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Version finale

42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)

Le jeudi 10 décembre 2020 - Vol. 45 N° 154

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Affaires courantes

Déclarations de députés

Saluer l'initiative bénévole Semer le bonheur

M. Gilles Bélanger

Rendre hommage à Mme Françoise Bertrand, nommée commandeure de l'Ordre de Montréal

M. Pierre Arcand

Souligner le 50e anniversaire du Club FADOQ du bassin de Chambly

M. Jean-François Roberge

Rendre hommage à Mme Brunilda Reyes, nommée chevalière de l'Ordre de Montréal

Mme Paule Robitaille

Souligner l'appui des citoyens envers M. Antoine Frappier dans son combat contre le cancer

M. Pierre Dufour

Souligner le 25e anniversaire de l'organisme Entraide communautaire des Îles inc.

M. Joël Arseneau

Féliciter Les Emballages L. Boucher inc. pour leur projet d'expansion

M. Mario Asselin

Appuyer les demandes du groupe Urgence climatique Sherbrooke

Mme Christine Labrie

Souligner le travail du Comité d'action local d'Argenteuil et de sa coordonnatrice,
Mme Hélène Kirouac

Mme Agnès Grondin

Rendre hommage à Mme France Arbour, comédienne et ambassadrice des arts et de la culture

M. François Bonnardel

Souligner le 20e anniversaire du Réseau québécois des OSBL d'habitation

Mme Monique Sauvé

Présentation de projets de loi

Projet de loi n° 83 — Loi concernant principalement l'admissibilité au régime d'assurance
maladie et au régime général d'assurance médicaments de certains
enfants dont les parents ont un statut migratoire précaire

M. Christian Dubé

Mise aux voix

Projet de loi n° 84 — Loi visant à aider les personnes victimes d'infractions criminelles et à
favoriser leur rétablissement

M. Simon Jolin-Barrette

Mise aux voix

Dépôt de documents

Rapport du comité interministériel sur la couverture des enfants nés au Québec de parents au statut migratoire précaire, rapport sur l'application de la procédure d'examen des plaintes du CISSS de l'Outaouais et plan stratégique 2020-2024 de l'Office des personnes handicapées

Réponses à des pétitions

Dépôt de rapports de commissions

Auditions et étude détaillée du projet de loi  n° 

Mise aux voix du rapport

Audition du directeur national de santé publique au sujet de la pandémie de COVID-19

Consultations particulières sur le projet de loi n° 73 — Loi modifiant diverses dispositions en
matière de procréation assistée


Dépôt de pétitions

Accorder un certificat de sélection du Québec à M. Mamadou Konaté

Questions et réponses orales

Accès à l'information sur l'évolution de la pandémie de COVID-19

Mme Dominique Anglade

M. Christian Dubé

Mme Dominique Anglade

M. Christian Dubé

Mme Dominique Anglade

M. Christian Dubé

Mme Dominique Anglade

M. Christian Dubé

Gestion de la pandémie de COVID-19

M. André Fortin

M. Christian Dubé

M. André Fortin

M. Christian Dubé

M. André Fortin

M. Christian Dubé

Rapport du Protecteur du citoyen sur la gestion de la pandémie de COVID-19 dans les centres d'hébergement et de soins de longue durée

Mme Monique Sauvé

M. Christian Dubé

Mme Monique Sauvé

M. Christian Dubé

Mme Monique Sauvé

M. Christian Dubé

Enquête sur la gestion de la pandémie de coronavirus dans les centres d'hébergement et de soins
de longue durée

M. Harold LeBel

M. Christian Dubé

M. Harold LeBel

M. Christian Dubé

Document déposé

M. Harold LeBel

Mme Sonia LeBel

Pénurie de places en service de garde

Mme Christine Labrie

M. Mathieu Lacombe

Mme Christine Labrie

M. Mathieu Lacombe

Mme Christine Labrie

M. Mathieu Lacombe

Achat d'appareils visant l'amélioration de la qualité de l'air dans les écoles

Mme Marwah Rizqy

M. Jean-François Roberge

Mme Marwah Rizqy

M. Jean-François Roberge

Mme Marwah Rizqy

M. Jean-François Roberge

Gestion des sols contaminés à Montréal

M. Sylvain Gaudreault

M. André Lamontagne

M. Sylvain Gaudreault

M. André Lamontagne

M. Sylvain Gaudreault

M. André Lamontagne

Atteinte des cibles en matière de création d'aires protégées

Mme Émilise Lessard-Therrien

M. Pierre Dufour

Mme Émilise Lessard-Therrien

M. Pierre Dufour

Mme Émilise Lessard-Therrien

M. Pierre Dufour

Rapport de la Commissaire à l'éthique et à la déontologie au sujet du ministre de l'Économie
et de l'Innovation

M. Marc Tanguay

M. Simon Jolin-Barrette

Rencontres avec les chefs de parti au sujet de l'évolution de la pandémie

Mme Dominique Anglade

M. Simon Jolin-Barrette

Motions sans préavis

Souligner l'apport de l'entrepreneuriat collectif au Québec

Mise aux voix

Demander au gouvernement de respecter la décision de la Commission de protection du territoire
agricole concernant la demande de dézonage d'une zone agricole de la ville de Saint-Hyacinthe

Mise aux voix

Avis touchant les travaux des commissions

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Décision de la présidence sur la demande de directive soulevée le 8 décembre 2020 concernant
la divulgation de propositions de recommandations d'une commission qui réalise un mandat
d'initiative

Avis de sanction de projets de loi

Affaires du jour

Projet de loi n° 75 —  Loi visant à améliorer l'accessibilité et l'efficacité de la justice, notamment
pour répondre à des conséquences de la pandémie de la COVID-19

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et des
amendements du député de LaFontaine

M. Simon Jolin-Barrette

M. Marc Tanguay

Mme Paule Robitaille

Mise aux voix des amendements

Mise aux voix du rapport

Projet de loi n° 66 — Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et des
amendements transmis

Mme Sonia LeBel

M. Gaétan Barrette

M. Sylvain Gaudreault

M. Vincent Marissal

M. Gregory Kelley

M. Pascal Bérubé

Mme Marie-Claude Nichols

Mise aux voix de l'amendement du député de La Pinière

Mise aux voix des amendements du député de Jonquière

Mise aux voix du rapport

Adoption

Mme Sonia LeBel

M. Gaétan Barrette

M. Sylvain Gaudreault

Projet de loi n° 218 — Loi concernant la Municipalité des Îles-de-la-Madeleine

Adoption du principe

Mise aux voix

Adoption

M. Joël Arseneau

Mme Marie-Claude Nichols

Mise aux voix

Dépôt de rapports de commissions (suite)

Étude détaillée du projet de loi n° 68 — Loi visant principalement à permettre l'établissement de
régimes de retraite à prestations cibles


Projet de loi n° 66 — Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure

Reprise du débat sur l'adoption

M. Vincent Marissal

Mise aux voix

Débats sur les rapports de commissions

Reprise du débat sur la prise en considération du rapport de la commission qui a procédé à des consultations particulières sur l'avenir des médias d'information

M. Louis Lemieux (suite)

Mme Marwah Rizqy

Mme Ruba Ghazal

Prise en considération du rapport de la commission qui a procédé aux auditions sur l'exploitation
sexuelle des mineurs

Mme Lucie Lecours

Mme Kathleen Weil

Mme Isabelle Lecours

M. Christopher Skeete

Mme Émilie Foster

Prise en considération du rapport de la commission qui a procédé à des consultations particulières
sur l'augmentation préoccupante de la consommation de psychostimulants chez les enfants et les
jeunes en lien avec le trouble déficitaire de l'attention avec hyperactivité

Mme Isabelle Lecours

Ajournement

Journal des débats

(Neuf heures quarante minutes)

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Bon jeudi à tous. Vous pouvez vous asseoir.

Affaires courantes

Déclarations de députés

Alors, nous allons débuter nos travaux aux affaires courantes, à la rubrique de déclarations de députés. Et nous allons débuter avec M. le député d'Orford.

Saluer l'initiative bénévole Semer le bonheur

M. Gilles Bélanger

M. Bélanger : Bon matin, Mme la Présidente. C'est avec une grande fierté que je salue tout le travail bénévole autour de Semer le bonheur. C'est une initiative qui a germé dans la tête d'une enseignante, Karine Bélanger, au printemps dernier, alors qu'elle a eu l'idée d'inviter les jeunes à écrire aux aînés confinés dans leurs résidences. L'organisme Les Correspondances d'Eastman, les centres de services scolaires Sherbrooke et des Sommets, des enseignants, plusieurs auteurs et des bénévoles se sont rassemblés autour de ce projet. Jusqu'à présent, 6 000 lettres sont passées par Les Correspondances d'Eastman, qui les redistribue aux aînés. 43 résidences ont reçu des lettres un peu partout au Québec.

On sait que le temps des fêtes qui approche sera difficile. J'invite les gens à consulter la page Semer le bonheur. L'organisation est prête à recevoir, de la part des petits comme des grands, des lettres et cartes de voeux, ce qui fera plaisir, j'en suis certain, à de nombreuses personnes âgées qui attendent qu'on illumine leur temps des fêtes. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, je cède la parole à M. le député de Mont‑Royal—Outremont.

Rendre hommage à Mme Françoise Bertrand, nommée
commandeure de l'Ordre de Montréal

M. Pierre Arcand

M. Arcand : Merci, Mme la Présidente. Permettez-moi de rendre hommage à Mme Françoise Bertrand, récipiendaire 2020 à titre de commandeure, le grade le plus élevé, de l'Ordre de Montréal.

Mme Bertrand rayonne dans le milieu des affaires québécoises depuis plus de 30 ans. Gestionnaire de haut niveau dans des organisations de renom telles Via Rail, le CRTC, Télé-Québec, la Fédération des chambres de commerce du Québec et plus encore, elle montre la voie à une nouvelle génération de femmes. Elle a également siégé sur de nombreux conseils d'administration, tels que Québecor et l'Université Concordia, pour ne nommer que ceux‑là.

Sa défense d'une société meilleure, plus égalitaire s'est traduite à travers les années par son engagement philanthropique au sein de multiples organismes.

Françoise, pour ton inestimable contribution envers la société québécoise, je tiens à témoigner, au nom de tous, la reconnaissance et la fierté que nous ressentons aujourd'hui. Toutes mes félicitations! Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, je cède la parole à M. le député de Chambly.

Souligner le 50e anniversaire du Club FADOQ du bassin de Chambly

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : Merci, Mme la Présidente. J'aimerais souligner, aujourd'hui, le 50e anniversaire de la FADOQ de Chambly. Avec les circonstances que nous connaissons, c'est impossible, évidemment, de célébrer comme il se doit, mais je suis certain que l'organisation va pouvoir se reprendre pour souligner l'événement en grand.

La mission de la FADOQ de Chambly est très importante. Les activités sont bien organisées, et la participation des membres est vraiment extraordinaire, comme j'ai pu le voir lors de mes nombreuses participations à leurs activités. La FADOQ brise l'isolement avec des activités sociales, culturelles, artistiques et sportives. Ce sont vraiment des activités essentielles, et on le voit aujourd'hui, alors que ces activités ne sont pas possibles, ne sont pas permises.

Je tiens donc à remercier le président, M. Royal Adam, et toute l'équipe de bénévoles de la FADOQ de Chambly pour leur travail et leur dévouement. Continuez votre belle mission. J'ai très hâte de vous revoir en personne.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé, la parole est à vous.

Rendre hommage à Mme Brunilda Reyes, nommée
chevalière de l'Ordre de Montréal

Mme Paule Robitaille

Mme Robitaille : Mme la Présidente, j'aimerais rendre hommage, aujourd'hui, à une vraie femme de coeur, Brunilda Reyes, cheffe de file du milieu communautaire montréalais, qui vient de recevoir le titre prestigieux de chevalière de Montréal.

Tout un parcours, Mme Reyes. Née au Chili, exilée par la dictature du général Pinochet d'abord en France, elle arrive au Québec avec son mari et ses enfants il y a exactement 25 ans, le 12 décembre 1995. Elle s'installe à Montréal-Nord et est frappée par la pauvreté. Elle se lance corps et âme à aider les plus démunis. Depuis 2001, elle et son équipe des Fourchettes de l'espoir ont aidé des milliers de familles, de jeunes et moins jeunes à sortir de la pauvreté, à briser l'isolement, à se réinsérer dans la communauté.

Durant la pandémie, son organisme est devenu ni plus ni moins le quartier général du dépannage alimentaire du comté.

Mme Reyes, merci pour tout ce que vous faites. Vous êtes notre inspiration. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, je cède la parole à M. le député d'Abitibi-Est.

Souligner l'appui des citoyens envers M. Antoine Frappier
dans son combat contre le cancer

M. Pierre Dufour

M. Dufour : Merci, Mme la Présidente. À partir d'un triste événement, permettez-moi, aujourd'hui, d'égayer la situation et de souligner la mobilisation exceptionnelle de la population de ma circonscription.

Antoine Frappier, un jeune homme de 28, est atteint d'une forme très rare de cancer de l'estomac. Malheureusement, les seuls traitements disponibles pour lui au Québec sont palliatifs, ce qui l'oblige à se tourner vers des soins très onéreux aux États-Unis.

Il y a quelques mois, alors qu'il était en rémission, il a appris que sa conjointe attendait leur premier enfant. La joie fut de courte durée, car son cancer est réapparu.

Dans cette triste séquence d'événements, il est beau de voir l'implication des citoyens de la région, qui ont été nombreux à mettre en place des initiatives afin de contribuer à la campagne de sociofinancement. Chaque don fait la différence. Jusqu'à maintenant, 300 000 $ ont été recueillis, ce qui le rapproche de l'objectif de 500 000 $ pour avoir les soins.

Je félicite, aujourd'hui, l'implication et la solidarité de ma région face au combat d'Antoine. Et je lui fais un clin d'oeil avec l'habit des fêtes que je porte aujourd'hui pour le faire sourire. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, je cède la parole à M. le député des Îles‑de-la-Madeleine.

Souligner le 25e anniversaire de l'organisme Entraide communautaire des Îles inc.

M. Joël Arseneau

M. Arseneau : Mme la Présidente, ces derniers temps les activités des banques alimentaires, au Québec, connaissent une forte croissance, et les Îles-de-la-Madeleine ne font pas exception. Certains de mes concitoyens, comme partout ailleurs, sont vulnérables et vivent momentanément ou de manière chronique des situations de précarité.

C'est pourquoi je souligne aujourd'hui le 25e anniversaire d'Entraide communautaire des Îles.

Ses fondateurs, M. Frémond Décoste et l'abbé Réjean Coulombe, ont tous deux mis en oeuvre un mouvement de partage et de générosité par la mise en place d'un service de dépannage alimentaire. Je me souviens de leur fébrilité alors que, jeune journaliste, j'avais couvert leur lancement.

Depuis un quart de siècle, l'organisme aide et conseille différentes clientèles ayant des besoins liés à l'alimentation, à la santé, à l'éducation, aux loisirs et au logement. Mme Carmel Lapierre, directrice générale, soutenue par son conseil d'administration et de nombreux partenaires, y investissent tant d'énergie que ça mérite d'être salué.

La solidarité sociale et communautaire est bien enracinée dans notre archipel. Entraide communautaire en est la plus belle illustration.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, je cède la parole à M. le député de Vanier-Les Rivières.

Féliciter Les Emballages L. Boucher inc. pour leur projet d'expansion

M. Mario Asselin

M. Asselin : Merci, Mme la Présidente. Toujours avec fierté et plaisir que je souligne les succès de nos entreprises du comté de Vanier-Les Rivières, et il y en a de nombreuses.

Récemment, les entreprises Les Emballages L. Boucher ont reçu une subvention, une aide financière de 6,2 millions de dollars de notre gouvernement. En activité depuis 55 ans, cette entreprise spécialisée en distribution de produits d'emballage, d'hygiène et d'entretien prévoit investir 15 millions de dollars pour la construction d'un nouvel entrepôt. Ce bâtiment de 85 000 pieds carrés, et ses composantes à la fine pointe de la technologie, regroupera sous un même toit les services de l'entreprise, qui sont actuellement répartis dans deux édifices distincts sur l'avenue Galilée, à Québec. Avec ce nouvel entrepôt dans le parc Colbert, Les Emballages L. Boucher pourront développer de nouveaux marchés.

Je souhaite à son directeur général, M. Alexandre Bouchard, et à toute son équipe une croissance à la hauteur de leurs attentes. Félicitations pour ce projet d'expansion! Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, je cède la parole à Mme la députée de Sherbrooke.

Appuyer les demandes du groupe Urgence climatique Sherbrooke

Mme Christine Labrie

Mme Labrie : Mme la Présidente, comme vous le savez, les citoyens de Sherbrooke sont très préoccupés par les enjeux environnementaux et le peu d'ambition des décideurs pour s'y attaquer.

Aujourd'hui, pour la quatrième semaine consécutive, des citoyens du mouvement Urgence climatique Sherbrooke vont se rassembler devant l'hôtel de ville pour rappeler aux élus que la ville a signé la Déclaration d'urgence climatique, il y a deux ans, et que peu de gestes concrets ont suivi cette déclaration symbolique.

À l'Assemblée nationale aussi, nous avons voté unanimement pour déclarer l'urgence climatique, il y a un peu plus d'un an, mais la suite n'a été que déception. Le Québec n'est toujours pas parvenu à protéger 17 % de son territoire, alors qu'il s'y était engagé, et il ne reste que quelques jours pour se conformer à cet engagement. Le plan vert déposé il y a quelques semaines a déçu bon nombre des groupes qui avaient participé à son élaboration.

Je veux souligner aujourd'hui la persévérance des citoyens qui restent mobilisés malgré leurs espoirs maintes fois déçus et qui continuent de demander aux élus de poser des gestes cohérents avec leur engagement envers l'urgence climatique. Ce que vous faites, c'est aussi un travail essentiel. Merci.

• (9 h 50) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, je cède la parole à Mme la députée d'Argenteuil.

Souligner le travail du Comité d'action local d'Argenteuil
et de sa coordonnatrice, Mme Hélène Kirouac

Mme Agnès Grondin

Mme Grondin : Merci. Dans Argenteuil, le filet social au service des jeunes enfants vulnérables et de leurs familles est tissé très serré

C'est Avenir d'enfants, avec son comité d'action local, qui a bâti cette synergie. Depuis 2006, ce sont plus de 2,2 millions de dollars qui furent investis pour les tout-petits, et plus de 200 familles en bénéficient chaque année.

Ce mois-ci, avec la fin d'Avenir d'enfants, le CAL d'Argenteuil tourne la page. Mais heureusement l'histoire se poursuit, les actions qui sont mises en place sont pérennisées, et la concertation des acteurs jeunesse est là pour rester.

Ce qu'il reste aussi, c'est l'engagement sincère et dévoué de la coordonnatrice du CAL durant toutes ces années, Hélène Kirouac, une femme de coeur, une battante, une rassembleuse. Hélène, au nom de tous les nourrissons, des Bouts'Choux, de Jeux d'enfants et des Petites Chenilles d'Argenteuil, au nom d'ALI et de Brindami, au nom de tous les acteurs jeunesse, au nom de nos tout-petits et de leurs familles et en mon nom personnel, un tendre merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Alors, sans plus tarder, je cède la parole à M. le député de Granby.

Rendre hommage à Mme France Arbour, comédienne
et ambassadrice des arts et de la culture

M. François Bonnardel

M. Bonnardel : Mme la Présidente, aujourd'hui, c'est avec beaucoup d'émotion que je tiens à rendre hommage à une grande ambassadrice de la culture à Granby, Mme France Arbour, qui est malheureusement décédée le 1er décembre dernier à l'Hôpital de Granby.

Comédienne chevronnée, dans sa grande carrière Mme Arbour a joué dans 32 films, 29 séries télévisées, 48 pièces de théâtre et plusieurs émissions de radio et de télévision. Mais, au-delà de son travail remarquable dans le domaine de la culture et son amour de la langue française, elle aura laissé une marque indélébile dans notre région avec son implication bénévole pour faire rayonner la culture et les artistes de chez nous.

L'impact de cette grande dame sur notre ville, qui a même un centre culturel à son nom à Granby, est inestimable. Que ce soit à travers la création du trio Les Conteuses, les concerts au parc Victoria, nos innombrables Journées de la culture et la fameuse boîte à chansons le Baratin, France Arbour aura laissé une trace immense dans notre région, qui ne sera jamais oubliée.

Je tiens à offrir mes plus sincères condoléances à la famille et aux proches de Mme Arbour. Le Québec a perdu une géante du monde de la culture. Merci pour tout, France.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. On m'informe qu'il y aurait eu consentement pour une 11e motion, de Mme la députée de Fabre. Est-ce qu'il y a consentement? Alors, Mme la députée de Fabre, la parole est à vous.

Souligner le 20e anniversaire du Réseau
québécois des OSBL d'habitation

Mme Monique Sauvé

Mme Sauvé : Mme la Présidente, en cette fin d'année, je tiens à souligner les 20 ans du Réseau québécois des OSBL d'habitation, qui représente près de 1 250 organismes sans but lucratif d'habitation et près de 55 000 logements abordables à des personnes à faibles revenus. La mission du réseau : soutenir et représenter ses membres avant tout.

J'en profite pour saluer les administrateurs de deux OSBL d'habitation de mon comté de Fabre, soit le Manoir du ruisseau et les Habitations Ararat. À travers cette pandémie, mes pensées vont notamment à l'endroit de Linda Delisle et Azad Temisjian, qui veillent respectivement au bien-être et à la santé de leurs résidents. Je remercie aussi Jacques Beaudoin, du réseau, avec qui il m'a fait plaisir de collaborer depuis maintenant un certain temps.

Au nom de tous les aînés du Québec, et avec le réseau des OSBL, sachez que je continuerai mes efforts afin de rendre plus équitable le crédit d'impôt pour le maintien à domicile des aînés. Au plaisir de célébrer avec vous en 2021. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Alors, ceci met fin à la rubrique de déclarations de députés.

Et je suspends les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 9 h 53)

(Reprise à 10 h 5)

Le Président : Mmes et MM. les députés, bon jeudi. Recueillons-nous quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Nous poursuivons les affaires courantes.

Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi

À la rubrique Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président, je vous demande d'appeler l'article a, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 83

Le Président : À l'article a du feuilleton, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux présente le projet de loi n° 83, Loi concernant principalement l'admissibilité au régime d'assurance maladie et au régime général d'assurance médicaments de certains enfants dont les parents ont un statut migratoire précaire. M. le ministre.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Alors, merci beaucoup, M. le Président. Puis je pense que je reconnais certains collègues qui vont être très heureux de voir ce projet de loi là être déposé aujourd'hui. Je les remercie pour leur appui.

Alors, projet de loi n° 83, la Loi concernant principalement l'admissibilité au régime d'assurance maladie et au régime général d'assurance médicaments de certains enfants dont les parents ont un statut migratoire précaire. Quelques notes explicatives, M. le Président.

Ce projet de loi a pour objectif principal de rendre admissibles au régime d'assurance maladie et au régime d'assurance général médicaments certains enfants dont les parents ont un statut migratoire précaire.

À cette fin, le projet de loi modifie la Loi sur l'assurance maladie et le Règlement sur l'admissibilité et l'inscription des personnes auprès de la Régie de l'assurance maladie du Québec pour permettre que soient considérés comme domiciliés au Québec, et donc couverts par l'assurance maladie à titre de résidents, tous les enfants mineurs non émancipés qui satisfont à certaines conditions et qui possèdent l'un des statuts prévus par cette loi, notamment la citoyenneté canadienne. Pour ce faire, ces derniers devront toutefois pouvoir démontrer leur intention de demeurer au Québec pour une période de plus de six mois suivant leur inscription à la Régie de l'assurance maladie du Québec. Le projet de loi modifie par ailleurs ce règlement pour permettre que soient couverts par le régime, à titre de personnes qui séjournent au Québec, tous les enfants mineurs qui détiennent une autorisation de séjour délivrée par les autorités canadiennes de l'immigration pour une période de plus de six mois, quel que soit le statut de leurs parents.

Le projet de loi modifie la Loi de l'assurance médicaments et le règlement sur le régime d'assurance médicaments pour rendre admissibles au régime général d'assurance médicaments tous les enfants qu'il fait bénéficier du régime d'assurance maladie. Il rend également admissibles au régime général d'assurance médicaments des enfants mineurs déjà couverts par le régime d'assurance maladie uniquement, soit les enfants à charge accompagnant des personnes qui séjournent au Québec et qui sont elles-mêmes couvertes par ce régime.

De plus, le projet de loi précise que, pour être considérés comme des résidents aux fins du régime d'assurance maladie, les enfants nés lors d'un séjour hors Québec d'un parent qui réside au Québec doivent, sous réserve du respect de certaines autres conditions, être mineurs et demeurer en permanence depuis leur naissance avec un tel parent. Il facilite la couverture de ces enfants dès leur arrivée dans la province en prévoyant qu'ils peuvent fournir, pour s'inscrire à la régie, une autorisation de séjour délivrée par les autorités canadiennes de l'immigration pour une période de plus de six mois.

Le projet de loi permet aussi au gouvernement de déterminer par règlement, après consultation de la régie ou sur la recommandation de celle-ci, les cas où une demande d'inscription, de renouvellement d'inscription ou de remplacement de la carte d'assurance maladie ou de la carte d'admissibilité doivent être authentifiées.

Enfin, le projet de loi prévoit des dispositions transitoires et de concordance. Merci beaucoup, M. le Président. Merci.

Le Président : M. le leader de l'opposition officielle.

M. Fortin : ...mais en même temps on voudra prendre connaissance des détails du projet de loi du ministre et pouvoir en discuter avec les groupes intéressés. On demande donc une consultation particulière sur cet enjeu.

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : Oui, très certainement, M. le Président, ce sera avec plaisir. On pourra échanger des groupes.

Mise aux voix

Le Président : Et donc, en application de l'ordre spécial, j'invite les leaders parlementaires à m'indiquer le vote de leurs groupes sur la présentation de ce projet de loi, suivi, bien sûr, des députés indépendants. M. le leader du gouvernement?

• (10 h 10) •

M. Jolin-Barrette : Pour.

Le Président : M. le leader de l'opposition officielle?

M. Fortin : Pour.

Le Président : M. le leader du deuxième groupe d'opposition?

M. Nadeau-Dubois : Pour.

Le Président : M. le leader du troisième groupe d'opposition?

M. Ouellet : Pour.

Le Président : M. le député de Chomedey?

M. Ouellette : Pour.

Le Président : Mme la députée de Marie-Victorin?

Mme Fournier : Pour.

Le Président : Je vous remercie. En conséquence, la motion est donc adoptée. M. le leader du gouvernement, à nouveau.

M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président. Je vous demande d'appeler l'article b, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 84

Le Président : Oui. À l'article b du feuilleton, M. le ministre de la Justice présente le projet de loi n° 84, Loi visant à aider les personnes victimes d'infractions criminelles et à favoriser leur rétablissement. M. le ministre.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président. Le projet de loi n° 84, Loi visant à aider les personnes victimes d'infractions criminelles et à favoriser leur rétablissement.

Ce projet de loi propose une réforme en matière d'aide aux personnes victimes d'infractions criminelles. Il vise à reconnaître les droits des personnes victimes d'une infraction criminelle et à mettre en place des mesures pour répondre à leurs besoins dans le but de favoriser leur rétablissement.

À cet effet, le projet de loi prévoit des mesures pour soutenir toute personne victime qui subit une atteinte à son intégrité ou une perte matérielle en raison d'une infraction criminelle. Entre autres, il reconnaît le droit d'une personne victime d'être informée de ses droits et des recours qu'elle peut exercer ainsi que des mesures d'aide dont elle peut bénéficier. Il permet au ministre de la Justice de reconnaître des centres d'aide aux personnes victimes d'infractions criminelles et d'accorder certaines subventions.

Le projet de loi met en place divers types d'aide financière. Il définit les personnes victimes de certaines infractions criminelles qui sont admissibles à une aide financière et met en place un processus de qualification pour ces personnes. Il précise notamment qu'une demande de qualification doit être présentée dans les trois ans qui suivent la connaissance du préjudice subi par la personne victime. Toutefois, il prévoit qu'une demande peut être présentée en tout temps si elle est en lien avec la perpétration d'une infraction criminelle qui implique de la violence subie pendant l'enfance, une agression à caractère sexuel ou la violence conjugale.

Une fois qualifiée de personne victime, le projet de loi prévoit qu'une personne est admissible au versement, selon la catégorie de personne victime dont elle fait partie, à l'une ou à plusieurs des aides financières suivantes : une somme forfaitaire, une aide financière palliant une perte de revenus, une aide financière pour la réhabilitation psychothérapique ou psychosociale, une aide financière pour la réadaptation physique, une aide financière pour la réinsertion professionnelle, une aide financière pour la réinsertion sociale, une aide financière pour l'assistance médicale et une aide financière sous forme de remboursement de certaines dépenses diverses. Le projet de loi permet également à d'autres personnes de bénéficier d'une aide financière sous forme de remboursement de dépenses diverses, dont la personne qui a acquitté les frais funéraires ou celle qui a assumé certains frais de nettoyage. De plus, il prévoit le versement d'une aide financière visant à contribuer aux aliments d'un enfant né à la suite d'une agression à caractère sexuel. Cette aide pourra être versée à la mère qui pourvoit seule aux besoins d'un enfant dont la conception résulte d'une telle agression ou, selon le cas, à une autre personne qui pourvoit à ces besoins.

Le projet de loi confère au gouvernement divers pouvoirs réglementaires pour déterminer principalement les normes, les montants et les modalités de ces aides financières. Il détermine des conditions particulières lorsque l'infraction criminelle est perpétrée à l'extérieur du Québec.

Le projet de loi accorde divers pouvoirs au ministre, notamment celui d'exiger qu'une personne se soumette à l'examen d'un professionnel de la santé et de requérir des rapports de certains professionnels de la santé ou d'établissements de santé et de services sociaux. Il prévoit diverses dispositions concernant les décisions rendues par le ministre, les mécanismes de révision et de contestation de celles-ci ainsi que la possibilité de recouvrer une aide financière.

En plus des aides financières qu'il prévoit, le projet de loi confère au ministre le pouvoir d'établir un programme d'aide en situation d'urgence pour permettre à des personnes dont la vie ou la sécurité est menacée de bénéficier de mesures visant notamment l'aide à la relocalisation. Il permet à un corps de police de communiquer des renseignements au ministre ou à un centre d'aide aux personnes victimes d'infractions criminelles et prévoit la création d'un bureau dédié à l'aide à ces personnes au sein du ministère de la Justice.

Le projet de loi institue un fonds affecté à l'aide aux personnes victimes d'actes criminels et y prévoit le transfert des actifs et des passifs du Fonds d'aide aux victimes d'actes criminels institué en vertu de la Loi sur l'aide aux victimes d'actes criminels.

Enfin, le projet de loi propose d'abroger la Loi sur l'aide aux victimes d'actes criminels, la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels et la Loi sur l'aide et l'indemnisation des victimes d'actes criminels, en plus de modifier la Loi visant à favoriser le civisme. Il prévoit également d'autres dispositions modificatives et transitoires ainsi que des dispositions finales. Merci, M. le Président.

Le Président : M. le leader de l'opposition officielle.

M. Fortin : Oui. Merci, M. le Président. Je suis certain que le ministre de la Justice et leader parlementaire du gouvernement va être d'accord pour entendre les groupes intéressés en consultations particulières.

Le Président : ...

M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président, ce sera avec plaisir.

Mise aux voix

Le Président : Alors, je vous invite à m'indiquer le vote de vos groupes sur la présentation de ce projet de loi, suivi des députés indépendants. M. le leader du gouvernement?

M. Jolin-Barrette : Pour.

Le Président : M. le leader de l'opposition officielle?

M. Fortin : Pour.

Le Président : M. le leader du deuxième groupe d'opposition?

M. Nadeau-Dubois : Pour.

Le Président : M. le leader du troisième groupe d'opposition?

M. Ouellet : Pour.

Le Président : M. le député de Chomedey?

M. Ouellette : Pour.

Le Président : Mme la députée de Marie-Victorin?

Mme Fournier : Pour.

Le Président : Merci. En conséquence, la motion est adoptée.

Dépôt de documents

Nous en sommes à la rubrique Dépôt de documents. M. le leader du gouvernement.

Rapport du comité interministériel sur la couverture des enfants nés au Québec de
parents au statut migratoire précaire, rapport sur l'application de la procédure
d'examen des plaintes du CISSS de l'Outaouais et plan stratégique 2020-2024
de l'Office des personnes handicapées

M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président, permettez-moi de déposer, au nom de mes collègues, les documents suivants : le rapport interministériel sur la couverture des enfants nés au Québec de parents au statut migratoire précaire, le rapport annuel 2019-2020 sur l'application de la procédure d'examen des plaintes et l'amélioration de la qualité des services du CISSS de l'Outaouais ainsi que le plan stratégique 2020-2024 de l'Office des personnes handicapées du Québec. Merci.

Le Président : Ces documents sont déposés. Je vous redonne la parole, M. le leader du gouvernement.

Réponses à des pétitions

M. Jolin-Barrette : Oui. M. le Président, je dépose les réponses du gouvernement à la pétition inscrite au feuilleton le 22 octobre 2020 par la députée de Mercier et la pétition présentée en Chambre le 4 novembre 2020 par la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.

Le Président : Et ces documents sont également déposés.

Dépôt de rapports de commissions

À la rubrique Dépôt de rapports de commissions, il y a consentement pour que je procède à des dépôts de rapports de commissions?

Auditions et étude détaillée du projet de loi n° 218

Alors, je dépose le rapport de la Commission de l'aménagement du territoire qui, le 9 décembre 2020, a procédé à l'audition des intéressés et à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 218, Loi concernant la Municipalité des Îles-de-la-Madeleine.

Mise aux voix du rapport

Et, en application de l'ordre spécial, j'invite les leaders parlementaires à m'indiquer le vote de leurs groupes, suivi des députés indépendants. M. le leader du gouvernement?

M. Jolin-Barrette : Pour.

Le Président : M. le leader de l'opposition officielle?

M. Fortin : Pour.

Le Président : M. le leader du deuxième groupe d'opposition?

M. Nadeau-Dubois : Pour.

Le Président : M. le leader du troisième groupe d'opposition?

M. Ouellet : Pour.

Le Président : M. le député de Chomedey?

M. Ouellette : Pour.

Le Président : Mme la députée de Marie-Victorin?

Mme Fournier : Pour.

Le Président : En conséquence, ce rapport est donc adopté.

Audition du directeur national de santé publique
au sujet de la pandémie de COVID-19

Je dépose également un rapport de la Commission de la santé et des services sociaux qui a tenu des auditions publiques le 9 décembre 2020 pour entendre le directeur national de la santé publique, le Dr Horacio Arruda, au sujet de la pandémie de la COVID-19.

Consultations particulières sur le projet de loi n° 73

Enfin, je dépose le rapport de la Commission de la santé et des services sociaux qui, les 8 et 9 décembre 2020, a tenu des auditions publiques dans le cadre de consultations particulières sur le projet de loi n° 73, Loi modifiant diverses dispositions en matière de procréation assistée.

Dépôt de pétitions

Nous en sommes à la rubrique Dépôt de pétitions. Je reconnais M. le député de Laurier-Dorion.

Accorder un certificat de sélection du Québec à M. Mamadou Konaté

M. Fontecilla : Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 1 900 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Considérant que M. Mamadou Konaté est arrivé au Québec en 2016 pour échapper à la guerre et aux menaces qui pesaient sur lui dans son pays, qu'il a été, avant cela, réfugié au Nigéria et au Libéria, qu'il a suivi des cours d'alphabétisation et de francisation, qu'il s'est intégré au Québec;

«Considérant qu'il a répondu à l'appel du premier ministre du Québec pour travailler dans des CHSLD pendant la pandémie, où il a contracté la COVID-19 en avril dernier, et que, malgré sa contribution, M. Konaté est aujourd'hui menacé de déportation;

«Considérant qu'en vertu de l'article 62 du Règlement sur l'immigration du Québec la ministre de l'Immigration, de la Francisation et de l'Intégration a le pouvoir d'émettre un certificat de sélection du Québec à une personne en situation — particulière — de détresse;

«Considérant qu'en vertu de l'article 65 du Règlement sur l'immigration du Québec la ministre de l'Immigration a le pouvoir de sélectionner un ressortissant étranger demeurant au Québec via le Programme des personnes sélectionnées pour considérations d'ordre humanitaire;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, soussignés, demandons à la ministre de l'Immigration, de la Francisation et de l'Intégration d'utiliser ses pouvoirs en vertu des règlements susmentionnés afin d'accorder un certificat de sélection du Québec à M. Mamadou Konaté en reconnaissance de sa contribution et de son dévouement pour le Québec.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président : Et cet extrait de pétition est maintenant déposé.

Il n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Questions et réponses orales

Nous en sommes maintenant à la période de questions et réponses orales, et je cède la parole à la cheffe de l'opposition officielle.

Accès à l'information sur l'évolution de la pandémie de COVID-19

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : Merci, M. le Président. Alors, questionné hier sur plusieurs sujets, le Dr Arruda a répondu, à la suite de la demande de l'opposition officielle, en commission parlementaire, et je tiens à nouveau à l'en remercier.

Plusieurs des questions sont demeurées sans réponse. Par contre, d'autres nous ont permis de mieux comprendre le processus de décision au sein du gouvernement.

Le premier ministre déclarait le 3 décembre dernier, lors de l'annulation du contrat moral, la chose suivante : «Je veux aussi préciser que la décision aujourd'hui, c'est une décision gouvernementale, ce n'est pas une demande de la Santé publique.» Il avait précisé qu'il s'agissait de la seule décision gouvernementale qu'il avait prise à ce moment‑là. Nous avons appris hier que ce n'était pas le cas, notamment en ce qui a trait à la fermeture des restaurants, des musées, à l'interdiction des purificateurs d'air.

Qu'il soit clair, M. le Président, il ne faut absolument pas que la population doute du bien-fondé des mesures sanitaires pour limiter la propagation du virus. Par contre, le gouvernement a un devoir de transparence dans les décisions qu'ils prennent. On ne reproche pas au gouvernement de prendre des décisions, M. le Président, on reproche au gouvernement de ne pas avoir dit que c'était sa décision. Gouverner, c'est choisir.

Est-ce qu'ils peuvent aussi assumer ces décisions?

• (10 h 20) •

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Bien, écoutez, M. le Président, je suis content d'avoir cette question-là de la cheffe de l'opposition officielle parce que, s'il y a bien une chose que l'on fait, dans ce gouvernement, c'est de s'assumer, et on s'assume, M. le Président, depuis le début de la pandémie. On pourrait nous accuser de manque de transparence; je pourrais vous donner la liste d'informations que nous publions depuis le début de la pandémie, le nombre de points de presse que nous avons faits sur une base régulière, le nombre de questions auxquelles nous avons répondu à l'opposition lorsqu'ils sont venus, par exemple... nous sommes venus, je m'en excuse, lors des discussions qui devaient porter sur les crédits, et qui ont porté uniquement sur la pandémie.

Nous n'avons jamais, jamais refusé, M. le Président, de répondre aux questions de l'opposition. Pourquoi? Parce que nous voulons être transparents avec les Québécois. Nous avons accepté, nous avons accepté, par voie de commission parlementaire, de laisser le Dr Arruda répondre à toutes les questions de l'opposition. Alors, je pense que la dernière chose que les Québécois comprennent... Ils savent que nous sommes transparents, M. le Président.

Le Président : Première complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition officielle.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : J'aimerais rappeler au ministre de la Santé que c'est lui-même qui avait refusé que l'opposition participe à des briefings techniques, M. le Président.

Nous avons posé des questions au Dr Arruda, et plusieurs sont demeurées sans réponse. Par contre, certaines d'entre elles étaient surprenantes. Les restaurateurs sont surpris d'apprendre que leur fermeture était une décision du gouvernement. Pourquoi, tout simplement, ne pas l'avoir dit?

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Bien, écoutez, je vais expliquer, parce que je pense que c'est important de mettre un petit peu de contexte. Parce que, lorsqu'il y a eu le témoignage du Dr Arruda, hier, puis j'ai été très, très clair puis je vais l'être encore, ça a été complété par le Dr Massé, qui fait partie de l'équipe du Dr Arruda, c'était très clair, puis je pense que l'opposition doit bien le comprendre aussi, que la recommandation avait un petit peu plus de détails de la part de la Santé publique à l'effet, M. le Président... qui disait : Bien, ce n'est pas de garder les restaurants ouverts ou fermés, mais il faudrait modifier sensiblement la façon de travailler avec eux, c'est-à-dire de réduire l'espace, d'augmenter le deux mètres, de faire une bulle familiale, et des recommandations qui se sont avérées non pratiques, et c'est pour ça que nous avons pris une décision d'agir, M. le Président.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition officielle.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : M. le Président, le premier ministre nous disait que la plupart des décisions se prenaient avec une consultation verbale de la Santé publique. Dr Arruda nous a confirmé hier qu'il y avait des avis, des recommandations, des états de situation.

À la lumière de ce qui a été dit hier par le Dr Arruda, comment est-ce que le gouvernement peut encore soutenir qu'il était complètement transparent?

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Bien, écoutez, je pense que les Québécois, là, depuis le mois de mars, s'ils savaient le nombre de décisions et d'interfaces que nous avons eues avec la Santé publique, soit au comité de gestion de crise ou dans toutes les discussions que nous avons eues... Il y a effectivement des fois où on a eu des documents. Nous les avons partagés. Je me souviens très bien, M. le Président, d'un moment où, lorsque nous avons présenté notre stratégie, par exemple, pour les zones d'alerte, qui a été félicitée par bien d'autres provinces, en passant, nous avons non seulement montré les documents qui nous avaient été recommandés, on a montré comment on les avait modifiés suite à des suggestions qu'on avait eues de personnes.

Alors, je pense qu'il y a une combinaison, M. le Président...

Le Président : En terminant.

M. Dubé : ...d'informations verbales et écrites que nous avons eues. Nous avons été transparents, M. le Président.

Le Président : Troisième complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : M. le Président, je vais prendre le ministre de la Santé au mot, puisqu'il dit qu'il est transparent. Très bien. Nous allons quitter l'Assemblée nationale pour les huit prochaines semaines. Est-ce qu'il est d'accord que nous devrions avoir des rencontres hebdomadaires, avec les chefs de l'opposition, pour discuter de la pandémie et trouver les meilleures décisions dans l'intérêt supérieur des Québécois? Est-ce qu'il accepte, à titre de transparence?

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Bien, encore une fois, je vais expliquer à la cheffe de l'opposition que je pense qu'on a été très transparents. Puis je vais prendre une liste, là, une liste, M. le Président, là, rapidement, là, des éléments : une liste des milieux de vie pour aînés publique, que l'on publie tous les jours; une liste des milieux scolaires publics sur notre site Web. On rend publiques les projections des hospitalisations, on rend publiques les projections de l'INSPQ, on diffuse la liste des cas par région, on diffuse le temps d'attente pour nos cliniques sans rendez-vous, on publie les graphiques et les hospitalisations sur nos réseaux sociaux, le nombre de prélèvements et d'analyses. On permet la prévisibilité. Et je peux continuer, là, j'en ai une liste de dizaines de choses que l'on fait et que l'on ajuste tous les jours pour que le Québec soit au courant, comment on évolue dans la pandémie, M. le Président.

Le Président : Question principale, M. le leader de l'opposition officielle.

Gestion de la pandémie de COVID-19

M. André Fortin

M. Fortin : Oui, M. le Président. Hier, en commission parlementaire, le Dr Arruda a affirmé que la Santé publique n'a pas recommandé la fermeture des restaurants et le gouvernement a choisi de les fermer quand même. Il a affirmé que la Santé publique ne recommandait pas la fermeture des musées; le gouvernement a choisi de procéder quand même. Il a affirmé que la Santé publique avait recommandé de permettre les bulles famille; le gouvernement a choisi de ne pas les permettre.

Soyons clairs, là, M. le Président, le gouvernement peut, si c'est son choix, imposer des restrictions, même si ce n'est pas la recommandation de la Santé publique, mais il doit les expliquer aux Québécois. Plutôt, le gouvernement a choisi de simplement répéter que ses décisions étaient celles de la Santé publique.

Jour après jour, les ministres du gouvernement répétaient la même chose. J'en cite un, le ministre de l'Économie : On va suivre la Santé publique, on est en réaction à la Santé publique.

Alors, est-ce que le premier ministre peut reconnaître aujourd'hui, un, l'importance des avis écrits de la Santé publique; deux, l'importance d'expliquer ses décisions au public; trois, l'importance de partager les données sur lesquelles il se base; et, quatre, la nécessité absolue de la transparence?

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Alors, écoutez, M. le Président, des fois ça me fait penser, puis j'ai vu dans un des quotidiens ce matin... J'ai l'impression que, des fois, l'opposition joue dans le film Retour vers le futur. J'aimerais ça, moi aussi, être capable de revenir en arrière puis de dire : Si je savais tout ce qui va arriver, j'aurais pris telle ou telle décision. Puis ce n'est pas ça, la réalité, M. le Président.

Aujourd'hui, là, j'aimerais rappeler aux Québécois qui nous écoutent, M. le Président, là, que nous avons 1 842 cas, aujourd'hui, 1 842 cas, M. le Président, nous avons 33 hospitalisations... 33 décès, pardon, 33 décès. Et, si ça continue, M. le Président, ça va être encore pire.

J'aimerais ça que l'opposition réponde à cette question-là : Aujourd'hui, là, de mettre autant d'emphase sur la difficulté que les restaurateurs ont eue, de la décision difficile, que nous assumons, que nous... est-ce qu'ils auraient pris la même décision et si eux autres recommanderaient de rouvrir les restaurants aujourd'hui, M. le Président?

Le Président : Première complémentaire, M. le leader de l'opposition officielle.

M. André Fortin

M. Fortin : Bon, M. le Président, le Dr Arruda a ouvert son jeu, hier, il a ouvert son livre. Il a rendu un témoignage honnête, puis on l'apprécie. Mais ça ne nous a pas empêchés de tomber en bas de notre chaise quand il a affirmé qu'aujourd'hui, là, le 10 décembre, après neuf mois de pandémie, après sept semaines où ils sont en en possession des tests rapides, on est encore en train d'élaborer la procédure pour introduire le test rapide dans les meilleurs délais. Il y a 1 842 cas, aujourd'hui, le ministre vient de le dire. Les tests rapides, on les attend depuis des mois, on les a depuis des semaines. Pourquoi ils ne sont toujours pas prêts?

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Alors, M. le Président, sur les tests rapides, j'ai répondu, je pense, au moins une dizaine de fois à la députée de Maurice-Richard, au cours des dernières semaines, puis je pense que le député de Pontiac devrait peut‑être relire les notes de ce que j'ai répondu. J'aimerais ça qu'il comprenne très bien qu'on a deux types de test rapide, on a les Panbio puis on a ID Now. Les Panbio, dont nous avons 1,1 million de tests, ils ne sont pas sécuritaires. Tous les gens, incluant la Santé publique, les autres provinces, nous disent que ces tests-là ne sont pas sécuritaires et, lorsque nous avons des tests négatifs, doivent être complétés par un test normal. Ça, c'est important de le dire, M. le Président, puis je continuerai à répondre un petit peu plus... pour ne pas faire de désinformation...

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le leader de l'opposition officielle.

M. André Fortin

M. Fortin : M. le Président, la réalité, là, c'est qu'en affirmant que les décisions prises n'étaient pas toujours les bonnes, en affirmant que le gouvernement n'adoptait pas toujours les recommandations de la Santé publique, en affirmant qu'après des mois le gouvernement ne sait toujours pas comment utiliser les tests rapides le Dr Arruda a confirmé une chose : qu'une enquête publique était nécessaire. Alors, M. le Président, cette recommandation-là du Dr Arruda, est-ce que le gouvernement a l'intention de la suivre, oui ou non?

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. Je vous dis à tous : Soyez prudents sur les termes utilisés, M. le... tout le monde, et ça va...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

M. Christian Dubé

M. Dubé : Oui, mais c'est parce que j'ai dit que je ne voulais pas que ce soit de la désinformation, je ne sais pas s'il y a un meilleur mot...

Des voix : ...

Le Président : ...je vous dis d'être prudent. Ce sont des termes sensibles. Alors, je vous demande tout simplement d'être prudents et votre collaboration.

M. Dubé : M. le Président, ça fait 10 fois que je réponds à la même question puis j'ai expliqué que l'on procède déjà, en ce moment, les Québécois doivent le savoir, là... on procède, en ce moment, dans trois hôpitaux à l'utilisation de ces tests rapides là. Puis une des raisons pour lesquelles on les utilise de la façon dont on les utilise, c'est suivant, justement, les recommandations de la Santé publique et d'autres organismes, qui disent : Soyez prudents avec les tests rapides, particulièrement avec ceux de Panbio, qui sont des tests transgéniques, vous devez vous assurer que vous les faites avec un autre test.

Alors, nous, on n'a jamais manqué de tests. Ce n'est pas comme l'Ontario ou ailleurs. Et dans... d'autres provinces ont pris la même décision que nous. Et c'est pour ça que je dis de faire attention de ne pas faire de la...

• (10 h 30) •

Le Président : Question principale, Mme la députée de Fabre.

 Rapport du Protecteur du citoyen sur la gestion de la pandémie de COVID-19
dans les centres d'hébergement et de soins de longue durée

Mme Monique Sauvé

Mme Sauvé : M. le Président, rapport d'étape de la Protectrice du citoyen, ce matin, sur la gestion de la COVID dans les CHSLD durant la première vague de la pandémie, un rapport troublant. Tous les constats d'une mauvaise gestion de crise y sont : les CHSLD ont été l'angle mort de la préparation de la pandémie; menace du virus sur les personnes âgées nettement sous-évaluée par les autorités, équipements de protection nettement insuffisants, contribution de la mobilité du personnel à la propagation du virus, mise à l'écart des proches aidants qui porte un dur coup à la santé des personnes hébergées, soins de base et de soutien annulés, renforts qui sont arrivés tardivement. Dans le rapport, on peut lire : «Les directives ministérielles pour adapter l'offre de services en CHSLD [ont] été transmises [tardivement], alors même que l'état d'urgence sanitaire était déclaré au Québec.» C'est le début d'une cascade de mauvaises décisions.

M. le Président, qu'est-ce que le ministre a à répondre aux 3 890 familles des aînés décédés en trois mois seulement, dans la première vague, en CHSLD?

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Premièrement, j'aimerais répondre à la députée de Fabre, là, quelques points.

Premièrement, on accueille avec beaucoup de sérieux la recommandation ou les recommandations de la Protectrice du citoyen, j'ai pris rapidement connaissance de son rapport, mais j'aimerais aussi indiquer aux citoyens que nous n'avons pas attendu les recommandations de la Protectrice du citoyen pour agir. Forts de ce que nous avons appris lors de la première vague, nous avons déposé, au mois d'août, un plan d'attaque pour la deuxième vague, M. le Président. Et je prenais rapidement connaissance, ce matin, du rapport de la Protectrice du citoyen, puis, chacune des cinq grandes recommandations, nous les avons déjà appliquées, M. le Président, que ce soit au niveau des équipements de protection, que ce soit au niveau des PCI, de la façon dont nous agissons avec les proches aidants.

Alors, moi, j'aimerais rassurer la population que nous avons effectivement pris acte de ce qui était arrivé dans la première vague, où c'était un nouveau virus, et nous agissons, depuis ce temps-là, très concrètement dans la deuxième vague, M. le Président.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Fabre.

Mme Monique Sauvé

Mme Sauvé : M. le Président, dans le rapport, on peut lire : «48 % des [...] travailleurs [...] ont rapporté avoir manqué d'équipements de protection, [...]en raison de la pénurie.»

«La distribution des équipements a été inéquitable entre les [...] régions...»

Elle «s'est faite au compte-gouttes dans les CHSLD».

Un travailleur dit : «Lors de la réunion de l'équipe clinique, j'ai appris qu'il restait 200 jaquettes dans les réserves alors que nous aurions dû normalement en utiliser 1 800 par jour.»

M. le Président, est-ce que le ministre peut, une fois pour toutes, admettre qu'il y a eu un manque d'équipements de protection dans les CHSLD?

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Bien, écoutez, je vais prendre en détail, là, le rapport de la Protectrice du citoyen, mais ce que j'aimerais dire aux Québécois qui nous écoutent, M. le Président, c'est que nous avons pris acte de ce qui est arrivé dans la première vague. Nous avons eu des enjeux qui étaient importants, et, je rappelle, juste en termes de pays, et on va publier prochainement les informations pour tous les achats qui ont été faits... il faut se rappeler, dans la première vague, là, que tous les pays étaient en compétition pour les mêmes produits. Tous les pays étaient dans la première vague, tous les pays avaient à acheter des équipements. Nos gens, nos responsables au ministère de la Santé ont fait le maximum de ce qu'ils pouvaient faire, M. le Président. Et c'est pour ça que nous nous sommes bien préparés à la deuxième vague, M. le Président.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Fabre.

Mme Monique Sauvé

Mme Sauvé : M. le Président, hier, j'ai questionné le directeur de la Santé publique sur les études qui ont amené le gouvernement à refuser l'accès aux proches aidants. Réponse : Pas d'études, pas de données. Je lui ai ensuite demandé qu'est-ce qui est différent pour la protection des proches aidants entre la première et la deuxième vague. Le Dr Arruda m'a répondu : On a beaucoup plus de matériel de protection.

M. le Président, est-ce qu'on a laissé des aînés finir leurs jours seuls, loin de leurs proches, en raison d'un manque de masques?

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : M. le Président, sur chacun des points qui sont soulevés ce matin par la députée de Fabre je répète la même chose : Nous avons pris acte de ce qui est arrivé dans la première vague. Nous n'avons pas attendu l'excellent rapport de la Protectrice du citoyen. Je le dis, il est très bon, nous allons en prendre connaissance et nous allons l'appliquer, mais nous avons déjà fait l'essentiel des recommandations. J'en ai pris acte ce matin. Nous allons voir ce qui peut être ajouté. Mais, je vous dis, depuis notre début... notre dépôt, pardon, au mois d'août, du plan de la deuxième vague, nous avons agi, et on le voit, les résultats sont très, très différents dans la deuxième vague, puis ce que je pense que les gens, les Québécois, en prennent acte, et je les remercie de leur support. Merci, M. le Président.

Le Président : Question principale, M. le député de Rimouski.

Enquête sur la gestion de la pandémie de coronavirus dans les
centres d'hébergement et de soins de longue durée

M. Harold LeBel

M. LeBel : Ça vaut la peine de lire le rapport de la Protectrice du citoyen, j'invite tous les députés à aller le voir puis le lire.

Je vous fais part de quelques témoignages rendus publics dans le rapport : «Les règles sur les mesures sanitaires étaient dictées sans arrêt[...]. "Allez dans votre chambre, il est interdit de sortir, on va vous attacher."»

«À cause du manque d'équipement, nous avons dû parfois choisir entre deux patients en détresse respiratoire...» Choisir.

«J'ai vécu l'horreur à force d'assister au décès d'autant d'usagers auxquels j'étais attachée.»

«Au pire de la crise, le personnel et les usagers étaient laissés à eux-mêmes.»

«...j'ai dû travailler sept jours sur sept et 12 heures par jour.»

M. le Président, il y a eu 4 000 décès ce printemps. Les résidents des CHSLD, les proches aidants, le personnel soignant ne méritent-ils pas une enquête publique, une vraie enquête publique, autant que les victimes du viaduc de la Concorde à Laval?

Est-ce qu'on peut s'entendre à avoir une enquête publique là-dessus, sur ce qui s'est passé?

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Écoutez, j'accueille la demande du député de Rimouski, parce que je pense qu'il faut se rappeler, M. le Président, que, premièrement, on a institué une enquête avec la Commissaire à la santé, et, je le rappelle, cette commissaire-là, on l'a dit plusieurs fois, mais il est peut-être important de le rappeler, elle a tous les moyens nécessaires pour faire toutes les enquêtes, toutes les analyses qu'elle doit faire sur la performance du système de santé auxquelles réfère le député de Rimouski.

Mais j'aimerais aussi rappeler que, depuis les événements de la première vague, nous avons ajouté plus de 7 000 préposés, 7 000 préposés dans les CHSLD, nous avons ajouté 15 000, 15 000 personnes qui sont des champions de PCI, qu'on appelle, pour la protection et le contrôle des infections. Malgré la grande contagion communautaire que nous vivons présentement, je l'ai dit tout à l'heure, M. le Président, 1 800 cas aujourd'hui, on a réussi à stabiliser la situation dans les CHSLD. Moi, je suis les RPA tous les jours, j'en ai parlé depuis quelques semaines, la situation semble se stabiliser. Je pense qu'il y a une très, très grande différence, M. le Président, entre la première et la deuxième vague.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Rimouski.

M. Harold LeBel

M. LeBel : Parlons de l'enquête de la Commissaire à la santé. J'ai ici le formulaire de consentement si je veux participer à cette enquête-là. Si je signe le formulaire de consentement, je ne peux pas dire un mot de ce que j'aurai entendu pendant l'enquête, je ne pourrai même pas parler de ce que j'ai vu. Ça va être l'opacité, vraiment, c'est contraire à la transparence.

Ce qu'il faut, ce que les familles méritent, ce que le personnel mérite, c'est une enquête publique, qu'on puisse parler. Ce que j'ai ici entre les mains, c'est l'opacité, c'est le contraire de la transparence.

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Bien, peut-être, premièrement, que j'aimerais que le député de Rimouski dépose le document qu'il vient de citer, s'il vous plaît, parce qu'avant de répondre ou de commenter sur...

Document déposé

Le Président : M. le leader du... Merci.

Une voix : ...

Le Président : Oui, oui, tout à fait.

M. Dubé : ...parce qu'avant de répondre à la question spécifique, j'aimerais mieux prendre connaissance du document.

Mais j'aimerais rappeler le principe, M. le Président. La Commissaire à la santé, Mme Castonguay, avec toute l'expérience qu'elle a, elle a toute la latitude de poser toutes les questions qu'elle veut.

Je vais laisser le député de Rimouski me donner le document, je vais prendre connaissance du document, et après ça, au besoin, j'irai vérifier si les choses se font de la façon dont elles doivent se faire dans une commission d'enquête.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Rimouski.

M. Harold LeBel

M. LeBel : Ce qu'on a dans le rapport du Protecteur du citoyen, c'est effrayant, les commentaires qu'on a là‑dedans. Je dis qu'il faut aller voir ce qui se passe puis rendre une enquête publique. La Commissaire à la santé nous dit : Oui, je vais faire l'enquête indépendante, mais, si vous voulez participer à l'enquête, vous devez signer une feuille de consentement où vous allez vous la fermer, pour l'avenir, vous n'allez dire aucun mot sur ce que vous allez avoir entendu pendant l'enquête. C'est le contraire de la vérité, c'est le contraire de la transparence, c'est de l'opacité. Il ne faut pas... Les familles ne méritent pas ça.

Le Président : M. le ministre de... Mme la présidente du Conseil du trésor.

Mme Sonia LeBel

Mme LeBel : Oui, peut-être, sur la base de ce qu'est une enquête publique, M. le Président, ce que réclame l'opposition, en termes d'enquête publique, c'est standard, là, qu'on ne puisse pas prendre connaissance de ce qui se passe dans le déroulement de l'enquête. D'ailleurs, je vois des députés de l'opposition qui participent présentement à l'enquête sur la DPJ, qui ont dû signer le même engagement. Également, ma collègue de Repentigny a dû signer le même engagement pour participer à l'enquête publique de la DPJ. Moi-même, quand j'étais dans la commission Charbonneau, j'ai dû signer le même engagement. Et c'est pour ça qu'un certain député de Québec solidaire s'est désisté de l'enquête où il avait été invité, parce qu'il voulait pouvoir continuer à interroger dans cette Chambre.

Donc, c'est de la nature même d'une enquête publique, ce genre d'engagement de confidentialité.

Le Président : Question principale, Mme la députée de Sherbrooke. Vous êtes la seule à avoir la parole.

Pénurie de places en service de garde

Mme Christine Labrie

Mme Labrie : M. le Président, on parle beaucoup de pénuries, ici, mais on ne parle pas assez de la pénurie de places en service de garde. J'ai lancé un appel aux parents qui cherchent une place et j'ai reçu 2 000 réponses. 80 % ne sont pas retournées au travail, ont réduit leurs heures ou ont laissé passer une offre d'emploi parce qu'elles n'ont pas de place en service de garde. Là-dedans, il y a 380 travailleuses de la santé, 387 travailleuses de l'éducation dont on se prive parce qu'on n'est pas capables de leur offrir une place pour leurs enfants. On parle de 170 infirmières, 105 enseignantes, des préposées, des éducatrices spécialisées, des travailleuses de tous les secteurs, des travailleuses qui ne demandent qu'à retourner travailler.

Et savez-vous quoi? Il n'y a pas juste 2 000 parents qui cherchent une place, en ce moment, il y en a presque 50 000. Imaginez les milliers de personnes dont on se prive, actuellement, il y a des pénuries dans tous les secteurs, juste parce qu'on reste les doigts croisés devant la pénurie d'éducatrices.

Pourquoi on ne s'inspire pas de ce qu'on a fait pour les préposés aux bénéficiaires pour régler enfin la pénurie d'éducatrices?

• (10 h 40) •

Le Président : M. le ministre de la Famille.

M. Mathieu Lacombe

M. Lacombe : Merci beaucoup, M. le Président. D'abord, je vais commencer en disant, en tout respect, que, cette comparaison avec ce qui s'est passé dans nos CHSLD, je refuse de la faire, parce qu'on parle d'une situation qui était complètement différente. On parle d'une situation où il y avait des vies qui étaient en jeu, une situation où il y a eu des centaines de décès. Donc, moi, je ne ferai pas de comparaison entre ces deux situations-là, où on avait une situation dans les CHLSD où, si on n'embauchait pas, il allait continuer d'y avoir des décès. Donc, je pense qu'il faut prendre la bonne mesure de comparaison.

Maintenant, est-ce que ça veut dire qu'il ne faut pas s'occuper de ce qui se passe dans les services de garde éducatifs à l'enfance? Bien sûr que non.

Ça me fait sourire, quand la députée de Sherbrooke dit qu'on reste les bras croisés, parce qu'imaginez-vous, M. le Président, que ce n'est pas le cas. Donc, depuis déjà plusieurs mois, on est au travail. C'est clair que la pandémie, là, ça a fait en sorte que 100 % des effectifs du ministère de la Famille étaient affectés à faire en sorte que ça se passe bien sur le terrain, on a dû mettre ce dossier-là de côté pendant quelques mois, quelques semaines, mais ça fait déjà un bon moment qu'on a repris ce dossier-là, qu'on le fait en collaboration aussi avec les partenaires. Parce qu'on avait une rareté de main-d'oeuvre, auparavant, dans le réseau, on n'avait pas une pénurie encore...

Le Président : En terminant.

M. Lacombe : ...mais la pandémie a fait en sorte que ça s'est transformé en pénurie. On ajuste. Et on a fait une annonce hier à ce sujet-là.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Christine Labrie

Mme Labrie : Parlons-en, de cette annonce. Le plan du ministre, en ce moment, c'est d'inviter les gens à postuler sur des postes qui n'intéressent personne à cause des mauvaises conditions. Il n'y en aura pas, de miracle. Si on veut trouver les milliers d'éducatrices qu'il manque, il faut les payer comme du monde. On le sait, ce qui a marché avec les préposés : une formation intensive rémunérée, un salaire décent.

Pour ouvrir un milieu familial régi, ça prend un cours de secouriste puis une formation de 45 heures. Si on décide de les payer comme du monde puis qu'on les aide, je suis certaine qu'en quelques mois on est capable de trouver des milliers d'éducatrices. Qu'est-ce qu'on attend?

Le Président : M. le ministre de la Famille.

M. Mathieu Lacombe

M. Lacombe : Merci, M. le Président. Bien, d'abord, hier, il fallait poser un geste. Et, ce geste-là, c'est important de le poser parce qu'on a besoin de gens pas dans trois ans, pas dans deux ans, pas dans six mois, on a besoin de gens demain matin. Donc, s'il y a des gens qui nous écoutent — je sais qu'ils doivent être nombreux — si vous vous cherchez un emploi, il y en a, des emplois disponibles.

Et ce qu'on a fait hier, ça peut sembler anodin, mais, quand on comprend bien la complexité du réseau des services de garde éducatifs à l'enfance, on comprend que ça ne l'est pas du tout. Pour la première fois, le ministère de la Famille accompagne le réseau... parce que le ministère n'est pas l'employeur, je pense que la députée de Sherbrooke le sait bien, mais le ministère est là pour débloquer les fonds pour nous assurer que le réseau puisse opérer.

Le Président : En terminant.

M. Lacombe : Auparavant, les employeurs, donc les CPE, les garderies, y allaient chacun de leur côté. Hier, on leur a donné...

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Christine Labrie

Mme Labrie : Il y a 80 % des familles qui cherchent une place, en ce moment, qui s'appauvrissent, il y a des milliers de femmes qui perdent leur indépendance économique alors qu'on a vraiment besoin d'elles. Juste en Estrie, j'ai trouvé 25 enseignantes et 30 infirmières qui ne travaillent pas comme elles voudraient à cause de la pénurie, 10 infirmières en Gaspésie, 18 en Mauricie.

La vraie question, ce n'est pas si on a la capacité de payer les éducatrices comme du monde, c'est si on a la capacité de ne pas le faire. Cette année, on a perdu plus de 3 000 places à cause de fermetures dans le réseau. Le bilan de la CAQ, c'est une perte nette de places en services de garde.

Le Président : M. le ministre de la Famille.

