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Version finale

43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)

Le mercredi 7 février 2024 - Vol. 47 N° 96

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Affaires courantes

Déclarations de députés

Rendre hommage à M. Serge Payette

Mme Kariane Bourassa

Souligner le Mois de l'histoire des Noirs

Mme Jennifer Maccarone

Féliciter l'Université de Sherbrooke pour son classement parmi les 10 meilleures universités
en recherche au Canada

Mme Geneviève Hébert

Souligner le travail du Service d'orientation et de recherche d'emploi pour l'intégration des
femmes au travail

Mme Ruba Ghazal

Remercier les pompiers du Service de sécurité incendie de Saint-Jean-sur-Richelieu pour leur
intervention au CHSLD Georges-Phaneuf

M. Louis Lemieux

Rendre hommage à Mme Janet King

Mme Désirée McGraw

Souligner le 40e anniversaire de l'organisme Accompagnement des femmes immigrantes de
l'Outaouais (AFIO)

Mme Suzanne Tremblay

Souligner le Mois de l'histoire des Noirs

M. Pascal Paradis

Souligner le 40e anniversaire de la Fondation pour la santé du Haut-Saint-Maurice

Mme Marie-Louise Tardif

Rendre hommage à M. Michel Métivier

M. Youri Chassin

Rendre hommage à Mme Martine Loiselle

M. Ian Lafrenière

Féliciter Mme Djénébou Drabo, lauréate du Prix d'alphabétisation du Conseil de la fédération

M. Bernard Drainville

Présence d'une délégation de parlementaires du Royaume-Uni, de Grande-Bretagne et
d'Irlande du Nord


Présentation de projets de loi

Projet de loi n° 44 — Loi modifiant principalement la Loi sur le ministère de l'Économie
et de l'Innovation en matière de recherche

M. Pierre Fitzgibbon

Mise aux voix

Dépôt de rapports de commissions

Consultations particulières sur le projet de loi n° 46 — Loi sur l'amélioration de la protection
des enfants dans les services de garde éducatifs


Dépôt de pétitions

Élargir le tronçon de l'autoroute 20 entre Rimouski et Mont-Joli

Questions et réponses orales

Stratégie du gouvernement en matière de foresterie

M. Marc Tanguay

M. François Legault

M. Marc Tanguay

M. François Legault

M. Marc Tanguay

M. François Legault

M. Marc Tanguay

M. François Legault

Développement de microréseaux électriques

M. Gregory Kelley

M. Pierre Fitzgibbon

M. Gregory Kelley

M. Pierre Fitzgibbon

M. Gregory Kelley

M. Pierre Fitzgibbon

Mesures d'aide pour les petites et moyennes entreprises

Mme Madwa-Nika Cadet

Mme Kateri Champagne Jourdain

Mme Madwa-Nika Cadet

Mme Kateri Champagne Jourdain

Mme Madwa-Nika Cadet

Mme Kateri Champagne Jourdain

Maintien du service de traversier entre Rivière-du-Loup et Saint-Siméon

M. Monsef Derraji

Mme Geneviève Guilbault

M. Monsef Derraji

Mme Geneviève Guilbault

M. Monsef Derraji

Mme Geneviève Guilbault

Mesures pour favoriser l'accès à la propriété

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. François Legault

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. François Legault

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. François Legault

Aide aux producteurs agricoles

Mme Alejandra Zaga Mendez

M. André Lamontagne

Mme Alejandra Zaga Mendez

M. André Lamontagne

Mme Alejandra Zaga Mendez

M. André Lamontagne

Délais d'attente dans les urgences

M. Joël Arseneau

M. Christian Dubé

M. Joël Arseneau

M. Christian Dubé

M. Joël Arseneau

M. Christian Dubé

Conditions de travail des enseignants

Mme Ruba Ghazal

M. Bernard Drainville

Mme Ruba Ghazal

M. Bernard Drainville

Mme Ruba Ghazal

M. Bernard Drainville

Financement des foyers de l'Association des Arches du Québec

Mme Elisabeth Prass

M. Lionel Carmant

Motions sans préavis

Demander au Parlement fédéral de modifier le Code criminel afin de permettre les demandes
anticipées d'aide médicale à mourir au Québec selon les critères établis dans la Loi
concernant les soins de fin de vie

Mise aux voix

Demander au gouvernement de déposer un document de consultation comprenant une modélisation
des trajectoires d'émission de gaz à effet de serre permettant au Québec d'atteindre la
carboneutralité en 2050 et de tenir une commission parlementaire à cet effet

Mise aux voix

Avis touchant les travaux des commissions

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Affaires du jour

Projet de loi n° 42 —  Loi visant à prévenir et à combattre le harcèlement psychologique et la
violence à caractère sexuel en milieu de travail

Adoption du principe

M. Jean Boulet

Mme Linda Caron

M. Alexandre Leduc

M. Pascal Paradis

Mme Elisabeth Prass

Mise aux voix

Renvoi à la Commission de l'économie et du travail

Mise aux voix

Projet de loi n° 41 —         Loi édictant la Loi sur la performance environnementale des bâtiments et
modifiant diverses dispositions en matière de transition énergétique

Adoption du principe

M. Mathieu Lemay

Affaires inscrites par les députés de l'opposition

Motion proposant que l'Assemblée demande au gouvernement de rendre obligatoire la
divulgation des promesses d'achat simultanées sur une même propriété

M. Andrés Fontecilla

Mme France-Élaine Duranceau

M. André Albert Morin

Mme Amélie Dionne

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Yannick Gagnon

Mme Linda Caron

Mme Chantale Jeannotte

Mme Alejandra Zaga Mendez

Mme Virginie Dufour

M. Andrés Fontecilla (réplique)

Vote reporté

Projet de loi n° 41 —  Loi édictant la Loi sur la performance environnementale des bâtiments et
modifiant diverses dispositions en matière de transition énergétique

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Mme Virginie Dufour

Mme Alejandra Zaga Mendez

Ajournement

Journal des débats

(Neuf heures quarante minutes)

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, bonjour à toutes, bonjour à tous. Nous allons débuter nos travaux. Je vous invite donc à prendre place.

Affaires courantes

Déclarations de députés

Et nous sommes bien rendus à la rubrique Déclarations de députés. Je reconnais tout de suite Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré.

Rendre hommage à M. Serge Payette

Mme Kariane Bourassa

Mme Bourassa : Merci, M. le Président. Aujourd'hui, je tiens à rendre hommage à un éminent scientifique, de réputation internationale, un résident de ma circonscription. Il vient de Saint-Jean-de-l'Île-d'Orléans.

M. Serge Payette est surnommé avec affection l'adolescent des grands sages. Il incarne toujours, à 80 ans, une jeunesse d'esprit et une passion inspirantes pour la recherche. Il a grandement enrichi notre compréhension de l'écologie en documentant notamment la flore nordique du Québec et du Labrador.

Parmi son parcours impressionnant, il a eu de nombreuses distinctions. J'en nomme quelques-unes. Scientifique de l'année par Radio-Canada. Il a été fait chevalier de l'Ordre national du Québec. En 2020, il a été honoré de l'Ordre du Canada pour sa contribution exceptionnelle à la science.

Afin d'ajouter à cette liste, soulignons que la bourse Grands Sages Serge Payette, remise par le Fonds de recherche du Québec, vient d'être créée. Cette bourse a pour effet de soutenir et faire la promotion de la recherche scientifique dans la province de Québec. C'est une belle distinction. Félicitations!

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré. Et je cède maintenant la parole à Mme la députée de Westmount—Saint-Louis.

Souligner le Mois de l'histoire des Noirs

Mme Jennifer Maccarone

Mme Maccarone : Merci, M. le Président. Je suis heureuse, aujourd'hui, de souligner le Mois de l'histoire des Noirs, qui se déroule pendant tout le mois de février et dont le thème cette année est Plusieurs nuances, une histoire. Ce thème vise à souligner la multiplicité des histoires, des points de vue et des expériences vécues par les personnes afrodescendantes au Québec.

Le Mois de l'histoire des Noirs nous permet de célébrer et informer sur l'importante contribution des Québécoises et des Québécois issus des communautés noires dans toutes les sphères de notre société. C'est aussi l'occasion de se réunir et réfléchir ensemble sur le grand impact du racisme systémique, de la discrimination et l'intolérance. Plus que jamais, nous devons construire une société qui prône le vivre-ensemble et l'inclusion.

Je tiens à féliciter tous les acteurs qui se mobilisent année après année pour faire briller l'héritage des communautés noires au Québec. Soyons fiers de ce travail de mémoire, de célébration. Bon Mois de l'histoire des Noirs!

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis. Et je cède maintenant la parole à Mme la députée de Saint-François.

Féliciter l'Université de Sherbrooke pour son classement parmi
les 10 meilleures universités en recherche au Canada

Mme Geneviève Hébert

Mme Hébert : M. le Président, l'Université de Sherbrooke atteint le top 10 des plus grandes universités de recherche canadiennes, selon le Canada's Top 50 Research Universities 2023. Cette performance est attribuable à la confiance sans cesse renouvelée de ses partenaires et au caractère visionnaire de sa communauté de recherche de plus de 6 500 personnes.

Pour la troisième fois en cinq ans, l'université est arrivée première au Canada pour la croissance de ses revenus de recherche. Ces augmentations sont des indicateurs fiables de sa capacité de former une relève hautement spécialisée dans des domaines jugés prioritaires. Partenaire des deux premières zones d'innovation au Québec, l'UdeS est reconnue pour son approche innovante.

On peut conclure en citant le vice-recteur à la recherche et aux études supérieures, Jean-Pierre Perreault. Celui-ci mentionne que «nos équipes de recherche talentueuses sont un gage de qualité pour ceux qui investissent dans nos travaux. Nous innovons là où les besoins sont criants, et cette pertinence rend nos projets d'autant plus attrayants.» Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de Saint-François. Et je reconnais maintenant Mme la députée de Mercier.

Souligner le travail du Service d'orientation et de recherche
d'emploi pour l'intégration des femmes au travail

Mme Ruba Ghazal

Mme Ghazal : Merci, M. le Président. Je veux souligner le travail remarquable de l'équipe du Service d'orientation et de recherche d'emploi pour l'intégration des femmes au travail, le SORIF.

Dirigé par Mme Nathalie Cloutier, cet organisme, qui a pignon sur rue dans Mercier, oeuvre depuis 40 ans auprès de mères qui désirent faire un retour aux études ou sur le marché du travail. J'ai été choyée, d'ailleurs, lundi, de participer à la remise d'attestations à des participantes, qui étaient très fières d'avoir complété un parcours de 15 semaines qui les mènera soit vers des études ou le marché du travail.

Les intervenantes du SORIF font des miracles pour donner confiance, outiller, accompagner les femmes dans leur parcours, dans une approche féministe.

Le SORIF collabore aussi à un projet qui s'appelle Elles font plus que la job, qui soutient des femmes qui étudient dans des métiers non traditionnels comme la construction, la boucherie, l'électricité ou le camionnage. J'aurai d'ailleurs le plaisir, au mois de mai prochain, de donner des bourses d'études à ces femmes.

Donc, bravo au SORIF et à toutes ces femmes qui investissent en elles-mêmes, en leur avenir et en celui de leurs enfants! Merci.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de Mercier. Et la parole revient maintenant à M. le député de Saint-Jean.

Remercier les pompiers du Service de sécurité incendie de
Saint-Jean-sur-Richelieu pour leur intervention
au CHSLD Georges-Phaneuf

M. Louis Lemieux

M. Lemieux : M. le Président, j'avais prévu vous parler, ce matin, de la conférence de presse conjointe à laquelle j'ai participé lundi avec la ville de Saint-Jean-sur-Richelieu pour annoncer une participation importante du gouvernement du Québec à la construction d'une nouvelle caserne de pompiers du quartier Saint-Luc. Et effectivement j'ai rencontré l'état-major du service des incendies de la ville, mais ce n'est pas tellement de subventions dont on a le plus parlé après l'annonce, mais plutôt de l'intervention de la veille au CHSLD Georges-Phaneuf, où un début d'incendie s'est tristement soldé par le décès d'un résident et qui a nécessité un déploiement important pour sécuriser les 125 résidents d'un des plus vieux et plus vétustes CHSLD au Québec. Mais ça, c'est une autre histoire, et j'y reviendrai.

Aujourd'hui, je veux surtout offrir mes pensées et mes condoléances à la famille et aux proches de la victime, et remercier du fond du coeur tous ceux et celles, à commencer par les pompiers, qui sont intervenus, et saluer le travail du personnel qui a si bien pris soin, dans les circonstances, des résidents. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député de Saint-Jean. Au tour, maintenant, de Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.

Rendre hommage à Mme Janet King

Mme Désirée McGraw

Mme McGraw : Merci, M. le Président. J'aimerais souligner l'implication extraordinaire d'une femme qui est un pilier dans mon comté, Janet King.

A social worker by training, Janet is a person whose contribution to her community can be felt through the generations. From the kids of the Montréal West Children's Library to the men and women she sings alongside at Christ Church Cathedral, Janet's influence and impact are far-reaching.

Membre et leader des guides depuis 1987, son bénévolat a été reconnu récemment par le prix du Québec, qui a été remis à Janet, connue sous le nom de «BrownOwl». Janet s'est impliquée aussi au IODE, un organisme international de femmes qui se consacre à l'éducation, au service communautaire et aux programmes de citoyenneté.

Janet's husband of 50 years and her partner in faith and service, Bob King, sums it up best : «When and where Janet sees need, she acts.»

Thank you, Janet King, for your compassion and your action in support of our community in Montréal West and beyond.

Merci.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce. Et je cède maintenant la parole à Mme la députée de Hull.

Souligner le 40e anniversaire de l'organisme Accompagnement
des femmes immigrantes de l'Outaouais (AFIO)

Mme Suzanne Tremblay

Mme Tremblay : M. le Président, je tiens à souligner le 40e anniversaire de l'organisme Accompagnement femmes immigrantes de l'Outaouais, l'AFIO, un organisme essentiel pour Hull et pour l'ensemble de l'Outaouais. L'AFIO épaule les femmes immigrantes dans leur chemin vers une nouvelle vie dans notre belle région.

La grande variété de services disponibles à l'AFIO vise toujours à accomplir le même objectif, soit d'offrir aux femmes immigrantes tous les outils dont elles ont besoin pour construire leur vie chez nous. C'est en ayant constamment à coeur les valeurs de respect et d'entraide que les gens de l'AFIO partagent leurs connaissances et leur expertise à des femmes venues de partout dans le monde. Peu importent les défis auxquels peuvent faire face les personnes immigrantes, elles peuvent compter sur l'équipe dévouée de l'AFIO.

Merci aux nombreux bénévoles et employés, ainsi qu'à sa directrice générale, Bettyna Bélizaire. Par votre travail extraordinaire, vous permettez à ces femmes immigrantes de s'intégrer pleinement et harmonieusement à la société québécoise. Bon 40e anniversaire à l'AFIO! Merci.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de Hull. Et je reconnais maintenant M. le député de Jean-Talon.

Souligner le Mois de l'histoire des Noirs

M. Pascal Paradis

M. Paradis : M. le Président, cette année marque la 33e édition du Mois de l'histoire des Noirs, sous le thème Plusieurs nuances, une histoire. La communauté noire est présente au Québec depuis les débuts de notre histoire. De Mathieu da Costa, interprète débarqué en homme libre en Nouvelle-France en 1606, jusqu'aux nouveaux arrivants d'aujourd'hui, en passant par les réfugiés de divers pays, l'histoire des personnes noires qui ont contribué à façonner le Québec doit rayonner encore plus.

Heureusement, il existe plusieurs initiatives pour mettre cette histoire en lumière, dont le Mois de l'histoire des Noirs ou, par exemple, la murale de Saint-Roch en hommage aux citoyens noirs et afrodescendants de Québec, parce que notre ville compte 15 000 personnes noires, dont plusieurs dans Jean-Talon, une circonscription qui est fière d'accueillir un grand nombre de personnes immigrantes, autant de citoyennes et citoyens qui contribuent culturellement, socialement et économiquement à la vitalité de Jean-Talon, de la capitale nationale et du Québec.

J'aimerais aujourd'hui souligner cet apport et nous souhaiter à toutes et tous un excellent Mois de l'histoire des Noirs. Merci.

• (9 h 50) •

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député de Jean-Talon. Et je reconnais maintenant Mme la députée de Laviolette—Saint-Maurice.

Souligner le 40e anniversaire de la Fondation
pour la santé du Haut-Saint-Maurice

Mme Marie-Louise Tardif

Mme Tardif : Je souhaite reconnaître le travail de plus de 200 hommes et femmes qui se sont investis depuis plus de 40 ans, en fait 40, c'est le 40e anniversaire, pour faire vivre la Fondation pour la santé du Haut-Saint-Maurice. 40 ans d'implication, plus de 160 bénévoles, plus de 4 millions de dollars amassés pour l'achat d'équipement spécialisé et pour offrir des bourses d'études pour encourager des professionnels à venir travailler à l'hôpital de La Tuque. La requête pour la constitution a été déposée le 2 février 1984. Je salue l'initiative de M. Jacques Veillette, directeur à l'époque, qui avait sollicité M. Gaston Bolduc pour mettre sur pied une fondation. Je souligne la longue implication des présidents Isabelle Voyer, 13 ans, et Gaston Bolduc, 12 ans. Je félicite les merveilleuses et merveilleux employés.

Bravo et merci pour tout : le scanner, la réfection du pavillon extérieur, le soutien pour l'unité d'hémodialyse, le réaménagement du GMF, des lits de naissance, etc. Bon anniversaire!

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de Laviolette—Saint-Maurice. Et je reconnais maintenant M. le député de Saint-Jérôme.

Rendre hommage à M. Michel Métivier

M. Youri Chassin

M. Chassin : Merci, M. le Président. Nous avons tous dans nos communautés des piliers, des gens qui s'impliquent, qui promeuvent des projets. Et c'est le cas de Michel Métivier, à Saint-Jérôme, qui prend sa retraite cette semaine. Alors, évidemment, quelle occasion de souligner sa participation à l'ensemble des projets de notre communauté, ces dernières années, mais en particulier à son travail au centre de formation générale des adultes de la Rivière-du-Nord, donc un très beau projet, dans lequel il a été longuement impliqué, notamment quand on manquait encore de bureaux et d'espace pour les classes et que Michel Métivier trouvait toujours un petit coin où s'installer durant la journée, en disant : Bon, où est-ce que je mets mon bureau ce matin pour la journée?

Alors, il est très débrouillard, il est un joueur d'équipe, mais, surtout, il pensait d'abord et avant tout aux élèves, parce que non seulement il a fait connaître les programmes axés sur l'emploi, mais il a monté plusieurs de ces programmes avec des entreprises, comme par exemple Savoura, en répondant aux besoins de ces jeunes.

Et évidemment, Michel Métivier, on te salue et on te souhaite une bonne retraite.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député de Saint-Jérôme. Je reconnais maintenant M. le député de Vachon.

Rendre hommage à Mme Martine Loiselle

M. Ian Lafrenière

M. Lafrenière : Merci beaucoup, M. le Président. Aujourd'hui, je souligne l'initiative et l'implication de Mme Martine Loiselle, responsable principale du Défi25.

En 2017, cette mère a pris l'initiative de lancer son premier Défi25, après le décès tragique de son fils Francis, qui s'est enlevé la vie à l'âge de 25 ans. À travers cette campagne, elle encourage le public à faire don de 25 $ à la mémoire de son fils, et tous les fonds collectés sont ensuite envoyés à l'organisme Suicide Action Montréal. De plus, Martine met en place des ateliers de cuisine collective en collaboration avec des bénévoles qui sont aussi touchés par le deuil causé par le suicide, et ensemble ils préparent des biscuits portant le slogan Le goût de la vie.

Je suis très fier de compter sur des citoyens engagés qui s'impliquent pour des causes qui leur tiennent à coeur. Martine, je te souhaite une excellente huitième édition du Défi25.

Et, M. le Président, en cette semaine de la prévention du suicide, rappelons qu'il ne faut pas hésiter, que ce soit par téléphone au 1 866 appelle ou encore par texto au #535353, il y a quelqu'un qui est à l'écoute. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député de Vachon. Au tour, maintenant, de M. le député de Lévis.

Féliciter Mme Djénébou Drabo, lauréate du Prix
d'alphabétisation du Conseil de la fédération

M. Bernard Drainville

M. Drainville : M. le Président, aujourd'hui je suis fier de vous dévoiler le nom de la lauréate du Prix d'alphabétisation du Conseil de la fédération de l'année 2023 pour le Québec, qui souligne les efforts exceptionnels des apprenants adultes dans le domaine de l'alphabétisation. Ils mettent en lumière l'importance de l'apprentissage tout au long de la vie.

Originaire de la Côte d'Ivoire, Mme Djénébou Drabo s'est investie de façon exceptionnelle dans son parcours scolaire en formation générale des adultes au centre d'éducation aux adultes des Navigateurs, à Lévis. Je lui ai d'ailleurs remis la bourse du député en juin dernier pour souligner sa persévérance.

Cette mère de trois jeunes enfants a vécu un grand déracinement et était confrontée, à son arrivée, à un grand défi d'alphabétisation. Grâce à son assiduité, son engagement, ses efforts, elle a réussi tous ses cours préalables pour poursuivre ses études en formation professionnelle au centre de formation professionnelle de Lévis. Elle est présentement étudiante au D.E.P. en assistance à la personne en établissement et à domicile. Elle deviendra, à n'en pas douter, une préposée aux bénéficiaires hors pair.

Je vous invite, M. le Président, à vous joindre à moi pour applaudir la persévérance de Mme Djénébou Drabo, fière lauréate québécoise du Prix d'alphabétisation du Conseil de la fédération 2023. Merci. Et félicitations, Mme Drabo!

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci. Merci, M. le député de Lévis. J'en profite pour rappeler à tous les collègues que les déclarations sont d'une durée d'une minute. Je vous remercie, chacun de vous, pour vos déclarations.

Nous allons donc suspendre les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 9 h 55)

(Reprise à 10 h 04)

La Présidente : Bonjour, tout le monde. Bienvenue chez vous. Le parlement du Québec, c'est chez vous.

Messieurs dames les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Présence d'une délégation de parlementaires du Royaume-Uni,
de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord

Alors, j'ai le plaisir de souligner aujourd'hui la présence, dans les tribunes, d'une délégation de parlementaires du Royaume-Uni, de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord à l'occasion de la visite du Comité des procédures du Parlement britannique, dirigé par la présidente du comité, Mme Karen Bradley.

Nous poursuivons les affaires courantes.

Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi

À la rubrique Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, je vous demande d'appeler l'article a du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 44

La Présidente : À l'article a du feuilleton, M. le ministre de l'Économie, de l'Innovation et de l'Énergie présente le projet de loi n° 44, Loi modifiant principalement la Loi sur le ministère de l'Économie et de l'Innovation en matière de recherche. M. le ministre.

M. Pierre Fitzgibbon

M. Fitzgibbon : Merci, Mme la Présidente. Ce projet de loi actualise la Loi sur le ministère de l'Économie et de l'Innovation en ce qui concerne la recherche et l'innovation. À cette fin, il intègre dans cette loi différentes dispositions prévues par la Loi sur le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie en y apportant certaines modifications.

Ainsi, le projet de loi confère au ministre de l'Économie, de l'Innovation et de l'Énergie le devoir d'élaborer et de mettre en oeuvre une stratégie en matière de recherche et d'innovation et actualise les dispositions relatives à la nomination du Scientifique en chef et aux fonctions de ce dernier.

Le projet de loi institue le Fonds de recherche du Québec et prévoit la fusion au sein de ce fonds de trois fonds de recherche du Québec institués par la Loi sur le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie. Il énonce que le fonds a principalement pour mission de soutenir financièrement le développement de la recherche scientifique et de promouvoir la formation de la relève en recherche. Il précise ses fonctions et lui confère différents pouvoirs.

Le projet de loi établit les règles d'organisation et de fonctionnement du fonds, notamment celles relatives à la composition de son conseil d'administration et à... à l'élaboration, je m'excuse, et à la mise en oeuvre de programmes d'aide financière. Il prévoit la nomination de trois directeurs scientifiques ayant pour fonction de veiller au bon fonctionnement du fonds à l'égard du domaine de recherche auquel il est rattaché. Il énonce également les règles relatives au financement du fonds, à ses comptes et ses rapports.

Le projet de loi transfère dans la Loi sur le ministère de l'Économie et de l'Innovation les dispositions relatives à la Commission de l'éthique en science et en technologie prévues par la Loi sur le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie.

Enfin, le projet de loi adopte des modifications de concordance et comporte des dispositions transitoires. Merci.

La Présidente : Et je reconnais le leader de l'opposition officielle, oui.

M. Derraji : Mme la Présidente, nous souhaitons la tenue de consultations sur ce projet de loi. Merci.

La Présidente : M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : On va attendre les groupes des collègues, Mme la Présidente.

Mise aux voix

La Présidente : Alors, est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix : Adopté.

La Présidente : Adopté.

Il n'y a pas de dépôt de documents.

Dépôt de rapports de commissions

À la rubrique Rapports de commissions, dépôt des rapports, Mme la présidente de la Commission des relations avec les citoyens et députée de Les Plaines. Mme la députée des Plaines, c'est à vous.

Consultations particulières sur le projet de loi n° 46

Mme Lecours (Les Plaines) : Merci, Mme la Présidente. Alors, j'ai le plaisir de déposer le rapport de la Commission des relations avec les citoyens qui, le 1er et le 6 février 2024, a tenu des auditions publiques dans le cadre de consultations particulières sur le projet de loi n° 46, loi sur l'amélioration de la protection des enfants et des services de garde éducatifs. Merci.

La Présidente : Ce rapport est déposé.

Dépôt de pétitions

À la rubrique Dépôt de pétitions, je reconnais M. le député de Matane-Matapédia.

Élargir le tronçon de l'autoroute 20 entre Rimouski et Mont-Joli

M. Bérubé : Mme la Présidente, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 10 021 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Considérant que la société québécoise accorde une grande importance à la sécurité routière;

«Considérant que l'amélioration du bilan routier est une priorité de la ministre des Transports et de la Mobilité durable;

«Considérant que l'autoroute Jean-Lesage entre les villes de Rimouski et Mont-Joli est constituée de deux voies contiguës;

«Considérant que de 2004 à 2021 on recense plus de 1 144 collisions, dont plus de 200 collisions avec blessés graves ou légers et 24 collisions mortelles, dans le tronçon entre Rimouski — Le Bic — et Mont-Joli;

«Considérant que le débit journalier moyen annuel — DJMA — se situe à 8 100 véhicules par jour et que le débit journalier moyen estival est de 9 500 véhicules par jour sur ce tronçon;

«Considérant que la route 175 entre Québec et Saguenay, constituée de deux chaussées de deux voies vers le nord et de deux voies vers le sud, reçoit un DJMA de 5 600 véhicules et de 8 200 en période estivale;

«Considérant que l'autoroute 85, dont se termine la construction de quatre voies de deux chaussées dans chaque sens, a un DJMA de 7 100 véhicules et un DJME de 9 000 véhicules;

«Considérant que la population mitissienne et rimouskoise souhaite l'élargissement à quatre voies du tronçon Rimouski—Mont-Joli;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, signataires, demandons à la ministre des Transports et de la Mobilité durable et au gouvernement du Québec de procéder à l'élargissement à quatre voies du tronçon de l'autoroute 20 située entre Rimouski — Le Bic — et Mont-Joli.»

Et je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

• (10 h 10) •

La Présidente : Cet extrait de pétition est déposé. Il n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Questions et réponses orales

Nous en sommes maintenant rendus à la période de questions et de réponses orales, et je cède la parole, en question principale, au chef de l'opposition officielle.

Stratégie du gouvernement en matière de foresterie

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Merci beaucoup, Mme la Présidente. On le sait, l'économie est à la base de tout. L'économie est à la base de notre capacité d'avoir des finances publiques en ordre et l'économie est à la base de notre capacité d'offrir les services publics.

Ce matin, avec le premier ministre, si ça lui va, on va parler de deux-par-quatre. Nos forêts sont au coeur de l'économie de toutes nos régions, 130 000 travailleurs québécois y travaillent, 12 % des exportations du Québec. Et ça contribue, nos forêts, à 18 milliards de notre PIB.

À l'été 2023, on en a tous été témoins, les feux de forêt ont été catastrophiques. Dès octobre 2023, cri du coeur de l'industrie forestière, l'alerte qui était lancée : Ça va avoir un impact, les pertes de bois, économique de 13,5 milliards de dollars. En novembre 2023, rapidement, le Forestier en chef a annoncé des baisses majeures de possibilité forestière. Ça, ce que ça représente, c'est la perte, en deux-par-quatre, d'un nombre suffisant pour construire 23 000 logements, Mme la Présidente. Ça menace 2 700 emplois. En décembre 2023, Jean-François Samray, du Conseil de l'industrie forestière, a dit : «Il ne faut pas attendre au 1er avril 2024 pour ajuster le système de mise en marché, parce que les prix vont monter de façon stratosphérique.» Il y a urgence d'agir.

Pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas déjà en place un plan forestier pour notre économie?

La Présidente : La réponse du premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Oui. Bien, Mme la Présidente, pour une fois, on est d'accord sur la prémisse de la question du chef de l'opposition officielle. Le chef de l'opposition officielle nous dit : L'économie est à la base de tout. Puis effectivement, si on veut être capable de bien financer nos services, de faire le choix qu'on a fait dans les négociations de conventions collectives, de réinvestir massivement en santé et en éducation, sans augmenter les impôts, sans nouvelle taxe orange... Je sais que le Parti québécois dit : Baisser les impôts, c'est «not on my dead body», selon le chef du Parti québécois. Donc, si on veut être capable de bien financer les services sans augmenter les impôts, même être capable de les diminuer, comme on l'a fait, bien, il faut créer de la richesse.

C'est pour ça que j'étais surpris, la semaine dernière, de voir le chef de l'opposition officielle se moquer un peu de l'investissement de 7 milliards de Northvolt, qui va créer de la richesse, comme les investissements de GM, de Ford, de Volta. On le sait, actuellement, Mme la Présidente, la croissance économique par habitant est meilleure au Québec que dans le reste du Canada. La croissance des salaires, au Québec, est meilleure que dans le reste du Canada.

Maintenant, pour ce qui est du secteur de la forêt, encore une fois, le chef de l'opposition officielle a raison, c'est 60 000 emplois directs et indirects. C'est pour ça, Mme la Présidente, qu'en décembre 2020 on a investi 250 millions sur les travaux de sylviculture. Et, dans la dernière mise à jour, en novembre... Je vais continuer, Mme la Présidente.

La Présidente : Première complémentaire.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Là, Mme la Présidente, hier, le premier ministre nous a confirmé qu'il avait un cartable, mais le cartable n'est pas à jour, là. Il me parle de décembre 2020. L'été passé, 2023 : catastrophe. Ce qui fait dire à Frédéric Verreault, de Chantiers Chibougamau, il le disait en décembre dernier : «C'est une perte de 850 000 mètres cubes de matériau [qui ne sont plus là] disponible pour construire des logements si on ne fait rien.»

«On manquait déjà de bois pour répondre aux besoins des usines et, selon nos estimations, il y aura une baisse d'approvisionnement de 20 %.»

Encore une fois, pourquoi le gouvernement n'a toujours rien fait?

La Présidente : La réponse du premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Oui. Bien, Mme la Présidente, le chef de l'opposition officielle ne m'a pas laissé la chance de compléter ma réponse. En novembre 2023, donc l'automne dernier, le ministre des Finances a ajouté 200 millions suite, justement, aux feux de forêt. Ça va permettre de reboiser 25 000 hectares de forêt.

Donc, Mme la Présidente, Frédéric Verreault, on le rencontre régulièrement. Chantiers Chibougamau, c'est une belle entreprise. Et on a des discussions avec les différentes entreprises dans le secteur de la forêt pour trouver des solutions, entre autres, aussi, ramasser le bois qui a été brûlé.

Je continuerai, Mme la Présidente.

La Présidente : Deuxième complémentaire.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Mme la Présidente, on doit, au Québec, avoir, au moment où on se parle, parce qu'il y a urgence, une vision, un plan forestier mis à jour. On parle de pertes, ici, de 850 000 mètres cubes de bois. Les matériaux, le coût des matériaux va exploser. Ils parlent de stratosphérique, les acteurs du milieu. Ils se sont déjà réunis par eux-mêmes et ils décrient le fait que le gouvernement ne fait rien. On est en retard, il y a urgence.Qu'il me parle de deux-par-quatre, parce que, là, on fonce dans le mur.

La Présidente : La réponse du premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Oui, Mme la Présidente, peut-être que le chef de l'opposition officielle a manqué l'annonce du Forestier en chef, mais on a annoncé la mise en place d'une table de réflexion sur l'avenir de la forêt, parce qu'il faut repenser aussi notre aménagement, même le choix des différentes plantations qu'on veut.

J'étais en train de dire, aussi, qu'on veut récolter le bois. Évidemment, il y a une certaine urgence, si on veut l'utiliser pour faire du bois, mais il y a des entreprises comme Nordic Kraft qui peuvent faire de la pâte kraft avec du bois qui a été brûlé, ils peuvent même récolter pendant un certain nombre d'années.

Donc, Mme la Présidente, autant la ministre responsable des Ressources naturelles que le ministre de l'Économie travaillent avec l'industrie.

La Présidente : Troisième complémentaire.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : C'est majeur, nos forêts, Mme la Présidente. Il mentionne la table de réflexion sur l'avenir de la forêt. Dominic Lemieux, directeur des Métallos, a dit, par rapport à cela, je le cite : «Le gouvernement fait une opération de relations publiques avec cette consultation-là. On pense que ça ne va pas assez en profondeur. On est les enfants pauvres du gouvernement.» Fin de la citation.

Question toute simple au premier ministre, j'espère qu'il va avoir la fiche pour me répondre : Pourquoi les préoccupations liées à la main-d'oeuvre ne figurent-elles pas à l'ordre du jour de ces consultations?

La Présidente : La réponse du premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Bon, peut-être que le chef de l'opposition officielle pourrait préciser sa question. Est-ce qu'on parle de la main-d'oeuvre pour faire les travaux de sylviculture? Est-ce qu'on parle des travailleurs de la construction? De quoi parle-t-on exactement?

Mais effectivement j'ai la chance, dans mon cabinet, d'avoir des gens qui connaissent très bien l'industrie. J'ai un ancien vice-président de Cascades, j'ai un ancien vice-président de Domtar. Donc, on parle avec les grandes entreprises. On sait que c'est beaucoup d'emplois. Puis le ministre des Finances est très conscient aussi. Il y a un budget qui s'en vient. Ce n'est pas toujours facile, faire les budgets, mais, à l'automne dernier, il a quand même annoncé 200 millions pour des travaux, donc ce n'est pas rien. On va continuer de bien s'occuper de notre forêt.

La Présidente : En question principale, je reconnais maintenant le député de Jacques-Cartier.

Développement de microréseaux électriques

M. Gregory Kelley

M. Kelley : Mme la Présidente, c'est une belle journée ensoleillée, alors pourquoi ne pas parler de l'énergie solaire? Le Québec a besoin beaucoup d'énergies renouvelables dans les prochaines années, c'est un gros défi pour notre société et pour notre économie. Et je sais que le premier ministre aime quand l'opposition officielle a des propositions, des solutions à nos gros défis. C'est exactement pourquoi j'ai écrit une lettre ouverte dans Le Journal de Montréal et Le Journal de Québec concernant les microréseaux.

Mme la Présidente, je crois que, dans toutes les régions du Québec, il faut avoir des panneaux solaires sur les toits des maisons. Et ce n'est pas juste moi qui crois que c'est une bonne solution, quand même Hydro-Québec croit que les microréseaux électriques sont la solution de l'avenir.

Alors, j'ai une question très simple pour le ministre de l'Énergie : Est-ce que les microréseaux feront partie de la solution au Québec, oui ou non?

La Présidente : La réponse du ministre de l'Économie, de l'Innovation et de l'Énergie.

M. Pierre Fitzgibbon

M. Fitzgibbon : Mme la Présidente, bien, premièrement, je pense qu'au niveau du solaire je suis totalement en accord avec le député. Je pense que, d'ailleurs, le plan qui a été établi par Hydro-Québec, le plan d'action 2035, fait état de 8 000 à 10 000 mégawatts d'énergie additionnels, duquel il va falloir qu'il y ait plus d'éolien et du solaire, qui n'existent pratiquement pas ici, au Québec, présentement. Et je demanderais au député d'attendre quelques semaines, quelques mois. On va voir probablement des appels d'offres qui vont avoir lieu de la part d'Hydro-Québec pour regarder, ultimement, la faisabilité du solaire en termes de son coût, surtout dans les milieux urbains. Donc, le solaire, on est totalement à la même place. Et on n'aura pas le choix que d'inclure le solaire dans notre offre de produits énergétiques.

Quant aux microréseaux, évidemment, on va attendre le projet de loi, parce que le projet de loi a été débattu dans les journaux, mais le vrai projet de loi va être déposé incessamment, dans lequel il y aura des mesures qu'on va regarder avec la collectivité, on va faire des consultations, on va avoir un débat public, parce que des microréseaux impliquent évidemment une certaine indépendance. Alors, il faut s'assurer que, d'une part, les municipalités, qui ont besoin d'énergie pour leurs projets, autant résidentiels que les projets sociaux et projets économiques... bien, à un moment donné, s'il n'y a pas d'électricité disponible, il va falloir trouver des moyens pour leur permettre d'arriver à leurs fins. Alors, on est ouverts à cette discussion-là en temps et lieu.

• (10 h 20) •

La Présidente : Première complémentaire.

M. Gregory Kelley

M. Kelley : Je suis content que le ministre accepte le principe sur l'énergie solaire, et, quand même, on va regarder les microréseaux. Il est pas mal d'accord avec le Parti libéral. C'est une bonne nouvelle, parce que la prochaine question, c'est, bien sûr, la rentabilité pour les citoyens. Si on regarde les chiffres, présentement, le remboursement sur l'investissement, à Montréal, ça prend environ 20 ans. Quand on regarde à Toronto, c'est 10 ans. Calgary, c'est cinq ans.

Alors, dans le prochain budget, est-ce qu'il va y avoir des mesures pour encourager les gens d'acheter des panneaux solaires au Québec?

La Présidente : La réponse du ministre.

M. Pierre Fitzgibbon

M. Fitzgibbon : Bien, encore une fois, Mme la Présidente, je pense que la nouvelle direction d'Hydro-Québec a tenu en compte les enjeux importants que nous avons présentement, au Québec, d'un manque d'énergie propre, d'énergie verte. Le plan, encore une fois, de M. Sabia a été déposé à l'Assemblée nationale à l'automne dernier, au mois de décembre. Dans le plan, qui est très ambitieux, on parle, encore une fois, de 8 000 à 10 000 mégawatts de puissance additionnel qui va être livré d'ici 2035, dans lequel il faut regarder toutes les alternatives.

Donc, il faut faire les choses dans l'ordre. De dire aujourd'hui qu'on va faire un microréseau, ce serait incohérent intellectuellement avec le fait qu'on doit avoir un projet de loi, qui va s'arrimer avec le plan d'Hydro-Québec. Et on va faire les choses dans l'ordre.

La Présidente : Deuxième complémentaire.

M. Gregory Kelley

M. Kelley : Mme la Présidente, je reviens sur la question de la rentabilité de l'affaire. Je ne demande pas un microréseau demain, c'est sûr, ça doit être fait dans l'ordre. Mais, quand je regarde, présentement, pour un citoyen, d'acheter un panneau solaire pour leur maison, l'investissement, la rentabilité, ce n'est pas là. Alors, j'espère que, dans le prochain budget, le gouvernement va arriver avec des programmes qui sont disponibles pour les citoyens, de se lancer dans l'autoproduction pour leurs maisons. Je pense, ça, c'est la solution de l'avenir, et j'espère que le ministre va parler avec le ministre des Finances pour s'assurer qu'il y a des solutions là.

La Présidente : La réponse du ministre de l'Économie.

M. Pierre Fitzgibbon

M. Fitzgibbon : Quand on regarde le plan d'action de M. Sabia, le premier élément qu'on voit dans le plan d'action, j'y vais de mémoire, là, il y a 2 000 à 3 000 mégawatts qu'on pourrait sauver, d'électricité que nous ne devrions pas consommer. Et ça va venir avec de l'efficacité énergétique, des technologies, des batteries multidirectionnelles et va venir possiblement avec peut-être des panneaux solaires sur les maisons, qui vont faire en sorte qu'on pourrait réduire la dépendance des consommateurs envers l'électricité traditionnelle.

Alors, clairement, M. Sabia a dit publiquement qu'on doit avoir la technologie qui va nous permettre de réduire la consommation résidentielle d'électricité, et commerciale et industrielle, en passant. Donc, ça fait partie de l'ensemble de l'oeuvre, qu'on va voir dans les prochaines semaines.

La Présidente : En question principale, je reconnais maintenant la députée de Bourassa-Sauvé.

Mesures d'aide pour les petites et moyennes entreprises

Mme Madwa-Nika Cadet

Mme Cadet : Mme la Présidente, la semaine dernière, dans cette Chambre, je mentionnais qu'au Québec on vit, en ce moment, une situation doublement préoccupante en matière d'emploi. D'un côté, comme on l'a souvent mentionné, bien, on a le manque chronique de travailleurs qui exerce une pression sur nos PME. On sait que la pénurie de main-d'oeuvre, elle est structurelle. C'est un enjeu à long terme qui fragilise leur croissance. De l'autre côté, on a le mauvais contexte économique des derniers trimestres qui fragilise nos PME en ce moment, ça les rattrape. Dans l'immédiat, le nombre de chômeurs est en hausse, et on constate des pertes d'emploi dans le secteur privé dans certaines régions.

Il y a le Bulletin mensuel du marché du travail pour décembre 2023 qui a été publié la semaine dernière. On dénombre plus de 16 000 emplois de moins dans le secteur privé par rapport au mois précédent. L'institut du Québec a publié hier le bilan de l'emploi 2023, et le constat est clair, le taux de chômage a augmenté, en un an.

Est-ce que la ministre de l'Emploi, elle saisit l'ampleur du défi qui l'attend dans son milieu?

La Présidente : La réponse de la ministre de l'Emploi.

Mme Kateri Champagne Jourdain

Mme Champagne Jourdain : Mme la Présidente, on est extrêmement conscients du contexte de la pénurie de main-d'oeuvre, du contexte aussi qui nous amène des pertes d'emploi actuellement aussi.

Vous savez, on a eu la chance de parler ici à de nombreuses reprises de ce qu'on fait, de ce qu'on met en place pour aider les chercheurs d'emploi mais aussi pour aider nos entreprises. Je pense, entre autres, à tous les services qui sont offerts via... pardon, via nos bureaux de Services Québec, dans le centre d'aide aux entreprises. On est là pour eux. On va continuer aussi avec nos mesures, qui vont permettre de répondre aux besoins de nos PME, notamment via l'Opération main-d'oeuvre, mais aussi dans d'autres secteurs. Je pense, entre autres, à ce qu'on a lancé aussi, qui est l'offensive de formation en construction.

Alors, on s'adresse à des questions comme celles-là. On pose des gestes ciblés, des mesures ciblées qui permettent de venir répondre à chacun des secteurs, et on va continuer comme ça.

Mme la Présidente, vous le savez, on a parlé de cette situation-là depuis le début des années 2000. Les gouvernements précédents n'ont rien fait pour prévenir cette situation-là. Notre gouvernement a choisi d'agir, et il va continuer de le faire, Mme la Présidente.

La Présidente : Première complémentaire.

Mme Madwa-Nika Cadet

Mme Cadet : Mme la Présidente, pendant six ans, pendant près... le gouvernement est dans sa sixième année, et pendant trop longtemps on nous a dit que la pénurie de main-d'oeuvre, c'était une bonne nouvelle. Ce n'est pas vrai. Et, en ce moment, nos entrepreneurs, ils sont inquiets, et les Québécois aussi, ils sont inquiets. Ils regardent les nouvelles, des annonces de licenciements. 200 postes perdus chez Transcontinental, à Saint-Hyacinthe, la semaine dernière. 74 mises à pied chez CGI. 180 chez RONA.

C'est quoi, le plan de la ministre? C'est un environnement anxiogène pour eux.

La Présidente : La réponse de la ministre.

Mme Kateri Champagne Jourdain

Mme Champagne Jourdain : Mme la Présidente, je l'ai dit tout à l'heure, on travaille pour répondre aux besoins de nos entreprises, on le fait via différentes mesures. On comprend que c'est un contexte qui est difficile pour ces entreprises-là. On est là pour les soutenir. Il y a aussi des annonces qui sont faites pour créer des emplois au Québec. Mon collègue du ministère de l'Innovation et de l'Économie a fait, cette année, différentes annonces qui permettent aussi la création d'emplois. On va être là pour soutenir les PME. On a différentes mesures, plus de 80 mesures, dans l'Opération main-d'oeuvre. On a plein d'autres services dans nos bureaux de Services Québec. On est là. On va continuer d'être là pour pouvoir répondre à leurs besoins et les soutenir à travers ces moments difficiles.

La Présidente : Deuxième complémentaire.

Mme Madwa-Nika Cadet

Mme Cadet : Mme la Présidente, il y a un déséquilibre du marché de l'emploi dans plusieurs régions du Québec. La ministre, elle énonce différentes mesures qui sont mises en place, mais les entrepreneurs, ils nous parlent. Ils nous disent qu'ils sont inquiets. Ils nous disent que les mesures que le gouvernement met en place en ce moment, ça ne fonctionne pas. Ce n'est pas évident, pour ces entrepreneurs, de faire face à deux tempêtes parfaites en même temps, la pénurie de main-d'oeuvre puis le contexte économique, aujourd'hui, qui les ralentit, qui fait en sorte qu'il y a des pertes d'emploi.

Elle nous nomme ce que tous les autres ministres font. La ministre, elle, elle fait quoi?

La Présidente : La réponse de la ministre.

Mme Kateri Champagne Jourdain

Mme Champagne Jourdain : Merci, Mme la Présidente. Écoutez, ce que je fais, c'est de m'assurer qu'on déploie, par exemple, l'Opération main-d'oeuvre. Dans le secteur de la construction, dans les 18 premiers mois, on a intégré 22 000 travailleurs sur un objectif total de 55 000 travailleurs dans la durée totale de cette opération de main-d'oeuvre là. Alors, je m'assure qu'on atteigne nos cibles au quotidien dans tous les secteurs qui sont priorisés à travers cette opération-là.

Vous savez, on est là pour aider nos entreprises. Je les rencontre dans le cadre de ma tournée que je continue à faire à travers toutes les tables de partenaires. Je rencontre des entreprises. Je rencontre aussi des organismes qui soutiennent ces entreprises-là et des chercheurs d'emploi. On comprend le contexte. On trouve des solutions qui vont nous permettre de répondre à leurs besoins.

La Présidente : En question principale. Je reconnais maintenant, en question principale, le député de Nelligan.

Maintien du service de traversier entre Rivière-du-Loup et Saint-Siméon

M. Monsef Derraji

M. Derraji : Oui, merci, Mme la Présidente. Depuis quatre ans, la ville de Rivière-du-Loup vit dans l'incertitude relativement à son service de traversier entre Rivière-du-Loup et Saint-Siméon, dans Charlevoix. Depuis quatre ans, le gouvernement caquiste menace de déménager ce fleuron économique et touristique, ce qui aurait comme conséquence de priver les restaurateurs, les hôteliers et les attraits touristiques de plus de 15 millions de dollars.

Mme la Présidente, la P.D.G. de la chambre de commerce, le maire de Rivière-du-Loup sont là, dans les tribunes. Et ils sont là pourquoi? Parce que, ils veulent rappeler au premier ministre, quand il était à Rivière-du-Loup, en mars 2022, il a déclaré que le dossier serait politique.

Ils ont une question très simple pour la ministre : Quand est-ce qu'il va aller à Rivière-du-Loup et annoncer que le quai de Rivière-du-Loup sera opérationnel?

La Présidente : La réponse de la ministre des Transports et de la Mobilité durable.

Mme Geneviève Guilbault

Mme Guilbault : Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bien, salutations à M. le P.D.G., qui est ici, en haut, selon ce que je comprends des propos de mon collègue de Nelligan. Salutations aux gens qui l'accompagnent, s'il y en a. Je vois d'ailleurs le précédent député de Rivière-du-Loup qui est ici avec nous aussi, de l'autre côté. Salutations à lui aussi, bien sûr...

Une voix : ...

