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Version finale

42e législature, 2e session
(19 octobre 2021 au 28 août 2022)

Le jeudi 14 avril 2022 - Vol. 46 N° 50

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Affaires courantes

Déclarations de députés

Féliciter l'organisme En moins de 2, avec Mathieu, lauréat du Prix d'excellence en français
Gaston-Miron

Mme Nadine Girault

Souligner la commémoration du génocide du peuple arménien

M. Saul Polo

Souligner le travail des patrouilleurs bénévoles du parc régional du Massif-du-Sud

Mme Stéphanie Lachance

Souligner le 200e anniversaire de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain

M. Frantz Benjamin

Féliciter l'organisme Moisson Estrie pour l'atteinte du niveau Élite dans le cadre du
programme ICI on recycle +

Mme Geneviève Hébert

Déplorer le manque d'encadrement entourant les reprises de logement

M. Sol Zanetti

Féliciter M. Jacques Charbonneau, lauréat du Prix international Caravaggio

Mme Agnès Grondin

Rendre hommage à M. Dominic Jean, pompier, décédé dans l'exercice de ses fonctions

Mme Nancy Guillemette

Rendre hommage à Mme Noëlla St-Laurent, artiste-peintre et enseignante, pour son engagement
dans le milieu culturel local et régional

Mme Suzanne Blais

Présentation de projets de loi

Projet de loi n° 795 — Loi visant à faciliter l'accès du vérificateur général aux documents et
aux renseignements nécessaires à l'exercice de ses attributions 

M. Vincent Marissal

Mise aux voix

Dépôt de documents

Réponse à une pétition

Réponses à des questions inscrites au feuilleton

Décisions du Bureau de l'Assemblée nationale

Questions et réponses orales

Enquête sur la gestion de la pandémie de coronavirus dans les centres d'hébergement et de
soins de longue durée

Mme Monique Sauvé

Mme Marguerite Blais

Mme Monique Sauvé

Mme Marguerite Blais

Mme Monique Sauvé

Mme Marguerite Blais

Enquête sur la gestion de la pandémie de coronavirus dans les résidences pour personnes âgées

Mme Monique Sauvé

Mme Marguerite Blais

M. Pierre Arcand

M. Simon Jolin-Barrette

M. Marc Tanguay

Mme Marguerite Blais

Pratiques en matière d'éthique chez les filiales de la Caisse de dépôt et placement

M. Carlos J. Leitão

M. Eric Girard

M. Carlos J. Leitão

M. Eric Girard

M. Carlos J. Leitão

M. Eric Girard

Protection du caribou forestier

Mme Manon Massé

M. Pierre Dufour

Mme Manon Massé

M. Pierre Dufour

Mme Manon Massé

M. Pierre Dufour

Accès à la propriété

Mme Méganne Perry Mélançon

M. Eric Girard

Mme Méganne Perry Mélançon

M. Eric Girard

Mme Méganne Perry Mélançon

M. Eric Girard

Mesures pour contrer la pénurie de main-d'oeuvre

Mme Isabelle Melançon

M. Jean Boulet

M. Marc Tanguay

M. Jean Boulet

Mme Filomena Rotiroti

Mme Caroline Proulx

Attribution de contrats publics en contexte de pandémie

Mme Claire Samson

M. Eric Girard

Mme Claire Samson

M. Christian Dubé

Mme Claire Samson

M. Simon Jolin-Barrette

Contrats attribués en contexte de pandémie

Mme Claire Samson

M. Christian Dubé

Mme Claire Samson

M. Christian Dubé

Mme Claire Samson

M. Christian Dubé

Relations entre le ministre de l'Économie et de l'Innovation et La Compagnie électrique Lion

M. Gaétan Barrette

M. Pierre Fitzgibbon

M. Gaétan Barrette

M. Pierre Fitzgibbon

M. Gaétan Barrette

M. Pierre Fitzgibbon

Stratégie pour contrer la pénurie de main-d'oeuvre

Mme Isabelle Melançon

M. Jean Boulet

M. Marc Tanguay

M. Jean Boulet

Votes reportés

Motion proposant que l'Assemblée exige du gouvernement qu'il déclenche une enquête
publique et indépendante pour faire la lumière sur les circonstances entourant les décès
survenus au CHSLD Herron lors de la première vague de la pandémie de COVID-19


Motions sans préavis

Demander au gouvernement d'examiner la possibilité de créer un comité-conseil jeunesse
sur le climat

Mise aux voix

Avis touchant les travaux des commissions

Affaires du jour

Projet de loi n° 15 —  Loi modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse et d'autres dispositions
législatives

Adoption

M. Lionel Carmant

Mme Kathleen Weil

M. Sol Zanetti

Mme Véronique Hivon

Mise aux voix

Projet de loi n° 28 — Loi visant à mettre fin à l'état d'urgence sanitaire

Reprise du débat sur l'adoption du principe

M. Gaétan Barrette

Mme Claire Samson

M. Saul Polo

Débats de fin de séance

Mesures pour contrer la pénurie de main-d'oeuvre

M. Marc Tanguay

M. Jean Boulet

M. Marc Tanguay (réplique)

Projet de loi n° 28 — Loi visant à mettre fin à l'état d'urgence sanitaire

Poursuite du débat sur l'adoption du principe

M. Jean Rousselle

Mme Francine Charbonneau

Mme Christine St-Pierre

M. Marc Tanguay

M. Pierre Arcand

M. Gregory Kelley

Ajournement

Journal des débats

(Neuf heures quarante et une minutes)

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Bon jeudi. Vous pouvez vous asseoir.

Affaires courantes

Déclarations de députés

Nous débutons nos travaux avec la rubrique de déclarations de députés, et je cède la parole à Mme la députée de Bertrand.

Féliciter l'organisme En moins de 2, avec Mathieu, lauréat
du Prix d'excellence en français Gaston-Miron

Mme Nadine Girault

Mme Girault : Mme la Présidente, à travers ses capsules humoristiques, Mathieu Roy transmet son amour du français de manière drôle et efficace.

Fondateur de l'organisme En moins de 2, avec Mathieu, ce professeur depuis plus de 18 ans a mis son expérience à profit pour développer des capsules humoristiques afin d'expliquer les concepts de la langue française aux jeunes de quatrième et cinquième secondaire. Des notions comme l'usage du participe passé ainsi que l'utilisation de la virgule viennent en aide à plusieurs, même à plusieurs adultes. Toujours accompagné d'une touche d'humour, il nous fait parcourir l'univers de la grammaire en ne manquant pas de souligner les subtilités de la langue de Molière.

Tout récemment son organisme a remporté un honneur bien mérité lors de la 10e édition du Prix d'excellence en français Gaston-Miron, éminent poète, natif de mon comté. D'ici peu, les capsules de la deuxième saison En moins de 2, avec Mathieu seront mises en ligne.

Félicitation, Mathieu, et merci de rendre les leçons de français aussi divertissantes pour nos jeunes et nos adultes!

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. M. le député de Laval-des-Rapides, la parole est à vous.

Souligner la commémoration du génocide du peuple arménien

M. Saul Polo

M. Polo : Le 24 avril prochain marquera le 107e anniversaire du génocide arménien.

À pareille date, en 1915, l'Empire ottoman a orchestré la mort de plus de 600 intellectuels arméniens à Constantinople, déclenchant ainsi une extermination sans précédent envers la minorité arménienne. Environ 1,5 million d'Arméniens ont été tués, soit les deux tiers de la population arménienne, entre 1915 et 1916.

La commémoration de ce génocide est un jour de deuil pour plusieurs de nos concitoyens, mais c'est aussi un jour de revendication pour la reconnaissance du génocide. Je salue votre résilience et votre courage. En mémoire des victimes, il nous incombe de se souvenir du premier génocide du 20e siècle.

Je souhaite vous exprimer ma solidarité la plus sincère à vous, chère communauté, mais aussi à vos ancêtres. Toutes mes pensées vont à la diaspora arménienne canadienne et québécoise. Plus que jamais nous devons tirer des leçons de cette tragédie, un tragique événement, afin d'éviter que les droits de l'homme soient encore une fois bafoués. Merci beaucoup, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci. Merci, M. le député. Mme la députée de Bellechasse, je vous cède la parole.

Souligner le travail des patrouilleurs bénévoles
du parc régional du Massif-du-Sud

Mme Stéphanie Lachance

Mme Lachance : Merci, Mme la Présidente. Il y a quelques jours a pris fin la saison de sports d'hiver au parc régional du Massif du Sud. J'aimerais souligner le travail de la patrouille composée de 30 bénévoles qui a assuré la sécurité des sportifs grâce à leur grande connaissance des circuits, leurs conseils, leur formation et, surtout, leur passion pour le plein air.

Cette patrouille bénévole existe maintenant depuis sept ans. Cet hiver, c'est plus de 900 heures de bénévolat qui ont été offertes, orchestrées par le chef de patrouille Éric Roberge. J'aimerais aussi profiter de l'occasion pour souligner l'apport inestimable de M. Pierre Dubeau, qui a été cochef de cette patrouille bénévole pendant plusieurs années avant de prendre sa retraite, l'an dernier.

À toute l'équipe de la patrouille du parc régional du Massif du Sud, merci de veiller à la sécurité des usagers et de faire la promotion d'un mode de vie sain et actif, hiver comme été. Une patrouille bénévole, c'est unique au parc régional du Massif du Sud, signe de l'engagement des gens dans leur communauté.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la parole à M. le député de Viau.

Souligner le 200e anniversaire de la Chambre de
commerce du Montréal métropolitain

M. Frantz Benjamin

M. Benjamin : Merci, Mme la Présidente. Cette semaine, la Chambre de commerce du Montréal métropolitain célèbre ses 200 ans d'existence.

Fondée en 1822 par un groupe de commerçants, elle n'a, depuis, cessé de contribuer à la prospérité du Grand Montréal et de ses entreprises. Acteur majeur pour l'économie de Montréal, la Chambre de commerce du Montréal métropolitain a directement participé à la création du port de Montréal, de HEC Montréal et d'Aéroports de Montréal. Son histoire moderne est tout aussi ancrée dans le vécu des Montréalaises et Montréalais. À titre d'exemple, le rôle dans la mobilisation pour relancer l'économie montréalaise pendant cette pandémie.

Aujourd'hui, la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, c'est un réseau de plus de 8 000 membres, ce sont quelque 3 000 entreprises. Je tiens donc à souligner le talent et la fierté qui animent la communauté d'affaires montréalaise à travers sa chambre de commerce, qui se révèle au quotidien comme un tremplin pour projeter Montréal vers l'avenir.

Je salue toute l'équipe de la chambre de commerce et son P.D.G., M. Michel Leblanc. Bon anniversaire à la Chambre de commerce du Montréal métropolitain!

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, je cède la parole à Mme la députée de Saint-François.

Féliciter l'organisme Moisson Estrie pour l'atteinte du niveau Élite
dans le cadre du programme ICI on recycle +

Mme Geneviève Hébert

Mme Hébert : Mme la Présidente, Moisson Estrie, déjà réputée pour être bien plus qu'une banque alimentaire, a obtenu récemment une nouvelle reconnaissance dans le cadre d'ICI on recycle +, de RECYC-QUÉBEC.

L'obtention niveau Élite résulte de l'implantation d'une quinzaine d'actions qui permettent à l'organisme de valoriser considérablement ses matières résiduelles. Par exemple, Moisson Estrie recycle les emballages et composte les résidus alimentaires non consommables provenant des denrées récupérées chez ses fournisseurs. En fait, son comité de développement durable a fait merveille, puisque le taux de valorisation atteint 98 %. En 2020‑2021, Moisson Estrie a sauvé environ 1 330 tonnes de CO2, ce qui représente plus de 11 000 allers-retours en voiture entre Sherbrooke et Québec. Voilà un extraordinaire exemple de réduction du gaspillage alimentaire, de redistribution des denrées, de la protection de l'environnement.

Je tiens donc à féliciter tous les employés et bénévoles pour leur participation efficace au tri des matières résiduelles, sous la houlette de la directrice générale, Mme Geneviève Côté. Merci, Mme la Présidente.

15  417 La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. M. le député de Jean-Lesage, la parole est à vous.

Déplorer le manque d'encadrement entourant les reprises de logement

M. Sol Zanetti

17  955 M. Zanetti : Merci, Mme la Présidente. La semaine dernière, on apprenait que des locataires ont été intimidés à accepter des évictions-loyers sans motif. C'est arrivé sur la rue des Aulnes, dans Jean-Lesage, un édifice de 36 logements où plusieurs locataires à moindres revenus dépendent du Programme de supplément au loyer pour survivre.

Je vous laisse imaginer la suite du plan : évincer les locataires, rénover les lieux, relouer l'ensemble de l'oeuvre à des prix indécents. Je comprends que des propriétaires cherchent à faire fructifier leur investissement, mais, encore une fois, une violation complète du droit au maintien au logement, c'est inacceptable. À chaque fois que ça arrive, les logements abordables se font de plus en plus rares, dans les quartiers populaires, déplaçant les gens loin des services dont ils ont besoin. Même quand les locataires portent plainte et ont gain de cause au tribunal, il n'y a aucune conséquence réelle pour les propriétaires, qui repartent se réessayer ailleurs.

La hausse incontrôlable des loyers et le déni du droit des locataires ne pourront pas être freinés tant qu'il n'y aura pas un réel encadrement des reprises de logements, tant qu'il n'y aura pas des réels recours pour les locataires malmenés. Merci, Mme la Présidente.

15  417 La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, M. le député. Mme la députée d'Argenteuil.

Féliciter M. Jacques Charbonneau, lauréat
du Prix international Caravaggio

Mme Agnès Grondin

17  827 Mme Grondin : Le parcours coloré de Jacques Charbonneau s'est dessiné lorsqu'un refus de s'excuser en classe, par conviction, l'a amené à suivre, en guise de punition, un cours d'arts visuels par correspondance de Paris depuis le bureau du directeur. Devenir un artiste reconnu mondialement commence d'abord par une vision de la vie singulière, Mme la Présidente.

Depuis les 20 dernières années, Jacques a choisi Argenteuil comme lieu de création. Il est le fervent promoteur des Journées de la culture, par le biais du projet Nature et tradition, une exposition en plein coeur de la forêt où les artistes sont invités à habiter la beauté de la nature dans l'expression de leur art.

Le 17 avril prochain, Jacques est attendu à Milan pour recevoir le prestigieux Prix international Caravaggio — Great Master of Art. Au nom de tous les Québécoises et Québécois, j'aimerais offrir mon admiration des plus sincères à cet illustre artiste.

15  417 La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Roberval.

Rendre hommage à M. Dominic Jean, pompier,
décédé dans l'exercice de ses fonctions

Mme Nancy Guillemette

18  247 Mme Guillemette : Merci, Mme la Présidente. Aujourd'hui, je tiens à rendre hommage à Dominic Jean, un pompier de mon comté, décédé en service le 24 mars dernier.

Le lieutenant Jean a quitté la maison pour combattre un incendie, il n'y est jamais revenu. Il a perdu la vie dans l'exercice de ses fonctions. Il n'a pas été en mesure de sortir après l'effondrement du bâtiment qu'il tentait d'éteindre avec ses collègues.

Pompier volontaire depuis plus de 18 ans, M. Jean était un homme d'exception, un homme dévoué, engagé dans sa communauté, un homme apprécié de tous. Il n'hésitait jamais à venir en aide aux autres et à s'impliquer pour le bien de sa communauté, pour le bien de tous.

Samedi dernier, plus de 200 pompiers et une foule impressionnante ont tenu à lui rendre un dernier hommage. Aujourd'hui, Mme la Présidente, je tiens à offrir mes sympathies à sa conjointe, son fils, sa fille, sa famille, sa mère et tous les gens du secteur Géant. Mes sympathies à tout le monde. Merci, Mme la Présidente.

15  417 La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Je cède la parole à Mme la députée d'Abitibi-Ouest.

Rendre hommage à Mme Noëlla St-Laurent, artiste-peintre
et enseignante, pour son engagement dans
le milieu culturel local et régional

Mme Suzanne Blais

17  825 Mme Blais (Abitibi-Ouest) : Mme la Présidente, aujourd'hui, je rends hommage à une femme de tête et de coeur, Mme Noëlla St-Laurent, qui nous a quittés en janvier dernier, à l'âge de 86 ans, au terme d'une vie bien remplie.

La communauté amossoise vous le dira : Décrire Mme Saint-Laurent, c'est parler de sa générosité, de sa sensibilité, de sa créativité, sa compréhension, de son respect envers autrui et de l'amour. Son engagement envers les jeunes et les autres s'est fait à travers sa carrière d'enseignante et son implication avec le groupe fondateur de La Société des arts Harricana en donnant des leçons privées de peinture au sein du Réseau du libre savoir d'Amos-Harricana. Dire oui ou encore «je suis prête» était naturel pour celle qui travaillait souvent dans l'ombre, mais combien impliquée. «En art, il n'y a jamais d'échec, mais tout est une source d'apprentissage et de créativité», disait-elle à ses élèves ou partenaires.

Mme Noëlla St-Laurent, je suis convaincue que vos oeuvres et votre générosité ne seront jamais oubliées. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Cela met fin à la rubrique de déclarations des députés.

Et je suspends les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 9 h 52)

(Reprise à 10 h 4)

Le Président : Mmes, MM. les députés, bon jeudi à toutes et à tous. Prenons quelques instants pour nous recueillir.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Mmes et MM. les députés, nous allons poursuivre les affaires courantes.

Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi

À la rubrique Présentation de projets de loi, Mme la leader du deuxième groupe d'opposition.

Mme Labrie : Merci, M. le Président. Je vous demanderais d'appeler l'article a, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 795

Le Président : Et, à l'article a du feuilleton M. le député de Rosemont présente le projet de loi n° 795, Loi visant à faciliter l'accès du vérificateur général aux documents et aux renseignements nécessaires à l'exercice de ses attributions. M. le député.

M. Vincent Marissal

M. Marissal : Merci, M. le Président. Alors, ce projet de loi a pour objet de faciliter l'accès du Vérificateur général aux documents et aux renseignements nécessaires à l'exercice de ses attributions.

Pour ce faire, le projet de loi modifie la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels afin qu'il ne soit plus nécessaire que le Vérificateur général fasse la démonstration d'un préjudice pour refuser de confirmer l'existence ou de donner communication d'un renseignement relatif à une vérification.

Le projet de loi précise également que le pouvoir du Vérificateur général d'exiger des documents et des renseignements peut porter sur certains documents du Conseil exécutif visés par une restriction de communication d'une durée de 25 ans en vertu de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels.

Enfin, le projet de loi énonce qu'une divulgation faite au Vérificateur général dans le cadre d'une vérification ne constitue pas une renonciation au secret professionnel de l'avocat, au privilège relatif au litige, au privilège relatif aux règlements ou à la confidentialité d'un document du Conseil exécutif. Merci, M. le Président.

Mise aux voix

Le Président : Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix : Adopté.

Le Président : Adopté.

Dépôt de documents

Nous sommes à la rubrique Dépôt de documents. M. le leader du gouvernement.

Réponse à une pétition

M. Jolin-Barrette : M. le Président, je dépose la réponse à la pétition déposée en Chambre le 16 mars 2022 par la députée de Roberval.

Réponses à des questions inscrites au feuilleton

Je dépose également les réponses aux questions inscrites au feuilleton par la députée de Mercier le 15 mars 2022 et par le député de Laurier-Dorion le 22 mars 2022 et le 29 mars 2022. Merci.

Le Président : Merci. Ces documents sont déposés.

Décisions du Bureau de l'Assemblée nationale

Pour ma part, je dépose des décisions du Bureau de l'Assemblée nationale.

Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions.

Il n'y a pas de dépôt de pétitions.

Il n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Je vous avise qu'après la période de questions et réponses orales sera tenu le vote reporté sur la motion du chef du troisième groupe d'opposition débattue hier aux affaires inscrites par les députés de l'opposition.

Questions et réponses orales

Nous en sommes donc maintenant à la période de questions et de réponses orales, et je cède la parole à la députée de Fabre.

Enquête sur la gestion de la pandémie de coronavirus dans les
centres d'hébergement et de soins de longue durée

Mme Monique Sauvé

Mme Sauvé : M. le Président, depuis deux semaines, l'horreur du CHSLD Herron a refait surface.

Après avoir appris que le gouvernement savait qu'il n'y avait plus personne pour s'occuper des résidents depuis le 30 mars, et qu'il n'a rien fait, et qu'aucun suivi n'a été fait pour s'assurer de leur sécurité, est-ce que quelqu'un peut douter encore de l'obligation de la CAQ à déclencher une enquête publique indépendante? En appui à une telle enquête publique indépendante, au Journal de Montréal on peut lire : «Si un gouvernement du Québec a [...] cru bon de créer une commission d'enquête sur l'effondrement d'un viaduc à Laval, on le doit bien plus encore aux 5 060 de nos compatriotes fauchés cruellement dans les CHSLD. Car plus le temps passera, plus les révélations se multiplieront.» Martine Biron a également dit : «Le gouvernement gagnerait à ouvrir ses livres.»

M. le Président, qu'est-ce que le gouvernement attend? Les 5 060 familles attendent.

Le Président : Mme la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants.

Mme Marguerite Blais

Mme Blais (Prévost) : Comme je suis la première à me lever, M. le Président, j'aimerais vous féliciter et vous remercier pour la belle soirée que vous avez organisée hier pour célébrer les personnes qui ont 15 ans, 20 ans de vie politique. Et, moi, dans mon cas, c'était 10 ans. Il n'y avait pas de partisanerie. C'est très intéressant d'entendre les chefs, je tiens à le souligner. Et la cheffe de l'opposition officielle, parlant de la députée d'Anjou—Louis-Riel, a mentionné que c'était une grande dame. Effectivement, c'est une grande dame. Elle a remis un présent à tous les députés de toutes les oppositions.

Maintenant, M. le Président, je tiens à vous dire aussi que tous les députés ici, qu'ils soient de l'aile du gouvernement ou d'ailleurs, qui ont contacté mon cabinet pour avoir de l'aide, durant la COVID, l'ont reçue. Je pense en particulier à des religieuses, des congrégations qui ne faisaient pas partie de l'enveloppe des primes COVID. Donc, on a été capables de répondre à la situation.

En terminant, M. le Président, il y a des enquêtes en cours. Il y a celle du coroner. Il y a eu l'enquête de la protectrice, du Commissaire à la santé et au bien-être. On va laisser la coroner terminer et déposer son rapport.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Fabre.

Mme Monique Sauvé

Mme Sauvé : M. le Président, on cherche toujours les réponses pour les familles. Qu'est-ce qui s'est passé? En appui à l'obligation de tenir une enquête publique indépendante, Daniel Boyer, de la FTQ, qui représente 35 000 professionnels de la santé, dit : «...il est temps que le gouvernement cesse de tourner autour du pot et qu'il ordonne la tenue d'une enquête publique sur l'hécatombe dans les CHSLD. [...]Les familles des victimes ont le droit de savoir ce qui s'est passé afin de corriger la situation.»

Qu'est-ce que le gouvernement attend? 5 060 familles attendent.

• (10 h 10) •

Le Président : Mme la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants.

Mme Marguerite Blais

Mme Blais (Prévost) : M. le Président, nous savons tous, ici, et la population le sait, combien ça a été difficile dans nos milieux de vie pour personnes âgées. Oui, les milieux de vie étaient des milieux qui n'étaient peut-être pas adaptés, ça fait des années qu'il y a des CHSLD vétustes. Il manquait de cliniciens en prévention et contrôle des infections. Il manquait de préposés aux bénéficiaires. Il manquait d'infirmières, d'infirmiers auxiliaires. Il manquait beaucoup de personnel, du personnel qui se déplaçait. Ça fait partie aussi des règles syndicales, des ententes de se déplacer d'un endroit à l'autre. Ce n'était pas valable dans le cas de la COVID.

Le Président : En terminant.

Mme Blais (Prévost) : C'était bien difficile, mais, M. le Président, on a fait tout ce qu'on a pu.

15  725 Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Fabre.

Mme Monique Sauvé

16  493 Mme Sauvé : M. le Président, et je continue, dans Le Devoir, Marie-Andrée Chouinard, qui écrit : «Un autre drame plane au-dessus de la tragédie funeste qui s'est jouée dans les CHSLD du Québec lors des premières vagues de la pandémie, avec un bilan de plus de 5 000 décès. Il s'agit du brouillard qui entoure la gestion de la crise dans ces moments les plus aigus, là où le terrain criait à l'aide, mais en vain. Pour découvrir la vérité, une commission d'enquête publique est nécessaire.»

Qu'est-ce que le gouvernement attend? 5 060 familles attendent.

15  725 Le Président : Mme la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants.

Mme Marguerite Blais

Mme Blais (Prévost) : M. le Président, je parlais des députés, tout à l'heure, qui avaient contacté le cabinet. Tous les députés qui ont contacté que ce soit mon cabinet ou le cabinet de l'ex-ministre de la Santé ont obtenu des réponses. On est allés faire des visites de vigie, on a envoyé les CISSS et les CIUSSS pour voir ce qui se passait. Il fallait aussi que l'ensemble de la députation soit extrêmement présente.

Et je répète ce que j'ai dit la semaine dernière : La semaine d'avant, au 30 novembre, nous avions 25 milieux de vie en éclosion et, au 10 avril, 274. Et nous les suivions à tous les jours...

15  725 Le Président : En terminant.

Mme Blais (Prévost) : ...et rien ne laissait présager la tragédie de Herron.

15  725 Le Président : Question principale, Mme la députée de Fabre.

Enquête sur la gestion de la pandémie de coronavirus
dans les résidences pour personnes âgées

Mme Monique Sauvé

16  493 Mme Sauvé : M. le Président, l'enquête de la coroner porte sur six établissements et 53 aînés décédés en CHSLD et RPA. Pour l'ensemble des 5 060 aînés décédés dans les CHSLD, en appui à la nécessité d'une commission d'enquête indépendante, Paul Arcand a écrit : «...le gouvernement du Québec [...] refuse de créer une commission d'enquête publique pour faire la lumière sur ce drame. Il l'aurait fait dans n'importe quelles autres circonstances aussi sordides.»

Dans La Presse, Isabelle Hachey écrit : «Des milliers d'aînés morts dans des conditions horribles, indignes, inhumaines. Il faut un temps de réflexion. Collectif et public. Il faut comprendre comment on a pu en arriver là. On le doit à ces milliers de victimes laissées à elles-mêmes au pire moment et à leurs familles endeuillées. Il faut une commission d'enquête publique. Pas pour demander à deux ou trois gestionnaires de rendre des comptes, mais pour se rendre compte, collectivement.»

Nous le demandons, ils le demandent. Qu'est-ce que le gouvernement attend? 5 060 familles attendent.

15  725 Le Président : Mme la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants.

Mme Marguerite Blais

Mme Blais (Prévost) : M. le Président, collectivement, ça fait des années qu'on sait que nos personnes vulnérables n'obtiennent pas toujours les soins et les services de haute qualité. La preuve : dans les CHSLD privés, on achetait des places au plus bas soumissionnaire, ce qui veut dire que les infirmières, les préposés étaient payés moins dans les CHSLD privés conventionnés que dans les CHSLD publics.

Ils ont raison, la Coalition avenir Québec, quand ils mentionnent qu'il faut conventionner. Il y a même un CHSLD qui a été nationalisé, oui, sur la Rive-Sud, récemment, on est parti de privé à public, le CHSLD Valeo. Il y a un CHSLD qui a été conventionné, et il y en a trois autres qui seront conventionnés prochainement. Pourquoi? Parce que, M. le Président, il faut que les employés reçoivent approximativement ou même le même salaire, avec les mêmes conditions de travail, pour faire en sorte qu'il y ait une stabilité dans nos milieux de vie. Et il faut aussi, M. le Président, faire en sorte de rénover le plus rapidement possible...

15  725 Le Président : En terminant.

Mme Blais (Prévost) : ...nos CHSLD vétustes.

15  725 Le Président : Première complémentaire, M. le député de Mont-Royal—Outremont.

M. Pierre Arcand

M. Arcand : M. le Président, il n'y a pas juste eu des drames au CHSLD Herron, il y en a eu même dans mon comté, Vigi Mont-Royal, M. le Président. Une enquête publique, c'est la chose nécessaire à faire. Pourquoi? Parce que les Québécois ont le droit de savoir ce qui s'est passé entre le 13 mars et le 10 avril. Les Québécois ont le droit de comprendre ce qui s'est passé pendant ces 12 jours d'inaction.

Refuser une enquête publique, M. le Président, c'est de refuser l'évidence. Allez-vous enfin...

15  725 Le Président : M. le leader du gouvernement, en réponse.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, il y en a déjà une, enquête publique, M. le Président. Les oppositions enfoncent une porte ouverte, M. le Président. Depuis le début, la coroner a fait enquête. Elle a le pouvoir d'assignation, elle a entendu des témoins, elle a entendu des ministres, des sous-ministres, des directeurs, des témoins. Les familles étaient présentes, ont pu par le biais de leurs avocats ou même eux-mêmes questionner les témoins, M. le Président. Le Commissaire à la santé et au bien-être, également, a fait une enquête, M. le Président, et a rendu ses rapports, ses recommandations, M. le Président. Alors, l'enquête... La Protectrice du citoyen, également, a rendu un rapport, M. le Président. Alors, on parle déjà de trois enquêtes publiques, M. le Président. Alors, ça existe déjà. En plus de la Vérificatrice générale, on est rendus à quatre, M. le Président. Alors, les enquêtes se font, et elles sont publiques, et le député de Mont-Royal le sait très bien.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de LaFontaine.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : M. le Président, ça fait plusieurs années que je connais la ministre sur une base personnelle. Mars 2020, c'est l'état d'urgence, vous êtes ministre — puis je prends à témoin les personnes qui nous écoutent — il y a des vies en danger. Votre chef de cabinet reçoit, le 29 mars, à 20 h 11, un message qui dit : «Le résultat est qu'il n'y a [...] plus de personnel pour prendre soin des 154 résidents[...]. C'est très problématique.» La ministre ne fait rien, pas de suivi.

Peut-elle reconnaître, aujourd'hui, qu'elle a commis une erreur, au moins?

Le Président : Mme la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants.

Mme Marguerite Blais

Mme Blais (Prévost) : M. le Président, je pense que je n'accepte pas les propos que la ministre n'a rien fait. Je pense que je n'accepte pas ça. Les trois ministres à la Santé étaient réunis à tous les matins, à 7 heures, et nous avions ensemble des discussions sur tout ce qui allait mal par rapport à la COVID.

Quand j'ai reçu le courriel, le 30, ce que vous n'avez pas mentionné... ce que le député n'a pas mentionné, c'est que le CIUSSS de l'Ouest-de-l'Île-de-Montréal nous affirmait, hein, par le biais de la sous-ministre qui nous avait écrit, qu'il prenait la situation en main, pour redresser la situation et former le personnel.

Le Président : En terminant.

Mme Blais (Prévost) : Et, dans toutes les situations à travers le Québec, ce sont les CISSS et les CIUSSS qui prêtaient...

Le Président : Question principale, M. le député de Robert-Baldwin.

Pratiques en matière d'éthique chez les filiales
de la Caisse de dépôt et placement

M. Carlos J. Leitão

M. Leitão : M. le Président, là, j'ai une question pour le ministre des Finances. Nous avons appris, cette semaine, qu'il y avait des suites dans l'affaire d'Otéra Capital, notamment des révélations qu'un de ses hauts dirigeants pourrait se trouver en situation de conflit d'intérêts concernant 26 prêts. Après le scandale de 2019, ces révélations sont inquiétantes pour la confiance du public et aussi pour la réputation de la Caisse de dépôt et placement du Québec. Il est donc très important que la caisse fasse preuve de la plus grande transparence possible.

Donc, M. le Président, je demande aujourd'hui que le conseil d'administration de la Caisse de dépôt et placement du Québec rende public le rapport de 2019 sur les manquements d'éthique dans sa filiale d'Otéra Capital, chose que ce gouvernement refuse toujours de demander.

Le Président : M. le ministre des Finances.

M. Eric Girard

M. Girard (Groulx) : Merci, M. le Président. Puis ça va me permettre de clarifier, parce qu'il y a eu plusieurs discussions sur la Caisse de dépôt, cette semaine, et les sujets allaient dans toutes les directions. Alors là, je vais répondre précisément à celui-ci.

Alors, l'éthique et la conformité, c'est non négociable, M. le Président. Et les conflits d'intérêts doivent être proscrits en tout temps, et on doit les prévenir. Et la Caisse de dépôt doit adopter les meilleures pratiques de l'industrie.

Et ce qui s'est passé en 2019, c'est qu'Otéra et Ivanhoé n'avaient pas les codes d'éthique et de déontologie de la Caisse de dépôt, et ça a amené des situations inacceptables, notamment quatre manquements graves, et ces personnes-là ont perdu leurs emplois.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Robert-Baldwin.

M. Carlos J. Leitão

M. Leitão : M. le Président, on se rend compte, maintenant, qu'après ce rapport 2019 il y a encore des situations qui, de l'avis du ministre et de mon avis aussi, sont inacceptables. Je ne comprends toujours pas qu'un haut dirigeant d'une entreprise financière qui accorde des prêts puisse aussi avoir des intérêts dans des entreprises à qui ces prêts sont accordés. On est en 2022, M. le Président, ça n'a aucun sens.

Qu'est-ce que le gouvernement va faire, M. le Président?

• (10 h 20) •

Le Président : M. le ministre des Finances.

M. Eric Girard

M. Girard (Groulx) : Bien, je ne suis pas d'accord avec l'interprétation du député de Robert-Baldwin. Les articles réfèrent à la situation qui précède le rapport 2019, et, suite au rapport, il y a eu des actions, Otéra et Ivanhoé ont dû adopter les meilleures pratiques de l'industrie, intégrer leurs codes d'éthique et de déontologie à celui de la Caisse de dépôt, faire preuve de la plus grande transparence. Et ces situations-là précèdent le rapport, et ces situations-là ne sont plus tolérées aujourd'hui.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Robert-Baldwin.

M. Carlos J. Leitão

M. Leitão : Raison de plus pour rendre ce rapport public, M. le Président. En plus, lors de son rapport de mars 2022, 2022, la Vérificatrice générale du Québec nous mettait en garde face au risque réputationnel, à la Caisse de dépôt et placement du Québec. La vérificatrice avait alors émis cinq recommandations qui auraient dû faire l'objet d'un suivi de la part de ce gouvernement. Rien ne semble avoir été fait.

Allez-vous finalement faire un suivi sur ces cinq recommandations de la Vérificatrice générale concernant les filiales de la caisse?

Le Président : M. le ministre des Finances.

M. Eric Girard

M. Girard (Groulx) : Bien, M. le Président, la Vérificatrice générale du Québec fait un travail remarquable. Elle a fait un audit de conformité à la Caisse de dépôt. Elle siège au comité d'audit, elle signe les états financiers. Elle a fait des recommandations, et, bien sûr, ses recommandations vont être intégrées au processus de la Caisse de dépôt.

Le Président : Question principale, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

Protection du caribou forestier

Mme Manon Massé

Mme Massé : Merci, M. le Président. Ce n'est pas à Ottawa de sauver les caribous forestiers du Québec, c'est au gouvernement du Québec. Moi, à la place du ministre des Forêts, je serais gênée de me faire marcher dessus par Ottawa. J'aurais honte de me faire donner des leçons par le ministre, monsieur Bay du Nord en personne. Une chose est certaine, M. le Président, si on avait un gouvernement solidaire, là, le fédéral, un, il se mêlerait de ses affaires, puis, deux, nous, on s'occuperait de nos affaires.

Le ministre, tout ce qui l'intéresse, en fait, c'est l'affaire des compagnies forestières. Il y a 10 ans, il y avait 200 caribous en Gaspésie. Aujourd'hui, il n'en reste même pas 30. À cette vitesse-là, les seuls caribous qu'il va nous rester, c'est ceux qu'il y a sur les vingt-cinq cents.

M. le Président, le ministre des Forêts, comment il trouve ça, lui, de se faire humilier par Ottawa parce que lui, il ne fait pas sa job?

Le Président : M. le ministre des Forêts, de la Faune et des Parcs.

M. Pierre Dufour

M. Dufour : Bien,M. le Président, premièrement, je pense qu'on va remettre un petit peu de pâte à dents dans le tube, là.

Premièrement, c'est important de mentionner, là, qu'il y a eu une rencontre, le 11 mars dernier, avec M. Guilbeault. On a discuté des enjeux parce qu'on avait une entente, justement, qui devait se renouveler, qu'on travaille, justement, entre nos deux appareils. C'est tellement facile, de dire que le gouvernement n'a rien fait.

Permettez-moi de mentionner quelques activités qu'on a faites. On a enlevé 1,5 million de mètres cubes de bois, qu'on a retirés de la possibilité forestière. On a fermé 310 kilomètres de chemins forestiers qui... c'est à peu près une valeur de 2 millions pour enlever ces chemins-là. On a protégé l'aire protégée de Manouane-Manicouagan, une aire de connectivité du caribou forestier, justement pour ne pas avoir la même situation que les hardes isolées qu'on a des problèmes avec aujourd'hui, au Québec, à cause du non-fonctionnement qui a été fait par les anciens gouvernements, et ça, nous, on l'a mis d'attaque, on l'a mis en place. On a mis des aires protégées, par rapport à cette situation-là, pour, justement, protéger le caribou. Ça, c'en est, des actions concrètes qu'on a faites. Et je pourrais continuer avec les 39 000 kilomètres carrés qu'on a faits dans la région d'Eeyou Istchee...

Le Président : En terminant.

M. Dufour : ...justement pour protéger le caribou migratoire.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

Mme Manon Massé

Mme Massé : M. le Président, ça, c'est le ministre, là, qui patente des commissions en pleine crise, actuellement, pour éviter d'agir maintenant. Maintenant. C'est maintenant que l'enjeu est majeur. C'est le même ministre, d'ailleurs, qui a aboli la protection du caribou au Saguenay. C'est le même ministre qui pense que des enclos, ça remplace une stratégie de protection de l'espèce. Le premier ministre disait...

