui vous a précédé, c'est l'union... puis là c'est... là, là, je suis
avec l'option...
Une voix
: Oui.
M. Julien : O.K. Amenait
des éléments que je trouvais intéressants par rapport à : On va à la cause
tarifaire puis on peut faire valoir certains éléments qui n'étaient pas sur la
base de la tarification, par exemple, là, toute la notion de l'évolution de
l'interfinancement, toute l'évolution des mesures prises par Hydro-Québec pour,
en réalité, soutenir les familles à faibles revenus dans le... Bon. Alors,
ça... ça, pour moi...
Mais, sur la base tarifaire, quand je vous
écoute, le pire scénario qu'on pourrait vivre, ce serait un gel avec inflation
quatre ans puis une correction après cinq ans parce que l'inflation quatre ans
a été trop élevée... pour le consommateur, là.
M. Bélanger (Jules) :
Oui. Puis je ne suis pas là pour militer pour le pire. Moi, je veux le mieux
pour les consommateurs. Puis ce qu'on pense, c'est que les mécanismes qui ont
été mis récemment en place répondent aux objectifs qui sont recherchés par le
gouvernement, donc de simplification, d'allégement réglementaire. Et, selon,
encore là, ce qu'on prévoit, ce qu'on pense que seraient les prochaines hausses
de tarifs, bien, on... dans le cadre réglementaire, les consommateurs
résidentiels seraient gagnants.
M. Julien :
M. Bélanger... C'est M. Bélanger, hein? M. Bélanger, en 2014... un an
avant, en 2013, si on avait eu cette discussion vous et moi ensemble, du p.l.
n° 34, vous auriez eu probablement la même position.
M. Bélanger (Jules) :
J'aurais... Comme organisme, là, ce n'est pas ma position, mais la position
d'Option Consommateurs, aurait été la même que celle qui est exprimée dans le
mémoire qu'on a déposé.
M. Julien : ...quand on
regarde les résultats, c'est supérieur à l'inflation. Alors, le discours, vous
l'auriez tenu de la même façon en 2013, dans la même perspective, mais le réel
a été supérieur à l'inflation depuis cette période-là.
M. Bélanger (Jules) : La
différence aurait été qu'il y aurait eu un dossier tarifaire avec un examen
sérieux, rigoureux des charges. Et, oui, si, au final, l'examen démontre qu'une
hausse supérieure à l'inflation est requise, eh bien, ce sont les règles du
jeu, ce sont des tarifs qui sont, malgré tout, justes et raisonnables parce
qu'ils évoluent selon la réalité qui est propre au distributeur.
M. Julien : ...un de mes
collègues qui a une question par rapport à ça.
Le Président (M. Lemay) :
Bien sûr. Donc, je céderai la parole maintenant au député de Dubuc.
M. Tremblay : Oui,
merci, M. le Président. Bonsoir. Merci pour l'engagement, bravo.
À la lecture du mémoire, on peut
comprendre que vous avez décortiqué l'aspect technique du projet de loi, c'est
clair. À la limite, c'est un plaidoyer en faveur — qui est louable,
là — de la régie puis de sa juridiction actuelle.
Je me pose la question, en mode famille,
question de famille, on travaille... on essaie de travailler, en tout cas, au
niveau de la prévisibilité. Je donnerai les exemples d'hypothèques sur cinq ans
fermés, peu importe, à taux variable, même au niveau d'Hydro avec des tarifs
qui peuvent être sur des versements anticipés, sur 12 versements de
l'année. Il y a une perspective aussi globale, je dirais, de planification. On
pourra me corriger, mais je pense que la stabilité implique aussi une
planification plus globale au niveau du budget famille.
J'essaie de voir... peut-être, vous
pourrez nous expliquer davantage dans quelle mesure vous ne voyez pas du
positif, du structurant à de la prévisibilité?
M. Bélanger (Jules) :
Oui. Je vais dire quelques mots puis je vais laisser, en fait, l'experte en
conseil budgétaire parler après moi. Il y a deux choses.