Mme Guilbault : Du bon côté. Mais, bon, ça dépend, ça dépend sous quel angle on le voit.

Alors, non, mais, blague à part, Mme la Présidente, c'est un dossier qui est effectivement très, très, très important. C'est la première fois qu'on m'en parle ici, alors merci au collègue de Nelligan. Et c'est un dossier sur lequel j'ai passé beaucoup de temps, mais encore plus de temps a été passé là-dessus par ma collègue de Rivière-du-Loup, qui est ici avec moi, plusieurs rencontres dans la dernière année sur ce dossier-là, un travail énorme et très actif de la part de ma collègue sur le terrain.

J'étais moi-même dans le Bas-Saint-Laurent, il n'y a pas si longtemps, avec, aussi, la ministre responsable du Bas-Saint-Laurent, où on a fait des activités publiques à ce sujet-là. On a d'ailleurs annoncé... la toute dernière annonce qui a été faite par ma collègue, juste avant les fêtes, c'est l'étude de... la potentialité de peut-être avoir un fournisseur, pour cette traverse-là, qui serait privé. Actuellement, on sait que c'est en collaboration avec la STQ.

Sur la question du déménagement du quai, je vais y revenir en complémentaire, Mme la Présidente.

La Présidente : Première complémentaire.

M. Monsef Derraji

M. Derraji : Bon, la réponse fut «peut-être». Mais, je tiens à rappeler à Mme la ministre, Mme la Présidente, les gens de Rivière-du-Loup tiennent à ce service essentiel et centenaire, ça, il faut que les gens de la Chambre comprennent ça, et ils n'accepteront pas un déménagement de traversée.

Donc, aujourd'hui, la question est très simple : Est-ce que, oui ou non, il y aura l'argent nécessaire? Est-ce que, oui ou non, elle partage, la ministre du Transport, que les gens de Rivière-du-Loup veulent garder le traversier à Rivière-du-Loup?

La Présidente : La réponse de la ministre.

Mme Geneviève Guilbault

Mme Guilbault : Oui. Bien, Mme la Présidente, s'il y a une personne qui est bien au fait du dossier, c'est ma collègue de Rivière-du-Loup, je viens de le dire, plusieurs, plusieurs rencontres qu'on a eues ensemble là-dessus, avec la Société des traversiers aussi. Ma collègue ainsi que la P.D.G. de la Société des traversiers ont fait aussi plusieurs rencontres localement pour prendre en compte l'ensemble des points de vue.

Et c'est justement parce que c'est particulièrement sensible et délicat qu'il faut s'assurer d'étudier toutes les options possibles, d'aller au fond des choses, de faire les rencontres et les consultations qui s'imposent. C'est ce que pilote précisément ma collègue députée, localement, avec, évidemment, mon concours et celui de la STQ. On est en train d'évaluer tous les scénarios possibles, Mme la Présidente, que ce soit en ce qui concerne l'emplacement du quai ou en ce qui concerne l'opération de la traverse. Mais, quoi qu'il en soit, on est très conscientes que c'est névralgique pour le secteur. On va prendre les bonnes décisions le moment venu.

La Présidente : Deuxième complémentaire.

M. Monsef Derraji

M. Derraji : Mme la Présidente, les gens de Rivière-du-Loup qui sont là aujourd'hui veulent des réponses. Ils ont fait le déplacement de Rivière-du-Loup au parlement parce qu'ils veulent des réponses. Si la ministre est disponible, nous aimerions bien qu'elle les rencontre avec moi après la période de questions. C'est très important. On parle d'un service centenaire, on parle de 15 millions de dollars de retombées économiques.

Donc, je vais répéter ma question. Je sens qu'il y a un effort qui se fait, je vous remercie, mais ils veulent des réponses. Ils veulent quand, ils veulent une date et ils veulent s'assurer de le garder à Rivière-du-Loup.

La Présidente : Et je vous rappelle qu'on s'adresse à la présidence. Mme la ministre.

Mme Geneviève Guilbault

Mme Guilbault : Oui. Bien, Mme la Présidente, je l'ai dit, c'est un dossier qui est complexe, je l'ai reconnu, c'est un dossier qui est complexe, qui est sensible, tant pour la localisation du quai que pour l'opération de la traverse. Mais le député, s'il s'est plongé dans ce dossier-là, sans jeu de mots, sait très bien qu'il y a notamment des enjeux de dragage, il y a des enjeux d'animaux marins, donc il faut vraiment étudier comme il faut tous les scénarios.

Et je veux lui réitérer à quel point ma collègue est active dans ce dossier-là. Il n'y a pratiquement pas une semaine sans qu'on s'en parle. Ça me fera plaisir de rencontrer avec lui les gens qui sont présents, ça va de soi. On a, lui et moi, le même rendez-vous en commission parlementaire par la suite, donc, si on se permet tous les deux d'arriver quelques minutes plus tard, ça va me faire plaisir de l'accompagner à la rencontre.

• (10 h 30) •

La Présidente : En question principale, je reconnais maintenant le chef du deuxième groupe d'opposition.

Mesures pour favoriser l'accès à la propriété

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Nadeau-Dubois : Merci, Mme la Présidente. Ça veut dire quoi faire partie de la classe moyenne? Bien, pendant des générations, au Québec, c'était un peu comme une promesse : si tu travailles fort, si tu fais attention à tes sous, bien, tu vas être capable de t'acheter une maison. Aujourd'hui, cette promesse-là, elle est brisée. Pour la première fois en 50 ans, la proportion de Québécois propriétaires recule. Le premier ministre, il ne défend pas beaucoup les droits des locataires, mais, ironiquement, sous sa gouverne, il se crée plus de locataires que jamais, au Québec. Il y a des jeunes, aujourd'hui, qui ont la même job que leurs parents, mais qui ne pourront jamais faire ce que leurs parents ont fait, s'acheter une maison, parce que les maisons sont trop chères, le marché immobilier est brisé.

Je sais bien qu'il n'y a pas une solution magique pour régler ce problème-là, mais il y en a, des solutions, puis il y en a même qui sont très simples.

Ces temps-ci, avec le coût de la vie, les gens à l'épicerie, là, ils comparent les circulaires pour trouver le meilleur prix, mais, quand vient le temps de faire le plus gros achat de leur vie, s'acheter une maison, bien là ils font ça à l'aveugle et sous pression, sans savoir c'est quoi, le juste prix.

Québec solidaire va déposer, cet après-midi, une motion pour mettre fin aux surenchères à l'aveugle. C'est bon, ça, pour nos jeunes.

Est-ce que le premier ministre va voter pour notre motion?

La Présidente : La réponse du premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Oui. Mme la Présidente, d'abord, je suis content de voir que le chef du deuxième groupe d'opposition s'intéresse à la classe moyenne. On se rappelle tous, en campagne électorale, que son parti promettait des nouvelles taxes orange pour les gens qui ont des condos ou des maisons au-dessus d'un certain montant mais qui reflète le marché. Donc, je suppose que ce ne sera pas là en 2026 dans son programme.

Maintenant, Mme la Présidente, évidemment, il y a deux problèmes, actuellement. Un, il manque de logements, puis on investit 5,7 milliards pour aller plus rapidement. Il manque de travailleurs, on investit dans les formations courtes. On investit dans un projet de loi — le ministre du Travail — pour améliorer la productivité du secteur de la construction.

Maintenant, aussi, les efforts qu'on fait en économie depuis cinq ans. Mme la Présidente, savez-vous que, depuis cinq ans, les salaires, en moyenne, au Québec, ont augmenté de 24 %, ce qui est plus que l'inflation, en moyenne, donc plus que l'augmentation de l'alimentation et des loyers? Évidemment, il y a des exceptions, il y a des gens qu'il faut aider davantage. C'est pour ça qu'on a augmenté, par exemple, l'aide sociale pour les gens qui ont des restrictions à l'emploi, on a augmenté leurs prestations de 55 %.

Maintenant, bon, si le chef du deuxième groupe d'opposition pense que la surenchère... mettre fin à la surenchère à l'aveugle, ça va tout régler les problèmes, je pense qu'il se trompe.

La Présidente : Première complémentaire.

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Nadeau-Dubois : Le premier ministre parle de l'augmentation des salaires. Depuis que le premier ministre est au pouvoir, les salaires, au Québec, ont augmenté de 29 %. Ce n'est pas pire. Pendant ce temps-là, le prix des maisons a augmenté de 74 %. Ça ne marche pas, il y a toute une génération qui voit s'effriter sous ses yeux l'accès à la propriété. C'est la classe moyenne qui est menacée.

Est-ce que le premier ministre est ouvert à notre proposition raisonnable et qui ne coûte pas une cent à l'État québécois?

La Présidente : La réponse du premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Bien, Mme la Présidente, on a tous soit utilisé personnellement ou connu des gens qui ont utilisé un courtier immobilier pour acheter une maison, acheter un condo. Puis, effectivement, parfois il y a des courtiers qui nous disent : Bien, il y a quelqu'un d'autre qui a fait une offre, donc, si vous voulez l'avoir, il faudrait offrir plus. Il faudrait s'assurer... Puis je pense qu'ils ont un certain honneur puis même un code à respecter. Donc, quand ils nous disent qu'il y a une autre offre, il faudrait que ce soit vrai. Il y a peut-être des moyens, effectivement, de s'assurer de ça. Il faudrait savoir aussi s'il y a des conditions sur l'autre offre qui était près. Donc, on est ouverts à ça. Mais, Mme la Présidente, le vrai enjeu, le vrai enjeu, c'est de créer de la richesse, puis ça, Québec solidaire ne comprend pas ça.

La Présidente : Deuxième complémentaire.

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Nadeau-Dubois : Je suis content que le premier ministre soit ouvert à la proposition de Québec solidaire, parce que je vais vous parler de ce qui se passe en ce moment dans la vie des jeunes travailleurs, des jeunes travailleuses. Vanessa, elle s'est fait mettre de la pression pour mettre 30 000 $ de plus que l'offre qu'elle voulait; Andrea, 60 000 $; Élise, 80 000 $ au-dessus du prix affiché. C'est ça qui se passe pour les jeunes familles qui veulent acheter une maison. Ils se font dire : Mets plus, mets plus, mets plus, sinon tu vas perdre ta maison. Mais ils ne savent pas c'est quoi, les autres prix sur le marché. Ce n'est pas normal. Les jeunes se font avoir.

Est-ce que le premier ministre va voter pour notre motion?

La Présidente : La réponse du premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Bien, je ne connais pas la situation ni de Vanessa, ni d'Andrea, ni d'Élise, mais, bon, s'il me transmet les informations, on peut regarder ce qui est arrivé avec leurs courtiers immobiliers. Est-ce que le courtier, quand il leur a dit qu'il y avait quelqu'un d'autre qui faisait une offre... est-ce que c'était vrai? Quel était le prix? Y avait-il des conditions? Donc...

Mais Québec solidaire pense qu'ils vont régler le problème du logement en enlevant la, comment qu'il appelle ça... la surenchère à l'aveugle. Franchement, il faut être déconnecté.

La Présidente : En question principale, je reconnais maintenant la députée de Verdun. La parole est à vous, madame, juste à vous. On l'écoute.

Aide aux producteurs agricoles

Mme Alejandra Zaga Mendez

Mme Zaga Mendez : Merci, Mme la Présidente. Aujourd'hui, moi, je veux vous parler de Marjolaine, une maraîchère de l'île d'Orléans qui fait des paniers de légumes depuis 15 ans. Bien, en fait, qui faisait des paniers de légumes, parce qu'en août dernier son rêve s'est brisé, parce que, l'argent, en agriculture, bien, il n'y en a pas. Marjolaine vivait sous le seuil de la pauvreté, puis les cinq dernières années ont été un calvaire pour elle et sa production. La météo de l'été dernier a été la goutte qui a fait déborder le vase.

Pour Marjolaine, l'agriculture, ça veut dire précarité et détresse. Il y a des limites à s'endetter pour nourrir les gens au Québec.

Ça fait depuis le mois d'août qu'on demande une aide d'urgence pour les petits producteurs agricoles. Ça fait six mois, six mois, puis on n'a toujours pas de réponse du ministre. Les agriculteurs sont en colère. Le monde agricole envoie un cri du coeur.

Est-ce que le ministre va répondre enfin? Est-ce qu'il va mettre une aide d'urgence maintenant?

• (10 h 40) •

La Présidente : La réponse du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. André Lamontagne

M. Lamontagne : Bien, merci, Mme la Présidente. Je remercie ma collègue pour sa question ce matin.

On va rappeler que l'été... la saison 2023 au complet a été une saison excessivement difficile pour nos producteurs, nos productrices. Puis je vous dirais que, dès le mois de juin, là, quand les premiers signaux apparaissaient, là, que ça allait être difficile, bien, ce qu'on a fait, on a, justement, mis en place un fonds d'urgence pour venir accompagner les producteurs, les productrices, là, qui allaient avoir des enjeux de liquidités. On a continué à suivre tout ça tout au long de l'été. On a mis un comité spécial en place avec le secteur maraîcher. On a bonifié à deux reprises ce fonds d'urgence là, si bien qu'aujourd'hui le bilan qu'on a, là, au niveau de l'assurance récolte, on a versé, jusqu'à maintenant, 114 millions de dollars, qui a été versé, il y a encore 82 millions à être versés, là, pour des versements records de 196 millions en 2023. Au moment où on se parle, il y a 367 millions de dollars qui sont disponibles dans les comptes à risque, les comptes de gestion de risque des producteurs, des productrices. Le fonds d'urgence qu'on a mis en place peut fournir 167 millions de liquidités aux producteurs, productrices, aujourd'hui, il y a 1 063 demandes qui ont été faites, et chaque demande qui est reçue est analysée, et il y a de l'aide qui est apportée, Mme la Présidente.

La Présidente : Première complémentaire.

Mme Alejandra Zaga Mendez

Mme Zaga Mendez : «Je pars d'ici sans compte de banque, sans voiture, avec quelques meubles, mes sacs de vêtements, rien d'autre.» Ça, là, c'est l'histoire de Mme Daguerre, une autre productrice maraîchère qui a fait faillite. Les faillites, dans le milieu agricole, là, elles ont augmenté de 23 % l'année dernière, 23 %. La réponse du ministre, c'est des réponses cosmétiques, parce que l'argent, là, ne descend pas chez nos petits producteurs.

Est-ce que la CAQ va mettre une aide d'urgence pour nos producteurs...

La Présidente : La réponse du ministre.

M. André Lamontagne

M. Lamontagne : Bien, Mme la Présidente, le fonds d'urgence qu'on a mis en place, justement, là, sa caractéristique première, c'est sa flexibilité. Il est accessible autant aux très, très petits producteurs qu'aux très, très grandes entreprises, là. C'est une aide qui peut aller de 50 000 $ jusqu'à 200 000 $, qui est remise en liquidités pour les entreprises. Alors, le programme est tout à fait adapté pour venir accompagner les gens qui sont en difficulté. Mais, je le répète à ma collègue, c'est une situation qu'on suit de très près, La Financière agricole, tous les agriculteurs, les agricultrices qui souscrivent à des programmes d'assurance. Naturellement, c'est certain que, si on est un producteur et on n'a souscrit à aucun programme d'assurance, il peut y avoir des enjeux. Mais l'accompagnement est là, Mme la Présidente.

La Présidente : Deuxième complémentaire.

Mme Alejandra Zaga Mendez

Mme Zaga Mendez : Les aides présentées par le ministre, ce n'est pas suffisant. Ça fait six mois qu'il nous répète la même chose. L'aide n'arrive pas chez nos petits producteurs, chez nos producteurs de proximité. Avec la CAQ, là, les fermes familiales, là, puis la relève agricole, j'ai peur que ça va être seulement dans les livres d'histoire.

Si le ministre ne veut pas implanter une aide d'urgence pour les petits producteurs, est-ce qu'il peut au moins s'engager aujourd'hui à adopter notre projet de loi sur l'accaparement des terres et faire en sorte qu'on donne enfin de l'espoir à la relève agricole au Québec?

La Présidente : La réponse du ministre.

M. André Lamontagne

M. Lamontagne : Oui, Mme la Présidente, je veux encore réitérer, l'année 2023 a été une année excessivement difficile pour nos producteurs et productrices. Puis soyez assurés, là, à quel point on est mobilisés pour leur accorder le meilleur soutien possible.

Sans vouloir diminuer ça, je veux quand même rappeler à ma collègue qu'au cours des quatre dernières années, au Québec, là, on a eu une création nette de fermes. Il y a davantage de fermes qui se sont créées au Québec que partout ailleurs dans le Canada. Et puis d'avoir des années comme ça, de croissance de fermes, c'est la première fois vous savez depuis combien de temps, Mme la Présidente? 100 ans. 100 ans. Ça ne s'est pas vu depuis 100 ans, d'avoir une création nette de fermes. Ça n'enlève rien que c'est très, très difficile quand la météo se met de la partie, mais, en même temps, il y a beaucoup de gestes qui sont posés pour accompagner nos producteurs, nos productrices.

La Présidente : En question principale, je reconnais maintenant le député des Îles-de-la-Madeleine. La parole est à vous.

Délais d'attente dans les urgences

M. Joël Arseneau

M. Arseneau : Merci, Mme la Présidente. On a tous appris que, la semaine dernière, le ministre de la Santé est allé faire une visite surprise à l'urgence de l'Hôtel-Dieu de Lévis, une visite hautement médiatisée. Le ministre laisse entendre que les problèmes, localement, vont peut-être se régler à la suite de son passage, il va leur revenir dans un mois. Il dit même que, s'il avait rencontré les gestionnaires, les hauts gestionnaires de l'établissement, il n'aurait pas eu l'heure juste sur la situation. Qu'est-ce que ça dit sur sa confiance envers les gestionnaires de proximité?

Mais surtout il faut se rappeler que les attentes aux urgences, là, elles sont problématiques partout au Québec. Le tableau de bord du ministre, il clignote de partout. Par exemple, l'Hôpital Pierre-Le Gardeur est à 155 % d'occupation; l'urgence de Mont-Laurier, 160 %; l'hôpital de Saint-Jérôme, 170 %. Et je pourrais continuer.

Si le ministre pense réellement qu'aller sur le terrain, ça va régler les problèmes, est-ce qu'il s'engage à aller à ces hôpitaux-là aussi? Puis ajoutez Rivière-Rouge, tant qu'à y être.

La Présidente : La réponse du ministre de la Santé.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Bien, premièrement, je suis très content que le député des Îles-de-la-Madeleine commence à s'intéresser aux urgences. Nous, ça fait plusieurs années qu'on le fait. Et, Mme la Présidente, ça fait plusieurs visites que je fais. Ce n'est pas juste à Lévis, Mme la Présidente. Je fais ces visites-là surprises pour une simple et bonne raison : je veux avoir l'heure juste de ce qui se passe sur le terrain. On a des enjeux importants. On a mis une cellule de crise en place, qu'on a renouvelée l'automne dernier. Et, lorsque j'entends des commentaires des membres, qui font un excellent travail, je pense, entre autres, au Dr Boucher, à plusieurs personnes qui ont de l'expérience dans les urgences, ils me disent souvent : C'est des questions de détails. On veut s'assurer que les recommandations que la cellule de crise fait aux différentes directions des établissements, elles sont mises en place. Quoi de mieux, Mme la Présidente, que de se rendre directement sur le terrain et d'écouter? Ce que j'ai entendu des infirmières sur place, lorsque j'ai eu cette rencontre-là et bien d'autres : Merci, M. le ministre, de vous déplacer, on est contents de pouvoir vous parler, c'est ce qu'on veut être capables de faire.

Alors, Mme la Présidente, moi, je vais continuer parce qu'on veut avoir l'heure juste, comment on est en train de s'améliorer dans notre réseau.

La Présidente : Première complémentaire.

M. Joël Arseneau

M. Arseneau : Mme la Présidente, on s'intéresse aux urgences depuis très longtemps. Le ministre, lui, il s'intéressait aux structures. Il a même dit que, maintenant que le p.l. n° 15 a été adopté par bâillon, il pouvait commencer à s'occuper des vrais problèmes, puis il a commencé ses visites surprises.

Mais, parlant de la cellule de crise, là, qui a été formée, abandonnée, remise sur pied, transformée... Puis les résultats, bien, on les attend encore. Puis là on dit à la population : Prenez des Tylenol, ou : Ne vous rendez pas aux urgences, vérifiez si vous êtes un P4 ou P5. Qui sait, au Québec, s'ils sont un P3, un P4 ou un P5?

La Présidente : La réponse du ministre. On l'écoute.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Bon, bien, écoutez, je ne commenterai pas... je ne commenterai pas sur la question, mais je vais continuer ma réponse, je pense que c'est mieux de garder ça à ce niveau-là. Ce que je dis aussi, Mme la Présidente, c'est que les gens de la cellule de crise nous ont dit : On voit les améliorations, on les voit.

Mais, je vous donne un exemple, trois priorités qui ont été mises par la cellule de crise, il y en a une que les gens commencent à connaître, c'est ce qu'on appelle la surcapacité. Lorsqu'il y a des événements, dans l'année, comme par exemple où on a notre trio de virus, lorsqu'on est durant les fêtes, la surcapacité, c'est de dire, maintenant, ce n'est pas juste l'urgence qui doit payer le prix parce qu'il y a une augmentation de volume, mais comment on doit s'organiser à l'étage. Alors...

Je continuerai, Mme la Présidente.

La Présidente : Deuxième complémentaire.

M. Joël Arseneau

M. Arseneau : Écoutez, Mme la Présidente, le ministre répète à peu près les mêmes réponses. Aux mêmes questions, il faut le dire. Mais pourquoi on pose les mêmes questions? C'est parce que la situation, elle continue de se détériorer, au Québec.

Alors, moi, j'ai une question très précise au ministre, là : Après les visites surprises, à quand les résultats surprises?

Des voix : ...

La Présidente : S'il vous plaît! La réponse du ministre de la Santé.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Je suis tellement content d'avoir la question, Mme la Présidente. Regardez mon sourire, là. Je suis tellement content d'avoir la question. Les résultats, ils sont en train d'arriver. Vous regarderez dans le tableau de bord public, M. le député, là, dans la section des urgences, on a mis un tableau où on compare 14 jours d'affilée, trois années de suite. Bien, vous allez voir que les données sont en train de s'améliorer grâce, justement, à la cellule de crise. On est en train de faire la même chose avec les chirurgies. On est en train de faire la même chose avec le CRDS.

Mme la Présidente, les résultats, ils s'améliorent. Merci beaucoup.

La Présidente : En question principale, je reconnais la députée de Mercier. La parole est à vous.

Conditions de travail des enseignants

Mme Ruba Ghazal

Mme Ghazal : Mme la Présidente, dans les derniers mois, les profs du Québec ont eu l'impression que les choses allaient peut-être enfin changer dans notre réseau de l'éducation. Les parents aussi avaient envie de recommencer à faire confiance à l'école de leurs enfants. Et ça, Mme la Présidente, ce n'était pas grâce au ministre ni à ses sept priorités. Ça, c'était grâce à la mobilisation historique très, très fortement appuyée par les parents, pour que notre école publique sorte enfin du fossé.

Les votes d'acceptation des conventions collectives s'achèvent, et on a vu à quel point c'était extrêmement serré. Ce matin, dans les classes du Québec, les profs sont amèrement déçus, et les parents sont très, très inquiets. Et pendant leur pause, ce midi, il y a des profs qui vont regarder les offres d'emploi pour changer de carrière. Je le sais, il y a des profs qui me parlent de la démobilisation. Beaucoup de gens regardent ça aller, au Québec, et redoutent un départ massif des profs.

Qu'est-ce que le ministre a à dire, ce matin, aux profs et aux parents? A-t-il un message d'espoir à leur envoyer pour contrer la démobilisation?

• (10 h 50) •

La Présidente : La réponse du ministre de l'Éducation.

M. Bernard Drainville

M. Drainville : Bien, Mme la Présidente, le plus beau message d'espoir, je pense, dont on peut parler, c'est du succès du plan de rattrapage. Si vous regardez, Mme la Présidente, le nombre d'enseignants, le nombre de TES, le nombre de professionnels, le nombre d'éducatrices qui participent au plan de rattrapage, ça, c'est un signal clair de l'engagement de notre personnel scolaire pour la réussite scolaire. 145 000 élèves différents vont recevoir du tutorat dans 2 500 écoles par 23 000 professeurs et autres membres du personnel scolaire. 215 000 élèves différents vont recevoir des mesures de soutien pédagogique dans plus de 2 000 écoles par 18 000 membres du personnel scolaire, incluant des enseignants.

Les élèves à besoins particuliers, les élèves allophones et autres élèves qui ont besoin d'améliorer leurs compétences en français, le plan de rattrapage, c'est un succès. Ce n'est pas parfait, il reste encore des choses à améliorer, mais ça va bien. Et ça, c'est un très beau signal d'espoir. On devrait tous s'en réjouir ici, dans cette Chambre, et changer un petit peu le narratif autour de l'éducation pour dire que c'est beau, l'éducation, au Québec.

La Présidente : Première complémentaire.

Des voix : ...

La Présidente : Je suis debout. Silence. Pas de commentaire après les réponses. Mme la députée, la parole est à vous.

Mme Ruba Ghazal

Mme Ghazal : S'il y a des gens qui tiennent vraiment à l'éducation, c'est les profs, c'est les gens qui travaillent dans les écoles, c'est les parents. Puis ils n'entendent pas de message d'espoir. C'est un plan à court terme. Moi, pendant la grève, j'ai été là avec mes collègues aux piquets de grève puis j'ai vu beaucoup d'espérance pour le futur, pour l'avenir de nos enfants, pour l'éducation. L'espoir, là, ça ne se met pas sur un tableau de bord du ministre. L'espoir, ce n'est pas uniquement par des augmentations de salaire.

Est-ce que le ministre partage l'inquiétude à long terme pour le réseau de l'éducation, l'inquiétude des parents et des profs?

La Présidente : La réponse du ministre de l'Éducation.

M. Bernard Drainville

M. Drainville : Mme la Présidente, les votes se poursuivent, et on va donc être prudents jusqu'à la fin des votes. Lorsque les votes se seront terminés, on pourra parler, ma collègue présidente du Conseil du trésor et moi-même, des très belles avancées qu'il y a dans cette nouvelle convention collective. Je vais vous dire, Mme la Présidente, j'ai très, très hâte d'en parler. Et on ne parlera pas seulement des avancées salariales, on va parler de plein d'autres sujets qui vont nous permettre, effectivement, des avancées positives, qui vont être bonnes pour les élèves, qui vont être bonnes pour les enseignants, qui vont être bonnes pour le personnel scolaire. Oui, on pense, Mme la Présidente, qu'avec cette convention collective on peut regarder en avant et mettre les grèves derrière nous. J'invite QS à faire la même affaire.

La Présidente : Deuxième complémentaire.

Mme Ruba Ghazal

Mme Ghazal : Les problèmes, là, dans l'école sont profonds et existent bien avant cette négociation et la grève. Il faut vraiment être déconnecté, il faut vraiment manquer d'écoute pour ne pas comprendre que le problème, dans nos écoles, c'est la composition de la classe. Puis la convention collective, là, bien, elle ne va pas le régler. Ça, c'est sûr.

Les profs, je le répète, et je donne la chance au ministre de répondre, attendent un message d'espoir, mais pas uniquement des paroles, ils attendent des gestes, des gestes pour régler, pour enlever la démobilisation et...

La Présidente : La réponse du ministre de l'Éducation.

M. Bernard Drainville

M. Drainville : Mme la Présidente, j'ai visité, là... je pense, je suis rendu à 55 écoles, 57 écoles. La composition de la classe, là, je l'ai identifiée dans mes premières visites d'école. Pourquoi? Parce qu'on écoute les profs puis on écoute le personnel, quand on se promène dans les écoles. Puis c'est clair que c'est un enjeu.

Alors, on n'est pas aveugles, on n'est pas sourds non plus, Mme la Présidente, on le sait, que c'est un défi. Et on est allés au maximum, on ira dans le détail lorsqu'on pourra le faire, mais on est allés au maximum de ce qu'on peut faire dans les circonstances actuelles de la pénurie que nous vivons pour aider nos enseignants puis notre personnel avec la composition de la classe. Il y a, dans cette nouvelle convention, des belles avancées pour aider avec la composition de la classe. On en reparlera.

La Présidente : En question principale, je reconnais maintenant la députée de D'Arcy-McGee. La parole est à vous, juste à vous.

Financement des foyers de l'Association des Arches du Québec

Mme Elisabeth Prass

Mme Prass : Mme la Présidente, en tant que société, notre devoir est de s'occuper de nos plus vulnérables, et c'est exactement ce que fait l'Arche du Québec, avec ses 24 foyers dans toutes les régions, pour offrir de l'hébergement de longue durée aux personnes avec une déficience intellectuelle ou sur le spectre de l'autisme. Le problème est que la survie de toutes ces maisons est en danger de fermeture en raison d'un sous-financement de la part de ce gouvernement. Malgré deux ans de démarches auprès du gouvernement de la CAQ, l'Arche dit ne recevoir aucune réponse cohérente du ministère de la Santé et Services sociaux. Le ministère les renvoie aux CISSS, et les CISSS les renvoient au ministère.

Où vont aller ces personnes vulnérables, dont plusieurs n'ont tout simplement plus de famille ou dont les parents sont trop âgés pour s'occuper d'eux? Est-ce que le ministre s'engage à financer les maisons à l'Arche à la hauteur qu'ils le méritent pour la survie, oui ou non?

La Présidente : La réponse du ministre responsable des Services sociaux.

M. Lionel Carmant

M. Carmant : Merci, Mme la Présidente. Je remercie la députée de D'Arcy-McGee pour sa question. Et c'est sûr que l'hébergement des personnes vulnérables, c'est une priorité pour nous. On a investi grandement dans le logement pour les personnes qui souffrent de déficiences intellectuelles, troubles du spectre de l'autisme ou handicaps physiques. En fait, Mme la Présidente, on a modifié le modèle, où on a donné du logement supervisé dans toutes les régions du Québec. On a investi pour plus de 800 places en logements supervisés dans toutes les régions du Québec. Au départ, les maisons alternatives, on devait avoir 100 places, Mme la Présidente. On va ouvrir plus de 1 000 places de maisons alternatives à travers le Québec pour nos personnes en situation de handicap.

Et, oui, on est en discussion avec les Arches, Mme la Présidente, et les Arches reçoivent plus de 4 millions de dollars, Mme la Présidente, en support à la mission globale. L'enjeu, c'est que le financement est surtout pour les activités de jour. On est en train de discuter avec eux comment on peut les compenser pour les besoins au niveau du logement et s'assurer que ces individus — et on ne veut pas qu'ils se déplacent — restent à un endroit où ils sont bien logés. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente : Alors, cela met fin à la période de questions et de réponses orales.

Motions sans préavis

Comme il n'y a pas de votes reportés, nous allons passer à la rubrique Motions sans préavis. Et, pour ce faire, je cède la place au troisième vice-président de l'Assemblée nationale. Je vous remercie beaucoup pour votre attention. Bonne fin de journée à tous.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, à la rubrique des motions sans préavis, en fonction de nos règles et de l'ordre de présentation des motions sans préavis, je reconnais maintenant un membre du groupe formant le gouvernement, et c'est monsieur... Mme la ministre responsable des Aînés.

Demander au Parlement fédéral de modifier le Code criminel afin de permettre
les demandes anticipées d'aide médicale à mourir au Québec selon
les critères établis dans la Loi concernant les soins de fin de vie

Mme Bélanger : Alors, M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec la députée de Sherbrooke :

«Que l'Assemblée nationale rappelle que les représentants élus de la population québécoise ont dûment adopté, le 7 juin 2023, le projet de loi 11 visant notamment à permettre, au plus tard en juin 2025, les demandes anticipées d'aide médicale à mourir pour les personnes souffrant d'une maladie neurocognitive grave et incurable menant à l'inaptitude à consentir aux soins;

«Qu'elle réitère que sa compétence pleine et exclusive pour légiférer en matière de santé, d'administration des soins, de droit civil et d'encadrement du consentement aux soins ainsi qu'en matière d'administration de la justice permet au Québec d'encadrer les demandes anticipées d'aide médicale à mourir;

«Qu'elle rappelle que le Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir de la Chambre des communes a recommandé en février 2023 que le gouvernement fédéral modifie le Code criminel pour permettre les demandes anticipées d'aide médicale à mourir à la suite d'un diagnostic de maladie grave et incurable menant à l'incapacité;

«Qu'elle note que la Chambre des communes s'apprête à modifier le Code criminel eu égard à l'aide médicale à mourir, par le projet de loi C-62;

«Qu'à cette occasion, l'Assemblée nationale demande au Parlement fédéral de respecter les lois adoptées par le Parlement du Québec reflétant les volontés de la société québécoise et qu'elle lui demande de modifier le Code criminel afin de respecter la volonté du Québec d'agir en respect de son champ de compétence exclusif et ainsi permettre les demandes anticipées d'aide médicale à mourir, au Québec, selon les critères établis dans la Loi concernant les soins de fin de vie.» Merci.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Lévesque (Chapleau) : Oui, M. le Président, il y a consentement, sans débat. Mais je voudrais vous demander de bien vouloir ajouter la députée de Vaudreuil, qui était conjointe à cette motion. Et donc je vous demanderais également un vote par appel électronique.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Donc, merci. Donc, ce sera fait.

Mise aux voix

Donc, un vote a été demandé. Qu'on appelle les députés. La période de vote... Donc, la période de vote est ouverte.

La période de vote est terminée. M. le secrétaire général.

Le Secrétaire : Pour :  109

                      Contre :              0

                      Abstentions :     4

• (11 heures) •

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Donc, cette motion est adoptée. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lévesque (Chapleau) : ...possible d'envoyer copie au gouvernement fédéral et au Parlement fédéral également? Merci.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Ce sera fait. Et, pour la prochaine motion, j'invite maintenant... c'est une motion de l'opposition officielle, et c'est Mme la députée de D'Arcy-McGee.

Mme Prass : ...je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec le député de Saint-Henri—Sainte-Anne, le député des Îles-de-la-Madeleine et la députée de Vaudreuil :

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse l'apport important des 24 foyers de l'Arche du Québec qui offrent aux personnes avec une déficience intellectuelle ou qui sont sur le spectre de l'autisme un hébergement de longue durée;

«Qu'elle prenne acte que ces foyers sont en danger de fermeture en raison d'un financement inadéquat de la part du gouvernement;

«Qu'elle prenne acte qu'une telle fermeture aurait pour effet de forcer la prise en charge de ces personnes par leur famille et que, dans certains cas, la famille est trop âgée pour offrir cette prise en charge ou est carrément inexistante;

«Qu'enfin, elle demande au gouvernement d'agir de façon urgente pour accorder un financement accru et adéquat afin d'assurer la pérennité des foyers de l'Arche du Québec.»

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Il n'y a pas de consentement. Et, pour la prochaine motion, c'est une motion portée par le deuxième groupe d'opposition, et j'invite M. le député de Maurice-Richard.

Demander au gouvernement de déposer un document de consultation comprenant
une modélisation des trajectoires d'émission de gaz à effet de serre permettant
au Québec d'atteindre la carboneutralité en 2050 et de tenir
une commission parlementaire à cet effet

M. Bouazzi : Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement de cette Assemblée pour présenter la motion suivante conjointement avec la députée de Mille-Îles, le député des Îles-de-la-Madeleine et la députée de Vaudreuil :

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse que l'atteinte de la carboneutralité implique de mettre fin à toute utilisation de gaz naturel d'origine fossile;

«Qu'en conséquence, elle demande au gouvernement de déposer un document de consultation comprenant une modélisation des trajectoires d'émission de gaz à effet de serre (GES) permettant au Québec d'atteindre la carboneutralité au plus tard en 2050, et de tenir une commission parlementaire à cet effet.»

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Consentement, sans débat. M. le leader.

M. Leduc : ...électronique, s'il vous plaît, M. le Président.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, un vote électronique a été demandé. Qu'on appelle les députés. La période de vote est maintenant ouverte.

La période de vote est terminée. M. le secrétaire général.

Le Secrétaire : Pour :  112

                      Contre :              0

                      Abstentions :     0

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Cette motion est adoptée. M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

M. Leduc : Oui, M. le Président. Si on pouvait envoyer copie de la motion à la coalition Sortons le gaz!, à l'organisme Greenpeace et à Nature Québec, s'il vous plaît. Merci.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Ce sera fait. Et, pour la prochaine motion, j'invite... une motion du troisième groupe d'opposition, j'invite M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Arseneau : Merci,M. le Président. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec le député de Pontiac, le député de Rosemont et la députée de Vaudreuil, la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse que l'Hôpital Sainte-Croix, à Drummondville, ne répond pas aux besoins d'aujourd'hui;

«Qu'elle reconnaisse que la région est en croissance démographique, avec une population vieillissante nécessitant plus de soins;

«Qu'elle se rappelle que la région connaît un développement économique rapide;

«Qu'elle prenne acte de la mobilisation de plusieurs acteurs de la région comme des médecins, des professionnels de la santé, des gens d'affaires et des députés de la CAQ;

«Finalement, que l'Assemblée nationale demande au gouvernement d'inscrire la construction d'un nouvel hôpital régional à Drummondville au Plan québécois des infrastructures 2024‑2034.»

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Lévesque (Chapleau) : ...M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Il n'y a pas de consentement.

Avis touchant les travaux des commissions

Alors, à la rubrique touchant les travaux des commissions, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lévesque (Chapleau) : Merci beaucoup, M. le Président.

J'avise cette Assemblée que la Commission des transports et de l'environnement va poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 48, la Loi modifiant principalement le Code de la sécurité routière afin d'introduire des dispositions relatives aux systèmes de détection et d'autres dispositions en matière de sécurité routière, aujourd'hui, après les avis touchant les travaux des commissions jusqu'à 12 h 50 et de 15 heures à 18 h 15, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

La Commission de la santé et des services sociaux va poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 37, la Loi sur le commissaire au bien-être et aux droits des enfants, aujourd'hui, après les avis touchant les travaux des commissions jusqu'à 12 h 50 et de 15 heures à 18 h 15, à la salle Marie-Claire-Kirkland.

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, j'invite les collègues qui doivent quitter, s'il vous plaît, de le faire avec un peu plus de discrétion, s'il vous plaît. Merci.

Alors, aux avis de la présidence, pour ma part, je vous avise que la Commission de la culture et de l'éducation se réunira en séance de travail aujourd'hui, de 15 heures à 15 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine, afin de statuer sur la possibilité que la commission se saisisse de la pétition concernant la gratuité du transport scolaire.

Je vous avise également que la Commission de l'économie et du travail se réunira en séance de travail demain, le jeudi 8 février 2024, de 8 heures à 8 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine, afin de statuer sur la possibilité que la commission se saisisse de la pétition portant sur la rémunération des stages obligatoires.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

À la rubrique Renseignements sur les travaux de l'Assemblée. La période des affaires courantes étant terminée... Oui, M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

M. Leduc : Sur la rubrique Renseignements sur les travaux?

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Oui.

M. Leduc : Parfait. Rapidement, hier on a eu un échange sur l'opportunité de pouvoir continuer l'étude du projet de loi n° 495 sur l'accaparement des terres, là, déposé par ma collègue de Verdun, et on m'a répondu que ce n'était pas possible, il y avait trop de place... il n'y avait pas de place, pardon, il y avait trop de choses dans l'agenda des travaux du salon bleu, hier. Or, les travaux ont terminé à 15 h 40, hier, au salon bleu, on avait donc presque trois heures supplémentaires, jusqu'à 18 h 30, qui est l'horaire normal de gestion des travaux au salon bleu, ici, pour poursuivre d'autres projets. Je pense que c'était une estimation que nous, on avait, que ça allait terminer assez tôt, les travaux, ici. Je suis pas mal certain qu'il y avait la même analyse du côté de mes collègues du gouvernement. On ne peut pas refaire le passé, on ne peut pas revenir en arrière, je fais juste notifier cette information-là.

Et ma question, donc : Est-ce qu'on peut s'engager à faire de la place, pour la semaine prochaine, au p.l. n° 495 dans les travaux du salon bleu? Merci.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le leader du deuxième groupe d'opposition. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lévesque (Chapleau) : Oui, merci beaucoup, M. le Président, là. J'apprécie nos échanges quotidiens avec le leader du deuxième groupe d'opposition.

D'abord, il faut dire qu'effectivement il n'est pas possible de présumer, lorsqu'on débat d'un projet de loi, de la durée des interventions et le nombre d'intervenants. Comme vous le savez, tous les députés en Chambre peuvent intervenir sur le projet de loi. Donc, évidemment, on avait bien estimé qu'il allait y avoir beaucoup de personnes qui allaient parler.

Pour aujourd'hui, eh bien, nos travaux sont bien chargés, comme vous le savez, on a l'étude du projet de loi n° 42, l'étude du projet de loi n° 41, l'étude du projet de loi n° 31, l'étude du projet de loi n° 204. Cet après-midi, on a même la motion du groupe... du deuxième groupe parlementaire, donc, du député Laurier-Dorion. Donc, nous allons être très, très occupés.

Et, pour le reste, on ne peut pas présumer, là, des travaux pour le moment, selon, évidemment, l'horaire, qui est toujours très chargé, un peu comme hier on ne pouvait pas présumer du temps que ça allait durer, l'étude du projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le leader adjoint du gouvernement.

Affaires du jour

Donc, nous allons poursuivre, maintenant, avec la période des affaires courantes qui est terminée, aux affaires du jour. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lévesque (Chapleau) : M. le Président, je vous demanderais de bien vouloir appeler l'article 4 du feuilleton.

Projet de loi n° 42

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, à l'article 4 du feuilleton, M. le ministre du Travail propose l'adoption du principe du projet de loi n° 42, Loi visant à prévenir et à combattre le harcèlement psychologique et la violence à caractère sexuel en milieu de travail.

Il y a des interventions? Je reconnais tout de suite M. le ministre du Travail.

M. Jean Boulet

M. Boulet : Merci, M. le Président. Tout d'abord, permettez-moi de saluer l'ensemble des collègues qui sont ici aujourd'hui pour l'adoption du principe du projet de loi n° 42, qui vise à prévenir et à combattre le harcèlement psychologique et la violence à caractère sexuel en milieu de travail.

J'aimerais aussi profiter de l'occasion pour saluer les 16 regroupements que nous avons entendus la semaine dernière, lors des consultations particulières et auditions publiques, particulièrement Me Rachel Cox, Me Anne-Marie Laflamme et Me Dalia Gesualdi-Fecteau. En plus de ceux et celles qui ont eu l'opportunité de s'adresser aux membres de la Commission de l'économie et du travail, je remercie les dizaines d'organismes et citoyens qui nous ont transmis des mémoires électroniques.

M. le Président, je suis particulièrement fier aujourd'hui, car l'adoption du principe du projet de loi représente un pas de plus vers une avancée majeure du droit pour les travailleuses et les travailleurs d'évoluer sans crainte dans des environnements de travail exempts de harcèlement et de violence. C'est une question qui me tient vraiment à coeur.

• (11 h 10) •

Il est important de souligner que, malgré les prises de conscience générées par les mouvements sociaux, le harcèlement psychologique et les violences à caractère sexuel continuent malheureusement d'exister. D'ailleurs, je rappelle à mes collègues qu'en 2020 au Québec près d'une personne sur deux, 49 %, avait observé ou subi un comportement sexualisé, inapproprié ou discriminatoire en milieu de travail au cours des 12 mois précédents, selon Statistique Canada. Les femmes seraient deux fois plus nombreuses, 26 %, que les hommes, 13 %, à indiquer avoir subi ce type de comportement. Certains groupes de personnes, soit les jeunes femmes et les personnes faisant partie de la communauté de diversité sexuelle et de genre, sont particulièrement susceptibles d'être visés par du harcèlement sexuel. C'est tout simplement inacceptable.

Le harcèlement psychologique et les violences à caractère sexuel ont des effets corrosifs sur le bien-être physique et psychologique des personnes victimes. Cela infléchit indûment leur parcours professionnel par la suite et peut aussi avoir des incidences sur les autres travailleurs et affecter le climat de travail.

Au cours des dernières années, nous avons modernisé le régime de santé et de sécurité du travail puis nous avons encadré le travail des enfants. Il était évident pour moi qu'il fallait également agir pour lutter contre ces formes de violence, tout en rendant plus cohérent le cadre juridique actuel. 82 recommandations ont découlé du rapport du comité d'expertes que j'avais mis en place en février 2022, dont 69 visaient le ministère du Travail ou des organismes sous ma responsabilité. Au total, c'est plus de 80 % des recommandations des expertes qui seront mises en oeuvre, soit grâce au projet de loi directement ou par le biais de modifications administratives.

Sur ce dernier aspect, la très grande majorité des 23 recommandations concernant des améliorations liées aux processus administratifs réalisés par la Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail sont maintenant en place. La CNESST pourra d'ailleurs compter sur un partenariat avec l'organisme Juripop afin de mieux préparer ses intervenantes et intervenants. Leur objectif sera l'accompagnement des personnes victimes tout le long du processus de plainte.

De plus, j'ai annoncé que le Tribunal administratif du travail allait mettre en place une équipe spécialisée en matière de violences à caractère sexuel qui sera constituée de juges et de conciliateurs dûment formés et qui prévoira des mesures pour faciliter le processus des personnes victimes.

Le 15 novembre dernier, Mme Catherine Gareau-Blanchard, du ministère de la Justice, a dispensé à tous les juges une formation intitulée Mythes et stéréotypes avec lesquels composent les personnes victimes de harcèlement sexuel et d'agressions à caractère sexuel. Les conciliateurs et assesseurs du tribunal ont aussi assisté à cette formation d'une durée de trois heures adaptée aux besoins du tribunal. Une formation complémentaire à tous les membres de cette équipe sera offerte. On m'a également confirmé que le processus de sélection des juges administratifs et des conciliateurs qui feront partie de l'équipe spécialisée est en cours.

Maintenant, avec le projet de loi n° 42, nous poursuivons notre engagement afin d'offrir une meilleure protection des travailleuses et des travailleurs avec des avancées majeures pour des milieux de travail plus sains et sécuritaires.

M. le Président, j'aimerais rappeler aux collègues les mesures-phares du projet de loi. Lorsqu'elle sera en vigueur, la loi permettra de bonifier les obligations de prévention et de prise en charge des situations de harcèlement par l'employeur, faciliter la reconnaissance des lésions professionnelles découlant d'une violence à caractère sexuel, prévoir qu'un employeur peut effectuer une gradation des sanctions en cas de comportements violents malgré une clause d'amnistie, protéger la personne salariée qui effectuerait un signalement contre des représailles de l'employeur concernant une conduite de harcèlement psychologique commise envers une autre personne salariée ou qui collaborerait au traitement d'un signalement ou d'une plainte, prévoir le droit pour les travailleurs étudiants, les stagiaires ou un enfant visé à une indemnité de remplacement de revenu plus élevée et conséquente avec leur capacité de gains futurs, prévoir que tout grief en matière de harcèlement psychologique doit être traité par un arbitre ayant suivi une formation reconnue en matière de violences à caractère sexuel, réaffirmer l'importance d'assurer la confidentialité du dossier médical du travailleur qui dépose une réclamation concernant une lésion professionnelle.

Pour conclure, M. le Président, j'aimerais rappeler que ce projet de loi découle d'un consensus quant à la nécessité de limiter les comportements inacceptables et, idéalement, atteindre l'objectif zéro. Les groupes entendus en consultations particulières ont tous salué l'objectif du projet de loi. J'aimerais les remercier pour leur participation éclairante. Certains points soulevés pourront faire l'objet de discussions lors de l'étude détaillée, et je me fie, évidemment, à mes collègues de Bourassa-Sauvé, Hochelaga-Maisonneuve et Jean-Talon.

Rappelons-nous ceci, M. le Président : le geste le plus important est celui que l'on pose. Nous voulons agir dès maintenant pour prévenir le pire et changer les moeurs, en collaboration autant avec les employeurs, les associations syndicales, les travailleuses et les travailleurs.

À présent, je suis persuadé de pouvoir compter sur l'appui, encore une fois, de mes collègues de l'opposition afin de procéder rapidement à l'étude détaillée article par article. M. le Président, j'invite maintenant les membres de l'Assemblée à adopter le principe du projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le ministre du Travail. Et j'invite maintenant Mme la députée de La Pinière à prendre la parole.