Le Président : M. le leader du gouvernement, question de règlement.

M. Jolin-Barrette : ...35, M. le Président. Il y a un prêt d'intentions de la part de la députée. Et je ne me suis pas levé tout de suite, M. le Président, ni sur la première... Là, sur la deuxième, on rajoute, c'est un crescendo. M. le Président, on ne peut pas prêter des intentions qui ne sont pas vraies, M. le Président, alors un peu de prudence s'impose.

Le Président : Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, poursuivez votre question.

Mme Massé : Hier, le premier ministre disait que le ministre des Forêts, il faisait son travail. Bien, c'est vrai. Est-ce qu'il est fier d'être l'employé du mois des forestières?

Le Président : M. le ministre de la Forêt, de la Faune et des Parcs.

M. Pierre Dufour

M. Dufour : Oui. M. le Président, permettez-moi de souligner à la collègue que, donc, on a investi, dans les dernières années, 25 millions, alors que le fédéral a investi 3,5 millions. Je pense que, déjà là, ça démontre, là, qu'il y a de l'argent que le Québec a investi pas mal plus que le fédéral, dans ce dossier-là.

L'autre chose qu'il est important de préciser, notre commission, que vous dites, là, qui semble être bidon, selon vos propos, cette commission-là, à Sainte-Anne-des-Monts, qui commençait le 12 avril, plus de 100 personnes y ont assisté. Ils ont été obligés de mettre du monde debout parce qu'il n'y avait plus de chaises. Et il y avait différentes personnes qui étaient là pour, justement, parler, autant des environnementalistes, le milieu, des gens de la politique...

15  725 Le Président : En terminant.

17  823 M. Dufour : ...et, je peux dire une chose, les gens étaient très contents de cette consultation.

15  725 Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! Vous êtes la seule à avoir la parole.

Mme Manon Massé

15  421 Mme Massé : C'est fou, M. le Président, j'entends ça, mais il ne nous dit pas c'était quoi, le mandat de la commission. Le mandat de la commission, ce n'est pas de protéger les caribous.

Comment le ministre va protéger les caribous? Pourquoi, tout simplement, ne pas... Par exemple, la solution de l'aire protégée de Pipmuacan, pourquoi ne pas dire oui maintenant? Pourquoi ne pas mettre un moratoire sur les territoires où ces bêtes-là vivent, actuellement? On est en train de les exterminer. Qu'est-ce qu'attend le ministre pour agir maintenant?

15  725 Le Président : M. le ministre de la Forêt, des Parcs et de la Faune.

M. Pierre Dufour

17  823 M. Dufour : M. le Président, justement, on peut dénigrer les enclos de protection qu'on a faits, mais les enclos de protection, ça a été, justement, pour protéger la bête actuelle, qui existe, pour, justement, arrêter l'hémorragie qui existait au niveau de ces hardes-là. Donc, ça, je pense que c'est une action concrète qui nous a permis, justement, de travailler avec la commission pour arriver à une résultante finale, avec une stratégie, comme elle l'a mentionné, qui va être déposée en 2023.

15  725 Le Président : Question principale, Mme la députée de Gaspé.

Accès à la propriété

Mme Méganne Perry Mélançon

18  217 Mme Perry Mélançon : M. le Président, la flambée des prix de l'immobilier est un des sujets les plus courants dans les discussions, au Québec, notamment pour les adultes de mon âge. Chaque semaine, on voit des articles sur les 100 000 logements manquants, au Québec, ou sur des gens fortunés qui flippent des maisons ou des blocs-appartements pour faire une passe d'argent.

Avec regret, on ne peut pas dire que le gouvernement en fait suffisamment. Même que je ne l'ai jamais entendu aborder le phénomène de la spéculation immobilière. J'espère qu'il ne minimise pas la colère des jeunes sur l'enjeu de l'habitation, parce que c'est toute une génération de Québécois qui subit les effets d'un marché immobilier hors de prix. M. le Président, la spéculation immobilière est un réel enjeu.

Avant que les jeunes perdent tout espoir de posséder un jour une propriété, qu'est-ce que va faire le gouvernement pour s'y attaquer?

15  725 Le Président : M. le ministre des Finances.

M. Eric Girard

17  929 M. Girard (Groulx) : Merci pour la question, c'est un sujet extrêmement important. Et effectivement la demande pour les biens immobiliers est extrêmement forte parce que la pandémie a provoqué un désir d'avoir plus d'espace, et en plus on a mis les taux d'intérêt à 0 %, ce qui a stimulé la demande. Donc, on a besoin... Puisque la demande est forte, il faut stimuler l'offre. C'est pour ça, d'abord... Puis ce n'est pas juste le gouvernement. Il y a eu une hausse des mises en chantier, l'an dernier, au Québec, donc, du secteur privé, de plus de 50 %. Donc, le marché privé réagit.

Ensuite, nous avons financé les 15 000 unités de logements sociaux qui avaient été promises, qui n'étaient pas adéquatement financées, avec 950 millions, 3 000 logements abordables avec un nouveau programme. Nous avons resserré les règles hypothécaires pour tempérer l'endettement à la demande. Nous avons resserré les pratiques de déontologie des courtiers. Et pas plus tard qu'hier, M. le Président, il y a eu une hausse des taux d'intérêt de la Banque du Canada, qui va tempérer la demande. Alors, le marché va s'équilibrer.

Le Président : En terminant.

M. Girard (Groulx) : Et on fait tout ce qu'on peut dans le respect des contrats privés.

15  725 Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Gaspé.

Mme Méganne Perry Mélançon

18  217 Mme Perry Mélançon : M. le Président, c'est drôle puis ce n'est pas drôle, parce que, chaque fois qu'on parle de crise du logement, avec le gouvernement de la CAQ, il y a le ministre des Finances qui nous répond, sur un air complètement détaché, à peu près les mêmes réponses, là : J'ai foi que le marché va s'équilibrer de lui-même; il ne faut surtout pas soutenir la demande en aidant les premiers acheteurs; consolez-vous, Montréal est moins pire que Vancouver. Bref, il reste passif pendant que des spéculateurs sont hyperactifs et dopent le marché immobilier.

Va-t-il enfin intervenir dans ce far west immobilier?

15  725 Le Président : M. le ministre des Finances.

M. Eric Girard

17  929 M. Girard (Groulx) : Bien, je regrette, mais le secteur privé a un rôle. Les mises en chantier sont en hausse de 50 %, au Québec. La banque centrale est celle qui doit contrôler l'inflation. Il y a eu une hausse de taux d'intérêt de 50 points de base hier. On a resserré les pratiques des courtiers pour qu'ils défendent les premiers acheteurs, interdire la double représentation. On a resserré les règles hypothécaires. Et surtout on travaille sur l'offre, M. le Président, avec la construction de logements sociaux, la construction de logements abordables.

15  725 Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Gaspé.

Mme Méganne Perry Mélançon

18  217 Mme Perry Mélançon : Bien, je vais poursuivre l'énumération. On peut favoriser la construction, on peut essayer de faire diminuer le prix du bois, créer une taxe antispéculation. Plusieurs façons d'agir sur l'offre, M. le Président. Parce que le gouvernement ne veut rien faire pour la demande. Ne rien faire n'est plus une option.

Est-ce que le ministre peut enfin nous dire pourquoi ma génération n'aurait pas le droit d'accéder à la propriété?

• (10 h 30) •

15  725 Le Président : M. le ministre des Finances.

M. Eric Girard

M. Girard (Groulx) : Bien, au contraire, votre génération a le droit d'accéder à la propriété, puis c'est pour ça qu'on travaille à l'enrichissement collectif. Nous sommes 23 % de la population canadienne mais seulement 20 % de son économie. C'est inacceptable. C'est pour ça qu'on a des mesures en main-d'oeuvre, des mesures pour la productivité des entreprises, pour créer de la richesse. C'est pour ça que le revenu disponible a crû plus vite que la hausse de l'inflation, au Québec, depuis le début de la pandémie.

On va continuer à travailler sur l'offre parce que la demande est plus forte que l'offre. Si on stimule la demande, on ne fait rien pour aider le marché.

Le Président : Question principale, Mme la députée de Verdun.

Mesures pour contrer la pénurie de main-d'oeuvre

Mme Isabelle Melançon

Mme Melançon : Après quatre ans, la CAQ n'a toujours pas de plan pour lutter contre la pénurie de main-d'oeuvre, puis la situation est pire que jamais. Au début de leur mandat, le nombre de postes vacants, au Québec, était de 118 000. On est rendus à 238 000 postes vacants, et la situation va continuer de s'envenimer.

Le constat de la Commission des partenaires du marché du travail est que tous les secteurs seront en déséquilibre. D'ici 2030, ça va juste s'empirer. Ce qui s'en vient, pour les entreprises, ce sont des années de misère.

Le gouvernement brille actuellement par son inaction. L'économie des régions en fait les frais. Les entreprises sont abandonnées. Les travailleurs sont abandonnés parce qu'ils doivent compenser pour le manque de main-d'oeuvre. Les consommateurs et les citoyens sont abandonnés. Ils vont perdre des services, ils vont payer plus cher, ils vont attendre plus longtemps.

À quand des actions efficaces?

Le Président : M. le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

M. Jean Boulet

M. Boulet : Merci, M. le Président. Évidemment, le phénomène de pénurie de main-d'oeuvre qui découle du vieillissement de la population, tout le monde le sait, c'était annoncé et anticipé depuis une vingtaine d'années. Le parti qui nous a précédés au pouvoir a déposé une stratégie nationale de main-d'oeuvre en mai 2018, donc à peu près une vingtaine d'années après l'information venant des économistes et démographes, de ce vieillissement-là de la population.

On travaille avec les entreprises. On a quatre piliers d'intervention. On a un plan d'action pour la main-d'oeuvre qu'on a présenté en septembre 2019. On a une vaste offensive main-d'oeuvre qu'on a présentée après la mise à jour économique de mon collègue : formation, requalification, accroissement de la productivité des entreprises, immigration temporaire et permanente. On est en action. On a le taux d'emploi, au Canada, chez les 15 à 64 ans, le plus élevé, à 77,6 %. 75,6 % au Canada, 74,8 % en Ontario. C'est un témoignage très éloquent des résultats...

Le Président : En terminant.

M. Boulet : ...découlant de nos mesures pour lutter contre la pénurie de main-d'oeuvre.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de... M. le député de LaFontaine, en première complémentaire.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Oui, merci, M. le Président. Le ministre, M. le Président, est très sympathique, le ministre dit : J'ai fait ça, ça, ça, mais la conclusion est que ça ne fonctionne pas, ça ne marche pas, M. le Président, et ont été déçus les entrepreneurs du Québec, les femmes et les hommes qui soutiennent notamment l'économie des régions. J'ai fait une tournée du Québec de Gaspésie en Abitibi. Le premier sujet de l'heure, là, c'est la pénurie de main-d'oeuvre. C'est une véritable crise. Les exportateurs et manufacturiers du Québec ont déploré qu'il n'y avait rien, de mesures structurantes, dans le dernier budget.

Quand le gouvernement va-t-il s'attaquer à la crise?

Le Président : M. le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

M. Jean Boulet

M. Boulet : M. le Président, pour la première fois, on a formé un comité interministériel, on travaille, Éducation, Enseignement supérieur, Économie et innovation, MIFI, Travail et emploi. On a un plan qui est extrêmement cohérent, avec des bourses Perspective Québec, avec des soutiens de revenu. On a intégré, depuis notre accession au pouvoir, 91 000 prestataires d'aide sociale, parce que ça, c'est une des clientèles éloignées du marché de l'emploi, ce qui fait qu'au Québec, actuellement, on a le taux d'assistance sociale le plus bas depuis 1977. Imaginez, M. le Président...

Le Président : En terminant.

M. Boulet : ...il y a 183 000 personnes, cette année, qui ont participé à nos...

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Jeanne-Mance-Viger.

Mme Filomena Rotiroti

Mme Rotiroti : Merci, M. le Président. Juste pour les hôtels de la région de Québec, c'est plus de la moitié des postes qui sont à combler. Il y a des propriétaires qui travaillent 11 jours consécutifs par manque d'employés. D'autres grands hôtels ferment tous les jours de semaine parce qu'ils sont incapables de trouver des travailleurs.

Malgré ces défis, le gouvernement n'a pas jugé bon d'inclure le tourisme dans sa supposée opération main-d'oeuvre. Pourquoi?

Le Président : Mme la ministre du Tourisme.

Mme Caroline Proulx

Mme Proulx (Berthier) : ...je veux paraphraser le député de LaFontaine, qui dit : Ça ne marche pas, ça ne fonctionne pas. Bien, dans l'industrie hôtelière et avant la pandémie, il manquait 14 000 travailleurs avant que le gouvernement de la CAQ ne prenne le pouvoir.

Alors, je peux poser la question à l'opposition officielle : Qu'est-ce qui a été fait de la part de l'opposition officielle avant qu'on arrive en poste, où déjà, dans une industrie qui était florissante, il n'y avait pas d'action qui était menée de la part du gouvernement précédent pour contrer, donc, cette pénurie...

Des voix : ...

Le Président : Je vais vous demander, s'il vous plaît... Ça va très bien, on entend questions et réponses. Je vais vous demander de continuer sur cette lignée. S'il vous plaît, soyons attentifs à ceux et celles qui ont la parole. En l'occurrence, c'est Mme la ministre du Tourisme. Il vous reste 13 secondes, madame.

Mme Proulx (Berthier) : Merci, M. le Président. Le collègue de... Le ministre de l'Emploi a déposé plusieurs mesures, plusieurs actions, 10 millions du côté du ministère du Tourisme, entre autres...

Le Président : En terminant.

Mme Proulx (Berthier) : ...avec le Conseil québécois des ressources humaines en tourisme.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! Évitez ces commentaires. Je n'en ai pas entendu jusqu'à maintenant, ça ne me tente pas de commencer à en entendre non plus.

Mme la députée d'Iberville, en principale.

Attribution de contrats publics en contexte de pandémie

Mme Claire Samson

Mme Samson : Merci, M. le Président. S'il est vrai que les faits sont têtus, comme ils le disent si souvent, je vous confirme que je le suis tout autant, M. le Président.

Ma question : En vertu de la Loi sur la santé publique et de l'état d'urgence sanitaire, les pouvoirs supplémentaires dont l'État se dote doivent viser à protéger la santé de la population et de la situation de pandémie. C'est du moins ce que prétend le projet de loi n° 28.

J'aimerais savoir en quoi l'entreprise McKinsey — et les millions de dollars de contrats qu'ils ont reçus du gouvernement — a-t-elle protégé la santé des Québécois.

Le Président : M. le ministre des Finances.

M. Eric Girard

M. Girard (Groulx) : Bien, je veux juste clarifier que nous avons travaillé avec McKinsey pour l'enrichissement de la société québécoise. On a fait des travaux, avec le ministère de l'Économie, pour augmenter le potentiel économique du Québec à long terme, pour travailler sur la productivité, l'offre de travail, et c'était vraiment un travail qui était utile, et ça a permis de stimuler la réflexion, d'engendrer des mesures qui vont faire une différence pour les Québécois. Et le contrat a été négocié pour s'assurer qu'on paie un tarif vraiment minimal pour la qualité du travail qu'on a reçu.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée d'Iberville.

Mme Claire Samson

Mme Samson : Alors, je vois que les travaux et les contrats octroyés à McKinsey n'avaient rien à voir avec la santé, premièrement.

Deuxièmement, est-ce que le gouvernement nous dit ainsi que cette expertise-là n'était pas disponible au sein du gouvernement?

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Écoutez, je me souviens très bien, M. le Président, qu'au début de la pandémie, notamment, on avait des discussions avec le ministre des Finances et avec, entre autres, le ministre de l'Économie et moi-même, quand j'étais au Trésor, parce que, il faut se rappeler, au début de la pandémie il y avait un enjeu très important, c'est de dire quelles étaient les mesures qui devaient être mises en place qui auraient le plus d'impact pour être capable de garder l'économie ouverte tout en regardant ce qui se passait du côté de la pandémie. Puis je me souviens très bien qu'il était important, et la firme McKinsey a apporté une expertise incroyable, de nous montrer qu'est-ce qui s'était fait en Europe...

Le Président : En terminant.

M. Dubé : ...parce que la pandémie avait frappé bien avant, et je pense que ça a été d'une aide inestimable, M. le Président.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée d'Iberville.

Mme Claire Samson

Mme Samson : Alors, ça n'avait rien à voir avec la santé. Et les hauts fonctionnaires vont être contents de savoir que le gouvernement ne leur reconnaissait pas l'expertise pour promouvoir et améliorer la situation économique du Québec.

J'aimerais savoir combien d'autres contrats comme celui de McKinsey va-t-on retrouver, qui n'ont rien à voir avec la Loi sur la santé publique et l'urgence sanitaire.

• (10 h 40) •

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, je veux que ce soit très clair, M. le Président : les gens de la fonction publique qui ont travaillé les deux dernières années, durant la pandémie, on doit leur dire merci, M. le Président. On a une fonction publique, au Québec, M. le Président, qui est compétente, des gens dévoués. Tous les sous-ministres à la Santé qui ont été mobilisés, les gens à la Sécurité publique, les gens avec le ministère des Aînés, M. le Président, avec le ministre délégué à la Santé mentale, les gens du conseil exécutif, peu importe, M. le Président, de quel ministère, ce sont des gens qui ont travaillé jour et nuit. Je pense aux infirmières, je pense aux gens dans les CIUSSS, dans les CHSLD également, M. le Président. On doit leur dire merci et être reconnaissants...

Le Président : En terminant.

M. Jolin-Barrette : ...à tous les employés de l'État, qui se sont donnés corps et âme pour faire fonctionner le système de santé durant cette période.

Le Président : Question principale, Mme la députée d'Iberville, à nouveau.

Contrats attribués en contexte de pandémie

Mme Claire Samson

Mme Samson : Alors, je persiste, M. le Président. J'aimerais savoir combien d'autres contrats ont été octroyés par le gouvernement, qui n'avaient rien à voir avec la santé publique et l'urgence sanitaire, au cours des deux dernières années, et pour combien de milliards.

Le Président : Question principale... M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : M. le Président, je vais juste, aussi, informer la députée d'Iberville d'une information qu'elle a peut-être, là, puis je ne suis pas certain qu'elle a oublié, mais je vais juste le rappeler. Elle est avec nous, justement, à la Commission de la santé, et, à la Commission de la santé, lorsqu'on discute du projet de loi n° 28, on sait très bien qu'une des exigences de la Loi sur la santé publique, c'est de faire un rapport d'événement de ce qui est arrivé durant la pandémie, que nous devons déposer 90 jours après la fin des mesures d'urgence. Ce rapport-là, nous nous sommes engagés, lorsque les mesures d'urgence seront levées, à le déposer. Dans ça, on va faire référence à tous les contrats qui ont été donnés de gré à gré par la Santé en raison des mesures d'urgence. Elle le sait, ce rapport-là va être en préparation. Mais la première chose qu'il faut faire, c'est mettre fin aux mesures d'urgence, et ça, elle le sait aussi, M. le Président.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée d'Iberville.

Mme Claire Samson

Mme Samson : M. le Président, le gouvernement aurait pu mettre fin aux mesures d'urgence et à l'urgence sanitaire hier en ne renouvelant pas pour la 107e fois ou 108e fois le décret. Il pouvait y mettre fin, hier, puis c'était fini. Il ne l'a pas fait. Pourquoi?

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Je vais le répéter, M. le Président, on est prêts à mettre fin aux mesures sanitaires depuis la journée où nous avons déposé le projet de loi n° 28, le 16 mars. Nous avons dit : En termes de prudence, en termes de bonne gestion de l'État, on a besoin de mesures transitoires pour être capables de mettre fin à l'état d'urgence dans les meilleures conditions pour protéger les Québécois.

On a besoin, en ce moment, de vacciner 30 000 à 40 000 personnes par jour, en ce moment. On a 29 000 personnes de Je contribue qui viennent nous aider à un moment difficile de la crise, où il manque 13 000 employés. Ça, c'est de la gestion, M. le Président.

Le Président : En terminant.

M. Dubé : Ça nous prend des mesures transitoires pour être capables d'enlever les mesures sanitaires.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée d'Iberville.

Mme Claire Samson

Mme Samson : Moi, je pense, ses chiffres ne fonctionnent pas, M. le Président, là. Il y a 39 000 personnes qui viennent vacciner, ils administrent 33 000 vaccins. Chaque personne qui vaccine vaccine une personne par jour? Ça ne marche pas, les chiffres.

Qu'il mette fin à l'urgence sanitaire immédiatement. Les mesures transitoires, là, c'est un leurre.

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : M. le Président, je pourrais inonder la députée d'Iberville de chiffres, je ne le ferai pas, là, ce matin, là. Je pense que de réaliser, en ce moment, qu'il manque 13 000 employés uniquement dans le réseau de la santé, pour fins de COVID... Il manque 50 000 employés pour d'autres raisons. On a besoin des 29 000 personnes de Je contribue non seulement pour la vaccination, non seulement pour le dépistage, mais pour toutes les autres activités où ils viennent nous aider dans le réseau, dans tous nos établissements du Québec, M. le Président.

Pourquoi, en ce moment, on est obligés de faire du délestage puis de fonctionner à 70 %, 75 % de notre capacité?

Le Président : En terminant.

M. Dubé : C'est parce qu'il nous manque du monde. Je pense que tout le monde le comprend. Peut-être pas la députée...

Le Président : Question principale...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! Question principale, M. le député de La Pinière.

Relations entre le ministre de l'Économie et de l'Innovation
et La Compagnie électrique Lion

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : M. le Président, ce matin, il y a encore un article, dans le Journal de Montréal, qui montre à quel point c'est une bonne chose d'être en lien, on va dire, positif avec le ministre de l'Économie.

Quand le ministre de l'Économie est venu en politique, M. le Président, là, il était en lien avec deux individus, entre autres Guy LeBlanc, dont il a fait le premier fonctionnaire millionnaire de l'histoire du Québec, et évidemment Michel Ringuet, qui a bénéficié, comme c'est écrit dans le journal, des effets des subventions du ministre. M. le Président, là, Michel Ringuet, là, à l'entrée en bourse de Lion Électrique, s'il avait vendu ses actions, il était assis sur 30 millions de dollars.

Il y a une question à laquelle il n'y a jamais eu de réponse, que je vais reposer : Le ministre de l'Économie, directement ou indirectement, avait-il une participation dans Lion entre son entrée en politique et l'entrée de Lion en bourse?

Le Président : M. le ministre de l'Économie et de l'Innovation.

M. Pierre Fitzgibbon

M. Fitzgibbon : M. le Président, je trouve un peu déplorable, ce matin, l'article du Journal de Montréal à l'effet de M. Ringuet, il y a clairement un manque de rigueur qu'on a vu dans l'article, et il est encore plus déplorable de voir le député embarquer dans le même jeu.

Premièrement, M. Ringuet n'a jamais été gestionnaire de mes actifs, plutôt mandataire. Il faudrait expliquer au député la différence. Deuxièmement, il n'est plus mandataire depuis quelque temps.

Deuxièmement, dans l'article, on parlait que la CAQ avait propulsé Lion. Alors, la CAQ... ou, en fait, Lion a été propulsée en 2016‑2017 par le Parti libéral. Je l'ai félicité ce matin parce que c'était une bonne chose.

Troisièmement, tous les projets, tous les programmes, avec Lion, pour la subvention du transport d'autobus scolaire ou les programmes d'aide aux subventions sont gérés par mes deux collègues en face de moi, à savoir le MTQ et le MEQ. Le ministère de l'Économie n'a rien à voir avec les programmes de subvention pour Lion Électrique. Donc, toutes insinuations de conflit d'intérêts sont non justifiées.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de La Pinière.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : Quand on n'a pas une bonne relation avec le ministre, on tombe en faillite. C'est dans le journal ce matin, et allez parler aux actionnaires de Nemaska.

Je répète, c'est dans un français, à mon avis, M. le Président, impeccable, c'est aussi facile à comprendre que des chiffres, le ministre de l'Économie connaît les chiffres : A-t-il eu, oui ou non, une participation directe ou indirecte dans Lion Électrique entre son entrée en politique et l'entrée en bourse de Lion?

Le Président : M. le ministre de l'Économie et de l'Innovation.

M. Pierre Fitzgibbon

M. Fitzgibbon : La réponse, c'est non, parce qu'en entrant en politique j'avais des investissements dans un fonds d'investissement, qui a été vendu au mois de novembre 2018, dans lequel il y avait une petite participation dans Lion. Ça a été vendu en novembre 2018, ça a été divulgué. La Commissaire à l'éthique était au courant. Alors, ça n'a aucun rapport avec l'entrée en bourse de Lion Électrique.

Alors, non, il n'y a eu aucun intérêt de la part du ministre de l'Économie dans Lion Électrique. Et, encore plus important, toutes les aides qui ont été données à Lion ont été gérées par le ministère de l'Éducation et par le ministère du Transport. L'aide à Lion d'Investissement Québec, elle se fait au même titre...

Le Président : En terminant.

M. Fitzgibbon : ...qu'on va faire avec tous les assembleurs de voitures électriques au Québec.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de La Pinière.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : Compte tenu des déboires du ministre de l'Économie avec la Commissaire à l'éthique, nous sommes en droit de poser la question suivante : Le ministre serait-il d'accord de participer à un audit piloté par la Commissaire à l'éthique pour s'assurer, pour s'assurer que le ministre dit vrai?

Des voix : ...

Le Président : ...la parole n'appartient qu'au ministre de l'Économie et de l'Innovation. À vous la parole.

M. Pierre Fitzgibbon

M. Fitzgibbon : M. le Président, je dois avoir 500 pages de la part de vérifications de la Commissaire à l'éthique, et, tout ça, la Commissaire à l'éthique a publié, a commenté. Alors, je pense que le travail a été fait. Alors, la demande du député de La Pinière n'a aucun bon sens.

Le Président : Question principale, Mme la députée de Verdun.

Stratégie pour contrer la pénurie de main-d'oeuvre

Mme Isabelle Melançon

Mme Melançon : Bien, M. le Président, vous avez entendu le ministre de la Santé dire, tout à l'heure : Il nous manque 50 000 personnes. Clairement, il y a quelque chose qui ne fonctionne pas, quand on parle de pénurie de main-d'oeuvre. Clairement, il faudrait peut-être que les ministres se parlent entre eux. Le plan du ministre en emploi ne fonctionne pas.

• (10 h 50) •

Je le rappelle, là, en 2018, quand ils sont arrivés, il y avait 118 000 postes vacants. Là, il y en a 238 000, c'est deux fois plus. On est assis sur nos mains. On manque des belles occasions. Lors de la mise à jour économique, le ministre aurait pu bouger. Lors du budget, le ministre aurait pu bouger. Malheureusement, il n'y a rien qui est fait. Les régions crient au secours, les employeurs crient au secours, les employés crient au secours, et les consommateurs, là, c'est eux qui vont attendre plus longtemps, qui vont payer plus cher, qui n'auront plus de services.

Qu'attend le ministre pour agir?

Le Président : M. le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

M. Jean Boulet

M. Boulet : Merci, M. le Président. On partage manifestement le même intérêt. C'est une priorité. Après la mise à jour économique, l'opération main-d'oeuvre, M. le Président, 3,9 milliards de dollars, dont 2,9 milliards de nouveaux crédits. J'invite ma collègue à bien lire le budget aussi. Dans le budget, il y a des mesures pour accroître la productivité, la recherche, l'innovation, prendre le virage numérique, acheter des nouveaux équipements, 2,2 milliards de dollars. Il y a 290 millions de dollars, dans le dernier budget de mon collègue aux Finances, pour accompagner les personnes immigrantes dans les régions, pour répondre aux besoins de main-d'oeuvre.

Enfin, dernière information, c'est important : le vieillissement de la population, ça va continuer. On va connaître un creux historique en 2030. C'est important de mettre des solutions à moyen et long terme, et ça passe par la formation. La requalification, ça donne des résultats. Il y a 183 000 participants individuels actifs entre le 1er avril et le 18 février derniers, cette année...

15  725 Le Président : En terminant.

17  899 M. Boulet : ...qui participent à nos mesures. Merci, M. le Président.

15  725 Le Président : Première complémentaire, M. le député de LaFontaine.

M. Marc Tanguay

11  789 M. Tanguay : Oui, M. le Président. Le ministre vient de parler d'investissements pour augmenter la productivité, augmenter la production. J'ai visité à Coaticook, jeudi dernier, une entreprise qui fabrique des armoires, M. le Président. Ils ont investi massivement, puis c'est une merveilleuse entreprise, dans la productivité et dans la robotisation. Mais les employés, qui, avant, en sortaient 450, unités par jour, vont en sortir 1 100, unités par jour. Et personne ne va perdre son emploi, la pénurie va demeurer. Alors, ça ne marche pas, ce que vous mettez de l'avant, ça ne marche pas. Et les PME...

15  725 Le Président : M. le ministre du Travail, de l'Emploi et de...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! La parole... S'il vous plaît! M. le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale, vous avez votre réponse à donner.

M. Jean Boulet

17  899 M. Boulet : Oui. Alors, merci, M. le Président. La pénurie de main-d'oeuvre, c'est un défi de société. Ce n'est pas qu'une responsabilité qui repose sur les épaules de l'État. Les entreprises qui sont représentées par des associations patronales à la Commission des partenaires du marché du travail reconnaissent toutes que l'accroissement de la productivité, que ce soit la robotisation, l'automatisation ou l'intelligence artificielle, ça aide les entreprises non seulement à lutter contre la pénurie de main-d'oeuvre, mais à accroître leur potentiel de recrutement et de rétention. Il y a énormément d'entreprises modèles, au Québec, qui connaissent un succès phénoménal. Merci, M. le Président.

15  725 Le Président : Et cela met fin à la période de questions et de réponses orales.

Mmes, MM. les députés, nous allons suspendre pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 10 h 54)

(Reprise à 10 h 57)

Votes reportés

Motion proposant que l'Assemblée exige du gouvernement qu'il déclenche une
enquête publique et indépendante pour faire la lumière sur les circonstances
entourant les décès survenus au CHSLD Herron lors de la
première vague de la pandémie de COVID-19

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Comme annoncé précédemment, nous allons maintenant procéder au vote reporté sur la motion de M. le chef du troisième groupe d'opposition débattue hier aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, qui se lit comme suit :

«Que l'Assemblée nationale déplore le drame survenu au CHSLD Herron, où 47 aînés sont décédés lors de la première vague de la pandémie de COVID-19, au printemps 2020;

«Qu'elle rappelle les inquiétantes révélations concernant cette tragédie qui ont ressurgi dans les médias ces derniers jours;

«Qu'elle réitère le principe de responsabilité ministérielle dans la gestion des événements, c'est-à-dire que les ministres sont individuellement responsables de la gestion de leur ministère et qu'ils doivent répondre non seulement de leurs propres actions, mais aussi de celles de leurs fonctionnaires;

«Enfin, que l'Assemblée nationale exige du gouvernement le déclenchement d'une enquête publique et indépendante pour faire toute la lumière sur les circonstances entourant ces décès, et ce, tant pour les familles des victimes que pour la dignité de celles et de ceux qui ont perdu la vie.»

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint : M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), Mme Perry Mélançon (Gaspé), Mme Hivon (Joliette), M. Gaudreault (Jonquière), M. Bérubé (Matane-Matapédia).

M. Fortin (Pontiac), M. Leitão (Robert-Baldwin), Mme Nichols (Vaudreuil), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), M. Tanguay (LaFontaine), Mme St-Pierre (Acadie), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), Mme David (Marguerite-Bourgeoys), M. Derraji (Nelligan), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), Mme Melançon (Verdun), Mme Charbonneau (Mille-Îles), M. Barrette (La Pinière), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Sauvé (Fabre), M. Polo (Laval-des-Rapides), M. Arcand (Mont-Royal—Outremont), M. Ciccone (Marquette), Mme Rizqy (Saint-Laurent), M. Rousselle (Vimont).

M. Nadeau-Dubois (Gouin), Mme Labrie (Sherbrooke), Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques), Mme Ghazal (Mercier), M. Zanetti (Jean-Lesage), Mme Lessard-Therrien (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), M. Fontecilla (Laurier-Dorion), Mme Dorion (Taschereau), M. Marissal (Rosemont), M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve).

M. LeBel (Rimouski), M. Roy (Bonaventure), Mme Samson (Iberville).

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Que les députés qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

• (11 heures) •

Le Secrétaire adjoint : M. Jolin-Barrette (Borduas), Mme Guilbault (Louis-Hébert), M. Laframboise (Blainville), Mme Rouleau (Pointe-aux-Trembles), M. Girard (Groulx), Mme McCann (Sanguinet), M. Fitzgibbon (Terrebonne), Mme Roy (Montarville), M. Lemay (Masson), M. Simard (Montmorency), Mme Lavallée (Repentigny), M. Martel (Nicolet-Bécancour), M. Roberge (Chambly), M. Lévesque (Chauveau), Mme Lachance (Bellechasse), M. Charette (Deux-Montagnes), M. Lamontagne (Johnson), M. Carmant (Taillon), Mme Blais (Prévost), M. Caire (La Peltrie), M. Lefebvre (Arthabaska), M. Dubé (La Prairie), Mme Laforest (Chicoutimi), M. Dufour (Abitibi-Est), M. Skeete (Sainte-Rose), Mme Chassé (Châteauguay), Mme Hébert (Saint-François), Mme Proulx (Berthier), Mme Charest (Brome-Missisquoi), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), Mme Girault (Bertrand), M. Julien (Charlesbourg), M. Boulet (Trois-Rivières), M. Lafrenière (Vachon), M. Poulin (Beauce-Sud), M. Émond (Richelieu), M. Bachand (Richmond), Mme IsaBelle (Huntingdon), M. Chassin (Saint-Jérôme), M. Bélanger (Orford), Mme Picard (Soulanges), Mme Grondin (Argenteuil), M. Caron (Portneuf), M. Asselin (Vanier-Les Rivières), M. Reid (Beauharnois), Mme Dansereau (Verchères), Mme Jeannotte (Labelle), M. Tremblay (Dubuc), Mme Blais (Abitibi-Ouest), M. Campeau (Bourget), Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice), M. Thouin (Rousseau), Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac), Mme Boutin (Jean-Talon), M. Girard (Lac-Saint-Jean), M. Allaire (Maskinongé), Mme Guillemette (Roberval), M. Lemieux (Saint-Jean), M. Bussière (Gatineau), M. Provençal (Beauce-Nord).

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Y a-t-il des abstentions? Mme la secrétaire générale, pour le résultat du vote.

La Secrétaire : Pour :         38

                      Contre :          60

                      Abstentions :   0

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc, la motion est rejetée.

Motions sans préavis

Maintenant, nous sommes à la rubrique des motions sans préavis. En fonction de nos règles et de l'ordre de présentation des motions sans préavis, je reconnais maintenant un membre du deuxième groupe d'opposition. Mme la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue, la parole est à vous.

Demander au gouvernement d'examiner la possibilité de
créer un comité-conseil jeunesse sur le climat

Mme Lessard-Therrien : Merci, Mme la Présidente. J'aimerais souligner la présence dans nos tribunes des jeunes de la Délégation des générations futures et celle de Génération Climat Montréal, pour qui nous déposons la motion ce matin.

Alors, Mme la Présidente, je demande le consentement de cette Assemblée pour débattre de la motion suivante conjointement avec le ministre de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, le député de Robert-Baldwin, le député de Jonquière, le député de Bonaventure et le député de Rimouski :

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse l'importance et la nécessité de la voix, des idées et du pouvoir de la jeunesse, dans une perspective de justice intergénérationnelle;

«Qu'elle reconnaisse également la légitimité du rôle que la jeunesse a à jouer face à l'urgence climatique en tant que citoyennes et citoyens ainsi que représentantes et représentants des générations futures;

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement d'examiner, dans un processus horizontal, inclusif, participatif et transparent, la création d'un comité conseil jeunesse permanent sur le climat, représentatif des régions du Québec et des membres des Premières Nations et des Inuits du Québec.»

Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader du gouvernement.

M. Schneeberger : Il y a consentement, sans débat.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Oui, Mme la leader du deuxième groupe d'opposition.

Mme Labrie : Je demanderais le vote par appel nominal, s'il vous plaît.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc, nous allons procéder à la mise aux voix de cette motion présentée par Mme la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint : M. Nadeau-Dubois (Gouin), Mme Labrie (Sherbrooke), Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques), Mme Ghazal (Mercier), M. Zanetti (Jean-Lesage), Mme Lessard-Therrien (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), M. Fontecilla (Laurier-Dorion), Mme Dorion (Taschereau), M. Marissal (Rosemont), M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve).

M. Jolin-Barrette (Borduas), Mme Guilbault (Louis-Hébert), M. Laframboise (Blainville), Mme Rouleau (Pointe-aux-Trembles), M. Girard (Groulx), Mme McCann (Sanguinet), M. Fitzgibbon (Terrebonne), Mme Roy (Montarville), M. Lemay (Masson), M. Simard (Montmorency), Mme Lavallée (Repentigny), M. Roberge (Chambly), M. Lévesque (Chauveau), Mme Lachance (Bellechasse), M. Charette (Deux-Montagnes), M. Lamontagne (Johnson), M. Carmant (Taillon), Mme Blais (Prévost), M. Caire (La Peltrie), M. Dubé (La Prairie), Mme Laforest (Chicoutimi), M. Dufour (Abitibi-Est), M. Skeete (Sainte-Rose), Mme Chassé (Châteauguay), Mme Hébert (Saint-François), Mme Proulx (Berthier), Mme Charest (Brome-Missisquoi), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), Mme Girault (Bertrand), M. Julien (Charlesbourg), M. Boulet (Trois-Rivières), M. Lafrenière (Vachon), M. Poulin (Beauce-Sud), M. Émond (Richelieu), M. Bachand (Richmond), Mme IsaBelle (Huntingdon), M. Chassin (Saint-Jérôme), Mme Foster (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. Bélanger (Orford), Mme Picard (Soulanges), Mme Grondin (Argenteuil), M. Caron (Portneuf), M. Asselin (Vanier-Les Rivières), M. Reid (Beauharnois), Mme Dansereau (Verchères), Mme Jeannotte (Labelle), M. Tremblay (Dubuc), Mme Blais (Abitibi-Ouest), M. Campeau (Bourget), Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice), M. Thouin (Rousseau), Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac), Mme Boutin (Jean-Talon), M. Girard (Lac-Saint-Jean), M. Allaire (Maskinongé), Mme Guillemette (Roberval), M. Lemieux (Saint-Jean), M. Bussière (Gatineau), M. Provençal (Beauce-Nord).