D'abord, il existe un mode de versements
égaux chez Hydro-Québec. Donc, déjà en place, il y a un moyen pour lisser la
facture des consommateurs d'électricité.
La deuxième chose que je dirais, c'est que
la régie est très sensible à cet aspect-là de stabilité des...
M. Bélanger (Jules) : ...dire
quelques mots puis je vais laisser, en fait, l'experte en conseils budgétaires
parler après moi. Il y a deux choses. D'abord, il existe un mode de versements
égaux chez Hydro-Québec, donc déjà en place il y a un moyen pour lisser la
facture des consommateurs d'électricité.
La deuxième chose que je dirais, c'est que
la régie est très sensible à cet aspect-là de stabilité des tarifs. C'est pour
ça que, par exemple, lorsqu'il y a des hivers très, très froids et
qu'Hydro-Québec doit peut-être augmenter de manière conséquente ses tarifs,
elle va créer des comptes d'écarts qui sont étalés sur plusieurs années. Donc
il y a déjà, dans la structure réglementaire, des mécanismes en place pour
stabiliser les facteurs de croissance ou de diminution des tarifs. Je vais
laisser ma collègue...
Le Président (M. Lemay) :
Mme De Bellefeuille, la parole est à vous.
Mme De Bellefeuille (Sylvie) :
Je vous remercie, merci pour votre question. Je fais régulièrement des budgets
avec des gens, souvent aussi avec des ménages à faible revenu, donc des gens
pour qui le budget, c'est serré. La facture d'électricité représente un poids
important. La question de la prévisibilité, ce n'est pas uniquement lié aux
tarifs, c'est un des éléments. Mais souvent, un des gros aléas qui va aussi
modifier la facture d'électricité, c'est le climat. C'est le climat.
Quand on a un hiver qui est très froid et
que les gens ont des logements comme des passoires, comme l'a indiqué
M. Décary, c'est sûr que ça a un impact sur le budget et qu'importe si le
tarif a augmenté de 1 % ou 2 %, ce n'est pas l'élément qui va être le
plus marquant pour les consommateurs. Ce sera vraiment les aléas qui sont dus
au climat, je vous dirais.
Le Président (M. Lemay) : M.
le ministre la parole est à vous.
M. Julien : Juste pour faire
du pouce là-dessus puis après ça, j'avais une autre question, mais... De
l'autre côté, j'entends que les aléas naturellement de la température, on le
sait tous, là, par rapport à notre facturation, il y a un lien en fin de
compte. Mais au-delà de ça, on comprend bien que oui c'est considéré dans le
budget, mais on s'entend également que si demain matin on disait on augmente de
10 % le tarif... tu sais... Les deux sont quand même importants.
Mme De Bellefeuille (Sylvie) :
Absolument, M. le ministre, mais je vous dirais, je doute que du jour au
lendemain la régie va augmenter les tarifs de 10 % sans raison, là... Et
par ailleurs, il y a toujours aussi dans les clauses tarifaires, c'est une des
raisons pour laquelle j'y participe aussi, toujours la préoccupation de voir
quels sont les effets des hausses de tarifs sur les ménages à faible revenu.
Pour les gens qui ont de la difficulté de
payer, il y a auprès d'Hydro-Québec différents modes, des ententes de paiement qui
peuvent être prises qui sont sans frais, qui sont disponibles pour aider ces
ménages-là, justement pour les plus démunis pour pouvoir pallier à ça. Et le
mode de versements égaux est une autre façon qui permet aussi de pallier ça. Si
jamais, il y a un écart, on peut à ce moment-là l'étaler l'année suivante
aussi, là.
Le Président (M. Lemay) :
Donc, je vais céder la parole au député de Bourget pour environ une durée de
3 min 30 s.