M. Mathieu Lacombe

M. Lacombe : Merci, M. le Président. On est en action. Depuis qu'on est arrivés, il n'y a jamais eu autant d'action dans le réseau des services de garde éducatifs à l'enfance. Donc, évidemment que ce qu'on a présenté hier, d'abord, c'est un outil pour faire en sorte que toutes les offres d'emploi puissent être au même endroit. Donc, ça, ça ne s'était jamais fait dans le passé. Et ensuite — je vois des collègues du Parti libéral rigoler — bien, on s'attaque au fait que, depuis 2014... 2014, austérité du gouvernement libéral, bien, les inscriptions sont en chute libre, on a perdu plus de 40 % d'inscriptions. Donc, plutôt que rire, ils devraient plutôt applaudir, en ce moment, ce qu'on fait avec les partenaires du réseau pour faire en sorte qu'on valorise la profession. On aura un plan, dans les prochains mois, qu'on travaille avec les partenaires du terrain.

Le Président : Question principale. Question principale, Mme la députée de Saint-Laurent.

Achat d'appareils visant l'amélioration
de la qualité de l'air dans les écoles

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : Au Parti libéral du Québec, on ne rit pas, on lit. On lit Harvard, Yale, Oxford, CDC, OMS, Santé Canada, et j'en passe, et plus récemment encore l'étude allemande sur la transmission par voie aérienne du coronavirus. L'Allemagne a mis plus de 500 millions de dollars pour acheter des purificateurs d'air avec le filtre HEPA. L'Allemagne a même présenté comment on devait les installer, comment, même, qu'on devait faire avec la disposition des bureaux pour s'assurer de la qualité de l'air et surtout minimiser le risque de propagation. Hier, on a entendu le Dr Arruda ainsi que le Dr Massé, ils n'ont pas interdit les purificateurs d'air. Par contre, effectivement, ça nous prend un plan de match, ça nous prend les bons purificateurs d'air, avec le bon calibrage et, effectivement, le bon filtre.

Alors, aujourd'hui, je demande pour une énième fois au ministre : Faites comme l'Allemagne, présentez-nous votre plan et laissez, s'il vous plaît, les enfants et les enseignants respirer de l'air de qualité.

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, la première condition pour combattre la contamination par aérosols, c'est de mieux ventiler les classes, de bien aérer les classes. C'est pour ça qu'on suit les directives de la Santé publique, de l'Institut national de la santé publique, donc qu'on les diffuse, qu'on les suit. C'est pour ça aussi qu'on a déposé un rapport puis qu'on a demandé aux centres de services scolaires de bien entretenir, réparer les systèmes de ventilation, s'assurer que les fenêtres s'ouvrent et qu'on peut le faire fréquemment.

Moi, je me surprends que ma collègue revienne encore avec cette question-là jour après jour, parce qu'elle semble aller à l'envers des directives de la Santé publique. Moi, je l'ai entendue hier à QUB Radio faire de l'esbroufe sur le dos de la Santé publique. Hier, c'était le temps d'aller interroger Dr Arruda, Dr Massé; elle n'était pas présente. Sa formation politique n'a posé aucune question sur...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! Là, je vais vous demander, encore une fois, votre collaboration. Ce sont des questions sensibles, importantes. Nombreux et nombreuses sont les Québécoises et les Québécois qui nous écoutent sur des sujets comme ceux-ci. Il y a des rôles légitimes qui sont faits par les députés, par les parlementaires, alors on ne doit pas remettre en question la légitimité du rôle de ces parlementaires. D'autant plus... Je vous demande également d'être prudents dans les termes à utiliser. Il y en a quelques-uns, vous les savez, sur le lexique. Je n'interviens pas tout le temps, mais vous les savez, c'est sensible.

Poursuivez. Et gardons le ton et l'attitude, s'il vous plaît.

M. Roberge : M. le Président, à ce moment-là, la cheffe de l'opposition officielle aurait pu faire part des préoccupations, des questions de sa collègue, mais, non, il n'y a pas eu de questions par rapport à la ventilation, par rapport aux purificateurs d'air. C'est comme s'ils avaient déjà toutes les réponses, au Parti libéral.

Le Président : Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : Moi, je suis capable de travailler sans aucune partisanerie. Et j'ai même félicité le député de Gouin, qui, lui, a posé la question sur les purificateurs d'air.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

Mme Rizqy : Vous pouvez rire, vous pouvez vraiment rire, mais la différence, c'est que le député de Gouin a posé la question, puis moi, je suis capable de dire : Oui, effectivement, c'était une bonne question, puis, la réponse, on l'a eue. Donc, nous, on n'a pas besoin de se répéter lorsqu'on pose des questions.

Par contre, j'entends le ministre parler, mais qui ne répond toujours pas à la question puis à la préoccupation des parents. Il y a une école primaire, dans le comté de l'ancien ministre de la Santé, un enfant sur quatre est infecté à la COVID. En êtes-vous fiers?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, c'est vrai qu'hier le député de Gouin a bien fait son travail. Je le remercie d'avoir posé des questions à Dr Massé et M. Arruda, ça a permis de clarifier les choses.

Je vais lire une réponse de Dr Massé. Il a dit, concernant la question des purificateurs d'air : «Dans les salles de classe [...] ça n'a pas été démontré. [Et] ça peut nuire aussi. [...]il faut que ce soit très près des personnes.» Dans un très grand local, c'est plus difficile. «[Dans] les classes, c'est [...] trop grand pour qu'un appareil ou même deux [...] puissent faire la différence. Et là où ça peut nuire, comme [dit le] Dr Perron, [...]si ce n'est pas installé parfaitement, [...]si [...] pas bien entretenu...» Ça peut nuire. Il y a «un risque potentiel qui existe». Ce risque fait qu'on ne recommande pas l'utilisation des purificateurs d'air, «mais on ne va pas l'interdire».

Le Président : En terminant.

M. Roberge : Donc, ça, c'étaient des questions qui amenaient des précisions utiles.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : Donc, pourquoi le ministre l'a interdit? Pourquoi que les écoles anglophones ont le droit d'en avoir? Pourquoi que les écoles privées ont le droit d'en avoir, mais pas les 72 centres de services francophones? Comme par hasard, les 72 doivent dire non, puis il voudrait nous faire croire qu'ils chantent tous la même chanson sans avoir eu un grand maestro pour leur dire quoi chanter.

Vous avez raison de dire que ça prend un plan. Vous avez raison de dire qu'il faut bien les installer. C'est d'ailleurs pour cela que la chancelière allemande, que d'ailleurs c'est une scientifique, a vraiment mis un plan : Voici un purificateur, deux purificateurs, trois purificateurs...

Le Président : M. le ministre de l'Éducation, en réponse.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : Oui, M. le Président, dans la liste des choses, les premières, c'est la distanciation, c'est le respect des consignes sanitaires, c'est le respect des groupes étanches, des bulles-classes. Évidemment, l'aération, la ventilation fait partie des choses qui sont nécessaires. C'est pourquoi on a diffusé dans le réseau scolaire, depuis le début, les directives de la Santé publique et c'est pourquoi elles sont appliquées. Et en ce moment on est allés même plus loin, on a bâti un protocole de test avec des prises d'échantillons, encore avec les experts de la Santé publique, et on aura bientôt les résultats. Mais, je veux rassurer la population, on fait tout ce qui est nécessaire...

Le Président : En terminant.

M. Roberge : ...pour prévenir les éclosions et la propagation.

Le Président : Question principale, M. le député de Jonquière.

Gestion des sols contaminés à Montréal

M. Sylvain Gaudreault

M. Gaudreault : Oui. M. le Président, on a appris ce matin des informations très préoccupantes sur la gestion des sols contaminés à la ville de Montréal. Le gouvernement du Québec a versé 175 millions afin de décontaminer les terrains dans l'est de Montréal. Problème : selon la ville, c'est le ministère de l'Environnement qui a demandé de changer les conditions des subventions afin de permettre l'enfouissement des sols contaminés en Ontario. Cette diminution de nos exigences environnementales est déjà inacceptable, mais de savoir qu'en plus la demande vient du ministère de l'Environnement, c'est un scandale. On a une expertise de pointe, au Québec, en matière de décontamination de sols, avec des entreprises qui attendent juste d'obtenir des contrats pour faire travailler leur monde, notre monde.

Comment le gouvernement peut-il cautionner une telle décision du ministère de l'Environnement?

• (10 h 50) •

Le Président : M. le ministre de l'Agriculture.

M. André Lamontagne

M. Lamontagne : Oui. M. le Président, je remercie mon collègue pour sa question. Ce qu'il faut comprendre, dans ce dossier-là, c'est qu'il y a eu une directive qui nous a été envoyée de la part de la direction de l'administration de la justice du ministère de l'Environnement qui nous faisait part que cette clause-là s'inscrivait en faux en lien avec les accords interprovinciaux que notre gouvernement signe avec nos partenaires canadiens et puis que la municipalité de Montréal et puis que le gouvernement du québécois s'exposaient à des poursuites dans ces dossiers-là. C'est suite à ces avis-là que le ministère a dû procéder à ces changements-là. Mais je veux rappeler à mon collègue que la clé, dans ce dossier-là, c'est toute la question de la traçabilité des sols. Puis je vais lui rappeler encore que notre gouvernement a été très proactif à ce niveau-là. Dans les mois qui ont suivi notre entrée au pouvoir, on a déposé un règlement sur la traçabilité des sols, qui va devenir en vigueur ce printemps, et présentement on est à créer une plateforme de traçabilité qui va nous permettre, de l'excavation jusqu'à l'enfouissement, en fonction du niveau de contamination, là, de faire un suivi des matériaux qui vont être excavés. Alors, je veux rassurer le collègue, là, qu'on est très proactifs sur le dossier de la contamination des sols, M. le Président.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Jonquière.

M. Sylvain Gaudreault

M. Gaudreault : Oui, on apprend beaucoup de choses, là, d'abord que c'est vraiment le ministère de l'Environnement qui a envoyé la demande à la ville. On veut décontaminer nos sols, on ne veut pas les enfouir chez nos voisins, en Ontario. On parle de 175 millions de nos taxes et de nos impôts, M. le Président.

Moi, ce que je veux savoir, là, c'est : Quand, qui, comment le ministère de l'Environnement a exigé de la ville de Montréal le changement à cette entente-là, par quel décret, comment ça a été fait?

Le Président : M. le ministre de l'Agriculture.

M. André Lamontagne

M. Lamontagne : M. le Président, je vais rappeler à mon collègue qu'on signe des ententes, le Québec, avec nos partenaires canadiens. Et puis, dans le cadre du dossier auquel mon collègue fait référence, il y a eu un avis de la Direction des affaires juridiques du ministère qui a dit qu'on s'exposait... que la ville de Montréal s'exposait à des poursuites, que le gouvernement du Québec s'exposait à des poursuites, et c'est dans la foulée de ces avis-là que les changements ont été apportés, M. le Président.

Mais je rappelle encore que la clé, dans toute la question de la contamination des sols, c'est la traçabilité, et je peux vous assurer, puis j'assure mon collègue... et il sait, mon collègue, à quel point on est proactifs dans ce dossier‑là et que tout le travail qui a été fait pour s'assurer du suivi...

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Jonquière.

M. Sylvain Gaudreault

M. Gaudreault : C'est sûr que la meilleure solution, c'est de ne pas être dans le Canada. Moi, je suis bien d'accord avec ça. Au projet de loi n° 66, une chance que j'étais là pour changer les choses et forcer la décontamination plutôt que l'enfouissement, parce que la CAQ, visiblement, ne s'en occupe pas assez.

Le ministre nous parle de traçabilité, je suis d'accord. Je veux savoir : Est-ce que, pour l'avenir, seule et seulement la décontamination des sols, au Québec, sera favorisée et qu'elle deviendra la règle et non l'exception, la règle, dans le règlement sur la traçabilité dont il nous parle?

Le Président : M. le ministre de l'Agriculture.

M. André Lamontagne

M. Lamontagne : Bien, M. le Président, je suis heureux de voir que mon collègue souligne l'ouverture et l'accueil que ma collègue ministre du Conseil du trésor a accordés à sa demande d'inscrire dans le projet de loi n° 66 de faire un lien entre le Plan québécois des infrastructures et puis la question de la décontamination des sols. Je vous dirais que cette plateforme de suivi, si on veut, de la traçabilité des sols va être une clé dans la gestion future de tout ce qui va découler d'excavations, dans les travaux d'immobilisations. Alors, on est tout à fait en ligne avec les préoccupations du collègue, à savoir l'importance de décontaminer, l'importance de suivre... en fonction des réglementations, naturellement, l'importance de suivre... à partir de l'excavation jusqu'à l'enfouissement ou au traitement, l'importance de suivre les sols.

Le Président : Question principale, Mme la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.

Atteinte des cibles en matière de création d'aires protégées

Mme Émilise Lessard-Therrien

Mme Lessard-Therrien : Merci, M. le Président. Richard Desjardins disait : Tout le monde sait qu'une forêt, ça ne vaut rien tant qu'elle n'est pas à terre. Ça décrit bien la pensée du ministre des Forêts. En fait, le ministre est bon pour deux choses : garantir notre territoire et nos forêts aux compagnies forestières et bloquer la création d'aires protégées. Et tant pis pour la majorité de la population québécoise qui souhaite qu'on protège davantage notre territoire naturel.

Le ministre a le pouvoir d'autoriser plusieurs aires protégées, les projets sont sur la table, mais il les bloque. Je donne un exemple au Lac-Saint-Jean. Les citoyens se mobilisent depuis plus de 10 ans pour créer un parc le long de la rivière Péribonka, un joyau du Québec. C'est un territoire qui abrite des caribous forestiers et des forêts vieilles de plus de 250 ans, il n'est même pas bon pour la coupe. Tout est prêt, les plans sont dessinés, et le ministère de l'Environnement l'a recommandé. Il manque juste le O.K. du ministre des Forêts.

Est-ce que le ministre va autoriser la création du parc de la rivière Péribonka?

Le Président : M. ministre des Forêts, de la Faune et des Parcs.

M. Pierre Dufour

M. Dufour : M. le Président, juste pour dire à ma collègue, il y a beaucoup de travail qui se fait, présentement, entre notre ministère et le ministère de l'Environnement de mon collègue, M. Charette. Ce qu'il est bien important de comprendre là-dedans, c'est qu'il y a des enjeux. Il y a des enjeux, comme elle mentionne, de forêt, il y a enjeux, naturellement, d'aires protégées, de biodiversité, on est tous conscients de ça, mais il faut travailler avec un équilibre et une agilité dans le dossier, et ça, je pense que c'est le secteur qui est le plus important.

Il ne faut pas, jamais oublier une chose : on arrive, nous autres, en poste, en 2018, il y a des aires protégées qui sont techniquement reconnues depuis 2012, et on essaie, justement, de faire la situation parfaite pour être capables de faire une harmonie dans les situations. Que ce soit l'exemple qu'elle nous présente, rivière Péribonka, ou d'autres projets, nous, ce qui est important, c'est d'arriver à un juste milieu pour être capables d'avoir une valeur économique et une valeur de protection du territoire. Donc, c'est là-dessus qu'on travaille présentement.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.

Mme Émilise Lessard-Therrien

Mme Lessard-Therrien : Le ministre vit encore à l'époque où l'on vendait notre forêt aux Américains. En 2020, on peut couper de manière écologique. Le ministre a d'ailleurs des excellents exemples dans sa propre région, des forestières qui sont capables de s'asseoir autour de la même table que les communautés autochtones, que la SNAP‑Québec pour protéger le caribou forestier et du territoire à haute valeur écologique.

Pourquoi certaines forestières sont capables d'arriver en 2020, et pas le ministre?

Le Président : M. le ministre des Forêts, de la Faune et des Parcs.

M. Pierre Dufour

M. Dufour : Nous sommes en 2020, il n'y a pas de trouble avec ça, jeune dame, mais, M. le Président...

Une voix : ...

M. Dufour : Bien oui, on va le préciser. Mais une chose qui est importante à comprendre, je le répète : ce n'est pas seulement que les forestières, avec lesquelles on travaille. On travaille entre les ministères, on discute des situations. Lorsqu'on nous demande des aires protégées de 2012 qui ont été établies et qu'on veut les agrandir, c'est ce qu'on nous demande présentement, on doit, nous, de notre côté, voir le juste milieu entre les deux événements. Donc, c'est pour ça qu'il y a beaucoup de discussions qui se font entre nos deux ministères, présentement. Et, lorsqu'on parle de bunker, que le ministre de la Forêt met un stop sur tout l'ensemble du dossier, un instant. Je peux dire une chose, on a un travail de...

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.

Mme Émilise Lessard-Therrien

Mme Lessard-Therrien : M. le Président, c'est à cause des réponses comme ça, de manque de vision que le Québec va complètement rater sa cible d'aires protégées prévue cette année. Le gouvernement devrait avoir deux fois plus d'aires protégées qu'en ce moment.

Est-ce qu'il faudrait renommer le ministère du ministre le ministère des Forestières... ou, mieux encore, le ministre de la Forêt contre la Faune et contre les Parcs? Au moins, on aurait l'heure juste.

Le Président : Je vais vous demander, évidemment... Je pense...

Des voix : ...

Le Président : M. le leader du gouvernement. M. le leader du gouvernement. Oui, je comprends...

M. Jolin-Barrette : ...ce sont des propos blessants, ce sont des propos... on prête des intentions au ministre. Écoutez, on a laissé aller la députée de Rouyn-Noranda à plusieurs reprises, elle est à sa troisième question. Honnêtement, nous savons qu'elle est capable de poser une question avec sa grande qualité de... une question qui est respectueuse. Et, je pense, pour la fin de nos travaux, on devrait maintenir un ton respectueux, M. le Président.

Le Président : D'abord, je veux vous dire, hein, vous le savez bien... M. le leader, je vais vous donner votre petite seconde, mais vous le savez tous, on ne joue pas avec les titres, bien sûr, et vous le savez. Je pense que c'est très clair, pas besoin de le rappeler, pas besoin de faire de débat là-dessus non plus. Alors, de fait, je vous redemande de travailler, avec toute l'expérience que vous avez, avec des propos qui n'attaquent pas les titres ou la légitimité du travail qui est fait. M. le leader du deuxième groupe.

M. Nadeau-Dubois : M. le Président, je remercie le leader du gouvernement d'avoir permis à la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue de poser trois questions, tel que c'est prévu dans le règlement.

Le Président : M. le leader...

Une voix : ...

Le Président : Non, je comprends, mais, M. le leader, je m'excuse, le temps file, on est en période de questions...

Une voix : ...

Le Président : Non, mais je viens de dire... Puis, je pense, ça va directement avec ce que je viens de vous dire. Je vous entends bien, mais je vais donner à la députée le soin de poursuivre sa question. Mme la députée, à vous la parole.

Mme Lessard-Therrien : On aurait juste l'heure juste, M. le Président, si c'était plus clair, nommé ainsi. Voilà.

• (11 heures) •

Le Président : M. le ministre des Forêts, de la Faune et des Parcs.

M. Pierre Dufour

M. Dufour : Bien, premièrement, M. le Président, si ma collègue, elle veut changer le titre du ministère et mon poste, bien, elle peut toujours déposer un projet de loi à cet effet-là. Mais, autrement que ça, je pense qu'il est important de mentionner que, justement, on travaille sur le 17 %, et ça, c'est l'objectif de base qui est en place, qui est supposé... qu'on veut atteindre pour le 31 décembre 2020, et c'est le travail qu'on fait présentement avec mon collègue du ministère de l'Environnement pour arriver à un juste milieu, et un équilibre, et une agilité pour l'ensemble des utilisateurs de la forêt. Merci.

Le Président : Question principale, M. le député de LaFontaine.

Rapport de la Commissaire à l'éthique et à la déontologie au sujet
du ministre de l'Économie et de l'Innovation

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : M. le Président, hier, les députés de la Coalition avenir Québec ont voté contre le rapport de la Commissaire à l'éthique qui recommandait une réprimande envers le ministre de l'Économie et de l'Innovation pour trois manquements à notre code d'éthique. Le ministre s'est notamment placé dans une situation de conflit d'intérêts.

La commissaire termine son rapport en confirmant que le ministre, tant qu'il ne vendra pas les intérêts qu'il détient dans une compagnie spécifique, sera en infraction. Elle confirme même que, si le manquement perdure, elle n'aura pas d'autre choix que de se ressaisir à nouveau de l'affaire et considérer les autres sanctions. La commissaire, M. le Président, le dit clairement : «...le ministre ne peut demeurer en situation de manquement au code pendant l'entièreté de son mandat.»

M. le Président, quelles sont les intentions du ministre? Entend-il se conformer à notre code d'éthique? Et quand?

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, nous avons pris acte du rapport de la Commissaire à l'éthique relativement au dossier du ministre de l'Économie, le ministre de l'Économie, qui est un homme de grande qualité et qui a décidé de s'investir pour le Québec au service public, M. le Président, en se présentant aux élections en tant que député de Terrebonne et a été élu par ses concitoyens.

M. le Président, le ministre a eu l'occasion de discuter avec la commissaire, de lui présenter ses excuses, et s'est engagé à régulariser sa situation pour dissiper tout malentendu. C'est ce qu'il s'est engagé à faire, M. le Président, et c'est ce qu'il va faire. Mais il y a une chose qui est sûre, M. le Président. Dans notre institution, il est fondamental de s'assurer de pouvoir compter sur des gens de la qualité du ministre de l'Économie, qui connaît bien l'économie, qui est une personne qui, dans le domaine privé, M. le Président, a réussi avec des succès personnels, s'est investi à l'intérieur de différentes entreprises, a réussi à créer de la richesse pour les Québécois, a réussi à créer des emplois, M. le Président, à travers le Québec. Et il décide, M. le Président, de faire le choix de venir au gouvernement, au bénéfice des Québécois, pour créer davantage de richesse pour tous les Québécois et surtout pour développer l'économie du Québec, pour créer des emplois de qualité, qui va bénéficier à tous les Québécois, M. le Président. On doit souligner son engagement de s'investir pour le Québec et les Québécois...

Le Président : Question principale, Mme la cheffe de l'opposition officielle.

Rencontres avec les chefs de parti au sujet de l'évolution de la pandémie

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : Merci, M. le Président. Là, je veux m'adresser aux Québécois, M. le Président, qui veulent que le gouvernement collabore avec les oppositions. On est venus en Chambre depuis le mois de septembre et on a fait plusieurs propositions au gouvernement. On a demandé d'avoir des rencontres hebdomadaires avec le premier ministre, on nous a dit non. On a demandé de faire partie de briefings techniques, on nous a dit non. On a demandé d'avoir des plans sur la ventilation, on nous a dit non. On a demandé d'avoir des plans spécifiques par rapport au déploiement des tests rapides, la réponse est encore non.

Puis honnêtement, M. le Président, pour la comparution du Dr Arruda en commission, la réalité, c'est que lui‑même a dit qu'il voulait participer, ça devenait être gênant de dire non. Ce n'est pas par grandeur d'âme, là, M. le Président, que tout ça, ça s'est passé.

La transparence, M. le Président, la transparence, ce n'est pas juste un mot dans le dictionnaire. La transparence, là, c'est une manière de se gouverner.

Ma question, ma question très spécifique : Il va y avoir huit semaines, huit semaines où nous ne serons pas en Chambre. Est-ce que le gouvernement peut accepter de travailler avec les oppositions et de faire des rencontres hebdomadaires, pendant ces huit semaines qui vont être critiques pour l'ensemble des Québécois?

Le Président : M. le leader du gouvernement, s'il vous plaît.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, le gouvernement travaille sans relâche avec les oppositions. Vous le voyez, à quel point on collabore bien durant les différents forums que nous avons ici, à cette Assemblée, et même extraparlementaires, M. le Président. Et nous continuerons de travailler en collaboration avec les partis d'opposition et surtout d'être transparents à l'égard de la population, M. le Président.

On ne compte pas le nombre de conférences de presse, M. le Président, que le ministre de la Santé a données, que le directeur national de la santé publique a données, que le premier ministre a données, M. le Président. S'il y a une chose qu'on ne peut pas reprocher au gouvernement de la CAQ, c'est de ne pas être transparent, M. le Président. Nous sommes transparents, nous donnons les informations. Et, dans cette situation particulière de crise, M. le Président, le fait que le ministre de la Santé s'adresse pratiquement à tous les jours à tous les Québécois, M. le Président, c'est remarquable, et il faut souligner le travail constant du député de La Prairie, du ministre de la Santé, qui jour après jour travaille pour s'assurer de mettre fin à cette pandémie, pour faire en sorte de s'assurer que la population québécoise pourra lutter contre le virus et d'être en santé.

Le Président : Cela met fin à la période de questions et de réponses orales.

Motions sans préavis

Nous passons maintenant à la rubrique des motions sans préavis. En fonction de nos règles et du consentement accordé lors de la séance du 4 décembre dernier afin d'inverser les séances deux et trois du cycle des motions sans préavis, je reconnais donc maintenant M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président. Je demande le consentement de l'Assemblée pour débattre de la motion suivante conjointement avec la députée de Marie-Victorin :

«Que l'Assemblée nationale prenne acte des propos tenus hier par le Dr Horacio Arruda, selon lesquels le gouvernement du Québec a pris la décision de fermer les salles à manger des restaurants alors que les autorités de santé publique recommandaient plutôt d'en limiter l'accès aux seuls membres d'une même cellule familiale;

«Qu'elle prenne acte des vives réactions des restaurateurs à cette révélation;

«Qu'elle reconnaisse que le milieu de la restauration est durement touché par les mesures actuelles de confinement;

«Qu'elle rappelle que la Commission des institutions de l'Assemblée nationale étudie actuellement le projet de loi n° 72, qui contient diverses mesures pouvant aider les restaurateurs à passer au travers des prochains mois, notamment l'autorisation de la livraison d'alcool par un tiers;

«Que l'Assemblée nationale invite l'ensemble des formations politiques à collaborer activement afin d'adopter le projet de loi n° 72 d'ici la fin de la présente période des travaux.»

Le Président : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolin-Barrette : Consentement, sans débat, M. le Président.

Le Président : Consentement...

Une voix : ...

Le Président : M. le député de Chomedey, pas de consentement.

Je reconnais maintenant, à ce moment-ci, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Arseneau : Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec la députée de Maurice-Richard, le leader du deuxième groupe d'opposition, le député de Chomedey et la députée de Marie-Victorin, la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement l'élargissement de l'ensemble des primes COVID-19 à tous les professionnels, techniciens, notamment en laboratoire, et au personnel de soutien du réseau de la santé;

«Qu'elle rende hommage à leur dévouement constant et sans faille depuis le début de la crise de la COVID‑19, et qu'elle salue leur engagement dans le réseau de la santé pendant les vacances des fêtes;

«Qu'elle leur offre ses meilleurs voeux pour la période des fêtes.»

Le Président : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolin-Barrette : Pas de consentement, M. le Président.

Le Président : Pas de consentement.

Je reconnais, à ce moment-ci, Mme la ministre déléguée au Développement économique régional.

Souligner l'apport de l'entrepreneuriat collectif au Québec

Mme Proulx (Côte-du-Sud) : Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec le député de Nelligan, le député de Rosemont, le député de Chomedey, la députée de Marie-Victorin :

«Que l'Assemblée nationale souligne l'apport de l'entrepreneuriat collectif au Québec, qui représente plus de 11 200 entreprises, 220 000 salariés et près de 48 milliards de dollars de chiffre d'affaires;

«Qu'elle rappelle que les entreprises collectives, qui prennent la forme de coopératives, de mutuelles ou d'organismes à but non lucratif, sont fondées sur des valeurs d'entraide, de partage et qu'elles stimulent l'activité économique en plus de créer des emplois durables;

«Qu'elle rappelle également que ces dernières procurent des biens et services de proximité afin de répondre aux besoins de leurs membres et des communautés qui les accueillent;

«Qu'elle reconnaisse qu'en ces temps de pandémie et dans un contexte économique difficile, leur contribution aux défis de la société, comme le vieillissement de la population, l'autonomie alimentaire et le bien-être des collectivités des individus est indéniable;

«Qu'enfin, elle souligne la bonification de plus de 26 millions de dollars du nouveau Plan d'action gouvernemental en économie sociale 2020‑2025, dont 15 millions serviront à la relance économique.»

Le Président : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolin-Barrette : Consentement, sans débat, M. le Président.

Mise aux voix

Le Président : Consentement, sans débat. Je demande le vote de vos groupes respectifs, suivi des députés indépendants. M. le leader du gouvernement?

M. Jolin-Barrette : Pour.

Le Président : M. le leader de l'opposition officielle?

M. Fortin : Pour.

Le Président : M. le leader du deuxième groupe d'opposition?

M. Nadeau-Dubois : Pour.

Le Président : M. le leader du troisième groupe d'opposition?

M. Ouellet : Pour.

Le Président : M. le député de Chomedey?

M. Ouellette : Pour.

Le Président : Mme la députée de Marie-Victorin?

Mme Fournier : Pour.

Le Président : Ainsi, cette motion est adoptée.

Mme la députée de Saint-Laurent, à vous la parole.

• (11 h 10) •

Mme Rizqy : Merci beaucoup, M. le Président. Je sollicite le consentement afin de présenter la motion suivante conjointement avec la députée de Sherbrooke, la députée de Joliette, le député de Chomedey et la députée de Marie-Victorin :

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse que la gestion de la COVID dans le réseau de l'éducation a eu un impact direct sur la réussite éducative des élèves;

«Qu'elle rappelle que les taux d'échec des élèves du secondaire sont de trois à cinq fois plus élevés qu'à pareille date l'an dernier, soit de 30 % à 50 %, selon les régions;

«Qu'elle rappelle que les échecs scolaires peuvent contribuer à une augmentation du niveau d'anxiété chez les jeunes et mettre les jeunes en difficulté à risque de décrochage scolaire;

«Qu'elle souligne que les sommes annoncées par le gouvernement pour pallier ces difficultés d'apprentissage sont non récurrentes, mais que les problèmes liés à ces retards ne se régleront pas en une seule année;

«Qu'elle souligne que ces retards sont accentués pour les familles qui n'ont pas les moyens financiers d'obtenir de l'aide supplémentaire tel que le tutorat privé pour accompagner leurs enfants à la maison;

«Qu'elle constate que les allègements promis par le ministre n'ont pas eu les effets attendus sur le terrain;

«Qu'elle demande au gouvernement d'investir massivement sur une période de 5 ans afin de pallier les retards causés par la pandémie chez les élèves;

«Qu'elle invite le gouvernement à étudier la proposition de mettre en place un cours d'implication citoyenne afin d'inciter des étudiants du cégep à prêter main-forte dans le réseau de l'éducation;

«Qu'elle exige du gouvernement de mettre en place rapidement un programme de tutorat accessible pour l'ensemble des élèves dans les écoles publiques.»

Merci, M. le Président.

Le Président : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolin-Barrette : Pas de consentement, M. le Président.

Le Président : Pas de consentement. Je reconnais Mme la députée de Marie-Victorin.

Demander au gouvernement de respecter la décision de la Commission de
protection du territoire agricole concernant la demande de dézonage
d'une zone agricole de la ville de Saint-Hyacinthe

Mme Fournier : Merci, M. le Président. Je demande le consentement de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue et le député de Chomedey, la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse que la Commission de la protection du territoire agricole du Québec doit être la seule instance responsable de trancher lorsqu'il est question de dézonage agricole, en suivant les critères prévus à Loi sur la protection du territoire agricole;

«Qu'elle demande au gouvernement du Québec de s'engager à ne pas dézoner par décret la zone agricole de 23,64 hectares visée par une demande de dézonage de la ville de Saint-Hyacinthe en Montérégie, de laisser la CPTAQ trancher sur la question et de respecter sa décision.»

Le Président : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolin-Barrette : Consentement, sans débat, M. le Président.

Mise aux voix

Le Président : Consentement, sans débat. Je vous invite donc à m'indiquer vos votes respectifs. Mme la députée de Marie-Victorin?

Mme Fournier : Pour

Le Président : M. le leader du gouvernement?

M. Jolin-Barrette : Pour.

Le Président : M. le leader de l'opposition officielle?

M. Fortin : Pour.

Le Président : M. le leader du deuxième groupe d'opposition?

M. Nadeau-Dubois : Pour.

Le Président : M. le leader du troisième groupe d'opposition?

M. Ouellet : Pour.

Le Président : M. le député Chomedey?

M. Ouellette : Pour.

Le Président : Cette motion est donc adoptée. Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Fournier : Oui. J'aimerais qu'une copie de cette motion soit envoyée à l'UPA de la Montérégie ainsi qu'à la ville de Saint-Hyacinthe et à la MRC des Maskoutains.

Le Président : Bien entendu, bien sûr, ce sera fait.

Avis touchant les travaux des commissions

Nous sommes à la rubrique Avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, j'avise cette Assemblée que la Commission de la culture et de l'éducation entreprendra l'étude détaillée du projet de loi n° 69, Loi modifiant la Loi sur le patrimoine culturel et d'autres dispositions législatives, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 19 h 30 à 22 h 30, à la salle du Conseil législatif;

La Commission du transport et de l'environnement poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 46, Loi modifiant la Loi sur la conservation du patrimoine naturel et d'autres dispositions, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle Pauline-Marois;

La Commission des institutions poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 72, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant principalement des organismes du domaine de la sécurité publique, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 19 h 30 à 22 h 30, à la salle Marie‑Claire‑Kirkland;

La Commission des finances publiques poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 68, Loi visant principalement à permettre l'établissement de régimes de retraite à prestations cibles, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 19 h 30 à 22 h 30, aux salles Louis-Joseph-Papineau et Louis-Hippolyte-La Fontaine;

La Commission de l'aménagement du territoire poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 67, Loi instaurant un nouveau régime d'aménagement dans les zones inondables des lacs et des cours d'eau, octroyant temporairement aux municipalités des pouvoirs visant à répondre à certains besoins et modifiant diverses dispositions, aujourd'hui, de 19 h 30 à 22 h 30, à la salle Pauline-Marois.

Le Président : Merci. Pour ma part, je vous avise que la Commission de la culture et de l'éducation se réunira en séance de travail aujourd'hui, de 13 heures à 13 h 30, à la salle Pauline-Marois, afin de statuer sur la possibilité que la commission se saisisse d'un mandat d'initiative concernant la scolarisation des enfants autistes.

Je vous avise également que la Commission des finances publiques se réunira en séance de travail aujourd'hui, à 14 h 30, pour une durée de 30 minutes, à la salle Marie-Claire-Kirkland, afin de statuer sur la possibilité que la commission se saisisse d'un mandat d'initiative portant sur la lutte contre le crime organisé chez Loto-Québec.

Je vous avise également que la Commission des relations avec les citoyens se réunira en séance de travail aujourd'hui, à 14 h 30, pour une durée de 30 minutes, à la salle Pauline-Marois, afin de statuer sur la possibilité que la commission se saisisse d'un mandat d'initiative portant sur la régularisation des personnes immigrantes à statut précaire.

Enfin, je vous avise que la Commission de la santé et des services sociaux se réunira en séance de travail aujourd'hui, à 13 heures, pour une durée de 30 minutes, à la salle Marie-Claire-Kirkland, afin de statuer sur la possibilité que la commission se saisisse de la pétition concernant la couverture publique universelle de la psychothérapie.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Nous en sommes à la rubrique de renseignements sur les travaux. M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

M. Nadeau-Dubois : M. le Président, je me lève rarement à cette rubrique, et là je n'ai pas le choix de le faire.

Vous êtes intervenu de nombreuses fois, dans les dernières semaines, et je vous ai souvent appuyé quand vous vous êtes levé pour parler de respect dans cette Chambre.

Il y a quelques instants, le ministre de la Forêt, de la Faune et des Parcs a fait référence à la députée de Rouyn‑Noranda—Témiscamingue en utilisant l'expression suivante : jeune dame. Je ne suis pas certain que, si le député de Rosemont avait posé une question, on lui aurait répondu en disant «vieux monsieur», je ne pense pas. Je ne pense pas, M. le Président.

Au courant de la même séquence, pendant le même échange, la collègue de Rouyn-Noranda—Témiscamingue a ironisé sur le titre officiel du ministre. Le leader du gouvernement vous a soumis une question de règlement. Vous vous êtes levé pour remettre à l'ordre la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue, c'est votre rôle.

Je me suis levé pour faire une question de règlement également, pour y répondre. C'est mon droit, comme leader parlementaire, en vertu du règlement. Vous ne m'avez pas laissé terminer. J'ai commencé par répondre au collègue sur un ton ironique, j'en conviens. J'allais enchaîner sur ce qui venait de se produire pour comparer les deux événements. Je me suis rassis, puisque vous étiez levé, par déférence pour votre rôle.

Je vais donc faire maintenant la représentation que j'allais vous faire tout à l'heure. Ce n'est pas acceptable, M. le Président, en 2020, qu'on s'adresse à l'une des plus jeunes députées femmes de cette législature et de l'histoire de cette institution en la qualifiant de «jeune dame». Je ne suis pas content, vous le voyez. Je n'accepterai pas que les députés de ma formation politique soient qualifiés comme tels par aucun autre député en cette Chambre.

Je vous demande, avec toute la déférence et tout le respect que j'ai envers votre rôle, à l'avenir, de rappeler à l'ordre les députés lorsqu'ils désignent les députés par autre chose que leur titre. C'est l'article 35.1° de notre règlement. Et je vous demande une vigilance supplémentaire pour s'assurer que cet espace, que ce salon bleu soit un lieu où tout le monde peut prendre la parole sans jamais redouter qu'on fasse allusion à leur genre ou à leur âge dans la manière et dans le ton avec lequel on s'adresse à eux et à elles.

C'est de votre responsabilité, M. le Président, de s'assurer que ce salon bleu soit un salon inclusif, où la parole de tous et toutes est égale, peu importe notre génération et peu importe notre genre. Je pense que, pour reprendre le terme de la question de ma collègue, ce serait une manière de démontrer qu'on est bel et bien en 2020.

Le Président : Je me permets ici de vous signifier qu'effectivement, et c'est souvent rappelé, je le fais très, très régulièrement pour tous dans cette Chambre, l'utilisation des titres doit être la seule avenue possible, vous le savez.

Évidemment, vous comprendrez que j'essaie d'entendre tout ce qui se dit. Très clairement, j'en échappe à l'occasion. Mais vous me dites, et je comprends... Je rappellerai qu'à la lumière de ce que vous me dites... oui, à tous, je vais vous rappeler la règle. C'est une question de respect, d'attitude, de ton, d'utilisation de propos et de titres. Et je continuerai à le faire de façon très fréquente, d'être extrêmement vigilant, mais je prends bonne note et je pense que tout le monde prend bonne note également de ce qui se dit maintenant et qu'on fasse en sorte d'éviter... de faire en sorte qu'on puisse aussi se sentir bien dans le travail qu'on a à faire. Et là je parle au nom de tous et pour tous les parlementaires.

M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : Un simple commentaire, M. le Président, pour ne pas que ce soit mal interprété : Il n'y avait aucune intention de blesser de la part du ministre des Forêts lorsqu'il a utilisé ce terme. Je peux comprendre le leader du deuxième groupe d'opposition de demander à ne plus utiliser ce terme, mais le tout a été fait en toute bonne foi, M. le Président, sans aucune arrière-pensée, M. le Président, et en toute amitié, M. le Président.

Cela étant dit, M. le Président, je crois que, dans le respect que nous devons avoir, les propos tenus et l'identification à laquelle le ministre a été qualifié par la députée de Rouyn-Noranda n'étaient pas à la hauteur, M. le Président, de ce qu'on est capables de faire ici, en cette Assemblée.

Alors, cela étant dit, moi, M. le Président, vous me permettrez de dire au leader du deuxième groupe d'opposition que, s'il souhaite me qualifier de jeune homme encore, je vais accepter son compliment.

Le Président : Je vous demanderai... M. le leader de l'opposition officielle.

M. Fortin : Oui, M. le Président, je veux simplement renchérir pour dire une chose; d'abord, que j'appuie les propos du leader du deuxième groupe d'opposition. De la façon que le ministre des Forêts s'est adressé à la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue, aujourd'hui, ce n'était pas approprié en cette enceinte. Et je vous demande, je vous demande surtout de porter une attention particulière à la façon dont le ministre responsable pour les Forêts s'adresse aux collègues ici, en cette Chambre. Hier, il s'est adressé à notre porte-parole en matière de forêts non pas en la qualifiant par son âge, mais par son sexe.

Il y a une certaine mesure de respect qui est nécessaire ici, en cette Chambre. De la façon que ça a été fait aujourd'hui, ce n'était pas approprié. La façon que c'était fait hier, c'était limite, M. le Président. Alors, je vous demande de porter une attention particulière à la façon que le ministre des Forêts s'adresse aux gens ici, en cette Chambre.

• (11 h 20) •

Le Président : Bien, vous le savez, hein? Je crois que tout le monde a bien entendu. Je comprends tous vos propos, évidemment. Vous le savez, j'exerce une extrême vigilance à ce sujet-là. Le rappel est fait fréquemment, et il sera fait fréquemment. Et j'imagine que l'échange que nous avons eu aura aussi été saisi et compris par ceux et celles qui siègent en cette Chambre. Sinon, je me chargerai de le rappeler, d'être très vigilant à ce chapitre-là.

Merci, messieurs, pour votre intervention. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Fortin : Oui, sur une autre question, M. le Président. Je veux faire référence à une question qui est inscrite au feuilleton par ma collègue de Maurice-Richard, une question qui m'apparaît essentielle de par sa nature.

Le 1er décembre dernier, elle a inscrit une question au feuilleton concernant une directive émise aux paramédicaux de Montréal et de Laval de ne pas réanimer les personnes qui sont en arrêt cardiorespiratoire. Concernant la nature, étant donné la nature, étant donné l'importance de ce sujet-là, étant donné les conséquences qu'une telle directive peut avoir sur les Québécois et les Québécoises qui sont en situation où ils ont besoin d'une aide, et d'une aide rapide, je demanderais au leader du gouvernement de nous confirmer qu'on pourra avoir une réponse à cette question-là d'ici la fin de la session, donc demain, si possible.

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, je ne peux pas vous confirmer, à ce stade-ci, que nous aurons une réponse. Je vais aller aux nouvelles, puisque ça relève du ministre de la Santé, puis je pourrai informer cette Chambre à savoir quand est-ce qu'on va avoir la réponse. Mais je ne peux pas m'engager à transmettre la réponse d'ici demain à ce stade-ci.

Décision de la présidence sur la demande de directive soulevée le 8 décembre 2020
concernant la divulgation de propositions de recommandations d'une
commission qui réalise un mandat d'initiative

Le Président : Je suis, à ce moment-ci, dans cette rubrique, prêt à rendre ma directive sur la question soulevée par le leader du troisième groupe d'opposition, lors de la séance du 8 décembre dernier, au sujet de la divulgation de propositions de recommandations d'un rapport de commission. Et là, de manière plus spécifique, il s'agit de propositions de recommandations formulées à l'attention de la Commission de la santé et des services sociaux dans le cadre de son mandat d'initiative portant sur l'augmentation préoccupante de la consommation de psychostimulants chez les enfants et les jeunes en lien avec le trouble déficitaire de l'attention avec hyperactivité.

Le leader du troisième groupe d'opposition mentionne avoir reçu, le 24 novembre dernier, un courriel envoyé par le cabinet du leader du gouvernement à des conseillers politiques des ministères de l'Éducation et de la Santé et des Services sociaux. Ce courriel sollicitait leur opinion au sujet d'un document de travail, joint au courriel, compilant les différentes propositions de recommandations formulées par chaque groupe parlementaire. Ce document avait été préparé initialement à l'attention du comité directeur élargi de la commission. Il devait faire l'objet de discussions au cours d'une rencontre du comité directeur de la commission le 27 novembre, soit trois jours plus tard.

Selon le leader du troisième groupe d'opposition, cela démontre un manque de déférence envers l'indépendance de l'Assemblée et l'autonomie de ses membres. Il ajoute que la jurisprudence parlementaire a rappelé à plusieurs reprises le rôle central du principe de la séparation des pouvoirs et de celui selon lequel les députés doivent être les premiers à prendre connaissance des informations qui leur sont destinées. De plus, il souligne que les mandats d'initiative ont été ajoutés à notre règlement justement pour valoriser le rôle du Parlement et de ses députés en augmentant leur indépendance par rapport à l'Exécutif. Enfin, il me demande de préciser les règles applicables aux documents de travail des commissions parlementaires, en particulier en ce qui a trait à la préparation d'un rapport qui clôt un mandat d'initiative.

J'ai mentionné, la semaine dernière, dans une autre directive portant sur une question similaire, que la jurisprudence parlementaire a clairement établi que certaines informations doivent être divulguées en priorité aux parlementaires par déférence pour les fonctions qu'ils occupent et que cela inclut non seulement les projets de loi, mais aussi les rapports à être déposés à l'Assemblée.

J'ai même précisé pourquoi un rapport final à être déposé par une commission est visé par ce principe. Le contenu des rapports finaux doit être divulgué d'abord et avant tout aux parlementaires, en particulier parce qu'ils en sont eux-mêmes les principaux instigateurs.

Il importe de préciser que ces mises en garde que d'autres présidents et moi-même avons formulées à plusieurs reprises par le passé ne sont pas sans fondement. En effet, bien que la question ne soit pas abordée ici sous l'angle de la question de privilège et que la présidence n'ait jamais eu à se prononcer à cet égard, soulignons que certains auteurs en droit parlementaire sont d'opinion que la divulgation du contenu d'un rapport de commission avant son dépôt en Chambre peut constituer un outrage au Parlement. L'importance accordée à la confidentialité des travaux entourant la préparation des rapports des commissions ressort d'ailleurs de nombreuses décisions rendues sur le sujet dans plusieurs juridictions, incluant la Chambre des communes du Canada de même que la Chambre des communes britannique.

Dans le cas qui nous concerne, il ne s'agit cependant pas de la divulgation du rapport final d'une commission ni même de celle d'un projet de rapport. En effet, il s'agit plutôt d'un document de travail produit pour le comité directeur de la commission qui compile par thèmes les recommandations proposées par chaque groupe parlementaire et pouvant potentiellement être retenues par la commission dans le cadre de son mandat.

Si certains documents disposent d'un statut particulier, ce ne sont pas tous les documents qui bénéficient de ce statut. Alors, en ce qui concerne les projets de loi, notre jurisprudence parlementaire a établi que seule la communication du texte du projet de loi à être présenté peut constituer un outrage au Parlement. Notre jurisprudence a également établi qu'avant sa présentation à l'Assemblée les orientations d'un projet de loi et ses différentes versions préliminaires peuvent faire l'objet de consultations et de discussions. Cependant, les parlementaires doivent être les premiers à être saisis du texte du projet de loi sur lequel ils devront se prononcer.

Suivant ce principe, la divulgation d'un document de travail qui ne contient pas les conclusions finales de la commission sur son mandat d'initiative mais bien des propositions de recommandations que pourrait adopter cette dernière ne peut être assimilée à la divulgation d'un projet de rapport ou à la divulgation hâtive d'un rapport final sur le mandat d'initiative.

Une fois cela établi, on doit se demander quel était le but de la communication qui a été portée à mon attention. Était-ce pour s'assurer que les propositions pouvaient tenir la route quant à leur mise en oeuvre ou était-ce dans le but d'influencer indûment les travaux de la commission? À la lumière de ce que je peux lire du courriel déposé par le leader du troisième groupe d'opposition, il semble que la consultation s'intéressait davantage à la faisabilité des recommandations, ce qui, à mes yeux, est fort différent d'une communication qui aurait eu pour objectif d'influencer les travaux de la commission ou d'imposer les vues du ministère quant aux recommandations à retenir.

Dans le cas qui nous occupe, je ne peux qualifier la communication de tentative d'ingérence dans les travaux de la commission. D'ailleurs, lorsque je regarde le fruit des travaux de la commission, je constate que les recommandations qui se retrouvent dans le rapport final de la commission ressemblent beaucoup à celles qui étaient dans le document de travail de la commission transmis au ministère. On peut penser qu'elles ont été peaufinées entre‑temps pour en arriver à une version satisfaisante ayant permis aux membres de la commission de les adopter à l'unanimité. La satisfaction affichée par les membres de la commission à l'égard du résultat de leurs travaux témoigne d'ailleurs de la réussite de ce mandat.

Toutefois, je me dois quand même d'en appeler à la plus grande prudence, puisque les discussions d'une commission concernant les observations, conclusions et recommandations qu'elle pourrait adopter à la fin d'un mandat d'initiative se déroulent dans le cadre de séances de travail qui, je le réitère à nouveau, ne sont pas publiques. En mai 2018, la présidence de la Commission des relations avec les citoyens avait d'ailleurs fait un tel appel à la suite de la publication dans les médias d'extraits d'un document provenant d'une de ses séances de travail. Elle avait alors mentionné que les documents transmis et les discussions tenues lors de la séance de travail sont de nature privée. Elle avait aussi lancé une mise en garde énonçant que la diffusion à l'externe d'informations confidentielles pouvait briser le lien de confiance qu'entretiennent les membres de la commission et nuire à ses mandats. J'ai moi-même insisté, la semaine dernière, sur l'importance de préserver un contexte propice à cet espace privilégié de discussion au sein d'une commission.

Je souligne aussi que ce principe ne s'applique pas exclusivement aux parlementaires, mais également à tous les membres de leur personnel, qui doivent faire preuve d'une prudence accrue lorsqu'ils sont amenés à les appuyer dans le cadre de travaux parlementaires revêtant un caractère confidentiel ou privé. J'en appelle donc à la responsabilité individuelle et collective de chacun afin de respecter ce principe jusqu'à la toute fin des travaux de la commission, c'est-à-dire jusqu'au dépôt de son rapport, qui a pour effet de rendre son contenu public.

Et, en terminant, j'ajouterai que les mandats d'initiative ont notamment pour but de rehausser le rôle du Parlement et des députés en leur donnant des moyens pour exercer leurs fonctions de façon plus efficace et avec l'autonomie accrue vis-à-vis l'Exécutif. Dans les circonstances, la divulgation auprès d'employés de l'Exécutif des potentielles recommandations d'une commission sur un mandat d'initiative peut donner l'impression d'une mainmise de l'Exécutif sur la finalité des travaux de la commission, ce qui, vous en conviendrez, n'est pas en phase avec le principe à la base de l'introduction des mandats d'initiative dans notre règlement. Bien que rien ne m'indique qu'une ingérence ait effectivement eu lieu dans le cas qui m'est soumis, j'en appelle quand même à l'ensemble des parlementaires afin d'agir de manière à préserver la zone d'autonomie reconnue aux membres des commissions qui prennent part à un mandat d'initiative.

Je vous remercie de votre attention. M. le leader du troisième groupe d'opposition.

• (11 h 30) •

M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le Président. J'accueille votre décision. Évidemment, on avait besoin d'éclairage. C'est la quatrième fois, dans cette législature, M. le Président, sur la question de... sur la section des renseignements sur les travaux, que nous vous demandons certaines directives par rapport notamment... sur des mandats qui ont été confiés en séance de travail, pour des mandats d'initiative, qui se sont transformés, dans la plupart des cas, en commissions.

De ce que je comprends bien, M. le Président, c'est que, si les recommandations qui ont été transmises se retrouvent à peu près similaires à ce qui a été présenté... j'ai compris dans votre réflexion, M. le Président, qu'il n'y a pas eu ingérence, mais je nous invite quand même... Parce que la grande question que nous avions aussi, c'est : Est‑ce que ça se passe régulièrement? Parce que, là, on a été témoins de quelque chose que nous avons vu. Imaginez ce que l'on ne voit pas. Ça, ce que ça veut dire, c'est que, si les recommandations qui ont été discutées... et que, suite aux commentaires des employés politiques, elles ne sont plus les mêmes, c'est là, M. le Président, que nous pensons qu'il y a risque d'ingérence.

Cela étant dit, je pense que vos indications sont claires. Je pense que ça va nous aider à gouverner nos travaux. Je comprends que vous vous attendez de nous à la plus grande collaboration. Vous comprenez que, lors des mandats d'initiative, il y a effectivement la possibilité que les équipes de travail, qu'elles soient gouvernementales ou du côté de la partie d'opposition, peuvent être influencées par des acteurs externes, qui nous amènent à avoir une meilleure compréhension et d'avoir un plus grand détail aux recommandations qui pourraient être apportées.

Donc, je comprends bien qu'on n'interfère pas dans le rôle des députés. Mais quand même, M. le Président, j'attire notre attention sur le fait suivant : il sera important tout de même que ces informations qui s'échangent entre les différents cabinets du gouvernement et les collègues qui travaillent sur la commission puissent effectivement bénéficier à l'ensemble des membres de la commission avant même d'être transmises au comité directeur. Merci, M. le Président.

Le Président : M. le leader de l'opposition officielle.

M. Fortin : Oui, merci, M. le Président. Je prends également acte de votre décision et j'espère que le gouvernement prendra également acte de cette décision, de cette énième décision de votre part sur un sujet similaire.

Mais en même temps, M. le Président, je veux féliciter le leader de la troisième opposition pour la grande qualité et la grande solidité de la preuve qu'il a amenée lorsqu'il a fait ses représentations. Et c'est, en fait, indicatif, M. le Président, de la possibilité que ce soit un phénomène qui se déroule à plus d'une occasion.

Je ne sais pas, M. le Président, vous, là, mais on se trompe de destinataire, dans nos adresses courriel, une fois sur 100, une fois sur 1 000, peut-être, et par pur hasard le leader du troisième groupe d'opposition a été le destinataire erroné, disons, dans cette situation-là. Ça nous laisse croire, M. le Président, que c'est possible que ce soit une situation qui se produise à plusieurs reprises.

Alors, on veut simplement rappeler au gouvernement la plus grande prudence dans ce dossier-là. On souhaite que l'Exécutif prenne note, encore une fois, de votre rappel quant à l'indépendance que doivent avoir nos commissions, et les gens qui y participent, et les décisions qu'ils y prennent. Et, M. le Président, je souhaite simplement que l'intervention probable du leader du gouvernement reflétera ce constat. Je vous remercie.

Le Président : Merci. D'autres interventions? Je n'en vois pas.

Évidemment, je vous dirai, de base, et vous l'avez bien dit, vous l'avez rappelé, hein, c'est un message de prudence à nouveau qui s'adresse à tous, bien sûr, dans le but fondamental de préserver l'autonomie. Vous avez bien compris le message, j'ai bien compris le vôtre également.

Avis de sanction de projets de loi

Je poursuis dans la rubrique Renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Je vous informe qu'il y aura sanction du projet de loi n° 71, Loi sur les véhicules hors route, aujourd'hui, à 13 h 15, au bureau de Son Honneur le lieutenant-gouverneur.

Je vous informe également qu'il y aura sanction du projet de loi n° 70, Loi visant à protéger les personnes contre les thérapies de conversion dispensées pour changer leur orientation sexuelle, leur identité de genre ou leur expression de genre, demain le 11 décembre à 13 h 30, au bureau de Son Honneur le lieutenant-gouverneur.

Affaires du jour

Sur ce, la période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour.

Et je suspends les travaux pour quelques instants. Merci à toutes et à tous.

(Suspension de la séance à 11 h 34)

(Reprise à 11 h 44)

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, nous poursuivons nos travaux aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Schneeberger : Oui, bonjour, Mme la Présidente. Alors, je vous demanderais d'appeler l'article 25 du feuilleton.

Projet de loi n° 75

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude
détaillée et des amendements
du député de LaFontaine

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc, à l'article 25 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la Commission des institutions sur le rapport du... sur le projet, excusez-moi, de loi n° 75, Loi visant à améliorer l'accessibilité et l'efficacité de la justice, notamment pour répondre à des conséquences de la pandémie de la COVID-19, ainsi que sur les amendements transmis en vertu de l'article 252 du règlement par M. le député de LaFontaine. Ces amendements sont déclarés recevables.

Y a-t-il des interventions sur ce rapport ainsi que sur ces amendements? M. le ministre de la Justice, la parole est à vous.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : Oui, Mme la Présidente, un plaisir de vous retrouver. Je suis heureux aujourd'hui, Mme la Présidente, de procéder avec vous à la prise en considération du projet de loi n° 65 visant à améliorer l'accessibilité et l'efficacité de la justice, notamment pour répondre à des conséquences de la pandémie de la COVID-19.

Je tiens tout d'abord à remercier les groupes qui ont pris part aux consultations particulières, une étape fondamentale de l'élaboration du projet de loi. Ces groupes ont jeté un éclairage pertinent sur la réalité du terrain dans les palais de justice et dans les cliniques juridiques. Leurs observations et recommandations nous ont permis de travailler davantage certaines mesures pour qu'elles remplissent encore mieux leur objectif qui est de faciliter l'accès à la justice tout en améliorant son efficacité.

Je réitère ma reconnaissance à la Table Justice-Québec qui a consacré temps et énergie afin d'élaborer des mesures ciblées et concrètes pour répondre aux différents problèmes identifiés en matière de droit civil, de droit familial, de droit pénal et aux petites créances. Votre apport à ce projet de loi doit être souligné.

Enfin, je remercie les collègues qui nous ont accompagnés tout au long de l'étude détaillée, les collègues de la partie gouvernementale ainsi que les collègues des oppositions qui ont travaillé de façon constructive. Cela nous a permis d'arriver à un projet de loi efficace et qui améliorera concrètement l'accès à la justice des Québécois et des Québécoises.

Comme vous le savez, Mme la Présidente, durant les derniers mois, le système de justice s'est adapté en quatrième vitesse afin de répondre aux besoins des citoyens et des citoyennes du Québec tout en respectant les mesures sanitaires mises en place. Alors, la justice n'a pas été mise sur pause, Mme la Présidente. En effet, au début de la pandémie, des solutions innovantes ont été mises en place pour permettre de maintenir les services judiciaires. Ce projet de loi vise ainsi à assurer la pérennité de ces nouvelles mesures puisqu'elles ont fait leurs preuves depuis le mois de mars dernier.

Concrètement, nous proposons de favoriser et d'encadrer le recours à des moyens technologiques pour éviter aux citoyens et citoyennes de se déplacer au palais de justice lorsque cela n'est pas nécessaire. La simplification des processus et le fait de permettre l'utilisation de l'écrit dans certaines situations permettront de réduire les déplacements au palais de justice. Par exemple, nous proposons de ne plus exiger de déclaration sous serment pour l'exemption des jurés et le paiement de certains témoins.

L'un des éléments majeurs du projet de loi n° 75 dont nous sommes particulièrement fiers concerne les services offerts dans les cliniques juridiques établies ou reconnues par une université ou établies par l'École du Barreau. Dorénavant, les étudiants en droit seront autorisés à offrir non seulement de l'information juridique vulgarisée, mais aussi des conseils et des avis juridiques à la population, et ce, gratuitement ou à faible coût, à coût modique, répondant ainsi aux besoins de la population pour de tels services. Cette mesure permettra d'outiller les citoyens et citoyennes qui doivent faire appel au système de justice pour régler une situation ou un conflit.

Et, Mme la Présidente, je tiens à vous dire que c'est la première fois au Québec qu'on ouvre de cette façon-là pour donner davantage d'accès à la justice, davantage d'efficacité également et surtout au bénéfice des citoyens, des personnes vulnérables, qui n'ont pas nécessairement les moyens pour être mieux renseignés sur leurs droits, parce que des centaines d'étudiants en droit pourront, dans le cadre de cliniques juridiques universitaires et également dans des organismes communautaires, si c'est autorisé, si c'est supervisé par l'université, donner des conseils aux gens qui vont se présenter dans les OBNL, dans les organismes communautaires et également à l'université.

Alors, je pense que le Québec était en retard et on rattrape un retard. Et c'est une mesure d'accès à la justice porteuse qui fait en sorte que ça bénéficiera aux étudiants en droit, mais ça bénéficiera surtout à la population québécoise en ayant accès à des avis et des conseils juridiques pour être mieux outillé relativement à leurs droits et à leurs obligations.

Mme la Présidente, la réduction des délais de traitement des dossiers judiciaires est aussi au coeur du projet de loi, entre autres pour la communication de la preuve au soutien des actes de procédure en matière civile. Plusieurs mesures visent également à assurer la communication efficace entre les différentes parties aux étapes clés des procédures judiciaires. En matière civile et pénale, nos propositions visent entre autres à clarifier ou à préciser certaines mesures répondant ainsi à des problèmes concrets et trop fréquents vécus dans le système de justice.

Les mesures du projet de loi n° 75 s'inscrivent également dans un plan plus vaste, le plan de transformation de la justice, afin d'améliorer considérablement l'efficacité et l'accessibilité du système de justice dans son ensemble car il était sous tension depuis quelques mois déjà. Le contexte de la crise sanitaire a obligé plusieurs changements à vitesse grand V et nous aura permis de remédier à plusieurs problèmes qui entraînaient des frais, des déplacements inutiles, des délais de traitement et un manque d'information pour les justiciables du Québec.

En déposant ce projet de loi, nous souhaitons rendre ces mesures plus pérennes et pallier de la sorte aux conséquences et, à moyen et long terme, de la pandémie sur le système de justice. Ces mesures ont été élaborées et discutées avec rigueur de sorte qu'elles font maintenant consensus au sein des partenaires de la justice. Et, encore une fois, Mme la Présidente, je tiens à remercier l'ensemble des collègues qui ont participé aux consultations, aux travaux, à l'étude détaillée et désormais à l'étude de la prise en considération. Je pense important de souligner qu'il s'agit d'une avancée significative pour la justice au Québec, au bénéfice des citoyens et des citoyennes. Plus d'efficacité, plus d'accès, c'est ce qui est demandé par les citoyens et c'est ce que le gouvernement livre. Alors, Mme la Présidente, ce sera mission accomplie suite à l'adoption finale. Merci, Mme la Présidente.

• (11 h 50) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie. Merci, M. le ministre. Maintenant, je cède la parole à M. le député de LaFontaine.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Oui, merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, effectivement, nous croyons que le projet de loi n° 75 sera une bonification, nous en avons la conviction, là, d'un meilleur accès à la justice.

Alors, le projet de loi n° 75, Mme la Présidente, d'abord et avant tout, ce qui est important de souligner, et ça relève du titre du projet de loi, le projet de loi s'intitule Loi visant à améliorer l'accessibilité et l'efficacité de la justice, notamment pour répondre à des conséquences de la pandémie de la COVID-19. Lorsque l'on dit, Mme la Présidente, «notamment pour répondre à des conséquences de la pandémie de la COVID-19», il faut se rappeler que nous, de l'opposition officielle, nous avons toujours abordé les débats de façon pérenne, pour qu'ils s'inscrivent dans la pérennité. Ce n'est pas parce que, Mme la Présidente, oui, il y a des éléments dans le projet de loi qui pourront être mis en application pour faciliter l'accès à la justice, faciliter l'administration de la justice, faciliter le cheminement des demandes, notamment par une hausse de l'utilisation des moyens technologiques... Oui, donc, des moyens pourront être utilisés, seront mis en place avec l'adoption du projet de loi, dans le contexte de la COVID, mais nous devons, Mme la Présidente, savoir qu'il n'y a pas de date de péremption. Une fois que le gouvernement n'aura pas renouvelé le décret pris en vertu des articles 118 et suivants de la Loi sur la santé publique qui a décrété l'état d'urgence sanitaire au Québec, une fois que le gouvernement... On verra, probablement en 2021, on le souhaite, on espère se sortir de la COVID... collectivement, tout le monde le souhaite. Une fois que le gouvernement n'aura pas renouvelé ce décret-là, nous ne serons plus, donc, dans un contexte d'état d'urgence sanitaire, mais, à ce moment-là, Mme la Présidente, ce que nous avons adopté dans le contexte COVID va demeurer. Je veux dire, tout ce qu'on a mis là n'a pas de date de péremption.

Alors, nous aurons eu l'occasion... Puis je vais sauter tout de suite sur cet élément-là, Mme la Présidente. Dans le projet de loi... Et je reviendrai plus tard sur les cliniques. Dans le projet de loi, il est fait mention d'un élargissement de l'utilisation par les juges des moyens technologiques.

Nous avions déjà... Lorsque l'actuelle présidente du Conseil du trésor était ministre de la Justice, elle avait déposé le projet de loi n° 32, qui visait à apporter beaucoup de modifications au Code de procédure pénale. Le projet de loi n° 32 avait été déposé à la fin 2019, avant le fameux vendredi 13 mars 2020, où le décret a été pris, décret déclarant l'état d'urgence sanitaire au Québec. Il y avait le projet de loi n° 32 qui avait été déposé, puis le projet de loi n° 32, Mme la Présidente, visait à modifier à plusieurs endroits le Code de procédure pénale, majoritairement, et faire en sorte d'augmenter les possibilités pour les juges, dans un contexte de procédure pénale, d'utiliser les moyens technologiques.

Et nous avions, à ce moment-là, créé l'article 2.2 du Code de procédure pénale, qui était tout nouveau et qui visait à permettre à un juge d'office, donc sans le consentement des parties, d'utiliser les moyens technologiques lorsqu'il y a communication de documents, lorsqu'il y a communication de procédures et pour gérer les instances également. Donc, conférence de gestion d'instance, selon quel calendrier les parties vont fonctionner. Les parties sont là via leurs avocats ou elles-mêmes, si elles ne sont pas représentées, lorsqu'elles sont intimées à un recours pénal. Donc, gestion d'instance, qu'est-ce que vous allez faire, quand, comment, et voilà, gestion d'instance, moyens technologiques, communication de documents, et ainsi de suite.