M. Fortin (Pontiac), M. Leitão (Robert-Baldwin), Mme Nichols (Vaudreuil), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), M. Tanguay (LaFontaine), Mme St-Pierre (Acadie), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), Mme David (Marguerite-Bourgeoys), M. Derraji (Nelligan), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), Mme Melançon (Verdun), Mme Charbonneau (Mille-Îles), M. Barrette (La Pinière), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Sauvé (Fabre), M. Polo (Laval-des-Rapides), M. Arcand (Mont-Royal—Outremont), M. Ciccone (Marquette), Mme Rizqy (Saint-Laurent), M. Rousselle (Vimont).

M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), Mme Perry Mélançon (Gaspé), Mme Hivon (Joliette), M. Gaudreault (Jonquière), M. Bérubé (Matane-Matapédia).

M. LeBel (Rimouski), M. Roy (Bonaventure), Mme Samson (Iberville).

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever. Y a-t-il des abstentions? Mme la secrétaire générale, pour le résultat du vote.

La Secrétaire : Pour :         97

                      Contre :            0

                      Abstentions :   0

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc, cette motion est adoptée. Donc, je reconnais maintenant un membre du troisième groupe d'opposition. M. le député de Matane-Matapédia.

M. Bérubé : Mme la Présidente, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec la députée d'Acadie, la députée de Taschereau, le député de Bonaventure, la députée d'Iberville et le député de Rimouski, la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale insiste sur l'importance de l'art pour l'identité québécoise, ainsi que sur celle des artistes, des artisans et de toutes les personnes qui la rendent possible pour la production, la diffusion, la promotion et la valorisation de notre culture, précieuse et unique au monde;

«Qu'elle souligne que depuis deux ans, ces dernières catégories de travailleuses et de travailleurs ont été particulièrement touchées par les vagues successives de la pandémie;

«Qu'elle rappelle que la CAQ s'était engagée, lors de la [dernière] campagne électorale de 2018, à réformer la loi sur le statut de l'artiste au cours de la présente législature, qui s'achève;

«Qu'elle précise que cette réforme doit permettre aux artistes de bénéficier des mêmes droits et protections que les autres travailleurs québécois, c'est-à-dire d'obtenir des conditions minimales de travail négociées, applicables à tous leurs contrats, d'être couverts par la Loi sur la santé et sécurité du travail et protégés lors d'accidents de travail ou de maladies professionnelles, et d'avoir accès à des ressources et à des mécanismes en matière de harcèlement prévus par les normes du travail, entre autres;

«Qu'elle affirme le caractère essentiel d'assurer l'équité entre les différentes catégories d'artistes et de disciplines artistiques, certaines étant désavantagées, voire exclues de l'application de l'actuelle loi;

«Enfin, que l'Assemblée nationale demande au gouvernement de déposer au plus tard le 15 mai 2022 un projet de loi pour réformer le statut de l'artiste, afin de permettre son adoption avant la fin de la 42e législature.»

Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader du gouvernement.

M. Schneeberger : Pas de consentement.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Comme il n'y a pas de consentement, je suis...

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : S'il vous plaît!

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : M. le député de Matane-Matapédia. Mme la ministre, on... Bon. Alors, nous allons procéder à la prochaine motion, un membre du groupe formant le gouvernement. M. le leader du gouvernement, la parole est à vous.

M. Jolin-Barrette : Oui. Mme la Présidente, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec le député de Jean-Lesage, avec la députée de Joliette, le député de Bonaventure et le député de Rimouski :

«Qu'à l'approche du 17 avril, l'Assemblée nationale du Québec rappelle l'opposition formelle du Québec au rapatriement unilatéral de la Constitution à cette même date en 1982;

«Qu'elle dénonce que, 40 ans plus tard, cet affront n'a toujours pas été corrigé et continue à produire des effets préjudiciables à l'autonomie du Québec et à sa capacité de maintenir et de développer sa personnalité collective;

«Qu'elle rappelle que tous les gouvernements du Québec successifs depuis 40 ans ont dénoncé cette situation qui continue à produire des effets préjudiciables;

«Qu'enfin l'Assemblée nationale réitère que la négation du caractère national du Québec dans les lois constitutionnelles est injustifiée et inadmissible.» Merci.

• (11 h 10) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? Il n'y a pas de consentement.

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Bon, O.K., MM. les leaders. MM. les leaders. MM. les leaders! M. le leader du gouvernement...

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : MM. les leaders, est-ce qu'on peut passer à la prochaine motion? O.K. Alors, merci.

Alors, je suis prête à reconnaître un membre du groupe formant l'opposition officielle. Mme la députée de Verdun, la parole est à vous.

Mme Melançon : Alors, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec le député d'Hochelaga-Maisonneuve, le leader parlementaire du troisième groupe d'opposition, la députée d'Iberville, le député de Bonaventure et le député de Rimouski :

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse que l'ensemble des secteurs de l'économie québécoise sont affectés par la pénurie de main-d'oeuvre, et ce, partout au Québec;

«Qu'elle rappelle qu'il y a maintenant 238 140 postes vacants à combler;

«Qu'elle prenne acte qu'Emploi-Québec considère que sur l'horizon 2023, tous les secteurs d'activités seront en déséquilibre et que ceux-ci demeureront en déséquilibre jusqu'en 2030;

«Qu'elle déplore que le budget déposé en mars 2022 n'offre aucune solution à court terme pour freiner la pénurie de main-d'oeuvre;

«Qu'elle déplore que le gouvernement n'ait pas donné suite aux propositions offertes par les associations patronales et les syndicats pour réduire la pression de la pénurie de main-d'oeuvre;

«Qu'enfin, elle exige du gouvernement des mesures immédiates pour enrayer la pénurie de main-d'oeuvre qui affecte l'économie de toutes les régions du Québec.»

Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader du gouvernement.

M. Schneeberger : Pas de consentement.

Avis touchant les travaux des commissions

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Comme il n'y a pas de consentement, nous sommes rendus à la rubrique Avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.

M. Schneeberger : Oui, Mme la Présidente. Alors, j'avise cette Assemblée que la Commission de la santé et des services sociaux poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 11, Loi visant à augmenter l'offre de services de première ligne par les médecins omnipraticiens et à améliorer la gestion de cette offre, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 14 heures à 16 h 30, à la salle Pauline-Marois;

La Commission de la culture et de l'éducation poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 96, Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 14 heures à 16 h 30, à la salle Marie-Claire-Kirkland;

La Commission de l'économie et du travail poursuivra l'étude du projet de loi... l'étude des crédits budgétaires, pardon, 2022-2023 du volet Développement économique régional du portefeuille Économie et Innovation le mardi 26 avril 2022, de 9 h 45 à 11 h 15, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

La Commission des finances publiques procédera à l'étude des crédits budgétaires 2022-2023 du portefeuille Cybersécurité et Numérique, le mardi 26 avril 2022, de 9 h 30 à 11 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine...

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Excusez-moi. Si vous quittez le salon bleu, s'il vous plaît, faites-le en silence, parce que je n'entends pas un mot de ce que le leader du gouvernement dit présentement.

M. Schneeberger : La Commission de l'aménagement du territoire procédera à l'étude des crédits budgétaires 2022-2023 du volet Loisirs, Sports et Saines habitudes de vie du portefeuille Éducation le mardi 26 avril 2022, de 9 h 45 à 10 h 45, à la salle Pauline-Marois;

La Commission des institutions procédera à l'étude des crédits budgétaires 2022-2023 du volet Réforme des institutions démocratiques du portefeuille Conseil exécutif le mardi 26 avril 2022, de 11 h 45 à 12 h 30, à la salle Pauline-Marois;

La Commission des relations avec les citoyens procédera à l'étude détaillée des crédits budgétaires 2022-2023 du volet Lutte contre l'intimidation du portefeuille Famille le mardi 26 avril 2022, de 11 heures à midi, à la salle Marie-Claire-Kirkland;

La Commission des institutions procédera à l'étude détaillée des crédits budgétaires 2022-2023 du volet Lutte contre l'homophobie et la transphobie du portefeuille Justice le mardi 26 avril 2022, de 9 h 30 à 10 h 30, à la salle de l'Assemblée nationale;

La Commission de la culture et de l'éducation procédera à l'étude détaillée des crédits budgétaires 2022-2023 du volet Protection de la langue française du portefeuille de Justice le mardi 26 avril 2022, de 10 h 45 à 12 h 30, à la salle de l'Assemblée nationale. Voilà.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le leader. Aujourd'hui, il n'y a pas d'avis de la présidence.

Alors, nous allons suivre avec la rubrique Renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

Affaires du jour

La période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour.

M. le leader du gouvernement, pouvez-vous nous indiquer la suite des travaux, s'il vous plaît?

M. Schneeberger : Oui. Alors, pour la suite, je vous demanderais d'appeler l'article 18 du feuilleton.

Projet de loi n° 15

Adoption

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc, à l'article 18 du feuilleton, M. le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux propose l'adoption du projet de loi n° 15, Loi modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse et d'autres dispositions législatives. Y a-t-il des interventions? M. le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux, je vous cède la parole.

M. Lionel Carmant

M. Carmant : Merci, Mme la Présidente. Permettez-moi d'ouvrir la séance. Je suis particulièrement fier et heureux de me lever aujourd'hui en cette Chambre pour l'adoption du projet de loi n° 15, projet de loi dans lequel j'ai investi énormément d'efforts et de temps, car, pour moi, la protection de nos enfants, c'est primordial, en fait, c'est la priorité.

Cette loi, qui date maintenant de 40 ans, n'a jamais vraiment été dépoussiérée. Il y a bien eu quelques ajustements au fil du temps, mais rien de cette ampleur, Mme la Présidente. C'est ni plus ni moins une réforme en profondeur, adaptée aux réalités d'aujourd'hui, et il était temps, et, en fait, c'était plus que temps, Mme la Présidente, de s'y attaquer. Moins d'un an après le dépôt du rapport de la Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse, nous livrons la marchandise. L'adoption de ce projet de loi va changer la donne, notamment parce que nous nous sommes attaqués à des concepts complètement dépassés en 2022.

Pour débuter, nous avons introduit un préambule qui n'existait pas dans l'ancienne loi, soit celui de venir dire que l'enfant est dorénavant la priorité lorsque vient le temps de prendre des décisions le concernant. Cela peut sembler anodin, mais il n'en est de rien. Nous avons ainsi répondu favorablement à l'une des recommandations de la commission Laurent.

Nous avons également revu la notion de confidentialité, qui posait un problème dans bien des cas, notamment en ce qui concerne l'échange d'information, et ce, pour le bien de l'enfant. Dorénavant, la DPJ sera tenue de transmettre de l'information jugée essentielle et pertinente à un tiers lorsque la situation le nécessite. Dans l'intérêt de l'enfant et afin d'éviter des drames ou des situations potentiellement à risque, il est nécessaire que tous collaborent afin d'assurer la protection de nos jeunes. Ce changement, pour moi, était non négociable. Trop de familles ont été brisées en raison de cette notion. Je n'en veux plus.

Autre point majeur que nous avons introduit dans la loi, à partir de maintenant, et pour l'avenir, il faudra s'assurer que les enfants confiés à la DPJ ou en famille d'accueil puissent s'épanouir pleinement sans avoir à vivre des situations qui peuvent engendrer des troubles d'attachement sévères parce qu'ils passent d'une famille d'accueil à leur famille biologique trop souvent. Il faut arrêter ce qu'on a communément appelé le ballottage des enfants, Mme la Présidente. L'idée, ici, n'est pas d'enlever les enfants à leurs parents, bien au contraire. Ceux-ci auront toujours un rôle primordial à jouer. Mais, à un moment donné, c'est l'enfant qui pâtit des allers-retours incessants, et ça, c'est excessivement nocif pour le développement de nos jeunes.

• (11 h 20) •

Un autre point très important et qui a été réclamé par de nombreux groupes est l'introduction de la notion d'exposition à la violence conjugale. Dorénavant, celle-ci devra être prise en considération lors de l'intervention de la DPJ. S'il y a risque de compromission, des actions devront être posées immédiatement. Une formation sera d'ailleurs offerte à tous les intervenants afin qu'ils soient en mesure de détecter celle-ci, car l'expression à la violence... l'exposition à la violence conjugale peut parfois prendre des formes insidieuses.

L'ajout suivant a été fortement recommandé par ma collègue et députée de Notre-Dame-de-Grâce ainsi que par la commission Laurent, et c'est avec plaisir que nous avons pu introduire l'accompagnement lors de la transition des jeunes à la vie adulte. Maintenant, ceux-ci pourront bénéficier de services de l'État pour les aider à s'accomplir lorsqu'ils auront atteint l'âge de 18 ans, et ce, jusqu'à 25 ans. C'est une avancée majeure et importante pour les jeunes adultes qui se retrouvaient plus souvent qu'autrement livrés à eux-mêmes. Ces situations peuvent engendrer des problèmes graves, comme l'itinérance.

La nouvelle mouture de la loi ajoute un chapitre nouveau tenant compte des réalités autochtones. Nous adaptons plusieurs dispositions de la LPJ aux Premières Nations et Inuits afin de mieux répondre aux besoins des enfants autochtones et de favoriser une plus grande participation des communautés et des organismes autochtones en milieu urbain aux moyens à mettre en place afin de soutenir les familles et d'assurer la continuité culturelle. D'aucuns diront que nous n'allons pas encore assez loin, mais, au lieu de voir le verre à moitié vide, il serait bien mieux de voir la réelle volonté de notre gouvernement de travailler de concert avec les peuples autochtones.

Enfin, en ce qui concerne l'intervention judiciaire, les modifications apportées à la Loi sur la protection de la jeunesse assurent notamment la représentation systématique des enfants par avocats au tribunal. De plus, les ordonnances visant la permanence du projet de vie de l'enfant dans un milieu de vie substitut devront tenir d'abord compte de l'intérêt de l'enfant et ensuite assurer une continuité et une stabilité.

Notre gouvernement est en action et dans la bonne direction afin d'améliorer les services offerts aux jeunes et aux familles et de mieux protéger les enfants du Québec. Plusieurs actions ont été déployées au cours des dernières années, notamment afin de consolider les services en protection de la jeunesse. Et, tellement important pour moi, le plan du gouvernement améliorera la qualité et l'accès aux services de proximité pour nos jeunes en difficulté et leurs familles et misera sur des services qui seront adaptés selon l'intensité des besoins, pour soutenir le développement optimal des jeunes, et cela, en amont de la DPJ.

Bref, Mme la Présidente, nous avons travaillé très fort, mon équipe et moi, de concert avec les équipes du ministère, tant clinique que juridique, qui ont mis tout leur coeur malgré tous les autres dossiers qu'ils ont à gérer. Ils ont toute ma reconnaissance et ma gratitude pour ce travail colossal.

Je tiens également à remercier les oppositions, qui nous ont permis de bonifier ce projet de loi. J'en profite pour souligner particulièrement l'appui indéfectible dont a fait preuve la députée de Notre-Dame-de-Grâce lors de l'étude détaillée. Je sais qu'elle croit en notre réforme depuis le début. Elle a su défendre ses points de façon remarquable afin d'améliorer considérablement celle-ci. Et, tout comme moi, elle l'a fait pour nos enfants présents et à venir. Je tiens à la remercier publiquement pour cette excellente collaboration. Je suis persuadée que ce travail que nous avons fait tous ensemble permettra d'améliorer l'avenir de nos jeunes. J'y crois fermement.

Un mot également pour tous ceux qui sont venus en consultations particulières et qui nous ont déposé un mémoire. Je vous ai tous lus et écoutés avec le plus grand intérêt, et chacun était motivé par la motivation la plus noble, celle d'améliorer l'avenir de nos enfants.

Et, pour terminer, je tiens à remercier Mme Laurent ainsi que tous les commissaires, qui ont fait un travail de fond remarquable en nous remettant un rapport étoffé qui nous a permis de réformer cette loi, et ce, en moins d'un an.

Bien entendu, Mme la Présidente, notre travail ne s'arrête pas ici, et nous poursuivrons la mise en oeuvre de ce chantier colossal que nous avons entrepris. Il en va de l'intérêt de tous nos enfants. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, M. le ministre.

Maintenant, je suis prête à céder la parole au prochain intervenant. Je crois que ça va être Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce. Alors, la parole est à vous.

Mme Kathleen Weil

Mme Weil : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Donc, nous voilà, évidemment, à une étape bien, bien importante du projet de loi, soit l'étape de l'adoption, Loi modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse et d'autres dispositions législatives.

Alors, on se rappelle le tragique et triste contexte de la réforme proposée par la Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse, qui inclut des recommandations de modifications législatives, soit le décès de la fillette de Granby en avril 2019, la petite Lilly, comme l'appelle Mme Laurent. Et j'ai une pensée aujourd'hui pour la petite Lilly.

Pour cette dernière étape, aujourd'hui, j'aimerais revenir sur certains grands thèmes du projet de loi n° 15 pour que l'on puisse apprécier l'impact que des mots et l'importance qu'on donne à des mots... à quel point ça peut avoir un impact sur le bien-être de l'enfant.

Alors, l'intérêt de l'enfant, la considération primordiale, le projet de loi vient affirmer que toutes décisions par la DPJ doivent être prises dans l'intérêt de l'enfant, qui est la considération primordiale, et que la stabilité de l'enfant est un déterminant majeur pour son sain développement. Et, bien que le maintien ou le retour de l'enfant dans son milieu familial est privilégié pour assurer cette stabilité, il est conditionnel, toujours et toujours, à l'intérêt de l'enfant.

Un amendement vient clarifier que c'est l'intérêt de l'enfant qui prime, aussi, dans le projet de loi qui vise également à mettre en évidence l'ordre de priorité pour choisir un milieu de vie substitut. Lorsque le maintien de l'enfant dans son milieu familial n'est pas dans son intérêt, l'enfant doit être confié en priorité à des personnes qui lui sont les plus significatives, notamment les grands-parents et les autres membres de la famille élargie. Lorsqu'il n'est pas dans l'intérêt de l'enfant qu'il soit confié à ces personnes, l'enfant doit être confié à un milieu de vie se rapprochant le plus possible d'un milieu familial. Lorsque le retour, finalement, de l'enfant dans son milieu familial n'est pas dans son intérêt, la décision doit, de façon permanente, assurer la continuité des soins et la stabilité des liens et des conditions de vie appropriés à ses besoins et à son âge.

J'ai amené un amendement, que le ministre a accepté, afin de favoriser le maintien de l'enfant avec sa fratrie dans un même milieu de vie substitut quand la situation est favorable. Donc, l'amendement se lit : «Lorsqu'un enfant est retiré de son milieu familial, le maintien de l'enfant avec sa fratrie dans un même milieu de vie substitut doit être favorisé à condition que cela soit dans l'intérêt de cet enfant.»

Par ailleurs, plusieurs groupes avaient demandé de réduire les délais lorsque le tribunal ordonne de confier un enfant à un milieu de vie substitut. Nous avons plaidé que le temps des enfants est différent à chaque âge et à chaque étape de leur développement. Malheureusement, notre amendement a été rejeté, mais le concept, évidemment, est bien compris par le ministre et son équipe.

Donc, une nouveauté dans le projet de loi, c'est le fait d'inclure celui du droit de l'enfant ou adolescent d'être représenté. Chaque enfant a un droit d'être représenté par un avocat. Et donc il faut y revenir sur la commission spéciale qui avait dit qu'actuellement, à présent, la représentation des enfants est variable et peu encadrée. Donc, cet amendement vient répondre à cette préoccupation.

La plupart des enfants sont représentés par avocat devant le tribunal grâce à l'aide juridique. D'ailleurs, les avocats permanents de la Commission des services juridiques représentent, Mme la Présidente, plus de 12 000 enfants par année devant le tribunal. Et le commentaire de la commission, c'est que, toutefois, le travail de représentation des enfants s'avère complexe et les règles pour l'encadrer sont insuffisantes. Donc, il faudra porter une attention toute particulière à ce nouveau droit pour assurer l'efficacité et l'impact voulu par le ministre pour les enfants et par la société, évidemment.

(11 h 30)

Donc, autre changement bien important que je voudrais souligner, c'est la création de ce poste de directeur national de la protection de la jeunesse et table des directeurs, bon, surtout le directeur. En novembre 2020, on se rappelle, lors d'observations et de recommandations préliminaires, la commission spéciale recommandait qu'un directeur national de la protection de la jeunesse ayant un statut de sous-ministre soit nommé. La commission soulevait, à l'époque, un problème de leadership et de reddition de comptes au sein de la protection de la jeunesse. Et elle recommandait aussi que cette autorité provinciale aurait notamment pour fonction d'exercer un suivi rigoureux des services aux enfants et aux familles et de mesurer les effets des interventions. Je pense que c'est un commentaire important.

On a eu l'occasion, d'ailleurs, non seulement lorsqu'on a adopté cet article, mais aussi tout au long... on a pu poser des questions à la directrice nationale, qui a pu répondre à nos préoccupations... ou tout simplement une compréhension du fonctionnement du système avant d'adopter certains amendements. Et je dois vous dire que j'ai beaucoup apprécié sa collaboration et son éclairage.

En mars 2021, le gouvernement a nommé une première... bon, donc, c'est Catherine Lemay, cette première directrice dont je vous parlais qu'on a eu l'occasion d'échanger avec tout au long de l'étude du projet de loi. Elle s'assure, donc, du suivi des trajectoires de soins et de services des enfants de la DPJ, détermine les orientations et les normes de pratique clinique et de gestion et exerce les contrôles requis pour assurer que les interventions à la DPJ respectent les standards généralement reconnus et soient adéquates sur les plans à la fois scientifique, humain et social. De plus, elle doit exercer un leadership et soutenir l'action des directeurs dans l'exercice de leurs responsabilités, coordonner toute l'intervention impliquant l'intervention de plus d'un directeur au sein d'une autre autorité compétente. J'ai eu l'occasion de parler de la table qui a été créée, qui était un forum. Une fois, c'était la table... non, ce n'était pas la table, je ne m'en rappelle plus... l'Association des centres jeunesse du Québec. Donc, j'ai eu l'occasion de parler... donc, cette table va produire un rapport parce qu'ils vont faire des échanges sur les meilleures pratiques et s'assurer qu'il y a une cohésion et cohérence dans les actions qu'ils posent dans tous les territoires du Québec. C'est bien important de le mentionner, parce que c'est inégal, l'application de la loi dans les territoires, pour différentes raisons. D'ailleurs, la commission spéciale a dédié un chapitre complet sur les impacts.

Donc, j'en viens à la violence conjugale, le ministre y a fait référence. C'est bien important de souligner le travail qui a été fait concernant la violence conjugale. La commission spéciale, d'ailleurs, a dédié un chapitre ou avait dédié un chapitre complet sur les impacts des conflits familiaux et de la violence conjugale sur les enfants, le chapitre XII. Selon la commission, l'intervention, selon des services de protection de la jeunesse, dans le cas de violence conjugale et de conflits sévères de séparation, est un des enjeux ayant fait l'objet du plus grand nombre d'appels et de courriels à la commission. Imaginez-vous, pendant tous les mois qu'ils ont fait leurs consultations, c'était l'enjeu numéro un. Elle a également reçu de nombreux témoignages à ce sujet lors des auditions publiques et des forums régionaux, et ceux-ci ont soulevé de nombreux problèmes, notamment le manque de formation des intervenantes, les difficultés de collaboration entre les différents organismes et l'exercice de parentalité lors de ces conflits.

Selon la commission, l'exposition à la violence conjugale fait partie des catégories les plus fréquentes d'incidents fondés en protection de la jeunesse. Elle souligne aussi que l'agressivité du parent violent peut faire vivre aux enfants un climat de peur et d'insécurité. Selon les victimes, experts entendus, la violence conjugale a des répercussions sur le développement. Les enfants vivant dans un contexte de violence conjugale ont davantage de problèmes de santé et le bien-être des enfants. Cette violence affecte leur sentiment de sécurité et de bien-être, en plus d'entraver leur développement mentale et physique. Ils sont également plus à risque de reproduire des modèles relationnels violents dans leur vie en devenant à leur tour victime ou agresseur.

Selon ce qu'a entendu la commission, le vécu des enfants n'est pas toujours pris en compte, et des témoins ont souligné qu'il est important d'écouter les enfants qui vivent des situations de violence conjugale. L'Alliance des maisons d'hébergement de 2e étape pour femmes et enfants victimes de violence conjugale affirme que, lorsque l'enfant exprime des peurs, elles ne sont pas entendues. On priorise le droit de contact des parents au détriment de l'intégrité psychologique et physique des enfants. Dans un mémoire déposé à la commission, le refuge de l'Ouest-de-l'Île a dénoncé le fait que les intervenantes de la DPJ ne reconnaissent pas le vécu des enfants et ne respectent pas leur rythme. Il mentionne également la pression exercée sur les enfants pour reprendre contact rapidement avec l'agresseur, même s'ils disent qu'ils ne sont pas prêts.

La commission constate que les enfants vivant dans un contexte de violence conjugale ou familiale ainsi que ceux qui sont au centre de conflits sévères de séparation constituent des victimes trop souvent oubliées. Les commissaires soulignent l'urgence d'intervenir rapidement dans la vie de ces enfants et de leur apporter le soutien et les ressources nécessaires pour leur venir en aide et pour assurer leur bon développement et qu'il est essentiel de bien évaluer les besoins de ces enfants, de les écouter, d'écouter leurs opinions, leur détresse et les accompagner adéquatement tout en tenant compte de leur rythme.

Alors, elle a aussi souligné... Puis on a beaucoup parlé avec le ministre de ça, la formation. Et donc on nous a rassurés qu'il y aura la formation pour tous les intervenants et intervenantes qui auront à agir, évidemment, en matière de compromission. Et donc on a été rassurés, et je vous dirais que ce que le ministre a fait, on a trouvé ça excellent, je l'ai dit hier, c'est qu'il... On était tous en train de déposer des amendements suite aux consultations qu'on a eues. Le ministre a dit : Ce qu'on va faire, c'est que moi, je vais demander à mon équipe, avec des experts, de regarder cette question et d'amener un paquet, si on veut, des amendements qui vont être cohérents et comme ça, donc, on pourra s'assurer qu'on respecte toutes les règles de la législation, etc., mais en tenant compte des endroits importants dans le projet de loi. Alors, on a beaucoup apprécié.

Ça a pris quelques semaines. Le ministre voulait vraiment que son équipe aille au fond des choses, et donc il y a eu des amendements qui ont été apportés. Et on a tous apprécié cette expérience, parce qu'on sent vraiment qu'on a pu faire une différence par rapport à cet enjeu, qui était souvent un peu... bien, souvent, très, très caché, je vous dirais, parce que j'ai vraiment parlé avec beaucoup d'avocats et de femmes victimes de violence conjugale qui m'ont beaucoup éclairée sur la situation, et on est venu vraiment répondre, je crois bien... On verra avec l'expérience, mais j'ai bon espoir. Et c'est vraiment formation, formation, formation qui va jouer un rôle, notamment, les tribunaux aussi, et ce sera donc aux tribunaux d'assurer cette formation.

Le ministre l'a mentionné, le passage à la vie adulte, un chapitre bien important pour moi dans ce trajet que j'ai pris en matière de protection de la jeunesse. Donc, le passage à la vie adulte... À 18 ans, on n'est pas vraiment adulte. Ça me fait penser à un article que j'avais lu, ce titre est toujours resté dans ma tête, en effet, plus de 60 % des Québécois âgés de 18 à 24 ans vivent encore chez leurs parents. Ça, c'est dans la population ordinaire, là, de tous les jours... de tout le monde. Imaginez, donc, des jeunes plus fragiles que la moyenne, laissés à eux-mêmes, à un âge où l'on a peut-être atteint la majorité, mais pas la maturité d'un adulte. C'est ce que vivent les jeunes de la DPJ.

Comme l'a documenté un groupe de chercheurs dans l'étude sur le devenir des jeunes placés, qui suit un millier d'ex-placés de la DPJ, l'atterrissage dans la vie autonome est difficile, voire brutal. Ainsi, 20 % de ces jeunes ont connu au moins un épisode d'itinérance. À 19 ans, à peine le quart ont leur diplôme d'études secondaires. Mal préparés, mal soutenus, beaucoup tombent dans le vide. C'est pourquoi ils ont besoin du soutien du gouvernement. L'étude démontre qu'étendre le soutien de l'État à ceux qui le souhaitent jusqu'à l'âge de 21 ans serait rentable humainement et économiquement. Imaginez jusqu'à 25 ans... jusqu'à 26 ans, comme le ministre a inclus, donc, dans le projet de loi.

Alors, oui, en effet, j'ai interpelé le ministre à de nombreuses occasions lors de l'étude du p.l. n° 15 afin qu'il garantisse un accompagnement pour les jeunes issus de la DPJ dans ce passage à la vie adulte. Et les jeunes sont venus rencontrer le ministre. Ça a été un moment très, très fort, pour moi, en tout cas, de cette étude du projet de loi. Et donc, lors d'une conférence de presse, les ex-placés sont venus livrer un message. Le ministre les a rencontrés. Et donc ils ont parlé d'un programme qui prévoit l'accès aux services de santé physique et mentale, soutien social et communautaire, le logement, le soutien à la scolarisation et à l'insertion à l'emploi et un soutien financier adéquat.

Alors, la bonne nouvelle, c'est que le ministre a eu beaucoup d'écoute vis-à-vis ces jeunes et mes propres paroles. Nous avons bonifié le projet de loi. Un amendement a été présenté par le ministre, et donc, comme il l'a dit hier, modifiant la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux. C'était une des clés de la solution. Alors, l'État doit prendre des mesures, et évidemment le ministre a dit qu'il doit prendre le temps pour bien implanter... Il fera des consultations. Alors, on va tous suivre l'évolution de ce dossier. Moi, je vais le suivre avec beaucoup d'intérêt.

Et j'aimerais remercier, donc, les jeunes qui sont venus ici. Ils étaient en haut, dans nos estrades, donc, quand ils sont venus. Jessica Côté-Guimont, je la remercie. Je remercie Jessy Steve Gagné, Geneviève Caron, Kevin Champoux-Duquette et Émilie Roy pour le succès, je pense, collectivement, qu'on a eu et le succès qu'on aura pour les jeunes de... les ex-jeunes placés de la DPJ.

• (11 h 40) •

Les autochtones, évidemment, c'est un chapitre plus... bon, j'en parlerais, mais évidemment c'est une situation plus difficile. Le projet de loi n° 15 introduit un chapitre qui regroupe de nouvelles dispositions sur les services de protection de la jeunesse destinés aux autochtones et reconnaît, dans son préambule, qu'ils sont les mieux placés pour prendre soin de leurs enfants. C'était d'ailleurs une recommandation de la commission Viens sur les relations entre les autochtones et certains services publics, d'ailleurs reprise aussi par la commission Laurent.

De nouvelles mesures visant à tenir compte des facteurs historiques, sociaux et culturels qui leur sont propres seront intégrées, comme la possibilité de former des conseils de famille. Le projet de loi prévoit aussi la possibilité, pour une communauté autochtone ou un regroupement de communautés, d'administrer l'aide financière pour favoriser la tutelle, la tutelle coutumière, l'adoption et l'adoption coutumière. Le projet de loi permet aussi de généraliser des ententes, comme celles qui sont intervenues entre des bandes attikameks et le gouvernement québécois, visant la prise en charge par les communautés des services de protection de la jeunesse.

Mais la nouvelle loi ne prévoit pas de nouveau mécanisme pour les communautés qui souhaitent s'affranchir de la Loi sur la protection de la jeunesse avec l'implantation de leurs propres modèles, autres que ceux existant en vertu de l'article 37.5 de la loi actuelle.

Lors du dépôt du projet de loi, l'Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador a souligné leur mécontentement quand il écarte des recommandations de la commission spéciale qui proposait au gouvernement du Québec de permettre aux dirigeants autochtones de créer leur propre loi sur la protection de la jeunesse et de la famille. Et je les cite : «Malheureusement, nous sommes encore devant un gouvernement qui tient absolument à imposer ses lois et ses façons de faire en matière de protection de la jeunesse. Le p.l. n° 15 n'est pas à la hauteur de nos ambitions, puisqu'il ne reconnaît pas notre droit inhérent à l'autodétermination en matière de protection de la jeunesse.»

D'ailleurs, l'APNQL a encore réagi cette semaine pour exprimer leurs préoccupations à... leur consternation par le peu d'écho que semblent avoir les nombreuses représentations faites devant d'innombrables tribunes qui ont étudié la situation des enfants et des jeunes qui se trouvent confrontés, donc, au système québécois de protection de la jeunesse. Selon eux, il est clair que l'objectif poursuivi par les gouvernements des Premières Nations est d'obtenir une pleine autonomie dans la gestion de leur protection de la jeunesse. Or, le gouvernement a plutôt fait le choix d'imposer ce qu'il juge être bon pour les communautés.

D'ailleurs, une des recommandations du Conseil de la nation atikamekw était de formuler le considérant suivant, dans le préambule : «Considérant que les Premières Nations et les Inuits possèdent le droit à l'autodétermination et à l'autonomie gouvernementale, notamment à l'égard de leurs enfants et de leurs familles.

«En ce sens, le Conseil de la nation atikamekw aurait aimé que le gouvernement saisisse l'opportunité [...] de mettre en oeuvre l'ensemble des recommandations émises par la commission Laurent à l'égard des autochtones et principalement celles leur reconnaissant une plus grande et réelle autonomie, à savoir : permettre aux dirigeants autochtones de créer leurs propres lois sur la protection de la jeunesse et de la famille; et reconnaître la compétence des dirigeants autochtones dans l'exécution et le contrôle d'application de ces textes...»

Alors, il faudra... Moi, je vous dis, cette expérience, et les échanges que j'ai eus, et la sensibilisation que les communautés autochtones ont pu nous faire, cette sensibilisation qu'ils nous ont... nous ont sensibilisés, finalement, à la réalité. Moi, je suis convaincue que, plus tôt, certainement plus tôt que plus tard, il va falloir écouter la voix des autochtones.

Et j'en viens donc à un sujet qu'on a traité vraiment à la fin de l'étude du projet de loi, c'est ce fameux... durée maximale d'hébergement. Richard Guay, gestionnaire des services sociaux à la Commission de la santé et des services sociaux des premières nations du Québec et du Labrador, a écrit une lettre adressée au ministre afin de rectifier ce qu'il appelle certains faits et réaffirmer leur opposition à la formation d'un conseil de famille comme condition pour exempter les enfants autochtones des durées maximales d'hébergement, comme il est prévu à l'article 131.12 du projet de loi.

Je le cite, dans sa lettre, il dit : «...vous affirmez vouloir conserver un "filet de sécurité" si l'enfant se trouve dans une situation défavorable, ce filet de sécurité prenant la forme du conseil de famille. Nous réitérons que nous sommes en désaccord avec le fait d'assujettir l'exemption des durées maximales d'hébergement à la mise en place d'un conseil de famille, notamment car celui-ci ne constitue pas une pratique répandue dans l'ensemble des nations et communautés au Québec. Certaines d'entre elles se verraient ainsi imposer une façon inadaptée de gérer leurs services à l'échelle locale, par le Québec. Les agences des services à l'enfance et à la famille des Premières Nations, déjà en place dans les communautés, ainsi que les organismes autochtones ayant le mandat d'offrir des services sociaux en milieu urbain, tels que les centres d'amitié autochtones, jouent déjà ce rôle de "filet de sécurité" auprès des familles en difficulté et des enfants à risque. L'article 131.12 tel que libellé actuellement a pour effet de créer un traitement différentiel et de porter directement préjudice aux enfants et aux familles qui soit décident de recevoir des services différents...» Soit parce qu'ils décident de recevoir des services différents, soit parce qu'ils n'ont pas accès aux services d'un conseil de famille.

«Par ailleurs, rappelons que les durées maximales d'hébergement ont été introduites à la loi dans le but d'assurer la stabilité des liens affectifs des enfants confiés en milieu de vie substitut. Cette disposition s'appuie sur une théorie — qu'il appelle — occidentale de l'attachement, dont l'application aux peuples autochtones est hautement contestée, vu notamment les dynamiques familiales différentes au sein des communautés.» Alors, il continue : «En quoi d'exempter les enfants autochtones d'une disposition fondée sur une doctrine occidentale et culturellement inadaptée mettrait-il l'enfant à risque? D'où vient la prétendue nécessité d'ajouter un filet de sécurité? Par ailleurs, la loi regorge d'autres possibilités pour le tribunal de s'assurer de la sécurité de l'enfant. Toute décision rendue par le tribunal doit, application des durées maximales d'hébergement ou pas, l'être dans l'intérêt de l'enfant et dans le respect de ses droits.»

Et, je vous dirais, il a rajouté aussi : « Enfin, il y a une contradiction entre le fait que le gouvernement refuse d'accepter cet amendement et le considérant qu'on a adopté dans le nouveau préambule qui se lit ainsi : "Considérant que les autochtones sont les mieux placés pour répondre aux besoins de leurs enfants de la manière la plus appropriée".»