M. Campeau : Merci. Je suis
très sensible au ce que vous dîtes par rapport aux consommateurs à faible
revenu. On en voit souvent au bureau de comté. J'ai vu aussi bien un cas qui
était un peu olé olé, quelqu'un qui avait fait faillite sept fois qui voulait
qu'on l'aide dans ces tarifs d'électricité. Je pense qu'on est un petit peu
moins sympathique dans ce cas-là, mais j'ai vu la grande majorité du temps des
gens vraiment mal pris. Et Hydro-Québec, je les ai vus vraiment extrêmement...
Je ne sais pas si on peut parler d'une société d'État empathique, là, mais on a
eu du support de leur part et ça marche vraiment.
Mais je me pose juste la question. On
parle du consommateur puis on veut minimiser, minimiser, minimiser, c'est bien.
Un des endroits où on utilise beaucoup d'énergie et où nos maisons ne sont pas
très bien isolées, c'est bien ici. Puis quand le coût d'énergie est bas, bien
c'est dans ce temps-là que les gens n'isolent pas. Est-ce que la réaction à
tout ça pour aider les consommateurs c'est d'avoir quelque chose de prévisible
comme disait le ministre et un programme d'isolation à la place? Est-ce que
qu'on ne vise pas au mauvais endroit pour aider les consommateurs?
• (17 heures) •
M. Bélanger (Jules) : On
vient de terminer un dossier de Transition énergétique Québec et dans le cadre
de ce dossier-là, on ne sait pas ce qu'il va arriver avec l'organisme, mais il
y a des programmes que, nous, on pense qu'ils doivent être bonifiés. Il y a le
programme Éconologis qu'on a déjà mené dans le passé chez Option Consommateurs,
mais qui vise particulièrement les ménages à faible revenu pour leur livrer des
conseils en efficacité énergétique, mais également des mesures, dont par
exemple, à l'époque c'était les remplacements de thermostats. Donc, des mesures
concrètes qui permettent d'alléger à long terme leurs factures d'électricité.
Et il y aurait certainement, et je pense
que le gouvernement du Québec est engagé dans cette voie-là avec la politique
énergétique, mais de oui mener des programmes de grande envergure au niveau de
l'efficacité énergétique. Pour nous, c'est une avenue absolument...
17 h (version non révisée)
M. Bélanger (Jules) : ...leur
facture d'électricité. Et il y aurait certainement... mais je pense que le gouvernement
du Québec est engagé dans cette voie-là avec la politique énergétique, mais de,
oui, mener des programmes de grande envergure au niveau de l'efficacité
énergétique, pour nous c'est une avenue absolument à considérer.
M. Campeau : Est-ce que ce
n'est pas une meilleure avenue que de vouloir à chaque année contrôler le prix?
C'est un peu ça, ma question en arrière. On dirait que je vous avais ouvert la
porte pour vendre un projet, là, mais ce n'était même pas arrangé, hein?
M. Bélanger (Jules) : Bien,
ce que je comprends des intentions du gouvernement, c'est vraiment la simplification
du processus. Puis, comme je l'ai dit, la simplification du processus, pour
nous, elle est déjà entamée à la régie, elle porte ses fruits. Il faut la
continuer.
Oui, des prix élevés, théoriquement, des
prix plus élevés, on va faire plus attention à... on va faire fermer les
lumières, on va bien isoler nos fenêtres, nos portes. La réalité est qu'il y a
beaucoup de ménages qui sont par exemple locataires, qui on très peu de contrôle
sur les mesures qu'ils pourraient mettre en place. On a, donc, un parc locatif
qui est très, très important.
Donc, ça prend des mesures, oui, à mettre
en place. Par contre, même si leur facture augmenterait, ces ménages-là
seraient pris, ne pourraient pas... ou en tout cas seraient limités dans les
mesures en efficacité énergétique qu'ils pourraient mettre de l'avant.
M. Campeau : En fait, vous
représentez surtout ou presque uniquement des gens qui sont locataires, fort
probablement. J'ai raison de dire ça?
M. Bélanger (Jules) : Je n'ai
pas les statistiques, avec moi, récentes, là. Peut-être c'est... Sylvie...