Ça, c'était l'article 2.2 déposé fin 2019, dans le projet de loi n° 32, qui venait augmenter l'utilisation des moyens technologiques dans le contexte de la procédure pénale. Arrive le vendredi 13 mars, état d'urgence sanitaire, la pandémie que l'on vit maintenant. Bien, on a continué à travailler sur le projet de loi n° 32 avec une assemblée nationale fonctionnant sur un règlement modifié par une motion spécifique, mais le projet de loi n° 32 a finalement été adopté, Mme la Présidente, début juin de cette année. Le projet de loi n° 32 est adopté, on a un nouvel article 2.2, tout frais, tout nouveau, et là il a pu être utilisé dans le contexte de la COVID. Quand la COVID ne sera plus là, Mme la Présidente, on ne sera plus en pandémie, 2.2 va demeurer.

Le contexte fait en sorte qu'on peut moins... évidemment, on ne peut pas se rassembler, on peut plus difficilement aller produire des documents au greffe des différents tribunaux, procédure pénale, on pouvait le faire davantage sur ordonnance du juge par les moyens technologiques. Là, ce nouvel article là a été bénéfique dans le contexte COVID, il est tout nouveau. Quand vous élargissez, quand vous modifiez, dans notre société, par une loi, des façons de faire, la plus grande prudence est de mise, parce que vous ne savez pas comment sera utilisé cet article-là nouveau, cette nouvelle possibilité d'utiliser bien davantage, d'office par le juge, des moyens technologiques. Vous ne savez pas... Est-ce que ce sera utilisé à bon escient? On l'espère, on le présume parce que nos juges, évidemment, sont des femmes et des hommes tout à fait raisonnés et raisonnables et qu'ils vont considérer ce qu'on avait mis dans l'article. Considérer quoi? Considérer notamment, évidemment, les moyens technologiques à la disposition du palais de justice dans le district où vous siégez. Est-ce que le greffe est capable de recevoir, par exemple, des téléversements de procédure? Ça, c'est important, de un. Et aussi les juges devront considérer est-ce que les parties ont la capacité, via leur procureur... on le souhaite, on l'imagine, on prend pour acquis, même, dans certains cas, que les procureurs ont accès aux moyens technologiques, mais lorsqu'ils se représentent seuls dans un contexte de procédure pénale.

Ce n'est pas tellement les montants. Que ce soit 200 $, 500 $, 1 000 $ ou peut-être même 10 000 $, dans un contexte pénal, vous êtes reconnu coupable, bien, c'est une tache à votre dossier. C'est important, audi alteram partem, d'avoir votre journée à la cour, puis de faire vos représentations, et là d'avoir une décision qui soit prise de façon éclairée, et que l'on ait jugé de la crédibilité des témoignages. Alors, nouvel article, plus de moyens technologiques, juin 2020, ça fait six mois à peine, Mme la Présidente. Laissons vivre l'article, voyons, à l'usage, comment cet article‑là, il est bien ou pas rédigé.

Là, avec le projet de loi n° 75, on en rajoute une couche, Mme la Présidente, on vient dire : Les audiences pourront se faire par moyen technologique. Ah! Bien là, après six mois à peine, on vient d'en rajouter une autre couche. Les audiences, au fond, Mme la Présidente, si moi, je suis face à un recours pénal, je suis à risque d'être condamné pour payer une amende de x milliers de dollars puis je risque d'avoir une tache dans mon dossier... Oui, les juges pourront toujours considérer et devront toujours considérer comment le palais de justice, dans le district où il siège, cette semaine-là, est-il équipé ou pas pour mettre sur place des auditions par Teams, par exemple. Par Teams, on connaît ça, Teams. Il y a huit mois, là, je veux dire, en début 2020, on ne connaissait pas ça, Teams. Moi, je ne connaissais pas ça, Teams, puis Zoom, et tout ça. Mais là on connaît ça, on commence à les connaître, mais ce n'est pas tous les palais de justice qui ont l'infrastructure. Alors, oui, les juges pourront considérer : O.K. est-ce que le palais de justice peut permettre l'audience par Teams? Est-ce que les parties en l'espèce peuvent avoir accès à cet outil-là? Parce que moi, comme juge... et c'est ça le nouveau pouvoir, puis on a dit : Faites attention. On a dit au ministre : Faites attention. La juge pourrait d'office dire : Parfait, alors, pour juger de la culpabilité ou pas de l'inculpé ici ou de la personne qui est visée par la procédure pénale, on va faire ça par Teams, puis on aura les témoignages par Teams, puis vous lirez mon jugement, soit je le rends sur le banc ou je l'écrirai, puis vous me lirez plus tard. D'office, sans consentement des parties, les juges pourront l'ordonner.

Là, on a dit : Faites attention. On a déposé un amendement, qui a été rejeté, mais je relève le drapeau jaune, vous me le permettrez, Mme la Présidente. Faites attention. Et je crois que c'est un des amendements qui est devant vous, on en a déposé deux, amendements. Faites attention que lorsque vous allez faire l'audition des témoins, l'audition des parties... On voulait que dans ce contexte-là, lorsque, oui, le juge peut décréter qu'il y aura des audiences qui vont se faire de façon virtuelle, mais que, s'il y a des témoins à être entendus, bien, que ce soit de consentement des parties. Parce que moi, je veux ma journée en cour puis, Mme la Présidente, je suis devant vous, là, je plaide devant vous, là, vous êtes capable et vous devez, comme juge, juger de ma crédibilité, alors vous devez dire... Puis, dans certains jugements, à la fin de la journée, ce sera écrit, la cour n'accorde aucune crédibilité au témoignage de la partie intimée, elle a relevé plusieurs contradictions et elle juge qu'il n'a pas la crédibilité et il n'a pas créé de doute dans la tête du tribunal, dans l'esprit du tribunal... le condamne en conséquence. Vous me jugez, vous êtes capable de voir ma sincérité ou pas. Vous êtes capable de me voir et de juger de ça, et ça, c'est l'essence même de nos tribunaux, l'essence même qui fait en sorte que les tribunaux sont publics. À moins qu'il y ait des ordonnances de huis clos, à moins que ce soit sur certains dossiers spécifiques, notamment en droit familial, c'est public, c'est ouvert, c'est au grand jour, et vous êtes devant votre juge. Ça, c'est un autre fondement, vous êtes devant votre juge. Là, ça pourra se faire sans le consentement des parties par visioconférence.

• (12 heures) •

On a eu le témoignage, puis franchement, tous les collègues autour de la table, là, on a trouvé ça très stimulant, un témoignage de Me Marie Christine Kirouac, qui représentait l'Association des avocates et des avocats en droit familial du Québec, plusieurs années d'expérience, et, au-delà du mémoire, on a eu l'occasion d'échanger avec Me Kirouac, puis c'était réellement intéressant, elle avait des réponses très directes basées sur la pratique de comment ça se passe, dans la vraie vie. Et elle nous disait : Faites attention, faites attention quand il y a des auditions de témoins.

Là, il est important de bien me suivre. Lorsqu'il y a audition d'une requête, exemple, je donne un exemple en matière civile parce qu'il y a le pendant civil à la procédure pénale, lorsque vous êtes juge et que, là, les parties, il y a eu un interrogatoire hors cour, puis il y a eu des objections sur des questions, et là, moi, je dois juger si les objections de ne pas répondre à des questions sont bien fondées ou pas, vous avez les deux avocats, il n'y a pas de témoin, j'ai la requête écrite devant moi, il y a trois questions sur lesquelles il y a eu des questions de soulevées, et là, je dois juger des moyens légaux, du bien-fondé juridique ou pas de ces objections. Là, je pourrais le faire par Teams. Je vais entendre l'avocate, je vais me virer de bord, puis je vais entendre l'avocat. Je vais dire : Parfait, voici ma décision, l'objection maintenue à la question un, objections rejetées aux questions deux et trois, la partie intimée est donc requise, dans les 10 jours, de fournir la réponse. Merci, bonsoir. Je n'ai pas de problème que ça se fasse par Teams. Mais, lorsque vous avez une motion incidente où, là, il y aura des témoignages, vous êtes juge, Mme la Présidente, je pense que vous aimeriez ça m'avoir devant vous. Des témoignages qui, parfois, dans un contexte civil, puis peut-être plus souvent en matière pénale, qui est très humain, fait appel à des perceptions, fait appel également à des émotions que vous devrez juger. Lorsque vous devez juger si j'ai commis cette infraction-là, je l'ai commise, l'infraction, est-ce que je l'ai fait de façon intentionnelle? Vous me voyez, là, les bras croisés, puis vous me voyez en train de me lever les épaules, puis vous me voyez comme ça, là, c'est important que vous voyiez ça. Puis, si je fais ça, Mme la Présidente, là, je peux vous dire une chose, là, selon l'expérience qu'on a, ça ne regarde pas bien. Si je vous réponds ça puis j'ai juste... ça ne regarde pas bien. Il va falloir que vous évaluiez ça parce que vous devrez statuer, il avait-u l'intention ou pas, puis est-ce que je le crois ou pas. Si vous faites ça par Teams, bonne chance, Mme la Présidente. Puis si, à tort peut-être, dans les faits, vous dites : Je ne le crois pas, mais que finalement ça participe d'une mauvaise perception... Vous devez percevoir ça, puis à travers Teams, c'est ça, notre point, je peux le résumer de même, à travers Teams, vous êtes limité quant aux perceptions.

Me Kirouac est même venu nous dire une chose à laquelle on n'avait pas pensé, on n'avait pas pensé à ça. Vous êtes devant votre écran. Moi, je suis assis, Mme la Présidente, à un bureau, j'ai l'écran et je témoigne. Elle a dit : Écoutez, avez-vous pensé à un cas d'espèce où, 10 pieds en arrière de l'écran, quelqu'un est là avec un tableau blanc, entend, puis m'écrit des réponses? Ça se peut. Ça peut arriver. Techniquement, ça peut arriver. Elle a dit : Faites attention. Le juge va avoir de la difficulté à juger de la crédibilité d'un témoin, et il pourrait y avoir, dans certains cas... on présume de la bonne foi de tout le monde, là, Mme la Présidente, mais dans certains cas où il y a des intérêts financiers très élevés, des femmes et des hommes d'affaires, Mme la Présidente, qui, sur des centaines de milliers de dollars ou peu importe le montant, se chicanent, et que, là, c'est important que notre témoin expert, par exemple, témoigne de façon très crédible, puis que les réponses soient courtes. Hein, on dit toujours ça, comme avocat, quand on prépare les témoins : Écoutez, écoutez bien la question, répondez sur le point et ayez des réponses compréhensibles, pas trop longues, je ne dirai pas courtes, mais compréhensibles sur le point, précises puis sans hésitation. Quand un témoin commence à avoir de la difficulté, on aimerait tellement ça aller l'aider parce qu'on l'a entendu, on l'a pratiquée, cette question-là, puis je veux dire, c'est la vérité, puis là il n'a pas tellement compris. Mais là, Mme la Présidente, une personne ne peut pas se faire aider. Le témoin est là, puis vous allez en juger. Il est dans la boîte, comme on dit. On met le témoin dans la boîte, puis là on doit juger de sa crédibilité. Bien, il pourrait y avoir des cas d'espèce où des personnes mal intentionnées pourraient avoir un tableau blanc, dix pieds en arrière, puis là d'être capable de dire : Bien là, la réponse, c'est ça, là. Elle va dire : La réponse, c'est ci, c'est ci, c'est ça.

Alors, Me Kirouac qui est sur le terrain, des années et des années, en matière de droit familial... Puis, droit familial, il y a beaucoup d'enjeux : questions de garde d'enfants, questions de pension alimentaire, de couples qui... ça ne va plus bien. Et il y a des séparations, puis là il faut statuer sur les droits de garde d'enfants, notamment. Il en va beaucoup de la crédibilité du témoignage de madame, par exemple, à l'encontre de monsieur ou du témoingnage de monsieur à l'encontre de madame. Puis qui va avoir la garde? Puis même dans des cas de déchéance de l'autorité parentale aussi, je veux dire, vous devez juger de ça.

Mon point, c'est que, oui, on va s'assurer de respecter l'indépendance judiciaire. Les femmes et les hommes qui sont juges sont des personnes tout à fait raisonnées, raisonnables, qui connaissent ces enjeux-là, mais l'inquiétude que nous avions lorsqu'il y a audition de témoins, c'est que si le tribunal peut l'ordonner d'office, sans le consentement des parties, bien, qu'à un certain moment donné, le tribunal puisse se rendre compte, en cours de piste, ou à la fin du processus, ou même sans même ne jamais s'en rendre compte, qu'on a joué un petit peu avec ça ou que ça aura été difficile.

Puis, oui, on veut un accès à la justice, on veut une justice qui juge avec célérité, mais on ne veut pas que les étapes soient écourtées. Justice doit avoir été rendue dans les faits, Mme la Présidente, et on ne pourrait pas honnêtement dire qu'on a fait avancer le Québec si les décisions rendues pouvaient être remises en question quant à la procédure. C'est un des amendements qu'on ramène aujourd'hui, le consentement des parties quand il y a des témoins qui sont entendus, ça, c'est important.

Donc, oui, plus de technologies. Faisons attention, à un moment donné, on ne sera plus dans l'état d'urgence et, à un moment donné, Mme la Présidente, bien, ces articles-là vont être péreins. Nous aurions cru bon de laisser ça comme c'était avec l'article 2.2. On aurait pu tout aussi bien élargir, quant à des auditions, quand il n'y a pas de témoins, mais si vous voulez qu'il y ait des témoins, bien, que ce soit le consentement des parties, ça, c'est important.

Également, une autre chose qui a été dite, puis je vais revenir, là, il va me rester du temps, Mme la Présidente, sur, évidemment, les cliniques juridiques. Les étudiants en droit, c'est bon, on a voté pour ça, mais on a eu beaucoup de débats, beaucoup, beaucoup, beaucoup de débats. Puis juste pour vous donner une petite statistique, c'est intéressant, hier, j'avais donné une statistique par rapport au projet de loi n° 70, projet de loi n° 70 sur les thérapies de conversion, 10 articles, quatre réellement substantiels, et, j'y vais de mémoire, Mme la Présidente, je pense que c'est quelque chose comme 17 amendements qui ont été adoptés sur 27 proposés. Alors, honnêtement, on a fait du bon travail, on doit s'enorgueillir puis s'en féliciter, puis c'est ça, en article par article, avec le ministre de la Justice, pour ce qui est de thérapie de conversion. C'est avec ma collègue de Westmount—Saint-Louis. Puis là on définissait pour la première fois, c'est quoi, une thérapie de conversion. Je referme la parenthèse.

À peu près sur la même logique, on a fait du bon travail aussi sur le projet de loi n° 75, on a déposé beaucoup d'articles. Le total des amendements... on a adopté beaucoup d'amendements, dis-je, le total des amendements, si mes comptes sont bons, puis on me corrigera si j'ai tort, 33 amendements ont été déposés, 33 amendements ont été déposés, c'est correct, il y a 58 articles, 33 amendements déposés, mais 28 ont été adoptés. Quand vous dites 28 sur 33 amendements ont été adoptés, c'est parce qu'on a, collectivement, une bonne moyenne au bâton, là. Il y a bien des projets de loi que ce n'est pas la moitié des amendements qui sont adoptés puis, des fois, c'est encore bien, bien, bien moins que ça. Alors, 28 sur 33, ça dénote toute la raisonnabilité et aussi l'ouverture du ministre à dire : O.K. Je suspends. Puis il revient, je n'ai pas encore la réponse, on suspend l'article, on avance. Puis on a toujours travaillé comme ça en collégialité, puis on a bonifié le projet de loi. Il y en a toujours bien cinq qui n'ont pas été adoptés, puis on le resouligne à cette étape-là de la prise en considération, c'est le moment pour nous de le faire.

Autre élément qui a été soulevé, puis ça, ça n'a pas fait l'objet d'un amendement parce que vous ne pouvez pas amender ça, mais c'est une préoccupation. Je reviens sur les moyens technologiques. Rappelez-vous du procès médiatisé Lola contre Éric — je pense, c'était Éric — Lola contre Éric, il y a quelques années, on en a tous entendu parler, c'était sur une pension alimentaire, des gens avec énormément de moyens financiers. Il y avait une ordonnance de huis clos. On ne dit pas c'est qui, puis c'était réellement en droit familial, une chicane. Il y avait, je pense, trois enfants, j'y vais de mémoire. C'est le contexte.

Là, Mme la Présidente, il y avait huis clos. Huis clos, ça veut dire que physiquement... Ce n'est pas les moyens technologiques. Vous allez voir que les moyens technologiques, à un moment donné — puis là je vais vendre mon punch tout de suite — moyens technologiques, vous n'avez plus réellement de contrôle à 100 % de qui a accès au Teams. Huis clos, là, la bonne vieille façon de faire... Je ne dis pas que la bonne vieille façon de faire ne doit pas être changée. Elle doit être changée, mais il y a un drapeau jaune. Préoccupons-nous de la sécurité du huis clos quand on fonctionne par Teams.

• (12 h 10) •

La bonne vieille façon de faire, c'est que la salle, là, elle est physiquement là. Entre qui? Il y a quoi, il y a huit personnes? La juge ou le juge regarde : Qui êtes-vous, monsieur? Qui êtes-vous, madame? Parfait, vous êtes journaliste. C'est prévu en vertu du règlement. Vous êtes journaliste, parfait. Je dois vous annoncer par contre que, si vous enregistrez, si vous prenez des photos, vous ne pouvez pas diffuser ça à l'extérieur. C'est le huis clos. Le journaliste comprend, il enregistre pour écrire son article plus tard, et ainsi de suite. Vous, monsieur, qui êtes-vous? Oui, O.K., vous êtes le père de madame dans le divorce. Parfait, quel est votre intérêt? Il va dire : Oui, non, vous êtes là... Vous n'avez pas à être là. Je vous prie de quitter. Une fois que ça, c'est fait, on ferme la porte puis là on est à huis clos.

Audience par moyens technologiques, par Teams. Vous êtes à Montréal. Madame est à Québec, puis monsieur est ailleurs au Québec ou peut-être même à l'extérieur du Québec. Et là nous allons recevoir les demandes d'accréditation pour avoir le numéro puis rentrer sur Teams. Je suis journaliste. Parfait. Là, la juge ou le juge devra autoriser chaque personne, chaque, chaque personne. Là, on dit : Ah! c'est le fun, parce qu'avant il y avait 30 chaises dans la salle d'audition. Là, c'est le moyen technologique, on pourrait en avoir jusqu'où le système pourra les supporter, il pourrait y en avoir 100. Mais, à un moment donné, le huis clos à 100... Mais, si c'est un journaliste, vous devez l'accepter. Comment...

Première des choses, il y a deux écueils, deux drapeaux jaunes. Je n'ai pas la solution, je n'ai pas d'amendement, mais il faut faire attention à ça. Puis, quand on dit : On élargit les moyens technologiques, c'est le fun, c'est qu'une fois qu'une communication est permise, vous ne contrôlez pas nécessairement la personne qui va avoir accès à ça. Il y a des ratoureux, des filous qui peuvent usurper l'identité de quelqu'un puis rentrer sur Teams. Et là, si vous êtes sur Teams par les moyens technologiques, vous pouvez capter le son, puis vous avez l'image, puis vous pouvez, même à l'extérieur du Québec, utiliser ça.

Alors, peut-être, je ne le sais pas, mais peut-être que le huis clos dans l'affaire Lola c. Éric, peut-être qu'il y aurait eu... Il y aurait eu très clairement un défi, sur lequel on ne peut pas se tromper, de préservation de la confidentialité du huis clos. Ma question était : Est-ce que nos tribunaux... Parce qu'on parle d'être à la fine pointe de la technologie. Mme la Présidente, à toutes les semaines, à tous les mois, il y a des tentatives hostiles d'entrer sur les systèmes protégés de la CIA. Alors, imaginez-vous donc que le palais de justice de Montréal, Québec ou Trois-Rivières pourrait faire l'objet de telles tentatives ou d'usurpation d'identité. Est-ce que les tribunaux, nos juges, ont l'intime conviction que nos moyens technologiques sont à la fine pointe, et on est toujours devant les malfaiteurs?

J'ai un gros drapeau jaune, gros doute, il faudra faire attention. Ce sera du cas par cas, mais une fois que le code l'autorise, pour aller plus vite, pour être plus pratique, bien, il faut faire attention, il ne faut pas laisser, en cours de route, la protection du huis clos puis de la confidentialité. Alors, une fois qu'on autorise, est-ce que la personne est réellement celle qui prétend être? La personne, une fois qu'elle est autorisée, va capter — et il est dit qu'elle ne peut pas diffuser le son et l'image — est-ce qu'elle pourra transférer ça à un tiers, de bonne foi ou de mauvaise fois? Puis, ce tiers, que fera-t-il? Alors, là, c'est un fondement important de notre justice. Les tribunaux sont publics, mais, quand il faut avoir un huis clos, il faut avoir un huis clos. Là, il y a un écueil potentiel.

Autre élément, puis on aura eu l'occasion de le faire dans les petites créances... Ça, les petites créances, il y aura possibilité plus facilement de téléverser les pièces au soutien de notre demande, ça va être plus facile, et ça, c'est une avancée réellement intéressante. On a eu l'occasion de demander au ministre de la Justice, puis il va y réfléchir. Depuis 2016, le montant maximal pour les petites créances, c'est 15 000 $. Alors, on a dit au ministre : On ne fera pas d'amendement à matin, là, mais est-ce qu'on pourrait augmenter le montant des petites créances? Les petites créances, vous vous représentez sans avocat, ça se fait selon des délais courts, ce n'est pas une justice à rabais, mais c'est une justice qui permet d'avoir une décision et de régler un conflit, parce que ce n'est pas le fun, être en conflit, que ce soit avec un voisin, un partenaire d'affaires, une connaissance, pas intéressant d'avoir un conflit. Quand il y a une décision, il y a une décision, ça apaise tout le monde, puis justice a été rendue.

Les petites créances, depuis 2016, c'est à 15 000 $. Vous pouvez avoir une décision, là... Bien là, les délais ont augmenté beaucoup parce que les délais, là, ils sont passés, j'y vais de mémoire, de 2018‑2019, de 223 jours à, 2019‑2020, donc d'une année à l'autre, elle est passée de quelque 2 000... pardon, quelque 220 jours à plus de 430 jours. Il y a presque eu un doublement des délais. Ça, ça veut dire... Alors, ça, il faut faire attention, on a questionné le ministre, puis la COVID n'est pas en cause, là, les délais ont augmenté avant la COVID. Alors, oui, c'est important les petites créances. Est-ce qu'on pourrait augmenter le nombre de juges? C'est une autre question qu'on a posée au ministre de la Justice. Il nous a confirmé, à notre grand étonnement, que si la présidente du Conseil du trésor lui libérait les sommes nécessaires, qu'il accepterait l'argent puis qu'il nommerait les juges. Alors, on était très étonnés de cela, mais il est parfaitement conscient que, oui, on peut réorganiser le travail, mieux travailler. Mais je pense qu'il y a 308 juges à la Cour du Québec, il y aurait peut-être lieu de nommer plus de juges parce que les petites créances, Mme la Présidente, c'est la Cour du Québec, division des petites créances. Alors, plus de juges et faire en sorte de réduire les délais. Et on a donc soulevé, peut-être, l'à-propos de se faire une réflexion collectivement à ce que le 15 000, qui est le plafond, le maximum pour les petites créances, ne pourrait-il pas être 20 000, 25 000? Peu importe, mais d'augmenter ça de façon à ce que ça colle à la réalité puis qu'on puisse désengorger les tribunaux puis que les gens puissent avoir justice.

Évidemment, je ne peux pas passer sous silence les cliniques juridiques. Les étudiants en droit, dorénavant, auront l'opportunité, durant leur bac, de donner des conseils juridiques, des avis et des consultations. C'est écrit de même dans la loi, de donner des conseils juridiques dans des cliniques, au sein des facultés de droit. Ça, c'est une avancée. On a déposé un amendement qui a été adopté, là, alors sur les 33 amendements, un des 28 qui ont été adoptés, ça a été de spécifier que ces cliniques juridiques là seront gratuites ou à frais modiques. Ça, c'est important. Ce n'était pas dans la loi, on l'a fait ajouter parce qu'on se disait, pour une faculté, ils pourraient dire : Bon, bien on va charger un frais. On dit ça... puis on prenait pour acquis que ça va être gratuit ou que, si ça coûte de quoi, ça ne coûtera pas grand-chose, mais on l'a mis dans la loi. Puis a eu un débat là-dessus, puis en jasant avec le ministre, bien, il dit : Bien, écoutez, si on ne le met pas... bien, il n'a pas dit ça de même, je le paraphrase, mais collectivement, on s'est rendu compte que la faculté pourrait dire : Bien, moi, pour l'ouverture de dossier, bien, je charge 200 $. Puis ça peut être raisonnable dans la tête de la doyenne, c'est 200 $. Puis pas juste de la doyenne, mais de l'organisation, puis tout ça. Mais là, on se dit : Bien, si on donne accès à la justice, il faut que ce soit gratuit ou à frais administratifs, frais modiques. Ça, on l'a fait mettre dans la loi, c'est important.

On a également élargi à ce que de telles cliniques, au sein des facultés, gérées par les facultés de droit, puissent avoir des partenariats avec des cliniques communautaires. Parce que je vais vous dire ça bien, bien simplement, Mme la Présidente, si j'inclus Ottawa, il y a six facultés de droit au Québec : Ottawa, trois à Montréal, une à Sherbrooke, Université Laval ici, à Québec. Alors, couverture régionale, on n'était pas là. En permettant aux facultés d'avoir des ententes spécifiques avec les cliniques juridiques communautaires, bien, on faisait en sorte, Mme la Présidente, d'élargir la possibilité que d'autres, tantôt à Rimouski, tantôt au Saguenay, tantôt en Mauricie, aient accès aussi. Puis là, on pourrait utiliser... On aime ça, le virtuel. Bien, de se faire donner un conseil juridique virtuellement, ça peut se faire, ça peut s'imaginer, et ainsi de suite.

Il y a un élément important, puis ça, ça a été... je ne dirais pas l'éléphant dans la pièce, mais on aura l'occasion collectivement de se poser la question. Si vous n'êtes pas au courant, Mme la Présidente, je vous informe qu'une avocate et un avocat ne peut pas, s'il est regroupé, donner des conseils juridiques, à moins qu'il soit incorporé ou au sein d'une société à responsabilité limitée. Au Québec, vous ne pouvez pas donner un conseil juridique si vous n'êtes pas incorporé ou si vous ne faites pas partie d'une société à responsabilité limitée. Ça veut dire quoi? Ça veut dire que les avocates, avocats qui travaillent au sein d'OBNL, organismes à but non lucratif, imaginez-vous donc, ne peuvent pas donner des conseils juridiques.

On a dit : Est-ce qu'on pourrait élargir ça en allant changer le Code des professions? Finalement, le ministre, je pense qu'il est conscient de l'incongruité. Quelle est-elle? C'est que la faculté de droit qui va faire une entente de partenariat avec une clinique juridique va avoir des étudiants, étudiantes en droit qui vont pouvoir donner des conseils juridiques à l'OBNL, au sein de l'OBNL, même physiquement, mais les avocates, avocats qui sont là, parce que c'est un OBNL, ne peuvent pas donner des conseils juridiques alors qu'eux autres sont inscrits au tableau de l'ordre.

Alors, on a dit : On pourrait-u libéraliser ça, puis justement, par souci d'accès à la justice, augmenter le nombre d'avocates et avocats au sein d'OBNL qui vont donner des conseils juridiques? Ça, il aurait fallu changer le Code des professions, il y a un aspect aussi fiscal, ainsi de suite. Mais ça, c'est un débat que nous aurons encore, Mme la Présidente. C'est un débat que nous avons devant nous et que nous devrons nécessairement ouvrir parce qu'il y a là une incongruité. Il y a 46 ordres professionnels, c'est la même chose pour tous les ordres professionnels. Mais il faudra se poser cette question-là et on aura l'occasion de le faire.

Alors, Mme la Présidente, nous avons travaillé de façon, comme l'a dit le ministre, excessivement constructive, je pense, de façon raisonnée, raisonnable et intelligente, 28 amendements adoptés sur 33. Le projet de loi, est-ce qu'il est parfait? Non. Est-ce que c'est une avancée pour le Québec? Oui. Est-ce qu'il faut faire attention parce que ces articles-là... de quelle façon seront-ils mis en application? Oui. Puis on aura l'occasion d'y revenir, Mme la Présidente. Merci.

• (12 h 20) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur le projet de loi n° 75? Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme Paule Robitaille

Mme Robitaille : Merci, Mme la Présidente. Écoutez, c'était vraiment un plaisir de participer à l'étude article par article de ce projet de loi là, là, le projet de loi n° 75, la Loi visant à améliorer l'accessibilité et l'efficacité de la justice, notamment pour répondre à des conséquences de la pandémie de la COVID-19. Donc, vraiment un plaisir parce qu'on parlait d'accessibilité à la justice, d'efficacité, et aussi, avec des collègues, des collègues d'une expérience éprouvée en la matière, mon collègue de LaFontaine, le ministre de la Justice, l'ancienne ministre de la Justice, députée de Notre-Dame-de-Grâce, et évidemment, la députée de Joliette aussi, juriste aguerrie. Donc, de travailler avec ces parlementaires d'expérience et qui ont vraiment travaillé de concert pour améliorer la loi puis améliorer la loi pour le bien public, là, pour le bien de tout le monde parce qu'on veut... puis on le sait, la justice, là, c'est extrêmement... pour le commun de mortels, ça fait peur, c'est lourd, c'est kafkaïen, on se voit entrer là-dedans, on ne comprend pas trop. Alors, ce projet de loi là voulait justement... continuait les efforts qui ont été faits sous l'ancien gouvernement, avec le projet de loi n° 32, pour rendre l'accès à la justice plus facile pour le commun des mortels, pour le contribuable.

Encore une fois, je l'ai dit, quand on a discuté du principe, mon collègue député de LaFontaine en a parlé, la députée de Joliette aussi, même que la députée de Joliette pensait... trouvait incohérent qu'on ait un titre comme celui‑là pour le projet de loi, c'est, oui, pour répondre à des conséquences de la pandémie de la COVID-19, mais le projet de loi, bien, c'est beaucoup plus que ça parce que, quand la pandémie va se terminer, puis on espère qu'elle va va se terminer en 2021, puis qu'on tourne la page, mais ce projet de loi là et le travail qu'on a fait sur ce projet de loi là, les changements qui auront eu lieu suite à ce projet de loi là, bien, ils vont rester, ils vont être là, ils vont péreins, ça va être permanent et ça va être pour le bénéfice de tout le monde. Ça, c'était extrêmement important donc, oui, pour répondre à des conséquences de la pandémie, mais c'est plus que ça, Mme la Présidente, c'est vraiment un autre bout de chemin pour améliorer l'accessibilité et l'efficacité de la justice au Québec.

Donc, comme disait mon collègue de LaFontaine, est-ce qu'il est parfait, le projet de loi? Non, mais il est très, très nécessaire, il a été très, très nécessaire. La situation évolue extrêmement rapidement. La pandémie nous a fait prendre conscience de certaines choses, nous a mis devant certaines limites, et nous a forcés à se moderniser, à aller plus vite, à utiliser les moyens technologiques d'une façon plus efficace. Mais évidemment, Mme la Présidente, dans tout ça, il y a des dangers, et de là l'importance d'avoir des juristes aguerris, du monde qui ont l'expérience des tribunaux, qui ont participé à l'étude détaillée, et puis de se poser des questions. C'est bien beau, là, tout le monde sur Teams, et puis je fais le procès de chez nous, puis ça va bien, mais ça engendre toutes sortes de choses, toutes sortes de conséquences, et alors il faut y aller avec prudence, il faut y aller avec prudence.

Déjà, bon, première étape du projet de loi, on peut faire des procès sur Teams. On peut faire des interrogatoires, au préalable, sur Teams, en tout cas, on peut utiliser des moyens technologiques à toutes sortes de choses, mais, justement, est-ce que c'est bien dans toutes les circonstances? Et c'est ça dont on a discuté, et on voit, dans le projet de loi, que le juge, évidemment, acquiert beaucoup de pouvoirs là-dedans parce qu'avant il y avait un paquet de procédures, et tout ça, et ça allongeait les choses, on a voulu rendre ça plus rapide, plus efficace. La célérité, hein? Et donc on se pose des questions, on ne peut pas toujours, toujours, toujours faire un procès sur Teams, ce n'est pas possible.

Et, comme on le disait quand on discutait du principe, il ne faudrait pas déshumaniser la justice non plus, parce qu'il n'y a rien comme avoir le témoin en chair et os devant nous, j'imagine, je me mets à la place du juge, là, pour bien sentir les choses, pour évaluer la crédibilité d'un témoin, et Dieu sait que c'est important, là, surtout en première instance, Dieu sait que c'est important. C'est important de pouvoir sentir les gestes, voir les gestes, voir les mimiques du témoin, de l'accusé. En droit criminel, c'est fondamental, évidemment. Alors, on a fait des améliorations dans le projet de loi. Alors, on voyait... certains articles disaient que le juge, en bout de ligne, hein, sans nécessairement le consentement des parties, pouvait décider si on va sur Zoom ou non pour entendre l'interrogatoire d'un témoin ou non. Et là on a travaillé là-dessus, ce n'est pas parfait, mais on s'est arrangé pour que, dans la loi, on prenne... Le juge doit prendre en considération l'argumentaire des parties, il doit y aller avec le consentement des parties. Donc, c'est très, très important. Et toujours dans cet esprit où la technologie, c'est l'exception, ce ne sera pas nécessairement la règle surtout pour les procès, surtout pour les audiences, là. Pour certains, pour transmettre des documents, et tout ça, bon, oui, c'est vrai, ça va beaucoup plus vite, mais, quand on parle d'audience, quand on parle de témoin, quand on parle d'interrogatoire, ce sera l'exception, il faut garder ça en tête. Et, encore une fois, ça doit se faire avec... le juge doit absolument prendre en considération l'argumentaire de toutes les parties, audi alteram partem, on l'a dit.

On a parlé aussi des huis clos, mon collègue en a parlé. Évidemment, la technologie, ça nous met dans une position assez particulière parce que, oui, on a des procès à huis clos, où la confidentialité des faits doit être absolument respectée, et là, oui, avant, finalement, on avait une salle d'audience avec 30 chaises, et le juge pouvait juger de qui venait et ne venait pas. Et là, maintenant, bien, il y aura les parties qui pourront assister, mais là, il y aura les journalistes, mais c'est le juge, finalement, qui aura le pouvoir de faire le triage et qui devra juger de ça de façon technologique. Et là, finalement, quelqu'un peut s'improviser journaliste, puis là, évidemment, dans le projet de loi, on le dit bien clairement, on le répète, c'était le cas avant, c'est toujours le cas maintenant, mais tous les enregistrements, la prise d'images, tout ça ne peut pas être publié, ne peut pas être diffusé par après, mais, une fois qu'on a quelqu'un qui est en ligne, qui regarde l'audience et qui... bon, il peut l'enregistrer, il peut le diffuser partout, et le contrôle de cette confidentialité-là sera extrêmement importante.

Je vois que le temps file. Les cliniques juridiques, très important. Écoutez, dans mon comté, là, il y a une clinique juridique, la Clinique juridique de Montréal-Nord, qui vient de voir le jour. On a des étudiants qui travaillent là. Avant, ils pouvaient simplement donner de l'information, là, maintenant, ils pourront donner des conseils juridiques, ils pourront donner des avis juridiques, c'est fondamental. Avant, au tout début du projet de loi, la Clinique juridique de Montréal-Nord n'aurait pas pu donner des conseils juridiques, et là, grâce aux amendements qu'on a faits dans le projet de loi, ils pourront le faire. Pourquoi? Parce qu'avant, au début, l'idée première du projet de loi, c'était de permettre aux cliniques juridiques universitaires de donner des conseils juridiques. Maintenant, ça va plus loin, et l'université pourra reconnaître différentes cliniques communautaires, et là les étudiants qui travaillent dans ces cliniques communautaires là pourront donner des conseils.

Évidemment, ce n'est pas parfait, on l'a dit, on aura des OBNL où on a des avocats qui y travaillent, qui, à cause de la loi, à cause du Code des professions, pourront simplement donner des informations, et les étudiants qui travailleront dans ces OBNL là, qui seront supervisés par un avocat, bien, eux, pourront donner des conseils. Donc on est devant quelque chose de très incohérent. Le ministre nous a dit qu'il le considérera. Il réalise, finalement, l'incohérence. Il faudra aller plus loin. On se retrouvera plus tard certainement, espérons-le, pour amender le Code des professions pour avoir quelque chose de beaucoup plus cohérent.

Alors, Mme la Présidente, du beau travail qui a été fait, on avance pour l'accessibilité des...

• (12 h 30) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur le rapport de la Commission des institutions, le projet de loi n° 75?

Mise aux voix des amendements

Comme il n'y a pas d'autre intervention, je vais d'abord mettre aux voix les amendements proposés par M. le député de LaFontaine.

Comme je m'aperçois qu'il manque un groupe parlementaire, je vais suspendre les travaux quelques instants pour permettre au groupe parlementaire manquant de venir se joindre à nous.

(Suspension de la séance à 12 h 31)

(Reprise à 12 h 35)

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc, nous étions rendus à mettre aux voix les amendements proposés par M. le député de LaFontaine. Alors, je comprends qu'il y a un consentement pour que je lise et que je mette aux voix un à un les amendements proposés par M. le député de LaFontaine. Il y a bien consentement? Oui.

Alors, le premier amendement, introduisant l'article 1.2, se lit comme suit : Insérer, avant l'article 2 du projet de loi, l'article suivant :

Code des professions.

1.2. L'article 94 du Code des professions est modifié par l'insertion, après le paragraphe p), du suivant :

«p.1) autoriser les membres de la Chambre des notaires du Québec et du Barreau du Québec à exercer leurs activités professionnelles au sein d'une personne morale sans but lucratif.»

En application de l'ordre spécial, j'invite maintenant les leaders parlementaires à m'indiquer le vote pour leurs groupes sur cet amendement. M. le leader adjoint de l'opposition officielle?

M. Derraji : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : M. le leader adjoint du gouvernement?

M. Schneeberger : Contre.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Mme la députée de Sherbrooke?

Mme Labrie : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : M. le député des Îles-de-la-Madeleine?

M. Arseneau : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci. M. le leader adjoint, avez-vous des indications à nous transmettre concernant les votes des députés indépendants?

M. Schneeberger : Oui, un, celui de Chomedey, et c'est pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci. Alors, je vous remercie. En conséquence, le premier amendement présenté par M. le député de LaFontaine est rejeté.

Alors, nous allons procéder au deuxième amendement, concernant l'article 38 du projet de loi, qui se lit comme suit : L'article 2.2 du code est modifié par l'ajout, à la fin de l'article, de : «En cas de témoignage, le consentement des parties est requis pour l'utilisation de moyens technologiques.»

En application de l'ordre spécial, j'invite maintenant les leaders parlementaires à m'indiquer le vote pour leurs groupes sur cet amendement que je viens tout juste de vous lire. M. le leader adjoint de l'opposition officielle?

M. Derraji : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : M. le leader adjoint du gouvernement?

M. Schneeberger : Contre.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Mme la députée de Sherbrooke?

Mme Labrie : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : M. le député des Îles-de-la-Madeleine?

M. Arseneau : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci. M. le leader adjoint, avez-vous des indications concernant le vote de la députée de Marie-Victorin et de Chomedey?

M. Schneeberger : Oui, j'ai celui du député de Chomedey : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci. En conséquence, le deuxième amendement présenté par M. le député de LaFontaine est rejeté.

Mise aux voix du rapport

Maintenant, en application de l'ordre spécial, je vais inviter maintenant les leaders parlementaires à m'indiquer le vote de leurs groupes sur l'adoption du rapport de la Commission des institutions portant sur le projet de loi n° 75, Loi visant à améliorer l'accessibilité et l'efficacité de la justice, notamment pour répondre à des conséquences de la pandémie de la COVID-19. M. le leader adjoint du gouvernement?

M. Schneeberger : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : M. le leader adjoint de l'opposition officielle?

M. Derraji : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Mme la députée de Sherbrooke?

Mme Labrie : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : M. le député des Îles-de-la-Madeleine?

M. Arseneau : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : M. le leader adjoint, si vous voulez nous donner les indications pour le vote de la députée de Marie-Victorin.

M. Schneeberger : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci. Je vous remercie. Vous l'avez, Chomedey, également?

M. Schneeberger : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Pour. Parfait. Alors, je vous remercie. En conséquence, le rapport de la Commission des institutions portant sur le projet de loi n° 75, Loi visant à améliorer l'accessibilité et l'efficacité de la justice, notamment pour répondre à des conséquences de la pandémie de la COVID-19, est adopté.

M. le leader adjoint du gouvernement, pour la suite des travaux.

M. Schneeberger : Oui. Alors, pour la suite de nos travaux, Mme la Présidente, veuillez appeler l'article 24 du feuilleton.

Projet de loi n° 66

Prise en considération du rapport de la commission qui en a
fait l'étude détaillée
et des amendements transmis

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci. Donc, à l'article 24 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la Commission des finances publiques sur le projet de loi n° 66, Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure, ainsi que les amendements transmis en vertu de l'article 252 du règlement par M. le député de La Pinière, par M. le député de Rosemont et par M. le député de Jonquière. Ces amendements sont déclarés recevables.

Cependant, l'amendement transmis par le député de Rosemont est similaire aux deux autres transmis par le député de Jonquière, à savoir qu'il vise à retirer de la liste des projets d'infrastructure de l'annexe I du projet de loi les projets 117, agrandissement du collège Dawson, et le 120, aménagement sur une partie du site de l'Hôpital Royal Victoria du Centre universitaire de santé McGill. Afin d'éviter la répétition, et considérant que le député de Jonquière propose ces changements dans deux amendements distincts plutôt que dans un seul comme c'est le cas pour l'amendement du député de Rosemont, seuls les amendements transmis par le député de Jonquière seront mis au vote. Cette manière de procéder favorisera le droit de vote des députés en leur permettant de se prononcer distinctement sur ces deux propositions de retrait de la liste, du projet de loi, d'infrastructures, de l'amendement... de l'annexe I du projet de loi.

• (12 h 40) •

Y a-t-il des interventions sur ce rapport ainsi que sur les amendements que je viens tout juste de vous lire? Oui. Mme la ministre du Conseil du trésor, la parole est à vous.

Mme Sonia LeBel

Mme LeBel : Merci, Mme la Présidente. En effet, là, comme vous l'avez... Oh! Je vois quelqu'un de levé, je pense que...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Oui, M. le leader adjoint de l'opposition officielle.

M. Derraji : Désolé, mais, je veux juste faire mention, nous avons aussi envoyé des amendements. Je n'avais pas l'impression d'entendre nos amendements.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Bien, comme j'ai mentionné — attendez un petit peu, là — ils sont déclarés recevables, mais, comme... Peut-être que vous n'étiez pas arrivé lorsque j'ai mentionné, là, qu'il y avait seulement les amendements du député de Jonquière qui allaient être vus parce qu'ils étaient similaires, en fait. O.K.? Veuillez poursuivre, Mme la ministre.

Mme LeBel : Oui. Merci, Mme la Présidente. En effet, comme vous venez de le mentionner, nous entamons, là, les dernières étapes en vue de la sanction du projet de loi n° 66, qui est la Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure.

Avant toute chose, je pense que c'est important pour moi de souligner, j'ai eu l'occasion de le faire à quelques reprises lors de la fin de l'étude détaillée, lors d'un point de presse que j'ai tenu, là, au lendemain, l'excellente collaboration de mes collègues de l'opposition, de tous les partis d'opposition, d'ailleurs, au projet de loi n° 66, que ce soit le député de La Pinière, de Rosemont ou de Jonquière. Pendant tous les travaux, on a eu une collaboration qui était extrêmement harmonieuse. Malgré la divergence de points de vue, les discussions étaient respectueuses, et je l'ai beaucoup apprécié.

J'aimerais aussi remercier les 26 organismes experts, Mme la Présidente, qui ont participé aux consultations particulières. Leurs interventions et commentaires ont passablement enrichi nos réflexions et nous ont permis aussi de bonifier le projet de loi sous plusieurs aspects. Merci aussi à mes collègues députés du gouvernement qui m'ont épaulée, je vous dirais, avec patience tout au long de la soixantaine d'heures, là, qu'a duré l'étude détaillée. Alors, je les remercie. Ils sont essentiels dans notre travail, et, sans eux, on ne pourrait pas procéder, et je tiens à le souligner.

Il est bon de rappeler, Mme la Présidente, que le projet de loi n° 66 constitue un effort concerté du gouvernement pour favoriser la relance économique par l'accélération de la mise en chantier de 180 projets d'infrastructure. La crise actuelle, sanitaire, qui nous occupe malheureusement trop, impose de prendre des actions décisives pour lutter contre les impacts du virus à différents niveaux. Le projet de loi n° 66 est l'un des éléments clés de notre réponse aux enjeux économiques qui découlent de la situation exceptionnelle que nous vivons.

Je suis très fière que nous ayons pu, à la suite de discussions toujours fructueuses, bonifier différents aspects de cet important projet de loi par notre travail collectif des dernières semaines. Donc, permettez-moi, peut-être, de faire état des principaux amendements parmi les 50 qui ont été adoptés.

En ce qui concerne l'Autorité des marchés publics, nous étendons ses nouveaux pouvoirs d'enquête aux contrats qui sont connexes au projet de loi... aux projets, pardon, d'infrastructure prévus à l'annexe I. L'autorité pourra donc désormais intervenir sur les contrats et sous-contrats publics de d'autres projets d'infrastructure, comme les aqueducs, les égouts, des infrastructures routières, qui sont nécessaires pour desservir les 180 projets de la liste. Ainsi, la surveillance des marchés publics entourant un projet sera également assurée.

De plus, l'Autorité des marchés publics pourra faire enquête de sa propre initiative lorsqu'elle constate un manquement, notamment sur le processus d'adjudication ou d'attribution d'un contrat public ou sur l'exécution d'un tel contrat. Ça va bien au-delà des pouvoirs d'enquête actuels en matière de gestion contractuelle, qui ne peuvent être exercés qu'à l'endroit d'un organisme public qu'elle désigne ou qui est désigné par le gouvernement. Cet amendement avait pour but de répondre aux préoccupations manifestées par plusieurs groupes ainsi que par la Vérificatrice générale du Québec lors des consultations. Par ailleurs, on assure également la probité des individus qui travaillent en collaboration avec l'Autorité des marchés publics, ce qui est primordial dans les circonstances. Surveillance accrue, probité accrue. Alors, on entoure bien le projet de loi n° 66, et c'était un enjeu très important pour moi.

On étend les pouvoirs de l'AMP avec l'article 73.1 également. En effet, on reconnaît la nécessité d'assujettir tous les contrats et sous-contrats publics qui y sont liés, qui découlent des projets majeurs inscrits au Plan québécois des infrastructures à ses nouveaux pouvoirs.

En matière d'expropriation, nous avons adopté un amendement à l'article 17 pour que le locataire ou l'occupant de bonne foi reçoive... donne dorénavant une notification plus précise et plus complète. On a aussi prévu un délai plus important, pour donner le temps à tous les gens concernés de remplir les documents requis dans le cadre des démarches d'expropriation. Le délai passe ainsi de 30 à 45 jours.

Plusieurs amendements ont été ajoutés à la suite de plusieurs préoccupations également soulevées en matière environnementale. Ainsi, nous mettons clairement de l'avant le respect du principe de l'objectif zéro perte nette en ce qui concerne les milieux humides et hydriques pour les projets prévus à l'annexe. En outre, on prévoit l'obligation de consulter le ministre de l'Environnement pour bénéficier d'un accompagnement afin de déterminer s'il y a des milieux sensibles à l'endroit où seront réalisées les activités du projet. Pensons notamment, encore une fois, aux milieux humides et hydriques ou à la présence d'espèces menacées ou vulnérables.

L'ajout d'un article oblige la publication en continu de plusieurs renseignements concernant les projets. On peut penser aux mesures prises pour éviter ou limiter le rejet des contaminants ou pour atténuer leurs effets ou encore aux mesures prises pour minimiser les impacts sur les milieux humides et hydriques, incluant celles concernant la remise en état.

Des modifications ont aussi été apportées, aussi, pour favoriser le traitement et la valorisation des sols contaminés lors de la réhabilitation du milieu. Ça a d'ailleurs été mentionné à la période de questions par le ministre de l'Agriculture à une question du député de Jonquière ce matin. Donc, on met aussi en place des mesures pour assurer la traçabilité des sols contaminés et favoriser la valorisation.

Au regard des mesures facilitant le paiement aux entreprises parties à des contrats publics des travaux de construction ainsi qu'aux sous-contrats publics qui y sont liés, un amendement à l'article 66 a aboli la limite de 20 millions de dollars. Alors, ces mesures, l'application de ces mesures pour l'accélération du paiement, qu'on pense au calendrier de paiements ou à la mise en place de solutions pour le traitement des plaintes, ce sera maintenant appliqué à tous les projets de l'annexe qui sont, naturellement, admissibles, dépendamment... Bon, ça prend un calendrier de paiements, on en a parlé en consultations, mais tous les projets admissibles pourront être assujettis à cette règle de facilitation des paiements, et ça répond à de nombreuses demandes exprimées par les représentants de l'industrie, Mme la Présidente.

On a également entendu certaines nations autochtones en consultations particulières. J'ai aussi rencontré, avec mon collègue du Secrétariat des affaires autochtones, le ministre responsable, le conseil de bande... le Conseil mohawk de Kahnawake, et le projet de construction du pont Honoré-Mercier, finalement, a été retiré de l'annexe I pour ne pas court-circuiter un mécanisme de consultation qui a déjà été mis en place par un protocole particulier entre le ministère du Transport et le Conseil mohawk de Kahnawake. C'était une de leurs demandes, et je suis vraiment très heureuse de pouvoir y avoir répondu de façon positive. De plus, nous avons consenti à l'ajout d'un article qui prévoit que les dispositions de la loi doivent s'interpréter de façon compatible avec l'obligation de consulter les différentes nations, ce qui était une de leurs préoccupations majeures.

Pour conclure, je suis très satisfaite du chemin qu'on vient de parcourir, Mme la Présidente, afin de mener à terme ce projet de loi. On va d'ailleurs entamer ensemble, prochainement, le dernier droit vers l'adoption. Au final, ce sont les services à la population et notre économie qui en sortiront gagnants. Avec ce projet de loi, nous allons pouvoir rénover nos hôpitaux, construire des écoles, construire des maisons des aînés, rendre nos routes plus sécuritaires, et ce, dans toutes les régions du Québec.

Sur le plan économique, je rappelle que les entreprises dépendent de notre rapidité d'action en cette période difficile. Nous sommes convaincus qu'à travers l'élaboration de ce projet de loi nous proposons une réponse plus qu'adéquate aux enjeux uniques et exceptionnels auxquels nous faisons face collectivement. Il faut agir ensemble pour redémarrer l'économie du Québec et répondre aux besoins de nos citoyens. Il est possible d'accélérer nos processus sans affecter nos standards en matière de protection d'environnement et d'intégrité des marchés publics. C'est le temps d'aller de l'avant, Mme la Présidente. Merci.

• (12 h 50) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, Mme la ministre. Maintenant, je suis prête à entendre un autre intervenant, qui sera M. le député de La Pinière. Vous disposez d'un temps de parole de 30 minutes

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : Merci, Mme la Présidente. Alors, avant de commencer mon propos sur le projet de loi n° 66, je vous demanderais de me permettre de faire un petit aparté pour saluer les gens qui manifestent actuellement devant le parlement, manifestation à laquelle je souhaitais participer. Les circonstances font en sorte que je ne peux y être. Et c'est une manifestation en lien avec la régularisation des immigrants qui sont sur notre territoire, la régularisation des immigrants avec statut précaire et évidemment dans une circonstance particulière qui est celle des déportations qui ont commencé. Alors, je profite du fait que la ministre de l'Immigration soit présente en Chambre aujourd'hui pour encore une fois solliciter un geste de sa part et d'élargir à tous les travailleurs de la santé, peu importe leur catégorie d'emploi, et aussi, un cas particulier, pour lequel il n'y a toujours pas eu de geste, la famille Horbanov, Mme Horbanov, dont le père... le mari est décédé dans un méga-nid-de-poule. J'ai terminé, Mme la Présidente, dans cette phrase...

M. Schneeberger : Mme la Présidente, c'est parce que ce n'est pas le sujet, actuellement. Alors, j'aimerais ça dire au député de La Pinière de revenir à ce sujet principal concernant le projet de loi n° 66. Merci.

M. Barrette : C'est tout à fait vrai, Mme la Présidente...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Poursuivez sur le projet de loi, M. le député.

M. Barrette : ...j'y reviens, en terminant ma phrase — il m'a interrompu, il aurait pu laisser finir ma phrase, là — Mme Horbanov, dont le mari est décédé dans un méga-nid-de-poule sur la 30, dont le mari suivait légalement toutes les procédures, qui auraient abouti, et qui aujourd'hui fait face à une déportation avec ses deux enfants.

Ceci dit... Et je pense que c'est important de le dire, Mme la Présidente. Je comprends, là, que c'est irrégulier, là, puis que ça fait de la peine au leader adjoint, là, mais je pense qu'il peut subir cette peine-là avec le sourire, ce que je vois, actuellement.

Maintenant, je reviens au projet de loi n° 66. Et je vais commencer, moi aussi, par remercier tout le monde, à commencer par le président, l'équipe du secrétariat, notre équipe à nous, l'équipe et les collègues parlementaires, et la présidente du Conseil du trésor, parce que je suis tout à fait d'accord avec elle, nous avons fait des travaux qui ont été pratiqués dans la collaboration, dans l'intérêt de la population. Évidemment que je suis d'accord avec elle sur le fait qu'il y a des éléments pour lesquels on est en désaccord, et on le sera jusqu'à la fin. Mais ça, c'est le jeu parlementaire. Mais il n'en reste pas moins que, si la politique est l'art du compromis, nous aurons atteint un compromis, d'une part. Et moi, j'ai toujours vécu... Puis je l'ai dit à plusieurs reprises, je vais le redire aujourd'hui, peut-être que ça va rentrer dans les annales, j'ai vécu ma vie comme ça : Du débat naît soit la vérité soit un compromis raisonnable. Nous avons débattu, nous avons atteint un compromis raisonnable. Comment on l'a atteint? Après avoir entendu 26 groupes, reçu un certain nombre de mémoires et débattu pendant plus de 58 heures.

Je fais une parenthèse là-dessus, M. le Président, parce qu'on... Mme la Présidente, pardon, excusez-moi, parce qu'on a entendu souvent le premier ministre et d'autres parlementaires dire : Tout a été dit, on devrait faire un bâillon. Et là on a fait 58 heures où on a dit beaucoup, puis je pense qu'on a dit tout, et on arrive à quelque chose qui est tout à fait adéquat.

Alors, vous comprendrez, Mme la Présidente, de mon propos, à cette étape-ci, qu'on va voter pour l'adoption de ce projet de loi là, mais on va voter pour dans un contexte particulier. Le contexte, on le connaît, c'est celui de la pandémie. Et une situation exceptionnelle appelle des solutions qui sont souvent exceptionnelles. Il est vrai, et personne ne le conteste, que la relance économique passe de façon significative, mais certainement pas exclusive, et ça, j'insiste là-dessus, par le lancement de travaux d'infrastructure — là, là-dessus, j'imagine que le leader adjoint ne va pas m'interrompre — et on le sait, ça. Alors, à cet égard-là, évidemment, on est en faveur. Puis on a toujours été en faveur. On l'est encore aujourd'hui.

Ceci dit, Mme la Présidente, le choix des travaux, on sait comment il a été fait, hein, alors je reviendrai plus tard dans mon allocution, mais aujourd'hui on va voter pour parce qu'il y a une situation d'exception. La situation d'exception nous oblige... et je vais vous dire une chose, Mme la Présidente, ça nous oblige à poser un geste que normalement on ne poserait pas. Il est clair, démontré, puis je ne sais pas s'il est accepté de la partie gouvernementale, je pense que non, que nous faisons des entorses à plusieurs de nos règles que l'on s'est données après moult débats, notamment en matière de protection de l'environnement. Je dis «notamment» parce que ce n'est pas juste ça. Mais, sur cet élément-là, Mme la Présidente, il y a des entorses, des accrocs, d'autres diront des entorses, qui sont, pour nous, tout à fait significatives. Et on accepte d'aller de l'avant uniquement, uniquement, à cause de l'urgence de la situation.

Et, à propos de l'urgence de la situation, Mme la Présidente, je ne peux pas m'empêcher de faire le commentaire, que vous voyez probablement venir comme un paquebot qui rentre dans une gare, ce qui est assez rare... Ça prend un film apocalyptique pour voir ça, mais ça s'est vu dans certains films, il y avait de l'apocalypse. Alors, on est presque devant une apocalypse réglementaire environnementale, compte tenu des entorses que l'on fait, mais ce sont quand même des entorses. L'urgence de la situation, Mme la Présidente, elle existait au printemps. Elle existait au printemps. C'est au mois de mai qu'on a commencé à parler de ce projet de loi là. C'est à ce moment-là qu'on nous a accusés... et j'ai été accusé personnellement, Mme la Présidente, par le premier ministre d'être celui qui ralentissait les travaux, qui ralentissait la reprise économique du Québec, là. J'ai passé mon été à me faire dire que j'étais le méchant député de La Pinière qui empêchait la relance économique par le projet de loi n° 61.

Je ne peux pas faire autrement, Mme la Présidente, que de rappeler le caractère abusif du projet de loi n° 61, qui a généré la plus importante levée de boucliers civile que j'ai vue, moi, dans mon expérience politique, c'était spectaculaire, et ce n'est pas à cause de moi que 61 a été battu. C'est sûr que j'ai été instrumental, et je l'ai fait avec plaisir, un plaisir quasiment symphonique, mais ça a donné le résultat que l'on connaît. Et 61, il a donné ça.

Alors, je ne peux pas dire autrement, Mme la Présidente, que, si 61 avait été écrit et présenté par l'actuelle présidente du Conseil du trésor, bien, on aurait sauvé pas loin de sept mois. Alors, peut-être que ça fait la démonstration qu'une approche différente de certains dossiers mène à un résultat différent et que, dans cette situation dite d'urgence, où il fallait agir vite, on a perdu essentiellement sept mois. C'est quand même assez ironique quand on pense à ça. Mais, quand même, on a réussi à aboutir et on est arrivés à la destination qui est la destination, je pense, souhaitée par tous les Québécoises et... toutes les Québécoises, pardon, et tous les Québécois.

Alors, on a fait ce bout de chemin là. C'est à l'honneur de la présidente du Conseil du trésor. Maintenant, il y a quand même un certain nombre d'éléments, Mme la Présidente, sur lesquels il y a encore... j'aurais souhaité faire un certain nombre de débats. Mais il y a eu des gains. Le temps passe, Mme la Présidente. Il ne me reste probablement qu'une minute avant la suspension. Je vais commencer par aborder quand même ce que je considère un gain significatif, qui est celui de l'amendement qui a été porté à l'article 66. Il est simple à traiter et il est simple à rappeler.

Rappelons-nous que notre gouvernement précédent avait mis en place un projet pilote pour améliorer, Mme la Présidente, la situation des entrepreneurs qui se retrouvaient souvent dans des situations budgétaires difficiles à cause de paiements en retard. Et les entrepreneurs nous avaient dit à l'époque que ça mettait même leur compétitivité en cause, et on le comprend. Comment un entrepreneur en construction peut-il avoir les garanties nécessaires pour soumissionner sur un projet de 40 millions de dollars si ses finances ne sont pas en ordre pour cause de paiements en retard? Lorsqu'il a à aller obtenir une marge de crédit ou une garantie financière chez un prêteur, ou autres, bien, ça le met dans une situation désavantageuse et même précaire.

Alors, le projet pilote qu'on avait mis en place à l'époque visait à faire en sorte que les entrepreneurs, par réglementation, allaient être payés dans des temps requis. Bien, ça a fonctionné. Le problème du projet pilote, c'est qu'il était limité aux contrats inférieurs à 20 millions de dollars. Et, bien, dans la liste que l'on avait des 202 projets, initialement, 180 au début du... 181, au début de 66, et maintenant 180, la majorité des projets...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Monsieur...

M. Barrette : Et je continuerai plus tard, cet après-midi.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, parfait. C'est noté. Vous reprendrez lorsque nous recontinuerons ce débat.

Maintenant, il est temps de suspendre jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 h 2)

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, bon après-midi à tous et toutes. Vous pouvez prendre place.

Alors, nous reprenons nos travaux, et l'Assemblée poursuit le débat sur la prise en considération du rapport de la Commission des finances publiques portant sur le projet de loi n° 66, Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure, ainsi que sur les amendements transmis en vertu de l'article 252 du règlement.

Au moment de suspendre ce débat, M. le député de La Pinière, c'est vous qui aviez la parole. Vous aviez utilisé 9 min 50 s de votre temps, et je vous recède la parole.

M. Barrette : Merci, Mme la Présidente. Alors, comme il y a eu une longue interruption, normale, je vais faire comme dans les séries télévisées, je vais commencer par «précédemment dans le débat», juste pour resituer les gens qui nous écoutent. Alors, ce matin, je débattais sur le fait que, dans le projet de loi n° 66, nous avions fait quand même une avancée, puisque, je recadre les choses, il y a un enjeu qui était très important pour les entrepreneurs québécois. On se rappellera, puis je le rappelle rapidement, là, je l'avais dit ce matin, il y a une problématique dans le monde de la construction qui vient du fait que, souvent, les entrepreneurs ne sont pas payés dans les temps requis, ils courent après leurs créances. Et on avait, nous, notre gouvernement, à l'époque, là, le gouvernement précédent, mis en place un projet pilote qui mettait en place une réglementation qui, essentiellement, permettait de déployer un calendrier, essentiellement garanti par les lois et règlements, de paiement des entrepreneurs. Et ça, c'était très important parce qu'un entrepreneur qui n'a pas les liquidités appropriées, soit parce que ce n'est pas une compagnie milliardaire, par exemple, soit parce que les paiements ne rentrent pas, bien, il n'a pas les liquidités pour soumissionner sur des grands projets. Et on sait qu'évidemment la compétition est le moteur du plus bas prix. Puis là on pourrait débattre longtemps sur la valeur du plus bas prix. D'ailleurs, ce genre de débat là s'est fait lors de l'étude du projet de loi n° 66, mais il n'en reste pas moins que, dans la construction — je vais peut-être faire une parenthèse là-dessus — ça demeure un élément qui est important.

Alors, dans le projet pilote que nous avions mis en place précédemment, le projet pilote s'adressait aux contrats de moins de 20 millions de dollars, donc, pour des PME dans la construction. Et ce 20 millions de dollars là avait été initialement reconduit dans 61 et dans sa suite, 66. Et personnellement, après avoir entendu, et dans 61 et dans 66, les entrepreneurs nous dire : S'il vous plaît, donnez-nous accès à ces mesures-là pour compétitionner pour les contrats de plus de 20 millions de dollars, j'en ai fait ma bataille. Et, après débat, ça a été un succès, ce qui fait que nous avons levé la barrière du 20 millions.

Alors, maintenant, nos entrepreneurs peuvent bénéficier de la mesure de calendrier plus garanti de paiement pour tous les contrats, sans limitation de valeur du contrat. Ce qui signifie donc qu'un des obstacles qu'il y avait dans 66, à savoir que la majorité, sinon la quasi-totalité — pas la totalité, mais la quasi-totalité — des projets étaient d'une valeur de 20 millions de dollars et moins... et plus, c'est-à-dire, là les entrepreneurs vont être compétitifs. Et ça, ça a été très bien reçu, et je pense que ça, c'est un vrai gain. D'autant plus que... Écoutez, c'est rare qu'on a ça, là. Il n'y a pas beaucoup de sujets, dans une consultation publique, à propos desquels ou duquel tous les gens qui viennent sont unanimes. Alors, les avocats étaient en faveur, les donneurs d'ouvrage, là, les villes, les commissions scolaires, centres de services aujourd'hui, et ainsi de suite, tous les donneurs d'ouvrage étaient en faveur de ça. On comprenait mal pourquoi il a fallu en débattre, mais ce n'est pas grave, on en a débattu, et on en a débattu d'une façon positive, puisque maintenant il y a levée de cette limitation, levée qui va être, je l'espère, permanente.

Je fais un aparté qui n'est évidemment pas approprié dans le cadre du projet de loi n° 66, puisque ça n'en est pas la portée, mais vous me permettrez, Mme la Présidente, de souhaiter que le gouvernement aille plus loin. C'est un projet pilote. Alors, le projet pilote, normalement, devrait se traduire en un changement de nos lois et règles et règlements en cette matière-là. Alors là, on vient de faire un pas en débordant du 20 millions. Maintenant, il reste une dernière étape, qui appartient au gouvernement, il reste encore deux ans pour le faire, un petit peu moins si on prend nos règles en compte. Alors, il est temps, je pense, de formaliser cette situation-là dont la démonstration a été faite qu'elle était utile et positive pour ce qui est de la compétitivité de nos entreprises et de faire en sorte que nos lois changent pour le futur.