Alors, je voulais porter leur voix parce que je pense que c'était un moment important pour nous tous, tous les députés, d'être très sensibilisés quand on a devant nous un objectif clair, c'est de protéger les enfants. Le ministre est plein de bonne volonté. Les gens qui travaillent avec le ministre, tout le monde est rempli de bonne volonté, mais ce qu'ils nous demandent, c'est de les écouter. Et j'ai été très touchée par ce commentaire, et mon collègue le député de Jacques-Cartier l'a bien dit hier, on les invite dans des consultations, ils expriment leurs points de vue. D'ailleurs, j'ai été vraiment agréablement surprise de voir le nombre d'autres groupes de la société québécoise qui appuient cette notion d'autodétermination, mais, quand vient le temps d'apporter un amendement, il n'y a pas vraiment d'écoute et qu'on ne leur donne pas le temps. Donc, il n'y a pas assez de temps de consultation, et on ne respecte pas leur notion de temps pour pouvoir échanger convenablement avec les décideurs.

Alors, je voulais le mentionner, et ça n'a pas changé, comment dire... C'est important d'apporter leur voix, parce que, tôt ou tard, comme je l'ai dit, la société québécoise va évoluer, les gouvernements aussi pour répondre. Et on a été au gouvernement. Je connais exactement les défis pour le ministre, mais chaque occasion est une occasion d'apprendre et d'apprécier. Pour moi, ça a été un moment important de comprendre que la notion de temps chez les autochtones est tout à fait différente de la notion de temps pour nous, et qu'il va falloir tenir compte de ça, et leur accorder le respect qu'on leur doit et le respect pour leur capacité de prendre des décisions qui concernent le bien-être de leurs enfants et de leurs communautés.

Il y a un chapitre, dans le temps qu'il me reste, qui est très... assez bouleversant, de la commission Laurent. On n'en a pas parlé en commission parlementaire parce qu'on n'avait pas... ce n'était pas le moment de le faire, mais c'est le chapitre sur la commission... la communauté anglophone et autochtone, et c'est certainement triste. Je tiens à signaler que le chapitre XI est bien important dans le rapport. Et, je sais, j'ai parlé avec des ex-commissaires qui ont dit qu'ils ont découvert quelque chose qui les a vraiment surpris et qu'il faut miser sur l'importance d'assurer un accès équitable aux services de prévention et de protection de la jeunesse aux enfants et leurs familles d'expression anglaise au Québec.

Donc, le constat de la commission spéciale : Pour établir un lien de confiance, les enfants et leurs familles ont besoin que le soutien soit offert dans une langue qu'ils comprennent. Les régions font face à une pénurie de ressources et de main-d'oeuvre anglophone malgré des besoins criants. Et ils soulignent l'Estrie, l'Outaouais, notamment, dans les autres régions du Québec, des services quasi inexistants, donc tout à fait différents de la réalité montréalaise, bien qu'à Montréal les services consacrés aux familles d'expression anglaise se détériorent. Alors, ils recommandent de garantir l'accessibilité des services en anglais aux enfants et aux familles partout au Québec et d'octroyer un mandat suprarégional à un ou des établissements pour offrir des services de réadaptation aux enfants d'expression anglaise.

• (11 h 50) •

J'ai fait le tour du Québec, quand j'ai eu la responsabilité... j'ai été nommé ministre responsable de la communauté anglophone. Je suis allée visiter toutes les communautés anglophones partout au Québec, et, je vous dirais, ça m'avait beaucoup frappée. Il y a beaucoup de pauvreté, contrairement à ce qu'on peut imaginer, beaucoup de pauvreté, de fragilité et un manque de ressources importantes pour les enfants qui ont des problèmes de développement et de comportement. Et, des fois, c'est vraiment... pour réussir à l'école, donc, des enfants autistes, etc., il n'y a pas d'appui. Et, on comprend, c'est un... Ce serait vrai pour d'autres communautés, notamment les autochtones aussi. Il va falloir porter... Ce que la commission demande, c'est d'apporter une attention particulière à cette situation.

J'ai vu, par ailleurs, les CIUSSS et les CISSS avoir une relation avec les organismes qui représentent des anglophones, et ça, ça m'a rassurée. Ce n'est peut-être pas partout, mais honnêtement, je trouvais qu'ils étaient toujours à l'écoute et ils se connaissaient. Mais il y a une fragilité dans ces communautés. Il va falloir porter attention...

Familles d'accueil, un enjeu important, il y a eu plusieurs reportages. C'est évidemment... et le ministre l'a évoqué, lorsqu'on voulait étendre la possibilité, pour ceux qui sont en famille d'accueil, de rester jusqu'à 21 ans, c'est ce manque de familles d'accueil au Québec. Geneviève Rioux, la présidente de la Fédération des familles d'accueil et ressources intermédiaires du Québec, croit que, pour en attirer de nouvelles et conserver celles qui jouent déjà ce rôle important, le gouvernement doit faire tomber bien des obstacles.

La commission spéciale, d'ailleurs, s'est penchée sur cette question, et son rapport contient une série de solutions, notamment d'alléger les critères de recrutement qui sont actuellement trop stricts et non identiques d'une région administrative à l'autre. On se demande — et je les cite — alors si le directeur national de la protection de la jeunesse imposera une norme générale quant aux critères pour recruter des familles d'accueil. Donc, c'est matière à réflexion, et je pense que la nouvelle directrice, c'est justement le genre de rôle qui tombe dans son mandat.

En conclusion, évidemment, cette réforme, c'est un pas de géant en avant, des changements importants qui répondent, pour la plupart, des recommandations de la commission Laurent, mais il y a tous autres types de mesures qui touchent la première ligne, des mesures de prévention, qui ne sont pas des mesures législatives. Mais on sait qu'il y a deux grands problèmes, c'est la pénurie de main-d'oeuvre...

Donc, le projet de loi ne peut pas tout régler. Depuis la pandémie, le nombre de signalements à la DPJ est en hausse. La liste d'attente pour une évaluation après un signalement ne cesse de s'allonger et les départs parmi le personnel expérimenté se multiplient. Alors, la commission spéciale recommande de, pour valoriser, soutenir et reconnaître les intervenantes, revoir la charge de travail des intervenantes pour assurer des services de qualité, assurer la sécurité physique et psychologique des intervenantes, offrir un meilleur soutien et un meilleur encadrement aux intervenantes, améliorer la formation initiale et le développement professionnel.

Aussi, le ministre est aussi très partisan d'une première ligne très, très forte, la prévention. On a parlé de plusieurs exemples où... des belles collaborations entre les CIUSSS, les CISSS, les CLSC et les organismes du terrain. Lorsqu'ils reçoivent un signalement, il y a certains qui ont eu le réflexe d'aller voir si... l'appui à la famille, sachant que ce n'était peut-être pas une situation de compromission, vraiment, mais tout simplement une inquiétude, et donc de tendre la main à des organismes communautaires qui viennent, comment dire, sécuriser la DPJ, mais aussi, évidemment, en travaillant avec la famille et les enfants, puis ça donne des résultats.

Donc, pour ça, évidemment, ça va prendre des programmes. Et je sais que le ministre a dans son napperon beaucoup de projets et une continuation à faire, mais ça va prendre un financement important pour soutenir les organismes. Ça, ce message-là, on le reçoit beaucoup. Ils sont mal en point. La COVID a fait beaucoup de mal aussi, la période de la COVID, autant du niveau de la compromission... mais aussi les organismes communautaires qui ont été fragilisés. Donc, il va falloir porter une attention particulière à la solidité de cette première ligne.

En conclusion, je tiens à souligner que notre formation a été présente à chaque séance de l'étude détaillée afin de plaider pour les différentes recommandations des groupes ayant édité un mémoire. Nous sommes fiers de notre participation. Moi, je suis particulièrement fière d'avoir participé à cette commission, un projet de loi extrêmement important pour nos jeunes et nos enfants. Et, à chaque étape de ce projet de loi et chaque intervention, nous avons tenu compte ensemble de l'intérêt de l'enfant primordial, une considération primordiale. On a amené, donc, des modifications.

Le ministre et son équipe, je veux saluer le ministre et son équipe. Ils ont démontré tout au long une ouverture pour expliquer tout. Et puis, bon, une fois qu'on a compris l'explication, soit que je retirais l'amendement, ça me semblait... évidemment, des fois, on le gardait quand même. Parfois, le ministre a amené l'amendement. L'atmosphère a été vraiment, je vous dirais, extraordinaire. Je sentais que tout le monde avait à coeur une chose, le bien-être de l'enfant et du jeune, tout le monde qui était autour de la table, tous les députés du gouvernement et des oppositions. Et on a bien échangé. Je me souviendrai toujours de cette belle expérience ici, à l'Assemblée nationale.

Donc, nous allons voter pour l'adoption du projet de loi. C'est une avancée pour la protection de la jeunesse. Il faudra suivre les actions, évidemment, du gouvernement et toutes les autres recommandations du rapport de la commission Laurent.

Encore une fois, je remercie le ministre et je remercie beaucoup aussi son équipe qui nous a accompagnés pour atteindre ce résultat vraiment magnifique aujourd'hui. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, Mme la députée.

Avant de céder la parole au prochain intervenant, je vous informe qu'un débat de fin de séance se tiendra aujourd'hui, à 13 heures, en application de l'ordre spécial. Ce débat portera sur une question adressée par M. le député de LaFontaine au ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale concernant l'impact de la pénurie de main-d'oeuvre sur l'économie et toutes les régions du Québec.

Maintenant, nous vous écoutons, M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve. La parole est à vous.

M. Sol Zanetti

M. Zanetti : Merci, Mme la Présidente. C'est Jean-Lesage, mais je ne vous en tiens pas rigueur. On se ressemble et on est des amis. Donc, pas de problème.

Alors, ce projet de loi sur la réforme de la Loi sur la protection de la jeunesse est né dans des circonstances tragiques. Et je me souviens de ce moment, au Québec, où il y a eu cette tragédie, à Granby, et ensuite où, finalement, le Québec entier était pris d'un émoi tout à fait légitime et justifié et où les chefs de l'opposition et le premier ministre ont décidé de travailler ensemble pour dire : Il y aura une commission spéciale pour qu'on trouve les causes profondes de ce qui s'est passé et qu'on y amène une solution collective qui se passe au-delà de la partisanerie. Et c'est ce qui s'est passé avec la commission Laurent, à laquelle, évidemment, tout le monde a participé.

Et je dois dire que l'étude du projet de loi, disons, ça ne s'est pas passé exactement dans le même esprit. Oui, évidemment, tout le monde, comme le disait la députée de Notre-Dame-de-Grâce, était, autour de la table, plein de bonnes intentions, puis avait, tout le monde, à coeur, là, disons, je dirais, le bien-être de l'enfant, son intérêt supérieur, mais clairement les oppositions n'ont pas participé à la rédaction de ce projet de loi.

Et, dans le cadre de l'étude détaillée, j'ai été quand même déçu de la quantité d'amendements qu'on a proposés qui n'ont pas été acceptés. Certaines choses l'ont été, des choses avec, disons, des conséquences grammaticales, mais plus grammaticales que fondamentales. Ensuite de ça, on présentait des amendements, d'autres étaient proposés de la part du ministre mais qui n'allaient vraiment pas, disons, rencontrer vraiment les demandes qui nous étaient faites de la part de la société civile, des gens qui sont venus témoigner en commission pour dire ce qu'il fallait bonifier dans ce projet de loi là. Alors, je le vis comme une déception. J'aurais voulu qu'on ait le même niveau de collaboration tout au long de ce processus-là, pas seulement dans la commission.

C'est un projet de loi en faveur duquel on va voter parce qu'il est bon pour les enfants québécois. Par contre, il y a quand même quelque chose de majeur, et, à voir comment il est reçu par plusieurs groupes, plusieurs communautés autochtones, plusieurs groupes de la société civile, plusieurs groupes politiques autochtones aussi, je ne peux pas m'empêcher d'y voir là une autre occasion historique ratée. Et je ne pense pas que c'est un projet de loi qui est bon pour les enfants autochtones, parce qu'il n'atteint pas le niveau qui nous était demandé, le niveau de réforme, le niveau de changement. Alors, c'est pour ça que j'ai un sentiment mitigé.

• (12 heures) •

On va voter pour. Il est bon pour les enfants québécois, mais, en même temps, je trouve ça inacceptable qu'on soit encore, au Québec, à dire aux autochtones : En théorie, on reconnaît que vous êtes les mieux placés pour vous occuper de vos enfants, puis ensuite de ça que, dans un projet de loi, on leur impose des structures qui font tout à fait le contraire, en fait, puis qu'on ne se rende pas à leurs arguments lorsqu'ils disent : Laissez-nous faire, nous avons une culture différente, les raisons pour lesquelles vous faites des choses qui sont bonnes pour vous ne s'appliquent pas chez nous et fait que les solutions adaptées pour vous ne le sont pas pour nous. C'est un message clair. C'est tellement simple. Et on dirait que, comme... bien, en fait, pas comme société parce que je pense que, de plus en plus, la société québécoise chemine vers là, puis est prête à entendre ça, et elle comprend ça de plus en plus. Mais, au gouvernement, ça a bloqué. Est-ce que ça a bloqué du point de vue ministériel ou ça a bloqué ailleurs dans le gouvernement? On n'aura jamais le fin détail. Dans tous les cas, c'est quelque chose qui m'attriste.

Le droit à l'autodétermination, pour faire quelque chose d'aussi crucial que ça, là, il ne peut pas être limité par des considérations du genre : c'est trop compliqué, parce qu'il y a plusieurs communautés, parce qu'il y a plusieurs nations. Qu'est-ce qu'on fait quand un enfant est à la fois dans une communauté, puis, après ça, il sort, puis là il est en milieu urbain? Qui va s'en occuper? Tout ça, ça s'arrange. Ce sont des choses qu'on est capable de faire.

Puis surtout, là, à partir du moment où on dit : C'est les autochtones qui décident, bien, je veux dire, qu'est-ce qui peut arriver d'autre que des solutions qui sont choisies par eux et qui, lorsqu'elles seront imparfaites, comme tous les peuples prennent des décisions imparfaites, et je nous inclus là-dedans, bien, ils vont les améliorer, ils les auraient améliorées, comme nous, on essaie d'améliorer nos processus qui ne sont pas bons, comme nous, on a essayé d'améliorer puis qu'on a réussi, je pense, à améliorer la protection de la jeunesse dans le cadre de ce projet de loi là?

Alors, moi, c'est mon amère déception par rapport à tout ça qui fait que j'ai un peu moins envie de fêter, même si je reconnais les grandes avancées pour la protection de la jeunesse et pour les enfants québécois qui sont amenées par ce projet de loi là.

Un autre angle mort qui a été pointé du doigt, c'est la question de la violence conjugale. Au début, le projet de loi ne contenait rien là-dessus, et finalement il y a eu des amendements qui ont été amenés, mes deux amendements. Et puis, quand on a voulu aller plus loin pour vraiment répondre aux demandes concrètes des gens sur le terrain qui disent comment s'opérationnalise la loi puis comment, des fois, la loi, sans le vouloir, bien, met des enfants en danger, puis met des femmes en danger aussi, les personnes victimes de violence conjugale, pour dire les choses plus largement encore... Et j'ai trouvé ça dommage. Il y a eu des gens en commission parlementaire, puis je ne sais pas pourquoi on n'est pas allé jusqu'au bout. Tu sais, à la fréquence à laquelle on ouvre ce genre de loi là et à laquelle on fait ce genre de réforme là, ça n'arrive tellement pas souvent, je me dis : Ce petit pas de plus qu'on pouvait faire chaque fois, bien, on ne l'a pas fait jusqu'au bout. Et c'est une autre de mes déceptions par rapport à ce projet de loi.

Je voulais le mentionner avant de voter pour, parce que c'est ce genre de chose qui arrive lorsqu'on est dans une situation, comme opposition, d'impuissance. Tu sais, on arrive dans une commission, puis on a la minorité des votes, puis on fait des choses, puis après ça, bien... C'est Woody Allen, je pense, qui disait : La dictature, c'est... Ah! bien, là, ce n'est pas... c'est malpoli de dire ça, la première phrase, mais après ça il disait... c'est comme : Ferme-la, puis, ensuite la démocratie, c'est : Cause toujours. Donc, des fois, j'ai l'impression qu'on a pas mal plus parlé qu'on a été... entendus, oui, là, entendus au sens des... ça a été perçu, ce qu'on a dit, mais ça n'a pas été intégré au projet de loi jusqu'au bout.

Et je le dis maintenant parce que c'est le genre d'erreur historique qu'il ne faut jamais faire, qu'on n'aurait jamais dû faire, mais qu'il ne faut surtout pas faire à nouveau. Et les conséquences de cette erreur historique, là, elles vont ressurgir dans les prochaines années. Il va y avoir des problèmes qui vont être liés au pas que nous n'avons pas fait. Je le dis maintenant parce que je trouve ça triste, mais il faut qu'on le sache. Puis, quand ça va ressurgir, fatalement, là... tu sais, les systèmes entraînent des conséquences, et c'est difficile à empêcher. Il faut changer les systèmes pour empêcher ces conséquences-là. Mais, quand ça va arriver, j'espère qu'il y aura plus d'oreilles partout et plus de sensibilité pour qu'on puisse vraiment aller jusqu'au bout par rapport à ça.

Je vous remercie, Mme la Présidente. Ça fait le tour de mes considérations sur ce projet de loi.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, M. le député de Jean-Lesage. Mme la députée de Joliette, la parole est à vous.

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Donc, je suis heureuse, à mon tour, de prendre la parole sur cet important projet de loi qui vient réformer la Loi sur la protection de la jeunesse.

Je veux, d'entrée de jeu, saluer mon collègue le député de René-Lévesque qui a fait un travail très assidu pour le projet de loi, mais qui, malheureusement, dans les derniers milles, n'a pas pu être présent, là, dans les derniers jours, pour l'aboutissement de ce projet de loi. Il est retenu chez lui pour de petits enjeux de santé mineurs, il ne faut pas s'inquiéter, mais, quand même, qui ont leur lot d'inconvénients, qui fait qu'il ne peut pas être avec nous. Donc, je le salue, je sais à quel point il a pris ce dossier-là à coeur, à quel point il a porté la voix de beaucoup de groupes et d'intérêts qui nous étaient communiqués et qu'il a communiqués au ministre. Alors, aujourd'hui, bien humblement, je veux juste prendre la parole en son nom pour cette étape ultime de l'adoption du projet de loi. Donc, merci, cher collègue, de tout le travail qui a été fait.

Je veux saluer aussi ma collègue de Duplessis, qui a siégé sur la commission Laurent avec, bien sûr, les représentants des autres oppositions et du gouvernement, dont la collègue qui est devant moi. Écoutez, je pense qu'il y a eu un travail extraordinaire qui a été fait dans cette commission-là. C'est incroyable, le nombre d'heures que nos collègues ont investi avec les experts dans la commission, et je pense que ça a donné de très bons résultats et, vraiment, je leur lève mon chapeau. Ce n'est pas eux, aujourd'hui, qui prennent la parole parce qu'ils ont fait un travail en toute indépendance et, ensuite, ils ont passé le ballon, mais on leur doit une fière chandelle d'avoir été présents dans une manière un petit peu différente de comment on fonctionne habituellement. Et je ne suis pas sûre qu'ils ont eu tout le crédit qui doit leur revenir par rapport à tout l'investissement qu'ils ont fait en temps, en coeur, en énergie. Donc, aujourd'hui, je veux vraiment leur rendre hommage, leur dire un énorme merci.

Donc, écoutez, oui, c'est un projet de loi qui franchit de grands pas, qui nous ramène, évidemment, au drame de la petite fille de Granby, qui nous a marqués collectivement de manière très forte, très durable et qui, au moins, nous aura poussés à l'action. Alors, il faut au moins se dire qu'il y aura des avancées qui sont sorties de cette terrible tragédie, mais il faut tout faire pour qu'il n'y en ait pas d'autres. Mais évidemment il faut aussi tout faire pour que le bien-être des enfants soit une préoccupation et une priorité constante tout en haut de la liste des priorités qu'une société avancée comme celle du Québec peut se donner, celle de protéger et d'accompagner ses enfants, surtout les plus vulnérables.

Donc, de ce point de vue là, c'est certain que le projet de loi, qui est directement inspiré des recommandations de la commission Laurent, franchit des pas importants. On rappelle, encore une fois, à quel point l'intérêt de l'enfant doit être au coeur de toutes nos décisions, c'est fondamental. Même chose pour la stabilité, pour assurer une véritable stabilité de l'enfant.

Petite parenthèse ici, dans la version précédente de la loi, avant celle qu'on va, j'imagine, adopter sous peu, on parlait de «tendre à assurer la stabilité». Une recommandation de la commission Laurent était vraiment de venir marquer le coup qu'il faut assurer, pas juste tendre à assurer, il faut assurer cette stabilité-là. Et d'ailleurs c'est mon collègue de René-Lévesque qui a amené cet amendement pour s'assurer, là, qu'on soit en droite ligne avec les recommandations de la commission sur cet enjeu-là important. Donc, je pense que c'est un amendement qui était d'intérêt.

Bien évidemment que l'enjeu de la stabilité, de l'intérêt de l'enfant, de s'assurer que tout le monde travaille de manière beaucoup plus intégrée, moins en silo, que, du début à la fin, on se préoccupe du parcours de l'enfant, qu'on va tout faire, déployer tout ce qu'on peut faire pour prévenir, mais aussi s'assurer du meilleur accompagnement possible. À cet égard-là, ma collègue de Notre-Dame-de-Grâce en a glissé un mot, mais toute la question de la stabilité, mais aussi de la transition vers l'âge adulte des jeunes adultes qui sortent du système de la protection de la jeunesse est fondamentale.

• (12 h 10) •

Je veux souligner à nouveau qu'à la demande de mon collègue et d'un amendement qu'il a déposé, le collègue de René-Lévesque, maintenant dans les considérants, on va avoir cette préoccupation-là qui va être écrite noir sur blanc, en plus d'un article formel dans le projet de loi, de vraiment bien marquer le coup qu'on doit avoir une préoccupation pour la transition vers l'âge adulte. C'est une période extrêmement critique. Le ministre le sait, on le sait tous, on a été très sensibilisés à cette réalité-là, mais on doit faire plus. Donc, maintenant, de l'écrire noir sur blanc, comme le suggérait mon collègue, je pense que c'est une belle avancée aussi.

Évidemment, je veux parler de la violence conjugale, Mme la Présidente. Ça a été une déception, lorsqu'on a lu la première mouture du projet de loi, de voir que toutes les recommandations du chapitre de la commission Laurent sur la violence conjugale qui étaient recommandées comme devant faire son entrée comme nouveau motif de compromission, l'exposition par l'enfant à la violence conjugale, ce n'était pas dans le projet de loi. Mon collègue a sensibilisé le ministre, il lui a suggéré de rencontrer des regroupements, évidemment, de femmes, de maisons d'hébergement, des experts aussi, ce qu'il a fait avec la plus grande ouverture, et ça a donné des fruits vraiment intéressants.

Donc, on a eu une série d'amendements pour reconnaître finalement la violence conjugale comme motif de compromission. C'est un pas énorme. C'était une recommandation aussi du rapport Rebâtir la confiance que toute la question de la violence conjugale soit beaucoup mieux prise en compte, notamment en matière de protection de la jeunesse. On a travaillé dans les fins détails le meilleur libellé possible. On aurait aimé aller un peu plus loin, c'est certain, mais on se réjouit, minimalement, que la violence conjugale soit véritablement reconnue désormais comme un motif de compromission.

Je veux d'ailleurs saluer tous les groupes qui se sont mobilisés, qui sont venus en commission parlementaire défendre l'importance de cet enjeu, qui ont rencontré le ministre, qui ont fait des propositions. C'est comme ça qu'on réussit à améliorer les choses et à faire des changements dans la société. Donc, vraiment, merci beaucoup à tous ces groupes qui ont été d'une aide, et d'un éclairage, et d'un sens de la conviction très, très précieux.

Bien sûr, je veux parler de la question autochtone. On aimerait ça, aujourd'hui, pouvoir se réjouir à 100 % du projet de loi qui est devant nous. Malheureusement, il y a une ombre qui plane sur ce projet de loi, une ombre qui est très sérieuse, malheureusement, et il faut dénoncer ce refus du gouvernement de vraiment entendre la voix des autochtones qui ont plaidé, qui ont demandé dans leurs mémoires, qui ont refait des représentations jusque dans les tout derniers jours pour essayer de convaincre le ministre, le gouvernement de vraiment reconnaître à quel point ils doivent être pris en compte et que leur réalité doit être prise en compte. Et, vous savez, on aurait souhaité, ils auraient souhaité avoir une souveraineté beaucoup plus grande en ce qui concerne tout le domaine de la protection de la jeunesse. C'est quelque chose qui a été refusé par le gouvernement. Mais, minimalement, ils nous ont demandé que, pour ce qui concernait les délais maximaux de placement, ce qu'on appelle le placement à majorité, qu'on reconnaisse leur spécificité et qu'on n'arrive pas avec des nouveaux concepts qui fassent en sorte qu'on soit dans une logique qui est étrangère à leur réalité.

Alors, très concrètement, Mme la Présidente, ce qui nous a été demandé et ce qui a été demandé au gouvernement, c'est de permettre qu'il n'y ait pas de placement à majorité, que ce ne soit pas quelque chose qui soit présent quand on parle d'enfants autochtones, pour différentes raisons culturelles, par le fait qu'on n'est pas dans la même logique, dans le même rapport à la théorie de l'attachement pour ce qui est des nations autochtones. On a une... C'est beaucoup plus un sens de la famille élargie, de la communauté. Donc, bref, il y a des réalités qui sont propres aux nations autochtones. Je ne m'aventurerai pas à dire que je suis la spécialiste aujourd'hui, mais j'ai beaucoup lu et été très sensible à leurs arguments.

Et, en fait, maintenant, ce que le projet de loi prévoit, c'est qu'il pourra y avoir un placement à majorité s'il y a une recommandation d'un conseil de famille à cet égard. Or, il rejette le concept de placement à majorité et il rejette le concept de conseil de famille parce qu'à part chez les Attikameks, qui, on le sait, ont leurs propres ententes en matière de protection de la jeunesse, donc ils sont dans autre chose, ce n'est pas une réalité qui existe dans les nations autochtones. Donc, de manière fort pertinente, les représentants de la Commission de santé et des services sociaux des premières nations ont écrit au ministre, ont écrit à la commission pour dire : C'est un concept qui nous est étranger. Qui va venir imposer ça chez nous? Qui va décider de mettre ça en place? Donc, c'est du paternalisme, c'est des relents de colonialisme. Et ils rejettent ça, et avec raison.

Il faut savoir aussi que, si on veut aller vers ça, ce que ça va vouloir dire, c'est contraire à l'esprit de la commission Viens, c'est contraire à la commission Laurent, qui endossait toutes les recommandations de la commission Viens en matière de protection de la jeunesse. Parce que ce que ça peut vouloir dire, c'est que, si on exige ça, c'est autant d'enfants qui vont devoir sortir de leur communauté, et donc vivre en dehors de leur communauté, de la réalité culturelle de leur nation. Donc, c'est sérieux comme enjeu. Et ce n'était pas énorme de leur donner ça. Et je ne m'explique toujours pas comment le gouvernement peut penser qu'il est mieux placé pour savoir ce qui est bon pour la protection des enfants autochtones que les autochtones eux-mêmes. Comment il est mieux placé pour savoir ce qui est bon pour les enfants autochtones que la commission Viens, qui a fait un travail de fond en comble, qui est allée dans le détail de recommandations et qui recommandait justement de ne pas aller vers les délais maximaux de placement, vers le placement à majorité, noir sur blanc, un appel à l'action très clair que le gouvernement rejette. En plus, comment peut-il penser qu'il est mieux placé, ensuite, que la commission Laurent, qui a repris intégralement cette recommandation-là du rapport Viens, qui, évidemment, provient des autochtones? Et comment peut-il penser qu'il est mieux placé que tous ces gens qui se sont mobilisés, des Premières Nations, pour nous écrire et nous demander de ne pas aller dans cette voie?

Donc, vraiment, ça dépasse l'entendement. C'est d'autant plus choquant qu'il y a deux considérants dans le projet de loi qui sont opportuns, mais qui, malheureusement, ne semblent déjà pas respectés :

«Considérant que les autochtones sont les mieux placés pour répondre aux besoins de leurs enfants de la manière la plus appropriée; et

«Considérant que la sécurité culturelle est essentielle au mieux-être des enfants autochtones.»

Donc, en refusant d'entendre la voix de la commission Viens et de la Commission Laurent, mais surtout des autochtones, les premiers concernés, le gouvernement lui-même est en train de montrer qu'il fait fi de deux considérants qu'on nous disait pourtant être fondamentaux pour les autochtones.

Donc, une amère déception, une incompréhension, je dois vous le dire, Mme la Présidente, de cette fin de non-recevoir de respecter la voix des autochtones dans le dossier de la protection de la jeunesse. Et, bien sûr, ça fait suite au fait qu'on a appris que la sécurisation culturelle ne serait pas incluse dans la Loi sur la santé et les services sociaux dans la présente législature et qu'il n'y aurait pas de protecteur de l'élève autochtone. Donc, d'amères déceptions.

Alors, c'est dommage, mais je pense que c'était essentiel de le dire. Si on veut travailler de nation à nation et si on veut bâtir de la confiance, bien, il faut entendre ces cris du coeur, il faut entendre la voix des autochtones et il faut enfin sortir de ces réflexes paternalistes, qui, malheureusement, sont ceux qui nous ont menés dans les écueils que l'on vit aujourd'hui.

Donc, en terminant, je veux dire qu'il faut rester très vigilants sur des enjeux. Les intervenants du réseau de la protection de la jeunesse, ils doivent avoir un meilleur soutien. On doit valoriser davantage cette profession-là. On doit vraiment s'assurer de s'occuper des intervenants en détresse, qui ont une charge de travail et une complexité de travail énorme. J'interpelle le gouvernement, notamment pour que la technique en travail social soit bien valorisée et qu'elle puisse faire l'objet des bourses Perspective pour s'assurer qu'il va y avoir de l'attraction, parce qu'on les a mis de côté dans les premières moutures de ce programme-là. Il faut envoyer des signaux importants. Il faut que les ressources soient présentes. Il faut que les investissements soient présents. Sans ça, on pourra faire les plus belles réformes du monde, on n'arrivera pas.

Il faut aussi s'occuper des familles d'accueil. Malheureusement, on ne va pas aussi loin que ce qu'on aurait souhaité. On aurait vraiment voulu qu'il y ait un signal clair parce que la commission Laurent recommandait vraiment de mettre en place des mesures de soutien financier et clinique mieux adaptées pour mettre en confiance les familles d'accueil, pour favoriser leur stabilité, pour favoriser leur présence, le fait qu'on puisse en recruter. C'est un énorme enjeu, cette question-là. Donc, j'espère que ça va rester sur l'écran radar du ministre puis qu'il va s'en préoccuper.

• (12 h 20) •

Donc, aujourd'hui, on franchit un pas important, et je pense qu'on peut être fiers collectivement dans l'ensemble, sauf, évidemment, le gros problème que j'ai soulevé, du pas qui est franchi. Il faut rester très vigilants sur comment cette réforme-là va être appliquée, s'assurer qu'elle va répondre aux objectifs qu'on s'est donnés, à l'intention qu'on a poursuivie, autant dans les travaux de la commission Laurent que dans la mouture du projet de loi. Et il va falloir s'assurer que les moyens soient présents sur le terrain pour que ça se déploie à la hauteur des ambitions que l'on doit avoir, pas pour nous, Mme la Présidente, mais pour les enfants, pour les plus vulnérables dans notre société, pour les enfants qui ont besoin d'accompagnement, de protection, et leurs familles, qu'on espère pouvoir outiller le mieux possible. Parce que j'espère qu'on va se dire un jour qu'au Québec on en a fait une véritable priorité, qu'on est à l'avant-garde, qu'on a fait des différences incroyables puis que, dans 10 ans, on va voir les résultats de ça puis on va dire : On a de quoi être fiers. Parce que, malheureusement, dans les dernières années, ce n'est pas ce qui s'est passé. Alors, il est le temps de se tourner vers l'avenir. Espérons qu'aujourd'hui avec ce projet de loi, c'est un premier jalon pour y arriver pour nos enfants. Merci beaucoup, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur le projet de loi n° 15?

Mise aux voix

Comme il n'y a pas d'autre intervention, le projet de loi n° 15, Loi modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Adopté. M. le leader du gouvernement, pouvez-vous nous indiquer la suite des travaux?

M. Schneeberger : Oui. Alors, pour la suite, je vous demanderais d'appeler l'article 4 du feuilleton.

Projet de loi n° 28

Reprise du débat sur l'adoption du principe

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc, à l'article 4 du feuilleton, l'Assemblée reprend le débat, ajourné le 13 avril 2022, sur l'adoption du principe du projet de loi n° 28, Loi visant à mettre fin à l'état d'urgence sanitaire. Y a-t-il des interventions? Y a-t-il des interventions? Alors, M. le député de La Pinière, vous voulez intervenir? Alors, je vous cède la parole.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : Je veux être certain d'intervenir sur la bonne chose, Mme la Présidente. On ne sait jamais, dans mon cas. Mme la Présidente, je veux quand même faire une petite parenthèse, puisque...

Une voix : ...

M. Barrette : Oui, je sais, c'est volontaire. Alors, Mme la Présidente, je veux quand même faire une courte intervention pour féliciter le ministre délégué, qui vient de voir son projet de loi adopté, puisque c'est un sujet qui m'a été aussi cher. Et je constate qu'il y a un travail significatif et remarquable qui a été fait, dans l'ensemble de l'oeuvre, par tous les parlementaires. Je veux souligner aussi le travail de ma collègue la députée de Notre-Dame-de-Grâce et les autres équipes aussi. Alors, c'est un bon moment pour le parlementarisme.

Je vais arrêter là parce que, là, à un moment donné, il ne faut pas exagérer, là. Non, je viens de faire quelque chose que les parlementaires ne font pas souvent, rendre à César ce qui lui appartient. Moi, je suis très expérimenté là-dedans.

Alors, bon, là, ça va être un petit peu différent, Mme la Présidente, pour le projet de loi n° 28. J'ai dit «2», tantôt, mais c'est 28, là, évidemment. Alors, je dois avouer, Mme la Présidente, que c'est un projet de loi, à l'image de tous les parlementaires des oppositions, qui a été éminemment surprenant par son fond et par sa finalité. Et vais m'exprimer très clairement, Mme la Présidente, dans les prochaines minutes.

Tout le monde le sait, là, je vais le rappeler parce que c'est d'usage de rappeler un peu le contexte, ce projet de loi là est particulier, il vise à mettre fin à l'urgence sanitaire, une urgence qui a été décrétée, je le rappelle, 107 fois depuis mars 2020, et on peut se demander si la totalité de ces 107 fois là étaient justifiées. Alors, je vais répondre à cette question-là : c'est oui au début, c'est définitivement non par la suite. Alors, comment ça se fait qu'on se retrouve aujourd'hui avec ce projet de loi là?

La première question qu'on doit se poser, Mme la Présidente, c'est simple : Est-ce qu'il faut une loi pour abolir, arrêter l'urgence sanitaire? Est-ce qu'on a besoin d'une loi pour ça? La réponse, c'est évidemment non. Si c'est non, la réponse, Mme la Présidente, ça doit être parce qu'il y a d'autres finalités. Et est-ce que ces finalités-là sont honorables? Là je ne sais pas si je peux répondre non, si la réponse non est parlementaire ou non, mais je pense que non. Et j'irais même jusqu'à dire, Mme la Présidente, que c'est assez douteux. Il y a plein de qualificatifs que je peux utiliser. Mais, Mme la Présidente, j'apprécie les codes gestuels que vous m'envoyez, mais j'ai le droit de douter et j'ai le droit d'exprimer que je doute. Alors, j'exprime que je doute. Voilà.

Alors, personne ici, Mme la Présidente, ne peut se lever et dire qu'il faut une loi pour abolir l'urgence sanitaire. Ça, là, c'est un non-sens juridique, un non-sens, une impossibilité. Ça frise le ridicule. Mais j'ai juste dit «frise», hein? Vous savez, quand on frise, on passe proche, mais je n'ai pas le droit de dire qu'on l'atteint. Mais je peux friser même si j'ai les cheveux assez droits, pas tout le temps, ça dépend de l'humidité.

Alors, Mme la Présidente, 107 fois. Et là on arrive aujourd'hui avec un projet de loi qui vise à arrêter l'urgence sanitaire, O.K. Il y a eu des consultations. Ah! ça, Mme la Présidente, les consultations, je dois dire que ça a été, pour moi... Je les ai regardées. J'y ai même participé. Je dois dire, Mme la Présidente, que c'est un moment d'anthologie extraordinaire, unique, qui va rentrer dans les annales.

En général, Mme la Présidente, quand un gouvernement, un ministre dépose une loi, il consulte. Et là je parle par expérience, Mme la Présidente. Ça m'est adonné, imaginez-vous, de présenter des projets de loi qui ont même été adoptés. N'est-ce pas extraordinaire? Et, quand j'ai fait ça, écoutez, moi, je suis arrivé en politique, j'ai fait selon les us et coutumes de la vie parlementaire, selon les règles.

Alors, consulter, ça veut dire qu'après, comme ministre, avoir réfléchi on va recueillir des informations, des opinions venant de la société, la société en dehors du gouvernement. C'est ça qu'on fait, parce que nul, évidemment, n'est parfait, et il y a utilité d'aller voir, demander l'opinion des gens qui sont sur le terrain, de diverses orientations, pour ajouter à la réflexion pour que le ministre, avec ces informations-là, puisse lui-même, s'il le juge nécessaire et opportun, appuyer, améliorer son propre projet de loi. C'est ça qu'on fait.