Le Président (M. Lemay) :
Désolé, la période d'échange avec les membres du gouvernement étant maintenant
terminée, je vais céder la parole au député de D'Arcy-McGee.
M. Birnbaum : Merci, M. le
Président, et merci de votre présentation. J'aimerais vous donner le temps de
répondre à la dernière petite question, de façon très vite si possible.
Mme De Bellefeuille (Sylvie) :
Oui, je vous remercie M. le député. En fait, on représente l'ensemble des
consommateurs. Alors, il y a là-dedans des propriétaires et il y a des
locataires. Donc, on vise l'ensemble de la clientèle.
M. Birnbaum : Merci. Bon, de
toute évidence, une des choses qui font en sorte que nous sommes ici, c'est
pour qu'on décharge le gouvernement collectivement de notre responsabilité
morale, légale, fiduciaire de retourner l'ensemble des trop-perçus. Est-ce
qu'il avait... il y aurait d'autres façons d'aborder cette problématique? La
question se pose, et s'est posée durant les deux jours et va continuer à se
poser. Mais je veux vous, vous poser la question. Selon vous, est-ce que la
proposition devant nous répond à la promesse du gouvernement actuel de rembourser
l'ensemble des trop-perçus ou y aurait-il eu d'autres façons plus efficaces,
plus humaines, plus structurantes de le faire?
M. Bélanger (Jules) : Pour
nous, la solution aux trop-perçus, elle existait déjà depuis 2014. La régie...
en fait, dès 2010, hein, elle évoquait dans ses décisions des préoccupations
par rapport aux trop-perçus, par rapport aux écarts de rendement. Elle a mis en
place en 2013 un mécanisme qui traite... qui partage avec la clientèle en fait
ces écarts de rendement là, qui a été suspendu pour favoriser l'atteinte de
l'équilibre budgétaire du gouvernement du Québec. Pour nous, c'est cette
solution qu'il faut... qui était la bonne et qu'il faut maintenir.
Et donc, pour nous, la question des
trop-perçus, c'est quelque chose de passé. Maintenant, ce qu'on veut s'assurer,
c'est que les tarifs soient fixés encore par un organisme indépendant et qu'ils
soient justes et raisonnables.
Le Président (M. Lemay) : M.
le député de D'Arcy-McGee.
M. Birnbaum : Merci, M. le
Président. Le projet devant nous, on en parlé un petit peu, mais j'aimerais
vous inviter à en élaborer, propose la défense... présentation par Hydro-Québec
d'un dossier tarifaire une fois par cinq ans. Je crois comprendre que vous
auriez identifié plusieurs risques dans cette proposition-là, et vous avez
parlé un petit peu de l'état actuel et de vos interventions devant la régie
actuellement. Je veux vous inviter de nous offrir un exemple concret, peut-être
un portrait d'une de ces 15 années, vous avez dit que ce n'est pas nouveau pour
vous, où, au nom de vos membres, les gens qui nous touchent tous, dans nos
circonscriptions, en région, partout, de nous parler en... un petit plus de
comment ça s'est passé, avec un avec un oeil sur ce qui risque d'être perdu
avec la proposition devant nous?
Le Président (M. Lemay) :...
Mme de De Bellefeuille, allez-y.
Mme De Bellefeuille (Sylvie) :
Oui, bien, en fait, on intervient à différents niveaux. Dans le cadre des
demandes tarifaires, il y a également souvent des demandes aussi qui peuvent
toucher les conditions de service. Il y a quelques années, je pense que c'était
en 2013, entre autres, Hydro-Québec voulait inscrire tous les...
Le Président (M. Lemay) :
...monsieur... Mme de Bellefeuille, allez-y.