Maintenant, Mme la Présidente, je fais une autre parenthèse parce qu'on en a débattu beaucoup, c'est toujours dans le cadre de la construction. Vous savez, il y a bien des gens, aujourd'hui... Ce n'est pas la portée du projet de loi, mais on en a débattu beaucoup, sur l'importance de peut-être changer les modes d'adjudication de nos contrats pour aller au-delà du plus bas... ou ailleurs, plutôt, que... pas au-delà, ailleurs du plus bas soumissionnaire. Ça, ça va être un débat intéressant, Mme la Présidente, si on le fait à un moment donné. La présidente du Conseil du trésor, dont c'est la responsabilité, a ouvert une porte à cet effet. Ça, ce serait toute une révolution. Je n'en ferai pas le débat ce matin, mais on doit aujourd'hui se poser la question : Est-ce que notre problème, au Québec, en termes de construction dans les édifices, infrastructures, et ainsi de suite, publics, c'est un problème de devis, ou c'est un problème de surveillance, ou des deux? Je m'explique, puis c'est très simple : Comment ça se fait qu'on a tant de nids-de-poule, Mme la Présidente? Est-ce que c'est parce qu'on ne prend pas du bon asphalte? Est-ce qu'on l'épand correctement ou non? Ça, s'appelle un devis. Ou bien est-ce que le devis est bon et qu'on ne le surveille pas? On dit, dans le devis, telle qualité de ciment, puis ce n'est pas la qualité de ciment dans le devis qui est installée parce que ce n'est pas surveillé? Alors ça, ce sont tous des enjeux qui ont été débattus, d'ailleurs, dans le cadre du projet de loi n° 66 parce que les gens disent : Moi, il faut que je sois compétitif comme entrepreneur, puis en plus on ne prend pas en compte la qualité. Regardez l'état de nos routes, par exemple. Je prends cet exemple-là parce qu'il est tellement flagrant pour quiconque roule sur nos routes et autoroutes, hein? Des fois, on a plus l'impression de plus être au Moyen-Orient que d'être en Amérique du Nord, compte tenu des trous que l'on a.

Bref, c'est un autre sujet, mais qui va être intéressant dans le cadre de l'amendement dont je vous parle, à 66, qui permet maintenant d'aller ailleurs, en termes de cédule de contrats, compétitivité d'entreprises, qualité, et ainsi de suite. Mais ça, ça ne se réglera pas aujourd'hui. Donc, de ce côté-là, il est clair que nous avons fait un gain qui est important.

• (15 h 10) •

Un autre gain qui, pour moi, était fondamental... Vous savez, j'ai fait quelque chose, Mme la Présidente, qui n'est pas fait souvent, puis ce n'est pas un reproche que je fais à qui que ce soit, j'ai choisi d'aborder le projet de loi n° 66 d'une façon ultratransparente. Vous savez, il y a des gens qui critiquent la chose parlementaire comme quoi ça prend du temps, puis c'est ci, puis c'est ça. Bien là, je suis arrivé au projet de loi n° 66, j'ai dit : Regardez, là, ce n'est pas compliqué, je vais vous annoncer à l'avance les points que je veux traiter et les points sur lesquels je souhaite avoir une avancée. Alors, un des premiers points que j'ai mentionnés, ça s'adonne que c'était le premier sujet du projet de loi, le premier article, la première section : l'Autorité des marchés publics. Alors, pour moi, surtout que j'avais en face de moi la procureure générale de la commission Charbonneau, quelle bonne occasion pour parler de l'AMP. C'était un moment rêvé, politiquement parlant, j'ai la personne qui est plus que bilingue en problématiques contractuelles dans nos structures publiques. Quelle bonne occasion de parler d'enquêtes, de surveillance, de contrôle.

Alors, l'AMP, on sait que c'est une structure qui est jeune, qui est née récemment et qui, à mon sens, n'a pas pris encore son envol. Je m'excuse, je le dis mal. Elle a pris son envol, mais elle ne vole pas beaucoup puis elle ne vole pas loin. Elle fait bien son travail, je ne dis pas que l'AMP est une organisation qui fait mal son travail, je dis qu'elle apprend à marcher, à voler, mais elle ne court pas encore puis elle ne fait pas de migration du nord au sud. Je dis simplement qu'actuellement, l'AMP, telle qu'elle a été créée et là où elle est rendue, elle devrait être rendue ailleurs.

Alors, j'ai abordé la problématique de cette façon-là. L'AMP, c'est un gardien, hein, c'est l'équivalent au quotidien, essentiellement, de la commission Charbonneau, entre guillemets. C'est définitivement le gardien du BIG. Tout le monde, aujourd'hui, connaît le BIG. Tout le monde sait qu'au sortir de la commission Charbonneau a été mis en place, pour la grande région de Montréal — en fait, pour Montréal — le bureau d'inspection de Montréal, hein? Ça a été mis en place... On le surnomme le BIG, et le BIG, c'est quelque chose qui fonctionne. Et on a entendu le BIG dans le 61, et on l'a entendu encore dans le 66, et ils sont venus nous dire à quel point ça marchait, et ils sont venus nous dire pourquoi ça marchait. Ils sont venus nous dire que ça marchait parce que, premièrement, ils avaient les pouvoirs appropriés, deuxièmement, ils avaient les ressources appropriées et, troisièmement, dans leurs pouvoirs, dans leurs ressources, leur force résidait dans la dissuasion, c'est-à-dire que ces gens-là avaient et ont encore aujourd'hui le pouvoir de débarquer le matin, là, le soir, la nuit sur n'importe quel chantier de construction, regarder et, sans faire d'enquête, là, exiger preuve de, documents de, et ainsi de suite.

Les gens dans le monde de la construction craignent le BIG. Et ce n'est pas que le BIG, ce sont des terreurs, ce n'est pas ça, c'est que ce sont des gens rigoureux qui n'hésitent jamais à poser des questions. Et, dès qu'il y a un soupçon, et même s'ils n'en ont pas, de problématique, je n'irais même pas jusqu'à dire malversation, mais d'irrégularité... mais par contre encore plus s'il y a malversation, ils débarquent, et tout le monde doit montrer patte blanche. Et la loi est claire, et ils ont le pouvoir, ils peuvent rentrer chez vous, chez nous, Mme la Présidente, puis demander, si on est en construction, document a, b, c, d, prouvez-moi ceci, cela, là, et puis tout le monde a le droit... tout le monde doit abdiquer. On s'entend-u que, quand le BIG débarque en quelque part, là, si l'asphalte qui est épandu sur le sol n'est pas de la bonne qualité, ils vont le savoir tout de suite, ça peut faire peur à des entrepreneurs? Puis je ne dis pas que les entrepreneurs méritent tous d'être traités comme ça, là, mais c'est parce qu'il y en a que oui puis il y en a que non.

Le BIG, le problème du BIG, c'est qu'il existe à Montréal, par la suite il a existé à Laval, et aujourd'hui il existe à Saint-Jérôme. À chaque endroit, l'effet a été positif en termes de contrôle de coûts, en termes de délais de travaux, de respect de délais de travaux et en termes de qualité de travaux. Alors, quand on voit ça, et ça, c'est... puis c'est pour ça que je disais tantôt que c'est le fun d'avoir la présidente du Conseil du trésor qui est l'ancienne procureure générale, ça, ça découle de Charbonneau. Alors, quand on a cette personne-là en face de soi, on a l'occasion de dire : Oui, mais pourquoi pas ailleurs? Pourquoi juste à Montréal? Pourquoi juste à Laval? Pourquoi juste à Saint-Jérôme? Comme si, à Québec, à Trois-Rivières, à Sherbrooke, à Chicoutimi... Je ne suis pas capable de dire «Saguenay», j'aime ça, moi, Chicoutimi, qu'est-ce que vous voulez que je dise, je le dis à chaque fois, c'est sentimental. Alors, pourquoi là, on n'aurait pas ça? Comme si ces endroits-là seraient immunisés contre les irrégularités. Bien, la nature humaine, elle existe partout où il y a des humains, on va dire ça comme ça, alors il y a donc lieu d'avoir l'équivalent d'un BIG ailleurs, et ce qui avait été prévu pour l'AMP était, justement, d'aller en dehors de ces territoires-là classiques.

Alors, moi, j'avais fait la bataille, je l'avais dit en entrée de jeu, là, dans... Vous savez, Mme la Présidente, comment ça marche, une commission parlementaire, on fait nos remarques préliminaires. Mes remarques préliminaires, Mme la Présidente, ça a été : Je souhaite avoir a, b, c, d. Je n'avais pas de e, f, g. Alors, c'était clair que j'allais faire cette bataille-là, puis on l'a faite. Et là ça a été le fun parce qu'on a eu vraiment un beau débat qui est arrivé à une conclusion qui était intéressante, et je l'explique, et c'est la raison pour laquelle j'en suis très satisfait, je souhaitais, Mme la Présidente, et je souhaite encore que l'AMP voie ses pouvoirs et responsabilités étendus sur tout le territoire du Québec, là où il n'y a pas de BIG, donc en dehors de Montréal, Laval et Saint-Jérôme. Je souhaitais et je souhaite encore que l'AMP ait la capacité de faire les enquêtes, d'intervenir de façon dissuasive ou non sur tout le territoire en matière d'infrastructures publiques partout sur le territoire du Québec parce qu'il m'apparaît que c'est nécessaire, c'est certainement utile et la preuve a été faite que c'est le cas.

Alors, je souhaite donc... je souhaitais donc qu'on profite du projet de loi n° 66 pour changer certains éléments de la Loi sur l'Autorité des marchés publics. Et là on a eu un débat, et c'est là que c'était agréable, Mme la Présidente, parce qu'au départ ça a été une fin de non-recevoir parce que... et Mme la présidente du Conseil du trésor avait raison, c'est sûr que ce que je demandais avait des ramifications qui étaient assez larges et que, donc, il devait y avoir, conséquemment, plusieurs changements dans la loi de l'AMP, dans des lois connexes quand on parle... au régime de plaintes, et toutes ces affaires-là. C'était une grosse commande que je faisais, et j'ai souhaité aller jusqu'au bout de ça. Au début, la réponse a été négative non pas sur le principe, mais sur la difficulté de le faire dans le cadre de 66, et la difficulté de le faire, évidemment, venait du fait de tous les changements connexes que ça amenait aux différentes lois.

Alors, on a débattu. On a passé la section I, on est allés à un autre sujet, mais j'ai profité de toutes les opportunités que je pouvais pour le ramener. Et en fin de compte, et c'est là qui... et là je reconnais la flexibilité dont a fait preuve la présidente du Conseil du trésor, à la fin, on a convenu d'une solution mitoyenne. En réalité, elle est plus que mitoyenne, c'est à peu près les trois quarts du chemin. Et quelle est-elle? Alors, nous avons réussi à faire en sorte que les pouvoirs de l'AMP, premièrement, soient étendus, étendus à tous les contrats publics gouvernementaux et organismes, donc tout ce qui n'est pas municipal. C'est beaucoup, là. Ça veut dire que, là, maintenant, l'AMP a un droit de regard plein et entier, du genre de celui du BIG, sur tout le PQI de l'État, toutes catégories confondues. Alors, ça, c'est un vrai gain parce que le gouvernement est, sans aucun doute, le plus gros donneur d'ouvrage, certainement en dollars, du Québec. C'est un gain.

Et je voulais aussi, parce que je l'avais dit à la case départ que, si je gagnais ça... que ces changements-là soient péreins, c'est-à-dire qu'ils ne soient pas limités à la durée de vie de 66. Parce que le problème de 66 dans cette matière-là, c'est que tous ces changements-là ne s'appliquent que pour la durée de vie légale du projet de loi n° 66, qui est de cinq ans. Si ma prémisse de départ est d'élargir les pouvoirs de l'AMP, je ne souhaitais certainement pas les élargir pendant cinq ans, mais bien de façon permanente. Alors là, le compromis qui a été fait, Mme la Présidente, qui est magnifique, dans le débat, c'est qu'on a réussi à mettre en place un amendement qui faisait ça. Les pouvoirs de l'AMP sont élargis à tout le PQI, tout ce qui est gouvernemental et organismes publics, et ce, de façon permanente, permanente.

Et là arrive la cerise sur le sundae parlementaire — on n'en fera pas une indigestion, faites-vous-en pas — alors, ça va durer jusqu'à ce qu'il y ait une refonte de la Loi de l'AMP, ce que la présidente du Conseil du trésor a affirmé à plusieurs reprises vouloir faire d'ici la fin du mandat. Alors, moi, je répondais tout le temps : Bien oui, mais là c'est parce que, Mme la ministre, vous pourriez être remaniée, parce que tout le monde peut se faire remanier — elle l'a même déjà été, dans le bon sens du terme, je dirais — tout le monde peut être remanié, puis en plus vous pourriez ne pas avoir le temps de le faire. Alors, moi, je ne peux pas accepter qu'il y ait ce risque-là. Alors, elle l'a écrit, c'est son écriture, on l'a fait ensemble, là, on a écrit un amendement qui faisait en sorte que les pouvoirs allaient être élargis à tout le PQI, comme je viens de vous le dire, mais de façon permanente, la permanence venant par le fait que c'est jusqu'à ce que la Loi sur l'AMP soit refondue. Magnifique, n'est-ce pas? Alors, on est partis, là, d'une idée qui était la mienne, à une fin de non-recevoir, à un compromis qui ne peut qu'être bénéfique pour la société québécoise.

Alors, pour ceux qui doutent de l'utilité des travaux parlementaires, bien là vous en avez un bel exemple que les travaux parlementaires peuvent donner quelque chose. Parce que les travaux parlementaires, hein, ils sont le résultat de différents leviers, hein? Il y a les idées au départ, puis après il y a les leviers. Puis, dans les leviers, bien, il y a les travaux parlementaires, la vitesse, ceci, cela, mais je ne rentrerai pas dans ce détail-là. Alors, ça, ça a été un gain, pour moi. Pourquoi? Parce qu'encore une fois je l'ai joué de façon transparente. À la case départ, je souhaitais a, b, c, d, et essentiellement, à date, j'ai eu a, b. C et d, il y a...

• (15 h 20) •

Une voix : ...

M. Barrette : Oui, je le sais, mais je vais pouvoir revenir plus tard, évidemment, à l'adoption. Mais, quand je reviendrai à l'adoption, Mme la Présidente, j'aborderai les autres sujets, qui sont, eux aussi, importants. Mais vous voyez, là, que, là, je viens de traiter de deux portions majeures.

Je regarde mon collègue du Parti québécois, le député de Jonquière, qui a fait comme moi. Il avait ses intérêts à lui, qu'il a débattu avec beaucoup d'énergie. D'ailleurs, je le salue pour ça. Il a démontré sa grande expertise dans le monde de... dans le secteur de l'environnement. Il a fait ses gains, je pense qu'il les a faits avec brio. Mais tout ça pour dire, là... puis je termine là-dessus parce qu'il me reste à peu près juste une minute, mais il est possible de faire des gains, là, dans l'étude d'un projet de loi comme celui-là, qui soient au bénéfice de la population.

Maintenant, est-ce que c'est un projet de loi qui est le nirvana de tout? La réponse, c'est non, Mme la Présidente, et je termine là-dessus, et j'y reviendrai plus tard cet après-midi, je maintiens qu'il y a un grand risque, là. À la première seconde, j'ai dit que ce projet de loi là pouvait être un laboratoire, une expérience sur laquelle on allait s'appuyer pour justifier des aménagements trop grands à nos lois sur la protection de l'environnement. Je vais y revenir cet après-midi. Je suis convaincu que mes collègues des deux autres oppositions vont en parler abondamment dans les prochaines minutes. Mais il y a là des gains qu'on a faits, mais il y a encore là des dangers. Et ces dangers-là, bien, il va falloir que la population qui nous écoute continue à nous écouter parce que ces dangers-là peuvent nous amener à la mauvaise place.

Alors, je termine là-dessus. On a fait des gains. Je vais revenir, cet après-midi, sur les sujets que je n'ai pas traités ce matin, parce que, là, j'ai une demi-heure, je vais avoir un petit peu plus un petit peu plus tard. Mais vous comprenez aujourd'hui où nous nous logeons et, encore une fois, pourquoi nous allons voter pour. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de La Pinière. Et maintenant je cède la parole à M. le député de Jonquière.

M. Sylvain Gaudreault

M. Gaudreault : Oui, merci, Mme la Présidente. Ça me fait plaisir de parler à mon tour sur la prise en considération du projet de loi n° 66 concernant la relance, la relance post-COVID, la relance économique, la reconstruction, appelez-le comme vous le souhaitez. Et on a effectivement une situation tout à fait exceptionnelle qui commande des mesures exceptionnelles. C'est ce que j'ai appris, moi, dans ma vie, à situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles. Cependant, j'avais eu l'occasion de le dire au principe, à l'adoption du principe, on a un projet de loi qui fait plus ce qu'on a déjà connu, je le dirais comme ça, au lieu de saisir l'opportunité d'une crise sans précédent pour prendre un chemin qui est différent.

Mon objectif n'est pas de parler trop longtemps. Je pense qu'on a fait un travail tout à fait rigoureux, un travail tout à fait important en commission parlementaire, le député de La Pinière l'a souligné, je suis d'accord avec lui. Et d'ailleurs il en arrive, des choses exceptionnelles en 2020 parce que ça fait plusieurs fois que je dis que je suis d'accord avec le député de La Pinière. Alors, honnêtement, je ne pensais jamais que ça arriverait, mais c'est ce qu'on appelle des alliés objectifs. Et, sur la question du projet de loi n° 66, nous avons partagé plusieurs points de vue en commun, et effectivement je dois reconnaître tout de suite et témoigner devant les collègues du travail positif, constructif à plusieurs égards, avec la présidente du Conseil du trésor qui a permis d'avancer et de faire quelques gains.

Ceci étant, Mme la Présidente, oui, quelques gains, mais, de notre côté, contrairement à l'opposition officielle — c'est là qu'on revient dans nos bonnes vieilles habitudes — nous, on va continuer de voter contre, on va continuer de voter contre. En fait, j'avais voté pour le principe parce que je voulais voir jusqu'où on était capables d'aller, jusqu'où on était capables de le changer pour faire les choses différemment. Mais aujourd'hui, quand je fais la balance des avantages puis des inconvénients, les pour et les contre, les vices et les vertus, appelez ça comme vous voulez, j'arrive avec un... dans ma balance, là, il y a plus de contre que de pour, donc ça pèse plus de ce bord-là, et c'est pour ça qu'on va, au final, voter contre, bien que nous avons été capables de changer les choses, nous avons été capables de modifier des règles, notamment en matière environnementale, c'est important, mais c'est insuffisant. Alors, pour cette raison, on va voter contre.

J'annonce tout de suite que, sur le volet, entre autres, qui touche la langue... Parce que, dans la liste des 181 projets, il y avait la réfection de Royal Vic, à Montréal, et du collège Dawson, et sur cet aspect-là, nous, depuis le début, on dit : Il faudrait les retirer du projet d'infrastructures, des 181 projets d'accélération des infrastructures, pour toutes sortes de raisons, notamment ce que j'ai déjà eu l'occasion d'expliquer ici, qui est l'espèce de cercle vicieux, avec le collège Dawson, qui me fait penser au principe de la saucisse Hygrade. Vous savez, plus elle est fraîche, plus on en mange, plus on en mange, plus elle est fraîche. Alors, plus il y a d'étudiants qui fréquentent Dawson, plus il a besoin d'agrandissements, plus il y a des agrandissements à Dawson, plus il va chercher des étudiants. Alors, c'est une espèce de cercle vicieux qu'on pense qu'il... sur lequel on doit, comme société, réfléchir. Mais je dis tout ça pour vous dire que je ne veux pas en parler parce que c'est surtout mon collègue de Matane-Matapédia qui va parler de ces enjeux linguistiques, éventuellement.

Donc, Mme la Présidente, en matière d'environnement, sur le fond des choses, ce que nous avions déjà évoqué ici, et qui est l'esprit derrière ce projet de loi, et que nous déplorons, c'est cette éternelle, et absurde, et improductive, et stérile opposition entre environnement puis économie. Je sens encore, dans ce projet de loi et dans ce gouvernement, malheureusement, l'environnement qui est vu comme un frein, constamment, pour faire des projets, pour créer de la richesse, pour changer les choses, alors qu'au contraire l'environnement doit être vu comme un levier. Au contraire, l'environnement est créatrice de richesse. Au contraire, protéger l'environnement à la fois pour nous, mais pour les générations futures, c'est positif.

Et malheureusement toute la toile de fond du projet de loi n° 66 envoie le signal depuis le début que l'environnement est un frein, que l'environnement est un problème, que c'est trop long, qu'il faut consulter du monde, qu'il y a des espèces menacées, qu'il y a un boisé dans un quartier ou dans une ville qui peut refermer une espèce rare ou qui peut être un îlot de verdure dans une municipalité bétonnée ou dans un centre-ville en asphalte, puis que c'est comme si c'était encore vu comme un empêchement, alors qu'au contraire... Et vous le savez sûrement, dans votre circonscription, dans votre région, Mme la Présidente, imaginez toutes les municipalités qui viennent cogner à nos portes de députés pour dire : J'ai encore des travaux à faire pour assainir les eaux parce qu'il y a encore des eaux usées qui sont déversées dans une rivière ou dans un lac. C'est la même chose chez moi, au Saguenay.

• (15 h 30) •

Imaginez, on est en 2020, on est le pays au monde le plus riche en matière d'eau potable puis on n'est même pas encore... j'allais dire un mot, que je ne dirai pas, mais on n'est même pas encore capable de contrôler entièrement nos systèmes d'assainissement des eaux. Ça, c'en est, des projets d'infrastructure qui font travailler du monde. Oui, c'est la municipalité qui est responsable, qui est maître d'oeuvre. Mais qui qui finance pour la plupart des petites municipalités? C'est le gouvernement du Québec. Il y avait zéro projet en assainissement des eaux. Bon. Alors, c'est un exemple que je vous donne. Donc, toile de fond d'opposition stérile entre environnement puis économie. Et là ça se traduit comment? Bien, ça se traduisait par le fait que, par exemple, le projet de loi n° 66 vient retirer l'initiative des mains des citoyens pour demander et exprimer des besoins en matière d'audience publique avec le BAPE. L'audience publique est la procédure la plus complète dans l'ensemble de l'évaluation des impacts environnementaux.

Vous savez, dans notre langage populaire et dans l'imaginaire collectif, on limite ça souvent à un BAPE, on dit : Ah! ça prend un BAPE, mais le BAPE n'est qu'une étape dans l'évaluation environnementale. Et malheureusement, dans cette étape, une des étapes, qui s'appelle l'audience publique, comme le nom le dit, Bureau d'audiences publiques sur l'environnement, bien, elle est... dans le cas du projet de loi n° 66, elle a été escamotée. Elle est devenue, je vous dirais, l'exception.

On avait trois voies. On a normalement trois voies, l'audience publique, la médiation, la consultation ciblée. Là, la ministre, par le projet de loi n° 66, est venue donner comme une valeur supérieure à la consultation ciblée puis à la médiation. Puis, si le ministre le veut, on va faire une audience publique. Alors, ça change la dynamique du BAPE.

Et nous, on a demandé... Parce qu'on n'a pas reçu, en auditions publiques, malheureusement, le Bureau d'audiences publiques... Bien, ça a l'air drôle, là, je répète : mais, en audition publique de la commission, on n'a pas reçu le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement. On a demandé, puis avec l'appui de l'opposition officielle, de les entendre par après. Ça a été refusé par le gouvernement.

Mais nous, de notre côté, on a écrit au bureau d'audiences publiques avec un certain nombre de questions, pour dire : Qu'est-ce que vous en pensez? Puis là c'est vrai qu'il y a eu un peu de confusion sur la procédure. Le député de La Pinière l'a soulevé pertinemment en commission parlementaire, ce n'était pas clair que, quand on recevait les réponses du BAPE, on aurait pu ou dû les déposer ou ça aurait dû passer par le secrétariat au lieu de passer par le courriel de notre équipe. Bon.

Enfin, on a reçu les commentaires du BAPE sur le projet de loi n° 66, et c'est assez, assez sévère, à la page 2, on dit... mais pas «on», là, c'est le président du BAPE, M. Philippe Bourke, qui nous dit que le projet de loi n° 66 ébranle «les fondements historiques quant au rôle du citoyen dans la procédure d'évaluation environnementale. Rappelons que dès la mise en place de cette procédure, à la fin des années 70, le rôle du citoyen a été reconnu et valorisé par le législateur, tel qu'en témoigne cette citation du ministre Marcel Léger datant du 25 septembre 1978 : "Nous voulons que le citoyen soit un agent actif et responsable de l'environnement et devienne un partenaire indispensable dans le processus de prise de décision".»

Et là le BAPE proposait une alternative à la ministre, et l'alternative du BAPE aurait permis même de sauver plus de temps. On maintient... le BAPE aurait maintenu les audiences publiques, mais aurait réduit la période d'information pour l'intégrer dans l'audience publique, pour un total, de tout le processus, là, au BAPE, de 155 jours au lieu de la consultation ciblée qui est privilégiée par la ministre de 175 jours. Donc, on sauve 20 jours.

Ça, cette lettre-là, elle nous a été donnée en copie à nos réponses. Elle a été envoyée, par le BAPE, au sous-ministre de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, Marc Croteau, le 16 octobre 2020. On ne l'a pas eue. Il a fallu qu'on fasse une demande, nous, puis M. Bourke, le président du BAPE, il nous l'a mise en pièce jointe, mais c'est arrivé trop tard.

Ensuite, le président du BAPE dit que, par rapport à l'article 41 du projet de loi n° 66, cet article «pourrait avoir pour effet :

«De nuire à la crédibilité de l'audience publique sur [les] projets susceptibles d'entraîner des impacts majeurs;

«[...]nuire à l'acceptabilité des projets eux-mêmes;

«[...]faire en sorte que les citoyens se sentent muselés si la commission d'enquête refuse d'entendre leurs questions ou leur intervention si celles-ci ne sont pas directement liées aux cibles identifiées;

«[...]nuire à l'acquisition du savoir et au partage des connaissances locales ou autochtones qui permettent une meilleure compréhension des enjeux». Alors, c'est majeur, c'est majeur. Nous, on a fait quelques propositions, mais la ministre ne les a pas acceptées, donc déception là-dessus.

Deuxième déception, pour la route 117 et l'autoroute 30, qui étaient à l'article 52, carrément retirées de toute audience et travaux du BAPE. Moi, ce que j'ai proposé, c'est de faire ce que j'ai appelé une équipe dédiée, une équipe dédiée qu'on pourrait même mettre en projet pilote pour voir si ça ne pourrait pas marcher pour d'autres projets éventuels, donc une équipe dédiée pour la 117 et pour la 30, comme ça a été fait dans le cas du REM, à Montréal, une équipe dédiée qui a poussé la machine, qui était dédiée à 100 % juste à avancer les choses puis à faire des consultations, tout en respectant les citoyens, mais juste là-dessus, ils n'ont pas d'autre chose sur leur bureau. On aurait pu en faire deux, une pour la 30, l'élargissement, puis une pour la 117. Le ministre a refusé ça. Bon, deuxième déception.

Ensuite, sur les exigences environnementales, au moins, là, on a eu un gain pour qu'il y ait une consultation du ministre de l'Environnement avant de soustraire un projet à l'obligation d'obtenir une autorisation environnementale, donc au moins une consultation du ministre.

Protection des espèces menacées, là aussi, c'est imparfait, mais, au moins, j'ai pu obtenir la déclaration... pour que la déclaration de projet contienne une évaluation de la présence, réelle ou potentielle, d'une espèce menacée ou vulnérable.

Et là je termine avec ce que moi, j'ai appelé le gain majeur. On a eu une nouvelle il y a quelques semaines, on était en pleine séance de travail de la commission parlementaire sur le projet de loi n° 66, et, toujours sur le REM, tombe l'information qu'un sous-traitant du REM, chargé du traitement des sols contaminés d'une portion du trajet du REM, 600 tonnes, Mme la Présidente, de sols contaminés seront exportés en Ontario au lieu d'être décontaminés chez nous. Le REM, vous le savez, c'est notre argent, à vous, à moi. Alors, moi, je veux dire, je suis scandalisé par ça, comme bien du monde était scandalisé. Ça a fait la une de La Presse.

Alors, j'ai amené un amendement à l'intérieur du projet de loi n° 66 pour faire en sorte qu'au moins, sur les 181 projets de l'annexe, que les sols contaminés seront, en priorité, décontaminés, traités. Moi, ça a toujours été, dans mon esprit, la question des sols contaminés, comme une espèce d'entonnoir. Puis là le minimum, là, le bout de l'entonnoir, il faut que ce soit l'exception, c'est quand tu as des sols extrêmement contaminés de matière que tu ne peux pas vraiment décontaminer, puis là tu n'as pas le choix de les enfouir. Mais il ne faut pas que l'enfouissement devienne un choix comme un autre. Donc, en haut de l'entonnoir, c'est quoi? C'est le traitement par la décontamination des sols. Puis ça, on fait ça chez nous, au Québec, parce qu'on a l'expertise pour ce faire avec des entreprises qui embauchent du monde dans nos régions, qui ont un savoir-faire exceptionnel. Pourquoi? Parce qu'on a la loi la plus sévère du Canada là-dessus, au Québec. C'est une fierté.

Bien là, le REM, avec la Caisse de dépôt, CDPDQ Infra puis son sous-traitant, ils envoient ça en Ontario. C'est un scandale. Donc, moi, j'ai dit : On ne fera pas ça au moins à travers le projet de loi n° 66. Ça fait que j'ai obtenu un amendement pour qu'on tienne compte que ça doit être... que le traitement, ce qui signifie la décontamination, la revalorisation des sols, doit être favorisé.

Tantôt, mon collègue de La Pinière parlait des devis techniques. Quand on fait un projet d'infrastructure, il y a des devis techniques. Il faut que, dans le devis technique puis éventuellement dans les appels d'offres, apparaisse ça, qu'il faut d'abord décontaminer les sols. Puis là c'est une question de respect de nos générations futures, Mme la Présidente. Donc, c'est un gain important. Je suis très, très heureux de l'avoir obtenu.

• (15 h 40) •

Puis là, je veux dire, je devais avoir la chance de mon bord. Je devrais aller m'acheter un 6/49, parce que, dans les négociations finales du projet de loi n° 66, on a obtenu de l'étendre, cette obligation de mon entonnoir, là, de d'abord décontaminer, puis que l'exception doit être l'enfouissement. Mais moi, j'ai un gros défaut dans ma vie : je suis sceptique. Alors, on va suivre ça.

Donc, on ramasse nos billes, on est contents, mais là il reste à adopter le règlement sur la traçabilité. Le collègue de l'Agriculture en a justement parlé aujourd'hui, à la période de questions, en réponse à ma question. Je le salue en passant. Puis je suis content, dans le fond, qu'il ait répondu à ça. Parce que savez-vous quoi? Il y a beaucoup de sols contaminés qui s'en vont discrètement où, la nuit, dans des camions? Dans des champs, dans des terres agricoles. Ça fait que je suis content que le ministre de l'Agriculture comprenne ça puis soit sensible à ça. Alors, il va falloir qu'on le surveille. Pas le ministre, les camions.

Il va falloir qu'on le suive, le camion, la traçabilité, mais il faut... Puis là je réinsiste parce qu'il est là, puis tout le monde est là, puis il va falloir qu'il en parle au ministre de l'Environnement, puis la ministre... la présidente du Conseil du trésor l'a compris, mais là il va falloir ça se reflète dans le règlement. Ma hiérarchie dont je vous parle, il faut que ça se reflète dans le règlement. Donc, on traite, on décontamine, on valorise puis, dans l'extrême cas où on ne peut plus faire un traitement, ou une valorisation, ou une décontamination, bien, on l'enfouira.

Alors, ça, c'est un gain important, mais je demeure sceptique puis je dois faire... Bien, ce que j'ai dit à la ministre, en commission parlementaire : Je vais faire la traçabilité de la traçabilité. On va la suivre à la trace, cette traçabilité qui va transparaître dans le règlement éventuellement.

Donc, voilà, sur la question de la langue, mon collègue de Matane-Matapédia va faire un bout là-dessus. On a déposé des amendements, comme nos règles le permettent de faire, pour l'étude de la prise en considération. Donc, on a redéposé. Ça a été reçu par la table, là, par les secrétaires et par vous-même, comme présidente. On a déposé sept amendements, donc, qui seront traités en temps et lieu ici.

Alors, je veux saluer tout le monde, en passant, le travail des légistes autour de la table avec la ministre. Ça a été extrêmement productif, collaborateur. Les collègues députés qui étaient là, j'en vois quelques-uns, qui ont été en commission parlementaire. Merci. Merci infiniment. Puis quelques collègues qui à l'occasion aussi m'ont remplacé... Parce que, nous, neuf députés, il faut être un peu comme le père Noël, là, puis se multiplier partout, puis être dans deux centres d'achat en même temps. Alors, c'est ce qu'on doit faire en commission parlementaire. Ça fait que, parfois, j'ai été remplacé par d'autres collègues. Mais je veux saluer tout le monde. Et on va continuer notre travail. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Jonquière. Et maintenant je vais céder la parole à M. le député de Rosemont.

M. Vincent Marissal

M. Marissal : Merci, Mme la Présidente. Alors, c'est à mon tour de discuter ici, là, du projet de loi n° 66, à cette étape-ci. Il y aura une autre étape aujourd'hui, comme quoi 66 aura occupé beaucoup de notre temps au cours des dernières semaines, et en particulier aujourd'hui.

Puis je pense qu'il faut souligner d'abord que, le député de Jonquière l'a dit, puis il a beaucoup plus d'expérience que moi ici, les travaux se sont bien déroulés, ça s'est bien fait. La présidente du Conseil du trésor l'a dit à plusieurs reprises, ce n'est pas parce qu'on est d'accord qu'il faut que ça se passe mal. Et, de fait, nous n'étions pas d'accord sur tout, puis ça s'est plutôt bien passé.

La présidente du Conseil du trésor a une façon de travailler que je salue, que je n'ai pas vue souvent ici, en un peu plus de deux ans, puis sans porter de jugement sur ses collègues. Chacun, chacune a sa façon de travailler, et je n'ai pas pratiqué tous les ministres du gouvernement mais quelques-uns, quelques-unes. Puis, je le disais, je n'ai pas l'expérience du collègue de Jonquière. Mais j'ai quand même fait énormément de commissions parlementaires, parce que, quand on est un petit caucus, on est «multitask» puis on court plusieurs lièvres à la fois. Et je veux saluer la façon de travailler de la présidente du Conseil du trésor. Et je pense même qu'il y a là quelque chose qui pourrait nous inspirer collectivement, là, tous et toutes, les élus ici, si tant est que nous devions aller de l'avant avec la réforme des travaux parlementaires.

Bon, vous me direz, Mme la Présidente, aussi qu'il faut être deux pour danser. Puis, dans ce cas-ci, beaucoup plus que deux parce qu'il y avait cinq ou six députés du côté gouvernemental, nous étions souvent quatre ou cinq du côté des oppositions. Puis, si ça bloque d'un côté de la table, bien, c'est toute la table qui bloque, c'est sûr. Alors, nous avons aussi, je crois, collaboré, mais une main tendue, ça appelle la collaboration. Le député de Jonquière, à un moment, me disait même qu'il n'avait jamais vu une telle façon de fonctionner. Je le crois, je le crois sur parole. Je l'ai dit, là, il a pas mal d'années de parlementarisme derrière la cravate que moi. Alors, la ministre, elle a notamment... la présidente du Conseil du trésor avait notamment une façon de fonctionner que, plutôt que de bloquer puis de s'obstiner, puis je ne le dis pas de façon péjorative, là, de débattre, je devrais dire de débattre plutôt que s'obstiner, c'est péjoratif, bien, on prend une pause, on ajourne, puis on discute, puis on s'entend.

À la fin, là, comprenez-moi bien, ça ne veut pas dire que je vais voter pour le projet de loi n° 66, puis ça ne veut pas dire que tout ce qui est là-dedans me satisfait, puis que c'était Noël trois semaines avant le temps, là. Ce n'est pas ça. Il y a des choses qu'on a changées dans le projet de loi n° 66 qui sont satisfaisantes, il y a des choses, dans le projet de loi n° 66, que je n'aime pas du tout et qui, quant à moi, ne passe pas la rampe, mais là j'en suis plus sur la forme que le fonds.

Ça vaut la peine de se parler, il paraît que c'est comme ça qu'on s'entend, puis, des fois, juste de miser sur l'intelligence de tout le monde autour de la table... d'autant qu'on le vérifie souvent ici, puis je l'ai vérifié encore ce matin, le projet de loi n° 68 sur les retraites, qui est un projet de loi hypercomplexe et technique, là, je l'ai revérifié ce matin puis j'ai l'ai revérifié aussi avec 66 cette semaine, nous bénéficions d'une fonction publique de très grande qualité, des gens qui travaillent pour nous et pour nos électeurs et nos électrices, qui travaillent pour le Québec, pour la plupart, qui pourraient probablement faire pas mal plus d'argent ailleurs au privé, mais qui sont dévoués à leur travail ici.

Et nous avons la chance, dans les commissions parlementaires, de les avoir à portée de main, ou plutôt de voix, je devrais dire, pour avoir leurs explications. Et, quand on est capable de travailler comme ça sur des articles qui sont parfois d'une grande complexité... Puis vous aussi, Mme la Présidente, vous avez pas mal plus d'expérience parlementaire que moi. Vous savez, un projet de loi là, ce n'est pas un livre de Balzac, là, ça ne se lit pas si facilement. C'est même parfois ardu, des fois, on le relit, des fois, même, le porteur ou la porteuse du projet de loi est obligé de le relire. Il y a une façon d'écrire un projet de loi. Évidemment, là, ce n'est pas de la fiction, ce n'est pas un texte d'humoriste non plus. Puis parfois on a de la difficulté à comprendre la portée exacte, puis, à ce moment-là, l'aide des fonctionnaires est absolument essentielle, et c'est parfait.

Alors, chapeau à la présidente du Conseil du trésor. On nous avait demandé d'aller vite. Ce projet de loi là, vous le savez, c'est la déclinaison numéro deux d'un autre projet de loi, c'était mal parti en juin. On est revenu avec un autre projet de loi, deuxième essai et 10, comme on dit au football. Je pense même que le gouvernement avait pris une pénalité de 15 verges puis on était deuxième essai et 25, là, parce qu'on avait pas mal reculé. Alors, on partait de loin. Puis n'eût été l'ouverture de la présidente du Conseil du trésor, ça aurait été plus laborieux. Puis, comme on nous a demandé, à la fin, notre collaboration pour aller plus rapidement, ce qu'on a fait, bien, je pense que c'était la bonne attitude.

• (15 h 50) •

Ça, c'était pour les fleurs, parce que, tu sais, après tout, le projet de loi n° 66... Les députés d'en face me regardent comme si j'allais lancer des pots, ce n'est pas exactement mon intention à ce moment-ci, mais c'était pour les fleurs, et je pense qu'il faut le dire, il faut le reconnaître quand c'est le cas. Mais, cela dit, Mme la Présidente, l'étude article par article, en particulier du projet de loi n° 66, ce n'était pas un référendum sur la présidente du Conseil du trésor. C'eût été un référendum qu'elle aurait gagné, oui, elle aurait eu notre adhésion, parce qu'elle travaille bien. Mais ce n'est pas de la présidente du Conseil du trésor dont il s'agit, c'est plutôt le contenu. Et là j'en arrive au fond. C'est le contenu du projet de loi n° 66, qui, même amélioré, est encore, selon moi, plus qu'imparfait, je dirais même défectueux, à bien des égards, et à commencer, évidemment, par tout ce qui est analyse environnementale.

Ça ne surprendra personne qu'un député de Québec solidaire se lève ici puis parle d'abord et avant tout d'évaluation environnementale, de protection de l'environnement, de développement durable. Je pense que nous avons marqué notre territoire politique en ce sens. Nous ne sommes pas les seuls, nous n'avons pas le monopole, je tiens à le dire. Mais, pour nous, au départ, le fait d'amoindrir l'organisme chargé des évaluations environnementales, comme disent les Anglais, c'était pas mal un «nonstarter», ça tuait pas mal d'affaires dans l'oeuf, pour nous. Même si je me suis lancé dans l'étude de ce projet de loi avec la plus grande des ouvertures et avec la ferme intention de collaborer, pour nous, au départ, que... d'enlever quelques dents au chien de garde qui est le BAPE, qui en a déjà perdu pas mal au fil des années, c'était, au départ, inacceptable. Et c'est pourtant là qu'on a fini, malgré quelques amendements, malgré des efforts louables et des partis de l'opposition et de la ministre, qui, à défaut d'acquiescer à nos demandes, a au moins écouté puis a débattu, nous avons débattu.

La résultante, là, du projet de loi n° 66, là, c'est, d'abord et avant tout, un amoindrissement de la portée du BAPE, une diminution des analyses environnementales avant de commencer les travaux. Puis ici soyons clairs, là, on parle de travaux routiers. Il n'y aura pas d'évaluation environnementale pour rénover le CHSLD Jeanne-Le Ber, là. C'est intra-muros, à Montréal, il n'y a pas de rainette dans les CHSLD — je vais finir par le dire — il n'y a pas d'espèce menacée vivante dans les écoles que l'on veut construire. Ce n'est pas de ça dont il est question, c'est essentiellement pour les projets routiers.

Alors, le résultat net, c'est qu'on a enlevé, on a amputé un autre membre au BAPE, qui, je le dis, en a déjà perdu quelques-uns au fil des années. Puis ça, en ce qui me concerne, malgré toutes les qualités que je reconnais à la présidente du Conseil du trésor, malgré tous les efforts qu'on a faits, malgré quelques gains qu'on a faits aussi... Le député de Jonquière parlait des siens, le député de La Pinière aussi. On a tenté d'en arracher et on en a obtenus quelques-uns, notamment sur la portée de l'Autorité des marchés publics, ce qui n'est pas rien, ce qui n'est pas rien, c'était un gros morceau. Mais, quant à nous, le fait que... de dire soudainement, parce qu'il faut relancer l'économie, qui a été mise à mal par une pandémie, qui n'est toujours pas terminée, d'ailleurs, bien, la première affaire qui nous vient en tête, c'est de réduire la portée des analyses environnementales... Moi, je l'aurais pris à l'envers, j'aurais fait exactement le contraire. J'aurais plutôt profité... C'est drôle de dire «profité de la COVID», là, «profité de la pandémie», là. Ne vous méprenez pas, Mme la Présidente, je ne veux pas être cynique, ici, je veux juste dire qu'à toute chose malheur est bon puis que cette satanée pandémie aurait dû nous forcer à nous creuser les méninges puis à penser, comme disent les anglophones, en dehors de la boîte, ne pas retourner juste à ce qu'on a toujours fait de la même façon. Et on aurait dû en profiter pour lire très, très, très attentivement certains mémoires qui nous ont été proposés, présentés, défendus, notamment G15, qui a fait du développement durable son cheval de bataille, et c'est bien fait.

Je l'ai déjà dit en cette Chambre, je l'ai dit à la présidente du Conseil du trésor aussi pendant l'étude, regardez la liste, là, des signataires, là, du G15, là, ce n'est pas tous des alliés naturels de Québec solidaire. La Fédération des chambres de commerce, là, je leur parle régulièrement, c'est des gens que j'apprécie beaucoup, mais je ne leur vendrai jamais une carte de membre. Ces gens-là, pourtant... Le Conseil du patronat, le Conseil du patronat, des gens que je respecte aussi beaucoup... Et d'ailleurs, cette pandémie, quand je dis qu'elle doit nous forcer à penser en dehors de la boîte, cette pandémie a provoqué des rapprochements, notamment avec des députés de Québec solidaire et des gens qui sont habituellement assez loin de notre posture politique, des gens comme la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, des gens comme le Conseil du patronat, des gens comme les fédérations de chambres de commerce, qui se sont dit, et c'est là qu'on se rejoignait : Bien, profitons... à défaut d'un meilleur verbe, là, je vais en trouver un meilleur, là, mais : Saisissons l'occasion que cette foutue pandémie jette devant notre chemin, là, ce n'était pas choisi, ce n'était pas voulu, évidemment, pour essayer de faire les choses différemment. Bien non, bien non. Il fallait relancer la machine, il fallait construire tout de suite, il fallait construire des routes. Puis là la première chose qu'on fait, au risque de me répéter, mais on ne le dira jamais trop, c'est de minimiser la portée des évaluations environnementales.

Puis on a eu très vite, Mme la Présidente, la puce à l'oreille. Remarquez que pas besoin d'un doctorat en développement durable pour comprendre qu'il y avait une brèche immense qui venait d'être ouverte. Mais on a eu la puce à l'oreille très rapidement, parce que, très rapidement, quand on a entendu les témoins qui sont venus parler du projet de loi n° 66, certains de ces témoins, certains groupes sont venus nous dire : C'est une sacrée bonne idée d'aller plus vite, ce serait même très bien que ça se généralise. Ce serait bien qu'on utilise 66 — et ça a été dit, là, ça a été dit — ce serait très bien que le projet de loi n° 66 soit, en quelque sorte, un projet pilote, pour ensuite généraliser ou étendre certaines mesures, notamment d'accélération en matière d'analyse environnementale.

• (16 heures) •

Puis je ne ferai pas du prêchi-prêcha ici, là, je les comprends, là, notamment les gens des municipalités, l'Union des municipalités, par exemple, la Fédération québécoise des municipalités, je les comprends. Parce que leur modèle fiscal est basé sur quoi? Il est basé essentiellement sur des nouvelles constructions de quartier, sur de nouveaux développements résidentiels. Puis qui dit nouveau développement résidentiel en banlieue, première, deuxième, troisième, quatrième couronne, dit autoroute. Alors, pour accroître leur assiette fiscale, ils ont besoin de construire des nouveaux quartiers. C'est comme ça que le modèle est fait. Puis souvent, même si c'est grand, le Québec, dans le territoire, le périmètre d'une municipalité tu n'as pas, parfois, tant de choix que ça, alors ça se peut que tu sois obligé d'aller dans un marécage, dans un lieu... des terres humides. Ça se peut, ça s'est vu. Ça s'est vu. Laval, ça dit quelque chose à quelqu'un? Ça s'est vu puis ça se voit encore, malheureusement, trop souvent. Alors, je ne les juge pas, mais je pense qu'on devrait changer ce modèle fiscal là qui ne nous mène à rien de positif en matière de développement durable.

Alors, ces gens-là, ils ont compris, ils avaient compris avec 61, ils ont compris deux fois plus avec 66 qu'il y avait là une porte ouverte. Là, il y a eu une espèce de surenchère d'expressions puis d'analogies. Le député de La Pinière a parlé de laboratoire. Ce n'est pas faux. Ce n'est pas faux, d'autant que des témoins sont venus nous dire : Projet pilote. Projet pilote, laboratoire. Le député de Jonquière a parlé d'occasion ratée, parce que c'est vrai qu'on a, comme je le disais, raté l'occasion de penser en dehors du modèle courant, en dehors de la boîte, pour prendre un anglicisme. Puis moi, j'ai parlé... pas pour m'autociter, mais j'ai parlé de cheval de Troie. Puis, comme chacun sait, cheval de Troie, bien, c'est ce mythique stratagème qui permet de rentrer quelque part sous d'autres prétextes bien cachés pour attaquer l'ennemi ou, dans ce cas-ci, pour faire des brèches aux évaluations environnementales. Bon, je sais que, malgré la bonne entente qu'il y avait avec la présidente du Conseil du trésor, elle n'a pas beaucoup aimé l'analogie de cheval de Troie. Elle en a parlé, elle en a reparlé, c'est même devenu un peu une blague courante pendant la commission, mais je crois fermement que c'est ça. Je crois que c'est ça. Puis j'aurais aimé ça, arriver à une autre conclusion, mais je ne peux pas arriver à une autre conclusion, Mme la Présidente, parce qu'on a posé tellement de questions à savoir pourquoi vous avez besoin de ce projet de loi là. Pourquoi vous avez besoin de déposer un tel projet de loi? Pourquoi avez-vous besoin de ces quatre cartes d'accélération, notamment en matière environnementale? Puis je peux vous dire qu'à part pour quelques routes et autoroutes, là, où c'est très, très clair, là, pour le reste, on n'a pas eu de réponse parce qu'il n'y a pas de réponse. Le gouvernement n'avait pas besoin de ça.

Il y a des projets, là, dans la liste, là, des 181, maintenant 180 parce qu'on en a enlevé un, qui sont déjà annoncés, puis certains sont déjà en construction. D'autres qui ne sont pas dans la liste ont été annoncés, seront construits incessamment dès que la terre va dégeler au printemps ou sont déjà en préparation. Puis, de toute façon, on a fait la démonstration, trois fois plutôt qu'une, qu'il y a une pénurie de main-d'oeuvre dans le milieu de la construction au Québec. Alors, on peut bien envoyer 380 projets si on veut. Essayez de trouver un menuisier pour faire réparer votre escalier au Québec en ce moment. C'est tout un défi, c'est tout un défi. Il y a déjà une pénurie. Alors, pourquoi ce projet de loi là?

Moi, j'ai appris, dans mon ancien métier de journaliste, que, parfois, c'est les questions les plus courtes qui donnent les réponses les meilleures, pas nécessairement les plus longues, mais les meilleures. D'ailleurs, il y a une anecdote que j'adore, là, je vais vous la raconter. Une fois, sous le gouvernement Mulroney, son ministre des Affaires étrangères, c'était Joe Clark, puis Joe Clark était parti en Israël faire une mission, puis, en tout respect pour lui, il s'était mis un peu le pied dans la bouche en disant que, finalement, ce serait une bonne idée de déménager la capitale d'Israël de Tel-Aviv à Jérusalem. Bon, il n'y a pas... En diplomatie internationale, je pense que c'est le plus gros piège à ours, mais M. Clark avait sauté à deux pieds joints dans ce piège à ours, ce qui n'avait évidemment pas fait l'affaire de son patron, le premier ministre de l'époque, Bryan Mulroney, qui n'était pas très heureux de ça. Alors, quand Joe Clark est revenu à Ottawa, l'avion se pose sur la piste, le tarmac de l'aéroport à Ottawa, puis il descend de l'avion, puis c'était une époque où les relations entre les journalistes et les élus étaient plus conviviales, les journalistes se jettent dessus, puis un collègue... j'allais dire un vieux collègue, je n'ai pas le droit de dire ça, mais un collègue expérimenté de La Presse canadienne, qui était très drôle, qui arrive le premier, qui se plante devant avec son micro puis qui lui dit : Pis? C'est tout. Pis? Alors, Joe Clark a été saisi, puis il a finalement donné une très longue réponse puis il s'est encore plus mis le pied dans la bouche. Je pense que, là, il s'est mis les deux pieds puis les rotules dans la bouche en même temps. Alors, fin de l'anecdote, c'était pour voir si vous suiviez. Fin de l'anecdote.

Alors, il y a une question qui est revenue très, très, très souvent, pendant l'étude de 66, puis je regarde mes deux collègues parce qu'ils l'ont posée, surtout le député de La Pinière : Pourquoi? Pourquoi on a ça? Pourquoi on a ça? Ça sert à quoi? Ah! mais ça sert à accélérer les travaux. Bien non, ça n'accélérera pas les travaux, s'il y a une pénurie de main-d'oeuvre puis si, de toute façon, les travaux roulent déjà. Ça va aider à couper court à certaines évaluations environnementales pour deux, trois routes au Québec. Ça, oui. Ça, on l'a compris. Mais, si... La couverture, là, elle ne dit pas tout ce qu'il y a dedans. La vitrine est un petit peu trompeuse, dans ce cas-ci.

Alors, on a même essayé avec les 181 projets, là. Ça, ça a-tu besoin de telle mesure? On ne le sait pas, on ne le sait pas. Je ne sais pas combien de fois moi-même, j'ai posé la question, là, je me suis autotanné de poser la question moi-même, mais c'est parce que je ne haïs pas ça, comprendre ce que je fais puis je ne hais pas ça, avoir l'impression que ça a un but, puis qu'on cherche quelque chose, puis que ça ait une logique. Je ne l'ai pas trouvé dans le projet de loi n° 66. Puis à ce jour, si je recroise, avec grand plaisir, la présidente du Conseil du trésor d'ici à ce qu'on ajourne, en plus de lui souhaiter de très joyeuses fêtes, je vais lui redemander : Pourquoi? On pourrait même le dire en deux mots, «pourquoi» en un puis «pour quoi». Parce qu'on n'a pas eu la réponse de ça. C'est quand même assez curieux. C'est quand même assez curieux, parce que ce projet de loi là, il fait quand même pas mal de choses. Ce n'est pas un projet de loi mineur, notamment en matière d'environnement, mais je ne vous ai pas parlé encore des règlements d'urbanisme, parce que ça, c'est une autre chose.

Ce projet de loi là permet aussi de couper court à plusieurs processus dans les règlements d'urbanisme. Puis ça, c'est dangereux, ça. Ça, c'est une porte ouverte, là. C'est une porte ouverte à faire les choses trop rapidement, c'est une porte ouverte sous le couvert de la relance économique, à couper court, à aller beaucoup trop vite. On se l'est fait dire, d'ailleurs, on se l'est fait dire. C'est la beauté de la chose quand on fait des projets de loi ici, il y a des experts qui viennent nous parler puis qui nous disent : Ne faites pas ci, ne faites pas ça. Ça, c'est une bonne idée, ça, ce n'est vraiment pas bon, ça, ça peut être amélioré. Puis je ne sais pas qui est mieux placé pour parler d'urbanisme que l'Ordre des urbanistes, puis ils sont venus nous dire : Vous allez faire reculer dangereusement le Québec en matière d'urbanisme avec ça. Même si c'est juste pour 180 projets, ça ouvre des portes, et on ne devrait pas faire ça, je ne pense pas qu'on devrait faire ça.

J'aurai l'occasion tout à l'heure, là, de reparler de 66, du projet de loi n° 66, je devrais dire, parce qu'on a va arriver tout à l'heure à l'adoption finale. On avait préparé un amendement, nous aussi, qui va dans le même sens que celui déposé par le collègue du Parti québécois. Donc, on ne va pas empiler les amendements pour le plaisir s'ils disent la même chose. Nous ne visons pas exactement le même but, quoique nous partageons les vues du Parti québécois sur l'anglicisation de certaines institutions, mais qu'il soit dit ici qu'on pense qu'un édifice comme le Royal Vic, l'Hôpital Royal Victoria, à Montréal, aurait une bien meilleure vocation si on en faisait notamment du logement social que de le donner à McGill. Je n'ai rien contre McGill, mais McGill est déjà bien pourvue, ça va. Je pense qu'on devrait profiter pour saisir l'urgence de la situation du logement social à Montréal.

Pour ceux et celles qui n'auraient pas bien suivi l'actualité cette semaine, là, ça a été assez difficile à manquer, ce qui s'est passé le long de la rue Notre-Dame, à Montréal, là, dans Hochelaga-Maisonneuve, de pauvres gens, là, qui en sont réduits à vivre dans des tentes, avec tous les dangers que ça comporte, et qui se sont... effectivement confirmé, ce qu'on craignait, bien oui, parce qu'une chandelle, dans une tente, ça fait ce qu'on a vu cette semaine, c'est ça, c'est le danger. Alors, si on ne saisit pas cette occasion-là, avec un édifice qui est dans le giron public, je pense qu'on aura raté encore une fois une très belle occasion.

• (16 h 10) •

Je termine, Mme la Présidente, sur une note positive, en disant que j'ai aussi proposé plusieurs amendements, dont l'immense majorité ont été refusés, mais, bon, ça, c'est comme ça que ça fonctionne malheureusement trop souvent, mais au moins, je l'ai dit, on en a débattu. Par contre, je pense, en mon âme et conscience, avoir fait le travail que je devais faire pour représenter le plus dignement possible les Premières Nations... je vais reformuler ça, pour représenter les demandes des Premières Nations, parce que je ne suis pas autochtone, je ne suis pas membre d'une première nation. Et plusieurs chefs sont venus témoigner à la commission. Ils l'avaient fait déjà à 61, un petit peu par la porte d'en arrière, parce que ça a tout pris pour qu'ils soient invités, et ça, c'est malheureux. Ils sont revenus, le grand chef McKenzie de Mani-Utenam notamment, je n'ose jamais... je ne m'avance jamais à prononcer le nom de sa nation, parce que je manquerais de respect au nom de leur nation, donc le grand chef McKenzie de Mani-Utenam, évidemment les représentants des Mohawks de Kahnawake, d'où le retrait du projet du pont Mercier, le retrait temporaire du projet de reconstruction du pont Mercier, et évidemment l'Assemblée des premières nations Québec et Labrador, qui sont venus nous dire essentiellement qu'encore une fois on les avait laissés de côté, qu'on ne les avait pas invités à la discussion puis qu'on s'apprêtait à faire des choses qui allaient être très, très désagréables pour eux, parce que, quand on voit nos droits bafoués, qu'on a signé de bonne foi des traités et qu'on est protégé par des protections constitutionnelles, et que, malgré tout, le gouvernement passe par-dessus, c'est désagréable, pour dire le moins, pour dire le moins. Alors, ces gens-là nous ont demandé de les considérer, c'est quand même la moindre des choses, là, juste de les considérer, de les écouter, idéalement, même, d'en faire des partenaires, puisqu'il y a beaucoup de projets qui vont être lancés dans plein de régions du Québec.

Alors, nous avons retiré, et j'en remercie la présidente du Conseil du trésor, le projet, tel qu'écrit dans l'annexe I du projet de loi n° 66, de réfection du pont Mercier. Le pont Mercier sera rénové, il y aura réfection du pont Mercier. On ne va pas laisser tomber le pont Mercier, là, ce n'est pas ça. Mais les Mohawks de Kahnawake nous ont demandé, et ce sont leurs mots, un geste de bonne foi, donc de retirer ce projet de loi... ce projet de réfection, tel qu'inscrit dans la loi n° 66, pour le faire en accord avec eux et en collaboration, après pourparlers. Ça tombe bien parce que le ministère des Transports est justement dans cette démarche avec la nation mohawk. Alors, tant mieux. Tant mieux si on a été capable de répondre, pour une fois, d'un modeste geste de bonne foi.

Alors, voilà, je l'ai dit, je le redis puis je termine là-dessus, je vais et ma formation politique va voter contre le projet de loi n° 66, pour les raisons que je viens d'énumérer et quelques autres que je ne n'ai pas le temps d'aborder. Et, non, ne me faites pas dire que je suis contre la relance économique du Québec. Ce serait me prêter des intentions fausses et même diffamantes. Je suis, comme tout le monde dans cette salle, en faveur de la reprise économique la plus rapide possible du Québec, mais j'aurais souhaité que nous saisissions cette occasion pour la faire verte et équitable. Ce n'est malheureusement pas le cas avec le projet de loi n° 66. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Rosemont. Et maintenant je vais céder la parole à M. le député de Jacques-Cartier. Et vous disposez d'un temps de parole de 10 minutes.

M. Gregory Kelley

M. Kelley : Merci, Mme la Présidente. Je veux juste commencer par saluer le travail de mon collègue le député de La Pinière, qui a siégé pas juste le projet de loi n° 66, mais aussi l'autre projet de loi, n° 61. Et je crois qu'il a bien défendu les intérêts des Québécois et aussi notre formation politique.

Je veux commencer avec une discussion, parce que je sais que le député de Matane va prendre la parole après moi. Alors, on va avoir, Mme la Présidente, la discussion ou le discours de... après. Alors, moi, je vais parler pour... oui, dans la défense de Dawson. Il y a un débat, présentement, mené par le Parti québécois que l'agrandissement de Dawson sera... la conséquence, c'est l'anglicisation de Montréal. Moi, je crois que le moment que quelqu'un est un adulte, a 18 ans, ils sont capables de prendre leur propre choix d'étudier dans un cégep de leur choix et de prendre leur propre décision. Et je pense qu'il y a aussi un élément que c'est vrai, il y a beaucoup de francophones qui décident d'aller à Dawson, à John-Abott, à Vanier, mais il y a aussi un moment qu'un francophone pas mal unilingue rentre dans un cégep puis peut-être va rencontrer un anglophone unilingue, et peut-être cet anglophone unilingue va commencer le chemin vers d'être plus bilingue. Parce que, ah! j'ai un ami francophone, je veux parler avec lui, parler avec ses amis. Alors, je pense que cet échange est important.

Ça ne dit pas qu'il n'y a pas nécessairement d'autres changements à faire en termes... Un cégep, est-ce que c'est nécessaire pour tous les élèves qui ont étudié dans une école secondaire francophone de prendre un examen en français à la fin de leurs études à un cégep anglophone? Il y a des autres moyens qu'on peut regarder pour protéger la langue française, faire la promotion et s'assurer que, oui, les gens sont toujours forts en langue française, mais on ne bloque pas leur accès à un cégep anglophone.

Je connais quand même des personnes qui travaillent pour le Parti libéral, où j'ai travaillé avec pendant mes années comme attaché politique, qui ont allé à un cégep anglophone ou une université anglophone. Ils ont dit : Bien, c'est important pour moi. Je ne suis pas toujours complètement bilingue, mais, au minimum, je... faire le chemin, mais j'ai maintenant des amis des différents coins du Québec. Alors, je pense qu'il y a aussi cette réalité que c'est bon pour nos communautés d'avoir les chances d'être ensemble, de changer leur culture puis leurs idées. C'est important et c'est une force du Québec.

Et je veux juste répéter, parce que ça revient souvent, la ville de Montréal a passé une motion, la ville de Montréal, c'est une ville francophone. Leurs institutions sont francophones. La langue de travail, c'est le français. La langue commune de Montréal, c'est le français. On comprend tout ça. Et c'est vrai, on peut quand même dire que, oui, il y a un recul, un déclin, les chiffres le démontrent, de la langue française sur l'île de Montréal. Mais il y a aussi des choses positives qu'il faut souligner aussi, des autres chiffres qui démontrent que les anglophones sont plus bilingues que jamais. Ça, c'est un fait aussi.

Alors, il faut toujours trouver l'équilibre, parce que Montréal est une ville diverse. Ce n'est pas une ville qui est exclusivement francophone, dans le sens il y a juste des francophones qui habitent là, ce n'est pas vrai, parce... Well, I come from Montréal and I'm an Anglophone, so... There are many more people like me. Il y a des allophones, il y a des autochtones.

Et ça, c'est un petit peu pourquoi notre drapeau a des symboles de toutes les personnes qui étaient là quand les Européens ont arrivé. J'imagine, la première discussion, ce n'était pas juste dans la langue française. Je pense qu'un côté a parlé français, puis l'autre côté a parlé mohawk ou peut-être la langue algonquine, on ne sait pas exactement. Mais, bref, quand même, au début, il y a eu des autochtones qui étaient ici, qui ont parlé une autre langue qui n'était pas la langue française. Alors, c'est une richesse, mais on est tous d'accord que la langue commune du Québec et de Montréal, c'est le français.

Mais, bref, c'est juste de faire le point sur Dawson, que je pense qu'on peut trouver une meilleure avenue pour les cégeps anglophones, pour bien encadrer l'utilisation du français, et que le fait que les gens soient plus bilingues, des anglophones, et que les francophones demeurent toujours que leur français... à améliorer dans leur période des études à un cégep anglophone.

Mais je veux aussi juste... Le collègue de Rosemont, qui a parlé du projet de Royal Vic, bien, il a dit que peut‑être c'est le temps d'approprier le projet, de prendre ça de McGill puis donner ça à des logements sociaux. Je ne suis pas contre l'idée d'ajouter plus de logements à Montréal, mais, si ça, c'est logique, pourquoi ne pas prendre une tour de Hilton, une grosse corporation, prendre une tour là puis utiliser ça? Pourquoi on attaque McGill? C'est une université. Et le plan de McGill, présentement, c'est d'utiliser cette place-là, ces lieux-là pour développer un programme dans la lutte contre les changements climatiques. Et McGill demeure toujours une institution, une université avec une excellente réputation partout dans le monde. Alors, si on est capables de chercher des experts partout dans le monde, oui, des experts qui sont francophones aussi pour... vient ici, à Montréal, pour créer une institution qui est une des meilleures dans le monde pour la lutte contre les changements climatiques, moi, je pense que ça, c'est une bonne chose pour le Québec et pour Montréal. Bien, ça, c'est pourquoi on est ici, c'est d'avoir des débats et des échanges sur des projets de loi comme ça.

Et maintenant, Mme la Présidente, je veux faire le switch envers les peuples autochtones. Je sais que tout le monde a essayé de faire les représentations pour les différentes nations autochtones présentées dans les... publiques pour dire : On n'est pas sur la liste, ce projet, ce n'est pas notre affaire. Je suis content que le gouvernement a décidé, avec le pont Mercier, d'enlever ça de la liste. Je ne sais pas si on peut dire que c'est un gain. Je pense, c'était la correcte chose à faire après que les Mohawks aient dit : Enlevez ça, il faut avoir une vraie consultation. Mais moi, je vais parler un petit peu, Mme la Présidente, de la discrimination systémique par des gouvernements, parce que c'est deux listes qu'on a présentées devant le peuple québécois qu'il n'y a eu aucun projet pour les peuples autochtones. Et ça, c'est comment ils ont regardé ça : On fait la relance économique, on fait des projets qui sont hyperimportants dans la santé, pour les aînés, en éducation, puis il n'y a aucun projet pour nous. Et je comprends, et puis ça peut toujours répéter, si c'est un gros projet avec une liste qui était... bien, on va dire que c'était une liste qui était prise du PQI, là, on va reprendre ces projets-là, mais, quand même, quand les autochtones regardent ça, ils disent : Pourquoi on n'est pas là? Il n'y a pas une urgence pour nous?

• (16 h 20) •

Et, si on regarde... Et je comprends qu'il y a des règles qui existent pour le PQI. Ça doit être un certain niveau de montants pour un projet. Mais, si on regarde juste le logement dans le Grand Nord, juste de faire toutes les rénovations pour s'assurer que les maisons sont à un même niveau, qu'elles respectent toutes les règles du Québec, du gouvernement fédéral, ça va prendre 50 millions juste pour faire toutes les rénovations sur le territoire cri pour les maisons qui existent. Mais, Mme la Présidente, il y a un problème de logement plus «at large» dans le Grand Nord qui va prendre des millions et des millions de dollars, des centaines. Ça, c'est juste une communauté crie, et des Inuits, et des Naskapis que je parle, pour le logement. Puis on peut ajouter plusieurs autres, mais juste un exemple que ça, c'est un besoin criant, pour les peuples autochtones, qui existe. Et ce n'est pas juste une responsabilité du Québec, il y a aussi le gouvernement fédéral, mais, quand même, nous avons un rôle à jouer, nous avons un rôle à dépenser l'argent. Alors, ce n'est pas juste... je ne parle pas le gouvernement... le parti et la formation politique, ce n'est pas eux autres qui font la discrimination, je dis que ça arrive trop souvent que les autochtones disent qu'il y a une discrimination des institutions. Alors, c'est juste de faire ce point-là.