Mme Linda Caron

Mme Caron : Merci, M. le Président. Alors, d'entrée de jeu, je remercierais aussi les personnes qui ont travaillé en commission et tous les groupes qui ont préparé des mémoires, qui sont venus les présenter et qui ont permis de voir peut-être quelques angles morts du projet de loi. Cela dit, le ministre a été en mode écoute durant les présentations. Il a répété à quelques reprises que le projet de loi, comme, d'ailleurs, tout projet de loi, est toujours perfectible. Alors donc, les travaux, jusqu'ici, se sont bien déroulés.

Et je me permets d'attirer l'attention sur certains points qui ont été soulevés par les groupes qui sont venus à notre rencontre. D'abord... Et aussi il faut... j'ajoute que ces préoccupations-là, quant à moi, sont dans l'esprit de s'assurer que le projet de loi... que la loi, une fois adoptée, pourra effectivement être mise en application partout, parce qu'on partage l'objectif de protéger les victimes, de prévenir les violences à caractère sexuel et le harcèlement dans tous les milieux de travail, quels qu'ils soient.

Alors, une certaine préoccupation quant aux définitions qui sont utilisées dans le projet de loi, l'idée étant de tenter de simplifier pour que soient entendus, soient compris le harcèlement psychologique, les violences à caractère sexuel de la même manière pour tous, qu'il n'y ait pas une ouverture à... un dérapage dans les compréhensions qui ferait en sorte que, finalement, le Tribunal administratif pourrait être embourbé dans plein de demandes de contestation. Alors, il y a un besoin d'harmoniser, donc, les définitions le plus possible pour simplifier la mise en application du projet de loi ou de la loi, une fois adoptée.

• (11 h 20) •

Il y a aussi une modification qui a été relevée, par exemple, la modification qui est proposée à l'article 28 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, où on dit que... on veut faire un ajout, on dit qu'«une blessure ou une maladie d'un travailleur est présumée être survenue par le fait ou à l'occasion de son travail lorsqu'elle résulte de la violence à caractère sexuel subie par ce dernier et commise par son employeur, l'un des dirigeants de ce dernier dans le cas d'une personne morale ou l'un des travailleurs dont les services sont utilisés par cet employeur aux fins d'un même établissement, sauf si cette violence survient dans un caractère strictement privé». Et ce que la majorité, la grande majorité des groupes sont venus nous dire, c'est que c'est très difficile de faire la différence entre un contexte strictement privé et le contexte du travailleur. Un seul groupe le voyait différemment et nous disait qu'on pouvait... que, si on gardait le mot «privé», il fallait absolument garder «strictement privé». Il en faisait une interprétation différente de tous les autres groupes. Alors, est-ce que c'est l'interprétation qui serait retenue, par exemple, devant le tribunal? Je n'en suis pas certaine, mais, bref, il faut se pencher sur ce concept-là de «strictement privé». Est-ce qu'on veut l'enlever pour ne pas compliquer les choses davantage?

En ce qui a trait aux ententes de non-divulgation et d'amnistie au bout de 12 mois des personnes mises en cause qui sont trouvées fautives après une enquête, ça aussi, ça vient... ça vient poser certaines questions. Il faut que les victimes sachent quelles sanctions ont été données aux personnes mises en cause, parce que ça peut avoir une incidence concrète au quotidien dans leur milieu de travail. Si la victime ne sait pas que le mis en cause ne doit pas faire telle ou telle chose en sa présence ou ne doit pas s'en approcher, et qu'elle ne le sait pas, et que le mis en cause ne respecte pas les sanctions, et qu'il n'y a personne d'autre qui peut en témoigner au quotidien, il y a un problème là. Alors, il faut... il faut réfléchir à cet aspect-là davantage.

Pour la question des antécédents des mis en cause fautifs, il ne faut pas qu'on déplace le problème, c'est-à-dire qu'il ne faut pas qu'on efface l'ardoise et que la personne aille travailler ailleurs comme si rien n'était jamais arrivé, que tout est beau. Parce que prenons l'exemple qui m'inquiète, personnellement, à titre de porte-parole de l'opposition officielle pour les aînés, prenons une personne qui a commis des actes de violence à caractère sexuel ou de harcèlement psychologique, qui perd son emploi ou qui décide de quitter son emploi, et de recommencer ailleurs, et se trouve un emploi dans un milieu de vie de personnes vulnérables, que ce soient des personnes aînées ou même aussi des personnes en situation de handicap lourd, et donc que cette personne se trouve à trouver... à travailler dans un CHSLD, dans une maison des aînés, dans une RPA. Alors là, non seulement la clientèle, les résidents du milieu de travail sont des personnes vulnérables qui sont dans leur milieu de vie, elles sont vulnérables... en plus, le milieu de travail est composé d'un grand nombre de travailleuses vulnérables également, qui sont des femmes. Comme le ministre l'a dit, les femmes sont les plus touchées par ces violences ou ce type de harcèlement. Alors, ce sont des femmes, beaucoup de femmes immigrantes, qui sont vulnérables et qui n'oseront peut-être pas porter plainte. Bref, on ne veut pas mettre le loup dans la bergerie. Alors, il y a... il y a un arbitrage à faire, là, entre : est-ce que, vraiment, on permet à quelqu'un de nettoyer l'ardoise... À moins qu'il ait fait, peut-être, des choses vraiment pour s'amender au fil du temps, mais moi, je ne verrais pas... je ne serais pas très à l'aise de penser qu'une personne qui a des comportements violents aille travailler dans un CHSLD, par exemple. Je pense qu'on ne se rendrait pas service, comme société, à personne, et ce n'est pas l'objet non... l'objectif non plus du projet de loi, qui veut protéger.

Un angle mort, peut-être, du projet de loi, c'est pour les personnes qui bénéficient du chèque emploi-service, alors des personnes, pour obtenir des services à domicile, qui bénéficient du chèque emploi-service. Et ces personnes, donc, doivent choisir, par exemple, le préposé qui vient leur offrir des services à domicile et, bon, sont compensées pour une partie du salaire. Là, je ne rentrerai pas dans les technicalités du chèque emploi-service, mais, dans le cadre de ce programme, la personne qui reçoit des soins ou des services, donc c'est la personne vulnérable, ça peut être une personne aînée, ça peut être une personne en situation de handicap, cette personne-là, elle est légalement l'employeur de la personne qui vient lui offrir des services.

Alors, imaginons le cas de... d'une personne aînée qui reçoit des services, qui bénéficie du chèque emploi-service et qui est l'employeur de celle qui lui donne des services, et là un membre de la famille de la personne aînée ou un voisin qui commet des actes de violence sexuelle ou du harcèlement à l'endroit de la personne qui vient rendre les services, comment la personne aînée, qui est l'employeur, là... comment cette personne-là va-t-elle pouvoir appliquer la loi? C'est une question qui est... qui est importante parce qu'on ne peut pas non plus... Ce n'est pas une personne qui a... qui a les moyens de... d'appliquer la loi. Alors, il faudra regarder comment s'assurer que les employés sont effectivement protégés, ces employés en vertu du chèque emploi-service, mais il faudra, je dirais, alléger le fardeau de la personne aînée ou en situation de handicap qui est considérée comme employeur, ici. Alors, ça, c'est quelque chose vraiment d'important à regarder.

Il y a aussi la question de l'accès de l'employeur au dossier médical de l'employé qui a subi des lésions. Alors, ça aussi, c'est une question assez délicate qui a été amenée par les groupes, et il faudra s'y pencher, parce que, la personne, le médecin qui va faire... qui va avoir un rapport qui doit communiquer uniquement les informations nécessaires à l'employeur, bien, ce ne sont peut-être pas ce que... dans le... selon le jugement professionnel du médecin, qui n'est pas à critiquer, mais qui a un jugement médical, ce ne sera peut-être pas les informations suffisantes pour que l'employeur puisse faire son travail et assumer ses obligations correctement en vertu de la loi sans être lui-même lésé et aussi sans que ses employés soient lésés. Alors, c'est à... c'est à regarder.

Bien entendu, des personnes nous ont... nous ont dit qu'il faut aussi faire de la prévention, de la formation en milieu de travail et même avant que les gens arrivent sur le marché du travail. Ça va être important que les personnes qui font les enquêtes sur le milieu de travail reçoivent aussi une formation assez solide en matière de harcèlement et de violences à caractère... en fait, en... dans la façon de regarder ces... les cas qui se présentent. Parce que n'oublions pas qu'il y a des employeurs qui ont des directions de ressources humaines, qui ont un contentieux, qui peuvent avoir facilement accès ou avoir les moyens d'embaucher des personnes de... des professionnels de l'externe pour pouvoir mener les enquêtes dans les règles de l'art, parce qu'il faut être capable de déterminer si le témoignage, que ce soit de la victime alléguée ou de la personne mise en cause, est-ce que c'est crédible, est-ce qu'il y a des contradictions. Bref, il y a quand même un travail important. Le Barreau a une formation, je crois, de 60 heures pour des avocats pour que ce travail-là soit fait correctement. Donc, il faut qu'il y ait des aménagements pour permettre même aux petits employeurs d'avoir accès à des ressources ou d'être formés pour pouvoir faire le tout dans les règles de l'art, encore une fois, pour rencontrer les objectifs du projet de loi.

Et finalement la CNESST, malgré son partenariat avec Juripop, nous a dit... a mentionné qu'elle avait demandé, dans son rapport d'impact, là, l'ajout de 20 équivalents temps complet pour pouvoir mettre en oeuvre toutes les... tout ce qu'elle a à mettre en oeuvre en lien avec ce projet de loi. Alors, je pense que ça va être important de leur accorder.

Et finalement, bien, nous allons étudier avec attention, dès jeudi, au début de l'étude détaillée, les amendements qui seront sûrement amenés par la partie gouvernementale, étant donné que le ministre reconnaissait que le projet de loi était perfectible et qu'il était à l'écoute des groupes. Alors, nous allons travailler dans ce sens-là. Et nous votons... nous allons voter en faveur du principe du projet de loi. Merci beaucoup, M. le Président.

• (11 h 30) •

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de La Pinière. Et nous reconnaissons... Donc, je reconnais maintenant le prochain intervenant, M. le député d'Hochelaga.

M. Alexandre Leduc

M. Leduc : Merci, M. le Président. Ça me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi n° 42 sur le harcèlement au travail. C'est un projet de loi qu'on a accueilli avec beaucoup d'enthousiasme. Ça faisait longtemps qu'on attendait une réforme de cet enjeu-là. Le dossier du harcèlement au travail et des violences à caractère sexuel a fait couler beaucoup d'encre dans les dernières années, et une mise à jour était nécessaire. On savait qu'il y avait un comité de travail qui était en train de s'y pencher, alors on attendait avec impatience, là, de voir les résultats de ce comité-là.

Avant d'aller dans les détails, M. le Président, comme c'est mon habitude bien personnelle, j'aime ça prendre le temps de remercier tous les gens qui ont participé, bien sûr, à la commission, aux auditions...

(Interruption)

M. Leduc : On entendait un petit bruit électronique. Il n'y a pas de problème, ça arrive à tout le monde, même aux meilleurs.

Et tout ça pour vous dire que j'apprécie toujours les gens qui viennent en commission. Je veux remercier les gens du cabinet du ministre, les gens... les attachés politiques de nos différentes formations politiques, les gens qui travaillent, bien sûr, à la commission, pour l'Assemblée nationale, les gens qui travaillent, aussi, à l'audiovisuel et les gens qui travaillent à la transcription, qui vont mettre par écrit toutes nos belles paroles. On les oublie souvent, et moi, je pense souvent à eux parce que, quand on veut aller chercher, après ça, dans le passé, ce qui a été dit, c'est eux et elles qui ont pris le temps de transcrire en mots nos paroles.

Les auditions, donc, ça s'est déroulé sur deux jours, j'ose à peine dire «et demi», parce que, la dernière journée, il restait une seule intervention, qui était celle du Barreau, si je ne me trompe pas, jeudi dernier. Comme d'habitude, ça a été un peu laborieux, là — et là je ne me vire pas envers le ministre du Travail, mais bien vers le bureau du leader du gouvernement — de rajouter des groupes. Il y a eu quand même des négociations difficiles, parce qu'on a échappé des regroupements syndicaux. Moi, j'ai comme principe que, lorsqu'on touche au droit du travail, on devrait entendre tous les groupes syndicaux qui ont envie de s'exprimer sur le sujet. Ça n'a pas été le cas dans le projet de loi n° 42, M. le Président, on n'a pas pu entendre la Centrale des syndicats démocratique, la CSD, une centrale comme les autres, peut-être de plus petite taille que FTQ, CSN, CSQ, mais une centrale néanmoins, et on n'a pas pu entendre non plus la FAE, la Fédération autonome de l'enseignement, qui regroupe des centaines, des milliers de professeurs à la grandeur du Québec. C'est un peu triste qu'on n'ait pas pu les entendre, M. le Président. Bien sûr, ces organisations-là ont envoyé des mémoires, mais on n'a pas pu les questionner. Il en va de même, si je ne me trompe pas, pour la FIQ, également, la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec. Alors, un regret que je tiens à préciser ici, parce que, d'après moi, là, encore une fois, je le répète, quand on touche au droit du travail, par principe, tous les groupes syndicaux qui représentent des travailleurs, des travailleuses qui auront à jouer avec le droit du travail par la suite, à l'appliquer, à le contester, à l'évaluer, on devrait pouvoir les entendre, on devrait prendre le temps de les entendre. Ce n'étaient pas des nombreuses auditions à rajouter, là, je parle de trois, peut-être quatre groupes à rajouter. On avait un après-midi de libre, en plus, le jeudi, ça aurait facilement pu se placer là. Ça n'a pas été possible, malheureusement, et je le regrette. Je remercie néanmoins ces organisations de nous avoir envoyé des mémoires, et d'autres organisations aussi, ça nourrit notre réflexion.

Je tiens aussi à remercier différentes organisations à qui j'ai posé des questions. Je pense entre autres au CRHA, l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés, à qui j'ai posé des questions, qui étaient des questions de fond sur des éléments qui n'avaient pas été nécessairement mis au jeu dans le projet de loi, mais qui étaient apparus pendant les auditions et qui ont dit qu'ils allaient prendre le temps d'y réfléchir et de nous communiquer l'état de... le résultat de leurs réflexions. Et ils l'ont fait. On a reçu une lettre dans les derniers jours, une lettre très courte, très bien écrite, très succincte, qui nous expliquait, dans le fond, les éléments de réflexion dans lesquels on les avait... auxquels on les avait convoqués à nous répondre, et puis voilà, ça... ça fait un échange intéressant. Alors, merci pour tout le monde.

Sur le projet de loi, il y a plusieurs éléments qui ont soulevé des questions. Donc, encore une fois, hein, sur le principe, ça va assez bien. Je vais me... je vais évoquer quelques éléments, là. J'en ai pour quelques... quelques minutes, M. le Président. D'abord, l'élément strictement privé. Hein, dans la définition de la présomption, on introduit une présomption qui est un outil fort utile en droit du travail, en matière de santé, sécurité, là, qui permet d'accélérer la procédure en renversant le fardeau de preuve. Bien sûr, ce n'est pas tant la personne qui a à démontrer qu'elle a vécu cette situation-là que l'inverse. Le patron, essentiellement, a à démontrer qu'il n'y a pas eu cette situation-là. Donc, renverser le fardeau de preuve, c'est ça, la nature d'une présomption.

Alors, le projet de loi introduit une présomption, qui, à notre avis et à mon avis, est bienvenue, à l'effet qu'une lésion est présumée professionnelle si elle est à l'origine d'un acteur lié au travail, sauf si elle survient dans un contexte dit, et là c'est les mots du projet de loi, strictement privé. Il y a quand même beaucoup de gens qui se sont prononcés là-dessus. Une grande majorité était inquiète du caractère strictement privé, qu'on... qu'on ouvrait une porte peut-être à reculer de quelques pas sur l'époque où on avançait en introduisant une présomption. Donc, l'écrasante majorité des gens qui se sont prononcés était en faveur du retrait de ce concept de strictement privé. Il faut noter, quand même, l'union des travailleuses et travailleurs accidentés et victimes de maladies, l'UTTAM, qui, eux, avaient une analyse inverse, qui disaient : Non, non, c'est une bonne nouvelle.

Ça fait que je vous avoue que moi, personnellement, je n'ai pas fait ma tête encore là-dessus. Est-ce que c'est bien ou pas bien d'avoir référé à «strictement privé»? L'argument principal qui était invoqué par les gens qui étaient critiques de cette utilisation-là de «strictement privé», c'était que ça continuait... en anglais, on dit le «victim shaming», là, la pression qu'on met sur la victime de dire : Bien, tu n'étais pas une victime parfaite puis tu avais... tu as réagi de telle ou telle manière, ce qui te discrédite et qui fait de toi une mauvaise victime. Il y a toute une littérature, là, féministe, scientifique sur le dossier. Et des gens plaidaient que dans... en précisant «strictement privé», etc., d'une part, on rajoutait de la confusion dans un endroit où est-ce qu'on en a besoin du moins possible, c'est-à-dire le droit du travail, et puis ensuite on glissait un peu dans cette culture-là. Je ne suis pas en train d'accuser, hein, le gouvernement ou le ministre personnellement d'avoir voulu faire ça, loin de moi l'idée, mais, des fois, on fait une première lecture, une première écriture plutôt, devrais-je dire, et ça génère des fois des réflexions qu'on n'avait peut-être pas vues. Moi-même, j'avoue, quand j'avais lu «strictement privé», au début, dans le projet de loi, j'avais noté... Ah! je vais avoir des questions à poser là-dessus. Puis je n'avais pas nécessairement eu le réflexe par rapport à la victime qui pourrait se remettre dans une posture difficile. Alors, j'étais content de l'entendre, cette critique-là dans les audiences. Alors, on devra en discuter, et ce sera certainement un bon moment, à l'étude détaillée, pour le faire.

Tout un débat sur les moins de 18 ans. Il y a un drôle d'article, là, dans la loi, M. le Président, qui détermine comment on va calculer les revenus de remplacement. C'est-à-dire que vous êtes blessé, etc., puis on doit vous indemniser pour un certain temps, puis on doit calculer comment on va vous donner ce revenu-là, sur quoi on se base? Et il y a un article, à mon avis et à l'avis de plusieurs groupes, qui est discriminatoire envers les jeunes de moins de 18 ans, qui dit qu'ils auront droit qu'à un chiffre fixe. Il y a un chiffre dans la loi, mais il a été modifié par une autre loi. Bien, en tout cas, c'est un chiffre fixe de quelques dollars par semaine, là. C'est un peu ridicule comme montant. Le ministre, lui, il dit... bon, il constate la situation. Il constate les recommandations des trois expertes qui disent : Il faut changer ça mais ne va pas au bout de la logique. Il fait comme une moitié du chemin, le ministre, puis il dit : Oui, bon, bien oui, il faut corriger ça, mais j'ai aussi adopté... — là, je parle en tant que ministre — j'ai adopté une loi sur le travail des enfants, l'an dernier, qui limitait à 17 heures par semaine le travail des moins de 18 ans. Donc, en conséquence, on ne peut pas se faire indemniser avec un revenu de remplacement plus que 17 heures par semaine. Il plaide, dans le fond, une espèce de cohérence entre les différentes lois du travail, à savoir la loi sur le travail des enfants, qu'on a adoptée ici même l'an dernier, et la loi qu'on est après étudier, qu'on est à même d'étudier. Or, dans la loi sur le travail des enfants, le 17 ans... le 17 heures, pardon, c'était pour l'année scolaire, c'était dans les périodes scolaires. Ça excluait clairement, dans la loi, par exemple, le congé d'été. Le congé d'été, il n'y a pas de limitation d'heures pour les enfants de 16, 17, 18 ans. Ils peuvent travailler 40 heures. Il n'y a pas de souci. Or, on pourrait très bien, en effet, se blesser, subir un accident, une lésion psychologique, ou du harcèlement, ou des violences sexuelles en plein été. Il est même statistiquement possible, si tu travailles plus durant l'été, qu'il y ait plus de chances que tu subisses un accident ou une lésion dans la période où tu travailles plus.

• (11 h 40) •

Alors, pourquoi, si en plein été, alors que tu fais des 40 heures semaine puis que tu subis une lésion, on décide, après ça, un peu arbitrairement, de ne t'indemniser qu'à 17 heures? C'est un peu, à mon avis, un raccourci. Est-ce que c'est des raisons pécuniaires, aussi, qui ont mené à cette proposition-là du gouvernement en plus de leur argument de cohésion et de cohérence du corpus législatif? C'est certainement un élément que je vais invoquer. Je vous confirme certainement qu'au-delà de l'évoquer je vais préparer un amendement là-dessus, M. le Président, parce que c'était une recommandation des expertes. Elles sont revenues nous dire qu'elles étaient déçues que ça ne soit pas appliqué comme elles l'avaient proposé dans le projet de loi. Plusieurs groupes se sont prononcés là-dessus aussi. J'espère que le ministre lui-même pourra le faire, son amendement, mais, s'il ne le fait pas, je vais le faire, moi, de manière enthousiaste.

Ça me permet, d'ailleurs, petite parenthèse, de saluer que, le ministre du Travail, ça va être notre, je pense, huitième ou neuvième projet de loi ensemble, qu'on est des vis-à-vis, depuis 2018. J'apprécie beaucoup mes échanges avec le ministre. On a une bonne relation. Et je veux souligner, parce que je le fais à chaque fois, que le ministre a la bonne culture de déposer en ouverture de l'étude détaillée l'ensemble des amendements sur lesquels il va... il a travaillé. Ça n'exclut pas qu'il puisse en rédiger d'autres, évidemment, en cours de route, mais l'état où il aura fait sa réflexion, pour, je pense, faciliter la bonne ambiance et l'échange et, je pense, par marque de respect envers le travail des oppositions, il dépose ses amendements en ouverture, nous, on l'apprécie beaucoup. Ça nous permet de savoir où s'en va un peu le ministre. Ça nous permet de savoir si on a à rédiger ou pas des amendements sur des articles qu'on avait identifiés. Si lui l'a déjà fait, puis que ça nous convient, bien, voilà, on n'écrira pas un amendement dans le dalot pour rien. Puis moi, je l'apprécie, puis je le souligne, puis je trouve ça important, parce que j'en ai fait, différents projets de loi avec différents ministres, ce n'est pas nécessairement la culture majoritaire. Alors, j'aimerais bien que ça se contamine du côté des banquettes gouvernementales et que les autres prennent exemple de ce bon... de cette bonne pratique. Alors, parenthèse fermée. Je continue dans ma liste d'enjeux.

La Pre Rachel Cox, que je salue... D'ailleurs, des trois expertes, M. le Président, qui avaient écrit le rapport et qui sont venues nous parler en commission, j'ai eu la chance d'être l'étudiant de deux d'entre elles au certificat en droit social et du travail, à l'UQAM. Alors, quand j'ai fini mes études en histoire, je suis tombé dans le syndicalisme. J'étais conseiller syndical. Je faisais du recrutement, etc. Et, à temps partiel, je suivais un certificat en droit du travail... droit social et du travail, et j'ai eu la chance d'avoir Pre Dalia Gesualdi-Fecteau et Pre Rachel Cox comme enseignantes à l'UQAM, des excellentes enseignantes. J'ai beaucoup appris avec elles et je les salue.

Alors, Mme Cox a proposé plusieurs choses, mais je le souligne parce que, là-dessus, elle était vraiment très vocale sur la question de la désimputation. La question de la santé et sécurité est importante, puis on en avait parlé abondamment dans le cadre du projet de loi n° 59 il y a trois ans maintenant, qui réformait la santé et sécurité, c'est tout le principe de ce qu'on appelle le «no-fault», le sans-faute.

Alors, l'employeur ne peut pas être tenu responsable, au civil ou au criminel, d'un accident de travail, hein? On ne peut pas poursuivre son employeur. C'était le cas, là, dans le XIXe, début XXe siècle, dans les anciennes lois du travail. Si vous aviez un accident à la shop, comme on disait, vous deviez, si vous vouliez obtenir réparation, poursuivre. On s'imagine que le poids financier, psychologique, etc., d'un petit salarié dans un... qui vivait dans un trois et demie avec cinq, six enfants puis des voisins, etc., ce n'était juste pas possible.

Alors, on a bien fait d'évoluer vers ça. Et là toute la question, ensuite, donc, de l'échange, entre le fait qu'on ne peut plus vous poursuivre... c'est que les cotisations pour le régime d'indemnisation, pour le maintien aussi de la CNESST, en matière de santé et sécurité, toujours, bien sûr, ce n'est pas l'apanage unique des employeurs et que, si vous avez des accidents à répétition dans votre entreprise, peu importe la nature, votre cotisation sera ajustée à la hausse, évidemment, parce qu'on veut, en quelque part, vous punir de mal faire votre travail de prévention de santé et sécurité au travail.

Et là Mme Cox, elle avait une approche intéressante, elle disait : En ce qui a trait aux violences à caractère sexuel, si ce n'est... si c'est un accident, s'il y a une lésion qui est faite, de l'employeur, là, comme il y a un cadre ou il y a un patron qui a fait une violence à caractère sexuel sur une employée, l'imputation, elle reste là, comme c'est prévu en ce moment. Mais Mme Cox, elle disait : Si c'est entre deux employés, par exemple, c'est quand même le cas parfois aussi, on devrait avoir un système où l'imputation, elle n'est pas personnalisée par entreprise, mais pour l'ensemble d'un secteur économique. Parce que, malheureusement, le côté pervers de ce système d'imputation, donc, de votre cotisation qui augmente plus vous avez des accidents, le corollaire de ça, négatif, c'est que ça a poussé beaucoup d'entreprises à développer une culture de contestation juridique où, systématiquement, pour ne pas avoir à payer une cotisation plus élevée dans les prochaines semaines, prochaines années, l'employeur conteste, conteste, conteste tout. Alors, ça mène évidemment à un phénomène de surjudiciarisation. Encore une fois, on en a abondamment parlé durant le projet de loi n° 59, mais, pour des bonnes et des mauvaises raisons, on n'a pas trouvé d'alternative à cette économie générale, j'oserais dire, de la santé et sécurité au Québec.

Mais Mme Cox apporte quelque chose d'intéressant. Elle dit : Pour éviter cet effet pervers de surjudiciarisation où est-ce que les patrons ont toujours envie de contester, systématiquement, chaque réclamation pour ne pas avoir à payer une plus grosse cotisation, pourquoi ne pas, dans les cas où il y a une violence à caractère sexuel de manière assez pointue, plutôt que de punir précisément l'entreprise, on punirait l'ensemble d'un secteur? Donc, la hausse de cotisation, si un de vos employés fait une violence à caractère sexuel sur un autre employé, bien, ce n'est pas juste vous qui allez en subir la conséquence financière sur votre cotisation, c'est l'ensemble d'un secteur. Je trouve qu'il y a une piste intéressante là. Il y a une piste intéressante pour commencer quasiment, à la limite, comme un projet pilote, à tester des systèmes pour éviter la surjudiciarisation des dossiers en matière de santé et sécurité au travail, qui, je le répète, est un fléau, un véritable fléau. On parle d'accès à la justice. Souvent, laissez-moi vous dire que ce n'est pas évident, en matière de santé et sécurité au travail, l'accès à la justice, notamment à cause de cette culture-là qui s'est développée, à tort, à mon avis, mais, bon, il faut constater qu'elle est là, en matière de contestation des lésions. À suivre, là-dessus, pour la désimputation.

Il y avait aussi une conversation importante sur la formation. Vous savez, les violences à caractère sexuel, comme je le disais tantôt, tu sais, moi-même, je n'ai pas nécessairement eu le réflexe, quand j'ai lu strictement en privé, de penser à la victime puis a la situation où ça la mettrait, etc., mais tout ça, ça ne peut pas venir spontanément à tout le monde, puis c'est normal. Il faut donc que les gens suivent des formations sur les violences à caractère sexuel, comment les prévenir, comment les traiter, comment administrer un dossier de violence à caractère sexuel, les recours possibles, etc.

Il y a des organismes, comme Juripop, par exemple, qui disaient qu'il faudrait qu'il y ait des accréditations pour que l'employeur ait des enquêteurs, que ça ne soit pas n'importe qui qui fasse une enquête n'importe comment lorsqu'il y a violence à caractère sexuel. C'est très délicat. Il faut avoir beaucoup de doigté, beaucoup de tact pour ne pas, à la limite, empirer une situation ou générer un stress encore plus grand et une détresse psychologique encore plus grande à la victime de violence à caractère sexuel en raison de l'enquête qui doit suivre suite à une demande de réparation et de lésions.

Alors, là-dessus, le besoin de formation est immense. Je sais que le ministre est très sensible à ça, très ouvert à ça. La CNESST aussi fait beaucoup de travail, mais là il y avait des propositions de dire : Ça devrait être obligatoire, on devrait pouvoir avoir des accréditations pour les enquêteurs. D'autres personnes, comme les gens à la CSN, par exemple, faisaient référence à la formation d'autres intervenants, comme les représentants en santé et sécurité du travail. Donc, là-dessus, je pense qu'il y avait de l'ouverture, il y avait de la bonne foi de tout le monde pour dire : C'est un dossier sensible, il va falloir qu'on apprenne à mieux le traiter pour le bien des victimes.

À quelques reprises dans le projet de loi, on fait référence à un nouveau règlement qui devra être adopté alentour de ce thème-là, des violences à caractère sexuel, bien sûr, et ça a soulevé l'enjeu de l'adoption réglementaire. Qui n'est pas simple, parce que la façon dont ça fonctionne, les règlements en santé et sécurité du travail, c'est que c'est le conseil d'administration de la CNESST, qui est un conseil administration paritaire, hein, moitié syndicats, moitié employeurs, qui doit se concerter et qui doit produire un règlement de manière consensuelle, par définition, qui, ensuite, est envoyé au ministère, qui, ensuite, est envoyé au Conseil des ministres. Adoption, publication à la Gazette, délai, je pense, de 90 jours, 60, 90 jours pour commentaires, et, après ça, adoption effective.

Or, dans le cadre des travaux du projet de loi n° 59 il y a trois ans, on avait eu tout un échange sur les nouveaux règlements qui allaient devoir être adoptés suite à cette loi-là et on avait trouvé un compromis, qui était mon idée, d'ailleurs, qui était ma suggestion auprès du ministre pour dire : Là, le nouveau règlement de prévention, en particulier qui allait toucher les non-syndiqués, moi, je ne faisais pas confiance, je vais dire, au système. Puis là je ne parle pas nécessairement des individus impliqués ou des fonctionnaires qui travaillent à la CNESST. C'est tous du bon monde, formé, intelligent, brillant, ce n'est pas ça, la question. La question, c'est l'écosystème.

• (11 h 50) •

Quand on fait un nouveau règlement en santé et sécurité du travail, quand on rajoute des nouveaux éléments de norme, d'encadrement, par définition, je vous dirais, 99 % du temps, on restreint le droit de gestion, le droit de gérance, qu'on appelle, hein? Puis, dans les formations en syndicalisme que je... que j'ai suivies puis que je donnais, aussi, dans mon ancien travail, on expliquait toujours ça avec un graphique. Le droit de gestion, dans le droit du travail, en théorie, il est à peu près absolu, puis il y a essentiellement deux affaires qui le limitent : les lois du travail, comme les normes du travail, la santé et sécurité du travail et ensuite un syndicat avec sa convention collective. Le droit de gestion, il reste très, très grand. Ce n'est pas une mauvaise chose nécessairement, hein, qu'il reste très, très grand, le droit de gestion, c'est que l'employeur, en tant qu'employeur, a un champ de compétence, a de l'espace pour appliquer ses compétences de ressources humaines puis sa gestion de ressources humaines.

Or, si je reviens à l'adoption du règlement, pourquoi je vous explique ça, c'est que, quand on rajoute des règlements, des nouvelles normes, on rajoute de la matière qui vient restreindre davantage l'assiette, ou le champ d'expertise, ou le champ de... comment je dirais ça, de coudées franches des patrons. Alors, par définition, ce n'est pas quelque chose qu'ils souhaitent, les patrons, rajouter des limitations à leur droit de gestion. Alors, sans grande surprise, ça peut prendre du temps. Il peut y avoir des contestations, il peut y avoir des compromis difficiles à attacher, parce qu'ils n'ont pas avantage à ce que ça procède plus rapidement. Et, en cette... pour cette raison-là, cette analyse très froide du rapport de force salariés-employeur, on avait proposé, dans le cadre du projet de loi n° 59, l'idée de dire : Bien là, vous allez devoir vous entendre d'ici deux ans, pour le nouveau règlement découlant des protections pour les non-syndiqués en santé et sécurité, là, du n° 59, vous avez deux ans pour vous entendre, puis, sur les éléments que vous ne vous serez pas entendus, si d'ici deux ans vous n'avez pas de compromis, le ministre va trancher.

Ça, c'est intéressant, parce que, des fois, tu as un débat entre syndicat et patronat, puis là il n'y a pas un désaccord, mais tu ne le sais pas vraiment, le ministre va pencher de quel bord si tu n'es pas capable d'avoir une entente. Ça fait que tu es-tu prêt à prendre le risque de laisser faire une entente ou un compromis avec ton vis-à-vis puis de laisser le ministre trancher ou tu dis : J'aime mieux le compromis qui est sur la table que de ne pas savoir ce que le ministre va trancher? C'était un peu ça, la philosophie derrière l'idée de dire : Tu as deux ans, sinon le ministre tranche. Et force est de constater, M. le Président, que ça a donné des résultats. En janvier, on a eu la... on a eu le... la publication de la Gazette avec le fameux règlement dont je vous parlais, qui découlait du projet de loi n° 59. Ça a marché, les syndicats et les patronats ont réussi à s'entendre dans un délai raisonnable pour envoyer une publication au gouvernement, puis voilà.

Alors, des syndicats sont revenus avec ça pendant les audiences, M. le Président. Ils ont dit... pour le nouveau règlement qui doit découler de l'adoption de cette loi-là, ils disent : On aimerait ça refaire cette expérience-là. Ça a fonctionné, visiblement, le délai a été respecté. J'ai posé la question aux regroupements patronaux qui sont venus en audience, pour leur dire : Vous, qu'est-ce que vous tirez, tu sais, de... qu'est-ce que vous pensez de cette idée-là de limiter à deux ans? Puis, sans grande surprise, il n'y avait pas beaucoup d'appétit, dans les regroupements patronaux, pour refaire cette expérience-là, pour les raisons structurelles que je vous expliquais il y a un instant, à savoir eux, ils n'ont pas avantage d'avoir plus de normes puis plus de standards, parce que ça limite leur droit de gestion. Mais moi, je vais revenir à la charge avec ça. Je pense que c'était une bonne idée. Elle a été démontrée dans les faits que ça a fonctionné et que c'est suffisamment important, les violences à caractère sexuel, pour qu'on force un peu la main à la négociation entre patronat et syndicat puis qu'on arrive à une entente d'ici deux ans, sinon le ministre ou peu importe qui occupera sa chaise aura l'obligation d'adopter un règlement dans le délai de deux ans.

Il y a eu d'autres éléments qui ont été évoqués, bien sûr, dans le cadre de ces débats-là. Un qui m'a beaucoup touché, c'était un débat qui traîne depuis plusieurs années sur les congés de maladie. Vous savez qu'au Québec il y a eu quand même une réforme importante des normes du travail en 2017 ou 2018, juste avant les élections, je pense, en 2018, si je ne me trompe pas, et c'est mon collègue le député de Gouin, qui était tout fraîchement arrivé à l'Assemblée nationale, qui est allé représenter ma formation politique à cet exercice-là, et on avait plaidé à l'époque pour 10 journées de congé payées. En ce moment, il y a 10 journées de congé, oui, mais, de mémoire, c'est seulement deux qui sont rémunérées. Donc, c'était ça, la grosse avancée. Il y avait plus de congés puis deux qui étaient rémunérés, alors que la... l'écrasante majorité des gens qui intervenaient disaient : Bien là, il faut 10 congés payés. Ça a été refusé. Et là il y a des groupes qui sont revenus en disant : Bien là, vous voyez bien, tu sais, une violence à caractère sexuel, on ne se remet pas de ça facilement. Tu sais, ça peut prendre quelques jours, quand même, pour encaisser le choc, laisser de l'espace à sa santé mentale, dans le fond, pour se rétablir, revenir dans les lieux de travail, probablement revenir au lieu de travail où sera encore présent l'harceleur ou l'agresseur, vivre l'enquête. Bref, tu sais, ce n'est pas de trop, là, 10 journées de congé payées, dans les normes du travail, pour des situations comme les VACS. Bien sûr, on souhaite que ça s'applique pour toutes les situations, mais le dossier des violences à caractère sexuel donne un nouveau levier, je dirais, à cette revendication importante de Québec solidaire, bien sûr, mais de beaucoup de représentations des salariés et des travailleurs, travailleuses.

Le débat sur l'amnistie, les clauses d'amnistie, ça, ça a fait couler beaucoup d'encre, M. le Président. C'est un débat vraiment intéressant. Un jour, il faudra faire... Ce serait un bon cas d'étude de comment se transforment les lois au Québec puis la genèse d'un débat. C'est sorti, j'oserais dire, un peu de nulle part, dans les congrès d'associations étudiantes, là. Autant la Fédération étudiante collégiale du Québec que l'Union étudiante du Québec, donc plus pour l'universitaire, ont sorti un peu de leur chapeau... Moi, je suis responsable de... J'étais responsable de ce dossier-là pendant quelques années et je me rappelle qu'il y a à peu près, peut-être, deux ans, sorti de nulle part, ce dossier-là sort. Oui, là, les clauses d'amnistie pour les professeurs, etc., ça nous pose problème, on veut que ça change.

Puis, à ce moment-là, il n'y avait pas vraiment eu de cas très médiatisé, réel, dans le sens où ça m'avait semblé, quand j'avais des discussions préliminaires avec elles, il y a... Je dis «elles» parce que c'étaient beaucoup et c'est encore beaucoup des femmes qui sont à la tête des organisations étudiantes. Ça m'avait semblé des discussions préliminaires où est-ce que j'ai dit : Bien oui, mais c'est très théorique, tout ça. Ça... Y a-tu vraiment un problème? Je comprends, tu sais, l'hésitation alentour d'avoir des clauses d'amnistie pour les violences à caractère sexuel, mais y a-tu vraiment un problème démontré? Ma crainte à l'époque, c'était que, si on ouvre cette boîte-là, il y ait des organisations patronales qui en profiteraient pour vouloir mettre aux poubelles l'ensemble de l'oeuvre des clauses d'amnistie.

Qu'est-ce qu'une clause d'amnistie, M. le Président? Je constate que peu de gens s'y sont penchés en détail dans, je dirais, l'espace public, dans l'espace médiatique non plus. Une clause d'amnistie, c'est très simple, c'est : si vous avez une mesure disciplinaire à votre dossier, une mesure disciplinaire de nature mineure, bien sûr, on ne pourra pas vous la reprocher ad vitam aeternam, parce qu'en droit du travail il y a le concept de gradation des sanctions. Si vous faites une première offense de nature mineure, vous pouvez avoir une tape sur les doigts. Souvent, la gradation classique, là, c'est un avertissement verbal; après ça, un avertissement écrit; après ça, une suspension d'un jour, suspension de trois jours, suspension d'une semaine, puis, à la fin, ça peut être un renvoi. Tu sais, ce n'est pas une recette parfaite. Ce n'est pas écrit noir sur blanc en quelque part, cette codification-là. C'est un peu la pratique d'usage, la jurisprudence factuelle, en quelque sorte, là... pas factuelle, mais la jurisprudence, je dirais, d'usage.

Or, s'il n'y a pas une clause d'amnistie pour retirer du dossier... Puis là je ne parle pas juste des VACS, bien sûr, là, je parle de l'ensemble de l'oeuvre. S'il n'y a pas une clause d'amnistie pour retirer du dossier un élément, vous êtes arrivé en retard, vous avez levé le ton à un moment donné, vous n'avez pas produit les résultats espérés sur x sujet, vous avez fait une blague déplacée, bref, des cas de mesures disciplinaires, il y en a à la pelletée, il n'y a pas de problème, mais, s'il n'y a pas de clause d'amnistie, ça voudrait dire que deux ans, cinq ans, 10 ans, 15 ans plus tard, on pourrait ressortir ça de votre dossier, puis jumeler ça à une autre infraction, puis justifier ça pour dire : Vous êtes parti, on vous congédie en additionnant plusieurs petites infractions mineures, en faisant un collage d'infractions mineures.

C'est contraire, philosophiquement, au principe de réhabilitation. La raison pour laquelle on dit «clause d'amnistie», c'est : faute est appliquée, et, si elle est reconnue par le salarié et que le remède, ça peut être une formation, des excuses, des engagements à ne plus reproduire un comportement x ou y, bien, si, dans les faits, en effet, il n'y a plus ce comportement, il disparaît, et que l'employé s'est réformé, il y a une forme un peu étrange de dire : Bien oui, mais on va garder ça dans ton dossier pour toute ta carrière, une espèce d'épée de Damoclès de droit du travail.

Maintenant, avec raison, les associations étudiantes sont venues nous voir puis nous ont dit : Tout ça, c'est bien beau, mais, en matière de violence à caractère sexuel, on n'aime pas ça, ce concept-là de clause d'amnistie, qu'une infraction, même mineure, en matière de violence à caractère sexuel, disparaisse. Puis, je vous dirais, pour avoir vu plusieurs conventions collectives, là, souvent, les clauses d'amnistie sont à l'intérieur d'un délai entre six mois, un an, où la clause disparaît du dossier, et les associations ont dit : Ça n'a pas de bon sens, il faut que ça change.

• (12 heures) •

Au début, quand on a évoqué ça, comme je dis, moi, je réfléchissais beaucoup et je me demandais si c'était le bon chemin. Au début, il y avait un refus de la partie gouvernementale d'agir là-dessus, mais les assos étudiantes ont persisté, persisté, persisté. Ils sont revenus de manière systématique à la charge avec ce dossier-là puis ils ont bien fait de le faire, parce qu'aujourd'hui on va adopter le principe d'un projet de loi qui bouge sur ce dossier-là. Alors, chapeau, en fait, aux assos étudiantes d'avoir pu maintenir le cap sur le dossier des clauses d'amnistie, parce qu'elles sont en train de gagner leur bataille. C'est pour ça que je vous disais que ce serait intéressant à étudier en matière de sciences politiques aussi, sur la séquence de... d'une loi, d'où ça vient, ces choses-là.

Entre-temps, on a beaucoup réfléchi tout un chacun. Le ministre aussi, il a fait des consultations, là, à l'automne. J'avais vu passer des cahiers de consultations. C'est là que j'ai compris qu'il allait agir sur les violences à caractère sexuel, parce que, dans son cahier de consultations, il y avait un élément qui faisait référence à ça.

Les groupes syndicaux ont réfléchi à ça aussi puis, en audition, ils sont venus nous poser quelques questions. Ils étaient en ordre dispersé, M. le Président. Il n'y avait pas une unité syndicale du tout sur qu'est-ce qu'on devait faire avec les clauses d'amnistie. Il se dégageait quand même une position majoritaire qu'il fallait faire quelque chose, hein? Le statu quo, là, peu d'organisations sont venues revendiquer le statu quo en matière de clauses d'amnistie. La plupart avaient quelque chose à proposer en disant qu'il faut qu'on fasse quelque chose. Quoi faire? Donc, différentes propositions. Il y en a qui disaient...

D'abord, sur le cadre d'application, parce que le ministre nous a un peu surpris, à la limite, parce que... Alors que tout le monde ne parlait que des violences à caractère sexuel pour abolir les clauses d'amnistie, le ministre est venu rajouter deux autres... Pardon. Le ministre est venu rajouter deux autres éléments en disant : Je rajoute à l'interdiction d'avoir des clauses d'amnistie le harcèlement psychologique et les violences physiques. Donc, trois éléments, finalement : violence à caractère sexuel, violence physique, harcèlement psychologique. Ah! on n'avait pas nécessairement réfléchi beaucoup d'avance au volet harcèlement psychologique et violence physique.

On regarde ça. On continue d'y réfléchir. Ça a une certaine logique de rajouter ces deux éléments-là. Moi, au début, j'avais la crainte qu'on rajoute tout, tu sais, puis qu'il n'y ait plus aucune clause d'amnistie, puis que les retards, par exemple, on ne puisse plus avoir de clauses d'amnistie pour des retards. Ça m'aurait semblé exagéré comme approche. Le ministre n'est pas allé jusque-là, mais il a rajouté deux éléments. On y réfléchit. On est ouverts.

Ça fait que, là, quand même, il y a des syndicats qui disent : Oui, mais là ces deux éléments-là sont tellement larges qu'ils pourraient mener à des dérives puis donner plus d'arbitraire aux patrons. Comme je vous dis, on y réfléchit. On posera des questions au ministre, comment il voit ça, comment il pense que ça va s'appliquer, surtout. Peut-être que ça pourrait rassurer certaines personnes.

Après ça, maintenant, comment on les applique, là? Ça fait qu'il y a la question de la portée puis, après ça, l'application. Le ministre dit : On abolit les clauses d'amnistie, et c'est interdit d'en négocier. Bon, c'est clair, c'est net. Il n'y a pas beaucoup de nuances là-dedans. Certaines centrales syndicales ont dit : À défaut de les interdire, ce qu'eux et elles jugent peut-être être un terrain glissant en matière d'accès à la justice, ils ont expliqué leur point, ça leur appartient, elles disent : Peut-être que l'alternative, ce serait de mettre un plancher minimal. C'est-à-dire qu'à défaut d'avoir une clause amnistie qui disparaît après six mois, un an, c'est un peu court, peut-être, on pourrait avoir un délai minimal, que les clauses d'amnistie soient au minimum d'une durée de deux ans ou cinq ans. Je pense, la FTQ proposait deux ans, la CSQ, cinq ans.

C'est intéressant. C'est une alternative. Est-ce que c'est là-dessus qu'on va nous-mêmes se positionner? Je serais surpris. Je pense qu'on va voir, là. On va poser des questions au ministre, encore une fois, sur sa vision de l'application. Mais ça mérite certainement d'avoir la discussion en étude détaillée, ce que nous aurons bientôt.

D'autres organisations syndicales, comme la CSD, par contre... pardon... pas pardon, mais par exemple, disaient : On est d'accord pour interdire les clauses d'amnistie, mais juste les violences à caractère sexuel. Donc, tantôt, quand je vous disais : Il y a deux autres éléments, harcèlement psychologique, violences physiques, eux autres disent : Non, non, non, ça, il faut garder le système tel qu'il est. Donc, encore une fois, je vous dis, vraiment un ordre dispersé en matière de centrales syndicales qui avaient des positions, je pense, différentes, chacune d'entre elles. Des fois, c'étaient des nuances, là, mais il n'y a pas eu un bloc clair par rapport aux représentants de travailleurs, travailleuses sur ce qu'il fallait faire là-dessus. Encore une fois, j'insiste, la plupart disaient qu'il fallait faire quelque chose. Et, justement, il faut faire quelque chose. Et moi, quand j'ai vu ce débat-là sur les clauses d'amnistie, je me suis dit : On aura le débat puis on verra si c'est un bon chemin, mais moi, j'en ai un autre aussi à proposer, qui n'est pas une alternative, mais qui est un supplément, je dirais.

Les gens qui sont dans le domaine du droit du travail connaissent tous très bien l'article 47.2 du Code du travail. L'article 47.2 du Code du travail, c'est celui qui donne l'obligation aux syndicats de représenter tout le monde. C'est un peu une contrepartie, philosophiquement parlant, toujours, de la cotisation, hein, la formule Rand, qu'on appelle, qui est une vieille loi qui date depuis des années, où, si tu réussis à convaincre une majorité de travailleurs dans une entreprise x d'être membres d'un syndicat, tu n'es pas obligé de devenir membre avec ta carte de membre, ça, personne ne t'obligera jamais de faire ça, par contre tu vas être obligé de cotiser parce que les conditions de travail, la convention collective que le syndicat va négocier s'appliquent à tout le monde. La hausse de salaire que je vais aller négocier, les assurances que je vais aller négocier ne vont pas s'appliquer juste à ceux qui ont signé leur carte de membre, hein, par définition, donc on applique la formule Rand, tout le monde doit cotiser au syndicat.

Et vient avec ça, assez logiquement, une obligation de représentation. Tu dois représenter tout le monde. C'est aussi un élément qui avait été mis en place pour éviter le plus possible les effets de gang. Malheureusement, parfois, l'homme étant l'homme, l'humain étant l'humain, dans un environnement de travail se forment des gangs. Puis là il y a des élections, n'est-ce pas? C'est un objet politique, un syndicat, il y a une élection pour l'exécutif. Bien, si tu as une gang qui se présente contre l'autre gang, puis, bon, pourrait se développer une très mauvaise culture de... une forme de côté revanchard où la gang qui a gagné décide de ne pas vouloir défendre la gang qui a perdu si jamais ils ont des problèmes de relations de travail, alors cet article 47.2 vise aussi à éviter ce système-là de favoritisme ou de gangs internes à un syndicat.