Mme De Bellefeuille (Sylvie) :
Oui, bien, en fait, on intervient à différents niveaux. Dans le cadre des
demandes tarifaires, il y a également souvent des demandes aussi qui peuvent
toucher des conditions de service. Il y a quelques années, je pense que c'était
en 2013, entre autres, Hydro-Québec voulait inscrire tous les mauvais
payeurs... en fait, tous les clients d'Hydro-Québec, sans même leur consentement,
auprès des agences de vérification de crédit, les Equifax, les TransUnion de ce
monde. On a, par notre intervention, réussi à convaincre la Régie de l'énergie
que ce n'était pas à l'avantage de tout le monde, puis que ça allait, par
ailleurs, même nuire davantage aux ménages qui sont moins bien nantis.
Il y a, donc, vraiment des questions qui
sont vraiment importantes, qui doivent... qui doivent être entendues par la
régie et quand on regarde le projet de loi tel que déposé, il y a des
modifications qui sont faites aux articles 25 et 48 de la Loi sur la Régie de
l'énergie, qui vont même faire en sorte que lorsque des demandes qui sont
faites pour modifier, que ce soit les tarifs ou les conditions de service du
distributeur, la régie ne sera même pas tenue d'avoir une audience publique.
Donc, théoriquement, elle peut le faire à huis clos, sans même... sur dossier,
sans même qu'il y ait d'interventions.
Il y a, à ce niveau-là, vraiment un
problème de transparence et qui va faire en sorte que même les intervenants ne
pourront pas faire valoir leur point de vue devant la régie.
Le Président (M. Lemay) :
Parfait. M. le député de D'Arcy-McGee.
M. Birnbaum : Merci. Maintenant,
actuellement, aujourd'hui, on est devant le régime qui est en place, avec les
présentations des dossiers tarifaires annuellement et tout ça et nous nous
trouvons devant un projet de loi qui propose de changer tout ça. Suite aux
discussions normales, j'imagine, entre le gouvernement et Hydro-Québec, qui
était ici, ça ne vous surprendrait pas, en notant son approbation, son appui
pour le projet de loi devant nous.
Maintenant, comme je dis aujourd'hui, la situation
est telle qu'elle est et il y a une proposition devant nous. Dans ce contexte,
croyez qu'Hydro-Québec devrait déposer un dossier tarifaire pour l'année 2020‑2021?
Le Président (M. Lemay) : M.
Bélanger.
M. Bélanger (Jules) : Nous
avons, donc, déposé, avec les représentants des industriels et des petites
entreprises, une requête à cet effet. Elle est actuellement déposée devant le Régie
de l'énergie et poursuivra son petit bout de chemin dans les prochaines
semaines. Mais, donc, c'est déjà fait. Je ne sais pas si c'était votre question...
Oui, donc, une requête qui est déposée.
Le Président (M. Lemay) :
Parfait. Donc, M. le député de Laval-des-Rapides, la parole est à vous.
M. Polo : Merci. Merci
beaucoup. Merci à vous tous.
Dans le contexte du projet de loi n° 34,
ce dépôt auquel vous faites référence ne serait pas possible.
M. Bélanger (Jules) : Exact. L'article...
Je...
Mme De Bellefeuille (Sylvie) :
Effectivement, l'article 25 fait en sorte qu'il y a seulement Hydro-Québec qui
va pouvoir faire des demandes de tarifs et des intervenants ne pourront plus le
faire.
M. Polo : Donc, si vous ou
l'Union des consommateurs, ou peu importe, tout autre organisme, vous jugez
qu'à l'an 3, à l'année 3 de cette période de cinq ans, vous considérez que l'augmentation
des coûts, en fait, en fonction de.. .vous considérez que l'augmentation est beaucoup
trop élevée et vous n'avez aucun recours. Donc, ici, c'est la dictature d'Hydro-Québec,
qui décide quand elle veut faire une demande d'augmenter ou de laisser la
croissance des coûts suivre l'inflation.
M. Bélanger (Jules) : Bon,
peut-être pour reprendre un peu les discussions qu'il y avait avec l'Union des consommateurs
préalablement, si on constatait, dans les informations qui seraient fournies
annuellement prévues au projet de loi n° 34, qu'il y a des surplus particuliers,
qu'il y a quelque chose qui se passe qui est inacceptable et qu'on souhaitait
faire une demande, eh! bien, selon les modifications législatives qui sont dans
le projet de loi n° 34, on ne pourrait plus effectuer cette démarche-là.