Alors, normalement, là, les partis politiques, toutes les oppositions, le gouvernement, on s'assoit, on propose une liste de gens qui devraient venir, des pour, des contre, on fait une liste, on envoie les invitations. Bon, à la CAQ, en général, c'est à la dernière minute, mais ça, c'est un autre débat. Et les gens viennent, préparent un mémoire, le déposent, le lisent, l'expliquent et répondent à nos questions, les parlementaires. Il y a donc eu des consultations, 13 entités, des individus ou des organisations qui sont venus donner leur opinion. Alors, c'est là, Mme la Présidente, que l'histoire se fait, et, vraiment, là, c'est quelque chose.

Alors, dans les entités qui sont venues, à la surprise générale, on a fait venir des entités pour ou contre extérieures au gouvernement et on a fait venir des employés de l'État. Il faut le faire. Il faut le faire, Mme la Présidente. Ça, là, ça ne se peut pas. Quand je vous dis que ça frise le ridicule, là, c'est ça que je veux dire. On fait venir en consultations, Mme la Présidente, ses propres sous-ministres. Ce sont des employés du ministre. Ce n'est pas n'importe qui, là. C'est des gens gentils, compétents, et tout. Ce n'est pas des gens indépendants qui viennent donner leur opinion, là. Pensez-vous vraiment qu'un sous-ministre va dire : Mme la Présidente, le projet de loi de mon ministre est mauvais, surtout si, probablement, il a été consulté avant pour le rédiger? Mme la Présidente, j'avais dit au président... au ministre : Cette phrase, il aurait dû la changer, mais il ne l'a pas... Je profite de l'occasion pour suggérer un changement au texte du projet de loi, qui, à mon avis, n'est pas le bon.

• (12 h 30) •

Aïe! Mme la Présidente, pensez-vous, disons, sur 1 milliard, là, combien de chances que ça, ça arrive, de la part d'un employé de l'État dans le ministère? Employé de l'État, Mme la Présidente, ça aurait pu être d'autres ministères. Non, non, non. On fait venir des gens qui sont dedans le ministère de la Santé : Bonjour, monsieur, bonjour, madame, pourriez-vous nous dire exactement ce que vous pensez de mon projet de loi? Vous êtes d'accord? Bien, merci. Vous trouvez que c'est bon? Bien, c'est fantastique. Et là on part avec ça puis on se dit : Wow! On a un appui de la population.

Il fait venir le sous-ministre, M. Paré. Je le connais bien, M. Paré, c'est un excellent sous-ministre. Très bon. C'est un bon choix. Il va-tu vraiment parler contre son ministre qui, lui, l'a nommé dans ce mandat-ci? On a fait venir Mme Labbé, P.D.G. du CISSS du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Mme la Présidente, c'est le ministre qui nomme ces gens-là, là, franchement. Elle vient d'être nommée, là, est-ce qu'elle va parler contre le ministre? On a demandé de venir en consultations le nouveau directeur par intérim de l'INESSS. Franchement. Il vient d'être nommé, là, puis, je l'ai déjà dit dans les médias, il souhaite même expandre son rôle. Il est très bon, mais... il est bien fin, là, le Dr Boileau, là, j'ai travaillé avec, mais il va-tu vraiment, vraiment, vraiment venir parler contre le ministre? Bien non.

Alors là, comme consultations, Mme la Présidente, là, ça m'apparaissait... il y a des gens qui regardent ça, puis ils diraient : Ça a l'air organisé avec le gars des vues pas mal. Et, c'est ça, moi, j'ai été étonné. Alors, vous ne serez pas surprise, Mme la Présidente, si tous les autres groupes, là, ceux qui n'étaient pas à l'emploi du ministère de la Santé, tous les autres groupes qui sont venus en consultations ont, à divers degrés, dit que ça n'avait pas d'allure, à divers degrés. Divers degrés, c'est : Ça n'a extrêmement pas d'allure, ça a un peu pas d'allure, mais ça a été critique, là. Il y a un seul groupe qui a dit : Oui, il faudrait des ajustements, mais ce n'est pas si pire. Il n'y a personne à l'extérieur du ministère de la Santé ou de l'Environnement du ministère de la Santé qui a été invité à la consultation qui a été totalement en faveur du projet de loi. Ce n'est pas banal. Ça dit beaucoup. On ne peut pas dire que ça ne dit rien. Ça dit beaucoup. Bon.

Mme la Présidente, ceux qui ont été contre, ils ont leurs propres intérêts. Je ne commenterai pas leurs propres intérêts parce que ça se résume en une phrase qui indique leur biais. C'est sûr que les syndicats, parce qu'il y en a eu beaucoup qui sont venus, la CSN, la FIQ, la FTQ, bon, on s'attend à ce qu'eux autres aient un biais qui leur est propre. Je ne le critique pas. Je ne le commente pas. Ils étaient contre. Je ne leur donne pas de valeur dans mon discours — ils étaient contre — autre le fait qu'ils étaient contre.

Mais, quand la Ligue des droits et libertés, quand des professeurs de droit, un de l'Université Laval, un de l'Université de Montréal, viennent nous dire qu'on n'a pas besoin de ça, bien, ça a un poids, ça. Ça, ce sont des individus qui, normalement, ont une objectivité intrinsèque. On ne peut, en général, pas attacher un biais à un professeur d'université. Ça se peut, Mme la Présidente, surtout si un professeur a fait sa carrière sur un sujet, on peut le comprendre, ça. Mais là, ce n'est pas ça, là, on a fait venir des professeurs de droit qui sont venus donner une opinion de droit légal sur le projet de loi, ils ont dit : Ça n'a pas d'allure.

Bon, Mme la Présidente, ont même été prononcés les mots «abus de pouvoir». Ça, là, ce n'est pas banal. Ce n'est pas moi qui... je cite, là, Mme la Présidente, je cite. Le Barreau, Mme la Présidente, est venu dire qu'on n'en avait pas besoin, le Barreau, là. Est-ce qu'on peut taxer le Bareau, devant un projet de loi, de parti pris? La réponse, c'est non. Le Barreau, c'est le Barreau.

Alors, c'est là qu'on est, Mme la Présidente, on est devant un projet de loi qui arrive comme ça, qui n'est pas nécessaire, et qui est qualifié comme ça par tous les observateurs externes, tous, sauf évidemment les employés du ministère. Moi, je trouve ça inquiétant. Alors, quand on regarde ça, on se dit : Voulez-vous bien me dire pourquoi on a ce projet de loi là? Pourquoi? C'est une bonne question. Alors, on peut creuser pour parfaire notre réflexion puis essayer d'identifier pourquoi on fait ça.

Bon, allons dans le corps du projet de loi. Il fait quoi, le projet de loi? Le projet de loi, là, bon, de façon globale et un peu pompeuse, on veut mettre fin à l'urgence sanitaire. On sait qu'on n'a pas besoin d'un projet de loi, c'est établi, tout le monde le dit, et on continue dans cette direction-là. C'est correct. Bien, en fait, ce n'est pas vraiment correct, mais, pour la compréhension des choses, on a établi ça. Pas nécessaire. O.K., maintenant, si ce n'est pas nécessaire, regardons donc ce que ça fait.

Alors, quand on regarde ce que ça fait, ça fait des choses qui ne sont pas très, très complexes, là. Est-ce que ça demande une loi pour, par exemple... Il y a quatre, cinq thèmes dans la loi, Mme la Présidente. Est-ce que ça prend une loi pour décréter des contrats pour louer des locaux, pour faire des vaccins et de stocker des vaccins? Voulez-vous bien me dire, Mme la Présidente, avec toutes les données qu'on a, pourquoi on a besoin de ça pour cinq ans? Ça fait maintenant, là, plus d'un an. Des vaccins, on sait ce que ça coûte, on sait combien ça nous en prend, on est capables de faire des contrats fermes avec les compagnies qui donnent ça, on sait tout ça, là, puis on sait où les stocker. On le sait. On a-tu besoin d'une loi pour ça? Non, on n'a pas besoin de ça. J'irais même jusqu'à dire, Mme la Présidente, que ce sont des éléments qui auraient dû être réglés il y a longtemps.

Dans la loi, là, on dit qu'on a besoin de ça, là, pour s'assurer d'avoir des contrats pour maintenir en place des centres de dépistage. Vous savez comme moi, Mme la Présidente... Puis je dis que vous le savez comme moi parce que je suis sûr que vous avez été vaccinée. Je suis sûr que tout le monde ici a été vacciné. Et je suis sûr que nous tous et toutes, on est allés dans des écoles, dans des arénas, dans des centres de palais de congrès, dans des locaux locaux — locaux locaux — où... des locaux qui n'étaient pas utilisés. Dans mon comté, Mme la Présidente, là, on a pris un immeuble vacant, là, qui était vacant depuis plus qu'une année et que, là, on a utilisé. C'est une épicerie. Cette épicerie-là, là, bien, on l'a louée. On a-tu besoin d'une loi, Mme la Présidente, pour prolonger ces contrats-là? Bien non, on n'a pas besoin de ça, ce n'est pas nécessaire. Là, vous allez me répondre : Oui, oui, oui, c'est pour ne pas aller en appel d'offres. Mme la Présidente, là, laissez-moi douter de ça parce que, même si on allait en appel d'offres, je ne pense pas qu'on aurait eu un meilleur prix.

L'autre élément, c'est le prolongement des contrats qui ont été conclus pendant la pandémie. Alors, je ne peux pas faire autrement, Mme la Présidente, que, là, là, vraiment, là... Là, ça, c'est clair, là, qu'on est dans le doute, là. On est dans le doute. Je vais vous compter deux histoires. Il y en a une qui est très connue, qui est l'histoire selon laquelle, à un moment donné, on a acheté de la gravelle à un prix qui était...

Une voix : ...

M. Barrette : Oui, oui, de la gravelle, on s'en rappelle tous, là, un contrat qui a été scindé pour être sûr de passer en dessous de la norme qui permet de faire un gré à gré. Ça a été fait, ça. Mais ça, c'est une histoire banale, c'est de la gravelle.

Moi, j'ai une compagnie que je connais, là, je la connais, je l'ai visitée, Mme la Présidente, ça, c'est... Le gré à gré, c'est quoi, là? C'est : Allo! Tu appelles quelqu'un puis tu lui dis : Peux-tu transférer ta production de la Chine à Montréal? Je vais te donner un contrat de x années. C'est ça, Mme la Présidente, le problème du gré à gré. En avons-nous eu pour notre argent? Ça existe, ça, Mme la Présidente, je l'ai vu, j'ai parlé à ces gens-là. Et le gré à gré, ce n'est pas bien, bien compliqué, là : Oui, je vais transférer ma production de Chine à Montréal, en partie; j'ai besoin, pour faire ça, d'un contrat de minimum 10 ans à tel montant d'argent.

• (12 h 40) •

Mme la Présidente, en 2020, là, il fallait le faire parce qu'il y avait une crise puis il n'y en avait pas, d'équipement. Puis la raison pour laquelle il n'y avait pas d'équipement, c'est parce que le gouvernement actuel n'avait pas rempli la réserve stratégique qui était périmée en 2018. Mais ces contrats de gré à gré là, maintenant, aujourd'hui, là, ne sont pas retournés en appel d'offres. Et ce gré à gré là nous amène potentiellement à du favoritisme. C'est pour ça que ce n'est pas correct. Mais la cerise sur le sundae, Mme la Présidente, là, c'est la partie syndicale. Qu'a fait le ministre de la Santé avec sa loi? Il ne fait qu'une seule chose, qui est politiquement importante pour lui, il achète la paix syndicale, parce que ce qu'il fait, Mme la Présidente, là... C'est beau, reconduire les primes, mais sachez, Mme la Présidente, qu'au moment où on se parle nous terminons aujourd'hui le cycle de négociation précédent, et qu'on entre cette année dans la prochaine négociation, et que, ce faisant, ça veut dire que les syndicats peuvent sortir.

Et, en faisant cette loi là, Mme la Présidente, le gouvernement s'achète la paix, il ne négocie pas, pas de moyens de pression, pas rien, jusqu'au 31 décembre 2022, qui, évidemment, vous le constatez, par hasard, par hasard, est après l'élection. Il est là, le moteur, Mme la Présidente, un favoritisme d'un bord et la paix sociale, de l'autre bord, en passant, par-dessus l'obstacle syndical, qui est 100 % politique, Mme la Présidente, et ça, en quelque part, c'est politiquement indécent, c'est se servir des lois avec une finalité politique. Il n'a pas besoin de faire ça. C'est un aveu d'échec devant sa négociation, et il en tire un bénéfice en utilisant la loi, Mme la Présidente. C'est ça qui se passe, là, ici, actuellement. Ce n'est pas plus compliqué que ça. Le ministre, là, avec sa loi, là, il le sait très bien, il sait très... Oui, Mme la Présidente?

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Votre temps est terminé, monsieur. Vous aviez...

M. Barrette : Ah! je suis désolé, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : C'est parce que vous n'êtes pas...

M. Barrette : Je vous voyais très intéressée.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je suis toujours très intéressée à ce que vous dites, M. le député de La Pinière, mais vous n'êtes pas... En fait, vous n'avez pas 60 minutes. Ça a été déjà pris par votre parti. Alors, c'était 20 minutes. Alors, je suis prête à entendre un autre intervenant.

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Malheureusement, ça ne fonctionne pas comme ça. Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions? Comme il n'y a pas d'autre... Oui, vous avez d'autres interventions...

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, je vous cède la parole, Mme la députée d'Iberville. Ce sera à vous après.

Mme Claire Samson

Mme Samson : Merci, Mme la Présidente. Le p.l. n° 28 est un leurre. On ne cherche pas ici à mettre un terme à l'urgence sanitaire, mais bien à pérenniser et à maintenir les pouvoirs exceptionnels que le gouvernement s'est donnés pendant la pandémie afin de se soustraire... et ainsi se soustraire à toute reddition de comptes et à répondre aux questions des oppositions. Et on en a eu un parfait exemple hier, là. J'ai pris une question pour avoir des renseignements sur un contrat de millions de dollars octroyé à McKinsey, et la seule réponse que le député de Borduas a trouvé à me donner, ça a été des commentaires sur l'endroit où je me trouvais au moment où j'ai participé à un webinaire avec M. Duhaime. Puis, après ça, ils vont nous dire que M. Duhaime ne les énerve pas pantoute, ça ne les stresse pas, mais ça, c'est une autre histoire.

Et on a devant nous un gouvernement qui, en début de pandémie, nous a cassé les oreilles en nous rappelant qu'il fallait continuellement se fier aux experts. Or, pendant les audiences pour le p.l. n° 28, on a eu des experts de très grande qualité, en droit, qui sont tous venus nous dire que le projet de loi n° 28 n'était pas nécessaire, parce que, pour arrêter l'urgence sanitaire, il suffit au gouvernement de ne pas renouveler son décret pour la 108e fois. Il aurait pu le faire hier. Il ne l'a pas fait.

Donc, ce n'est pas l'urgence sanitaire qui le préoccupe. Et, dans les faits, quand il dit qu'il veut avoir des mécanismes de transition... Dans la vraie vie, Mme la Présidente, là, si le gouvernement a besoin de louer des entrepôts réfrigérés pour stocker des vaccins, là, il n'a pas besoin d'une loi. C'est sa job. Il n'a pas besoin d'une loi pour faire sa job. Et c'est la même chose pour louer des endroits pour administrer des vaccins. Il n'a pas besoin d'une loi pour faire ça. C'est sa job. Alors... Et, pendant les audiences, à part les... puis le collègue de La Pinière l'a mentionné, à part les employés du ministère qui, vraiment, là, nous on fait une vidéo corporative, là, il n'y a personne qui était d'accord avec le projet de loi n° 28, personne. Alors...

Et les experts, là, dont on nous a tellement vanté la nécessité d'écouter, en début de pandémie, mais, quand c'est les avocats puis les professeurs de droit, les sommités du Québec, là, on passe outre, là, ce n'est pas important, ces experts-là, on n'a pas besoin de les écouter. Alors, Mme la Présidente, même chose pour ce qu'il prétend avoir besoin des mesures transitoires pour permettre à d'autres professionnels d'administrer des médecins. Comment ça se fait que ça n'a pas été fait, depuis deux ans, ça, avec l'ordre des professions puis le Code des professions? Parce qu'ils se sont traîné les pieds puis ils n'ont pas fait les vraies affaires. On va faire une loi, on va garder des pouvoirs démesurés, et puis au diable les conventions collectives, puis au diable tout, puis au diable les experts. C'est nous qui savons ce qui faisons.

Alors, ils ne l'ont pas fait, leur travail et, s'ils avaient vraiment voulu mettre fin à l'urgence sanitaire, ils auraient appelé le projet de loi no° 898 que j'ai déposé, qui compte deux articles, qui est facile et qui leur aurait redonné toute la latitude pour continuer de gérer. Et, de toute évidence, moi, je suis aussi d'avis que la Santé publique doit continuer à prodiguer des conseils à la population. Et, à cet effet, les budgets de publicité qui sont dédiés à la prévention devraient être administrés par la Santé publique et non pas par votre gouvernement, et que la santé publique fasse des messages publicitaires non partisans qui continuent d'informer la population des mesures qu'elle privilégie, des choses que les gens devraient faire pour se protéger. La Santé publique est capable de faire ça.

Alors, c'est pour toutes ces raisons, et je pourrais répéter ici ce que mes collègues de Nelligan et de Rosemont ont dit, on était tous là aux audiences, mais tout ça pour vous dire, Mme la Présidence, que, naturellement, je vais voter contre le projet de loi n° 28. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. M. le député de Laval-des-Rapides, je vous cède la parole.

M. Saul Polo

M. Polo : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Puis je suis bien d'accord avec vous, vous pouvez m'escompter les 19 secondes que vous avez données en trop à mon collègue de La Pinière, c'est bien correct. Mme la Présidente, tel que mon collègue de La Pinière l'a mentionné, je prends la parole aujourd'hui pour, en fait, dénoncer cet exercice démocratique de... oui, on débat, on débat d'un projet de loi présenté par le gouvernement pour... visant à mettre fin à l'état d'urgence ou à l'état d'urgence sanitaire qui, pour moi, est un exercice qui, comme mon collègue l'a mentionné, génère beaucoup de questions et beaucoup de doutes. Et, à la rigueur, Mme la Présidente, ce genre d'exercice, à travers ce projet de loi là, provoque justement une certaine apathie auprès de la population quant à l'intérêt auprès de la politique puis auprès de l'exercice démocratique que nous faisons aujourd'hui.

• (12 h 50) •

Ce projet de loi est, selon moi, innécessaire puisque nous n'avons pas eu besoin d'un projet de loi pour mettre en place l'urgence sanitaire. Puis, aujourd'hui, ce gouvernement arrive avec un projet de loi à la va-vite, à quelques semaines, quelques mois de la fin de la présente législature, pour se donner des pouvoirs additionnels, des pouvoirs qui vont au-delà de la fin de la pandémie, en fait, même du contexte actuel des besoins que nous avons comme population et qui, justement, font juste provoquer encore plus de doute auprès de la population sur cet exercice-là.

«Le projet de loi prévoit que les mesures prévues par décret ou par arrêt ministériel du ministre de la Santé et des Services sociaux pris en vertu de la Loi sur la santé publique [...] qui sont en vigueur — depuis, en fait... — en vigueur lors de la fin de l'état d'urgence demeurent en vigueur jusqu'au 31 décembre 2022. Il permet toutefois au gouvernement de modifier ou d'abroger un décret ou un arrêté afin de permettre l'allégement graduel des mesures.

«Le projet de loi permet au ministre d'ordonner à tout ministère ou organisme de lui communiquer ou de lui donner accès ment à tout document ou à tout renseignement en sa possession nécessaire pour la protection de la santé de la population en lien avec la pandémie de la COVID-19.

«Par ailleurs, le projet de loi prévoit que la durée de certains contrats en vigueur qui ont été conclus par le ministre ou par un établissement de santé et services sociaux pendant l'état d'urgence sanitaire peut être prolongée pour une période n'excédant pas, selon la nature du contrat, le 31 décembre 2022 ou cinq ans.

«Enfin, le projet de loi prévoit que ses dispositions cessent d'avoir effet le 31 décembre 2022, sauf exception», et prévoit aussi les conditions auxquelles la régie peut communiquer au ministre des renseignements nécessaires à l'exercice des fonctions de ce dernier.

Mme la Présidente, quels sont certains des enjeux associés à ce projet de loi là? On prévoit que la durée de certains contrats qui ont été conclus pendant l'état d'urgence sanitaire peut être prolongée pour une période n'excédant pas le 31 décembre 2022. Le gouvernement maintient sa capacité à dicter les conditions de travail des employés de bureau de la santé après deux années extrêmes, difficiles pour les employés et qui a été hautement problématique. Le projet de loi prévoit également que la durée et la valeur de tout contrat existant et ayant pour objet l'entreposage ou le transport des biens, la durée de ces contrats ne peut excéder cinq ans suivant la fin de l'état d'urgence sanitaire.

Mme la Présidente, contrairement à mon collègue de La Pinière, je n'ai pas participé à l'exercice des consultations du projet de loi. Ceci dit, quand je regarde la revue de presse, quand je regarde les notes, également, qui m'ont été partagées sur les rapports puis les recommandations effectuées lors de ces consultations, c'est assez surprenant, à ce stade-ci, que le ministre, que le gouvernement n'ait pas pris acte de l'opposition presque unanime à l'extérieur, si on peut dire, de l'espace gouvernemental, une opposition presque unanime à ce projet de loi. Et je dis bien à l'extérieur parce que je suis tout aussi abasourdi que mon collègue de La Pinière de constater que, pour ce projet de loi, lors des consultations, le ministre a fait appel à son sous-ministre ou à ses sous-ministres, a fait appel aux présidents-directeurs généraux de certains CISSS et CIUSSS pour venir corroborer la nécessité de ce projet de loi.

L'objectif même des consultations, Mme la Présidente, c'est de pouvoir, justement, inviter des personnes et des organismes ou des institutions à l'extérieur de l'appareil gouvernemental pour venir donner une opinion indépendante. À quoi bon sert d'inviter un sous-ministre ou des P.D.G. de CISSS et de CIUSSS, alors qu'ils ont l'occasion, à l'intérieur même de l'appareil gouvernemental, de contribuer à la rédaction du projet de loi lui-même? Alors, quelle validité, quel poids, quelle indépendance d'opinion a réellement des recommandations effectuées par ces mêmes personnes lors des consultations? La réponse, c'est : Aucune. Il n'y a aucune différence, aucune validité, aucun poids à donner à ces opinions, toutes complètes qu'elles soient, bien définies, bien présentées qu'elles soient, parce que, nécessairement, ces personnes qui sont venues témoigner, qui sont venus participer à l'exercice des consultations l'ont fait devant leur supérieur, le ministre de la Santé. Donc, Mme la Présidente, c'est un gros point d'interrogation. En fait, c'est une grosse... Je suis abasourdi, comme mon collègue de La Pinière l'a mentionné, sur la validité de cet exercice.

Je vais vous citer quelques passages, Mme la Présidente, de la revue de presse en lien avec ce projet de loi depuis les dernières semaines. Radio-Canada cite dans un article, Deux ans de gouvernance par décrets : «un bazooka en matière démocratique» : «Jugeant déraisonnable le maintien de l'état d'urgence sanitaire, des experts en droit demandent à ce que le gouvernement mette fin à cette mesure au Québec, deux ans jour pour jour après son entrée en vigueur.

«Cette mesure d'exception a été instaurée le 13 mars 2020 par le gouvernement afin de mettre rapidement en place des mesures pour lutter contre la propagation de la COVID-19. Elle donne plusieurs pouvoirs au gouvernement, dont celui d'accorder des contrats sans lancer de processus d'appel d'offres.

«"C'est un bazooka en matière démocratique", déplore Me Louis-Philippe Lampron, professeur à la Faculté de droit de l'Université Laval et spécialiste du droit constitutionnel. Bien qu'il croie que la mesure avait [...] raison d'être au début de la crise, son maintien, deux ans plus tard, est difficilement justifiable.

«[...]La professeure de droit à l'Université de Montréal, Me Martine Valois, abonde dans le même sens. La mesure n'a plus sa raison d'être, selon elle.

«"Que l'état d'urgence soit maintenu, je crois que c'est un abus de pouvoir du gouvernement."» Une citation de Martine Valois, professeure à la Faculté de droit de l'Université de Montréal, qui... «Selon elle, un recours aussi prolongé à une mesure exceptionnelle risque de mettre à mal la confiance des Québécois envers les institutions démocratiques.» Ce que je vous disais en début de mon intervention : «"On ne peut pas accepter dans un système démocratique que, pendant deux ans, un groupe de 24 ou 25 personnes prenne toutes les décisions qui concernent la gouvernance du Québec."

«Un bilan trop tard? La Coalition avenir Québec affirme vouloir mettre fin à l'état d'urgence sanitaire et déposer son rapport d'analyse avant les prochaines élections d'octobre 2022.» Bien sûr, mais tout ça après le projet de loi.

Mme la Présidente, La Presse du 15 mars dernier, je cite : «Le gouvernement [...] a accordé pour 4,1 milliards de dollars en contrats en vertu du décret d'urgence sanitaire 2020‑2021, selon [un] rapport [des] Statistiques sur les contrats des organismes publics, publié par le Secrétariat du Conseil du trésor. Ces sommes valent pour l'exécution de 2 688 contrats de plus de 25 000 $.

«Les chiffres pour 2021‑2022 ne sont pas encore comptabilisés — je cite — mais des contrats onéreux ont [...] été accordés de gré à gré. Et on n'a qu'à penser à l'achat massif des tests de dépistage rapide ou des masques N95 pendant la vague Omicron.»

Mme la Présidente : «Le fort volume de contrats accordés en vertu de l'urgence sanitaire fait craindre [...] que certains groupes ou entreprises aient pu profiter de favoritisme.» C'est de ça qu'on parle, Mme la Présidente. Et, à travers ce projet de loi là, on donne un passe-droit au ministre puis au gouvernement de poursuivre cette façon de faire jusqu'au 31 décembre de cette année, et peut-être même pour les cinq prochaines années.

Le gouvernement maintient... «a [...] maintenu en place trop longtemps l'état d'urgence [du] Québec. "Il y a des risques de dérapage énormes. La raison pour laquelle on fait des appels d'offres, c'est [justement pour éviter le] favoritisme."»

Mme la Président, je vous sens impatiente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Non, pas du tout, je regarde l'heure...

M. Polo : O.K. «Selon elle, il y a "clairement apparence de problème avec la gestion des contrats" par le gouvernement.» Justement, justement, parce qu'on a maintenu beaucoup... de façon trop longue l'état d'urgence sanitaire et que le gouvernement a abusé des mécanismes conférés par la même loi. Et aujourd'hui le gouvernement nous demande, à travers ce projet de loi là, de leur donner un chèque en blanc jusqu'au 31 décembre 2022 et de poursuivre pour encore cinq ans. Mme la Présidente, est-ce que vous...

• (13 heures) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Vous voulez que je vous arrête? Je vous arrête pile, il est 13 heures. Effectivement, vous aviez bien vu. Alors, si vous voulez poursuivre votre intervention, M. le député, de toute manière, vous connaissez... il vous restait quelques minutes, donc vous pourrez poursuivre lorsqu'on rappellera ce projet de loi.

Débats de fin de séance

Alors, nous sommes rendus aux débats de fin de séance. Conformément à l'ordre spécial, nous allons maintenant procéder au débat de fin de séance portant sur une question adressée par M. le député de LaFontaine au ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale concernant l'impact de la pénurie de main-d'oeuvre sur l'économie de toutes les régions du Québec.

Je vous rappelle que, conformément à l'article 310 du règlement, le député qui a soulevé le débat et le ministre qui lui répond ont chacun un temps de parole de cinq minutes, et le député a ensuite droit à une réplique de deux minutes. M. le député de LaFontaine, je vous cède la parole.

Mesures pour contrer la pénurie de main-d'oeuvre

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, heureux de poursuivre le débat, maintenant, en débat de fin de séance, parce que lors de la période de questions, évidemment, nous avons un temps excessivement limité, puis on est pressés par un 30 secondes, une question, puis un 45 secondes d'une réponse pour le ministre. Puis le ministre me faisait... soulignait tantôt, quand il a fait son entrée, à raison, et je l'avais souligné que je le trouvais sympathique. Et là je le réitère, Mme la Présidente, ce n'est pas un écart de langage, ce n'est pas... Je l'affirme et le réitère, mon collègue, je le trouve très sympathique. Mais je le rassure...

Une voix : ...

M. Tanguay : Il dit que c'est réciproque, alors c'est l'harmonie totale. Bien, on va essayer de maintenir ça, Mme la Présidente, pour alléger votre tâche pendant les quatre minutes et demie qu'il me reste ou à peu près. Mais je tiens à le rassurer, mon cinq minutes ne sera pas sur une preuve à étayer sur le fait qu'il est sympathique. Ça, je pense qu'on le prend pour acquis, puis c'est de connaissance judiciaire et publique.

Alors, un article ici et le budget, 22 mars 2022, Ulysse Bergeron, Québec mise sur la productivité des entreprises pour contrer la pénurie de main-d'oeuvre. Dans le budget, je vais sortir les pages E.9 et suivantes, où on parle de, longuement, accroître la productivité de l'économie québécoise. L'accroissement de la productivité... Je cite le budget : «L'accroissement de la productivité constitue le principal levier — il est là mon point, le principal levier — pour augmenter la richesse du Québec et éliminer son écart de niveau de vie avec l'Ontario.» Fin de la citation.

Ça, Mme la Présidente, on voit que le gouvernement... Bien évidemment, la productivité de l'économie québécoise, c'est un élément important. Oui, il faut investir, bien évidemment, dans la robotisation, dans des nouveaux procédés, des nouvelles technologies, faire en sorte que nos entreprises soient beaucoup plus performantes. Pourquoi? Pour produire plus, produire mieux, dans des délais qui se rapetissent, et faire en sorte, donc, d'assurer leur viabilité économique, et d'assurer, donc, ce qu'on appelle la productivité, produire plus, mieux, dans un délai plus restreint. Ça, c'est parfait, Mme la Présidente. Il n'y a pas personne ici qui est contre l'augmentation de la productivité via notamment les nouvelles technologies, la robotisation, etc.

Mon point, et comme le notait l'article du journal Le Devoir d'Ulysse Bergeron, Québec mise sur la productivité des entreprises pour contrer la pénurie de main-d'oeuvre. Quand on lit, dans le budget, «principal levier», c'est trop court, Mme la Présidente. Le gouvernement ne peut pas, puis j'aimerais entendre mon collègue là-dessus, mettre quasiment, quasiment, pas toutes, mais quasiment puis, en tout cas, la très, très, très grande part de ses oeufs dans ce panier-là. Ce qui a fait dire à qui, à Manufacturiers et exportateurs du Québec, le jour même du budget, et je les cite : «Les mesures annoncées, conjuguées à celles de la mise à jour économique, n'atténuent pas la pénurie de main-d'oeuvre dans le secteur manufacturier. Le nombre de postes vacants continue de progresser et a atteint un niveau record de 31 565 au quatrième trimestre de 2021, et les pertes économiques liées à la pénurie de main-d'oeuvre se chiffrent à plus de 18 milliards de dollars au cours des deux dernières années. Cela démontre que les mesures en place ont peu d'impact sur les manufacturiers.» Et ça, c'était — fin de la citation — Véronique Proulx, P.D.G. de Manufacturiers et exportateurs du Québec.

Mon point, Mme la Présidente, c'est que, oui, il y a la productivité, oui à investir en nouvelles technologies, robotisation, etc., et en innovation, mais l'on ne peut pas dire que là est la mesure qui va répondre à la pénurie de main-d'oeuvre, la mesure avec un grand L, et mettre la quasi-totalité, sinon à tout le moins, une partie très, très majoritaire, une énorme partie de ces efforts et également des investissements gouvernementaux via les différentes institutions. Ça, c'étaient les Manufacturiers et exportateurs du Québec le jour même, le 22 mars dernier, du budget qui disaient : Votre lutte à la pénurie, à cette crise de pénurie de main-d'oeuvre, c'est insuffisant.

Également, Mme la Présidente, autre chose. Avant le budget, le 9 février 2022, la Fédération canadienne des entreprises indépendantes titrait La pénurie de main-d'oeuvre sabote la reprise de l'économie : Deux PME sur cinq doivent refuser des ventes ou des contrats. Fin de la citation. Des refus de ventes ou de contrats des PME puis même des Manufacturiers et exportateurs du Québec, Mme la Présidente, il y en a à toutes les semaines, à tous les jours, à cause la pénurie de main-d'oeuvre. Et ça, il faut évidemment le reconnaître et avoir un plan complet qui n'est pas uniquement miser sur la productivité, parce que c'est insuffisant en soi, Mme la Présidente. Ça peut avoir un effet bénéfique, et ça a un effet bénéfique, mais c'est nettement insuffisant.

Et j'aurai l'occasion de revenir, dans le deux minutes qui m'est donné par la suite, pour compléter avec d'autres citations. Le gouvernement n'a pas un plan complet. Le gouvernement ne s'attaque pas de façon complète à la crise des pénuries de main-d'oeuvre, puis c'est ce qu'on vit, malheureusement, au Québec.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Alors, M. le ministre, je vous cède la parole pour un maximum de cinq minutes.

M. Jean Boulet

M. Boulet : Oui, merci, Mme la Présidente. Je renvoie le compliment à mon collègue de LaFontaine sur le volet sympathique. Et sympathique, quand c'est dans notre nature, ça a beaucoup plus d'impact, beaucoup plus de valeur.

Et la pénurie de main-d'oeuvre, comme vous savez, c'est un phénomène qui est occidental, qui se vit d'ailleurs dans plusieurs pays, même au-delà de l'Occident, qui est lié au vieillissement de la population. Mais, si on fait une analyse fragmentaire, comme l'a fait mon collègue, et de dire : C'est la productivité... Ça ne se limite pas à la productivité. Puis on a un plan d'action qui est global, qui est cohérent, qui a été fait en collaboration avec les partenaires du marché du travail, notamment les manufacturiers exportateurs.

Et je rappellerai à mon collègue ou je l'informerai que Véronique Proulx, elle est membre de la Commission des partenaires du marché du travail. Elle connaît les mesures, et les mesures, c'est un ensemble, c'est l'addition de solutions qui vont nous permettre de lutter efficacement contre la pénurie de main-d'oeuvre. Je le répète souvent, mais il y a l'intégration de toutes les clientèles éloignées du marché de l'emploi, les personnes en situation de handicap, les jeunes, les personnes expérimentées, les personnes judiciarisées, les personnes issues des Premières Nations, les personnes bénéficiaires de l'aide sociale. On a des succès. On a des taux d'emploi en augmentation chez toutes ces clientèles-là.

La formation, la requalification... J'inviterai mon collègue à regarder le plan qu'on a soumis en septembre 2019, qui a été bonifié lors de la mise à jour économique. Et il ne faut pas isoler le budget. La mise à jour et le budget sont véritablement complémentaires.

Rappelez-vous, Mme la Présidente, le 30 novembre, la vaste opération main-d'oeuvre, des bourses de 1 500 $ par session complétée au niveau collégial, 2 500 $ par session complétée au niveau universitaire dans les secteurs névralgiques de l'économie du Québec, notamment les technologies de l'information, le génie, la construction. Et il y a des secteurs publics essentiels, santé, éducation, services de garde à l'enfance, qui font l'objet de cette vaste offensive, la plus importante de l'histoire du Québec, en matière de pénurie de main-d'oeuvre : 3,9 milliards, dont 2,9 milliards de nouveaux crédits. Intégration, formation, requalification, productivité puis immigration.

Et je rappelle à mon collègue ce que je lui ai mentionné ce matin, dans le dernier budget, il y a 2,2 milliards pour stimuler la productivité, et c'est un incontournable. La pénurie de main-d'oeuvre, ça inverse le rapport de force entre les employeurs puis les salariés. Les employeurs se doivent, tous les sondages vont dans la même direction... intégrer des nouvelles technologies, que ce soit la robotisation, l'automatisation ou l'intelligence artificielle. Ça permet de lutter efficacement contre la pénurie de main-d'oeuvre, mais c'est aussi un facteur positif. Ça donne un potentiel additionnel de recrutement et de rétention aux entreprises. C'est extrêmement bénéfique aussi pour l'accroissement du PIB par habitant.

• (13 h 10) •

Ce n'est pas que ça. La pénurie de main-d'oeuvre, ça réside dans le nombre de départs à la retraite, mais aussi de la vigueur de l'économie québécoise, parce qu'il y a à peu près 20 % des postes vacants qui découlent de la croissance économique québécoise. Et ça, on n'en parle pas suffisamment. C'est un indicateur économique qui reflète l'excellente santé économique du Québec. L'autre 80 %, la roue tourne. Il y a des départs à la retraite à tous les mois, et ça additionne quant au nombre de postes vacants.

On a un taux d'emploi record, au Québec, 77,8 %, je l'ai mentionné ce matin... 77,6 %, je m'excuse, le plus haut taux au Canada chez les 15 à 64 ans. On a 183 000 personnes qui ont participé activement à nos mesures actives de formation et d'intégration en emploi chez toutes les clientèles éloignées du marché de l'emploi. En matière de requalification, en raison de la pandémie, on a accompagné 30 000 personnes qui se sont réorientées par la voie de formations dans des secteurs publics essentiels et dans des secteurs extrêmement fondamentaux pour notre économie. Il faut travailler tout le monde ensemble, et les entreprises ont aussi une responsabilité à assumer, comme chaque personne au Québec. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le ministre. M. le député de La Fontaine, je vous cède la parole pour votre droit de réplique.

M. Marc Tanguay (réplique)

M. Tanguay : Oui. J'aimerais souligner à mon bon ami le ministre, là, quand il a parlé de Véronique Proulx, qui est membre de la Commission des partenaires du marché du travail, elle est là-dessus, justement, elle, puis elle voit tout ce que le gouvernement fait. Et il a dit, en début de son intervention, aussi, il a dit : Il n'y a pas juste le budget, il y a eu la mise à jour économique. Parfait.