Mais je pense que la ministre, et je sais qu'elle est capable, elle a une grande écoute, elle a accepté des propositions des autres formations politiques pour le projet de loi, mais c'est juste une proposition pour la ministre qu'en 2021, ensemble, on va lancer un projet d'infrastructure et de relance économique pour les peuples autochtones. Puis tous ensemble on peut convoquer des peuples autochtones des différentes nations de venir ici détailler des projets qui sont importants pour vous, des priorités que vous avez, puis on va faire un «fast track» pour eux autres. Moi, je suis disponible de siéger avec la ministre et de faire tout ce travail-là. Je sais que mes collègues des autres formations politiques sont bien disponibles aussi. Alors, je pense que ça, c'est une solution qu'on peut finalement démontrer qu'on a changé des choses et la façon qu'on fait des projets, des gros projets de loi ici pour avancer des projets importants pour les peuples autochtones.

C'est probablement, Mme la Présidente, la dernière fois que je vais prendre la parole dans la Chambre avant la fin de la session, alors je veux juste saluer tous mes collègues ici. Je veux souhaiter à tout le monde un joyeux Noël, une joyeuse fête. Je sais que 2020 a été pas facile pour vos citoyens, et quand même, peut-être, parmi vous... peut-être que vous avez perdu un proche, et ce n'était pas facile pour plusieurs des Québécois. Alors, j'espère que tout le monde a une période... bonnes vacances avec leur famille, avec leurs proches. Alors, merci beaucoup, Mme la Présidente, pour votre écoute.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Jacques-Cartier. Et maintenant je vais céder la parole à M. le chef du troisième groupe d'opposition. Et vous disposez d'un temps de parole de 10 minutes.

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : Merci, Mme la Présidente. Chef parlementaire, faut-il le préciser.

Le Parti québécois votera contre le projet de loi n° 66 pour plusieurs raisons, des raisons environnementales qui ont été évoquées par mon collègue de Jonquière mais des raisons liées au nationalisme et particulièrement à la langue.

Une de ces raisons, c'est l'incapacité du ministre responsable de la Langue de convaincre son propre parti politique d'adhérer à nos propositions, notamment de renoncer aux projets de Dawson et de McGill. Alors, retenez ça, Mme la Présidente. Aujourd'hui, la CAQ voit au moins une formation politique voter contre son projet de loi parce qu'elle maintient un projet de loi amené par le Parti libéral quant à Dawson. Dans le projet de loi n° 66, la CAQ est venue contredire tout effort de protéger le français, notre langue commune et officielle. C'est sans équivoque pour nous, le gouvernement doit renoncer à ces investissements et les investir dans les institutions francophones, notamment les cégeps qu'on retrouve dans à peu près tous les comtés des collègues de la CAQ et des autres formations politiques.

D'une part, un investissement de 50 millions de dollars pour l'agrandissement du collège Dawson, un cégep anglophone qui est aussi le plus populeux du Québec. Et je sais qu'on ne va pas convaincre ni la CAQ, ni le Parti libéral, qui y tiennent, à ce projet-là. Québec solidaire, je crois qu'ils sont plutôt sensibles à notre position, mais ce n'est pas le cas pour les deux formations fédéralistes qui sont dans cette Chambre. D'autre part, l'Université McGill pourra profiter d'un investissement majeur de combien? 700 millions, en plus de se voir donner une majeure partie de l'ancien Hôpital Royal Victoria, un précieux morceau du patrimoine public montréalais. Ces deux projets ont plusieurs choses en commun. Ils ont tous les deux été initiés par l'ancien gouvernement libéral quelques semaines à peine avant les dernières élections. Ils vont tous les deux contribuer au recul de la langue française à Montréal ainsi qu'à l'anglicisation du Québec.

J'aurais tellement aimé, Mme la Présidente, que le gouvernement soit sérieux en matière linguistique et qu'il décide de se rendre à notre argument. Ce qui est triste, et c'est la semaine pour ça, c'est que le gouvernement du Québec a décidé de procéder malgré l'avis du ministre responsable de la Langue. Alors, l'autorité la plus importante dans ce domaine, c'est le ministre responsable de la Langue, mais il n'a pas été capable de convaincre son gouvernement que, si on veut être crédible en matière de français, il faut enlever ces projets-là. Donc, c'est un échec pour lui, mais ça, c'est tel quel. C'est un échec pour la francisation à Montréal, pour le caractère français de cette grande métropole francophone, la deuxième au monde, qu'est Montréal. Et ce projet à lui seul, celui de Dawson, enlève toute crédibilité à la CAQ pour la suite des choses. Alors, qu'on nous promette un plan costaud, quel que soit le qualificatif, présentez juste un plan, et on se chargera de le qualifier, mais ça finit très mal la session.

Le gouvernement va faire adopter son projet de loi grâce à sa majorité parlementaire et à une discipline de fer. Mais je sais que ça tiraille plusieurs députés qui sont sincèrement épris de la langue, au même titre qu'hier plusieurs députés étaient mal à l'aise d'une autre position du gouvernement, qui portait cette fois sur l'éthique. Aujourd'hui, c'est sur la langue. Pendant combien de temps ça va durer? Ça dépend de la capacité des députés d'encaisser tour à tour et de plus en plus ce genre de couleuvre. En bref, la CAQ finance et accélère l'anglicisation de Montréal. 750 millions de dollars pour financer l'anglicisation et le recul du français contre quoi? 5 millions de dollars pour l'OQLF, pour financer la francisation et l'embauche de 50 employés. En comparaison, ces investissements en francisation sont 150 fois moins importants que les investissements de Dawson et McGill. Comment un gouvernement autoproclamé nationaliste et soucieux de la pérennité de la langue française peut-il prioriser sciemment deux projets qui vont directement contribuer à faire reculer encore davantage la langue française à Montréal et angliciser le Québec? Parce que c'est ce qui a été fait à travers une liste de 181 projets, si je ne me trompe pas, dans ces eaux-là. On aurait pu prendre des projets dans l'ensemble des collèges du Québec, cégep de Rosemont, cégep de Matane, cégep de Sorel‑Tracy, cégep d'Alma, je vois les collègues, cégep de l'Abitibi, Jonquière. Non, on va en prendre un, ça va être Dawson. Pourquoi? Je ne le sais pas. Ils y tiennent énormément.

J'ai écouté le premier ministre, qui a participé à l'émission Les francs-tireurs, hier. L'animateur Benoît Dutrizac lui pose la question : Mais vous n'êtes pas très crédible avec Dawson, il passe à côté de la question. Je ne sais pas d'où vient le malaise, mais ils y tiennent pas à peu près. Et moi, je sais de source sûre que le ministre responsable de la Langue, il nous envoie des signaux de détresse : Aidez-moi, il ne m'écoute pas. Bien, je ne sais pas quoi faire, je ne suis pas au caucus de la CAQ. Mais ce que je peux dire : que, là, ça vient de coûter l'appui d'une formation politique à un projet-phare pour le gouvernement et ça va surtout coûter la crédibilité pour la suite des choses, parce que les partenaires en matière de langue, croyez-moi, vont noter que, malgré tous les avertissements, le collège Dawson demeure là.

Et, pour tout nationaliste qui se respecte, et Pierre Bourgault l'a annoncé de façon prophétique, si on perd Montréal, quant au français, on est foutus, comme nation. Alors, nous, c'est un enjeu important pour nous. Ce n'est pas une lettre ouverte, c'est un enjeu concret, c'est dans le réel. Au Parti québécois, les oeuvres parlent plus que les paroles. La loi 101, il a fallu faire preuve de courage pour la faire adopter.

Quand est venu le temps d'enlever le projet de Dawson, qu'on veut accélérer, ce qui ajoute l'insulte à l'injure, même pas capable de le retirer. Mais, M. le Président — c'était Mme la Présidente il y a quelques minutes — M. le Président, ce n'est pas mieux que les critiques que j'adressais au Parti libéral. Alors, pour les nationalistes québécois, pour les gens qui, comme nous, croient en l'avenir de la langue française au Québec, et particulièrement en région métropolitaine, arrêtez de dire qu'ils sont nationalistes, c'est de la fausse représentation. C'est la même position que le Parti libéral du Québec, qui au moins, eux, s'assument. Leur «branding», pour prendre un mot anglicisé, celui-ci est assez clair. Quant à la CAQ, on veut aller chercher les deux côtés, mais un jour, M. le Président, ce genre de fausse représentation fera en sorte que cette coalition s'écroulera. Et, quand ce jour arrivera, vous verrez que les gens chercheront ceux qui ont été authentiques comme nationalistes tout au long de leur engagement politique.

• (16 h 30) •

Sur les 48 cégeps publics au Québec, 48, un seul reçoit le privilège de voir son agrandissement priorisé, le collège Dawson, pour 800 étudiants supplémentaires. Et les étudiants qu'on leur accorde chaque année, ils s'additionnent. C'est le plus gros collège au Québec, et, avec la formation continue, ils sont à 11 000, 11 000. Dans nos régions, nos cégeps ont de la difficulté à se maintenir. Parfois, c'est 500 élèves... étudiants. C'est le cas du cégep de Matane. Puis il y a d'autres petits collèges qui auraient besoin de coups de pouce pour être plus attractifs. Et je suis sûr que chacun de mes collègues ont des projets qu'ils connaissent dans leurs cégeps dans leur circonscription.

Est-ce que le ministre responsable du dossier de la langue française peut nous expliquer en quoi la priorisation et l'accélération de ces deux projets, soit l'agrandissement du collège Dawson et l'Université McGill, est une bonne chose pour la pérennité et la protection de la langue française à Montréal et au Québec?

Sur 181 projets priorisés dans le projet de loi n° 66, le gouvernement prévoit accélérer seulement cinq projets en matière d'enseignement supérieur, quatre à Montréal, un en Outaouais. Concentration des projets à Montréal, rien pour les régions du Québec. C'était le thème de leur dernier congrès : les régions du Québec, jamais on n'aura vu un gouvernement aussi engagé dans les régions du Québec. On aurait pu commencer par le projet de loi n° 66. C'est mal barré.

Le plus important, M. le Président, des statistiques sur les étudiants francophones et allophones dans les cégeps anglophones de 1995 à 2018. Le nombre de francophones, pour qui c'est la langue maternelle, qui étudient en anglais au collégial au Québec est passé de 4 150 étudiants à 7 686, soit une augmentation de 3 536, 85 % d'augmentation. Si on est nationaliste, là, puis on entend ça, on bouge. Dans un caucus, on se lève puis on dit à son premier ministre puis à son Conseil des ministres : Bougez parce que, là, ça ne pourra pas marcher comme ça longtemps.

L'augmentation du nombre d'allophones dans les cégeps anglais depuis 1995 est aussi nette. Ils sont passés de 6 383 en 1995 à 8 820 en 2018, une augmentation de 38 %. En 2018, 3 000 étudiants de langue maternelle française sont inscrits au cégep anglais à Montréal. Ce nombre a doublé depuis 1995. Au total, à Montréal, la proportion de places en anglais au niveau collégial est de 47 %. Est-ce le rôle de l'État québécois de financer sa propre anglicisation? C'est la question que je pose.

Notre position est très claire là-dessus, on l'assume. Ce n'est pas un positionnement politique, c'est une conviction profonde qui anime les fiers militants du Parti québécois depuis la fondation de cette grande formation politique. On ne va jamais déroger de ça. Et sur le terrain de la langue, si on est sérieux avec ce qu'on avance, bien, on pose des gestes. On ne dit pas : On va régler Dawson, McGill, puis après on va commencer. Ça ne marche pas. Et, en en ce sens-là, j'accorde plus de crédibilité à l'intervention du député de Jacques-Cartier, qui arrive avec une proposition claire pour la francisation des anglophones. Et je reviendrai, M. le Président, pour parler encore de langue fièrement...

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Mme la députée de Vaudreuil.

Mme Marie-Claude Nichols

Mme Nichols : Merci. Merci, M. le Président. Je m'excuse, là, on n'était comme pas en ligne, j'étais dans votre angle mort.

Alors, voilà, ça me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi n° 66. Bon, je ne serai peut-être pas aussi enflammée que mon collègue précédent, mais, bon, j'ai des intérêts particuliers pour le projet de loi n° 66 parce que j'ai été approchée par plusieurs citoyens. Il y a plusieurs citoyens qui m'ont appelée, qui m'ont envoyé des courriels et qui voulaient savoir quelle était notre position relativement à ce dossier-là. Puis j'ai promis, entre autres à une citoyenne, de prendre la parole pour apporter sa voix ici, au salon bleu.

Donc, je me permets de vous lire son court courriel. Elle me dit, en lien avec le projet de loi n° 66 : «Mme Nichols, le projet de loi n° 66 a fait l'objet de l'adoption du principe à la séance du 3 novembre 2020 avec un résultat final des votes des élus 110 pour et 11 contre. Je m'oppose à ce projet de loi dans sa forme actuelle. Je vous demande de porter ma voix à l'Assemblée nationale et de vous y opposer également.» Alors, Mme Richard, là, je porte votre voix.

«Je m'oppose à chacune des quatre grandes catégories de mesures d'accélération des projets d'infrastructure, soit les procédures d'expropriation allégées et facilitées par des adaptations à la Loi sur l'expropriation, la possibilité d'entendre des travaux avant qu'aient été octroyés tous les droits nécessaires, l'ensemble des mesures d'allégement des procédures d'examen des impacts sur l'environnement, la soustraction de certains projets à l'application de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et les aménagements relatifs à l'obtention d'une autorisation des municipalités touchées.

«De plus, j'estime que les pouvoirs accordés à l'Autorité des marchés publics ne sont qu'une façade qui paraît bien en théorie, mais qui seront difficilement applicables dans la pratique. Le flou entourant le processus d'examen de l'attribution des contrats se traduira dans les faits par l'achèvement de travaux qui contreviennent aux lois et règlements sans qu'il soit possible de les stopper à temps.

«Je suivrai de près les prochaines étapes du cheminement de ce projet de loi. Je compte sur vous, Mme la députée, pour investir toute votre énergie à faire monter une opiniâtre opposition à ce projet de loi néfaste pour notre économie, notre territoire et notre peuple.» Donc, voilà, Mme Richard, j'ai porté votre voix, tel que demandé, à l'Assemblée nationale.

J'ai aussi parlé à d'autres citoyens qui étaient très préoccupés, préoccupés pour la partie, évidemment, environnement. On le sait, dans la première mouture du projet de loi le téléphone ne dérougissait pas en lien, entre autres, avec l'environnement. Et j'ai suivi les travaux, donc je suis quand même... et je félicite mon collègue qui a fait des belles représentations, là, au niveau de l'environnement, et j'ai des citoyens qui ont appelé pour me le dire aussi. Donc, peu importe les allégeances politiques, quand on a des collègues, là, qui portent notre voix, qui portent l'intérêt aussi d'autres citoyens, bien, ça nous plaisir de le souligner ici, au salon bleu, mais ça nous fait plaisir aussi de le dire aux citoyens qui nous abordent relativement à ces préoccupations-là. Il y avait aussi, comme je disais, des préoccupations relativement à l'environnement, des préoccupations relativement aux projets concernés pour le comté de Vaudreuil.

Donc, dans le projet de loi n° 66, il y a différents projets qui sont énumérés. Il y a des projets, là, qui touchent le comté de Vaudreuil, et je vais faire tout de suite référence à un dossier hyperimportant dans le comté de Vaudreuil-Soulanges, soit le dossier de l'hôpital. Donc, l'hôpital de Vaudreuil-Soulanges, je le rappelle, c'est un besoin. C'est un besoin. On est deux comtés en explosion démographique, autant Vaudreuil, autant Soulanges. Puis je n'ai pas besoin de vous dire que, ces temps-ci, là, l'hôpital du Lakeshore est à 140 % de taux d'occupation, l'Hôpital du Suroît à 200 %. Donc, je n'ai pas besoin de vous dire qu'il y a une nécessité, là, sur notre territoire. J'ai même beaucoup de citoyens, là, qui fréquentent l'hôpital de Hawkesbury, donc ils vont en Ontario se faire soigner. Je trouve ça... De là toute l'importance, là, de voir ce projet-là se réaliser.

Ce projet-là, ce projet d'hôpital, on a travaillé fort. Je vous le dis, depuis 2009 que je travaille le projet de loi de l'hôpital. Je l'ai travaillé comme mairesse, comme préfet, comme députée du gouvernement et maintenant comme députée dans l'opposition officielle. Ce projet de loi là... pas ce projet de loi là, ce projet d'hôpital, écoutez, j'en fais... pour moi, c'est un défi, pour moi, c'est... Je pourrais mobiliser toute la population, comme on a fait dans les dernières années, pour que ce projet-là voie le jour tel que prévu, aux dates et aux échéanciers tels que prévus.

D'ailleurs, j'en profite pour remercier mon collègue de La Pinière, il y a eu des suggestions pour que l'hôpital porte son nom, mais on va y réfléchir, on va y réfléchir, mais qui a toujours cru... qui est venu souvent dans le comté de Vaudreuil autant pour déterminer le terrain, pour parler aux élus, pour rencontrer nos maires, parce que, je le dis tout le temps, un hôpital, ce n'est pas comme une maison, hein, on ne construit pas ça en claquant des doigts. C'est complexe, un hôpital, ça prend un réseau d'égouts, aqueduc, électricité, les voies d'accès. Donc, c'est très complexe. Et j'ai vraiment eu une belle collaboration avec le député de La Pinière pour ce projet-là en particulier, donc, encore, merci beaucoup.

• (16 h 40) •

Maintenant, il est dans le projet de loi n° 66, et on nous dit que le dossier de l'hôpital sera accéléré. Bon, écoutez, je ne suis pas contre, là, je suis vraiment pour que le dossier de l'hôpital soit accéléré, mais permettez-moi d'avoir quelques petites réticences. J'ai des réticences parce que, comme je disais, c'est un dossier complexe. C'est un dossier qui a pris un petit peu de retard, M. le Président, quand la CAQ est arrivée au pouvoir, parce que la CAQ a voulu changer le terrain. Ça nous a pris à peu près sept ans, les 23 élus, pour déterminer le terrain. Les terrains étaient choisis, expropriés, la caractérisation des sols était faite, puis là la CAQ arrive puis voulait changer le terrain. Donc, bien sûr que les élus se sont manifestés puis sont revenus. La décision est revenue aux terrains choisis, par chance, mais il y a eu quand même un délai, là, qui a retardé quelque peu l'échéancier. Maintenant, on nous dit qu'on veut accélérer l'échéancier.

Ce projet-là, c'est la SQI, là, qui a pris le contrôle, là, si vous voulez, là, du dossier ou qui gère le dossier. On a des rencontres, le comité de citoyens, avec le CISSSMO, avec la SQI, à peu près aux deux mois pour faire les suivis. Quand on nous dit qu'on veut l'accélérer puis qu'on annonce ça en grandes lignes dans les journaux : Votez pour le projet de loi n° 61 — ou le projet de loi, maintenant, n° 66 — l'hôpital va être accéléré, bien, les citoyens, là, ils y croient à ça, là. Moi, je suis sceptique.

Alors, j'ai fait les démarches. J'ai fait les démarches, là, auprès du CISSSMO, j'ai fait les démarches auprès de la SQI. Et je l'ai posée, la question : Ça va être quoi, les répercussions à prévoir avec le dépôt du projet de loi n° 66? Est-ce que ça va accélérer la livraison des divers projets, dont la construction de l'hôpital de Vaudreuil-Soulanges? Et la réponse est clairement non. La réponse est clairement non. On nous dit que la SQI analyse présentement une situation en fonction des paramètres du projet de loi. Donc, ils ont clairement reçu la note, là, gouvernementale, ou la note à l'effet qu'il faut l'accélérer, ce dossier-là, mais on nous dit clairement que le projet suit actuellement un échéancier rigoureux, serré, et que le projet de loi ne pourrait pas faire devancer l'ouverture de l'hôpital.

Donc, c'est mon petit bémol. Je trouve ça dommage qu'on essaie de vendre un projet de loi ou qu'on essaie de... qu'on écrive, là, des gros titres en disant à nos citoyens : Ce projet-là va être accéléré. Ce projet-là, là, on y croit. Tout ce qu'on veut, c'est qu'il suive son échéancier. L'échéancier nous convient, ils ont beaucoup de travail à faire pour y arriver, alors on voudrait... S'il est devancé, tant mieux, mais si on nous dit que ce n'est pas possible, ce n'est pas possible, là. Ça fait que j'ai un... je trouve ça dommage, là, de la façon qu'on essaie de nous dire... Puis c'est parce que les citoyens nous appellent, là, les citoyens nous appellent, là : Le gouvernement dépose un projet de loi, là, vous allez voter pour, hein, parce que l'hôpital, là, on va l'avoir deux ans avant. Bien non, on ne l'aura pas deux ans avant, l'hôpital. On va l'avoir selon l'échéancier, tel que prévu. Donc, vous comprendrez que je réponds aux citoyens, bien... Puis je ne veux pas dire aux citoyens, là : On ne le veut pas deux ans avant, on n'en a pas besoin. Ce n'est pas vrai, on en a besoin. Mais je trouve ça dommage qu'on ne donne pas aux citoyens nécessairement, là, l'heure juste, tel qu'il est prévu, donc.

Mais, en terminant, parce que, là, je sais que le temps file, il me reste une trentaine de secondes, là, je veux juste dire qu'il y a d'autres projets dans Vaudreuil qui font partie de la relance économique qui n'ont pas nécessairement besoin d'être dans le projet de loi n° 66, où le ministère des... le ministre des Transports, aux crédits, a regardé ça d'un oeil favorable, et qui devraient voir le jour sans ce projet de loi là. Et je demande sincèrement une attention particulière pour la voie de contournement de l'autoroute 20, au bénéfice de la population de Vaudreuil et de Soulanges. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Puisqu'il n'y a pas d'autre intervention, nous devrions mettre aux voix.

Mais je constate qu'il y a des groupes parlementaires qui sont absents, donc je vais suspendre les travaux, pour un maximum de 10 minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 44)

(Reprise à 16 h 48)

Le Vice-Président (M. Picard) : Nous reprenons et nous allons maintenant procéder à la mise aux voix des amendements et du rapport. Je comprends qu'il y a consentement pour que le lise et que je mette aux voix un à un les amendements proposés par M. le député de La Pinière et par M. le député de Jonquière. Consentement? Consentement.

Mise aux voix de l'amendement du député de La Pinière

Je vais d'abord mettre aux voix l'amendement proposé par M. le député de La Pinière. L'amendement concernant l'article 52 se lit comme suit : L'article 52 du projet de loi est modifié :

1° par l'ajout au premier alinéa, après les mots «Rivière-Rouge», des mots «selon le tracé retenu par le gouvernement en 2013 et repris en 2018».

En application de l'ordre spécial, j'inviterais maintenant les leaders parlementaires à m'indiquer le vote de leurs groupes sur cet amendement. M. le leader adjoint de l'opposition officielle?

M. Derraji : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint du gouvernement?

M. Schneeberger : Contre.

Le Vice-Président (M. Picard) : Mme la députée de Sherbrooke?

Mme Labrie : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le député de Jonquière?

M. Gaudreault : Abstention.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint du gouvernement, est-ce que vous avez des indications concernant M. le député de Chomedey?

M. Schneeberger : Oui. Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : Et pour Mme la députée de Marie-Victorin?

M. Schneeberger : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : Je vous remercie. En conséquence, l'amendement présenté par M. le député de La Pinière est rejeté.

Mise aux voix des amendements du député de Jonquière

Je vais maintenant mettre aux voix les amendements proposés par M. le député de Jonquière. Le premier amendement, introduisant l'article 11.1, se lit comme suit : Insérer, après l'article 11 du projet de loi, le suivant :

«11.1. Pour bénéficier d'une ou plusieurs mesures d'accélération prévue à l'article 11, un projet d'infrastructure mentionné à l'annexe I doit faire l'objet d'une recommandation du président du Conseil du trésor s'appuyant sur la grille d'analyse multicritère des impacts sociaux, environnementaux et économiques prévus à l'annexe III.»

En application de l'ordre spécial, j'inviterais maintenant les leaders parlementaires à m'indiquer le vote de leurs groupes sur cet amendement. M. le député de Jonquière?

M. Gaudreault : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint du gouvernement?

M. Schneeberger : Contre.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint de l'opposition officielle?

M. Derraji : Abstention.

Le Vice-Président (M. Picard) : Mme la députée de Sherbrooke?

Mme Labrie : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint du gouvernement, pour le vote de M. le député de Chomedey et de Mme la députée de Marie-Victorin?

M. Schneeberger : Oui. Chomedey : Pour. Et Marie-Victorin : Pour.

• (16 h 50) •

Le Vice-Président (M. Picard) : Je vous remercie. En conséquence, l'amendement présenté par M. le député de Jonquière est rejeté.

Le deuxième amendement, concernant l'article 12 se lit comme suit : Le premier alinéa de l'article 12 du projet de loi est modifié par le remplacement du mot «cinq» par «deux».

En application de l'ordre spécial, j'inviterai maintenant les leaders parlementaires à m'indiquer le vote de leurs groupes sur cet amendement. M. le député de Jonquière?

M. Gaudreault : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint du gouvernement?

M. Schneeberger : Contre.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint de l'opposition officielle?

M. Derraji : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : Mme la députée de Sherbrooke?

Mme Labrie : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint du gouvernement, est-ce que vous avez des indications concernant le vote de M. le député de Chomedey?

M. Schneeberger : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : Et pour Mme la députée de Marie-Victorin?

M. Schneeberger : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : Je vous remercie. En conséquence, l'amendement présenté par M. le député de Jonquière est rejeté.

Le troisième amendement concernant l'article 28 se lit comme suit : Le deuxième alinéa de l'article 28 du projet de loi est modifié par le remplacement du mot «cinq» par «deux».

En application de l'ordre spécial, j'inviterais maintenant les leaders parlementaires à m'indiquer le vote de leurs groupes sur cet amendement. M. le député de Jonquière?

M. Gaudreault : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint du gouvernement?

M. Schneeberger : Contre.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint de l'opposition officielle?

M. Derraji : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : Mme la députée de Sherbrooke?

Mme Labrie : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint du gouvernement, avez-vous des indications concernant M. le député de Chomedey?

M. Schneeberger : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : Pour Mme la députée de Marie-Victorin?

M. Schneeberger : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : Je vous remercie. En conséquence, l'amendement présenté par M. le député de Jonquière est rejeté.

Le quatrième amendement, concernant l'article 52, se lit comme suit : L'article 52 est remplacé par le suivant :

«Le projet de sécurisation de la route 117 entre Labelle et Rivière-Rouge et le projet d'amélioration de l'autoroute 30 entre Brossard et Boucherville bénéficient d'un projet pilote sur la mise en place d'équipes dédiées à l'accélération de la mise en oeuvre de la procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur l'environnement.»

En application de l'ordre spécial, j'inviterais maintenant les leaders parlementaires à m'indiquer le vote de leurs groupes sur cet amendement. M. le député de Jonquière?

M. Gaudreault : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint du gouvernement?

M. Schneeberger : Contre.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint de l'opposition officielle?

M. Derraji : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : Mme la députée de Sherbrooke?

Mme Labrie : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader du gouvernement, est-ce que vous avez des indications concernant le vote de M. le député de Chomedey?

M. Schneeberger : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : Pour Mme la députée de Marie-Victorin?

M. Schneeberger : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : Je vous remercie. En conséquence, l'amendement présenté par M. le député de Jonquière est rejeté.

Le cinquième amendement, concernant l'article 53, se lit comme suit : L'article 53 est remplacé par le suivant :

«53. Les délais prévus aux articles 150 à 157 de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme peuvent être réduits de moitié pour un projet d'information mentionné à l'annexe I qui est une intervention visée à l'article 149 de cette loi.»

En application de l'ordre spécial, j'inviterais maintenant les leaders parlementaires à m'indiquer le vote de leurs groupes sur cet amendement. M. le député de Jonquière?

M. Gaudreault : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint du gouvernement?

M. Schneeberger : Contre.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint de l'opposition officielle?

M. Derraji : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : Mme la députée de Sherbrooke?

Mme Labrie : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint du gouvernement, avez-vous des indications à me transmettre concernant le vote du député de Chomedey?

M. Schneeberger : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : Pour Mme la députée de Marie-Victorin?

M. Schneeberger : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : Je vous remercie. En conséquence, l'amendement présenté par M. le député de Jonquière est rejeté.

Le sixième amendement, concernant l'annexe I, se lit comme suit : Le tableau de l'annexe I est modifié par la suppression de la ligne n° 117 — Agrandissement du collège Dawson.

En application de l'ordre spécial, j'inviterais maintenant les leaders parlementaires à m'indiquer le vote de leurs groupes sur cet amendement. M. le député de Jonquière?

M. Gaudreault : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint du gouvernement?

M. Schneeberger : Contre.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint de l'opposition officielle?

M. Derraji : Contre.

Le Vice-Président (M. Picard) : Mme la députée de Sherbrooke?

Mme Labrie : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint du gouvernement, avez-vous des indications concernant le vote de M. le député de Chomedey?

M. Schneeberger : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : Concernant le vote de Mme la députée de Marie-Victorin?

M. Schneeberger : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : Je vous remercie. En conséquence, l'amendement présenté par M. le député de Jonquière est rejeté.

Le septième amendement concerne l'annexe I et se lit comme suit : Le tableau de l'annexe I est modifié par la suppression de la ligne n° 120 — Aménagement sur une partie du site de l'Hôpital Royal Victoria du Centre universitaire de santé McGill.

En application de l'ordre spécial, j'inviterais maintenant les leaders parlementaires à m'indiquer le vote de leurs groupes sur cet amendement. M. le député de Jonquière?

M. Gaudreault : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint du gouvernement?

M. Schneeberger : Contre.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint de l'opposition officielle?

M. Derraji : Contre.

Le Vice-Président (M. Picard) : Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Labrie : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint du gouvernement, avez-vous des indications à me transmettre concernant le vote de M. le député de Chomedey?

M. Schneeberger : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : Concernant le vote de Mme la députée de Marie-Victorin?

M. Schneeberger : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : Je vous remercie. En conséquence, l'amendement présenté par M. le député de Jonquière est rejeté.

Mise aux voix du rapport

En application de l'ordre spécial, j'inviterais maintenant les leaders parlementaires à m'indiquer le vote de leurs groupes sur l'adoption du rapport de la Commission des finances publiques portant sur le projet de loi n° 66, Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure. M. le leader adjoint du gouvernement?

M. Schneeberger : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint de l'opposition officielle?

M. Derraji : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader... Mme la députée de Sherbrooke. Mme la députée de Sherbrooke?

Mme Labrie : Contre.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le député de Jonquière?

M. Gaudreault : Contre.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint du gouvernement, avez-vous des indications à nous transmettre concernant le vote du député de Chomedey?

M. Schneeberger : Contre.

Le Vice-Président (M. Picard) : Concernant le vote de Mme la députée de Marie-Victorin?

M. Schneeberger : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : Je vous remercie. En conséquence, le rapport de la Commission des finances publiques portant sur le projet de loi n° 66, Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure, est adopté.

Pour la suite de nos travaux, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Schneeberger : Oui. Alors, M. le Président, je vous demanderais de rappeler l'article 24 pour la suite de l'adoption du projet de loi n° 66.

Adoption

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci. Mme la ministre responsable de l'Administration gouvernementale et présidente du Conseil du trésor propose l'adoption du projet de loi n° 66, Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure.

Y a-t-il consentement pour déroger à l'article 230 du règlement prévoyant que l'adoption du projet de loi doit avoir lieu à une séance distincte de celle de la prise en considération du rapport de la commission? Consentement? Consentement. Y a-t-il des interventions? Mme la présidente du Conseil du trésor.

Mme Sonia LeBel

Mme LeBel : Oui. J'ai comme failli manquer ma shot, M. le Président, hein? Donc, oui, merci, M. le Président. Effectivement, je suis très fière qu'on passe maintenant à l'étape finale de l'adoption du projet de loi n° 66 qui est la Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure. Alors, merci encore une fois de la collaboration des députés de l'opposition, justement, entre autres pour déroger à la procédure régulière et nous permettre de faire, là, ces deux procédures une à la suite de l'autre aujourd'hui.

Au printemps dernier, nous avons été contraints de mettre le Québec sur pause, M. le Président. La crise sanitaire et ses effets sur l'économie constituent sans doute l'un des plus grands défis qu'a rencontrés notre nation. Pour y faire face, on devait agir sur deux fronts, c'est-à-dire combattre le virus et également soutenir, mais aussi renforcer notre économie. La relance économique, c'est un ensemble d'actions, M. le Président. Parmi celles-là, l'accélération de projets d'infrastructure est une, quant à moi, des pièces maîtresses de ce plan de relance. La reprise prudente et graduelle des activités, elle ne peut pas à elle seule compenser pour toutes les répercussions que nous subissons de la pandémie, que nous allons malheureusement subir encore pendant un très certain temps.

Donc, l'objectif est clair, nous voulons accélérer les projets prioritaires. C'est possible d'accélérer la mise en chantier de certains projets sans compromettre les standards en matière d'intégrité et d'environnement. Nous en sommes convaincus. Le projet de loi n° 66 est ciblé, les mesures qui y sont incluses sont temporaires et elles concernent spécifiquement une liste fermée de 180 projets. C'est nécessairement une mesure exceptionnelle, M. le Président, mais c'est une réponse exceptionnelle à une situation exceptionnelle. Et je pense que c'est pour cette raison que nous avons proposé le projet de loi n° 66 et que je suis très fière de pouvoir l'adopter aujourd'hui.

Nous sommes parvenus, je pense, à trouver le juste équilibre entre l'accélération et le contrôle rigoureux. Ces projets que les Québécois attendent avec impatience sont des écoles, M. le Président, des maisons des aînés, des routes rénovées, donc des projets d'infrastructure qui seront non seulement bénéfiques par leur accélération et les retombées économiques qu'ils généreront, mais par le fait aussi qu'ils vont durer longtemps et servir pour le bien-être des Québécois. Le projet de loi prévoit des mesures pour accélérer certaines procédures administratives et ainsi permettre une mise en chantier plus rapide.

Ces procédures, M. le Président, se déclinent en quatre axes : l'expropriation, le domaine de l'État, les autorisations environnementales ainsi qu'en matière d'urbanisme et d'aménagement du territoire. Lors de l'étude détaillée, nous n'y reviendrons peut-être pas en détail, là, mais on a adopté quand même 50 amendements sur ces divers sujets. Parmi ceux-ci, l'Autorité des marchés publics pourra faire maintenant sa propre enquête de sa propre initiative lorsqu'elle contacte un manquement, notamment sur le processus d'adjudication ou d'attribution d'un contrat public ou sur l'exécution d'un tel contrat. On reconnaît aussi la nécessité d'assujettir à ces nouveaux pouvoirs de l'AMP tous les contrats et sous-contrats publics qui découlent des projets majeurs inscrits au Plan québécois des infrastructures.

Une autre grande priorité de tous les Québécois, c'est l'environnement. Nous partageons cette priorité, M. le Président. C'est pourquoi l'accélération des projets d'infrastructure ne se fera pas au détriment de l'environnement. Ensemble, nous avons pris les mesures qui s'imposent. Des amendements concernant l'environnement ont été ajoutés, discutés et adoptés pour répondre à plusieurs des préoccupations soulevées par les groupes qui sont venus nous voir en consultations ainsi que par mes collègues de l'opposition. Ainsi, un amendement met de l'avant le respect de l'objectif du zéro perte nette en matière de milieux humides et hydriques pour les projets de l'annexe. La publication en continu, entre autres de certains renseignements concernant les projets, est à présent obligatoire. C'est une reddition de comptes qui avait été demandée par les groupes environnementaux, auxquels nous avons répondu. On peut penser aux mesures prises pour éviter, justement, ou limiter les rejets de contaminants ou pour atténuer leur effet. Un autre amendement concernant le traitement et la valorisation des sols contaminés et leur traçabilité a également été adopté à la suggestion du député de Jonquière.

• (17 heures) •

Au regard des mesures facilitant le paiement aux entreprises parties à des contrats publics de travaux de construction ainsi qu'aux sous-contrats publics qui y sont liés, un amendement abolit la limite de 20 millions et permet l'ajout de tous les contrats publics applicables découlant du projet de l'Annexe I, et ce, pour la période de cinq ans prévue par le projet de loi. Ça répond, M. le Président, à des demandes qui ont été exprimées par des nombreux représentants de l'industrie. On doit comprendre que c'est une mesure qui contribuera à stimuler notre économie et qui vient répondre aux problèmes de liquidités que nos entreprises ont, et, je dois le souligner en aparté, c'est également une mesure qui vient répondre à la recommandation 16 de la commission Charbonneau.

En matière d'expropriation, nous avons adopté un amendement pour que le locataire ou l'occupant de bonne foi reçoive dorénavant une notification plus précise et plus complète.

Un autre élément primordial pour notre gouvernement est l'importance d'impliquer les communautés autochtones, l'importance d'avoir des discussions, M. le Président, respectueuses, de nation à nation. Il y a un aspect du projet de loi qu'on a bonifié, deux articles, d'ailleurs, pour bonifier le projet de loi et répondre aux préoccupations des groupes autochtones qui sont venus témoigner, et qui me réjouissent particulièrement. À cet effet, le projet de reconstruction du pont Honoré-Mercier a été retiré de l'Annexe I pour permettre de ne pas court-circuiter le mécanisme de consultation qui est déjà en place avec la communauté mohawk. C'était une de leurs demandes, c'était une des demandes, d'ailleurs, des groupes... des représentants des communautés autochtones qui sont venus témoigner.

Il faut comprendre que ça ne compromet en rien le projet de construction du pont Mercier, comme ça ne compromet en rien tous les autres projets de construction qui sont au PQI de ne pas être à l'annexe du projet de loi n° 66, mais, dans ce cas-ci particulier, il faut comprendre qu'il y avait une entente particulière, qui a été signée entre le ministère du Transport et la communauté de Kahnawake, et on ne voulait pas faire en sorte... ça n'a jamais été l'intention, d'ailleurs, mais on ne voulait pas faire en sorte que le projet de loi n° 66 vienne, par son objectif d'accélération, court-circuiter ce processus de discussions respectueuses qui est entamé entre le conseil de bande et le ministère du Transport.

De plus, on a ajouté une disposition particulière qui prévoit que les dispositions de la loi et du projet de loi n° 66 doivent s'interpréter de façon compatible avec l'obligation de consulter les communautés autochtones concernées. Encore une fois, le projet de loi n° 66 a comme objectif d'accélérer des projets d'infrastructure et non pas de court‑circuiter nos obligations parallèles envers ces communautés ou d'autres obligations qui pourraient exister.

M. le Président, le gouvernement est appelé à gérer des situations qui sont sans précédent dans notre histoire, et ce, sur plusieurs fronts, tout en demeurant performant et à l'écoute de la population. C'est un défi qu'on se doit de relever au quotidien. Nous avons dû faire preuve d'initiative et d'écoute pour arriver à ce projet de loi innovant, qui permet, à mon avis, de maximiser les gains pour les citoyens et les entreprises, tout en minimisant les impacts négatifs de la crise sanitaire sur nos activités économiques.

En accélérant les projets d'infrastructure, on donne un électrochoc à différents milieux professionnels qui voient leur charge de travail augmenter. Le milieu de la construction est reconnu comme étant un milieu ou un secteur économique avec des retombées et des ramifications dans plusieurs autres secteurs, entre autres le secteur manufacturier. Nous augmentons ainsi le pouvoir d'achat de nombreux travailleurs, en plus de respecter nos obligations préalables à l'égard de nos citoyens, qui profiteront directement des infrastructures une fois complétées. Donc, on agit sur le présent de notre économie et sur le futur de nos citoyens en les dotant d'infrastructures utiles et essentielles.

En plus de cela, nous avons assuré, à travers plusieurs amendements clés, que nos priorités économiques ne prendront pas le dessus sur l'environnement. Il y a moyen de ne pas opposer les deux, M. le Président, et c'est ce que nous avons tenté de faire en améliorant, au cours des discussions, la proposition de base qui avait été mise sur la table par le projet de loi n° 66, et plus particulièrement le respect de certains milieux fragiles que nous tenons tous à protéger pour les générations futures.

J'aimerais, encore une fois, finalement, souligner l'excellente collaboration de tous mes collègues de l'opposition tout au long de l'étude du projet de loi n° 66, je le répète, Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure. Malgré le grand sérieux de ce projet de loi, nous avons travaillé dans un climat de collégialité, je dois le dire, que j'ai trouvé particulièrement agréable, et ce n'est pas parce qu'on est en désaccord qu'on ne peut pas le faire dans le respect. Ce climat sain s'est ressenti même durant les pauses car, bien évidemment, au cours de l'étude d'un projet de loi, on doit parfois suspendre nos activités. Mais, je pense que c'est important de répéter, pour les gens qui nous regardent, ce n'est pas parce que l'activité officielle est suspendue que le travail ne continue pas, au contraire. Souvent, il se fait beaucoup plus de travail dans nos discussions hors caméra qu'à la caméra. Et, à chaque fois, les pauses nous ont permis de progresser plus rapidement dans la suite de l'étude du projet de loi. J'ai constaté que c'est souvent, justement, dans ces moments-là que les bonnes idées émergent, et qu'on arrive à trouver une forme de compromis, qui nous permet d'avancer et de continuer à respecter nos objectifs, communs ou non.

Merci aussi aux 26 groupes d'experts consultés lors des consultations particulières, à toutes les équipes de toutes les parties, qui ont travaillé d'arrache-pied sur ce projet de loi. Je veux aussi finir, parce que c'est le dernier moment que j'aurai à m'adresser à vous sur ce projet de loi... remercier mes collègues de la banquette ministérielle, qui m'ont assistée tout au long de ce projet de loi. Ce n'est souvent pas facile pour eux parce que les interventions sont peu nombreuses de leur part, mais ils sont essentiels à notre travail, et à chaque journée, j'ai senti qu'ils étaient à mes côtés et qu'ils m'appuyaient, et ça nous aide, nous, à travailler de façon beaucoup plus sereine.

Mais je vais quand même aussi remettre l'accent, les derniers et non les moindres, aux équipes, aux équipes des différents ministères, M. le Président, qui ont eu à travailler sur ce projet de loi. Et j'ai eu un privilège qui est rarement donné à une ministre, c'est d'avoir un projet de loi qui touchait cinq ministères différents. J'ai eu à travailler avec l'équipe de cinq ministères différents, que ce soit le MAMH, le MTQ, l'Environnement, que ce soit la Faune, bon, le Conseil du trésor, naturellement, mais j'ai eu à travailler avec des sous-ministres, des légistes de cinq ministères différents, des équipes dévouées qui ont travaillé avec moi, qui ont fait preuve de la même ouverture et de la même détermination dans leurs sections respectives à améliorer le projet de loi, toujours dans l'objectif d'avoir une bonne relance économique pour les citoyens. Et souvent c'est des gens qui sont derrière la scène, qu'on ne nomme pas souvent. Je ne peux pas les nommer tous et chacun d'entre eux, mais je veux qu'ils se considèrent présentement remerciés.

J'ai maintenant le privilège de m'adresser aussi aux députés de l'Assemblée nationale, M. le Président, finalement, afin de demander l'adoption finale du projet de loi n° 66 concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure. Il est temps d'aller de l'avant pour nos travailleurs, il est temps d'aller de l'avant pour notre économie, il est temps d'aller de l'avant pour le Québec, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la ministre. Je cède la parole à M. le député de La Pinière.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : Merci, M. le Président. Alors, je vais continuer, parce qu'on est dans une situation un petit peu particulière. Comme nous faisons la prise en considération et l'adoption à la queue leu leu, alors, je ne vais pas, comme on fait parfois, répéter ce que j'ai dit précédemment, je vais simplement continuer là où j'étais rendu.

Ce matin... cet après-midi, plutôt, j'ai parlé des avancées que nous avions faites, pour ce qui est de l'AMP, sur la question du paiement des entrepreneurs. Et je disais qu'il y avait quatre axes, moi, que j'avais choisi, d'entrée de jeu, d'aborder, les deux autres étant lesdites mesures d'accélération, particulièrement en environnement, et les expropriations. Puis je ferai quelques commentaires sur l'annexe I, qui sont maintenant les 180 projets.

• (17 h 10) •

Alors, les mesures d'accélération, M. le Président, je ne les passerai pas une par une, mais je vais dire une chose qui est claire : Je suis d'accord avec mes collègues du Parti québécois et de Québec solidaire. Et sur le plan du principe, comment peut-on affirmer, puis c'est peut-être possible, là, mais comment peut-on affirmer d'une façon aussi nette qu'en en faisant moins, on va en faire autant? Ça se résume à ça, M. le Président. Les mesures d'accélération ne peuvent pas, par définition, être du même niveau que celles que l'on avait avant. C'est n'est pas possible. Et pourtant ça a été ça, la position gouvernementale, depuis le début. L'accélération exige, par définition, que des étapes ne soient pas faites de façon pleine et entière. Ce n'est pas parce qu'on garde le nom de l'étape que la teneur de l'étape, la substance de l'étape va demeurer la même.

Maintenant, on peut prétendre que la finalité va être raisonnablement respectée. J'accepter ça en partie, mais on ne peut pas dire que ça va être la même chose. Si vous demandez, on est dans la période, là, à votre garagiste de changer vos quatre pneus en cinq minutes, ça se peut que vous sortiez avec trois pneus d'été. C'est de même. On ne peut pas... C'est une vérité de la vie, là. Alors, on ne peut pas prétendre ça.

J'ai dit, M. le Président, je le dis encore qu'on va voter pour en sachant que nous faisons une entorse raisonnable et ponctuelle à nos règles pour l'intérêt supérieur du Québec. C'est ça être un parti de l'économie. Il y a une situation exceptionnelle, nous choisissons de prendre une mesure d'exception pour y faire face et on sait que ça exige de faire une entorse à nos règles.

Mais je vais répéter, et je le répéterai tout le temps, tout le temps, tous les observateurs, la Vérificatrice générale, le Conseil du patronat, tout le monde qui est un acteur, même les municipalités sont venues nous dire que le problème premier en matière d'environnement, d'urbanisme, et ainsi de suite, mais surtout d'environnement, c'est une question de staff, de personnel. Le ministère de l'Environnement n'a pas la structure et les ressources nécessaires pour appliquer ses propres règles. C'est ça la réalité.

Et, quand le député de Jonquière proposait une espèce de groupe d'intervention pour accélérer ça, bien, c'est ce qu'on a fait dans le REM, M. le Président. On a fait ça. Et c'est drôle, ça a marché. Pourquoi ça a marché? Parce qu'on a mis des gens dédiés et compétents avec les instances gouvernementales et pour faire en sorte que la procédure d'évaluation se fasse dans les temps requis. Et, oh! miracle, c'est exactement ça qui est arrivé. Il est donc possible au Québec de respecter nos règles, celles qu'on a votées après débat, dans les temps requis, sans rien ralentir, ce qui fait la démonstration que le projet de loi n° 66, on pouvait atteindre l'effet recherché sans faire de projet de loi n° 66.

Alors, comme un choix a été fait, au gouvernement, de ne pas doter le ministère de l'Environnement des ressources appropriées... Et ce n'est pas parce qu'il en manque, au Québec, là. On ne manque pas de talents et de compétence, on manque des postes. Pourquoi? Parce qu'au Québec on vit dans une société qui considère qu'il y a trop d'État. Ça existe, hein, ça? Ce n'est pas juste aux États-Unis. Pourquoi ça fonctionne dans d'autres pays, la question environnementale? Allez voir les Allemands, les Scandinaves, et ainsi de suite. Bien, ils mettent le staff. Je veux dire, pour eux autres, c'est une valeur. Alors, ce n'est pas rendu une valeur forte au Québec.

Et là, M. le Président, là, je vais vous dire une chose, je l'ai déjà dite, je la redis, c'est simple, là, moi, je fais partie, maintenant, de la génération qui se dirige vers le parc jurassique, là, je fais partie bientôt des dinosaures. Ce n'est pas ma génération qui faisait la promotion de l'environnement, c'est celle qui est là. Et celle qui est là, qui va me remplacer, elle est comme moi, ils le mettent aujourd'hui de l'avant. Ils le veulent, ça. Et c'est pour ça que, quand on entend le Conseil du patronat, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, tous ces acteurs économiques là qui normalement, de mon temps, auraient ri de ça... Aujourd'hui, ils nous disent : Bien non, là. Là, on est rendu là, là, c'est comme ça que ça doit marcher.

Ce pas-là n'a pas été franchi par le gouvernement. Le gouvernement a choisi de passer par une loi, d'amenuiser momentanément, je l'espère, nos règles. C'est un choix. Pas le choix de le respecter. Nous aurions pu faire un autre choix. Et ça, M. le Président, là, on ne peut pas dire le contraire de ça. On peut penser le contraire, mais on n'a pas démontré que la réalité est le contraire de ça. Et ça, c'est vraiment malheureux. C'est malheureux.

Pourtant, on a des exemples, là, au moment où on se parle, là. Vous n'avez qu'à regarder la santé, juste pour le fun. Qu'est-ce qu'on fait actuellement? On fait des équipes dédiées. Les «SWAT teams», là, c'est une expression qui m'était chère quand j'étais là. Elle a été reprise. J'ai comme un legs, le legs du «SWAT team» en santé, mais ça marche. Et c'est comme ça qu'il faut faire. Mettons les gens compétents en place, en quantité adéquate, avec un mandat clair, ça aboutit, ça s'appelle du leadership. Mais je ne dis pas que la présidente du Conseil du trésor a manqué de leadership, je dis que l'État, actuellement, le gouvernement en place, aurait pu faire d'autres choix. Je vois qu'en regardant, en scannant la salle, ce n'est pas ça qu'on pense de l'autre bord. Informez-vous, c'est ça la réponse que je vais vous faire.

Alors, M. le Président, je vais aller à l'autre élément, qui est un élément qui est important, qui est celui des expropriations, je l'ai abordé. Il n'y avait pas d'amendement nécessaire autre que de retirer certains articles pour lesquels il n'y avait aucune chance qu'un débat amène la ministre à prendre une décision contraire à celle qu'elle a prise. Mais je vais répéter ici, M. le Président, ce qui est l'enjeu et le risque que l'on a aujourd'hui en adoptant le projet de loi n° 66, tel qu'il est conçu.

Le projet de loi n° 66, lorsqu'il sera adopté, va créer un précédent, et là je dis un précédent peut-être parce que je n'ai pas la connaissance suffisante pour dire s'il y a déjà eu ça au gouvernement du Québec, mais certainement qu'au Québec, là, d'après les informations que j'ai, nous allons vivre un précédent par lequel le gouvernement, hein, l'État, le législatif, l'exécutif, dans les faits, va intervenir activement dans une cause, donc dans le juridique, qui est devant la cour. Au moment où on se parle, il y a des causes qui sont devant la cour, ce ne sont pas des requêtes d'instance, ce sont des procès en cour, et nous faisons aujourd'hui un précédent, qui est une loi qui va terminer, arrêter, avant sa conclusion, un procès. Ça, c'est fort, ce n'est pas banal.

Je comprends qu'on parle d'expropriations, qu'on parle de bâtiments, qu'on parle d'individus qui vont se faire exproprier. Probablement que ça ne va pas émouvoir grand monde, mais, sur le principe, parce que l'État, c'est aussi une question de principe, on fait un précédent. Nous allons, comme État, arrêter des procédures qui sont devant le juge. À ma connaissance, ça ne s'est jamais vu, sauf peut-être une cause ailleurs au Canada. Ce qui nous amène, M. le Président, à une conséquence : une des parties, la partie poursuivante, expropriée, va probablement, c'est ce à quoi je m'attends, puis je vais vous avouer que je l'espère, parce que ça va faire un beau débat juridique et... une partie, l'exproprié — j'ai-tu dit l'expropriante? — l'exproprié va probablement aller devant la cour plaider l'inconstitutionnalité de la mesure. On fait un précédent. Et ce n'est pas vrai que, l'État, ses décisions ne peuvent pas être entendues, sanctionnées ou cautionnées par une cour. Mais là ce qui est amusant là-dedans, M. le Président, c'est que, si les expropriés prennent ce chemin-là et gagnent, et gagnent, bien, ça vient invalider la loi n° 66, et probablement peut-être aussi juste une partie de la loi, mais ça vient l'invalider. Qu'est-ce que ça fait si ça l'invalide? On revient à la case départ en termes de délais. Un projet de loi dont on n'a pas vraiment fait la démonstration que ça va accélérer tous les projets, mais qui va se faire ralentir par la cour pour cause d'inconstitutionnalité, j'ai trouvé ça très amusant. Je l'ai dit à la présidente du Conseil du trésor, en faisant ça, on prend un risque. Tout le monde en est conscient. Mais imaginez l'ironie de l'affaire, imaginez l'ironie de l'affaire quand on résumera un jour dans l'histoire ce qui s'est passé avec le projet de loi n° 61, le 66 et une audition en cour avec une décision qui la rend inconstitutionnelle, il y aura eu un grand émoi de rapidité qui va se ramasser, à la fin, se conclure par une lenteur. C'est quand même assez ironique comme situation.

Alors, je répète quand même que le 61, s'il avait été mieux écrit, il serait actuellement en fonction. Il a été mal écrit. La présidente du Conseil du trésor l'a bien écrit, on est là, mais on peut aller à la cour. Écoutez, ça fait des partys de Noël, ça, des histoires comme ça, là. Aïe! savais-tu que... Alors, ça, ça risque d'arriver. Alors, sur le plan légal, il y a là un danger. Alors, on verra bien ce qui va arriver.

• (17 h 20) •

Alors, ça m'amène, M. le Président, parce que je ne veux pas m'étendre outre mesure, là, parce que je comprends que nous aurons un ajournement pour des raisons techniques dans quelques minutes, ça m'amène à parler des 180 projets, l'annexe I. M. le Président, là, l'annexe I, je l'ai déjà dit, je vais le répéter, c'est électoraliste, c'est électoraliste avec des omissions.

J'ai entendu, il y a quelques minutes, M. le Président, notre collègue de Rosemont qui faisait des... qui a pris une position très claire sur le fait du manque de considération auprès des Premières Nations dans le projet de loi n° 66. Elles sont venues nous dire, sans exception, qu'on n'avait pas daigné les consulter, puis elles ont raison. Mais ce qui me semble encore plus, je dirais, décevant, tiens, je vais dire ça comme ça pour ne pas utiliser d'autres mots, on fait un projet, là, d'accélération de projets d'infrastructures supposément pour le bénéfice de la population, mais ça a bien l'air que la population autochtone n'en bénéficiera pas parce qu'il n'y a pas un seul projet qui traite d'un bénéfice pour les autochtones, pas un. Pas un.

Qu'on ne vienne pas me dire que le pont Mercier, là, c'est un projet qui va aider la communauté de Kahnawake, là. Je veux dire, quand on a encore aujourd'hui des autochtones qui vivent sans électricité et sans eau courante, mettons qu'on aurait pu arriver avec une espèce de projet-phare, symbolique, là, n'importe quoi. N'importe quoi, là, qui aurait amélioré la vie de quelques autochtones dans leurs réserves. Bien, ça aurait été, évidemment, tout un message. Ça aurait été bienvenu de la part du gouvernement, de la part... Il n'y en a pas. Il n'y en a pas eu un. Un, juste un. Je vois ici la présidente du... qui m'envoie un message, je ne l'ai pas entendu, mais il n'y en a pas eu un, M. le Président. Ça aurait été bon qu'il y en ait un. Et c'est-u parce qu'on avait un problème de réflexion pour trouver un projet? Je pense qu'on avait l'embarras du choix. Alors, si on avait voulu vraiment faire quelque chose qui est totalement dans l'esprit d'aider, aller vers le bien-être de la population québécoise, qui comprend les Premières Nations, on en aurait réservé au moins un pour eux autres, et il y en a exactement zéro. Alors, moi, je trouve que c'est dommage. On a raté une occasion là.

Maintenant, il y a d'autres projets qui, pour moi, sont problématiques ou sont amusants à prendre en considération. J'écoutais il y a quelques instants ma collègue de Vaudreuil qui parlait de l'hôpital de Vaudreuil. Écoutez, il est impossible, c'est juste impossible de l'accélérer. Ça ne se construit pas de même, un hôpital, là, quand bien même on arrive puis on dit : Bien, voici, on va l'accélérer, on le met dans la liste. Bien non. Un hôpital, M. le Président, là, ça prend deux ans de préparations, ça prend quatre ans de construction. Trouvez-moi-z-en un qui passe en bas de ça, puis on va aller prendre un verre ensemble, avec plaisir, puis je vais vous le payer. Il n'y en a pas. C'est juste... C'est de même. Alors, on n'accélérera pas ce projet-là.

Mais le projet qui me déçoit le plus, M. le Président... Et là je vais faire un tout petit gentil reproche à la présidente du Conseil du trésor parce que c'est le moment où je l'ai sentie un peu mal à l'aise, quand j'ai abordé, évidemment, le projet de la 117. Et ce projet-là, M. le Président, là, je peux vous dire que c'est une déception.

Ce matin, dans La Presse, il y avait une lettre d'opinion qui a été adressée, qui a été publiée, et on titrait : L'erreur à ne pas commettre. Alors, vous allez me permettre de prendre quelques instants sur la 117.

La 117, on le sait, c'est documenté, il n'y a même pas de question, c'est une zone qui est accidentogène dans un segment donné, là, celui entre Labelle et Rivière-Rouge, parce que tous ces noms-là ont changé. Avant, on était plutôt biblique, là, on était dans L'Annonciation, et ainsi de suite, là, bon. Alors, vous savez, la 117, là, c'est une route que tout le monde connaît, qui traverse le Canada. Et, cette route-là, peu de gens l'ont connue en gravelle jusqu'à Val‑d'Or, puis beaucoup de gens l'ont connue assez étroite jusqu'à Val-d'Or, puis après ça elle a été élargie, et ainsi de suite. Et le dernier segment qu'il y a eu à être amélioré, bien, c'est celui dont on parle dans le projet de loi. La 117 a été grandement améliorée au fil du temps. Et la population, pendant des années... Puis là on ne fera pas le débat de qui aurait dû faire quoi, et ainsi de suite, on est là, là. On est aujourd'hui le 10 décembre 2020. On est bien le 10, hein? Alors, on est là, aujourd'hui, puis on a prendre une décision sur ce que l'on fait avec la 117.

Et là, là, c'est là... Et moi, je pense sérieusement, M. le Président, que, dans bien des dossiers la politique nuit au dossier. Et là, dans ce dossier-là, la politique nuit au dossier. Moi, j'ai voulu poser des questions sur la 117 et je n'ai pas pu poser des questions aux fonctionnaires, et ça me déçoit beaucoup. Et là j'ai senti que, là, il y avait, disons, une certaine nervosité quand j'abordais le sujet. Ce qui m'indique qu'il y a là des enjeux purement politiques.

La 117, M. le Président, là, ce n'est pas compliqué. Entre Labelle et Rivière-Rouge, dans l'histoire récente, là, dans les dernières années, il y a eu deux travaux majeurs de construction, deux travaux majeurs de construction qui ont été la voie de contournement à Labelle et la voie de contournement à Rivière-Rouge. Et il y a eu des débats locaux qui sont très clairs. Et les débats locaux étaient : on veut élargir la 117 parce qu'il y a trop d'accidents, parce que camions, parce que collisions frontales, parce que, parce que, parce que... et c'est tout à fait vrai.

La solution à ça, là, bien, ça a été débattu localement dans les dernières années, et, à deux reprises, deux gouvernements ont conclu que la meilleure solution, et j'y reviendrai dans un instant, était simplement de contourner cette zone-là, faire en sorte que la voie de contournement de Labelle soit continuée pour aller rejoindre la voie de contournement de Rivière-Rouge, O.K., et non pas, non pas d'élargir la 117 sur sa situation... son emprise actuelle. Et, quand les deux gouvernements ont regardé ça, M. le Président, là, ils ont conclu à un certain nombre de choses ou, plutôt, constaté un certain nombre de choses. Faire la voie de contournement, tel que je l'appelle, dans le nouveau trajet, il y avait 1,5 kilomètre de moins à construire, une économie là. Il y avait l'avantage de ne pas exproprier ou d'exproprier à peu près personne. Il y avait l'avantage de construire en terrain libre, donc de ne pas perturber la circulation pendant des mois ou des années dans l'emprise actuelle de la 117. Et le coût était essentiellement le même.

Bon, qu'est-ce qu'on a fait, actuellement? Et c'est là que la politique nuit, ça nuit à l'intérêt de la population. La population le veut, a tellement peur de ne pas l'avoir qu'elle accepte, sans aucun doute par des pressions qui viennent d'ailleurs... Oui, oui, on le prend, on le prend, on le prend! Cette semaine, j'ai rencontré le ministre des Transports dans le couloir, ici, au parlement, puis je lui ai dit la chose suivante, que j'ai dite à la présidente du Conseil du trésor : Est-ce qu'il y a quelqu'un qui est allé voir les gens localement, là, pour leur dire : On a une loi, là, qui est une loi spéciale, la loi n° 66, c'est une loi spéciale qui nous permet de faire essentiellement ce que l'on veut, et, si on vous dit, là, qu'avec ça on va faire dans le même temps, dans le même coût le trajet que vous aviez tous accepté il y a quelques années, versus élargir la 117, vous prenez quoi? Mais cette question-là, elle ne sera pas posée. Et le ministre m'a dit : Non, c'est déjà accepté, tout le monde est content. On l'a présenté, on a l'unanimité. Je n'arrête pas de recevoir des appels des gens localement pour me dire : Bien oui, mais c'est parce qu'on a peur de ne pas l'avoir si on fait cette démarche-là. Alors, aujourd'hui, là, au moment où on se parle, on va adopter un projet de loi pour des raisons politiques : les maires veulent l'avoir parce que l'année prochaine, ils sont en élections; le gouvernement veut l'avoir parce que dans deux ans, ils sont en élections, alors que dans la même période, là, on pourrait construire la voie telle que je vous décris.

Alors, je vais vous la décrire, M. le Président. Si vous connaissez le Québec comme moi, je le connais, puis je pense que c'est le cas, bien, vous allez le comprendre. Bien, la ministre, je lui ai dit, hein? Bon, elle est plus jeune que moi, là, mais elle est suffisamment... elle est suffisamment, comment dirais-je, expérimentée pour savoir qu'il fut un temps où, pour aller à La Tuque à partir de la Rive-Sud, il fallait rentrer dans Trois-Rivières, passer par Saint‑Louis‑de‑France, rentrer dans les terres, aboutir aux Grandes Piles. Une voie de contournement aujourd'hui, là, c'est l'autoroute qui sort du pont Laviolette puis qui nous emmène directement aux Grandes-Piles, hein, on ne passe même plus par le pont de Grand-Mère et ainsi de suite. C'est ça. Vous connaissez ça, ce coin-là, peut-être. Vous êtes déjà allé à Sherbrooke, M. le Président. La 55, Lennoxville. Avant, là, il fallait rentrer, là, faire la rue King au complet, se rendre jusqu'à la rue Wellington puis aller jusqu'à Lennoxville. Aujourd'hui, on sort de la 55, puis on passe à côté de l'université, puis c'est une autoroute jusqu'à Lennoxville. On s'en va à East Angus? On prend la sortie d'après, on passe à côté du CHUS puis on s'en va à East Angus, voie de contournement. C'est exactement le même scénario qu'on propose sur la 117.

Voulez-vous d'autres exemples, M. le Président? Vous, vous êtes de la Beauce. La 73, on ne l'a pas fait passer dans le village, hein, on ne l'a pas fait passer dedans, on est passé à côté des autres voies, des autres villes et villages, c'est ça qu'on a fait, et il y a ça partout.

Ce qu'on propose, actuellement, pour la 117, M. le Président, puis c'est ridicule, c'est comme si on faisait un élargissement à quatre voies avec terre-plein entre Alma puis Roberval. Ce serait beau, hein, entre Alma puis Roberval? Ce serait fantastique, quatre voies, hein? On se rappelle que, sur la route entre Alma puis Roberval... Je regarde le député, justement, du coin, là-bas, hein...

• (17 h 30) •

Une voix : ...

M. Barrette : Oui, oui, le député de Lac-Saint-Jean. Ça fait que, là, on imagine bien les voies dans le lac. Puis comme, entre la route et le lac, il y a un paquet de chalets, on se demande bien lequel va rester debout après les expropriations. Bien non, on ne ferait pas ça, mais on va faire ça, M. le Président, sur la 117. Aïe! Plus... C'est ridicule. Je le sais, que ce n'est pas parlementaire, là, mais je vais l'utiliser aujourd'hui. Je fais ma dernière plaidoirie sur ce dossier-là pour le bon sens, juste le bon sens. Et actuellement, bien, on choisit, pour des raisons purement politiques... Il faut qu'on se fasse plaisir, d'un étage politique à l'autre, pour des raisons, à mon avis, qui sont électorales. Alors, honnêtement, là, il y a bien des choses que j'aurai trouvées désagréables, que j'aurai trouvées désagréables dans les projets en question, et ce genre de chose là... mais je trouve très malheureux qu'à la fin, à la fin, on ne prenne pas la bonne décision pour ces raisons-là.