Puis ce que je comprends également, c'est
qu'Hydro-Québec devra demander au gouvernement de... au préalable, hein, avant
le dépôt d'une modification de tarifs également.
• (17 h 10) •
M. Polo : Mais je vous invite
à aller au fond de votre réflexion, au fond de votre... enfin, au bout de votre
argument. En quoi le fait que le projet de loi n° 34 retire cette
possibilité-là, comment ça vous affecte, vous et vos membres, les gens que vous
représentez? Allez plus loin, là, dans votre raisonnement.
M. Bélanger (Jules) : On le
voit concrètement...
M. Polo : ...de votre... enfin,
au bout de votre argument, en quoi le fait que le projet de loi n° 34
retire cette possibilité-là, comment ça vous affecte, vous et vos membres, les
gens que vous représentez? Allez plus loin, là, dans votre raisonnement.
M. Bélanger (Jules) : On le
voit concrètement cette année, Hydro-Québec n'a pas déposé de requête parce
qu'elle veut geler, hein, les tarifs. Évidemment, de notre côté, on a analysé
les données, c'est un exercice par ailleurs qui est difficile du point de vue
de l'intervenant, on n'a pas toutes les données en main, mais, selon nous, les
tarifs devraient diminuer et non pas être gelés, et c'est une occasion qu'on
perdrait certainement si le projet de loi n° 34 était adopté.
M. Polo : Donc, vous
dites : Déjà, actuellement, c'est difficile d'obtenir de l'information. Si
on se projette dans le futur avec le projet de loi n° 34, il sera
impossible pour vous ou d'autres associations, ou d'autres organismes de demander
une révision de toute hausse des tarifs. Je ne veux pas mettre des mots dans
votre bouche, mais moi, l'interprétation que j'en fais, c'est un manque de
transparence.
Mme De Bellefeuille (Sylvie) :
Oui. Je pense qu'on peut effectivement dire ça d'une certaine façon, puis il y
a un problème d'équité procédurale aussi, là, à travers tout ça. C'est que les
parties ne pourront plus intervenir sur certains sujets qui sont d'importance
pour l'ensemble de la clientèle d'Hydro-Québec. On ne pourra intervenir qu'aux
cinq ans avec les chiffres qui seront publiés au moment de la clause tarifaire.
Mais jusqu'à quel point est-ce qu'on va avoir les données précises qui vont
nous permettre, à ce moment-là, de faire l'analyse pour voir : Est-ce
que... sur la période de cinq ans, est-ce que les chiffres sont corrects?
Est-ce que le prix sera juste? On ne peut pas le savoir. Et quand on regarde le
projet de loi, techniquement, la régie n'est même pas obligée de tenir une
audience publique.
M. Polo : Pour un monopole.
Mme De Bellefeuille (Sylvie) :
Effectivement.
M. Polo : Quand on met dans la
même phrase «monopole et manque de transparence», à la fin de la ligne, c'est
ça, c'est le consommateur qui sort perdant.
M. Bélanger (Jules) : C'est
un risque aussi.
M. Polo : C'est un risque, un
risque important.
Mme De Bellefeuille (Sylvie) :
Oui, absolument. Oui.
M. Polo : Parfait. Il reste à
peu près 30 secondes. D'autant plus, le nouveau mécanisme proposé par le
projet de loi n° 34, en fait, il serait
hypercompliqué, sinon impossible de déterminer quels seraient ces écarts de
rendement futurs, donc de déterminer quels sont les trop-perçus de la société
d'État.
Le Président (M. Lemay) : M.
le député, sur ces paroles-là, je vais céder la parole au député de Jonquière,
et j'imagine qu'il veut demander le consentement pour utiliser le temps non
utilisé par la deuxième opposition.
M. Gaudreault : Vous imaginez
bien.
Le Président (M. Lemay) :
Consentement. Allez-y, M. le député de Jonquière, la parole est à vous.