Tout ça pour vous dire que, parfois, dans l'espace public, on entend des éléments ou des cas... des cas spécifiques de ce qu'on appelle un pourri qui a volé son employeur, ou qui a fait des commentaires racistes, ou qui a eu... qui a fait une violence à caractère sexuel envers une collègue, et là il y a toujours quelqu'un qui se trouve à être étonné de voir le syndicat défendre cette personne-là. Bien, moi, M. le Président, j'ai été longtemps conseiller syndical puis je ne vous dirais pas que c'était plaisant de faire ça. Personne n'a envie de défendre un agresseur, mais la loi oblige le syndicat à le faire. Le 47.2, précisément, et articles suivants, bien sûr, oblige le syndicat à le faire.

Maintenant, en matière de violences à caractère sexuel, si vous voulez changer l'ambiance dans le milieu de travail puis commencer à installer dans l'esprit des harceleurs et des potentiels harceleurs, dans l'esprit des agresseurs et des potentiels agresseurs que, s'ils vont faire des niaiseries, là, ils n'auront pas la protection du syndicat, qu'ils vont être tout seuls puis que le syndicat aura la possibilité... évidemment, il y a 150 000 situations différentes avec 150 000 nuances, mais le syndicat aura la possibilité de choisir, en matière de violence à caractère sexuel, de ne pas représenter le salarié, si on commence à aller dans ce terrain-là, laissez-moi vous dire une chose, ça va changer l'ambiance dans le milieu de travail, puis il y en a qui vont commencer à marcher pas mal plus avec les fesses serrées.

Alors, moi, j'ai écrit une lettre, que j'ai envoyée au ministre en octobre, lui disant : M. le ministre, je vois que vous êtes en train de consulter pour un projet de loi sur le harcèlement au travail, que vous avez l'intention, probablement, de faire une intervention en matière de limitation des clauses d'amnistie, tout ça est très bien, mais je vous soumets qu'il y a quelque chose qui serait potentiellement encore plus efficace pour changer l'ambiance de travail, puis que c'est de mettre, dans le fond, une exemption particulière aux violences à caractère sexuel à l'obligation de représentation qui est échue aux syndicats en fonction de l'article 47.2.

Le ministre a dit que c'était une suggestion intéressante. Il a été questionné la semaine dernière là-dessus. Il y a un article du Devoir qui mentionnait qu'il allait regarder ça. On verra la semaine prochaine... même pas la semaine prochaine, demain, logiquement, on commence l'étude détaillée. Alors, vous pouvez être certain, M. le Président, que moi, je travaille sur un amendement à cet effet-là, d'aller jouer un peu dans cette obligation de représentation syndicale là, parce que je pense que ça, ce serait un remède, pas le remède miracle, bien sûr, mais un remède qui pourrait se rajouter à d'autres et qui ferait en sorte de pouvoir être plus efficaces sur le terrain, dans le milieu de travail, et d'avoir un outil supplémentaire pour combattre et prévenir les violences à caractère sexuel. Alors, voici pour le dossier de l'amnistie et la potentielle révision de l'obligation de représentation syndicale.

Quelques éléments qu'il me reste, M. le Président, avant de conclure mon intervention. Il y a eu toute une discussion sur...

• (12 h 10) •

Bien, avant, peut-être, de... juste pour terminer la parenthèse sur l'amnistie, il faut... je ne peux pas m'empêcher de souligner qu'il y a une drôle de façon de procéder du gouvernement, là, parce qu'il y a aussi des articles qui traitent de ça dans le projet de loi du ministre de l'Éducation, le projet de loi n° 48, si je ne me trompe pas, ou 47, j'oublie le numéro, j'ai trouvé ça un peu bizarre parce qu'on modifie le Code du travail, les normes du travail. Logiquement, ça s'applique à tout le monde. On a, après ça, des articles qui parlent de clause amnistie aussi pour le milieu de l'éducation. Je ne sais pas... Je n'ai pas su si c'était... j'ai hâte de questionner le ministre là-dessus en étude détaillée, mais je n'ai pas su si c'était un problème qu'il y a des légistes qui ne se sont pas parlé. C'est-tu que chacun des ministres voulait son intervention à lui? Bien, tu sais, tantôt, je vous disais que le ministre disait : Ah! il faut... c'est important d'avoir une cohérence du corpus législatif. Là-dessus, c'est ordinaire. Pas que, sur le fond, ça pose problème, là, hein, entendez-moi bien, c'est sur la forme. C'est bizarre qu'on se trouve à aller écrire autre chose, d'une manière un peu différente, d'ailleurs, dans un autre projet de loi pour traiter un même problème. J'ai hâte d'entendre les deux ministres, parce que j'assume que ma collègue, bien sûr, de Mercier, qui va traiter le projet de loi sur l'éducation, va poser les mêmes questions ou, en tout cas, des questions de même nature à son vis-à-vis le ministre de l'Éducation. Donc, je referme la parenthèse pour la clause amnistie.

Un autre élément qui est évoqué, c'est la divulgation des antécédents aux autres employeurs. Et là je continue, donc, dans l'analyse du parallèle entre les deux projets de loi. C'est clairement un élément qui se retrouve dans le projet de loi de l'éducation, hein, puis on sait pourquoi. Ça, il y a eu beaucoup de cas qui sont sortis dans les médias, d'un professeur qui avait fait des violences à caractère sexuel, qui avait été réprimandé, puis là ce n'était pas une question de clause d'amnistie, là, ça, c'est un autre dossier complètement, mais lui, il avait juste à changer d'employeur, changer de commission scolaire, aller dans une école privée. Et, comme dans le droit du travail actuel il n'a pas l'obligation de fournir les antécédents de son ancien employeur — quand on fait son C.V., on écrit toujours «références sur demande» — bien, ça faisait en sorte qu'une commission scolaire x ne pouvait même pas savoir si un prof avait eu des comportements complètement déplacés dans une commission scolaire y. Ça, c'est assez étrange. Puis on est assez ouverts, ma collègue fera ses commentaires, bien sûr, on est ouverts à cette question-là, mais là il y en a, du monde, qui dit : On devrait mettre ça à la grandeur des sujets, parce que l'argument qui était fait pour les... le projet de loi du ministre de l'Éducation, c'est que c'est pour la protection des élèves, est-ce que, là...

Après ça, il y a Juripop, je les nomme. Juripop sont venus, ils ont dit : On devrait appliquer ça à l'ensemble des travailleurs, pas juste les travailleurs du milieu de l'éducation. Ça pose des questions. Ça pose une question de confidentialité de renseignements privés. Moi, je suis ouvert à avoir ce débat-là. Je suis ouvert à avoir cette discussion-là. Comme ce n'était pas dans le projet de loi n° 42 du ministre, à peu près aucune organisation ne s'est prononcée là-dessus. C'était une idée, je dirais, supplémentaire qui a été mise au jeu par Juripop. On verra si le ministre la retient ou pas.

Une autre... une autre idée qui a été mise au jeu par Juripop, c'était la possibilité d'ouvrir des poursuites au civil. C'est intéressant, ça. Si vous avez deux travailleurs, un harceleur, un harcelé ou un agresseur, une agressée... Hein, tantôt, je vous disais, hein, que c'est un principe de «no fault» pour... sans faute pour l'employeur, ça fait en sorte que l'employeur ne sera pas, comme, pénalisé à... il ne pourra pas se faire poursuivre. Il a l'obligation d'avoir un système sans harcèlement, de fournir un environnement de travail sans harcèlement, mais il ne sera... je veux dire, ce n'est pas lui qui a la conséquence. Il n'y a pas de... il n'y a pas de judiciarisation. Il n'y a pas de... comment je vous dirais ça, il n'y a pas de poursuite au criminel ou au civil. Mais Juripop disait : Il faudrait peut-être réfléchir à permettre, dans des cas où est-ce que le harcèlement ou l'agression a lieu entre deux salariés, d'ouvrir un recours au civil entre l'agressé... envers l'agresseur, ouvrir cette possibilité-là de... que la personne, l'individu, la victime puisse poursuivre au civil son agresseur. C'est intéressant. Est-ce que ça pourrait aussi participer à donner un outil supplémentaire pour lutter contre les violences à caractère sexuel dans les milieux de travail? C'est intéressant. Moi, j'ai posé la question... parce qu'ils sont arrivés assez tôt en audiences, Juripop, ça fait que j'ai pu poser la question à d'autres groupes qui étaient venus après. Bien, c'était un peu la même chose, tu sais, ce n'était pas un élément qu'ils avaient... qui était qui dans le projet de loi, ça fait qu'ils n'avaient pas eu le temps de se positionner là-dessus ou de réfléchir beaucoup là-dessus. On va voir si ça évolue aussi du côté du ministère et si on retrouvera, peut-être, des amendements en ce sens-là, mais il y avait là un filon, en tout cas, suffisamment intéressant pour qu'on n'ait pas le luxe de se priver d'une réflexion en bonne et due forme.

Je termine là-dessus, M. le Président, en disant que, dans cette discussion-là, il y a comme deux principes qui s'opposent ou, en tout cas, qui essaient de coexister. Le principe de base, qui est la justice, le droit à la justice naturelle. Vous pouvez parler à n'importe quel avocat... Je ne suis pas avocat. J'ai beau avoir fait un certificat en droit du travail, je ne suis pas avocat, mais je connais deux, trois principes de base puis quelques codes de ce beau métier là, et le droit à la justice naturelle, c'est un peu le principe qui dit : Tout le monde a le droit d'être considéré innocent avant d'être jugé coupable. Tout le monde a le droit à être défendu, tout le monde a le droit à une défense pleine et entière. Le droit à la justice naturelle.

Donc, il y a ça, puis, à côté, vous avez ce fléau qui sont les violences à caractère sexuel. Puis je termine là-dessus, M. le Président, en vous racontant un peu comment moi, j'avais vécu, d'un point de vue très personnel, tout l'épisode du #metoo, #agressionnondénoncée. C'est arrivé en deux vagues distinctes, là, #agressionnondénoncée, la première alentour de, quoi, 2015, peut-être, si je me rappelle bien. Moi, M. le Président, quand c'est arrivé, là, cette vague-là, j'ai tellement été profondément atteint de voir dans mon propre réseau d'amis, de connaissances... évidemment, je le voyais beaucoup sur les médias sociaux, moins de gens en parlaient alentour d'un souper, là, mais j'ai tellement été touché de voir autant de personnes que je connaissais personnellement avoir été victimes d'une agression dans leur vie. Là, je déborde un peu, nécessairement, du milieu de travail, là, quoique ça arrive quand même souvent en milieu de travail, mais ça m'avait tellement frappé. J'étais à la fois content qu'on en fasse un élément, assez rapidement, de débat public, que ça prenne beaucoup de place puis qu'on en parle, mais j'étais à la fois un peu déçu que ça ne soit pas traité, du point de vue du gouvernement, comme une urgence nationale. Je veux dire, je sais que je n'étais pas seul, en particulier chez les hommes, à découvrir le nombre effarant de femmes, la proportion énorme de femmes qui ont connu une agression dans leur vie, de différentes natures, bien sûr. Il y avait des chiffres qui circulaient, ce n'était pas loin de... c'était, quoi, une sur cinq, une sur trois, des fois, qui avait connu une agression, d'intensité différente, bien sûr, mais moi, j'étais catastrophé d'apprendre qu'il y en avait autant.

Je me rappelle m'être rendu à une manifestation au centre-ville, à la place Émilie-Gamelin, près de l'UQAM, puis il y avait une foule de gens, puis je connaissais des gens dans cette foule-là, bien sûr, mais une foule de gens, puis il y a une personne qui prenait la parole, qui faisait un discours, puis, à un moment donné, elle demande : Sentez-vous à l'aise de lever votre main ou pas, mais celles et ceux qui se sentent à l'aise, levez la main si vous avez déjà subi une violence à caractère sexuel, une agression. Là, tu es au milieu de la foule, là, puis là il y a plusieurs personnes qui lèvent la main, plusieurs femmes qui lèvent la main. Et là tu te rends compte, aïe! je la connais, elle. Elle, c'est mon amie. Elle, c'est ma collègue de travail. Et elles lèvent leur main. Bien sûr, je ne vais pas aller imposer une discussion pour qu'elles me racontent ça. J'étais là, ma présence à cette manifestation-là était ma forme de soutien, pas la seule, bien sûr, mais une forme de soutien. Mais pour vous dire que, pour moi, ça a été un choc. Puis là où je veux atterrir avec tout ça, M. le Président, c'est que c'est important, le droit à la justice naturelle, mais c'est important aussi de serrer la vis de manière structurée, à travers des projets de loi, à travers des interventions sur la question de la violence à caractère sexuel et les agressions. Puis ce n'est pas vrai qu'on va se reposer sur le principe de justice naturelle puis sur l'intégrité comme inattaquable et totale puis qu'on va dire : Bien, dommage, on ne pourra pas serrer la vis sur la question des violences à caractère sexuel parce qu'il faut préserver dans son intégralité le droit à la justice naturelle. Il y a peut-être une couple d'affaires qu'on peut aller équilibrer. Je pense que c'est un peu ce qui anime le ministre, il fait des pas intéressants là-dessus. J'en rajoute un, celui du 472, dont j'évoquais tantôt. D'autres font des propositions supplémentaires, comme Juripop, avec l'ouverture d'un recours civil. Moi, je trouve ça bien. Et je souhaite que ça continue d'être l'état d'esprit des collègues alentour de la table dans la poursuite de la perfectibilité souhaitée du ministre de son projet de loi. Et c'est certainement l'attitude qui va m'animer dès demain pour le début de l'étude détaillée du projet de loi n° 42. Merci, M. le Président.

• (12 h 20) •

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve.

J'en profite pour vous informer qu'un débat de fin de séance se tiendra demain, le jeudi 8 février 2024, à 13 heures, sur une question adressée par Mme la députée de D'Arcy-McGee à M. le ministre responsable des Services sociaux concernant le financement nécessaire pour les foyers de L'Arche.

Nous poursuivons, toujours sur l'adoption du principe du projet de loi n° 42, et je reconnais maintenant M. le député de Jean-Talon.

M. Pascal Paradis

M. Paradis : Merci, M. le Président. J'aimerais me joindre à mes collègues, en fait, pour saluer l'initiative du ministre et du gouvernement dans la présentation de ce projet de loi n° 42, Loi visant à prévenir et à combattre le harcèlement psychologique et la violence à caractère sexuel en milieu de travail.

Il s'agit d'un véritable fléau, M. le Président, et c'est une bonne chose, que cette Assemblée se saisisse de cet enjeu afin d'agir, afin de bonifier la réponse qu'y apporte le droit du travail. Je pense qu'il s'agit de créer un environnement le plus sain possible, un environnement de travail le plus sain possible partout au Québec, un environnement libre de toutes les formes de harcèlement et de violence, y compris de violences à caractère sexuel. En fait, le ministre l'a indiqué, l'idée est de mettre fin à ces types de harcèlement et à ces types de violences, sous trois axes, hein? Donc, il y a l'axe, d'abord, de la prévention, qui demeure extrêmement important : former, sensibiliser, créer un environnement de travail propice à des relations harmonieuses et exemptes de ce type de harcèlement et de violence. Deuxièmement, s'assurer que tout est fait pour faciliter le traitement adéquat des situations où il y a harcèlement, où il y a violence, donc tout le processus de plainte. Mais, troisièmement, aussi, de renforcer l'accompagnement des victimes, notamment pour qu'il y ait un retour réussi en milieu de travail.

Je pense que, le ministre nous l'a indiqué et il en a fait preuve jusqu'à maintenant, c'est une approche d'ouverture, une approche de dialogue et une approche qui va nous permettre, je pense, d'aborder toutes ces questions-là de manière transpartisane.

Tout comme mon collègue le député d'Hochelaga-Maisonneuve, je pense que, lorsqu'il vient le temps de convoquer les organisations, la société civile, les personnes concernées par des enjeux, on peut peut-être se laisser un petit peu plus de temps. Il est vrai qu'on a toutes et tous prêté notre collaboration parce qu'on a dit : On veut aborder ces questions-là ensemble. Mais on a tous et toutes entendu parler d'organisations, là, qui n'ont pas nécessairement eu le temps de réagir, d'envoyer un mémoire et d'être entendues lors des audiences.

Cela dit, je suis, moi, vraiment content de savoir que le ministre, que le gouvernement a notamment été inspiré, dans son travail de préparation du projet de loi, sur le rapport Mettre fin au harcèlement sexuel dans le cadre du travail : se donner les moyens pour agir, préparé par le comité d'expertes, donc c'est-à-dire Me Rachel Cox, qui est professeure au Département des sciences juridiques de l'UQAM, Dalia Gesualdi-Fecteau, qui est professeure à la Faculté de droit de l'Université Laval, et Anne-Marie Laflamme, la doyenne de la Faculté de droit de l'Université Laval, trois personnes, vraiment, qui s'y connaissent, qui se sont penchées longuement sur la question, qui avaient fait 82 recommandations, dont plusieurs... elles l'ont mentionné elles-mêmes en venant nous rencontrer en commission parlementaire, dont plusieurs, donc, ont servi d'inspiration dans le travail de préparation de ce projet de loi. Et moi aussi, j'aimerais féliciter, donc, tous les gens au ministère et au gouvernement qui y ont participé.

Très rassurant aussi de savoir qu'il y a des partenariats existants que le ministre indique vouloir renforcer, continuer, et même créer de nouveaux partenariats avec des organisations qui sont actives dans ce domaine. On a rencontré, notamment, les gens de Juripop, une organisation, une nouvelle fois, que je salue, plusieurs institutions qui gèrent ce genre de dossiers et qui sont venues dialoguer avec nous. Alors, je l'indique tout de suite, au Parti québécois, nous sommes en accord avec le principe et nous allons donc voter en faveur de son adoption pour qu'on puisse en discuter plus amplement.

On va justement avoir des arbitrages à faire. Certains sont venus nous dire qu'il y a des aspects du projet de loi qui sont... qui vont trop loin, d'autres, au contraire, sont venus nous dire qu'ils ne vont pas assez loin. Donc, il y a ces arbitrages-là à faire. Certains nous ont signalé aussi qu'il manque des éléments qu'on pourrait ajouter, notamment en allant dans les 82 recommandations du comité d'expertes.

Je le souligne, je pense que nous allons effectuer, et c'est de bon augure jusqu'à maintenant... nous allons devoir effectuer un travail qui est transpartisan. On est sur des enjeux, là, qui dépassent, ici, une quelconque ligne de parti. On est là pour faire la meilleure chose possible pour atteindre les objectifs mentionnés dans le projet de loi. Mais donc il y a plusieurs enjeux, il va y avoir... on va avoir un travail délicat de calibrage à faire, notamment sur les normes du droit du travail qui sont applicables. Donc, oui, M. le Président, on va faire du droit du travail en commission parlementaire.

Je nomme certains des enjeux qu'on a identifiés, ça recoupe un certain nombre des discussions qui ont déjà eu lieu dans ce débat aujourd'hui, mais moi, j'aimerais attirer l'attention sur cet enjeu de la mutualisation du coût des prestations qui sont versées en raison d'une lésion professionnelle qui résulte d'une violence à caractère sexuel. J'ai bien noté que les expertes, les trois expertes qui sont venues nous rencontrer nous ont dit : Aïe! Ça, c'est l'enjeu numéro un, parce que c'est un enjeu technique, administratif, financier. Donc, c'est difficile de voir tous les tenants et aboutissants, mais, justement, parce que c'est comme ça, il faut aller là, il faut se pencher sur cette question-là, elle demeure essentielle. Alors, elles réfèrent notamment à l'article 12 du projet de loi n° 42, qui lui-même modifie l'article 327 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles. Et je pense, M. le Président, que, oui, il va falloir aller creuser ces questions-là financières, administratives, techniques pour s'assurer qu'on fait les bonnes choses de ce côté-là.

Toute la question... Le deuxième point, le deuxième enjeu, je pense, sous-jacent est celui de la facilitation de la reconnaissance des lésions professionnelles qui sont liées aux violences sexuelles. Donc là, ici, on crée une présomption dans le projet de loi, donc, et l'étendue de la présomption de blessure ou de maladie survenue par l'effet du travail lorsqu'elle résulte d'une violence à caractère sexuel, c'est là-dessus qu'on va devoir travailler. Il y a notamment une exception qui est créée, là, avec la fameuse mention «sauf si la violence survient dans un contexte strictement privé». Alors, certains disent qu'on n'a pas besoin de ça et que, justement, ça perpétue des préjugés. D'autres nous disent : Attention, on a besoin, peut-être, de ça. Alors, on va devoir y travailler. Le délai, aussi, dans lequel apparaît une maladie résultant d'une telle forme de violence ou d'une telle forme de harcèlement, ça fait partie des discussions qu'il y a eu lors des audiences, donc, ça aussi, on va discuter là-dessus.

Que faire avec les clauses de confidentialité, aussi connues sous le nom de clauses d'amnistie? Donc là, ici, il y a un ajout qui est proposé, donc, à l'article 97.1 de la Loi sur les normes du travail, ou un ajout à la Loi sur les normes du travail, qui dit qu'aucune disposition d'une convention collective ou d'un décret ne peut empêcher un employeur, lorsqu'il impose une mesure disciplinaire à une personne salariée en raison d'une inconduite relative à de la violence physique ou psychologique, incluant, bien sûr, de la violence à caractère sexuel... donc, aucune clause ne peut empêcher de tenir compte d'une mesure disciplinaire précédemment imposée à cette même personne pour des raisons analogues. Alors, faut-il prévoir des délais d'extinction des fautes disciplinaires dans le dossier des personnes concernées? C'est la question plus large des antécédents judiciaires en lien avec le harcèlement et les violences sexuelles. Ce qu'on veut faire, c'est éviter la perpétuation des récidives. D'autres, par contre, nous parlent du droit à la réhabilitation. Au-delà de ça, c'est une question de protection des bénéficiaires, des usagers, par exemple, les élèves, des personnes qui travaillent dans le même milieu de travail d'une personne qui serait une récidiviste, parce qu'ici on parle de l'imposition des sanctions à la suite de la reconnaissance, donc, d'une forme de harcèlement ou de violence prohibée par la loi.

Donc, l'article 97.1, qui est proposé, donc, comme ajout à la Loi sur les normes du travail... elle peut sembler, à première vue, en tout cas, adoptée pour représenter l'état actuel de la jurisprudence. Et là, ça, c'est un enjeu... c'est important, parce qu'il existe de la jurisprudence sur cette question-là. Il y a un état du droit, et il faut s'assurer, dans notre travail, qu'on en tienne compte pour ne pas, par exemple, ajouter dans la loi des éléments qui seraient des reculs par rapport à là où le droit a avancé. J'ai bien noté, à une question de ma part, et je l'en remercie, le Barreau du Québec s'est porté volontaire pour nous aider à tracer l'état du droit sur cette importante question dont on va débattre, et je pense que ça va être important de bénéficier de l'éclairage du Barreau du Québec, de manière objective, sur l'état du droit pour être mieux capables d'avancer sur cette question-là, qui va être, je pense, centrale.

Je note bien que mon collègue de la circonscription d'Hochelaga-Maisonneuve parle peut-être d'arriver ici, là, avec une solution qui pourrait discuter de l'article 47.2 du Code du travail, donc de l'obligation qui est faite aux syndicats de représenter ou de défendre les travailleurs. À voir, on n'est pas fermés, mais ça me semble une conversation beaucoup plus large qui dépasse, je pense, le cadre... qui est très pertinente au cadre de ce projet de loi là, mais qui dépasse le cadre de ce projet de loi là, donc je ne sais pas si c'est le lieu pour avoir le débat.

Un quatrième enjeu qui est lié, c'est celui du droit à la défense pleine et entière de l'employeur et aussi de la personne visée par une allégation. Donc, quel encadrement doit-on faire aux enquêtes que l'employeur peut et doit faire lorsqu'il y a des questions ou lorsqu'il est question des informations auxquelles il peut avoir accès? Donc, ici, on parle du paramétrage de l'accès à l'information, notamment l'information médicale relative aux personnes qui portent plainte, pour éviter la revictimisation, pour éviter les abus de procédure, pour éviter les délais additionnels, mais, en même temps, en assurant une défense pleine et entière aux employeurs et aux personnes visées.

Un cinquième enjeu, ça a été abordé aussi, c'est toute la question de l'harmonisation des définitions et des délais entre différentes lois qui sont visées et, ici, ça a été mentionné aussi, entre deux projets de loi qui sont actuellement présentés, donc, ce projet de loi n° 42, mais aussi le projet de loi n° 47. Il faut s'assurer, là, qu'on avance de manière coordonnée et qu'on s'arrime les uns les autres.

Enfin, je noterais aussi que certains nous ont proposé, en audiences en commission parlementaire, d'autoriser peut-être des recours au civil dans certaines circonstances, ce qui pourrait être aussi considéré comme une espèce de brèche à la notion de responsabilité sans faute. Ça aussi, c'est intéressant, et c'est très pertinent à nos discussions, et peut-être qu'aussi ça dépasse le cadre de ce projet de loi là, donc à voir.

Alors donc, plein de discussions, beaucoup de discussions intéressantes sur des notions juridiques à venir. On va collaborer avec le gouvernement, avec les autres oppositions pour faire la meilleure chose possible pour contrer ce fléau, améliorer la réaction en milieu de travail et faire en sorte que notre droit soit à la fine pointe des meilleures pratiques dans ce domaine. Donc, nous sommes pour, nous sommes en faveur de l'adoption du principe. Merci beaucoup, M. le Président.

• (12 h 30) •

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député de Jean-Talon. Et, pour poursuivre, toujours sur l'adoption du principe du projet de loi n° 42, je reconnais maintenant Mme la députée de D'Arcy-McGee.

Mme Elisabeth Prass

Mme Prass : Merci, M. le Président. Donc, ce projet de loi n° 42 a pour objet de prévenir et de combattre le harcèlement psychologique et la violence à caractère sexuel en prévoyant diverses mesures dans les lois du travail visant principalement la protection des travailleurs dans leur milieu de travail. Le nombre croissant de... Une partie de la raison pour laquelle ce projet de loi est tellement nécessaire... et, d'après la CNESST, le nombre croissant de cas de harcèlement sexuel signalés dans la province du Québec avait... a atteint un total de 1 654 plaintes reçues en 2019. La CNESST souligne l'importance de prévenir et de contrer le harcèlement sexuel en milieu de travail, car il peut avoir des impacts négatifs importants sur les individus et les organisations. Donc, encourageons les employeurs à prendre des mesures proactives pour prévenir le harcèlement sexuel et assurer un milieu de travail sécuritaire et respectueux.

On ne peut pas nier qu'au Québec, en 2022, près d'une personne sur deux, 49 %, a observé ou subi un comportement sexualisé, inapproprié ou discriminatoire en milieu de travail au cours des 12 derniers mois précédant la réalisation de l'enquête sur les inconduites sexuelles au travail. En 2022, selon les données, encore, de la CNESST, 4 909 demandes de recours concernant du harcèlement psychologique ou sexuel ont été déposées en vertu de la Loi sur les normes du travail. Les femmes seraient deux fois plus nombreuses, à 26 %, que les hommes à indiquer avoir subi un comportement sexualisé inapproprié ou discriminatoire en milieu de travail.

Le harcèlement au travail est malheureusement une réalité pour de nombreuses personnes. Il peut prendre différentes formes, telles que le harcèlement moral, le harcèlement sexuel, le harcèlement psychologique et bien d'autres encore. Ces comportements nuisent non seulement à la santé et au bien-être des travailleurs, mais ils sapent également la productivité et la cohésion au sein des organisations.

Si ce projet de loi est un pas dans la bonne direction, il faut toutefois aller plus loin. Donc, parlons des éléments de la loi qui ont été salués lors des consultations. Le projet de loi vient éliminer les clauses d'amnistie que l'on retrouve à l'heure actuelle dans plusieurs conventions collectives. C'était une demande de ma formation politique, car les associations étudiantes avaient également demandé une telle abolition. Pour qu'un employeur puisse avoir... puisse prendre en compte d'une sanction passée, il est important qu'on ne perde pas en vue les gestes qu'une personne a pu poser à un moment donné qui pourraient faire en sorte qu'on ait une crainte que ça se reproduise dans notre milieu de travail.

La création d'une unité spéciale au Tribunal administratif du travail dûment formée par des violences à caractère sexuel ainsi que la formation obligatoire des arbitres de grief a également été bien reçue lors des consultations.

L'allongement à deux ans de délai de la réclamation pour une lésion professionnelle découlant d'une violence à caractère sexuel est également quelque chose d'essentiel. On ne peut pas nier tout l'élément de santé mentale quand une personne se retrouve victime de harcèlement, et ce n'est pas en leur donnant un temps prescrit qu'on prend en compte la réalité et la souffrance de cette personne-là. Donc, lors des consultations, nous avons entendu certains groupes qui ont exprimé une volonté que le délai soit complètement levé, encore une fois pour donner le temps à la personne qui est victime de vivre avec les enjeux de santé mentale, mais de bien venir à une place où ils se sentent sainement pour aller de l'avant avec une plainte.

Les personnes qui subissent du harcèlement au travail doivent en plus affronter un régime juridique des plus complexes au Québec si elles cherchent à être protégées et indemnisées. Avec de nombreuses lois s'appliquant à leur situation, elles ne savent plus à quelle porte frapper et finissent par perdre des recours et des indemnités. Est-ce que... Est-ce qu'elles se tournent vers la loi des normes du travail? Est-ce que c'est la Loi sur les accidents de travail et des maladies professionnelles ou encore une autre des lois qui touchent le harcèlement ou les violences sexuelles? Comment s'y trouver? Donc, il faut agir sur les lésions professionnelles qui rendent possible une indemnisation sous la loi des accidents du travail et des maladies professionnelles. Et, si on ne frappe pas la bonne porte en premier, on perd... on peut perdre nos droits.

Tout d'abord, il est essentiel de renforcer les obligations des employeurs en matière de prévention du harcèlement. Le projet de loi n° 42 prévoit déjà la mise en place de politiques de prévention et de formation pour les employés mais doit aller plus loin. Il est nécessaire d'établir des normes claires et précises sur ce que les politiques doivent contenir et comment elles doivent être mises en oeuvre. Cela garantira une approche cohérente et efficace dans toutes les organisations.

Le comité a... Le comité des auteurs qui ont écrit le rapport qui a mené justement à l'établissement de ce projet de loi ont recommandé que le Comité consultatif du travail et de la main-d'oeuvre mette sur pied une formation obligatoire sur les violences à caractère sexuel pour l'ensemble des arbitres et tienne compte de la nécessité d'une telle formation lors du recrutement, comme cela se fait déjà lors du recrutement des juges de la Cour du Québec et de la Cour supérieure.

Lors des consultations, certains groupes ont soulevé une autre lacune majeure du projet de loi concernant les sanctions pour les auteurs de harcèlement. Le texte ne prévoit pas de sanctions suffisamment dissuasives pour décourager les comportements de harcèlement au travail. Il est essentiel d'avoir des sanctions claires et proportionnées pour s'assurer que les auteurs de harcèlement sont tenus responsables de leurs actes et que des mesures correctives appropriées sont prises.

De plus, il est crucial d'accorder une attention particulière à la sensibilisation et à l'éducation. Le harcèlement au travail est souvent le résultat de comportements discriminatoires et de stéréotypes préjudiciables. Il est donc important d'intégrer des modules de sensibilisation et de formation sur la diversité et l'inclusion dans les politiques de prévention du harcèlement. Cela permettra de promouvoir des environnements de travail respectueux et de prévenir des situations de harcèlement dès le départ.

Une autre façon de bonifier le projet de loi n° 42 est d'améliorer les mécanismes de signalement et de traitement des plaintes. Il est essentiel de garantir la confidentialité et la protection des témoins et des victimes qui dénoncent des situations de harcèlement, cela encouragera davantage de personnes à signaler ces comportements inacceptables et contribuera à une culture de tolérance zéro envers le harcèlement au travail.

Il est important de souligner que bonifier le projet de loi n° 42 ne se limite pas uniquement à des mesures législatives. La sensibilisation et l'éducation doivent également être renforcées dans la société dans son ensemble. Les médias, les entreprises, les organisations de la société civile et les établissements d'enseignement ont un rôle crucial à jouer dans la prévention du harcèlement au travail. Nous devons encourager des partenariats et des initiatives visant à sensibiliser le public et à promouvoir des relations de travail saines et respectueuses.

Le projet de loi n° 42 sur le harcèlement au travail est une avancée importante dans la protection des travailleurs contre le harcèlement. Cependant, il est essentiel de bonifier ce projet de loi en renforçant les obligations des employeurs, en améliorant la sensibilisation et l'éducation, en renforçant les mécanismes de signalement et de traitement des plaintes et en imposant des sanctions dissuasives aux contrevenants.

Ce projet de loi est une étape cruciale dans la protection des travailleurs contre le harcèlement, mais il est également important de réfléchir à la façon de le bonifier pour renforcer encore davantage ces mesures de prévention et de lutte contre le harcèlement au travail.

• (12 h 40) •

Le projet de loi vise à mettre en place des mesures concrètes pour prévenir et combattre le harcèlement au travail. Il renforce les obligations des employeurs en matière de prévention, et les employeurs seront tenus de mettre en place des politiques de prévention du harcèlement, de former leurs employés sur ces questions et d'établir des mécanismes de signalement et de traitement des plaintes.

De plus, le projet de loi n° 42 étend les protections juridiques offertes aux travailleurs victimes de harcèlement. Il prévoit des mécanismes plus efficaces pour dénoncer les situations de harcèlement, notamment en renforçant la confidentialité et la protection des témoins. Il prévoit également des sanctions plus sévères pour les employeurs qui ne respectent pas leurs obligations en matière de prévention et de lutte contre le harcèlement.

Lors des consultations, plusieurs groupes ont exprimé que le projet de loi ne va pas assez loin pour faciliter le parcours des victimes, qu'il y a une quasi-absence de mesures de soutien, d'accompagnement, de sensibilisation et d'aide pour le milieu de travail à cette prise en charge. Il devrait y avoir des formations obligatoires pour les employeurs et les intervenants responsables. Il faut que nous pensions aux effets et aux séquelles en matière de santé mentale que ressentent ces victimes, qui resteront avec eux pendant des années. Donc, il faut que cette sensibilité à leur réalité soit mise de l'avant.

Le projet de loi vient modifier certains articles, ce qui a pour conséquence d'augmenter l'indemnité de remplacement du revenu d'un étudiant. C'est une augmentation par rapport à la situation actuelle, mais cela demeure nettement insuffisant et discriminatoire. Les membres du comité, dont le rapport a... dont le rapport a été... dont le rapport a inspiré ce projet de loi, suggèrent que les personnes victimes de moins de 18 ans, qui reçoivent présentement le quart du montant minimal versé à une personne victime de la même violence mais qui a plus de 18 ans ou qui n'étudie pas à temps plein... le projet de loi n° 42 propose que ces travailleurs reçoivent une indemnité calculée en multipliant le salaire minimum par 17 heures, le nombre d'heures que ceux de 16 ans et moins sont permis de travailler sous la loi du ministre du Travail. Mais rappelons que ces jeunes personnes, des cégépiens ou parfois des élèves de secondaire, souffrent 24 heures sur sept, sept jours par semaine, d'une incapacité psychologique à la suite d'une violence à caractère sexuel dont elles ont pu subir. Et si elles sont incapables de travailler, souvent, elles sont également incapables d'étudier. Le plus jeune on est, en tant que victime, le plus gros le traumatisme peut être. Comme il n'y a pas d'obligation de fréquentation scolaire durant l'été, donc les jeunes peuvent travailler à temps plein, pourquoi alors est-ce que l'indemnisation du remplacement du revenu de ces jeunes victimes serait réduite comme si elles travaillaient seulement 12 heures par semaine?

De plus, le projet de loi n° 42 ne prévoit pas de mesure spécifique pour protéger les travailleurs vulnérables contre le harcèlement. Il est important de reconnaître que certains groupes de travailleurs, tels que les femmes, les personnes LGBTQ+ et les personnes handicapées, sont plus susceptibles d'être victimes de harcèlement au travail. Il est donc essentiel d'inclure des mesures spécifiques dans la loi pour protéger ces travailleurs vulnérables et garantir leur sécurité au travail.

Il est important de souligner que ce projet de loi ne peut pas à lui seul résoudre tous les problèmes liés au harcèlement au travail. La sensibilisation et l'éducation sont également essentielles pour changer les mentalités et promouvoir les relations de travail saines. Nous devons tous nous engager à lutter contre le harcèlement au travail en soutenant les victimes, en dénonçant les comportements inappropriés et en promouvant des cultures organisationnelles inclusives. Créer des environnements de travail sains, respectueux et équitables pour tous les travailleurs du Québec est le but. Tout le monde a le droit de travailler dans un environnement de travail sain. Et le mot d'ordre, c'est la prévention.

Le principe d'égalité entre les femmes et les hommes constitue un fondement de la société québécoise. Or, le harcèlement et les agressions sexuelles dans le cadre du travail heurtent de front ce principe. Il faut donner la confiance dans le recours en droit au travail aux personnes victimes de harcèlement sexuel et d'agressions à caractère sexuel. Nous soulignons l'ouverture du ministre du Travail pour vouloir bonifier ce projet de loi qui est important. Et, pour cette raison, entre autres, ma formation politique votera en faveur de l'adoption du principe et collaborera à son adoption de façon constructive. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de D'Arcy-McGee. Et je cède maintenant la parole à M. le député de...

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Ah! Est-ce que j'ai d'autres intervenants? Non?

Mise aux voix

Alors, le principe du projet de loi n° 42, Loi visant à prévenir et à combattre le harcèlement psychologique et la violence à caractère sexuel en milieu de travail, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci. M. le leader adjoint du gouvernement.

Renvoi à la Commission de l'économie et du travail

M. Lévesque (Chapleau) : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Et donc, conformément à l'article 243 de notre règlement, je vais faire motion afin que le projet de loi n° 42, la Loi visant à prévenir et à combattre le harcèlement psychologique et la violence à caractère sexuel en milieu de travail, soit déféré à la Commission de l'économie et du travail pour son étude détaillée et que le ministre du Travail soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Cette motion est-elle adoptée?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lévesque (Chapleau) : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Je vous demanderais de bien vouloir rappeler l'article 3 du feuilleton. Et je pense qu'il y aura sûrement un collègue que vous vouliez reconnaître qui pourra se lever à ce moment-ci.

Projet de loi n° 41

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, à l'article 3 du feuilleton, M. le ministre de l'Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs propose l'adoption du principe du projet de loi n° 41, Loi édictant la Loi sur la performance environnementale des bâtiments et modifiant diverses dispositions en matière de transition énergétique. Et je reconnais M. le député de Masson.

M. Mathieu Lemay

M. Lemay : Merci, M. le Président. Donc, effectivement, je vais intervenir sur le principe du projet de loi n° 41, la Loi édictant la Loi sur la performance environnementale des bâtiments et modifiant diverses dispositions en matière de transition énergétique.

M. le Président, d'abord, avant d'y aller avec des commentaires plus généraux, j'aimerais remercier les collègues qui ont participé aux auditions qui ont eu lieu la semaine dernière, justement, nos collègues de René-Lévesque, d'Argenteuil, Iberville, Châteauguay, Mégantic, ainsi que le ministre de l'Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs, ainsi que tous nos collègues des partis d'opposition qui ont fait partie de ces consultations. J'aimerais aussi remercier notre conseiller auprès du ministre, M. Simon Berthiaume, qui nous a accompagnés lors de ces consultations, ainsi que toute l'équipe du sous-ministre, M. Gibeault, pour le travail qui a été fait lors des auditions.

Alors, M. le Président, l'objectif ultime du projet de loi, bien, c'est d'améliorer la performance des bâtiments existants et neufs, et ça, dans le but de réduire leur consommation d'énergie et leurs émissions de gaz à effet de serre. Et là, dans le Plan pour une économie verte 2030, bien, le Québec s'est déjà engagé à réduire de moitié les émissions de gaz à effet de serre qui proviennent des bâtiments, au niveau du chauffage, d'ici 2030. Et puis pour le parc immobilier du gouvernement, bien, l'objectif, c'est une diminution de 60 % d'ici 2030 ainsi que d'avoir zéro émission d'ici 2040. En ce qui concerne l'objectif de 2050, ce seraient tous les bâtiments du Québec qui devront être carboneutres.

Et donc ça, M. le Président, ce qu'on doit comprendre, c'est que ce sont des objectifs qui sont ambitieux. On est capables de les réaliser dans un laps de temps relativement court, mais notre gouvernement, il est déterminé à prendre les moyens nécessaires pour y parvenir. Et donc plusieurs mesures seront nécessaires pour y parvenir, comme je le mentionnais, notamment avec le programme sur la valorisation des rejets thermiques, qui a été lancé en mars 2023, des programmes aussi qui visent à soutenir la conversion du gaz naturel vers la biénergie pour la gestion de la pointe, qui a été lancée en juin 2022, pour le volet résidentiel, dans le programme Chauffez vert, et en 2023, pour le volet commercial et institutionnel, dans le programme ÉcoPerformance.

Et justement, sur le programme Écoperformance, entre le 1er avril 2022 puis le 31 mars 2023, bien, c'est 186 projets d'implantation qui ont été financés, pour une réduction annuelle de gaz à effet de serre de plus de 12 400 tonnes équivalentes de CO2. Et c'est aussi une mesure qui vise à soutenir la conversion à l'électricité de systèmes de chauffage au mazout par l'installation d'accumulateurs thermiques pour la gestion de la pointe énergétique.

Finalement, M. le Président, on a aussi le Règlement sur les appareils de chauffage au mazout, qui interdit l'installation d'un appareil de chauffage au mazout dans les nouvelles constructions, et ce, depuis le 31 décembre 2021, ainsi que l'installation ou le remplacement d'un appareil de chauffage au mazout dans les constructions existantes, depuis le 31 décembre 2023.

Donc, M. le Président, on a profité du début des travaux pour annoncer aussi l'intention du gouvernement d'encadrer à court terme et de manière réglementaire l'utilisation du gaz naturel dans les bâtiments, et, croyez-moi, M. le Président, c'est un sujet qui nous a fait jaser énormément lors des auditions.

• (12 h 50) •

Alors, ce qu'on retrouve dans le projet de loi, bien, je vais en rappeler brièvement les grandes lignes, là. Actuellement, le gouvernement, bien, il est limité dans son pouvoir d'action réglementaire puisque la responsabilité de mettre à jour et d'appliquer le Code de construction du Québec, y compris les parties relatives à l'efficacité énergétique des bâtiments, bien, elle revient à la Régie des bâtiments du Québec. Et là la loi qui encadre la mission de la RBQ, bien, c'est d'assurer la qualité puis la sécurité des bâtiments, mais ça ne permet pas d'inclure les critères environnementaux dans le code, sauf si ces critères-là sont liés à la sécurité et à la qualité des constructions.

Et là, dans ce projet de loi là, ce qu'on souhaite, c'est de remédier à cette situation-là en accordant au ministre la responsabilité de la transition climatique énergétique, les pouvoirs d'encadrer la performance environnementale des bâtiments, en fixant des normes minimales à atteindre en la matière. Puis ça, c'est une nouveauté, là. Pour une première fois, là, donc, des critères environnementaux vont être pris en considération dans l'élaboration des normes qui visent les travaux de construction. C'est ça, l'élément qui est de nouveauté, qui est instauré par le projet de loi. Donc, pour avoir des exemples, il pourrait s'agir des critères d'efficacité énergétique, d'empreinte carbone, de réduction de la demande électrique de pointe et d'installation d'infrastructures de mobilité durable.

Et là je veux vous rassurer, parce que le code qui viendra s'intégrer au Code de construction sera d'abord volontaire. Ça va permettre à l'industrie de se familiariser avec son contenu. C'est un peu à l'image de ce qui a été fait avec la norme volontaire Novoclimat. Je ne sais pas si vous la connaissez, mais la première itération est devenue une norme après quelques années d'implantation volontaire.

Également, ce qu'on retrouve dans le projet de loi, c'est des pouvoirs habilitants pour l'instauration d'un système de déclaration de cotation de performance des bâtiments, puis ça, un tel système, ça va venir rendre l'information... ça vise à rendre l'information qui concerne la performance énergétique des bâtiments plus accessible, tout en offrant aux propriétaires et aux locataires de ces bâtiments la possibilité de réaliser des économies considérables, puisque leurs bâtiments devront être éventuellement plus écoénergétiques. Mais ce qu'il est important de préciser, c'est que le gouvernement procédera par étapes.

D'abord, on va viser les plus gros bâtiments. C'est là qu'il y a un plus grand... un nombre restreint d'interventions qui va nous permettre d'aller chercher les plus grands gains. Ça, c'est la théorie du 80-20. Donc, on vise les plus grands bâtiments pour les plus grands gains. On fait ça pour débuter.

Il va y avoir, bien entendu, d'autres modifications législatives qui sont aussi proposées pour refléter les nouvelles fonctions et les responsabilités du ministre de l'Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs en matière de transition, innovation et efficacité énergétique. Concrètement, ce changement-là vient faciliter le rôle de coordination de l'action gouvernementale en matière de transition énergétique dans le cadre de la lutte contre les changements climatiques.

Et, d'ailleurs, dans le plan de mise en oeuvre pour le Plan pour une économie verte 2030 ainsi que le Plan directeur en transition, innovation et efficacité énergétiques, bien, avec le projet de loi, on va venir les fusionner, ces deux plans-là. On va faire un seul et unique plan, et là... ainsi que tous les fonds qui les alimentent. Donc, ça va devenir un tout sous la responsabilité du ministre de l'Environnement.

Une autre spécialité du projet de loi, c'est qu'on va venir veiller à une plus grande cohérence entre ces deux domaines d'action d'autant plus importants dans le contexte énergétique actuel du Québec, on le sait, avec tout ce qui s'en vient, ce qui est caractérisé par la fin des surplus de production d'hydroélectricité et le besoin croissant d'électricité propre pour décarboner l'économie. Donc, on croit que cette cohérence-là va nous permettre d'atteindre les objectifs visés.

Finalement, c'est un sujet qui est un petit peu plus... qui a été très peu discuté, M. le Président, durant les auditions, mais le ministre de l'Environnement deviendra responsable de la Loi sur les normes d'efficacité énergétique et d'économie d'énergie de certains produits, donc, ça, bien entendu, si le projet de loi est adopté.

Alors, en somme, le projet de loi, lui, ce qu'il vient faire concrètement, c'est qu'il vient édicter une nouvelle loi. Il vient modifier huit lois existantes et il modifie un règlement. Vous trouvez toutes les informations, là, au début du projet de loi. Je vous en ferai abstraction, de la lecture des différents lois et règlements qui sont traités par le projet de loi.

Maintenant, M. le Président, j'aimerais vous parler un peu, là, des remarques qui ont été entendues lors des auditions. Vous devez savoir que c'est quand même 27 mémoires qui ont été acheminés à la commission, puis les auditions, elles ont permis d'entendre 19 groupes au total, répartis sur quelques jours la semaine dernière. De manière générale, ce qu'on constate, c'est qu'il y a une réception positive du projet de loi. Tous les intervenants, ils conviennent qu'il faut agir. Sur la très grande majorité, ils voient aussi d'un bon oeil un système de déclaration, de cotation et de performance des bâtiments. Et, si je peux faire un résumé des principales critiques qui a eu lieu des divers... des 19 groupes qu'on a entendus, je pourrais le regrouper en trois groupes distincts. C'est des critiques, des suggestions d'améliorations constructives, M. le Président.

Donc, premièrement, l'industrie de la construction, elle a soulevé des craintes qu'on alourdisse ou complexifie la réglementation sur le bâtiment et la matière dont celle-ci évolue. Le niveau municipal, eux, et les groupes environnementaux, ils ont aussi demandé de conserver une autonomie d'action municipale, notamment pour interdire l'utilisation du gaz naturel. Et, troisièmement, l'autre type de critique qu'on a vu, c'est des groupes environnementaux qui ont demandé au gouvernement d'aller plus loin à la décarbonation.