Je vais vous citer Véronique Proulx : «Les mesures annoncées, conjuguées à celles de la mise à jour économique, n'atténuent pas la pénurie de main-d'oeuvre dans le secteur manufacturier.» Fin de la citation. Alors, elle qui est partie prenante, qui est partenaire, qui est membre de la commission, qui réfère, comme le demande le voeu du ministre, qui ne réfère pas juste au budget, mais à la mise à jour économique, force lui est de constater que l'ensemble de l'oeuvre fait en sorte qu'on rate la cible. Alors, ça, c'est un témoignage excessivement important qu'il faut entendre.

Je ne suis pas en train de dire que le ministre, il est assis sur ses lauriers puis qu'il ne fait rien. Il le sait que ce n'est pas ça que je dis. Je dis, entre autres, quand il parle... Là, je vais vous citer François Vincent, vice-président Québec de la FCEI, la Fédération canadienne des entreprises indépendantes. Lui, il dit, davantage au niveau du côté des PME : «La crise de la pénurie de main-d'oeuvre empire au Québec. Bien entendu, le budget 2022‑2023 comprend certaines mesures pour y répondre, mais on ne fait qu'effleurer l'enjeu.» Fin de la citation. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est lui qui le dit. C'est lui qui le dit, Mme la Présidente.

Alors, il faut les écouter. Puis moi, quand je vais sur le terrain... Je sais que le ministre y va, ça ne se peut pas qu'il n'entende pas ce message-là. Je suis en Gaspésie, en Abitibi, on fait beaucoup de régions, c'est l'enjeu numéro un. Puis il y a une expression forte que j'ai entendue en Abitibi, à Rouyn-Noranda, ils m'ont dit : M. le député, ça a un effet déstructurant de notre économie, la pénurie de main-d'oeuvre. Alors, ils parlaient... Bien, 80 %, notamment, c'est les gens qui vont à la retraite. Que faisons-nous, justement, pour garder sur le marché du travail les travailleurs expérimentés? Au niveau de l'immigration également, on n'est pas du tout performant. On n'est pas là. Alors, il faut que le gouvernement complète le plan de match, parce que c'est inexistant à l'heure actuelle.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député de LaFontaine.

Alors, compte tenu de l'heure, les travaux de l'Assemblée sont suspendus jusqu'à 14 h 30.

(Suspension de la séance à 13 h 14)

(Reprise à 14 h 31)

Le Vice-Président (M. Picard) : Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 28

Poursuite du débat sur l'adoption du principe

Aux affaires du jour, l'Assemblée poursuit le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 28, Loi visant à mettre fin à l'état d'urgence sanitaire. Et je reconnais M. le député de Vimont.

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Picard) : Attendez un petit peu. S'il vous plaît, ceux qui ont des discussions à avoir, je vous demanderais d'avoir les discussions à l'extérieur du salon bleu, j'aime bien entendre les personnes qui ont la parole. M. le député de Vimont, allez-y.

M. Jean Rousselle

M. Rousselle : Merci, M. le Président. Je suis heureux de prendre la parole, aujourd'hui, sur le projet de loi n° 28, Loi visant à mettre fin à l'état d'urgence sanitaire.

Premièrement, je voudrais commencer à remercier les groupes qui se sont présentés, les groupes qui ont préparé des mémoires. C'est toujours... tu sais, c'est du travail, hein, les gens, ils se déplacent ou ils le font par vidéoconférence, mais juste le fait de préparer ces mémoires-là, ça prend du temps, et bien souvent, bien, ils vont mettre des choses à côté pour, justement, favoriser, justement, le projet de loi qui est aujourd'hui... qu'on parle, le projet de loi n° 28. On connaît tous... mais les gens, peut-être, à la maison ne le savent pas, mais le choix des groupes... le gouvernement, c'est lui qui décide, dans le fond, mais les oppositions font des offres, elles demandent : Bien, écoute, j'aimerais ça écouter tel groupe, j'aimerais ça tel groupe soit là, mais, à un moment donné, ça finit comme un genre de négociation entre les groupes parlementaires et puis ça se termine de même. Donc, je regardais les groupes, justement, qui ont été entendus et, à ma grande surprise... et d'ailleurs je ne vais pas prendre les paroles de mon collègue de La Pinière, mais qui était vraiment très intéressant, en passant, mon collègue de La Pinière nous faisait remarquer comme quoi que c'étaient des employés du gouvernement qui étaient là au niveau... pour représenter les pour. D'habitude, comme le disait... puis là je ne vais pas répéter qu'est-ce que mon collègue mentionnait tantôt, mais d'habitude tu essaies d'avoir une opinion externe. D'habitude, tu essaies d'avoir des gens de l'externe qui vont dire est-ce qu'on s'en va dans le droit chemin, est-ce qu'il y a quelque chose à améliorer, est-ce qu'on est correct.

C'est sûr que, si on demande à notre gang, puis à notre gang qui, bien souvent, ont aidé à préparer le projet de loi, moi, je pense qu'ils vont toujours dire... bien, oui, ils vont dire comme le ministre. Écoutez, ils ont travaillé dans le projet de loi, ils sont là, et puis, en tout cas, pas sûr qu'il y en a un qui oserait dire : M. le ministre, moi, je ne suis vraiment pas d'accord, tout le kit, puis je ne pense pas qu'il viendrait le dire dans une commission. En tout cas, à moins que je fasse erreur, là, à moins que quelqu'un dise : Écoute, je suis tanné de travailler pour le ministère de la Santé puis moi, je veux aller travailler ailleurs, là, mais moi, je n'ai jamais vu ça. Ça fait 10 ans que je suis ici, là, je n'ai jamais vu ça, quelqu'un qui va dire quelque chose à l'inverse de son ministre. Donc, c'est ça que je trouve de spécial ou de bizarre, je dirais même bizarre, dans le sens que d'habitude, tu essaies d'avoir des opinions externes, tu essaies d'avoir des opinions qui t'enlignent un petit peu sur où tu t'en vas, surtout qu'on parle, justement, dans ce cas-ci, de mettre fin à l'état d'urgence sanitaire. Parce que je regarde les mémoires puis je regarde ces groupes-là, puis, juste pour vous dire, là, pour vous dire c'est qui qui sont pour, là, il y a Daniel Paré, le sous-ministre associé, il y a M. Luc Boileau — je pense que vous n'êtes pas surpris qu'il soit d'accord avec ça — il y a Mme Julie Labbé, elle, qui est P.D.G. du CIUSSS Saguenay—Lac-Saint-Jean, il y a M. Guy Thibodeau, P.D.G. du CIUSSS de la Capitale-Nationale, puis Jean-François Fortin Verreault, P.D.G. du CIUSSS de l'Est-de-l'Île-de-Montréal. Bien, eux autres, là, j'ai regardé, parce que je n'étais pas présent aux échanges, justement, des consultations particulières, j'ai lu les documents, j'ai regardé un petit peu le travail exceptionnel de mon collègue de Nelligan, qu'il a fait dans le dossier, puis ces personnes-là, c'est comme... ils reprendraient un petit peu un langage publicitaire pour le gouvernement au niveau du projet de loi. C'est certain que ces gens-là, ils ne diront pas que ça ne va pas bien, ils vont dire : Bien oui, on en a besoin absolument.

Par contre, quand je regarde les autres personnes qui ont fait des mémoires, qui se sont présentées, puis elles sont toutes contre à des niveaux différents, on va s'entendre, à des niveaux différents, bien là on parle... tu sais, le Barreau du Québec, là, il n'en a pas parlé positivement, là, l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé, là, l'APTS, ils sont contre, fédération interpersonnelle, Louis-Philippe Lampron, qui est un professeur de droit de l'Université Laval, Mme Martine Valois, professeure de droit à l'Université de Montréal, la Ligue des droits et libertés, Confédération des syndicats nationaux puis la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec. Bien, il y en a qui vont dire : Bien oui, mais là, là-dedans, tu as des syndicats, c'est sûr qu'eux autres ils vont dire... ils vont être contre, là. Oui, mais ces syndicats-là, là, ils parlent pour qui, eux? Ils parlent pour des gens, ils parlent pour des familles, ils parlent pour des femmes puis des hommes que ça fait deux ans qu'ils subissent, justement, ce système-là, là. C'est un système qui, à un moment donné... Puis je ne peux pas vous dire qu'au début on n'en avait pas de besoin, O.K.? On va se le dire, au début, quand ça commence, la pandémie, là, à un moment donné, tu as besoin de ça. Mais, à un moment donné, on a l'impression qu'on s'est comme habitués puis on aime ça. J'ai l'impression qu'on aime ça, on continue quand même.

Mais ces femmes-là, et tout, là... Juste pour vous dire, il y a une personne qui m'a appelé à mon bureau, c'est une femme, elle a accepté d'être permanente. Donc, oui, elle a reçu la prime, et tout ça, bon, elle est permanente maintenant. Elle a écouté, justement... elle a entendu, justement, l'appel du gouvernement, elle s'est dit : Moi, je vais aller travailler de manière permanente. Sa grand-mère décède. M. le Président, sa grand-mère décède. Bien, savez-vous quoi? La journée des obsèques, là, bien, ils ont coupé sa prime, ils ont coupé sa prime... sa grand-mère qui décède. Puis elle, elle est de bonne foi, là, elle va travailler pour le monde, là, elle s'en va travailler pour les gens, là, mais on lui coupe sa prime, parce que, toi, là, écoute, bien beau que ta grand-mère est décédée, mais, écoute, là... C'est-u normal, ça? Bien non, ce n'est pas normal.

C'est pour ça que, quand des fois j'entends des gens dire : Oui, mais là le syndicat va être là, non, mais, justement, le syndicat, là, il est là, justement, pour dire : Aïe! C'est assez, c'est assez. Ces gens-là, ils ont assez donné, là. Aïe! Ils ont assez donné. Ça fait deux ans qu'ils donnent, puis là le gouvernement peut faire qu'est-ce qu'il veut avec eux autres, il peut faire qu'est-ce qu'il veut. Et ça, c'est comme... À un moment donné, comme je vous dis, au début, je peux comprendre, puis, je pense, ces gens-là aussi, ils comprenaient. À un moment donné, on va mettre la main à la pâte puis, tu sais, on va faire quelque chose, parce que la première n'était pas évidente, comprenez-vous, donc tout le monde met la main à la pâte, puis on y va... puis, envoye, on y va avec qu'est-ce que le gouvernement faisait.

Mais là, tu sais, ce projet de loi, c'est... L'urgence sanitaire est là depuis le 13 mars 2020, 108 décrets. Aïe! Pensez-y, là, 108 décrets, ça n'a pas d'allure. Puis là, là-dedans, dans le projet de loi, on dit... c'est un projet de loi qui prévoit que les mesures prévues par le décret ou par l'arrêté ministériel... «arrêtés du ministre de la Santé et des Services sociaux pris en vertu de la Loi sur la santé publique et qui sont en vigueur lors de la fin de l'état d'urgence demeurent en vigueur jusqu'au 31 décembre 2022». Donc là, qu'est-ce qu'on essaie de faire, là... ce qu'on ne peut pas faire par la porte gauche, on va la faire par la porte droite, bien, on va mettre un projet de loi, puis on sait qu'on a la majorité, on va aller sur un projet de loi, puis là les décrets, nous autres, on ne se bâdrera plus... on ne se bâdre pas de ça, mais pas pantoute. Aïe! Nous autres, on va être... jusqu'au 31 décembre 2022, on ne sera pas agacés par personne, personne, personne.

Donc, dans le fond, le gouvernement s'achète la paix sur ce projet de loi là, et les syndicats, ils n'ont rien à dire, surtout que, là, je pense, ils sont en négociation, et tout ça. Mais, comme je revenais tantôt, c'est des gens qui vont payer, là-dessus, c'est des gens, des mères et des pères de famille qui... On oublie, là, on oublie... C'est bien beau que, oui, on va avoir des infirmières, c'est correct, ça, mais, quelque part, ces gens-là, ils ont fait un sacrifice. Ça fait deux ans qu'ils ont fait le sacrifice. À un moment donné, ils ont commandé leurs vacances, si je ne me trompe pas, mais là c'est rendu qu'il y a des congés... quand tu as des congés, soit pour ta famille ou encore, comme je vous ai expliqué, un décès, c'est comme... on coupe ta prime.

• (14 h 40) •

Donc, juste pour vous dire, c'est que ne soyez pas surpris que... puis moi, je ne suis pas surpris que les gens qui sont pour, là-dedans, c'est des employés du gouvernement. C'est des employés du gouvernement, donc c'est sûr qu'ils ne peuvent pas dire autre chose. Mais, comme je le disais tantôt, c'est que, d'habitude, ça se négocie entre les partis, le gouvernement, les partis. Comment ça se fait qu'on n'a pas trouvé... qu'on n'a pas réalisé à trouver des gens qui sont pour à l'extérieur de la boîte? Comment ça se fait qu'on n'a pas trouvé des gens qui sont d'accord avec ce projet de loi là à l'extérieur du gouvernement? Parce que tous les gens le disent, ça n'a pas d'allure, ça n'a pas d'allure, ce projet de loi, là. Ça n'a pas d'allure pantoute. Puis là les gens, ils vont dire : Oui, mais là les partis de l'opposition, ils vont prendre leur temps pour jaser. Non, non, ce qui nous fait perdre notre temps aujourd'hui, là, c'est le gouvernement, parce que, s'il n'y aurait pas ce projet de loi, je ne serais pas en train de vous parler aujourd'hui, actuellement. Moi, je serais peut-être en direction de Laval pour m'en aller chez nous, là, voir mes petits-enfants.

Mais ça, ici, là, bien, pourquoi qu'on est contre? Parce que les spécialistes le disent, que ça n'a pas d'allure, tout le monde le dit, que ça n'a pas d'allure, sauf les employés du gouvernement. Je pense qu'ils veulent avoir le pouvoir de prolonger un pouvoir d'une manière... voyons, d'une manière continue... excusez, le mot ne me vient pas, là, mais d'une manière continue jusqu'au 31 décembre. C'est ça qu'on veut avoir. Puis en même temps, bien, je pense que ça bafoue un petit peu les droits législatifs, parce que, là, pendant qu'on décide... parce que c'est une gang qui décide, là. Ils sont, quoi, 20, 25, je ne peux pas dire le chiffre exact, là, 27, si je ne me trompe, là, mais c'est une gang qui décide comment ça fonctionne au Québec. Et ça, c'est Me Valois qui vient de le sortir, ça. Me Valois, elle vient de mentionner, dire : Ça n'a pas d'allure.

Le côté législatif... Nous autres, on est élus, ici, là, on est 125 députés, c'est pour représenter nos gens dans notre circonscription et puis les représenter adéquatement. Mais là, avec des décrets de même, là, on ne représente pas adéquatement notre population, parce que, là, il y en a 25, 26, puis bon nombre, là-dedans, qui n'ont pas été élus, là, qui décident à la place du gouvernement : Ça, ça va être bon pour nous autres, le gouvernement. Donc, on bafoue carrément le droit législatif. Puis en plus, comment je pourrais vous dire ça, il y a les droits et libertés aussi qui arrivent à dire : Aïe! ça n'a pas d'allure, ça, non plus, là. À un moment donné, là, c'est comme... on veut tout simplement attacher tout le monde puis dire : Nous autres, on a raison.

Je le sais, que, le gouvernement, les partis d'opposition, là, ça les dérange, ça les dérange. Ça, on le sait. Dans toutes les autres lois, on l'a vu, ça les dérange, mais vraiment, vraiment, là. Mais je trouve malheureux qu'on se serve d'une loi, puis qu'en plus qu'on l'appelle Loi visant à mettre fin à l'état d'urgence sanitaire, là... Ouf! Un drôle de titre, ça, je pourrais vous dire, parce que ce n'est pas ça qui arrive, mais pas pantoute, on continue ça jusqu'au 31 décembre. Puis en plus, M. le Président, pour votre information, il y a des contrats qui vont durer pendant cinq ans. Et là le ministre... parce qu'avec l'échange qu'il y a eu pendant les consultations il vient dire... le ministre vient dire comme quoi : Oui, mais c'est juste 37 millions, là, c'est juste 2 % des dépenses là-dedans, là, tu sais, c'est juste 2 %, 37 millions. Bien, c'est juste 37 millions, tu sais, c'est... pendant cinq ans, ça, ça veut dire que ces contrats-là ont été donnés, puis là ils vont perdurer pendant cinq ans.

Premièrement, c'est un projet de loi qu'on n'a pas de besoin, mais pas pantoute, mais pas pantoute. Si on veut mettre fin, là, à l'état d'urgence, bien, qu'on mette fin. Si on a besoin... Un exemple, puis ça, c'est mon collègue, tantôt, qui le mentionnait aussi, mon collègue...

Une voix : ...

M. Rousselle : ...oui, de La Pinière, merci, mon collègue de La Pinière, bien, justement... Vous êtes d'une aide incroyable, M. le Président, merci beaucoup. Mais, juste pour vous dire, c'est que, s'ils ont besoin des endroits pour vacciner les gens, ils ont-u besoin d'une loi? Bien non, ils n'ont pas besoin d'une loi, ils ont juste à dire : Écoute, j'en ai besoin, puis on loue, puis, go, on y va, puis «that's it, that's all», tu sais, c'est juste ça. Puis, si ça prenait d'autres personnes, si ça prenait d'autres personnes pour vacciner... Ça fait deux ans, là, on n'aurait pas pu faire une loi ou quelque chose juste pour dire, écoutez, là, tous les gens qui vaccinent actuellement, leur donner le droit de vacciner, puis c'est tout, là? Ça ne prend pas un décret pour ça. Ça ne prend pas... Tu sais, ça, ça aurait été vite, vite, vite, ça, là, là, tout le monde est d'accord avec ça. C'est comme, go, il faut avancer, puis ça nous prend du monde pour accélérer la vaccination, bien, go, on y va.

Mais ce n'est pas ça qui se passe, c'est qu'on tient vraiment à garder ça, le contrôle. C'est comme un contrôle, vraiment, qu'on veut garder dans nos mains jusqu'au 31 décembre. Ah! bizarrement, les élections sont en octobre. En tout cas, juste pour vous dire ça, c'est un flash qui me vient dans la tête, là, c'est qu'on veut garder ça jusqu'au 31 décembre, après les élections. Donc, à ce moment-là, c'est comme, bon, là, on a la paix jusque-là, puis les syndicats, bien, il va falloir qu'ils prennent leur mal en patience, parce que c'est que... malheureusement, c'est que, écoute, on a une loi, maintenant, qui dit : Bien, écoute, c'est jusqu'au 31 décembre, puis on verra, au 1er janvier, là, on va vous régler ça, là, tu sais. Et c'est ça que je trouve bien... en tout cas, entre autres, je trouve ça bien malheureux.

Le maintien de l'état d'urgence sanitaire pendant deux ans aura permis au gouvernement caquiste d'octroyer pour 13 milliards en contrats de gré à gré depuis mars 2020. Pensez-y, c'est de l'argent, mais pas à peu près ça, là, là. Puis là on dit : Non, faites-vous-en pas, là, ça a été fait dans l'art de... il n'y a pas eu de problème, là, tu sais, ça s'est fait dans l'art, puis pas de problème. Oui, mais le monde, là, ils veulent savoir, eux autres, là. Bien beau croire une parole, là... Ça fait qu'au niveau transparence on repassera, là, comprenez-vous, on ne le sait pas, là. C'est que, là, on informe, on s'informe de ça, là. Le projet de loi prévoit le maintien par le gouvernement de la capacité de dicter les conditions de travail des employés, réseau de santé, après deux ans extrêmement difficiles, mais le maintien aussi de contrats jusqu'en décembre 2022 et, comme je vous disais, cinq ans aussi.

Puis le projet de loi prévoit aussi la durée de la valeur de tout contrat existant ayant pour objet l'entreposage, le transport de biens. Mais ça, là, tu n'as pas besoin d'une loi pour ça, là, on a juste à faire notre job puis de venir ici, à l'Assemblée nationale, puis de régler ça. Au moins, ça va être transparent. Les gens, ils vont dire : Écoute, là, on va le savoir vraiment, là, on veut comme... on va passer ça sur le côté, puis tout le kit. La FIQ... Puis là, bien, je pourrais vous en sortir... Tiens, je vais vous sortir... Radio-Canada parle justement : «Jugeant déraisonnable le maintien de l'état d'urgence[...], des experts en droit demandent à ce que le gouvernement [de la CAQ] — je ne dirai pas le nom, parce qu'on n'a pas le droit, ici — mette fin à cette mesure au Québec, deux ans jour pour jour après [sa mise] en vigueur.» C'est des professionnels, des professeurs de facultés de droit qui viennent nous dire comme quoi que c'est un bazooka en matière de démocratie, puis on continue pareil. Aujourd'hui, on est en train de jaser de ce projet de loi là. Il me semble qu'on aurait... on pourrait passer notre temps à bien d'autres choses que parler de ça, d'un projet de loi de même.

On devrait être transparents, puis s'organiser, justement, que ça fonctionne vraiment sur le terrain, mais ce n'est pas ça qui se passe. Et les gens... Excusez-moi, là, parce que j'ai tellement de papier, M. le Président, là, que je pense que j'en aurais pour une couple d'heures, mais on va arrêter à 20 minutes, je le sais. Mais au moins je sais qu'il y en... Tu sais, le monde m'écoute, c'est bon, tu sais. L'alliance professionnelle et technique de la santé, là, ils disent comme quoi que, justement, ça porte atteinte aux travailleurs. Mais ça, je vous le mentionnais tantôt, il ne met aucunement la fin des états d'urgence. Ça se continue, ça n'arrête pas. Et, comme c'est... Parce que, là, maintenant, c'est rendu un mode de fonctionnement, ce gouvernement impose et n'écoute pas. Bon, il demande que l'arrêté 2020-030 soit abrogé. Ça, c'est des demandes de syndicat, dire... Puis là eux autres, ils ont fait leur part, là, tu sais. Comme je vous disais tantôt, il y en a qui disent : Oui, bien, c'est les syndicats, hein? Non, non, eux autres, ils représentent des gens. Ils représentent des humains, eux autres. Ils représentent des mères de famille, des pères de famille puis qui veulent juste avoir un peu de répit, à un moment donné, tu sais.

Je vais sauter tout de suite à la Fédération interprofessionnelle de la santé, la FIQ. Ils ont justement parlé que la gestion par décrets, c'était assez. Et là qu'est-ce qu'on fait, actuellement, avec ce projet de loi là? On continue. À place d'y aller par décrets, on va y aller jusqu'au 31 décembre 2022. C'est ça qu'on veut faire. Donc, comme je vous ai dit tantôt, on fait par la porte de gauche qu'est-ce qu'on ne peut pas faire par la porte de droite. C'est un peu ça qu'on fait. Il faut favoriser les emplois à temps plein. Bien oui, il y en a qui ont accepté, mais je pense que le travail, il faudrait qu'il se fasse un petit peu plus sur le terrain puis essayer de gagner les gens qui sont là, mais surtout de s'organiser qu'ils restent à l'emploi. Parce que, là, ce n'est pas avec des décrets, puis ce n'est pas avec ce projet de loi là qu'on va comme gagner ces gens-là à rester en poste, là, bien non. Après ça, on dit : Bien non, mais ils s'en aillent au privé, ou ils s'en aillent ailleurs, ou ils lâchent carrément. J'en connais personnellement qui ont arrêté d'être infirmiers ou infirmières. Pourquoi? Bien, ils ne sont plus capables de vivre ça, là. Puis, avec le manque d'emplois qu'il y a un peu partout au Québec, pas besoin de vous dire que c'est facile pour eux autres de se trouver un emploi ailleurs, hein, et dans d'autres domaines, hein? Donc, il y a de la place partout, donc, eux autres : Pourquoi j'irais là me faire imposer des choses pendant que je peux aller ailleurs?

• (14 h 50) •

Donc, moi, je trouve ça malheureux, M. le Président, qu'on fasse ça. Comme je vous dis, tous les groupes, que ce soit comme Martine Valois, la professeure de droit... qui dit que ce n'est pas justifié, mais pas du tout, un renouvellement sans interruption, maintenant 108 fois, je pense, c'est déraisonnable, ça n'a pas d'allure. Et je pense que, si on veut mettre un petit peu... mettre de confiance la population au niveau politique, je pense qu'il faut avoir plus de transparence. Et, je pense, ce serait le temps, à un moment donné, de dire : Regardez, là... tu sais, on a demandé beaucoup de participation de la population, mais là, je pense, ce serait le temps de faire quelque chose pour démontrer, justement, qu'on est ouverts, on peut montrer... on peut parler de qu'est-ce qui s'est passé. Puis, en tout cas, juste pour vous dire que, je pense, vous avez bien compris qu'on est contre ce projet de loi là.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député de Vimont. D'autres interventions? Mme la députée de Mille-Îles.

Mme Francine Charbonneau

Mme Charbonneau : Merci, M. le Président. C'est toujours un privilège de se lever en cette Chambre, puis, je vous avoue, ça fait un petit bout que je ne l'ai pas fait. À chaque fois, quand je vois le temps qui se termine, de la personne précédente, j'ai toujours un peu de palpitations puis, je dis tout le temps, le genou mou, parce que c'est toujours un peu... je ne sais pas si je devrais qualifier d'excitant ou énervant, mais il y a toujours un sentiment de nervosité, quand on se lève en Chambre. Ça fait maintenant un peu plus de 13 ans que je le fais, puis à chaque fois, c'est un privilège, puis je vais avoir encore moins de temps pour le faire, donc j'en profite à chaque fois pour dire merci aux gens de Mille-Îles de m'avoir permis d'être ici. C'est toujours un privilège, M. le Président, puis vous comprenez ce privilège-là.

Parenthèse : hier soir, on a eu ici, à l'Assemblée nationale, au Parlementaire, une célébration des gens qui fêtaient leurs 10, 15 et 20 ans d'années d'expérience et d'implication publique, c'était fort apprécié. C'est toujours intéressant de pouvoir échanger avec ces gens-là. Puis ce matin je me suis permis de saluer de façon plus discrète le député de Matapédia, parce qu'il n'était pas avec nous, ça fait que je suis allée le voir puis je lui disais qu'il m'avait appris à juste être moi, en Chambre. Parce qu'au début, M. le Président, hein, on essaie de «perler» comme il faut, puis faire les choses comme il faut, puis on dirait qu'un coup que tu as annoncé que tu t'en vas tu te dis : Bien, regarde, je n'ai rien à perdre, puis, les gens de Mille-Îles, c'est cette Francine-là qu'ils connaissent, donc j'ai décidé de la laisser être. Et je l'ai remercié parce qu'il m'a appris cette grande leçon là. Il ne change pas, il reste pareil, quand il se lève puis il prend la parole, que ce soit en période de questions, et quel que soit le rôle qu'il a occupé, parce qu'il en a eu quelques-uns.

Juste avant de me lever, M. le Président, j'ai enlevé cette chose qu'on met avec beaucoup de précautions puis qu'on garde ici, en Chambre. Donc, pour les gens qui me voient, moi, je l'ai enlevé pour parler. Le président est isolé sur un trône, donc il n'est pas obligé de le porter, mais tous mes collègues dans cette salle sont obligés de le porter. Puis, je vous le dis, on est bien plus loin qu'au restaurant où j'étais, mardi soir, avec une collègue. Donc, la précaution est de mise.

M. le Président, en 2018, on a été élus, et les 125 députés qui rentraient en Chambre puis qui faisaient leur assermentation ne savaient pas ce qui les attendait. Puis un an plus tard, un an et demi plus tard, nos vies ont basculé. En 12 ans, je n'avais jamais vu ça. Et pourtant j'en ai vécu, des choses, du haut de mon grand âge. J'avais connu, vous vous souvenez, Hydro-Québec et le moment où on a eu le grand verglas. J'avais vu la grande grippe, où on a vacciné tous les aînés puis, après ça, on a continué à les vacciner année après année. J'ai vu des moments difficiles pour la société, j'ai vu des questionnements qu'on a faits ici, mais je n'avais jamais vécu une pandémie. Je ne souhaite pas le revivre non plus. Je ne pense pas que c'était un moment intéressant, mais je ne l'avais jamais vécu.

Et, au moment où c'est arrivé, M. le Président, je vous le dis, j'ai applaudi le fait que le premier ministre parlait aux Québécois à tous les jours. J'étais une groupie, j'ouvrais la télé puis j'attendais. Je suis une élue, vous me direz, peut-être parce que j'avais un intérêt, vous me direz, peut-être parce qu'il fallait que je transmette l'information aux gens qui appelaient au bureau puis qui ne savaient pas trop ce qui se passait, mais je trouvais qu'on était... puis là mon verbe est vraiment bien prononcé, parce qu'on est 125 députés, je trouvais qu'on était responsables, je trouvais qu'on informait bien la population puis qu'on prenait notre responsabilité collective pour dire : On a quelqu'un qui est en titre pour l'Assemblée nationale, on a un premier ministre, il s'assoit puis il informe la population. J'ai apprécié. Tout le long que ça n'a pas été politisé, j'ai apprécié, puis, je vous le dis, ça a été un bon moment.

Vous le savez, on a fermé l'Assemblée nationale, on a fermé des écoles, on a fermé des commerces. On a dit aux gens, avec beaucoup d'assurance et de bonne volonté : Il y a quelques gestes que vous pouvez poser personnellement — et ça, c'est avant le vaccin, là — qui peut vous protéger, hein, on lave ses mains, on met un masque, on garde la distanciation. Je me souviens d'avoir fait la ligne au IGA proche de chez nous avec une distanciation pour pouvoir aller faire mon épicerie. Personnellement, je ne mettais pas de gants, mais j'ai vu des gens avec des gants. J'ai vu la préposée avec le pouet-pouet pour être sûre qu'on mettait un liquide sanitaire sur nos mains pour protéger non seulement les gens qui rentraient, mais les choses qui étaient à l'intérieur. Et tout ça s'est fait de façon naturelle. Pas sans heurt, hein? Il y a des gens qui étaient sceptiques, qui sont sceptiques puis qui vont rester sceptiques. J'ai des collègues qui l'ont moins facile que moi, à Laval, pour convaincre les gens qu'il faut qu'ils soient prudents puis que ce virus-là, il ne fait pas juste couler ton nez, il peut amener jusqu'à la mort ta mère, ta grand-mère, ton enfant, alors il faut protéger les gens puis il faut que les gens en soient conscients.

Par contre, vous et moi, on sait qu'un sceptique, c'est un sceptique. Je ne pourrai pas le convaincre s'il est convaincu lui-même, je vous dirais, un peu comme un camionneur, en plein milieu d'Ottawa, qui ne sait pas qu'il dérange tout le monde quand il klaxonne à minuit le soir. Un sceptique, c'est un sceptique. Mais on a voulu mettre en place tout un processus qui amenait la population à cette réflexion de se protéger, et le gouvernement a mis en place des mesures pour pouvoir faire en sorte que la population se protège. Et j'ai compris les premiers moments de l'état d'urgence, où on s'est arrêtés, puis on a dit : Il faut mettre en place des gestes, il faut faire en sorte qu'on décide. Puis il y avait la cellule de crise, puis il y avait tous ces gens-là qui s'arrêtaient au quotidien, puis j'ai compris que l'immeuble où siège le premier ministre était un immeuble qui était protégé et que les gens qui étaient à l'intérieur travaillaient à tous les jours pour prendre les meilleures décisions pour amener notre population dans un état sécuritaire, parce que le virus était, à ce moment-là, quelque chose d'abominable.

Ça fait quelques périodes de questions qu'on passe. On n'est pas toujours chics, à la période de questions, mais les questions se posent parce qu'il est arrivé des choses, puis on se questionne, puis on veut avoir une résultante face à ça. Je mets ça de côté parce que ce n'est pas là que je veux aller. Je veux vraiment aller dans le principe où, au départ de cette pandémie, on avait une volonté de poursuivre, d'adhérer, puis de protéger la population. Et là-dessus, je n'ai aucun doute.

Où j'ai commencé à avoir un petit peu de problématique, c'est quand, là, on a commencé à se parler un peu plus puis poser un peu plus de questions. Parce que vous avez compris que, quand on a fermé l'Assemblée nationale, on n'en posait plus, de questions. Les chefs se parlaient, puis je sais que le premier ministre prenait contact avec les chefs de chaque parti, puis il y avait des discussions qui se faisaient parce qu'on n'était pas ici, puis la démocratie du Québec, c'est 125 députés. Ce n'est pas une personne, ce n'est pas cinq personnes, c'est 125 personnes. Mais on avait acquiescé au fait qu'il fallait qu'on se parle plus... j'allais dire discrètement, mais avec un moins grand nombre parce qu'il fallait faire avancer les choses, et être ensemble, c'était difficile. Je ne vous parlerai pas de la difficulté de faire des réunions par Teams, vous l'avez sûrement connu, la fameuse phrase, je dis tout le temps, c'est la phrase 2021, «ouvre ton micro», ou, l'autre phrase, «ferme ton micro», c'est les deux phrases les plus populaires que j'ai entendues en 2021, parce que tout se faisait un peu par ordinateurs et par écrans.

• (15 heures) •

Mais l'état d'urgence nous a permis de faire des choses, et de la façon que ça fonctionnait... Parce que les gens qui nous écoutent, des fois, ils mélangent l'aspect sanitaire puis l'état d'urgence. L'état d'urgence, c'était vraiment une volonté du Conseil des ministres, avec un plus petit groupe, de faire en sorte que les décisions se prennent et s'acheminent sans être obligés de faire des appels d'offres, de prendre le plus bas soumissionnaire, de regarder correctement l'ensemble des contrats. Il fallait que ça aille plus vite, parce que le virus, lui, il n'attend pas qu'on passe un décret, il n'attend pas qu'on prenne une décision à l'Assemblée nationale. Donc, les choses se sont mises en place, puis on a suivi la parade, parce qu'on y croyait. Je vous le dis, M. le Président, on a voulu adhérer à cette volonté-là.

Le début, c'était mars 2020, 2020. On est en mars 2022. Ça fait un petit bout, là. Le virus nous a joué un tour, hein? Il s'est fait des amis, il a trouvé un variant, il y a des choses différentes qui sont arrivées, mais on est revenus. L'Assemblée nationale a été fermée, puis on est revenus. On est revenus ensemble; en premier, en plus petit nombre, on n'était pas tous là en même temps. Les calculs avaient été faits, les gens, les leaders s'étaient entendus, puis les choses se sont faites correctement pour qu'il y ait de l'espace entre nous. Je me souviens, M. le Président, la dernière fois que je me suis levée, j'avais des plexiglas qui me contournaient puis qui faisaient en sorte que, quand je parlais à ma voisine, je ne savais pas trop s'il fallait que je parle un peu par là ou par là pour passer le plexiglas, pour qu'elle comprenne bien. Puis on gardait notre masque même quand on prenait la parole.

Les décrets se succédaient à tous les 10 jours. Puis le décret, bien, il ne se prend pas par l'ensemble de l'Assemblée nationale, il se prend par le Conseil des ministres, puis le Conseil des ministres, bien, c'est 125 députés concentrés en à peu près 25 ou 27 ministres. Je n'ai pas le décompte en tête, mais ça ressemble à ça. La confiance qu'on fait aux ministres, elle est toujours là, dans le sens où on pense qu'ils prennent les meilleures décisions, mais le temps fait que, quelquefois, on reprend les mêmes décisions en ne questionnant pas trop ou en questionnant moins puis en se disant : Bien oui, le décret de l'état d'urgence est nécessaire, puis c'est beaucoup moins compliqué, parce que je peux aller beaucoup plus vite dans plein de dossiers. Est-il utile de toujours aller vite dans plein de dossiers? La réponse, c'est non. Puis je n'ai pas été élue pour permettre juste à un petit groupe de prendre des décisions par rapport à l'ensemble des citoyens de Mille-Îles, j'ai été élue par les citoyens Mille-Îles pour pouvoir aider, amener leurs réflexions puis échanger par rapport à certaines décisions. Mais, j'aime le répéter en commission, puis vos collègues le savent très bien, M. le Président, je sais compter. S'il y a un gouvernement majoritaire, c'est parce qu'il est majoritaire, donc, que ce soit ici, en Chambre, ou en commission. Je sais compter. Mais j'ai l'opportunité de pouvoir parler au nom de mes citoyens, j'ai l'opportunité de pouvoir émettre une opinion. Alors, sur les projets de loi, comme celui du projet de loi n° 28, bien, cette opportunité-là, elle est accessible.

Puis je vous le dis parce que j'ai entendu la vice-première ministre, il y a quelques semaines, nous accuser un peu de faire du temps les mercredis pour la motion du mercredi parce qu'on revenait tout le temps sur la même question. Et je comprends que c'est tannant, j'ai trois enfants, la même question qui revient tout le temps, c'est vrai que c'est tannant, mais, en même temps, la volonté d'avoir des réponses... bien, quand tu donnes la bonne réponse, tu ne la reposes pas, la question. Moi, c'est clair que si vous me posez une question, puis je vous réponds, directe, franche, avec honnêteté. Si vous la reposez, je vais juger votre audition, mais je ne jugerai pas votre compréhension. De ce fait, bien, si on pose la même question mercredi après mercredi, c'est parce que la réponse n'était pas là.

Ceci dit, il y a aussi tout l'aspect parlementaire. Puis ça, bien, malheureusement, je vais quitter cette Assemblée, puis, malgré qu'on s'engage tous à faire de la politique autrement, ce ne sera pas autrement. Ça va être pareil. Ça veut dire que 45 minutes par jour, pendant la période de questions, il y a des questions qui se posent puis il y a des réponses qui se donnent ou qui ne se donnent pas. Puis, quand on se lève en Chambre, ici, bien, souvent, on porte des accusations ou on dit : Bien, le passé, c'était ça, puis, maintenant, c'est nous, l'avenir. Puis ça ne change pas. J'aimerais ça, par contre, je vous le dis. C'est un souhait que je vous laisse, que ça change pour qu'on puisse au moins se dire les vraies affaires.