M. Gaudreault : Merci. Merci
beaucoup, M. le Président. Vous avez un tableau très intéressant, à la
page 9, qui est l'évolution des tarifs d'électricité et des prix à la
consommation, et je veux le comparer avec le fameux tableau que le ministre
brandit à plusieurs occasions et dont j'ai une copie ici, en 8,5 x 11, parce
que le ministre a des plus grosses imprimantes que les miennes. Je veux juste
comprendre, parce qu'il y indique complètement le contraire. Alors, je
comprends que le... Est-ce que je comprends bien que le tableau que vous avez,
votre graphique II, à la page 9, c'est... vous faites figurer si le
projet de loi n° 34 était appliqué. Est-ce que c'est
ça?
M. Bélanger (Jules) : Bien,
il y a... donc, deux choses qui diffèrent : il y a l'indice des prix à la
consommation qui est utilisé; moi, j'ai repris exactement ce qui est proposé
dans le projet de loi n° 34, mais il y a également, c'est important, la
période de base. Parce que, si vous prenez... Hydro-Québec le fait à chaque
année, dans ses dossiers, hein, elle montre ce graphique-là, hausse de tarifs,
inflation, mais elle prend comme année de base la création... la date de
création de la régie, et c'est un autre portrait qui survient. Moi, ce que
j'ai... donc, j'ai pris une période de 10 ans, je pense que c'est...
M. Gaudreault : Je pense que
c'est à partir de 2009?
M. Bélanger (Jules) : Bien,
année de base, 2009, les 10 prochaines hausses tarifaires par après. Pour
moi, c'est important de prendre une période plus contemporaine, donc qui est
plus proche du contexte actuel d'affaires et économique d'Hydro-Québec.
M. Gaudreault : Oui, mais même
si je prends le tableau du ministre à partir de 2009, les hausses autorisées
par la régie, selon ce qu'ils disent, sont plus élevées que l'inflation. Mais
vous, à partir de 2009, c'est complètement l'inverse, là.
M. Bélanger (Jules) : Je n'ai
pas le tableau du ministre en main, là, mais...
M. Gaudreault : Bien, je peux
vous le prêter pour les fins de la discussion, là, si vous voulez.
Le Président (M. Lemay) :
M. Bélanger, vous l'avez, le tableau, vous l'avez mis à la page 9 de
votre mémoire, le tableau...
Une voix
: ...pas
pareil.
M. Gaudreault : ...mais le
tableau du ministre.
Le Président (M. Lemay) : Ah?
Bon.
M. Gaudreault : Mais, est-ce
que je comprends bien lorsque vous dites : Hydro-Québec illustre, par
exemple, dans des dossiers tarifaires que la croissance de ses tarifs
était inférieure à l'évolution de l'indice des prix à la consommation pour
l'ensemble du...
Le Président (M. Lemay) :
...M. Bélanger, vous l'avez, le tableau, vous l'avez mis à la page 9
de votre mémoire.
M. Bélanger (Jules) : Le
tableau de...
M. Gaudreault : ...mais
il a le tableau du ministre.
Une voix
: ...par
pareil.
Le Président (M. Lemay) :
Ah bon!
M. Gaudreault : Oui. Mais
ce que... Est-ce que je comprends bien? Parce que vous dites : «Hydro-Québec
illustre, par exemple, dans des dossiers tarifaires que la croissance de ses
tarifs était inférieure à l'évolution de l'indice des prix à la consommation
pour l'ensemble du Canada», alors que... Et ce que je comprends, c'est que vous
prenez l'indice des prix à la consommation proposé dans le projet de loi
n° 34. Je veux juste être sûr de bien comprendre parce que c'est très,
très important.
M. Bélanger (Jules) :
Juste vous donner un exemple, bien, l'indice des prix à la consommation dans le
projet de loi 34 exclut les dépenses de boissons alcoolisées, par exemple,
le tabac, le cannabis récréatif. C'est un indice québécois également. Ça, c'est
important. Lorsqu'on prend un indice qui est canadien, c'est tout le temps
supérieur à l'indice québécois. Donc, c'est des détails, mais qui sont...