Bon, je vais terminer sur deux commentaires, M. le Président, qui sont importants pour ma formation politique et pour moi personnellement, O.K.? Il a été dit, il y a quelques minutes, par le député de Matane, qui, à la fin, a quand même proposé une alliance Matane—Jacques-Cartier qui était très bonne... Je ne sais pas si elle est officielle, là, mais elle était très bonne. Puis je pense qu'elle est officieuse, je vois du député de Jonquière qu'elle est officieuse. Dawson, McGill, M. le Président, là, je vais le répéter, dans le projet actuel, il n'y a pas de projet qui va augmenter la capacité d'étudiants de 850 places, ça n'existe pas. Je rappelle à tout le monde que c'est un permis. Tant que le gouvernement ne donnera pas le permis d'avoir un étudiant de plus, à Dawson comme ailleurs, il va y en avoir zéro de plus. Dawson, c'est un vieux bâtiment. Ceux qui ont connu la création de Dawson, j'en suis, savent d'où on vient, là. On vient, là, d'un autre, autre siècle, là. On n'est pas dans un bâtiment qui a 20 ans d'âge, là. Alors, juste sur la notion de la vétusté, il y a une justification. Et, non, au moment où on se parle, dans ce qui est dans le projet, dans les 180 projets, il n'y a pas 850 places de plus. Les places viendraient si le gouvernement choisissait de les octroyer. Je doute que le gouvernement en place le fasse, mais, qu'est-ce que vous voulez, on en a vu beaucoup à date, là, on peut en voir d'autres, c'est toujours possible.

Pour ce qui est de McGill, écoutez, qu'on soit pour ou contre McGill, là, peu importe nos opinions politiques, là, si vous pensez qu'à McGill il y a là un Klondike académique, la révolution universitaire, non. Ce sont de vieux bâtiments dans une université qui, comme bien d'autres, n'a plus de place, et qui va recycler une partie de ses vieux bâtiments, et qui va les recycler, à mon sens, d'une façon adéquate.

Alors, que de dire que Dawson et McGill, dans les 180 projets, sont des outils d'anglicisation, honnêtement, là, M. le Président, là, je comprends qu'on fait de la politique, là, mais celle-là, elle est un petit peu, pas mal étirée. Je le dis parce qu'il faut bien que quelqu'un le dise publiquement, même s'il y a beaucoup de foules qui nous écoutent actuellement, peut-être qu'un journaliste va me rapporter demain, on ne sait jamais, mais l'argumentaire sur McGill, il n'existe pas. Il existerait s'il y avait octroi de places, mais ce n'est pas le cas. Et j'en parle, M. le Président, parce que, pour ce qui est du projet de McGill, j'y ai participé moi-même, alors je sais exactement ce qu'il va y avoir là. Et, sur la question des logements sociaux, c'est une solution qui passe par d'autres choix.

Alors, dans les 180 projets, je termine là-dessus, M. le Président, il y avait d'autres choix qui auraient pu être faits. Je me suis battu pour que ça ne change pas parce que j'ai choisi, on a choisi, nous, de ne pas faire de marchandage de projets. C'est ce qu'on a choisi et c'est ce qu'on a fait. Maintenant, là, on est là avec les hauts et les bas de l'affaire, et je vais donc terminer là-dessus à ce moment précis.

Alors, permettez-moi, M. le Président, en terminant, de féliciter et de remercier tout le monde. Ça a été un bon projet de loi, je pense. Et permettez-moi de terminer en réitérant pour une dernière fois que nous votons contre, pour les intérêts du Québec, tout en sachant qu'on fait une entorse à nos règles, qu'on souhaite ne pas faire deux fois. Maintenant, je vais quand même réitérer le fait que je suis sûr que c'est un laboratoire. Je suis sûr qu'un autre gouvernement va arriver puis va dire : Ça a marché, cette affaire-là, on va le refaire, mais seul le temps va dire si j'avais raison ou non. Mais, pour le moment, on est là, et, voilà, on va donc voter pour, M. le Président.

Et, comme il est possible pour moi aussi que ce soit ma dernière intervention avant le temps des fêtes, je vais vous souhaiter à tous et à toutes un bon temps des fêtes, même si on va le faire dans l'intimité, relative, mais dans l'intimité pareil. Retenons tous et toutes que c'est ce qui nous permettra, si on le fait, de revenir correctement au mois de janvier. Voilà. Merci.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député de La Pinière. Je cède maintenant la parole à M. le député de Jonquière.

M. Sylvain Gaudreault

M. Gaudreault : Oui. Alors, merci, M. le Président. Je remarque que le député de La Pinière a pris des bons trucs de parlementaires qui, avec le temps, vous savez, avec l'expérience... Puis là, je regarde ici, à part vous, M. le Président, c'est moi, le doyen, je pense, dans cette Assemblée, aujourd'hui en tout cas. Je constate que les parlementaires disent : Ah! je vais faire un petit discours, puis là, à un moment donné, en terminant, là, on prolonge de quelques minutes : Puis je voudrais terminer en disant que... mais je n'oublie pas qu'en conclusion... blablabla. Alors, c'est... Mais ce n'est pas un reproche, je le dis de façon tout à fait amicale, mais c'est parce que, depuis tout à l'heure, je suis sur le bout de ma chaise pour me relever, puis le député La Pinière est toujours dans une fin qui ne finit pas. Et je trouve que c'est... C'est tout à fait correct, c'est tout à fait correct. Il en perd son masque, M. le Président. Alors...

Une voix : ...

M. Gaudreault : C'est ça, oui, c'est ca, une vis sans fin. C'est bretelles et ceintures, pour reprendre l'expression consacrée de cette...

Une voix : ...

M. Gaudreault : ...et guêtres. Et c'est une expression consacrée dans nos travaux. Mais tout ça pour vous dire, M. le Présiden... Puis je fais un clin d'oeil amical à la ministre, qui faisait référence à l'ambiance des travaux du projet de loi n° 66, puis je pense que cette camaraderie que nous affichons démontre bien... est un bon symbole de ce travail. Puis je profite du fait que la ministre, présidente du Conseil du trésor est ici pour répéter ce que j'ai eu l'occasion de dire plus tôt, qu'effectivement on a eu une commission parlementaire fructueuse. Puis je me sens un peu en porte‑à‑faux, de dire ça, parce qu'au final je vote contre, mais je suis obligé de constater qu'on a travaillé correctement, on a travaillé avec ouverture. Puis il y a d'autres parlementaires qui faisaient la remarque à l'effet que ce n'est pas parce qu'on est contre ou qu'on a des visions opposées qu'on n'est pas capables au moins d'étirer l'élastique chacun de notre bord, à un moment donné le lâcher, ça donne un résultat, puis au final, bien, après ça, il y a des décisions qui se prennent dans chaque groupe parlementaire.

Puis c'est ce qui est arrivé dans ce projet de loi là, de façon tout à fait correcte et respectueuse, et je l'apprécie, notamment sur la question de l'environnement, où j'ai eu l'occasion de faire des représentations après avoir écouté quand même les représentants qui sont venus nous rencontrer, que ce soit du Centre québécois du droit de l'environnement, qui sont vraiment des experts en la matière, qui ont toujours un avis éclairé sur la question de l'environnement. Je pense à la Fondation David-Suzuki, à Vivre en ville. Je pense, en matière d'aménagement du territoire, à l'Ordre des urbanistes, qui est venu nous rencontrer également et qui nous a mis en garde sur plusieurs mesures du projet de loi n° 66, que nous avons essayé de changer, que nous avons discutées de long en large, où, par exemple, la ministre disait : Bien oui, il faut qu'on passe telle étape, et nous, on disait : Non, mais, si les délais sont dans la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, c'est qu'ils existent pour quelque chose, ces délais-là, c'est pour permettre aux villes de bien prendre connaissance des projets gouvernementaux des ministères et organismes qui vont venir avoir un impact sur les schémas d'aménagement, par exemple. Là, la réponse, continuellement, était de dire : Oui, mais les schémas sont toujours changés. Bon, bien, pourquoi d'abord on a cette Loi sur l'aménagement et l'urbanisme? Donc, il faut absolument procéder aussi à un changement de cette loi-là.

• (17 h 40) •

Alors, le projet de loi n° 66 et les travaux autour du projet de loi n° 66 ont été révélateurs, dans le fond, de plusieurs éléments. C'est peut-être, finalement, un avantage collatéral d'avoir travaillé sur ce projet de loi. Ça a au moins mis la lumière ici et là sur un certain nombre d'éléments, dans notre administration publique, qui mériteraient d'être changés, qui mériteraient d'être bonifiés sans avoir la nécessité de faire une totale, comme le fait le projet de loi n° 66... Parce que, on ne se le cachera pas, même si on ne l'appelle pas «loi spéciale», il reste que c'est une loi spéciale, avec un petit s, qui est adaptée à une circonstance spéciale qui est la crise qui découle de la COVID, M. le Président.

Alors, on a essayé, autant que possible, de l'améliorer. On a réussi sur la question de la traçabilité, sur la question de la décontamination. Je le répète parce que je veux vraiment être sûr que ce soit bien retenu, puis la ministre a eu l'occasion de le confirmer quand on a fait adopter les amendements que j'ai proposés, pour moi, l'idée, c'est une hiérarchie sur la question de la décontamination des sols. Quand on a des sols contaminés, la règle doit être de les traiter, de les décontaminer, de les valoriser. Et, quand on ne peut pas le faire, en bout de course, en bout de chemin, bien, parfois, la seule solution, c'est l'enfouissement, un peu comme, par exemple, avec les déchets nucléaires qu'on enfouit. Alors, on aime mieux ne pas en avoir, on aime mieux en avoir le moins possible. Ça veut dire que la règle, il faut que ce soit la décontamination, et on l'a plaidé à plusieurs reprises à l'intérieur du projet de loi n° 66. On a d'abord adopté un article 36.1 pour l'adapter spécifiquement, cette idée de la décontamination, pour les 181 projets de l'annexe I, puis après ça on l'a étendue, avec le 74.1, pour l'ensemble des projets d'infrastructure, quels qu'ils soient au Québec. À partir du moment où on a de l'excavation de sol, il faut arriver à cette décontamination d'abord et avant tout.

L'autre élément sur lequel je voulais insister, c'est sur la question du BAPE, le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement. J'ai eu l'occasion de le mentionner lors de la prise en considération du rapport de la commission sur le projet de loi n° 66, mais je veux quand même le répéter, on aurait aimé, idéalement, entendre le BAPE en commission parlementaire. On ne l'a pas entendu. On a convenu de recevoir des réponses à des questions qu'on pouvait poser comme parlementaires au Bureau d'audiences publiques sur l'environnement, ce que nous avons fait de notre côté, et ça nous a été remis. Et, dans le fond, ce qu'on doit retenir du document qui nous a été transmis par le BAPE et signé par le président, Philippe Bourke, c'est qu'à plein d'égards, concernant les audiences publiques puis la procédure d'évaluation des impacts environnementaux qui découlent du BAPE, au mieux, ça nous dit, bien, on n'avait pas vraiment besoin du projet de loi n° 66 ou, au pire, ça vient affecter les audiences publiques et ça vient affecter l'analyse des impacts environnementaux.

Et en plus on constate que, dans une lettre du 16 octobre 2020 que le BAPE a adressée à Marc Croteau, le sous-ministre de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, bien, c'est que le BAPE avait fait des suggestions pour être capable de réduire les délais d'une dizaine de jours, tout en gardant un principe fondateur du BAPE, qui est même dans son nom, le A et le P, qui est l'audience publique. Et la ministre, par le projet de loi n° 66, a plutôt choisi la médiation et les consultations ciblées, alors que les audiences publiques demeurent possibles, mais sont une exception selon la bonne volonté du ministre. Et la proposition du BAPE qui a été faite le 16 octobre 2020 permettait, en bout de ligne, de sauver 20 jours par rapport au choix qui a été fait par la ministre d'avoir des consultations ciblées. Donc, tout en maintenant les audiences publiques, qui est le principe fondateur du BAPE, on arrivait à un décompte final à 155 jours de délai, alors que la consultation publique... ciblée, pardon, arrive à 175 jours. Donc, vous comprenez, M. le Président, que c'est étonnant de voir ça que, dans un projet de loi dont la volonté, le prétexte est de raccourcir les délais, bien, on ait une proposition qui a été faite par le BAPE... c'est quand même une institution qui connaît ça, c'est le coeur même de leur mission, bien, ils ont proposé de réduire les délais davantage, tout en respectant le principe... bon, on comprime les délais, mais quand même on respecte les principes de l'audience publique, ça n'a pas été retenu par le gouvernement.

Alors, malheureusement, nous, on l'a obtenue un peu trop tard, cette lettre-là, et on n'a pas pu le faire valoir correctement, comme on aurait voulu le faire à l'origine, lors de l'étude des articles qui concernaient les audiences publiques puis l'évaluation environnementale. Alors, ça, c'est dommage. Pour votre information, M. le Président, cette lettre du BAPE, signée par le président le 16 octobre 2020, et, en plus, les réponses qu'ils nous ont données à la suite de nos questions qu'on a déposées, elles sont déposées dans le Greffier, sur le Greffier, sur le site de la commission parlementaire.

Donc, en gros, c'est ce que je voulais dire pour l'adoption finale, M. le Président. Encore une fois, je veux saluer les... quand même, les travaux, je veux saluer les collègues avec qui on a travaillé. Je sais qu'il y a une équipe de légistes, de fonctionnaires absolument extraordinaires qui ont accompagné la ministre, toutes les équipes qui nous accompagnent également. C'est un travail très important qui a été fait.

Et je voudrais... Moi, ce n'est peut-être pas ma dernière intervention, parce que tout à l'heure on doit intervenir sur le rapport sur la commission spéciale sur le TDAH, mais, en tout cas, je veux quand même... parce que je ne sais pas quels collègues seront là, quand je reviendrai tout à l'heure, mais, à ceux et celles qui sont présents, bien, bonne et heureuse période des fêtes. On se souhaitera bonne année quand on se reverra en 2021. Mais je pense que ça a été une année éprouvante, et nous avons tous besoin... Même si ce sera de façon, comment je pourrais dire... dans des bulles très intimes, bien, je pense qu'on a tous et toutes besoin de se reposer et d'en profiter.

Alors, merci beaucoup, M. le Président. Puis évidemment je termine en disant : On va voter contre.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci. Oui, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Schneeberger : Oui. Alors, M. le Président, alors, pour accommoder le député des Îles-de-la-Madeleine pour présenter son projet de loi privé, je vais faire motion pour ajourner le débat sur le projet de loi n° 66, selon l'article 100 de notre règlement, et puis je vous demanderais par la suite d'appeler l'article 68 du feuilleton.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint du gouvernement, avant de vous céder la parole, je vous rappelle que l'auteur de la motion et un représentant de chaque groupe parlementaire ont chacun un temps de parole de 10 minutes et que l'auteur de la motion a un droit de réplique de cinq minutes. Y a-t-il des interventions sur cette motion d'ajournement?

Puisqu'il n'y en a pas, en application de l'ordre spécial, j'inviterais maintenant les leaders parlementaires à voter.

Mais je perçois qu'il manque un groupe parlementaire, donc je vais suspendre les travaux, pour un maximum de temps de 10 minutes.

(Suspension de la séance à 17 h 49)

(Reprise à 17 h 53)

Le Vice-Président (M. Picard) : En application de l'ordre spécial, j'inviterais maintenant les leaders parlementaires à m'indiquer le vote de leurs groupes sur la motion d'ajournement du débat. M. le leader adjoint du gouvernement?

M. Schneeberger : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : Mme la députée de Vaudreuil?

Mme Nichols : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le député des Îles-de-la-Madeleine?

M. Arseneau : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : La motion est adoptée.

Projet de loi n° 218

Adoption du principe

Et, tel que demandé, à l'article 68 du feuilleton M. le député des Îles-de-la-Madeleine propose l'adoption du principe du projet de loi n° 218 concernant la municipalité des Îles-de-la-Madeleine.

Y a-t-il consentement pour déroger à l'article 268 du règlement prévoyant que l'adoption du rapport et l'adoption du principe d'un projet de loi d'intérêt privé doivent avoir lieu lors de deux séances distinctes? Consentement?

Des voix : Consentement.

Le Vice-Président (M. Picard) : Consentement. Y a-t-il des interventions?

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Picard) : Puisqu'il n'y a pas d'intervention, en application de l'ordre spécial, j'inviterais maintenant les leaders parlementaires à m'indiquer le vote de leurs groupes sur l'adoption du principe du projet de loi n° 218, Loi concernant la Municipalité des Îles-de-la-Madeleine. M. le leader adjoint du gouvernement?

M. Schneeberger : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : Mme la députée de Vaudreuil?

Mme Nichols : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le député des Îles-de-la-Madeleine?

M. Arseneau : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint du gouvernement, avez-vous des indications concernant le vote de M. le député de Chomedey?

M. Schneeberger : Je n'ai aucune indication pour les indépendants.

Le Vice-Président (M. Picard) : Mme la députée de Marie-Victorin non plus?

M. Schneeberger : Non.

Le Vice-Président (M. Picard) : Je vous remercie. En conséquence, le principe du projet de loi n° 218, Loi concernant la Municipalité des Îles-de-la-Madeleine, est adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Schneeberger : Oui. Alors, pour la suite, pour l'adoption finale, je vous demanderais de rappeler l'article 68 du feuilleton.

Adoption

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le député des Îles-de-la-Madeleine propose l'adoption du projet de loi n° 218 concernant la municipalité des Îles-de-la-Madeleine. Y a-t-il des interventions? M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Joël Arseneau

M. Arseneau : Merci, M. le Président. J'aimerais savoir si on a le consentement pour déborder au-delà de 18 heures, si c'est nécessaire, de quelques minutes seulement.

Le Vice-Président (M. Picard) : Oui, il y a consentement. Vous pouvez y aller, M. le député.

M. Arseneau : D'accord. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, on est rendus à l'étape finale pour l'adoption du projet de loi n° 218 concernant la municipalité des Îles-de-la-Madeleine. Je voudrais remercier, d'ailleurs, les différents groupes parlementaires d'avoir permis cette gymnastique qui nous permettra d'adopter le projet de loi dans les prochaines minutes.

Alors, je vais prendre les quelques minutes que j'ai à ma disposition pour expliquer brièvement le contexte et, essentiellement, l'objectif du projet de loi. Il est très, très simple, en fait, il porte sur les districts électoraux de la municipalité des Îles qui, selon la loi sur les élections et les référendums municipaux, doivent être révisés en fonction de la prochaine élection municipale, qui, comme vous le savez, se tiendra en 2021.

Alors, avant de modifier les districts électoraux, il fallait procéder à une consultation. Un rapport avait été déposé sur différents scénarios possibles. Et la COVID, au mois de mars, a interrompu le processus de consultation citoyenne publique, ce qui a interrompu aussi le processus qui devait se compléter pour le mois de juin dernier. Alors, ne pouvant pas répondre aux obligations de la loi, la municipalité des Îles-de-la-Madeleine aurait été, sans le projet de loi qu'on a devant les yeux, contrainte d'accepter une révision dictée par le Directeur général des élections, ce qui aurait pu donner un résultat, disons, qui ne colle pas parfaitement à la réalité et à la volonté des citoyens des Îles‑de‑la‑Madeleine.

Alors, pourquoi la réalité des Îles-de-la-Madeleine doit-elle être prise en compte? Je vous explique brièvement l'historique. Ce qu'on est en train de faire, dans l'archipel des Îles-de-la-Madeleine, c'est compléter, essentiellement, le projet de fusions municipales qui a démarré en 2001. À ce moment-là, il y avait essentiellement sept municipalités différentes, distinctes, avec son propre conseil municipal, et, par décret, le gouvernement a accepté de fusionner les différentes municipalités, mais ça ne faisait pas consensus. En fait, c'est à la demande de cinq des maires, cinq des municipalités sur sept que le gouvernement a accepté la fusion. S'en est suivi un processus de défusion entamé et rendu au bout de l'exercice pour une communauté anglophone qui s'appelle Grosse-Île, donc qui a été reconstituée, mais qui a été interrompu dans le cas d'une deuxième municipalité, la municipalité de Cap-aux-Meules, qui est la municipalité centrale où les services commerciaux, institutionnels sont rassemblés, Cap-aux-Meules, qui était à l'époque la municipalité la plus à l'aise financièrement. Et donc on ne pouvait pas imaginer que l'ensemble des municipalités se fusionnent sans avoir, essentiellement, les deux municipalités les plus riches qui soient à bord, là, de ce nouveau navire qu'on voulait confectionner pour continuer à naviguer ensemble comme Madelinots vers un avenir plus prospère, et ça posait donc un problème suite à la défusion de Grosse-Île, mais le retour de Cap-aux-Meules dans le giron des Îles-de-la-Madeleine a permis de stabiliser les choses.

Au moment de la fusion, on avait adopté une configuration du conseil municipal pour représenter les anciennes localités ou les anciennes municipalités. Évidemment, il y avait des plus petites municipalités, des plus grandes municipalités, une population de 3 000 habitants, par exemple, du côté de L'Étang-du-Nord, alors que du côté de Grande-Entrée, on comptait 500 ou 600 habitants, donc, évidemment, la loi ne permet pas de tels écarts. Mais, pour les trois premières élections, on avait inscrit dans le décret que, pour conserver un certain sentiment d'appartenance, aussi un intérêt pour la politique et développer une confiance envers le nouveau système politique municipal, on allait tolérer un écart à la loi pendant les trois premières élections.

• (18 heures) •

Mais là le processus de la défusion a quand même ébranlé certains citoyens, également le conseil municipal, et j'en faisais partie, soit dit en passant, de 2005 à 2013. C'est la raison pour laquelle le conseil municipal, sachant que toutes les plaies n'avaient pas été correctement cicatrisées puis qu'il y avait bien d'autres défis que de revoir les contours des districts municipaux, sachant que ça allait justement provoquer, certainement, certaines velléités, là, de revenir sur ce projet-là dans certaines communautés qui ne se sentaient peut-être pas pleinement reconnues et adéquatement représentées au sein du nouveau conseil municipal, on a demandé et obtenu à deux reprises une dérogation à la loi, donc pour l'élection de 2013 et pour l'élection de 2017. À ce moment-là, il était clair qu'il fallait agir. Le temps avait fait son oeuvre, une certaine réconciliation avait eu lieu, et une vision d'avenir plus régionale était en développement.

C'est la raison pour laquelle on a confié à la municipalité des Îles un mandat, finalement, à deux personnes qui connaissent très bien le milieu madelinot, et le milieu municipal, et le milieu politique. Il s'agissait de M. Jeannot Gagnon, qui était un fonctionnaire de carrière à la municipalité, et l'ancien parlementaire que vous connaissez, Maxime Arseneau, qui a été ministre également, député des Îles-de-la-Madeleine. Ils ont eu ce mandat d'essayer de trouver la quadrature du cercle pour que tous les Madelinots, peu importe d'où ils viennent, se sentent adéquatement représentés au sein d'un conseil municipal, avec des districts revus et corrigés. Ils ont déposé un projet en janvier dernier, projet qui devait être soumis à la consultation. J'en parlais tout à l'heure. Les quatre options devaient être débattues. Malheureusement, cette étape-là n'a pas pu être franchie. Alors, évidemment, ce que l'on souhaite, c'est obtenir un report de la révision des districts de façon à ce que ce processus-là puisse se compléter adéquatement pour que véritablement on puisse avoir une nouvelle façon de voir les choses de façon plus régionale, où chacun se sente adéquatement représenté, d'où qu'il vienne aux Îles‑de‑la‑Madeleine.

Et, pour ceux qui connaissent moins bien le territoire des Îles-de-la-Madeleine, je voudrais quand même vous dire qu'il y a une population francophone, une population anglophone, et qui est disséminée sur sept îles habitées. Alors, pour des raisons historiques, les gens parfois voient les choses différemment. Il y a des cantons, il y a un esprit, une solidarité aussi cantonale, locale qui est très, très forte. Il y a aussi des accents qui peuvent être différents d'une localité à l'autre, mais aussi surtout un profil sociodémographique qui est différent d'un endroit à l'autre, même si on se sent tous Madelinots et Québécois. Quand on arrive au palier municipal, bien, évidemment, il y a des gens qui se souviennent de la belle époque où ils étaient dans leur petite municipalité confortable, et où les choses, semble-t-il, allaient bien ou allaient mieux, ce qui reste à prouver, mais évidemment il y a une certaine nostalgie de cette époque.

Donc, pour bâtir une solidarité insulaire, il a fallu du temps, beaucoup de temps. On arrive au processus final, et il faut qu'il se complète, je dirais, dans la discussion la plus harmonieuse possible dans l'étape, donc, qu'on franchira une fois le projet de loi adopté, bien sûr. La prochaine élection se tiendra selon les paramètres des dernières élections, mais la prochaine fois, 2025, sera la bonne. Et la configuration, donc, des circonscriptions électorales, c'est-à-dire des districts électoraux sera modifiée, parce qu'à l'heure actuelle une population peut... un district peut contenir 55 % plus de gens qu'un autre district. Donc, le poids de chaque électeur n'est pas adéquatement représenté. Puis, encore une fois, là, pour que vous sachiez que c'est un moment difficile, là, je pourrais faire un parallèle avec le fait qu'essentiellement les Îles-de-la-Madeleine, dans la carte électorale québécoise, c'est une exception, comme vous le savez, mais, à l'intérieur des frontières de l'archipel, il y a également des localités qui souhaitent avoir cette exception-là pour continuer d'être représentées et avoir une proximité avec leur élu municipal qui puisse se continuer.

Alors, évidemment, il faudra faire les arbitrages. Et, quand on fait ces arbitrages-là, c'est un peu comme au Québec quand on décide de discuter d'un nouveau mode de scrutin. Alors, on s'y essaie. On a tous la bonne volonté, mais on voudrait tous aussi préserver notre poids politique, on voudrait tous aussi préserver, là, l'attachement et le lien qu'on peut avoir avec notre représentant élu.

Alors, c'est la raison pour laquelle on demande un sursis, encore une fois, et qu'on a bien l'intention... Et la municipalité, hier, pendant les auditions et consultations particulières sur le projet de loi, s'est engagée formellement à poursuivre le processus qu'ils avaient entamé pour que 2025 soit le rendez-vous où une nouvelle configuration de districts électoraux soit adoptée et soit également... fasse consensus aux Îles-de-la-Madeleine. Merci de votre attention et merci de votre appui, que j'anticipe, pour le projet de loi n° 218.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Mme la députée de Vaudreuil.

Mme Marie-Claude Nichols

Mme Nichols : Merci, M. le Président. D'emblée, je remercie les collègues. Je sais qu'on a dépassé 18 heures. Je vais faire ça très rapidement puisque le collègue des Îles-de-la-Madeleine a déjà fait, là, tout l'historique de... évidemment qu'il connaît bien la place. Donc, je n'entreprendrai pas l'historique. Je veux tout simplement rappeler qu'en effet, là, la municipalité des Îles-de-la-Madeleine avait l'obligation, en fonction du décret, de diviser son territoire en huit districts électoraux au lieu des six qui existent présentement, là. C'était prévu qu'il y avait des délais puis c'était prévu comme ça. Il y a quand même eu cinq reports. Donc, il y a eu cinq demandes. Il y en a eu une en 2005, en 2009, en 2013. En 2011, il y a eu des consultations, et, en 2017, bien, là, le DGEQ leur a dit : Là, il faut procéder, tel que prévu, aux subdivisions, sans quoi on va vous l'imposer. Donc, ce pour quoi on se retrouve aujourd'hui, là, devant un projet de loi d'intérêt privé. Puis, bien sûr, vous comprendrez que la pandémie est rentrée en ligne de compte dans tout ça. Donc, je remercie... J'ai parlé, cette semaine, à la commission, mais aussi, avant la commission, au maire, M. Jonathan Lapierre, le maire des Îles-de-la-Madeleine. Merci pour l'historique puis toutes les explications relativement à cette demande-là. Je remercie aussi son greffier, M. Solomon, qui était présent pour répondre à nos questions.

Ceci dit, M. le Président, d'emblée, je suis d'accord avec cette demande-là, là. Je comprends qu'on est dans un contexte tout à fait particulier. Reste que mes questions étaient principalement sur les méthodes ou la voie qu'on utilise pour en arriver là. C'est-à-dire que ça peut arriver, puis c'est prévu dans des lois que, des fois, en fonction de la population ou dans tel ou tel district, vous le savez, ça nous arrive à nous autres aussi, au provincial, qu'il faut procéder à un redécoupage. J'en conviens, là, un redécoupage, là, c'est toujours très, très, très délicat pour les citoyens. Les citoyens n'aiment pas ça, les citoyens ont souvent des sentiments d'appartenance à un comté, à un district. C'est très délicat, ça, là, le redécoupage comme ça, puis c'est pour ça que je comprends que le maire ne veut pas faire ça de façon précipitée puis l'enfoncer dans la gorge de tout le monde, puis dire : Bien là, ça va être comme ça parce qu'on manque de temps, puis ça va être fait de cette façon-là, puis revenez plus tard, puis là ce n'était pas logique. Puis qu'on veut consulter les citoyens, là, moi, je suis 100 % d'accord avec ça.

Là où je cherchais à comprendre pourquoi on en arrivait avec un PLIP, c'est parce que, des fois, ça peut fonctionner juste avec une autorisation de la part de la ministre des Affaires municipales. D'autres fois, ça peut fonctionner avec une autorisation du DGEQ. D'autres fois, ça peut fonctionner avec un décret. Puis, d'autres fois, ça peut fonctionner avec un PLIP. Ou sinon, on peut l'inclure aussi dans un omnibus. Ça fait que, moi, ma question, ce que je cherchais à comprendre, bien, c'est : Pourquoi on le fait cette fois-ci par un PLIP? Pourquoi la ministre ne donne pas son autorisation? Ou pourquoi... Donc, je n'ai pas eu les réponses précisément à ces questions-là.

Ce que je dois en comprendre ou ce que je dois en déduire, en fait, ce qu'on m'a donné comme réponse, c'est que, bien là, on utilise la voie du PLIP parce que, là, on était plus ou moins confortables avec le nombre de reports, donc on voulait faire ça de façon plus officielle dans un projet de loi d'intérêt privé. Donc, c'est la réponse que j'ai, mais il reste que je n'ai quand même pas la réponse ou le processus. Puis moi, j'aime ça comprendre, je suis très cartésienne, j'aime ça comprendre le pourquoi, à quel moment, ça s'applique comment. Donc, évidemment, là, il y aura d'autres questions, et je ferai des démarches de façon individuelle ou personnelle pour en arriver à avoir la réponse.

Bien sûr, on dit : Le maire, là, s'engage, là, pour 2025, mais vous savez comme moi, là, des élections municipales, on sait... c'est difficile de prendre un engagement dans le futur. Personne n'a de boule de cristal, on ne sait pas qu'est-ce qu'il va arriver en 2025. Donc, tout ce que je souhaite, bien, c'est que la population soit consultée, puis que ça fasse le bonheur de la population, puis évidemment qu'on en arrive à une bonne solution pour 2025, mais qu'évidemment que tout rentre dans l'ordre, qu'on respecte les décrets, puis qu'on n'ait pas à traiter un autre projet de loi d'intérêt privé.

Alors, sur ce, bien, je remercie M. le maire Jonathan Lapierre et son greffier. Je remercie le député des Îles‑de‑la-Madeleine aussi pour l'historique. Et je remercie les collègues, vous, M. le Président, et le personnel aussi, qui déborde parce qu'on est en dehors du 18 heures. Donc, merci beaucoup, tout le monde. Et je vais donner mon accord, évidemment.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée.

M. Arseneau : ...pour le droit de réplique, avant de passer à l'adoption du projet de loi, si vous me le permettez.

Le Vice-Président (M. Picard) : Il n'y a pas de droit de réplique pour les projets de loi privés, non, désolé.

Mise aux voix

Puisqu'il n'y a pas d'autre intervention, en application de l'ordre spécial, j'inviterai maintenant les leaders parlementaires à m'indiquer le vote de leurs groupes sur l'adoption du projet de loi n° 218, Loi concernant la Municipalité des Îles-de-la-Madeleine. M. le leader adjoint du gouvernement?

M. Schneeberger : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : Mme la députée de Vaudreuil?

Mme Nichols : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le député des Îles-de-la-Madeleine?

M. Arseneau : Pour.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint du gouvernement, est-ce que vous avez des indications concernant le vote de M. le député de Chomedey?

M. Schneeberger : Non.

Le Vice-Président (M. Picard) : Concernant Mme la députée de Marie-Victorin?

M. Schneeberger : Non plus.

Le Vice-Président (M. Picard) : Je vous remercie. Et, en conséquence, le projet de loi n° 218, Loi concernant la Municipalité des Îles-de-la-Madeleine, est adopté.

Et, compte tenu de l'heure, les travaux sont suspendus jusqu'à 19 h 30.

(Suspension de la séance à 18 h 10)

(Reprise à 19 h 31)

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Bonsoir. Vous pouvez vous asseoir.

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je le sais, que les journées sont longues, mais, tant qu'à procéder, on va procéder dans l'ordre. Donc, je vous demande de garder le silence, s'il vous plaît.

Dépôt de rapports de commissions (suite)

Alors, avant de poursuivre nos travaux, je comprends qu'il y a consentement pour procéder à un dépôt de rapport de la commission. Est-ce qu'il y a bien consentement?

Des voix : Consentement.

Étude détaillée du projet de loi n° 68

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je comprends également qu'il y a consentement pour que je procède à ce dépôt. Je procède donc... je dépose donc le rapport de la Commission des finances publiques qui, les 4, 9 et 10 décembre 2020, a procédé à l'étude détaillée du projet de loi n° 68, loi visant principalement à permettre l'établissement de régimes de retraite à prestations cibles. La commission a adopté le texte du projet de loi avec des amendements.

Par ailleurs, je souligne que les députés qui voudraient transmettre des amendements à ce rapport devront le faire d'ici 22 heures, ce soir, conformément à l'article 252 de notre règlement.

M. le leader adjoint du gouvernement, pour la suite des travaux.

M. Schneeberger : Oui. Alors, Mme la Présidente, pour la suite de nos travaux, je vous demanderais de rappeler l'article 24 pour la finalité du projet de loi n° 66.

Projet de loi n° 66

Reprise du débat sur l'adoption

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, à l'article 24 du feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné plus tôt sur l'adoption du projet de loi n° 66, Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure. Y a-t‑il des interventions sur ce projet de loi? M. le député de Rosemont, je vous cède la parole.

M. Vincent Marissal

M. Marissal : Merci, Mme la Présidente. Je crois bien être, de ce côté-ci, le dernier à discourir sur le projet de loi n° 66, à rediscourir sur le projet de loi n° 66, parce qu'on a... C'est bon, on essaie de me déconcentrer, de l'autre côté, alors que je commence à peine. Ce ne serait pas une bonne idée de me déconcentrer parce que ça va être encore plus long. Alors, on va s'en tenir à ça.

Je dis «rediscourir» parce que j'ai déjà fait l'étape précédente, qui était le... la prise en considération — je vais le dire — cet après-midi, j'ai pas mal tout dit ce que j'avais à dire. Mais il y en a toujours à dire, puis on réfléchit, aussi, d'autant qu'on l'a adopté en accéléré à la fin. Ça fait un bout de temps qu'on travaille dessus, mais on l'a adopté, à la fin, en vertu d'ententes entre nos partis respectifs, ce qui fait qu'on a quand même avalé, je ne dirais pas un éléphant, mais un éléphanteau d'une grosse bouchée en peu de temps. Puis, à la digestion, bien, il y a des choses qui me reviennent en tête et qui ne me rappellent pas seulement mes objections, mais aussi les moments où on a pu s'entendre sur certaines choses.

Alors, je vais essayer de ne pas vous étirer ça indûment. Par contre, je ne vais pas non plus me priver de dire deux, trois trucs. Je vais y aller d'abord en deux pans, le pan positif et le pan un peu moins positif, je n'ose pas dire «négatif», mais un peu moins positif, selon mon point de vue, bien sûr.

Alors, allons-y d'abord avec le pan positif.

Le premier pan positif de 66, c'est d'avoir remplacé 61. Ça, on a commencé comme ça. C'était une très bonne idée de finalement passer le projet de loi n° 66 à la déchiqueteuse et de recycler le papier. C'était une bonne idée parce qu'il y avait là-dedans des trucs qui étaient vraiment, vraiment inacceptables pour nous et, je crois, aussi pour les autres partis de l'opposition. L'actuelle présidente du Conseil du trésor, qui n'était pas à ce poste au moment de 66, avait, elle aussi, et je salue d'ailleurs la sortie à l'époque, eu des réserves assez lourdes sur un article en particulier qui touchait les contrats publics. Considérant le passé récent de l'actuelle présidente du Conseil du trésor, à la tête d'une commission d'enquête qui s'est chargée là-dessus, franchement, on ne s'attendait pas à moins d'elle, mais on était néanmoins heureux d'entendre ses objections ou, en tout cas, ses réserves à certains articles, qui ont sauté dans 66. Alors, premier point positif, 61 est devenu 66.

Deuxième point positif, puisque je parle de la présidente du Conseil du trésor, c'est son attitude. Je l'ai dit tout à l'heure, je le redis, on n'est jamais trop fin dans la vie, là, quoique... Il paraît que, des fois, on est trop fin, là, mais je serai gentil et je serai surtout redevable à la ministre d'avoir travaillé de cette façon-là, d'avoir bien travaillé, d'avoir travaillé rapidement, d'avoir travaillé d'une façon, selon mes collègues plus expérimentés, un peu inorthodoxe, là, dans nos façons de faire, mais ce n'est pas négatif. Ça, ce n'est pas péjoratif, au contraire, on a avancé, puis ça s'est bien fait.

Moi, la présidente du Conseil du trésor, c'est une des ministres que je n'avais pas eu l'occasion encore de pratiquer en commission parlementaire, parce qu'on est 10, ici, là, de mon côté, avec mon parti, ça fait qu'on fait beaucoup de commissions parlementaires. Puis j'en ai fait beaucoup depuis deux ans. Je la connaissais de très loin, à l'époque où, justement, elle était procureure de la commission Charbonneau. Alors, j'avais gardé d'elle, évidemment, une image un peu plus sobre, pour ne pas dire austère, mais ça allait, évidemment, avec la fonction qu'elle occupait à l'époque, non pas que l'actuelle présidente du Conseil du trésor est aujourd'hui plus... oui, elle est définitivement plus drôle, mais non pas qu'elle est loufoque, au contraire. Mais on a travaillé dans le plaisir. Puis, tant qu'à travailler de longues, longues heures et tant qu'à, des fois, débattre puis à ne pas être d'accord, il vaut mieux que ça se fasse dans le plaisir que dans le déplaisir. Puis on a assez de moments ici, en particulier dans cette salle-ci, où ça accroche, des fois, puis il y a des flammèches, quand on est capables de travailler de longues heures à améliorer un projet de loi, bien, tant mieux. Ça a été bien fait. Ça, c'est un point positif.

Point positif, assurément, les amendements qu'on a obtenus — je dis «je», mais, bon, ça a été fait de concert et en collégialité — pour les Premières Nations, notamment le retrait, de la fameuse liste, là, de la réfection du pont Mercier. Et je répète ce que j'ai dit, parce que c'est important, le pont Mercier, de ce que je comprends, ce n'est pas moi qui ai le contrôle là-dessus, là, mais ce que je comprends, c'est que le pont Mercier, il sera rénové, on ne va pas laisser le pont Mercier se détériorer. C'est juste que, dans la liste, la façon dont ça avait été amené, ça déplaisait — le mot est faible — ça déplaisait souverainement au conseil de bande mohawk, qui sont venus nous le dire. Je pense que leurs arguments portaient. Ils ont porté, d'ailleurs, et je remercie la ministre d'avoir consenti à prendre un autre chemin éventuellement pour la réfection du pont Mercier. C'est très bien ainsi, c'est donc une bonne attitude à prendre.

Autre bonne attitude à prendre qui a été amenée en amendement, en accord avec la présidente du Conseil du trésor aussi, c'est le fait qu'on doit respecter les ententes qu'on a avec les Premières Nations. On doit minimalement les consulter, s'asseoir avec ces Premières Nations et respecter les ententes qu'on a signées. C'est bien la moindre des choses dans un État de droit et dans des relations de nation à nation.

On a aussi élargi le rôle de l'Autorité des marchés publics. Ça, c'est une bonne chose. Je donne le crédit à mon collègue de La Pinière, qui s'est passionné pour ce sujet et bien d'autres, et tant mieux, je pense que c'est un plus, c'est définitivement un plus. On n'aura jamais trop de surveillance dans des secteurs comme la construction, où, on le sait, puis là je refais un autre détour par la commission Charbonneau, les stratagèmes sont apparemment illimités pour essayer de frauder l'État. Et là on met beaucoup, beaucoup, beaucoup d'argent dans le pipeline gouvernemental pour construire. Évidemment, ça va attirer du monde qui pourrait être mal intentionné. Tant mieux... J'ai même entendu parler du cartel des lumières. Je ne parle pas des Lumières de Rousseau et de la Renaissance française, là, je ne parle pas de ça, je parle du cartel de lumières. Apparemment que ça a existé dans le milieu de la construction, au Québec, des gens qui ont été assez allumés pour frauder avec un stratagème pour vendre des lumières plus cher. Alors, il n'y a pas de limite. Alors, tant mieux si on a quelques policiers pour surveiller ça, tant mieux.

• (19 h 40) •

Le collègue de Jonquière a fait aussi quelques gains, il l'a nommé à juste titre, notamment sur les suivis de terres contaminées. Mais là-dessus nous suivrons les suivis, parce que... Il l'a dit, c'est son expression, grosso modo, alors je lui donne le crédit. On a vu encore aujourd'hui, je crois que c'était encore une fois dans La Presse, si je ne m'abuse, peut-être que je mélange mes classiques, qu'il y a, encore une fois, des contrats pour exporter des cargaisons de terre contaminée ailleurs, en Ontario. Je ne pense pas qu'on aimerait beaucoup ça que l'Ontario nous envoie sa «junk», alors je ne pense pas qu'on devrait leur envoyer la nôtre.

Puis, de toute façon, si on est sérieux dans le développement durable puis dans ce qu'on fait ici, au Québec, bien, occupons-nous de nos affaires. Puis, des terrains contaminés, il y en a probablement pour recouvrir toute la surface de la lune juste dans l'est de Montréal, là. Alors, si on est pour décontaminer ça, qu'on le fasse correctement, et il y a maintenant des technologies ici qui feront travailler notre monde ici, puis on sera assurés que ça se fasse correctement.

Alors, voilà pour les points positifs. Ce qui l'est moins, je dois le dire, c'est, évidemment, ce que moi, je considère être une réduction du champ d'action du BAPE. Je sais que la ministre et moi, on ne s'entend pas là-dessus, et je pense que de ce côté-ci, en général, on a perçu ça comme une réduction des analyses environnementales. Je sais que la ministre ne le voit pas comme ça. On ne refera pas le débat ce soir, ça a été fait, mais par contre on va le vérifier à l'usage.

Moi, je pense que ce n'est pas une bonne idée que de diminuer la portée du BAPE, qui déjà n'en a pas tant que ça, qui déjà en a perdu au fil des années. Et il y a un paradoxe là-dedans, Mme la Présidente, parce que le gouvernement dit souvent, à bon droit, qu'il n'y a pas de grands projets... il n'y a pas de projets, mais surtout des grands projets qui peuvent se faire sans l'acceptabilité sociale, et le paradoxe là-dedans, c'est que la première chose qui a sauté dans le projet de loi n° 66, c'est les consultations publiques dans certains projets. Là, j'insiste, là, «dans certains projets». Les consultations publiques, au Québec, en matière d'environnement n'ont pas disparu à tout jamais, là, et entièrement, mais, dans certains projets, les consultations publiques auront disparu, puis ça, ce n'est assurément pas un gain, mais ça nous a été dit par plusieurs témoins de plusieurs groupes, même des groupes qui étaient totalement favorables au projet de loi n° 66. C'est l'enfance de l'art, c'est l'essence même de la démocratie que de consulter la population.

L'acceptabilité sociale, ça se mesure comment? Ce n'est pas juste un mot, là, ce n'est pas juste une expression, qui est bien à la mode, d'ailleurs. Alors, définir «acceptabilité sociale», si c'est juste le gouvernement ou le donneur d'ouvrage qui définit ce qu'est l'acceptabilité sociale, c'est assez unilatéral comme approche puis ça ne marche pas. Je ne dis pas que c'est ce que le gouvernement fait, mais ça pourrait être ça. Puis des fois c'est ça que les gouvernements font. Ils disent : Ah! il y a de l'acceptabilité sociale pour mon projet. Ah! peut-être pas. Puis comment l'avez-vous vérifié?

Les consultations populaires, c'est pas mal l'étalon de mesure, là, c'est la jauge qui permet de savoir est‑ce qu'il y a acceptabilité sociale ou non. La meilleure façon de savoir ce que la population pense, c'est toujours bien de lui demander puis de l'écouter, hein? Je ne chanterai pas Harmonium, là, je vous promets, là, mais j'ai une petite toune dans la tête, là.

Une voix : ...

M. Marissal : Non, vous ne voulez pas, je vous assure que vous ne voulez pas entendre ça. Mais, si vous voulez chanter, par contre, soyez bien à l'aise. Mais c'est vrai qu'on a mis du monde au monde... quelqu'un au monde, on devrait bien l'écouter, hein? Et on a une démocratie participative, où les gens doivent s'exprimer. Puis c'est là le paradoxe. Si on ne les écoute plus... Je me suis en plus fourvoyé dans ma ligne d'Harmonium. Franchement, ce n'est pas fort, je dois être fatigué. Alors, on a mis quelqu'un au monde, il faudrait bien... il faudrait peut-être l'écouter. C'est ça, je vais l'avoir. D'ici 10 heures, à soir, je vais l'avoir.

Alors, c'est pour ça que moi, je n'étais pas d'accord avec cet aspect-là du projet de loi n° 66 en particulier, parce que, si on ne demande pas à la population... Il y a plusieurs façons de mesurer l'acceptabilité sociale. Les sondages, quand c'est bien fait, par une firme sérieuse, et vérifiés, vérifiables, avec une méthodologie, ça, c'est une façon. Les référendums, quand il y a une bonne participation, c'est une façon. Mais une consultation publique, c'est assurément aussi une façon. Puis d'ailleurs on a grandement amélioré le projet de loi n° 66 comment? Par des consultations publiques. On a reçu, quoi, 25, 26 groupes. C'est beaucoup. On y a mis le temps voulu, mais on a entendu ces gens-là, et ils se sont exprimés.

Alors, on se retrouve malheureusement, dans quelques cas, puis on va se le dire franchement, là, quelques cas de projets autoroutiers, ce qui, moi, en plus, me cause quelques problèmes, là... Et je ne parle pas ici de la réfection de routes meurtrières. Je ne parle pas de ça. Je parle de nouvelles routes, là, où on se fait accroire que c'est un projet vert parce qu'on va faire des losanges pour du covoiturage, là. Moi, je me souviens que le précédent président du Conseil du trésor nous a déjà dit que le troisième lien, c'est un projet vert, puis il avait même provisionné de l'argent dans le Fonds vert parce qu'il y avait une voie réservée pour les bus dans le troisième lien. Franchement, franchement, c'est un peu poussé, là. C'est beaucoup poussé, même.

Alors, c'est pour ça que j'ai dit à la blague à la ministre, à un moment donné — bon, moi, je l'ai trouvée drôle, mais peut-être pas elle — que, dans certains cas, les projets autoroutiers, puis la liste a été faite notamment par le ministre des Transports, elle a été dite, là, la liste, là, on va se retrouver avec un ti-BAPE, un ti-BAPE vite, vite, puis il n'y aura pas de consultation publique. Ça, je trouve ça malheureux parce que c'est assez rare qu'on construise des routes sans avoir un certain effet sur l'environnement et sur le paysage ambiant. C'est assez rare qu'on arrive à construire des routes sans bouleverser quelque peu l'environnement.

Il y a des règlements, aussi, qui changent pour l'urbanisme. Ça, ça nous inquiète, ça a été dit. L'Ordre des urbanistes nous a sonné quelques cloches là-dessus, une sonnette d'alarme, en disant : Faites attention, des règlements d'urbanisme, il y en a au Québec, ils fonctionnent bien, il ne faudrait pas trop slaquer quand même, parce qu'évidemment il pourrait y avoir des promoteurs, des municipalités qui s'engouffrent là-dedans puis qui vont trop... qui pourraient aller trop vite dans certains projets.

Deux, trois éléments encore. La fameuse liste, la fameuse liste, on n'en a à peu près pas parlé, la fameuse liste de 181. Au début, je pense, c'était 201, c'est passé... ou 202, c'est passé a 181. On a enlevé le pont Mercier, c'est 180. Et on en a peu parlé pour la raison suivante, que... En tout cas, nous, de notre côté, là, pour Québec solidaire, on a décidé qu'on ne jouerait pas à The Price Is Right puis on n'allait pas essayer de gagner des prix en échange de quelque chose : tu me donnes tel projet, je te donne mon appui. On avait décidé dès le début qu'on ne voulait pas jouer ça parce que c'étaient des questions de principe, puis on ne marchande pas des principes. Mais la fameuse liste, là, 181, 180, comme vous voulez, là, c'est totalement arbitraire, là. Et je ne dis pas que ce n'est pas des bons projets, là. Des maisons des aînés, des écoles, soit, là, soit. Mais on ne peut pas quand même s'empêcher de regarder où est-ce qu'ils sont, les projets. On ne peut pas s'empêcher de penser que, dans 18 mois, on va être en campagne électorale. Alors, ce n'est pas parce qu'on ne négocie pas la liste qu'on n'est pas capables de voir la carte routière électorale qu'il y a avec cette fameuse liste.

Puis cette liste-là, franchement, c'est un peu comme une salade de fruits, là, on met ce qu'on veut dedans, hein? Si on n'aime pas les mûres, on met des framboises. Si on n'a plus de cantaloup, on met des fraises. Bon, c'est le gouvernement qui a choisi, là, c'est le gouvernement qui a choisi. Bien, il y avait des évidences, là, la ligne bleue. Ça aurait été absolument honteux et scandaleux, puis je n'ai pas assez de mots dans ce qu'il me reste de vocabulaire à cette heure-ci pour dire comment ça aurait été, si on n'avait pas mis finalement la ligne bleue là-dedans. Elle est là, tant mieux.

Mais je pose une question, Mme la Présidente : À tout prendre, là, tant qu'à lancer des gros projets, des beaux projets, des projets dont on a besoin, moi, je suis un gars de l'est de Montréal, l'Hôpital Maisonneuve‑Rosemont... Je sais que j'en ai déjà parlé, Mme la Présidente, là, mais c'est dans mon comté. Ça fait que je vais me permettre d'en reparler, parce que, de toute façon, à chaque fois que j'en reparle, il est tombé deux, trois briques de plus de l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont. Puis, si elles ne tombent pas, c'est parce que l'hôpital tient avec de la broche. Je l'ai déjà dit, je le redis, pas parce que ça me fait plaisir, je trouve ça absurde. À chaque fois que je passe là, je regarde ailleurs. Ça n'a aucun sens. Cet hôpital tient avec de la broche, de la clôture Frost. Il y a plus de clôture autour de cet hôpital-là qu'autour d'un pénitencier à sécurité maximale. Ça n'a aucun sens. Il y a tellement de broche autour de l'hôpital, là, qu'ils ont été obligés d'acheter des boosters, comment on dit ça, en français, des boosters, là... des boosters, des boosters de signal cellulaire, parce que les signaux cellulaires ne rentraient plus, n'entraient plus dans l'hôpital parce qu'il y a trop de broche autour. Ouf!

O.K., la bonne nouvelle, c'est que, là, le mur ne tombera pas tout de suite, parce qu'il tient avec de la broche, mais sinon... C'est un des plus gros hôpitaux au Québec — puis là je refais mon pitch, puis là je suis sérieux — c'est un des plus gros hôpitaux au Québec, c'est, entre Montréal, l'est de Montréal et Joliette, le plus gros et le seul hôpital. C'est, bon an mal an, l'urgence, la salle d'urgence, les... les urgences, on dit, les plus occupées du Québec. C'est 5 000 à 6 000 personnes qui travaillent là. C'est une petite ville dans la principauté de Rosemont. Puis cet hôpital est dans un état qui défie l'entendement, qui défie l'entendement. Je vous ai déjà parlé des gouttières, Mme la Présidente, hein, au huitième, au neuvième étage, des gouttières dans l'hôpital, dans l'hôpital pour évacuer l'eau qui circule, là. Bonjour les champignons! Dans un hôpital.

• (19 h 50) •

Alors, je lance un appel à la collaboration à la ministre, à la présidente du Conseil du trésor, avec qui on s'est plutôt... avec qui je me suis plutôt bien entendu, avec qui on travaille bien. Il faut régler, il faut régler l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont. Puis là je le dis pour la population : Il va arriver des malheurs avec cet hôpital-là. Il en arrive déjà. Cet hôpital-là est une infrastructure cruciale pour l'est de Montréal. Puis l'est de Montréal, ce n'est pas juste Rosemont puis le Jardin botanique. Ça part du boulevard Saint-Laurent puis ça va jusqu'à Pointe-de-l'Île. Puis cet hôpital-là couvre le sud aussi, la Rive-Sud, Longueuil et vers l'est, et Laval et vers l'est, jusqu'à Joliette, en fait, parce que le prochain hôpital, c'est Joliette.

population de l'est de Montréal et les usagers de cet hôpital-là... Qui, par ailleurs, est un hôpital extraordinaire en termes de recherche scientifique, de recherche scientifique, c'est un hôpital parmi les meilleurs dans certaines disciplines en Amérique du Nord. Puis je le sais, puis c'est un peu émotif pour moi, ils ont sauvé un de mes frères avec des greffes de cellules souches pour un cancer compliqué, un cancer sournois, un cancer snoreau. Ils l'ont presque éliminé. Puis ça, c'est juste mon frère, mais combien de gens... Ophtalmologie, ils ont un département d'ophtalmologie, là, qui fait l'envie des plus grands hôpitaux de la planète. Je le sais, j'ai été suivi là, rien de très grave, ma collègue de Saint-Laurent aussi. On le recherche, cet hôpital-là, pour ça. Et là je ne nomme que deux spécialités, sans compter, évidemment, tous les gens qui travaillent là, qui veulent travailler là puis qui donnent d'excellents services à la population. Alors, s'il vous plaît, tout ce que je veux pour Noël, c'est un nouvel Hôpital Maisonneuve-Rosemont. Ce n'est quand même pas trop demander.

Je vais terminer sur une chose. Il y a autre chose qui nous a accompagnés tout du long du projet de loi n° 66. Ce n'est pas dit nulle part, il n'y a pas d'article de loi là-dessus, il n'y a pas eu d'amendement là-dessus, parce que ça ne rentrait pas... tu sais, les amendements, il faut que ça rentre quelque part puis que ça trouve son utilité puis sa place dans un projet de loi, mais ça nous a suivis tout du long, à partir du premier témoin jusqu'au dernier article qu'on a étudié, c'est l'absence chronique et notoire de personnel dans certains départements du gouvernement, dans certains ministères du gouvernement. Et là je parle en particulier d'environnement et de transport. Ça a été dit, ça a été redit, ça a été re-redit, c'est quelque chose qu'on sait et c'est quelque chose aussi dont on doit s'occuper rapidement parce qu'on perd l'expertise, on perd l'expertise dans la maison, comme on dit en anglais, là, dans notre expertise, et on n'a pas assez de monde pour faire ce qu'on doit faire. Alors, à la limite, là, on se retrouve dans une situation assez absurde où on doit peut-être couper les coins ronds, notamment en évaluation environnementale, parce qu'on n'a pas assez de monde pour le faire. Puis vous pouvez ne pas me croire, c'est correct, ce n'est pas juste moi qui le dis, il y a des témoins qui sont venus nous le dire, notamment des témoins du monde municipal qui sont venus nous dire ça. Il y a des gens qui sont d'accord et qui espèrent de tous leurs voeux le projet de loi n° 66, qui sera très prochainement une loi. Alors, de ça aussi, on doit s'occuper, puis ça tombe bien parce que c'est un peu aussi dans les talles de la présidente du Conseil du trésor que de s'occuper de bien pourvoir l'État en personnel.

Et là je vais vraiment terminer là-dessus, Mme la Présidente — c'est un vieux truc, ça — je vais vraiment terminer là-dessus en disant que mon plus grand regret par rapport au projet de loi n° 66, c'est qu'on... je trouve qu'on a vraiment manqué d'audace, on a manqué d'ambition, on a manqué de vision. On a reproduit dans le projet de loi n° 66, pour la reprise économique du Québec, la recette qu'on utilise au Québec depuis le siècle dernier : de la brique, et du mortier, et des routes. Puis c'est correct, là, on en a besoin, là. Mais aujourd'hui, là, au XXIe siècle, là, on doit le faire dans une optique de développement durable. Puis, si ça ne s'est pas fait dans le projet de loi n° 66, ce n'est pas grave, ce n'est pas perdu. Il y a des groupes qui nous ont déposé d'excellents mémoires. Je pense notamment au groupe G15, qui est un groupe hétéroclite qui réunit à la fois le Conseil du patronat puis la Fondation David-Suzuki, à la fois les chambres de commerce et Équiterre, des gens qui se sont mis ensemble de bonne foi, de bonne foi, là, pour trouver des solutions et qui sont résolument tournés vers le développement durable. Alors, c'est de valeur que ça ne se retrouve pas dans 66, mais ce n'est pas perdu. Ce n'est pas soluble dans l'air, les bonnes idées ne sont pas solubles dans l'air. Alors, j'espère qu'on aura l'occasion d'en rediscuter puis de finalement être capables d'imbriquer ces bonnes idées dans des projets réels du gouvernement. Je vous remercie, Mme la Présidente.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Y a-t-il des interventions? Comme il n'y a pas d'intervention, nous allons procéder au vote.

Par contre, je constate qu'il manque une formation politique, donc je vais suspendre les travaux quelques instants pour leur permettre de nous rejoindre au salon bleu.

(Suspension de la séance à 19 h 56)

(Reprise à 19 h 59)

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : En application de l'ordre spécial, je vais maintenant inviter les leaders parlementaires à m'indiquer le vote pour leurs groupes sur l'adoption du projet de loi n° 66, Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure. M. le leader adjoint du gouvernement?

M. Schneeberger : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : M. le leader adjoint de l'opposition officielle?

M. Derraji : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : M. le député de Rosemont?

M. Marissal : Contre.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : M. le leader du troisième groupe d'opposition?

M. Ouellet : Contre.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : M. le leader adjoint, est-ce que vous avez des indications à nous transmettre concernant les votes du député de Chomedey ou de Marie-Victorin?

M. Schneeberger : Oui. Chomedey, contre. Et Marie-Victorin, contre.

• (20 heures) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie. En conséquence, le projet de loi n° 66, Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure, est adopté.

M. le leader adjoint du gouvernement, voulez-vous nous indiquer la suite des travaux?

M. Schneeberger : Oui. Alors, pour la suite de nos travaux, je vous demanderais d'appeler l'article 1 du feuilleton.

Débats sur les rapports de commissions

Reprise du débat sur la prise en considération du rapport de la
commission qui a procédé à des consultations particulières
sur l'avenir des médias d'information

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci. Donc, à l'article 1 du feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 9 décembre 2020 sur le rapport de la Commission de la culture et de l'éducation qui, les 26, 27, 28, 29 et 30 août 2019, a procédé à des auditions publiques dans le cadre de consultations particulières à l'égard du mandat d'initiative portant sur l'avenir des médias d'information. Ce rapport a été déposé le 1er décembre 2020, contient des observations et 20 recommandations.

Je vous informe qu'il reste un temps de parole de 15 min 14 s au groupe parlementaire formant le gouvernement, 8 min 57 s au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 12 min 46 s au deuxième groupe d'opposition. Et je vais maintenant céder la parole à M. le député de Saint-Jean pour la suite de son intervention.

M. Louis Lemieux (suite)

M. Lemieux : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Effectivement, c'est la suite. J'ai eu le plaisir de débuter hier par mes remerciements. Vous me permettrez donc de les reprendre rapidement puisque c'est dans la joie et l'allégresse que ce travail unanime a été réalisé après presque deux ans de travail avec la commission sur l'avenir des médias d'information et qu'on en est à cette dernière étape de ce débat au salon bleu sur ce qu'il y a dans ce rapport, ce qu'on voulait y voir, ce qu'on y trouve et ce qu'on va faire avec. Donc, considérez que mes remerciements d'hier se rajoutent à ceux de ce soir et permettez que j'entre dans le vif du sujet, puisque dans mon introduction hier... si vous avez manqué ça, vous retournerez sur la zone vidéo de l'Assemblée nationale, mais sérieusement, dans l'introduction, je disais que c'était important, quand on arrive ici, d'arriver avec ce qu'on est, ce qu'on a été et ce qu'on veut voir pour le secteur d'où on vient. Dans mon cas, après 40 ans de carrière dans les médias, c'est évident qu'en signant la demande officielle de mandat d'initiative il y avait pour moi une signification supplémentaire que je retrouve avec encore plus d'émotion au moment où ce rapport est maintenant public.

Notez que dans le titre ça dit, et on l'a souvent oublié... On parle de l'avenir des médias, on veut faire court, on essaie de faire la manchette rapide, ça va, mais on parle toujours de l'avenir des médias d'information, parce que ce qui est en cause et la raison pour laquelle on s'est saisis, je pense, de ce mandat-là au premier chef, même s'il y avait plein d'autres bonnes raisons, c'est le droit du public à l'information, un droit qui est répertorié à l'article 44 de notre charte, dans le troisième... quatrième chapitre. Et c'est tout simple, hein? «Toute personne a droit à l'information, dans la mesure prévue par la loi.» Bon, pour ce qui est de l'article, on repassera sur l'originalité, mais le fondamental de l'histoire, c'est qu'il y a effectivement un droit du public à l'information et qu'en ce qui me concerne, la crise, ce qu'on a appelé la crise des médias — et là, attention, ce n'était pas la crise des médias d'information, c'était la crise des médias — bien, elle est bien réelle, elle ne date pas d'hier.

D'ailleurs, permettez que je vous raconte une petite histoire. Parce qu'un des premiers reportages que j'ai faits en arrivant à Winnipeg, dans ma tendre jeunesse, au début des années 80, disons-le comme ça, j'ai eu le bonheur, dans le sens où ça m'est resté toute ma vie professionnelle, mais le malheur aussi d'assister à l'annonce de la fermeture d'un grand quotidien, le Winnipeg Tribune. Et c'est à ce moment-là que j'ai appris ce que voulait dire une espèce de code, que vous avez peut-être déjà vu, que vous connaissez peut-être, tiret, espace, trois, espace, zéro, espace, tiret, 30. C'est comme ça que depuis presque toujours, m'a-t-on dit, les journalistes terminent leurs textes, pour être sûrs que le pupitreur puis que le rédacteur puis les autres sachent que c'est la fin du texte. Et ce jour-là, quand je suis arrivé au Winnipeg Tribune, tout le monde pleurait. C'était en début 80. Et la une du Winnipeg Tribune, c'était, sur une page noire, «30». Ça m'est resté toute ma carrière. Mais vous ne voyez plus le 30 nulle part, sauf que la Fédération professionnelle des journalistes du Québec a un magazine qui s'appelle le Trente. Les journalistes partagent ce symbole universel. En tout cas, c'est ce que je pense, qu'il est universel. Partout au Canada, en tout cas.

Toujours est-il que ça dit, ça, même si, à l'époque, on ne parlait pas de la crise des médias... Ah! l'ironie, c'est que c'est Québecor qui a racheté un journal qui a remplacé le Winnipeg Tribune. Mais ça, c'est une autre histoire. On n'était pas en crise des médias, mais c'était le début du commencement des problèmes qui ont mené à ce qu'on est en train de vivre maintenant.

Et, tout au long de ces débats qu'on a eus ici et qu'on a eus en consultations, et que les journalistes et que les gens de médias ont régulièrement, on parle toujours de la crise des médias comme un modèle d'affaires pour s'adapter aux nouvelles technologies. Bien, le virage technologique, quant à moi, ça fait 40 ans, là, parce que quand j'ai commencé, il y a 40 ans, on commençait déjà à en parler. Alors, s'il n'est pas pris, il faudrait le prendre, le virage technologique.

C'est le sapré modèle d'affaires, le problème, parce qu'il change constamment. Et moi, ma réponse, ça a toujours été de dire : Bien, si ça existait, le bon modèle d'affaires, bien, on le saurait, puis on l'aurait, puis ce serait fait. Mais on ne l'a pas. Il y en a qui ont des bonnes idées, des bons modèles d'affaires, qui travaillent là-dessus.

Au-delà des recommandations et des observations que contient ce rapport, il y a surtout, à mon sens, une étape. C'est un état des lieux. C'est un état des lieux qui va faire en sorte qu'on va pouvoir dire qu'en... on va dire 2019, là, à la moitié du mandat, pendant qu'on est en consultation, puis 2020, au moment où on a écrit le rapport, il y a une espèce de constat qui va faire à lui seul oeuvre utile, ne serait que parce que l'industrie s'est parlé. L'industrie est venue nous parler en nous demandant de l'aider.

Évidemment, l'éléphant dans la pièce, c'est les médias sociaux, c'est les GAFAM de ce monde, c'est ce que les médias ont été obligés d'endurer au fil des dernières années. Mais pensez-y, Mme la Présidente, ce n'est pas unique aux médias. Uber pour l'industrie du taxi, Airbnb pour l'industrie hôtelière. Là, en ce moment, on est avec les livraisons, puis je ne donnerai pas les noms, il y en a tout plein, mais les compagnies de livraison qui ont pris le dessus. Qu'on réglemente? Oui, non, peut-être, pas tout à fait. Un peu comme on a été obligé de réglementer Uber et de travailler avec eux, avec Airbnb, on en parle encore, c'est dans l'actualité. Bref, c'est toute notre société qui est bousculée par les nouveaux médias. Normal que les médias sociaux bousculent aussi les médias traditionnels et normal, me direz-vous, que les médias aient de la misère à suivre parfois.