Mais je me lève quand même pour dire que moi, je pense que le... puis je dis, «moi, je pense», là, mais vous avez compris que, de notre parti, le projet de loi n° 28 vient bousculer tout ce qu'on comprend de la démocratie, parce que les gens nous disent... les gens, toutes les provinces sauf la nôtre : On n'a pas besoin d'un projet de loi pour enlever l'état d'urgence. On n'en a pas besoin. On peut juste lever l'état d'urgence. Et si, et si, M. le Président, parce qu'on l'a entendu, et si on a besoin d'un projet de loi pour donner des primes, bien, oui, présente, parce qu'autant les gens du CISSS de Laval, autant les gens des CISSS et des CIUSSS de l'ensemble du Québec, du concierge jusqu'au P.D.G., devraient recevoir une lettre de remerciement, devraient recevoir de l'Assemblée nationale un mot qui leur dit : Merci, merci pour les sacrifices, merci pour le temps, merci pour la disponibilité, puis même celle qu'on a forcée, merci du fait où, malgré la journée, vous avez probablement souri à une personne, accompagné une autre personne, vous avez peut-être soupiré une couple de fois, mais, au moins, vous étiez au rendez-vous, puis on n'aurait pas pu s'en sortir, tellement qu'on a fait appel à la population. On a demandé aux gens de se joindre à eux pour pouvoir aider encore plus parce qu'on s'est aperçu qu'il y avait moins de monde en santé que de monde qui vivait dans les villages puis dans les villes du Québec, puis que, quand le nombre d'un dépasse le nombre de l'autre, on tombe dans une problématique. D'ailleurs, on est encore en train d'en parler avec la sixième vague, de comment nos hôpitaux vont être occupés.

Est-ce que les décrets d'urgence puis est-ce que l'état d'urgence sanitaire vient changer ça? Non. Malheureusement, non. Mais est-ce qu'on pourrait avoir des lois ciblées sur les choses qu'on nous dit qu'on ne peut pas faire si on n'a pas cette loi-là? La réponse, c'est oui. Et ce serait probablement plus intéressant, puisqu'on pourrait cibler plus précisément. Moi, si je m'assois avec le ministre de l'Informatique puis que je lui parle de transports... Je ne devrais pas faire cet exemple-là parce que c'est sûr que, si je lui parle de transports, il va faire un lien puis on va passer à autre chose. Mais mettons que je m'assois avec lui puis on parle d'éducation, bien, on va parler d'éducation des enfants, de ceux qu'on connaît, de l'expérience qu'on a. Mais on n'ira pas jusque dans le fond de l'expérience ministérielle parce que c'est un ministre d'un département et non de l'autre. Il peut me donner de l'information qu'il a été chercher chez son collègue, mais sans plus.

Alors, si le ministre de la Santé a besoin d'un projet de loi pour les primes, bien, qu'il fasse un projet de loi pour les primes. Parce que, dans le projet de loi n° 28, c'est un peu noyé dans des bien belles phrases, qui veulent juste dire qu'il a juste besoin d'étirer l'état d'urgence jusqu'en décembre 2022. Pourquoi ça m'achale, décembre 2022? Bien, parce qu'il y a des élections, puis je n'aurai pas ma face sur le poteau. Puis les sondages, aujourd'hui, vous font une belle jambe, M. le Président, parce que les sondages, ils disent ce qu'ils disent, mais ce n'est pas parce que vous pensez être au pouvoir que ça vous donne le droit de prendre des lois qui vont vous donner des pouvoirs après les élections. Attendez d'être élus pour vous en donner, d'autres pouvoirs.

Ceci dit, le danger, c'est que les vagues ne sont pas finies. Puis, si on ne fait pas les choses correctement, bien, on va juste se ramasser, d'un décret à l'autre, à renouveler sans réfléchir, en disant : Ah! bien oui, c'est ça que ça prend, puis on ne fera pas de débat là-dessus, puis on ne posera pas trop de questions parce que ce n'est pas trop bon. Alors, M. le Président, je veux vous dire que, moi, la période de vaccination, j'y crois. Je vous le dis parce que je pense qu'il faut le répéter, parce qu'on a encore des gens qui sont sceptiques par rapport à ça. Puis, à chaque fois qu'on va me dire qu'il faut que je porte un masque, je vais le porter. J'ai juste peur que les gens qui nous filment ici, à l'Assemblée nationale, me chicanent parce que des fois, rendue dans le garage souterrain, je ne le porte pas tout le temps, parce que, là, j'en ai plein le pompon, de l'avoir, parce que j'ai marché tout... puis, rendue là, des fois, je l'enlève, mais je suis toute seule avec un paquet de chars, ça fait que je n'ai pas trop peur.

• (15 h 10) •

Je crois que le passeport vaccinal a eu lieu d'être, mais, maintenant, les gens sont rassurés. Les gens sont vaccinés, la plupart. Donc, le passeport vaccinal a fait son temps, puis on est passé à autre chose. Mais on nous dit : Ça se peut qu'il revienne, puis je ne suis pas mal à l'aise avec ça non plus. Par contre, M. le Président, quand on regarde la Loi visant à mettre fin à l'état d'urgence, quand on entend les gens qui sont venus en commission, quand on regarde que c'est pour mettre en place, encore, un décret puis un arrêté par rapport à tout ce qu'on peut faire, puis à tout ce qu'on doit faire, c'est quand même complexe. Et je crois sincèrement que ce n'est pas par un biais de projet de loi qui va jusqu'en décembre 2022 que ça va nous aider.

Avant d'arrêter de vous jaser, M. le Président, parce que je dois vous avouer que vous avez toujours une bonne écoute, je me permets de vous dire que je suis très mal à l'aise puis que, probablement, comme le disait mon collègue de Vimont, nous allons voter contre. Par contre, j'espère sincèrement que la semaine de relâche que nous aurons va nous faire du bien, va nous reposer, va faire en sorte qu'on passera peut-être une Pâques différente, encore cette année, c'est-à-dire aller voir la famille mais pas tous ensemble, peut-être par petits groupes. Mais le repos va nécessairement faire du bien. Puis, après la pluie, le beau temps. Alors, au plaisir, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. D'autres interventions? Mme la députée d'Acadie.

Mme Christine St-Pierre

Mme St-Pierre : Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de prendre la parole aujourd'hui relativement à ce projet de loi n° 28, projet de loi qui est très important, qui a été discuté lors de consultations à l'Assemblée... pardon, en commission parlementaire. Il y a des pour, il y a des contre. On va parler des personnes qui sont venues dire à quel point ce projet de loi là n'est pas nécessaire et qu'il va trop loin.

Mais, avant de commencer mon exposé, M. le Président, je veux un peu parler du fait que je vais bientôt quitter la vie politique active. Je ne pense pas que la politique va me quitter, mais je vais quitter la vie politique active. Et j'aurai eu, pendant ces 15 ans, de très, très belles images qui vont me revenir en tête pendant... Lorsque je fais... Je penserai à ces années exceptionnelles, ces années que j'ai beaucoup aimées, puis les personnes que j'ai rencontrées, que j'ai beaucoup aimées. Mais il y a des images moins belles qui vont me revenir en tête, M. le Président. Et l'une de ces images, c'est celle du vote de ce matin sur la motion qui demandait une enquête publique.

Le gouvernement, on le sait, est contre la tenue de cette enquête publique. De notre côté, nous sommes en faveur de la tenue de cette enquête publique. Je pense que c'est bien connu. Le gouvernement, on le sait, est contre. Très bien. Le gouvernement pouvait voter contre la motion ce matin. Parfait. Le gouvernement a la majorité. Donc, bien entendu, la motion allait être battue. Mais, lorsque j'ai vu, M. le Président, les députés se lever et applaudir deux ministres responsables, moi, là, je n'en suis pas revenue. M. le premier ministre a dit cette semaine, à la suite de la victoire dans Marie-Victorin, qu'il fallait rester humble. Je n'ai pas vu d'humilité, là. J'ai vu, M. le Président, quelque chose que je n'ai pas aimé, parce que la responsabilité ministérielle, c'est majeur. La responsabilité ministérielle, ça fait partie de notre système. Un ministre est responsable jusqu'au bout puis un ministre ne peut pas dire : Je ne le savais pas, puis les autres s'en occupaient, puis, parce que les autres s'en occupaient, bien, je suis allé me recoucher puis j'ai dormi. Un ministre ne peut pas dire ça, M. le Président.

Et je me mets dans la peau des personnes, des familles qui ont perdu des proches...

Des voix : ...

Mme St-Pierre : J'aimerais ça qu'on m'écoute, s'il vous plaît, M. le Président. Puis, si on ne veut pas m'écouter, bien, on peut regarder... ils peuvent regarder leurs iPad, leurs téléphones. Moi, j'ai la parole, là.

Le Vice-Président (M. Picard) : Vous pouvez continuer, là.

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Picard) : S'il vous plaît! Continuez, allez-y.

Mme St-Pierre : M. le Président, je me mets dans la peau des familles des victimes qui ont vu ça ce matin. Moi, là, si mon père ou ma mère étaient morts de cette manière-là, là, puis que j'aurais vu ça ce matin, là, j'aurais été complètement dégoûtée. Puis pourtant je ne doute pas... Ce sont des bonnes personnes, là. Il y en a une qui n'a plus le droit de parler parce qu'elle a perdu sa job de ministre, puis l'autre a le droit de parler, mais elle, elle dira : Ça débordait de partout. Puis on nous a dit que c'était beau, beau, beau puis c'était correct. C'était beau, beau, beau.

Le 29 mars 2020, la cheffe de cabinet de la ministre des Aînés reçoit un courriel à 20 heures du soir. Et c'est marqué urgent, là. Ça ne va pas bien à Herron. Passé minuit, vers 1 heure, elle écrit à sa ministre, cinq heures plus tard. Qu'est-ce qu'elle fait, la cheffe de cabinet, entre 20 heures et 1 heure du matin? À qui elle parle? Elle parle à deux autres collègues, chefs de cabinet aussi. Et ces trois chefs de cabinet là ne préviennent jamais le chef de cabinet du premier ministre, n'entrent jamais en contact avec le chef de cabinet du premier ministre, n'informent pas le cabinet du premier ministre de ce qui se passe à Herron. M. le Président, c'est impossible, impossible parce que l'ordre de marche d'un chef de cabinet, c'est de parler le plus rapidement possible, lorsqu'il arrive une situation d'urgence, de parler le plus rapidement possible au chef de cabinet du premier ministre. C'est ça, le travail d'un chef de cabinet. Et là on nous dit : Bien, la directrice du CIUSSS a dit : On a pris la chose en main, puis c'est bien correct. Ça n'a pas de bon sens, M. le Président. C'est incompréhensible.

Et je reviens à cette image de ce matin. C'était déplacé, d'applaudir lors de cette motion, c'était déplacé, puis, moi, là, ça va me rester, là, gravé dans la mémoire longtemps. J'ai beaucoup de respect pour mes collègues, puis hier on a eu un moment où on a célébré dans la transpartisanerie notre travail comme députés. J'ai beaucoup de respect pour mes collègues. Mais il y a, à un moment donné, une ligne qu'il ne faut pas dépasser. Puis ce matin, là, je vais vous le dire, M. le Président, j'ai vu ces images-là tourner en boucle, là, sur les médias sociaux, puis je pense qu'elles vont tourner en boucle très longtemps, parce que la population ne le prendra pas. La population veut une enquête publique. Je sais que le gouvernement veut mettre le couvercle sur tout ça, je sais que le gouvernement veut passer à autre chose. Je le sais, le gouvernement veut qu'on parle d'autre chose, mais on ne peut pas oublier ça.

On a déclenché une enquête publique, M. le Président, pour un viaduc qui est tombé, le viaduc de la Concorde, qui est tombé il y a quelques années. Il y a eu une enquête publique. On a des morts par dizaines et par milliers, et on ne veut pas déclencher d'enquête publique. Les personnes ont le droit de savoir, les familles ont le droit de savoir. Les familles ont le droit qu'on aille jusqu'au bout de ce qu'il s'est passé pendant cette période-là. Elles ont besoin de ça pour guérir puis pour se dire : Bien, mon papa puis ma maman, ils ne sont pas morts pour rien, mon oncle, ma tante ne sont pas morts pour rien. Puis on va avoir la vérité, puis on verra qu'est-ce qui est... comment les choses se sont passées. Mais la responsabilité ministérielle, elle demeure. Puis je pense que si on veut que les gens croient à notre système, croient notre parlementarisme, croient au gouvernement, il faut comprendre ce que ça veut dire, la responsabilité ministérielle.

Ce projet de loi, M. le Président, il va trop loin parce que les experts ont dit : On n'a pas besoin d'un projet de loi pour faire ce que le gouvernement veut faire. Il y a une juriste qui a parlé d'un bazooka en matière démocratique. C'est gros, là. Ce n'est pas l'opposition officielle qui vient dire ça, là, c'est une juriste qui vient dire à la commission parlementaire : «Jugeant déraisonnable le maintien de l'état d'urgence sanitaire, des experts en droit demandent [à ce] que le gouvernement Legault mette fin à cette mesure au Québec, deux ans jour pour jour après son entrée en vigueur.

«[...]"C'est un bazooka en matière démocratique", déplore Louis-Philippe Lampron, professeur à la Faculté de droit de l'Université Laval et spécialiste [en] droit constitutionnel. Bien qu'il croie que la mesure avait sa raison d'être au début de la crise — nous aussi, là, il n'y a pas de problème avec ça — son maintien deux ans plus tard est difficilement justifiable.»

• (15 h 20) •

Cette semaine, on a adopté le 108e décret sans jamais venir discuter à l'Assemblée nationale, devant les parlementaires, de la raison d'être de ces décrets. Puis les mesures sanitaires, je les ai suivies à la lettre puis je suis convaincue qu'il faut continuer de les suivre à la lettre, mais je ne suis pas, là, de la catégorie qui dit qu'il n'y a rien qui s'est passé, là. Mais poursuivre jusqu'en décembre... Les droits des travailleurs, on ne discutera pas des droits des travailleurs, puis on va dire : Vous allez faire ci, vous allez faire ça, puis on va vous imposer ci, puis on va vous imposer ça, puis on va vous imposer vos conditions de travail. Je pense que ça ne va pas dans le sens, là, du droit du travail. Ensuite, des contrats qui pourront être poursuivis pendant cinq ans sans appel d'offres, c'est fort en ketchup, c'est trop fort.

Il faut que le gouvernement comprenne que ce projet de loi là n'a pas sa place dans une société libre et démocratique. Quand des juristes parlent de bazooka... C'est un gros mot, bazooka, là, puis le peuple québécois a droit à avoir une situation claire qui va faire en sorte qu'il va comprendre ce qu'il se passe et que ça ne soit pas décrété continuellement par un conseil des ministres, qui disent : Bon, bien, O.K., aujourd'hui, on va prendre tel décret, on va en prendre un autre, puis on va prendre un autre, puis on va en prendre un autre. Moi, je pense que c'est inconcevable.

Puis on parle de l'argent... On parle de la santé, bien sûr, mais on en parle aussi, de l'argent des contribuables. Il y a eu des milliards, et des milliards, et des milliards de dollars de contrats qui ont été donnés de gré à gré pendant la pandémie. Puis on le comprenait, l'état d'urgence, puis vous ne nous avez pas vu critiquer. On n'a pas chiqué de la guenille, pas du tout. On a dit : Il faut mettre l'épaule à la roue. Le premier ministre rencontrait les chefs, régulièrement, des formations politiques. Je pense qu'on a été impeccables, puis on est intelligents, puis on est capables de comprendre, on est capables de comprendre qu'il faut, à un certain moment donné, bien sûr, poser des gestes. Mais là pourquoi on veut à tout prix ce projet de loi? Parce qu'il s'en vient des élections, puis on va prendre pour acquis qu'on va être encore au pouvoir au retour. Moi, je me garderais une petite gêne parce que j'ai vu ça, moi, dans ma carrière politique, des campagnes électorales qui virent bout pour bout en plein milieu d'une campagne. Je l'ai vu puis je peux vous donner des exemples. Et je pense qu'il faut être très prudent, très, très, très prudent lorsqu'on prend pour acquis qu'on va être là, l'autre côté de l'élection. Ce sera au peuple de décider. Puis moi, je crois à l'intelligence des électeurs, l'intelligence des Québécois. Mais ça, là, M. le Président, ça ne passe pas.

Je vous parlais des droits des travailleurs. Ici, l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux, qui a dit en commission parlementaire : «À l'aube d'une probable sixième vague, le naturel qui a été chassé revient au galop. Tel que présenté, le projet de loi n° 28 octroie au gouvernement Legault tous les pouvoirs pour imposer unilatéralement les conditions de travail à tous les travailleurs·[et toutes les travailleuses] du réseau de la santé [...] jusqu'au 31 décembre 2022[...]. Il s'exempte ainsi de son obligation de négocier avec leurs représentants syndicaux et peut ignorer en toute impunité le Code du travail. L'Alliance [...] considère que cette loi constitue aussi une atteinte directe au droit d'association, qui est protégé par la Charte des droits et libertés...» La Charte des droits et libertés protège le droit d'association de la personne, des droits et liberté de la personne. «[La loi] n° 28 crée donc un précédent inadmissible.»

Est-ce qu'on va avoir encore... Est-ce qu'on va assister encore à une autre clause dérogatoire, là? Parce qu'on est en train d'en prendre l'habitude, des clauses dérogatoires, dans ce gouvernement.

«Si le gouvernement veut véritablement mettre en place des mesures transitoires, il se doit d'assumer ses responsabilités en tant qu'employeur et de s'asseoir à une table spéciale de négociation avec l'Alliance [...] et les autres organisations syndicales...» C'est ce que les syndicats... l'Alliance du personnel, dis-je, professionnel et technique est venu dire en commission parlementaire, il faut négocier de bonne foi.

La Fédération interprofessionnelle de la santé, ils sont sur la même page, on parle de quand même beaucoup, beaucoup de personnes : «En décrétant l'état d'urgence sanitaire à 106 reprises — nous sommes rendus à 108 depuis le 13 mars 2020 — le gouvernement s'est donné tous les pouvoirs et en a abusé en brimant les droits des [travailleurs et des] travailleuses et en contournant leur convention collective. Avec ce projet de loi, le gouvernement souhaite ni plus ni moins conserver le droit de décider seul des mesures spéciales qu'il entend maintenir jusqu'au 31 décembre 2022, sans devoir rien justifier à quiconque.

«[...]Le gouvernement a utilisé le prétexte de l'urgence sanitaire depuis deux ans pour imposer unilatéralement aux professionnels en soins un nombre incalculable d'arrêtés et de décrets. Il a même eu l'odieux d'accorder 1 milliard de dollars en mesures incitatives pour le personnel du réseau, et ce, sans négociation, alors que la convention collective venait d'être signée, et qu'il affirmait haut et fort ne pas pouvoir offrir davantage. Cette façon de faire — a dit le syndicat — est inacceptable.

«[...]La fin de l'état d'urgence sanitaire devrait normalement conduire à la fin de l'application des mesures prises par arrêtés ministériels [qui modifient] les conditions de travail, à moins que le gouvernement et les syndicats conviennent d'une entente [en ce sens] à l'effet contraire.»

Donc, c'est important aussi, on parlait ce matin aussi du respect et comment on devait dire à quel point nos travailleurs et travailleuses de la santé, et tout le personnel, ces gens-là avaient été impeccables, et tous les fonctionnaires également, tout le monde a été impeccable, mais il faut aussi leur donner, leur donner ce à quoi ils ont droit, c'est-à-dire qu'on discute, qu'on s'assoie, qu'on fasse des ententes avec les syndicats pour arriver à des à des solutions si des problèmes se présentent. M. le Président, ce n'est pas compliqué, il faut qu'il y ait des discussions. C'est le dialogue qui doit s'installer.

Alors, je reviens à Louis-Philippe Lampron, qui nous dit qu'«en période de pandémie ou crise majeure, le gouvernement bénéficie d'une grande marge de manoeuvre pour bien protéger la population et bien protéger le public. Plus l'atteinte aux droits fondamentaux est grande, plus la justification devra être importante.» Donc, il faut justifier qu'on va décider... qu'on va décréter jusqu'en décembre 2022. Il dit : «On n'a pas besoin d'un projet de loi pour mettre fin à l'état d'urgence sanitaire.»

Moi, c'est un peu la question que je me posais lorsque j'ai vu cela, parce que je ne suis pas une juriste, mais je me disais : Si on met... si on décrète l'état d'urgence sanitaire sans projet de loi, pourquoi ça prend un projet de loi pour lever l'état d'urgence sanitaire? Je ne comprenais pas trop. Puis là, bien, on dit : Bien, c'est parce qu'il y a certaines mesures qu'on doit reconduire, et on veut s'assurer qu'on puisse les reconduire sans problème. À chaque conseil des ministres, un décret, on passe par là, puis c'est comme ça qu'on continue.

Mais c'est allé trop loin, selon les juristes, M. le Président. Le p.l. n° 28 vise à maintenir des pouvoirs, des pouvoirs d'état d'urgence. «Il est questionnable que l'Assemblée nationale ait été mise hors jeu pendant deux ans. On est hors des balises», dit maître Lampron. C'est lui qui parle de bazooka, là : «On utilise le bazooka. Au Canada, nous sommes la seule province à avoir maintenu l'état d'urgence pendant tout ce temps. Il est important d'identifier les mesures pour nous assurer de l'indépendance du directeur national de la santé publique.» Et, là aussi, c'est vraiment important, parce qu'on a mis en lumière le fait que de très bonnes personnes... mais, l'indépendance, là, il y a parfois... des fois, on n'avait pas l'impression... on a l'impression que la ligne est mince entre l'indépendance du directeur de la santé publique et... en fait, relativement à l'indépendance du directeur de la santé publique.

• (15 h 30) •

Alors, dans son mémoire, Me Lampron dit : «La COVID-19 n'est plus une menace dont les effets sur la santé de la population ne peuvent être anticipés de manière certaine, nécessitant la prise de mesures immédiates. Il est urgent de mettre fin à la gouvernance par décrets et arrêtés ministériels qu'autorisent ces dispositions extraordinaires de la loi. Le pouvoir de déclarer l'état d'urgence sanitaire est encadré de manière stricte, car il s'agit d'un pouvoir exceptionnel qui ne doit pas être pris à la légère. La déclaration d'état d'urgence n'a jamais été soumise à l'Assemblée nationale pour obtenir son assentiment, comme le veulent la lettre et l'esprit de la Loi sur la santé publique. La lecture des décrets et des arrêtés ministériels démontre de plus qu'il a été utilisé d'une manière parfois excessive et selon une formulation qui ouvre toute grande la porte à des interprétations abusives.» On parle... C'est Me Lampron, là, qui parle, là. C'est vraiment quelqu'un qui est un expert qui s'est penché sur la question.

«Depuis le 13 mars 2020, l'état d'urgence a été renouvelé à plus de 100 fois — on nous parlait de 107 — alors que l'évolution de la pandémie a connu plusieurs mois d'accalmie, sans compter le fait que plus de 82 % de la population a reçu à ce jour au moins deux doses de vaccin. La poursuite de l'état d'urgence n'est plus justifiée», dit-il. Il me reste une minute, alors j'achève. Donc, je vais conclure : «...n'est plus justifiée. Le gouvernement doit y mettre fin dès maintenant. Ces arrêtés ministériels concernent, pour au moins trois d'entre eux, et comme leur nom l'indique, des mesures opérationnelles et de ressources humaines», et on parle du mouvement de personnel. Donc, ces mesures, bien sûr, doivent être analysées autrement que par le projet de loi n° 28.

Alors, je termine là-dessus, M. le Président. Je vous dis que nous avons toujours à coeur de travailler, de collaborer, mais nous avons aussi à coeur les intérêts des Québécois et des Québécoises, les intérêts supérieurs des Québécois et des Québécoises. Et, compte tenu de cela et compte tenu de ce que je viens de vous dire, ce que mes collègues vous disent, M. le Président, nous sommes face à un projet de loi qui est inacceptable et qui va trop loin. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Avant de commencer mon temps, M. le Président, j'aimerais demander consentement à mes collègues de pouvoir déroger à l'article 32 et de faire mon intervention de cette banquette, parce que je ne voulais pas déranger ma collègue dans son allocution. Voilà.

Le Vice-Président (M. Picard) : Il y a consentement.

M. Tanguay : Il y a consentement? Parfait. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Picard) : Allez-y, M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Merci beaucoup. Alors, moi également, il m'était important de m'inscrire dans le débat, aujourd'hui, le débat quant au projet de loi n° 28, loi qui a pour titre, M. le Président, Loi visant à mettre fin à l'état d'urgence sanitaire, mais c'est un titre qui est paradoxal puis qui ne marche pas de pair avec la rédaction même des articles.

Lorsque vous dites, dans un titre, «mettre fin à l'état d'urgence»... Si je vous dis : Je vais mettre fin à quelque chose, bien, vous vous attendez que ce soit dans l'immédiat. Sinon, ce n'est pas réellement mettre fin. Sinon, si je vous dis : On va prolonger ça jusqu'au 31 décembre... Puis, voyez-vous, je ne voulais pas utiliser le mot «prolonger», mais c'est venu de soi, ça a coulé de source, ce n'est pas mettre fin que de prolonger au 31 décembre. Quant à ça, M. le Président, la Loi sur la santé publique, aux articles 118 et suivants, permet au gouvernement, et c'est ce qu'il a fait à 107 reprises jusqu'à maintenant, de renouveler, de 10 jours en 10 jours, l'état d'urgence. Là, il ne renouvelle pas de 10 jours, il ne renouvelle pas de 30 jours. Ils vont renouveler de plusieurs mois, jusqu'au 31 décembre 2022, et c'est excessivement préoccupant.

Puis je vais reprendre la balle au bond de ma collègue de l'Acadie, qui a cité le Pr Lampron. Moi, je vais citer d'abondant, M. le Président, la Pre Martine Valois, professeure agrégée, Faculté de droit de l'Université de Montréal, qui est venue parler de fondements de base, là. C'est fondamental dans nos chartes des droits et libertés, dans notre système démocratique. Nous devons avoir ici, à l'Assemblée nationale, des débats qui sont nécessaires. Puis ce n'est pas uniquement de dire : Ah! bien là, je veux dire, avant, on avait la ministre du Patrimoine, là, les députés de l'opposition, ils veulent avoir la minute de l'opposition puis ils veulent juste s'inscrire dans le débat. Ce n'est pas... On a un travail à faire, M. le Président, de questionner l'action gouvernementale. Puis je vois mon collègue de La Peltrie, en face de moi, qui le faisait lorsque nous étions au gouvernement, questionner... Je le prends au dépourvu. Il n'a jamais fait ça, questionner l'action gouvernementale, lorsqu'il était dans l'opposition, si peu soit-il.

Mais je serais curieux de savoir... Puis je vais prendre un exemple qui vient de notre capitale nationale, la région de Québec. Je serais curieux de savoir... J'aurais aimé ça savoir comment il aurait réagi si, d'aventure, on lui avait dit que 13 milliards de contrats publics ont été octroyés de gré à gré. On sait, le gré à gré, ce n'est pas fondamentalement mal, là, c'est nécessairement mal puis il y a nécessairement collusion ou quoi que ce soit de répréhensible. Mais c'est un système, M. le Président, qui est très, très, très limité quant à ses... Quant à la capacité de contracter de gré à gré, il y a des limites, il y a des plafonds. Là, sur deux ans, c'est 13 milliards.

Pour le bénéfice de mon collègue, je vais lui donner, puis je vois que j'ai d'autres collègues de la Capitale-Nationale qui sont ici, un exemple très tangible... puis les gens qui nous écoutent à la maison. J'aurais aimé le voir, comment il aurait questionné ça, si on lui avait dit qu'aurait été donné en contrats l'équivalent de 35 fois le Centre Vidéotron, qui a coûté, en 2015, 370 millions. Elle n'est quand même pas pire, celle-là. Je pense que c'est une belle image, qui parle beaucoup, 35 centres Vidéotron, 35 fois 370 millions, 13 milliards en deux ans donnés de gré à gré.

Une voix : ...

M. Tanguay : Pardon? Sans club de hockey, M. le Président, d'ailleurs, sans club de hockey, M. le Président, parce que, là, le club de hockey... Mais là, attention, le coup du club de hockey, d'ici au 31 décembre 2022, je pense qu'on va en avoir un puis deux, là. Je pense qu'on va être bons pour transférer les Penguins de Pittsburgh, les Blackhawks de Chicago puis les Rangers de New York, parti comme c'est là, M. le Président. Si on ne fait qu'appliquer une règle de trois, on va aller chercher au moins un 2 milliards, ce qui est à peu près le coût de ces trois clubs-là. Alors, il y en aura un... Évidemment, avec les deux tunnels, ça va bien aller, nos affaires, il y en aura un à Lévis, il y en aura un à Québec, puis il y en aura peut-être un à Portneuf.

Alors, tout ça pour dire, M. le Président, 35 centres Vidéotron ont été donnés dans les deux dernières années, l'équivalent de la valeur de 35 centres Vidéotron en contrats de gré à gré. Wow! Une fois que j'ai dit ça, là, tout le monde a compris à la maison. Ça a-tu de l'allure? Non. Est-ce que ça doit cesser? Oui. Est-ce qu'au départ, lorsque l'état d'urgence a été déclaré, le vendredi 13 mars 2020, lorsque l'état d'urgence a été déclaré, est-ce que c'était justifié? Bien oui, c'était justifié. Il y avait menace imminente. Il y avait une situation tout à fait exceptionnelle, à laquelle on n'était pas préparés, pour laquelle, évidemment, on était bien loin des vaccins, là. Là, c'était, je me rappelle, c'était l'équipement de protection individuelle, les EPI, je pense, si j'ai le bon acronyme. Puis là on a commencé à compter les masques, compter les chemises, compter les blouses, compter... et ainsi de suite, le matériel médical. Là, on le savait, l'état d'urgence... la loi, à ce moment-là, avait un objectif, c'est-à-dire que la loi permettait d'atteindre un objectif dans un état d'urgence. L'état d'urgence requérait que le décret soit pris.

Ce qu'on aurait aimé, évidemment, après ce 10 jours là, ou peut-être une prolongation, mais très rapidement, ça aurait été d'avoir un débat à l'Assemblée nationale. Mais le débat à l'Assemblée nationale, M. le Président, on ne l'a pas eu puis on ne l'a toujours pas eu quant à l'à-propos, quant aux mesures de façon spécifique, quant à la reddition de comptes. Là, j'entends que le premier ministre a dit que d'ici juin — donc on termine nos travaux le 10 juin — il y aura un rapport qui sera déposé à l'Assemblée nationale, mais visiblement, l'Assemblée nationale va arrêter de siéger le 10 juin. On n'aura pas le temps d'en débattre, d'en discuter puis de pouvoir poser des questions sur ce rapport qui, soit dit en passant, M. le Président, ne serait-ce que le chapitre des contrats de gré à gré, 13 milliards, le rapport, là, j'espère qu'ils vont nous l'envoyer en clé USB parce que, le cas échéant, on participerait à la déforestation de la planète.

Alors, en ce sens-là, c'est vous dire le nombre de questions qu'il y a à poser, l'analyse que nous devons faire de façon complète de ce qui a été apporté, de ce qui a été décidé. Puis aujourd'hui, M. le Président, on est dans une situation où, oui, la COVID-19 est encore présente. Je veux dire, il y a encore des cas. Est-ce que nous sommes dans un état comparable au 13 mars 2020? Personne ne peut affirmer qu'on est dans un état comparable au 13 mars 2020. Personne ne peut affirmer qu'on n'est pas plus préparés, qu'on n'est pas à même, ne serait-ce que pour ce qui est des connaissances scientifiques, ne serait-ce que la façon dont le réseau s'est réorganisé et que les services sont offerts et la façon dont évolue le virus, aujourd'hui, on n'est plus du tout, puis ça, c'est un fait bien simple, là, dans une situation comparable au vendredi 13 mars, date d'entrée en vigueur, le lendemain, samedi 14 mars, de l'état d'urgence sanitaire.

Là, ce qu'on nous dit, on exige, l'opposition officielle, que le débat ait lieu. On exige qu'il y ait fin de l'état d'urgence, mais le gouvernement dépose un projet de loi pour le prolonger au-delà des élections générales. Donc, au-delà des élections générales, le gouvernement nous annonce qu'on sera toujours en état d'urgence. Le gouvernement nous annonce ça... puis ça, c'est des juristes éminents qui disent et qui reprennent cette expression-là : Le pouvoir est concentré d'entre les mains de 24, 25 personnes au Conseil des ministres, M. le Président, dans la mesure où ils sont tous présents, quand une décision est prise en vertu de l'état d'urgence. Ça, ce n'est pas normal.

Puis il y a une affaire qui m'a frappé, moi, M. le Président, puis je veux le souligner à double trait. Le Québec, on est une société distincte, le Québec, nous sommes, à l'heure actuelle, on m'informe, la seule province qui est toujours en état d'urgence sanitaire. On est la seule province au Canada, le Québec, qui sommes... nous sommes toujours en état d'urgence sanitaire. C'est un autre élément, quand vous le dites, vous dites : Ah! qu'est-ce que les autres n'ont pas compris puis que nous, on a compris, ou peut-être, qu'est-ce que notre gouvernement n'a pas compris? Comment le gouvernement ne peut-il pas imaginer la suite des choses autrement que de concentrer tous les pouvoirs entre ses mains? Bien, ça a l'air que ça fonctionne en Ontario. Ça a l'air que ça fonctionne en Colombie-Britannique. Ça a l'air que ça fonctionne dans les Maritimes, dans les Prairies, partout ailleurs au Canada, mais au Québec, ils ont absolument besoin...

Puis encore une fois, M. le Président, mon point, il serait bon si, l'état d'urgence, on disait : On va y mettre fin dans une semaine, on va y mettre fin dans trois jours. Mon point sera de dire : Bien là, il n'est pas trop tard, parce que ça a été fait ailleurs. Je ne suis pas en train de dire que, parce que ça a été fait ailleurs, que de facto, tout de suite, on ne doit pas se poser... Non, mais le fardeau de la démonstration doit être fait. Puis, je veux dire, le premier ministre de l'Ontario, là, Doug Ford, il n'a pas une province plus simple à gouverner, moins complexe, 13 millions plus d'habitants, que le premier ministre du Québec a à gouverner, avec sensiblement les mêmes outils, les mêmes réalités, sensiblement les mêmes.

• (15 h 40) •

Alors, en ce sens-là, M. le Président, comment peut-il justifier non seulement que ça ne va pas cesser dans 30 jours, ça ne va pas cesser d'ici au 31 décembre 2022, d'ici même l'autre bord des élections? Nous ferons donc une élection dans un contexte d'état d'urgence sanitaire, alors que ça fera plusieurs mois qu'ailleurs au Canada ça ne sera plus le cas.

Ça, M. le Président, qu'est-ce que ça fait? Ça fait en sorte que le gouvernement conserve l'opportunité... Tantôt, on faisait l'analogie avec le Centre Vidéotron puis la Ligue nationale. Le gouvernement conservera, jusqu'au moins à l'élection, là, le 3 octobre prochain, les pleins pouvoirs pour dépenser et pour octroyer des contrats de gré à gré. Également, les décrets qui sont en vigueur demeureront jusqu'au... Et les contrats de gré à gré, en passant, M. le Président, pour ce qui est de l'approvisionnement, ça ne va pas terminer le 31 décembre 2022. Ils pourront être prolongés pour encore un autre cinq ans. Je ne sais pas où est-ce qu'on va être dans cinq ans, M. le Président, mais il y aura eu une autre élection dans cinq ans. Mais le gouvernement sait déjà que lui, dans cinq ans... Donc, encore plus loin que la prochaine élection, encore plus loin que la deuxième prochaine élection. Le gouvernement nous dit : Rajoutez une autre année l'autre bord de ça, dans deux élections, puis je suis convaincu que nous devrons toujours pouvoir prolonger des contrats de gré à gré, notamment pour l'approvisionnement. Là, les centres Vidéotron, là, on va pouvoir en mettre partout au Québec, octroyés en contrats de gré à gré. Ça ne tient pas la route.

Pour revenir, M. le Président, la juriste Me Martine Valois est venue témoigner lors des consultations particulières, et, dans le mémoire qu'elle a présenté le 6 avril dernier, elle disait... et je la cite, puis je vais vous citer des passages de son mémoire qu'elle nous a déposé. À la page introductive : «Le projet de loi n° 28 — et je la cite — a vocation de prolonger l'état d'urgence sanitaire au 31 décembre 2022, alors que les conditions posées par l'article 118 de la Loi sur la santé publique pour justifier la déclaration d'état d'urgence sanitaire ne sont plus satisfaites.» Et là elle soulève trois éléments importants. Entre autres, elle va citer les auteurs Prémont, Couture Ménard et Brisson relativement au pouvoir de déclarer l'état d'urgence sanitaire, qui est encadré de manière stricte.

Au Québec, c'est les articles 118 à 131 de la Loi sur la santé publique. Notre régime, si vous voulez, constitutionnel québécois, qui est dans un contexte canadien, bien, notre régime constitutionnel québécois, par la loi, fait en sorte, en donnant des pouvoirs extrêmes, extraordinaires au gouvernement, vient... est dirigé par 13 articles de la Loi sur la santé publique. De 118 à 131, c'est 13 articles qui nous gouvernent depuis deux ans, puis là on nous promet que ça va être encore la même chose jusqu'au 31 décembre 2018. Ça, c'est exorbitant de notre démocratie, où les décisions majeures doivent être prises ici, après débat. Et les décisions majeures doivent s'exprimer comment? Doivent s'exprimer par des budgets adoptés, doivent s'exprimer par des lois, discutées, et adoptées, et amendées, et doivent être exprimées également par des règlements qui vont découler d'une loi qui aura été discutée et amendée par tout le monde autour de la table. C'est ça, notre démocratie.