M. Gaudreault : Non, non,
non, mais c'est superimportant. Donc, ça, c'est l'indice canadien.
M. Bélanger (Jules) :
C'est l'indice québécois. Je... C'est ça, je n'ai pas de source d'information
non plus sur le tableau, là. J'ai pris celui qui était... selon ma
compréhension, dans le projet de loi n° 34.
Mais je pense que, pour répondre peut-être
à votre interrogation, la période de base est évidemment très importante puis
détermine le portrait qu'on a, c'est sûr, de l'évolution des tarifs versus
l'évolution de l'inflation. C'est peut-être là la différence, évidemment, eux
retiennent l'année 2003.
M. Gaudreault : Vous,
vous prétendez que l'année 2009 est plus réaliste par rapport au contexte
actuel en matière d'énergie, là où on s'en va, sur la question des marchés,
même la réglementation interne de la Régie de l'énergie.
M. Bélanger (Jules) :
Exact, oui. C'est ce qu'on fait régulièrement dans les dossiers tarifaires,
d'ailleurs, où, quand Hydro-Québec veut se comparer, elle regarde non pas une
période de 20 ans, hein, mais une période peut-être de cinq à 10 années
environ.
Mme Gaudreault : Donc,
Hydro-Québec elle-même utilise des graphiques ou des... une période historique
de 2009, mettons, à aujourd'hui.
M. Bélanger (Jules) :
Pour certains projets, c'est ça. Ça va dépendre des discussions.
M. Gaudreault : Donc, si
on veut comparer des pommes avec des pommes, il faut prendre des graphiques ou
des données qu'utilise Hydro-Québec pour bien justifier les choses. Puis là ce
que vous nous démontrez, c'est que finalement c'est l'inverse, c'est que les
hausses autorisées par la régie sont en bas de l'IPC.
M. Bélanger (Jules) : Ce
que je dirais, c'est que les hausses suivent une trajectoire qui est similaire
à celle de l'inflation, mais, en général, c'est inférieur, effectivement.
Mais ce que je dirais devant vous tous,
c'est que, plutôt que d'avoir ce débat-là, c'est plus sur qu'est-ce qui s'en
vient, qu'est-ce qui est prévu vers le futur. Parce que c'est ça, dans le fond,
le... peut-être, le... ce qui est le...
M. Gaudreault : Oui, je
suis entièrement d'accord avec vous, puis c'est ça qu'il faut regarder. On
n'est pas... Nous, comme législateurs, on ne fait pas des lois pour le passé,
on fait des lois pour le futur, donc il faut essayer de faire un peu de
prospective. Mais c'est parce que le ministre nous revient toujours avec le
fameux tableau que vous avez là pour asseoir son argumentaire. Donc, c'est
absolument important de bien faire la part des choses. Alors, c'est là-dessus
que je voulais vous emmener, là. O.K.
Écoutez, il me reste 30... même pas, 25
secondes. Politiser, vous avez nommé ça dans votre présentation. Vous avez
vraiment peur de la politisation de la régie ou de la fixation des tarifs.
M. Bélanger (Jules) :
Pour nous, c'est un problème, c'est sûr, et un problème qui est survenu. Donc,
l'exemple de la suspension du mécanisme de traitement des écarts de rendement
en est un. Nous ne serions pas là peut-être tous aujourd'hui si le mécanisme
avait été en application. Pour nous, c'est important d'avoir... de pouvoir
compter sur un organisme qui est indépendant et neutre dans la fixation des
tarifs.
Le Président (M. Lemay) :
Merci beaucoup, M. Bélanger, M. Corbeil, Mme De Bellefeuille. Je vous
remercie pour votre contribution à nos travaux.
La commission suspend ses travaux jusqu'au
jeudi 19 septembre, après les affaires courantes, où elle poursuivra son
mandat.
(Fin de la séance à 17 h 19)