Mais je vous ramène à mon point essentiel, Mme la Présidente, médias d'information. Ce qu'il y a en jeu ici, bien sûr, c'est des emplois, une industrie, je veux bien, mais c'est d'abord et avant tout le droit du public à l'information. L'industrie, comme à peu près tous les partenaires, que ce soit les municipalités, que ce soit les médias eux-mêmes, font partie de la solution. D'ailleurs, dans la foulée du rapport, je suis allé voir l'Association des agences de communication créative, A2C pour les intimes, qui a publié un communiqué pour saluer le rapport. C'est très gentil, c'est très bien, mais déjà, moi, je sens qu'il y a un début de commencement de quelque chose.

Bon, évidemment, vous allez retrouver les phrases habituelles : «Nous saluons la prise conscience de la commission dans le dossier de la crise des médias.» Mais Mme Villeneuve, Dominique Villeneuve, la présidente-directrice générale de l'A2C, a aussi écrit dans son communiqué, et là moi, j'ai trouvé qu'il y avait là quelque chose à surveiller : «Nous lancerons sous peu un guide du média responsable et un indice média d'ici pour ajouter des outils aux professionnels en médias et aux annonceurs pour encourager encore plus l'adhésion au Mouvement média d'ici. L'indice pourra être intégré à tous les plans média d'annonceurs pour les sensibiliser au pourcentage investi dans les médias locaux et les inciter...» Et je vous incite à aller lire la suite. C'est passionnant et c'est intéressant parce que c'est en plein de ça dont on parle dans le rapport, parce que vous allez retrouver plusieurs observations où on dit : Les municipalités font partie de la solution. Les médias, entre eux, ont maintenant le devoir, comme Radio-Canada est venue nous dire en consultations particulières, de travailler ensemble contre les médias sociaux, alors qu'ils étaient encore hier des compétiteurs. Alors, tout le monde fait partie de la solution.

• (20 h 10) •

Oui, j'ai le temps de vous parler de la théorie du trou de beigne, parce que ça va illustrer ce que j'essaie de vous dire dans mon appel au droit du public à l'information. Le trou de beigne, vous allez trouver ça drôle... non, non, on ne s'en va pas à la beignerie, là. D'ailleurs, je vous dis tout de suite, il y a, à l'Université du Québec à Montréal, le cours EUR8222, économie spatiale et dynamiques urbaines, où on parle très sérieusement de la théorie économique spatiale face aux grands phénomènes urbains actuels, universalité de l'urbanisation, la dichotomie centre-périphérie, inertie spatiale, étalement urbain et trou de beigne.

Le trou de beigne, c'est la base de mon raisonnement pour vous convaincre qu'on a quand même un problème, quelques soient les lendemains de la commission, on a un problème parce que le Québec des régions et du point de vue du droit du public à l'information et du point de vue du service que les Québécois obtiennent chez eux... je ne veux pas parler de peau de chagrin, mais quelque part, on doit admettre que ce n'est plus ce que c'était. Ce n'est plus ce que c'était dans la mesure où, et je l'ai déjà dit ici en interpellation, le soir des dernières élections municipales, dans une ville de 12 000 habitants, je suis allé me coucher après avoir été voté, comme tout bon citoyen, à 23 h 30, sans savoir qui était le nouveau maire ou la nouvelle mairesse de la municipalité où j'habitais alors. O.K., le DGEQ avait un problème pour cette municipalité-là, d'accord, mais personne, dans tout ce qu'il y avait de médias ce soir-là, ne s'intéressait à ma petite municipalité de 12 000 habitants. Ce n'est pas normal que c'est seulement le lendemain matin, en allant chercher mon café au coin, que j'ai entendu dire que c'est une telle qui avait gagné. Mais ce n'est pas seulement où j'étais à l'époque, c'est dans bien des endroits. Et la raison pour ça, et j'arrive à mon trou de beigne — je le sais, Mme la Présidente, vous voulez comprendre mon trou de beigne, j'arrive — mais c'est dans bien des endroits où on a des services locaux et régionaux, de petits hebdos, où on est encore capable de tenir la route et d'informer son monde, mais, dans le 450, dans les banlieues, parce que c'est ça, le trou de beigne, c'est tout ce qu'il y a autour du trou, les médias, surtout avec la montréalisation des ondes, les médias ne s'intéressent qu'à Montréal, par défaut, puis, à Québec... bien, à Québec. Donc, tout ce qu'il y a autour, à moins d'être très bien desservi par un média local, et on en a perdu beaucoup, bien, à moins de ça, tout ce qu'on va entendre dans les grands médias nationaux...

Puis à Montréal... Moi, j'habite à Saint-Jean-sur-Richelieu, à 25 minutes, si je roule vite, du centre-ville de Montréal. Théoriquement, une ville de 100 000 habitants, la 11e ville au Québec, on devrait pouvoir savoir ce qui se passe en ville, mais non, parce que Saint-Jean-sur-Richelieu, avec le temps, s'est organisée avec un hebdomadaire qui est extraordinaire, le plus vieux au Québec, Le Canada français, mais, que voulez-vous, il publie une fois par semaine, et une radio musicale, qui est une super de bonne radio, mais qui fait d'abord de la musique. Ce qui fait que, comme je le disais hier au député de Rimouski, je suis jaloux. Quand le député de Rimouski convoque la presse, il se retrouve avec trois caméras, avec quatre micros, avec cinq photographes et journalistes qui lui posent des questions. Moi, je n'ai pas besoin de convoquer la presse, j'ai juste un texto à envoyer, puis c'est réglé.

Et c'est le cas d'à peu près tout le monde. Il y a des endroits, dans certaines banlieues, où on est plus gâté que d'autres, on a une plus vieille relation avec les communautés. Mais essentiellement, tous autant que nous sommes, dans les régions du Québec, à part que d'être dans une région comme le député de Rimouski, qui est une tête de pont médiatique pour sa région, ou Matane, ou Chicoutimi... Je m'excuse, il faut dire Saguenay, mais bon, en tout cas, vous comprenez que moi, pour moi, c'est encore Chicoutimi.

Toujours est-il que cette théorie du trou de beigne là est importante pour moi, parce que notre rapport n'a pas pu faire grand-chose là-dessus, parce qu'on est dans des médias locaux et régionaux écrits, surtout, qui essaient tant bien que mal de se dépêtrer à travers ce virage technologique qui devrait avoir été pris à l'heure où on est et ce modèle d'affaires qui n'est pas évident, et l'industrie en a beaucoup arraché.

Tout ça pour dire que toutes les questions qu'on a abordées me passionnent : la montréalisation des ondes, le commentariat, l'ordre professionnel pour les journalistes. Ça fait 40 ans... Bien, j'ai passé 40 ans dans le métier. Ça faisait 40 ans qu'ils en parlaient quand je suis parti, ils en parlent encore puis ils en parlaient avant. Ce n'est pas nous qui allions régler ça. Tout ça pour dire que le rapport de la commission ne règle pas tout, mais il y a, dans le rapport, des leviers pour continuer d'aider. D'ailleurs, c'est clair que la crise, pour l'appeler comme ça, du Groupe Capitales Médias nous a un peu forcé la main et a forcé la main au gouvernement pour intervenir, ce qui fait que les crédits d'impôt à la presse écrite qui ont été annoncés sont venus un petit peu scooper, pour utiliser un terme du milieu, scooper la commission, avec lesquelles mesures on était d'accord, mais ça a devancé un peu les choses.

Il faut dire aussi que la pandémie n'a pas aidé. Je sais, la pandémie a le dos large, très large, trop parfois. Mais, dans notre cas, ça nous a peut-être aidés, parce que ce qui s'est passé avec la publicité gouvernementale pendant la pandémie, et ça, le député de Rimouski le disait, les autres députés de la commission l'ont confirmé, ce qui s'est passé, ça a montré jusqu'à quel point le gouvernement était un levier fondamental pour aider les médias locaux et régionaux, pour aller jusqu'où il fallait aller et de reconnecter avec les médias des régions. C'était important. La pandémie nous a forcé la main un peu, au gouvernement, et c'est tant mieux. À toute chose malheur est bon, et on se retrouve maintenant avec une capacité de pouvoir couvrir le Québec, d'acheter de la publicité partout, d'aider partout.

Une des aides que moi, je voulais, c'est dans le rapport, on verra ce qu'on peut en faire, mais j'aurais voulu qu'on puisse établir un régime fiscal vertueux, qu'on aide un commerçant à acheter plus de publicité, locale, on s'entend, pour qu'au bout du compte tout le monde en bénéficie, et ce commerçant-là, il va déduire ça de ses impôts, évidemment, mais, si on l'aide, il peut en déduire plus puis il peut acheter plus de publicité.

Le dernier mot, parce que mon temps est écoulé ou presque, la littératie médiatique, c'est important. Les «fake news», c'est des «fake news», mais encore faut-il être capable de faire la différence, et la littératie médiatique, c'est aussi dans le rapport.

Donc, Mme la Présidente, je suis très fier de ce rapport-là, très content d'avoir demandé et obtenu le mandat d'initiative qui a mené au dépôt de ce rapport et au travail, pendant deux ans, de la commission. Ça a été une expérience fabuleuse. Ça a d'ailleurs été, comme je l'expliquais hier, presque la première signature de mon nom sur une lettre portant mon titre de député de Saint-Jean, dont je suis si fier. Et, à l'heure où il est, il faut que je vous dise, Mme la Présidente, tiret, trois, zéro, tiret. Vive la presse!

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : M. le député de Saint-Jean, je ne peux pas passer à côté pour vous dire que Le Courrier de Saint-Hyacinthe est publié depuis 1853, hein, doyen de la... franco-canadienne, sans interruption de publication. Alors, petite parenthèse comme ça avant de céder la parole à Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : Merci beaucoup. Effectivement, on a eu la chance de pouvoir travailler avec beaucoup de collégialité mais aussi avec de l'expertise et, mon collègue l'a démontré énormément durant tous les travaux, une très grande ouverture, mais aussi une très grande connaissance et beaucoup, beaucoup d'amour qu'il porte pour les radios locales, régionales. Ça a été un charme de travailler dans cette commission. Ma collègue, évidemment, que vous avez entendue, la députée de Verdun... J'en profite aussi pour dire merci à la vice-présidente et la présidente, qui ont su mener ces travaux. Malheureusement, moi, je ne faisais pas partie du comité de direction qui sont allés directement en région, sur le terrain, vérifier tout ce qui se passait, mais ils ont très, très bien travaillé.

J'en profite aussi pour un merci tout particulier au professeur Jean-Hughes Roy. Jean-Hugues Roy, de l'UQAM, a été un des premiers à sonner l'alarme par rapport à la crise que les médias vivent. Et on l'a vu que plusieurs d'entre eux... je ne peux même pas dire se meurent à petit feu, se meurent plutôt à grand feu. Il a quantifié aussi les pertes enregistrées. Ça a été le premier aussi à mentionner justement que les revenus des médias traditionnels sont vampirisés à plus de 80 % par Google et Facebook principalement.

Donc, il y a beaucoup de recommandations, deux observations, des recommandations. Je vais commencer par une que j'apprécie énormément, l'éducation, vous comprendrez, parce qu'effectivement, à l'ère de la désinformation, notre meilleur allié, ça reste encore l'éducation. Puis la meilleure façon pour des citoyens qu'ils puissent évidemment bien s'impliquer dans notre société, ça reste d'avoir de l'information, une information de qualité, une information vérifiée. Donc, ça va nous prendre justement des médias forts. Et, vous savez, Mme la Présidente, notre droit d'expression... Comment pouvons-nous soutenir avoir un droit d'expression lorsque notre information n'est pas juste et vérifiée? Parce que pour être un citoyen qui s'exprime clairement dans les débats, encore faut-il avoir toute l'information pour prendre une position libre et éclairée. Alors, le droit à l'information, il faut aussi qu'on en parle.

• (20 h 20) •

Je salue aussi toute l'initiative #30 secondes avant d'y croire. C'est quelque chose que je trouve formidable. Ça permet vraiment aux gens de vérifier l'information juste. Et j'espère qu'un jour une de nos grandes facultés universitaires au Québec emboîtera le pas à l'université dans l'État de Washington, l'Université de Washington, qui a créé un cours, Mme la Présidente, «calling»... là, je ne le dirai pas, le mot parce qu'il est quand même grossier, je vais faire un «BS». Vous avez tous compris? Oui, parfait. Merci. Le député de Saint-Jérôme a un beau sourire, donc il a compris vite. Mais en français ça pourrait être... Je n'ai pas encore trouvé la formulation. Je sens que le député de Saint-Jérôme va m'en trouver une, il réfléchit. Mais ce serait très intéressant d'avoir, justement, non seulement une presse forte, mais aussi d'être en mesure de former plus tôt que tard les jeunes et les adultes, parce que l'information voyage beaucoup trop vite dans les médias numériques. Et, pire que ça, je trouve que Facebook notamment se comporte comme un journal sans avoir l'encadrement d'un journal. Il relaie l'information sans qu'elle soit vérifiée, et malheureusement, ça fait en sorte que ça devient de la désinformation.

Alors, à l'ère des complotistes plus que jamais nous avons besoin d'avoir des médias forts et surtout de façon régionale. Et les radios sont au Québec, surtout la radio parlée... vous le savez, au Québec, contrairement aux autres provinces, nous, la radio parlée, elle est très populaire, elle est écoutée, mais il faut s'assurer que ça ne soit pas juste quelques gros joueurs. Il y a encore les radios régionales, elles ne doivent pas juste survivre, elles doivent vivre. Et ça, c'est mon souhait.

Et comment on fait pour qu'elles puissent vivre? Alors, vous me voyez venir, je sais que vous me voyez venir. C'est sûr à 200 % que j'ai un tableau, n'est-ce pas? Alors, pour le tableau de ce soir, super simple... Vous savez, j'ai fait le saut en politique notamment pour lutter contre les paradis fiscaux, mais aussi pour la justice fiscale. Donc, Google et Facebook, deux sociétés étrangères, qui ne paient jamais d'impôt. Pourquoi qu'elles ne paient pas d'impôt? Parce qu'elles ne sont tout simplement pas assujetties... Ce sont ce qu'on appelle des sociétés qui sont dématérialisées. Leur siège social n'est pas ici. Ils n'ont pas d'établissement stable, physique ici. Donc, par conséquent, tous les revenus publicitaires que les gens mettent sur ces plateformes, bien, ils ne sont pas imposables au Québec ni au Canada.

On peut lutter contre ça. On n'a pas besoin... Et je le sais, là, tout le monde va dire : Oui, mais Ottawa... Vous savez aussi bien que moi, là, que, si on attend après Ottawa, c'est comme les transferts fédéraux, on le souhaite, mais ça n'arrive pas toujours aussi vite qu'on le souhaite.

Alors, au Québec, on est autonomes dans notre champ fiscal. Nous avons notre propre loi d'impôt et, en plus de ça, nous, on a Revenu Québec. Dans les autres provinces, là, ils doivent se fier à Revenu Canada. Nous, on est autonomes. Alors, on peut avoir ce qu'on appelle la fameuse taxe GAFAM. La taxe GAFAM, c'est quoi? C'est 3 % sur les recettes qui sont générées dans un territoire.

Alors, je me suis amusée et j'ai fait le calcul. Et je tiens à souligner que Jean-Hugues Roy aussi fait des calculs de son côté, et, sans même qu'on se concerte, on arrive à la cent près. Pouvez-vous croire? Je vous le jure, puis on n'a même pas la même méthodologie de travail. Un jour, je suis allée dans son bureau, quand j'étais encore professeure à l'Université de Sherbrooke, avec la chaire en fiscalité puis en finances publiques. J'ai apporté mon ordinateur, on a sorti notre fichier Excel, on arrive au même chiffre en empruntant un différent chemin. Alors, vous voyez, les chiffres, quand même, parlent d'eux-mêmes.

Ici, pour le Québec, imaginez, si on avait juste 3 % sur le chiffre d'affaires, donc les ventes générées au Québec pour Facebook... Alors, je vous explique comment que j'ai fait : tout simplement en allant sur les états financiers vérifiés de Facebook et de Google. Et on peut savoir à peu près combien, le pourcentage du Canada. Puis par la suite j'ai mis le poids de... population du Québec pour aller chercher les recettes fiscales qu'on aurait pu aller chercher avec Facebook et Google, Google étant la société cotée Alphabet. C'est quand même 63 millions de dollars. Mais imaginez si on étend tout ça aux autres entreprises numériques, Airbnb, UberEats, tout ça, là. C'est plein d'argent qu'on peut aller chercher.

Alors, ça, c'est mon souhait. On l'a déjà fait dans le passé. La taxe Netflix, je me rappelle, j'étais professeure et je faisais plein d'entrevues pour expliquer qu'il ne fallait pas attendre après Ottawa. Puis finalement on l'a fait, et regardez aujourd'hui, Ottawa nous regarde, puis ils ne sont pas capables de justifier leur position, et finalement ils emboîtent le pas au Québec.

Le Québec a toujours fait preuve de leadership. Le Québec a toujours su tracer la voie à suivre. Encore une fois aujourd'hui, ne soyons pas timides, allons plus loin. Et savez-vous quoi? Cet argent-là pourrait servir justement à financer des programmes, à s'assurer non seulement de la qualité de notre presse écrite en les finançant correctement, mais aussi allons plus loin, pensez à toute la culture québécoise.

J'ai un autre angle mort, qui n'est pas là-dedans mais qui est quand même important : notre culture québécoise. Netflix, là, je sais que, là... demain, c'est notre dernière journée, là, puis tout le monde connaît l'expression «Netflix and chill». Bien, il y a plein de monde qui vont le faire. Je vous vois sourire. Oui, effectivement, je m'inclus là-dedans. Alors, oui, on va se mettre en mou, il y en a plein qui vont ouvrir leur canal Netflix. Ça aussi, c'est une société qui ne paie pas d'impôt. Alors, imaginez comment que non seulement, ils ne paient pas d'impôt, mais, pire que ça, on est en train d'américaniser toute notre culture.

Alors, c'est important qu'au Québec on ait une presse écrite forte, des médias d'information forts pour s'assurer justement d'avoir des citoyens qui prennent complètement leur place ici, au Québec, et que justement, lorsqu'ils parlent, bien ce sont des citoyens qui sont informés puis, en plus de ça, ils ont vérifié l'information, ils sont capables de dire : Je suis allé dans un site qui était vraiment, vraiment sûr et, par conséquent, j'ai été capable non seulement de vérifier mon information, mais, si jamais je suis sceptique, je peux la contrevérifier.

Alors, en terminant, Mme la Présidente, un dernier merci, vraiment, pour cette commission. Ça a été un charme, comme je l'ai dit plus tôt. Et j'espère qu'on aura l'occasion d'avoir d'autres mandats d'initiative où est-ce que nous sommes capables de travailler sans partisanerie, pour le bien commun. Alors, merci à tous et au plaisir de vous retrouver.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, je cède la parole à Mme la députée de Mercier.

Mme Ruba Ghazal

Mme Ghazal : Merci, Mme la Présidente. Donc, aujourd'hui, je me fais la porte-parole de ma collègue la députée de Taschereau, qui ne peut pas être ici aujourd'hui, mais qui a fait un travail exceptionnel de collaboration avec tous les membres de la commission. Et donc il me fait plaisir, aujourd'hui, de porter son message pour parler du rapport sur l'avenir des médias.

On le sait, tout le monde le sait, dans une société démocratique on a vraiment besoin et aujourd'hui on n'a jamais eu autant besoin de médias pour nous comprendre nous-mêmes, pour animer notre conversation collective, et donc aussi pour permettre, évidemment, à la démocratie de vivre. Encore une fois pas, besoin de le répéter, c'est la raison d'être de la commission. Le monde des médias est en profonde mutation, en profonde transformation, notamment à cause des réseaux sociaux, dont personne aujourd'hui ne peut plus se passer. Et même, on développe une dépendance à ces réseaux sociaux là, et malheureusement, bien, ça a quand même un impact sur nos médias.

Ce qu'ils ont fait, ces réseaux sociaux, ils ont capté une grande proportion de l'auditoire. J'inclus les lecteurs, les auditeurs de télévision, etc., qui s'abonnaient auparavant aux médias traditionnels. Les annonceurs, évidemment, ils ont suivi ces gens-là en dépensant la majeure partie de leur budget dans ces nouveaux médias, en délaissant nos médias traditionnels et en délaissant, évidemment, nos journaux locaux, notamment. Moi-même, dans mon comté, et je pense que c'est la même chose aussi pour mes collègues les députés, on essaie le plus possible d'encourager nos médias locaux. Nous en avons besoin, ils ont besoin de nous. Et les médias locaux régionaux, c'est vraiment extrêmement important. On ne peut pas uniquement compter sur les médias nationaux, qui ont aussi, bien sûr, leur importance.

Malgré le fait que les recommandations sur lesquelles nous nous sommes entendus, donc les membres de la commission se sont entendus dans le rapport... Ces recommandations sont, à notre avis, très, très insuffisantes par rapport à la gravité de la situation des médias au Québec. Et, même si ma formation politique, évidemment, endosse ce rapport, on dit qu'il s'agit d'un pansement sur une plaie grande ouverte. Il y a différentes propositions qui ont été émises lors des auditions et, malgré leur unanimité, ne prennent pas en compte le changement de paradigme qui doit être fait aujourd'hui. Il faut laisser tomber les combats d'arrière-garde, par exemple obliger le gouvernement et les municipalités de publier leurs avis et autres publicités ou campagnes de sensibilisation dans les médias écrits. Ça peut être une bonne idée à court terme, mais ça ne peut pas durer à long terme, ça ne peut pas être ça, une des solutions. C'est un pansement et non pas une résolution du problème en profondeur.

Donc, suite aux auditions des groupes, ma collègue la députée de Taschereau a officiellement demandé à ce que la commission entende des acteurs supplémentaires, soit les représentants des GAFAM et des experts en fiscalité. Malheureusement, les députés de la CAQ ont bloqué cette avenue, et c'est très, très malheureux. Ça aurait été une belle opportunité pour entendre ces groupes, ces gens qui auraient pu bénéficier encore plus à la commission.

• (20 h 30) •

Comment, donc, s'assurer que le bien public que représente une information locale, régionale et nationale de qualité au Québec puisse continuer à exister au moment précis où le modèle financier qui le faisait vivre, donc qui faisait vivre notre écosystème médiatique, a démontré son obsolescence? C'est pour ça, donc, que ma collègue, même si, je le répète, nous endossons le rapport, a décidé, au nom de notre formation politique, de déposer un rapport complémentaire qu'elle a appelé l'annexe... — là, je ne sais pas si je peux le dire — l'annexe Dorion, l'annexe députée de Taschereau, un rapport qui annonce des recommandations qui vont beaucoup plus loin que les recommandations qui sont dans le rapport.

Je commencerais par énoncer les quatre grandes prémisses qui sont à la base des recommandations du rapport complémentaire de la députée de Taschereau. Ces prémisses auraient dû être à la base du rapport de la commission, mais les députés du gouvernement, malgré leur ouverture, je le répète, et leur bonne volonté, n'ont pas voulu admettre et accepter. Tout d'abord, il faut envisager les médias comme un service public. Ce n'est pas uniquement des entreprises privées qui sont là et dont l'objectif est de maximiser leurs profits, c'est un service public, une information de qualité, et on en a besoin dans notre société démocratique. On a besoin de l'information sérieuse, vérifiée de journalistes professionnels qui rapportent les faits avec scrupules, avec rigueur, qui alimentent aussi le débat public avec une recherche poussée et qui tient les puissants, hein, de notre société, responsables de leurs actes, pour qu'il y ait une reddition de comptes envers les citoyens. Il faut donc de toute urgence s'appuyer sur une logique où on conçoit l'importance d'informer et d'éduquer, plutôt que seulement de distraire, même si ça fait du bien, hein, d'avoir un peu de distraction. Mais il faut absolument aller vers de l'information de qualité, et c'est pour ça qu'il faut le voir comme un bien commun, un bien public.

Une autre prémisse importante, c'est le financement étatique des médias. Si on considère que les médias d'information procurent un bien public nécessaire au bon fonctionnement de notre démocratie, donc une intervention significative de l'État est nécessaire, est importante, et il faut qu'il y ait... il faut se demander à quelles conditions est-ce que l'État doit financer les médias au Québec. Donc, ces conditions-là, je vais... Quelles sont ces conditions-là? Il faut que l'information, donc, soit de qualité. Et souvent on a répondu que les conditions aux subventions nuiraient directement à l'indépendance de la presse. Parce que si l'État finance la presse, est-ce que ça remettrait en question son indépendance? Il faut regarder ce qui se passe, par exemple, avec notre télévision d'État, qui démontre qu'il est tout à fait possible que l'État finance la télévision publique et qu'il n'intervienne pas du tout dans le contenu, qu'il y ait une totale indépendance de ces médias-là. On le voit, c'est déjà le cas.

En ce moment, le gouvernement de la CAQ, avec son investissement majoré en publicité dans les médias et les programmes de sauvegarde à cause... de la pandémie et de la crise, plutôt, de la crise des médias, se garde la latitude de décider quel média sera financé, sous quelles conditions. Et ça, cette façon de faire là va fragiliser l'indépendance de nos médias. Il faut plutôt, selon nous, qu'une institution indépendante soit mise sur pied, une sorte de fonds des médias pour gérer les fonds publics destinés à l'information au Québec. Et c'est elle qui établirait ses critères sur lesquels il y aura du financement public. Et ces critères-là doivent se baser sur le code de déontologie déjà reconnu dans le métier de journaliste. On pourrait aussi exiger du milieu journalistique qu'il se dote d'un statut de journaliste professionnel ou d'un ordre professionnel, auquel il faudrait qu'ils appartiennent pour obtenir du financement public. Ça, c'est une avenue qui serait très, très intéressante à encourager et à regarder.

Il y a aussi, évidemment, ça, là où est l'argent. L'argent est où, maintenant? Eh bien, il est chez les géants, les GAFAM. Il faut aller le chercher là où il est et donc taxer les géants. L'État lui-même n'aura pas, dans les années à venir, de l'argent plein les poches, et les contribuables non plus, donc, si on veut soutenir nos médias, des informations de qualité, il faut absolument aller chercher l'argent là où il est.

La réponse a été matraquée par plusieurs députés des partis d'opposition à toutes sortes d'occasions, tout à l'heure aussi, mes collègues, quand ils sont intervenus sur la question, et aussi un grand nombre de témoins qui sont venus parler de leur réalité dans leurs auditions. Il y a une injustice, une iniquité incroyable. Il faut taxer et imposer les GAFAM, et le Québec a tout ce qu'il faut, avec Revenu Québec, pour le faire. Il n'a pas besoin d'attendre après le fédéral et encore moins après l'OCDE, comme à maintes reprises, quand j'ai moi-même aussi... Lors des crédits, des derniers crédits, j'ai posé la question à la ministre, elle disait : Bien, je ne peux rien faire, il faut que j'attende après l'OCDE ou le fédéral, on ne peut pas agir seuls. Au moins, si le message était : Il y a une volonté d'agir et de les taxer, au moins, s'il y avait cette volonté-là, ce serait déjà un premier pas, qu'on ne sent pas du tout. Ce qu'on entend, c'est plutôt un message d'impuissance.

Donc, ça, c'est les prémisses, que je viens d'énoncer, par rapport à la réflexion que ma collègue la députée de Taschereau a faite, et de ma formation politique.

Les recommandations, maintenant, je vais énoncer les recommandations qu'elle a faites dans l'annexe complémentaire pour l'avenir des médias. Un, je le répète, aller chercher l'argent là où il est : «Que le gouvernement du Québec impose à hauteur de 3 % le chiffre d'affaires réalisé au Québec par les grandes entreprises du numérique.» Ce n'est pas la mer à boire, 3 %.

Recommandation n° 2, gérer l'argent public de manière indépendante du gouvernement, donc : «Que le gouvernement du Québec crée un fonds des médias du Québec et lui octroie un financement capable d'assurer le maintien et le développement d'une information locale, régionale et nationale de qualité [et qui soit] respectueuse des codes de déontologie [qui sont] reconnus par le milieu, et peu importe son support.»

Trois, assurer le financement d'un journalisme de qualité, donc : «Que le gouvernement exige du milieu des médias, pour ceux qui souhaitent bénéficier de subventions publiques, [qu'ils se créent] — et de les encourager à le faire — [un] statut de journaliste professionnel déterminé par le respect des règles et des pratiques et de la déontologie qui sont reconnues par la profession.» Et ce serait une condition pour qu'ils puissent obtenir du financement de l'État.

Quatrième recommandation, décloisonner l'information de l'obligation de faire du profit, ça revient à la prémisse que j'ai dite tantôt. L'information publique, l'information doit être vue comme un bien commun. Nos médias, c'est ce qu'ils nous donnent, à la société, une société démocratique. Ça doit être vu comme un bien commun. Donc : «Que le gouvernement favorise l'acquisition d'entreprises de presse en difficulté par des coopératives de travailleurs...» Ça s'est déjà fait. Ça s'est vu, par exemple, avec le journal Le Soleil, où il y a une coopérative de travailleurs, et il y en a d'autres. Il faudrait encourager ce modèle-là. «...qu'un éventuel fonds des médias — donc on demande qu'il soit créé — s'inspire du secteur des arts et de la culture pour mettre en place des programmes de financement de projets de journalisme indépendant.»

Donc, voilà, ça, c'est les propositions supplémentaires que ma collègue la députée de Taschereau trouvait important d'ajouter au rapport qui a été, dans le fond, présenté par les membres de cette commission-là. Et je crois que ce serait vraiment le début d'un pas important pour régler le problème en profondeur, pas uniquement mettre un pansement, parce que la crise des médias actuelle est une crise qui ne doit pas uniquement préoccuper les députés de l'Assemblée nationale, pas uniquement les journalistes, pas uniquement les gens qui sont dans la profession, qui y oeuvrent, mais tous les citoyens, toutes les citoyennes, préoccupés par une information qui soit vraie, qui soit vérifiée, qui soit rigoureuse, et aujourd'hui plus que jamais, avec les réseaux sociaux, les fausses informations, les fausses nouvelles, plus que jamais, on en a besoin.

Donc, j'espère que les membres de la commission vont au moins lire l'annexe qui a été présentée par ma collègue et aussi, peut-être, mûrir leurs réflexions et, dans un éventuel... un avenir rapproché, peut-être faire ces recommandations, les faire les leurs, et que le gouvernement du Québec puisse commencer au moins une réflexion plus approfondie qu'un simple pansement. Notre démocratie le mérite, Mme la Présidente. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres... Non, il n'y a pas d'autre intervention, le temps de parole est terminé. Alors, je mets... Ceci met fin au débat sur le rapport de la Commission de la culture et de l'éducation. M. le leader, voulez-vous nous indiquer la suite?

M. Schneeberger : Oui, Mme la Présidente, pour la suite de nos travaux, je vous demanderais d'appeler l'article 2 du feuilleton.

Prise en considération du rapport de la commission qui a procédé
aux auditions sur l'exploitation sexuelle des mineurs

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, à l'article 2 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la Commission spéciale sur l'exploitation sexuelle des mineurs qui, les 4, 5, 6 et 7 novembre 2019, les 20, 21 et 23 janvier ainsi que le 24 août 2020, a procédé à des auditions publiques dans le cadre de consultations particulières sur l'exploitation sexuelle des mineurs. Ce rapport, qui a été déposé le 3 décembre 2020, contient 58 recommandations.

Je vous rappelle que, conformément aux dispositions de l'article 95 du règlement, la prise en considération du rapport donne lieu à un débat restreint d'au plus deux heures et qu'aucun amendement n'est recevable. Je vous rappelle également qu'en vertu du deuxième alinéa de l'article 95 ce débat n'entraîne aucune décision de l'Assemblée.

• (20 h 40) •

Conformément à ce qui a été énoncé antérieurement par la présidence, la répartition du temps de parole dans le cadre de ce débat s'effectuera comme suit : 58 min 30 s sont allouées au groupe parlementaire formant le gouvernement, 34 min 51 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 12 min 27 s sont allouées au deuxième groupe d'opposition, 11 min 12 s sont allouées au troisième groupe d'opposition et chaque député indépendant dispose d'un temps de parole de 1 min 30 s. Toutefois, lorsqu'un député indépendant n'utilise pas son temps de parole, l'autre député dispose d'un temps de parole de deux minutes. Dans le cadre de ce débat, le temps non utilisé par les députés indépendants ou par l'un des groupes parlementaires sera redistribué entre les groupes parlementaires selon la proportion établie précédemment. Mis à part ces consignes, les interventions ne seront soumises à aucune limite de temps.

Enfin, je rappelle aux députés indépendants que, s'ils souhaitent intervenir au cours de ce débat, ils ont 10 minutes à partir de maintenant pour en aviser la présidence.

Alors, je cède maintenant la parole à Mme la députée Les Plaines.

Mme Lucie Lecours

Mme Lecours (Les Plaines) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bonsoir. Écoutez, d'entrée de jeu, je vais me permettre de souligner le travail incommensurable qui a été fait pendant les 16 derniers mois par mes collègues membres de la Commission spéciale sur l'exploitation sexuelle des mineurs, une commission qui était transpartisane. Donc, je remercie beaucoup le travail des oppositions, et, évidemment, le travail immense qui a été abattu par mes collègues de la banquette gouvernementale.

On n'aura jamais... en tout cas, moi, je n'ai jamais autant parlé, dans les derniers jours, depuis le dépôt de ce rapport, de l'exploitation sexuelle des mineurs. Puis on en a beaucoup parlé ensemble, pendant 16 mois, mais jamais autant, depuis les derniers jours. Et tant mieux, parce que je pense qu'il faut en parler, il va falloir en parler encore, il va falloir en parler avec des actions. D'où notre présence ici aujourd'hui, ce soir, en Chambre.

Je vais commencer par vous poser une question à vous tous ici : Au-delà de l'argent, du pouvoir des grandes entreprises, des géants de ce monde, tout ce qui pourrait constituer une richesse, quelle est notre plus grande richesse? Bien, moi, je vais vous répondre, je vais répondre à cette question-là : Ce sont nos enfants, nos enfants sont notre plus grande richesse. On veut les protéger, on veut leur offrir un beau milieu de vie, on veut les encadrer, on veut leur offrir des activités stimulantes, un milieu de vie stimulant, sécuritaire, bref on veut qu'ils s'épanouissent. Oui, plusieurs d'entre eux, de ces enfants qu'on connaît, qu'on a, hein, ils sont heureux, j'espère que tous vos enfants sont heureux et bénéficient de tout ce soutien-là, les enfants de vos amis et tout ça. Mais ce n'est pas donné à tous les enfants, il y en a beaucoup qui vivent l'enfer, Mme la Présidente. Il y a l'enfer de la violence, la commission Laurent en parle, va en parler, va émettre ses recommandACTIONS bientôt, il y en a déjà un certain nombre qui ont été dévoilées, mais il y a aussi l'autre enfer, celui de l'exploitation sexuelle pour des jeunes personnes, des personnes mineures, on parle de 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17 ans, mais on parle d'enfants aussi plus jeunes que ça. Et ça, moi, ça m'a frappée directement au coeur.

Il y a plusieurs initiatives qui ont été mises sur pied au cours des dernières années. Il y a le Plan d'intervention québécois sur les gangs de rue en 2007 et celui en 2011. Il y a la Stratégie gouvernementale pour prévenir et contrer les violences sexuelles en 2016. Et, plus récemment, il y a eu la mise sur pied de l'EILP, dans le jargon, c'est l'Équipe intégrée de lutte au proxénétisme, en 2017. Est-ce que ça a été suffisant? Je vais vous dire, manifestement non. Avec ce qu'on a vu, manifestement, ce n'est pas suffisant.

Il y a eu la série Fugueuse. Plusieurs l'ont écoutée, je me permets de le dire maintenant, plusieurs ont écouté cette série-là. Ça s'est fait sur deux éditions. La première, elle nous a pris au coeur, on s'est posé la question : Est‑ce que c'est vrai? Maintenant, on peut dire que la réalité dépasse la fiction. Moi, je l'ai vu, les membres de la commission l'ont vu. On a regardé des documentaires, on a eu des formations, et, je vous dis, je le répète, ça nous atteint, ça nous a atteints énormément.

En fait, pourquoi il y a encore des victimes? Ça, c'est l'autre question qu'il faut se poser aujourd'hui. Avec les initiatives qui ont été mises sur pied, je vous dis, manifestement ce n'est pas suffisant. Mais pourquoi il y a encore des victimes d'exploitation sexuelles, des victimes mineures d'exploitation sexuelle? Parce qu'on a trop banalisé ce phénomène-là. On l'a banalisé.

Vous allez voir, dans le rapport, je souhaite que le plus grand nombre de personnes possible lisent ce rapport-là, il y a des citations. Il y en a une qui dit... Je vais vous la résumer rapidement. Combien de personnes vont aller, par exemple, pour un 18 ans, un anniversaire de 18 ans, vont aller aux danseuses, hein? Qui n'a pas invité, à un moment donné, une escorte à la maison? Mais ça, là, derrière ces gens-là, là, il y a de l'exploitation. Et ça, on en a été... Les gens sont venus l'expliquer, des gens sont venus nous le présenter. Ce n'est pas de la prostitution juvénile, c'est de l'exploitation sexuelle de personnes mineures. En fait, je vais vous le dire crûment, là, de la façon dont on nous le présente, là, il y a des individus qui vendent le corps de jeunes filles et de jeunes garçons comme on vend de la pizza. Et il y en a pour tous les goûts, vous pouvez choisir ce que vous voulez sur le menu. C'est cru, ce que je dis là, là, mais c'est vrai. Sauf qu'eux, les profits, par exemple, sont pas mal plus important. C'est très lucratif comme marché.

Pire encore, il y a ceux qui les vendent, mais il y a ceux qui les achètent, ceux qui achètent le corps de nos jeunes filles et de nos jeunes garçons. Je vais vous l'expliquer un peu plus tard, là, nous, on a décidé de les appeler des clients abuseurs. Pourquoi abuseurs? Parce qu'ils abusent du corps de nos jeunes garçons et de nos jeunes filles. Mais, encore plus, Montréal a acquis, au cours des années, la très triste, très, très triste réputation d'être la plaque tournante canadienne pour ce que... Dans les journaux, dans les médias, on parle de prostitution juvénile. Moi, je vous le répète, c'est de l'exploitation sexuelle de personnes mineures.

Il y a 16 élus de cette Chambre qui sont présents ici aujourd'hui qui vont être marqués à jamais par ce que nous avons vu, par ce que nous avons entendu, par les témoignages qui ont été les nôtres. On va être marqués par tout ce qu'on a vu, tout ce qu'on a lu, à jamais, mais on veut passer à l'action, et c'est ce que le rapport... c'est la résultante du rapport. En fait, je vais profiter de cette occasion-là... Parce que le rapport, comme je vous dis, il est assez volumineux, mais on a tellement de gens qui sont venus nous parler, j'aimerais les remercier, ce soir, chacun d'entre eux. Je ne les lirai pas tous, là, mais il y a tellement de gens qu'on a rencontrés, tellement de gens qui nous ont déposé des mémoires. Je veux les remercier parce que, sans eux, on n'en serait pas là. On comprendrait peut-être moins bien ce phénomène, cette spirale. J'appelle ça une spirale, mais c'est une vraie problématique.

Moi, c'est ma première expérience, comme parlementaire, dans ce type de commission là. Quand mon aile parlementaire est venue me demander si je voulais faire partie de cette commission-là, j'ai dit oui, évidemment, avec enthousiasme, ne m'attendant pas à ce qui allait venir, mais oui, j'ai dit oui de façon spontanée. Pourquoi j'ai dit oui? Parce que j'ai d'abord pensé à mes enfants. Puis là je vais me rappeler un peu le collègue d'Hochelaga-Maisonneuve, qui fait aussi partie de la commission spéciale et qui disait : C'est un cliché, de dire ça. Non, non, ce n'est pas un cliché. On a des enfants, j'ai pensé d'abord à mes enfants.

Aujourd'hui, ils ont 25 et 28 ans, mes enfants, ils sont grands, ils ont passé cette période trouble qu'est l'adolescence, mais je vais vous dire que je pensais à ça. Ça fait une dizaine d'années, là, mais, il y a 10 ans, ça existait déjà, hein, ce n'est pas un phénomène qui est nouveau. Il va en empirant, puis c'est pour ça qu'il faut vraiment s'en occuper. Mais j'ai pensé à eux puis je me disais : Bon, moi, je suis chanceuse, ils ont passé au travers cette période-là, j'ai fait attention à eux, je leur ai offert un milieu de vie sécurisant et tout. Mais ils n'étaient pas plus à l'abri de cette réalité-là parce que, vous savez, ça touche tous les milieux de vie. Ça, on s'en est rendu compte aussi. On pense souvent que c'est des familles moins bien nanties. Non, ça touche tous les milieux de vie. On a eu des témoignages qui nous ont fait pleurer, de gens, de couples qui étaient là, qui nous parlaient de leur réalité, d'un père qui a perdu sa fille, deux ans auparavant, et qui aujourd'hui est directeur d'un organisme dont la mission, c'est d'aider ces victimes-là. Et ça vient de tous les milieux, et c'est ça, c'est cette... il faut rester avec cette réalité-là en tête pour pouvoir avoir encore plus d'action. Donc, ce n'est pas nécessairement juste des familles moins bien nanties, c'est des familles normales, des familles aisées. Bref, ce phénomène-là touche tout le monde.

Puis, si les victimes entrent dans cette spirale ou cet enfer, comme je vais continuer à baptiser cette réalité-là, c'est un enfer, on nous l'a dit, on nous l'a expliqué, c'est parce que, dans un premier temps, c'est des enfants qui ne connaissent pas ce que c'est, une relation saine, une relation sexuelle saine. Donc, on veut agir de ce côté-là. C'est souvent des enfants qui ont une faible estime d'eux-mêmes, pas parce que les parents n'ont pas bien fait, tout ça. L'estime, ça se bâtit quand c'est tout jeune mais dans divers milieux. Donc, on veut agir également de ce côté-là.

• (20 h 50) •

C'est souvent aussi, justement, à cause de ces deux facteurs-là, des jeunes filles ou des jeunes garçons, beaucoup de jeunes filles, mais on va les appeler des personnes mineures... ce sont des jeunes à qui on a fait miroiter une belle vie, du glamour, de l'argent, des belles soirées arrosées, et finalement elles embarquent dans la spirale de l'exploitation. On nous l'a expliqué, des victimes nous l'ont expliqué, ils sont venus devant nous nous le dire, et toutes nous ont expliqué que ce n'est pas facile, de s'en sortir, c'est extrêmement difficile. Quand elles sont rendues à vouloir s'en sortir parce qu'elles ont réalisé qu'elles sont victimes d'exploitation, et ça, ça prend déjà un très long cheminement, elles arrivent dans le marché, tout ce qu'elles ont fait dans leur vie c'est ça, être exploitées sexuellement, donc souvent elles vont revenir. Donc, ça prend plusieurs allers-retours avant que finalement on puisse aider cette personne-là.

Une de mes collègues, la députée de Repentigny, qui était dans l'opposition au cours de la dernière législation, a débroussaillé beaucoup ce terrain-là. Elle en a fait un cheval de bataille. Puis c'est arrivé comme ça, à un moment donné elle est tombée... On a beaucoup jasé, là, quand elle a su qu'on était sur cette commission-là, on a beaucoup jasé avec elle, elle nous envoyait des documents. Elle a énormément travaillé sur ce dossier-là, ça lui tenait tellement à coeur. Quand elle a su que la commission était mise sur pied, elle était, je vous le dis, heureuse, puis, ce soir, je suis persuadée qu'elle nous entend, qu'elle nous écoute, puis qu'elle est contente de voir ces recommandations-là, puis qu'elle est assurée qu'on va les mettre de l'avant, qu'on va les regarder, qu'on va les mettre de l'avant, qu'on va s'attaquer à ce fléau-là. Donc, je veux l'en remercier, oui, effectivement. Oui. Puis elle m'a dit également que la première des recommandations, c'est sa grande fierté, d'en faire une priorité nationale.

Et, vous savez, je vais vous rajouter que, dans une des recommandations, qui est la recommandation 2, elle arrive assez rapidement... «La Commission recommande que le gouvernement du Québec déclare le 4 mars de chaque année comme étant la Journée de la lutte contre l'exploitation sexuelle des mineurs et qu'il souligne, en association avec l'ONU, la Journée mondiale de la lutte contre la traite d'êtres humains le 30 juillet de chaque année.» Vous savez, le 4 mars, c'est sa date de fête, c'est sa date de fête. Donc, elle m'a dit : Ça va rester à jamais marqué dans mon coeur. Mais ça veut dire qu'en tant que gouvernement, par contre, il faut agir, mais également en tant qu'individus, parce que cette réalité-là, ça nous touche aussi, tous et chacun.

Donc, on a devant nous ce rapport, je vous le montre à nouveau parce qu'on en est très, très fiers, ce rapport, qui est constitué de 58 recommandations qui ont été soigneusement rédigées, 58 recommandations qui, je vous le dis, sont réalisables, 58 recommandations tout aussi importantes les unes que les autres. Donc, si on me demande laquelle est plus importante que l'autre, moi, je vous le dis, elles sont toutes importantes les unes autant que les autres.

Je vais vous parler, évidemment, de mon collègue de Vachon, qui a été président de la commission jusqu'à ce que moi, j'arrive, parce qu'il accédait au Conseil des ministres. Lui aussi, ce soir, il est certainement très, très, très heureux de l'issue de ce rapport-là. Il en connaît les grandes lignes et il les a lues, évidemment, tout de suite après, lorsque le dépôt a été officiel, il a lu les dernières recommandations. Donc, il est excessivement fier. Et il en a fait son combat, lui aussi. Quand il est arrivé ici, à l'Assemblée nationale, quand il a mis le pied dans cette enceinte, il s'est juré qu'il allait faire de la lutte à l'exploitation sexuelle des mineurs son combat. Son combat pourquoi? Comme ex‑policier, il en a vu, des choses, davantage que nous, mais également comme père de deux jeunes filles. Donc, il s'était dit : Ça va être un de mes combats à moi aussi. Donc, je le salue. Et je sais qu'il nous écoute puis qu'il est très fier. Donc, le combat qu'il allait faire, que nous allons faire, c'est la guerre aux clients abuseurs. Donc, je vous disais : Pourquoi clients abuseurs? Parce qu'il y a les clients de la prostitution, mais les clients abuseurs, ce sont ceux qui achètent le corps de jeunes personnes mineures. Ce sont des clients abuseurs. C'est comme ça qu'on a décidé de les baptiser, puis je suis fière du fait qu'on le montre. Mais qui est le client abuseur? Ça, on a eu énormément de difficultés à trouver c'est qui. C'est qui, notre client abuseur? On n'a pas de données là-dessus. Donc, dans nos recommandations, ça en fait partie, c'est de trouver le portrait, de dénicher de l'information sur ces clients-là et, bien évidemment, de les coffrer, je vais dire ça comme ça, parce qu'il faut, il faut vraiment que les gens sachent qu'acheter le corps d'une jeune fille ou d'un jeune garçon, c'est non, c'est de l'abus, point final.

Donc, les recommandations — bonjour, Mme la Présidente — les recommandations passent par cinq grands thèmes. Le premier thème : faire face à cette réalité et la montrer à la face du monde. Donc, vous comprenez par là qu'il va falloir mettre sur pied des campagnes de sensibilisation sur cette réalité-là. Point deux, on veut faire comprendre à la population que ce fléau a été trop longtemps banalisé. Ça va nous prendre des données, ça va nous prendre des choses, on doit mettre sur pied plusieurs comités pour faire en sorte qu'on va être mieux outillés encore avec nos recommandations, pour mettre en place nos recommandations. Trois : prévenir et former, parce que c'est ce qu'il nous faut faire, prévenir et former la population, un, en soutenant les organismes du milieu qui en ont fait leur mission, en outillant les intervenants de la santé, le personnel des premières lignes, les pharmaciens, les enseignants, les policiers. Bref, il y a un réseau de gens qui doivent être encore plus sensibilisés à la réalité de ces jeunes personnes abusées sexuellement. Et enfin, évidemment, toujours dans cette portion-là : faire face à cette triste réalité. Trois : mettre les victimes au coeur de nos actions. Et ça, ça passe par la répression. On a parlé, dans notre rapport, des peines consécutives aux clients abuseurs. On a parlé de diminuer la pression sur les victimes qui veulent s'en sortir et qu'on va aider à s'en sortir. Inscrire les clients... s'assurer que l'inscription du nom des clients abuseurs est bel et bien au registre national des délinquants sexuels. Responsabiliser aussi les hôteliers pour s'assurer que personne ne ferme les yeux sur ce marché lucratif. Ça, ça va être très, très, très important. S'attaquer également, bien évidemment, au Web, on a vu, dans les derniers jours, tout ce qui est sorti dans les médias, s'attaquer au Web qui expose l'exploitation sexuelle des mineurs comme on vend des voitures usagers, parce que c'est ça, la triste réalité. En faisant une relecture et des modifications à l'IVAC, déjà on est bien partis. En brisant le cycle de l'exploitation pour aider les victimes à s'en sortir. C'est l'ensemble... Parce que, comme je vous disais tantôt, les 58 recommandations sont importantes, mais c'est l'essentiel de l'esprit des cinq grands thèmes qui chapeautent ces 58 recommandations là.

Moi, en 18 mois de travail, j'ai énormément appris de cette commission-là. J'ai appris, donc, qu'on s'est trop longtemps mis la tête dans le sable. J'ai appris qu'on ne prend pas suffisamment soin de nos jeunes. J'ai appris que beaucoup d'organismes s'en préoccupent, mais qu'ils ne sont pas suffisamment soutenus, qu'ils ne sont pas suffisamment connus, et même qu'entre eux ils ne se connaissent pas suffisamment. Il faut faire le nécessaire pour créer une plaque tournante — celle-là, elle va être positive — une plaque tournante d'organismes et de gens qui vont... où les parents vont pouvoir se référer, où les victimes vont pouvoir se référer, qu'elles n'aient pas à faire de multiples démarches. Elles ne s'en sortiront pas si elles ont à faire des multiples démarches comme c'est le cas en ce moment. Il faut créer une plaque tournante où les gens vont pouvoir se référer. Donc, aidons-les, ces organismes, à mieux se connaître entre eux, aidons-les à mieux s'organiser. Aidons-les à lutter contre l'exploitation sexuelle de mineurs parce que c'est notre souhait le plus sincère.

Depuis le dépôt du rapport le 3 décembre dernier, plusieurs organismes d'ailleurs ont salué les recommandations, et la teneur du texte, et l'analyse qui a été faite. Je les remercie. Rapidement, il me vient en tête Enfant-Retour Québec, la Fondation Marie-Vincent et l'Ordre professionnel des sexologues du Québec, mais j'en passe, là, plusieurs nous ont écrit pour souligner l'exemplarité du travail qui a été fait et qu'ils ont bien hâte, évidemment, de voir ces recommandations-là mises de l'avant, mises en application.

• (21 heures) •

Vous savez, le rapport, il touche énormément de ministères. Évidemment, il y a la Santé, les Services sociaux, la Justice puis la Sécurité publique, hein, on s'entend que c'est les plus importants par rapport à ce type d'intervention là, mais il y a aussi le Tourisme, je vous l'ai dit, avec les hôtels, il y a la Famille, il y a l'Éducation. On l'a dit, l'estime de soi, c'est où que ça se passe? Dans la famille, mais ça se passe aussi en bas âge à l'école. Donc, il y a l'Éducation, il y a l'Enseignement supérieur aussi, il y a les Affaires autochtones. Bon, le ministre a déjà le rapport en main et l'a bien étudié. Il y a l'Immigration. Il y a les Affaires municipales aussi, il y a des recommandations qui touchent également les villes, et il y a la Condition féminine. Moi, je peux vous assurer que chacun des ministres a eu déjà une copie de ce rapport-là puis que, déjà, ils sont en action pour travailler ces recommandations-là. Notre gouvernement, on veut agir.

Je vais vous lire une... Évidemment, depuis quelques jours, il y a plusieurs lectures qui se font, il y a plusieurs articles qui ont été rédigés sur toute la problématique qui tourne autour du Web, et il y en a une qui m'a accrochée parce que je la lisais puis je me disais : Bon, je pense qu'on a fait un excellent travail. Je vais vous le dire tout de suite, ça nous vient de Dominique Côté, qui est commandant à la section de l'exploitation sexuelle au SPVM. Il dit dans... c'est rapporté dans La Presse, mais, bon, dans l'ensemble du texte, moi, cette citation-là m'a vraiment frappée au coeur, il dit : «C'est un phénomène de société. Est-ce que seulement les corps policiers peuvent [...] venir à bout? Je ne pense pas. Mais il faut embarquer de toutes [...] façons. Il faut que de l'aide soit offerte aux victimes.» Ça fait partie de nos recommandations. «Il faut qu'on soit en prévention.» Ça fait partie de nos recommandations. «Il faut qu'on soit en coercition.» Ça fait partie de nos recommandations. «Et il faut qu'on se parle pour avoir le plus grand impact possible.» Ça, c'est le tout début de nos recommandations et même l'ensemble de chacune d'elles quand on les lie ensemble. «Est-ce qu'on va en venir à bout un jour? J'aurais tendance à dire non.» Ce n'est pas moi qui le dis, là, c'est lui. «Mais est-ce qu'on peut bâtir de meilleures façons de faire? Est-ce qu'on peut s'améliorer? Oui. Il ne faut jamais s'avouer vaincu.» Moi, je suis d'accord avec lui. À la lumière de ce commentaire-là, je pense qu'on a fait un excellent travail, Mme la Présidente.

Alors, à nouveau, en terminant, je remercie l'ensemble de mes collègues. Et, je vous le dis, il faut que chacun d'entre nous, en tant qu'élus mais en tant qu'individus aussi, on fasse notre bout de chemin.

Merci beaucoup, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Les Plaines. Et maintenant je suis prête à reconnaître la prochaine intervenante, qui sera Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.

Mme Kathleen Weil

Mme Weil : Merci, Mme la Présidente. Donc, c'est un moment émouvant. Puis je prends la peine de vous montrer la page couverture. Quand on nous a proposé, donc, cette image, qu'est-ce qu'on voit? Une personne, ça peut être un jeune garçon, ça peut être une jeune femme, on a fait exprès, en morceaux, en petits morceaux. Et donc le tout début de notre trajet ensemble, ça a été de comprendre pourquoi cette personne était en morceaux puis de voir à sa reconstruction. C'était vraiment une mission difficile, mais à quel point valorisante!

Alors, au terme de 18 mois de travaux, la Commission spéciale sur l'exploitation sexuelle des mineurs a déposé son rapport unanime à l'Assemblée nationale, donc, le 3 décembre dernier. Le rapport contient 58 recommandations qui appellent à la fois les autorités et, ma collègue vient... a mentionné les différents ministères, on parle vraiment de gouvernement quand on parle d'autorité, mais la police, etc., mais aussi la population dans son entièreté à agir dans cette lutte contre l'exploitation sexuelle des mineurs.

Alors, nous étions 16 députés à participer à cette commission spéciale, présidée, dans un premier temps, par le député de Vachon, ensuite par la députée de Les Plaines et coprésidée par la députée de l'Acadie. Et je dirais que les trois ont mené de main de maître leur mission. Et ça a été fort agréable de travailler avec des présidents et une coprésidente avec tant de passion et de doigté.

Dès le début des travaux, nous sommes restés unis et mobilisés autour de notre mission de combattre l'exploitation sexuelle des mineurs, ce fléau de notre époque. Nous avons travaillé avec beaucoup de respect mutuel sur les 58 recommandations. Je vous dirais que c'est une expérience unique. Ça fait 12 ans que je suis ici, à l'Assemblée nationale, comme élue, comme ministre aussi, j'ai fait des années comme ministre, je n'ai jamais eu une expérience de cette sorte. J'ai eu des expériences enrichissantes, mais d'avoir... Dès la première minute qu'on était ensemble, on était unis.

La première partie, évidemment, je vais vous l'expliquer, mais on a... Il fallait qu'on apprenne un peu et beaucoup sur quel était ce phénomène. Jusqu'à la fin des recommandations, tout le long, on a développé des consensus. On était sur la même page. Alors, on a travaillé de façon transpartisane tout au long du mandat avec un objectif commun qui nous a guidés, le mieux-être des victimes et de leurs proches, et nous espérons qu'avec le dépôt de ce rapport on suscitera une véritable prise de conscience de la part de tous les Québécois de l'horreur que vivent les victimes d'exploitation sexuelle. La plupart sont des filles, mais il y a aussi des garçons, des jeunes qui tombent dans une spirale infernale, incapables de s'en sortir sans accompagnement, sans notre bienveillance, sans le filet de sécurité qu'on peut bâtir, qu'on doit bâtir autour d'eux, autour de ces jeunes vulnérables. Comme société, nous devons prévenir cette chute infernale, mais, en tant que société, il faut aussi les accompagner pour en sortir, parce que la sortie de cet enfer est aussi difficile, très difficile.

J'aimerais citer ma collègue la députée de l'Acadie lorsqu'on a déposé le rapport. J'ai été très émue par ses paroles, je pense qu'on a été émus par les paroles de tous ceux qui se sont exprimés. Alors, elle dit : «Pourquoi [ce rapport]? Parce que nous tolérons l'impensable, nous tolérons que des clients abuseurs salissent à tout jamais leurs corps et brisent leurs âmes. Nous tolérons que l'on puisse commander une fille ou un garçon comme on commande une pizza. Nous regardons ailleurs, et ce, jusque dans les plus hautes sphères de la société. On minimise l'achat de services sexuels, pourtant inscrit au Code criminel.» Alors, voilà pourquoi ce rapport avec ses 58 recommandations.

Pour ce qui est du déroulement des travaux, il y a eu plusieurs étapes. La première étape, évidemment, il fallait qu'on apprenne d'experts, on a écouté des experts. Ça a été très difficile, cette partie-là, parce que, bien qu'on connaissait le phénomène, c'est vraiment en profondeur qu'on nous a sensibilisés. Ça prend du temps pour encaisser tout ça, pour bien comprendre, se familiariser avec ce qu'est l'exploitation sexuelle des mineurs, le cycle de violence relié à l'exploitation sexuelle des mineurs et la traite de personnes.

Deuxième phase, je vous dirais, c'étaient des consultations particulières et des auditions publiques qui nous ont permis de rencontrer une soixantaine de groupes qui agissent au quotidien pour lutter contre l'exploitation sexuelle des mineurs. C'était l'occasion de poser des questions, encore comprendre, et ça a été une période évidemment très instructive, puis on a tellement apprécié l'ouverture de tous ceux qui sont venus nous parler de leur expérience, et on doit... Je dois vous dire, Mme la Présidente, à quel point on doit être fiers de ces gens qui travaillent auprès de ces victimes-là avec tant de compassion, parfois peu de moyens aussi.

Et, troisième phase, nous avons tenu des consultations, donc, publiques en novembre 2019. La commission s'est déplacée, donc, à Montréal et ensuite Val-d'Or, une expérience extraordinaire en janvier dernier, et finalement une dernière journée d'auditions à Québec, cet été, le 24 août.

Nous avons entendu des témoins des milieux communautaires, de la santé et des services sociaux, du milieu de la recherche, du domaine médiatique, des communautés autochtones, des services de police et des milieux juridiques. On a vraiment fait le tour du jardin pour être sûrs qu'on avait tout entendu pour être capables de pondre des recommandations qui seraient stratégiques.

• (21 h 10) •

Les recommandations sont regroupées en cinq thèmes. Donc, la première, c'est la recherche, c'est le partage d'expertise. Le deuxième chapitre, si vous voulez, c'est la sensibilisation. Troisième, la prévention. Et une section sur laquelle j'ai travaillé beaucoup cet été, c'est la répression des clients abuseurs et des proxénètes. Alors là, c'est le droit et... C'est vraiment le domaine de la justice et de la sécurité publique. Et, évidemment, pour moi, avec ma formation, c'est une section qui me tenait beaucoup, beaucoup à coeur. Et, finalement, la reconstruction des victimes.

Alors, le premier thème, c'est intéressant, le titre qui a été choisi, c'est Braquer les projecteurs sur une réalité méconnue. En effet, moi, je ne connaissais pas en profondeur cette réalité. Je la connaissais plus ou moins, mais pas en profondeur. C'est peut-être... on reconnaît que ça existe, mais on n'a pas tellement le goût d'aller trop haut, parce que c'est pénible, c'est difficile de penser que des gens souffrent de ce genre d'exploitation.

Alors, on y évoque, dans ce thème-là, l'importance de la recherche. Et donc la toute première recommandation, c'est plus que symbolique, c'est vraiment... ça met le ton de notre mission : «...que le gouvernement [...] déclare formellement et solennellement que la lutte contre l'exploitation sexuelle des mineurs constitue une priorité nationale.» C'est rare qu'on utilise cette expression, «priorité nationale». Ça veut dire que les gens doivent être vraiment unis autour d'un objectif et que cette priorité soit accompagnée d'un plan d'action.

Parmi d'autres recommandations, je les donne en vrac pour cette section : «...que soit créée — puis c'est aussi très important — une chaire de recherche de stature internationale en partenariat avec l'UNESCO se penchant sur le phénomène de l'exploitation sexuelle des mineurs et les réponses à y apporter.» Et de confier «à des experts le mandat de produire un avis concernant la présence de pornographie juvénile sur les sites liés à des entreprises enregistrées au Québec et les mesures mises en place pour la prévenir et la réprimer». À quel point cette recommandation est venue à point! C'est jeudi qu'on a déposé cette recommandation 5 dans le rapport, et c'est à peu près en même temps que l'article, le reportage qui nous a ébranlés, qui nous a horrifiés, du New York Times, titré Les enfants de Pornhub. Les sept recommandations, voilà toute la pertinence de cette recommandation, on en a beaucoup parlé ces derniers temps et... l'importance de cette recommandation.

Donc, deuxième thème, c'est la communication et sensibilisation, donc une prise de conscience qui s'impose. Alors, afin de mobiliser tout le monde, tous les Québécois, Québécoises, la société québécoise entière, dans son entièreté, à lutter contre l'exploitation, ça prend des campagnes. C'est comme d'autres campagnes qu'on a menées, donc l'alcool et de conduire en état d'ébriété, la ceinture. Donc, on a comparé à d'autres campagnes qui ont vraiment changé les mentalités, mais ici, ce seraient des campagnes, évidemment, qui iraient droit au but, multiplateformes et récurrentes, visant donc à informer la population, les familles, les jeunes, les parents, les organismes communautaires, les intervenants sociaux et aussi le secteur de la restauration et de l'hôtellerie — j'y revendrai plus tard, on a des recommandations intéressantes à cet égard — et aux organisateurs de grands événements, parce que c'est beaucoup... le milieu de l'hôtellerie est très, très... c'est comme une plateforme en soi, et les grands événements aussi, pour l'exploitation sexuelle des mineurs, et aussi rappeler le caractère criminel de l'achat de services sexuels. Il y a des gens qui ne se rendent pas compte, mais c'est criminel, c'est dans le Code criminel.

Cette campagne de sensibilisation doit se faire en partenariat avec les communautés autochtones, les Inuits, mais aussi en collaboration avec le gouvernement fédéral. Pourquoi le gouvernement fédéral, cette campagne? On vise en particulier à mener une campagne de sensibilisation spécifiquement aux portes d'entrée et de sortie des aéroports, des ports et des postes-frontière s'adressant à tous les voyageurs, quel que soit leur statut, visant à rappeler le caractère criminel de l'achat ici, au Canada, de l'achat de services sexuels et de la traite des personnes sur le territoire canadien.

L'éducation étant à la base de tout, nous recommandons aussi que le ministère de l'Éducation intègre un contenu adapté spécifique à la prévention et au risque de l'exploitation sexuelle des personnes mineures au cours d'éducation à la sexualité au primaire et au secondaire. Alors, on a parlé avec des sexologues, des professionnels du domaine, ils disent : C'est tout à fait faisable, on adapte le cours à l'âge de l'enfant. Donc, eux, ils sont capables de guider le système scolaire, le milieu de l'éducation, qu'est-ce qui est convenable, à quel âge, à quel âge ils peuvent comprendre certaines choses, mais ils disent que c'est absolument essentiel de sensibiliser les jeunes. La meilleure protection, Mme la Présidente, c'est soi-même. Donc, la meilleure protection, on l'a tous vu, bien, ceux qui sont parents : équiper nos jeunes à l'âge approprié. On le fait dès l'âge de deux ans, trois ans, dès qu'ils comprennent, pas nécessairement ce sujet, mais à quoi faire attention. Donc, évidemment, la meilleure prévention, c'est l'éducation.

Le thème trois, c'est la prévention et la formation, donc c'est toute la notion de tisser un filet de sécurité autour des jeunes. Et en matière de prévention et de formation, nous avons plus d'une demi-douzaine de recommandations qui touchent ce thème. Parmi les enjeux soulevés, c'est l'équilibre entre la protection... il y a plusieurs enjeux, mais je vais juste en souligner quelques-uns, parce qu'il y en a beaucoup dans ce rapport, c'est la protection des renseignements personnels, mais aussi la protection des jeunes. Et il y a un conflit entre les deux, parfois, parce que la protection des renseignements personnels fait en sorte qu'on ne peut pas partager certaines informations qui aideraient le système de justice et de sécurité publique à protéger le jeune.