Puis là je prendrai les prochaines minutes, là... puis je vois qu'il y a le temps qui file, inquiétez-vous pas, je serai dans les temps, M. le Président, mais dites-vous que la critique numéro un, c'était avec l'industrie de la construction. Ils ne voyaient pas de différence dans le fonctionnement, ils voudraient qu'on... Dans le fond, ce qu'on va faire, c'est qu'on va intégrer des chapitres environnementaux au code de la construction. Ça va faciliter la vie aux entrepreneurs pour s'y retrouver. Donc, le projet de loi va permettre au ministre de désigner un organisme pour suivre l'application du code, et selon toute vraisemblance, M. le Président, l'organisme qui sera choisi sera la Régie du bâtiment. Donc, il n'y a pas de grande surprise de ce côté-là.

Je veux vous faire un fait saillant d'Hydro-Québec, qui a mentionné... Hydro-Québec est venue dire : «Nous saluons [...] les nouveaux pouvoirs que prévoit le projet de loi pour permettre au ministre d'adopter des normes encadrant la performance environnementale des bâtiments. Ce partage de pouvoirs entre la RBQ et le ministre est une excellente nouvelle, car il favorisera une plus grande intégration des facteurs énergétiques dans les normes de construction.»

Alors, pour les membres de l'industrie de la construction, ils ont fait parvenir une lettre. Ils estiment que le p.l., il allait « dansle sens contraire d'un code unique au Canada. Or, le Québec, avec son profil énergétique dans le bâtiment, il est très différent de celui du Canada. Il est désharmonisé à un très fort taux». Donc, la lettre justement, je vais faire un passage de leur conclusion, ils viennent dire : «Nous sommes convaincus que des cibles de performance environnementale peuvent être édictées par votre ministère, mais que celles-ci peuvent être appliquées par la RBQ.» Donc, on se rejoint, M. le Président. C'est ce qui devrait arriver si le projet de loi est adopté.

La critique numéro deux, on a bien entendu les récriminations des villes qui viennent dire que, sur les articles 29 et 30, ils ne veulent pas qu'on limite l'action municipale dans leur domaine de compétence, encore moins d'avoir des centaines de réglementations municipales sur le bureau du ministre à autoriser. Il y a un petit bémol là-dessus, je veux juste vous le mentionner, c'est qu'au niveau de la sécurité énergétique du Québec, bien, ça semble une base que l'autorisation du gouvernement, c'est la base. Donc, on va encadrer, bien entendu, au niveau municipal. Si une municipalité voudrait aller plus loin, elle devra obtenir l'approbation du gouvernement. Et, bon, je pourrais vous dire d'autre chose sur les municipalités, mais, grosso modo, c'est un peu le point qui était regroupé de ce côté-là.

La troisième critique, au niveau de la décarbonation, bien oui, on va aller aussi loin qu'on aura de l'électricité, ça, je veux vous le mentionner. Les transitions énergétiques et climatiques sont plus que jamais liées. Et j'aimerais préciser que le projet de loi couvre tous les bâtiments. On va y aller graduellement pour se donner toutes les chances de succès, je l'ai mentionné au début de mon intervention.

Donc, en conclusion, M. le Président, pourquoi que le projet de loi est si important, c'est parce que — des statistiques, là — le bâtiment représente deux tiers de la consommation énergétique au Québec. Selon Hydro-Québec aussi, 85 % de nos bâtiments actuels n'ont pas des équipements efficaces. Donc, ça adonne bien, parce qu'au coeur du projet de loi, c'est l'efficacité énergétique des bâtiments. Donc, il y aura plus d'une Romaine à aller chercher avec ce projet de loi là, si vous voulez avoir une image, M. le Président. Donc, on doit avoir une vue d'ensemble, une prévisibilité, un objectif concret à moyen et long terme si on veut atteindre une cible.

M. le Président, avec ces beaux discours, je serai prêt à entamer la prochaine étape d'échange avec les formations politiques lors de l'étude détaillée, article par article. Je suis persuadé qu'on va réussir à rendre le projet de loi meilleur, et c'est ça, la beauté de notre travail de législateurs. Merci de votre écoute.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député de Masson.

Alors, compte tenu de l'heure et afin de permettre le débat sur l'affaire inscrite par les députés de l'opposition cet après-midi, le présent débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 41 est ajourné.

Les travaux sont suspendus jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 heures)

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Bon après-midi, Mmes et MM. les députés. Je vous invite, s'il vous plaît, à bien vouloir vous asseoir.

Affaires inscrites par les députés de l'opposition

Motion proposant que l'Assemblée demande au gouvernement de
rendre obligatoire la divulgation des promesses d'achat
simultanées sur une même propriété

Alors, nous en sommes à la rubrique Affaires inscrites par les députés de l'opposition. Et, à l'article 49 du feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, M. le député de Laurier-Dorion présente la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse que le Québec traverse une grave crise du logement;

«Qu'elle reconnaisse que la hausse importante des prix de l'immobilier constitue un frein à l'accès à la propriété pour les jeunes familles du Québec;

«Qu'elle reconnaisse que le phénomène des surenchères à l'aveugle peut contribuer à la hausse des prix des maisons;

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement de mettre fin aux enchères immobilières à l'aveugle en rendant obligatoire la divulgation des promesses d'achat simultanées sur une même propriété.»

Je vous informe que la répartition du temps de parole pour le débat restreint sur la motion inscrite par M. le député de Laurier-Dorion s'effectuera comme suit : 10 minutes sont réservées à l'auteur de la motion pour sa réplique, 49 min 15 s sont allouées au groupe parlementaire formant le gouvernement, 24 min 39 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 28 min 36 s sont allouées au deuxième groupe d'opposition, six minutes sont allouées au troisième groupe d'opposition, 1 min 30 s sont allouées à la députée indépendante. Dans le cadre de ce débat, le temps non utilisé par la députée indépendante ou par l'un des groupes parlementaires sera redistribué entre les groupes parlementaires selon les proportions établies précédemment. Mis à part ces consignes, les interventions ne sont soumises à aucune limite de temps. Enfin, je rappelle que la députée indépendante, si elle souhaite intervenir au cours de ce débat, elle a 10 minutes à partir de maintenant pour en aviser la présidence.

Alors, je cède donc la parole à M. le député de Laurier-Dorion.

M. Andrés Fontecilla

M. Fontecilla : Merci beaucoup, M. le Président. Écoutez, les chiffres ne mentent pas. Après presque six ans du gouvernement caquiste, la crise du logement est pire que jamais. Le bilan de ce gouvernement en habitation est simple : incompétence, déconnexion, inaction. Les taux d'inoccupation dans le secteur locatif sont proches de zéro, les prix des loyers et des maisons ont explosé et les mises en chantier sont en chute libre, 40 % de moins cette année que... de mises en chantier que les années passées.

Après avoir aboli la cession de bail, ce gouvernement a refusé de protéger les locataires aînés des évictions. Par son refus de colmater les brèches dans le marché locatif, la CAQ contribue à gonfler la bulle spéculative et à aggraver la crise de l'habitation. Cette bulle spéculative est présente autant dans le secteur locatif que dans le secteur de la propriété privée.

La crise du logement, c'est donc aussi une crise d'accès à la propriété. En ce moment, il y a des milliers de jeunes ménages québécois qui ne parviennent pas à ramasser les sous nécessaires pour accéder à la propriété. Et, si jamais ils réussissent à le faire, ils vont atteindre des taux d'endettement jamais, jamais atteints. D'ailleurs, la SCHL, dans son rapport sur l'année 2023, note que les hausses marquées des taux d'intérêt et les niveaux élevés des prix des propriétés ont sans doute continué de freiner l'accession à la propriété chez les jeunes. Plusieurs acheteurs potentiels restent locataires plus longtemps qu'ils ne l'auraient voulu, ce qui fait gonfler la demande sur le marché locatif.

La croissance de l'emploi et de la population chez les 15‑24 ans au Canada est un autre facteur de la pression sur l'offre, car les jeunes ménages ont une tendance supérieure à la moyenne à être locataires.

Le vieillissement de la population contribue aussi à la croissance de la demande dans le secteur de l'habitation. Chaque année, des ménages vieillissants font la transition vers le marché locatif. Bien que limité, ce phénomène reste préoccupant, étant donné le poids démographique grandissant des aînés au Québec. Si les jeunes avaient eu un meilleur accès à la propriété, ils auraient libéré des logements, généralement parmi les moins chers qui restent.

Notre proposition, aujourd'hui, vise donc à limiter la surenchère dans les offres d'achat des maisons dans le but de permettre aux jeunes générations de pouvoir accéder, un jour, à la propriété. Le rôle du gouvernement, c'est d'agir pour qu'on arrête de mettre du combustible dans le feu de la spéculation immobilière, et la surenchère des offres d'achat à l'aveugle est un facteur qui contribue à cette spéculation.

En ce moment, on le sait tous et toutes, tout coûte plus cher au Québec. Les gens hésitent avant d'acheter un lave-vaisselle, mais ils sont forcés d'ajouter des dizaines de milliers de dollars à leur offre d'achat, et tout ça dans le seul espoir de peut-être remporter la mise sur une propriété. En 2021, la surenchère moyenne pour une maison était de 10 %, mais certains ont payé jusqu'à 20 % de plus. C'est très angoissant pour les gens, sans compter les impacts financiers à long terme pour les ménages déjà affaiblis par la hausse du coût de la vie.

La valeur moyenne, dans la région de Montréal, a bondi de 55 % en deux ans. Le marché de l'immobilier roule trop vite au Québec. Comme pour les logements, il y a plus de gens qui cherchent des maisons que des maisons disponibles à vendre, ce qui amène une compétition féroce entre gens qui veulent accéder à la propriété. Littéralement, certains acheteurs parlent de guerre, et, malheureusement, certains courtiers en profitent.

Des gens nous écrivent avec leurs histoires de surenchère, et c'est très troublant, M. le Président. Andrea nous dit, et je cite une des missives qu'elle nous a envoyées : «Deux maisons nous ont glissé entre les mains pour des enchères... des surenchères exagérées. On nous avait même conseillé de mettre 60 000 $ de plus que le prix demandé, mais un autre avait mis plus. Je crois que les gens devraient avoir accès aux montants des autres offres également au lieu de jeter de l'argent à l'aveugle pour espérer avoir la maison.»

Mathieu nous a dit : «On a visité environ 70 maisons et on avait 15 minutes pour visiter, faire une offre le soir même. Les maisons avaient entre 10 et 30 offres actives chacune. On a fait des offres sur 11 maisons et on a dû mettre entre 10 000 $ et 40 000 $ en surenchère.» Une autre dame nous a dit : «C'est stressant, je m'en vais visiter une maison. Il y a combien d'offres? Contre qui je me bats? Est-ce que je vais la perdre? Est-ce que je vais la perdre pour 50 000 $ ou pour 2 000 $?» Kelly-Ann nous informe : «En 2022, pour un condo trois chambres, on a offert 95 000 $ de plus que le prix demandé et nous ne l'avons même pas eu.»

Évidemment, le fait que les courtiers immobiliers profitent directement des offres à l'aveugle a pu amener certains abus. Même si la grande majorité des agents, des courtiers respectent les règles, beaucoup de témoignages et d'enquêtes ont démontré que certains ne se gênent pas : offres bidons, chiffres exagérés pour amener un ménage à allonger quelques dizaines de milliers de dollars de plus, etc.

Steve, maintenant, qui nous dit : «Les agents d'immeuble ont beaucoup trop de pouvoir dans ce système. C'est comme s'ils jouaient au poker en voyant les cartes de tout le monde.»

Cela dit, les courtiers sont tenus, dans l'état actuel des lois et des règlements au Québec, de ne pas dévoiler les offres. C'est donc à l'État d'intervenir si on veut changer les choses. Ce qu'on propose, ce n'est pas unique au monde, ce n'est pas particulièrement révolutionnaire et radical. En Ontario, en avril 2023, les vendeurs de maisons auront l'option de divulguer ou de tenir secrètes les offres d'acheteurs potentiels. Au printemps 2023, le gouvernement fédéral a annoncé qu'il prévoyait créer, avec la collaboration des provinces et territoires, une charte des droits des acheteurs et un plan national pour mettre fin aux offres à l'aveugle. Cette charte pourrait aussi comprendre l'assurance d'un droit légal à une inspection de la propriété avant l'achat et un accès à l'historique des prix de vente dans la recherche de titres.

L'article 96 du Règlement sur les conditions d'exercice d'une opération de courtage, sur la déontologie des courtiers sur la publicité du Québec nous dit, je cite : «Le courtier ou le dirigeant d'agence doit, lorsqu'un autre titulaire d'un permis collabore à la réalisation d'une transaction, lui révéler l'existence de toute proposition de transaction, qu'elle soit acceptée ou non; il ne peut cependant lui en dévoiler le contenu.» Ce serait tout simple, M. le Président, là, de changer un règlement, qui n'a même pas besoin d'un amendement, ici, au salon bleu, à l'Assemblée nationale. C'est un règlement. Il faudrait biffer la phrase : «...il ne peut cependant lui [...] dévoiler le contenu.»

• (15 h 10) •

Donc, M. le Président, là, voilà la situation. Nous vivons une crise du logement qui se voit, de façon manifeste, par l'augmentation des prix non seulement dans le secteur locatif, mais par l'augmentation des prix dans le secteur des résidences privées. Il y a une surenchère pour accéder à la propriété. Donc, c'est très simple, elle laisse... Beaucoup de courtiers incitent les éventuels acheteurs à... en leur disant : Il y a d'autres offres d'achat, on vous invite à mettre beaucoup plus d'argent pour avoir une chance d'avoir accès à cette propriété. On nous a même dit qu'en moyenne, dans le milieu... on dit qu'il faut augmenter de 10 000 $ chaque fois qu'il y a une offre d'emploi pour une propriété. Donc, si vous avez quatre offres dans... quatre... pardon, offres d'emploi... offres pour une maison... Si vous avez quatre offres pour une maison, il faut augmenter de 40 000 $, ainsi de suite. Si vous en avez 10, bien, c'est 100 000 $ pour avoir peut-être une chance. C'est une légende urbaine, c'est un calcul qui est sorti de la poche arrière, on ne le sait pas, mais c'est ce qui court dans le secteur d'achat des maisons. On doit mettre fin à cette opération immobilière, qui est, finalement, de la pure spéculation. On doit, oui... un vendeur de maison doit et peut s'attendre, de façon légitime, à obtenir un bon prix pour sa propriété, mais on doit... ce n'est pas l'intérêt individuel qui fait l'intérêt de la collectivité et de la société. On doit limiter les offres d'achat à l'aveugle afin que les acheteurs puissent faire des offres raisonnables sur une propriété. Et cela va avoir comme effet concret de ralentir tant soit peu la spéculation immobilière dans le secteur résidentiel. Et c'est un devoir de n'importe quel État de ne pas alimenter la spéculation immobilière au Québec, que ce soit dans le secteur locatif ou que ce soit dans le secteur de l'accès à la résidence privée. Ça va aider beaucoup de gens et beaucoup de jeunes ménages à avoir accès à une première propriété. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, M. le député de Laurier-Dorion. Je reconnais maintenant Mme la ministre responsable de l'Habitation.

Mme France-Élaine Duranceau

Mme Duranceau : Oui. Bon, merci, M. le Président. Alors, d'abord, je veux saluer les députés qui sont présents aujourd'hui. Merci aux députés des banquettes gouvernementales qui m'accompagnent aujourd'hui et qui prendront la parole, soit la députée de Labelle, la députée de Jonquière, la députée de Rivière-du-Loup et les députés de l'opposition.

M. le Président, j'ai passé beaucoup de temps en cette Chambre, cette semaine, à discuter de logement avec mes collègues des oppositions. C'est bien, parce que c'est un sujet important. La crise du logement est probablement un des éléments qui préoccupent le plus les Québécois dans leur quotidien en ce moment, et ils ont bien raison. Il y a de sérieux défis en habitation en ce moment. On doit composer avec énormément de facteurs qui rendent la situation difficile et complexe.

D'abord, il y a une rareté sur le marché du logement. Inévitablement, ça tire les prix vers le haut. C'est pourquoi on a agi beaucoup en termes d'aide à la personne dans les dernières années, parce que, malheureusement, trop de Québécois ont du mal à payer leur loyer. Ce n'est pas acceptable. C'est pourquoi on a notamment bonifié de manière significative le programme d'allocation au loyer ainsi que le Programme de supplément au loyer. On vient donner une aide additionnelle aux ménages les plus vulnérables pour qu'ils aient plus de facilité à payer leur loyer. Ça fait une grosse différence sur le terrain.

On fait aussi face à une pénurie importante de main-d'oeuvre, qui ralentit la construction de logements. Ça, c'est un problème majeur, parce qu'à mes yeux l'élément le plus stratégique pour régler la crise, c'est d'augmenter l'offre. Heureusement, je peux compter sur mes collègues ministre de l'Emploi et ministre du Travail, qui mettent sur pied des mesures importantes pour contrer la pénurie de travailleurs dans la construction. Je vais laisser mes collègues députés détailler ces mesures, mais on a l'Opération main-d'oeuvre et le projet de loi sur la réforme de la construction qui, j'en suis certaine, vont faire une grosse différence.

Tout ça pour dire que la crise du logement, ce n'est pas simple, et on doit tout mettre sur la table pour la résorber. C'est un travail de longue haleine.

La situation touche beaucoup de monde : les locataires, les petits propriétaires, les gens qui essaient d'acheter une première propriété, et j'en passe, ça cause beaucoup de stress à plusieurs Québécois, et c'est pourquoi on ne ménage pas nos efforts pour redresser la situation. On est, d'ailleurs, à quelques heures de discuter de l'adoption finale du projet de loi n° 31, qui propose une foule de mesures fortes et innovantes pour lutter contre la crise du logement. Je vous donne rapidement les principales : mieux protéger les locataires et faire connaître leurs droits, contrer les hausses de loyer abusives grâce à plus de transparence, rendre plus flexible la cession de bail, optimiser l'intervention du Tribunal administratif du logement et offrir une meilleure accessibilité à la justice, renforcer l'accès au logement étudiant, augmenter et préserver l'offre de logement social et abordable en assurant une meilleure gestion du parc de logements, accélérer la réalisation de projets d'habitation en donnant des pouvoirs temporaires spéciaux aux municipalités, donner à la Société d'habitation du Québec de nouveaux outils pour financer du logement et moduler certaines règles concernant la copropriété divise.

Ma motivation première, lors du dépôt du projet de loi, c'était de contribuer à rétablir l'équilibre entre les locateurs et les locataires, notamment pour contrer les évictions abusives. Je suis fière de cette pièce législative, qui contient des mesures efficaces pour protéger les locataires ainsi que pour inciter les locateurs à participer à la construction ainsi qu'à la préservation des logements.

Il confère aussi de nouveaux pouvoirs aux municipalités pour augmenter l'offre de logements. Je vais en parler en détail plus tard. Maintenant, ma responsabilité, en tant que ministre, c'est de faire connaître ces nouvelles mesures. Je vais travailler en collaboration avec les partenaires concernés dans les prochains mois.

Ce projet de loi va prendre son plein impact seulement si tous les acteurs comprennent bien leurs droits, leurs obligations et les nouveaux outils qui sont à leur disposition. M. le Président, j'ai très hâte à l'adoption finale et j'espère qu'on aura le soutien des oppositions pour ce projet de loi.

Maintenant, je vais prendre le temps de répondre directement à la question de mon collègue sur l'accès à la propriété. C'est vrai que c'est un gros enjeu, mais j'aimerais aussi prendre l'occasion qui m'est offerte aujourd'hui pour parler de ma vision globale en habitation, parce que, malheureusement, je crois que c'est ce qu'il manque au deuxième groupe d'opposition, une vision d'ensemble. Leurs idées ne sont pas nécessairement mauvaises, mais toutes les solutions qu'ils proposent ont une portée très limitée et un impact faible sur la crise.

On doit avoir une vision globale en habitation. C'est un problème complexe qui mérite des solutions à la hauteur de son importance. On doit être créatif dans notre manière d'utiliser les leviers financiers à notre disposition. Vous savez, la crise du logement, c'est un problème d'abord humain, on assiste à des drames, de la vraie détresse, et on doit agir pour ne pas que des ménages soient placés dans de telles situations. Mais la solution à la crise, elle passe par la bonne utilisation des leviers à notre disposition, notamment des leviers financiers, j'aurai l'occasion d'y revenir, mais on ne peut pas continuer à faire les mêmes choses que l'on a toujours faites en habitation, on doit penser en dehors de la boîte, innover. Et c'est ce que j'ai l'intention de faire et c'est ce que j'ai déjà commencé à faire. Contrairement au deuxième groupe d'opposition, qui fait les mêmes propositions depuis leur arrivée à l'Assemblée nationale, on a besoin de nouvelles idées.

Alors, M. le Président, revenons à la question qui nous occupe aujourd'hui, l'accès à la propriété. Mon collègue a raison de dire que l'accès à la propriété, surtout pour les premiers acheteurs, c'est un grand défi, plus que pour les générations précédentes, d'ailleurs. Les enjeux sont multiples et, pour acheter une maison, les Québécois doivent d'abord avoir accès à une mise de fonds. C'est une étape incontournable dans le processus. Pour aider les Québécois à atteindre cet objectif, notre gouvernement crée des emplois payants et remet de l'argent dans la poche des Québécois. On veut bâtir une société plus prospère. Et jamais aucun gouvernement n'a autant redonné aux Québécois grâce à notre bouclier anti-inflation.

Et on a aussi mis plusieurs outils fiscaux et financiers à la disposition des citoyens. Le régime d'accession à la propriété permet à quelqu'un de retirer jusqu'à 35 000 $, et un couple, jusqu'à 70 000 $ de son REER pour financer l'achat d'une première propriété, sans compter les modalités du CELIAPP, ça peut faire une différence importante. Le crédit d'impôt pour l'achat d'une première maison permet à des dizaines de milliers de premiers acheteurs de recevoir 1 500 $. On a, d'ailleurs, doublé ce crédit, qui était de 750 $ en 2022.

M. le Président, en ce qui concerne spécifiquement la question des surenchères à l'aveugle, je résume la position du député de Laurier-Dorion. Sa formation politique propose que l'on abolisse cette pratique. Ils soutiennent que cela cesserait la surenchère et donc faciliterait instantanément l'accession à la propriété. M. le Président, je comprends le raisonnement du collègue, cependant, je crois qu'il comporte des failles, et permettez-moi de vous expliquer pourquoi.

• (15 h 20) •

Dans un premier temps, c'est important de souligner qu'en 2022 notre gouvernement a procédé à des changements importants à la Loi sur le courtage immobilier afin de mieux protéger les consommateurs, notamment afin de prévoir qu'un détenteur de permis de courtier immobilier ne puisse représenter plus d'une partie à une transaction portant sur un immeuble résidentiel. Le règlement a ensuite été modifié pour prévoir des exceptions au courtage immobilier résidentiel décrit précédemment lorsqu'un courtier immobilier est dans une région éloignée et qu'il a obtenu le consentement écrit des deux parties. Les parties sont représentées par des courtiers différents d'une même agence. Alors, il y aura exception dans ces cas-là.

Depuis cette réforme, les obligations des courtiers envers leurs clients sont très claires et bien balisées par l'OACIQ, aussi bien... très bien surveillées. Tout est mis en place pour que l'acheteur ait toutes les informations essentielles en main pour prendre des décisions éclairées concernant la transaction en cours. Et les courtiers doivent agir de manière équitable avec toutes les parties. Ce n'est pas parfait, on ne se contera pas d'histoires, M. le Président, mais c'est un système qui est très bien encadré. Finalement, d'ici mai 2025, un rapport sur les activités de l'OACIQ devra être déposé, lequel pourra être accompagné d'une consultation, au besoin. Donc, on est venus mieux réguler ce domaine qui est souvent complexe.

J'en reviens, donc, à la proposition de Québec solidaire, qui propose de rendre obligatoire la divulgation des promesses d'achat simultanées sur une même propriété. Pour eux, les surenchères à l'aveugle tirent le profit des maisons vers le haut et contribuent à rendre l'achat d'une première maison encore plus difficile. D'abord, une chose est claire pour notre gouvernement, la protection des consommateurs québécois demeure au coeur de nos priorités. Nous encourageons d'ailleurs toutes les personnes se sentant lésées par certaines pratiques dans le domaine immobilier à porter plainte à l'OACIQ.

L'analyse des différents mécanismes d'enchères et leur contribution à la surchauffe du marché immobilier a été examiné lors de nos modifications à la Loi sur le courtage immobilier en 2022. Nous en sommes arrivés à la conclusion qu'une telle mesure pourrait avoir un impact économique négatif pour plusieurs ménages et que l'élément principal qui détermine le prix de vente d'une maison, c'est le budget de l'acheteur. Mon collègue le député de Jonquière pourra vous l'expliquer plus en détail, mais on a de bonnes raisons de croire que de rendre les offres transparentes pourrait inciter certains acheteurs à dépasser leur budget maximal, suite à un effet d'entraînement, et ça pourrait mettre de la pression sur certains acheteurs et précipiter des transactions ou encore les pousser à renoncer à certaines protections, comme la garantie légale ou encore l'inspection préachat. La mise en place d'une telle disposition pourrait aussi être un vrai défi lorsque la transaction n'est pas faite par un courtier immobilier, notamment pour les gens qui passent par DuProprio. Par ailleurs, les études sur le sujet présentent des résultats mitigés.

Comme gouvernement, il importe de s'assurer que nos changements soient pertinents, surtout lorsque la mesure vise... la mesure visée entraîne des conséquences très néfastes sur différents citoyens. Donc, malheureusement, on n'accédera pas à la demande de la deuxième opposition. Mais, attention, ça ne veut pas dire qu'on baisse les bras en matière de logement, bien au contraire. On a des annonces qui s'en viennent sur de nouvelles manières d'accéder à la propriété pour des gens qui sont déjà locataires. On innove.

M. le Président, je suis motivée plus que jamais, et ma vision est très claire. Et j'en profite pour vous dire que les prochaines semaines seront un terreau très fertile en matière d'annonces en logement. Restez à l'affût. Sur le plan du logement, mon objectif principal, c'est d'augmenter l'offre, je l'ai dit à multiples reprises, et, d'ailleurs, peut-être que vous êtes tannés de m'entendre, mais je pense que c'est la solution. Invariablement, si plus de logements sont disponibles sur le marché, ça va faciliter l'accès à la propriété, il y aura un effet domino qui va se faire sentir sur le marché. Et ça n'inclut pas seulement les logements locatifs. Si la construction reprend, puis on augmente l'offre, ça va affecter la disponibilité des propriétés, des condos, des maisons unifamiliales, c'est mathématique, M. le Président.

Alors, on redouble, donc, d'efforts pour augmenter l'offre de logements et mieux utiliser les outils à notre disposition. Et, je le répète, M. le Président, tous les partenaires doivent mettre l'épaule à la roue. On veut mobiliser les organismes à but non lucratif, les offices d'habitation, les municipalités, les MRC, les promoteurs privés, et j'en passe.

M. le Président, laissez-moi vous expliquer comment je vois les choses. D'abord, l'augmentation de l'offre doit, entre autres, passer par les villes qui partagent notre désir d'alléger les processus pour qu'un maximum de projets immobiliers sorte de terre le plus vite possible. Elles ont des leviers à leur disposition pour augmenter la construction résidentielle, notamment avec le projet de loi n° 31 et notre nouvelle Loi sur la fiscalité municipale, qui était le projet de loi n° 39. On s'attend à ce qu'elles les utilisent à leur plein potentiel, et je vais m'assurer que les outils soient bien compris par les municipalités en allant rencontrer plusieurs d'entre elles, d'ailleurs.

Du côté des OBNL et des offices d'habitation, on collabore surtout avec eux dans le contexte de nos programmes de logement social et abordable, notamment le Programme d'habitation abordable Québec. C'est une relation de concertation très productive, surtout avec l'accompagnement que donne... que leur donne la SHQ. On les invite... on les incite et on les invite aussi à faire preuve de rigueur dans la gestion de leurs projets. Et ça porte fruit, le message passe. Et, en contrepartie, on est à l'écoute de leurs besoins. À titre d'exemple, on a ajouté un prêt de démarrage dans le Programme d'habitation abordable Québec pour couvrir les coûts en début de projet. Les organismes nous disent que c'est vraiment apprécié, et que tout le monde y gagne, et que ça accélère le démarrage des projets.

Vous savez, le Programme d'habitation abordable Québec, dans ce programme-là, les projets ont entre 12 et 18 mois pour sortir de terre, donc, pour que le contrat avec l'entrepreneur soit signé. Et l'objectif, c'est que ça sorte de terre à l'intérieur de trois ans. Alors, bien sûr, le programme est tout jeune, les... L'entièreté des projets n'est pas encore sortie de terre, mais tout est très suivi méticuleusement.

Alors, en étant à l'écoute des organismes, en ajoutant un prêt de démarrage, on améliore l'efficacité du programme par l'entremise, justement, de la collaboration et d'un suivi en continu. On a déjà des projets du PHAQ qui sont en chantier, et plusieurs nouveaux chantiers vont s'ajouter dans les prochains mois, dès que le printemps arrivera, M. le Président.

On a un important parc de logement social et abordable qui répond aux besoins de plusieurs Québécois et Québécoises, que l'on travaille, d'ailleurs, aussi à entretenir, mais on doit construire plus et plus rapidement. Il y a, d'ailleurs, des mesures dans notre projet de loi n° 31 pour encourager des propriétaires et des locataires à détenir et entretenir des logements.

On va construire plus de logements sociaux et abordables, M. le Président. Vous savez qu'on a annoncé 8 000 unités qui... lors de la mise à jour économique, grâce à une entente, d'ailleurs, avec le fédéral, mais on ne fera pas que du logement social et abordable traditionnel avec nos partenaires habituels. À preuve, on met de l'avant un nouveau modèle avec nos partenariats, avec Desjardins, FTQ et Fondaction, qui vont nous permettre de développer 3 000 unités additionnelles.

Je l'ai répété souvent, M. le Président, tout le monde doit faire sa part dans le domaine du logement, y compris le privé. Il dispose de moyens financiers et d'une expertise considérable dont on n'a pas les moyens de se priver actuellement. Ce serait une opportunité manquée de ne pas les mettre à profit, en complément, bien sûr, avec ce que peuvent nous offrir les offices d'habitation et les organismes à but non lucratif.

On veut développer de nouvelles approches avec de nouveaux partenaires et on a plusieurs projets dans le collimateur, M. le Président. L'important, c'est que les fonds publics soient bien utilisés et que des logements sortent rapidement de terre.

Quand le premier ministre m'a nommée ministre responsable de l'Habitation, j'ai vite voulu me mettre à la recherche de solutions pour que lèvent de terre davantage d'immeubles pour bien loger les ménages québécois, et ce, le plus rapidement possible. Parfois, ça signifie innover, sortir des sentiers battus, éviter de se mettre des oeillères et voir plus loin. Il n'est pas question de statu quo dans mon discours, M. le Président, là, moi.

Dans d'autres cas, il s'agit plutôt de poursuivre le travail enclenché et donner la chance à de bonnes initiatives de se frayer un chemin pour porter leurs fruits.Il arrive que se présente un heureux mélange des deux options.

En ce qui concerne Desjardins et FTQ, on investit, avec ces deux partenaires crédibles et engagés dans la communauté, la somme globale de 350 millions pour la création de 2 000 logements abordables, qui le resteront, d'ailleurs, pour une période allant jusqu'à 35 ans.Nos partenaires ont ajouté 75 millions chacun par leurs véhicules financiers respectifs et entrepris le travail, du travail très bien fait jusqu'à maintenant, et les choses avancent. Ils ont jeté les bases des mécanismes de sélection des projets, ont accueilli les propositions venant de promoteurs variés et répondu aux demandes promptement. J'ai confiance que les projets vont sortir de terre rapidement.

• (15 h 30) •

Le travail pour rendre disponible un autre 1 000 logements supplémentaires, avec la collaboration de Fondaction et du milieu coopératif, est aussi en cours.Je me permets un petit rappel sur notre partenariat avec Fondaction. Il vise la construction de 1 000 logements abordables, de type copropriété, pour des premiers acheteurs, justement, sur l'ensemble du territoire québécois, et ce, pour une période de cinq ans... à l'intérieur d'une période de cinq ans.

Le modèle prévoit un accès à la propriété à un coût inférieur aux comparables du marché. Des terrains permettant la construction de logements sont cédés à une coopérative, qui demeure propriétaire des unités, mais donnera un droit d'usufruit aux membres sur une base individuelle. Ces derniers pourront acquérir ce droit et le financer sur le marché traditionnel. Au moment de la revente de son unité, le membre récupère sa mise de fonds et 40 % de la plus-value. Alors, l'avantage de cette initiative est double puisque les ménages qui acquerront ces copropriétés abordables à titre de premier acheteur libéreront des logements qui seront ainsi accessibles à d'autres ménages sur le marché locatif.

Alors, on voit ici, M. le Président, l'effet domino. Et ça résume l'ensemble de ma vision pour aujourd'hui sur l'habitation et des mesures constructives qu'on met de l'avant pour augmenter l'offre de logements, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, Mme la ministre. Et je reconnais maintenant le prochain intervenant. Ce sera M. le député de l'Acadie.

M. André Albert Morin

M. Morin : Merci. Merci, M. le Président. Alors, on doit débattre, cet après-midi, d'une motion qui a été présentée par le deuxième groupe d'opposition. «Que l'Assemblée reconnaisse que le Québec traverse une grave crise du logement.» Ça, je pense qu'il ne devrait pas y avoir un débat très long là-dessus. Nous vivons une crise du logement, et c'est une situation qui est difficile pour un très grand nombre de ménages. «Qu'elle reconnaisse [...] la hausse importante du prix de l'immobilier...» Et ça aussi, c'est un phénomène, mais, ça, il n'est pas Québécois uniquement. On le vit à travers le Canada tout entier.

J'ai écouté très attentivement Mme la ministre de l'Habitation, qui concluait en nous parlant de sa vision pour aujourd'hui. Alors, je ne sais pas quelle sera sa vision demain, M. le Président, mais il y a une chose qui est sûre : ce qu'il faut rappeler, indépendamment de ce qui apparaît dans la motion du deuxième groupe d'opposition à propos des surenchères à l'aveugle, ce qu'il faut rappeler, ce qu'il ne faut pas oublier, c'est que, si on a, aujourd'hui, une crise du logement, c'est parce que le gouvernement de la CAQ, qui est au pouvoir depuis plus de cinq ans, est assis sur une foule de dossiers, et c'est une inaction complète et totale. Donc, aujourd'hui, on se ramasse avec une société qui vit une crise. Puis, il faut le rappeler, s'il y a une surenchère dans l'immobilier, s'il y a un problème avec l'accès au logement, bien, regardons l'inaction gouvernementale depuis plus de cinq ans, et c'est là qu'on va commencer à trouver où est le véritable problème, M. le Président.

Ceci étant dit, ceci étant dit, à cause de l'inaction gouvernementale, on se ramasse maintenant dans une situation où il y a un nombre important d'acheteurs pour un vendeur. Et évidemment nous vivons dans une économie de marché. Alors, quand il y a plus d'offres que de demandes, bien, évidemment, les prix vont augmenter, et c'est une situation... C'est une réalité économique, mais c'est une situation qui est particulièrement difficile à vivre, et je suis très conscient... J'ai beaucoup d'empathie pour les gens, jeunes ou moins jeunes, qui veulent acquérir une propriété présentement au Québec, parce qu'il y a effectivement des enchères et il y a des enjeux économiques importants. La ministre nous parlait de toutes ces annonces, là. À date, on n'a pas vu grand-chose lever de terre puis là, bien, on est pris avec une situation de crise, puis je comprends, puis je comprends les gens.

Maintenant, je suis loin d'être convaincu, M. le Président, que rendre accessible, rendre obligatoire la divulgation des promesses d'achat simultanées va faire en sorte qu'on va régler la situation du jour au lendemain, même du surlendemain, parce que c'est une réalité économique dans laquelle on vit, une réalité qui est difficile et qui fait en sorte qu'on va avoir, malheureusement, des Québécois puis des Québécoises qui vont être pris avec ce phénomène-là pendant des années.

Puis j'aimerais vous donner deux exemples très concrets, dans différentes régions du Québec, de ce que peuvent vivre des gens. Puis je vous le dis bien humblement, je suis loin d'être convaincu que, finalement, faire en sorte qu'on rende obligatoire la divulgation des promesses d'achat, ça va régler les problèmes, puis je vais vous donner quelques exemples concrets.

Il y a une région au Québec où ils ont un taux d'inoccupation, présentement, de 0,6 %, la région du Bas-Saint-Laurent, particulièrement de Rimouski, qui vit un problème de manque de logements, que ce soit au niveau du logement locatif ou de l'achat des propriétés, et ce, depuis des années. Je vous le disais au début, M. le Président, ça fait cinq ans qu'on vit l'inaction gouvernementale, avec le résultat qu'on a là. Si vous avez, demain matin, des personnes qui ont une offre d'emploi à Rimouski, que ce soit à l'Université du Québec, à l'Institut maritime ou ailleurs, et qui veulent acheter une maison, il n'y en a pas. La minute où il va y en avoir une sur le marché, bien, évidemment, s'il y a trois, quatre, cinq familles ou personnes seules qui vivent la situation, bien, ils vont se lancer pour vouloir acheter la maison, ils ont besoin d'un toit. Alors, que vous rendiez accessible ou que vous divulguiez les différentes offres, en bout de piste, le consommateur va regarder s'il a la capacité de payer ou pas, puis, s'il veut absolument avoir un toit parce qu'il a un emploi qui y est associé au bout, bien, il va payer davantage pour avoir la maison, c'est une réalité économique. Puis, si moi, je suis l'acheteur puis j'ai besoin absolument d'une propriété, on aura beau me dire : Il y a trois ou quatre montants sur la table, si j'ai la capacité de payer, je la veux, la maison, je vais l'acheter. Donc, loin d'être convaincu que ça va régler le problème actuel.

Autre phénomène, on parlait, l'autre jour, de la région de Thetford Mines, taux d'inoccupation, c'est 0,8 %. Ils vivent exactement le même problème. Gatineau, c'est la même chose. Donc, il faut voir la crise du logement d'une façon un peu différente puis il faut surtout inviter ce gouvernement à travailler le plus vite possible pour faire en sorte que ça puisse se régler, et ça, je pense que c'est hyper, hyper important, et ça va permettre, éventuellement, on l'espère, d'avoir, évidemment, plus d'offres sur le marché.

J'aimerais aussi attirer votre attention, M. le Président, et ça, la ministre y a fait référence pendant son allocution, il y a une loi sur le courtage immobilier au Québec, et les agents d'immeubles sont régis par des critères qui sont stricts. Je regardais rapidement sur leur site, notamment les devoirs et les obligations du courtier immobilier, le premier devoir, c'est d'être transparent. Par la suite, c'est d'informer et de vérifier, d'être loyal, d'être de bon conseil et être disponible.

Donc, moi, quand je regarde cette documentation-là, quand je regarde les obligations qu'un courtier doit rencontrer, bien, je me dis, parce que mon collègue de la deuxième opposition y faisait référence, s'il y a des courtiers qui ne font pas leur travail, bien, oui, on a des lois pour la protection du consommateur puis on le sait, que la protection des consommateurs, c'est hyper important au Québec, d'une part, puis, d'autre part, bien, que ces gens-là qui se sentent floués portent plainte auprès de l'OACIQ pour faire en sorte qu'éventuellement il y ait une enquête et que les courtiers, le cas échéant, soient sanctionnés. Et ça, je pense que c'est une disposition qui est déjà à la portée des gens au Québec et qui va permettre de régler le problème, notamment si quelqu'un se sent floué. Je pense qu'on a là une piste de solution, et l'OACIQ devrait être en mesure de jouer son rôle pleinement pour protéger les consommateurs.

Alors, M. le Président, en concluant, oui, on vit une grave crise du logement, oui, c'est difficile d'avoir accès à la propriété, puis, oui, c'est de la faute de l'inaction du gouvernement, il faut le rappeler. Mais, quant à la surenchère à l'aveugle et quant à rendre obligatoire la divulgation des promesses d'achat, pour ma part, on n'en est pas là. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, M. le député de l'Acadie. Alors...

Une voix : ...

• (15 h 40) •

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Non, je vais reconnaître... O.K., parfait, il y a une entente. Alors, je vais reconnaître Mme la députée de Rivière-du-Loup—Témiscouata.

Mme Amélie Dionne

Mme Dionne : Merci, M. le Président. Je suis très heureuse de prendre la parole aujourd'hui sur un enjeu qui touche, dans le fond, l'ensemble de nos régions.

Permettez-moi d'abord de revenir un peu dans le passé et de vous parler des efforts et des actions qui ont été déployés depuis notre élection en 2018. Après 15 ans d'années libérales caractérisées par l'inaction, cette période nous a laissé en héritage d'importants retards en construction de logement social et abordable, et encore plus particulièrement dans ma région, le Bas-Saint-Laurent.

Les oppositions vous diront qu'on a refusé d'avouer qu'il y a une crise du logement ou encore qu'on n'a pas voulu prononcer le mot «pénurie». Voyez-vous, M. le Président, à cette époque, notre gouvernement ne s'est pas formalisé sur l'emploi du terme, mais plutôt le plus important était d'être en action.

Si on remet les choses en perspective, je pense sincèrement que d'agir de manière efficace et proactive implique de prendre des mesures concrètes pour résoudre les problèmes identifiés plutôt que de simplement reconnaître leur existence. Et, pour répondre à un problème par des actions concrètes et efficaces, eh bien, M. le Président, ça nécessite une analyse approfondie des différentes problématiques sous-jacentes, des défis auxquels sont confrontés les citoyens pour trouver des solutions stratégiques et surtout durables pour y faire face.

En agissant de manière efficace et proactive, on peut non seulement atténuer les effets de la crise du logement, mais aussi poser les bases d'un avenir où chaque citoyen aurait accès à un logement sûr, abordable et de qualité. Assurer à long terme un logement à toutes les Québécoises et... à tous les Québécoises et Québécois, ça implique également d'être engagés de façon continue à identifier les défis, à élaborer des solutions novatrices et à mettre en oeuvre des politiques qui favorisent l'accès au logement.

M. le Président, tout est perfectible, et je vous l'accorde, mais les faits sont têtus. Alors, voilà quelques démarches qui prouvent que notre gouvernement a toujours placé au coeur de ses priorités de loger chaque citoyen dans un logement qui répond à ses besoins. Donc, oui, M. le Président, on est en action et on met les sommes nécessaires pour que les Québécoises et Québécois puissent se loger dignement.

Bien souvent, la difficulté de trouver un logement abordable est une problématique qui affecte autant les nouveaux arrivants que les gens dans nos régions, parce que ce n'est désormais plus exclusif aux grandes villes. Chez moi, au Bas-Saint-Laurent, on le vit au quotidien, avec un taux d'inoccupation de 0,6 %, et c'est d'ailleurs pourquoi nous en avons fait une priorité pour augmenter l'offre de logement social et abordable.

En février 2020, on a franchi une première étape décisive avec l'adoption du projet de loi n° 16, qui a apporté des changements significatifs pour améliorer les relations entre locataires et locateurs et instituer le TAL. La réduction de la clause F de cinq à trois ans pour les constructions neuves fait partie aussi des changements majeurs apportés à la loi. Il ne faut pas perdre de vue, M. le Président, qu'un propriétaire peut reprendre son logement. Toutefois, il doit maintenant le faire selon les règles édictées, et en contrepartie les locataires ont aussi des droits légaux qui se doivent d'être respectés et protégés. C'est important de reconnaître qu'il existera toujours des exceptions, qu'il s'agisse de mauvais propriétaires ou de mauvais locataires, mais c'est crucial de souligner que notre objectif, c'est de mettre en place des politiques et des mesures qui bénéficient à la grande majorité des acteurs du marché immobilier plutôt que de se concentrer sur la gestion des exceptions.

Maintenant, je vous ramène au 1er juillet 2020. La directrice de l'office de l'habitation de Montréal, à l'époque, Mme Danielle Cécile, affirmait ne pas avoir vu une coordination aussi fluide en 10 ans dans cette journée nationale du déménagement.

Maintenant, pour faire un lien direct avec la motion du député de Laurier-Dorion, il est important de mentionner que certains acteurs du milieu affirment qu'il est incertain que la transparence apportée dans la divulgation des prix des promesses d'achat pourrait ralentir la surchauffe. À la base, lorsque la demande est forte et que l'offre est faible, une sorte de frénésie est générée, et c'est ce qui crée la surchauffe. La divulgation des prix dans les promesses d'achat ne ferait que diminuer les écarts entre les prix offerts à cet... et cet effet positif se ferait sentir uniquement si l'offre surpasse la demande, ce qui n'est malheureusement pas le cas, à l'heure actuelle. Dans le mémoire de l'Organisme d'autoréglementation du courtage immobilier du Québec, déposé lors de la Commission des finances publiques en décembre 2021, on cite M. Jean-Philippe Meloche, professeur à l'École d'urbanisme et d'architecture du paysage de l'Université de Montréal. Vous savez, M. le Président, ce dernier est loin d'être convaincu que moins de confidentialité permettrait d'endiguer la flambée immobilière. On croit que cela pourrait même l'exacerber.

Je vous donne un exemple. Si je veux investir un maximum de 400 000 $ sur une maison, mon prix s'arrête là dans un encan à l'aveugle. Par contre, dans le cas d'un encan ouvert au public, les gens ont tendance à exagérer, donc à se dire : Ah! bien, je vais rajouter un petit 5 000 $, puis encore un 5 000 $, donc, ainsi de suite. Là, il y a un effet d'entraînement. La demande de divulgation des offres n'aura malheureusement pas l'effet escompté sur la hausse des prix des propriétés.

D'autres pratiques dans le marché immobilier tendent à pousser les prix vers le haut, comme par exemple la planification de nombreuses visites d'une même habitation sur une courte période de temps. Cela crée un sentiment d'urgence qui bénéficie certes aux vendeurs, mais pas nécessairement aux acheteurs. L'OACIQ encadre bien les pratiques pour éviter les abus envers certains acheteurs qui pourraient être plus vulnérables. Les courtiers doivent respecter des obligations déontologiques tout en promouvant l'intérêt de leurs clients.

Certains intervenants pourraient aussi citer la Norvège ou la Suède, où la quasi-totalité des vendeurs procèdent par enchères. Des pratiques semblables ont aussi lieu en Australie. Des chercheurs ayant étudié les stratégies des enchérisseurs en Suède ont conclu qu'en pratique, peu importe la stratégie choisie, c'est presque toujours la taille du budget de l'acheteur qui détermine l'identité du gagnant. Des chercheurs norvégiens ont conclu que les acheteurs dans des marchés en effervescence étaient moins susceptibles de fixer un prix maximum avant de participer à une enchère que les acheteurs placés dans des circonstances de marché plus neutre. La plupart des experts locaux et internationaux s'entendent pour dire que la surchauffe est un enjeu qui ne dépend pas réellement des règles du jeu en matière de courtage immobilier, mais elle dépend surtout du contexte actuel de rareté des immeubles à vendre et de la grande demande pour ce dernier.

M. le Président, malgré toutes les prévisions des spécialistes depuis les dernières années, le marché fait face à une crise importante, et sachez que nous en sommes bien conscients. C'est pourquoi on continue nos investissements historiques pour augmenter l'offre et aider à baisser la surchauffe du marché. On a mis plusieurs autres mesures en place pour aider les Québécoises et les Québécois et leur permettre de passer à travers ces temps plus difficiles.

En résumé, notre engagement envers le secteur du logement se traduit par des actions concrètes visant à relever les défis et à améliorer les conditions de vie des citoyens. Malgré les critiques, nous avons choisi l'action plutôt que l'inaction en adoptant des mesures concrètes et surtout chiffrées.

M. le Président, bien que des défis subsistent et qu'il y ait des exceptions, notre objectif demeure toujours le même : garantir à chacun un accès équitable à un logement sûr et abordable. Nous continuerons à travailler de manière proactive et efficace pour atteindre cet objectif en partenariat avec toutes les parties prenantes afin d'offrir aux citoyens un avenir où le logement demeure un droit fondamental pour tous. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, Mme la députée de Rivière-du-Loup—Témiscouata. Et je reconnais maintenant M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président. Pouvez-vous m'indiquer le temps qu'il me reste?

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Avec plaisir. Il reste à votre groupe 20 min 26 s.