Les pouvoirs sont tellement exorbitants qu'ils peuvent réécrire la loi, peuvent donner des contrats, évidemment, de gré à gré, contrairement à l'esprit et à la lettre de la loi sur les contrats publics, Loi sur les contrats des organismes publics. Contrairement à la lettre et l'esprit de cette loi-là, des contrats sont donnés de gré à gré. Ça, c'est une chose, mais également plein de décisions sont prises qui viennent changer les rapports individuels et collectifs, notamment relativement aux relations que le gouvernement entretient avec les syndicats. C'est exorbitant et ce n'est pas justifié. Évidemment, vous avez compris que, dans ce contexte-là, on ne peut que le déplorer, que de réaffirmer encore haut et fort qu'on va voter contre la loi n° 21.

Et, pour poursuivre, là, la citation de Me Valois disait donc... Tantôt, j'ai dit, elle citait les auteurs Prémont, Couture Ménard et Brisson, qui disaient ce qui suit : «Sous la Loi sur la santé publique — la LSP — trois conditions essentielles doivent être réunies pour justifier la déclaration de l'état d'urgence sanitaire. Il doit y avoir menace grave à la santé de la population, cette menace doit être réelle et imminente, et [trois] elle doit exiger l'application immédiate de mesures de protection prévues à l'article 123...» Elle dira plus loin, je la cite, Me Martine Valois : «Depuis la déclaration de l'état d'urgence sanitaire du 13 mars 2020, le pouvoir exceptionnel prévu à l'alinéa 8° de la Loi sur la santé publique est devenu la source principale des décisions du gouvernement et du ministre de la Santé et des Services sociaux. La lecture des décrets et des arrêtés ministériels démontre de plus qu'il a été utilisé d'une manière parfois excessive et selon une formulation qui ouvre toute grande la porte à des interprétations abusives.

«Or, depuis le 13 mars 2020, l'état d'urgence a été renouvelé à plus de 100 reprises — on le sait, c'est 107 reprises, au moment où on se parle — alors que l'évolution de la pandémie a connu plusieurs mois d'accalmie, sans compter le fait que plus de 82 % de la population a reçu à ce jour au moins deux doses de vaccins contre la COVID-19.

«Considérant ce qui précède, la poursuite de l'état d'urgence sanitaire n'est plus justifiée et le gouvernement doit y mettre fin dès maintenant.» Fin de la citation.

M. le Président, c'est une avocate émérite, professeure agrégée, Faculté de droit de l'Université de Montréal. Très rarement, vous allez voir, dans une opinion juridique, une avocate ou un avocat, lorsqu'il rend une opinion juridique, être de façon aussi catégorique, aussi claire quand il s'agit d'appliquer les faits à la loi. En ce sens-là, la Pre Valois, Me Valois, qui est une autorité en la matière, vient carrément affirmer : «Considérant ce qui précède, la poursuite de l'état d'urgence sanitaire n'est plus justifiée et le gouvernement doit y mettre fin dès maintenant.»

Quand elle dit ça, M. le Président, c'est sans équivoque et, encore une fois, c'est prenant en compte qu'il y a toujours une réserve. Il faut toujours y aller avec l'interprétation. Mais les faits sont tellement clairs, et limpides, et évidents pour elle, contrairement au gouvernement, qu'il n'y a aucune place à l'interprétation. L'état d'urgence devrait être levé parce qu'il n'est pas justifié en vertu de la Loi sur la santé publique. Alors, ça, c'est une affirmation très forte, qui aurait dû faire réfléchir bien davantage, notamment, le ministre de la Justice, qui, lui, connaît bien ces approches, ces analyses, et qui ressort cette déclaration-là de façon on ne peut plus limpide.

Également, autre élément, autre écueil soulevé par Me Valois, le respect de la primauté du pouvoir législatif et de l'Assemblée des élus. À ce chapitre, on souligne que «le rôle du législatif est de prendre des décisions et d'énoncer des politiques; le rôle de l'exécutif est d'administrer et d'appliquer ces politiques». Fin de la citation. Là, M. le Président, il revient non seulement à l'exécutif, au gouvernement caquiste, d'administrer et d'appliquer ces politiques, mais il lui revient lui-même d'écrire en amont lesdites politiques, de prendre les décisions et d'énoncer lesdites politiques. Alors, on peut voir que le rôle ici de l'Assemblée nationale, débattre, adopter la loi qui va évidemment encadrer le pouvoir réglementaire et, par la suite, les directives qui vont en découler, bien, nous sommes pieds et poings liés et nous ne pouvons pas faire notre travail.

13 mars 2020, ça tient la route. Ça fait plusieurs mois que ça ne tient plus la route, et là on dépose un projet de loi voulant mettre fin, mais on prolonge jusqu'au 31 décembre 2022. Non seulement ça ne tient plus la route, M. le Président, mais c'est un abus de pouvoir, un abus de pouvoir en vertu de la Loi sur la santé publique, et ça, il faut le dénoncer. C'est notre rôle de le dénoncer. Évidemment, le gouvernement va utiliser sa majorité, probablement, pour faire adopter la loi, indépendamment de ce qu'on pourrait dire. Mais ça, M. le Président, on ne peut pas... on ne pourra pas dire... Puis je crois que l'histoire sera quand même assez sévère, puis on saura noter la date aujourd'hui, à l'endroit du gouvernement, d'avoir conservé pendant tout ce temps, deux ans et demi, à ce moment-là, au 31 décembre 2022, tous ces pouvoirs qui ne sont pas justifiés et qui fait du Québec, même au moment où on se parle, la seule province au Canada qui est encore sous un régime d'état d'urgence sanitaire.

Toujours Me Valois, et je la cite : «Depuis la déclaration d'état d'urgence le 13 mars 2020, un groupe réduit de membres du Conseil exécutif, y compris le ministre de la Santé et des Services sociaux, agissant parfois seul, a pris des mesures exceptionnelles qui n'ont jamais obtenu l'assentiment de l'Assemblée nationale ni même été débattues devant cette Assemblée. Ce faisant, le gouvernement a permis que soit renversée la hiérarchie des normes qui gouvernent notre démocratie.»

Quand vous en êtes rendu, M. le Président, à dire que vous avez renversé, durant tout ce temps, la hiérarchie des normes de notre système démocratique, je veux dire, une fois que vous avez dit ça, là, ça ne peut qu'être non seulement un immense drapeau rouge, ça, c'est clair, mais c'est un péril qui fait en sorte que les décisions qui sont prises ne sont pas débattues, ne sont pas analysées.

• (15 h 50) •

On ne peut même pas, après coup des décisions, M. le Président, faire une reddition de comptes complète et questionner l'à-propos. 13 milliards de contrats de gré à gré, les droits et libertés de tout un chacun, notamment en matière du travail, sont impactés par ça de façon plus ou moins directe ou indirecte, et, en ce sens-là, on ne peut que déplorer ça, ce qui faisait dire... Encore une fois, ici, j'ai un texte du 15 mars, Journal de Montréal, Antoine Robitaille, sous le titre État d'urgence sanitaire : assez d'exagérations. «L'état d'urgence sanitaire a fait son temps.» On pouvait y lire : «Je ne nie pas que cette loi pose problème et mérite un examen lucide. Quand elle fut adoptée, personne n'avait prévu qu'un état d'urgence "puisse durer aussi longtemps que ce que nous vivons actuellement", dixit la Cour d'appel dans un jugement, fin janvier.

«Le gouvernement a aussi donné l'impression que sa bureaucratie et lui avaient pris goût à ces mesures exceptionnelles.

«Les réponses du premier ministre justifiant l'état d'urgence, récemment, étaient peu convaincantes. A-t-on vraiment [...] besoin, en 2022, de la version absolue de l'état d'urgence pour "payer des primes" dans le système de santé, embaucher des vaccinateurs? Douteux.» C'est ce qu'écrivait notamment Antoine Robitaille le 15 mars dernier.

Alors, je pense que le gouvernement doit se rendre à l'évidence, il ne peut plus gouverner, deux ans après, comme il l'a fait, puis c'était justifié à l'époque, mais ça ne l'est plus maintenant, le 13 mars. Il ne peut plus gouverner de cette façon-là. La démocratie l'exige. Le pouvoir qui lui a été remis, suite aux élections, l'exige. C'est un fondement essentiel de notre démocratie. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député de LaFontaine. D'autres interventions? Je cède la parole à M. le député de Mont-Royal—Outremont.

M. Pierre Arcand

M. Arcand : Merci beaucoup, M. le Président. À mon tour de prendre la parole sur le projet de loi n° 28 qui est devant nous. Et évidemment c'est un projet de loi qui est un peu particulier dans la mesure où ce projet de loi, évidemment, est particulièrement électoraliste, entre guillemets. C'est un projet de loi qui... on se pose, encore une fois, beaucoup de questions sur le projet de loi. Et cette fois-ci, ce qu'il est très important de mentionner, c'est que je ne pense pas qu'on va devoir accuser les oppositions, dans ce dossier-là, de quoi que ce soit.

Je vous rappelle, le 12 mars, avant qu'on arrête l'Assemblée nationale, il y avait une période de questions à l'Assemblée nationale, et je posais les questions au premier ministre, à ce moment-là. Et essentiellement ce que je lui demandais, c'était de nous dire... de faire le point sur la situation qui prévalait à ce moment-là, le 12 mars, et je lui offrais toute la collaboration de l'opposition. La réponse du premier ministre, à ce moment-là, il a dit essentiellement la chose suivante, il a dit : Écoutez, je veux remercier le chef de l'opposition officielle pour sa collaboration et pour le ton de sa question. Je pense, c'est très important que les 125 élus travaillent ensemble.

Et, comme vous le savez, immédiatement après la période de questions, à ce moment-là, il avait fait une conférence de presse pour nous dire : Écoutez, la situation est particulièrement sérieuse au Québec. C'est une situation qui mérite qu'on travaille tous ensemble. Et, si vous vous rappelez bien, M. le Président, l'Assemblée nationale n'avait pas siégé avant le mois d'avril, mai, même, je pense, pour permettre au gouvernement de faire face à cette situation-là, parce qu'on n'avait pas de vaccin, parce qu'évidemment la situation était critique. On le sait, ce qui s'est passé dans les CHSLD un peu partout.

Alors, évidemment, on se retrouve, M. le Président, aujourd'hui avec une situation complètement différente. C'est une situation qui a évolué au cours des dernières années. Je vous dirais aussi que, tout à l'heure, le député de LaFontaine disait : Écoutez, faire des mesures d'urgence, à ce stade-ci, on est le seul État au Canada qui fait des mesures d'urgence, qui décrète des lois dans lesquelles il y a des mesures d'urgence. Alors, M. le Président, ce n'est pas seulement au Canada. Moi, j'ai fait une vérification, et, à moins de me tromper, c'est en Amérique du Nord. Ce n'est pas juste au Canada, c'est... il n'existe pas de telles choses actuellement aux États-Unis.

Et ce qui est particulièrement déplorable, dans la loi qui est devant nous aujourd'hui, c'est qu'en fait on sait que les Québécois veulent la fin de l'urgence sanitaire. Ça, là-dessus, personne n'est en désaccord, mais, malgré ça, on dit qu'on veut mettre fin à l'état d'urgence. Mais il faut être honnête et transparent avec les Québécois. En fait, ce qui se passe, c'est que ce projet de loi veut prolonger l'état d'urgence jusqu'au 31 décembre 2020. Et, quand ce projet de loi... Et, si on veut voir si un projet de loi est bon ou un projet de loi a de la difficulté, bien, il faut regarder un petit peu autour puis il faut voir les premiers commentaires que l'on entend sur un projet de loi.

Alors là, c'est un projet de loi qui dit qu'on veut mettre fin à l'état d'urgence. Puis là nous, on se lève puis on dit : Non, ça ne met pas fin à l'état d'urgence, au contraire, ça continue de donner des pouvoirs au gouvernement, des pouvoirs extrêmement importants encore. Et là, à ce moment-là, le ministre de la Santé dit : Écoutez, mon projet de loi va instaurer, et là je le mets entre guillemets, des mécanismes opérationnels pour pouvoir permettre au gouvernement de réagir rapidement en cas de nouvelle vague. Il ne précise pas exactement c'est quoi, les mécanismes opérationnels, mais il nous dit ça. Et, quand on sait que le gouvernement...

Ce projet de loi peut être éminemment contestable. Très souvent, le chef de cabinet intervient, le chef de cabinet du premier ministre qui dit : Oh! vous savez, nous voulons garder à notre disposition un minimum de pouvoirs sans être obligés de déclarer l'urgence sanitaire. Essentiellement, c'est ce qu'il nous dit aujourd'hui. Mais tout ça est fait dans un contexte, M. le Président, où on n'a pas vraiment de précision. C'est quoi, les pouvoirs qu'ils veulent avoir, exactement? C'est quoi, les contrats gré à gré qu'ils veulent renouveler d'ici le 31 décembre? Qu'est-ce qui doit se passer? Heureusement, il va y avoir bientôt les crédits. J'aurai l'occasion de poser des questions à la présidente du Conseil du trésor pour essayer de savoir un peu quel genre de contrats dont on parle.

On comprend parfaitement, on est quand même pragmatiques face à ces choses. On comprend très bien qu'au cours de l'année 2020 le gouvernement a donné des centaines de millions de dollars de contrats gré à gré parce qu'il y avait une situation d'urgence. J'ai un peu plus de difficulté à comprendre pourquoi, à partir de 2021 jusqu'à 2022, on devait agir avec autant de célérité au niveau des contrats d'urgence. Et le raisonnement ou les réponses que nous avons eus jusqu'ici, de la part du premier ministre en particulier et du ministre de la Santé, ne nous convainquent pas véritablement, dans la mesure où ce qu'ils disent, essentiellement : Bien, vous savez, on a besoin de ça parce que... Par exemple, pour faire vacciner des dentistes, bien, ça prenait une loi d'urgence. Les syndicats... on avait de la difficulté à négocier certaines choses avec les syndicats.

Or, quand il y a eu les... quand on a eu les consultations particulières sur le projet de loi n° 28, que ce soit la CSN ou la FTQ, qui sont intervenues, ils nous ont tous dit : Écoutez, nous, on comprend très bien que, quand il y a une situation qui nécessite vraiment... où l'intérêt public, en fait, est en cause, nous allons être ouverts à négocier un certain nombre de choses. On n'a pas besoin, d'une part, de l'état d'urgence.

• (16 heures) •

Et, en plus de ça, comme l'ont mentionné plusieurs de mes collègues depuis le début, bien, pour parler comme tel d'état d'urgence... On comprend que, si on veut mettre fin à l'état d'urgence, on n'a même pas besoin de faire une loi. Alors, c'est véritablement là où le bât blesse, à mon avis. C'est que... Comment peut-on justifier une telle loi, alors que tout le monde reconnaît ici, à l'Assemblée nationale, tous les partis d'opposition ont reconnu qu'on ne peut pas mettre, en fait, fin à l'état d'urgence par une loi? On peut très bien décréter qu'on met fin comme tel à l'état d'urgence. Donc, si on présente une loi de cette nature, c'est parce qu'on veut prolonger l'état d'urgence. Je pense que ça va de soi de ce côté-là.

Alors, M. le Président, il est clair que le gouvernement, actuellement, va devoir nous justifier, justement, dans les articles par articles, comment il peut en arriver à cette conclusion. Et depuis le début, depuis qu'on a discuté de ces différentes consultations, je dirais que le gouvernement, en fait, n'a pas réussi à répondre de façon correcte à ce qu'on a vu. Et tout le monde, ici, on n'est pas dupe, à l'Assemblée nationale... le gouvernement, clairement, pour avoir choisi le 31 décembre 2022, alors qu'on sait très bien que, vers la fin du mois de décembre, s'il y avait un moment où ils ont besoin, justement, où ils auraient peut-être besoin d'évoquer l'état d'urgence, parce que, comme vous le savez, au cours des dernières années, les crises se sont faites à partir... Autour de Noël, en général, c'est là que, s'il y a une recrudescence, ça se produit, autour de Noël. Pourquoi ils ont mis le 31 décembre 2022? La réponse, M. le Président, on ne peut pas faire autrement que de penser la chose suivante, ils veulent avoir la paix pendant la période électorale et être en mesure de bouger rapidement durant cette période-là, alors que nous, on pense fondamentalement que ce n'est absolument pas nécessaire.

Et on sait, en fait, que, depuis le début, la façon, pour le gouvernement, de véritablement être en mesure de pouvoir gérer la santé, c'est véritablement par des contrôles qui sont extraordinaires, par exemple contrôle total du ministère. Vous le savez, le gouvernement n'arrête pas de tenter de présenter des lois pour essayer de contrôler un peu le travail des médecins de ce côté-là, de présenter des lois pour une grande réorganisation de la santé dans laquelle le gouvernement va exercer évidemment de plus grands contrôles. C'est ça qu'on voit, M. le Président, dans ce projet de loi qui m'apparaît extrêmement important.

Et, comme vous le savez, le contrôle que le ministre a mentionné qu'il voulait faire était... Tant qu'il s'agissait d'avoir un contrôle plus sérieux au niveau des données, nous pouvions aller de l'avant avec ça. On pouvait comprendre que le ministère de la Santé voulait avoir plus d'information, être en mesure d'orienter de meilleure façon le ministère de la Santé à ce niveau-là. Mais ce n'est pas ce qu'on retrouve dans ce projet de loi. Il le fait, d'ailleurs, dans un autre projet de loi. Et, M. le Président, on se demande finalement, en bout de ligne, de quelle façon les choses vont être capables d'évoluer.

Et il y a un phénomène encore plus important, je pense, qui a été mentionné par quelques collègues, mais qui m'apparaît aussi fondamental. On sait que depuis le début, quand on demande une enquête publique, on dit : Bon, ce n'est pas nécessaire, il y a déjà un coroner, et puis on n'a pas besoin... Lorsqu'on demande d'avoir plus de débats, c'est toujours particulièrement difficile. On sent que le premier ministre n'aime pas cette espèce d'état de compte de... les comptes rendus qu'il doit faire sur un certain nombre de choses. Lorsqu'on a négocié, par exemple, avec le leader parlementaire, il voulait, évidemment, même si, maintenant, je pense qu'on est passablement revenus à la normale à l'Assemblée nationale, il voulait, au niveau des crédits, diminuer le nombre d'heures au maximum, il voulait négocier toujours à la baisse.

Et la question qui se pose maintenant dans ce contexte-là, et dans un contexte où, déjà, on a un gouvernement majoritaire qui est devant nous, la question est la suivante : C'est quoi, le rôle d'un député de l'opposition? Les gens, la population, ont donné un mandat à ce gouvernement-là et, en même temps qu'ils ont donné le mandat au gouvernement, ils ont dit : Vous allez gouverner dans le meilleur intérêt public. Mais la deuxième chose qu'ils ont dite au gouvernement : Nous voulons avoir aussi une opposition officielle qui va jouer son rôle au Parlement. Le rôle, c'est quoi? C'est de contrôler les actions du gouvernement. Comment on contrôle les actions de ce gouvernement? Bien, on les contrôle par le fait qu'on puisse utiliser nos institutions de la meilleure façon possible, de faire en sorte que le gouvernement réponde aux questions, que le gouvernement suive le plus possible les règles qui sont devant nous.

On l'a vu, ces tentatives, par exemple, dans le projet de loi sur Hydro-Québec, où on a mis de côté la Régie de l'énergie, où on a dit : Bien là, un organisme indépendant, ça ne nous intéresse pas tellement avant 2025. Hydro-Québec peut faire à peu près ce qu'il veut, et on a vu qu'est-ce qui s'est passé de ce côté-là. Ça a été la même chose dans d'autres domaines, M. le Président. Combien de fois on a demandé des débats publics? Combien de fois on a demandé de faire en sorte qu'il y ait des débats d'urgence sur des situations particulières. Dans à peu près 90 % des cas, ça a été refusé par le gouvernement. Et donc, en ce sens là, on est un peu inquiets pour la démocratie, parce que le salon bleu est perçu actuellement comme un endroit où : Bien, écoutez, c'est-u bien nécessaire qu'on fasse des débats comme ça? On gouverne et puis on fait ce que vous devez faire à l'Assemblée nationale. Vous faites des débats, mais finalement sans beaucoup de conviction.

Alors, la question, c'est : Pourquoi le gouvernement a choisi, depuis le début, de contrôler... en fait, de gouverner, c'est-à-dire, par décret depuis le début? Bien, vous allez comprendre qu'ils ont trouvé des façons assez particulières, depuis le début, de renouveler, de semaine en semaine, les décrets. On est maintenant rendus au 108e décret. Et là on dépose un projet de loi pour ne pas avoir, particulièrement au mois d'août puis au mois de septembre... pour ne pas être obligé de se soustraire à la campagne électorale puis d'être obligé de refaire un décret à chaque semaine. C'est pour ça que ce projet de loi là a été déposé, M le Président.

En décrétant, en fait, l'état d'urgence à 107 reprises depuis le 13 mars 2020, le gouvernement s'est donné tous les pouvoirs. Et, en fait, on peut dire que le gouvernement s'est assuré justement de pouvoir utiliser ces pouvoirs-là pour gouverner sans nécessairement rendre des comptes de la façon dont ça doit se faire. Et ce n'est pas moi seulement qui le dis. Les syndicats sont venus, pendant les périodes de consultations, nous dire que ça n'avait pas de bon sens. Les syndicats sont venus nous dire que, par exemple, plusieurs des primes, encore, qui avaient été discutées... qu'on avait décrété un certain nombre de primes pour les employés, que plusieurs de ces primes-là n'avaient pas encore été versées.

Et, lorsqu'on invoque comme ça l'état d'urgence, c'est beaucoup plus difficile, pour une opposition, de faire son juste travail, M. le Président. De ce côté-là, on voit aujourd'hui, de façon très claire... Moi, j'ai eu des discussions avec les gens du CIUSSS sur une base particulièrement régulière. Et dans mon comté, juste à côté de mon comté, en fait, j'ai l'Hôpital général juif, j'ai St. Mary's. J'ai également l'Hôpital Sainte-Justine qui est dans mon comté. J'ai donc trois hôpitaux, là, qui sont vraiment très près de moi.

Et même, je vous dirais que plusieurs des experts qui étaient là, qui disent : Écoutez, la quatrième dose, c'est bon, c'est sûr que ça ne peut pas être mauvais, mais les résultats... Jusqu'ici autant on disait que la troisième dose était fondamentalement importante pour nous protéger du virus... Les gens disent : La quatrième dose, ça ne peut pas être mauvais. On ne peut pas être contre ça. C'est bon, mais les effets encore positifs ne sont pas aussi évidents qu'ils l'ont été pour la troisième dose. Et donc ça veut dire que, dans les circonstances dans lesquelles on vit actuellement, le vaccin, tel qu'il existe, ne nous protège pas nécessairement contre le fait d'attraper le virus, mais nous protège contre le fait d'avoir des symptômes graves du virus. Je pense que tout le monde a reconnu ces éléments-là.

• (16 h 10) •

En d'autres termes, puis le gouvernement, en fait, l'a répété à plusieurs reprises, le directeur de la santé publique l'a répété à plusieurs reprises, écoutez, il faut apprendre à vivre avec le virus. Il faut apprendre à avoir ces mesures qui sont les plus saines possible dans les circonstances. Il faut travailler pour qu'on puisse vivre le plus normalement possible, d'où ma question, M. le Président. Après avoir regardé tout ça, après avoir vu ce qui est devant nous aujourd'hui, la question demeure fondamentalement la même : Pourquoi? Pourquoi il est nécessaire d'avoir une telle loi qui ne fait que prolonger l'état d'urgence?

Alors, M. le Président, nous allons continuer à poser ces questions-là au ministre de la Santé. Je pense qu'il va devoir y répondre, parce que, jusqu'ici, les arguments qu'il a invoqués ne sont pas très convaincants et pas seulement de sa part, mais également des autres intervenants dans le milieu de la santé. Il n'y a pas vraiment de justification actuellement.

Alors, je termine là-dessus, M. le Président, en vous disant que notre formation politique va s'opposer à cette loi parce que le titre même de ce projet de loi ne reflète absolument pas le contenu de cette loi-là. C'est une loi qui dit, essentiellement : Nous allons mettre fin à l'état d'urgence sanitaire, et, quand on lit paragraphe par paragraphe, on s'aperçoit que, finalement, une grande partie des pouvoirs d'urgence sont maintenus d'ici le 31 décembre 2022. Alors, M. le Président, nous allons nous opposer à ce projet de loi. Et, encore une fois, je vous remercie. Merci.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Jacques-Cartier.

M. Gregory Kelley

M. Kelley : Merci, M. le Président. Merci à mon collègue le député de Mont-Royal pour son discours. C'était bien intéressant.

M. le Président, au début de la pandémie, aucune personne n'a critiqué le gouvernement du Québec quand ils ont imposé l'état d'urgence sanitaire. Tout le monde était d'accord que c'était nécessaire. Pas mal toutes les juridictions partout dans la planète ont pris des actions de suspendre certains droits de leurs citoyens pour attaquer une situation grave, une vraie urgence.

Dans une démocratie, M. le Président, les citoyens sont, de temps en temps, prêts à céder leurs droits pour le bien-être de l'État, mais il y a une raison pourquoi des gens, des fois... quand même si c'est une urgence aussi grave qu'une pandémie ou, quand même, une guerre, que les gens disent : Est-ce que c'est une bonne idée de céder certains de mes droits, de suspendre certains règlements et lois parlementaires de notre démocratie pour faire ça? Parce qu'il y a toujours cette pensée que peut-être le gouvernement ne va jamais retourner ces droits-là aux citoyens et au Parlement. Et c'est légitime, c'est une bonne question de posée.

La deuxième fois qu'on a eu une vague, je pense, la plupart des gens étaient d'accord. Il faut continuer, il faut avoir des mesures pour protéger notre système de santé, pour protéger nos grands-parents, c'est important. Quand même pour la troisième, pour la quatrième. Mais, après un certain moment, je vois que ma collègue la députée d'Iberville est présente, à un certain moment, là, les gens commencent à dire : Est-ce que je vais toujours être obligé de céder mes droits?

Et le gouvernement arrive, après d'être talonné par les oppositions sur la durée de cet état d'urgence : Pourquoi c'est nécessaire de toujours garder le Québec dans un état d'urgence quand on regarde les autres juridictions puis c'était terminé? Mon collègue de LaFontaine a bien expliqué : Bien, en Ontario, là, avec une population plus grande que nous, avec un système de santé qui est pas mal dans la même situation que le nôtre, eux autres n'étaient jamais obligés de garder un état d'urgence pour gérer la pandémie. Et on peut faire le débat qu'Ontario a mieux géré la pandémie que nous sans mettre en place certaines mesures très strictes envers leur population.

Alors, on arrive ici avec une loi. Et je sais que le gouvernement aime des fois, de temps en temps, d'attaquer, bien, des complotistes, mais je trouve ça très intéressant d'avoir une loi qui dit : On va mettre fin de l'urgence sanitaire, mais ce n'est pas là, ça va être en décembre 2022. Puis je pense que la population a raison d'avoir un petit doute qu'un gouvernement peut quand même retourner pour changer toutes les choses qu'il présente aujourd'hui. C'est toujours possible. Je pense qu'on arrive à ce stade, ici, que le gouvernement dit : On va enlever ça, on va enlever ça. Mais ils ont poussé la date, ils ont poussé la date. Ils ont renouvelé ça sans débat, sans respecter les règles dans la... même la loi qui existe. Je comprends pourquoi il y a un doute dans la population québécoise présentement, parce que ce projet n'est quand même pas nécessaire d'enlever l'état d'urgence. J'ai vu que, sur Twitter, mon collègue le député de Sainte-Rose a dit que les oppositions sont contre le projet de loi d'enlever l'état d'urgence sanitaire. Mais nous avons des experts, quand même, le professeur Taillon, de l'Université Laval, qui a dit : Ce n'est pas nécessaire d'avoir ce projet de loi pour sortir juridiquement le Québec de l'état d'urgence. Alors, qu'est-ce qu'il a dit sur Twitter, est-ce que c'est vrai? Selon les experts, je ne pense pas que mon collègue est un expert constitutionnaliste, moi non plus, mais, selon un des meilleurs au Québec, il dit : Ce n'est pas nécessaire.

Alors, on peut faire le spin, on peut faire les... mettre les choses pour convaincre des chroniqueurs du Québec que ce projet de loi, il faut le faire, il n'y a pas d'autre option, mais, selon les experts qui ont témoigné devant la commission parlementaire, non, il y a d'autres options d'enlever ça. Et il y a quand même des gens qui disent c'est nécessaire de faire ça maintenant.

On sait que peut-être, M. le Président, si on enlève, demain, l'état d'urgence, on retourne à notre système normal de gestion des contrats, les arrêtés ministériels, etc., on retourne à la normale. Mais on sait, M. le Président, que peut-être dans un an on va avoir une autre vague qui est la plus sévère de toutes les vagues qu'on a vues, qu'à un certain moment... à un certain moment, peut-être, on va voir une vague avec une... excusez-moi, un variant de virus qui peut dépasser nos défenses de vaccin, puis on va être dans une situation très, très grave. Là, peut-être, les citoyens vont dire : Bien, écoute, là, il faut restreindre notre interaction entre nous, limiter nos déplacements, etc., peut-être ça veut dire c'est nécessaire de retourner avec l'état d'urgence. On a une recette au minimum de combattre un virus quand on ne sait pas trop comment gérer ça. Je pense qu'on a vécu ça. Les gens sont intelligents, ils sont capables de dire : Je comprends pourquoi c'est nécessaire maintenant. Mais là, maintenant, on arrive pour dire pourquoi on est toujours dans cet état-là quand, quand même, le premier ministre dit que, si vous êtes vacciné, bien, c'est juste comme un rhume, c'est correct, ce n'est pas aussi pire que ça.

I understand why there could be some doubts in people's minds about why this bill is even necessary, because in parliamentary studies... sorry, in parliamentary hearings, when we had experts come here, they mentioned that, to get ourselves out of this emergency power situation, we don't necessarily need to pass this bill, we could do it right now, if we wanted to. And, if I look through all the different groups who presented before the House... excuse me, before the parliamentary committee, plenty of them said that there is a lot of issues with this bill and there is a lot of reasons why we should be concerned.

• (16 h 20) •

As I mentioned before, Mr. Speaker, when the pandemic hit, everyone was ready to cede some of their rights and suspend certain parliamentary powers within our democracy for the greater good of the State, of the entire population. People, in times of crisis, are willing to do that, but people are always concerned when they do pass those rights back to the State because there is no guarantee the State will ever give those rights back. Once the State takes certain powers from a parliamentary system, from our governing system, they will probably more likely be hesitant to return those powers to just keep governing how they were without any checks or balances.

But that's not how democracy is supposed to work, that is not why people were willing to pass over something which is so fundamental of theirs to the Government, because, at the end of the day, we can say people have rights, we can say people and governments have to play by certain norms and certain rules, but, if that is suspended and never returns to the people, it's extremely hard for the people to get it back.

So, that's why I can understand why people doubt, doubt when they do let governments take certain rights from them, when they are suspended in situations of crisis. And we've seen that throughout the past. I've heard it from citizens, in my riding, who were concerned, saying, «I'm willing to do my part», but be very cautious and vigilant about how much power the Government does take.

I'm just going to go over, Mr. Speaker, a few of the things I kind of found that were interesting in the, you know, articles in the press about the bill that was coming out here. That it is a bazooka in democratic matters was one of the headlines that came out of the news, and that it is pretty hard, again, supporting what I've been saying here... Prof. Louis-Philippe Lampron, who said, «It's understandable to justify the need for powers at the beginning of the crisis, but, two years later, it's becoming more difficult to justify the need to have exceptional powers and to continue those exceptional powers into the future.»

Contracts has been something that has been addressed and spoken about again and again, that many contracts were offered without tender. The Government has granted $4.1 billion of contracts under the health emergency decrees to this point. My colleague from LaFontaine suggested that we buy the Blackhawks and maybe the Pittsburgh Penguins. I would prefer to have an NFL team. So, maybe we could look into purchasing one of the NFL teams at that type of rate. But just the point he was making about the money that has been spent out there without any checks and balances is quite extreme, it's quite large. There has also been the execution of 2,688 contracts for over $25,000 since the beginning of the pandemic. Those numbers, obviously, will continue to climb as we get more and more information.

The high volume of contracts awarded under the health emergency has raised, you know, some concerns amongst us that there are certain groups or companies that, perhaps, had taken advantage of the situation or have benefitted from favoritism. Our leader and the MNA for Saint-Henri—Sainte-Anne, Dominique Anglade, reminded everyone, just saying that there's a reason why we do have a process of tendering, it's to make sure that there is, you know, a bit of competition out there, and, again, we have to make sure that we're vigilant, that, if we're using exceptional powers towards contracts, there is no favoritism. There is, at some point, obviously, going to be a very large review of everything that was spent on, and, again, it's going to be interesting to see.

To come back to the issue of, you know, rights and liberties, la Ligue des droits et libertés had, you know, many things to say about this bill, one of them being that the declaration... the maintenance of the state of health emergency since March 2020 has interrupted the democratic debate, both on substantive issues affecting Québec society and on the relevant impact of pandemic management measures. That's why, in 2021, they launched a campaign to end the state of emergency in Québec. So far, there's 128 different organizations across Québec who have supported the league at least attempts to convince parliamentarians to remove this act as quickly as possible. They did state that... believes the Québec Government has found too much comfort with the state of the health emergency act, that... the distinction between the State, and the health emergency, and the measures necessary for the management of the health crisis. For the League of Rights and Freedoms, the Government does not need this bill, which only continues the state of emergency. On many occasions, when they were here, before parliamentary commission, they used the word that it's antidemocratic, and we really need to lift the emergency act right away, and not wait until 2022, in December.

They're obviously... You know, whenever you're looking to see how much support a bill has and does not have, you can go to the different groups of consultations and see what the people say. I found it to be interesting to see the fors and againsts. For the bill that was tabled, we have Daniel Paré, «sous-ministre associé», ministère de Santé et des Services sociaux, Dr Luc Beaulieu, Mme Julie Labbé, la P.D.G. du CIUSSS du Saguenay—Lac-Saint-Jean, Guy Thibodeau, P.D.G. du CIUSSS de la Capitale-Nationale, Jean-François Fortin Verreault, P.D.G. du CIUSSS de l'Est-de-l'Île-de-Montréal. La dernière fois que j'ai vérifié, M. le Président, ces personnes-là travaillent pour le gouvernement et pour le ministre de la Santé. Alors, ce n'est jamais une bonne idée d'aller publiquement critiquer votre patron, M. le Président. Juste une règle en général. Quand même, nous, comme des élus, on sait ça très, très bon, jamais une bonne idée d'aller contre le chef ou la cheffe, un ou l'autre. Et les personnes qui étaient contre, et ça, c'est aussi, je pense, une façon de dire qu'il y a une contrebalance à qu'est-ce que le gouvernement veut contre qu'est-ce que la société veut, on a eu l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux qui était contre, la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec, la FIQ qui était contre, Louis-Philippe Lampron, professeur de droit à l'Université Laval, qui était contre, Me Martine Valois, professeure de droit à l'Université de Montréal, contre, la Ligue des droits et des libertés était contre, la Confédération des syndicats nationaux était contre, et la Fédération des travailleurs et des travailleuses du Québec était contre. Alors, j'ai le gouvernement puis j'ai les autres groupes qui ont des opinions qui sont très, très différentes.

Je sais que, M. le Président, ce débat est maintenant passé. Nous avons passé à la phase de l'étude détaillée. Mais, quand même, dans les consultations publiques, le ministre est arrivé avec des amendements qu'il va proposer. Alors, quand même, c'est tout ce processus-là, pour les élus, de bien comprendre c'est quoi, l'intention du gouvernement. Pas facile. Demandez à des différents groupes, quand même, des professeurs, d'analysent le projet de loi, puis tu commences l'analyse, tu as deux semaines avant les audiences publiques, puis le ministre arrive, il dit qu'il va y avoir un paquet d'amendements, je ne sais pas, mais pas nécessairement la meilleure façon, selon moi, de gérer les choses.

This is also a bill, Mr. Speaker, that has come up in my riding. There are lots of people who do follow what is going on, who have become increasingly interested about the state of emergency powers that we have here, in Québec, and why they are not being lifted. So, there were a few people, I won't name them because I've not asked for their permission, but they sort of reiterated the points that I've raised here today, trying to understand why prolonging this act is necessary. I mean, they've seen the news, too, and there's different groups that say, «You could take these powers away tomorrow, you don't need to prolong them any further, you don't need a special bill.»

Also, people, obviously, in the health care system have reached out to me to say that, in terms of managing human resources, they're concerned, too, that the Government will just continue to have unlimited powers in that area or large amounts of power in that area, and they are concerned about that because they're tired of working from one place to the other over... all that. So, they are obviously concerned, and were willing to reach out to their MNA to talk about it. Of course, I forward those on to our health critic, the MNA from Nelligan, who has been working very hard in keeping his colleagues informed, of course, on the updates of this bill, and what is going on, and what whether the debates are going on in commission. So, I will continue to follow his advice and guidance and listen to what he has to say as this bill carries on through the House. There's not a lot of time left in this, of course, parliamentary life in terms of this...

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le député, je vais vous demander...

M. Kelley : ...

Le Vice-Président (M. Picard) : Vous allez continuer à la reprise des...

M. Kelley : ...joyeuses Pâques, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci. À vous aussi.

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Picard) : S'il vous plaît!

Ajournement

Compte tenu de l'heure, les travaux de l'Assemblée sont ajournés au mardi 26 avril 2022, à 13 h 40.

(Fin de la séance à 16 h 30)