Et, dans le cadre de leurs activités, là, je cite du rapport, les services policiers, on en a beaucoup parlé, avec la police, à quel point ça peut être un obstacle, cette loi, donc il faut trouver une solution. «Dans le cadre de leurs activités, les services policiers, les établissements scolaires, les organisations affiliées au réseau de la santé et des services sociaux et les organismes communautaires colligent des données sur les jeunes et leur entourage : enquêtes, rapports, dossiers, observation des intervenants, etc. Du recrutement a-t-il été observé dans un secteur donné? Un élève montre‑t‑il une baisse soudaine de ses résultats scolaires? Un jeune a-t-il de nouvelles fréquentations qui influencent son comportement? Une victime a-t-elle reçu des soins qui relèvent des violences liées à l'exploitation sexuelle? Le partage de renseignements de cette nature entre les divers intervenants oeuvrant auprès des mêmes jeunes peut s'avérer très utile pour mieux cibler les efforts de prévention.

«[Mais] l'échange est limité par la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et de la protection des renseignements personnels. [Et] dans plusieurs circonstances, les intervenantes et les intervenants ne peuvent partager l'ensemble des données.

Donc, à cet égard, la commission «recommande que le gouvernement du Québec uniformise un protocole approprié de partage des renseignements personnels et d'information entre les intervenants des services sociaux et des services policiers dans l'optique de prévenir et d'intervenir pour protéger les mineurs de situations d'exploitation sexuelle».

Je peux vous dire, Mme la Présidente, je suis, donc, à l'opposition, responsable... la critique en matière de protection de la jeunesse, et ce thème-là revient très, très souvent. Le problème, c'est qu'ils ne peuvent pas aller plus loin parce qu'ils doivent protéger les renseignements personnels. La police fait constamment face à cet obstacle, et c'est en vertu de la loi. Donc, il faut trouver une façon d'ouvrir un peu pour pouvoir avoir ces protocoles pour aider ces jeunes-là.

Formation. Bien important, bien important. Et d'ailleurs j'ai bien envie de commencer avec ça. Bon, ici, on parle de formation dans tous les domaines où les gens seraient portés à travailler auprès des jeunes. Voici la citation d'une jeune victime d'exploitation sexuelle qui vous permettra de comprendre l'importance de cette recommandation sur la formation, et je cite : «Je me suis présentée à l'hôpital après une fausse couche, couverte de bleus et sans carte d'assurance maladie. Personne n'est intervenu.» Paroles d'une survivante, une survivante sous l'emprise d'un proxénète. Et souvent le proxénète est là, à l'urgence. Et donc, si les infirmières, les médecins et tout le personnel traitant ne sont pas capables d'identifier les indices qui montreraient que cette personne est aux prises, ils ne vont pas poser les bonnes questions à cette jeune fille. Donc, on a eu d'ailleurs un témoignage dans ce sens-là. Et une équipe spécialisée en la matière du CUSM, donc on parle du centre McGill, sont venus... une infirmière qui est très au fait de ce dossier et un médecin nous ont dit : C'est absolument urgent d'avoir ces programmes de formation dans le réseau de la santé, parce qu'il manque beaucoup ces drapeaux rouges pour leur dire que voici une jeune qui est vulnérable et qui est aux prises... et dans les griffes, si vous voulez, d'un proxénète.

• (21 h 20) •

Donc, il y a beaucoup de professions et d'intervenants qui sont ciblés : ceux dans le réseau de la santé, évidemment, le personnel de première ligne dans les communautés autochtones, les pharmaciennes, pharmaciens — parce que, les pilules, ils le voient, le genre de pilules dont elles ont besoin, ils seraient capables de voir... ils voient la jeune fille qui vient pour sa prescription et ils voient... les signaux sont là aussi — l'ensemble du personnel enseignant, évidemment, les intervenants des niveaux primaire et secondaire, la magistrature de la chambre criminelle et pénale ainsi que la chambre de la jeunesse, une formation pour eux aussi, les procureurs aux poursuites criminelles et pénales, personnel policier civil, autres intervenants qui sont près de la jeunesse. Et on recommande que le ministère de la Santé et des Services sociaux s'assure que l'ensemble des professionnels oeuvrant auprès des jeunes connaisse l'obligation, ça c'est important, l'obligation de dénoncer des situations à risque d'exploitation sexuelle en vertu de la Loi sur la protection de la jeunesse. Il y a beaucoup de professionnels qui ne connaissent pas cette obligation. Donc, ça aussi, c'est important dans cette formation.

Il y a un programme, un programme de formation qui connaît un grand succès dans le domaine policier, c'est le projet Les Survivantes du Service de police de la ville de Montréal. C'est vraiment un programme extraordinaire. Ils sont venus nous expliquer comment ça fonctionne. Ce programme a pour objectif de sensibiliser les policières et policiers à cette réalité. Il les informe sur la nature de l'exploitation sexuelle afin de lutter contre les stéréotypes entretenus sur cet univers. Des survivantes, accompagnées des intervenantes du programme, exposent leur parcours dans le monde prostitutionnel. Nous avons rencontré ces policiers et policières, ils sont extraordinaires. Vous ne pouvez pas vous imaginer la relation qui se développe entre cette victime et ces agentes, souvent, et agents policiers. Très touchant, extraordinaire. Il faudrait que dans toutes les régions du Québec, parce que ce phénomène existe dans toutes les régions du Québec, on puisse multiplier, donc, des programmes de ce genre, comme le programme de la SPVM.

Pour ce qui est, ensuite... Il y a aussi une série de recommandations qui touchent le milieu touristique. Donc, ça, c'est important aussi, tout est important. «La commission recommande [par ailleurs] que le gouvernement du Québec crée un sceau "Non à l'exploitation sexuelle des mineurs" et en fasse la promotion [...] en partenariat avec l'industrie hôtelière, les festivals, les grands événements, l'industrie du transport de personnes [...] sur l'ensemble du territoire du Québec.

«Que le sceau soit disponible pour l'ensemble des commerces et que son obtention repose sur des conditions dont la formation obligatoire du personnel — donc, ils seraient obligés de former leur personnel pour reconnaître et aussi dénoncer lorsqu'ils voient l'exploitation ou ont des soupçons — le dépistage de l'exploitation sexuelle des mineurs et l'affichage au sein du commerce d'une publicité sensibilisant à l'exploitation sexuelle des mineurs.» Donc, on embarque tout ce milieu-là dans cette guerre contre ce fléau.

Là, je voulais vous parler aussi de protection de la jeunesse plus particulièrement. Il y a plusieurs recommandations qui touchent la protection de la jeunesse. Je les ai regroupées pour mieux comprendre la portée, elles sont un peu disparates dans les différents segments.

Vous savez que la Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse sort avec son rapport dans quelques mois. Il y a eu des échanges entre les deux commissions, on voulait s'assurer d'une harmonisation entre nos recommandations qui touchent la jeunesse. Moi, je ne sais pas quelles seront les recommandations de la commission Laurent, mais on s'est assurés qu'il y avait des échanges.

Donc, parmi les recommandations : «La commission recommande — notre commission — que le gouvernement du Québec interdise la mixité des clientèles dans les centres jeunesse afin d'optimiser le rétablissement des victimes d'exploitation sexuelle.» Vous comprenez peut-être instinctivement pourquoi on ne veut pas mélanger, mais je vais peut-être vous l'expliquer. C'est que, dans la mixité des clientèles, c'est-à-dire la cohabitation de victimes d'exploitation sexuelle avec d'autres jeunes hautement vulnérables au sein des centres jeunesse... peut s'avérer néfaste pour les jeunes hébergés. Non seulement des jeunes vulnérables peuvent y être exposés à une promotion de la marchandisation de services sexuels, les victimes d'exploitation sexuelle n'y trouvent pas toujours la quiétude nécessaire pour se reconstruire au contact des autres vivant des problématiques très différentes. Alors donc, ça, c'est une recommandation, évidemment, bien importante.

Je voudrais vous parler aussi plus largement des centres jeunesse et des fugues. Dans les centres jeunesse, malheureusement... On en a beaucoup parlé il y a plusieurs années, quand notre collègue Lucie Charlebois avait... donc l'année des modifications à la Loi sur la protection de la jeunesse, et je vais vous décrire cette réalité. Donc, dans les centres jeunesse, malheureusement, les jeunes pris en charge par la Direction de la protection de la jeunesse et placés dans un centre jeunesse sont encore plus vulnérables, plus vulnérables, parce qu'elles sont, imaginez-vous, dans les centres jeunesse, aux dynamiques d'exploitation sexuelle. Nous avons appris que certains aspects du fonctionnement des centres jeunesse sont vraiment alarmants, car ils contribuent à nourrir le phénomène de l'exploitation sexuelle. Ces jeunes sont souvent pris en charge par la protection de la jeunesse en raison de traumatismes comme ceux liés à des violences sexuelles, à l'abandon des parents, à la négligence. Ils sont fragilisés, aisément identifiables. Ces établissements peuvent devenir des cibles de recrutement pour les proxénètes. De plus, les centres jeunesse rassemblent des jeunes qui vivent des problèmes de natures différentes. Ainsi, des jeunes filles exploitées sexuellement peuvent faire la promotion de l'échange de services sexuels auprès d'autres adolescentes, tout aussi vulnérables, qui sont à la recherche de liberté, de reconnaissance ou d'argent. Enfin, les conditions de l'hébergement s'apparentent à une forme de détention, pour ces adolescentes, alors elles chercheront à s'échapper à tout prix de cet encadrement rigide.

Je vais vous donner des statistiques qui sont frappantes. Ça a été repris dans La Presse il y a quelques mois. Les fugues constituent d'ailleurs un facteur de risque majeur. Selon une analyse menée par l'Équipe intégrée de lutte contre le proxénétisme, dans les dossiers de proxénétisme, 44 % des victimes mineures étaient en fugue lorsqu'elles ont été recrutées, 44 %. Plus encore, 77 % de ces jeunes s'étaient enfuis d'un centre jeunesse, c'est-à-dire le tiers des jeunes sous l'emprise d'un proxénète. Alors, ça, moi, quand j'ai vu ces chiffres-là, écoutez, j'étais vraiment frappée. Et donc les recommandations qu'on a puis les recommandations qui vont venir de la commission Laurent vont nous permettre de vraiment nous attaquer à cette problématique.

Et nous avons été désolés d'apprendre que des centres jeunesse du Québec, voués à la protection des jeunes les plus vulnérables de notre société, se transforment en lieux de recrutement de futures victimes de proxénètes. Soulignons que l'immersion dans le milieu du proxénétisme se déroule aussi à l'adolescence ou au début de l'âge adulte.

Des mesures de prévention sont nécessaires et doivent être généralisées. Certains centres jeunesse ont développé une expertise, interviennent pour renforcer les facteurs de protection ou pour offrir un filet de sécurité aux garçons et aux filles. Ces interventions prennent différentes formes. À titre d'exemple, des ateliers adaptés au parcours des jeunes portent sur l'éducation à la sexualité et sur le développement de l'estime de soi et des compétences. Il y a un programme qui s'appelle Pour ados seulement qui a été mis en place au Centre jeunesse de Montréal. C'est un exemple de contenu pour aider les jeunes en difficulté à adopter une sexualité saine et responsable. Donc, nous avons une recommandation justement qui va dans ce sens-là. C'est des cours aussi sur la sexualité pour les accompagner dans leur, comment dire, leur sortie de cet enfer.

Mme la Présidente, bon, la section Répression : la victime au centre de nos actions, c'est comme ça qu'on a appelé cette section, nous avons fait 19 recommandations qui touchent la sécurité publique et la justice, autant au point de vue des mesures de répression que de financement. Donc, on touche des actions dans le Code criminel ou ailleurs, des actions policières, mais aussi le financement dont on a besoin pour aider les victimes. Plusieurs recommandations s'adressent au gouvernement fédéral, et évidemment je ferais donc... je ne peux pas rendre justice à cette section sur la justice, parce qu'il y a beaucoup, beaucoup de matière intéressante. Dans le temps que j'ai, j'aurais voulu aller plus profondément, mais j'invite les gens qui y sont intéressés, c'est très, très, très profond et très dynamique, les recommandations qui ont été faites, évidemment, avec le soutien qu'on avait d'experts. Je ferai donc un survol rapide et je vais faire de mon mieux pour vous l'expliquer. Comme je vous ai dit, cette section-là me tient à coeur. Tout l'été, j'ai travaillé sur ces mesures de répression avec les collègues.

• (21 h 30) •

Parmi les recommandations, nous demandons notamment au gouvernement fédéral, par l'entremise du gouvernement provincial, évidemment, du Québec, de «prendre le décret permettant l'entrée en vigueur de la disposition autorisant l'imposition de peines consécutives pour les trafiquants de la traite de personnes âgées de moins de 18 ans». Ce ne serait pas trop sévère, c'est sûr, d'avoir des peines consécutives quand on reconnaît le sérieux de ce crime qui nous horrifie.

«...que les clients abuseurs reconnus coupables soient inscrits au Registre national des délinquants sexuels.» On a eu un consensus de tous les membres de notre commission pour cette recommandation. D'ailleurs, toutes les recommandations ont été consensuelles.

Que, les établissements hôteliers, les propriétaires de lieux d'hébergement touristique, les salons de massage érotique et les saunas, on leur rappelle «leur obligation de signaler toute situation à risque d'exploitation sexuelle de mineurs».

«...que le ministère de la Justice examine la possibilité de modifier le Code civil du Québec afin d'accorder aux victimes d'exploitation sexuelle un recours en dommages et intérêts imprescriptible contre un établissement hôtelier qui n'a pas agi ou alerté la police alors qu'il savait ou devait savoir qu'une personne mineure y était sexuellement exploitée.»

Je veux vous dire que j'ai trouvé cette recommandation par ce qui se fait aux États-Unis. Les États-Unis ont de l'avance sur nous. Alors, je vous explique. Tous les hôtels ont l'obligation de mettre un affichage pour dire que l'exploitation sexuelle des mineurs, c'est un crime et qu'ils doivent aviser les autorités compétentes s'ils ont des doutes. Ensuite, s'il y a des drapeaux rouges... Et, des drapeaux, on nous explique : S'il y a 10 hommes qui attendent dans le couloir, c'est ça qu'on voit, là, sur les sites américains, 10 qui attendent en file, qu'on commande des serviettes toute la journée, qu'une jeune est rentrée sans valise, accompagnée d'un adulte, généralement une femme... C'est les drapeaux rouges que les hôtels connaissent. Alors, s'ils ont ignoré ces drapeaux rouges, et, dans le langage, que j'ai vu... «knew or should have known», le savaient ou auraient dû le savoir...

La victime, qui, à l'époque, est traumatisée, peut-être que ce n'est pas sur le coup qu'elle est capable de mener, donc, une action contre l'hôtel, mais, avec le temps, avec la thérapie, ça peut être 10 ans, 20 ans plus tard, et c'est pour ça que, ce «statute of limitations», cette prescription, dans notre Code civil, il n'y a pas de délai, il n'y a pas de limite, parce que ça peut lui prendre cinq, 10, 15 ans pour récupérer, se rendre compte qu'est-ce qui s'est passé. Depuis qu'ils ont institué des lois comme ça en Oregon, Washington, Pennsylvanie, quelques autres, imaginez-vous, les hôtels font attention, parce qu'ils ont été trouvés... pas coupables, ce n'est pas le Code criminel, c'est en vertu du droit civil, donc ça peut leur coûter des fortunes s'ils ne font pas attention et ça les rend imputables de ce qu'ils observent.

Alors, je tenais à l'expliquer parce qu'on a réussi à intégrer ça dans notre rapport. Ce serait vraiment une innovation au Canada d'avoir une mesure de la sorte, il n'y a pas une autre province qui l'a. Alors, j'espère qu'on va s'inspirer et le gouvernement va agir. Alors, on demande au ministère de la Justice d'examiner cette possibilité, mais, personnellement, je vais pousser, pousser, pousser pour cette modification.

«[Qu'on] augmente les ressources humaines et financières de l'Équipe intégrée — il me reste, donc, quatre minutes — de lutte...» Ça, c'est une équipe extraordinaire. Je vous dirais qu'ici aussi on veut nommer, au Directeur des poursuites criminelles et pénales, des procureurs attitrés — 10... neuf minutes — donc on nomme, donc, au DPCP, le Directeur des poursuites criminelles et pénales, des procureurs attitrés aux dossiers sur l'exploitation sexuelle dans toutes les régions. Donc, pourquoi? Parce qu'ils développent une expertise, uniformité de traitement des dossiers au sein du système judiciaire. Ça nous prend ça.

«...mieux outiller les corps de police autochtones pour faire face aux enjeux liés à l'exploitation sexuelle des mineurs.»

«...bonifier les ressources humaines et financières afin de renforcer les équipes spécialisées dans l'analyse des nouvelles technologies et des médias sociaux et que ces ressources appuient l'Équipe intégrée de lutte contre le proxénétisme dans ses enquêtes.» Ça, on a beaucoup entendu les corps policiers nous dire... surtout ceux qui sont spécialisés, ils ont dit : Oui, on est spécialisés, mais ça nous prend d'autres ressources. Écoutez, c'est une course contre la montre pour sauver ces jeunes filles, et ils ont besoin de ces ressources-là. Je vous dirais que la police en général, tous ceux qui sont dans ce domaine, ça nous prend plus de ressources. Alors, c'est... Je pense qu'on a été touchés par leur dévouement à cette cause, ceux qui travaillent dans ce domaine. Ce n'est pas facile pour eux, mais, une fois qu'ils développent leur expertise, je vous dis, ils restent dans le domaine pendant plusieurs années. Ils sont très dévoués, mais c'est difficile, surtout avec l'Internet. On l'a vu avec Pornhub et la compagnie mère, à quel point... donc, le nom m'échappe, mais à quel point c'est difficile, hein, parce que, les technologies, il y a de l'innovation constante. Mais le Québec, surtout Montréal, est un centre d'intelligence artificielle... MindGeek! Bon, c'est de l'anglais, MindGeek. Donc, on a vu à quel point c'est rapide, c'est innovateur, ça change. Comment rester à l'affût? Ils ont besoin de plus de ressources.

La commission recommande que le DPCP et le ministère de la Justice développent et financent un programme de mesures de rechange aux procédures judiciaires traditionnelles destinées à l'achat de services sexuels de majeurs.

Le thème cinq, bon, c'est la reconstruction. On appelle ça briser le cycle de l'exploitation. Et je vais vous citer, pour bien comprendre à quel point c'est difficile, la reconstruction... c'est une victime. Je cite : «Le plus difficile, c'est de se rebâtir. Tu n'as pas de C.V., pas de perspective, l'estime de soi à plat. Ça prend probablement toute une vie pour se rebâtir. Cette expérience-là sera toujours en moi.» Alors, voilà les propos d'une survivante de l'exploitation sexuelle qu'on a entendue, donc, au mois d'août, au mois d'août dernier, le 24 août.

Et ensuite, autre citation : «Si les mécanismes d'entrée et de maintien dans ce milieu sont connus, la sortie d'une dynamique d'exploitation sexuelle est tout à fait différente en fonction de chaque jeune.» Donc, à quel point ils ont besoin d'un accompagnement serré, ciblé, qui comprend plusieurs types de professionnels.

Mais ça vaut tout l'argent qu'on peut investir parce que c'est une vie qu'on sauve et c'est une vie d'une jeune femme, généralement, la majorité, c'est des femmes, mais il y a des jeunes hommes, qui va contribuer, éventuellement, à la société, qui va se stabiliser. Alors, il n'y a pas de prix à ça, il n'y a pas de prix à retrouver une vie. C'est comme sauver une vie qui était en train de mourir, on sauve juste à temps pour en faire une citoyenne à part entière de la société.

Parmi les recommandations du comité pour aider les victimes et sortir du cycle de l'exploitation, nous recommandons «que le gouvernement du Québec instaure un programme spécial de sortie de la prostitution ayant pour objet le versement de prestations d'aide financière à toutes les victimes en processus de reconstruction [en] leur assurant notamment un revenu, un accès aux services de santé [...] et psychologique et un logement», et que des lieux d'hébergement spécifiques et hautement sécuritaires soient créés sur l'ensemble du territoire québécois afin de protéger, soigner et contribuer à leur réinsertion sociale. Nous recommandons aussi «une modification à la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels afin d'ajouter le proxénétisme et la traite des personnes à la liste des crimes indemnisés, de reconnaître les victimes d'exploitation sexuelle des mineurs, d'abolir le délai de prescription, et ce, même si le crime a été commis ailleurs au Canada».

Combien de minutes, Mme la Présidente? Parfait. Alors, en conclusion, permettez-moi de citer Rose Sullivan, survivante et cofondatrice du Collectif d'aide aux femmes exploitées sexuellement, qu'on a entendue le 6 novembre 2019. Et je la cite, et on la cite dans le rapport. Plusieurs d'entre nous la citent parce que ça a été très émouvant. Elle est très ouverte, très passionnée par le sujet et ouverte à partager son expérience personnelle. Et elle a le feu, elle a le feu au coeur, et elle a transmis, donc, sa passion et sa «dédication» : «On possède toutes en nous ce qu'il faut pour prendre ou reprendre le pouvoir sur notre vie et on lutte quotidiennement pour y arriver. Vous, vous avez le pouvoir d'alléger nos luttes, de les rendre moins pénibles et de faire en sorte qu'elles ne soient pas vaines.»

Donc, elle s'adresse à nous, législateurs, ici, que nous sommes, que nous pouvons changer le cours des choses, aider ces femmes à devenir entières à nouveau. Pour faire ça, il faut d'abord, et je vous dis, ce n'est pas facile, ouvrir les yeux. On a tous trouvé ça très difficile au début, très difficile. Je vais être honnête avec vous, cet été, parce que je travaillais beaucoup sur le dossier, j'ai fait des cauchemars, et c'est des cauchemars où on a... ce n'est pas nécessairement... Tout ce qu'on sait, c'est qu'on se réveille puis on est bouleversé parce qu'on a tellement pris ça... Mais, quand on arrive sur les solutions puis qu'on a commencé à faire les recommandations, c'est comme, nous-mêmes... et je pense que tous mes collègues ont vécu la même chose, on se sent «empowered», comme on dit en anglais, que, O.K., on a la capacité de changer des choses. Quand on a déposé le rapport, je ne peux pas vous dire la fierté qu'on a ressentie, mais aussi un soulagement. Voilà, on partage avec la société québécoise tout ce travail qu'on a fait tous ces mois.

• (21 h 40) •

Alors, tous les députés qui ont participé à ce rapport partagent un sentiment de fierté, mais aussi un sentiment d'urgence. Nous avons travaillé de façon transpartisane pour atteindre notre objectif commun, assurer le mieux-être des victimes et de leurs proches. Nous estimons impératif de changer les mentalités pour arrêter la banalisation, lutter contre cette banalisation de l'exploitation sexuelle, et ce rapport trace la route. Moi, je crois bien, je pense qu'on y croit tous, que notre rapport trace la route, et nous demandons au gouvernement et à la population entière à s'engager activement dans cette lutte contre l'exploitation sexuelle des mineurs. Les premiers échos qu'on a du gouvernement sont positifs. Évidemment, c'est le gouvernement qui a mis sur pied cette commission, et j'en suis ravie. J'étais au ministère de la Justice, et on a fait différentes choses au fil des années. D'ailleurs, plusieurs de ces équipes à la Sécurité publique ont été créées par notre... des gouvernements antécédents. Donc, il y a eu du travail qui a été fait, et c'est du travail... D'ailleurs, la beauté de la chose, c'est que c'est du travail qui porte fruit. Là, il faut investir et multiplier.

Alors, Mme la Présidente, je conclus sur ça, une expérience extraordinaire. Je sens que nous nous sommes tous mobilisés. La société a évolué, mais je vous dirais que les parents ont besoin de soutien, et les enfants et les jeunes ont besoin de soutien. On a rencontré des parents, on a entendu l'histoire de parents... Honnêtement, aucune idée que ça pouvait arriver à leurs jeunes filles. Plusieurs ont expliqué comment les proxénètes fonctionnent pour qu'elles deviennent prisonnières. Dans un premier temps, elles pensent que c'est l'amour, elles y croient. Et puis il va lui faire des cadeaux et la traiter comme une reine, une princesse. Et ça peut durer, on nous a dit, ils sont patients, très patients, ils peuvent attendre deux ans, parce qu'après ça, une fois qu'ils tournent la vis, c'est la fin.

Alors, merci, Mme la Présidente. Voilà mon discours.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce. Et maintenant je vais céder la parole à Mme la députée de Lotbinière-Frontenac.

Mme Isabelle Lecours

Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) : Merci, Mme la Présidente. C'est un privilège, dans un mandat de député, de pouvoir participer à une commission spéciale, parce qu'en vertu de l'article 178 du règlement de l'Assemblée nationale du Québec, la Commission spéciale sur l'exploitation sexuelle des mineurs, c'est la sixième commission spéciale à être formée depuis 1984. La dernière commission spéciale remontait à 2009, sur la question du droit de mourir dans la dignité. Donc, l'exploitation sexuelle des mineurs, c'est un sujet important et surtout très inquiétant, qui devrait tous nous préoccuper. C'est une réalité méconnue, comme la plupart de mes collègues l'ont dit.

Il y a plusieurs mois, les Québécois ont pu suivre la série Fugueuse. C'est une série qui est très, très dure, mais c'est une série qui a été écrite à partir de faits vécus. L'exploitation sexuelle des mineurs, c'est un phénomène omniprésent, mais invisible parce que ça se passe dans des chambres de motel, d'hôtel ou des appartements. Ce n'est pas dans la rue que ça se passe. On doit prendre conscience du phénomène, qui est trop souvent banalisé. Ça peut arriver à toutes les familles. On a entendu des témoignages de parents, et, parmi eux, il y avait des policiers, il y avait des intervenants sociaux. Donc, personne n'est à l'abri.

Ce qu'on a entendu était très difficile, c'est des choses que je ne pourrai jamais oublier. Des victimes ont partagé leurs histoires avec nous. Une dame nous a raconté que, pour elle, les abus ont commencé avec son grand-père à l'âge de cinq ans. Et ça, ça s'est poursuivi une grande partie de sa vie. Ça nous a tous ébranlés. Pour ma part, ça m'a profondément choquée parce que, pour moi, il n'y a rien de plus important qu'un enfant. Les enfants, ils n'ont rien demandé en venant au monde. Et nous, en tant qu'adultes, nous devons les aimer tels qu'ils sont, les guider et les protéger, pas les détruire.

Des parents sont venus nous parler du cauchemar qu'ils ont vécu, de l'impuissance qu'ils ont ressentie, des images qu'ils avaient et qu'ils auront toujours dans la tête. Ce n'est pas facile de parler de sa souffrance, des difficultés vécues. J'aimerais dire aux victimes puis aux familles : Vous avez tout mon respect. Ce n'est pas facile de vivre avec de telles atrocités. Ce n'est pas facile de se relever. C'est un long chemin.

Nous avons entendu des intervenants, des experts engagés, toutes des personnes de coeur. On nous a parlé de ce qui existe comme programmes ou initiatives pour venir en aide aux victimes. Nous avons parlé des problématiques que les organismes rencontrent, des besoins, des opérations policières, des sentences.

Ce qui nous a guidés durant les 18 mois qu'a duré la commission spéciale, ce sont les victimes. 18 mois de travail, un rapport de 132 pages, 58 recommandations. Nous avions tous le souci de mettre les victimes au centre de nos actions. Paradoxalement, nous avons eu peu de données ou d'information sur les proxénètes et les clients abuseurs. C'était un peu comme l'éléphant dans la pièce. Toute cette problématique est pourtant causée par eux. S'il n'y avait pas de demande, il n'y aurait pas d'exploitation sexuelle de mineurs.

Nous avons tenté de tracer le portrait des proxénètes, et, à ne pas en douter, ce sont des individus manipulateurs, violents, qui n'ont aucun respect pour les humains. Ils sont motivés par l'appât du gain. Ils font miroiter des objets de luxe, une vie de rêve et de partys à leurs victimes. La réalité est tout autre. Et, pour ce qui est des clients abuseurs, c'est une personne sans scrupule, ça, c'est certain, pas d'âge ni de métier spécifique. Ça pourrait être notre voisin, notre oncle, notre patron. C'est un acteur central mais anonyme.

Pendant 18 mois, on s'est interrogés sur la meilleure façon de casser la demande et comment mieux soutenir les victimes. Nous avons regardé ce qui se fait sur le sujet au Canada, aux États-Unis et ailleurs dans le monde. Nous avons accompli un travail énorme.

Je veux dire merci à tous ceux qui ont participé à la commission : les victimes, leurs familles. Je veux souligner leur courage d'être venus nous parler mais aussi leur courage pour s'être relevés et continuer. D'autres n'en ont pas eu la force, mais il ne faut pas les juger. Merci aux intervenants, aux experts, aux différents services de police qui sont venus nous rencontrer. Merci aux collègues députés, qui avaient tous à coeur de mener à bien ce mandat. Un merci particulier au président, député de Vachon, et puis à ma collègue des Plaines, qui a repris la relève avec brio. Merci au SPVM, qui nous a offert l'opportunité d'accompagner leurs agents pour une soirée de patrouille. Merci à la communauté autochtone de Lac-Simon qui nous a accueillis pour nous parler de la réalité des femmes autochtones. Merci à toute l'équipe de l'Assemblée nationale qui nous a accompagnés pour la coordination des travaux, la recherche, la rédaction. Merci pour votre grand professionnalisme. Un merci tout spécial à ma collègue députée de Repentigny, qui a porté ce dossier lorsque la CAQ était dans l'opposition, sans jamais pu être entendue du gouvernement de l'époque. C'est notre gouvernement qui a mis sur pied la commission spéciale, et j'en suis très fière. Je suis fière de faire partie d'un gouvernement qui a du coeur et qui a de la volonté de changer les choses.

• (21 h 50) •

D'ailleurs, j'aimerais souligner que nous sommes déjà en action, la recommandation n° 50, qui demande une modification à la Loi d'indemnisation des victimes d'actes criminels afin d'ajouter le proxénétisme et la traite de personnes à la liste des crimes indemnisés, de reconnaître les victimes d'exploitation sexuelle des mineurs, d'abolir le délai de prescription, et ce, même si le crime a été commis ailleurs au Canada. Aujourd'hui, le ministre de la Justice a déposé le projet de loi n° 84 visant à réformer en profondeur le régime de l'IVAQ.

La réforme proposée permet de répondre à la demande de reconnaissance qu'exprimaient les personnes victimes depuis plusieurs années. Le projet de loi propose d'abolir la liste des infractions visées et de prévoir que le régime d'indemnisation soit désormais applicable pour toute infraction contre la personne. Elle permettrait désormais l'indemnisation d'une personne victime, entre autres, de menaces de mort, de harcèlement criminel et de proxénétisme.

La réforme propose de rendre imprescriptible le dépôt d'une demande d'indemnité en matière d'agression à caractère sexuel, de violences subies pendant l'enfance et de violence conjugale. Il est également proposé de rendre admissibles au régime les personnes légalement domiciliées au Québec victimes d'une infraction à l'extérieur de la province, que ce soit au Canada ou à l'étranger, si elles remplissent certaines conditions. Nous aurons l'occasion, à la prochaine session parlementaire, de faire cheminer ce projet de loi important et qui correspond parfaitement à notre recommandation.

Mme la Présidente, tout à l'heure, j'ai parlé du privilège, pour un député, de participer à une commission spéciale et à celle-ci en particulier. Quand on se présente en politique, on a tous une cause qui nous tient à coeur, qui nous motive. Pour ma part, je me suis présentée en politique pour améliorer le sort des enfants, des jeunes et des femmes. En tant que parlementaire, je me sens doublement privilégiée, puisque, par notre travail, nous avons le pouvoir de changer les choses.

Nous allons mettre en application les recommandations contenues dans le rapport, pour le bien des victimes. Nous ne les laisserons pas tomber. Le premier ministre a mandaté ma collègue ministre de la Sécurité publique et vice‑première ministre pour que les recommandations soient mises en place. C'est une femme d'action efficace, et j'ai confiance pour la suite des choses. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Lotbinière-Frontenac. Y a‑t‑il d'autres interventions? Oui. Alors, M. le député de...

M. Christopher Skeete

M. Skeete : Sainte-Rose.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Sainte-Rose. Excusez-moi. Alors, la parole est à vous.

M. Skeete : C'est beau. Bien, merci beaucoup, Mme la Présidente. Très content de prendre la parole ce soir, parce que j'ai eu le privilège de participer à la Commission spéciale sur l'exploitation sexuelle puis j'ai appris beaucoup de choses. J'ai appris des choses en tant qu'homme, en tant que papa — ça m'a fait assez peur — puis aussi en tant que parlementaire. Je vais vous faire une petite liste, je me suis pris des petites notes pour être sûr que je n'oublie rien.

Je me souviens encore de la première fois que j'ai eu mon ordinateur, j'avais 16 ans, puis l'Internet, c'était une nouvelle invention. Puis, je me souviens, la première chose que j'ai faite à 15, 16 ans, c'est aller sur un chat. Puis là on découvre rapidement, sur un chat, qu'il y en a de toutes les couleurs. On apprend à échanger avec des jeunes de notre âge, puis ça, c'est le bout le fun, puis on apprend aussi qu'il y a des gens, bien, qui cherchent autre chose sur ces sites-là. Moi, j'ai eu la chance que l'Internet, ce n'était pas trop évolué à cette époque-là. Puis, heureusement, dans mon temps, il n'y avait pas des caméras partout. Il n'y avait pas des appareils photo partout. Il n'y avait pas des vidéos partout. Aujourd'hui, les jeunes doivent composer avec cette réalité-là, et on doit faire mieux pour les protéger, pour encadrer cette réalité technologique là. Ça a été, pour moi, ma première ouverture à cette réalité sexuelle, les adultes, les jeunes. On est ado en même temps. Ça fait qu'on essaie de se comprendre. On essaie de se découvrir. On ne comprend pas trop comment ça marche puis on espère s'en sortir correctement.

La prochaine fois que j'ai vécu des moments où est-ce que je me suis senti vulnérable, où est-ce que j'ai vu la vulnérabilité des autres, c'était lorsque je suis rentré étudiant à la douane. J'ai eu la chance d'être étudiant à la douane puis après ça douanier, et on m'a choisi pour travailler à la douane postale. On ne le sait pas, mais, quand on reçoit une lettre, ça a passé les douanes, et souvent on n'y pense pas. Et j'ai fait deux belles années à la douane postale. Mais la poste, c'est surtout... Encore une fois, en 2002, l'Internet, quand même, c'est là, mais ce n'est pas ce que c'est aujourd'hui, mais, à l'époque, c'était une façon de garder l'anonymat. Alors, c'est le fun, on va sur l'Internet puis on peut acheter ce qu'on veut sans être obligé de regarder une personne dans les yeux pour expliquer qu'est-ce qu'on achète. Ça fait qu'on en voit des vertes et des pas mûres, à la douane postale.

Et, je me souviendrai toujours, il y avait une section qui s'appelait la prévention, et, derrière la prévention, il y avait un bureau qui était fermé et il y avait un douanier qui était là, attitré à la prévention. Et, lui, son travail, c'était d'avoir quatre télévisions avec quatre appareils, des DVD, des VHS, à l'époque, Mme la Présidente, ça me date un peu — pas de Beta, par exemple, je ne suis pas si vieux que ça — et puis on regarde la télé. Puis, je me souviendrai toujours, il portait des lunettes, dans sa quarantaine, puis il y avait ses télécommandes, puis il se promenait avec ses télécommandes, puis il regardait les vidéos sur «fast forward», comme on dit. Puis c'est là qu'on voit que c'est une industrie, la pornographie. C'est une industrie où est-ce qu'on fait la marchandisation du corps des gens, oui, parce qu'il y a aussi des hommes, mais surtout les femmes. Et le douanier qui a l'onus, l'odieux, de surveiller les vidéos et de chercher pour des choses qu'on appelait prohibées, des choses qu'on désignait obscènes... C'est des choses qu'une fois qu'on les voit on ne peut plus ne plus les voir, c'est quelque chose qui reste avec nous et qui nous marque. Et c'est très gratifiant de les saisir, ces affaires-là, parce que tu as vraiment l'impression de faire quelque chose. Puis, quand on parlait avec nos partenaires policiers, on envoyait les vidéos puis on avait le sentiment vraiment de contribuer à protéger des gens et à surtout poigner les coupables.

Mais ce n'est pas ça qui était le plus désolant. Le plus désolant, dans mes souvenirs, à ce moment-là, c'étaient les vidéos qui étaient... on le sait tous, qu'est-ce qu'ils veulent, mais ce n'est pas prohibé, c'était entre les deux, le genre de vidéo filmé derrière un bois où est-ce qu'on surveille une cour d'école puis on regarde les enfants jouer. Ce n'est pas prohibé, mais on sait exactement ce que la personne recherche quand elle commande une vidéo comme ça. Et c'est des moments comme ça qu'on vit des moments de frustration quand on est sur les forces de l'ordre, parce qu'on essaie de contrôler quelque chose puis on essaie d'arrêter l'exploitation, mais en même temps on n'a pas toujours les outils.

La commission spéciale, sa mission, c'était de faire le tour d'horizon, de voir où est-ce qu'on peut agir, où est-ce qu'on doit agir, puis où est-ce qu'on n'en fait pas assez, puis quels outils qu'on peut donner pour s'aider. Et la satisfaction que moi, j'ai eue à écouter les témoignages de gens qui ont été brutalisés dans ce commerce de la chair : de pouvoir déposer un rapport comme on l'a fait, pas la CAQ, le Parlement, tout le monde, tous les partis confondus, un rapport conjoint où est-ce qu'on s'est dit : Regarde, là, c'est assez.

Puis en plus, au-delà des 58 recommandations fortes que ce Parlement a faites, bien, on se l'est traduit aussi. Vous le savez, j'ai aussi le dossier des Québécois d'expression anglaise, et ce document-là est traduit parce qu'on veut partager les leçons que nous, on a découvertes en faisant de nombreux témoignages, en se déplaçant un peu partout dans le Québec, en écoutant toutes sortes de personnes parler de ce fléau. Et nous, on s'est dit : On a la responsabilité, comme bons acteurs dans notre fédération, de le partager avec nos partenaires dans le reste du Canada puis aussi avec nos voisins du Sud.

• (22 heures) •

Et j'ai en mémoire, et mes collègues qui ont siégé avec moi dans la commission vont s'en souvenir, une survivante qui, à un jeune âge, s'est fait exploiter par un membre de sa famille, son grand-père. Et je ne vais jamais oublier quand les policiers nous ont présenté cette personne et... bien, en fait, ils savaient ce qui s'en venait, alors chaque personne a eu sa boîte de kleenex, puis moi, je me disais : Que c'est qu'ils vont nous raconter? Mais, à la fin, j'en avais de besoin, tout le monde dans la pièce en avait de besoin, c'était assez saisissant comme témoignage.

Et je me souviens, en tant qu'homme assez libertarien, là, souvent, là... bien, regarde, la prostitution, c'est correct, puis, regarde, vends-le, ton corps. Puis là j'ai compris que, bien, ce n'est peut-être pas un choix. Peut-être, quand on se fait exploiter quand on est jeune, puis qu'on connaît juste ça, puis on se fait pousser vers ça, puis on se fait tellement diminuer en tant que personne qu'on pense qu'on est juste bon à ça, bien, c'est peut-être la suite logique qu'en tant qu'adulte on va vivre de ça. Et c'est à ce moment-là que j'ai compris le phénomène de la prostitution en général. Puis on a compris, là, à la commission, collègues, hein, on l'a vu, on l'a entendu, ces gens-là, souvent, bien, ça a commencé très, très tôt. Ça a commencé soit avec l'exploitation d'un membre de la famille, ça a commencé avec... ils se sont fait piéger, carrément, ou on les force à voir, à participer à leur insu à un crime, justement, pour qu'on puisse les manipuler pour dire... pour les conformer à ce qu'on veut qu'ils fassent plus tard pour qu'ils... Tous les moyens sont possibles, tous les moyens sont permis pour casser la femme. Et je dis «la femme» parce qu'en grande majorité c'est les femmes, mais on a aussi entendu des témoignages d'hommes.

Et, moi, ce que je retiens de cet homme-là qui nous a fait son témoignage, c'est deux choses. Dans son témoignage, il n'a jamais réussi à dire qu'il a vendu son corps. Il nous a expliqué comment ça marchait, on comprenait qu'il l'avait fait, mais c'était comme si, même en huis clos, il n'était pas capable de l'avouer à des parlementaires, à des gens dans un lieu comme le parlement, c'était peut-être trop formel pour lui. Mais c'était comme si, même s'il essayait de faire un bon coup puis nous expliquer le traumatisme qu'il a vécu, il était incapable, dans son fond, de l'avouer à voix haute. Puis pourtant il était là pour ça, tout le monde était là pour entendre ça, mais il n'était pas capable. Et j'ai compris rapidement que, quand tu es pauvre, quand tu n'as pas de choix, même si tu n'es pas gai, bien, des fois tu vas te permettre de te faire exploiter parce que tu n'as pas le choix.

Et souvent on a appris que les refuges, bien, ils se trouvent dans le même quartier, sur la même rue où est-ce que les gens magasinent la chair. Alors, une de nos recommandations, justement, c'est de dire : Bien, ça n'a peut-être pas de sens, on devrait peut-être bouger les lieux d'aide à ces personnes-là, comme ça ils ne sont pas obligés de traverser cet environnement-là pour aller chercher de l'aide. C'est la moindre des choses, mais ça, c'est une des recommandations qu'on va trouver dans notre rapport.

Puis à travers ça, bien, on s'est dit : Mais, en bout de ligne, il y a quand même des clients qui achètent ça. Il est où, le problème, avec ces gens-là? Mais on a appris que c'est très compliqué d'aider ces femmes qui sont exploitées et ces hommes qui sont exploités parce que, souvent, si on leur demande : Avez-vous besoin d'aide?, ils vont dire non, pas parce qu'ils n'ont pas besoin d'aide, pas parce qu'ils ne veulent pas s'en sortir, mais parce que des fois ils se font interpeler par la police, alors il y a un manque de confiance. De l'autre côté, il y avait une culture, historiquement, où est-ce que les forces de l'ordre, la société en général, on disait : Bah! Tu sais, tu es un moins que rien si tu uses de ton corps comme ça. Mais ça, c'est justement les moeurs qu'on doit changer. Si vous êtes une victime, ce n'est pas de votre faute, et ça, je pense que c'est un aspect fort de notre rapport, de dire que c'est des personnes qui sont victimes, elles n'ont pas à se sentir mal ou avoir honte d'avoir été exploitées, ils ont été exploités. Une des recommandations... Mon collègue le ministre de la Justice, aujourd'hui, a déposé un projet de loi pour la réforme de l'IVAC, mais la bonne nouvelle, c'est que, dans nos recommandations, justement, on parle de l'IVAC. On veut changer la définition d'une victime dans le but, justement, d'inclure des gens qui, eux, ont été exploités. Ça semble normal, mais avant ce n'était pas le cas. Après, ça va l'être, et j'en suis profondément fier.

Au-delà des clients abuseurs qui achètent la chair... Puis on dit «client abuseur», c'est un vocabulaire qu'on a utilisé pendant notre commission, parce que le mot «client», ça suppose, en quelque part, bien, on a acheté quelque chose et on y a droit; quand on dit «client abuseur», on dénombre une situation qui est une transaction inégale entre deux individus où une personne se fait exploiter, et je pense que c'est ça, en général, quand on parle d'exploitation sexuelle en général, puis en particulier des mineurs. Il est important... et ça a été un constat dans notre rapport que c'est important de voir comment on peut tuer l'offre et aussi comment on peut s'arranger avec les forces de l'ordre pour leur donner des outils pour essayer de parler aux hommes, d'essayer d'être plus contraignants envers les hommes qui achètent ces services-là, d'essayer de les aider, ceux qui ont un problème. Toutes les options sont sur la table pour essayer d'éradiquer ce fléau-là.

Et je vois dans les nouvelles aujourd'hui la bonne nouvelle que, bien, il y a certains fournisseurs de carte de crédit qui vont cesser de transiger avec une compagnie qu'on ne nommera pas. Bien, ça, c'est une bonne nouvelle parce qu'en bout de ligne, dans nos recommandations, on avait dit que le gouvernement du Québec devrait exercer un plus grand contrôle sur des entités basées au Québec qui sont dans le domaine de la pornographie, qui peuvent être légitimes, mais qui ne se soucient pas de la façon et le contenu qu'ils ont sur leurs propres serveurs. C'est un non-sens, et c'est bien que les Québécois se réveillent pour dire : Mais non, ce n'est pas acceptable, et que les compagnies de carte de crédit, à leur tour, disent : Mais non, ce n'est pas acceptable.

J'arrive aussi à dire qu'on a reçu, durant les consultations, un groupe de Laval qui traite les hommes, qui reçoit les hommes qui ont ce qu'ils considèrent des fantasmes inappropriés ou des gens qui, suite à une condamnation, doivent suivre une thérapie. À Laval, on a un groupe qui soigne les hommes. Puis ça aussi, c'est un autre aspect fort du rapport, puis j'en suis aussi fier, parce qu'on peut tout faire pour les femmes, en quelque part il y a quelqu'un, souvent un homme, qui l'achète, il faudrait bien l'aider, lui. Bien, c'est de financer un peu mieux ces activités-là où est-ce qu'on va traiter des hommes qui ont une délinquance sexuelle. C'est normal qu'on aide aussi eux. Ce n'est pas populaire toujours. Il y a eu des débats, je ne vous le cacherai pas, à l'intérieur de notre commission, à savoir : Oui, mais, tu sais, où est-ce qu'on met l'emphase? Mais heureusement je pense qu'on a réalisé la sagesse de se dire : Mais, en quelque part, il faut regarder la panoplie de l'offre de services, incluant les consommateurs, puis eux aussi doivent être considérés, pas seulement sanctionnés — parce qu'ils doivent être sanctionnés dans le cas des mineurs, absolument — mais aussi traiter le désir, qui est un peu anormal, qui ne devrait pas exister.

• (22 h 10) •

Alors, je regarde la conclusion de ce rapport-là, 58 recommandations, un Parlement qui a parlé d'une seule voix, où est-ce que j'ai côtoyé mes collègues de l'opposition, où est-ce qu'on a voyagé à Val-d'Or, où est-ce qu'on a rencontré les Premières Nations, où est-ce qu'on a ri ensemble, on a pleuré ensemble, on a discuté ensemble et on a fait avancer le Québec ensemble. Pour moi, ça a été un beau moment dans ma relativement courte carrière de politique, et je souhaite qu'on ait plus d'occasions comme ça de travailler ensemble et de faire avancer les choses.

En tout cas, pour ma part, je serai présent pour défendre ce rapport-là. J'ai pleinement l'intention d'être assez tannant et assez persistant pour être certain que ce rapport-là aboutisse à des choses tangibles. Je vois qu'on est déjà en action et j'en ai énuméré une couple. Très confiant aussi que ma collègue la vice-première ministre du Québec va prendre en main ce dossier-là et va nous aider à arriver à une finalité. Mais, honnêtement, je regarde ce que ce Parlement est capable de faire quand il le veut et j'en suis profondément fier.

Alors, Mme la Présidente, je pense que j'ai dit tout ce que j'avais à dire sur le sujet, mais j'invite les personnes qui nous écoutent ici aujourd'hui à prendre un moment, de parler à leurs jeunes enfants, leur parler que c'est important qu'ils respectent leur corps, qu'ils écoutent et qu'ils respectent le corps des autres, qu'ils se soucient des moyens technologiques déployés dans leur maison, qu'ils s'intéressent aux technologies utilisées par leurs enfants. Je vous avoue que ma fille me trouve plus contraignant depuis cette commission-là, mais c'est pour son bien, puis un jour je suis convaincu qu'elle va me remercier.

Alors, merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci beaucoup, chers collègues, pour votre collaboration dans ce beau rapport. Puis, ensemble, assurons-nous qu'on ne permette plus ces exploitations sur notre territoire. Je pense qu'on est rendus là. Je pense que c'est important qu'on le fasse pour hier, pour aujourd'hui puis pour demain. Merci beaucoup.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Sainte-Rose. Et maintenant je vais céder la parole à Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré.

Mme Émilie Foster

Mme Foster : Merci beaucoup, Mme la Présidente. C'est avec une grande émotion ce soir que je prends la parole pour vous parler de ce rapport, ce rapport de la Commission spéciale sur l'exploitation sexuelle. C'est avec beaucoup d'émotion parce que, je vous le dis, je pense qu'on ne voudrait pas que ça existe. C'est un peu la conclusion à laquelle on peut en venir après avoir entendu, après avoir écouté, après avoir lu, après cette commission. Je vous dis que c'est un phénomène horrible et qu'on aimerait tellement que ce fléau-là n'existe pas, mais il existe, et ce rapport‑là, ce rapport-là, c'est une fierté que les 16 parlementaires aient pu en venir, unanimement, sans partisanerie, à 58 recommandations pour enrayer ce fléau-là. Vous savez, l'exploitation sexuelle, c'est un phénomène qui est encore trop peu discuté dans la société. C'est une cruelle réalité, la réalité de personnes majeures qui exploitent sexuellement des mineurs.

Je viens de le dire, c'était une démarche transpartisane. Alors, ce que ça implique, c'est que, chacun de notre côté, de part et d'autre, nous avions, au fil des années, émis des idées, émis des enjeux sur la place publique. Je ne peux pas parler pour les autres partis, mais je parlerai pour le nôtre parce que, vous savez, j'ai été conseillère politique lorsque nous étions dans la deuxième opposition, et c'est un sujet qui nous tenait beaucoup à coeur. Et, à ce sujet-là, je ne peux m'empêcher de souligner le travail exceptionnel et incroyable de la députée de Repentigny, vraiment, qui a porté ce dossier-là lorsque nous étions dans la deuxième opposition. J'ai eu le privilège d'être recherchiste, à une certaine époque, pour la députée de Repentigny, une femme de coeur, une femme engagée, une femme qui, lorsqu'elle a pris ce dossier, l'a pris avec vraiment une grande conviction. Je me souviens, elle me parlait... à l'époque, moi, j'avais fait une pause, j'étais retournée au doctorat, et je me souviens qu'on se parlait, on était demeurées en contact, et elle m'appelait, elle me disait tout ce qu'elle lisait puis elle me disait : Écoute telle émission, puis elle lisait des piles de documents. Je tiens aujourd'hui vraiment à saluer son travail parce que, vous savez, le fruit de son travail, entre autres, avait connu son dénouement en mars et en mai 2018. En mars, elle avait émis sur la place publique... elle avait fait une sortie pour mettre de l'avant plusieurs propositions, et en mai 2018 elle avait déposé le projet de loi n° 1194, Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels afin d'inclure les notions d'exploitation sexuelle et de traite des personnes, qui aujourd'hui, je vous le rappelle, est dans la recommandation 50 de notre commission spéciale. Et, bien sûr, on a eu une annonce cette semaine de notre ministre de la Justice... bien, plutôt un dépôt de projet de loi, et nous avons l'intention, là, dans ce projet de loi, d'inclure les victimes d'exploitation sexuelle dans le régime de l'IVAC.

Alors, on est déjà en action. Comme mon collègue le député de Sainte-Rose le disait tout à l'heure, on est en action comme gouvernement. On a annoncé également des mesures... la ministre de la Sécurité publique a annoncé des mesures face aux cyberprédateurs, donc les exemptions... bien, plutôt des punitions fiscales pour les entreprises qui seraient reconnues coupables de crimes liés à l'exploitation sexuelle. Alors, on avance, on est en action, comme gouvernement.

Et je prends le temps de vous lire quelques recommandations qui avaient été mises de l'avant par la députée de Repentigny à l'époque, parce qu'il y a beaucoup de choses qui se retrouvent dans le rapport. Bon, elle, elle demandait que ce soit considéré comme une priorité nationale, c'est la recommandation n° 1 de notre rapport, également de former les acteurs de l'industrie hôtelière, ça aussi, ça se retrouve dans notre rapport. Bien sûr, bon, l'IVAC, l'inclusion des victimes, je viens d'en parler. Également, elle parlait du cours d'éducation sexuelle, donc qu'une partie du programme soit dédiée à l'exploitation sexuelle pour mieux sensibiliser nos jeunes, alors, ça aussi, ça se trouve dans notre rapport. Déployer les organismes communautaires, leur donner plus de ressources — ça aussi, ça se trouve dans notre rapport — pour les financer à la mission parce que c'est vraiment plus utile pour ces organismes-là, de, bien sûr, augmenter les effectifs policiers qui luttent contre l'exploitation. Alors, il y a plein de belles choses dont elle parlait déjà.

Donc, je ne peux pas parler pour les autres, je sais que chacun avait émis, au fil du temps... chaque parti avait émis, au fil du temps, des propositions sur la table, mais, nous, je peux dire que le travail de la députée de Repentigny, là, je le salue vraiment à grands traits parce que, vous savez, ça a mené, le 14 juin 2019, à une motion adoptée ici même, à l'Assemblée nationale, qui a créé cette commission spéciale là sur l'exploitation sexuelle des mineurs.

Vous savez, dans cette commission-là, ça a été une expérience très troublante, très spéciale. On en a vu, entendu de toutes les couleurs, mon collègue de Sainte-Rose en parlait tout juste avant moi. On a vécu des émotions ensemble, on a été fâchés, on a été outrés, on a pleuré. C'est incroyable, tout ce qu'on a pu entendre. Des fois, on se dit que c'est invraisemblable, mais c'est la réalité, c'est la cruelle et c'est la dure réalité. C'est une commission qui, je pense, a touché notre humanité profonde, à tout le monde, au-delà de la partisanerie.

Récemment, j'ai fait la tournée de mes médias régionaux suite à la parution du rapport. Moi, je voulais en parler, j'ai dit : Je veux en parler, il faut absolument qu'on en parle. Et à la radio, quelqu'un m'a demandé : Est-ce que ça ressemble à la série Fugueuse? Je lui ai dit : Mon cher monsieur, j'ai malheureusement l'honneur de vous dire que ce qu'on a appris, là, c'est que la réalité dépasse la fiction, malheureusement. On en a tellement vu, on a vu... bon, il y a des victimes qui sont venues témoigner sous le couvert de l'anonymat, une dame qui a été agressée par son grand-père, très, très jeune, et qui même la vendait à d'autres de ses amis pour être exploitée sexuellement. On a vu des filles, des adolescentes qui sont tombées sous le charme d'un homme qui leur promettait mer et monde. Souvent, ça se fait comme ça, hein? Le proxénète ou le pimp arrive dans la vie de la jeune femme, bien, il lui fait accroire qu'il est en amour avec, il fait miroiter la belle vie, là, les vêtements, les bijoux. Vous savez, une adolescente, c'est sûr, là, que ça se peut, là... ce n'est pas parce que c'est des mauvaises personnes, mais ça se peut, là, de tomber là-dedans quand tu as 13, 14, 15 ans, c'est très possible. Ce n'est pas évident, il y a vraiment des gens qui en abusent. Et ces filles-là, lorsqu'elles sont menées vers l'exploitation sexuelle par leur pimp, leur proxénète, peuvent avoir sept, huit, 10 clients par jour. C'est ce qui nous a été relaté, là, c'est vraiment, vraiment quelque chose. Ces filles-là sont détruites. Leur vie bascule parce que l'argent que leur proxénète... bien, qu'elles font, c'est leur proxénète qui s'en empare, malheureusement, donc elles sont souvent sous l'emprise d'un cycle de pauvreté, d'un cycle de violence également parce que de l'amoureux qu'il était, le pimp passe souvent à quelqu'un de très violent qui menace, qui veut garder sa victime sous son joug. Donc, c'est des choses qui sont difficiles à entendre, mais c'est ça qu'on a entendu dans la commission.

Il ne faudrait pas penser que c'est un phénomène qui se limite uniquement aux grandes villes. Ça aussi, je me suis fait demander ça dans mes entrevues régionales. Les gens me disaient : Bah! Ce n'est pas une affaire, ça, juste pour Montréal, Québec? Oh non, non, non! Il y a des policiers qui sont venus nous témoigner, et le constat est clair : oui, Montréal est une plaque tournante, mais aujourd'hui, en particulier avec le Web, c'est très facile pour les proxénètes de pouvoir s'insérer dans la vie des jeunes filles, même en région. Donc, il y a plein de cas aussi en région, et d'ailleurs ça fait partie des enjeux qu'on doit adresser... qu'on devait adresser, comme commission, de régionaliser. C'est pour ça qu'on propose une table de concertation pour chacune des régions administratives, parce qu'il y en a partout. Donc, il ne faut vraiment pas penser que ce n'est pas généralisé.

• (22 h 20) •

Et ces filles-là se font détruire leur confiance. Vous savez, quand on est jeune, on tombe amoureux... quand tu te fais détruire ta confiance, après, tu es démolie, ce n'est vraiment pas le fun. Il y en a qui s'en sortent. Il y en a qui, malheureusement, restent dans ce cycle-là. Et souvent celles qui vont s'en sortir vont demeurer vraiment marquées à jamais. Et je vous lis un témoignage qui se trouve dans le rapport. Ce témoignage-là provient d'un livre qui s'appelle Pour l'amour de mon pimp, je ne l'ai pas avec moi aujourd'hui, mais, je vous le dis, vous devriez vraiment lire ça parce que c'est vraiment des vrais témoignages de victimes et c'est très touchant, et elle dit : «Mon nom ne se trouve pas dans l'annuaire téléphonique; il n'y a aucune information personnelle à propos de moi sur Internet. Au restaurant, je veux toujours faire face à la salle, pour être certaine que personne ne puisse me surprendre par derrière. J'ai l'impression que [mon ancien proxénète] pourrait surgir de nulle part, essayer de revenir dans ma vie ou simplement se venger en me poignardant dans le dos. [...]Pendant des années, j'ai regardé derrière moi en marchant dans la rue.»

C'est ça, la réalité. C'est vraiment ça, la réalité des jeunes femmes, parce que ce sont souvent des jeunes femmes, mais il y a également des jeunes hommes qui sont victimes. C'est ça, la réalité des victimes. Et souvent la réinsertion sociale va être difficile parce que ces personnes-là, ces victimes-là ont peut-être arrêté l'école, n'ont pas de diplôme, c'est la seule source de revenus qu'elles ont connue, donc ce n'est pas évident après de se sortir de ce cycle‑là.

Moi, je peux vous dire une chose, je remercie vraiment tout le personnel qui nous a suivis. Je remercie, bien sûr, mes 16 collègues qui étaient avec moi sur cette commission, mais je remercie les personnes qui nous ont soutenus, les personnes à la recherche, à la rédaction. C'était vraiment un gros, gros défi, là, de résumer tout ce qui se disait parce qu'il y avait beaucoup de contenu. Mais, vous le savez, ce rapport-là, ça ne doit pas être une fin en soi. Bien au contraire, ça doit être impérativement un début, parce que, tant qu'on n'en parlera pas, les mentalités ne changeront pas. Et ça, on le doit à nos victimes. Merci beaucoup. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée Charlevoix—Côte-de-Beaupré. Alors, y a-t-il d'autres interventions? Alors, il n'y en a pas, et cela met fin au débat sur le rapport de la Commission spéciale sur l'exploitation sexuelle des mineurs.

Pour connaître la suite de nos travaux, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Schneeberger : Oui. Alors, je voudrais juste regarder les personnes, Soulanges... parce que j'avais... O.K., Abitibi, oui. C'est correct pour toi? Parfait. C'est beau.

Alors, excusez-moi, parce qu'avant d'appeler il faut qu'on ait les bonnes personnes qui viennent présenter. Alors, je vous demanderais d'appeler l'article 3 du feuilleton.

Prise en considération du rapport de la commission qui a procédé à des consultations
particulières sur l'augmentation préoccupante de la consommation de
psychostimulants chez les enfants et les jeunes en lien avec le trouble
déficitaire de l'attention avec hyperactivité

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est très bien. Alors, à l'article 3 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la Commission de la santé et des services sociaux qui, les 6, 7, 8 et 13 novembre 2019, a procédé à des auditions publiques dans le cadre de consultations particulières à l'égard du mandat d'initiative sur l'augmentation préoccupante de la consommation de psychostimulants chez les enfants et les jeunes en lien avec le trouble déficitaire de l'attention avec hyperactivité, que l'on connaît sous l'acronyme TDAH. Ce rapport, qui a été déposé le 4 décembre 2020, contient des conclusions et 17 recommandations.

Je vous rappelle que, conformément aux dispositions de l'article 95 du règlement, la prise en considération du rapport donne lieu à un débat restreint d'au plus deux heures et qu'aucun amendement n'est recevable. Je vous rappelle également qu'en vertu du deuxième alinéa de l'article 95 ce débat n'entraîne aucune décision de l'Assemblée.

Alors, conformément à ce qui a été énoncé antérieurement par la présidence, la répartition des temps de parole dans le cadre de ce débat s'effectuera comme suit : 58 m 30 s sont allouées au groupe parlementaire formant le gouvernement, 34 min 51 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 12 min 27 s sont allouées au deuxième groupe d'opposition, 11 min 12 s sont allouées au troisième groupe d'opposition. Chaque député indépendant dispose d'un temps de parole de 1 min 30 s. Toutefois, lorsqu'un seul député indépendant participe à un débat, il dispose d'un temps de parole de deux minutes.

Dans le cadre de ce débat, le temps non utilisé par les députés indépendants ou par l'un des groupes parlementaires sera redistribué entre les groupes parlementaires selon les proportions établies précédemment. Mis à part ces consignes, les interventions ne seront soumises à aucune limite de temps. Et enfin je rappelle aux députés indépendants que, s'ils souhaitent intervenir au cours du présent débat, ils ont 10 minutes à partir de maintenant pour en informer la présidence.

Et, sans plus tarder, je cède la parole à Mme la députée de Lotbinière-Frontenac.

Mme Isabelle Lecours

Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) : Merci, Mme la Présidente. Tout d'abord, je souhaite saluer mes collègues de la banquette gouvernementale ainsi que les députés de l'opposition avec qui j'ai eu la chance de siéger lors du mandat d'initiative sur l'augmentation préoccupante de la consommation de psychostimulants chez les enfants et les jeunes en lien avec le trouble déficitaire de l'attention avec hyperactivité s'étant déroulé à la Commission de la santé et des services sociaux depuis l'automne 2019.

Comme vous le savez, depuis plusieurs années au Québec, l'usage de la médication spécifique au trouble du déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité chez nos jeunes est préoccupant. Dès 2017, l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux, l'INESSS, publiait un document concernant l'usage des médicaments spécifiques au trouble du déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité chez les Canadiens de moins de 25 ans. D'ailleurs, le phénomène devient si préoccupant qu'il interpelle plusieurs experts du monde médical.

En 2019, près d'une cinquantaine de pédiatres et autres spécialistes lancent un appel, via une lettre ouverte, dénonçant l'utilisation jugée trop systématique de médicaments pour traiter les symptômes s'apparentant au TDAH, et ce, chez les enfants et les jeunes. Non seulement ces professionnels du domaine de la santé remettaient en question les pratiques en place, mais ils nous ont également poussés, en tant que société, à nous questionner sur les priorités et sur ce que nous avions envie de transmettre à nos jeunes comme valeurs.

Ce que ces experts révèlent dans leur lettre ouverte, c'est qu'au Canada le Québec est la province où la tendance est la plus forte quant à l'usage de médicaments spécifiques au TDAH. Selon l'INESSS, en 2014‑2015, l'usage de ces médicaments chez les enfants et chez les jeunes était de 6,4 % au Québec alors qu'ailleurs au Canada ce taux était de 2,4 %. La différence était tout de même significative, le fait de se questionner sur le sujet était donc tout à fait pertinent.

C'est dans ce contexte qu'en avril 2019 les membres de la Commission de la santé et des services sociaux, dont je fais partie, ont adopté à l'unanimité un mandat de leur propre initiative sur l'augmentation préoccupante de la consommation des psychostimulants chez les enfants et les jeunes en lien avec le trouble déficitaire de l'attention avec hyperactivité, et ce, en vertu de l'article 149 du règlement de l'Assemblée nationale.

Dans le cadre de ce mandat, la commission avait deux objectifs. Le premier était de tenir des consultations particulières et des auditions publiques pour tenter de trouver des explications à l'augmentation préoccupante de la consommation de psychostimulants chez les enfants et les jeunes ainsi que des solutions pouvant contribuer à les réduire. Quant au second, il s'agissait d'étudier les façons de mieux encadrer le diagnostic et la prescription de médicaments pour le TDAH et d'améliorer l'accès aux services ainsi que sur le phénomène de la détresse psychologique chez les jeunes.

Au total, Mme la Présidente, la commission a reçu 16 mémoires, et nous avons entendu 13 groupes lors des consultations particulières et des auditions publiques qui se sont déroulées les 6, 7, 8 et 13 novembre 2019. Je remercie d'ailleurs les groupes qui sont venus présenter leur vision sur l'enjeu du mandat d'initiative lors des consultations particulières et auditions publiques. Vos commentaires nous ont grandement éclairés quant aux améliorations à mettre en place pour le projet de loi. Parmi ces groupes, nous avons entendu la Chaire UQAC-Cégep de Jonquière sur les conditions de vie, la santé, l'adaptation et les aspirations des jeunes, présenté par Mme Marie-Christine Brault, qui est cotitulaire de la chaire, l'Institut national d'excellence en santé et des services sociaux, le Mouvement Jeunes et santé mentale, représenté par Mme Stéphanie Benoit-Huneault, coordonnatrice, et Mme Anne-Marie Boucher, membre du comité de coordination et coordonnatrice du Regroupement des ressources alternatives en santé mentale...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Mme la députée, à ce point-ci, je me dois de vous demander si vous avez terminé votre intervention. Ce n'est pas le cas, je ne crois pas. Alors, je vais vous demander de reprendre votre allocution lors de la reprise de ce débat.

Ajournement

Et, compte tenu de l'heure, j'ajourne nos travaux au vendredi 11 décembre, à 9 h 40.

(Fin de la séance à 22 h 30)