M. Nadeau-Dubois : Merci beaucoup.

Aujourd'hui, la CAQ va devoir répondre à une question : Est-ce que c'est normal que le plus gros achat d'une vie, l'achat, aussi, le plus stressant d'une vie... est-ce que c'est normal que cet achat-là soit fait à l'aveugle, sous pression, sans vraiment savoir c'est quoi, le juste prix? Si on pose cette question-là aujourd'hui, c'est parce que les maisons sont trop chères au Québec. Le premier ministre se vante souvent d'avoir fait augmenter les salaires au Québec. Ce n'est pas faux. Depuis qu'il a été élu, les salaires ont augmenté de 29 % au Québec. Pendant la même période de temps, le prix des maisons, lui, a augmenté de 74 %. C'est presque trois fois plus. Mais tenez-vous bien, depuis le début des années 2000, au Québec, le prix des maisons a triplé. Est-ce que les salaires ont triplé au Québec depuis le début des années 2000? Bien sûr que non. La déconnexion entre les salaires du monde et le prix des maisons au Québec, elle est réelle, elle s'agrandit, puis c'est un vrai problème.

Ce n'est pas juste un problème économique, c'est un problème social, c'est un problème de justice générationnelle. Parce qu'il n'y a pas si longtemps, au Québec, la classe moyenne était fondée sur un pilier assez simple, sur une idée assez simple : si tu travailles fort dans la vie, si tu te trouves une bonne job stable, bien, tu vas pouvoir épargner, t'acheter une maison, donner un peu de sécurité financière, de stabilité économique à ta famille puis un jour léguer cette stabilité économique là à tes enfants. C'était ça, le rêve de la classe moyenne au Québec. Et ce à quoi on assiste en ce moment, c'est à la fin de ce rêve-là.

• (15 h 50) •

Ma collègue Manon... en fait, la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, raconte souvent que son père, avec un seul salaire d'ouvrier, a été capable, dans les années 70, de s'acheter son propre bungalow à Boucherville. Est-ce que ce serait possible, ça, aujourd'hui, M. le Président, de s'acheter, avec un seul salaire d'ouvrier, un petit bungalow pour élever sa famille? La réponse, les Québécois puis les Québécoises la connaissent, c'est non. Ce monde-là n'existe plus. Ce Québec-là n'existe plus. Puis là ma collègue Manon a de l'expérience, mais, quand même, elle n'est pas si vieille que ça. Je ne vous parle pas de quelque chose qui s'est passé il y a 200 ans, je vous parle d'en deux générations. En deux générations, on est passé d'un système économique où c'était possible, en ayant une job honnête puis en travaillant fort, d'accéder à la propriété, à un Québec dans lequel c'est même un rêve inaccessible que d'accéder à la propriété avec un seul salaire, humble mais honnête, de travailleur, de travailleuse de la classe moyenne.

Aujourd'hui, il y a des gens qui ont le même emploi que leurs parents et qui, avec ce même emploi-là, ne pourront jamais rêver de faire ce que leurs parents ont fait, c'est-à-dire s'acheter une maison. Bien sûr, il y a plein de raisons pour ça. Le premier ministre, la ministre de l'Habitation n'arrêtent pas de dire : Bien, voyons donc, ce n'est pas rien que ça, la proposition de Québec solidaire, qui va régler tout le problème. On n'a pas cette prétention-là, M. le Président. C'est sûr que ce n'est pas une mesure qui va régler ce défi énorme. Il y a plein de choses qu'il faut faire pour régler la crise du logement, pour rendre possible à nouveau l'accès à la propriété pour les jeunes familles qui travaillent fort au Québec, mais il faut commencer quelque part.

C'est la proposition qu'on fait aujourd'hui, une proposition simple qui ne coûterait pas une cent au gouvernement de la CAQ : s'assurer que les offres d'achat soient transparentes au Québec, mettre fin à un système complètement absurde de surenchère à l'aveugle, où on met de l'argent, on met de l'argent, on met de l'argent de peur de ne pas avoir la maison de nos rêves, sans savoir vraiment si on a besoin de mettre cet argent-là pour obtenir la maison qu'on veut acheter. S'acheter une première maison, là, ce n'est pas rien. Je disais, plus tôt, c'est le plus gros achat d'une vie, c'est aussi une grosse source de stress, puis le système actuel de surenchère à l'aveugle, il ajoute une couche de stress de plus.

J'ai demandé, dans les derniers jours, à... j'ai lancé un appel à témoignages, j'ai dit : Écrivez-moi vos histoires, vos expériences comme jeunes travailleurs, comme jeunes travailleuses, d'achat d'une première maison. Regardez bien ce que j'ai reçu. Alice nous a raconté qu'elle a surenchéri de 26 000 $ par rapport au budget qu'elle s'était initialement fixé. Pourquoi? Je la cite, parce que «c'est par la peur qu'on a autant surenchéri». Elle avait peur de ne pas avoir sa maison, ça fait qu'elle a trop payé pour sa maison. Myriam nous a écrit : «J'ai acheté une maison 65 000 $ en haut du prix de vente parce qu'il y avait 11 offres dessus. Le marché était fou. Je la voulais vraiment, et mon agent m'encourageait à y aller fort. Au final, la vendeuse m'a dit, une fois la vente conclue, que j'avais offert beaucoup plus que la deuxième offre.» Élise nous a écrit, Élise a fait une offre 80 000 $ en haut du prix pour avoir sa maison. Sabrina nous a écrit, elle a mis 100 000 $ de plus que le prix demandé. Il y a même des vendeurs, des gens qui vendent leur maison, qui m'ont écrit, qui me disent... Sophie nous dit : «Il y a quelqu'un qui a surenchéri de 20 000 $ sur ma maison», alors qu'elle avait déjà fait l'offre la plus élevée. Donc, on l'aurait acceptée, sa première offre, sans la surenchère.

C'est ça qui se passe dans le Québec de 2024. Le premier ministre et sa ministre de l'Habitation sont complètement déconnectés de ce qui se passe dans la vie des jeunes familles du Québec qui essaient d'avoir accès à la propriété, qui essaient d'acheter leur première maison puis qui se font avoir par un système qui est absurde. Ça, c'est des vraies histoires de vraies personnes, puis ils ont tous un point en commun, c'est du monde qui paie trop cher.

En ce moment, on est en pleine crise du coût de la vie. Les Québécois et les Québécoises magasinent pour à peu près tout ce qu'ils achètent. Vient le temps de s'acheter un nouveau frigo, par exemple, ils vont comparer les prix pour économiser sur l'achat du frigo. Mais, pour le plus gros achat de leur vie, leur première maison, bien, ça, ils vont s'en remettre à une loterie. Ils vont s'en remettre à un genre de partie de poker où il y a une seule personne qui connaît les cartes que tout le monde a dans les mains, l'agent d'immeuble. Lui, il sait, il y a combien d'offres, mais c'est le seul. Tous les autres jouent à cette partie de poker là à l'aveugle, sans savoir les cartes que les autres ont entre les mains.

Ce système-là, il est absurde, et ça me surprend que la CAQ le défende avec autant d'énergie, parce que ces gens-là n'arrêtent pas de nous dire à longueur de journée, dans à peu près tous les dossiers, que le libre marché, que le marché capitaliste, c'est un bon système puis que ça fonctionne, ça, le marché capitaliste, pour régler nos problèmes de société. Bien, savez-vous c'est quoi, un des principes fondamentaux du marché capitaliste? La transparence des prix. Un marché capitaliste qui fonctionne, c'est un marché où les acheteurs connaissent le prix de ce qu'ils achètent. C'est une notion fondamentale du modèle économique que ces gens-là défendent à longueur de journée.

La surenchère à l'aveugle, c'est le contraire, ce n'est pas transparent. Ça fait en sorte que les gens misent sans connaître vraiment quel est le juste prix. Alors, au lieu d'avoir un système de marché qui récompense le bon prix de la maison, au lieu d'avoir un marché libre qui récompense le juste prix, on a un système qui récompense la personne qui est prête à surpayer pour obtenir la maison. Ils ne devraient pas défendre ça, ces gens-là. C'est contre les principes économiques mêmes qu'ils sont toujours en train de défendre, à l'effet que le libre marché, ça règle des problèmes en société.

Le premier ministre nous demande constamment des solutions. Ça fait depuis 2018 qu'à Québec solidaire, on lui pose des questions sur la crise du logement. Puis une de ses marottes préférées, c'est de dire : Proposez-nous donc des solutions, Québec solidaire. Bien là, on en fait une. Est-ce qu'elle est parfaite? Bien sûr que non. Est-ce que c'est une solution miracle? Bien sûr que non. Est-ce que c'est une solution qui va régler la crise du logement? Bien sûr que non. Est-ce que c'est une solution qui, à elle seule, va redonner accès à la propriété à la génération qui est en train de voir ça s'effondrer sous ses yeux? Bien sûr que non. Mais est-ce que c'est une bonne idée? Est-ce que c'est un pas dans la bonne direction? Est-ce que c'est un geste simple, concret qui nous permet d'enlever un peu de poids sur les épaules d'une génération qui croule sous la pression économique, une génération qui s'enligne pour s'appauvrir par rapport à celle de ses parents, notamment parce que les maisons ne sont plus achetables au Québec? Est-ce que c'est une solution simple sur laquelle on pourrait s'entendre pour aider ces jeunes familles là? La réponse, c'est oui, puis on devrait le faire, M. le Président, parce que, toutes rivalités partisanes mises de côté, on n'a pas les moyens de se priver de bonnes idées, on n'a pas les moyens de laisser de côté une idée, même si elle vient de Québec solidaire.

La fin de l'accès à la propriété, là, pour les jeunes travailleurs, les jeunes travailleuses, c'est une injustice générationnelle qui n'a pas d'allure, puis on ne devrait pas accepter ça. Il me semble que ce n'est pas trop demander au Québec que, quand tu travailles fort, tu fais des études ou peut-être même pas, mais, peu importe, tu as une bonne job, une job honnête, tu travailles fort, tu gagnes un salaire humble, digne... c'est-tu trop demander d'être capable, à un moment donné, puis idéalement pas à 48 ans, d'avoir assez d'argent mis de côté pour t'acheter une petite maison pour ta famille? C'est-tu trop demander, ça, au Québec?

C'est vrai que la crise du logement, elle n'est pas juste au Québec. C'est vrai que le problème d'accès à la propriété, c'est un problème qui dépasse nos frontières. Mais, au Québec, on a choisi un modèle de société différent, on a choisi un modèle de société où on priorise la justice sociale, la mobilité sociale, où on trouve ça important d'avoir une classe moyenne forte en santé, puis l'accès à la propriété, le fait de permettre aux jeunes de s'acheter une maison, ça fait partie de ce projet-là. Ça ne change pas le monde, M. le Président, de mettre fin aux surenchères à l'aveugle dans le domaine de l'immobilier, mais ça aiderait bien du monde. Moi, je pense qu'on est capables de s'entendre là-dessus, je pense que la CAQ est capable de faire un bout de chemin vers nous autres. Puis on ne lâchera pas, parce que les jeunes travailleurs, les jeunes travailleuses du Québec méritent d'avoir au moins autant de prospérité puis de sécurité économique que la génération de mes parents puis de mes grands-parents. Moi, je pense qu'on mérite ça, au Québec. Merci, M. le Président.

• (16 heures) •

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, M. le chef du deuxième groupe d'opposition. Et je reconnais maintenant M. le député de Jonquière.

M. Yannick Gagnon

M. Gagnon : Bonjour, M. le Président. C'est un plaisir d'être avec vous aujourd'hui et d'entendre la ministre, les collègues. Je ne veux pas faire une grosse histoire, mais je voulais quand même le dire d'entrée de jeu, hier, à la période des questions, il y avait une phrase de l'opposition qui mentionnait au gouvernement qu'on était davantage à l'écoute de nos amis de la Chambre de commerce... des chambres de commerce. Je ne veux pas aller loin dans ça, mais je veux simplement dire que je voyais la ministre qui était dans la région de la Côte-Nord il y a quelques semaines, puis les chambres de commerce sont des vecteurs importants qu'il faut écouter. Puis cette petite phrase là, elle m'a piqué hier, pendant la période de questions, parce que ce matin, dans notre journal local, chez nous, du Quotidien, il y avait Sandra Rossignol... Sandra Rossignol, c'est notre P.D.G. de la Chambre de commerce et de l'industrie Saguenay—Du Fjord, qui... je vois mon collègue du Lac-Saint-Jean, qui était avec le regroupement des chambres de commerce de la région, puis ils ont identifié trois grandes priorités pour notre région, et ils ont identifié... je ne les donne pas en ordre nécessairement, mais trois grandes priorités. Ils ont identifié que, pour notre région, nous, du Saguenay—Lac-Saint-Jean, ce qui serait important, c'est une transition verte, une transition numérique, et également Mme Rossignol et le regroupement mentionnaient aussi qu'ils avaient une préoccupation sur le logement.

Alors, oui, la Chambre de commerce est préoccupée par le logement, puis elle est dynamique, Mme Rossignol. Et ce que j'aimais dans l'article de ce matin, c'est qu'elle allait plus loin, elle disait qu'elle avait également consulté la jeunesse, la jeunesse de chez nous. Puis moi, j'embarque dans ça, parce que j'ai été également consulter la jeunesse avec mon comité, et j'en ai entendu parler, effectivement, comme mentionnait le député avant moi, de l'accès à la propriété. Il y a une série de facteurs pour l'accès à la propriété, et ces facteurs-là qui affectent le marché immobilier, je pense qu'il faut en parler, parce qu'effectivement ces facteurs-là, puis c'est une série de facteurs, ont un impact sur les propriétaires actuels, ont un impact sur les futurs propriétaires — et, qui dit futurs propriétaires, c'est sûr que ça vient toucher ma corde — ont un impact sur les jeunes, les jeunes qui veulent vivre, comme je l'ai vécu puis bien des gens l'ont vécu ici, l'achat de la première propriété. Mon collègue prédécesseur l'a dit, cette crise-là, elle n'est pas unique. Elle n'est pas unique à notre province. La crise immobilière est répandue en France, en Chine, aux États-Unis, au Canada. On pourrait énumérer...

Tout à l'heure, on a abordé la surenchère. Je ne reviendrai pas, pour l'instant, sur la surenchère. Ce que j'ai le goût de parler, c'est quelque chose de base, mais c'est quand même quelque chose qui explique... un des facteurs de la situation qu'on est au... ce moment, c'est-à-dire, il y a une baisse. Il y a une baisse de l'offre qui pousse les prix vers le haut, et à cela s'échange et vient... vient s'actualiser, pardon, des taux d'intérêt élevés. Moins de maisons force le prix vers le haut, et les taux d'intérêt sont élevés. Qu'est-ce que ça fait? Ça fait que l'accès à la propriété est difficile. C'est majeur. C'est majeur pour les futurs acheteurs. C'est majeur pour nos jeunes.

Cette augmentation-là, effectivement, comme le disait tout à l'heure mon collègue, a débuté en 2010... en 2008, avec la crise. Le Canada, d'ailleurs, il faut le dire, s'est plutôt bien sorti en resserrant les règles de qualification hypothécaire, particulièrement entre 2008‑2012, mais le coup de grâce, et je le sais qu'on en parle souvent, de la pandémie, mais le coup de grâce fut malheureusement les années pandémiques, aux alentours de 2020. Je ne veux pas, encore une fois, je le dis, cogner le clou sur la pandémie, mais c'est un facteur important à ce qu'on a vécu dans les deux dernières années. Ça a un effet et un impact direct sur le prix des propriétés des dernières années.

Lors des deux dernières années, qu'est-ce qui s'est passé... puis plusieurs acheteurs ont diminué leurs dépenses. Certains ont même accumulé de l'épargne. Et qu'est-ce que ça fait? Ça devient intéressant, ce qui leur a permis de faire un investissement, de s'offrir une propriété. La Banque du Canada, à ce moment-là, avait un taux d'intérêt à des niveaux historiques. Les taux d'intérêt étaient bas. Les gens avaient économisé. C'était le temps. Les coûts étaient faibles. Les emprunteurs ont consacré... et il s'en est vendu, des maisons.

Et, en plus de ça, et je suis en état pour en parler, il y a eu la popularité du télétravail. Je ne veux pas me lancer sur la popularité, qu'est-ce que ça peut avoir eu... sur l'île de Montréal ou dans les grands centres. Je veux vous parler de qu'est-ce que ça a fait en région. En région, si on est en télétravail, on peut consacrer son sept, huit, cinq heures, 10 heures de travail par jour. On peut le faire de la maison. On peut choisir un environnement qui nous plaît davantage.

Alors, en région, il y a eu effectivement des gens qui sont venus s'installer, particulièrement en nature, et ça a provoqué ce que ça provoque aujourd'hui et ça m'inquiète. Ça m'inquiète. Les propriétés sur le bord de l'eau, sur des endroits paradisiaques, qui étaient accessibles, bien, ça a créé ce que j'ai expliqué tout à l'heure, sur quoi je ne reviendrai pas. Alors, il faut en parler, quand même.

À ça s'ajoute aussi, et il faut le dire, quand je parle de facteurs, il faut la gratter, la question, la croissance démographique. La croissance démographique, au même moment, des deux dernières années, c'est une hausse historique. Seulement en 2022, Statistique Canada dit ici qu'à la première période de 12 mois, à laquelle la population canadienne s'est accrue, plus de 1 million de personnes, dans l'histoire, est le taux d'accroissement le plus élevé depuis 1957, M. le Président. Bien entendu, on en parle régulièrement, de ce nombre de 1 million, 96 % est la migration internationale. Je pense qu'on peut quand même dire que le Canada est, de loin, le pays du G7 à avoir affiché la croissance démographique la plus importante en 2022.

C'est important, pour moi, de parler des facteurs, de ce que j'ai dit en amont, les facteurs difficiles à la propriété, parce qu'après ça il y a eu une autre étape dans laquelle on se retrouve, c'est la reprise économique. Lors de la reprise économique, qu'est-ce qui est arrivé? Les taux d'intérêt ont été rehaussés par la Banque Nationale pour limiter l'inflation, oui, mais cette hausse, qu'est-ce que ça a eu comme impact? On va se le dire, c'est, additionné à la baisse de l'offre... affecte directement l'accès à la première propriété.

Il serait irresponsable de ma part de ne pas tenter d'éviter à ça tout ce qui s'ajoute sur les foyers québécois, qui nous touche, malheureusement, au quotidien. En plus du taux d'intérêt de la Banque du Canada, bien, c'est l'inflation, l'inflation sans cesse croissante. Les Québécois sont obligés davantage de mettre une plus grande partie de leur salaire vers les biens essentiels, les biens de base, comme on dit, et, par conséquent, la capacité de ceux ayant l'intention d'acheter une propriété, qu'est-ce que ça fait? Ça diminue. Ça diminue, faute de pouvoir se mettre une mise de fonds de côté. Il faut en parler, de la mise de fonds.

• (16 h 10) •

J'aimais cette statistique-là qu'on m'a... que j'ai écrit. Au Mouvement Desjardins au début 2023, les économistes ont constaté, bien oui, que la mensualité pour payer l'hypothèque pouvait faire un bond. Et ça pouvait toucher... Et c'est en centaines de dollars par mois que ça pouvait toucher, cette inflation-là. Puis je voulais regarder un exemple. Je vais en donner un exemple qui est flagrant ici. Une maison de 350 000 $, qui représente le prix moyen actuel pour la région de la Capitale-Nationale, avec une mise de fonds de 5 % amortie sur 25 ans, M. le Président, avant, avant, ça pouvait donner un taux mensuel de 1 369 $ au plus fort de la pandémie. Maintenant, maintenant, même maison, même chose sur 25 ans, en mensualités, on est passé de 1 369 $ à 2 112 $. Et ça, c'est dû à la hausse du taux d'intérêt. Ce n'est pas une question d'enchère ou de surenchère. Le seul facteur entre 1 369 $ et 212 $ pour la même maison moyenne dans la région de Québec, eh bien, c'est l'augmentation du taux d'intérêt. Et ça, ça, ça, c'est beaucoup d'argent.

Dans plusieurs cas, à défaut d'une aide financière extérieure, les futurs propriétaires n'arrivent pas à couvrir la mise de fonds nécessaire pour avoir accès au prêt hypothécaire. Un rapport économique sur l'accès à la propriété réalisé par Desjardins dévoile que les facteurs influents dans la première propriété chez les jeunes millénaux... Un jeune Canadien de 30 ans et moins dépense en moyenne plus de la moitié de son revenu pour le logement, l'éducation et le transport. La réalité, c'est que les prix des maisons, auxquels on a ajouté des taux d'intérêt exorbitants et une mise de fonds importante... Je trouvais ça vraiment important de le mentionner.

Le directeur général de Royal LePage, M. Dominic St-Pierre, disait que 13 ans, 13 ans seraient nécessaires pour amasser une mise de fonds chez les jeunes adultes. Dans le temps, et pas dans le temps, 10, 15 ans, il n'y a pas si longtemps, il y a moins de deux ans, c'était... c'est sept ans de plus qu'il y a quelques années. On est passé de 13 à sept ans, M. le Président.

Bien entendu, à ça... je l'ai entendu aussi, les frais de scolarité, on étudie plus longtemps, on s'endette, mais, quand même, il faut regarder, le taux d'intérêt est majeur, et ça a un impact.

Bien entendu, on est tous ici puis on voudrait tous... on voudrait tous claquer des doigts, que la situation revienne à la normale. Malgré la bonne volonté de tout le monde qui est ici, c'est impossible en claquant des doigts. Ça a fait des... et on ne peut pas bâtir des milliers d'unités du jour au lendemain.

Par contre, par contre, on bouge puis on est en action. Et ça, c'est important de le mentionner. On a fait référence, et on en a parlé ici, à l'offensive de formation en construction lancée en octobre dernier. C'est une formation professionnelle accélérée, payée, qui vise à former entre 4 000 et 5 000 professionnels de la construction pour alléger la pénurie de main-d'oeuvre : charpentiers, conduite d'engins, ferblanterie, frigoristes. Cette formation-là, les gens qui s'y investissent. Il faut le reconnaître, c'est une formation intense et rigoureuse. C'est quatre à six mois. On veut que les gens soient diplômés rapidement, en juin, pour venir nous aider sur les chantiers du Québec. C'est une subvention de 750 $ qui est donnée par semaine. On va en former entre 4 000 et 5 000, M. le Président, mais c'est 47 000 personnes qui auraient aimé y participer.

Avec la ministre, moi, j'étais présent à la première journée de la cohorte. J'ai la chance, à Jonquière, d'avoir le CFP. J'étais présent. J'étais présent puis je peux dire que j'ai vu le sentiment des gars puis des filles qui étaient dans cette classe-là quand la ministre leur disait : Merci, merci de venir nous aider à construire les unités, à construire notre Québec. Les gens étaient fiers. C'était un beau moment dans la classe, et on le sentait.

Alors, M. le Président, il faut aussi parler des facteurs. Et, aujourd'hui, je dirais qu'il est malhonnête d'accuser notre gouvernement de rester les bras croisés face à la situation actuelle. Ce n'est pas vrai, nous sommes sensibles à la réalité des futurs acheteurs, nos jeunes. Nous avons mis des mesures en place pour aider plusieurs Québécois à passer à travers cette période plus difficile et nous n'arrêterons pas là. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, M. le député de Jonquière. Et je reconnais maintenant Mme la députée de La Pinière.

Mme Linda Caron

Mme Caron : Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, au Parti libéral du Québec, on saisit l'ampleur de la crise du logement. On saisit les drames que ça représente pour de nombreux Québécois et de nombreuses Québécoises. On décriait la pénurie de logements déjà lorsque le gouvernement de la CAQ refusait même d'en reconnaître l'existence, ce qui explique pourquoi ça a pris tant de temps avant qu'il commence à se mettre en action. Et je vous rappelle qu'il a fallu attendre le dernier jour de la session, l'année passée, au mois de juin 2023, pour le dépôt du projet de loi n° 31 en habitation, projet de loi qui créait de grandes attentes parce qu'on avait hâte de voir c'était quoi, le plan pour juguler cette crise du logement. Mal nous en prit. On attend encore des résultats puisque l'étude du projet de loi a été si chaotique et n'est pas encore terminée, mais elle le sera bientôt, heureusement.

Ma collègue députée des Mille-Îles et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'habitation a participé activement aux travaux du projet de loi n° 31. Elle a même déposé un projet de loi qui aurait permis aux municipalités de faire du zonage différencié, ce qui aurait permis d'innover, de construire, d'inciter les promoteurs et les OSBL à construire plus de logement social en permettant de construire plus haut que ce qui est prévu dans le plan d'urbanisme ou d'aménagement. Bref, c'était une proposition constructive et structurante qui a malheureusement été rejetée du revers de la main par le gouvernement. C'était pourtant une proposition du Parti libéral qui visait à répondre aux besoins de base des Québécois et des Québécoises les plus vulnérables : avoir un toit pour s'abriter, avoir la possibilité de payer un loyer raisonnable tout en étant capable de s'alimenter. On est dans la base, là, de la pyramide de Maslow.

M. le Président, nous partageons, au Parti libéral du Québec, l'inquiétude et l'impatience de la population face à cette situation, à cette crise du logement. Nous reconnaissons aussi que la surenchère immobilière, ça fait augmenter les prix, ça contribue à augmenter le prix des maisons ou des condos. Mais ce n'est pas la seule chose. Quand on pense que le prix d'un deux-par-quatre a quadruplé, sinon quintuplé depuis avant la pandémie, bien, on comprend que le prix des maisons ou des condos neufs a vraiment augmenté, et ça fait augmenter le prix des maisons existantes dans le parc immobilier.

Mais, contrairement à Québec... à la deuxième opposition, au Parti libéral du Québec, nous ne sommes pas dans la philosophie d'arracher quelque chose aux propriétaires existants pour donner aux aspirants propriétaires. Comprenez-moi bien, l'accès à la propriété pour les jeunes familles, les jeunes couples, c'est important, et il faut qu'il y ait des moyens en place, des moyens efficaces pour les aider à accéder à la propriété. Ça, on est d'accord avec ça. Mais le malaise que j'ai dans la proposition, dans la motion qui est faite par le deuxième groupe d'opposition, M. le Président, c'est pour les personnes aînées.

Pensez, là, à une personne aînée qui vend sa maison ou son condo parce qu'elle n'est plus capable de l'entretenir physiquement, là, elle n'est plus capable parce que peut-être elle est devenue veuve, elle ne veut pas vivre seule, elle a un besoin de sécurité, elle décide de vendre sa propriété pour aller vivre dans une résidence privée pour aînés ou alors son état de santé s'est dégradé rapidement puis elle a besoin d'une place en ressources intermédiaires ou en CHSLD. Il va falloir qu'elle paie par la suite pour son hébergement. Il va falloir qu'elle paie certains soins. On le voit, là, dans les RPA, il y avait un cas, la semaine dernière, une dame qui a vu les frais de soins augmenter à un point tel et son loyer augmenter à un point tel que ça lui coûte 101 000 $ par année pour se loger. C'est absolument faramineux. Une personne millionnaire est capable de le prendre, M. et Mme Tout-le-monde, je ne pense pas. Alors là, si cette personne-là avait une... avait eu une résidence, là, à vendre, bien, on voudrait contrôler la surenchère ou le prix de vente pour permettre à quelqu'un d'autre de payer moins cher? Il y a un équilibre à aller trouver, là.

• (16 h 20) •

Il y a près de 800 000 aînés au Québec qui ont un revenu de 25 000 $ ou moins par année. Ceux d'entre eux, parce qu'il y en a, qui possèdent une propriété, une résidence, soit un condo ou bien une maison, libre d'hypothèque parce que ça fait des décennies qu'ils habitent là puis ils ont pris la discipline de payer leur hypothèque ou ils sont là depuis tellement longtemps qu'ils ont pu le faire, ils ne sont pas à la merci, là, des loyers, des hausses de loyer. Il y a par contre la hausse des taxes municipales qui vient les plomber un peu, mais ils sont capables de... ils sont capables de s'arranger pour vivre. Bien, ces personnes-là, ils ont travaillé à la sueur de leur front pendant toute leur vie pour la payer, leur propriété.

Le co-porte-parole du deuxième groupe d'opposition a dit lui-même : L'achat d'une maison, c'est le plus gros achat d'une vie. C'est tout à fait vrai. Mais, pour bien des aînés, c'est le seul bien de valeur qu'ils possèdent. Pour certains d'entre eux, c'est une sécurité, c'est la seule sécurité financière qu'ils ont parce qu'ils ont un capital dans cette propriété-là, parce qu'ils savent que, si, à un moment donné, ils sont obligés de déménager parce que, comme je le disais tout à l'heure, ils veulent aller dans une RPA pour ne pas être isolés, vivre seuls, parce qu'ils ne peuvent plus entretenir leur propriété, parce qu'ils ont besoin d'aide, leur... ils sont en... ils commencent à être en perte d'autonomie ou tout simplement ils veulent avoir la sécurité d'une RPA, parce que les RPA, ça répond à un besoin de sécurité, bien, ils savent que, s'ils vendent leur propriété, ils ont des chances d'avoir l'argent qu'il faut pour se loger puis avoir les soins et les... le soutien à domicile dont ils ont besoin.

Parce que ne vous trompez pas, on a un système de santé soi-disant universel au Québec, mais tout n'est pas gratuit. Et, les aînés, pour avoir des services, il faut qu'ils en paient une partie. Alors, pour eux, la propriété, cette propriété-là qu'ils ont trimé si dur toute leur vie pour payer, c'est leur sécurité, et là on va venir regarder combien ils la vendent pour avantager quelqu'un d'autre? Je ne pense pas que ça marche, là. Je ne pense pas qu'on rend service à nos aînés puis qu'on se rend service en tant que société de fonctionner comme ça.

Bien entendu, il faut que les consommateurs soient protégés aussi. Bien, si vous allez sur le site d'Option consommateurs, vous allez voir qu'il y a des possibilités de s'assurer que les transactions immobilières sont faites correctement. Le rôle de l'OACIQ, c'est de protéger les consommateurs. Ils ont des obligations pour s'assurer que les transactions immobilières ou hypothécaires se déroulent en toute confiance. Mon collègue de l'Acadie l'a dit tout à l'heure, les courtiers immobiliers ont des obligations, ont un code d'éthique, et c'est possible de porter plainte. Peut-être faudrait-il faire connaître davantage cette possibilité-là plutôt que d'aller jouer ou essayer de contrôler le prix de vente des propriétés. Je soumets la proposition.

Alors, M. le Président, je pense qu'il faut penser aux aînés quand on fait des propositions comme ça, parce que celle-ci, je trouve qu'elle frise l'âgisme. On veut avantager des personnes plus jeunes à avoir accès à la propriété, et, comme je l'ai dit, c'est correct, il faut le faire, il faut avoir des mesures, mais pas des mesures qui vont venir contrôler le fruit d'un investissement pour un aîné qui en a tant besoin pour poursuivre sa vie dans un état sécuritaire et recevoir les soins et l'aide dont il a besoin.

Alors, pour ces raisons-là, M. le Président, je suis contre la motion présentée par le deuxième groupe d'opposition. Merci.

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup. Merci beaucoup, Mme la députée de La Pinière. Alors, deux intervenantes levées. Selon le principe d'alternance, je vais céder la parole à Mme la députée de Labelle.

Mme Chantale Jeannotte

Mme Jeannotte : Merci, M. le Président. Donc, écoutez, ça me fait plaisir de prendre la parole en cette Chambre. Je salue les députés de l'opposition ainsi que mes collègues députés du côté gouvernemental. Je trouve ça intéressant, M. le Président, quand on a des suggestions de la part des oppositions parce que ça contribue au débat. Puis je salue les collègues de Québec solidaire, parce que c'est intéressant, ça nous fait réfléchir sur les avenues, parce qu'on travaille très, très fort.

Les questions qu'ils ont posées, d'entrée de jeu, est-ce qu'on est d'accord avec ça? Tout à fait. Bien sûr qu'il y a une crise du logement. Bien sûr qu'on agit. Et puis c'est tellement complexe puis c'est interministériel, cette affaire-là, hein, M. le Président. Bien sûr, on a la Société d'habitation, puis notre premier ministre a nommé une ministre, mais on a travaillé très, très fort avec aussi la ministre des Affaires municipales pour donner des outils aussi aux municipalités. On a travaillé très, très fort avec la formation de la main-d'oeuvre, les collègues en ont parlé, avec le projet de loi n° 51 aussi, de mon collègue Boulet, qui va améliorer beaucoup les enjeux au niveau de la construction...

Une voix : ...

Mme Jeannotte : Pardon, le ministre du Travail. Merci, M. le Président. Donc, c'est sûr qu'il y a une crise du logement puis c'est sûr qu'on travaille très fort pour contrer tout ça.

Maintenant, la proposition des collègues, eh bien, posons-nous la question : Est-ce qu'obliger les courtiers et les agences à divulguer les offres ne va pas systématiquement empêcher la surenchère immobilière? Systématiquement, permettez-moi d'en douter, M. le Président. Si les acheteurs voient leurs offres concurrentes, ça pourrait même peut-être encourager la surenchère, comme d'autres collègues l'ont mentionné aussi. C'est un peu le principe d'un encan, M. le Président. Lorsqu'il existe plusieurs offres sur la table, dans le fond, les perspectives de gagner une enchère en la bonifiant incitent normalement les acheteurs à surenchérir, comprenez-vous? Moi, je le perçois comme ça, en tout cas, a priori. En divulguant le nombre d'offres déposées sur une propriété, ça pourrait tout autant stimuler l'engouement autour de la vente et créer une potentielle surenchère. En révélant le montant des offres, les contre-offres ne se multiplieraient pas, ce qui serait à l'avantage des personnes qui ont le plus de moyens financiers, car ils n'hésiteront pas à bonifier leur offre initiale. Ça fait que cette situation désavantagerait les acheteurs de première maison.

Mais, M. le Président, j'ai contacté des courtiers dans mon patelin, dans ma région, pour savoir ce qu'ils en pensaient. C'est clairement non. Ils ont dit : Il ne faut pas dévoiler les offres d'achat. C'est le même constat. Ils arrivent à la conclusion que retirer les enchères à l'aveugle aurait plutôt tendance à avantager les plus nantis.

Le phénomène de surenchère s'explique davantage par la rareté des maisons à vendre due à la hausse de la demande provoquée par la pandémie. C'est dans ce contexte que la... dans ce contexte-là, là, de pandémie, que la demande dépassait largement l'offre. Cette rareté a inévitablement provoqué une hausse des prix, comme l'ont dit plusieurs collègues, favorisant ainsi les vendeurs, mais il est important de comprendre que ça n'a pas toujours été le cas et que ça tend, il me semble, à diminuer. Avec le temps, ce phénomène s'est atténué, s'est rétabli à un niveau post-pandémique. Les lois du marché tendent à revenir.

Rappelons-le, le marché immobilier obéit à des cycles, disent les experts. D'ailleurs, on constate un ralentissement du marché immobilier au Québec. Pour l'ensemble du Québec, le nombre des ventes enregistrées en décembre 2023 a diminué de 13,2 % par rapport à celui des ventes effectuées en décembre 2022. On constate également un recul du nombre de ventes dans la quasi-totalité des régions du Québec, donc... dont le marché... donc le marché se stabilise, pardon.

Il est important de noter qu'après des années exceptionnelles où un nombre record de transactions ont été effectuées en 2021 et 2020 l'année 2022 marquait la fin des fortes demandes du marché immobilier. Le ralentissement de l'activité immobilière observé au cours de l'année 2022 a démontré un rééquilibrage du marché au niveau de 2019, soit la période de référence prépandémique. En comparaison avec 2022, les données de 2023 affichent un recul de deux points de pourcentage pour les ventes. On constate donc que la folie des surenchères du temps de la pandémie est bel et bien terminée. Le marché s'est stabilisé, et l'écart entre l'offre et la demande s'est rétréci.

• (16 h 30) •

Petit retour en arrière maintenant. En juin 2022, dans le contexte de la surchauffe immobilière, il y en a d'autres qui l'ont mentionné, notre gouvernement avait adopté le projet de loi n° 5 pour modifier la Loi sur le courtage immobilier afin de mieux protéger les acheteurs dans une transaction immobilière au Québec. Grâce à cette réforme, nous avons mieux encadré les obligations des courtiers envers leurs clients pour qu'ils agissent de façon équitable avec les différentes parties impliquées. Ce projet de loi implique différentes mesures fiscales, mais également des mesures liées au marché immobilier. Le projet de loi interdit, entre autres, la double représentation d'un courtier immobilier, avec un acheteur et un vendeur, pour un immeuble résidentiel ainsi que le contrat de courtage verbal. Le contrat de courtage achat devient alors obligatoire si un acheteur désire être représenté par un courtier immobilier. Ces mesures permettent d'éviter un conflit d'intérêts potentiel et assurer un traitement davantage équitable entre les acheteurs et les vendeurs.

L'analyse des différents mécanismes d'enchères et leur contribution à la surchauffe du marché immobilier avaient été examinées lors de nos modifications de cette loi, de cette loi, là, la Loi sur le courtage mobilier, en 2022. Une telle mesure pourrait avoir un impact économique négatif pour plusieurs ménages, a-t-on dit. La mise en place d'une telle disposition pourrait aussi être vraie... être un vrai défi lorsque la transaction n'est pas faite par un courtier immobilier. Les études sur le sujet démontrent des résultats mitigés. Donc, il n'est pas vraiment clair qu'une politique de divulgation obligatoire aurait pour effet de diminuer les prix. Tout n'est pas noir, tout n'est pas blanc, M. le Président.

Nous sommes dans un contexte de creux historique au niveau des stocks de propriétés à vendre au Québec. Comme je l'ai dit plus tôt, la divulgation des offres pourrait mener à une surenchère dans un contexte de pénurie de logements à vendre. Comme gouvernement, il importe de s'assurer que nos changements soient pertinents, comme disait Mme la ministre, surtout lorsque la mesure visée entraîne des conséquences très néfastes sur nos citoyens.

M. le Président, j'aimerais aussi mentionner qu'il existe plusieurs mesures d'aide pour l'achat d'une première maison : le CELIAPP, le crédit d'impôt pour l'achat d'une première maison, qu'on a d'ailleurs doublé en 2022. Nous avons remis de l'argent dans les poches des Québécois et nous allons continuer de le faire, M. le Président. Le premier ministre le dit souvent, depuis cinq ans, les salaires, en moyenne, au Québec ont augmenté de 24 %. Je ne suis pas en train de dire que c'est... tout va bien dans le meilleur des mondes, mais il faut quand même souligner que c'est plus que l'augmentation de l'alimentation puis des loyers. Puis, au cours de la dernière année, parmi tous les pays du G7, c'est au Québec que le pouvoir d'achat a le plus augmenté. Ça fait que c'est quand même intéressant de le noter. On a baissé les impôts des Québécois cette année. On a remis jusqu'à 814 $ dans les poches de 4,6 millions de Québécois. Écoutez, je pourrais continuer comme ça longtemps. On a remis 2 000 $ à 1,1 million d'aînés de 70 ans et plus à faible revenu.

M. le Président, Mme la ministre, elle a raison, il faut augmenter l'offre et la demande...

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Ça complète le temps qui était à votre disposition. Malheureusement, ça complète le temps que vous aviez à votre disposition, Mme la députée de Labelle. Je reconnais maintenant Mme la députée de Verdun. Et il reste 7 min 8 s à votre groupe parlementaire.

Mme Alejandra Zaga Mendez

Mme Zaga Mendez : Merci, M. le Président. L'idée qu'on met de l'avant aujourd'hui, elle est très simple, c'est un principe de transparence, de rendre transparente la surenchère en obligeant la divulgation des promesses d'achat simultanées sur une même propriété. Et j'entendais les collègues et je vais me permettre, en fait, de remettre quelques informations, parce que... d'amener, là, un peu des informations plus justes, parce qu'on fait beaucoup de références à l'offre et la demande, au contrôle de l'offre. Puis, vous savez, moi, dans une autre vie, j'ai enseigné le principe en microéconomie à des étudiants en environnement, puis une des choses qu'on apprend dans la base de l'économie, c'est que... qu'est-ce qui détermine le prix, on le sait tous, on nous l'a répété, c'est la dynamique entre l'offre et la demande.

Qu'est-ce que c'est, l'offre? Bien sûr, dans notre cas, c'est la capacité à accepter... la volonté à accepter des vendeurs, des personnes qui ont travaillé, oui, toute leur vie pour édifier leur maison, pour bâtir leur maison et la vendre, et ça, on ne s'attaque pas, on ne touche pas à ça, avec notre proposition. C'est-à-dire que le prix de base qui est affiché, qui est affiché, bien, c'est celui qui correspond à la volonté des gens et qui reflète le travail qu'on fait, qui reflète l'avoir, bref, le prix du bien. Mais, de l'autre côté, il y a la demande, c'est-à-dire combien tout le monde est prêt à payer. Donc, cette volonté à payer là, ce qu'on appelle l'offre qui est faite sur la maison, bien, la seule chose qu'on demande, c'est de dévoiler ces préférences-là. Et tout ce qu'on a dans l'économie, tous les biens et services, on est capable de comprendre et de savoir c'est quoi la préférence des gens par rapport à un bien, ça veut dire d'avoir l'information la plus juste et transparente. Et on sait que le phénomène de surenchère est créé par le fait qu'on ne connaît pas... tous les acteurs qui sont impliqués, bien, ils ne connaissent pas la demande, ils ne connaissent pas c'est combien que les gens sont prêts à payer sur une maison. Donc, notre mesure, là, en soi, là, elle ne va pas révolutionner le marché, loin de ça, elle va juste permettre de trouver le juste prix d'une propriété en enlevant cette surenchère à l'aveugle et en permettant à plus de gens d'avoir accès à la propriété.

Puis juste ramener qu'il y a des études universitaires qui sont... qui prouvent, en fait... un professeur aux HEC, M. Amine Ouazad, qui enseigne la théorie des enchères depuis des années, nous montre que la transparence, lors des enchères, va faire baisser le revenu des vendeurs. Les recherches l'ont révélé, que le prix... le prix demandé a un impact important sur le prix de vente final d'une maison ou d'une propriété.

Juste donner un exemple, en Norvège, le système d'enchère pour l'immobilier est organisé comme les oeuvres d'art où tout le monde connaît les offres qui sont faites. Une analyse des chercheurs norvégiens nous montre que le prix demandé est relativement bas lorsqu'on obtient des prix... et donc, on obtient des prix plus bas. Mais quand les prix qui sont demandés, et qu'on connaît la nature, donc on connaît cette offre-là, bien, ça résulte dans des prix qui sont plus hauts. Donc, avoir cette information-là a un impact direct sur le prix de vente des maisons.

Alors, notre mesure, qui est basée sur des études de marché, qui est basée, en fait, sur le principe même de l'économie puis la microéconomie, qui gère... qui est même, comme le disait tout à l'heure notre chef parlementaire, qui est défendu par la CAQ puis est défendu, c'est le modèle économique capitaliste, par d'autres groupes parlementaires, ici, c'est juste respecter le principe de base de transparence et d'information.

J'aimerais attirer notre attention aujourd'hui au fardeau économique des jeunes, surtout des jeunes familles qui ont de plus en plus de la misère à acheter une propriété. Vous le savez, depuis des nombreuses années, on voit cette génération qui n'est pas... qui devient un peu une génération de locataires parce qu'ils n'ont pas accès à la propriété. Pour pouvoir avoir une mise de fonds, le nombre d'années pour les 25-35 ans pour économiser 20 % de la mise de fonds, en 1976, on parlait de cinq ans, en 2020, on parlait de 13 ans. Donc, qu'est-ce qu'ils font, les jeunes? Ils s'endettent ou ils restent plus longtemps sur le marché locatif, ce qui met une pression supplémentaire sur les logements.

On le voit aussi, que les prix actuels de l'immobilier rendent l'accession à la propriété encore plus difficile pour les jeunes, surtout pour les personnes moins nanties. Pour donner un exemple, le prix médian d'une maison unifamiliale en janvier s'est chiffré à 535 000 $, soit une hausse de 7 % par rapport à janvier 2023. Le prix médian d'une copropriété était de 390 000 $ en janvier, soit 5 % de plus, et celui d'un plex était de 722 500 $, 7 % de plus. Comment vous voulez qu'un jeune couple qui commence leur vie de jeunes professionnels dans la vingtaine achète quelque chose? Depuis cinq ans, la proportion des jeunes propriétaires a diminué au Québec, et ce sont chez les générations plus âgées, l'effet inverse se fait ressentir.

Il ne me reste pas beaucoup de temps. Je ne vais pas continuer avec des chiffres, j'en aurais plusieurs démonstrations économiques à vous faire. Puis on le sait que, comme je disais tantôt, là, notre mesure, c'est une mesure parmi d'autres. On pourrait faire tellement de choses au Québec pour pas seulement régler la crise du logement, mais augmenter l'accès à la propriété, on peut parler de moratoire sur les évictions pour agrandissement et subdivision, renforcer la protection des locataires face aux rénovictions.

Bref, ce qu'on veut, aujourd'hui, c'est voter sur une seule mesure, une mesure qui est structurante, qui est simple, qui est déjà à la base, comme je l'expliquais tantôt, de nos principes économiques et qui va juste rendre justice, justice générationnelle envers les nouvelles personnes, générations et jeunes familles qui veulent juste acheter une maison pour habiter, pour bâtir un foyer. Bref, pour nous, c'est urgent de le faire. Et on s'attend aujourd'hui que les autres nous suivent le pas. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, Mme la députée de Verdun. Et je cède la parole à Mme la députée de Mille-Îles, en rappelant qu'il reste 8 min 58 s à votre formation politique.

Mme Virginie Dufour

Mme Dufour : Excellent. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, d'emblée, j'aimerais dire que la situation actuelle, elle est terrible. La crise du logement qui sévit, elle empire de jour en jour, d'année en année. Et la situation actuelle amène une grande détresse dans la population, on le voit, on le sent, on a des échos, on a des citoyens qui nous contactent. Ma collègue la députée de La Pinière a parlé, a dit : On sent l'inquiétude et l'impatience des citoyens. Bien, elle a tout à fait raison, et on les comprend.

Et je salue, là, les collègues de Québec solidaire qui font une proposition, une proposition pour freiner la surenchère dans les transactions, en demandant de la transparence, en faisant... en voulant, dans le fond, forcer le dévoilement de l'ensemble des offres d'achat qu'un vendeur aurait reçues aux autres acheteurs potentiels. De prime abord, la prémisse, c'est que ça aiderait à réduire le coût, du moins éviter des... que des gens paient en surplus. Et le député de Gouin a donné plusieurs exemples où il a parlé de gens qui lui ont écrit puis qui ont dit qu'ils avaient donné, dans le fond, une mise de... une offre supérieure à ce que, peut-être, ils auraient fait en temps normal, parce qu'ils avaient peur et souhaitaient absolument avoir la propriété. Un autre qu'il a mentionné, c'était une dame qui a réalisé que, dans le fond, elle avait eu la plus... la plus grande offre, l'offre la plus importante, mais elle avait renchéri de 20 000 $, avant même d'avoir l'offre, pour être certaine de l'avoir.

Tout ça témoigne d'une rareté immense. Et les gens veulent des maisons, et, actuellement, plus ça va et moins il y en a sur le marché. Ça, c'est la réalité. Les mises en vente ont chuté de 13,2 % en 2023, par rapport à 2022. Donc, déjà, puis je ne sais pas, peut-être qu'il y en a d'autres comme moi qui suivent ça. Moi, j'ai des alertes DuProprio, et j'ai certains secteurs que je surveille, et il se passe des semaines, des semaines sans qu'il n'y ait aucune propriété qui s'ajoute dans le secteur que je surveille, à Laval, aucune, alors qu'il y a eu une époque, avant la pandémie, où il y en avait à toutes les semaines, des alertes. Alors, définitivement, il y a une grande rareté ici, et ça cause, évidemment, une certaine inflation.

• (16 h 40) •

Il y a aussi une rareté de logements, de moins en moins de logements. Il y a des gens qui souhaitent devenir propriétaires et, lorsqu'une maison se libère, bien, ils vont rapidement faire des offres pour être les premiers à l'avoir, parce qu'il n'y en a pas. Et le on sait, dans la loi de l'offre et du marché, quand il n'y a pas d'offre, quand la demande est tellement grande, bien, les prix montent. Ça, il y a peu de choses qu'on puisse faire.

Et je comprends que la proposition, l'intention est de voir les prix baisser. Mais la réalité, c'est que ça a été testé, il y a des juridictions qui l'ont mis en place, et les résultats, bien, ce n'est pas exactement la même chose. Alors, ce n'est pas le côté positif qu'on voudrait lui donner. Alors, il y a plusieurs juridictions qui l'ont fait : la Suède, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, aux États-Unis aussi. Et la Suède, bien, pendant la pandémie, les prix ont augmenté plus rapidement qu'au Canada, alors qu'ici, bien, c'est le système que l'on connaît. Et puis en Nouvelle-Zélande, 25,9 %. Et en comparaison, nous, c'était 16 %. Donc, quand même, un taux quand même supérieur.

Et il y a une étude, là, sérieuse, qui a été menée par le Smart Prosperity Institute, et c'est un organisme de Toronto... pardon, d'Ottawa, très sérieux, une étude exhaustive qu'ils ont menée, puis ils en sont arrivés à la conclusion que, partout où ça a été mis en place, des enchères ouvertes, bien, en fait, comme en Australie, en Nouvelle-Zélande, bien, c'est toujours à la faveur des vendeurs parce que, dans les faits, c'est le prix qui l'emporte sur le reste. Et surtout, d'autant plus quand il y a une rareté, on l'a vu, on le sait, il n'y en a pas, de logements, alors, quand les offres sont ouvertes, celui qui y tient le plus va renchérir sur les autres, et donc, au bout du compte, finalement, ça monte encore plus. Dans les marchés où il y a des enchères ouvertes, c'est ce qui s'est passé.

Alors, je comprends l'intention, mais l'outil ne semble pas être le plus approprié. L'effet boomerang, hein, qu'on parle souvent, il faut bien l'évaluer. Puis, ma collègue l'a mentionné, la réalité, c'est qu'aussi il y a des... Les nouvelles constructions, on le voit, il y en a moins aussi. Non seulement il y a moins de maisons, sur le marché, qui tombent en vente, mais, en plus, il y a moins de construction. On est dans des mises en chantier. En fait, ça a chuté. 32 % de moins de mises en chantier en 2023 qu'en 2022, c'est énorme.

Ça, c'est au Québec, parce que, dans le reste du Canada, c'est vraiment beaucoup mieux, là, que chez nous. C'est au Québec qu'on a le pire, le pire bilan des mises en chantier. Non seulement les coûts de construction ont augmenté, 40 %, mais, en plus, il y a des mesures qui ont été mises dans les autres provinces que nous, on n'a pas faites. L'Ontario, ils veulent tellement être sûrs que ça continue à bien aller, le marché, qu'ils ont retiré la TVQ, par exemple, du locatif, de la construction de locatif, pas chez nous. Nous, on attend. On attend, puis, pendant ce temps-là, bien, le marché se détériore.

Alors, non seulement on a les pires mises en chantier, en plus, j'ai entendu la ministre, un peu plus tôt, parler du programme... le PHAQ, le programme abordable Habitation Québec. Bien, je suis désolée, mais je dois lui dire qu'il y a très peu d'unités qui ont levé de terre jusqu'à maintenant avec ce programme. Si je ne me trompe pas, le chiffre, c'est zéro pour l'instant. Donc, ce n'est pas ce programme-là qui va venir sauver et changer quelque chose à la situation. Malheureusement, on vit les conséquences d'une inaction. Pendant six ans, il ne s'est rien passé avec la CAQ par rapport à la crise du logement.

Maintenant, il y a quand même d'autres solutions qu'on pourrait regarder. Et ma collègue a parlé de la protection... Mon collègue député de l'Acadie et ma collègue, aussi, de La Pinière a parlé de la protection des consommateurs. C'est vrai que... Mais il y a un besoin de renforcer l'encadrement des courtiers. On a vu, malheureusement, des abus, dans les journaux, récemment, puis il y a eu des pénalités d'imposées. Il y a eu des sanctions, mais pas assez, pas suffisantes. Il y en a eu qui étaient peut-être un peu bonbon.

Et les suspensions de permis, quand on fraude littéralement... Parce qu'ici, en fait, c'est ce qu'on tente de faire, c'est de répondre à des cas de fraude, mais le remède qu'on veut faire pourrait créer un effet boomerang. Mais les cas de fraude, on doit mieux les encadrer. Donc, on doit augmenter les temps de suspension de permis, parce qu'actuellement c'est un peu bonbon. Quelqu'un fraude et, au bout du compte, 18 mois après, il peut recommencer à avoir son permis et à vendre des propriétés... à représenter des vendeurs de propriétés ou des acheteurs. Les pénalités, aussi, elles ne sont pas assez substantielles pour décourager le fait...

Et il y a aussi la possibilité... puis c'est une option que, personnellement, je pense qu'on devrait plutôt regarder, c'est l'obligation de dévoiler s'il y a vraiment eu des offres, une fois le processus terminé, simplement pour s'assurer qu'il n'y ait pas eu un courtier qui a dit : Ah oui! il y a eu des offres, puis, finalement, c'était simplement pour faire renchérir une personne, parce qu'il y a eu des cas comme ça.

Mais on ne peut pas présumer de la mauvaise foi. Et ça, c'est mon collègue le député de l'Acadie qui m'expliquait... Dans le Code civil, on devrait présumer de la bonne foi, et non pas de la mauvaise foi, et la proposition qui nous est faite de Québec solidaire, ici, bien, c'en est une où on présumerait de la mauvaise foi. Mais, dans les faits, la proposition qui est faite risque de créer un effet boomerang beaucoup pire que la situation actuelle. Alors, c'est pour cette raison que nous allons nous y opposer. Merci beaucoup, M. le Président.

• (16 h 50) •

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, Mme la députée des Mille-Îles. Et je cède maintenant la parole, pour la réplique de 10 minutes, à M. le député de Laurier-Dorion.

M. Andrés Fontecilla (réplique)

M. Fontecilla : Merci, M. le Président. Nous avons assisté aujourd'hui à un débat très intéressant, un débat d'ordre économique, où nous avons pu constater, en quelque sorte, les différences de points de vue sur certains phénomènes économiques. Mais, au-delà de ce débat sur certains principes économiques, nous avons assisté à une convergence des points de vue, une convergence idéologique, en quelque sorte, une collusion idéologique entre les partis au gouvernement, la Coalition avenir Québec et le Parti libéral du Québec, qui, tous les deux, se disant les partis de l'économie, ont avancé des positions qui, en somme, en somme, contredisent les principes de l'économie capitaliste tels qu'établis par les plus grands penseurs de ce courant-là, c'est-à-dire qu'un marché sain, un marché capitaliste en santé doit reposer sur l'ensemble des informations.

Les deux partis nous ont dit très clairement aujourd'hui, là, que, non, cette loi, dans le cas de l'immobilier, ne fonctionne plus, et ils nous ont cité des études, et j'ai même entendu des études dont les résultats sont mitigés, donc les conclusions ne vont pas clairement dans un sens ou dans l'autre, mais, bref, des études qui nous... des positions qui nous disent que, dans le secteur de l'immobilier, oui, on peut contredire la loi économique et qu'on peut faire, et c'est salutaire, et c'est bon pour l'économie, de faire des marchés... du marché immobilier un marché où on offre... on fait des offres et de la surenchère à l'aveugle. Ça me semble assez contradictoire à la base même.

D'autres intervenants, d'autres collègues, là, ont mis en lumière, en quelque sorte, la contradiction, je dirais, là, entre des intérêts économiques divergents de différents secteurs de la société : d'une part, les acheteurs, qui veulent, évidemment, et de façon légitime, obtenir un bon prix pour une propriété en vente, et, d'autre part, des consommateurs et des consommatrices, qui veulent accéder à la propriété, souvent pour la première fois, à un prix le plus bas possible. Et laissez-moi vous dire, M. le Président, qu'en général les acheteurs, dans l'état actuel, surtout dans l'état actuel du marché, vont avoir un très bon prix pour leur propriété, puisqu'à la base il manque de propriétés en vente et il y a beaucoup de gens qui veulent acheter une propriété. Donc, il y a un déséquilibre. La loi économique nous le dit, encore une fois, ça fait en sorte, de façon structurelle, que ce marché-là va produire des ventes qui sont plus élevées qu'en temps normal, si l'offre et la demande est équilibré. Donc, en ce moment, il y a un avantage net aux vendeurs, puisqu'il n'y a pas beaucoup de propriétés à vendre.

Donc... mais nous, ce qu'on dit, là, on n'est pas en train de dire que l'abolition de la surenchère à l'aveugle va régler la crise du logement, va régler la crise de l'abordabilité, là, pour les jeunes ménages à la propriété. Tout ce qu'on dit, c'est que c'est une mesure qui va ralentir l'augmentation des prix et qui va rendre un peu plus facile l'accès à la propriété pour des jeunes ménages. La tendance structurelle, elle est là, elle est à la hausse, et les acheteurs vont aujourd'hui payer beaucoup plus cher pour avoir accès à la propriété qu'il y a quelques années, avant la crise du logement. Mais ce qu'on dit aussi, c'est que la surenchère à l'aveugle fait en sorte de rendre encore plus difficile parce que ça fait augmenter de façon exagérée les prix de l'immobilier.

Écoutez, je vous ai lu et on vous a apporté quelques témoignages. Je serais tenté de vous en apporter d'autres d'acheteurs qui veulent avoir accès à la propriété et qui ont dû mettre beaucoup plus d'argent. Je pense que la preuve est faite, là, que la surenchère à l'aveugle force les gens qui veulent accéder à la propriété de faire des offres démesurées pour avoir accès à cette propriété-là, et cela va à l'encontre des principes économiques et à l'encontre du sens commun, là, du... Intuitivement, on se dit que, s'il y a des offres à l'aveuglette, on va automatiquement, automatiquement monter les prix. Nous avons tous et toutes vu des films, dans notre vie, des encans, des oeuvres d'art, là, où tout le monde connaît les prix des... qui sont mis sur ce marché-là pour un bien, un bien donné, une oeuvre d'art, là, dans le cas de ces films-là, mais tout le monde connaît l'information, là. Qu'arriverait-il? Et placez-vous dans les mêmes films où on ne connaît pas ce que l'autre a dit, tout ce qu'on sait, c'est qu'il y a quelqu'un qui a fait une offre un peu plus élevée. Bien, voilà, l'acteur économique qui veut avoir accès à ces biens-là va avoir tendance à mettre le paquet, à mettre beaucoup plus d'argent pour avoir accès à, dans ce cas-ci, une propriété.

Mais cela a des conséquences, M. le Président. On nous a... la députée de La Pinière nous a accusés tantôt de faire de l'âgisme parce qu'on a enlevé aux personnes aînées un profit qui leur revenait de droit. C'est sûr qu'il y a un profit qu'ils vont faire, les personnes aînées, lors de la vente d'une propriété, un profit substantiel, mais tout ce qu'on dit, c'est qu'il y a une partie de ces profits-là qui vient d'un phénomène de spéculation et qu'on devrait essayer d'éviter. Parce que je pense qu'ici tout le monde est d'accord, là, on doit contrer la spéculation, surtout dans le secteur immobilier, mais cela a des conséquences sur les ménages qui veulent avoir accès à la propriété, des conséquences qui peuvent être graves non seulement pour ces ménages, mais pour le système, pour la santé du système économique en général.

Tout d'abord, les ménages vont s'endetter de façon considérable, beaucoup plus... ils pourraient s'endetter s'il n'y avait pas eu d'enchères à l'aveuglette. Est-ce qu'ils pourront soutenir ces taux d'endettement à travers 20, 25 ans, 30 ans, 35 ans dans certains cas? C'est aux économistes de répondre, mais si on additionne, on additionne toutes les transactions qui sont faites, qui ont été réalisées et qui ont été achetées trop cher, bien là, on commence à avoir un phénomène économique de la société dans son ensemble et qui affecte l'ensemble de la société.

Donc, il faut colmater une brèche, une petite brèche qui augmente la spéculation immobilière au Québec, là, parce que cela a des conséquences sur les ménages qui s'endettent de façon démesurée, mais aussi ça peut avoir des conséquences sur l'ensemble du système. Encore une fois, l'intérêt individuel d'une personne, d'un ménage qui vend sa propriété de façon... avec un prix exagéré n'est pas nécessairement l'intérêt de la collectivité.

Comme collectivité, nous avons intérêt à ce que les jeunes ménages aient accès à la propriété et nous avons aussi intérêt à ce que les ménages, souvent des ménages composés d'aînés, vendent à un prix juste, non pas un prix exagéré, à un prix juste. Nous ne sommes pas... notre proposition ne vise pas à déposséder les aînés d'un montant qui leur revient pour les donner à des plus jeunes. Non. Nous visons la justice. Nous visons à ce que les jeunes ménages puissent avoir accès à ce qui est considéré comme un rêve légitime dans notre société, et notre chef parlementaire en a fait amplement mention. C'est légitime d'avoir accès à la propriété aujourd'hui, là, pour la classe moyenne.

Et il y a une autre conséquence. Ces ménages là, souvent, ne peuvent pas compétitionner, là, pour atteindre les prix demandés, des prix exagérés, encore une fois, et ils vont... et ma collègue de Verdun l'a mentionné, ils vont rester dans le secteur locatif, ils vont occuper un appartement, ce qui va accentuer la rareté d'unités locatives dans le secteur locatif, alimentant ainsi la crise du logement et la surenchère des prix dans le secteur locatif.

Donc, nous devons favoriser l'accession des ménages, surtout des jeunes ménages, à une première propriété à un prix juste. Ça, nécessairement, on ne veut pas, surtout pas punir les fonds de pension, entre guillemets, des aînés, ils vont quand même, dans le marché actuel, obtenir un prix et un très bon prix, ce qui va assurer leurs vieux jours, là. Tout ce que nous voulons, c'est concilier cette nécessité-là avec la nécessité que les jeunes ménages aussi aient accès à la propriété. C'est le sens de notre proposition et je pense que la CAQ devrait considérer sérieusement cette possibilité-là, de colmater une brèche qui est en train aujourd'hui d'alimenter la fournaise de la spéculation immobilière ici, au Québec. Et c'est un phénomène que n'importe quel gouvernement devrait à tout prix éviter. Merci.

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, M. le député de Laurier-Dorion.

Alors, je mets maintenant aux voix la motion de M. le député de Laurier Dorion, qui se lit comme suit. Je vais tout d'abord la mettre aux voix. Je vais maintenant...

«Que l'Assemblée [nationale] reconnaisse que le Québec traverse une grave crise du logement;

«Qu'elle reconnaisse que la hausse importante des prix de l'immobilier constitue un frein à l'accès de la propriété pour les jeunes familles du Québec;

«Qu'elle reconnaisse que le phénomène des surenchères à l'aveugle peut contribuer à la hausse des prix des maisons;

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement de mettre fin aux enchères immobilières à l'aveugle en rendant obligatoire la divulgation des promesses d'achat simultanées sur une même propriété.»

Cette motion est-elle adoptée? M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

• (17 heures) •

M. Leduc : On demanderait un vote électronique, s'il vous plaît, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Alors, le vote électronique est demandé. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lévesque (Chapleau) : ...de reporter ce vote à demain, à la prochaine période des affaires courantes, s'il vous plaît.

Vote reporté

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Alors, conformément à la demande du leader adjoint du gouvernement, le vote sur la motion de M. le député de Laurier-Dorion sera tenu à la période des affaires courantes de demain.

Alors, M. le leader adjoint du gouvernement, pour la suite de nos travaux.

M. Lévesque (Chapleau) : M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 3 du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 41

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Alors, à l'article 3 du feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné plus tôt aujourd'hui sur la motion du principe du projet de loi n° 41, Loi édictant la Loi sur la performance environnementale des bâtiments et modifiant diverses dispositions en matière de transition énergétique.

Y a-t-il des interventions? Oui, je reconnais Mme la députée des Mille-Îles. La parole est à vous.

Mme Virginie Dufour

Mme Dufour : Merci, M. le Président. Alors, je vais être là, pour un petit moment, debout devant vous. Alors, bon, je vais commencer.

D'abord, bon, nous sommes ici pour discuter d'un projet de loi sur la performance environnementale des bâtiments, et on parle de diverses dispositions en matière de transition énergétique. Et je vais prendre un petit verre d'eau, parce que je vais en avoir besoin. Merci.

Alors, j'ai insisté sur le mot «performance environnementale», parce qu'il a une certaine importance, et je vais y revenir, mais je vais vous décrire un peu... Je vais vous décrire, en fait, la nature, là, du changement législatif, là, qu'on étudie... qu'on a étudié, là. D'ailleurs, on a eu trois jours de consultations, et je vais y revenir, à ce sujet-là.

Donc, ce qu'on propose, ce que le projet de loi propose, c'est d'octroyer des pouvoirs au ministère de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs, donc, pour déterminer les renseignements relatifs à la performance environnementale des bâtiments, pour administrer une plateforme numérique qui permettrait de transférer au propriétaire d'un bâtiment les renseignements relatifs à la consommation énergétique de ce bâtiment — par ce mot, vous comprenez que ça veut dire qu'on va capter, on va aller chercher des données sur les bâtiments — déterminer, par règlement — le mot «règlement» est important ici — les bâtiments auxquels doit être attribuée une cote de performance environnementale — donc, vous comprendrez qu'on va établir une cote, une cote environnementale des bâtiments — ainsi que les méthodes de calcul applicables — parce qu'il n'y en a pas actuellement, donc, comment on va établir la cote — établir des normes en matière de performance environnementale des bâtiments — ça, je vais y revenir, puis là on dit, par exemple, des normes comme pour la réalisation de travaux de construction, de rénovation ou de démolition d'un bâtiment — tenir un registre public de la performance environnementale des bâtiments, et même une obligation d'affichage de la cote et de la performance, et divulgation de la cote obtenue par un bâtiment dans certaines circonstances.

C'est quand même un changement majeur, tout ce que je viens de vous lire, par rapport à ce qu'on connaît aujourd'hui pour nos bâtiments. Et, en deuxième lieu, il y a un autre élément qui est un peu plus technique, mais qui propose de fusionner le Fonds de transition, d'innovation et d'efficacité énergétiques au Fonds d'électrification et de changements climatiques. Donc, ce sont deux fonds distincts qu'on propose de fusionner.

Et donc ça, c'est le projet de loi. Lui, ce projet de loi là... Je vous donne... Tu sais, dans le fond, ce qu'on... ce qu'on comprend, c'est que le projet de loi vise à obtenir des renseignements sur les bâtiments pour connaître leur performance environnementale, leur performance énergétique. Et, également, on souhaite établir un système de cotation qui permettrait... qui va permettre, dans le fond, de connaître la cote d'un bâtiment par rapport à cette performance énergétique, principalement, mais aussi environnementale.

Donc, ça, c'est ce que le projet de loi propose. Puis il propose de modifier, quand même, somme toute, plusieurs lois que je vais vous citer ici, mais notamment la Loi sur Hydro-Québec, la Loi sur le bâtiment, ça va de soi, la Loi sur les normes d'efficacité énergétique, la Loi sur la Régie de l'énergie, la Loi sur la justice administrative, la loi sur certaines mesures d'appliquer les lois en matière d'environnement et de sécurité des barrages, la Loi sur le ministère des Ressources naturelles et de la Faune et, évidemment, la Loi sur le ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs.

Je suis devenue porte-parole, M. le Président, des dossiers environnementaux il y a à peine... un peu moins qu'un mois et je vous avoue que je ne pensais pas me mettre autant dans l'énergie et toutes les consultations que nous avons eues. Ça a été fort intéressant, trois jours de consultations où on a eu les unions municipales, mais aussi Hydro-Québec, Énergir, on a eu des groupes en construction, l'Association des professionnels de la construction et de l'habitation du Québec, l'APCHQ, le conseil... — là, là, je vais... je vais juste terminer au niveau des... de la construction — le Bâtiment durable Québec, on a eu l'Ordre des ingénieurs du Québec, on a eu aussi l'association des constructeurs, et il y a un groupe qui s'est joint avec le Conseil du patronat. Et on a eu plusieurs groupes, aussi, en environnement : le Conseil patronal de l'environnement du Québec, le Conseil québécois des entreprises en efficacité énergétique, la coalition Sortons le gaz!, la Commissaire au développement durable est venue, ça, c'était fort intéressant, Jean-Pierre Finet, un grand spécialiste, Pierre-Olivier Pineau, également, est venu, Vivre en ville, le Centre québécois de droit à l'environnement. Et on a eu aussi des groupes qui représentaient les intérêts plutôt commerciaux, privés, notamment BOMA Québec, qui représentait des centres commerciaux, des grands centres qui font de la location, et aussi la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante et, en terminant, le Centre d'études et de recherches intersectorielles en économie circulaire.

Alors, vous voyez qu'on a... on a touché vraiment, là... on a eu des groupes qui venaient de partout. On a eu aussi des mémoires qui sont venus de d'autres... d'autres sphères, notamment quelques... il y a eu la ville de Saint-Hilaire qui nous a fait parvenir un mémoire.

Et, comme je le mentionnais, je ne m'attendais pas que mon premier projet de loi sur lequel je travaillerais, je toucherais autant à l'énergie. Mais c'est vraiment, vraiment le coeur de ce projet de loi là. Et, quand on le regarde, en fait, c'est... à force d'échanger, d'entendre les commentaires, on réalise que ce projet de loi là est devenu comme nécessaire, parce que le gouvernement a réalisé qu'on pourrait manquer d'électricité. Et ils en ont parlé, le ministre... le ministre de l'Économie, je crois bien, a parlé qu'il y avait des projets qu'il devait refuser... qu'il devait refuser, il y avait beaucoup d'entreprises qui souhaitaient venir au Québec parce qu'on a une électricité qui est propre, par l'hydroélectricité, et donc on manquerait d'énergie.

Mais ce que... puis il y a des groupes qui l'ont souligné, mais, à la base, tout ça, c'est parce qu'on a vendu notre électricité à New York avec... on a eu un contrat avec New York, qui a été fait, et ce contrat-là, bien, permet à la ville de New York de décarboner ses bâtiments. Mais, chez nous, on s'est rendu compte qu'on avait des difficultés, on manquerait d'énergie. Et, d'ailleurs, il y a des groupes qui sont venus nous parler du fait que... Bien, notamment, Hydro-Québec nous a dit : Bien, faites attention à sortir le gaz des bâtiments, ne faites pas ça trop tôt, parce qu'on ne sera peut-être pas capable de fournir tout le monde en électricité. Et parfois, surtout, la pointe semble être... Et ça, on en a tellement parlé, de la pointe, là, M. le Président, pendant ces consultations-là. La pointe énergétique, ça, c'est le moment où il y a le plus de demandes, par exemple, en plein hiver, quand il fait très, très froid et que tout le monde allume les lumières en même temps, le chauffage et le lave-vaisselle, etc. Donc, cette pointe-là est vraiment problématique, et même que ça peut retarder certains projets domiciliaires.

Alors, c'est... ça a été une surprise, tout ça, de découvrir tout ça. On en entendait par les médias, mais, avec ce projet de loi là, je pense que... comme moi, de mon côté, j'en ai vraiment pris conscience, à un point qu'on peut se demander si ce contrat-là va... n'est pas trop pénalisant pour le Québec. Je soulève la question. On n'a pas tous les détails du... quelle serait la pénalité de revenir en arrière sur ce contrat, mais ça semble être vraiment, vraiment problématique, présentement.

• (17 h 10) •

Ce plan-là, en fait, le projet de loi, en fait, je dois dire qu'il est en retard. Il est en retard, parce que le Plan directeur en transition, innovation et efficacité énergétique du Québec de 2018, donc en 2018, prévoyait... ce plan-là prévoyait de doter le Québec d'un système de cotation énergétique obligatoire, ce qu'on parle dans le projet loi, pour les nouvelles constructions et lors de la revente de maisons unifamiliales, d'ici 2023. Ça, c'était l'an dernier. Donc là, on le voit bien, là, qu'évidemment ça n'a pas été mis en place, le plan, ça n'a pas été fait. On est six ans plus tard par rapport à ce plan-là, le plan directeur que je parle, et, maintenant, bien, si on regarde le projet de loi, bien, on commence... ce n'est que le point de départ. Parce que, quand on regarde les intentions réglementaires, les dates que... je pourrai revenir, là, mais les dates dans... au moment que ce sera vraiment en vigueur, tout ça, là, on est très loin dans le temps, on dépasse le 2030.

Alors, maintenant, je vais peut-être vous parler d'une particularité, vraiment, de ce projet de loi là. Je vous dirais que c'est peut-être... j'appellerais ça, peut-être, une mauvaise habitude qui est en train de se... c'est ça, de se faire avec ce gouvernement, c'est l'utilisation du règlement pour établir des... en fait, pour tout établir. Puis, dans ce projet de loi là, j'ai fait le calcul, on le retrouve 54 fois, le mot «règlement». 54 fois, on dit : On établira par règlement une cote relative déterminée par règlement. Et là, après ça, là, tout est déterminé par règlement, tellement que l'ensemble des groupes sont venus nous dire : Bien, on est d'accord, on pense que c'est un projet de loi intéressant, on croit qu'il est nécessaire, mais, par contre, on ne peut pas l'évaluer, on ne peut pas savoir combien ça va nous coûter, combien... ça va être quoi, vraiment, la portée, parce que tout va être établi par règlement, les cas, les conditions, les critères, absolument tout. Tout, tout, tout.

Je comprends peut-être qu'on voulait se donner une certaine flexibilité. J'ai entendu, je crois que c'était un sous-ministre, dire que l'approche réglementaire était nécessaire pour atteindre les cibles. Mais il y a eu, dans le passé, d'autres projets de loi qui ont été faits, dans lesquels il y avait l'objectif d'atteindre des cibles, et il n'y avait pas autant de fois le mot «règlement». Donc, c'est... Et le problème d'un règlement, bien, c'est que ce n'est pas écrit de la... aussi ouvertement qu'un projet de loi. Un projet de loi, on a des consultations publiques où on peut avoir l'ensemble des mémoires, et tout ça est public. Les parlementaires peuvent échanger, poser des questions, questionner, améliorer le projet de loi.

Lorsqu'on est en règlement, bien, à quelque part, il s'écrit derrière des portes closes. Oui, il peut... on peut consulter l'industrie pour faire le règlement, mais on n'en a pas l'assurance, on ne sait pas qui a été consulté. Et, lorsqu'il y a une consultation écrite qui est faite par la suite de l'adoption d'un règlement, la période est courte, mais, surtout, on ne sait pas ce que les autres ont dit, on n'a pas d'échange, et les parlementaires ne font pas partie du processus.

Donc, ça, c'est un élément qui, à mon sens, n'est pas positif dans ce projet de loi là. C'est qu'on a beaucoup trop d'éléments qui sont par règlement, et donc c'est impossible d'évaluer l'impact final ni les intentions gouvernementales, parce qu'elles pourraient changer.

On a eu une rencontre au préalable, avant l'étude... avant les consultations particulières, on a eu une rencontre où on nous a présenté les intentions du gouvernement, mais elles pourraient bien changer six fois entre ici et 2029. On ne le sait pas, tout va se faire par règlement. Donc, c'est bien beau, ce sont des intentions, mais on n'en a pas la certitude. Et donc, moi, j'aimerais savoir : Est-ce que le ministre, lui, va s'engager à dévoiler les intentions visées pour les règlements? Ce serait bien qu'on le sache avant... pendant l'étude détaillée, là, ce serait bien qu'on sache publiquement, ouvertement, quelles sont les intentions derrière chacun des articles qu'on va étudier lors de l'étude détaillée du projet de loi n° 41.

Maintenant, je vais vous parler, M. le Président, des groupes que nous avons entendus et des enjeux qu'ils ont soulevés. On en a entendu, je vous l'ai mentionné, quand même plusieurs, groupes, et il y a vraiment des éléments très intéressants qui nous ont été mentionnés qui, je crois, permettront de bonifier le projet de loi ou, du moins, les futurs règlements, au moins. Donc, peut-être d'abord vous parler... J'avais insisté un peu sur le mot «performance environnementale» parce que le projet de loi parle bien de la performance environnementale des bâtiments, et là des groupes nous ont dit : Bien, la performance environnementale, c'est assez englobant, ça inclut beaucoup de choses, mais, quand on lit le projet de loi, on a plus l'impression que ce qui nous intéresse, c'est la performance énergétique du bâtiment, pas tant l'ensemble de ce que peut toucher la performance environnementale de bâtiments. Alors, c'est pour ça qu'il y a vraiment plusieurs groupes, là, qui nous en ont parlé, notamment... je cherche, ici, je m'excuse, le nom, là, c'est... je fais exprès, là, CPEQ, j'en suis bien... fort désolée, je ne me souviens plus de l'acronyme. Bon, ça fait exprès, je ne l'ai pas. Bon. Le CPEQ nous a dit exactement ça, que les intentions gouvernementales semblent surtout s'intéresser, d'abord, à la performance énergétique des bâtiments, qu'il y a certains éléments qui laissent entendre qu'on pourrait aller plus loin, mais on n'en a pas la certitude, puis là on dit que ça pourrait couvrir, par exemple, la gestion des matières résiduelles ou encore l'impact sur la diversité.

Et là, quand on a eu ces échanges-là, M. le Président, je dois dire que je n'ai pas pu m'empêcher de parler de Northvolt. Northvolt est une usine qui sera peut-être avec une cotation exceptionnelle, une performance énergétique exceptionnelle du bâtiment, mais on n'aura pas pris en considération les milieux humides détruits, les arbres coupés, et ça, et je donne l'exemple de Northvolt, mais ça pourrait s'appliquer dans toutes les sphères, c'est rarement pris en compte dans la... dans la... le cycle de vie d'un bâtiment, mais pourtant ça en fait partie, ça a un impact. Et, quand on retire des milieux humides, ça crée, ça génère des GES.

D'ailleurs, à la ville de Laval, où j'étais précédemment élue municipale responsable des dossiers environnementaux, il y avait une bourse du carbone, genre de bourse du carbone, et, lorsque des développeurs développaient du terrain, bien, ils devaient acheter des crédits carbone, dans le fond, qui servaient... Pourquoi? Parce que ça génère des GES, ça a été quantifié. Et cette bourse-là existait même avant que je sois élue, là, de mémoire, ça existait depuis 2011. Donc, ça fait longtemps qu'on sait que le terrain, quand il est construit, génère des GES, donc... Mais ça, ici, on n'en parle pas du tout, là, dans ce projet de loi là.

Ensuite, il y a la coalition Sortons le gaz!, que nous avons rencontrée, qui nous a parlé de... voilà, qui nous a parlé de faire attention aussi de la façon que... Comme tout va se faire par règlement, ce qu'on sait, c'est que les intentions du gouvernement, c'est de commencer, d'abord, avec les grands bâtiments, on parle des bâtiments de 25 000 pieds carrés et plus, mais plusieurs groupes nous ont dit : Bien, il faut faire attention, parce que les meilleurs gains environnementaux sont peut-être des fois dans les petits bâtiments. On nous a dit... puis c'est ça, les petits bâtiments, quand on regardait l'échéancier qui est proposé dans les intentions gouvernementales, bien, les petits bâtiments n'étaient pas vraiment visés. Éventuellement, oui, pour capter l'information, mais pas nécessairement pour améliorer l'efficacité énergétique. Mais là il y a beaucoup de groupes qui nous ont parlé du potentiel d'énergie qu'il y aurait dans ces... on parlait de 2,5... l'équivalent de deux fois et demie la Romaine en électricité qui pourrait être récupérée dans les bâtiments construits avant 1960, bâtiments résidentiels, je dis bien. Donc, c'est beaucoup, beaucoup d'énergie qui peut être récupérée, c'est évidemment beaucoup d'améliorations pour... Et on comprend que c'est peut-être plus simple de commencer par les grands bâtiments, mais les groupes voulaient nous dire : N'oubliez pas les petits.

Et, regardez, un autre élément que j'ai ici, c'est, selon l'expert Philippe Dunsky, qui a été cité beaucoup pendant la commission, le potentiel d'efficacité énergétique du Québec se situe entre 30 et 50 térawattheures d'ici 2050, mais seulement... ce gain est seulement réalisable si une réglementation rigoureuse est mise en place. Donc... et donc c'est pour ça que la coalition disait : Considérant les coûts économiques, sociaux, environnementaux liés au déploiement de nouveaux approvisionnements énergétiques, bien, on s'explique mal pourquoi la majorité des bâtiments seraient exclus du cadre réglementaire projeté. Donc, c'est ce qu'ils nous soulignaient, qu'il y aurait peut-être... il faudrait peut-être regarder de ce côté-là aussi, des petits bâtiments.

• (17 h 20) •

Par la suite, il y a des groupes qui nous ont parlé de la notion, et là j'ai appris un mot, je vais vous dire, le carbone intrinsèque. Je n'avais jamais entendu ce mot avant, auparavant, et donc on découvre, on apprend. Et là, bien, il y en a quand même plusieurs groupes qui nous ont parlé de ça. Et le carbone intrinsèque, dans le fond, ça fait référence aux émissions associées à l'ensemble du cycle de vie du bâtiment. Et, tout à l'heure, je vous parlais des milieux humides. Bien, les milieux humides pourraient faire partie du calcul du carbone intrinsèque. Donc, on nous a parlé de... c'est associé à la fabrication, au transport, à l'installation des composants du bâtiment, mais également la démolition. Parce que, ça aussi, il y a un coût, il y a un coût environnemental à la démolition. Donc, ça, c'était fort intéressant, de... Et ça, c'est le... le CERIEC et l'ETS qui nous en ont parlé, et ils nous ont parlé aussi qu'en fait, en France, le carbone intrinsèque, il est calculé depuis 2016, il est pris en compte. Et aussi la ville de Vancouver s'est donné des objectifs, pour le carbone intrinsèque, de réduire de 40 %, d'ici 2030, pour les nouvelles constructions. C'est un objectif très ambitieux. J'ignore si le gouvernement se donnera un tel objectif, parce qu'il n'y a nulle part qu'on parle, dans le projet de loi, de carbone intrinsèque, mais il y a une belle opportunité ici d'ajouter ce concept... de ce concept au projet de loi.

Par la suite, dans les... je pense que c'est l'élément peut-être qui a été mentionné le plus souvent, de... par le plus grand nombre de groupes, c'est le fait que le projet de loi prévoit qu'il y aura un code du bâtiment durable, distinct du code du bâtiment, donc, et le code du bâtiment durable serait sous l'égide du ministère de l'Environnement, alors que le code du bâtiment, lui, serait sous l'égide de la Régie du bâtiment du Québec. Et, pour opérer ce changement, le projet de loi prévoit de retirer du... dans le fond, de la portée de la... voyons, de la Régie du bâtiment, l'efficacité énergétique, donc retirer tout ce qui est efficacité énergétique du code du bâtiment pour que ce soit dans un code du bâtiment durable. Donc, on comprend l'objectif, c'est qu'on dit : Dans le fond, le ministère de l'Environnement est celui qui est... qui connaît le mieux tout ce qui est efficacité énergétique, donc ça devrait être nous qui le faisons. Mais tous les groupes ont convenu, et c'est vraiment... je pense qu'il y en a un qui pensait autrement, tous les groupes ont dit : Bien, la multiplication des codes complexifie trop les choses.

Et, on le voit, actuellement on le voit, il y a beaucoup de gens qui réfléchissent à la crise du logement et à des solutions. Et, quand on voit que toutes les villes peuvent avoir leur code du bâtiment distinct du code du bâtiment du Québec, bien, ça complexifie les choses pour les développeurs, c'est la même chose si on rajoute d'autres codes. Puis il y a, en plus, le code national, au niveau canadien, du bâtiment. Alors, tout ça, ça fait beaucoup, beaucoup de multiplications.

Et l'Ordre des ingénieurs nous en a parlé, et je pense que leurs mots sont les plus appropriés pour bien décrire la situation : «...l'ordre est d'avis que la dispersion des normes de construction dans plusieurs outils réglementaires adoptées par différentes instances risque d'entraîner un manque de cohérence et un problème d'application inégale de ces normes.

«La détermination de normes en matière de construction constitue un exercice complexe qui requiert une expertise poussée.» Et là ils nous disent que, partout au Canada, ce n'est qu'un seul organisme qui fait ça.

Et, écoutez bien : «L'ordre estime que la RBQ — la Régie du bâtiment du Québec — est le seul organisme qui détient l'expertise requise pour déterminer des normes de construction applicables à l'ensemble du territoire [du Québec].» Alors, visiblement, là, on ne croit pas que le ministère est l'instance qui a l'expertise pour créer le code du bâtiment durable. Mais tous les groupes ont dit : Par contre, ce serait vraiment bien que le ministère travaille de concert avec la régie pour établir des meilleures normes d'efficacité énergétique dans le code du bâtiment, mais ne créons pas deux codes, s'il vous plaît. Il y a même eu la discussion, à savoir : Bien, est-ce que ce serait correct si c'est dans le même cartable, les deux codes dans le même cartable? Le problème ce n'est pas physique, c'est... il faut qu'il y ait une cohérence. Et ça, c'est un enjeu, là, qui a été soulevé aussi par l'ordre.

Ils ont soulevé d'abord que... bien, c'est ça que... Il y a des normes, dans le code du bâtiment, qui touchent l'efficacité énergétique, mais sans être nécessairement directement liées à l'efficacité énergétique. Et un exemple qu'on nous donnait, c'est la ventilation. Les normes de ventilation vont avoir un impact sur l'efficacité énergétique, même si, dans les faits... puis ça, ça resterait dans le code de construction. Donc, c'est évident qu'il pourrait y avoir de l'incohérence. Le Code de construction pourrait dire une chose, avec des normes... Et, d'ailleurs, on nous a soulevé, à un moment donné, des... On nous a dit : Bien, il y a des enjeux, des incohérences dans le code, actuellement, il doit être mis à jour parce qu'il y a certaines normes de ventilation qui font en sorte que, dans le fond, ce n'est pas... ce n'est pas efficace pour l'énergie et pour... qui est consommée dans un bâtiment, ce n'est pas efficace pour un bâtiment. Et donc il y a définitivement un ménage à faire dans le Code de construction par rapport à l'efficacité énergétique, mais on croit que c'est vraiment la régie qui devrait le faire. Donc, ça, c'était assez unanime.

Une inquiétude qui a été soulevée par les deux unions municipales, mais par d'autres groupes également, Vivre en ville en a fait parler... en a parlé, le Centre québécois du droit à l'environnement, il y en a eu d'autres, qu'on craint une atteinte à l'autonomie municipale. Et ça, ça a été soulevé parce qu'il y a deux articles, l'article 29 et l'article 30, qui viennent dire que le... que tout règlement municipal qui viendrait toucher la même nature que ce projet de loi deviendrait inopérant, caduc, et que... et que des municipalités qui avaient de telles normes, précédemment, auraient six mois pour obtenir l'autorisation du ministre pour aller... pour qu'elles restent, dans le fond, toujours en fonction. Et là on comprend que... je pense que ça s'adressait surtout à un cas de figure, qui est la ville de Montréal, qui, elle, a des... a fait son propre code du bâtiment. Dans le fond, c'est l'élément qui nous a été mentionné le plus, c'est que les villes ont été plus proactives, dans le passé, que le gouvernement, plus rapides, et donc que, si on empêche les villes d'avoir des normes plus strictes, bien, c'est un peu... on va prendre un retard. Et les villes ont été des leaders, pas toutes les villes, mais certaines villes ont amené d'autres villes à l'être, et, au bout du compte, ce qu'on nous dit, c'est que ces deux articles-là seraient un très grand recul.

Le ministre a parlé de ses intentions, mais, encore une fois, ce n'est pas dans le projet de loi, mais ses intentions, c'était surtout de s'assurer que les villes, lorsqu'elles mettent en place un règlement, qu'elles ne... n'omettent pas les... tous les paramètres par rapport à l'énergie. Ça revient à ce que je vous disais au début, on est toujours dans la question de l'énergie, assurer l'énergie. Et je ne sais pas combien de fois le ministre a dit : Il faut assurer l'approvisionnement de la pointe. La pointe, ça, c'est bien important.

Alors, les... ça reste que la façon que c'est rédigé présentement, ça devra être modifié pour que ça représente cette intention-là. Parce que là, on parle de toute norme qui touche... qui touche, dans le fond, la performance environnementale des bâtiments. Et l'Union des municipalités du Québec a fait une grande... une grande liste de tous les types de règlements municipaux qui sont déjà... que les municipalités régissent déjà, et qui touchent les performances, la performance environnementale d'un bâtiment. Parce que la définition de performance environnementale est large, je vous ai parlé de matières résiduelles, ça, c'est un exemple, mais il y a des villes qui ont des réglementations sur les toitures, toitures blanches, végétalisées, évidemment, des normes d'implantation qui favorisent l'énergie passive, il y a des équipements qui sont encadrés, les systèmes de ventilation. Par exemple, nous, à Laval, on avait mis une interdiction pour tous les systèmes de climatisation refroidis à l'eau, parce que ça prenait énormément d'eau, et, comme on le sait, l'eau est une ressource précieuse, donc ça aussi, ce serait touché, l'utilisation de matériaux de... recyclés, des exigences concernant les eaux de pluie, l'imperméabilisation des sols, des aménagements pour vélos, etc. Vous comprenez, là, qu'il y a énormément d'éléments dans les règlements municipaux qui pourraient venir, dans le fond, en compétition avec la performance environnementale des bâtiments, telle que décrite actuellement dans le projet de loi. Et donc... et donc c'est ça, ça rendrait inopérants de nombreux règlements municipaux sur d'autres objets.

• (17 h 30) •

Ensuite, les villes... ça, c'est Vivre en ville qui nous l'a dit, les villes, bien, ce sont des acteurs, je l'ai dit, des acteurs de changement et des acteurs en termes de transition énergétique. Je vous ai mentionné toute une série de normes sur lesquelles les municipalités interviennent. Bien, Vivre en ville nous a dit : Bien, pourquoi est-ce qu'on n'utilise pas les villes, avec un soutien technique et financier, pour, finalement, en faire des médiateurs importants pour atteindre nos objectifs de transition énergétique? Alors, j'ai trouvé ça intéressant qu'on souhaite, qu'on propose d'utiliser les villes comme leviers, au lieu que tout part du gouvernement, qu'on utilise les villes... Évidemment, à chaque fois qu'on leur demande un... on leur donne un nouveau mandat, elles demandent aussi des sommes équivalentes, et c'est une question que... De toute façon, le gouvernement aura lui aussi des sommes à mettre, donc il pourrait passer par les villes.

Ensuite, il y a un autre élément qui a été soulevé, c'est tout ce qui est le fardeau administratif, la paperasse. Ça, ça a été mentionné, parce que le projet de loi est assez... décrit assez en détail ce qui pourrait être collecté. Et je vais vous donner un exemple, M. le Président. Je cherche ici... Alors, on dit que «tout propriétaire d'un bâtiment»... et là on dit «déterminé par règlement». Alors, il faudra voir qui sera couvert, mais, si on est... fait partie des chanceux, bien, on va devoir déclarer au ministre la consommation énergétique d'un bâtiment, sa localisation, sa superficie — ça, ce n'est pas si pire, on n'est pas trop encore... c'est assez générique — l'utilisation qui en est faite, le type d'énergie qui est consommée et le moment où cette énergie est consommée — le moment, ça, c'est quelque chose — les matériaux utilisés lors des travaux de construction et ensuite le nom, les coordonnées d'un propriétaire. Mais le moment où l'énergie est consommée, ça peut aller dans beaucoup de détails, et il y a des groupes qui nous ont parlé que ce ne serait peut-être pas si simple que ça à aller chercher, ces données-là. La localisation, travaux, bon, ce n'est pas si pire.

Puis là il y a un groupe qui est venu nous parler qu'eux ont fait... ont mis en place un système comme ça, mais volontaire. Donc, c'était le groupe BOMA, qui représente des centres... des centres commerciaux, notamment, des espaces commerciaux, et ils l'ont fait de façon volontaire. Ils nous ont dit : C'était... C'est quand même assez complexe d'aller chercher l'information chez des locataires — et là je parle de locataires commerciaux — donc, pour l'ensemble d'un bâtiment. Et là tous les groupes ont dit : Bien, il faut avoir l'information pour un bâtiment, mais, quand un bâtiment inclut 120 compteurs, et chacun a sa forme d'énergie et sa propre... sa propre facture, ce n'est pas si simple que ça de consolider l'information. Donc, ça, ici, il y aura quand même beaucoup de questions qui vont devoir se poser lors de l'étude détaillée.

Et là, c'est ça, exactement, l'APCHQ, donc, c'est la... je ne veux pas les déformer, l'Association des professionnels de la construction et de l'habitation du Québec, nous ont dit : Bien, écoutez, là, les entrepreneurs, déjà, évaluent de 10 % à 25 % le temps alloué dans une semaine pour répondre aux formalités administratives et réglementaires. On parlait... Tout à l'heure, dans la motion, juste avant, on parlait des coûts de construction qui ont augmenté. Il y a des gains à faire ici, là. 10 % à 25 % du temps alloué pour répondre à des formalités, ça, ça pourrait... en réduisant les formalités administratives, on pourrait réduire certains des coûts de construction.

Et on nous dit, c'est ça, que les... Puis là, c'est ça, le projet de loi, lui, prévoit que le propriétaire devra fournir une étude... une étude, là, pour établir la cote de performance, mais ça va être aux frais du propriétaire, donc, et là il y avait... il y a eu une... Tout le monde l'appelle le RAI, là. Pour moi, c'est un terme nouveau, là, mais c'est... dans le fond, c'est l'analyse réglementaire qui a été faite et... l'AIR, pardon, c'est ça, l'analyse de l'impact réglementaire. Là, dans cette analyse d'impact réglementaire là, on évaluait les coûts, pas tant... pas si élevés que ça, mais l'industrie nous dit : On pense qu'elle est assez insuffisante. Ici, on parlait de... que, peut-être, ça pourrait représenter quatre heures, en moyenne, par bâtiment, à 27 $ de l'heure, donc 108 $ par bâtiment, mais tout le monde nous a dit : Ah! c'est plus complexe que ça et ça va prendre... ça va coûter pas mal plus cher que ça.

Donc, ça, c'est un élément comme... on ne sait pas trop comment ça va se faire, mais personne n'était capable d'évaluer réellement les coûts que ça allait représenter pour eux, les surcoûts. Et je vous ai parlé, là, de...

Ah oui, je veux juste revenir aux formalités administratives. Il y a aussi le Conseil du patronat et le FCEI, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, qui nous ont parlé aussi de ça, que c'était leur grande priorité, qu'il faut absolument que... La paperasserie a coûté, en 2020 seulement, 2,3 milliards aux PME, PME québécoises. Déjà, on le dit, on l'entend tous les jours, ces temps-ci, les PME sont égorgées, à bout de souffle. Ce sont celles qui ont eu les plus grandes hausses de taux des tarifs d'Hydro-Québec. Bien, en plus, on leur demande tellement de paperasse qu'en 2020 ça leur en a coûté 2,3, milliards. C'est sûr que ça affecte notre PIB, ça, M. le Président.

Et donc le gouvernement du Québec avait introduit le principe de un pour un dans des... dans une politique, là, gouvernementale qui avait été attablée, la Politique gouvernementale sur l'allègement réglementaire et administratif. Ça, ça avait été adopté. Mais ce qu'on constate avec le projet de loi, selon les groupes ici, c'est qu'on est plutôt devant le fait que ce serait un projet de loi qui augmenterait de façon assez substantielle le fardeau administratif. Ça, c'est un enjeu qui a été soulevé.

Et je vous ai parlé de BOMA, qui parlait de la difficulté d'obtenir les données de ses locataires, bien, eux, ils nous ont cité l'Ontario, qui a en place une réglementation comme ça depuis déjà quelques années. Mais l'Ontario a mis l'emphase d'abord, comme le Québec vise, sur les bâtiments de 25 000 pieds carrés et plus. Et l'Ontario, ça leur a pris... Non, en fait, ce n'est pas vrai, ce n'est pas 25 000 en Ontario. Ça, c'est ce que nous, on vise, chez nous, avec le projet de loi n° 41. Non, l'Ontario, c'étaient plutôt les bâtiments de 50 000 pieds carrés, donc un peu... Il y a moins de bâtiments qu'ils couvraient. Ça leur a pris cinq ans, cinq ans, M. le Président, pour obtenir toutes les données énergétiques, toutes les divulguer. C'est... Ça démontre qu'il y a quand même un certain... il y a un certain défi pour aller chercher ces données-là, que... Actuellement, là, comme je disais, les intentions réglementaires amènent ça dans un délai quand même plus court, parce qu'on a des objectifs à atteindre de réduction de GES, mais ça ne semble pas réaliste, présentement, ou du moins, en tout cas, si on compare avec l'Ontario, il faudra se trouver un système plus efficace pour aller chercher les données, c'est certain.

Ensuite, bien, c'est ça, l'APCHQ a fait un parallèle avec la ville de Montréal — et là je cherche le mémoire de l'APCHQ, ça fait exprès, je l'ai mis de côté — ils ont fait le parallèle avec la ville de Montréal, qui demande des normes, des données un peu similaires, là. Ça fait exprès, je le cherche, je ne le trouve pas. Bon, bien, je vais essayer... Ah! il est là. Excusez-moi. Donc, ils ont fait le parallèle, et c'est quand même assez... c'était assez coûteux, de mémoire, à Montréal et... Voilà, ici, ils sont... En fait, ils ont mentionné que ce serait très important d'avoir une ligne d'appel, que ça, à Montréal, ça avait fait vraiment toute la différence. À Montréal, avec l'expérience, ils croient qu'il faudrait que les données soient vérifiées par une tierce partie. Mais, encore une fois, c'est ça, c'est la difficulté d'aller chercher les données qui les inquiète. Et ils se questionnent — ça, c'est intéressant — sur la capacité de main-d'oeuvre pour recevoir toute cette information-là dans un contexte de grand projet énergétique, de pénurie de main-d'oeuvre et de criants besoins de construction d'unités d'habitation pour remédier à la crise actuelle.

Effectivement, on n'arrête pas d'en parler, il faut construire du logement, mais construire du logement, ça va prendre de la main-d'oeuvre. Actuellement, on n'en construit pas assez, là. On construit... On a... On construit à peu près le tiers de ce qu'on devrait construire pour essayer de rattraper un retard. Alors, si on rattrape ce retard-là, on s'entend qu'il y a beaucoup de gens qui vont se déployer dans le domaine de la construction.

Mais en même temps on a des grands projets. Il y a Hydro-Québec qui a annoncé qu'il voudrait investir 155 milliards, il y a Northvolt qui arrive, et toute l'industrie de la filière batterie, il y a plusieurs projets, et plus l'ensemble des projets que les municipalités veulent faire. On est déjà en pénurie de main-d'oeuvre, l'équation ne marche pas. Alors, comment le gouvernement va s'assurer qu'il y a... la main-d'oeuvre, les ingénieurs, les entrepreneurs pour faire ces cotations-là soient en nombres suffisants pour y arriver? C'est une question à... qui a été soulevée.

• (17 h 40) •

Ensuite, vous ne serez pas surpris que plusieurs groupes ont soulevé la question sur les coûts, les coûts que ça pourrait représenter pour eux d'aller chercher l'information mais aussi de mettre à niveau les bâtiments, éventuellement. La Fédération québécoise des municipalités s'inquiétait pour les... parce que la fédération représente des plus petites municipalités, et ils ont écrit : «...le projet de loi entraînera assurément des coûts importants pour les municipalités qui devront se conformer à de nouvelles exigences tant pour la mise à niveau de leurs bâtiments, la déclaration [de] données énergétiques relatives à ces bâtiments et pour la vérification et l'audit de ces données.» Donc, ce qu'ils souhaitent, c'est évidemment qu'ils soient compensés pour ça.

Il y a eu aussi des... d'autres groupes qui en ont parlé. Je cherche les... C'est ça, il y a des groupes comme la CPEQ, qui a mentionné que ce serait quand même difficile à estimer, les coûts pour les entreprises, en l'absence d'orientations concernant l'exercice des pouvoirs. Comme je vous disais, tout va se faire par règlement, donc c'est difficile d'évaluer, mais il y aura certainement un coût. Et actuellement on n'a aucune idée s'il y aura des sommes qui seront prévues.

Et là je vais vous mentionner la France, qui a... qui a mis en place, en fait, un programme similaire. Puis on semble beaucoup s'être inspiré de la France pour ce projet de loi, mais la France a débloqué un budget de 5 milliards d'euros pour son programme de rénovation énergétique, 5 milliards d'euros. Au prorata, si on prend en compte du taux de change, bien, ce serait autour de 900 millions de dollars pour le Québec, que ça représenterait. Quand on entend le ministre des Finances nous dire que... bien, qu'il n'y a plus de marge de manoeuvre et que toute nouvelle dépense devra être empruntée, bien, je pense que c'est assez évident qu'on n'a pas la marge de manoeuvre pour un programme de 900 millions. Alors, avant de mettre tout ça en place, si ce sont nos entreprises qui doivent payer, si ce sont les municipalités, au bout du compte, c'est le même citoyen, si ce sont les citoyens eux-mêmes, ça... on n'arrivera pas. Donc, il faudra s'assurer que ce soit le plus efficace possible et les coûts les moindres possible pour tout le monde, parce que la facture environnementale pour... la facture, pour le gouvernement, pourrait être très élevée.

Et, juste pour vous donner une idée, là, je vais poser des questions au gouvernement. Mais est-ce qu'on a une évaluation de l'état des bâtiments gouvernementaux? Parce que le gouvernement aussi sera visé par ce règlement. Combien ça va coûter les mettre aux normes, les écoles, les hôpitaux, les CHSLD? On le dit, partout on le sait, que l'état, malheureusement, des bâtiments est déficient, et il y a certainement des gains énergétiques à faire, mais il y aura des coûts.

Et, pour vous donner une idée, actuellement, j'en ai parlé beaucoup, là, dans divers échanges avec la ministre de l'Habitation, mais les HLM, les habitations à loyer modique, il y en a plusieurs qui sont barricadés, qui sont inutilisables parce qu'ils sont trop... qu'ils sont trop désuets, trop dépéris, malheureusement. Et donc il y a une cotation, là, qui a été faite, les immeubles ont tous été évalués, c'est un type de cotation de A à E, E étant les bâtiments les plus... qui ont besoin de plus d'argent à investir, ceux qui sont les plus dépéris et souvent qui sont inhabitables ou presque. Il y en a qui sont habitables, mais il y en a quand même plusieurs qui ne le sont pas. Et donc il y a eu un nouveau programme qui a été mis en place, qui était suite à des sommes qui venaient du fédéral, pour les HLM, directement. Ça, c'est des sommes qui ont été signées en 2020, et seulement en 2023 le programme est arrivé. Il n'a toujours pas été utilisé, ce programme, et ça, la ministre sera questionnée là-dessus, éventuellement. Mais ce qu'on a appris, c'est que seules les unités cotées E depuis au moins cinq ans vont être admissibles à la première phase de ce programme-là, les cotées E depuis au moins cinq ans. Ceux-là sont vraiment maganés, ces immeubles-là, et c'est seulement eux qui auront accès aux sommes. Alors, on peut se poser la question : Comment on pense arriver, un jour, aux C, aux immeubles C et B pour les mettre à niveau pour atteindre la performance environnementale qui serait visée dans ce projet de loi là? Ça risque de demander des sommes très, très, très importantes.

Et je ne peux pas m'empêcher, M. le Président, de mentionner que c'est quand même le gouvernement de la CAQ qui a mis fin au programme RénoVert, qui avait pourtant permis la rénovation de milliers de bâtiments. C'était un programme qui était très efficace. Il y a un autre programme, mais les groupes nous disent : Il faudrait... il faudrait vraiment ramener RénoVert, les deux, ensemble, seraient complémentaires. Mais le programme qui est actuel, actuellement, il est trop limité dans ce qu'il est possible de faire avec ce programme-là. On n'atteindrait pas les objectifs du projet de loi, ça, c'est certain, avec le programme qui est actuellement en vigueur. Donc, RénoVert, lui, par contre, s'approchait de ça.

Maintenant, je voudrais peut-être parler du... bon, ça, j'en ai déjà parlé, le potentiel de l'efficacité énergétique qu'on peut aller chercher dans nos bâtiments, mais c'est quand même impressionnant, là, les chiffres. Je vais peut-être juste vous le mentionner, parce que l'APCHQ a fait une étude à cet effet, et je vais juste... Je vous ai parlé des bâtiments avant 1960, là, qu'on... qu'il y avait tout un gisement énergétique, là, dans ces bâtiments-là, je cherche le chiffre, mais c'était, de mémoire, entre 11 et 15. Ah! voilà, ici. On dit, donc : «Négliger les bâtiments résidentiels neufs et existants serait de se priver d'un potentiel de 11 à 15 térawattheures en gains d'efficacité énergétique.» C'est immense. On a parlé qu'il nous fallait 100 térawattheures à aller chercher, et c'est le grand plan d'Hydro-Québec, et on en a 11 à 15 térawattheures seulement dans le bâtiment résidentiel neuf et existant. Au lieu de construire des nouveaux barrages, on devrait investir dans l'efficacité énergétique, ça, c'est clair. Ce sont... C'est ce que les chiffres nous disent.

Ensuite, je vais peut-être vous parler d'Hydro-Québec, qui est venue nous parler, puis il y a eu des échanges fort intéressants. Mais ce qu'ils nous ont dit, c'est que... Puis c'est une des inquiétudes, avec le projet de loi, que plusieurs groupes nous ont dit, c'est : On a peur que ça n'aille pas assez vite, parce que, comme tout va se faire par règlement, puis on ne sait pas qu'est-ce que les règlements vont prévoir puis dans combien de temps ces règlements-là vont sortir, bien, on aimerait qu'en attendant, là, il y a des gains plus rapides. Et Hydro-Québec nous a... nous a dit : Bien, il serait... dans leur mémoire, il serait... il sera essentiel que les règlements visant l'adoption de ces normes soient présentés sans tarder. Et ils nous disent : Voici quelques mesures qui pourraient être envisagées pour des gains rapides, tout de suite. Dans les nouvelles constructions, on pourrait déjà exiger des systèmes de chauffage plus performants et éprouvés avec des thermopompes, par exemple, et ça, ça ne serait pas compliqué, parce que, là, on parle de nouvelles constructions, donc... et généralement, c'est... le bénéfice va être pour la personne qui va faire construire son... soit sa maison, soit le condo, va bénéficier des factures d'électricité réduites immédiatement, améliorer les exigences relatives à l'isolation de l'enveloppe du bâtiment, isoler le toit, les fenêtres Energy Star. Ça, c'est la base, on devrait déjà être là, M. le Président, on devrait déjà, tout le monde, avoir une... tu sais, les nouvelles constructions devraient toujours avoir ces standards-là, intégrer des systèmes connectés permettant la gestion de leur demande de puissance des thermostats connectés, donc ça, c'est... ça va de soi, ça devrait... on devrait tous être là, dans les nouveaux... les nouveaux bâtiments. Et ils nous disent qu'une mise à niveau de la formation de la main-d'oeuvre va s'imposer, et pour... parce qu'évidemment il y aura plusieurs... en fait, il va y avoir énormément de besoins de formation après le... après l'adoption de ce projet de loi là pour que tout puisse se mettre en place.

• (17 h 50) •

Il y a le bâtiment... le groupe Bâtiment durable du Québec qui nous a parlé qu'il y avait un enjeu — ça, c'était intéressant — de mesurage net de la part d'Hydro-Québec. Et là, ça, c'est un autre terme que j'ai appris, M. le Président, après le carbone intrinsèque, mesurage net, je ne connaissais pas. Et donc ce qu'on expliquait, dans le fond, M. le Président, c'est que, lorsqu'un bâtiment a une mesure, par exemple des panneaux solaires, hein, si on est... Je vais vous donner l'exemple concret qu'on a discuté, la bibliothèque de Varennes. Moi, j'ai été la visiter il y a plusieurs années, c'est très impressionnant, c'est un bâtiment net zéro, c'est comme ça que ça a été construit. Mais elle n'est pas capable d'être net zéro, actuellement, parce que, lorsque les panneaux solaires sont à leur maximum en été, elle consomme beaucoup moins que ce qu'elle produit, la bibliothèque, et donc les panneaux solaires produisent de l'électricité qui s'en va dans le réseau d'Hydro-Québec, mais elle ne peut pas avoir de crédits pour cette électricité-là qu'elle produit. Et donc, en hiver, quand il en manque un peu, parce qu'en hiver, on sait, c'est plus... c'est plus froid, il y a moins de soleil, il y a moins d'heures d'ensoleillement aussi, bien, dans ce temps-là, elle doit acheter, elle doit acheter l'électricité, alors qu'elle en a produit gracieusement pour Hydro-Québec tout l'été. Et donc elle ne peut pas être considérée net zéro, parce que net zéro, ce serait qu'on... il n'y a pas de consommation d'électricité, mais, dans les faits, c'est un bâtiment qui l'est.

Alors, ce qu'il nous expliquait, c'est le mesurage net qui est bloqué, actuellement, par Hydro-Québec, et il faudrait augmenter, là, il nous expliquait qu'ils devraient passer de 50 kilowatts à 500 kilowatts pour la catégorie des bâtiments institutionnels, commerciaux et industriels, et ça, ça nous permettrait d'aller chercher toutes... vraiment beaucoup d'opportunités pour la production locale d'électricité renouvelable, puis là on parle vraiment de solaire. Puis il y avait un portrait fort intéressant sur le site de Radio-Canada aujourd'hui ou hier, mais il me semble que c'était aujourd'hui, sur le solaire, et il y a également mon collègue le député de Jacques-Cartier qui a parlé des microréseaux, qui a fait une proposition sur les microréseaux, une lettre ouverte à ce sujet-là, et ça permettrait d'aller chercher beaucoup, beaucoup d'électricité, là, les chiffres étaient là aujourd'hui, alors... mais pour que ce soit attrayant, il faut que l'investissement en panneaux solaires puisse être récupéré avec une réduction de la facture d'électricité en hiver, c'est bien évident, parce qu'autrement, bien, c'est pour ça que ça ne décolle pas, là, le solaire. Et en Ontario il s'en vend beaucoup plus parce qu'il y a des mesures beaucoup plus intéressantes, en Ontario.

Et là je terminerais la présentation des groupes avec la... juste un mot sur la Vérificatrice générale du Québec, qui est venue... pardon, la Commissaire au développement durable, plutôt, excusez-moi, je me suis trompée, Commissaire au développement durable qui est venue nous parler, elle, de vraiment l'intégration des deux fonds, là — je vous avais parlé que c'était un deuxième élément, c'était un peu plus technique — les fonds d'électrification et le fonds de transition énergétique, là, je ne me rappelle plus exactement les noms exacts, là, parce que ce sont de très, très longs noms, les fonds, mais... voilà, Fonds d'électrification et de changements climatiques et fonds... eh mon Dieu! Je ne retrouve pas le deuxième nom. Bon, en tout cas, ces deux fonds-là, quand ils vont être fusionnés, la commissaire, ce qu'elle nous indique, c'est l'inquiétude qu'en fait il y ait un problème de gouvernance, parce qu'elle a déjà dans le passé soulevé ces enjeux-là que... Et, suite aux enjeux qu'elle avait soulevés, bien, il y a eu un changement de gouvernance, mais là on propose encore un changement de gouvernance.

Alors, ce qu'elle se demande, c'est comment on va être capables de suivre la transition énergétique, comment on va être capables de suivre les cibles de la Politique énergétique 2030, qui avaient été transférées au plan directeur en 2022, qui va être réellement responsable de la transition énergétique après ce changement-là, parce qu'il y a comme deux ministères qui étaient impliqués dans ces fonds-là. Donc, bref, il y a des enjeux, et ça, ce sera à surveiller, M. le Président.

Et je vais terminer mon intervention en parlant de propositions que mon parti politique avait faites en 2022. Donc, je voudrais revenir sur la plateforme ECO. Il y a eu, à l'époque, des gens qui riaient de l'hydrogène, mais il y avait quand même des éléments fort intéressants dans cette plateforme qui concernaient aussi les transitions énergétiques, et on disait : «Pour assurer une transition énergétique tout en développant notre économie, nous devrons aussi nous assurer d'avoir les quantités d'énergie propre nécessaires pour soutenir la production [...] l'électrification de notre économie. Nous devrons donc assurer la relance de notre approvisionnement en électricité en mettant en place un plan ambitieux.» On parlait de réduire le gaspillage énergétique des deux tiers d'ici 10 ans, ça, c'était ambitieux — ce qu'on n'a pas avec le projet de loi, on n'a pas de cible — et donc l'équivalent de deux fois l'énergie produite par le complexe La Romaine. On parlait de développer nos capacités de production éolienne et solaire en partenariat, évidemment, avec les communautés locales et les peuples autochtones. On parlait de contrôle des systèmes d'éclairage intérieur et extérieur, d'optimisation du chauffage, de la ventilation, du conditionnement d'air. On a même parlé de récupération de chaleur, du dimensionnement des équipements. Ça, ça a été soulevé, là, dans des mémoires, là, qu'on visait, avec le projet de loi, éventuellement d'avoir des capteurs thermiques. Bien, on en parlait, nous, en 2022. L'isolation des tuyaux, ça, c'est simple, c'est une mesure qui est simple puis qui peut faire une différence, quantité de surface vitrée sur un projet aussi.

Il y a peu de ces éléments-là que je viens de vous mentionner, M. le Président, qui sont mentionnés dans le projet de loi. En fait, il n'y a pas de cible, puis c'est vague. Tout va se faire par règlement, donc ça nous... ça nous met, là, un peu sur notre appétit, puisqu'on ne sait pas trop à quoi s'attendre avec le projet de loi. Mais, somme toute, les objectifs du projet de loi sont en ligne avec ce que tous les groupes souhaitent. Et évidemment nous appuierons le... nous appuierons le principe du projet de loi pour cette étape-ci. Puis j'ai bien hâte, là, de commencer l'étude détaillée. Il n'y a pas de doute que nous aurons beaucoup d'amendements, plusieurs, plusieurs éléments qu'il faudra préciser, beaucoup de questions. Je peux vous dire que j'ai pris énormément de notes déjà, et il y a plusieurs lois qui sont... qui sont interpelées avec ce projet de loi là, il y a d'autres lois, et donc il faudra aussi aller consulter ces autres lois là. Mais, M. le Président, on aura... je pense qu'on va apprendre beaucoup sur l'énergie. Et, voilà, je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de Mille-Îles. Et je reconnais maintenant Mme la députée de Verdun.

Mme Alejandra Zaga Mendez

Mme Zaga Mendez : Merci, M. le Président. Je vais commencer par saluer l'ensemble des collègues qui ont travaillé avec... On a travaillé ensemble lors des consultations dans le cadre du projet de loi n° 41. Également, je remercie la collègue députée de Mille-Îles pour son exposé.

Je vais quand même prendre le temps de remercier tous les groupes qui ont pris part à ces consultations-là. Ça prend du temps, de la préparation, de venir nous exposer de façon très claire tous les enjeux en lien avec l'efficacité énergétique des bâtiments, la consommation énergétique. Donc, je salue la Coalition Sortons le gaz, Vivre en ville, le Regroupement des organismes environnementaux en énergie, le Centre québécois du droit de l'environnement, le Conseil du patronat, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, l'Union des municipalités du Québec, la Fédération québécoise des municipalités, Hydro-Québec, l'Association des professionnels de la construction et de l'habitation du Québec, Énergir, le Conseil patronal de l'environnement du Québec, le Conseil québécois des entreprises en efficacité énergétique, M. Pierre-Olivier Pineau, Bâtiment durable Québec, BOMA Québec, la Commissaire du développement durable, Écohabitation, l'Ordre des ingénieurs du Québec, le Centre d'études et de recherches intersectionnelles en économie circulaire, l'Institut AdapT et M. Jean-Pierre Finet, qui sont venus nous exposer divers angles morts, mais surtout l'importance de se pencher sur le bilan énergétique du secteur du bâtiment.

Donc, je vais commencer en traçant un portrait. Puis je peux vous dire d'entrée de jeu, là, qu'on accueille ce projet de loi avec ouverture. On veut travailler là-dessus, parce qu'il faut que le gouvernement... En fait, il fallait que ce gouvernement se réveille, agisse sur cette question depuis longtemps. On le sait, on est dans un contexte de changements climatiques, on est dans un contexte qu'on vit déjà les effets des changements climatiques et on doit penser à la fois à lutter et s'adapter face à ces intempéries climatiques.

On va se rappeler qu'en arrivant au pouvoir la CAQ n'avait pas de plan pour réduire les émissions des gaz à effet de serre. Ça a pris beaucoup de pressions de la part de notre groupe parlementaire, mais de la société civile, pour dire : Il faudrait se pencher sur comment on va arriver à réduire l'impact environnemental, mais l'impact, en fait, en termes de GES au Québec. Par la suite, ils sont arrivés avec des objectifs de réduction... un objectif de réduction, qu'on va se le dire, là, on est encore en deçà de qu'est-ce que les scientifiques partout dans le monde s'entendent, c'est-à-dire d'avoir... comme un pays... un groupe de l'OCDE, comme un pays développé, mais on devrait faire une part beaucoup plus grande, ce qui nous amènerait à une réduction de 45 %, au moins, de nos émissions comparé à nos émissions de 1990. D'ailleurs, dans ce sens... que notre groupe, à Québec solidaire, nous avons développé l'ensemble de nos politiques, et des propositions environnementales dépassaient même les 45 %, allaient jusqu'à 55 % de réduction, parce que c'est ça, notre responsabilité climatique.

• (18 heures) •

Je veux aussi, d'entrée de jeu, rappeler que, parmi les mesures qu'on va discuter, tout ceci s'inscrit dans le Plan pour une économie verte du gouvernement du Québec, de la CAQ, et, dans ce plan-là, on n'arrive même pas à détailler 60 % des mesures pour atteindre nos objectifs climatiques, ce qui est encore très, très préoccupant. Et depuis des années qu'on demande d'agir sur le secteur des bâtiments. Parce que coter des bâtiments, donner une cote énergétique à nos bâtiments, bien, c'est la moindre des choses. C'est la première étape qu'on attend depuis très longtemps. Alors, pour nous, c'est l'étape zéro, c'est le strict minimum.

Il faut qu'on se rappelle que 10 % des émissions de GES viennent du secteur du bâtiment. Ceci, ça équivaut aux émissions de 1,6 million de voitures. Donc, réduire 10 %... de 10 %, enlever les émissions de GES, les réduire le plus possible, ça équivaut aussi à remplacer un nombre quand même significatif de voitures sur les routes.

Puis tout cela... La source principale de nos émissions de GES, bien, c'est le chauffage. C'est le chauffage, c'est notre dépendance à des énergies fossiles et aussi le manque d'efficacité énergétique. En d'autres mots, nos bâtiments, ça chauffe le dehors, et on perd grandes... des grandes quantités d'énergie. Et c'est pour ça qu'il est urgent d'agir.

Lors de différents témoignages, j'avais nommé, quand même, l'ensemble des groupes qui sont venus nous éclairer sur la question, il y a l'expert Pierre-Olivier Pineau qui nous le disait, là, la réalité incontestable, c'est le fait qu'au Québec on construit mal, puis surtout quand il s'agit de décarbonisation. Décarboner nos bâtiments, c'est là-dessus qu'il faut se pencher, puis il faut qu'on se penche rapidement.

Hydro-Québec aussi nous a admis que 85 % des résidences qui se chauffent à l'électricité n'utilisent pas d'équipement efficace. Un des exemples en termes de pertes énergétiques dans le bâtiment, on peut voir qu'en 2020 le secteur des bâtiments représente 35 % de la consommation totale énergétique du Québec et 15 % des pertes énergétiques totales. 15 %, c'est encore énorme, surtout dans un contexte qu'il faut aller chercher le plus possible l'efficacité énergétique.

On le sait aussi que c'est... L'électrification du chauffage et du transport, ça doit être là l'approche la plus prometteuse pour atteindre nos cibles de décarbonation. Il faut se rappeler, parce que, même si ce n'est pas l'objectif du projet de loi... que c'est dans le secteur des transports qu'on a le plus grand apport des gaz à effet de serre au Québec. Et, comme je le disais, c'est 10 % de nos émissions qui viennent du secteur du bâtiment parce qu'on a encore une grande dépendance à l'énergie fossile. Et je reviendrai.

Donc, en même temps qu'on doit réduire, on le sait puis on le reconnaît, une demande d'électricité qui va accroître dans les années à venir... Et, dans ce contexte, on doit faire le maximum pour mettre en oeuvre et pour réduire la demande, d'abord, électrique, et, quand je dis : Demande... réduire la demande, ce n'est pas demander, les gens, de ne pas partir leur lave-vaisselle à minuit, c'est de voir des mesures d'efficacité énergétique pour faire en sorte qu'on réduit la consommation inutile d'énergie dans le bâtiment, ce qu'on peut appeler aussi le gaspillage énergétique, et qui émane, entre autres, des systèmes de chauffage.

Quelques mots sur la mesure qui est au coeur du projet de loi n° 41, c'est-à-dire la cote sur la performance des bâtiments. Donc, cette cotation énergétique, comme je vous disais, on en parle depuis des années. Les experts nous l'ont dit, on est en retard sur cette mesure. Cette démarche, elle demeure essentielle, quand même, pour rencontrer nos objectifs de réduction des GES et de carboneutralité d'ici 2050. J'aimerais bien voir la modélisation, je reviendrai, de comment toutes ces mesures-là vont enfin réduire les objectifs. Puis on ne va pas juste cocher dans une charte ou une feuille qui nous dit : Ah! on a des mesures. J'aimerais ça vraiment le voir.

Nous, de notre côté, quand on avait préparé la campagne électorale en 2018 et en 2022, je faisais partie de l'équipe qui avait tracé ce qu'on appelait Vision 2030, un plan pour réduire les émissions de GES, avec un travail de modélisation, de comptabilité des gaz à effet de serre, donc, entre autres, basé sur la science. Puis, dans ce plan-là, on incluait, entre autres, oui, la révision du Code de construction du Québec, la modernisation du code du bâtiment, les bâtiments qui devraient recevoir une cote énergétique accessible publiquement et le recours au bois comme matériau de construction dans les nouvelles constructions afin de profiter de la capacité du stockage de carbone de ce matériau-là.

Dans le p.l. n° 41, qu'on va s'apprêter à étudier article par article, un article, l'article 6, qui réfère à la cote de performance environnementale qui va être attribuée à un bâtiment, ce serait fait conforme à la méthode et aux modalités prévues par règlement du gouvernement. Donc, ça, c'est un des premiers enjeux que je veux soulever, c'est le fait que la cote sur la performance des bâtiments, c'est déjà une mesure très minimale — on va dire que c'est la première étape, on aurait dû aller plus loin, je reviendrai — mais, en plus de ça, on va la définir puis on va mettre tout l'ensemble des détails par règlement. On parle aussi de méthodes de calcul applicables à l'attribution de la cote de la performance environnementale d'un bâtiment, et tout ça peut varier. Ça, ça veut dire que, la pierre angulaire de l'application et le succès du projet de loi, le gouvernement la garde un peu entre ses mains, entièrement pour lui, puis ça va encore passer par la réglementation.

Donc, moi, je peux vous dire, d'entrée de jeu, une de nos plus grandes demandes puis que... sur laquelle on va marteler, c'est d'être capables de voir l'ensemble des réglementations qui va suivre suite au projet de loi n° 41. Ce serait bien, même, de les voir avant l'étude détaillée pour bien comprendre comment la cote va être établie, comment elle va être définie, c'est quoi, les critères, et comment elle va être appliquée. Donc, c'est... Parce que ce règlement-là qui va découler de ce projet de loi est un élément crucial pour atteindre nos objectifs de décarbonisation qu'on se fixe, et c'est ça qui va nous permettre, entre autres, de mesurer l'ambition du gouvernement, l'ambition de la CAQ, bref, de les juger par les résultats. Parce qu'on le sait, on ne peut pas se permettre de faire des pas à côté. Il faut juste faire des pas de l'avant en ce qui concerne la lutte aux changements climatiques.

Donc, première critique, nous n'avons pas encore plus de détails sur qu'est-ce qui va être cette cotation qui va se faire par règlement. Encore une fois, c'est entre les mains du ministre, le fait de définir les différentes modalités, et, par la suite, en ce qui concerne, entre autres, les données déclarées et l'attribution d'une cote.

Peut-être pour se rappeler un peu comment marche... ou comment qu'on souhaite qu'elle marche, cette cotation, on avait un programme, le programme Rénoclimat. La collègue de Mille-Îles en faisait référence. Il y avait déjà une cote établie, la cote ÉnerGuide, une cote qui repose sur la consommation, laquelle est mesurée... ce qu'on appelle les gigajoules, par année. C'est le fun de parler de gigajoules en Chambre, je tiens à le dire, de parler de ces mesures énergétiques. Puis cette cote de consommation annuelle est donnée en unités de consommation d'énergie similaires à celles de ce qu'on appelle une cote de consommation en kilowattheures par année pour les appareils ménagers. Donc, c'est de comparer combien d'énergie est consommée par chaque bâtiment, comme on le fait déjà pour nos appareils ménagers.

Il faut que cette cote-là soit le plus... inclue le plus d'informations possible, un peu basé aussi sur le même principe qu'on a pour détailler quand un produit, il est fait au Québec, ou détailler quand un produit, il est fait dans des conditions écologiques, comme c'est le cas de la certification biologique. Et il y a aussi la gestion, de faire des rapports, des renseignements, des recommandations à l'intention des propriétaires.

Je veux, bien, faire quand même une mise en garde. C'est que, pour obtenir une cotation énergétique qui est ambitieuse, il faudrait que le projet de loi s'applique à l'ensemble du parc immobilier, parce qu'en ce moment le projet de loi vise seulement les grands bâtiments, puis je reviendrai, sans vraiment donner des échéanciers. Il faut qu'on ait un plan pour décarboner tous les bâtiments au Québec, puis ça inclut aussi, bien sûr, l'institutionnel et le résidentiel.

Entre autres, le Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement constate que le projet de loi n° 41 n'indique pas clairement si toutes les nouvelles constructions seront visées par ce règlement à venir, et ça demeure une lacune importante. Comme je vous disais, avoir une cote, c'est le minimum, et on ne peut pas se permettre de rester là. Il faut que ça, ce soit élargi, il faut qu'on connaisse la nature du règlement, comment il va être défini, quelle est l'ampleur et quelle... On souhaite que ce soit le plus de bâtiments possible qui vont être assujettis à cette cote d'efficacité énergétique.

• (18 h 10) •

Une des recommandations, entre autres, de la coalition Sortons le gaz! à cet égard, c'est que la portée du système de cotation énergétique ne soit pas limitée aux grands bâtiments, comme je le disais, mais... qu'il représente, en fait, une minorité du parc immobilier, étant donné que l'atteinte des cibles de réduction des émissions de GES... et aussi à l'égard de la cible de carboneutralité, de baisser d'ici 2050.

Cette coalition-là nous ont... nous ont dit aussi, en commission, comment ils déplorent que, malgré les pouvoirs habilitants larges accordés au ministre par le p.l. n° 41, l'intention annoncée publiquement lors de la présentation du projet soit de limiter la portée du système de cotation énergétique aux grands bâtiments multilogements, commerciaux et institutionnels, plus précisément les bâtiments privés de plus de 2 000 mètres carrés ou plus de 25 logements, ainsi qu'aux bâtiments publics couverts par le périmètre comptable du gouvernement du Québec. Ça fait qu'on a là des exemples de l'ensemble des bâtiments qui devraient aussi être inclus pour être capables d'avoir plus d'ambition avec cette mesure.

Puis on... bon, comme je disais tantôt, pardon, on a déjà une crainte. On a un discours de sobriété énergétique plutôt que d'étendre cette loi à l'ensemble des bâtiments. Parce que, vous le savez, pour réduire d'ici 2030, là, l'objectif de réduction pour arriver à la carboneutralité en 2050, il faut être capables de réduire au moins 50 % des GES dans le secteur des bâtiments. C'est la chose nécessaire à faire. Dans le mémoire de Vivre en ville, on lisait qu'«il est d'autant plus urgent de dépasser les mesures incitatives [et] d'exiger dorénavant que les propriétaires et constructeurs de bâtiments prennent les mesures nécessaires pour respecter les cibles fixées dans différents plans [stratégiques] — plans et stratégies, pardon — notamment en vue de réduire, d'ici 2030, les GES de 50 % dans le secteur du bâtiment et de 60 % spécifiquement pour le parc immobilier gouvernemental».

Vivre en ville nous a dit aussi qu'ils appuient, donc, l'intention, le principe du projet de loi, mais ils appellent aussi à une mise en oeuvre suffisamment rigoureuse et ambitieuse pour atteindre les objectifs, entre autres en établissant un échéancier pour que l'ensemble des bâtiments québécois soient couverts par le système de cotation. Et je joins ma voix à celles des organismes, parce qu'il nous faut un plan pour décarboniser l'ensemble des bâtiments au Québec.

Donc, on... qu'est-ce qu'on demande? D'inclure un échéancier pour savoir quand l'ensemble des bâtiments seront concernés par la cotation. Ce qu'on demande, c'est de la transparence, prévoir, entre autres, par exemple, un calendrier, définir les normes minimales de performance environnementale de tous les bâtiments, d'où vient notre demande d'avoir le règlement le plus tôt possible pour être capables d'en discuter en commission parlementaire.

Bien sûr, il y a des points qui sont intéressants, on n'est pas contre tout ce qui se trouve dans le projet de loi, puis je pense qu'il va falloir travailler ensemble pour le rendre meilleur, que ce soit la cote de performance qui permet de divulguer des informations concrètes sur la performance environnementale des bâtiments, mais il faut qu'on ait des normes qui sont ambitieuses. Puis, on insiste, qu'est-ce qu'on a là, c'est le strict minimum. On a besoin d'aller plus loin.

Je ne vous cacherai... je ne vais pas vous cacher, M. le Président, qu'il y a deux articles dans ce projet de loi qui nous ont quand même interpelés puis ont interpelé plusieurs intervenants. Et un qui sera notre principal cheval de bataille en commission et sur lequel on va faire des propositions, c'est qu'il faut que ce projet de loi protège et qu'il instaure, voire qu'il encourage le principe des autonomies... de l'autonomie des villes.

De nombreux groupes l'ont exprimé, que ce soit la FQM, l'UMQ, Vivre en ville, Sortons le gaz!, et j'en passe, ce projet de loi doit instaurer un seuil minimal et ne pas aller vers un plafonnement des initiatives municipales. Parce qu'on a des municipalités, un peu partout au Québec, qui font déjà des efforts énormes parce qu'ils ne voyaient pas, en fait... La réalité, c'est qu'ils ne voyaient pas un gouvernement agir au niveau québécois. Ça fait qu'ils se sont dit : On va le faire de notre côté, parce qu'on a aussi une responsabilité envers les générations futures. On doit... Les municipalités, plusieurs d'entre elles ont déjà adopté des plans de réduction des gaz à effet de serre ambitieux, qui tracent, et ils savent comment ils vont arriver à la réduction des émissions en 2030 et en 2050. Et les bâtiments, bien, c'est un incontournable. Donc, depuis quelques années, plusieurs municipalités se sont penchées là-dessus.

Donc, l'esprit du projet de loi n° 41 et les... et, je vais être plus spécifique, sur l'article 29 et 30, c'est le fait d'assurer l'autonomie des villes puis de faire en sorte qu'on établit ce qu'on appelle un seuil minimal, et de ne pas aller vers le plafonnement des initiatives municipales. Les règlements qui vont être adoptés par le p.l. n° 41, s'ils ne sont pas assez ambitieux, on va enlever aux municipalités les possibilités de faire des règlements pour combler les lacunes que je disais tout à l'heure.

Comme je le disais, les municipalités ont déjà accompli des grandes choses en termes de lutte aux changements climatiques. On nous parle des règlements sur les toitures blanches ou végétalisées, des règlements sur la gestion des eaux pluviales, les règlements pour encadrer les matériaux... l'utilisation des matériaux recyclés ou locaux dans les constructions, je fais juste prendre quelques exemples, puis il faut qu'on continue dans ce sens.

Et en ce qui... Comme... On parlait tantôt de réduction des gaz à effet de serre. On le sait que ça passe par l'utilisation des énergies fossiles. Plusieurs municipalités se sont penchées sur la question. Il y a la municipalité de Prévost qui est devenue la première ville québécoise à adopter un règlement pour bannir le gaz dans la nouvelle... dans les nouvelles constructions, interdire aussi le renouvellement des équipements dans les bâtiments existants.

On voit aussi que les villes de Candiac, de Montréal, de Mont... du Mont-Saint-Hilaire ont suivi le pas, parce qu'ils savent que brancher des nouvelles constructions au gaz en 2024, 2025, 2026, bien, ce n'est pas possible si on veut vraiment se mettre dans une perspective de décarbonation. Ceci va juste accroître notre dépendance au pétrole, au gaz naturel.

Par exemple, la ville de Mont-Saint-Hilaire, qui nous a fait un mémoire très, très intéressant, ils se sont dotés de son... d'un premier plan climat pour la période 2024 à 2030, au cours de la dernière année, visant une réduction de 40 % des émissions de GES, encore plus ambitieux, là, parce qu'ici, je vous disais, notre objectif, c'est 37 %... autour de 37 %, 38 %, là. On a des villes qui se donnent des objectifs de réduction plus ambitieux que le Québec. La ville de Mont-Saint-Hilaire a décidé d'aller plus loin que le Règlement sur les appareils de chauffage au mazout et d'édicter son propre règlement interdisant les appareils fonctionnant avec un combustible gazeux.

Il y a d'autres municipalités au Québec qui ont pris des positions publiques et qui ont adopté une résolution type sur la décarbonation des bâtiments : la ville de Beloeil, La Prairie, Lavaltrie, Otterburn Park, Petit-Saguenay, Saint-Bruno-de-Montarville, Saint-Cuthbert, Saint-Lambert, Saint-Narcisse et Très-Saint-Rédempteur, des villes partout au Québec qui prennent la question climatique au sérieux et qui sont allées de l'avant parce qu'ils voyaient, comme je vous disais, qu'on attend depuis des années qu'on se penche sur cette question.

L'enjeu ici, c'est qu'au Québec on a ce qu'on appelle le principe de préséance. C'est... Ce principe-là se trouve dans la Loi sur la qualité de l'environnement, puis on répète un peu l'erreur dans le cadre de ce projet de loi là. Le principe de préséance, dans la Loi sur la qualité de l'environnement, nous dit que, lorsqu'il y a un règlement, il est fait... lorsqu'il existe un règlement au niveau québécois pour le même objet, pour le même sujet, bien, ce règlement-là vient annuler des règlements municipaux.

Donc, pour les villes, pour être capables de réglementer sur des enjeux climatiques, les villes, avant de s'élancer, font tout un travail de recherche pour dire : Est-ce qu'il existe un autre règlement au Québec pour cet enjeu-là? Déjà, le milieu municipal est extrêmement critique de ce principe de préséance, et, dans le projet de loi, on insère la même... le même principe dans les articles, c'est-à-dire de faire en sorte que, lorsqu'il y a un règlement qui est émis par le Québec sur le même objet, que ce soit la question de la consommation énergétique, la sécurité énergétique, la distribution énergétique... bref, les règlements que j'ai nommés pourraient être mis de côté, voire cassés par la réglementation québécoise.

On a commencé à discuter avec le ministre, puis j'ai très hâte qu'on soit en commission pour qu'on sache jusqu'à où et comment la CAQ vise à réglementer la question de la consommation énergétique. On nous dit que c'est dans son objectif d'homogénéiser, c'est-à-dire de faire en sorte que tout le monde avance dans la même direction, mais il faut le faire si et seulement si on est en train de tirer les villes vers le haut, qu'on est en train de dépasser nos objectifs et être plus ambitieux.

• (18 h 20) •

On nous parle aussi de planification, c'est-à-dire qu'il faut planifier la consommation énergétique. Moi, ce que je trouve un peu contradictoire, c'est qu'on veut garder le principe de préséance réglementaire, mais, de l'autre côté, on refuse d'avoir un BAPE général énergétique au Québec pour se pencher sur l'ensemble de l'enjeu de la consommation énergétique. On... Jusqu'à très longtemps, on nous a dit : On ne veut pas faire un plan sur la sortie du gaz. Ça fait que, pour nous, c'est un peu contradictoire. Et ce qu'on souhaite, c'est qu'on n'ait pas le principe de préséance dans le projet de loi n° 41 afin de continuer de donner aux villes un peu d'oxygène et qu'elles puissent appliquer des réglementations plus ambitieuses que de... qu'est-ce qu'on a dans la réglementation québécoise.

Donc, dans le principe de préséance, qu'est-ce qu'on a aussi, c'est que le pouvoir est entre les mains du ministre, d'approuver ou pas des règlements municipaux. Donc, le ministre risque également de mettre de côté un travail énorme. C'est qu'on... On va mettre de côté le travail qui requiert... Comme je vous disais, la mise en place d'un règlement municipal, ça ne se fait pas sur un coin de table, là. Il y a des études. Il y a toute une étude, pas seulement réglementaire mais basée sur la science. Ça fait que, pour nous, le p.l. n° 41 devrait être un seuil pour encourager les municipalités d'aller bien au-delà des normes minimales. On l'a vu dans le mémoire que l'UMQ et la FQM nous ont remis, les deux nous disent qu'ils veulent que le contenu des règlements qui vont être déposés, que ce soient des règlements dans le cadre de la Loi sur la qualité de l'environnement ou dans le cadre du p.l. n° 41, bien, ce soit le plus ambitieux possible. Encore une fois, on veut rehausser les normes minimales et ne pas casser les efforts des municipalités.

Je nous rappelle aussi qu'il existe d'autres moyens moins intrusifs pour avoir un regard sur ce qui est fait. Par exemple, le fardeau de la preuve peut être inversé. Il faut trouver un mécanisme pour concilier l'autonomie municipale. Et c'est tout ça, c'est toutes ces interventions-là que nous allons amener dans le cadre de l'étude détaillée du projet de loi.

Le ministre a quand même fait un pas de l'avant en disant qu'il va annoncer un règlement sous peu, qu'on a hâte de voir, puis j'espère qu'on va avoir la chance de l'avoir pendant... avant et pendant les débats qu'on va avoir en commission parlementaire, disant qu'on va réglementer l'usage du gaz, qu'on va réglementer en ayant un angle de sécurité énergétique. Il nous a dit que ce règlement-là risque d'être en fonction de la LQE.

Comme je vous disais, on a le principe de préséance, dans l'article 118.3.3, qui va lui permettre automatiquement de dire oui ou non à des règlements municipaux, bien, dans d'autres mots, lui donner le pouvoir de casser les règlements municipaux qui sont déjà plus ambitieux. Cette préséance sur le règlement est décriée depuis des années par les municipalités, qui demandent d'abroger. La demande initiale des municipalités, c'est d'enlever l'article 118.3.3 de la Loi sur la qualité de l'environnement. Je nous rappelle que cette réglementation est unique au Québec, parce que ça n'existe pas ailleurs. En Ontario, ils n'ont pas ce principe de préséance, et il n'y a pas eu de... des grands... comment je peux dire, des grands problèmes avec ça, parce que ça permet, les villes, comme je dis, d'aller plus loin puis d'être encore plus ambitieuses. Donc, je le répète, il faut arrêter cette erreur ici, dans le p.l. n° 41. Il faut enlever les articles 29 et 30, qui demeurent dans cette logique de centralisation du pouvoir.

Le ministre nous a dit qu'il ne veut pas s'en servir pour tout, qu'il va faire quelques règlements mais pas pour l'ensemble. Il va juste se servir pour le principe de sécurité énergétique. Mais, moi, ce que je me demande : S'il nous a dit que la réglementation pour la question de sécurité énergétique, donc pour les gaz à effet de serre, va être faite dans le cadre de la LQE, c'est-à-dire en appliquant l'article 118.3, pourquoi on insiste à garder l'article 29 et 30 dans le p.l. n° 41? Pourquoi on insiste à garder ce principe de préséance là si on peut le faire déjà? Puis on n'est vraiment pas d'accord, puis les villes ne sont pas d'accord avec ce principe-là, mais ce principe-là existe déjà dans la loi. Donc, ça, c'est une des questions qu'on a puis sur laquelle on va revenir, parce qu'on est en train d'ouvrir une grande brèche en termes... qui va atteindre l'autonomie municipale.

Combien de temps qu'il me reste, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Benjamin) : ...donc il vous reste... Il vous reste à peu près une demi-heure. Mais je vous rappelle, Mme la députée, que nous terminons à 18 h 30. Voilà.

Mme Zaga Mendez : ...alors, bien, je vais continuer mon exposé.

Un des grands enjeux sur lequel on va débattre puis on va, nous, faire beaucoup, beaucoup de pression dans le cadre de ce projet de loi, c'est concernant l'utilisation du gaz dans les bâtiments.

Le Québec doit sortir du gaz pour atteindre la carboneutralité en 2050. Puis, comme je le disais tout à l'heure, ça fait longtemps qu'on amène cette question-là. Jusqu'à maintenant, on a toujours eu une grande fermeture de la part du gouvernement.

Aujourd'hui, je dirais, c'est un peu l'exception. Je veux juste nous rappeler qu'on a eu une motion, ce matin, qui a été adoptée par la Chambre, ici, une motion amenée par mon collègue de Maurice-Richard, avec qui on travaille de très près les questions énergétiques, dans laquelle on a reconnu, comme Assemblée nationale, que, pour atteindre la carboneutralité, bien, ça implique de mettre fin à toute utilisation de gaz naturel d'origine fossile. Et ça, ça inclut les bâtiments, on va se le dire. Si on veut sortir du gaz, il faut le sortir de partout. Et là même l'Assemblée a accepté que le gouvernement dépose un document de consultation en ayant une modélisation des trajectoires d'émission de gaz à effet de serre. J'étais vraiment contente, en fait, quand j'ai lu ça, puis j'ai dit : Aïe! Enfin, on va voir la trajectoire de comment on va arriver à la réduction des gaz à effet de serre au plus tard... en atteignant, pardon, la carboneutralité au plus tard en 2050, et de tenir aussi une commission parlementaire à cet effet.

Je vous dis, M. le Président, pour nous, c'est un gain que, déjà, on commence à parler de sortir du gaz puis, deux, qu'on va nous présenter et que... on le souhaite, le plus tôt possible, un plan, une modélisation de la trajectoire de nos gaz à effet de serre afin d'en discuter en commission parlementaire. Et faire cet exercice-là demeure extrêmement urgent. On ne peut pas passer à côté dans le cadre du p.l. n° 41 parce que l'utilisation du gaz naturel est responsable de 63 % des émissions liées au secteur du bâtiment. C'est... Deux tiers des émissions dans le bâtiment, bien, c'est lié au gaz naturel.

L'équipement de chauffage qui sont basés sur le gaz naturel ont des durées de vie de 20 à 30 ans. C'est-à-dire que, dès qu'on met un nouveau système de chauffage basé sur du gaz naturel ou de biénergie, et je reviendrai, on permet l'utilisation du gaz, encore, 20, 30 ans. On est en 2024. Ça, ça veut dire qu'il y a encore du gaz dans les bâtiments en 2050 si, aujourd'hui, on permet encore des nouveaux branchements au gaz. On ne peut plus encourager ça.

On n'augmente pas seulement notre dépendance aux sources de carbone fossiles, on est... on continue à encourager une industrie qui devrait déjà nous présenter des plans pour la transition complète. Dans le... dans le mémoire, pardon, du regroupement, de la coalition Sortons du gaz!, ils nous le répètent : «...la norme de performance environnementale des bâtiments stipule clairement que la gestion de la pointe électrique doit s'effectuer sans recours aux énergies fossiles et que cette norme [ne doit pas encourager] l'usage de la biénergie et du gaz naturel renouvelable.»

Et pourquoi? Je vais commencer par parler du gaz naturel renouvelable. Bien sûr, dans le nom, on a «renouvelable». Ça veut dire que ça vient d'une source qu'on appelle la biomasse. Puis, bien sûr, on n'est pas contre le principe de réutiliser, que ce soient des déchets organiques, nos propres déchets, la biomasse forestière, des systèmes de biométhanisation, tout ça. On n'est pas contre ça. Mais la vérité, c'est que le GNR, en ce moment, n'est pas une option de remplacement pour le gaz naturel parce qu'il n'y en a pas assez, on n'est pas capables puis on ne sera pas capables d'en produire assez pour remplacer complètement l'utilisation du gaz naturel fossile, puis qu'on se demande sur quels chiffres le gouvernement s'appuie pour soutenir encore qu'il va y avoir... avoir assez de GNR pour tous les nouveaux bâtiments. Est-ce qu'on se base sur des études, sur des vraies études basées sur la capacité de produire du GNR au Québec, et combien ceci va combler en termes de besoins énergétiques, ou est-ce qu'on se base sur les dires d'Énergir? Puis ça, c'est notre grande peur.

Juste pour se donner des exemples de production actuelle de GNR, il n'y a pas de GNR en quantité suffisante pour remplacer le gaz. Il n'y a aucune étude qui le prouve. Dans la Stratégie québécoise sur l'hydrogène vert et les bioénergies en 2030, on soulignait que, bien qu'importante...

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, Mme la députée, je voudrais savoir, est-ce que vous souhaitez poursuivre votre intervention à la reprise des travaux dans ce dossier?

Mme Zaga Mendez : ...

Ajournement

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Parfait. Alors, compte tenu de l'heure, nous allons ajourner nos travaux à jeudi, demain, le 8 février, à 9 h 40.

(Fin de la séance à 18 h 30)